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Version finale

31e législature, 2e session
(8 mars 1977 au 22 décembre 1977)

Le vendredi 27 mai 1977 - Vol. 19 N° 94

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude des crédits du ministère de l'Education


Journal des débats

 

Étude des crédits du ministère de l'Éducation

(Onze heures quarante-cinq minutes)

Le Président (M. Clair): À l'ordre, messieurs!

La commission permanente de l'éducation, des affaires culturelles et des communications est réunie ce matin pour continuer l'examen des crédits budgétaires du ministère de l'Éducation.

Les membres de la commission pour aujourd'hui sont: M. Alfred (Papineau), M. Bertrand (Vanier), M. Lefebvre (Viau) en remplacement de M. Bisaillon (Sainte-Marie); M. Brochu (Richmond), M. Charron (Saint-Jacques), M. Chevrette (Joliette-Montcalm), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Goldbloom (D'Arcy McGee), M. Marquis (Matapédia) en remplacement de M. Guay (Taschereau); M. Laplante (Bourassa), M. Laurin (Bourget), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Le Moignan (Gaspé), M. Marchand (Laurier), M. Morin (Sauvé), M. O'Neill (Chauveau), M. Paquette (Rosemont), M. Samson (Rouyn-Noranda).

Lorsque nous avons ajourné nos travaux hier, nous avions adopté les programmes et éléments compris dans le bloc 1, sous réserve du droit de parole du député de L'Acadie. Avant de lui accorder le droit de parole, cependant, le ministre a manifesté le désir de fournir certains renseignements qui lui ont été demandés hier.

M. le ministre.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, je me réjouis de ce que nous ayons avancé à grands pas, hier, grâce à la présence du député d'Outremont, qui a fort bien pris la relève. Je suis sûr que la présence du député de L'Acadie, ce matin, va nous permettre de compléter assez rapidement à tout le moins le premier bloc, parce que nous avons déjà passé une quinzaine d'heures, à ce qu'on me dit. Je n'ai pas senti passer ces heures, tellement elles ont été intéressantes, mais il faut tout de même, à un moment donné, aboutir.

Je voudrais, de façon préliminaire, au début de cette séance, vous entretenir de deux questions qui me paraissent importantes. La première a trait au taux de scolarisation. C'est une question qui m'a été posée par le député d'Outremont hier. J'y répondrai peut-être dans un instant, pour laisser à M. Martin le temps de vérifier quelques chiffres pour voir s'il y a bien concordance entre les chiffres de 1975 et ceux dont il dispose pour une date plus récente.

Conseil scolaire de l'île de Montréal

M. Morin (Sauvé): Je voudrais également relever un article que je crois biaisé, publié dans le Devoir de ce matin et intitulé: "Le Conseil scolaire de l'île de Montréal a gagné la bataille des chiffres."

Mme Lavoie-Roux: Je me réjouissais.

M. Morin (Sauvé): Je ne connais pas le journaliste qui a écrit cet article. Je ne sais de quelles sources il s'est inspiré, mais visiblement ce sont des sources tout à fait unilatérales, parce que la vérité est tout autre. Il n'y a pas de gagnant ni de perdant dans cette bataille, si ce n'est le contribuable.

Pour ce qui est des chiffres, les voici: Les prévisions initiales du Conseil scolaire de l'île de Montréal, quant à ses dépenses, étaient de l'ordre de $38,6 millions; j'entends, bien sûr, les dépenses hors normes. Après discussions, au cours desquelles nous avions soutenu, du côté du ministère, que ces dépenses devaient être fixées à $30 millions, le conseil scolaire vient de nous soumettre une nouvelle proposition qui se chiffre par $32,8 millions.

M. le Président, pour être malin, je pourrais poser la question suivante: Le nouveau chiffre qui nous est fourni par le conseil scolaire est-il plus près de ce que nous avions prévu, ou plus près de ses prévisions à l'origine? En ce qui me concerne, et sans être grand mathématicien, je pense que $32,8 millions est plus près de $30 millions que de $38,6 millions. S'il devait y avoir un perdant ou un gagnant dans cette bataille de chiffres, je vous laisse déterminer par vous-mêmes lequel il serait.

À la lumière de cet examen des chiffres auquel ont procédé les fonctionnaires du conseil scolaire et du ministère, je m'apprête, aujourd'hui-même, à faire une nouvelle proposition, celle-là définitive, au Conseil scolaire de l'île de Montréal, de sorte qu'il puisse, avant le 1er juin, prendre les décisions qui s'imposent quant aux taxes.

M. le Président, les gagnants disais-je tout à l'heure, ce seront les contribuables. Nous proposons au conseil scolaire une légère augmentation, mais significative tout de même, au chapitre de l'aide aux milieux défavorisés. Nous proposons de porter celle-ci à $1 025 000. Nous acceptons aussi de subventionner les dépenses encourues pour les élections scolaires, ce qui signifie un ajout de $642 060 à la subvention déjà consentie. Cet allégement des dépenses du conseil scolaire lui permettra d'approprier, à même le surplus du 30 juin 1976, une somme de $2 276 780, de sorte qu'il n'existe plus aucune raison d'augmenter les taxes ni de restreindre de quelque façon que ce soit les fonds destinés aux milieux défavorisés.

Pour mieux renseigner les députés, j'ai demandé qu'on vous fasse distribuer un exemplaire de la lettre que je viens d'adresser au président du conseil scolaire, M. Jacques Mongeau. Je souhaiterais qu'à l'avenir le journal que je mentionnais plus tôt fasse preuve d'un peu plus d'objectivité. Je sais que nous sommes en campagne électorale scolaire sur l'île de Montréal; je sais que ce journal est déjà engagé dans une certaine bataille du référendum, mais ce n'est pas une raison pour faire preuve de partialité dans cette élection scolaire.

Le Président (M. Clair): Le député de l'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, est-ce que je pourrais poser quelques questions au ministre simplement pour bien comprendre les chiffres?

M. Morin (Sauvé): Assurément. C'est d'ailleurs un peu dans ce but que je dépose cette lettre dès le début de nos travaux, ce matin, parce que j'ai pensé — je ne pense pas me tromper, Mme le député — que vous seriez intéressée à revenir sur cette question.

Mme Lavoie-Roux: Ce matin, j'ai vu l'article dans le journal, mais je ne m'étais pas proposée de poser des questions sur l'article du journal, je n'en connaissais pas les résultats, de toute façon.

Il y a eu également — je ne sais pas encore s'il y avait eu erreur de chiffres — un autre article, dans le même journal, peut-être a-t-il paru ailleurs aussi, il y a à peu près trois semaines. À ce moment, je vous avais posé une question à l'Assemblée nationale. On parlait d'une demande de $24 millions qui avait été adressée au ministère de l'Éducation. On avait besoin de $24 millions supplémentaires, autrement, on serait obligé d'aller taxer pour cette somme.

