(Quinze heures dix-huit minutes)
La Présidente (Mme Bélanger): Je constate que nous avons quorum. Je déclare donc ouverte cette séance de la commission de l'éducation.
Le mandat de la commission est d'entendre les dirigeants et dirigeantes des établissements d'enseignement de niveau universitaire sur leurs rapports annuels 1999-2000, conformément aux dispositions de la Loi sur les établissements d'enseignement du niveau universitaire.
Alors, Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
La Secrétaire: Non, Mme la Présidente.
Auditions (suite)
La Présidente (Mme Bélanger): Il n'y a pas de remplacements. Alors, j'aimerais dire à nos invités que nous avons deux heures. Donc, c'est 40 minutes pour faire votre présentation, suivies d'une discussion avec les membres... Ah bon! Je l'ai devant moi. Alors, un exposé de 40 minutes, pour une période d'échange de 80 minutes.
Alors, monsieur, je vous demanderais de vous présenter, de présenter les personnes qui vous accompagnent, même si nous vous connaissons bien, c'est pour le bénéfice du Journal des débats.
Université Laval (UL)
M. Tavenas (François): Très bien. Mme la Présidente, merci beaucoup de nous accueillir dans cet exercice annuel, ou presque, de reddition de comptes des universités devant l'Assemblée nationale et sa commission de l'éducation.
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(15 h 20)
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Je suis accompagné de Claude Godbout, qui est le vice-recteur aux affaires académiques et étudiantes et vice-recteur exécutif de l'Université, et de Michel Héroux, qui est le directeur des relations gouvernementales.
Et puis j'ai le plaisir d'être accompagné par une bonne délégation de l'Université Laval: M. Banville, qui est le président du Syndicat des professeurs; M. Brochu, qui est du Syndicat des chargés de cours; une délégation d'étudiants de premier cycle; le président sortant de l'Association des étudiants de premier cycle ? il a terminé son mandat en fin de semaine ? M. Cédric William; le président de l'Association des étudiants de deuxième et de troisième cycles, M. Mamboundou, qui est accompagné de quelques collègues; et puis Christian Robitaille, qui est candidat au rectorat, puisque vous savez que nous vous imitons, de ce temps-ci, nous sommes en campagne électorale à l'Université Laval. Et donc, Christian et moi, nous étions dans un débat public aujourd'hui sur le campus.
Une voix: ...
M. Tavenas (François): Non, non, pas du tout. Ici, nous sommes ici pour présenter le rapport en application de la loi sur les établissements d'enseignement universitaire, le rapport pour l'année 1999-2000. Alors, c'est un petit peu ancien, et je me suis dit qu'il serait approprié, avant que nous abordions les questions que vous nous avez posées, de vous faire une petite mise à jour de ce rapport 1999-2000. Je sais que les services de la commission ont fait des analyses de ces rapports-là, et nous pourrons répondre aux questions.
Alors, je n'ai pas de copie de mon texte parce que, vous voyez, il y a plein de petits graffitis dessus puis je sais que les services de l'Assemblée nationale reproduisent tout ça, là, intégralement et tel que c'est dit. Donc, je n'ai même pas besoin de m'assurer de la concordance entre un texte écrit et les paroles prononcées du fameux truc.
Alors, laissez-moi d'abord vous brosser à grands traits un tableau de la situation de l'Université Laval en citant un certain nombre de données statistiques qui donnent une idée du volume et de la qualité de nos activités. Je vous dépose, pour votre information, là ? ce n'est pas un dépôt officiel pour la commission à l'Assemblée nationale, là, mais c'est pour votre information à vous ? d'abord, le rapport annuel 2000-2001 de l'Université, qui vous donne donc une image complète assez récente de nos activités et des grands événements qui ont marqué la vie universitaire.
La population étudiante à l'Université Laval se chiffre à 35 500 personnes. L'Université a pu maintenir cet effectif constant au cours des dernières années malgré la décroissance démographique du bassin naturel dans lequel se fait le recrutement de l'Université Laval. Ce maintien s'est fait principalement par des progrès enregistrés dans les inscriptions dans nos programmes de premier cycle en sciences de l'administration et en sciences et génie et puis par le démarrage de programmes de formation continue et par aussi des efforts du côté de l'accueil, encadrement, intégration des étudiants, ce qui fait qu'on a un peu amélioré nos taux de rétention.
Nos étudiants viennent toujours principalement de la région de Québec, 60 % à peu près, 16 % de l'Est du Québec, mais nous avons eu une croissance des étudiants en provenance de l'Ouest du Québec. La population se chiffre maintenant à 14 % de l'ensemble étudiant. Je noterai aussi que la proportion des diplômés de cégeps qui s'inscrivent à l'Université Laval dans notre bassin naturel de recrutement, cette proportion est en croissance régulière, là, depuis quelques années, et j'y vois le signe de l'attrait de nos programmes et, donc, un signe de la qualité de nos programmes, puisque, si on attire plus d'étudiants, c'est parce qu'on doit faire des choses bien et comme il faut.
Le nombre d'étudiants étrangers est en croissance lui aussi. Il se situe actuellement à 6 % de la population totale. Et, si je veux terminer ce petit tableau statistique concernant les étudiants, nous avons décerné, au printemps 2001, plus de 8 000 diplômes, 8 077 pour être précis: 6 330 baccalauréats; 1 510 maîtrises; 227 doctorats, le chiffre de 227 étant, en fait, le résultat d'un transfert d'une année sur l'autre. En moyenne, nous nous tenons à 235, 240. L'année précédente, on en avait diplômé 262 parce qu'il y a eu une dernière fournée, là, qui est arrivée juste avant la fin de l'année.
Au niveau de la recherche, des montants annuels de subventions et de contrats ont connu une croissance régulière très importante au cours des dernières années. On était à 110 millions de dollars de subventions et contrats de recherche en 1997; on est à plus de 160 millions en 2000-2001. C'est tout à fait remarquable comme performance, surtout si on prend en compte le fait que, du fait des coupures de subventions, nous avons dû réduire nos dépenses et, en particulier, réduire le nombre de professeurs et de demandeurs de subventions. Nous avons effectivement 200 professeurs de moins aujourd'hui que nous en avions en 1997 et 50 % de plus de recherche, ce n'est pas banal comme amélioration de la performance de tout le monde.
Nous avons obtenu des résultats impressionnants dans les grandes compétitions au niveau canadien pour le financement de la recherche. Le dernier de ces résultats, c'est évidemment le concours de la Fondation canadienne de l'innovation, qui nous a amené 53,5 millions de dollars de subventions pour toute une série de projets précis, y compris des projets de construction de laboratoires de recherche, des projets d'équipements, à l'Université et dans le réseau hospitalier affilié à l'Université Laval.
Nous nous trouvons dans la situation intéressante où il va se réaliser, à partir des prochaines semaines, pour plus de 150 millions de dollars de travaux de construction, d'installation d'équipements, de développement d'infrastructures de recherche. J'en suis tout à fait heureux parce que c'est d'une part l'indication de la qualité des chercheurs qui oeuvrent à l'Université Laval et puis c'est une garantie pour eux qu'ils vont avoir des installations à la fine pointe, là, qui vont leur permettre d'affirmer leur place sur la scène internationale.
Notre excellence en recherche, elle ne se fait pas juste au chapitre du financement, elle se fait aussi au chapitre des résultats de la recherche. Et, pour l'année 2000, qui est l'année dont nous parlons, là, officiellement dans le contrat sur lequel je vous fait rapport, la revue Québec Science, qui publie à chaque année une espèce de palmarès de la recherche au Québec et qui identifie les 10 grandes découvertes de l'année, Québec Science, en 2000, a identifié cinq des 10 grandes découvertes provenant de l'Université Laval. Alors, la moitié du tableau d'honneur de Québec Science, en 2000, était le résultat de recherches exécutées à l'Université Laval.
Par ailleurs, je pense bien que je n'ai pas besoin d'insister sur l'importance de notre Université dans le développement économique de la région de Québec, de la grande région de Québec, qu'il s'agisse de biotechnologie agroalimentaire, de nutraceutiques, de biotechnologie médicale, de développement de la géomatique, du développement de tout le secteur des matériaux et puis de l'optique photonique.
Nous sommes, je pense, le moteur du développement économique de la région de la Capitale-Nationale et nous avons mis en place une société en commandite en collaboration avec le Centre hospitalier universitaire de Québec, le CHUQ. Nous avons créé cette société, SOVAR, avec l'appui de Valorisation-Recherche Québec. Nous avons été les premiers à instaurer cette société pour contribuer encore plus à la valorisation de la recherche et à la création d'entreprises.
L'Université Laval, c'est 36 centres de recherche reconnus dans un processus très rigoureux de sélection géré par notre Commission de la recherche et le Conseil universitaire. Sur les 36 centres reconnus, dont quelques-uns sont de naissance assez récente, 28 ont passé avec succès les évaluations des organismes subventionnaires provinciaux et passé avec succès l'évaluation dans le nouveau contexte beaucoup plus exigeant qui implique des partenariats en réseau avec d'autres universités au Québec, et donc je suis particulièrement heureux, là, de nous voir très bien performer dans ce programme.
L'Université Laval est aussi la tête de réseau de deux réseaux canadiens de recherche financés par le programme des Réseaux de centres d'excellence, le réseau GEOIDE, dans le domaine de la géomatique, et le réseau ICIP ? I-C-I-P ? dans le domaine de l'optique photonique. Dans les deux cas, c'était simplement reconnaître l'expertise et le leadership national et international des chercheurs de Laval dans ces domaines.
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(15 h 30)
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Vous savez que le gouvernement canadien a créé, il y a une couple d'années maintenant, le Programme des chaires de recherche du Canada, qui permet aux universités de créer des postes ou d'affecter de ces chercheurs de grande réputation sur des postes dont le financement est garanti à long terme, ce qui nous permet d'être un petit peu plus compétitifs sur la scène internationale. Laval se voit attribuer, par ce programme-là, une centaine de chaires au cours des cinq années prévues pour le Programme. Nous avons doté, à l'heure actuelle, 35 de ces chaires avec des candidats de l'interne, pour la majorité, mais aussi avec un certain nombre de professeurs que nous sommes allés recruter sur la scène internationale.
Ça nous a amenés à établir un plan de développement de la recherche, et il vous est déposé, là, dans la pochette qu'on vous a remise. Ce plan de développement de la recherche fait, en fait, le tour des secteurs d'excellence de l'Université, des secteurs en croissance à l'Université. C'est un plan que nous mettons à jour annuellement, non pas parce que nous changeons d'idée annuellement, mais parce qu'il se passe suffisamment de choses dans la communauté universitaire pour qu'on soit amenés à préciser un certain nombre de choses, à mettre l'emphase sur des développements particuliers. Donc, c'est devenu, pour nous, un document de planification permanente, là, du développement de nos activités. Alors, ça vous donnera, en même temps, une idée de l'extrême richesse de la recherche universitaire qui se fait à l'Université Laval.
Nous sommes impliqués depuis quelque temps, comme un peu tout le monde dans les réseaux universitaires, dans la réflexion autour de la protection et de la mise en valeur de la propriété intellectuelle issue de la recherche. C'est un sujet important, c'est aussi un sujet difficile parce qu'il implique beaucoup de monde. Il implique toutes les composantes de la communauté universitaire: les professeurs, les étudiants, le personnel technique, le personnel professionnel. Et puis aussi il implique la responsabilité de l'Université dans la gestion de fonds publics et dans le contrôle, je dirais, de l'exploitation des résultats, des fruits de cette dépense de fonds publics pour, dans toute la mesure du possible, le bien public.
Alors, je voulais vous dire là-dessus que, suite à une entente qui a été conclue avec le Syndicat des professeurs de l'Université Laval à l'automne dernier, nous sommes en train de mettre en place un comité qui sera composé de représentants du syndicat, des étudiants et de la direction de l'Université, de façon à nous faire avancer sur ce dossier. Il faut que cette question de politique de propriété intellectuelle soit traitée en concertation avec l'ensemble des parties. La publication par le gouvernement du Québec de sa politique de la recherche, de la science et de la technologie et puis surtout, plus récemment, d'un cadre de référence pour la propriété intellectuelle va sans aucun doute éclairer nos discussions et nous donner un certain nombre d'orientations.
Alors, ça, c'était pour le petit retour que je voulais faire, mise à jour. Vous me pardonnerez sans aucun doute de ne pas vouloir passer avec vous à travers le rapport officiel de la loi n° 95. Vous l'avez eu, je suis sûr que vous l'avez analysé et que nous avons répondu à toutes les exigences de la loi.
Je voudrais maintenant aborder quelques questions que vous nous avez suggérées pour fins de discussion. D'abord, le contrat de performance. Sur cette question, ce que je voudrais vous dire, c'est que, quand la problématique des contrats de performance a été mise sur la table par le ministre de l'Éducation, en ce qui concerne l'Université Laval, nous étions particulièrement prêts pour nous insérer dans cette problématique-là dans la mesure où nous avions une idée très claire de nos objectifs institutionnels, de nos priorités institutionnelles de développement.
En 1997-1998, il y avait eu une commission d'orientation qui avait siégé à l'Université, impliquant à peu près tout le monde sur le campus dans une consultation très structurée, et ce rapport de la commission d'orientation nous a servi de guide au cours des dernières années. Il fixait des grandes priorités, des grandes lignes d'action pour l'ensemble de la communauté.
En 2000, donc deux ans et demi plus tard, là, nous avons éprouvé le besoin de faire le point sur le rapport de la commission d'orientation. Et nous avons donc convoqué les instances de l'Université, les commissions, le conseil universitaire, le conseil d'administration, de même que des partenaires externes de l'Université dans deux journées de réflexion autour du rapport de la commission d'orientation pour faire une mise au point: Où est-ce qu'on en est? Qu'est-ce qui a été réalisé? Qu'est-ce qui reste à faire? Est-ce que les constats sur l'environnement sont toujours pertinents, etc.? Et ça nous a donné les bases de notre plan stratégique 2000-2003, qui est en cours d'exécution et qui est dans la continuité du rapport de la commission d'orientation.
