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Audition des mémoires sur
le projet de loi no 1
Charte de la langue française
au Québec
(Onze heures dix minutes)
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, madame et
messieurs!
Nous commençons une nouvelle séance de la commission de
l'éducation, des affaires culturelles et des communications.
Cette séance est particulière en ce sens que ce sera la
plus longue des travaux de cette commission. Elle débute vers 11 h 09,
ce matin; elle se poursuivra jusqu'à au moins 23 heures, ce soir, avec
suspension à 13 heures, reprise à 15 heures, suspension à
18 heures et reprise à 20 heures.
Comme il n'y a pas de séance de l'Assemblée nationale, la
commission est sûre de ne pas suspendre pour des votes ou autres
incidents. Je fais l'appel des membres de la commission. Si je n'indique pas
tous les changements, on voudra bien m'en prévenir, s'il vous
plaît.
M. Alfred (Papineau), M. Bertrand (Vanier); M. Bisaillon (Sainte-Marie)
est remplacé par M. Charbonneau (Verchères); M. Chevrette
(Joliette-Montcalm), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. de Belle-feuille
(Deux-Montagnes), M. Dussault (Châteauguay), M. Godin (Mercier); M.
Grenier (Mégantic-Compton) est remplacé par M. Goulet
(Bellechasse); M. Guay (Taschereau), M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys), M.
Laplante (Bourassa); M. Laurin (Bourget) est remplacé par M. Morin
(Sauvé); Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Le Moignan (Gaspé); M.
Paquette (Rosemont) est remplacé par M. Fallu (Terrebonne); M. Roy
(Beauce-Sud), M. Saint-Germain (Jacques-Cartier), M. Samson
(Rouyn-Noranda).
Conformément à l'article 118-A du règlement, je
fais l'appel de l'ordre du jour. Je souligne à nos invités qu'ils
doivent être présents au début d'une séance, sauf
exception ou entente ou accord de la commission. Je vais lire une liste assez
longue, nais qui est une possibilité pour la journée.
Nous continuerons ou nous débuterons avec la poursuite de
l'audition du mémoire de La Banque Royale du Canada, mémoire 91.
Est-ce que les représentants de La Banque Royale du Canada sont ici?
Merci, messieurs. Vous pouvez vous approcher immédiatement. Ensuite,
Participation Québec, mémoire 73. Merci, messieurs. Justement,
vous êtes venus assez souvent que ce sera vraiment votre tour.
Association des cadres scolaires du Québec, mémoire 253.
Oui. Merci, monsieur; Association du transport aérien
international, IATA, mémoire 75; merci, madame; la Commission des
écoles catholiques de Québec, mémoire 74; merci, monsieur;
Quebec Association of School Administrators, mémoire 14; merci;
Metropolitan Quebec Language Rights Committee, mémoire 180, merci,
monsieur. Voici notre menu pour la journée, particulièrement pour
les membres de la commission.
Je rappelle que les changements qui ont été faits aux
membres de la commission sont valides pour toute la journée et que,
conformément à la directive que j'avais donnée le premier
jour de la première séance, il sera impossible d'effectuer
d'autres changements. S'il y avait vote ou autres procédures, il
faudrait s'en tenir à cette liste, mais, en vertu d'une motion
adoptée en ce même jour, tous les députés ont le
droit de parole, pourvu que ce soit dans les limites de l'autre motion,
c'est-à-dire 20 minutes pour l'exposé du mémoire et 70
minutes pour tous les partis.
Au moment où nous nous sommes quittés, la Banque Royale
avait déjà déposé son mémoire, le ministre
d'Etat au développement culturel avait déjà employé
12 minutes du temps alloué au parti ministériel; il reste donc 18
minutes au parti ministériel, aucun des autres partis n'ayant encore
utilisé une parcelle de son temps. Tout cela étant dit, pour ne
pas retarder davantage les travaux, nous allons commencer à 11 h 13. Je
donne la parole au ministre de l'Education.
Banque Royale du Canada (suite)
M. Morin (Sauvé): Merci, M. le président. Le
ministre d'Etat au développement culturel, mon collègue, le Dr
Camille Laurin, a déjà commenté, la semaine
dernière, le mémoire soumis par la Banque Royale du Canada.
Aussi, me contenterai-je ce matin, d'autant qu'il ne nous reste qu'une douzaine
de minutes du côté gouvernemental, de poser quelques questions
pour éclairer certains passages du mémoire.
La première question porte sur les cadres supérieurs de la
Banque Royale à son siège social du Québec.
On nous révélait, la semaine dernière, dans le
mémoire, que 6% des 85 cadres supérieurs étaient
Québécois. J'imagine que, dans le vocabulaire utilisé par
la Banque Royale, le mot "Québécois" embrasse aussi bien les
anglophones que les francophones. C'est du moins le sens dans lequel je
l'entendrais pour ma part. J'aimerais vous demander tout d'abord quelle
proportion de ces 6% de Québécois sont anglophones et quelle
proportion sont francophones. C'est ma première question, M. le
Président.
M. Grier (David): Vous faites référence au
paragraphe 31, je crois.
M. Morin (Sauvé): Je pense que c'est cela.
M. Grier: Ces 6% sont des Québécois francophones,
tous.
M. Morin (Sauvé): Y a-t-il également des
Québécois anglophones?
M. Grier: Oui.
M. Morin (Sauvé): Mais alors, pourquoi avez-vous restreint
le mot "Québécois" aux seuls francophones?
M. Grier: Les deux adjectifs...
Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse, le
député de Marguerite-Bourgeoys, sur une question de
règlement.
M. Lalonde: M. le Président, c'est parce que le ministre
de l'Education, qui sait sûrement lire, aurait dû lire, à
l'article 31, que les 6% de la représentation des
Québécois de langue française dans le vocabulaire de tout
le monde, de toute façon, Québécois, cela comprend des
Québécois de toutes langues.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Lalonde: Sauf si on le spécifie. C'est simplement pour
aider le ministre, qui n'était pas ici souvent.
Le Président (M. Cardinal): Ce n'est ni une question de
règlement, ni une question de privilège. C'est une mise au point
et elle n'est pas prévue par le règlement, à moins que le
ministre n'ait consenti à l'entendre. C'est l'article 100. M. le
ministre, s'il vous plaît. Je m'excuse, monsieur.
M. Morin (Sauvé): De sorte qu'il existe donc
également des Québécois anglophones qui font partie de ces
cadres supérieurs.
M. Grier: En plus de ces 6% notés, là.
M. Morin (Sauvé): Comment expliquez-vous... Je sais que
vous avez esquissé une explication, mais elle me paraît difficile
à suivre. Comment expliquez-vous qu'après plus de 100 ans au
Québec, puisque, si ma mémoire est bonne, la banque a
été établie en 1864, qu'après si longtemps, et
après avoir été l'une des institutions bancaires du
Québec les plus fortes, les plus assises, vous n'ayez encore que 6% de
cadres supérieurs francophones?
M. Grier: Ce sont des cadres supérieurs qu'on inclut dans
notre mot "exécutif", "executive officers" et l'explication se trouve
dans la dernière partie, la seconde partie, du paragraphe 31.
Aussi, plus tard, dans notre mémoire, dans la section qui traite
des occasions d'avancement des francophones. En effet, cela trouve son
explication, toutes autres choses étant pareilles, dans les conditions
et l'environnement de la banque, au Québec, il y a 20 ou 25 ans, mais
les choses sont tout à fait différentes aujourd'hui.
M. Morin (Sauvé): Voulez-vous dire qu'il y a plus que 6%
aujourd'hui?
M. Grier: A ce niveau spécifique, non, c'est exact, 6%,
mais, au niveau juste au-dessous, il y en a beaucoup plus. Cela donne beaucoup
de raisons de penser que, dans l'avenir, cela va accroître
énormément.
M. Morin (Sauvé): Vous considérez que cette
situation est anormale, j'imagine?
M. Grier: Pour le moment, oui. Mais cela prend du temps pour
former des banquiers bien expérimentés et, pour retourner un peu
à l'anglais, pour le moment, it is like arising tide as the trained
people in their experience move upwards, the numbers in the more senior ranks
will, of course, increase.
M. Morin (Sauvé): Mais, vous me souligniez, il y a un
instant, qu'au niveau subalterne il y a plus de francophones, de sorte que le
réservoir se trouve là depuis longtemps, j'imagine. Ce que je
m'explique mal, c'est comment ce réservoir que vous aviez, parmi tous
vos employés francophones à travers le Québec, n'ait pas
pu engendrer une proportion plus juste parmi vos cadres supérieurs.
M. Grier: Peut-être que M. Fréchette aurait des
commentaires là-dessus.
M. Fréchette (Pierre): Je pourrais peut-être faire
un petit commentaire. Il faut bien comprendre qu'au niveau subalterne la
période de formation et d'avancement est relativement plus courte,
naturellement. C'est sûr que, pour former un cadre supérieur, cela
peut prendre dix, quinze, vingt ans. Le problème qu'il y a eu du
côté francophone au Québec, pour ce qui est de la Banque
Royale j'en sais quelque chose puisque cela fait déjà 40
ans que je suis là c'est que le francophone, il y a 40 ans et 30
ans, n'était pas attiré vers la profession bancaire en nombre
suffisant pour permettre, naturellement, d'avoir aujourd'hui... C'est comme une
récolte, cela prend du temps à se produire. On voit un changement
depuis une dizaine d'années.
Nos efforts de recrutement ont été plus fructueux. Ce
changement que nous voyons aujourd'hui est quelque chose de graduel, comme M.
Grier l'a souligné. Quand je suis entré à la banque il y a
quarante ans, tout était en anglais; même Ie directeur de la
succursale où je suis entré, qu était à
Drummondville, était un Ecossais. Vous voyez la métamorphose
graduelle qui s'est interposée. Tout ce qu'on faisait, on le faisait en
anglais.
Aujourd'hui, naturellement, pour ce qui est de l'administration du
Québec, que je représente, c'est à 95% en français.
Donc, nous sommes prêts, à présent, à infiltrer le
siège social, si vous voulez.
M. Morin (Sauvé): II n'empêche, monsieur, que la
meilleure façon de former des cadres supérieurs, c'est encore de
leur donner la chance de se faire valoir. Il y a des choses, dans la banque
comme dans beaucoup d'autres métiers, j'ima-
gine, qui ne s'apprennent qu'avec l'expérience, que sur le
tas.
M. Fréchette: D'accord.
M. Morin (Sauvé): De sorte que si vous refusez à
des gens d'accéder à certaines positions, forcément, ils
ne prendront jamais l'expérience en question. J'attire votre attention
sur le fait que ces quarante années, dont vous venez de me parler et qui
ont marqué votre carrière personnelle, ont été
caractérisées également par la croissance immense des
caisses populaires, lesquelles ont précisément donné des
responsabilités à des francophones et ce massivement; et regardez
le résultat, aujourd'hui.
Est-ce que la Banque Royale, institution ancrée dans la vie
québécoise, institution qui a des moyens considérables,
n'aurait pas pu faire également cet effort?
M. Fréchette: II faut bien comprendre, lorsque vous dites
que la Banque Royale aurait pu donner une meilleure chance aux francophones de
se faire valoir, que, pour se faire valoir il faut, premièrement, qu'ils
viennent à nous. Une équipe de hockey ne peut pas "scorer" si
elle ne va pas sur la glace. Si les francophones ne venaient pas à nous
en nombre suffisant il faut bien se comprendre il y a trente et
quarante ans, ils avaient peut-être une certaine hantise, une certaine
peur et disaient: Dans une banque anglaise, tu ne pourras pas aller loin. Cela
existait. Je pense que la plupart des membres de la commission sont trop jeunes
pour se rappeler il y a quarante ans, mais moi, je me le rapelle.
C'était un peu ce sentiment, qui était faux, naturellement,
enfin, j'en suis une preuve, et il y en a beaucoup d'autres qui peuvent
attester la même chose. Il fallait qu'ils viennent à nous; s'ils
ne venaient pas à nous, comment voulez-vous qu'on leur donne de
l'avancement?
M. Morin (Sauvé): Au niveau immédiatement
en-dessous des cadres supérieurs, on nous dit qu'il existe 1200 cadres
dont 18% parlent le français alors que 25% en possèdent un usage
comme langue de travail. Ces 18%, qui parlent le français, est-ce que ce
sont des francophones ou s'il y a parmi eux des anglophones capables de parler
le français?
M. Grier: Dans ces chiffres on ne fait pas de différence
entre ceux qui parlent français et ceux qui sont d'origine
canadienne-française, parce qu'on a fait ces chiffres dans notre
système d'informatique qui demande aux employés, dans leur
dossier, de remplir les petites boîtes pour indiquer leurs aptitudes dans
les langues. On ne sait pas si un gars parle le français couramment ou
bien s'il a une connaissance pratique, on ne sait pas de même de ces
données s'il est d'origine canadienne-française ou bien s'il est
un anglophone bilingue.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, comme le temps
court et que je voudrais laisser quand même la chance à mes
collègues, je poserai simplement une dernière question, laquelle
porte sur les articles 51 et 52 et la recommandation que nous fait la Banque
Royale à ce sujet. On nous dit que le système scolaire devrait
être accessible aux enfants actuels et futurs de tous les anglophones et
que l'Etat devrait prendre des mesures pour améliorer l'enseignement de
l'anglais dans les écoles françaises et qu'en attendant que cela
soit fait, que les écoles anglaises devraient être temporairement
ouvertes, accessibles aux francophones. J'aimerais d'abord poser la question
suivante: Comment détermine-t-on qui est anglophone et qui ne l'est pas
pour les fins de l'entrée à l'école anglaise, tel que vous
le recommandez ici même?
M. Frazee (Rowland): Mr Chairman, I may comment on that. The
definition of anglophone and francophone is not an easy one, I am not sure that
the government has yet specifically defined it; generally speaking, our
definition here would be someone whose mother tongue was English or French, in
defining francophone and anglophone.
M. Morin (Sauvé): Nous avons, M. le Président, les
mêmes hésitations que notre invité sur la définition
du mot "francophone" et du mot "anglophone". C'est précisément la
raison pour laquelle en matière d'accès à l'école
anglaise, nous avons évité de nous fonder sur un tel
critère. J'imagine que vous êtes conscient du fait que certaines
personnes peuvent être de père anglophone et de mère
francophone, et vice versa, et que dans beaucoup de cas, on ne sait pas
très bien qui est anglophone et qui est francophone,
particulièrement lorsqu'il s'agit de personnes qui viennent de pays non
francophones et non anglophones, d'immigrants qui viennent s'établir au
Québec et où il est bien difficile de dire s'ils sont anglophones
ou francophones.
Dans ces cas-là, dans les cas de personnes qui ne sont ni de
langue maternelle française, ni de langue maternelle anglaise, comment
établit-on qui est anglophone et qui est francophone?
M. Frazee: Mr Chairman, for our purposes and because the majority
of the people we bring in, we bring them into our head office from all over the
world. Obviously, the principal area of our recruiting for our head office is
within Canada and, although I would agree that the definition in certain cases
can create problems, as a generality, in a pragmatic sense, we feel that the
definition of someone whose mother tongue is English includes most of the
people. There might be a few exceptions where some decisions would have to be
made, some agonizing, but we also do a fair amount of recruiting in Great
Britain, United States, even Australia, and these countries, obviously, the
language where they have gone to school in their earlier years and received
perhaps their university training generally, almost without exception, has been
English; but our major problem is in bringing people in, from British Columbia,
the Atlantic Provinces where I come from, etc.
M. Morin: Mais ce n'est pas le sens de ma question. Ma question,
de façon précise, est la suivante: Cette décision
agonisante, comme vous l'appelez, "this agonizing decision", est-ce qu'elle
pourrait prendre la forme d'un test, par exemple?
M. Frazee: Mr Chairman, I would like to emphasize that, in my
opinion, the number of questionable cases would be so minimal that I really do
not have a solution at the moment whether it is a test or whatever it is, but,
by our terms of reference, the number of people we bring in, and we bring in
more, in the past anyway, than have been transferred out of our head
office...
M. Morin: Oui.
M. Frazee: ... that there really would not be, I do not think,
any problem of interpretation of our meaning of the articles 51 and 52.
M. Morin: M. le Président, puisqu'il ne reste que deux
minutes et que je veux donner la chance quand même à mes
collègues de poser une question, je dirais simplement que le projet de
loi fait une place spéciale à ceux qui viendront des autres
provinces ou de l'étranger pour occuper temporairement des postes au
Québec. C'est un autre problème auquel vous faites allusion.
Ce que je voulais souligner, c'est que votre critère de
l'anglophonie pour déterminer l'accès à l'école
anglaise, nous ramène inévitablement au test. Or, le gouvernement
a décidé d'écarter une fois pour toutes les tests
linguistiques à cause du caractère odieux qu'ils
présentent.
Le Président (M. Cardinal): Merci, M. le ministre. Nous
allons pouvoir passer aux partis de l'Opposition. M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, avant de m'adresser aux
invités, j'aimerais souligner une situation exceptionnelle. Aujourd'hui,
M. le Président, nous vivons un grand jour à la commission
parlementaire de l'éducation. Nous avons de la grande visite. Le
ministre de l'Education vient nous voir. Après quatre semaines
d'étude et devant une quarantaine d'invités, il a bien
condescendu à se joindre à nous. M. le Président, cela
doit être souligné d'une certaine façon. J'espère
que vous avez mis sur pied un service d'accueil qui nous permettrait quand
même...
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Taschereau, sur la question de
règlement.
M. Guay: M. le Président, il me semble que nous sommes ici
pour entendre les témoins et poser des questions aux témoins,
pour faire des commentaires sur les interventions des personnes qui
comparaissent et non pas pour utiliser des tactiques dilatoires, comme le fait
le député de Marguerite-Bourgeoys, aux fins de faire perdre du
temps à la commission.
Le Président (M. Cardinal): D'accord...
M. Morin (Sauvé): Je vous remercie, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys, de ces propos fort aimables.
Le Président (M. Cardinal): Un instant, s'il vous
plaît...
M. Lalonde: ...j'avais quelque chose à dire sur la
question de règlement...
Le Président (M. Cardinal): Oui, c'est cela, sur la
question de règlement, M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Je remercie le député de Taschereau qui
me permet de continuer mes remarques sur le temps d'un règlement et non
pas sur mon temps, mes 20 minutes. Sur la question de règlement, M. le
Président, tout ce qui concerne les travaux de cette commission est
pertinent. Etant donné que c'est la première fois que le ministre
de l'Education vient nous voir pour autre chose que faire des leçons
constitutionnelles à quelques invités, je pense que cela vaut la
peine d'être souligné...
M. Guay: Le député de Marguerite-Bourgeoys ne parle
pas sur la question de règlement.
M. Lalonde: M. le Président, si on n'avait pas tant
d'invités...
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. le député de Marguerite-Bourgeoys s'informe de droit,
dans les limites du temps qui est imparti au parti de l'Opposition officielle
et voudrait souhaiter la bienvenue au député de Sauvé et
ministre de l'Education.
Cependant, je trouve que la question de règlement que le
député de Taschereau et vous-même voulez développer,
qui n'est normalement pas calculée dans le temps de l'exposé,
peut nuire à l'audition des invités. Je vous prierais d'en
revenir, soit au voeu que vous adressez au ministre de l'Education, soit aux
questions que vous adressez aux députés.
M. Lalonde: J'en reviens au voeu, M. le Président.
M. Ciaccia: Sur une question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Cardinal): Sur la question de
règlement, M. le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Le député de Taschereau, M. le
Président, a parlé des remarques du député de
Marguerite-Bourgeoys comme étant une tactique dilatoire. Sur la question
de règlement, je veux seulement que ce soit clarifié, que ce soit
clair que c'était seulement une remarque de bienvenue et que ce
n'était pas une tactique dilatoire.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mont-Royal. J'ai déjà rendu cette décision dans le
même sens. Probablement que je n'ai pas été assez clair,
mais je considère la question de règlement comme
réglée. A nouveau, j'accorde la parole au député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, la seule chose que je
regrette, c'est qu'on ne puisse pas souligner avec tout l'éclat que cela
mérite la présence du ministre de l'Education. N'eussent
été le nombre et l'importance des invités d'aujourd'hui,
j'aurais suggéré que vous nous accordiez le congé de la
visite de M. l'inspecteur. Cela vaut la peine. Songez-y et peut-être
qu'on pourrait l'avoir un peu plus tard cette semaine. Je vous en fais une
demande...
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je serais
disposé à donner congé à l'Opposition pour la
journée.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît! Je m'excuse, est-ce que mon micro a des problèmes? Enfin,
j'espère qu'on me comprend bien.
M. Lalonde: M. le Président, une question de
règlement.
Le Président (M. Cardinal): Oui.
M. Lalonde: J'espère que le ministre s'aperçoit
qu'il ne pourrait même pas siéger aujourd'hui, si l'Opposition
n'était pas là, il n'y aurait pas quorum.
Le Président (M. Cardinal): La question de
règlement est...
M. Lalonde: Ceci dit, qu'on s'en souvienne!
Le Président (M. Cardinal): Oui.
M. Lalonde: L'Oposition est ici pour rester.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je donnerais
congé au député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Ah non! Je ne lui offrirai pas ce plaisir! On aura
des questions à poser au ministre de l'Education un peu plus tard. Je ne
voudrais pas retarder davantage l'audition.
Le Président (M. Cardinal): Tout de suite, je veux donner
mon avis, j'ai déjà indiqué à voix basse ainsi
qu'à voix haute que le mandat de la commission permet de poser des
questions à un député ou à un ministre au moment
où il parle et avec sa permission. En plus, cela a été dit
le premier jour et cela a été répété chaque
jour, nous posons des questions à ceux qui sont devant nous.
M. Lalonde: M. le Président, nous poserons les questions
puisque cela nous est permis. Nous espérons que le ministre nous
répondra et répondra aux dizaines de personnes qui ont
émis toutes sortes d'inquiétudes concernant la langue
d'enseignement, concernant l'éducation, et j'espère que le
ministre prendra l'occasion de cette visite à notre commission, à
la commission de l'éducation, pour éclairer justement les gens
qui y sont venus et d'autres qui sont ici.
En second lieu, je voudrais remercier la Banque Royale pour son
mémoire extrêmement intéressant à plusieurs points
de vue, mais je voudrais souligner surtout l'aspect descriptif de l'institution
qu'est la Banque Royale. Peu de gens, je pense, connaissaient cette institution
d'une façon aussi claire, aussi détaillée qu'on peut le
faire en lisant simplement les nombreux paragraphes qui concernent non
seulement votre structure, votre présence dans plusieurs pays mais aussi
vos opérations et l'importance qu'une institution comme la Banque Royale
conserve dans une société industrialisée, une
société moderne comme la nôtre. Je remercie plus
particulièrement la Banque Royale sous cet aspect. Je voudrais poser une
question il me paraît que la francisation du Québec, celle
qu'on poursuit en vertu de la loi actuellement en vigueur, celle qu'on
recherche en vertu de la loi qu'on propose, affecte plus
particulièrement la Banque Royale, surtout en ce qui concerne le
siège social. Du moins, il semble, c'est mon impression que c'est
surtout en ce qui concerne les opérations du siège social, qu'on
voit plus difficilement comment cela peut se passer. Je prends d'ailleurs le
témoignage de jeudi dernier de M. Fréchette et encore celui de ce
matin en ce qui concerne la division du Québec, c'est largement
francisé.
J'aimerais poser une question à l'un de vous à savoir si
vous avez pris connaissance du rapport de la mission qui est allée en
Europe il y a quelques semaines et qui a remis au gouvernement un rapport sur
le traitement linguistique aux sièges sociaux de grandes entreprises
multinationales, et, si oui, qu'en pensez-vous? Autrement dit, est-ce que vous
êtes d'accord avec ces conclusions?
M. Frazee: While I am not, right in detail, Mr Chairman, of
course, Mr Fréchette was a member of that commission and he has briefed
me. My understanding of it is that nothing from my briefing came as any
surprise to me, but perhaps I could ask Mr Fréchette to comment in more
details.
M. Fréchette: Etant un des signataires du ra-port, c'est
sûr que non seulement je l'ai lu mais j'ai participé à sa
rédaction conjointement avec mes "co-missionnaires". Si c'était
votre question, oui, je le connais.
M. Lalonde: Vous êtes d'accord. Dans ce rapport, on voit
quand même qu'il y a une certaine place pour la langue du pays, la langue
principale de la région. Est-ce que vous voyez un problème
à l'implantation d'une telle réalité linguistique à
l'intérieur du siège social de la Banque Royale à
Montréal?
M. Fréchette: Je me demande même si on
projette dix ans, quinze ans, vingt ans d'avance, prenons un exemple, le
siège social de la Banque Royalesi le rôle du
français sera aussi prépondérant que dans la Suisse
allemande où on a vu des compagnies qui travaillaient exclusivement dans
la langue du pays. La nature des activités est différente, mais
je vois, de mon côté, une amélioration constante et
même assez rapide de la présence du français dans les
sièges sociaux en général au Québec.
M. Lalonde: Oui, mais pour la Banque Royale, vous ne voyez pas de
difficulté à s'adapter à une certaine francisation.
M. Fréchette: Aucune difficulté.
M. Lalonde: Même au niveau du siège social.
M. Fréchette: Aucune difficulté.
M. Lalonde: Est-ce que vous diriez que la situation
géographique du Québec est une des raisons qui feraient que c'est
un peu différent, ici à Montréal, pour un siège
social, qu'en Suisse allemande, comme vous l'avez dit?
M. Fréchette: La géographie, les distances que nous
connaissons, la présence de 250 millions d'Américains au sud,
tout le contexte est totalement différent. C'est sûr. Je pense que
cela augmente peut-être les difficultés, mais les obstacles ne
sont pas infranchissables.
M. Lalonde: Je vous remercie, je vais laisser du temps à
mes collègues pour poser d'autres questions.
Le Président (M. Dussault): Merci, M. le
député. La parole est maintenant au député de
Bellechasse.
M. Goulet: M. le Président, je serai très bref.
D'abord, je félicite la Banque Royale de son rapport. Comme le disait
mon collègue de Marguerite-Bourgeoys, cela nous fait comprendre les
activités de la banque et mieux connaître cette banque. Il y a
seulement deux ou trois points où on dit, par exemple, à la page
72: Nous continuons d'adhérer au principe que des clients ont le droit
d'être servis en anglais ou en français. Plus loin, on dit, par
exemple: Le français est nettement la langue première
utilisée au sein de l'exploitation. Cela va au Québec. Ce qui me
surprend un peu, c'est que les proportions sont complètement
inversées lorsqu'il s'agit des décisions. Dans le domaine
décisionnel, c'est anglophone quasi à 100% et les exploitations,
on le dit, sont nettement du côté francophone, du
côté français. Vous parlez également des secteurs
d'activités du siège social. Vous dites: La langue de travail au
siège social est essentiellement l'anglais et doit je souligne le
mot doit y demeurer. Un peu plus loin, vous soulignez, pour des raisons
de commodité, d'ordre pratique, cela va, mais, quand vous dites de
commodité et de courtoisie... J'en viens quasiment à la question
que posait le ministre de l'Education. Il me semble que, dans 40 ans... Vous
dites que des efforts ont été faits, mais il me semble que, si
des efforts avaient été faits encore davantage, il y aurait plus
de 6% des cadres. Je parle du domaine décisionnel qui serait
possiblement francophone. Il me semble que, dans 40 ans, il y aurait eu
possibilité de trouver plus de 6%, surtout que le français, vous
le dites, est nettement la langue première utilisée au sein de
l'exploitation, toujours au Québec. Le siège social étant
au Québec, on y trouve seulement 6% de francophones. Je ne dis pas qu'il
n'y a pas eu d'effort marqué, vous l'avez expliqué
antérieurement, et je le comprends, mais il me semble qu'il aurait pu y
avoir davantage de francophones dans le domaine décisionnel. Si vous le
permettez, j'aimerais aussi, peut-être pour éclairer nos
lanternes, en tout cas la mienne, lorsque vous parlez de siège social
à Montréal, j'aimerais que vous nous disiez ce que c'est. Par
exemple, est-ce que c'est le coeur de l'organisation, est-ce que les gros
services sont là? Quel est le nombre d'employés comparativement
à celui de Toronto, la composition humaine, les effectifs physiques,
matériels? Est-ce qu'il n'y a pas autant de décisions qui se
prennent à Toronto qu'il y en a à Montréal, même si
le siège social, officiellement, est à Montréal? Est-ce
que les décisions ne se prennent pas à Toronto? Je pose la
question. Ce ne sera pas seulement un "fun " peut-être, je ne voudrais
pas être trop dur, mais je pose la question afin d'avoir une
réponse précise.
M. Frazee: Mr Chairman, I hope that the head offices are not just
a front, but I think I would like to clarify the role of a head office...
M. Goulet: M. le Président. Une question de
privilège ou de règlement. Je vois que monsieur a une
interprète; moi, je ne possède pas la langue de Shakespeare
à 100%. Je ne sais pas s'il ne pourrait pas demander à
mademoiselle qui parle français de répondre. Est-ce que cela se
demande ici?
Le Président (M. Dussault): Remarquez qu'ici, à la
commission, les témoins ont le choix de la langue d'expression. On ne
peut pas les obliger è quoi que ce soit. Peut-être que votre
question a été comprise.
M. Goulet: J'aimerais que le gouvernement soit aussi riche que la
Banque Royale pour nous fournir des interprètes.
M. Morin (Sauvé): Si le député le veut et
sans prendre sur son temps, M. le Président, nous pourrions
peut-être, pour le côté de l'Opposition, fournir une
traduction pour aider.
M. Fréchette: Je peux...
Le Président (M. Dussault): Je vous demanderais de garder
l'ordre. Est-ce que vous êtes prêt à donner votre
réponse?
M. Fréchette: Je peux donner la réponse. Je ne suis
pas au siège social, mais je connais très bien ses
activités.
Le Président (M. Dussault): Je vous remercie.
M. Fréchette: II faut bien comprendre qu'au siège
social... que la Banque Royale est très décentralisée.
Comme représentant du Québec, je prends 99% et plus de mes
décisions, c'est-à-dire des décisions de mon groupe, sans
me référer du tout au siège social. Le siège social
va surtout prendre des décisions de politiques
générales.
On va prendre des décisions de trésorerie, par exemple,
d'investissement, des choses comme cela, mais des décisions de jour
à jour, d'opérations journalières; c'est très
décentralisé. Si je vais au siège social, moi, une ou deux
fois par mois, c'est à peu près le maximum. On est
décentralisé, on n'est pas dans le même édifice et
nous avons naturellement une association avec eux, même si nous sommes
indépendants, une association de travail. Ils vont nous consulter pour
des campagnes générales de marketing, par exemple, des choses
comme cela où il y a consultation.
Je pense que le pouvoir décisionnel du siège social a
peut-être été exagéré dans l'esprit de
certaines personnes. Je le répète, 99% de mes décisions,
pour ce qui est du Québec, je les prends sans consultation et sans
demander la permission.
Est-ce que cela éclaire?
M. Goulet: C'est parce qu'on a répondu au ministre de
l'Education, tantôt, en disant: Depuis 40 ans, il n'y a pas tellement de
francophones qui sont venus à nous. C'est l'expression qu'on a
employée. Mais si je reculais trois ou cinq ans en arrière,
est-ce que la proportion a changé ou si c'est encore environ 6% qui vont
à vous? Oublions les 40 dernières années puis venons-en
par exemple aux cinq dernières années. La proportion de
francophones qui sont allés travailler chez vous qui auraient
été aptes à obtenir des postes de commande, si vous
voulez, est-ce que la proportion a changé?
M. Fréchette: La proportion a augmenté, aussi la
proportion de ceux qui restent a augmenté, c'est cela qui est important.
C'est cela qui justifie d'être optimiste pour l'avenir. Il faut bien
comprendre que la première chose que nous avons dû faire à
la Banque Royale a été de conquérir le Québec, si
vous voulez, parce que le Québec, quand je suis entré dans la
banque, était anglophone totalement.
M. Goulet: Cela veut dire que, prochainement, dans les cinq
prochaines années, le chiffre de 6% pourrait monter à quoi
d'après vos prévisions?
M. Fréchette: Un minimum de 10%.
M. Goulet: Merci, M. le Président, c'est complet en ce qui
me regarde.
Le Président (M. Cardinal): Merci, M. le
député de Bellechasse. M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Moi aussi, je voudrais
souhaiter la bienvenue au ministre de l'Education pour sa présence comme
ministre de l'Education et pas comme avocat-conseil, j'espère que vous
serez parmi nous durant le reste des travaux de la commission pour entendre
tous les mémoires qui restent à être entendus par la
commission.
M. Lalonde: Les 220.
M. Ciaccia: Les 220 autres mémoires.
M. le Président, je voudrais poser quelques questions à
nos invités. Est-ce que vous avez évalué, est-ce que
d'après vous, il y aura un coût économique à payer,
si le projet de loi était adopté sans amendement, tel que vous
l'avez vu et tel qu'il est présentement? Est-ce qu'il va y avoir un
coût économique à payer pour cela?
M. Frazee: Mr Chairman, we have suggested that to make final
decisions on the impact of the bill before the regulations are enforced; or
amendments which the minister has already indicated, there will be some
amendments, might be hazardous; but we also have said in our brief that
anything which would inhibit the activities of major head offices in the
province of Quebec, anything which would create uncertainty in the minds and
activities of business-men would obviously and inevitably impact unfavourably
on the economics of this province.
M. Ciaccia: Well, for instance, I would refer to the provisions
of bill 1 which impose unilingual signs; would that be the kind of a provision?
Quite a part from the other provision such as 36 and 37 which seem to go into
the internal operations of a company, would that cause an economic price also
to companies such as yourself or...
M. Frazee: Mr Chairman, it would cost dollars to convert our
signage, we have already, a few years ago, started creating bilingual signage
and the unilingual French in those communities which were essentially French;
there would be dollars involved but I cannot say that particular provision is
going to have a significantly unfavourable impact on the community.
What it might do, if it creates some hesitation on the part of
businessmen to expand the plant and the facilities in the province of Quebec;
that is the sort of thing which would impact unfavourably, not the signs in
themselves.
M. Ciaccia: II y a eu plusieurs mémoires, de ceux qui
appuient le projet de loi, qui veulent la francisation du Québec;
naturellement, c'est un objectif que personne ne contredit, personne n'est
contre cela, mais plusieurs invités voudraient s'assurer qu'un
Québécois de langue française puisse
travailler en français au Québec sans que cela nuise
à sa carrière. Je vous demanderais votre opinion. Est-ce
possible? Je parle de ceux qui veulent arriver au sommet de leur
carrière. Est-ce possible d'arriver à cet objectif? Est-ce un
objectif que le projet de loi peut atteindre?
M. Frazee: Mr Chairman, I would like to emphasize again, as our
brief does, that the Royal Bank of Canada is a major international bank, a
world-scale bank, which has extensive operations in Quebec, but it happens to
have its head office in Montreal. With that in mind, and as an international
organization, I personally could not see any possibility whatsoever of someone
reaching the top of the Royal Bank who did not have some considerable capacity
in English because of the international implications and because such a high
percentage of our business is done in the rest of Canada.
M. Ciaccia: Of course, that would not only apply to the Royal
Bank, that would also apply to any head office in Montreal which is of an
international character and which does business outside of Quebec.
M. Frazee: I believe this is consistent with what the group was
recently overseas studying head offices that M. Fréchette participated,
as I understand, this was one of the conclusion they reached.
M. Ciaccia: D'accord.
M. Grier: If I might add a point...
Le Président (M. Cardinal): Un instant! Votre micro, s'il
vous plaît.
M. Grier: ...a basic propos, if you like, which, in examining our
head office operations, is the one to which we withdraw attention, is that any
business organization and I think that the mission in Europe sound
largely the same sort of thing reflects its own system, its own spread,
its own markets and this is certainly the case in a bank. A bank largely
promotes from within, largely trains within and it draws its people from
throughout its own system. Now, if our system was largely, let us say, in
Spanish-speaking areas, we would have a very large proportion of
Spanish-speaking people in the head office and a lot of Spanish spoken in the
head office. Similarly, if a majority of our business, of our system happened
to be in a French-speaking area of Canada, "c'est-à-dire Québec",
no doubt the proportions would be different; the proportion of languages, in
our head office, reflects and we believe that is the logic of efficiency
our own spread and our own system.
M. Ciaccia: Si je vous comprends correctement, vous nous dites
que si le projet de loi a comme objectif de donner le droit, de donner
l'occasion à un Québécois francophone unilingue de pouvoir
travailler au Québec sans que cela nuise à sa carrière, ce
n'est pas réaliste et c'est un objectif qui ne peut pas être
atteint par ce projet de loi; le contexte du Québec dans le nord de
l'Amérique et le contexte des nombreux sièges sociaux
internationaux ne permettraient pas à cet objectif d'être atteint
et ce serait totalement idéaliste.
J'aurais une autre question sur les articles 36 et 37. There are certain
articles, in bill 1, which impose certain obligations by the government within
the operations of the company, for instance, you would have to satisfy a
government official in certain cases that you need a person who would be
bilingual.
Would you agree that international companies in Quebec have a choice of
staying within Quebec or even, at certain costs, not being within Quebec or
going another city, would you agree that, if companies do leave, they will not
leave because they must do business in Quebec in French, but because the
present government insists of interfering in the internal operations of their
companies? Would that be a fair statement to make?
M. Frazee: Mr Chairman, I would not feel competent to comment on
the reasons that any other company other than the Royal Bank might make these
such decisions. I have not consulted with them and we have made no such
decision. I always say in our brief that our head office is unique whether it
is in Montreal, or Toronto or Vancouver, New York or Munich and, if it is of
international scale, there are certain elementary requirements and one of them
is that there will be a large capacity for English within that organization but
that does not exclude, as we say in our brief, the speaking of French,
courtesy, pragmatism, etc., and, as Mr Frechette says, increasingly within our
head office, you do hear French in the corridors, you hear it in the trading
rooms of our foreing exchange, you hear it in the data center; it is quite a
dramatic change. Forty years was mentioned earlier; in my personal experience,
in the last twenty years, the changes that had been effective are dramatic; but
that does not mean that the head office is imminently to become
French-speaking, it is not going to happen.
M. Ciaccia: Unfortunately, I was not present when you gave your
original presentation, and you may have answered this particular question and I
apologize if I am duplicating, but is it your opinion that French Quebecers are
still disadvantaged in the business world?
M. Frazee: Mr Chairman, can I ask Mr Fréchette? I think it
would be very appropriate if he would answer that.
Le Président (M. Cardinal): Excusez, M.
Fréchette.
M. Ciaccia: Est-ce que les Québécois francophones
sont désavantagés dans le monde des affaires à
Montréal, au Québec?
M. Fréchette: Le changement que j'ai vu, la
métamorphose que j'ai vue depuis quelques années est quelque
chose de tout à fait formidable, dans tous les domaines, pas seulement
dans le domaine bancaire. Nous voyons des compagnies, par exemple, des firmes
d'ingénierie qui se sont affirmées sur le plan international,
tout simplement parce qu'elles ont eu l'initiative, premièrement, de
prendre un départ, c'est bien entendu, et de s'affirmer en dehors de nos
frontières. Alors, je pense que, dans le monde des affaires, en
général, cette crainte du francophone que j'ai mentionnée
tout à l'heure ou cette indécision du francophone, il y a trente
ans peut-être, de se lancer en affaires, cette crainte semble être
totalement dissipée aujourd'hui et on voit des francophones qui
s'affirment, qui ont les capacités, naturellement, et qui n'ont pas peur
de s'affirmer. On voit cela dans tous les secteurs, je pense,
l'émergence qui a lieu.
M. Ciaccia: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): D'accord, avec sept minutes,
M. le député de Notre-Dame-de-Grâce; non, M. le
député de Jacques-Cartier auparavant. M. le député
de Jacques-Cartier, il reste sept minutes pour l'Opposition officielle.
A l'ordre, s'il vous plaît!
M. Saint-Germain: Le ministre a posé une question assez
discrète tout à l'heure, relativement aux 6% de francophones qui
étaient dans la haute direction de la banque. On peut, à ce point
de vue, je pense bien, essayer de conclure qu'il y a eu, à la Banque
Royale, un certain rejet du fait français au Québec et que les
politiques de la banque ne permettaient pas ou ne paraissaient pas attrayantes
pour un francophone.
En suivant le même raisonnement, on pourrait aussi dire que les
caisses populaires qui ont été fondées au Québec
n'ont certainement pas dans leur haute direction 6% d'anglophones. On pourrait
aussi dire que les caisses populaires ont une politique qui n'est pas
attrayante ou, du moins, qu'elles ne peuvent établir une politique qui
permette à un anglophone d'atteindre les hautes directions.
Je crois qu'à ce point de vue, le jugement pourrait aller pour
les deux. Vous avez répondu, en fin de compte, que lorsque vous
êtes entré à la banque il n'était pas dans
l'échelle des valeurs, si vous voulez, des francophones du Québec
d'être banquiers ou d'avoir des ambitions à ce point de vue et
qu'il y avait aussi un barrage de langue entre vous et la majorité des
Québécois, du moins et la langue parlée à la
banque.
Je crois que vous touchez là, fondamentalement, le fond du
problème qu'on a au Québec aujourd'hui. Si on prend ces deux
champs d'activité, et la Banque Royale et la caisse populaire, je crois
qu'on a des exemples assez typiques de ce qui a pu se passer au Québec.
La Banque Royale a été fondée par des anglophones, ici au
Québec. Elle a évolué sans trop tenir compte, pour des
raisons historiques qu'il serait bien long de définir, qu'elle existait
et que son siège social était dans la pro- vince de
Québec, comme les caisses populaires, d'ailleurs ont été
fondées selon une échelle de valeurs réellement
francophone, pour satisfaire des besoins de la majorité de la province
de Québec et elles y ont réussi.
La relation, si vous voulez, entre les deux communautés, a
été très peu existante dans le passé. Pour un type
qui travaille à la Banque Royale, comme M. le président, par
exemple, qui a certainement des responsabilités de distribuer les
promotions, c'est toujours facile pour un homme de penser, lorsqu'il y a une
promotion à donner, au type avec qui on joue au golf, au type avec qui
on a étudié étant jeune, à celui qu'on a connu dans
le même quartier, à celui qu'on rencontre souvent dans des
événements sociaux et cela joue pour les deux côtés.
On n'a pas d'anglophones, au gouvernement du Québec, comme
employés; il y a des raisons.
Lorsque vous avez donné votre raison à Drummondville, vous
avez dit: J'y suis allé et j'ai réussi. C'est plus profond que
cela, je crois, parce qu'il faudrait analyser la raison pour laquelle les gens
de langue française n'étaient pas attirés vers la Banque
Royale. Il y en avait des raisons, comme aujourd'hui, les anglophones ne sont
pas attirés par les caisses populaires, il y en a des raisons.
On a vécu dans cette société comme deux
sociétés parallèles, si vous voulez. Cela ne voulait pas
dire qu'on se déteste ou qu'on se hait ou qu'on se regarde avec haine et
rancune, à mon avis toujours, pour la majorité des
Québécois; mais, c'est une question de fait et c'est cela la
cause de nos problèmes aujourd'hui. C'est que le Québec, en
général, comme les francophones du Canada en
général, ne peut plus accepter cette situation qui n'est pas,
à mon avis, causée exclusivement par le comportement exclusif
d'un groupe ou d'un autre groupe. Si on étudie l'évolution du
Québec, je crois qu'on peut comprendre comment cette situation s'est
créée.
Ceci dit, il faut nécessairement que cette évolution
parallèle, si vous voulez... C'est la cause de nos problèmes
aujourd'hui et, à mon avis, les choses ont évolué et
très rapidement et la Banque Royale a évolué aussi
très rapidemment, devant la situation politique que ces choses-là
ont créée. Il s'agit de savoir comment arriver à vivre
ensemble, parce que si la province de Québec peut probablement se passer
de la Banque Royale, la Banque Royale peut aussi se passer de la province de
Québec; mais il arrive qu'en se séparant, peut-être
quecomment dirais-je ce seraient des préjudices que
subiraient les deux groupes qui auraient tout avantage, dans des
intérêts communs, à apprendre à vivre ensemble.
C'est dans ce sens que, personnellement, je crois, puisque cette
évolution est amorcée et qu'elle est très bien
amorcée, à mon avis, que le bill 1 est trop coercitif et non
respectueux des libertés individuelles et qu'il peut mettre un bris et
une cassure, si vous voulez, dans cette progression, dans cette
évolution très positive qu'on constate aujourd'hui non seulement
au Québec, mais dans tout le pays. J'aimerais avoir vos commentaires
là-dessus, si ce n'est pas trop vous
demander, vu que vous êtes francophone, que vous connaissez bien
le milieu francophone et comme vous avez vécu, votre vie durant, dans un
milieu anglophone, peut-être que vous pourriez donner des commentaires
qui seraient positifs, parce que seulement un seconde, je suis
peut-être un peu long je crois que c'est important. Je crois que
c'est un inconvénient sérieux actuellement de faire croire
à nos jeunes francophones que le succès est dans une
législation comme le bill no 1.
Je crois qu'il faudrait dire à nos jeunes francophones que s'ils
veulent réussir dans la vie, il va falloir qu'ils apprennent à
être compétents, quel que soit le domaine de leur profession et
rares sont les domaines où les jeunes Canadiens français vont
vouloir évoluer, où, à un moment donné, la
connaissance de la langue seconde deviendra, pour eux, un facteur de
compétence et s'ils n'ont pas ce facteur de compétence, ils
seront profondément handicapés. Cela, la population du
Québec francophone le sait. Cela fait longtemps qu'elle exige de ses
gouvernements d'avoir un enseignement positif dans le système
francophone, de langue française.
Je termine là-dessus et j'aimerais bien avoir vos commentaires,
monsieur.
M. Fréchette: Etant banquier, je suis
nécessairement avare de mes mots, ma réponse va être moins
longue que votre question. Je voudrais vous dire que, lorsque vous mentionnez
que nous devons apprendre à vivre ensemble, j'applaudis chaleureusement
à ce que vous dites. Parce que, advienne que pourra, nous serons
toujours ensemble ou nous ne serons pas loin, nous serons voisins. Je pense
qu'il faut apprendre à vivre avec ses voisins; donc, là-dessus,
ça n'était pas une question que vous me posiez, c'était
une affirmation, je la supporte, je pense, comme tout le monde.
Pour ce qui est du passé, vous avez parlé d'il y a 40 ans,
d'il y a 30 ans, c'est sûr que le contexte a changé et je dois
réitérer ce que j'ai dit tout à l'heure, je ne sais pas si
c'est parce que je prends de l'âge que je commence à radoter, mais
je me répète peut-être un peu, que si les francophones chez
nous commencent à émerger et émergent d'une manière
sérieuse, c'est parce qu'ils ont bien voulu prendre place dans nos
rangs. C'est aussi simple que ça.
Le Président (M. Cardinal): Merci, monsieur. Pour terminer
cette audition, je rappelle que chacun des partis a encore deux minutes
à sa disposition, chacun des trois partis. M. le député de
Bellechasse, dans l'ordre, M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce et M. le député de Taschereau.
M. le député de Bellechasse.
M. Goulet: Merci, M. le Président. Aux gens de la Banque
Royale, dans une société telle que la vôtre
spécifiquement, il est à peu près impossible,
d'après vous, pour un unilingue francophone, d'accéder à
un poste supérieur, un poste décisionnel, d'après ce que
vous avez dit, vu votre champ d'activité à l'échelon
mondial. C'est ce que vous avez affirmé antérieurement?
M. Fréchette: Votre question est que les
possibilités d'un francophone unilingue...
M. Goulet: D'accéder à un poste supérieur,
un poste de commande décisionnel.
M. Fréchette: Cette personne se limiterait
énormément dans l'évolution de sa carrière, parce
que, lorsqu'on arrive à un certain niveau, qu'on le veuille ou non,
comme francophone, cela me choque jusqu'à un certain point, mais les
faits sont là, quand on arrive à un certain niveau, lorsqu'on
sort des cadres du Québec, lorsqu'une banque internationale doit le
faire, l'anglais s'interpose de plus en plus. La mission européenne l'a
démontré à nouveau, je pense que c'est un fait
induscutable.
M. Goulet: Si un francophone ne devient pas parfaitement
bilingue, j'entends posséder l'anglais, il ne pourra jamais goûter
au gâteau, il ne pourra jamais accéder aux postes
supérieurs.
M. Fréchette: C'est mon opinion.
M. Goulet: II faut qu'il soit bilingue, dans une
société comme la vôtre.
M. Fréchette: Je crois.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Mackasey: Merci, M. le Président. J'ai seulement deux
ou trois questions.
Le Président (M. Cardinal): De 30 secondes chacune!
M. Mackasey: Avec plaisir. Je pense qu'on ne fait pas assez la
distinction entre le siège social et la Banque Royale dans la province.
Il me semble qu'il y a quatre organisations de la Banque Royale à
travers le monde.
I think, Mr Frazee, you have four different operations working from the
central bank, like the Canadian area, the Carribean area, am I right about
that?
M. Frazee: We are divided so that essentially each province has
its own general manager, except the Atlantic, which group the four provinces
under a general manager and we have four other areas in the world.
M. Mackasey: The head office, because I am trying to get to the
point very fast, must serve, to some extent, each of those four areas with
information, advice and the rest, am I right on that?
M. Frazee: Yes.
M. Mackasey: Therefore, it must be, by its very nature,
trilingual or more. You head office must go where events do take you, you were
once in Halifax, if I am not mistaken, and now you are in Quebec. You find
yourself with the head office in Quebec, at advantage or at disadvantage,
vis-à-vis your competitors?
M. Frazee: So far, it has not been a disadvantage at all, I think
over the years, it has been an advantage to the Royal Bank being here.
M. Mackasey: Do you feel, it could, in your brief, potentially
become a disadvantage from one reason or another, you have certain rules and
regulations that the other banks do not have?
M. Frazee: It would be a disadvantage, if certain restrictions or
regulations were imposed on our head office, as compared to, let us say, the
Toronto based head office.
M. Mackasey: A la page 47, dans la version française, au
paragraphe 99, je pense, y a-t-il possibilité d'élaborer sur le
fait qu'il y avait beaucoup de progrès de fait dans le nombre des
francophones qui occupent maintenant des postes de cadres supérieurs ou
intermédiaires au siège social? Je parle des salaires de plus de
$25 000. Vous mentionnez que, dans votre service international et votre
division du Québec, il y a maintenant, au lieu de sept, comme il y avait
auparavant, 74 Canadiens d'expression française qui occupent des postes
importants. Voulez-vous, s'il vous plaît, préciser un peu ce
point?
M. Grier: Je peux ajouter que le pourcentage dans les deux cas a
augmenté de 3,3% à 9,3% depuis dix ans. En 1967, c'était
7% sur 210 et, actuellement, c'est 74 sur 794.
M. Mackasey: M. Frazee, if I could, I am allowed just one last
question, the very entry of your business, I understand, you are federally
incorporated by law. You have not only to serve people, loan money and that,
but you have to be part of the fiscal monetary operation for this country. Can
you visualize anybody in your friends who would not be prepared to be mobile
from city to city, from branch to branch, from province to province, in fact,
from country to country, sometimes in his or her career, ever reaching your
level within the bank, because of the very caracteristics of banking, this
mobility and flexibility is imperative?
M. Frazee: M. Chairman, I think it would be highly unlikely and
if I am an example, I have moved much, I would think that the future presidents
and so forth of the Royal Bank will have had international experience as well
as a significant domestic experience. There is always the exception, I suppose,
but I do not see it on the horison at the moment.
M. Mackasey: My last word, even in Canada itself? Je
m'excuse.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce... M. le député de Taschereau, vous
avez aussi deux minutes, vous savez comment cela s'étire, pour terminer
cette audition.
M. Guay: Le taux d'élasticité. M. le
Président, je tiens à remercier la Banque Royale du
mémoire qu'elle a présenté, qui était
extrêmement intéressant et qui ressemblait inévitablement,
à maints égards, dans ses conclusions, à celui que l'autre
grande banque anglophone de Montréal, la Banque de Montréal, a
présenté devant cette commission il y a quelque temps. Ce
mémoire ressemble aussi, à maints égards, à
l'ensemble des mémoires qui nous sont venus des Québécois
anglophones jusqu'ici en ce sens qu'il est favorable aux principes du projet de
loi no 1, qui est de faire du Québec un Etat foncièrement
français, mais il s'oppose de façon générale
à un certain nombre des dispositions de la loi quand ce n'est pas
à l'ensemble de la loi. En ce sens, ils me paraissent ressembler, ces
mémoires, non pas celui de la Banque Royale spécifiquement, mais
ceux de la minorité anglophone en général, un peu à
la loi 22 qui, après avoir proclamé le français langue
officielle, s'emploie dans des pages et des pages à institutionnaliser
le bilinguisme au Québec. Dans la mesure où ces mémoires
voudraient que l'affichage soit bilingue, même que l'anglais devienne
langue officielle du Québec, soit no 1 ou no 2, l'Union Nationale a
apporté une nuance là-dedans, mais enfin, qu'on instaure le
bilinguisme officiel dans le monde des relations de travail ou dans le monde
des affaires, ou surtout, bien sûr, la plupart des mémoires ont
proposé que la loi no 1 soit modifiée afin de permettre le libre
choix dans l'enseignement, ce qui serait, à tout le moins, une
première mondiale, surtout pour un peuple placé dans la position
où est placé le peuple québécois en Amérique
du Nord. Bref, l'ensemble des mémoires de la minorité anglophone
au Québec, jusqu'à ce jour, ont plusieurs points en commun,
c'est-à-dire d'être favorables au principe de la loi et ensuite de
s'opposer à l'une ou à l'autre ou à l'ensemble des mesures
qui sont prévues dans la loi pour atteindre l'application
concrète de ce principe.
En ce sens, M. le Président, je trouve que ces mémoires
commencent à être singulièrement répétitifs
et, pour ma part, à moins que quelqu'un, qu'un organisme ou un individu,
émanant de la minorité anglophone au Québec, ait des
choses particulièrement géniales et particulièrement
nouvelles à venir nous annoncer, j'ai l'impression personnelle je
parle en mon nom propre et cela ne préjuge en rien de la
qualité des mémoires qui sont présentés, le fait
demeure que, dans l'ensemble, si on fait le bilan de ces mémoires, pour
ma part, en tout cas, je commence à être suffisamment
informé de l'attitude que la minorité anglophone...
M. Ciaccia: Est-ce que cela fait partie du scénario?
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Lalonde: Le bâillon s'en vient!
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Ciaccia: Vous pouvez arrêter de siéger.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre!
Mme Lavoie-Roux: Personne ne vous retient.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! Mme le
député de L'Acadie, M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, M. le député de Mont-Royal, à
l'ordre!
M. Lalonde: On vient juste d'avoir le ministre de l'Education. On
n'est pas pour mettre fin à cela tout de suite.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, à l'ordre, s'il vous plaît!
M. Ciaccia: C'est une insulte pour...
Le Président (M. Cardinal): Ce n'est une insulte pour
personne. Je permets de...
Une Voix: Le député est suffisamment
informé.
Le Président (M. Cardinal): Le député est
peut-être suffisamment informé, mais, d'après l'article
118a, alinéa 6, c'est la commission qui doit être suffisamment
informée. M. le député de Taschereau.
M. Guay: Vous avez parfaitement raison, M. le Président,
et c'est pourquoi j'ai précisé...
Mme Lavoie-Roux: Une question d'information.
M. Guay: II n'y a pas d'information, Mme le député
de L'Acadie.
Le Président (M. Cardinal): Oui, un instant! M. le
député de Taschereau, je m'excuse, j'ai une demande de directive
de Mme le député de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Qui doit décider si la commission est
suffisamment informée? Est-ce que c'est un député, le
ministre ou l'ensemble de la commission?
Le Président (M. Cardinal): Mme le député de
L'Acadie, je sais que beaucoup de personnes parlent en même temps. Je
viens exactement de dire que ce n'est pas un député, mais la
commission qui se déclare suffisamment informée. M. le
député de Taschereau, ceci n'est pas une correction à
votre exposé, vous avez le droit d'être suffisamment
informé. M. le député de Mont-Royal, sur une question de
directive ou de règlement?
M. Ciaccia: De directive, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): D'accord, M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Est-ce que je pourrais demander au Président
si le fait que la motion pour limiter notre débat à 20 minutes a
été commencée et proposée par le
député de Taschereau et a été acceptée par
les députés ministériels, est-ce que le fait qu'il vient
de se référer à l'article 118a est le commencement d'une
manoeuvre pour nous avertir qu'on va mettre fin aux travaux de cette
commission?
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! M. le
député de Mont-Royal, ce n'est pas une demande de directive au
président, c'est une demande d'opinion à M. le
député de Taschereau. Je répète, si vous voulez que
je lise le texte pour éviter du temps, que c'est la commission qui en
décide, en vertu de l'alinéa 6 de l'article 118. Ce texte se lit
comme suit: Lorsqu'elle se croit être suffisamment renseignée, la
commission peut décider de cesser les auditions. Certains
députés qui sont ici savent ce qui est arrivé au mois de
juillet 1974, après la première lecture, à l'étude
du projet de loi no 22. J'ai de plus indiqué qu'il y a deux moyens de
terminer les auditions d'une commission, l'article 118a, alinéa 6, et
l'article 156, alinéa 1 ou 2, ou les deux à la fois. M. le
député de Taschereau.
