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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le jeudi 4 décembre 1997 - Vol. 35 N° 49

Consultations particulières sur le projet de loi n° 180 - Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique et diverses dispositions législatives


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Table des matières

Remarques préliminaires

Auditions


Autres intervenants
Mme Jeanne L. Blackburn, présidente
Mme Fatima Houda-Pepin
M. Marcel Parent
M. Russell Copeman
M. Geoffrey Kelley
*M. Guy Lessard, FQDDEE
*Mme Lorraine Pagé, CEQ
*M. Luc Savard, idem
*M. Luc Sénéchal, idem
*Mme Diane Drouin, FCSQ
*Mme Jan Langelier, APEPQ
*M. Alan Lombard, idem
*M. Gary Stronach, FCPPQ
*Mme Nicole Bherer, idem
*M. Ron Edwards, AQCS
*Mme Elizabeth Annesley, idem
*Mme Ann Cumyn, idem
*M. Jeff Polenz, idem
*Mme Jennifer-Anne Stoddart, CDPDJ
*Mme Muriel Garon, idem
*M. Philippe Robert de Massy, idem
*M. Daniel Lafrance, ASGEMSQ
*Mme Brigitte Guy, idem
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Douze heures une minute)

La Présidente (Mme Blackburn): Mesdames et messieurs, nous allons débuter nos travaux. M. le secrétaire, est-ce que nous avons quorum?

Le Secrétaire: Oui, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, M. le secrétaire. Je déclare donc la séance de la commission de l'éducation ouverte.

Vous allez me permettre de rappeler le mandat de la commission. La commission a comme mandat de procéder à des consultations particulières sur le projet de loi n° 180, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique et diverses dispositions législatives.

M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Il n'y aura pas de remplacement, mais il y aura...

La Présidente (Mme Blackburn): Il n'y a pas de remplacement?

Le Secrétaire: On me dit qu'il n'y aura pas de remplacement, mais qu'il y a une autorisation particulière pour Mme Pepin. Elle ne remplace personne, elle serait membre de la commission.

La Présidente (Mme Blackburn): Alors, il y a eu entente, me dit-on, pour que Mme la députée La Pinière soit membre de la commission pour cette séance.

Alors, l'ordre du jour. Vous avez comme moi constaté que nous avons une heure de retard, les affaires courantes ont pris un peu plus de temps. Alors, il était prévu: à 11 heures, les remarques préliminaires des membres des groupes parlementaires formant le gouvernement et l'opposition; à 12 heures, Association des directions d'école de Montréal conjointement avec l'Association québécoise du personnel de direction des écoles et la Fédération québécoise des directeurs et directrices d'établissement d'enseignement; la suspension, à 13 heures, nous y reviendrons; à 15 heures, Centrale de l'enseignement du Québec; à 16 heures, Fédération des commissions scolaires du Québec; à 17 heures, Association provinciale des enseignantes et enseignants protestants du Québec; la suspension à 18 heures; à 20 heures, Fédération des comités de parents de la province de Québec; à 21 heures, Association québécoise des commissions scolaires; à 22 heures, Commission des droits de la personne et des droits de le jeunesse; et à 23 heures, Association des services de garde en milieu scolaire, pour un ajournement prévu à 24 heures.

Vous aurez compris que nous devrons décaler l'horaire prévu en comptant sur la collaboration des uns et des autres. Alors, je vous souhaite, Mme la ministre, Mmes et MM. parlementaires, la bienvenue à cette commission. Il était prévu 30 minutes du côté du gouvernement et du côté de l'opposition. Je sais qu'on me parle de 15 à 20 minutes par intervenant, ce que sans doute les personnes qui doivent venir présenter un mémoire vont apprécier. Mais je dois vous informer tout de suite qu'il n'est pas possible, compte tenu d'engagements pris antérieurement par les membres de la commission, de dépasser 13 heures. Alors, le premier groupe que nous entendrons, nous entendrons une première partie, et l'audience se poursuivra tel que prévu à 15 heures. Alors, sans plus tarder, je laisse la parole à Mme la ministre de l'Éducation pour ses remarques préliminaires. Oui, M. le député.

M. Ouimet: Avec votre permission, la ministre et moi, je pense, avions convenu... Est-ce que ça serait possible d'avoir les outils de travail que la ministre a à sa disposition, pour tous les membres de la commission, une comparaison de la loi actuelle, de l'avant-projet de loi et du projet de loi n° 180, pour faciliter les travaux des membres? Nous apprécierions.

Mme Marois: Il n'y a pas de problème. J'ai dit au député que je les lui procurerais. C'est parce que ce dont je me suis rendu compte, c'est qu'il n'y avait pas de copie disponible actuellement, mais, aussitôt que la copie sera disponible, on va la lui donner.

La Présidente (Mme Blackburn): Comme on n'est pas à l'étape de l'étude article par article, ça sera déposé dans les temps utiles pour vous.

Mme Marois: Ce n'est pas urgent, dans ce sens-là. C'est ça, oui.

La Présidente (Mme Blackburn): Mme la ministre, la parole est à vous.


Remarques préliminaires


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, Mme la Présidente. La commission parlementaire qui s'ouvre aujourd'hui marque la dernière étape à franchir dans l'examen des modifications à apporter à la Loi sur l'instruction publique. Elle sera l'occasion d'apprécier avec les principaux partenaires intéressés le chemin parcouru depuis l'étude de l'avant-projet de loi en septembre dernier. Je souhaite que nous franchissions cette ultime étape ensemble, car il est essentiel que la réforme de l'éducation recueille l'adhésion du plus grand nombre pour porter ses fruits.

Déjà, le débat public, je crois, a eu lieu, entre autres par la voix des médias, et les propos exprimés montrent à l'évidence que la population recherche une solution d'équilibre. Équilibre entre une responsabilité accrue des établissements et le maintien de l'orientation nationale, entre la réussite de tous les élèves et la nécessité d'accorder une attention particulière à certains d'entre eux, entre l'égalité des chances et les conditions différentes dans lesquelles vivent les milieux, entre l'exercice des compétences des parents et de celles des différentes catégories de personnel de l'enseignement et, enfin, équilibre entre l'autorité de la direction de l'école et celle de la commission scolaire.

Comme il se doit, l'Assemblée nationale tranchera ces questions délicates, mais la commission parlementaire qui s'ouvre aujourd'hui est une occasion privilégiée pour clarifier les intentions du gouvernement, pour lever certaines ambiguïtés qui persistent, j'en conviens, et pour renouveler par ailleurs les consensus sur les grandes orientations du projet de loi. Aussi, sans en reprendre une à une les différentes dispositions, j'aimerais cependant passer en revue certaines des questions fondamentales qu'il touche et qui apparaissent comme les plus importantes.

D'abord, la question de la décentralisation. De l'examen qu'a fait l'OCDE des politiques d'éducation de nombreux pays, il ressort clairement que, parmi ceux qui ont mis en place des systèmes scolaires très centralisés, certains cherchent à mettre en place des modalités de décentralisation, alors que d'autres, qui avaient des systèmes d'éducation très décentralisés, cherchent à retrouver certains des avantages ou des bénéfices d'une plus grande centralisation. En déléguant des pouvoirs aux écoles, les gouvernements centraux n'en gardent pas moins le contrôle sur celles-ci, notamment, bien sûr, par les programmes d'études, le financement et l'évaluation des résultats. Le fait d'accorder plus de responsabilités aux écoles a toujours pour corollaire obligé la reddition des comptes.

Pourquoi cette recherche d'une plus grande autonomie des acteurs de l'éducation, qui fait partie d'ailleurs des grandes tendances et qui se manifeste de plus en plus clairement en Europe? Et même, selon le livre blanc de la Communauté européenne sur l'éducation et la formation publié en 1996, c'est par l'autonomie d'acteurs responsables et clairement informés des missions qui leur sont confiées que les systèmes d'éducation pourront le mieux s'adapter. Une plus grande autonomie aux établissements de base est le meilleur garant du développement de partenariats à visée sociale.

Dans la même veine, le rapport de la Commission internationale sur l'éducation pour le XXIe siècle de l'UNESCO, plus communément connu sous le nom de rapport Delors, à cause de son président, affirme que l'amélioration du système éducatif passe par l'établissement d'un nouveau modèle de gestion fondé sur deux mouvements.

D'abord, décentraliser, parce que le transfert de responsabilités du centre au local augmente le sens des responsabilités des individus et des collectivités, améliore la qualité de la prise de décision et aussi encourage l'innovation.

Ensuite, on dit: renforcer l'autonomie des établissements, parce que c'est là le facteur essentiel de développement des initiatives sur le plan local. Cette autonomie permet l'adaptation de l'intervention à la communauté, une meilleure collégialité dans le travail des enseignants et la généralisation de la capacité d'innovation. Cette autonomie se manifeste réellement dans la gestion des ressources, quand une partie importante, évidemment, de celles-ci sont gérées au niveau de l'établissement. Dans la structure de gestion, maintenant, elle est concrétisée par des procédures qui favorisent la coopération entre les différents acteurs, soit les enseignants et les enseignantes, les parents et, bien sûr, la direction de l'école.

(12 h 10)

Avec le projet de loi n° 180, je crois que nous n'allons pas à contre-courant. En effet, il ne s'agit plus de démontrer que la décentralisation favorise la réussite éducative, mais de mettre à la disposition des écoles les leviers qui leur permettront de faire des interventions plus nombreuses et mieux adaptées en faveur de la réussite des élèves. Cela était aussi la conclusion unanime, je le rappelle, de la commission de l'éducation, que vous avez présidée, Mme la Présidente, des avis et des rapports aussi du Conseil supérieur de l'éducation ainsi que de la Commission des états généraux sur l'éducation.

Enfin, de cette comparaison entre pays, toujours faite par l'OCDE, il ressort deux constats. D'abord, aujourd'hui, les modèles décentralisés sont plus fréquents que les modèles centralisés, ces derniers ayant tous procédé – tous! – à une certaine forme de décentralisation, depuis quelques années. Ensuite, il ressort que, lorsque l'établissement prend des décisions, c'est surtout dans le domaine de l'organisation pédagogique qu'il le fait.

Alors, voilà pourquoi je maintiens l'économie d'ensemble du partage des pouvoirs entre l'école et la commission scolaire, telle qu'aménagée dans l'avant-projet de loi. Je crois qu'elle est conforme à la tendance générale des systèmes d'éducation. Elle seule peut procurer aux établissements les outils nécessaires à l'adaptation de la mission éducative. Enfin, je crois surtout qu'elle correspond à notre propre évolution.

La participation des parents. J'aimerais d'abord rappeler quelques demandes exprimées par les parents à l'occasion de la commission parlementaire sur l'avant-projet de loi et auxquelles j'ai donné suite: l'augmentation du nombre de membres au conseil d'établissement; la présidence du conseil d'établissement assumée par un parent; la possibilité pour les parents de se doter d'un forum de participation à eux; l'immunité des parents dans l'exercice de leurs fonctions.

Sur ces questions, il est peut-être intéressant de regarder comment ça se passe ailleurs au Canada. La plupart des provinces ont implanté, ou sont en voie de le faire, des comités d'école de nature consultative agissant auprès de la direction de l'école et parfois – parfois, je dis bien – auprès du conseil scolaire. La composition de ces comités est assez similaire d'ailleurs d'un endroit à l'autre, d'une province à l'autre, ailleurs évidemment qu'au Québec. Ils sont constitués principalement de parents, de quelques représentants de la communauté – pas toujours – de représentants du personnel enseignant, du directeur ou de la directrice d'école – sans droit de vote – et d'un représentant des élèves au secondaire.

Avec le projet de loi, et je pense que c'est important qu'on se le dise et qu'on le constate bien ensemble, les parents passent du champ de la consultation, que, soit dit en passant, ils partageaient avec les différentes catégories de personnel, au champ de la décision, que les parents partageront également avec le personnel de l'école. Comment parler d'un recul, dans ces conditions? Nous sommes, au contraire, le seul État, le Québec, par rapport à ce qui se passe ailleurs, où les parents auront une prise réelle sur les orientations de l'école, l'encadrement des élèves, la répartition du temps alloué aux matières, l'organisation des services extrascolaires, et je ne cite que quelques exemples.

Sur la question, maintenant, du matériel didactique, qui demeure controversée, j'aimerais faire la remarque suivante. Le matériel didactique, c'est le matériel qui est en liaison directe avec les programmes d'études. On se comprend bien. C'est d'ailleurs pour cette raison que la ministre l'approuve et que l'école doit choisir parmi la liste du matériel approuvé. Il faut donc que soit posé un jugement professionnel, à l'école, sur le choix de ce matériel. Je crois que ce jugement revient au personnel enseignant et à la direction de l'école parce qu'il doit être exercé en fonction de la pertinence du matériel au regard des apprentissages à faire. Est-ce à dire que les parents ne pourront pas être informés ni même dire leur mot sur cette question? Ce n'est pas le sens, je le dis bien, ce n'est pas le sens que je donne aux dispositions du projet de loi. En effet, rien, mais rien n'empêche la direction de l'école de recueillir le point de vue du conseil d'établissement avant d'approuver le choix fait par le personnel enseignant. Et rien n'empêche le conseil d'établissement de s'exprimer, par exemple, sur l'utilisation et le coût des cahiers d'exercices. Je sais que cela préoccupe particulièrement les parents. Je suppose que cela fera partie du cours normal des discussions. Et je présume surtout, et je n'en doute pas, du bon jugement de la direction en ce qui concerne l'approbation qu'elle aura à donner.

Qu'en est-il maintenant des pouvoirs et des responsabilités au sein de l'école? La pire évaluation que l'on puisse faire des dispositions du projet de loi relativement à la répartition des pouvoirs et responsabilités à l'intérieur de l'école, la pire grille de lecture qu'on puisse utiliser, c'est celle du «qui perd? qui gagne?». D'une certaine façon, je crois que tout le monde y gagne. Les parents, comme je l'ai dit, accèdent au pouvoir décisionnel sur les questions d'orientation. Le personnel enseignant a le pouvoir de recommandation sur des questions pédagogiques et professionnelles. La communauté y gagne, puisqu'elle est sollicitée par ses représentants à contribuer aux débats du conseil d'établissement, la direction aussi, parce qu'elle a le pouvoir d'approuver dans certains domaines et d'influencer dans tous les cas.

Et surtout, ce sont les élèves qui seront gagnants, si, au-delà d'une quelconque comptabilité des pouvoirs, ils ont le sentiment que toutes les compétences, celles de leurs parents, celles de leurs enseignants et enseignantes, celles de la communauté et les leurs propres, dans le cas du deuxième cycle du secondaire, celles de leurs directeurs ou directrices sont rassemblées et tendent vers le même but pour leur profit à eux et pour soutenir leur cheminement scolaire et appuyer leur réussite.

Je sais bien qu'il s'agit de provoquer un changement de culture, ce qui implique une méfiance à dissiper, des barrières à abolir et des apprivoisements à réaliser, dans certains cas. Mais je sais qu'au-delà de certains discours officiels il existe dans plusieurs milieux des collaborations qui ne demandent qu'à s'accentuer. Et j'ai surtout la conviction profonde que chaque pouvoir, chaque responsabilité attribuée respecte la nature de l'intervention éducative à faire et la compétence de celles et de ceux qui auront à la faire. J'en suis convaincue. Et je suis convaincue également que ces pouvoirs et responsabilités ne s'exerceront pas contre qui que ce soit, mais pour les élèves et pour l'amélioration des conditions de la réussite.

Abordons maintenant la question de la mission de l'école, du curriculum national et des projets particuliers. J'avais affirmé, à l'occasion de la commission parlementaire sur l'avant-projet de loi, qu'on ne pouvait séparer l'énoncé de politique éducative, que j'ai rendu public depuis, et le projet de loi sur le partage des pouvoirs et responsabilités. Je crois que ce sont les deux dimensions d'un même projet, ils doivent donc se lire de manière intégrée, et c'est ainsi seulement qu'ils illustrent comment le partage des pouvoirs et responsabilités est au service des apprentissages à effectuer.

J'ai donc voulu confirmer cette convergence en allant encore plus loin dans la rédaction du projet de loi. Ainsi, j'ai inscrit dans le projet de loi l'énoncé de la mission de l'école de même que la portée des projets éducatifs des établissements. Ceux-ci constitueront l'adaptation ou l'enrichissement du projet éducatif national. Comme les matières enseignées au primaire et au secondaire sont toutes essentielles, ainsi que l'indique la grille-matières contenue dans l'énoncé de politique éducative, le projet de loi prévoit l'obligation, pour en déroger, d'obtenir l'autorisation de la ministre.

Par ailleurs, un conseil d'établissement pourra, aux fins d'un projet éducatif particulier, recourir à la marge de manoeuvre déjà prévue à la grille-matières, à condition, bien sûr, de ne pas compromettre l'atteinte des objectifs obligatoires des programmes d'études. La réforme concilie, de cette façon, l'existence d'un curriculum national qui garantit la même qualité de formation pour tous et la capacité des établissements d'adapter l'enseignement aux besoins et caractéristiques de leurs élèves.

(12 h 20)

On peut s'attendre, en outre, à ce que tous les élèves reçoivent une réponse à leurs besoins dans l'établissement le plus proche de leur lieu de résidence, ce critère de proximité étant dorénavant déterminant pour l'inscription des élèves dans les écoles par la commission scolaire. C'est donc exceptionnellement, sur l'initiative d'un groupe de parents seulement, que la commission scolaire pourra, après avoir consulté son comité de parents, requérir de la ministre l'autorisation d'établir une école aux fins d'un projet particulier. Dans ces cas-là, je pourrai donner une autorisation pour la période et aux conditions que je déterminerai.

C'est la ligne d'équilibre que j'entends tracer entre la diversification souhaitable et souhaitée des projets éducatifs dans toutes les écoles du Québec et l'affectation d'écoles entières à des projets particuliers. Je suis convaincue qu'il s'agit d'une position raisonnable, qui évite l'éclatement du système d'éducation tout en favorisant la diversification des écoles. Tous les élèves n'en seront que mieux servis.

J'aimerais faire remarquer qu'en ce domaine nous sommes loin d'une simple réforme de structures gratuites et superflues. Au contraire, il s'agit de faire servir les structures à des fins éducatives diverses en préservant la possibilité pour le plus grand nombre d'avoir accès à une diversité de projets, comme c'est déjà le cas présentement, mais tout en garantissant la même qualité de formation de base, quel que soit le projet. En ce sens-là, ce projet de loi est assurément un projet éducatif bien plus que structurel.

Qu'en est-il du pouvoir de solliciter ou de recueillir des fonds? Il est vrai que certains ont fait des gorges chaudes de cette section du projet de loi, y voyant même de ma part une volonté de désengagement à l'égard du financement des services publics; et, je vous dirai, rien de moins. Or, il se trouve que la collecte de fonds est une pratique généralisée depuis de nombreuses années; pratique qu'on viendrait de découvrir, à en croire certains propos.

Face à une telle pratique, j'avais trois choix. Soit l'hypocrisie, c'est-à-dire faire semblant qu'elle n'existe pas, même si tout le monde sait qu'au contraire elle existe, et laisser perpétuer cette pratique avec le risque déjà présent d'effets pervers, même de situations frôlant l'illégalité, puisque la loi actuelle ne le prévoit pas. Deuxième possibilité, deuxième choix possible, soit l'interdiction formelle d'une telle pratique sous peine de sanction, auquel cas on m'aurait sûrement reproché, au pire, de créer une police des écoles, au mieux, d'étouffer des initiatives qui font partie de la culture scolaire. Soit, enfin, le choix d'encadrer cette pratique, un effort étant fait pour concilier le légitime pouvoir d'initiative des établissements et, bien sûr, l'intégrité de la mission de l'école, et c'est l'option que j'ai privilégiée. Elle présente deux volets.

D'une part, les établissements ne pourront solliciter ou recevoir des fonds de quelque nature ou de quelque source à des conditions qui sont incompatibles avec la mission de l'école. J'oblige ainsi le conseil d'établissement à porter un jugement sur ces questions sans me substituer à lui. En outre...

La Présidente (Mme Blackburn): Vous permettez, Mme la ministre...

Mme Marois: Oui.

La Présidente (Mme Blackburn): Je pense qu'on avait convenu de 20 minutes, il y a 18 minutes de fait.

Mme Marois: D'accord. Alors, dans quelques minutes, je pourrai terminer, mais je pense que c'est important...

La Présidente (Mme Blackburn): Je vous remercie.

Mme Marois: ...que l'on puisse faire état de l'ensemble des orientations soit nouvelles ou reprécisées que l'on retrouve au projet de loi maintenant.

En outre, je ne crée pas de fardeau additionnel pour ces fonds, puisque les fonds seront à la commission scolaire au nom de l'établissement. J'assure ainsi la transparence du processus.

D'autre part, la commission scolaire devra répartir les budgets entre les écoles de façon équitable et en tenant compte des inégalités sociales et économiques des milieux. Je laisse ainsi s'exercer publiquement le jugement d'une instance élue, politique, telle que l'est la commission scolaire. Cependant, si cette option que je retiens devait être perçue comme intolérable, injuste ou même dangereuse, je demeure disposée à envisager d'autres solutions, à condition bien sûr qu'on m'en expose les avantages et les inconvénients. Je ne prétends pas, d'ailleurs, qu'il n'y a pas de risque à mettre en place l'encadrement proposé, mais je crois que quelques balises suffiront à réduire ces risques au minimum.

L'intégration des enfants en difficulté d'adaptation et d'apprentissage. J'ai bien écouté les revendications faites au nom de ces enfants pour qui l'intégration dans la société est un droit qu'on ne devrait pas remettre en cause. Par conséquent, j'ai inséré dans le projet de loi un énoncé favorable à leur intégration scolaire, indiquant ainsi une direction qu'on devrait emprunter résolument, mais dans des conditions qui ne se retournent pas contre le développement de ces enfants.

De cette façon, tout en respectant l'état actuel de la jurisprudence en la matière, le projet de loi confirme le principe de l'intégration des enfants en difficulté d'adaptation et d'apprentissage, il invite les organismes scolaires à le partager concrètement et, surtout, il demande à ceux-ci de créer ainsi les conditions favorables à cette intégration. Je crois que nous faisons un pas de plus, tout en nous situant dans le peloton de tête des provinces en ce qui concerne les services offerts aux enfants en difficulté ou handicapés.

Quant aux services de garde en milieu scolaire, le projet de loi va plus loin que l'avant-projet de loi, sur cette question. En effet, il oblige dorénavant la commission scolaire à organiser des services de garde.

En conclusion, Mme la Présidente, il nous reste une dernière étape à franchir ensemble. Les changements proposés dans le projet de loi, sur lesquels des organismes et des associations s'apprêtent à exprimer leurs points de vue, ne sont pas ambigus et n'ont pas de sens caché. Ils témoignent de notre confiance dans la maturité des parents, des enseignants et des enseignantes, du personnel scolaire, des directions d'écoles et de l'ensemble des Québécoises et des Québécois qui attendent beaucoup de l'école, car ils veulent travailler ensemble là où cela importe, c'est-à-dire à la réussite scolaire et éducative. Ils le feront de différentes façons parce que chaque milieu a une personnalité différente. Ils le feront de façon responsable parce qu'ils partagent un engagement commun à l'égard de l'éducation. Et ils le feront de façon démocratique parce que les règles du jeu le veulent ainsi.

Nous ne choisissons pas le statu quo, parce qu'il est impératif d'améliorer le système scolaire. Nous ne choisissons pas la fuite en avant, parce que nous savons qu'il y a dans tous les établissements du Québec des ressources compétentes qui n'attendent qu'un espace plus grand pour s'exprimer. Nous choisissons de faire évoluer les structures pour que la mission éducative soit assumée par une plus grande diversité d'acteurs. Évidemment, nous inversons la pyramide, et ce mouvement bouscule des personnes, des comportements organisationnels, des attitudes ancrées. Mais je ne crois pas que nous le faisons de manière irresponsable ou irréfléchie.

Nous assumons notre propre obligation à l'égard des élèves en garantissant une formation de base commune et de même qualité pour tous, le même niveau de ressources partout sur le territoire et l'accès aux mêmes services éducatifs. Nous continuons de confier aux commissions scolaires, en tant qu'organismes politiques intermédiaires, des fonctions de péréquation, de contrôle et d'évaluation. Nous augmentons même leurs obligations en matière de services de garde à l'école et de justice envers tous les élèves.

Le système d'éducation a besoin de cet oxygène pour respirer mieux, pour libérer l'initiative et pour valoriser toutes les compétences. À la tutelle, nous substituons l'autonomie responsable. Aux querelles et aux conflits d'intérêts, nous substituons la collégialité responsable. Et à l'isolement, nous substituons, la communauté responsable. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, Mme la ministre. La parole est maintenant au porte-parole de l'opposition officielle en matière d'éducation, M. le député de Marquette. M. le député.


M. François Ouimet

M. Ouimet: Merci, Mme la Présidente. Mirages et illusions, écrans de fumée ou, comme diraient les anglophones, «smoke and mirrors», c'est de ça dont il s'agit, parce que l'élève et l'étudiant est le grand oublié dans cette réforme, dans ce projet de loi n° 180 qui est déposé devant nous. Il est assez surréaliste, Mme la Présidente. On s'est livré à un exercice, dans le cadre d'un avant-projet de loi, où on a une cinquantaine d'organismes qui se sont présentés devant nous. On a fait ou on a entendu de longs débats entre les différents groupes d'intérêts par rapport au choix des manuels scolaires: Ça relevait de qui? Qui devait consulter qui? Qui allait avoir le dernier mot? Et la ministre soulevait ce débat-là dans un projet de loi qui était ambigu. Ce n'était pas trop clair.

(12 h 30)

Mais, à l'évidence, on se rend compte qu'il y a un problème plus fondamental que celui-là sur lequel la ministre de l'Éducation ne se penche pas, c'est l'absence, la pénurie de manuels scolaires dans nos écoles primaires et secondaires. On fait de grands débats, ici, pour savoir qui doit avoir la responsabilité. Pourtant, dans trop d'écoles primaires et dans trop d'écoles secondaires, au Québec, alors qu'il y a des garanties législatives dans la Loi sur l'instruction publique, dans le régime pédagogique, qui stipulent clairement et carrément que chaque élève doit disposer personnellement de son propre manuel scolaire, c'est l'outil indispensable pour accéder au savoir. C'est le silence complet. On fait des débats sur qui va pouvoir choisir les manuels alors qu'il y a absence de manuels dans nos écoles primaires et secondaires au Québec. Ça, c'est dramatique. On ne parle pas des vraies affaires en éducation et on ne sent pas une volonté de la part de la ministre de l'Éducation de prendre des initiatives pour redresser cette situation-là. On nous entretient dans des débats qui sont de tuyauterie, de mécanique, des brassages de structures – on a eu droit à ça depuis que la ministre de l'Éducation est arrivée en poste – et on investit des dizaines, pour ne pas dire des centaines de millions de dollars dans des briques, dans du mortier, avec l'agrandissement de certaines écoles pour faire de la place à des maternelles cinq ans temps plein.

Et ça, ça témoigne d'un autre problème. Les enfants qui sont le plus à risque, les enfants qui ont des difficultés n'ont pas reçu et ne reçoivent pas des services qui pourraient favoriser, en bout de piste, leur réussite scolaire. On a uniformisé une mesure qui s'adressait en premier et avant tout à des élèves en difficulté, des élèves qui proviennent de milieux économiquement faibles. On leur avait accordé des maternelles temps plein, et l'argent que nous avions dans le système... On disait: Il faut faire une distinction: si on veut préserver le principe de l'égalité des chances, il faut que ça passe par l'inégalité des ressources, et on va tenter d'en mettre un peu plus pour les élèves qui, nous disons, sont plus susceptibles de décrocher. On a pris de l'argent qui devrait servir pour des élèves et on a dit: On va financer des maternelles cinq ans temps plein pour tous et pour toutes. En quoi est-ce que ça va venir aider des élèves qui sont en difficulté, des élèves qui proviennent de milieux où on sait qu'ils vont avoir des difficultés accrues à réussir leurs études?

Au niveau des élèves ayant des difficultés d'adaptation et d'apprentissage, ces mêmes élèves qui ont des difficultés à compléter leur diplôme d'études secondaires, ces mêmes élèves qui ont de la difficulté à réussir, quels gestes concrets, quelles mesures, quels moyens est-ce que la ministre de l'Éducation a mis à leur disposition? Aucun, sauf pour des compressions budgétaires sans précédent qui font en sorte qu'on se retrouve avec un système qui devient à deux vitesses. Comme le rapporte combien d'articles de journaux: des listes d'attente qui n'en finissent plus pour des élèves qui ont besoin de services, des élèves qui sont en première année, en deuxième année, en troisième année qui ont besoin d'orthopédagogues, de psychologues, d'orthophonistes, eh bien, il y a une diminution importante au niveau de ces ressources-là.

Pourtant, on est conviés à brasser des structures. On a été conviés, dans le cadre du projet de loi n° 109 qui a été adopté, qui fait maintenant partie de la Loi sur l'instruction publique, à une réduction du nombre de commissions scolaires pour les faire passer de 156 à 72. Je vous rappelle, Mme la Présidente, vous vous en souvenez fort bien, notre commission parlementaire, nous étions favorables à une telle mesure à la condition que les économies qui seraient dégagées par cette réduction de structures scolaires soient investies directement dans les écoles. Mais le 100 000 000 $, on sait qu'il ne sera pas investi directement dans les écoles parce qu'on a vu dans un autre dossier, dans un autre projet que ça va être au service du déficit, que ça va servir à l'atteinte du déficit zéro et que ça va venir pallier à la compression budgétaire annoncée déjà, qui s'en vient le 1er juillet 1998, réduction de 70 000 000 $ pour ce service-là. Et la ministre était d'accord. Et, malheureusement, la Fédération des commissions scolaires du Québec était d'accord pour faire en sorte que les économies dégagées par la fusion et la réduction du nombre de commissions scolaires ne serviront pas pour les enfants. Ça, c'est malheureux.