Alors, quand il a été question d'établir un contrat de performance, bien, nous avions, en ce qui nous concernait, fait toute la réflexion qu'il y avait à faire sur ce que devaient être les priorités de l'Université Laval et ça a été pour nous relativement facile d'élaborer ce que j'ai appelé notre convention de développement institutionnel, qui a été déposée à l'automne de l'année 2000 au ministère de l'Éducation et qui a servi de base à la formulation du contrat de performance. Alors, je veux insister là-dessus parce que c'est tout à fait essentiel, le contrat qui est passé entre le gouvernement du Québec et l'Université Laval reflète intégralement, entièrement, totalement les priorités institutionnelles de notre Université. Et, dans ce sens-là, je le vois comme une base solide d'interaction parce que, en même temps que nous nous engageons à faire ce qu'on s'était promis de faire nous-mêmes, le gouvernement, de son côté, s'engage à financer les priorités de l'Université d'une façon très concrète.
Alors, on est donc dans une situation où, pour nous, ce contrat qui lie les deux parties va nous permettre de réaliser nos priorités institutionnelles. On nous a demandé, au mois de novembre dernier, de faire un premier bilan sur la mise en oeuvre du contrat de performance. Ce bilan a été facile à faire, il est positif et vous en trouverez un document... le document qui a été déposé à notre conseil universitaire et qui a été déposé au ministère à la fin de novembre dernier et vous constaterez, à la lecture de ce document, que nous avons atteint ou dépassé tous les objectifs qu'on s'était donnés. Il n'y a pas de grande surprise là, on était déjà en train de travailler dans le sens fixé.
Je pense très sincèrement que l'approche de contrat de performance peut être un moyen de faciliter, à l'avenir, les échanges que nous avons, peut être une façon d'aller un peu plus loin dans les objectifs de la loi n° 95, dans le respect des orientations institutionnelles des établissements. Ça, c'est tout à fait essentiel, ça avait été un élément fondamental des discussions que nous avions eues à l'époque avec le ministre de l'Éducation. Ce contrat de performance se doit de refléter les priorités institutionnelles. En ce qui nous concerne, il le fait. Je pense que c'est le cas pour l'ensemble des universités, mais je ne parlerai pas en leur nom, là. Et ça peut être pour nous, je crois, un bon outil de reddition de comptes et d'interaction entre l'Assemblée nationale et les universités.
Vous nous avez demandé de parler de financement. Vous vous imaginez que j'accepte cette invitation avec un certain plaisir. Le gouvernement du Québec a fait des efforts considérables de refinancement des universités dans la foulée du Sommet du Québec et de la jeunesse, au cours des trois dernières années. Il nous reste encore une année à faire. Et, pour avoir été un des acteurs du Sommet du Québec et de la jeunesse, je sais les efforts que ça a pu représenter et j'apprécie à leur juste valeur les efforts du gouvernement pour amorcer le refinancement de l'enseignement supérieur. Ceci dit, il ne faut surtout pas penser que, une fois les engagements du Sommet respectés jusqu'à bout, on aura réglé le problème.
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(15 h 40)
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Il y a un des engagements du Sommet qui, dans les faits, n'a pas encore été respecté et que je m'attends à voir respecté rapidement, c'est celui qui voulait que nous établissions une comparaison systémique validée à l'externe entre le financement universitaire au Québec et le financement dans les autres provinces canadiennes. Nous avons fait ? quand je dis «nous», c'est la CREPUQ ? nous avons fait des propositions au gouvernement en ce sens, il y a eu toutes sortes de discussions, mais nous n'avons, pour l'instant, pas pu convenir de la mise en oeuvre de cette étude comparative. Alors, mes collègues de la CREPUQ et moi-même avons décidé, à la dernière réunion du conseil d'administration, que nous allions procéder à l'étude ? parce que je pense qu'il nous faut la faire ? et que nous allons procéder avec une étude qui implique une expertise externe de façon à lui donner toute la crédibilité voulue et que nous ayons finalement une image claire de la position des universités québécoises par rapport aux autres universités canadiennes.
Alors, dans votre pochette, vous allez trouver une comparaison qui est faite à partir des chiffres qui nous sont disponibles. Alors, ces chiffres, ils sont... Je ne vous les dépose pas en disant: C'est des chiffres sur lesquels je peux mettre toutes les garanties d'exactitude et de certitude voulues parce que c'est des chiffres qui sont sortis des rapports annuels des universités avec lesquelles nous faisons des comparaisons et ils ne tiennent pas nécessairement compte de tous les raffinements dans les différences, dans la façon de comptabiliser des étudiants, de comptabiliser du personnel ou, disons, de mesurer les activités de façon générale. Mais c'est les chiffres publiés par chacune des universités. Alors, je vous invite à regarder ces chiffres-là.
Les universités qui sont dans ce tableau, les trois premières, Alberta, Laval et Western, c'est les universités qui sont classées cinquième, sixième et septième dans ce qu'il est convenu d'appeler le groupe des dix au Canada, c'est-à-dire les 10 grandes universités de recherche. Et vous allez constater, si je vous amène à la troisième colonne de droite, que le ratio dollars disponibles à partir des subventions gouvernementales et des droits de scolarité, c'est-à-dire des fonds qui sont disponibles pour gérer les opérations courantes, ratio par étudiant: 14 000 $ à l'Université d'Alberta; 8 000 $ à l'Université Laval; 11 000 $ à l'Université Western. Alors, je ne suis pas en train de vous dire: Ces chiffres-là sont l'image complète, parfaite des disparités, mais je suis en train de vous dire qu'il y a une indication de disparité suffisamment substantielle pour qu'il soit urgent qu'on ait des études très fiables qui vont nous permettre de faire des comparaisons solides. Alors, nous sommes en train de le faire.
J'avais espérer que, comme on en avait convenu au Sommet du Québec, ces comparaisons puissent se faire ensemble, bon, on n'a pas avancé suffisamment. Je pense qu'on en a besoin, de ces comparaisons, et nous allons donc les faire. Mais vous pouvez voir sur ce tableau que l'Université Laval tire plutôt de la patte en termes de financement et de financement par étudiant. Alors, quand on sait que le marché des professeurs d'université, pour ne prendre que celui-là, est un marché mondial dans lequel la concurrence s'exerce à plein tous les jours, des disparités de financement comme celles-là ne peuvent pas faire autrement que d'avoir un impact négatif sur notre capacité d'attirer et de retenir les professeurs dont on a besoin, d'attirer et de retenir les étudiants de bonne qualité dont on a besoin. Il y a un réel problème là. Vous allez sans aucun doute en entendre parler. Vous en avez, je pense, déjà entendu parler par un certain nombre de mes collègues. Il y a une urgence à poursuivre l'effort de réinvestissement dans l'enseignement supérieur québécois.
Je voudrais maintenant souligner quelques autres problèmes que nous avons à vivre, des problèmes du côté des espaces, qui sont des problèmes de ressources là aussi. Les normes gouvernementales d'espace disent que l'Université Laval a toujours largement ce qu'il lui faut en termes de mètres carrés pour faire le travail qu'il y a à faire, mais les collègues qui m'accompagnent et les étudiants qui sont là vous diront qu'on est serrés à bien des endroits et puis surtout qu'avec la structure facultaire et la structure de pavillons que nous avons, il n'y a pas toujours congruence entre là où sont les étudiants et là où se trouvent les mètres carrés. Et alors nous avons un certain nombre de projets prioritaires, et en particulier celui de la réfection du pavillon Vandry pour tout le secteur des sciences de la santé. C'est un secteur qui est en pleine croissance. Le gouvernement du Québec nous a demandé d'augmenter de 70 % les clientèles en médecine, de 40 % les clientèles en sciences infirmières, d'une trentaine de pour cent les clientèles en pharmacie, il va nous falloir de la place pour ça. Et donc nous avons déposé un projet. J'espère que nous allons trouver avec le ministère des moyens de résoudre ces problèmes-là.
Rationalisation des programmes. Vous vouliez en entendre parler. Je vous ai déposé un tableau qui a été déposé au conseil universitaire du mois de février dernier. Donc, il est tout chaud, tout récent. Et vous pourrez constater, à l'examen de ce tableau, qu'il y a un travail énorme de reconfiguration de programmes qui s'est exécuté à l'Université Laval au cours des dernières années. Il reste encore un bon bout de chemin à faire, là, avant que nous soyons au bout de nos priorités, mais il y a vraiment beaucoup de travail qui a été fait. Les programmes de l'Université Laval, le ministre de l'Éducation l'a déjà déclaré publiquement, sont parmi les mieux gérés du Québec, je pense que c'est effectivement le cas.
Vous vouliez qu'on se parle, enfin, de relations avec les cégeps. Là-dessus, sans vouloir me vanter, je pense que l'Université Laval est, à l'heure actuelle, celle qui a les meilleures relations avec le réseau des cégeps dans tout l'Est du Québec. Nous avons établi le principe de rencontres très systématiques, très régulières avec les directions de cégep. Nous avons établi des rencontres de professeurs d'université et de professeurs de cégep, discipline par discipline. Nous avons négocié toute une série de passerelles pour faciliter le passage de D.E.C. techniques à des programmes universitaires. Et nous avons créé, finalement, des programmes de D.E.C.-bac intégrés, c'est-à-dire en travaillant avec les cégeps à l'intégration complète de nos curriculums. Vous avez, dans la pochette qui vous a été remise, une liste de toutes les ententes qui ont été passées et vous constaterez qu'il y en a un bon nombre, une vingtaine, et pas juste dans la région de Québec, puisqu'il y a aussi Alma, Baie-Comeau, La Pocatière, Rivière-du-Loup, Saint-Hyacinthe qui sont dans ces ententes.
Alors, nous avons l'intention de poursuivre dans ce domaine-là. Et je me permettrai de souligner, à ce sujet, que le travail que nous faisons est un travail véritablement désintéressé parce que, dans ces ententes de D.E.C.-bac intégrés et de passerelles, ce que nous faisons, finalement, c'est de permettre aux étudiants de raccourcir leurs études de l'ordre de deux sessions ou une année complète. Ce raccourcissement des études, pour eux, c'est un gain de temps puis c'est un gain de dépenses. Pour le gouvernement du Québec, c'est une économie considérable parce que, au lieu d'avoir des programmes de trois ans au cégep, trois ans à l'université, c'est des programmes de deux ans ou deux ans et demi au cégep, et deux ans et demi ou trois ans à l'université. Au total, il y a une année d'enseignement supérieur qui est économisée. C'est notre contribution à l'état des finances publiques du Québec. Mais c'est très magnanime parce que, en même temps, c'est une réduction des revenus pour l'Université Laval. Et nous le faisons. Je pense que c'est une belle illustration de notre sens des responsabilités et de l'engagement dans le développement de notre société.
Toujours au chapitre de la reconfiguration des programmes, je voudrais insister sur notre action dans le développement des profils internationaux et de l'action internationale de l'université. Là aussi, l'Université Laval est un modèle. Nous avons mis en place un modèle de profil international dont l'objectif est que 20 % de nos diplômés acquièrent une expérience internationale durant leurs études par un stage d'au moins un trimestre ? en fait, c'est en moyenne deux trimestres, maintenant, à l'étranger ? dans des universités partenaires. Cinquante-deux de nos programmes, toutes disciplines confondues, offrent aujourd'hui de ces profils internationaux et permettent à des étudiants d'aller faire un stage dans une université étrangère, leur permettent de s'ouvrir à la diversité linguistique, à la diversité culturelle, etc. Nous avons décerné, en juin dernier, les premiers diplômes portant la mention Profil international, puisque les étudiants qui auront cette expérience la verront validée par une mention dans leur diplôme.
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(15 h 50)
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Je passe rapidement pour en arriver à la problématique de l'embauche et de la rétention du corps professoral. Je vous ai dit tout à l'heure la nécessité de donner aux universités québécoises un meilleur financement de façon à leur permettre d'être plus actives, plus concurrentielles sur la scène canadienne et internationale. Nous faisons face à un défi, vous en avez déjà entendu parler, là, je pense, tous mes collègues ont souligné le problème, nous faisons face, en fait, à une multiplicité de défis.
Nécessité de renouveler le corps professoral. Il y a eu toutes la croissance du système universitaire qui s'est faite dans les années soixante-dix. C'est qu'il y a toute une cohorte de gens qui sont en âge de prendre leur retraite, qui ont commencé à le faire puis qui vont le faire aux cours des prochaines années, et donc il y a un problème de renouvellement. On n'est pas les seuls là-dedans. Donc, le marché des professeurs d'université est de plus en plus compétitif sur la scène internationale, ce qui complique le problème financier.
Nous avons, par ailleurs, l'obligation de fournir à ces professeurs que nous engageons des conditions de travail qui soient attrayantes, et ce n'est pas juste des conditions de salaires, c'est aussi des conditions de salaires, mais c'est des conditions d'environnement de recherche, c'est des conditions générales, là, de travail. Je dirais que, de ce côté-là, il y a des progrès qui ont été faits par le financement des infrastructures de recherche, par le refinancement public au Québec, mais il y a encore beaucoup, beaucoup, à faire.
L'Université a cependant des avantages à faire valoir. Le premier est notre organisation de la recherche, notre structuration de la recherche en centre, en institut, qui constitue un élément d'attrait substantiel. Nous avons, par exemple, réussi, au cours des deux dernières années, à recruter au centre de recherche Université Laval?Robert-Giffard, dans le domaine de la neuropsychiatrie, une équipe absolument extraordinaire de chercheurs en provenance principalement des États-Unis, des National Institutes of Health et de l'Université Stanford. Et nous avons aujourd'hui, grâce à ce recrutement qui a demandé la concertation université-hôpital-fondation et la mise en oeuvre de tous les moyens disponibles, y compris la Fondation canadienne de l'innovation, nous avons aujourd'hui, je pense, un des centres qui est un leader mondial dans son domaine.