M. Morin (Sauvé): Est-ce que c'était dans le même journal?

Mme Lavoie-Roux: Oui, c'était dans le même journal.

M. Morin (Sauvé): C'est tout aussi farfelu. Il n'a jamais été question d'un pareil montant.

Mme Lavoie-Roux: D'accord.

Il reste que, hors normes, M. le ministre, l'île de Montréal doit financer $32,8 millions, moins les sommes que vous venez de mentionner, un ajout pour l'aide aux milieux défavorisés, et des dépenses pour couvrir les frais des élections scolaires.

M. Morin (Sauvé): C'est exact. Pour vous donner toutes les précisions nécessaires, Mme le député, cela signifie que la nouvelle proposition augmentant notre contribution aux milieux défavorisés et aux élections scolaires signifie des dépenses hors normes de $31 513 000.

Mme Lavoie-Roux: II y a déjà une taxe supplémentaire qui existe à Montréal, pour couvrir les dépenses hors normes qui avaient été effectuées, l'année dernière. Maintenant, ces $31 millions est-ce qu'il y en a déjà une partie de couverte par la taxe qui est prélevée localement?

M. Morin (Sauvé): Oui, il y en a pour une vingtaine de millions de dollars. Si vous voulez vous référer à la lettre, à la page 2, au bas du second paragraphe complet, vous pourrez lire ceci: "Ce pourcentage porte la prévision des revenus de la taxe supplémentaire à $20 236 000."

Je continuais: "Si on ajoute les $8 millions de l'entente sur la taxe des corporations, on peut prévoir des revenus de $31 513 025. "

Mme Lavoie-Roux: Alors, tout serait couvert sans taxe supplémentaire?

M. Morin (Sauvé): C'est ma conviction, Mme le député. Il ne sera pas nécessaire d'augmenter les taxes. Il s'agit ici du rendement de la taxe, n'est-ce pas?

Mme Lavoie-Roux: Celle qui est prévue actuellement.

M. Morin (Sauvé): Exactement.

Mme Lavoie-Roux: Dans le paragraphe suivant, M. le ministre, la différence entre les dépenses prévues par le conseil de $32,8 millions et les revenus de $31 513 000 décrits plus haut, tel qu'il apparaît dans la lettre, laisse $1,3 million. C'est pour cela qu'il faudrait peut-être aller prélever une taxe supplémentaire.

M. Morin (Sauvé): Non, nous ne pensons pas que ce soit nécessaire. Je l'ai fait savoir au président du conseil scolaire. Nous pensons que cette différence peut être réaménagée — c'est ce que je dis au bas de la page 2 et au sommet de la page 3 — "par la révision des réserves prévues ou par une légère diminution du per capita versé aux commissions scolaires, et ce sans qu'il soit nécessaire de réduire vos activités dans les milieux défavorisés — c'est le chantage qu'on avait tenté d'exercer sur nous, n'est-ce pas — ou d'augmenter le taux de taxe des contribuables et des corporations." Nous sommes convaincus qu'il est possible, évidemment, en administrant de façon serrée — nous en sommes tous là, au Québec, à l'heure actuelle — de boucler avec les montants mentionnés, c'est-à-dire $31 513 025.

Mme Lavoie-Roux: De toute façon, tout à l'heure, on va reparler de l'opération dans les milieux défavorisés. Je pourrai peut-être revenir sur le sujet, mais il semble que déjà, quand même, il y a eu une coupure faite par le conseil scolaire à partir des prévisions préliminaires qui étaient de l'ordre de $38,6 millions. Vous leur avez demandé de les réduire pour atteindre un chiffre de $30 millions.

M. Morin (Sauvé): Nous leur avons demandé aussi de revoir leurs chiffres, parce que leurs chiffres ne nous paraissaient pas exacts. Révision faite de concert, cela a donné ces $32,8 millions, n'est-ce pas...

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Morin (Sauvé): ...plutôt que $38,6 millions.

Mme Lavoie-Roux: Oui, vous dites que, de concert, vous avez réaménagé cela de telle sorte que vous êtes arrivés à $32,8 millions. À ce moment-ci, tous les montants qu'on retrouve sont de l'ordre de $31 513 000. Il reste quand même une différence. Vous leur dites de réaménager de nouveau?

M. Morin (Sauvé): Nous leur disons qu'ils peuvent s'en tirer avec $31 513 000 parce que nous sommes convaincus, à l'examen des chiffres, que c'est possible. Dans ses premières prévisions de dépenses — je tiens à le souligner à Mme le député de L'Acadie, qui va être à même de juger les demandes qui nous étaient faites — le conseil scolaire avait prévu une allocation per capita de $97 par élève, alors que nous étions convaincus qu'on pouvait s'en tirer avec $67 par élève.

Évidemment, ayant soufflé de la sorte le per capita, on aboutissait à $38,6 millions. Le per capita que nous serions prêts à soutenir, à l'heure actuelle, est de l'ordre de $71 par tête.

Mme Lavoie-Roux: Est-il identique pour l'ensemble de la province, ce per capita, ou si c'est en fonction des besoins de l'île de Montréal?

M. Morin (Sauvé): Cela n'a rien à voir avec le Québec hors du territoire du conseil scolaire.

Mme Lavoie-Roux: Quel était leur per capita, l'an dernier, vous en souvenez-vous?

M. Morin (Sauvé): $63.50.

Mme Lavoie-Roux: C'était leur per capita hors normes; cette année, ils demandaient $97? Bon. Enfin, je n'ai pas les détails.

M. Morin (Sauvé): Une augmentation de seulement 54%, soit dit en passant! Dans une période financière comme celle que nous traversons, je vous laisse juge.

M. Raynauld: On appelle cela un taux marginal, M. le ministre. Les taux marginaux sont toujours plus élevés que les taux moyens.

M. Morin (Sauvé): Pour ne pas jeter indûment d'huile sur le feu, je ne ferai pas de commentaires.

Mme Lavoie-Roux: Une dernière question là-dessus. La population diminue de combien dans l'île de Montréal?

M. Morin (Sauvé): Vous voulez dire la population scolaire?

Mme Lavoie-Roux: Scolaire, oui.

M. Morin (Sauvé): On peut vous donner les chiffres là-dessus, il y a une diminution. En général, c'est à peu près la moitié de la diminution québécoise. C'est de l'ordre de 10 000 à 12 000 étudiants pour l'ensemble de l'île.

Mme Lavoie-Roux: Pour l'ensemble, ce n'est pas de 20 000?