Les études, j'en ai cité combien dans le cadre de l'avant-projet de loi pour dire à la ministre qu'il y a des spécialistes qui se sont penchés sur la question de la décentralisation. Nous avons tous reconnu les bienfaits de la décentralisation, mais ce n'est pas ça qui est en cause. Ce n'est pas ça qui est en cause et on sent la ministre qui tente de faire dire à l'opposition que nous sommes favorables à un système centralisé. Bien au contraire, dans notre programme politique, nous préconisons la décentralisation des structures. Sauf que la clé au niveau de la réussite scolaire, l'objectif que vous vous êtes fixé, auquel nous adhérons, de faire réussir le plus grand nombre d'élèves possible, eh bien, la clé de cela n'est pas devant nous cet après-midi, ne passe pas par le projet de loi n° 180, ne passe pas par la loi n° 109 qui a été adoptée. Elle passe par des mesures qui vont venir soutenir les enseignants dans la salle de classe, qui vont venir assurer... et ça, c'est la responsabilité au premier titre et au premier chef de la ministre de l'Éducation de s'assurer que tous les élèves au Québec, pour toutes les matières, pas juste les matières essentielles, toutes les matières – c'est ce que dit notre régime pédagogique – que ces élèves-là vont pouvoir avoir leur propre livre, le ramener à la maison, ce livre-là, pour pouvoir poursuivre leur apprentissage, pour pouvoir faire leurs devoirs et leurs leçons. Malheureusement, ce n'est pas le cas présentement.

Et les élèves qui sont à risque, nous les connaissons parce que nous savons, à cause des milieux desquels ils proviennent, qu'ils ont besoin de ressources additionnelles. Ces mêmes élèves qui fréquentaient les maternelles cinq ans temps plein l'année passée se retrouvent en première année et n'ont plus de services spécialisés, ils n'ont plus de mesures d'appoint, parce qu'on a décidé de prendre ces ressources-là et de les diriger davantage vers le financement d'une maternelle cinq ans temps plein uniforme à travers le Québec, qui profite, par exemple, à mon fils qui est inscrit à la maternelle cinq ans temps plein. Mais je me pose la question: Est-ce que c'est lui qui avait le plus besoin d'une telle mesure?

Est-ce qu'on n'aurait pas dû prendre de l'argent, comme nous le recommandent les spécialistes des services à la petite enfance, pour réduire les ratios au niveau des maternelles cinq ans temps plein? Parce qu'ils sont de un enseignant présentement pour 22 et, Mme la ministre, dans certains cas, 24 élèves dans une maternelle cinq ans temps plein. Et ça, c'était dénoncé ce matin et hier par la CEQ. On aurait dû prendre ces sommes d'argent là pour peut-être réduire les ratios à un enseignant pour 10 élèves. Il y a des spécialistes de la petite enfance qui nous l'ont recommandé à combien de reprises? Il y a eu un colloque à l'Université de Montréal au mois de novembre dernier auquel mon bureau a assisté et c'était la recommandation des spécialistes qui se penchaient sur la question. Alors, à ces enfants-là, à risque, on ne leur offre et on ne leur donne à peu près aucun soutien additionnel. On a décidé de prendre du financement qui se dégageait et de l'investir ailleurs.

(12 h 40)

Et pourtant le discours que tenait la ministre, que chaque dollar que nous investirons à la petite enfance va nous en faire épargner 7 $ au bout du processus, ce discours-là, elle le tenait d'expériences américaines vécues aux États-Unis dans certaines écoles. Mais le ratio maître-élèves dans ces écoles-là, là où on avait effectivement fait un bon investissement, le ratio était de un enseignant par six élèves, pas par 20, 22, 24. Comment voulez-vous que les élèves aient des services personnalisés, ceux qui en ont le plus besoin pour effectuer un certain rattrapage et ceux qui vont en avoir besoin tout au long de leur cheminement scolaire? On est passé à côté, on est à côté de la coche, on est à côté de la track. Comment expliquer que des enfants qui sont dans des milieux favorisés... on en connaît, des villes au Québec où il y a une certaine richesse et une richesse importante. À ces élèves-là, on va donner les mêmes services qu'autrefois on donnait aux enfants en difficulté.

Alors, Mme la Présidente, on est conviés à ça dans le cadre de l'exercice que nous amène à faire la ministre de l'Éducation. Malheureusement, on ne parle pas de vraies choses, on ne parle pas de véritables problèmes en éducation. On est en train de redéfinir la tuyauterie, mais on ne s'attaque pas aux véritables problèmes. Je suis convaincu que, si on posait la question à l'ensemble des 2 200 ou 2 400 directeurs et directrices d'école du Québec, ils nous diraient qu'il y a d'autres priorités et les argents devraient être investis ailleurs: pour des enfants qui ont besoin de services en première, deuxième, troisième année, qui n'arrivent pas à les obtenir par rapport aux années antérieures; les psychologues qui doivent couvrir 20 écoles, bien, il y en a au Québec, pour des enfants qui ont besoin des services.

Et là il y a des brèches importantes dans le projet de loi n° 180 au niveau du principe fondamental de l'égalité des chances et de la gratuité scolaire. On installe un mécanisme qui fait en sorte que les conseils d'établissement vont pouvoir exiger des contributions financières pour les services éducatifs, puis ça a déjà commencé. Ça a déjà commencé dans les écoles montréalaises et c'est bien sûr que, dans les milieux les plus favorisés, les parents n'auront pas d'objection à piger dans leurs poches pour mettre de l'argent sur la table parce qu'ils souhaitent la meilleure éducation pour leurs enfants, ils sont prêts à payer. Mais, dans d'autres milieux qui n'ont pas les mêmes moyens, ces enfants-là risquent de reculer parce que, au niveau du milieu, ils ne seront pas capables de financer des services qui seront offerts ailleurs. Et c'est là qu'on voit s'installer un système à deux vitesses, une école à deux vitesses.

La ministre avait déjà dit: Écoutez, le député de Marquette regarde juste le projet de loi n° 180, mais il y a d'autres pièces dans l'ensemble de la réforme que je dépose qui vont venir favoriser la réussite du plus grand nombre, et elle citait les curriculums. Regardons la première déclaration de la ministre de l'Éducation qui disait: Il y aura plus d'heures consacrées au français, plus d'heures consacrées à l'histoire, plus d'heures consacrées à d'autres matières. Ça, c'est la volonté exprimée par la ministre de l'Éducation. Mais elle a un contrôle sur les moyens qu'elle a décidé de ne pas exercer, parce que les heures ne seront uniquement qu'à titre indicatif et les conseils d'établissement vont avoir toute marge de manoeuvre pour décider – ça, c'est dans la loi n° 180 – du nombre d'heures...

Une voix: Le contenu.

M. Ouimet: Oui, le contenu. Mais le contenu, là, il y a des minimums, il y a des maximums. Ça prend combien de temps pour atteindre des objectifs? On ne peut pas quantifier ça au niveau des heures. Dans certaines écoles, les mieux nanties, où les enfants proviennent d'un milieu où ils ont eu de la stimulation, ils sont bien préparés à leurs études, ils vont faire ça en moins d'heures. Il y en a d'autres, au niveau du conseil d'établissement, qui vont avoir d'autres priorités que les priorités fixées par la ministre de l'Éducation, qui vont se donner comme priorité, peut-être, l'informatique, et l'informatique va prendre le dessus sur d'autres matières que la ministre disait fondamentales ou essentielles. Mais on ne peut pas laisser croire à la population que, dans l'ensemble des écoles du Québec, il va y avoir plus d'heures consacrées au français, à l'histoire et à d'autres matières quand ce n'est pas du ressort de la ministre de l'Éducation et quand ce ne sera pas dans le régime pédagogique, que ça va être uniquement à titre indicatif. Le seul endroit, et la ministre le sait, où c'est à titre prescriptif, où les écoles n'ont pas d'autres choix, c'est au niveau de l'enseignement moral et religieux.

Et en quoi changer les programmes, changer les matières qui seront transmises aux élèves va favoriser la réussite de ces élèves-là? Il n'y a aucun lien de cause à effet entre la réussite des jeunes et une matière qui va changer, sauf que ce qu'on sait, c'est que, dans la réforme des programmes d'études – la ministre l'a déclaré à plusieurs reprises en commission parlementaire, en interpellation et aux médias – il n'y aura pas un dollar de plus pour financer la réforme des curriculums, qui va nécessiter le changement de tous les manuels scolaires, parce qu'on va intégrer de nouvelles notions qui sont les compétences transversales. Les programmes que nous avons actuellement, il faut les balancer par-dessus bord et, avec ça, les manuels scolaires, et les manuels scolaires pour tous les enfants au Québec, du primaire au secondaire. Ça va coûter combien, cela? Alors qu'on a déjà identifié un problème, pénurie de manuels scolaires par rapport à des programmes qui existent déjà, on va changer les programmes, il n'y aura pas un dollar de plus pour faire l'achat de manuels scolaires. Et on prétend que cette réforme des curriculums...

Mme Marois: Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Blackburn): Oui, Mme la ministre.

Mme Marois: Je ne veux pas même que vous interveniez auprès de mon collègue, mais je vous signale cependant que la pertinence des propos de notre collègue quant au projet de loi qui est devant nous est questionnable. Mais je vais quand même continuer à l'écouter.

La Présidente (Mme Blackburn): Mme la ministre, on est généralement, à cette étape-ci, assez généreux et assez large.

Mme Marois: C'est pour ça que je comprends, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Blackburn): Mais, cependant, en tout respect et en toute amitié, j'inviterais le député de Marquette à ramener son propos à un peu plus de pertinence.

M. Ouimet: Oui, Mme la Présidente. Je constate, par l'intervention de la ministre, qu'elle préfère parler d'autres choses que de véritables problèmes. Mais je lui rappelle que...

La Présidente (Mme Blackburn): Monsieur, non, vous permettez...

M. Ouimet: ...le projet de loi n° 180... Oui, Mme la Présidente...

Mme Marois: Là, franchement, vous exagérez.

La Présidente (Mme Blackburn): Écoutez, vous permettez, monsieur...

M. Ouimet: Le projet de loi n° 180...

La Présidente (Mme Blackburn): Vous permettez, M. le député, on est aux remarques préliminaires...

M. Ouimet: Oui, voilà.

La Présidente (Mme Blackburn): ...touchant un projet de loi, on est extrêmement tolérant, mais je vous inviterais à revenir aux commentaires touchant le projet de loi et ses effets, ce qui est tout à fait votre droit.

(12 h 50)

M. Ouimet: Oui, merci, Mme la Présidente, mais il faut rappeler une chose. La ministre s'est fixé comme objectif la réussite du plus grand nombre d'élèves possible et elle nous a dit que le projet de loi n° 180, c'était un des moyens, c'était une pièce maîtresse pour y arriver. Mme la Présidente, là, on est dans l'ordre des moyens. Ce que nous disons à la ministre de l'Éducation: Elle fait fausse route. Ça sert d'autres objectifs, ça, on en convient, mais pas l'objectif que vous avez fixé. Et on sait également que ça va alourdir la tâche de tous les intervenants scolaires: ceux qui oeuvrent au niveau des premières lignes dans la salle de classe et dans l'école, ça va augmenter leur tâche de façon importante, mais il n'y aura pas de ressources additionnelles. Il y a – et on va l'entendre, ce discours-là, en commission parlementaire – plutôt des engagements progressifs et alarmants du gouvernement en matière de financement des services publics.

Je rappelle également que, toujours au niveau de la réforme des curriculums, on a coupé de façon dramatique les conseillers pédagogiques, les conseillères pédagogiques, ceux-là et celles-là même qui vont devoir bien comprendre les nouveaux programmes d'études et qui vont devoir transmettre cela aux professeurs qui sont sur le terrain. Ce qui se passe actuellement, c'est que, compte tenu que, dans certaines commissions scolaires, dans certaines écoles, il n'y a plus de conseillers pédagogiques, on demande à des enseignants d'assumer la tâche. Ces enseignants-là doivent quitter la salle de classe pour aller suivre soit un perfectionnement ou pour assister à des colloques de toutes sortes qui sont donnés pendant les heures de classe par les responsables du ministère de l'Éducation. Qu'est-ce qui se passe dans la salle de classe? Ils sont remplacés par des suppléants, et on me dit que, dans certains cas, le prof est absent pendant deux semaines à trois semaines, et les apprentissages qui devraient normalement se faire ne se font pas. Ça aussi, c'est dramatique; on est en train d'hypothéquer possiblement une génération d'enfants.

Alors, ça peut faire rire quelques députés, mais on va ressentir les conséquences...

Mme Marois: Non...

La Présidente (Mme Blackburn): Si vous permettez...

Une voix: Un point de règlement.

La Présidente (Mme Blackburn): Monsieur, si vous permettez, je vais le rappeler à l'ordre.

Une voix: Personne ne rit ici.

La Présidente (Mme Blackburn): Je pense qu'on n'a pas à juger du comportement des collègues, et je n'ai pas vu sourire de ce côté-là de la Chambre.

Une voix: Désagréable.

La Présidente (Mme Blackburn): Alors, comme les caméras ne sont pas là-dessus, je pense que je me dois de le dire. Je vous rappellerais, s'il vous plaît, à la pertinence, en vous rappelant en même temps que vous avez 23 minutes de faites.

M. Ouimet: Alors, je vais terminer, Mme la Présidente. Alors, ceci étant dit, sur une toile de fond de compressions budgétaires sans précédent où la préoccupation n'est pas l'enfant, n'est pas l'élève, mais davantage la réalisation d'économies au service de la stratégie référendaire du gouvernement, on est conviés à un projet de loi. Nous allons faire une bataille et nous allons mener une bataille farouche sur au moins trois éléments: la place des parents dans le système, la brèche que vous proposez au niveau du principe de l'égalité des chances et de la gratuité scolaire et, troisièmement, la menace omniprésente dans le projet de loi par rapport au projet éducatif à vocation particulière. Et nous participerons, parce que nous y sommes conviés, au processus enclenché par la ministre de l'Éducation, tout en rappelant qu'on est à côté de la cible et toutes les études nous l'ont indiqué. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, M. le député de Marquette. Y a-t-il d'autres remarques du côté du parti ministériel? Du côté de l'opposition? Alors, vous permettez, il me semblerait peu courtois et pas très productif de vous inviter à commencer votre présentation pour une durée de cinq minutes et reprendre après le lunch. Donc, je suspends les travaux jusqu'à 15 heures. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 53)

(Reprise à 15 h 10)

La Présidente (Mme Blackburn): Mesdames, messieurs, la commission reprend ses travaux, tel que prévu. Nous entendrons maintenant trois associations, l'Association des directions d'école de Montréal, l'Association québécoise du personnel de direction des écoles et la Fédération québécoise des directeurs et directrices d'établissement d'enseignement. Alors, j'inviterais les porte-parole à prendre place à la table, en rappelant simplement que... Mme la ministre, vous avez un peu empiété sur votre temps de parole?

Mme Marois: C'est vrai? Non.

La Présidente (Mme Blackburn): En guise de boutade. Alors, je vous rappelle brièvement les règles. Vous avez 20 minutes pour la présentation de votre mémoire, et c'est suivi d'une période de questions également répartie autant que possible entre la ministre...

M. Ouimet: Vous empiétez sur mon temps aussi.

La Présidente (Mme Blackburn): ...oui, un peu – et le porte-parole officiel de l'opposition en matière d'éducation, le député de Marquette. Alors, j'inviterais, je pense que c'est M. Émery, à présenter les personnes qui l'accompagnent. Et vous pouvez débuter dès maintenant la présentation de vos mémoires.


Auditions


Association des directions d'école de Montréal (ADEM), Association québécoise du personnel de direction des écoles (AQPDE), et Fédération québécoise des directeurs et directrices d'établissement d'enseignement (FQDDEE)

M. Lessard (Guy): Je suis Guy Lessard, président de la Fédération des directeurs d'école; à ma gauche, Mme Liliane Marcoux, présidente de l'AQPDE; M. Émery, qui est président de l'ADEM.

La Présidente (Mme Blackburn): Alors, on vous souhaite la bienvenue et on vous écoute.

M. Lessard (Guy): Merci, Mme la Présidente. Mme la ministre, M. Ouimet, la FQDDEE, l'ADEM et l'AQPDE, je vous dirais qu'on est en accord avec l'orientation générale de la réforme du système d'éducation proposée par le gouvernement. Le mémoire que l'on vous présente aujourd'hui se veut une critique du projet de loi sur l'instruction publique et aussi des propositions qu'on veut faire à partir des articles de loi qui ne nous semblent pas conformes ou peuvent nuire au fonctionnement d'une école autonome et responsable.

Alors, au niveau de la critique des articles de loi, les articles 39 et 96.7 – je vous fais grâce de les lire – la position de la FQDDEE est à l'effet de situer l'école autonome et responsable dans un cadre juridique lui donnant un statut légal et, ainsi, la pleine autonomie sur les responsabilités qui lui sont dévolues par la loi. Si le statut légal n'est pas accordé, il faudrait toutefois préciser, selon nous, à l'article 39, que l'école est établie par la commission scolaire, sous l'autorité du conseil d'établissement et du directeur. Quant à l'article 96.7, il faudrait lire seulement: «Sous l'autorité du conseil d'établissement, le directeur de l'école s'assure de la qualité des services éducatifs dispensés à l'école.» Cette façon de faire évite, selon nous, la bicéphalité patronale et toute l'ambiguïté qui peut en découler. N'oublions pas que la très grande majorité des fonctions et pouvoirs du directeur d'école se réalisent sous la gouverne des fonctions et pouvoirs attribués au conseil d'établissement.

Quant à l'article 43, pour assurer une représentation égale des parents en toute circonstance, il est proposé de modifier le deuxième alinéa de l'article 43 ainsi: «Le nombre total des postes pour les représentants des parents doit être au moins égal au total des autres postes ayant le droit de vote au conseil d'établissement.» Cependant, une telle modification ne devrait pas avoir pour effet d'augmenter le nombre maximal de 20 membres. Référence: l'article 42.

Quant aux articles 79, 80 et 218.1, s'il y a des articles, dans ce projet de loi, qui sont superflus, ce sont bien ceux-ci. Ils viennent entacher l'esprit même de l'ensemble du projet de loi qui veut rendre les écoles autonomes et responsables. Dans l'école de la réussite, nous avons fait état des effets néfastes qui pourraient résulter de certaines mesures de contrôle externe. Ces articles ouvrent toute grande la porte à des abus de contrôle. Il faut donc les supprimer. Et on croit que le rapport prévu à l'article 80 est une mesure suffisante.

Quant aux articles 83, 86 et 87, à titre de commentaire, nous voudrions souligner que ces articles mettent bien en évidence toute la complexité pour le directeur d'école d'oeuvrer dans un système où l'on a décidé de favoriser plusieurs paliers décisionnels. Il se retrouve donc au coeur d'un processus de prise de décision qui peut faire intervenir jusqu'à cinq instances différentes: le ministère, la commission scolaire, le conseil d'établissement, les enseignants et les autres personnels. Voilà un défi énorme qui guette les directions d'école, qui auront certainement besoin d'un support particulier.

Articles 88, 89 et 90. Il faut préciser, à l'article 90, «sont imputés aux crédits attribués à l'école», car ce libellé laisse place à des interprétations différentes. Notre position est à l'effet de ne pas pénaliser les milieux qui font des efforts au niveau d'activités pouvant leur générer des revenus autres que ceux alloués et répartis par la commission scolaire, selon les dispositions de l'article 275.

Quant à l'article 92, pour les mêmes raisons que celles invoquées à l'article 90, il ne faut pas pénaliser les milieux qui sollicitent ou reçoivent toute somme d'argent d'une personne ou d'un organisme lors de la répartition des subventions de fonctionnement par la commission scolaire.

Les articles 93 et 276. Pour nous, le dernier alinéa de l'article 276 devrait être retiré, car il vient créer une situation susceptible de neutraliser le bon fonctionnement d'une école et des services aux élèves qui la fréquente.

Dans le même ordre d'idées, il faudrait supprimer de l'article 95 les mots suivants: «l'approbation», et les remplacer par: «et en rend compte à la commission scolaire». Cette reddition de compte apparaît suffisante, considérant les fonctions et les pouvoirs du conseil d'établissement.

Quant à l'article 96.4, nous souhaiterions une modification à cet article pour que celui-ci se lise ainsi: «Le directeur de l'école choisit son ou ses adjoints. La commission scolaire procède ensuite à la nomination.»

Quant à l'article 96.5, dans la même foulée que l'article précédent, il revient au directeur d'école de nommer un adjoint pour le remplacer en cas d'absence ou d'empêchement de ce dernier.

L'article 96.6. Il est normal pour un directeur d'école de ne pas avoir d'intérêt dans une entreprise mettant en conflit son intérêt personnel et celui de l'école. Toutefois, pour éviter tout malentendu, il faudrait circonscrire la notion d'intérêt indirect.

Les articles 96.16 et 261.1. Ces articles obligent, dans le cadre d'une entente entre la commission scolaire et les universités, à recevoir des stagiaires universitaires. Dans le cadre d'une gestion plus collégiale telle que préconisée pour l'école dans ce projet de loi, nous proposons d'ajouter à l'article 261 les modalités d'application suivantes: «Une telle entente doit être établie par le comité consultatif de gestion, lors de l'assemblée convoquée à cette fin par le directeur général de la commission scolaire. Lorsque la commission scolaire n'approuve pas une proposition du comité consultatif de gestion, elle doit lui en donner les motifs.»

À 218.2, un tel pouvoir ne devrait pas être exercé par une personne morale ou physique qui est susceptible d'être partie au conflit. Dans une telle situation, au lieu de substituer ses décisions à celles de l'établissement, la commission scolaire devrait dénoncer l'école ou le centre au ministre qui, lui, pourra faire enquête et prendre les mesures appropriées.

À 266.1, il est légitime que la commission scolaire s'assure du bon état des biens mis à la disposition des établissements d'enseignement. Toutefois, on croit qu'il y aurait lieu de préciser cet article, qui pourrait se lire ainsi: «La commission scolaire s'assure du maintien en bon état des biens mis à la disposition de ses établissements d'enseignement et peut prendre les mesures appropriées pour suppléer au défaut d'un établissement, dans le cas où celui-ci se détériore indûment.»

L'article 275. Dans le premier alinéa, sur l'aspect des subventions de fonctionnement, il faudrait préciser qu'elles comprennent les montants reliés au budget d'opération et d'immobilisations. Pour une plus grande transparence, et c'est le but de cet article, le dernier alinéa de l'article devrait se lire ainsi: «La commission scolaire doit rendre publics les objectifs et les principes de répartition ainsi que les montants des subventions, du produit de la taxe scolaire et des autres revenus entre ses établissements et les critères afférents à ces mêmes principes, ainsi que les objectifs, les principes, les critères et les montants qu'elle retient pour ses besoins et ceux des comités de la commission scolaire.»

À l'article 283, pour éviter toute controverse et dans l'esprit de cet article, il faudrait ajouter un quatrième point, qui se lirait comme suit: «Le responsable ne détient aucune autorité en ce qui concerne les choix, les décisions budgétaires et les dépenses effectuées par les instances autorisées par le conseil d'établissement de l'école.»

L'article 472: Le remplacement des mots «proportionnelle aux nombres d'élèves inscrits dans les écoles» par le mot «équitable» laisse, là encore, place à une large interprétation qui est susceptible de défavoriser les écoles. Il faudrait venir préciser les critères d'équité qui seront retenus.

Quant à l'article 508.04, si celui-ci est encore d'actualité, il y aurai lieu de modifier le début de cet article par: «À la suite d'une demande justifiée et écrite du conseil confessionnel, le directeur d'une école est tenu de transmettre à ce dernier...»

Quant aux considérations générales, les mesures d'exception, on souhaiterait des mesures... Au sujet de l'obligation de la formation du conseil d'établissement, il faudrait prévoir des mesures d'exception pour deux types de situations particulières.

(15 h 20)

Dans un premier temps, les très petites écoles. Il y a des situations où une même direction a plus de trois établissements. Il devient alors difficile pour une même personne d'assumer les responsabilités qui lui incombent par la loi. Dans un même ordre d'idées, un même établissement peut regrouper des clientèles diverses dans un même établissement: école de formation générale, centre de formation professionnelle, centre d'éducation des adultes. Est-ce à dire que le même directeur d'établissement aura trois conseils d'établissement à gérer dans la même bâtisse?

Convention collective. Les grilles-matières et le temps d'enseignement s'harmonisent dans un système rigide et complexe. Il faut être téméraire pour seulement tenter l'innovation dans un tel cadre. Il est impératif d'ajuster les conventions collectives du personnel des écoles dans l'objectif d'une plus grande flexibilité et non pas de faire des gains patronaux sur les conditions d'emploi. Il faut enrichir la tâche et non pas l'élargir, travailler pour la réussite éducative des élèves, à titre d'exemple: tâches globales, permettre les échanges partiels de tâches selon les forces des enseignants, décloisonner certains horaires, équilibrer les tâches sur plus d'un cycle, etc. La pratique des enseignants a besoin d'air pour se relancer et pour s'exercer dans un professionnalisme accru. Ces éléments impliquent plus de liberté pour les enseignants, mais également plus de responsabilités.

Quant à l'autonomie professionnelle des enseignants, la voie de l'autonomie professionnelle des enseignants apparaît être une réponse conforme à l'esprit de cette loi, qui préconise une prise de décision le plus près possible de l'action. La relation étroite entre élève et enseignant, qui fait ses propres choix dans le cadre des orientations pédagogiques de l'école et d'un projet éducatif s'inspirant d'une réalité du milieu, semble une voie susceptible de favoriser la réussite éducative des élèves. Toutefois, le concept d'autonomie appelle celui de la responsabilité, une responsabilité d'instruire, de socialiser et de qualifier – l'article 36 – qui réfère à des obligations – l'article 22 – reliées au statut d'enseignant. Dans cette optique, nous croyons qu'il faut ajouter aux obligations de l'enseignant celle de s'inscrire dans une démarche de formation continue qui réfère aux obligations légales de l'enseignant de soumettre annuellement aux directeurs d'école son plan de formation et les activités qui s'y rattachent.

Le pouvoir de contrôle des commissions scolaires. Concernant le pouvoir de contrôle de la commission scolaire, on retrouve à de nombreux articles «la commission scolaire s'assure que». Il y aura lieu, par conséquent, de circonscrire la définition de ce pouvoir de s'assurer dans la loi elle-même. À cette fin, le rapport annuel contenant le bilan des activités, transmis à la commission scolaire par le conseil d'établissement, semble la voie à privilégier. L'article 80.

La commission et les comités du ministre. Le projet de loi donne plus d'importance à l'école et aux acteurs qui y oeuvrent, en particulier les enseignants et les directeurs d'école. Il est donc proposé d'assurer une ou des places nommément identifiées aux groupes respectifs des enseignants et des directeurs d'école dans la composition de la commission des programmes d'études, du comité d'évaluation des ressources didactiques, du comité d'agrément des programmes de formation à l'enseignement et du comité d'orientation de la formation du personnel enseignant.

En conclusion, pour les directeurs d'école, le projet de réforme du système éducatif est essentiel au développement de notre société et, ainsi, à l'avenir des jeunes Québécois. L'esprit du projet de loi sur l'instruction publique veut établir un nouveau partage des responsabilités entre l'école, la commission scolaire et le ministère de l'Éducation. Ce nouveau partage des responsabilités en faveur de l'école s'appuie sur une littérature importante, une recherche de cohérence et un contexte québécois qui prônent une prise de décision le plus près possible de l'action. Nous avons déjà abordé certains éléments et principes favorables à une telle orientation dans les documents Une école autonome et responsable et L'école de la réussite .

Il appert que l'articulation d'un tel virage, d'un tel changement provoque des insatisfactions et des oppositions de certains groupes, dans le mesure où les pouvoirs et les privilèges qui s'y rattachent sont remis en question. C'est au moment où les pressions sont les plus vives qu'il faut se recentrer sur le fondement même de cette réforme, soit l'élève et la réussite éducative de ce même élève. Nous tenons à vous rappeler que c'est sur ce dernier point que s'est articulé l'ensemble des réflexions des directeurs et des directrices d'école. Je vous remercie.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, M. Lessard. La parole est maintenant à Mme la ministre. Madame.

Mme Marois: Merci, Mme la Présidente. D'abord, on s'excuse auprès des regroupements de directions d'école d'avoir dû reprendre la séance cet après-midi, alors qu'on devait vous recevoir ce matin, mais nous n'étions pas responsables de cet agenda, ni de l'autre côté ni de notre côté, compte tenu que l'Assemblée, ce matin, avait un certain nombre d'activités à son calendrier qui obligeaient une présence de notre part.

D'abord, je vous remercie pour votre mémoire. Je pense qu'il est bien ramassé et va aux choses qui, pour vous, demeurent importantes, et elles nous sont signifiées.

Une première chose, d'abord, que j'aimerais partager avec vous, c'est le fait qu'on va regarder chacune des propositions que vous nous faites sous un angle évidemment légal, pour savoir ce que nous pourrions retenir, ce qui pourrait nous permettre d'ajuster et de bonifier le projet de loi.

Par ailleurs, il y a des choses, évidemment, avec lesquelles, soit je suis moins à l'aise ou plus en désaccord ou sur lesquelles j'aimerais avoir votre éclairage. Et je pense que l'objet de notre rencontre aujourd'hui, évidemment, est peut-être de dire plus clairement les choses avec lesquelles on est moins d'accord puis, en même temps, de creuser plus loin celles qui méritent qu'on les éclaire.

D'abord, je pense, la première chose, je connais suffisamment vos organisations respectives pour savoir qu'il y a depuis longtemps une discussion sur cette question du statut légal de l'institution qu'est l'école et, associée à cela, donc, une pleine autonomie. C'est évident que le choix que nous avons fait n'est pas celui-là, au sens strict et légal du terme. Je pense qu'il faut être bien clair, ce n'est pas celui-là que nous reconnaissons, le statut d'établissement, mais nous ne lui reconnaissons pas un statut au plan légal, si on veut, comme unité autonome qui aurait à répondre, par exemple, à son conseil, dont le directeur ou la directrice aurait à répondre au conseil d'établissement. Le lien d'emploi reste avec la commission scolaire. Et je pense qu'il faut être clair. Je sais qu'il y a un certain nombre de recommandations que vous faites qui vont dans ce sens-là. Vous êtes cohérents, vous êtes logiques par rapport à toutes les analyses que vous avez faites jusqu'à maintenant, et je respecte ça, mais cela reste pour nous un choix qui a été, à ce moment-ci, écarté.

Par ailleurs, vous dites, à la page 5: Évidemment, on devra être au coeur d'un processus de prise de décision, où on aura à être en relation avec plusieurs instances: ministère, commissions scolaires, conseils d'établissement, enseignants et enseignantes et autres personnels. Et, vous nous dites: C'est un défi énorme et nous aurons certainement besoin d'un support particulier. Nous vous l'avons dit, je le répète ici, et nous le ferons surtout, nous sommes d'accord pour apporter ce support, je pense que c'est absolument fondamental.

