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Version finale

37e législature, 1re session
(4 juin 2003 au 10 mars 2006)

Le mardi 23 mars 2004 - Vol. 38 N° 23

Consultation générale sur les enjeux entourant la qualité, l'accessibilité et le financement des universités au Québec


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures trente-six minutes)

Le Président (M. Arseneau): Bonjour. Alors, si vous permettez, on va débuter la séance. Je déclare donc cette séance de la Commission de l'éducation ouverte. Je rappelle que le mandat de la commission est de tenir une consultation générale sur les enjeux entourant la qualité, l'accessibilité et le financement des universités au Québec.

M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Lessard (Frontenac) remplace M. Auclair (Vimont) et M. Blackburn (Roberval) remplace Mme Delisle (Jean-Talon).

Auditions (suite)

Le Président (M. Arseneau): Bienvenue à la commission. Alors, l'ordre du jour d'aujourd'hui est le suivant. Cet avant-midi, nous entendrons l'Ordre des ingénieurs et le Comité des doyens d'ingénierie du Québec, la Fédération des associations étudiantes universitaires québécoises en éducation permanente et la Fédération des associations de familles monoparentales et recomposées du Québec. Cet après-midi, nous poursuivrons avec la Corporation des services universitaires en Chaudière-Appalaches, le Centre universitaire des Appalaches et le Conseil consultatif de l'université en Beauce.

Alors, je demanderais aux gens qui ont des petits appareils cellulaires de bien vouloir les éteindre. Et j'invite dès maintenant l'Ordre des ingénieurs du Québec et le Comité des doyens d'ingénierie du Québec, qui ont déjà pris place devant nous. Alors, M. Lefebvre, je vous demanderais de présenter votre groupe, et vous avez aussi 20 minutes pour faire votre présentation.

Ordre des ingénieurs du Québec (OIQ) et Comité des doyens d'ingénierie du Québec (CODIQ)

M. Lefebvre (Gaétan): M. le Président, M. le ministre de l'Éducation, Mmes, MM. les députés et commissaires, je tiens à remercier la commission de nous recevoir aujourd'hui.

Permettez-moi d'abord de procéder aux présentations. Je m'appelle Gaétan Lefebvre. Je suis ingénieur et président de l'Ordre des ingénieurs du Québec. Je suis accompagné, à ma gauche, de M. Richard Marceau, ingénieur, doyen de la Faculté de génie de l'Université de Sherbrooke, président et porte-parole du Comité des doyens d'ingénierie du Québec. À côté de M. Marceau, c'est M. Robert Papineau, ingénieur et directeur général de l'École polytechnique. Sont également présents, à ma droite, M. Yves Beauchamp, ingénieur et directeur général de l'École de technologie supérieure, et M. Robert Nelson, ingénieur et directeur de l'administration de l'École de technologie supérieure, expert incontesté sur les chiffres et le financement de la formation en génie.

L'Ordre des ingénieurs du Québec et le Comité des doyens d'ingénierie ont décidé d'unir leurs voix pour vous adresser un message simple mais d'une importance capitale. Le sous-financement dont souffrent les écoles et facultés du génie du Québec a pris des proportions telles qu'il est inévitable que la qualité de la formation en génie donnée au Québec en soit sérieusement affectée si aucun correctif n'est apporté dès maintenant. Cela pourrait entraîner à terme de graves conséquences sur la protection du public, sur la profession d'ingénieur et sur l'économie du Québec. Nous considérons que cette situation critique doit retenir toute l'attention de la commission et nous y consacrons l'essentiel de notre mémoire.

La protection du public, voilà ce qui explique la présence d'un ordre professionnel aux côtés des doyens et de directeurs d'écoles et de facultés de génie. L'Ordre des ingénieurs du Québec, est-il besoin de le rappeler, est l'organisme qui, en vertu du Code des professions du Québec, a pour mandat, reçu du gouvernement du Québec, d'assurer la protection du public. Pour l'essentiel, cela consiste à s'assurer que le génie est pratiqué par des personnes compétentes et intègres. La compétence de l'ingénieur est le résultat cumulatif de l'apprentissage, notamment lors de la formation universitaire, et de l'expérience. Elle détermine son aptitude à poser un geste, à effectuer un acte professionnel. Elle est constituée de l'ensemble des connaissances, des savoir-faire, des attitudes et du jugement qui permettent à l'ingénieur d'exercer sa profession.

n (9 h 40) n

En vertu de l'impératif de protection du public, la compétence de l'ingénieur doit être parfaitement à jour dans son domaine d'activité, conforme aux règles de l'art, de façon à ce qu'il choisisse et applique les meilleures solutions à un problème donné. La compétence de l'ingénieur doit être constamment arrimée sur la réalité scientifique et technologique du génie, qui évolue très rapidement. Le maintien à jour de la compétence est une obligation primordiale faite à l'ingénieur. C'est un élément que l'ordre vérifie de manière rigoureuse, notamment par l'inspection professionnelle. L'inspection professionnelle, rappelons-le, s'effectue dans le cadre de la visite d'un inspecteur de l'ordre et vise à contrôler la pratique de la profession.

Cette obligation qu'a l'ingénieur d'être à la pointe de l'évolution scientifique et technologique dans son domaine se répercute évidemment sur les écoles et facultés d'ingénierie du Québec. Ce sont ces institutions qui rassemblent et transmettent des connaissances aux étudiants en génie et aux ingénieurs confirmés. Nos écoles et facultés n'ont pas le choix. Elles doivent, en matière de formation, donc de transmission des connaissances, être au niveau des établissements d'enseignement les plus avancés dans leur domaine. Il n'y a pas d'alternative.

En ce qui concerne le développement des connaissances, c'est-à-dire la recherche, la barre est encore plus élevée. Nos institutions doivent choisir des créneaux dans lesquels on s'attend à ce qu'elles soient parmi les meneurs, les meilleurs, ceux qui définissent l'excellence. C'est un défi auquel elles sont confrontées tous les jours. Pour relever ce défi de la recherche, pour donner un enseignement de pointe, nos écoles et facultés de génie doivent disposer de ressources comparables à celles des autres établissements de leur niveau. C'est d'ailleurs l'un des critères qu'utilise le Bureau canadien d'accréditation des programmes d'ingénierie quand vient le temps de renouveler l'agrément d'un programme de formation, généralement au terme d'une période de trois à six ans.

C'est d'autant plus important que, au-delà de la protection du public, c'est l'économie du Québec qui est en cause. Nous savons tous que, dans le monde d'aujourd'hui, notre avenir économique dépend de notre capacité collective à maîtriser et à mettre en oeuvre la technologie. Et les ingénieurs sont les principaux maîtres de la technologie, les maîtres d'oeuvre dont nos entreprises, particulièrement les PME, et nos institutions ont le plus grand besoin, car les ingénieurs sont nettement moins nombreux au Québec que dans la majorité des pays industrialisés.

La société québécoise est bien servie par ses ingénieurs. Des réalisations majeures ont vu le jour grâce au savoir-faire des ingénieurs du Québec. Je n'en mentionnerai que quelques-uns: l'hydroélectricité, par exemple, des réseaux de transport d'électricité d'une puissance jamais vue auparavant; une industrie aéronautique de renommée et d'envergure mondiales, tant pour la conception et la fabrication de moteurs de petite puissance, d'avions et d'hélicoptères, que de simulateurs de vol; une industrie manufacturière de pointe, fortement exportatrice. Ce sont les ingénieurs qui ont conçu les équipements, les infrastructures et les réseaux de transport et de communication grâce auxquels le Québec et le Canada se sont hissés au rang des nations industrialisées. Ce sont eux encore qui maintiendront et amélioreront ces infrastructures essentielles dans un environnement incertain. Attendons-nous à des interventions majeures, notamment au chapitre des changements climatiques. Toutes ces réalisations sont dues non seulement au savoir-faire des ingénieurs, mais également à la recherche scientifique et à l'innovation technologique.

Au-delà de leur mandat de former des ingénieurs, les écoles et facultés de génie y ont pris une part très importante en développant, par la recherche, des connaissances dont bénéficient nos entreprises et notre collectivité. Elles jouent là encore un rôle économique de premier ordre. Ces connaissances sont plus accessibles que jamais grâce aux mécanismes de transfert de technologie que les universités ont mis en place au cours de la dernière décennie. Les ingénieurs et les chercheurs s'affairent à y préparer l'avenir avec des innovations qui défient parfois l'imagination. À titre d'exemple, mentionnons les biotechnologies et les technologies de l'infiniment petit, qui annoncent à moyen terme une révolution technologique comparable à l'avènement de l'électronique. Ajoutons les technologies de l'information, dont on est loin d'avoir exploré tout le potentiel, l'ergonomie et les méthodes mathématiques d'optimisation et de simulation, sans oublier les domaines plus classiques, comme les matériaux, les structures de génie civile, où le Québec fait actuellement figure de leader mondial, enfin l'électronique, la productique, etc.

Ces développements scientifiques et technologiques répondent à des besoins spécifiques de la société et contribuent au bien-être collectif, par exemple la santé et le maintien de la qualité de vie d'une population vieillissante. C'est un domaine d'activité qui touche particulièrement le Québec et auquel les ingénieurs sont appelés à contribuer de plus en plus. Mentionnons également l'environnement, où là encore les ingénieurs québécois se sont taillé une réputation internationale, le maintien et le renouvellement des infrastructures publiques, les changements climatiques et beaucoup d'autres. Il y a là des acquis majeurs et des développements extrêmement prometteurs. Mon confrère, Richard Marceau, à qui je vais céder la parole dans un instant, vous entretiendra davantage de ce sujet.

La société attend beaucoup de la part des ingénieurs, mais encore doit-elle se donner les moyens de ses ambitions. Jusqu'ici, en dépit de ressources insuffisantes, nos écoles et facultés de génie ont su se maintenir à niveau, souvent avec brio, mais au prix de compromis qui hypothèquent sérieusement leur potentiel et dont on commence à mesurer les effets. Nous sommes profondément inquiets et préoccupés face à l'avenir. Difficile de ne pas l'être quand on mesure des écarts de financement de près de 70 % avec l'Ontario, notre plus proche compétiteur. C'est une situation qui ne peut durer. Le Québec n'a pas le choix, il faut réinvestir dans les écoles et facultés de génie. Réinvestir est certes un mot que vous entendez souvent, par les temps qui courent. Le choix des priorités en ce domaine n'est pas facile certes, mais il s'agit de rétablir une situation qui s'est lourdement dégradée depuis plus d'une décennie. Il est temps de réinvestir dans l'avenir du Québec, et cet investissement en génie est absolument incontournable. Je vous remercie de votre attention.

Le Président (M. Arseneau): Alors, M. Marceau.

M. Marceau (Richard): M. le Président, M. le ministre de l'Éducation, Mmes, MM. les députés et commissaires, M. Gaétan Lefebvre vous a présenté un portrait de la pratique du génie, a mis en évidence sa relation avec la protection du public et a souligné l'importance du génie dans le développement économique. Je propose de poursuivre notre témoignage conjoint en énumérant tout d'abord quelques-unes des contributions récentes des écoles et facultés de génie au développement économique du Québec.

Tout d'abord, l'Université du Québec à Trois-Rivières a donné naissance à la compagnie Axiocom, qui conçoit des récepteurs sans fil pour stations de base de troisième génération. Axiocom vise à prendre sa part de marché, évaluée à 25 milliards de dollars. L'École de technologie supérieure a développé le système Intelligent Software Radio, commercialisé sous licence, qui permet la transmission de micro-ondes programmables de très grande puissance. L'École polytechnique de Montréal a mis sur pied Polyvalor, en 1997, en partenariat avec le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec. Ceci a mené à la valorisation de 69 technologies, soit la création de 12 entreprises dérivées, de 22 accords de licence, de 16 accords de cession et de 200 emplois. La valeur globale de ces entreprises est déjà de l'ordre de 60 millions de dollars, et leur potentiel de croissance est considérable.

n (9 h 50) n

L'Université de Sherbrooke est pionnière dans l'utilisation des matériaux composites pour renforcer les structures en béton. En effet, l'utilisation des bétons renforcés de matériaux composites promet d'augmenter considérablement la durée de vie des infrastructures, et tout le monde connaît la rapidité avec laquelle nos infrastructures au Québec se détériorent et combien elles coûtent cher. De plus, l'Université de Sherbrooke est connue mondialement pour sa technologie de traitement de la parole ACELP, installée dans plus de 1 milliard de téléphones cellulaires et plus de 500 millions d'ordinateurs personnels à l'échelle mondiale. Elle se classe première au Canada et quatrième en Amérique du Nord au chapitre du retour par dollar investi en recherche universitaire.

Ces contributions ne représentent qu'un échantillonnage bien modeste des réalisations récentes de nos écoles et facultés de génie. De plus, nous pouvons être fiers de nos diplômés. Ceux-ci contribuent à construire le Québec moderne. Cependant, si nous sommes devant vous aujourd'hui, c'est que, pour poursuivre cette oeuvre, nous avons besoin de votre aide. En effet, notre intervention d'aujourd'hui se résume à quelques idées clés. La menace à la qualité en génie est bien réelle. Le sous-financement de la formation en génie est reconnu. Le parc d'équipements en génie se renouvelle trop lentement, et nos concurrents investissent.

Abordons maintenant chacun de ces points à tour de rôle. Tout d'abord, il y a la menace à la qualité en génie. Le tableau 2 de notre mémoire démontre que les écoles et facultés de génie du Québec perdent du terrain par rapport à leurs concurrents ontariens et américains. L'impact sur la qualité de la formation est inévitable, et personne ne souhaite que les employeurs québécois recrutent leurs ingénieurs ailleurs. Plusieurs ont affirmé devant cette commission que la qualité est encore là et que la menace n'est que future. Le génie n'en est plus là. Par exemple, étant donné le fait que la subvention non récurrente accordée à l'École polytechnique et à l'ETS n'a pas augmenté depuis 2000-2001, chaque étudiant additionnel augmente un ratio étudiants-professeur déjà inacceptable. Par exemple, à Sherbrooke, le déficit budgétaire structurel que vit la Faculté de génie place une pression immense sur la mise sur pied de son nouveau programme en génie biotechnologique. Or, comment peut-on appuyer les créneaux industriels émergents ou de pointe avec si peu de moyens? Par exemple encore, même si l'on a pu construire certains nouveaux locaux pour accueillir la croissance, les écoles et facultés de génie n'ont pas les moyens de meubler et d'équiper correctement leurs laboratoires de premier cycle.

Notre premier message: en génie, la menace à la qualité est bien réelle et elle fait partie de notre quotidien.

Parlons maintenant du sous-financement en génie. La sous-représentation croissante du génie au sein du secteur des sciences appliquées a conduit à un sous-financement de la fonction enseignement en génie estimé à 26 % en 2000-2001. Le gouvernement a reconnu le problème en offrant à l'École polytechnique et à l'ETS une correction sous la forme d'une subvention non récurrente. Cependant, ceci n'est qu'une partie du sous-financement qui affecte le génie.

Notre second message: nous sommes trois ans plus tard et nous attendons toujours une solution globale pour le génie. Si nous attendons encore plus longtemps, le déclin de la formation en génie au Québec sera définitivement amorcé.

Examinons maintenant le renouvellement des équipements dédiés à la formation. L'enseignement en génie requiert des équipements de laboratoire représentatifs de ce que l'on retrouve en industrie. Or, le financement actuellement disponible pour l'acquisition d'équipements correspond à des durées de vie à peu près irréalistes. Par exemple, quel logiciel, quel ordinateur utilise-t-on pendant 11 ans?

Notre troisième message: Les montants alloués pour le renouvellement des équipements devraient normalement se rapprocher de ceux du cadre normatif du ministère de l'Éducation du Québec.

Parlons maintenant de concurrence. La formation en génie analytique traverse une période de grands changements et de défis, et ce, à l'échelle nord-américaine. Tout d'abord, il y a les changements dans les façons d'enseigner, dont les concepts clés sont le développement des compétences personnelles, professionnelles, scientifiques, l'intégration de ces compétences, l'apprentissage par problèmes et par projets et la conception de produits. Ensuite, il y a les changements dans les sujets enseignés au premier cycle: bioingénierie, génie biotechnologique, etc. Il y a également les changements dans la nature même des projets de recherche des étudiants de maîtrise et du doctorat, sous le signe de la convergence des disciplines du génie et du vivant. Par exemple, grâce à la télésanté, aux prothèses intelligentes, au génie titulaire, aux «biochips», les ingénieurs contribuent à relever le défi de la santé d'une population vieillissante. Enfin, il y a le défi d'embaucher des professeurs-chercheurs dans les domaines de pointe qui puissent enseigner ces nouvelles matières et développer les technologies de demain. Le marché des cerveaux étant devenu mondial, la compétition pour y avoir accès augmente la pression sur les coûts, aux plans de la rémunération, des fonds de démarrage, des espaces de laboratoire et de leur mise à niveau.

Tous ces changements et défis requièrent des moyens considérables. L'écart qui se creuse entre le Québec et l'Ontario, de l'ordre de 70 %, met en évidence la volonté d'investir de nos concurrents. Si la société québécoise s'attend à ce que ses écoles et facultés de génie soutiennent la comparaison avec leurs homologues nord-américains, elle doit leur consentir les moyens de le faire. D'ailleurs, l'existence des mécanismes d'accréditation des programmes d'ingénieurs à l'échelle canadienne nous oblige à soutenir cette comparaison. Veut-on en arriver à la désaccréditation des programmes québécois? Veut-on en arriver à la situation vécue par la Faculté de médecine vétérinaire de Saint-Hyacinthe?

Notre quatrième message: nos concurrents investissent et creusent l'écart qui nous sépare. Pour soutenir la concurrence, les facultés et écoles de génie doivent en avoir les moyens, sinon nous perdrons l'accréditation de nos programmes.

Un dernier point. Depuis longtemps, la présence féminine en génie n'augmente pas comme on l'aurait souhaité. De plus, la désaffectation des garçons pour les études tout court pose un problème épineux envers toute la société et non seulement pour le génie, où ils représentent la clientèle traditionnelle. Cela limite de fait l'accessibilité à la profession.

Notre dernier message: il faut s'attarder aux difficultés des garçons qui abandonnent trop rapidement l'école et il est également important de travailler à l'accroissement du nombre de femmes en génie. Les facultés et écoles de génie s'y emploient dans la mesure de leurs moyens. Il importe cependant que le gouvernement supporte davantage les initiatives de rétention des garçons à l'école ainsi que les activités de sensibilisation des filles et des garçons à l'intérieur des carrières en science et en génie.

Pour conclure, permettez-moi de résumer les idées centrales de notre présentation d'aujourd'hui: la menace à la qualité en génie est bien réelle; le sous-financement est reconnu; le parc d'équipements se renouvelle trop lentement; et nos concurrents investissent. Nous espérons avoir mis en évidence le fait que nous, ingénieurs, écoles et facultés de génie du Québec, sommes des partenaires de premier plan de l'économie du Québec et que nous souhaitons le demeurer. Au nom de mes collègues de l'Ordre des ingénieurs du Québec et de tous les directeurs et doyens d'écoles et de facultés de génie du Québec, je tiens à remercier chaleureusement le gouvernement du Québec de bien vouloir nous offrir cette occasion de nous exprimer.

Le Président (M. Arseneau): Merci beaucoup, messieurs. Alors, nous allons maintenant aborder la période d'échanges avec les parlementaires. Selon la règle d'alternance, je vais commencer par M. le ministre et je suis certain qu'on ne manquera pas d'aborder cet important problème que vous avez soulevé à la toute fin en regard des difficultés de la clientèle masculine ? c'est dans les grands médias de ce matin ? et aussi de la nécessité pour vous de recruter une clientèle féminine. M. le ministre.

M. Reid: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord souhaiter la bienvenue au président de l'ordre et aux doyens d'écoles et facultés de génie et les féliciter également, autant la profession que les facultés, parce que je pense que, autant du côté génie-conseil, par exemple, que du côté de la qualité des diplômes, que du côté du succès des innovations qui viennent de nos facultés de génie au Québec et des écoles de génie, on peut dire que tous les Québécois et les Québécoises sont fiers de ce qui se fait en génie au Québec. Et la profession nous amène cette fierté-là pas seulement chez nous, mais aussi quand on se compare et qu'on regarde notre impact sur la scène internationale, et je pense que vous en avez fait part de plusieurs façons. Il est intéressant aussi de mieux comprendre, par votre mémoire et par vos interventions, les problématiques particulières des facultés de génie ou écoles de génie, et nous allons évidemment, par nos questions, vous permettre d'en dire un peu plus et nous permettre, à nous, d'en comprendre un petit peu plus.

Je voudrais peut-être juste faire une petite remarque, avant, sur effectivement le décrochage des garçons et la problématique. Et je vivais hier... En visitant une école, primaire d'ailleurs, je regardais des programmes qui ont été faits dans le cadre de la réforme scolaire, qui est une approche qui a été commencée dans certaines facultés de génie au Québec mais qui maintenant est appliquée au primaire et de plus en plus au secondaire. Et je voyais des jeunes garçons m'expliquer comment fonctionnaient les petits robots qu'ils avaient montés par des... C'est un projet qu'ils avaient, et je vous garantis que j'avais là deux futurs ingénieurs, c'était évident, et ils aimaient ça, et ils mordaient là-dedans.

n (10 heures) n

Et c'est pour vous dire que je pense que cette approche pédagogique nouvelle, au primaire et au secondaire, comporte des... amène des opportunités nouvelles, je pense, pour le génie notamment, parce que les garçons souvent s'intéressent et mordent dans ce genre de problématique ou ce genre de problème, de projet. Ils apprennent beaucoup et aussi prennent confiance. Tout ça pour vous dire que je pense que le génie québécois fait partie de la solution aussi parce qu'à la fois on veut des jeunes garçons, puis à la fois le génie peut les intéresser, ces garçons-là, à faire partie du génie. Et ce serait intéressant... Puisque vous êtes là, je vous invite à ce que nous reparlions, à une autre circonstance, de quelle façon est-ce que notre force québécoise en génie, autant du côté conseil, que du côté universitaire... comment est-ce qu'on peut aussi en faire profiter nos jeunes pour effectivement permettre d'avoir ce renouvellement. Et, en même temps, évidemment, il ne faut pas oublier la problématique des filles, bien entendu, et j'aimerais que nous puissions en reparler.

Pour l'instant, je pense que vous nous amenez des problématiques bien concrètes, bien terre-à-terre aussi, en plus de celles-là, budgétaires, financières, et ça fait partie évidemment des objets de la commission. J'aimerais, moi, que vous m'expliquiez un petit peu plus qu'est-ce qui se passe, qu'est-ce vous attendez, qu'est-ce que vous... comment vous pensez que ça va se dérouler ou si le gouvernement doit faire quelque chose, le ministre de l'Éducation ou le ministère de l'Éducation, dans les discussions qui ont cours sur ce qu'il est convenu d'appeler la grille de répartition, parce que c'est ce dont on parle aussi. Vous dites: Bon, les facultés de génie n'ont pas suffisamment de fonds. Par exemple, on se compare avec le reste du Canada. La comparaison se fait aussi pour l'ensemble, et il y a des sommes qui ont été identifiées de différents... Et, quand vous arrivez avec des comparaisons finalement qui doivent se situer à l'intérieur de l'ensemble des comparaisons universitaires, ça, me semble-t-il, me ramène à une problématique, à l'interne au Québec ou à l'interne entre les universités, de répartition de ces fonds-là supplémentaires qu'on pense qu'on devrait avoir, mais les répartir différemment peut-être de la façon dont c'est réparti jusqu'à maintenant.

Je sais que vous avez abordé la question, et pourriez-vous le faire dans l'optique des discussions qui ont cours quand même déjà depuis quelque temps? Est-ce que ça achoppe? Est-ce qu'il y a des difficultés entre les facultés ou écoles de génie? Est-ce qu'il y a des difficultés par rapport à d'autres disciplines dans les discussions qui ont lieu entre les universités entre elles et aussi avec le ministère de l'Éducation? Est-ce que vous pourriez nous éclairer un petit peu pour aller un peu plus loin que votre mémoire sur cette problématique-là du financement spécifique du génie?

Le Président (M. Arseneau): M. Lefebvre peut-être ou M. Marceau?

M. Marceau (Richard): Je pourrais peut-être donner un élément de réponse et je crois que les chefs d'établissement qui nous accompagnent aujourd'hui aimeraient aussi apporter leur témoignage. Tout d'abord, je dirais que... Pour aborder une partie de ce que vous avez dit... Vous avez parlé de l'échelle canadienne. Puis pourquoi ça s'applique à l'échelle québécoise plus spécifiquement? C'est qu'en génie, pour pratiquer le génie, il faut avoir... il faut être issu d'un programme accrédité. L'accréditation se passe à l'échelle canadienne. Si l'Ontario possède... les établissements ontariens ont un écart de 70 % par rapport à ce qui est au financement des établissements québécois, ça risque de mettre la barre d'accréditation à ce niveau-là. Si la concurrence ? et c'est en ce sens-là que nous parlons de concurrence ? si la concurrence, elle, elle est mieux financée et accrédite ses programmes avec des taux de financement de beaucoup supérieurs aux nôtres, tôt ou tard nous allons perdre la capacité de maintenir notre position à l'échelle nationale et de diplômer des ingénieurs qui, eux, peuvent circuler librement dans l'espace économique du Canada. Ça, c'est un élément de ce que vous avez abordé.

Le second élément, c'est que, dans la plupart des établissements, je dirais que la répartition des budgets est faite à peu près comme ce que le gouvernement du Québec fait à l'égard des établissements eux-mêmes. Donc, il y a une cascade des mêmes critères vers les facultés, ce qui fait qu'à peu près systématiquement, même si théoriquement une enveloppe est envoyée dans un établissement X, de façon équitable et transparente, les établissements maintenant propagent ces mêmes critères au niveau des facultés. Donc, inévitablement le génie se fait défavoriser, puisque le financement de base du génie est défavorisé.

Je crois que j'inviterais maintenant Robert Papineau et Yves Beauchamp à compléter ce témoignage.

M. Papineau (Robert L.): Bien, je crois, M. le ministre... Pour répondre à votre question, il y a deux niveaux, et je suis sûr que mes collègues pourront élaborer plus longuement, mais, si j'essaie de m'en tenir à l'essentiel, il y a un premier niveau de difficulté qui provient du fait qu'il y a un seul secteur, qui s'appelle sciences appliquées, pour couvrir bien sûr les subventions en génie, mais aussi d'autres programmes de sciences appliquées: programme d'informatique, aménagement du territoire, urbanisme, bon, etc. Et, au fil des années, l'importance du génie à l'intérieur de ce secteur-là a diminué parce qu'il y a eu beaucoup de nouveaux programmes sciences appliquées non génie, si vous me permettez l'expression. Et la moyenne de ce secteur-là maintenant sous-estime les coûts d'offre de programmes de génie de l'ordre de 26 %. M. Nelson pourra préciser là-dessus. Ça, c'est un premier volet.

Et, quand il y a eu changement avec les contrats de performance et qu'on a retourné essentiellement à une approche où... par exemple, l'École de technologie supérieure, l'École polytechnique, qui sont des établissements essentiellement génie, bien là on a mis carrément sur la table le problème parce que ce sont les deux seuls établissements au Québec qui à l'époque n'avaient pas d'augmentation de budget. C'était, à toutes fins pratiques, zéro, alors que la moyenne québécoise, de mémoire, je pense, à l'époque, c'était de l'ordre d'à peu près 13 %. Et c'est ce qui a amené le ministre Legault, à l'époque, devant une évidence comme celle-là, de dire: Bien, avec l'introduction des contrats de performance, nous allons accorder temporairement, pour la prochaine année, un correctif ? qui s'est chiffré à 5,2 millions à l'École polytechnique, 2,6 millions à l'ETS ? et on va examiner la question. On pense avoir une solution l'an prochain. Bon. Depuis, ces montants-là ont été reconduits, n'ont pas été indexés, n'ont pas été ajustés aussi aux augmentations de clientèles, et le problème de fond est demeuré, ce qu'expliquait mon collègue Marceau tout à l'heure. À l'intérieur de l'université, il y a peut-être place pour une forme de péréquation, bien que je pense que ça ne rend pas service à la Faculté de génie qui existe, mais, dans le cas d'établissements comme l'ETS et Polytechnique, bien sûr il ne peut y avoir de péréquation.

Il y a un deuxième niveau de difficulté de financement qui... Même en ajoutant ce correctif-là de 26 %, quand nous nous comparons à nos collègues de l'Ontario notamment ? on prend souvent l'Ontario comme comparaison ? on constate qu'au fil des années le financement québécois pour le génie, si on compare à 1994-1995, on a moins d'argent présentement qu'on en avait en 1994-1995 par étudiant, et ceci... ce qui explique que les facteurs de qualité se sont détériorés au fil des années.

Si je vous parle de Polytechnique, nous sommes passés de 17 étudiants équivalence temps complet en 1994-1995 à 21,5 cette année. Le nombre d'étudiants est passé de 30,2 en 1996-1997, nombre d'étudiants par cours, par activité d'enseignement, à 38 en 2002-2003, donc un accroissement de 26 %. Et, quand on se compare à l'ensemble canadien, plus particulièrement à l'Ontario, bien là on constate qu'il y a un autre 40 % et quelque de déficience par rapport aux subventions moyennes que nos collègues ontariens reçoivent pour des étudiants en génie, d'où bien sûr une pression encore une fois pour diluer. C'est un phénomène un peu insidieux, pernicieux parce que ça se produit tout doucement, là. On passe de 17 à 21,5 sur 10 ans. Mais, si on poursuit ça un autre 10 ans, bien c'est sûr qu'à ce moment-là on va avoir de graves problèmes d'accréditation et on ne pourra plus maintenir les standards, aussi bien nationaux qu'internationaux.

Le Président (M. Arseneau): ...compte tenu de la règle d'alternance, ça mettrait fin au premier bloc du côté gouvernemental, et je céderais la parole maintenant à la députée de Taillon.

Mme Marois: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, je vais vous souhaiter la bienvenue, à mon tour, à notre commission au nom de mes collègues et en mon nom propre. Je vous remercie de votre présentation. J'étais heureuse d'entendre le ministre souligner l'importance de la nouvelle approche en termes pédagogiques, qui est une approche par compétences et qui est bien connue généralement dans les facultés de génie et dans les écoles de technologie supérieure. Ça me rassure aussi parce que le ministre semble s'être réconcilié avec la réforme et veut l'accélérer. Je suis très heureuse d'entendre cela.

Cela étant, vous avez... Bon, je pense que votre mémoire fait bien état, là, des difficultés que vous risquez de rencontrer pour l'accréditation. Mais aussi, sur le fond des choses, vous pensez qu'il y a un risque de détérioration en termes de qualité. Bon. D'abord, la première question, plus concrète, là, et pratique: Est-ce qu'actuellement, dans les discussions que vous avez avec le ministère, vous avez l'impression qu'on va consolider votre budget dans le sens d'intégrer les sommes qu'on vous a à tout le moins reconnues jusqu'à maintenant, on va dire, pour corriger la situation? Un.

n (10 h 10) n

Deuxièmement, vous faites référence aux ratios qui se sont détériorés, nombre d'étudiants versus professeur. Est-ce qu'il y a, à votre point de vue, un idéal à respecter? Et, étant entendu que vous faites des comparaisons avec ce qui se passe ailleurs, soit aux États-Unis ou avec le reste du... c'est-à-dire avec les autres provinces, est-ce que vous considérez que ces ratios-là devraient être ceux qui s'appliquent dans votre cas et dans votre situation?

M. Marceau (Richard): J'inviterai M. Yves Beauchamp à répondre à la question.

M. Beauchamp (Yves): Peut-être, pour la première question, pour ce qui est de la consolidation de sources de revenus supplémentaires, 2,6 millions, même actuellement... Il faut comprendre que cette somme-là avait été octroyée en 1999 et elle avait été basée, pour l'ETS, sur 2 050 étudiants équivalents temps complet, alors que présentement nous sommes presque 4 000 étudiants équivalents temps complet. Donc, même si on faisait une indexation ou si on ajustait en fonction de la croissance depuis les dernières années, le montant devrait être plus de l'ordre de 5 millions.

Mais encore là le 5 millions n'est pas suffisant. Je vais expliquer pourquoi. C'est qu'actuellement, à l'ETS par exemple, pour être en mesure de maintenir un équilibre budgétaire, on doit avoir 150 professeurs et un taux d'encadrement qui avoisine le 26,7 étudiants équivalents temps complet par professeur. Or, le taux que nous avions en 1994-1995, il était de l'ordre de 20,29 étudiants équivalents temps complet et, nous, à l'école, on a toujours visé une cible de 22, essentiellement parce que historiquement on se comparait peut-être avec l'Ontario à une certaine époque. Mais on a toujours visé 22. Et, si on voulait, cette année, atteindre un ratio de 22, il faudrait que j'embauche présentement au-delà de 32 professeurs avec également les employés de soutien qui viennent avec, soit finalement un investissement supplémentaire de 6,4 millions qui est au-delà du 5 millions qu'on obtiendrait si on indexait finalement le 2,6 millions qu'on obtenait.

Mme Marois: Que vous aviez reçu en...

M. Beauchamp (Yves): Tout à fait.

Mme Marois: ...qu'on vous avait reconnu depuis 1999, là.

M. Beauchamp (Yves): Tout à fait. Tout à fait. Et, si je décidais cette année d'aller avec un taux d'encadrement, par exemple, de 22 étudiants équivalents temps complet par professeur, bien l'école ferait un déficit de 6,4 moins 2,6 millions, de l'ordre de grandeur de 4 millions environ par année.

Donc, essentiellement, c'est la situation. Et, si on veut se comparer avec l'Ontario ? parce qu'on peut le faire ? si on avait le financement de l'Ontario, par exemple, bien ça permettrait à l'école d'obtenir des revenus supplémentaires de l'ordre de près de 13 à 16 millions de dollars par année, et ça, ça nous permet d'atteindre un taux d'encadrement de l'ordre de 18,5. C'est exactement ce que la CREPUQ tend à viser comme étant un ratio qui a déjà été obtenu il y a quelques années. Donc, à ces ratios-là, on parle d'investissements supplémentaires de l'ordre de 16 millions, juste à l'ETS, en termes d'économie.

Donc, c'est quand même un investissement important et, s'il n'y a pas d'investissement qui vient au niveau de l'ETS ? c'est probablement la même chose dans les autres universités également ? les choix ne sont pas tellement compliqués. C'est-à-dire que soit qu'on monte à 22... c'est-à-dire, soit qu'on descend à 22 étudiants équivalents temps complet pour l'encadrement, ce qui veut dire, à ce moment-là, qu'on engage des professeurs et on va vers un déficit de près de 4 millions de dollars par année, ce qui n'est sûrement pas souhaitable, ou, une autre façon de faire finalement, ce serait de maintenir les professeurs à 150, comme ils le sont présentement. Mais comment est-ce qu'on peut ramener un ratio de 26 à 22? C'est essentiellement en réduisant le nombre d'étudiants, donc de passer à 4 000 étudiants équivalents temps complet à près de 3 300 étudiants équivalents temps complet. Donc, bien entendu, on vient, à ce moment-là, de causer un problème au niveau de l'accessibilité et tout ce que ça entraîne, etc. Donc, les solutions, je dirais qu'elles ne sont pas tellement...

Mais je sais que M. Papineau peut peut-être intervenir sur... pour ce qui est du taux idéal. Parce qu'il faut comprendre que, nous, on est à 22, mais, au niveau de la recherche, ça peut descendre un peu plus.

M. Papineau (Robert L.): Je vais être court, M. le Président. Si on parle de ratio idéal, ça dépend un peu de la nature de l'établissement. À Polytechnique, maintenant, il y a le tiers des étudiants qui sont aux études supérieures. Donc, si on se compare à d'autres établissements qui ont à peu près ce pourcentage aux études supérieures, on peut penser qu'un ratio de 16... Et on va bien sûr vers des... certains établissements où on peut toujours rêver, là. Je n'ose pas les prendre comme comparaison. MIT, par exemple, c'est huit. Nous avons reçu récemment le réseau des écoles de mines de France. Il y a six écoles. Le ratio, c'est six étudiants temps complet par professeur. Mais je pense que 16, pour un établissement qui a, je dirais, un développement de recherche assez poussé... C'était à 17 en 1994-1995 à Polytechnique. Ça semble être une cible. Et ensuite bien sûr, dépendant de cette implication en recherche, ça crée un fardeau d'encadrement, une tâche d'encadrement pour les professeurs qui est beaucoup plus grande pour les étudiants de maîtrise et de doctorat.

Mme Marois: Comme un étudiant qui est en... c'est-à-dire, un étudiant qui fait de la recherche et qui est au doctorat ou en postdoc, c'est quoi, à ce moment-là? En fait, c'est un ratio de un pour un, ou de un pour deux, ou un pour trois?

M. Papineau (Robert L.): Présentement, à Polytechnique, c'est huit pour un. Chaque professeur de Polytechnique dirige huit étudiants en maîtrise ou au doctorat, ou des projets de maîtrise pour ceux qui sont dans des maîtrises de cours.

Mme Marois: Bon. Dans l'évaluation qui a été faite par la CREPUQ et le ministère de l'Éducation, on évalue que, pour qu'il y ait un rattrapage correct par rapport à ce qu'on vit ailleurs dans les autres universités comparables au Canada, c'est une somme à la hauteur de 375 millions. Est-ce que, dans ce que vous nous proposez aujourd'hui... C'est-à-dire, cette somme comprend ce que vous nous proposez aujourd'hui. Et ce que vous nous proposez aujourd'hui représente quelle valeur globale?

Une voix: Regardez... Oui...

Mme Marois: Parce que, évidemment, vous souhaitez être considérés différemment, puis on comprend bien, je pense, la logique, là.