M. Guay: M. le Président, avant que les
députés de l'Opposition officielle ne grimpent dans les rideaux
comme ils viennent de le faire, j'avais bien précisé que
c'était à titre personnel que je me croyais suffisamment
informé personnellement en ce qui concerne les mémoires en
provenance des Québécois anglophones, à moins qu'il n'y
ait quelqu'un qui ait quelque chose de nouveau et de particulièrement
transcendant à nous dire. Cela ne veut pas dire que la commission est
suffisamment informée. C'est à elle d'en décider. Je veux
parler en mon nom, pour moi, ce qui est mon droit le plus strict, on en
conviendra, n'est-ce pas? Donc, pour conclure, M. le Président, je tiens
donc, après avoir souligné ce fait, à remercier la Banque
Royale de nouveau pour son mémoire, qui est d'une qualité qui ne
m'étonne pas, compte tenu de la qualité de l'institution bancaire
elle-même et, sur ce, je pense que nous pouvons passer au mémoire
suivant.
Le Président (M. Cardinal): D'accord. Est-ce que... Oui,
monsieur...
M. Mackasey: M. le Président, j'ai quelque chose...
J'espère qu'on prendra connaissance du mémoire de la Banque
Royale, que ce n'est ni un mémoire anglophone, ni francophone, mais le
mémoire d'une entreprise qui, parmi ses em-
ployés, a des Canadiens de toutes les expressions dans le monde,
la population de...
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Mackasey: II y a une distinction à faire.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît! Vous n'avez pas le droit de réplique. Je l'ai
déjà indiqué. Si vous aviez assisté à toute
cette audition, vous sauriez que, dès le début, la Banque Royale
a déposé un mémoire qui était bilingue. Elle a fait
un exposé dans les limites, d'environ 20 minutes, mais en plus, je lui
ai offert de déposer en annexe au journal des Débats le
mémoire en entier, dans son texte, tel que rédigé, et je
ne puis pas vous permettre de continuer. Je regrette. L'audition est depuis
longtemps...
M. Mackasey: Je m'excuse, M. le Président, mais ce n'est
pas je sais aussi bien que vous que le mémoire est dans les deux
langues, je parle de la Banque Royale elle-même ...
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce, s'il vous plaît, je pense...
M. Mackasey:... oui, mais faire la distinction...
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît! J'ai été très patient, je pense que vous
n'avez pas un droit de réplique pour commenter cette audition qui a
déjà commencé la semaine passée et qui a amplement
dépassé son temps. C'est pourquoi, immédiatement, je
remercie M. Frazee...
M. Saint-Germain: Une question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Cardinal): Cela a besoin d'être une
vraie question de règlement, M. le député de
Jacques-Cartier.
M. Saint-Germain: Ce n'est pas une réplique que le
député de Notre-Dame-de-Grâce...
Le Président (M. Cardinal): Ce n'est pas une
demande...
M. Saint-Germain: ... il a rétabli des faits.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît! Il n'y a pas de rectification de faits ici. Il n'y a pas de
question de privilège et l'article 49 ne peut pas être
invoqué. L'on ne peut qu'invoquer l'article 96 lorsqu'on a fait
soi-même un discours, immédiatement après, si un
député interprète mal notre discours. Je considère
qu'il n'y a pas de question de règlement et je remercie
immédiatement la Banque Royale, par ses porte-parole, M. Frazee, M.
Grier, M. Fréchette, Mme Tosaj, M. Morrison, M. Poitras, M.
Rhéaume. Je regrette que vous ayez eu à exercer tant de patience
devant nous, que vous avez été obligés de revenir, mais
cependant, vous êtes toujours les bienvenus dans la capitale du
Québec, même si ce n'est pas l'endroit de votre siège
social. Je vous remercie beaucoup, madame et messieurs.
J'invite immédiatement les prochains invités.
M. Frazee: Thank you very much, Mr Chairman.
Le Président (M. Cardinal): Merci, M. Frazee.
Prochain groupe, Participation Québec, mémoire 73.
Juste un instant, s'il vous plaît! Bonjour et, d'avance, merci
pour vos nombreuses visites. Vous allez, s'il vous plaît, selon la
règle, identifier votre groupe, identifier vos porte-parole. Vous aurez
ensuite 20 minutes pour faire votre exposé ou le résumer
vous-mêmes, comme les députés, n'êtes pas
obligés d'employer tout le temps de l'audition. L'audition doit durer 90
minutes, normalement.
Je vous donne la parole.
Participation Québec
M. Prupas (Michael): Je vous remercie, M. le Président. Je
vous présente notre groupement, nos porte-parole, qui s'appellent M.
Graham Weeks, à ma gauche, Mlle Nancy Warner ici, M. Robert Doyle,
à ma droite, et je m'appelle Michael Prupas.
M. le Président, membres de la commission parlementaire, nous ne
sommes pas ici cet après-midi pour contester un par un les articles de
la Charte de la langue française que nous trouvons inacceptables. Nous
ne sommes pas ici non plus pour débattre avec vous l'histoire triste des
relations entre anglophones et francophones au Québec. Le but de
l'intervention de Participation Québec est de vous faire connaître
les grandes lignes de la société québécoise que
nous, en tant que membres de la jeunesse non francophone du Québec,
trouvons à bâtir avec nos citoyens francophones. On veut, en plus,
expliquer pourquoi nous croyons que certains éléments de la
Charte de la langue française pourraient être utilisés pour
nier les valeurs sociales et humaines que nous aimerions avoir ici. Chacun de
nous entreprendra une partie distincte de cette explication.
J'aimerais d'abord vous présenter Participation Québec.
Notre groupement comprend une centaine de personnes surtout jeunes, bilingues
et diplômés d'universités, qui se sont réunis pour
promouvoir collectivement l'idée d'un Québec où la
majorité garantira son épanouissement tout en encourageant une
plus grande participation de la minorité dans la vie
québécoise.
Ainsi, nous avons formulé les principes de base suivants: 1. Que
tout citoyen du Québec, sans égard à son origine ethnique
est un Québécois; 2. Qu'une meilleure participation des membres
des groupes minoritaires à la vie collective de la majorité est
absolument nécessaire; 3. Que le français soit accepté et
utilisé comme langue courante au Québec; 4. Que le gouvernement
du Québec ait la res-
ponsabilité de promouvoir l'idée d'un Québec
pluraliste dans toutes ses politiques. En prenant nos valeurs de base, il est
clair que nous nous opposerions à tout acte gouvernemental qui
suggère que le français est depuis toujours la langue des
Québécois, comme le dit le préambule de la charte,
étant donné qu'un tel énoncé nie l'appartenance des
gens d'origine non francophone à la communauté
québécoise. Pour certaines gens, y compris plusieurs anglophones
de l'Ontario et plusieurs francophones du Québec, cela ne vaut pas la
peine d'avoir deux langues sur un seul territoire; ils
préféreraient une division nette: les Anglais d'un
côté et les Français de l'autre. Pour nous, c'est un point
de vue étroit et dangereux pour le Québec que nous voulons
bâtir. Nous croyons que l'identité culturelle d'un individu n'est
pas menacée par la présence d'un individu d'une autre culture
avoisinante si ce deuxième n'empêche pas du tout l'expression de
l'identité du premier.
Entendu qu'il faut prendre des mesures concrètes pour sauvegarder
la culture du français dans l'Amérique du Nord, entendu qu'il
faut corriger la situation qui existait dans le monde des affaires où un
francophone était exclu des positions de haute direction, car il
n'était pas membre d'une clique sociale qui le contrôlait, mais il
faut également éviter de forcer la minorité avec laquelle
on vit d'abondonner son identité linguistique. Il faut dire clairement
dans la loi qui règle toutes les importantes questions linguistiques
dans la société, que tout citoyen du Québec est un
Québécois et qu'il a le droit de conserver son propre
héritage en offrant sa contribution au Québec.
Admettons, pour le moment, que l'intention des auteurs de la charte
n'était pas d'étouffer la communauté minoritaire au
Québec, pourquoi alors a-t-on dit dans l'article 112b, que ce sera
nécessaire, pour une entreprise, d'augmenter le nombre de
"Québécois" pour garder son certificat de francisation? Est-ce
qu'on sait que déjà la définition ambiguë du mot
"Québécois" dans la charte a encouragé une politique
d'embauche dans plusieurs compagnies, qui est ouvertement discriminatoire?
Même dans les compagnies privées, le fait de ne pas avoir un bon
nom du Bas-Saint-Laurent empêche un Anglo-Québécois
bilingue d'obtenir un emploi. Je connais personnellement quelques victimes de
ces politiques. Il faut souligner aussi que 85% de la population anglophone de
Montréal ont gagné moins de $10 000 en 1971, selon les chiffres
de Statistique Canada, ce qui représente une proportion égale
à la proportion des francophones de Montréal qui ont eu un tel
revenu cette année-là.
Je crois que le gouvernement du Québec doit tenir compte des
problèmes que les anglophones de faible moyen auraient à gagner
leur vie si la loi est sanctionnée telle que rédigée. Si
on ne change pas l'article 112b, afin de rendre clair qu'on exige seulement une
connaissance du français de la part des cadres d'entreprises, on
condamnera tous ceux qui cherchent un emploi et qui ne sont pas membres d'une
ethnie franco-québécoise, surtout des jeunes, à quitter
leur foyer. Ainsi, l'étouffe- ment graduel de la communauté non
francophone serait inéluctable.
Si on exclut les non-francophones de la définition de
Québécois, on nuira à l'identité culturelle et
même à l'existence du million de gens qui, comme moi, se sont
toujours considérés comme Québécois. On niera aux
Franco-Québécois la possibilité de vivre dans une
société pluraliste et ouverte. Ce sont des tournures
psychologiques et politiques qui me forcent à protester du fond de mon
coeur.
M. Weeks.
M. Weeks (Graham): M. le Président, madame, messieurs,
nous sommes représentatifs des Québécois non francophones
qui tentent de se libérer de leur élite traditionnelle. Je ne
suis pas plus content d'avoir M. Earl McLaughlin, par exemple, comme mon
porte-parole, que le Dr Lau-rin n'était content de recevoir de lui une
soi-disant leçon économique. Notre groupe prend comme position
incontestable que le Québec devienne une province foncièrement
française dans laquelle tout citoyen devrait pouvoir s'exprimer en
français. La montée en flèche du nombre d'étudiants
inscrits dans des cours d'immersion française indique l'acceptation de
cette proposition par des adultes non francophones du Québec qui veulent
que leurs enfants soient bien préparés pour la vie dans le
nouveau Québec. Beaucoup de ces adultes suivent, eux aussi, des cours de
français et Participation Québec se demande si ces cours sont
vraiment efficaces, c'est-à-dire, est-ce qu'ils rendent les
étudiants capables de fonctionner dans un Québec
français?
On n'a trouvé aucune recherche répondant à ces
questions, donc, notre groupe a dessiné un projet de recherche dans
l'espoir d'en trouver une. On va, d'ici quelques jours, adresser au
gouvernement québécois une demande d'aide financière pour
l'achèvement de ce projet. Etant donné les promesses plusieurs
fois répétées du Dr Laurin d'aider les non-francophones du
Québec à s'adapter aux nouvelles circonstances linguistiques, on
espère avoir une réponse rapide et positive à notre
demande.
Pour ce qui est du système scolaire lui-même, on croit que
la solution la plus équitable serait de choisir entre deux
extrêmes, soit une liberté complète de choix, soit un
système unitaire des cadres pour tout le monde. Malheureusement,
l'opinion publique est si divisée actuellement que ni l'une ni l'autre
solution n'est pratique. Donc, la solution réaliste se trouve quelque
part entre ces deux extrêmes. Il s'agirait de donner l'enseignement au
niveau primaire et secondaire en français. Les exceptions à cette
règle nous amènent inévitablement à faire des
distinctions entre les différents groupes résidant au
Québec. Répugnant à la notion parmi les droits de la
personne des qualités de bon aloi, l'objectif fondamental devrait donc
faire le minimum de distinction possible.
Tous nos francophones au Québec, à l'époque de la
promulgation de la loi, auraient le choix de la langue d'instruction pour leurs
enfants. Si au
moins lui ou son épouse avaient reçu un enseignement
primaire ou secondaire n'importe où dans le monde exception faite
et j'ajoute ici au texte que vous avez en main à la page 16 des
écoles françaises au Québec, on éviterait ainsi
l'iniquité de la rétroactivité. Le Dr Laurin a
déjà déclaré en public que les immigrants vivant
ici mais qui n'ont pas encore d'enfants à l'école sont plus
nombreux. S'il en est ainsi, il ne sera pas dommageable à la survivance
de la langue française de traiter ce petit groupe de la même
façon qu'avec les immigrants dont les enfants sont déjà
dans les écoles québécoises.
Par contre, les enfants de tous les immigrants futurs qui viennent d'en
dehors du Canada devraient aller à l'école française,
à condition que les agents de l'immigration canadienne ou
québécoise indiquent clairement à leurs parents, avant
qu'ils ne quittent leur patrie, les effets de la loi sur la langue sur leur vie
au Québec. Les écoles anglaises du Québec devraient
être accessibles à tout enfant dont l'un des parents a reçu
l'enseignement primaire ou secondaire n'importe où au Canada. Ces
soi-disant immigrants des autres provinces ne causeraient pas l'expansion du
système d'écoles anglaises au Québec. Le Dr Laurin a
cité le nombre d'arrivants anglophones des neuf autres provinces entre
1966 et 1971. On se croit sur pied ferme en suggérant que, depuis 1971,
au moins et surtout depuis la controverse sur la loi 22, le nombre de
départs a augmenté et le nombre d'arrivées a
diminué. On trouve absurde par ailleurs, la suggestion que les dossiers
scolaires des autres provinces seraient trop difficiles à trouver et
à vérifier. Est-ce que cela veut dire que vous accepteriez un
certificat de Sierra Leone, mais non pas de l'AIberta? D'ailleurs nous notons
qu'en contraste avec la communauté franco-québécoise, la
communauté anglophone du Québec se compose de deux portions,
l'une très stable qui comprend de 75% à 80% des
Anglo-Québécois et l'autre de 20% à 25%, qui est
très mobile. Merci.
Mme Warner (Nancy): M. le Président, membres de la
commission. En 1963, un éminent juriste québécois
appelé dans la cause d'une charte des droits de la personne, a dit ce
qui suit: "Dans une société où la majorité affirme
son existence en tant que groupe national, au moment même où se
manifeste un certain pluralisme dans la structure ethnique et religieuse de la
population, l'Etat provincial doit se donner pour mission d'assurer la
coexistence pacifique des groupes et de la perte des croyances. D'aucuns
opineront que le Canada français est encore trop absorbé par la
lutte pour ses libertés collectives et que l'Etat n'est pas mûr
pour l'adoption d'une charte aussi ample que celle dont nous nous faisons
l'avocat. "Nous croyons au contraire que les droits individuels et les droits
collectifs sont désormais indissolublement liés, puisqu'aussi
bien le progrès de ceci dépend aujourd'hui de progrès de
cela et qu'il ne saurait exister de démocratie sans le respect des uns
et des autres". Ces observations sur l'importance essentielle des droits de la
personne ont été faites par le présent ministre d'Etat
pour l'Education, M. Jacques-Yvan Morin.
Les libertés et droits spécifiés dans la Charte des
droits et libertés de la personne sont fondamentaux et s'appliquent
à tous les résidents sans préférence
arbitraire.
Ces droits étaient considérés par les auteurs de la
loi 50 comme le fondement de la justice et de la paix. En ce temps-là,
on considérait les droits et libertés de la personne humaine
comme inséparables des droits et libertés d'autrui et du
bien-être général.
Clairement, selon les auteurs de la loi 50, et selon M. Morin en 1963,
il n'y avait aucun conflit entre les droits et libertés de l'individu et
ceux de la collectivité. La Charte de la langue française
spécifie qu'elle prévaudra sur la Charte des droits et
libertés de la personne. Le fait même que le gouvernement ait
jugé convenable d'abroger spécifiquement la
préséance de ces droits fondamentaux nous inquiète. Il y
aurait sous la loi 1, telle qu'écrite maintenant, une grande
possibilité d'abus. Avec l'adoption de la loi no 1, avec l'article 172
dans sa forme présente, les minorités du Québec, qui
incluent des pauvres aussi bien des riches, qui incluent des gens
déjà opprimés par des circonstances économiques et
d'autres problèmes, perdraient le peu de protection qui existe
actuellement. L'accès aux emplois, aux professions, à la justice,
le droit de vivre une vie sans persécution pourraient subir de graves
préjudices.
Il est déjà prévu dans la Charte de la langue
française que les Québécois soient favorisés dans
l'accès aux emplois, avec des références qui
suggèrent fortement qu'un Québécois n'est qu'un membre du
groupe majoritaire, et nous qui habitons au Québec depuis des
générations, qui sommes chez nous ici, est-ce qu'on n'est pas
Québécois aussi? Si oui, nous voudrions bien le voir inscrit dans
la Charte de la langue. Ce n'est pas assez de confier nos droits à la
bonne volonté du gouvernement, particulièrement quand
l'application de la loi sera déléguée aux nombreux
fonctionnaires. S'il y a de la bonne volonté, qu'elle soit écrite
dans la loi, avec une déclaration claire que les droits
déjà donnés continueront d'avoir préséance
et que tous les groupes du Québec sont des citoyens à part
égale.
Plusieurs Québécois francophones, anglophones, allophones,
nouveaux arrivés et descendants des colons, veulent voir la construction
d'une meilleure société, une société qui fonctionne
en français, qui préserve le caractère unique qui existe
dans notre petit coin du monde. Nous voulons tous participer au projet de
régler les injustices et les inégalités qui existent pour
tous les Québécois, mais une société basée
sur un esprit renfermé, animé d'un désir de revanche et
d'amertume, perdra son âme. Nous habitons une des rares
sociétés où les gens d'origines diverses vivent dans une
interaction relativement harmonieuse. Notre but, c'est de continuer à
enrichir cette existence. Nous n'acceptons qu'aucun gouvernement, avec une loi
qui divise les gens et sème l'hostilité, détruise cet
esprit unique de notre Québec.
M. Doyle (Robert): M. le Président, honorables membres de
la commission parlementaire, tel qu'expliqué par M. Prupas, les buts
fondamentaux de notre association n'ont jamais compris une confrontation avec
notre gouvernement sur la loi sur la langue. Participation Québec
existait avant la publication du livre blanc et le groupe continuera à
poursuivre ses objectifs principaux après l'adoption d'une Charte de la
langue française sous n'importe quelle forme.
Notre mémoire expose que Participation Québec a,
dès le début, appuyé une intervention gouvernementale
positive qui cherche à promouvoir la position de la langue
française pour qu'elle soit la langue courante au Québec. Je peux
vous assurer que nous nous sentons obligés de commenter le projet de loi
no 1, non pas parce que nous avons changé cette position, et non pas
parce que nous sommes pour ou contre les principes et les moyens
généraux du projet, mais nous sommes plutôt d'opinion qu'il
y a, dans la législation proposée, beaucoup
d'éléments non positifs, en ce qu'ils n'encouragent pas la langue
française, mais dénigrent plutôt l'usage des autres
langues.
Plusieurs clauses du projet de loi militeront contre la participation de
plus en plus grande des citoyens de fonds linguistique et culturel non
francophone dans la vie québécoise. Les jours où l'on
courtisait les anglophones pour exercer une influence politique, les jours de
chantage efficace sont disparus ici au Québec. Si le débat public
sur le projet de loi no 1 a été animé et a
entraîné la division, cela ne s'explique pas par une
communauté anglophone qui veut se cramponner à ses droits acquis
ou ses privilèges impérialistes, c'est plutôt que le projet
de loi est considéré comme un instrument qui va nuire aux groupes
minoritaires pour avoir une présence vitale et efficace au Québec
et qui va opposer les Québécois les uns aux autres.
C'est avec tristesse que nous avons entendu les accusations
précitées d'une communauté à l'autre et entre les
communautés anglophones et francophones. Les individus raisonnables ont
été caractérisés comme des nazis, des
rois-nègres, des inférieurs, des impérialistes, etc.
Le projet de loi a été trop souvent défini comme
l'expression des aspirations légitimes des Québécois
francophones; ce n'est rien qu'un projet, bien qu'il soit d'une importance
incontestable. Il a été assujetti aux imperfections humaines en
ce qui concerne la rédaction et est susceptible d'une multitude de
divergences d'opinions. C'est la responsabilité de notre gouvernement de
tenter de calmer la fureur et de prendre l'avis de tout individu et de tout
groupe qui participe au développement du Québec. Cela doit
être le but, non seulement de ce gouvernement, mais encore de cette
législation et d'établir la primauté de la langue
française et d'agir honnêtement et justement envers les
minorités pour qu'elles sentent qu'elles sont bienvenues dans la
province et qu'elles ont un rôle dans un Québec massivement
français.
On ne s'acquitte pas de ce devoir envers les minorités en les
obligeant à se parler français entre elles dans leurs fonctions
de commissaires d'école et d'employés municipaux, tel que requis
dans les clauses 21 et 23. La garantie de leurs emplois représente un
conseil sérieux et justifié d'un grand nombre de
Québécois non francophones, surtout en face d'un effort de
francisation massif.
Participation Québec est profondément désolé
qu'en dépit des garanties qui nous ont été données
par le ministre d'Etat aux affaires culturelles, le 16 avril, des assurances
législatives des programmes d'enseignement du français et de la
sécurité d'emploi ne se trouvent nulle part dans le projet de
loi. Vous devez garantir non seulement la capacité des minorités
de gagner leur vie au Québec, mais encore leur capacité de le
faire en français.
En agissant pour garantir les droits linguistiques, le gouvernement ne
doit pas perdre de vue ses obligations dans le même domaine. Nous
suggérons que les clauses 19 et 20 soient amendées pour que la
participation des non-francophones dans la fonction publique soit
encouragée. La représentation proportionnelle est un concept
autant dans la vie publique de Québec que dans les domaines
commerciaux.
Pour ce qui concerne l'affichage, on a dit qu'actuellement, il ne
reflète pas fidèlement l'identité collective du
Québec. Si l'affichage doit servir de miroir de la société
québécoise, laissons-le être un miroir exact dans lequel le
français prédominerait tout en permettant l'usage des autres
langues. Nous ne connaissons aucune société normale du monde qui
supprime, au point de l'article 46, cette forme d'expression publique. Notre
gouvernement nous dit, d'un côté, qu'il entend poursuivre son
objectif dans un climat de justice et d'ouverture à l'égard des
minorités et d'un autre côté, qu'il ne veut voir aucune
trace publique de ces mêmes minorités.
L'assurance calmante d'un meilleur traitement à l'avenir ne peut
pas remédier à cette clause mesquine. Finalement, si le
gouvernement et si le projet de loi veulent nous convaincre que cette
société doit être nécessairement unilingue, il faut
plus que de vagues références historiques et des allusions peu
utiles aux injustices perpétrées dans les autres provinces. On
est tous Québécois ici, au moins par notre définition et
la société que Participation Québec voudrait voir dans un
sens culturel et économique ne doit avoir nécessairement rien
à voir avec les sociétés d'Ontario ou de la
Colombie-Britannique.
Nous croyons qu'une société pluraliste idéale qui
fonctionne en français, tout en permettant l'expression de
minorités, ne sera pas construite sur la méfiance que plusieurs
clauses de ce projet engendrent.
Si je peux voler une pensée d'un de nos plus grands
poètes, en plaidant pour un Québec unifié et
francisé, je vous laisserai avec les paroles suivantes: "Gens du pays,
c'est votre tour de vous laisser parler d'amour".
Le Président (M. Cardinal): Merci. Vous avez
employé exactement votre temps. Je donne la parole au
député de Terrebonne, en premier lieu. M. le député
de Châteauguay, je m'excuse, je croyais
que l'entente allait à l'effet contraire. M. le
député de Châteauguay.
M. Dussault: Je vous remercie, M. le Président. Pour
commencer, je tiens à remercier le groupe d'être venu
témoigner ici, à la commission parlementaire. Je pense qu'il faut
faire remarquer le ton avec lequel ce mémoire est
présenté. Je pense qu'il est appréciable et, du moins, du
côté ministériel, il est pris comme tel. Cependant, je
pense qu'il y a aussi quelques remarques qu'il faut faire à la suite des
nombreux mémoires que nous avons entendus, qui nous permettent
aujourd'hui de faire des comparaisons et de pouvoir dire, à l'instar de
mon collègue, le député de Taschereau, qu'il y a,
effectivement, des redites et vous n'avez probablement pas fini d'en entendre,
madame et messieurs.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Châteauguay, comme les autres, ne perdez pas votre temps...
M. Dussault: II y a des distinctions qui ne sont pas faites et
qui nous laissent penser que cela revient à ce que d'autres ont aussi
laissé entendre quant à la question des droits individuels et des
droits collectifs, quant à la question du bilinguisme individuel et du
bilinguisme institutionnel. J'aimerais savoir quelle distinction vous faites
dans votre mémoire entre ces deux notions de bilinguisme individuel et
de bilinguisme collectif.
M. Prupas: Si je peux me permettre de répondre, nous
croyons que le bilinguisme est un attribut individuel qu'il faut encourager; il
n'y a aucun doute là-dessus. Je suis sûr que le gouvernement
aimerait aussi voir la majorité des citoyens du Québec avoir
cette connaissance d'une deuxième langue, mais il me semble qu'il faut
aussi accorder du respect à ces gens qui sont des citoyens du
Québec, qui sont ici depuis des générations et qui ne sont
pas capables de s'exprimer en français dans les communications qu'ils
pourront avoir avec le gouvernement. D'accord, il faut avoir le français
comme langue officielle du Québec dans toutes ses politiques, mais il
faut aussi reconnaître qu'il y a des individus qui ont le droit de
communiquer avec le gouvernement en anglais.
M. Dussault: Par le projet de loi no 1, est-ce que vous comprenez
que le gouvernement voudrait obliger tous les individus à parler
français?
M. Doyle: Dans le projet de loi tel que rédigé
actuellement, ce n'est pas tout à fait clair. Je pense qu'il est
écrit qu'il sera loisible au gouvernement de répondre aux
individus en anglais. L'individu n'a aucun droit à une réponse en
anglais de son gouvernement, s'il écrit au ministère de la
Justice ou à n'importe quel ministère. Cela doit être
rectifié parce que les affirmations du gouvernement étaient que
chaque individu a le droit de recevoir ses réponses du gouvernement en
français.
Tel que rédigé, cela ne se passerait pas.
M. Dussault: Vous faites donc allusion à des relations
entre l'Etat et l'individu. Est-ce que, dans ce contexte de relations entre
Etat et individu, vous préconisez qu'il y ait des relations
bilingues?
M. Prupas: Je m'excuse, mais je ne comprends pas ce que cela veut
dire, des relations bilingues. Il me semble que le bilinguisme institutionnel,
c'est le droit d'un individu, qui parle une des deux langues, de communiquer
avec son gouvernement dans sa propre langue. Mais je ne crois pas que ce soit
nécessaire pour chaque correspondance entre un anglophone et le
gouvernement d'être faite dans les deux langues.
M. Dussault: Effectivement, ce que le projet de loi
prévoit, c'est une relation institutionnelle unilingue avec permission,
parce que rien dans le projet de loi n'empêche les individus de parler
leur langue chez eux, dans leurs relations interpersonnelles. Alors, le projet
de loi n'intervient pas dans les relations individuelles. Le projet de loi
parle de relations d'individu à Etat. Est-ce que pour vous c'est
clair?
M. Weeks: Si je peux vous donner un exemple concret et
très actuel, je connais une immigrante qui parle sa propre langue
maternelle d'Europe, qui parle aussi l'anglais, mais non pas le
français, qui a écrit à l'école du COFI, qui est
régie par le gouvernement québécois, qui a écrit en
anglais et la réponse est venue en français, parce que cela
venait du gouvernement québécois. Cette personne écrivait
pour savoir quand son cours de français commencerait. Alors, cela a
l'air un peu ridicule! Dans ce contexte, le fait que le projet de loi, tel que
rédigé actuellement, dit: Le répondant peut avoir... que
ce ne soit pas obligatoire de donner la réponse dans la langue du
répondant, c'est rédigé permissivement, si je peux
m'exprimer comme cela, que le gouvernement ou l'agent du gouvernement peut
répondre dans la langue, du répondant, mais ce n'est pas
obligatoire.
M. Dussault: En somme, si je comprends bien, la personne à
laquelle vous faites allusion, a eu cette fois-là sa première
leçon de français, bien pratique! Je voudrais savoir d'abord
depuis quand le groupe Participation Québec existe?
M. Prupas: II existe depuis à peu près le 1er
décembre 1976.
M. Dussault: 1976. Alors peu de temps avant le projet de loi no 1
et la charte, mais un petit peu après le 15 novembre dernier.
M. Prupas: Exactement.
M. Dussault: Qui fait partie de ce groupement Participation
Québec?
M. Prupas: Nous avons plusieurs membres, à
peu près une centaine, qui viennent de toutes les couches de la
population. La majorité sont jeunes, bilingues, et ont une certaine
formation universitaire. Mais je dois dire qu'il y a des enseignants, des
urbanistes, des conseillers en relations publiques, de jeunes avocats, des
étudiants même et quelques professeurs à
l'université.
M. Dussault: Ce groupement-là, est-ce qu'il a
été formé en fonction des objectifs linguistiques ou pour
d'autres objectifs? Si oui, lesquels?
M. Prupas: Comme je l'ai souligné au début dans mon
discours, les objectifs étaient d'abord de faire promouvoir une
meilleure participation des non-francophones à la vie de la
collectivité francophone. Cela veut dire que nous croyons que c'est une
idée de premier ordre. Il y a des cours de français qui seront
disponibles aux adultes non francophones qui n'ont pas cette connaissance. Nous
espérons aussi que la fonction publique québécoise va
ouvrir ses portes aux anglophones de façon qu'ils pourraient être
utilisés. Cela veut dire qu'on doit avoir la possibilité d'entrer
à la fonction publique québécoise, sans avoir une
très bonne connaissance du français avec l'idée
d'apprendre le français, dans les six mois qui suivent.
M. Dussault: Est-ce que je me trompe en pensant que vous visez
l'intégration des allophones, des anglophones au milieu francophone
québécois?
M. Prupas: Oui, je ne peux pas donner une définition
exacte du mot "intégration". Pour nous, il faut garder la culture de
langue anglaise, la facilité de s'exprimer en anglais tout en
travaillant dans la vie publique dont le travail est en français.
M. Dussault: Le mémoire que vous nous soumettez
aujourd'hui, a-t-il été préparé par vous
quatre?
M. Prupas: A peu près une quinzaine y ont
participé. Il a été approuvé par une
assemblée plénière des 100 membres de notre
groupement.
M. Dussault: D'accord. Vous avez fait allusion à la
définition de "Québécois", dans le préambule de la
loi. Je pense que vous n'avez peut-être pas vu dans les journaux ce que
le ministre en disait. Mais à ce sujet, effectivement, il y aura une
retouche du texte, parce qu'il y avait là une ambiguïté.
Vous n'êtes pas les premiers et sûrement pas les derniers
d'ailleurs à venir le faire remarquer.
M. Prupas: II faut ajouter aussi que le mot
"Québécois" était utilisé dans l'article 112b. Et
pour nous, même si on utilise le mot francophone
"Québécois", il pourrait être utilisé pour nier les
droits des non-francophones aux emplois dans quelques entreprises
privées et même au gouvernement.
M. Dussault: Comme je le disais.il y a des redites du
côté de ceux qui viennent présenter des mémoires,
comme de notre côté à nous, forcément on
réagit un peu à ce qui vient, et la définition de
"Québécois" d'une façon ou d'une autre sera
clarifiée de façon qu'il n'y ait plus d'ambiguïté
dans le projet de loi.
La deuxième partie de votre mémoire fait aussi allusion
à l'article 172 et à ce qu'on dit être une
ambiguïté ou un danger. A ce point de vue, le ministre a dit
très clairement, d'ailleurs quasiment dès le début de
cette commission, qu'il y aurait une correction au projet de loi de
façon telle qu'il n'y ait pas d'ambiguïté, que les droits
individuels soient respectés mais que, en même temps, les droits
collectifs le soient aussi.
Ceci m'amène à vous demander quelle place vous
reconnaissez à une majorité linguistique dans un territoire
donné comme celui du Québec, actuellement.
Le Président (M. Cardinal): Un instant, avant de
répondre. Je vais être obligé, à 13 heures, de
suspendre techniquement les travaux et comme je n'aime pas interrompre les
opinants, j'ai préféré vous en informer avant que vous ne
donniez votre réponse. A 13 heures, je me lèverai et nous
reprendrons les travaux a 15 heures. Nous vous invitons à revenir avec
nous dès 15 heures. Cela vous convient-il? D'accord. Alors, vous pouvez
répondre jusqu'à 13 heures.
Mme Warner: J'aimerais dire, sur le sujet des droits humains, que
nous voudrions beaucoup plus qu'une clarification; nous voulons que les droits
humains aient d'abord la priorité. Nous ne voudrions aucune
référence dans la charte à la prédominance de la
charte, en aucune partie, sur les droits humains. Nous pensons que les droits
humains doivent avoir absolument la priorité absolue sur toute charte de
langue et sur toute autre législation.
M. Dussault: Si je comprends votre intervention, vous me dites
reconnaître le droit à l'existence de la langue française
comme langue officielle; si je comprends les explications que vous avez
données tout à l'heure, en lisant votre mémoire, vous
voulez qu'on vous reconnaisse des garanties, des certitudes quant à la
possibilité pour les anglophones de continuer à parler anglais
ici. C'est cela?
M. Prupas: Ce n'est pas seulement la question de continuer
à parler anglais ici, je ne crois pas que le gouvernement puisse
empêcher les Hongrois de parler hongrois ici, au Québec.
M. Dussault: Alors, quel statut...
Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse. Vous entendez la
cloche, il est 13 heures. Les travaux de cette commission sont suspendus
jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 58)
Reprise de la séance à 15 h 5
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, madame et
messieurs!
Nous allons reprendre l'audition. Le parti ministériel a
déjà utilisé douze des trente minutes qui lui sont
accordées. Je cède donc la parole à M. le ministre de
l'Education.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, permettez-moi
tout d'abord de me réjouir de ce que le 15 novembre ait eu pour effet
d'amener ce groupe à se constituer. Mieux vaut tard que jamais. C'est
sûrement par hasard, si les initiales de ce mouvement sont les
mêmes que celles d'un parti politique que nous connaissons tous.
Cependant, je veux que vous sachiez que le gouvernement considère comme
Québécois, que les députés du parti que je
représente considèrent comme Québécois tous ceux
qui résident ici et qui veulent bien s'attacher à l'énorme
tâche de développer ce pays. Anglophones, francophones de quelque
origine que ce soit, nous les considérons comme des
Québécois.
Là-dessus, je suis donc à même de vous donner tous
apaisements, comme l'a fait à plusieurs reprises d'ailleurs mon
collègue le ministre d'Etat au développement culturel, le Dr
Laurin. Si j'en juge d'ailleurs d'après l'aisance que vous
témoignez dans la langue de la majorité, les membres de votre
groupe n'auront sûrement aucune difficulté à
s'intégrer à ce Québec nouveau qui pointe à
l'horizon. Vous avez bien voulu rappeler et même citer mes propos de
1963, en faveur d'une charte des droits de l'homme pour le Québec. A
vrai dire, je n'en changerais pas un mot, ni même une virgule,
aujourd'hui.
J'étais déjà conscient, à ce moment, et je
le suis devenu encore davantage depuis, de la difficulté de concilier
les droits collectifs avec les droits individuels dans de nombreuses situations
et le voeu que j'exprimais, en 1963, c'était que nous arrivions
justement à concilier les uns et les autres. Il n'est pas question de
faire prédominer les droits collectifs sur les droits individuels, pas
plus qu'il ne saurait être question de faire prédominer des droits
individuels sur les droits collectifs, contrairement à ce qui a
été suggéré ce matin.
La plupart des analystes, des politologues, des philosophes qui se
penchent sur cette question qui est délicate, difficile, en viennent
à la conclusion qu'il faut savoir trouver un équilibre entre
droits individuels et droits collectifs et c'est dans cet esprit, je tiens
à vous le dire, que ce projet de loi a été conçu et
c'est dans cet esprit qu'il a connu une certaine évolution, depuis qu'il
a été déposé devant la Chambre. C'est dans cet
esprit que le gouvernement entend légiférer sur cette question
qui ne saurait attendre davantage. Etant donné que nous avons jusqu'ici,
adopté, en 1975, une Charte des droits de la personne, à
laquelle, comme chef de l'Opposition, j'ai été associé
étroitement, il nous restait à nous pencher sur les droits
collectifs, ce qui n'avait pas encore été fait. Nous sommes en
train de le faire désormais et je ne retirerai pas, encore une fois, un
seul mot de ce que j'ai écrit en 1963 et vous ne trouverez nulle part,
dans mes écrits, la moindre suggestion à l'effet que les droits
individuels doivent primer les droits collectifs ou vice versa.
Cela étant dit, j'aimerais vous poser une ou deux questions sur
votre mémoire que je touve fort intéressant et imbu d'ailleurs
d'un certain progressisme, sur le plan socio-économique, qui n'est pas
pour déplaire aux membres ministériels de cette commission. A la
page 16 de votre mémoire, vous recommandez la liberté de choix de
la langue d'enseignement pour les non-francophones ou, un peu plus loin, pour
ceux que vous appelez les Anglo-Québécois. J'aimerais savoir
comment, dans votre esprit, on peut départager ceux que vous nommez les
anglophones ou les non-francophones d'avec les Anglo-Québécois et
je pose cette question en étant parfaitement conscient de la
difficulté qu'elle présente, puisque c'est une question à
laquelle nous nous sommes heurtés.
L'une des hypothèses de travail, lorsque nous avons abordé
cette législation, c'était de dire: Essayons de reconnaître
les droits des Anglo-Québécois et on s'est aperçu que ce
n'était pas facile à définir, un
Anglo-Québécois ou un non-francophone, parce qu'il y a des
quantités de gens qui ne sont ni anglophones, ni francophones et qu'il
faut évidemment savoir de quel côté ils vont tomber.
Vont-ils tomber du côté de la langue de la majorité
ou du côté de la langue de la minorité anglophone? De sorte
que j'aimerais savoir comment vous départagez dans votre esprit
anglophone de francophone et ce que vous faites pour les gens dont la langue
maternelle n'est ni le français, ni l'anglais.
M. Prupas: Avant de laisser répondre mon collègue,
M. Weeks, je veux dire que nous avons fait une division entre ceux qui sont des
francophones de langue maternelle et ceux qui sont des non-francophones de
langue maternelle pour décider qui pourrait aller à
l'école anglaise. M. Weeks va répondre à la question.
M. Weeks: Comme le gouvernement actuel et comme des gouvernements
précédents, on s'est rendu compte, lorsqu'on a
étudié le livre blanc et le projet de loi 1, que c'était
très difficile d'avoir des définitions comme vous avez dit tout
à l'heure, comme vous venez de le dire vous-même.
On prend le même système que le gouvernement,
c'est-à-dire en tentant de donner une définition à partir
de l'éducation des parents de l'enfant en question. Par exemple, pour
les soi-disant immigrants des neuf autres provinces, on les considère
comme ayant l'accessibilité à l'école anglaise du
Québec si au moins un des parents a reçu son éducation
primaire ou secondaire en anglais.
M. Morin: Bien sûr, mais cette expression de
non-francophone que vous utilisez dans votre mémoire comprend beaucoup
de gens qui ne sont pas nécessairement des anglophones, si j'ai bien
compris. Donc, votre liberté de choix irait, en
somme, à tous ceux qui ne sont pas des québécois de
langue française?
M. Weeks: Oui, on accepte...
Mme Warner: La liberté de choix serait seulement pour ceux
qui sont déjà ici au Québec; on accepte que les immigrants
aillent à l'école francophone. La liberté de choix, c'est
seulement pour les gens qui sont déjà installés au
Québec, qui se sont installés ici sous les anciens
règlements qui comportaient la liberté de choix, mais nous ne
demandons pas la liberté de choix pour les immigrants à
l'avenir.
M. Morin (Sauvé): Oui, d'après ce que vous dites
à la page suivante, effectivement, vous nous dites: Nous sommes d'accord
que les enfants de tout futur immigrant qui vient de l'extérieur du
Canada devrait aller à l'école française à
condition que les agents d'immigration du Canada et du Québec indiquent
clairement à chacun d'eux, avant qu'ils ne quittent leur patrie, les
effets de la loi sur la langue et sur leur vie au Québec.
Je me réjouis, soit dit en passant, de cet aspect de votre
mémoire qui va dans le sens des intentions du gouvernement. Mais pour
ceux qui sont déjà là, vous accorderiez donc la
liberté de choix, même s'ils ne sont pas de langue maternelle
anglaise; si quelqu'un vient d'un pays européen, autre que la
Grande-Bretagne, quel qu'il soit, ou s'il vient d'Amérique latine,
quelle que soit sa langue maternelle, vous lui donneriez la liberté de
choix.
M. Weeks: Par exemple, ceux qui sont déjà ici, qui
sont venus au Québec avec une certaine perception de ce qui se passe au
Québec actuellement, et comme le gouvernement a déjà
décidé de permettre aux immigrants qui sont déjà
ici, au Québec, qui ont déjà des enfants dans les
écoles québécoises de les laisser continuer dans ces
écoles, on ne voit pas pourquoi on ne peut pas laisser le petit nombre
d'immigrants qui sont déjà ici, mais qui n'ont pas d'enfants
à d'école, pourquoi ne pas les traiter de la même
façon. C'est votre collègue, le Dr Laurin, qui a admis que
c'était un groupe très petit, donc...
M. Morin (Sauvé): Remarquez que je respecte cette opinion;
ce n'est pas du tout l'intention du gouvernement d'agir de la sorte. Le
problème, c'est que si nous faisions cela, il faudrait donner libre
choix à tous ceux qui, bien qu'étant de langue anglaise sont
déjà à l'école française, parce qu'ils n'ont
pas passé les tests sous l'empire de la loi 22. De sorte que si nous
allions reconnaître cette liberté de choix pour l'avenir
immédiat à tous ceux auxquels vous voudriez l'appliquer, il
faudrait défaire les effets de la loi 22 et revenir, en somme, à
la loi 63. J'aime autant vous dire que le gouvernement ne le fera sous aucun
prétexte. Il faudrait retirer de l'école française ceux
qui y sont déjà, soit parce qu'ils ont choisi librement d'y
aller, soit parce qu'ils ont échoué aux tests. Cela voudrait dire
quelques milliers d'élèves, et je ne pense pas que le
gouvernement soit prêt à accep- ter des conséquences aussi
dramatiques que celle-là. Vous vous rendez compte, si nous allions
appliquer cela aux enfants cette année et l'an prochain, ce que nous
diraient tous ceux qui se sont plies à la loi dans le passé. Vous
voyez bien que cela pose des difficultés tout à fait
insurmontables. Mais cela dit, je respecte tout à fait ce que vous
pensez.
M. Weeks: Oui, mais vous pensez que chez ceux qui sont
déjà inscrits dans des écoles françaises parce
qu'ils ont échoué aux tests ou pour d'autres raisons, si on
adopte notre proposition, la plupart de ces enfants vont maintenant quitter
l'école française?
M. Morin (Sauvé): Peut-être pas la plupart, mais un
bon nombre, et cela créerait des jalousies et un sentiment de
discrimination terrible. On nous dirait: Nous, nous avons accepté ou
nous y sommes allés, nous nous sommes conformés à la loi
et maintenant vous voulez changer les règles du jeu. Ce n'est pas
possible, quand même il y aurait une minorité qui nous dirait
cela, peut-être serait-ce une minorité, mais nous ne sommes pas
prêts à rouvrir les règles passées de cette
façon. Cela créerait un sens de la discrimination terrible chez
les gens.
M. Doyle: Mais vous avez déjà ouvert la porte aux
différentes règles sous la loi 22 dans les autres domaines. Je ne
sais pas pourquoi vous pensez que c'est une justification exacte de ne pas
changer les règles dans ce coin-ci quand vous changez les règles
quant à l'affichage, quant aux différentes clauses de la loi no
1. Ce n'est pas seulement une question de rétroactivité.
M. Morin (Sauvé): Oui, mais les conséquences de
l'affichage sont bien moins sérieuses que des conséquences qui
portent sur des enfants et sur l'avenir d'enfants, n'est-ce pas?
M. Doyle: Peut-être bien que les enfants voudraient rester
aux écoles françaises mais on trouve, à Participation
Québec, que ce serait juste de laisser le libre choix aux gens qui sont
déjà installés ici sous les anciennes règles.
M. Morin (Sauvé): II ne faut pas laisser ouverture
à la moindre discrimination. Il ne faudrait pas qu'il y ait des
règles applicables aux uns et aux autres. De cette façon, bien
que votre opinion soit tout à fait respectable, ce n'est pas la
première fois d'ailleurs que nous l'entendons, beaucoup de groupes
anglophones sont venus nous tenir exactement le même langage, mais ce
n'est pas l'intention du gouvernement. Je tenais à ce que vous le
sachiez.
J'aurais peut-être une autre question, au sujet des futurs
immigrants. Vous nous dites: A condition que les agents d'immigration du Canada
ou du Québec indiquent clairement à chacun d'eux, avant qu'ils ne
quittent leur patrie, les effets de la loi sur la langue et sur leur vie au
Québec. Je dois vous dire que, dans le passé, nous avons eu
beau-
coup de difficulté à faire comprendre aux services
fédéraux qu'ils devaient expliquer le Québec aux gens qui
venaient s'y établir. A ma connaissance, même le gouvernement
antérieur, même le gouvernement libéral a exigé
à plusieurs reprises que les services fédéraux fassent
comprendre aux immigrants qu'ils venaient ici s'établir dans un pays
à dominante francophone et ce message ne semble pas être
passé du tout. Je dois dire que nous ne sommes pas les premiers à
mettre l'accent là-dessus. Tous les gouvernements antérieurs
depuis dix ans l'ont fait, que je sache.
M. Prupas: Mais je crois qu'avec la dernière entente entre
le gouvernement fédéral et le gouvernement du Québec sur
l'immigration, les relations entre ces niveaux gouvernementaux ne sont pas ce
qu'elles étaient sous l'ancien régime et je crois aussi qu'avec
les 50 points que le gouvernement a sur la décision à savoir qui
viendra à Québec, il a assez de liberté, le gouvernement
du Québec, pour faire connaître aux futurs immigrants l'obligation
qu'il y a pour eux d'aller à une école francophone.
M. Morin (Sauvé): Je puis vous assurer que nous avons
hâte de voir comment ces mécanismes vont fonctionner et de
constater si oui ou non ils nous permettent justement de faire connaître
le Québec tel qu'il existe. Parce que, jusqu'à ce jour, cela n'a
pas été le cas. C'est une des raisons pour lesquelles nous sommes
devant un certain nombre de ces problèmes. Une dernière question,
ensuite, nous pourrons passer à d'autres interventions. Il ne se
dégage pas clairement de votre mémoire si vous êtes en
faveur d'une langue officielle ou de deux langues officielles. Cela ne se
dégage pas clairement de vos textes et j'aimerais vous poser la
question: D'après vous, doit-il y avoir une langue officielle au
Québec ou doit-il y en avoir deux?
M. Doyle: C'est une question assez difficile, M. le ministre,
parce que, tel que rédigé, on n'est pas tout à fait
d'accord sur le principe du français comme langue officielle. Mais on
prend une définition de langue officielle dans le texte actuel du projet
de loi tel que rédigé actuellement. On comprend que la langue
officielle, en vertu de la Charte de la langue française, veut dire
qu'il n'y aura aucun respect pour les autres langues. Sous cet angle, on n'est
pas en faveur du français comme seule langue officielle. Quand les gens
doivent parler entre eux en français quand ils sont anglophones, dans
les commissions scolaires, dans les conseils municipaux, si c'est cela la
portée d'une langue officielle, on n'est pas en faveur de cela. On
serait en faveur de deux langues officielles. La langue officielle du
Québec, c'est une question difficile, c'est peut-être ridicule de
reprendre les recommandations de la commission Gendron, mais c'est
peut-être la meilleure façon de l'exprimer. Une langue nationale,
puis deux langues officielles, l'anglais et le français.
M. Morin (Sauvé): Mais avez-vous bien lu le projet de
loi?
M. Doyle: Oui.
M. Morin (Sauvé): La langue officielle, c'est la langue de
l'Etat, la langue des documents, mais cela n'empêche pas les gens de
parler la langue qu'ils veulent entre eux, ni même devant les tribunaux,
ni même devant l'Assemblée nationale. Rien n'interdit à
quiconque de parler l'anglais devant...
M. Doyle: Mais la Charte l'interdit certainement entre eux dans
les commissions scolaires, et certainement entre eux dans les
municipalités.
Ils n'auront pas le droit d'utiliser leur langue dans l'affichage.
M. Morin (Sauvé): L'affichage, c'est autre chose. Nous
pensons aux documents publics, là, les procès-verbaux des
commissions scolaires, des municipalités, etc. Mais croyez-vous que cela
aille jusqu'à forcer les gens à parler français lorsqu'ils
ne savent pas s'exprimer en français dans les commissions scolaires?
M. Doyle: C'est exactement ce qui va arriver selon les articles
21 et 23 tels que rédigés.
M. Morin (Sauvé): Ah! Vous inférez.
M. Doyle: Non, ce n'est pas une interprétation, c'est le
texte littéral de la loi. Vous, monsieur, comme avocat, devez savoir
cela.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! J'aimerais bien que
les murmures qui m'entourent cessent et que nous continuions nos travaux
conformément à l'ordre.
M. Lalonde: II est novice un peu...
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! A l'ordre, s'il
vous plaît!
M. Lalonde: ... je voudrais l'aider.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! Je vous en prie! Le
président, jusqu'à présent, n'a jamais interrompu les
membres de la commission, sauf s'ils avaient dépassé leur temps,
et encore! J'aimerais bien que les députés laissent la parole
à celui qui l'a.
M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Morin (Sauvé): Etant donné que le temps passe,
je voudrais, encore une fois, remercier ce groupe intéressant, issu du
15 novembre, des propos qu'il est venu tenir devant nous. Je crois qu'il y a
certains aspects de ce mémoire qui sont fort encourageants, d'autres le
sont moins, mais nous ne sommes pas obligés de nous rendre à tous
les arguments. Il y en a, cependant, que je retiens parce qu'ils sont fort
intéressants. Je me réjouis surtout de voir qu'il y a de jeunes
anglophones qui songent à prendre la place qui leur revient comme
citoyens à part entière dans le Québec de demain. Merci,
M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): Merci, M. le ministre. Mme le
député de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je désire
remercier et féliciter les représentants du groupe Participation
Québec pour le mémoire extrêmement fouillé et
complet qu'il a présenté à la commission parlementaire. Je
réalise qu'il n'est pas facile, pour les groupes minoritaires, de venir
devant cette commission. A certains moments, le côté
ministériel les soupçonne allègrement de venir
défendre des privilèges, à d'autres moments, on leur
reproche de ne pas avoir évolué.
C'est ainsi, par exemple, qu'on a constamment tenté de minimiser
la valeur des classes d'immersion dans le secteur d'enseignement anglophone
comme étant un phénomène marginal et n'étant
d'aucune façon une évidence que quand même il y a des
efforts pour essayer de vivre en français au Québec et de pouvoir
communiquer avec les autres concitoyens en français.
Je pense que vous avez dû être rassurés depuis que le
député de Châteauguay vous a assurés que le
gouvernement, dans la loi 1, n'entend pas empêcher les citoyens, dans
leurs échanges privés, de fonctionner entre eux. C'est une
très grosse réassurance et je suis fort aise de l'entendre
surtout après la démonstration qu'on a eue, jeudi
après-midi dernier, alors que l'esprit démocratique de ce
gouvernement s'est manifesté d'une façon sans
équivoque.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît! A l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît! Je regrette. Jeudi
après-midi, quand nous nous sommes réunis, on a fait allusion au
même fait. Vous savez que je suis lié à la
présidence, j'ai invoqué souvent l'article 140, je voudrais qu'on
s'en tienne au débat.
M. Lalonde: M. le Président, une question de
règlement...
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Naturellement, loin de moi l'intention de contester
l'impartialité dont vous avez fait preuve depuis le début des
délibérations à cette commission. Maintenant j'aimerais
quand même que vous nous indiquiez, dans quelle mesure votre
interprétation du règlement et l'application du règlement
à nos délibérations vont empêcher un
député de faire référence quand même à
des événements qui se sont passés ici à
l'Assemblée nationale. Il n'y a rien d'illégal à cela. Je
craindrais qu'une trop grande restriction de votre part amène non pas
les députés à être plus dociles, mais au contraire,
à montrer plus de préoccupation à l'égard de leurs
droits et de l'exercice de leurs droits.
Alors, je ne vois en rien de quelle façon le député
de L'Acadie était non conforme au règlement lorsqu'elle a fait
référence à l'esprit non démocratique du
gouvernement. On va le répéter à toutes les minutes s'il
le faut, si c'est de cette façon que nous voulons démontrer notre
point de vue ici, à cette réunion de la commission parlementaire.
Alors j'aimerais que ces propos que je veux très positifs soient bien
reçus, de façon que nos délibérations se
poursuivent, mais en toute liberté pour le député de
s'exprimer.
Les ministériels peuvent faire des références
à la Suède et à tout ce qui se passe ailleurs et quant
à nous, quand nous parlons de ce qui s'est passé à
l'Assemblée nationale, il y a quelques jours, on nous rappelle à
l'ordre.
Alors, je m'élève contre cette façon d'appliquer le
règlement, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): D'accord, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys, je ne regrette, dans votre
exposé que la dernière phrase, à savoir que vous vous
élevez contre cette façon d'appliquer le règlement, ce qui
est viser pas mal assez directement la présidence. Cependant...
M. Lalonde: II faut que je le dise, je ne suis pas d'accord.
M. Charbonneau: Vous n'étiez pas d'accord et on a vu ce
que cela a donné.
Le Président (M. Cardinal): ... A l'ordre, s'il vous
plaît! Justement, je l'ai mentionné à plusieurs reprises.
En tant que parti politique, il y en a normalement cinq à cette table,
je fais des commentaires peut-être de trop à ce sujet, quant
à ceux qui ne nous accompagnent pas toujours. Il faut cependant
désirer que le travail de cette commission parlementaire se tienne
à un niveau tel, que malgré les attaques politiques que je
reconnais normales, entre partis, on s'en tienne strictement et je
répète strictement au projet de loi 1.
Ce que je viens de faire n'est pas du tout dans le but de brimer les
députés, mais justement d'éviter ce qui se produit parfois
à l'Assemblée nationale ici, je suis très mal
placé pour en parler parce que vous vous rendez compte, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys, que j'ai mentionné
à plusieurs reprises que, même si les présidents, les
vice-présidents ou les présidents de commission se remplacent
à cette table ou dans l'autre salle, au salon vert, il y a quand
même, quant à moi, un minimum de décence pour
éviter. qu'on ne reprenne des débats et que l'on ne reprenne
aussi, par le biais, ce qui n'était certainement pas l'intention de Mme
le député de L'Acadie, des décisions déjà
rendues à cette assemblée ou a cette salle de commission.
M. le député de Marguerite-Bourgeoys, j'admettrai que vous
avez raison sur le fond, je ne voudrais pas montrer trop de
sévérité et je n'ai pas à juger la façon
dont j'ai montré ou non de la sévérité. Vous
annoncez vous-même que vous avez l'intention, si j'exerce trop
sévèrement le rôle qui m'est attribué, de rappeler
à chaque instant que vous désirerez le faire certains faits qui
se sont produits en dehors de cette commission ou à cette commission et
vous parlez de docilité. Je vous rappellerai que je ne suis pas le
patron de cette commission, que, dès le 7 juin, si je ne me trompe,
j'ai indiqué que j'en étais le serviteur et que, par
conséquent, je ne veux exercer aucun paternalisme; mon seul désir
est que, devant le nombre de mémoires qui doivent être
présentés devant cette commission, devant le nombre de membres de
cette commission, porté à vingt, ce qui donne un quorum de onze,
je dois quand même tenter de réaliser le mandat de cette
commission. Je n'ai en rien attaqué Mme le député de
L'Acadie, je l'ai simplement retenue au moment où je craignais qu'elle
ne déborde le débat. Je lui donne quand même la parole et
j'espère que, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, vous
accepterez, sinon le bien-fondé, du moins l'expression de cette
façon de procéder.
Mme La voie-Roux: Merci, M...
M. Saint-Germain: M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Jacques-Cartier.
M. Saint-Germain: ...j'aimerais avoir une directive. De quel
droit et qu'est-ce qu'il y a dans nos règlements qui peut me
défendre ou défendre à un député de
l'Opposition de dire qu'on a un gouvernement antidémocratique?
Le Président (M. Cardinal): Rien, monsieur.