Il y a deux questions que vous n'abordez pas dans votre mémoire, mais que d'autres groupes abordent. Et là je voudrais peut-être m'adresser à votre expérience. Actuellement, il est prévu que l'on puisse consulter les parents par le biais de leur comité d'orientation, je crois, ou de leur conseil d'orientation sur les matériels scolaires, les matériels didactiques. Nous avons la prétention, j'ai la prétention qu'à l'intérieur des articles qui sont là cela est toujours possible de le faire. Je l'ai dit ce matin dans mon intervention, vous étiez présents. Est-ce que ça vous apparaît effectivement, vous, suffisamment clair pour vous dire: Nous pourrons le faire si nous le croyons utile, nécessaire, et nous pensons que ce le sera, ou: C'est important peut-être que nous précisions cet aspect-là, étant entendu évidemment que le manuel scolaire ou l'outil pédagogique qui va suivre la méthode reste lié à la méthode? Or, comme la méthode revient sous la responsabilité de l'enseignant et de l'enseignante, approuvée évidemment par vous-mêmes. Il reste qu'il y a un lien là dont il faut être conscient. Mais la loi, à mon point de vue, n'empêche pas qu'on consulte; je souhaiterais même qu'on le fasse. Est-ce qu'il est nécessaire qu'on le précise davantage dans la loi? Ça, c'est une première question.

Une deuxième, c'est la question des fonds. Vous avez vu qu'on reconnaît tout simplement ce qui se fait déjà, et on suggère une façon de le gérer. Est-ce que, pour vous, ça apparaît raisonnable, ce qu'on propose? Vous ne l'abordez pas dans votre mémoire. Ça, c'est deux questions que vous n'abordez pas.

Une autre que vous abordez: au budget, vous parlez des immobilisations, de l'argent disponible pour les immobilisations. Est-ce que vous souhaitez que la commission scolaire dise les critères qu'elle va utiliser pour allouer son budget d'immobilisations, comme elle doit le faire pour l'ensemble du budget de fonction, ou c'est plus que ça que vous voulez dire, ici?

La Présidente (Mme Blackburn): M. Lessard.

Mme Marois: Je pense que ça se retrouve...

M. Lessard (Guy): À la page 11.

Mme Marois: C'est ça.

La Présidente (Mme Blackburn): Oui. Alors, M. Lessard, nous vous écoutons.

(15 h 30)

M. Lessard (Guy): Tout d'abord, je voudrais faire une courte introduction pour vous dire: On est revenus sur le statut légal de l'école. Vous savez très bien que, pour nous, c'était fondamental, à un moment donné, pour que l'équipe-école puisse avoir le plus de marge de manoeuvre possible pour atteindre les objectifs qu'on s'était fixés. Alors, je pense qu'il y a une cohérence là-dedans. Nous continuons à y croire.

On voit très bien que, dans le projet de loi, vous ne nous l'avez pas accordé. Cependant, je pense qu'il y a une série de recommandations qu'on retrouve à d'autres articles, qui sont reliées un peu là-dedans, tout en ne le donnant pas, mais ils nous permettent d'enlever peut-être une série de contrôles à outrance, ce qui nous permettrait peut-être d'avoir les mains plus déliées pour être capables de fonctionner. Ça, c'est le premier point.

Deuxièmement, on n'aborde pas le matériel scolaire et on n'aborde pas la question de fonds. Vous comprenez que, si on ne l'aborde pas, c'est parce qu'on est d'accord avec ce qui est là.

Mme Marois: Parfait. O.K.

M. Lessard (Guy): Mais on ne l'a pas oublié. On en avait entendu parler. On sait que c'est un sujet de discussion important pour plusieurs organismes. Mais, pour nous, le matériel scolaire, je pense que c'est normal que ce soit les enseignants et les enseignantes qui, prioritairement, se penchent là-dessus et en fassent une recommandation aux directions d'école.

Quant à votre sous-question, à savoir: Est-ce que c'est clair dans la loi, cette consultation qui devrait être faite auprès des parents? on ne l'a pas regardé en fonction de: Est-ce que c'est clair ou pas clair? Comme gestionnaires d'école, comme étant de plus en plus des leaders pédagogiques, de travailler en concertation avec des équipes-écoles, ça devenait quelque chose qui était presque normal à un moment donné dans un projet de loi où on retrouve une gestion de partenariat.

Mme Marois: D'accord.

M. Lessard (Guy): Alors, pour répondre, on ne l'a pas abordé comme tel: Est-ce que c'est assez clair ou pas? Mais il me semble que ça faisait partie du portrait que, oui, on consulte les enseignants, et les enseignants nous font des recommandations, si ça va ou pas, mais on ne pouvait pas tomber, décrocher totalement, ne pas au moins informer les parents là-dessus.

Quant à l'autre questionnement, à la page 11, lorsqu'on regarde l'article 275... sur cet article, les subventions de fonctionnement, on a consulté beaucoup de personnes pour essayer de savoir ça voulait dire quoi, une subvention de fonctionnement, et on a reçu beaucoup de réponses. Alors, on dit: Il y aurait intérêt à le préciser. Pour nous, les subventions de fonctionnement devraient comprendre les montants reliés au budget d'opération et d'immobilisation. Donc, ce n'est pas de dire: L'article 275, on le remet en cause. On redemande une précision pour bien s'entendre sur les subventions de fonctionnement. Parce que, pour certains ou certaines, les subventions de fonctionnement, c'est seulement le budget d'opération. Nous, dans notre définition, ça comprend et budget d'opération et budget d'immobilisation. Il faudrait avoir la même définition au point de départ si on veut s'entendre sur la transparence que veut bien donner cet article 275.

Mme Marois: D'accord.

La Présidente (Mme Blackburn): Mme la ministre.

Mme Marois: Voulez-vous l'alternance ou...

La Présidente (Mme Blackburn): Non, allez.

Mme Marois: C'est parce que, sur ça, pour moi, effectivement, un budget de fonctionnement n'inclut pas un budget d'immobilisation. Mais un budget de fonctionnement inclut le budget, si on veut, d'entretien régulier des immobilisations, mais pas l'entretien extraordinaire dans le sens où il y a un remplacement de fenêtres ou il y a un toit qui ne va pas, etc. Et c'est évident que le budget d'immo, comme on le dit dans notre langage, le budget d'immobilisation, soit les sommes que l'on rend disponibles pour investir dans de l'équipement immobilier ou mobilier, est sous la responsabilité de la commission scolaire qui doit cependant dire, et c'était ça le sens de ma question: Est-ce que vous souhaitez que ce budget-là aussi, on explique les critères ou on identifie les critères sur lesquels on va s'appuyer pour l'allouer, pour décider qu'on investit dans telle école et dans telle autre, qu'on construit une classe de plus là, dans tel coin du village, plutôt qu'on ne le fait pas par rapport à un autre aspect? Alors, c'est ça un petit peu. Pour moi, le fonctionnement, ça concerne évidemment tout ce qui a trait au budget habituel relié au projet éducatif, tandis que l'immobilisation, c'est vraiment l'investissement dans des biens meubles et immeubles qui ont une plus longue durée de vie, qui permet d'être amorti, etc.

La Présidente (Mme Blackburn): Oui, M. Lessard.

M. Lessard (Guy): C'est sûr que, là-dessus, on veut la plus grande transparence possible sur l'ensemble des budgets.

Mme Marois: D'accord. On se comprend.

M. Lessard (Guy): Alors, si on veut être transparent, pas juste être transparent sur un petit bout, puis l'autre bout ne l'est pas. Si on veut atteindre cet objectif-là, qu'on y aille d'une façon globale.

Mme Marois: O.K. Vous suggérez à la page 13, vous dites: «Il y aurait lieu de modifier le début de cet article», et c'est sur la question du conseil confessionnel qui doit donner son avis. Vous dites: «À la suite d'une demande justifiée et écrite du conseil confessionnel, le directeur d'une école est tenu de transmettre à ce dernier», alors que l'article actuel dit: «À la demande du conseil confessionnel, les adaptations sont requises et le conseil confessionnel peut indiquer son désaccord», etc. Pourquoi vous demandez cela?

La Présidente (Mme Blackburn): M. Lessard.

M. Lessard (Guy): On le demande, en fait, dans le but d'une autonomie, puis je pense, à un moment donné, être en mesure, à ce moment-là, de fournir de façon claire, nette et précise ce qui est demandé là. Mais, sur cet article 508.4, je vous le dis, on l'a mis là... Dans ma présentation tout à l'heure, j'ai quand même dit: Si celui-ci est encore d'actualité. On avait un peu de difficultés à se situer à travers ça, sauf qu'on dit: Si jamais il est encore là, bien, il faudrait à ce moment-là que la demande qui vient du conseil confessionnel, ce soit quelque chose qui est justifié puis que ce soit clair et non pas une demande à la légère. C'est un peu dans la même optique des autres articles où on dit que, lorsque la commission demande des rapports, il faudrait peut-être encadrer un peu pour ne pas qu'on soit soumis à tout bout de champ à fournir des rapports sur n'importe quoi puis à n'importe quelle période.

La Présidente (Mme Blackburn): Mme la ministre.

Mme Marois: Oui, je suis consciente de ça et j'ai bien vu que c'était là votre souhait. Et c'est le nôtre aussi, évidemment. Je pense qu'il ne s'agit pas de s'enfarger dans des demandes qui deviennent complètement déraisonnables, qui arrivent à tout moment, etc., mais il s'agit de s'assurer cependant qu'il y a de la transparence et qu'on puisse rendre des comptes. J'ai bien insisté sur la question d'imputabilité; elle m'apparaît importante.

Vous revenez, à l'article 472, sur la notion d'équité que nous utilisons plutôt que la notion de proportionnalité et vous dites: On ne voudrait pas qu'il y ait trop matière à interprétation risquant de défavoriser les écoles. Moi, je veux revenir sur ça. On a justement voulu enlever le mot «proportionnelle» parce qu'il ne comporte pas cette notion d'équité au sens où... peu importe qu'une école ait des problèmes particuliers ou pas, vit des difficultés plus importantes ou pas, on dit: Il y a 1 000 élèves dans une commission scolaire – on sait que c'est plus, mais il y en a 1 000 pour les fins de l'exemple – on répartit les budgets, essentiellement en proportion du nombre d'élèves qui sont là. On dit: Il y a un critère général pour élève en difficulté que le ministère établit chaque année, on suit celui-là, puis on applique. Et là on répartit donc le budget en fonction des têtes de pipe. Et nous, ce qu'on veut – et je sais que ça méritera qu'on précise et puis qu'on encadre mieux: on a des règlements pour ce faire, on a des directives, on a des règles financières – mais ce qu'on veut là, c'est justement ça, c'est qu'il y ait une base qui soit la même pour tous les élèves, peu importe là où ils sont sur le territoire. Et une fois cela fait...

La Présidente (Mme Blackburn): Mme la ministre...

Mme Marois: Je termine avec une petite phrase.

La Présidente (Mme Blackburn): ...il vous reste une demi-minute.

Mme Marois: Et une fois cela fait, on dit: Oui, dans telle école, il y a un problème de décrochage terrible, il y a un taux de réussite très bas, il y a un problème de pauvreté majeur, et cette école, on devra lui accorder des crédits supplémentaires de l'ordre de 100 $ par élève alors que la base est, par exemple, 3 000 $ pour tout le monde, mais eux, on ajoutera cela. Je suis consciente qu'il faudra baliser, mais j'aime mieux ça que la proportionnalité. Êtes-vous capable de vivre avec ce que je vous donne comme interprétation et est-ce qu'elle peut correspondre à une certaine réalité?

La Présidente (Mme Blackburn): M. Lessard, une réaction.

M. Lessard (Guy): Oui, je suis peut-être capable de vivre avec votre interprétation, mais j'ai de la misère à vivre avec le texte de loi, parce que l'équité pour l'un n'est pas égale à la même équité pour l'autre. C'est là le problème qu'on a.

Mme Marois: Donc, il faudra le... O.K.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien. Alors, merci, Mme la ministre, le temps qui vous était imparti est écoulé. La parole est maintenant au député de Marquette, porte-parole de l'opposition en matière d'éducation.

M. Ouimet: Merci, Mme la Présidente. Bienvenue, Mme Marcoux, M. Lessard, M. Émery. J'étais content de vous entendre le dire: On est souvent d'accord avec les propos émis par la ministre, mais on ne retrouve pas toujours ça dans le texte du projet de loi. Et, lorsqu'il y a conflit, les gens regardent le texte du projet de loi pour avoir des indications, à savoir comment on interprète une notion aussi subjective que l'équité. Ce qui est équitable pour quelqu'un ne l'est pas nécessairement pour quelqu'un d'autre. Ça dépend de quel côté de la clôture on se situe.

(15 h 40)

Mais, sur 96.10, vous n'en parlez pas beaucoup dans votre présentation. Premièrement, qu'est-ce qui arrive en cas d'impasse? Ça ne semble pas être couvert par 96.10: Sur proposition des enseignants ou des membres du personnel concernés, le directeur de l'école peut approuver un certain nombre de choses. Mais, s'il y a impasse entre, par exemple, une proposition des enseignants et un refus d'une direction d'école qui donne les motifs, quelle est la situation? Comment est-ce qu'on règle l'impasse? Parce que, à mon point de vue, ce n'est pas clairement identifié dans la loi.

Deuxièmement, les parents tiennent à être consultés sur le choix des manuels scolaires, pour des raisons qu'on connaît très bien. Ils tiennent à être consultés également sur les modalités d'évaluation des apprentissages, entre autres, les bulletins scolaires, les bulletins d'école. Il n'y a pas de place pour les parents à 96.10, malgré ce que la ministre peut dire. Dans les faits, allez-vous consulter les parents? Dans certains cas, probablement que oui; dans d'autres cas, ça va dépendre de la direction de l'école. Mais il n'y a rien de prévu, il n'y a pas de droit prévu pour les parents d'être consultés sur ces décisions-là. J'aimerais vous entendre là-dessus également.

Troisièmement, vous dites que vous êtes en accord avec 88 et 89. C'est la raison pour laquelle vous n'élaborez pas dans votre mémoire. Les articles 88 et 89 prévoient la possibilité pour un conseil d'établissement d'exiger une contribution financière des utilisateurs de biens ou de services offerts, et on parle de services éducatifs en dehors des heures de classe. Avez-vous fait la demande pour un tel article? Avez-vous demandé à ce que le conseil d'établissement ait le pouvoir d'exiger des contributions financières? Quelle serait la conséquence si la ministre décidait d'abroger les articles 88, 89 et les autres articles qui en découlent?

La Présidente (Mme Blackburn): M. Lessard, trois questions.

M. Lessard (Guy): Je vais commencer par la troisième. Je vous dirais qu'on n'a jamais fait la demande de voir apparaître ça, mais c'est la réalité. Écoutez, je pense qu'il faut vraiment, et, dans toutes vos questions... On peut peut-être y revenir aussi, à la vraie vie. Il y a une loi, puis il y a une vraie vie aussi, puis on essaie d'avoir un lien entre les deux. Je pense que les conseils d'établissement... ça s'appelle «conseil d'orientation», «comité d'école»... Actuellement, des levées de fonds, il y en a à profusion à la grandeur du Québec. Jusqu'à preuve du contraire, les levées de fonds qui ont lieu au niveau du Québec, ce n'est pas au profit du directeur, pas au profit des enseignants, ce n'est pas au profit des parents, c'est au profit des élèves pour leur organiser quelque chose. Dans une école, c'est peut-être un voyage; dans une autre école, ça peut être des livres de bibliothèque, puis je dis bravo! à ce moment-là; dans une autre école, c'est peut-être de la surveillance.

En tout cas. Il y a une série de choses qui se font actuellement, et la loi, nous, la façon dont on l'a analysée, je ne suis pas un juriste, je suis un directeur d'école, la façon dont je l'ai analysée, ça vient en quelque sorte confirmer ce qui se fait déjà. C'est sûr qu'on peut faire un grand discours: les milieux défavorisés, les milieux qui le sont moins, etc., mais je pense qu'il y a peut-être quelques balises qui pourraient se mettre, peut-être, quoiqu'on est capable de vivre très bien avec les articles qui sont là.

La conséquence de l'enlever, il y a deux choses: soit que ce qui n'est pas écrit à l'intérieur de la loi, je peux le faire, puis je vais continuer à faire exactement ce que je fais – ça peut arriver, je ne sais pas si c'est de la délinquance, mais, en tout cas, pour être dans les écoles, il faut être délinquant des fois – donc, soit ça, que je le fais, ou bien, à un moment donné, vous venez de mettre un article de loi disant que ce n'est pas possible, pour des raisons x, y, z, et là vous empêchez des milieux d'évoluer, vous empêchez des milieux d'offrir des services à des élèves, et ça, aussi bien milieux favorisés que défavorisés. Les milieux défavorisés, je veux bien croire que les parents n'ont peut-être pas la même ressource financière que, mais j'ai déjà oeuvré dans des milieux défavorisés à Québec et, à ce moment-là, je pense que les parents étaient capables de trouver d'autres moyens pour arriver à ces fins.

Alors, là-dessus, 88, 89, 90, ils ne m'inquiètent pas. Je pense qu'il faut continuer en ce sens-là si on veut véritablement offrir des services que la communauté veut. On veut faire une école communautaire, on veut faire une école qui est près du milieu, qui répond aux besoins du milieu, pourquoi j'empêcherais un milieu, une équipe-école d'aller de l'avant sur un projet A parce que, peut-être, 10 rues plus loin, ou la ville voisine, ils n'ont pas les mêmes moyens? Ce qu'il faut faire, c'est peut-être d'aider et d'équiper l'autre pour en arriver, avec des moyens différents, aux mêmes objectifs. En tout cas, je pense que là-dessus, nous autres, on n'a pas de problème à vivre avec cela et ça vient tout simplement confirmer ce qui se passe.

M. Ouimet: Juste sur cette question-là. Vous dites que ça existe déjà, ce qui est prévu à l'article 88, pour des services éducatifs, d'exiger une contribution financière. Vous me dites...

La Présidente (Mme Blackburn): M. Lessard.

M. Lessard (Guy): Les services éducatifs, il y a des endroits que ça existe... certains pour l'aide aux devoirs et leçons, à titre d'exemple. Il faudrait peut-être qu'on s'entende sur la définition de «services éducatifs». Les services éducatifs, ce n'est pas un cours de français, un cours d'anglais, un cours de maths, ce n'est pas ce qui est à l'intérieur du régime pédagogique ou du curriculum. C'est ce qui est à l'extérieur de ça. Et l'école, dans tout ce qu'elle fait, M. Ouimet, c'est toujours un geste éducatif. Moi, je le prends comme ça au point de départ. Lorsque je fais du basketball avec des élèves, il y a de l'éducation là-dedans. C'est une des missions de l'école, ça fait que ça... Le terme, je l'interprète dans l'approche éducative que des enseignants et enseignantes, les animateurs ou autres font auprès des jeunes.

La Présidente (Mme Blackburn): Sur la deuxième et la première question?

M. Lessard (Guy): Oui, je peux aller à la deuxième, si vous permettez. Je vais suivre un ordre chronologique. Je vais continuer avec la logique qu'on a toujours eue à l'intérieur de nos affaires.

La consultation sur le choix des manuels. Je pense qu'il faut s'entendre que, prioritairement, ça appartient aux enseignants. Je pense que les enseignants sont professionnels. Les enseignants, le manuel, c'est leur outil. Je pense que c'est eux autres qui, en premier lieu, doivent être en mesure de dire: De quel outil j'ai besoin pour réaliser les objectifs du programme, à titre d'exemple. Alors, je pense que la consultation des parents... moi, je me dis – je le disais tout à l'heure à Mme la ministre – dans les écoles, dans la très grande majorité des écoles, si un parent posait une question au conseil d'établissement, à savoir: Je veux bien savoir ce qu'il en est sur le choix des manuels, on lui répondrait. Je sais ce que vous voulez dire, c'est les consulter officiellement.

M. Ouimet: Est-ce qu'on devrait le prévoir dans la loi, le droit des parents d'être consultés? Ce n'est pas ce qui va se faire sur le terrain, là. Mais est-ce que les parents ont ce droit-là et c'est reconnu dans le texte de la loi?

M. Lessard (Guy): Je n'aurais pas de problème avec ça, je pourrais vivre avec.

M. Ouimet: O.K.

M. Lessard (Guy): Puis je pourrais vivre avec ça, sauf: attention à la façon dont vous allez l'écrire. Ne venez pas m'asseoir, comme directeur d'école, entre les parents, d'une part, qui me disent: Je veux la planète bleue, puis les enseignants qui veulent la planète rose. Je vais vous trouver la verte entre les deux, moi. Et c'est peut-être là-dessus qu'il faudrait préciser. Si vous allez comme ça, vous allez écrire dans la loi aussi que, après avoir consulté tout le monde, c'est moi, le directeur, qui décide.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien. La première question?

M. Lessard (Guy): Et là je réponds à votre première question en même temps.

La Présidente (Mme Blackburn): Oui, allez.

M. Ouimet: L'impasse.

M. Lessard (Guy): Donc, si ça devient trop consultatif, à peu près tout le monde, lorsque tout le monde est consulté dans la vie, ça prend quelqu'un pour décider. Vous allez l'écrire dans la loi. Écrivez-le, la consultation aux parents, mais écrivez en même temps que, s'il n'y a pas d'entente, si n'est pas la même planète bleue des deux côtés, le directeur décidera. Mais écrivez-le, par exemple.

M. Ouimet: Mais là, pour l'instant, la question d'une impasse qui pourrait subsister, ce n'est pas prévu, ce n'est pas couvert.

M. Lessard (Guy): Il n'est pas couvert dans la...

M. Ouimet: On prend pour acquis qu'il y a une proposition des enseignants...

M. Lessard (Guy): Des enseignants, oui.

M. Ouimet: ...et des enseignantes, que le directeur, la directrice d'école va approuver. Mais si, pour toutes sortes de motifs, le directeur ou la directrice ne l'approuve pas, n'approuve pas la proposition, les enseignants soumettent une nouvelle proposition...

M. Lessard (Guy): Oui, jusqu'au moment où on va s'entendre; le statu quo demeurera en attendant.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien. M. le député, il y a votre collègue aussi qui voulait la parole.

M. Ouimet: Oui, je sais, mais je veux juste terminer là-dessus.

La Présidente (Mme Blackburn): Oui, une dernière question.

Mme Houda-Pepin: Laissez-le terminer.

M. Ouimet: On sait que, dans des situations, ça peut paraître facile. Mais, dans des situations, dans la vie à l'école, où il y a des situations conflictuelles et...

M. Lessard (Guy): Bon, c'est exceptionnel.

M. Ouimet: C'est exceptionnel, mais ça arrive. Le rôle du législateur, c'est de prévoir ces situations-là et de pouvoir les solutionner au cas où elles arriveraient. On a eu la situation sur un autre dossier, à la commission scolaire des Découvreurs, des problèmes importants au niveau du corps professoral qui a décidé d'exercer des moyens de pression par rapport à une décision prise par la commission scolaire.

M. Lessard (Guy): Mais on n'est pas sur les manuels scolaires, là.

M. Ouimet: Non, non, je sais.

M. Lessard (Guy): À Découvreurs, c'est une autre chose.

(15 h 50)

M. Ouimet: Mais il pourrait y avoir quand même conflit sur la question des manuels scolaires.

M. Lessard (Guy): Il pourrait y avoir une mésentente. Mais je pense que, quand même, avec les enseignants, si on veut avoir une gestion collégiale là-dessus... Les enseignants, ils ne nous proposeront pas n'importe quoi comme manuels. Il faut tenir compte du projet éducatif de l'école, il faut tenir compte des orientations qui sont données à l'intérieur du projet éducatif par le conseil, il faut tenir compte du budget. Je pense que là-dessus, là... ils peuvent bien faire une proposition, on ne s'entendra pas, puis on va leur dire pourquoi on ne s'entend pas. Moi, je leur fais confiance. Moi, je fais confiance aux enseignants. Peut-être que vous n'êtes pas d'accord avec ça, mais, moi, je leur fais confiance là-dessus, et, dans la majorité des écoles, ça fonctionne. Et si on n'est pas capables de s'entendre sur ce sujet-là pendant trois semaines, bien, on gardera un statu quo, puis, après ça, trois semaines après, on y reviendra. Ça ne me fatigue pas, que de toujours essayer de prévoir tout ce qui peut se passer, à ce moment-là, ça devient... Je pense que, si on parle d'école autonome et responsable, si on parle d'implication de l'équipe-école, si on parle de partenariat, il faut laisser des marges de manoeuvre pour que les gens s'entendent entre eux et non pas tout prévoir dans un projet de loi.

M. Ouimet: Vous avez employé le terme: «Si vous ne faites pas confiance aux enseignants», ce n'est pas du tout le cas. Si je soulève la question, c'est parce qu'un syndicat d'enseignants m'a demandé de soulever la question. Eux sont préoccupés, à savoir: Qu'est-ce qui se passe en cas d'impasse? C'est la raison pour laquelle je pose la question. Je pense que la ministre a une responsabilité de prévoir ces cas-là qui pourraient arriver.

La Présidente (Mme Blackburn): M. Lessard.

M. Lessard (Guy): Il y a deux choses: soit qu'on ne le prévoit pas puis on s'entendra en partenariat, ou soit qu'on le prévoit puis c'est le directeur qui décide. Moi, je pense qu'être enseignant, je préférerais qu'on ne le prévoit pas parce que ça donne toujours une marge de manoeuvre de négociation. Si c'est prévu que c'est le directeur qui décide, le couteau tombe. Ils feront leur choix, là. Moi, je suis capable de vivre en ne prévoyant pas. Si les enseignants souhaitent qu'on le prévoit, le mécanisme d'arbitrage qui est la décision du directeur, je n'ai pas de problème à vivre avec ça, aucun problème.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, M. Lessard. M. le député, il vous reste deux minutes.

M. Ouimet: Oui, ça va.

La Présidente (Mme Blackburn): Alors, madame, la parole est à vous, Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci, Mme la Présidente. Alors, à mon tour, M. Lessard, Mme Marcoux et M. Émery, je vous remercie pour le mémoire et la présentation que vous nous avez faite.

Je reviens à la page 5 de votre mémoire, quand vous parlez du directeur et que vous dites: «Il se retrouve donc au coeur d'un processus de prise de décision qui peut faire intervenir jusqu'à cinq instances différentes: le ministère, la commission scolaire, le conseil d'établissement, les enseignants et les autres personnels.» Et vous ajoutez: «Voilà un défi énorme qui guette les directions d'école qui auront certainement besoin d'un support particulier.»

J'ai eu l'occasion de parler avec des directeurs d'école dans mon comté pour leur demander comment ils reçoivent toute cette décentralisation au niveau de l'école et qu'est-ce que cela implique concrètement pour eux dans la gestion quotidienne de l'école. Et un des directeurs m'avait dit: Vous savez, Mme la députée, si j'ai le toit de mon école qui coule, j'ai un enfant indiscipliné à la porte de mon bureau à rencontrer, une rencontre pédagogique avec le personnel, etc., mon ordre de priorités est établi, parce que c'est beau la décentralisation, mais il faut l'accompagner de ressources.

Alors, je voudrais savoir: Quand vous parlez d'un «support particulier», vous faites référence à quoi? Est-ce que vous parlez de ressources ou d'autres choses? Et comment est-ce que cela se traduit concrètement?

La Présidente (Mme Blackburn): M. Lessard.

M. Lessard (Guy): Au niveau du support particulier, c'est beaucoup plus en termes de perfectionnement des directeurs d'école que l'on en parle. C'est sûr que ce que vous dites à ce moment-là, que le directeur aura des priorités à se donner, ce n'est pas nouveau, ça. Ce n'est pas nouveau. Dans les écoles, aujourd'hui, le directeur est toujours obligé d'en faire. La situation que vous décrivez, c'est une situation... qu'il y ait décentralisation ou pas, c'est des situations que l'on rencontre quotidiennement: le toit peut couler, l'enfant est à la porte. On a toujours donné priorité, je pense, à l'élève et, avec le projet de loi, on va toujours continuer à axer nos services en fonction de l'élève dans nos priorités.

C'est sûr que ça vient changer les choses. Ça vient changer des habitudes de travail pour les directions d'école. Ça vient changer des attitudes aussi à avoir. Ça vient changer... beaucoup de nouvelles attitudes à développer, par exemple, entre la commission scolaire et l'école, il y a de la nouveauté à ce moment-là, et c'est en ce sens-là qu'on dit qu'il faut nous aider pour qu'on soit en mesure de remplir nos fonctions et responsabilités le mieux possible.

Ce qui est là, l'école autonome et responsable, plus de pouvoirs au directeur, on le souhaitait comme direction d'école. Bon. Comme Mme la ministre disait, le cadeau de Noël, si c'est un cadeau que l'on a le 19 janvier, ce n'est peut-être pas le cadeau qu'on a souhaité. Peut-être qu'on l'aurait aimé avec un statut juridique, plus d'autonomie, etc. Ça, c'est comme un cadeau que je commande assez souvent: lorsque quelqu'un d'autre le donne, il n'arrive pas tout à fait de la même façon que si c'était moi-même qui l'avais acheté.

Mais, ceci dit, je pense qu'on est capable à ce moment-là, avec du support, du perfectionnement, de l'aide... Vous savez que le rôle du directeur à travers tout ça, les cinq, là, c'est de jouer un rôle, c'est comme un chef d'orchestre, essayer d'harmoniser tout ça. Alors, il peut y avoir de l'inquiétude chez les membres. Je vous dis: Oui, il peut y en avoir, c'est normal, tout changement en entraîne, mais on est prêts à relever le défi.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien. Sur cette remarque, M. Lessard, prend fin notre échange. Je voudrais, au nom des membres de la commission, vous remercier, Mme Marcoux, M. Lessard, M. Émery, de votre présentation devant les membres de cette commission. Alors, nous allons suspendre quelques minutes, le temps de vous permettre de quitter la table et aux autres intervenants d'y prendre place.

(Suspension de la séance à 15 h 56)

(Reprise à 15 h 57)

La Présidente (Mme Blackburn): Mesdames, messieurs! Nous reprenons, tel que prévu au moment où on a annoncé l'ordre du jour, avec la Centrale de l'enseignement du Québec. Mme la présidente, je vous souhaite la bienvenue au nom des membres de cette commission. Vous allez nous faire le plaisir et l'honneur de présenter les personnes qui vous accompagnent, et vous avez 20 minutes pour la présentation de votre mémoire. Ce sera suivi d'échanges avec les membres de la commission pour une durée de 30 minutes. Alors, nous vous écoutons.