Alors, il faut qu'on se dise que cette problématique de renouvellement du corps professoral, dans un contexte de plus en plus compétitif, c'est la clé de l'avenir de l'enseignement supérieur au Québec. Il faut qu'on soit en mesure de gérer ça d'une façon constructive, d'une façon efficace, et, pour ça, on aura besoin de ressources supplémentaires.
Vous nous aviez demandé de parler de l'informatisation. Je pense qu'on pourra en parler dans la période de discussion, mais je pense que notre Université a de belles choses à raconter autour de ces questions-là. Et peut-être que je m'arrêterai là, sinon pour vous dire que l'Université Laval va fêter à partir de demain, puisque c'est demain que nous lançons l'opération, les grandes fêtes du 150e anniversaire de l'octroi de la charte de notre Université et le 340e anniversaire de la fondation de l'institution qui nous a donné naissance, là, c'est-à-dire le Séminaire de Québec. Et vous êtes bien évidemment tous invités à participer à ces célébrations qui vont s'étendre sur 14 mois et qui vont impliquer toute une série d'activités festives, d'activités sportives et puis, aussi et surtout, des activités intellectuelles. Nous avons toute une série de colloques organisés sur les grandes questions qui préoccupent la société aujourd'hui, parce que... Pour vous qui vous intéressez aux grandes questions qui préoccupent la société, nous devrions avoir des choses intéressantes à vous offrir. Alors, voilà, Mme la Présidente, j'ai été probablement un peu trop long, comme d'habitude et...
La Présidente (Mme Bélanger): Non, il vous reste huit minutes.
M. Tavenas (François): Ma foi du bon Dieu! Ça va nous faire huit minutes de plus de discussion.
La Présidente (Mme Bélanger): Alors, je vous remercie beaucoup M. Tavenas. Mme la députée de Terrebonne.
Mme Caron: Merci, Mme la Présidente. Alors, je commencerai par vous souhaiter un bon 150e. Et on remarque effectivement des progrès au niveau de l'attraction pour votre Université du côté de l'Ouest du Québec, du côté des étrangers, et ça, c'est extrêmement positif, et l'Est du Québec également. Je pense que c'est extrêmement intéressant.
Vous féliciter évidemment pour vos grandes découvertes. La moitié des grandes découvertes, c'est intéressant, c'est un signe qu'effectivement il y a eu des progrès extrêmement intéressants au niveau de la recherche et surtout que vous performez dans les résultats. Je veux aussi souligner l'attrait pour les disciplines qui permettent d'avoir un profil à l'international. Je pense que c'est un plus pour les étudiants et les étudiantes.
Je me permettrai évidemment quelques commentaires, votre petit tableau que j'ai bien apprécié, la comparaison des revenus d'universités canadiennes. Évidemment, on pourrait faire plusieurs choix parmi ceux qu'on regarde, mais, si je compare l'Université Laval, la sixième, en fait, et l'Université Western, la septième, si on examine bien les chiffres, en fait, le gouvernement du Québec investit 100 200 $ de plus. Là où c'est plus faible, c'est évidemment du côté des droits de scolarité. Lorsqu'on additionne le tout, subventions plus droits de scolarité, vous avez à peu près un peu moins que 30 000 $ de plus. Puis, quand on regarde le nombre d'étudiants, bien, vous avez 35 564 étudiants, étudiantes; pour l'Université Western, 23 689. C'est évident que la vraie différence, elle est au niveau des droits de scolarité. C'est très clair, puisque la subvention, elle est de 100 000 $ de plus, 100 200, du côté du gouvernement du Québec.
Je pense que c'est un choix de gouvernement que nous avons fait. Je me souviens très bien de la période où j'étais à l'opposition, où les frais de scolarité ont triplé en très peu d'années. Nous nous étions engagés, à l'élection de 1994, à geler les frais de scolarité, ce que nous avons fait. Nous avons pris le même engagement en 1998, ce que nous avons fait. Et récemment le premier ministre, dans ses rencontres, a réitéré cet engagement-là parce que nous croyons profondément à l'importance de l'accessibilité. Et, si on peut avoir 35 500 étudiants à l'Université Laval, c'est aussi parce que les frais de scolarité y sont plus bas pour les étudiants puis les étudiantes. Et, quand on parle avec les étudiantes et les étudiants, c'est évident qu'on s'aperçoit que, pour eux, même si les frais de scolarité sont beaucoup plus bas que partout ailleurs au Canada, c'est évident que, pour eux, c'est quand même des montants importants. Et, lorsqu'on regarde les dettes des étudiants à la fin des études, c'est quand même des montants extrêmement importants. Donc, on a fait ce choix-là, qui venait aussi soutenir l'éducation au Québec. Il faut regarder notre passé, d'où on partait, ce qu'on souhaitait: augmenter l'accessibilité d'une manière extrêmement importante. Et donc, pour nous, c'est vraiment un choix de gouvernement.
Bon, nous devrons aussi évidemment... Nous avons commencé à réinvestir au niveau des universités, avec les contrats de performance. Et je pense que le souhait, c'est de poursuivre dans ce sens-là. Évidemment, il y a des conditions qui sont liées à ça, les transferts sociaux que nous obtenons, le déséquilibre fiscal, les montants que nous réussirons à aller chercher pour contrer ce déséquilibre fiscal là. Mais l'objectif, c'est évident, est d'augmenter et de continuer d'augmenter l'accessibilité pour les étudiants puis les étudiantes.
Au niveau des questions, dans un premier temps, je vous questionnerai sur ? vous n'avez donné aucune information, vous avez seulement ouvert la porte et je vais y entrer ? toute la question de votre système d'informatique, les coûts de ce système d'informatique là, où vous en êtes rendus, ce que vous avez comme résultats. Et, tant qu'à parler du système d'informatique, on pourrait peut-être en même temps vous questionner sur tout ce qui a trait au niveau des bibliothèques ou les montants investis au niveau des bibliothèques. C'est important pour les étudiants, les étudiantes, au niveau de la recherche, au niveau des professeurs. Alors, le système informatique, bibliothèques, où en êtes-vous rendus, et j'aurai des sous-questions sûrement suite à votre présentation.
La Présidente (Mme Bélanger): M. Tavenas.
M. Tavenas (François): Vous allez me permettre de revenir sur votre analyse du tableau comparatif, là, parce que je pense qu'on est au coeur du débat. Vous avez raison de noter qu'une bonne part de la différence de financement de l'Université Laval par rapport à Western ou à l'Université d'Alberta vient des revenus des droits de scolarité.
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(16 heures)
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Ceci dit, je pense que c'est ce que j'ai répété avec insistance au cours des derniers mois. Je n'ai aucun problème avec la décision qui a été prise par le gouvernement du Québec, dans le cadre d'une politique sociale et d'un politique fiscale, de fixer les droits de scolarité au niveau où ils ont été fixés. Là où j'ai un problème, c'est que le financement public des universités ne tienne pas compte de cette décision, par ailleurs, de maintenir les droits de scolarité plus bas. Et là où j'ai un problème et où je peux difficilement accepter que ce soit, je dirais, un choix de société constructif, c'est lorsque je regarde le ratio dollars par étudiant, c'est-à-dire les ressources que nous avons à mettre à la disposition de chacun des étudiants inscrits à l'Université Laval et que j'ai 8 000 $ à mettre à la disposition de chaque étudiant inscrit en moyenne à l'Université Laval, que mon collègue Paul Davenport, de Western, a 11 000 $ à mettre à la disposition de chacun des étudiants inscrits, que mon collègue de l'Université d'Alberta a 14 000 $ à mettre à la disposition de chacun des étudiants inscrits. Le problème, il est là.
Si la société québécoise veut effectivement... Et c'est tout à fait légitime, c'est tout à fait dans l'ordre des choses pour un gouvernement de prendre les décisions qui ont été prises sur le niveau des droits de scolarité. Il est impératif, en association avec cette décision-là, d'investir plus d'argent public de façon à compenser le manque à gagner et à nous donner au total les mêmes moyens que les autres. Si je n'ai pas les mêmes moyens que les autres au total, je ne serai pas en mesure de donner la même qualité de formation, de donner la même diversité de programmes, de donner les mêmes ressources de bibliothèque. Il y a un réel problème là. Le choix de société qu'il faut faire, il faut que ce soit un choix de société global d'accessibilité à une formation d'un niveau de qualité qui soit concurrentiel. Si nous ne faisons pas ça, nous sommes en train de desservir la jeunesse québécoise.
Et je pense qu'il y a besoin de faire ce débat-là, il n'a jamais été fait de façon suffisamment sereine ni suffisamment complète. Il est essentiel, essentiel. Et ce n'est pas juste un débat sur les droits de scolarité, pas du tout. C'est un débat très complexe qui doit faire intervenir des considérations socioéconomiques. Je suis convaincu que l'accessibilité à l'université ne s'exprime pas du tout de la même façon pour un jeune qui habite dans la région de Québec et un jeune qui habite à Gaspé. Je suis convaincu que l'accessibilité à l'université ne s'exprime pas du tout de la même façon pour un jeune qui habite dans le quartier Saint-Roch et pour un jeune qui habite à Sillery. Je suis convaincu que l'accessibilité ne s'exprime pas du tout de la même façon pour un adulte qui a besoin d'acquérir une formation complémentaire par une formation à temps partiel et pour un jeune qui est sur une piste vers un doctorat. Ces questions-là, il faut qu'on les analyse, mais il faut qu'on les analyse de façon sereine.
Mais, à l'heure actuelle, là, je suis préoccupé par la situation dans laquelle nous sommes obligés de vivre, qui est une situation dans laquelle, au total, je n'ai pas les ressources qui sont disponibles à mes collègues des autres provinces canadiennes. Et ça, à terme ? puis ce n'est pas à long terme, là ? à terme, ça va nous jouer un très mauvais tour comme société. On a besoin de s'attaquer à ce problème-là. J'irais même jusqu'à dire, puis je vais reprendre en paraphrasant des paroles qui avaient été exprimées il y a une dizaine d'années par un ancien président de Bell Canada à l'époque: Si on veut pouvoir se payer les systèmes de santé et les services sociaux qu'on se paie aujourd'hui dans 10 ans ou dans 20 ans, la priorité doit être d'investir dans l'enseignement supérieur. Parce que, si on n'investit pas dans l'enseignement supérieur, on ne sera pas capable de créer la richesse collective qu'il nous faudra pour assurer le soutien de la santé et des services sociaux. Il y a un réel problème là. On l'avait amorcé, le débat, dans le cadre du Sommet du Québec et de la jeunesse, il y a besoin d'en faire encore.
Mme Caron: À ce niveau-là, je vous dirai que, si on veut effectivement répondre à l'ensemble de nos besoins, nous devrons ensemble, comme société, lutter contre le déséquilibre fiscal qui existe et nous devrons ensemble prendre position contre ce déséquilibre fiscal là et se donner les moyens pour avoir les budgets dont on a besoin. Et ça, là-dessus, j'avoue qu'on n'entend pas très, très souvent ceux qui réclament des budgets additionnels au niveau du gouvernement du Québec faire cette lutte-là avec nous.
Mais je reviens à ma question, que vous avez complètement éludée et que je ne veux pas, absolument pas passer à côté. Votre système informatique et vos bibliothèques, je veux vous entendre là-dessus.
M. Tavenas (François): Absolument, madame, et ça va me faire plaisir. Sur notre système informatique, je dois vous dire que ce système fonctionne bien, après avoir connu une période difficile en 1997-1998, que je pense que le système informatique de l'université dans le domaine des systèmes financiers est celui qui a réussi la transition dans l'ensemble du système public. Je sais que nous avons eu certaines difficultés mais peut-être moins que celles du gouvernement du Québec dans sa transition avec des très grands systèmes informatiques. Nous sommes passés l'an dernier, l'été dernier, sans aucune difficulté à une version beaucoup plus substantielle de ce système-là, et, de ce côté-là, donc, je suis très heureux de l'évolution des choses. Nous sommes en train de planifier les prochaines étapes.
Mme Caron: À quel coût?
M. Tavenas (François): Le financement de l'ensemble se fait dans le cadre de l'enveloppe de financement des investissements sur les systèmes informatiques qui nous est donnée par le gouvernement du Québec. Donc, il n'y a aucun impact sur nos budgets de fonctionnement, puisque c'est tout financé par l'enveloppe d'investissement. Vous savez que le gouvernement a mis en place dans l'enveloppe d'investissement un volet spécifique: développement des systèmes informatiques. C'est ce que nous utilisons pour financer cette opération-là.
Pour ce qui est des bibliothèques, nous nous sommes engagés, dans le contrat de performance, à accroître de façon récurrente le budget des acquisitions de bibliothèques de 600 000 $ par an à chacune des trois années du contrat. Donc, nous sommes dans la deuxième, le budget est augmenté de 1,2 millions de manière récurrente, et, compte tenu de marges de manoeuvre qui se sont révélées récemment, nous avons décidé que, pour l'année 2002-2003, nous allions réinvestir non pas le 600 000 prévu mais 2 millions dans le budget d'acquisitions des bibliothèques, et le 2 millions étant lui aussi récurrent. Alors, notre budget d'acquisitions des bibliothèques sera 9 millions pour l'année prochaine. Ce n'est pas rien comme croissance, puisque, en 1998-1999, on était à 5,6 millions. Ça vous donne une ampleur, là, une idée de l'ampleur de l'effort. Si le financement des frais indirects de recherche se maintient et se développe comme je pense qu'il devrait le faire, là, nous aurons les ressources pour accélérer encore le réinvestissement dans la bibliothèque.