M. Saint-Germain: Pour le prouver, qu'est-ce qui nous
défend de faire référence à certains débats
qui ont eu lieu à l'Assemblée nationale?
Le Président (M. Cardinal): C'est justement la marge que
l'on peut ou non franchir. C'est la dernière phrase du premier
alinéa de l'article 140. Nous ne sommes pas à l'Assemblée
nationale ici.
M. Saint-Germain: Non.
Le Président (M. Cardinal): Nous sommes en commission
parlementaire et même si l'article 163 dit que les mêmes
règles s'appliquent, elles s'appliquent, pourvu qu'il n'y ait pas des
règles distinctes et différentes...
Mme Lavoie-Roux: ...
Le Président (M. Cardinal): Est-ce que je peux terminer ma
réponse à M. le député de Jacques-Cartier?
Mme Lavoie-Roux: ...
Le Président (M. Cardinal): A ce moment-là, j'ai
cité souvent ce bout de phrase, j'ai indiqué que nous avions un
mandat très précis. Je reconnais parfaitement le droit à
tous les membres de chacun des partis de l'Opposition d'attaquer
l'équipe ministérielle. C'est non seulement un droit, c'est
même, dans certaines limites, prévu par l'article 99, en
particulier...
M. Saint-Germain: On est ici pour cela...
Le Président (M. Cardinal): ...un pouvoir, justement.
M. Saint-Germain: ...que voulez-vous...
Le Président (M. Cardinal): Je vous le dis. Mme le
député de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, une directive, s'il vous
plaît.
Le Président (M. Cardinal): Oui.
Mme Lavoie-Roux: Dans quelle mesure peut-on faire une analogie ou
une comparaison sans que ceci ne déroge au règlement prévu
par l'Assemblée nationale?
Le Président (M. Cardinal): Ceci, Mme le
député, étant non pas à la discrétion, le
mot serait beaucoup trop fort et ne serait pas juste, mais au jugement de celui
qui, au moment où cette analogie est faite, préside cette
commission. Ainsi, par exemple, si l'on fait l'analogie avec la Charte des
droits de l'homme, c'est sûr que je l'admets et que je l'ai toujours
admis, si on fait l'analogie avec la loi 22, ou la loi 63 ou la loi 85, c'est
sûr que je l'ai toujours permis, mais si l'on entre dans un débat
on a essayé de le faire ce matin où les questions,
selon les termes qu'emploie l'Opposition, de séparation ou sur les
termes qu'emploie le parti ministériel de référendum ou si
on réfère à la loi 31 ou à la loi 7 ou à la
loi 19, je laisserai porter quelque temps, mais, très bientôt, je
rappellerai à l'ordre celle je le dis par politesse, non pas
parce que vous le faites fréquemment
Mme Lavoie-Roux: ...
Le Président (M. Cardinal): ...et celui ou ceux qui le
feraient.
Par conséquent, c'est purement une question de jugement
porté sur non pas l'impulsion du moment, mais sur la situation
présente à chacune des secondes et à chacune des minutes
des auditions de cette commission parlementaire.
Je sais que cette directive est peut-être un jugement de Salomon;
je ne peux pas en dire plus, ce ne sont pas des choses qui se tranchent au
couteau.
Cela étant dit, je pense que je puis vous redonner la parole et
tout ce qui a été dit depuis que je vous ai interrompue ne
comptera pas dans votre temps.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Vous conviendrez
quand même que le rôle de l'Opposition officielle et de
l'Opposition en général, dans une commission parlementaire, est
de faire valoir, dans un projet de loi, ce qui pourrait aller à
l'encontre du bien général d'une société que l'on
veut démocratique. Je pense que le groupe qui est devant nous a fait
amplement démonstration qu'à l'intérieur du projet de loi
no 1, il y a plusieurs éléments qui, justement, remettent en
question son fondement démocratique et je réalise
fort bien que le gouvernement a commencé à reculer. Il a
commencé à reculer sur la définition du terme
Québécois, sur l'article 172. Mais, quand on examine ces deux
articles en relation avec l'article 23, l'article 75, l'article 112, l'article
11, l'article 13, pour n'en mentionner que quelques-uns, on a vraiment une
perception nette de l'esprit peu démocratique qui anime tant le livre
blanc que le projet de loi no 1.
Je pense que le rôle de l'Opposition officielle est justement
d'éveiller la population à ces dimensions et je continuerai de le
faire parce que, sans ça, on serait aussi bien de s'en retourner chez
nous.
Le Président (M. Cardinal): Me permettez-vous, Mme le
député de L'Acadie? Par votre intelligente façon de
procéder, vous montrez que vous avez complètement compris ma
directive.
Mme Lavoie-Roux: Je ne sais pas si c'est un compliment, mais, en
tout cas...
Des Voix: Oui.
Mme Lavoie-Roux: Allons donc!
Le Président (M. Cardinal): N'en doutez point, madame.
M. Lalonde: Si c'est un compliment, méfiez-vous!
Une Voix: ... sortir encore.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre!
Mme Lavoie-Roux: Pour donner une autre indication de ce que je
pense, quant au processus démocratique, et quant à la
non-discrimination, le ministre de l'Education vient justement de nous dire
avec une grande naïveté et, je suis sûre, avec beaucoup de
sincérité, que, "quant à la langue d'enseignement, il ne
faut pas laisser la porte ouverte à la moindre discrimination". Je pense
que je le cite au texte. S'il regarde la loi telle qu'elle est, si vous
regardez la communauté anglophone qui vit présentement au
Québec, il y aura déjà trois types de citoyens qui seront
traités différemment par le projet de loi, l'article 51 et ceux
qui le suivent, quant à langue d'enseignement.
Je pense que le ministre de l'Education a assez d'expérience pour
savoir que, lorsqu'on légifère sur la langue d'enseignement, tout
ce qu'on peut souhaiter, c'est d'être le moins discriminatoire possible.
Penser qu'une loi pourra, dans ce domaine, éviter toute forme de
discrimination, je pense que c'est avoir beaucoup d'illusions et je suis
sûre que le ministre de l'Education n'en a pas là-dessus, mais il
a évidemment le rôle de défendre ce projet de loi en ce qui
touche la langue d'enseignement.
J'ai une seule question à vous poser qui ne touchera pas aux
articles que vous avez soulevés. Je pense qu'ils sont très
clairs. J'aimerais vous demander, compte tenu de l'esprit de votre groupe, des
objectifs que vous poursuivez, quelle est votre perception des obstacles qui
empêchent présentement une meilleure participation des
minorités à la vie du Québec.
M. Prupas: On pourrait citer une longue liste des obstacles qui
existent présentement. Je crois qu'on peut les trouver des deux
côtés. Du côté anglophone, des gens qui, jusqu'ici,
reconnaissent qu'ils vivent dans une société fortement
francophone et qui n'essaient pas, dans leur vie personnelle, de participer
à cette vie. Je dois souligner que je crois que la communauté
anglophone du Québec a beaucoup changé durant les dix
dernières années et nous devrons les pousser à changer un
peu plus.
Mais nous croyons que dans beaucoup d'aspects du projet de loi no 1 il y
aura aussi une meilleure participation, dans la vie québécoise,
des anglophones. Je cite les exemples que mon ami, M. Doyle, avait cités
tantôt, les articles 21 et 23; je cite aussi et je crois que c'est
peut-être l'article le plus important qui ira à la participation
des anglophones au Québec, l'article 112-B qui forcera les anglophones
à quitter la province si les politiques d'embauche déjà
mises en vigueur par des compagnies privées continuent.
M. Weeks: Si je peux ajouter un exemple concret, lorsqu'on
regarde la section "carrières et professions" de la Presse et du
Montreal Star de samedi dernier, et cela se répète tous les
samedis, d'après ce que j'ai vu depuis quelques mois, il y avait, dans
la Presse de samedi dernier, presque la moitié d'une page d'annonces
pour la fonction publique québécoise et rien dans le Montreal
Star, en français, en anglais ou en n'importe quelle langue. Je me
demande comment on peut réaliser les propos qu'a faits maintes fois le
Dr Laurin d'attirer davantage d'anglophones à la fonction publique
québécoise sans mettre les mêmes annonces dans les journaux
anglais que dans les journaux français. On pourrait très bien
dire qu'ils devraient lire les journaux français comme je le fais
moi-même, mais je crois que si on veut les attirer, il faut passer aussi
par leurs propres media d'information.
M. Prupas: Au sujet de la fonction publique, si on prend un
anglophone qui a peut-être une connaissance du français qu'il a
eue à l'école secondaire, qui essaie de trouver un emploi dans la
fonction publique québécoise, l'article 35 de la Loi de la
fonction publique lui niera le droit d'apprendre le français au travail,
ce qui est exigé par plusieurs compagnies.
Mme Lavoie-Roux: Je pense que vous avez raison de vous
inquiéter sur ce point et on a eu une démonstration à
l'Assemblée nationale d'un ministre qui n'a jamais retiré les
directives qu'il avait données et, au contraire, a essayé de les
justifier et je pense que cela a été signalé par la FTQ, a
été signalé par un groupe anglophone pour l'unité
du Québec j'oublie le titre exact et vous le signalez
exactement, les journalistes l'ont fait. Je pense qu'il faut revenir à
la charge là-
dessus et je souhaite que d'autres groupes minoritaires, même si
le député de Taschereau est suffisamment informé,
reviennent et le redisent. Peut-être qu'à force de l'entendre, ils
finiront par comprendre. Je vous remercie.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Gaspé.
M. Le Moignan: Merci, M. le Président. Si votre groupe est
issu du 15 novembre, c'est peut-être là l'affirmation d'un geste
positif. Je regrette beaucoup de ne pas avoir assisté, ce matin, quand
vous avez résumé un peu votre mémoire; comme je viens
d'entrer à Québec, j'ai essayé de le regarder un petit peu
en vitesse et il y a certainement quelques aspects qui me frappent de
façon particulière. Je ne sais pas si c'est parce que nous avons
changé de ministre aujourd'hui, quoique que je n'aie absolument rien
à dire contre M. Lau-rin, le ministre de l'Education semble vous
raffermir davantage quand il ne veut pas ouvrir les portes à la
discrimination. Evidemment, en feuilletant votre mémoire, vous
êtes inquiets un peu, vous êtes peut-être nerveux face
à l'avenir, et je crois qu'ici on est en droit de comprendre vos
revendications, mais quand on regarde le projet de loi no 1, Charte de la
langue française au Québec, j'inscris sur le mien "Charte
linguistique du Québec", et je crois que c'est dans ce sens que vous
marchez.
Il ne faut pas oublier une chose, je pense, quand on regarde le projet
de loi no 1, c'est la Charte de la langue française et non pas la Charte
des droits linguistiques, et je crois que c'est là où des groupes
comme le vôtre accrochent. C'est un projet de société en
somme qu'on retrouve là-dedans, et peut-être que comme vous, nous
aurions aimé que ce projet de loi s'étende en même temps,
soit un peu plus développé, un peu plus rassurant, donne plus de
détails, que ce soit la minorité anglophone ou encore aux autres
groupes qui déjà, depuis des années, que ce soient les
Italiens, les Juifs, les Grecs, se sont intégrés un peu au groupe
anglophone.
Il y a tout un projet de société québécoise.
Evidemment, tout le monde y souscrit et même votre groupe, il n'y a pas
de doute, que la langue du Québec soit bien la langue française.
Mais il y a un point fondamental ici, dans votre mémoire, que vous
exposez, au tout début. Quand vous parlez de langue officielle,
j'aimerais connaître votre opinion. Vous ne semblez pas faire la
distinction, parce qu'on parle beaucoup du statut juridique de la langue
française. Comment voyez-vous un statut juridique pour la langue
anglaise, par exemple? Quelle différence voyez-vous entre les deux quand
on parle de statut?
M. Doyle: J'ai essayé de répondre à cette
question, tout à l'heure, monsieur. C'est une question assez difficile
pour nous, parce qu'on reconnaît que la langue du Québec, la
langue courante est bien la langue officielle du Québec, elle doit donc
être le français. On accepte que ce soit la première langue
du Québec. On ne peut pas ac- cepter que ce soit la seule langue du
Québec. Comme cela, je pense bien qu'on devrait avoir les mêmes
droits ou la même reconnaissance de la langue anglaise ici qu'on a pour
la langue suédoise en Finlande, avec une minorité de 5%. Je pense
bien que même si ce n'est pas utilisé partout dans la fonction
publique, même si toute la société fonctionne en
français, il doit y avoir une reconnaissance de la langue anglaise comme
langue officielle du Québec.
M. Le Moignan: Tout de même, ce point qui est bien
indiqué, la Charte de la langue française, cela vous surprend,
cela vous étonne, je comprends un peu votre point de vue, que l'on ne
légifère pas plus sur les autres langues. Vous avez
mentionné tout à l'heure, quand M. le ministre vous a posé
une question, que ce que vous vouliez, c'était un bilinguisme
institutionnel. Autrement dit, une reconnaissance officielle des deux
langues.
M. Prupas: Au fond, une reconnaissance officielle des droits
qu'un individu anglophone pourrait avoir dans les communications qu'il pourrait
avoir avec son gouvernement. Nous exigeons dans ce sens qu'il y ait des droits
linguistiques pour les anglophones non seulement envers le gouvernement tel
quel, mais aussi avec les conseils municipaux et les conseils scolaires. Si je
peux reprendre une autre de vos idées, nous croyons que cette loi
arrête tous les aspects linguistiques de la vie québécoise.
Ce n'est pas seulement une Charte de la langue française. Comme cela,
nous croyons qu'il faut donner quelques droits, pas les droits d'une
majorité, mais les droits d'une minorité à la
minorité anglophone du Québec.
M. Le Moignan: Sur un autre détail, peut-être, un
peu plus loin. Au sujet de l'impact économique face à ce projet
de loi no 1, quels sont les inconvénients vis-à-vis de la langue
du travail et la langue de l'enseignement qui sont de nature, peut-être,
à attirer davantage votre attention?
M. Prupas: Comme j'ai mentionné dans mon discours ce
matin, vous n'étiez pas ici, alors je pourrais le répéter.
Nous avons des chiffres qui montrent qu'une grande proportion des anglophones
de Montréal ont des moyens très faibles. 85% des anglophones de
Montréal ont un revenu de moins de $10 000 par année. Ce sont des
gens âgés, il y a plus de 15 ans, ils ont eu un revenu de moins de
$10 000 en 1971. Dans la même année, les francophones de
Montréal étaient à peu près dans la même
catégorie économique à Montréal. C'est vrai que
dans l'autre direction, dans les plus hautes catégories salariales, on
trouve plus d'anglophones que de francophones. Nous croyons qu'il faut avoir
des changements dans cet aspect.
Mais nous croyons aussi que si l'article 112b tel que
rédigé et les autres aspects de cette loi qui ne donneraient pas
des moyens aux anglophones peu instruits, aux immigrants, aux gens qui n'ont
pas une connaissance suffisante de la langue
française de l'obtenir, nous croyons qu'ils ne trouveront pas
d'emploi au Québec et ce sera à cause de la loi
elle-même.
M. Le Moignan: Croyez-vous que... Oui?
M. Prupas: Nous comprenons bien que la majorité
québécoise a peur que si on laisse continuer le bilinguisme
officiel, les Anglais du Québec, les non francophones du Québec
ne vont pas apprendre le français suffisamment bien pour communiquer
avec l'Etat en français. Moi, je n'ai pas de gêne à
communiquer avec le gouvernement québécois en français,
même pour mes impôts, et c'est difficile même dans la langue
anglaise, pour moi, d'accord? Mais il y a beaucoup de Québécois
non francophones qui ont de la difficulté à s'exprimer et
à comprendre le français et on veut, dans la période de
transition surtout, dans cette société entièrement
française à laquelle on a fait référence ce matin,
assurer à ces gens le pouvoir de communiquer et de recevoir des
communications dans la langue qui leur convient le mieux. C'est cela le
problème, un équilibre entre le fait qu'on veut franciser le
Québec davantage et le fait qu'il y a beaucoup de gens qui s'expriment
mieux dans une langue autre que le français.
M. Le Moignan: Si je comprends bien, et c'est ma dernière
question, quand vous dites: Les immigrants, ce sont des gens qui sont
déjà intégrés au Québec depuis quelques
années, des nouveaux citoyens québécois qui vont souffrir
le plus parce qu'ils n'ont pas les aptitudes, les facilités, question de
l'âge, peut-être question d'emploi manuel, je ne sais trop, ce sont
eux qui seront les plus désavantagés à l'avenir, parce
qu'ils n'auront peut-être pas cette facilité des cadres
supérieurs d'apprendre de façon assez rapide la langue
française.
M. Prupas: C'est cela.
Le Président (M. Cardinal): Merci, M. le
député de Gaspé.
Je donne la parole au député de Marguerite-Bourgeoys en
rappelant au parti de l'Opposition officielle qu'il lui reste huit minutes.
J'ai relevé très précisément le temps du
mini-débat et accordé au député de L'Acadie le
droit, comme le voudrait le député de Marguerite-Bourgeoys, de
s'en prendre au parti ministériel.
M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, je vous remercie beaucoup. Je
voudrais simplement faire quelques remarques à propos du chapitre que
vous consacrez à la Charte des droits et libertés de la personne.
Je tiens à le faire parce que, même si pour quelques membres de
cette commission, il ne s'agit que des redites et des
répétitions, je pense qu'on doit reconnaître
qu'après plus d'une quarantaine peut-être de mémoires qui
ont été présentés et souvent par des organismes
beaucoup plus "importants" au niveau des ressources financières, par
exemple, au niveau du nombre de membres que le vôtre, c'est la
première fois, et je peux vous en rendre hommage, qu'on nous
présente des questions fort précises sur les conséquences
du geste, du piétinement que le gouvernement a fait de la Charte des
droits et libertés de la personne, de l'amputation à froid qu'il
a faite par l'article 172. Vous posez des questions tout à fait
précises à savoir qu'est-ce qui arrive de tel article si la
Charte des droits et libertés de la personne... si on continue à
la mettre de côté et à donner préséance au
projet de loi no 1 ?
Je crois que ces questions sont extrêmement pertinentes. Je veux
vous remercier de nous les avoir apportées. Il n'est pas sûr que
les réponses qu'on apporterait à ces questions soient exactement
les mêmes que vous, il y a aussi une question d'appréciation et
d'opinion. Je pense que ce que vous avez fait, c'est le gouvernement qui aurait
dû le faire, au lieu de simplement rejeter du revers de la main, par son
article 72, l'explication du ministre là-dessus est inénarrable,
c'était simplement pour voir ce qui arriverait. Imaginez-vous que le
Conseil des ministres s'est prononcé sur le principe de l'amputation de
la charte, mais simplement pour voir ce qui va arriver. Je pense que c'est le
gouvernement qui aurait dû s'imposer cet exercice de voir exactement
quels sont les effets de la Charte des droits et libertés de la personne
sur la question linguistique.
Même si le député de Taschereau n'entend ici que des
répétitions et même si le député de
Châteauguay vous a dit que c'étaient des redites, je pense qu'on a
besoin que de nombreux autres organismes et de nombreux autres citoyens
québécois viennent nous le dire ici afin qu'ils voient la
lumière. C'est tout ce que je voulais vous dire et je voulais vous
remercier.
Le Président (M. Cardinal): Merci, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. le député de Mont-Royal, vous avez cinq minutes. Si M.
le député de Jacques-Cartier veut parler ensuite, il lui restera
la différence.
M. le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Merci beaucoup, M. le Président.
Premièrement, je veux remercier nos invités parce qu'ils nous ont
apporté une nouvelle approche. Malgré les paroles du
député de Taschereau, à savoir qu'il avait
été suffisamment informé, je crois que s'il était
resté ici pour écouter les explications de M. Prupas sur
l'article 112, il aurait bien vu que c'est la première fois qu'on nous
apporte ces nouvelles interprétations, ces nouvelles discriminations
possibles dans le projet de loi. Je crois que ce n'est pas le temps de dire que
nous sommes suffisamment informés, à moins que vous continuiez
votre rôle, celui que vous avez eu au début, qui était de
commencer à donner l'impression de vouloir nous bâillonner, de
limiter le temps de l'Opposition, à moins que ce soit un préavis
que vous allez clôturer cette commission parlementaire. Ce serait
très malheureux, parce qu'on commence maintenant...
M. Guay: M. le Président, j'invoque le
règlement.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Taschereau sur une question...
M. Ciaccia: Vous enlèverez cela de mon temps!
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre!
M. Guay: J'invoque à la fois les articles 96 et 99.
D'abord, quant à ce que j'ai dit ce matin, c'était pour ceux qui
étaient venus jusqu'à maintenant. J'ai bien précisé
que si des organismes apportaient quelque chose de particulièrement
nouveau, ce serait sans doute extrêmement intéressant, mais que,
sinon, cela commençait à être répétitif et je
le maintiens.
Deuxièmement, j'invoque l'article 99. Le député de
Mont-Royal...
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît! Quant à l'article 96, vous avez parfaitement raison. Pour
ce qui est de l'article 99, j'ai hâte que vous fassiez la preuve que vous
avez raison.
M. Guay: Au sujet de l'article 99, le député de
Mont-Royal vient de dire que je jouais un rôle qui avait pour but de
baîllonner le parti de l'Opposition officielle. Je ferais d'abord
remarquer qu'on m'impute des motifs et que, d'autre part, le
député de Marguerite-Bourgeoys a voté en faveur de la
motion qui avait pour but...
M. Lalonde: Pas la vôtre. Des Voix: Pas la
vôtre.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Guay: ... de bâillonner son collègue. Une motion
modifiée, mais néanmoins.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre!
M. Guay: J'aimerais bien, M. le Président, que vous
rappeliez le député de Mont-Royal à l'ordre et qu'il s'en
tienne au but de la commission plutôt que de lancer un débat avec
moi ou avec qui que ce soit d'autre de ce côté-ci.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît! J'aimerais bien vous faire plaisir, M. le député de
Taschereau, mais il ne suffit pas d'imputer des motifs à un
député, il faut lui imputer des motifs indignes. Comme je ne
crois pas qu'il oserait imputer des motifs indignes, je remets la parole
au...
M. Lalonde: Ce n'était pas loin, M. le
Président.
Le Président (M. Cardinal): Si c'était cela, je
vais être obligé de rappeler le député de Mont-Royal
à l'ordre.
M. Lalonde: Ce n'était pas loin.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Merci beaucoup, M. le Président. J'aurais
pensé qu'avec la nouvelle approche que nos témoins nous ont
apportée, le gouvernement aurait, plutôt que d'essayer de
renverser les opinants, essayé de les encourager et de reconnaître
cette nouvelle approche qui est présentée ici par un jeune groupe
de francophones; ce semble être une nouvelle voie, qui semble vouloir
faire le lien entre tous les groupes de notre société et qui
apporte, tout en acceptant l'objectif du projet de loi, des suggestions
très valables afin d'améliorer la situation et de créer
une harmonie entre les différents groupes plutôt que d'exacerber
leurs relations comme le projet de loi semble le faire.
Puisqu'on n'a pas trop de temps j'aurais voulu faire d'autres
remarques quant à l'approche de ce groupe je voudrais demander
à M. Prupas quelque chose quant à l'article 112. Il y a plusieurs
étudiants qui viennent me voir, qui me parlent et qui ont les
mêmes préoccupations que vous. Jusqu'à présent, j'ai
essayé de les rassurer, je leur ai dit: Vous ne devez pas quitter le
Québec, vous devez rester ici, vous êtes Québécois.
Quelle approche suggérez-vous, que recommanderiez-vous que je leur dise
suite à vos remarques sur l'article 112? Ils interprètent la
situation présente de la même façon que vous vous la
représentez. Ils disent que ce n'est pas assez de pouvoir parler le
français, il faut avoir un nom français pour obtenir un emploi au
Québec.
M. Prupas: Je dois franchement avouer qu'avec l'article 112 tel
que rédigé, c'est très difficile de dire à un jeune
anglophone, qui essaye de trouver un emploi dans ces temps difficiles, qu'il a
le droit de demander à son futur employeur de ne pas faire de
discrimination contre lui à cause du fait qu'il n'a pas un nom du
Bas-Saint-Laurent. J'aurais préféré répondre de la
façon suivante. Tout employeur doit savoir que le gouvernement a dit
plusieurs fois qu'on ne veut pas faire de discrimination contre les anglophones
qui sont bilingues, mais, pour moi, c'est très difficile d'être
clair et de donner une réponse comme cela. J'aimerais aussi passer la
parole à Mlle Warner qui pourrait peut-être apporter quelques
précisions sur ce que je viens de dire.
Mme Warner: Cela précise qu'il faut augmenter le nombre de
Québécois dans les entreprises pour qu'elles détiennent
leur certificat de francisation. On sait que cela est peu pour le gouvernement
que de nous assurer verbalement qu'un Québécois, c'est tous ceux
qui résident au Québec, quand, dans le langage populaire, un
Québécois, c'est un Canadien français. D'après mon
expérience personnelle, il y a des compagnies qui m'ont dit
personnellement que, si je veux travailler, il faut aller ailleurs, que, pour
travailler au Québec, il faut être Canadien français.
Cela ne veut rien dire si vous parlez français, si vous
êtes bilingue; il faut être Canadien fran-
çais, c'est ce que ces gens disent. Cela arrive avec beaucoup de
gens. Je connais des amis qui sont diplômés d'universités
anglophones. Il y a deux bureaux séparés pour les entrevues, un
pour les Canadiens français et un autre pour les Québécois
d'autres origines. Le bureau pour les Québécois d'autres origines
est pour les emplois en dehors du Québec. Pour les emplois ici au
Québec, il faut des Canadiens français.
Ceci est déjà mon expérience et l'expérience
de mes amis, etc. Avec l'article 112b, je ne peux pas imaginer comment cela
peut devenir pire dans la question de la discrimination. Quand on discute avec
les gens, quand on entre dans un débat avec ces gens, ils me disent que
c'est injuste, cette discrimination. On me dit: II y a quinze ans, on faisait
de la discrimination contre les Canadiens français. C'est vrai, on a
fait de la discrimination contre les Canadiens français dans le
passé, contre tous ceux au Québec qui ne faisaient pas partie des
Anglo-Saxons privilégiés, pas seulement les Canadiens
français, mais tout le monde. Avec la loi 1, pour moi, cela signifie,
cela implique que c'est le commencement de quelque chose de nouveau. Si on
bâtit une nouvelle société, une société avec
plus de justice, il ne faut pas commencer avec les mêmes injustices et
inégalités que celles qu'on avait avant.
Quelle sorte de société va-t-on bâtir si on met dans
une loi, une loi qui vient du gouvernement, qu'il faut user de discrimination
contre les Québécois de différentes origines?
M. Ciaccia: Vous avez parfaitement raison, c'est un exemple
flagrant de discrimination. M. le Président, puisqu'il me reste
seulement une minute, je veux donner l'occasion à mon collègue...
J'aurais aimé poser plus de questions, mais, malheureusement, je n'ai
plus le temps. Alors, je vous remercie.
Le Président (M. Cardinal): Un instant, s'il vous
plaît. Pour les fins de l'audition, nous avons déjà
dépassé le temps alloué. Il reste encore, malgré le
temps passé, une minute au parti ministériel et une minute au
parti de l'Opposition officielle.
Je vais accorder la parole à M. le député de
Jacques-Cartier, en lui rappelant qu'il faudrait qu'il tente de se contenir
dans cette minute. M. le député de Jacques-Cartier.
M. Saint-Germain: Merci, M. le Président. Il y a un
défi de lancé, alors, j'accepte...
Le Président (M. Cardinal): Est-ce à la
présidence ou au député de Jacques-Cartier?
M. Saint-Germain: Les règlements, par les
règlements, M. le Président.
Vous avez tantôt, avant l'heure du lunch, fait une relation entre
l'article 21 et l'article 23 qui s'appliquent aux commissions scolaires. Je
comprends très bien que, de la façon que c'est
rédigé, cela peut créer, à mon avis, des injustices
bien spécifiques, bien écrites dans ces articles. J'aimerais vous
demander d'expliciter votre pen- sée là-dessus. Vous m'avez
semblé mettre une fin assez abrupte à votre réponse, pour
une raison ou pour une autre. Pouvez-vous vous permettre de parler un peu plus
de la teneur de ces deux articles?
Le Président (M. Cardinal): Merci, mesdames,
messieurs.
M. Weeks: J'ai le texte anglais devant moi, mais cela dit qu'on
peut utiliser les deux langues, l'anglais et le français, dans les
communications internes, pour les services d'organisation et d'instruction en
anglais, mais supposons, par exemple, qu'à l'intérieur d'une
commission scolaire foncièrement anglophone, quelqu'un veut commander
quelque chose à une autre partie par un système de
clignotisation; tout cela étant anglophone, on en arriverait à
une situation ridicule où il y a deux anglophones se parlant
français entre eux, c'est-à-dire qu'en spécifiant qu'il
s'agirait seulement de la fonction pédagogique de la commission
scolaire, cela pourrait entraîner d'autres situations ridicules dans
d'autres domaines de fonctionnement de la commission scolaire.
Le Président (M. Cardinal): Merci. M. le
député de Châteauguay, en vous demandant la même
collaboration que m'a accordée le député de
Jacques-Cartier.
M. Dussault: Merci, M. le Président, je vais essayer.
Avant de vous remercier, j'aurais une petite remarque à faire,
à laquelle le député de L'Acadie m'a fait penser, en fait,
tout à l'heure. Vous savez qu'au Parti québécois, du
côté ministériel, nous avons une position linguistique
très claire, et cela nous permet de ne pas devoir nous cacher
derrière quelque image que ce soit, mais d'être critiques devant
les mémoires qui nous sont présentés.
Entre autres, sur la question des classes d'immersion, tous ceux qui
nous en ont parlé ici nous ont permis, nous ont donné l'occasion
de nous montrer inquiets devant ce qui se faisait. Je vais vous donner un petit
exemple de ce qui peut faire qu'on doit s'inquiéter. A une
élève qui était en classe d'immersion depuis six ans, en
fait, qui était en sixième année de classe d'immersion,
c'est-à-dire 6000 heures de français, à une question qu'on
lui posait à savoir: Qui a décidé que tu allais en
immersion? Elle répond: "C'est mes parents qui ont décidé
va aller; mais premièrement, j'étais dans anglais, 1ère
année, mais ma mère n'aimait pas ça, parce que elle
pensait quand je ne parlais plus français dans tous mes amis plus tard.
C'est pourquoi décidé à changer les classes."
A une autre question, elle répondait: "Je n'sais pas,
j'étais dans 1ère année. Je sais pas si je vais choisir
toutes les autres classes et c'est tout, c'est mes parents; maintenant, je
pense que c'est les français que je le veux."
A une autre question, elle disait: "Je veux parler français parce
que tout le Québec c'est français presque et aussi, si tu vas en
France, tu
veux parler à tous les personnes et si vous étais Anglais,
vous savez pas."
A une autre question, elle disaitc'est la dernière
Le Président (M. Cardinal): S'il vous plaît,
oui.
M. Dussault: "... y a des mots on sait pas et on veut parler
anglais, parce qu'on veut jouer des jeux et on sait pas des mots en
français comment s'appelle et on parle en anglais."
Devant cela, ce que je tiens à vous dire, c'est que nous voulons
être extrêmement prudents devant tout ce qui va se faire pour
intégrer les personnes et tout ce qui va se faire pour rendre les choses
faciles aux personnes, mais, quand même, sans prendre de risque sur
l'esprit même des enfants qui nous concernent.
Or, ceci étant dit, je tiens à vous remercier beaucoup de
votre présence ici. Nous avons apprécié, quoique certaines
personnes pourraient, malignement, dire le contraire, votre présence, et
tous ceux qui viendront, nous les écouterons avec la même
attention. Merci encore.
M. Weeks: M. le Président, en tant que professeur
d'immersion française dans une école anglaise, je me demande si
je pourrais répondre, dans un temps très court, à...
Le Président (M. Cardinal): Oui, très... Je
m'excuse, M. le député de Marguerite-Bourgeoys. Je m'excuse, la
question est...
M. Lalonde: ...au cas.
Le Président (M. Cardinal): Ah bon! d'accord. Je vais
présumer le consentement de la commission pour qu'on poursuive pendant
plus...
M. Saint-Germain: On ne fait pas passer un examen de
français dans une école française?
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît! Je ne voudrais pas enlever la parole à quelqu'un qui veut
terminer cette audition. Je vous prierais...
M. Dussault: M. le Président, si vous me permettez,
quelques secondes. Je vais vous expliquer que cela a été
tiré d'une émission de télévision à
Radio-Canada. On a seulement retranscrit les paroles de quelques
élèves qu'on avait fait paraître devant la
télévision, à qui on avait posé des questions en
français. Je suppose même que les élèves qui ont
paru à la télévision ont été choisis par le
SBGM et j'en conclus que c'étaient les meilleurs éléments,
c'est-à-dire ceux qui avaient vraiment réussi.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Châteauguay, je vous invite justement à terminer cette
audition.
M. Weeks: J'ai enseigné dans des classes françaises
d'immersion depuis deux ans, à Bea- consfield, dans l'ouest de
l'île de Montréal, et je constate qu'il y a des problèmes.
D'après mon expérience personnelle, j'enseigne en 2e année
et en 8e année. Ils comprennent très bien, mais ils s'expriment
assez mal. C'est au moins un début, c'est un indice d'un très
fort changement d'attitude, et j'admets aussi que, dans beaucoup de cas, c'est
plutôt la décision des parents que la décision des jeunes,
mais, pour la plupart des décisions, dans le domaine scolaire, ce sont
les parents qui prennent les décisions et non pas les enfants.
Peut-être que c'est malheureux, mais c'est un fait.
M. Dussault: J'avais remarqué moi-même d'ailleurs le
changement d'attitude des parents.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît! A l'ordre! A l'ordre! A l'ordre! Non, merci, c'est terminé.
D'une façon...
M. Prupas: Je...
Le Président (M. Cardinal): Non, je m'excuse, j'ai
répété vingt fois que ce n'est pas un débat. J'ai
laissé beaucoup de temps, tant aux membres de Participation
Québec qu'aux députés. Je veux donc, d'une façon
non impliquée dans le débat, au nom de toute la commission,
remercier le groupe Participation Québec, particulièrement ceux
qui ont été leurs porte-parole, M. Prupas, M. Doyle, M. Weeks,
Mme Warner, si je ne commets pas d'erreur. Nous vous remercions encore une
fois, je l'ai mentionné au début, du fait que vous ayiez
été obligés d'attendre et que vous soyez revenus avec nous
et même que vous ayez porté le temps de la suspension. Je pense
que vous avez dû être heureux à Québec.
M. Prupas: De notre côté, M. le Président, je
veux remercier tous les membres de la commission parlementaire de nous
écouter et j'espère que les précisions que nous avons
apportées seront entendues au Conseil des ministres quand le projet de
loi sera rédigé à nouveau. Merci beaucoup.
Le Président (M. Cardinal): Merci. C'est pourquoi la
commission se réunit. Oui, M. le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Me permettriez-vous d'exprimer un certain regret? Le
regret que nous ne puissions pas prendre plus de temps pour un mémoire
qui est aussi innovateur et aussi positif que celui de Participation
Québec.
Le Président (M. Cardinal): Je suis d'accord, mais vous
savez que je suis lié par une résolution. Je pense que tous ont
des regrets, mais...
M. Morin: Nous sommes navrés.
Le Président (M. Cardinal): ...je dois continuer et
j'appelle immédiatement l'Association des cadres scolaires du
Québec, pour les membres de la commission, mémoire no 253.
Mme le député de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je voudrais avoir une
directive. Ce matin, à l'arrivée du ministre de l'Education que
le député de Marguerite-Bourgeoys a soulignée avec...
M. Morin: Enthousiasme.
Mme Lavoie-Roux: ...enthousiasme, adulation, vous avez
laissé entendre...
M. Lalonde: II ne faut pas se méprendre.
M. Morin: Je ne voudrais pas que le député
interprète la démarche du député de cette
façon.
M. Lalonde: Je ne dis pas que vous me prêtez des motifs
indignes, mais quand même...
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît! Mme le député de L'Acadie.
Une Voix: Allons donc!
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! Mme le
député de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Vous avez laissé entendre que nous
pouvions poser des questions au ministre, mais que ceci devait se faire dans le
cadre de ces interventions. Je suis un peu embarrassée, parce qu'il y a
tel article qui dit qu'on ne doit pas interrompre celui qui parle et d'un autre
côté...
M. de Bellefeuille: ...directive.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! Je m'excuse,
madame. Allez.
Mme Lavoie-Roux: ...et d'un autre côté, vous savez
dans quel esprit j'ai présenté cette motion, il y a près
de dix jours maintenant. C'était pour que nous puissions justement poser
des questions au ministre de l'Education. Je me demande à quel moment
béni nous pourrons le faire.
Le Président (M. Cardinal): Je vais justement
répondre à cette question immédiatement. Je ne la prendrai
pas en délibéré cette fois-ci. Je vais lire lentement
l'article 100, je vais référer ensuite à ma
décision, sans la relire, parce qu'elle est assez longue et je vais
rappeler le mandat de la commission, ce sont les trois fondements de la
brève décision que je vais rendre.
L'article 100 se lit ainsi: "Tant qu'un député a la
parole, aucun député ne doit l'interrompre sur ce point,
vous avez donc raison si ce n'est pour lui demander la permission de
poser une question ou de donner des explications pour soulever une question de
règlement"; le reste ne s'applique pas ici. Donc, le premier point: On
peut toujours demander à un ministre s'il veut bien être
interrompu pour répondre à une question. Il a le droit de refuser
ou d'accepter.
Le deuxième point: Lorsque vous avez fait une motion pour inviter
le ministre à se présenter comme témoin, si j'avais
accepté cette motion comme recevable, vous auriez pu l'interroger comme
témoin. Malheureusement pour vous, la motion a été
jugée irrecevable et nul ne peut revenir sur cette décision.
Quant au troisième point, le mandat clair et précis de la
commission, en vertu de l'avis officiel, publié dans la Gazette
officielle du Québec, le 4 mai 1977, est clairement à l'effet que
nous sommes ici, non pas pour faire un débat, mais pour entendre des
invités que nous appelons malheureusement parfois témoins. Et la
dernière partie qui est purement, ce qu'on appelerait obiter dictum, M.
le ministre, c'est simplement que vous aurez toutes les occasions pendant le
débat en deuxième lecture à l'Assemblée nationale
et pendant le mandat de la commission parlementaire, s'il en est une,
après deuxième lecture, de procéder à ces questions
dans les limites de l'article 160.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
Mme Lavoie-Roux: Je peux toujours l'interrompre.
Le Président (M. Cardinal): Oui, mais il ne sera pas
obligé de vous répondre. Il n'est pas témoin mais membre
de la commission. M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: C'est une directive et un avis en ce qui concerne nos
travaux. Lorsque vous avez fait l'appel ce matin, il y avait six ou sept
organismes sur votre liste.
Le Président (M. Cardinal): Sept, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Votre optimisme n'a d'égal que votre
impartialité. Nous avons entendu un organisme complet, nous avons
terminé un premier qui avait commencé jeudi dernier; il en reste
donc cinq.
Le Président (M. Cardinal): Non, il y a une correction.
Oui, vous avez raison, j'ai calculé la Banque Royale comme étant
le premier intervenant. Il reste donc, avec l'organisme qui est devant nous,
cinq organismes d'ici 23 heures.
M. Lalonde: D'après le temps réparti à
chaque organisme, on devrait normalement, si on s'en tient à la moyenne,
entendre trois autres organismes. Je vous demanderais d'abord s'il y aurait
lieu d'aviser les autres organismes. Je sais que vous n'êtes pas
complètement vous-même maître des travaux, il est possible
qu'ils soient entendus, mais très peu possible.
Une autre chose. Je vous ai indiqué la semaine dernière,
je crois que c'était mardi ou mercredi dernier, que la motion que
j'avais faite il y a maintenant une dizaine de jours pour entendre le
président de la Régie de la langue française était
toujours sur la table et que j'avais l'intention de
demander qu'on en discute aujourd'hui. Ce soir, à la reprise des
travaux, à 20 heures, j'aimerais qu'on continue la discussion, je vous
en donne avis, même si ce n'est pas prévu par les
règlements, strictement pour aider la bonne marche des travaux,
j'aimerais qu'on continue la délibération sur cette motion en
particulier et possiblement sur une autre.
Le Président (M. Cardinal): D'accord. Merci, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys, de me donner ces deux avis.
M. Lalonde: Si vous me le permettez, M. le Président,
j'aimerais quand même expliquer pourquoi.
Il nous paraît toujours un peu difficile de discuter de motion
lorsque des gens nous attendent, les organismes sont là, souvent, depuis
une journée ou deux. C'est pour cela que j'en donne avis avant, mais
aussi le fait qu'on a eu des indications ce matin que certains membres se
sentent parfaitement informés maintenant, et vous comprendrez que
même si je voulais interrompre le moins possible le déroulement
des mémoires et la présentation de ces mémoires par les
organismes, il ne faudrait pas que je sois mis dans une position où ma
motion serait discutée après la motion d'ajournement.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, si vous me le permettez, je veux faire les commentaires
tout de suite pour qu'on ne fasse pas une partie de l'après-midi sur ce
sujet.
Déjà, un certain nombre d'organismes qui viennent, disons
en cinquième ou sixième lieu, m'ont approché et je leur ai
dit que même si je ne pouvais pas préjuger de la présence
d'abord de tous les organismes, deuxièmement, du temps employé
pour chacun des organismes, je l'ai dit autant de fois qu'il y a eu
d'organismes, rien n'oblige ni l'organisme, ni la députation à
employer tout le temps prévu. Je ne dis pas cela pour brimer les droits
ni les organismes, ni la commission. Le député de
Marguerite-Bourgeoys sait fort bien que, pendant l'étude du projet de
loi 22, il y a eu des organismes qui sont passés peut-être 30
minutes seulement devant la commission, malgré qu'à ce moment, il
y avait une règle de pratique qui permettait de les entendre pendant au
moins une heure. Je puis difficilement dire à un groupe: Revenez demain.
Je puis cependant assurer le député que la plupart des groupes
sont disposés à revenir demain et que, de toute façon,
à la suspension de 18 heures, au moment où nous verrons où
nous en sommes rendus, sans donner un avis, je donnerai quand même des
indications sur la marche des travaux de cette commission. De toute
façon, je conçois fort bien qu'à 20 heures nous revenions
à votre motion qui a déjà été
déclarée re-cevable, qu'il puisse s'y en ajouter une autre, mais,
encore là, je puis difficilement donner congé à tous ne
sachant pas si le débat va durer 20 minutes ou toute la
soirée.
Je ne sais pas si cela vous satisfait mais, d'une part, vous avez
été très courtois envers nos invités et envers la
présidence en donnant cet avis. D'autre part, vous savez quelles sont
les limites de la manoeuvre que je puis posséder à ce sujet,
quelles sont les balises que je dois suivre. Oui, monsieur le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: J'aurais seulement un autre renseignement à
vous demander, M. le Président. Avez-vous une idée du nombre
d'organismes qui ont été invités formellement par le
gouvernement en plus de ceux qui sont déjà devant nous
aujourd'hui?
Le Président (M. Cardinal): Absolument pas, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys. Je n'ai même pas la liste
des gens convoqués pour demain. M. le député de Bourassa
et ensuite M. le député de Vanier.
M. Laplante: En vertu de l'article 100 est-ce que le
député de Marguerite-Bourgeoys pourrait répondre a une
question?
Le Président (M. Cardinal): Le même article que
tantôt. Il demande si vous voulez répondre à une
question.
M. Lalonde: Je vais voir la question avant.
M. Laplante: Vous dites depuis le début que vous voulez
aller dans le sens de la bonne marche de la commission. La motion que vous
voulez présenter ce soir, est-ce que vous ne trouvez pas qu'il y a une
ressemblance avec celle du Conseil supérieur de l'éducation? En
voulant gagner du temps à cette commission et entendre les gens qui sont
déjà convoqués, il ne serait pas plus sage de
révoquer ou d'abandonner une telle motion? Vous connaissez le
résultat que cela a apporté avec le Conseil supérieur de
l'éducation? Vous savez'les résultats, vous y avez
participé.
M. Lalonde: Vous me parlez?
M. Laplante: Oui, c'est toujours à vous.
M. Lalonde: Moi, j'ai participé au Conseil
supérieur de l'éducation?
M. Laplante: Je n'ai pas dit vous, monsieur. J'ai répondu
au député de L'Acadie, parce que c'est son habitude de toujours
parler en même temps que les autres.
M. Lalonde: Ah bon!
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît. J'ai de la misère avec ce micro, excusez-moi. M. le
député de Bourassa.
M. Laplante: Je conçois qu'il n'y a pas de réponse
là-dessus.
Le Président (M. Cardinal): La question est posée,
M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: J'attends que la présidence ou le gouvernement
informe la commission sur les suites qui seront apportées à la
convocation du Conseil supérieur de l'éducation.
Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys. Je ne sais pas si vous
étiez présent ou pas. J'ai lu, jeudi soir, le
télégramme de réponse du Conseil supérieur de
l'éducation qui indiquait l'impossibilité de comparaître
dans les délais qui étaient impartis à cet organisme.
M. Lalonde: Alors, je ne peux pas présumer du désir
ou de la possibilité de la Régie de la langue française de
cornparaître. Au contraire, je pense que le président de la
régie... Vous m'invitez à aller au fond, presque, je vais essayer
de l'éviter.
Le Président (M. Cardinal): S'il vous plaît.
M. Lalonde: Je ne peux pas, compte tenu de toute
l'économie de nos travaux, présumer qu'un invité va
refuser de venir. Au contraire, je pense que si la commission parlementaire
invite formellement un organisme, toutes choses étant normales, que
l'organisme se présentera. D'ailleurs la motion concernant le
président de la régie mentionne le 20 juillet. Alors cela donnera
assez de temps, je pense, au président de la régie ou à la
régie elle-même de se préparer. Non, je ne peux pas avoir
le même motif que celui qui a été invoqué par le
Conseil supérieur de l'éducation. Quant à l'autre motion,
la commission sera au courant de cette motion lorsqu'elle sera faite.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Vanier.
M. Bertrand: Serait-il possible d'obtenir par vos bons offices,
M. le Président, que nous ayons copie ce soir de ce
télégramme que vous aviez reçu du Conseil supérieur
de l'éducation?
Le Président (M. Cardinal): II est déjà au
journal des Débats et je l'ai remis, quant à moi, au
secrétaire de la commission. Il apparaît au journal des
Débats de jeudi dernier, en fin de journée. M. le
secrétaire de la commission possède l'original. Il ne
m'était pas adressé. Il était adressé à
l'Assemblée nationale, à la chambre 2. Il m'a été
remis par le secrétariat de la commission.
M. le député de Mont-Royal et ensuite Mme le
député de L'Acadie.
M. Ciaccia: M. le Président, sur le même article
100, est-ce que le député de Bourassa me permettrait une question
en réponse à votre question?
M. Laplante: Avec la liberté d'y répondre.
Le Président (M. Cardinal): Vous savez, c'est au
président que vous devriez poser la question. C'est interpréter
très largement l'article 100, mais si votre question est brève,
d'accord.
M. Ciaccia: Elle sera brève. Vous avez fait allusion
tantôt au bon déroulement des travaux de la commission et de la
motion qui peut-être serait présentée ce soir. Est-ce que
je pourrais demander si vous pourriez nous assurer qu'il n'y aura pas
clôture des travaux de la commission parlementaire cette semaine.
Peut-être que cela pourrait nous guider dans nos travaux et dans les
motions qui nous pourrions faire.
M. Laplante: C'est la commission qui décide, ce n'est pas
moi.
M. Ciaccia: Ne posez pas de telles question alors.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! Mme le
député de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, au sujet du Conseil
supérieur de l'éducation, tout ce dont j'ai eu connaissance,
c'est qu'il a envoyé un télégramme pour signaler qu'il ne
pouvait se présenter dans les délais prévus ou
exigés. Mais ceci, à mon point de vue, ne veut pas dire qu'il ne
veut pas se présenter. Alors, j'imagine qu'il y aura une suite à
ce télégramme.
Le Président (M. Cardinal): II n'y a pas eu de suite
donnée. C'est à se demander s'il faudrait une nouvelle
convocation.
Quand j'ai eu ce télégramme, jeudi soir, en fin de
séance, il n'y a aucune question qui a été posée,
nous avons ajourné presque immédiatement après. Je pourrai
cependant me renseigner. Dans ce télégramme, encore une fois,
dont le texte est en entier au journal des Débats, il n'y a aucune
indication que le conseil supérieur prenne position sur sa
présence ou son absence à une commission parlementaire.
D'accord?
Ceci étant dit, messieurs de l'Association des cadres scolaires
du Québec, je demanderais que vous vous présentiez. Vous aurez
ensuite 20 minutes pour exposer votre mémoire.
Association des cadres scolaires du
Québec
M. Langlais (Fernand): M. le Président, le porte-parole de
l'Association des cadres est M. Jean-Claude Rousseau, de la régionale de
Chambly, il est assisté de M. Roger Breton, de la régionale
Saint-François et de M. Yves Lafortune, de la Commission scolaire de
l'Argile bleue. Je suis Fernand Langlais, le directeur général de
l'Association des cadres.
L'Association des cadres scolaires est un organisme professionnel
incorporé il y a cinq ans, en vertu de la Loi des syndicats
professionnels. C'est un organisme qui regroupe 1700 membres qui sont des
cadres de direction, de coordination et de gérance dans les commissions
scolaires francophones du Québec.
Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse. Vous lisez
présentement votre mémoire, vous avez
commencé à lire votre mémoire, parce que je dois
compter le temps.
M. Langlais: Je voulais simplement expliquer l'objectif de notre
présence ici, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): D'accord. Vous me le direz
quand vous débuterez parce que sans être sévère, je
dois quand même tenir le temps.
M. Langlais: Etant donné que nous croyons utiliser
à peine une douzaine de minutes de notre temps pour faire notre
exposé, je voulais tout simplement préciser ceci. Nous nous
sommes déjà présentés à cette salle
même au niveau du projet de loi no 22, en 1974. Notre objectif au sein de
l'Association des cadres scolaires est toujours de collaborer avec le
gouvernement à l'élaboration de toute politique relative au
développement ordonné du système scolaire.
C'est par le biais de cette vocation que la CSQ s'est déjà
présentée et aujourd'hui encore le projet de loi no 1 nous
intéresse au plus haut point, du fait qu'elle regroupe les cadres
scolaires francophones du Québec dont la fonction première et
essentielle est d'assurer une éducation de qualité dans les
écoles québécoises.
Puisqu'une éducation de qualité est largement tributaire
de la langue qui est l'instrument privilégié de communication et
d'expression, il en découle que la législation
québécoise en matière linguistique retient notre attention
au plus haut point et c'est pourquoi nous croyons de notre devoir d'être
très vigilants et d'intervenir à ce moment-ci.
Je demanderais à M. Jean-Claude Rousseau de vous présenter
son point de vue, à partir du mémoire qui a été
rédigé par un comité ad hoc et sanctionné par le
Conseil provincial de l'Association des cadres scolaires, lequel conseil
provincial est représenté par des gens en provenance de tous les
milieux du Québec.
Le Président (M. Cardinal): Merci, M. Langlais. Nous
commençons. Je m'excuse de me répéter parfois, mais je
veux que tout soit enregistré. Nous commençons cette audition
à seize heures trente.
M. Rousseau (Jean-Claude): M. le Président et membres de
cette commission, de par notre champ d'activité, comme cadres scolaires,
c'est de l'école que nous voulons traiter aujourd'hui et
particulièrement donc référant au projet de loi du
chapitre sur l'enseignement.
Nous voulons quand même au préalable signaler que nous
appuyons fermement le gouvernement dans sa détermination de clarifier
par un texte de loi le statut de la langue française au Québec.
Nous attirons cependant, dans notre mémoire, l'attention de cette
commission sur les points suivants: La nécessité de lever toute
ambiguïté sur les termes "peuple québécois", comme
plusieurs d'ailleurs l'ont déjà souligné; la
nécessité pour le ministère de l'Education
particulièrement de favoriser à tous les niveaux, jusqu'à
l'université inclusivement, et dans tous les secteurs, y compris
l'éducation aux adultes, l'expression de notre identité
culturelle.
Nous demandons également le maintien de la cohérence entre
les paroles et les gestes lorsqu'on discoure sur l'héritage culturel et
l'apport des minorités et les moyens mis de l'avant pour assurer la
survie de ces minorités, particulièrement, de la plus importante
en nombre, la minorité anglophone. Il y a également l'adoption
impérieuse de mesures appropriées favorisant, d'une part,
l'accroissement de la population francophone via la natalité et
l'immigration et, d'autre part, le rapatriement des nôtres inscrits
à l'heure actuelle, à l'école anglaise et dont la
progéniture avec toute la postérité qui s'ensuivra, aura
encore "droit" à l'école anglaise selon le projet de loi, ce qui
a, à notre avis, plus de conséquences que l'arrivée de
quelques immigrants dans nos milieux respectifs. Je réfère ici
aux commissions scolaires.
La valorisation, auprès des minorités de l'apprentissage
de la langue française et qu'on fasse appel, sur ce point, beaucoup plus
à des motifs d'appartenance à la communauté
québécoise qu'à des règles d'obligation ou à
la coercition. Compte tenu de ce qui précède, nous
suggérons les amendements suivants au texte de loi, amendements contenus
dans notre mémoire. Je réfère à la page 5 du
mémoire, à l'article 51 où, sur un point technique, sur
une question de vocabulaire, nous demandons que le terme "maternelle" soit
remplacé par le terme "préscolaire" qui représente pour
nous l'année qui précède immédiatement
l'entrée à l'élémentaire.
Nous recommandons également, au regard de cet article, que le mot
collégial soit ajouté au texte du premier paragraphe et que les
règlements qui seront rédigés dans le cadre de la loi
prévoient des interventions du gouvernement au niveau universitaire qui
permettront d'atteindre cet objectif. Nous basons ces recommandations sur les
considérants suivants: "II faut assurer le développement naturel
et progressif de la langue", citation de la politique québécoise
de la langue française; la langue de travail doit être le
français à tous les niveaux et le marché du travail
reçoit les finissants des collèges et des universités; les
collèges et les universités représentent les plus hautes
instances du système de l'éducation et, par contre, ne doivent
pas être mis en marge du texte de loi; l'apprentissage de la langue
française n'en sera que plus valorisé si on applique les
règles au collège et à l'université. D'ailleurs,
les étudiants des collèges et des universités ne
constituent pas une classe de citoyens à l'écart des autres.
Au regard de l'article 54, deuxième paragraphe, face au
problème de l'inscription des élèves, question aussi
technique: Que la date du 31 décembre 1977 soit remplacée par la
date du 1er mars 1978. Nous apportons les considérants suivants: la
nécessité d'organiser les écoles avant le 1er septembre;
nous vivons présentement les difficultés de la nouvelle
réglementation; le caractère odieux que pourrait avoir le retrait
d'un enfant de son école au cours d'une année scolaire parce
que les délais ne nous permettraient pas de répondre aux
échéances proposées dans la nouvelle réglementation
et, enfin, les délais de vérification des inscriptions.
A l'article 57, nous souhaitons que les mots "collégial" et
"universitaire" soient ajoutés après le mot "secondaire"
précisant qu'à ces niveaux, seuls ceux qui ont
complété tout leurs cours au Québec seraient soumis
à cette réglementation, compte tenu du texte de l'article qui
soumet les programmes aux directives du ministère de l'Education du
Québec. Là aussi, nous apportons l'attendu suivant: II est aussi
important, pour les élèves du secteur collégial et du
secteur universitaire, de bien posséder la langue française.
Attendu la nécessité de l'apprentissage du
français, que cet apprentisage vaut autant pour les élèves
francophones que pour les élèves anglophones; attendu qu'il faut
enlever tout caractère discriminatoire à la loi, nous
recommandons que les mots francophone ou anglophone soient ajoutés
après le mot élève, lors de la certification.
En conclusion, nous remercions la commission de nous recevoir et nous
assurons notre collaboration sur toute consultation se rapportant aux
règlements qui pourraient être édictés suite
à la loi. Merci.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci.
M. le ministre.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je voudrais
remercier l'Association des cadres scolaires de l'appui qu'elle apporte au
gouvernement dans sa volonté de régler ces problèmes
linguistiques que nous accumulons au Québec depuis plusieurs
années. Je voudrais aussi rassurer l'association à l'égard
de certaines de ses préoccupations. Par exemple, on souhaite que
l'affirmation des droits de la majorité ne soit pas l'occasion de
représailles à l'endroit de ceux qui, par le passé, ont pu
bénéficier de privilèges, comme vous dites, non
généralement reconnus aux minorités linguistiques. Je
voudrais assurer l'association que dans l'esprit du gouvernement, il n'a jamais
été question d'exercer les moindres représailles. De
même à la page 4, vous nous dites qu'il ne devrait pas, en tout
état de cause, s'agir d'une cure d'amaigrissement. C'est une
façon imagée de nous demander de respecter les droits de la
minorité anglophone, de la véritable minorité anglophone
et cela le gouvernement s'est engagé à le faire.
