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Version finale

36e législature, 2e session
(22 mars 2001 au 12 mars 2003)

Le jeudi 28 novembre 2002 - Vol. 37 N° 43

Consultations particulières sur le projet de loi n° 124 - Loi modifiant la Loi sur le Conseil supérieur de l'éducation et la Loi sur l'instruction publique


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Table des matières

Remarques préliminaires

Auditions

Remarques finales

Autres intervenants

 
Mme Madeleine Bélanger, présidente
M. Claude Cousineau, président suppléant
Mme Solange Charest, présidente suppléante
Mme Margaret F. Delisle
M. Lawrence S. Bergman
* M. Ron Paterson, ACSAQ et ADGESBQ
* M. John Cyr, idem
* M. Léo La France, idem
* M. Jeff Polenz, idem
* Mme Diane Miron, FCPQ
* Mme Édith Samson, idem
* Mme Monique Richard, CSQ
* Mme Johanne Fortier, idem
* M. Pierre Bouchard, idem
* M. Denis Roy, ADIGECS
* M. André Garon, idem
* Mme Pâquerette Gagnon, idem
* M. André Caron, FCSQ
* M. Réjean Morel, idem
* M. Ronald Gauthier, CSN
* Mme Caroline Senneville, idem
* M. Serge Rodrigue, AAEAQ, AMDES et AQPDE
* M. Jacques Delfosse, idem
* Mme Diane Bertrand, FQDE
* M. Raymond Gilbert, idem
* M. Paul Famelart, idem
* M. Jacques Seminaro, ACSQ
* Mme Ardèle Warr, APEQ
* M. Alan Lombard, idem
* Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Onze heures vingt-trois minutes)

La Présidente (Mme Bélanger): Constatant que nous avons quorum, la commission de l'éducation débute ses travaux. La commission de l'éducation est réunie afin de tenir des consultations particulières à l'égard du projet de loi n° 124, Loi modifiant la Loi sur le Conseil supérieur de l'éducation et la Loi sur l'instruction publique.

Est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Aucun remplacement, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, l'ordre du jour. C'est que nous sommes un peu en retard. Il va y avoir les remarques préliminaires, 15 minutes pour le ministre, 15 minutes pour le critique de l'opposition, pour ensuite recevoir l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec et l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires anglophones du Québec, qui sera suivie de la Fédération des comités de parents du Québec; et, à 13 heures, nous allons suspendre, pour reprendre à 15 heures avec la Centrale des syndicats du Québec; 15 h 45, l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires du Québec; 16 h 30, Fédération des commissions scolaires du Québec; 17 h 15, la Fédération des syndicats nationaux, pour suspendre nos travaux à 18 heures et reprendre à 20 heures avec l'Association des administrateurs des écoles anglaises du Québec et l'Association montréalaise des ? j'ai des problèmes avec mes verres ? des directions... du personnel de direction des écoles et la Fédération québécoise des directeurs et directrices d'établissement d'enseignement. Ça va? À 21 h 30, l'Association des cadres scolaires du Québec, puis, 22 h 15, l'Association provinciale des enseignantes et des enseignants du Québec; puis, il y aura, à 23 heures, des remarques finales.

Remarques préliminaires

Alors, M. le ministre, vous avez la parole.

M. Simard (Richelieu): Merci, Mme la Présidente. Je ne vous demanderai pas de lire vous-même mon texte.

La Présidente (Mme Bélanger): Non, sûrement pas, ou bien passez-moi vos verres.

M. Sylvain Simard

M. Simard (Richelieu): Nous sommes réunis aujourd'hui à l'occasion des consultations particulières sur le projet de loi n° 124, qui est la Loi modifiant la Loi sur le Conseil supérieur et la Loi sur l'instruction publique. Ces consultations nous permettront d'échanger sur les implications multiples du projet de loi.

En matière d'éducation, le Québec a fait le choix de l'accessibilité. Nous avons ouvert grandes nos portes pour accueillir tous les jeunes Québécois et Québécoises dans nos écoles. Jadis réservée à une élite, l'éducation n'est plus un privilège, elle est accessible à toutes et à tous. C'est un très beau legs de la Révolution tranquille. Toutefois, si notre système d'éducation est une belle réussite, il a aussi ses lacunes. Sur le chemin de la réussite scolaire, nous perdons des passagers et beaucoup n'arrivent pas à destination. En effet, nous avons constaté qu'un trop grand nombre de nos tout-petits redoublent au primaire, que beaucoup trop de nos adolescentes et surtout de nos adolescents, malheureusement, décrochent au secondaire. Il fallait agir et nous avons agi. Partout, les acteurs de l'éducation ont retroussé leurs manches.

Bien entendu, le système scolaire est toujours aussi accessible. Cependant, la réforme en cours consacre une augmentation des exigences envers les élèves, une refonte du curriculum mais aussi une vive détermination à favoriser la réussite de tous. Pour reprendre ma métaphore de tout à l'heure, nous voulons conduire nos passagers jusqu'à la gare du succès. Il y va de l'épanouissement et de la réalisation personnelle de chaque individu mais aussi du développement du Québec tout entier. Et, en effet, il ne faut pas oublier que la réussite éducative embrasse les trois missions de l'école: instruire, socialiser et qualifier. Les trois missions, c'est ça, la réussite éducative.

Avant d'accueillir le fruit de vos réflexions et d'engager les échanges sur le projet de loi n° 124, j'aimerais rappeler les principaux changements qu'il implique et le contexte dans lequel ils s'inscrivent. Deux engagements majeurs ont été pris à l'occasion du Sommet du Québec et de la jeunesse tenu au printemps de l'an 2000: l'éducation doit être au coeur des priorités du Québec et la réussite éducative de 100 % des jeunes, en fonction de leurs aptitudes et de leur potentiel, doit être l'une de nos principales préoccupations.

Dans la foulée du Sommet, un réinvestissement substantiel a été fait dans les réseaux de l'éducation. Il était assorti de l'engagement pour chacun des établissements à définir un projet éducatif et à produire un plan de réussite en fonction d'objectifs et à rendre publics les résultats atteints. Depuis deux ans, les établissements ont adopté des plans pour accroître la réussite de leurs élèves. Le ministère de l'Éducation a fourni des données précises à tous les établissements, leur révélant ainsi la situation des jeunes qui les fréquentent. En tenant compte de leur réalité propre, les écoles et les centres de formation ont élaboré des mesures d'intervention adaptées à leur réalité, afin d'améliorer la réussite, et ils ont fixé des objectifs à atteindre. Toutefois, force est de constater que ces établissements n'ont pas répondu d'une façon égale: ils n'ont pas tous mis à contribution leur conseil d'établissement dans le cadre d'une reddition de comptes; certains conseils d'établissement ont rendu public leur plan de réussite, ont fait connaître les moyens mis en place et leur évaluation des résultats obtenus. Par ailleurs, les commissions scolaires ont senti le besoin de se situer comme soutien à leurs établissements et de se doter elles-mêmes d'un plan stratégique servant à faire des choix d'orientations compte tenu des fonctions et pouvoirs qui leur sont dévolus et rendre compte des résultats atteints.

n (11 h 30) n

Pourquoi donc légiférer? Le présent projet de loi a comme objectif d'assurer la pérennité, la continuité dans le temps, la suite de l'opération qui a mobilisé tous les acteurs de l'éducation depuis maintenant deux ans. Les plans de réussite découlant des projets éducatifs sont des leviers pour surmonter les obstacles et créer des conditions favorables à la persévérance et à la réussite de tous les élèves. Cette démarche éducative est bien engagée ? il faut le dire, elle est bien engagée ? et suscite une forte adhésion. Il nous faut maintenant ? et c'est pour cela que nous sommes réunis ? établir les assises légales de cette pratique. Elles permettront d'amener tous les établissements à produire un plan de réussite et à toutes les commissions scolaires d'élaborer un plan stratégique, et ainsi à rendre compte à la population des résultats obtenus en fonction des objectifs fixés.

De manière à éviter le chevauchement ou la répétition des démarches d'analyse, de planification et d'évaluation, le milieu scolaire souhaitait que les liens entre le projet éducatif et le plan de réussite soient précisés. On va entendre souvent ces expressions: «projet éducatif», «plan de réussite». Quels sont les liens? Il fallait le préciser. En effet, les nouvelles dispositions éliminent une source de tensions en répartissant clairement les responsabilités entre le personnel de l'école, le conseil d'établissement et la commission scolaire.

J'insiste cependant, Mme la Présidente, sur le fait que le projet de loi maintient les principes fondamentaux et l'économie générale de la Loi sur l'instruction publique, telle que modifiée en 1997, au regard des nouvelles responsabilités qu'elle accorde aux commissions scolaires ? on se rappelle tous de la loi n° 180 ? aux conseils d'établissement, aux directions d'école et aux autres membres du personnel de l'école.

Comment s'articule ce partage des responsabilités? Pour l'école, les dispositions du projet de loi viennent confirmer l'attribution de responsabilités le plus près possible du lieu où se passe l'action, tout en prévoyant des dispositions qui maintiennent le partenariat entre les usagers de l'école. À ce titre, le conseil d'établissement devra: analyser la situation de l'école avant d'adopter un projet éducatif ? l'analyse est très importante; souvent il faut prendre beaucoup de temps pour savoir exactement quelle est notre situation; nous aurons l'occasion d'en reparler ? approuver le plan de réussite et son actualisation; informer annuellement non seulement la communauté, mais aussi les parents des services qu'offre l'école et leur rendre compte de leurs qualités; informer annuellement les parents et la communauté du projet éducatif et du plan de réussite de l'école; et leur rendre compte des moyens mis en place et des résultats obtenus au regard des objectifs fixés.

En ce qui concerne les directions d'école, les modifications proposées s'inscrivent dans le cadre de ses responsabilités d'assistance au conseil d'établissement dans l'exercice de ses fonctions et pouvoirs. À ce titre, la direction devra coordonner non seulement l'élaboration, la réalisation, l'évaluation périodique du projet éducatif de l'école, mais aussi l'analyse de sa situation. La direction devra aussi coordonner l'élaboration, la révision et, au besoin, l'actualisation du plan de réussite de l'école. La direction devra s'assurer que le conseil d'établissement reçoit les informations nécessaires avant d'approuver les propositions qui lui seront soumises. De plus, conformément à la responsabilité qu'elle a d'exprimer les besoins de l'école, la direction participe à l'élaboration du plan stratégique de la commission scolaire, de la même façon qu'elle participe actuellement à l'élaboration de ses politiques et de ses règlements.

Quant aux membres du personnel de l'école, les modifications proposées maintiennent le partenariat entre eux et les parents ainsi que l'autonomie professionnelle de l'enseignant ? l'autonomie professionnelle de l'enseignant. Les membres du personnel de l'école participeront à l'analyse de la situation de l'école effectuée par le conseil d'établissement, à l'élaboration, la réalisation, l'évaluation périodique du projet éducatif, et les membres du personnel de l'école participeront à l'élaboration du plan de réussite qui sera proposé par le directeur de l'école au conseil d'établissement, de même qu'à son actualisation.

Pour ce qui concerne les commissions scolaires, les modifications proposées s'inscrivent dans le cadre de ses pouvoirs généraux de planification, de contrôle et d'évaluation des services éducatifs. Ainsi, elle devra établir un plan stratégique pluriannuel, le rendre public et rendre compte à la population de son territoire de la mise en oeuvre de ce plan. Cela implique une plus grande transparence de la gestion, une plus grande imputabilité des gestionnaires. La commission scolaire devra favoriser ? je pèse mes mots; nous y reviendrons ? favoriser la mise en oeuvre, notamment sur le plan de réussite, du projet éducatif de chaque école. Et la commission scolaire devra s'assurer que chaque école s'est dotée d'un plan de réussite qui est conforme aux enjeux auxquels doit faire face la commission scolaire et aux grandes orientations qu'elle détermine en matière de réussite éducative.

Le présent projet de loi, Mme la Présidente, assure donc l'arrimage et la cohésion entre les obligations d'une commission scolaire, contenues dans son plan stratégique, et celles de ses écoles, de ses centres de formation, énoncées dans le plan de réussite. Les plans stratégiques élaborés selon les nouvelles règles seront mis en oeuvre dès l'année 2003-2004.

Nous souhaitons vivement aujourd'hui, grâce à ces consultations particulières de la commission sur l'éducation, tirer profit de la riche expérience et du bagage de connaissances des personnes qui sont aujourd'hui réunies. Chacune, chacun d'entre nous a à coeur la réussite de tous nos jeunes. Collectivement, nous devons nous donner des moyens d'agir efficacement pour atteindre cet objectif très important. C'est exactement ce que nous visons avec le présent projet de loi.

Mme la Présidente, voilà ce qui complète le tableau que je désirais brosser en début de nos travaux, avant d'entreprendre les consultations particulières sur le projet de loi n° 124. Évidemment, vous me connaissez, puisque nous travaillons régulièrement ensemble, je serai très ouvert à toutes les suggestions, propositions, commentaires qui seront faits évidemment dans les présentations qui seront faites aujourd'hui lors de ces audiences, mais également à toutes les propositions que les autres députés, membres de la formation ministérielle et de l'opposition, voudront faire. Il s'agit ici d'un projet pour améliorer, pour le bien de l'enfant, et nous avons tous le devoir d'y travailler pour nous assurer qu'il s'agisse là d'un projet de loi qui réponde réellement aux besoins. Je vous remercie beaucoup.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le ministre. M. le député de Vaudreuil.

M. Yvon Marcoux

M. Marcoux: Merci, Mme la Présidente. Bienvenue aux membres de la commission, M. le ministre également, qui est membre de la commission pour les fins de la journée de consultation, et bienvenue également à tous les groupes qui ont pris le temps de préparer un mémoire et qui viendront se faire entendre aujourd'hui. Je voudrais, Mme la Présidente, faire quelques commentaires reprenant certains que j'avais faits lors de la discussion en deuxième lecture, l'adoption de principe, à l'Assemblée nationale.

Il est bien sûr que tous les intervenants et, je vous dirais, toute la population du Québec souhaitent améliorer la réussite de nos élèves. C'est essentiel. Et aujourd'hui, vous savez, dans notre société du savoir, il est important que les jeunes aient au moins ? pour ceux qui le peuvent, peut-être pas tout le monde ? un Diplôme d'études secondaires ou l'équivalent. Lorsqu'on considère la nature des emplois qui seront créés au cours des prochaines années, on dit: Au moins 60 % exigeront des qualifications ou des études de niveau secondaire et plus.

Et il est bien sûr que, même si peut-être nous avons moins parlé de réussite antérieurement, sur le plan du ministère... Mais je suis convaincu, et pour l'avoir expérimenté moi-même, que, au niveau des écoles, à la fois les enseignantes, les enseignants, les directions d'école, les parents ont toujours visé à obtenir, pour les enfants qui étaient à l'école, la meilleure réussite possible, autant au primaire, au secondaire, ou au cégep, à l'université pour ceux qui poursuivent. Donc, il est bien sûr que, comme tout le monde, nous souscrivons aux objectifs du projet de loi et ce qu'a indiqué le ministre.

n (11 h 40) n

Cependant, je voudrais faire certains commentaires sur l'esprit qui préside ou l'approche qui est présentée dans le projet de loi. Lors de mes remarques le 31 octobre, ou à la fin du mois d'octobre, je pense, Mme la Présidente, j'indiquais que l'approche qui était proposée dans ce projet de loi semblait, quant à moi, s'inspirer d'une approche bureaucratique et technocratique et être présidée par un esprit de centralisation. Or, le ministre a mentionné tout à l'heure que son projet de loi s'inspirait évidemment des principes qui se dégageaient de la révision de la Loi de l'instruction publique, la réorganisation, la fusion des commissions scolaires, l'apparition des conseils d'établissement. Cependant, je diverge un peu d'opinions là-dessus, et je les avais exprimés en deuxième lecture.

Et je constate également que, dans un avis que le Conseil supérieur de l'éducation a fait parvenir au ministre ? et on l'a retrouvé sur Internet ce matin, dans les publications du Conseil supérieur de l'éducation ? donc un avis en date du 26 novembre 2002 ? c'était lundi, ça, le 26 novembre, ou en tout cas, peu importe ? le Conseil supérieur de l'éducation se questionne également sur l'approche qui, pour lui, découle du projet de loi en question. Et je voudrais simplement peut-être reprendre certains éléments ou passages de l'avis dont le ministre, d'ailleurs... qu'il a reçu, que, nous, on a eu un peu par le... C'est-à-dire, on l'a cherché puis on l'a trouvé ce matin. Donc, dernière lecture rapide, mais sur les conclusions et touchant la centralisation, l'approche.

Et ce que le Conseil dit donc à la page 22 de son avis au ministre et relativement à ce projet de loi n° 124, le Conseil dit, et je cite: «À ce propos, justement, force est de constater que le projet de loi n° 124 réintroduit dans le système scolaire une logique de centralisation évidente. Ainsi, par un jeu d'emboîtement...» Et ce que j'avais expliqué d'ailleurs en commission parlementaire, en disant: Il y a un plan stratégique du ministère, il y a un plan stratégique des commissions scolaires, qui s'intègre dans celui du ministère, puis il y a des plans de réussite qui s'intègrent dans celui des commissions scolaires. C'est un peu un jeu de poupées russes. Mais donc, ce que le Conseil dit, il dit: «Ainsi, par un jeu d'emboîtement, les établissements doivent, dans leur plan de réussite, tenir compte du plan stratégique de la commission scolaire, lequel doit à son tour se baser sur celui du ministère de l'Éducation, lequel enfin doit respecter les orientations générales du gouvernement. On a là, sur le plan symbolique, sinon dans les faits, une parfaite représentation de la centralisation!» Donc, ce n'est pas moi qui le dis, là, Mme la Présidente, c'est le Conseil supérieur de l'éducation.

À la page 23, dans un paragraphe intitulé La position du Conseil, et je cite: «Le Conseil juge que le mouvement de centralisation qu'imprime le projet de loi, ne serait-ce qu'en raison du jeu symbolique de son écriture, n'est pas approprié au contexte d'une décentralisation encore largement inachevée. Il y a [...] risque d'une dérive importante par rapport aux intentions décentralisatrices qui ont inspiré la Loi sur l'instruction publique il y a à peine 5 ans. Ce retour du balancier paraît tout aussi prématuré qu'inopportun.» Fin de la citation.

Et, un peu plus loin, le Conseil, à la page 25, dans ses conclusions, reprend donc, je pense, un élément important, semble-t-il, qui se dégage de l'avis du Conseil, et je cite, à la page 25: «Enfin, il ? en parlant du Conseil ? a noté que l'architecture du projet de loi trahissait une conception centralisatrice de la gestion de l'éducation, opérant un renversement de la tendance amorcée il y a 20 ans de faire de l'école le pivot du système éducatif québécois. Il a signalé en outre que l'école n'était pas une administration et que le danger de la bureaucratiser davantage ne peut être ignoré. Il souhaite à cet égard que le projet de loi soit rédigé de telle façon à éliminer ces équivoques.» Fin de la citation.

Alors, Mme la Présidente, je voulais, je pense, évoquer ces commentaires du Conseil supérieur de l'éducation, qui, à mon avis, sont importants, et je le fais non pas d'une façon négative, mais dans une approche tout à fait constructive.

Deuxièmement, j'avais évoqué également que toute cette approche, et je ne voudrais pas dire que c'est négatif, là, mais me semble exiger beaucoup de paperasse à préparer dans le réseau un peu partout. Et, vous savez, oui, il est important de préparer de la documentation, je pense que, ça... des plans, mais dans la mesure où nous obtenons des résultats qui sont significatifs au bout de l'exercice. On peut bien produire du papier en masse ? et j'ai déjà aussi été dans la fonction publique, puis ce n'est pas péjoratif, ce que je dis là ? mais je pense qu'il est important de dégager, dans cette documentation-là ou dans la préparation de documents, ce qui est significatif pour les intervenants.

Et je dois vous dire que, peut-être que ça va changer au cours des prochaines années, mais, depuis deux ans, où il y a une préparation de plans de réussite, où on a demandé aux écoles de préparer des plans de réussite, il y a beaucoup de documents. J'ai seulement deux écoles ici, là, deux écoles, voyez-vous? C'est ce qu'ils ont préparé. Parce qu'on a obtenu, par l'accès à l'information, la commission scolaire de Montréal, en 2000, bon, une documentation. J'ai demandé également d'avoir un bilan: quelle était l'analyse, le bilan que le ministère a préparé des plans de réussite. Et la réponse que nous avons eue, au mois de juin 2002... Évidemment, ces documents totalisent environ 3 100 pages ? 3 100 pages. Et je me dis, évidemment...

Une voix: ...

M. Marcoux: Pardon?

Une voix: ...

M. Marcoux: Je comprends, on peut produire 100 pages par élève, là, mais je ne pense pas que ce soit l'objectif, M. le ministre, je pense que vous êtes d'accord avec moi là-dessus. Mais ma question, c'est: Est-ce que, de produire 3 100 pages, il y a des gens qui analysent ça, et est-ce qu'on en dégage, là, des éléments qui sont structurants et qui ont une valeur importante? C'est toujours ça. Mais, ce qui est important, c'est ça qui est essentiel.

Et un autre document où, par exemple... Et je sais que le ministre nous parlait d'indicateurs nationaux, d'objectifs nationaux, de cibles. Et le document que nous avons obtenu... Évidemment, on aura l'occasion d'en reparler, M. le ministre, lors de la discussion en commission parlementaire, mais on dit: «Les cibles pour 2002-2003, telles que calculées par le ministère, ont été appréciées selon qu'elles étaient ambitieuses ou non ambitieuses.» Alors là j'ai tout un document où on nous parle des commissions scolaires, on indique les cibles qui ont été données, et là on qualifie: Bien, cette cible-là est ambitieuse; l'autre, non ambitieuse. Est-ce que c'est vraiment significatif à la fois pour le ministère et également pour les gens, les intervenants qui sont dans le milieu?

Donc, tout ceci pour dire que, à mon avis, une telle opération doit être la plus simple possible, pour qu'elle soit signifiante. Parce que, dans le langage du métier, plus il y a de papier, souvent, moins les gens en prennent connaissance, ou ils disent: Bien, écoutez, tout est là, regardez, là, il y a une liasse de papier. Donc, de simplifier et de ramener l'exercice à ce qui est significatif pour tenter d'améliorer la réussite des élèves, je pense que c'est ça, l'objectif fondamental que nous devons poursuivre.

L'autre point, Mme la Présidente, touchait les conseils d'établissement. Et le ministre y a fait référence tout à l'heure, et j'avais indiqué que, lorsqu'on regardait les modifications aux articles 37, qui étaient proposées par le projet de loi n° 124, l'article 75, il me semble qu'on modifiait les pouvoirs des conseils d'établissement ou les responsabilités des conseils d'établissement par rapport à ce qui est actuellement dans la Loi de l'instruction publique. Et je dois vous dire qu'à cet égard-là également le Conseil supérieur de l'éducation fait des commentaires. Et on aura l'occasion de les reprendre, mais le Conseil s'inquiète de l'impact des modifications proposées sur l'exercice et le développement de l'exercice des responsabilités des conseils d'établissement. Et donc, en parlant des...

Une voix: ...

M. Marcoux: Oh! Bien, écoutez, là, comme je l'ai eu ce... Je peux vous dire: Je n'ai pas... Mais on reviendra. Donc, c'est une interrogation importante qui est exprimée aussi dans l'avis que le Conseil a rendu public, a transmis au ministre, j'imagine, le 26.

n (11 h 50) n

L'autre élément, c'est celui de la conception de la réussite. Il y a trois volets qui sont exprimés dans la Loi sur l'instruction publique. Ils nous disent: On doit instruire, socialiser et qualifier. Le ministre nous a dit au début: Nous allons respecter, dans les plans de réussite, l'atteinte de cette triple mission. Or, le Conseil supérieur de l'éducation, dans le même document ? pardon, Mme la Présidente, j'ai, comme vous pouvez voir, un peu de problèmes avec ma voix ? s'interroge justement à cet égard-là. Il dit, donc, à la page 6: «De quelle réussite parle-t-on? L'analyse interne du projet mène vraisemblablement à la conclusion qu'il vise avant tout la réussite scolaire.» Mais le Conseil dit, tout en appuyant sans équivoque l'objectif de la réussite scolaire ? ce avec quoi nous sommes d'accord ? on dit: Il faut également «dissiper toute confusion et ambiguïté sur la conception de la réussite à laquelle se réfèrent la loi actuelle et le projet de loi qui vise à la modifier». Et le Conseil recommande «de reformuler la loi actuelle et le projet de loi n° 124 de manière à dissiper toute équivoque, en s'assurant, d'une part, que le mot réussite s'applique à la triple mission de l'école [...] instruire, socialiser, qualifier, tout en faisant droit, d'autre part, à l'importance stratégique de la réussite scolaire». Donc, ce que j'indique: Il semble que le Conseil s'interroge sur exactement quelle est la réussite, comment on définit la réussite, là, dans le cadre de la modification du projet de loi.

Et, en ce qui a trait au conseil d'établissement dont je vous parlais tantôt, évidemment, le Conseil dit: Le projet de loi apporte deux modifications substantielles: l'une touche le fond, et l'autre, les compétences du conseil d'établissement. Je voudrais simplement... Vous les retrouvez, là, M. le ministre, à la page 10. Par exemple, le Conseil mentionne, et je cite: «Pour ce qui est de la compétence du conseil d'établissement, le projet de loi propose [...] un changement significatif. En effet, la loi actuelle donne au conseil d'établissement le pouvoir d'adopter à la fois les orientations et les mesures du projet éducatif. Le projet de loi n° 124 réduit ce pouvoir aux seules orientations. En effet, en ce qui concerne les plans de réussite, le conseil d'établissement aurait le pouvoir de l'approuver sur proposition du directeur[...]. C'est-à-dire qu'à l'égard de tout autre moyen visant à assurer la réalisation du projet éducatif le conseil perdrait tout droit d'initiative.» Fin de la citation.

La Présidente (Mme Bélanger): En conclusion, M. le député de Vaudreuil.

M. Marcoux: Oui, Mme la Présidente. Et l'autre point, je pense, qu'on peut questionner et qui ressort d'analyses, là, qui ont été faites par des directions générales du ministère de l'Éducation, d'analyses de plans de réussite... Bon, par l'accès à l'information, là, on a eu une commission scolaire, à titre d'exemple, la commission scolaire de la Capitale. Sans doute, ça aurait pu être une autre, là, mais on ne voulait pas avoir les 3 100 pages, ça aurait coûté trop cher, M. le ministre. Alors, on fait état là-dedans aussi que, dans les écoles où il y a un nombre d'élèves moins élevé, ça rend plus difficiles et inutilisables les cibles quantitatives. Et nous aurons sans doute une discussion là-dessus avec les gens qui y sont, qui viendront devant la commission, mais est-ce que c'est vraiment significatif de demander d'établir des cibles quantitatives pour trois, quatre ans, dans un plan de réussite d'école, alors que les cohortes changent dans les écoles, surtout au primaire, les gens déménagent, il y en a des nouveaux qui arrivent puis ils n'ont pas exactement les mêmes...

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, M. le député, vous avez dépassé votre temps.

M. Marcoux: Alors, je pense que c'est un autre élément, M. le ministre, qui se dit d'ailleurs ouvert ? et je le sais, qu'il est ouvert ? à des changements, des modifications dont nous pourrons discuter, Mme la Présidente, au cours...

La Présidente (Mme Bélanger): Au cours de la journée.

M. Marcoux: ...de nos délibérations. Merci.

Auditions

La Présidente (Mme Bélanger): C'est ça, M. le député de Vaudreuil. Merci. Alors, nos invités ayant déjà pris place, je tiens à leur rappeler que le temps alloué pour la présentation de leur mémoire est de 15 minutes, qui sera suivi d'une période d'échange de 30 minutes entre le ministre et le porte-parole.

Alors, je demanderais à nos invités de bien... Que le porte-parole se présente et présente les personnes qui l'accompagnent.

Association des commissions scolaires
anglophones du Québec (ACSAQ) et Association
des directeurs généraux des commissions scolaires
anglophones du Québec (ADGESBQ)

M. Paterson (Ron): Merci, Mme la Présidente. M. le ministre, Mmes et MM. membres de la commission, j'aimerais d'abord vous remercier de nous avoir invités à présenter le point de vue de l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec et de l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires anglophones du Québec sur le projet de loi n° 124. Aussi, j'aimerais présenter les personnes qui m'accompagnent: M. John Cyr, à ma gauche, qui est le président; et, à sa gauche, M. Léo La France, vice-président de l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires anglophones du Québec; et, à ma droite, M. Jeff Polenz, directeur général de l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec.

Commentaires généraux. Je peux vous dire que les deux associations sont d'accord avec l'objectif général selon lequel le système scolaire, à tous les niveaux, se concentre, comme partie de sa culture institutionnelle, sur la réussite scolaire. À cet égard, il est important de ne pas oublier que notre préoccupation quant à l'amélioration de la réussite scolaire n'est pas nouvelle et, dans bon nombre de cas, existait avant ce projet de loi et même avant tous les débats publics portant sur le rendement du système scolaire.

Le système scolaire anglophone jouit d'une longue tradition dans l'élaboration des programmes éducatifs innovateurs et des modèles d'apprentissage visant à améliorer les chances de réussite du plus grand nombre d'élèves. À titre d'exemple, notre système scolaire a été un pionnier dans le domaine de l'immersion française et du programme de français langue seconde. Ces programmes ont permis l'épanouissement de la communauté linguistique la plus couramment bilingue du Canada. De plus, le système scolaire anglophone continue à être un pionnier dans l'élaboration des modèles pour l'intégration et la socialisation des élèves ayant des problèmes d'apprentissage. Au cours des années, notre système scolaire a sans cesse démontré une préoccupation à l'égard des décrocheurs, souvent aux dépens des notes peu élevées obtenues aux examens du secondaire du ministère de l'Éducation.

Ces exemples servent à préciser que la notion de l'amélioration de la réussite scolaire est le principe fondamental guidant les décideurs de notre système depuis bon nombre d'années et n'est pas un phénomène récent.

Cela étant dit, nous reconnaissons que le contexte des attentes publiques quant au rendement du système scolaire a évolué et qu'il existe un besoin d'établir des objectifs réalistes et cohérents dans une structure plus formelle. À cet égard, nous appuyons l'objectif global d'assurer que toutes les commissions scolaires élaborent des plans stratégiques couvrant une période de plusieurs années et que les écoles et les centres élaborent également les plans de réussite ayant des objectifs clairs et mesurables.

De plus, nous croyons qu'il est important de créer des liens entre le ministère de l'Éducation, les commissions scolaires et les écoles conformes au rôle, aux responsabilités et à la relation hiérarchique entre ces trois partenaires afin d'accroître la cohérence dans tout le système. À cet égard, nous appuyons la notion que les commissions scolaires tiennent compte des objectifs du plan stratégique établi par le ministère de l'Éducation en élaborant leurs plans stratégiques et que les écoles soient obligées de tenir compte du plan stratégique de la commission scolaire en élaborant leurs plans de réussite.

Bien que le projet de loi n° 124 prévoit une relation hiérarchique cohérente et logique entre le ministère de l'Éducation, les commissions scolaires et les écoles dans l'établissement de leur plan stratégique ou de réussite, selon le cas, il ne répond pas aux critères de cohérence et de logique en ce qui concerne les mécanismes de reddition de comptes proposés. Plus particulièrement, nous croyons que, même si le projet de loi prévoit clairement l'obligation du conseil d'établissement d'informer les parents de la communauté locale du plan de réussite et du projet éducatif de l'école et leur rendre compte des résultats obtenus en regard des objectifs fixés, il ne prévoit pas l'obligation de l'école de rendre compte à la commission scolaire en regard des résultats obtenus.

n (12 heures) n

Le manque de reddition de comptes entre l'école et la commission scolaire est problématique et va à l'encontre de la Loi sur l'instruction publique. De plus, la commission scolaire, à titre de gouvernement élu localement, doit rendre compte à la population de son territoire, de la même manière que les autres gouvernements élus localement, comme les municipalités, doivent rendre compte aux électeurs et aux électrices. À cet égard, nous croyons que l'article 24 du projet de loi, selon lequel la commission scolaire doit rendre compte à la population de son territoire et au ministère de l'Éducation de l'accomplissement de son plan stratégique, est sans fondement et n'est pas conforme à la notion de la reddition de comptes des établissements gérés par des autorités élues. De plus, nous recommandons que le projet de loi soit modifié afin d'assurer que le plan de réussite de l'école et le plan stratégique de la commission scolaire couvrent une période de trois ans et que ces plans soient annuellement mis à jour, ce qui permettrait d'assurer un niveau de cohérence dans la planification, tant au niveau de l'école que de la commission scolaire. Pour terminer, nous sommes préoccupés par l'ambiguïté qui pourrait survenir quant au rôle du conseil d'établissement à intégrer le projet éducatif et le plan de réussite, ainsi que la distinction entre l'adoption du projet éducatif et l'approbation du plan de réussite.

Les recommandations particulières. À la lumière de nos commentaires généraux, nous avons quelques recommandations concernant certains articles du projet de loi n° 124.

Concernant l'article 8, nous recommandons que cet article soit modifié afin d'assurer qu'à chaque année la directrice ou le directeur d'école rend compte à la commission scolaire des résultats obtenus en regard des objectifs fixés dans le plan de réussite de l'école. Nous croyons qu'il faut faire une distinction importante entre le rôle du conseil d'établissement à fournir de l'information et des explications à la communauté et la responsabilité de l'école, par l'entremise de la directrice ou directeur d'école, de rendre compte à la commission scolaire.

Concernant l'article 9, nous nous interrogions sur la nécessité d'introduire un nouveau sous-alinéa 2.1 selon lequel la directrice ou le directeur d'école doit s'assurer que le conseil d'établissement reçoit les informations nécessaires pour élaborer le plan de réussite. Il semblerait inconcevable que ceci ne fait pas partie des responsabilités de la directrice ou du directeur d'école, compte tenu de son rôle de coordonner l'analyse de la situation de l'école, prévu à la modification à l'article 96.13.

Concernant l'article 17, cet article est la même situation problématique que l'article 8, car il ne prévoit pas l'obligation des centres d'éducation aux adultes et de formation professionnelle de rendre compte à la commission scolaire. Nous recommandons de modifier cet article afin d'assurer que la directrice ou le directeur du centre rende compte à la commission scolaire des résultats obtenus en regard du plan de réussite du centre.

Article 19. Encore une fois, nous formulons les mêmes commentaires que ceux concernant l'article 9.

En ce qui concerne la directrice ou le directeur du centre, concernant l'article 20, nous sommes d'accord avec l'intention de cette modification de créer une plus grande flexibilité pour les commissions scolaires en introduisant la possibilité de tenir des séances du Conseil des commissaires par vidéoconférence. Nous recommandons toutefois que cet article soit modifié afin d'assurer que la directrice générale ou le directeur général ainsi que la présidente ou le président soient présents physiquement à l'endroit où siège le Conseil afin d'éviter toute difficulté qui pourrait survenir lors de la présidence d'une telle séance.

Concernant l'article 21, nous sommes tout à fait d'accord avec cette modification qui prévoit la consultation obligatoire par la commission scolaire du comité des parents quant à son plan stratégique.

Concernant les articles 22 et 24, nous appuyons le cadre proposé pour le plan stratégique de la commission scolaire, incluant l'obligation de la commission scolaire de transmettre, chaque année, au ministère une copie de son plan stratégique et de le rendre public. Toutefois, pour les raisons précisées antérieurement, nous recommandons que l'article 24 soit modifié afin d'assurer que les commissions scolaires, en tant qu'établissements élus localement, doivent rendre compte de leur plan stratégique, et notamment des résultats obtenus, aux populations qu'elles desservent. Maintenant, cet article, tel quel, a créé une situation de conflit et de confusion quant aux rôles et responsabilités des décideurs de notre système scolaire. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Paterson. Alors, M. le ministre.

M. Simard (Richelieu): Merci, Mme la Présidente. Je veux d'abord remercier nos amis du réseau scolaire anglophone du Québec, des commissions scolaires autant que les directeurs généraux, de la qualité du mémoire qu'ils viennent de nous présenter. J'y ai trouvé une analyse extrêmement sérieuse et pertinente de la plupart des aspects de ce projet de loi.

Vous avez raison, M. le président, et je connais suffisamment votre réseau pour l'affirmer, lorsque vous nous dites que la préoccupation de la réussite a toujours été intégrée dans le développement et la vie quotidienne de votre réseau, et j'en suis évidemment conscient. Et je suis heureux que vous admettiez aussi par le fait même que notre volonté de formaliser ce processus arrive à point nommé et est justifié. Donc, j'ai vu dans votre mémoire, dans l'ensemble, un très haut niveau d'approbation à la fois des principes et des grandes orientations internes du projet de loi.

Vous avez soulevé évidemment un certain nombre de préoccupations, qui me touchent directement dans certains cas, qui mériteront un certain nombre de modifications. Je l'ai dit en début et je vais continuer à le répéter, je suis très ouvert. Vous avez fait un travail sérieux, et nous tiendrons compte de vos propositions. Certaines se retrouveront très certainement dans les modifications apportées. Dans certains cas, M. Paterson, c'est d'autant plus facile que les papillons sont prêts et vont dans le sens de vos interventions.

J'aurais cependant quelques questions à vous poser.

M. Marcoux: ...

M. Simard (Richelieu): Pardon?

M. Marcoux: Donc, nous pourrons les avoir bientôt aussi, nous?

M. Simard (Richelieu): Oui, enfin, dès que ce sera possible, et attendons au moins d'être en étude article par article. Vous savez que j'ai l'habitude ? et vous faites bien de le rappeler en souriant... J'aime bien remettre à l'avance à l'opposition ? ça travaille beaucoup mieux ? nos projets de modification, et je vais continuer dans cette direction, mais pas aujourd'hui.

Quelques questions plus précises. Lorsque vous soulevez... À la page 5 de la copie que j'ai de votre mémoire, vous dites: «À cet égard, nous appuyons la notion que les commissions scolaires tiennent compte des objectifs du plan stratégique établi par le ministère de l'Éducation en élaborant leurs plans stratégiques et que les écoles soient obligées de tenir compte du plan stratégique de la commission scolaire en élaborant leurs plans de réussite.»

Vous le savez, vous avez peut-être entendu tout à l'heure le critique de l'opposition lire ou, en tout cas, s'inspirer de quelques passages des commentaires de l'analyse du Conseil supérieur de l'éducation qui parlait ? j'ai beaucoup aimé l'expression, d'ailleurs ? du «jeu symbolique de son écriture», enfin, en parlant de l'influence de ses mots. Est-ce que vous sentez que, dans l'expression «tenir compte de», il y a une mainmise? Est-ce que vous pensez que... Lorsque le conseil d'établissement devra tenir compte du plan stratégique de la commission scolaire, est-ce que vous avez l'impression qu'il y a une centralisation, une mainmise, ou c'est simplement une chose qui vous apparaît normale?

n(12 h 10)n

La Présidente (Mme Bélanger): M. Paterson.

M. Paterson (Ron): Bien, si vous me le demandez, M. Simard, moi, je trouverais tout à fait normal... Comme vous avez proposé la structure, on trouve ça tout à fait normal et on n'est pas... Je ne sais pas si les autres qui sont... Vous êtes d'accord aussi?

M. Cyr (John): Les grandes orientations sont importantes pour tout organisme, et ça n'empêche pas que les écoles aient leur propre identité au niveau local. Donc, on ne voit pas de conflit entre les deux notions.

M. Simard (Richelieu): À la page 6, vous rappelez ce qui sera, pendant les prochains jours, n'en doutons pas un instant, un sujet de débat sémantique dans cette commission entre les mots «adoption» et «approbation». On le sait, depuis le premier jour des conseils d'établissement, il y a eu des débats sur cette notion. Dans la version actuelle, en tout cas, du projet de loi, il est bien clair que nous souhaitons que les conseils d'établissement approuvent les plans de réussite qui leur sont soumis par la direction. Est-ce que vous êtes à l'aise, vous, avec cette façon de faire les choses?

M. La France (Léo): En ce moment, ça apporte... Avec les discussions qu'on a eues avec nos écoles puis au niveau de la commission scolaire, où il y a un peu de confusion, c'est entre le projet éducatif et le plan de réussite. Et je crois qu'au niveau de la loi on comprend que le but, c'est de l'intégrer. Mais je ne suis pas tout à fait d'accord que c'est clair dans le moment que c'est le plan éducatif qui vient en premier ou si c'est le plan de réussite. Et je pense que c'est là les questions qu'on va recevoir de nos écoles, de quelle façon ils vont intégrer le plan éducatif de l'école à l'intérieur de leur plan de réussite. C'est des questions qu'on a eues à date.

M. Simard (Richelieu): Il faut bien se rappeler qu'il y a deux notions importantes qu'il faut comprendre, c'est au coeur du projet de loi. Dans chaque école, le conseil d'établissement va adopter un projet éducatif. Ça, c'est au coeur de toute la réalité de l'école depuis quelques années. Ça fait en sorte que le pouvoir s'est transposé très largement au plan de chacune des écoles, et il ne peut pas être question de remettre ça en cause.

L'exécution, la réalisation de ce projet éducatif passe par un plan de réussite. Il faut... Une fois qu'on dit que voilà le type de formation que nous souhaiterions donner, dans quel milieu nous souhaiterions que baignent nos étudiants, comment y arriver, ça, c'est le plan de réussite évidemment. Ce plan de réussite, lui, dans la logique actuelle, qui est la mise en oeuvre du projet éducatif, ce plan de réussite, il est préparé par la direction, par l'équipe-école, et soumis pour approbation au conseil d'établissement, où se retrouvent évidemment les parents. Si ce plan n'est pas satisfaisant, j'imagine que le conseil d'établissement ne l'acceptera pas, ne l'approuvera pas. Mais, dans l'économie actuelle du projet de loi, c'est très clair que l'initiative de rédiger, de préparer ce plan de réussite appartient aux directions d'école.

Alors, vous trouvez qu'il y a... Je n'ai pas senti une opposition de votre part mais une crainte que la compréhension ne soit pas très claire.

M. Cyr (John): Bien, c'est ça.

M. Simard (Richelieu): Qu'est-ce que vous proposez pour clarifier la compréhension?

La Présidente (Mme Bélanger): M. La France.

M. La France (Léo): Ça, c'est intéressant. Parce qu'on en a discuté souvent, quelle façon de le faire. Parce que c'est un peu la question: Quel vient en premier? Vous avez clarifié que c'est le projet éducatif qui vient en premier. Mais ce n'est pas tout à fait clair dans le réseau, je pense, que c'est le... Puis je ne sais pas de quelle façon qu'on... Je ne réponds pas à votre question bien, bien là, mais c'est parce que, nous autres, on en a discuté longuement. Mais je pense que, pour nous, c'est d'essayer de trouver cette solution-là, de trouver la façon de faire comprendre à nos écoles que ce n'est pas un nouveau travail à faire. Vous faites déjà un projet éducatif. Le projet éducatif existe déjà au niveau de l'école, c'est comment faire pour le mettre en oeuvre. Mais eux, pour le moment, voient plutôt que c'est de l'autre façon qu'on doit faire un plan de réussite et que le projet éducatif doit être en cohérence avec ce plan, ce projet-là. Alors, de quelle façon le traduire dans une loi, je ne le sais pas.

M. Simard (Richelieu): C'est plutôt l'inverse.

M. La France (Léo): Oui. C'est ça.

M. Simard (Richelieu): Vous voyez, même en l'exprimant, on arrive à dire l'inverse de ce qu'on pense. La loi doit autant que possible rendre les choses claires et simples. Et, si nous pouvons trouver une formulation, au cours des prochains jours, qui nous permette de vraiment clarifier et de rendre le travail des conseils d'établissement, des directions d'école plus facile, il faut le faire. Il ne faut pas... Il faut éviter en autant que possible que des débats interminables reprennent. Tout le monde a envie d'être au travail et non pas de faire des jeux sémantiques pendant des années.

M. La France (Léo): C'est un peu ce qui nous inquiète dans le moment. C'est... Même au niveau des directions d'école et des administrateurs de la commission scolaire, en discussion même ça porte à confusion. Alors, quand on demande à un conseil d'établissement d'ensuite clarifier la chose, vous pouvez voir les discussions qui auront lieu au conseil d'établissement.

M. Simard (Richelieu): Vous constatez le problème, mais vous ne m'aidez pas beaucoup à le résoudre. Mais on va essayer de travailler au cours des prochains jours pour le résoudre.

Vous dites, à la toute fin de votre présentation, que vous avez peur que le fait que la loi exige que les commissions scolaires rendent compte de leur plan stratégique au ministre crée une confusion. Voulez-vous vous expliquer là-dessus? Moi, je ne vois pas vraiment de confusion là-dedans, mais enfin. Vous dites, à la dernière phrase: «Une situation de conflit et de confusion quant aux rôles et responsabilités des décideurs de notre système scolaire.»

La Présidente (Mme Bélanger): M. Paterson.

M. Polenz (Jeff): Oui. Peut-être que je peux essayer d'apporter des nuances ou précisions sur notre réflexion là-dessus. Ce que nous pensons, c'est que la commission scolaire, par sa mission même, son plan stratégique va comporter des objectifs puis des orientations qui dépassent, disons, les orientations ou les indicateurs nationaux établis par le ministre ou le ministère dans son plan stratégique. Alors, en suivant la logique de la conception même d'une reddition de comptes, nous, on s'interroge sur le fait de comment une commission scolaire peut rendre compte à un autre niveau, au ministre, de certains choix faits selon les priorités ou les choix stratégiques qui portent sur les besoins régionaux, locaux, qui répondent aux besoins de la commission scolaire même.

Alors, c'est là-dessus où on se pose la question: Comment une commission scolaire peut être redevable devant à la fois le ministre et sa population sur certains choix stratégiques qui vont au-delà des indicateurs nationaux établis par le ministre? Puis d'ailleurs nous sommes totalement d'accord et on trouve tout à fait normal que le plan stratégique de la commission scolaire intègre et tienne compte des indicateurs nationaux et des objectifs nationaux. Mais c'est sur l'autre volet, sur les aspects... sur les choix locaux qui vont complémenter le plan stratégique sur lequel, disons, on a des problèmes.

M. Simard (Richelieu): Juste un petit commentaire en terminant, Mme la Présidente. Sur la dernière prise de position, permettez-moi d'être en désaccord. Vous le comprendrez, j'ai un point de vue différent là-dessus. Nous sommes... Enfin, le ministre, c'est donc le Parlement, le législateur, est imputable, et une bonne partie du financement de ce que sera le contenu de ce plan stratégique vient de sommes qui sont... qui proviennent des taxes et impôts, et il me semble qu'il est assez normal que le ministre ait au moins la possibilité d'avoir une reddition de comptes.

Prenons un exemple qui est dans l'actualité depuis plusieurs mois, que tout le monde va comprendre. Une commission scolaire mettrait, dans son plan stratégique, l'élimination du tiers de ses écoles dans les milieux ruraux pour concentrer dans les villes, parce qu'elle considérerait que c'est plus facile, c'est plus économique, et c'est sa conception de l'approche. Il serait important que le ministre en soit quand même saisi, de façon à pouvoir au moins interagir face à un tel plan.

n(12 h 20)n

Je crois à l'autonomie des commissions scolaires. Je pense qu'effectivement elles sont d'abord imputables face à leurs électeurs, c'est un niveau de gouvernement. Mais notre système de financement est tel que, l'immense majorité des sommes qui sont dépensées par les commissions scolaires venant des impôts qui sont levés par le Parlement, je crois qu'il est important que nous ayons quand même ce lien direct qui fasse en sorte que le ministre puisse quand même être l'objet d'une reddition de comptes de la part des commissions scolaires. Mais enfin, on n'est pas d'accord là-dessus, et je pense qu'on peut en discuter longtemps et je ne pense pas qu'on change grand-chose à cette réalité de fond. Je respecte tout à fait l'autre point de vue.

J'annonce tout simplement, et ça fera plaisir à mon collègue de l'opposition, qu'il y aura effectivement une modification quant à la présence physique du directeur et du président pour les visioconférences, dans le sens que vous souhaitez, ne vous inquiétez pas.

Alors, je termine là-dessus et j'invite évidemment les gens des deux parties à compléter, du côté ministériel comme du côté de l'opposition. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le ministre. M. le député de Vaudreuil.

M. Marcoux: Alors, merci, Mme la Présidente. Bienvenue, M. Paterson et les personnes qui vous accompagnent, et merci d'être là et d'avoir, on peut le constater par votre mémoire, bien analysé le projet de loi n° 124. Compte tenu de l'expérience que vous avez dans le domaine, alors c'est extrêmement important et ça permet, comme le mentionnait le ministre, d'apporter, le cas échéant, des ajustements.

Sans vouloir évidemment tomber dans la sémantique d'un texte, quand le ministre vous a posé une question tout à l'heure ? et je ne voudrais pas en faire un débat, là, d'interprétation des textes ? sur quelle est votre conception de «tenir compte», est-ce que, «tenir compte», on peut le nuancer en disant: Bien, écoutez, on tient compte de certaines choses là-dedans ou des grandes orientations? Je pense que là-dessus le Conseil supérieur a évoqué la même interrogation en disant: «Tenir compte» veut dire quoi dans la façon dont est écrit le texte? Et donc, souvent, souligne le Conseil supérieur de l'éducation, ça peut être vu comme une interprétation plus rigoureuse. Et «tenir compte», ça veut dire: Bien, écoutez, là, il faut vraiment le faire selon tout ce qu'il y a dans le plan stratégique. C'est plus fort que simplement «tenir compte». Pas de débat, mais je pense que nous aurons sans doute à discuter de ça. Et je pense que même pour le Conseil supérieur de l'éducation ça pose des interrogations.

L'autre point... Et vous avez parlé de projet éducatif, plan de réussite. Et je pense que c'est M. La France d'ailleurs, à qui je souhaite la bienvenue de façon particulière, parce que c'est le directeur général de la commission scolaire Lester-B.-Pearson, qui couvre le territoire de Vaudreuil, du comté de Vaudreuil, de la MRC de Vaudreuil-Soulanges. Plan éducatif et... projet éducatif et plan de réussite, vous dites: Ce n'est pas nécessairement d'une compréhension tout à fait limpide pour nos gens. C'est aussi un commentaire du Conseil supérieur de l'éducation. Et je pense que, là-dessus, ce serait important peut-être d'essayer de clarifier cet aspect-là. Parce que, finalement, si je comprends, les gens dans les écoles commencent à dire: Bien, ça marche comment, là? puis, pendant deux, trois ans, on s'interroge à savoir quelle est la portée d'un article de loi. Ce n'est pas très productif pour la réussite des élèves. Je pense qu'il y a des choses plus importantes que ça.

Mais il y a une question que je voudrais vous poser. On parle du plan stratégique du ministère avec des indicateurs nationaux et des objectifs nationaux. Est-ce que déjà là vous l'avez, ce plan stratégique du ministère, avec les indicateurs nationaux et les objectifs nationaux, entre les mains?

M. Paterson (Ron): Pas pour le moment, non.

M. Marcoux: Donc, vous n'avez pas encore ce plan.

M. Paterson (Ron): Pas comme tel. Mais, John, peux-tu...

M. Cyr (John): Disons que nous sommes représentés à un comité qui discute continuellement des orientations au niveau des indicateurs nationaux et des orientations qui se prennent dans ce sens-là. Et nous avons aussi eu l'assurance que le plan stratégique, même dans son premier «draft», premier brouillon, va nous être présenté bientôt. Et, avant qu'elles soient officielles, on va avoir les grandes orientations du ministère. Donc, ça, c'est ce qu'on présuppose, puisqu'on nous a assurés de ça.

M. Marcoux: Mais donc, ce serait rendu officiel et public, le plan stratégique du ministère avec les indicateurs nationaux et les objectifs nationaux, à quel moment à peu près? La semaine prochaine. Et, à ce moment-là, les commissions scolaires de votre organisation ont-elles déjà préparé un plan stratégique qui est en accord avec ce que vous discutez au niveau du ministère?