M. Morin (Sauvé): II faudrait vérifier pour être sûr. On vous donnera l'information, chiffres à l'appui. Nous avons les chiffres.

Mme Lavoie-Roux: Oui. Je ne veux pas plaider en faveur des $71 versus les $97, je n'ai pas assez d'éléments pour le faire, mais il ne faut pas oublier que dans l'île de Montréal, depuis six ou sept ans, la baisse de la population a été vraiment très très considérable, compte tenu de l'ensemble de la province. Cela a demandé des ajustements radicaux d'année en année. Avec la disparition de toutes les ententes qui avaient été prévues, même l'entente sur l'équipement, etc., alors, finalement, c'est peut-être par ce truchement de la hausse du per capita hors normes qu'on essaie de maintenir une qualité de services qui soit un peu identique à celle qu'on avait avant.

M. Morin (Sauvé): Disons que pour l'année 1977/78, ce que vous soulevez sera certainement atténué, compte tenu des prévisions dans les conventions collectives à l'égard de la sécurité d'emploi. Dans les données des années antérieures, soit la CECM, le PSBGM, ou d'autres commissions scolaires de l'île ou dans la province de Québec, bon nombre des dépenses hors normes étaient pour assumer un surplus de personnel. Maintenant, dans la nouvelle convention, compte tenu de la sécurité d'emploi et surtout du fait que la sécurité d'emploi est payée hors enveloppe, ceci devrait diminuer de beaucoup estime-t-on, le coût des dépenses hors normes à être supporté par les commissions scolaires, surtout au poste 90, entretien des écoles et autres, des diminutions d'effectif, de personnel.

Mme Lavoie-Roux: Pour le moment c'est...

Le Président (M. Clair): Étant donné que la discussion sur le sujet est parti sur la base de faits nouveaux portés à la connaissance de la commission, je permettrai au député de Bourassa de poser une question sur le sujet. M. le député de Bourassa.

M. Laplante: Ce n'est pas une question, c'est surtout l'état du conseil de l'île avec son président. Je trouve regrettable que le président du conseil de l'île, depuis le 15 novembre, n'ait pas réalisé ou n'ait pas accepté encore l'élection du nouveau gouvernement péquiste.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, question de règlement. Évidemment, on a l'immunité parlementaire, ici, on peut dire ce qu'on veut. Mais je pense qu'essayer, à ce moment-ci, de faire un débat sur le président du conseil de l'île... Le président du conseil de l'île est quand même le porte-parole des commissions et ces demandes sont venues des commissions scolaires. Je trouve que les propos du député de Bourassa n'ont guère de pertinence avec le dossier qui vient de nous être présenté qui était vraiment d'examiner les chiffres que le ministre de l'Éducation a retenus. Je pense que cela n'avance à rien.

M. Laplante: Vous considérez-vous le porte-parole de M. Mongeau, de ce temps-ci, Mme le député de l'Acadie?

Une voix: Non, mais ce sont des affirmations gratuites.

Le Président (M. Clair): À l'ordre!

Mme Lavoie-Roux: Vous faites des affirmations gratuites.

M. Laplante: Si cela n'est pas cela, le président m'a donné la parole sur la réponse...

M. Alfred: Une question de privilège, M. le Président.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

Mme Lavoie-Roux: Je ne vois pas ce que cela va faire avant que...

Une voix: Ne vous laissez pas faire, Mme...

M. Alfred: J'invoque le règlement, M. le Président.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît! Le député de Papineau a soulevé une question, une nouvelle question de règlement.

M. Alfred: Ma question c'était pour signifier que l'exposé que s'apprête à faire le député de Bourassa sur cette question est dans l'ordre, M. le Président.

Le Président (M. Clair): M. le député de Bourassa, est-ce que vous désirez intervenir sur la question de règlement?

M. Laplante: Sur la question de règlement. Je conçois, après avoir donné la parole au député de l'Acadie sur la déclaration du ministre, qu'il y a certains faits que j'aimerais rétablir dans cette déclaration, parce que c'est une continuité. Je crois qu'il y a des mises au point qui doivent être faites.

M. Raynauld: M. le Président, sur cette question de règlement.

Le Président (M. Clair): Le député d'Outremont.

M. Raynauld: Je ne sais exactement ce que le député de Bourassa veut dire, mais, si c'est dans la veine de son début de tout à l'heure, je pense que c'est inadmissible qu'on accepte ici des affirmations absolument gratuites comme celle qu'il a faite à l'effet que le président du conseil ne s'était pas encore aperçu qu'il y avait eu des élections le 15 novembre. Si c'est pour poursuivre dans cette veine je vais m'y opposer jusqu'au bout. Je pense que c'est inadmissible.

Mme Lavoie-Roux: C'est le vieux style du député de Bourassa, vous savez.

M. Laplante: C'est peut-être le nouveau style.

J'aime mieux le dire ouvertement que d'aller le dire dans un restaurant du nord de Montréal, madame, avec certain directeur général. Vous comprenez très bien ce que je veux dire, madame, vos relations avec le conseil de l'île ont été établies comme si vous étiez commissaire encore au conseil de l'île.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

Mme Lavoie-Roux: Question de privilège.

Le Président (M. Clair): Mme le député de L'Acadie, il n'y a pas de question de privilège en commission parlementaire.

Mme Lavoie-Roux: Quand des faussetés sont dites, quel recours avons-nous?

Le Président (M. Clair): Vous avez des recours devant l'Assemblée nationale comme telle sur une question de privilège.

Mme Lavoie-Roux: Je reviendrai.

Le Président (M. Clair): Sur la question de règlement, lorsqu'une commission étudie un projet de loi ou des crédits, l'article 160 de notre règlement prévoit qu'un député peut prendre la parole sur le même point aussi souvent qu'il lui plaît à condition de ne pas parler plus de 20 minutes en tout sur un même sujet. M. le député de Bourassa, vous êtes président de commissions parlementaires, vous savez sûrement aussi bien que moi les droits et privilèges des membres de l'Assemblée nationale de même que les limites dans lesquelles nous pouvons discuter d'un sujet. Je suis convaincu que le député de Bourassa connaît bien les conséquences de ses gestes et, malheureusement ou heureusement, je n'ai pas à déterminer de la justesse des propos prononcés par un député en commission parlementaire.

Mme Lavoie-Roux: Ils seront reproduits. Je poserai une question de privilège à l'Assemblée nationale.

Le Président (M. Clair): M. le député de Bourassa, je vous invite à continuer.