Par ailleurs, c'est peut-être un secret bien gardé, mais la bibliothèque de l'Université Laval est une de celles qui sont le plus informatisées et le mieux informatisées. Vous savez que, dans le domaine des publications scientifiques, entre autres, les publications papier existent encore mais sont moins fréquentes et moins pertinentes qu'elles ne l'étaient il y a 10 ans ou il y a 15 ans et que, de plus en plus, ce qu'on a, c'est de la publication électronique. De ce côté-là, la bibliothèque de l'Université Laval a été un leader. Notre directeur de la bibliothèque à été un des deux artisans du projet canadien de bibliothèque virtuelle qui s'est monté... du projet québécois de bibliothèque virtuelle qui s'est monté en partenariat avec toutes les universités, les universités canadiennes pour le projet canadien et les universités québécoises pour le projet québécois. Et les chercheurs de Laval ont maintenant accès à une quantité assez considérable de revues scientifiques plein texte directement, pas à la bibliothèque, là, mais dans leur bureau, sur leur écran d'ordinateur, parce que par ailleurs notre réseau informatique est un des meilleurs sur la scène québécoise, sinon sur la scène canadienne. On a un réseau à larges bandes qui est absolument extraordinaire.
Ça va me permettre de vous souligner cependant qu'il y a le tiers-monde dans le domaine des réseaux informatiques universitaires, il se retrouve, à l'heure actuelle, de façon assez étonnante dans le réseau de la santé. Un chercheur, sur le campus, a accès à une bande passante, on peut dire, quasiment illimitée. Un chercheur dans le réseau de la santé ? sauf pour le CHUQ en ce moment parce qu'il y a eu une entente spécifique dans le cas du CHUQ ? un chercheur dans le réseau de la santé a accès à une bande passante tout à fait insuffisante par rapport aux besoins que nous avons. Il y a un débat entre le ministère de la Santé et des Services sociaux et le réseau de la santé et des services sociaux, le RTSS, et les universités et le réseau Internet universitaire, le RISQ, sur la façon de brancher les centres de recherche en milieu hospitalier. Nous n'avons pas encore trouvé de solution convenable à ce débat qui dure depuis un an. Alors, pour mes collègues chercheurs dans le domaine de la santé, c'est une très grande préoccupation.
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(16 h 10)
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Mme Caron: Je vous remercie.
La Présidente (Mme Bélanger): Mme la députée de Rimouski.
Mme Charest: Merci, Mme la Présidente. Bienvenue à messieurs de l'Université Laval. Je regarde vos informations qu'on a et j'ai une question par rapport au niveau d'obtention des diplômes des étudiants de deuxième et de troisième cycles. Ça m'apparaît un peu faible. Est-ce que je suis trop sévère ou je rapproche de la réalité? Est-ce que vous êtes confiants d'atteindre vos objectifs? Et quels moyens vous prenez pour ça de façon concrète?
M. Tavenas (François): Alors, je pense que vous êtes, disons, juste dans votre constat, si vous comparez les premier, deuxième et troisième cycles, parce que les taux de diplomation au premier cycle sont beaucoup plus élevés qu'aux deuxième et troisième cycles. Vous êtes sévère si vous nous comparez aux autres universités québécoises dans le domaine, dans le sens où c'est un fait généralisé que les taux de diplomation au niveau du deuxième cycle et du troisième cycle sont plus faibles qu'au niveau du premier cycle. C'est un fait aussi, je pense, que les taux de diplomation de l'Université Laval, de façon assez générale, sont supérieurs aux taux de diplomation... ou dans le groupe de tête des taux de diplomation des autres universités francophones du Québec.
Nous sommes pleinement conscients des efforts que nous avons à faire autour, d'une part, de la réduction de la durée des études et, d'autre part, de l'amélioration des taux de diplomation. Nous nous sommes engagés à réduire la durée des études d'une session à la maîtrise ? en moyenne, c'est huit sessions en ce moment, ça devrait devenir sept ? de deux sessions en moyenne au doctorat ? c'est 15 sessions en moyenne, ça devrait devenir 13 ? et je suis tout à fait confiant que nous allons y arriver. Il faut savoir qu'il y a une corrélation assez directe entre la durée des études et les taux d'abandon. Plus les études durent longtemps, plus les étudiants perdent la perspective de ce dans quoi ils s'étaient embarqués puis ils sont gagnés par le découragement. Et, en jouant sur la durée des études, nous sommes convaincus de pouvoir aussi jouer sur les taux de diplomation.
Le travail se fait à partir, je dirais, de deux grandes pistes, la première, qui est d'améliorer le suivi que nous faisons des étudiants et de l'encadrement des étudiants pour nous assurer que les affaires progressent, que, s'il y a des problèmes qui se révèlent entre un professeur et son étudiant, ils sont traités à temps et corrigés. La Faculté des études supérieures est en train de mettre en place tout un système d'encadrement et de suivi de la progression des études, et je suis tout à fait confiant que la mobilisation que la mise en place de ce système va permettre va nous aider à améliorer les choses.
La deuxième piste, c'est celle du soutien financier aux étudiants. Les étudiants de deuxième et de troisième cycles sont des adultes souvent responsables pas juste d'eux-mêmes, mais aussi de famille, qui ont besoin d'avoir des revenus et d'avoir une certaine garantie de revenus. Alors, de ce côté-là, l'Université Laval a fait beaucoup d'efforts à partir de toute une panoplie de moyens. Nous avons un fonds de soutien au doctorat qui donne un soutien financier, donc, aux étudiants inscrits au doctorat. Ce fonds de soutien a été protégé durant toute la période des coupures budgétaires. C'est le seul poste budgétaire de l'université qui n'a jamais été touché; il est touché maintenant mais à la hausse. Nous avons mis en place des programmes de bourses, d'admission au doctorat. Nous avons décidé de recycler aux facultés une bonne partie des revenus générés par la formule de financement au chapitre des primes de diplomation, donc nous avons mis en place une mécanique de croissance des fonds disponibles en soutien aux étudiants de deuxième et de troisième cycles.
Nous avons par ailleurs invité, il y a six mois maintenant, les facultés à élaborer ce que nous appelons des plans facultaires dont l'objectif est d'organiser l'ensemble du soutien financier disponible pour les étudiants de deuxième et troisième cycles. Et on parle de beaucoup d'argent. Quand on ramasse toutes les choses de fonds, il y une quarantaine de millions de dollars qui s'en va en soutien sous toutes sortes de formes: contrats, subventions, bourses, etc. Mais ces fonds étaient utilisés d'une façon assez dispersée. Ce que nous voulons maintenant, c'est qu'ils soient utilisés d'une façon coordonnée et d'une manière adaptée à l'organisation de la recherche et aux problématiques de vécu des étudiants dans les différentes disciplines.
Alors donc, chaque faculté a été invitée à faire un bilan, à ramasser l'ensemble de l'information, enfin, des fonds disponibles et à les organiser de manière à ce qu'ils aient un effet optimal sur la vie des étudiants et, par conséquent, sur leur capacité de mener leurs études à bien. On est à peu près, je dirais, à moitié de l'exercice. Nos collègues de l'AELIES ont publié récemment une espèce de palmarès des facultés dans le journal de l'Université, l'Impact Campus, qui montre qu'on est à peu près à mi-chemin. Le bon de commande qui a été passé à toutes les facultés est que, pour septembre 2002, ces plans facultaires soient en oeuvre et nous permettent d'accompagner les étudiants et de leur assurer la probabilité de succès optimale. Alors, j'ai tout à fait confiance, là, qu'on va y arriver.
Mme Charest: Il y a un suivi, il y a une grille d'analyse, il y a quoi, là, pour la suite des choses? Parce que, là, vous mettez des modalités en application, vous êtes en train de les concevoir, vous allez les appliquer. Et vous allez les évaluer à quel rythme et de quelle façon?
M. Tavenas (François): On va les évaluer sur une base annuelle.
Mme Charest: À partir de quel outil? Il y a sûrement des indicateurs que vous allez identifier, là, pour pouvoir avoir une analyse pas seulement quantitative mais qualitative, ce qui est bien important.
M. Tavenas (François): Absolument. Le mandat de la Faculté des études supérieures, c'est justement de mettre en oeuvre ces mécanismes de suivi. Ça va se faire par un mécanisme traditionnel de suivi de cohorte. On prend l'étudiant qui entre et puis on regarde comment il progresse dans ses activités et à quel taux il diplôme. C'est un mécanisme qui est intéressant parce qu'il permet de détecter très rapidement les déviations par rapport à des objectifs ou par rapport à la moyenne de l'Université.
Mme Charest: Donc, ça veut dire que, dans vos prochains bilans devant nous, on va pouvoir voir ces analyses et ces suivis...
M. Tavenas (François): Absolument. Sans aucun doute.
Mme Charest: Dans un autre ordre d'idées ? je m'excuse de faire un petit peu de coq-à-l'âne ? j'aimerais qu'on parle de toute la question de la politique d'internationalisation de la formation. Dans un premier temps, j'aimerais savoir quelle est la proportion des étudiants étrangers par rapport aux étudiants...
M. Tavenas (François): 6 %.
Mme Charest: 6 %.
M. Tavenas (François): Si je prends en compte uniquement ceux qui sont des détenteurs de visa. Si j'intègre là-dedans les gens qui ont un statut d'immigrant reçu, on monte à presque 10 %.
Mme Charest: Parce que je trouve que ce n'est pas beaucoup, 6 %.
M. Tavenas (François): C'est un fait, madame. Mais, à 6 %, nous sommes les premiers dans les universités francophones du Québec.
Mme Charest: Bien, en tout cas... Vous êtes sûr?
M. Tavenas (François): Ah oui!
Mme Charest: Oui?
M. Tavenas (François): Oui. C'est, je dirais, le drame des réseaux universitaires.
Mme Charest: Parce que, si je vous compare à... 6 %, ça représente combien? Vous avez 36 000 étudiants, grosso modo, année après année...
M. Tavenas (François): C'est ça, 2 100...
Mme Charest: Oui, 2 100 étudiants. Parce que, je regarde, à l'UQAR, qui est une petite université en région, sur 4 000 étudiants globalement, autant pour le campus de Lévis que pour le campus de Rimouski, il y a, strictement à Rimouski, au moins 150 étudiants étrangers. Alors, ça fait quand même un pourcentage intéressant.
M. Tavenas (François): Oui, oui. Je ne dis pas le contraire.
Mme Charest: Et, une fois qu'on a dit ça, je voudrais qu'on aille plus loin quand même, je voudrais voir, les étudiants d'ici, qu'est-ce qu'on leur offre pour exporter en quelque sorte leur formation puis aller en chercher d'autres? C'est quoi, les réseaux, les systèmes que vous avez mis en place pour que ce ne soit pas seulement dans un sens mais que ce soit dans les deux sens, qu'on ait des Québécois qui soient aptes et prêts à aller à l'international, comme nous, nous devons toujours demeurer prêts et à l'avant-garde pour pouvoir recevoir et former des étudiants étrangers qui vont trouver chez nous une formation actualisée, exportable soit dans leur pays d'origine ou ailleurs, à travers le monde?
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(16 h 20)
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M. Tavenas (François): Je pense que ce qui fait la particularité de l'Université Laval aujourd'hui, dans le réseau québécois et canadien, c'est la structure que nous avons mise en place pour permettre à nos étudiants d'aller faire des séjours à l'étranger, et d'aller faire des séjours à l'étranger qui sont des séjours complètement intégrés, ce qu'on appelle nos profils internationaux. Or, comment ça marche, ces profils internationaux? Bien, chaque programme de premier cycle ? parce que c'est au premier cycle que, pour l'instant, l'action se passe; on va l'avoir à tous les cycles, mais pour l'instant, c'est au premier cycle que ça se passe ? chaque programme a été invité à identifier un certain nombre d'universités partenaires à l'étranger: en Europe, en Amérique latine, aux États-Unis, ailleurs dans le monde, là. Les choix ont été faits en fonction de la qualité de ces universités partenaires dans le domaine disciplinaire en question. Donc, les profs qui se connaissent, qui connaissent des profs dans d'autres universités, dans le réseau, là, ils ont construit là-dessus.
Nos responsables de programme sont partis pour aller négocier avec ces universités partenaires un contenu de curriculum qui sera disponible aux étudiants québécois de façon à ce qu'ils puissent faire ce séjour à l'étranger en pleine continuité de leurs études. Pour l'étudiant qui sera en stage à l'Université de Salamanque ou à l'Université de Munich, le programme de cours qu'il va suivre pendant son année d'études à Salamanque ou à Munich est un programme qui va être coordonné avec celui qu'il aurait suivi à l'Université Laval. Donc, quand il va revenir, il va pouvoir réintégrer son programme, réintégrer son groupe sans avoir perdu quoi que ce soit, mais en ayant gagné une année d'études dans une université étrangère, une année de vie à l'étranger, une année de pratique d'une langue étrangère.
Et notre objectif est que 20 % de chaque cohorte bénéficie de ce système-là. Nous avons lancé cette opération avec un soutien financier de la fondation J.W. McConnell. Nous avons reçu très rapidement le soutien du gouvernement du Québec, puisque, dans les contrats de performance, il y avait du financement pour la mobilité étudiante. Et je pense que nous sommes l'université qui en fait le plus large usage parce qu'on était organisé puis préparé pour le faire. Nous avons... Et nous sommes en train de monter en puissance, là, dans le nombre d'étudiants. Il y a en ce moment 450 étudiants de Laval qui sont quelque part dans une université à l'étranger. Alors, il nous reste du chemin à faire. Mais on est déjà trois fois meilleurs que la moyenne canadienne dans le domaine de la mobilité étudiante, du nombre d'étudiants lavallois qui sont en séjour à l'étranger.
Mme Charest: Alors là vous me parlez surtout de formation probablement académique, là, en termes de cours.