M. Beauchamp (Yves): Oui. Bien, je vais faire un exercice, ici, pour l'école, par exemple, et si, par exemple, on obtenait le financement moyen ? on parle de 7 700 $ par étudiant équivalent temps complet ? et qu'on regardait finalement la proportion qui viendra à l'ETS du réinvestissement de 375 millions ? nous, on représente actuellement 2,16 % en termes d'ETP, par rapport aux 185 000 ETP ? ce serait 8 millions qui viendrait à l'ETS. Si on rajoute ça à la subvention qui viendrait pour les coûts moyens, on parle de 14 millions de dollars. Et, si on avait le financement de l'Ontario, on serait à 16,4 millions de dollars. Ce que je veux vous dire ici, c'est que, même avec le financement coût moyen, additionné au prorata du 375 millions, on est en deçà de ce que l'Ontario obtient pour une école comparable à la nôtre. Voilà.

Mme Marois: D'accord. Je pense que ça donne quand même un bon aperçu de ce que ça pourrait signifier. Vous abordez, dans votre mémoire, d'autres éléments qui sont, entre autres, la question des subventions pour le démarrage dans les domaines de pointe. À combien vous situez les besoins à cet égard et quelle est la situation actuelle que vous souhaiteriez changer?

M. Marceau (Richard): Il y a deux volets là-dedans. Lorsqu'on veut démarrer un nouveau programme, il y a le volet équipements, il y a le volet des frais de fonctionnement. Au niveau des équipements, cela varie beaucoup selon les domaines. Mais, si vous me permettez de vous dire une chose, c'est que les nouveaux domaines, qui représentent la convergence du vivant et de n'importe quelle discipline génie, sont des domaines extrêmement coûteux.

Souvent, il faut travailler dans des salles spéciales, ce qu'on appelle typiquement des salles blanches de différentes qualités, et des salles blanches, ça coûte très cher à monter. Ça, c'est un élément. Des fois aussi, on travaille avec des virus, des bactéries. Le génie biotech utilise des petites bêtes, comme des bactéries, pour créer des nouvelles molécules plutôt que de les fabriquer par la chimie traditionnelle. Donc, ces installations-là requièrent la protection des gens qui sont déjà dans l'université. Maintenant, déjà, ça se faisait, mais on le faisait à plus petite échelle. Maintenant, lorsqu'on fait beaucoup de travaux de recherche où plusieurs professeurs interviennent sur de plus en plus de sujets de recherche, qui sont de plus en plus délicats, il faut des installations un petit plus coûteuses, malheureusement. Donc, ça, c'est un élément.

Lorsque l'on crée un nouveau programme de premier cycle, évidemment, l'autre côté, c'est que le fonds de démarrage est requis pour embaucher les professeurs de façon précoce pour qu'ils puissent se préparer, s'établir en recherche et préparer leurs cours pour pouvoir entrer en régime permanent. Donc, il y a cet investissement de transition qui est requis, et c'est ça qui pose difficulté, du point de vue fonctionnement, lorsqu'on crée un nouveau programme. Je pense qu'on peut s'arrêter là.

Le Président (M. Arseneau): Oui. Merci beaucoup, M. Marceau. Peut-être qu'on...

Mme Marois: ...un petit complément de réponse.

Des voix: ...

M. Beauchamp (Yves): Lorsqu'on a démarré génie logiciel chez nous, il y a de cela trois ans, on avait obtenu une subvention de 500 000 $. Je pense que c'est une subvention spéciale qu'on accordait à ce moment-là au génie logiciel. On a démarré dernièrement en technologie de l'information; on n'a pas eu de subvention. On va démarrer éventuellement un autre programme; on compte ne pas avoir non plus de subvention. Et là on parle du génie logiciel, qui est un génie qui n'est pas nécessairement coûteux, en termes d'infrastructures ? bon, c'est des ordinateurs, etc. ? mais, pour des programmes plus coûteux, c'est sûr que ça nous cause un problème parce que l'introduction de ces programmes-là va drainer nécessairement des ressources, tant au niveau financier qu'au niveau matériel, pour être en mesure de soutenir ces programmes-là. Actuellement, il n'y a plus de subvention au démarrage.

Le Président (M. Arseneau): Merci beaucoup, M. Beauchamp. On pourrait retourner peut-être du côté ministériel, avec le ministre de l'Éducation, pour sept minutes. Je sais qu'il y a la députée de Maskinongé qui veut poser une question aussi.

n (10 h 20) n

M. Reid: Oui. Ça va être assez court, M. le Président; je vais laisser la parole à ma collègue. D'abord, une toute petite remarque, là, je pense que c'est approprié, aujourd'hui, que les gens de génie soient ici, en particulier le doyen de Sherbrooke, pour, je pense, répondre à des sous-entendus sur mon intérêt pour la réforme de l'approche par compétences, parce que je pense que j'ai été probablement le premier recteur au Québec, et dans une période particulièrement difficile sur le plan budgétaire, à investir, contre beaucoup d'avis, pour qu'on fasse un programme ? c'était en génie mécanique ? qu'on fasse un programme qui est orienté par compétences, et ça a été un franc succès. Mais j'y ai appris aussi qu'avant de démarrer il faut être prêts. Et c'est une des raisons pour lesquelles on s'est assurés que les écoles auraient le temps pour la réforme au secondaire.

Juste une petite remarque aussi: si je comprends bien, vous parliez tantôt de 14 000 $ ou 16 000 $ en Ontario. Est-ce qu'on s'entend pour dire que c'est aussi... quand l'argent est le même au total pour les universités, c'est aussi une redistribution de la tarte en fait dans laquelle les discussions que vous avez avec les autres universités et avec le gouvernement jouent un rôle? Autrement dit, entre 14 et 16, par exemple, c'est à l'intérieur d'une enveloppe globale? En Ontario ou ailleurs, c'est que les répartitions sont faites un peu différemment. Peut-être qu'on accorde un peu plus d'importance aux écoles de génie à l'intérieur d'une même tarte, en quelque sorte. Et, à moins que vous ayez envie de commenter là-dessus, mais je pense que c'est juste pour qu'on se comprenne bien, je passerais peut-être la parole, M. le Président, à ma collègue.

Le Président (M. Arseneau): Oui. Alors, peut-être un bref commentaire, M. Marceau.

M. Marceau (Richard): Vous avez raison, il y a une partie des sommes qui sont déjà dans le système, il y a une partie qui ne le sont pas. J'inviterais M. Nelson à expliquer dans le détail, rapidement.

M. Nelson (Robert): Bien, si vous permettez, juste pour illustrer, au Québec actuellement, parce que c'est des pondérations relatives, là, on part de un, qui vaut 4 000 $, puis, à partir de là, bien on dit... Alors, actuellement, le Québec finance à 1,5 le génie, l'Ontario finance à 2,5 le génie. Vous allez trouver, je le sais, 2, dans les documents de l'Ontario, mais il ne faut pas oublier que l'Ontario ne finance pas juste le fonds d'enseignement. Il finance tout, incluant l'investissement. Si on va chercher la part de l'enseignement-recherche, l'Ontario finance 2,5. Alors, vous voyez l'écart de financement, là, quel que soit l'argent relatif qui existe, dans deux systèmes différents, 1,5 versus 2,5.

Le Président (M. Arseneau): Merci beaucoup, M. Nelson. Alors, Mme la députée de Maskinongé.

Mme Gaudet: Merci, M. le Président. Alors, moi, j'aimerais vous entendre sur le financement des facultés de génie dans les universités en région et j'aimerais connaître votre position sur cet aspect. Et j'aimerais aussi vous entendre sur le fait que les étudiants en région semblent privilégier d'aller prendre leur formation dans les grands centres. Est-ce que vous croyez que le gouvernement devrait donner des incitatifs ou encourager les étudiants à poursuivre leur formation en génie dans les universités en région?

M. Papineau (Robert L.): Si vous permettez, madame, peut-être certains points. Je suis sûr que mes collègues en ont d'autres. Il y a aussi... il y a une première situation, je pense, qui découle du fait que, même quand il existe des programmes en région ? je suis un ancien de l'Université du Québec à Trois-Rivières, au début de ma carrière ? c'est sûr que l'établissement ne peut pas offrir toute la gamme de programmes. Nous avons 11 programmes de baccalauréat à Polytechnique et, que je sache, il y en a quatre à Trois-Rivières. Donc, dans certains secteurs, c'est normal que le jeune d'une région aille vers la grande ville, si je puis dire, que ce soit Québec ou Montréal, où il y a plus de choix de programmes.

Lorsque les programmes existent localement bien sûr, bien je pense que c'est important que ces programmes-là jouent un rôle bien sûr de développement économique régional et de pôle économique, je pense, dans la région. Donc, il y a ce facteur-là. Je pense que ce n'est pas possible bien sûr d'offrir partout en région une gamme complète de programmes. On a déjà des difficultés. Par exemple, si je vous parle de génie minier, il y a deux programmes, dont un conjoint entre Poly et McGill présentement, et on a toute la difficulté à faire vivre ces deux programmes-là. Donc, c'est un exemple.

L'autre exemple que je voulais citer, c'est qu'il y a aussi des possibilités. Polytechnique a une entente, par exemple, avec l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue par laquelle l'étudiant peut faire deux années à l'UQAT. Et, eux, ils offrent un programme d'électromécanique, je crois, qui est un secteur qui colle assez bien aux réalités régionales. Mais, si un étudiant veut étudier génie logiciel ou génie informatique, bien il peut venir, par exemple, à Polytechnique après deux ans et compléter son baccalauréat à Polytechnique. Et, si, en plus, on peut s'assurer qu'on peut lui trouver des stages ou que des employeurs dans la région s'intéressent à lui, je pense qu'on a autant de probabilités que ce jeune-là retourne éventuellement dans sa région. Je pense que M. Beauchamp, là-dessus, a des chiffres intéressants.

Le Président (M. Arseneau): ...M. Beauchamp, peut-être.

M. Beauchamp (Yves): Oui, c'est justement... À l'école, il faut dire que, nous, nous avons une caractéristique qui est particulière: tous nos étudiants doivent être détenteurs d'un D.E.C. technique. Donc, nécessairement, on a certain pouvoir d'attraction au niveau de l'extérieur: plus de 50 % de nos étudiants viennent de l'extérieur de la grande région de Montréal. Mais il faut faire attention, ils ne viennent pas nécessairement des régions. Si je prends, par exemple, Saguenay, Abitibi, Gaspésie et que je fais la somme de ces régions-là, sur les 1 043 étudiants qui sont rentrés l'année dernière, il y en a seulement 60 %. C'est moins de 4 % à 5 %. Par contre, ce que je peux vous dire, c'est que, parmi nos étudiants, chaque année, au niveau des stages, on place environ 1 800 stages par année, et les étudiants se placent dans l'entreprise dans environ 40 % des endroits où ils ont fait leur stage.

Ce qui est intéressant, c'est que 50 % des étudiants viennent de l'extérieur et, quand on fait une enquête sur où ils se trouvent un emploi par la suite, pratiquement 75 % à 80 % des étudiants qui sont venus de l'extérieur sont retournés dans les régions. Et on fait des efforts importants, même au niveau des stages ? c'est pour ça que j'en parle au départ ? c'est qu'on donne même, par exemple, des subventions incitatives au-delà de ce que la compagnie va donner. On va donner des bourses de 500 $ à 1 000 $ pour inciter l'étudiant à retourner en région pour faire son stage, surtout dans sa région natale, compte tenu du fait qu'il a beaucoup plus de chances de se trouver un emploi dans ce contexte-là. Et les chiffres sont révélateurs. Quand je vous dis que 75 % à 80 % de ces étudiants-là retournent, je trouve que c'est une performance assez exceptionnelle.

Le Président (M. Arseneau): M. Marceau, peut-être juste... Oui?

Mme Gaudet: Et concernant le financement des...

M. Marceau (Richard): Ça va être très court, madame, parce que ça complète le témoignage de mes deux collègues. Une petite université régionale d'aujourd'hui peut devenir une grande université nationale demain, et l'Université de Sherbrooke est probablement le meilleur exemple de ceci. Et un autre élément de réflexion, c'est que l'Université de Sherbrooke reçoit 80 % de sa clientèle hors... à l'extérieur de la région. Donc, une université régionale est un investissement à long terme. Au début, ça commence avec certaines modalités. C'est peut-être très spécifique. Ça soutient une région, par exemple l'aluminium au Saguenay, les mines en Abitibi-Témiscamingue, l'océanographie à Rimouski, mais à la longue ça devient un investissement de grande envergure pour la société tout entière.

Le Président (M. Arseneau): Merci beaucoup, M. Marceau. On doit maintenant aller du côté de l'opposition, et je donne la parole au député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Merci, M. le Président. Alors, bonjour, messieurs. Est-ce que vous êtes au courant que ? j'imagine... je vous dis que vous êtes... mais je suis sûr que vous l'êtes, au courant ? beaucoup de grosses industries aujourd'hui, beaucoup de grosses compagnies vont aller chercher tous leurs plans d'ingénieurs, dessinateurs à l'extérieur même du pays? Ça se fait dans les pays asiatiques, en Inde, partout. Est-ce que ça ne vous inquiète pas, cette nouvelle approche que les compagnies... C'est sûr que, s'ils le font, c'est pour l'argent, parce que c'est moins coûteux, et puis ils nous disent souvent: Bien, quand on va dans ces pays-là, l'ingénieur peut aussi bien dessiner, il fait tout, là, lui, là, puis on reçoit tout ça par Internet, c'est très rapide puis c'est moins coûteux. Ça, c'est ma première petite question.

Puis j'en aurais une deuxième, parce que, moi, ça m'agace un peu. On se compare toujours avec l'Ontario, les États-Unis, mais on ne pourrait pas... Ici, on est une population peut-être plus petite, on dit... Puis ça ne pourrait pas arriver que les étudiants québécois soient plus rapides puis qu'ils apprennent plus vite que les... qu'en Ontario puis aux États-Unis? On se compare toujours avec eux autres, là, mais on n'est pas le même bassin de population, on n'est pas la même chose. Moi, je pense que... Souvent on se dit qu'on est une société distincte, alors on doit être distincts partout. Je n'aime pas beaucoup cette approche-là, de nous comparer avec les voisins. J'imagine... En tout cas, vous avez peut-être des réponses pour moi.

Puis dans votre... vous êtes tous des ingénieurs, là. Si vous mettez tout ça à l'école, là, comment est-ce qu'on peut tout régler notre problème de démographie qui s'en vient? On sait qu'il va y en avoir moins, d'étudiants, la population ne se renouvelle pas. Alors, automatiquement, c'est sûr que, dans 10, 15 ans, 20 ans, on va avoir des problèmes. On va en avoir un peu partout, là, si on ne regarde pas une façon positive de régler ce problème-là immédiatement.

Le Président (M. Arseneau): Merci. M. le député de Beauce-Nord est très habile. Il a toutes posé ses questions d'un bloc. Maintenant, il ne reste que quatre minutes et demie, et je sais que la députée de Champlain souhaiterait poser une question aussi, et même peut-être le député de Bertrand.

n (10 h 30) n

M. Marceau (Richard): Et nous voulons tous répondre. Donc, je vais être très, très rapide. Je crois que vous avez parfaitement raison. La compétition, elle se fait à l'échelle internationale en génie. Nous sommes très conscients que le logiciel se fait en Inde, que la tuyauterie, la conception de la tuyauterie se fait le plus souvent en Chine pour les grands édifices, qu'ils soient conçus à Montréal ou ailleurs, mais ce qu'il faut faire, c'est de ne pas chercher à compétitionner les bas salaires avec des bas salaires. Il faut chercher à compétitionner les bas salaires avec des connaissances à haute valeur ajoutée. Et c'est ce que le génie apporte. Nous apportons un effet de levier à la société toute entière par ce que nous faisons.

Il y a une autre dimension aussi, c'est l'intégration des connaissances. Le génie québécois se distingue à l'échelle mondiale parce qu'il est un intégrateur de systèmes. Nous savons gérer des grands projets comme à peu près personne à l'international. Nous allons chercher l'expertise, les connaissances là où elles sont et nous l'intégrons. Mes collègues veulent également témoigner, donc je vais céder la parole.

M. Papineau (Robert L.): J'aimerais... surtout sur vos dernières remarques. Écoutez, si c'est l'Ontario ou le reste du Canada qui créent problème, on peut très bien se comparer à la Suède, ou à la Norvège, ou au Danemark, à la Suisse. Et vous allez retrouver des pays qui ont même moins de population que le Québec et où est-ce qu'ils vont avoir plus d'ingénieurs qu'au Québec, où est-ce que les facultés... Si vous allez en Suisse, par exemple, les facultés polytechniques fédérales, autant Lausanne, Zurich, etc., sont de calibre absolument international et de façon incontestée. Donc, je ne pense pas qu'il faille se retourner vers nous. Et, si on cherche à compétitionner uniquement les bas salaires, on sera incapable de contrôler éventuellement les technologies que d'autres vont produire pour nous. Donc, je pense qu'il faut continuer. Nos facultés de génie sont un levier de développement économique et technologique important, puis je pense qu'il faut continuer à aller dans ce sens-là.

Le Président (M. Arseneau): Merci, M. Papineau. Peut-être, on pourrait passer la parole à la députée de Champlain.

Mme Champagne: Alors, bonjour à vous tous. Écoutez, ma question va être très simple. Et, ce matin, même les journaux dans la région de Trois-Rivières et les médias parlés le mentionnaient: on a un problème d'intérêt chez nos jeunes hommes, chez notre clientèle masculine. Et vous en parlez même dans votre document, en page 13, en disant que «l'un des principaux problèmes d'accessibilité aux études en génie, [c'est] que la clientèle, traditionnellement masculine, fait preuve d'un réel désintérêt à l'égard des études». Je sais qu'au niveau recherche il y a des incursions au niveau des écoles primaires. Est-ce que ça se fait de façon systématique? Puis est-ce qu'au niveau des écoles de génie il y a un travail particulier là-dessus?

Le Président (M. Arseneau): Oui. Monsieur...

M. Lefebvre (Gaétan): J'aimerais dire que l'Ordre des ingénieurs a un certain nombre de programmes et invite les ingénieurs à témoigner dans les écoles, particulièrement dans le Mois du génie qui... annuel. Donc, c'est une des démarches que l'on soutient. Et je sais que des écoles ont aussi des initiatives de même nature. Donc, on s'intéresse beaucoup à ce que les jeunes choisissent des carrières scientifiques et de génie. Et je pense que c'est d'autant plus important ? ça va répondre en partie à la question précédente ? quand on dit qu'en Suède il y a cinq fois plus d'ingénieurs par habitant qu'au Québec et que... 3,6 au Japon. Et, même aux États-Unis, il y en a 1,6 fois plus qu'au Québec. Donc, je pense que, pour l'économie du Québec, c'est utile et nécessaire de maintenir l'accessibilité au plus grand nombre dans cette profession.

Le Président (M. Arseneau): Il resterait une minute à peine pour le député de Bertrand, pour une courte question et une courte réponse.

M. Cousineau: Merci, M. le Président. Vous dites, à la page 10, là, que, pour équilibrer les budgets, évidemment, vous devez hypothéquer tout le secteur des travaux pratiques, des laboratoires, puis voire même au niveau de l'équipement, c'est des équipements qui sont désuets. Moi, je voulais savoir, le partenariat que vous avez avec le privé au niveau des stages de formation, est-ce que c'est dans une proportion qui était assez importante pour pallier contre le manque de... Est-ce que vous avez... Est-ce qu'il existe un beau partenariat entre le privé puis... l'entreprise puis les écoles de formation?

Le Président (M. Arseneau): 15 secondes.

M. Marceau (Richard): Nous avons l'aide du privé pour établir des laboratoires, de temps en temps, quand... Mais le mécénat n'est pas très développé au Canada et au Québec, contrairement aux États-Unis.

Pour ce qui est des stages eux-mêmes, pour que nos étudiants puissent être efficaces en stage, pour qu'ils apportent quelque chose à l'entreprise, pour que l'entreprise ait le goût, un petit goût de revenez-y, si vous permettez, il faut qu'ils soient prêts et, pour ça, il faut qu'ils aient été formés.

Le Président (M. Arseneau): Merci beaucoup, messieurs du Comité des doyens d'ingénierie du Québec et de l'Ordre des ingénieurs du Québec. J'avais moi-même un conseil à vous demander, puisque mon fils a été admis conditionnellement à Polytechnique et aussi à l'Université Laval, et on ne s'entend pas sur où il devrait aller, mais je vais garder ça pour plus tard.

Alors, je vais suspendre les travaux pour quelques instants et demander à la Fédération des associations étudiantes universitaires québécoises en éducation permanente de se joindre à nous. Merci, messieurs.

(Suspension de la séance à 10 h 35)

 

(Reprise à 10 h 38)

Le Président (M. Arseneau): Nous allons reprendre nos travaux avec la Fédération des associations étudiantes universitaires québécoises en éducation permanente. Alors, c'est M. Denis Sylvain, président. Je vous demanderais de présenter les gens qui vous accompagnent. Et aussi j'ajouterais que vous avez une vingtaine de minutes pour faire votre présentation. Bienvenue à l'Assemblée nationale.

Fédération des associations étudiantes
universitaires québécoises
en éducation permanente (FAEUQEP)

M. Sylvain (Denis): Merci, M. le Président. M. le ministre, Mmes et MM. les députés, membres de la commission. Je vous présente M. Louis Monti, qui est trésorier à l'Association des étudiants hors campus de l'Université du Québec à Trois-Rivières; Mme Miki Hirasawa, qui est vice-présidente de la McGill Association of Continuing Education Students; M. Robert Martin, président de l'Association générale des étudiants et des étudiantes de la Faculté de l'éducation permanente à l'Université de Montréal; et M. Claude Garon, rédacteur et recherchiste pour la fédération.

Je ferai d'abord... Excusez-moi. Alors, la présentation du mémoire ne sera pas nécessairement dans l'ordre que vous l'avez... tel qu'il est dans le document. Nous avons choisi de limiter notre mémoire d'ailleurs aux questions qui touchent nos membres, soit la formation continue. J'attaquerai d'entrée de jeu les deux questions qui nous sont posées dans le document de consultation touchant la formation continue. Mon collègue M. Martin fera par la suite un portrait de la clientèle de la formation continue, de la qualité de son enseignement à l'université. Et je reviendrai en conclusion sur le financement.

n (10 h 40) n

Au regard tant des données que de la problématique de l'éducation des adultes dans les universités, le document de consultation s'avère d'une utilité restreinte. Le sous-chapitre sur la formation continue, à la page 24, se résume en effet à deux paragraphes et deux questions. Il est vrai que, comme le note le document, un comité d'experts étudie le financement de la formation continue depuis plus d'un an. Ce comité avait prévu tenir récemment une consultation, mais à peu près tous les intervenants en éducation des adultes, entre autres les membres de la table des partenaires du marché du travail, l'Institut canadien de l'éducation des adultes et notre fédération, se sont abstenus, en soulignant que l'exercice était déficient, notamment du fait que le comité n'avait rendu public aucune des données colligées au cours de ses travaux et que les questions étaient si larges qu'elles semblaient destinées à une quête d'information plutôt qu'à l'enrichissement du débat. Nous sommes de ceux qui déplorent ce cafouillage et nous reviendrons sur cette question lors de la conclusion.

Alors, venons-en aux deux questions qu'on nous pose. Le financement des universités devrait-il faire appel de façon plus systématique aux employeurs lorsque la demande de la formation créditée concerne les besoins de l'organisation? Et existe-t-il des circonstances où les étudiants en situation de formation continue devraient assumer une plus large part pour le coût de leur formation?

Le gouvernement veut selon nous amener une confusion entre la formation créditée et non créditée, et la FAEUQEP tient à rappeler qu'elle privilégie la formation créditée à tout autre type de formation. La formation créditée est plus qualifiante et plus facilement transférable.

Nous aurions par ailleurs apprécié que les auteurs du document nous donnent quelques exemples où il pourrait y avoir lieu de demander une plus grande contribution des employeurs lorsque la demande de formation créditée concerne les besoins de l'organisation. Le seul cas qui nous vient à l'esprit est celui d'une grande institution financière qui avait obtenue d'une université, il y a quelques années, qu'elle crée un certificat destiné exclusivement à ses employés. Notre fédération avait indiqué à l'époque qu'elle n'était pas d'accord avec une telle pratique.

...la pertinence de cette question étant entendu que toutes les formations créditées, même si elles n'ont pas là leur seule finalité, au bout du compte ont pour objectif de répondre aux exigences du marché du travail et, par conséquent, aux besoins des entreprises et des organismes, qu'ils soient à caractère public ou privé.

Nous n'avons rien contre l'idée que les employeurs contribuent davantage au financement de l'éducation, mais nous croyons que c'est par la fiscalité qu'elles devraient le faire. À ce point de vue, le gouvernement a donné un très mauvais signal en réduisant récemment la portée de la loi favorisant le développement de la main-d'oeuvre.

La deuxième question nous laisse aussi perplexes, sensiblement pour les mêmes raisons que la première. À quelles circonstances fait-il ici allusion? S'il s'agit de la formation non créditée, les modalités actuelles prévoient l'autofinancement, ce qui a évidemment pour conséquence que les personnes qui s'y inscrivent paient beaucoup plus cher pour leurs cours que ceux qui sont en formation créditée.

À la perplexité s'ajoute notre crainte, car, dans le paragraphe précédent la question, le document affirme: «La frontière entre la formation continue non créditée qui s'autofinance et les études créditées repose dans certains cas sur [les] distinctions liées au travail personnel de l'étudiant, à l'évaluation de ses apprentissages et au caractère transférable de ses apprentissages.» À moins que nous ayons mal saisi le sens de cet énoncé, nous pensons que ce dernier cherche à minimiser la distinction entre la formation créditée et non créditée.

Et, M. le Président, nous avons reçu récemment un appui de l'Association canadienne de l'éducation des adultes dans les universités de langue française, dont je laisserai des copies à votre attention, et qui reprennent les mêmes craintes que nous avons concernant la formation créditée et non créditée.

Il s'agit de deux choses tout à fait différentes, particulièrement au chapitre de la durée et des coûts de cette reconnaissance. Un certificat, c'est 450 heures de cours et plus de 1 000 heures de travail personnel; à notre connaissance, il n'existe pas de formation non créditée de cette ampleur. En existerait-il une que le coût de cette formation pourrait dépasser les 10 000 $, car elle doit s'autofinancer.

Contrairement à la formation non créditée, la formation créditée est reconnue dans l'ensemble de la société et elle peut s'intégrer dans un programme de baccalauréat. La grande majorité des adultes qui étudient à l'université ont déjà un diplôme d'études collégiales au moment de leur inscription. Il est donc dans l'ordre des choses qu'ils souhaitent obtenir une formation universitaire créditée, et nous ne voyons pas au nom de quel principe ils devraient payer davantage pour leurs cours parce qu'ils n'ont pas eu la possibilité d'effectuer ce type d'études lorsqu'ils étaient jeunes ou parce qu'ils occupent un emploi. Nous croyons qu'une telle mesure pourrait même être considérée discriminatoire au sens de la Charte des droits et libertés de la personne du Québec, et notre Fédération, le cas échéant, n'hésiterait pas à poser la question à la commission.

Quelques études. À la lumière de l'histoire des trois dernières décennies, notre fédération ne peut que répéter ce qu'elle dit depuis plusieurs années: l'ampleur du phénomène des adultes à l'université ne se reflète ni dans le poids politique, qui demeure marginal, ni dans la faible considération que leur portent le ministère de l'Éducation et les établissements universitaires.

Depuis la création des premières associations étudiantes adultes, au milieu des années quatre-vingt, nous avons été témoins de diverses tentatives de déconstruction de l'éducation des adultes: ce fut le cas en 1985, alors qu'un rapport du défunt Conseil des universités a recommandé rien de moins que l'élimination des programmes de certificat; dans les années quatre-vingt-dix, lorsque le Groupe de travail sur le financement des universités a reçu le mandat d'envisager la réduction du financement des programmes de certificat; et dernièrement, en l'an 2000, le ministère de l'Éducation qui avait mis sur la table une formule de financement banale selon laquelle les universités auraient reçu 60 % du financement des programmes courts, l'autre tranche de 40 % étant conditionnelle à l'obtention du diplôme; et tout récemment, évidemment, particulièrement depuis la fin du mois de février, où le groupe d'experts qui avait reçu le mandat de revoir le financement de l'ensemble de l'éducation des adultes a déposé son rapport auprès du ministre. Et nous lui rappelons que nous souhaiterions, pour le bénéfice de l'ensemble de la collectivité, pouvoir avoir une copie de ce rapport-là. Je passerai maintenant la parole à mon collègue M. Martin.

Le Président (M. Arseneau): M. Martin.

M. Martin (Robert): Je vous remercie. Moi, je veux vous entretenir en tout premier de l'évolution de la clientèle adulte dans les universités. Je vais brosser peut-être un petit relevé historique.

En fait, M. Pierre Doray, professeur à l'Université du Québec à Montréal, aidé par M. Pascal Mayrand, brosse un tableau de l'évolution de la clientèle des adultes à l'université au cours des 35 dernières années. Ce qu'on remarque plus particulièrement: si on part de l'année 1966, on retrouvait 16 636 personnes à temps partiel qu'on peut considérer comme étant des personnes adultes et ils représentaient à l'époque 31,6 % des étudiants; en 1976, ils étaient 46 %; en 1981, ils étaient plus de 50 %. Maintenant, au cours des années ? naturellement, je brosse ça assez rapidement, là ? 1990-1999, toutefois, on constate une baisse des personnes de 25 ans et plus, et ils ne représentent plus que 18 %, soit 24 800 personnes. Donc, on a eu une baisse de la clientèle parmi les personnes adultes durant ces années-là.

En fait, il y a un ensemble de causes qui expliquent vraisemblablement la décroissance de l'éducation des adultes. Pour M. Doray et M. Mayrand, on invoque: le vieillissement de la population; la hausse des droits de scolarité ? on sait qu'il y a eu un dégel à l'époque où M. Ryan était ministre de l'Éducation; les crises économiques; les coupes budgétaires dans le secteur de la santé et de l'éducation. Cela dit, en dépit de leur décroissance, les personnes de 25 ans et plus, au premier cycle, demeurent une composante très importante de l'effectif étudiant. En fait, on pourrait dire qu'en 1999 il y avait encore plus de 100 000 étudiants et étudiantes de plus de 25 ans dans le réseau des universités québécoises.

Je dirais aussi que toutefois, malgré la diminution du nombre d'étudiants dans les années quatre-vingt-dix, le phénomène demeure important et semble même stabilisé. Selon les données du document de consultation que nous avons reçu, pour l'année 2002, à la page 16, le tableau 18, on dénombre 64 442 personnes dans les programmes courts de premier cycle, soit 47 000 dans les programmes de certificat, 17 000 dans les catégories attestation, et autres. Les données indiquent qu'il n'y a pas eu de variation significative de la clientèle durant la période de 1998 à 2002 jusqu'à aujourd'hui.

n (10 h 50) n

Je voudrais maintenant aborder une étude qui a été réalisée il y a déjà plusieurs années, en fait en 1990, par M. Jacques La Haye, au ministère de l'Éducation du Québec, intitulée Diplômes et accès aux diplômes dans les universités québécoises, 1976-1988, MEQ. Ces données nous disent d'abord ceci ? on peut retrouver ça à la page 6, si l'on veut, de notre mémoire: pour la période étudiée, que ce soit avant ou après 30 ans d'âge de la personne, l'espérance d'entreprendre un baccalauréat était deux fois moindre pour les francophones que pour les anglophones; elle était même moins élevée chez les francophones que chez les allophones. C'est grâce aux programmes de certificat, et après l'âge de 30 ans, que l'espérance d'accès à l'université s'équivaut chez les anglophones et les francophones. En toute logique, M. La Haye en a déduit: «L'égalité des chances qu'on observe dans l'ensemble vient en fait du rattrape important réalisé par les francophones après [l'âge de] 30 ans. L'espérance d'accès après [l'âge de] 30 ans chez ces derniers est en effet de 60 % plus élevée que chez les anglophones.»

Donc, en fait, le tableau aussi qui est présenté là nous montre qu'il y a une distinction très importante sur l'accessibilité à l'université, les personnes anglophones pouvant compléter leur baccalauréat à un âge plus jeune. On pense que cette étude-là est d'une extrême importance, et nous avons demandé à quelques reprises au ministère de l'Éducation de pouvoir la remettre à jour pour connaître la situation, là où nous en sommes présentement relativement à ces questions-là. On considère que les données comme... Excusez-moi. Nous considérons ces données comme très importantes, et à cet effet nous avons à plusieurs reprises demandé au ministère de l'Éducation de mettre à jour l'étude de M. Lahaye avant que ne soit prise toute décision concernant le financement des programmes de certificat.

Nous voudrions aussi préciser que nous avons demandé à plusieurs reprises au ministère de l'Éducation de compléter aussi certaines études que nous considérons comme d'une extrême importance avant que quelque décision se prenne concernant le financement de l'éducation des adultes dans les universités ou des programmes qui sont offerts à cette clientèle-là. Parce que, souvent, on nous fait comme des menaces ou on nous laisse entendre qu'il pourrait y avoir des coupures, mais on ne sait jamais sur quoi ça se base. Alors, ça crée un mouvement de panique chez les personnes; les gens se demandent pourquoi qu'on les met dans une telle situation.

Donc, on a demandé que des études soient faites. Une première, et très importante: savoir est-ce que les entreprises au Québec, qui reçoivent des milliers d'étudiants qui ont complété les baccalauréats par cumul de certificats... est-ce qu'ils rendent service aux entreprises? Est-ce qu'ils rendent service à la société québécoise? Est-on satisfait du rendement qu'ils peuvent donner une fois qu'ils ont complété leurs études? On n'en sait rien au moment où nous nous parlons.

Nous pensons aussi qu'il est important de disposer d'une étude sur la persévérance aux études, parce que souvent on disait: Bon, ceux qui s'inscrivent dans ces programmes-là ne terminent pas leurs études, ils abandonnent, etc. Je vais pouvoir vous en parler un petit peu plus loin, on a des chiffres qui démontrent tout à fait le contraire. Mais on pense que... Et l'étude que nous avons, c'est une étude qui appartient à un seul établissement. On pense qu'une étude sur la persévérance devrait être faite pour l'ensemble du réseau des universités pour connaître la véritable situation puis connaître si ça répond vraiment aux besoins de la société québécoise. On ne le sait pas; on ne peut pas prétendre plus que ce que nous demandons.

Et puis on demande aussi de s'assurer qu'il y a une étude qui puisse nous assurer quant à la qualité de formations qui sont offertes par ces programmes de certificat.

On dit que... À moins qu'on nous produise une démonstration contraire, par de nouvelles études bien sûr, nous estimons justifié d'affirmer que tout mode de financement qui aurait pour effet de réduire l'offre des programmes de certificat fragiliserait de manière importante l'espérance des francophones d'accéder aux études universitaires et de se voir octroyer un diplôme ou un grade. Nous croyons qu'il en est de même pour de nombreuses femmes, des personnes en emploi, de ceux qui résident en région ou qui sont d'origine sociale plus modeste. Quand on parle de l'accessibilité aux études et d'équité sociale, ce sont autant de données essentielles à la prise de décision éclairée. Donc, aussi, on pense que c'est un geste démocratique de procéder à de telles études avant de prendre quelque décision ou laisser entendre que telle et telle chose pourrait se produire.

Maintenant, quelques mots sur la question de la persévérance aux études. On ne saurait par ailleurs parler d'accessibilité en ignorant la question cruciale de la persévérance dans les études. Tous les projets passés de déconstruction de l'éducation des adultes que nous avons évoqués précédemment avaient pour fondement la présumée faible persévérance dans les études.

Dans le mémoire qu'elle a présenté, en janvier 1997, au Groupe de travail sur le financement des universités, la Faculté de l'éducation permanente de l'Université de Montréal a remis les pendules à l'heure. Sans entrer dans les détails de la méthodologie de l'étude qu'a réalisée Mme Lise Lavallée du Bureau d'études et de développement de la Faculté d'éducation permanente, rappelons que l'analyse du fichier des cohortes de l'Université de Montréal ? tout de même une université qui est assez importante; un grand nombre d'étudiants aussi en éducation permanente ? lui a permis d'établir les taux suivants de persévérance selon le type de programmes pour la cohorte de l'automne 1987, lue à l'hiver 1993: en premier, en tête, les doctorats de premier cycle, à 90,8 %; les deuxièmes, les baccalauréats contingentés, à 65,7 %; les troisièmes, les programmes de certificat, à 44 % qui complètent leurs études; et puis on a par la suite, en quatrième, des programmes de majeure; suivis, en cinquième, des baccalauréats non contingentés; et, en sixième, des programmes de mineure. Donc, on voit que les programmes de certificat, là où des personnes adultes, issues souvent du milieu du travail, s'inscrivent à l'université... sont des personnes sérieuses et qui complètent leurs études, en tout cas toutes proportions gardées, lorsqu'on les considère aux autres étudiants, aux autres étudiantes.

En fait, il semble aussi que la persévérance ait augmenté dans les années suivantes, car la cohorte de 1990, lue à l'hiver 1996, donne les résultats suivants: on s'aperçoit que les programmes de certificat atteignent 51 %, en rapport aux programmes de mineure à 36 %, aux programmes de majeure à 49 %. Encore deux minutes? Bon.

L'octroi de grades. J'essaie de faire...

Une voix: ...

M. Martin (Robert): O.K. Non, mais je vais laisser à Denis de faire ça. Bon, bien, je vais considérer que j'ai terminé ma partie, puis je vais demander à notre président de pouvoir compléter. Merci, M. le Président.

M. Sylvain (Denis): Merci, Robert.

Le Président (M. Arseneau): Alors, oui, c'est M. Sylvain?

M. Sylvain (Denis): Oui. Alors, M. le Président, ça nous amène à la question centrale: le financement des universités. On pourrait plutôt parler du sous-financement, devrait-on dire, puisqu'il y a un consensus, dans le monde universitaire, sur la nécessité d'injecter dans le système une somme récurrente de 350 millions à 375 millions.

Deux sources de financement possibles, on le sait: la subvention gouvernementale et les droits de scolarité. Le gouvernement actuel étant très ferme sur la promesse de maintenir le gel des droits de scolarité au cours de son mandat, il en découle qu'il devra augmenter la part du financement gouvernemental.