M. Laplante: Pour faire suite, le président du conseil de l'île devrait réaliser que le 15 novembre est passé, que nous sommes un nouveau gouvernement et qu'il fait du chantage actuellement dans sa première déclaration en voulant imposer des taxes nouvelles aux contribuables et faire passer cela sur le dos du gouvernement. Cela fait suite aussi à une autre action du conseil de l'île, sur le Musée d'histoire naturelle. Mme le député de L'Acadie connaît très bien aussi les conséquences de l'affaire du Musée d'histoire naturelle où on menace continuellement, aussitôt qu'on n'a pas ce qu'on veut. On a même menacé d'envoyer ces pièces en Ontario. Cela vient encore du Conseil de l'île de Montréal. Il faudra apprendre à fonctionner avec le gouvernement.

Mme Lavoie-Roux: ... berlue...

Le Président (M. Clair): M. le ministre de l'Éducation.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, puis-je exprimer simplement un souhait? C'est que ces questions financières qui sont d'ordre technique ne deviennent pas un enjeu dans l'élection scolaire du mois de juin. Malheureusement, je dois constater, en lisant certains communiqués publiés notamment dans le Devoir, que les chiffres pourraient devenir un enjeu électoral. Je le regretterais profondément parce que cela forcerait le ministre de l'Éducation — qui jusqu'ici a beaucoup insisté pour tenir un langage technique, financier — à monter dans l'arène.

Je dirais une chose. Si le président du conseil scolaire n'est pas capable d'adopter une attitude semblable à la mienne, j'irai défendre les chiffres et j'irai parler de son administration, si la chose est nécessaire. Et dans la mesure où Mme le député de L'Acadie entretient encore des rapports favorables avec le président du conseil scolaire, elle voudra bien lui faire part de mon message.

Le Président (M. Clair): Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je n'ai pas vu le président du conseil scolaire et je ne lui ai pas parlé depuis l'élection du 15 novembre. Je voudrais, M. le ministre, dire que celui qui tente de politiser la situation est le député de Bourassa. J'ai simplement dit tout à l'heure qu'on aurait dû strictement s'en tenir aux explications techniques que je vous ai demandées pour essayer de mieux comprendre le tableau. Je pense que je ne m'en suis pas écartée.

M. Morin (Sauvé): C'est juste. M. le Président, puis-je ajouter simplement que je prends acte?

M. Raynauld: Question de règlement.

Le Président (M. Clair): M. le ministre, M. le député d'Outremont soulève une question de règlement.

M. Raynauld: Je soulève une question de règlement. M. le Président, vous venez de dire que le député de L'Acadie n'avait pas le droit de soulever une question de privilège. Il est bien indiqué à l'article 133 qu'à moins de dispositions contraires les règles relatives à l'Assemblée s'appliquent aux commissions.

Or, dans les règles de l'Assemblée nationale, on dit à l'article 49, qu'un député peut toujours soulever une question de privilège à l'Assemblée immédiatement après qu'ont été prononcées les paroles ou que se sont déroulés les événements qui y donnent lieu."

Ce n'est pas à moi de soulever la question de privilège, mais sur cette question de règlement, le député de L'Acadie a parfaitement le droit de soulever cette question privilège. Elle aurait double- ment raison, maintenant que le ministre vient lui aussi de faire allusion aux mêmes faits.

M. Morin (Sauvé): Non, M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le ministre, sur la question de règlement?

M. Morin (Sauvé): Non, ce n'est pas sur la question de règlement. J'estime que ce débat a assez duré. Je voudrais simplement prendre acte de ce qu'a dit Mme le député de L'Acadie. Je crois très volontiers ce qu'elle a dit. Pour le cas où elle aurait l'occasion de rencontrer M. Mongeau, si elle a quelque influence sur lui, si elle pouvait lui expliquer le langage que nous avons tenu ce matin, qui est un langage financier et technique, si elle pouvait l'inciter à s'en tenir à cela, ce serait pour le plus grand bien et du conseil scolaire et de l'éducation.

Le Président (M. Clair): Sur la question de règlement du député d'Outremont, il a raison sur le point qu'il défendait voulant entre autres, qu'il n'appartient pas à lui, mais bel et bien au député de L'Acadie de soulever une question de privilège, s'il y avait question de privilège. Mais il a tort quant au fait qu'il y aurait lieu de poser des questions de privilège en commission parlementaire. C'est une tradition solidement établie en vertu de notre règlement, en vertu de nos interprétations passées et actuelles du règlement. Je n'ai pas l'intention d'admettre en aucune façon des questions de privilèges en commission parlementaire.

Mme Lavoie-Roux: Je ne sais plus si je soulève une question de règlement ou de privilège, mais puis-je vous poser une question?

Le Président (M. Clair): Faites-le sous la forme d'une question de règlement ou de demande de directive, Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Si vous me demandez quel règlement j'invoque, il faudrait que j'aille étudier pendant... Pour ne pas créer de confusion, il y a une précision que je voudrais donner. C'est vraiment avec un souci d'honnêteté que je le fais. J'ai dit que je n'ai pas vu le président du Conseil scolaire de l'île de Montréal depuis le 15 novembre. Or, j'ai été convoquée au Conseil scolaire de l'île de Montréal au moment du débat sur la présentation du comité de restructuration scolaire. On avait invité les membres qui n'en faisaient plus partie pour le présenter au public. À ce moment, je l'ai vu. Je tiens à le dire. Je ne me souviens pas à quelle date. Cela se peut que ce soit au mois de janvier. Si on voulait aller vérifier si je l'ai vu physiquement, je vais au moins vous dire cela. Je l'ai vu à ce moment et il n'a pas été question de budget.

M. Morin (Sauvé): Nous ne vous en tiendrons pas rigueur.

Mme Lavoie-Roux: Question de privilège.

Le Président (M. Clair): Mme le député de L'Acadie, il n'y a pas de question de privilège en commission parlementaire.

Mme Lavoie-Roux: Comment vais-je poursuivre?

M. Alfred: Question de règlement.

M. Raynauld: Sur cette question de règlement, M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député d'Outremont, je serais bien embêté de savoir sur quelle question de règlement puisqu'il n'y a pas, effectivement, de question de règlement soulevée actuellement.

M. Raynauld: En vertu des articles 163 et 48b).

M. Alfred: Vous n'avez pas le droit, M. le député d'Outremont, de revenir sur une décision du président.

Le Président (M. Clair): M. le député d'Outremont...

M. Alfred: La décision du président est irrévocable.

Le Président (M. Clair): ... vous auriez sûrement avantage à communiquer avec d'autres membres de votre parti sur ce point. Il n'est vraiment pas d'usage de soulever des questions de privilège en commission parlementaire.

Mme Lavoie-Roux: On a aussi eu de longues discussions à savoir si une motion pouvait être présentée en commission parlementaire pour l'étude des crédits. Les gens se souviendront que cela s'est passé à l'étude des crédits des Affaires culturelles, des Communications et dans une autre commission, j'oublie laquelle.