M. Tavenas (François): Oui.
Mme Charest: Mais, moi, je voudrais voir aussi quels sont les liens de ce réseau à l'international que vous avez bâti ou que vous êtes en train de consolider en lien avec votre plan de développement en recherche. Est-ce qu'on peut faire des liens? Parce que je pense que c'est une possibilité, hein? Je veux voir jusqu'où vous avez une cohérence ? ha, ha, ha! ? ...
M. Tavenas (François): On a la cohérence par les personnes.
Mme Charest: ...dans la formation versus la recherche et dans vos équipes multidisciplinaires, dans vos équipes à partenariats multiples, que ce soit au niveau des maîtres, que ce soit au niveau des étudiants chercheurs et que ce soit au niveau des entreprises qui, autant à l'international qu'ici, deviennent vos partenaires dans des consortiums que vous avez dans votre plan de... Alors, c'est ça que je voudrais que vous me...
M. Tavenas (François): Alors, il y a une concordance assez naturelle entre les deux parce que, comme je vous le disais il y a un instant, la base de construction du réseau des partenaires impliqués dans les profils internationaux, c'est les relations personnelles des profs de Laval avec des profs d'autres domaines. Et ces relations personnelles, c'est des relations qui sont issues de collaborations de recherche. Alors, vous ne trouverez pas une concordance parfaite entre notre plan de développement de la recherche et le développement international parce que le développement international, il va se faire partout. Mon objectif est que, à la fin de l'année académique prochaine, tous les programmes de premier cycle offrent un profil international, tous, sans exception. Et ce n'est pas...
Mme Charest: Vous n'avez pas peur qu'il y ait éparpillement au détriment d'une consolidation ou d'un...
M. Tavenas (François): Pas du tout. Pas du tout.
Mme Charest: Non?
M. Tavenas (François): Je pense avoir la responsabilité de donner à chaque étudiant de Laval qui veut acquérir une formation internationale cette formation internationale, peu importe qu'il soit inscrit en philosophie, en génie électrique ou en sciences infirmières. Alors, nous l'offrons systématiquement dans tous les programmes. Certains collègues nous ont dit: Dans notre secteur, ça va peut-être être plus difficile ou moins évident. Bon. Le programme de Baccalauréat d'enseignement primaire, peut-être que c'est moins évident, encore qu'il y a bien des enseignants qui vont faire des stages en Europe pour voir comment ça se passe. Mais la diversité linguistique est peut-être, disons, moins appropriée là. Mais, de manière générale, je pense que, aujourd'hui, un diplômé universitaire devrait avoir une connaissance des langues étrangères, devrait avoir acquis une expérience à l'étranger.
Mme Charest: Ça, ça va, là. Mais je reviens avec la concordance. Dans quelle proportion on peut dire qu'il y a concordance entre vos projets, qui favorisent quand même les échanges autant au niveau international qu'ici, là, nord-américain, et ce réseau d'échanges de profs, d'étudiants? Parce qu'il me semble qu'il y a des liens à faire dès le départ. Et il y a quelque chose à aller chercher là qui sert à la fois... pas juste de l'enrichissement personnel et individuel, pour lequel on est tous d'accord, là, mais je pense qu'au niveau de l'enrichissement de la connaissance scientifique, vous avez un plan de développement de la recherche qui est structurant, en tout cas, qui doit l'être, et qui m'apparaît... qui ne devrait pas être décroché de vos autres axes prioritaires de formation et de recherche comme tels.
M. Tavenas (François): Et, de fait, il ne l'est pas, là.
Mme Charest: Non, non, je ne dis pas qu'il l'est, là.
M. Tavenas (François): Non, non, mais ce que je veux dire...
Mme Charest: J'essaie de voir vos...
M. Tavenas (François): Si vous voulez, il y a une relation directe et parfaite entre nos initiatives internationales et le plan de développement de la recherche dans tous les secteurs qui sont identifiés dans le plan de développement de la recherche.
Mme Charest: Vous en avez plusieurs.
M. Tavenas (François): Mais il y a, à côté de ça, des activités internationales qui se développent dans d'autres secteurs.
Mme Charest: Bien, c'est sûr.
M. Tavenas (François): O.K.? Donc, c'est comme ça que ça s'est fait. Dans le domaine de l'optique, on est en train de discuter même de la mise en place de programmes conjoints avec des partenaires européens. Dans le domaine de la géomatique, on est en train de discuter de la mise en place d'un programme conjoint avec des partenaires mexicains. Dans le domaine des sciences politiques, on a déjà fait des choses avec nos amis bordelais.
Mme Charest: Et, à l'intérieur de ça, vous avez des étudiants stagiaires qui...
M. Tavenas (François): Absolument.
Mme Charest: O.K., c'est beau.
M. Tavenas (François): On a d'ailleurs, et je pense qu'on doit être une des seules universités à offrir ça actuellement, on a des programmes dans lesquels les étudiants s'inscrivent: une moitié de cohorte est française, l'autre moitié est québécoise, et puis les Québécois vont faire une moitié de leurs études en France, ils ramènent leurs collègues français, qui viennent faire une moitié de leurs études chez nous. Donc, un vrai programme conjoint. Alors, on a initié ça dans le domaine du journalisme. On est en train de le planifier dans le domaine... enfin, de le mettre en place dans le domaine de la formation des gestionnaires de formation continue. Et puis on vient d'adopter la création d'un programme dans le domaine ? je ne sais pas si je peux en parler ici ? du lobbying.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Charest: Nous sommes très à l'aise, vous pouvez y aller.
M. Tavenas (François): Non, mais, justement, je pense que ça a été... c'est tout à fait symptomatque du rôle de l'université aussi dans ces questions-là.
M. Charest: Tout à fait. Vous avez raison, oui.
M. Tavenas (François): Parce que donner une formation universitaire dans le domaine permet de gérer ces questions d'une façon plus efficace, plus responsable. Et, dans ce sens-là, le programme conjoint que nous allons offrir à partir de l'année prochaine, en partenariat avec Bordeaux, va être assez exceptionnel parce qu'il va permettre aux étudiants québécois et français qui ont été inscrits conjointement dans le programme de voir fonctionner ces systèmes de représentation d'intérêts dans deux environnements politiques très différents, dans deux environnements économiques très différents. Donc, du point de vue de la qualité de la formation, ça va être assez extraordinaire.
Mme Charest: Tout à l'heure, vous avez parlé des revenus de recherche, des projets de recherche qui avaient été augmentés. Je ne me souviens plus du montant, je pense que je ne l'ai pas pris...
M. Tavenas (François): De 110 à 160 millions.
Mme Charest: 210? 110.
M. Tavenas (François): On est passé de 110 à 160.
Mme Charest: À 160.
M. Tavenas (François): C'est ça.
Mme Charest: Et c'est quoi, votre objectif pour les prochaines années?
M. Tavenas (François): Ah, je n'ai pas le chiffre de mémoire, mais je pense que l'objectif qu'on s'était fixé dans le contrat de performance est de 175, là.
Mme Charest: Parce que ça, ça doit représenter quand même plusieurs millions, si vous réalisez tout ça.
M. Tavenas (François): Oui, oui, oui. Ah oui!
Mme Charest: Bon. Alors, à partir de ça, vous avez...
M. Tavenas (François): Notre objectif, c'est de rester... Nous avons, entre nous, dans les universités, nous avons un système, je dirais, de classement un peu plus objectif que la célèbre revue Maclean's, là, un système de classement...
Mme Charest: Non, quand même! On se fie sur vous pour être sérieux, quand même.
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(16 h 30)
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M. Tavenas (François): Ha, ha, ha! Un système de classement en fonction de l'intensité de l'activité de recherche. Alors, c'est basé sur les revenus de recherche comparables, donc les revenus distribués à l'échelle canadienne, par compétition, jugés par les pairs, les grands conseils subventionnaires, puis c'est basé sur le nombre d'étudiants, de diplômes de doctorat décernés par chaque université. Laval, à l'heure actuelle, est sixième dans ce système-là, pas très loin du cinquième, qui est l'Université d'Alberta, et un bon bout de chemin en avant du septième, qui est l'Université Western.
Notre objectif, c'est de consolider notre position dans ce groupe des 10 ? puisque c'est comme ça qu'il s'appelle ? et de nous assurer que nous maintenons à tout le moins la part du marché de la recherche universitaire canadienne qui est produite à l'Université Laval. Nous avons réussi à maintenir cette part du marché au cours des cinq dernières années et je suis convaincu que nous allons pouvoir la maintenir à l'avenir.
Mme Charest: Mais vous ne la chiffrez pas?
M. Tavenas (François): Elle est de... Je peux la chiffrer. Par rapport aux fonds distribués par les trois grands conseils subventionnaires canadiens, Laval va chercher 4,88 %, je pense. Et ça se tient dans ces eaux-là. On a été particulièrement fier dans le cadre de la Fondation canadienne de l'innovation tout récemment parce que, là, on est allé chercher un 10 % d'un coup sec, le double de notre performance habituelle. Ça ne fait pas de mal.
Mme Charest: Merci.
M. Tavenas (François): Merci, madame.
La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de La Prairie.
M. Paquin: Saint-Jean.
La Présidente (Mme Bélanger): Saint-Jean. Excusez-moi.
M. Paquin: Est-ce qu'il reste un peu de temps?
La Présidente (Mme Bélanger): Il reste deux minutes et demie.
M. Paquin: Ah! Une petite question pointue, vite faite, dans ce cas-là. Dans votre tableau sur la comparaison des revenus d'universités canadiennes, dans la colonne Professeurs, pour l'Université d'Alberta, il y a un astérisque qui dit: Ce chiffre incorpore à la fois les profs, les assistants et les chargés de cours.
M. Tavenas (François): On soupçonne. Oui.
M. Paquin: Mais pas pour les autres?
M. Tavenas (François): Non.
M. Paquin: O.K. Je voulais juste être sûr de ça.
M. Tavenas (François): À part ce chiffre-là ? c'est pour ça qu'on a mis un astérisque à côté, là ? à part de chiffre-là, les autres chiffres, c'est le corps professoral.
M. Paquin: O.K. Vitement, sur la question aussi de la coopération internationale. Est-ce qu'il y a un programme avec les professeurs, s'il y a des échanges d'enseignants d'université à université, d'une façon ou d'une autre?
M. Tavenas (François): Alors, disons qu'il n'y a pas de programme géré par l'université comme telle. Nous avons, dans la mise en place de nos profils internationaux, fourni un soutien financier aux responsables de programmes qui sont allés négocier des ententes avec des universités partenaires. Dans la subvention qu'on a reçue de la fondation McConnell, il y avait un volet qui était prévu pour ça et, donc, on a mis cet argent-là à la disposition des collègues pour se déplacer.
Pour ce qui est de la mobilité des professeurs, de façon générale ? puis c'est surtout dans le domaine de la recherche qu'elle se fait ? bien, les profs ont accès aux subventions de recherche des fonds québécois, des fonds canadiens, à des revenus propres issus de contrats, et ainsi de suite. Et, je dirai, de ce côté-là, je n'ai pas perçu de grandes contraintes, disons.
M. Paquin: Une dernière question dans la foulée des questions qui ont été posées par ma collègue tantôt au niveau de l'informatique. Je suis heureux d'entendre ce que vous me dites sur l'état actuel, mais on avait eu dans la littérature, notamment il y a deux ans, à peu près à cette période-ci, des articles notamment de M. Thibodeau, qui disait: Bon, ça doit coûter 12 millions, ça va en coûter 20, il y a un dépassement, des enseignants veulent demander à ce qu'il y ait une enquête, et tout ça, et tout ça. Alors, j'aimerais que vous me disiez de quelle manière ça s'est résorbé entre-temps ou qu'est-ce qui s'est passé dans les faits.
M. Tavenas (François): En fait, ce qui s'est passé, c'est qu'on a repris le contrôle de façon convenable sur le projet. Comme j'ai répondu à votre collègue tout à l'heure, le projet est financé au complet à partir de l'enveloppe d'investissement. Bon. Il s'est dit, je pense, beaucoup de choses pas toujours très pertinentes autour des difficultés qu'on a vécues. Il s'est dit en particulier que c'était l'explication principale des déficits de l'université, ce qui n'est pas le cas, puisque ça a été financé à partir du budget d'investissement et pas du budget de fonctionnement.
Ce qui est clair cependant, c'est qu'on a connu une période difficile en termes de fonctionnement. Les responsables de départements, le personnel administratif dans les unités a vécu une période difficile pendant quelques mois, au moment où on avait essayé de faire une transition d'un système qui était manifestement pas tout à fait fonctionnel. Maintenant, je pense qu'on a repris le contrôle. On l'a repris à l'intérieur de budgets qui ne sont pas du tout des chiffres que vous mentionnez, puisqu'on reste à l'intérieur de notre...
Une voix: ...
M. Tavenas (François): Oui, oui, je sais. Maintenant, ceci dit, mon défi, notre défi collectif ? parce que je pense qu'on n'est pas seuls, là, toutes les universités sont dans la même problématique aujourd'hui ? c'est que nous allons devoir accroître nos investissements dans le développement des systèmes d'information. Parce que, là, à l'heure actuelle, nous, ce qu'on a fait, c'est un système financier, puis il marche bien, mais il nous reste le système de gestion des études puis il nous reste le système de gestion de l'information sur les ressources humaines, et les investissements additionnels dont on parle sont encore substantiels. Il y a un certain nombre de collègues d'autres universités qui ont fait des expériences un petit peu pénibles, là; je pense, entre autres, à l'Université du Québec à Trois-Rivières. Il va falloir qu'on ait des solutions. Alors, de ce côté-là, je ne vous cacherai pas que ça me semblerait dans l'ordre des choses pour le gouvernement du Québec, au moment où il investit de façon massive dans ses propres systèmes d'information, qu'il pense à investir d'une façon je ne dirais pas proportionnelle, mais ordonnée ou correspondante dans les systèmes d'information des autres organismes publics qu'il finance.
La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Tavenas.