À cet égard, une étude de la FEP encore une fois nous démontre que 25 % des étudiants ? majoritairement des étudiantes parce que les certificats est un phénomène qui favorise et qui touche beaucoup la condition des femmes; 75 % à l'Université de Montréal sont des femmes qui sont inscrites dans les programmes de certificats ? 25 % d'entre eux gagnent moins de 20 000 $. Alors, on peut raisonnablement croire qu'un dégel des droits de scolarité pourrait affecter l'accessibilité, mais nous aurons l'occasion, je pense, d'y revenir un peu plus tard.

Cependant, il faut croire que... Il faut absolument que le gouvernement n'opte pas pour le statu quo. Il faut qu'il réinvestisse massivement dans les universités, parce que, pour nous, à la fédération, investir dans les universités n'est pas une dépense mais bien un investissement. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Arseneau): Merci beaucoup, M. Sylvain et M. Martin. Alors, M. le ministre, vous avez encore cette période, je dirais, budgétaire, puisqu'il y a des lectures qui seront importantes dans les minutes et dans les jours qui viendront. Alors, je lance le débat et je vous donne la parole, M. le ministre.

M. Reid: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord souhaiter la bienvenue et remercier de leur présence le président de la Fédération des associations étudiantes universitaires québécoises en éducation permanente et également à toute la délégation.

Je pense, M. le président, que l'étude de M. La Haye, dont vous parliez, qui a été faite en 1990, mérite effectivement d'être rafraîchie, et nous allons regarder de très près cette situation-là pour pouvoir effectivement avoir toutes les données nécessaires pour avancer dans toute cette question de l'éducation des adultes, qui prend une importance de plus en plus grande dans notre société.

J'aimerais poser une question sur ce qui me semble être une association que vous faites entre la formation créditée, la formation sur mesure et le financement ou l'autofinancement de la formation. Autrement dit... enfin, l'association serait plutôt entre la formation non créditée... et il semble que, pour vous, c'est associé étroitement à la formation sur mesure et que c'est associé étroitement à un autofinancement. Et j'aimerais que vous élaboriez un peu là-dessus, parce que, au ministère de l'Éducation, cette association n'est pas faite de façon... comme vous la faites ou comme vous semblez la faire.

Parce que, par exemple, la formation créditée, et on le reconnaît, et dans le monde universitaire, je pense que les directions universitaires le reconnaissent aussi, la formation créditée, c'est plus que la formation, c'est aussi une reconnaissance face à notre société que la personne a reçu la formation et qu'elle a été sanctionnée par les crédits, par donc une reconnaissance de l'atteinte d'objectifs pédagogiques et d'apprentissage. Et, dans ce sens-là, il me semble qu'on trouve... Et il n'y a pas d'association qui est faite ? et j'ai cherché, ça fait un an, là, j'ai parlé à beaucoup de monde dans le ministère, et, moi je n'ai pas fait, je ne fais pas cette association-là ? entre le fait que ce soit sur mesure, par exemple, et le fait que ce soit crédité, et faisant intervenir aussi la question du financement qui pourrait être différencié, là, dans chaque cas.

Est-ce que vous pourriez élaborer un peu là-dessus? Ou qu'est-ce qui vous fait craindre qu'on fasse une association ou qu'on veuille diminuer le nombre de formations créditées, par opposition à la formation non créditée, étant donné que c'est un plus pour l'individu? Je comprends que vous soyez inquiets, mais ce que je comprends moins, c'est pourquoi est-ce que ça vous inquiète, cette question.

M. Sylvain (Denis): Bien, je dirai tout d'abord: dans la formulation des deux questions, qui nous amène, avec les deux petits paragraphes en introduction des deux questions, à nous interroger vivement sur quel est cet axe que vous soulevez entre la formation créditée et non créditée. Et, pour nous, la façon dont c'est formulé, ça nous laisse croire qu'on pourrait envisager de faire passer de la formation créditée à de la formation non créditée et non l'inverse.

Donc, un cours... On a souvent, on voit ça dans les publicités, des cours de fin de semaine, qui sont à 800 $, 900 $ et qui ont pratiquement le même nom qu'un cours de 45 heures à l'université et qui est crédité. Donc, la question peut se poser effectivement: quelle est la valeur du crédité par rapport au non crédité, si on peut le donner en deux jours, alors que l'autre... en 15 heures alors que l'autre en demande 45? Bien, pour nous, la question ne se pose pas, parce que, comme vous l'avez dit, M. le ministre, d'une part, cette formation-là, elle est transférable, on la reconnaît, elle a une valeur de reconnaissance, donc elle peut aussi s'insérer dans le cadre de programmes de certificat qui peuvent s'insérer également dans le cadre d'un baccalauréat, par cumul, alors que l'autre formation ne le fait pas.

Alors, pour nous, ça nous apparaît comme étant important que cette formation créditée, qui demande aussi, hein, 45 heures, mais c'est aussi tout près de 100 heures de travail par l'étudiant, ce que l'autre formation non créditée ne demande pas... Alors, il y a un approfondissement des connaissances, de la théorie, je dirais, également qui est beaucoup plus fort dans le crédité. Et d'essayer de penser que cette même formation là pourrait dorénavant se faire donner par du non crédité, bien, je pense que c'est l'ensemble des citoyens et des citoyennes qui y perdraient au change, parce qu'on ne peut pas, en 15 heures, apprendre ce qu'on apprend en 45 heures à l'université. C'est impossible. On ne ferait qu'un tableau.

Le Président (M. Arseneau): M. le ministre.

M. Reid: Bien, on est d'accord sur le crédité, l'importance et l'avantage pour les citoyens d'avoir une formation créditée. Mais la question 12, la question telle que, moi, en tout cas, je voulais et j'aimerais peut-être vous demander d'y répondre: «Le financement des universités devrait-il faire appel de façon plus systématique aux employeurs lorsque la demande de formation créditée concerne les besoins de l'organisation?» L'employeur veut donner de la formation créditée, parce que, aujourd'hui, les employeurs, à ma connaissance, savent que c'est intéressant, encore plus pour leurs employés, et que, quand ils offrent une formation à leurs employés qui est créditée, ils offrent beaucoup plus à leurs employés: c'est une façon de les motiver en plus, etc.

La question, c'est: Est-ce que... Dans quelle mesure est-ce qu'on devrait subventionner, comme État, de la même façon, lorsqu'un employeur souhaite donner une formation créditée à ses employés, sur mesure, etc., mais créditée? Et est-ce que, dans ces contextes-là, on devrait faire appel plus ou non ? et c'est la question qui est posée ici ? à l'employeur de contribuer davantage dans un cas comme celui-là, pour libérer peut-être des fonds publics pour d'autres formations?

Le Président (M. Arseneau): M. Sylvain.

M. Sylvain (Denis): Merci, M. le Président. Je pense que vous allez avoir plusieurs réponses, M. le ministre. Moi, je dirais d'emblée que, si c'est pour une entreprise, c'est très bien. Là où le bât blesse, c'est qu'il ne soit accessible qu'aux et que pour les employeurs... les employés de l'entreprise. Et c'est ça, nous, comme c'est du financement public qui va aller financer ce type de programme, bien, on ne voit pas au nom de quel principe on ne pourrait que le limiter à... et aux employés de l'entreprise en question. Robert, tu veux rajouter? Claude?

M. Garon (Claude): Peut-être, oui, un commentaire. Je prendrais un exemple. On prend... Par exemple, il y a beaucoup d'infirmières qui suivent des programmes de certificat dans le réseau universitaire, des programmes crédités en santé communautaire, en santé mentale, en toxicomanie, en soins à domicile. Souvent, c'est leurs employeurs qui vont... les employeurs souhaitent que ces gens-là y aillent, aillent suivre ces formations. Est-ce que l'hôpital qui envoie ses infirmières devrait payer davantage les universités? Mon Dieu, peut-être, mais on ne voit pas vraiment selon quel principe ça se ferait. Parce que toutes les formations universitaires correspondent aux besoins des employeurs. Qu'il s'agisse d'un doctorat, d'une maîtrise ou d'un bac, ça répond à un besoin d'un employeur.

Et tant qu'on est dans le crédité... Parce que l'avantage, évidemment... L'employeur peut demander effectivement que ses employés aillent suivre des formations créditées, mais il faut penser aussi à la personne qui suit ces formations-là: lorsqu'il s'agit de formation créditée, cette personne-là après coup va avoir une mobilité professionnelle très importante du fait d'avoir augmenté sa compétence, et ça, on pense que ça doit demeurer.

Si le programme est conçu spécifiquement pour un employeur, nous, à notre avis, l'employeur devrait assumer le coût entier du programme, le coût de conception et de dispensation de la formation. Dans ce cas-là, oui. Mais, à notre connaissance, ça n'existe pas. Il y a des programmes évidemment à caractère professionnel, qui sont relativement spécialisés, mais ils ont quand même une optique assez générale qui permet de dire que c'est de la formation fondamentale. En même temps, tout en accroissant sa compétence professionnelle, la personne augmente également sa formation fondamentale.

Et donc, à ce moment-là, on ne voit pas très bien comment il serait possible de distinguer là où il faudrait subventionner et là où il ne faudrait pas le faire. En tout cas, nous, on ne réussit pas. Tel qu'est organisé le réseau présentement, on ne voit pas comment ce serait possible.

Le Président (M. Arseneau): Merci beaucoup, M. Garon. Peut-être qu'on pourrait aller de l'autre côté, et nous reviendrons ultérieurement. Alors, je cède la parole à la députée de Taillon et aussi critique de l'opposition officielle en matière d'éducation.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Alors, ça me fait plaisir de vous souhaiter la bienvenue, de vous revoir à nouveau, puisqu'on a eu dans le passé, dans une autre vie, des échanges et des discussions avec... J'ai eu des échanges et des discussions avec votre association. D'ailleurs, il faut dire, M. le Président, que, si les étudiants adultes ont accès au moins à des régimes de prêts, c'est entre autres dû au fait que l'association a fait des représentations importantes et, je dirais, persistantes à cet égard auprès des ministres de l'Éducation qui se sont succédé. Et on peut constater un résultat heureux aujourd'hui; ils en sont en partie responsables, faut-il le mentionner.

J'appuie complètement votre demande de mise à jour de toutes les informations et surtout de toutes les études nécessaires et souhaitables sur la formation des adultes, sur la formation continue. Je suis heureuse d'entendre le ministre nous dire qu'il a bien l'intention de répondre, d'accéder positivement... de répondre positivement à votre demande, d'accéder donc à votre demande. J'espère qu'il pourra le faire dans un temps relativement bref parce qu'il y a longtemps qu'il n'y a pas eu de mise à jour sur ces questions. On fait référence à des études qui datent déjà de quelques années, d'une dizaine d'années, à toutes fins pratiques, et on sait comment ce sera de plus en plus important, la formation continue. Ça l'est déjà, et ça le sera de plus en plus dans un monde qui est en continuelle et perpétuelle mutation.

Bon. Alors, je veux revenir sur vos remarques et critiques, qui sont assez dures, hein, à l'égard du ministère de l'Éducation puis aussi des établissements, où vous affirmez que tout se passe comme si le ministère et les universités n'avaient pas encore intégré ce phénomène de la reconnaissance des adultes en formation et de leurs besoins. D'abord, un, qu'est-ce que vous voulez dire par là? Quels sont les faits qui vous permettent d'affirmer de telles choses? Vous avez fait référence à des études, ou des commentaires, ou des propos tenus par l'ancien Conseil des universités ou d'autres institutions, mais, dernièrement, est-ce que vous avez toujours ce sentiment-là? Et qu'est-ce que vous souhaiteriez ou qu'est-ce que vous attendez des décideurs politiques et des décideurs institutionnels quant à la reconnaissance de la formation continue, de la formation des adultes au niveau supérieur?

Le Président (M. Arseneau): M. Sylvain.

n(11 h 10)n

M. Sylvain (Denis): Oui. D'entrée de jeu, je dirais que ça fait seulement quelques années qu'on a évacué le mot «clientèle additionnelle» du vocabulaire universitaire, alors c'est peu dire ? je parle de quelques années. Les adultes ont toujours été considérés comme des clientèles additionnelles, dû évidemment au mode de financement, qui favorise évidemment toutes les universités à ouvrir leurs portes à cette clientèle-là. Mais on a toujours senti qu'on ouvrait la porte à ces clientèles-là pour le financement d'abord, donc d'où le vocable «clientèle additionnelle». Heureusement, on n'entend presque plus parler de clientèle additionnelle aujourd'hui; on va parler davantage d'étudiants ou de clients.

Également, dans la reconnaissance, il est très difficile pour les adultes de se donner une voix dans les établissements universitaires, notamment dû à la loi n° 32 qui laisse les établissements définir ce qu'est l'éducation permanente. Et on sait que plusieurs établissements... Notamment, le réseau UQ dit qu'il n'y a pas d'éducation permanente dans le réseau UQ. Donc, c'est des clientèles qui sont à même titre que toutes les autres clientèles, soit des étudiants et des étudiantes à temps plein ou à temps partiel. Alors, dû au fait que ces clientèles-là, qui ont des revendications précises, qui ont besoin de services qui sont plus adaptés, ont besoin aussi, par rapport à leurs formations, qui sont souvent de très bonne qualité mais dispensées par des chargés de cours, mais, je le répète, d'excellente qualité... le phénomène des relations avec l'établissement est différent. Quand on travaille, on a des responsabilités familiales, et autres, donc il n'y a pas de voix pour cette clientèle-là de l'éducation des adultes.

Est-ce que les associations générales des étudiants réguliers, dits réguliers, s'occupent de cette clientèle-là? Ce qu'on nous rapporte, à travers les établissements, c'est: non. Pour toutes sortes de raisons, hein: les étudiants sont de soir, les jeunes sont de jour, bon, il y a des distinctions fondamentales. Et là où on peut avoir une voix, c'est dans les établissements qui ont spécifiquement identifié des facultés d'éducation permanente ou des départements clairement dévolus à cette clientèle-là. Mais n'eût été que ça, nous ne serions pas ici, aujourd'hui, assis devant vous. Alors, c'est très difficile pour les adultes de se donner cette voix auprès de leur établissement.

Le Président (M. Arseneau): Une chose à ajouter?

M. Martin (Robert): Oui. Merci, M. le Président. Je voudrais rajouter aussi une question peut-être assez importante. On sait que le gouvernement du Québec s'est doté d'une politique québécoise, si on veut, en éducation des adultes et que les universités ont été peu sensibles à cette politique-là, dans le sens qu'ils ont peu adhéré ou n'ont pas voulu adhérer à cette politique-là.

Il y avait des éléments tout de même, à notre avis, qui étaient d'une extrême importance, comme celui de la reconnaissance des acquis. Parce qu'on sait que, dans la politique québécoise, on parle beaucoup de la reconnaissance des acquis, autant dans le milieu du travail, la reconnaissance des acquis expérientiels, etc., donc cela nous prive. Cela nous prive dans le sens que, comme les universités n'ont pas adhéré à ça, il est difficile d'arriver à des ententes où on pourrait élaborer une politique qu'on penserait qui, dans l'ensemble des réseaux des universités, serait commune. D'avoir une politique de reconnaissance des acquis par établissements, c'est comme fermer le réseau. C'est qu'une personne qui veut transférer son dossier d'un endroit à l'autre, pour toutes sortes de raisons, des raisons professionnelles, familiales, lorsqu'ils arrivent, ce n'est pas sûr qu'on va reconnaître l'ensemble de son dossier.

Donc, on pense qu'il serait très important que les universités adhèrent à la politique d'éducation des adultes. Puis on pense aussi que le gouvernement du Québec devrait favoriser, auprès du réseau des universités, par la CREPUQ, la naissance d'un comité interuniversitaire chargé d'établir une politique de reconnaissance des acquis dans l'ensemble du réseau. Parce qu'on sait que cela sauverait beaucoup de sous, de sous, et cela, d'une part pour le gouvernement, pour des études que les gens ont déjà les connaissances. Ils pourraient les démontrer, sauveraient un temps énorme à ne pas réapprendre ce qu'ils savent déjà et sauveraient bien sûr des investissements que le gouvernement paie présentement pour faire en sorte que des gens apprennent des choses qu'ils savent déjà. Alors, les sommes économisées pourraient servir à être investies ailleurs en éducation. Ça fait que c'est peut-être pour compléter ce que Denis, là... M. Sylvain disait.

Le Président (M. Arseneau): Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Oui, très brièvement. Il y a aussi des références quand même universelles à la question de la formation des adultes, de la formation continue, même au niveau supérieur. La Déclaration de Hambourg, en ce sens-là, auquel le Québec a adhéré dans le cadre d'une rencontre de l'UNESCO, nous donnerait un cadre intéressant pour, je dirais, aller plus loin dans le débat actuel, et une meilleure reconnaissance. Peut-être que la mise à jour des données pourrait nous amener à développer un cadre conceptuel un petit peu plus significatif avec les partenaires que sont les universités, que sont les associations étudiantes à cet égard. En tout cas, je... Moi, c'est une réflexion que j'avais faite aussi dans le cadre de cette rencontre internationale, là, sous l'égide de l'UNESCO, où il y avait eu des débats assez en profondeur sur le fait qu'on devait ou non, et comment, reconnaître la formation continue.

Bon. Une question courte, là, parce que je sais qu'il y a peu de temps qui me reste puis je sais que ma collègue veut intervenir ? peut-être dans un deuxième bloc, M. le Président? Bon. Vous avez fait référence, vous y êtes revenus encore, là, sur la consultation, si j'ai bien compris, concernant la formation continue, là, le comité d'experts. Vous y faites référence à la page 11, vous dites, bon, que «le document de consultation s'avère d'une utilité restreinte», et vous n'avez pas souhaité... vous avez refusé de participer, si je comprends, à la consultation. Est-ce que vous pouvez m'expliquer pourquoi et ce qui s'est passé, dans le cadre des travaux de ce comité, qui expliquerait votre attitude et, maintenant, vos attentes?

M. Sylvain (Denis): Oui. Bien, dans un premier temps, nous ne sommes pas les seuls, nous l'avons dit dans le mémoire, il y a plusieurs autres organisations de l'éducation des adultes qui ont refusé. Pourquoi? Bien, tout simplement parce que le document en lui-même était tellement large au niveau du questionnement et avec aucune donnée de référence. Alors, on a constaté que les membres du comité avaient, eux, énormément de données, mais qu'ils n'ont pas voulu partager. Donc, on sentait qu'on allait discuter devant eux sur quelque chose dont on n'avait pas les mêmes outils pour argumenter. D'où le fait qu'on dit qu'on n'a pas pu participer à un débat, mais on sentait qu'on venait davantage chercher chez nous des informations, des informations qui auraient pu être, entre guillemets, piégeantes dans la mesure où on constatait qu'eux savaient davantage où ils allaient. Et on avait évidemment une crainte de manipulation également face à ça.

Mme Marois: O.K. Donc, c'est ce qui explique, là, votre attitude à l'égard de ce comité-là. Bon. Dans le document, à la page 10, vous dites, bon: «La fédération a déjà indiqué dans le passé que les conditions garantes de la qualité des programmes...», et là vous faites référence aux programmes destinés aux adultes et en particulier au certificat, si j'ai bien compris. Bon. Vous donnez un certain nombre de conditions donc qui devraient être davantage respectées ou qu'on devrait davantage opérationnaliser. J'aimerais ça vous entendre sur cela.

M. Martin (Robert): Oui, bien sûr. C'est que, de un, on pense qu'il est très important qu'on puisse assurer la qualité des programmes de certificat qui vont être offerts et que nul doute ne puisse exister dans la société en rapport à sa qualité. Et plus particulièrement aussi, dans le milieu du travail, les gens veulent des garanties, être assurés que ces programmes-là sont de qualité. Donc, les premières conditions qui sont là, c'est des points qu'on a pu vérifier, et, dans plusieurs établissements universitaires, ça se passe tel qu'on l'a décrit. En tout cas, chose sûre, à l'Université de Montréal, ça l'est, mais, dans d'autres établissements, ce n'est pas seulement là.

On dit: Bien, oui, ça prend «une étude étoffée des besoins et des clientèles, et ce, préalablement à la création de tout programme», parce que ça coûte très cher. Il y a un investissement important qui doit être fait. Alors, lorsqu'on crée un programme de certificat, on attend aussi, souvent, qu'il y ait une demande sociale qui ait été posée par des groupes de professionnels qui disent: Écoutez, nous, là, pour être capables de répondre aux besoins de la société dans ce champ-là, un bon programme qui serait conçu serait intéressant. Donc, qu'il y ait une demande qui soit formulée, qu'on ne crée pas des programmes, autrement dit, sur le coin d'une table parce qu'on pense que ça va nous apporter tant de personnes puis ça va nous donner un financement. Il faut qu'il y ait une demande sociale.

Une «participation étroite à la conception du programme de professeurs spécialisés dans la ou les disciplines couvertes par le certificat»; bien, je crois que c'est très important que les professeurs dans les universités, qui sont associés bien sûr à la recherche, donc qui sont à la fine pointe des besoins, participent, je dirais même qu'ils contribuent à la création de ces programmes-là qui, par la suite, peuvent être dispensés par des chargés de cours. Mais que la qualité essentielle soit sous la responsabilité de professeurs et de chercheurs, pour nous, c'est très important. Je peux dire que ça existe à l'Université de Montréal mais dans d'autres établissements aussi.

«L'évaluation périodique des programmes»; bien, ça, je pense que c'est comme incontournable. Il faut s'assurer que les programmes, au moins aux cinq ans, soient revus par des spécialistes dans le champ de la discipline, que ces gens-là nous permettent à ce moment-là de pouvoir les mettre à jour.

n(11 h 20)n

Je voudrais aussi rajouter peut-être que... l'importance qu'il existe ce qu'on appelle des conseils de programmes, ça peut changer d'appellation d'un établissement à l'autre, mais, là où on retrouve la présence des professionnels, des professeurs, des chargés de cours, des étudiants, des étudiantes qui ensemble suivent l'évolution du programme puis s'assurent, lorsque les besoins se font sentir, de modifier le programme puis de le mettre à jour pour qu'il réponde aux besoins, et aussi d'être capable de dire qu'un tel certificat, sa durée de vie est complétée puis qu'on doit l'abolir parce qu'il ne répond plus aux besoins, et de répondre à d'autres besoins. Et puis, bien, c'est ça qu'on appelle aussi des mécanismes de rétroaction qui permettent des ajustements rapides en cours de programme. Donc, pour nous, ça, c'est des questions incontournables, là.

Le Président (M. Arseneau): Je n'ai pas voulu interrompre M. Martin dans son intervention très, très intéressée et dynamique, mais il restera moins de temps, on comprend, pour l'opposition lors du deuxième bloc. Et je céderais maintenant la parole à la députée de Maskinongé.

Mme Gaudet: Merci, M. le Président. Merci pour votre présentation. On constate, ces dernières années, qu'il semble y avoir une diminution du nombre des étudiants à temps partiel. Alors, moi, j'aimerais vous entendre sur quels seraient les moyens pour raviver l'intérêt des étudiants à poursuivre leurs études universitaires. Et est-ce que ces constations-là sont les mêmes en région que dans les centres urbains? Puis tout à l'heure, vous avez parlé aussi de la proportion hommes-femmes; j'aimerais vous entendre un peu plus sur la proportion hommes-femmes qui poursuivent leurs études.

M. Sylvain (Denis): Oui. Alors, dans un premier temps, depuis 18 ans que je gravite alentour de la formation continue et des programmes de certificats, ça fait 18 ans que 75 % de la clientèle de ces programmes-là sont des femmes. Alors, il y a peut-être une raison historique, il y a peut-être une raison encore qui fait que les femmes préfèrent rester, au début, avec les enfants et reporter leurs formations à plus tard. Il y a toutes sortes de raisons, mais le phénomène est là depuis 20 ans, et ça n'a pas changé. C'est majoritairement des femmes qui sont aux programmes de certificat.

Ceci étant dit, il y a une baisse d'étudiants à temps partiel, c'est souvent cyclique. Il y en a eu une dans les années 1993. Suite au dégel des frais de scolarité, il y a eu une chute drastique des inscriptions des étudiants à temps partiel. Il y a aussi le fait que, souvent, les temps-partiels vont s'en aller étudier à temps plein pour terminer plus rapidement, parce que le contexte s'y prête ou parce qu'ils vont aller sur l'aide financière. Mais, je dirais d'emblée que c'est cyclique. Est-ce que la tendance se maintiendra cependant à la baisse sur une longue période? Bien, ça, je pense que c'est important qu'on suive l'évolution, effectivement.

Par contre, je remercie la députée, qui a soulevé la question de l'aide financière pour les temps-partiels; c'est une mesure extrêmement importante et qui encore là favorise beaucoup la condition féminine, puisqu'on a... Dans les universités, j'ai fait une recherche, et beaucoup d'étudiantes auraient auparavant abandonné parce que... doivent s'occuper de la famille et aujourd'hui peuvent terminer leurs études parce qu'elles ont cette possibilité de le finir à temps partiel avec les mêmes conditions.

Le Président (M. Arseneau): Mme la députée de Maskinongé.

Mme Gaudet: Est-ce que la réalité que vous nous exposez est la même en région par rapport aux grands centres urbains?

M. Sylvain (Denis): Je dirais peut-être oui. Louis, qui est à Trois-Rivières...

M. Monti (Louis): Moi, je suis à Trois-Rivières et je peux vous dire qu'on a des hors campus surtout, on a beaucoup de hors campus, hein, répartis un peu partout dans la province, et je dénote que majoritairement, en ce moment, il y a de plus en plus de femmes monoparentales qui s'inscrivent dans les certificats. Je suis, en ce moment, un certificat, et, on peut dire, c'est... 90 %, dans mon certificat, c'est des femmes. Le nombre augmente, et même on a dénoté une augmentation, depuis un an et demi, là, du nombre d'étudiants qui s'inscrivent dans les certificats. La population globale, là, sur le hors campus, a augmenté. Donc, je crois que c'est nécessaire.

Le Président (M. Arseneau): Merci, M. Monti. Vous avez un complément, monsieur...

M. Sylvain (Denis): Si je peux rajouter, par rapport aux régions, il y a le phénomène aussi du programme lui-même. Il y a un bassin et, quand le bassin a fait le plein, comme on dit, quand les infirmières ont tout fait leur bac par cumul, il va y avoir beaucoup moins d'étudiants à temps partiel dans certains programmes de santé.

Alors, oui, il y a un lien aussi à faire entre la population de la région et les programmes qui sont offerts. Et c'est pour ça que, pour les régions... C'est un phénomène qu'on ne rencontre pas nécessairement à Montréal, avec deux grandes universités francophones et deux grandes universités anglophones, où là le choix de la formation est beaucoup plus important. Mais, dans les régions, effectivement, il y a ce phénomène où il y a beaucoup de citoyens et de citoyennes qui aimeraient mais qui, faute de distance, parce qu'il n'est pas offert dans l'établissement près de chez eux, n'y vont pas.

Le Président (M. Arseneau): Du côté... Est-ce que, M. le ministre, vous avez d'autres questions?

M. Reid: On pourra revenir tantôt.

Le Président (M. Arseneau): Il vous reste encore, de votre côté, deux, trois minutes.

M. Reid: Bien, on reviendra, si nécessaire, à la fin.

Le Président (M. Arseneau): Bon. Alors donc, on pourrait, puisque effectivement il y a au moins deux questions du côté de l'opposition... Alors, je reconnais le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Merci, M. le Président. Alors, je vais aller direct à ma question, je n'ai pas beaucoup de temps. Moi, la question que je me pose, je me mets à la place des citoyens, là, vous demandez un réinvestissement de 375 millions récurrent dans les universités... remarquez que je ne suis pas contre ça, là, mais où je me pose la question: qu'est-ce que les étudiants vont en retirer? Est-ce que ça va se rendre aux étudiants ou si ça va être juste... si ça va être dans le système puis, l'étudiant, il n'aura aucun bénéfice de ça? Mais, par la porte d'en arrière, le gouvernement, on sait qu'il prend l'argent dans la poche des citoyens, parce que ça ne vient pas du ciel: les étudiants et le peuple en général, les citoyens, souvent les plus pauvres, vont être taxés pour aller récupérer le 375 millions. Et la question que je me pose: est-ce qu'ils ne seront pas doublement pénalisés?

M. Sylvain (Denis): Bien, je dirais que, dans l'ensemble, au Québec, si on prend la question sous cet angle-là, le citoyen qui ne fréquente pas l'université est pénalisé. Donc, c'est une contribution de l'ensemble. Parce que... Il est pénalisé parce qu'il paie pour cette formation-là, alors que lui ne l'utilise pas. Par contre, il va être récompensé parce que, si on forme des médecins, tu sais, il va en avoir besoin un jour, hein? Donc, oui, si on regarde strictement au niveau de financer la formation, on peut dire qu'il peut être pénalisé, mais il est regagnant parce qu'il a un toit, ça prend des ingénieurs, il est malade, ça prend des médecins, etc.

Quant aux 350 à 375 millions, est-ce que les universités vont les investir dans les bibliothèques, dans la qualité, dans les professeurs? Bien, ça, je pense que l'ensemble des intervenants et des directions universitaires l'ont bien répété ici, il manque de professeurs, c'est vrai. Est-ce qu'ils choisiront de tout mettre sur le recrutement des professeurs au détriment de d'autres secteurs? Ça, on peut poser des questions, mais je pense que les étudiants ont à être vigilants. En tout cas, là où les adultes ont cette possibilité de participer aux décisions et des décisions de cet ordre-là, par l'assemblée universitaire, par différents conseils et comités, je pense que c'est à eux aussi d'être vigilants sur la façon dont les universités vont dépenser cette somme-là. Robert, tu voulais rajouter?

M. Martin (Robert): Moi, peut-être juste... Merci. Ce que je voudrais rajouter bien sûr, c'est que, lorsqu'on compare les sommes dont disposent les universités québécoises puis on les compare ? je n'aime pas beaucoup faire ça, là, je vous le dis tout de suite ? avec les universités canadiennes ? puis je prends l'exemple de l'Université de Toronto parce que j'ai vu les montants ? oui, il y a moins d'investissement qui est fait au Québec, parce que bien sûr les droits de scolarité que doivent verser les étudiants sont moins importants. En tout cas, il y a des sommes qui sont là.

Maintenant, il y a un choix de société qui a été fait, là, dans les années soixante, là, où on allait même vers la gratuité. En fait, le dégel devait se rendre à une gratuité comme on retrouve en France. Mais ce n'est pas ça qui a été fait par la suite: on a décidé plutôt d'augmenter les droits de scolarité. Donc, ça fait que le problème est là. Là, c'est dans le sens qu'il y a un choix de société à faire.

Le Président (M. Arseneau): Merci, M. Martin. Encore...

Mme Champagne: ...

Le Président (M. Arseneau): La députée de Champlain. Oui, vous avez le temps.

Mme Champagne: Alors, je suis limitée à une minute. Alors, bonjour. Bienvenue. Petite question très courte. On sait qu'il y a de la qualité dans les cours, dans les certificats. Les professeurs qui donnent ces certificats-là sont des professeurs de qualité. Est-ce que c'est surtout formé de chargés de cours, et à quelle hauteur, ou si ce sont des professeurs dits réguliers qui donnent ces cours-là?

n(11 h 30)n

M. Sylvain (Denis): Je dirais que, dans la grande majorité des cas, ce sont des chargés de cours. Les professeurs évidemment ont déjà leurs recherches, l'encadrement des étudiants au cycle supérieur. Ils manquent déjà de temps. Alors, de prendre une charge de cours supplémentaire, il faudrait qu'ils soient dégagés par le département, et évidemment le département ne voit pas d'un bon oeil dégager un professeur de l'enseignement régulier pour donner une charge de cours le soir.

Quant aux chargés de cours, ils sont très compétents. Les exigences d'embauche des chargés de cours sont le doctorat avec minimum trois, des fois cinq ans d'expérience ou, à la rigueur, une maîtrise avec 10 ans d'expérience. Donc, l'expérience vient aussi ? on parlait de reconnaissance des acquis tantôt ? vient aussi s'ajouter à la valeur du doctorat ou de la maîtrise qu'ils détiennent déjà. Mais ce sont aussi des gens qui sont impliqués dans le milieu. Alors, leur enseignement évidemment est très, très, très en lien avec l'actualité et les besoins immédiats. Et, comme ce sont des formules qui sont souvent très accolées à la formation professionnelle de calibre universitaire, bien, c'est un mariage qui à notre avis est très bon.

Le Président (M. Arseneau): Madame, messieurs de la Fédération des associations étudiantes universitaires québécoises en éducation permanente, je veux vous remercier beaucoup de vous être déplacés pour venir rencontrer les membres de la commission.

Et j'ajourne... je suspends quelques instants, le temps d'inviter les gens, les représentantes de la Fédération des associations de familles monoparentales et recomposées du Québec à venir prendre place.

(Suspension de la séance à 11 h 32)

 

(Reprise à 11 h 36)

Le Président (M. Arseneau): Alors, si vous permettez, nous allons reprendre nos travaux, puisque, avec les horaires, on doit absolument cesser ou arrêter à 12 h 30, alors respecter les horaires de l'Assemblée nationale.

Alors, mesdames, je vous souhaite la bienvenue à l'Assemblée nationale. C'est Mme Marie-Paule Katabarwa, si je comprends bien, c'est vous qui allez faire la présentation. Je vous demanderais... Non?

Une voix: En fait...

Le Président (M. Arseneau): Vous êtes les trois? Alors, que celle qui débute présente celles qui l'accompagnent, et vous avez 20 minutes pour faire votre présentation.

Fédération des associations de familles monoparentales et recomposées
du Québec
(FAFMRQ)

Mme Lévesque (Sylvie): Bonjour. Mon nom est Sylvie Lévesque, de la Fédération des associations de familles monoparentales et recomposées du Québec. Donc, les filles vont éviter de répéter le nom, heureusement, donc on va déjà économiser du temps. Oui, on va parler les trois, parce qu'on trouve important quand même aujourd'hui de présenter aux parlementaires ce qu'on a à dire par rapport particulièrement aux responsables de familles monoparentales.

Donc, dans un premier temps, la fédération existe depuis près de 30 ans, cette année, va fêter son 30e anniversaire, donc ce n'est pas rien, et ça fait plusieurs années que la fédération lutte sur plusieurs dossiers pour les familles monoparentales et recomposées. Et le dossier de l'éducation n'est pas nouveau non plus, et c'est un dossier qui date de longtemps, particulièrement concernant les prêts et bourses, particulièrement depuis la marche Du pain et des roses, qu'on a repris aussi, en l'an 2000, pour justement améliorer la situation des parents étudiants, en particulier monoparentals.

Alors, aujourd'hui, notre mémoire va porter principalement sur... On n'a pas touché au financement parce que... pas qu'on n'est pas nécessairement capables de dire des choses dessus, mais on voulait particulièrement parler surtout de l'accessibilité parce que, pour nous, c'est un problème majeur pour les parents étudiants monoparentals. Donc, c'est un peu ce à quoi on va aujourd'hui parler principalement, qui pour nous... Il y a deux principes qui est la base d'une véritable accessibilité aux études: ce sont le maintien au niveau le plus bas possible des frais de scolarité, tant au collégial qu'à l'université, et une aide financière aux études permettant une couverture véritable des frais de subsistance ainsi qu'un endettement minimal. Marie-Paule et Lorraine pourront plus vous parler en détail des recommandations justement qu'on a mises dans notre mémoire.

Et on avait participé aussi, en septembre 2003, lors de la commission sur l'accessibilité financière aux études, où on avait déjà aussi souligné un certain nombre de choses au ministère concernant les problèmes reliés aux prêts et bourses pour les étudiants monoparentals. Donc, on trouvait important aujourd'hui, même si ce n'est pas juste... en tout cas, il n'y a pas nécessairement beaucoup de monoparentals qui réussissent à se rendre à l'université, on trouvait quand même important aujourd'hui de venir justement souligner cette problématique-là, surtout quand on sait que les familles monoparentales évidemment sont encore beaucoup en majorité dirigées par des femmes. La preuve: aujourd'hui évidemment, c'est majoritairement des femmes qui vous présentent le mémoire, donc je pense que c'est encore présent. Plus de 82 % sont des «cheffes» de familles monoparentales, et donc... et aussi vivent encore beaucoup dans la pauvreté, malheureusement. Et je pense que les études sont justement un moyen pour éventuellement s'en sortir. Alors, Marie-Paule peut-être ou Lorraine?

Mme Desjardins (Lorraine): Alors, mon nom est Lorraine...

Le Président (M. Arseneau): Alors, c'est Mme Desjardins?

n(11 h 40)n

Mme Desjardins (Lorraine): Oui. Mon nom est Lorraine Desjardins. Bonjour, tout le monde. Alors, comme Sylvie vous le disait, effectivement les deux principes qui sont à la base de l'accessibilité à l'université pour la fédération, c'est d'abord le maintien des frais de scolarité au niveau le plus bas possible et une aide financière aux études qui permette un endettement minimal et qui permette une couverture adéquate des frais de subsistance.

Alors, comme on le sait puis comme vous vous en doutez sûrement ? peut-être que même, parmi vous, il y en a qui ont vécu la situation ? le fait d'être parent et être aux études en même temps, d'être parent monoparental et être aux études en même temps, c'est beaucoup, beaucoup de travail. En plus de devoir concilier ces deux rôles là...

C'est d'ailleurs une charge encore plus lourde que la conciliation travail-famille, la conciliation études-famille. Quand on travaille ? à part dans certains domaines d'emploi, comme le vôtre entre autres ? on n'apporte pas de travail à la maison nécessairement, mais, quand on étudie, on apporte beaucoup d'ouvrage à la maison. Si, en plus d'avoir cette charge-là, qui est assez lourde, on a à faire face à des problèmes financiers très sérieux, évidemment on n'a plus l'énergie nécessaire pour se concentrer sur la réussite de ses études.