À ce moment, le parti ministériel a fait état du fait que ce n'était pas exclu et l'Opposition officielle avait fait valoir que c'était l'usage qui faisait qu'on n'introduisait pas de motion au moment de l'étude des crédits aux commissions parlementaires qui font l'étude des crédits. À ce moment, vous vous servez d'un argument de l'Opposition officielle pour dire que l'usage fait qu'on ne soulève pas de questions de privilège. Pourriez-vous soumettre la question au président de l'Assemblée nationale?

M. Alfred: Une question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Sur la question de règlement, M. le député de Papineau.

M. Alfred: Je pense que ce que Mme le député de L'Acadie dit n'est pas tout à fait vrai, parce qu'il y avait eu des précédents qui ont été confirmés par le vice-président de la Chambre en ce qui concerne la recevabilité de la motion du député de Vanier.

Mme Lavoie-Roux: J'aimerais, quand même, qu'on étudie la chose, parce que, pour moi, c'est peut-être plus important des questions de privilège sur des propos tels qu'a tenus le député de Bourassa, qui sont absolument gratuits, qu'une motion qui, en fait, peut être sans conséquence.

Le Président (M. Clair): M. le député de Rosemont sur la question de règlement.

M. Paquette: Si je peux me permettre une dernière intervention là-dessus, je pense qu'il ne faudrait pas préjuger de ce qui se passe dans le cerveau du président du Conseil scolaire de l'île de Montréal. Nous verrons, d'après sa réaction à la proposition du gouvernement, s'il est guidé par des considérations politiques. Si, devant une proposition qui est fort raisonnable, il ne réussit pas à gratter encore $1 million dans les divers budgets du Conseil scolaire de l'île, chacun pourra tirer ses conclusions, mais je souhaiterais qu'on passe à autre chose.

M. Morin (Sauvé): Je suis tout à fait disposé à faire cela, M. le Président. Je serais même tout à fait prêt à répondre à la question du député d'Outremont posée hier soir au sujet du taux de scolarisation, du moins à lui donner la réponse partielle que j'ai sous les yeux. Les recherches faites par M. Dufour et...

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je m'excuse. J'ai demandé au président d'obtenir l'opinion du président de l'Assemblée nationale, à savoir si une question de privilège pouvait être soutenue ici, compte tenu de l'autre incident qui s'est passé.

Le Président (M. Clair): Sur le fait que vous affirmez qu'il y a lieu de soulever des questions de privilège en commission parlementaire...

Mme Lavoie-Roux: Oui.

Le Président (M. Clair): ... je pourrai rendre une décision dans quelques minutes. Nous allons donc suspendre la commission pour quelques minutes, s'il vous plaît!

M. Morin (Sauvé): M. le Président, pour ne pas perdre trop de temps, je suis prêt à entendre la question de privilège du député n'importe quand.

Le Président (M. Clair): M. le ministre, pour l'instant je suis fermement convaincu qu'il n'y a pas lieu d'accepter — c'est un précédent qui serait créé — à première vue, une question de privilège en commission parlementaire. J'aimerais pouvoir bénéficier de quelques minutes pour rendre une décision motivée.

M. Paquette: Je me demande si c'est nécessaire. De toute façon, le député de L'Acadie a fait tellement d'interventions qui revenaient au même.

Mme Lavoie-Roux: II y en a que je voudrais faire.

M. Paquette: II y en a que vous n'avez pas faites!

Le Président (M. Clair): Je considère que la chose est suffisamment importante pour que nous suspendions les travaux pendant quelques minutes afin de rendre une décision motivée.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, au moment où vous allez faire cela, pour que le député de L'Acadie ne perde pas son temps dans l'intervalle, je vais déposer, pour qu'elle puisse en prendre connaissance, la liste des comités du ministère de l'Éducation pour l'année financière 1976/77.

Mme Lavoie-Roux: Merci beaucoup, M. le ministre.

Le Président (M. Clair): Suspension. À l'ordre, s'il vous plaît!

Sur la question soulevée par le député de L'Acadie visant à savoir s'il y avait ou pas de questions de privilège en commission parlementaire, je maintiens la décision que j'ai rendue ou que je m'apprêtais à rendre tantôt à l'effet qu'effectivement je n'accepte pas de questions de privilège en commission parlementaire. Je réfère le député de L'Acadie au journal des Débats du 21 mai 1975, page B-3576; elle verra que cette décision est conforme à la tradition et à la coutume établies en commission parlementaire en vertu de notre règlement.

Si le député de L'Acadie entend soulever une question de privilège, elle pourrait le faire sur un avis d'une heure au président de l'Assemblée nationale, à la prochaine occasion.

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. C'est ce que je ferai mardi prochain à l'Assemblée nationale. Je m'excuse du retard, je ne l'ai pas provoqué.

M. Morin (Sauvé): Madame, vous êtes tout excusée et, avec votre permission, bien que le député d'Outremont ne soit plus des nôtres, je déposerais quelques chiffres sur le taux de scolarisation. Ensuite, nous pourrons, si vous le désirez, Mme le député, aborder la question des milieux défavorisés qui, je le sais, vous intéresse.

Mme Lavoie-Roux: J'en avais quelques autres avant.

M. Morin (Sauvé): À votre guise.

Le Président (M. Clair): Le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Non, M. le ministre veut parler.

Le Président (M. Clair): M. le Ministre.

Taux de scolarisation au Québec

M. Morin (Sauvé): Le taux de scolarisation, je voudrais que ce soit réglé. Nous avons des chiffres fiables qui nous viennent des recherches de M. Dufour et de Mlle Lavoie, sur la fréquentation scolaire au Québec de 1966 à 1986, jusqu'à l'âge de 17 ans. Au-delà, les chiffres doivent êtres pris sous réserve parce qu'ils ne comprennent pas les étudiants universitaires, ce qui entraîne, on en conviendra, une certaine déformation des résultats.

Ces chiffres sont tout de même significatifs jusqu'à l'âge de 17 ans et je les résume. En 1966, le taux de scolarisation chez les garçons de 14 ans était de 94,6%, alors qu'il est passé à 99% en 1975. Pour les filles, le même taux était de 92,8% en 1966; il est passé également à 99% en 1975, ce qui marque une évolution fort significative. Passons maintenant au palier des garçons et filles de 15 ans. Le taux en 1966 pour les garçons était de 87,1%; il est passé à 97%. De même, pour les filles, il est passé de 84,8% à 97%. Pour ceux de 16 ans, les garçons sont passés de 72,2% à 81% et les filles, de 64,9% à 81% également.

On voit qu'il y a une égalisation constante des taux entre garçons et filles.