Centrale de l'enseignement du Québec (CEQ)

Mme Pagé (Lorraine): Parfait. Merci, Mme la Présidente. Alors, je vous présente les personnes qui m'accompagnent: à ma droite, M. Luc Savard, président de la Fédération des enseignantes et des enseignants de commissions scolaires, et Mme Hélène Le Brun, conseillère à la Centrale; à ma gauche, M. Luc Sénéchal, président de la Fédération des professionnels de l'éducation, et Mme Renée Dallaire, présidente de la Fédération du personnel de soutien.

La CEQ a été en mouvement depuis plusieurs années déjà relativement à une nécessaire réforme de l'éducation. Ses membres ont été les premiers à réclamer des états généraux sur l'éducation. Ils se sont engagés par la suite activement afin d'influencer et d'orienter chacune des étapes du processus. Les orientations mises de l'avant visaient essentiellement à faire en sorte que l'éducation au Québec soit une priorité publique servant le bien commun et l'égalité des chances.

Le dépôt de l'avant-projet de loi et le mémoire présenté par la CEQ en commission parlementaire en septembre ont suscité un large débat public et une importante mobilisation en nos rangs. Nous avions alors invité la ministre à refaire ses devoirs parce que plusieurs dispositions rendaient, à notre avis, l'avant-projet de loi inacceptable.

Le projet de loi déposé à l'Assemblée nationale le 13 novembre dernier a été évalué à partir des préoccupations que nous avions précédemment exprimées au regard de six aspects prioritaires que je vous rappelle: le pouvoir collectif et l'autonomie professionnelle du personnel, les écoles sélectives, le curriculum national, la gratuité scolaire, la privatisation et la sous-traitance, et la décentralisation budgétaire et administrative.

Pour ce faire, nous avons conduit et réussi, dans un délai très court, une vaste opération de consultation auprès des membres. Dans les premiers jours qui ont suivi le dépôt du projet de loi, plus de 1 500 établissements: écoles, centres, sièges sociaux, ont tenu des réunions avec le personnel à l'emploi qui était présent sur les lieux de travail ces journées-là. C'est donc plus de 20 000 membres qui ont donné leur appréciation sur le contenu du projet de loi. Et c'est en prenant appui sur la force de cette réponse que nous vous livrons nos préoccupations.

(16 heures)

Le message des membres a été clair à l'occasion de la consultation de nos 90 000 membres du secteur scolaire: s'il y a des changements notables dans l'avant-projet de loi, le présent projet de loi va dans le sens de nos revendications sur certains chapitres: le bien commun, le pouvoir collectif, l'autonomie professionnelle, mais il reste des irritants majeurs particulièrement aux chapitres de la gratuité scolaire ainsi que de la privatisation et de la sous-traitance. À notre avis, plusieurs dispositions du projet de loi n° 180 mettent en lumière le désengagement de plus en plus probant de l'État face au financement de l'éducation, ce qui met en péril la qualité des services et l'égalité des chances en éducation pour tous les jeunes Québécois et Québécoises.

Je ferai maintenant un rapide survol des différents points abordés dans notre mémoire. Concernant la mission de l'école, il faut rappeler que le concept d'égalité des chances était une proposition centrale de la Commission des états généraux sur l'éducation. Elle reflétait un solide consensus intervenu à l'occasion de cette démarche. Le projet de loi ne devrait pas escamoté ce concept de l'égalité des chances, et le nouvel article 36 traitant de la mission de l'école devrait l'inclure.

Le dossier des écoles sélectives a fait couler beaucoup d'encre, au cours des dernières semaines. Lors de la commission parlementaire, en septembre dernier, la ministre de l'Éducation a souvent laissé entendre ses volontés par rapport aux écoles à projets particuliers, qui ne devraient pas choisir leurs élèves uniquement sur la base du rendement scolaire. Cette orientation, à notre avis, devrait apparaître clairement dans le projet de loi. Elle devrait aussi être incluse à la disposition concernant les projets pédagogiques particuliers. À ce chapitre, il est clair quant à nous que la question des écoles sélectives demeure un véritable débat de société qui devra se poursuivre.

À propos du curriculum national, maintenant, le projet de loi laisse place à une grande diversité, d'une école à l'autre. Plusieurs de nos demandes à son sujet sont restées sans réponse. C'est ainsi qu'il permet toujours à la commission scolaire plutôt qu'au ministre d'exempter un groupe d'élèves de l'application d'une disposition du régime pédagogique et qu'il laisse au conseil d'établissement de l'école le pouvoir d'approuver le temps alloué à chaque matière et l'orientation générale en vue de l'élaboration de programmes d'études locaux. Des correctifs s'imposent donc.

Au chapitre de l'autonomie professionnelle, nos membres ont constaté que le projet de loi marquait des progrès par rapport à l'avant-projet de loi à l'égard de l'autonomie professionnelle, particulièrement pour le personnel enseignant, et à l'égard de la place faite au personnel dans le processus de décision. Nos membres y ont vu une marque de reconnaissance explicite de la compétence du professionnalisme du personnel de l'éducation. Un des principaux éléments de satisfaction fait d'ailleurs référence à la parité de représentation au sein du conseil d'établissement de l'école. Pour le personnel, toutefois, il ne s'agit pas là d'un cadeau, mais bien d'un changement logique et nécessaire. Il faut bien comprendre que ces dispositions constituent des assises fondamentales sur lesquelles aucun recul ou compromis ne saurait être accepté. Nous souhaitons d'ailleurs que l'ensemble des autres acteurs en éducation, notamment les parents et les administrateurs scolaires, y accorde un appui inconditionnel.

Toutefois, certains points demeurent inacceptables en regard de l'autonomie professionnelle, notamment au chapitre du volontariat dans l'encadrement des stagiaires, qui deviendrait, à toutes fins pratiques, une obligation pour le personnel enseignant si le projet de loi est adopté tel quel. Si le volontariat peut être un gage de succès pour différents projets, le caractère obligatoire d'une telle mesure n'obtiendrait sûrement pas les mêmes résultats. Cela viendrait d'ailleurs à l'encontre même d'une entente intervenue en juin dernier, dont le ministère de l'Éducation est signataire.

De même, en ce qui concerne le perfectionnement du personnel de l'école, c'est le conseil d'établissement qui, sur proposition du directeur de l'école, ferait part à la commission scolaire des besoins en ce sens. Pour la CEQ, il est inacceptable que le projet de loi ne prévoie pas que le personnel participe à l'identification de ses propres besoins de perfectionnement.

Au chapitre de la représentativité au sein du conseil d'établissement, le d'établissement, le personnel de la formation professionnelle et de l'éducation des adultes n'est pas assuré, par l'écriture du texte, d'une parité de représentation au sein du conseil d'établissement. Il s'agit là d'une parité qui est pourtant tout aussi légitime, et le projet de loi devrait corriger et garantir les mêmes droits au personnel, quel que soit le secteur d'enseignement.

Nous constatons que s'il y a des progrès notables au chapitre de l'autonomie professionnelle des enseignants, des zones d'ombre demeurent à l'égard de l'autonomie et du processus décisionnel pour le personnel professionnel et le personnel de soutien. Le projet de loi devrait clarifier les mécanismes de nomination de ce personnel.

Enfin, le nouvel article 48, tel que rédigé, exclut les membres du personnel professionnel qui seraient affectés à l'école, mais dont les tâches seraient autres que de dispenser des services complémentaires ou particuliers, par exemple, les conseillers pédagogiques ou les bibliothécaires.

Pour la CEQ et pour les parents aussi, sans doute, la gratuité scolaire constitue un élément essentiel pour assurer l'égalité des chances. Déjà, plusieurs écoles du Québec peuvent difficilement mettre à la disposition de tous leurs élèves, les manuels scolaires nécessaires à leur apprentissage. D'autres établissements scolaires exigent des frais de plus en plus élevés pour des projets spéciaux qui ne sont pas à la portée de la majorité des familles.

Si le projet de loi restaure la gratuité, à certains égards, il permet au conseil d'établissement d'exiger une contribution financière pour certains autres services éducatifs que ceux prévus au régime pédagogique, y compris de l'enseignement en dehors des périodes d'enseignement pendant une journée de classe ou en dehors des jours de classe. Nous dénonçons encore une fois cette possibilité confiée au conseil d'établissement de l'école d'exiger ce type de contribution financière. Et cette disposition devrait être retirée du projet de loi parce qu'il s'agit là d'un accroc important au principe de la gratuité des services aux jeunes et d'un recul par rapport à la loi actuelle. C'est important de le mentionner. On pourrait, dorénavant, devoir payer pour des services ou des cours le samedi ou après les heures de classe, comme les cours de récupération et l'aide aux devoirs. Est-il besoin de signaler que ce type de services est destiné à des élèves qui éprouvent des difficultés d'apprentissage et qu'on retrouve souvent ces élèves dans des milieux socioéconomiques moyens et faibles, là où les parents seraient dans l'impossibilité de fournir une contribution financière.

Et, que dire des fonds spéciaux. Cette nouveauté du projet de loi transforme les conseils d'établissement en organismes solliciteurs de dons. Non seulement les fonds spéciaux sont-ils le reflet flagrant du désengagement de l'État, mais, en plus, ils laissent la porte ouverte à une distinction encore plus grande entre les écoles riches et les écoles pauvres. Ce nouvel article a surgi subitement dans le projet de loi, et toute cette question de collecte de fonds spéciaux destinés, selon le texte du projet de loi, à aider à la réalisation du projet éducatif de l'école n'a jamais fait l'objet d'aucun débat public ni au cours de la démarche des états généraux, ni, plus largement, au sein de la société québécoise. Il était d'ailleurs étonnant d'entendre la ministre affirmer que les fonds spéciaux ne serviraient jamais à financer les services éducatifs de base, alors qu'ils sont textuellement destinés à aider à la réalisation du projet éducatif de l'école.

Or, le projet éducatif tel que défini dans le projet de loi, c'est les orientations propres à l'école et les mesures pour en assurer la réalisation et l'évaluation. Et ces orientations et ces mesures visent, selon, toujours, les termes du projet de loi, l'application, l'adaptation, l'enrichissement du projet éducatif national défini par la loi, le régime pédagogique et les programmes d'études. Le conseil d'établissement pourrait dont solliciter de l'argent pour aider à la réalisation du projet éducatif national défini par la loi, le régime pédagogique et les programmes d'étude. On est très loin des activités parascolaires.

(16 h 10)

Dans son allocution rendant public le projet de loi, la ministre a indiqué qu'elle introduisait cette question dans un souci de transparence dans le but d'encadrer de façon législative une pratique généralisée dans les milieux. Il est vrai que cette pratique est devenue si courante qu'il faudrait se demander s'il vaut mieux l'encadrer ou tout simplement l'interdire. Mais, quoi qu'il en soit, cela ne doit pas se faire de façon précipitée et sans en mesurer d'abord les impacts. Les premières réflexions invitent à la vigilance. Nous vous en livrons quelques-unes.

Un encadrement est proposé par l'article 92 et mérite d'être retenu. Il doit y avoir une compatibilité entre les dons et la mission de l'école. De plus, cet encadrement devrait explicitement exclure toute forme de publicité, d'invitation à la consommation, de sollicitation ou d'obligation de nature commerciale reliée à un don. L'école pourrait certes recueillir des dons et des subventions pour aider à la réalisation de toute activité parascolaire ou de toute activité éducative tenue hors classe, les sorties scolaires par exemple.

À notre avis, si les fonds recueillis étaient réservés à des fins autres que celles prévues au régime pédagogique, ils pourraient certainement contribuer à redonner vie à tout le vécu parascolaire, social, culturel, sportif, si déterminant pour créer un milieu d'appartenance intéressant et stimulant. Et, je cite ici, à titre d'exemple, l'expérience qui se déroule à l'école Jeanne-Mance, à Montréal.

Mais, il serait inacceptable que la collecte de fonds conduise à creuser des écarts entre les écoles riches et les écoles pauvres, concernant entre autres le matériel scolaire, les équipements de base de l'école, les services éducatifs et les services complémentaires ou particuliers. C'est ici que des solutions concrètes doivent être trouvées et incluses dans le projet de loi pour contrer la multiplication des inégalités.

Différentes hypothèses peuvent être envisagées, et nous en donnons quelques exemples. Cependant, chacune d'entre elles mériterait d'être étudiée de façon plus approfondie. Ainsi, une partie des fonds spéciaux recueillis par les écoles pourraient être retenus par la commission scolaire afin de pouvoir les distribuer aux écoles qui ne réussissent pas à faire de collectes de fonds. La collecte de fonds pourrait être centralisée à la commission scolaire, qui les distribuerait suivant une politique élaborée conjointement avec toutes ses écoles.

Outre les fonds recueillis par les écoles, la commission scolaire pourrait avoir le pouvoir de recueillir des fonds destinés spécialement aux écoles plus démunies. Les fonds pourraient même être recueillis sur une base régionale et répartis au prorata du nombre d'élèves dans chaque école. Dans tous les cas, il nous semblerait plus équitable que les fonds soient gérés collectivement plutôt qu'établissement par établissement.

Comme on peut le voir, plusieurs éléments devraient être examinés de façon plus approfondie. Ce qui est certain, c'est que le nouvel article 92, tel que rédigé, présente de sérieux dangers. La CEQ a dénoncé fortement le financement public de l'éducation privée, elle dénonce tout aussi fortement le financement privé de l'éducation publique. La collecte de fonds est un phénomène plus complexe qu'il n'y paraît, elle soulève tout autant des questions d'ordre éthique, philosophique, social, pédagogique que simplement fiscal. C'est pourquoi nous croyons que les dispositions entourant la possibilité de recueillir des fonds devraient faire l'objet d'une réflexion spécifique qui pourrait être reportée afin de réunir les conditions d'un véritable débat démocratique.

Le désengagement de l'État se dévoile également dans l'élan marqué, à l'intérieur du projet de loi, concernant la privatisation et la sous-traitance. Le projet de loi ne reflète nullement les engagements pris par la ministre à ce sujet à la commission parlementaire. La CEQ a la ferme conviction que la qualité des services professionnels et de soutien est mieux assurée par du personnel à l'emploi de la commission scolaire, faisant partie intégrante de l'équipe-école, qui en partage la philosophie d'intervention, les valeurs éducatives et la connaissance du milieu et de ses besoins.

Le raisonnement est plutôt curieux. À l'heure où l'on demande aux écoles de constituer une communauté d'appartenance, les élèves, les parents, le directeur d'école, le personnel enseignant ont besoin plus que jamais de compter sur des services professionnels et des services de soutien de qualité. Et que fait l'État? Il répond par un encouragement à recourir à la privatisation de ces services. Nous sommes loin d'une volonté de resserrer la privatisation et la sous-traitance.

En conclusion, j'espère avoir réussi à vous convaincre que le projet de loi n° 180 mérite des amendements afin de refléter les engagements attendus de la part de l'État. Il nous faut, au Québec, parler de gratuité scolaire et non de contribution financière, de financement public et non de collectes de fonds, de services publics de qualité dispensés par du personnel franchement intégré aux équipes-écoles et non de privatisation et de sous-traitance. Il nous faut, au Québec, pouvoir parler d'un engagement franc et indéfectible de l'État. Le Québec s'apprête à prendre un virage important pour l'avenir de l'éducation. Il ne faudrait pas le rater. Je vous remercie.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, Mme la présidente. La parole est maintenant à Mme la ministre de l'Éducation. Mme la ministre.

Mme Marois: Merci, Mme la Présidente. Je vous remercie pour la présentation du mémoire. Je pense qu'on l'aura remarqué, et vous le dites, en tout cas je le lis à travers les lignes, effectivement, il y a des améliorations par rapport à ce que vous aviez présenté et souhaité lorsque vous êtes venue présenter votre premier mémoire sur l'avant-projet de loi. Et je pense que tout ce qui concerne la question de l'autonomie professionnelle reste un élément très solidement, je pense, reprécisé dans le projet de loi et apparaît maintenant plus clairement et dans le respect, effectivement, du champ de pratique professionnelle, et c'était ce qu'on souhaitait. Et, dès le départ, je pense qu'on n'avait pas souhaité autre chose. Mais les termes méritaient d'être précisés – et c'est ce qu'on a fait – d'être resserrés, d'être mieux définis. Alors, je conviens de cela avec vous.

Par ailleurs, je comprends un certain nombre de vos recommandations, de vos propositions; je vais y venir. Il y a une première recommandation à laquelle je suis très sensible. J'ai demandé qu'on regarde comment on pourrait introduire cela d'une façon un peu plus claire dans la loi. C'est cette question de l'égalité des chances, qui est fondamentale. Et je suis aussi consciente, avec vous, de ce que ça peut signifier. Bien inscrire cela dans la loi, je crois que ce serait intéressant. Nous explorons le tout. Je ne vous dis pas que ce sera clairement et formellement dit comme ça, mais c'est une orientation à laquelle je suis sensible parce que, de toute façon, c'est ce qu'on veut faire. Alors, on se dit: Si c'est ça qu'on veut faire, pourquoi ne pas voir à l'inscrire? Évidemment, tout ce qu'on inscrit a des conséquences, cependant, et il faut être conscient de ce que ça signifie au quotidien.

Des questions un petit peu plus pointues. D'abord, sur la collaboration à la formation des futurs enseignants, j'ai une interprétation un petit peu différente. Dans le projet de loi, on dit: «Il est du devoir de l'enseignant». Mais «devoir», pour moi, n'entraîne pas «obligation». Même si, évidemment, on croit que cela fait partie normalement de la responsabilité, cela ne va pas jusqu'à la notion d'obligation. Alors, là, j'aimerais ça que vous m'apportiez un éclairage sur ça.

Une question plus précise que vous n'abordez pas au mémoire, c'est ce fameux souhait qu'expriment les parents sur la possibilité d'être consultés et de donner leur avis, peut-être moins sur le matériel pédagogique proprement dit, les livres d'école, etc., mais, entre autres... Et moi, c'est ce que j'ai posé, en tout cas, comme question aux parents en dehors de notre forum et je le referai aujourd'hui ou demain, lorsqu'ils viendront. Eux, ils disent: On est préoccupés par toute la question des cahiers d'exercices et de ce qui entraîne des coûts, évidemment, quand on achète le matériel.

Nous, on pense que la loi permet au directeur et à la direction de l'école de consulter les parents, de demander un avis. Ce que je voulais vous demander, c'est: Est-ce que vous croyez que, si on l'introduisait au projet de loi, ça ne viendrait pas nécessairement entacher, justement, cette responsabilité professionnelle que vous avez, étant entendu que c'est un avis qui leur serait demandé et non pas un pouvoir de décision qui leur serait conféré, enfin, dans l'hypothèse qu'on pourrait envisager? Ça, c'est une première question.

La seconde, c'est sur la question de la sous-traitance. Je vous avoue que... D'abord, on a effectivement rebalisé des choses, puis je pense que vous le mentionnez. Et nous ne voulons pas privatiser. Il faut être clair. Il me semble que je l'ai assez dit sur différentes tribunes, notre objectif n'est pas de privatiser, nous ne voulons pas le faire. Nous pensons que c'est une responsabilité collective, l'éducation, et nous pensons que ces services, que ces programmes doivent être offerts à l'intérieur de nos institutions par le personnel dûment formé pour le faire et reconnu pour le faire. Nous avons tenté de baliser ces aspects-là.

(16 h 20)

Et j'essaie de voir comment on peut tirer comme conclusion qu'effectivement on souhaiterait introduire de la sous-traitance à l'intérieur des fonctions prévues par la loi de l'instruction publique, par le régime pédagogique, dans le cadre du curriculum et, en plus, dans le respect des conventions collectives que l'on a signées ou que vous avez signées avec les organismes qui sont responsables de le faire. Parce qu'on a effectivement réintroduit des éléments pour rebaliser, pour être sûr, justement, qu'il n'y avait pas matière à interprétation, pour ce qui est des services éducatifs et de la mission fondamentale de l'école. Alors, j'aimerais ça que vous m'apportiez, un peu, quelques commentaires sur ces deux éléments-là, puis je reviendrai sur la question des fonds un peu plus tard.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci. Mme la présidente, commentaires, remarques, réponses?

Mme Pagé (Lorraine): Alors, tout d'abord, je suis très contente de vous entendre dire que vous êtes très sensibles à cette préoccupation de l'égalité des chances. Et, sous réserve des réflexions que vous conduisez pour en voir la traduction dans la loi, c'est une réponse qui nous agrée, et si nous pouvons contribuer à alimenter cette réflexion, ça nous fera plaisir.

Sur la consultation des parents, quelques clarifications. Tout d'abord, nous pensons que c'est le personnel enseignant qui est le plus à même de juger si un manuel scolaire est adéquat pour aborder les objectifs prévus au programme et que c'est aussi le personnel enseignant qui est à même d'évaluer si un cahier d'exercices permet d'aller vraiment vérifier l'acquisition des connaissances et l'atteinte des objectifs prévus au programme.

Par ailleurs, que les parents expriment leur point de vue sur le coût du matériel ou sur le nombre de cahiers demandés, c'est autre chose. Nous interprétons, nous, que les textes, tels qu'ils apparaissent dans le projet de loi, pourraient permettre au conseil d'établissement de débattre de ces questions. Et, en plus, les parents pourraient toujours se doter d'un mécanisme de participation distinct, où certaines de ces questions pourraient faire l'objet d'un commentaire acheminé au directeur d'école ou aux enseignants. Mais il reste que le personnel qui est habilité à évaluer la qualité du matériel didactique, que ce soit le manuel de base ou le cahier d'exercices, c'est la personne qui a à voir à l'enseignement du programme et à l'atteinte des objectifs. On se comprend bien.

Maintenant, sur les deux questions que vous avez soulevées par rapport à l'obligation faite aux enseignantes et aux enseignants dans l'accompagnement des stagiaires et les questions soulevées sur la question de la privatisation et de la sous-traitance, M. Luc Savard et M. Luc Sénéchal vont répondre à ces deux questions.

La Présidente (Mme Blackburn): M. Savard.

Mme Pagé (Lorraine): Je m'en allais dire Luc et Luc, comme je dis parfois.

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Blackburn): M. Savard.

M. Savard (Luc): Oui, alors, sur la question de la formation des enseignantes et des enseignants, Mme la ministre, j'apprécie que vous interprétiez ce que vous ajoutez dans le projet de loi. Vous l'interprétez comme étant... pas entraînant une obligation. Sauf que les ministres passent, mais, la Loi sur l'instruction publique, ça reste, et c'est interprété par des... Il y a des avocasseries autour de ça, la Loi sur l'instruction publique.

D'abord, un petit rappel historique. Au mois de juin dernier, Mme la ministre, les parties, c'est-à-dire la Fédération des commissions scolaires, le ministère de l'Éducation, la Fédération des enseignantes et enseignants de commissions scolaires, on a convenu d'une entente sur l'encadrement des stagiaires, dans laquelle, en termes de principes généraux, les trois parties reconnaissaient l'encadrement des stagiaires comme une responsabilité acceptée par une enseignante ou par un enseignant, qui contribue ainsi à la formation des futurs enseignantes et des futurs enseignants. Cette fonction est reconnue et valorisée comme une contribution individuelle à la responsabilité collective de l'ensemble des membres de la profession au regard de la relève.

Donc, je pense qu'à cet égard-là il y a eu un engagement de la Fédération, donc des enseignants de commissions scolaires, que la question de l'encadrement des stagiaires était une responsabilité à assumer collectivement. Mais, dans cette même entente, les parties reconnaissaient que la participation d'une enseignante ou d'un enseignant à l'encadrement d'une ou d'un stagiaire se fait sur une base volontaire.

Ce que vous amenez, par le projet de loi, c'est la confusion, c'est-à-dire, d'une part, le fait qu'en ajoutant cet amendement-là dans les devoirs vous introduisez une forme d'obligation, dans la Loi sur l'instruction publique, de devoir remplir les devoirs qui accompagnent la fonction d'une enseignante ou d'un enseignant. Et vous mettez ça en contrepartie des dispositions d'une convention collective et même d'ententes intervenues entre les commissions scolaires et les universités.

Ce que les enseignantes et les enseignants disent là-dessus, c'est que, là, on va être assujettis, au regard de la question de l'encadrement des stagiaires, non seulement à l'égard d'ententes prévues dans la convention collective, mais même d'ententes à l'extérieur avec le milieu universitaire. Nous retrouverons-nous avec trois employeurs, le MEQ, la Fédération des commissions scolaires et, sur les questions d'encadrement des stagiaires, les ententes intervenues entre les universités puis les commissions scolaires? Premier objet de préoccupation.

Et, sur la question de la confusion, c'est que, juridiquement, au Québec, quand, à un moment-donné, il y a un problème d'interprétation entre une convention collective et la Loi sur l'instruction publique, qu'est-ce qui prime? C'est la loi. Et qu'est-ce que la loi dit? Si vous introduisez la question de la collaboration avec les stages comme un devoir, vous introduisez la notion d'obligation.

Et, nous, notre prétention c'est que... Puis, je veux dire, notre engagement à collaborer, il est très bien indiqué, nous l'avons signé au mois de juin dernier, et on pense qu'il y a là un engagement de notre part à collaborer à cet accompagnement-là.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien. Monsieur...

Mme Pagé (Lorraine): ...que les nôtres se parlaient et en arrivaient à une compréhension commune, ça éviterait que des avocats, par la suite, se mettent à l'interpréter n'importe comment puis qu'on puisse avoir des problèmes.

Mme Marois: Parce qu'effectivement on l'interprète déjà. Voyez-vous, déjà, on a commencé. Mais je n'ai pas d'objection, effectivement, à ce qu'on regarde ça. On disait: Doit avoir le souci de, ou doit avoir la volonté, la préoccupation de. C'est dans ce sens-là qu'on le voyait ici. Mais, s'il faut le préciser...

La Présidente (Mme Blackburn): M. Sénéchal. Sur la même question?

Mme Marois: Non, c'est sur l'autre. Ça m'intéresse autant.

M. Sénéchal (Luc): Sur la privatisation et la sous-traitance, je pense que ce qu'il faut regarder, c'est le projet de loi actuel en parallèle avec la Loi sur l'instruction publique qui s'applique présentement, précisément les articles 88 et 89. Il faut lire l'article actuel du projet de loi, l'article 89, en fonction de 88, qui dit que «le conseil d'établissement – là, je vous lis le 89 – peut, au nom de la commission scolaire et dans le cadre du budget de l'école, conclure un contrat pour la fourniture de biens ou services». Alors, «le conseil d'établissement peut, au nom de la commission scolaire», alors qu'auparavant c'était la commission scolaire qui avait tous ces pouvoirs-là. Là, il y a un transfert vers le conseil d'établissement. Et les biens et services, ça peut être autant les services professionnels que les services de soutien.

Mais là où, dans le projet de loi, c'est fortement différent sur le fond de la LIP actuelle, c'est dans le nouvel article 213. L'article 213 de la Loi sur l'instruction publique dit: «Une commission scolaire peut conclure une entente – et c'est au deuxième alinéa – avec une autre commission scolaire, un organisme ou une personne pour la prestation de certains services éducatifs aux élèves handicapés, aux élèves en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage...» C'est présent dans le projet de loi, mais on y rajoute, dans le projet de loi, le nouvel article 213, au deuxième alinéa: «Une commission scolaire peut conclure une entente avec une autre commission scolaire, un organisme ou une personne pour la prestation des services complémentaires et particuliers...» et non pas pour une clientèle spécifique d'élèves en difficulté d'adaptation ou pour d'autres services. Et ça, ça fait comme un antagonisme entre 88 et 89, où «le conseil d'établissement peut», et dans le 213, où «la commission scolaire peut».

Dans 88 et 89, si on les lit l'un par rapport à l'autre, «le conseil d'établissement peut, au nom de la commission scolaire», et, dans le 213, «la commission scolaire peut» sans nécessairement entente avec le conseil d'établissement, pour «des services complémentaires ou particuliers», inclus ou non au régime pédagogique. Et c'est la forte différence qui nous laisse croire qu'il y aura davantage de privatisation sans engagement.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, M. Sénéchal. Mme la ministre.

Mme Marois: Mon temps est terminé, mais on va le regarder quand même, ce que vous soulevez. Et je ne l'ai pas redit, mais je vous le redis, comme j'ai dit aux directions d'écoles, tout à l'heure, ce que l'on peut corriger, resserrer, qui nous est proposé et qui va dans le sens des affirmations, entre autres ce matin, on va le regarder attentivement.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, Mme la ministre. M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Merci, Mme la Présidente. Bienvenue à Mme Pagé et aux personnes qui l'accompagnent. J'imagine que le premier amendement qui devrait être déposé par la ministre, et, si la ministre ne le fait pas, ça sera le député de l'opposition, c'est le principe de l'égalité des chances. Vous avez probablement pris connaissance de l'éditorial de Mme Bissonnette, le 17 novembre 1997, qui disait que c'est le premier amendement que l'Assemblée nationale devrait apporter à ce projet de loi, condition essentielle à sa crédibilité. Et vous avez longuement parlé, dans votre mémoire, du principe de l'égalité des chances.

(16 h 30)

La question de la privatisation et la question des services professionnels et des services complémentaires et de ce qui sera possible à un conseil d'établissement ou à une commission scolaire. Peut-être, la question s'adresse davantage à M. Sénéchal parce qu'il élaborait là-dessus. Il y a eu un article qui est paru dernièrement, le 20 novembre, dans le journal Le Droit , qui parlait des services éducatifs spécialisés à deux vitesses, des organismes qui semblent proliférer, où on charge, par exemple, 18 $ de l'heure pour un tuteur et 22 $ de l'heure pour un enseignant qualifié, et ces services sont en train de prendre la place des services qui devraient être offerts gratuitement dans toutes les écoles. Il y a un directeur général d'une commission scolaire, des Draveurs, qui commentait cet état de situation qui devient assez alarmant. Et la présidente de la commission scolaire aussi admettait qu'il y avait prolifération de services d'éducation privés et que cela encourageait la création d'une école à deux vitesses.