À ce titre-là, ce n'est pas étonnant qu'en 1997-1998 il y avait 7 432 bénéficiaires du Programme des prêts et bourses qui étaient monoparentaux, et, en 2001-2002, ils n'étaient plus que 5 500 à faire partie de ce groupe-là. Alors, il y a une diminution importante. Nous, on croit que c'est probablement dû au fait que les deux tâches sont trop lourdes et les difficultés financières également.

Alors, le premier principe donc, c'est de maintenir les droits de scolarité. Et la première recommandation de la fédération, c'est que le gel des frais de scolarité et des frais obligatoires soit maintenu tant au collégial qu'au niveau universitaire. Il y en a d'autres avant nous qui sont venus devant cette commission démontrer l'importance de maintenir le gel des frais de scolarité, notamment la FEUQ, la Fédération étudiante universitaire du Québec, la CSN, l'Université du Québec à Montréal, pour ne nommer que ceux-là. La FEUQ en a d'ailleurs fait une excellente démonstration dans leur mémoire.

Le Québec privilégie, depuis des années, le gel des droits de scolarité, lesquels se situent à moins de la moitié de la moyenne canadienne. Nous, on croit que le Québec devrait être fier de cette chose-là et demeurer un chef de file en cette matière.

Pour les responsables de familles monoparentales, les enjeux qui entourent le gel des droits de scolarité et des frais obligatoires sont cruciaux, d'une part parce que plus ces frais-là sont élevés, plus la dette à la fin des études est élevée également, étant donné que les frais de subsistance sont plus élevés qu'un étudiant en formation initiale. Même si l'aide financière est ajustée en conséquence, ça finirait en bout de ligne avec des dettes plus élevées.

D'ailleurs, il y a une enquête qui a été menée sur les conditions de vie des étudiants, qui a été menée par l'Aide financière aux études, et qui disait que la dette d'études des étudiants qui ont un ou plusieurs enfants à charge est généralement plus élevée que celle des étudiants sans enfants, on s'en doute. À l'université, en moyenne, elle est de 8 311 $ pour les parents étudiants et de 7 107 $ pour les étudiants sans enfants, et l'écart est encore plus important au collégial, puisque la dette d'études est de 5 000 $ en moyenne, 5 106 $, pour les parents étudiants et de 3 600 $ pour les étudiants sans enfants.

Alors, le second principe, c'est une aide financière aux études adéquate et qui couvre les frais de subsistance puis qui permette un endettement minimal. Le document de consultation qui a conduit à la présente commission posait deux questions: y a-t-il lieu d'accroître l'accès aux études universitaires et par quels moyens? Et la seconde question: quels sont les principaux obstacles actuels à l'accessibilité aux études universitaires? Évidemment, la réponse de la fédération, c'est oui, il existe, particulièrement pour les étudiants responsables de familles monoparentales, un besoin urgent d'accroître l'accessibilité aux études universitaires. Et la façon d'y parvenir, eh bien, c'est en améliorant, entre autres, le Programme de prêts et bourses. Les principaux obstacles auxquels ces étudiantes-là et ces étudiants-là font face, évidemment c'est, comme on le disait tout à l'heure, la double charge études-famille et, entre autres, les difficultés financières.

Alors, le Programme de prêts et bourses, malgré les récentes améliorations qui ont été faites, demeure quand même conçu davantage pour les étudiants en formation initiale que pour les parents étudiants et les responsables de familles monoparentales. Alors, la première modification au programme que propose la fédération: la fédération recommande que la pension alimentaire pour enfants cesse immédiatement d'être considérée comme un revenu du parent étudiant dans le calcul de l'aide financière aux études.

Alors, en 1997, comme chacun le sait... depuis 1997, la pension alimentaire pour enfants n'est plus considérée comme un revenu du parent pour le ministère du Revenu du Québec, alors qu'elle persiste à être considérée comme un revenu du parent au Programme de prêts et bourses et à l'aide sociale aussi, notamment. Alors, ici, on croit aussi... la fédération croit qu'il existe une... qu'il s'agit là d'une mesure discriminatoire, puisque, en plus de considérer ce revenu-là... ce montant-là comme un revenu du parent... est traité différemment des revenus de travail, c'est-à-dire que les revenus de travail sont considérés à 50 %, alors qu'on déduit à 100 % la pension alimentaire. Alors, il y aurait urgence à ce moment-là de modifier cette mesure-là.

C'est la seule mesure qu'on a chiffrée dans notre mémoire. Selon l'Aide financière aux études, ça représenterait un investissement de 3,7 millions. C'est peu si on considère le moyen et le long terme et si on considère surtout que, pour des milliers d'étudiantes et d'étudiants, ça peut signifier une accessibilité véritable à une diplomation. Ce n'est pas tout de pouvoir commencer des études, mais, si on est obligé d'abandonner en cours de route parce qu'on manque de ressources financières, ce n'est pas évident. Évidemment, ce n'est pas tous les étudiants monoparentaux qui ont des pensions alimentaires, mais du moins celles et ceux qui l'ont devraient pouvoir la conserver, ou en tout cas les enfants devraient pouvoir y avoir accès. D'ailleurs, on n'est pas les seuls à avoir demandé ça. Le Conseil national des cycles supérieurs de la FEUQ et le Comité consultatif sur l'aide financière aux études sont venus faire la même recommandation devant cette commission.

Deuxième recommandation de la fédération. La fédération recommande également que des montants suffisants soient alloués afin de permettre une couverture complète des frais de garde de jour, de soir, de fin de semaine, et ce, tout au long de l'année. Alors, présentement, le règlement accorde des frais de garde, dans le cas des gens qui ont accès à une garderie subventionnée, de 7 $ par jour seulement et uniquement pendant les semaines où les étudiantes ou étudiants sont réputés étudier à temps plein. Et, comme on le sait, pour avoir une place en garderie subventionnée, un enfant doit y être inscrit 50 semaines par année. Donc, il y a une partie de ces semaines-là qui ne sont pas couvertes. Et il n'y a pas non plus... on ne prévoit pas non plus une couverture de frais de garde de soir et de fin de semaine, alors que des cours... ça arrive assez souvent que des cours sont données de 4 à 7 ou de 7 à 10, le soir. Donc, on a besoin de faire garder les enfants. Et il peut arriver aussi assez fréquemment qu'on ait besoin de faire des travaux en bibliothèque ou des travaux d'équipe. Alors, ça représente des frais qui ne sont pas couverts, et c'est des frais dans certains cas qui peuvent être très importants.

Bien, maintenant j'aimerais passer la parole à Marie-Paule Katabarwa qui va vous présenter nos autres recommandations.

Mme Katabarwa (Marie-Paule): La quatrième recommandation est que le seuil de revenu familial à partir duquel une contribution parentale est requise soit rehaussé substantiellement. La contribution parentale est un des aspects qui préoccupe la fédération parce que le seuil de revenu familial à partir duquel une contribution parentale est requise est trop bas et contribue à exclure beaucoup d'étudiants provenant de familles à faibles revenus. Et, comme on le sait, les familles monoparentales comptent parmi les familles qui ont vraiment un revenu qui est très bas.

La cinquième recommandation, c'est que l'étudiant dont les parents ont connu une séparation sans jugement de la cour et dont le parent non gardien n'a jamais ou rarement contribué financièrement à ses besoins ne soit pas tenu d'obtenir une contribution parentale de ce dernier. Au moment où on a déposé le mémoire, cette recommandation n'était pas... ce besoin n'était pas vraiment rencontré, mais on a appris très récemment que c'est en voie de règlement, et nous vous en remercions pour ça.

La sixième recommandation, c'est que l'aide financière accordée corresponde au coût réel des frais de subsistance reliés à la vie étudiante et permette un endettement minimal. En effet, les besoins sont sous-estimés dans le calcul de l'aide financière accordée, ce qui, dans bien des cas, assure à un parent étudiant des revenus inférieurs à ce qu'il recevrait d'une aide de ce dernier recours.

n(11 h 50)n

Les étudiants et étudiantes monoparentals vivent des situations particulières en regard d'autres postes de dépenses. Par exemple, si on vous parle du logement, je peux dire qu'un parent qui a des... donc une mère ou un homme monoparental a des responsabilités familiales qui peuvent difficilement l'empêcher de choisir un logement avec d'autres personnes, ce qui augmente ses dépenses en termes de loyer, de facture de téléphone, de charges et d'électricité. Et, même si, en cas de difficulté majeure, on choisirait d'habiter avec quelqu'un, souvent les colocs ne veulent même pas parce qu'ils savent très bien qu'habiter avec une mère qui a des enfants, ce n'est pas toujours évident parce que les enfants font du bruit, ça peut déranger. Donc, déjà ça, ce n'est pas évident quand on n'a pas assez d'argent.

Aussi, ceux qui demandent que... En tout cas, ce qui implique qu'une aide financière soit vraiment accordée, c'est que, par rapport à ce qui a trait à l'alimentation, un étudiant qui n'a pas d'enfants dépense moins qu'une femme ou un homme monoparental qui doit nourrir ses enfants. Pourquoi? Parce que les parents monoparentaux, ils veillent à ce que leurs enfants mangent bien, sinon ils vont se retrouver à l'hôpital pour des raisons de santé, ce qui fait qu'ils ne pourront même pas aller étudier facilement. Donc, c'est ça.

Le fait d'avoir des enfants implique donc des dépenses importantes que le niveau actuel d'allocations familiales n'arrive pas à combler, étant donné l'intensité des exigences reliées au fait d'être aux études. Si l'on vise véritablement à augmenter le nombre de diplômes dans toutes les couches de la population, l'aide financière aux études devrait minimalement assurer la couverture des besoins essentiels des parents étudiants et de leurs enfants. Et l'un des moyens les plus efficaces pour y parvenir serait sans doute de laisser aux enfants l'accès au montant complet de la pension alimentaire versée en leurs noms, comme Lorraine l'a dit tout à l'heure.

Nous soulignons aussi que les besoins... que les responsables de familles monoparentales ont moins la possibilité que les étudiants sans enfants de combler leurs manques à gagner par les revenus de travail. On le sait que, si on va aux études le jour, on ne peut travailler que le soir et les fins de semaine. Mais le soir et les fins de semaine, si on va travailler, il faut qu'on fasse garder les enfants. Donc, déjà, c'est un problème parce qu'on n'a pas d'argent pour aller... pour payer une gardienne ou les gens qui gardent le soir. Et, même si on a quelqu'un, c'est ce qu'on va gagner qu'on va devoir donner à cette gardienne-là. Et à part ça, comme Lorraine l'a dit, quand on travaille, on finit le travail, on rentre à la maison, mais, quand on étudie, le travail n'est pas fini, c'est-à-dire qu'on sort de l'école, mais on a des travaux à faire, on doit réviser nos cours. Donc, si on doit en plus de ça travailler les fins de semaine, le soir, c'est sûr qu'on ne va pas réussir les études. Donc, je pense que... Je ne sais pas si je me suis bien expliquée.

Et de plus certains employeurs rebutent à embaucher le personnel qui a des responsabilités parentales. Moi, je suis un cas vivant parce que, quand j'ai été chercher un job pour pouvoir subvenir à mes études et en même temps pour que mes enfants puissent mieux vivre, mon employeur, quand je lui ai dit que j'étais monoparentale, c'est clair qu'elle ne m'a pas prise. Et, quand j'ai été me faire embaucher ailleurs, je n'ai pas dit que j'avais des enfants, et on m'a prise. Donc, il faut dire qu'on est obligés de mentir pour même trouver un petit job pour augmenter nos revenus.

Donc, finalement, il nous apparaît important qu'en plus de couvrir adéquatement les frais de subsistance l'aide financière accordée via le Programme de prêts et bourses puisse permettre un endettement minimal. Il y aurait peut-être lieu dans ces conditions de déplafonner les montants des bourses accordées.

Et, pour finir, donc la fédération croit qu'il est indiscutable que le Programme de remboursement différé soit maintenu et que, en plus de limiter le coût réel aux étudiants universitaires, d'importantes modifications devraient donc... Je m'excuse.

Le Président (M. Arseneau): Il reste encore deux minutes. Vous pouvez conclure, oui.

Mme Katabarwa (Marie-Paule): L'implantation de modes de remboursement proportionnel au revenu pourrait également être une avenue intéressante. C'est ça que je voulais vous dire.

Le Président (M. Arseneau): C'est tout?

Mme Katabarwa (Marie-Paule): Oui.

Mme Lévesque (Sylvie): Voilà. On peut répondre à vos questions.

Le Président (M. Arseneau): Alors, je vous remercie pour cette présentation qui campe la problématique qui est la vôtre carrément au niveau de l'accessibilité en termes de conciliation famille-études et au niveau aussi des frais de subsistance. Alors, M. le ministre, pour commencer ce bloc d'échange.

M. Reid: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord souhaiter la bienvenue aux représentantes de la Fédération des associations de familles monoparentales et recomposées du Québec. On a déjà eu l'occasion de... J'ai déjà eu l'occasion de rencontrer certaines des personnes qui sont dans la délégation. Et je voudrais peut-être commencer par vous dire qu'une des recommandations que vous faites ici a déjà été faite dans mon bureau et que, sans pouvoir annoncer de résultat à ce moment-ci, je peux vous annoncer ou vous dire en tout cas qu'on y travaille de façon très attentive: c'est celle concernant la pension alimentaire pour enfants dont on a parlé tantôt et qu'on espère pouvoir dénouer ? cette question-là ? dans des délais les plus brefs.

J'aimerais peut-être vous entendre sur quelque chose dans votre mémoire, où vous dites que l'université ne convient pas nécessairement ou ne saurait convenir à toutes les personnes, et c'est bien évident, et que des efforts devraient également être consentis dans le but de valoriser les domaines d'études techniques et professionnelles. Est-ce que vous pourriez élaborer un peu plus là-dessus? Parce que, évidemment, votre association ne s'intéresse pas qu'aux personnes qui veulent étudier à l'université, de toute évidence. Alors, est-ce que vous pourriez aller un peu plus loin là-dessus et peut-être...

Mme Desjardins (Lorraine): Bon, évidemment, le mémoire a été présenté dans le cadre d'une commission sur les universités, l'avenir des universités du Québec. Cependant, on pensait important de passer le message de ne pas oublier les autres niveaux d'enseignement. C'est-à-dire, ce n'est pas nécessairement tout le monde qui a les capacités ou le désir d'entreprendre des études universitaires, mais c'était juste pour passer le message de ne pas non plus négliger ces niveaux d'études là: l'éducation... la formation professionnelle, la formation technique au cégep.

Parce qu'on a aussi des mères qui viennent chez nous, dont une qui est venue... qu'on a demandé de nous accompagner, mais elle ne pouvait pas parce qu'elle est en stage, qui a fait un programme technique en éducation spécialisée au cégep. Évidemment, quand on est mère monoparentale au cégep, on est encore plus seule que quand on est à l'université parce que nos collègues d'études sont encore plus jeunes. Donc, c'est un peu dans ce sens-là, de ne pas négliger non plus... C'est vrai que l'université est un lieu de savoir et où on peut acquérir une formation qualifiante, mais il existe aussi d'autres lieux. C'était simplement dans ce sens-là qu'on soulignait cette chose-là. Il existe aussi d'autres niveaux d'enseignement qu'il ne faudrait pas non plus négliger.

Le Président (M. Arseneau): Merci. M. le ministre.

M. Reid: Est-ce qu'il y a des collègues qui veulent...

Le Président (M. Arseneau): Bien, il y a Mme la députée de Maskinongé qui a déjà indiqué qu'elle souhaitait poser une question.

Mme Gaudet: Bonjour. Merci pour votre présentation. Vous avez évoqué à plusieurs reprises les problèmes de garderie, hein, lorsque vous êtes aux études, tant au niveau de la poursuite des cours qu'au niveau du travail en équipe qui se fait souvent le soir, les fins de semaine. Des groupes qui vont ont précédés nous ont parlé de mettre sur pied des garderies sur les campus soit au niveau du cégep ou de l'université, et j'aimerais vous entendre sur ce sujet.

Mme Lévesque (Sylvie): Bien, ce que... Nous, on ne privilégie pas cette avenue-là dans le sens que... Bon, ça ne veut pas dire qu'au niveau des campus il ne pourrait pas y avoir des aménagements justement pour des familles, je pense qu'il ne faut pas ghettoïser non plus le lieu pour les familles monoparentales ou les gens qui ont des enfants. Je pense que, nous, ce qu'on dit, c'est: Donnons davantage de soutien financier à ces personnes-là et à ces familles-là, à ces parents-là, et je pense qu'ils vont être capables après ça de se débrouiller pour trouver... avoir accès ou évidemment voir s'il y a des possibilités que... Élargissons dans le fond les services de garde pour donner davantage de services régis ou publics, même le soir et les fins de semaine, puis à ce moment-là peut-être que les gens vont être capables eux-mêmes de les trouver dans toutes les régions du Québec, pas juste à Montréal, mais dans l'ensemble des régions.

Donc, on privilégie plus ça que de... Ça ne veut pas dire qu'il ne faut pas offrir, comme je disais tantôt, des possibilités, là, des campus pas juste avec un lit puis un bureau, là, mais avoir plus d'espace, mais en même temps je pense qu'il faut aussi prévoir davantage un soutien financier substantiel et aussi améliorer les services de garde. C'est un peu ce que Marie-Paule disait. Dans le sens que, si on pouvait avoir des services de garde le soir et les fins de semaine aussi pour répondre à ces besoins-là, bien, peut-être que davantage le gouvernement devrait investir là-dedans à ce moment-là.

Mme Gaudet: Merci.

Le Président (M. Arseneau): Mme la députée de.... Ah! M. le ministre, il y a encore du temps.

M. Reid: ...

Le Président (M. Arseneau): Comme vous voulez. Mme la députée de Chauveau, allez.

Mme Perreault: Merci beaucoup. Bonjour à vous. À vous entendre, on voit bien que ça prend beaucoup de courage pour retourner aux études, étudier avec des enfants. Moi-même, j'ai des enfants et je sais que c'est beaucoup d'investissement, alors je salue votre courage.

n(12 heures)n

Je vois dans votre mémoire que vous accordez une importance aux frais de scolarité, en ce sens que vous voulez qu'ils demeurent bas. Et, moi, j'aimerais vous entendre... Dans l'éventualité où... Ce n'est pas le cas parce qu'on a un engagement qu'on gèle les frais de scolarité, mais, au niveau, moi, de l'arrimage du prêt et bourse par rapport aux frais de scolarité, j'aimerais vous entendre là-dessus. Parce que ce que je comprends de votre situation, c'est que ce n'est pas les frais de scolarité qui posent un problème, c'est que vous n'avez pas assez de revenus pour subvenir à vos besoins. Ça fait que dans le fond le fait des frais de scolarité, si on avait un système de prêts et bourses qui était mieux adapté aux besoins et aux difficultés précises que vous vivez comme parents ou comme familles monoparentales, vous seriez peut-être... puis ce serait peut-être plus avantageux. J'aimerais vous entendre là-dessus.

Mme Desjardins (Lorraine): ...répondre, oui.

Le Président (M. Arseneau): Mme Desjardins, oui.

Mme Desjardins (Lorraine): Écoutez, notre première recommandation vise le gel des frais de scolarité. Et ce qu'on a dit d'ailleurs quand on a étayé un peu la recommandation, c'est que, peu importe si le Programme de prêts et bourses est adapté en conséquence, le fait d'avoir des frais de scolarité plus élevés, ça va faire en bout de ligne que la dette étudiante va être plus élevée. C'est... Puis de toute façon, même si on donnait ce surplus-là en bourses uniquement, on est vraiment... notre position là-dessus est très claire, c'est vraiment le gel des frais de scolarité d'abord, là. Peu importe comment on organise le Programme de prêts et bourses autour de ça, il y a déjà un grand manque à gagner au niveau de la différence entre le revenu et les dépenses. On pense que c'est important de garder les dépenses au minimum et même de les couvrir davantage.

Mme Lévesque (Sylvie): Ce que j'ajouterais...

Le Président (M. Arseneau): Oui, absolument, Mme Lévesque.

Mme Lévesque (Sylvie): On veut être aussi solidaires avec l'ensemble des étudiants, parce que je pense qu'en quelque part les étudiants en général au Québec sont endettés, on l'a vu, puis je pense que vous le savez mieux que nous, parce qu'il y a bien du monde qui sont venus ici, dans la commission, pour le dire. Et c'est dans ce sens-là qu'on se dit: Il y a comme des vases communicants, comme disait Lorraine. C'est que, si d'un côté on augmente les frais de scolarité, même s'il y a... les prêts et bourses sont plus généreux ou on améliore le système, si c'est les autres étudiants à qui on a augmenté les frais de scolarité que le gouvernement prend cet argent-là pour le redonner à d'autres, pas sûr que c'est une bonne façon de solidarité sociale. Parce qu'on sait que le gouvernement, il faut qu'il génère de l'argent, donc, s'il va les chercher dans les poches de un, il va les donner à l'autre, donc en quelque part pas sûr que c'est une économie puis c'est bien avantageux pour l'ensemble des citoyens et des citoyennes.

Mme Perreault: Merci.

Le Président (M. Arseneau): Est-ce que, pour une courte... Oui, encore une autre question.

M. Reid: J'ai une courte question, M. le Président. Je pense que c'est certainement la délégation qui connaissent mon intérêt pour cette question-là. On parle souvent des difficultés des garçons à l'école, mais j'aimerais que, dans le domaine qui nous intéresse, avec votre visite, que vous nous disiez un tout petit peu: est-ce que les hommes qui sont responsables de familles monoparentales... est-ce qu'il y en a ? enfin il semble que c'est moins rare que ce l'était il y a 20 ans ? et est-ce que les éléments dont on parle ici, vos recommandations, etc., est-ce que ça prend une couleur différente si on regarde la problématique d'un homme qui est chef de famille monoparentale et qui veut aller aux études ou est-ce que c'est semblable? Et j'aimerais vous entendre là-dessus.

Le Président (M. Arseneau): Mme Lévesque.

Mme Lévesque (Sylvie): Vous dites que c'est moins rare, mais je pense que non malheureusement. C'est que, bon, oui, il y a de l'évolution effectivement. À la fédération, je dirais c'est à peu près 30 %, disons, dans nos associations et dans l'ensemble de la fédération, qui est à peu près, bon, 25 % à 30 %, qui sont des pères monoparentals. Donc, c'est quand même minoritaire. Bon, il y a de l'évolution, oui, là, mais il reste que je pense que c'est majoritairement des responsables féminins qui sont... qui vont au niveau universitaire. Il y en a, des pères monoparentals, mais je pense que, dans les statistiques, c'est encore... Il n'y en a pas beaucoup parce que, bon, effectivement plusieurs se... Il y en a quand même, là, ce n'est pas qu'il n'y en a pas du tout, mais c'est encore... ce n'est pas un phénomène qui est encore bien, bien répandu. La plupart, soit qu'une mère devient monoparentale soit, bon, au niveau collégial ou plus jeune, et tout ça. À ce moment-là, le père est parti dans le décor, donc lui va pouvoir continuer aux études, mais sans nécessairement avoir la responsabilité parentale de l'enfant.

M. Reid: Ma question était pour ceux... Pour les cas où ça arrive, est-ce qu'il y a une coloration particulière dans les recommandations que vous faites ou si c'est pareil à tout point de vue pour vous?

Mme Lévesque (Sylvie): On n'a pas de données précises là-dessus, mais j'imagine que ça doit être les mêmes problèmes, les mêmes obstacles reliés auprès de l'accessibilité. Évidemment, ça dépend toujours du revenu, hein? Ça dépend, le père monoparental, c'est quoi, ses revenus. Puis ils sont en majorité, quand même suite à une rupture, encore plus élevés que la majorité des femmes. Donc, ils vont peut-être mieux s'en sortir.

Le Président (M. Arseneau): Merci beaucoup, Mme Lévesque. Alors, on va aller du côté de la critique de l'opposition officielle en matière d'éducation, la députée de Taillon.

Mme Marois: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, je suis heureuse de vous souhaiter la bienvenue au nom de ma formation politique et vous remercier pour votre contribution aux travaux de notre commission, vous féliciter aussi pour le travail que vous faites inlassablement pour défendre les droits des familles monoparentales et surtout ? je pense que c'est plutôt la philosophie qui vous anime ? pour leur permettre de s'intégrer à la société et de pouvoir participer comme citoyens ou citoyennes à part entière, peu importent les secteurs d'activités où ces personnes se retrouvent. Bon.

D'abord, une première chose. Effectivement, le ministre a l'habitude de rappeler ses engagements électoraux; je pourrais peut-être rappeler un des nôtres, et j'ai compris que le ministre était peut-être sensible à cela. C'était, entre autres, que les pensions alimentaires ne soient plus... les pensions alimentaires versées pour les enfants ne soient plus considérées comme un revenu à l'Aide financière aux études, et j'espère bien que ce sera le cas le plus rapidement possible.

Par ailleurs, vous abordez beaucoup la question de la pauvreté des familles dans votre mémoire, des familles monoparentales en particulier. J'espère aussi qu'on verra enfin le gouvernement adopter son plan de lutte contre la pauvreté, qui est attendu depuis au moins un an. Et je crois que c'est autant de familles à ce moment-là, hommes et femmes et enfants, qui souffrent du fait qu'un certain nombre de mesures ne sont pas en place pour leur venir en aide.

Je vais maintenant aborder une question plus précise que vous soulignez dans votre mémoire. Bon. Vous indiquez que... À la page 3, 4, là, du mémoire, la dernière phrase à la page 3 et ensuite à la page 4, vous rappelez le fait que le nombre de bénéficiaires d'une aide financière aux études chefs de familles monoparentales était moindre en 2001-2002 qu'elle ne l'avait été en 1997-1998. Plus loin, vous faites référence au programme d'aide et de support aux chefs de familles qui voulaient retourner à des études postsecondaires mais en continuant de bénéficier de la sécurité du revenu, de l'aide sociale. Je me souviens de ça parce qu'on les avait travaillés ensemble, mais il y a un long moment. Et là, bon, vous déplorez le fait qu'il ait été abandonné, ce programme-là. Est-ce que ça pourrait expliquer le fait qu'il y ait une baisse du nombre de demandes à l'Aide financière aux études ou c'est parce que les critères de l'Aide financière aux études sont moins intéressants pour les familles monoparentales et donc ça explique la réduction du nombre qui en bénéficie?

Le Président (M. Arseneau): Mme Desjardins.

Mme Desjardins (Lorraine): Oui, O.K. Nous, on pense que... En tout cas, on suppose, c'est sûr qu'on n'a pas de preuve béton, là, mais on suppose fortement que, s'il y a une baisse importante comme celle-là de bénéficiaires monoparentaux au Programme de prêts et bourses, c'est parce que les difficultés sont plus importantes qu'elles ne l'étaient. Maintenant, le REPS, le programme auquel vous faites référence, si je me souviens bien, il était plus du recours de l'aide sociale que des prêts et bourses.

Mme Marois: Oui, c'est ça.

Mme Desjardins (Lorraine): Il y avait un problème majeur avec le REPS, c'est qu'il avait une durée de deux ans.

Mme Marois: Oui, c'est ça.

Mme Desjardins (Lorraine): Alors, après deux ans, même... fini pas fini, diplômé pas diplômé, tu devais changer de mode. Donc, tu te retrouvais aux prêts et bourses et, étant donné que tu avais été soutenu... Le programme soutenait quand même mieux... Le REPS soutenait quand même mieux au niveau financier les besoins particuliers parce qu'il était conçu pour les responsables de familles monoparentales, il soutenait mieux financièrement les étudiants que les prêts et bourses. Donc, évidemment il y avait comme une espèce de...

Le Président (M. Arseneau): Peut-être, pour les gens qui nous écoutent, expliquer le REPS, en quoi ça consistait là, parce que tout le monde n'est pas nécessairement familier avec...

Mme Desjardins (Lorraine): Comment ça s'appelait? Le Retour aux études postsecondaires, REPS.

Mme Marois: En fait, c'était essentiellement...

Une voix: ...

Mme Marois: C'est ça. On permettait aux gens de demeurer à l'aide sociale, à la sécurité du revenu, et de pouvoir retourner aux études à plein temps.

Mme Desjardins (Lorraine): Et là on couvrait les frais de garde complets. On donnait aussi une allocation...

Mme Marois: Transport.

Mme Desjardins (Lorraine): Transport.

Mme Marois: Aide pédagogique.

Mme Desjardins (Lorraine): C'est ça. C'était vraiment...

Le Président (M. Arseneau): Mais c'était juste pour une période déterminée.

Mme Marois: Deux ans.

Le Président (M. Arseneau): C'était pour deux ans.

Mme Desjardins (Lorraine): Ça durait deux ans. Après deux ans, même si on n'avait pas obtenu notre diplomation, c'était terminé. Et évidemment, même dans un programme du niveau collégial, quand on est responsable de famille monoparentale, il y a de fortes chances que notre programme déborde du deux ans prescrit, du délai prescrit, même chose à l'université. Donc, beaucoup de femmes, même la majorité des femmes, ou d'hommes parce qu'il y avait aussi des hommes, qui étaient sur ce programme-là, avaient de la difficulté à obtenir leur diplomation. D'ailleurs, c'était un des arguments qui a été invoqué pour abandonner le programme, le faible taux de diplomation, mais c'est parce qu'ils n'avaient pas le temps de se rendre.

n(12 h 10)n

Mme Marois: C'est ça. Mais est-ce que, dans cette perspective-là, ce ne serait pas intéressant d'envisager la possibilité d'un programme qui ferait une transition du même ordre, mais qui ferait une transition vers l'aide financière aux études? Je vous pose la question parce qu'il y a eu quand même un bon nombre de personnes qui s'étaient prévalues de ce programme.

Le Président (M. Arseneau): Mme Lévesque.

Mme Lévesque (Sylvie): Bien, comme dit Lorraine, c'est qu'un des problèmes, c'était aussi la durée, ce n'était pas assez long. Parce que justement la situation, comme Marie-Paule décrivait tantôt, tout ça, qui font... Bon, quand tu as des enfants, donc il y a des périodes, comment je dirais, d'arrêt où tu ne peux pas nécessairement faire tes études comme un étudiant qui n'a pas d'enfants. Donc, il y a des débuts, tu arrêtes à un moment donné, tu recontinues, et tout ça. Donc, le fait... Même avec un deux ans, c'était insuffisant. C'est sûr que ça occasionne des coûts importants pour le gouvernement, sauf qu'il faut que ce soit à plus long terme, parce que... Ça pourrait être intéressant, mais il faudrait que ce soit sur des périodes plus longues pour justement permettre à ces gens-là de pouvoir plus à long terme arriver à quelque chose d'intéressant. Parce que c'est sûr que sur le coup, c'est un investissement à long terme, mais après ça la personne se retrouve avec une job qui est plus intéressante, peut payer des impôts puis, bon, etc. Ça fait que... Donc...

Mme Marois: Est-ce que vous pensez que d'accompagner ces chefs de familles monoparentales jusqu'à l'obtention d'un diplôme d'études universitaires pourrait être une avenue à explorer?

Mme Desjardins (Lorraine): Ça dépend pour qui.

Mme Lévesque (Sylvie): Pas juste à l'aide sociale non plus.

Mme Desjardins (Lorraine): Pour les personnes qui sont à l'aide sociale, probablement que ce serait intéressant, mais ce n'est pas la totalité des parents étudiants, là, qui ont vécu ce cheminement-là ou ce parcours-là. Donc, il ne faudrait pas négliger les changements qu'on demande aux prêts et bourses pour...

Mme Marois: Ne vous inquiétez pas, je les aborde.

Mme Desjardins (Lorraine): D'accord.

Mme Marois: Bon, d'abord, sur ça justement, vous faites référence au seuil de contribution parentale et vous suggérez de le hausser. J'aimerais vous entendre si vous avez fait une analyse de ça, si vous avez évalué un seuil auquel on devrait le hausser et qui serait plus près d'une réponse aux besoins et qui vous apparaîtrait convenir à la réalité des chefs de familles monoparentales.

Le Président (M. Arseneau): Mme Desjardins, peut-être.

Mme Desjardins (Lorraine): Oui. Alors, présentement on n'a pas fait une fouille poussée, on n'a pas chiffré cette chose-là, c'est bien évident. Ce qui est présent... Présentement, à partir de 44 000 $ par année, un parent doit contribuer, est tenu de contribuer. Puis le seuil est de... Le parent doit contribuer à 6 480 $, si je ne m'abuse, 6 840 $ ? j'avais inversé les chiffres ? par année pour son enfant qui va aux études.

Ce qu'il ne faut pas oublier, c'est que... Bon, on n'a pas vraiment de seuil, là, on ne peut pas vous donner un chiffre. Simplement, je reprendrais peut-être le petit bout dans le mémoire du FEUQ qui était très intéressant à ce propos-là, il disait que 80 %... 85 % des jeunes issus de familles gagnant 80 000 $ et plus étaient aux études universitaires, alors que 50 % des étudiants issus de familles... qui viennent de familles dont le revenu annuel est de 55 000 $ et moins... Donc, on voit, là, que la fréquentation universitaire est différente entre le 55 000 $ et le 85 000 $... le 80 000 $ et plus. Vous dire le seuil exact, là, on n'a pas vraiment établi ça, mais c'est une préoccupation.

Mme Marois: C'est une barrière importante.

Mme Desjardins (Lorraine): C'est une barrière importante.

Mme Marois: D'accord. Bon, est-ce que...

Le Président (M. Arseneau): Mme la députée de Taillon, on pourrait aller du côté...

Mme Marois: Certainement. L'alternance.

Le Président (M. Arseneau): Juste pour l'alternance, tel que nos règles le prévoient. M. le ministre de l'Éducation.

M. Reid: M. le Président, je voudrais parler un peu de régions, mais, juste avant peut-être, c'est important de souligner que cette question des pensions alimentaires, ce n'est pas probablement quelque chose qui se fait, disons, dans quelques secondes. Et l'étude se fait actuellement, et, je vous assure, avec célérité. Ça explique peut-être pourquoi aussi cette complexité. Le gouvernement, même si la question était résolue en 1997 au niveau du ministère du Revenu, le gouvernement précédent a quand même mis cinq, six ans, ou cinq ans ou six ans, avant d'en faire, à la veille d'une élection, je dois le dire, un engagement électoral. Nous allons quand même mettre les quelques mois qu'il faut pour bien étudier la question et trouver des fonds et nous allons tenter de répondre à cette question dans les meilleurs délais.

Ma question sur les régions, j'y reviens tout de suite: est-ce que la situation que vous nous décrivez... Parce que, vous savez, au courant de la commission parlementaire, nous avons eu souvent l'occasion de faire des distinctions entre des recommandations qui nous étaient faites ou des situations qui nous étaient décrites selon qu'elles se trouvaient en région, ou dans des universités qui étaient en région, hors de Québec et Montréal, ou selon qu'elles se trouvaient dans la région métropolitaine ou la région de la Capitale-Nationale. Est-ce que vous avez ce genre de distinction à faire également? Est-ce que la situation ou les situations que vous décrivez et les recommandations que vous faites peuvent varier selon qu'on se retrouve dans une région, disons, qui n'est pas la région métropolitaine ou la région de la Capitale-Nationale ou selon si c'est une région de ce type-là?

Le Président (M. Arseneau): Mme Lévesque.

Mme Lévesque (Sylvie): Moi, ce que je dirais, c'est que je ne pense pas qu'il y a de distinction. La différence ça va être plus au niveau des coûts et de l'accessibilité, dans le sens que, par exemple, si on prend à Montréal où, en tout cas, il y a une plus grande facilité de transport, par exemple, transport en commun, pour la majorité des gens. Si on prend en région, pour une famille monoparentale, bon, évidemment tu es obligé d'avoir une voiture, donc c'est des coûts que tu n'as pas quand tu es en région urbaine. Si tu veux aller à l'université aussi, c'est plus loin, donc il faut en tenir compte. Il y a les services de garde qui sont moins développés en région qu'à Montréal. Donc, c'est dans ce sens-là qu'il y a des différences, je dirais, au niveau des conditions de vie. Mais je pense qu'elles ne sont pas différentes de l'ensemble des citoyens non plus, mais qui peuvent avoir des particularités, parce que tu es monoparental, tu as des besoins spécifiques.

Mais, nous, je pense que les recommandations s'appliquent pour l'ensemble du Québec, parce qu'on est un organisme national, donc l'ensemble de nos membres sont aussi dans les différentes régions du Québec. Donc, dans ce sens-là, ça pourrait être les mêmes affaires, mais ce serait plus au niveau des coûts des frais de subsistance qui pourraient être différents. Mais, si on bonifie de façon substantielle, je pense que ça peut aider aussi l'ensemble des familles, qu'elles soient en Abitibi ou qu'elles soient sur la Côte-Nord.

Mais, comme je disais, ça dépend des ressources aussi disponibles. C'est sûr que, si, par exemple, il faut que tu ailles à l'université à Québec, par exemple, tu es dans la région du Bas-Saint-Laurent, bien là c'est sûr qu'il y a des conditions différentes. Si tu es monoparental puis, mettons, tu as une garde partagée... Bon, tu sais, il y a toutes ces situations-là qui peuvent être différentes, que d'autres étudiants n'ont pas, par exemple. Tu ne peux pas nécessairement aller dans un campus, être là tout le temps, mettons, hébergé à Québec alors que ta famille est ailleurs. Donc, c'est des situations comme celles-là, je pense, qui sont différentes, là.

M. Reid: Mais est-ce qu'on peut conclure de ce que vous dites, surtout la première partie de votre intervention, que les problèmes sont un peu plus aigus dans un environnement régional hors des régions de Québec, Montréal?

Mme Lévesque (Sylvie): Bien, je pense que oui, dans le sens que...

M. Reid: Aigus sur le plan financier ou aigus sur le plan des...

Mme Lévesque (Sylvie): En termes de... Bien, peut-être que le tissu est social est mieux parce que les gens qui sont en région urbaine évidemment sont plus isolés puis, bon, ils fonctionnent pas mal plus tout seuls, et tout ça, alors que la différence, c'est que les gens en région, bon, t'as ta famille qui peut s'occuper de ton enfant peut-être plus, le tissu social est peut-être plus présent. Sauf que, quand tu rentres au niveau collégial, universitaire, bien là il faut que tu t'expatries, t'es en région éloignée souvent, ça dépend où tu veux aller. Donc, c'est là peut-être que ça cause problème. Mais je ne dirais pas nécessairement que c'est pire, mais disons que c'est différent.