Pour l'âge de 17 ans, le taux est passé de 51,1% à 60% chez les garçons et de 39% à 62% chez les filles. Il y a donc là encore beaucoup de place pour l'amélioration. Au-delà, à compter de 18 ans, les chiffres ne tenant pas compte des étudiants universitaires, je n'oserais donner officiellement quelque chiffre que ce soit. Mais je puis assurer le député de L'Acadie, pour le député d'Outremont, que nous allons tenter d'établir ces chiffres au cours de l'année qui vient et que l'an prochain, lorsque nous nous retrouverons pour l'étude des crédits, je tenterai de donner un tableau complet de la situation.

Mme Lavoie-Roux: Excusez-moi, M. le Président, est-ce que le tableau a été remis ou est-ce qu'on va nous remettre le tableau de ce qui existe présentement?

M. Morin (Sauvé): Oui, le député d'Outremont est parti avec les documents que nous voulions déposer, parce qu'il attachait un intérêt particulier à la chose.

Mme Lavoie-Roux: Je m'en ferai faire une copie.

M. Morin (Sauvé): Si cela intéresse d'autres députés, nous pourrons le déposer en Chambre, la semaine prochaine. Je le ferai, puisque je vois deux députés qui m'indiquent que cela peut les intéresser, le député de Rosemont et le député de Gaspé, notamment.

Voilà pour les taux de scolarisation, du moins pour l'instant.

M. le Président, je suis prêt à écouter les questions du député de l'Acadie.

Le Président (M. Clair): Le député de L'Acadie.

Encadrement des étudiants

Mme Lavoie-Roux: Quand j'ai quitté, hier soir, j'ai demandé si on avait songé à associer des parents au programme d'encadrement des étudiants dans le règlement 7 qui a été finalement adopté, puisqu'il semble qu'il y a eu peu de modifications qui aient été apportées. On m'a répondu que non, on ne l'avait pas fait. J'aimerais demander au ministre s'il ne croit pas que ce serait là une bonne occasion, dans un esprit d'encouragement, d'avoir la participation des parents et de peut-être songer à les associer dans certaines activités d'encadrement. Je pense d'ailleurs que, dans les faits, cela se fait particulièrement au niveau élémentaire et même au niveau secondaire dans des écoles. Je pense que cela aurait peut-être été une occasion, quitte à qualifier leur intervention, mais au moins, officiellement, l'inclure dans la révision du règlement no 7.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, j'ai le même souci que Mme le député. Je pense que la présence des parents devrait être plus prononcée, notamment au niveau primaire. Au niveau secondaire, la chose peut paraître plus difficile, quoique ce serait également à explorer. Puisque vous abordez le problème de l'encadrement des élèves, je me permettrais de faire quelques observations, notamment pour le niveau où ce problème présente le plus de difficultés, qui est le niveau secondaire.

Mme Lavoie-Roux: J'aimerais bien.

M. Morin (Sauvé): Avant de le faire, cependant, je peux assurer Mme le député que dans notre projet de remettre l'école dans son milieu, nous voulons également mettre le milieu dans l'école parce que cela va de pair. Nous voulons que les parents jouent un rôle plus considérable dans l'école et que l'un des aspects de cette participation soit non seulement de contribuer à la définition des principes de discipline, de la vie scolaire en général, mais aussi d'apporter une contribution d'ordre pédagogique.

Naturellement, cela va devoir varier beaucoup selon les milieux parce que, comme vous l'avez fait observer, Mme le député, il y a des milieux où cela se fait déjà, mais il y en a d'autres où on est très réfractaire à ce genre de participation des parents puisque d'aucuns considèrent l'école comme étant une sorte de garderie, un endroit qui permet de se débarrasser de ses enfants pour la journée. Ces attitudes demeurent beaucoup trop répandues pour qu'on puisse les ignorer, elles sont là. Il faut certainement souhaiter une évolution dans les mentalités qu'on trouve dans certains milieux à cet égard. En somme, je partage les préoccupations du député de L'Acadie.

Me tournant maintenant vers l'encadrement des élèves au secondaire, il me paraît assez clair que cet encadrement doit être réalisé en traçant à chaque étudiant, chaque élève, un programme de travail personnel, en lui indiquant les normes d'évaluation dans son travail et en lui fournissant l'appui, avant tout, des éducateurs qui sont là pour l'aider et pour le guider. À ce niveau, c'est surtout aux éducateurs que je m'adresserais, d'abord parce que l'enseignement est devenu plus complexe qu'au niveau primaire et aussi parce que les démarches pédagogiques sont devenues plus complexes. Le lieu premier de l'activité de l'étudiant est la classe, je pense que nous en conviendrons tous. C'est là qu'on doit lui créer, par tous les moyens, un cadre de travail et lui assurer tout le soutien dont il a besoin. Cette responsabilité relève avant tout, à mon avis, en tout cas, du professeur.

Bien sûr, on doit faire intervenir d'autres professionnels de l'éducation, des conseillers d'orientation, des psychologues, des éducateurs dans le domaine du sport et de l'éducation physique, mais c'est encore dans la classe que se déroulent les choses les plus importantes du point de vue de la formation de l'élève.

Les reproches qu'on adresse le plus fréquemment à l'endroit de l'école secondaire sont probablement ceux de l'anonymat de l'élève et de l'absence parfois trop généralisée de discipline. La prolifération des voies, des options, la spécialisation des enseignants, la distribution des élèves en groupes-matières plutôt qu'en groupes-classes, tout cela, évidemment, ne contribue pas à favoriser le climat souhaitable aux études.

D'ailleurs, ce sont des causes bien connues de cette situation. Les éducateurs — ce n'est pas toujours leur faute, je tiens à le dire — ne connaissent pas suffisamment leurs élèves et, compte tenu du va-et-vient généralisé, ils peuvent difficilement faire une évaluation de chaque élève en particulier. Cette situation, on commence à en convenir dans plusieurs milieux, est préjudiciable à l'élève qui ne perçoit plus très bien la responsabilité de l'école et des enseignants à son endroit et qui ne peut facilement se référer à un adulte qui puisse intervenir rapidement lorsqu'il a des problèmes.

L'élève se sent trop souvent laissé à lui-même dans l'école et cet isolement n'est pas de nature à favoriser son sentiment d'appartenance à un milieu de vie, ce sentiment d'appartenance qui, à tous les âges de la vie, est fort important pour l'équilibre émotif de chacun. De plus, cette lacune constitue une barrière entre la famille et l'école, de sorte que j'en conclus à la nécessité, au cours des mois et des années qui viennent, de créer une situation où l'enseignant ou des équipes d'enseignants, comme je le dirai tout à l'heure, aient une connaissance personnelle de chaque élève pour atteindre l'objectif de formation générale dont j'ai parlé.