M. Tavenas (François): Merci, madame.
La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Westmount?Saint-Louis.
M. Chagnon: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Vous me permettrez aussi de saluer et de souhaiter la bienvenue aux représentants de l'Université Laval, et particulièrement à M. le recteur, M. le recteur Tavenas. Je m'en voudrais aussi de ne pas saluer les étudiantes et les étudiants de l'Université Laval qui sont venus accompagner leur recteur dans cette présentation, les représentants et les leaders de la CADEUL et de l'AELIES
Et, pour commencer, puisqu'on a parlé de quelques sujets, mais un sujet qui est certainement un sujet qui est incontournable dans la situation de l'Université Laval, c'est bien la question financière, je pense, qui devrait d'abord nous... On devrait s'attaquer d'abord à la question financière. D'abord, vous avez reçu, par le biais des contrats de performance, une quarantaine de millions de dollars à peu près. À peu près. Bien, vous allez les recevoir d'ici 2002-2003. Vous aviez, en 1994-1995, 281 699 000 de budget en subvention versée par le gouvernement du Québec, pas de budget mais une subvention versée. La subvention qui sera versée à l'Université Laval en 2002-2003 sera de 252 669 000, soit quasiment 30 millions de moins, 30 millions de moins par année qu'il y a 10 ans. Évidemment, ça ne comprend pas la valeur de l'argent de 1994 par rapport à celle de 2002-2003 et 2003-2004, où on a un différentiel d'à peu près 15 à 17 %, 15 à 17 % de dévaluation de la monnaie par l'inflation.
Alors, on se retrouve dans une situation où finalement, si vous aviez 17 % de plus que 280 millions, vous auriez à peu près un budget de 320, 325, mais vous aurez 252. En principe, vous vous retrouvez dans une situation où vous êtes à 75 millions en déficit, par rapport à la situation de 1994-1995, en 2002-2003. Est-ce que je me trompe?
M. Tavenas (François): En termes de pouvoir d'achat, non, sinon que...
M. Chagnon: C'est fait pour ça, de l'argent.
M. Tavenas (François): Oui. Sinon que je pense qu'il faut quand même, pour être complet, rajouter qu'on a à peu près 500 étudiants de moins qu'on avait en 1994. On est passé par un pic, là, un petit peu plus que 36 000, on en a 35 500 aujourd'hui. Ça fait intervenir, mais ça n'explique sans aucun doute pas la différence. Alors, c'est pour ça que je vous ai dit tout à l'heure, là, que le problème du financement, il...
M. Chagnon: 500 étudiants, de toute façon, mettons-les à 10 000 $ chacun, ça fait 5 millions.
M. Tavenas (François): Oui, c'est ça.
M. Chagnon: On est dans l'ordre des chiffres, là, à 5 millions près.
M. Tavenas (François): C'est ça. Tout à fait, tout à fait, d'où la nécessité, là, de poursuivre l'effort.
M. Chagnon: Je remarque aussi que cette situation-là a dû certainement amener quelques problèmes particuliers spécifiques à l'Université Laval parce que vous vous êtes retrouvés avec un problème unique: 131 millions de déficit accumulé. Non?
M. Tavenas (François): Bien, c'est une centaine, là, en ce moment. On va attendre de fermer les chiffres, avant, de l'année 2001-2002, là. Ha, ha, ha!
M. Chagnon: Je vous en souhaite le moins possible, remarquez, là. Je vous en souhaite le moins possible, mais cela entraîne un service de la dette.
M. Tavenas (François): Exact.
M. Chagnon: Service de la dette qui est au moins l'équivalent de vos 500 étudiants de moins.
M. Tavenas (François): Pas tout à fait. On a des bons gestionnaires de notre dette, Ha, ha, ha!
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(16 h 40)
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M. Chagnon: Alors, si vos 500 étudiants de moins impliquent 5 millions de moins de revenus, j'imagine que 100 quelques millions de dette doivent vous coûter au moins 5 millions aussi de revenus.
M. Tavenas (François): Un petit peu moins.
M. Chagnon: Bon, tant mieux. Tant mieux. Mais, de toute façon, ce 4 millions est-il subventionné?
M. Tavenas (François): Non. Non.
M. Chagnon: Donc, c'est une perte sèche pour vous. Et vous vous retrouvez dans la situation où vous avez à financer votre dette, mais aussi vous allez avoir à rembourser votre dette. Ce n'est pas tout de la financer. Vous ne tiendrez pas ça éternellement, cette dette-là. C'est quoi, votre plan de refinancement de votre dette?
M. Tavenas (François): Alors, d'abord, pour réduire les coûts d'intérêt, on a utilisé toutes les techniques appropriées de financement à court, moyen et long terme et on est, par cette structure-là, relativement insensibles aux fluctuations de taux d'intérêt. Le deuxième élément, nous avons fait adopter par le conseil d'administration un plan de redressement financier qui prévoit que, à partir de 2004-2005, l'université consacrera 2,5 % de ses revenus de subvention du gouvernement pour le remboursement de la dette et ça devrait nous amener à éteindre la dette sur une période inférieure à 20 ans.
Alors, évidemment, c'est un montant important. Mais, en même temps, je le considère, et le conseil d'administration avec nous le considère, considère cette dette accumulée comme un investissement que nous avons fait dans la capacité de développement de l'université. Le choix qu'on avait, c'était de réduire encore plus et de façon encore plus drastique nos dépenses. Nous n'aurions pas éliminé la dette, parce qu'il y a une vitesse maximale à laquelle on peut réduire les dépenses, c'est la vitesse à laquelle les gens quittent l'université. De fait, toutes les universités québécoises pratiquement ont des dettes accumulées. Nous n'aurions pas évité la dette au complet, mais nous aurions eu, par exemple, un méchant déficit académique, là, c'est-à-dire qu'on aurait eu des secteurs qui auraient été décimés par des départs à la retraite tout à fait aléatoires.
Puis je vais vous donner un exemple particulièrement frappant. On a perdu, au Département d'informatique, on a perdu deux collègues par décès, puis, si je me rappelle bien, deux ou trois par des démissions. Bon. Dans une hypothèse ou j'aurais cherché à fermer tout poste qui se libère, j'aurais réduit le corps professoral au Département d'informatique alors que la demande de formation dans ce domaine-là est en pleine explosion. Donc, on a accepté d'investir dans la capacité de développement de l'université. Et, comme n'importe quel investissement, bien, c'est un peu comme une hypothèque. Quand une entreprise décide d'investir dans une nouvelle installation, elle emprunte de l'argent, elle construit sa nouvelle installation qui produit, qui génère des revenus et qui permet de rembourser l'hypothèque.
M. Chagnon: Vous vous êtes retrouvés dans une situation où vous aviez perdu, en fait, à peu près 30 % de vos revenus gouvernementaux. Ce n'est pas rien, là.
M. Tavenas (François): Tout à fait. Tout à fait.
M. Chagnon: Ce n'est pas rien, là, vous avez perdu 30 % de vos revenus gouvernementaux entre 1995 et l'an 2000, et de façon draconienne.
M. Tavenas (François): D'une façon très rapide.
M. Chagnon: Une politique qui a entraîné la perte de 1000 professeurs à travers le Québec. C'est l'équivalent, ça, de l'UQAM. C'est comme si on avait fait disparaître l'UQAM du paysage des universités au Québec, 1000 profs; 986 qu'ils sont là-bas. Et, vous, vous avez pris comme politique de tenter d'amoindrir l'impact de la baisse de vos profs tout en le finançant, en vous en allant sur le service de la dette.
M. Tavenas (François): Je pense qu'on a fait le bon choix dans les circonstances. Mais c'est sûr que j'aurais préféré ne pas avoir à faire de choix, là, de ce côté-là parce que, pendant le temps où nous étions en train de gérer de la décroissance, nos copains des autres provinces canadiennes, eux, étaient en train de gérer de la stabilité ou de la croissance, alors...
M. Chagnon: Oui. Mais, ce que ça implique, c'est que, vu d'un strict plan institutionnel, le moment où le gouvernement décidait de diminuer son niveau de dette, d'endettement ? parce que c'était ça, l'option gouvernementale ? le niveau d'endettement s'est retrouvé à être transféré dans votre institution. Dans le fond...
M. Tavenas (François): En partie.
M. Chagnon: En partie. On peut le vérifier aussi beaucoup dans le domaine de la santé. Ça a été le cas pour plusieurs places. Et ça me sonne une cloche, ça.
M. Tavenas (François): On en a quand même absorbé beaucoup, hein? Parce que, si prend le manque à gagner total, sur sept ans, on a perdu 300 millions au total, O.K., sur la période de sept ans.
M. Chagnon: Oui. Vous êtes passés de 281 millions à 217. Je m'excuse, 281 millions à 217.
M. Tavenas (François): Voilà. Quand je fais le total cumulé sur toutes les années, on a 300 millions de manque à gagner jusqu'à l'année en cours et on a 100 millions de dette accumulée. Ça veut dire qu'il y a un 200 millions qu'on a réduit en termes de dépenses, là, qu'on a absorbé en coupures. Ce n'est pas rien comme effort, là.
M. Chagnon: L'objectif gouvernemental de diminuer le déficit ou de ramener le déficit à zéro était un objectif louable définitivement, auquel tous s'accordent. La différence, si on compare, par exemple, avec l'Ontario... L'Ontario, si je prends le portrait de la situation financière des universités et du gouvernement, en prenant 1994-1995 au Québec et en Ontario, je me ramasse avec ? prenons le chiffre généralement exprimé ici, au Québec ? 6 milliards de déficit dans l'année 1994-1995, 281 millions de... enfin, 1,5 milliard de financement universitaire à travers le Québec à ce moment-là, et je me ramasse en Ontario avec 1 860 000 000. Mes chiffres viennent de Facts and Figures 2000: A Compendium of Statistics of Ontario Universities, en page... Tableau 5.1.1, 1 860 000 000. Eux autres sont à 11 milliards de déficit, si vous vous rappelez, dans le processus. Ils diminuent leur déficit aussi mais l'étalent sur une période un peu plus longue, ce qui fait qu'on se retrouve en 1999-2000 avec un financement qui augmente à 2 120 000 000 pour les universités en Ontario. Donc, il y a 10 % d'augmentation du financement public ? je ne parle pas des frais de scolarité puis tout ça, là ? strictement du financement gouvernemental en Ontario pendant que, vous, vous baissez de 30 %, alors que, au moment où on commence, où on va vous remettre votre 30 % sur les quatre prochaines années, l'Ontario continue à financer davantage. Donc, l'écart qui vous sépare de l'Ontario n'est plus seulement l'écart qui vous ramenait au taux d'inflation entre 1994 et 2002-2003, mais c'est le taux d'inflation plus 10, 15, 20 %.
M. Tavenas (François): C'est pour ça que je dis: Il était important de faire ces comparaisons les plus objectives possible. Ce n'est pas facile de comparer les systèmes universitaires parce que, en Ontario, il y a le système de cégeps qui n'est pas là, donc il y a une première année qui est incluse. Bon, il y a toutes sortes de spécificités, mais il y a des spécialistes de ces questions-là qui sont capables de faire les analyses comparées. Et, quand, à titre de représentant de la CREPUQ, au Sommet du Québec et de la jeunesse, j'avais insisté, dans la séance finale de négociations, pour que soit inclus cet engagement du Sommet qui veut que le gouvernement et la CREPUQ mettent en place un système de comparaison des ressources disponibles au Québec par rapport aux ressources disponibles dans les autres provinces canadiennes, c'était justement pour ça, là, qu'on ait une espèce de tableau de bord, qu'on sache où on est.
Alors, je me souviens de la discussion parce que le premier ministre Bouchard me disait: M. Tavenas, vous ne me demandez toujours pas de vous garantir que je vais vous donner le même financement que dans les autres provinces? J'ai dit: Ce n'est pas ça que je vous demande, ce dont on a besoin, c'est d'un tableau de bord, ce dont on a besoin, c'est de savoir où on est, partant du...
M. Chagnon: Mais pourquoi vous auriez un...
M. Tavenas (François): Parce que je pars du principe que, quand on sait...
M. Chagnon: Mais pourquoi vous auriez un financement inférieur à celui des autres provinces?
M. Tavenas (François): Ce n'est pas ça, ce que je dis. Je pars du principe qu'à partir du moment où on sait où on est, relativement parlant, le gouvernement a les outils qu'il lui faut pour prendre des décisions responsables. C'est ça.
M. Chagnon: Ah, ça, c'est clair. Ça, c'est évident. Ça, c'est sûr, on s'entend là-dessus. Mais pourquoi n'insistiez-vous pas pour avoir un financement semblable à celui des autres provinces?
M. Tavenas (François): Bien, ce serait mon objectif mais... Et puis là on revient sur la question du débat qu'il y a à faire sur le financement de l'enseignement supérieur, les différentes sources de financement, etc.
M. Chagnon: Parce que là on risque de le mélanger avec toutes sortes de choses, là. J'entendais mes collègues ministériels parler du problème de... enfin...
Une voix: ...
M. Chagnon: Non, du rapport Séguin, là, c'est-à-dire l'équité fiscale. L'équité fiscale touche toutes les provinces. Peu importe la province où on se trouve, ce problème se retrouve aussi. Si vous êtes moins financés qu'une université d'une autre province, ce n'est pas... là, on ne peut pas imputer ça au fédéral. S'il y avait plus d'argent pour les provinces, probablement que toutes les universités auraient plus d'argent pour leurs universités, c'est entendu. Et, dans ce cadre-là, évidemment, le dossier... Si on touche particulièrement l'aspect du financement des universités, le problème devient un peu caduc lorsqu'on s'en sert uniquement pour se comparer avec les autres universités puis les autres provinces.