Et, nous, on avait fait une étude en 1993-1995 sur les conditions de vie des familles monoparentales en région, puis effectivement il y a des différences, puis je pense qu'il faut les noter. Mais par contre il ne faudrait pas, à mon point de vue, faire des écarts parce qu'on est dans une région puis on est à Montréal. Il y a aussi de la pauvreté à Montréal, puis il y a de l'isolement aussi. Donc, si on prend les besoins et les frais, je pense qu'il faudrait à ce moment-là que ce soit égal d'une région à l'autre, mais peut-être tenir compte de certaines conditions spécifiques, disons. Je ne sais pas si je réponds, là, mais...

M. Reid: Oui, oui, ça répond bien à ma question. Merci.

Le Président (M. Arseneau): Oui. Mme la députée de Maskinongé.

Mme Gaudet: Merci, M. le Président. Alors, vous savez, on a reçu ici les représentants de la Télé-université, qui nous ont parlé de leur méthode pédagogique, qui est une approche différente, là, de l'université traditionnelle, en ce sens que les cours peuvent être donnés soit à la maison et concilier davantage études, famille. Alors, moi, j'aimerais vous entendre sur cette approche universitaire, cette nouvelle façon de faire et aussi d'autres façons de faire, là, qui peuvent ressembler à des études par la téléconférence. Et qu'est-ce que vous en pensez? Est-ce que vous avez exploré ces avenues? Est-ce que vous êtes des utilisatrices ou des utilisateurs de ces nouvelles approches pédagogiques?

Mme Lévesque (Sylvie): Ce que je pourrais dire, c'est que personnellement, ce n'est pas une nouvelle approche parce que, dans le temps, moi, même si j'ai dépassé l'âge de l'université pour l'instant ? malgré que je peux y retourner, on peut y retourner plus longtemps ? j'ai déjà utilisé Télé-université, je n'avais pas d'enfants à ce moment-là et j'ai abandonné. Alors, ça n'a pas marché pour moi, ce système-là. Je n'avais pas d'enfants pourtant, là, mais disons que ça ne correspondait pas à mes besoins. Donc, je ne suis pas sûre que c'est une nouvelle approche parce que ça date de longtemps. Peut-être que c'est une nouvelle approche pour les familles, mais en tout cas je sais que ça fait longtemps que ça existe. Mais, du côté des familles monoparentales, je ne sais pas si c'est quelque chose qui a été déjà... On n'a pas fait vraiment... Je ne sais pas si Marie-Paule, tu connais ou si...

Le Président (M. Arseneau): Mme Katabarwa, c'est ça?

n(12 h 20)n

Mme Katabarwa (Marie-Paule): Oui. Moi, j'avais essayé, mais en tout cas ça ne donne rien. Pourquoi? Parce que, quand on est une mère monoparentale, on a tellement beaucoup de responsabilités à la maison qu'il y a toujours quelque chose à faire. Donc, tu te dis que tu vas étudier, mais il y a toujours quelque chose à faire. Il faut préparer le souper, il y a le linge, il y a les bains, il y a beaucoup de choses à faire que les heures finissent, tu n'as même pas étudié. Tu empiles, tu empiles, les examens arrivent. Quand les examens sont là, l'enfant a peut-être la fièvre, puis tu rates. En tout cas, moi, j'ai essayé.

Mais je trouve que c'est important de sortir de chez soi, d'aller voir les autres étudiants. C'est stimulant. Tu es dans un cadre où tu es avec des étudiants et des professeurs et tu travailles, quoi. Mais, à la maison, il y a toujours quelque chose à faire, donc ce n'est pas... En tout cas, dans mon cas, ça ne marchait pas.

Le Président (M. Arseneau): Mme la députée de Maskinongé, peut-être qu'on pourrait dire aussi que, dans certaines régions, les nouvelles technologies sont encore assez compliquées.

Mme Gaudet: Peut-être, peut-être en Gaspésie, M. le Président.

Le Président (M. Arseneau): Pas toujours accessibles.

Mme Gaudet: Et pas toujours accessibles.

Le Président (M. Arseneau): Alors, il reste encore quelques minutes, je crois, du côté gouvernemental.

Mme Gaudet: Bien, moi, j'aimerais peut-être vous entendre sur... Vous avez parlé des gels de frais de scolarité, et on a entendu beaucoup de groupes qui ont plaidé en faveur, là, d'un financement supérieur des universités entre autres, de façon plus particulière. Est-ce que vous avez des idées comment on pourrait combler ce sous-financement, qui est quand même important, là, qui nous a été mentionné? On a parlé du partenariat public-privé, on a parlé de différentes formes. Je ne sais pas si vous vous êtes attardés sur des façons différentes de financer les universités qui sont en manque important de financement.

Mme Lévesque (Sylvie): Il faudrait peut-être contrer les coupures qu'il y a depuis des années, là, peut-être que ça aiderait. On n'a pas vraiment, de notre côté, touché ces volets-là, mais c'est sûr que, comme fédération, on lutte sur plusieurs dossiers pour qu'il y ait plus de programmes sociaux.

Alors donc, on est plus du côté pour dire qu'il faudrait davantage investir dans le public, que ce soit à l'université, aussi au niveau secondaire. Moi, j'ai des jeunes enfants au secondaire puis disons qu'il y aurait beaucoup d'investissements à faire, au public en particulier. Et, si on finançait moins le privé, peut-être qu'on pourrait permettre d'avoir des meilleurs services au public. En tout cas.

Donc, dans ce sens-là, je pense que... On n'a pas fait de travail de notre côté, mais, à notre point de vue, je pense que ce n'est pas... on devrait davantage investir, comme société, par nos impôts, dans le système public d'éducation, à tous les paliers, à mon point de vue.

Mme Gaudet: Merci.

Le Président (M. Arseneau): On pourrait aborder peut-être le dernier bloc, et je demanderais la collaboration de tout le monde. Je sais qu'il y a au moins trois questions encore du côté de l'opposition, alors je cède la parole au député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Ma question, ce n'est pas une question, c'est peut-être une recommandation que je fais au ministre, parce que je vois les femmes monoparentales puis, avec le problème qu'on a présentement au Québec avec la démographie, je me dis qu'il faudrait mettre tout en oeuvre pour supporter ces femmes ou ces hommes monoparentals là qui acceptent d'avoir des enfants. Quand on sait qu'on sort de l'université entre 25 et 30 ans, qu'ils veulent faire des enfants pour régler un problème de démographie au Québec, même si on irait chercher l'argent dans un budget de, je ne sais pas, moi, d'immigration, je pense que ce serait peut-être le meilleur investissement que la province ne pourrait pas faire pour l'avenir. Alors, c'est une recommandation que je fais au ministre.

Le Président (M. Arseneau): Alors, c'était un commentaire. Est-ce que ça appelle d'autres commentaires? Alors, Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Le ministre faisait des remarques sur les engagements que nous avions pris. Disons qu'on n'a pas beaucoup de leçons à recevoir, puisque nous ne les avons pas reniés, nous, nos engagements, nous les avons respectés.

Je vais maintenant venir à une question qui a été un peu abordée avec vous et sur laquelle j'aimerais avoir un éclairage peut-être un peu plus complet de votre part. Vous suggérez d'étendre la couverture des frais de garde pour permettre une couverture plus complète, puis reconnaître, là, que les besoins sont particuliers selon qu'on doit étudier le soir, selon qu'on a même des cours le soir. J'imagine que ça doit être le cas de plusieurs personnes, entre autres qui sont soit dans des retours aux études, ou dans les études en formation continue, ou à temps partiel. Est-ce que vous avez identifié un montant que cela pourra représenter par mois, ou par semaine, ou globalement pour répondre aux besoins que vous nous avez indiqués? Et est-ce qu'une façon de répondre à cela, ce ne serait pas, entre autres, par les dérogations, par l'utilisation du processus de dérogation, là, qui permet de faire reconnaître certains besoins que l'Aide financière ne reconnaîtrait pas dans ses règlements plus officiels?

Mme Desjardins (Lorraine): Évidemment, c'est difficile de chiffrer ce besoin-là parce qu'il est très variable d'une personne à l'autre, d'une situation à l'autre. Pour certains, ça va être un besoin de garde ponctuel, par exemple trois ou quatre fois par mois, pour d'autres, ça va être vraiment régulier. Il y a des factures de frais de garde qui peuvent s'élever jusqu'à 600 $ par mois, facilement. D'ailleurs, une de nos accompagnatrices nous disait ça tout à l'heure. Donc, c'est difficile de chiffrer ce que ça peut représenter, là. On aimerait bien vous donner un chiffre, là, pour savoir combien ça vaut dans le budget, mais on ne peut pas vous le faire.

La deuxième partie de votre question, rappelez-moi, c'était...

Mme Marois: Est-ce que le régime d'aide financière aux études, qui prévoit un processus de dérogation pourrait...

Mme Desjardins (Lorraine): Dérogatoire, oui. On a été... C'est-à-dire, les familles monoparentales, les femmes monoparentales ou les responsables de familles monoparentales ? c'est toujours difficile d'éviter la féminisation, là ? sont un peu allergiques à la dérogation parce qu'ils ont été obligés d'y faire appel énormément à cause de la pension alimentaire. Alors, une des raisons pour laquelle on voulait régler le... C'est-à-dire que, même en processus dérogatoire, ils n'arrivaient pas à récupérer l'entièreté du montant de pension alimentaire.

Mais, imaginez, avec le portrait que Marie-Paule vous a fait tout à l'heure de ce que ça représente d'être aux études, d'être parent, d'avoir des problèmes financiers et de faire tout le processus de dérogation, d'envoyer les lettres aux députés, de rencontrer l'Aide financière... Alors, si ça pouvait être fait simplement avec le calcul de situation réelle: J'ai un cours tel soir... C'est facile à prouver. J'ai un cours tel soir, tous les soirs, j'ai besoin de tant pour faire garder mon enfant. De la même façon que n'importe quel autre frais, le loyer, et tout ça, là, le transport.

Mme Marois: ...reconnu. Ma collègue?

Le Président (M. Arseneau): Oui. Est-ce qu'il y a d'autres... Je sais qu'il y a la députée de Champlain qui aurait une question. Le temps commence à nous glisser des mains.

Mme Champagne: Une petite question. Alors, bonjour à vous trois. Écoutez, concernant les besoins financiers, que ce soit au niveau des familles monoparentales, hommes ou femmes, parce que, effectivement, il y a quelques hommes, que ce soit au niveau des étudiants libres qui n'ont pas d'enfants, pas de conjoint, qui dépendent un peu encore de leurs parents, il y a un besoin financier évident, une réalité, là. La reconnaissance des besoins de subsistance, on n'est pas rendu en 2004, on est encore accotés un petit peu avant. Ça, je pense c'est un constat qu'on peut faire après la rencontre des nombreux groupes qu'on a vus, là. C'est tous le même message.

Mais, dans les circonstances actuelles, il y a une autre donne. À partir du moment donné où tu as accès à un prêt ? tu as accès à des bourses mais davantage à un prêt ? il faut qu'un jour tu le remettes. Il y avait le rapport Montmarquette... Et, même si on augmentait les prêts, un jour il faut que tu remettes quand même. Le rapport Montmarquette permettait d'étaler et de récupérer un 24 mois, là, quatre fois six mois, pour avoir un paiement différé. Tu as accès à ça; c'est une possibilité qui avantage les étudiants. Vous demandez que soit prolongé ce délai-là. En quoi ce serait avantageux? La dette demeure. Il y a d'autres possibilités également au niveau de la fiscalité. J'aimerais vous entendre sur votre façon de voir sur les paiements différés.

Mme Desjardins (Lorraine): Le problème du paiement différé ou en tout cas de la durée actuelle, c'est parce que c'est assez courant. C'est 24 mois. Bon. On sait que souvent une situation familiale comme celle-là, on peut être dans... il peut y avoir des impondérables. On peut avoir un emploi, un enfant tombe malade, on perd son... Il y a beaucoup d'impondérables. Donc, ce qu'on suggérait, c'était de l'allonger un petit peu.

C'est sûr qu'on ne peut pas faire ça indéfiniment, il faut finir par le remettre, il faut finir par remettre la dette en bout de ligne. Évidemment, dans un monde idéal, l'endettement est minimal. On a moins de dettes, donc c'est plus facile probablement de la remettre au bout de tout ça. Mais c'est juste permettre de respirer un petit peu plus là. Ce n'est pas nécessairement en sortant avec le diplôme entre les mains qu'on va pouvoir se trouver un emploi avec... un emploi décent avec un salaire décent. Voulais-tu ajouter quelque chose?

Mme Lévesque (Sylvie): Bien, en fait c'est relié à la condition. Tout est là. C'est pour ça qu'on l'a mis. Si on réussit quand même à augmenter les frais de subsistance puis régler la question justement pour les études, bien, peut-être que ce problème-là va être réglé d'une certaine façon. Donc, nous, on a essayé de trouver des avenues pour... Si, le gouvernement, il fait différents choix qu'il fait, s'il ne fait pas le reste, bien au moins celui-là pourrait permettre à des personnes de l'étaler puis c'est mieux que rien. C'est un peu ça.

Mme Champagne: ...un peu, c'est ça.

Le Président (M. Arseneau): Écoutez, l'horloge de l'Assemblée nationale m'indique qu'il est déjà 12 h 30. Je n'ai pas demandé le consentement pour prolonger les débats parce que je pense qu'on a respecté un peu le temps de chaque côté.

Mmes Desjardins, Katabarwa et Mme Lévesque, je vous remercie beaucoup d'être venues échanger avec les membres de la commission. Ça a été très intéressant.

Je suspends donc nos travaux jusqu'après les affaires courantes de ce jour.

(Suspension de la séance à 12 h 30)

 

(Reprise à 15 h 44)

Le Président (M. Arseneau): Si vous permettez, nous allons reprendre nos travaux. Est-ce que... On a quorum. Alors, nous allons reprendre nos travaux. Et ce que je vous propose, puisque j'avais même parlé avec les gens de la belle région de Chaudière-Appalaches qui sont avec nous de la possibilité qu'on puisse redébuter nos travaux autour de 15 h 45, et si c'était le cas ? c'est ce que je vous propose: qu'on ait à peu près 45 minutes par groupe. Vous pourrez prendre le temps que vous voulez pour faire votre présentation à l'intérieur d'un 20 minutes, disons, et je redistribuerai le temps entre la partie gouvernementale et l'opposition. Et, comme cela, nous pourrons en principe terminer nos travaux à 18 heures, comme prévu.

Alors donc, nous recevons, nous accueillons la Corporation des services universitaires en Chaudière-Appalaches et nous avons M. Roy, Mme Lachance, Marie Garon. Est-ce que... Alors, qui qui va faire la présentation? Je vous demanderais de présenter les gens qui sont avec vous. Vous avez 20 minutes.

Corporation des services universitaires
en Chaudière-Appalaches

M. Roy (André): Oui, M. le Président. Bonjour. Merci de l'accueil que vous nous faites, M. le ministre de l'Éducation, Mmes, MM. membres de la commission.

Je vais vous présenter les gens qui m'accompagnent, de la corporation, alors M. Pierre Lachance, de la région... de la MRC de Montmagny, qui est vice-président du CRD Chaudière-Appalaches et président de la Conférence des préfets Chaudière-Appalaches; Mme Marie Caron, des Centres jeunesse, qui est directrice ressources humaines aux Centres jeunesse, dont les bureaux sont situés à Lévis; M. Lussier, Jacques Lussier, maire de Sainte-Clotilde, dans la région de l'Amiante, la MRC de L'Amiante; et, moi-même, André Roy, de la corporation et également directeur général de la commission scolaire Beauce-Etchemin.

Alors, M. le Président, d'abord vous dire que la corporation est composée de membres de différents... comme vous le voyez, un peu de différents tissus socioéconomiques de notre territoire, et tous les membres ne sont pas là évidemment; on a des gens d'entreprises sur la corporation. Elle a été créée, en 1989, pour corriger le déficit universitaire qu'on connaissait à ce moment-là. Et puis on considérait que c'était un des principaux obstacles au développement de notre région. Alors, on a remarqué, dans les dernières statistiques, qu'on est passés à 9,1 % de notre population qui avait une diplomation universitaire, comparativement à 5,3 % en 1986. Alors, c'est sûr que c'est une augmentation. Cependant, la moyenne provinciale était de 8,6 % en 1986 et elle est devenue de 14 %. Notre écart était de 3,3 %, il est maintenant de 5 %. Finalement, on pourrait dire, si on résumait ça, que la région Chaudière-Appalaches est au niveau du Québec il y a 15, 20 ans en termes de réussite universitaire, de diplomation universitaire.

Alors, on avait prévu à ce moment-là créer... On avait demandé de créer une université à Chaudière-Appalaches. On disait: Les besoins sont énormes à ce niveau-là. Puis, de bonne foi, je pense, après avoir... après s'être fait recommander une étude lors du Sommet socio-économique, on a convenu qu'on le ferait avec les universités, dans le modèle qu'on connaît avec le Centre universitaire des études Appalaches à Saint-Georges, Thetford et Sainte-Marie et le centre de l'Université du Québec à Rimouski, là, qui a un pavillon à Lévis.

Alors, on constate cependant que, même si ce qui a été mis en place a une valeur certaine, ça n'a pas répondu, ou très partiellement répondu, aux besoins de la région, et beaucoup d'objectifs n'ont pas été atteints à ce moment-là. Le Campus de Lévis qui, malgré une bonne clientèle... il a de la difficulté, lui, à mettre en place des programmes qui ne sont pas propres à l'Université du Québec à Rimouski, également des difficultés, je pense, dans les espaces qu'il occupe actuellement, parce que c'est trop limité pour la clientèle qu'il pourrait développer. Quant au Centre universitaire des Appalaches, eh bien, la dénatalité puis les exigences des universités en termes de nombre d'étudiants par groupes-cours bien rendent difficile la formation de groupes à temps plein dans ce secteur de la région.

On a choisi de situer notre intervention évidemment dans le cadre des régions, parce que la récurrence de l'offre des services est un aspect important de développement d'une véritable culture universitaire en région, comme ça l'est ailleurs. Notre approche est également axée sur la contribution des universités. On pense qu'il faut faire les choses avec les universités encore actuellement pour qu'on puisse rejoindre le Québec urbain, tant sur les plans de la scolarisation que les programmes qui sont offerts dans le milieu, pour rendre une plus grande accessibilité.

Si j'ai dit tantôt que notre diplomation universitaire était de 9,1 % en région, quand on va un peu plus loin, qu'on creuse un peu plus loin puis qu'on sort de Lévis, c'est beaucoup plus dramatique. Selon les MRC, la scolarisation est de 6 % à 11 %. Alors, les MRC ont un taux de scolarisation de 6 % à 8 %, à 9 %, c'est de beaucoup inférieur à la moyenne provinciale. Et puis vous le voyez par les taux de fréquentation, de notre document, de la population qui fréquente une université, c'est la même chose, Lévis est au-dessus un peu de la moyenne provinciale, et, dans les autres MRC, bien ça dépasse à peine 10 %. Alors, on a un retard évident de notre région à ce niveau-là. Puis on n'est pas uniques au Québec, je pense qu'il y a plusieurs régions au Québec qui sont comme celles-là. Puis notre mémoire, je vous dirais qu'on ne l'a pas fait juste pour Chaudière-Appalaches, on pense que c'est quelque chose qui est utile pour l'ensemble du Québec, dans les régions où il n'y a pas d'université.

Il faut réviser les conditions d'offre de la formation puis les modèles d'organisation de services si on veut aller plus loin au niveau universitaire dans chacune de nos régions. De façon générale, la formation en région, c'est de la formation hors campus. C'est de la formation évidemment hors campus, mais limitée dans les programmes courts alors puis limitée aussi à quelques heures de soutien pour les étudiants, et par des chargés de cours, ce qui limite évidemment le développement de nos services sur le territoire à l'échelle du Québec.

Je pense qu'il ne faut pas déduire que la formation courte, c'est ça qui est nécessaire pour les régions, parce que, si on regarde ce qui s'est passé au Québec à ce niveau-là, sur 10 ans, il y a 19 000 étudiants de moins qui prennent des formations courtes. Alors, si on fait une stratégie sur cette base-là, on est complètement, là, je pense, en dehors de la track. Il faut s'en aller sur du développement de programmes permanents, des bacs et des maîtrises, je pense, un peu plus sur notre territoire. On a fait des percées à ce niveau-là, autant à Lévis qu'à Saint-Georges, plus à Lévis qu'à Saint-Georges, et il faut reconnaître qu'ils ont apporté quelque chose de positif dans ces régions-là quand ça s'est produit.

n(15 h 50)n

Il y a un manque cependant. Il faut que... ça prend plus de programmes, parce qu'il y a beaucoup de nos jeunes qui s'en vont à l'extérieur du territoire pour étudier, soit à Québec, à Montréal, à Sherbrooke et ailleurs, puis ils ne reviennent pas dans la région. À titre d'exemple, je vous dirais que la commission scolaire Beauce-Etchemin, l'an passé, en 2002, a fait une étude auprès de 1 000 étudiants qui ont terminé, en 1995, chez nous, un diplôme d'études secondaires. On leur a posé, sept ans après, en 2002: Où êtes-vous? Que faites-vous? Et quelle formation avez-vous? Bon. Un certain nombre avaient une formation universitaire, de maîtrise ou de baccalauréat, quelques-uns de doctorat. Et «où êtes-vous?», bien seulement 20 %, de 20 % à 25 % des gens étaient sur notre territoire. Donc, le trois quarts des gens ne reviennent pas dans leur milieu.

C'est majeur, comme situation, là, pour une région comme la nôtre puis pour plusieurs autres régions aussi. Puis on pense que, si on avait offert le choix à ces jeunes-là d'étudier dans leur milieu, dans des domaines spécifiques, bien ils auraient choisi de le faire, de rester sur place, d'autant plus que, pour les parents et pour eux-mêmes, c'est des coûts beaucoup moins dispendieux. Alors, à long terme, ça nous prend un engagement clair et net des universités pour assurer une récurrence de l'offre de formation puis une récurrence de l'offre de formation sur des programmes de base, des programmes de baccalauréat, et autres.

On remarque aussi que les universités exigent le recrutement d'une masse critique d'étudiants avant de s'engager dans un programme. Puis, même quand on atteint cette masse-là, les universités nous disent, en région: Bien, si jamais ça baisse, on ne s'engage pas à le poursuivre, le cours. Comment voulez-vous que des personnes, des jeunes ou des adultes, s'inscrivent dans ces entrées-là si on n'a pas une garantie qu'on va donner le cours là? Et puis je pense qu'avec la répartition actuelle des pouvoirs de décision, les centres, ils ne peuvent pas offrir ça. Puis c'est important qu'on puisse offrir...

La même chose que quand les gens... les agents de recrutement viennent dans nos cégeps, ils vont dire aux étudiants: Bien, on te garantit qu'il va partir, le cours. Bien, nous autres aussi, il faut garantir que le cours va partir, parce qu'on a des gens qui laissent tomber leurs projets de formation universitaire quand ces choses se produisent. Ils ne se déplacent pas, ils ne vont pas à Québec. Puis on a eu des exemples où des cours ont été annulés, puis il y avait même une vingtaine d'étudiants, et puis l'université nous disait, l'Université Laval entre autres, nous disait: Ils vont venir sur le campus. Bien, ceux qui ont continué, il n'y en a pas un qui est allé sur le campus de Laval. Donc, l'université n'a pas été regagnante, les étudiants n'ont pas été regagnants, puis la région n'a pas été regagnante là-dedans.

Dans cette perspective-là, on veut qu'on accorde aux responsables régionaux les ressources de soutenir le démarrage de programmes prioritaires. Et puis, avec la création d'un fonds spécial, comme le proposait le Conseil supérieur de l'éducation il y a quelque temps, fonds qui serait géré localement, pour garantir aux candidats la poursuite du programme évidemment et également rassurer les universités quant à la viabilité financière de le faire, ça pourrait être une des façons de s'aider là-dedans. Je dirais que le ministère de l'Éducation a lui-même reconnu l'existence des coûts additionnels quand les interventions des universités se font en région, puisqu'il s'est engagé, au rendez-vous régional des régions, il y a quelque temps, à bonifier ce paramètre dans la formule de financement des universités. Je ne peux pas dire si ça a été fait actuellement, je ne le crois pas.

Alors, on cherche à imposer en milieu rural actuellement des normes administratives, donc conçues comme... Elles sont conçues pour les grands campus sur les grands centres. Alors, on ne peut pas... C'est sûr que ça ne peut pas fonctionner longtemps. Même si on comprend que les universités cherchent à se donner des règles pour assurer la rentabilité de leur fonctionnement, on comprend mal qu'on importe les mêmes règles dans les milieux régionaux. Trop souvent, on a vu des cours de 18, 20 étudiants et plus être annulés. Puis des fois ce n'est pas parce qu'il n'y avait pas de... les gens n'avaient pas la volonté de le faire, mais les enseignants, eux, ne voulaient pas venir en région. En passant, je dirais que le pouvoir d'autonomie départementale ne devrait pas aller jusque-là ? je ferme la parenthèse.

Donc, les universités... ou l'université se contente de répondre aux besoins qui sont faciles à desservir puis qui sont rentables. Puis une politique fondée sur la rentabilité immédiate ne peut suffire à corriger le déficit de formation en région, ça, c'est évident. Si la formation universitaire de la région est fondée sur ce critère, il n'y a pas d'avenir pour la scolarisation universitaire en région, on n'en sort pas, et donc pas d'avenir pour les régions elles-mêmes, parce que l'université est un élément essentiel de développement régional, croit-on. Il faut donc revoir ces normes de formation de groupes.

Puis, tant que le mode de financement ne tiendra pas compte aussi des particularités démographiques et de la dispersion géographique, les régions vont avoir des problèmes. Alors, il faut qu'on tienne en compte ces aspects-là. Et enfin, dans ce secteur-là, nos centres universitaires, nos deux centres universitaires doivent avoir une plus grande autonomie de gestion et financière pour être capables de gérer des cours de formation en fonction de la réalité propre au milieu. Puis un plus grand pouvoir de décision est aussi requis pour l'élargissement des programmes offerts. Un bel exemple: CIMIC, par exemple, on a travaillé ensemble, les trois ordres d'enseignement, puis on s'est donné des choses particulières, des règles particulières avec les entreprises. Ce qu'on veut faire aussi, il faudrait le faire en lien avec les entreprises, parce que le marché du travail chez nous est composé principalement d'entreprises industrielles et manufacturières, puis c'est à ce niveau-là qu'il faut répondre en bonne partie aux besoins du milieu.

À l'origine, en 1990, de notre projet, on envisageait d'attirer chez nous des étudiants des autres régions en conservant des programmes spécifiques dans des domaines associés à la gestion, l'ingénierie des PME autant qu'au commerce international. On avait prévu également la recherche et le développement qui porteraient sur les problématiques reliées au tissu industriel de notre milieu. Ça ne s'est malheureusement pas produit. L'expérience des 15 dernières années a démontré que les services actuellement conçus empêchent le développement de programmes originaux exclusifs aux régions.

Tant que les universités conserveront le monopole de l'offre des programmes, qu'elles seront les seules entités à être reconnues aux fins de financement et qu'elles retiendront leurs corps professoraux sur les campus, rien ne va les convaincre de développer en région. L'histoire... On ne peut pas dire: On va faire des ententes. On en a fait souvent, des ententes.

Puis je vous dirais en passant que je salue le travail des directeurs des centres, des directeurs généraux des centres, parce que... avec fierté. Moi, je dis que je suis fier quand on dit: Les Beaucerons, les Jarrets noirs. Moi, ça ne m'insulte pas, je suis fier de ça parce que c'est signe de travailleurs puis de gens qui vont de l'avant. Et je regarde les directeurs de centre, ils n'ont pas les jarrets noirs, ils ont les genoux verts parce qu'ils se promènent à genoux sur les gazons des universités pour avoir des programmes puis pour demander des choses. Il faut que ça cesse.

Alors, notre région a fait des compromis. Bien sûr, la conception d'une université comme on le voyait au point de départ... mais on n'a pas renoncé à renforcer l'autonomie des centres de services et à faire en sorte qu'ils soient davantage en mesure de planifier l'offre des programmes qui pourraient leur être propres. Il ne restera que l'alternative d'une université autonome si on ne peut pas faire ça, puisque, à ce jour, il faut reconnaître que les grandes décisions d'orientation comme les décisions administratives relèvent des décideurs en dehors de la région.

Puis on n'est jamais si bien servi que par soi-même, puis je pense que, si on veut se développer en région, il faut avoir le contrôle d'une partie de ce qu'on veut faire chez nous et non pas le voisin. C'est dans cette perspective qu'on demande au ministère de l'Éducation de remettre en question le monopole, les monopoles actuels puis de repenser les modèles d'organisation dans les régions en accordant aux représentants du milieu un plus grand pouvoir: un plus grand pouvoir en regard du développement de services aux étudiants, de l'offre de programmes, de création de programmes originaux et de recherche-développement propre aux problématiques de notre région.

Puis le modèle qu'on propose, c'est d'instaurer des centres d'études universitaires à statut particulier associés aux différentes universités ou à certaines universités. Je pense qu'on a accepté des compromis en 1990, mais la région ne veut plus accepter de compromis à ce niveau-là. Parce que, quand on se promène dans nos localités, sur la 1re avenue de nos localités, on ne voudrait pas se faire dire qu'on a laissé tomber la région au plan universitaire. On veut se faire dire qu'on a fait évoluer la région au plan universitaire.

Alors, le portrait qu'on vient de tracer relève que les services universitaires hors campus sont laissés aux lois du marché. On ne perçoit, de l'action du ministère de l'Éducation, pas une vraie volonté d'étendre les services universitaires dans les régions périphériques. Il ne faut pas, je pense, laisser l'université décider ça toute seule. Même s'il y a une autonomie universitaire, je pense qu'il y a une responsabilité du Québec, une responsabilité régionale qui doit être prise en main par le ministère de l'Éducation pour assister les populations locales en formation universitaire.

Depuis 30 ans, les régions périphériques... le service aux régions périphériques n'a fait l'objet d'aucun examen systématique. Il est important que le ministère de l'Éducation, lui-même, entreprenne une évaluation systématique de la problématique des services d'enseignement universitaire en région. Une telle analyse serait faite en collaboration avec les représentants locaux évidemment pour être capable de mieux cerner la dynamique et comprendre vraiment les besoins de chacun des milieux, qui peuvent être différents. Je pense qu'on n'a pas besoin d'une formule mur à mur mais pour répondre aux besoins de chacun des milieux. On suggère même d'élargir la réflexion à l'ensemble des ordres d'enseignement, compte tenu des partenariats de première importance, à ce niveau-là, qu'on peut faire ensemble ? l'exemple encore du CIMIC. Alors, voilà, M. le Président. Madame...

n(16 heures)n

Mme Caron (Marie): J'ai quatre minutes, donc une minute par recommandation ? parce qu'il y a des gens qui n'étaient pas là au début. Première recommandation qu'on vous fait: des règles de financement qui prévoient, dans les régions, qu'il y ait, des universités, un financement adéquat des fonds régionaux. On vous demande aussi que le ministère de l'Éducation crée, dans les régions non desservies par des universités, des centres d'études universitaires ? on vous donne des bonnes idées ici, après-midi; que le ministère de l'Éducation accorde aux centres d'études universitaires un statut particulier associés; qu'on puisse gérer notre administration, notre offre de cours, nos programmes, l'organisation des services professionnels ? ce n'est pas du papier collé comme dans les ordinateurs, on est une région, on a besoin de nos spécificités pour nos travailleurs et nos futurs travailleurs; que le ministère de l'Éducation mandate les centres d'études universitaires à statut particulier associés: des dispensations de programmes d'études, de la conception, de la mise en oeuvre de programmes spécifiques; que le ministère de l'Éducation procède lui-même à une évaluation systématique de la problématique des services universitaires en région. Un peuple fort, c'est un peuple qui développe sa main-d'oeuvre selon ses besoins. Alors, on vous remercie beaucoup de votre écoute et on est à votre service pour les prochaines minutes.

Le Président (M. Arseneau): Vous avez encore... Mme Caron, vous avez encore quelques minutes si vous voulez, il reste trois minutes, trois grosses minutes, ou bien on peut procéder tout de suite aux échanges.

Mme Caron (Marie): On vous écoute.

Le Président (M. Arseneau): D'accord. Vous êtes généreux en plus d'être très bien structurés. Je me rends compte qu'il y a un bloc de recommandations et j'espère que les gens vont questionner sur... à savoir si toutes les régions sont pareilles. Et peut-être, M. le ministre... je ne veux pas vous indiquer dans quelle direction aller, mais c'est très intéressant. Mais par contre, quand on est dans certaines régions éloignées et qu'on vous regarde, est-ce que les problématiques sont identiques? Est-ce que votre bloc de recommandations s'applique à toutes les régions du Québec? Alors, on va partager le temps qui reste, et je commencerais avec M. le ministre de l'Éducation.

M. Reid: Merci, M. le Président. Je voudrais... Vous remarquez... Tout le monde ici remarquera que cette commission s'intéresse beaucoup aux régions, et à preuve notre président a du mal à se retenir de donner un certain nombre de directions, mais je pense...

Le Président (M. Arseneau): En fait, je ne me retiens pas, M. le ministre.

M. Reid: ...oui, et d'indiquer que, si nous allons passer ensemble un certain nombre d'heures pour parler plus spécifiquement de la région que vous habitez et dans laquelle vous faites évoluer le système d'éducation de multiples façons, c'est aussi évidemment notre intérêt de vous entendre si vous avez quelque commentaire que ce soit qui pourrait être étendu à l'ensemble des régions du Québec qui pourraient avoir des problématiques ou des projets semblables à ceux que vous proposez ici.

Je voudrais commencer d'emblée avec une question très large, mais en même temps qui assez curieusement est très pointue et qui... C'est large parce que ça regroupe également beaucoup de choses que vous avez dites. Quand vous demandez pour la région plus d'autonomie, etc., vous le faites toujours dans le cadre d'un centre d'études qui... il a une existence propre. Mais vous savez sans doute que l'association... la Fédération des collèges, par exemple, a fait certaines propositions, et on en a débattu, nous, ici, à la commission, avec des représentants de corporations de centres d'études, notamment de la Côte-Nord dans deux cas. Et je voudrais vous poser une question un peu similaire.

Quand on commence à parler de développer un centre, de lui donner une autonomie, de lui donner des professeurs, etc., on a l'impression qu'on est en train un peu de développer une petite université. Or, il y a, dans les régions, et il y en a chez vous, une institution d'enseignement supérieur qui s'appelle un cégep, pour lequel il y a un questionnement qui est commencé et pour lequel il y a des idées qui circulent et notamment celle que la Fédération a proposée, c'est-à-dire, pour certains collèges ou... du moins de s'avancer graduellement vers les services universitaires.

Est-ce que, dans un tel contexte, il n'y a pas... Et on a eu des réponses qui étaient effectivement et l'une et l'autre dans ce qu'on a posé comme questions jusqu'à maintenant. Mais est-ce qu'il n'y a pas, dans ce contexte-là, une intégration à faire advenant le cas où les collèges auraient la possibilité de s'avancer un peu plus vers les études universitaires? Il n'y aurait pas une intégration à faire entre les efforts qui sont faits, d'un côté, par un centre d'études et, d'autre part, un établissement qui... moyennant évidemment peut-être des mesures législatives, etc., mais qui aurait une masse critique, qui aurait des infrastructures, qui aurait, à ce moment-là, un certain nombre d'éléments plus caractéristiques d'une université ou du moins pour des services universitaires, alors que vous proposez, d'un autre côté, de le développer comme indépendamment?

Alors, la question, c'est: si on allait dans le sens de la proposition, par exemple, de la Fédération des collèges, est-ce qu'il y aurait encore lieu de faire deux établissements, deux entités différentes dans une même ville, pour une même région, ou alors d'intégrer vraiment avec cet établissement, qui a déjà quand même beaucoup rendu service au Québec, qui s'appelle un collège ou un cégep?

Le Président (M. Arseneau): Avant de vous laisser répondre, M. Roy ou Mme Caron, je voudrais juste, pour le bénéfice des parlementaires, vous signifier qu'en répartissant le temps il y a 14 minutes de chaque côté de la table, donc il resterait du côté gouvernemental à peu près 11 minutes, 10 min 30 s.

M. Roy (André): Oui. À votre question, M. le ministre, je dirais qu'il faut regarder des formules, des formules différentes. On vous dit «un centre universitaire» parce qu'on parlait, là, au niveau universitaire, de centre universitaire à statut particulier, d'avoir... Dans le fond, l'important, c'est d'avoir une reconnaissance légale, au point de vue universitaire, prendre des décisions dans notre milieu sur ce qu'on veut comme programmes de formation. C'est ça qui est important pour nous.

Puis je vous dirais, dans un deuxième temps, que, dans les régions, la nôtre et bien d'autres, on n'a plus les moyens aujourd'hui, Québec ne l'a plus non plus, les régions n'ont plus les moyens, avec les ressources limitées qui leur sont allouées, de se donner deux, trois structures. Il faut rentabiliser les structures d'éducation en région en tout cas, ramasser ça d'une certaine façon pour qu'il y ait des économies d'échelle à ce niveau-là, que chaque... qu'on n'ait pas une vision corporatiste de ça, mais vraiment une vision de services à la communauté, et puis éviter de faire des dépenses en double. Bon. Chaque type d'organisation a son directeur de Service de ressources humaines, son directeur des Ressources matérielles, ta, ta, ta, ta, ta, ta.