Dans mes remarques préliminaires, j'ai fait remarquer à la ministre, ce matin, que je n'avais pas l'impression qu'on attaquait les vrais problèmes, en éducation, et vous y faites référence dans votre mémoire: l'absence et la pénurie de manuels scolaires dans nos écoles, qui sont des outils fondamentaux pour permettre aux étudiants, aux élèves d'avoir accès au savoir, et, dans un deuxième temps, les élèves qui sont le plus à risque, les élèves qui ont besoin de services spécialisés, orthopédagogues, orthophonistes, psychologues, etc. Quelles sont les craintes que vous avez? Peut-être que la question s'adresse à M. Sénéchal. Quelles sont les craintes que vous avez à l'égard de cette situation-là, qui pourrait s'accentuer, avec ce qui est prévu dans le projet de loi n° 180? Puis pourriez-vous nous brosser un tableau de la situation au Québec? Est-ce que les services spécialisés augmentent, diminuent?

J'ai évoqué, ce matin, que, dans certains cas, on m'a rapporté des situations où des psychologues devaient couvrir une quinzaine ou une vingtaine d'écoles. Et pourtant, l'objectif du moyen choisi par la ministre de l'Éducation, c'est de faire réussir le plus grand nombre d'élèves possible. Mais on ne semble pas avoir de plan d'action par rapport à ces situations-là. Et, si je l'évoque avec vous, c'est que vous dites dans la conclusion de votre mémoire que «pour prendre le virage du succès, l'engagement doit se traduire concrètement par des plans d'action et par des orientations qui visent à assurer la qualité des services, l'égalité des chances, la gratuité scolaire et surtout un financement public de l'éducation publique». Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus, soit Mme Pagé, M. Sénéchal ou M. Savard.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien. Il y avait deux questions, une touchant les manuels scolaires, l'autre, les services professionnels.

M. Ouimet: Non, surtout les services professionnels.

Mme Pagé (Lorraine): M. Sénéchal. La question lui a été adressée.

La Présidente (Mme Blackburn): Alors, M. Sénéchal.

M. Sénéchal (Luc): Pour répondre à votre question, M. Ouimet, la notion de services professionnels est souvent mal comprise. Il y en a de trois types. Il y a les administratifs: les agents de gestion financière, les gens qui travaillent dans les centres administratifs. Il y a le côté pédagogique: spécialistes, moyens techniques d'enseignement, conseillères et conseillers pédagogiques. Et il y a les particuliers complémentaires: les services directs aux élèves. Et c'est là que c'est le plus dangereux, dans la réforme actuelle, avec la privatisation et la sous-traitance qui pourraient être incluses. Mme la ministre nous dit que ce n'étaient pas ses intentions. Mais, quand on fait une réforme et qu'on veut rendre le plus de jeunes Québécois possible à la diplomation, il faut mettre des conditions pour que cela se produise, des conditions professionnelles.

À mon avis – on ne reviendra pas sur certains facteurs – quand on oblige la maternelle cinq ans obligatoire, pour tous les cinq ans obligatoire pour dépister d'une façon plus hâtive les troubles d'apprentissage et qu'on n'engage pas de personnel lié en emploi à la commission scolaire pour corriger ces troubles d'apprentissage là, on dit qu'on prend l'objectif, mais qu'on ne met pas les moyens. Quand on dépiste un trouble de langage à cinq ans ou à six ans et qu'on n'a pas d'orthophoniste nécessairement pour corriger le langage, on vient de créer encore plus une marginalisation, on vient de faire prendre conscience à des enfants qu'ils sont encore plus différents à l'école que s'ils étaient restés chez eux. On les rend plus différents plus jeunes, quand on n'offre pas de services.

Quand on veut dépister des problèmes d'adaptation – vous savez ce qui se passe dans les écoles aujourd'hui, il y a des familles éclatées, il y a des problèmes relationnels – et qu'il n'y a pas de psychologue ou très peu, ou on fait appel à un sous-traitant ou à une sous-traitante en psychologie, qui, après ses deux heures par jour, sera partie... Que feront les directions d'écoles, les enseignantes et les enseignants et que feront les parents pour pouvoir rejoindre cette personne-là, qui n'est pas à l'emploi de la commission scolaire? Les enseignantes et les enseignants, dans la consultation, nous ont dit, à la CEQ, que c'étaient les problèmes de privatisation et de sous-traitance qui étaient les plus graves, dans le projet de loi actuel, outre les correctifs et les avancés qui ont été amenés.

Je peux vous dire, présentement, au 20 septembre, il y a 908 professionnels cotisants de moins dans nos organisations syndicales, chiffre fourni par les commissions scolaires, entre le 30 juin et le 20 septembre. Les données équivalents temps complet de «per cost» du ministère qui doivent sortir le 30 septembre, on les aura probablement en janvier ou février. On pourra, à ce moment-là, se rasseoir et regarder les données des services professionnels à la commission scolaire. Mme la ministre a déjà dit que les services professionnels avaient augmenté entre 1992 et 1996, et c'est vrai, les services personnels ont augmenté entre 1992 et 1996. Mais, entre 1993 et 1996, ils ont diminué, par exemple. Ce n'est pas la même chose.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, M. Sénéchal. M. le député.

M. Ouimet: Vous dites qu'il y a 900... C'est quoi, le chiffre?

M. Sénéchal (Luc): Il y a 908 cotisants, à partir des bordereaux de cotisation syndicale transmis par les commissions scolaires.

M. Ouimet: Qui sont des professionnels?

M. Sénéchal (Luc): Des gens qui travaillaient, il y en a 908 de moins entre le 30 juin et le 20 septembre: mesures de départs volontaires non remplacés, affectations provisoires à des postes de cadres, retraites, démissions non remplacés, 908 personnes. Je ne vous dis pas que c'est des équivalents temps plein. Équivalents temps plein, c'est à peu près 470, selon notre évaluation, qu'on n'a pas encore.

La Présidente (Mme Blackburn): D'autres questions?

M. Ouimet: Oui. Dans le cadre de l'avant-projet de loi, j'avais fait référence à plusieurs études, dont l'étude de M. Rondeau, des études américaines, des études canadiennes sur les effets bénéfiques de la décentralisation, oui, mais par rapport à l'objectif que s'est fixé la ministre de l'Éducation et que nous partageons, c'est-à-dire, faire réussir le plus grand nombre d'élèves possible. On peut bien se donner des projets de loi comme le projet de loi n° 180, mais il me semble que ça va prendre d'autres conditions pour atteindre l'objectif que nous nous fixons.

(16 h 40)

Vous faites référence, toujours dans votre conclusion, à toutes les conditions, ce que j'appellerais des conditions de réalisation. Et on sent, avec la réponse que nous donne M. Sénéchal, et on sent, avec la pénurie de livres, de manuels scolaires dans nos écoles, et on sent également avec une annonce de compressions budgétaires en éducation de 2 %, qui sont déjà annoncées, qu'on ne pourra pas atteindre l'objectif.

Mme Pagé (Lorraine): Écoutez, M. Ouimet, j'espère que je n'alarme pas la ministre, mais qu'elle est consciente du phénomène. Il y a un grave problème de financement de notre réseau d'écoles primaires et secondaires. Cela fait 15 ans, 15 années successives que le réseau scolaire absorbe des compressions budgétaires. Je sais bien qu'on peut me répondre que l'éducation n'est pas qu'affaire d'argent. Mais l'éducation est aussi affaire d'argent parce que, quand on n'a pas l'argent, on ne peut pas engager le personnel. M. Sénéchal vient de vous en faire l'illustration pour les services professionnels, et effectivement c'est les services qui ont été les plus dégarnis au cours des derniers mois. Et on est capable de voir qu'on n'est pas capable, non plus, d'acheter des manuels, de garnir nos bibliothèques scolaires et toutes sortes d'autres problèmes qu'on peut identifier.

Et c'est là qu'il faut faire les liens entre les dispositions du projet de loi. Quand on permet que des fonds privés interviennent dans le financement de l'école et qu'on dit que ces fonds-là, c'est pour payer la réalisation du projet éducatif, qu'on dit que le projet éducatif, c'est ce qui découle de la loi, des programmes d'études et du régime pédagogique et, donc, qu'on peut ramasser des sous pour payer pour cela, dans les écoles où on n'a pas les services, qu'est-ce qu'on va faire? On va ramasser des sous pour les payer. Mais les écoles qui vont réussir à ramasser des sous, ce n'est pas les écoles où 75 % des parents sont sur le bien-être social.

J'ai fait faire un relevé des écoles qui, à la CECM, comptent sur des fonds spéciaux, il n'y en a pas une qui est du quartier Saint-Henri puis Centre-Sud. Alors, on permettra à des écoles de ramasser des sous, de financer des activités de base de l'école pour cela. Et, tel que c'est libellé dans le projet de loi, ça ne peut pas couvrir que les activités parascolaires; nous l'avons regardé attentivement. Et pendant ce temps-là, au même moment, les élèves qui ont le plus besoin de services professionnels, qui ont le plus besoin de récupération, qui ont le plus besoin d'aide aux devoirs et aux leçons, ils sont dans les milieux pauvres où on n'est pas capable de ramasser de l'argent.

Donc, toute la question des fonds spéciaux mérite qu'on s'y attarde. Je disais, dans mon exposé, qu'il y a certains encadrements que la ministre laisse voir qui sont bien, ils pourraient même être renforcés, à certains égards. Mais je crois qu'il faudrait vraiment se donner quelques mois pour regarder quel dispositif il faudrait mettre en place pour ne pas se retrouver, dans cinq ans ou dans 10 ans, avec une école des riches ou une école des pauvres. Je suis certaine que les Québécoises et les Québécois ne veulent pas de cela. Je suis convaincue de cela. Alors, prenons le temps de regarder cette question des fonds spéciaux. Creusons bien la problématique. Trouvons des solutions. Amenons certains encadrements dans la loi pour éviter la commercialisation, soit, mais il faut faire des liens étroits entre les dispositions sur les fonds spéciaux et les ouvertures qui sont faites sur la privatisation et la sous-traitance. À notre avis, c'est les deux facettes d'une même médaille. Et la question du financement demeure toujours et elle va se reposer encore, j'en suis certaine, aux prochains crédits budgétaires.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, Mme Pagé. Quelques mots de conclusion, M. le député de Marquette?

M. Ouimet: Oui, juste pour compléter là-dessus. Mon inquiétude, malgré les propos de la ministre, c'est lorsqu'une commission scolaire qui va répartir le financement entre les différentes écoles, elle va tenir compte des fonds amassés par l'école...

Une voix: ...

M. Ouimet: Mais les articles sont clairs, là. Peut-être pas au niveau de l'article 92, mais au niveau des articles 88, 89, oui, c'est inscrit carrément dans le projet de loi.

Et mon inquiétude: si la commission scolaire tient compte des subventions que l'école est allé chercher, est-ce qu'on pense pour une seconde que le ministère de l'Éducation, lui, ne tiendra pas compte de ce même financement-là qui va exister dans les 3000 écoles du Québec, qui va, par la suite, risquer de faire en sorte de diminuer le financement parce que, localement, vous êtes en mesure d'aller chercher x milliers de dollars et, sur le plan national, ça va représenter probablement des millions de dollars? Le danger est là.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien. Alors, sur cette remarque, quelques minutes, quelques mots de conclusion, Mme la ministre.

Mme Marois: Alors, oui. Je sais que c'est quelques mots. Merci, Mme la Présidente. Je veux réitérer le fait que notre objectif, c'est que les fonds publics servent à assurer le projet éducatif de base, les services complémentaires et couvrent l'ensemble des obligations de l'école, tant au niveau du curriculum que du régime pédagogique et, je le répète, des services complémentaires. Et notre intention n'est vraiment pas, mais d'aucune espèce de façon, de faire en sorte que les fonds qui peuvent s'accumuler, que ce soit pour des activités parascolaires ou toute espèce d'autres activités – d'ailleurs, que les directions d'école décrivaient assez bien tout à l'heure – servent ou remplacent, se substituent à l'obligation qu'a l'État d'assurer le projet éducatif de base. Et, s'il faut encore un peu baliser, on va le regarder très attentivement parce que je veux que la volonté soit clairement dite et reconnue aussi dans la loi. Alors, on vous remercie pour votre contribution à nos travaux.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, Mme la ministre. Une dernière remarque, Mme la présidente?

Mme Pagé (Lorraine): En conclusion, pour dire à la ministre de l'Éducation que, tous les examens particuliers qu'elle voudrait faire sur les questions que nous avons soulevées, nos ressources seront disponibles pour rencontrer les ressources du ministère, pour bien s'assurer que les éléments que nous avons mis de l'avant puissent se retrouver dans une écriture qui reflète bien les volontés, qui ne laisse pas de place à l'ambiguïté. Et je vous remercie du temps d'écoute que vous nous avez consacré.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, Mme Le Brun, M. Savard, Mme Pagé, M. Sénéchal et Mme Dallaire, pour votre participation aux travaux de cette commission. Et, comme vous avez pu le constater, je pense que c'était une présence fort utile et appréciée, et il en sera pris compte, nous dit la ministre, au moment d'étudier le projet de loi article par article. Merci.

Nous suspendons les travaux quelques instants, le temps aux témoins de quitter la table et aux prochains de s'y présenter.

(Suspension de la séance à 16 h 46)

(Reprise à 16 h 48)

La Présidente (Mme Blackburn): Mesdames, messieurs, nous reprenons nos travaux. C'est maintenant la Fédération des commissions scolaires du Québec qui témoignera devant nous.

Au nom des membres de la commission, je voudrais vous souhaiter la bienvenue à cette commission et vous inviter, Mme la présidente, à présenter les personnes qui vous accompagnent, et vous indiquer, comme vous le savez déjà, que vous avez 20 minutes pour la présentation, qui sera suivie d'un échange d'une trentaine de minutes avec les membres de la commission. Alors, Mme Drouin, nous vous écoutons.


Fédération des commissions scolaires du Québec (FCSQ)

Mme Drouin (Diane): Merci, Mme la Présidente. Mme la ministre, M. le porte-parole de l'opposition, avec moi, aujourd'hui: à ma gauche, M. André Caron, qui est premier vice-président, et Mme Manon Beaudry-Roberge, qui est deuxième vice-présidente; à ma droite, M. Berthier Dolbec, qui est conseiller au dossier, et M. Clermont Provencher, qui est secrétaire général à la Fédération.

La Fédération des commissions scolaires constate que le projet de loi n° 180 apporte plusieurs clarifications aux propositions contenues dans l'avant-projet de loi. Sans en faire l'énumération, il importe de signaler que les responsabilités de la commission scolaire et celles des établissements y sont plus clairement définies, ce que nous avions souhaité, et que les rôles d'orientation, d'encadrement, de coordination et d'évaluation de la commission scolaire y sont mieux cernés.

(16 h 50)

Toutefois, nous croyons que des modifications sont encore nécessaires pour que les changements souhaités produisent la mobilisation et l'amélioration des résultats de nos services d'éducation. Nous croyons nécessaire de rappeler à la ministre de l'Éducation que les objectifs de décentralisation du gouvernement, tels qu'ils sont définis dans la politique de soutien au développement local et régional, doivent guider le gouvernement dans cette révision de la Loi sur l'instruction publique. Aussi, nous rappelons quelques-uns de ces objectifs: décentraliser aux instances locales, qui, dans ce cas-ci, sont les commissions scolaires; adapter les politiques et les programmes gouvernementaux aux réalités locales et régionales; tendre à éliminer le mur-à-mur et à instaurer la gestion par résultat pour responsabiliser les intervenants. Il nous semble que le gouvernement doit mieux prendre en compte ces objectifs et confier aux commissions scolaires de plus grandes marges de manoeuvre.

Quand nous voyons le projet éducatif de l'école décrit comme un enrichissement du projet éducatif national défini par la loi et que nous entendons la ministre de l'Éducation dire: «À curriculum national, dérogation nationale», ça ressemble au mur-à-mur décrié par le gouvernement. Quand nous voyons également le nombre d'autorisations de la ministre requises a priori, les contraintes imposées à l'administration, c'est loin d'une gestion par résultat responsabilisante pour les commissions scolaires et pour les établissements. Nous y reviendrons avec des exemples plus précis un petit peu plus loin.

Nous reconnaissons que l'État a des responsabilités propres en éducation et que la ministre de l'Éducation doit les définir. Toutefois, le dynamisme et la mobilisation, l'innovation et l'adaptation de services dont nos concitoyens ont besoin, commandent que les commissions scolaires puissent adapter les encadrements ministériels aux caractéristiques et aux besoins particuliers de leur milieu. Afin d'obtenir l'efficacité et l'efficience nécessaires, il leur faut des marges de manoeuvre. Nous recommandons que le gouvernement convienne que la commission scolaire, gouvernement local, soit habilitée à mettre en oeuvre et à adapter les orientations et les prescriptions gouvernementales dont la ministre de l'Éducation est responsable et à en rendre compte a posteriori.

Au niveau de la participation des parents, nous soutenons que les parents doivent jouer un rôle très important à l'égard de la réussite éducative de leurs enfants. Leur engagement à supporter la mission de l'école doit donc être facilité. Il est nécessaire que les parents puissent être consultés sur les choix pédagogiques que fait l'école parce que ces choix peuvent avoir une incidence financière pour eux. De plus, comme accompagnateurs dans l'expérience scolaire de leurs enfants, les parents doivent être à l'aise avec certains éléments du fonctionnement pédagogique qui concernent leurs enfants. Ainsi, nous recommandons que la loi rende manifeste que les parents peuvent interagir sur des éléments du fonctionnement pédagogique, en particulier le matériel didactique et le bulletin scolaire.

Au sujet de la participation du commissaire d'école au conseil d'établissement, nous jugeons très pertinent que la commission scolaire détermine le nombre de membres d'un conseil d'établissement après consultation des groupes concernés. Voilà un exemple positif de la marge de manoeuvre locale. Par ailleurs, nous trouvons vraiment inacceptable qu'un commissaire d'école élu par la population doive attendre une invitation ou une autorisation préalable pour participer à une séance d'un conseil d'établissement.

Il est nécessaire que la Loi sur l'instruction publique permette au commissaire d'école d'assumer entièrement et librement les fonctions pour lesquelles la population l'a choisi, tout particulièrement d'établir un lien direct entre sa communauté et le Conseil des commissaires. Nous recommandons donc qu'un commissaire élu ou nommé en application de la Loi sur les élections scolaires puisse participer aux séances d'un conseil d'établissement d'une école ou d'un centre, bien sûr, sans droit de vote.

Le projet de loi propose trois types d'établissements scolaires: l'école, le centre de formation professionnelle et le centre d'éducation des adultes. De nombreuses commissions scolaires utilisent un seul et même immeuble pour la formation générale des jeunes, la formation générale des adultes et même pour la formation professionnelle. Et il arrive qu'on confie la direction d'un tel établissement à la même personne.

Pour éviter des conflits, il importe que les encadrements, les règles et les codes de vie destinés aux personnes fréquentant un tel établissement n'entrent pas en contradiction. Il est important que la commission scolaire puisse adapter les nouvelles dispositions des chapitres III et IV à la réalité de tels établissements. Nous recommandons que la loi permette d'instituer un établissement constitué de deux ou même trois des types d'établissements prévus au projet de loi et que la commission scolaire soit habilitée à adapter ces dispositions des chapitres III et IV aux caractéristiques et aux besoins d'un tel établissement.

Le gouvernement accorde une grande importance à la flexibilité des services de formation et à la diversification des parcours et des cheminements de formation qualifiante. Les commissions scolaires sont, elles aussi, très soucieuses de rendre le plus accessible possible les services et de faciliter le cheminement des personnes, jeunes et adultes, vers l'acquisition d'une qualification professionnelle. Pour améliorer les dispositions prévues aux articles 38 et 98 du projet de loi, nous recommandons qu'à la demande de la commission scolaire une école ou un centre soit habilité à dispenser un programme de formation générale ou de formation professionnelle complémentaire au profil de formation d'un élève déjà admis dans un de ces établissements.

Au sujet de l'inscription des élèves, nous reconnaissons la pertinence des principes énoncés par la ministre de l'Éducation, à savoir: le droit de l'élève ou de ses parents de choisir parmi les écoles de la commission scolaire celle qui répond le mieux à leurs préférences et également l'accessibilité de l'école du quartier aux élèves du quartier.

Nous rappelons cependant que la commission scolaire a la responsabilité de répartir les services éducatifs entre ces établissements. C'est pourquoi il est nécessaire qu'elle puisse continuer d'établir des critères pour l'inscription des élèves dans les établissements. Outre la capacité d'accueil des écoles, nous devons tenir compte de la répartition des services éducatifs, du transport scolaire et des bassins d'alimentation des écoles. C'est pourquoi nous recommandons que la responsabilité de la commission scolaire d'établir annuellement des critères pour l'inscription des élèves dans les écoles qu'elle administre soit maintenue.

Nous appuyons la reformulation de l'article 468 de la Loi sur l'instruction publique encadrant l'établissement d'écoles ou de centres à vocation régionale ou nationale. Toutefois, nous tenons à ce que de telles écoles ou centres soient établis sous la compétence d'une commission scolaire et qu'un acte d'établissement leur soit décerné par la commission scolaire. Aussi, nous recommandons que les écoles ou les centres à vocation régionale ou nationale soient institués sous la compétence d'une commission scolaire et qu'ils soient établis en vertu d'un acte d'établissement de cette commission scolaire. Nous ne voulons pas d'autres écoles de ministres.

En lisant la nouvelle formulation de l'article 240, on dirait qu'on cherche à oublier les efforts énormes qui ont été faits au cours des 10 dernières années, particulièrement pour améliorer les services éducatifs et pour mieux répondre aux besoins des élèves. C'est comme si nous devions nous repentir de plusieurs de nos succès. Mobiliser des élèves qui ont des talents, ramener des élèves ayant décroché dans un nouveau contexte pour reprendre le goût d'apprendre dans une école pour raccrocheurs, permettre à des jeunes aux prises avec de sérieux problèmes de comportement de trouver un encadrement qui les fasse progresser, c'est tout ça, les écoles à vocation particulière. Tout récemment, la CECM a ouvert l'école du Bon Dieu dans la rue, au centre de jour pour jeunes itinérants du père Emmett Johns, au coeur même de la ville de Montréal.

Le nouveau libellé de l'article 240 envoie malheureusement un signal négatif à ceux et à celles qui ont travaillé d'arrache-pied pour permettre au plus grand nombre de s'épanouir à l'école et de réussir leurs études – quand on lit: «exceptionnellement», «à la demande de», «après consultation», «avec l'approbation du ministre», «aux conditions qu'il détermine», et le reste, et le reste. Afin de répondre adéquatement aux besoins de sa clientèle, nous recommandons qu'il soit du ressort de la commission scolaire d'affecter un immeuble aux fins d'un projet particulier qu'elle détermine et que la commission scolaire puisse orienter vers ce projet particulier les personnes qui en ont besoin, notamment en faisant connaître les caractéristiques du projet.

Quant à la formation de la main-d'oeuvre, la commission scolaire est habilitée à contribuer à la formation de la main-d'oeuvre, à aider des entreprises à participer à des projets d'innovation technologique et au développement de la région. Elle est habilitée aussi à fournir des services à des fins culturelles, sociales, sportives ou scientifiques et à participer à des programmes de coopération avec l'extérieur, dans le domaine de ses compétences.

Nous savons que, très souvent, les commissions scolaires se regroupent entre elles ou s'associent avec des cégeps ou des entreprises pour des activités de formation, de service aux entreprises et de développement régional. Dans de tels cas, il est important que la commission scolaire ait la possibilité de confier la gestion de toutes ou d'une partie de ses activités à un comité qu'elle institue ou à un organisme qu'elle désigne. C'est pourquoi nous recommandons que la commission scolaire ait cette possibilité de confier à un comité qu'elle institue ou à un organisme qu'elle désigne la gestion de toutes ou d'une partie des activités prévues à l'article 255, y compris la formation de la main-d'oeuvre, divers services aux entreprises et le développement régional.

(17 heures)

En ce qui touche la commission scolaire d'une façon plus précise: la durée du mandat des membres du comité exécutif. Étant entendu que le président du conseil des commissaires est membre du comité exécutif pour toute la durée de son mandat, plusieurs commissions scolaires révisent à chaque année ou aux deux ans la composition du comité exécutif, favorisant ainsi une expérience plus étendue de l'administration scolaire pour un plus grand nombre de commissaires. C'est pourquoi nous recommandons de laisser à chaque commission scolaire le choix de déterminer la durée du mandat des commissaires élus qui doivent siéger au comité exécutif.

Deux représentants du comité de parents continueront de siéger au conseil des commissaires et au comité exécutif de la commission scolaire. Ces commissaires-parents – dit-on – ont les mêmes droits et devoirs que le commissaire d'écoles élu par la population, à l'exception du droit de vote. Parce qu'il est nécessaire d'assurer une stabilité et une continuité dans les travaux du conseil des commissaires et du comité exécutif, nous recommandons que les représentants du comité de parents siégeant au conseil des commissaires et au comité exécutif de la commission scolaire ne puissent être remplacés par des substituts.

Au sujet...

La Présidente (Mme Blackburn): Mme la présidente, est-ce que je peux vous inviter un peu à accélérer le rythme, parce que je vois qu'il vous reste encore quatre ou cinq pages?

Mme Drouin (Diane): Ce sera court.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien, merci.

Mme Drouin (Diane): Au niveau de l'autonomie de gestion, l'avant-projet de loi permettait à la commission scolaire d'emprunter à court terme sans l'autorisation du ministre. Nous ne retrouvons pas ça dans le projet de loi. Alors, nous recommandons, bien sûr, que la loi habilite la commission scolaire à emprunter à court terme sans l'autorisation du ministre de l'Éducation, étant entendu que ça s'avère parfois nécessaire compte tenu du retard dans le versement des subventions aux commissions scolaires.

Au niveau de la nomination des responsables quand on parle de décentralisation, la commission scolaire – dit-on dans la loi – doit nommer un responsable de la comptabilité. C'est possible que ce soit nécessaire, mais faut-il l'écrire dans une loi. Également, à l'article 262, on vient préciser que le conseiller en éducation chrétienne doit consacrer la majeure partie de son temps à l'exercice de cette fonction. Je pense que la commission scolaire est capable de déterminer elle-même l'importance relative des ressources qu'elle doit affecter à ces responsabilités.

Au sujet du pouvoir délégué, on a mentionné tout à l'heure que les conseils d'établissement pouvaient conclure des contrats au nom de la commission scolaire. Alors, nous souhaitons, comme la commission scolaire demeure toujours responsable des personnes qui y travaillent, comme employeur, que ces contrats puissent être faits dans le respect des obligations et des engagements auxquels est liée la commission scolaire et dans le cadre d'une délégation de pouvoirs de la commission scolaire.

Nous souhaitons également, dans la composition des commissions et des comités que la ministre entend mettre en place, qu'un commissaire d'écoles puisse y siéger et nous disons, par le fait même, de revoir peut-être le rôle du Conseil supérieur de l'éducation.

Alors, en conclusion, vous avez vu nos recommandations qui touchent particulièrement la décentralisation et la participation des parents, et nous vous rappelons que nous sommes prêts à collaborer dans un esprit de responsabilités mieux partagées. Voilà, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, Mme Drouin. Ça a été effectivement efficace. Alors, la parole est maintenant à Mme la ministre de l'Éducation. Madame.

Mme Marois: Merci, Mme la Présidente. Je vous remercie pour votre mémoire. Je vais redire ce que j'ai dit déjà par le passé et parce que je le pense, je veux vous féliciter pour ce que nous avons fait ensemble depuis quelques mois et je pense particulièrement à l'implantation de nos maternelles. Malgré quelques commentaires qu'on nous fait ces jours-ci, nous savons, pour avoir d'autres informations, puisque nous sommes à faire l'évaluation actuellement à l'occasion d'une journée d'évaluation des maternelles, comment le taux de satisfaction est élevé à tous égards, et que, à certains endroits, il y ait eu des ajustements à faire, je pense que c'était normal quand on mène une opération d'une aussi grande envergure.

D'abord, il y a beaucoup de choses que vous proposez ici, et je peux vous dire, Mme la Présidente, que la présidente de la Fédération me l'avait mentionné, Mme Drouin m'avait mentionné qu'il y a certains aspects peut-être plus légaux et techniques, qu'on est prêts à revoir avec la Fédération, comme je l'ai dit au groupe précédent – je pense que Mme Pagé nous a offert la même chose, Mme Drouin l'avait fait privément à l'occasion d'une autre rencontre. Il y a donc des choses que je n'aborderai pas ici spécifiquement, mais toute la question du représentant sur la comptabilité, puis il y a un certain nombre d'autres mesures. Alors, on va le regarder. Et j'ai déjà de prêts certains petits amendements qui vont clarifier des choses, et nos services pourront rester en contact avec les vôtres pour d'autres aspects des discussions que nous pourrions avoir.

Il y a une chose, par contre, qui a l'air petite à première vue, mais j'ai consulté ici pendant l'intervention, le fait que nous habilitions la commission scolaire à emprunter à court terme. Je dois vous dire qu'on le souhaitait, on le souhaiterait toujours, mais il y a vraiment une contrainte, semble-t-il, du côté du ministère des Finances et de la loi générale d'administration financière. Enfin, on pourra regarder cela s'il y avait lieu, mais c'est plutôt extérieur à nous, ce n'était pas notre propos.

Il y a une chose aussi que je voudrais clarifier d'entrée de jeu, c'est la question des écoles à projets particuliers. Je comprends avec vous que, par les exemples que vous nous donnez... vous nous dites, dans le fond: Il y a beaucoup de projets particuliers que l'on pourrait facilement autoriser sans avoir à aller chercher l'autorisation formelle de la ministre. Et vous avez sûrement raison. Mais vous savez que ce sujet a soulevé tellement de débats, de discussions, et j'ai essayé de trouver un équilibre, sachant par ailleurs que mon point de vue, c'est qu'effectivement je préfère qu'il y ait le moins possible de ségrégation. Je pense que c'est plus ça qui m'embête que les projets particuliers eux-mêmes. Je pense que les projets particuliers, au contraire, on l'a dit, il y en a beaucoup dans nos écoles et je pense qu'il faut qu'il y en ait davantage parce que ce sont des projets qui vont s'adapter aux réalités de l'école, qui vont permettre d'utiliser le potentiel extraordinaire de nos jeunes, mais aussi celui de ceux et de celles qui leur enseignent.

Mais, pour essayer de rétablir l'équilibre, de faire en sorte qu'on évite un débat, qui n'est pas utile à mon point de vue, parce qu'on a tellement d'énergie à mettre ailleurs, j'ai préféré de régler comme ça, c'est-à-dire en faisant en sorte que la ministre ait à donner une autorisation. Évidemment, par ailleurs, il faut bien comprendre que la commission scolaire devra nous faire une recommandation. Si la commission scolaire dit: Ce n'est pas notre choix, nous ne sommes pas prêts à le faire, bien, déjà, le projet ne franchira pas cette étape. Il faut bien être conscient de ça.