M. Cyr (John): Je crois que les commissions scolaires sont en voie de réaliser une démarche stratégique, planification stratégique, qui va s'enligner, je présume, sur les axes que le ministère va établir. Nous les connaissons quand même de façon globale, générale. On ne les connaît pas de façon précise pour le moment, jusqu'à temps qu'ils soient déposés, mais nous pouvons lire, à travers les lignes, les orientations qui se dessinent dans certains domaines, et nous nous orienterons vers ces choses-là. Je pense que toutes les commissions scolaires sont en train d'essayer d'élaborer des plans stratégiques au niveau de leur organisation.

Et, l'autre point que je voudrais souligner, c'est une opportunité d'impliquer le milieu aussi dans le plan stratégique de la commission scolaire. Parce que c'est en fait un plan de la commission, et donc tous les partenaires de la commission doivent être impliqués dans un processus. Et c'est les orientations que la plupart des commissions scolaires, je crois, sont en train de prendre.

M. Marcoux: Est-ce que les... Je réfère à un commentaire, je pense, que M. Polenz a fait tantôt. Des indicateurs nationaux et des objectifs nationaux, est-ce que ça va permettre de tenir compte de certaines dynamiques ou caractéristiques régionales particulières? En d'autres termes, j'aime toujours les grands objectifs nationaux et les grandes normes nationales, mais il y a des régions qui ont des caractéristiques différentes. Donc, selon vous, est-ce que ce qui est dans le processus actuellement va permettre quand même d'avoir des particularités pour des régions qui ne sont pas... qui sont différentes des autres?

M. Cyr (John): Bien, je pense qu'il va y avoir ? des «trends»? des tendances qui vont se dessiner, peut-être plus dans une commission scolaire qu'une autre, dans les indicateurs nationaux, sur un premier plan. Sur un deuxième plan, la commission scolaire doit élaborer aussi des indicateurs pour elle-même, qui doivent, je présume, tenir compte des orientations de la commission scolaire. Et, en même temps, l'école, elle a la même opportunité de choisir des indicateurs locaux qui peuvent mettre en relief leur projet éducatif avec leur plan de succès. Donc, je pense que, de ce côté-là, nous avons la possibilité d'ajuster vers l'école et vers la commission scolaire.

Je voudrais souligner un point à votre question précédente. Vous avez demandé les orientations des commissions scolaires face aux orientations du ministère. Le seul point qui cause un petit peu de difficultés, je crois, c'est que c'est, bien entendu, la première année d'une planification stratégique semblable, et l'échéancier pour les écoles et pour la commission scolaire, c'est le mois de juin. Donc, c'est sûr que la qualité des produits cette année, je présume qu'elle ne sera pas la même que l'année prochaine puis l'année suivante.

M. Marcoux: Est-ce que la préparation au niveau des écoles, ce qui est exigé demande beaucoup d'efforts ou demande pas mal de temps aussi? Parce que les commentaires que je peux entendre dans le réseau, c'est que les gens trouvent ça très exigeant, là, à assumer en plus des autres responsabilités qu'ils ont à exercer en ce qui a trait, là, à tout l'aspect pédagogique et puis la mise en place des projets éducatifs, d'autres projets demandés, puis les écoles ouvertes sur leur milieu. Puis là on s'en vient avec chacun notre petit projet à soumettre. Est-ce que vous dites: Non, il n'y a pas de problème, ce n'est pas un effort additionnel qui est important à la fois, à la commission scolaire ou dans les écoles, et puis ça va très bien?

M. Paterson (Ron): Écoutez, ce que j'ai constaté moi-même, c'est que les écoles ne se plaignent pas et trouvent que c'est un travail qui est très important et puis sont prêtes à travailler là-dedans, c'est sûr. Mais je vais demander à M. La France, parce qu'il travaille quotidiennement avec les écoles, et M. Cyr, ils sont, les deux, plus proches des écoles que moi-même.

n(12 h 30)n

M. La France (Léo): Bien, moi, je pense que la clé, c'est que l'école puisse se doter de stratégies pour pouvoir préparer ces plans-là, parce que, il n'y a aucun doute, le temps que ça prend, si on veut que le travail soit bien fait, reflète bien la communauté, il faut qu'il y ait vraiment des indicateurs. Parce que je sais que, le milieu anglophone, aux réunions, on a eu l'occasion d'en parler, c'est qu'on pense que c'est important aussi d'avoir des indicateurs qui vont être qualitatifs en plus d'indicateurs qui vont être quantitatifs, qui vont refléter le milieu. Et je pense que c'est d'essayer de trouver le moyen de donner le temps à nos directeurs d'école et à nos conseils d'établissement de pouvoir préparer les plans.

Et c'est ça qui nous inquiète, en ce moment, vous avez bien raison. Mais je pense que c'est un travail qui est important. C'est, pour nous, au niveau de la commission scolaire, et je pense que je pourrais le dire aussi au niveau du ministère, de pouvoir trouver des moyens de donner des stratégies à nos écoles où elles peuvent avoir accès à des sondages, accès à du matériel de recherche qui pourrait aider à compléter ces travaux-là. Puis je pense que c'est ça qui est la clé, parce que, en ce moment, c'est nouveau, mais on essaie de travailler là-dedans.

M. Marcoux: Mme la Présidente, simplement un dernier commentaire, parce que ma collègue de Jean-Talon voudrait poser des questions également. Donc, ce n'est pas un fardeau additionnel pour les directions d'école, pour les gens des conseils d'établissement, je veux dire, ça se fait naturellement, et c'est parmi les autres tâches qu'ils ont à assumer, et ça va bien?

M. La France (Léo): Je n'ai pas dit que ça se faisait naturellement.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. La France (Léo): Il y a certainement des exigences...

M. Marcoux: Non, mais je vous posais la question, là.

M. La France (Léo): Les exigences sont là.

M. Paterson (Ron): Ha, ha, ha! Ils se plaignent toujours de la paperasse et des choses qu'ils doivent faire. Ça, je le sais. Vas-y, John.

M. Cyr (John): Disons que c'est tellement important qu'on mesure pour voir si ce qu'on fait réussit. Donc, c'est important qu'on corrige le tir avec ces mesures-là, et même si ça rajoute un travail initial. C'est comme un plan stratégique où on énonce une vision pour mission: au départ, c'est laborieux, c'est long, ça prend du temps, mais par la suite tous les canons sont pointés dans la même direction. Puis c'est un petit peu ça qu'on vit dans ce processus-là. Donc, on dit que c'est peut-être lourd, des fois, par contre, c'est important de le faire.

La Présidente (Mme Bélanger): Ça va? Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Delisle: Merci. Il reste combien de temps, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Bélanger): Quatre minutes.

Mme Delisle: Bon. Alors, je vais faire ça rapidement. Dans votre mémoire, messieurs, à la page 6, vous touchez l'article 24 qui, lui, cet article-là, suggère évidemment que la commission scolaire informe la population de son territoire au sujet des services éducatifs qu'elle offre, etc. J'ai relu le deuxième paragraphe de la page 6 et, à chaque fois que je le relis, je trouve qu'il y a une certaine confusion. C'est peut-être moi qui comprends mal. Vous semblez dire, dans cet article-là, autrement dit, que l'article 24 n'est peut-être pas nécessaire, puisque les commissions scolaires ont déjà, en vertu de leur loi, l'obligation d'informer la population, par le biais d'un rapport annuel et, bon, une publication quelconque, là, une fois par année, pour que les gens, tous les citoyens soient informés de ce qui se passe à la commission scolaire.

Est-ce que je fais une bonne lecture de ce paragraphe-là? Ou bien êtes-vous en train de nous dire que ce qui est proposé dans l'article 24 ne correspond pas du tout à votre notion de la façon dont les commissions scolaires devraient informer la population et le ministre? Parce que, en fait, on fait référence au ministre de l'Éducation, dans cet article-là. Je le relis puis, à chaque fois, je reviens soit à ma première interprétation ou soit à ma deuxième. Alors, je voudrais juste que vous nous expliquiez ce qui sous-tend finalement ce commentaire-là et si on doit y apporter une amélioration dans le projet de loi, par rapport à la meilleure diffusion possible auprès de la population, là, du projet éducatif puis des plans de réussite, si c'est ce que vous dites, là?

M. Polenz (Jeff): Oui, effectivement, je pense que vous avez raison, là, en faisant la lecture, là, la façon dont c'est rédigé, ça peut porter à la confusion. On va essayer de nettoyer ça un peu. Ce qu'on veut dire, tout simplement, c'est que dans notre esprit à nous, c'est évident que la commission scolaire doit rendre compte annuellement à la population quant aux attentes, quant aux objectifs et la réalisation de ces objectifs par rapport à son plan stratégique et, au ministre aussi, sur les objectifs nationaux établis en fonction...

Mme Delisle: C'est déjà dans la loi.

M. Polenz (Jeff): Non. Bien, c'est ça qui est proposé dans le projet de loi.

Mme Delisle: Ah bon! Bon, parfait.

M. Polenz (Jeff): Mais ce que nous voulons dire, c'est que le plan stratégique de la commission scolaire va porter sur des choses autres que des indicateurs nationaux ou bien des objectifs nationaux, et c'est là-dessus... Et je vous donne un exemple. Une commission scolaire peut avoir, exemple, des objectifs très clairs par rapport aux services offerts aux entreprises ? exemple ? ou bien certains services complémentaires à la communauté. Ce que nous disons, c'est que, la reddition de comptes de ces objectifs-là, est-ce qu'il devrait y avoir une obligation de rendre compte non seulement à la population ? là-dessus, nous sommes d'accord ? mais aussi au ministre sur des objectifs qui sont plutôt locaux et qui n'ont pas de relation nécessaire avec les objectifs établis en vertu du plan du ministère?

Mme Delisle: Bon. Est-ce que je peux...

La Présidente (Mme Bélanger): Merci.

Mme Delisle: Non?

La Présidente (Mme Bélanger): C'est terminé.

Mme Delisle: O.K. Je vais aller le leur demander. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, on vous remercie beaucoup de votre participation. Alors, on va suspendre quelques instants, le temps de changer d'invités.

(Suspension de la séance à 12 h 37)

 

(Reprise à 12 h 39)

La Présidente (Mme Bélanger): Nous reprenons les travaux. Alors, nous recevons maintenant la Fédération des comités de parents du Québec. Alors, je demanderais à la porte-parole de bien vouloir s'identifier et d'identifier la personne qui l'accompagne. Et vous avez 15 minutes pour faire votre présentation, qui sera suivie d'échanges de 30 minutes entre les deux parties.

Fédération des comités
de parents du Québec (FCPQ)

Mme Miron (Diane): Bonjour. Je suis Diane Miron, présidente de la Fédération des comités de parents. Alors, je suis accompagnée de Mme Samson, qui est première vice-présidente, et de M. Boisvert, qui est le directeur des services administratifs. Et Mme Samson fera la présentation de notre mémoire.

Mme Samson (Édith): Alors, bonjour. La Fédération des comités de parents du Québec est heureuse de vous soumettre aujourd'hui sa position à l'égard du projet de loi n° 124 modifiant la Loi sur l'instruction publique. Ce projet de loi concerne au plus haut point les parents engagés dans les conseils d'établissement et les comités de parents que nous représentons. Permettez-nous de remercier la commission de nous donner l'occasion d'être entendus avant les délibérations sur ce projet de loi.

n(12 h 40)n

Le projet de loi n° 124 comporte des enjeux majeurs pour l'avenir de l'éducation des jeunes du Québec, puisqu'il vise en premier lieu à conforter la volonté unanimement partagée d'atteindre la réussite de tous les élèves. Le texte de loi que nous avons entre les mains contient de nombreux éléments qui reconnaissent le rôle que les parents doivent jouer dans le système scolaire, et nous ne pouvons que nous en réjouir. Cependant, les changements législatifs envisagés restreignent par ailleurs le champ d'intervention des conseils d'établissement, ce qui a pour effet indirect de réduire le pouvoir des parents engagés dans cette structure. Dans ce contexte, nous nous sommes empressés de consulter nos membres, et c'est à la lumière des réponses à cette démarche que nous nous présentons devant vous.

La recherche de résultats. La Fédération des comités de parents du Québec souscrit d'emblée à l'intention première du projet de loi d'accentuer la recherche de résultats dans la poursuite de la mission des écoles et des commissions scolaires et d'exiger à cette fin un plan de réussite de la part des écoles et un plan stratégique de la part des commissions scolaires. Même si l'atteinte de résultats en matière de réussite de l'école nous semble un enjeu important pour le réseau scolaire dans le contexte actuel, nous ne souscrivons pas pour autant à tous les objectifs du projet de loi. Ainsi, en voulant rendre obligatoires le plan de réussite et le plan stratégique, le projet de loi bouscule sans raison évidente l'équilibre général du système scolaire. Nous verrons plus loin que nous ne pouvons souscrire à un tel changement.

Le plan de réussite. La Fédération des comités de parents est heureuse de constater que le ministère de l'Éducation a tenu à protéger l'essentiel du projet éducatif, à savoir les orientations de l'école, tout en remplaçant les mesures d'application du projet éducatif par le plan de réussite. Mais nous demeurons fortement préoccupés par la place que pourra prendre à l'avenir le plan de réussite au détriment des orientations qui concernent la totalité de la mission de l'école.

On pourrait nous répondre que la réussite de l'école embrasse aussi toute la mission de l'école, mais tel n'est pas le sens généralement admis du mot «réussite», particulièrement en milieu scolaire. La réussite des élèves veut dire, dans l'esprit d'un grand nombre de Québécois, passage aux examens et bonnes notes dans le bulletin. Le plan de réussite exigé des écoles depuis deux ans a d'ailleurs déjà teinté en ce sens la compréhension commune de la réussite. On constatera ainsi qu'à l'article 37.1 le texte glisse facilement de la réussite de l'école à la réussite des élèves. Comment, devant une telle compréhension limitative du terme «réussite», peut-on croire que les orientations de l'école mises en oeuvre par le plan de réussite ne seront pas restreintes à des visées quantitatives au détriment des orientations qui recherchent la qualité de l'ensemble des services éducatifs, particulièrement ceux qui ne seront jamais mesurables qualitativement?

Prenons quelques exemples. Pour améliorer leur place au palmarès des écoles secondaires, certains établissements ont cru bon de mettre en place des cours de passage d'examen. Cette mesure n'est pas mauvaise en soi, mais on est loin du goût d'apprendre et des compétences transversales visées par le nouveau curriculum. Autre exemple. On a vu ces dernières années de nombreuses écoles mettre l'accent, dans leur projet éducatif, sur la réduction de la violence à l'école. La poursuite d'une telle orientation a un effet direct sur la réussite, mais aura-t-elle encore sa place quand le plan de réussite visera strictement l'augmentation du nombre de diplômés? Et n'y a-t-il pas danger que la poursuite d'objectifs de diplomation à tout prix ait des effets pervers sur les services aux élèves qui ont des besoins particuliers?

En somme, on s'inquiète surtout que l'introduction du plan de réussite pour mettre en oeuvre le projet éducatif cloisonne celui-ci dans des dimensions quantitatives. Le projet éducatif fait en sorte que tous les agents de l'éducation d'un milieu partagent une même vision de leur mission éducative. Cette recherche de cohésion et de cohérence doit s'étendre à l'ensemble de l'activité éducative et scolaire et ne peut, à notre avis, être limitée aux orientations de l'école, à l'exclusion des objectifs et des moyens pour assurer la réussite des élèves.

L'élaboration et la réalisation du projet éducatif est déjà une tâche complexe. On sent actuellement que de plus en plus d'écoles reviennent à cette responsabilité première et fondamentale, particulièrement au primaire où l'application du nouveau curriculum est en voie d'être complétée. Il ne faudrait pas que l'exigence d'établir des plans de réussite vienne court-circuiter ce mouvement en rendant de plus en plus complexe la planification de la vie de l'école.

En conclusion de ce chapitre, nous estimons que les articles du projet de loi qui concernent le plan de réussite devraient être revus. Ainsi, l'article 37.1, 1.0 est inapplicable dans sa formulation actuelle, du fait qu'il porte un jugement négatif sur l'école québécoise en lui demandant d'améliorer la réussite des élèves. Une telle formulation se conçoit dans un contexte administratif mais pas, à notre avis, dans la loi qui encadre le réseau scolaire. L'article 37.1 du projet de loi devrait être restructuré de manière à bien clarifier la relation entre le plan de réussite et le projet éducatif et réécrit de façon aussi précise que l'est le plan stratégique de la commission scolaire. Pourquoi n'y aurait-il pas une périodicité prévue par la loi pour la révision du projet éducatif, comme le prévoit dorénavant le plan stratégique de la commission scolaire? Donc, en première recommandation, nous recommandons que l'article 37.1 soit reformulé en conséquence. Nous avons même une formulation dans notre mémoire.

L'encadrement des élèves. La proposition du texte que nous venons de soumettre à l'article 37.1 insiste beaucoup sur l'encadrement des élèves. À la suite des états généraux sur l'éducation, la loi 180 de 1997 a introduit dans la Loi sur l'instruction publique l'obligation pour chaque école de se doter d'une politique d'encadrement des élèves. L'article 75 de la loi suggère aussi des éléments de contenu que devrait toucher cette politique. Voilà que, pour faire place au plan de réussite, on biffe carrément cette obligation. À notre avis, ceci constitue un net recul.

Il est indispensable que chaque école établisse comment elle entend encadrer et suivre de près les élèves. Cet encadrement n'est-il pas un facteur important de réussite, et n'a-t-on pas décrié depuis longtemps le fait trop répandu que les élèves, particulièrement au secondaire, sont trop laissés à eux-mêmes? En effet, de nombreux parents revendiquent depuis longtemps que l'école encadre davantage les élèves, justement pour le motif qu'un encadrement plus serré contribuerait directement au succès scolaire de leur enfant. La mise en place d'activités susceptibles de rendre l'école attrayante et stimulante favorise aussi directement le succès des élèves.

C'est au nom des parents et de nos jeunes que nous réclamons de rétablir l'obligation pour l'école de prévoir des mesures reliées à l'encadrement des élèves, tel que nous l'avons recommandé précédemment dans la formulation suggérée de l'article 37.1. Enfin, nous voyons un autre avantage à l'insertion des modalités d'encadrement des élèves dans le plan de réussite. L'article 83 prévoit que les parents seront informés du plan de réussite et de l'atteinte des objectifs visés. Du même coup, ils seront au fait de ce qui est entrepris par l'école pour assurer un bon encadrement des élèves.

Le rôle du conseil d'établissement. Depuis plus de 20 ans, les conseils d'orientation et conseils d'établissement qui leur ont succédé en 1998 ont le pouvoir d'adopter les mesures qui assurent l'application du projet éducatif. À notre connaissance, ce pouvoir attribué à l'organisme d'orientation de l'école n'a jamais posé de problème. Au contraire, les parents engagés dans ces structures ont pu contribuer à la recherche de moyens susceptibles d'assurer l'application des orientations retenues par l'ensemble des participants de l'école. Or, le projet de loi n° 124 vient réduire le rôle du conseil d'établissement à un simple pouvoir d'approbation en ce qui a trait à tout ce qui va assurer l'application du projet éducatif, soit le plan de réussite. En termes clairs, on vient dire aux parents, aux élèves du secondaire, aux représentants de la communauté qu'ils n'ont plus à participer à la recherche des objectifs, ni des moyens de réalisation, ni des mesures d'évaluation du projet éducatif: Acceptez ou refusez ce qu'on a pensé de bon pour vous et vos enfants. En quoi est-il nécessaire d'exclure les parents de la recherche de moyens pour atteindre la réussite des élèves?

Le fait que les conseils d'établissement n'adopteraient plus les moyens d'appliquer le projet éducatif constitue donc, lui aussi, un pas en arrière qu'il nous est difficile d'accepter. N'a-t-on pas depuis longtemps établi une corrélation entre la participation des parents et la réussite des élèves? Comment peut-on maintenant songer à réduire la place des parents dans le processus de décision sur les moyens à prendre pour atteindre les objectifs de réussite?

Le projet de loi n° 124 introduit aussi une nouvelle disposition qui vient répondre en partie à cette préoccupation des membres des conseils d'établissement d'être mieux informés avant l'étude d'un document soumis pour adoption ou approbation. Il s'agit d'obligations pour le directeur de l'école, à l'article 96.13.2.1°, de s'assurer «que le conseil d'établissement reçoit les informations nécessaires avant d'approuver les propositions» qui lui sont soumises. Pour couvrir toutes les situations, autant les cas d'adoption que d'approbation de propositions, ce texte mériterait d'être reformulé.

Recommandation 2. Nous recommandons qu'à l'article 75 le conseil d'établissement adopte le plan de réussite de l'école et son actualisation proposée par le directeur d'école.

Recommandation 3. Nous recommandons que l'article 96.13, 2.1° se lise comme suit: «Il s'assure que le conseil d'établissement reçoit au préalable les propositions visées dans le présent chapitre ainsi que les informations pertinentes, et ce, dans les délais prévus aux règles de régie interne adoptées en vertu de l'article 67.»

n(12 h 50)n

La responsabilité de l'école en matière de qualité des services éducatifs. Depuis 1997, la commission scolaire a la responsabilité de s'assurer que les services éducatifs sont dispensés aux personnes qui résident sur son territoire. Pour leur part, les écoles voient à la qualité de ces services tant par leurs fonctions et pouvoirs attribués au directeur, par ceux confiés au conseil d'établissement que par les responsabilités dévolues aux enseignants et aux membres du personnel. Le message de la Loi sur l'instruction publique véhiculé depuis 1997 est que ceux qui font l'école sont maintenant responsables de la qualité des services qui y sont dispensés. On s'est vanté depuis d'avoir inversé la pyramide des pouvoirs de façon à donner à l'école les leviers nécessaires pour atteindre sa mission, qui est d'instruire, de socialiser ? responsabilités importantes dans une société en profonde mutation, soit dit en passant ? et de qualifier les élèves en les rendant aptes, chacun, à entreprendre et à réussir un parcours scolaire. Dans ce nouveau contexte, les services de la commission scolaire se sont repositionnés en se mettant au service des écoles.

Moins de cinq ans après l'adoption de ce changement majeur, mais combien significatif pour les éducateurs et les parents, voilà qu'on leur signifie que des consignes viendront s'imposer d'ailleurs, sous forme d'axes d'intervention ou autres mesures précises, pour assurer la réussite des élèves. D'ailleurs, dans un document du comité directeur conjoint ministère de l'Éducation-commissions scolaires, en date du 26 mars 2002, les axes d'intervention dont on parle ici sont définis comme les mesures et les moyens précis choisis pour atteindre les objectifs.

Le projet de loi n° 124, sous prétexte de rechercher des résultats, renverse en un tour de main l'équilibre général du réseau scolaire fraîchement établi. Sur quelle analyse des effets de la réforme s'appuie-t-on pour procéder à un bouleversement aussi draconien et aussi rapidement? Dans les faits, le projet de loi n° 124 nous propose un retour au modèle où la qualité tombe sous la responsabilité d'agents extérieurs de l'école. Pourtant, nous avons vécu des décennies sous l'influence de ce modèle centralisé sans pour autant que soit nettement diminué le taux d'échecs et d'abandons scolaires. Les états généraux et la réforme de 1998 ont considéré que l'école, là où se passe l'activité éducative, doit être le lieu où se prennent les orientations qui assurent l'atteinte de la réussite. L'école a donc été saisie de la responsabilité de la qualité des services éducatifs et, en l'occurrence, de la réussite d'un parcours scolaire pour tous les élèves. Si le présent gouvernement a le mérite de remettre la réussite au premier plan des objectifs du réseau, il ne doit pas le faire en déniant à l'école la capacité ou, pire encore, le sens du devoir face à une responsabilité aussi importante.

La Fédération des comités de parents du Québec croit toujours que l'école doit disposer des pouvoirs et des moyens pour assumer elle-même la responsabilité de la réussite de ses élèves. Dans cette vision du système scolaire, c'est davantage à la commission scolaire de s'inspirer des plans de réussite des écoles pour ajuster ses services qu'aux écoles d'être assujetties à des axes de développement qui ne tiennent pas compte de leurs réalités spécifiques.

Recommandation 4. Nous recommandons que l'article 209.1 du projet de loi soit introduit avant le bilan des activités, soit à l'article 219.1, de manière à ne pas porter à confusion quant à la mission première de la commission scolaire, qui est d'assurer les services éducatifs aux personnes relevant de sa compétence.

Recommandation 5. Nous recommandons que l'actuel article 209.1 soit modifié de façon à ne contenir que des orientations, des enjeux et des axes de développement qui concernent uniquement les fonctions et pouvoirs de la commission scolaire et non ceux des écoles.

Recommandation 6. Nous recommandons que l'article 221.1 se lise comme suit: «La commission scolaire s'assure que chaque école s'est dotée d'un projet éducatif et d'un plan de réussite qui est conforme aux prescriptions de la présente loi.»

La contribution de tous les agents du milieu. Nous ne pouvons passer sous silence que l'actuel projet de loi entraîne, sans doute malgré lui, un effet négatif sur la contribution de tous les agents du milieu à l'évolution de l'école. En éliminant du projet éducatif les mesures pour en assurer la réalisation, voici qu'on retire du même coup aux élèves, aux parents et aux représentants de la communauté la possibilité d'être partie prenante du choix, de la réalisation et de l'évaluation des moyens mis en oeuvre. Nous avons vu plus haut les impacts de ce changement sur les fonctions du conseil d'établissement, et nous avons réclamé, à cet égard, des modifications au projet de loi.

Mais cela ne s'arrête pas là. Aussi, l'organisme de participation des parents et le comité des élèves perdent le pouvoir de collaborer à la mise en place des moyens visant l'application des orientations de l'école et de son plan de réussite. Nous réclamons que cette situation soit corrigée pour que tout ce qui concourt à la réussite éducative fasse partie des préoccupations de tous ceux qui veulent et qui peuvent y contribuer à l'intérieur des structures prévues à cette fin. Restreindre ce pouvoir ne fait que replier l'école sur elle-même. Peut-on encore rêver que l'école soit l'affaire de tout un village?

Recommandation 7. Nous recommandons que l'article 96.2 et 96.6 portant sur l'organisme de participation des parents et le comité des élèves soient revus de façon à inclure le plan de réussite dans les champs de collaboration des parents et des élèves. Nous proposons d'ailleurs à cette fin un libellé dans notre mémoire.

En bref, la Fédération des comités de parents souhaite ardemment que la participation de tous soit considérée dans le milieu scolaire comme un élément indispensable à la réussite des élèves, que l'autonomie de l'école et le partenariat entre les membres au sein des conseils d'établissement soient soutenus par des dispositions législatives claires et sans ambiguïté et que les changements législatifs envisagés valorisent l'ensemble de la mission de l'école, qui est d'instruire, de socialiser et de qualifier les élèves tout en les rendant aptes à entreprendre et à réussir un parcours scolaire. Merci de l'attention que vous portez à ce mémoire et à ses recommandations.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, Mme Samson. Alors, M. le ministre.

M. Simard (Richelieu): Merci, Mme la Présidente. Alors, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt la lecture de ce mémoire. Voilà un travail qui a été fait en profondeur, qui montre, ne serait-ce que par la tonalité, une passion pour la défense du rôle des parents à l'école. Et, Mme Miron, que d'ailleurs nous saluons ici, je pense, pour la première fois comme présidente de la Fédération des comités de parents... Nous sommes entrés définitivement dans l'après Stronach, et pour la première fois vous êtes notre interlocutrice. Soyez les bienvenus parmi nous, Mme Samson, M. Boisvert.

Je suis très à l'aise de vos commentaires, qui souvent paraissent assez directs et assez critiques quant à certains aspects du projet de loi, parce que, sur le fond, nous partageons exactement la même vision. Et, s'il y a dans le projet de loi des éléments qui devaient perturber cette vision commune, nous allons les changer. D'ailleurs, dans certains cas, je vous ai annoncé déjà que les changements sont envisagés de façon assez précise.

Mais permettez-moi de vous rappeler dès le départ à votre propre conclusion, hein, vous ramener à votre propre conclusion, lorsque vous dites que la mission de l'école est d'instruire, de socialiser et de qualifier les élèves. C'est ce que j'ai dit, moi, dans mon introduction et ce qui est au coeur de toute cette opération des plans de réussite sur laquelle nous sommes en train de légiférer. Donc, vouloir réduire, comme vous le faites dans votre introduction, les plans de réussite, et l'opération «plans de réussite», et la loi qui tente à les accréditer au seul aspect quantitatif, au seul aspect limité à la diplomation, à la réussite dans le sens scolaire immédiat d'instruction me semble tout à fait impossible à vérifier à la lecture de notre projet de loi. En aucun endroit, il n'est question de limiter ainsi. Au contraire, il n'y a pas d'objectifs mesurables d'indiqués. C'est cette vision intégratrice de l'éducation qui est au coeur des plans de réussite.

Réussir, ce n'est pas uniquement passer ses examens. Réussir, c'est une foule de choses qui d'ailleurs est définie largement dans le plan éducatif d'une école et qui comprend beaucoup d'autres éléments que la réussite. Nous sommes tous évidemment favorables à ce qu'il y ait le plus grand nombre de diplômés, que les gens aient de bonnes notes, réussissent, mais ce n'est qu'un des aspects, et les plans de réussite ne sont en aucun endroit ? et je vous mets au défi de me trouver un endroit où c'est spécifié dans ce sens-là ? à aucun endroit, conçus dans ce sens-là. Et d'ailleurs je suis certain que les comités de parents qui participent activement aux conseils d'établissement, les parents qui sont impliqués dans les conseils d'établissement, ne laisseraient pas les projets éducatifs et les plans de réussite se limiter à des éléments purement mesurables. Donc, je voudrais au départ que l'on s'entende, dans le fond, que nous sommes d'accord.

La même chose, je vous ai entendu faire un plaidoyer en faveur...

La Présidente (Mme Bélanger): Je m'excuse, M. le ministre.

M. Simard (Richelieu): Oui.

La Présidente (Mme Bélanger): Étant donné qu'il est 13 heures, ça me prend le consentement des membres de la commission pour poursuivre.

M. Simard (Richelieu): Oui. On va essayer d'être rapides. J'ai des rendez-vous, évidemment, vous l'aurez compris.

Une voix: Nous n'en doutons pas.

n(13 heures)n

M. Simard (Richelieu): Vous n'en doutez pas? Simplement un dernier point là-dessus, et je vais plutôt écouter votre réaction, sur l'encadrement. Il me semble que là je me fatigue du propre son de ma voix, tellement je dis le mot «encadrement» souvent et tellement j'insiste que tout ce que nous faisons actuellement dans les réformes mène à un meilleur encadrement. Les caricaturistes me caricaturent en encadrement actuellement. Donc, pour moi, vous entendre parler d'encadrement, ce n'est certainement pas, pour moi, choquant, là. Et, s'il y a le moindrement un écart par rapport à ça, vous pouvez être assurés que nous allons le rétablir. Nous avons voulu que la loi soit plus générale et donc ne pas s'arrêter spécifiquement sur un aspect, mais, si vous jugez que c'est important et que ça nous écarterait de l'encadrement, vous pouvez être sûrs que je suis tellement un défenseur de l'encadrement que je le remettrai.

Je vous dis tout de suite que, pour certaines de vos recommandations ? je pense à 5, à 6 ? il y aura des modifications proposées qui iront, je pense... qui vous satisferont. Alors, simplement nous assurer dès le départ que nous parlons bien de la même chose. Pour nous, deux principes: les parents ne doivent pas trouver dans ce projet de loi le moindre recul quant à leur participation, et, s'il faut clarifier, nous allons le clarifier ? je l'ai dit tout à l'heure, l'objectif, ce n'est pas l'ambiguïté mais de clarifier ? et, deuxièmement, l'objectif de tout cela, c'est la réussite globale des élèves, telle que je l'ai définie tout à l'heure.

La Présidente (Mme Bélanger): Mme Miron.

Mme Miron (Diane): Je vais commencer par l'encadrement. Bon, effectivement, on vous caricature. Mais, peut-être parce que justement on vous caricature là-dedans puis on connaît votre discours sur l'encadrement, c'est une grande surprise pour les parents de constater que ça a été enlevé de la loi. C'est quand même un consensus qui avait été fait lors des états généraux, qui avait été largement discuté aussi, je pense, dans l'adoption du projet de loi n° 180. Et, constater qu'on le retire actuellement, bien, je pense qu'on se questionne au niveau du message qui est laissé.

Cependant, on est bien conscients que ça peut être repris ailleurs. Mais, pour le parent, c'est important d'avoir son mot à dire sur les politiques d'encadrement. Et c'est peut-être un moment privilégié de réflexion dans l'école sur qu'est-ce qu'on veut comme encadrement et qui viendra teinter différentes actions qui seront posées par après. Alors, à ce niveau-là, on souhaiterait... Et on vous fait une proposition de libellé. Ce n'est peut-être pas obligé de s'appeler «politiques d'encadrement», ça pourrait être des mesures concrètes qui sont bien établies.

M. Simard (Richelieu): Alors, on s'entend là-dessus.

Mme Miron (Diane): D'accord. L'autre question, sur la conception des plans de réussite, le fait qu'on semble... Dans nos propos, on dit qu'on a l'impression que c'est réduit juste aux mesures quantitatives. C'est la perception qu'on a à la lecture du texte, probablement basée, et d'ailleurs on le dit dans notre mémoire, sur le vécu qu'on a actuellement des plans de réussite que l'on vit. C'est quelque chose qui est à part, qui est en dehors du, je dois dire... Actuellement, les plans de réussite, comme on les vit, c'est axé sur des mesures quantitatives, le taux de réussite des jeunes à différents... Et c'est ce qu'on veut éviter. Probablement que ce n'est pas suffisamment clair dans le projet de loi, parce qu'on a cette impression-là. Mais c'est presque unanime dans la consultation qu'on a faite auprès de nos parents là-dessus: on ne sent pas que le plan de réussite englobe toutes les dimensions du projet éducatif et de la mission de l'école.

Et d'ailleurs, à un article, une proposition que vous faites ? là je n'ai pas la référence exacte ? mais ce n'est pas clair, le message qu'on donne. On dit que l'école réalise sa mission dans le cadre d'un projet éducatif et d'un plan de réussite, et, un peu plus loin, le plan de réussite, il est subordonné au projet éducatif. Alors, ce n'est pas clair, là, tu sais. C'est comme deux choses différentes. C'est comme si on avait l'impression que, pour réaliser notre projet éducatif, il fallait se donner un plan d'action puis un autre plan d'action qui ne touche que la réussite des élèves. Alors, c'est la perception qu'on a à la lecture du texte.

Et toute la définition du mot «réussite» aussi n'est pas claire, là, tu sais. On a l'impression... On parle de la réussite de l'école. À un moment donné, on parle de la réussite de l'élève. Alors, je pense que, ça aussi, il n'y a peut-être pas consensus au Québec sur qu'est-ce qu'on entend par «réussite», là. Peut-être que c'est tout ça qui est sous-jacent à l'impression qu'on a, comme parent, sur l'importance qu'on accorde au plan de réussite versus le projet éducatif. Et on ne voudrait pas qu'à plus ou moins court terme le plan de réussite remplace le projet éducatif. Je sais que ce n'est pas l'intention, mais ça risque... Si on met trop d'emphase sur le plan de réussite, mesure quantitative, on va perdre les autres dimensions du projet éducatif, parce qu'il y a beaucoup de choses à faire dans une école, il y a beaucoup de préoccupations.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre.

M. Simard (Richelieu): Mme la Présidente, ma réaction immédiate, c'est de dire que je vais absolument dans le même sens que Mme la présidente. Mais, si ? le mot qu'elle a employé le plus, c'est l'«impression», hein? ? l'impression est donnée, ce n'est pas bon, puisque le projet de loi, il est fait pour éclairer les acteurs. Les acteurs sont les parents, les directions d'école, les enseignants, les commissions scolaires. Il faut donc que ce soit clair. Alors, s'il faut préciser, nous allons préciser, hein?

Vous ne mettez pas en question, je l'ai bien compris, la valeur de tout ça et vous savez que, dans le fond, nous partageons la même conception. Mais vous avez peur que, dans la formulation actuelle, si on ne précise pas suffisamment, cette impression pourrait dominer... d'un plan de réussite qui serait réduit à la partie quantifiable du projet éducatif, ce qui n'est pas notre intention. Alors, je peux vous donner l'assurance ? et nous aurons l'occasion d'en reparler ? que nous amènerons les précisions qu'il faut. Vous en proposez certaines, elles sont un peu complexes peut-être, mais enfin nous allons les analyser. Si ce ne sont pas celles-là, nous allons vous en proposer qui nous assureront qu'il n'y ait pas d'ambiguïté à ce sujet-là. Il ne peut pas y en avoir là-dessus. Projet éducatif, c'est le coeur de toute la participation autour de l'enfant par le milieu, par les parents, par l'équipe-école, par tous les intervenants. Alors, on ne peut pas remettre ça en question.

Le plan de réussite, c'est la partie mise en oeuvre de cette opération, de cette conception, de ce projet éducatif. La mise en oeuvre, elle passe par des mesures d'appui à la réussite scolaire comme elle passe par des mesures d'appui à la culture, à la formation physique, à la formation linguistique, selon ce que les parents ont décidé, n'est-ce pas? Et ça, ça doit être très clair que cette notion de projet éducatif est d'abord l'élément-clé, que le plan de réussite ne peut pas être réduit à un aspect uniquement quantifiable et qu'il doit toucher les trois aspects dont nous avons toujours parlé: instruire, qualifier, socialiser. Donc, nous sommes parfaitement d'accord sur les objectifs. Vous avez peur de l'imprécision, enfin vous avez l'impression de ne pas retrouver totalement la clarté que vous souhaitez. Nous allons essayer de l'introduire. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci. M. le député de Vaudreuil.

M. Marcoux: Merci, Mme la Présidente. Alors, bienvenue, Mme Miron. Nous vous félicitons de votre élection à la présidence. Si je comprends, vous remplacez M. Gary Stronach, qui a occupé cette fonction-là pendant un certain nombre d'années, qui est d'ailleurs un résident de Pincourt, dans mon comté. Et puis également Mme Samson et M. Boisvert. Merci de votre présentation, également de l'analyse très approfondie que vous avez faite de la portée du projet de loi.

D'entrée de jeu, je voudrais vous dire que le questionnement que vous faites sur la notion de réussite, je ne sais pas si vous aviez eu, vous, accès au rapport du Conseil supérieur de l'éducation avant nous ce matin, mais, en tout cas, ça correspond exactement à des préoccupations et également à des interrogations qu'exprime le Conseil supérieur de l'éducation dans l'avis qu'il a transmis au ministre en date du 26 novembre, c'est-à-dire, en d'autres termes, est-ce que ça touche seulement la réussite scolaire ou encore les deux autres volets, la triple mission de l'école?

Donc, je pense que, si des groupes comme vous plus le Conseil supérieur de l'éducation s'interrogent à cet égard-là ? et c'est ce que vous faites ? le ministre, je pense, est d'accord pour apporter des précisions. Et, à mon avis, ce sera important pour dissiper des confusions sur le terrain quand c'est rendu au niveau de l'école. Parce que, vous savez, on peut bien, dans les discours ? et le ministre sera d'accord avec moi ? énoncer des principes, mais parfois ça peut se perdre dans la nuit des temps lorsque ce n'est pas précisé, surtout dans une loi.

Deuxièmement, en ce qui a trait à l'encadrement ? et j'étais heureux que vous en parliez ? j'avais moi-même soulevé la question, lors de l'étude en deuxième lecture, en indiquant qu'on enlevait, à l'article 75, cette notion de politique d'encadrement des élèves. En tout cas, quant à moi, ça me paraît important, surtout, je pense, lorsque vous discutez avec des parents au niveau secondaire qui vont dire: Bien, nous voulons envoyer nos enfants à l'école privée ? je ne suis pas négatif vis-à-vis de l'école privée, ce n'est pas ça ? mais pas nécessairement parce que la qualité de l'enseignement est meilleure ? ça peut, mais, dans d'autres cas, non. Mais, souvent, nous entendons parler de la préoccupation d'encadrement des élèves. Et je suis d'accord avec vous, si nous l'enlevons dans la loi, je pense que le message que nous envoyons n'est peut-être pas celui que nous voulons envoyer.

n(13 h 10)n

La même chose à l'article 37 lorsqu'on enlève, évidemment, pour le projet éducatif de l'école, là, compte tenu des... mais avant les orientations dans le projet éducatif, les mesures, les applications en adaptation à l'enrichissement, compte tenu des besoins des élèves et des priorités de l'école. C'est peut-être encore seulement... peut-être pas important, mais, pour moi, le projet éducatif doit répondre aux besoins des élèves. Je pense que ça, c'est essentiel.

Maintenant, quant à ce que vous parlez, de la subordination et du lien entre le projet éducatif et le plan de réussite, depuis deux ans, les écoles préparent... En fait, de par la loi, ils devaient préparer un projet éducatif, donc selon la Loi de l'instruction publique. Et, depuis deux ans, selon ce qui a été demandé par le ministère, les écoles devaient préparer aussi un plan de réussite, si je comprends. Donc, est-ce que votre préoccupation se base, dans le fond, sur l'expérience que vous avez vécue depuis deux ans au niveau des écoles, c'est-à-dire la préparation du plan de réussite? Vous sembliez dire que c'était davantage orienté vers des cibles quantitatives ou des données quantitatives. Donc, est-ce que vos préoccupations découlent, dans le fond, de ce que vous avez vécu depuis deux ans? Parce que vous avez l'expérience depuis deux ans.

Mme Miron (Diane): Comme je le disais tantôt, la critique qu'on en a faite dans notre mémoire s'appuie sur le vécu qu'on a depuis deux ans. Alors, c'est sûr qu'on avait comme message de raccrocher le plan de réussite au projet éducatif. Mais ça ne se faisait pas aussi facilement, et ce n'est pas toutes les écoles non plus qui sont rendues au même niveau concernant l'élaboration d'un projet éducatif. Alors, effectivement, c'est basé sur l'expérience qu'on a. Et on voulait être sûrs de ne pas échapper cette dimension-là. Le projet éducatif, c'est global, et le plan de réussite, ça devrait être le plan d'action du projet éducatif finalement et ça doit englober toutes les dimensions.

M. Marcoux: Maintenant, comment vous le voyez, vous? Comment vous verriez le plan de réussite par rapport au projet éducatif? Est-ce que... Vous dites: Le plan de réussite doit être le plan d'action du projet éducatif. Mais donc, en ayant beaucoup d'autres éléments qui sont autres que quantitatifs et qui reprennent des éléments du projet éducatif, comment...

Mme Miron (Diane): Bien, en fait, quand on touchera la dimension qualification, bien, dans notre plan d'action ou dans le plan de réussite, c'est sûr qu'on va s'interroger, par exemple, sur c'est quoi, le taux de réussite de nos jeunes en français, en mathématiques, sur des matières comme ça qui vont faire qu'on va être capables de se questionner pour savoir si les services sont bien rendus ou comment améliorer la situation. Et, si ça touche la socialisation, on va avoir d'autres préoccupations. Et, bon, alors, tout ça, sur chacun des volets, on va être capables d'identifier en fonction de l'analyse qu'on aura faite de notre milieu et des besoins et des attentes du milieu. On ira se chercher des éléments qui viendront donner... On réussira à se donner un plan d'action en fonction de ça.

M. Marcoux: Vous référez, Mme la présidente, à la page 7 de votre mémoire, à un document du comité directeur conjoint ministère de l'Éducation-commissions scolaires, en date du 26 mars 2002, et vous indiquez: «Les axes d'intervention dont on parle ici sont définis comme "les mesures et les moyens précis choisis pour l'atteinte des objectifs".» Et vous concluez en disant que «le projet de loi n° 124, sous prétexte de rechercher des résultats, renverse [...] l'équilibre général du réseau scolaire».

Est-ce que... C'est parce que vous dites: Le projet de loi n° 124 a des orientations qui concordent avec ce document conjoint du ministère et des commissions scolaires qui...

Mme Miron (Diane): Oui. Mais je pense que ça a servi d'assise, là. Il y a un comité de travail qui avait été formé, et ça a servi d'assise à mettre en place les plans stratégiques des commissions scolaires et de venir cadrer le plan de réussite. C'est dans ce sens-là. Nous, ce qu'on dit là-dedans, c'est que... Quand on dit qu'on renverse l'équilibre général, bien, c'est que c'est ? c'est quoi, le mot qu'on utilisait? ? l'entonnoir...

Une voix: La pyramide inversée.

Mme Miron (Diane): ...la pyramide inversée. Alors, c'est ça qu'on voulait soulever. Nous aussi, encore là, on a l'impression que les commissions scolaires vont avoir une mainmise sur les plans de réussite des écoles.

M. Marcoux: Et, dans le fond, vous voudriez que ce soit l'inverse...

Mme Miron (Diane): Que ce soit l'inverse, effectivement.

M. Marcoux: ...que ça parte d'abord des écoles et...

Mme Miron (Diane): Ce qu'on a compris de l'orientation de la Loi sur l'instruction publique, c'est que c'est l'inverse, et, nous, on pense que, actuellement, c'est un petit renversement qui se fait.

M. Marcoux: Donc, encore une fois, vous allez dans le sens du Conseil supérieur de l'éducation, si je comprends.

Mme Miron (Diane): On ne s'est pourtant pas consultés, mais c'est ça, ça a l'air. Ha, ha, ha!

M. Marcoux: Bien, je commence... Ha, ha, ha! À la page 8, dernière question, vous dites: «Dans les faits ? au haut de la page ? le projet de loi n° 124 nous propose un retour au modèle où la qualité tombe sous la responsabilité d'agents extérieurs de l'école.»

Ces agents extérieurs là, donc, si je comprends, vous dites...

Mme Miron (Diane): C'est la commission scolaire, c'est à ça qu'on fait référence, là. Dans le contexte, actuellement, c'est la commission scolaire qui viendrait imposer des choix pour l'école.

M. Marcoux: Une dernière question, Mme la Présidente. Je ne sais pas si ma collègue, après ça... À la page 9, vous dites: «En éliminant du projet éducatif les mesures pour en assurer la réalisation, voici qu'on retire du même coup aux élèves, aux parents [...] de la communauté la possibilité d'être partie prenante du choix, de la réalisation et de l'évaluation des moyens pour sa mise en oeuvre.»

Même si ce n'est pas dans la loi, est-ce que ça ne va pas de soi qu'il y ait des mesures qui soient élaborées pour réaliser le projet éducatif? Est-ce que c'est nécessaire que ça reste dans la loi? Parce que vous dites: On élimine du projet éducatif les mesures pour en assurer la réalisation. Mais donc, vous voudriez que ça reste dans la loi, ça. Parce que, dans la loi, on dit justement...

Mme Miron (Diane): Oui, mais, en fait, c'est qu'on le retire comme responsabilité du conseil d'établissement. On définit les orientations mais on n'est plus partie prenante, on ne fait qu'approuver les moyens qui ont été choisis par le milieu-école. Alors, c'est à ce niveau-là qu'on dit: Finalement, c'est un recul pour l'ensemble des parents, et particulièrement, les parents et les élèves, les parents qui sont membres de l'OPP, parce que, actuellement, le projet éducatif contient des orientations et des mesures, et là, dans le projet de loi n° 124, ça contient des orientations seulement, ce sur quoi on est d'accord. Mais on n'est pas d'accord sur le fait qu'on n'adopte pas les mesures qui sont choisies par après.

M. Marcoux: Donc, c'est la modification qui est présentée à l'article 37, où on élimine les mesures pour en assurer la réalisation.

Mme Miron (Diane): C'est une espèce de concordance pour inclure tous les milieux.

M. Marcoux: Bien, écoutez, merci beaucoup. Je ne sais pas si ma collègue...

Une voix: Non, ça va. J'ai beaucoup apprécié votre...

M. Marcoux: Merci beaucoup pour votre mémoire.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, merci, Mme Miron. Oui?

M. Simard (Richelieu): Permettez-moi aussi de remercier les parents et de les rassurer, hein, nous vous avons écoutés avec beaucoup d'attention. Je n'ai eu votre mémoire que dans les dernières heures. Nous avions eu, à la fin de l'été, un certain nombre de rencontres, mais il y a eu de l'évolution de votre part, et je vais m'assurer que tous les points que vous avez mentionnés soient considérés de façon très sérieuse. Et je peux d'ores et déjà vous assurer que la plupart donneront lieu à des modifications qui devraient faire disparaître certaines impressions.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, merci beaucoup de votre participation. Alors, la commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 h 18)

 

(Reprise à 15 h 1)

La Présidente (Mme Bélanger): Constatant que nous avons quorum, je déclare la séance ouverte. Alors, le mandat de la commission de l'éducation: la commission est réunie afin de tenir des consultations particulières à l'égard du projet de loi n° 124, Loi modifiant la Loi sur le Conseil supérieur de l'éducation et la Loi sur l'instruction publique. Alors, nous recevons cet après-midi la Centrale syndicale du Québec. Alors, comme vous semblez être déjà prêts, je demanderais à la porte-parole de bien vouloir se présenter et présenter les personnes qui l'accompagnent. Et je tiens à vous dire que vous avez 15 minutes pour présenter votre mémoire, qui sera suivi de l'échange entre les parlementaires ministériels et l'opposition pendant 30 minutes. Alors, vous avez la parole.

Centrale des syndicats du Québec (CSQ)

Mme Richard (Monique): Merci, Mme la Présidente. Alors, la Centrale des syndicats du Québec est représentée aujourd'hui bien sûr par la présidente, mais aussi les représentants et représentantes des différentes fédérations concernées par ces modifications à la Loi de l'instruction publique, alors du niveau préscolaire, primaire, secondaire. À ma gauche, Mme Johanne Fortier, présidente de la Fédération des syndicats de l'enseignement; M. Bernard Couturier-Lévesque, président de la Fédération du personnel de soutien; à ma droite, M. Jacques Tondreau, qui est conseiller à la Centrale, particulièrement affecté au dossier de l'éducation, et M. Pierre Bouchard, président de la Fédération des professionnelles et professionnels de l'éducation.

Alors, ça se veut aussi un témoignage que ce projet de loi concerne le monde de l'éducation, particulièrement celles et ceux qui font l'école à tous les jours. Et simplement pour vous dire d'entrée de jeu qu'à notre avis la réussite, ça ne se décrète pas, c'est conséquent d'un travail d'engagement des personnels dans le milieu de l'éducation. Et, dans ce sens-là, je pense que depuis bon nombre d'années l'engagement de la CSQ ne s'est pas démenti au chapitre de notre préoccupation à l'égard d'une réussite plus grande, une réussite scolaire et une réussite éducative.

On a entrepris déjà, au début des années quatre-vingt-dix, une campagne importante qu'on avait appelée Réussir l'école, réussir à l'école, qui a conduit à un premier plan d'action gouvernemental en faveur de la réussite. À ce moment-là, on avait soulevé, aux dires de certains responsables politiques de l'époque, des épouvantails, et la réussite n'était pas si problématique. Cependant, après avoir discuté longuement, on en est venu à mettre en place un plan, qu'on a appelé le plan Pagé, qui a, après une consultation large bien sûr, proposé une trentaine de mesures à partir desquelles chaque école avait l'autonomie d'élaborer un projet pour travailler à la réussite des jeunes et conséquemment avait aussi des moyens financiers alloués à cette élaboration de mesures à mettre en place. Ça a été un moment de mobilisation important du réseau scolaire à l'égard de la réussite des jeunes.