Il ne s'agit pas d'une cure d'amaigrissement, mais bien de
réserver aux résidants qui sont vraiment des anglophones, le
droit d'aller à l'école anglaise. J'ai noté
également l'appui que vous apportez à ce qu'on a appelé
quelquefois l'option Québec, par rapport à l'option Canada qui
aurait consisté à recevoir automatiquement dans l'école
anglaise les enfants de personnes ayant effectué des études
primaires n'importe où au Canada.
Je constate que vous allez même plus loin que le gouvernement,
quand vous nous suggérez de ne pas maintenir les droits des francophones
qui, profitant de la loi 63, ont inscrit leurs enfants à l'école
anglaise. Et, prenant bonne note de cette suggestion, je voudrais tout de
même vous souligner la difficulté qu'il pourrait y avoir au moment
où les enfants dont vous parlez se présenteront à la porte
de l'école anglaise, peut-être dans dix ans, peut-être dans
quinze ans, la difficulté qu'il pourrait y avoir à établir
si les gens étaient anglophones ou francophones à l'époque
où les parents ont fait leurs études.
Si vous pouviez m'éclairer sur les moyens de ne pas commettre
d'injustices, je serais heureux d'examiner avec mes collègues la
possibilité de donner suite à cette suggestion.
M. Rousseau: Alors, pour répondre, M. le ministre, je
mentionnerais que pour nous c'est aussi un problème pratique. Il reste
cependant que nous nous attachons fortement au principe. Nous évaluons
que, par les expériences que nous vivons dans nos milieux et je me
réfère ici à la régionale de Chambly par exemple
où sur 4000 étudiants inscrits à l'école anglaise,
30% sont francophones à l'heure actuelle... Alors, je me dis: II y a
quand même un réservoir d'effectifs francophones à
l'intérieur de cette institution qui normalement et dans l'esprit de la
loi, devraient plutôt fréquenter l'école francophone.
Quelles mesures prendre pour rapatrier ces élèves? Les
rapatrier en cours d'étude où ils ont déjà
commencé à cheminer à travers un système, les
rapatrier avant qu'il ne soit trop tard, à l'intérieur de ce
système, mais, là, cela se situe à quel niveau?
Après le premier cycle du secondaire? Après le secondaire?
Après le collégial? Nous sommes vraiment en interrogation. Il
demeure cependant que, pour nous, il y aurait possibilité de
considérer comme actifs francophones les dossiers des étudiants
et, en conséquence, d'évaluer par la suite, lorsqu'il s'agira de
l'inscription des élèves dans la poursuite de la carrière
de ces étudiants, les mesures nécessaires pour qu'on puisse
récupérer ces actifs.
M. Morin (Sauvé): Si j'ai bien compris la teneur de votre
suggestion, vous désirez que, dans dix ans et dans quinze ans, nous
récupérions les enfants de ces gens qui, à l'heure
actuelle, se trouvent à l'école anglaise et qui, selon vous, ne
devraient pas y être?
M. Rousseau: Nous trouvons que ce serait tout à fait
normal, soit par voie de conséquence d'une action immédiate ou
par voie d'une action à long terme.
M. Morin (Sauvé): Evidemment, le fait que ces enfants sont
à l'heure actuelle à l'école anglaise pourrait bien avoir
pour effet de les angliciser, de sorte que leurs enfants seraient probablement
dans un milieu familial anglophone et que la récupération
pourrait être difficile. Est-ce que vous voyez un moyen de
départager ceux qui seraient restés des francophones, de ceux qui
n'en seraient plus?
M. Rousseau: Je crois que votre argumentation prévaut pour
une action peut-être immédiate.
Je sais fort bien qu'à long terme, la situation que vous
présentez dans la dernière partie de votre énoncé
deviendrait difficilement applicable, mais ce serait peut-être dans cette
recherche de solution qu'il faudrait envisager votre argumentation.
M. Morin (Sauvé): Est-ce que je comprends bien? Vous nous
suggérez d'agir maintenant. Vous voulez dire par là d'aller
chercher, dans les écoles anglaises, les enfants francophones qui s'y
trouvent?
M. Rousseau: C'est une solution qui, pour nous, serait à
envisager. Nous n'avons pas fait d'étude exhaustive sur ce point. On est
à l'état d'opinion ici.
M. Morin (Sauvé): Est-ce que certains de ces enfants qui
ont des noms français ne sont pas quelquefois des anglophones?
M. Rousseau: C'est fort plausible. Il faudrait faire la
recherche.
M. Morin (Sauvé): Je me demande dans quelle mesure...
j'essaie de voir dans quelle mesure on ne serait pas forcé de revenir
aux tests qui, vous le savez, ont suffisamment soulevé de
réprobation générale pour que nous évitions,
coûte que coûte, d'y revenir.
M. Rousseau: Non, je crois que la réglementation que vous
proposez ou le critère que vous proposez au texte de loi pourrait
très bien correspondre au critère qui serait envisagé pour
cette mesure de rapatriement.
M. Morin (Sauvé): Peut-être encore une ou deux
questions portant sur ce que vous dites du collège, et même de
l'université si je ne m'abuse, ou est-ce que vos remarques, vos
observations ne portent que sur le collège: que le mot
"collégial" soit ajouté au texte du premier paragraphe,
c'est-à-dire que les règles qui, à l'heure actuelle, selon
le projet de loi, ne s'appliquent qu'aux niveaux primaire et secondaire,
seraient applicables également au collégial.
Le gouvernement s'est penché sur ce problème. Je ne pense
pas que vous soyez les premiers, d'ailleurs, à le soulever. Nous
pensons, pour l'heure en tout cas, qu'en assurant, aux niveaux primaire et
secondaire, l'apprentissage de la langue française, nous constituons une
base solide sur laquelle nous pourrons construire, par la suite, au niveau
collégial notamment.
Si ceux qui doivent se trouver à l'école française
y font toutes leurs études, j'imagine que, dans un Québec qui
d'ailleurs aura le français pour langue de travail, les
élèves auront tendance à continuer leurs études en
français. C'est le pari que fait actuellement le gouvernement, mais,
naturellement, comme vous nous le suggérez dans un autre contexte,
vous-mêmes, dans votre mémoire, si, par hasard, il
s'avérait que nous nous trompons, il sera toujours temps de
légiférer en conséquence.
Pour l'heure, le gouvernement n'est pas enclin à suivre cette
recommandation que vous nous faites. Toutefois, je l'accueille et vous pouvez
être sûrs que nous allons en tenir compte. Peut-être
voudriez-vous expliquer plus avant, avec plus de détails, pourquoi vous
pensez qu'il est indispensable de procéder de la sorte.
M. Rousseau: D'abord, en termes de pari, M. le ministre, je crois
qu'on pourrait en prendre plusieurs sur les articles de la loi. Pour le
collégial, nous ne voyons pas la nécessité d'en prendre
un, d'autant plus qu'au niveau collégial, toutes les options qui se
donnent au secteur anglophone se donnent au secteur francophone. Donc, à
ce titre, il y a sûrement possibilité d'exiger une
continuité dans la formation de nos élèves du secondaire
et les efforts que nous faisons, autant à l'élémentaire
qu'au secondaire, pour l'apprentissage de la langue française
parlée et écrite, sont une continuité au niveau
collégial. Ceci en regard d'une liaison nécessaire ou d'une
continuité nécessaire entre les deux secteurs
d'éducation.
Au niveau universitaire, le problème se pose différemment,
compte tenu des différentes facultés, compte tenu des
différents cours qui se donnent, des différents
méthodologies et des différents moyens d'expression qui existent
au niveau universitaire. Il demeure cependant qu'on devrait même faire
allusion à ce niveau dans le texte de loi. Parce qu'il nous semble que
c'est important, l'apprentissage du français à
l'élémentaire et au secondaire, mais ça devient quelque
peu laissé aux individus au niveau collégial et universitaire et
l'accent qu'on peut y mettre à l'élémentaire et au
secondaire demeure aléatoire lorsqu'on se réfère au niveau
collégial et au niveau universitaire.
C'est notre opinion.
M. Lafortune: M. le Président, est-ce que je peux ajouter
quelque chose là-dessus, s'il vous plaît? Il nous semble qu'au
niveau collégial en particulier, il y a un tas de jeunes qui sortent de
là et qu'on retrouve sur le marché du travail, dans
l'administration en particulier. On aimerait bien qu'ils soient imbus de la
francisation du peuple québécois. Il nous semble qu'après
le secondaire, la mesure n'est pas suffisante pour recouvrer l'ensemble de ces
personnes qui auront une certaine influence dans la société de
demain. C'est pour ça qu'on aimerait que la mesure soit prise le plus
tôt possible.
Tandis qu'au niveau universitaire, évidemment, nous formons ce
qu'on pourrait appeler l'élite d'encadrement de la
société, l'université est un lieu de haut savoir
universel. Très souvent, il y a beaucoup de cours qui vont se donner
dans des langues étrangères. Le besoin de la formation des gens
l'exige parfois, certains programmes l'exigent, etc. Il nous semble que c'est
moins important de prendre des mesures immédiates à l'endroit des
universités.
Cependant, il me semble que, dans la réglementation, les
universités devraient être invitées à emboîter
le pas dans cette francisation du peuple québécois; cela nous
paraît très important que l'élite de demain soit imbue de
cet esprit.
M. Morin (Sauvé): Bien. Voulez-vous ajouter quelque chose,
monsieur?
M. Breton (Roger): Quelque chose de très court,
finalement. C'est qu'au niveau collégial, c'est une langue technique
qu'on peut également acquérir et, dans le milieu du travail, cela
nous apparaît extrêmement important que la langue de travail soit
également le français. Actuellement, on retrouve, à
plusieurs endroits, une langue de travail qui chevauche entre le
français et l'anglais et on considère que, si l'Etat devient un
Etat français, l'école étant un lieu d'apprentissage, la
grande majorité des jeunes Québécois vont passer, bien
sûr, de la maternelle jusqu'au niveau collégial et on s'assure une
qualité de l'apprentissage de la langue française.
Enfin, c'est l'objectif qu'on vise par cette recommandation.
M. Morin (Sauvé): Je vous remercie, messieurs, nous allons
certainement en tenir compte, de même que nous allons tenir compte de
votre suggestion au sujet de l'article 54, lorsqu'à la page 7 de votre
mémoire, vous nous recommandez de remplacer la date du 31
décembre 1977, qui porte sur la vérification du droit à
fréquenter l'école anglaise par la date du 1er mars 1978. Je puis
vous dire d'ores et déjà que nous allons tenir compte de cette
recommandation. Je ne sais pas encore exactement sous quelle forme, mais nous
allons en tenir compte.
M. le Président, je voudrais conclure en approuvant pleinement
une des conclusions que nous trouvons dans ce mémoire
réfléchi de l'Association des cadres scolaires du Québec,
lorsque vous nous dites que vous tenez à souligner qu'un des
éléments essentiels du projet de loi se situe au niveau de la
langue de travail et des affaires, et que vous ajoutez qu'il vous
apparaît que si la langue actuelle de travail était le
français et si l'environnement actuel était tout à fait
francophone, il ne serait probablement pas nécessaire de
légiférer pour assurer les droits linguistiques de la
majorité francophone québécoise. Messieurs, le premier
ministre, M. Lévesque, à plusieurs reprises, vous a donné
entièrement raison, a tenu des propos tout à fait semblables, et
je puis vous assurer qu'une des préoccupations majeures du gouvernement
dans cette législation, c'est précisément de faire en
sorte que la langue de travail au Québec soit désormais le
français. Une fois cela assuré, plusieurs des problèmes et
des débats scolaires que nous affrontons à l'heure actuelle
paraîtront beaucoup plus faciles à résoudre. Je remercie
ces messieurs, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci,
M. le ministre. Mme le député de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je veux remercier
les représentants de l'Association des cadres scolaires du Québec
de leur mémoire à la commission qui étudie le projet de
loi no 1. Ce qui me frappe particulièrement dans votre mémoire,
c'est votre ouverture d'esprit, dans le sens que même si rigoureusement
vous dites qu'il y a des mesures à prendre pour assurer le fait
français, et que, hors de tout doute, le Québec doit vivre en
français, etc., vous ne le faites pas dans un esprit qui, à mon
point de vue, pourrait être qualifié d'étroit et de
mesquin.
Ainsi, à la page 3, vous dites: "Que les gestes qui doivent
être posés, compte tenu de la politique qui est
énoncée dans le livre blanc touchant les droits des
minorités devraient être conséquents à cette
grandeur de vue, et les règlements devraient prévoir des mesures
pour permettre à ces minorités de survivre, de se
développer et de maintenir leur réseau de communications. Dans le
cas contraire, les adversaires du projet de loi ont toute raison de croire que
le gouvernement est sur la défensive face aux minorités, etc. Je
pense que ceci montre d'abord un esprit démocratique, et
également de la maturité au plan politique, et c'est probablement
pour cela aussi que vous écrivez en conclusion, le paragraphe que le
ministre a cité et qui, d'ailleurs, a toujours été, je
pense, la préoccupation première des organismes d'enseignement
quand ils ont eu à se prononcer sur des projets de loi linguistiques sur
lesquels ils trouvaient toujours extrêmement difficile, je pense, de se
prononcer pour essayer d'être le moins discriminatoires possible, le plus
justes possible, et sachant fort bien que le fondement d'une
société qui vit en français au Québec est vraiment
davantage relié à la langue du travail qu'à la langue
d'enseignement qui demeure toujours un domaine extrêmement sensible au
plan de la législation.
Je vous rejoins également quand vous parlez de la cure
d'amaigrissement. Je pense que le gouvernement a choisi, et c'est son droit, je
suppose, de laisser survivre et non pas de se développer
la minorité anglophone, non pas à partir des véritables
anglophones mais à partir de francophones que le gouvernement a
soudainement décidé d'angliciser. Il y en a parmi vous qui
viennent de l'extérieur de Montréal, et on sait fort bien que des
régions comme la région du Saguenay, des Trois-Rivières,
et même de la ville de Québec sont je pense que personne
n'en doute vraiment des milieux tout à fait français
où on recrutait, dans une certaine proportion, des francophones qui ne
sont jamais allés à l'école anglaise pour s'angliciser
mais vraiment pour acquérir l'anglais comme langue-outil ou
élément additionnel de culture.
Alors, je pense que le critère retenu par le gouvernement demeure
un critère utilitaire, un critère que j'appelle opportunisme,
parce que cela me semble clair, noir sur blanc. Vous avez l'attestation: Tu vas
là. Il n'y a pas l'attestation: Tu vas de l'autre côté.
Mais je pense que ce critère n'est pas fondé sur des principes
solides et, en dépit de ce que disait tout à l'heure le ministre,
ouvre la porte à beaucoup de discrimination, même entre les
francophones eux-mêmes.
Un autre aspect de ce critère que je n'ai jamais cité et
que je trouve dans ce choix, qui pourrait être un indice parmi d'autres
pour décider de l'appartenance, afin de décider si un enfant est
anglophone ou non, un indice qu'on peut ajouter
à d'autres, pour moi, c'est une certaine analogie
j'espère que celle-là le président me la permettra
qui est quand même symptomatique de la société
judéo-chrétienne dans laquelle on vit où, au lieu de se
référer à un critère de religion pour
décider de notre appartenance à tel ou tel groupe de la
société comme ce fut longtemps notre cas, ceci tend à
disparaître, maintenant vous amenez ce critère de
fréquentation scolaire pour déterminer si on est un anglophone ou
un francophone. Et sans vouloir ironiser outre mesure, je pense même que
c'est assez sérieux, on aura maintenant un nouveau critère dans
le choix des conjoints, à savoir, le lieu où le conjoint aura
fait ses études primaires. Mais espérons que, d'ici là, le
Québec se sera assez francisé pour que cela ne devienne plus un
critère dans l'ensemble des critères que des conjoints pourraient
utiliser pour... oui, justement... pour décider d'entreprendre une
aventure maritale ou pas.
J'aimerais que vous me donniez quelques détails sur un autre
point. Je trouve cela intéressant et je sens que, déjà,
avant même que vous n'arriviez, le ministre de l'Education était
sensibilisé aux complications de l'application de l'article 54 dans des
délais relativement courts. Cela prend une dimension
particulièrement intéressante, parce que, jusqu'à
maintenant, les seules protestations que nous avions entendues venaient des
commissions scolaires anglophones ou protestantes. Evidemment, le premier
geste, c'était de les soupçonner peut-être d'un manque de
collaboration, mais il me semble qu'au plan pratique, ceci vous crée des
difficultés particulièrement peut-être à Chambly,
où vous avez quand même un assez grand nombre d'étudiants.
Je me demandais si vous pourriez élaborer au plan pratique sur les
difficultés que vous entrevoyez et qui motivent votre recommandation
touchant l'article 54?
M. Rousseau: Les faits sont les suivants: nous sommes
convoqués la semaine dernière pour recevoir des informations sur
les inscriptions des élèves à l'école anglaise. On
nous remet un tas de formulaires à faire remplir d'ici le 15 août.
A cette période de l'année, période estivale,
période de vacances, il nous faut rejoindre les parents de tous les
élèves qui, pour la première fois, s'inscrivent à
l'école anglaise, qu'ils soient d'origine francophone ou d'origine
anglophone. Ce sont tous les élèves qui s'inscrivent pour la
première fois à l'école anglaise, les formules sont
très complexes, les formules demandent un contact individuel avec chaque
parent, ce qui, en principe, est excellent, mais qui, en pratique, est peu
réalisable dans les circonstances présentes, de sorte que
l'opération devra se faire dans un délai très court avec
tous les aléas de parcours que cela peut représenter, avec
même la possibilité que des enfants se retrouvent à
l'école anglophone en septembre parce qu'on n'aura pas eu le temps de
monter les dossiers, d'avoir les preuves qui certifient la présence d'un
enfant à l'école anglaise ou le droit à l'école
anglaise, de sorte que si, par révision du dossier au mois de novembre
ou janvier, on en vient à la conclusion que l'enfant ne doit pas
être à l'école anglaise, on devra le retirer de
l'école et le placer à l'école française, ce que
nous trouvons inadmissible en cours d'année, d'obliger un enfant
à changer de milieu scolaire.
Nous préférerions de beaucoup que la réglementation
s'implante progressivement et que lors de l'inscription officielle de mars, on
entreprenne vraiment des mesures. Comme points techniques mon collègue
aurait des choses à indiquer là-dessus.
M. Lafortune: C'est justement; si on a indiqué le 1er
mars, cela ne veut pas dire qu'il ne serait pas possible, en vertu de la
réglementation, de débuter le plus tôt possible l'analyse
des cas: quels seront les élèves qui pourraient être admis
à l'école francophone, quels sont ceux qui pourraient être
admis à l'école anglophone. On pourrait commencer dès
maintenant de manière que dès le 1er mars, à la date
officielle d'inscription des élèves dans les commissions
scolaires, ces cas soient déjà décantés, que nous
sachions où nous allons. Parce qu'il ne faut pas oublier qu'avec
l'application des nouvelles conventions, la nouvelle convention dans le secteur
de l'enseignement, dès le début de juin, il faut être
absolument fixé sur le nombre d'élèves qu'on a, puis
même avant cela d'ailleurs. Déjà, nous serons
obligés de faire des prévisions en janvier, février, par
là, de manière qu'on puisse appliquer d'une façon
pertinente et réaliste la convention, sans déboire. Vous
connaissez bien cela, madame-Mine Lavoie-Roux: Est-ce que
présentement, simplement la distribution de vos professeurs, compte tenu
des deux secteurs, vous crée des problèmes?
M. Lafortune: Si j'ai fait référence à
l'application de la convention, c'est peut-être un
à-côté, mais ce qui nous paraît plus important quand
même dans la chose, c'est que les cas des élèves soient
bien analysés au préalable, avant l'inscription officielle. Cela
nous paraît très important de manière à
éviter des situations auxquelles faisait appel mon collègue; cela
nous paraît odieux.
Mme Lavoie-Roux: Une autre question. Je pense qu'on fait
obligation au directeur général de signer les attestations dans
le cas où on n'a pas de preuve de la fréquentation scolaire de
l'école anglaise par les parents. De quelle façon avez-vous
procédé? Est-ce que vous avez procédé par
délégation à certains cadres de votre commission ou de
quelle façon pensez-vous procéder. J'imagine que dans une
commission scolaire où il y a passablement d'élèves, cela
peut-être assez lourd que le directeur général soit
obligé de faire l'étude de chacun des dossiers; pourriez-vous
indiquer de quelle façon vous pensez procéder?
M. Rousseau: Ce sera sûrement par délégation.
D'ailleurs, pour nous à la régionale de Chambly, la mesure est
déjà prise dans ce sens.
Mme Lavoie-Roux: Vous déléguez à qui?
M. Rousseau: Nous déléguons à des
fonctionnaires de la commission, soit de coordonna-teurs ou des conseillers
pédagogiques qui sont aptes à contacter les parents, à
analyser les dossiers avec les parents, à approuver ledit dossier pour
le transmettre ensuite au ministère.
Mme Lavoie-Roux: Là où il n'y a pas de preuve de
fréquentation scolaire du secteur anglais, vous procédez comment?
Par serment, déclaration solennelle? Qu'est-ce que vous faites?
M. Rousseau: De par les formules que nous avons reçues,
c'est par déclaration assermentée.
Mme Lavoie-Roux: Je vous remercie.
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le député de
Gaspé.
M. Le Moignan: Merci, M. le Président. Alors si le
gouvernement tient compte de toutes les suggestions qui ont été
faites par différents groupes et le ministre au développement
culturel et même le ministre de l'Education assurent ces groupes de leur
collaboration, j'ai bien l'impression que le projet de loi no 1 va subir de
profondes modifications.
Je voudrais revenir... Vous m'avez mentionné qu'à la
régionale de Chambly il y a 30% de francophones. Maintenant, ces jeunes
demeurent dans des milieux où les parents sont de langue
française; de retour à la maison, ils vont parler
français. Est-ce que vous avez remarqué s'il y a un danger
d'anglicisation pour ces jeunes? Parce que j'imagine qu'il y a des classes de
français en même temps à l'école anglaise; est-ce
qu'ils suivent des cours en langue française?
M. Rousseau: En fait, le danger que nous pouvons supposer avec
une hypothèse qui est quand même fondée, c'est que ces
enfants poursuivent au collégial, en langue anglaise, poursuivent
à l'université en langue anglaise et s'intègrent vraiment
à la communauté anglophone.
M. Le Moignan: Tout de même...
M. Breton: M. le Président, si vous permettez, c'est le
manque d'apprentissage de la langue maternelle, c'est que dans bien des cas
dépendant du niveau où ils ont été
intégrés au secteur linguistique scolaire, si par exemple c'est
au niveau élémentaire, la plupart du temps, ces personnes
connaissent très peu, ont une connaissance pratique minime de leur
langue maternelle.
Des éléments comme un monsieur ce matin en a
mentionné, ce sont des éléments qu'on retrouve. Je suis,
moi, dans une commission scolaire élémentaire, une commission
scolaire où la clientèle qui fréquente le secteur
anglophone représente à peu près 45% de francophones des
deux parents, par exemple, si on prend les critères actuels. On se rend
compte d'une chose à la fin de l'élémentaire, il y a une
très mauvaise connaissance linguistique du français. Evidemment,
la connaissance qu'ils en ont c'est une connaissance verbale. Là-dessus,
c'est quand même assez bien, compte tenu qu'au niveau familial,
généralement, les enfants continuent de parler français
pour ne pas dire la très grande majorité. Mais, au niveau de
l'écrit et de la lecture, c'est très difficile, très
pénible.
M. Le Moignan: II y a le risque, autrement dit, que ces jeunes ne
participent jamais à la véritable culture française?
M. Breton: C'est un fait.
M. Le Moignan: Ils vont être plongés dans l'ambiance
anglaise du mouvement.
Vous avez parlé, tout à l'heure, de ceux qui sont
déjà dans les écoles. Vous êtes même
prêts à conseiller au gouvernement de les retirer le plus vite
possible. C'est donc dire que, d'après vous, cette loi devrait avoir un
effet rétroactif parce que, dans la pratique, ce serait passablement
dangereux pour un élève, s'il est allé 4, 5 ou 6 ans
à la classe anglaise, d'être envoyé au secondaire en
français, s'il n'a pas la base.
M. Rousseau: Sans avoir un effet rétroactif, la loi
pourrait s'appliquer aux différents niveaux du système
d'éducation. Le critère d'inscription, à la
première année du secondaire, pourrait être
appliqué, à la deuxième année du secondaire et
à la troisième année du secondaire et ainsi de suite. Ceci
n'aurait pas d'effet rétroactif, ce serait une application de la loi
à tous les paliers.
M. Le Moignan: Quand vous avez parlé de l'inscription des
élèves, si je comprends bien, vous avez reçu, il n'y a pas
longtemps, des formulaires et, dans les écoles, on convoque les parents.
Est-ce qu'il y a une date limite pour remplir ces formules?
M. Rousseau: Devrais-je la dire? Le 15 août.
M. Le Moignan: Justement, j'ai rencontré un principal
d'école et sa grande difficulté, c'est que, dans notre milieu, il
y a beaucoup de parents de langue anglaise qui ont quitté et qui ne sont
plus du tout dans la région. Depuis une semaine, je pense bien, les
formules sont arrivées. Je n'ai pas la date. Ils sont en dehors pour
cinq, six, sept ou huit semaines; je ne dis pas que c'est la majorité,
mais il y a plusieurs cas comme ça. Cela pose un problème, vous
êtes au courant.
J'avais une autre petite question. On définit le statut de la
langue française au Québec et, évidemment, tout le monde
est favorable. Croyez-vous qu'avec le temps le gouvernement pourrait ou
devrait, en annexe peut-être, définir aussi le statut des autres
langues? Est-ce une chose possible?
M. Rousseau: C'est une chose qui serait possible dans un
deuxième temps.
M. Le Moignan: Est-ce que, M. le ministre...
On a dit tout à l'heure qu'on pouvait poser des questions au
ministre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Si le
ministre veut répondre.
M. Le Moignan: Si le ministre veut répondre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): II a le
droit de répondre ou de ne pas répondre.
M. Le Moignan: M. le ministre, croyez-vous je ne vous
demande pas si vous avez l'intention de le faire que c'est dans l'ordre
du possible qu'une fois la charte de la langue adoptée, le gouvernement
puisse faire un pas de plus je ne dis pas pour débâtir
votre loi pour statuer sur les autres groupes, les autres langues, avoir
une charte des droits linguistiques?
M. Morin (Sauvé): On verra en temps et lieu.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Gaspé, je pense que vous avez eu votre
réponse. Il vous reste encore cinq minutes.
M. Le Moignan: C'est un point d'interrogation que je voulais
simplement élucider. J'aurais peut-être une autre question. Quand
vous parlez, à la page 5 c'est très bien de
l'apprentissage de la langue anglaise pour les francophones et que vous dites
"comme le fait d'un souci au moins d'ordre culturel", alors que, pour les
minorités, c'est une obligation, si on regarde du côté des
anglophones, un francophone, s'il apprend l'anglais, est-ce simplement par
souci culturel qu'il devrait le faire ou s'il y a une espèce de loi
impérative, si on tient compte du contexte nord-américain?
Jusqu'à quel point conseillez-vous l'enseignement de l'anglais aux
francophones?
M. Rousseau: Pour sûr, il y a le souci culturel dans
l'apprentissage de l'anglais; pour sûr, il y a aussi un impératif
qui vient de la vie quotidienne.
De ce côté, on ne peut ignorer l'apprentissage de
l'enseignement de l'anglais. Ce que nous voulons faire ressortir ici, c'est
surtout l'appartenance à la communauté québécoise,
au peuple québécois, de tous ceux qui vivent au Québec et,
à ce titre, qu'ils doivent tous pouvoir communiquer par le
français, qui est la langue significative de cette appartenance. Alors,
pour ce qui est de la langue seconde, pour les francophones, il y a
sûrement nécessité aussi d'y apporter des
éléments comme ceux qu'on apporte ici, éléments
d'ordre culturel et éléments d'ordre pratique.
M. Breton: II y a peut-être un autre élément,
si vous permettez, également. Nous n'avons pas mentionné dans le
mémoire si nous favorisions par exemple l'apprentissage d'une langue
seconde très tôt ou pas. C'est que notre opinion,
c'est-à-dire notre option pédagogique, compte tenu des
études actuelles, c'est de faire l'apprentissage des langues secondes,
pour quelque groupe que ce soit, à partir du niveau secondaire.
De quelle façon l'expliquer? Je pense que vous avez pris
connaissance des différentes études qui ont été
faites un peu partout dans le monde, en Angleterre et même
récemment à la CECM, qui étaient une version qui
contredisait l'expérience d'Angleterre qui, elle-même, contredit
une expérience d'un autre pays. Actuellement, les spécialistes ne
sont pas en mesure de faire des recommandations tellement fermes sur
l'apprentissage d'une langue seconde.
Lorsqu'on regarde certaines orientations de pays par exemple, dits
unilingues, généralement l'apprentissage d'une langue seconde se
fait à partir du niveau secondaire, au tout début du niveau
secondaire, et on fait même l'apprentissage de deux langues secondes. Je
pense à l'Allemagne par exemple. Sur le plan pédagogique, les
opinions sont très partagées et nous, si on avait une
recommandation à faire, on aurait tendance à recommander la
suppression de l'apprentissage d'une langue seconde au niveau de
l'élémentaire, autant pour les anglophones que pour les
francophones.
M. Le Moignan: Cela c'est votre point de vue. C'est ma
dernière question, je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Cardinal): Merci, M. le
député de Gaspé. M. le député de
Jacques-Cartier, il reste huit minutes au parti de l'Opposition officielle.
M. Saint-Germain: M. le Président, je vous remercie. Vous
dites à un moment donné, à la page 2 de votre
mémoire, le statut de la langue française, et, au deuxième
paragraphe, vous dites: "Nous partageons le souci historique non encore
réalisé de donner une identité sociale et culturelle aux
francophones du Québec en égard à leur histoire, à
leur nombre et à leurs institutions. Je vous avoue ne pas trop
comprendre le sens de votre paragraphe et j'aimerais bien avoir des
explications.
Je croyais que nous avions tout de même, au point de vue de
l'histoire, réalisé une identité sociale, une
identité culturelle. Je croyais que c'était déjà
acquis, mais enfin qu'est-ce que vous entendez exactement par ce
deuxième paragraphe?
M. Rousseau: On pourrait peut-être faire
référence à des expériences de vie quotidienne pour
se poser la question, voir si vraiment ce phénomène est acquis.
C'est vraiment la question fondamentale. Comme Québécois, je veux
bien m'identifier à un groupe, à une collectivité. Je veux
m'identifier à une collectivité qui a des caractéristiques
particulières et non pas des caractéristiques mixtes, et que ces
caractéristiques soient propres d'abord à la majorité qui
constitue ce peuple québécois et, par conséquent, que je
puisse, de par mon langage, de par mes expressions, de par ce que je suis et ce
que je véhicule, être reconnu et être marqué au coin
du Québécois. C'est ce qu'on veut signifier par ce
deuxième paragraphe.
M. Saint-Germain: Ce n'est pas déjà chose
faite?
M. Rousseau: Je ne sais trop. Je ne sais trop. Si je visite, si
je voyage quelque peu à travers le pays et à l'étranger,
c'est possible que je puisse répondre de façon précise
à la question qu'on me pose: D'où venez-vous et qui
êtes-vous? Et surtout le: Qui êtes-vous?
M. Saint-Germain: J'avoue ne pas plus comprendre, parce que je
croyais réellement que, comme Canadiens de culture française, on
nous a toujours dit d'ailleurs que s'il y avait quelqu'un en Amérique du
Nord qui avait une culture, une identité bien marquée,
c'était nous; cela me surprend un peu de lire dans votre mémoire
qu'on se cherche encore. J'avoue que cette identité sociale et
culturelle est en évolution constante.
L'identité culturelle et sociale du groupe francophone, au
Québec en particulier, n'est pas la même aujourd'hui qu'il y a
cinquante ans ou un siècle ou deux siècles. C'est une
évolution constante. Cette évolution se continuera dans les
années à venir, mais je croyais toujours que, dans notre
évolution, en fait, parce que tous les jours, je rencontre des
Québécois de divers groupes, de diverses identités, par
leur façon de voir, de s'expliquer et de s'exprimer, on sent bien qu'il
y a une différence. D'ailleurs, on prendrait comme témoins,
simplement, par exemple, les différents groupes qui viennent nous
soumettre des mémoires. L'identification est tellement marquée,
à un moment donné, que même si un mémoire de langue
française était écrit en anglais, si vous voulez, par des
gens de langue française, on pourrait dire: C'est un mémoire
francophone et cela pourrait être la même chose pour des
mémoires... Si je lisais, par exemple, le mémoire, en anglais, de
la Banque de Montréal, si je le lisais exclusivement en français
et même s'il n'était pas signé, je serais induit à
dire: C'est un mémoire qui a été écrit par des
anglophones.
Cela me surprend un peu que ce partage ne semble pas fait d'une
façon plus marquée, ou, du moins, que vous n'admettiez pas que ce
soit fait d'une façon plus marquée.
M. Lafortune: M. le Président, j'aurais une
réaction à ce qui vient d'être dit. Je pense que, sur le
plan culturel, il n'est pas dans notre intention de nier le fait qu'il y ait
une certaine identité par le biais des arts, un tas de moyens
d'expression propres à la majorité francophone
québécoise qui sont connus de par le monde entier mais, ayant
fait personnellement le tour de quelques pays, je peux vous assurer que, dans
le domaine des affaires, dans le domaine socio-économique, etc., on
ignore parfaitement ce qu'est le peuple québécois, dans son
expression de la majorité.
M. Saint-Germain: Oui, mais l'ignorance de l'étranger, si
vous voulez...
M. Lafortune: Quand on parle d'identité...
M. Saint-Germain: ...n'a pas expliqué qu'on ne s'est pas
vendu à l'étranger, qu'on n'a pas créé à
l'étranger une image positive ou...
M. Lafortune: On n'avait pas...
M. Saint-Germain: Cela n'a rien à voir avec la
réalité des choses.
M. Lafortune: Ce n'était pas le premier souci, on
était vendu par d'autres, de toute façon.
M. Breton: M. le Président, mes réactions sont
peut-être émotives face aux commentaires du député.
Je pense qu'il s'agit de vivre à Montréal. Je ne sais pas si vous
avez déjà vécu à Montréal. Moi, en tout
cas...
M. Saint-Germain: Je suis de Lachine, j'ai vécu sur
l'île de Montréal ma vie durant.
M. Breton: Je ne suis pas né à Lachine, je suis
né à Montréal et j'ai vécu 28 ans de ma vie
à Montréal. Je suis maintenant en banlieue de Montréal et
lorsqu'on arrive à Montréal... Je rencontrais, il n'y a pas
tellement longtemps. M. Jean Drapeau, qui était fier de dire qu'il
était le maire de la deuxième ville française au monde. Je
lui ai dit: Ecoutez, j'arrive de Paris et ce n'est pas du tout la même
sensation qu'on a d'une ville française. Montréal, ce n'est pas
une ville nécessairement dans laquelle on se retrouve comme ville
française. Vous avez vécu là; vous êtes né
à Lachine et je pense qu'on ne peut pas identifier Montréal comme
une ville française. Je pense que c'est un peu ce qu'on a voulu dire.
Montréal, évidemment, c'est peut-être 45% de la population
totale du Québec mais Montréal ne reflète pas, ne
reflète véritablement pas un esprit français. Comme
Montréal est quand même un élément
générateur au Québec, il faudrait peut-être se poser
la question: Est-ce que Montréal n'arrivera pas à influencer de
façon telle le Québec qu'un jour le Québec ne sera
peut-être pas aussi français qu'il l'est actuellement? On peut
être optimiste ou pessimiste, mais, enfin, on peut avoir une
réaction face à cela.
M. Saint-Germain: Comme je vous ai dit, je suis né
à Lachine. Cela fait longtemps que je sais que Montréal n'est pas
une ville homogène, loin de là. Même au tournant du
siècle, elle était en majorité de langue anglaise. Cela
n'enlève pas la caractéristique qu'on peut l'apprécier ou
ne pas apprécier la ville de Montréal. En fait! Montréal
n'a pas été construite exclusivement par les gens de langue
française. Cela a été construit... Les gens de langue
anglaise ou les minorités qui sont arrivées par après ont
certainement fait une marque, l'ont marquée et s'il y a une
différence entre Paris et Montréal, tant mieux, je n'ai pas
d'objection de principe. Il s'agirait de savoir pour le groupe francophone,
comme pour le groupe anglophone, si Montréal est une ville assez
humaine, si vous voulez, pour qu'on puisse y vivre en partenaire. C'est cela,
je pense bien, le but de toute législation de vivre, sans un
déséquilibre social.
Si on parle de réalités historiques... Vous dites: "Nous
partageons le souci historique non encore réalisé de donner une
identité sociale et culturelle aux francophones du Québec".
Cela a pris du temps à en arriver là, mais vous amenez
l'élément majeur du conflit. C'est que, traditionnellement,
surtout à Montréal, toute l'industrie, le commerce, la finance, a
été développé en majeure partie par les
anglophones, mais le fait qu'on n'y ait pas participé, c'est une
réalité historique pour nous. La motivation n'était pas
là. On a fondé SIDBEC il y a quelques années, on aurait pu
la fonder il y a cinquante ans...
M. Charbonneau: ... Seigneur, c'est la conquête. Maudit!
Cela n'a pas d'allure.
Le Président (M. Cardinal): Un instant, s'il vous
plaît! A l'ordre!
M. Saint-Germain: Je n'ai jamais demandé au
député...
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Saint-Germain: ... d'exiger qu'il ait de l'allure. Je ne suis
pas responsable des députés.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Verchères, à l'ordre,
s'il vous plaît! M. le député de Verchères. Veuillez
laisser au député de Jacques-Cartier le soin de définir
ses propres options et opinions.
M. Saint-Germain: Je disais qu'on aurait pu fonder SIDBEC il y a
plus de cinquante ans. En 1960, on a fait la révolution tranquille, on
aurait bien pu la faire il y a cinquante ans, cette révolution
tranquille. Il y a au-delà d'une quinzaine d'années, on a voulu
transformer profondément notre système scolaire, on aurait pu le
modifier cinquante ans auparavant. Rien ne nous empêchait de faire
ça c'est une réalité historique qu'on ne l'ait pas fait.
Aujourd'hui, on s'aperçoit, à titre de francophones, que,
nécessairement, il faut que notre culture s'appuie sur une force dans le
domaine économique, dans le domaine financier, dans le domaine
scientifique, sur des champs d'activités que, traditionnellement et
historiquement, on a négligés.
Je crois que ce sont des choses qu'on doit dire, parce que, si on
s'imagine, avec le bill no 1, transformer profondément tout ceci et
donner par le fait même aux francophones un soutien financier ou un
soutien au point de vue du développement industriel, on fait une erreur.
Parce que vous frayez avec des jeunes, vous autres, vous êtes en charge
de l'éducation de la jeunesse, vous avez la jeunesse entre les mains. Il
va falloir que vous formiez des hommes qui ne se lanceront pas
nécessairement dans le droit, dans la prêtrise et dans le
professorat. Il va falloir que vous formiez des hommes qui seront
compétents, des scientifiques, des gars qui connaîtront les
marchés internationaux, des hommes qui connaîtront la finance,
l'administration et qui, par leur énergie, leur sens des
responsabilités, leur crédibilité, vont accaparer des
postes. C'est ça, le problème fondamental.
C'est de cette seule façon, comme Québécois et
comme francophones, qu'on pourra jouer, dans le monde de l'industrie et de la
finance, le rôle qui nous appartient. Je crois que tout ceci peut
être un inconvénient sérieux pour notre jeunesse et on est
rendu que notre jeunesse croit qu'avec des lois comme la loi no 1, on va
résoudre le problème du développement industriel,
économique, financier et scientifique du Québec. A mon avis,
c'est fondamentalement faux. Je ne dis pas qu'une législation sur les
langues n'a pas son importance et qu'elle ne peut pas aider dans le processus
ou dans l'évolution. Mais ce n'est certainement pas une loi comme
celle-ci, à mon avis, qui va jouer un rôle prédominant dans
ce besoin que nous avons, comme francophones, d'accaparer des postes de
direction dans des domaines où nous n'avons jamais été
motivés à le faire.
C'est tout ce que je voulais dire, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): M. le député,
vous avez très légèrement dépassé le temps
du parti de l'Opposition officielle. Mais je vous ai écouté avec
beaucoup d'attention.
M. Laplante: Un vrai somnifère.
Le Président (M. Cardinal): Pour conclure...
M. Charbonneau: C'est édifiant...
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît, à l'ordre! Pour terminer cette audition, M. le
député de Terrebonne.
M. Fallu: M. le Président, j'aimerais, au moins comme
troisième personne, apprécier à sa juste valeur le premier
paragraphe de la conclusion de votre mémoire. Je pense que, comme vous,
il est un peu triste d'avoir à légiférer pour la
troisième fois, presque pour la quatrième fois, au Québec,
sur les droits linguistiques de la majorité francophone. Puisque vous
soulignez ces droits historiques, je tenterai, pour ma part, en deuxième
lecture, d'essayer de convaincre le député de Jacques-Cartier de
ces nécessités...
M. Bertrand: Bonne chance!
M. Fallu: Merci, cher collègue.
J'ai une remarque à faire et une question à vous poser. La
remarque est relative à votre proposition de récupération
des bébés de la loi 63 et de la loi 22. Pour ma part, je crains
qu'il soit un peu arbitraire de tenter de les récupérer parce
qu'il faudrait au-delà des termes québécois, ou peuple
québécois, ou québécois francophones ou quoi que ce
soit, déterminer un modèle opérationnel pour les
récupérer, pour ainsi dire. Ce que vous soulignez là, je
consens à ce que ce soit une remarque prospective; mais, pour moi, c'est
sur-
tout, malheureusement, un jugement de valeur que vous portez sur les
lois antérieures.
Dans votre exposé oral, vous avez soulevé un aspect
prospectif que vous n'avez fait qu'énoncer sans développer, et
j'aimerais savoir un peu davantage quel est le fond de votre pensée. Je
cite à peu près au texte; vous parliez de valorisation de
l'apprentissage de la langue française chez les minorités. Si je
comprends bien, vous alléguez par là que c'est après que
la Charte de la langue soit devenue officielle qu'il faudrait valoriser
l'apprentissage de la langue française chez les minorités. Cela
suppose donc, si j'ose trouver des applications, des méthodes, un
marketing, cela suppose peut-être bien même des crédits
disponibles. Dans votre pensée, qu'est-ce qu'il en est de cet aspect de
l'apprentissage de la langue française chez les minorités?
M. Rousseau: Nous voulons d'abord signifier que cette
reconnaissance des minorités participant et faisant partie de plein
droit au peuple québécois de par la définition des termes
qu'on apportera et dans l'esprit que M. le ministre mentionnait tout à
l'heure... Nous devrions trouver là la motivation nécessaire chez
les minorités pour apprendre le français puisqu'elles
appartiendront de plein droit à ce peuple québécois, et
nous préférons cette démarche à une démarche
coercitive. C'est le fond de l'énoncé que je prenais. Il reste
aussi qu'on devra nécessairement aller un peu dans le sens du marketing,
comme vous le mentionnez, c'est-à-dire envisager des mesures qui
favorisent, de la part de ces minorités, l'apprentissage du
français, leur donner une instrumentation adéquate, leur donner
des maîtres compétents dans le domaine et des maîtres qui
ont vraiment un souci culturel de ce côté.
Ce sont différentes mesures qu'on peut envisager.
M. Fallu: A ce moment-là, aux minorités à
l'école ou aux minorités qui ont déjà
dépassé le stade scolaire? Entre autres, vous avez fait allusion,
au niveau de l'éducation permanente tantôt. Est-ce que cela
comporte aussi ce niveau postscolaire?
M. Rousseau: Cela comporte ce niveau, pour sûr.
M. Fallu: Pour ma part, c'est tout. Je vous remercie
officiellement, au nom de l'équipe ministérielle de vous
être présentés, du souci que vous avez eu à
préparer ce mémoire qui, d'ailleurs, est en tout point
remarquable. Remarquable parce que vous avez profondément senti le noeud
du problème québécois qu'après deux lois... Nous en
sommes à une troisième qui, espérons-le, sera finale, et
vous êtes venus nous le dire dans des mots qui sont assez semblables
à ceux, je crois, de la majorité des Québécois.
Merci.
Le Président (M. Cardinal): Est-ce que vous avez un
très bref mot à ajouter?
M. Rousseau: Un dernier mot, M. le Président, à
l'intention de M. le député qui, malheureusement, a quitté
son siège lorsqu'il faisait référence aux jeunes dan6 nos
écoles, et pour nous, je crois que le projet de loi apportera une
motivation auprès des jeunes pour l'apprentissage du français et
les aidera à trouver une identité qu'ils n'ont pas
présentement puisqu'ils sont dans l'ambiguïté d'une
situation où ils apprennent le français et où ils
envisagent de travailler en anglais.
Le Président (M. Cardinal): Vous avez quelque chose
à ajouter?
M. Langlais: M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): Votre micro...
M. Langlais: M. le Président, je veux tout simplement vous
dire que nous sommes heureux d'avoir eu l'occasion de vous présenter
tout de go nos positions sans trop d'anicroches à vos règles
d'ordre. Je vous remercie.
Le Président (M. Cardinal): Alors, dans l'ordre, M.
Rousseau, M. Breton, M. Lafortune et Langlais, merci pour le mémoire que
vous avez présenté au nom de l'Association des cadres scolaires
du Québec. Je vais inviter immédiatement le prochain organisme.
Merci.
Lettre du Conseil supérieur de
l'éducation
Le Président (M. Cardinal): L'Association du transport
aérien international, IATA, mémoire 75. Madame, je m'excuse,
avant que vous ne commenciez, j'aurais un très bref mot à dire en
réponse à une question de Mme le député de
L'Acadie, en particulier, son collègue de gauche étant parti.
Il y a quelques minutes à peine, j'ai reçu la lettre
suivante que je veux lire en entier: Québec, le 4 juillet 1977. C'est
adressé au Président de la commission permanente de
l'éducation, des affaires culturelles et des communications, à
mon nom.
M. le Président,
Le Conseil supérieur de l'éducation a été
requis le lundi 27 juin de comparaître le lundi suivant, le 30 juin,
devant la commission permanente de l'éducation, des affaires culturelles
et des communications au sujet du projet de loi no 1, Charte de la langue
française au Québec.
Devant le précédent d'une convocation que lui adressait
une commission parlementaire, le conseil a cru devoir demander un sursis afin
d'en mesurer les implications. Il sait gré à la commission de ne
l'avoir pas pressé de comparaître.
A l'examen, le conseil souhaite n'avoir pas à se présenter
auprès de la commission. Il estime en effet préjudiciable au
caractère propre de ses travaux de devoir témoigner au cours d'un
débat parlementaire, une fois son avis soumis sur le sujet en cause au
ministre de l'Education, dont il relève immédiatement.
A l'unanimité, les membres du conseil estiment que
l'impartialité dans laquelle ils se tiennent pourrait autrement se
trouver affectée dans l'avenir et que le recul dont ils
bénéficient pourrait leur être plus difficile.
En conséquence, sans méconnaître les pouvoirs de la
commission, le conseil espère qu'elle lui permettra de ne pas se rendre
à sa convocation.
Veuillez agréer, M. le Président, l'expression de mes
sentiments distingués, le président du conseil, Jean-M.
Beauchemin.
Alors, on m'a posé... Oui. C'est au journal des Débats,
évidemment. Je possède l'original qui a été
livré à mon bureau et il y a une copie qui a été
remise au secrétariat de la commission.
Mme le député de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je voudrais
simplement, avant de réagir, en dire mot à mes collègues.
Après le dîner, je pourrai vous faire connaître le point de
vue de l'Opposition officielle, qui avait fait la motion.
Le Président (M. Cardinal): D'accord.
M. le député de Bourassa.
M. Laplante: M. le Président, j'aurais souhaité que
le député de Marguerite-Bourgeoys, lorsqu'il vient à la
commission, fasse le temps que dure la commission, pour le peu de fois qu'il
peut venir, pour entendre cette missive du Conseil supérieur de
l'éducation.
M. Ciaccia: Une question de règlement, M. le
Président. On impute des motifs au député de
Marguerite-Bourgeoys pour le peu de temps qu'il peut venir. Il a
été ici durant tous les débats, sauf quelques abstentions;
pour ses abstentions, je ne crois pas qu'il doive des excuses ou des
explications au député de Bourassa. Je ne voudrais pas qu'on
impute des motifs au député de Margeurite-Bourgeoys, pour des
raisons que le député de Bourassa ignore. Il a dû
s'absenter à ce moment-ci.
M. Laplante: Cela fait mal, lorsqu'on impute...
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, sa contribution est
beaucoup plus précieuse que celle du député de Bourassa
aux travaux de cette commission.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît! Madame et monsieur, les deux députés, le
député de Mont-Royal a raison. Il ne faudrait pas que maintenant
l'on impute de nouvelles intentions à d'autres députés et
que l'on recommence le débat. J'ai simplement, comme président,
fait mon devoir en répondant à une question de deux
députés de l'Opposition officielle, en lisant cette lettre qui
m'a été livrée aujourd'hui même et qui est
datée d'aujourd'hui, que j'ai d'ailleurs présentée
immédiatement après l'avoir lue tant au ministre de l'Education
qu'aux représentants du parti ministériel. Je peux aussi la
passer à M. le député de Gaspé. Je demanderais
qu'on me remette l'original. Je n'en ai parlé à aucun membre de
la commission auparavant. Ceci s'est fait il y a environ 20 minutes.
Alors je voudrais bien que, devant le Conseil supérieur de
l'Education, la commission prenne, comme le dit Mme le député de
L'Acadie, le temps de réfléchir. Je n'ai pas, personnellement,
d'avis juridique à rendre sur une semblable lettre, certainement
pas.
M. Bertrand: M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Vanier.
M. Bertrand: Puisqu'il en sera sans doute question ce soir,
à la séance, où le député de
Marguerite-Bourgeoys représentera sa motion pour faire comparaître
la Régie de la langue française, est-ce qu'il serait possible
d'en avoir des copies pour les membres, ce soir?
Le Président (M. Cardinal): Je vérifie ceci
immédiatement. Vous savez que l'horaire d'été du personnel
de l'Assemblée nationale n'est pas celui des membres des commissions. Je
vais tenter l'impossible pour en obtenir.
M. Ciaccia: Celui d'hiver n'est pas le même non plus.
Le Président (M. Cardinal): J'ai donné des
directives pour qu'avant 20 heures, nous puissions avoir 20 photocopies; c'est
une copie pour chacun des membres de la commission. Cela va.
Je m'excuse, madame. Alors, Association du transport aérien
international. Si vous voulez bien, non pas identifier votre organisme, je
pense que tout le monde le connaît, mais vous identifier. Vous êtes
madame Larose-Aubry.
Association du transport aérien
international
Mme Larose-Aubry (Huguette): C'est ça, oui.
Le Président (M. Cardinal): Si vous voulez vous identifier
davantage quand même; approchez votre micro s'il vous plaît.
Mme Larose-Aubry: Mon nom est Huguette Larose-Aubry et je suis
conseiller juridique adjoint pour l'Association du transport aérien
international.
Le Président (M. Cardinal): Ces micros sont difficiles.
Approchez-vous ou rapprochez votre micro. Venez plus près de nous ou
approchez le moyen de communication.
Mme Larose-Aubry: Mon nom est Huguette Larose-Aubry, je suis
conseiller juridique adjoint de l'Association du transport aérien
international, organisation à but non lucratif constituée en
cor-
Doration en 1945, en vertu d'une loi spéciale du Parlement du
Canada.
Au nom de l'IATA, je tiens à remercier la commission
parlementaire d'avoir bien voulu nous donner l'occasion d'exposer publiquement
notre point de vue sur la Charte de la langue française ou du moins le
projet de charte.
L'objet du mémoire soumis par l'IATA est d'inviter la commission
à reconnaître, à l'instar d'autres autorités
gouvernementales, le caractère international et quasi gouvernemental de
l'IATA, à lui accorder le statut spécial pour l'exercice de ses
fonctions et à l'exempter des dispositions de la Charte de la langue
française, dispositions susceptibles de nuire au maintien des conditions
nécessaires à l'exercice des fonctions qui nous sont
déléguées par les gouvernements du monde.
L'IATA poursuit les objectifs suivants: encourager le
développement de transports aériens sûrs, réguliers
et économiques au bénéfice des peuples du monde; favoriser
le commerce aérien et étudier les problèmes s'y
rapportant; fournir les moyens propres à une collaboration des
entreprises de transports aériens engagées directement ou
indirectement dans les services de transports aériens internationaux et,
enfin, coopérer avec l'Organisation de l'aviation civile internationale,
organisme spécialisé de l'ONU, et autres organisations
internationales.
Toutes les compagnies aériennes peuvent adhérer à
l'association, à condition que l'Etat dans lequel elles sont
immatriculées soit admissible comme membre de l'OACI. Il est
intéressant de constater, surtout si l'on tient compte que l'IATA est
une association entièrement volontaire et apolitique, que la très
grande majorité des compagnies qui desservent des routes
aériennes internationales ont décidé de devenir membres. A
l'heure actuelle, nous comptons 109 compagnies membres exploitant leurs
services sous le pavillon d'environ 80 Etats.
En 1977, les services exploités par les membres de l'IATA
représentent quelque 86% du trafic aérien régulier
international du monde entier. Bien que le siège social de l'association
se trouve à Montréal, notre bureau principal est à
Genève. Nous avons également des succursales à Bangkok,
Londes, Nairobi, New York, Rio de Janeiro et Singapour ainsi que de nombreux
bureaux chargés de contrôler l'application de nos
règlements et ces bureaux sont répartis dans les plus grandes
villes du monde, de sorte que la majeur partie du personnel de l'IATA est
employée hors du Canada et hors du Québec.
Le personnel de l'association, y compris celui travaillant au
siège social, est recruté parmi les ressortissants des nombreux
pays représentés par les membres de l'IATA. En fait, les quelque
500 membres du personnel représentent environ 50
nationalités.
Parmi les activités de l'IATA, celles qui sont les mieux connues
et les plus controversées sans doute sont les conférences de
trafic au sein desquelles les compagnies aériennes internationales
conviennent des tarifs passagers et marchandises, des redevances et des
conditions de service y rela- tives. Les conférences de DATA constituent
également un forum qui permet de mettre au point les règlements
du programme mondial relatif aux agences. On y négocie les formulaires
de trafic, les conditions de transport, les codes d'identification, les
procédures de réservations ainsi qu'une kyrielle d'autres normes
et accords pour établir un lien entre les services des compagnies
membres et nos membres dans le monde entier.
Bien qu'à l'IATA les trois langues officielles soient le
français, l'anglais et l'espagnol, au sein des conférences de
trafic, nous n'utilisons que l'anglais, car les résolutions des
conférences doivent être adoptées à
l'unanimité, elles touchent des matières hautement techniques et
controversées et on ne peut... Chaque traduction devrait être
autorisée et approuvée à l'unanimité
également de sorte que toutes les compagnies, d'un commun accord, ont
décidé de n'utiliser que l'anglais.
Depuis 1944, plus d'un millier d'accords intergouvernementaux
bilatéraux de transport aérien ont prescrit expressément
que les transporteurs désignés doivent, chaque fois que possible,
conclure des accords tarifaires par le truchement du système des
conférences multilatérales de l'IATA. Le système de
conférences sur le transport aérien international est devenu
ainsi un corollaire indispensable du cadre intergouvernemental de
réglementation qui régit l'industrie. Les conférences
effectuent leurs travaux en vertu de l'autorité que leur
confèrent les gouvernements et sous l'étroite surveillance de ces
derniers. En fait, ces accords sont soumis à l'approbation des
gouvernements.
Dans le cadre des activités techniques assumées par le
personnel de Montréal, l'IATA coopère avec l'OACI, organisme
spécialisé de l'ONU, et les gouvernements du monde entier pour
veiller à ce que les normes, les installations et services
destinés à l'aviation répondent aux normes les plus
élevées et ainsi assurent la sécurité et
l'efficacité des services aériens. Les questions relatives
à l'approbation et à l'enregistrement de quelque 17 000 agences
de voyages, situées en Amérique du Nord, en Amérique du
Sud, en Amérique centrale et dans les Antilles, sont également
traitées à Montréal.
Dans le domaine juridique, un personnel familier avec les divers
régimes juridiques travaille en étroite liaison avec l'OACI et
autres organismes internationaux à l'élaboration de règles
de droit aérien international. Il traite également des questions
de conflit de lois et de tous autres développements législatifs
qui risquent d'avoir une incidence sur le transport aérien ou les
systèmes réglementaires dans le cadre desquels il fonctionne et
fournit les services nécessaires à l'arbitrage des
différends entre transporteurs et agents.
C'est aussi au département juridique qu'il incombe d'aider les
compagnies membres à établir une politique coordonnée en
matière de redevances d'usage et de sécurité
aérienne et de présenter le point de vue de l'association
à l'OACI et aux autres autorités responsables.
Comme je l'ai expliqué plus tôt, le but du mémoire
est de prier la commission et les autorités provinciales de
reconnaître, à l'instar d'autres autorités où nous
avons établi nos bureaux, le caractère assez spécial de
l'IATA, en fait son caractère quasi gouvernemental et international.