Il faut organiser ça autrement, je pense, dans les régions. Puis ce n'est pas obligé d'être la même chose que dans les grands centres, mais je pense qu'on a avantage vraiment à regarder des formules où... J'ai quand même l'exemple du CIMIC où on a dit: On met des choses ensemble puis on fait les choses ensemble; on n'achète pas chacun nos équipements puis on n'achète pas chacun nos affaires. On travaille pour le bien commun de l'ensemble de la communauté.

Le Président (M. Arseneau): M. le ministre.

M. Reid: Merci. Je prends bonne note.

M. Lussier (Jacques): Est-ce que je peux compléter?

Le Président (M. Arseneau): Oui, M. Lussier, s'il vous plaît.

M. Lussier (Jacques): Aussi, cet après-midi, notre message, c'est de vous dire que, depuis 15 ans, le modèle qui a été mis en place ne fonctionne pas. Regardez juste les statistiques qui émergent de l'expérience qu'on a eue: en 15 ans, on a rattrapé le niveau québécois. Ce n'est pas fort, là. Ce n'est pas fort. Et pourquoi? Puis on le sait pourquoi: parce que les argents, les ressources, elles passent par les campus universitaires. Je suis bien placé pour vous en parler, j'en ai fait partie pendant 35 ans. J'ai dirigé des professeurs d'université. J'ai été directeur de programmes, directeur du Département de management. J'ai dirigé le M.B.A. J'étais doyen d'une faculté.

Quels sont les incitatifs qu'un professeur d'université a d'aller travailler en région? Il n'y en a pas. Il n'y en a pas, d'incitatifs. C'est un emmerdement. Il va se sentir obligé d'y aller si on lui promet autre chose. Il n'y en pas, d'incitatifs. Donc, au point de départ, on est mal alignés, si vous voulez, avec les universités telles qu'elles sont. Elles ne sont pas toutes mauvaises, les universités, elles font de bonnes choses. Mais, au niveau de la vocation régionale, je n'y crois pas. J'étais un doyen qui y croyait beaucoup. J'étais à peu près le seul à aller enseigner à Saint-Georges. Mes collègues ne se dérangeaient pas. Ce n'était pas utile, il n'y avait aucun incitatif, on n'était pas forcés à le faire. Pendant ce temps-là, pour prendre encore l'exemple de la Faculté des sciences de l'administration, on a construit un pavillon d'un niveau de 16 millions de dollars. Il n'y avait aucun sou qui nous obligeait à aller ouvrir une succursale ou une antenne au CIMIC de Saint-Georges. Pourtant, on est en pleines PME, là. Voyez-vous? Ça ne marche pas.

Alors, de deux choses l'une: ou vous dédiez des sommes spécifiquement au développement des programmes universitaires en région, sans les faire passer par les canaux traditionnels des universités, parce qu'elles vont faire du prélèvement normal ? n'oubliez pas que, nous, on finance le PEPS de l'Université Laval dans nos programmes offerts à Saint-Georges, c'est fort, ça, puis c'est normal, c'est dans la logique des choses ? ou on fait cela, ou on s'oriente vers «donnez-nous plus d'autonomie». Est-ce que ça doit aller jusqu'à un corps professoral? Je ne le sais pas trop. Peut-être que, là, on en prend large. Est-ce que ça peut passer probablement par des partenariats avec des cégeps actuels, existants? Probablement.

Inventons des formules, mais rendez-nous un petit peu plus autonomes pour nous permettre d'offrir des programmes de façon plus régulière. C'est anormal que, dans ces programmes-là, depuis des années... Puis j'y ai enseigné, là. On partait des groupes, par exemple avec l'Université Laval, en gestion, des groupes de... L'Université Laval nous disait: O.K., c'est 22 étudiants, minimum. On en recrute 24, on part. Deux trimestre après, ça descend à 21: fini, on n'offre plus le cours. C'est quoi, l'effet que ça a, ça, dans la tête des étudiants, qui partent après ça avec leurs petits paquetons pour aller suivre leurs programmes au HEC ou ailleurs? Ils ne reviennent plus. C'est fini. L'effet de cela est une désertification de nos régions. Ça contribue à cela. Le modèle qui marche bien dans les universités traditionnelles, sur les campus, ne marche pas en région. C'est vrai pour l'université, comme c'est vrai pour les petites écoles.

Le Président (M. Arseneau): Oui, M. le ministre. Ah! il y a le député de Frontenac qui... Enfin, allez-y, M. le député.

M. Lessard: Merci. Alors donc, je veux souhaiter la bienvenue donc, à M. Roy, M. Lachance, Mme Caron et M. Lussier. Donc, étant un député de Chaudière-Appalaches, il me fait plaisir de vous entendre sur la question.

n(16 h 10)n

Je voudrais revenir particulièrement sur cette question d'arrimage, parce que vous avez parlé tantôt que les Beaucerons... Et je comprends que vous vouliez dire aussi que probablement que les gens de Montmagny ou de l'Amiante et de Bellechasse, et de etc., étaient à quatre pattes, les genoux verts, devant les...

Donc, sur l'arrimage, vous avez beaucoup élaboré. Le ministre a d'ailleurs posé la question: Est-ce que ce n'est pas un créneau différent versus les centres d'éducation supérieure que sont... que représentent les collèges en région, qui sont très bien positionnés? Alors, cet arrimage-là nécessaire, alors sans faire des structures supplémentaires... j'aimerais ça que vous essayez de développer un petit peu plus ce statut particulier qui conditionnerait une réussite. Parce que, tantôt, vous avez dit aussi, puis là je termine là-dessus: Les gens ne vont pas à Québec pour se former, mais le constat, c'est qu'ils y vont pour travailler, une fois formés. Alors donc, ce qui veut dire qu'entre l'offre et la demande il y a une disparité, là. Alors donc, je veux revenir donc sur l'arrimage que vous proposez pour qu'il y ait des réalités d'efficacité en région.

Le Président (M. Arseneau): M. Roy.

M. Roy (André): Bien, l'arrimage, dans le fond, ce qu'on dit, c'est: si les étudiants s'inscrivent, qu'ils désirent s'inscrire dans un centre, soit à Lévis ou à Saint-Georges, il y a 35 étudiants qui viennent, et puis, je ne sais pas, ça coûte 5 000 $ par étudiant, puis que le financement vienne au centre, là il y a une négociation, il y a une vraie négociation avec les universités: Nous autres, on a besoin de ça dans notre région, on veut développer ça, on a tant d'argent pour le faire, veux-tu venir, Sherbrooke?, veux-tu venir, Laval? Non, oui, non, non, puis sinon, on va traverser du côté américain.

Le Président (M. Arseneau): Oui. Est-ce que ça répond à votre question, M. le député de Frontenac?

M. Lessard: Ça veut dire que ça n'existe pas, donc c'est un langage unidirectionnel? Est-ce qu'on pourrait dire qu'actuellement c'est du monologue ou du discours?

M. Roy (André): Bien, c'est un monopole. Actuellement, c'est... Puis je dirais qu'à mon expérience les recteurs avec qui on a travaillé puis les vice-recteurs, ces gens-là, ils ont une volonté ferme, mais, quand ça arrive plus bas, c'est là que le bât blesse.

Le Président (M. Arseneau): M. le député de Roberval, je crois, avait une question aussi.

M. Blackburn: Merci, M. le Président. Madame, messieurs. M. Lussier, je trouve votre constat un peu dur, un peu dur, puis je vais vous dire pourquoi. Parce que, moi, de la région d'où je viens, le Saguenay?Lac-Saint-Jean, on a un exemple qui fonctionne et qui donne des services à sa population étudiante, qui est l'Université du Québec à Chicoutimi, en étroite collaboration bien sûr avec un centre hors campus, qui est à Saint-Félicien, à une heure et demie de route, là ? il ne faut pas se conter de peur, c'est quand même assez loin ? mais aussi en faisant participer le collège de Saint-Félicien dans les démarches qu'offre l'Université du Québec à Chicoutimi à la population du Lac.

Dans ce contexte-là, moi, je vous avouerai que j'ai été le premier... j'ai été dans la première cohorte, si on veut, de l'université, parce que la première année s'est donnée à Saint-Félicien, et j'ai eu l'occasion et le privilège de pouvoir rester dans mon coin pour faire ma première année d'université. Et ça se continue depuis ce temps-là, depuis 1992. Ça veut dire que ça fait une douzaine d'années que ça existe et ça fonctionne bien. Et l'université, la mentalité qu'elle a, elle y va dans un souci de satisfaire sa clientèle.

Et c'est pour ça que je me dis qu'à quelque part il y a des exemples de fonctionnement qui donnent, réussissent à donner des bons services à la population sur l'ensemble du territoire. Et, lorsqu'on parle de Chicoutimi, puis je reviens à ce que je vous disais tantôt par rapport à Saint-Félicien, c'est quand même une heure et demie de route, et le fait d'être à Saint-Félicien permet aux gens de Dolbeau, permet aux gens de Saint-Augustin, permet aux gens de Notre-Dame-de-Lorette de pouvoir aller à Saint-Félicien, qui est beaucoup plus près de leurs résidences que de descendre au Saguenay, aller à Chicoutimi.

Alors, j'ai un peu de misère avec ce que vous nous donnez comme exemple: c'est un système qui ne marche pas pantoute depuis 15 ans, et qu'il faut vraiment donner plus d'autonomie, en sachant qu'en tout cas chez nous, de la manière que ça fonctionne, ça a l'air à bien fonctionner. J'en suis la preuve, de la première cohorte qu'il y a eue hors campus pour l'Université du Québec.

Le Président (M. Arseneau): Mme Caron, peut-être une réponse, parce qu'il reste à peu près deux minutes au bloc gouvernemental.

Mme Caron (Marie): Soyez assuré qu'on va regarder en avant, et on veut tisser le tapis à mesure qu'on marche dessus. Ça tient aux acteurs en place. On veut un statut légal pour être capables de s'entretenir avec tous nos acteurs. Puis on dessinera ça ensemble. Mais, pour ça, il faut une reconnaissance de certains acteurs. Parce que, quand je vais m'acheter une voiture, il faut que je l'aie dans la cour. Donc, quand j'offre un programme, il faut que mon prof soit là. Et peut-être que nos cohortes devraient être un peu plus petites en région. C'est toutes des petites choses comme ça qu'on veut discuter ensemble. Et on vous dit qu'avec ce qu'on vous recommande là on va y arriver. Et vous avez raison de nous apporter votre exemple.

Le Président (M. Arseneau): Il reste une minute du côté gouvernemental. M. le ministre.

M. Reid: J'aimerais que vous précisiez un peu, parce que, quand vous dites «un statut légal»... il y a déjà un statut légal qui existe, vous êtes une corporation, etc. Est-ce que c'est en rapport avec ce qu'on lit par ailleurs: «autonomie»? Mais là il va falloir que vous m'expliquiez, parce que, ce qu'on nous a dit dans un autre cas, on nous a dit, à toutes fins pratiques: On voudrait être une microuniversité. Est-ce que c'est ce dont vous parlez? Est-ce que ça ressemble à ça?

M. Roy (André): Dans le fond, l'idée vient un peu de quand on regarde ce que le HEC est par rapport à l'Université de Montréal, c'est une école associée ? il me semble, le nom ? c'est une école associée qui a un financement du ministère de l'Éducation mais qui relève d'une université, qui a une certaine autonomie. Écoute, on ne veut pas être le HEC, là, ce n'est pas dans cet esprit-là, mais on pense que notre région pourrait développer le double, le triple de finissants universitaires si on en avait le pouvoir de décision.

M. Reid: Je vais juste répéter encore ma question initiale par rapport à ça pour qu'on ferme la boucle: est-ce que le cégep, mettons si le cégep allait vers plus de travail universitaire, ne représente pas cette structure-là, qui deviendrait autonome à ce moment-là?

M. Roy (André): Ça dépend des pouvoirs qu'il aura par rapport aux décisions, aux choix de programmes qu'il pourra offrir.

M. Reid: Donc, le cégep, ce n'est pas exclu que ce soit l'aboutissement de ce que vous demandez?

M. Roy (André): Nous autres, écoutez, on dit...

M. Reid: S'il avait des pouvoirs qui vont... comme vous dites tantôt, qui permettent aux gens de la région de prendre des décisions sur ce qui les concerne davantage. C'est un peu le sens de ce que vous dites?

M. Roy (André): Oui, au niveau du baccalauréat, c'est ce qu'on veut dire, le cégep ou toute autre structure qui pourraient dorénavant structurer les régions.

M. Reid: ...mettons, le cégep n'est pas exclu a priori, donc?

M. Roy (André): C'est ça.

M. Reid: Ça va. C'est intéressant parce que, dans d'autres cas, il y a un cas où c'était clair que c'était... le cégep n'était pas exclu, puis, dans l'autre cas, il semblait bien exclu. Donc, je voulais avoir votre position là-dessus. C'est intéressant.

M. Roy (André): ...et non le moyen.

M. Reid: Alors, merci.

Le Président (M. Arseneau): Je pense que vous l'avez, là, M. le ministre.

M. Reid: C'était clair.

Le Président (M. Arseneau): Alors, ça terminerait pour le côté gouvernemental, et je céderais la parole maintenant à la députée de Taillon, porte-parole de l'opposition officielle en matière d'éducation.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Alors, ça me fait plaisir de vous souhaiter la bienvenue à mon tour au nom de ma formation politique et vous remercier pour la qualité de votre présentation. Je vais commencer par la dernière recommandation que vous faites puis je vais revenir ensuite à la question qui a été soulevée par le ministre.

Dans votre dernière recommandation ? je pense que c'est la première fois qu'on la voit, elle n'est pas venue de d'autres mémoires jusqu'à maintenant, à moins que je n'aie pas... ça m'a échappé, là ? on dit: «Que le ministère de l'Éducation procède lui-même à une évaluation systématique de la problématique des services universitaires en région où il n'y a pas d'université.» Vous avez le sentiment que ce n'est pas assez documenté, que votre situation serait comparable à celle de d'autres populations ou d'autres citoyens dans d'autres régions. On vient d'avoir un exemple, là, du Saguenay?Lac-Saint-Jean, où on dit: Il y a un modèle qui s'est développé pour couvrir... pour offrir les services à des populations qui sont assez excentriques par rapport au point central qu'est l'Université du Québec à Chicoutimi. J'aimerais ça vous entendre quant à la finalité de ce que vous recherchez par une telle étude.

Le Président (M. Arseneau): M. Roy.

M. Roy (André): Bien, je vous dirais d'abord que, comme je disais tantôt, en 1990, quand on est allés au Rendez-vous des régions... pas Rendez-vous des régions, là, j'ai oublié le nom, de toute façon, c'était terminé par une étude. Ça fait qu'on s'est dit: On va initier l'étude puis on va dire: On veut être dedans tout de suite en partant ? parce que, des fois, c'est ça qui arrive, hein? Et puis... Mais on pense que l'étude doit être faite par le ministère de l'Éducation, pas par le livreur de services nécessairement, qui est l'université. Il faut qu'il y ait une objectivité là-dedans, puis regarder vraiment ce qui se passe dans les régions, le potentiel des régions, le tissu industriel du milieu, les liens avec la formation d'emploi évidemment et puis... Parce qu'on a la certitude que, chez nous et dans beaucoup de régions au Québec, même chez vous, monsieur du Saguenay, l'offre de service et la diplomation universitaire pourraient être de beaucoup supérieures à celle qu'elle est présentement. Je me suis trompé, je suppose?

Mme Marois: Du Lac-Saint-Jean.

M. Roy (André): Du Lac-Saint-Jean. Véreux! Aïe, tabarouette! Je vous enverrai du sirop d'érable pour ça.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Arseneau): Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Oui. D'accord. Alors, bon, je comprends bien ce que vous souhaitez, puis d'ailleurs vous dites, dans votre mémoire... Vous hésitiez un peu à le recommander, là, mais en même temps c'est très intéressant parce qu'il y a toutes sortes de modèles de développés dans plusieurs régions du Québec avec, dans certains cas, des résultats fort intéressants, dans d'autres, peut-être un petit moins que les espoirs qui avaient été mis au départ, puis, dans d'autres, des projets embryonnaires, mais qui semblent être bien engagés. On a vu des gens, là, entre autres d'Abitibi-Témiscasmingue, la semaine dernière, qui couvrent très largement la région.

Bon. Je veux revenir maintenant sur ce que vous proposez dans les autres recommandations, et là je vais rejoindre un peu les questions du ministre. J'essaie de voir le modèle que ça donnerait dans la perspective où on reconnaîtrait, où on accepterait vos recommandations. La façon dont je le vois, puis je peux peut-être me tromper, c'est que vous voulez être un donneur d'ordre, je simplifie un peu les choses, hein, dans le sens où vous connaissez les besoins de la population, vous dites: Nous voulons retenir chez nous de nos jeunes, qui y demeureront par la suite. Parce que ça a l'air assez... Pour beaucoup de gens qui nous écoutent, ils doivent dire: Bien, Chaudière-Appalaches, c'est à côté de Québec, c'est quoi, cette affaire-là? Mais effectivement les jeunes quittent, et puis on sait fort bien que le dynamisme de la région s'en ressent. Ce n'est pas le cas maintenant, mais on sent cela venir, et ça m'a été souligné à plusieurs reprises.

n(16 h 20)n

Alors donc, vous dites: On connaît nos besoins, on veut que nos jeunes restent là, on veut offrir de la formation continue, on veut faire de la recherche avec les entreprises. Parce que vous recommandez ça aussi. Alors, ce que je comprends, c'est que vous voulez avoir un statut qui vous permettrait ensuite d'aller chercher ces services, ces formations, les équipes de professeurs, ces équipes de recherche dans les autres universités, que ce soit l'Université Laval, que ce soit l'Université du Québec à Rimouski, à la limite que ce soit l'Université de Sherbrooke ou une autre université. Est-ce que c'est un peu ça que vous imaginez comme modèle?

M. Roy (André): Bien, effectivement. Effectivement, c'est exactement, là, le pouvoir ? le pouvoir... le modèle qu'on voudrait développer dans notre région pour que justement, les centres, ils disent: Écoute, on voudrait partir un certificat en génie industriel de la PME. On l'a essayé, ça fait longtemps qu'on l'essaie, puis on ne réussit pas. Mais je vais vous dire que, si le ministère de l'Éducation disait: Vous avez ça, vous avez tant d'étudiants, je vous donne le financement, allez voir avec quelle université vous pouvez le faire maintenant, je suis convaincu qu'ils vont venir. Regardez à Rimouski, en océanographie. Tout le monde, à peu près, bien presque tout le monde dans le monde va à Rimouski, bien j'exagère un peu, là, mais...

Mme Marois: Bien, pas tant que ça, pas tant que ça.

M. Roy (André): ...tu sais, ça a une popularité. Ça a une popularité, là. Mais un créneau spécifique... Puis on est sûrs qu'on est capables de développer des créneaux spécifiques puis que, si les universités le respectent, les gens vont venir chez nous, parce que ce n'est pas si désagréable que ça en Chaudière-Appalaches.

Mme Marois: Au contraire, c'est une région extraordinaire...

M. Roy (André): C'est ça. Exactement.

Mme Marois: ...et tellement belle. Les gens sont tellement accueillants et généreux, je suis d'accord avec vous.

Mais, au-delà de ça, vous suggérez qu'il y ait une création de fonds régionaux spécifiques à l'enseignement universitaire. Imaginons que le point de chute ou le point de départ de cette nouvelle institution, ce soit le cégep ou la table des institutions réunies, parce que j'ai compris, chez vous, qu'il y avait une table interordre, là, où on a le primaire, secondaire, cégep et centre de formation professionnelle et universitaire, mais imaginons, là, que ce serait cette table-là, est-ce que le cégep pourrait à ce moment-là être la base, un peu comme le suggérait le ministre, la base de départ pour la formation et les ententes avec les autres universités?

Le Président (M. Arseneau): M. Roy.

M. Roy (André): Oui. Je pense que oui. On le disait tantôt, ce qui est important, c'est d'avoir un modèle qui marche, un modèle avec lequel on est capables de répondre à nos besoins. C'est une solution, là, qui est envisageable. Puis je pense que l'analyse pourrait nous permettre de voir qu'est-ce que ça donne dans l'ensemble du Québec, une solution comme celle-là, là. Bien, on pourrait s'asseoir puis regarder puis développer des modèles intéressants à partir de ça.

Mme Marois: La création de fonds régionaux spécifiques à l'enseignement universitaire, est-ce que vous le voyez pour d'autres régions aussi?

M. Roy (André): Oui. Bien oui! Je pense qu'il faut soutenir l'ensemble des régions du Québec à ce niveau-là. Avec les minimums que les universités exigent, c'est 35 élèves, 30, 35 élèves pour partir un programme de certificat ou de bac chez nous, je veux dire, on est mieux de mettre la clé dans la porte, là.

Le Président (M. Arseneau): Un complément de réponse peut-être pour M. Lussier, et Mme Caron aussi après.

M. Lussier (Jacques): Très brièvement. Et ce fonds-là nous permettrait aussi de discuter avec les universités présentes pour adapter les programmes de cours davantage en fonction des besoins de PME et industriels que nous avons. Parce que l'enseignement de la gestion, pour prendre ça comme exemple ? c'est un peu ma hache ? ça ne se fait pas de la même façon d'une région à l'autre, dépendamment de ce qu'on vit comme problématique concrètement, sur le terrain, là. Si vous avez affaire à une entreprise de type industriel ou commercial, on ne parle pas de la même chose dans le marketing ou en finance. Alors ça, ça nous permettrait de colorer davantage. On n'est pas pour tout réinventer, c'est sûr. Les programmes, ils sont là, les universités sont là. Mais on serait plus partenaires, on pourrait plus s'asseoir avec eux en disant: Bon, bien, on aimerait ça faire ça comme ça, pouvez-vous nous aider? On a des ressources.

Je vais revenir 30 secondes sur votre cas. La culture des UQ est très différente de celle des universités traditionnelles. Ce serait un long débat, là, mais qui explique peut-être les différences d'expérience. Puis voilà.

Le Président (M. Arseneau): Mais le débat avec le côté gouvernemental est comme terminé en ce qui concerne... on pourra revenir, mais il y a Mme Caron qui veut ajouter un complément de réponse.

Mme Caron (Marie): Écoutez, j'espère que ça ajoute, mais peu importe pour nous qu'on dépende d'une institution déjà existante, qui peut être un collège ou un cégep, l'important, c'est d'assurer un financement par programme, donc un programme universitaire, de prendre la photo sur des groupes peut-être différents des grands centres, une cohorte peut-être de 30 dans une ville, mais qu'elle pourrait être de 18 dans une région. Tenir compte de ces particularités-là, pour nous, c'est bien important, vous le retrouvez dans nos recommandations. Alors, oui, on est prêts à expérimenter n'importe quel modèle, mais on veut vraisemblablement...

Parce qu'on ne fait plus une carrière pour la vie, hein? On a beaucoup de jeunes mamans qui voudraient se recycler vers la trentaine, et on pense que ce serait bien le fun qu'elles puissent faire ça pas trop loin de chez elles, ou un papa qui veut se recycler autrement que dans l'industrie. Alors, c'est à ça qu'on pense, à notre population. Et on est prêts à s'installer dans différents modèles. Mais vraiment du financement par programme, s'assurer qu'on est capables d'offrir... Quand on dit: On vous donne ce cours-là, on ne le cancelle pas rendu à la mi-septembre. Ça défait des projets professionnels.

Le Président (M. Arseneau): Peut-être qu'on pourrait passer au député de Beauce-Nord, puisqu'il reste encore quelque 4 min 30 s, je sais qu'il a une question. On pourra peut-être revenir, Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Ça va.

M. Grondin: Je vais en prendre 2 min 15 s, M. le Président.

Le Président (M. Arseneau): Pas de problème.

M. Grondin: Moi... Bonjour, messieurs. Si on fait un résumé assez rapide de votre mémoire, je vois que la recommandation, ce serait d'essayer de diminuer les cohortes, le nombre d'étudiants. À 20, 22, est-ce que ce serait... en région, est-ce que c'est atteignable ou... vous avez parlé de 18, mais de diminuer le nombre d'étudiants qui est exigé à l'heure actuelle pour partir un cours.

Mme Caron (Marie): Écoutez, je n'irais pas jusqu'à dire qu'on veut le diminuer. On va prendre ceux qui s'inscrivent, vous comprenez? Et, s'il y en a 15, il y en aura 15, mais on va leur garantir un programme. Mettons-nous pas trop de chiffres pour nous permettre d'offrir. Puis, vous savez, quand ça fait une couple d'années que c'est là, les groupes augmentent puis ils disent: C'est le fun, vas-y, tu vas voir que c'est intéressant. Alors, ça aussi, je pense que ça fait partie d'un rythme qu'on veut installer.

M. Grondin: O.K. Je veux vous poser d'autres questions.

Mme Caron (Marie): Parfait. Je vais essayer de vous répondre.

M. Grondin: Dans vos recommandations, on voit que ce qui est le désir, c'est que l'université donne les cours que la région veut avoir et non les cours que l'université veut donner. C'est un peu ça que j'ai compris.

Mme Caron (Marie): Oui, bien sûr, il faut vraiment donner des cours qui fait qu'on peut offrir à nos gens du travail par la suite, parce qu'un cours pour un cours, vous savez, on peut faire de l'Internet en masse. Mais on fait ça aussi parce qu'il y a des écoles... l'universitaire nous sanctionne dans cette qualité-là d'apprentissage, voyez-vous? Alors, je pense que c'est bien important.

M. Grondin: La troisième chose que j'ai cru comprendre, c'est que vous aimeriez avoir une garantie que le cours va exister d'année en année pour ne pas vous promener à genoux à Québec à toutes les années. Parce qu'on a beau avoir les jarrets noirs, on n'a pas nécessairement besoin d'avoir les jarrets rouges... les genoux rouges.

Le Président (M. Arseneau): Mme Caron.

Mme Caron (Marie): Ça, c'est traduction simultanée... Non, c'était juste une blague.

Le Président (M. Arseneau): Alors, M. le... Je ne veux pas vous pénaliser d'aucune façon, M. le député de Beauce-Nord, est-ce que vous avez terminé? Je ne veux pas vous sanctionner. Alors, il y a du temps pour la députée de Champlain.

Mme Champagne: Que je suis heureuse. Alors, merci d'être là. Bienvenue. Écoutez, on a entendu bien sûr de nombreuses universités en région. Je viens même d'une région, la région du grand Trois-Rivières, et on a des difficultés à garder chez nous les gens parce qu'on n'a pas suffisamment d'étudiants pour donner les formations.

Alors, je sais que, chez vous, avec votre corporation, vous avez des liens très étroits tant avec le cégep qu'avec d'autres instances au niveau scolaire, même au niveau secondaire. Ça ressemble à quoi, ces liens-là? Puis comment vous arrivez à vous concerter pour arriver à donner quand même une forme d'efficacité en attendant d'avoir toutes les règles et lois qui vont vous permettre peut-être d'avoir des pouvoirs que vous n'avez pas présentement? Ça s'arrime comment chez vous, ces divers niveaux là?

Le Président (M. Arseneau): Vous auriez 1 min 30 s pour répondre et conclure peut-être.

M. Roy (André): O.K. Bien, disons que ça s'arrime de la façon suivante, c'est qu'il y a un conseil d'administration sur lequel siègent plusieurs représentants du milieu, de différents types d'activités socioéconomiques, puis les gens se parlent. Les universités sont là, sont assises là en même temps que nous aussi, puis on se parle, puis on essaie de faire de notre mieux pour développer les choses qui vont répondre aux besoins des... les programmes qui vont répondre aux besoins de nos clientèles sur notre territoire, là. Essentiellement, c'est qu'on essaie d'impliquer le plus possible le tissu socioéconomique de notre milieu dans les prises de décision ? bien les prises de décision... de recommandations qu'on peut faire actuellement, parce qu'on n'a pas beaucoup de pouvoirs de décision.

Mme Champagne: L'implication de l'université ou des sections universitaires en région, au niveau même des écoles secondaires, pour les initier, les inviter, les amener à vouloir demeurer chez vous pour suivre leur formation, est-ce que ça a un impact? Est-ce que ça se fait de façon systématique?

M. Roy (André): Au niveau du secondaire, vous dites?

Mme Champagne: Oui.

M. Roy (André): Non.

Mme Champagne: Mais au niveau collégial, oui?

M. Roy (André): Oui.

Mme Champagne: Il n'y a pas de...

M. Roy (André): Oui, il y a un recrutement qui se fait, là, à chaque année, par les universités, dans chacun de nos collèges sur le territoire...

Le Président (M. Arseneau): 30 secondes?

M. Roy (André): Bien, 30 secondes, je vous dirais, je ferais peut-être une image en terminant: si on traitait nos cabanes à sucre comme on traite les services universitaires en région, là, on entaillerait juste les érables qui sont près de la cabane puis on couperait les autres pour les approcher, pour essayer de les faire couler là. Merci.

Le Président (M. Arseneau): Alors, madame, messieurs de la Corporation des services universitaires Chaudière-Appalaches, nous vous remercions d'avoir participé activement à nos travaux.

Je suspends quelques instants et j'invite le Centre universitaire des Appalaches à se joindre à nous.

(Suspension de la séance à 16 h 30)

 

(Reprise à 16 h 32)

Le Président (M. Arseneau): Je vous demanderais, s'il vous plaît, de prendre place, puisqu'il nous reste 1 h 30 min et deux groupes, alors donc il faut procéder le plus rapidement possible.

Alors, c'est M. Jean-Guy Jacques, président du conseil d'administration? Bienvenue. Je vous demande de présenter les gens qui vous accompagnent. Vous avez environ 20 minutes. Si vous préférez plus d'échanges, c'est à votre convenance. Nous vous écoutons.

Centre universitaire des Appalaches (CUA)

M. Jacques (Jean-Guy): M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les députés. J'aimerais tout d'abord vous présenter les personnes qui m'accompagnent: je suis accompagné de Mme Christiane Piché, qui est vice-rectrice aux études, de l'Université Laval; M. René-Paul Fournier, qui est vice-recteur aux études et à l'enseignement à l'Université du Québec à Trois-Rivières; accompagné aussi du directeur général du Centre universitaire des Appalaches, M. Denis Rousseau; ainsi que du directeur général, nouvellement retraité, M. Pierre Bégin.

Je vous présenterai d'abord la raison d'être du centre et son mandat. D'entrée de jeu, le Centre universitaire des Appalaches n'a pas la prétention d'être un acteur majeur sur le plan provincial. Le nombre d'étudiants qui le fréquentent, le budget dont il dispose, l'absence de programmes de formation récurrents, l'offre de programmes plutôt limitée, l'inexistence d'un corps professoral permanent, la quasi absence d'activités de recherche ne nous permettent pas de prétendre à ce titre. Nous sommes tout au plus un petit centre de services universitaires qui s'apparente davantage à ce qui se fait sur la Côte-Nord qu'à ce qui se déroule dans les véritables universités en région ou ailleurs.

En ce sens, peut-être que l'expérience du CUA mérite d'être partagée et que les solutions que nous voulons proposer méritent d'être discutées. Nous remercions donc la commission de nous recevoir aujourd'hui.

La raison d'être du Centre universitaire des Appalaches. Le Centre universitaire des Appalaches est le fruit d'un partenariat original entre les organismes du milieu et les établissements universitaires. Il a été créé, en 1991, sur la base d'une entente officielle entre un regroupement d'organismes socioéconomiques de la région, le cégep Beauce-Appalaches, le cégep de la région de l'Amiante, l'Université Laval et l'Université du Québec à Trois-Rivières.

La raison d'être du CUA, du centre universitaire, est de contribuer à hausser le nombre de diplômés universitaires dans le territoire Beauce-Etchemin-Amiante, à encourager la participation des jeunes aux études de haut niveau, à faciliter l'accès au perfectionnement et à la formation, tant pour les jeunes que pour les adultes, et ainsi contribuer à l'adaptation de la main-d'oeuvre régionale aux exigences de la nouvelle économie.

Le mandat du Centre universitaire des Appalaches. Le Centre universitaire est responsable de l'analyse des besoins régionaux, de la promotion des programmes, du recrutement des étudiants, des services immédiats qui leur sont offerts et de l'organisation des cours. En collaboration avec nos partenaires universitaires, son rôle est d'assurer l'accès aux programmes et aux cours attendus. La conception des programmes, la prestation des cours, l'engagement des professeurs, l'admission des étudiants, leur évaluation dans les cours et l'émission des diplômes restent sous la responsabilité des universités. La formation offerte au CUA est de même nature, de même qualité que celle que les universités partenaires offrent sur leurs campus. L'évaluation institutionnelle que nous avons menée en 2001 l'indique clairement.

Enfin, j'ajouterai, M. le Président, quelques chiffres qui démontrent bien l'importance du centre et quelques-unes de ses retombées pour la région. De 1991 à 2003: 114 groupes de finissants; 1 475 diplômes; 47 programmes différents; 246 diplômés dans le programme de baccalauréat; 153 diplômés de deuxième cycle; et 1 076 diplômés dans les programmes courts ou de certificat. Pour l'année courante, l'année 2003-2004, le CUA offre 21 programmes différents à 31 cohortes; il offre des cours à 571 personnes, pour un total de 1 061 étudiants en cours. Au printemps 2004, quelque 115 nouveaux diplômés s'ajouteront aux 1 475 diplômés, pour un grand total de 1 590, de 1991 à 2004.

C'est donc dire, M. le Président, toute l'importance qu'a le CUA pour la région. Évidemment, vous avez remarqué dans notre présentation des éléments qui évidemment rejoignent la présentation précédente, notamment le financement des petits groupes puis la catégorie de programmes qui peuvent être offerts.

J'aimerais maintenant donner la parole à nos partenaires et en ce sens je vais céder la parole à Mme Christiane Piché, de l'Université Laval.

Mme Piché (Christiane): Merci, monsieur. Alors, il faut presque du courage pour venir ici, aujourd'hui, après ce que nous avons entendu concernant certaines insatisfactions relatives à la collaboration des universités partenaires.

Soyez sûrs que l'Université Laval a été présente dès les premiers jours de la création, depuis 1991, et nous assumons 80 % des crédits étudiants qui sont dispensés dans la région et au CUA comme tels. Donc, nous nous considérons comme un partenaire majeur. Donc, nous sommes particulièrement sensibles, je dirais, à certaines insatisfactions qui ont pu être énoncées ici par le groupe qui nous a précédés.

Néanmoins, j'aimerais insister sur les difficultés qui ont été mises de l'avant par nos prédécesseurs à l'effet qu'il y a vraiment... Les problèmes qui ont été énoncés sont réels. Les problèmes de masse critique d'étudiants, qui ont été soulevés, sont récurrents. La question du financement aussi des activités qui se déroulent en dehors des campus sont aussi, je dirais, à l'ordre du jour de nos préoccupations. Alors donc, les problèmes qui ont été mentionnés sont vraiment vécus par les universités partenaires, et nous souscrivons totalement aux recommandations qui vont être faites ici par les membres du CUA comme tels.

n(16 h 40)n

D'autre part, sans vouloir étirer, là, mon temps de parole, que je sais limité, j'aimerais rassurer par ma présence les gens qui sont ici sur la volonté de l'Université Laval de continuer à collaborer avec le CUA. Nous sommes sensibles aux besoins, nous sommes sensibles aussi au désir d'autonomie et nous voulons travailler en appui avec les gens du CUA. Nous savons qu'ils ont identifié des programmes prioritaires. Alors, ils veulent occuper le champ de l'administration ? nous sommes très sensibles à ça ? le domaine de l'éducation, où nous sommes très présents, mais aussi celui des sciences infirmières.

Et, pour établir un lien avec ce qui a été dit précédemment et des liens intéressants qui peuvent être noués avec les collèges de la région, alors l'Université Laval s'apprête à signer une entente D.E.C.-bac avec le collège de la région de Chaudière-Appalaches au niveau des sciences infirmières. Alors, notre présence est très importante et nous voulons vous assurer que nous allons la maintenir.

M. Jacques (Jean-Guy): Merci, Mme Piché. J'aimerais vous présenter le représentant de l'autre université partenaire, M. René-Paul Fournier, de l'Université du Québec à Trois-Rivières.

M. Fournier (René-Paul): Oui. Merci. Écoutez, j'entérine tout à fait ce que Mme Piché vient de dire. J'aimerais peut-être tout simplement donner quelques éléments de contexte pour notre université.

Le poids que représente notre université dans les activités qui se donnent au centre, c'est de l'ordre de 20 %. Maintenant, pour notre université, qui doit fonctionner au global avec à peu près 55 % de chargés de cours et qui offre déjà des activités de formation continue ou de programmes courts dans six centres hors campus, donc, cette formation en région, nous y sommes très sensibles et nous y croyons beaucoup.

Maintenant, il est bien clair que, dans le contexte budgétaire dans lequel notre université se retrouve, comme pour n'importe quelle autre université, lorsqu'on s'investit dans des activités dans la région de la Beauce, il est clair que nous devons établir des exigences minimales pour s'assurer que l'on puisse au moins couvrir les frais que cela implique. Et il appert effectivement que, dans plusieurs cas, dans certains cas à tout le moins, il y a des activités qui ne peuvent pas être offertes parce que les groupes ne sont pas suffisamment nombreux.

Bien sûr, nous sommes très sensibles aux besoins de la région. Il s'agit d'une région effectivement qui est relativement éloignée des centres universitaires. Je pense qu'on l'a dit à satiété, le problème fondamental, pour nous, ce n'est pas un problème de volonté, c'est un problème financier, essentiellement. Dans plusieurs cas, nous, à Trois-Rivières, étant donné que les interventions que nous faisons sont surtout dans des domaines où il y a une pression importante des clientèles sur nos campus, ça veut dire que nos profs déjà sur les campus sont très chargés. On doit évidemment avoir recours le plus souvent à des chargés de cours pour aller assumer les activités en Beauce, et souvent, ces chargés de cours, il faut aller les chercher à Montréal. Alors, vous vous imaginez les coûts que cela représente pour l'université.

Alors, je pense que ce sont quelques éléments de contexte, là, qui vous permettent de comprendre la situation dans laquelle on se retrouve.

Le Président (M. Arseneau): Merci, M. Fournier.