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(16 h 50)
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Ceci étant dit, je remarque que dans les crédits à voter qui ont été déposés aujourd'hui... Je voudrais savoir si vous avez été informés ? ou consultés ? du fait que le 80 millions qui doit être ajouté sur l'année 2002-2003 sera des crédits à voter pour les dépenses imputables à l'année financière 2003-2004? Dans la page 6-11 de nos crédits qui ont été déposés, Enseignement supérieur, Universités, Transfert: 80 164 500, total du portefeuille, 80 164 500, mais pas pour l'année financière 2002-2003, mais bien 2003-2004, ce qui risque d'entraîner, en 2003-2004, une difficulté accrue pour augmenter ou d'aller faire en sorte de voir augmenter... Tous vos collègues ont demandé ici, à cette commission, depuis trois semaines, de faire en sorte d'augmenter effectivement les crédits à l'éducation, plus particulièrement à l'ensemble supérieur.
«Ces crédits ont pour objet d'assurer le financement d'une partie des sommes allouées pour le réinvestissement en éducation dans le cadre des contrats de performance signés avec les universités ? dont on sait que la première étape doit se terminer en 2002-2003. En raison de l'obligation de s'assurer de l'atteinte des résultats au terme de l'année académique qui survient deux mois après la fin de l'année financière du gouvernement, les montants consentis à ce titre sont imputables aux crédits 2003-2004.» Là, on est en train de venir s'accrocher sur des crédits 2003-2004 qui ne seront évidemment pas déposés avant l'an prochain. Est-ce que vous avez été consultés sur cette question?
M. Tavenas (François): On a été mis au courant de cette question. Je pense qu'à titre de président de la CREPUQ, ça a été une des dernières lettres que j'ai envoyées au sous-ministre de l'Éducation quand on a été informé du fait qu'une partie du financement prévu dans les contrats de performance allait être mise à la disposition des universités sur constat des résultats. Et ce dont vous venez de parler, c'est exactement ça. Le résultat net de l'opération, c'est de nous amener à recevoir les fonds prévus au contrat de performance avec plusieurs mois de retard, et donc à devoir financer ce cash-flow pendant quelques mois. Alors, nous avons écrit au ministère pour exprimer les problèmes que nous avions avec cette approche-là.
M. Chagnon: On ne mettra pas ça au compte des bonnes nouvelles.
M. Tavenas (François): Pas tellement, non. Il y a effectivement un problème dans ce sens-là, dans la mesure où le... Je crois que le ministère de l'Éducation a tous les moyens qu'il lui faut pour, disons, prendre les mesures dans l'hypothèse où l'université ne respecterait vraiment pas son contrat de performance. La compréhension que j'ai des choses, c'est que tout le monde les respecte parce que c'est des contrats qui ont été... comme dans le cas de l'Université Laval, qui reflètent nos priorités institutionnelles, nos actions qui étaient déjà entreprises, et, dans ce sens-là, je pense que la mesure prise...
M. Chagnon: Moi, je pense qu'on a assez d'informations, au moment où on se parle...
M. Tavenas (François): ...ces difficultés
M. Chagnon: ...pour être capable de faire l'évaluation de la finalité des contrats de performance université par université. Vous êtes presque en fin d'année financière aussi, dans le fond, votre année financière finit le 31 mai. Alors, c'est assez évident, on peut voir si vos performances sont là ou pas là. On est capables de le faire au moment où on se parle. C'est bien plus un problème d'ordre du cash-flow du gouvernement dont il s'agit que du problème dont on vous parle, de faire l'inventaire des conclusions de vos rapports de performance université par université. Je ne vous demanderai pas de commenter sur ce dernier point qui est plus politique, mais qui demeure quand même, en tout cas, sujet à réflexion, disons.
Vous avez été un des principaux animateurs du Sommet de la jeunesse. Pour rester dans le dossier financier, vous aviez demandé 600 millions ? vous étiez président de la CREPUQ à l'époque ? vous aviez demandé 600 millions, vous avez eu 300 étalés sur trois ans, trois, quatre ans, maintenant quatre ans. On vous avait aussi généreusement promis, si je me rappelle bien, de financer à 100 % toutes vos dépenses, vos coûts de système, tout ce qui évidemment contribue à faire augmenter vos frais sans que... Vous ouvrez votre porte au mois de septembre puis inévitablement ces frais-là vont augmenter, que ce soient les échelles de salaire de vos profs nouveaux que vous avez engagés, qui seront en croisière dans leur échelle salariale, etc. Est-ce que vos coûts de système sont financés à 100 %?
M. Tavenas (François): Les coûts de système sont financés à 100 % dans le sens où... La portion des coûts de système qui correspond à la subvention gouvernementale dans notre budget, ça, c'est financé à 100 %. Le problème qu'on a, c'est que la subvention gouvernementale représente à peu près 81 %, 82 % du budget de fonctionnement de l'université, donc il y a un 18, 19 % qui est couvert par d'autres sources de revenu, la principale étant les revenus de droits de scolarité. Et, les droits de scolarité étant gelés, cette partie-là des coûts de système n'est pas financée. On a par ailleurs un autre problème...
M. Chagnon: Donc, les coûts de système ne sont pas financés à 100 %, tel que ça a été promis au Sommet de la jeunesse.
M. Tavenas (François): Disons que...
M. Chagnon: C'est oui ou c'est non.
M. Tavenas (François): ...nous avons un débat intéressant sur cette question-là.
M. Chagnon: Débattons!
M. Tavenas (François): Parce que là aussi j'ai écrit au ministre ? à l'époque, François Legault ? pour lui souligner qu'il y avait un problème et que, comme le niveau des droits de scolarité était déterminé par le gouvernement, il avait aussi la responsabilité de porter les conséquences en termes de coûts de système correspondants à ces droits de scolarité. D'un autre côté, je pense que, quand on parle avec les fonctionnaires du gouvernement, on se fait dire: Les coûts de système, ils sont financés à plein parce que dans notre partie on les finance à plein. Mais il me reste encore un trou de 18 ou 19 %. Vous avez raison sur le fait que l'ensemble des coûts de système n'est pas financé.
M. Chagnon: L'an dernier, par exemple, vos coûts d'énergie, est-ce qu'ils ont été financés à 100 %?
M. Tavenas (François): À ma connaissance, il y a eu un énoncé de principe de financement de la croissance des coûts de l'énergie.
M. Chagnon: Ça, ça aide, ça.
M. Tavenas (François): Je ne suis pas sûr que le vice-recteur à l'administration et finances ait reçu le chèque encore.
M. Chagnon: Voilà. Il attend. Le chèque est dans la poste.
M. Tavenas (François): Mais j'ai l'énoncé de principe.
M. Chagnon: O.K. Ce qui rend un peu plus difficile évidemment l'administration courante de l'université. Quand on attend ces subventions et qu'elles arrivent à la fin de l'année financière, ça vous entraîne des dépenses supplémentaires d'emprunt parce que, en plus de votre emprunt majeur sur votre déficit accumulé, vous êtes obligé d'emprunter pour financer vos opérations courantes, en fait. Est-ce que vous trouvez que ça fait beaucoup de sens?
M. Tavenas (François): ...
M. Chagnon: Merci.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Tavenas (François): Disons que, si vous voulez aller encore plus loin, à ma connaissance ? puis ça, c'est vrai pour tous les paliers de gouvernement ? nous payons les impôts sur la masse salariale le jour où on fait le chèque de paie et nous recevons la subvention gouvernementale à la fin du mois. Donc, nous payons les impôts sur la masse salariale avant d'avoir reçu le financement de la masse salariale en question.
M. Chagnon: C'est un peu... C'est un cercle tout à fait vicieux, vous allez jusqu'à emprunter pour payer des impôts.
M. Tavenas (François): Mais, M. Chagnon, il date d'il y a fort longtemps! Ha, ha, ha!
M. Chagnon: Oui, je sais. J'ai eu le temps de corriger bien des choses mais pas suffisamment assez de temps pour corriger... On se reprendra bientôt. Sauf qu'on se retrouve à financer finalement les impôts qu'on retourne au gouvernement. Alors, vous suggérez ceci: d'abord, faisons en sorte de déterminer combien ça vaut l'enseignement universitaire au Québec, puis ensuite, voilà la question qui doit être posée ensuite au gouvernement, à savoir quelle partie de cette augmentation des frais universitaires, qui doit être posée.
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(17 heures)
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Ça rend un peu court un peu le discours du premier ministre qui dit: Je vais geler les frais de scolarité pendant quatre ans. C'est une excellente initiative, à une condition, à condition de continuer le discours puis de dire: Bien, je vais financier le 500 millions qui manque, puis pas dans cinq ans ou dans 12 ans, je vais le financer dès l'année 2003-2004, à partir du moment où on établit que c'est 500 millions. Parce que c'est au moins 300, minimum 300. Vous étiez à 300 à l'époque, les autres universités sont à 10, 12, 15 % en avance sur vous. 15 % de 2 milliards, c'est un autre 250, 300 milliards, c'est 300 milliards... 300 millions, c'est-à-dire 15 % de 2 milliards, ça nous amène à peu près à ça, un chiffre qui va tourner autour de... quelque part entre 450 puis 500 millions. Et, à partir du moment où on fait cette relation-là, si on arrive à tirer cette conclusion-là, bien, il faut être capable ensuite de sortir son stylo puis de préparer le chèque. Et ce que vous dites finalement, c'est que le premier ministre, dans le fond, agit de façon qui serait... Il agirait de façon plus responsable s'il annonçait en même temps un réinvestissement majeur pour compenser les autres pertes de revenus que l'université pourrait avoir.
M. Tavenas (François): Nous, ce qu'on dit, c'est: On a besoin de savoir exactement où on est comparativement aux autres puis de valider les chiffres que vous mentionnez, qui seront probablement dans les ordres de grandeur qu'on a. Mais on a besoin d'avoir une analyse comparée, validée à l'externe, de façon à ce qu'on soit sûrs des chiffres et qu'on puisse, à partir de là, agir en conséquence. Mais je suis de ceux qui pensent que l'objectif de garantir l'accessibilité à l'université est un objectif absolument central pour la société québécoise...
M. Chagnon: On s'entend là-dessus, c'est sûr.
M. Tavenas (François): ...sous réserve que ce soit l'accessibilité à une université qui va donner une formation de qualité comparable avec celle qui se donne dans les autres pays développés avec lesquels on est en contact. Et c'est ça, le bout de l'équation qui nous manque en ce moment.
M. Chagnon: Je vous remercie beaucoup, je vais laisser... Je sais que ma collègue du comté de Jean-Talon a quelques questions à poser, puis ensuite je reviendrai sur, d'abord, la captation de ces nouveaux profs qu'il vous faut trouver au moment où on se parle, puis surtout de leur rétention dans certains cas.
La Présidente (Mme Bélanger): Alors, Mme la députée de Jean-Talon.
Mme Delisle: Merci, Mme la Présidente. Alors, vous me permettrez de saluer bien particulièrement le recteur de mon université et de lui dire que, si mon étoile continue de briller au firmament politique, j'aurai le grand plaisir, après les prochaines élections générales, de représenter l'Université Laval ici, puisqu'il y a un changement, le comté s'agrandit et vous ferez partie de Jean-Talon. Je n'ai pas l'intention d'aller dans Louis-Hébert, je reste dans Jean-Talon.
Ceci étant dit, j'ai suivi avec beaucoup d'intérêt, écouté surtout avec beaucoup d'intérêt les réponses que vous avez données aux questions de mes collègues. J'ai une préoccupation et elle touche tout ce qui entoure la dénatalité. Et je vais faire un lien avec un des engagements que vous aviez pris, qui touchait la reconfiguration des programmes puis faire un peu le grand ménage dans certains programmes qui étaient peu fréquentés ou enfin qui étaient peut-être un peu moins populaires, etc., et l'avenir.
Dans un premier temps, j'aimerais savoir si vous avez réussi à reconfigurer l'ensemble des programmes que vous souhaitiez un peu mettre au rancart pour toutes sortes de raisons ? peut-être que mon choix de mots n'est pas bon ? et quelle est votre planification à l'égard justement de cette dénatalité. Vous êtes comme nous, vous avez pu lire les dernières statistiques touchant évidemment toute cette réalité qui est la dénatalité au Québec. Notre région est aussi durement touchée que d'autres régions du Québec. Vous avez fait mention tout à l'heure qu'on est passé de 36 000 étudiants à 35 500, une perte de 500 étudiants en quelques années. J'imagine que ça n'ira pas nécessairement en s'améliorant. Par contre, j'imagine que vous devez... Je souhaite, en tout cas, à tout le moins, que vous ayez dès maintenant en tête un plan pour nous assurer que nos petits-enfants et nos arrière-petits-enfants puissent avoir le même privilège que nous avons eu, c'est-à-dire l'accès à une éducation, une instruction de qualité et de premier plan. Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus.
M. Tavenas (François): Alors, c'est un fait que la dénatalité est un problème sérieux pour l'ensemble du Québec, et c'est un problème très sérieux en termes d'évolution des régions du Québec. La région de Montréal, malgré la dénatalité, est en croissance; la région de Québec est à peu près stable; et les régions éloignées, les régions-ressources sont plutôt en déclin.
Ceci dit, du point de vue de l'université, d'abord, oui, nous sommes passés de 36 000 à 35 500, mais on est passé entre-temps par 32 000 et, donc, il y a eu une croissance qui s'est faite depuis quelques années et une stabilisation ensuite, croissance et stabilisation qui s'expliquent par une combinaison de phénomènes.
Le premier, c'est que les taux de participation aux études universitaires continuent d'être en croissance et, donc, oui, il y a moins de citoyens, mais il y en a plus qui ont envie d'aller à l'université. Le deuxième, c'est qu'il y a une croissance assez significative du côté de la formation continue, clientèles non traditionnelles, là, mais qui sont de plus en plus importantes. Et, quand je regarde l'ensemble de la population de l'Université Laval, la population de ce qu'il est convenu d'appeler... Alors, je ne sais plus si je dois dire les adultes parce que, l'autre jour, Christian Robitaille m'a fait remarquer que tous les étudiants de Laval étaient des adultes, ce qui est vrai.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Delisle: Il s'agit sans doute des adultes de mon âge.