Diverses solutions s'offrent pour tenter d'atteindre cet objectif, diverses formules d'organisation qui, d'ailleurs, sont déjà pratiquées dans plusieurs écoles secondaires. Nous avons déjà des expériences sur lesquelles nous pouvons nous fonder et qu'on pourrait répandre à travers le Québec, des expériences qui ont porté fruit, no-

tamment dans certaines grosses polyvalentes. En général, ces expériences font qu'on distingue les élèves du premier cycle et du deuxième cycle non seulement au plan des méthodes d'enseignement et des formules d'encadrement, mais aussi au plan de la localisation physique dans l'école.

Au premier cycle surtout, on regroupe les élèves de façon plus homogène et plus stable. On retrouve les mêmes élèves ensemble et en des lieux qui leur sont propres. En conséquence, les enseignants, surtout ceux du premier cycle, commencent à être regroupés dans certaines expériences en équipes de formation plutôt que selon les disciplines. À mon avis, il faudrait favoriser la création et la stabilité d'équipes dont les membres se complètent, je veux dire d'équipes interdisciplinaires. Une équipe de formation se définirait comme un groupe formé des enseignants, des personnes-ressources et aussi des administrateurs qui sont collectivement responsables du cheminement d'un groupe spécifique d'élèves.

Cette solution ne ferait pas de distinction entre ce qu'on désigne souvent par vie étudiante et vie pédagogique. Dans la mesure du possible, il nous semble souhaitable que des enseignants spécialistes ne soient désignés que dans les disciplines qui requièrent une spécialisation particulière. Je pense, par exemple, à l'enseignement religieux, à l'éducation physique, à la musique, aux arts et à la langue seconde.

Pour le reste, plus on pourra faire appel à des généralistes, mieux cela vaudra.

M. le Président, j'ai encore quelques mots à dire sur la question. Je ne veux pas m'étendre indûment, mais je sais que ce problème en est un de fond et intéresse plusieurs membres de la commission. C'est pour cela que je me permets de faire en quelque sorte une introduction au débat qui devrait suivre.

À l'heure actuelle, déjà, dans les écoles secondaires, il y a plusieurs solutions qui ont été mises à l'épreuve. Je voudrais retenir deux exemples. La première de ces solutions est celle du titulariat dans laquelle les élèves d'un groupe donné sont placés sous la responsabilité d'un professeur de ce groupe. Les tâches de ce titulaire incluent des moments de rencontre avec chacun de ses élèves, en plus de prévoir des contacts avec les parents de chacun tout au cours de l'année. On a prévu d'ailleurs, dans ces cas, un allégement de la tâche d'enseignement dudit professeur. La seconde solution est celle qu'on pourrait appeler le tutorat qui est une formule pédagogique bien connue notamment dans certains établissements britanniques où chaque professeur a la responsabilité d'un très petit nombre d'élèves. La division des responsabilités s'effectue au sein d'une équipe multidisciplinaire responsable de plusieurs groupes d'élèves.

Comme tous les enseignants n'ont pas nécessairement le goût et les aptitudes pour jouer ce rôle, la répartition des tâches peut se faire en conséquence. Si la formule dite du groupe d'élèves stable, des équipes de formation paraît particulièrement adaptée au premier cycle, il faut, pour le second cycle, je crois, étudier une combinaison des formules du titulariat et du tutorat. Autrement dit, il faut avoir des formules très souples qui pourraient, d'ailleurs, varier d'une polyvalente à l'autre.

À notre avis — ces solutions seront évoquées dans le livre vert qui sera rendu public sous peu — l'utilisation de ces formules est de nature à diminuer sensiblement les difficultés vécues par les élèves et les enseignants dans les grosses écoles. Déjà, les expériences qui ont été faites nous le démontrent. Mme le député de L'Acadie connaît, je pense, ces expériences et elle peut constater avec nous qu'elles sont, somme toute, fort concluantes.

Ces solutions devraient également permettre une action conjointe entre la famille et l'école, une action qui serait fondée sur une connaissance commune, conjointe de l'enfant. Cette action suppose, de toute évidence, le maintien de la communication régulière et l'identification d'interlocuteurs, de part et d'autre.

Pour terminer, je dirais qu'on ne saurait ignorer les conséquences pratiques de ces formules, notamment pour ce qui est des coûts prévisibles tant en aménagements physiques qu'en effectifs supplémentaires dans plusieurs cas.

Aux deux types d'encadrement déjà évoqués, je veux dire l'encadrement lié à la formation et l'encadrement lié au rattachement à un groupe stable, il faut ajouter celui qu'assument déjà les services aux étudiants. Ces services poursuivent des objectifs qui sont de toute évidence du même ordre.

Ils veulent aider l'élève dans son orientation scolaire et professionnelle en lui fournissant les moyens techniques, l'information et l'appui moral dont il a besoin, organiser des loisirs formateurs, assurer la plus large autonomie dans l'accomplissement des démarches d'apprentissage, aider aussi l'élève à prendre contact avec le monde extérieur à l'école pour qu'il puisse y acquérir des suppléments de formation.

M. le Président, j'en ai déjà assez dit. Je pourrais continuer encore longtemps sur un sujet aussi passionnant et aussi crucial que celui-là, mais j'aimerais entendre les observations de mes collègues.

Le Président (M. Clair): Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Je ne me proposais pas de continuer la discussion là-dessus. Les formules que le ministre a énumérées sont intéressantes. Il y en a plusieurs qui sont déjà à l'essai dans plusieurs commissions scolaires et dans les écoles. Évidemment, il faut la collaboration et la motivation du milieu pour arriver à réaliser ces choses. Cela ne se réalise pas nécessairement avec de l'argent, mais bien davantage avec cet esprit de collaboration et cette motivation dont je parlais.

M. Morin (Sauvé): Vous avez tout à fait raison.

Mme Lavoie-Roux: Je voudrais simplement — je ne m'étendrai pas davantage sur ce su-

jet — demander au ministre, sur la question de l'encadrement: Quelle réception reçoit-elle chez les enseignants, d'une façon générale? Malheureusement, et on le sait, les enseignants avaient un peu perdu — particulièrement au secondaire, parce que le problème ne se posait pas à l'élémentaire — cette notion d'encadrement, les circonstances ne s'y prêtant pas ou quelles que soient les raisons. À ce moment on leur redemande de reprendre une responsabilité véritable en éducation. Semble-t-on rencontrer chez les enseignants, en général, d'après les rapports que vous avez des commissions scolaires, une ouverture et une motivation à l'égard de ces formules qui pourraient être introduites pour le bénéfice des élèves?