Selon la conception traditionnelle, une organisation internationale est
constituée par un traité entre Etats et comprend des Etats comme
membres. D'un point de vue formel et classique, la personnalité
juridique internationale conférée à une organisation
dépendrait de deux conditions, l'une relevant du processus de
création, l'autre de la nature de ses membres. Mais la doctrine et la
pratique du droit international contemporain tentent à donner la
préférence à un critère fonctionnel. Ce sont en
effet les fonctions exercées par une organisation qui requièrent
un statut spécial lorsque ces fonctions revêtent pour la
communauté des Etats un intérêt général tel,
que l'indépendance de l'organisation à l'égard de l'Etat
qui l'accueille doit être garantie spécialement. Et, c'est ce que
nous allons tenter de prouver pour l'IATA.
Il semble reconnu en fait que le statut formel d'une organisation ne
devrait pas être déterminant en ce qui concerne la question de la
définition, lorsque cette organisation exerce des fonctions qui
s'apparentent à celles d'une organisation intergouvernementale et
possède des pouvoirs et une personnalité internationale opposable
aux Etats.
L'IATA n'a pas été constituée par un traité
interétatique et ses membres ne sont pas formellement des Etats. Il faut
donc s'en référer aux critères fonctionnels. L'impulsion
première pour la création de l'IATA est venue au cours de la
Conférence sur l'aviation civile internationale qui s'est tenue à
Chicago en 1944. Les 49 gouvernements représentés à cette
conférence n'ayant pas réussi à établir à
l'intérieur de la convention, un mécanisme pour régler les
questions économiques fondamentales relatives aux droits de trafic et
aux tarifs, ont encouragé les représentants de leurs compagnies
aériennes nationales qui étaient présents à Chicago
à former une institution internationale pour combler cette lacune, en ce
qui a trait à la détermination des tarifs.
C'est ainsi que le 19 avril 1945, à La Havane, une soixantaine de
compagnies aériennes ont créé l'IATA. L'accord de La
Havane a été formellement reconnu par les Etats, par les
références directes faites à l'IATA dans d'innombrables
accords bilatéraux ainsi que dans l'accord international sur la
procédure applicable à l'établissement des tarifs, des
services aériens réguliers, accord conclu à Paris en
juillet 1967.
Lors de la création de l'IATA il existait déjà dans
de nombreux pays, des corporations, régies publiques ou compagnies
appartenant aux gouvernements et qui se conformaient aux instructions de ces
derniers. En défendant leurs propres intérêts, ces
compagnies sauvegardaient également ceux des gouvernements. On constate
donc que dès le début, les Etats ont participé de
manière variable selon les pays, mais le plus souvent de manière
très directe au processus de création de l'IATA. A l'exception de
l'URSS et de la République populaire de Chine, la plupart des Etats ont
confié à l'IATA la fonction d'établir des tarifs pour les
transports aériens.
Une fois ratifiés les accords conclus dans les conférences
de trafic et dans certains cas même, une fois écoulé le
délai de ratification, les tarifs élaborés font partie
intégrante des accords bilatéraux et lient ainsi les Etats
contractants.
On constate que dans le domaine très important de
l'établissement des tarifs, l'IATA remplit une fonction gouvernementale
ou quasi gouvernementale.
La formule souple des conférences tarifaires permet aux
gouvernements de s'entendre sur des questions souvent très complexes,
par l'intermédiaire de leurs compagnies aériennes, en
évitant les inconvénients d'une confrontation ouverte.
Le "déphasage" qui apparaît entre le statut formel de
l'IATA et l'intérêt public ou étatique de ses fonctions est
accentué par les compétences de l'IATA qui ont, en fait, un
caractère quasi gouvernemental relevant du droit public.
D'ailleurs, les résolutions de l'IATA, une fois acceptées
par les gouvernements, acquièrent généralement la force
d'une règle de droit national. Aux termes de plusieurs traités
bilatéraux, la mise en vigueur par l'IATA, après approbation
gouvernementale, lie les Etats contractants entre eux et les oblige à
respecter les tarifs tant que ceux-ci demeurent en vigueur.
Il est dès lors logique de conclure de ces faits que les
règlements et décisions de l'IATA constituent une source de
droit, cela d'autant plus qu'il est incontestable que l'association exerce une
forte influence sur l'activité législative des Etats dans le
domaine aérien.
Outre l'établissement des tarifs, ainsi que nous l'avons
mentionné plus tôt, les conférences de trafic pourvoient
à l'administration et à la discipline d'un réseau
très important d'agences de voyages, quelque 25 000 à travers le
monde, et ce contrôle a été encore une fois entrepris avec
l'encouragement et l'approbation des gouvernements.
En vue d'assurer le respect de ses tarifs et des règlements,
ratifiés en fait par les gouvernements, ces derniers laissent, en
général, à l'IATA les soins d'assurer par des sanctions
disciplinaires le respect et l'application des tarifs et règlements par
les membres de l'association, leurs associés et les agences.
Si, comme c'est parfois le cas, une violation incriminée est le
fait d'une compagnie agissant sur instructions de son gouvernement, l'affaire
opposant l'IATA à son membre prend proportion d'un différend
entre le gouvernement transgres-seur et les autres gouvernements dont les
intérêts économiques sont lésés par la
violation. L'importance économique des tarifs aériens est en
effet si grande que les gouvernements doivent pouvoir considérer que les
résolutions ne seront pas remises en question par ceux qui les ont
approuvées.
En outre, les conférences tarifaires taisant partie
intégrante de l'IATA, leur reconnaissance par les gouvernements emporte
implicitement celle de l'IATA comme organisation internationale.
Cette reconnaissance confère à l'IATA une certaine
personnalité internationale opposable aux Etats.
De plus, même si l'IATA constitue une fédération des
compagnies nationales d'aviation et que ses membres ne sont pas les
gouvernements tels quels, c'est, pour la plupart des cas, pour des raisons que,
même lorsque la société de navigation aérienne
appartient intégralement à l'Etat ou en est une émanation,
les gouvernements ont, en général, donné à ces
sociétés un caractère de sociétés de droit
privé. Ils l'ont fait pour des raisons d'ordre pratique, ou soit pour
arriver à une efficacité et à une souplesse
opérationnelle plus grande. C'est ainsi qu'un certain nombre des
sociétés membres de l'IATA sont, à la forme, des
sociétés de droit privé, mais la majorité et
souvent même la totalité de leur capital-actions est
détenue par les Etats ou par des communautés de droit public. Un
tableau indiquant la participation gouvernementale dans les
sociétés membres de l'association est joint au mémoire en
annexe I.
Le fait que l'IATA ait été créée sur
l'initiative des transporteurs aériens et non les gouvernements
eux-mêmes et qu'ensuite les gouvernements n'en soient pas devenus
formellement membres ne signifie pas grand-chose. En effet, pratiquement et
politiquement, dans la plupart des pays, les gouvernements s'identifient
à leurs agents transporteurs.
En résumé, il est clair qu'outre ce qui
précède, la dynamique des activités propres de l'IATA,
leur extension et les nécessités actuelles ont imprimé
à l'association le caractère d'une organisation quasi
gouvernementale et internationale.
Ce caractère est aujourd'hui accrédité par une
certaine coutume internationale, étant donné que l'IATA
élabore et règle, depuis plus de trente ans, les tarifs
aériens et qu'environ 86% du trafic international est assuré par
les membres de l'IATA.
Ce caractère a été reconnu par la Suisse qui,
récemment, accordait à l'IATA, un statut spécial lui
garantissant l'indépendance nécessaire à l'exercice de ses
activités en Suisse.
Les dispositions du projet de loi no 1 soulève de graves
préoccupations pour l'IATA, car elles risquent d'entraver ou de brimer
une certaine latitude nécessaire à l'exercice de nos fonctions,
fonctions qui, je le répète, nous ont été
déléguées par les gouvernements du monde.
L'IATA souscrit, en principe, aux mesures visant à
reconnaître formellement le droit de tout salarié à exiger
que soit rédigées en français les communications
écrites relatives aux conditions d'emploi qui lui sont adressées
par l'employeur. Les membres du personnel de l'IATA peuvent déjà
exercer ce droit. Il importe cependant de laisser à l'employeur le droit
d'adresser, et au salarié celui de recevoir, la version anglaise de ces
mêmes communications.
Une connaissance approfondie de la langue anglaise est une des
conditions essentielles à l'accomplissement des tâches au sein de
l'IATA. Les nombreux avis, circulaires, rapports, études et autres
communiqués adressés à une centaine de lignes
aériennes immatriculées dans quelque 80 pays différents,
ne peuvent, de toute évidence et pour des raisons d'ordre pratique,
être rédigées dans toutes les langues officielles de ces
pays. Il a fallu adopter la langue reconnue par la pratique internationale dans
le domaine de l'aviation civile internationale, à savoir la langue
anglaise.
Toute personne postulant un emploi à l'IATA doit donc non
seulement répondre aux exigences techniques du poste, mais encore
posséder une connaissance suffisante de la langue anglaise lui
permettant d'analyser les données des divers problèmes qui lui
seront généralement soumis en anglais, par ses collègues
de l'industrie, d'en discuter avec eux et de leur soumettre les recommandations
écrites appropriées.
Pour mener à bien les tâches qui lui sont
déléguées par les gouvernements, l'association doit
conserver une certaine liberté d'action quant à l'imposition des
conditions d'embauche et de congédiement pour cause de son
personnel.
L'article 37 reconnaît en partie ce principe. Le mécanisme
d'exemption prévu n'offre peut-être pas la latitude
nécessaire à l'IATA dans la mesure où une preuve
justifiant l'exigence de la connaissance de la langue anglaise devrait
être fournie dans les cas d'embauche. Il n'est pas clairement
stipulé non plus si la même preuve serait suffisante dans les cas
de congédiement. Le projet de loi no 1 reconnaît en partie ce
problème également à l'article 63 qui stipule que "rien
n'empêche l'emploi d'une langue en dérogation avec la
présente loi lorsque les usages internationaux le demandent.
Cette définition ne définit pas cependant les termes
"usages internationaux" qui peuvent donner lieu à interprétation.
L'effet des dispositions du chapitre VIII sur le libre choix laissé aux
membres du personnel de l'IATA constitue un grave sujet de
préoccupation. Les exigences de fonctions hautement
spécialisées et les obligations de l'IATA envers ses membres
contraignent l'association à recruter son personnel de direction dans le
monde entier. Ainsi, les 41 membres du personnel de direction du bureau de
Montréal proviennent de quatorze pays différents. En raison de
leurs origines ethniques et de leurs antécédents culturels,
certains des membres du personnel de direction désirent que leurs
enfants reçoivent leur enseignement en anglais.
Nombreux parmi eux envisagent le retour de leurs enfants dans leur pays
d'origine; d'autres doivent également opter pour ce système afin
d'assurer une certaine continuité, peu importe le pays où leurs
fonctions souvent itinérantes les conduiront. Si la nouvelle
législation devait rendre la chose impossible, l'IATA éprouverait
de la difficulté à garder certains de ses cadres, et il lui
serait encore plus malaisé à l'avenir d'embaucher du personnel
répondant aux exigences précitées ou d'effectuer les
transferts nécessaires entre ses divers bureaux à travers le
monde.
Les dispositions relatives à la langue de l'enseignement risquent
de faire obstacle à la mobilité du personnel de l'association et,
ainsi, de nuire à l'exercice de ses fonctions quasi gouvernementales.
L'IATA invite donc instamment la commission
et les autorités gouvernementales à reconnaître,
à l'instar de la Suisse, le statut spécial de l'association et
à l'exempter de l'application des dispositions susceptibles d'entraver
la liberté d'action si nécessaire à son bon
fonctionnement.
Le présent mémoire a été limité
à dessein aux aspects les plus épineux du problème.
Certaines autres dispositions de la charte, de même que les politiques
ultérieures de l'Office de la langue française,
soulèveront peut-être d'autres difficultés, mais nous
prions la commission de recommander, à la lumière des principes
énoncés, que l'IATA possède ce caractère
international et quasi gouvernemental et de recommander que l'IATA et son
personnel soient clairement exemptés de l'application des dispositions
de la Charte de la langue française au Québec, lui accordant
ainsi le statut spécial nécessaire à l'exercice de ses
fonctions internationales et quasi gouvernementales. Merci.
Le Président (M. Cardinal): Merci, madame. Je pense qu'il
est inutile de commencer une période des questions à cette heure.
Il y a bien assez que je mange certains mots sans qu'on les interprète
mal pour moi. Les travaux de cette commission on entend toujours la
cloche reprendront à 20 heures. La séance est donc
suspendue jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 17 h 58)
Reprise de la séance à 20 h 8
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, ma dame,
messieurs!
Mme Larose-Aubry, si vous voulez regagne votre fauteuil. Mme
Larose-Aubry ayant termini son mémoire, j'accorde la parole à M.
le ministre de l'Education.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, ce n'es pas sans
un plaisir particulier que j'accueille, pou ma part, Mme Huguette Larose-Aubry.
Il m'arrive quelquefois, quand je retrouve de la sorte l'une de mes
étudiantes ou l'un de mes étudiants occupant un poste
intéressant dans un organisme international, de me dire que mon
enseignement a été utile à quelque chose.
M. Lalonde: II n'a pas trop nui.
M. Morin (Sauvé): II n'a pas trop nui, comme dit le
député de Marguerite-Bourgeoys.
Vous nous avez soumis un mémoire fort bien documenté,
madame, dans lequel vous priez le gouvernement, de la part de l'IATA, de
reconnaître le caractère international et quasi gouvernemental de
cette association et de l'exempter clairement de l'application de la Charte de
la langue française au Québec.
J'aimerais faire une distinction, si vous le voulez bien, pour les fins
des questions que j'ai à vous poser, entre la langue de travail et la
langue de l'enseignement. Pour ce qui est de la langue de travail, il est
déjà prévu, dans le projet de loi, que certaines
situations particulières, comme celle de l'IATA, seront
considérées à part. J'attire votre attention sur les
articles 63, 109 et 113 du projet de loi qui sont destinés justement
à couvrir le cas de ce genre d'organisme.
D'ailleurs, dans les règlements qui ont été
déposés à l'Assemblée nationale, par mon
collègue le ministre d'Etat au développement culturel, vous aurez
pu noter qu'il est prévu un statut spécial pour les organismes
internationaux à but non lucratif.
Je ne sais pas si on a attiré votre attention déjà
sur ces règlements mais ils viennent compléter la loi sur ce
point précis.
Pour ce qui est maintenant de la langue d'enseignement pour les enfants
des cadres travaillant à votre siège social à
Montréal, j'aimerais vous poser un certain nombre de questions. Parmi
ces cadres, ces employés, il s'en trouve certains qui sont
étrangers et qui sont employés en raison de leurs aptitudes
techniques particulières, de leurs connaissances techniques
particulières. Il se trouve également sans doute des
Québécois qui, à l'heure actuelle, ont la
nationalité canadienne. Il se trouve certainement aussi des personnes
qui, ayant obtenu un statut d'immigrants reçus, espèrent, par le
truchement de ce poste international, obtenir la nationalité canadienne
et, de la sorte, s'installer à demeure ou, en tout cas, pour quelques
années à Montréal.
J'aimerais vous demander si, lorsque vous revendiquez la non-application
de la charte ou du
projet de charte à l'IATA, vous visez non seulement la langue de
travail, mais également la langue d'enseignement. Si tel est le cas,
voulez-vous que l'exemption accordée à l'IATA s'applique non
seulement aux cadres et employés étrangers, mais encore aux
cadres et employés québécois ou canadiens?
Autres questions. Je vous les pose pour sauver du temps, je vous les
pose à la queue leu leu, autres questions qui, elles, pourraient
peut-être faire l'objet de recherches de votre part, je ne sais trop.
Votre siège social, le siège social de l'IATA est à
Montréal, mais vous avez également un bureau principal à
Genève, des succursales à Bangkok, à Londres, à
Nairobi, à New York, à Rio de Janeiro et à Singapore.
J'aimerais vous demander si, dans chacune de ces capitales
étrangères où vous avez des cadres et des employés,
l'Etat d'accueil autorise votre personnel à fréquenter, aux frais
de l'Etat, des écoles anglaises. Voilà. J'en ai terminé
pour mes questions et je voudrais laisser à Mme Larose-Aubry tout le
loisir de faire ses commentaires.
Le Président (M. Cardinal): Madame.
Mme Larose-Aubry: Merci, M. le ministre, je vais essayer de
répondre à tous ces points.
Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse encore, madame,
votre micro, s'il vous plaît.
Mme Larose-Aubry: Merci, M. le ministre, de vos questions; je
vais essayer d'y répondre. Sur le premier point, où vous avez
porté à mon attention le fait qu'il y a déjà un
règlement ou qu'on prévoit déjà un règlement
spécial pour les organismes internationaux à but non lucratif,
nous avons noté ce développement et également les articles
63, 109 et 113. Mais, en tant qu'entité juridique, l'IATA est une
corporation canadienne; il lui faut donc un acte des autorités
gouvernementales lui reconnaissant son statut international. C'est
peut-être une technicité puisque, dans les faits, nous le sommes
déjà et que d'autres autorités l'ont reconnu, mais ce
serait peut-être préférable de veiller à ce
point.
M. Morin (Sauvé): J'en prends bonne note.
Mme Larose-Aubry: Merci. Par votre deuxième question, je
crois, vous nous demandiez si nous voulions une exemption à la fois pour
la langue de travail et la langue de l'enseignement. La réponse à
cette question est oui.
En ce qui a trait à la langue de l'enseignement, c'est un peu
difficile de répondre clairement à votre question puisque vous me
parlez d'employés québécois et que j'ignore toujours ce
qu'est un employé québécois. Est-ce quelqu'un qui est
né ici? Est-ce quelqu'un qui a ici une résidence permanente?
Est-ce quelqu'un qui travaille ici? Comme je n'ai pas ces précisions, je
ne peux vraiment pas vous répondre.
M. Morin (Sauvé): Je suis tout à fait
disposé à vous préciser la question. J'avais à
l'esprit quelqu'un possédant déjà la nationalité
canadienne ou un statut d'immigrant reçu distinguons
peut-être ces deux cas et résidant, naturellement, à
Montréal ou au Québec.
Mme Larose-Aubry: En général, le problème
là-dessus, pour nous, ce serait très difficile de faire une
distinction très claire.
Très souvent, nos employés, lorsqu'ils viennent d'autres
bureaux, sont transférés ou sont embauchés, pour obtenir
leur permis de travail, parce qu'encore là nous sommes une corporation
canadienne et non pas un organisme spécialisé de l'ONU, demandent
le statut au départ et sont intéressés à venir
s'établir ici de façon permanente. Ils ont cette intention au
départ. Evidemment, les aléas d'une carrière
internationale les amènent à se déplacer, de sorte que la
plupart de nos employés ont ce statut d'immigrant reçu, aux fins
de résidence permanente. Je ne dis pas tous, je dis plusieurs, de sorte
que si, maintenant quelques-uns qui ont décidé de
s'établir vraiment de façon permanente au Canada et au
Québec, quel que soit peut-être par la suite leur carrière,
quitteront l'IATA et s'établiront ici, eux demanderont la
nationalité canadienne ou d'être naturalisés.
Mais, si vous me demandez si on demande l'exemption pour à la
fois ces employés de cadres résidant de façon permanente
au Québec, la réponse est oui.
M. Morin (Sauvé): Et dans le cas d'un employé ou
d'un cadre qui, comme vous, par exemple, est Québécois d'origine
et qui entre à l'IATA pour y faire carrière, vous attendriez-vous
à ce que ce Québécois soit exempté, parce qu'il
entre à l'IATA, de la loi linguistique?
Mme Larose-Aubry: Je dois répondre à cette question
non en mon nom personnel, mais au nom de l'IATA. Il est parfois difficile, au
sein d'une association comme la nôtre, de demander des exemptions
différentes pour certains de nos employés que pour d'autres.
Alors, dans une mesure d'uniformité, nous croyons qu'il serait
préférable d'accorder cette exemption totale à nos
employés. Maintenant, si le gouvernement a des difficultés plus
particulières, enfin, ne peut admettre ce point, je ne voudrais pas me
prononcer plus avant avant de consulter notre comité exécutif sur
cette question.
M. Morin (Sauvé): Je vous engagerais à le faire,
parce que si vous ne voulez pas faire de distinction entre vos employés
et vos cadres, nous ne voulons pas en faire entre Québécois. Le
principe est aussi important pour le gouvernement qu'il peut l'être pour
vous, de sorte que j'aimerais que vous portiez ce problème à
l'attention des autorités de l'IATA, pour que nous puissions
éventuellement en reparler.
L'autre partie de ma question avait trait à ce qui se passe
à Genève. Commençons par Genève.
Est-ce que l'Etat, à Genève, paie aux employés de
votre bureau principal, comme vous l'appelez, la fréquentation de
l'école anglaise?
Mme Larose-Aubry: Pour répondre à cette question,
malheureusement, ce serait peut-être un peu long et je dois expliquer
certaines choses. Lorsque nous avons établi notre siège social au
Québec, il y avait plusieurs raisons militant en faveur de notre
établissement ici: la présence de l'OACI, la situation en
Amérique du Nord également, à proximité des grands
manufacturiers de l'aviation et également le fait que nous étions
dans un pays où on avait les deux langues officielles.
Il y en avait d'autres également. Je ne veux pas
développer davantage cette question.
Lorsque nous avons ouvert notre bureau à Genève,
premièrement, c'est le quartier français de la Suisse, mais il y
a également les écoles allemandes, comme vous le savez sans
doute, et anglaises qui sont privées... Dans ce cas-là, parce que
c'était un bureau, on versait aux employés certains frais pour
assumer les frais d'éducation, mais maintenant ce n'est plus
nécessaire, parce que les autorités suisses et les
autorités cantonales de Genève, ayant reconnu à l'IATA, ce
statut quasi gouvernemental et international, ont également
exempté d'impôt tous les employés de l'IATA, de sorte que
les sommes ainsi épargnées compensent largement pour les frais
d'éducation.
M. Morin (Sauvé): On voit qu'elle a été bien
formée. Mais le principe demeurait que l'Etat ne payait pas, même
avant que cette exemption ne soit accordée, l'école anglaise aux
fonctionnaires de l'IATA puisqu'une telle école n'existe pas de toute
façon dans le canton de Genève.
Mme Larose-Aubry: C'est exact, mais la seule différence,
c'est que lorsque nous nous sommes établis à Genève, nous
le savions.
M. Morin (Sauvé): Oh, mais est-ce que désormais
vous ne le saurez pas?
Mme Larose-Aubry: Exactement, désormais, nous le saurons,
si c'est le cas et ce sera aux autorités de l'IATA de soupeser les
conditions existantes.
M. Morin (Sauvé): C'est cela, la présence de loi,
enfin tout ce qui fait que...
Mme Larose-Aubry: II y a plusieurs facteurs à
considérer effectivement.
M. Morin (Sauvé): C'est cela. Et Bangkok, qu'en est-il
à Bangkok?
Mme Larose-Aubry: A Bangkok, nous avons un très petit
bureau d'environ quatre ou cinq employés, seulement, si vous me
permettez de vérifier, parce que... Le personnel de cadre, à
Bangkok, se résume environ à trois personnes. Par contre, les
autorités de Bangkok, évidemment, je ne pourrais pas vous
répondre au point de vue de la langue de l'éducation, je ne le
sais pas, tout ce que je pourrais.. Je devrais faire des recherches, de
même que dans tous les autres bureaux. Je sais que dans bien des cas, les
autorités nous facilitent certaines choses. A Rio, il y a une
reconnaissance pour l'enregistrement de nos bureaux de Rio qui a
été facilitée, il y a des choses comme
celles-là.
M. Morin (Sauvé): Oui, je ne le conteste pas, mais je
pense que c'est un peu normal qu'il en soit ainsi. Mais Londres mis à
part, pour des raisons qui paraissent évidentes, est-ce que, dans les
autres grandes villes où vous avez des succursales, comme Nairobi, Rio
de Janeiro, Singapour, est-ce qu'à votre connaissance, l'Etat paie
à vos cadres ou employés l'école publique anglaise?
Mme Larose-Aubry: A Nairobi évidemment, à Singapour
aussi.
M. Morin (Sauvé): Est-ce que vous en êtes
sûre?
Mme Larose-Aubry: Nos cadres...enfin, je peux vérifier. Je
sais qu'à Nairobi, c'est le cas, et je crois qu'à Singapour c'est
la même chose.
M. Morin (Sauvé): Ce serait utile pour la suite de cette
discussion que vous fassiez une recherche la plus sommaire possible pour nous
indiquer la situation, notamment à Genève, à Rio de
Janeiro, à Singapour, à Bangkok, à Nairobi. Vous pouvez
laisser Londres et New York de côté.
Mme Larose-Aubry: J'ai déjà répondu pour
Genève, je crois.
M. Morin (Sauvé): Oui...
Mme Larose-Aubry: Assez en détail.
M. Morin (Sauvé): ...mais j'aimerais que vous vous
assuriez des détails, parce qu'il pourrait être important pour
nous de les connaître. Si vous aviez l'amabilité en tout cas de
nous les fournir, éventuellement, par écrit.
Une dernière question, est-ce que le traitement d'exemption que
vous revendiquez ne serait applicable qu'aux cadres ou également aux
employés?
Mme Larose-Aubry: Dans le domaine de la langue, nous croyons
qu'il devrait également s'appliquer aux employés, parce que si
votre personnel de cadre doit travailler en anglais dans toutes ses
communications à l'extérieur et c'est notre travail, nous
sommes un secrétariat pour 109 compagnies aériennes
éparpillées dans le monde il faut que les employés
subalternes puissent comprendre, rédiger, dactylographier ou comprendre
les instructions qui leur sont données, évidemment.
M. Morin (Sauvé): Oui, je n'en doute pas.
Mme Larose-Aubry: De sorte que la connaissance de la langue
anglaise est également un prérequis.
M. Morin (Sauvé): Bien, je n'en doute pas et je faisais
allusion, avant tout, à la langue d'enseignement, plus que la langue de
travail. Je pense que le gouvernement a très bien compris, depuis
quelque temps d'ailleurs, la situation particulière dans laquelle vous
vous trouvez sur le plan de la langue de travail. Mais c'est au plan de la
langue d'enseignement que nous posons des questions. Ce soir, j'essaie d'aller
aussi loin que possible sur le chemin de l'élucidation de ces
questions.
Mme Larose-Aubry: Dans le cas de la langue de l'éducation,
dans la mesure où une bonne partie de notre personnel est
recrutée localement, je ne crois pas que l'IATA insisterait
nécessairement de ce côté. Par contre, à cause de
réunions internationales qui sont parfois assez longues et qui peuvent
même durer un an à l'occasion, nous avons du personnel de nos
bureaux, soit la Genève, soit de New York, qui vient prêter main
forte à l'occasion. Il y a une certaine mobilité du personnel,
même subalterne.
M. Morin (Sauvé): Oui. D'ailleurs, ce cas est
également prévu dans la loi, n'est-ce pas? Le cas des
séjours temporaires.
Mme Larose-Aubry: Oui, parfois cela peut être plus que
temporaire. C'est rarement défini. M. Untel ou Mlle Unetelle viendra
à Montréal pour un an. Elle vient et elle peut passer six mois ou
un an, elle peut passer trois ans comme beaucoup moins, de sorte que nous ne
sommes pas certains si la disposition actuelle couvre ces cas.
M. Morin (Sauvé): Dites-moi, il me semble ou est-ce
que je confonds avec un autre mémoire que vous avez
mentionné quelque part le nombre de cadres, mais je ne suis pas
sûr que vous ayez mentionné le nombre d'employés.
Mme Larose-Aubry: Est-ce que vous parlez strictement du
siège social ou de l'ensemble de l'IATA?
M. Morin (Sauvé): Non, je vous entretiens du siège
social de Montréal.
Mme Larose-Aubry: Au siège social de Montréal, nous
avons 125 employés, dont 41 cadres.
M. Morin (Sauvé): Et là-dessus, à votre
connaissance, combien y a-t-il de Québécois?
Mme Larose-Aubry: Québécois comme tels, je ne
pourrais pas vous le dire. Nous avons environ une cinquantaine de Canadiens,
tant d'expression française qu'anglaise.
M. Morin (Sauvé): Et d'expression française?
Mme Larose-Aubry: Environ quatorze ou seize.
M. Morin (Sauvé): Si vous n'avez pas la réponse
exacte...
Mme Larose-Aubry: Pardon, quatorze. M. Morin (Sauvé):
Quatorze?
Mme Larose-Aubry: Oh non! Attendez, je me fie à de mauvais
chiffres. Douze, pardon.
M. Morin (Sauvé): Douze au niveau des employés ou
à la fois employés et cadres?
Mme Larose-Aubry: Employés et cadres.
M. Morin (Sauvé): Et, là-dessus, combien de cadres
et combien d'employés?
Mme Larose-Aubry: Deux cadres. M. Morin (Sauvé):
Deux cadres. Mme Larose-Aubry: Dix employés.
M. Morin (Sauvé): Dix employés francophones, les
autres étant donc des Anglo-Canadiens ou des
Anglo-Québécois, peu importe!
Mme Larose-Aubry: C'est cela, ou encore certaines personnes qui
maintenant ont acquis la nationalité canadienne.
M. Morin (Sauvé): Bien. Ces faits étant
établis, M. le Président, je pense qu'il y aurait lieu que nous
continuions à parler des problèmes de l'IATA au cours des
semaines qui viennent. Je vous invite à nous renseigner sur ce qui se
fait ailleurs. Ce sera pour nous du plus haut intérêt et cela
pourrait même nous guider. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): Madame.
Mme Larose-Aubry: Excusez-moi, M. le Président, est-ce que
je peux demander...? Je vais essayer de faire ces recherches et de vous fournir
ces renseignements. Dois-je adresser ce supplément au président
de la commission ou est-ce qu'il y a...
Le Président (M. Cardinal): Le fait s'est
déjà produit. Vous pouvez les adresser soit au président
de la commission, soit au secrétariat de la commission. M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, en l'occurrence est-ce que
vous verriez à ce que chacun des membres de la commission reçoive
une copie de ces renseignements?
Le Président (M. Cardinal): Comme cela s'est toujours fait
dans le passé.
M. Lalonde: Merci.
M. Morin (Sauvé): C'est la règle.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Nous avons ici un
mémoire que, je crois, on ne peut critiquer du point de vue de
l'origine, comme d'ailleurs on l'a souvent fait, pas nécessairement le
ministre de l'Education, parce qu'il n'était pas ici, mais le ministre
d'Etat au développement culturel et les autres députés
ministériels. Dès l'instant où un mémoire venait
ici critiquant la position du gouvernement, c'était ou d'un
inféodé à l'établissement ou c'était...
M. Morin (Sauvé): Est-ce que vous avez critiqué le
gouvernement, madame? Je ne vous ai pas entendue critiquer le gouvernement.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre.
M. Ciaccia: Non pas critiquer le gouvernement, critiquer le
projet de loi et apporter des suggestions, des recommandations.
M. le Président, j'invoque le règlement. Quand le ministre
de l'Education a parlé, je ne l'ai pas interrompu et j'aurais pu le
faire à maintes reprises, spécialement quand il donnait ses
interprétations de l'article 113 et quand il donnait ses
interprétations des articles 23 et autres. Je demanderais, s'il vous
plaît, de ramener le ministre à l'ordre et de lui demander
très respectueusement de ne pas interrompre les députés
quand ils font leurs interventions.
M. Morin (Sauvé): Je me ramène à l'ordre
moi-même, M. le Président.
M. Ciaccia: Merci.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mont-Royal, allez.
M. Ciaccia: Je continue. Les critiques que vous avez faites du
projet de loi, en ce qui concerne une compagnie internationale, chose
étrange, sont les mêmes critiques qui ont été
apportées ici par d'autres compagnies dites québécoises,
dites internationales, mais on a tout de suite libellé ces compagnies
d'être anglophones, d'être inféodées à
l'establishment, d'être des anarchistes, quand il y avait un jeune qui,
évidemment, ne pouvait pas être catalogué comme un
inféodé. Mais je crois que quand nous avons un mémoire
d'un organisme qui représente quelque 89 pays, cela peut être
considéré comme un peu objectif. Ce mémoire, M. le
Président, est une illustration des faiblesses fondamentales du projet
de loi no 1.
Premièrement, ce mémoire reconnaît que
Montréal a un aspect international et il reconnaît que le projet
de loi, et, semble-t-il, les propos du Parti québécois voudraient
faire de Montréal une ville régionale, plutôt que de
maintenir son caractère international avec tous les avantages que cela
peut nous apporter, tant aux francophones qu'aux anglophones.
Si le projet de loi c'est souligné dans le mémoire,
et non seulement dans celui-ci, mais dans beaucoup d'autres est
adopté tel que rédigé, Montréal va perdre ce
caractère de ville principale internationale.
Je ne suis pas rassuré par l'interprétation que le
ministre de l'Education donne à l'article 113. Je crois que c'est un peu
une insulte aux témoins qui viennent ici et qui demandent certains
changements, certains amendements au projet de loi, parce qu'il ne
reconnaît évidemment pas le caractère international de
Montréal, et on leur jette à la face l'article 113, comme si ces
gens ne savaient pas lire. Ces gens savent lire. C'est un conseiller juridique
de l'IATA, ce sont des présidents de compagnies, ils l'ont lu l'article
113. Et puis l'article 113 n'est pas du tout rassurant, parce que l'article 113
laisse au gouvernement entière discrétion de décider si
une compagnie est internationale ou non. Il ne donne même pas à ce
pouvoir un appel devant les tribunaux d'une façon objective. Je crois
que jusqu'à ce jour, les compagnies ne veulent pas se soumettre à
de tels règlements.
Les articles 113, 36 et 37 ouvrent la porte au patronage. M. le
Président, les projets de loi doivent autant que possible, connaissant
la nature humaine, fermer la porte au patronage. C'est ce que ces compagnies
viennent nous dire. On vient nous apporter des suggestions, ces organismes, les
compagnies aussi qui sont venues, des compagnies, pas seulement une. Les propos
qui sont soulignés par notre invitée méritent
considération et méritent...
M. Charbonneau: ... patronage.
M. Ciaccia: ... d'être pris au sérieux par les
ministériels. Continuez dans votre voie de rire de tout ce que vous
n'approuvez pas, de tout ce qui peut affecter l'économie de notre pays,
de notre province, et vous allez voir les résultats, mes chers
députés ministériels.
Je voudrais revenir à une question. Vous avez souligné
certains exemples dont celui de Genève. A votre connaissance, est-ce
qu'il y a une loi linguistique à Genève? Est-ce qu'il y a des
articles tels que les articles 36 et 37 de notre projet de loi? Est-ce qu'il y
a l'équivalent à Genève?
Mme Larose-Aubry: Non, il y avait à Genève,
cependant on les a adoptées, il y a environ deux ans ou un an et
demi certaines lois relatives à l'embauche des étrangers
qui étaient assez limitatives pour l'obtention des permis C. et B.
lorsque vous vouliez travailler à Genève. Evidemment, la
reconnaissance par les autorités suisses de notre statut nous a
maintenant exemptés de l'application de cette loi.
M. Ciaccia: Cette loi se rapportait strictement à
l'embauche des étrangers?
Mme Larose-Aubry: C'est cela.
M. Ciaccia: Elle ne touchait pas la question linguistique
à Genève?
Mme Larose-Aubry: A ma connaissance, il n'existe pas de telle loi
à Genève.
M. Ciaccia: M. le Président, la raison pour laquelle
j'interroge le témoin sur Genève, c'est parce que la semaine
dernière, ici, le Board of Trade est venu présenter un
mémoire et le ministre d'Etat au développement économique
s'est donné beaucoup de peine pour souligner la situation à
Genève.
Il a critiqué le Board of Trade, il a dit: Pourquoi ne
faites-vous pas comme à Genève? C'est très apparent
qu'à Genève il n'y a pas les contraintes, les contradictions et
les restrictions qui existent dans ce projet de loi-ci.
M. Morin (Sauvé): II n'y a pas d'école
anglaise.
M. Ciaccia: Je crois que ce sont des demi-vérités
que le ministre d'Etat au développement économique a
données. C'est la façon d'induire la population en erreur. Je
crois qu'on doit le rappeler à l'ordre lorsqu'il vient nous tenir de
tels propos. Le ministre de l'Education dit qu'il n'y a pas d'école
anglaise. Le témoin a spécifiquement dit que c'était une
des attractions de la province de Québec, l'existence de ce
système. Vous essayez de vous référer aux autres villes
d'Europe. Je ne peux pas comprendre pourquoi on essaie de nous réduire
aux conditions qui existent dans d'autres pays quand c'est évident
qu'ici on a certains avantages que les autres pays n'ont pas.
Le parti ministériel veut toujours nous réduire, nous
enlever les avantages que nous avons. On dirait qu'il pense que, pour eux, on
peut légiférer le succès. Je crois qu'on ne peut pas
légiférer le succès, on doit le gagner. C'est une
leçon que ce côté-ci de la table n'a pas encore
apprise.
Une Voix: Cela fait mal!
Une Voix: La loi 22!
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît! Il me semble que toutes ces choses-là se sont dites dans le
passé. M. le député de Mont-Royal, vous êtes
sérieux...
M. Ciaccia: Merci. Il faut répéter.
M. Lalonde: II faut leur dire, ils ne comprennent pas
facilement.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre!
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, vous Darlez de redites,
vous aussi?
Le Président (M. Cardinal): Oui, mais pas de la même
façon. Je vous en prie, ne m'imputez pas d'intentions, qu'elles soient
dignes ou indignes, vous savez que je n'en ai aucune. M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Je ne sais pas, je pense que madame, mademoiselle,
excusez-moi...
Le Président (M. Cardinal): Madame.
M. Ciaccia: Mme Larose-Aubry a peut-être répondu
à cette question, mais pourriez-vous nous donner quelques-unes des
raisons pour lesquelles IATA s'est implantée à Montréal
plutôt qu'à Toronto ou à Edmonton? Voulez-vous, s'il vous
plaît, ne pas interrompre le témoin? Je n'ai jamais vu des
polissons et des gens aussi mal élevés que ce soir ici! Je ne
sais pas ce qu'ils ont pris au souper. Ayez donc un peu de décence!
Une Voix: Ils n'aiment pas travailler le lundi soir!
M. Charbonneau: ...des agents provocateurs...
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît, à l'ordre!
M. Ciaccia: M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: ...voici le député qui
réfère toujours à la conquête, il y a 200 ans. Ils
ont eu une guerre mondiale, en Europe, en 1945, et ils n'en parlent plus.
M. Charbonneau: La conquête...
M. Ciaccia: Vous autres, cela fait 200 ans que vous parlez de la
conquête. Vous n'avez pas honte!
M. Charbonneau: Vous pourriez peut-être...
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît, à l'ordre! M. le député de Mont-Royal.
M. Charbonneau: II serait peut-être bon que vous appreniez
un peu l'histoire du Québec.
Le Président (M. Cardinal)- A l'ordre, M. le
député de Verchères. M. le députe de
Verchères...
M. Charbonneau: Vous apprendriez peut-être certaines
choses.
Le Président (M. Cardinal): ...à l'ordre! On ne
parle pas de l'histoire du Québec. M. le député de
Mont-Royal sait fort bien que rendu là il est vraiment en dehors du
sujet.
M. Ciaccia: Très bien, je retire mes remarques...
M. Charbonneau: ...retirer cela?
M. Ciaccia: ...mais je voudrais qu'elles paraissent au journal
des Débats, par exemple.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! D'accord, c'est
déjà fait.
Madame, si vous avez une réponse nouvelle à apporter.
Mme Larose-Aubry: Disons au tout départ. Après
l'échec de la conférence de Chicago en 1944, pour enfin aboutir
à un accord sur un mécanisme sur les questions économiques
et commerciales, déjà l'embryon de l'IATA était né
et les représentants des autorités gouvernementales canadiennes
avaient invité l'IATA à venir s'établir ici.
Nous avions eu, à l'époque, d'autres invitations pour
aller nous établir ailleurs. Les raisons principales motivant le choix
étaient évidemment la proximité de l'OACI, qui surtout
à l'époque était très importante, parce qu'il
fallait standardiser. Nous partions, je ne dirais pas à zéro,
mais le progrès accomplis lors de la deuxième guerre mondiale, je
m'excuse d'y revenir, même si c'est hors propos...
Le Président (M. Cardinal): C'est une
référence utile, vous avez le droit.
M. Ciaccia: Et vous ne le faites pas d'une façon
négative. Vous ne vous en plaignez pas, c'est un fait que vous
constatez.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mont-Royal, n'interrompez pas le témoin.
Mme Larose-Aubry: Cela nous obligeait donc à
coopérer très étroitement avec l'OACI à
développer les nouveaux standards techniques de l'aviation. Il y avait
également la proximité des grands manufacturiers
américains. A l'époque aussi c'était très
important; aujourd'hui, est-ce que cela l'est encore? Je ne le sais pas.
Puisqu'on a maintenant ce projet Concorde franco-britannique, il faut regarder
également ce qui se passe ailleurs.
Mais le choix de Montréal, tant pour l'OACI que pour l'IATA
je ne veux pas parler pour l'OACI pour l'IATA, Montréal
représentait quand même un embryon de communications
aériennes intéressant entre l'Europe, les Etats-Unis et
l'Amérique du Sud. Vous aviez également ce fait bilingue. Lorsque
nos délégués viennent assister à des
conférences, souvent eux-mêmes doivent se référer
à une langue seconde; ils pouvaient se retrouver, utiliser une des
langues secondes, soit le français ou l'anglais.
Il y avait peut-être d'autres raisons économiques
présentées par le gouvernement à l'époque pour
inciter encore plus l'IATA à venir, mais là je ne les connais
pas. Disons que je pourrais résumer ces raisons-là comme je viens
de les expliquer.
M. Ciaccia: Une des raisons qui vous ont amenée ici
à Montréal, c'est l'aspect bilingue, bi-culturel, multicultural
de Montréal, ce qui donne certains avantages à un organisme
international de votre genre. Maintenant, vous demandez d'être
exemptée du projet de loi; est-ce que vous auriez une opinion à
nous donner sur l'éventualité où vous ne seriez pas
exemptée du projet de loi? Supposons que l'IATA n'est pas
exemptée, qu'est-ce que vous pensez qui va arriver?
Mme Larose-Aubry: Les destinées de l'IATA, dans le sens de
ce qui concerne l'établissement de bureaux et les politiques
générales de l'IATA, sont décidées par un
comité exécutif composé d'une vingtaine de
présidents des plus grandes lignes aériennes au monde et assurant
une certaine représentation géographique, pour être certain
que tous les continents sont représentés. La plupart de ces
lignes, mais pas toutes nécessairement, fonctionnent au Canada, en vertu
d'accords bilatéraux.
Disons que déjà, périodiquement, le comité
exécutif se penche sur l'étude de la location actuelle de nos
divers bureaux et c'est souvent non seulement à Montréal, mais
ailleurs, que certaines choses sont remises en question. Je ne peux qu'assumer
que, dans ce cas-là, la décision de maintenir ou non le bureau
à Montréal serait étudiée. Ce qui arriverait, je ne
le sais pas, mais ce serait sûrement considéré, comme dans
n'importe quel cas, lorsqu'une législation ou un autre changement
modifie les conditions actuelles. Ce serait étudié par ce
comité exécutif de l'IATA.
M. Ciaccia: M. le Président, il est évident que les
raisons qui ont amené l'IATA à demander d'être
exemptée de ce projet de loi, ce n'est pas parce que le projet de loi
est excellent et qu'elle peut fonctionner avec lui, mais ce serait les
mêmes raisons, M. le Président, que celles que les autres
compagnies internationales à Montréal ont pour être
exemptées aussi, ou au moins pour que certaines modifications soient
apportées. Il est évident, certainement, que ce
mémoire-ci, on ne peut le qualifier autrement que objectif, parce que
l'IATA n'a pas d'intérêts particuliers, c'est 89 pays qu'elle
représente. Je dirais que les raisons qui amènent l'IATA à
demander une exemption ou des modifications au projet de loi sont les
mêmes raisons que celles des autres compagnies internationales qui sont
à Montréal. J'aurais pensé que le gouvernement aurait
considéré l'importance du fait international à
Montréal, parce qu'il y a d'autres organismes des Nations Unies qui,
durant les quelques dernières années, ont songé à
venir s'implanter ici à Montréal. C'est garanti, certainement, M.
le Président, qu'avec ce projet de loi, on va oublier cela
totalement.
C'est évident qu'il y a des amendements très importants
à apporter au projet de loi. M. le Président, je remarque que je
viens vers la... Je voudrais... Combien de temps reste-t-il, s'il vous
plaît?
Le Président (M. Cardinal): Cinq minutes.
M. Ciaccia: Cinq minutes. Je voudrais donner l'occasion à
mes collègues, non seulement de poser des questions, mais de se faire
insulter aussi par le côté ministériel. Merci, Mme
Larose-Aubry.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Gaspé.
M. Le Moignan: Merci, M. le Président. Je remarque
déjà que les membres du côté ministériel sont
très sages, sont très calmes. Nous allons essayer de les garder
dans cette atmosphère-là.
M. Bertrand: Avec vous, c'est tellement simple et facile.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! M. Le Moignan:
C'est compliqué des fois. Mme Lavoie-Roux:
Discrimination.
M. Le Moignan: J'ai bien aimé, madame, l'exposé que
vous avez présenté ici devant les membres de la commission et,
comme on l'a souligné et vous l'a dit lui-même, le ministre de
l'Education, c'est certainement un mémoire très bien
préparé. Je comprends les préoccupations de votre groupe,
puisque, si vous aviez choisi Montréal, qui est tout de même une
ville internationale, à cause des compagnies, des aéroports, des
relations faciles aussi avec l'étranger, je ne suis pas surpris que,
face au projet de loi no 1, votre groupe se pose des questions.
Vous dites qu'il faut connaître la langue anglaise, je suis bien
d'accord, mais votre organisme a été fondé en 1945, cela
fait tout de même 32 ans. Sur une possibilité, je crois, de 125
employés, vous avez 81 employés de cadre et, sur ce, il n'y a que
quatorze francophones dont deux cadres seulement. J'aimerais savoir pourquoi
les francophones n'ont pas été attirés, au cours des
trente dernières années, par votre association. Est-ce
pourtant il y a beaucoup de francophones qui sont bilingues aussi parce
que beaucoup proviennent de l'étranger ou est-ce qu'on ne leur
permettait pas d'accéder à des postes de cadres supérieurs
en entrant chez vous?
Mme Larose-Aubry: Pour répondre à votre question,
premièrement, ce n'est pas 81 employés de cadre, mais 41.
Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse, si vous permettez
aussi pour les fins du journal des Débats, ce n'est pas quatorze, mais
c'est douze.
Mme Larose-Aubry: Douze non pas pour le personnel de cadre, mais
pour le total des employés.
M. Le Moignan: C'est cela, douze, deux de cadre et dix
employés.
Mme Larose-Aubry: C'est cela, oui. Le recrutement à DATA,
comme je l'ai mentionné dans le mémoire soumis par l'IATA, nous
avons des responsabilités envers nos membres. Nous représentons
des systèmes à la fois juridiques, des méthodes techniques
et commerciales de plusieurs pays au monde. Par conséquent, dans notre
recrute- ment, il est nécessaire pour nous d'avoir des experts qui
viennent et qui représentent diverses écoles de pensée. De
sorte qu'au secrétariat de l'IATA, lorsque nous élaborons des
politiques communes pour l'ensemble de l'industrie du transport aérien
international régulier, nous prenions note de tous les systèmes
et de toutes les méthodes d'opération.
Le recrutement ne se fait pas comme tel sur une base de Canadiens
d'expression française, de Québécois, ou de qui que ce
soit. Une fois que nous tenons compte de ces réalités,
c'est-à-dire d'avoir des experts présents dans tous les domaines
et dans les divers continents, le recrutement se fait uniquement sur une base
de compétence, uniquement. Il n'est vraiment pas question de dire:
Celui-là est anglophone, francophone, Espagnol, Turque, ou je ne sais
quoi, le recrutement se fait vraiment sur cette base.
Nous avons des fonctions hautement spécialisées, soit dans
l'avionique ou dans d'autres domaines, le domaine de la sécurité
aérienne, dans le domaine juridique également, au
département juridique, les grands systèmes sont
représentés. Je peux difficilement répondre à votre
question en expliquant pourquoi les francophones n'y sont pas venus. Je sais
que moi-même, lorsque je me suis inscrite à McGill, à la
faculté, j'étais, je ne dirais pas la pionnière, mais
peut-être pas loin, non seulement chez les Canadiens d'expression
française, mais chez les Canadiens d'expression anglaise
également.
C'est un domaine qui m'intéressait, j'y suis allée, je
n'ai jamais senti qu'il y avait un blocage parce que j'étais
d'expression française ou autrement, c'était un domaine qui
m'intéressait, j'y suis allée.
M. Le Moignan: A votre siège social de Montréal,
combien de pays sont représentés dans le moment?
Mme Larose-Aubry: Au siège social de Montréal, au
total, nous avons 21 nationalités.
M. Le Moignan: Quand vous dites que les experts sont difficiles
à recruter, est-ce que les gens d'autres nationalités qui
viennent travailler ici, demeurent un certain nombre d'années, ou
sont-ils simplement de passage? Est-ce que certains font carrière ici,
à Montréal même?
Mme Larose-Aubry: Oui, certainement. Mais encore là, tout
dépend des fonctions et des exigences des fonctions. Très
souvent, une personne va venir s'établir ici pensant faire
carrière à l'IATA et au siège social, mais peut-être
que cinq ans, dix ans plus tard, cette fonction sera transférée
à un bureau de Genève, de New York et cette personne,
automatiquement, sera transférée. Ce sera peut-être quatre
ans plus tard, parfois, c'est plus court, parfois, c'est plus long.
C'est-à-dire que contrairement à l'OACI où les
employés sont recrutés sur une base de contrat, je crois de trois
ans, chez nous, ce n'est pas le cas. Les gens viennent chez nous pour faire
carrière en général et selon les
exigences des fonctions, demeurent au siège social ou plus tard,
sont transférés ailleurs, ou souvent retournent ailleurs.
Plusieurs de nos employés, par exemple, sont des employés des
lignes aériennes qui viennent au secrétariat, ils travaillent
quelques années là-dedans et un secrétariat est souvent
très différent des activités d'une ligne aérienne
et, après quelques années, ils se rendent compte qu'ils
préfèrent retourner dans un champ d'activité
différent et retournent pour la ligne aérienne, la même ou
une autre.
M. Le Moignan: Sur une vingtaine de pays
représentés à Montréal, il y a certain nombre de
Canadiens parmi eux...
Mme Larose-Aubry: Oui.
M. Le Moignan: ... est-ce qu'ils occupent des postes clés,
les principaux postes ou est-ce que des Canadiens, dans d'autres succursales,
occuperaient des postes de cadres aussi?
Mme Larose-Aubry: Oui. En fait, encore là je vais
vous citer les chiffres exacts dans le personnel de cadres de
Montréal, 12 Canadiens. Le personnel de cadres, par exemple les postes
les plus élevés, il y en a un certain nombre à
Genève, parce que nos fonctions sont divisées surtout entre le
siège social et le bureau de Genève.
Comme je l'expliquais, les questions tarifaires relèvent surtout
du bureau de Genève, alors qu'à Montréal nous traitons des
questions techniques, d'une partie des questions juridiques et de la question
des agences de voyages. Il y a également le secrétariat qui est
là et le domaine de l'administration. Mais dans le personnel de cadre,
tant à Genève qu'à Montréal, nous avons des
Canadiens comme nous avons des Suédois, des Hongrois, des Finlandais,
des Américains, des Français, enfin je ne peux pas les
énumérer tous, il y en a 50.
M. Le Moignan: Alors, je vous remercie.
Le Président (M. Cardinal): M. le ministre de l'Education
à nouveau.
M. Morin (Sauvé): Ce sera très bref, M. le
Président, avant de passer la parole à l'un de mes
collègues. Le député de Mont-Royal a laissé
entendre que le mémoire que vous avez présenté pour le
compte de l'IATA pourrait valoir pour d'autres compagnies
étrangères établies au Québec. Si j'ai bien compris
son intervention, il faudrait aocorder les exemptions que vous revendiquez pour
l'IATA à toutes ces autres compagnies étrangères. J'avais
cru comprendre, au contraire, que vous revendiquiez pour l'IATA un statut
quelque peu spécial en raison de son caractère international et
quasi intergouvernemental. Si ce n'était pas le cas, si l'IATA devait
être considérée comme une autre société
commerciale étrangère, par exemple, j'ai l'impression qu'il nous
serait très difficile de vous accorder un statut spécial.
J'espère que cela est très clair. La question que je voudrais
vous poser pour bien clarifier la situation, parce que le
député de Mont-Royal est en train de vous entraîner sur une
pente un peu glissante, sans doute malgré vous est la suivante:
Pensez-vous que l'IATA doive être considérée comme une
corporation ordinaire?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui, M.
le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Sur l'article 96, on m'a imputé certaines
intentions. D'après les paroles que j'ai prononcées, je n'ai pas
essayé de faire glisser Mme Larose-Aubry. C'est une constatation que
j'ai faite, je ne lui ai même pas posé la question. C'est une
déduction que j'ai faite, et je veux que ce soit clair, une
déduction des arguments qui ont été
présentés pour une compagnie ou un organisme international qui
avait son siège social à Montréal. Je n'avais aucunement
l'intention de susciter un débat, ni même de faire se prononcer
l'invitée sur un sujet autre que celui sur lequel elle est venue ici
témoigner aujourd'hui.
M. Morin (Sauvé): II m'intéresse d'avoir tout de
même la réponse de notre invitée, ce n'est pas sans
conséquence et pour l'IATA et pour la décision du
gouvernement.
Mme Larose-Aubry: Le mémoire soumis par l'IATA
n'étudie évidemment que le cas de l'IATA, et probablement que
vous avez tous remarqué que la partie du mémoire qui explique
pourquoi on devrait accorder à l'IATA ce statut spécial est assez
élaboré et les raisons sont très précises. Dans le
cas de l'IATA je ne peux me prononcer sur les autres organismes car je
ne connais pas leur mécanisme mais dans le cas de l'IATA, nous
avons des responsabilités déléguées par des
gouvernements dans des accords bilatéraux internationaux sur les
transports aériens, et ces fonctions sont également reconnues
dans un accord multilatéral qui est l'accord de Paris de 1967. Par tout
ce que j'ai expliqué, je ne veux pas recommencer les mêmes
arguments ou les répéter, c'était vraiment dans ce
but.
Nous croyons que l'IATA pour nous, du moins, et nous
espérons que les autorités nous suivront là-dessus, comme
l'ont fait les autorités suisses possède vraiment ce
statut spécial d'organisme international ou à caractère
international et quasi gouvernemental.
M. Morin (Sauvé): Je vous remercie, Madame.
M. Lalonde: M. le Président, de toute évidence,
d'après la réponse, l'élève...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Marguerite-Bourgeoys, puis-je me permettre de vous
poser une question? Est-ce que vous intervenez sur une question de
règlement?
M. Lalonde: Ce que je voulais dire c'est que
l'élève, de toute évidence, a dépassé le
maître.
M. Ciaccia: M. le Président, est-ce que le ministre me
permettrait une question à lui-même?
M. Morin (Sauvé): A moi ou à madame?
M. Ciaccia: Non, une question au ministre.
M. Morin (Sauvé): Si vous le désirez.
M. Ciaccia: Est-ce que le ministre ne trouve pas étrange
le fait suivant? Malgré que les arguments, dans le mémoire de
l'IATA, sont pour l'IATA, il y a les mêmes articles et quelques-uns des
mêmes arguments, quant à la langue d'enseignement, qui ont
été soulevés par d'autres organismes qui ne sont pas comme
l'IATA, censément, mais qui ont un caractère international. Vous
ne trouvez pas cela un peu étrange ou si c'est seulement une
coïncidence?
M. Morin (Sauvé): M. le Président, faisons une
distinction, et je tiens à le dire puisque notre invitée a
souligné le caractère international de l'IATA et attiré
notre attention sur ses caractéristiques qui appellent un traitement
spécial. Je tiens à dire que nous faisons une distinction tout
à fait fondamentale entre un organisme à vocation internationale
comme l'IATA, composé d'un très grand nombre de
sociétés étrangères, et de simples compagnies
à but lucratif qui pourraient venir trouver leur profit au
Québec.
M. Lalonde: C'est très mauvais le but lucratif. Oui, c'est
très mauvais. Parce qu'à but lucratif c'est très
mauvais.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Parce qu'à but lucratif c'est très
mauvais, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Marguerite-Bourgeoys, je pense que la question a
été posée, la réponse a été
donnée. Maintenant, je cède la parole au député de
Notre-Dame-de-Grâce, en lui indiquant qu'il reste cinq minutes à
l'Opposition officielle.
M. Mackasey: Merci, M. le Président. Sans doute, madame
est au courant du fait que le premier Talbot est arrivé ici avec
Montcalm par le vol Air Lingus... Montcalm et Talbot ensemble. Cela fait
longtemps, par exemple.