M. Tavenas (François): Oui, oui, c'est ça. C'est ce qu'il dit, ils sont vieux, disons, comme moi.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Tavenas (François): Non, c'est un fait qu'il y a une participation substantielle maintenant aux études universitaires, et je m'attends à ce que ça augmente.
Troisième phénomène, les universités ont la capacité, par l'offre de programmes qu'elles font, d'attirer des étudiants en proportion plus grande. Alors, évidemment, là, on est dans une dynamique de concurrence entre établissements. Mais, quand je regarde l'évolution des choses ? puis vous le mentionniez tout à l'heure, madame ? nos taux d'attraction de diplômés de cégeps dans notre réservoir naturel de recrutement est en croissance. Donc, Laval offre des programmes qui attirent proportionnellement plus d'étudiants. Et puis nous avons commencé à diversifier nos lieux de recrutement. Alors, l'Université Laval recrute de façon croissante dans la région de Montréal et dans l'Ouest québécois. Et là c'est parce qu'on a offert des programmes qui sont nouveaux, qui attirent.
J'ai eu la surprise agréable, il y a quelques mois, d'avoir Raymond Bachand dans mon bureau, qui venait discuter de développement technologique, développement de la région, etc., et puis qui me mentionne en passant que sa fille était inscrite dans notre nouveau Baccalauréat en études internationales et langues vivantes. Bon. Alors, elle vient de Montréal parce que Laval offre quelque chose qui est particulier.
Sur le plus long terme, je pense qu'il y a des possibilités extrêmement intéressantes qui s'offrent à l'Université Laval. D'abord, directement en termes de recrutement, tout le milieu francophone canadien, pour lequel nous avons, dans le passé ? puis je remonte il y a 20 ans, 30 ans, 40 ans ? joué un rôle intéressant de pôle de formation pour la francophonie canadienne, nous l'avions laissé tomber un peu, ce rôle-là, depuis une vingtaine d'années. Nous avons repris nos efforts de recrutement en Ontario, au Nouveau-Brunswick et dans l'Ouest canadien, où nous avons des choses intéressantes à offrir.
Le deuxième volet, évidemment, c'est le recrutement international. L'Université Laval a, dans la francophonie mondiale, une réputation absolument extraordinaire, et une réputation qui se maintient. Nous attirons une proportion croissante d'étudiants étrangers, grosso modo, un tiers de Français, un tiers en provenance des pays francophones, un tiers reste du monde, c'est à peu près comme ça que ça se divise, et ces nombres sont en croissance, et notre réputation est en croissance elle aussi. Alors, il y a toute une possibilité de ce côté-là.
Maintenant, je pense que l'université a un rôle indirect à jouer aussi. La Chambre de commerce et d'industrie du Québec métro avait organisé il y a quelques semaines une journée d'étude sur la problématique de l'immigration dans la région de Québec. La région de Québec a ceci de très particulier qu'elle est très homogène au plan culturel et semble être peu accueillante pour des immigrants. On a effectivement les plus bas taux d'immigration à travers tout le pays. Et le colloque visait à se poser des questions: Qu'est-ce qu'on peut faire? Bien, il se trouve que l'Université Laval peut faire beaucoup de choses dans ce domaine. Et je suis allé dire aux participants de cette journée d'étude que nous étions en train de faire beaucoup de choses dans ce domaine, d'être des joueurs dans l'accueil d'immigrants dans la région, d'être des moteurs d'immigration dans la région et, en contribuant au développement économique, d'être des moteurs de développement économique qui vont attirer de l'immigration.
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(17 h 10)
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Vous avez juste à aller dans une entreprise comme EXFO pour vous rendre compte à quel point une entreprise comme ça peut être un attracteur d'immigrants. Et je pense que c'est dans les intérêts bien compris de l'Université Laval que de jouer ce rôle-là parce que, plus il y aura de gens et de jeunes qui vont venir s'installer dans la région de Québec pour contribuer au développement, plus ça va faire de parents qui auront des enfants qui voudront aller à l'université puis qui viendront chez nous. Mais là on est dans le très long terme.
M. Chagnon: Nous sommes dans une situation, ou vous êtes dans une situation où vos choix pour augmenter vos clientèles ou, du moins, les conserver sont ou bien d'aller cannibaliser d'autres institutions universitaires au Québec ou de trouver un marché... de rentrer sur le marché international des étudiants et d'aller chercher des étudiants étrangers qui vont venir étudier ici.
M. Tavenas (François): Ou, encore une fois, de jouer la carte de la formation continue de manière plus agressive, là, et de faire des choses, alors...
M. Chagnon: Bien sûr. Par exemple, si vous pouviez conserver vos droits de scolarité pour les étudiants étrangers ? vous les perdez, ils s'en vont au fonds consolidé actuellement ? est-ce que ça ne vous donnerait pas plus d'intérêt à faire en sorte d'augmenter votre nombre d'étudiants étrangers?
M. Tavenas (François): Je ne le regarde pas sous cet aspect-là. Je le regarde sous l'aspect de l'enrichissement de la vie universitaire, de la diversification des populations.
M. Chagnon: Mais si l'un venait avec l'autre, là? Si l'un venait avec l'autre?
M. Tavenas (François): M. Chagnon, vous ne me ferez pas dire que je refuserais de l'argent s'il venait, là, c'est bien évident. Ha, ha, ha!
M. Chagnon: Bien, voilà! Mais ça ne serait pas une formule... Sérieusement, ce ne serait pas une formule qui pourrait permettre justement aux universités de s'assurer de rentrer sur ces marchés-là, de faire une promotion? Au lieu faire une promotion locale pour chercher des étudiants, il me semble qu'il y a un marché qui est ouvert à tout le monde, et marché mondial qui pourrait être ouvert à des universités, des grandes universités comme la vôtre.
M. Tavenas (François): Moi, je suis convaincu qu'on a tout ce qu'il faut pour être attrayants sur la scène internationale. Ça, il n'y a pas de doute, là, hein, on a la qualité qu'il nous faut. Je ne vous cacherai pas... De ce temps-ci, en Europe de l'Est, l'Université Laval est en train de s'établir comme université de référence pour la formation dans le domaine des sciences humaines, des sciences sociales.
Dans le contexte des programmes de l'Agence universitaire de la Francophonie, on s'est intégrés dans un programme de doctorat dans le cadre de l'École doctorale des sciences sociales d'Europe de l'Est. Cette École doctorale fonctionne à partir de Bucarest, attire des étudiants de tous les pays d'Europe de l'Est, la Russie, la Pologne, la Bulgarie, la Hongrie et la Roumanie et la Moldavie. Nous sommes quatre là-dedans, l'École des hautes-études en sciences sociales de Paris, qui est un peu considérée comme La Mecque dans le domaine, l'Université libre de Bruxelles l'Université de Neufchatel et l'Université Laval. Puis là, de ce temps-ci, on a un problème intéressant parce que les étudiants veulent tous venir à Laval.
M. Chagnon: Il y a pire problème évidemment dans la vie. Mais je voudrais revenir, parce qu'il ne nous reste pas beaucoup de temps, malheureusement. Là, vous avez plusieurs professeurs à engager dans plusieurs domaines. Vous avez des difficultés, probablement, comme tous vos autres collègues, à faire du recrutement de ces professeurs-là. Le marché extérieur du Québec est à peu près fermé, compte tenu de vos capacités de payer, vos capacités de faire en sorte de concurrencer les universités hors Québec, puis même au Québec dans certains cas. Vous allez faire quoi, là, d'ici les quelques mois à venir, compte tenu du temps que ça prend pour engager un prof?
M. Tavenas (François): Disons que la problématique est très variée d'une discipline à l'autre et d'un secteur à l'autre, alors il y a des domaines dans lesquels c'est devenu presque mission impossible. Dans le secteur des sciences de l'administration, si on pense...
M. Chagnon: Un docteur en finances?
M. Tavenas (François): Un docteur en finances aujourd'hui, n'importe où sur le marché, là, il vaut trois, quatre fois le salaire qu'une université est capable d'offrir. Donc, il y a un problème réel. Il y a certains secteurs, comme l'informatique, dans lesquels c'était très difficile et ça l'est un petit peu moins aujourd'hui. Il y a des secteurs, comme le génie électrique, dans lesquels on avait des vrais problèmes, puis là, bien, avec les déboires de l'économie, ça nous aide un peu.
Mais, je dirais, on n'est pas complètement démunis, dans le sens où ? je l'ai mentionné tout à l'heure ? notre structure d'organisation de la recherche avec des centres de recherche fait qu'on est un milieu attrayant, en particulier pour des jeunes parce qu'ils peuvent s'intégrer facilement dans l'opération de recherche, ils ont des collègues pour les appuyer, les accompagner, des infrastructures qui sont en place, et ça, pour nous, c'est un gros actif, c'est un gros point.
M. Chagnon: Vous allez réussir à trouver vos docteurs. Parce que j'imagine que vous n'engagez que des docteurs.
M. Tavenas (François): Essentiellement, essentiellement. Alors, l'environnement de recherche est un gros point. Deuxième truc...
M. Chagnon: Alors, je vais être obligé d'accélérer un peu en vous demandant de répondre à quelques questions un peu rapides, là. Je change les règles du jeu un peu.
La Présidente (Mme Bélanger): En rafale.
M. Chagnon: En rafale, exactement, en rafale. Votre espace pour faire de la recherche est-il suffisant? Vous avez augmenté vos crédits de recherche de façon importante. Généralement, ça implique... Vos collègues ont généralement des problèmes d'espace en termes de recherche. Est-ce que c'est votre cas aussi?
M. Tavenas (François): C'est le cas de la même façon. Les programmes de la FCI, avec le financement de l'appariement du gouvernement du Québec, vont nous donner un bon coup de main. Dans les projets qu'on a reçus, il y a trois projets de construction qui sont en réalisation.
M. Chagnon: O.K. Et maintenant est-ce que vous avez... Par exemple ? changement de sujet ? vos capacités d'encadrement de vos étudiants au niveau du deuxième et du troisième cycles. Parce que vos augmentations de clientèles, entre autres, viennent aux deuxième et troisième cycles, ce qui est extrêmement intéressant dans votre cas, pour 2000-2001, en tout cas, si je regarde les statistiques de 2000-2001. Qu'est-ce que vous avez comme intention d'augmenter ou d'améliorer comme services d'encadrement pour vos étudiants de deuxième et troisième cycles?
M. Tavenas (François): L'avantage de la nouvelle formule de financement est que, les variations de clientèles étant maintenant financées à 100 %, une croissance au niveau du deuxième et troisième cycles va être accompagnée par une croissance de ressources. Alors, je ne suis pas tout à fait satisfait du niveau de financement de l'étudiant moyen de deuxième et troisième cycles, mais il n'en reste pas moins qu'on va être capable d'accompagner la croissance par des croissances de ressources.
M. Chagnon: Dans le document que vous nous avez apporté concernant les comparaisons des revenus...
La Présidente (Mme Bélanger): Dernière question.
M. Chagnon: ...des universités canadiennes, il me semble qu'il doit y avoir une erreur dans UBC, le nombre de soutiens administratifs. Est-ce que je me trompe? 7 339, ça m'apparaît complètement hors normes et hors champ.
M. Tavenas (François): Ça dépend ce qu'ils ont calculé là-dedans.
M. Chagnon: Je veux bien, mais...
Une voix: Il n'y a pas un rapport annuel qui se ressemble.
M. Chagnon: Oui. Mais, en tout cas, ça fait bizarre.
M. Tavenas (François): J'imagine qu'ils ont dû comptabiliser là-dedans tout le travail, tous les trucs, le programme travail-études donné à des étudiants puis des assistances de ce type-là.
M. Chagnon: Quels sont vos critères pour être parmi les 10 universités canadiennes que vous avez reprises? Parce que j'imagine que, si je montrais ce chiffre...
M. Tavenas (François): Ce n'est pas tous du groupe des 10 là-dedans, hein?
M. Chagnon: Si je montrais ça à votre collègue de l'Université de Montréal ou de l'Université McGill, il serait peut-être surpris un peu.
M. Tavenas (François): Non, non. Ce n'est pas tout le groupe des 10, là. Ça, c'est 10... Enfin, il y en a une dizaine là-dedans.
M. Chagnon: Oui, il y en a 10.
M. Tavenas (François): Oui? Y en a-t-u 10?
M. Chagnon: Oui, il y en a 10.
Une voix: Mais ce n'est pas le groupe des 10.
M. Tavenas (François): Mais ce n'est pas le groupe des 10. O.K.?
M. Chagnon: Il y en a 10, mais ce n'est pas le groupe des 10. O.K. Ha, ha, ha!
M. Tavenas (François): Non, non. Le groupe des 10... les trois premières sont du groupe des 10.
M. Chagnon: Oui, oui, je les connais. Je les connais.
M. Tavenas (François): Le groupe des 10, c'est UBC, Alberta, cinq ontariennes, qui sont Toronto, Western, McMaster, Waterloo et Queen's, et trois québécoises, McGill, Montréal et Laval. C'est ça, le groupe des 10 au Canada.
M. Chagnon: Mme la Présidente, je veux remercier les représentants de l'Université Laval. Je sais que le recteur est un peu sur la sellette, dans ces semaines-ci, alors je lui dis merde et à la prochaine.
La Présidente (Mme Bélanger): Alors, nous vous remercions de votre présence.
M. Tavenas (François): Merci, madame.
La Présidente (Mme Bélanger): Ça a été très intéressant.
M. Tavenas (François): Merci, messieurs dames.
La Présidente (Mme Bélanger): Alors, la commission ajourne ses travaux au 9 avril 2002, après les affaires courantes.
(Fin de la séance à 17 h 19)