Par ailleurs, je peux vous dire que je crains un peu – je le dis très simplement – de voir apparaître un certain nombre de projets plutôt de type religieux, entre guillemets, si on veut. Et il y a une forme de protection jusqu'à un certain point à cet égard dont je voulais m'assurer. Alors, c'est tout ça qui est en cause et ce n'est pas un vote de non-confiance à l'égard des commissions scolaires. C'est peut-être pour ça surtout que je voulais donner ces explications-là. J'ai essayé de trouver un équilibre dans ça. Ce n'était pas nécessairement facile. Vous avez vu un peu les oppositions qu'il y a eu, les difficultés qu'il y a autour de ça, et je pense qu'on y arrive, sauf que ça nous amène évidemment à procéder de la façon que j'ai retenue dans le projet de loi.

Maintenant, revenons à des questions plus pratiques encore. Vous soulevez la question des mandats complémentaires. On dit: «Pour améliorer les dispositions prévues aux articles 38 et 98 – est-ce que c'est celui-là? oui – nous recommandons qu'à la demande de la commission scolaire [...] un centre soit habilité à dispenser un programme de formation générale ou de formation professionnelle complémentaire au profil de formation d'un élève déjà admis dans un de ces établissements.» Peut-être que c'est parce que je comprends mal les choses, mais est-ce que c'est parce que vous pensez que notre projet l'empêche formellement? Alors, ça, c'est une première question.

Une autre question. La question de l'inscription des élèves dans les écoles, là, qu'on établisse des critères. Si on revenait à l'établissement de critères, est-ce que vous croyez cependant que le premier critère, ça devrait être de privilégier la proximité? Je sais que ça m'a été soulevé par d'autres organismes, en fait, entre autres les D.G. des commissions scolaires, et je suis consciente des difficultés que ça peut poser. Je voudrais vous entendre un peu sur cette question-là.

Vous parlez de la formation de la main-d'oeuvre. Expliquez-moi un petit peu ce que vous voulez nous dire. J'ai de la difficulté, là. Il faut dire que je le lis pour la première fois. Vous nous dites: «Nous recommandons que la commission scolaire ait la possibilité de confier à un comité qu'elle institue [...] la gestion de toutes ou d'une partie des activités prévues à l'article 255, y compris la formation de la main-d'oeuvre, divers services aux entreprises et le développement régional.» Explicitez-moi un petit peu pourquoi vous souhaitez ça, là, et dans quel contexte.

Vous nous parlez du rôle du Conseil supérieur de l'éducation. Je veux vous entendre là-dessus. Qu'est-ce que vous avez en tête? Bon. O.K. Allons-y avec ça, là, puis...

La Présidente (Mme Blackburn): Alors, oui, ce sera probablement les trois seules questions, Mme la ministre. Mme la présidente, en commençant par un, deux ou trois?

Mme Drouin (Diane): On va essayer d'y aller dans l'ordre.

La Présidente (Mme Blackburn): Première question.

(17 h 10)

Mme Drouin (Diane): D'abord, quand vous parlez des mandats complémentaires, un exemple. On est en train de vouloir mettre sur pied les régimes d'apprentissage. Donc, ça veut dire que le jeune apprenti fera la majeure partie de sa formation dans l'entreprise, mais il devra aussi s'inscrire à une école de formation générale parce qu'il devra prendre la formation générale. Il devra également s'inscrire dans un centre de formation professionnelle parce que tout ne pourra pas être fait dans l'entreprise, par exemple certaines techniques. Bon, je vais prendre en soudure. Nécessairement, l'entreprise ne le placera pas sur des machines directement; alors, il devra procéder au départ dans une école de formation professionnelle. Ça voudra dire que le jeune devrait s'inscrire à trois endroits différents. Alors, est-ce qu'il ne serait pas possible que, dans des cas particuliers, on puisse dire: Bon, il est en formation professionnelle, il est en apprenti, l'école peut lui donner également de la formation générale pour compléter son cours? C'est l'exemple peut-être le plus précis que je peux vous donner à ce chapitre-là qui explique ce qu'on veut dire.

Pour ce qui est des critères d'inscription à l'école, vous me dites: Est-ce que le premier ne devrait pas être la proximité? Règle générale, c'est ça. Mais ce qu'on veut, c'est qu'il y ait un peu plus de souplesse, parce que... Bon, un autre exemple, c'est peut-être la meilleure façon de se comprendre. Une école primaire est dans un milieu en développement. On dit: Tous les enfants qui sont dans un rayon de 1 km vont à cette école-là, il n'y a pas besoin de transport, et le reste. Mais, l'année d'après, il s'en ajoute encore. Alors, là, le parent s'installe à 0,8 km, il dit: Moi, je veux être dans l'école – il y en a 50 parents comme ça – mon enfant devra être à cette école-là, c'est la plus proche; celui qui est à 1 km, envoyez-le ailleurs. Est-ce qu'on ne pourrait pas avoir un critère, dire que le jeune qui s'inscrit dans une école devrait pouvoir y compléter son cours primaire? Par exemple, pour ne pas dire que le petit, on va le déplacer d'une école à l'autre parce qu'il y en a toujours des plus proches qui viennent s'ajouter. C'est un exemple. Il peut y en avoir d'autres. Mais c'est des éléments comme ça où il faut être un petit peu plus attentif, surtout au niveau des écoles primaires, je pense que c'est important. Et s'il y a deux écoles qui sont collées l'une sur l'autre, est-ce qu'on va jouer pour un demi-point de kilomètre pour dire: Le mien est plus proche, je veux absolument qu'il aille à cette école-là? Qu'on ait un petit peu plus de souplesse. C'est dans ce sens-là qu'on souhaite qu'il y ait des critères.

Pour ce qui est de la formation de la main-d'oeuvre, des services aux entreprises, on sait qu'il y a beaucoup de commissions actuellement qui offrent des services aux entreprises dans le cadre de développement régional, et tout ça, et même des services à l'extérieur du pays – vous en connaissez comme moi. Et, dans la loi, il y a un article qui empêche, par exemple, la commission scolaire de désigner un organisme, ou, si elle le fait en collaboration avec le cégep, le personnel ne peut pas toujours nécessairement tout gérer ça, alors on met en place un organisme qui s'occupe de gérer. Et là il y a un article de la loi qui empêche que ça puisse être fait. C'est ce qu'on vous demande de regarder pour ne pas, je dirais, diminuer ces possibilités-là d'offrir des services au niveau des entreprises. C'est simplement, je dirais, pour des raisons d'efficacité qu'on vous le demande. C'était une orientation ministérielle il y a à peu près trois ans, du temps de Mme Robillard, je pense qu'on avait décidé d'aller dans ce sens-là, que les commissions pouvaient s'ouvrir.

Le rôle du Conseil supérieur de l'éducation. Écoutez, on a un conseil supérieur de l'éducation qui a pour mandat premier de conseiller la ministre. Vous mettez en place une commission et trois autres comités. Alors, est-ce que tout ça va rester en place? C'est des coûts, c'est des personnes qui dépensent beaucoup d'énergie. Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu de revoir? Est-ce que la ministre souhaite avoir plutôt des comités ou des conseils ad hoc que d'avoir un conseil qui est là en permanence? Est-ce que vous souhaitez autre chose? C'est ce qu'on vous demande de réviser tout simplement. On ne prend pas position, on vous demande d'étudier ça pour ne pas multiplier les commissions et les comités.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci.

Mme Marois: Ça va. Je reviendrai.

La Présidente (Mme Blackburn): Oui, peut-être en conclusion tout à l'heure, quelques minutes. M. le député de Marquette, la parole est à vous.

M. Ouimet: Merci, Mme la Présidente. Je salue la présidente de la Fédération des commissions scolaires et les personnes qui l'accompagnent. J'ai pris beaucoup de plaisir à vous entendre dans le cadre de la présentation de votre mémoire.

Je n'ai pas fait l'exercice, parce que c'est un exercice qui est quand même fastidieux, puis j'avais peu de ressources pour pouvoir le faire, mais je suis nettement sous l'impression que la décentralisation, elle s'est faite beaucoup en faveur de l'école, de la commission scolaire vers l'école. Mais, du ministère vers la commission scolaire, puis c'était, je pense, une de vos recommandations dans le mémoire sur l'avant-projet de loi ou, en tout cas, de l'Association québécoise des commissions scolaires... je n'ai pas vu véritablement de décentralisation du ministère vers les commissions scolaires. On dirait qu'ils ont oublié d'appliquer le principe au ministère. Mais j'ai vu une centralisation de pouvoirs qui étaient autrefois décentralisés vers les commissions scolaires, et là vous tentez de rétablir un certain équilibre à cet égard-là par rapport à des points bien particuliers.

Mais la première question que je vous pose, c'est: Avez-vous eu l'occasion de faire une comparaison entre l'actuelle Loi sur l'instruction publique et ce qui est prévu dans le projet de loi par rapport à la question de la décentralisation du ministère vers les commissions scolaires? Parce que, dans les cas que vous avez évoqués, la commission scolaire est beaucoup mieux placée pour faire des arbitrages, pour faire des choix, que le ministère de l'Éducation ou la ministre de l'Éducation. Ça, c'est une première question.

La Présidente (Mme Blackburn): Mme Drouin.

Mme Drouin (Diane): Oui, effectivement, M. Ouimet, vous avez raison. On a regardé – remarquez que le temps était très court également – et c'est ce qu'on déplore, que la décentralisation du ministère vers les commissions, elle est très restreinte et même, dans certains cas, on augmente. Et je vais vous donner quelques exemples très rapidement. On dit actuellement dans le projet de loi: L'adoption d'une politique de maintien ou de fermeture d'école par une commission scolaire est assujettie aux orientations que peut établir le ministre. Actuellement, la commission établit son plan ou sa politique de maintien. Il peut y avoir des conditions établies par le ministre. Une commission scolaire, par exemple, qui veut s'associer avec un collège pour fournir une formation collégiale ou le collège de la formation secondaire, devra également avoir une autorisation de la ministre.

Actuellement, une commission scolaire peut offrir des programmes d'études dans les métiers semi-spécialisés et délivrer une attestation d'études à l'étudiant. Maintenant, avec le projet de loi, la commission scolaire devra d'abord, avant d'offrir le programme, obtenir l'autorisation de la ministre. Alors, c'est des contraintes nouvelles.

J'ai parlé des écoles à vocation particulière, j'ai parlé d'une école qui veut mettre en commun de la formation, par exemple, avec le cégep. On connaît le CIMIC, en Beauce. On ne pourra plus faire ça par nous-mêmes avec nos partenaires. Il faut avoir l'autorisation de la ministre.

J'ai parlé du personnel en comptabilité, en éducation chrétienne. C'est exactement la même chose. On a des contraintes supplémentaires, et c'est ce qu'on veut que le ministère regarde, dans un contexte de décentralisation et de responsabilisation, qu'au moins la liste que je viens d'énumérer on y porte une attention spéciale parce que je pense que, si on veut faire confiance au milieu, c'est le moment où jamais de l'écrire.

La Présidente (Mme Blackburn): M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Oui. On dit souvent: On juge un arbre à ses fruits. Je n'ai pas l'impression que le discours a suivi. Par rapport aux commissions scolaires, c'est inquiétant de voir cela. Je ne sais pas si la ministre de l'Éducation a l'intention d'apporter des modifications majeures par rapport aux différents points qui ont été soulevés par les commissions scolaires, mais, si vous tenez un discours de décentralisation en faveur de plus de souplesse, de plus d'oxygène, etc., bien, il faudrait que ça s'applique de votre ministère vers les commissions scolaires pour des dossiers qui sont évoqués qui sont drôlement importants.

Je prends acte de votre demande, dans le fond, par rapport à... ou votre appui à la demande de la Fédération des comités de parents où les parents veulent être consultés sur deux questions importantes: la question du choix des manuels ou du matériel didactique et la question du bulletin scolaire. Je ne sais pas si on va réussir à renverser la vapeur à cet égard-là, mais il m'apparaît être drôlement important, votre appui.

Vous parlez aussi de la question des écoles à vocation particulière, et j'ai bien aimé vos propos quand vous disiez: «C'est comme si nous devions nous repentir de plusieurs de nos succès», et que vous avez réussi à mobiliser des élèves qui avaient du talent, à ramener des élèves qui avaient décroché. Vous vous êtes donné des projets éducatifs particuliers pour répondre à des problématiques que vous sentez sur le terrain dans votre milieu. Par la suite, tout ça risque d'être anéanti lorsque la ministre dit que, «dorénavant, et de façon exceptionnelle, je déciderai pour les milieux». Moi, ça m'inquiète grandement, et je sais que ça préoccupe ma collègue la députée de La Pinière qui pourra aussi vous adresser quelques questions relativement à l'impact de tout ça. Mais c'est fondamental, ça. C'est fondamental pour les commissions scolaires de pouvoir maintenir et conserver ce pouvoir-là.

La Présidente (Mme Blackburn): Mme Drouin.

(17 h 20)

Mme Drouin (Diane): Bon. Vous avez deux éléments. D'abord, au niveau des parents, effectivement, je pense que le projet actuellement n'empêche pas le directeur d'école de consulter. Mais, nous, ce n'est pas que le directeur peut, c'est que le directeur doit consulter. Ça doit devenir un objet de consultation du conseil d'établissement parce qu'il peut y avoir des directeurs d'école qui vont s'entendre avec le personnel et jamais ils ne consulteront les parents. Et on ne demande pas sur tout ce qui touche le domaine pédagogique. Mais, effectivement, les coûts des cahiers d'exercices, on le sait, à chaque année, ça revient, c'est les parents qui doivent les assumer. Alors, même si une méthode est très bonne, je pense que les enseignants ont le droit de s'exprimer là-dessus et de faire des recommandations, mais les parents doivent absolument au moins être consultés.

Et la même chose au niveau des modalités d'évaluation des apprentissages. Les modalités d'évaluation des apprentissages, c'est très vaste. L'enseignant, dans sa classe, peut décider, pour évaluer ses élèves au fur et à mesure, pour voir la progression de chacun des élèves, d'utiliser la méthode ou la modalité qu'il veut bien. Mais, le jour où il doit transmettre cette information-là aux parents via un bulletin, le parent devrait pouvoir se prononcer sur la forme que doit prendre le bulletin; pas nécessairement la méthode d'évaluation que l'enseignant prendra dans sa classe, ça, ça fait partie de l'autonomie professionnelle. Mais, quand vient le temps de livrer le message au parent, je pense que le parent est en droit de dire: Je veux avoir un bulletin que je suis capable de comprendre. Ça, ça m'apparaît déjà, au départ, important.

Pour votre deuxième sujet, les projets particuliers ou les écoles à vocation particulière, écoutez, je dirais à Mme la ministre que, si c'est vraiment une catégorie spécifique d'écoles que vous craignez, pourquoi ne pas le préciser dans la loi? On vous a parlé des CFER, de l'école du Bon Dieu, on vous a parlé de tous ces projets-là qui, je pense... Remarquez bien, le jour où il y aura demande de la part du conseil d'établissement, recommandation de la commission scolaire, comment la ministre sera placée pour refuser ça? Elle devra avoir de jolis arguments. Alors, à ce moment-là, pourquoi ne pas laisser ça au niveau de la commission et, s'il y a des choses spécifiques que vous craignez, bien, précisez-le tout simplement.

La Présidente (Mme Blackburn): M. le député de Marquette, encore à vous. Une question, ensuite, à votre collègue, Mme la députée de La Pinière.

M. Ouimet: Oui, dernière question, au niveau de la composition du conseil d'établissement. Dans le mémoire que vous aviez déposé sur l'avant-projet de loi, vous plaidiez à l'époque pour que les parents soient majoritaires au conseil d'établissement, tant au niveau primaire-secondaire. Je peux m'être trompé, je ne pense pas l'avoir vu dans votre mémoire sur le projet de loi. Est-ce que vous maintenez toujours le même appui aux parents, qu'ils soient majoritaires au conseil d'établissement?

Mme Drouin (Diane): Remarquez que, effectivement, nous avions demandé qu'ils soient majoritaires compte tenu que ça touche particulièrement les parents. J'ai eu des contacts avec le président de la Fédération des comités de parents qui, eux, pour le primaire, semblent satisfaits de ce qui est actuellement dans la loi à l'effet qu'ils soient présidents et avec un vote prépondérant. Je pense que les parents feront leurs propres consultations et vous donneront les résultats. Quant au secondaire, je sais que les parents souhaitent être en nombre égal aux représentants du personnel sans enlever le droit de vote aux étudiants qui pourront se ranger d'un côté ou de l'autre selon les sujets. Nous irions dans cette même proposition que le font les parents. Nous les appuyons dans leur demande à ce chapitre-là.

M. Ouimet: O.K. Merci.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, Mme Drouin. Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Oui, Mme la Présidente. Alors, Mme Drouin et les représentants de la Fédération des commissions scolaires du Québec, merci beaucoup pour le mémoire. Il était assez étoffé, très clair et limpide.

Je suis en effet très préoccupée par la question des écoles à vocation particulière. Il y en a dans mon comté et il y en a dans ma MRC, sur la rive sud de Montréal. J'ai reçu également de nombreuses représentations de la part des parents et de la part des élèves. Il y a, entre autres, le problème de l'École internationale de Saint-Hubert. Je reçois des lettres de jeunes qui me disent: Pourquoi la ministre veut-elle mettre la clé dans notre école? Je voudrais vous entendre sur ce point-là. Les écoles internationales, pour vous, est-ce que c'est un modèle qui devrait être consolidé et développé, ou si, comme on peut l'entendre de l'autre côté, notamment de la CEQ, et de la ministre aussi qui envoie des signaux dans ce sens, ou si c'est des choses, c'est un modèle qu'il faudrait limiter parce que c'est sélectif?

La Présidente (Mme Blackburn): Oui...

Mme Houda-Pepin: Excusez-moi, Mme la Présidente. Le deuxième aspect...

La Présidente (Mme Blackburn): En vous demandant un peu d'accélérer.

Mme Houda-Pepin: Oui.

La Présidente (Mme Blackburn): Je comprends que j'ai le douteux privilège de tenir l'ordre et de jouer la préfète de discipline.

Mme Houda-Pepin: Donc, il y a également un autre problème relié à des écoles à vocation particulière, par exemple, l'école Saint-Lawrence, qui a une clientèle francophone, anglophone et allophone, qui relève de la commission scolaire South Shore. Mais, avec les nouvelles divisions, il y a cinq écoles comme ça sur la rive sud de Montréal qui souhaiteraient, entre autres, une cohabitation entre les francophones et les anglophones. Comment vous voyez ça? Est-ce que c'est faisable? Est-ce que vous êtes favorables à ce genre de solution pour sauvegarder ces acquis et ces écoles-là qui ont développé des projets assez spéciaux?

La Présidente (Mme Blackburn): Mme Drouin.

Mme Drouin (Diane): Écoutez, au départ, les écoles à vocation particulière, j'y crois, et toutes nos écoles sont à vocation particulière, et je dirais que toutes nos écoles qui ont des projets particuliers, c'est pour répondre aux besoins des enfants. Et ce qui est important, c'est de répondre aux besoins des enfants et de développer le potentiel de chacun à son maximum. Même les écoles comme les écoles de raccrocheurs et les CFER, c'est des écoles sélectives parce qu'elles sélectionnent leur clientèle. Alors, là, on ne jouera pas sur les mots. Je pense qu'il ne faut pas se cacher non plus. Effectivement, il faut avoir des jeunes, des personnes qui répondent aux critères, aux besoins d'une école particulière ou d'un projet particulier. Quand même on ferait un programme sports-études, si le petit ne veut rien savoir des sports, il ne réussira pas là. Alors, on se comprend. Il y a toujours une sélection qui doit se faire et c'est pour répondre à des besoins. Alors, nous, on est d'accord avec ça. Et, effectivement, qu'il y ait des programmes dans toutes nos écoles, tant mieux, et, s'il y a une école, un bâtiment qui est vide, qui ne sert pas et qu'on désire instaurer un programme particulier, je pense que la commission est en mesure de juger et, par elle-même, de voir si cette école-là pourrait être utilisée à des fins comme celle-là, que ce soit pour des jeunes raccrocheurs ou autres clientèles.

Pour ce qui est de votre deuxième question, je la trouve très pointue. Remarquez qu'on tombe dans les commissions scolaires linguistiques. Alors, il y a une possibilité que des commissions scolaires puissent faire des ententes entre elles, mais je pense que ça demeure, à ce moment-là, vraiment très pointu. Il faudrait regarder de ce côté-là. Est-ce que c'est ce qui répond le mieux aux besoins des jeunes? Je pense que c'est toujours la question qu'il faut se poser.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, Mme Drouin. Quelques mots de conclusion, Mme la ministre.

Mme Marois: Oui, merci, Mme la Présidente. Je pense que Mme Drouin vient de faire une démonstration assez éloquente du fait qu'effectivement il y a dans nos écoles beaucoup de projets particuliers et il y a dans tous les cas des exigences qui sont posées qui amènent à orienter la sélection dans un sens ou dans l'autre. Et, dans le fond, ce qu'on a toujours dit sur cette question, ce que j'ai essayé de mieux camper, de mieux préciser, parce que ça m'a amenée, moi aussi, à faire une réflexion assez en profondeur, bien sûr, c'est le fait qu'il n'y ait pas de critères excessifs qui fassent en sorte que, par exemple, on exclut des jeunes de projets particuliers sur la base du seul critère de la note qui doit être en haut de 90 %, par exemple, alors qu'on sait qu'on demande à l'élève de réussir un cours, mais que, en même temps, s'il est très motivé, ça peut l'aider, dans le fond, à participer à un projet particulier, qu'il soit d'éducation internationale, d'arts-études ou autre. Alors, je pense qu'on s'entend bien là-dessus, puis nos débats ont permis de clarifier des choses.

Et, dans le fond, je le sais ce qui m'agace dans le fait qu'on dédie une école à un projet particulier, je le dis très simplement, c'est quand on fait une forme de ségrégation au sens où on dit: On va mettre tous les meilleurs ensemble ou ceux qui ont vraiment tous les problèmes ensemble. Et c'est là que j'avoue que je vis difficilement avec ça, pour toutes sortes de raisons, parce que la société, elle n'est pas bâtie comme ça. Par ailleurs, je suis allée, cette semaine, dans une école, et j'ai trouvé ça... J'y vais souvent puis j'espère y aller de plus en plus souvent – le temps m'a manqué un peu. Je suis allée, cette semaine, dans une école et c'était absolument fantastique de voir des jeunes de cinquième secondaire, oui, un peu plus talentueux, qui vont un peu plus vite, et qui supervisaient et aidaient des plus jeunes de premier ou de deuxième secondaire. Et l'aide qu'ils apportaient à leurs pairs, au sens de petits camarades, était tellement plus appréciée par les enfants qui étaient là que si, sans doute, ça avait été un parent qui était venu aider aux devoirs, aux leçons ou à autre chose, parce que ce n'est jamais pareil, ton ami ou ton aîné de quelques années qui vient t'aider. Et si ces enfants-là, on les met dans une école à part et qu'ils ne sont pas avec l'école normale, l'école du quartier, bien, on les perd. Pour ce type d'activité là, entre autres, je pense que c'est un enrichissement pour l'école. Mais il faut se préoccuper du fait que certains d'entre eux sont plus talentueux et qu'on doit autant les accompagner qu'on accompagne des enfants en difficulté.

Alors, c'est simplement ce que je voulais partager avec vous. Je vous remercie pour votre présence et votre intervention, et on va tenir compte de bon nombre de vos remarques que vous nous avez faites, d'autres où je pense que vous savez aussi où on va et on va les confirmer.

Mme Drouin (Diane): Une courte conclusion, Mme la Présidente, si vous le permettez.

La Présidente (Mme Blackburn): Une remarque de l'opposition, brève également, et la vôtre ensuite.

Mme Drouin (Diane): O.K. Ça va.

M. Ouimet: Oui, je voulais juste remercier la présidente de la Fédération des commissions scolaires pour son mémoire. Petite inquiétude: le temps file rapidement, la ministre offre de vous voir pour clarifier certaines choses, mais il reste moins de deux semaines avant l'adoption en Chambre de ce projet de loi. Il y a au moins deux projets de loi importants devant notre commission, 166, 180. Où va-t-on trouver le temps pour faire tous ces arbitrages?

Mme Marois: Ne vous inquiétez pas!

(17 h 30)

M. Ouimet: Bien, c'est justement, c'est ça qui m'inquiète. Et sur la question de la ségrégation, il faudrait que la ministre et les membres de son cabinet prennent connaissance de l'étude de Douglas Willams, qui avait été déposée dans le cadre d'un colloque à Montréal, qui prévoit précisément que la limitation géographique qu'elle veut implanter dans les écoles accroît la ségrégation beaucoup plus que l'éliminer. Alors, je l'invite à en prendre connaissance, puis elle va vite se rendre compte que ça va à l'encontre du discours qu'elle tient. Merci.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien. Alors, Mme Drouin...

Mme Drouin (Diane): Je veux simplement vous dire, il y a toujours des exceptions, bien sûr, mais le succès, souvent, de nos écoles des raccrocheurs, c'est parce qu'ils se retrouvent ensemble et non pas avec d'autres. Parce que cette école-là ne leur convenait pas. Alors, c'est une exception, mais c'est une école particulière.

Mme Marois: Oui.

Mme Drouin (Diane): Et, en conclusion, depuis que les autres groupes avant nous sont passés, vous avez dit à peu près à chacun: On écoute et, si on peut resserrer, on le fera. Moi, je vais vous dire pas trop, laissez-un petit peu...

Mme Marois: Ha, ha, ha! Vous l'aimez, malgré tout, notre projet de loi.

Mme Drouin (Diane): ...de latitude. Ne resserrez pas trop.

Mme Marois: D'accord.

Mme Drouin (Diane): Faites confiance aux gens.

Mme Marois: Merci.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, Mme Drouin. M. Provencher, M. Dolbec, Mme Drouin, M. Caron et Mme Dolbec, merci, au nom des membres de la commission, de votre participation aux travaux de cette commission.

Alors, nous suspendons, le temps que les personnes quittent la table et que le prochain groupe, c'est-à-dire l'Association provinciale des enseignantes et enseignants protestants du Québec, prenne place.

(Suspension de la séance à 17 h 31)

(Reprise à 17 h 32)

La Présidente (Mme Blackburn): Mesdames, messieurs, nous reprenons, tel qu'annoncé, avec l'Association provinciale des enseignantes et enseignants protestants du Québec. J'accueille en votre nom la présidente Mme Langelier et M. Lombard. Vous avez 15 minutes pour la présentation, suivies de 30 minutes pour l'échange avec les membres de la commission. Alors, nous vous écoutons.


Association provinciale des enseignantes et enseignants protestants du Québec (APEPQ)

Mme Langelier (Jan): Merci. Justement, on aimerait vous remercier de nous recevoir. Vous allez être obligés de nous écouter. Comme une autre fois, quand on s'est présenté, on n'a pas de mémoire, mais on n'a aussi pas beaucoup de choses à vous présenter aujourd'hui.

En général, on a eu une réaction assez favorable à ce projet de loi. On est content de constater qu'il y a certaines clarifications qui répondent à des questions qu'on avait soulevées, justement pendant la phase de consultation sur l'avant-projet de loi. Par exemple, l'autonomie professionnelle, on trouve que ça se trouve bien ciblé, bien arrangé. Le curriculum national aussi, ça nous convient. L'autorité de la commission scolaire en matière de gestion des ressources humaines, on trouve aussi que ça été resserré comme on aurait voulu.

Au niveau des écoles sélectives aussi, on est prêt à accepter que les balises maintenant incluses dans la loi puissent contrôler d'une certaine façon la multiplication d'écoles sélectives. Mais on va continuer à avoir des soucis à propos de ces écoles sélectives exceptionnelles. On avait soulevé justement nos inquiétudes de problèmes liés à des écoles trop sélectives, surtout dans la région de Montréal, où on peut trouver des gens par exception dans une école genre ghetto à cause d'écoles sélectives. Nous, ce qu'on cherchait, c'était d'avoir une ou des balises qui pourraient nous rassurer sur ça. On n'est pas complètement satisfaits, mais, d'un autre côté, on va veiller à ce que ces écoles sélectives exceptionnelles ne se multiplient pas trop. On pense que, dans la plupart des écoles de quartier, on est capable d'offrir des services à l'intérieur d'une même école pour justement répondre aux besoins des élèves. Et puis, à l'intérieur d'une école, on peut avoir des projets spécifiques pour répondre à certains niveaux de problèmes particuliers dans une école. On a quand même un certain nombre de questions ou de problématiques encore à soulever avec vous. En premier, j'aimerais demander à mon collègue M. Lombard de vous parler de nos inquiétudes au niveau des conseils d'établissement.

M. Lombard (Alan): Quand on scrute la loi, on trouve que le conseil d'établissement, pour le secteur des jeunes, est passablement satisfaisant, on trouve que c'est équilibré. Et, certaines de nos inquiétudes, surtout la possibilité que des conseils dans des quartiers moins aisés aient de la difficulté de fonctionnement, je pense que c'est une bonne solution de trouver un comité paritaire qui va sûrement alimenter le travail de ce conseil-là.

On se demande pourquoi, cependant, dans le secteur des adultes ou de la formation professionnelle, on ne pourrait pas arriver à une formule paritaire également. Nous signalons qu'après notre présentation lors de la commission parlementaire sur l'avant-projet de loi, tout de suite après, nous sommes allés à une conférence de l'OCDE et on a appris que l'expérience de certains autres pays, en l'occurrence la Nouvelle-Zélande, avec des conseils d'établissement qui n'étaient pas équilibrés, s'est avérée difficile, ça n'a pas fonctionné, dans plusieurs milieux. Et le gouvernement a été obligé à même une espèce de mise en tutelle de plusieurs conseils qui n'étaient pas équilibrés. Donc, on trouve qu'il y a une bonne possibilité que la formule que nous trouvons dans la loi ou que la loi telle que proposée puisse fonctionner facilement.