M. Morin (Sauvé): Règle générale, ces idées qui circulent déjà dans le milieu sont assez bien reçues. Je conviens qu'il y a encore des difficultés à surmonter. Toutefois, je vous ferai observer que la convention collective — je crois que c'est pour la première fois — parle d'encadrement. Évidemment, on a prévu un nombre de minutes qui peut paraître insuffisant — qui est de 100 minutes mais le principe de l'encadrement est déjà inscrit dans un document qui a fait l'objet de longues discussions, comme vous le savez.

En second lieu, parmi les expériences pratiques qui ont été tentées, je songe en particulier à la régionale de Chambly, les résultats sont probants non seulement du point de vue des élèves, mais du point de vue des enseignants, qui se félicitent d'appartenir à des groupes, je crois que c'est une vingtaine de professeurs coiffés par un responsable et responsables à leur tour de 500 à 600 élèves en général. Je suis justement allé rencontrer des personnes qui ont été mêlées de près à cette expérience et mon impression, c'est qu'elle a été très réussie. Les enseignants ne demandent pas mieux que de continuer. Aurons-nous le même succès ailleurs? La réponse va tenir dans la manière dont nous allons procéder. Il faut que nous le fassions avec les enseignants et non pas comme la foudre tombée de Jupiter — si je me fais comprendre.

Mme Lavoie-Roux: De toute façon je ne veux pas ajouter de commentaires sur ce point car vous avez invité les autres collègues à réagir. Je vais laisser la parole aux autres si tel est leur désir.

M. Morin (Sauvé): Si je comprends bien, vous êtes, en gros, d'accord avec la démarche. Cela m'intéresse de le savoir.

Mme Lavoie-Roux: Certainement, il y a eu le rapport POLY, il y a eu toutes sortes de formules qui ont été tentées, que ce soient des chefs de groupes, etc. La seule question que je me pose, je la répète: Est-ce qu'on pourra — et je le souhaite beaucoup — remotiver les enseignants à une partie de la tâche que les circonstances leur avait fait mettre de côté jusqu'à un certain point? C'est la seule question...

M. Morin Sauvé): C'est une question réelle, mais je pense que cela va dépendre du climat aussi. Est-ce que nous allons continuer d'avoir un climat d'affrontement, ou si nous allons avoir un climat de concertation et de coopération? C'est toute la question qui se pose, non seulement dans le domaine économique mais dans le domaine social, dans le domaine de l'éducation.

Mme Lavoie-Roux: II faudrait en parler à M. Charbonneau.

M. Morin (Sauvé): Cela a déjà été évoqué à quelques reprises, et je compte bien avoir des entretiens féconds avec la CEQ sur ces problèmes.

Le Président (M. Clair): M. le député de Rosemont.

M. Paquette: Sur le même sujet, M. le Président, je pense que les formules de titulariat et de tutorat ont été expérimentées avec des succès divers, quand même. J'ai tendance à rattacher le problème au fait que, souvent, on laisse des équipes d'enseignants ou d'enseignants-titulaires, ou tuteurs d'un groupe d'étudiants sans support pédagogique et aussi sans activité précise. J'aimerais savoir si le ministère a songé à une formule qui s'est développée dans certains États américains, qui consiste à réserver certaines périodes à des projets de groupe qui sont, justement, multidisciplinaires et qui permettent à l'enseignant responsable d'un groupe d'étudiants de penser au développement global de l'étudiant, sur le plan de différents objectifs, sur le plan intellectuel, sur le plan cognitif ou sur le plan affectif. Qu'on permette aux groupes d'étudiants de réaliser des projets précis qui impliquent plusieurs matières et où l'enseignant puisse se préoccuper du développement global de l'enfant. Je sais qu'il y a certaines formules où, simplement, on dit à l'étudiant: Vous pouvez aller voir le titulaire ou le tuteur pendant dix ou quinze minutes, jaser de vos problèmes. Cela n'apporte pas de résultats tellement probants parce que les enseignants n'ont pas d'activité à réaliser avec les jeunes, où les problèmes de développement global peuvent se poser, où le titulaire ou le tuteur peut voir les étudiants à l'oeuvre sur des projets précis, ce qu'ils n'ont pas le temps de faire, souvent dans des matières spécialisées.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, ces expériences auxquelles songe le député de Rosemont ont déjà été effectuées, notamment au niveau collégial. Le député sait que cela existe et, effectivement, cela se pratique non pas de façon généralisée, mais à gauche et à droite, avec un succès certain. La question que je me pose est la suivante: Dans quelle mesure peut-on transposer ces techniques pédagogiques, dont l'utilité paraît certaine, au niveau collégial, au niveau secondaire, où nous avons des étudiants, je crois, de 13, 14, 15 ans qui ont encore énormément de formation, de connaissances à acquérir avant de tomber dans un contexte multidisciplinaire?

Je pense qu'on pourrait sans doute songer à des essais, des expériences pour voir ce que cela pourrait donner, mais il reste que les objectifs de

formation du secondaire sont encore fortement axés sur les acquisitions de connaissances qui, au niveau collégial, permettront, justement, un climat prémultidisciplinaire.

M. Paquette: Les expériences auxquelles je songeais ont été faites aux États-Unis, à la fin de l'élémentaire, justement. Je pense qu'il y a une partie du temps qui est réservée, quand même minime, sur le plan d'activité, où on peut se préoccuper de la formation globale, ce qui n'empêche pas de coordonner cela avec la formation spécialisée au secondaire. Je pense qu'il faut aller dans cette direction.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, je serais heureux que le député de Rosemont nous communique ces documents. Ils n'ont pas été portés à ma connaissance.

M. Paquette: D'accord.

Le Président (M. Clair): II est présentement treize heures, nous devons donc ajourner nos travaux à mardi prochain. Maintenant, mardi prochain, ce sera un autre que moi qui présidera la commission. Pour le bénéfice de ce président, est-ce qu'on peut considérer que la discussion, sur ce point, est close et que nous reviendrions avec de nouvelles questions du député de L'Acadie, toujours concernant l'élémentaire et le secondaire publics, à moins que Mme le député de L'Acadie nous informe qu'elle est prête à aller au bloc 2?

Mme Lavoie-Roux: Je regrette, je vais essayer de faire le plus brièvement possible mardi, mais je...

M. Morin (Sauvé): M. le Président, nous avons réservé tous les droits du député de L'Acadie tel que cela avait été entendu. Est-ce que je pourrais, cependant, lui demander pour combien de temps elle pense que nous pourrions en avoir à parcourir ces questions?

Mme Lavoie-Roux: Je peux vous dire brièvement, même les...

Le Président (M. Clair): Nous pouvons immédiatement ajourner nos travaux à mardi matin prochain, et nous reprendrons avec des questions du député de L'Acadie qui demande l'ajournement.

(Fin de la séance à 12 h 57)

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