L'IATA, si je me rappelle, est affiliée aux Nations Unies, dans
le sens que c'est la même organisation, la même structure.
Mme Larose-Aubry: Est-ce que je peux répondre maintenant
à cette question?
M. Mackasey: Oui.
Mme Larose-Aubry: Non. L'organisme spécialisé des
Nations Unies, dans le domaine de l'aviation civile internationale, est l'OACI.
A l'OACI siègent les gouvernements. L'IATA est une corporation,
constituée par une loi spéciale du Parlement du Canada, et y
siègent les lignes aériennes. Dans bien des cas, alors
qu'à l'OACI au premier rang siègent les gouvernements et comme
conseillers vous retrouverez souvent des gens des lignes aériennes,
à l'IATA, c'est peut-être un peu l'inverse qui se fait. Les lignes
aériennes suivent les instructions et directives de leur
gouvernement.
M. Mackasey: Si je me rappelle, depuis quelques années,
presque chaque année, votre comité exécutif est
obligé de faire face à un mouvement pour déménager
de Montréal, si je me rappelle bien.
Mme Larose-Aubry: Disons que ce n'est pas seulement de
Montréal. En général, périodiquement, le
comité exécutif se penche sur la question de savoir si nos
bureaux, tant le siège social que nos autres bureaux, si nos structures
sont conformes à nos besoins et si nous pouvons exercer nos fonctions
dans ces locations.
M. Mackasey: Excusez-moi, je vais vous poser plusieurs questions,
si vous voulez.
Néanmoins, il y a deux ans je me rappelle la question des taux,
la question des frais; d'autres questions étaient, je pense, quelques
discussions assez fortuites, si vous voulez, et cela ne prendrait pas
grand-chose pour que l'IATA quitte le Québec, quitte Montréal,
même le Canada, pour New York ou ailleurs, si je me rappelle
objectivement les débats.
Mme Larose-Aubry: Je ne peux vraiment pas faire des commentaires
là-dessus parce que c'est une décision qui relève du
comité exécutif. Dans la mesure où dans tout bureau il
sera impossible pour nous d'exercer nos fonctions, de maintenir les conditions
nécessaires à l'exercice de nos fonctions, je suis convaincue que
le comité exécutif réévaluera la situation et
prendra la décision qui s'impose. A savoir si ce sera... je ne peux
vraiment pas me prononcer là-dessus.
M. Mackasey: Actuellement, toutes choses égales, ils
préfèrent rester à Montréal? J'ai parlé des
Nations Unies pour une raison. Vous avez 89 ou 90, si je me rappelle, membres
dans votre association et probablement les 89 membres veulent être
représentés ici à Montréal, n'est-ce pas? Autant
que possible.
Mme Larose-Aubry: Nous avons 109 membres qui représentent
environ 80 pays différents, peut-être 85. Comme il est impossible
d'avoir les 85 représentés ici, il y a toujours une question de
compétence.
M. Mackasey: On ne veut pas seulement des Canadiens ou seulement
des Montréalais.
Mme Larose-Aubry: Exactement, mais il faut quand même
assurer une certaine représentation des diverses
nationalités.
M. Mackasey: Combien de représentations y a-t-il?
Mme Larose-Aubry: A Montréal? M. Mackasey: Oui.
Mme Larose-Aubry: II y a 21 nationalités de
représentées.
M. Mackasey: Avec raison, parce qu'ils sont tous des membres.
S'ils déménageaient demain à New York, Chicago,
Genève, Paris ou Londres, ce serait exactement la même chose?
Mme Larose-Aubry: Exactement.
M. Mackasey: Si, par l'indifférence d'un gouvernement qui
ne sait pas qu'il est bien et qui impose ces règlements à votre
siège social, c'est impossible de les suivre pour vos membres, ils vont
s'en aller. Si c'est impossible de suivre la loi, ne vous gênez pas
à cause du ministre, répondez honnêtement... Autant que
possible, les membres veulent être représentés ici à
Montréal, et si, par accident ou par la loi, c'est impossible de remplir
cette demande, sans doute le comité exécutif va être
obligé de déménager?
Mme Larose-Aubry: Je ne peux me prononcer sur ce que le
comité exécutif décidera. C'est une prérogative de
ce comité.
M. Mackasey: Je m'excuse, Madame, combien de langues parlez-vous,
s'il vous plaît?
Mme Larose-Aubry: J'en parle au moins deux, je comprends
l'espagnol, un peu d'italien, un peu de souahéli et cela s'arrête
là.
M. Mackasey: Vous pensez être plus riche parce que vous
avez la compétence dans plusieurs langues?
Mme Larose-Aubry: C'est une question très personnelle que
vous posez. Quant à moi, j'aimerais en parler dix ou douze, mais cela
est très personnel. Je ne crois que cela...
M. Mackasey: Certainement plus d'une? Mme Larose-Aubry:
Oui.
M. Mackasey: Avec notre système d'éducation, vous
êtes chanceuse d'avoir appris la deuxième langue par un autre
moyen que les écoles ou par la formation dans cette province. Je vous
remercie beaucoup.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci.
Le député de Deux-Montagnes et je vous indique qu'il vous reste
sept minutes.
M. de Bellefeuille: Merci, M. le Président. Se-nora quiero
preguntarle... cela c'est seulement pour l'avantage du député de
Notre-Dame-de-Grâce.
Comme le ministre de l'Education l'a déjà indiqué,
Mme Larose-Aubry, nous souhaitons vive- ment que ce dialogue continue, parce
que la situation de l'organisme que vous représentez est en effet
très particulière pour nous, du côté
ministériel. C'est une entité connue, nous savons que l'IATA est
implantée à Montréal, qu'elle y a son siège social.
C'est un des attraits de Montréal de compter parmi les organismes qui y
vivent un organisme comme le vôtre, de caractère tout à
fait international et d'envergure mondiale.
Sur un ton plus personnel, Mme Larose-Aubry, je voudrais vous
féliciter d'être venue seule, j'oserai dire, affronter la
commission, présenter un mémoire d'un poids tel que celui que
vous nous avez présenté, d'être venue seule, alors que
généralement, les organismes privés, publics ou multiples
se présentent devant nous représentés par trois, quatre,
cinq, six, sept et huit personnes. Vous êtes venue seule et vous
êtes venue, femme, affronter ce qui devient parfois, sous l'action de
certains de mes collègues, un jeu...
Mme Lavoie-Roux: Question de privilège, M. le
Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît! Il n'y a pas de question de privilège en
commission parlementaire.
Mme Lavoie-Roux: Bien une directive, M. le Président.
M. Lalonde: II y a toujours un privilège
féminin!
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît!
M. de Bellefeuille: ...qui devient...
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que c'est une analogie qui est
permise?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je
pense, Mme le député de L'Acadie, que le député de
Deux-Montagnes n'avait aucune mauvaise intention...
Mme Lavoie-Roux: C'est de la discrimination.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ... en
employant ces paroles et je lui redonne la parole. M. le député
de Deux-Montagnes.
M. de Bellefeuille: Merci, M. le Président, j'allais dire
que vous êtes venue seule affronter ce qui, parfois, semble devenir un
assez vilain jeu de petits garçons.
Quant à nous, du côté ministériel, nous
souhaitons vivement que les discussions de la commission restent à un
niveau plus élevé que ce genre de jeu pour petits garçons
où on s'attaque pour rien, où on cherche à faire
flèche de tout bois, où on cherche à tirer des avantages
partisans de questions dans lesquelles il faudrait voir les aspects
objectifs.
En passant, Mme Larose-Aubry, je voudrais at-
tirer votre attention sur la page 15 de votre mémoire, là
où vous affirmez: "II importe cependant de laisser à l'employeur
le droit d'adresser, et aux salariés, celui de recevoir, la version
anglaise de ces mêmes communications". Comme cela a déjà
été fait pour l'avantage d'autres invités avant vous, ce
que la loi n'interdit pas est permis, et il est clair que ce à quoi vous
faites allusion est permis.
Ceci dit, je voudrais, pendant les 4 ou 5 minutes qui restent, parler un
peu de Montréal afin d'obtenir votre sentiment, votre perception. On a
parlé, tout à l'heure, d'attraction. Moi, j'hésite
à percevoir Montréal comme un cirque qui présente des
attractions, je perçois plutôt Montréal comme l'une des
métropoles du monde qui a d'innombrables attraits dont un attrait
extrêmement important et c'est déjà ce que vous avez
dit dans votre mémoire est le fait que cette ville soit
multicul-turelle et qu'elle soit aussi une ville multilingue et, en un certain
sens, une ville principalement bilingue. Tout ceci m'amène à vous
demander, dans le cadre de cette évaluation des avantages, sur laquelle
M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, en particulier, vous a
interrogée, cette évaluation des avantages de Montréal,
dis-je, comme siège social de l'IATA, si, dans l'hypothèse
où Montréal conserve son caractère de ville
multiculturelle, où on continue d'utiliser très
fréquemment l'anglais, à Montréal, à des fins
diverses, le fait que par suite de l'adoption de la loi no 1, le gouvernement
prenne des dispositions pouvant aider Montréal à devenir vraiment
ce qu'elle prétend depuis longtemps être, la deuxième ville
française du monde... si cette accession de Montréal à ce
titre, si cette accession plénière de Montréal à ce
titre de deuxième ville française du monde, si Montréal
conserve, par ailleurs, le caractère que j'ai décrit, si cela
jouerait au désavantage de l'IATA du point de vue de son choix quant
à la ville où est situé son siège social...
Mme Larose-Aubry: Sur cette question, comme sur certaines
questions précédentes, c'est peut-être l'envers de la
médaille et, pour moi, la question revient peut-être un peu au
même. Il appartiendra au comité exécutif, comme il lui
appartient déjà, d'étudier et de décider si, dans
une ville donnée que ce soit Montréal ou une autre
les conditions nécessaires à l'exercice de nos fonctions
existent.
M. Ciaccia: Excellent! Excellente réponse!
M. de Bellefeuille: Je ne puis qu'abonder dans le même sens
que mes collègues de l'Opposition, votre réponse est absolument
irréprochable, sauf que...
M. Ciaccia: Lisez entre les lignes de cette réponse.
M. de Bellefeuille: M. le Président, les
députés de l'Opposition n'ont pas le droit de m'interrompre.
Le Président (M. Cardinal): D'accord, mais j'ai le droit
de vous interrompre et vous arrivez à la limite, vous êtes
à 30 secondes près.
M. de Bellefeuille: Oui, je veux seulement souligner que je
reconnais le caractère irréprochable de la réponse de
notre invitée qui s'en remet à ses instances supérieures.
Mais la question, je la lui posais à elle, à savoir si elle croit
que si Montréal, étant devenu vraiment la deuxième ville
française du monde, serait en quelque sorte un siège moins
hospitalier pour l'IATA?
Mme Larose-Aubry: Je crois qu'ayant été
invitée à paraître devant la commission en tant que
conseiller juridique adjointe de l'IATA, je ne puis me permettre de dire, dans
une audience publique, quels sont mes sentiments personnels sur la
question.
Le Président (M. Cardinal): II reste une minute et elle
est accordée au député de Gaspé. Je vous prierais
de la prendre cette minute avec beaucoup de retenue.
M. Le Moignan: Ah! beaucoup de retenue.
Le Président (M. Cardinal): Oui, dans le temps.
M. Le Moignan: D'habitude, je suis toujours très
modéré, M. le Président, alors je comprends votre
intervention. Madame, un oui ou un non, vous êtes membre de
l'exécutif à Montréal?
Mme Larose-Aubry: Non, le comité exécutif, comme
j'ai dit, est composé de présidents d'une vingtaine de lignes
aériennes. Moi, je suis au secrétariat et je suis conseiller
juridique adjoint, donc, je fais partie du personnel de cadre.
M. Le Moignan: Merci. Moi, je ne suis pas enclin à vous
féliciter d'être seule ici ce soir. Si on vous fait une telle
confiance, je crois que c'est à cause de votre talent. Comme citoyens
francophones, je crois que nous sommes fiers de vous. Cela dénote
déjà cette qualité de ceux qui veulent faire leur chemin
dans la vie. Vous nous prouvez qu'on peut parler plusieurs langues. Le
député d'Argenteuil-Deux-Montagnes peut probablement battre votre
record, je n'ai pas osé lui poser la question. Vous nous servez quelque
chose de très bien, je crois que cela aide beaucoup à la
dignité des Québécois de voir qu'il y a des nôtres
qui réussissent même dans des sociétés
internationales.
Le Président (M. Cardinal): Merci, M. le
député de Gaspé.
M. Ciaccia: M. le Président, sans le
bénéfice du projet de loi 1, même avant.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît! Madame, très sérieusement, la commission vole
très haut, mais à un rythme de croisière très lent.
Cependant vous avez inspiré ces membres de la commission puisque nous
terminons, à presque trois minutes près, le temps prévu
pour cette audience. Par vous je remercie l'Association du transport
aérien international, et au nom de la commission, au nom de tous les
partis qui sont ici, je vous remercie particulièrement de votre
collaboration à cette commission. Merci madame. J'appelle
immédiatement le prochain organisme, la Commission des écoles
catholiques de Québec, mémoire 74.
M. Lalonde: M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
Motion pour entendre le président de la
Régie de la langue française (suite)
M. Lalonde: M. le Président, simplement une question de
règlement pour vous indiquer que nous avons l'intention de mettre sur la
table la motion que nous avons présentée, il y a de cela presque
deux semaines maintenant, concernant la convocation du président de la
Régie de la langue française. Je sais que mon temps est
écoulé relativement à cette intervention, mais je voulais
vous indiquer que c'est ce que nous avons l'intention de faire dans les
quelques minutes qui vont suivre, jusqu'au moment où le gouvernement,
représenté en force d'ailleurs ce soir, se déclarera tout
à fait d'accord et nous indiquera son intention de voter en faveur.
Le Président (M. Cardinal): Alors, juste un instant que
j'accueille les représentants de la Commission des écoles
catholiques de Québec. Je vous demande un peu de patience. Nous allons
tenter de vider cette question de procédure et nous vous entendrons
ensuite. Alors, je relis cette motion parce que, comme l'a indiqué le
député de Marguerite-Bourgeoys, il y a déjà un
certain temps qu'elle a été entendue. Permettez, madame le
député de L'Acadie, vous savez, que ce soit en cette Chambre ou
dans l'autre, que je reviens toujours à la source.
La motion est la suivante: Que cette commission entende le
président de la Régie de la langue française le 20 juillet
1977, à 20 heures, afin que la présente commission soit
pleinement informée de la portée du projet de loi no 1, Charte de
la langue française au Québec, touchant en particulier la langue
de travail et des affaires.
Je souligne, en terminant, qu'après une modification au
libellé de cette motion elle a été déclarée
recevable, et j'accorde la parole à Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Tout le monde se
rappellera que la loi 22, adoptée en 1974, avait créé la
Régie de la langue française, qui avait pour rôle de donner
son avis au ministre sur les divers règlements qui étaient
prévus par la loi, à l'exception des règlements touchant
la langue d'enseignement.
Le gouvernement a choisi de ne pas examiner le travail que la
Régie avait fait, de ne pas examiner les résultats de
l'application de la loi 22, particulièrement dans le domaine des
affaires, dans le domaine du travail, de l'affichage, de l'étiquetage,
sans aucun doute pour pouvoir, par la suite, mieux justifier la
présentation de son projet de loi no 1, même s'il mettait en
veilleuse des problèmes très importants, que ce soient des
problèmes de chômage ou autres. Il a choisi d'y faire porter tous
ses efforts et de laisser la population en attente pour se faire le parrain
d'un nouveau projet de loi. Il a écarté l'ancien, qui, pour une
large partie, je dirais la plus grande je mets toujours de
côté la langue d'enseignement avait posé des jalons
extrêmement importants dans le domaine de la francisation pour s'efforcer
de donner au Québec un statut français. Le gouvernement a choisi
de tout ignorer et de ne pas examiner même les réalisations de la
Régie de la langue française.
M. Guay: M. le Président, puis-je simplement faire une
suggestion? Ce n'est pas une question de règlement, mais simplement une
suggestion.
Le Président (M. Cardinal): Si Mme le député
de L'Acadie permet que vous l'interrompiez?
M. Guay: C'est pour économiser du temps et vous
économiser une intervention et pour permettre d'entendre
immédiatement la CECQ. Le parti ministériel, pour autant que je
sache, est d'accord sur la motion. Il est donc inutile de la débattre,
à moins que vous y teniez absolument pour tuer le temps. Sinon...
Mme Lavoie-Roux: Je n'ai pas le goût de tuer le temps, je
vous assure...
M. Ciaccia: ...le temps.
Mme Lavoie-Roux: ...mais je pense qu'il est extrêmement
important que le public sache exactement là où en était
rendue la Régie de la langue française dans son travail.
J'aimerais continuer non pas 20 minutes, M. le Président, mais
peut-être quelques minutes.
M. Guay: C'est parce que cela aurait pu être dit au moment
où la Régie va comparaître.
Le Président (M. Cardinal): D'accord. Si vous permettez,
M. le député de Taschereau, je vous remercie pour votre
suggestion. Je vais laisser continuer Mme le député de L'Acadie
pendant quelques minutes et je demanderai immédiatement après si
la motion est adoptée. M. le ministre de l'Education.
M. Morin (Sauvé): Je vais laisser terminer Mme le
député de L'Acadie, après quoi j'aurai quelques
commentaires à faire.
Le Président (M. Cardinal): D'accord. Cela étant
dit, Mme le député de L'Acadie.
Mme La voie-Roux: Tout ce que je voulais signaler, c'est que la
Régie de la langue française avait déjà émis
des règlements touchant l'étiquetage des produits, l'affichage
public, les catalogues, les brochures, la connaissance d'usage du
français nécessaire à l'obtention d'un permis d'exercer
dans une corporation professionnelle. Elle avait également, en octobre,
publié les règlements de francisation des entreprises,
après avoir travaillé avec beaucoup de lucidité, beaucoup
de patience et d'intelligence à l'établissement de guides
d'utilisation sur l'analyse de la situation linguistique des entreprises. Elle
avait évalué, dans ce processus de francisation, ce que pouvaient
être les contraintes commerciales, technologiques de gestion et de
fonctionnement.
Je pense qu'elle avait même un échéancier qui, pour
une partie des entreprises, particulièrement les plus grandes
entreprises, était déjà en voie de réalisation et,
pour les moins grandes entreprises, devait s'échelonner sur une
période allant jusqu'en 1981.
Elle avait également rédigé des règlements
sur la connaissance du français que doit posséder tout personnel
qui est muté ou promu à l'intérieur d'une fonction de
l'administration publique. Je ne donnerai pas plus de détails ici, sauf
pour indiquer qu'à un moment où nous allons encore probablement
consacrer un grand nombre d'heures à l'étude du projet de loi
article par article, il me semble tout à fait important d'entendre le
président de la régie, seul ou accompagné je pense
qu'on prévoit seul dans la motion afin d'éviter, un peu
plus tard, des arguments un peu stériles et permettre une
vérification des faits avant qu'on ne se mette à l'oeuvre.
Aussi, je pense qu'il est important que le public réalise quel
est l'exercice auquel ce gouvernement soumet les membres du Parlement à
ce moment-ci. Exercice qui, je pense, non seulement est inutilement long, mais
risque même de compromettre certains résultats qui étaient
déjà en voie de réalisation. Là-dessus, je pense
que le président de la régie pourrait nous apporter des
informations fort à point.
Il vous est sans doute arrivé, comme à moi, que certains
membres de la régie se soient inquiétés de la
réalisation des objectifs alors qu'on se propose de procéder par
des contraintes, dans certains cas, inutiles, plutôt que de continuer de
procéder d'une façon plus incitative comme le prévoyait la
loi 22. Enfin, je ne veux pas prolonger, M. le Président. Pour toutes
ces raisons, je pense que je n'ai pas à argumenter ici, puisque
déjà les membres du parti ministériel ont accordé
leur appui à cette motion, mais je suis quand même très
heureuse de pouvoir appuyer la motion de mon collègue de
Marguerite-Bourgeoys.
Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): Merci, madame. M. le ministre
de l'Education. Oui, M. le député de Jacques-Cartier.
M. Saint-Germain: Relativement à cela, j'aimerais bien
vous laisser savoir que je voudrais, pendant quelques minutes, prendre la
parole sur cette motion et que je ne voudrais pas perdre ce droit.
Le Président (M. Cardinal): D'accord. Je vais poser la
question tout de suite pour que l'on sache exactement vers quel but on se
dirige. M. le député de Gaspé, avez-vous l'intention
d'intervenir?
M. Le Moignan: Je vais peut-être succomber à la
tentation, je n'en suis pas certain.
Le Président (M. Cardinal): Alors, M. le ministre de
l'Education, M. le député de Jacques-Cartier et M. le
député de Gaspé. M. le ministre.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, comme vous l'a
indiqué le député de Taschereau il y a un instant, le
côté ministériel est plutôt favorable à la
proposition, quoique nous nous interrogions sur l'opportunité de donner
un ordre à la régie. Je me demande s'il ne vaudrait pas mieux,
par déférence, l'inviter ou inviter le président de la
régie à se faire entendre.
Si je me pose cette question, c'est suite à la lecture de la
lettre que vous a fait parvenir le président du Conseil supérieur
de l'éducation qui se trouvait quelque peu dans la même position,
par rapport au Parlement et par rapport au gouvernement, que la Régie de
la langue française. Comme on le sait, la Régie de la langue
française conseille le gouvernement, tout comme le Conseil
supérieur de l'éducation.
Or, je me permets de rappeler aux membres de cette commission un
paragraphe particulièrement éloquent de la lettre du
président du Conseil supérieur de l'éducation. "A
l'examen, écrit-il, le conseil souhaite n'avoir pas à se
présenter auprès de la commission. Il estime en effet
préjudiciable au caractère propre de ses travaux de devoir
témoigner au cours d'un débat parlementaire une fois son avis
soumis sur le sujet en cause au ministre de l'Education dont il relève
immédiatement.
A l'unanimité, les membres du conseil estiment que
l'impartialité dans laquelle ils se tiennent pourrait autrement se
trouver affectée dans l'avenir et que le recul dont ils
bénéficient pourrait leur être plus difficile". Cette
position délicate dans laquelle nous aurions pu mettre le Conseil
supérieur de l'éducation pourrait très bien se reproduire
dans le cas de la Régie de la langue française. C'est pourquoi,
tout en n'ayant pas d'objection foncière à ce que la régie
se fasse entendre, si elle le désire, je demanderai je n'en ferai
même pas une proposition parce qu'il me semble que c'est si naturel que
cela ne devrait pas soulever de difficulté si le
député qui a proposé cette motion accepterait de
substituer le mot "invite" le président de la régie à se
faire entendre, plutôt que de lui donner l'ordre d'être
entendu.
Encore une fois, nous n'avons pas d'objection à ce que la
régie vienne, mais la régie pourrait en avoir. La régie
pourrait étant donné qu'elle devra continuer à
mettre en oeuvre la loi par la suite avoir des objections à se
trouver mêlée à un débat partisan.
Le Président (M. Cardinal): Si vous me le permettez
juste un instant, M. le député de Marguerite-Bourgeoys une
situation semblable s'est déjà présentée à
l'Assemblée nationale à au moins trois reprises, le jour des
députés, le mercredi. Le ministre de l'Education, si j'ai bien
compris, n'en fait pas une motion formelle, il en fait une suggestion pour que
nous ne tombions pas dans un piège de procédure. D'ailleurs,
à ce moment-là, il faudrait discuter de l'amendement, et ensuite
de la motion principale. A mon tour, j'invite le député de
Marguerite-Bourgeoys à répondre. Ce n'est pas une incitation,
c'est seulement une invitation à répondre au ministre de
l'Education.
M. Lalonde: M. le Président, en préambule à
sa suggestion, le ministre de l'Education a mentionné l'exemple du
Conseil supérieur de l'éducation. J'aimerais souligner que
contrairement au Conseil supérieur de l'éducation, la
régie n'a pas soumis d'avis ni fait de représentation. Il y
aurait quand même une distinction à apporter, à savoir si
on devrait remplacer le mot "entendre" par le mot "invite". Quant à moi,
je ne veux pas en faire une question de fond. Il s'agit de savoir si la
commission désire vraiment et sincèrement poser des questions au
président de la régie et recevoir l'éclairage que le
président de la régie peut nous apporter en ce qui concerne
surtout la langue de travail, la langue des affaires.
Est-ce que, en substituant le mot "invite" à celui de "entendre",
on dilue l'autorité de la commission? J'invite à mon tour les
membres de la commission à se poser des questions, à savoir,
est-ce que, à ce moment-là, cela pourrait devenir un geste sans
valeur de la part de la commission? Par respect pour l'institution que cette
commission représente, je ne suggérerai pas qu'on dilue cette
motion de telle sorte que l'effet en serait plutôt aléatoire.
Je répète, M. le Président, que je ne veux pas
qu'on tombe, comme vous le disiez tantôt, dans un piège de
procédure. Je suis prêt à prendre la parole du ministre de
l'Education, à ce propos, qui représente, dans une certaine
mesure, le gouvernement à cette commission, à savoir s'il croit
très sincèrement que cette invitation serait quand même
assez péremptoire à l'égard du président de la
régie, à ce moment-là, je serai prêt à le
remplacer... J'attends l'avis du ministre de l'Education, à savoir si en
substituant le mot "invite" au mot "entendre", dans son esprit, tout en
ajoutant une certaine mesure de courtoisie à l'égard du
président de la régie, on demeure quand même, au niveau de
l'efficacité et qu'on puisse s'attendre que le président de la
régie réponde de façon positive.
Le Président (M. Cardinal): M. le ministre, si vous voulez
répondre, toujours en rappelant à tous les membres de cette
commission qu'il ne s'agit pas d'une motion mais, comme cela s'est fait le 7
juin, il y a eu des voeux, des suggestions, des souhaits. Alors, M. le
ministre.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, pour qu'il n'y
ait pas d'ambiguïté, nous sommes favorables à ce que la
régie se présente devant la commission, à la condition
qu'elle n'y voit pas d'objection majeure, et qu'elle ne sente pas que son
rôle futur dans l'application de la loi est compromis par sa
participation, en dépit d'elle-même, à un débat
partisan.
M. Lalonde: Alors, je prends la parole du ministre. Cela me
suffit. Dans ces conditions, je suis prêt à remplacer, dans ma
motion, le mot "entendre" par le mot "invite".
Le Président (M. Cardinal): Si vous permettez, j'ai
écouté chacune des parties. La motion, non pas telle
qu'amendée mais telle que suggérée et convenue, se lirait
comme suit: Que cette commission invite le président de la Régie
de la langue française, le 20 juillet 1977, à 20 heures, à
se faire entendre afin que...
M. Morin (Sauvé): M. le Président, sur la
question...
Le Président (M. Cardinal): Un instant. M. le
député de Jacques-Cartier avait demandé la parole sur le
même sujet.
M. Saint-Germain: Merci, M. le Président. J'aimerais vous
souligner, M. le Président, l'importance qu'il y aurait pour nous et
pour la population en général de connaître les vues de
l'Office de la langue française sur ce sujet particulier, non pas
nécessairement avoir son opinion, mais au moins de pouvoir nous
éclairer...
Le Président (M. Cardinal): Si vous permettez, la
régie.
M. Saint-Germain: De la régie, mais c'était avec
l'ancienne loi. Parlons de la régie, mais c'est à peu près
les même gens, de toute façon. Ces gens ont eu une
expérience pratique, ont été en contact journalier avec le
monde de l'industrie, du commerce, de la finance et ils ont une
expérience très pratique de l'application d'une loi linguistique
dans le monde des affaires. Il serait intéressant de les écouter,
non pas nécessairement pour avoir d'eux une opinion, mais on pourrait
avoir les faits qu'ils ont vécus, les difficultés qu'ils ont
rencontrées, les difficultés qu'ils ont pu surmonter, la
coopération qu'ils ont reçue ou la non-coopération qui a
marqué leur action. Inutile de vous dire que les seuls professionnels
qui existent dans ce champ d'activité extrêmement limité et
particulier, c'est à ce niveau qu'on peut les trouver. Comme ces gens
sont payés par les fonds publics, comme ils travaillent pour le public,
je ne verrais pas avec quel argument ils pourraient refuser de nous
rencontrer.
Il serait d'autant plus important, M. le Président, d'avoir leur
point de vue là-dessus, que ce qui caractérise le Parlement
actuel, c'est que très peu de députés aujourd'hui ont eu
une carrière dans le monde de l'industrie, de la finance ou une
carrière scientifique, si vous voulez. Et je crois
que, au niveau du Parlement, les personnes qui ont été
actives dans ces milieux et qui connaissent bien la façon d'agir et la
façon d'administrer tout le réseau économique et financier
du Québec sont rares, comme je le disais et je crois que ces absences se
font remarquer dans une rédaction comme le projet de loi no 1. Je crois
qu'une personne qui connaîtrait profondément ce milieu ou ces
personnes qui auraient vécu dans ces milieux accepteraient difficilement
de souscrire à un projet de loi comme celui que nous avons dans le
moment. J'avoue que, dans le passé, les réactions
négatives vis-à-vis des lois linguistiques ont été
surtout dans le monde de l'éducation et je crois discerner actuellement
une réaction vive du milieu industriel et financier du Québec
vis-à-vis de ce projet de loi, réaction qu'on n'avait pas
ressentie précédemment.
Comme une des causes profondes qui nous amènent à
étudier et qui nous a amenés dans le passé à
étudier une loi linguistique c'est l'absence de francophones dans le
monde de l'industrie, des affaires et de la finance, il est extrêmement
important de légiférer tout en connaissant les réactions
négatives qu'un projet de loi comme celui que nous étudions
pourrait avoir dans ce monde des affaires. Ce projet de loi,
théoriquement, est adopté pour voir la culture française
progresser au Québec; s'il y a une réaction vive et
négative du milieu de l'industrie qu'on ne contrôle pas au
Québec, je crois qu'on pourrait même créer des situations
néfastes vis-à-vis du développement de la culture
française, ce qu'on ne voudrait pas pour tout l'or du monde.
Ceci dit, je crois que les membres de cette régie pourraient nous
éclairer d'une façon très positive et nous apporter des
faits qu'ils sont les seuls à connaître. Ils pourraient
certainement nous indiquer les progrès qui ont été faits,
ces dernières années, dans l'utilisation du français dans
le monde de l'industrie et du commerce. Il y a eu un progrès
réel, qu'on semble avoir beaucoup de difficulté à peser,
à doser. Il y aurait une multitude de renseignements que ces gens
pourraient nous transmettre, qui pourraient éclairer non seulement la
commission, mais, par la voie de la commission, la population du Québec
en général. Et ceci, toujours en s'en tenant aux faits, sans
nécessairement demander aux membres qui nous feraient l'honneur de nous
visiter leur opinion sur les principes qui sous-tendent la loi. On leur
poserait des questions regardant les faits qu'ils ont vécus.
Le Président (M. Cardinal): Est-ce que le
député de Gaspé succombe à la tentation?
M. Le Moignan: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): Allez-y mon père.
M. Le Moignan: Je n'ai pas l'intention de faire languir les
témoins qui attendent avec beaucoup de patience. Je voudrais simplement,
M. le Président, si vous me le permettez, résumer comme j'ai
l'habitude de le faire, quoique cela me tenterait de pérorer ce soir,
mais je vais me maintenir.
Mme Lavoie-Roux: Vous retenir.
M. Le Moignan: M. le ministre a parlé du Conseil
supérieur de l'éducation; je comprends très bien, j'ai lu
attentivement la réponse de ce conseil. Mais, quand il s'agit, par
exemple, de la Régie de la langue française, j'y vois tout un
monde, toute une différence, puisque ce sont des fonctionnaires. Ce qui
m'aurait intéressé je résume, ce ne sera pas long,
M. le Président c'est parce qu'ils ont un mandat, ils ont
l'expérience de la loi 22. Le président ou un des membres de la
régie pourrait nous donner un bilan de ces deux années de la loi
22. Quelles ont été leurs expériences? Quels ont
été leurs échecs? Quelles sont les difficultés
qu'ils ont connues? De quelle façon la loi s'est-elle appliquée
dans le concret? A ce moment, je crois que les membres de la commission
seraient davantage renseignés. Personnellement, avec ceux de notre
groupe, nous aimerions les rencontrer simplement pour qu'ils éclairent
un peu notre lanterne en fonction de l'office qui va remplacer cette
régie. Déjà nous serions mieux situés pour
évaluer le rôle futur que l'office va remplir auprès des
Québécois.
Je résume, je ne veux pas prolonger davantage. Nous prenons la
parole du ministre, je la prends à 100%, sans aucun doute; c'est un voeu
qu'il a lui-même dit, de les inviter, ce n'est pas un ordre qu'il leur
donne. Personnellement, je serais heureux de voir la régie
paraître ici devant cette commission.
Le Président (M. Cardinal): Merci, M. le
député de Gaspé. M. le ministre.
M. Morin (Sauvé): Les arguments du député de
Gaspé ne sont pas sans importance; c'est la raison pour laquelle
d'ailleurs nous serions curieux, nous aussi, s'ils veulent bien venir devant la
commission, de les entendre.
Cependant, je répète qu'ils ne doivent pas se sentir
coincés. Etant donné qu'ils ont servi l'ancien gouvernement, que
certains d'entre eux sont appelés, sans doute, à servir sous un
nouveau gouvernement, mais à ne pas appliquer les mêmes
dispositions, ils pourraient se sentir coincés dans un débat qui
pourrait prendre des allures tout à fait partisanes et sentir que leur
efficacité au service de la loi serait par la suite quelque peu
compromise. C'est dans cet esprit que je remercie le député
d'avoir accepté de modifier, tout à fait spontanément, sa
motion.
Je voulais demander autre chose, avant de terminer, et cela me
paraît tout de même important. Pourquoi a-t-on choisi le 20 juillet
qui, d'après mon calendrier, est un mercredi? Y a-t-il une raison
spéciale pour laquelle vous avez choisi cette date, autre que de tenter
de vous assurer que la commission siégera encore à ce
moment-là?
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Non.
M. Morin (Sauvé): Parce que si ce sont des assurances de
ce genre que vous voulez, je ne suis pas en mesure de vous les donner. Je ne
sais si la commission siégera ou pas. Il faudrait que ce soit clair,
cela aussi.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): Cependant, permettez-moi
je vais laisser la parole, M. le député de
Marguerite-Bourgeoys de vous rappeler, après votre intervention,
ce qui paraît au journal des Débats, même si je ne l'ai pas
devant moi, peut-être pas verbatim, mais dans sa
généralité au sujet de cette date.
M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: J'allais le faire, M. le Président. Si le
ministre de l'Education nous avait fait l'honneur de sa présence ce
mercredi soir où la motion a été discutée, il se
souviendrait que nous avont été très flexibles; nous avons
fait preuve d'une souplesse rare è l'égard de la date. Il nous a
paru qu'il fallait une date à la motion pour qu'elle soit recevable.
Cela n'a pas été, je pense, décidé comme tel par la
présidence, mais c'était notre impression au moment où
nous avons mis une date.
Nous avions plus de 200 mémoires, à ce moment-là,
qui devaient être présentés. Nous avions aussi l'impression
que le président de la régie devait recevoir un avis assez long
ou, enfin, suffisamment long pour lui permettre de préparer une
intervention valable. Le 20 juillet... D'ailleurs, dans ma présentation,
j'ai même invité le gouvernement ou les membres
ministériels de cette commission à suggérer d'autres dates
comme le 13 juillet ou le 20 août. C'est à votre guise.
Naturellement, si le ministre préfère le mois d'août, moi,
je n'ai pas d'objection. Nous sommes ici, de toute façon, pour un bon
moment. Il reste 220 mémoires à entendre. Que ce soit à
l'automne, si le ministre le préfère.
Une Voix: Cette année.
M. Lalonde: Cette année ou même au printemps
prochain, cela dépend. Si on préfère changer la date, je
renvoie la balle au ministre, étant donné que c'est lui qui pose
la question. Moi, j'ai pensé au 20 juillet, un mercredi soir. C'est un
soir excellent pour siéger. D'ailleurs, depuis que le leader du
gouvernement nous a demandé de siéger le mercredi soir, nous
avons été extrêmement actifs.
M. Morin (Sauvé): Je commence à comprendre le sens
de la motion.
M. Lalonde: Nous avons été extrêmement actifs
les mercredis soirs, mercredi dernier, d'ailleurs.
M. Morin (Sauvé): Oui, oui, c'est punitif, en quelque
sorte.
Mme Lavoie-Roux: On veut qu'ils soient bien occupés, les
mercredis soirs.
M. Lalonde: Et nous voulions nous assurer que ces mercredis soirs
soient occupés à des travaux tout à fait utiles. Nous
pensions que le mercredi 20 juillet serait fort propice pour entendre le
président de la Régie de la langue française.
Le Président (M. Cardinal): Puis-je vous rappeler, en
guise non pas de directive mais de renseignement, que ce soir-là,
lorsque le député de Marguerite-Bourgeoys, qui a parlé de
10 h 34 à 10 h 54 et qui a bien employé son temps, a fait cette
motion, j'ai indiqué que ne connaissant pas les dates de convocation des
séances de la commission je ne parle pas de la fin des travaux de
cette commission en vertu de l'article 118.6, mais uniquement du fait que nous
vivons en vertu d'avis, de motions ou d'ordres de la Chambre quotidiens ou
presque je ne pouvais pas engager la commission sur une date semblable.
J'ai même alors parlé d'honnêteté intellectuelle, ce
qui a été un grand mot lancé. Un député, qui
n'est pas présent ce soir je n'aime pas attaquer les absents
a même laissé entendre que peut-être je participais
aux débats. Il n'est pas ici, alors, vous n'avez pas à me lancer
des regards interrogateurs qui, encore une fois, ne paraissent pas au journal
des Débats.
J'indique simplement au ministre et aux membres de cette
commission...
M. de Bellefeuille: Sauf quand on en parle. Le Président
(M. Cardinal): Oui, c'est cela.
M. Lalonde: II y a d'autres façons de les avoir...
Le Président (M. Cardinal): C'est cela, vous voyez que je
vous aide beaucoup.
Par conséquent, les invités sont tous convoqués
actuellement à sept jours d'avis, en vertu du règlement, qu'il y
a déjà eu une motion qui a été
déclarée recevable vis-à-vis du Conseil supérieur
de l'éducation, que cette motion avait été
également déclarée recevable, mais que ceci ne
préjugeait pas ni qu'il y aurait séance le mercredi soir, ni que
les travaux de la commission seraient ou ne seraient pas terminés comme
l'a indiqué le ministre; sans quoi nous ne pourrions jamais rendre
efficaces les articles 118-A et 156. C'est donc sans préjuger de
l'avenir que j'ai déclaré cette motion recevable et j'ai
ajouté ceci... je pense que le député de
Marguerite-Bourgeoys qui était présent ce soir-là, se
rappelle que c'est à peu près ce que j'ai indiqué, que
lui-même d'ailleurs a rappelé certains faits à ce sujet et
je veux dans ce sens rassurer le ministre. Oui, M. le ministre.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, c'est dans le
même esprit et sans présumer de l'avenir que nous n'avons pas
d'objection à ce que cette motion soit acceptée telle que
rédigée.
Adoption de la motion
Le Président (M. Cardinal): Je vais demander plus que
cela. Je ne veux pas savoir s'il y a ou non des objections, je veux simplement
savoir, si cette motion sera adoptée?
M. Lalonde: Adopté. Des Voix: Adopté.
Le Président (M. Cardinal): Adopté unanimement. La
motion est adoptée. Je la signe et la remets au secrétaire de la
commission. Oui, M. le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Une question, s'il vous plaît. Sur la motion,
on nous dit qu'il n'y a pas de garantie que le 20 juillet, nous allons encore
poursuivre nos travaux, qu'on va siéger, alors est-ce que je pourrais
demander au ministre quel est le sens d'avoir une motion qui peut-être
sera inutile? Est-ce que vous pourriez suggérer une date à
laquelle on pourrait être assuré que le président de la
régie va être entendu? Cela ne sert à rien d'accepter.
C'est bien beau d'accepter une motion pour le 20, quand vous savez,
d'après le député de Taschereau, que demain ou le jour
suivant, il va faire une motion pour terminer les travaux. C'est bien
généreux de votre part.
Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le
député de Bourassa sur une question de règlement.
M. Laplante: La motion a été adoptée
unanimement par les membres de la commission. Elle ne doit pas faire l'objet
d'un autre débat.
M. Ciaccia: C'est avant qu'on me l'ait demandé, je n'ai
pas donné mon consentement au groupe.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! La motion est
adoptée. Je veux rappeler que si un député s'est
déclaré suffisamment informé quant à certains
mémoires et si un autre député a indiqué qu'il y
avait des redites et rien de plus, ni rien de moins n'a été dit,
que je ne sais certainement pas quel jour et à quelle heure nous
siégerons, sauf demain, sauf après-demain, à cause de
l'avis qui a été donné à l'Assemblée
Nationale, en ce jeudi dernier, veille du 1er juillet 1977.
Oui, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: C'est une directive ou un renseignement que je
voudrais avoir, est-ce que l'invitation de la commission va être
transmise quand même assez rapidement au président de la
régie, de sorte qu'il puisse se préparer?
Le Président (M. Cardinal): Dès demain, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): Sur ce, est-ce que je peux
inviter les représentants, les porte-parole de la Commission des
écoles catholiques de Québec, mémoire 74, à se
présenter? Je sais que c'est un M. Fernand Paradis, directeur
général qui a communiqué avec la commission. Vous
êtes ici, M. Paradis? Maintenant, est-ce vous qui présentez vos
collègues ou...
Commission des écoles catholiques de
Québec
M. Forgues (André): André Forgues, président
de la CECQ. Je suis accompagné de Mme Jacqueline Lambert-Jacob,
commissaire; de M. Fernand Paradis, directeur général; de M.
Clément Saint-Germain, vice-président; de M. Marc-André
Lacasse, coordonnateur et de M. Bill McNamara, directeur du secondaire
St-Patrick à Québec.
Le Président (M. Cardinal): Merci, Monsieur, je pense
qu'il n'est pas nécessaire de présenter la Commission des
écoles catholiques de Québec. Est-ce que vous désirez
commencer immédiatement l'exposé de votre mémoire?
M. Forgues: Oui.
Le Président (M. Cardinal): Vous avez vingt minutes pour
le faire, sauf si des membres de la commission décident à
même leur propre temps, de vous en accorder davantage. Alors nous
commençons à 21 h 52... plutôt 21 h 57. Vous avez raison,
M. le député de Marguerite-Bourgeoys. Cette horloge va vraiment
me rendre je ne sais quoi, mais elle change d'heure continuellement, on ne sait
jamais comment elle est par rapport au Greenwich. A 21 h 58 exactement, M. le
président de la Commission des écoles catholiques de
Québec.
M. Forgues: Madame, MM. les commissaires, dans le cadre de la
consultation que vous poursuivez sur le projet de loi no 1, Charte de la langue
française au Québec, vous avez invité la population et les
divers organismes à vous faire part de leurs commentaires et
réflexions. Laissant à d'autres le soin d'aborder le projet de
loi sous des angles comme ceux de la législation et de la justice, de
l'administration, du travail, du commerce et des affaires, la Commission des
écoles catholiques de Québec, soucieuse d'apporter sa
contribution à la communauté québécoise,
désire intervenir principalement dans le domaine de la langue de
l'enseignement pour: A) situer ses rôles historique et actuel; B)
décrire les effets des récentes lois 63 et 22; C) exposer ses
observations sur le projet de loi; D) exprimer ses recommandations.
Les membres qui ont collaboré à la préparation du
présent mémoire oeuvrent à la CECQ à di-
vers titres: commissaires, parents, cadres des services, cadres des
directions d'école, professionnels non enseignants. Tous ont, à
l'invitation de la direction générale, apporté leur aide
précieuse pour exprimer le point de vue de notre milieu scolaire.
Rôles historique et actuel. L'enseignement se donne sous la
responsabilité des paroisses lorsqu'en 1846 le gouvernement de
l'époque adopte la loi 9 Victoria, chapitre 27, intitulée
"L'Education élémentaire en Bas-Canada" et charge, à
l'article 42, douze commissaires, dont six catholiques et six protestants,
d'organiser les écoles sur le territoire de Québec. Par cette
oeuvre conjointe, les communautés francophone et anglophone de
l'époque se forgent déjà une certaine cohérence. On
relève que l'Ecole Notre-Dame-de-la-Garde possède, du temps de
Mgr Signai, en 1855, des classes françaises et des classes anglaises
où peuvent venir des élèves anglophones de
l'extérieur de Québec.
Diverses modifications légales surviennent, comme en font foi les
procès-verbaux de la CECQ qui montrent que la Commission scolaire
catholique de Québec existe avant 1867. En 1906, le gouvernement
précise certains pouvoirs particuliers en promulguant la loi 6 Edouard
VII, chapitre 87, et mandate le Bureau des commissaires d'écoles
catholiques romains de la cité de Québec d'organiser sur son
territoire l'enseignement pour tous les catholiques francophones et
anglophones.
Un registre, qui va des années 1885 à 1919, nous permet de
connaître les noms et le domicile des élèves qui
fréquentaient l'école St. Patrick, rue McMahon, dans le Vieux
Québec. Il est important de noter que certains élèves
venaient des comtés actuels de Portneuf, Charlevoix, Montmorency et
Charlesbourg.
A cette époque, les communautés anglaises des environs
rassemblaient à Québec leurs enfants pour assurer leur
instruction. La vocation régionale de la CECQ, en ce qui a trait
à l'enseignement en langue anglaise, l'amène à dispenser
en 1977 cet enseignement à des élèves provenant d'au moins
sept autres territoires scolaires de la zone économique no 3 qui ont des
contrats à long terme avec la CECQ dont notamment la localité de
Shannon.
Durant toutes ces années, ces communautés catholiques se
fréquentent et entretiennent d'importantes relations humaines, alors que
la CECQ y joue, nous le croyons, un rôle essentiel d'instruction,
d'éducation et de fraternité.
Effets de la loi 63, 1969, chapitre 9. Cette loi qui permettait aux
parents le libre choix de la langue d'enseignement pour leurs enfants aurait eu
comme effet principal d'accroître, en 1969, puis de maintenir, par la
suite, jusqu'en 1974, le nombre d'élèves qui fréquentaient
en langue anglaise nos deux écoles élémentaire et
secondaire St. Patrick et qui provenaient tant de notre territoire scolaire que
de l'extérieur. Le tableau A, en annexe, pourrait nous porter à
cette conclusion.
Il nous semble toutefois que cet accroissement peut aussi être
dû, pour une partie, qu'il est assez difficile à établir
par ailleurs, à l'explosion scolaire provoquée par d'autres lois
de l'éducation. Il peut être aussi attribuable, pour une autre
partie, plus faible probablement, à une immigration accrue et à
une certaine mobilité des anglophones et des allophones canadiens vers
notre région.
Néanmoins, cette augmentation d'élèves a
nécessité un recrutement un peu plus élevé
d'enseignants pour nos écoles de langue anglaise et, il va de soi,
l'organisation scolaire s'est développée en
conséquence.
Le tableau B, en annexe, permet de constater la diversité des
provenances géographique et linguistique du personnel enseignant. Ce
tableau permet aussi de constater un taux de mobilité plutôt
élevé de l'ordre de 25% de ce personnel enseignant.
Effets de la loi 22, 1974, chapitre 6. Cette loi qui limitait
l'admission à l'enseignement en langue anglaise aux seuls enfants qui
pouvaient, par les tests, démontrer une connaissance suffisante et qui
restreignait, par contingentement, le nombre de places-élève pour
les enfants qui n'étaient pas de langue maternelle anglaise aurait eu
comme effet principal d'abaisser, dès l'année scolaire 1975/76,
première des deux années où les tests de connaissance
linguistique furent administrés, le nombre d'élèves
inscrits en langue anglaise a la CECQ. (Voir le tableau A en annexe).
Il nous semble toutefois que cet abaissement peut aussi être
dû, pour une partie qu'il est assez difficile à établir par
ailleurs, à une diminution naturelle de la clientèle scolaire
causée par la dénatalité. Il peut aussi être
dû, pour une autre partie sûrement intéressante à
connaître, à une immigration décroissante vers notre
région. Peut-être aussi à une certaine mobilité des
anglophones ou des allophones vers d'autres régions. Peut-être
aussi à une certaine préférence pour l'école
privée.
Néanmoins, cette diminution d'élèves a
néce-sité un recrutement d'enseignants à peine moindre
puisque le taux de mobilité du personnel enseignant demeure toujours
assez élevé, soit de l'ordre de 20%. (Voir le tableau B en
annexe). Même si elle se rapporte à un moins grand nombre
d'élèves, l'organisation scolaire a à peine décru
et est même devenue plus complète puisque la CECQ offre des
options professionnelles, notamment dans les secteurs de l'industrie et des
services, aux élèves de l'école secondaire de langue
anglaise.
Observations sur le projet de loi 1. Regret. De façon
générale, toutes les personnes qui ont participé à
la préparation du présent mémoire ont été
unanimes à exprimer leur profond regret de ne pas connaître les
règlements afférents à ce projet de loi. Elles souhaitent
que, par ce fait même, ces règlements puissent être
éclairés par la contribution de la CECQ à la
présente commission parlementaire.
Transition. Actuellement, il y a, nous semble-t-il, une période
transitoire entre l'actuelle loi 22 et la prochaine loi 1 que nous qualifierons
de problématique. L'arrêté en conseil 4640-74, 18
décembre 1974, et le règlement 74-643, 19 décembre
1974, relatifs à la Loi de l'instruction publique et concernant
l'inscription obligatoire des élèves pour l'année scolaire
1977/78 stipulent que cette inscription doit être faite "avant le 1er
mars précédent..." et sur une formule demandant des informations
précises. Le 10 février 1977, le ministère de l'Education,
dans une lettre codifiée B.S.M. 77-5, nous demanda d'attendre jusqu'au
15 mars certaines directives avant de procéder. Les commissions
scolaires de la région 03 ont fixé diverses dates d'inscription
et les renseignements fournis au public ne furent pas identiques.
Pour sa part, la CECQ a tenu la période d'inscription obligatoire
du 21 au 31 mars. Les parents ne détenaient alors aucune autre
information officielle que celle qui se rapportait à la loi 22 et
devaient se gouverner selon cette loi. Depuis le 1er avril, d'autres questions
ont été soulevées par les parents: Qui peut aller suivre
l'enseignement en langue anglaise et quand? Nous avons répondu que la
loi 22 était toujours la loi, que l'arrêté en conseil
4640-74, avec délai jusqu'au 1er avril, fermait la période
d'inscription pour la CECQ, à moins que la prochaine loi ne permette une
prolongation de la période d'inscription jusqu'au dernier jour
d'août pour les personnes désireuses de se prévaloir de
cette loi et dont les enfants répondront aux critères.
Nous soumettons que des clarifications s'imposent le plus tôt
possible afin de déterminer les clientèles de nos deux
écoles de langue anglaise, de compléter l'engagement du personnel
enseignant et de voir à l'organisation scolaire. Il faut rappeler que le
nombre d'élèves venant de l'extérieur du territoire de la
CECQ influence grandement l'organisation scolaire à mettre en place dans
notre secteur anglais.
Afin de ménager un bon départ à la prochaine
année scolaire et de veiller à la qualité de
l'enseignement dispensé en anglais, il est impérieux,
actuellement, croyons-nous, de prendre une décision rapide mais
juste.
Commentaires. Aux articles 30, 31 et 32, nous remarquons que la
connaissance de la langue officielle pour les personnes désirant obtenir
un permis d'exercer au Québec dans un ordre professionnel peut
être démontrée par un examen. Nous sommes
étonnés, devant les difficultés qui furent
soulevées au sujet des tests de connaissance linguistique
administrés dans le cadre de la loi 22, que le projet de loi propose
aussi des examens.
Selon la docimologie, c'est-à-dire l'étude scientifique
des méthodes d'examen, un examen valide est celui qui a des normes, qui
vérifie selon des critères de référence, qui a les
caractéristiques de justesse et de fidélité, qui est en
somme un examen standardisé, qui a fait l'objet d'une analyse
longitudinale et critique. Dès qu'il possède de telles
qualités, cet instrument de mesure n'est plus un examen, c'est un test.
S'il n'a pas ces qualités, cet instrument est peu scientifique et
possède peu de notoriété véritable.
A l'article 52, nous soumettons que le cadet ou la cadette francophone
ou allophone d'un ou d'une aînée francophone ou allophone qui a
déjà fait ses études secondaires au secteur anglophone
mais qui ne le fréquente plus devrait posséder le droit, pour
préserver l'unité familiale, de recevoir l'enseignement en
anglais. La préparation à la vie professionnelle et à
l'âge adulte pourrait être grandement facilitée à
l'élève en question.
A l'article 53, nous soumettons que la double formulation
négative du début de l'article ne confère aucune garantie
à la CECQ de continuer à dispenser l'enseignement en langue
anglaise aux élèves de son territoire et à ceux des
commissions environnantes. Nous souhaitons vivement une formulation
précise et concrète en ce sens.
A l'article 54, deuxième paragraphe, nous soumettons que la date
du 31 décembre 1977 soit remplacée par une date plus
appropriée suivant qu'il s'agit de l'admissibilité pour 1977-1978
ou de celle de 1978-1979. Notre préoccupation se rapporte à
l'élève qui ne doit pas subir la perturbation d'une année
scolaire où il changerait d'école et de rythme de vie en cours
d'année.
A l'article 57, nous soumettons que des mesures particulières
soient disponibles pour rendre possible la certification d'un
élève anglophone qui arriverait au Québec pour y suivre
l'année terminale du cours secondaire. Comme, selon le projet de loi, il
devrait fréquenter l'école française, cet
élève risque, à tout le moins, de subir un échec en
français. Dès lors, il ne serait pas certifié et ne
pourrait accéder au niveau collégial. Ne pourrait-on pas procurer
à un tel élève les mêmes chances déjà
prévues pour les personnes des ordres professionnels qui, à
l'article 32, peuvent bénéficier d'un permis temporaire? Cet
étudiant pourrait ainsi avoir droit sinon à un certificat
temporaire du moins à une admission temporaire au collégial.
Particularités de la CECQ. A la CECQ, les enseignants de nos deux
écoles de langue anglaise sont nés hors du Québec dans une
proportion d'environ 50%. Le tableau B en annexe relève, en plus de la
langue maternelle et de la provenance géographique, le taux de
mobilité de ce personnel. En moyenne, à ce jour, ce taux est
d'environ 24% pour les cinq dernières années. Malgré le
contingentement naturel qui est un effet appréhendé du projet de
loi, malgré la dénatalité et malgré la
mobilité des familles du Québec et de sa région, il
restera un certain nombre d'élèves auxquels la CECQ devra
pourvoir l'enseignement en langue anglaise.
Nous remarquons par ailleurs que deux des facteurs qui peuvent assurer
une meilleure qualité de l'enseignement sont: un rapport
maître-élèves plus petit et un nombre réduit
d'heures d'enseignement. Nous sommes ainsi portés à croire que le
recrutement du personnel enseignant pour les classes anglaises peut demeurer un
problème.
Nous savons bien que le nombre d'étudiants inscrits aux cours de
formation des maîtres dans les universités anglaises du
Québec s'est accru d'environ 200 depuis cinq ans. Cependant, une grande
partie de ces étudiants sont déjà des enseignants en
exercice qui vont augmenter leur scolarité ou se perfectionner. Parmi
ces enseignants, plusieurs se préparent aussi à assurer une
meilleure qualité de l'enseignement de l'anglais, langue seconde, dans
les écoles françaises. Il y a
aussi le fait que les universités anglaises du Québec sont
dans la vaste région de Montréal et que ces candidats à un
recrutement possible y demeurent ou y demeureraient quand ils seront
diplômés.
Ces réflexions faites, la CECQ, désireuse de recruter un
personnel enseignant de qualité d'abord pour ses écoles de langue
anglaise, puis pour l'enseignement de l'anglais, langue seconde, soumet deux
résolutions qui lui permettraient de remplir son rôle. Il nous
apparaît que ces deux résolutions devraient s'appliquer
immédiatement et concurremment. 1.Que des mesures incitatives soient
prises en vue de permettre aux étudiants en formation des maîtres
de Québec et de sa région de rester dans notre région. Un
moyen pourrait être celui de décentraliser la formation des
maîtres en ouvrant un module anglophone ici même à
Québec. 2. Qu'à l'article 58, les enseignants anglophones des
autres provinces du Canada, qui voudraient travailler au Québec, soient
incités à y venir et à y demeurer en leur procurant
notamment sinon la possibilité de permanence, du moins le droit de
placer leurs propres enfants au secteur linguistique de leur choix.
Nous sommes d'avis que ces deux mesures permettraient à la CECQ
de contrer les difficultés de recrutement du personnel enseignant de
langue anglaise.
Recommandation de la CECQ. La Commission des écoles catholiques
de Québec a consulté avec intérêt le livre blanc
publié le 1er avril par le ministre, M. Camille Laurin. La CECQ a, nous
le croyons, analysé sans charge émotive les articles du projet de
loi 1. Comme elle tente de le faire pour ses élèves et ses divers
personnels, la commission est soucieuse du respect de deux types de droits qui
doivent avoir cours dans toute société: les droits collectifs et
les droits individuels.