M. Jacques (Jean-Guy): Alors, je remercie évidemment nos deux partenaires pour leurs petits mots. Je voudrais souligner évidemment que les statistiques qui vous ont été mentionnées, à savoir 80 % par Laval, 20 % par Trois-Rivières, bien, ce ne sont pas des statistiques qui sont figées dans le béton, ça évolue. Il a déjà été un temps où c'était pratiquement l'inverse. Alors, c'est fonction un petit peu des cours qui sont offerts, des capacités que les universités ont à être présentes aussi puis des besoins qu'on peut déceler aussi dans la région.

Et pour continuer la présentation, bien, je vous présente le directeur du centre, M. Denis Rousseau.

Le Président (M. Arseneau): Bienvenue.

M. Rousseau (Denis): Merci. Je reviens de façon plus particulière au mémoire. Dans notre mémoire, une des premières choses qu'on remarque, c'est les caractéristiques régionales. Le groupe d'André Roy, de la Corporation des services universitaires, a parlé énormément de la région que dessert le CUA, qui, elle, est moins scolarisée. Je ne pense pas qu'on ait besoin d'y revenir. Cependant, il y a une différence qu'il faudrait établir tout de suite entre ce que je qualifierais du littoral, donc la région de Lévis, et ce qu'on pourrait qualifier d'arrière-pays.

Donc, quand on regarde les statistiques de Chaudière-Appalaches, on ne fait pas souvent la distinction entre les deux, Chaudière-Appalaches étant considérée comme un grand tout. Or, dans des régions, par exemple Les Etchemins, on parle d'un taux qui oscille autour de 5,9 % de diplômés universitaires. Si on regarde le résultat global, on parle de 13.2 %. Donc, il y a vraiment un écart entre ce qui se vit le long du littoral et ce qui se vit dans l'arrière-pays, le territoire où évolue le Centre universitaire, donc la grande région Beauce-Etchemin-Amiante. Donc ça, c'est un premier élément que je pensais nécessaire de préciser.

Alors, j'aimerais revenir aussi sur les obstacles à la formation. Dans notre mémoire, on y fait abondamment référence. Un des premiers obstacles qu'on souligne ? il y en a trois que j'ai cru bon retenir ? c'est celui de l'éloignement des centres de formation. On parle d'une distance de 80 kilomètres. Il y a une étude de Statistique Canada qui nous dit que, dès que la distance de 80 kilomètres sépare des étudiants potentiels d'un collège ou d'une université, les étudiants n'y vont pas dans une proportion de 37 % inférieure... le taux de poursuite des études est de 37 % inférieur. Donc, ça, c'est une statistique qui nous interpelle particulièrement sur tout notre territoire d'arrière-pays, comme je l'ai qualifié antérieurement.

Deuxièmement, le coût des études et la pauvreté relative de notre population. Le coût des études étant le même pour tout le monde, il me semble important de mentionner que les revenus de la population de Beauce-Etchemin-Amiante sont inférieurs à ceux du Québec, règle générale. À titre d'exemple, dans Les Etchemins, on parle d'autour de 38 000 $; dans la région de l'Amiante, on parle de 40 000 $; et la moyenne provinciale, la moyenne du Québec, est autour de 50 000 $. Donc, des gens qui ont moins de ressources financières et qui sont de surcroît éloignés des centres universitaires.

Le troisième élément, c'est la ruralité. Dans notre région, pour la moyenne québécoise, on parle d'à peu près 20 % de ruralité. En Chaudière-Appalaches, ce taux est autour de 40 %. Dans certaines MRC, je vous donne deux exemples: dans Les Etchemins, on parle de 63 % de taux de ruralité; dans la région de Sainte-Marie, en Nouvelle-Beauce, on parle même de 68 %.

Donc, de toutes les caractéristiques qu'on énumère dans notre première partie de notre mémoire qu'on vous a soumis, c'est important de retenir que la population qui est desservie par le CUA vit à plus de 80 kilomètres des universités, qu'elle a des revenus moindres à la moyenne québécoise et qu'elle vit dans un milieu à dominance rurale. Donc, ça c'est trois caractéristiques fondamentales, c'est trois obstacles évidents à l'accessibilité aux services universitaires qui peuvent, du moins en partie, expliquer le retard de la région.

Compte tenu de ces caractéristiques et des caractéristiques du CUA, vous avez compris que le CUA, de par ce que le président du conseil d'administration nous a livré ? il était une création, depuis 1994, de deux collèges et de deux universités ? donc, de par ses caractéristiques, de par les caractéristiques régionales, on a cru bon de soumettre à la commission cinq solutions. Je prendrai peut-être quelques minutes pour expliquer un peu plus largement, disons, chacune de ces cinq solutions-là.

La première qu'on met en évidence, c'est d'actualiser le financement de base. Le financement de base du centre universitaire est le même depuis 1991, à savoir 150 000 $. Donc, depuis 14 ans, nous vivons avec à peu près ce budget-là ? exception pour 2003 et 2004, une allocation particulière nous avait été conseillée... consentie, pardon. Donc, le financement de base, à notre avis, nous permet de répondre à certains besoins, mais il y a d'autres besoins qui ne sont pas couverts. Par exemple, dans les régions de la Nouvelle-Beauce, dans les régions de l'Amiante, dans les régions des Etchemins, on n'a pas les ressources nécessaires pour aller supporter de nouvelles cohortes dans ce coin-là, d'aller faire du démarchage, si on veut, aller chercher des étudiants. Et la partie encadrement des étudiants et la partie aide à la réussite sont laissées en plan, faute d'un financement approprié.

Le deuxième élément: attribuer un financement majoré pour les inscriptions en territoires désignés. Autrement dit, nous vous demandons d'attribuer un poids pondéré supérieur par étudiant en formation dans les milieux où il n'y a pas d'université. En accordant un financement particulier, un peu comme le ministère le fait déjà pour les commissions scolaires, on pourrait accroître l'offre générale de formation. Donc, ça, c'est notre deuxième solution.

La troisième, c'est celle de créer un fonds de compensation qui serait géré localement. Ce fonds ou cette allocation annuelle, pourrait servir, d'une part, à développer des formations spécifiques sur le territoire, à partir des priorités régionales ? et ça, c'est bien important; d'autre par, elle pourrait servir aussi à démarrer des cohortes ou, à tout le moins, à les maintenir. On parlait, dans la précédente intervention, qu'un groupe pouvait commencer à 20, 25, et pouvait par la suite être à 17, 18, et souvent l'offre de formation s'arrête, faute d'un financement. Donc, ce fonds ce compensation-là pourrait servir à poursuivre cette cohorte, si on veut.

Deux autres solutions qu'on propose rapidement: on souhaiterait... le CUA souhaiterait constituer une équipe professorale en résidence, à savoir: on croit qu'il est important d'avoir de la recherche, d'avoir des créneaux d'excellence et que ces retombées de la recherche et ces retombées des créneaux d'excellence doivent être accessibles à notre région aussi. Il en a été abondamment question dans la commission, durant la commission, donc je pense que c'est fondamental pour notre région aussi. Donc, ces professeurs-là pourraient, d'une part, offrir de l'enseignement et pourraient, d'autre part, aussi offrir de la formation, offrir de la recherche.

Finalement, offrir des programmes de base dans trois secteurs disciplinaires. On a ciblé l'éducation, la santé et l'administration. Donc, avoir une certaine récurrence dans nos programmes, avoir une offre minimale de base. On a déjà le baccalauréat en enseignement primaire et préscolaire depuis cinq cohortes. On s'apprête à démarrer, l'automne prochain, la sixième cohorte. Donc, cette offre-là doit être récurrente dans les trois domaines qu'on a ciblés, à savoir l'administration, l'éducation et la santé.

Je terminerais, M. le Président, par dire que le centre, depuis 1991, a réussi à répondre à de nombreux besoins de formation. Ça, c'est une réalité qu'on vit à tous les jours. Mais ce qu'on demande au ministère, ce qu'on demande au gouvernement, c'est de lui donner un second souffle. Le centre a un avenir qui passe par le partenariat avec l'Université Laval, par le partenariat avec l'UQTR, mais il faut nous donner les moyens, il faut donner les moyens à nos universités partenaires de mener à terme les projets de formation qu'on a sur notre territoire, et ça, c'est important.

n(16 h 50)n

Je terminerais, M. le Président, si vous permettez, pour dire que le CUA fait un large consensus dans notre milieu. Quand on a parlé de notre projet à différents intervenants, aux CLD, aux chambres de commerce de l'Amiante ou aux chambres de commerce de Saint-Georges, on a eu un accueil très favorable, et spontanément il y a une quinzaine d'organismes qui nous ont appuyés dans cette démarche-là. Et j'aimerais, si vous le permettez, M. le Président, déposer les lettres d'appui que nous avons reçues de ces groupes et organismes. On parle des cégeps, des commissions scolaires, des CLD, des chambres de commerce de la ville de Saint-Georges, de la ville de Sainte-Marie, du Forum jeunesse régional. Donc, vraiment, les intervenants, dès qu'ils ont entendu parler de notre mémoire, ont cru bon l'appuyer, ont cru bon nous soutenir dans cette démarche-là auprès du ministère, auprès de la commission.

Alors, voilà, M. le Président. Nous sommes disponibles évidemment pour répondre à toutes vos questions.

Le Président (M. Arseneau): Merci. Merci beaucoup pour cette présentation. Il nous resterait comme 12 minutes à peu près, de chaque côté de la table, pour les échanges. Et peut-être que ce serait intéressant pour les gens qui nous écoutent, parce que c'est la région Chaudière-Appalaches, la Rive-Sud, il y a aussi Lévis, il y a aussi une autre université, peut-être que... je ne sais pas si ça va être abordé, là, mais pour le portrait des services universitaires.

M. Reid: M. le Président, après avoir souhaité la bienvenue, ce que je fais immédiatement, à toute la délégation du CUA, je voudrais demander à la délégation de peut-être ? et sur le temps du gouvernement, M. le Président ? de peut-être éclairer la commission sur les liens qui existent entre les trois intervenants que nous rencontrons aujourd'hui, soit: la Corporation des services universitaires en Chaudière-Appalaches, le Centre universitaire des Appalaches et le Conseil consultatif de l'université en Beauce, les relations qui existent et la... pas une cohabitation, puisque tout le monde semble avoir les mêmes objectifs, mais de quelle façon l'un aide l'autre ou l'autre aide l'un.

M. Jacques (Jean-Guy): M. le Président. M. le ministre, je suis comptable agréé. Je ne suis pas un professionnel de l'enseignement, même si j'ai déjà touché à l'enseignement. J'ai mon bureau de comptable, mais ça fait au-dessus de 20 ans que je me préoccupe de l'éducation dans la région. Il y a plus de 20 ans, on a commencé à travailler pour essayer d'organiser des cours dans la région avec l'Université du Québec à Trois-Rivières, du temps de M. Archambault qui était là. Alors, on a travaillé pendant pratiquement une dizaine d'années du mieux qu'on pouvait, un bout de temps avec Trois-Rivières, un bout de temps avec Rimouski, un bout de temps avec le siège social de l'Université du Québec. Puis, en 1991, là, il y a eu l'organisation du Centre universitaire.

L'ancienne organisation qui existait auparavant, avant 1991, c'est l'organisation qui a perduré et qui est là pour surveiller de quelle façon les services universitaires peuvent évoluer dans la région; c'est ceux qui vont vous rencontrer dans quelques minutes après nous. Alors, c'est ce qu'on appelle la Corporation des services en Chaudière-Appalaches...

Une voix: ...

M. Jacques (Jean-Guy): ...le Conseil consultatif, pardon. Alors, à ce moment-là, il y avait des gens de Thetford qui avaient un noyau... Il y avait un noyau à Thetford Mines, il y avait un noyau à Sainte-Marie, il y avait un noyau à Saint-Georges, un noyau à Lac-Mégantic puis un noyau à Lac-Etchemin. Et tous ces noyaux-là travaillaient à l'avancement de l'éducation dans la région.

En 1991, évidemment, le CUA a pris naissance, mais il a pris naissance suite au sommet socioéconomique. Et, au moment du sommet socioéconomique, à ce moment-là, il y avait eu des idées de peut-être demander une université dans la région ? je pense que nos prédécesseurs vous l'ont mentionné. Et, à ce moment-là, il y avait eu une corporation qui avait été formée, qui est la Corporation des services universitaires en Chaudière-Appalaches, qui, elle, englobait toute la région Chaudière-Appalaches puis voyait à essayer de développer aussi des services dans la région.

Entre-temps, bien, évidemment, il y a Rimouski qui est venue s'installer à Lévis. Donc, à ce moment-là, Lévis s'est trouvée à être très bien desservie, disons-le. Et évidemment, bien, la région plus au sud, évidemment, elle, bien, est moins favorisée, c'est sûr.

Mais le lien... Je ne sais pas si vous saisissez bien, si ça répond à votre question pour le lien entre les trois organisations. Il y en a une qui a 20 ans; il y en a deux qui ont 10 ans. Mais il y en a une qui est née du sommet socioéconomique, puis l'autre, celle que je représente, bien évidemment est née d'une collaboration entre l'Université du Québec à Trois-Rivières, l'Université Laval, le cégep Beauce-Appalaches, le cégep de l'Amiante.

Le Président (M. Arseneau): Est-ce que c'est M. Bégin qui voudrait apporter un complément?

M. Bégin (Pierre): Oui, très brièvement, M. le Président, vous dire peut-être des liens sur le plan corporatif. Le CUA est composé de personnes qui sont membres de la Corporation des services universitaires. Il y a des gens qui sont sur le conseil d'administration du CUA qui sont membres du Conseil consultatif. Par contre, ce sont des organismes totalement indépendants.

Et, si je faisais une caricature très brève, la corporation, qui est intervenue avant nous, porte un regard sur l'ensemble de la région Chaudière-Appalaches et a son membership dans l'ensemble de la région de Chaudière-Appalaches; le CUA se préoccupe, a une pensée du côté de Beauce-Etchemin-Amiante, la partie plus éloignée du littoral; tandis que le dernier organisme qui interviendra cet après-midi, le Conseil consultatif de l'université en Beauce, est un organisme qui existe bien avant le CUA. Il y a quand même un membre du Conseil consultatif en Beauce qui est sur le conseil d'administration du CUA.

Donc, c'est certain que, dans une grande région avec peu de personnes, il y a nécessairement des liens apparentés entre les individus. C'est peut-être ça qui nous amène à penser interordres et à penser faire autrement, faire avec tout le monde plutôt que faire individuellement, indépendamment des autres.

Le Président (M. Arseneau): M. le ministre, oui.

M. Reid: Est-ce qu'il y a d'autres personnes?

Le Président (M. Arseneau): Il y a le député de Frontenac qui a signifié son désir de poser une question. M. le député.

M. Lessard: Oui. Alors, bienvenue à cette commission. Ça fait extrêmement plaisir de vous rencontrer. Vous souligniez, Mme Fournier, tantôt, le courage... J'ai l'impression d'avoir la trilogie, en fait, de la desserte en région: les deux centres universitaires donc et le Centre universitaire des Appalaches. Vous avez parlé de courage effectivement parce que, après la présentation de la Corporation des services universitaires, il semble que la région est à quatre pattes devant les centres universitaires pour être en demande. Et vous avez soulevé que les problèmes sont réels, toutefois ils sont récurrents. Et toutefois, dans votre offre de services, vous avez aussi mentionné le fait que l'université favorise le partenariat.

Quand vous entendez les demandes précédentes sur le désir d'une autonomie ou d'avoir un fonds spécifique, c'est-à-dire le contrepoids de la négociation des services orientés en fonction... parce qu'il faut le dire, c'est pour les travailleurs de demain, donc les gens qui vont prendre la relève de nos entreprises tantôt. Je vous poserais la question assez audacieuse: jusqu'où êtes-vous prêts à aller dans ce partenariat-là? Jusqu'où les universités, devant la demande qui est faite... est prête à aller, à développer ce partenariat-là?

Le Président (M. Arseneau): Question franche, alors question directe.

Mme Piché (Christiane): Écoutez, je dois vous dire que nous nous considérons déjà comme des partenaires parce que nous sommes à l'écoute des besoins du Centre universitaire des Appalaches. Les cours que nous offrons, les programmes que nous offrons le sont à la demande du Centre universitaire des Appalaches. Alors donc, nous nous considérons comme des partenaires.

Sauf que, dans ce partenariat, les conditions sont devenues de plus en plus difficiles. Je pense que mon collègue Fournier, René-Paul, les a mentionnées. Nous sommes venus, les universités, les unes après les autres, vous dire jusqu'à quel point nous étions dans des conditions financières difficiles. Et ces conditions financières difficiles rendent ce type d'activité là vraiment extrêmement ? comment dirais-je? ? à risque, fragile.

Mais, par ailleurs, nous avons... les universités disposent de ressources. Nous avons des professionnels de l'analyse de besoins, qui sont capables d'être à l'écoute des besoins à la grandeur de la planète, aujourd'hui. Je pense que toutes les universités peuvent témoigner de cette capacité que nous avons. Alors, pour desservir une région qui est à 100 kilomètres de chez nous, je suis certaine que nous avons les moyens pour le faire, mais l'obstacle majeur demeure la question financière.

Le Président (M. Arseneau): ...réponse aussi nette et claire, et, M. le ministre, vous avez à nouveau la parole.

M. Reid: Merci. Est-ce qu'il y a quelqu'un d'autre qui voulait...

Le Président (M. Arseneau): Je pense que vous êtes concerné par la réponse de madame... Ah! est-ce qu'il y a d'autres questions? Vous vouliez poser...

M. Lessard: Ah! Non, c'est correct.

Le Président (M. Arseneau): Alors, la députée de...

Mme Vien: ...Bellechasse.

Le Président (M. Arseneau): La députée, bien sûr, de Bellechasse.

n(17 heures)n

Mme Vien: Merci, M. le Président. Messieurs, bienvenue. Je suis très heureuse de vous revoir aujourd'hui. Madame, bienvenue à l'Assemblée nationale. Vous nous parlez beaucoup... Et je ferais peut-être du pouce sur ce que nous a dit... la question qu'a posée mon collègue de Frontenac, qu'il s'agit vraiment véritablement d'un problème de financement. Mais on nous a parlé aussi, un peu plus tôt, de volonté aussi du corps professoral de venir en région. 100 kilomètres, 80 kilomètres, pour une cohorte d'étudiants, ça peut être démobilisateur, hein! Ça peut être quelque chose qui n'est pas attractif du tout pour les étudiants, mais... alors qu'on ferait juste déplacer une personne en provenance de Québec vers la Beauce ou idéalement vers les Etchemins, pourquoi pas? on le souhaite grandement et vivement. Comment vous réagissez à ça, madame?

Le Président (M. Arseneau): Juste avant de vous laisser répondre... J'ai supposé que les gens de la commission donnaient leur consentement pour que la députée de Bellechasse puisse...

Mme Marois: Vous savez comment nous sommes...

Le Président (M. Arseneau): Oui, alors...

Une voix: Avec plaisir.

Mme Marois: ...accueillants...

Le Président (M. Arseneau): Parce que c'est vraiment dans sa région. M. le député de Beauce-Nord, vous êtes d'accord aussi? Allez, alors, on peut répondre à la question de la députée de Bellechasse, s'il vous plaît.

Mme Piché (Christiane): Oui. Alors, vous avez tout à fait raison. Tout à l'heure, la personne qui était assise au bout complètement, qui était un ancien doyen de faculté, vous disait... Et heureusement il a eu un bon mot pour les vice-recteurs, tout à l'heure, en disant que, malgré la volonté très ferme des vice-recteurs, souvent, lorsque ça descend aux paliers opérationnels, il y a certaines réserves qui sont exprimées par les gens. Et effectivement, lorsqu'on arrive pour trouver les ressources, souvent, c'est difficile. Il faut trouver des éléments qui vont motiver.

Mais, en même temps, nous, on est en train de faire une réflexion en profondeur en se disant: Si nos professeurs sont capables d'aller se promener un peu partout sur la planète, il doit y avoir moyen de s'organiser pour qu'ils puissent trouver ça fort intéressant aller dispenser la connaissance en Beauce. Je dirai aussi qu'il y a différents moyens qui ont été utilisés, des moyens, je pense, très astucieux pour s'assurer que les activités pouvaient se... ou la totalité des activités d'un programme pouvait être dispensée. Oui, les professeurs se sont déplacés. Le Centre universitaire, le CUA s'est doté d'équipements d'enseignement à distance très sophistiqués qui sont...

Mme Vien: ...interactives, par exemple, des classes interactives?

Mme Piché (Christiane): Je laisserai mes collègues se prononcer là-dessus. Mais il y a aussi, pour compléter la question de l'offre de la formation, il y a aussi, pour certaines activités qui devenaient plus complexes à organiser, il y a eu du transport, du covoiturage, bon, qui a été organisé. Je pense que M. Bégin peut en témoigner. Alors, quand on veut desservir les gens en région, il faut être prêt aussi à mettre en pratique la débrouillardise toute beauceronne.

Mme Vien: Beauce étant une partie, comprenons-le et disons-le, s'il vous plaît, qu'il n'y a pas que la Beauce à l'intérieur de ce...

Une voix: ...

Mme Vien: Oui, c'est ça. On est très sensible. M. Jacques?

M. Jacques (Jean-Guy): La Beauce, Etchemin, l'Amiante, c'est tout le même monde, ça vient tout de la même place. On a fait un volume sur... Il y a des volumes qui se font sur l'histoire des régions, et c'est l'histoire de Beauce, Etchemin, Amiante, puis le volume est ça d'épais. Quand on parle de Beauce, on parle d'Etchemin; quand on parle d'Etchemin, on parle de Frontenac.

Le Président (M. Arseneau): Alors, merci beaucoup, M. Jacques. Ça fermerait le bloc du côté gouvernemental. Et je vais laisser la parole à la députée de Taillon.

Mme Marois: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, ça me fait plaisir de vous souhaiter la bienvenue au nom de ma formation politique et vous remercier pour la présentation de votre mémoire.

Quand on le lit, ce qu'on constate, c'est qu'il rejoint, dans beaucoup de ses recommandations, dans une majorité de ses recommandations, là, si on pense à partir de la page 12, 13: actualiser le financement de base de l'infrastructure universitaire locale; un financement majoré pour les inscriptions des territoires désignés; fonds de compensation... Ce qu'on constate, c'est un peu ce que demandent beaucoup des régions, des représentants des régions périphériques à certains milieux universitaires pour dire: Considérez nos régions d'une façon particulière avec un financement adapté.

Et même le fonds de compensation... Je pense que c'est les gens de la Côte-Nord, la semaine dernière, qui nous disaient: On paie pour le nombre d'élèves pour lesquels l'université n'est pas... enfin, l'institution n'est pas financée ? mettons que c'est l'Université du Québec à Rimouski ou une autre constituante du réseau de l'Université du Québec. Alors, donnez-nous un fonds. Même si on a 15 élèves, qu'il en prend 20 pour faire la cohorte, on va payer pour les cinq autres.

Est-ce que c'est beaucoup le sens des recommandations qu'on retrouve dans votre mémoire? Est-ce que je me trompe ou je fais une bonne analyse de ce que vous nous proposez?

M. Jacques (Jean-Guy): La lecture est bonne. Puis j'ajouterais là-dessus que... bien, je pense que je n'ai pas besoin de vous convaincre, mais l'importance de garder nos gens en région. Parce que, quand ils partent, aujourd'hui, assez souvent, ils rencontrent un conjoint à Montréal, un conjoint à Québec, puis ils restent là. Dans la Beauce, Marcel Dutil, ses enfants ont marié des filles du coin puis ils sont installés dans la Beauce. Edouard Thabet est un diplômé universitaire qui a marié une fille du coin. Il est revenu dans la région; il a parti Boa-Franc, que tout le monde connaît à peu près. Un petit Gendreau, qui a marié aussi une fille du coin, il est revenu dans la région: ce sont les Portes Garaga.

Alors, un diplômé universitaire qui reste dans la région, c'est un facteur de développement d'une région, c'est un employeur, c'est quelqu'un qui donne des emplois à des gens. C'est pour ça que c'est si important, dans les régions du Québec, qu'on s'occupe de garder nos jeunes dans les régions. Puis là je viens de vous donner trois exemples; je viens de vous parler d'au moins 2 000 emplois, là, dans le coin, là.

Le Président (M. Arseneau): En complément, M. Rousseau?

M. Rousseau (Denis): Oui. Je dirais tout simplement que ce qu'on demande, c'est en bonne partie le financement différencié, le financement asymétrique. On croit qu'en insistant, en ayant une certaine marge de manoeuvre financière, appelons-la comme ça, on pourrait développer des projets régionaux, des projets spécifiques à notre région et soutenir des cohortes. On offre déjà en ce moment, au Centre universitaire, 21 programmes, 31 cohortes pour l'année en cours, et on croit qu'avec un coup de pouce financier on pourrait facilement ajouter une quinzaine ou une vingtaine de cohortes. Parce que, pour avoir 18, 20, 22 étudiants, ce n'est pas nécessairement une difficulté; la grande difficulté est de passer à 25, 28, 30, 35, dans nos milieux. C'est là la grande difficulté, je dirais, pour répondre à votre question.

M. Jacques (Jean-Guy): Et on rendrait nos partenaires universitaires si heureux.

Mme Marois: Vous pensez à tout le milieu économique, communautaire et...

M. Jacques (Jean-Guy): Non, mais ils seraient capables de venir donner des cours qui s'autofinanceraient...

Mme Marois: Ah, ça, ce serait très, très... Ah! Vos partenaires universitaires, oui.

M. Jacques (Jean-Guy): ...donc ils auraient le sourire fendu jusqu'aux oreilles, il n'y a pas de problème.

Mme Marois: Je ne veux pas vous mettre dans une situation inconfortable, mais par rapport à ce que proposait le groupe qui vous a précédés ? évidemment, vous avez vu le mémoire, vous les avez entendus ? est-ce que vous iriez aussi loin que de dire: Nous souhaitons avoir une autonomie plus grande pour pouvoir négocier, avec nos éventuels partenaires ou nos actuels partenaires, des ententes qui ne nous obligent pas à nous inscrire dans une ? vous le dites, même ? dans une activité... pas de marchandage, là, mais je pense... je me demande si vous n'utilisez pas cette expression-là aussi dans votre mémoire, attendez un peu, oui ? quémandage, pas marchandage, quémandage?

M. Jacques (Jean-Guy): C'est sûr, madame, qu'on s'est tous parlé, hein?

Mme Marois: Bien, j'imagine quand même un peu, là, mais...

M. Jacques (Jean-Guy): Quand on frappe à une porte puis qu'elle est fermée, on essaie d'en trouver une autre, hein?

Mme Marois: D'accord.

M. Jacques (Jean-Guy): Ça fait qu'en fait ce qu'on fait, c'est qu'on essaie d'explorer, à un moment donné, toute...

Mme Marois: Il y a une gradation, quoi.

M. Jacques (Jean-Guy): On essaie d'explorer toutes les possibilités...

Mme Marois: De l'autonomie à avoir des moyens plus grands.

M. Jacques (Jean-Guy): Si on n'est pas capables de rendre nos partenaires universitaires heureux de cette façon-là, on va essayer d'une autre façon. Mais ce qui est important pour nous, quand même, puis je reviens là-dessus, c'est qu'on garde nos gens en région et qu'à ce moment-là on ait les moyens de les garder dans la région.

Le Président (M. Arseneau): Et pour revenir à vos portes, M. Jacques, vous en fabriquez aussi beaucoup dans votre région. Alors donc, vous ne manquez pas de portes auxquelles frapper. Il y a M. Rousseau qui voulait ajouter un complément.

M. Rousseau (Denis): Oui. J'ajouterais que l'idée est, oui, audacieuse, l'idée peut paraître intéressante, on ne la rejette pas nécessairement. Pour nous, par contre, ce qu'on demande dans notre mémoire, c'est vraiment une question de financement, c'est un financement différencié, c'est un financement asymétrique qui nous permettrait d'aller compléter les cohortes, d'aller compléter les formations, d'offrir sur place des formations qui en ce moment sont peut-être plus difficiles à offrir. Il faut aider les gens du milieu, il faut aider nos universités partenaires à offrir ces formations-là, et c'est en ce sens-là que nos demandes financières viennent peut-être ajouter au portrait, là.

Mme Marois: Vous faites une recommandation très, très précise aussi. Est-ce que vous l'avez évaluée par rapport à ce qu'elle signifierait pour l'ensemble du Québec? Vous dites: «Les nouvelles normes développées au bénéfice des régions pourraient s'appliquer, par exemple, aux secteurs éloignés de plus de 80 kilomètres d'une université ou aux secteurs qui se caractérisent par leur faible densité démographique.»

M. Rousseau (Denis): M. le Président, on n'a pas fait nécessairement d'étude à ce sujet-là. Si mon information est juste, il y a huit régions au Québec qui ne disposent pas d'universités autonomes. Donc, pour ces huit régions là, je pense qu'il y aura un bassin, si on veut, pour offrir une formation différenciée, un financement différencié. Donc, on n'a pas les données en tant que telles, on n'a pas les moyens d'avoir ces données-là, ça, je pense que c'est important de le préciser. Mais il y a huit régions, en tout cas, où ce modèle-là serait exportable. C'est un peu dans le sens de votre question.

Le Président (M. Arseneau): Oui. Alors, M. Fournier aurait un complément de réponse, oui? Ou... Bien, allez-y.

M. Jacques (Jean-Guy): On s'attendait, Mme Marois, à ce que la question de la capacité financière du gouvernement nous vienne plutôt de M. le ministre.

Le Président (M. Arseneau): C'est M. Bégin qui aurait un complément.

n(17 h 10)n

M. Bégin (Pierre): Pour nous, ça ne devrait pas être quelque chose d'automatique. Je pense que le CUA a démontré sa volonté et sa capacité de s'associer un certain nombre de partenaires. Donc, la commission devrait se pencher sur le potentiel que peut offrir le lien entre les partenaires, donc le développement... optimaliser le partenariat, non seulement le partenariat avec les universités, mais le partenariat qui doit se bâtir à l'intérieur de la région, alors de sorte qu'à ce moment-là il y aura une dynamique nouvelle qui va se créer dans les régions qui auront accepté de faire ces démarches. Et, quand vient le temps de le quantifier, on estime que c'est à indice variable, puisque l'existence et la récurrence de services de formation de base et, je dirais, la recherche de solutions de dispensation ? partage de locaux, partage de matériel ? va faire en sorte qu'on ne doit pas l'analyser dans le contexte traditionnel ou dans le contexte formel actuel.

Alors, je pense que ce que propose le Centre universitaire des Appalaches, c'est de poursuivre la démarche avec des moyens financiers qui permettront justement d'aller bonifier le partenariat et assurer la récurrence des services dans le milieu pour faire en sorte que les jeunes qui rêvent d'une formation universitaire n'auront pas à se dire: Est-ce que, dans deux ans, est-ce que, dans quatre ans, est-ce que, dans cinq ans, je pourrai, comme disait le député de Lac-Saint-Jean, amorcer la formation universitaire dans le milieu, à tout le moins? Et, qui sait, je dirais, l'intelligence des hommes et des femmes... on pourra développer une formule, formule mixte, formule nouvelle, qui fasse en sorte qu'à coût moindre on arrive à faire autant.

Le Président (M. Arseneau): M. Jacques veut ajouter quelque chose ? brièvement, parce que je veux laisser la parole au député de Beauce-Nord, qui a une question importante à vous poser.

M. Jacques (Jean-Guy): Mais ad hoc je voulais juste rajouter qu'on n'a pas demandé de béton, si vous remarquez, on a demandé des services. Et vous remarquerez qu'à ce moment-là, dans le prix de revient d'un étudiant, si on mettait aussi les bâtisses, probablement que le prix de revient serait inférieur chez nous pour des petits groupes par rapport à des grands groupes sur les campus.

Mme Marois: Merci.

Le Président (M. Arseneau): M. le député de Beauce-Nord, vous avez trois minutes.

M. Grondin: Merci beaucoup.

Le Président (M. Arseneau): C'est quand même mieux que la dernière fois; vous aviez accepté 2 min 15 s.

M. Grondin: Bien oui. Merci, M. le Président, vous êtes très généreux. Alors, messieurs, j'ai envie, moi aussi, de faire du pouce sur la dernière réponse que vous avez donnée, le financement. Quand on parle... Les universités en région, le financement, on se sert des locaux qu'on a de disponibles en région. Alors, je suppose que, pour financer un groupe d'étudiants en région, ça doit être beaucoup moins dispendieux que le financer dans un campus universitaire à Québec, ou à Montréal, ou à Trois-Rivières.

M. Jacques (Jean-Guy): On ne sait pas si le ministère de l'Éducation fait un prix de revient global, incluant les bâtisses et les opérations. Peut-être que, s'il faisait ça, qu'on aurait des surprises. Tout ce qu'on connaît, comme coût d'étudiant, c'est le coût des opérations seulement. À ma connaissance, comme comptable agréé, en tout cas, c'est ça que ça donne. Alors, on n'a pas le vrai coût par étudiant dans une université, ou dans un cégep, ou dans une commission scolaire, parce que les immobilisations, c'est une chose et les opérations, c'est l'autre. Dans notre cas, on n'a pas nécessairement besoin d'immobilisations, parce qu'on utilise celles qui sont déjà existantes puis qui sont payées par d'autres organismes. Alors, c'est de l'éducation à bas coût et à bonne réussite en plus.

M. Grondin: Alors, j'espère que M. le ministre a bien entendu ça. Je voyais dans votre conclusion... Je remarquais dans un passage: «Nous ne croyons pas obtenir une pleine réponse à nos demandes tant et aussi longtemps que les règles ne seront pas revues.» Je voudrais savoir c'est quelles règles. À la page 17, conclusion, là, votre troisième paragraphe, vous parlez que les règles, il faut qu'elles soient revues.

M. Rousseau (Denis): On parle essentiellement de formation de groupes, le nombre d'étudiants pour former une cohorte. Si...

Une voix: Cohorte de financement.

M. Rousseau (Denis): De financement, effectivement. Si on parle de 35 étudiants, tant que la règle ne sera pas revue pour tenir compte de la réalité de nos milieux, à savoir 20, 22, 23 étudiants, le statu quo va être en vigueur.

M. Grondin: Bien.

Le Président (M. Arseneau): C'est bien? Est-ce qu'en 30 secondes vous pouvez... Oui? Mme la députée de Champlain.

Mme Champagne: Vous parlez de constituer une proposition, une équipe professionnelle en résidence avec trois mandats. J'aimerais juste vous entendre là-dessus. Je trouve que c'est une approche nouvelle, intéressante pour les régions. Alors, je parle bien sûr de l'équipe professorale en résidence.

M. Rousseau (Denis): L'équipe professorale en résidence, le premier mandat qu'on lui donne ? je retrouve mes notes: une formation... une partie de recherche. Recherche: on avait identifié des secteurs comme la PME, le commerce transfrontalier, par exemple ? on est très près des États-Unis ? ...

Une voix: ...

M. Rousseau (Denis): ...entente avec les États-Unis ? on parlait d'un collège ou d'une université américaine, donc ça, c'est une piste, et voir les retombées, dans le milieu, de cette réalité-là. Puis de former aussi. Un des mandats importants, ce serait de donner de la formation dans les baccalauréats de base. Le professeur en gestion pourrait enseigner et faire de la recherche en même temps. Ça, je pense que rapidement c'est peut-être...

Mme Champagne: ...communs aussi, là. C'est de ça, que vous parlez?

M. Rousseau (Denis): Pardon?

Mme Champagne: Les troncs communs?

M. Rousseau (Denis): Oui. Les troncs communs. En administration, par exemple: si le professeur donne un bloc en administration, on pourrait utiliser ce cours-là pour former une première année en région, ce serait peut-être une hypothèse. L'idée de tronc commun viendrait en ce sens-là.

Mme Champagne: Pour ce faire, ça prend des sous.

Le Président (M. Arseneau): Oui, Mme la députée de...

Mme Champagne: J'ai essayé.

Le Président (M. Arseneau): Je dois vous interrompre, parce que je veux aussi être juste. En terminant, vraiment brièvement, M. Jacques.

M. Jacques (Jean-Guy): Tout simplement vous remercier beaucoup de votre bonne attention et espérer que ça va avoir donné quelque chose pour la région.

Le Président (M. Arseneau): Alors, c'est moi qui vous remercie, madame, messieurs, de vous soumettre aux règles assez... très sévères même, de cette commission et pour ces discussions franches et vraiment intéressantes.

Et on va continuer à parler avec les gens de votre belle région, puisque j'appelle le Conseil consultatif de l'université en Beauce de prendre la place que vous allez laisser. Merci beaucoup. Alors donc, je suspends quelques instants.

(Suspension de la séance à 17 h 16)

 

(Reprise à 17 h 19)

Le Président (M. Arseneau): ...demander de reprendre les travaux, puisque nous devons ajourner à 18 heures. Et nous avons avec nous les gens du Conseil consultatif de l'université en Beauce. J'ai, moi, ici, M. Serge Roy, trésorier. Et j'aimerais ça peut-être que vous puissiez présenter les gens qui sont avec vous ? en tout cas sur ma feuille, je n'ai que ce nom. Peut-être que vous pouvez présenter les gens qui vous accompagnent. Et vous avez une vingtaine de minutes, là... ou, si vous préférez plus d'échanges, il faudrait qu'il y ait moins de temps de présentation, puisqu'on doit ajourner à 18 heures.

Conseil consultatif de l'université
en Beauce (CCUB)

M. Roy (Serge): ...M. le Président. Alors, directement à ma gauche, c'est Jocelyn Benoit, qui va commencer le mémoire; Mme Huguette Giroux; ainsi que M. Pierre Bégin, qui était là auparavant. Alors, immédiatement, je cède la parole à M. Jocelyn Benoit.

n(17 h 20)n

Le Président (M. Arseneau): Alors, M. Benoit.