Mme Langelier (Jan): Deuxièmement, sur le financement, on continue d'avoir les mêmes inquiétudes, que ce soit à l'intérieur de la loi ou que ce soit à l'intérieur de la situation économique qu'on connaît. Et c'est pour ça qu'on continue à avoir de très graves problèmes avec une idée de financement qui pourrait faire en sorte que l'équité dont on est si fier à travers la province de Québec... Et même, on avait soulevé, lors de la dernière présentation, qu'on peut avoir une certaine fierté d'avoir gardé une équité assez bien à travers la province. Puis on trouve qu'avec certaines décentralisations de pouvoirs ça, ça devient peut-être un problème.

Si on met ça en lien avec l'idée des fondations, on trouve qu'il y a peut-être un certain bon sens dans ce qui est proposé. Mais ce qu'on trouve, c'est qu'il reste encore un certain problème au niveau de certaines écoles qui vont avoir plus de possibilités de recueillir des fonds à travers une fondation que d'autres. Et comment ça va être équitable à travers la province? On se le demande. Et surtout dans un contexte où on a des coupures partout, on a des graves inquiétudes à travers ça. On ne voudrait pas perdre l'équité qu'on a à l'intérieur de notre système d'éducation actuel. Puis, via les choses de fondation, on trouve là un certain problème, cette possibilité-là. D'un autre côté, c'est peut-être mieux d'avoir certaines balises à l'intérieur de la loi. Je ne sais pas. Il me semble que c'est juste une inquiétude que ça devienne une source de financement privé pour des écoles publiques. Moi, c'est ça qui m'inquiète.

En dernier lieu, deux petits commentaires supplémentaires, qui sont très petits. Le premier, c'est la modification de l'article 22, où on ajoute l'obligation de collaborer à la formation des futurs enseignants. On accepte que ça doit faire partie de notre responsabilité professionnelle, mais on ferait le point que c'est mieux de respecter la décision individuelle et volontaire de quelqu'un de bien vouloir accepter une nouvelle enseignante ou une stagiaire à l'intérieur de sa classe. Si on commence à faire une obligation de cette chose-là, peut-être qu'on va perdre une certaine qualité au niveau de cette intervention-là. Alors, on se pose la question: Est-ce que c'est vraiment nécessaire de l'inclure?

Deuxièmement, c'est dans la section IV, direction d'école et fonctions, où on parle, à l'article 96.15, au niveau des besoins de perfectionnement puis qu'il revient au conseil d'établissement d'établir ces besoins-là. Nous, on se dit: Cette affaire-là, ça devrait être les enseignantes et les enseignants qui décident eux autres mêmes c'est quoi, leurs besoins en perfectionnement. On n'a pas besoin d'aller dans un conseil d'établissement pour ça. Et puis, avec ça, je pense que je pourrais terminer et puis vous écouter au niveau de vos questions.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien, Mme Langelier. Mme la ministre.

(17 h 40)

Mme Marois: Alors, merci beaucoup, Mme la présidente. Je suis très heureuse de vous entendre. Et ce n'est pas parce que vous n'avez pas de papier à nous présenter que vous n'avez pas des choses à nous dire. Et, je pense, c'était assez évident dans votre intervention et intéressant aussi. Je comprends, dans le fond, que vous nous dites: On est assez à l'aise et on est assez d'accord avec le projet de loi, mais faites attention, ici, là, il y a des risques. Alors, je vous entends bien. Et je pense que ça rejoint aussi vos collègues, qui sont venus, de la CEQ, cet après-midi, de même que d'autres intervenants, qu'il s'agisse des parents ou même de la Fédération des commissions scolaires.

Moi, je veux revenir sur la constitution du conseil d'établissement. Parce que, sur celui-là en particulier, vous dites: Dans le cas des jeunes, ça nous va; c'est quand on arrive au conseil d'établissement soit du centre de formation professionnelle ou du centre d'éducation des adultes. En fait, l'économie qui est derrière ça – l'économie, au sens de l'organisation générale de ces articles-là – c'est de nous assurer qu'il y ait vraiment des élèves qui soient présents, bien sûr – parce qu'il s'agit la plupart du temps d'adultes ou de jeunes adultes – et qu'il y ait aussi des gens des milieux socioéconomiques. Parce qu'on sait entre autres que – dans le cas de la formation professionnelle, c'est particulièrement vrai – il y a des liens à établir avec les entreprises du milieu, qui vont définir leurs besoins, qui vont identifier aussi quelles sont les améliorations qu'on doit apporter pour assurer les liens entre l'école et le monde du travail, même si l'école ne doit jamais oublier sa mission première qui est de former et de donner la base à tous ceux et celles qui la fréquentent.

Alors, qu'est-ce que vous souhaiteriez que l'on modifie ou qu'est-ce qui ne vous convient pas dans ce qui est proposé au conseil d'établissement dans sa composition et sa formation? Je pense qu'on a ça à l'article 102. Parce qu'on dit: Des élèves élus par leurs pairs; au moins quatre membres du personnel du centre, dont au moins deux enseignants; deux personnes nommées par la commission scolaire, mais qui viennent des groupes socioéconomiques ou communautaires; deux parents d'élèves dans les centres de formation professionnelle; deux personnes nommées par la commission scolaire et choisies au sein des entreprises.

La Présidente (Mme Blackburn): Oui, alors, M. Lombard.

M. Lombard (Alan): C'est surtout à l'article 103...

Mme Marois: O.K.

M. Lombard (Alan): ...où on dit: «Le nombre total de postes [...] du personnel ne doit pas être supérieur...» Nous, on croit qu'il serait peut-être plus heureux de parler d'un équilibre ou de parité pour le personnel, comme c'est le cas pour les jeunes. Ce n'est pas pour enlever des personnes, mais c'est...

Mme Marois: D'accord. Mais vous souhaiteriez qu'il y ait plus de personnel, dans le fond, que ce qui est prévu actuellement.

M. Lombard (Alan): Exact.

Mme Marois: D'accord. Je comprends bien votre propos. Sur la question du financement, je ne répéterai pas longuement ce que j'ai dit tout à l'heure à vos collègues de la CEQ. Nous voulons vraiment que l'État québécois assume sa responsabilité, en termes de ressources à rendre disponibles pour que le projet éducatif soit supporté par les fonds publics. Je pense que c'est très clair. Et c'est vrai que je suis préoccupée, bien sûr, par le fait qu'on ait à baliser les fonds qui pourraient être mis en place et qui existent déjà. Ils existent déjà, vous le savez, vous êtes dans les écoles, alors vous les connaissez, ces fonds-là, probablement mieux que moi encore.

Maintenant, est-ce que vous auriez, sur ces balises-là, des recommandations particulières à nous faire ou des commentaires plus précis ou plus pointus que ce que vous nous avez apporté comme commentaires généraux? Parce que, je suis d'accord aussi, je ne veux pas que finalement on abandonne nos responsabilités comme État à l'égard de la mission éducative et qu'on se dise: Bien, que les gens se débrouillent et puis qu'on laisse se privatiser le système. Et ce n'est pas ça, la perspective qu'on a.

La Présidente (Mme Blackburn): Mme Langelier.

Mme Langelier (Jan): Je pense qu'où on a une inquiétude, c'est à l'article 92. C'est là-dedans qu'on parle que ces fonds-là pourraient être là pour aider à la réalisation du projet éducatif de l'école; ça en mène large, ça. Et puis, c'est justement, un projet éducatif particulier, disons, d'une école sélective d'une telle façon va accueillir un certain attrait pour le monde des affaires ou le monde général qui supporte cette école-là, tandis qu'une autre école – je ne sais pas – à Saint-Henri ou quelque part, n'aura pas cette même façon d'accueillir. Ça fait que, quand on parle de projet éducatif, ça fait un lien avec toute l'idée des écoles sélectives aussi. Puis c'est là qu'on voit qu'il va y avoir des développements d'écoles spécifiques puis très différentes d'autres, au niveau même du financement. Comment vous allez régler ça? Je ne sais pas. Je ne peux pas vous demander autre chose que de regarder ça. Nous, on soulève cette crainte-là, que ça va devenir des petites écoles nanties et d'autres écoles très, très pauvres.

La Présidente (Mme Blackburn): Mme la ministre?

Mme Marois: Ça va.

La Présidente (Mme Blackburn): Ça va aller? M. le député de Marquette et porte-parole officiel de l'opposition en matière d'éducation. M. le député.

M. Ouimet: Merci, Mme la Présidente. Bienvenue à Mme Langelier et à M. Lombard. Je voulais revenir sur toute la question du financement des écoles, les articles 88 à 89. Vous évoquez le risque de créer un système à deux vitesses. Vous évoquez le risque que sont les articles 88 et suivants, d'une école à deux vitesses, d'un système à deux vitesses. Est-ce qu'on devrait maintenir les articles 88 et suivants? Parce que ça ouvre la porte à certains risques. La CEQ parlait de graves dangers et suggérait, je pense, d'attendre qu'on ait un débat public sur de telles questions avant de les implanter dans un projet de loi. Parce que ça n'a jamais fait l'objet d'un débat public. Moi, je n'ai pas entendu un seul groupe, dans le cadre de l'avant-projet de loi, venir demander de tels articles. Comme la CEQ disait, ça ne sortait de nulle part. Alors, les intentions ministérielles deviennent quelque peu suspectes, à ce moment-là. Ça n'a été demandé par aucun des groupes; ça a été proposé par la ministre de l'Éducation. Et ça nous inquiète lorsqu'on voit les dangers et les risques que ça va créer. J'aimerais entendre l'avis des enseignants par rapport à la réalité de leur milieu.

La Présidente (Mme Blackburn): Mme Langelier ou M. Lombard? M. Lombard.

M. Lombard (Alan): Oui, en réalité, on partage ces craintes. On a vu apparaître l'article, on s'est demandé pourquoi. Nous, on avait signalé, lors de notre première présentation, des inquiétudes par rapport à un certain financement, ou demander des fondations, créer toutes sortes de formes de recherche d'argent dans les écoles, et puis on a vu apparaître...

Il y a du bon dans ce que nous avons vu. Parce qu'une des difficultés, c'est le fait que, ces fondations, l'argent est ramassé par des groupes, par des parents, par des sous-comités. C'est géré par qui? On ne le sait pas. La loi indique que ça devrait être la commission scolaire. Si des fondations doivent exister, quelqu'un devrait avoir la responsabilité de gérer au moins les fonds. Ça, ça peut être positif, si on accepte le fait que ces fondations-là existent.

Nous avons beaucoup d'inquiétudes, cependant, parce que nous sommes conscients que, dans certains endroits, des fondations existent pour justement bâtir des gymnases, vraiment faire des travaux qui, nous croyons, devraient être subventionnés par l'État et non pas par des groupes de parents, des compagnies qui peuvent se permettre d'investir dans une école, dans un quartier et, bien sûr, pas dans un autre quartier. On comprend qu'il y ait un certain équilibre à l'intérieur d'une commission scolaire, mais on se demande... Entre une commission scolaire à Montréal et une commission scolaire en Gaspésie, il n'y a pas d'équilibre. La possibilité d'aller chercher les fonds nécessaires pour construire, que ce soit un gymnase ou un laboratoire en Gaspésie, ça n'existe pas. Donc, on croit qu'il y a anguille sous roche, possiblement, ici.

On peut nous dire que, bien sûr, l'État devrait assurer, l'État voudrait assurer, mais nous sommes conscients aussi qu'il y a des coupures. On vit des coupures tout le temps. Il y a des compressions dans tous les budgets. Et c'est une réaction assez normale, je crois, on le vit dans les écoles, d'aller se chercher de l'argent ailleurs. C'est malsain, de notre point de vue.

La Présidente (Mme Blackburn): M. le député.

M. Ouimet: De mémoire, c'était la CSN qui l'avait invoqué dans son mémoire, dans l'avant-projet de loi, que c'était suspect, à un moment où il y a des compressions budgétaires importantes. Et on annonce une nouvelle compression budgétaire de 2 % qui s'en vient. On sait les effets dramatiques que ça va avoir à nouveau dans les écoles primaires et secondaires par rapport aux services qu'on doit offrir aux élèves. La ministre dit non. Alors, la ministre dit que les compressions de 2 % n'auront pas...

Mme Marois: Non. Il interprète, Mme la Présidente. Il prend pour acquis qu'il va y avoir des compressions...

M. Ouimet: Non, mais, écoutez...

Mme Marois: ...en dehors du fait qu'on ait un gel budgétaire.

M. Ouimet: On a mal lu les journaux.

La Présidente (Mme Blackburn): Mme la ministre, vous aurez l'occasion de donner un avis avisé.

Mme Marois: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Blackburn): M. le député.

M. Ouimet: La ministre pourra prendre l'engagement que c'est fini, les coupures en éducation. L'occasion lui est offerte de dire: Fini les coupures en éducation! Mais je reviens...

(17 h 50)

La Présidente (Mme Blackburn): Vous avez une question, M. le député?

M. Ouimet: Oui, j'avais une question et j'ai été interrompu, Mme la Présidente. La CSN disait que c'était suspect, qu'à la fois il y avait un désengagement de l'État pour le financement des services publics et qu'à la fois on ouvre la porte à ces mécanismes-là: prolifération de fondations partout. Moi, je vous signale que d'autres projets de loi aux niveaux collégial et universitaire favorisaient la création des fondations. Et, à un moment donné, il faut commencer à s'interroger: l'impact que ça va avoir dans certains milieux.

Moi, je pense à mon comté, à la ville de Saint-Pierre, par exemple. Ce n'est pas évident qu'à la ville de Saint-Pierre, compte tenu que c'est un milieu qui n'est pas favorisé, l'école, le conseil d'établissement qui voudrait peut-être mieux outiller les enfants en matière d'ordinateurs va pouvoir y arriver, alors que, dans d'autres milieux, les parents vont dire: Il n'y a pas de problème, on va s'occuper d'une levée de fonds et on va réussir à atteindre des ratios intéressants pour que – je ne sais pas, moi – on puisse avoir trois élèves, cinq élèves par ordinateur. Et ça, ça va être possible dans des milieux, mais ça ne sera pas possible dans d'autres milieux. Et on sait que ça va être possible dans les milieux mieux nantis, favorisés, mais que ça ne sera pas possible dans des milieux défavorisés.

Et c'est là qu'on voit s'implanter un système à deux vitesses, à tous égards, au niveau de choses pour lesquelles le gouvernement retire son financement. Mais des parents vont être prêts à mettre la main dans leur poche, puis à payer des fonds pour ces choses-là, alors que d'autres parents ne seront pas en mesure. Et, tranquillement, pas vite, le désengagement de l'État va se poursuivre, et il va pouvoir dire: Écoutez, dans des milieux, les parents ont pris le relais, donc on sent moins le besoin de financer ces choses-là. Alors, il est là, le risque. Et le risque, c'est qu'on n'a pas fait de débat public autour de ces questions-là.

Il y a peut-être des resserrements par rapport à des situations qui existent sur le terrain présentement. Oui, il faut resserrer ça. Oui, il faut voir maintenant à avoir un meilleur encadrement par rapport à des levées de fonds qui sont effectuées. Mais là on ouvre la porte très, très grande. Alors, moi, il me semble qu'on devrait attendre, avoir un débat public, puis par la suite prendre une décision. Mais, la ministre, ce n'est pas le choix qu'elle a fait. La ministre a fait le choix d'insérer ça dans le projet de loi parce qu'on semble pressé de faire en sorte que les contribuables, les parents prennent le relais pour financer des choses qu'autrefois l'État finançait.

Alors, je me demande si vous partagez cette analyse du risque potentiel qui est là, qui frappe à notre porte, alors que ça fait deux, trois ans qu'on vit des compressions budgétaires sans précédent. À moins que la ministre fasse une déclaration, aujourd'hui, qu'il n'y aura pas de compressions budgétaires lors du dépôt des prochains crédits. Là, ça va me rassurer.

La Présidente (Mme Blackburn): Mme Langelier.

M. Ouimet: J'écouterais ses propos.

Mme Langelier (Jan): On partage ces craintes, mais on pense aussi, vu qu'il existe déjà de ces situations-là qui ne sont pas contrôlées, on voit une nécessité de justement resserrer ça pour ne pas que ça parte sans aucun contrôle. Mais on voit très bien ce que vous décrivez, et c'est notre peur, c'est exactement ce qu'on vous dit. Puis on le dit depuis le début, c'est que, dans tout ça, toute décentralisation qui se fait dans un contexte de compressions budgétaires, on a peur de ce que ça peut avoir comme effet sur l'équité puis sur la qualité des services qu'on donne à nos élèves à travers la province, dont on devrait être fiers. Alors, nous, on est très, très inquiets par la situation économique qui affecte nos classes, c'est sûr.

La Présidente (Mme Blackburn): Oui, M. Lombard.

M. Lombard (Alan): Je voudrais tout simplement ajouter qu'on partage les craintes, surtout parce que nous sommes également membres de la Fédération canadienne des enseignants et, en jasant avec d'autres collègues dans d'autres provinces et dans les États, aux États-Unis, on découvre que cette idée de fondation et d'aller chercher auprès des parents l'argent pour faire fonctionner l'école, c'est généralisé et ça se généralise ailleurs. On a déjà de l'expérience, dans d'autres provinces, de ce type de financement, suite à des compressions budgétaires, bien sûr.

La Présidente (Mme Blackburn): Dans les autres provinces, ce financement sert à quoi, dans les cas où vous avez pu observer que ça se pratiquait?

M. Lombard (Alan): Ça sert surtout pour les ordinateurs. Ça, c'est toujours à la mode.

La Présidente (Mme Blackburn): Oui.

M. Lombard (Alan): Quand on parle de plus gros sous, on parle de gymnases, on parle de constructions, on parle de laboratoires pour les sciences. Et, malheureusement, c'est rendu à un point tel que, je ne dirais pas dans toutes les autres provinces, mais aux États-Unis, ça sert à de l'engagement d'enseignants.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien. Merci. Quelques mot de conclusion, M. le député de Marquette? Puis ensuite, Mme la ministre.

M. Ouimet: Remercier Mme Langelier et M. Lombard. Vos propos sont toujours bien appréciés, votre éclairage. Je vous remercie de votre contribution très positive à l'avancement de nos travaux. Merci.

La Présidente (Mme Blackburn): Mme la ministre..

Mme Marois: Alors, je vous remercie à mon tour, et souhaite qu'effectivement nous trouvions ensemble des façons de baliser des outils, enfin, des réalités qui sont déjà là. On les connaît. Et, en ce sens, vous avez raison de dire: Mieux vaut peut-être, à ce moment-là, et je peux comprendre vos inquiétudes, mais faire en sorte que nos inquiétudes, on puisse les canaliser dans un resserrement, si on veut, de certaines règles pour justement éviter de tomber dans ces craintes que vous exprimez. Et je suis d'accord avec vous parce que je pense que l'État doit rester responsable de ce qui concerne sa mission fondamentale qu'est la mission d'éducation de l'école. Les services de base, le curriculum, les services complémentaires, je crois que ça doit impartir au budget de l'État. Mais nous savons aussi que beaucoup d'activités qui se mènent en périphérie de l'école et qui sont intéressantes pour la dynamique de l'école le sont grâce à des contributions volontaires de personnes qui croient à leur école. Et je pense qu'il faut être capable d'encadrer le tout, pour ne pas que ça nous mène à l'école à deux vitesses, et que ce soit bien utilisé aux fins pour lesquelles on veut que ça le soit.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, Mme la ministre.

Mme Marois: Alors, merci beaucoup pour votre présentation.

La Présidente (Mme Blackburn): Mme Langelier, un mot de conclusion?

Mme Langelier (Jan): Tout petit, juste pour vous remercier de votre écoute attentive et puis aussi pour vous dire que je pense qu'on vous a ramenés à l'heure dans vos horaires.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Marois: C'est absolument exceptionnel. Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Blackburn): Nous vous en savons gré. Je voudrais vous dire que votre présentation, bien qu'étant verbale, est allée, je pense, à l'essentiel de ce que vous vouliez nous communiquer. Vous avez, je pense, su sensibiliser les membres de cette commission. Alors, Mme Langelier, M. Lombard, merci de votre participation aux travaux de cette commission.

Les travaux sont suspendus jusqu'à 20 heures, dans la même salle.

(Suspension de la séance à 17 h 59)

(Reprise à 20 h 11)

La Présidente (Mme Blackburn): Mesdames, messieurs, Mme la ministre, M. le porte-parole officiel de l'opposition en matière d'éducation, membres de la commission, nous allons reprendre nos travaux et, tel que prévu à l'agenda, nous entendrons maintenant la Fédération des comités de parents du Québec. J'inviterais ses représentants à prendre place. Alors, nous avons plaisir à vous retrouver. Je vous souhaite la bienvenue à cette commission. Comme vous connaissez bien les règles, vous nous présentez les personnes qui vous accompagnent et vous avez une vingtaine de minutes pour la présentation de votre mémoire suivie d'une période d'échanges avec les membres de la commission. Alors, la parole est à vous, M. Stronach.


Fédération des comités de parents de la province de Québec (FCPPQ)

M. Stronach (Gary): Merci, Mme la Présidente. Je suis accompagné ce soir par Mme Nicole Bherer, première vice-présidente.

La Présidente (Mme Blackburn): Bonsoir, madame.

M. Stronach (Gary): En arrière, M. Jude Bourke, directeur des services administratifs, et Mme Marie Blouin, conseillère en communication.

La Présidente (Mme Blackburn): Bonsoir.

M. Stronach (Gary): Nous allons partager la présentation. De prime abord, je voudrais remercier M. Mathieu, secrétaire de la commission, pour tout ce qu'il a fait pour nous permettre d'être ici ce soir. Il en a fait beaucoup pour nous. J'en avais parlé à M. Ouimet et au cabinet de Mme la ministre, puis, avec le consentement des professeurs protestants qui ont accepté de changer avec nous, ça m'a permis d'être avec vous ce soir.

La Présidente (Mme Blackburn): M. Comeau va transmettre vos remerciements à M. Mathieu.

M. Stronach (Gary): Merci beaucoup.

Dans notre présentation, nous posons, premièrement, la question: L'engagement parental est-il menacé? Cette question traduit bien l'état d'esprit des parents à la lecture du projet de loi n° 180 modifiant la Loi sur l'instruction publique déposé en novembre par la ministre, Mme Pauline Marois. En effet, la Fédération des comités de parents s'estime plus ou moins satisfaite de ce projet, même si elle se réjouit que la loi donne plus de pouvoirs aux écoles. Certains articles sont très préoccupants pour l'engagement et la survie même des parents dans la cause scolaire. La Fédération fait référence particulièrement à la représentation minoritaire des parents au conseil d'établissement de l'ordre d'enseignement secondaire.

La Fédération reconnaît toutefois l'obtention de certains gains appréciables comme l'immunité des parents qui exercent leur rôle de bonne foi dans le conseil d'établissement, la reconnaissance du substitut du parent au sein du comité de parents et la représentation nouvelle au comité de parents d'un parent du comité consultatif des services aux élèves handicapés et aux élèves en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage.

Nous avons observé des pertes. En ce qui a trait à la composition du conseil d'établissement au secondaire, l'article 42, nous réclamons pour les parents du conseil d'établissement au secondaire qu'ils soient paritaires aux autres représentants et représentantes qui ont un droit de vote. Un calcul rapide de la situation observée démontre qu'à ce niveau il peut y avoir aussi peu que deux parents qui siègent. Pourquoi le gouvernement donne-t-il la parité aux parents du conseil d'établissement au primaire et non au secondaire? Nous comprenons mal les raisons de cette différence entre les deux ordres d'enseignement. L'école reproche aux parents de se délester de leurs responsabilités. La non-reconnaissance de la parité des parents au conseil d'établissement au secondaire vient renchérir leur déresponsabilisation. Comme premiers éducateurs de leurs enfants, ce sont les parents qui doivent être en nombre égal aux autres représentants et représentantes et non l'inverse.

Pour ce qui est des fonctions et pouvoirs du directeur d'école, la Fédération réclame que le conseil d'établissement soit consulté sur des sujets comme le choix du matériel scolaire et du matériel didactique, les normes et modalités d'évaluation des apprentissages de l'élève et pour les règles de classement des élèves. Les parents sont les premiers concernés par des décisions à incidence financière. Il est donc tout à fait normal que leurs représentants puissent se faire entendre. Pour assurer le principe de la gratuité scolaire, la Fédération estime important d'aller au-delà des mots, tel que stipulé à l'article 7 de la Loi sur l'instruction publique.

Dans un autre ordre d'idées, la Fédération rappelle sa reconnaissance du professionnalisme des enseignants et des enseignantes dans le domaine pédagogique, sauf qu'elle tient, là aussi, à ce que les représentants et représentantes des parents soient entendus.

Mme Bherer (Nicole): Quant à l'approbation par le conseil d'établissement de la programmation des activités éducatives, la Fédération réclame le maintien intégral de l'article 78 de la Loi sur l'instruction publique actuelle en faisant les adaptations nécessaires, à savoir: «Le conseil d'établissement approuve la programmation proposée par le directeur de l'école des activités éducatives qui nécessitent un changement à l'horaire habituel des élèves ou un déplacement de ceux-ci à l'extérieur de l'école.» Le conseil d'établissement, où siègent les parents en parts égales, doit approuver ou non les diverses activités qui risquent de modifier les cours réguliers et d'influencer la réussite éducative des élèves.

Le conseil d'établissement et l'acte d'établissement. La Fédération réclame, comme la loi actuelle le stipule pour le nombre de comités d'école, que l'acte d'établissement qui met plus d'un immeuble à la disposition de l'école puisse se subdiviser en plusieurs conseils d'établissement si tel est le choix exprimé par les parents en assemblée générale. L'acte d'établissement qui met plus d'un immeuble à la disposition de l'école doit bénéficier d'un nombre équivalent de conseils d'établissement, et ce, pour correspondre adéquatement aux besoins de la communauté au regard du projet éducatif. Ignorer cette réalité, c'est restreindre la participation parentale. À ce sujet, les expériences qui ont été vécues dans les conseils d'orientation n'ont pas été probantes justement parce qu'on regroupait des écoles sous un même acte d'établissement. Ce qui arrivait, c'est qu'on avait seulement des parents d'un même édifice qui participaient puis les autres laissaient tomber. Il n'y avait plus de participation.

Fonctions et pouvoirs reliés aux services éducatifs. La Fédération réclame que l'article 83 se lise comme suit: «Le conseil d'établissement détermine – au lieu de «approuve» – l'orientation générale de l'école en vue de l'enrichissement ou de l'adaptation par les enseignants et les enseignantes des objectifs et des contenus indicatifs des programmes d'études établis par le ministre et en vue de l'élaboration de programmes d'études locaux pour répondre aux besoins particuliers des élèves.» Je dois noter ici que Mme la ministre, le 25 novembre, nous a dit que «approuver» voulait dire «décider». Si c'est ça, nous achetons. Mais, dans le passé, elle nous a dit que «approuver», ce n'était pas ça que ça voulait dire. Dans cette section, on constate qu'il n'existe aucune possibilité pour les membres du conseil d'établissement d'émettre des propositions. Donc, comment peut-on encourager la participation des membres s'ils ne sont pas sollicités à émettre des points de vue parfois différents mais tellement enrichissants pour toute la communauté?

Au comité de parents, la Fédération réclame l'abolition de substituts pour les commissaires représentant des parents. Nous voyons un problème parce que le conseil des commissaires est un corps politique. Les commissaires élus au suffrage universel n'ont pas de substitut. Dans la pratique, comment la commission scolaire pourra-t-elle gérer efficacement cet élément? L'assermentation? La rémunération? Le huis clos?

Le comité consultatif des services aux élèves handicapés et aux élèves en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage. La Fédération réclame pour ce comité la tenue d'une assemblée générale annuelle des parents d'élèves EHDAA pour que ceux-ci élisent, parmi eux, les parents membres du comité consultatif et que les parents membres de ce comité élisent un substitut au représentant au comité de parents. Le phénomène de la confidentialité actuellement, puis qui continuera de demeurer, rend excessivement difficile la désignation par le comité de parents des membres parents au comité EHDAA. L'ouverture de la loi permet de remédier à cette situation. La Fédération considère important que le représentant du comité consultatif des services aux élèves handicapés et en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage, tout comme le représentant des parents de l'école au comité de parents, ait, lui aussi, son substitut.

(20 h 20)

M. Stronach (Gary): En conclusion, la Fédération des comités de parents représente les intérêts de tous les parents qui s'investissent sans compter dans la cause scolaire. Le projet de loi présenté en novembre par la ministre de l'Éducation vient compromettre leur engagement puisqu'ils agissent davantage comme des administrateurs d'un conseil d'administration. Les préoccupations majeures des parents sont bien différentes des nouveaux pouvoirs que leur accorde le projet de loi n° 180. Rappelons qu'ils sont davantage attentifs à ce qui touche directement l'élève, sa vie en classe et à l'école. La compétence parentale est un atout certain pour l'école et pour tous ses partenaires. Reconnaître la compétence parentale, c'est valoriser la présence des parents, stimuler leur engagement et s'assurer de leur contribution à la réussite du plus grand nombre d'élèves.

Mme Bherer (Nicole): Je dois dire que nous apprécions aussi la place accordée aux parents dans les comités ministériels. C'est un signe qu'on reconnaît l'expertise des parents. Par contre, au conseil d'établissement, est-ce que les pouvoirs qu'on donne... la question qu'on doit se poser tout le monde: Est-ce que ces pouvoirs-là, ça va vraiment changer l'école? Est-ce que ça va vraiment améliorer les apprentissages ou aider les parents à suivre leurs enfants dans leur réussite? Parce que ce qui les intéresse, les parents, est-ce que c'est les questions administratives ou si ce n'est pas plutôt la réussite de leur enfant puis les problèmes qu'il vit, la relation maître-élève?

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, Mme Bherer et M. Stronach. La parole est maintenant à Mme la ministre.

Mme Marois: Alors, je vous remercie pour votre mémoire. Cela vient s'ajouter, Mme la Présidente, d'ailleurs, à des recommandations ou à des communications que l'on m'a transmises aujourd'hui, entre autres du comité de parents de la Commission des écoles catholiques de Québec qui nous dit qu'on est particulièrement satisfait... «Nous sommes très satisfaits d'un certain nombre de modifications et nous croyons...» Bon, enfin, on appuie, on dit: «Je tiens à vous transmettre l'appréciation de l'exécutif du comité de parents de la Commission des écoles catholiques de Québec face au projet de loi n° 180. Nous sommes très satisfaits des modifications suivantes. Nous croyons que ces points plus particulièrement démontrent l'intérêt que vous donnez au point de vue présenté par les représentants des parents lors des audiences publiques et sommes assurés que vous prendrez en compte nos recommandations ci-jointes qui rejoignent un certain nombre de vos recommandations.» Et il y a la Fédération des comités de parents de l'île de Montréal qui, sans équivoque, nous donne aussi un appui au projet de loi n° 180.