Dans la recherche d'une base d'équité et de justice qui
contribuerait à ce respect et à un heureux équilibre entre
une législation trop permissive et une législation trop
restrictive, la CECQ a accueilli, comme génératrice d'une
évolution pondérée et sérieuse de notre
société québécoise, la recommandation du Conseil
supérieur de l'éducation au ministre de l'Education,
recommandation adoptée en février 1977 relative à la
langue d'enseignement.
Ce texte officiel, qui fit l'objet d'un communiqué de presse le
21 février 1977 sur le réseau 1 Telbec, apporte des solutions
à la plupart des préoccupations de la CECQ. Il nous semble que
ces solutions sont justes et équitables et permettent aux diverses
communautés linguistiques québécoises de parvenir à
un nouvel équilibre.
La CECQ fait tout particulièrement siens les articles de cette
recommandation qui se rapportent à la nécessité pour le
gouvernement de créer un climat francophone dans toutes les
sphères d'activités pour que l'école y joue son
véritable rôle, article 2; les critères
d'admissibilité des enfants, article 7; le souci de maintenir
l'unité familiale sur le plan linguistique, article 8;
l'améliora- tion de l'enseignement du français, article 10; et
l'amélioration de l'enseignement des langues secondes, article 11.
La CECQ croit que la recommandation du Conseil supérieur de
l'éducation, complétée par les observations que nous avons
soumises plus haut, constitue dans le domaine de l'enseignement la base juste
et équitable d'une nouvelle législation recherchée par les
membres de la présente commission parlementaire.
En conclusion, la Commission des écoles catholiques de
Québec recommande que la présente commission parlementaire
s'inspire largement des recommandations du Conseil supérieur de
l'éducation et de nos observations. La CECQ croit que cette position du
Conseil supérieur de l'éducation en matière de langue
d'enseignement obtiendra au niveau provincial le même consensus que celui
qui a su rallier les membres du Conseil supérieur de l'éducation,
membres qui sont nommés par le gouvernement et qui proviennent des
multiples communautés linguistiques et religieuses du Québec.
La Commission des écoles catholiques du Québec tient
à remercier toutes les personnes qui ont apporté leur
collaboration à la préparation du présent mémoire
et elle exprime à la commission élue permanente de
l'éducation, des affaires culturelles et des communications le voeu que
son rapport puisse contribuer au bien de la communauté
québécoise. Nous vous remercions de nous avoir entendus.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci,
M. Forgues. M. le ministre.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, permettez-moi
d'abord de remercier les représentants de la CECQ d'être venus
nous présenter ce mémoire. Il est très important que nous
entendions les sons de cloche des commissions scolaires, notamment de celles
qui ont de lourdes responsabilités, comme la CECM et la CECQ.
Vous êtes l'une des commissions scolaires où la loi 63 a eu
le plus d'impact en proposant le libre choix de la langue d'enseignement.
Cependant, j'ai eu beau chercher le moindre commentaire là-dessus dans
votre mémoire, je ne l'y ai pas trouvé. Ma première
question serait de vous demander combien de francophones se trouvent, à
l'heure actuelle, dans les écoles anglophones de la CECQ. Je me serais
attendu à ce que ces chiffres paraissent notamment au tableau A.
J'aimerais que vous puissiez, pour éclairer notre lanterne, nous
indiquer, pour chacune des écoles qui sont sous votre
responsabilité, le pourcentage d'élèves francophones qui
se sont prévalus de la liberté accordée par la loi 63. Et
j'aimerais que vous m'indiquiez également, si le chiffre est
significatif, combien il y a de Néo-Québécois qui ont pris
des places d'élèves dans ces écoles anglophones.
M. Forgues: M. le ministre, cette question est assez complexe
puisque le tableau nous fait voir les statistiques globales pour les deux
écoles anglophones: l'école élémentaire
Saint-Patrick et
l'école secondaire. Il faut se rappeler que les clientèles
indiquées pour chacune des années ne sont pas uniquement des
clientèles de la CECQ, mais les élèves de la Commission
des écoles catholiques de Québec plus ceux de 14 autres
commissions scolaires que nous desservons. On sait que la clientèle de
la Commission des écoles catholiques de Québec est en
période décroissante depuis 1969-1970. Pour l'ensemble de notre
population, nous avions, à l'époque, 32 900 élèves.
A la rentrée de septembre 1977, nous aurons un peu plus de 20 400
élèves. Nous aurons donc perdu tout près de 13 000
élèves en moins de huit ans.
Côté anglophone, on remarque des courbes à peu
près semblables. Mais les commissions scolaires de banlieue sont en
nette progression. On n'a qu'à examiner les statistiques qui concernent
la régionale Chauveau. Alors que nous connaissons une période de
dépopulation, elle est en période de croissance. Même
phénomène pour Jean-Talon. Ce sont donc des
phénomènes qui vont parfois en sens inverse qu'on retrouve ici de
façon plus globale.
En ce qui concerne les élèves de la CECQ, je demanderais
à M. Lacasse s'il peut apporter des précisions sur le nombre
d'élèves qui sont de notre territoire.
M. Lacasse: Je pourrais dire, M. le ministre, que dans la
population desservie par notre commission scolaire et qui réside
effectivement sur notre territoire géographique, il y a environ 40% de
ces étudiants qui sont dans nos deux écoles anglaises et qui sont
francophones, et environ 10% qui sont allophones.
Ce qui reste, ce sont des anglophones de notre territoire
géographique. C'est, en gros, des chiffres qui nous situent dans le sens
de la question que vous posez.
M. Morin (Sauvé): C'est un chiffre qui compte parmi les
plus élevés du Québec, je pense que vous en êtes
conscient, ces 40%. Je me serais attendu que votre commission scolaire se
penche un peu sur ces problèmes de l'école francophone et du
passage d'un nombre aussi important, d'un pourcentage aussi important
d'élèves du secteur francophone au secteur anglophone. Votre
mémoire, au contraire, semble se préoccuper uniquement des
problèmes des anglophones. Cela m'a un peu étonné, je vous
l'avoue; je me serais attendu que vous parliez, au moins également, des
problèmes des deux communautés que vous avez sous votre
responsabilité et qui semblent, à ce que vous nous dites,
coexister très bien.
A cet égard, je ne m'explique pas que vous ne fassiez pas
allusion de façon plus directe à ces problèmes qui ont
été engendrés par la loi 63, auxquels la loi 22 a
tenté, vaille que vaille, de répondre et auxquels le
gouvernement, à nouveau, tente d'apporter un correctif qui soit plus
efficace. J'aimerais que vous m'expliquiez comment vous avez
rédigé ce mémoire, qui l'a rédigé. A la page
1, vous faites allusion à cela. Vous nous dites: Les membres qui ont
collaboré à la préparation du présent
mémoire oeuvrent à la CECQ à divers ti- tres:
commissaires, parents, cadres des services, cadres des directions
d'école, professionnels non-enseignants et enseignants. Tous ont
apporté, à l'invitation de la direction générale,
une aide précieuse pour exprimer le point de vue du milieu scolaire.
J'aimerais savoir comment s'est faite exactement la rédaction de
ce mémoire. Qui a invité qui? Comment se fait-il qu'il y ait
cette espèce de déséquilibre dans la présentation
de la problématique de votre commission scolaire? Comment se fait-il
qu'il faille vous interroger pour découvrir qu'il y a 40% de
francophones dans les écoles anglophones de votre territoire, ce qui est
certainement un problème considérable puisqu'on ne trouve des
chiffres semblables à peu près nulle part ailleurs? Pourriez-vous
également me dire à quelle époque cela a été
rédigé? J'imagine que c'était à l'époque de
la présidence de M. Dawson, probablement, ou si c'était
antérieurement? Quand cela a-t-il été
rédigé? Bref, j'aimerais que vous me fassiez la genèse de
ce mémoire.
M. Ciaccia: Excusez-moi, M. le Président, avant qu'on ne
réponde. Est-ce que le ministre me permettrait de lui demander s'il
craint l'anglicisa-tion du Québec, de la ville de Québec? Est-ce
pour cela, vos questions?
M. Morin (Sauvé): M. le Président, c'est une
question frivole. J'ai posé des questions à nos invités et
j'attendrai maintenant la réponse; je pense qu'ils ont des tas de choses
à nous dire.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je
demande aux invités de répondre, s'il vous plaît.
M. Paradis: II y a un certain nombre de points que vous avez
soulevés. Je voudrais tout de suite disposer d'un point que vous avez
soulevé à la toute fin; M. Dawson n'a pas participé, en
aucune façon, à la rédaction du mémoire. Je
voudrais tout de suite écarter cette réflexion.
Le deuxième point que je voudrais aborder, c'est la question de
la cueillette des données. Sur la demande du conseil des commissaires,
à la séance du 26 mai, sauf erreur, du 15 mai, excusez-moi, le
conseil nous a demandé de recueillir un certain nombre
d'éléments en vue de nourrir la pensée du conseil pour la
présentation de ce mémoire. Nous avons donc réuni
différentes composantes de la commission scolaire pour recueillir, face
à la loi 1, les points d'interrogation que cela pouvait soulever. Donc,
les personnes qui sont mentionnées en page 1 furent réunies. Nous
avons colligé un certain nombre de données et par la suite un
comité ad hoc, formé de commissaires et entouré de
quelques cadres, ont fait état des données recueillies. Les
commissaires ont articulé le plan de ce mémoire, l'ont
proposé, dans un deuxième temps, aux membres du comité
exécutif, qui nous ont demandé de procéder à la
rédaction du mémoire en tenant compte des idées qui
avaient été retenues par le comité ad hoc.
Par la suite, le mémoire fut présenté au conseil
des commissaires, qui l'a adopté tel qu'il fut rédigé.
M. Morin (Sauvé): Pourriez-vous nous expliquer cette
insensibilité au problème des 40%, par exemple?
M. Paradis: Pour ce qui est des 40%, je voudrais souligner que le
mémoire fut rédigé en tenant compte de ce que nous
observons dans notre milieu. Je fais ici carrément allusion au fait que
les problèmes qui se posent dans la ville de Québec sont assez
différents de ceux de la CECM ou du territoire de la région de
Montréal. Je pense qu'on peut dire que, dans une très large
mesure, la population francophone est très largement
représentée et forme plus de 90% de la population de notre
territoire et des territoires avoisinants.
Lorsque vous utilisez le pourcentage de 40%, il peut sembler assez
élevé, mais c'est 40% d'une population qui est actuellement
à 1400 élèves et qui ne concerne pas seulement la CECQ,
mais aussi le territoire avoisinant; 40% font une image forte, puissante, mais
si on prenait uniquement les anglophones de la CECQ, on parlerait de 700 sur
environ 21 878. C'est donc une proportion minime et cette proportion, si on
applique maintenant les 40%, est réduite d'autant. Ce sont les
réflexions que je ferais.
J'en ajouterais une dernière, si vous permettez. Le
mémoire ne met peut-être pas suffisamment l'emphase sur des points
qui apparaissent en page 9. Nous aurions voulu développer davantage,
mais nous avons appris tardivement qu'il y avait une date, un délai de
fixé et que ce délai était formel, qu'on ne pouvait pas le
passer.
Donc, dans la rédaction, nous n'avons pu donner tout ce que nous
aurions voulu apporter comme renseignement. Si on arrête au bas de la
page 9, on comprend les intentions réelles de la CECQ. D'abord cette
nécessité que nous voyons pour le gouvernement de créer un
climat francophone dans toutes les sphères d'activité, pour que
l'école puisse y jouer son rôle véritable. Si on retourne
aux propos du Conseil supérieur de l'Education, c'est
développé à l'article 2 de son communiqué du 21
février dernier.
Nous parlons également des critères
d'admissibilité. Nous soulignons aussi le souci que nous devrions avoir
pour maintenir l'unité familiale. Nous soulignons également les
tentatives qui devraient se poursuivre elles sont déjà
amorcées en vue de l'amélioration de l'enseignement du
français et aussi de l'anglais à titre de langue seconde. Nous
reconnaissons volontiers, sur ces deux derniers points, qu'il y a eu des
mesures de prises qui ont déjà produit certains résultats,
particulièrement en ce qui concerne l'enseignement de la langue
française, et les mesures annoncées en vue de spécifier
les programmes nous apparaissent déjà prometteuses.
En ce qui concerne l'amélioration de l'enseignement de l'anglais
à titre de langue seconde, nous avons profité des mesures que le
gouvernement nous a offertes afin de spécialiser des maîtres en
exercice, afin qu'ils puissent enseigner l'anglais à titre de langue
seconde.
Nous n'avons peut-être pas suffisamment développé
ces points. J'accepterais volontiers cette critique, mais reste que c'est tout
de même dans nos préoccupations, même si dans le
mémoire cela prend peu de place.
M. Morin (Sauvé): Je comprends que vous ayez
été bousculés par les délais. Effectivement, ce fut
le cas pour beaucoup de mémoires. Devant cette explication, je comprends
que vous n'ayez pu détailler sans doute certains de vos
problèmes. Il reste que ces 40% représentent tout de même
plusieurs centaines d'enfants, à moins que je ne m'abuse. Même en
chiffres absolus, c'est un phénomène dont, j'espère, vous
tiendrez compte, dans l'avenir en tout cas.
Un autre point sur lequel j'aimerais me pencher avec vous, c'est le
recrutement de vos enseignants anglophones. Cette particularité, comme
vous l'appelez, de la CECQ, qui consiste à recruter une proportion
d'environ 50% de ses professeurs anglophones hors du Québec, c'est un
autre record. J'aimerais que vous m'expliquiez comment vous procédez
pour recruter ces professeurs à l'extérieur du Québec.
J'aimerais que vous me décriviez également les efforts que vous
faites pour trouver des professeurs anglophones ici au Québec, où
nous en avons qui sont en chômage.
M. Paradis: Les mesures que nous avons prises je fais
appel au passé ont. été par le truchement des
journaux, à l'endroit des professeurs de la région de
Québec. Nous avons étendu nos demandes à la région
de Montréal et nous avons même dû, en certains cas, aller
au-delà des frontières provinciales pour faire appel à du
personnel qui dispenserait l'enseignement dans nos écoles anglaises.
Au cours des dernières années, il est souven-tefois
arrivé, même à la fin du mois d'août et, à la
limite, au début de septembre, de ne pas avoir le personnel complet pour
l'enseignement dans nos établissements. Nous avons pris des mesures
d'urgence, des professeurs qui acceptent de faire de la suppléance pour
un temps limité, afin qu'ils puissent dispenser l'enseignement à
des élèves qui, de façon officielle, n'avaient pas de
professeurs attitrés pour l'année.
En cours de septembre, nous arrivons à combler nos cadres, mais,
chaque année, enfin, presque chaque année, nous avons eu de la
difficulté à combler les postes ouverts dans nos deux
établissements et nous avons souventefois dû aller au-delà
des frontières provinciales pour obtenir du personnel.
M. Morin (Sauvé): Quand vous dites que vous avez dû,
à bien des reprises, aller au-delà des frontières
provinciales, voulez-vous dire par là que vous envoyez des
délégations à l'extérieur du Québec ou des
personnes, ou une personne à l'extérieur du Québec?
M. Paradis: Nous faisons appel par l'entremise des journaux. A ma
connaissance on me corrigera je ne pense pas que nous ayons
envoyé de personnel.
M. Morin (Sauvé): Ce sont donc des annonces tout
simplement que vous faites passer dans les journaux?
M. Paradis: Oui, c'est cela.
M. Morin (Sauvé): J'imagine que vous les mettez
également dans les journaux anglophones montréalais ou les
journaux anglophones de tout le Québec?
M. Paradis: Je le crois. C'est le bureau du personnel qui
s'occupe de cela, mais j'en tire la conclusion logique qu'on doit le faire.
M. Morin (Sauvé): J'aimerais en être assuré,
parce que c'est un phénomène qui est un peu, vous en conviendrez,
exceptionnel.
M. Paradis: M. McNamara, qui est directeur de l'école
secondaire anglaise, qui a travaillé à
l'élémentaire et qui travaille maintenant au secondaire,
répondra, de façon plus précise, à votre
question.
M. McNamara (W.J.): Nous plaçons des annonces dans le
Star, la Gazette et, normalement, au Soleil, ici à Québec. Ce
sont les trois journaux, surtout. Quand on dit en dehors de la province,
normalement, on réfère aussi au Ottawa Citizen, en
particulier.
Il faut aussi dire qu'on prend d'autres démarches. Nous allons
même au Bureau de placement des professeurs du Québec
métropolitain et au Centre de main-d'oeuvre, au cas où il y
aurait des enseignants canadiens. Si nous n'avons pas de réponse
positive, nous prenons d'autres moyens, comme avoir des professeurs qui sont
là de façon temporaire, des professeurs suppléants au mois
de septembre, comme le directeur général l'a souligné,
jusqu'à ce qu'on en trouve.
M. Morin (Sauvé): Est-ce que vous faites...
M. Paradis: M. le ministre, est-ce que vous me permettrez une
réflexion très brève?
M. Morin (Sauvé): Volontiers.
M. Paradis: Les difficultés de recrutement ne
résident pas seulement dans le fait qu'il faut trouver des professeurs
anglophones, mais il faut trouver des professeurs anglophones qui enseigneront
les mathématiques, par exemple, ou qui enseigneront la biologie, ou la
physique. A ce moment-là, les exigences allant plus loin, cela
entraîne, du même coup, des difficultés plus grandes pour
obtenir le personnel.
M. Morin (Sauvé): Dites-moi, est-ce que vous communiquez
avec la CECM ou avec d'autres commissions scolaires qui ont des professeurs
anglophones à leur service, éventuellement même avec le
PSBGM, d'autres commissions scolaires qui ont de nombreux enseignants
anglophones quelquefois en disponibilité? Est-ce que vous avez des
contacts suivis, de façon à faire l'impossible pour recruter vos
professeurs ici même au Québec? Vous n'ignorez pas qu'il y en a
qui ont de la difficulté à se recaser chaque année.
M. Paradis: Nous faisons appel à ces commissions scolaires
et M. McNamara pourra donner des précisions là-dessus, si besoin
en était.
M. McNamara: Ni de façon continue, ni
régulière, mais quand il me manque quatre ou cinq professeurs
à la fin d'août, je communique avec la CECM j'ai quelques
contacts là aussi avec l'école protestante ici de
Québec et aussi avec le St-Lawrence, le CEGEP anglais ici à
Sainte-Foy. Je vais même là consulter les dossiers pour voir si je
ne peux pas avoir là des enseignants canadiens ou
québécois.
M. Morin (Sauvé): Vous faites ça dans les derniers
jours du mois d'août?
M. McNamara: Dans les derniers jours du mois d'août,
oui.
M. Morin (Sauvé): Et les annonces dans les journaux
montréalais sont vers quelle époque?
M. McNamara: Encore au mois d'août. Parce qu'il y a...
M. Morin (Sauvé): Et les annonces dans le Ottawa
Citizen?
M. McNamara: Encore au mois d'août, à la fin du
mois. Voici pourquoi...
M. Morin (Sauvé): Et vous n'avez pas une idée des
besoins en personnel, des besoins de professeurs que vous pourriez avoir avant
la fin du mois d'août?
M. McNamara: Oui, mais notre commission scolaire, qui
déclare des surplus d'enseignants presque à chaque année,
veut s'assurer que, parmi ses surplus, il n'y a pas d'enseignants francophones
qui pourraient très bien faire l'affaire à St. Patrick, dans
notre cas, par exemple. Ce qui veut dire une analyse de dossiers, interview de
professeurs, quitte à m'en envoyer pour les interviewer pour voir s'ils
ont une connaissance suffisante de l'anglais, tout ça prend du temps.
Cela se fait normalement au mois d'août, quitte à voir s'il n'y a
pas de professeurs parmi notre surplus de francophones qui pourraient enseigner
à St. Patrick. Alors ces choses-là retardent.
M. Morin (Sauvé): Est-ce que vous n'avez pas une
idée du nombre de professeurs requis, cependant, beaucoup plus tôt
que cela?
M. McNamara: Oui, jusqu'à un certain point, mais avec le
bill 22, tel qu'il existait, et le bill 63 précédemment, il nous
arrivait toujours des élèves, évidemment, au mois
d'août. Le résultat des
tests linguistiques, avec le bill 22, nous arrivait aussi au mois
d'août et quelquefois au mois de septembre, ce qui voulait dire un
changement de clientèle, normalement en augmentant. Ce qui veut dire
aussi d'autres professeurs.
M. Morin (Sauvé): Je vous suggérerais d'essayer
d'accélérer vos procédures; attendre la fin du mois
d'août, évidemment, ce n'est pas étonnant que vous soyez
bousculés et que vous ne trouviez pas. Je pose la question au
président de la commission, est-ce qu'il n'y a pas moyen de vous
arranger pour accélérer ces procédures?
M. Forgues: Les prochaines actions qu'on va prendre, ce sera dans
ce sens pour tenter une accélération.
M. Morin (Sauvé): Je suis convaincu que si vous cherchez
ici même, au Québec, vous allez en trouver. Moi, j'en entends
parler beaucoup, en tout cas, d'enseignants anglophones qui cherchent du
travail, qui seraient bien heureux de savoir que vous avez des places, comme
ça, disponibles, à St. Patrick ou ailleurs, plutôt que
d'aller chercher 50% de votre recrutement à l'extérieur du
Québec.
M. Paradis: Un élément, M. le ministre, qu'il ne
faudrait pas oublier, c'est le fait que nous fassions affaires avec 14 autres
commissions scolaires où nos pouvoirs décisionnels sont assez
dilués. Nous pouvons cerner nos populations scolaires, mais nous sommes
tributaires, auprès des autres commissions scolaires, de
décisions qu'elles-mêmes peuvent prendre. Cela allonge les
circuits d'autant, et le fait que le pouvoir décisionnel leur
appartienne, ça nous donne des temps de réaction qui sont
écourtés d'autant.
M. Morin (Sauvé): Oui, oui, ça, je le
conçois et je vois que vous avez des problèmes particuliers. Mais
enfin, 50% d'enseignants recrutés à l'extérieur du
Québec, c'est quand même un record. Franchement, je vous tire mon
chapeau. Il me semble qu'il faudrait essayer d'améliorer cette
situation. Alors qu'on sait qu'ici même, au Québec, nous avons des
enseignants anglophones à placer. Je peux vous dire qu'il y en a.
Même, si vous cherchez des listes, on pourrait peut-être vous
aider.
Passons à autre chose, M. le Président, avec votre
permission. A la page 7 de votre mémoire, toujours, vous faites
allusion, au bas de la page, au rapport maître-élèves,
à la CECQ. Je ne sais pas si je lis correctement votre paragraphe,
est-ce que vous suggérez par là qu'il devrait y avoir, dans les
écoles anglophones, une proportion maître-élèves
plus favorable que dans les écoles francophones? Ce n'est pas ça
que vous voulez dire, sûrement.
M. Paradis: Non.
M. Morin (Sauvé): Vous voulez dire un abaissement de ce
qu'on appelait autrefois le ratio dans toutes les écoles.
M. Paradis: C'est ça.
Evidemment, les conventions collectives ne sont plus fondées,
comme vous le savez, sur le principe de la ratio. C'est maintenant un nombre
d'heures par enseignant. Les principes sont différents. Comment
arriveriez-vous à faire le point entre les conventions collectives et
cette proposition?
M. Paradia: Je concède, M. le ministre, que le rapport
maître-élèves n'est plus l'unique base. Il y a tout de
même un certain nombre de contraintes qui sont maintenant dans les
conventions collectives, entre autres le plafonnement à 30
élèves que nous ne pouvons dépasser, ou, si on le fait,
c'est avec un dégrèvement. C'est donc une dimension qui
apparaît maintenant dans la nouvelle entente provinciale et qui
présente les questions de façon différente.
M. Morin (Sauvé): Comme le temps passe, M. le
Président, j'aurais encore seulement une ou deux questions. Je vais les
poser rapidement pour donner la chance à mes collègues
d'intervenir s'ils le désirent. J'ai constaté, notamment à
la page 9, que vous endossez les recommandations que le Conseil
supérieur de l'éducation me faisait parvenir il y a quelque
temps, quant aux critères d'admission en particulier. Je crois
qu'effectivement il y a d'excellentes choses dans ce rapport que me fait le
Conseil supérieur, notamment pour ce qui est de la
nécessité pour le gouvernement de créer un climat
francophone dans toutes les sphères d'activités, le souci de
maintenir l'unité familiale au plan linguistique, qui, vous le savez, a
trouvé son écho dans la loi, l'amélioration de
l'enseignement du français, de même que de l'enseignement des
langues secondes, qui constituent vraiment des priorités
gouvernementales. J'ai l'impression que ce devront être des
priorités pour quelques années, si on veut vraiment arriver
à infléchir le cours des choses et à redresser la
situation actuelle. Là-dessus, nous n'aurons pas de querelles.
Cependant, pour ce qui est des critères d'admissibilité des
enfants à l'école anglaise, si j'ai bien compris, sans le
mentionner spécifiquement, vous vous ralliez au critère de la
langue maternelle qui est un critère que le gouvernement a
examiné longuement, je puis vous l'assurer.
Pourriez-vous me dire comment il serait possible de déterminer la
langue maternelle de certains enfants qui ne sont pas toujours de milieu
anglophone ou de milieu francophone, qui sont quelquefois de couples mixtes sur
le plan linguistique, ou encore qui viennent de l'extérieur et dont la
langue maternelle peut être aussi bien le grec que l'italien, que le
chinois, quoique là c'est un problème plus montréalais que
québécois? Mais il se trouve certainement, ici, à
Québec, un certain nombre d'immigrants venant de l'extérieur.
Comment établit-on la langue maternelle dans ces cas?
M. Paradis: Je reconnais volontiers, et je pense que les
commissaires sont de cet avis, que c'est un point assez délicat. Par
ailleurs, le Conseil supérieur de l'éducation, dans son dernier
avis, celui du 13 juin dernier, précise sa pensée et offre
de nouvelles pistes pour trouver une solution aux problèmes que
vous soulevez.
M. Morin (Sauvé): Vous voulez dire les registres des
hôpitaux, les registres de l'état civil, n'est-ce pas?
M. Paradis: C'est, dans son dernier avis, un certain nombre
d'éléments où le parent, le père, la mère
ou, à la limite, le tuteur, devrait, à la satisfaction de l'Etat,
fournir la preuve que l'enfant est anglophone. Il nous semble que dans cette
veine les solutions seraient plus faciles d'application que celles
qu'antérieurement nous avions entrevues.
M. Morin (Sauvé): Je puis vous dire là-dessus que
nous avons effectivement vérifié si les critères
suggérés dans l'abstrait par le Conseil supérieur de
l'éducation étaient applicables dans les faits, pour
découvrir que les registres en question ne nous apportaient pas les
lumières qu'ils étaient censés nous apporter. C'est l'une
des raisons pour lesquelles nous nous sommes rabattus, après
expérience et après avoir fait enquête, sur un autre
critère qui est celui de la langue d'enseignement des parents. Mais pour
en revenir à notre langue maternelle, supposons que par hypothèse
les registres de naissance ne nous donnent pas de renseignements sur la langue
maternelle, comme c'est le cas, je dirais, dans la majorité des cas.
Comment peut-on déterminer la langue maternelle dans les cas litigieux?
Doit-on s'en remettre simplement à une déclaration des
parents?
M. Paradis: Une simple déclaration, à mon avis,
risque de mener à des difficultés, mais qu'il appartienne aux
parents de faire la preuve que l'enfant est anglophone, cela m'apparaît
beaucoup plus poussé comme exigence. S'il leur appartient à eux
d'en établir la preuve, il y aura certainement bon nombre de cas qui
pourront être réglés par des mesures connues: appel
à des registres ou preuve par des fréquentations scolaires ou
autres.
M. Morin (Sauvé): Vous ne pensez pas que nous revenons aux
tests, de la sorte?
M. Paradis: Pas de prime abord.
M. Morin (Sauvé): Non? Expliquez-moi comment il est
possible de déterminer la langue d'un enfant si ses parents
déclarent mordicus être de langue maternelle anglaise? Cela s'est
vu sous l'empire de la loi 22; on a fait passer les tests et les tests nous ont
révélé que les enfants n'avaient pas la langue d'usage.
Les parents affirmaient dur comme fer qu'ils l'avaient. A la limite comment
vérifie-t-on une chose comme la langue maternelle?
M. Paradis: Je vous retourne la balle, M. le ministre, si vous me
le permettez. Actuellement, les parents qui déclareront avoir
fréquenté l'école élémentaire anglaise
pendant six ans, quelle preuve cela nous fournira-t-il que l'enfant parle
anglais?
M. Morin (Sauvé): C'est un critère objectif qui est
certainement plus précis que les autres et qui évite surtout les
tests. C'est surtout cela que nous avons à l'esprit.
M. Paradis: Qui pourrait aussi amener à l'école
anglaise un enfant francophone.
M. Morin (Sauvé): C'est possible que marginalement cela se
produise, mais...
M. Paradis: Nous avons des cas, M. le ministre.
M. Morin (Sauvé): ...je ne pense pas que ce soit
fréquent. Parmi tous les critères, je pense que c'est le plus
exact, le plus facile à manipuler. Il faut avouer que le critère
que vous nous suggérez, qui est celui de la langue maternelle, nous
ramène directement aux tests. On l'a examiné sous toutes les
coutures. Il était impossible d'éviter de revenir aux tests. Or
le gouvernement est tout à fait déterminé à n'en
pas tenir, il est tout à fait déterminé à modifier
les règles du passé, sur ce point.
M. le Président, pour ce qui est des règlements tant
attendus, comme vous le mentionnez à la page 6, vous savez que ces
règlements ont été adoptés le 8 juin vous
les avez à votre disposition désormais et qu'il y aura
cette semaine même des rencontres...
M. Paradis: Mercredi.
M. Morin (Sauvé): ...d'ordre administratif, mercredi,
justement, pour vous éclairer sur tous les détails de ces
règlements. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci,
M. le ministre.
Mme le député de l'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je veux d'abord
remercier les représentants de la Commission des écoles
catholiques de Québec. Je tiens à souligner que vous êtes
la première commission scolaire française à venir devant
la commission et je pense que votre mémoire apporte des
éléments nouveaux et des problèmes qui n'ont pas
été examinés à cette commission.
C'est fort dommage que le député de Taschereau ait
quitté, peut-être qu'il aurait trouvé qu'il n'y avait pas
uniquement des redites.
Je veux simplement reprendre certaines remarques du ministre. La
première démontrant que vous êtes fort coupables d'aller
chercher 50% de votre personnel à l'extérieur de la province.
Pourrait-il être de 40%, je l'ignore, mais il y a une chose, à
moins que la loi 22 ait eu de fort heureux résultats. C'est que la CECM,
jusqu'à j'ignore pour cette année cette
année devait aller aussi recruter à l'extérieur du
Québec, parce qu'avec la confessionnalité des écoles il
était extrêmement difficile pour la CECM de recruter son
personnel, non seulement à l'intérieur du Québec, mais
même à l'intérieur du Canada. Il se peut que le
problème soit un peu résolu maintenant que l'institut pour
la formation des maîtres anglo-catholiques à Montréal a
été intégré à l'Université McGill
où on forme et les professeurs catholiques et les professeurs
protestants de langue anglaise. Mais malgré toute votre bonne
volonté, je pense qu'il était extrêmement difficile pour
vous de recruter sur place à l'intérieur de la province des
professeurs de langue anglaise.
Je voudrais vous poser une question sur les statistiques alarmantes
soulignées par le ministre de l'éducation. Vous n'avez
mentionné que deux banlieues où la population scolaire a connu
une augmentation fort notable. Y a-t-il dans ces deux banlieues ou ces deux
commissions scolaires des élèves anglo-catholiques ou
viennent-ils tous chez vous?
M. Paradis: Dans le cas M. McNamara serait sans doute plus
au courant que moi, parce qu'il s'agit là de commissions scolaires, mais
sauf erreur de Chauveau, nous avons Shannon qui est sur le territoire de
Chauveau où il y a une communauté anglophone assez nombreuse,
assez stable, cependant. Il y a aussi Valcartier.
M. McNamara: Valcartier, Neufchâtel, Duber-ger, tout cela
fait partie de Chauveau.
M. Paradis: Pour répondre à la question de Mme
Lavoie-Roux, est-ce qu'il s'agit de populations stables ou bien si elles ont
tendance, elles aussi, à l'exemple du milieu...
Mme Lavoie-Roux: ...francophone à augmenter?
M. McNamara: ...francophone à diminuer aussi. Il y a aussi
une autre école anglaise catholique sur le territoire, dans la
région de Québec qui est à Sainte-Foy, Saint-Vincent, elle
est dans la régionale de Tilly. Elle dessert la section de Cap-Rouge et
Sainte-Foy. C'est une école peut-être un peu plus petite que la
nôtre, mais elle est là, elle existe.
Mme Lavoie-Roux: C'est quand même une augmentation
majoritairement francophone dans les banlieues de Québec. Les
écoles anglaises demeurent un phénomène assez marginal,
même dans Chauveau et Sainte-Foy dont vous venez de parler. Sur le
territoire de la CECQ, la population diminue. Ce que je trouve assez
intéressant, c'est que le ministre est très scandalisé de
vos 40% de population francophone et pourtant, il a retenu un critère
qui va maintenir cette population sinon l'augmenter.
J'aurais peut-être dû vous poser une question
préalable. Ces francophones, qui sont allés à
l'école anglaise, à votre avis se sont-ils, d'une façon
générale, anglicisés ou sont-ils allés là
apprendre l'anglais, langue seconde?
M. Paradis: II y a certainement un pourcentage assez large
personnellement, j'ai de la difficulté à le préciser
qui voulait apprendre l'an- glais par immersion. Je pense que cela s'est
pratiqué ici, à Québec, comme dans d'autres milieux. Quel
est le pourcentage exact? Qu'est-ce qu'il est advenu de ces gens? J'ai tendance
à croire M. McNamara fréquente beaucoup la
communauté anglophone ici, à Québec
personnellement, qu'il s'agit de cours d'anglais par immersion qu'on est
allé y suivre. Par la suite, si les gens sont demeurés à
Québec, qui est un milieu, dans une très large majorité,
de francophones, j'ai l'impression que les gens continuent à vivre en
français, mais ils ont eu l'occasion d'apprendre l'anglais de
façon autre que par les cours magistraux.
Mme Lavoie-Roux: Là-dessus vous êtes très
prudents quant à la loi 63 et la loi 22 pour analyser les
résultats et je pense qu'il faut vous en savoir gré
sur des périodes aussi courtes et, particulièrement quant
à la loi 22, d'en arriver à des conclusions absolument finales,
je pense que ce peut être difficile.
A ce moment-ci où la population française dans les classes
anglaises de toute façon, diminue puisque la population des
écoles anglaises diminue, on s'apprête à retenir un
critère qui aura pour effet d'aller chercher tous les enfants dont les
parents, possiblement, ont fréquenté l'école
française alors que le nombre de ces francophones dans les écoles
anglaises de la ville de Québec ou des environs devait être plus
grand qu'il ne l'est présentement.
Le ministre n'aime pas la recommandation... Les mots "n'aime pas", ce
n'est peut-être pas exact de ma part. Le ministre met de
côté la recommandation du Conseil supérieur de
l'éducation. Quand on ne veut pas retenir une solution,
évidemment, l'examen qu'on en fait peut être plus ou moins
objectif, je regrette de le dire. Je pense que les entrevues ne sont pas des
tests et peuvent, dans les cas douteux, trancher le débat à
savoir si un enfant est vraiment de langue anglaise, s'il appartient à
la communauté anglophone ou pas. Je ne veux pas discuter plus longuement
là-dessus, mais je trouve quand même un peu surprenant le scandale
du ministre de l'Education. Dans votre rôle historique, vous parlez de
l'école Notre-Dame-de-la-Garde.
M. Laplante: M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): Un instant, s'il vous
plaît.
M. Laplante: ...en vertu de l'article 100, Mme le
député de L'Acadie, pourriez-vous me dire la différence
qu'il y a entre le test et l'entrevue? Selon votre façon de le voir,
quelle est la différence entre un test et une entrevue pour
l'acceptation d'un enfant?
Mme Lavoie-Roux: Je pense que le député de
Bourassa, qui était à la CECM, sait fort bien la
différence entre les deux.
M. Laplante: Non, j'ai vu que c'étaient tou-
jours des tests qu'on passait à ces entrevues. C'était
égal à cela à la CECM.
Mme Lavoie-Roux: Bon, il faudrait retourner à
l'école. Je retourne au rôle historique. Oui, c'est une
question...
Le Président (M. Cardinal): Permettez-vous, excusez-moi
pendant qu'il y a...
M. Laplante: Tâchez de donner votre position
là-dessus pour nous éclairer; peut-être que les gens ne
différencient pas ici en avant.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît! Un instant. Pendant qu'il y a une interruption, qui ne vient pas
du président, nous nous dirigeons très rapidement vers 23 heures.
Nous entendrons, comme a déjà dit le ministre d'Etat au
développement, la cloche du beffroi de Québec sonner et
normalement nous ajournerions. Si nous continuons le débat, nous en
avons certainement, comprenant les réponses, les interruptions, les
questions de règlement et tout d'après la pratique habituelle,
jusqu'à 23 h 30. Avant de couper quelqu'un dans une réponse ou
dans une question, je voudrais avoir l'avis de la commission.
A moins, oui?
M. Charbonneau: De ce côté-ci de la Chambre, je peux
vous dire que 23 heures, pour nous, c'est le délai maximum, parce que je
pense à ce qui est survenu avant l'audition de ce groupe. Nous n'avons
pas l'intention de porter l'odieux du retard et de la procédurite, une
espèce de faux simulacre qu'on a tenté de nous faire avaler. Je
pense que 23 heures, pour nous, c'est le délai maximum.
Le Président (M. Cardinal): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je vous ferai remarquer
que, sur les interventions qui ont été faites au sujet de la
Régie de la langue française, le ministre a pris au moins autant
de temps que les députés.
M. Charbonneau: Non, non, non, non.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Charbonneau: On ne charriera pas sur cela mais...
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! A cette heure-ci ne
m'obligez pas d'office à ajourner. Je vais poser une question aux
représentants de la CECQ; comme vous êtes de Québec, est-ce
que vous êtes disposés à revenir ici demain matin, à
dix heures?
M. Forgues: On sera ici demain à dix heures.
Le Président (M. Cardinal): Dans ce cas, je pense que Mme
le député de l'Acadie, les membres de la commission seraient
d'accord. Je vais tout simplement ajourner les travaux de la commission
à demain matin, dix heures. Merci à tous.
(Fin de la séance à 22 h 58)
ANNEXE 1
Mémoire de Participation Québec Analyse de la charte de
la langue française Préambule "Participation-Québec"
croit que le premier paragraphe du projet de la Loi no. 1 est dangereusement
faux. Que le français 'soit depuis toujours, la langue de la
majorité des québécois n'est pas discutable; mais il est
faux de déclarer que le français est actuellement et depuis
toujours la langue du peuple québécois. Depuis des
siècles, les citoyens du Québec ont parlé d'autres langues
afin d'exprimer leur identité culturelle.
Donc est exclu par la définition du préambule du "peuple
québécois", tous ceux qui ne sont pas francophones. Si la
législature entend poursuivre son objectif dans son climat de justice et
d'ouverture à l'égard des minorités, il faut que soit
accepté dès le début, que ces minorités font partie
du peuple québécois.
Chapitre premier - La langue officielle du
Québec
Le premier chapitre du projet de loi no. 1 est une copie exacte de la
section un de la Loi sur la langue officielle, S.9. 1974 c.6. Or,
"Participation-Québec" est d'avis que le sens de la section a
été modifié fondamentalement de telle sorte que la section
elle-même devrait être changée.
"Participation-Québec" soutient le principe que le
français est la langue d'usage du Québec et que tout
québécois doit apprendre à s'exprimer en français.
Mais "Participation-Québec" s'oppose fermement à une
interprétation de la "langue officielle" qui poussée jusqu'au
bout exclut l'usage légal des langues autres que le français dans
les sphères où l'utilisation d'une autre langue est essentielle
pour faire durer l'existence et la vitalité des minorités
linguistiques au Québec. "Participation-Québec" suggère
que la position préconisée par la Commission Gendron soit
adoptée. Ainsi le français serait la langue nationale et d'usage
du Québec et le respect dont jouissait la langue anglaise dans le
passé serait maintenu.
Chapitre II - Droits linguistiques
fondamentaux
L'affirmation des droits de chaque francophone du Québec pour un
usage courant de sa langue dans toutes ses activités, tel
qu'exprimé dans les sections 2 à 6 de la charte, est
nécessaire pour la survie de la culture française au
Québec. "Participation-Québec" appuie ce principe, par contre,
l'application de celui-ci dans les autres articles de la loi nous
inquiète sérieusement.
Chapitre III - La langue de la législation et
de la justice
Dans le préambule du projet de Loi no. 1, notre gouvernement
déclare entendre poursuivre son objectif dans un climat de justice et de
l'ouverture à l'égard des minorités qui participent au
développement du Québec. Nous croyons que la section du projet de
loi qui traite de la langue de la législation et de la justice ne
rejoint pas cet objectif et rend suspecte la volonté du gouvernement de
l'atteindre. On peut même se demander si notre gouvernement
reconnaît et souhaite le fait que les minorités peuvent contribuer
au processus législatif et gouvernemental.
Les articles 7, 8 et 9
Le gouvernement québécois devrait rechercher deux
objectifs. Tout d'abord il devrait rechercher la justice, en introduisant des
lois nouvelles et en mettant à date celles qui existent
déjà. Deuxièmement il devrait assurer que le processus
démocratique, qui est le fondement de toutes nos libertés, soit
respecté. Mais la position adoptée par le gouvernement dans le
projet de Loi no. 1 ne peut qu'avoir pour résultat qu'une inutile
méfiance et de la confrontation.
L'article 7 consacre la langue française comme langue de la
justice au Québec. Il n'est pas clair si cet article s'applique aux
tribunaux judiciaires et quasi-judiciaires, le projet de loi ne comprenant
aucune définition du mot "justice".
La législation sur la langue n'exige pas que les projets de loi
soient accompagnés d'une version anglaise lorsqu'ils sont
déposés à l'Assemblée nationale. Dans notre
système démocratique de gouvernement, c'est à cette phase
que la contribution du pubiic peut être la plus profitable.
Les minorités de notre province ont une contribution importante
à faire au processus législatif. Leur nombre, leur
diversité, et leur expérience rend impératif qu'ils ne
soient pas exclus du débat.
L'article 10
Cet article requiert qu'on imprime en public une version anglaise des
textes de lois. Il omet de reconnaître que la plupart des lois sont
formulées en fait par l'Exécutif au moyen de règlements.
Les règlements ne sont pas des "textes de lois". Dans la plupart des cas
des règlements sont aussi importants que la loi habilitante. Il faut
qu'une version anglaise des règlements soit publiée avant qu'ils
ne deviennent la loi, afin de permettre un débat ouvert à tout
québécois.
L'article 11
L'article 11 ne spécifie pas que les individus qui ne sont pas
francophones ont le droit d'être représentés devant les
cours en anglais. Il faut corriger cette omission.
Le projet de loi crée une distinction artificielle entre
l'individu qui agit pour lui-même et celui qui agit pour une compagnie,
qui peut-être n'est que son alter ego.
C'est le cas à la cour des petites créances. Une compagnie
devant la cour des petites créances ne peut pas être
représentée par un avocat. L'individu qui y représente la
compagnie et qui ne parle pas couramment le français se verra nier son
droit de répondre pleinement et de se défendre contre les
allégations portées contre lui.
Ceci ne met pas en valeur la position et le prestige de la langue
française, ni ne met en valeur notre système de justice.
La rédaction actuelle de l'article veut que toutes les parties
plaident en anglais s'il y a un accord d'après lequel une partie peut
plaider en anglais. Ceci est peut-être une conséquence
imprévue de l'article et devrait être corrigé.
Il est universellement reconnu que le système juridique de notre
province fonctionne actuellement presque exclusivement en français,
exception faite lorsque les meilleurs intérêts de la
protection
des droits des parties l'exige. Selon l'Honorable Robert Burns, une
exception est la profession légale. Nous préférons le voir
comme un exemple de ce que peuvent accomplir la bonne volonté, un sens
de coopération et la recherche d'un objectif commun. Il n'y a aucun
motif qui peut justifier le remplacement de ce sentiment d'harmonie et
d'accomplissement par un système de coercion et d'entraves
insignifiantes qui gênerait la protection des droits de tout
Québécois. Toute personne, morale ou autre, devrait avoir le
droit de plaider en anglais ou en français, à son gré.
L'article 13
L'article 13, qui fait de la version française d'une
décision rendue en anglais le seul texte officiel,
méconnaît l'importance de la fonction remplie par nos cours et les
officiers de justice. En fait, il y aura jugement par un traducteur au lieu du
juge qui a rendu la décision en anglais si la traduction n'est pas
exacte. Tout au moins, on devrait exiger que la traduction d'un jugement rendu
en anglais soit authentifiée par le juge qui l'a rendu.
Chapitre IV - La langue de l'administration
Les articles 15 & 16
Nous rejetons la proposition que seuls les textes et documents tenant
à la santé ou à la sécurité publique et
"autres cas" peuvent être accompagnés d'une traduction du
français; nombreux sont des avis qui ne concernent pas la santé
ni la sécurité publique, mais qui concernent d'autres questions
d'importance vitale. Par exemple: l'expropriation, les changements dans les
règlements du zonage, les élections, les offres d'emploi pour la
fonction publique, etc.. Ces documents et textes doivent être disponibles
au plus grand nombre de québécois que possible. A cette fin, le
gouvernement doit fournir ces textes et documents en anglais.
L'article 17
Cet article prévoit que le gouvernement peut joindre à sa
réponse une traduction dans la langue de son interlocuteur lorsque ce
dernier s'est adressé à lui dans une langue autre que le
français. L'expression "il lui est loisible de joindre" devrait
être remplacée par l'expression "doit être jointe" afin de
garantir que ceux qui communiquent avec le gouvernement en anglais recevront
réponses dans cette langue.
Nous soutenons le principe que les contrats avec l'administration soient
rédigés en français. Mais notre gouvernement ne devrait
pas intervenir dans les relations privées contractuelles. Donc
l'expression "y compris ceux s'y rattachant en sous-traitance" devrait
être rayée de l'article 18.
Les articles 19 & 20
Les nominations dans l'administration devraient être basées
tout d'abord sur la compétence de l'individu. En évaluant la
compétence, on ne devrait pas prendre en ligne de compte la langue
parlée par l'individu. Si l'individu est aussi compétent que
n'importe quel autre candidat, mais n'a pas de la langue française une
connaissance suffisante, le gouvernement devrait lui permettre d'apprendre le
français au travail.
Ce n'est que par ce moyen que le respect des minorités, principe
qui est censément reconnu par le projet de loi, peut trouver son
application vis-à-vis l'administration.
L'article 23
Lorsque la majorité d'une population administrée par une
commission scolaire est de langue anglaise, il est ridicule d'exiger que le
français soit la seule langue des communications à
l'extérieur de la commission. Se conformer à l'article 23
créerait un paradoxe. Une commission scolaire qui ne fonctionnerait et
ne communiquerait qu'en français contrôlerait des écoles
fonctionnant en anglais. Dans le cas des municipalités et des
commissions scolaires où il y a une minorité significative qui
parle anglais (15%) on devrait permettre des communications internes
bilingues.
Chapitre V - La langue de certains organismes
parapublics
La loi doit reconnaître que les services de santé et les
services sociaux communautaires et des entreprises d'utilité publique,
dont une proportion significative des clients parle une langue autre que le
français, puissent exiger que leurs employés puissent communiquer
dans cette langue...
L'article 27
II faut que les ordres professionnels aient le droit de communiquer avec
leurs membres et le public en français et en anglais.
L'article 30
Lorsqu'une connaissance de français est nécessaire, les
ordres professionnels ne devraient délivrer de permis d'exercer au
Québec qu'à des personnes ayant de la langue française une
connaissance suffisante. A cette fin, le gouvernement devrait offrir des cours
de langue française à ses frais.
Les ordres professionnels et le gouvernement devraient déterminer
conjointement quand une connaissance de français est requise et ce qui
constitue une connaissance suffisante pour cette profession.
L'article 31
Nous sommes d'accord qu'un candidat à un ordre professionnel peut
faire la preuve de sa connaissance de la langue française dans les deux
ans précédant l'obtention d'un diplôme.
L'Article 32 (2)
Cet article devrait être changé afin de permettre le
renouvellement annuel des permis sans le contrôle du gouvernement et de
l'ordre professionnel particulier auquel l'individu est inscrit. La
législation devrait comprendre une disposition qui permettrait
d'accorder, si justifié, un statut permanent garanti, surtout dans le
domaine de la recherche professionnelle. L'Article prévoit que les
permis ne sont renouvelables que si l'intérêt public le
justifie.
Le gouvernement et l'ordre professionnel devraient déterminer
conjointement ce qui constitue l'intérêt public; autrement, la
disposition pourrait conduire à l'abus et à
l'indiscrétion.
Cet article précise aussi que les intéressés
doivent se présenter à des examens. Il n'est pas clair quelle
matière sera couverte. S'agit-il d'examens sur la langue? Dans
l'affirmative, le seul objectif visé par la délivrance d'un
permis est le fait qu'un individu n'a pas une connaissance suffisante du
français. Donc, on n'a pas besoin d'examiner quelqu'un afin de confirmer
son manque de connaissance.
Chapitre VI - La langue du travail
L'article 35
Nous sommes d'avis que les modifications que nous avons
recommandées au sujet de l'article 13 s'appliquent à l'article 35
pour des motifs semblables. Donc, la dernière phrase du premier
paragraphe devrait être rayée.
L'article 36
On doit remarquer que l'article aurait été superflu si la
charte des droits de l'homme n'avait pas été rejetée, une
protection adéquate des employés contre la discrimination
étant prévue à cette charte.
Trois problèmes peuvent être causés par cet article.
Tout d'abord on risque d'accroître la tension entre employés et
employeurs en donnant à un commissaire-enquêteur nommé par
le Code du Travail, juridiction vis-à-vis une prétendue
infraction de la Loi sur la langue. On pourrait mieux promouvoir la paix
industrielle en donnant à un arbitre nommé par l'Office de la
langue française la juridiction que l'article 36 donne au
commissaire-enquêteur.
Deuxièmement, au cours des années, la nature d'un emploi
peut changer. Au début de l'emploi un français unilingue pourrait
suffire; subséquement, les exigences de la position pourraient changer,
nécessitant le reclassement à un emploi bilingue. Ainsi, un
mécanisme semblable à celui prévu à l'article 37
devrait être établi. Un employeur devrait avoir le droit de
s'adresser à l'Office de la langue française afin de faire
reclasser une position.
En troisième lieu, la prohibition de l'article 36 ne devrait pas
s'appliquer dans le cas d'un employé qui obtient sa position sur la base
de son bilinguisme conformément à l'article 37, et qui refuse
subséquemment d'utiliser une langue autre que le français dans le
cours de son emploi ou démontre subséquemment qu'il n'a pas en
fait une connaissance suffisante de la deuxième langue.
L'article 37
Nous acceptons le principe de l'article 37, mais, on exigerait de
l'Office que soient anticipées par le moyen des règlements, les
exigences des emplois et autres circonstances qui règnent dans tout
secteur du marché du travail et de tout employeur qui opère dans
ce secteur. L'employeur devrait déterminer si une connaissance d'une
langue autre que le français est nécessaire. Le futur
employé devrait
avoir le droit de contester la détermination de l'employeur par
moyen d'un appel à l'Office, auquel cas, le fardeau de la preuve devrait
être fait par l'employeur.
Chapitre VII La langue du commerce et des
affaires
L'article 41
Comme l'objectif du projet de Loi no 1 est de favoriser la langue
française et non pas de dénigrer l'usage d'autres langues,
"Participation-Québec" est d'avis que le paragraphe 3 de l'article 41
devrait être classifié de la manière suivante: "L'Office de
la langue française peut faire des règlements pour assurer que le
français est présenté de façon prédominante,
ou à tout le moins le faire figurer d'une façon aussi
évidente que tout autre langue; mais il n'a pas le pouvoir de prohiber
l'usage de tout autre langue".
D'après la rédaction actuelle de l'article, d'importants
pouvoirs discrétionnaires sont donnés sans
nécessité à l'Office de la langue française, ce qui
peut conduire à des abus.
L'article 42
L'article 42, dans sa forme actuelle, ne comprend pas assez d'exemptions
à l'article 41 du projet de loi. Les spécialités qui
pourvoient à des petits marchés locaux doivent constituer une
autre exemption pour que les produits tels que les aliments de
spécialité ethnique puissent être toujours disponibles dans
la province.
L'article 43
Si "Participation-Québec" apprécie le sens et l'objectif
de la disposition concernant les jouets et les jeux,
"Participation-Québec" est d'avis que le gouvernement ne devrait pas
intervenir dans ce domaine. "Participation-Québec" ne préconise
ni la conservation de jeux anglais unilingues, ni l'assimilation d'innocents
enfants francophones. "Participation-Québec" s'intéresse
plutôt à l'idée fondamentale que le gouvernement peut
intervenir dans toutes les sphères de l'existence d'un individu et
à cette fin peut créer une bureaucratie superflue.
L'article 46 "Participation-Québec" rejette la proposition que
l'affichage commercial doit se faire uniquement en français. S'il est
vrai que l'affichage destiné au public, tel que défini par
l'article 46 de la charte, ne reflète pas actuellement la
société québécoise, le remède
suggéré est trop hardi. Si l'intention est de faire
refléter la société québécoise dans
l'affichage destiné au public, faites-le d'une façon exacte, en
reflétant les parties de la société
québécoise qui ne sont pas francophones. L'image d'un "Chinatown"
français unilingue serait amusante, si elle n'était pas si
tragique.
Que le français domine ou tout le moins figure d'une façon
aussi évidente que tout autre langue utilisée pour l'affichage
commercial est juste et acceptable; une législation semblable a
été adoptée en France en 1975 et
"Participation-Québec" la supporte pleinement.
Que le français seul soit la langue d'affichage est une
proposition qui polarisera et attisera les minorités, supprimera d'une
façon fausse toute expression publique de l'existence et de la
vitalité des minorités et militera contre une participation
croissante des minorités dans la vie du Québec. Nous ne
connaissons aucun pays du monde qui supprime à tel point cette forme
d'expression publique des minorités linguistiques.
Sans doute, le gouvernement réalise qu'il impose un fardeau
financier aux milliers d'institutions qui pourront difficilement supporter les
frais additionnels. Cette disposition représente un fardeau
particulièrement injuste en ce qui concerne les établissements
qui se sont montrés de bonne foi, en modifiant leurs enseignes pour se
conformer aux exigences du projet de Loi 22. Le fardeau de transition
imposé par le projet de Loi no 1 n'est pas allégé par le
prolongement des délais qui leur est donné.
Les articles 48 à 50 "Participation-Québec" appuie le
principe que les raisons sociales doivent être en langue
française. Mais il rejette l'ethnocentricité du paragraphe 2 de
l'article 50 du projet qui rendrait illégale l'utilisation d'une autre
version. Les compagnies et les sociétés dépendent
fortement de leur réputation et de l'achalandage engendrés par
leurs raisons sociales et la mise en vigueur de l'article 50 n'est ni moins que
l'expropriation sans compensation d'un actif d'une compagnie ou
société par le gouvernement.
"Participation-Québec" suggère que la raison sociale
française soit utilisée en tout temps, mais que soit aussi
permise l'utilisation d'une version dans une autre langue.
La mise en vigueur de ces articles, rendant illégale
l'utilisation d'une version autre que celle uniquement en français, ne
changera ni la nature ni la propriété de ces
sociétés et fera énormément croire à
beaucoup de Québécois que le contrôle étranger des
biens au Québec est moindre qu'il ne l'est actuellement. La solution
n'est pas un blanchiment linguistique qui cachera la question de la domination
de l'économie par des étrangers.
Chapitre VIII - La langue de l'enseignement
Le système le plus équitable en ce qui concerne la langue
de l'enseignement serait de choisir entre deux extrêmes: soit une
liberté de choix complète, soit un système unitaire
d'écoles pour tout le monde. Mais ni l'un ni l'autre de ces choix ne
saurait satisfaire aux besoins scolaires des divers groupes linguistiques et
ethniques du Québec.
Aussi, la solution réaliste se trouve quelque part entre ces deux
extrêmes. Il s'agirait, moyennant certaines exceptions, de donner au
niveau primaire et secondaire l'enseignement dans la langue française.
Les exceptions nous amènent inévitablement à faire des
distinctions entre les différents groupes résidant au
Québec. Répugnant à la notion d'égalité
devant la loi visée par des groupes civiques, l'objectif fondamental
devrait donc être de faire le minimum de distinctions possible.