Nous avons de plus, en collaboration avec l'Université Laval, créé le Centre de recherche et d'intervention sur la réussite éducative et scolaire, dont le rayonnement est très connu ici et ailleurs. Et j'espère qu'on s'en préoccupera autant ici qu'ailleurs, puisque ces chercheurs du CRIRES font des recherches importantes sur toute la question de la réussite éducative. Et on a aussi produit un répertoire de projets très novateurs favorisant la réussite éducative. On a aussi bien sûr travaillé à la création d'un programme de formation universitaire, qui est crédité, à l'intention du personnel scolaire, sur la réussite, un microprogramme de deuxième cycle à l'Université Laval qui, aussi, soulève de l'intérêt et de la participation.

Notre intention aujourd'hui, dans la poursuite de cet engagement, c'est de travailler à la réussite des jeunes qui nous sont confiés. On a donc procédé à l'analyse du projet de loi à partir de cette lunette, et nous vous proposons certains éléments susceptibles de faire consensus, on le souhaite.

Nous ne sommes pas contre... Notre position est la suivante. Je ne lirai pas de façon textuelle dans le mémoire, il est trop long puis je n'ai pas assez temps, même si je parle vite. Alors, je vais y aller de façon résumée sur des éléments qui, à notre avis, sont essentiels. Nous ne sommes pas contre les plans de réussite, ni d'ailleurs contre les objectifs chiffrés. Nous sommes contre l'obligation de résultat qu'ils comportent. On a un peu l'impression que l'on cherche à transposer au développement des personnes des concepts qui s'appliquent à la production de produits matériels. Pour nous, un plan de réussite, ce n'est pas un plan d'affaires, c'est très différent d'un plan d'affaires.

À la suite des états généraux de l'éducation, le plan d'action du ministère de l'Éducation a reconnu bien sûr des objectifs quantitatifs: 85 % de diplomation en 2010 pour les jeunes du secondaire, et ça, avant 20 ans. C'est souhaitable, mais, dans les faits, si on se réfère au tableau qu'on retrouve en page 11 de notre mémoire, on voit qu'on est un peu plafonné au niveau de la réussite des élèves et qu'il y a peut-être un certain nombre de fluctuations qui font qu'il y a des hauts et des bas, fluctuations qui n'appartiennent pas, en termes de gestion, à l'école. Pensons particulièrement à la hausse de la note de passage, qui a créé, à un moment donné, une certaine fluctuation; les épreuves ministérielles, qui, d'année en année, peuvent amener, selon le niveau de difficulté, des réussites qui sont différentes; des coupures budgétaires, qui ont eu bien sûr des effets dans le réseau scolaire comme elles en ont eu dans d'autres réseaux.

Alors, le projet de loi qui nous est présenté impose aux écoles et aux centres une obligation de résultat qui ne fait pas de sens à ce niveau dans le système scolaire. Nous croyons qu'il est pertinent que la Loi de l'instruction publique demande aux commissions scolaires de se doter d'un plan stratégique qui est en concordance avec les obligations imposées aux organismes publics par la Loi sur l'imputabilité gouvernementale. On peut comprendre que l'État veuille s'assurer que les gouvernements locaux rendent compte de leurs décisions et de leur gestion. Cependant, ce n'est pas la même nature de gestion ou de situation qui se pose au niveau de l'école. L'école n'est pas un petit gouvernement en soi, l'école est un lieu d'apprentissage qui met à contribution les différents types de personnel à partir d'une mission dont on va se parler un petit peu plus tard. Et bien sûr que peut-être que le territoire aussi de la commission scolaire peut permettre des objectifs quantitatifs, parce qu'on a là quand même une clientèle qui est plus captive, à cause d'un territoire beaucoup plus large que celui qui est cerné par l'école.

Nous nous opposons fermement à l'article 5 de la loi n° 124 pour les raisons suivantes. Cet article situe les établissements scolaires dans un cadre où ils devront se doter d'un plan de réussite comportant des objectifs précis et mesurables. Ces objectifs précis et mesurables doivent tenir compte, par un jeu de cascade, des indicateurs fixés au niveau national. Or, les encadrements qui valent pour les grands ensembles ne peuvent être transposés aux établissements dont la clientèle change, que ce soit par le choix des parents à l'école, que ce soit par l'organisation des services, qui fait qu'il y a tel ou tel type de clientèle une année et qu'on n'a pas le même type de clientèle l'année suivante, que ce soit par des projets éducatifs qui vont amener aussi des modifications dans la clientèle. Ces indicateurs nationaux, valables en soi, créent une pression très forte sur le milieu lorsqu'ils sont replacés dans le contexte réel.

L'obligation de résultat n'a pas de sens pour les établissements, et voici trois raisons qui appuient notre dire. L'établissement n'est pas un niveau pertinent pour l'obligation de résultat car il n'a pas de prise sur des éléments déterminants de la réussite. On n'a qu'à se référer au graphique de la page 12 pour voir que, malgré un travail constant dans les établissements, en faveur de la réussite, le taux de diplomation varie parfois substantiellement dans une période donnée. Ces variations peuvent s'expliquer, entre autres, par les plus ou moins grandes difficultés des épreuves ministérielles, des changements dans le financement, des directives quant à la note de passage, j'en ai parlé tout à l'heure.

Une deuxième raison. Il y a également un problème de données. Le cédérom, dont on a tellement parlé, sur la réussite comporte des erreurs, et les données ont une année de décalage par rapport aux besoins de mise à jour du plan de réussite des établissements. Par exemple, à l'automne 2002, l'école ne dispose que de données relevant de 2000-2001. À quelle gymnastique on va devoir se livrer, comme intervenant dans le milieu scolaire, pour être en mesure de trouver l'application en 2002? Alors, comment on va traiter les cheminements particuliers? Comment on va traiter les fermetures de classes qui ont eu lieu? Comment on va traiter l'ajout de nouveaux groupes en EHDAA? Comment on va traiter la question du manque de ressources, qui peut avoir une influence? Et tout ça, en comptabilisant un an de décalage. On n'est pas là pour faire de la comptabilité et de la mesure, on est là pour faire de l'enseignement et amener des jeunes à développer leur potentiel tout au long de leurs années d'apprentissage.

n(15 h 10)n

Les fluctuations de clientèle, une troisième raison, c'est faire varier le taux de diplomation d'un établissement, et ces fluctuations dépendent, entre autres, du choix de l'école par les parents, les projets particuliers, et ainsi de suite. Je peux vous prédire une chose, moi. Avec la question du redoublement actuelle, le taux de retards scolaires a certainement chuté, puisque la question du redoublement, on doit le plus possible l'éviter et faire du redoublement seulement dans des cas majeurs. Mais est-ce qu'on a pour autant amélioré la qualité des services? Est-ce qu'on a pour autant rendu service à l'élève? Bien sûr qu'on atteindra un pourcentage qui sera amélioré. Qu'est-ce qu'on a, comme solution, pour ces enfants qui, d'année en année, vont être en situation de démotivation et de difficulté dans leurs démarches d'apprentissage? L'école n'est pas, selon nous, un niveau approprié pour l'obligation de résultat, ne serait-ce que pour une question de rigueur. Et je pense que, s'il y a un milieu qui doit travailler avec rigueur, c'est vraiment le milieu de l'éducation.

Il y a aussi des effets pervers. Confrontés à une pression très forte pour atteindre les taux de diplomation tels que prévus par les indicateurs nationaux, certains seront tentés de tout faire pour atteindre les objectifs visés. Et il y a de nombreuses recherches, on les a ici, qui démontrent comment on essaie de contourner cette obligation de résultat. Par exemple, l'accent qui est mis sur des matières qui font l'objet d'épreuves centralisées, au détriment d'une formation équilibrée; la préparation intensive, disproportionnée aux épreuves centralisées ou comptant dans l'atteinte des objectifs; l'acheminement de certains élèves à risque vers d'autres secteurs, notamment vers l'éducation des adultes ou les services d'aide aux élèves en difficulté, sont des pratiques qui sont présentes. Et il faut être en mesure de vérifier ces choses-là et de comprendre que ça se passe. Ce n'est pas de la théorie, ça se passe sur le terrain et ça a des effets qui ne sont pas aidants à l'égard de la réussite des jeunes. Et, ces recherches, elles sont disponibles; les problèmes que ça cause, vous les trouvez en page 24 du mémoire.

Devant l'obligation de rendre des comptes au grand public, le système d'éducation pourrait se transformer en système de surveillance où celles et ceux qui sont au banc des accusés sont les mêmes qui à tous les jours font les efforts concrets auprès des jeunes et des adultes qu'ils reçoivent dans leur classe. Confusion aussi autour de la notion de réussite: réussite scolaire, réussite éducative. Il faut vraiment tabler sur la réussite éducative, et c'est ça qui est important. L'obligation de résultat en termes de diplomation nous amène à cibler la réussite scolaire, ce qui est contraire à la démarche d'apprentissage prévue dans les écoles.

Nos propositions. On est d'accord avec des plans de réussite. Nous sommes d'accord avec des objectifs chiffrés, lorsque cela est pertinent. Nous souhaitons cependant que les plans de réussite tiennent compte de certaines de nos préoccupations, puisque nous sommes dans l'école à tous les jours, à côtoyer ces jeunes. Le plan de réussite doit comporter une définition large de la réussite, qu'elle soit scolaire et éducative.

Les pratiques. On recommande donc, à l'article 5 ? et les concordances bien sûr à faire avec l'article 12 ? la définition suivante: «Le plan de réussite devrait comporter les mesures prises pour assurer la réalisation du projet éducatif de l'école, des mesures et des moyens pour améliorer la réussite des élèves au cours d'une période de plusieurs années et, lorsque jugé pertinent, des objectifs visés, un mécanisme d'évaluation de ces mesures.»

On veut aussi qu'on tienne compte, dans la reformulation de l'article 6, du besoin des élèves. À moins que les normes bureaucratiques deviennent reines, on croit qu'il faut réintroduire cette prise en compte des besoins des élèves qui était disparue dans la dernière mouture qui nous a été proposée.

Enlever l'obligation de résultat pour les établissement en évitant la référence, dans les plans de réussite, au plan stratégique de la commission scolaire. Selon nous, il est important que le ministère ait son plan, que la commission ait son plan. Il est important aussi qu'on protège l'autonomie de l'école quant à sa capacité de répondre à la mission de l'école. On veut donc voir, au début du deuxième alinéa du nouvel article 37, qu'on tienne compte de la mission de l'école, et c'est ce qu'on vous propose en termes de modification.

On veut aussi faire en sorte que le troisième, et je termine là-dessus, le troisième et le quatrième alinéas de l'article 8 soient libellés de la façon suivante, de façon à ce que le processus de reddition de comptes tienne compte aussi des changements qu'on veut: «Il rend compte annuellement de l'évaluation des moyens et mesures mis en oeuvre pour assurer la réalisation et, le cas échéant, les résultats obtenus au regard des objectifs visés ? c'est en lien direct avec les modifications que nous proposons à l'article 5 ? et le projet éducatif et le plan de réussite, de même que l'évaluation qui en est faite, ou un document explicatif de ceux-ci, sont distribués aux parents.» Je pense que c'est important que les parents aient aussi de l'information.

Deux précautions, en conclusion. Il y a des divergences profondes qui nous interpellent sur ce projet que vous nous amenez. Je pense que c'est important que vous preniez en considération l'expérience, les considérations de celles et ceux qui à tous les jours sont dans les écoles, celles et ceux qui ne veulent pas être pris dans des montagnes de chiffres, dans de la comptabilité de leur acte d'enseigner, de leur acte de donner des services, qu'on soit personnel de soutien ou personnel professionnel. Ne commettez pas l'erreur de penser qu'on va motiver les gens dans le réseau scolaire en leur donnant des formules quantitatives à remplir auxquelles il faut répondre. Laissez-les travailler avec un plan national et un plan local d'intervention pour la réussite et donnez-leur les moyens de cette réussite.

De plus, dernière remarque, sur les conseils d'établissement, on a fait conjointement une recherche qui a dit bien sûr que les conseils d'établissement allaient bien, mais qu'il y avait une fragilité certaine. Alors, ne brisons pas cet équilibre qu'on est en train de consolider et qu'on continue à construire. Il faut arrêter de chambarder les choses, dans le milieu de l'éducation, nous donner réellement les moyens de travailler sur le terrain à la réussite des jeunes. Alors, c'est à ça qu'on vous convie, et on va être disponible bien sûr pour les échanges.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, Mme Richard. M. le ministre.

M. Simard (Richelieu): Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je veux d'abord remercier Mme Richard, la présidente de la Centrale des syndicats du Québec, et l'équipe qui l'accompagne, avec les membres de laquelle nous sommes habitués de travailler à divers degrés, de façon parfois très intensive. Et je pense qu'il est heureux que, dans nos sociétés, sociétés de concertation, il y ait une participation aussi intensive à ce devoir démocratique qui est de participer à l'étude, la préparation des projets de loi. Vous venez ici faire un geste profondément démocratique à partir de votre expérience, à partir du point de vue évidemment qui est le vôtre mais qui est un point de vue essentiel: venir nous mettre en garde. Vous venez attirer notre attention, vous venez nous informer de votre point de vue, et, en ce sens, je pense que nous allons tous profiter de l'excellent travail que vous avez fait.

Je veux tout de suite rappeler un élément qui, à mon avis, ne doit pas être oublié et doit être toujours présent dans tout ce que nous faisons en éducation. Vous l'avez cité à plusieurs reprises vous-même en filigrane, Mme la présidente, c'est le rôle essentiel des enseignants dans le processus éducatif. Parfois, au Québec, on se surprend à entendre des gens avoir des enseignants un point de vue opposé à la vision de l'éducation que l'on a. On a une conception de l'éducation puis on oublie que ce sont d'abord et avant tout des enseignants, des directeurs d'école, du personnel de soutien, des cadres, du personnel, des gens qui, professionnellement, s'occupent des enfants, qui sont responsables de cette éducation. Je le dis sur toutes les tribunes, vous le savez, on ne peut pas investir 11 milliards en éducation, en faire une priorité d'État et ne pas estimer à sa juste valeur le travail qui est fait par les professionnels de l'enseignement.

C'est un des grands problèmes de notre société actuelle, de mettre sur les épaules, de transporter sur les épaules des enseignants notamment, mais de ceux aussi qui les appuient et qui travaillent avec eux dans l'équipe-école, à peu près tous les problèmes de la société. On demande aux enseignants d'instruire évidemment, mais aussi d'éduquer, d'encadrer, de donner des valeurs, de discipliner, parfois même d'être la source d'affection, et, en même temps, il me semble que nos sociétés actuellement n'ont pas l'estime nécessaire, enfin, qui serait à la hauteur des attentes que l'on a. Il y a une contradiction entre les attentes que l'on a des enseignants et l'estime qu'on a pour eux. Je pourrais ? mon collègue de l'opposition serait d'accord, mes collègues seront d'accord avec nous ? je pourrais me plaindre de la même chose pour les hommes et les femmes en politique, de nos jours, mais disons que je vais me concentrer sur le travail des enseignants. Je pense qu'il y a un travail nécessaire, important, déterminant, au cours des prochaines années, de revalorisation du rôle des enseignants, et c'est au coeur de votre intervention aujourd'hui: la place que doivent jouer les enseignants dans ce processus.

n(15 h 20)n

Alors, voilà pour un point de départ où nous nous entendons très bien. D'ailleurs, j'ai très bien compris aussi, Mme la présidente, que vous êtes, vous aussi, convaincue que notre rôle à tous, autour de cette table, dans cette salle et dans toutes les écoles, c'est de faire réussir nos élèves, c'est d'amener l'ensemble des élèves du Québec... Il n'y a personne ici qui met en doute la nécessité de la réussite. L'engagement dans cette direction est consensuelle, et ça, il faut quand même le noter. Les moyens parfois, sur des éléments essentiels, mais souvent sur les questions de nuance, peuvent différer; l'objectif est toujours le même: on est là parce qu'il y a des enfants et qu'on veut que ces enfants réussissent ? réussissent, il faut bien s'entendre, là.

Et là je touche un premier point de vue. Vous avez constamment fait allusion, dans votre texte, à une vision très quantifiable, très numérique, purement matérielle presque, du résultat de la réussite scolaire. Dans mon esprit, la mission ? et c'est dans la loi, et nous ne l'avons pas changée ? la mission, c'est d'instruire, c'est de qualifier, c'est de socialiser, et je pourrais ajouter quelques verbes. C'est beaucoup plus large que simplement faire réussir à des examens, avoir la plus haute note. L'école, c'est là pour éduquer et donc de transmettre beaucoup plus que simplement l'atteinte, les matières, la possibilité d'atteindre à des résultats. Alors, là-dessus, il faut qu'on s'entende.

Et ce n'est pas un plan d'affaires, un plan de réussite, vous avez parfaitement raison. Ce serait trop simple, hein, si on pouvait dire: Il y a tant d'intrants, il y aura tant d'extrants au bout, il suffit de les mélanger correctement. On sait bien qu'on a affaire à des enfants, à des enfants qui ont des caractéristiques psychologiques individuelles, qui ont des origines sociales et des problèmes vécus à la maison différents. On ne peut pas, donc, penser qu'il suffit de mélanger tout ça et qu'il va sortir tels résultats à l'autre bout. Soyez convaincus que, s'il y a un mot dans ce projet de loi qui laisse croire ou qui pourrait amener à penser ou qui pourrait aller dans ce sens, nous allons le changer. D'ailleurs, je vous dis tout de suite qu'à la suite de votre mémoire, de ce que nous avons entendu, sur plusieurs points, et je vous en parlerai, de certains points en particulier, nous allons faire une tentative très, très sérieuse pour rejoindre plusieurs de vos préoccupations.

Cependant, et c'est là que je vais poser ma première question, elle est fondamentale, je suis personnellement... Avant de poser la question, je fais une pétition de principe. Moi, je suis personnellement convaincu que l'on doive, dans la vie, se fixer, dans quelque domaine que ce soit, pour avancer, des objectifs. Il faut avoir une ligne d'horizon, il faut savoir où on veut aller. Et, si on ne se fixe pas ces objectifs, chacun individuellement ou chaque groupe en fonction de sa réalité, ce n'est pas le même objectif pour tout le monde, c'est très différencié selon les circonstances et les situations, mais, si on ne se fixe pas des objectifs, on n'avancera pas.

Et vous faites constamment le lien entre fixer des objectifs et l'obligation de résultat. On est dans un domaine où l'obligation de résultat sera toujours extrêmement relative. Mettre en oeuvre tous les moyens pour arriver à des résultats ne nous garantit pas de les atteindre. Et on ne pourra jamais reprocher à des gens qui ont mis en oeuvre... qui ont mis tous les efforts pour identifier dans quelle situation ils sont, hein: l'analyse, le diagnostic, se fixer des objectifs et se donner les moyens pour les atteindre, il ne sera jamais question et il n'y a pas un mot dans ce projet de loi qui fait un lien d'obligation de résultat entre les objectifs à atteindre et l'établissement de ces objectifs.

Alors, je ne pense pas que nous soyons très loin les uns des autres. Il y a peut-être parfois un vocabulaire qui a pu être utilisé dans le passé ou des réalités qui ont pu vous heurter et qui pourraient être déminées, qui pourraient faciliter une meilleure compréhension, mais je n'ai pas senti dans vos propos qu'il y avait, sur le fond, une opposition de principe à ce que nous nous fixions des objectifs. Est-ce que j'ai bien entendu?

Mme Richard (Monique): C'est bien sûr qu'on doit se fixer des objectifs. Mais il y a une opposition de fond, puisque le projet de loi, tel que nous en faisons la lecture ? à moins que vous ne me confirmiez le contraire par un changement de langage dans le projet de loi ? nous amène à dire qu'il y aura des objectifs quantifiables au niveau du taux de diplomation. Et on a beau tirer sur une fleur, elle ne poussera pas plus vite. Puis on a beau dire au médecin qu'il a un objectif de guérison qui doit augmenter de 5 % dans un an, il n'en guérira pas plus, mais il va toujours essayer d'avoir les moyens de faire en sorte d'amener ses malades à la guérison.

Même chose dans nos écoles. On se lève tous les matins pour aller rencontrer les jeunes avec l'objectif de les amener à la réussite. Mais on fonctionne avec une clientèle, on fonctionne avec les moyens qui nous sont donnés ? manquement de moyens, de toute façon ? et dans ce sens-là on veut avoir la certitude que, sur la question du taux de diplomation, il n'y aura pas une obligation de résultat. Non pas qu'on ne veut pas que nos élèves ne réussissent pas. Ce qu'on veut... C'est que cette obligation de résultat, que vous semblez vouloir nous donner, à moins que vous me disiez le contraire, elle est théorique, elle est contre-productive, elle ne tient pas compte de la nature de l'intervention que nous avons à mener dans les écoles auprès des jeunes. Je vais laisser Mme Fortier compléter là-dessus.

Mme Fortier (Johanne): Oui, parce que, quand vous mentionnez...

La Présidente (Mme Bélanger): Mme Fortier.

Mme Fortier (Johanne): Oui, Johanne Fortier, Fédération des syndicats de l'enseignement. Bonjour. Je voulais vous mentionner que la nuance est importante. Ce n'est pas juste une question de nuance. Quand on regarde la définition du plan de réussite, tel que vous le formulez quand vous parlez d'objectifs fixés, et que ces objectifs-là sont déterminés en tenant compte des indicateurs nationaux et ceux que nous trouvons au niveau du plan stratégique des commissions scolaires, vos exemples que vous mettez au jeu, dans les milieux, c'est des objectifs précis et mesurables, quantitatifs, qui fixent des objectifs en termes de taux de diplomation et en termes de non-retards scolaires. Et là, dans cette perspective-là, vous n'atteignez qu'une seule cible, c'est celle de la qualification.

Alors, nous, ce qu'on dit là-dessus, et ça, je trouve que c'est essentiel et fondamental: Cette approche-là n'est pas qu'inutile, d'après nous, elle est nuisible. Elle est nuisible et elle est documentée. L'AFIDES a fait un colloque. Vous avez, à la page 24 de notre mémoire, l'ensemble des pratiques que sont appelés à mettre de l'avant les établissements pour atteindre les fameux scores et les quotas. En page 24, vous avez: «Pour atteindre les objectifs "précis et mesurables" fixés, les établissements ont recours à un ensemble de pratiques.» Et vous les avez, là. Mme Richard en a fait état, mais là je vous les relève. Vous avez: l'accent sur les matières qui font l'objet d'épreuves; préparation intensive aux épreuves centralisées ? là, ça, c'est le bachotage, dit savamment; tricheries avec l'appui de certains membres; acheminement de certains élèves à risque, etc. Vous l'avez là ce qu'on a appelé, pour certains, la tricherie institutionnalisée. Moi, je vous dirai qu'on fait primer le score sur le besoin des élèves, et c'est là que ça devient nuisible.

Et je vais même plus loin. A contrario, dans Le Devoir, en fin de semaine, ça arrive bien, on a parlé d'une école, l'école Saint-Henri, qui met différentes mesures pour aider les élèves à persévérer à l'école, les élèves qui ont le plus de problèmes. La direction et les enseignantes et enseignants, l'ensemble du personnel est fier de l'école, de ce qu'ils font. Mais ils disent bien là-dedans: Moi, là, je réussis à faire en sorte qu'il y ait 50 % de ces élèves-là, qui étaient prêts à décrocher, à les faire persévérer une année de plus à l'école. J'en suis contente, mais ça, ça ne me fait pas remonter ma moyenne dans les listes du ministère ni les palmarès, mais je garde mes élèves à l'école plus longtemps. C'est ça, l'objectif d'une réussite éducative dans son ensemble.

Mais c'est pour ça que nous nous objectons au libellé tel que vous le formulez dans la définition du plan de réussite. Parce que les quotas vont gérer notre pratique, et nous nous opposons à se faire gérer par les quotas. Et ce que nous voulons, c'est pouvoir mettre de l'avant des moyens pour lesquels on a un contrôle, que ce soit sur des cibles comme l'absentéisme, le retard, la lecture, etc. Alors, c'est pour ça que nous avons plus que des nuances, une opposition formelle sur la définition des plans de réussite, tel que vous le soumettez.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre.

M. Simard (Richelieu): Je vais essayer de répondre à tout cela point par point, je vais essayer d'être le plus clair possible. L'exemple que vous citez de Saint-Henri, c'est exactement ce que nous souhaitons. Et je ne vois pas comment vous pouvez arriver à opposer les plans de réussite tels que nous les concevons, qui touchent, je le rappelle, à la qualification, à la ? je l'avais tout à l'heure ? à la socialisation et à l'instruction, comment vous pouvez opposer cet exemple-là avec ce que nous faisons. Où avez-vous vu, dans le projet de loi, qu'il y a des palmarès quelconques, que ce soit réduit aux matières quantifiables?

n(15 h 30)n

J'ai l'impression que vous nous faites un peu une chasse aux sorcières. Vous parliez du banc des accusés tout à l'heure. Qui accuse qui? Qui accuse qui? Je voudrais garder le débat le plus neutre possible et le plus calme possible, mais j'ai l'impression que vous me parlez d'un autre projet de loi. S'il y a des mots qui heurtent, s'il y a dans le projet de loi des éléments qui pourraient être changés et qui permettraient de clarifier certaines choses, j'y suis ouvert. Mais un procès d'intention sur des mots que je ne retrouve pas dans le... sur des expressions ou sur des articles que je ne retrouve pas dans le projet de loi, j'avoue que j'ai un petit malaise, hein, j'ai un problème, là. En aucun moment il n'est question... Vous avez entendu ce que j'ai pensé... Vous avez lu, dernièrement, ce que je pense des palmarès. J'espère que je l'ai dit assez clairement, ce que je pense des palmarès.

Se fixer des objectifs dans la vie, objectifs multiples, complexes, des objectifs complets en fonction d'une vision éducative, d'un projet éducatif, de se donner des moyens pour atteindre ces objectifs par un plan de réussite multiforme, parce qu'il y a plusieurs types d'objectifs à atteindre, je ne vois pas en quoi, je ne vois pas où vous pouvez voir là un palmarès qui vise à identifier, à évaluer les gens. J'avoue que j'ai l'impression que vous vous battez contre un autre projet de loi et pas celui que vous avez devant vous.

Mme Richard (Monique): C'est parce que les documents de... Une petite vite.

La Présidente (Mme Bélanger): Quinze secondes seulement.

Mme Richard (Monique): Les documents de consultation qui nous ont amenés au projet de loi, qui sont là, donnent toujours comme exemple, par exemple, un indicateur: sorties avec diplôme. Objectif: augmenter le taux de diplômés parmi les sortants. Cible: 2 % par année au cours des trois prochaines années. Ça, là, dans les documents d'appoint qui ont fait les frais d'une certaine consultation depuis un certain temps, c'est toujours ça, comme exemple. Alors, si ce n'est pas ça, votre objectif, votre exemple, il n'est pas très bien choisi pour nous amener à penser autre chose, d'autant plus que, depuis la mise en place des plans de réussite, depuis deux ans, il y a des gens qui vous ont précédé puis qui se sont assez facilement gargarisés d'objectifs quantifiables puis de plans d'affaires.

La Présidente (Mme Bélanger): Mme Richard, vous allez pouvoir continuer...

Mme Richard (Monique): Alors, peut-être qu'on a un petit traumatisme, mais, pour savoir où on va, faut savoir d'où on vient.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, Mme Richard. M. le député de Vaudreuil.

M. Marcoux: Merci, Mme la Présidente. Bienvenue, Mme Richard, Mme Fortier et les personnes qui vous accompagnent. Vous remercier de votre mémoire et de votre présentation. Simplement quelques commentaires avant de vous poser ma première question. Il est bien sûr, je pense, que l'objectif de la réussite n'est pas nouveau. Je pense que, dans le passé, les enseignantes, les enseignants, les parents, les directions d'école visaient à ce que soit leurs élèves ou leurs enfants réussissent le mieux possible. Je pense que là-dessus là on n'a pas l'impression que c'est nouveau et qu'on a inventé les boutons à quatre trous. Cependant, je pense qu'il est possible de l'améliorer et de pouvoir faire mieux, et c'est, dans le monde d'aujourd'hui, vous le savez mieux que moi, très important pour nos jeunes et pour le développement de notre société.

Je pense que vous avez fait référence à l'ambiguïté de la notion de réussite. Je comprends qu'il y a d'autres groupes également qui ont fait la même réflexion, M. le ministre, le groupe des comités de parents, ce matin, qui a été à peu près dans le même sens que vous. Un avis très récent du Conseil supérieur de l'éducation, qu'on a eu ce matin là, qui date du 27 novembre 2002, reprend également le même sujet, se dit préoccupé et demande de reformuler la loi actuelle pour dissiper toute équivoque en ce qui a trait à la réussite visant la triple mission de l'école. Alors, je pense que là-dessus il y a des convergences et des concordances. Je comprends que le ministre n'a peut-être pas l'intention de changer quoi que ce soit, mais je pense que ça reflète peut-être qu'il y a une certaine ambiguïté, hein, une certaine ambiguïté dans la...

Une voix: ...

M. Marcoux: Non, non, j'ai dit: Je comprends qu'on ne veut pas changer ça, mais le fait que plusieurs groupes s'interrogent suite au texte du projet de loi, je pense, indique qu'il y a peut-être certaines ambiguïtés à corriger là-dessus. C'est ça que je voulais dire.

Maintenant, quand vous mentionnez que vous êtes d'accord évidemment à ce que le ministère ait un plan stratégique ? d'accord là-dessus ? avec des indicateurs nationaux et des objectifs nationaux, que les commissions scolaires également doivent avoir un plan stratégique avec leurs propres indicateurs, mais vous arrivez au niveau de l'école et vous dites: Là, je pense que ça ne doit pas descendre plus bas que la commission scolaire. Et c'est un peu surprenant, parce qu'il me semble que, si la commission scolaire fait état de certains indicateurs, ça doit se refléter à partir également des écoles, autrement, ça devient irréaliste ou ça ne donne rien de faire ça.

Mme Richard (Monique): Pour nous, l'école, c'est un lieu qui, bien sûr, s'inscrit dans le cadre d'un projet éducatif national. D'ailleurs, on a revendiqué, au Sommet du Québec et de la jeunesse, que le projet éducatif national soit beaucoup plus constitué, soit beaucoup plus structuré en termes d'engagements et ainsi de suite, bon, au-delà des indicateurs, avoir un énoncé politique en termes d'engagements financiers, aussi de moyens. La commission scolaire, que le ministère de l'Éducation, à cause de la loi ? je ne sais plus quel numéro ? 82, pose des obligations puis veuille avoir une reddition de comptes, c'est correct, on est prêt à faire une reddition de comptes, au niveau des écoles, sur ce qu'on contrôle, sur la mise en place d'un certain nombre de moyens à l'égard de la réussite. Mais écoutez, là, on est à l'école pour recevoir des étudiants, des jeunes de tous les âges, de les amener à la réussite le plus largement avec les moyens qui nous sont octroyés.

Pour utiliser un exemple que quelqu'un de chez nous donnait, ce n'est pas nous autres qui a la main sur la switch, là, pour dire quels budgets vont arriver, quelles ressources on va avoir, quelle clientèle on va avoir, comment l'école va s'organiser d'une année à l'autre. Une année, on peut... On peut, on peut... Écoutez bien, vous pouvez nous donner un beau plan de réussite avec 2 % d'amélioration à chaque année, bien, ça va être du calcul puis ça va être toutes sortes d'effets pervers qui vont être mis en place. Mais on compose avec une cohorte d'étudiants à chaque année, on compose avec une organisation scolaire qui peut faire que, dans une école, une année, il y a quatre, cinq groupes en EHDAA, l'année suivante il y en a deux, il y a des groupes en cheminement particulier, il y a des clientèles avec des difficultés ou avec des situations particulières. Ça a une influence sur le taux de diplomation, ça.

C'est quoi, notre pouvoir réel là-dessus, nous autres? On a le pouvoir d'amener les jeunes à la réussite avec les moyens qui nous sont donnés. On ne veut pas, on ne veut pas de cette obligation de quantification, qui est théorique. On berne les gens avec ça. On va s'engager cependant à prendre les moyens de la réussite. Comme le médecin, c'est un exemple qui fait image: le médecin, il va prendre les moyens de la guérison, il a l'obligation de trouver tous les moyens pour la guérison, mais il ne peut pas la garantir, par exemple. Alors, c'est la même chose pour nous autres, c'est la même dans l'éducation. On travaille avec des enfants, on travaille avec des jeunes qui ont un potentiel puis on travaille avec une obligation de donner ces services-là puis de trouver les moyens pour les amener à la réussite. Mais on ne peut pas vous garantir le résultat, c'est impossible. Je vais laisser la parole à M. Bouchard sur les services complémentaires, ça va lui permettre de faire une petite glisse là-dessus.

M. Bouchard (Pierre): Une petite glisse, oui.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Bouchard.

M. Bouchard (Pierre): Pierre Bouchard, de la Fédération des professionnels de l'éducation. C'est sûr que chez nous, dans les services complémentaires notamment, on peut bien nous fixer des objectifs quantifiables, mais, si on n'a pas le personnel pour pouvoir y répondre, on se demande bien comment qu'on va pouvoir y avoir accès. Il s'agit aussi à un moment donné que la situation économique se dégrade un peu, que la situation de pauvreté augmente, puis c'est des problèmes qui se ramassent plus grands, dans l'école.

Je vais me permettre aussi, vu que j'ai la parole, de dire que, dans le projet, on voit disparaître la question des besoins des élèves pour évaluer ce qu'on devrait avoir, comme plan, dans l'école. On a comme un petit peu de difficulté à voir que, dans la Loi de l'instruction publique, par ce projet de loi là, on enlève la question des besoins des élèves. Et pourtant je pense au Sommet du Québec et de la jeunesse, entre autres, des jeunes nous avaient identifié des besoins quant à l'orientation et l'information scolaire et professionnelle. Est-ce qu'il y a eu de l'argent qui a été mis? Mais, c'est drôle, ça ne s'est pas réalisé avec de l'ajout de personnel dans le système. Là, on ne pourra pas nous blâmer de ne pas avoir amélioré les services d'orientation puis d'information quand, dans les faits, sur les sommes allouées, à peine 15 % ont servi dans l'ajout de ressources. Après, on va se faire évaluer sur des résultats? Là, ça ne marche pas. On ne nous a pas donné les moyens de le faire.

n(15 h 40)n

Alors, quand on arrive avec le quantifiable, moi, je pense que, quand on arrive dans l'école, on a des problèmes. On va juste briser l'élan éducatif, briser l'élan que, les enseignantes, le personnel de soutien, le personnel professionnel, on met à faire cette éducation, mais en prenant en compte tous les éléments de l'éducation, pas juste des taux de diplomation, comme on a un peu dans les exemples qu'on a comme exemples dans les documents d'appui qui sont dans le projet.

Pour nous, c'est clair, l'obligation de résultat, on peut l'avoir dans le plan stratégique avec le ministère de l'Éducation. Quand j'arrive dans une commission scolaire, ça va. Mais, quand j'arrive dans une école, ce n'est plus des statistiques, c'est des codes permanents, puis je peux vous dire que c'est tel élève, en bout de piste, qu'on va demander... On va l'obliger de réussir. Ça ne marche pas, ces histoires-là.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Vaudreuil.

M. Marcoux: Merci, Mme la Présidente. Est-ce que c'est vraiment une obligation? Je veux dire, est-ce qu'il n'est pas normal qu'il y ait quand même certains objectifs qui soient fixés et qui tendent, dans le fond, à motiver tous les intervenants à atteindre ces objectifs-là? Et à vous entendre ? et je ne voudrais pas mal interpréter vos propos ? ça ne donne rien de faire ça, ça ne donnerait rien de faire ça, et ça, ça me surprend un petit peu. Il me semble que, si on veut améliorer, il faut fixer des objectifs.

Mme Fortier (Johanne): Là-dessus, si vous regardez notre mémoire là, quand on a notre proposition de définition du plan de réussite, la proposition 4 à la page 31, on est quand même très engagés là. C'est parce qu'on veut respecter la mission dans toutes ses dimensions. Alors, dans cette proposition 4, à la page 31, nous, on verrait: le plan de réussite doit comporter les mesures prises pour assurer la réalisation du projet éducatif, parce qu'on a dit: Le plan de réussite, c'est la mise en oeuvre du projet éducatif, c'est là qu'on fait des jonctions, puis il faut éviter que le projet éducatif, ce soit de la théorie: les voeux, les intentions puis, tu sais, le plan de réussite, là, on s'en occupe, tu sais. Bon. Donc, on fait le lien, là. Et voyez le 2: des mesures et moyens pour améliorer la réussite au cours d'une période plusieurs années et, lorsque jugé pertinent, l'objectif fixé pour une mesure ou un moyen.

Je vous donne des cibles, au niveau de l'école, pour lesquelles on a du pouvoir puis du contrôle. Si je décide de travailler sur l'absentéisme, je suis capable de vous donner des objectifs, j'améliore le taux de présence à l'école de tant; je peux travailler sur la communication des parents; je peux travailler sur la lecture pour tel élève; je peux travailler sur des modèles d'encadrement pour le secondaire I, parce que, ça, ce sont toutes des cibles pour lesquelles j'ai un contrôle. Mais, si vous me demandez de travailler en fonction d'une cible, qui serait identifiée au niveau de l'école, de 2 % de taux de diplomation, c'est là qu'on vous dit qu'on développe, les établissements ? et c'est documenté ? développent des pratiques perverses ? c'est des effets pervers plutôt, Ha, ha, ha! ? des pratiques qui font en sorte que, pour scorer, ils sont prêts à tout faire, donc éliminer des élèves qui ne sont pas bons à l'école pour les examens.

Et c'est là qu'on vous dit qu'on est capable de vous garantir que, nous, on travaille. Quand on parle de garantie de moyens et non pas de garantie de résultat, c'est ça qu'on veut dire: pas juste des moyens financiers, des moyens, des objectifs qu'on se donne dans la mesure des moyens dont on dispose dans l'école. Et, ça, c'est la réussite, c'est une garantie de réussite éducative, et c'est dans ce sens-là qu'on travaille.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Vaudreuil.

M. Marcoux: Merci. Peut-être une question un peu plus générale. Dans la Loi de l'instruction publique, avec les changements qui avaient été apportés en 1997, on visait une plus grande décentralisation vers l'école. Je pense que, ça, c'est l'objectif. Est-ce que le projet de loi n° 124, pour vous, remet en cause cette orientation-là? Parce que la Fédération des comités de parents nous ont dit ce matin que, pour eux, les conseils d'établissement avaient peut-être un peu moins de pouvoir avec ce projet de loi n° 124 et qu'en quelque sorte on venait modifier cet équilibrage ou cette orientation. Le Conseil supérieur semble également incliner dans la même orientation. Qu'est-ce que vous en pensez et quel est votre point de vue là-dessus?

La Présidente (Mme Bélanger): Mme Richard.

Mme Richard (Monique): Bien, c'est un peu dans ce sens-là qu'à la fin de mon intervention je disais: On a fait une recherche sur la mise en place des conseils d'établissements pour être en mesure d'évaluer ce fonctionnement-là, et on a dit, bien sûr, que ça fonctionnait somme toute assez bien à peu près partout, mais que c'était un équilibre fragile. Et, dans ce sens-là, bien sûr, que ce que la loi n° 124 apporte, ça remet en cause le rôle, pour une certaine part, partie, le rôle des conseils d'établissements et ça remet les orientations au conseil d'établissement. Mais le plan d'action, le plan d'intervention, ça demeure, au niveau de la direction de l'école, plus clair en tout cas... C'est une partie plus importante qui est remise à la direction de l'école et ça diminue d'autant le rôle du conseil d'établissement, où sont les parents, bien sûr. Alors, c'est plus en termes d'orientation où, ensuite, la direction de l'école, par le biais de son engagement à l'égard du plan de réussite, va venir faire entériner ? je ne sais plus le terme qui est utilisé.

M. Marcoux: Mais il faut quand même qu'il soit approuvé par le conseil d'établissement.

Mme Richard (Monique): Oui, mais, écoutez, là, vous savez, quand c'est tricoté serré puis que ça a été préparé de longue date, bien, t'as de l'ouvrage pour détricoter les choses. Alors, approuver, quelquefois là, c'est plus facile que détricoter les choses. Et les parents qui sont là ne passent pas des journées complètes à préparer le travail des conseils d'établissement. C'est en sus de leur travail comme travailleurs ou travailleuses ailleurs, en sus de leur travail auprès de leurs enfants dans la famille qu'ils ont une disponibilité puis un engagement à l'égard de l'école. Je ne veux pas le diminuer, mais je veux dire aussi que, quand on se prépare pour aller à un conseil d'établissement avec un dossier, on ne s'en va pas là pour se faire avoir. On le prépare pour qu'il passe et qu'il soit approuvé. Alors, ça donne une marge de manoeuvre qui est différente, au conseil d'établissement, que ce qu'elle avait. Et c'est dans ce sens-là qu'on dit: Ça remet en cause un équilibre qui était déjà fragile et qu'on travaillait à consolider dans le temps, cette importance du rôle du conseil d'établissement.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Vaudreuil.

M. Marcoux: Oui. Merci, Mme la Présidente. Vous avez indiqué tout à l'heure, et vous en parlez dans votre mémoire...

Une voix: ...

La Présidente (Mme Bélanger): Non, il vous reste 1 min 15 s.

M. Marcoux: ...qu'il y a toutes sortes de moyens qui peuvent être pris au niveau, enfin, des écoles ou des établissements pour tenter d'atteindre des objectifs qui seraient fixés et qui constitueraient, selon vous, des obligations de résultat. Vous avez parlé du redoublement, ce qui me surprend un peu parce qu'il me semble que ça va dans la nouvelle approche pédagogique, de ne pas faire redoubler les élèves, et donc... parce qu'il y aurait des supports qui permettraient de les faire évoluer et qui terminent... C'est surtout au primaire ? parlons-en là ? ce n'est pas...

Mme Richard (Monique): Vous avez la réponse dans votre question: parce qu'il y aurait des supports pour éviter. Mais où sont les supports, les mesures alternatives?

M. Marcoux: Donc, vous jugez que ce n'est pas suffisant et que ça ne permet pas actuellement de pouvoir pallier à... pas l'obligation, mais aux situations de redoublement qui existaient? Merci.

Une voix: C'est clair.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci. Merci, Mme Richard, M. Bouchard, M. Tondreau, Mme Fortier et M. Couturier-Lévesque. On vous remercie de votre participation. Nous allons suspendre quelques instants, le temps de changer d'invités.

(Suspension de la séance à 15 h 48)

 

(Reprise à 15 h 51)

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, la commission reprend ses travaux, et on sait que la commission est réunie afin de tenir des consultations particulières à l'égard du projet de loi n° 124, Loi modifiant la Loi sur le Conseil supérieur de l'éducation et la Loi sur l'instruction publique.

Nous recevons l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires du Québec. Alors, je demanderais au porte-parole de bien vouloir s'identifier et présenter la personne qui l'accompagne. Vous avez 15 minutes pour présenter votre mémoire, qui sera suivi des échanges avec les membres de la commission parlementaire.

Association des directeurs généraux
des commissions scolaires (ADIGECS)

M. Roy (Denis): Alors, Mme la Présidente, bonjour. Denis Roy, directeur général, commission scolaire des Affluents, dans le sud de Lanaudière, et président de l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires. M'accompagnent Mme Pâquerette Gagnon, qui est directrice générale adjointe à la commission scolaire des Découvreurs ici, à Québec, et M. André Garon, qui est directeur général de la commission scolaire De La Jonquière.

Peut-être en notes préliminaires, si vous permettez, vous signaler que j'ai remis tout à l'heure à Mme Léonard une copie modifiée. On la lui avait envoyée par courriel, cette semaine, et il y a eu une modification hier, mais uniquement sur la page 7. Alors, le document remis tout à l'heure, là, modifie uniquement la page 7. Il y a des rédactions qui ont été modifiées, des erreurs qui avaient été commises à ce moment-là. Vous allez constater que, dans notre mémoire également, les références aux articles, on a été sur les articles de la Loi sur l'instruction publique. Donc, on a intégré le projet n° 124, on trouvait que c'était peut-être plus fonctionnel pour la présentation.

Ce qu'on va tenter de faire, comme premiers gestionnaires des commissions scolaires, c'est partager avec vous la lecture que nous faisons du projet de loi n° 124. Le message de notre Association sur les dispositions du projet de loi, d'abord, un d'appui à l'essentiel du projet. Il nous semble sain que le cadre de gestion visant à promouvoir l'imputabilité dans tous les aspects de l'administration publique touche aussi le monde de l'éducation, en tenant compte par contre de ses particularités.

Il est nécessaire en effet de tenir compte des facteurs propres au service de l'éducation, des particularités des structures décisionnelles et participatives déjà prévues à la Loi sur l'instruction publique. Le projet de loi nous semble proposer une piste intéressante à ce sujet. Sa trame de fond, telle que nous la comprenons, repose sur la notion de planification au service de la réussite. Cette planification donne lieu à la prise d'engagements publics, à une reddition de comptes sur le respect de ces engagements dans un contexte de transparence. Cette piste est beaucoup plus féconde pour appuyer la responsabilisation des personnes et des institutions que les concours d'images statistiques et les palmarès d'établissement.

Le projet de loi s'efforce aussi de tenir compte de la réalité actuelle des commissions scolaires, dans le but d'intégrer au mieux les nouvelles dispositions dans le cadre réglementaire actuel. Nous nous sommes, comme Association, investis à fond dans la démarche qui a conduit au projet de loi sous étude. Un comité de travail de l'ADIGECS a contribué à clarifier les enjeux propres au monde scolaire, en mars 2000. L'ADIGECS publiait à ce moment-là un document qui s'intitulait L'ADIGECS et l'imputabilité dans le réseau scolaire. Et la lecture que nous faisons du projet de loi est en droite ligne avec cette position qu'on avait eue à l'époque. L'assemblée générale de l'Association s'est prononcée à plusieurs reprises sur les problématiques soulevées.

Plusieurs délégués de l'ADIGECS, enfin, ont participé intensivement aux travaux du comité directeur conjoint MEQ-commissions scolaires sur les plans de réussite et les sous-comités. Nous continuerons évidemment, après l'adoption de la loi, de nous impliquer dans cet important dossier, puisque nous aurons à assumer le leadership de son implantation dans les pratiques de gestion du réseau scolaire.

Pourquoi une loi? Pourquoi les directions générales de commission scolaire appuient-elles un projet de loi qui rendra obligatoires des processus de gestion qui peuvent être appliqués volontairement et qui le sont déjà dans plusieurs cas? L'éducation est le fruit de gestes posés par une multiplicité de personnes qui interviennent en raison de rôles sociaux différents. Le personnel enseignant, les autres catégories de personnel de l'éducation, les parents, la communauté locale ont tous un impact majeur sur le développement des élèves, jeunes et adultes. Si la collaboration de toutes ces personnes au sein des institutions scolaires est nécessaire, elle ne peut être coordonnée par le seul pouvoir rattaché au lien d'autorité hiérarchique. Cette collaboration doit s'appuyer sur une compréhension partagée de ce qui relève légitimement de chacun, des mécanismes par lesquels ces rôles complémentaires s'exercent. C'est la loi qui encadre l'exercice des rôles sociaux et définit les pouvoirs des institutions et des personnes. Dans la mesure où on veut agir sur l'économie générale du réseau scolaire en y intégrant les contributions et les rôles complémentaires des différents intervenants, la législation constitue pour nous un véhicule approprié.

Nous trouvons un intérêt particulier au fait que le projet de loi prend pour assise principale la planification au service de la réussite plutôt que les comparaisons interétablissements d'indices statistiques ou l'application de normes uniformisées. C'est en effet à partir d'analyses spécifiques de la situation de l'établissement que les plans de réussite seront élaborés. Ces plans de réussite se traduisent en objectifs à atteindre, en moyens pour les atteindre et en mesures d'évaluation.

L'établissement prend donc des engagements. Il appuie le bien-fondé de ces engagements sur une analyse approfondie de ses réalités, son milieu, son état actuel, les enjeux auxquels il est confronté. Et, en passant, on préférerait beaucoup si le projet de loi parlait des enjeux de la réussite plutôt que des obstacles à la réussite. On pense que c'est beaucoup plus large, et ça englobe à la fois le positif et le négatif et une situation de milieu. Cet engagement devient celui de l'établissement entier, après l'approbation du conseil d'établissement, grâce à la participation de l'ensemble du personnel de l'établissement. Ces engagements sont rendus publics de même que les résultats obtenus en regard des objectifs fixés. C'est donc par rapport aux engagements pris que l'on situe l'imputabilité, non en rapport aux normes de comparaison.

Au niveau de la commission scolaire, la notion qui fait pendant à cette planification au service de la réussite est celle de plan stratégique. Ce plan stratégique répond aux mêmes orientations de fond que celles qui s'appliquent aux plans de réussite des établissements. Il repose sur une analyse du contexte et les attentes du milieu desservi, précise les résultats visés, les moyens de les mesurer. Ce plan stratégique est communiqué au ministre et rendu public. Nous apprécions d'y trouver les mêmes notions d'engagement et de transparence qu'au niveau de l'établissement.

C'est sur la base de ces engagements publics que se fait par la suite la reddition de comptes. Nous croyons, au niveau de l'ADIGECS, qu'il n'y a pas de moteur plus puissant, dans le monde de l'éducation, que celui qui consiste à demander aux différents acteurs de définir ce qu'ils visent à accomplir et de s'assurer ensuite de ce qu'ils ont accompli ou de l'état d'accomplissement. C'est ainsi que l'on focalise sur l'essentiel, et nous croyons que c'est la voie à privilégier. Nous ne voyons pas là une obligation de résultat, mais une obligation de moyens qui est demandée au système scolaire.

Nous apprécions également, dans le projet de loi, la volonté d'intégration et de cohérence. On sait que ce n'est pas parce qu'une idée est bonne qu'elle est nécessairement facile à réaliser. Les plans de réussite, les plans stratégiques posent des exigences élevées au niveau du réseau scolaire. Il y a là une somme considérable de travail, des défis de concertation et de collaboration très importants. Ces notions doivent être intégrées à l'ensemble de l'action éducative et au cycle de gestion pour ne surtout pas devenir un document de plus à produire ou un document de plus qui a été produit.

Par ailleurs, l'inclusion de nouvelles dispositions dans une loi déjà complexe risque de créer des contradictions ou des distorsions involontaires, des complexités inutiles, des redondances paralysantes. Nous croyons que, pour l'essentiel, le projet de loi n° 124 évite ces pièges pour le moment. Nous y voyons en effet le net effort d'intégrer les dispositions relatives aux plans de réussite avec les plans stratégiques, en cohérence avec les dispositions existantes.

Cet effort de cohérence touche d'abord le processus. On note par exemple l'intégration cohérente pour les établissements dans une séquence dont la logique nous semble intéressante: l'énoncé de la mission de l'établissement; l'analyse de la situation de l'établissement; le respect du cadre national défini par la loi, régime pédagogique, programmes d'études. Tout ça débouche sur l'adoption d'orientations propres à l'établissement ? le projet éducatif ? se traduisent en objectifs, moyens d'action, indicateurs de réussite ? le plan de réussite ? sont communiqués aux parents et à la communauté et servent de base à la reddition de comptes.

Cette intégration vise aussi à harmoniser les rôles respectifs. Notons principalement le rôle prépondérant du conseil d'établissement dans l'analyse diagnostique de l'établissement, ce qui est nouveau dans le projet de loi, la définition de ces orientations ? il adopte et évalue le projet éducatif ? et celui, en contrepartie, prédominant, de la direction de l'établissement dans l'opérationnalisation des orientations, donc dans l'élaboration du plan de réussite.

Cette intégration recherchée entre les rôles du conseil d'établissement et celui de la direction de l'établissement se définit avec en toile de fond la large participation des personnes intéressées, la collaboration entre le conseil et la direction, en respect des compétences mutuelles.

n(16 heures)n

Nous notons avec satisfaction que le projet de loi affirme clairement le rôle central de la direction d'établissement. Son rôle de premier conseiller du conseil d'établissement comprend la coordination de l'analyse diagnostique ainsi que l'établissement et la mise à jour du plan de réussite, qui s'ajoutent à la coordination, l'élaboration, la réalisation et l'évaluation du projet éducatif.