M. Benoit (Jocelyn): Alors, merci, M. le Président. M. le ministre, Mmes, MM. les députés. D'abord, merci de nous recevoir en commission parlementaire. Nous sommes très heureux de présenter, devant cette commission le court mémoire qu'a préparé le Conseil consultatif de l'université en Beauce ? le CCUB, comme on l'appelle ? d'autant plus que nous avons constaté l'intérêt que portent les membres de cette commission à la problématique de l'accessibilité des services universitaires en région.

J'aimerais tout d'abord vous présenter les personnes qui m'accompagnent... C'est déjà fait.

Le CCUB se définit comme un organisme de veille. Il est localisé à Saint-Georges, et son principal mandat est de travailler à rendre plus accessibles et possibles, dans la région, des études et des recherches de niveau universitaire. Le CCUB regroupe un peu plus d'une vingtaine de membres, soit les organismes sensibilisés à l'importance de la diversification des services universitaires dans la région ? entre autres, le Conseil économique de la Beauce, l'UPA, les réseaux scolaires, les réseaux de la santé, la Chambre de commerce de Saint-Georges, la MRC, la ville de Saint-Georges et différents autres groupes. En plus, nous avons autour de la table un groupe d'hommes d'affaires en vue dans notre région, impliqués, et qui sont les artisans de la première heure de ce conseil.

Comme le gouvernement l'exprime dans son document Briller parmi les meilleurs, nous croyons fermement que la formation et l'éducation jouent un rôle stratégique dans le développement économique, culturel et social de nos régions, et particulièrement de la nôtre, dans une région où 80 % de la production manufacturière est exportée. Le virage technologique et les nouvelles technologies méritent évidemment un peu plus de place, et la formation universitaire est là pour... ou devrait être là pour nous permettre d'y arriver.

Dans son mémoire, le Conseil consultatif de l'université propose au gouvernement de revoir le financement des universités en région, et de redéfinir l'université québécoise selon de nouveaux paradigmes, et d'amorcer une réflexion sur l'université de demain. La révision du financement et du rôle des universités permettra de doter le Québec d'universités modernes qui répondent davantage aux véritables besoins des citoyennes et citoyens, particulièrement en région.

D'entrée de jeu, mentionnons que le CCUB constate que l'offre de service en région est trop limitée. Faute d'un nombre suffisant de candidats ? on en a parlé ? pour répondre aux exigences des partenaires universitaires dans la région, plusieurs programmes n'ont pu démarrer, avec le résultat que plusieurs individus ont abandonné leurs projets d'études. Les ratios trop élevés sont des obstacles majeurs au démarrage de nouvelles cohortes. Nous croyons ainsi que des mesures financières soutenues, des normes de formation de cohortes mieux adaptées et une plus grande autonomie légale ou administrative des centres pourraient permettre de contribuer à surmonter ces difficultés. Il en va de l'avenir même de notre région.

Selon nous, les solutions peuvent varier d'une région à l'autre. Pour ce faire, le système doit être beaucoup plus souple. Les besoins de formation en région sont criants dans plusieurs domaines ? l'administration, l'agroalimentaire, l'ingénierie, la santé ? mais, dans le cadre actuel, personne n'est en mesure d'y répondre adéquatement. Bien sûr, les ratios sont un obstacle, mais il y a aussi une question économique que l'on ne peut passer sous silence. La formation doit être rentable pour les universités partenaires ? et ça, c'était la même problématique il y a 30 ans, dans les universités au Québec, en région ? et cette situation suppose que de petits groupes ou des programmes moins exportables ne puissent jamais être offerts, faute de garantir cette rentabilité. Nous le répétons: sans une révision du mode de financement, sans des mesures financières soutenues, l'avenir de notre région nous apparaît compromis.

À notre avis, le financement des services universitaires en région devrait faire l'objet d'une enveloppe particulière. Ces montants serviraient, d'une part, à assurer une offre de cours minimale et, d'autre part, à compenser, au besoin, des universités pour les groupes-cours qui n'atteindraient pas l'autofinancement dans les secteurs clés en particulier. On estime que ces sommes, versées directement aux centres de formation et non pas aux universités, pourraient permettre de consolider l'offre de cours, d'assurer une récurrence dans l'offre de cours. Cette récurrence nous apparaît comme essentielle pour espérer développer une véritable culture de formation continue. Une région qui aspire à des travailleurs plus spécialisés doit être en mesure d'assurer l'accessibilité à des programmes de formation continue de sa main-d'oeuvre.

Si vous me le permettez, M. le Président, je céderai maintenant la parole à Mme Huguette Giroux, directrice générale du Centre hospitalier Beauce-Etchemin, qui vous parlera de la relève dans son secteur d'activité.

Mme Giroux (Huguette): Merci, M. Benoit. M. le Président, M. le ministre. Je vais juste vous faire le lien entre la relation directe qu'il y a avec le niveau d'éducation et l'état de santé d'une population, quelque chose qui m'interpelle au premier plan.

D'entrée de jeu, je positionne le volet de la santé en Beauce-Etchemin, soit environ 2 500 employés dans le futur réseau local de la santé et des services sociaux. Nos défis: le recrutement et la rétention de la main-d'œuvre ? 75 % de notre main-d'oeuvre est issue de notre population locale, tant au niveau médical que dans les autres domaines. Avoir une main-d'oeuvre suffisante en nombre et en qualité ? je ne vous parlerai pas des problèmes médicaux, cela présuppose un volet de formation nécessaire et pertinent dans notre région.

Il y a un dynamisme dans le secteur de la santé, au niveau de l'enseignement. On est des acteurs de la première heure, avec le Centre universitaire. Toujours avec le Centre universitaire, nous avons obtenu la reconnaissance de devenir une unité de médecine familiale lourde pour septembre prochain. Seulement au Centre hospitalier, cette année, nous avons eu 69 étudiants en médecine, 35 dans différentes spécialités et au-delà de 30 dans les disciplines paramédicales universitaires.

Mais il nous faut des leviers pour relever le défi énorme qui nous attend. Je vais vous donner des exemples. Pour assurer un service de qualité à la population, on ne peut être considéré comme une population de second ordre. La formation D.E.C.-bac dans nos régions, c'est un projet Beauce-Amiante-Etchemin, et le besoin de mettre... la mise en place d'une cohorte, ce dossier a été très difficile à lever, et ça a pris énormément de discussions. Il faut réussir à combiner les besoins du secteur de la main-d'oeuvre au niveau de la santé, et vous comprenez qu'il faut combiner la formation continue en cours d'emploi et il faut garantir le travail et avoir une main-d'oeuvre en quantité.

Je vous parle d'un travail... projet de travail-études pour le D.E.C.-bac. On s'est fait dire tout à l'heure que ça avancerait. Mais, vous comprenez, quand on va arriver au niveau du baccalauréat, nous, à notre niveau, on ne peut pas avoir une année de rupture de recrutement de main-d'oeuvre dans nos régions, et c'est à la grandeur du Québec, à cause de la pénurie de main-d'oeuvre qui existe. Il nous faut trouver de nouvelles voies. Et là on demande aux universités de s'adapter aux besoins des employeurs, et ça, c'est un grand défi. Au niveau de notre région, on est prêt à faire une avancée dans ce domaine-là et de s'assurer une main-d'oeuvre, surtout les fins de semaine, et d'assurer des cours sur semaine. En tout cas, il y a des pistes à explorer. On a besoin de l'ouverture des universités.

Je vous donne aussi un autre exemple. Pour réussir à donner le cours de formation en soins infirmiers, on s'est retrouvé... ce n'est pas qu'on n'avait pas de groupes, c'est qu'on n'a pas de professeurs qui viennent en région. Alors, on a dû, entre nous, démarrer un cours de deuxième cycle en andragogie, un programme court qui se termine présentement, et on a accepté dans notre programme 11 personnes, mais les employeurs ont dû compléter le financement qui manquait parce qu'on nous demandait au moins 22 étudiants. Ce petit noyau ? c'est juste pour vous dire le levier que ça donne ? juste dans notre coin de pays, sur les 11, il y en a sept qui relèvent... qui viennent de notre coin de pays. Et on est en train d'organiser une formation de deuxième cycle pour développer notre autonomie en région. Alors, ce groupe-là va nous permettre de faire lever probablement un groupe qu'on espère de 20, parce que, sinon, vous comprenez qu'on ne peut pas se permettre des années sans formation continue dans nos centres.

L'engagement dans la recherche. Nous faisons de la recherche. Nous avons une recherche expérimentale, là, justement sur l'identification du chromosome de la schizophrénie, chez nous, un projet de recherche avec le Centre universitaire de l'Université Laval. C'est juste pour vous dire que le dossier recherche est aussi quelque chose qu'il faut considérer dans nos régions. Nous n'avons pas l'image d'un centre urbain, nous n'avons pas la même réalité, et nos réalités devraient être intéressantes pour permettre de faire des recherches cliniques dans nos milieux. Alors, comme on dit, ce n'est pas la volonté qui manque, c'est vraiment de trouver les bons partenaires pour permettre à cette recherche-là de prendre essor.

n(17 h 30)n

Plusieurs autres liens existent, notamment au niveau de la gestion, et pensez à la relève des cadres. Je vous ai parlé de la nouvelle entité qui doit naître sous peu. Alors, c'est un grand défi pour nous. On devra avoir des gens compétents, des gens formés et prêts à relever les défis. Mais, pour cela, la région doit avoir les marges de manoeuvre nécessaires pour assurer notre pérennité au niveau de la santé.

M. Benoit (Jocelyn): M. le Président, je vais passer la parole à M. Pierre Bégin, qui aujourd'hui remplace M. Roger Carette, maire de ville Saint-Georges, qui s'excuse, étant retenu par les obligations municipales.

Le Président (M. Arseneau): M. Bégin, rebienvenue à notre commission.

M. Bégin (Pierre): M. le Président, je n'ai pas la prétention d'être et de pouvoir accomplir ce que M. Carette aurait pu vous livrer comme message, mais je vais faire de mon mieux.

Nous croyons qu'il faut redéfinir le modèle de l'université québécoise, à tout le moins en région. Il faut faire davantage, ce qui ne signifie pas nécessairement coûts plus élevés. Il faut faire autrement. Le système universitaire québécois doit explorer de nouvelles façons de faire qui garantiront un service de proximité accru. Service de proximité égale augmentation du potentiel de formation universitaire.

Le changement ne peut s'opérer de l'extérieur, il doit prendre forme dans les régions. À titre d'exemple ? vous comprendrez que M. Carette ne pouvait pas ne pas nommer le CIMIC ? en créant le CIMIC, le Centre intégré de mécanique industrielle de la Chaudière, au début des années quatre-vingt-dix, les intervenants du monde de l'éducation et la ville de Saint-Georges ont été des précurseurs au Québec et même au Canada. Le milieu est sorti des sentiers battus, avec les résultats que vous connaissez. Le CIMIC est devenu modèle qu'on cherche à imiter.

Et c'est exactement le même genre de défi que nous souhaitons, comme région, relever en créant une institution universitaire, pas nécessairement autonome, nouveau genre surtout, une université carrefour, une université ouverte aux partenariats, qui aura besoin des partenariats, une université ouverte aux collaborations interniveaux, une université ouverte aux collaborations intersectorielles, une institution universitaire qui offre des solutions alternatives de formation, pas nécessairement des solutions toutes prêtes, non pas en compétition avec les universités québécoises existantes pour le nombre d'étudiants, pour les ressources ou pour des subventions.

En ce sens, nous proposons au gouvernement de commander une étude exhaustive de l'évolution des universités de par le monde. Il y a peut-être, dans certains endroits du monde, des modèles sur lesquels on pourrait s'inspirer pour développer un modèle dans la région. On ne dit pas que la formule du CIMIC est une formule magique. On s'en inspire, mais on veut également s'inspirer de ce qui se fait ailleurs afin de pouvoir créer dans le milieu un modèle universitaire transformé, non pas tourné vers lui-même, mais ouvert aux réalités des régions et aux besoins propres à chaque individu.

M. Benoit (Jocelyn): En conclusion, M. le Président, nous n'avons pas la prétention de posséder la recette magique. Nous avons cependant la conviction qu'avec la volonté qui nous anime et des mesures gouvernementales mieux adaptées à notre réalité nous serons en mesure de développer davantage de services et ainsi mieux répondre aux défis de l'avenir. Une région comme la nôtre a autant besoin que les autres régions du Québec d'une structure minimale de services aux trois ordres d'enseignement.

En terminant, j'aimerais simplement porter à votre réflexion la question suivante: sommes-nous rendus, en 2004, à faire enfin un pas de plus vers la décentralisation, démocratisation et accessibilité de l'enseignement universitaire en région, le premier pas ayant été fait avec la création du réseau des UQ à la fin des années soixante, au début de soixante-dix? Le pas suivant, c'est d'aller un peu plus loin dans un modèle moderne et très bien orienté vers les populations. À vous tous, merci.

Le Président (M. Arseneau): Merci beaucoup. Merci beaucoup, M. Benoit, Mme Giroux, M. Bégin. Il nous reste à peu près 25 minutes, si je comprends bien. Donc, on va faire deux blocs de 15... de 12. On a beaucoup entendu parler, encore cet après-midi, de...

Mme Marois: ...

Le Président (M. Arseneau): De 12... oui, d'accord, 12 min 30 s. Merci beaucoup, Mme la députée de Taillon. Il a été beaucoup question encore une fois, cet après-midi, des régions, de leurs réalités, en particulier de la région de Chaudière-Appalaches. Il est question toujours d'accessibilité et d'enveloppes particulières, M. le ministre. M. le ministre de l'Éducation, vous avez la parole.

M. Reid: Merci, M. le Président. D'abord, je voudrais souhaiter la bienvenue à nos invités du Conseil consultatif de l'université en Beauce et répondre, en partie du moins, à votre question: est-ce que nous sommes prêts à aller plus loin dans la décentralisation? C'est ce que notre gouvernement souhaite. Maintenant, nous vous écoutons attentivement et nous écoutons tous les groupes qui sont venus nous rencontrer pour essayer de voir quelle est la meilleure façon qui soit compatible évidemment avec les situations particulières que le Québec vit, tant au niveau de sa démographie qu'au niveau évidemment des finances publiques.

J'ai une question que je voudrais poser, mais je vais en poser une autre avant. La question que je voudrais poser, s'il me reste du temps, c'est de profiter du fait qu'on ait avec nous un ancien directeur général de collège pour nous ramener un peu sur cette question dont on a parlé un peu plus tôt avec le premier groupe, à savoir: est-ce que le collège pourrait être une espèce d'élément cristallisateur d'un centre de services un peu plus autonome, etc.?

Mais, avant de poser cette question-là, je voudrais revenir sur un élément peut-être un peu plus technique et j'espère qu'on aura le temps de vous donner la parole, M. Benoit. Les universités, beaucoup sont venues ? je pense qu'on n'a peut-être pas terminé, mais on a presque entendu toutes les universités ? et ont parlé de cette nécessité d'offrir... ou de permettre... ou de donner aux universités des moyens financiers qui tiennent compte des particularités régionales et notamment ? et c'est revenu souvent ? des masses critiques d'étudiants pour être capables d'avoir un seuil de rentabilité, entre guillemets, là, un seuil de non-déficit du moins, quand on donne des cours. Et, de votre côté ? et c'était vrai aussi pour d'autres groupes ? on parle de la même problématique mais dans un contexte où ce n'est pas uniquement une université seule qui offre des cours, dans un contexte où il y a un centre présent dans une région.

Et en fait, moi, ce que je constate, c'est que, dans les deux cas, on parle d'ajouter des éléments financiers. Dans un cas, on dit, dans le cas des universités: Bon, il faudrait avoir des sommes dans les universités pour pouvoir offrir à distance ? ou dans la région où nous sommes ou dans les régions que nous desservons ? de pouvoir offrir des formations lorsque la masse critique n'est pas la même qu'habituellement. Et, de votre côté, vous demandez que ces sommes transitent ? pour les mêmes motifs, ce que je comprends, là ? transitent plutôt par le centre lui-même, qui, lui-même, verrait à compléter le financement qui est nécessaire dans les universités. Est-ce qu'il y a effectivement deux possibilités ou si on parle de la même chose, là, que l'argent transite dans un endroit ou un autre, on parle de... et ça ne pose pas de problème, l'un ou l'autre, ou s'il y a des avantages à l'un plutôt qu'à l'autre?

Le Président (M. Arseneau): M. Benoit.

M. Benoit (Jocelyn): Si vous permettez, je pense que c'est important qu'une partie de cet argent-là transite directement par les régions. L'autonomie des régions, on en a parlé. J'ai eu l'occasion, dans ma carrière, de faire plusieurs groupes régionaux. Ça nous prend, au niveau de la région, un minimum. Parce qu'il est évident, pour avoir été directeur de cégep, comme vous dites, la loi des grands nombres a toujours un avantage. Alors, dès que tu as une enveloppe nouvelle, tu vas trouver le moyen d'en disperser à tes amis, puis les gens qui sont plus loin en ont moins. On prend, par exemple, le service d'orientation, les espaces, c'est tout justifié, le service d'admission.

Ce qui est fondamental dans la demande qu'on fait, et ça peut se faire à travers des normes... Si on a, par exemple ? je prends un exemple, là ? un ratio de 1 par groupe d'étudiants à l'Université de Montréal ou à l'Université Laval, peut-être qu'en région le ratio de financement d'étudiants pourrait être de 1,4, 1,5. C'est à travers la norme, mais ça va être affecté à.

Bon. Je prends un exemple. Je regarde le président de la commission. Il a travaillé dans un cégep, il me semble, déjà ou près d'un cégep jadis. En région éloignée, il y avait des ratios. Donc, si on avait des ratios pour les groupes d'étudiants, un ratio de base différent pour l'encadrement...

Tout à l'heure, nos collègues ont parlé de l'importance d'avoir sur place des professeurs résidents. J'ai eu l'occasion de le vivre en d'autres circonstances ? je vais aller rapidement ? à la mise en place d'un centre d'études collégiales dans une région qui était la vôtre, M. le ministre, avant l'Estrie, à Lac-Mégantic, et c'était fondamental d'avoir deux ou trois profs qui étaient là à plein temps sur une base régulière. On n'a pas ça.

Dans ma carrière, j'ai eu l'occasion d'être chargé de cours dans deux universités, dont celle de Sherbrooke et l'UQAM. Tu es chargé de cours, tu n'as pas le maximum d'heures... Alors, ce qu'on demande, c'est d'avoir des normes ? puis ça s'apprend, ça ? qui ne sont pas financièrement très coûteuses.

On est plusieurs régions au Québec. Je pense au modèle de la Montérégie actuellement. Je pense qu'il y en a qui le savent, là, le succès de Sherbrooke à Longueuil. Sherbrooke est à Granby, il y a un bassin de population. Nous, on ne l'a pas, la Côte-Nord ne l'a pas, la région de Lanaudière ne l'a pas. Il y a du travail à faire de ce côté-là, et ça fait ? quand je vous disais: êtes-vous prêts à faire le pas? ? depuis le milieu des années soixante-dix que ces régions-là crient: On a besoin de services, on a besoin de... Je pense qu'il faut une enveloppe régionale, il faut revoir avec les universités certains paramètres au niveau des normes, mais ça nous prend un minimum vital.

n(17 h 40)n

Le Président (M. Arseneau): Mme la députée de Maskinongé.

Mme Gaudet: Une question complémentaire, M. le Président.

Le Président (M. Arseneau): Oui, bien sûr.

Mme Gaudet: J'aimerais que vous nous disiez quel est votre bassin d'étudiants potentiels. Et à combien d'élèves ou d'étudiants donnez-vous un service, une formation?

M. Benoit (Jocelyn): Je vais demander à M. Bégin parce qu'il est plus au fait que moi, là.

Le Président (M. Arseneau): M. Bégin.

M. Bégin (Pierre): Ce que je pourrais vous donner, sur le territoire de Beauce-Etchemin-Amiante, le bassin de population...

Mme Gaudet: Étudiante, là, possible?

M. Bégin (Pierre): Je peux vous donner... Le bassin de population, c'est 175 500, à quelques unités près. Alors, si on fait la proportionnelle que... Faisons l'hypothèse que c'est 20 %, ça peut vous donner l'indication, là, du bassin potentiel. L'expérience des cinq dernières années où j'ai été directeur général du Centre universitaire, recruter sur le territoire 20, 21, 22, 23 étudiants, c'est jouable, sauf que recruter 35 étudiants pour des formations qui répondent à des besoins du milieu, ça veut dire faire des cycles de deux ans, trois ans, de sorte que, quand tu es en fin de cycle, les premiers qui avaient manifesté intérêt ont passé à d'autre chose, de sorte que... bon, se sont engagés dans d'autres éléments sur le plan du marché du travail et ne deviennent pas des éléments... des gens en formation continue.

Donc, le bassin des deux cégeps peut être une autre indication. Je dirais autour de 2 000 étudiants à peu près, là. Alors, si on divise le technique versus le professionnel, je vous dirais, peut-être un bassin de 500, 600 étudiants. Sauf qu'il serait à notre avis une erreur de considérer uniquement les 18-24 ans. Notre perspective de formation universitaire vise, dans un nouveau contexte, à la fois les 18-24 ans et les 24 jusqu'à la retraite, ce qui fait en sorte que ce nouveau bassin là est beaucoup plus élevé, là, que le 20 % que je vous mentionnais.

Mme Gaudet: Merci... Non, ça répond. Merci.

Le Président (M. Arseneau): Vous avez encore du temps, il reste trois, quatre minutes. M. le député de Charlesbourg.

M. Mercier: M. le ministre, allez-y.

M. Reid: C'était uniquement pour donner peut-être la possibilité à M. Benoit de répondre à cette question que je n'ai pas posée finalement...

M. Benoit (Jocelyn): ...d'y répondre.

M. Reid: ...sur le rôle possible des cégeps dans l'évolution d'un centre universitaire.

M. Benoit (Jocelyn): En peu de mots, avec le peu de temps, juste rappeler aux membres de la commission qu'à deux ou trois reprises, dans les commissions parlementaires sur l'éducation, soit dans le cadre des états généraux, soit dans le cadre de la commission parlementaire aux états généraux sur la formation professionnelle et technique, le cégep où j'étais, qui était Beauce-Appalaches, avait déposé, en ses mémoires, à chacune des reprises, un projet de collège universitaire bilingue. Pour réussir l'arrimage collège-université, je pense que les expériences qu'on a vécues chez nous, avec le CIMIQ, le Centre d'études collégiales de Lac-Mégantic et mon expérience personnelle antérieure avec le Centre d'études collégiales de Mont-Laurier... il y a quatre ingrédients qui me paraissent fondamentaux.

Le non-corporatisme des institutions. Si on s'embarque à essayer de voir: ça, c'est mon petit territoire, mon petit carré de sable, c'est le voisin, c'est voué à l'échec.

Le respect des besoins des individus et des organismes. Exemple, moi, que j'ai vécu et qui m'est apparu très porteur: quand on a créé le Centre d'études collégiales Lac-Mégantic, c'est avec nos gens d'affaires, nos gens des groupes communautaires, nos gens des groupes sociaux, les parents et les étudiants. Et, après ça, on disait au ministère: Bien, regardez, on est rendus là, on est-u capables de faire de quoi? Une bonne complicité aussi avec les gens du ministère.

La concertation régionale. Il ne faut pas avoir des programmes... On a parlé tout à l'heure de programmes ici. Il faut avoir des programmes qui répondent à des besoins de notre région. Dans le moment, dans Chaudière-Appalaches, particulièrement dans l'arrière-pays ? je pense à Beauce-Amiante-Etchemin ? 80 %, c'est de l'exportation. Il faut faire de quoi. On n'a pas pris le virage technologique.

Ce matin, dans ma nouvelle vie, j'avais un téléphone d'un de mes clients, qui dit: On vient de tirer sur la plug. C'est 75 emplois au moins. M. le député, vous le savez. Alors...

Et l'autre: la recherche de solutions, parfois à travers les normes. Il y a des normes, au ministère, on ne peut pas dire... Il faut les bardasser. J'ai souvenance d'avoir travaillé avec M. Carette, quand on a mis le CIMIC en place ? j'étais au collège, j'étais à la commission scolaire ? on a frappé à des portes, au ministère, puis c'était non parce que les normes ne convenaient pas. Mais on s'est assis avec les gens du ministère, avec des sous-ministres, des directeurs, des hauts fonctionnaires et on a trouvé des solutions. Ouverture, recherche de solutions, parfois normées parce qu'on ne veut pas être débridés, de la concertation régionale, le respect des besoins individuels.

Et, concertation, là, il faut sortir des palabres. J'ai lu plusieurs mémoires à date où il faudrait puis il faudrait... Je reviens à ma question de tout à l'heure: est-ce qu'on est prêts à aller plus loin que les UQ, que les collèges, que les polyvalentes au tournant des années soixante-dix? Est-ce qu'on est prêts à se donner un réseau d'éducation moderne?

Et regardez ? parce que c'est dans mon alma mater ? j'ai l'occasion de lire régulièrement ? je ne veux pas vendre une université plus qu'une autre, là ? la revue Sommet de l'Université de Sherbrooke, tout ce qui se fait de créatif, de novateur à partir des anciens, puis il s'est fait du développement. Donc, je pense qu'on est capables en région. Puis les collèges non corporatistes, les universités non corporatistes, parce que ça demeure l'enseignement supérieur au Québec, pourraient faire de quoi avec d'excellentes contributions de commissions scolaires.

Le Président (M. Arseneau): Merci, M. Benoit. Un complément bref, M. Bégin, et...

M. Bégin (Pierre): Très brièvement, M. le Président.

Le Président (M. Arseneau): Un complément pour la recette. Très intéressant. Juste un instant, je veux souligner qu'il y a une personne qui est très intéressée, avec nous, dans l'audience. Il y a la députée de Beauce-Sud aussi qui est avec nous et qui écoute très attentivement. Allez-y, M. Bégin.

M. Bégin (Pierre): Très rapidement, j'ajouterais l'élément suivant: de mon point de vue, ça ne doit pas être une formule toute faite; ça doit être une solution émergente. Donc, faire en sorte que ce soit une nouvelle institution panquébécoise, ça deviendrait, à ce moment-là, je dirais, un empêchement important parce que ça rejoint ce que M. Benoit... À partir du moment où c'est émergent, il y a un minimum de concertation dans le milieu, et ça fait référence à la partie du texte que j'ai livré de M. Carette. La solution doit partir de l'intérieur.

Le Président (M. Arseneau): 12 min 30 s, finalement. Alors, je vais laisser la parole à la députée de Taillon, porte-parole de l'opposition officielle en matière d'éducation.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Alors, je vous souhaite la bienvenue à mon tour et vous remercie de votre présentation et des échanges que nous pouvons avoir avec vous.

Moi, je veux revenir sur des choses très, très concrètes et pratiques, dans un premier temps, puis après ça vous amener sur un autre terrain, que vous proposez d'ailleurs et qui peut peut-être nous faire rêver à la suite des choses.

Bon. D'abord, dans les propositions que vous faites, vous dites: Nous proposons deux solutions aux problèmes évoqués. Vous en avez fait la démonstration. Vous dites: «Le financement des services universitaires en région devrait [...] faire l'objet d'une enveloppe particulière; [...]compenser...» Bon, on dit: Assurer une offre de cours minimale, bon, etc. Mais ce n'est pas là mon propos. Vous continuez en disant: «On estime que ces sommes, versées directement aux centres de formation et non pas aux universités, pourraient ? leur ? permettre de consolider l'offre de cours, d'assurer une récurrence dans l'offre de cours», etc.

Donc, votre proposition vise à ce que les sommes soient versées directement à une institution que vous identifieriez. Il y a des gens qui sont venus avant vous. Je pense au Centre universitaire des Appalaches, avant vous, la Corporation universitaire. L'un de vous fait partie du Centre universitaire des Appalaches. Alors, est-ce que ce que vous nous dites finalement, c'est: Ne passez pas par les universités existantes, mais reconnaissez-nous quelque part dans une institution, et on veut avoir les fonds directement?

M. Benoit (Jocelyn): Vous avez très bien compris. Il y a évidemment un besoin de sommes directement versées à la région à travers un organisme, à travers des paramètres aussi qui sont... Pas tirer l'argent pour tirer de l'argent, là, mais d'être capable d'avoir des paramètres clairs qui donnent à la région un minimum d'oxygène pour pouvoir se développer.

Mme Marois: Et cette institution-là, est-ce que ça pourrait être le Centre universitaire des Appalaches ou une autre institution du réseau déjà implantée?

M. Benoit (Jocelyn): Il faut absolument que ce soit un des organismes existants, là. On ne créera pas pour le plaisir de créer, mais, compte tenu de la région, ce pourrait être la Corporation des services universitaires...

Mme Marois: D'accord.

M. Benoit (Jocelyn): ...qui couvre l'ensemble du territoire.

Le Président (M. Arseneau): M. Bégin.

n(17 h 50)n

M. Bégin (Pierre): ...peut-être pour préciser et... bien comprendre à la députée de Taillon que ce ne sont pas la totalité des sommes de l'enseignement universitaire. Dans ce qui est proposé, la partie de financement régulier de l'enseignement demeure toujours aux universités, sauf que, je dirais, le différentiel entre une cohorte payante et une cohorte moins payante pourrait faire en sorte que ça génère un peu d'oxygène pour des cohortes moins nombreuses, de sorte qu'il ne faille pas toujours utiliser le fonds ou des sommes particulières quand... Je pense à une certaine forme d'équilibre. Parce que, actuellement, dans la formation du Centre universitaire, quand il y a une difficulté, c'est l'université qui a la difficulté qui doit l'absorber, il n'y a pas de mesures particulières. Donc, la partie qui permettrait de rendre plus alléchante ou plus facile à financer l'activité de formation universitaire serait dans la région.

Mme Marois: D'accord. Bon, je pense que ça vient quand même préciser un certain nombre d'éléments. Bon, là où on commence à rêver un peu, c'est quand vous faites ce parallèle et que vous faites une proposition pour une université nouvelle, hein? Dans votre mémoire, vous dites: Voilà quelle est la définition ou du moins les caractéristiques de l'université traditionnelle, et ensuite vous nous faites un long tableau sur l'université nouvelle. Je vous donne juste un exemple. On dit: Enseignement parfois négligé; recherche souvent privilégiée; formation continue, limitée à certaines facultés... Ça, c'est l'université traditionnelle. On regarde l'université nouvelle: Formation, au sens d'apprentissage du terme ? vous me rappelez ma propre formation universitaire en faisant référence à Piaget ? sur toute la durée de la vie; recherche en vue du développement durable du milieu, etc. Et là vous faites rappel du concept de l'apprentissage andragogique, là, centré sur des problématiques réelles de l'organisation d'appartenance, etc.

Quand je lis ça, j'ai l'impression de me retrouver devant un projet d'université continue, hein, d'université qui va offrir de la formation, c'est-à-dire, pardon, continue, et qu'on sort vraiment de l'université traditionnelle, comme vous le dites, qui offrirait des services aux jeunes avec quelques extensions pour les services à la collectivité ou les services aux adultes. Là, vous dites vraiment: C'est une université centrée sur l'ensemble de la collectivité. Et vous êtes assez audacieux dans les concepts que vous avez développés là. J'aimerais vous entendre deux minutes puis après j'ai une toute petite question plus technique.

M. Benoit (Jocelyn): ...Bégin.

Le Président (M. Arseneau): M. Bégin, allez-y.

M. Bégin (Pierre): Oui. Les éléments qui sont donnés, en fait le travail que nous avons déposé, là, en commission parlementaire, c'est un peu comme deux visions, un, de ce qu'est avec ses limites l'université traditionnelle et, deux, de ce que pourrait être l'université nouvelle ou, pour ce qui est de notre région, on ne parle pas d'université, on parle d'institution universitaire, en pesant bien les mots parce que, peu importe ce que ce sera, on ne croit pas que ce soit une université au sens connu de l'université. Donc, les éléments qui sont donnés là sont des éléments qui viennent alimenter la réflexion qu'il faut terminer pour en arriver à un produit, à une institution universitaire qui soit, oui, d'une part suffisamment souple pour pouvoir se renouveler comme institution. Ça, c'est le premier élément.

Le deuxième élément, c'est une institution qui soit suffisamment souple pour se centrer davantage sur les besoins des individus que sur la capacité à court terme de donner du travail aux personnels qui sont en place dans les départements. Ou, tout simplement, une pratique qui est trop souvent décriée, c'est celle d'essayer d'appliquer à un groupe en formation la même recette qui peut avoir été utilisée à d'autres groupes en formation. Donc, c'est difficile pour nous de vous dessiner un projet qui est fixe. C'est un peu comme un embryon qui est en réflexion, et ce que l'on offre à la commission parlementaire, c'est de poursuivre la réflexion, aller voir qu'est-ce qui se fait ailleurs dans le monde pour faire en sorte que la formule qui soit utilisée ne soit pas une formule statique, mais qui soit un peu comme une formule d'organisation apprenante, si je peux me permettre de parodier Peter Senge.

Mme Marois: C'est très intéressant. Je veux juste ajouter un commentaire en fait parce que monsieur l'a abordé: dans votre mémoire, dans le mémoire aussi, vous suggérez qu'il y ait une étude faite par le ministère de l'Éducation concernant l'évolution et les initiatives des universités de par le monde, et «qu'il s'engage ? en parlant du ministère ? à rendre accessibles les conclusions de cette étude avant d'amorcer un chantier de réingénierie de l'enseignement supérieur, qui pourrait être une suite logique aux vastes chantiers qui sont en marche au primaire et au secondaire». Bien, c'est intéressant. Dans le fond, moi, j'aimerais bien qu'effectivement une telle étude puisse se faire. Ça pourrait étayer votre proposition d'une université nouvelle et peut-être permettre de l'appliquer concrètement parce que c'est intéressant, ce que vous soulevez comme approche, et comme vision, et comme perspective.

M. Bégin (Pierre): Juste «institution universitaire».

Mme Marois: Institution universitaire, j'ai bien compris. Merci.

Le Président (M. Arseneau): Alors, je comprends que c'est un commentaire positif de la part de la députée de Taillon et je vais céder la parole immédiatement au député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Merci, M. le Président. Alors, rebonjour. Moi, je me pose la question, je ne vous la pose même pas, là, mais je me dis: est-ce qu'on a le choix, comme le gouvernement ou comme société, de ne pas s'organiser pour former le plus de gens possible et le plus rapidement possible? On fait face présentement, on fait face à une compétition féroce. Ce n'est plus de notre voisin, là, c'est rendu... c'est l'Asie, c'est l'Afrique, c'est l'Inde. On est devant une compétition très féroce, et puis il faut, moi, d'après moi, s'organiser pour former nos gens pour aller dans des produits à valeur ajoutée le plus rapidement possible. On va passer à côté du bateau, on va avoir des problèmes. Puis c'est une réflexion.

Puis, je me dis, c'est sûr qu'il ne faudrait pas non plus comparer les villes, les grandes villes avec les régions. On se sert souvent du même barème, puis ce n'est pas... Je pense que souvent les régions, dans plusieurs cas, les régions aident beaucoup les villes. On paie, les régions, on paie pour le transport en commun de la ville de Montréal, puis ça fait bien longtemps, puis on paie pour le Stade olympique, puis on paie pour bien des affaires. Mais, quand on arrive pour dire: on veut avoir une formation universitaire, on s'en va sur les mêmes critères. Alors, on pourrait peut-être assouplir les critères en région, comparer que, de temps en temps, les régions paient pour les villes. Peut-être que les villes pourraient être un petit peu plus gentilles avec nous autres, d'autant plus qu'en région, dans le moment présent, qu'est-ce que vous avez proposé aujourd'hui comme approche, ce n'est même pas investir dans du ciment, ce n'est pas investir dans des structures ? les structures sont là, on utilise les structures qui ne servent plus ou qui sont disponibles ? c'est investir dans le savoir. Et puis, moi, je... Ce n'est pas une question mais en tout cas, si vous voulez en rajouter, moi, c'est ma vision des choses. Je trouve que vous avez apporté une nouvelle orientation aujourd'hui, ici, puis c'est très bien.

Le Président (M. Arseneau): C'est un appui très net que vient de vous donner le député de Beauce-Nord. Si vous voulez construire sur cette base, vous avez encore 1 min 30 s.

M. Benoit (Jocelyn): Alors, le 1 min 30 s, on va d'abord le prendre pour remercier la commission parlementaire, M. le Président, M. le ministre et MM. et Mmes les députés, et de vous inviter à penser que notre région pourrait être un incubateur extrêmement riche pour expérimenter une université nouvelle. Le dynamisme des gens de Chaudière-Appalaches, particulièrement de Beauce-Etchemin-Amiante, la synergie qu'il y a entre nous... Et ce qui m'apparaît extrêmement important dans notre région, c'est que le secteur manufacturier, qui est une pierre angulaire du développement du Québec... on a plein de PME. Je regarde ? puis j'ai l'occasion de travailler présentement dans la région de l'Amiante ? renaître la région de l'Amiante avec de la PME, pas avec des mines. Je regarde en Beauce actuellement, la PME, c'est la force. On regarde Les Etchemins et tout le secteur touristique, récréotouristique.

Avec ce qu'on vous dépose aujourd'hui, notre invitation est la suivante: on est prêts à s'engager à être un incubateur d'une nouvelle université, et, ce matin, ma réflexion est simple. Je le voyais dans Le Soleil, le taux de passage, le taux de réussite des garçons au secondaire, qui est beaucoup plus faible que les filles, je me dis: est-ce que ? puis là je me parle à moi, là ? 35 ans dans l'éducation, on aurait fait autant d'échecs que ça? Merci.

Le Président (M. Arseneau): Merci beaucoup, M. Benoit, madame, messieurs, et je vous remercie beaucoup. Je pense que, à l'invitation que nous faisait M. Bégin, à la commission parlementaire, de poursuivre notre réflexion, d'aller plus loin, je pense que cet après-midi les gens de Chaudière-Appalaches nous ont certainement donné beaucoup de matériel et de contenu pour que justement nous puissions aller plus loin.

Alors, j'ajourne nos travaux jusqu'au mercredi 24 mars, à 9 h 30. Merci à tous.

(Fin de la séance à 18 heures)


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