Nous ne prétendons pas parler pour les québécois
francophones, qui, représentant 80% de la population, peuvent exprimer
leurs propres opinions. Mais nous soumettons que les exceptions prévues
à l'article 52 devraient être plus nombreuses afin de donner
à tout non-francophone au Québec à l'époque de la
promulgation de la loi, la liberté de choix. Ce choix s'appliquerait
à tout enfant dont au moins un des parents à reçu un
enseignement primaire ou secondaire n'importe où dans le monde.
Ainsi on garantirait le droit à l'enseignement en anglais
à chaque anglo-québécois. Il y aurait aussi un effet plus
équitable que sous le projet de Loi no. 1 vis-à-vis les
immigrants qui sont venus au Québec avec des aspirations
légitimes avant la promulgation du projet de loi et qui n'ont pas encore
d'enfants dans le système d'éducation du Québec. On
évite ainsi l'inéquité de la rétroactivité.
Le Dr Laurin a déjà déclaré en public que ces
immigrants sont peu nombreux. S'il en est ainsi, il ne sera pas dommageable
à la survivance de la langue française de se conduire avec ce
petit groupe de la même façon qu'avec les immigrants dont les
enfants sont déjà dans les écoles
québécoises.
Nous sommes d'accord que les enfants de tout immigrant futur qui vient
d'hors du Canada, devraient aller à l'école française
à condition que les agents d'immigration du Canada ou du Québec
indiquent clairement à chacun d'eux avant qu'il ne quitte leur patrie,
les effets de la loi sur la langue sur leur vie au Québec.
Nous sommes d'accord avec la C.E.Q. que les écoles anglaises du
Québec devraient être accessibles à tout enfant dont l'un
des parents a reçu l'enseignement primaire en anglais n'importe
où au Canada. Nous proposerons en outre que cette exception comprenne
l'enseignement secondaire aussi bien que l'enseignement primaire.
Adhérer à la position actuelle du gouvernement c'est traiter tous
ceux qui viennent des neuf autres provinces comme immigrants au Québec
après la promulgation du projet de loi.
De tels immigrants ne causeraient pas l'expansion du système
d'écoles anglaises au Québec. En effet, les statistiques montrent
qu'il y a plus d'anglophones qui quittent le Québec qu'il y en a qui y
arrivent.
Le Dr Laurin a fait mention de statistiques qui attestent autrement. Si
de telles statistiques existent, elles devraient être
publiées.
Le gouvernement n'ignore pas que le fait d'interdire l'enseignement en
anglais aux "immigrants" canadiens anglophones éventuels aura des
répercussions néfastes sur l'habilité de plusieurs
compagnies québécoises d'attirer les employés dont elles
ont besoin d'autres parties du Canada, et plus particulièrement celles
dont le siège social est situé au Québec. Le gouvernement
a l'intention d'accorder la liberté de choisir à ceux qui ne
résident au Québec que "pour un temps limité". Une
période de trois ans a été suggérée à
titre de temps limité, mais aucune précision à cet effet
n'a été prévue au projet de loi. Malheureusement, les
compagnies, particulièrement celles dont le siège social est au
Québec, ne fonctionnent pas de cette manière. Il s'agit d'une
opération à deux sens: la compagnie doit pouvoir recourir
à son personnel à partir de toute sa base d'opération; ni
le Québec, ni l'Ontario ou quelque partie d'une telle base ne peut
s'attendre à pourvoir à la compagnie, en un temps donné
toute l'expertise dont elle a besoin. Tout employé pouvant
accéder à un poste supérieur dans une compagnie doit
pouvoir viser un poste au siège social aux fins de poursuivre sa
carrière. Parfois cela signifie un stage de 2 à 3 ans au
siège social; souvent, cela implique une période plus longue par
l'entremise de plusieurs promotions. Toutefois, pour la compagnie en
quête de talent et pour le cadre moyen désireux d'accéder
à un poste supérieur, il est impossible de prédire la
durée de telles affectations.
Si le gouvernement maintient cette restriction, les compagnies vont
réagir de deux façons: en déménageant (au niveau de
la direction) entièrement ou partiellement du Québec, non comme
une menace mais afin d'assurer leur survivance économique dans la mesure
où il leur faut attirer des gens de talent d'une base plus large que le
Québec, ou il se serviront de la porte de sortie
commodément prévue à l'article 41, pour établir des
institutions complètement privées. L'Ecole canadienne de
Montréal peut
être entièrement autofinancée. Les enfants des
cadres anglophones iront à leurs propres écoles privées,
les enfants de l'élite francophone iront aux leurs, par exemple les
enfants des membres du cabinet actuel.
Afin de protéger le développement de la qualité de
l'enseignement d'une deuxième langue dans les écoles
françaises, il faut clarifier l'article 53. Nous comprenons par
l'expression "l'enseignement en anglais" et pensons qu'elle devrait dire,
l'enseignement fait principalement en anglais. Mais, elle pourrait vouloir dire
les cours en anglais comme deuxième langue ou des cours anglais
d'immersion pour des élèves français.
Chapitre IX - Dispositions diverses
Les articles 61 à 65
La population autre que francophone pourrait être sensiblement
affectée par suite des dispositions de l'article 61, lequel supprime
leur droit de lire tout avis public en anglais. Les québécois non
francophones ne devraient être privés de communiquer avec leur
gouvernement provincial et consé-quemment, tous renseignements relatifs
aux élections, à l'expropriation, tout changement de zonage et
l'embauche dans la fonction publique devraient être publiés en
anglais.
Le premier paragraphe de l'article 65 prévoit pour l'avis de
publication de 60 jours, des règlements qui complètent la loi,
permettant ainsi la discussion de tels règlements avant leur
entrée en vigueur. Toutefois, le paragraphe 3 de cet article
élimine entièrement un tel avis pour que les règlements
soient soumis au moment de l'entrée en vigueur de la loi de
manière à ce que toute discussion publique de ces
règlements sera impossible.
TITRE II Chapitre premier -
Interprétation
L'article 75
L'article 75 (h) devrait être amendé afin de donner
à l'Office le pouvoir de déterminer quelles municipalités
sont composées, dans une proportion significative (15%, selon les
statistiques du recensement le plus récent) d'anglophones et lesquelles
devraient donc offrir à la population des services bilingues et
devraient pouvoir fonctionner intérieurement en anglais. L'Office ne
devrait pas déterminer quels services devraient fonctionner en anglais
à l'intérieur des commissions scolaires anglaises. Tout service
à l'intérieur de ces commissions peut être en anglais selon
notre proposition alternative de l'article 23.
Les articles 89 et 90
L'article 89 (a) qui traite du pouvoir de la Commission de Toponymie,
devrait être amendé afin d'obliger la commission à
préserver et développer une nomenclature géographique qui
reflète l'actuel édifice historique multi-lingue et
multi-culturel.
L'article 90 (1er paragraphe) devrait exiger de la commission qu'elle
consulte la population locale, ou existante, avant de donner des noms aux
endroits auparavant sans nom officiel. L'article 90 (2e paragraphe) devrait
exiger de la commission qu'elle consulte la population locale avant de changer
les noms actuels et ne devrait pas pouvoir recommander le changement de nom
à moins qu'une majorité significative de la population (66 2/3%)
le désire. Sans cette disposition, si les seules autorités
municipales à une simple majorité de la population le veulent,
les identifications historiques pourraient être facilement
ignorées et les traditions historiques du Québec pourraient
être oubliées.
Chapitre III Section première - Objectif
général Section II - Services et organismes de
l'administration
Les articles 95 à 105
L'article 95, qui établit les objectifs généraux de
la francisation des services et entreprises devrait être amendé
afin de reconnaître explicitement le fait que les municipalités
avec des populations anglophones significatives, devront offrir tous les
services en français et en anglais, que les commissions scolaires qui
servent des élèves anglophones pourront fonctionner
intérieurement en anglais et que les entreprises de moins de cinquante
salariés ne seront pas obligées de fonctionner
intérieurement en français.
Le danger possible de harcèlement bureaucratique par des
organismes gouvernementaux créés par les règles de la
francisation de l'administration (les articles 96 à 105) est
énorme et il est difficile de croire qu'un gouvernement qui a
été élu sur la base d'un programme qui condamnait
l'intervention bureaucratique de l'ancienne administration dans la vie des
individus, l'exécute.
L'article 98, qui prévoit que quiconque entrave le travail de
l'Office commet une infraction à la loi, est une mesure qui pourrait
être utilisée comme une arme abusive par certains
bureaucrates.
Nous croyons qu'un effort basé sur la collaboration est plus
approprié que celui basé sur la coercion, comme prévu
à cet article.
Les articles 99 et 100 encourageront les fonctionnaires de l'Office
à harceler les directeurs d'autres services gouvernementaux en
prévoyant la publication des noms des organismes censément
récalcitrants. La persuasion par le moyen des mécanismes
prévus aux articles 101 à 104, au lieu d'un harcèlement,
est la seule façon d'accomplir les objectifs de francisation tout en
évitant le chaos administratif. L'article 105, qui donne à
l'Office des pouvoirs discrétionnaires de poursuivre en vertu de
l'article 98 aussitôt que le projet de loi entre en vigueur, devrait
être éliminé de la législation.
Chapitre III Section III
Les articles 106 à 119
L'aspect le plus frappant du programme de certificats de francisation
pour entreprises est que notre gouvernement a transformé les
règles du projet de Loi no 22 qui étaient
légèrement ambiguës et peut-être sujettes à des
abus, en règles complètement ambiguës et
définitivement sujettes à des abus. La règle qui constate
qu'une date sera fixée à laquelle certaines catégories
d'entreprises devront appliquer un programme de francisation, sans
spécifier quelles entreprises seront exemptées (l'article 109);
la règle qui donne à l'Office des pouvoirs
discrétionnaires permettant d'obliger toutes les entreprises de moins de
50 salariés à procéder à l'implantation d'un
programme de francisation (l'article 111); le défaut de la règle
qui traite des sièges sociaux de préciser que les
opérations des sièges sociaux des entreprises internationales
peuvent être faites en anglais (l'article 113), et l'exigence que le
nombre de "Québécois", (que soit défini ce mot ambigu)
soit augmenté à tous les niveaux de l'entreprise (l'article 112
(b); sont des exemples des dispositions qui vont laisser beaucoup d'entreprises
dans un état d'incertitude. Lorsqu'on ajoute le fait qu'une entreprise
peut se voir priver de ses permis, qui sont dans la plupart des cas des
éléments essentiels à son fonctionnement, si elle ne
satisfait pas aux exigences de l'Office de la langue française, il est
clair que beaucoup d'entreprises préféreront fonctionner dans
d'autres juridictions où les aspects essentiels de l'entreprise ne sont
pas sujets à des caprices administratifs. "Participation-Québec"
croit que la création de l'égalité dans les conditions
sociales et l'encouragement d'une vie culturelle sensible dans la province
dépendent du développement d'une économie stable ou
à tout le moins du maintien du niveau d'activité
économique dont les québécois jouissent
déjà. Un environnement économique instable,
compliqué par l'intervention poussée de l'administration,
résultera dans une inhabilité à moderniser la technologie
existante ou d'attirer le capital à risque. Donc, nous sommes d'avis que
les dispositions suivantes du programme de francisation des entreprises du
projet de Loi no 1 doivent être amendées ainsi: a)L'article 106
(a) devrait être amendé afin d'empêcher la suspension ou
l'annulation des permis des entreprises qui ne satisfont pas aux exigences de
l'Office. Des amendes, le retrait de contrats gouvernementaux et des
procédures de grief devraient être suffisants pour favoriser les
programmes de francisation. b)L'article 109 devrait être amendé,
ou devrait y être ajouté une annexe qui préciserait
explicitement quand chaque catégorie d'entreprise sera obligée
d'implanter un programme de francisation. c) L'article 110 devrait être
amendé afin d'obliger l'Office à émettre des certificats
de francisation aux entreprises qui démontrent qu'elles ont fait des
arrangements afin de commencer l'implantation des programmes de francisation.
d) L'article 111 devrait être éliminé afin de permettre
l'indépendance de fonctionnement des entreprises de moins de cinquante
salariés. Si de telles entreprises sont soumises aux programmes de
francisation, la loi doit préciser clairement les critères
déterminants, si l'entreprise sera soumise à de tels programmes.
e) L'article 112 (b) devrait être amendé pour que la
présence chez les compagnies d'individus pouvant travailler en
français sans se soucier de leur origine soit un objectif de
francisation. Nous rejetons particulièrement la rédaction de
l'article 112 (b) parce qu'il implique directement qu'un
québécois n'est qu'un individu qui parle français. Le
gouvernement a réitéré à plusieurs reprises qu'un
québécois est un citoyen du Québec, un principe que cet
article ignore complètement. f) L'article 113 devrait être
amendé afin de constater explicitement que le fonctionnement du
siège social des entreprises nationales et internationales ne sera pas
soumis aux exigences de francisation. g)L'article 114 devrait être
amendé afin d'exiger que les salariés de toute entreprise
choisissent leur représentant au comité, et de ne pas permettre
que ce pouvoir soit concentré entre les mains des officiers du syndicat
qui pourraient représenter les salariés d'une douzaine de
sociétés en même temps.
h) L'article 119 devrait être amendé afin d'exiger de
l'Office que soit donné à toute entreprise qui ne se conforme pas
au programme de francisation un avis de 60 jours avant d'annuler son certificat
de francisation.
Titre III
L'organisation de la "Commission de surveillance et les enquêtes"
ouvrirait les portes à des ingérences inutiles et inacceptables
dans la vie privée et les libertés civiles des citoyens
québécois.
Déjà la société affronte suffisamment de
questions sérieuses quant à ses tentatives pour équilibrer
les exigences de la sécurité publique et le maintien des
libertés civiles. Les gouvernements canadiens éprouvent quelques
difficultés à empêcher certains abus de droits civils par
la force publique.
En plus d'augmenter l'ambiance négative et polarisée qui
existe au Québec, la police linguistique dont le Québec se
propose d'établir se verrait attribuer les mêmes pouvoirs que les
forces publiques normales à l'égard du traitement des
contrevenants suspects. Le point de vue plutôt restreint et
bureaucratique de la Commission de la langue serait assez grave en
lui-même; l'autorité exercée par la Commission de la langue
pourrait conduire à un abus de pouvoir.
Le fait de demander aux citoyens d'avoir confiance au sens inné
d'honnêteté des bureaucrates de la Commission serait de demander
un acte de foi impossible et irréaliste. Toute personne qui pourrait
rendre jugement sur des requêtes et qui aurait le pouvoir de lancer des
enquêtes indépendamment se verrait en même temps
chargée de garantir la prééminence de la Charte relative
aux droits humains fondamentaux tel que visé à la Charte de la
liberté et des droits de l'homme. Le Titre III, qu'il ait
été intentionnel ou non, peut être utilisé d'une
manière vindicative et sans scrupule pour une force policière
culturelle contre les minorités formant une partie importante de la vie
québécoise.
L'article 132
Selon l'article 132, la commission peut procéder à des
enquêtes chaque fois qu'elle a raison de croire que la loi n'a pas
été observée. Nous rejetons entièrement une
rédaction si large parce qu'il n'y a pas de critères objectifs
auxquels la commission peut se référer. Ceci laisse la porte
ouverte à toutes sortes d'abus.
Selon l'article 139. la commission pourrait convoquer devant elle, pour
leurs enquêtes, des particuliers avec tous les documents que la
commission jugerait pertinents, y inclus des communications priviligiées
et ceci sans l'exigence d'un mandat de perquisition. Ceux qui
résisteraient, se sentant injustement harcelés, pourraient
être poursuivis pour outrages.
La commission tout en poursuivant sa tâche avec la sagesse de
Salomon, la patience de Job et la pitié du Christ, ferait face à
une pression énorme d'accroissement bureaucratique afin de fonctionner
d'une manière plus efficace.
Il est hors de toute compréhension comment on peut justifier la
croissance rapide d'une bureaucratie complètement superflue et
négative qui constitue une atteinte directe de la bonne volonté
au Québec.
Le projet de loi no. 1 et les droits de la
personne
Les droits et libertés de la personne exposés à
grands traits dans la Charte des droits de la personne comprennent le droit
à la vie, le droit à la sûreté, le droit au secours
à toute personne dont la vie est en péril, la liberté de
conscience et la liberté de religion, les libertés d'expression
et de réunion pacifique et la liberté d'association. On
considère que toute personne a droit à sa dignité,
à sa réputation, au respect de sa vie privée et à
la libre disposition de ses biens. Sa demeure est inviolable et il a droit au
respect de la propriété.
L'article 10 de la Loi des droits de la personne prévoit que ces
droits existent sans distinction fondée sur la race, la couleur, le
sexe, la religion, les convictions politiques, la langue ou l'origine ethnique,
national ou social. La Charte des droits de la personne est assujettie à
la Charte de la langue.
La Charte des droits et libertés de la personne est
destinée à mieux protéger la personne contre toute
violation de ses droits fondamentaux. Ces droits sont considérés
comme intrinsèques. Les auteurs considéraient que ces droits
constituaient "le fondement de la justice et de la paix". A cette
époque, on considérait que "les droits et libertés de la
personne humaine sont inséparables du bien-être
général". Il était clair qu'on ne voyait pas de conflit
entre les libertés de l'individu et la liberté de la
collectivité. En effet, les droits de l'individu sont le fondement de
tout autre droit et le fondement de ce qu'on connaît ordinairement sous
le nom de démocratie.
L'article 52 de la Charte des droits de la personne constate
spécifiquement que les articles 9 à 38 devraient prévaloir
sur toute disposition d'une loi postérieure.
Le projet de loi no 1 amende spécifiquement l'article 52 avec le
résultat que la Charte de la langue prévaut. (Le reste de la
Charte des droits de la personne ne jouit pas probablement de la protection de
l'article 52, par conséquent, on peut l'enfreindre aussi).
II est inquiétant que le gouvernement abroge
spécifiquement les droits les plus fondamentaux. Si la Charte des droits
de la personne n'avait jamais été votée, on aurait
peut-être pu réclamer ces droits en se fondant suivant la coutume
et conformément à la tradition. Ceci n'est plus vrai. La
possibilité d'abus créée par le projet de Loi no. 1 tel
quel, sera grande. Si la Charte de la langue française doit primer les
articles les plus importants de la Charte des droits de la personne, il incombe
au gouvernement de spécifier au juste les articles de la charte des
droits de la personne qui seront primés et pourquoi. La disposition qui
prévoit de façon générale que le projet de Loi no.
1 prime les articles 9 à 38, contient beaucoup de clauses d'un sens
très large. Comme tel, il est inacceptable.
Si l'article 172 est voté en même temps que le projet de
Loi no. 1, les minorités du Québec n'auront qu'une alternative:
se demander quel sera l'effet des futurs règlements qui seront
adoptés et l'interprétation à venir du projet de Loi no.
1. Un climat de peur et de méfiance ne peut que résulter de ces
questions.
Les articles 9 à 38 de la Charte des droits de
la personne qui sont maintenant remplacés.
L'article 9 affirme que chacun a droit au respect du secret
professionnel. La Charte de la langue primera cet article. Les secrets
professionnels peuvent être révélés sous l'apparence
de se conformer à la Charte de la langue.
L'article 10 interdit la restriction des droits fondamentaux
fondés sur la race, la couleur, l'origine nationale, etc. Il deviendrait
légal de décréter des règlements qui auraient un
effet différent selon l'ethnicité de l'individu. Dans
l'intérêt de "la langue" il peut être jugé
nécessaire de limiter leur liberté d'expression. Toute
liberté peut être restreinte sur n'importe quelle base choisie par
le gouvernement sous l'étiquette de "la langue".
L'article 11. L'enlèvement de cet article pourrait
résulter dans les enseignes "seuls français sont tenus de
s'adresser" ou "pas de..." à travers la province. Il serait
légal.
L'article 16 interdit la discrimination dans tout le secteur du travail.
Mais selon les dispositions sur la francisation du projet de Loi no. 1, les
minorités pourraient être mises à pied en grand nombre et
se verraient refuser du travail à cause de leur ethnicité et ce
serait légal. En effet, le besoin d'obtenir les certificats de
francisation encouragera les mises à pied et la discrimination dans
l'embauche.
L'article 17. La mise en suspens de l'article 30 du projet de Loi no. 1,
légalisera la discrimination dans l'admission aux ordres
professionnels.
L'article 18. Dans le même esprit, il sera légal de prendre
les détails vis-à-vis la religion, la race, l'origine ethnique,
etc. afin d'évaluer des candidats au travail, si cet article est mis en
suspens.
L'article 19. Si cet article est mis en suspens, il sera légal
d'avoir des salaires différents pour de différentes sortes
"d'autres".
L'article 20. Cet article donnait aux institutions ethniques le droit de
distinguer si ces distinctions viseraient le bien-être d'un groupe
ethnique spécifique.
L'article 23. Abroge-t-on le droit à la justice??? Si cet article
était lu avec ceux sur les procédures de surveillance et de
l'Office de la langue française, il pourrait rendre possibles les
condamnations sans audition ce qui pourrait conduire aux abus
criants.
Les articles 26 à 31. Toute personne arrêtée
n'aurait plus droit d'être informée dans une langue qu'elle
comprend, des motifs de son arrestation.
L'article 37. L'abrogation de cet article peut avoir pour effet de
rendre une loi rétroactive. Ainsi, les tribunaux et les
pénalités du projet de Loi no. 1 pourraient avoir un effet
rétroactif.
L'une des suppositions fondamentales d'un système
démocratique, selon la Charte des droits de la personne, est
l'égalité devant la loi. La définition du "peuple
québécois" du préambule du projet de Loi no. 1 est
ambiguë. Il y a une forte implication que "le peuple
québécois" est un seul groupe ethnique. Il paraît qu'on
remet déjà en question l'égalité des individus
devant la loi. La société comprend "Le peuple
québécois" et "les minorités". Ainsi, la Charte de la
langue est arrêtée dans l'intérêt du "peuple
québécois" seul.
Les articles 30 et 32 du projet de Loi no.1 (qui réglementent
l'accès aux ordres professionnels) sans la protection de l'article 17 de
la Charte des droits de la personne, laissent ouverte la porte à la
discrimination, possible, surtout à cause de l'expression "que
l'intérêt public le justifie". Les minorités se sont
servies des professions comme un des moyens principaux de changer leur position
sociale dans la société nord américaine. Pour que
l'intégration de tout groupe ethnique continue paisiblement ici, il est
essentiel que l'accès aux professions soit libre. L'image des "quotas"
pour des immigrants et des québécois, membres des groupes
ethniques, limitant ainsi leur entrée aux professions, est une atteinte
à l'édifice même de la société
nord-américaine.
L'article 37 du projet de Loi no. 1, sans la protection de l'article 20
de la Charte des droits de la personne, pourrait peut-être conduire non
seulement au harcèlement de l'homme d'affaire d'une petite entreprise,
mais aussi à la persécution d'associations ethniques et
d'écoles spéciales. L'Association hellénique, n'a-t-elle
pas le droit de demander pour ces diverses organisations et projets des Grecs?
A tout le moins, ils devraient avoir le droit d'exiger une connaissance de la
langue grecque.
Il apparaît que les règlements des articles 37, 41 et 42 du
projet de Loi no. 1 pourraient contrevenir à l'article 43 de la Charte
des droits de la personne qui affirme le droit des minorités "de
maintenir et de faire progresser leur propre vie culturelle avec les autres
membres de leur groupe".
Les articles 112 (a) et (b) de la Charte de la langue exigent de tout le
personnel d'une entreprise, une connaissance "satisfaisante" de français
et une augmentation du nombre de québécois, sous peine de ne plus
pouvoir continuer.
Comme les articles 16 et 17 de la Charte des droits de l'homme sont
rejetés, la porte ainsi ouverte au gouvernement invite à la
discrimination dans le domaine du travail et du fonctionnement d'entreprises.
Tandis qu'il n'y a aucune définition précise d'un
"québécois" nulle part dans le projet de loi, il va sans dire que
le "peuple québécois" du préambule veut dire ceux qui
avaient été connus sous le nom de "Canadiens
français".
ANNEXE 2
Mémoire soumis
par L'Association du Transport Aérien
International
à la Commission parlementaire
chargée d'étudier
le projet de loi numéro 1 :
Charte de la langue française au Québec 1.
L'Association du Transport Aérien International (IATA), organisation
à but non lucratif constituée en corporation en 1945 en vertu
d'une loi spéciale du Parlement canadien (9-10 George VI, Chap. 51,
amendé par Elizabeth II, Chap. 26), soumet, en toute
déférence, le présent mémoire sur le projet de loi
numéro 1, intitulé: Charte de la langue française au
Québec.
Objet de la demande 2. Le projet de loi numéro 1 contient des
dispositions dont les conséquences seraient susceptibles de nuire au
maintien des conditions nécessaires à l'exercice des fonctions de
l'IATA. Les dispositions relatives à la langue du travail (Chapitre VI)
et de l'enseignement (Chapitre VIII) préoccupent plus
particulièrement l'Association. 3. Désireuse d'obtenir un
règlement satisfaisant des problèmes soulevés par le
projet de loi numéro 1, l'Association du Transport Aérien
International prie instamment la Commission parlementaire et le Gouvernement de
la Province de reconnaître le caractère international et
quasi-gouvernemental de l'IATA, ainsi que les autorités
fédérales suisses l'ont fait récemment, et, à ce
titre, de l'exempter des dispositions de la Charte de la langue
française au Québec.
Organisation de l'IATA 4. L'IATA existe en vertu d'une Loi
spéciale du Parlement canadien et ses objectifs sont les suivants: 1)
encourager le développement de transports aériens sûrs,
réguliers et économiques, au bénéfice des peuples
du monde; favoriser le commerce aérien et étudier les
problèmes s'y rapportant; 2) fournir les moyens propres à une
collaboration des entreprises de transports aériens engagées
directement ou indirectement dans les services de transports aériens
internationaux; 3) coopérer avec l'Organisation de l'Aviation Civile
Internationale et autres organisations internationales.
Toutes les compagnies aériennes peuvent adhérer à
l'Association à condition que l'Etat dans lequel elles sont
immatriculées soit éligible comme membre de l'Organisation de
l'Aviation Civile Internationale. Les compagnies aériennes
désignées pour l'exploitation de services internationaux de
passagers, de poste ou de marchandises peuvent adhérer à titre de
Membres actifs, tandis que celles qui n'exploitent que des services
intérieurs peuvent devenir Membres associés. Il est
intéressant, surtout si l'on tient compte du fait que l'IATA est une
association entièrement volontaire et apolitique, de constater que la
grande majorité des compagnies qui desservent des routes
aériennes internationales ont décidé de devenir Membres.
Au 1er mai 1977, 89 compagnies aériennes étaient Membres actifs
de l'IATA et 20 étaient Membres associés. Ces 109 compagnies
membres exploitent leurs services sous le pavillon d'environ 80 Etats
différents. En 1977, les services exploités par les Membres de
l'IATA ont représenté quelque 86% du trafic aérien
régulier international du monde entier. 5. Le siège social de
DATA se trouve à Montréal. Il existe un bureau principal à
Genève, des succursales à Bangkok, Londres, Nairobi, New York,
Rio de Janeiro et Singapore, ainsi que des bureaux chargés du
contrôle de l'application des règlements, réparties dans
les grandes villes du monde entier.
Ainsi, la majeure partie du personnel de secrétariat de l'IATA
est employée hors du Canada. Le personnel de l'Association, y compris
celui travaillant au siège social, est recruté parmi les
ressortissants des nombreux pays représentés par les membres de
l'IATA. 6. Parmi les activités de l'IATA, celles qui sont les mieux
connues et les plus controversées sont sans doute les Conférences
de trafic, au sein desquelles les compagnies aériennes internationales
conviennent des tarifs passagers et marchandises, des redevances et des
conditions de service y relatives. Les Conférences de l'IATA constituent
également un forum qui permet de mettre au point les règlements
du programme mondial relatif aux agences. On y négocie les formulaires
de trafic, les conditions de transport, les codes d'identification, les
procédures de réservations ainsi qu'une kyrielle d'autres normes
et accords pour établir un lien entre les services des compagnies
membres et non membres dans le monde entier. 7. Ces accords des
Conférences de l'IATA ont également un caractère unique en
ce qui concerne la base sur laquelle ils reposent. Les Conférences de
trafic fonctionnent en vertu d'accords gouvernementaux bilatéraux qui
réglementent l'exploitation des services aériens réguliers
entre les diverses juridictions intéressées. Etant donné
que la Conférence de Chicago, de 1944, n'a pas pu aboutir à un
accord sur un mécanisme intergouvernemental en vue de
l'établissement des routes, tarifs et droits de trafic pour les services
aériens internationaux réguliers, ces questions ont
été résolues au moyen d'une multitude d'accords
intergouvernementaux bilatéraux sur le transport aérien. Ces
accords prévoient divers contrôles, dont des dispositions
relatives aux tarifs. 8. Depuis 1944, plus d'un millier d'accords
intergouvernementaux bilatéraux de transport aérien ont prescrit
expressément que les transporteurs désignés doivent,
chaque fois que possible, conclure des accords tarifaires par le truchement du
système des Conférences multilatérales de l'IATA. Le
système de Conférences sur le transport aérien
international est devenu ainsi un corollaire indispensable du cadre
intergouvernemental de réglementation qui régit l'industrie. Les
Conférences effectuent leurs travaux en vertu de l'autorité que
leur confèrent les gouvernements et sous l'étroite surveillance
de ces derniers. Les accords conclus au sein des Conférences de trafic
sont ensuite soumis à l'approbation des gouvernements. L'IATA offre
ainsi le cadre reconnu dans lequel sont établis les tarifs
aériens internationaux de passagers et de marchandises. Pour ces motifs,
le gouvernement fédéral de la Suisse et les autorités du
Canton de Genève ont reconnu à l'IATA le statut d'organisation
internationale quasi-gouvernementale tant pour son bureau de Genève que
pour le personnel dudit bureau. 9. Dans le cadre de ses activités
techniques, assumées par le personnel de Montréal, l'IATA
coopère avec l'Organisation de l'Aviation Civile Internationale (OACI),
organisme spécialisé de l'ONU, et les gouvernements du monde
entier pour veiller à ce que les installations et services
destinés à l'aviation répondent aux normes les plus
élevées et ainsi assurer la sécurité et
l'efficacité des services aériens. Ces activités portent
sur tout ce qui a trait aux aéroports, aux aides à la navigation,
au contrôle de la circulation aérienne, à la
météorologie, aux télécommunications, etc. Ces
installations et services, de nature hautement technique, font l'objet de
recherches et de perfectionnements constants. 10. Les questions relatives
à l'approbation et à l'enregistrement de quelque 17,000 agences
de voyage situées en Amérique du Nord, en Amérique
centrale, en Amérique du Sud et dans les Antilles sont également
traitées à Montréal. L'objectif poursuivi par l'IATA est
similaire à celui recherché par le Gouvernement de la Province de
Québec dans sa "Loi des Agents de Voyage," à savoir la protection
des fonds remis par le consommateur aux agents de voyage. Les dispositions
gouvernementales précitées sont venues compléter les
mesures de contrôle édictées par l'IATA avec l'approbation
des gouvernements intéressés. 11. Dans le domaine juridique, un
personnel qualifié et familier avec les divers régimes juridiques
travaille, en étroite liaison avec l'OACI et autres organismes
internationaux, à l'élaboration de règles de droit
aérien international. Il traite également des questions de
conflit de lois et de tous autres développements législatifs qui
risquent d'avoir une incidence sur le transport aérien ou les
systèmes réglementaires dans le cadre desquels il fonctionne, et
fournit les services nécessaires à l'arbitrage des
différends entre transporteurs et agents. 12.C'est aussi au
Département juridique qu'il incombe d'aider les compagnies membres
à élaborer une politique coordonnée en matière de
redevances d'usage et de présenter le point de vue de l'Association
à l'OACI et aux autres autorités responsables. L'attitude
collective des compagnies aériennes, représentées par
l'IATA, sur l'ensemble des questions de sécurité de l'aviation
civile relèvent de ce Département. Là, encore, il s'agit
d'élaborer les principes d'une politique commune et d'effectuer les
représentations nécessaires auprès des divers
gouvernements.
Caractère international et quasi gouvernemental de l'IATA 13.
Selon la conception traditionnelle, une organisation internationale est
constituée par un traité entre Etats et comprend des Etats comme
membres. D'un point de vue formel et classique, la personnalité
juridique internationale, conférée à une organisation
internationale, dépendrait de deux conditions, l'une relevant du
processus de sa création, l'autre de la nature de ses membres. Mais la
doctrine et la pratique du droit international contemporain tendent à
donner la préférence à un critère fonctionnel.
14.Ce sont en effet les fonctions exercées par une organisation
internationale qui requièrent un statut spécial, lorsque ces
fonctions revêtent pour la communauté des Etats un
intérêt général tel que l'indépendance de
l'organisation à l'égard de l'Etat qui l'accueille doive
être garantie spécialement. Le critère fonctionnel a pour
corollaire que le statut spécial trouve notamment sa justification dans
le fait que les fonctions d'une organisation pourraient être
entravées par l'absence d'un tel statut. Il faut donc rechercher quelles
sont les conditions, en droit international, pour qu'une organisation qui n'est
pas intergouvernementale d'un point de vue formel mais qui exerce certaines
fonctions d'intérêt général pour les Etats, puisse
obtenir le statut spécial nécessaire à l'exercice
indépendant de ses activités. 15. La condition essentielle est
réalisée par le caractère gouvernemental ou
quasi-gouvernemental des compétences de l'organisation, ce qui entend
des pouvoirs et une personnalité internationale opposables aux Etats.
16. La vie internationale connaît actuellement une catégorie
nouvelle d'organisations, parfois appelées quasi-gouvernementales, qui
réalisent de façon inégale d'ailleurs cette
condition. Il n'est guère facile de définir cette
catégorie d'organisations, qui se situe entre les grandes organisations
internationales publiques (telles que les institutions
spécialisées des Nations Unies) et les associations
internationales non gouvernementales. 17. Il semble en tous les cas
évident que le statut formel d'une organisation ne devrait pas
être déterminant en ce qui concerne la question de la
définition, lorsque cette organisation exerce des fonctions qui
s'apparentent à celles d'une organisation intergouvernementale. 18. Il
convient donc d'analyser les caractères propres de l'IATA, pour pouvoir
déterminer si cette association réalise les conditions
nécessaires pour être reconnue comme une organisation à
caractère international et quasi-gouvernemental. a) Réalisation
des conditions par l'IATA 19. L'IATA n'a pas été
constituée par un traité interétatique et ses membres ne
sont pas formellement des Etats. A cet égard, le cas de l'IATA illustre
de manière frappante un phénomène bien connu des juristes
et tout particulièrement des internationalistes, c'est-à-dire un
décalage entre la réalité sociale, économique et
politique d'une part, et les normes de droit positif destinées à
régir cette réalité d'autre part. b) Histoire 20.
L'impulsion première pour la création de l'IATA est venue au
cours de la Conférence sur l'aviation civile internationale qui s'est
tenue à Chicago en 1944. Les 49 gouvernements représentés
à cette conférence n'ayant pas réussi à
établir à l'intérieur de la convention un mécanisme
pour régler les questions économiques fondamentales relatives aux
droits de trafic et aux tarifs, ont encouragé les représentants
de leurs compagnies aériennes nationales qui étaient
présents à Chicago à former une institution internationale
pour combler cette lacune en ce qui avait trait à la
détermination des tarifs. 21. C'est ainsi que le 19 avril 1945, à
La Havane, une soixantaine de compagnies aériennes nationales, dont
certaines étaient encore en voie de formation, ont créé
l'IATA et ont signé ses statuts. Pour des raisons d'ordre pratique le
Comité exécutif de la nouvelle association résolut par la
suite d'obtenir la consécration juridique de l'IATA au Canada par une
loi spéciale du Parlement de ce pays; cela fut fait le 18
décembre 1945. L'Accord conclu à La Havane entre les compagnies
nationales fut formellement reconnu par les Etats par les
références directes faites à l'IATA dans d'innombrables
accords bilatéraux ainsi que dans l'Accord international sur la
procédure applicable à l'établissement des tarifs des
services aériens réguliers, accord conclu à Paris le 10
juillet 1967. 22. Peu après la création de l'IATA, la
nécessité d'un règlement économique des transports
aériens internationaux a conduit à l'Accord
américo-britannique des Bermudes de 1946. Cet accord, le premier du
genre, et qui servit de modèle par la suite, prévoyait
déjà la détermination des tarifs aériens par
l'IATA, sous réserve de la ratification ultérieure des Etats
intéressés. 23.Ainsi, alors que les conceptions
américaines de la libre entreprise n'avaient pas permis, à la
Conférence de 1944, que les fonctions de l'IATA fussent dévolues
à une organisation intergouvernementale, il est évident que ces
fonctions se sont situées d'emblée au niveau de
l'intérêt général des Etats. 24. Lors de la
création de l'IATA il existait déjà dans de nombreux pays
des corporations, régies publiques ou compagnies appartenant aux
gouvernements et qui se conformaient aux instructions de ces derniers. En
défendant leurs propres intérêts ces compagnies
sauvegardaient également ceux des gouvernements. On constate donc que,
dès le début, des Etats ont participé de manière
variable selon les pays, mais le plus souvent de manière très
directe, au processus de création de l'IATA. c) Compétences
tarifaires 25. A l'exception de l'URSS et de la République populaire de
Chine, la plupart des Etats ont confié à l'IATA la fonction
d'établir des tarifs pour les transports aériens. L'Association
se trouve ainsi mentionnée dans un nombre considérable de
traités interétatiques, lesquels lui attribuent des fonctions
précises relevant du droit public. Plusieurs de ces traités
bilatéraux consacrent, expressément ou taci-
tement, le mécanisme des conférences tarifaires de l'IATA,
qui aboutit à établir des tarifs par des résolutions
soumises ensuite aux Etats. 26.Une fois ratifiés et, dans certains cas,
une fois écoulé le délai de ratification, les tarifs
élaborés par l'IATA font partie intégrante des accords
bilatéraux et lient ainsi les Etats contractants. 27. On constate ainsi
que, dans le domaine très important de l'établissement des
tarifs, l'IATA remplit une fonction gouvernementale ou quasi-gouvernementale.
La formule souple des conférences tarifaires permet aux gouvernements de
s'entendre sur des questions souvent très complexes, par
l'intermédiaire de leurs compagnies aériennes, en évitant
les inconvénients d'une confrontation ouverte. On a ainsi pu comparer
l'IATA à un canal de communication et à un centre de
décisions, permettant aux gouvernements d'exprimer leur politique dans
le domaine de l'aviation commerciale. 28. Le mécanisme des
conférences tarifaires s'inscrit donc bien dans l'évolution
récente de la pratique des Etats qui semble s'orienter de plus en plus
vers des accords conclus entre institutions spécialisées. 29. Le
"déphasage" qui apparaît entre le statut formel de l'IATA et
l'intérêt public ou étatique de ses fonctions, est
accentué par les compétences de l'IATA, qui ont souvent un
caractère quasi-gouvernemental, relevant du droit public. 30. Ainsi
qu'on l'a vu, la compétence, attribuée à l'IATA par de
nombreux traités bilatéraux, d'établir des tarifs
aériens, est exercée par des résolutions de l'Association,
soumises le plus souvent à la ratification des gouvernements. 31. Les
résolutions de l'IATA, une fois acceptées par les gouvernements,
acquièrent généralement la force d'une règle de
droit national. Aux termes de plusieurs traités bilatéraux, la
mise en vigueur par l'IATA, après approbation gouvernementale, lie les
Etats contractants entre eux et les obligent à respecter les tarifs tant
que ceux-ci demeurent en vigueur. 32. Il est dès lors logique de
conclure de ces faits que les règlements et décisions de l'IATA
constituent une source de droit, cela d'autant plus qu'il est incontestable que
l'Association exerce une forte influence sur l'activité
législative des Etats dans le domaine aérien. 33.Outre
l'établissement des tarifs, les conférences de trafic de l'IATA
pourvoient à l'administration et à la discipline d'un
réseau très important d'agences de vente. Quelque 17 000 agences
de voyage et de fret, situées en Amérique du Nord, en
Amérique centrale, en Amérique du Sud et dans les Antilles, sont
contrôlées à partir des bureaux de l'IATA à
Montréal. Ce contrôle a été entrepris avec
l'encouragement et l'approbation des gouvernements. d) Pouvoir de police 34. En
vue d'assurer le respect des tarifs et des règlements, adoptés
par les Conférences de trafic et ratifiés par les gouvernements,
ces derniers laissent en général à l'IATA le soin
d'assurer, par des sanctions disciplinaires, le respect et l'application des
tarifs et règlements par les membres de l'Association, leurs
associés et les agences. 35.A l'égard de ses membres, les
pouvoirs disciplinaires de l'IATA sont définis à l'article XII
des "Dispositions pour la réglementation et la conduite des
conférences de trafic de l'IATA". 36. Ainsi, lorsqu'un membre viole une
résolution, une procédure répressive faisant intervenir
plusieurs organes ad hoc de l'organisation aboutit, le cas
échéant, à des sanctions allant de simples mesures de
publicité à une expulsion de l'IATA, en passant par des
blâmes et des amendes qui peuvent s'élever à US$ 50 000.
L'IATA possède donc à cet égard un véritable
pouvoir de police. 37.Si la violation incriminée est le fait, ainsi que
ce fut parfois le cas, d'une compagnie agissant sur instructions de son
gouvernement, l'affaire opposant l'IATA à son membre prend proportion
d'un différend entre le gouvernement transgresseur et les autres
gouvernements dont les intérêts économiques sont
lésés par la violation. L'importance économique des tarifs
aériens est en effet si grande que les gouvernements doivent pouvoir
considérer que les résolutions ne seront pas remises en question
par ceux qui les ont approuvées. 38.S'il est surtout question ici de
l'activité tarifaire de l'IATA, c'est qu'elle est la plus connue et la
plus importante. En outre, les conférences tarifaires faisant partie
intégrante de l'IATA, leur reconnaissance par les gouvernements emporte
implicitement celle de l'IATA comme organisation internationale.
e)Quasi-personnalité internationale 39. Or, cette reconnaissance
confère à l'IATA une certaine personnalité internationale
opposable aux Etats. En particulier, ladite reconnaissance peut résulter
tant de traités bilatéraux (expressément) que (tacitement
ou par actes concluants) des approbations, désapprobations et
réserves qui sont formulées par les gouvernements des compagnies
membres, au sujet de toutes les résolutions de l'IATA. 40.Mais la
situation présente ne s'arrête pas à cela: l'IATA constitue
une fédération des compagnies nationales d'aviation. Ses membres
ne sont pas les gouvernements tels quels pour la raison que, dans la plupart
des cas, et même lorsque la société de navigation
aérienne appartient intégralement à l'Etat ou en est une
émanation, les gouvernements ont en général donné
à ces sociétés un caractère de
société de droit privé. Ils l'ont fait pour des raisons
d'ordre pratique, soit pour arriver à une efficacité et
une souplesse opérationnelles plus grandes. C'est ainsi qu'un
certain nombre des sociétés membres de l'IATA sont, à la
forme des sociétés de droit privé, mais la majorité
et souvent même la totalité de leur capital-actions est
détenue par les Etats ou par des communautés de droit public. Un
tableau indiquant la participation gouvernementale dans les
sociétés membres de l'IATA est joint en annexe I. 41. Les membres
de l'IATA sont des transporteurs aériens spécialement
désignés ou autorisés par leurs Etats respectifs pour
effectuer des transports internationaux sous pavillon de ces Etats auxquels ils
assurent des services réguliers. 42.Certains Etats ont soutenu que des
corporations publiques, régies d'Etat ou sociétés
étatisées, devaient être considérées comme
des instruments de l'Etat jouissant, par exemple, des droits du Souverain. On
pourrait invoquer en faveur de cette conception le principe de la transparence
lorsqu'il s'agit de personnes morales de droit privé dont les actions
sont entièrement ou presque entre les mains de l'Etat. 43. Il faut
relever également que certaines compagnies étatiques peuvent
être considérées comme des émanations ou des
"démembrements" de l'Etat et être par conséquent capables
de l'engager au plan du droit international public. 44. Le fait que l'IATA ait
été créée sur l'initiative des transporteurs
aériens et non des gouvernements eux-mêmes et qu'ensuite les
gouvernements n'en soient pas devenus formellement membres ne signifie pas
grand-chose. En effet, pratiquement et politiquement, dans la plupart des pays,
les gouvernements s'identifient à leurs agents transporteurs. 45.En
résumé, il est clair qu'outre ce qui précède, la
dynamique des activités propres de l'IATA, leur extension et les
nécessités actuelles ont imprimé à l'Association le
caractère d'une organisation quasi-gouvernementale et internationale.
46.Ce caractère est aujourd'hui accrédité par une certaine
coutume internationale, étant donné que l'IATA élabore et
règle depuis plus de 30 ans les tarifs aériens, et que
l'essentiel (environ 86%) du trafic international est assuré par des
membres de l'IATA. Il a également été reconnu par la
Suisse qui a récemment accordé à l'IATA un statut
spécial lui garantissant l'indépendance nécessaire
à l'exercice de ses activités.
L'IATA et le projet de Charte de la langue française au
Québec 47. Le projet de loi numéro 1, intitulé: Charte de
la langue française au Québec contient, au Chapitre VI, des
dispositions relatives à la langue du travail. On y reconnaît
entre autres choses, a) le droit qu'aura tout membre du personnel d'un
employeur d'exiger que soient rédigées en français les
communications écrites qui lui sont adressées par ce dernier
(article 33); b) l'interdiction faite à l'employeur de congédier
ou de rétrograder des salariés pour la seule raison qu'ils ne
connaissent pas suffisamment une langue donnée autre que le
français, toute infraction autorisant le salarié à faire
valoir ses droits au même titre que s'il s'agissait d'un
congédiement pour activités syndicales (article 36); et
l'interdiction faite à l'employeur d'exiger pour l'accès à
un emploi ou à un poste la connaissance d'une langue autre que le
français, à moins que l'accomplissement de la tâche ne
nécessite la connaissance de cette autre langue, conformément aux
règlements adoptés à cet effet par l'Office de la langue
française; c'est à l'employeur qu'il incombera de prouver que la
connaissance de l'autre langue est nécessaire (article 37). 48. L'IATA
souscrit en principe aux mesures visant à reconnaître formellement
le droit de tout salarié à exiger que soient
rédigées en français les communications écrites
relatives aux conditions d'emploi qui lui sont adressées par
l'employeur. Les membres du personnel de l'IATA peuvent déjà
exercer ce droit. Il importe cependant de laisser à l'employeur le droit
d'adresser, et aux salariés, celui de recevoir, la version anglaise de
ces mêmes communications. 49. Une connaissance approfondie de la langue
anglaise est une des conditions essentielles à l'accomplissement des
tâches au sein de l'IATA. Les nombreux avis, circulaires, rapports,
études et autre communiqués adressés à une centaine
de lignes aériennes immatriculées dans quelque quatre-vingts pays
différents ne peuvent de toute évidence, et pour des raisons
d'ordre pratique, être rédigés dans toutes les langues
officielles de ces pays. Il a fallu adopter la langue reconnue par la pratique
internationale dans le domaine de l'aviation civile internationale, à
savoir la langue anglaise. Toute personne postulant un emploi à l'IATA
doit donc non seulement rencontrer les exigences techniques du poste, mais
encore posséder une connaissance suffisante de la langue anglaise lui
permettant d'analyser les données des divers problèmes qui lui
seront généralement soumis en anglais par ses collègues de
l'industrie, d'en discuter avec eux et de leur soumettre des recommandations
écr'tes appropriées. 50. Pour mener à bien les
tâches qui lui sont déléguées par les gouvernements,
l'Association doit conserver une certaine liberté d'action quant
à l'imposition des conditions d'embauche et de congédiement pour
cause de son personnel. L'article 37 reconnaît ce principe. Le
mécanisme d'exemption prévu n'offre peut-être pas la
latitude nécessaire à l'IATA dans la mesure où une preuve
justifiant l'exigence de la connaissance de la langue anglaise devrait
être fournie dans chacun des cas d'embauche. Il n'est pas clairement
stipulé non plus si la même preuve serait suffisante dans les cas
de congédiement. 51.Le projet de loi numéro 1 reconnaît en
partie ce problème à l'article 63 qui stipule que "Rien
n'empêche l'emploi d'une langue en dérogation avec la
présente loi lorsque les usages internationaux le
demandent". Cette disposition ne définit pas cependant les termes
"usages internationaux" qui peuvent donner lieu à interprétation.
L'IATA, en toute déférence invite donc la Commission et le
Gouvernement à reconnaître le caractère international et
quasi-gouvernemental de l'Association, comme d'ailleurs l'a fait la Suisse, et,
à ce titre, à exempter l'IATA de l'application des dispositions
du Chapitre VI. 52. Le Chapitre VIII relatif à la langue de
l'enseignement prévoit que l'enseignement devra se faire en
français dans les écoles maternelles, primaires et secondaires
des secteurs public et subventionné. Il est prévu que, par
dérogation, pourront recevoir l'enseignement en anglais, à la
demande de leur père et de leur mère: a) les enfants dont le
père ou la mère a reçu, au Québec, l'enseignement
primaire en anglais; b) les enfants qui, à la date de l'entrée en
vigueur du projet, sont domiciliés au Québec, et (i) qui
reçoivent déjà, au Québec, l'enseignement en
anglais à l'école maternelle, primaire ou secondaire, le
même droit s'étendant à leurs frères et soeurs
cadets; (ii) dont le père ou la mère est, à ladite date,
domicilié au Québec et a reçu, hors du Québec,
l'enseignement primaire en anglais. L'article 58 précise que ces
dispositions ne s'appliquent pas aux personnes qui, aux conditions
fixées par règlement du Gouvernement, sont de passage au
Québec ou y séjournent pour un temps limité. 53. L'effet
de ces dispositions sur le libre choix laissé aux membres du personnel
de l'IATA constitue un grave sujet de préoccupation. Le personnel des
services généraux est recruté sur place, à
Montréal. Les exigences de fonctions hautement
spécialisées et les obligations de l'IATA envers ses compagnies
membres contraignent l'Association à recruter son personnel de direction
dans le monde entier. Ainsi, les quarante-et-un membres du personnel de
direction du bureau de Montréal proviennent de quatorze pays
différents. 54. En raison de leurs origines ethniques et de leurs
antécédents culturels, certains des membres du personnel de
direction désirent que leurs enfants reçoivent leur enseignement
en anglais. Nombreux parmi eux envisagent le retour de leurs enfants dans leur
pays d'origine; d'autres doivent également opter pour ce système
afin d'assurer une certaine continuité, peu importe le pays où
leurs fonctions, souvent itinérantes, les conduira. Si la nouvelle
législation devait rendre la chose impossible, l'IATA éprouverait
de la difficulté à garder certains de ses cadres et il lui serait
encore plus malaisé, à l'avenir, d'embaucher du personnel
répondant aux exigences précitées ou d'effectuer les
transferts nécessaires entre ses divers bureaux à travers le
monde. 55. Les dispositions relatives à la langue de l'enseignement
risquent de faire obstacle à la mobilité du personnel de
l'Association et ainsi de nuire à l'exercice de ses fonctions
quasi-gouvernementales. l'IATA invite instamment la Commission et les
autorités gouvernementales à reconnaître, à l'instar
de la Suisse, le statut spécial de l'Association et à l'exempter
de l'application de dispositions susceptibles d'entraver la liberté
d'action nécessaire à son bon fonctionnement. 56. Le
présent mémoire a été limité, à
dessein, aux aspects les plus épineux du problème. Certaines
autres dispositions du projet de Charte de la langue française au
Québec et les politiques ultérieures de l'Office de la langue
française soulèveront peut-être d'autres
difficultés. L'IATA, en toute déférence, prie donc
instamment la Commission à bien vouloir reconnaître le
caractère international et quasi-gouvernemental de l'Association et
à l'exempter clairement de l'application de la Charte de la langue
française au Québec.
CONCLUSION 57. En résumé, l'IATA invite respectueusement
la Commission parlementaire chargée d'étudier le projet de loi
numéro 1, intitulé: Charte de la langue française au
Québec, à prendre les mesures suivantes: 1)Reconnaître,
à la lumière des principes et des données
énoncés aux paragraphes 13 à 47 et à l'instar des
autorités fédérales de la Suisse, le caractère
international et quasi-gouvernemental de l'Association du Transport
Aérien International; 2) Recommander que l'IATA et son personnel soient
clairement exemptés de l'application des dispositions de la Charte de la
langue française au Québec, lui accordant ainsi le statut
spécial nécessaire à l'exercice de ses fonctions
internationales et quasi-gouvernementales.
SOUMIS EN TOUTE DEFERENCE
J.G. Thomka-Gazdik, c.r. Conseiller Juridique
ASSOCIATION DU TRANSPORT AÉRIEN INTERNATIONAL
Engagement et contrôle étatiques dans les
sociétés membres de l'IATA
Première catégorie: Sociétés
étatiques
Deuxième catégorie:
Sociétés privées a) Membres actifs (43) a) Membres
actifs (20)
Aer Lingus Aerocondor
Aerlinte Eireann (Irish International) Air-Siam (90% Prince Varand)
Aerolineas Argentinas Allegheny Airlines
Aeromexico American Airlines
Air-Algérie Avianca (38% Pan Am)
Air Canada Braniff International
Air Ceylon British Caledonian Airways
Air Guinée CP Air
Air-India Cruzeiro
Air Malawi Delta Air Lines
Air Mali Eastern Airlines
Air New Zealand Flying Tiger Line
Alia Royal Jordanian Airlines Icelandair
Angola Airlines (TAAG) National Airlines
British Airways Pan American World Airways
British West Indian Airways Trans-Mediterranean Airways (100% Abu
Haider)
Ceskoslovenske Aerolinie Trans World Airlines
Cubana United Airlines
DETA Linhas Aereas de Moçambique UTA Union de
Transports Aériens
East African Airways VARIG (51% employés; 35% la direction)
Ecuatoriana
Egyptair b) Membres associés (16)
Ethiopian Airlines
Garuda Indonesian Airways Aerocor Aerolinea Cordillera
Iberia Ansett Airlines of Australia
Indian Airlines Commercial Airways
Iran Air Douglas Airways Lty. Ltd.
Iraqi Airways Eastern Provincial Airways
JAT Jugoslovenski Aerotransport East-West Airlines
Kenya Airways Limited LADECO
Kuwait Airways Mount Cook Airlines
LAN-Chile New York Airways
Libyan Arab Airlines Panga Airways Ltd.
LOT Lignes Aériennes Polonaises Québecair
Nigeria Airways Suidwes Lugdiens
Olympic Talair
Qantas Airways Trans Brasil
Saudi Arabian Airlines Trans-West Air Charter
South African Airways United Air Services
Sudan Airways
Syrian Arab Airlines
TAPTransports Aériens Portugais
Zambia Airways Corporation b) Membres associés (2)
New Zealand National Airways Trans Australia Airlines
Troisième catégorie: Sociétés mixtes
contrôlées par l'Etat a) Membres actifs (22)
Air Afrique (Etats: 60%; Sodetraf: 30%)
Air France (Etat: 98.76%)
Air Malta (Etat: 71.83%; PIA: 28.17%)
Air Niugini (Etat: 60%; Qantas: 12%; TAA: 12%;
Autres: 16%) Air Zaire (Etat: 70%; INSS: 8%; Caisse d'Epargne: 8%)
Alitalia (Etat: 91%; Fiat: 8.8%)
Ariana (Etat: 51%; Pan Am: 49%)
Austrian Airlines (Gouv. Féd.: 33%; Gouv. Local: 33%;
intérêts locaux: 34%)
Cameroon Airlines (Etat: 70%; Air France: 30%)
Cyprus Airways (Etat: 53.2%; British Airways: 22.7%;
intérêts locaux: 24.1%) El Al Israel Airlines (Etat: 75%)
Finnair (Etat: 73%; privé: 23%)
Ghana Airways (Etat: 60%; British Airways: 40%)
KLM Lignes aériennes néerlandaises (Etat: 78%)
Lufthansa Lignes aériennes allemandes (Etat: 75%)
Middle East Airlines (Etat: 70%; Air France: 30%)
Pakistan Int'I. Airlines (Etat: 90%)
SABENA (Etat: 90%; intérêts privés: 10%)
SAS (Etat: 50%; ABA: 42.5%; DNL: 28.6%;
DDL-ABA, DNL et DDL: 28.6%)
THY Turk Hava Yollari (Etat: 99.4%; British Airways: 0.6%)
Tunis Air (Etat: 51%; Air France: 49%)
VIASA (Etat: 55%; intérêts privés dont LAV et
AVENSA: 45%) b) Membres associés (2)
Air Liberia (Etat: 50%; Autres: 50%)
VASP Viacao Aerea (Partagé entre l'Etat de Sao Paulo,
Sao Paulo La Banque Nationale de Sao Paulo, et la Municipalité de
Sao Paulo)
QUATRIEME CATEGORIE: Sociétés mixtes à
contrôle privé a) Membres actifs (4)
Japan Air Lines (intérêts privés: 65%;
Etat: 35%) Mexicana (intérêts privés: 90%;
Etat: 10%) Philippine Airlines (Rubicon Inc.: 72%;
Govt. Service Insurance: 20%; intérêts privés: 8%)
Swissair (intérêts privés: 70%; institutions publiques:
30%) b) Membres associés aucun
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