Les articles 37.1 et 97.1, où on précise que le plan de réussite de l'établissement tient compte du plan stratégique de la commission scolaire, l'article 218, où on précise que la commission favorise les plans de réussite, et les articles 221.1 et 245.1, où la commission s'assure que les plans de réussite tiennent compte de son plan stratégique, illustrent la convergence planifiée des orientations de la commission et des établissements.

Les plans de réussite des établissements, pour nous, c'est clair, leur appartiennent. Cependant, nous ne croyons pas que c'est nier la responsabilité pédagogique de l'établissement que d'exiger que son plan de réussite tienne compte du plan stratégique de la commission scolaire dans la mesure où celle-ci doit contribuer, de façon intégrée, à la réalisation de certains objectifs collectifs, d'origine nationale ou locale.

À son tour, le plan stratégique de la commission scolaire propose aussi une intégration avec les orientations nationales. Même si l'article qui définit le plan stratégique est trop détaillé sur le plan des moyens ? nous y reviendrons ? nous apprécions qu'il intègre, en les distinguant, les éléments qui relèvent des attentes du milieu et ceux qui relèvent des objectifs nationaux du plan stratégique établi par le ministère de l'Éducation. Nous reconnaissons en effet que le réseau scolaire doit répondre à des objectifs nationaux, adoptés formellement et publiquement par le ministre.

Il est intéressant que la commission scolaire soit appelée à intégrer ces objectifs nationaux dans son propre plan stratégique et planifie ses opérations et axes d'intervention de façon intégrée, en tenant compte des équilibres à maintenir entre les objectifs nationaux et locaux. Nous souhaitons, dans la foulée de ces considérations, que le plan stratégique du ministère de l'Éducation soit développé en lien de consultation avec la commission scolaire. Bien que cette disposition ne relève pas, nous en sommes conscients, du projet de loi n° 124, celle-ci nous semble offrir un potentiel d'enrichissement considérable.

Malgré ce qui précède, si nous avions à voter ? ce n'est pas notre cas, ce sont les parlementaires qui auront à voter ? si nous avions à voter sur le projet de loi n° 124, tel qu'il est actuellement rédigé dans son intégralité, nous voterions contre à cause de l'article 220. Mais notre vote peut changer avec certaines modifications.

L'article 220 est celui qui vient en bout de course définir les exigences de reddition de comptes de la commission scolaire. Il a le mérite d'intégrer le rapport annuel au cycle de planification stratégique, et c'est appréciable. Il définit également certaines exigences de transparence du plan stratégique et du rapport annuel envers la population et le ministre. C'est encore positif. Il précise que la commission scolaire rend compte à la population de son territoire de la qualité des services éducatifs et culturels et de l'accomplissement de son plan stratégique. C'est là l'essence même d'un gouvernement local qu'est la commission scolaire. Nous croyons fermement qu'il faut conserver ce caractère primordial à notre réseau scolaire.

L'article 220 est cependant formulé de façon telle qu'il rend la commission scolaire responsable devant le ministre de l'accomplissement de l'ensemble de son plan stratégique, au même titre que sa population. Cette disposition, qui apparaît à première vue comme un détail, conduit à un bouleversement majeur des responsabilités dans le réseau scolaire. Dans l'économie générale de la loi actuelle, la commission scolaire rend compte au ministre du respect des encadrements nationaux en rapport à l'imputabilité financière, aux programmes d'études et aux régimes pédagogiques. Elle ne lui rend cependant pas compte de ses choix de priorités politiques locales ni de ses orientations stratégiques particulières.

Le projet de loi n° 124 ajoute, à ces encadrements, la présence d'objectifs nationaux. Désormais, de façon claire et explicite, les commissions scolaires auront à intégrer ces objectifs nationaux dans leur plan stratégique. Elles devront aussi rendre compte de l'accomplissement de ces objectifs nationaux au ministre et à la population. Il s'agit de plus qu'une clarification, selon nous. Les pouvoirs du ministre en sont accrus. Cependant, nous considérons qu'il est légitime que les commissions scolaires répondent de leur accomplissement en référence à ces objectifs nationaux, et nous sommes en accord.

L'article 220 va cependant au-delà de ça. Il rend les commissions scolaires responsables au ministre de l'accomplissement de l'ensemble de leur plan stratégique. Il s'agit, selon nous, d'un pas de trop. Cette disposition, qui rendrait les commissions scolaires imputables au ministre au même titre que la population, modifierait la logique de base de l'ensemble du système scolaire. Nous ne croyons d'ailleurs pas que c'était l'intention des rédacteurs du projet de loi. Le libellé de l'article 220 ouvre la porte à une intervention du ministère, par le biais du plan stratégique, dans tous les domaines importants qui relèvent exclusivement de l'autorité locale, Nous ne croyons pas que ce soit l'objet du projet de loi n° 124. L'article 220, à notre sens, devrait plutôt distinguer clairement l'imputabilité politique totale du Conseil des commissaires envers la population locale et l'imputabilité qui doit exister, envers le ministre, du respect des encadrements réglementaires et de l'accomplissement des objectifs nationaux adoptés par le ministre, et de ceux-ci seulement.

Nous terminons avec quelques suggestions. Ce sont des modifications qui sont sur des points moins essentiels mais qui visent, à notre sens, à polir les efforts de clarification des dispositions du projet de loi.

D'abord, certaines dispositions nous apparaissent beaucoup trop détaillées dans un texte législatif. Le dernier paragraphe de l'article 83 devrait être éliminé de façon à laisser aux établissements le choix des moyens de communication avec la communauté. L'alinéa 2.1° de l'article 96.13 est au mieux inutile. Le rôle de tout conseiller comprend la responsabilité de renseigner, et la loi devrait faire davantage confiance au professionnalisme des directions d'établissement. L'actualité récente illustre, par des problèmes de pénurie vécus, combien il est important de valoriser enfin cette fonction à sa juste valeur. Nous ne croyons pas que l'alinéa 2.1° contribue à cette valorisation.

L'article 29.1 prescrit avec force de loi certains éléments qui relèvent davantage d'un manuel de gestion. D'autre part, quelques modifications devraient être faites, à notre sens, pour harmoniser les dispositions relatives aux centres de formation d'adultes et de formation professionnelle avec celles applicables aux établissements, et nous parlons de la notion de projet éducatif. Puisqu'on parle encore d'orientations pour les centres et de projets éducatifs au niveau des écoles, on pense qu'on devrait harmoniser cette notion-là, bien sûr avec des contenus différents.

Par ailleurs, selon nous, la loi devrait préciser clairement que les plans stratégiques et les plans de réussite devraient avoir un horizon minimal de trois ans et être mis à jour plutôt qu'actualisés; ce dernier terme nous apparaissant ambigu. Si, bien sûr, les plans stratégiques et de réussite deviennent triennaux, comme nous le proposons, la transmission au ministre deviendrait également triennale plutôt qu'annuelle.

En conclusion, nous croyons que l'articulation générale du projet de loi respecte les droits de tous d'intervenir dans le processus d'élaboration des projets éducatifs, des plans de réussite et du plan stratégique, de telle sorte qu'il n'y a pas lieu de les préciser davantage en réaction à toute revendication d'un groupe qui chercherait à se distinguer dans la loi par l'obtention de privilèges plus détaillés. On devrait chercher, au contraire, à simplifier le plus possible ce qui devrait demeurer une référence qui guidera le réseau dans l'ensemble de son fonctionnement.

Et, Mme la Présidente, je n'aborderai pas... Vous avez, en annexe, deux pages où nous avons indiqué clairement, là, quelles étaient les modifications que nous suggérions. J'attire peut-être plus votre attention sur les articles 209.1 et 220 où nous nous sommes permis de vous suggérer une rédaction complète, différente de celle du texte. Et nous constations ce matin, également, là, qu'il y a quelques cohérences qui n'ont pas été apportées dans notre texte, les centres versus les écoles, mais on pense que, rendu là, c'est facile à harmoniser.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Roy. M. le ministre.

M. Simard (Richelieu): Merci, Mme la Présidente. Alors, M. Roy, Mme Gagnon, M. Garon, merci d'un mémoire qui ressemble un peu à votre travail habituel. C'est cohérent, c'est solide, c'est documenté et c'est d'une lisibilité remarquable. La synthèse que vous faites à la page 5, je pense, du mémoire ? non, un peu plus loin que ça, 6 du mémoire ? est une synthèse qui nous est même utile pour comprendre ce qu'on a fait, hein? C'est utile d'avoir des gens qui savent bien nous lire comme ça. On peut enfin se comprendre parfois. Les équilibres sont là. On comprend exactement dans quel ordre les choses vont. Bravo! C'est un travail tout à fait remarquable.

Vous êtes prêts à voter en faveur du projet de loi même si, malheureusement pour vous, vous êtes... C'est une façon de parler, mais...

M. Roy (Denis): On est habitués, comme directeurs généraux, de toute façon, vous savez.

M. Simard (Richelieu): Absolument. Mais en même temps vous avez un point sur lequel... comme, j'imagine, la Fédération des commissions scolaires, comme, ce matin, les directeurs et les commissions scolaires anglophones, vous tiquez un peu sur un seul point majeur qui est, pour vous, l'obligation de rendre compte au ministre pour les commissions scolaires. Vous craignez, si j'ai bien compris, que cela n'ouvre la voie à un rééquilibrage et à une importance, une ? j'allais dire une invasion de pouvoir...

Une voix: ...

M. Simard (Richelieu): ...ingérence ? merci ? une ingérence du ministre dans le travail des commissions scolaires. Je ne le crois pas personnellement, mais je peux quand même réfléchir à vos arguments et m'assurer que nous tentons le plus possible d'arriver à une rédaction qui corresponde à nos intentions et qu'il n'y ait pas d'ambiguïté sur l'objectif.

M. Roy, je vous rappelle ? je m'adresse à vous, puisque c'est vous qui avec lu le mémoire, mais, évidemment, vos collègues pourront venir en appui ? vous le savez comme moi, qu'il y a un petit peu une ambiguïté. Lorsque nous disons ? et j'imagine que... j'aperçois le président de la Fédération des commissions scolaires dans le fond de la salle; je suis sûr qu'il ira dans le même sens. Lorsque nous disons que les commissions scolaires sont un gouvernement local, c'est parce que c'est un gouvernement local avec un pouvoir de taxation et avec des responsabilités et une imputabilité auprès des électeurs qui les ont nommées. On a eu des discussions, à d'autres moments, sur le moyen d'améliorer cette légitimité par une participation plus grande au vote, on le sait.

n(16 h 10)n

Mais la réalité, c'est qu'il s'agit d'un gouvernement, d'un niveau de gouvernement qui a... La meilleure preuve d'un nouveau gouvernement, c'est quand il est capable de lever des taxes et qu'il est imputable à une population de l'usage qu'il en fait. Mais il y a, vous l'admettrez, une certaine ambiguïté dans ce rôle, puisqu'en même temps il gère... Hein, c'est une gestion par délégation dans nos réseaux; il gère des sommes qui sont collectées, votées par un autre niveau du gouvernement: 80 quelque pour cent de tout ce que vous dépensez vous vient de taxes, d'impôts qui sont perçus par l'Assemblée nationale, qui sont perçus par la décision des parlementaires et donc, dans un gouvernement responsable, des sommes dont le ministre est imputable.

Vous ne croyez pas qu'il est normal qu'il y ait cette relation de reddition de comptes de la commission scolaire vers le ministre dans la réalisation des plans stratégiques et qu'il n'y a pas là d'invasion des responsabilités vécue quotidiennement par les commissions scolaires? En d'autres mots, où est-ce que vous voyez le mal là-dedans?

M. Roy (Denis): O.K. Si vous permettez, Mme la Présidente, je vais revenir, M. le ministre, au rapport du comité directeur conjoint MEQ-commissions scolaires sur les plans de réussite, là, le rapport du 26 mars 2002, qui était le rapport intégral; on sait qu'il y a eu une version un peu plus grand public qui a été diffusée dans le réseau. Si on va à la page 9, on convenait, au niveau de l'ensemble des intervenants, donc le ministère, les représentants des commissions scolaires, les représentants des directions générales, que l'instrument privilégié de reddition de comptes devenait le rapport annuel qui cessait d'être un rapport d'activité, on en convenait.

Et, par contre, on avait une phrase très claire qui disait: «Les thèmes et éléments devant faire partie de la reddition de comptes seront présentés dans une partie de ce rapport annuel qui sera destiné au ministre de l'Éducation.» Alors, ce qu'on avait conçu dans les discussions et la compréhension qu'on avait du consensus, c'est de dire oui. L'ensemble du rapport sur le rapport annuel, donc qui fait rapport sur le plan stratégique, est envoyé au ministre, puis il n'y a pas des parties qui sont gardées locales; et ce n'est pas du tout l'idée. Mais de dire que dans ça il y a une partie reddition de comptes qui s'adresse au ministre, alors que l'ensemble du plan stratégique, la reddition de comptes s'adresse à l'ensemble de la population, c'est de faire la distinction et non pas de dire que les commissions scolaires n'ont pas à rendre compte au ministre. Mais on ne pense pas que les commissions scolaires ont nécessairement à rendre compte au ministre de l'ensemble des éléments de leur plan stratégique, parce qu'il y a des choses qui sont des choix politiques locaux, des orientations locales. On pense qu'on doit plutôt distinguer.

Puis notre compréhension des travaux du comité directeur, c'était ça, de distinguer qu'est-ce qui est réglementaire, qu'est-ce qui est aussi objectifs nationaux de réussite. Puis je pense qu'on le disait très clairement dans le mémoire, on est pleinement d'accord qu'on ajoute cette donnée-là qui n'existait pas auparavant. Mais c'est simplement: on pense que 220 devrait faire une distinction. On a fait un essai de rédaction dans ce sens-là. Et ce n'est surtout pas de dire que les commissions scolaires n'ont pas de reddition de comptes à faire au ministre de l'Éducation, au gouvernement du Québec. Je pense que, comme vous le dites vous-même, avec les sources de financement, ce n'est que normal. Mais c'est de dire: Il y a peut-être des nuances qu'on pourrait faire sur le contenu.

M. Simard (Richelieu): Vous avez très bien clarifié votre position, et je m'y relis facilement. Un point. Vous avez entendu les intervenants précédents. Ce matin, nous avons eu les parents qui sont venus, les organismes de parents qui sont venus témoigner. Ils ont l'impression que nous changeons l'équilibre entre les directions d'école et les conseils d'établissement par la notion de préparation, d'adoption du projet éducatif et d'approbation du plan de réussite. Est-ce que, de votre côté, vous trouvez cet équilibre correct? Quelle est votre pratique quotidienne avec vos directions de cette collaboration nécessaire entre des gens qui de toute façon devront réaliser ces plans de réussite ensemble?

M. Roy (Denis): Oui. De toute façon, le milieu devrait collaborer. Notre lecture, c'est qu'on ne pense pas qu'effectivement ça enlève ? au contraire ? des pouvoirs au conseil d'établissement. Puis, rapidement, si on fait une lecture de la situation actuelle des plans de réussite depuis deux ans, on sait que c'est quelque chose qui se déroulait à l'automne, qui était distinct de tout le reste du travail qui se faisait dans l'école: plan d'effectifs, budget, plan d'action, et on arrivait avec ça au mois d'octobre. Compte tenu de l'échéancier, la direction de l'école devait le donner à la commission qui devait rendre compte au ministre pour à peu près le 15 novembre. Donc, les conseils d'établissement élus le 30 septembre, quand ça allait bien, là, il y avait deux soirées qu'ils pouvaient consacrer à ça. Là, avec un plan triennal, ils peuvent vraiment ? puis on le pense, là ? faire en sorte que c'est le travail essentiel du conseil d'établissement de travailler à la réussite.

La loi ajoute un élément qui nous semble majeur: de dire que le conseil d'établissement, maintenant, c'est lui qui fait l'analyse de la situation puis ce qu'on appelle, nous, les enjeux plutôt que les obstacles à la réussite. Cet élément-là s'ajoute, est majeur, n'existait pas auparavant. On voit qu'on est dans des projets éducatifs qui prennent un peu une autre teinte, un peu comme disaient les gens de la Centrale tout à l'heure, probablement moins axés sur des notions de valeur puis un peu plus concrètes, et que ça devient un travail majeur, de longue haleine, du conseil d'établissement qui peut l'élaborer en cours d'année, parce qu'on sait que c'est au printemps que l'échéance arriverait. Donc, un conseil d'établissement élu en début d'année a toute l'année pour travailler à ça et peut consacrer beaucoup de séances à ce moment-là,

Qu'on arrive maintenant à la notion... Le plan de réussite, on le rebaptise un peu, entre nous c'est le plan d'action de l'école. Le plan d'action de l'école, là, on est de l'ordre de l'opérationnalisation, on pense que c'est normal que ce soit le gestionnaire qui l'ait, mais pas tout seul. Puis le fait de rajouter, au conseil d'établissement, l'approbation ? la loi n'en parlait même pas; dans la pratique, ça se faisait beaucoup, sauf que ce n'était pas dans la loi; c'est une notion additionnelle, qui s'ajoute au niveau des conseils d'établissement ? on ne pense pas que c'est une recentralisation du réseau scolaire vers les commissions scolaires. On pense que ça va donner simplement plus de cohérence.

Puis même on prétend que ça va donner plus d'importance aux conseils d'établissement, comme actions au niveau des plans de réussite, tels qu'ils sont attachés maintenant avec l'analyse de la situation, le fait qu'ils travaillent sur beaucoup plus du long terme mais qu'ils ont le temps de travailler sur un plan de réussite. Parce que, dans la vraie vie, depuis trois ans, les conseils d'établissement qui ont pu mettre beaucoup de soirées pour travailler au plan de réussite, il n'y en a pas eu beaucoup. Le temps faisait qu'ils ne pouvaient pas le faire, et c'était toujours à la suite de la réélection à l'automne. On ne pense pas qu'il y a un danger là-dessus, au contraire. Je ne sais pas si mes collègues ont des choses là-dessus.

M. Simard (Richelieu): Seriez-vous quand même sensibles... Puisqu'on est dans le domaine des perceptions, il faut s'assurer... Je ne voudrais pas et personne ici ne voudrait voir les deux années consacrées à des querelles sémantiques sur «adoption». Bon. Alors, si on trouvait une formulation qui améliore la perception de la part des parents, ça ne vous choquerait pas non plus, sachant très bien que le rôle du directeur d'école sera instrumental, nécessairement, dans la réalisation de ce que vous appelez le plan d'action et qui est le plan de réussite.

M. Roy (Denis): Mais, je vous avoue, M. le ministre, on ne serait pas en accord avec le fait que le conseil d'établissement adopte. On sait, les juristes nous l'ont appris depuis quatre ans, la distinction entre «adopter» et «approuver». C'est un peu lier le directeur d'école, ça peut être aussi déresponsabilisant. Et le lien entre l'école et la commission scolaire, si c'est le conseil d'établissement qui adopte le plan de réussite, le directeur d'école est absent dans ce lien-là. La commission scolaire n'a pas beaucoup de lien et d'emprise sur le travail d'un conseil d'établissement puis, en soi, c'est correct en autant que les pouvoirs qui vont avec y soient.

Mais là on va dire à une commission scolaire: Vous nommez un directeur d'école, vous le sélectionnez en qualité, leader pédagogique, et tout ça, mais vous n'êtes pas capable d'avoir une relation de reddition de comptes sur la réussite de l'école, parce que c'est mon conseil d'établissement qui l'a adoptée.

Que le conseil d'établissement soit très impliqué, on n'a aucun problème, mais, on pense, ça doit demeurer essentiellement le gestionnaire qui ait l'impulsion à ce moment-là mais que ce soit approuvé. Ce n'est quand même pas déposer. Un conseil d'établissement n'est pas consulté dans le projet de loi, il doit l'approuver. On sait qu'approuver, bien, il peut dire: Refaites vos devoirs, il manque des notions; revenez avec une bonification; revenez avec les éléments qu'on vous a suggérés lors de la rencontre. Donc, ce n'est pas désincarné. On pense que c'est un équilibre plus sain puis qui va amener une relation, entre la commission, les écoles et les directions d'école, plus saine que de risquer de déresponsabiliser.

M. Simard (Richelieu): Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Bélanger): Ça va? Alors, M. le député de Vaudreuil.

M. Marcoux: Merci, Mme la Présidente. Bienvenue, M. Roy, Mme Gagnon, M. Garon, et merci pour votre mémoire. Ce qu'on peut y retrouver, c'est toujours la rigueur de la gestion, du gestionnaire. Alors, ça transparaît à travers l'ensemble de votre mémoire. J'aurais une question à vous poser, qui est un peu générale, compte tenu de votre expérience et du rôle charnière que vous occupez dans l'ensemble du réseau de l'éducation. À lire le projet de loi n° 124, j'ai l'impression qu'on avait en tout cas une certaine orientation qui était plus centralisatrice que l'objectif de la Loi de l'instruction publique, qui a été adoptée en 1997, où on table beaucoup sur la décentralisation.

n(16 h 20)n

Ce matin, j'ai pris connaissance d'un avis du Conseil supérieur de l'éducation qui, lui... un avis qui a été transmis au ministre, et le Conseil supérieur s'interroge justement sur le maintien de cette orientation de décentralisation qui a présidé à l'adoption de la Loi de l'instruction publique en 1997. Et le Conseil supérieur de l'éducation dit ceci ? c'est pour ça que j'aimerais avoir votre réaction: «Force est de constater que le projet de loi n° 124 réintroduit dans le système scolaire une logique de centralisation évidente. Ainsi, par un jeu d'emboîtement, les établissements doivent, dans leur plan de réussite, tenir compte du plan stratégique de la commission scolaire, lequel doit à son tour se baser sur celui du ministère de l'Éducation, lequel, enfin, doit respecter les orientations générales du gouvernement. On a là, sur le plan symbolique, sinon dans les faits, une parfaite représentation de la centralisation!» Et je sais que vous tenez beaucoup au statut décentralisé et au rôle de gouvernement local des commissions scolaires; ce avec quoi je suis d'accord.

Et, un peu plus loin, le Conseil dit ceci: «Le Conseil juge que le mouvement de centralisation qu'imprime le projet de loi, ne serait-ce qu'en raison du jeu symbolique de son écriture, n'est pas approprié au contexte d'une décentralisation encore largement inachevée. Il y a risque d'une dérive importante par rapport aux intentions décentralisatrices qui ont inspiré la Loi sur l'instruction publique il y a à peine cinq ans. Ce retour du balancier paraît tout aussi prématuré qu'inopportun.» J'aimerais avoir vos commentaires sur cette opinion du Conseil supérieur de l'éducation.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Roy.

M. Roy (Denis): Bien, je peux vous dire que, quand on lit la loi actuelle, oublions même le projet de loi n° 124, ce n'est pas la lecture qu'on fait de la Loi sur l'instruction publique. La Loi sur l'instruction publique, à notre lecture: oui, décentraliser au niveau de l'école ou du centre des responsabilités pédagogiques... mais aussi un équilibre. Et, si vous regardez dans la loi les articles 220 et suivants, notamment sur le plan pédagogique, c'est toujours «la commission scolaire s'assure de», voit à ce que ça se fasse, que la qualité y soit. Il y a une responsabilité clairement territoriale qui est confiée dans la Loi de l'instruction publique à la commission scolaire, qui était peut-être moins évidente à l'implantation de la loi n° 180 à l'époque. Mais je pense que l'équilibre... En tout cas, notre lecture s'est faite beaucoup depuis ce temps-là.

Qu'on dise: À partir du moment où on planifie au service de la réussite, qu'on se donne un mode intégrateur et cohérent, que là aussi la commission scolaire doit s'assurer de... si la commission scolaire, comme responsabilité territoriale, ne peut pas s'assurer de l'évolution de la réussite dans ses établissements, elle a comme les deux mains attachées dans le dos, alors que tout le reste de la loi n'est pas dans ce sens-là. Si on regarde la loi puis on regarde autant les conseils d'établissement, la participation des enseignants dans l'école au plan pédagogique, c'est large comme responsabilité pédagogique, toujours avec des encadrements nationaux, avec les politiques et orientations de la commission scolaire et le rôle de la commission scolaire de s'assurer de... ce qui fait des relations de collaboration une notion de réseau.

La commission scolaire, c'est un réseau d'établissements au service des élèves et de la réussite des élèves de ce territoire-là. Que, ce réseau-là, on ajoute maintenant ou on intègre une notion plus articulée de plan de réussite et de planification pour la réussite, on ne pense pas que, ce faisant, on vient de miner l'orientation de la loi, de décentraliser une responsabilité pédagogique au niveau des établissements. On n'a jamais lu, de notre côté, la loi n° 180 comme une décentralisation de pouvoirs pédagogiques, une décentralisation de responsabilités, puisque tous les encadrements, que ce soit au régime pédagogique, etc., sont nationaux. Une marge de manoeuvre à l'école, oui, une responsabilité de travailler en ce sens-là.

Je pense que mon collègue veut compléter, si vous permettez, Mme la Présidente.

M. Garon (André): Tous les intervenants du réseau, depuis toujours, quels qu'ils soient, souhaitent la plus grande cohérence possible entre les actions et les interventions du ministère de l'Éducation, des établissements et des commissions scolaires. À cet égard-là, l'obligation qui est faite ou les liens qui sont faits entre les plans de réussite des établissements, les plans stratégiques, les commissions scolaires, et le plan stratégique du ministère, je ne vois pas en quoi ceci constitue un obstacle à la décentralisation. Ça n'amène simplement que des éléments de cohérence, à tous égards, entre les différents intervenants.

Une voix: Peut-être, si vous permettez, Mme Gagnon puis...

Mme Gagnon (Pâquerette): J'ajouterai tout simplement, si vous le permettez, que ça ne vient que confirmer une pratique, hein? Dans nos pratiques... Et la Loi sur l'instruction publique ne prévoyait pas que le plan d'action ou le plan de réussite soient déposés au conseil d'établissement. Ça vient confirmer la pratique. Dans nos pratiques, la direction d'école nous dépose des plans d'action et des plans de réussite. Alors, ça ne vient absolument pas mettre en cause la décentralisation des responsabilités mais confirmer une pratique de gestion qui est demandée par nos directions.

M. Roy (Denis): Peut-être, si vous permettez, rapidement, M. Marcoux, un exemple précis: parlons de la réussite des garçons. On sait que c'est un thème, là... Je pense qu'il n'y a pas une journée où il n'y a pas de littérature là-dessus. Ça préoccupe beaucoup de personnes. Ce ne serait pas normal qu'une commission scolaire qui aurait ça dans son plan stratégique, de travailler à améliorer la réussite des garçons et trouver des moyens, aurait 10, 15 écoles qui diraient: Nous autres, là, ça ne nous préoccupe pas du tout. Je pense qu'on aurait un problème de système éducatif au Québec si on était dans cette situation-là, alors que ce qui est proposé nous semble justement permettre ce maillage-là sans nier la responsabilité pédagogique de l'établissement d'aucune espèce de façon.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député Vaudreuil.

M. Marcoux: Mme la Présidente. Tantôt, vous avez répondu, je pense, à une question de M. le ministre au sujet, là, du projet éducatif, plan de réussite, et vous avez mentionné que le plan de réussite était... C'est le plan d'opération de l'école, si je reprends vos termes, je pense.

Une voix: ...

M. Marcoux: Oui, mais... et que ça semblait être clair dans le projet de loi, maintenant, tout ça. Ce matin, vos collègues de l'Association des commissions scolaires anglophones et l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires ont justement souligné ce qui leur apparaissait... en tout cas, je lis leur texte: «Nous sommes préoccupés quant à l'ambiguïté qui pourrait survenir quant au rôle du conseil d'établissement à intégrer le projet éducatif et le plan de réussite ainsi que la distinction entre l'adoption du projet éducatif et l'approbation du plan de réussite.»

Alors, c'est ce qu'ils ont souligné dans leur mémoire. Ils ne sont pas les seuls d'ailleurs, il y a eu d'autres groupes qui l'ont souligné. Pour vous, ça vous apparaît tout à fait clair, il n'y a pas d'ambiguïté dans le projet de loi, là.

M. Roy (Denis): On ne voit pas cette ambiguïté-là ? avec le respect pour nos collègues avec qui on travaille fréquemment. Il y a peut-être une question aussi de culture, là, dans les deux réseaux qui ne sont pas identiques, mais on ne le lit pas comme ça. Puis, peut-être compléter un petit peu, quand on parlait tout à l'heure de plan d'action de l'école, là, c'est que, dans le fond, ce qu'on vit depuis quelques années ? puis, souvent, les directions d'écoles puis le personnel de l'école nous le disaient ? on a un plan pour les nouvelles technologies; il faut faire un plan d'implantation de la réforme; il faut faire un plan de l'école orientante; à l'automne, il faut faire un plan de réussite.

Là, on dit: On a l'occasion que l'école fasse une planification intégrée au printemps, sur un horizon de trois ans, et pas avoir un plan de toutes sortes de choses alentour, mais que le plan ? ce que, nous, on appelle le plan d'action de l'école ? comporte la notion de réussite, comporte la réforme. C'est toutes des choses qui sont dans le même ordre de pensées. On pense qu'il y a une intégration qui va être intéressante là-dedans et on pense que, quand on est de l'ordre d'un plan d'action, on est plus de l'ordre du gestionnaire mais qui doit faire approuver ses projets qu'il a travaillés. D'ailleurs, on parle d'élaborer en collaboration, là, en étroite collaboration avec le personnel de l'école. Ce n'est pas le directeur dans son bureau qui va préparer un plan de réussite, là.

On pense que le rôle du conseil d'établissement, il est majeur de l'approuver, là. Ce n'est pas... Il n'est pas informé, il n'est pas consulté sur le plan de réussite. Il doit donner son approbation. Mais on sait que la distinction peut être importante. «Approbation», là, on pense que ça laisse une marge de manoeuvre et une responsabilité au gestionnaire, qu'il est risqué de lui enlever si, à ce moment-là, c'est une adoption pure et simple.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Vaudreuil.

M. Marcoux: Oui. Ma collègue de Jean-Talon...

Mme Delisle: Non, ça va. J'ai eu réponse à mon questionnement. Je m'excuse.

M. Marcoux: Dans les propositions de modifications, il y a deux choses ? peut-être qu'elles sont un peu plus précises ? que je voudrais vous souligner. À l'article 37, lorsqu'on parle du projet éducatif, on dit que les orientations et les mesures pour en assurer la réalisation et l'évaluation, là, d'abord, ça, ça disparaît, mais, en plus, on dit que ces orientations pour le projet éducatif... On enlève... Normalement, on disait: Ça doit tenir compte des besoins des élèves et des priorités de l'école. Le projet éducatif, donc, les orientations du projet doivent tenir compte des besoins des élèves et des priorités de l'école. On enlève ça de la loi. Moi, ça me surprend un peu parce qu'il me semble qu'une école ça doit exister pour... doit tenir compte des besoins des élèves et certaines priorités.

Et l'autre élément, à l'article 75, on prévoit présentement que le conseil d'établissement approuve une politique d'encadrement des élèves, et là ça disparaît, ça aussi. Donc, il me semble que la politique d'encadrement... surtout au secondaire, si vous parlez aux élèves, aux parents d'élèves qui envoient leurs enfants ou qui veulent les envoyer à l'école privée, souvent l'argument majeur, ce n'est pas la qualité académique de l'enseignement, parce qu'ils disent: Écoutez, oui, effectivement, ça peut être aussi bon dans l'école publique, puis il y a des écoles privées qui ne sont pas meilleures, puis etc. Ce n'est pas nécessairement les locaux non plus. Ça peut varier des fois parce que... Mais, ils disent: C'est l'encadrement. Alors là c'est dans la loi présentement, on enlève ça. Ça dit: Quelle sorte de message nous envoyons aux parents? Je dis: Écoutez...

n(16 h 30)n

M. Roy (Denis): Bien, peut-être deux éléments que nous voyons de notre côté, si vous parlez de la question de besoins des élèves, on pense qu'avec l'analyse de la situation qui est déplacée, là, qui est logée à l'article 74 dans la loi, quand on dit «analyse de la situation de l'école», nous, on se permet de dire: Notamment les enjeux quant à la réussite des élèves ainsi que les caractéristiques et attentes de la communauté qu'elle dessert. On pense que, dans un texte législatif, c'est très large, là, ça permet effectivement de tenir compte de l'ensemble de ces éléments-là.

La lecture qu'on avait de 75, quand on vous dit que la lecture qu'on a du plan de réussite, c'est intégrateur et ça comprend l'ensemble des actions de l'école, pour nous, ça comprenait ça. On ne pense pas qu'on l'évacue. Parce que, si vous regardez, quand on parle de politique d'encadrement là, on parle des mesures à des... «à l'utilisation à des fins pédagogiques du temps hors enseignement, hors horaire, l'aménagement d'activités parascolaires», on est dans le domaine de la réussite.

M. Marcoux: Oui, Mme la Présidente. Simplement un commentaire là-dessus parce que je pense qu'on n'a plus de temps. Et, en tout respect, M. Roy, évidemment, c'est bien sûr, mais, pour avoir déjà fait un peu de législation ? puis, je pense, il y a d'autres collègues ? c'est qu'on dit souvent que le législateur ne parle pas ne pour rien dire, et, s'il y a des choses qui sont dans un projet de loi et qu'on enlève, bien, ça veut dire que ça devient moins important, comprenez-vous, là, surtout lorsqu'on ne le mentionne pas. Je voudrais... mon collègue de D'Arcy-McGee, mais de dire: Bien, écoutez, ça a moins d'importance, c'était dans la loi, le législateur l'avait inscrit, ça disparaît, maintenant, puis on pense que c'est inscrit à quelque part dans une autre place. Mais je ne voudrais pas vous... Mais je vous dis une réflexion personnelle là-dessus.

M. Roy (Denis): ...simplement, je vous disais tout à l'heure: on vous donne la lecture qu'on fait de la loi. C'est cette lecture-là qu'on fait.

M. Marcoux: Oui, oui.

M. Simard (Richelieu): Mme la Présidente, à ce sujet, et sans vouloir lancer une polémique, il y a une expression en français qui dit que ça va sans dire, mais parfois ça va mieux en le disant. Et je suis tout à fait d'accord avec mon collègue, et mon obsession de l'encadrement va faire en sorte qu'on va le retrouver dans le texte final. Et ça ne vous choquera pas, je le sais bien, M. Roy.

M. Roy (Denis): C'était notre compréhension, de toute façon. Ce n'est pas un problème.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, ceci étant dit, on vous remercie, M. Roy, pour votre présence. Et nous allons suspendre quelques instants. Et j'inviterais la Fédération des commissions scolaires du Québec à s'approcher.

(Suspension de la séance à 16 h 32)

 

(Reprise à 16 h 35)

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, la commission reprend ses travaux. Alors, nous avons comme invitée la Fédération des commissions scolaires du Québec. Je demanderais au porte-parole de bien vouloir s'identifier et identifier la personne qui l'accompagne. Vous avez 15 minutes pour présenter votre mémoire, qui sera suivi d'échanges avec le ministre et le porte-parole.

Fédération des commissions
scolaires du Québec (FCSQ)

M. Caron (André): Merci, Mme la Présidente. Mon nom est André Caron, président de la Fédération des commissions scolaires du Québec. Et les personnes qui m'accompagnent: à ma gauche, M. Réjean Morel, directeur général, et, à ma droite, M. Clermont Provencher, secrétaire général. Et, très brièvement, compte tenu qu'on se voit très fréquemment, vous savez que la Fédération représente les 60 commissions scolaires francophones au Québec depuis 55 ans, en plus de la commission scolaire du Littoral, et comme on a comme intérêt de défendre les intérêts de l'éducation et du système public de l'enseignement... Et c'est avec plaisir que nous avons pris l'initiative de vous soumettre un mémoire, et on vous remercie aujourd'hui de nous écouter très brièvement sur cedit mémoire-là.

Peut-être en guise d'introduction, une mise en situation, à savoir que... Je dirais que les gouvernements, en général, sont pris simultanément avec la recherche de l'équilibre des finances publiques et en même temps contraints de reconsidérer leur mode de gestion, de manière à s'adapter aux nouvelles réalités et aux attentes des citoyens et des citoyennes à l'égard des services de qualité mieux adaptés aux besoins et à moindre coût.

On peut dire aussi que la gestion publique traditionnelle a atteint ses limites et semble essoufflée. Bien sûr, la réponse de chaque pays varie, mais, à bien des égards, les réformes de la gestion publique s'inspirent de nouvelles méthodes de gestion en donnant une plus grande autonomie aux acteurs directement responsables de la dispensation des services, en échange d'une plus grande reddition de comptes axée sur les résultats.

La Fédération des commissions scolaires du Québec estime que les modifications proposées par le projet de loi n° 124 à la Loi sur l'instruction publique, qui visent une plus grande transparence, plus d'information sur les objectifs poursuivis pour améliorer la réussite des élèves et les moyens pour y arriver, sont tout à fait cohérentes avec les actions des commissions scolaires pour valoriser l'école publique.

La Fédération estime toutefois que la reddition de comptes doit se faire dans le respect des responsabilités des commissions scolaires qui, tout en assurant une ligne de communication efficace avec le ministère de l'Éducation, n'ont pas à lui rendre compte des politiques et des priorités locales. Pour la Fédération, il est important de bien informer les parents, mais aussi les citoyens et les citoyennes, parce que les responsabilités confiées aux gestionnaires publics, et particulièrement aux élus, vont de pair avec l'obligation de leur rendre compte des résultats face aux responsabilités confiées.

La reddition de compte est aussi un moyen d'amélioration continue, d'amélioration de la qualité des services et amélioration de la performance d'un organisme au regard de son mandat. Il est aussi très important que ces informations soient simples et compréhensibles. La Fédération travaille actuellement d'ailleurs de concert avec les commissions scolaires à une stratégie de communication qui va dans cette voie.

La Fédération est tout à fait l'aise avec l'introduction, dans la Loi de l'instruction publique, de l'obligation, pour une commission scolaire, d'établir un plan stratégique couvrant une période de plusieurs années. D'ailleurs, plusieurs commissions scolaires ont déjà élaboré un plan et d'autres sont en démarche de le faire. Aussi, la Fédération accompagne présentement plus d'une dizaine de commissions scolaires dans le processus d'élaboration de leur plan stratégique.

Par ailleurs, la Fédération reconnaît que le réseau scolaire doit répondre aussi à des objectifs nationaux, objectifs adoptés formellement et publiquement par le ministère de l'Éducation. Nous sommes totalement en accord avec le fait que les commissions scolaires soient appelées à intégrer des objectifs nationaux dans leur propre plan stratégique et planifient leurs orientations et leurs axes d'intervention de façon intégrée en tenant compte toutefois des équilibres à maintenir entre les objectifs locaux et les objectifs nationaux.

Pour les commissions scolaires, la planification stratégique est un puissant outil de gestion. Cette planification contribue à définir les orientations et les objectifs stratégiques de l'organisation, à préciser les priorités, à identifier les moyens concrets pour coordonner les politiques et les activités à l'intérieur de l'organisation. La planification stratégique de la commission scolaire contribue également à fournir un cadre de référence axé sur les résultats, résultats qui servent à allouer les ressources de façon équitable en fonction des besoins et des priorités établies.

n(16 h 40)n

En outre, la planification stratégique constitue un outil interne de communication et de motivation qui permet d'informer le personnel et la communauté des enjeux de l'organisation, de ses croyances et de ses valeurs. Cela favorise aussi la compréhension et l'adhésion aux orientations et aux objectifs de l'organisation ainsi que des résultats à atteindre.

La Fédération des commissions scolaires est d'avis par ailleurs que le projet de loi n° 124 permet de bien faire le lien entre le projet éducatif et le plan de réussite d'une école. Il permet aussi de bien déterminer le rôle du directeur d'établissement et celui du conseil d'établissement relativement au plan de réussite. De plus, le projet de loi vient confirmer la responsabilité du conseil d'établissement au niveau de la reddition de comptes. Enfin, il est important ? et nous insistons là-dessus ? que le ministère de l'Éducation continue d'associer ses partenaires dans l'élaboration de son nouveau plan stratégique.

Voilà pour notre appréciation générale du projet de loi n° 124. Je voudrais, en terminant, porter à l'attention des membres de la commission de l'éducation des observations relatives à un article spécifique du projet de loi n° 124, soit l'article 24. Et, vous allez comprendre, on ne s'est pas parlé, avec l'ADIGECS, mais on a la même ligne de pensée sur cet article; vous ne vous en seriez pas doutés. En effet, l'article 220 est celui qui vient cerner les exigences de la reddition de comptes des commissions scolaires et permet d'intégrer le rapport annuel dans le cycle du plan stratégique. Nous sommes tout à fait en accord avec le fait qu'une commission scolaire, gouvernement local élu, doive rendre compte à la population de son territoire de la qualité des services éducatifs et culturels offerts et de l'accomplissement de son plan stratégique. Nous avons cependant des réserves quant au libellé de l'article 24, eu égard à la reddition de comptes au ministre de l'Éducation. Le libellé de cet article vient, selon nous, profondément modifier les responsabilités de la commission scolaire envers le ministre.

Présentement, la Loi sur l'instruction publique prévoit plusieurs éléments de reddition de comptes au ministre sur divers aspects reliés aux encadrements nationaux, tels les régimes pédagogiques, les programmes d'études, les aspects financiers et bien d'autres. Ce qui nous apparaît normal. Dans la nouvelle dynamique des plans de réussite et des plans stratégiques, nous reconnaissons, tel que nous l'avons approuvé précédemment, l'ajout d'objectifs nationaux de réussite pour lesquels les commissions scolaires devront rendre compte au ministre. Cependant, le libellé de l'article 220, tel qu'il est proposé, fait en sorte que la commission scolaire devra dorénavant rendre compte au ministre sur l'ensemble des résultats atteints de son plan stratégique. Or, si nous sommes d'accord avec la notion d'indicateurs nationaux dont les commissions scolaires auront à tenir compte dans leur plan stratégique, cela ne veut pas dire que les commissions scolaires doivent rendre compte au ministre des orientations, des priorités ou des objectifs locaux spécifiquement dits, des objectifs dans leur propre milieu. Par exemple, si une commission scolaire, à la suite de la consultation de sa communauté, se donne des objectifs au regard du développement local et régional, elle doit rendre compte des résultats à sa communauté, pas nécessairement au ministre. Elle pourra toutefois remettre au ministre un bilan de ses résultats.

Ainsi, il est important de se rappeler que la commission scolaire est une personne morale de droit public. Il nous parait tout à fait légitime qu'une commission scolaire soit imputable uniquement à sa population d'objectifs locaux convenus suite à une démarche structurée d'une planification stratégique. La Fédération des commissions scolaires du Québec demande donc au ministre de l'Éducation de modifier le libellé de l'article 220 afin de bien respecter la différence importante entre la nécessité de rendre compte de la réussite de la commission scolaire eu égard aux objectifs nationaux et celle de rendre compte à sa population des résultats atteints en ce qui a trait aux domaines qui relèvent de l'autorité locale.

En conclusion, la Fédération des commissions scolaires du Québec adhère aux grands principes du projet de loi n° 124. La Fédération reconnaît en effet que le ministère de l'Éducation est responsable du pilotage du système d'éducation et de la qualité des services éducatifs au Québec. La Fédération reconnaît également que la commission scolaire a pour mission d'assurer la qualité des services éducatifs dispensés dans ses établissements et la responsabilité d'en rendre compte à la population de son territoire.

Enfin, la Fédération des commissions scolaires reconnaît que les établissements ont pour mission d'instruire, socialiser et qualifier les élèves et que, pour ce faire, elle élabore des orientations qui leur sont propres, mises en oeuvre par leur plan de réussite et dont elles doivent rendre compte à leur communauté. Pour se réaliser, cette responsabilité partagée entre le ministère de l'Éducation, les commissions scolaires et les établissements doit s'inscrire dans une démarche assurant la cohérence des actions. Et, bien sûr, vous trouverez dans notre mémoire d'autres suggestions mineures pour des modifications que je vous fais grâce présentement. Voilà, Mme la Présidente, Mmes, MM. les députés, les principales remarques que nous désirions porter à l'attention des membres de cette commission.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Caron. M. le ministre.

M. Simard (Richelieu): Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci, M. le président, merci à vos collaborateurs. La qualité du mémoire ne nous étonne pas, puisque vous participez à peu près à toutes nos commissions, à tous nos travaux qui visent à améliorer la Loi de l'instruction publique ou, en tout cas, visent à améliorer le niveau de l'éducation au Québec, et nous sommes habitués à ce niveau de qualité. Deuxièmement, je ne suis pas trop étonné de votre réticence à l'égard de l'article 220. Même si vous le faites de façon totalement autonome, déjà, l'ADIGECS avait un petit peu ouvert le terrain là-dessus, préparé le terrain.

Je ne sens pas ? et vous me corrigerez si je me trompe ? je ne sens pas dans cette réticence une mise en cause du rôle du ministère de l'Éducation par rapport aux commissions scolaires ou à la nécessité de fixer les objectifs nationaux. Il s'agit plutôt ici d'une certaine crainte de devoir rendre compte d'objectifs locaux au niveau national. Et je vous annonce tout de suite que nous allons y réfléchir sérieusement en tenant compte de vos argumentations. Je ne sais pas si nous arriverons à un changement de formulation qui vous plaira, mais je suis sensible à certains aspects de votre argumentation.

Ce que je retiens tout de suite, c'est que ce mémoire est parfaitement conforme à votre pratique. Vous êtes impliqués depuis le tout début dans cette opération des plans de réussite, vous y croyez. Vous croyez à la reddition de comptes, vous croyez à cette nouvelle façon d'administrer et de gérer par transparence et par objectifs. Alors, je ne peux pas être surpris du contenu de votre mémoire, puisque c'est comme ça que nous collaborons depuis plusieurs années, enfin avec mon prédécesseur ou avec moi-même.

Cependant, vous avez une pratique qui vous permet peut-être d'analyser certaines réalités de façon plus rapprochée que pour nous, notamment pour ce qui est de la pratique des écoles. Évidemment, l'ADIGECS tout à l'heure est intervenue dans ce sens-là, mais je vous repose un peu la même question: Considérez-vous que l'équilibre introduit par le projet de loi entre les directions d'école et les conseils d'établissement est un équilibre fonctionnel et qui risque de donner de bons résultats, ou, au contraire, craignez-vous, comme les comités de parents, que cela crée une impression de confusion et qu'il y ait de la difficulté à motiver les parents à participer aux conseils d'établissement, dans cette formulation qui donne, je le rappelle, le pouvoir d'initiative quant aux projets éducatifs et un pouvoir d'approbation pour ce qui est des plans de réussite?

M. Caron (André): Bon, je dirais là-dessus, d'abord, si on fait la comparaison avec la Loi de l'instruction publique telle qu'on la connaît aujourd'hui, sans les modifications de l'article 124, c'est sûr qu'il n'en était pas question, de plan de réussite, parce que les plans de réussite sont arrivés après la loi n° 180. Donc, ça pouvait avoir peut-être certains nuages à l'horizon. Avec le projet de loi n° 124, à mon avis, ça vient clarifier tous les rôles, les responsabilités, ça vient clarifier la responsabilité du directeur d'établissement, ça vient clarifier le rôle et les responsabilités du conseil d'établissement. Donc, ça n'enlève pas rien à personne, sauf y ajouter quelque chose de clarification et de cohérence dans le processus. Et, comme mon prédécesseur l'a dit, dans le calendrier de gestion qu'on prévoit dans la loi, contrairement à celui qu'il y avait avant, il y a une amélioration énorme. Donc, moi, je ne vois que de la clarification et non quelque chose qui va être embrouillé comparativement à ce qu'il y avait avant.

M. Simard (Richelieu): D'accord. Merci. Moi, je pense que je n'ai pas d'autres commentaires. Est-ce qu'il y en a d'autres de ce côté-ci qui aimeraient intervenir, mes collègues qui voudraient intervenir? Sinon, je suis prêt à céder maintenant la parole à mon vis-à-vis.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, M. le député de Vaudreuil.

n(16 h 50)n

M. Marcoux: Merci, Mme la Présidente. Bienvenue, M. Caron, M. Morel et M. Provencher. Merci d'être là. Et également votre mémoire est fort intéressant comme d'habitude. D'ailleurs, vous êtes habitué, je pense, de présenter des mémoires non pas seulement à la commission de l'éducation, M. le président, mais à d'autres commissions parlementaires de l'Assemblée nationale, à des fréquences assez régulières. Donc, on vous remercie.

Une question, Mme la Présidente. À la page 5, et peut-être que vous en avez parlé durant votre présentation et j'ai pu l'échapper, vous mentionnez que, bon, vous êtes à l'aise avec l'obligation d'établir un plan stratégique couvrant une période de plusieurs années. D'autres ont suggéré des périodes précises: trois ans, par exemple, ou des plans triennaux. Est-ce que, pour vous, il est souhaitable d'avoir une période précise, de sorte que ce soient les mêmes... les plans stratégiques couvrent, pour l'ensemble des commissions scolaires du Québec, des périodes qui sont les mêmes?

M. Caron (André): Moi, à mon avis, c'est le milieu, qui est le mieux placé pour déterminer l'échéance de son plan stratégique. Étant bien entendu... et je fais référence ici au plan d'établissement des immeubles, c'est des plans triennaux qu'on révise à chaque année. Un plan stratégique, pour moi, même si on a annoncé que ça avait une durée de trois ans ou de cinq ans, dans le monde où on vit, à la vitesse où on vit, à chaque année il faut revoir, il faut réanalyser, il faut faire des mises à jour du plan stratégique. Donc, je pense que c'est les milieux qui sont les mieux placés pour déterminer si la durée de leur plan stratégique devrait être de trois ans ou cinq ans, dépendant de la vision, des priorités, des orientations qu'ils se sont donnés. Parce qu'il y a des choses peut-être qui ne sont pas réalisables dans trois ans et qui sont réalisables dans un autre milieu. Mais ce n'est pas en mettant une balise provinciale ou en mettant ça dans la loi à mon avis qu'on rend service au milieu. On est bien mieux de leur laisser le soin d'établir leur plan stratégique et la fréquence qu'ils veulent bien lui donner.

M. Marcoux: Mme la Présidente, vos... Et je comprends que... Vos collègues de l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec ce matin disaient ceci: «Nous recommandons que le projet de loi soit modifié afin d'assurer que le plan de réussite de l'école et le plan stratégique de la commission scolaire couvrent une période de trois ans et que ces plans soient annuellement mis à jour.» Ça, ça va de soi que les plans pluriannuels doivent être annuellement mis à jour, c'est bien évident. C'est vrai dans les entreprises comme dans les administrations publiques. Et ils ajoutent: «...ce qui permettrait d'assurer un niveau de cohérence dans la planification, tant au niveau de l'école que de la commission scolaire.» Mais, pour vous, ce n'est pas une recommandation qui vous apparaît importante, si je comprends, pour...

M. Caron (André): Bien, moi, je pense qu'en bas de trois ans c'est un petit peu revenir, là, parce que c'est assez laborieux de faire un plan stratégique, là. Quelqu'un qui veut le faire d'une façon très exhaustive, avec des audiences ou des consultations, recommencer à chaque année un plan stratégique, à mon avis, c'est un petit peu trop. Un minimum de trois ans m'apparaît tout à fait logique. Mais, si une commission scolaire voulait en faire un plan quinquennal, cinq ans, bien, à ce moment-là, ce serait son privilège, mais il y aura à répondre aussi. Mais le minimum.

M. Marcoux: Parce que cinq ans, comme vous le mentionnez, cinq ans aujourd'hui, là, c'est de l'ouvrage pour peut-être... bien des efforts pour finalement peu de résultats, là, sur des périodes de cinq ans. Mais vous n'auriez pas d'objection à ce que, administrativement, il y ait une sorte d'entente, que le ministère dise: Écoutez, dans un premier temps, allez-y donc dans trois ans, puis pour tout le monde au niveau de la province, puis après ça on verra?

M. Caron (André): Pas de problème.

M. Marcoux: D'accord. Vous parlez également des objectifs nationaux qui sont adoptés formellement par le ministère de l'Éducation et publiquement. Je ne sais pas s'il y a un débat public sur les objectifs nationaux, ça me paraît nouveau, mais... une consultation publique. Parce que ce que vous mentionnez, c'est que «nous reconnaissons que le réseau scolaire doit répondre à des objectifs nationaux adoptés formellement et publiquement par le ministère de l'Éducation». Alors, «publiquement» veut-il dire une consultation publique ou un débat...

Une voix: ...

M. Marcoux: Ah! Rendus publics? Ça, c'est différent. Il n'y aura pas de commission parlementaire là-dessus, si je comprends, M. le ministre, hein?

Une voix: Ouf!

M. Marcoux: Ouf! Non? Ha, ha, ha! Et vous ajoutez, bon: «Nous sommes en accord avec le fait que les commissions scolaires sont appelées à intégrer les objectifs nationaux dans leur propre plan stratégique, planifient leurs orientations et leurs axes d'intervention de façon intégrée en tenant compte des équilibres à maintenir entre les objectifs locaux et nationaux.» Pourriez-vous nous exprimer un petit peu plus en détail ce que ça veut dire, parce que c'est sûr qu'il y a une préoccupation, à savoir: c'est bien beau, des objectifs nationaux, des indicateurs nationaux là, c'est parfait, ça, mais je ne suis pas sûr si les réalités régionales sont les mêmes au Québec.

M. Caron (André): Je vais demander à M. Morel, Mme la Présidente, de répondre à la question, s'il vous plaît.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, M. Morel.

M. Morel (Réjean): Bonjour. Ce qu'on veut dire un peu par cela, c'est-à-dire que des objectifs nationaux peuvent s'appliquer à l'ensemble des commissions scolaires, à une commission scolaire, mais rendu au niveau de la commission scolaire, au niveau de ses écoles, bien, la réussite, dépendamment des indicateurs... peuvent s'appliquer plus fortement dans un milieu par rapport à un autre, dans un milieu économiquement faible, par exemple, par rapport à un autre. Ce qui va justifier d'ailleurs la répartition des ressources, par la suite, les ressources humaines, matérielles, financières de la commission scolaire en fonction de ses objectifs qu'elle aura faits. Donc, elle va moduler les objectifs nationaux dans chacun de ses établissements.

M. Marcoux: Pourriez-vous nous donner un exemple, M. Morel?

M. Morel (Réjean): Bien, par exemple, mettons qu'on dit: au niveau des centres de formation professionnelle, on avait des objectifs d'avoir plus de jeunes de moins de 20 ans. Vous pouvez avoir un centre de formation professionnelle que, vraiment, il y a un rythme où la base des jeunes est importante, alors que vous allez peut-être avoir deux autres centres de formation professionnelle que ce n'est pas le cas. Donc, la commission scolaire va moduler l'indicateur national là-dessus, lequel on a convenu avec le ministère, va avoir moins d'attentes par rapport à un centre, va en avoir plus, d'attentes, par rapport aux deux autres centres, en fonction de cette priorité gouvernementale là d'avoir plus de jeunes en formation professionnelle. Donc, elle va moduler les attentes nationales à l'intérieur de ses établissements en fonction du diagnostic qui va être fait par les établissements et par celui de la commission scolaire.

M. Marcoux: Parce que, dans la loi, on indique évidemment que le plan stratégique des commissions scolaires ou d'une commission scolaire doit tenir compte du plan stratégique du ministère. «Tenir compte», ça peut vouloir dire deux choses, ça, je veux dire: on tient compte de certaines parties, ou encore le plan stratégique est un peu comme une directive qu'on doit appliquer dans notre plan de la commission scolaire. Alors, quand la loi dit «tenir compte», pour vous là, qu'est-ce que ça veut dire, comme impact?

M. Morel (Réjean): Je vais faire allusion par rapport aux discussions qu'on a eues avec le ministère depuis plus d'un an là-dessus. C'est pour ça d'ailleurs qu'on a demandé au ministère de s'intégrer dans l'élaboration de leur propre plan stratégique. Je veux dire, quand on fait un plan stratégique, d'habitude, on fait l'analyse interne et externe de nos... pour être capables d'établir des priorités. Et on fait partie, en somme, des éléments externes là du ministère comme tel, mais des partenaires. Et, dans l'élaboration de leur plan stratégique, les orientations, les axes d'intervention, bien, on peut intervenir là-dessus. Et c'est bien sûr que, si le ministère, au plan gouvernemental, indique par exemple un suivi sur la politique d'adaptation scolaire, nécessairement, on peut s'attendre à ce que les commissions scolaires soient interpellées dans la validation puis dans l'assurance que le ministère veut avoir, dans l'application de la politique gouvernementale, sur l'adaptation scolaire. Donc, nécessairement, une commission scolaire ne pourra pas avoir un plan désincarné par rapport à ce que le ministère a comme objectifs.

Si je me rapporte avec ce qu'on fait à la Fédération, depuis quelques années, avant de faire notre propre planification stratégique à la Fédération, on regarde l'ensemble des planifications de tous les ministères. C'est une mine d'informations pour voir qu'est-ce qui s'en vient, qu'est-ce qu'on nous concocte dans les différents ministères qui peuvent avoir des effets sur les commissions scolaires, les établissements. Donc, ça veut dire que quand, par la suite, on fait notre propre plan, on l'établit en fonction de qu'est-ce que le gouvernement a comme orientation, pour un volet, puis, l'autre volet, bien, c'est le local. C'est un peu pour ça qu'on faisait la différenciation, dans les attentes là au ministre, en reddition de comptes, entre le volet des attentes du gouvernement puis du ministère sur son réseau scolaire ? faut le prendre en considération ? et le volet local.

Pour prendre un autre exemple, on a une nouvelle politique de formation continue. On peut s'attendre que, dans la planification stratégique du ministère, il va y avoir des axes d'intervention puis des indicateurs en fonction de cette politique-là. Donc, ce serait d'avoir les yeux bouchés si, dans notre propre plan, au niveau des commissions scolaires, on n'en tenait pas compte parce que, de toute façon, on va recevoir pareil des demandes d'information, ou des demandes de validation, ou des informations de gestion en fonction de ça. Donc, c'est pour ça que... Et c'est un peu ce qu'on essaie de... de ramasser. Au lieu d'avoir des interventions ad hoc de tous bords, de tous côtés du ministère, on essaie de ramasser dans un processus toutes ces informations-là de gestion puis ces indicateurs-là dans un processus normal et cohérent avec les trois paliers qui sont le ministère, la commission scolaire puis les établissements.

n(17 heures)n

M. Marcoux: Évidemment, il y a bien des groupes, Mme la Présidente, avant vous qui ont parlé d'obligation de résultat, obligation de moyens, là, par rapport aux objectifs des plans de réussite. Est-ce que vous les concevez comme des obligations de résultat, les plans de réussite, ou des obligations de moyens seulement? Et, deuxièmement, est-ce que vous croyez fondamentalement à l'établissement de cibles quantitatives et est-ce que, pour vous, c'est prioritaire, l'établissement de cibles quantitatives, dans les plans de réussite?

M. Caron (André): À mon avis, Mme la Présidente, c'est une obligation de moyen. Moi, je pense que tout le monde devraient mettre tous les moyens à leur disposition pour atteindre certains objectifs. Et il y a tellement... En tout cas, à ce que j'ai vu à date, ce que je comprends, c'est que, ayant plusieurs indicateurs, c'est sûr qu'à un moment donné il va falloir que ça s'imbrique, ces indicateurs-là. Si on vise seulement... Si on travaille en silo puis on travaille juste sur un indicateur, on risque de manquer le coche sur les autres. Donc, il va falloir travailler d'une façon intégrée et cohérente.

Mais, tout ça mis ensemble, je pense que ce n'est pas de viser un chiffre magique. Et là je ferais peut-être une nuance ? qui n'est peut-être pas trop appropriée ? entre un objectif puis une cible. Une cible, c'est vraiment le «bull's-eye» qu'on vise, tandis que, un objectif, c'est qu'on prend les moyens pour l'atteindre, l'objectif. Et, si, mettons, on n'a pas atteint l'objectif, bien, on aura à justifier qu'il y a des moyens autres qu'on devra prendre pour essayer de l'atteindre. C'est un petit peu la nuance que je fais. M. Morel préciserait en complément.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Morel.

M. Morel (Réjean): J'aimerais peut-être faire un lien avec ce que les représentants de l'ADIGECS ont dit tout à l'heure et puis ce que vraiment un directeur d'école me mentionnait récemment. C'est qu'un directeur général, dans son évaluation avec ce directeur d'école, lui disait: Bien, écoute, tu as baissé ta performance cette année, tes résultats scolaires ont baissé; tu vas me faire un plan d'action pour te rétablir. Alors, le directeur d'école, un peu frustré, dans une lettre lui a répondu: Regarde, j'ai augmenté mon taux de décrochage de 10 % à mon école par les mesures que j'ai mises de l'avant, ce qui fait en sorte que, mes résultats, là, ma moyenne a baissé. Donc, c'est là qu'on voit qu'il faut que les indicateurs soient intégrés. Et on peut avoir quelques indicateurs indicatifs mais des indicateurs aussi qualitatifs ou d'autres types qui vont nous permettre de venir valider et voir... d'expliquer en somme les résultats. C'est un peu ce qui...

M. Marcoux: Parce que, quand... Et, M. Caron, vous faisiez la distinction entre «cible» et «objectif», là, et que les objectifs étaient peut-être plus contraignants en termes d'atteinte. Est-ce que j'ai bien compris?

M. Caron (André): Pas nécessairement.

M. Marcoux: Pas nécessairement. Ah bon! O.K. Mais je vais reposer une autre question, d'abord. Dans le... Bien, c'est ce que j'avais compris, mais je ne veux pas vous... parce qu'il y avait une distinction entre «cible» et «objectif». Dans un des tableaux que nous avons eus cet après-midi ? je pense que c'est la CSQ qui l'a présenté ? on indique que, dans huit ans, l'objectif du taux d'obtention d'un premier diplôme du secondaire avant l'âge de 20 ans, qui est à peu près 71, 72 actuellement, là, pour cent, 71,7 en 2000-2001, l'objectif, c'est d'augmenter ça à 85 %. Est-ce que vous croyez que c'est possible et est-ce que vous êtes d'accord là-dessus, premièrement?

Et, deuxièmement, qu'est-ce que vous répondez à des groupes qui nous disent: Quand vous établissez des objectifs quantitatifs trop précis et que vous insistez trop à ce qu'on les atteigne, ces cibles ou ces objectifs quantitatifs précis, il y a des effets pervers qui se produisent dans le système? Par exemple, bien, vous dites: Oui, il y en a peut-être qui devraient redoubler, on ne les fait pas redoubler. Peut-être qu'on va faire des sessions intensives de préparation aux examens, puis il y a d'autres choses qu'on va éliminer, etc. Alors donc, est-ce que vous croyez au 85 %, premièrement? Et, deuxièmement, est-ce que des cibles quantitatives amènent des effets pervers?

M. Caron (André): Je demanderais à M. Morel de répondre, s'il vous plaît.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Morel.

M. Morel (Réjean): Bon, sur les objectifs, il faut faire attention quand vous parlez du 71 %. On s'aperçoit aussi que ça, c'est probablement à la sortie du secondaire V, c'est-à-dire... Mais, les élèves, il y en a plusieurs qui poursuivent ou ils reviennent aux adultes. Puis notre taux, au total, est plus élevé que ça. Donc, ça, je pense, c'est au niveau de la...

M. Marcoux: Ça, je suis d'accord, c'est 80 %. Mais là on parle des moins de 20 ans, M. Morel. C'est juste ça.

M. Morel (Réjean): Oui. Oui, mais c'est pour ça que c'est par des mesures de rétention dans les écoles qu'on va pouvoir réussir ça. Et, la mesure du 85 %, on peut y croire, dans le sens qu'on parle de diplôme et de qualification aussi.

Alors, prenons, par exemple, les élèves en difficulté ou handicapés, par exemple, mentaux. Alors il va falloir développer peut-être, à un moment donné, les services qu'on leur donne, jusqu'à 21 ans, de par la loi. Et, lorsqu'on les sort de nos écoles par la suite puis qu'ils s'en vont s'établir dans la société, qu'est-ce qu'on leur a donné comme formation ou comme socialisation pour pouvoir agir de façon minimalement dans la société, actuellement, on n'a rien, comme tel, ce qui fait en sorte qu'on a comme une partie de nos élèves qu'on oublie, qu'on n'a pas diplômés, comme tel, qui ne seront jamais diplomables, selon les normes généralement reconnues. Mais on a investi des milliers et des milliers de dollars. On sait qu'un élève handicapé peut nous coûter jusqu'à 17 000 $, 20 000 $ par élève, et à la suite on se dit: Bien, on ne l'a pas diplômé, puis ça, ça vient jouer dans nos... On sait qu'on se retrouve fragiles un petit peu là-dessus, je trouve. Alors, il va falloir établir des moyens pour reconnaître le travail qui s'est fait par rapport à ces étudiants et ces étudiantes-là.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Morel, M. Caron et M. Provencher, de votre participation. Nous allons suspendre quelques instants, le temps de changer d'invités. Et j'inviterais la Fédération des syndicats nationaux de bien vouloir s'approcher à la table.

(Suspension de la séance à 17 h 6)

 

(Reprise à 17 h 7)

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, je demanderais à la Fédération des syndicats nationaux de bien vouloir s'approcher à la table.

La commission de l'éducation est réunie afin de tenir des consultations particulières à l'égard du projet de loi n° 124, Loi modifiant le Conseil supérieur de l'éducation et la Loi sur l'instruction publique. Alors, est-ce que la Fédération des syndicats nationaux est arrivée? Je leur demanderais d'approcher à la table.

Une voix: La Confédération.

La Présidente (Mme Bélanger): La Confédération des syndicats nationaux. Alors, nous vous souhaitons la bienvenue. Alors, je demanderais au porte-parole de bien vouloir s'identifier et d'identifier la personne qui l'accompagne. Et vous avez 15 minutes pour présenter votre mémoire, qui sera suivi ? je pense que vous l'avez entendu une partie de la journée ? d'un échange entre le ministre et le porte-parole de 30 minutes.

Confédération des syndicats nationaux (CSN)

M. Gauthier (Ronald): Bon. Mon nom est Ronald Gauthier, je suis représentant de la Fédération des employées et employés de services publics. À ma droite, c'est Caroline Senneville, de la Fédération nationale des enseignantes et enseignants du Québec pour les écoles privées.

D'abord, je voudrais vous remercier... Bon, la Fédération des employées et employés de services publics ? FEESP ? et la Fédération nationale des enseignants, enseignantes du Québec remercient les membres de la commission de l'éducation de leur permettre de participer à cette consultation sur le projet de loi n° 124. La FEESP et la FNEEQ sont affiliées à la Confédération des syndicats nationaux, la CSN, qui regroupe 270 000 membres. Parmi ces derniers, plus de 50 000 proviennent du secteur de l'éducation.

La Fédération des employées et employés de services publics regroupe plus de 23 000 employés de soutien des commissions scolaires, des catégories administrative, technique et manuelle. Quant à la Fédération nationale des enseignantes et des enseignants du Québec, la FNEEQ, elle compte plus de 23 000 membres, dont 1 600 enseignantes et enseignants au primaire, au secondaire et au collégial du secteur privé subventionné.

n(17 h 10)n

Ce mémoire est déposé par la Fédération des employés de services publics au nom des employés de soutien qu'elle représente dans les commissions scolaires et par la Fédération nationale des enseignantes et enseignants du Québec pour les enseignantes et enseignants qu'elle représente dans les écoles primaires et secondaires du secteur privé subventionné.

Les enseignantes et les enseignants, les professionnels et les employés de soutien ont à coeur la réussite des jeunes et des adultes, et travaillent dans la perspective qu'ils puissent connaître le succès, le multiplier et obtenir un diplôme. Si le travail des enseignantes et des enseignants est davantage connu, malheureusement, on sous-estime grandement celui accompli par l'ensemble des employés de soutien oeuvrant dans les écoles, les centres d'éducation des adultes et les centres de formation professionnelle. Les contacts quotidiens qu'ils entretiennent avec les élèves les amènent à être des confidents, la personne à laquelle on se réfère pour obtenir un conseil, celle qui freine certains comportements inacceptables, qui les rappelle à l'ordre et qui valorise leurs bons coups. Pour leur part, les éducatrices et les éducateurs des services de garde sont les seuls dans l'école à être en contact continu avec les parents des élèves, qui viennent reconduire leurs enfants le matin et les chercher en fin de journée. Quant aux techniciennes et techniciens en éducation spécialisée, ils contribuent au plan de réussite en étant en support aux enseignantes et enseignants dans les classes.

Le travail des personnels du soutien est trop souvent passé sous silence, comme l'illustre bien un exemple récent. Le 21 novembre dernier, le gouvernement annonçait un plan d'action pour prévenir le taxage. On indique que «parents, enseignants, psychologues et jeunes sont engagés dans cette bataille». On souhaite que les enseignantes et les enseignants interviennent, mais on oublie que ceux qui, au quotidien, circulent dans les corridors et font la surveillance dans la cour de l'école sont souvent des employés de soutien. Pourquoi sont-ils absents du plan d'action? Ne devraient-ils pas être, eux aussi, formellement engagés dans cette bataille? Malheureusement, encore une fois, dans les officines gouvernementales, on reste muets sur leur contribution.

Dans ce mémoire, nous abordons certaines préoccupations se rapportant à la réussite des élèves, jeunes et adultes. Par la suite, nous traitons des plans stratégiques et des plans de réussite et nous terminons en proposant des modifications au contenu de ce projet de loi.

Se mobiliser pour la réussite. L'éducation occupe une place importante dans les préoccupations des Québécoises et des Québécois. La CSN et ses fédérations de l'éducation ont toujours été en faveur que l'on se fixe, comme société, d'ambitieux objectifs de diplomation et de qualification. Cependant, la FEESP et la FNEEQ émettent des réserves quant aux effets possibles du projet de loi n° 124. Ils souhaitent aussi alerter les membres de la commission de l'éducation sur les dangers d'inscrire dans une loi l'obligation de produire des plans stratégiques et des plans de réussite, craignant que l'on s'éloigne des objectifs poursuivis.

Rendre des comptes, au-delà des chiffres. Dans le cadre de la démarche de modernisation de l'administration publique, le Québec s'est doté de nouveaux mécanismes pour la gestion gouvernementale. Afin de s'inscrire dans ces objectifs gouvernementaux, le ministère de l'Éducation a mis en place une série de mesures visant l'évaluation et l'atteinte de résultats, et ce, aux trois ordres d'enseignement.

Les questions relatives à l'évaluation des résultats et à la reddition de comptes ne sont pas nouvelles. On a pu observer, au cours de la dernière décennie, un engouement qui s'est concrétisé par un foisonnement de mesures et de mécanismes d'évaluation, privilégiant souvent le processus au détriment des objectifs poursuivis. Ces approches sont venues alimenter les critiques de plusieurs qui n'y voient qu'un objet supplémentaire de contrôle, de sanction, de comparaison, de concurrence et de compétition.

Suite au Sommet du Québec et de la jeunesse, le ministre de l'Éducation annonce, au printemps 2000, une série de mesures à l'égard de la réussite et demande à chaque école publique, aux écoles privées subventionnées, aux centres d'éducation des adultes et aux centres de formation professionnelle de produire un plan de réussite et de voir à sa réalisation. L'ensemble des établissements répondent à cette démarche et déposent un plan de réussite au ministère. En 2001, suite au bilan produit par son ministère, le ministre de l'Éducation se dit «réjoui par la participation et par l'engagement du réseau scolaire ainsi que par la qualité du travail effectué».

Ce bref rappel permet de constater que des actions ont réellement été entreprises jusqu'à maintenant par les commissions scolaires et les écoles publiques et privées et que la démarche a produit des résultats, et ce, sans que cette obligation ne soit enchâssée dans une loi. Nous sommes profondément convaincus qu'une loi ne sera jamais garante de la responsabilisation et de l'engagement des individus et des établissements.

Les élèves au coeur des plans stratégiques et des plans de réussite. La FEESP et la FNEEQ considèrent que le premier objectif des mécanismes d'évaluation est de supporter les établissements dans la réalisation de leur mission éducative et que ces mécanismes doivent être surtout des instruments de changement et d'amélioration continue pour mieux répondre aux besoins des élèves, jeunes et adultes, et permettre au plus grand nombre de réussir leur parcours scolaire.

Pour la FEESP et la FNEEQ, l'élève et ses besoins doivent être au coeur du système d'éducation. Nous sommes favorables à la mise en place de plans de réussite et nous croyons que l'ensemble de la démarche proposée peut être un moteur important dans chaque école pour favoriser la réussite. Le plan stratégique de chaque commission scolaire et de chaque école privée subventionnée doit s'articuler avec le plan stratégique du ministère de l'Éducation, et ce, de façon intelligente et non stéréotypée. Une pression importante s'exercera sans doute sur quelques écoles dont l'effectif scolaire éprouve des difficultés importantes.

La réussite est multifactorielle: des éléments d'ordre économique, social, familial, éducatif, affectif et individuel sont en interaction étroite. La vigilance sera donc de mise pour s'assurer que l'obsession de la réussite ne pousse ces écoles à niveler vers le bas leurs exigences de formation pour répondre aux résultats souhaités. Et il faut aussi reconnaître que l'école a une responsabilité d'obligation de moyen mais qu'on ne peut la contraindre à une obligation de résultat.

L'illusion de l'encadrement législatif. Nous ne sommes pas opposés à des mécanismes de reddition de comptes et loin de nous l'idée de s'y soustraire. Mais nous appréhendons certains effets néfastes d'une obligation légale. Nous nous opposons à toute mesure de financement liée à des résultats d'évaluation ou à des indicateurs de performance. Un tel financement conditionnel augmenterait les difficultés des établissements qui, se trouvant pénalisés en termes de moyens financiers, seraient obligés de restreindre les mécanismes d'aide et de soutien aux élèves en difficulté. Cette iniquité dans le financement augmenterait l'écart en ce qui a trait au succès et à la réussite entre les écoles.

D'autres types d'effets nuisibles sont à craindre. Pour performer, certaines écoles pourraient, par exemple, diminuer leurs exigences, rehausser les résultats des plans de réussite par un maquillage savant, et surtout produire des données statistiques présentant aux acteurs extérieurs une évaluation du système d'éducation québécois qui relève du miroir aux alouettes. Certains bilans déposés au ministère pourraient être le reflet de ce que la commission scolaire, l'école ou le ministre souhaite entendre et non le véritable portait de la situation.

Pour permettre l'atteinte d'objectifs en matière de succès, de réussite scolaire et de diplomation, le gouvernement doit assumer ses responsabilités et assurer au réseau scolaire les ressources humaines, financières et matérielles nécessaires. De 1994 à 1999, le gouvernement a imposé des compressions de 1,9 milliard de dollars à l'ensemble du réseau de l'éducation. Les impacts de ces compressions sont encore fortement ressentis dans les écoles où les moyens pour supporter les élèves ne sont pas à la hauteur des besoins. Il est urgent que le gouvernement procède à un plus grand rehaussement du financement général en éducation, condition essentielle pour assurer la réussite. Ce rehaussement se doit d'être supérieur aux sommes consenties par le gouvernement lors du Sommet du Québec et de la jeunesse.

Voici certaines modifications que la FEESP et la FNEEQ souhaitent voir intégrer quand même. À l'article 3, nous souhaitons que la formule retenue pour le plan de réussite soit similaire à celle du projet éducatif, d'autant plus qu'à l'article 2 de la Loi sur l'instruction publique on indique que l'école réalise sa mission dans le cadre d'un projet éducatif et d'un plan de réussite. Pour la FEESP et la FNEEQ, ces deux volets sont complémentaires. Le plan de réussite doit être collé à la réalité de l'école, aux préoccupations et aux attentes du milieu, comme le projet éducatif. Comment peut-on penser pouvoir élaborer le plan de réussite sans une adhésion large des divers intervenants aux objectifs poursuivis et aux moyens à privilégier? Nous souhaitons que l'on procède aussi à une consultation large des partenaires de l'éducation, de la société civile et des personnels pour le plan de réussite, tel qu'on le prévoit dans la loi actuelle pour l'élaboration du projet éducatif.

Nous recommandons que l'article 3 soit modifié comme suit: Le projet éducatif et le plan de réussite sont élaborés, réalisés et évalués périodiquement avec la participation des élèves, des parents, du directeur de l'école, des enseignants, des autres membres du personnel de l'école, des représentants de la communauté et de la commission scolaire.

Nous demandons aussi qu'un mécanisme semblable soit prévu pour les écoles privées subventionnées afin d'assurer une participation des élèves, des parents, des enseignants, des autres membres du personnel, des représentants de la communauté à l'élaboration, la réalisation et l'évaluation du plan stratégique et du plan de réussite.

À l'article 8, nous tenons à souligner l'importance de rendre des comptes publics. Les parents et la communauté doivent être informés de l'évolution du projet éducatif et du plan de réussite de chaque école, des progrès effectués et des difficultés rencontrées. Il faudra que le ministère, la commission scolaire et l'école portent une attention toute particulière à la transparence de cette opération. Il faudra surtout que les parents, les élèves, les personnels et les membres de la communauté suivent attentivement l'évolution du projet éducatif et du plan de réussite et aient un espace pour pouvoir questionner les résultats, les clarifier et s'assurer qu'ils reflètent bien la réalité. Nous souhaitons que des efforts soient faits pour faciliter l'appropriation par les parents et la communauté du contenu du plan de réussite, du projet éducatif et des résultats obtenus, sans oublier de remettre les documents aux divers personnels.

n(17 h 20)n

Nous recommandons que l'article 8 soit modifié comme suit: donc, que le conseil d'établissement informe annuellement les parents ainsi que la communauté que dessert l'école des services qu'elle offre, et leur rende compte de leur qualité, et les informe également du projet éducatif et du plan de réussite de l'école, et leur rende compte annuellement des résultats obtenus en regard des objectifs fixés. Le projet éducatif et le plan de réussite de même que les résultats obtenus en regard des objectifs fixés et ? au lieu du «ou» ? un document explicatif de ceux-ci sont distribués aux parents. On ajouterait «au personnel et, sur demande, aux membres de la communauté».

À l'article 16, nous croyons que les directeurs de centre de formation professionnelle ou d'éducation des adultes ont l'obligation de consulter les personnels et les étudiants pour l'approbation du plan de réussite. En ce sens, nous proposons que l'article 16 soit davantage explicite, qu'il ne laisse aucune prise à l'interprétation et qu'il se lise comme suit: «Afin de procéder à l'approbation du plan de réussite et à son actualisation, le directeur du centre consulte les personnels et les étudiants pour élaborer les propositions. Suite à cette consultation, le conseil d'établissement approuve le plan de réussite du centre et son actualisation proposés par le directeur du centre. Les modalités de cette participation sont établies avec les personnels intéressés, les organisations qui les représentent et les étudiants lors de rencontres convoquées par le directeur du centre.»

À l'article 17, on ajoute un nouvel article après l'article 110.3 de la Loi sur l'instruction publique. Nous proposons que la concordance soit faite avec la modification proposée à l'article 8 et que le dernier alinéa soit modifié de la façon suivante: Les orientations et le plan de réussite de même que les résultats obtenus en regard des objectifs fixés et un document explicatif de ceux-ci sont distribués aux élèves et aux personnels et, sur demande, aux membres de la communauté.

À l'article 22, la Loi de l'instruction publique est modifiée par l'insertion, après l'article 209, d'un article qui définit les différents éléments d'un plan stratégique. L'avant-dernier alinéa de cette loi indique: «Le ministre établit les indicateurs nationaux après consultation des commissions scolaires et les rend publics.» Toute cible quantitative établie nationalement exerce une pression sur les commissions scolaires et les écoles. Il faut distinguer les indicateurs nationaux des cibles nationales. Nous faisons une mise en garde sur l'imposition de cibles quantitatives mesurables et sur les impacts négatifs qu'elles pourraient engendrer dans les différents milieux. N'oublions pas que dans les écoles nous intervenons auprès d'élèves jeunes et adultes en vue de leur transmettre des valeurs, des connaissances, des savoir-faire, et qu'il est impossible d'en mesurer tous les impacts.

À l'article 25, nous proposons qu'il y ait obligation pour chaque commission scolaire de mettre en place des mécanismes de support et de soutien afin de venir en aide aux écoles qui, pour différents motifs, seraient confrontées à des difficultés particulières pour l'actualisation de leur plan de réussite, et que l'on ajoute à la fin de cet article: Celle-ci doit mettre en place différents mécanismes de support et de soutien afin de venir en aide aux écoles rencontrant des difficultés particulières.

La Présidente (Mme Bélanger): Si vous avez une conclusion, il reste 30 secondes.

M. Gauthier (Ronald): On voulait ajouter un nouvel article qui serait: «Aucune mesure de financement conditionnel ne sera associée à l'atteinte des résultats basés sur la réussite ou la diplomation des étudiantes et des étudiants. Aucune mesure ne peut avoir comme impact de pénaliser, en termes de financement, les commissions scolaires et les écoles qui n'ont pas atteint les résultats souhaités.»

Bon, en terminant... Non. Nous souhaitons de plus que les conseils d'établissement soient consultés sur l'utilisation de ces budgets et l'identification des priorités, et, comme il n'y a pas de conseils d'établissement dans les écoles privées, il faudrait mettre un mécanisme de consultation pour ces écoles.

Et, en terminant, nous tenons à rappeler que la réussite et la qualité des services ne sont pas uniquement fonction de ce qui est évaluable. L'écoute, la disponibilité, l'attention, l'empathie, l'encouragement, le support, la tape dans le dos, tous ces gestes gratuits qui se vivent au quotidien dans les écoles ne sont pas et ne seront jamais mesurables.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci. M. le ministre.

M. Simard (Richelieu): Je veux d'abord remercier les représentants de la CSN, la FNEEQ, du personnel de soutien comme du personnel d'encadrement. Nous avons ici un mémoire extrêmement intéressant, qui montre bien que, malgré certaines réticences et certaines mises en garde, il y a une adhésion tout d'abord fondamentale au principe de la réussite et des moyens à mettre en oeuvre pour atteindre cette réussite. Alors, je ne peux que me réjouir de cette prise de position fondamentale et qui, à mon avis, va servir beaucoup le milieu de l'éducation.

Vous avez rappelé avec beaucoup de pertinence que l'équipe-école, c'est une équipe complète. Ce ne sont pas seulement des enseignants, ce ne sont pas seulement des directions, mais il y a tout un personnel dans les services de garde comme dans les services d'entretien, dans les services de secrétariat, dans les services de surveillance, dans les services divers qui sont en contact quotidiennement avec les élèves et qui sont nécessaires à la réussite. Il n'y a pas de réussite sans la participation de tout le monde. Et, s'il y a des précisions à apporter ? vous avez fait un certain nombre de suggestions ? pour nous assurer que ce soit très clair qu'il s'agit bien de l'implication de l'ensemble de l'équipe-école, nous allons le faire, et je suis très sensible à ces propositions.

Je voudrais vous entendre réagir à ma réaction sur un élément qui me semble important. À la page 15 de votre mémoire, vous dites qu'«aucune mesure de financement conditionnel ne sera associée à l'atteinte des résultats». Évidemment, vous comprenez bien que c'est très difficile de mettre dans un projet de loi ce qui ne sera pas, parce que, dans le fond, il n'y a aucun élément dans le projet de loi qui lie le moindrement l'atteinte des réussites au financement des différentes écoles ou des commissions scolaires. C'est très clair, il n'y a pas de ce lien, et nous ne l'avons pas voulu, ce lien, parce que nous ne croyons pas qu'il doive y avoir un lien.

Vous le savez bien, par ailleurs, que parfois, bien au contraire, ce sont des moyens supplémentaires qui sont mis en oeuvre pour aider des établissements qui ont des difficultés particulières. Tout le programme Agir autrement dans les milieux défavorisés que nous avons lancé cette année, par exemple, vise à donner plus de moyens à des écoles qui ont des...

(Panne de son)

n(17 h 27 ? 17 h 28)n

M. Simard (Richelieu): ...obligation d'atteindre des résultats. Nous ne sommes pas dans le domaine des sciences exactes, dans le domaine d'une réalité comptable immédiate.

La réussite éducative, je le rappelle, elle est globale. Elle contient évidemment la réussite scolaire plus classique, qui est de réussir ses examens et de diplômer, mais elle consiste aussi à recevoir une formation, une socialisation, une qualification, dans tous les sens que cela revêt, qui dépassent très largement simplement la diplomation ou l'atteinte de résultats très élevés au niveau scolaire. Non pas qu'il ne faille pas tendre vers une meilleure diplomation, vers des résultats meilleurs, sinon que ce serait... Tous les enseignants et tout le personnel des écoles tendent évidemment à ce que les élèves réussissent mieux. Mais cette réussite, elle est beaucoup plus large que celle qui est mathématiquement quantifiable. Et je pense que là-dessus ? vous me corrigerez si je me suis trompé ? je sens une adhésion à toute cette opération des plans de réussite, mais en même temps un petit relent de méfiance quant aux possibles effets pervers. Est-ce que je me trompe?

La Présidente (Mme Bélanger): Mme Senneville?

Mme Senneville (Caroline): Mme Senneville. Vous avez tout à fait raison quand vous parlez de notre adhésion au principe de la réussite. Je vous dirais: C'est la raison pour laquelle on se lève le matin puis on va travailler, il en va de soi. Nous sommes cependant prudents, pour ne pas dire circonspects, à enchâsser dans une loi quelque chose que les commissions scolaires et les écoles font déjà et pour lequel elles semblent, elles aussi, engagées. Alors, il est clair pour nous, qu'on se pose la question: On met ça dans la loi pourquoi? D'ailleurs, c'est ce qu'on montre à nos élèves, de toujours se poser des questions.

Et, effectivement, le financement conditionnel, pour nous, bon, on s'est dit: Ça pourrait être une hypothèse. Nous sommes heureux de vous entendre dire que ce ne l'est pas, que c'est justement le contraire. Parce que, effectivement, quand on rend... On doit rendre des comptes, ce sont des deniers publics, y compris dans le réseau privé subventionné: il y a une partie des sous qui viennent des impôts publics. Nous devons rendre des comptes, savoir ce qui se passe, identifier là où il y a difficulté effectivement pour apporter support. Et c'est bien mentionné dans notre texte, c'est quelque chose...

n(17 h 30)n

Nous, dans nos instances, à la FNEEQ, on utilise beaucoup ? c'est un principe qu'on a mis sur la table ? ce qu'on appelle l'obligation de moyens et non pas l'obligation de résultat, et c'est ce qui fruste beaucoup, je pense, les enseignants, enseignantes, d'une part, mais aussi l'équipe-école, y incluant la direction, parce qu'on n'a pas le contrôle sur tout, et il devient très frustrant d'être évalué et d'être mesuré sur une chose sur laquelle nous n'avons pas le contrôle.

Vous savez, les facteurs de réussite sont multiples. Et je vous parle de choses qu'on a lues dans les journaux depuis une dizaine de jours. Le taux d'éducation de la mère, on n'a pas le contrôle là-dessus. Le nombre de livres présents à la maison, on n'a pas le contrôle là-dessus. Même, à Montréal, il est sorti l'origine ethnique des élèves, on n'a pas le contrôle là-dessus. Les moyens financiers de la famille, on n'a pas le contrôle là-dessus. Tout ce qui sorti dernièrement sur les centres jeunesse... Les enfants poqués, bien, ce qu'on oublie, c'est que ces enfants-là sont en classe. On les voit, ils sont là le matin. Est-ce qu'on a le contrôle là-dessus? Si peu. Alors, c'est ça. Quand on dit: La réussite est multifactorielle, c'est tout ça. Ce sont des exemples concrets, qui font craindre aux enseignants et aux personnels qui sont dans les écoles de se faire blâmer pour des choses ou de se faire demander des comptes pour des choses sur lesquelles nous n'avons pas prise. Et, vous l'avez dit, ce n'est pas le sens exact, on traite... C'est banal à dire, mais on traite avec des être humains. Alors, oui, c'est une crainte qu'on a.

On sait que les deniers publics sont gérés de façon de plus en plus serrée, que les gens demandent de plus en plus de comptes. On est prêts à dire quels sont les moyens qu'on a mis en place, mais, sur les résultats ? j'aime bien l'expression que vous avez utilisée ? on va tendre vers mieux, on va toujours essayer de faire mieux. Mais il y a des cibles qui peuvent être inaccessibles.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre.

M. Simard (Richelieu): Madame, tout en reconnaissant parfaitement que les situations sont très diverses, vous admettrez avec moi que l'essence du projet de loi et l'essence de ce qui est un plan de réussite, c'est d'abord une bonne analyse, un bon diagnostic de la réalité. Les objectifs que l'on se fixe sont toujours à partir du réel. Si vous avez des parents qui ont un taux de scolarité très faible, un taux d'occupation de... s'ils sont en chômage ou s'ils gagnent très peu, s'ils sont loin de toute forme de culture, tout cela fait partie du diagnostic que l'on établit au point de départ.

Ce n'est pas vrai... Et c'est pour ça que je me suis toujours insurgé contre les palmarès. Vous avez vu le mois dernier la parution d'un palmarès qui a soulevé beaucoup de réactions: c'est de considérer que tout le monde est à peu près égal, qu'au collège Jean-de-Brébeuf ce sont les mêmes enfants qu'à Pointe-Gatineau ? où je réside ? que le Québec, de Sorel-Tracy à Sept-Îles, n'est rempli que d'écoles recevant des élèves de même niveau. Mais ce n'est pas ça du tout, la vraie vie, là. On ne peut pas comparer des pommes et des oranges. On doit d'abord faire un diagnostic extrêmement précis, qui évalue exactement quels sont les points forts, les points faibles, les difficultés, les obstacles, de façon à mettre en oeuvre les moyens pour dépasser ces... L'objectif, ce n'est pas: une fois qu'on a constaté qu'on a des difficultés, qu'il y a des obstacles, simplement baisser les bras et dire qu'il n'y a rien à faire.

Vous savez bien que l'acte éducatif, c'est de croire qu'on peut y changer quelque chose et, à partir des moyens qu'on a et des moyens qu'on obtient, arriver à mobiliser les efforts, mettre en oeuvre tous les moyens de façon à ce que tout le monde atteigne à la réussite. Vous savez, je reprends mon exercice de tout à l'heure, les enfants de Sorel-Tracy, de certains quartiers de Saint-Joseph, ont autant le droit à la réussite que tout autre enfant au Québec. Et on doit mettre en oeuvre les moyens, dans chaque école, pour atteindre cette réussite.

Je ne comprends pas, vous me semblez admettre parfaitement tous ces principes-là mais avoir peur que ce soit dans une loi. Il me semble que, justement, tout notre système d'éducation et notre système d'ailleurs de vie en société, lorsqu'une pratique... Vous reconnaissez vous-même que la pratique est maintenant instaurée. Il faut la pérenniser, lui permettre d'exister dans le temps et d'avoir des moyens assurés de survie par l'inclusion dans une loi. Vous allez m'expliquer, je l'espère, mieux pourquoi vous vous méfiez de la législation, à nous, les législateurs.

M. Gauthier (Ronald): Je vais tenter de répondre.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Gauthier.

M. Gauthier (Ronald): Oui. Ronald Gauthier. Je vais tenter de répondre en partie à votre réponse. On vise les mêmes objectifs. Là-dessus, on s'entend. Toutefois, quand on parle du réel, on l'a mentionné tantôt, quand il est le temps de consulter l'ensemble des personnels, les employés de soutien ne sont jamais consultés. Et on le répète depuis de nombreuses années, on fait partie de la réalité la plus concrète qui se passe dans les écoles. Et ce n'est pas vrai qu'on nous consulte, c'est totalement faux. Et ça passe à tous les niveaux. Ça, c'est la première chose.

Quand on est d'une méfiance un peu, en tout cas, épidermique face à la loi... C'est que la loi va établir certaines règles, et on a peur qu'en établissant certaines règles on établisse certains paramètres et que les paramètres produisent des financements et donc mettent en péril les plans de réussite. Et, pour atteindre les paramètres, les écoles vont faire les manoeuvres nécessaires pour avoir les financements reliés. C'est ça, notre crainte: d'avoir des règles aussi bien encadrées qui ne s'adaptent pas aux réalités de tous et chacun. C'est pour ça qu'on a une certaine crainte à ce niveau-là. Mais on partage tout à fait votre vision au niveau de l'accès à la réussite pour tous et pour toutes.

M. Simard (Richelieu): Mais juste une précision. Vous êtes au coeur du conseil d'établissement, puisque, le conseil d'établissement, il y a au moins un membre du personnel de soutien élu par ses pairs. Donc, vous êtes au sein de ce processus. La loi, actuellement... Admettez avec moi que, si la loi ne le précisait pas, il y a bien des chances qu'on vous oublierait bien souvent. C'est parfois utile d'être dans la loi, vous savez.

M. Gauthier (Ronald): Je vais vous rappeler comment c'est arrivé, que nous y soyons, parce que, au début, dans le projet de loi, nous n'y étions pas. Nous avons fait des démarches importantes pour y être. On a réussi à obtenir un siège...

M. Simard (Richelieu): C'est pour ça que les commissions parlementaires existent.

M. Gauthier (Ronald): ...qui n'est pas statutaire, soit dit en passant. Ce siège-là, si on ne l'occupe pas, on le perd au profit d'un autre groupe. Et le seul siège statutaire que nous avons, c'est celui des services de garde, heureusement. Et, à partir de là, nous devons nous battre pour ce siège-là. Ce n'est pas aussi évident que ça, et nous sommes minoritaires fortement dans ça. Bon. Un coup qu'on a dit ça, c'est correct. On a notre place à faire et on est là pour vous le dire encore. Mme Senneville voudrait compléter.

La Présidente (Mme Bélanger): Mme Senneville.

Mme Senneville (Caroline): Rapidement, pour les conseils d'établissement, ils n'existent pas dans les écoles privées, et les personnels, fussent-ils enseignants ou non, là, ont rarement voix au chapitre.

Mais vous parliez de la réalité. Je vais vous parler de la vie réelle aussi. Vous parliez d'effets pervers. La vie réelle, c'est: quand on se fixe des objectifs, fussent-ils nationaux, régionaux, et qu'on est en classe, et puis que, bon, il y a des années meilleures que d'autres, il y a des groupes meilleurs que d'autres, il y a des taux de chômage plus hauts que d'autres, et là on se fait dire: Écoute, madame, là, dans ton cours de maths, là, la cible, c'est 85, puis, toi, t'es juste à 78, ça, c'est un effet pervers. Et ça peut devenir très pervers, parce que la meilleure façon de se décoincer pour un enseignant, c'est de changer les notes. Et là ce n'est plus nous qui avons le problème, ce sont les autres.

L'autre problème qu'on a... Et, oui, nous adhérons aux mêmes objectifs. Mais je reviens à ce que je disais sur les obligations de moyen et les obligations de résultat. Quand on met tout le poids de la réussite sur le réseau scolaire, je pense qu'on fait erreur. Oui, on a un rôle prépondérant à jouer, tout le monde dans le réseau scolaire, mais c'est une affaire de société aussi. C'est comme si on disait: La santé, c'est rien que dans les hôpitaux. En fait, c'est peut-être plus à l'extérieur des hôpitaux. Bon. Alors, l'école aussi, elle va jouer son rôle, bon, elle va remplir sa mission.

Mais la société, quelle est la valeur qu'on donne à l'éducation comme société? Et quelles sont les sommes que... Bon. Dans le débat public, c'est: santé, santé, santé. Malheureusement, chez nous, il n'y a personne qui meurt dans les corridors, donc on fait moins souvent la page couverture des journaux. Mais quand est-ce que, comme société, on va se donner un plan de réussite sociétal? Et les gens dans les écoles, ils adhèrent aux objectifs, mais ils se sentent coincés. Et je pourrais même aller plus loin: des fois, ils sentent que le fardeau est déchargé sur eux. Et c'est là qu'on trouve ça plus difficile.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, Mme Senneville. M. le député de Vaudreuil.

M. Marcoux: Merci, Mme la Présidente. Alors, bienvenue, M. Gauthier et Mme Senneville, et merci de votre mémoire fort intéressant. Et je veux certainement souligner également l'importance des employés de soutien. Vous mentionniez, M. Gauthier, que, parfois, vous vous sentez un peu orphelins ou oubliés. Je pense que c'est important que vous soyez partie aussi aux diverses consultations, parce que, quand on visite une école, qu'on se promène dans les corridors, on peut voir, je pense, l'importance et le rôle essentiel que jouent les employés de soutien, que ce soit dans les corridors, dans la cour d'école, les services de garde, etc. Et, pour moi, ça fait partie de la vie de l'école au même titre que les enseignantes et les enseignants ou les professionnels.

n(17 h 40)n

Vous avez soulevé, enfin, une certaine interrogation quant à la nécessité de légiférer sur les plans de réussite, les plans stratégiques. Je dois vous dire que j'ai toujours moi-même une certaine prudence à dire: On doit légiférer sur tel et tel sujet. Parce que c'est toujours facile de passer une loi, ça, ça va bien, mais ce n'est pas nécessairement une garantie que ça va faire changer les choses dans le milieu ou sur le terrain. Et, à cet égard-là, dans le cas du projet de loi n° 124, ce que j'espère, c'est que ça va faciliter les choses mais que ça n'entraînera pas un exercice qui serait plutôt bureaucratique et également qui effectuerait une sorte de centralisation vers le haut, dans le fond, de ce qu'on visait, donc changer l'équilibre de ce qu'on visait avec la Loi de l'instruction publique, en 1997, tel que le souligne d'ailleurs le Conseil supérieur de l'éducation dans son avis, qui a été rendu le 26 novembre dernier, il y a quelques jours, l'avis au ministre, où il indique, évidemment, qu'il est préoccupé par une possible centralisation vers le haut avec ce qu'il y a dans le projet de loi. Donc, ça, c'est une préoccupation.

Cependant, malgré tout, je pense qu'il est bon d'avoir la loi mais de maintenir cependant, dans l'application du processus qui est proposé, l'objectif d'être simple, et non pas trop compliqué. Parce que, autrement, il n'y a pas personne qui va s'y retrouver, et je pense que l'objectif que nous allons poursuivre ne sera pas réalisé. Puis on n'obtiendra pas des résultats qu'on juge significatifs. Si on veut que ce soit accessible aux parents, à tout le monde dans la communauté, il est essentiel que ce soit assez simple, pas simpliste mais simple. Je pense que c'est extrêmement important, et, souvent, parfois, on l'oublie.

L'autre commentaire ? et c'est relié, Mme Senneville, à ce que vous avez mentionné ? je pense que nous sommes tous d'accord, et ça a toujours été, je pense, le cas historiquement, ce n'est pas nouveau: les intervenants, les parents, les enseignantes et les enseignants, les directions de commission scolaire ont toujours visé une meilleure réussite des élèves ou des enfants, selon le cas. Et on doit viser à l'améliorer. Cependant, ce qui est essentiel ? et je partage avec vous ? c'est de maintenir les exigences et la qualité. Et, quand vous mentionniez tantôt qu'il peut y avoir des pressions à l'égard des enseignantes et des enseignants où on demanderait même de changer des notes pour atteindre des objectifs de cibles, de diplomation, je dois vous dire que ça m'étonne un peu. Et, si... Pardon?

Une voix: ...

M. Marcoux: Non, mais ça m'étonne, et j'espère que ça n'arrive pas. Parce que là disons que, dans le fond, on détruirait l'objectif qu'on recherche par tout ce processus-là. Alors, je ne sais pas...

Une voix: ...

M. Marcoux: Non, mais je ne voudrais pas vous faire... Mais ça me préoccupe quand vous me dites ça.

La Présidente (Mme Bélanger): Mme Senneville.

Mme Senneville (Caroline): Oui. Bon. Alors, Mme Senneville. Qu'est-ce qu'on fait quand on est un enseignant, puis qu'on est convoqué dans le bureau du directeur, puis on dit: Regarde, ça ne marche pas, là, tu n'atteins pas les cibles, ton taux de réussite n'est pas assez élevé. Il y a des parents qui se sont plaints. Il y a des élèves qui se sont plaints? Puis là tu défends ton plan de cours, puis là tu défends... puis là tu dis: Bien... Surtout à la fin du secondaire, tu vas dire: Bien, j'ai un examen du ministère, il faut que je prépare mes élèves à l'examen du ministère. Mais il se passe ce qui se passe, on dit: Bon, bien, le premier examen n'était pas réussi autant que j'aurais voulu, il devait compter sur 30 %, je vais donner un coup de pouce à mes élèves, je vais le mettre à 20 %. On fonctionne de compromis en compromis qui finissent, des fois, à ressembler à des compromissions. Quatre pages de dissertation, c'est trop long, bon, ils ont trop de difficultés, on va descendre ça à trois pages.

Et c'est comme ça parce que, socialement, dans des écoles, dans des commissions scolaires, la réussite devient de plus en plus chiffrée. C'est de plus en plus aussi l'approche client dans les écoles, alors l'élève ou le parent a toujours raison. Toi, comme expert, entre guillemets, pédagogique, bon, c'est toujours trop difficile.

Et, bon, je ne dis pas que c'est une pratique étendue, je ne dis pas que ça ne se passe pas... On va augmenter tout le monde de 10 %, ce n'est pas flagrant, ce n'est pas grossier comme ça. Mais d'ajustement en ajustement, bien, un moment donné, la matière se dilue. Et c'est des choses comme ça qui se passent. Je dirais, ça se passe jusqu'aux examens ministériels. Il faut étudier les formules de pondération, parce que, bon, les questions plus difficiles, moins difficiles, etc. Je me suis déjà penchée là-dessus dans une vie antérieure, et c'est ce qu'on fait parce que, socialement, il y a des taux de réussite qui sont plus acceptables que d'autres.

Alors, oui, on doit fixer des objectifs, oui, on doit tendre... mais je pense que, quand on parle de miroir aux alouettes dans notre mémoire, c'est très important, on se fixerait des... Il n'y a rien de plus facile que de se fixer des taux de réussite, de parvenir à les atteindre plus ou moins artificiellement. Je pense qu'il faut aller du côté de la reddition de comptes, voir ce qui fonctionne, ce qui ne fonctionne pas, et agir à l'intérieur et à l'extérieur de l'école, là où on voit qu'il y a des problèmes.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Vaudreuil.

M. Marcoux: Bien, merci. Mais avez-vous l'impression que la mise en place et l'accent placé sur les plans de réussite vont accroître cette possibilité-là? J'imagine que ça existait quand même avant, ce que vous décrivez là, un peu, comme phénomène. Mais est-ce que, je veux dire, c'est susceptible de prendre de l'ampleur parce qu'on va mettre davantage d'accent sur des cibles quantitatives?

Une voix: ...

M. Marcoux: Pour les palmarès également, mais, je pense, les deux. Parce que, lorsqu'on voit des documents sur des cibles de résultat de plan de réussite... Puis le ministère calcule une cible ambitieuse puis une cible non ambitieuse ? qu'est-ce que c'est, je ne le sais pas, là. Mais, si ça s'en va dans le réseau, bien, il faut être ambitieux. Autrement, si on ne rencontre pas l'addition, il n'y aura peut-être pas de sanction sur le plan financier, mais il y aura peut-être une perception moins bonne de notre efficacité et de ce qu'on fait.

La Présidente (Mme Bélanger): Mme Senneville.

Mme Senneville (Caroline): Bon, vous avez raison, c'est un danger qui existe. Oui, à notre avis, le fait de légiférer ? vous avez utilisé le mot «bureaucratiser» ? pourrait augmenter le danger. Alors, il faut faire attention au discours que l'on tient et il faut, je pense, aussi consulter, consulter, consulter les parents, les employés, et travailler ensemble, et non pas essayer de chercher des coupables. Puis, oui, effectivement, quand on parle de reddition de comptes, aussi on parle de statistiques qui peuvent être utilisées à toute sorte d'escient, là, pour toutes sortes de palmarès. Mais, encore une fois, c'est au niveau du discours, et pas seulement du ministère de l'Éducation, je dirais, de tout le gouvernement, de toute la société.

M. Marcoux: Mme la Présidente, une dernière question, sur une proposition de modification que vous faites. Et je retrouve à la page 13 de votre mémoire... Ça touche l'article 8, où vous recommandez une modification, et, dans la dernière partie de la modification proposée, vous dites: «Le projet éducatif et le plan de réussite de même que les résultats obtenus en regard des objectifs fixés et un document explicatif [...] sont distribués aux parents, aux personnels et, sur demande, aux membres de la communauté.» Bien, d'abord, je pense que, si ce n'est pas clair pour la distribution personnelle, là, ça, je pense que c'est important de le faire, et ça, je suis convaincu que le ministre est tout à fait d'accord.

Cependant, dans ce que vous proposez, dans le projet de loi n° 124, on indique qu'on peut distribuer, aux parents et aux personnels, le projet éducatif et le plan de réussite de même que les résultats ou un document explicatif. Alors là, vous autres, vous dites: On distribuerait le projet éducatif, le plan de réussite, les résultats et un document explicatif. Est-ce qu'on n'est pas en train d'augmenter, dans le fond, le fardeau un peu de documents ou de paperasse pour les parents, pour le personnel?

La Présidente (Mme Bélanger): M. Gauthier.

M. Gauthier (Ronald): Oui. On pense que les...

M. Marcoux: Excusez. Au lieu de laisser ça, dans le fond, au conseil d'établissement, on dit: On fait ça ou un document explicatif qui est peut-être plus léger, ce que dit la loi actuelle. C'est ça, le projet proposé.

M. Gauthier (Ronald): En tout cas, la compréhension et ce qu'on connaît actuellement, c'est qu'on pense que le document explicatif est plus éclairant que les autres. Pour les personnes qui ne sont pas initiées aux débats qu'il y a eus et qui voudraient suivre de près, on pense que le document explicatif est plus utile. Parce que, souvent, ce que les gens... Ceux qui ne participent pas de façon régulière au conseil d'établissement, ils vont voir des notes, ainsi de suite, alors que le document explicatif va résumer, va donner une idée plus large et plus claire, on pense. C'est pour ça qu'on pense que ce document-là doit être distribué. C'est comme ça qu'on voit ça.

n(17 h 50)n

M. Marcoux: Donc, ne pas laisser le choix au conseil d'établissement de distribuer ou les plans ou un document explicatif. Mais ce que vous proposez, c'est qu'ils distribuent les deux, toute la documentation: les plans, les résultats plus un document explicatif.

M. Gauthier (Ronald): Oui.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre. Il a une question.

M. Simard (Richelieu): ...que c'est une question importante.

M. Marcoux: Oui, oui, bien, c'est pour ça que je pense que c'est...

M. Simard (Richelieu): Ce qu'on a en tête, c'est un document simple à lire. Je dis toujours que, même si je m'oppose totalement au document de L'actualité, le palmarès, il a une qualité, c'est sa lisibilité. Ce qui en fait le succès, c'est que tout le monde peut aller trouver son école, son enfant, et comparer. Il faut arriver à une lisibilité très grande. Il ne s'agit pas de simplification, il s'agit de simplicité. Il faut que ce soit simple, lisible. Est-ce qu'on est mieux d'aller vers un document explicatif qui carrément permet de se situer par rapport aux objectifs et de comprendre le projet éducatif? Peut-être. En tout cas, je suis très ouvert au débat que nous aurons là-dessus, parce que je partage l'objectif de mon collègue: il faut que ce soit simple, sinon... J'en ai vu quelques-uns, là... Soyons honnêtes, j'en ai vu quelques-uns, je suis ministre de l'Éducation, puis je n'ai pas compris. Il y a un problème quelque part, hein? Alors, s'il vous plaît... Alors, il y a une simplification à faire et il faut trouver la bonne formule.

La Présidente (Mme Bélanger): Est-ce qu'il y a des commentaires?

Mme Senneville (Caroline): Oui, en complément.

La Présidente (Mme Bélanger): Oui, Mme Senneville.

Mme Senneville (Caroline): Nous, on a mis les deux parce que, bon, c'est peut-être ceinture et bretelles, là, mais il y a toujours des gens qui veulent en savoir plus. Ils l'auront. De toute façon, il existe déjà. Ce n'est pas... Là c'est un problème de reprographie, là. Ce n'est pas un fardeau supplémentaire à la commission scolaire ou à l'école, de reproduire ça. Donc, c'est pour ça qu'on mettait les deux. Parce que, bon, oui, certains vont préférer avoir un condensé d'informations vulgarisées, puis d'autres vont peut-être vouloir en savoir plus. Alors, par souci de transparence...

La Présidente (Mme Bélanger): Ça va?

M. Marcoux: Parfait.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, Mme Senneville, M. Gauthier, nous vous remercions de votre participation. La commission suspend ses travaux à 20 heures.

(Suspension de la séance à 17 h 52)

 

(Reprise à 20 h 1)

Le Président (M. Cousineau): Alors, nous allons reprendre nos travaux. Je rappelle le mandat de la commission: la commission de l'éducation est réunie afin de tenir des consultations particulières à l'égard du projet de loi n° 124, Loi modifiant la Loi sur le Conseil supérieur de l'éducation et la Loi sur l'instruction publique.

Alors, nous en sommes rendus aux groupes de 20 heures: l'Association des administrateurs des écoles anglaises du Québec, l'Association montréalaise des directions d'établissement scolaire, l'Association québécoise du personnel de direction des écoles et la Fédération québécoise des directeurs et directrices d'établissement d'enseignement. Je vous précise que vous avez 30 minutes d'exposé par groupe, et puis il y aura...

Une voix: Pour les trois premiers groupes.

Le Président (M. Cousineau): Pour les trois premiers groupes, oui, 30 minutes d'exposé. Il y aura 37,5 minutes à peu près d'échange avec les parlementaires. Alors, vous avez la parole. Si vous voulez présenter les gens qui sont à votre table.

Association des administrateurs
des écoles anglaises du Québec (AAEAQ),
Association montréalaise des directions
d'établissement scolaire (AMDES) et
Association québécoise du personnel
de direction des écoles (AQPDE)

M. Rodrigue (Serge): Tout d'abord, monsieur, ce serait de vous remercier de nous recevoir pour entendre nos commentaires et nos recommandations sur le projet de loi n° 124. J'aimerais d'abord vous signifier qu'une direction d'école est plus à l'aise dans une école avec des élèves, des enseignants, des personnels et des parents que dans une salle du Parlement avec des députés.

Il me fait tout de même plaisir de vous présenter les gens qui m'accompagnent et avec qui nous avons préparé ce mémoire: à ma gauche, M. Doug Stafford, qui est assistant exécutif de l'Association des administrateurs des écoles anglaises du Québec; et, à ma droite, M. Jacques Delfosse, qui est président de l'Association montréalaises des directions d'établissement scolaire; et, moi-même, Serge Rodrigue, président de l'Association québécoise du personnel de direction des écoles.

Pour bien comprendre la position que nous défendrons, à savoir conserver l'esprit de la loi n° 180, il faut d'abord regarder les événements qui précèdent le projet de loi n° 124. Vous me permettrez donc de vous dresser un bref historique, et je passerai la parole par la suite à mon collègue de l'AMDES, qui se chargera d'entrer dans le vif du sujet.

En 1992-1993, le Conseil supérieur de l'éducation publiait son rapport annuel intitulé Le défi d'une réussite de qualité, lequel est sans contredit la base de la réforme actuelle et, de ce fait, de la loi n° 180. Ce rapport faisait état d'éléments importants qu'il est bon de se rappeler: il faut changer la structure; il faut travailler sur la mobilisation et la professionnalisation des personnels enseignants et de gestion; et l'école a tout ce qu'il faut, en termes de compétences, pour s'occuper de la réussite éducative.

Vous retrouverez à la page 2 de votre mémoire des extraits du rapport du Conseil supérieur de l'éducation. Et permettez-moi de vous en lire une partie: «Le système d'action convivial doit permettre la responsabilisation institutionnelle. Il est fondé sur la reconnaissance que les établissements d'éducation disposent du potentiel requis pour prendre en main leur propre organisation éducative. Chaque établissement possède en effet sa dynamique propre, résultant de l'ensemble des compétences qui l'habitent et de la convergence des engagements de tous et de toutes, y compris des élèves, en fonction de la réussite éducative. Cette dynamique est porteuse de différenciations dans l'organisation du travail éducatif.» Fin de la citation.

Puis, en 1998, arrive la loi n° 180, qui vient modifier la Loi sur l'instruction publique. Nous en rappellerons les grandes parties, mais, avant, un bref retour sur le document que avons cru important de vous déposer en annexe à notre mémoire. Ce document, intitulé Présentation du chapitre III de la Loi sur l'instruction publique, relatif aux fonctions et pouvoirs du directeur et de la directrice d'école et ceux du conseil d'établissement, a été initié par l'AQPDE et entériné par l'ensemble des associations de directions d'établissement. Il a comme but premier de mieux faire connaître à toutes les directions d'établissement du Québec les fonctions et pouvoirs qui leur sont dévolus par la loi n° 180 et ceux qui reviennent aux conseils d'établissement.

Nous ne nous arrêterons pas aux chapitres I et II de la Loi sur l'instruction publique, lesquels sont consacrés respectivement à l'élève, premier responsable de son apprentissage, et à l'enseignant, l'agent le plus important de l'apprentissage, mais nous parlerons des chapitres III et V qui traitent de l'école et de la commission scolaire.

Dans le chapitre III, la loi délègue à ceux qui font l'école, c'est-à-dire le conseil d'établissement, direction et personnel de l'école, tous les pouvoirs reliés à l'application, l'adaptation et l'enrichissement du curriculum. Ils sont responsables de la réussite des élèves et d'en rendre compte aux élèves et à leurs parents. Le chapitre IV, qui concerne les centres de formation professionnelle et centres d'éducation des adultes, est à peu près similaire au chapitre III.

Le chapitre V, quant à lui, est consacré aux commissions scolaires. Il y est précisé que la mission de la commission scolaire est celle d'assurer aux personnes qui relèvent de sa compétence les services éducatifs auxquels elles ont droit. Pour ce faire, la loi délègue à la commission scolaire trois fonctions: organiser les services, contrôler l'application de la loi et évaluer les établissements et les enseignements.

En l'an 2000, l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires, l'ADIGECS, dans un document intitulé L'ADIGECS et l'imputabilité dans le réseau scolaire, écrivait, et je cite... Je m'excuse, c'est vrai, peut-être que je devrais dire les références immédiatement. On peut faire référence toujours avec le mémoire qu'on vous a déposé. Je fais un historique, des fois, en dehors de ça. Ça va? Alors, il disait: «Le nouveau cadre juridique des commissions scolaires consacre l'autonomie des établissements en leur attribuant des pouvoirs par l'action de la loi plutôt que par une décision d'un palier supérieur. C'est donc une forme nouvelle de décentralisation que les commissions scolaires sont invitées à concrétiser.» Fin de citation.

Dans ce même document, nous retrouvons un autre extrait, que nous n'avez pas dans le mémoire et qu'il semble important de vous faire connaître: «Le rapport du Conseil de l'éducation fait valoir une dynamique proprement éducative qui se traduit par la déconcentration de la responsabilité éducative à l'établissement, la mobilisation, la valorisation des responsabilités personnelles et l'invitation à un esprit de partenariat et d'insertion dans la communauté, le tout encadré par l'obligation d'évaluation et d'imputabilité.»

17 mars 2001, lors du colloque de la commission scolaire des Navigateurs, M. Réjean Morel, qui est le directeur général de la Fédération des commissions scolaires, disait, et je cite: «L'objectif principal de la loi n° 180 est d'assurer plus d'autonomie à l'école en renforçant son rôle comme première entité responsable de la gestion pédagogique. Les politiques de gestion en matière de ressources humaines, matérielles et financières devraient être en appui à cet objectif.»Puis, toujours dans la même présentation: «En principe, la commission scolaire n'a plus le pouvoir de prendre des décisions relativement aux fonctions éducatives et pédagogiques qui ont été transférées dans ses établissements au conseil d'établissement et à la direction d'établissement.»

En mai 2000, la Loi sur l'instruction publique, la loi n° 82, instaure un nouveau cadre de gestion pour la fonction publique. Celui-ci est axé sur l'atteinte des résultats attendus, sur le respect du principe de la transparence et sur une imputabilité accrue de l'administration devant l'Assemblée nationale, en vue d'affirmer la priorité accordée à la qualité des services aux citoyens. Cette loi a une incidence sur le réseau scolaire, comme en fait foi le document d'orientation La planification stratégique des commissions scolaires et les plans de réussite des établissements, comité directeur conjoint MEQ-commissions scolaires du 26 mars. On y précise l'obligation pour le ministère d'établir un plan stratégique qui doit orienter son action et produire un rapport annuel en conformité avec les objectifs de son plan. Ce plan doit prendre appui sur les besoins de ses clientèles.

Toujours en 2000, le ministre de l'Éducation de l'époque, M. Legault, lance le projet Plan de réussite des établissements, auquel presque toutes les écoles ont donné suite avec une mobilisation réelle de tous les intervenants. Il ne faut toutefois pas cacher les difficultés qui sont survenues et qui perdurent encore, à savoir la résistance des équipes-écoles à adhérer à la seule notion de cibles quantitatives.

n(20 h 10)n

En 2001, le ministère, la Fédération des commissions scolaires du Québec, l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires, l'Association des commissions scolaires anglophones et l'Association des directeurs généraux anglophones forment ensemble le comité directeur conjoint MEQ-commissions scolaires sur les plans de réussite. Fait à souligner, un comité est formé pour discuter des plans de réussite, et aucun directeur d'établissement n'est présent. De ce comité directeur, cinq sous-comités verront le jour, dont l'un a le mandat de traiter exclusivement des plans de réussite des établissements.

Après beaucoup de pression de la part des associations des directions d'établissement, une place est finalement accordée à ceux et celles qui sont les premiers responsables des plans de réussite dans les établissements.

Les observations et les recommandations qui feront le propos de mon collègue et qui reflètent la position de nos trois associations prennent racine dans la toile de fond que nous venons de dépeindre. Je laisse donc le soin à M. Delfosse de vous les faire connaître.

M. Delfosse (Jacques): Alors, merci, M. Rodrigue.

Le Président (M. Cousineau): M. Delfosse.

M. Delfosse (Jacques): Alors, je vous emmène à la page 5, là, je vais suivre un peu plus le texte du mémoire. Je vais sauter quelques paragraphes un peu fastidieux, là, mais je vais y aller comme ça.

Alors, d'entrée de jeu, nous établirons clairement notre position face au projet de loi n° 124. Bien que nous soyons d'accord pour que le législateur intègre à la Loi sur l'instruction publique les plans de réussite des établissements comme partie intégrante du projet éducatif de l'école et les plans stratégiques des commissions scolaires, vous aurez compris que nos trois associations estiment qu'une telle modification à la loi qui ne respecterait pas l'esprit dans lequel la loi n° 180 a été pensée et écrite par le législateur serait néfaste non seulement à la motivation et la mobilisation des personnels qui oeuvrent dans les établissements, mais également à la réussite des élèves et des adultes qui reçoivent une formation dans nos écoles et nos centres. Nous nous emploierons donc à vous démontrer l'importance d'agir dans un continuum de façon à préserver l'esprit de la loi n° 180.

Alors, le projet de loi n° 124 propose d'introduire dans la Loi de l'instruction publique trois nouveaux concepts: le plan de réussite de l'école, approuvé par le conseil d'établissement sur proposition du directeur de l'école en application avec le nouvel article 75; le plan stratégique de la commission scolaire, établi en application du nouvel article 209.1; le plan stratégique du ministère de l'Éducation, établi en application avec le même article. En outre, le projet de loi n° 124 établit une hiérarchie entre ces trois nouveaux concepts: le plan de réussite de l'école doit être conforme aux prescriptions de la loi, notamment eu égard au plan stratégique de la commission scolaire; et le plan stratégique de la commission scolaire doit tenir compte des indicateurs et des objectifs nationaux du plan stratégique du ministère de l'Éducation.

Alors, l'analyse du projet de loi n° 124. En vertu du projet de loi n° 124, l'école réalise sa mission dans le cadre d'un projet éducatif et d'un plan de réussite. Le plan de réussite de l'école doit tenir compte de l'analyse de la situation de l'école, notamment les obstacles à la réussite des élèves ainsi que les caractéristiques et les attentes de la communauté que dessert l'école, analyse que doit faire le conseil d'établissement sous la coordination du directeur d'école. Le plan de réussite doit également tenir compte du plan stratégique de la commission scolaire. Le projet éducatif de l'école ? ses orientations, donc ? est mis en oeuvre par le plan de réussite de l'école. Le plan de réussite remplace la politique d'encadrement des élèves, prévue par l'ancien article 75, et comporte les objectifs à atteindre pour améliorer la réussite des élèves au cours d'une période de plusieurs années, les moyens pour atteindre ces objectifs et les mesures d'évaluation de l'atteinte des objectifs.

Commentaires. Le texte actuel de la Loi sur l'instruction publique, donc la loi n° 180 actuellement, ne retient pas le concept de plan de réussite de l'école. Cependant, la réussite des élèves est une préoccupation constante dans la loi actuelle, et nous la retrouvons dans plusieurs articles. Et permettez-moi de vous les citer.

Alors, dans la loi n° 180 actuellement, l'école, dit-on, a pour mission, dans le respect du principe de l'égalité des chances, d'instruire, socialiser, qualifier les élèves tout en les rendant aptes à entreprendre et à réussir un parcours scolaire. Le conseil d'établissement favorise la participation des élèves, des parents, du directeur d'école, des enseignants, des autres membres du personnel de l'école et des représentants de la communauté à la réussite des élèves. L'organisme de participation des parents a notamment pour fonction de promouvoir la participation des parents à la réussite scolaire de leur enfant. Le comité des élèves a notamment pour fonction de promouvoir la participation des élèves à leur réussite scolaire. Et le directeur de l'école favorise la participation des parents, des élèves et du personnel à la réussite scolaire.

Le plan de réussite de l'école proposé par le projet de loi n° 124 comporte les objectifs à atteindre pour améliorer la réussite des élèves sur une période de plusieurs années, les moyens pour atteindre ces objectifs et les mesures d'évaluation de l'atteinte de ces objectifs ? on l'a dit tantôt. Les moyens qui doivent être mis en place sont déjà prévus par les articles 75, 76, 84 et 88 et 96.15 de la loi n° 180, lesquels couvrent déjà toutes les situations que peuvent vivre les élèves tout le temps de leur présence à l'école, à l'intérieur et à l'extérieur de l'horaire des classes.

Je ne vous énumère pas tous les articles, dans le fond, qui touchent à toute la vie pédagogique de l'école, mais je vous invite quand même à jeter un coup d'oeil sur l'ensemble des articles qui suivent et qui en fait viennent démontrer jusqu'à quel point, déjà, les préoccupations au plan pédagogique sont déjà présentes dans la loi n° 180.

Le plan stratégique de la commission scolaire. Analyse du projet de loi n° 124. Donc, le projet de loi n° 124 propose un nouvel article 209.1 qui ferait obligation à chaque commission scolaire d'établir un plan stratégique couvrant une période de plusieurs années. Ce plan devrait comporter, entre autres: les principaux enjeux auxquels la commission scolaire fait face, entre autres en matière de réussite, qui tiennent compte des indicateurs nationaux prévus par le plan stratégique du ministère de l'Éducation; les orientations stratégiques et les objectifs de la commission scolaire qui tiennent compte des objectifs nationaux du plan stratégique du ministère; et les axes d'intervention retenus pour parvenir à l'atteinte des objectifs; les résultats visés aux termes de la période couverte par le plan. Donc, le projet de loi propose en outre un nouvel article 221.1 pour faire l'obligation à la commission scolaire de s'assurer que chaque école s'est dotée d'un plan de réussite qui est conforme au plan stratégique de la commission scolaire.

L'essentiel de la loi n° 180 a consisté à déléguer à ceux qui font l'école toutes les fonctions et tous les pouvoirs de la commission scolaire reliés à l'application, l'adaptation et l'enrichissement du curriculum national. Ce choix législatif découle d'une conviction que le moyen le plus déterminant pour améliorer la réussite des élèves consiste à responsabiliser ceux qui font l'école, suivant en cela les recommandations faites par le Conseil supérieur de l'éducation dans son rapport annuel 1992-1993 portant sur la réussite éducative, tel qu'on vous l'a cité tout à l'heure.

Les nouveaux articles 209.1 et 221.1 permettent à la commission scolaire d'intervenir directement dans les champs de compétence que la loi délègue à ceux qui font l'école. Ainsi, le projet de loi n° 124 permet d'inverser totalement le mouvement de déconcentration introduit par la loi n° 180.

Il faut en effet rappeler que l'article 209.1 habilite la commission scolaire à déterminer non seulement des orientations et des objectifs à atteindre pour améliorer la réussite des élèves, mais également les axes d'intervention pour parvenir à l'atteinte de ces objectifs et les résultats visés. En outre, la commission scolaire doit s'assurer que le plan réussite de l'école est conforme au plan stratégique de la commission scolaire. Puisque le plan de réussite de l'école assure déjà la mise en oeuvre des orientations propres à l'école et comporte les objectifs à atteindre pour améliorer la réussite des élèves ainsi que les moyens pour réaliser ces objectifs, pourquoi permettre aux commissions scolaires de venir imposer au milieu des orientations, des objectifs, des moyens, alors que la loi confie déjà cette responsabilité aux établissements?

n(20 h 20)n

Alors recommandations. De même que l'école réalise sa mission dans le cadre d'un plan de réussite, il nous apparaît tout à fait approprié que la commission scolaire réalise sa propre mission dans le cadre d'un plan stratégique. Mais la mission de la commission scolaire est de s'assurer que les personnes qui relèvent de sa compétence reçoivent les services éducatifs auxquels elles ont droit ? c'est l'article 208 ? et non pas d'intervenir dans les champs de compétence dévolus par la loi à ceux qui font l'école.

En conclusion, les propos que nous venons de tenir reflètent, selon nous, la rigueur avec laquelle nous avons analysé le projet de loi n° 124. Le gouvernement pourra compter sur l'entière collaboration des trois associations pour intégrer les plans de réussite à notre démarche d'éducation et de formation. Nous espérons que notre exposé aura su convaincre les membres de la commission parlementaire de l'éducation qu'il serait préjudiciable à la clientèle scolaire québécoise de dévier de l'axe de développement fixé dans la loi n° 180. Merci.

Le Président (M. Cousineau): Alors, merci. Nous allons passer à une période d'échange entre les parlementaires et votre groupe. Je rappelle que les parlementaires de chaque côté de la table auront autour de 18 minutes chacun. M. le ministre.

M. Simard (Richelieu): J'essaierai de ne pas en abuser, M. le Président. Je veux d'abord remercier les directeurs d'école de l'Association québécoise du personnel de direction des écoles, l'AMDES et les directeurs anglophones d'être ici, ce soir. Nous aurons d'ailleurs une autre présentation, tout à l'heure. Vous savez, avec les directeurs d'école, on est à la fois en terrain très agréable, parce que ce sont eux qui font l'école tous les jours, en bonne partie, enfin qui sont les leaders dans ce monde éducatif, mais, quand on en voit un, on a le plaisir d'en voir plusieurs, ce qui est à la fois désagréable et parfois un peu complexe.

Vous avez présenté un mémoire qui est d'une clarté, je dirais, resplendissante. Vous faites l'historique de la loi n° 180, vous faites l'historique de la loi n° 180, vous adhérez totalement à la loi n° 180 et vous nous demandez de ne pas nous éloigner de la loi n° 180, c'est-à-dire de nous assurer que la loi n° 124 ne vienne pas aller à l'encontre des principes d'autonomie des écoles qui étaient contenus dans 180. D'emblée, là, je ne peux que trouver cette idée juste et y adhérer. C'est pourquoi je vais vous demander, dans la discussion que nous aurons, de préciser davantage en quoi 124 s'éloigne autant que vous le dites de 180.

Qu'il y ait un plan stratégique du ministère, vous ne le contestez pas, à ce que je sache; que les commissions scolaires soient obligées aussi de se doter d'un plan stratégique, vous ne le contestez pas non plus. Là où vous semblez tiquer, c'est lorsque la commission scolaire doive s'assurer par la loi que les plans de réussite sont conformes à la loi, qu'ils existent et qu'ils sont conformes à la loi.

M. Rodrigue (Serge): Non. Ce n'est pas ça du tout, là. Excusez.

M. Simard (Richelieu): On va peut-être... Je vais terminer, M. Rodrigue, puis vous me répondrez. Je ne demande pas mieux que de me tromper, d'ailleurs. Et que ces plans de réussite des écoles doivent tenir compte... Je pense que c'est l'expression d'ailleurs que reprenait le Conseil supérieur de l'éducation en contestant ou, en tout cas, en remettant en question le sens de «tenir compte»: en tenant compte des plans stratégiques des commissions scolaires.

Évidemment, il y a deux interprétations ? le Petit Robert, il y a d'autres dictionnaires. «Tenir compte», c'est... Il y a une ambiguïté qu'il va nous falloir sans doute préciser. Pour nous, ça nous semblait clair que «tenir compte», ça ne voulait pas dire de s'aligner, d'être dépendant, de devoir être subordonné. Mais, si certains considèrent que c'est comme ça, que ça doit être lu, il y a un problème d'ambiguïté qu'il va nous falloir corriger. Je pense que c'est là-dessus que vous avez un problème, que vous vous sentez mal à l'aise. Quelle proposition nous faites-vous pour clarifier cet élément?

Le Président (M. Cousineau): M. Rodrigue.

M. Rodrigue (Serge): Ce que je voulais dire tout à l'heure simplement pour répondre: on ne conteste pas le fait que les commissions scolaires vont venir contrôler à l'effet si on respecte les objectifs du ministère, absolument pas, et ça, c'est correct. Nous, effectivement, vous avez trouvé exactement le point qui fait défaut ou qui nous porte problématique, c'est: Que veut dire véritablement «tenir compte»? Nous, on l'a appliqué comme si c'était «devenait obligatoire». Et à ce moment-là on dit: On ne veut pas parce qu'on considère que les écoles ont tout ce qu'il faut pour tenir compte des objectifs du ministère, sans aucun problème, tandis que, avec la mission de la commission scolaire, on pense que nous... Ils auraient avantage, si vous voulez mon... Si je veux le dire directement, c'est de venir nous aider davantage à réaliser notre plan stratégique, nous autres, notre plan de réussite école, et ça, c'est de nous soutenir, de nous aider, de nous superviser. C'est ce qu'on souhaite le plus. Et je pense que c'est dans leur rôle de toute façon.

Et je me suis toujours interrogé, et je le dis, je n'avais pas envie de dire ça aujourd'hui ici, mais je vais oser le faire. On se dit, nous: Qui, à la commission scolaire, va intervenir? Si on regarde ça de très près: Est-ce que c'est les gens des ressources matérielles? des ressources financières? des ressources humaines? C'est les services éducatifs. Moi, je pense que les services éducatifs existent déjà; ils sont capables de venir nous rendre service dans les écoles directement. Et, de fait, le terme le dit «services éducatifs». Et c'est dans ce sens-là que je dis: Les commissions scolaires, par leur structure actuelle, sont capables de venir nous rendre service, de travailler à ce qu'on réalise véritablement nos plans de réussite école.

Le Président (M. Cousineau): M. le ministre.

M. Delfosse (Jacques): Je pourrais peut-être compléter en disant aussi que vous savez que, une des craintes qu'on a, c'est qu'on revienne à une espèce de structure où on en viendrait à ce que les commissions scolaires puissent avoir la solution, pour les écoles de sa commission, pour la réussite des élèves. Et, le danger, c'est de se retrouver dans des écoles avec des projets éducatifs qui deviennent quasiment caducs parce que la commission scolaire a décidé, à un moment donné, que: Vous savez, si on avait de l'éducation physique à toutes nos écoles primaires, trois heures de plus, ou bien de l'anglais intensif dans nos écoles, il me semble qu'on réussirait mieux. On veut éviter ça.

On veut que ce soit suffisamment clair pour que, quelque part, le projet éducatif de l'école... que l'école, avec ses forces vives, avec ses personnels, avec ses parents, établisse un projet éducatif, se donne des moyens, hein? On dit: Le plan de réussite, là, on est d'accord pour qu'il continue à exister, absolument. Mais on pense que l'école, et la loi, et tous les moyens qu'on a actuellement sont suffisants pour atteindre ces objectifs-là. Et les indicateurs ou objectifs nationaux, quant à nous, ils sont là et ils doivent être pris en compte et par la commission scolaire et par l'école. Et il est clair qu'on ne nie pas, hein? Et je pense qu'on ne dit pas, là, que l'école doit être toute seule dans son coin, sans tenir compte des objectifs nationaux. On ne dits pas ça; que du contraire.

Et on dit aussi... Je veux juste terminer en disant ceci. On a un mécanisme qui, au niveau de la commission scolaire, existe, qui s'appelle le CCG, le comité consultatif de gestion, qui permet... Les directeurs d'écoles avec la direction générale peuvent, à un moment donné, déterminer des objectifs communs compte tenu de la situation des écoles de cette commission scolaire là. Donc, on a tout ce qu'il faut, actuellement; toutes les poignées, là, on les a. Dans le fond, tout ce qui nous manquait, c'était de dire, bien: Dans la loi, dorénavant, il y aura les plans de réussite et la planification stratégique.

Le Président (M. Cousineau): M. le ministre.

M. Simard (Richelieu): Oui, je vous suis. Sauf que ça ne répond pas à toute ma question. Vous ne contestez pas la nécessité, enfin, pour les commissions scolaires, de se doter d'un plan stratégique. Et un plan stratégique d'une commission scolaire qui serait complètement déconnecté, qui n'aurait pas de rapport avec l'ensemble des plans de réussite des écoles de la commission scolaire, vous admettrez avec moi que ce serait un petit peu déconnecté, aussi.

M. Rodrigue (Serge): Ah, tout à fait.

M. Simard (Richelieu): Donc, notre problème, là, c'est: Comment s'articulent les deux, hein? Comment le plan de réussite, qui est issu de la communauté éducative de l'école, se réalise avec la commission scolaire en appui? La loi dit «favorise». Vous êtes d'accord avec ça, monsieur?

M. Rodrigue (Serge): Exact. Oui, oui.

n(20 h 30)n

M. Simard (Richelieu): Bon. Alors, comment nous assurer que cela se fasse sans intrusion inopportune, hein? C'est un peu votre crainte, hein, qu'il y ait une intervention qui viserait à faire la même chose d'une école à l'autre dans un ensemble de commissions scolaires. Comment vous prémunir contre cette intervention? Tout est dans la définition évidemment de...

Une voix: ...«tenir compte».

M. Simard (Richelieu): ...de «tenir compte». Bon. Qu'est-ce que vous proposez à la place? Parce que, dans le fond, on en est là, on est dans le... C'est un peu bizarre, mais on le savait, que ce débat sur ce projet de loi se jouerait à quelques mots près. «Approuver» et «adopter», «tenir compte», il y a quatre ou cinq mots, là, qui sont clés et qui sont lus différemment par les parties. Les commissions scolaires, vos patrons de l'ADIGECS n'ont pas la même lecture que vous là-dessus. Pour eux, ils sont à l'aise avec cette terminologie. Vous, vous vous en inquiétez. Quelle serait la formulation ? puisque cela vous inquiète, vous avez dû vous y pencher ? quelle serait la formulation qui vous assurerait qu'il n'y ait pas cette intervention qui viendrait limiter l'autonomie des écoles?

M. Rodrigue (Serge): Nous n'avons pas trouvé de terme pour remplacer «tenir compte». J'aurais bien aimé ça...

M. Simard (Richelieu): Vous n'êtes pas bien, bien aidants. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Rodrigue (Serge): J'aurais bien aimé vous... Mais, nous, ce qu'on veut s'assurer, c'est que ça parte des écoles. C'est vraiment ça, et c'est de ça qu'on n'est pas sûrs, à ce moment-là, quand on lit le texte, si vous voulez, de la loi n° 124. S'assurer que les besoins, c'est les écoles. Comme vous avez pour le plan de stratégie de la commission scolaire, ils vous demandent de les consulter, et vous allez tenir compte de ce qu'ils vont dire avant de faire votre plan stratégique du ministre. Et, nous, il faut s'assurer que ça va se faire de cette façon. Non pas dire: On va consulter, s'assurer que ça part des écoles. C'est dans ce sens-là qu'on veut le faire. Peut-être que je... Parce que «tenir compte», on n'en a pas trouvé, de terme, nous aussi. Mais, la problématique, on vient de vous la donner.

Le Président (M. Cousineau): M. le ministre.

M. Simard (Richelieu): J'essaie, hein, j'essaie quelque chose. Si, dans la formulation, au lieu de dire simplement «tenir compte», on précisait qu'on doive tenir compte des besoins des élèves, des attentes du milieu, du plan stratégique, est-ce qu'à ce moment-là ça ne vous donnerait pas beaucoup plus de garanties sur la prééminence du plan de réussite de l'école sur le plan stratégique de la commission scolaire?

M. Delfosse (Jacques): Moi, je pense que ça pourrait être une réponse. Mais vous savez que le plan stratégique de la commission scolaire ne peut pas se faire de façon isolée, hein? Le plan stratégique de la commission scolaire, je le disais tout à l'heure, doit se faire à partir d'une concertation du milieu. Je donnais l'exemple du CCG tantôt, mais je dis: Quand la planification stratégique de la commission scolaire s'établit, les directions, les écoles, le milieu est mis à contribution. Donc, moi, je pense que le «eu égard» qui est dans le texte, actuellement, ou «tenir compte», quant à moi, a besoin tout simplement d'être... Oui, bien sûr, vous me dites: Ce serait quoi, exactement? Je n'ai pas le...

Parce que vous savez qu'on a aussi eu à réfléchir sur la possibilité aussi qu'à un moment donné, dans les commissions scolaires, la commission scolaire, une fois qu'elle a adopté, bon, qu'elle a reçu les objectifs nationaux, pourrait très bien se doter d'objectifs dits, entre parenthèses, régionaux et pourrait, pour établir ces principes-là ou ces objectifs-là, le faire en collaboration avec le milieu, dire: Bon, à Montréal, milieu défavorisé, etc., nous, il y a certains objectifs nationaux qui nous ressemblent plus, à nous, puis qui ressemblent... tu sais, qu'ailleurs, ils n'ont pas nécessairement besoin de l'appliquer de la même façon qu'ailleurs, en tout cas, selon les disparités régionales. Donc, quelque part, la commission scolaire pourrait à un moment donné, en collaboration avec son milieu, se doter d'objectifs qui lui ressemblent et qui sont en lien direct avec le...

Donc, cette articulation-là, dans le fond, on pourrait le mettre dans la loi en disant quelque part que, quand on a, je ne sais pas, moi, un article où on dit «eu égard à», on dit: Oui, mais on dit surtout aussi «en collaboration avec le milieu». Donc...

Une voix: En concertation.

M. Delfosse (Jacques): En concertation avec le milieu. Comprenez-vous? Vous savez qu'actuellement il y a déjà des commissions scolaires qui s'avancent, là, sur les plans stratégiques puis qui ont des, tu sais... On connaît des gens qui travaillent là-dessus, là, puis qui sont déjà en train de dire: Bon, on l'a l'affaire, on s'en vient avec, hein, on s'en vient avec les bonnes solutions, là, tu sais. C'est ça, le danger. On ne voudrait pas quelque part que l'école soit menottée par les bonnes idées. Puis sûrement qu'il y en a d'excellentes, puis probablement que la plupart des idées vont être partagées. Mais elles ne le seront peut-être pas toutes et, un moment donné, il faut laisser à l'école... Et je pense que c'était ça, au début, là, de notre intervention, c'était de dire: La loi n° 180 a dit et le Conseil supérieur de l'éducation a dit: On va remettre à l'école ? et je citais d'ailleurs un certain nombre... Bon, vous voyez? Je ne veux pas reprendre tout.

M. Simard (Richelieu): Oui. Bon, je vois très bien. Écoutez, on va essayer de trouver une formulation, là, qui là-dessus nous permette d'assurer ce qui est l'esprit, selon nous, de la loi, le respect absolu de l'autonomie de cette opération qui doit être à l'école, par l'école. On s'entend bien là-dessus.

Cependant, puisque vous êtes là et que vous êtes les premiers concernés, j'aimerais bien avoir votre point de vue sur un débat qui a été lancé et qui a été sous-jacent toute la journée entre «adopte» et «approuve». Alors, est-ce que vous êtes à l'aise avec la formulation qui est ici? Bon, vous savez que les comités de parents ont été plutôt mal à l'aise, le Conseil supérieur de l'éducation semble indiquer qu'il y a un malaise là, qu'il y a une ambiguïté. Comment, vous, vous... Est-ce que vous êtes à l'aise avec les termes tels qu'ils sont là? On se le rappelle, pour ce qui est du projet éducatif, il est adopté par le conseil d'établissement; pour ce qui est du plan de réussite, il est approuvé, donc l'action initiale est prise par la direction de l'école qui constitue le dossier et le fait approuver.

M. Rodrigue (Serge): Cette question-là, on l'a apprise en arrivant tout à l'heure. On nous a dit: Ça a été l'objet de débats, ça, aujourd'hui. Alors, j'aurais bien aimé l'avoir une semaine avant, j'aurais peut-être consulté beaucoup plus de monde que ça. Mais, moi, je regarde un petit peu ce qui s'est fait jusqu'à maintenant avec la loi n° 180. On parlait de projet éducatif et d'adoption à ce moment-là. Aujourd'hui, on arrive avec le concept nouveau de plan de réussite et, tant qu'à moi, étant donné qu'on travaille avec ces gens-là, on veut véritablement que sa forme, que... pas le pouvoir mais, je dirais, que la version pédagogique se passe à l'école. Dans ce contexte-là, moi, je ne vois pas réticence à ce que ce soit l'adoption.

Je vous répète, je n'ai pas consulté personne, mais j'ai examiné ça tout à l'heure, peut-être à votre grande surprise que vous allez avoir, mais, nous, on fonctionnerait avec ça.

M. Delfosse (Jacques): C'est ça, c'est que tout à l'heure on s'en est parlé et puis c'est sûr que, moi non plus, je n'ai pas été consulter mon monde, là. Puis je pense que, quand on a examiné, au départ, l'idée d'adopter et d'approuver... Vous savez, dans le projet de loi, on parle quelque part de rendre public, hein, le... et on se dit, bien: C'est qui, qui est responsable de ce projet-là, puis c'est qui, qui... Dans le fond, c'est tout le milieu. Que tu l'aies approuvé, adopté, c'est sûr que, quand on fait le projet éducatif, dans le fond, on dit: C'est tout le milieu qui se mobilise puis qui s'en va vers... Le plan de réussite, dans le fond, là, il n'est ? et on n'arrête pas de le dire depuis tantôt ? que le prolongement naturel, hein? Et on dit même: C'était déjà prévu dans la loi, là.

Ça fait que, là, là, qu'est-ce qu'on vient d'inventer de si extraordinaire sinon que de dire ce qu'on fait déjà, hein? C'est: On a un projet éducatif, puis voici comment on va, hein, on va aboutir, quels sont les moyens qu'on va se donner puis les cibles qu'on va se donner. Et on sait bien que, quand tous les indicateurs vont arriver puis etc., bon, ça va être précis. Mais simplement comme ça, là, nous, on dit: Oui.

Le Président (M. Cousineau): Il reste une minute, M. le ministre.

M. Delfosse (Jacques): On ne serait pas en contradiction...

Le Président (M. Cousineau): Une minute, M. le ministre.

M. Simard (Richelieu): Bien, écoutez, moi, je suis très heureux d'entendre ce point de vue parce qu'il est très important.

M. Delfosse (Jacques): On va peut-être se faire crucifier pour ça, là.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Simard (Richelieu): Vous serez plusieurs à être crucifiés, ça va être facile. Vous ne serez pas le premier.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Cousineau): Très bien.

M. Simard (Richelieu): Écoutez, c'est un élément important, là, c'est dans l'équilibre. Vous êtes des acteurs majeurs et, pour vous, c'est tout à fait naturel que, puisque le projet est l'émanation de tout le milieu, sa traduction dans un plan de réussite soit aussi l'objet du travail conjoint de tout le milieu. Dans notre esprit, il n'y a jamais eu prééminence de l'un sur l'autre, là, il s'agissait simplement d'être opérationnel. Mais, pour vous, ça ne changerait rien. Bien, écoutez, je suis très heureux de l'apprendre dans ce sens-là, et je vais laisser maintenant la parole à mon collègue.

Le Président (M. Cousineau): M. le député de Vaudreuil.

n(20 h 40)n

M. Marcoux: Alors, merci, M. le Président. Alors, M. Rodrigue, M. Delfosse et M. Stafford, bienvenue. Et votre mémoire est remarquablement bien fait, précis, avec des commentaires tout à fait pertinents, et je vous en félicite, et je vous en remercie également.

Vous avez touché, dans votre mémoire, et vous en avez discuté précédemment avec le ministre beaucoup, vous avez insisté sur l'esprit de la loi n° 180 et l'importance de maintenir cet esprit-là dans le cadre des modifications du projet de loi n° 124. Vous dites même, à la page 9, que le projet de loi n° 124 permet d'inverser totalement le mouvement de déconcentration introduit par la loi n° 180. Ce que je constate, c'est que vous rejoignez là une opinion qui est émise par le Conseil supérieur de l'éducation dans un avis que ce dernier a transmis au ministre en date du 26 novembre, donc il y a deux jours à peu près, dont j'ai pris connaissance ce matin...

Une voix: ...

M. Marcoux: ... ? bon, bien, voyez-vous, moi, je l'ai trouvé sur Internet ? et où le Conseil supérieur indique que le projet de loi n° 124 réintroduit dans le système scolaire une logique de centralisation évidente. Il parle du jeu d'emboîtement où, bon, les établissements doivent, dans leur plan de réussite, tenir compte du plan stratégique de la commission scolaire et cette dernière doit tenir compte du plan stratégique du ministère, sans discuter du sens nécessairement de «tenir compte», qui porte à ambiguïté ? puis ça, je pense qu'il y a différents groupes qui l'ont soulevé, et donc ce sera à corriger; je pense, en tout cas, que le ministre est très ouvert.

Mais le Conseil supérieur poursuit en disant, par exemple: À propos des indicateurs nationaux, le projet de loi précise que le ministre les établit après consultation des commissions scolaires. En vertu du vieil adage romain qui dit sagement que ce qui concerne tout le monde doit être débattu par tout le monde, il y aurait lieu d'inventer un mécanisme par lequel les conseils d'établissement et les directions pourraient être des acteurs plus directs dans l'instauration des indicateurs nationaux. Après tout, c'est à eux que l'on demande au premier chef d'élaborer, de mettre en oeuvre et de rendre compte des plans de réussite. Est-ce que vous avez des commentaires à cet égard-là? Est-ce que c'est possible, ça, de permettre aux directions d'établissement de jouer un rôle plus actif dans l'instauration des indicateurs nationaux, ou si c'est déjà le cas?

M. Delfosse (Jacques): Moi, je pense que c'est un peu dans le sens de... Tout à l'heure, en tout cas, j'ai cité un certain nombre d'éléments qui permettaient justement, déjà, dans la structure actuelle, d'être partie prenante. Tout à l'heure, je parlais des plans de réussite des écoles, du plan stratégique. M. le ministre précisait tout à l'heure que les plans stratégiques des commissions scolaires, là, ils ne peuvent pas partir ailleurs que des plans de réussite des écoles, hein? On ne l'inventera pas, la planification stratégique, là, hein? Maintenant, que les commissions scolaires soient, évidemment, à la suite en tout cas des éléments qu'ils auront identifiés comme faisant partie des objectifs provenant du milieu, je pense qu'on ne l'a pas vu comme ça encore, mais là, je découvre ça avec votre question, M. Marcoux. Peut-être que les objectifs nationaux aussi pourraient être issus...

Mais là, en tout cas, je pense que, quelque part, dans l'idée d'une planification stratégique ministérielle et d'une planification stratégique des commissions scolaires, en tout cas, me semble-t-il que l'esprit qu'il y a derrière ça, c'est aussi un État, hein, un pays qui dit, bien: Nous autres, là, pour mieux réussir, pour réussir dans nos écoles, voici un certain nombre d'éléments qu'il faudrait qu'on mette en place. Bien sûr que les écoles, les milieux pourront, à la lumière de ce qu'ils sont, identifier ceux qui font plus leur affaire, si on veut, et finir par avoir, d'abord, chaque milieu son projet éducatif, puis, à un moment donné, qu'on ait une adhésion, si on veut, nationale autour de certains indicateurs puis certains objectifs communs.

M. Marcoux: M. le Président. Quand on lit ? et c'est toujours relié un peu à ce que vous avez présenté ? l'article 209.1, où on détermine, là, l'établissement du plan stratégique de la commission scolaire, on évoque que, bon, ça doit comporter le contexte dans lequel elle évolue, les enjeux auxquels elle fait face en tenant compte des indicateurs nationaux, les orientations stratégiques et les objectifs qui tiennent compte des objectifs nationaux du plan stratégique, les axes d'intervention retenus ? et, si je comprends, nationalement ? les résultats visés au terme de la période couverte par le plan et les mesures d'évaluation. Je pense que ce seraient plutôt des modes d'évaluation que des mesures d'évaluation, mais peu importe.

Mais, quand je regarde ce que vous avez mentionné tantôt, en disant: La commission scolaire, évidemment, va tenir compte des plans de réussite ou des projets éducatifs des écoles, ce n'est pas clair une miette dans l'article 209.1, et ce qui fait dire au Conseil supérieur de l'éducation... Puis peut-être que c'est inutile, là, mais, à la page 24 de son avis, lorsqu'il dit: Il y a un esprit centralisateur et il faudrait revenir davantage à l'esprit qui présidait la loi n° 180, il dit: Le Conseil recommande de modifier le projet de loi n° 124 de façon à ne pas faire obstacle au mouvement de décentralisation. Ça, ça correspond. Et il va plus loin en disant également: ...recommande de faire en sorte que le plan stratégique des commissions scolaires soit défini, en outre, en prenant en compte les projets éducatifs et les plans de réussite, donc de le dire, soit défini dans le respect de l'autonomie des établissements à l'égard des fonctions et pouvoirs qui leur sont dévolus, parce qu'on ne trouve pas ça dans le 209.1, en fonction du soutien apporté aux établissements, ce que vous avez mentionné tout à l'heure, et au regard du devoir des commissions scolaires de favoriser la mise en oeuvre des projets éducatifs et des plans de réussite de leurs établissements.

Donc, est-ce qu'il y aurait lieu, pour vous, qu'on précise, dans le fond, si on veut vraiment maintenir l'esprit de la loi n° 180, davantage dans l'article 209.1 où on parle de la confection des plans stratégiques par les commissions scolaires, de ces éléments que mentionne le Conseil supérieur de l'éducation?

M. Rodrigue (Serge): Nos interventions étaient justement dans ce sens-là, parce que le 209.1 nous cause problème. Alors, je pense que, quand vous me parlez du Conseil supérieur de l'éducation dont vous citez des exemples, on est entièrement d'accord avec ça.

M. Marcoux: Et pour vous est-ce que vous jugez qu'il serait important que ce soit modifié pour prendre en compte, là...

M. Rodrigue (Serge): Je vous répète ce qu'on disait depuis le départ puis qu'on a toujours dit, ce que notre texte dit, que l'école est en mesure de travailler véritablement par ses propres moyens, si vous voulez. Ils ont toutes les compétences voulues pour le faire. Et, dans ce contexte-là, si les objectifs du ministre sont là, on est capables de s'en occuper, et on demande à la commission scolaire aussi de venir nous aider à le faire et non pas intervenir et nous dire exactement quoi faire.

M. Marcoux: M. le Président.

Le Président (M. Cousineau): M. le député.

M. Marcoux: En ce qui a trait aux plans de réussite eux-mêmes, il y a eu des discussions aujourd'hui au sujet des objectifs quantitatifs qui sont inclus dans les plans de réussite, objectifs quantitatifs qui, selon des documents du ministère, sont jugés ambitieux ou non ambitieux, là ? ...une série de documents. Mais il y avait deux préoccupations, je pense, des groupes qui ont évoqué ça. D'une part, on mentionnait: Ces objectifs quantitatifs sont-ils des obligations de résultat ou de moyen? Et ils disent: Ce n'est pas clair. Peut-être que c'est clair, mais ils disent: Ce n'est pas clair. Et, deuxièmement, ils disent: La fixation d'objectifs quantitatifs, si on met trop d'emphase justement sur l'atteinte de ces objectifs quantitatifs, ça peut avoir des effets pervers au niveau des écoles. On nous dit, par exemple: Des directions d'écoles ? des directions d'écoles ? peuvent faire des pressions sur les enseignantes ou les enseignants en disant: Écoutez, là, voyez-vous, on n'atteint pas nos objectifs, on serait mieux de les atteindre ou d'être plus près de nos objectifs. Je pense que je suis assez fidèle, là...

M. Delfosse (Jacques): ...

M. Marcoux: Pardon?

M. Delfosse (Jacques): On met des cibles, là, bien précises.

M. Marcoux: Bien oui, parce que, écoutez, on n'arrive pas dans les objectifs, là, puis il faudrait arriver. Donc, est-ce qu'il est possible que ça ait, peut-être que je caricature un peu, là, mais des effets pervers si on veut trop strictement se rattacher à des objectifs quantitatifs?

n(20 h 50)n

M. Delfosse (Jacques): Écoutez, hier soir, j'avais la chance d'être au Hilton, où M. Perrenoud, M. Janosz ? et j'oublie le nom du troisième intervenant, là ? parlaient justement des plans de réussite, hein, réussir, puis c'était précédé par un très joli vidéo, si on veut, là, un petit film qui avait été fait avec les enfants, où on leur posait la question c'était quoi, réussir, tu sais, puis c'était vraiment touchant de voir tous ces enfants-là, ces jeunes du primaire qui répondaient c'était quoi, pour eux autres, la réussite, là. Bon.

C'est quoi, la réussite, tu sais? L'école, on lui donne trois objectifs principaux: instruire, socialiser, qualifier. Le danger du plan de réussite, c'est de venir, juste venir chercher des résultats et aller sur l'aspect qualifier sans se préoccuper des deux autres, socialiser et instruire. Alors, il va falloir qu'on fasse attention, pas juste avoir, comme vous dites, des résultats, mais qu'on soit capable quelque part d'aller chercher du qualitatif, hein? Socialiser là, ça se mesure comment? Puis comment est-ce que, dans nos plans de réussite, on est capable de mettre des éléments qui nous permettent d'aller voir ça? Si tout ce qu'on a c'est de mesurer du français puis des mathématiques puis dire: Toi, tu es une bonne école, t'es la 25e, puis toi, t'es... on n'a pas fait un grand bout de chemin, quand on a fait ça, là, hein?

Donc, moi, je dis: Il faut que le plan de réussite, qu'on ait une vision suffisamment large pour permettre à l'école d'aller mesurer, de donner des éléments sur les trois missions qu'elle a, hein, d'instruire, de qualifier... puis de qualifier. Donc, attention à ça, tu sais? Juste des cibles quantitatives, quant à moi, ça ne nous mènera pas loin, et on va créer un autre palmarès, tu sais? Alors, attention, là, tu sais? Je pense que c'est le danger, c'est vrai, mais je sais qu'on est plus innovateur que ça, que, dans les indicateurs, dans les termes qu'on va soumettre aux écoles, quelque part, il va y avoir, hein, des éléments qui vont aller toucher le qualitatif, bien sûr. On ne s'en tiendra pas, j'espère bien, qu'au quantitatif. En tout cas, c'est ce que j'avais le goût de vous dire par rapport à ça.

Le Président (M. Cousineau): M. le député.

M. Marcoux: Oui. Parce que, entre nous, je pense qu'il est important de se fixer des objectifs pour essayer de les atteindre et d'améliorer la situation. Et, ça, c'est un processus toujours perfectible. Mais en ce qui a trait à la socialisation, par exemple, ou aux autres missions que celle d'instruire, qualification, est-ce qu'il est possible de fixer des objectifs et d'avoir des modes d'évaluation de ces deux aspects de la triple mission de l'école?

M. Rodrigue (Serge): Je pense que, votre question, je n'y répondrai pas. Mais je vais y répondre, c'est-à-dire...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Rodrigue (Serge): Excusez-moi. Je vais vous donner un petit peu... Je pense que le ministère actuellement travaille sur des indicateurs de qualité. Alors, je pense qu'on va en trouver toute une série qui vont être proposés aux écoles. Je dis bien qu'il faut qu'ils soient proposés et non pas imposés. Alors, c'est dans ce sens-là que c'est important. Alors, je pense que ça vous répond à votre question, je n'ai pas besoin de vous le dire.

M. Marcoux: Bien. Poursuivant dans ce sens-là, donc, puis je suis entièrement d'accord sur cette orientation, mais est-ce qu'on devrait davantage préciser, dans le projet de loi n° 124, que le mot «réussite» s'applique à la triple mission de l'école?

M. Rodrigue (Serge): Oui, tout à fait.

M. Marcoux: Ce qui apparaît plutôt ambigu présentement et ce que note également le Conseil supérieur de l'éducation dans l'analyse qu'il en a faite.

M. Rodrigue (Serge): C'est parce que dans le projet de loi, si vous remarquez, la mission de l'école n'a pas changé, c'est toujours dans ce sens-là. Alors, il faudrait peut-être y attacher de l'importance. Mais elle est dans la loi, dans la mission de l'école en tant que telle. Alors, c'est pour ça, il n'y a pas de modification dans la loi, quant à ça.

M. Marcoux: Parfait. Alors, merci. Moi, je n'ai pas d'autres questions. Merci.

Le Président (M. Cousineau): Alors, merci. J'inviterais donc le quatrième groupe de votre délégation à s'avancer, puis... Alors, je vais suspendre pendant une minute.

(Suspension de la séance à 20 h 54)

 

(Reprise à 20 h 56)

Le Président (M. Cousineau): S'il vous plaît! Alors, nous reprenons nos travaux, s'il vous plaît. Alors, j'invite les gens de la Fédération québécoise des directeurs, directrices des établissements d'enseignement à prendre la parole. Je rappelle le temps: vous avez 10 minutes pour votre exposé et autour de 13 minutes d'échange avec les ministériels. Alors, madame, si vous voulez présenter les gens... Oui?

Une voix: ...

Le Président (M. Cousineau): Et de l'opposition aussi, évidemment.

M. Marcoux: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cousineau): Ça me fait plaisir.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Cousineau): Si vous voulez présenter les gens qui sont avec vous, madame.

Fédération québécoise des directeurs et
directrices d'établissement d'enseignement (FQDE)

Mme Bertrand (Diane): Bonsoir. Je suis Diane Bertrand, présidente de l'Association des cadres d'établissement de la commission scolaire des Affluents et vice-présidente de la Fédération des directeurs d'établissement. Je vous présente Paul Famelart, qui est directeur et président de l'Association de l'ouest de Montréal, et Raymond Gilbert, qui est président de l'Association des gens de Québec. Alors, je vous remercie de nous accueillir ce soir, M. le ministre, membres de la commission parlementaire, et surtout de porter une écoute attentive à ce que nous allons vous apporter.

La Fédération québécoise des directeurs et directrices d'établissement d'enseignement est un organisme national regroupant 21 associations de directeurs d'établissement d'enseignement du primaire, du secondaire, du professionnel et de l'éducation des adultes sur l'ensemble du territoire du Québec. Elle représente plus de 2 300 directions et directions adjointes sur ce même territoire.

La FQDE est en accord avec l'orientation générale du projet de loi n° 124 et des modifications proposées par celui-ci pour ce qui est d'introduire dans la Loi de l'instruction publique l'obligation pour chaque établissement d'enseignement d'établir un plan de réussite et pour chaque commission scolaire tout comme pour le ministère au niveau national d'établir un plan stratégique.

Notre présentation se veut un questionnement de certains articles de ce projet de loi qui pourraient nuire au fonctionnement d'une école autonome et responsable. Nous nous interrogeons plus spécifiquement sur la précision de l'encadrement proposé qui va dans le détail et qui pourrait être une entrave à la personnalisation du plan pour chacun des établissements. Alors, je ne veux pas faire la lecture du mémoire, je vais vous résumer convivialement ce qu'on en pense.

Alors, depuis les grands consensus des états généraux, la FQDE a toujours supporté, encouragé l'esprit de la réforme des dernières années et, ainsi, des modifications de la loi qui visait à la décentralisation du système éducatif québécois pour en faire une réussite auprès des élèves que nous desservons. Pour mettre en vigueur cette approche, le législateur a permis de façon spécifique à donner les fonctions et responsabilités entre le gouvernement, la commission scolaire et les conseils d'établissement.

On voit que le gouvernement définit ces grandes orientations nationales. Les commissions scolaires s'assurent effectivement que les élèves reçoivent les services qui doivent leur revenir pour une meilleure réussite, que le conseil d'établissement, qui est l'organisme qui gère l'établissement d'enseignement dans le cadre que la loi lui a dévolu... Donc, à ce moment-là, les modifications de la loi, on les voudrait facilitantes dans l'opération de nos établissements d'enseignement, en fonction de la réussite du plus grand nombre de nos élèves. Alors, ces questionnements, les voici pour la loi n° 124.

n(21 heures)n

La première se voit dans l'interrogation de l'article 37.1, sur les trois composantes du plan de réussite, qui, à notre avis, sont à la base de chacun des plans de réussite. Mais nous demandons effectivement de laisser à chacun des établissements le choix et la variété, pour qu'on puisse reconnaître les besoins fondés de chacun des milieux, la liberté d'ajouter des composantes. Sinon, on ne voudrait pas que, une fois encadrés dans un moule, les plans de réussite deviennent moins signifiants et moins utiles à l'élève. On se rend compte que le volet qui est présenté dans les trois composantes est un volet au niveau de l'instruction. Et, comme la mission de l'école est d'instruire, de socialiser et de qualifier, il y a place à une grande répartition de ces volets-là.

Le deuxième commentaire a lieu avec l'article 83, simple mais qui dit au conseil d'établissement: doit informer annuellement les parents des services que l'école dessert. C'est parce que les personnels de nos écoles aussi ont le droit d'être informés. C'est un simple oubli. Même si c'est implicite, je pense que nos personnels font partie aussi de cette information.

Le troisième commentaire fait référence aux articles 209.1, 221.1, 245.1. Les modifications proposées à ces articles... Nous pensons que la réussite de l'élève risque de passer, en partie, par la mise en oeuvre des plans de réussite, subordonnés aux plans stratégiques. La Loi de l'instruction publique prévoit déjà aux commissions scolaires le droit, versus le conseil d'établissement, de revenir s'ils ne sont pas conformes à nos plans de réussite. Donc, on ne voit pas pourquoi on a une ingérence, là. Nous posons aussi la question sur les axes d'intervention. Si c'est un moyen direct d'intervenir dans nos plans de réussite, nous nous y opposons fortement. Il serait peut-être bon, à ce moment-là, de définir ce que veulent dire les axes d'intervention.

À l'article 221.1, tel que rédigé, ça risque de donner à la commission scolaire un pouvoir d'ingérence sur les moyens et les objectifs spécifiques à atteindre pour nos plans de réussite. Dans le fond, qui sont les meilleurs placés dans nos écoles? Notons en tout dernier lieu, par souci de cohérence et de continuité, qu'il serait bon de définir les plans stratégiques établis au plan national, puisqu'ils sont en interrelations avec ceux des commissions scolaires, et des plans de réussite de nos écoles.

En conclusion, la FQDE espère que ces quelques commentaires serviront à enrichir votre réflexion et apporteront la clarification nécessaire pour faciliter l'atteinte, le but de ces modifications, qui est, bien sûr, de mieux servir les élèves du Québec.

Nous terminons notre réflexion par un regard sur le futur, en portant à votre attention que, pour faire face aux changements qui seront apportés par les modifications de la loi n° 124, il ne faudra pas que les structures, les procédures trop encadrantes, trop étroites, finissent par prendre trop de temps et nuisent à la qualité des mesures mises en place. Il ne faudrait pas que la préparation, l'évaluation, le contrôle deviennent l'objectif au détriment des services d'instruction, de socialisation et de qualification de l'élève.

Il y a aussi lieu de questionner sur l'assouplissement de l'organisation du travail du personnel affecté aux établissements d'enseignement. De même, nous croyons important par la suite de se questionner sur les règles budgétaires afin de s'assurer que ces dernières répondent au nouveau contexte. Le succès des modifications proposées par le projet n° 124 dépend d'une allocation juste des ressources, en tenant compte d'où l'action se passe. Nous croyons important que la formation du personnel se poursuive et soit même augmentée, et ce, pour faire face aux nouvelles réalités. Finalement, nous croyons important de nous assurer que la réforme continue jusqu'au bout, c'est-à-dire ne pas arrêter au secondaire mais pour se poursuivre au niveau collégial et universitaire, pour donner aux élèves du Québec la meilleure chance de succès, leur permettant de faire face à la réalité du monde d'aujourd'hui. Merci.

Le Président (M. Cousineau): Merci, Mme Bertrand. Nous allons passer à une petite période d'échange de 14 minutes, sept minutes du côté ministériel et sept minutes du côté de l'opposition officielle. Ça va vous donner la possibilité de prendre un petit verre d'eau, là. M. le ministre.

M. Simard (Richelieu): Oui. Écoutez, vous avez fait une prouesse, je vous en félicite, de synthétiser en si peu de temps votre pensée et de façon très claire.

Deux petites remarques. D'abord, pour ce qui est du plan stratégique du ministère, rassurez-vous, il est défini. Il est défini dans la Loi de l'administration publique. Chaque ministère doit se doter d'un plan stratégique qui est défini à cet endroit. Mais ça nous ramène à l'essentiel de vos interventions, que je pourrais résumer de la façon suivante, et ça rejoint évidemment l'exposé fait précédemment par les autres associations: Comment réaliser, presque ce que vous souhaitez, une sorte de mur coupe-feu entre les plans de réussite des établissements et les plans stratégiques des commissions scolaires, alors que vous souhaitez évidemment qu'il y ait plan stratégique des commissions scolaires? Vous souhaitez qu'ils soient significatifs, ces plans stratégiques. Donc, ils ne peuvent pas ignorer ce qui se fait dans les écoles. Mais comment vous prémunir contre une intervention possible par une meilleure définition des termes? Je pense que c'est ce que vous souhaitez, si je résume l'essentiel.

Il y a deux aspects d'un projet de loi, et le mémoire du Conseil supérieur de l'éducation nous le rappelle: il y a ce qui est contenu et ce que l'on peut lui faire dire, l'ambiguïté qui peut naître de certains thèmes et l'interprétation qui peut en être donnée. Manifestement, vous vous méfiez de certains termes. Manifestement, vous craignez que, par l'intermédiaire d'axes d'intervention, de définition du plan stratégique, vous vous retrouviez tout à coup avec un manque de liberté. Je vous souligne que, pour le plan stratégique des commissions scolaires, les directeurs d'établissement sont consultés. La loi le précise très précisément. Alors, je vous demanderais, comme je l'ai demandé à vos prédécesseurs: Quelles seraient les expressions que vous souhaiteriez changer et, une fois que vous les avez identifiées ? et c'est là que ça commence à être difficile ? par quelles autres expressions souhaiteriez-vous que nous changions la loi?

La Présidente (Mme Charest): Mme Bertrand ou M. Famelart.

Mme Bertrand (Diane): Je vais laisser la parole à M. Gilbert, si vous le permettez.

La Présidente (Mme Charest): Alors, M. Gilbert.

M. Gilbert (Raymond): Merci. Nous pensons que, au niveau d'une commission scolaire, un plan stratégique devrait être issu des plans de réussite. Donc, pourquoi pas... Le plan stratégique de la commission scolaire pourrait être au confluent du plan national et des plans de réussite locaux. Un plan stratégique d'une commission scolaire ne peut être désincarné, à mon point de vue, des plans de la base, des gens et des plans nationaux. Ils sont au confluent.

Il y a une question, c'est sûr, de syntaxe, de verbe, de qui précède l'autre. Nous pensons que, pour respecter l'esprit de la loi et ne pas briser l'équilibre qui s'est instauré, on devrait... Puis on a trouvé, ce matin, dans les gens du... dans l'avis qui vous a été donné, peut-être les bons mots, à mon point de vue, si le plan stratégique de la commission scolaire prenait en compte les plans de réussite pour bâtir.

C'est parce que, dans le vécu, je regarde chez nous ce qui se passe, c'est ça qu'on est en train de bâtir à partir de nos problématiques, de notre vécu, de nos plans de réussite de chacun de nos établissements, pour bâtir un plan stratégique de commission scolaire qui, naturellement, va tenir compte du plan national. Et je pense que c'est viable. Vous parliez d'un mur coupe-feu, ce serait un mur coupe-feu. Ça nous prémunirait, puisque la commission scolaire, elle, si on ne respecte pas les grands encadrements, elle a un pouvoir de venir nous voir. Mais je pense que, en général, il y a des exceptions. Les gens le respectent.

Le Président (M. Cousineau): Ça va, M. le ministre? D'autres interventions? Oui.

M. Simard (Richelieu): Oh! peut-être une petite question rapide. Je vais vous poser la même question-piège que tout à l'heure: Approuver ou adopter?

Mme Bertrand (Diane): Approuver.

M. Simard (Richelieu): Ah! là j'ai deux points de vue, là. Très bien. Merci.

Mme Bertrand (Diane): Oui, vous avez deux points de vue. Je vais commencer, M. Famelart va continuer.

M. Simard (Richelieu): Vous avez le même tous les trois, j'espère.

Des voix: Oui, oui, oui.

n(21 h 10)n

Mme Bertrand (Diane): Nous en sommes fiers.

M. Simard (Richelieu): Et M. Morin est d'accord aussi.

Mme Bertrand (Diane): Oui. Oui, oui. Nous en discutions effectivement ensemble, et, pour avoir vécu dans les conseils d'établissement, quand, comme direction d'établissement, on se fait dire par nos conseils d'établissement, et là c'est les parents, les enseignants, les personnels de soutien, les personnels du service de garde et personnels professionnels: On n'approuve pas, je pense que, comme direction d'établissement, on a mal fait notre travail. Et, personnellement, je serais bien malheureuse de recevoir une non-approbation de mon conseil d'établissement sur un plan de réussite, alors que je les ai mis à contribution, tout le monde, là-dessus et qu'au fur et à mesure on a validé, revalidé. Alors, je pense qu'ils ont un pouvoir quand ils disent: On n'approuve pas, qui est comme: On ne reconnaît pas la compétence. Alors, c'est dans ce sens-là. M. Famelart peut compléter.

M. Simard (Richelieu): Vous ne venez pas de faciliter mon travail, là. Merci.

Mme Bertrand (Diane): Non, mais c'est un sens de loi, je pense, qui était donné dans la loi n° 180 et qu'on a expliqué à nos conseils d'établissement. Et, quand il y a approbation, quand il y a adoption, c'est tout à fait différent. Et je pense que, là aussi, notre directeur général, quand on adopte ou on approuve, peut suivre plus facilement, quand le conseil d'établissement n'approuve pas, peut questionner plus facilement pourquoi ça n'a pas été approuvé. Il y a une supervision là-dessus. Quand on adopte, on peut jouer: non, on ne prend pas cette partie-là, mais on va faire ça comme ça. Ce n'est pas nous.

M. Simard (Richelieu): En 1980, il n'y avait pas de plan de réussite, donc c'était un peu différent quand même.

Mme Bertrand (Diane): C'est vrai, mais il y avait quand même des parties où on avait à approuver ou à adopter, là.

Le Président (M. Cousineau): M. Famelart.

M. Famelart (Paul): Oui. Le plan de réussite étant la mise en oeuvre du projet éducatif, le projet éducatif étant adopté, le plan de réussite se traduit beaucoup plus par des moyens et des cibles ou des indicateurs. Alors, le risque est grand qu'on... sur le tas, lors d'une rencontre d'un conseil d'établissement, qu'on choisisse un moyen et que le directeur, qui aura la responsabilité de faire en sorte que ce soit mis en oeuvre dans son école, n'ait pas les ressources et les moyens pour atteindre ces cibles-là. Donc, c'est un peu la raison pour laquelle... c'est aussi beaucoup la raison, pour laquelle nous nous opposons au fait que ce soit adopté plutôt qu'approuvé.

Le Président (M. Cousineau): Merci. M. le député de Vaudreuil.

M. Marcoux: Merci, M. le Président. Deux aspects, simplement pour poursuivre sur cette question-là. Pourquoi le plan de réussite devrait être approuvé, alors que le projet éducatif, qui est la base du plan de réussite, est adopté? Et pourquoi il y a une différence entre les deux? Est-ce qu'il y en a un qui est moins important que l'autre, de sorte qu'on doit le faire approuver plutôt qu'adopter? Parce que, s'il n'y a pas une adhésion au plan de réussite et aux objectifs et aux moyens mis en oeuvre, je me dis: Est-ce que c'est souhaitable? Alors, pourquoi adopter dans l'un puis l'autre, c'est approuver?

M. Famelart (Paul): Un ou l'autre demande le même type d'adhésion. C'est la procédure qui est différente. Tout ce qui est présenté au conseil d'établissement doit être proposé par le directeur et élaboré avec l'ensemble, soit: si c'est pédagogique, plus les enseignants et, si c'est niveau encadrement, l'ensemble du personnel. Mais les deux demandent le même type d'adhésion. Ce qu'on voit, c'est que le projet éducatif est beaucoup plus au niveau des orientations qui sont choisies, et le plan de réussite, beaucoup plus au niveau des moyens. Alors, les moyens appartiennent beaucoup plus aux gens qui sont sur le terrain: le directeur, qui doit jouer son rôle de leader pédagogique, puis les enseignants, les membres du personnel, pour établir des moyens avec leur clientèle qui... Ça doit se subordonner au plan de réussite... au projet éducatif. Alors, c'est juste une façon de travailler.

M. Gilbert (Raymond): Et, j'ajouterais, au niveau de l'adhésion, quelqu'un qui, dans un conseil d'établissement, une direction, n'irait pas chercher l'adhésion de son monde, il serait foutu. Ce serait très court, et c'est impossible.

M. Marcoux: Mais, à ce moment-là, est-ce que ce n'est pas un peu bonnet blanc, blanc bonnet, là, un ou l'autre? Je veux dire...

M. Gilbert (Raymond): Je vous dirais non. Au niveau de vraiment rendre opérationnel, à mon point de vue, il y a une économie de fonctionnement. Si c'est adopté, et puis que là on s'en va dans des culs-de-sac, et le lendemain tu le vois revenir... Parce que ça ne part dans les airs tout seul, ça. Quand on amène une proposition, on l'a validée avec notre monde au niveau de l'établissement, on a travaillé avec eux autres. Et là on prend une mauvaise courbe. Et là ce n'est pas opérationnel. Le lendemain, il va falloir que tu reprennes ton monde, il va falloir que tu essaies... il va falloir que tu leur vendes... Et puis tu t'aperçois que ce n'est pas opérationnel, il va falloir que tu retournes au conseil d'établissement dire: J'ai vérifié, ce n'est pas opérationnel, on recommence. Alors, il y a là un alourdissement, à mon point de vue, dont on doit se prémunir.

M. Marcoux: M. le Président, un autre volet. Vous mentionnez dans votre mémoire évidemment que, au sujet du plan de réussite, les éléments proposés semblent se limiter au volet instruction de la mission de l'école. Évidemment, certains prétendent que déjà dans la Loi sur l'instruction publique, et notamment à l'article 36, on indique que l'école a pour mission d'instruire, de socialiser et de qualifier et que, avec ce paragraphe, ça se trouve à conditionner tout le reste.

Cependant, quand je regarde l'avis du Conseil supérieur de l'éducation, qui, lui aussi ? c'est l'avis du 26 novembre ? se questionne là-dessus et qui semble avoir bien analysé le projet de loi, l'expression «plan de réussite» semble, en tout cas, tel qu'il est présenté, viser avant tout la réussite scolaire: On retrouve cependant dans les modifications l'expression «plan de réussite», sans autre qualification. L'analyse externe du projet de loi, dit le Conseil, mène aussi à la conclusion que le projet vise avant tout la réussite scolaire ? même si, à l'article 36, on parle de la triple mission. En effet, les documents ministériels intitulés La réussite de tous, un des plus grands défis de l'éducation ? de 2000, le ministère de l'Éducation en l'an 2000 ? et invitant les écoles à préparer leur plan de réussite ne laissent pas de doute à cet égard, comme le révèlent les tableaux touchant les cibles à atteindre.

Donc, le Conseil dit: Malgré ce qu'il y a dans la loi qui énonce la triple mission, ce qui, administrativement, semble avoir été mis en oeuvre touchait principalement, sinon presque uniquement, la réussite scolaire ou l'aspect des cibles à atteindre. Donc, le Conseil dit: Par mesure de précaution, il serait peut-être bon de préciser, relativement au plan de réussite, que ça doit viser non pas seulement l'aspect de la réussite scolaire, mais également l'aspect de socialisation et de qualification. Alors, je ne sais pas si...

M. Gilbert (Raymond): C'est un peu ce qu'on vous dit. Quand on réagit à l'article 37, c'est un peu ce qu'on vous dit. On veut que les trois composantes soient élargies de façon à ajouter des éléments qui toucheraient les deux autres aspects: de socialisation et de qualification. Il y a effectivement une espèce de manque à gagner, là. Et je vous dirais aussi un peu l'historique, ce qui nous fait un petit peu peur. Il y a un historique, de déjà quelques années, de plans de réussite où on a travaillé beaucoup au niveau quantitatif. On nous annonce des indicateurs de qualité, et là on pourrait travailler effectivement sur le qualitatif. Parce que, effectivement, il y a, bon, quand on regarde le niveau de diplomation... Mais on pourrait ajouter des cibles que nous avons, d'une manière ou d'une autre, à l'intérieur de nos établissements. Le nombre de jeunes que j'empêche de décrocher, c'est un chiffre, ça aussi, mais c'est dans le qualitatif que je vais aller le chercher. C'est dans les moyens que je vais instaurer pour les garder dans mon établissement.

M. Marcoux: Merci beaucoup.

Le Président (M. Cousineau): C'est tout? Alors, merci de votre présence, Mme Bertrand, M. Famelart et M. Gilbert. Alors, je vais suspendre deux minutes, et puis j'inviterais l'autre groupe, le groupe suivant, l'Association des cadres scolaires du Québec, à se présenter à la table en avant.

(Suspension de la séance à 21 h 19)

 

(Reprise à 21 h 21)

Le Président (M. Cousineau): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux. Les membres de l'Association des cadres scolaires du Québec, M. Seminaro... Et vous pourrez présenter les gens qui vous accompagnent. Vous avez 15 minutes pour faire votre présentation, et puis il y aura 30 minutes d'échange, 15 minutes de part et d'autre pour les échanges. Alors, c'est à vous.

Association des cadres scolaires du Québec (ACSQ)

M. Seminaro (Jacques): Merci. On voudrait vous remercier de nous avoir invités à cette commission parlementaire. Je voudrais vous présenter... On a la parité, à l'Association des cadres: deux hommes, deux femmes. Donc, la discussion sera... C'est un objectif qu'on maintient tout le temps. C'est un indicateur national, de toute façon.

Le Président (M. Cousineau): Deux jeunes femmes.

M. Seminaro (Jacques): À l'extrême gauche, il y a Mme Reid, qui est professionnelle à l'Association, responsable des communications; M. Francoeur, qui est aux services éducatifs à la commission scolaire Marie-Victorin; et Mme Micheline Pelletier, ici, directrice de centre à l'éducation des adultes aux Découvreurs, commission scolaire des Découvreurs; et, moi, Jacques Seminaro, je suis directeur actif et président de l'Association des cadres.

Le Président (M. Cousineau): Vous avez les copies, oui?

M. Seminaro (Jacques): On n'a pas fait de résumé, on pense qu'il est déjà très court. Puis, de toute façon, ça devrait être assez rapide.

L'Association des cadres scolaires du Québec représente plus de 1 800 gestionnaires qui oeuvrent dans les écoles et les centres d'éducation des adultes et de formation professionnelle ainsi que dans les centres administratifs de toutes les commissions scolaires du Québec. Après avoir pris connaissance du projet de loi n° 24, l'ACSQ souscrit aux intentions ministérielles qui sous-tendent les modifications proposées à la Loi sur l'instruction publique par ce projet de loi, mais avec, d'une part, l'étonnement et, d'autre part, l'inquiétude. Suivent quelques recommandations normales concernant l'école, la commission scolaire, les centres, les conseils d'établissement des centres et, finalement, le comité de parents. On a ajouté un élément qui n'était pas dans la loi mais... qui pense que ce serait important peut-être, un jour, de le préciser.

Premièrement, de l'étonnement. Un peu comme tout le monde, la principale modification proposée par le projet de loi, la principale, consiste à insérer dans la loi l'obligation pour l'ensemble des établissements scolaires de produire un plan de réussite. Bien que l'idée d'inscrire à l'intérieur de la loi cette obligation ait été connue du réseau, le besoin de le faire se fait-il réellement sentir? Depuis l'année 2000-2001, les établissements n'ont-ils pas déjà commencé à en produire, et ceci, sans que cela ne soit inscrit dans la loi?

À cet effet, reprenons quelques extraits du rapport annuel de gestion du ministère de l'Éducation 2001-2002. À la quatrième orientation, accroître l'efficacité et l'efficience du système d'éducation en maintenant l'accent sur les résultats, sur l'imputabilité et sur la transparence de la gestion publique, dans la section consacrée aux plans de réussite, sous la rubrique des indicateurs retenus pour évaluer l'atteinte de cette orientation, on peut constater que les établissements de même que les commissions scolaires se sont mis en branle et se sont donné des plans de réussite.

À l'item Participation des établissements d'enseignement à l'élaboration et à la mise en oeuvre des plans de réussite, la cible du ministère, c'était 100 % de participation. Les résultats: «Depuis 2000-2001, l'ensemble des établissements d'enseignement du réseau des commissions scolaires doivent élaborer et mettre en oeuvre un plan de réussite. Dans ce plan sont présentés, après l'analyse de la situation, des objectifs clairs et mesurables relativement à la réussite scolaire. On y indique également les moyens concrets qui seront mis en oeuvre pour atteindre ces objectifs ainsi que la façon dont les résultats obtenus, tant sur le plan quantitatif que qualitatif, seront mesurés périodiquement.

«Au cours de l'année 2001-2002 ? l'an passé ? deuxième année de mise en oeuvre des plans de réussite triennaux des établissements scolaires, des efforts importants ont été consacrés à la mise à jour de ces plans. Plusieurs établissements, à la lumière d'une analyse plus approfondie de leur situation, ont réajusté leurs objectifs et les moyens envisagés pour les atteindre.»

Participation des établissements à la détermination des cibles. Cible: 100 % de participation. Résultats ? c'est l'an passé, ça: «...on constate une nette augmentation de la participation des établissements d'enseignement à l'établissement des cibles selon les principaux indicateurs nationaux des plans de réussite par rapport à l'année dernière ? page 82. Les taux de participation mentionnés sont de 95 % pour trois des quatre indicateurs nationaux ? retard scolaire à la fin du primaire, réussite aux épreuves ministérielles et aux épreuves relatives à la langue d'enseignement au secondaire ? et 85 % pour le quatrième ? décrochage au secondaire.»

L'autre item, Participation des commissions scolaires à l'élaboration des plans consolidés de réussite de leurs établissements d'enseignement et à leur dépôt aux directions régionales du ministère. Cible: 100 %. «...toutes les commissions scolaires ont élaboré des plans consolidés pour l'ensemble de leurs établissements et les ont déposés aux directions régionales du ministère. La cible visée quant à la participation des commissions scolaires a été atteinte. La très grande majorité des commissions scolaires ont aussi rendu publics les plans de réussite et leurs établissements.»

Force est de constater, à la lecture des résultats mentionnés dans ce rapport, que le réseau des commissions scolaires avait déjà amorcé le virage tant souhaité. Pourquoi alors vouloir l'ajouter dans la loi? C'est l'étonnement.

À l'inquiétude... Une fois cette interrogation présentée, la principale réaction que nous voulons partager avec vous en est une de crainte et d'inquiétude ? puis ça a été mentionné par beaucoup de gens ? celle de constater que cette obligation légale pour les établissements scolaires de produire des plans de réussite réduit le concept même du projet éducatif à un simple exercice mathématique où seule la réussite scolaire entre en ligne de compte. Or, à notre avis, la réussite scolaire n'est qu'un des aspects de la réussite éducative, et non le seul.

Loin de nous l'idée de nier qu'il est important de vérifier si l'école joue son rôle en examinant si les élèves qui la fréquentent terminent leurs études et obtiennent un diplôme. Mais est-ce là le seul résultat attendu? La loi confie à l'école, à l'article 36, le mandat d'instruire, socialiser et qualifier les élèves. C'est donc dire que le législateur a déjà accepté l'idée que l'école joue un rôle à plusieurs dimensions. Oui, les élèves devraient la fréquenter et obtenir un diplôme. Mais encore, l'école ne doit-elle pas aussi ouvrir les horizons de la génération montante, leur faire découvrir différentes facettes, artistique, musicale, historique, etc.? Souhaite-t-on produire des diplômés qui ont réussi à obtenir des notes nécessaires en donnant les bonnes réponses aux examens? Ou veut-on préparer des personnes adultes, autonomes et responsables, aptes non seulement à se trouver un travail, mais également à fonctionner de façon harmonieuse en société?

Aucun des trois aspects de la mission de l'école, instruire, socialiser et qualifier, ne peuvent ni ne doivent être mis de côté. L'idée d'évaluer la performance des écoles sur le seul résultat mathématique du nombre d'élèves diplômés comporte, à notre avis, son lot de risques. Comment ne pas s'attendre à ce que, graduellement, les établissements scolaires s'arrangent pour améliorer leurs résultats? C'est ce qui sera attendu d'elles. Quel accueil fera-t-on aux élèves qui viendront baisser la moyenne? Quelle importance accordera-t-on aux autres apprentissages?

Déjà, à l'intérieur du rapport annuel de gestion du ministère, les plans de réussite sont placés sous l'objectif stratégique de généraliser une approche de gestion axée sur les résultats ? et c'est le ministère qui l'a dit ? et les quatre indicateurs retenus pour en évaluer l'atteinte ne sont que quantitatifs: retard scolaire à la fin du primaire, décrochage au secondaire, réussite aux épreuves ministérielles et à celles relatives à la langue d'enseignement au secondaire.

Introduire la notion de gestion par résultats dans le réseau de l'éducation peut avoir des effets positifs, à certains égards. Mais l'introduire directement dans la loi, de cette façon, est un risque trop élevé par rapport à la qualité de l'éducation dispensée dans les écoles et les centres. Évaluer l'école sur son seul taux de réussite scolaire est trop réducteur, et la façon dont le plan de réussite est amené dans le projet de loi n° 124 risque grandement de conduire directement à cette interprétation.

Nous ne pouvons que souligner la façon dont est mentionnée la réussite des élèves handicapés ou en difficulté dans le rapport annuel de gestion du ministère de l'Éducation 2001-2002, première orientation, sous la rubrique L'adaptation scolaire et le soutien aux élèves en difficulté, et c'est un peu ce qu'on aurait voulu voir apparaître dans la loi: «Le ministère de l'Éducation a adopté, en janvier 2000, une nouvelle politique de l'adaptation scolaire dont l'orientation fondamentale est d'aider l'élève handicapé ou en difficulté à réussir sur les plans de l'instruction, de la socialisation et de la qualification. À cette fin, il faut accepter que cette réussite éducative se traduise différemment selon les capacités et les besoins des élèves, se donner les moyens qui favorisent cette réussite et en assurer la reconnaissance.»

n(21 h 30)n

Pour les élèves handicapés ou en difficulté, on élargit la notion de réussite à la dimension éducative. Pourquoi pas pour tous les élèves? Et, la dimension sociale, que fait-on? On n'entend pas suffisamment parler de violence à l'école, taxage, pour nous rappeler que l'école a aussi un rôle social?

Pourquoi ? puis c'est un peu notre orientation ? ne pas plutôt poursuivre sur la lancée du projet éducatif? Il s'agit là d'un concept intégrateur qui permet à l'école de tenir compte de l'ensemble des dimensions de sa mission. En nous référant à la définition proposée par M. Jean de Carufel et André Moreau, de l'Université de Sherbrooke, un projet éducatif, c'est ? puis, selon nous, ça comprend tout ce qu'on a besoin à l'intérieur du plan de réussite ? «une démarche dynamique par laquelle une école, compte tenu des besoins des élèves et en concertation avec ses divers agents, s'applique à assurer un environnement éducatif favorable à l'élève, détermine ses orientations propres et se donne un plan d'action en lien avec sa mission. Il devient alors l'élément intégrateur autour duquel se mobilisent les forces vives de l'école. Le projet éducatif de l'école s'appuie sur la mission de l'école qui est d'instruire, socialiser et de qualifier les élèves tout en les rendant aptes à entreprendre et réussir un parcours scolaire. Il émerge d'un processus cohérent de réflexion, de discussion dans lequel les acteurs d'un établissement expriment clairement les idées directrices qui les animent et se bâtissent progressivement une identité collective qui les distingue des autres écoles. Ce processus peut s'étaler sur quelques années et il se situe dans une perspective dynamique d'un milieu qui progresse dans le sens de l'amélioration du développement des élèves. La démarche du projet éducatif est cyclique et se renouvelle annuellement.» C'est un des gros points majeurs.

Le prochain: le leadership pédagogique des commissions scolaires. Le projet n° 124 ne répète pas cet effet réducteur pour les commissions scolaires. En effet, le concept de plan stratégique qu'il introduit est beaucoup plus large et englobant que celui du plan de réussite pour l'école et le centre ? qu'on vit, présentement. Un plan stratégique peut comporter plusieurs volets et les commissions scolaires peuvent s'en servir pour guider les établissements scolaires vers la poursuite d'objectifs reflétant toutes les facettes de leur mission.

Cependant, cette liberté d'action doit s'inscrire à l'intérieur des objectifs nationaux du ministère de l'Éducation et doit tenir compte des indicateurs nationaux. Reconnaissant la nécessité d'une cohérence entre les différents acteurs, la même mise en garde s'impose que les encadrements nationaux ne viennent pas dévier les commissions scolaires de leur rôle de leader pédagogique et de soutien aux établissements dans la mise en oeuvre de leurs projets éducatifs. Des indicateurs nationaux axés exclusivement sur les résultats quantitatifs risquent de dévier l'ensemble du système scolaire vers l'atteinte de ces seuls objectifs.

Nos recommandations en fonction de l'étonnement et de l'inquiétude. C'est donc à la lumière de la définition du projet éducatif cité précédemment qu'a été préparé l'avis de l'ACSQ. Les propositions qui suivent tentent d'en refléter l'esprit dans le texte du projet de loi.

De façon générale, l'ACSQ recommande que, face à l'idée d'insérer à l'intérieur de la loi la notion de plan de réussite, on ajoute le mot «global» aux mots «plan de réussite», car le plan de réussite, tel que présenté et évalué présentement, ne s'attarde qu'à la réussite scolaire des élèves. À titre d'exemple, l'article 37 deviendrait: «Le projet éducatif est mise en oeuvre par le plan global de réussite de l'école.» De même, tous les articles comprenant les mots de «plan de réussite».

À l'article 36, troisième alinéa, l'ACSQ propose d'inverser le libellé de celui-ci. Ainsi, au lieu de lire: «Elle réalise sa mission dans le cadre d'un projet éducatif et d'un plan de réussite», on inverse, on pourrait lire: «Elle réalise son projet éducatif et son plan global de réussite dans le cadre de sa mission.» Il reste trois minutes?

L'ACSQ s'interroge ensuite sur la nécessité d'ajouter dans la loi l'étape de l'analyse de la situation de l'école puisque, nous semble-t-il, il s'agit d'une étape normale. Puis je vais passer tout de suite au niveau d'une spécificité des centres de formation professionnelle. C'est à la page... Je n'ai pas le même texte.

Une voix: 7.

M. Seminaro (Jacques): 7? Bon. On a écouté, tantôt, il n'y a pas beaucoup d'associations qui en ont parlé, fonctions des orientations nouvelles. Aux remarques précédentes relatives aux écoles... Bon, ce n'est pas celle-là, c'est...

Une voix: ...

M. Seminaro (Jacques): Non, c'est plus loin un peu. Je vais tout de suite tomber au conseil d'établissement des centres parce que, au niveau des centres d'éducation des adultes, on fait les mêmes resituations puis on introduit la même chose qu'on a faite au niveau des conseils d'établissement versus la mission. Donc, on ne fera pas la relecture. Par contre, au niveau des conseils d'établissement de centres, il y avait une modification majeure sur le quorum. On est une des seules associations, comme je disais tantôt, à en parler.

En premier lieu, nous apprécions grandement que le législateur se propose de modifier la loi dans le sens de l'une des recommandations faites par l'ACSQ en février 2000. En effet, l'article 107.1, qui modifie le quorum aux séances du conseil d'établissement des centres, représente, selon nous, une très grande amélioration pour le fonctionnement de celui-ci.

Cependant, d'autres difficultés majeures avaient été aussi soulevées par nos membres et nous n'en retrouverons aucune dans l'écho actuel du projet. Ne pourrait-on poursuivre davantage l'amélioration? Et c'est pour ça qu'on vous a donné en annexe nos recommandations, qui sont facilement intégrables au projet de loi n° 124, dans le cadre des conseils d'établissement dans les écoles.

Le comité de parents. On termine par ça. Compte tenu qu'il y a un plan stratégique, compte tenu qu'il y a des conseils d'établissement, compte tenu qu'il y a des plans de réussite, on pense qu'il faut redéfinir le lien qui existe entre le comité de parents et le conseil d'établissement. Présentement, il y a un petit point de discussion, ce n'était pas dans le mandat, mais compte tenu qu'on en a parlé puis que le lien doit se faire clairement, compte tenu qu'il y a un lien entre les plans stratégiques et les plans de réussite, on veut faire aussi un lien entre le conseil d'établissement et le comité de parents.

Avant de terminer, nous nous permettons de souligner une autre difficulté créée par la configuration de la structure des comités de parents. Présentement, conformément au deuxième alinéa de l'article 47 de la loi, ce sont les parents des élèves réunis en assemblée générale qui élisent, parmi leurs représentants au conseil d'établissement, un représentant au comité de parents. Les conseils d'établissement n'ont aucun lien formel avec le comité de parents, puisque les membres du comité de parents ont été nommés par l'assemblée générale des parents et non par le conseil d'établissement. Cette absence de lien légal se vit parfois difficilement dans certains milieux, lorsque des décisions prises par le comité de parents sont à l'opposé de ce que les conseils d'établissement veulent. S'il est inscrit dans la loi que les membres du comité de parents doivent faire partie du conseil d'établissement, on peut comprendre que le législateur y voyait un lien. Ce lien ne pourrait-il pas être précisé davantage? Ne pourrait-on confier aux parents membres du conseil d'établissement la responsabilité de nommer parmi eux leur représentant au comité de parents, pour avoir ce lien entre la commission scolaire, le conseil d'établissement et le comité de parents?

Finalement, la conclusion. Nous osons espérer que la contribution de l'ACSQ saura alimenter la réflexion des décideurs autour des grands enjeux éducatifs qui peuvent être menacés par ce projet de loi n° 24. La qualité de l'éducation est notre préoccupation première et nos recommandations n'ont d'autres buts que de la préserver. Loin d'être une entreprise de production, l'école et le centre en sont une d'éducation et leur efficacité ne se mesure pas uniquement en chiffres. Elle se mesure aussi par la qualité de vie de ceux qui la fréquentent, élèves et membres du personnel. Le résultat ne se perçoit pas toujours au terme d'une seule année scolaire. Évitons de les enrôler dans un carcan administratif d'entreprise. Préservons leur liberté d'action et leur créativité tout en leur demandant de rendre compte de leurs réalisations en termes quantitatifs et qualitatifs. Merci. Quinze minutes...

Le Président (M. Cousineau): Merci, M. Seminaro. Alors, M. le ministre.

M. Simard (Richelieu): Merci, M. le Président. D'abord, remercier l'Association des cadres scolaires du Québec d'avoir pris le temps de préparer un mémoire fouillé et documenté et de nous le présenter ce soir. Leur collaboration est évidemment très appréciée.

Mais j'enchaîne en disant tout de suite, et c'est la première fois que je le dis aujourd'hui, que je ne saurais être plus en désaccord avec ce mémoire ? c'est la première fois que je dis ça aujourd'hui ? que maintenant, et probablement pour pas beaucoup de choses, hein, pour un seul point et qui est central, puisque tout le mémoire dans le fond ne fait que dire de façon différente une seule réalité: Nous sommes contre les objectifs de réussite scolaire, des objectifs quantitatifs. Une réussite scolaire ramenée au seul taux de réussite scolaire, c'est trop réducteur.

Mais, M. Seminaro, à quel endroit vous voyez ça, dans le projet de loi, que c'est écrit «réussite scolaire» et que c'est réduit à des objectifs quantitatifs, à quel endroit, puisqu'on dit, au contraire, dans la loi qu'il s'agit d'un projet éducatif, avec lequel vous êtes parfaitement d'accord, et que le plan de réussite est la traduction des moyens d'action pour atteindre ce projet éducatif? Où sont ces objectifs uniquement scolaires? Où sont ces objectifs purement quantitatifs? Je ne les ai pas vus dans le projet de loi, puisque nous ne les y avons pas mis.

M. Seminaro (Jacques): Vous avez parfaitement raison.

M. Simard (Richelieu): Ah bien...

n(21 h 40)n

M. Seminaro (Jacques): Nous les avons vus dans les indicateurs nationaux. Non, non, écoutez, tout le monde autour de notre table est d'accord que, dans l'écriture du projet de loi telle quelle, on ne voit pas de problème. O.K.? On voit des problèmes, puis on l'a dit, dans la projection de la définition des plans de réussite dans le cadre de ce qu'on vit présentement. Puis notre rôle, je pense que c'est d'allumer des lumières pour faire attention. On passe trois jours à échanger avec les gens puis, toujours on se ramène à des objectifs quantitatifs. On n'est pas contre. Mais la mission de l'école, elle est plus que ça. Elle est ça et plus que ça. Dans la loi, on ne le voit pas, mais on se réfère à beaucoup d'inconnus, donc on peut supposer que présentement c'est des choses qui peuvent se produire.

M. Simard (Richelieu): Écoutez, soyons bien clairs, là, ce n'est pas un reproche que je vous fais. Si vous ne voyez pas dans la loi mais vous supposez que cela pourrait être l'application réelle de la loi, il y a donc là, comme vous dites, une lumière rouge allumée et il y a donc à préciser certaines choses.

Mais, je l'ai dit plusieurs fois aujourd'hui, et peut-être faudra-t-il l'écrire plus clairement, puisque, semble-t-il, tout le monde ne le lit pas de la même façon, pour nous, l'objectif d'un projet éducatif, c'est d'instruire, de qualifier et de socialiser. C'est la mission globale, comme vous dites vous-mêmes, de l'école. Et le plan de réussite n'est que la traduction en moyens d'action de cette mission globale. Si le projet éducatif a cette vision globale et que le plan de réussite en est sa traduction, il ne peut pas, par définition, être ramené à des éléments uniquement quantitatifs et scolaires, puisque le projet éducatif est beaucoup plus global.

Alors, peut-être faut-il souligner les mots, peut-être... Vous-même, vous nous proposez d'ajouter «global» dans le texte. Peut-être que c'est la solution, je ne sais pas, on va regarder ça. Mais je peux vous assurer que nos intentions correspondent exactement à vos intentions, que vos craintes, selon nous, ne sont pas justifiées, mais nous les partageons. Nous sommes totalement conscients, je suis totalement conscient et, au ministère, on est totalement conscients que réduire la réussite scolaire seulement à des indicateurs mesurables de réussite ? je l'ai dit combien de fois depuis le matin! ? ce n'est pas rendre justice à la réalité de l'éducation à l'école.

Les formateurs que vous êtes, les éducateurs que vous êtes, les leaders pédagogiques que vous êtes, puisque vous être directeurs d'école, savent très bien que l'école n'est pas uniquement là pour faire atteindre à la grande majorité des notes supérieures en mathématiques ou en français, faire réussir tout le monde et arriver à des objectifs uniquement quantifiables, bien que, vous serez d'accord avec moi, ce n'est pas non plus négligeable. L'école n'est pas là non plus pour faire échouer les gens. L'école est aussi là pour aider à faire en sorte que les gens soient le plus forts possible en mathématiques, en français, dans les matières de base. L'instruction, c'est aussi un aspect important de l'école. Mais une fois qu'on a dit ça, ce n'est pas restrictif à ce seul aspect.

Alors, nous sommes tous d'accord sur les objectifs, nous sommes tous d'accord pour dire que c'est ça, l'enseignement, nous sommes tous d'accord pour dire qu'il n'y a rien d'autre, dans le projet de loi, que ce que je viens de dire. Alors, qu'est-ce que vous nous proposez, puisque nous partageons le même objectif, pour nous assurer que le projet de loi ne soit pas interprété de la façon dont vous l'interprétez vous-mêmes? Que faut-il dire ou faire dans le projet de loi pour nous assurer que le projet éducatif, qui est un projet nécessairement global, ne soit pas vu de façon réductrice et limité au simple plan quantitatif de la réussite scolaire?

M. Seminaro (Jacques): Quoi faire ou quoi ne pas faire?

M. Simard (Richelieu): Si vous voulez.

M. Seminaro (Jacques): On pourrait dire: Quoi ne pas faire? Parce que présentement nous luttons, dans nos écoles, à tous les jours contre cette notion de mesures en fonction des résultats de tous les élèves. Présentement, dans les commissions scolaires, les parents appellent puis ils veulent s'acheter une maison près de l'école la plus performante, tu sais, même si, comme tel, nos écoles, au niveau de la base... Nous, ce qu'on dit depuis le début, c'est: les indicateurs nationaux, c'est le programme de formation. C'est ce qui existe dans le bulletin. On n'a pas présentement à introduire des indicateurs nationaux, et c'est le danger.

Hier soir...

Une voix: ...

M. Seminaro (Jacques): Pourquoi? Je vais vous répondre. Hier soir, un nommé M. Marceau nous a dit: On a hâte que le ministère de l'Éducation fasse des examens uniformes en sixième année pour qu'on puisse faire un palmarès des écoles primaires. Bien, je veux dire, on est rendu là.

Nous, on dit: Connu par les gens présentement, le plan de réussite, c'est le plan de réussite, ce n'est pas le plan de réussite scolaire, ce n'est pas le plan de réussite éducative. Nous, on le comprend global. C'est pour ça qu'on dit que, si on ajoute le terme «global», c'est le projet éducatif qui va continuer à être la clé maîtresse dans l'école... Et puis moi, je vous le dis, personnellement, je suis d'accord que le plan de réussite focusse sur la réussite même quantitative de nos élèves. Mais, tout en focussant sur le projet éducatif, on va mettre en valorisation beaucoup plus le projet éducatif que le plan de réussite comme tel.

Le plan de réussite, pour nous, c'est un élément majeur, dans le contexte du programme de formation, pour renforcir nos objectifs dans le projet éducatif. C'est juste ça. Puis là, présentement, on l'a mis en avant, puis c'est ça qui nous fait peur.

M. Simard (Richelieu): Parlons du projet de loi.

M. Seminaro (Jacques): Je le sais, on est d'accord, on l'a lu, on l'a relu, on l'a discuté. À tous les jours, c'est ce qu'on dit. On se l'est fait dire devant 600 personnes hier soir, mais à tous les jours on est obligés de leur dire, puis les gens attendent ça.

Vous avez dit: Qu'est-ce qu'on doit faire? Je vous le dis, M. le ministre, vous devez continuer à tenir le même discours que vous tenez présentement, un discours de mission à trois volets, puis un jour ça va être plus compris. Parce que, même au niveau des commissions scolaires, ce n'est pas nécessairement facile quand on voit sortir nos résultats et notre degré de, je ne sais pas, moi, notre taux de décrochage ou notre projection de taux de décrochage. Il faut continuer de le dire.

Nous, à un moment donné, on s'est rencontrés, on a dit: On ne se présente pas au projet de loi n° 124. On est d'accord, on est d'accord tel qu'écrit. Mais, par contre, on s'est dit: Oui, on va aller leur dire où on a peur, où c'est dangereux, pas dans le contexte actuel, mais sur la projection de choses qui sont souvent... C'est le non-écrit souvent qui est le plus dangereux que l'écrit. C'est pour ça qu'on ne s'est pas objectés. On vous dit: On a des inquiétudes. Ce n'est pas dangereux d'avoir des inquiétudes, on aime mieux le prévoir que de le corriger.

M. Simard (Richelieu): Quand les parents téléphonent chez vous pour savoir quel est votre degré de performance dans votre école, ce n'est pas après avoir lu le plan de réussite, vous le savez bien, c'est après avoir lu le dernier numéro de L'actualité, hein?

M. Seminaro (Jacques): C'est le palmarès. C'est le palmarès, c'est sûr.

M. Simard (Richelieu): C'est les palmarès. Donc, il ne faudrait pas entacher le projet de loi de péchés qui ne sont pas les siens. Cependant, il y a une mise en garde là que je respecte et qui est tout à fait légitime.

M. Seminaro (Jacques): Je pense que c'est notre rôle aussi de le faire, tu sais, comme Association. Et vous avez une orientation qui est ministérielle et intéressante, mais nous, nous avons un vécu de milieu qui nous introduit des objections ou du moins des dangers à éviter, tu sais? Parce qu'on a commencé, hein? Le projet de loi est là; ça fait déjà deux mois que, dans les commissions scolaires, on réfléchit sur les plans d'action et sur les plans de stratégie. On n'attend pas la loi. Puis, déjà, il faut ramener tout le monde, il faut le ramener et se le dire. Parce que, même, on a de la formation par l'Université de Sherbrooke, puis ce n'est pas encore évident.

Je vous le dis, là, ce n'est pas encore évident. Puis la tentation de plonger au niveau d'un palmarès, même au niveau des écoles, dans ce cadre-là, même si vous n'aimez pas... puis vous nous le dites, que ce n'est pas ça qui est écrit, vous avez raison, mais elle est réelle. Elle est réelle. Puis, on n'est pas contre, je vous le dis, on n'est pas contre. Mais on doit avoir le pouvoir, le temps et la possibilité, dans le cadre d'un plan de réussite, de l'expliquer.

Moi, j'ai le bulletin de ma fille. Je suis toujours très intéressé parce que je regarde plus les compétences transversales, qui est global, que les résultats en mathématiques ou en français. Puis c'est ça, c'est ça qui fait que tantôt, à une des questions: Comment on fait pour mesurer la sociabilisation? Ça l'est dans le bulletin. Le programme de formation du ministère, il est complet. Les indicateurs nationaux sont dans le programme de formation. Le ministère peut donner d'autres indicateurs nationaux plus quantitatifs, mais pour nous, les indicateurs nationaux de réussite, c'est ça. On peut faire un plan d'action sur des choses moins bien réussies dans des régions données, fonction de problèmes particuliers de lecture, ou de bibliothèque, ou de choses comme ça, mais la base de nos plans d'action, c'est le programme de formation. Puis on n'a pas à recréer le monde. Il est là et bien fait, à corriger, c'est sûr.

n(21 h 50)n

M. Simard (Richelieu): Dernier commentaire. Un plan de réussite, ce sont des moyens. Il n'y a pas d'obligation de réussite, il y a obligation de faire tous les efforts nécessaires pour atteindre des objectifs, et donc c'est les moyens que l'on met en oeuvre, le plan de réussite. Ça ne peut pas être réduit à un palmarès, un plan de réussite. C'est même le contraire d'un palmarès, c'est le moyen pour améliorer l'éducation que l'on transmet, que l'on donne aux enfants, que le milieu donne aux enfants, sous plusieurs aspects.

Là où probablement originent vos craintes, et là-dessus je suis assez sensible à celles-ci, c'est que les indicateurs qui ont couru actuellement, qui ont été utilisés, qui ont été transmis, ont été en général des indicateurs uniquement quantitatifs. Vous savez que nous travaillons sur d'autres indicateurs. Le milieu doit aussi générer ses propres objectifs non quantitatifs, puisque le conseil d'établissement connaît son milieu, a fait l'analyse de sa réalité, peut donc déterminer dans son projet éducatif et par conséquent dans son plan de réussite des objectifs qui lui sont propres. Mais je pense que nous devons aussi aider en ce sens en fournissant autre chose que des indicateurs quantitatifs, qui sont importants, il faut se comparer aussi à d'autres, mais pas uniquement limités à cela. Et en ce sens-là, c'est vrai que les indicateurs qui ont été surtout utilisés ces dernières années ont été les indicateurs ? on le connaît ? de performance académique, de performance scolaire.

M. Seminaro (Jacques): Je vous arrête.

M. Simard (Richelieu): Arrêtez-moi.

M. Seminaro (Jacques): Je suis d'accord avec des indicateurs quantitatifs fonctions de l'élève. Présentement, c'est des indicateurs quantitatifs de commissions, d'écoles ou ainsi de suite. Que, dans mon milieu, l'indicateur quantitatif, c'est l'amélioration de la lecture par des projets spécifiques, je vais mesurer l'amélioration. Ce n'est pas le fait qu'ils soit quantitatifs, c'est le fait qu'ils soient nationaux et pas accrochés à un enfant. La réforme, elle est parfaite, elle est parfaite sur ça quand elle est bien vécue. C'est le fait qu'on globalise des choses puis on mesure tout le monde, au lieu de l'accrocher à un individu, ou à une personne, ou à un temps, tu sais? C'est pour ça que ce n'est pas l'indicateur quantitatif individuel qui... Il existera toujours. C'est la façon d'informer le parent qui est importante.

M. Simard (Richelieu): Oui, mais en même temps ne négligeons pas le fait que, par définition, si nous fixons des objectifs, nous devons en même temps vérifier ce qui se passe autour. Chaque école et chaque enfant ne vit pas dans une bulle, on fait partie d'un ensemble: l'enfant est dans son école, l'école est dans sa commission scolaire, la commission scolaire est dans le Québec. Alors, il faut situer ces efforts-là dans un ensemble. Il est important qu'on se... Tu te préparais à chanter? Moi aussi.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Cousineau): L'arbre est dans ses feuilles.

Une voix: Dans ses feuilles.

M. Simard (Richelieu): On avait compris ça. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Cousineau): M. le député de Vaudreuil.

M. Simard (Richelieu): Merci.

M. Marcoux: Ha, ha, ha! Oui. Merci, M. le Président. Alors, sur cette note lyrique, alors bienvenue, M. Seminaro et les autres personnes qui l'accompagnez. Merci de votre mémoire, qui est bien fait et également qui fait preuve de propositions de modifications, donc ce qui indique que vous avez bien analysé le projet de loi n° 124.

Un commentaire, vous savez, sur une interrogation que vous posez, et je le partage, je l'ai déjà partagé d'ailleurs avec le ministre: Pourquoi la loi n° 124? Pourquoi légiférer? Écoutez, je pense que, comme disait déjà quelqu'un, trop fort ne casse pas, mais, administrativement, déjà, comme vous l'indiquez, c'était en place, et je comprends que législativement ça vient confirmer un processus qui en bonne partie était déjà depuis deux ans, comme vous le dites, mis en oeuvre par les établissements et les commissions scolaires.

Une voix: ...

M. Marcoux: Pardon?

Le Président (M. Cousineau): ...M. le député.

M. Marcoux: Oui. Est-ce que vous voulez intervenir, Mme la députée?

Une voix: ...

M. Marcoux: Ah! Excusez-moi. Donc, alors maintenant, c'est là, et je pense que, les objectifs de réussite ou d'améliorer la réussite, nous les partageons tous. Et ce n'est pas nouveau, je pense que les intervenants dans le milieu scolaire, depuis longtemps, essaient, visent à améliorer la réussite soit des élèves, soit des parents, soit des enfants pour les parents.

Quelques mots sur l'inquiétude que vous indiquez quant aux objectifs des plans de réussite. Nous en avons discuté à certaines reprises aujourd'hui, il y a des groupes qui l'ont soulevé. Quant à moi, je pense que les objectifs quantitatifs ne sont pas à éliminer. Je pense que, ça, là-dessus, il y en a une certaine partie qui... C'est un aspect qu'on doit considérer dans l'ensemble.

Cependant, ce que vous indiquez comme étant l'inquiétude est partagé par d'autres groupes qui sont venus devant nous, aujourd'hui, puis également par le Conseil supérieur de l'éducation dans l'avis du 26 novembre, qui dit: Oui, on énonce, à l'article 36 de la Loi de l'instruction publique, la triple mission de l'école. Lorsqu'on lit le projet de loi n° 124, cependant, le Conseil supérieur de l'éducation, lui également, s'interroge: De quelle réussite parle-t-on? L'analyse interne du projet mène vraisemblablement à la conclusion qu'il vise avant tout la réussite scolaire. Je pense que... Mais avant tout. Et il ajoute: L'expression «plan de réussite», sans autre qualification, ça laisse beaucoup d'interrogations, et les modifications proposées créent donc une certaine ambiguïté notionnelle.

Et, quand vous évoquiez tout à l'heure les directives qui ont été émises jusqu'à maintenant et les indicateurs nationaux, les quatre catégories d'indicateurs nationaux, bien le Conseil supérieur réfère en disant: Évidemment, même si dans la loi présentement on prévoit la triple mission, les documents ministériels de 2000 qui invitent les écoles à préparer leur plan de réussite ne laissent pas de doute, comme le révèlent les tableaux touchant les cibles à atteindre. Donc, vraisemblablement, les documents administratifs, c'est principalement les objectifs quantitatifs. Alors, je pense que... je partage, en tout cas, votre interrogation et votre inquiétude à cet égard-là.

Moi, je suis sensible, là, au fait qu'on peut dire des choses dans la loi; la loi, c'est une chose, c'est facile de régler. Mais il y a du non-dit également et qui peut, comme ça a été le cas en 2000, donner une place à l'interprétation et finalement, par des règles administratives ou des documents administratifs, bien, disons, avoir demandé des résultats qui sont différents de ce qu'on veut peut-être obtenir. Et je comprends le ministre qui énonce... puis je le crois, d'ailleurs.

M. Simard (Richelieu): Bien, je ne peux pas amender le non-dit.

M. Marcoux: Ce que vous dites. Cependant, il arrive que, dans deux ans, on peut peut-être interpréter différemment. Alors, je pense qu'il est important à cet égard-là de préciser, quelle que soit la terminologie utilisée, globale ou autrement. Mais, ça, je partage avec vous l'opinion que vous exprimez.

Il y a un point qui a été soulevé par les associations des directeurs d'établissements scolaires et qui touche les intrants du plan stratégique des commissions scolaires. Dans l'article 209 présentement, ce qu'on indique, c'est que les commissions scolaires établissent un plan stratégique, bon, décrivant le contexte dans lequel la commission scolaire évolue, décrivant les principaux enjeux auxquels il fait face, tenant compte évidemment des orientations stratégiques et des objectif nationaux du plan stratégique du ministère. Et les directeurs d'école disent: Écoutez, il nous semble que le plan stratégique des commissions scolaires devrait davantage tenir compte des plans de réussite. Et ce qui semble, actuellement, c'est plus d'en haut vers le bas et non pas du bas vers le haut. Est-ce que vous avez des commentaires sur ce que les directions d'établissement ? je ne sais pas si vous étiez ici tout à l'heure ? nous ont dit?

M. Seminaro (Jacques): Oui, oui. Écoutez, nous, notre affirmation sur ça, vous l'avez au niveau du leadership pédagogique des commissions scolaires. On l'a décrié dans le contexte des plans de réussite d'il y a deux ans, où la commission scolaire avait un rôle de facteur, tu sais, de faire des résumés puis les envoyer au bureau régional. Nous, nous reconnaissons... Dans le cadre de la loi, c'est déjà là: La commission scolaire doit s'assurer de la qualité de l'éducation dans les écoles. En tout cas, les termes, ce n'est pas ça, mais on pense que la commission scolaire a un rôle.

n(22 heures)n

Puis, tel qu'écrit, nous, on n'a pas de problème parce que la couleur de l'école viendra par le projet éducatif où c'est l'école qui l'adopte dans le cadre du conseil d'établissement, où la couleur locale sera très clairement définie. Qu'il y ait quelques objectifs ou quelques indicateurs de commission scolaire englobant toutes les écoles, je pense que les commissions scolaires vont écouter, consulter puis prendre des orientations qui vont... Moi, je trouve ça normal qu'une commission scolaire qui a une lecture d'une région donnée puisse mettre des budgets en fonction d'objectifs plus nationaux ? quelques. Mais, par contre, une école qui veut prendre une orientation très précise, le projet éducatif lui donne la marge de manoeuvre pour aller au maximum de ses possibilités.

Nous, c'est là qu'on a fait la nuance entre le danger de haut vers bas. Puis on a vu, on a lu le résumé du Conseil supérieur puis on en a rediscuté, on ne voyait pas ça, tu sais? On aurait pu dire... On ne pense pas que c'est une recentralisation versus une décentralisation. Le plus bel exemple: malgré l'absence de la loi n° 180, beaucoup de commissions scolaires, avant 1998, avaient déjà décentralisé. La loi a confirmé certaines orientations. Certaines commissions scolaires ont déjà centralisé des choses malgré la loi n° 180. Ce n'est pas les lois qui confirment les orientations de tout le monde, c'est beaucoup plus la dynamique des milieux puis en fonction des orientations que les milieux se donnent.

Mais, je pense, avec un plan stratégique bien défini, à l'intérieur d'un conseil, d'un CCG, qu'il y ait un, deux ou trois indicateurs nationaux, qu'une commission scolaire décide de faire un plan stratégique qui met beaucoup d'emphase sur, je ne sais pas, moi, l'option musicale de ses écoles, puis met des budgets en conséquence, puis organise des choses, puis que les écoles se greffent à ça pour une ou deux orientations stratégiques, je ne vois pas de problème. Je trouve ça même normal. Mais de là à coincer directement les écoles, je ne pense pas, parce que je pense qu'une école, en tout cas dans notre milieu, fonction du projet éducatif, les valeurs qu'on a à véhiculer ou du moins les orientations, elles sont personnelles à l'école et approuvées par le conseil d'établissement. Et, la commission scolaire, je ne dis pas qu'elle ne veut rien savoir de ça, mais, je veux dire, elle est très, très, très loin d'une ingérence à ces niveaux-là. Elle ne peut pas et elle ne veut pas. Mais c'était...

Dans l'ancienne orientation, où tu arrivais avec 44 projets de plan d'action, où la commission scolaire n'avait rien dit et faisait simplement recevoir, approuver et envoyer au ministère, je ne trouvais pas ça normal. Nous, en tout cas, au niveau de l'Association, compte tenu que la commission scolaire existe, compte tenu qu'elle a un rôle à jouer au niveau de la loi, c'est normal qu'elle ait un genre de droit de regard sur les grandes orientations en fonction des lacunes globales qu'elle peut déceler dans son milieu. Si elle ne fait pas ça, il faudrait l'enlever de la loi.

Le Président (M. Cousineau): Merci. Ça va?

M. Marcoux: Oui.

Le Président (M. Cousineau): Est-ce qu'il y a d'autres questions? Alors, on vous remercie, M. Seminaro, M. Francoeur, Mme Pelletier puis Mme Reid, pour votre participation à notre commission. Merci beaucoup. Alors, on va suspendre pour deux minutes, permettre à l'autre groupe, l'Association provinciale des enseignantes et des enseignants du Québec...

(Suspension de la séance à 22 h 3)

 

(Reprise à 22 h 4)

Le Président (M. Cousineau): Nous allons reprendre nos travaux. Alors, nous reprenons nos travaux, s'il vous plaît. J'invite les gens de l'Association provinciale des enseignantes et des enseignants du Québec à bien vouloir prendre place.

Je rappelle le temps qui vous est alloué: cinq minutes pour la présentation de votre mémoire, puis il y aura 30 minutes d'échange, 15 du côté ministériel et 15 minutes du côté de l'opposition officielle. Alors, Mme Warr, si vous voulez présenter le monsieur qui vous accompagne. À vous la parole.

Association provinciale des enseignantes et
des enseignants du Québec (APEQ)

Mme Warr (Ardèle): Merci. On behalf of our Association, the Québec Provincial Association of Teachers, I want to thank you all for allowing us to be heard this evening. Je me présente, Ardèle Warr, présidente de l'Association provinciale des enseignantes et enseignants du Québec, et puis mon collègue, M. Alan Lombard, qui est le directeur général de notre Association.

Notre Association représente les 8 000 enseignantes et enseignants qui oeuvrent dans les écoles anglophones du Québec. Nous sommes très inquiets, mesdames, messieurs, compte tenu des expériences ailleurs, où les plans de réussite sont vite tournés dans des montagnes de chiffres pour identifier les meilleurs et par conséquence les moins bons, sinon les pires. L'analyse des résultats de cette approche ne semble pas amener à la réussite, au contraire. Et là je laisse la parole à mon collègue, M. Lombard.

M. Lombard (Alan): Merci de votre invitation. Je vais vous signaler tout d'abord que notre position est suite à une large réflexion que nous avons commencée il y a un mois, un mois et demi, qui s'est terminée dans une espèce d'événement lors de notre congrès pédagogique annuel, congrès que nous faisons depuis 1864, d'ailleurs. Nous avons invité une soixantaine de nos leaders syndicaux partout dans la province à assister à une journée de travail, aidés par un professeur de l'Université McGill, M. Bill Smith, et surtout par un professeur de l'Université de Cambridge, M. John MacBeath, sur l'aspect des plans de réussite. Nous n'avons pas examiné en détail la loi ou le projet de loi n° 124, mais surtout l'impact de lois pareilles ailleurs dans le monde entier.

Avant de commencer l'analyse en profondeur de notre position, je tiendrai à vous signaler dans notre mémoire que nous avons mis une certaine emphase sur les résultats des épreuves internationales dans le but de démontrer que, déjà, nous avons un système d'éducation assez bien réussi. Je crois que c'est souvent oublié que le Canada, comme pays, se situe bien au-delà de la moyenne, et le Québec est parmi les provinces les plus performantes au Canada. J'ai pris au hasard quelques exemples de quelques études ou quelques épreuves, qui sont en annexe; c'est pas mal ce que nous constatons dans toutes les épreuves: sciences, mathématique, littérature, comme vous voulez, que ce soit international ou que ce soit pancanadien, le Québec s'en tire assez bien, merci.

Nous croyons que c'est important de comprendre cela, parce que, quand on parle d'un plan de réussite, il faut ne pas oublier que nous avons déjà réussi, dans notre système. Nous croyons que le projet de loi n° 124 se situe dans une stratégie de gestion hiérarchique verticale descendante et, pour nous, c'est une antithèse de la décentralisation proposée par les états généraux de l'éducation. C'est notre lecture de la loi, froidement faite. Ce n'est pas ce que nous avons reçu comme explication de la loi, mais c'est vraiment ce que nous décelons à l'intérieur de la loi.

n(22 h 10)n

Ce qui nous inquiète énormément... Et nous allons surtout parler du niveau de l'école en soi. Nous avons des inquiétudes par rapport à des comparaisons entre écoles, cela parce que nous avons vécu ça un tout petit peu ici, au Québec. Nous sommes les derniers, quasiment, dans le monde occidental, à arriver à des palmarès. Mais là les palmarès, ils y sont, et c'est en regardant l'expérience de l'Angleterre, de la Grande-Bretagne, de tous les États des États-Unis, de la Nouvelle-Zélande, des autres pays de l'OCDE, c'est en discutant avec les autres associations d'enseignants, parce que nous sommes partie, à l'APEQ, de la Fédération canadienne des enseignants... Nous assistons à des rencontres avec les syndicats de l'Angleterre, le LEA des États-Unis, et ils sont tous unanimes à nous dire: Ne tombez pas dans ce piège-là.

Nous croyons que, tant et aussi longtemps que nous sommes de bonne foi, personne ne va penser à développer des indicateurs nationaux, développer des indicateurs au niveau de la commission scolaire, développer des indicateurs au niveau d'une région ou d'une école propre, tant et aussi longtemps que nous sommes de bonne foi. Mais cela ne dure pas longtemps, nous croyons. Le danger est toujours de se donner l'idée que, avec chiffres, avec des évaluations quantitatives, nous pouvons sortir une espèce de vérité.

Je vais vous citer l'exemple de nos palmarès, ces palmarès tellement véhiculés par L'actualité, qui sont d'origine du Fraser Institute de Vancouver ? le Fraser Institute qui a commencé en Colombie-Britannique et qui commence tranquillement à s'insérer dans toutes les provinces. Ce palmarès-là est basé sur des chiffres et statistiques, des données fournies par le ministère de l'Éducation. Mais, croyez-moi, ces données-là ne sont pas faites, ne sont pas développées pour indiquer qui est le meilleur et qui par conséquence est le pire dans le système de l'éducation.

En plus, je dirai que le concept même est complètement faussé dans le sens suivant: je ne peux pas mesurer de résultats d'élèves pour savoir si l'école fonctionne bien, c'est un non-sens. Une école pleine d'élèves forts va sûrement performer. Une école qui est remplie d'élèves en difficulté va sûrement avoir des difficultés. Ce n'est pas là que je vais découvrir si l'école fonctionne. Ce qui est important, et nous le signalons dans notre mémoire, c'est de s'autoévaluer à l'école. Le plan de réussite de l'école, le plan devrait se situer à l'intérieur du projet éducatif de l'école, et ce plan-là devrait tenir compte d'une globalité à l'école.

Nous avons avec nous un exemple, parce que ce n'est pas d'hier que nous regardons ce problème-là. Nous faisons partie d'un comité, un partenariat avec le MEQ, l'Université McGill, les associations... pardon, les commissions scolaires anglophones, sur l'amélioration de l'école, et dans le cadre de nos travaux, et ça fait sept, huit ans de ça, nous avons pensé et développé du matériel pour que les écoles puissent s'autoévaluer sur une totalité, sur une globalité de questions. Nous avons aussi, et je vous les ai amenés ce soir, les travaux de M. John MacBeath, en Angleterre, qui sont à l'encontre de l'approche quantitative, purement, les «league tables», comme ils appellent ça en Angleterre, où les écoles qui performent ou qui semblent performer se voient doter de beaucoup d'argent et les écoles qui ne performent pas sont même fermées. Il y a un danger à ça.

Le ministère de l'Éducation peut, se basant sur le projet de loi une fois adopté, décider à n'importe quel moment donné de définir des indicateurs nationaux. Ce faisant, le ministère lie la commission scolaire, nous croyons, dans le plan stratégique. Si la commission scolaire, dans le plan stratégique, adopte des indicateurs quantitatifs, purement, des résultats d'examens, du «testing», comme on retrouve aux États-Unis, à ce moment-là l'école va être liée, et de beaucoup, par une approche qui ne vient pas du milieu, qui n'est pas une approche de gens qui oeuvrent dans le milieu, et c'est très dangereux. Croyez-moi, en Angleterre, aujourd'hui, n'importe qui peut aller enseigner. Si vous voulez avoir un poste, facile, en Angleterre. Personne ne veut travailler là actuellement. À cause de cette approche-là, nous sommes en train, ou les gens en Angleterre sont en train de démolir leur système d'éducation. La Nouvelle-Zélande a passé par ça. Ils ont finalement aboli en large partie l'approche de toujours tenter de mesurer les écoles, et le système est en train de remonter.

Mais il y a une question de morale dans tout cela. Je vais vous indiquer ce que nous pensons. Nous sommes en faveur d'une responsabilisation du public. Nous soutenons des indicateurs de rendement mais des indicateurs qui sont exacts et équitables et qui tiennent compte de l'ensemble de la culture scolaire. La valeur ajoutée, c'est quelque chose à mesurer, mais ce n'est pas nécessairement le résultat des élèves qui va nous donner cette valeur ajoutée là.

On prône l'autoévaluation par les écoles en fonction d'indicateurs réels et valides. Je vous ai déjà mentionné l'exemple de l'instrument de M. MacBeath; nous croyons que le ministère devrait investir, et beaucoup, dans des recherches d'instruments pour aider les écoles à s'autoévaluer.

On soutient la livraison de renseignements utiles et exacts au public. On soutient la recherche intelligente et utile des méthodes d'évaluation de la réussite scolaire, qui fournit des données importantes pour l'école. Mais attention, déjà, avec les plans de réussite qui ne sont pas formalisés dans une loi, nous avons des commissions scolaires qui ont décidé de faire passer des examens aux élèves de tous les niveaux, à partir de la maternelle jusqu'au secondaire V, deux fois par année, examens pour indiquer lesquelles des écoles performent et lesquelles des écoles ne performent pas. Déjà, c'est implanté dans un milieu, parce que les gens tournent vite vers quelque chose qui semble être scientifique et rigoureux. Malheureusement, ce n'est pas le cas.

On s'oppose fermement au genre de publication de données typifié par la publication annuelle du MEC, Résultat aux épreuves uniques de... juin ou janvier, ça n'a pas d'importance, parce que ces résultats-là ne montrent pas grand-chose. Je vais vous donner un exemple, un exemple qui me frappe annuellement: anglais langue maternelle, langage de Shakespeare, c'est une école privée qui va être le numéro un. C'est une école privée qui va être le numéro deux dans le standing. Anglais langue maternelle, je vous le dis ? mais ce n'est pas Lower Canada College, ce n'est pas le Selwyn House, ce n'est pas Miss Edgar's and Miss Cramp's ? c'est une école francophone qui performe le mieux en anglais. Est-ce vrai? Je ne pense pas. On dit que ce sont des examens uniformes, mais ce n'est pas le cas, et ils ne sont pas corrigés de façon uniforme, et ça, ça amène beaucoup de distorsion dans les résultats. Et le Fraser Institute me dit toujours, quand je leur ramène ça comme exemple: Oui, oui, mais ce n'est pas de notre faute, les données sont fournies par le ministère de l'Éducation.

Le Président (M. Cousineau): Si vous voulez conclure, M. Lombard. Il reste une minute.

M. Lombard (Alan): Certainement. Bon, nous avons suggéré comme commentaire spécifique sur le projet de loi que, de notre point de vue, on croit qu'on devrait séparer l'école de l'obligation de suivre le plan stratégique de la commission scolaire et surtout de se faire influencer par les indicateurs nationaux.

n(22 h 20)n

Le Président (M. Cousineau): Merci. M. le ministre.

M. Simard (Richelieu): Écoutez, votre mémoire et votre intervention ont le mérite d'être clairs. C'est une vertu que n'ont pas toujours les mémoires. Nous n'avons pas besoin de nous interroger, après votre intervention et la lecture de votre texte, sur son contenu: vous êtes opposés à la reddition de comptes, vous êtes opposés aux examens nationaux, vous êtes opposés à des objectifs nationaux, régionaux, vous êtes opposés à des indicateurs de performance quels qu'ils soient. Ça a le mérite d'être clair.

Est-ce que vous ne vous servez pas un petit peu, cependant ? et là c'est votre méthodologie de critique que je veux remettre temporairement en question ? vous ne servez pas un petit peu de la description des palmarès genres Actualité et Maclean's pour vous attaquer à des concepts qui sont relativement très loin de cela, les projets éducatifs et leur traduction en termes d'objectifs que sont les plans de réussite? Moi, j'ai entendu de votre part ce soir essentiellement une attaque anticomparaison palmarès qui se passe en Angleterre, qui a été mise sur pied à l'époque de Margaret Thatcher, en Nouvelle-Zélande où on a mis les «vouchers» en éducation, comme certains partis ici les proposent, et vous vous servez de cela pour dénoncer un projet de loi qui, lui, touche un phénomène de société, un phénomène qui me semble assez normal où les gens, lorsqu'ils ont une action, cherchent à déterminer un peu un horizon vers quoi ils tendent et à se doter des moyens pour l'atteindre. J'ai l'impression que vous assommez une mouche avec un énorme marteau qui n'a pas beaucoup de rapport avec la réalité. Enfin, je vous donne mon premier commentaire, et j'aimerais avoir votre réaction.

M. Lombard (Alan): On peut toujours prétendre que le projet de loi n'a pas cette intention-là. C'est un peu ce que Margaret Thatcher et les conservateurs disaient à l'époque.

M. Simard (Richelieu): Merci! Ha, ha, ha!

M. Lombard (Alan): Mais c'est vite tourné en autre chose. Regardez les États-Unis, que ce soit une équipe de football, que ce soit le système d'éducation, aux États-Unis, là, tout le monde définit le numéro 1, 2, 3, 4, 5, «the top». On cherche toujours ça. Est-ce raisonnable de penser que nous allons être les seuls à y échapper si on parle d'indicateurs nationaux dans notre projet de loi? Vous, vous me dites, et je vous crois, que ce n'est pas votre intention, mais parfois on change de ministre de l'Éducation. C'est mon expérience. Parfois... Ha, ha, ha!

M. Simard (Richelieu): ...

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: C'est là le problème.

M. Simard (Richelieu): C'est là le problème. Ha, ha, ha!

M. Lombard (Alan): Et le MEQ demeure et le ministère va sûrement vouloir imposer un jour ou l'autre. Il sera peut-être important, si c'est vraiment un marteau que j'utilise pour tuer une mouche, de mettre les affaires claires dans la loi, d'indiquer dans la loi, comme on suggère ici, lesquels, objectifs, ne devraient pas être exclusivement ou majoritairement basés sur des résultats d'examens ou sur des comparaisons. À ce moment-là, j'aurai beaucoup moins d'inquiétude. Mais c'est l'être humain qui me fait peur, ce n'est pas quand on parle en théorie. C'est deux ans plus tard.

M. Simard (Richelieu): Vous n'avez pas confiance à l'être humain?

M. Lombard (Alan): Et, déjà, c'est implanté dans certaines commissions scolaires, l'esprit quantitatif. Je n'ai rien contre le quantitatif, croyez-moi, quand c'est quelque chose de réel. Je vous cite des examens que je trouve qui sont très corrects, ceux des épreuves internationales, les épreuves...

M. Simard (Richelieu): Ça, c'est un palmarès. Le PISA, c'est un palmarès, hein?

M. Lombard (Alan): Oui, mais ce n'est pas le fait que ce soit un palmarès, c'est le fait que ce soit une population, au total, qui est comparée. Je trouve ça correct, c'est une façon de comprendre si, comme société, comme Québécois, on a un système d'éducation qui performe ou pas. Globalement, je n'ai rien contre ça, moi.

M. Simard (Richelieu): Prenons votre exemple. Je vous prends au mot. Vous nous avez rapporté ici les résultats des tests PISA, et je suis très heureux que vous l'ayez fait. Vous avez totalement raison. Le début de votre intervention est tout à fait remarquable. Nous ne sommes pas en train de tenter de réparer un système qui est tout croche et qui fonctionne mal. C'est un système qui fonctionne remarquablement bien, personne n'en doute; qui a ses faiblesses aussi, puisque 27 % de nos jeunes n'atteignent pas un diplôme secondaire avant l'âge de 20 ans. Il y a quand même quelques faiblesses. Il ne faut pas s'autosatisfaire. S'il faut s'autoévaluer, il ne faut pas s'autosatisfaire trop facilement non plus. Mais il est vrai que nous avons un excellent système, et il ne faut certainement rien faire pour le mettre péril, mais tout faire pour tenter de l'améliorer.

Là où j'ai de la difficulté à vous suivre, c'est que, ce que vous valorisez, des comparaisons entre pays, pourquoi les fait-on dans le fond? Pourquoi le Conseil des ministres de l'Éducation du Canada, hein, auquel j'assiste assez régulièrement, tient-il à ces tests? Parce que nous en avions un national, plus le PISA. Pourquoi tient-il à ces tests? C'est justement pour nous permettre de nous donner des moyens d'améliorer encore, de perfectionner. Lorsqu'on connaît la vérité, on peut s'orienter davantage. La même chose pour... vous dites: Les examens nationaux, c'est... Vous nous mettez en garde même contre la notion d'examens nationaux.

M. Lombard (Alan): Non. Vous m'avez mal compris, je crois.

M. Simard (Richelieu): Bon, bien, alors, précisez là-dessus, parce que j'étais inquiet.

M. Lombard (Alan): Ce n'est pas du tout ça que je voulais dire. Si jamais on fait des examens, il faudra les faire au complet. Parce que, quand on fait les comparaisons, quand le Conseil des ministres de l'Éducation au Canada fait quelque chose, c'est bien fait. L'examen est travaillé correctement, avec beaucoup d'inputs de notre ministère, qui fait ça très bien. Et ce n'est pas le cas dans les autres provinces nécessairement. Félicitations. Mais je crois qu'il faut absolument corriger, de la même façon, ces examens. Ça, c'est notre faiblesse. Aussi...

M. Simard (Richelieu): Mais nos examens en mathématiques, au Québec, ont des guides de correction assez précis qui nous permettent, je pense, de pouvoir évaluer...

M. Lombard (Alan): Oui, mais le palmarès est basé sur quatre sujets, surtout l'anglais et le français, soit langue seconde, dépendant du cas, et ces examens-là sont corrigés à l'école. Je vous ai donné l'exemple, là, allez-y voir, vous allez voir que c'est deux écoles privées francophones qui sont les meilleures en anglais, si je me fie à cet examen-là. Si vous croyez ça, là, il y a un pont que je vais vous vendre...

M. Simard (Richelieu): Je ne peux ni conformer ni infirmer. Je ne peux pas ni confirmer ni infirmer.

M. Lombard (Alan): Bien, je n'ai pas ça ici, mais c'est...

M. Simard (Richelieu): Oui. Non, non, mais je ne peux pas prétendre et vous ne pouvez pas non plus prétendre que ce n'est pas vrai parce que vous supposez que c'est impossible.

M. Lombard (Alan): Si vous voulez assister à ces classes dans ces écoles-là, elles sont même assez loin de Montréal, ce n'est pas des...

M. Simard (Richelieu): Je ne les connais pas. Écoutez, je comprends vos préoccupations. Et je reviens à la fin de votre intervention, vous m'avez entendu plusieurs fois ce soir, et je l'ai fait toute la journée, indiquer à quel point j'étais sensible au fait qu'un projet éducatif ne peut pas être réduit à des aspects purement quantitatifs. C'est beaucoup plus complexe. De même, le plan de réussite pour le traduire doit tenir compte d'autres facteurs que simplement des comparaisons quantitatives et mathématiques.

Le projet de loi, il me semble, ouvre à cela. Cependant, s'il faut préciser davantage, et je pense que le Conseil supérieur de l'éducation nous invite à le faire, plusieurs groupes aujourd'hui nous ont invités à le faire, nous allons donc le faire pour nous assurer, madame, monsieur, qu'il n'y a pas seulement que les bonnes intentions du ministre, mais un projet de loi qui ne nous entraîne pas dans une direction où nous ne voulons pas aller.

Les comparaisons que vous avez faites tout à l'heure sont à 100 000 lieues des objectifs éducatifs que j'ai. L'expérience de la Nouvelle-Zélande, ça fait quatre ans qu'ils essaient de se sortir du bourbier dans lequel les «school vouchers» les ont plongés. Et nous n'allons certainement pas aller dans cette direction, même si un certain parti, l'Action démocratique, ici, se fait le promoteur de ce genre de valeurs là. Ce ne sont pas nos valeurs et ce sera très, très clair, vous le verrez dans la version définitive du projet de loi. Je vous remercie.

Le Président (M. Cousineau): Merci. Alors, M. le député de D'Arcy-McGee.

n(22 h 30)n

M. Bergman: Merci beaucoup. Mrs. Warr, Mr. Lombard, thank you very much for your presentation. It's really been excellent and I appreciate the bilingual memoir, so it's easier to read both sides of the coin.

Vous faites référence que le ministère, dans vos conclusions, peut agir en qualité de centre d'échange des meilleures pratiques qui sont élaborées dans les écoles de sorte que les techniques développées dans une école soient rapidement mises à la disposition des autres écoles. Est-ce que vous pouvez élaborer sur ces concepts d'échange que vous envisagez pour le ministère pour faire profiter les écoles plus faibles des données des écoles plus fortes?

M. Lombard (Alan): Oui, avec plaisir. D'ailleurs, je tenais à vous signaler que, depuis les années soixante au moins, si on produit quelque chose, c'est toujours en anglais et en français.

Nous privilégions ce que j'ai appelé l'autoévaluation par l'école. Nous croyons que c'est un travail difficile de développer les instruments nécessaires. Il ne faudra pas faire le même travail dans chaque école, mais il faudra se donner un moyen pour qu'on travaille un aspect dans une école, un autre aspect dans une autre école pour développer ? ce que j'ai ici comme exemple ? des façons... C'est des façons de chiffrer, là, et c'est pour arriver à des évaluations quantitatives avec lesquelles on peut travailler.

L'exemple très simple, si on se donne un instrument dans une école, parce qu'on dit: Il faudra évaluer le niveau de communication que nous avons avec nos parents, un questionnaire peut-être, une espèce d'approche focus, ou peu importe, quand le travail va être fait dans cette école-là, ce sera important que ce travail soit repris, un peu travaillé peut-être, et véhiculé auprès des autres écoles pour ne pas qu'elles soient toutes appelées à toujours recréer ou réinventer la roue. C'est ce que nous voulons dire par cela. Il y a très peu d'instruments développés à date. Et je parle pour le monde entier, il y a très peu d'instruments développés qu'on peut véhiculer. C'est un travail à faire.

Lors de notre session, nous avons commencé avec des idées, et l'Association provinciale s'est donné comme mandat de véhiculer auprès de nos écoles ce que nous pouvons faire. Mais le constat que nous avons fait, avec notre approche d'amélioration de partenariat que nous avons, c'est: il faut toujours que ce soit quelque chose qui part de l'école et non pas d'en haut. Et cela dit, c'est pour encourager les gens à développer de quoi et, en contrepartie, recevoir quelque chose, pour faire un kit au complet pour nous permettre d'évaluer notre école. Ce faisant, on peut découvrir nos faiblesses et travailler sur nos faiblesses. C'est ce que j'appelle un vrai plan de réussite.

M. Bergman: Quelle est l'expérience dans d'autres juridictions de cet échange d'expériences d'une école à l'autre? Est-ce qu'il y a une expérience qui montre que les écoles plus faibles ou dans une situation plus faible dans une autre juridiction, comme la santé ou l'éducation, peuvent bénéficier de cet échange d'informations?

M. Lombard (Alan): Est-ce qu'il y a d'autres expériences? Oui, il y en a un peu que je connais. C'est surtout quelques chercheurs en Angleterre qui travaillent ça actuellement, qui font ça en Europe surtout. Ça, ce que je vous amène ici, ça a été commandé par le National Union of Teachers, en Angleterre, qui, eux, trouvaient ça important. C'est le genre de travail que nous croyons qu'on devrait faire, en unifiant ce qui a été fait dans nos écoles. Parce que ça, c'est propre à l'Angleterre. C'est utile pour nous autres, on l'a acheté, mais, quand même, il va falloir l'adapter. Ce n'est pas toujours la même réalité. Il n'y a pas grand-chose que je connais aux États-Unis, il y a de quoi au Danemark.

M. Bergman: Question d'autoévaluation, est-ce que vous pouvez nous donner votre vision d'autoévaluation des écoles?

M. Lombard (Alan): Je vais vous donner un exemple assez simple, un instrument que nous avons développé ? bien, c'est surtout Bill Smith, à McGill, avec le partenariat et l'Association: un projet-pilote dans une quinzaine de nos écoles. Ce que nous avons fait, ça a été de développer une espèce de questionnaire, mais un questionnaire à être rempli, en partie ou en totalité, dépendant de qui, ou à qui on s'adressait, par les parents, les élèves, le personnel de l'école, la direction de l'école, finalement tout le monde impliqué dans l'école. Et les gens indiquent sur une échelle Lickert de 1 à 5 est-ce que c'est bien fait ou pas, un paquet de choses que l'école fait: livraison d'information aux parents, vous sentez-vous en sécurité à l'école pour l'élève, toutes sortes de questions.

Ils ont normalisé ça pour dire: Bon, écoute, en bas de 3,5, ce n'est pas performant; en haut de 3,5, on rejoint l'objectif partiellement; en haut de 4,5, on rejoint l'objectif. Ce faisant, les écoles ont pu dire: Bon, cette année, nous allons travailler ces trois faiblesses-là, nous allons trouver des solutions à des difficultés qu'on constate. On croyait que l'école était sécure, mais ce n'est pas perçu de même par les élèves. Donc, c'est quelque chose sur lequel on devrait travailler. C'est le genre de travail que je peux vous mentionner comme exemple.

M. Bergman: I'll just go in English on this one. I just wondered why you found it necessary... your interesting conclusion, when you say, on your page 1, that the «Québec is unique among educational jurisdictions, not for the existence of two languages of education, but for the fact that the minority language group and the majority language group perform equally as well». Pourquoi est-ce que vous avez pensé que c'est nécessaire de trouver ces conclusions dans votre rapport? Pourquoi est-ce que vous trouvez ça remarquable?

M. Lombard (Alan): Ah! c'est remarquable. C'est à notre honneur, je crois, que les deux systèmes fonctionnent aussi bien l'un que l'autre. Ce n'est pas le cas ailleurs.

Une voix: ...

M. Lombard (Alan): Oui, bien, il y a ça, il y a ça. Non, non, on n'était pas parmi ceux qui s'opposaient à ça, nous, à l'APEQ, à l'époque. Et nous croyons que c'est quelque chose de remarquable au Canada. Ce n'est pas le cas ailleurs. Les minorités ont plus de difficultés à fonctionner ailleurs. Ils performent moins bien, que ce soit dans la langue, parce que c'est toujours le français ailleurs, que ce soit dans la langue première, que ce soit en maths, que ce soit en sciences. Et c'est remarquable que les deux systèmes fonctionnent, parfois avec une approche un peu différente, ce qui est très enrichissant.

Je vais vous citer un cas. Le curriculum a été beaucoup travaillé et beaucoup amendé en mathématiques du côté francophone. Il y avait un retard il y a 15 ans. C'est un curriculum qui est meilleur, dans mon point de vue ? je le jure, je le jure devant n'importe qui ? meilleur que n'importe quel autre curriculum de mathématiques dans le monde. Le système anglophone en a profité... Le système anglophone avait, à l'époque, tendance à regarder l'Ontario. Bon. Les gens ont constaté un certain retard du côté anglophone, et les anglophones ont repris ça.

Par contre, un des leaders mondiaux de l'enseignement de langues maternelles, c'est le système anglophone, l'approche «the whole language». Ça s'est répandu, on le trouve même dans la réforme de l'éducation du côté francophone, si vous voulez. C'est les deux systèmes, encouragés par le même ministère, qui produisent des effets. Il faut se rendre à l'évidence.

Le Président (M. Cousineau): M. le député de Vaudreuil. Non? M. le député de...

M. Bergman: Thank you very much again. I very much appreciate your presentation and... On vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Cousineau): Alors, je vous remercie, M. Lombard puis Mme Warr. Nous allons procéder... Bien, je vais suspendre 30 secondes pour vous saluer, mais nous allons passer...

(Suspension de la séance à 22 h 39)

 

(Reprise à 22 h 40)

Le Président (M. Cousineau): ...finales. M. le député de Vaudreuil.

M. Marcoux: Oui, M. le Président.

Remarques finales

Le Président (M. Cousineau): Alors, nous allons maintenant procéder aux remarques finales, 15 minutes à l'opposition officielle et 15 minutes à...

Une voix: Ce n'est pas une demi-heure?

Le Président (M. Cousineau): Non, 15 minutes. Ha, ha, ha! Vous pouvez faire une demi-heure si vous voulez, mais on va aller se coucher.

Une voix: ...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Simard (Richelieu): Je lui cède mon quart d'heure, il peut bien faire sa demi-heure.

M. Marcoux: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Cousineau): M. le député de Vaudreuil.

M. Marcoux: Vous seriez surpris. Ha, ha, ha!

M. Simard (Richelieu): Surprenez-moi aussi. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Cousineau): Ha, ha, ha! M. le député de Vaudreuil, vos remarques finales, s'il vous plaît.

M. Yvon Marcoux

M. Marcoux: Merci, M. le Président, oui. Remarquez qu'à l'heure où nous sommes rendus et après une journée assez chargée mes remarques seront relativement brèves. D'abord, vous remercier, puis remercier la présidente également, le vice-président, qui a présidé quelques minutes seulement, les membres de la commission, M. le ministre, et également tous les groupes qui sont venus faire des présentations devant la commission parlementaire. Ce que nous avons pu constater, c'est que chacun a bien analysé le projet de loi, a évidemment présenté des perspectives, parfois différentes, ce qui est tout à fait normal, ce qui est également enrichissant et ce qui permet parfois, aussi, de pouvoir constater qu'il y a peut-être des améliorations à apporter au projet de loi.

Je dirais qu'il y a peut-être trois ou quatre éléments principaux et qui feront sans doute l'objet de reconsidérations par le ministre, comme il l'a mentionné. Je voudrais aussi ajouter la contribution, je pense, de l'avis du Conseil supérieur de l'éducation, qui est bien fait, une bonne analyse. On peut être d'accord ou en désaccord avec certains de ses éléments, mais je trouve que c'est enrichissant que d'avoir un avis comme celui-là pour l'analyse d'un projet de loi comme le projet de loi n° 124. Et d'ailleurs, j'avais peut-être une proposition à faire, M. le ministre. Dans d'autres cas, si ça arrive ? ce matin, c'est un peu par hasard, sur Internet, comme je disais, que nous sommes allés voir ? il serait intéressant, si parfois vous le recevez, que vous puissiez nous le communiquer. Je pense que ça me...

M. Simard (Richelieu): On l'a reçu mercredi, là. Vous l'avez reçu le lendemain.

M. Marcoux: La veille. Bon. D'accord. Mais je pense que c'est extrêmement intéressant. Évidemment, il y a un élément sur tout ce qui touche à la portée ou la compréhension de la notion du temps de réussite et la notion de réussite par rapport à la triple mission de l'école, qui est énoncée à l'article 36. Les interrogations qui ont été soulevées, et par plusieurs groupes, également par le Conseil supérieur de l'éducation, indiquent, à mon avis, je pense, qu'il y a lieu de préciser cet élément-là.

Moi, personnellement, je pense que nous sommes tous d'accord sur l'établissement de cibles ou d'objectifs quantitatifs, ce qui touche d'abord la réussite scolaire. Mais il est essentiel de ne pas oublier les autres aspects, qui sont de qualifier et socialiser. Et ça rassurerait, je pense, tout le monde et sans doute que ça pourrait éviter également, à un moment donné, des interprétations. Parce que, comme vous l'avez dit vous-même, tu sais, parfois, les personnes passent et les institutions restent, et ça évite... même si on recherche les intentions du législateur subséquemment. S'il y a moyen de le préciser, je pense que ça permet d'aider tout le monde.

L'autre élément, je dirais, c'est celui aussi, dans l'application du processus, de tenter d'être le plus simple possible. Je pense que tenter de ne pas trop compliquer tout le processus, c'est une préoccupation, moi, je pense, qui est importante. Je comprends que ça ne peut pas... Il faut quand même avoir certains éléments et des statistiques. Mais, souvent, il y a moyen de présenter des éléments d'une façon concise, et c'est plus facile pour ceux qui le reçoivent de le comprendre et d'en discuter et, souvent, de cerner également les enjeux. Ça, je pense que c'est une préoccupation, en tout cas, qui, pour moi, est importante.

L'autre point, c'est sans doute le rôle des conseils d'établissement avec les directions d'école en ce qui a trait à l'adoption du plan de réussite, l'approbation du plan de réussite, les relations du projet éducatif avec le plan de réussite, et c'est une préoccupation qui est ressortie dans un certain nombre de mémoires et dans le cadre des discussions que nous avons eues. Donc, sans doute, là, qu'il y a certaines clarifications aussi à apporter.

Le dernier élément, je dirais, est celui du respect de l'esprit de la loi n° 180 en ce qui a trait à la décentralisation, donc de confirmer cette orientation qui a été adoptée il y a maintenant... en 1997, il y a cinq ans, et qui aussi, dépendant des groupes qui sont venus témoigner... Les groupes représentant, je dirais, l'administration scolaire se sentent confortables en disant: Non, c'est tout à fait correct. On a pu percevoir que les groupes qui représentent davantage l'école, l'établissement scolaire, que ce soient les enseignantes et les enseignants ou encore les directions d'école, ont une préoccupation à cet égard, comme l'a évoqué également le Conseil supérieur de l'éducation. Peut-être serait-il possible de donner un message à l'effet que ce n'est pas seulement imposé d'en haut, c'est-à-dire les axes d'intervention, mais que le plan stratégique des commissions scolaires doit également tenir compte de ce qui émerge des établissements ou des éléments principaux. Alors, ça, à un moment donné, ce serait intéressant et ça confirmerait l'esprit qui a présidé à l'élaboration et à l'adoption de la loi 180.

Alors, pour moi, M. le Président, ce sont les principaux éléments. Je pense que nous aurons l'occasion, en commission parlementaire, de discuter article par article et puis, moi, je suis très ouvert à apporter ma collaboration. Et également je voudrais dire au ministre que nous apprécions beaucoup son ouverture à vouloir, si c'est possible, bonifier le projet de loi, et ça, c'est très positif. Alors, merci, M. le Président.

Le Président (M. Cousineau): Merci, M. le député de Vaudreuil. M. le ministre.

M. Sylvain Simard

M. Simard (Richelieu): Alors, merci, M. le Président. D'abord, remercier de la collaboration de tous les collègues autour de cette table, et des deux côtés. Je sais qu'il faut parfois beaucoup de patience. Et je sais d'expérience, parce que j'ai joué ce rôle aussi, M. le Président, que présider demande beaucoup d'attention, participer, notamment du côté ministériel, où l'implication est parfois limitée, demande énormément de patience, et je veux remercier mes collègues, de part et d'autre, de la remarquable collaboration qu'ils m'ont apportée aujourd'hui, qu'ils nous ont apportée aujourd'hui. Remercier évidemment les gens qui m'accompagnent. Je ne l'ai jamais présentée, mais vous connaissez tous Mme Gosselin, sous-ministre au réseau, au ministère de l'Éducation; M. Gardner, à ma gauche, qui est mon adjoint pour ces mêmes... pour le primaire et le secondaire; et nos juristes et amis du ministère, que vous connaissez parce qu'ils nous suivent de projet de loi en projet de loi, les remercier pour leur collaboration. Également, évidemment...

M. Marcoux: Je partage avec vous ces remerciements.

M. Simard (Richelieu): Merci. Et remercier d'abord et avant tout les groupes qui sont venus aujourd'hui, qui se sont donné la peine de travailler pendant des heures, parfois des jours, de faire des réunions, de jouer pleinement ce rôle démocratique de participation à l'Assemblée nationale, aux travaux de l'Assemblée nationale. Évidemment, tous ne sont pas arrivés ici avec exactement le même point de vue, mais ils nous ont tous éclairés, d'une façon ou d'une autre, sur des aspects du projet de loi. J'ai entendu, il y a quelques instants, mon collègue et ami le critique de l'opposition extraire de ce qui s'est fait aujourd'hui un certain nombre de points qui devraient attirer notre attention, quand nous analyserons article par article, de façon à nous assurer que le projet de loi corresponde davantage aux attentes. Et je peux dire que je partage assez bien les principaux points de... J'ai retenu en effet à peu près les mêmes points. Évidemment, dans certains cas, c'est plus facile à dire qu'à faire. Je pense notamment au partage de la responsabilité entre les conseils d'établissement et les directions d'école, où on a vu que les lignes de clivage sont assez délicates. Et il ne faut jamais non plus, sous prétexte de penser améliorer quelque chose, briser un équilibre, qui serait rompu et qui changerait complètement le sens du projet de loi. Donc, il faut être attentif.

n(22 h 50)n

Nous allons essayer d'améliorer, de bonifier, de perfectionner le projet de loi, mais il y a certains points sur lesquels il faudra se limiter à une certaine imperfection, puisqu'on ne peut pas tout prévoir. Et il y a des choix à faire. Il y a un moment où il faut trancher, la ligne doit passer quelque part. Mais, préciser la notion de plan de réussite, c'est bien évident que c'est dans mon intention. Et nous allons apporter des modifications qui nous permettront, je l'espère, de voir un peu plus clair, ne serait-ce que pour répondre à des éléments extérieurs au projet de loi, à des pratiques, à des perceptions. On a entendu souvent le mot «perception» aujourd'hui. Si nous pouvons aller à... Si la loi permet d'éviter certaines perceptions fausses, ce sera d'autant plus facile, et on évitera peut-être des mois et des mois de querelle sur le sens de mots.

Pour ce qui est de la décentralisation, il faut la préserver très attentivement. Je crois que les séquences qui sont prévues par la loi sont beaucoup plus dynamiques. Elles s'autofécondent et elles doivent s'autoféconder de façon très dynamique. Et je ne vois pas une approche du haut vers le bas dans ce que nous avons présenté, mais il faut que ce soit clarifié peut-être davantage dans le projet de loi pour être bien à l'aise et nous assurer qu'effectivement l'opération essentielle soit toujours celle qui se réalise dans les écoles, qui est au coeur du processus éducatif.

Vous avez vu que c'est cette réussite éducative, et dans toutes ses composantes, qui est au coeur des principales priorités du gouvernement du Québec. Nous voulons évidemment, tous ici, autour de cette table, favoriser la persévérance chez les élèves. Nous voulons les accompagner afin de les aider à se réaliser pleinement. Les interventions sont toutes allées dans ce sens, je crois. Et nous allons nous assurer que cette réussite éducative devienne pour tous une réalité.

Alors, je remercie tous ceux et celles qui ont enrichi notre réflexion aujourd'hui. Nous avons fait de la réussite scolaire et éducative pour tous les élèves l'une de nos principales priorités collectives au Québec depuis 30 ans. L'éloge qui a été fait de notre système par un groupe qui, pourtant, n'avait pas beaucoup de sympathie pour les méthodes quantitatives d'évaluation, dont nous proposons, en partie, l'adoption, nous rappelle, à juste titre, que nous avons un système d'éducation remarquable, qu'il nous faut améliorer mais qu'il ne faut jamais mettre en péril. Alors, c'est une obligation, c'est un devoir, c'est une mission que nous avons et que nous allons tenter, au cours des prochaines semaines, dans l'étude article par article du projet de loi, de mettre au coeur de nos préoccupations.

Alors, je vous remercie, M. le Président, et j'espère que nos travaux vont se poursuivre de façon aussi intéressante dans les prochains jours.

Le Président (M. Cousineau): Alors, merci à tous et à toutes. La commission, ayant terminé ses travaux, ajourne sine die.

(Fin de la séance à 22 h 54)


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