Alors, je suis très heureuse de pouvoir lire cela et de pouvoir recevoir aussi vos commentaires. Je pense que ce que vous nous proposez est intéressant. Je vous le dis, comme je l'ai dit à d'autres groupes qui sont venus, nous étudierons chacune des propositions. Déjà, mon équipe a commencé aujourd'hui, au fur et à mesure qu'on reçoit les mémoires parce qu'on veut procéder quand même avec célérité... donc, au fur et à mesure que nous recevons les mémoires, on procède à l'analyse et on voit ce qu'il sera possible de recorriger à nouveau dans le projet de loi.

Par ailleurs, j'aimerais questionner un certain nombre des commentaires que vous faites. Dans le fond, vous terminez votre mémoire sur une note un peu critique, mais, en même temps, si, par exemple, on retenait – je ne dis pas qu'on le fera, il faut être clair – mais, si on retenait l'ensemble des recommandations que vous faites... Vous dites: Nous sommes déjà quand même satisfaits de certains avancements dans le projet; ce que nous vous proposons, si vous le reteniez – je me mets dans votre peau, si vous le reteniez – on serait particulièrement satisfaits. On va essayer d'en retenir un certain nombre. On ne pourra pas tout retenir, c'est évident. Il y a toujours cet équilibre un peu souhaitable, et même nécessaire en fait.

Toute la question de «approuve», ou de «décide», ou de «recommande», moi, sur ça, je veux être au clair: «approuver» peut vouloir dire, au contraire, «refuser». Quand on a la possibilité de refuser, ça veut dire qu'on a un pouvoir de décision. Et «approuver» ne dit pas «j'appose ma signature en bas d'un document sans le questionner, sans proposer des modifications». Alors, pour moi, cela va de soi. On l'a expliqué longuement à des gens avec lesquels nous avons discuté, des commissions scolaires, des directions d'école; on vous l'a dit aussi, à vous, à d'autres reprises, et je tiens à le reprendre ici. Pour moi, c'est fondamental parce que, sans ça, vous auriez raison de mentionner que ça ne va pas assez loin.

Par ailleurs, je veux revenir sur la constitution du conseil d'établissement. Effectivement, au primaire, je pense que vous êtes d'accord et vous êtes à l'aise. Vous dites que c'est au secondaire où les représentants des élèves, vous les placez, dans le fond, du côté des représentants du reste... c'est-à-dire, des représentants qui ne sont pas les parents, alors que, nous, on identifiait le fait que les élèves étant utilisateurs de l'école, étant vos enfants, étaient davantage du côté des parents. J'aimerais encore vous entendre sur ça. Je veux essayer de me laisser convaincre. Mais il y a une chose, je ne voudrais pas qu'on augmente le nombre. Je pense qu'on est au maximum puis je ne crois pas qu'il soit souhaitable d'aller au-delà du nombre qui est là. Donc, ça voudrait dire, si on acceptait votre proposition ou votre recommandation, qu'il faudrait modifier un petit peu l'équilibre pour redonner pleine parité aux parents au niveau du secondaire, étant entendu que, pour nous, je vous le dis, on le percevait comme étant cette parité qu'on accordait, associant les élèves à la représentation des parents.

La Présidente (Mme Blackburn): M. Stronach.

M. Stronach (Gary): De prime abord, je vous dirais que ça semble être très logique. Vous avez ceux qui donnent les services puis ceux qui utilisent les services.

Mme Marois: C'est ça.

M. Stronach (Gary): Ceci étant dit, il y a d'autres réalités. C'est que, souvent, les parents auront à trancher sur des sujets où les élèves pourront être tenus, disons, entre les deux groupes. Par exemple, on parle – je sais que ça a fait la manchette depuis une couple de semaines – on va prendre les voyages à l'école. Et les enfants, les élèves les plus impliqués, ils veulent y aller. Les parents le voient d'un autre oeil. Ce n'est pas toute la clientèle de l'école qui a la possibilité de. Ça fait que ce serait un sujet où, peut-être, les élèves auront un parti pris.

On va prendre un autre exemple qui se vit concrètement lors des réunions de comités d'école et de conseils d'orientation. Sachant que la plupart de ces réunions-là se font les soirs de semaine, nous plaçons dès le début de la rencontre la place pour que les élèves puissent venir donner leur rapport et quitter pour retourner faire des choses comme des devoirs ou d'autres choses. Donc, il y aura une partie de la rencontre où les usagers de l'école seront paritaires, mais, au bout d'une demi-heure, trois quarts d'heure, ils seront minoritaires. Vous savez comme moi que, souvent, les comités d'école se réunissent jusqu'à 22 h 30, 23 heures, 23 h 30. C'est connu. Mais les jeunes, normalement, à 21 heures, 21 h 30... On les place à l'ordre du jour assez tôt pour qu'ils puissent partir vers les 19 h 45, 20 heures, 20 h 15. Donc, ce serait débalancé pour la fin de la réunion.

On ne veut pas enlever le droit de vote aux élèves puis on ne veut pas rajouter d'autres membres. On dit: qu'ils soient comme les membres de la communauté qui ne sont pas comptés dans le nombre, mais qu'on respecte que les élèves, ils sont là avec leur droit de vote; ils comptent toujours dans le maximum de 20. Mais que les parents soient paritaires avec le personnel de l'école. Donc, on n'enlève rien. Il y en a qui pourront dire que les élèves auront quand même la balance du pouvoir avec leurs deux votes. Ça, on en convient, on ne veut pas leur enlever. Mais, en temps normal, vous auriez une parité entre le personnel de l'école et les parents. Et les élèves, on ne leur enlève rien. Loin de nous de leur enlever le droit de vote. Parce que ça va brimer leur participation au sein du conseil et on veut vraiment que les élèves y participent.

La Présidente (Mme Blackburn): Mme Bherer, vouliez-vous ajouter autre chose?

Mme Bherer (Nicole): Non, ça va.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien. Merci. Mme la ministre.

Mme Marois: Je veux revenir maintenant sur le point 4 puis, après ça, je vais aborder une question que vous n'abordez pas dans votre mémoire, mais que d'autres abordent, entre autres, la Fédération des comités de parents de l'île de Montréal. Le conseil d'établissement et l'acte d'établissement, c'est-à-dire le point 4 de votre mémoire qui concerne les articles 39 et 42. On dit: «La Fédération réclame, comme la loi actuelle le stipule pour le nombre de comités d'école, que l'acte d'établissement qui met plus d'un immeuble à la disposition de l'école puisse se subdiviser en plusieurs conseils d'établissement si tel est le choix exprimé par les parents en assemblée générale.» L'interprétation, nous, qu'on donne actuellement, c'est qu'effectivement chaque bâtisse pourrait avoir et devrait normalement avoir son conseil d'établissement même si... Je vais donner l'exemple de petites écoles – ça apparaît toujours assez clairement à ce moment-là. Une petite école dans un village reçoit les enfants de première, deuxième et troisième année et le village à côté reçoit les enfants de quatrième, cinquième, sixième. Moi, je vois très bien – et c'est comme ça que j'interprète la loi – qu'on ait un conseil d'établissement pour chaque école.

M. Stronach (Gary): Si c'est votre interprétation, ça, on l'achète.

Mme Marois: Je n'erre pas, là.

Mme Bherer (Nicole): Mais je dois vous dire...

La Présidente (Mme Blackburn): Mme Bherer.

Mme Marois: C'est ça, il y a deux conseils d'établissement, deux écoles. Mais c'est deux écoles...

Mme Bherer (Nicole): C'est parce que, actuellement...

Mme Marois: ...et c'est donc deux actes d'établissement. Il faudrait qu'à ce moment-là il y ait deux actes d'établissement et, donc, ça veut dire deux conseils d'établissement. On se comprend. Par ailleurs, certains parents voudraient pouvoir, j'imagine, dans certains cas, dire: Bon, nous... Mettons dans un quartier. Prenons une ville à ce moment-là. Mettons qu'on est dans un quartier puis on dit: Là, c'est vraiment parce que l'école n'a pas la capacité de recevoir tous les enfants. Et on comprend que, dans mon premier exemple, évidemment, c'est parce qu'il n'y avait pas suffisamment d'enfants pour remplir toute une école puis on devait charrier tout le monde. Là, on dit: On est dans un quartier puis on doit utiliser ce qu'on appelle souvent, à Montréal, l'annexe, l'école annexe; elle est une rue à côté ou elle est... c'est ça, quelques rues à côté. Mais les parents disent: Bien, nous, là, c'est une école qui va de maternelle à sixième, on veut avoir un conseil d'établissement même si on est dans deux bâtisses. Ce serait possible aussi, on se comprend.

(20 h 30)

Et là l'acte d'établissement reconnaîtrait qu'on couvre tout le cycle du primaire, qu'il y a un conseil d'établissement pour ces deux bâtisses. Mais, si l'acte d'établissement est demandé et souhaité pour dire: Parce qu'on a, dans deux écoles, une partie du premier cycle puis l'autre partie du deuxième cycle, c'est possible aussi. C'est comme ça que j'interprète la loi. Mais c'est ça que vous souhaitez?

Mme Bherer (Nicole): C'est ça.

Mme Marois: D'accord.

Mme Bherer (Nicole): C'est parce que, actuellement...

Mme Marois: Mais vous ne voulez pas empêcher le fait, cependant...

Mme Bherer (Nicole): Non.

Mme Marois: ...qu'on puisse avoir un conseil d'établissement pour deux bâtisses...

Mme Bherer (Nicole): Non. C'est ça.

Mme Marois: ...si jamais c'était souhaitable.

La Présidente (Mme Blackburn): Mme Bherer.

Mme Bherer (Nicole): Oui. C'est parce que, actuellement, il y a un gros lobby qui se fait par les commissions scolaires et par les directions d'école pour avoir un acte d'établissement par direction d'école, parce qu'on est en train d'étudier les plans triennaux des commissions scolaires et on fait un lobby pour justement regrouper. Et l'expérience qui a été vécue avec les conseils d'orientation ne fonctionnait pas du tout quand on regroupait plusieurs villages autour d'un même conseil d'orientation.

Mme Marois: C'est ça.

Mme Bherer (Nicole): Si on avait quatre villages, il y en avait un ou deux qui participaient puis les autres ne participaient pas du tout. Ils avaient des problèmes au niveau du projet éducatif. C'était énorme.

Mme Marois: C'est ça. Bon. Alors, on se comprend bien, et là je me suis assurée, j'ai bien vérifié auprès de mes légistes et c'est la bonne interprétation.

M. Stronach (Gary): Mme la ministre, juste sur le même point.

Mme Marois: Allez-y donc. Oui, je vous écoute.

M. Stronach (Gary): C'est parce qu'il y a un élément qui va au-delà de ça, là. C'est que, avec la Loi sur l'instruction publique, même s'il y avait juste un conseil d'établissement, il y avait toujours un comité d'école, il y avait toujours un délégué au comité de parents. Mais là, si nous regroupons pour fins de conseil d'établissement...

Mme Marois: Oui, je comprends.

M. Stronach (Gary): ...ces parents-là sont totalement isolés, même du comité de parents de la commission scolaire. Donc, plus important que jamais de leur permettre de se regrouper.

Mme Marois: C'est ça. Alors, on se comprend. Mais je veux apporter une précision, cependant. On a la situation où, dans une même bâtisse, on a du secondaire, on a une formation professionnelle et de l'éducation des adultes et, dans ce cas-là, cela prendra trois conseils d'établissement. Parce que, justement, on veut instituer des établissements spécifiques et des institutions spécifiques selon qu'on s'occupe du secondaire, de la formation professionnelle ou de l'éducation des adultes. Alors, on se comprend bien là, pour que l'interprétation soit claire. Mais ce que vous présentez comme situation est tout à fait la bonne interprétation de la loi et c'est possible. Et je comprends que les parents puissent parfois se désintéresser parce que, finalement, c'est trop loin, un comité prend un peu le dessus sur l'autre, etc. Alors, on s'entend bien sur ça, et c'est très clair pour nous, et le fait de le dire ici... d'ailleurs, c'est enregistré, ça se retrouvera au Journal des débats , ça pourra servir d'interprétation. Mais on va très bien clarifier ça au niveau des commissions scolaires.

Une question que vous n'abordez pas et qui est cette fameuse question des fonds, hein. La Fédération des comités de parents de l'île de Montréal, à laquelle vous appartenez, je pense, M. le président, n'est-ce pas, nous dit: «Nous vous rappelons, Mme la ministre, que, depuis de nombreuses années, les comités d'école et les conseils d'orientation gèrent les fonds ainsi accumulés par les parents», parce que nous savons qu'il y en a et c'est justement parce que nous savons qu'il y en a que nous voulons un peu les encadrer. Ce qu'on nous dit ici, ce n'est pas qu'on ne les veut plus, ce n'est pas qu'on ne veut pas les utiliser, on dit: «Cet article laisse craindre aux parents une limitation dans la capacité d'effectuer les levées de fonds et de disposer des profits qui en sont issus pour des fins d'activités dans le cadre de vie de l'école de leurs enfants.»

Notre intention est très claire là aussi, mais j'aimerais vous entendre d'abord sur la question des fonds elle-même et sur notre intention qui est que le fonds qui va être ramassé par les parents serve pour cette école et non pas que la commission scolaire puisse piger dans ce fonds-là. La seule distinction qu'on fait, c'est que la gestion de ce fonds serait assurée par la commission scolaire pour éviter justement d'avoir à mettre un fardeau administratif inutile sur le dos du conseil d'établissement. Mais l'objectif n'est absolument pas qu'on départisse l'école de son fonds. Je sais qu'il y a des discussions; il y a d'autres organismes qui sont moins d'accord avec ça. On essaiera de bien baliser, quand même, ces fonds-là. Je pense qu'il y a peut-être matière encore à resserrer. Mais on veut que ça reste à l'école. Alors, par contre, vous n'en parlez pas dans votre mémoire.

M. Stronach (Gary): Non, je peux vous dire...

La Présidente (Mme Blackburn): M. le président.

M. Stronach (Gary): Merci, Mme la Présidente. C'est une question qui m'a surpris. C'est que, tout de suite après le dépôt de l'avant-projet de loi, j'ai eu l'occasion de fréquenter plusieurs colloques et j'admets, pas comme président de la Fédération, comme parent d'un comité d'école, comité de parents, que ça me chicotait un peu de voir le contrôle de ces fonds-là, de ces comptes-là devenir des postes budgétaires au niveau de la commission scolaire. Je peux vous dire que ça n'avait pas l'air à offusquer plus que ça les autres parents. Moi, ça m'offusquait plus. Le fait que le comité n'aurait plus son compte de banque, moi, ça porte atteinte à mes droits, je croyais, mais les autres parents me disaient que non, c'est déjà une situation qui se vit.

Les activités de levée de fonds, ça existe depuis fort longtemps, ça va toujours exister. J'en ai déjà acheté, des palettes de chocolat, puis j'en ai déjà vendu.

Mme Marois: Moi aussi.

M. Stronach (Gary): J'en ai vendu. Ce qui inquiétait les parents, c'était de savoir, puis je pense que la loi va un peu plus loin en disant que ça va être affecté à l'école en question... ils craignaient que les fruits de ces activités-là, au niveau de la commission scolaire, ils n'auraient plus le droit de regard. Il y en a, au niveau de l'île, qui allaient aussi loin que de dire: Est-ce qu'on doit instituer, dans la communauté anglophone, les «home and school»? Est-ce qu'eux autres pourraient s'occuper de faire des activités de levée de fonds? Est-ce que l'organisme de participation des parents pourrait faire les activités? Nous, en discussion puis en comité plénier, à l'Île, on a quand même convenu que c'est la responsabilité du conseil d'établissement et, si les balises étaient bien respectées, ça va continuer, mais c'était juste d'être sécurisés, à savoir où allait l'argent.

Mme Marois: O.K., ça va. Et je pense que je vous sécurise, puis on le fera davantage s'il le faut.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, madame. Oui, Mme Bherer.

Mme Bherer (Nicole): Sur ce sujet-là, moi, j'ai eu des questions aussi d'autres parents qui disaient: Souvent, on fait des levées de fonds pour des raisons bien précises, par exemple, pour acheter des livres de bibliothèque ou pour des activités de l'école; si on fait une levée de fonds pour tel montant pour la bibliothèque, on affecte le reste, on décide nous-mêmes. Là, le problème... c'est qu'ils voyaient comme un problème, c'est que l'école déciderait comment ce serait affecté. Mais, si c'est affecté à l'école même, c'est peut-être moins problématique.

Mme Marois: C'est ça, et c'est l'objectif, c'est la perspective. Certains les craignent un peu. On peut essayer de resserrer, de bien baliser pour ne pas faire dire n'importe quoi à ça, mais c'est vraiment ça que l'on veut. D'accord?

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, Mme la ministre. La parole est maintenant au député de Marquette. M. le député.

M. Ouimet: Merci, Mme la Présidente. Bienvenue, M. Stronach, Mme Bherer. Peut-être une petite question d'intendance. Je demanderais à la ministre si elle aurait la gentillesse de déposer l'avis qu'elle a reçu, parce que les membres de la commission n'ont pas reçu le même mémoire, de la Fédération des comités de parents de l'île de Montréal. Je suis convaincu que ça va lui faire grandement plaisir.

Mme Marois: Certainement, avec plaisir. On va s'assurer que les copies soient faites.

M. Ouimet: Pour que nous puissions tous avoir les mêmes documents.

La Présidente (Mme Blackburn): J'ai celui de la CECQ ici.

M. Ouimet: Je suis un peu surpris, M. Stronach. Dans votre mémoire au niveau de l'avant-projet de loi, dans le mémoire de la Fédération des commissions scolaires, dans le mémoire de la Fédération des directeurs et directrices d'établissement scolaire, je pense que même le mémoire de la Fédération des cadres scolaires, on appuyait l'idée que les parents soient majoritaires au conseil d'établissement. Ça, c'était l'avant-projet de loi, avant que les choses soient bien campées. Ce soir, en prenant connaissance de votre mémoire et pour en avoir discuté avant ça avec la Fédération des commissions scolaires, on est rendus à demander la parité.

J'ai l'impression qu'il est survenu quelque chose dans le processus. Je ne sais pas s'il y a eu un processus de négociation intense ou du tordage de bras, mais j'étais étonné de voir qu'on partait avec plusieurs partenaires avec une majorité. Moi, j'étais prêt à plaider fortement pour que les parents demeurent majoritaires au conseil d'établissement. Là, on en est rendus à la parité. Je ne sais pas si la ministre va accéder à votre demande par rapport à l'école secondaire. Mais, juste pour ma compréhension, qu'est-ce qui s'est passé qui justifie aujourd'hui que la demande que vous faites n'est pas du même degré que la demande qui avait été faite dans l'avant-projet de loi?

La Présidente (Mme Blackburn): M. le président.

(20 h 40)

M. Stronach (Gary): Je vous dirais que, premièrement, pour ce qui est des directeurs d'école, j'ai ici ce que Guy Lessard m'a envoyé, puis il me parlait des points qu'il était pour soulever dans la loi, il a dit: Doit-on demander que le nombre de parents soit toujours égal à celui des membres du personnel? Donc, leur orientation, c'est bien de suivre la nôtre, à savoir que... Nous autres, ce qu'on n'avait pas, c'est que le libellé avait changé. Là, c'était «le personnel égal» au lieu de «parent égal». Mais toute la problématique, je pense, dans les commentaires qui ont été émis lors de notre dernière représentation ici, c'est: Est-ce que la participation des parents a maturé depuis 1972? On est quand même conscients que, si on demande, comme c'était le cas au conseil d'orientation, que les parents soient au moins en nombre égal... N'oublions pas qu'au niveau du conseil d'orientation – c'est une demande que nous avons faite pour assurer que les parents avaient au moins un nombre égal, sinon pas une majorité... nous n'avions pas le vote prépondérant. Le vote prépondérant fait en sorte que demander une majorité voudrait dire qu'on serait un de plus, plus un vote prépondérant, ce qui voudrait dire que, même en l'absence d'un parent, le président pourrait exercer son vote prépondérant. Les parents ont compris. Les endroits où les conseils d'orientation n'ont pas bien fonctionné, c'étaient des endroits où deux professeurs se présentaient; six, sept, huit parents. Les jeux étaient faits. On se réunissait pour de la «réunionite» quasi.

On dit: Avec la dynamique des conseils d'établissement, en vrai partenariat, on n'acceptera jamais de se faire enlever notre droit de vote prépondérant, là, mais que l'équité fera en sorte que les parents, au moins en nombre égal, lors d'une question où il faudrait que ce soit tranché, le président étant un parent... ça nous a été donné... Ce qui n'était pas là dans l'avant-projet de loi, nous l'avons gagné dans le projet de loi puis, avec la présidence assurée, nous serions prêts à ce moment-là à être en nombre égal avec le vote prépondérant. Si c'est ça, le tordage de bras, c'est le crayon qui nous a tordus, le crayon qui a écrit l'article. On a gagné la présidence, donc on pouvait se permettre à ce moment-là de revenir à l'équité.

La Présidente (Mme Blackburn): M. le député.

M. Ouimet: Vous ne craignez pas, dans certains milieux, le fait que les parents soient peut-être moins disponibles pour les réunions, ce qui ferait en sorte que, oups! vous perdez à ce moment-là le vote prépondérant.

M. Stronach (Gary): Honnêtement, je vais vous dire que la lutte, si on peut l'appeler ainsi – les conseils d'établissement – va se faire bien plus au Conseil des commissaires qu'au conseil d'établissement. Le Conseil des commissaires détermine le nombre et le nombre de postes. Un coup le nombre de postes déterminé, il relève, à ce moment-là, des individus de combler ces postes-là. Nous allons demander que les commissions scolaires soient très ouvertes dans le nombre de postes qu'elles vont allouer à chaque conseil d'établissement. Si on dit que c'est quatre, ou cinq, ou six «personnel» et six parents, ce sera de la responsabilité des parents de cette école-là de trouver six parents pour combler ces sièges-là, comme ça relèvera du personnel enseignant de combler les six postes pour le personnel. J'ai amplement confiance que les parents vont pouvoir plus combler les postes que le personnel enseignant.

M. Ouimet: O.K.

M. Stronach (Gary): On est habitués à faire du bénévolat.

La Présidente (Mme Blackburn): M. le député.

M. Ouimet: Oui. Au niveau de l'article 83, et vous y faites référence au point 5 de votre mémoire, la Fédération réclame que l'article 83 se lise comme suit: «Le conseil d'établissement détermine – au lieu de «approuve» – l'orientation générale...» Ce n'est pas clair, là, le sens de «approuver» au lieu de «déterminer», à qui revient le pouvoir. Mais vous savez comme moi, l'article 87 est là également, tout va partir à la base, la proposition qui sera élaborée par les enseignants ou les membres du personnel de l'école. Et là la proposition, elle est élaborée, et là elle va monter tranquillement. On peut prendre pour acquis qu'avec le jeu de l'article 96.10, par exemple, le directeur d'école va y donner son assentiment. De telle sorte que mon inquiétude, c'est que... Lorsque ça va arriver au conseil d'établissement, l'inquiétude que j'ai, c'est que les décisions auront été pas mal prises et que le risque, c'est que le conseil d'établissement n'aura qu'à estampiller une décision déjà prise à la base, puisque d'autres personnes l'auront élaborée, et puis, par la suite, les appuis, ils les auront obtenus en fonction de l'adoption ou de l'approbation par le conseil d'établissement. Puis ce n'est pas sur rien, là.

Lorsqu'on regarde tous les pouvoirs qui sont prévus aux articles 82, 83, 84, 85 et suivants, il y a quand même des pouvoirs importants au niveau d'une école. Et j'avais la même préoccupation par rapport à l'article 96.10 où, là, si ma compréhension est bonne, ça ne monte pas au conseil d'établissement, c'est le directeur d'école ou la directrice d'école qui prend la décision. C'est élaboré, il y a une décision qui est prise. On peut bien dire que, dans les faits, peut-être, ils vont vous consulter, mais, si ce n'est pas prévu dans la loi, peut-être qu'ils ne le feront pas non plus.

M. Stronach (Gary): Je partage votre interprétation – d'ailleurs, c'est le bien-fondé de notre demande – qu'au niveau de l'article 83 le conseil d'établissement détermine, approuve, risque d'estampiller ce qui est proposé par la direction d'école après consultation du personnel. Nous disons que, si le conseil d'établissement a à approuver les règles générales de l'école, on devrait faire partie du processus. Donc, on voudrait déterminer. Si ce n'est que des balises générales pour l'école, on devrait être déterminant là-dedans. Et là, quand on retourne à 96.10, le premier alinéa, où la direction d'école, suite aux critères établis par le conseil d'établissement, travaille avec le personnel enseignant, là je veux bien, mais le conseil d'établissement aura déterminé les balises, pas juste approuvé.

On travaille à la détermination de l'orientation générale de l'école; dans le cadre de cette orientation, M. le directeur, allez voir les représentants du personnel enseignant et trouvez les spécificités, les modalités, dans le cadre de ce que nous avons décidé. Au-delà de ça, nous demandons quand même, à 96.10, que le directeur d'école, après consultation du conseil d'établissement, approuve. On ne lui enlève aucun pouvoir. On reconnaît le droit de gérance de l'administrateur sur l'école. Mais on dit: Après consultation, là, approuvez, approuvez, faites ce que vous avez à faire, M. le directeur; mais on vous donne les balises larges, vous travaillez avec les enseignants, vous déterminez les modalités, vous revenez, vous dites: Ce sont les modalités, je vous annonce ce qui s'en vient, qu'est-ce que vous en pensez? Et là, lui, il approuve. On ne demande pas d'être décisionnel.

La Présidente (Mme Blackburn): Mme Bherer.

Mme Bherer (Nicole): Oui. Entre autres, par rapport au matériel didactique – on l'avait souligné dans l'avant-projet de loi – par rapport au matériel périssable, par rapport aussi aux normes d'évaluation des apprentissages... parce que, dans les normes, les modalités d'évaluation des apprentissages, il faut comprendre qu'il y a aussi les bulletins scolaires, puis les bulletins scolaires, c'est l'information aux parents. Je pense qu'un bulletin, il faut savoir... on se sent informé par ça, donc il faut absolument au moins l'avoir vu et avoir donné notre opinion. C'est peut-être des détails, mais, dans l'ancienne loi, on consultait le comité de parents là-dessus, puis le comité de parents, dans plusieurs cas, se donnait le mandat d'aller consulter les comités d'école.

Donc, c'est des choses qui affectent directement aussi la relation entre le parent et l'enfant, sa collaboration au niveau de sa réussite, quant au classement. Parce que, si on a un plan d'intervention, on va demander... on a le droit de dire si on va le faire soit rester dans la même année ou... la question de la dérogation. Je pense que ces règles-là, au niveau de la consultation ou, à tout le moins, pour donner des opinions qui vont enrichir justement le débat... Parce que, actuellement, ce sont des choses, justement, qui permettent aussi des concertations puis des consensus.

La Présidente (Mme Blackburn): M. le député.

M. Ouimet: Oui, parce que M. Stronach parlait de consulter, avant qu'il approuve, le directeur ou la directrice d'école... de consulter le conseil d'établissement. Moi, j'aurais plutôt pensé que vous souhaiteriez avoir le même pouvoir que vous aviez dans la Loi sur l'instruction publique, c'est-à-dire que les parents soient consultés et non pas que le conseil d'établissement soit consulté sur ces choses précises là. Parce que ça permet, dans un premier temps, lorsque ça remonte au conseil d'établissement, eux l'ont déjà, les autres membres du personnel ou le personnel enseignant... l'a déjà élaboré.

C'est sûr que, s'ils l'ont élaboré, au conseil d'établissement, ils vont pousser très fort pour que ça soit adopté ou approuvé par le conseil d'établissement. Surtout à la lumière du fait qu'il y a des pouvoirs exclusifs dans cette affaire-là pour les enseignants, et pour les membres du personnel, et pour la direction d'école, mais il n'y a pas de pouvoirs exclusifs pour les parents, je m'étais dit: Peut-être le pouvoir exclusif qui pourrait être réservé aux parents, c'est le pouvoir d'être consultés. Ce n'est pas un gros pouvoir, mais, à tout le moins, l'obligation de consulter les parents sur ces questions-là qui vous préoccupent.

La Présidente (Mme Blackburn): M. Stronach.

M. Stronach (Gary): O.K. Sauf que, si on se met à scinder le conseil d'établissement pour des objets de consultation, on perd toute la notion de la collégialité, la raison d'être du conseil d'établissement. C'est très difficile de consulter les parents du conseil d'établissement sans consulter les autres. Puis on veut savoir ce que pensent les enseignants. Ils ont parlé à la direction d'école, mercredi passé. Mais là on voudrait savoir... que les enseignants qui siègent avec nous nous expliquent le bien-fondé des modalités qui ont demandé que le directeur approuve.

(20 h 50)

Nous, comme parents, si on veut, on peut demander, si on a formé l'organisme de la participation, d'aller consulter ces parents-là. C'est une forme de responsabilisation. Mais, nous aussi, on y a pensé, mais on dit: Si on consulte juste les parents, on va se réunir une demi-heure avant; tout ce qui était prévu pour le rôle du conseil d'établissement tombe à l'eau. Il faut qu'on soit ensemble, il faut que le même discours soit tenu devant tout le monde, puis on veut que les gens participent, puis on a avantage à entendre... Parce que ce n'est pas nécessairement les enseignants qui siègent avec nous au conseil d'établissement qui étaient les plus partie prenante dans les décisions du directeur; ils sont à la remorque, pareils comme nous. Mais là, à la table, on échangerait ensemble. C'est dans ce sens-là.

La Présidente (Mme Blackburn): Une autre question, M. le député?

M. Ouimet: Sur la composition du conseil d'établissement, ça va. Une question qui a été soulevée dans un autre mémoire, c'était: À la lumière des articles 88, 89 et 92, est-ce que la commission scolaire doit tenir compte dans sa répartition des ressources financières des sommes d'argent qui ont été recueillies par le conseil d'établissement, non pas dans le cadre de l'article 92, mais davantage dans le cadre des articles 88 et 89, c'est-à-dire lorsqu'on exige une contribution financière? Vous souhaitez que ça demeure à l'école sans que la commission scolaire puisse en tenir compte lorsqu'elle établit sa répartition?

La Présidente (Mme Blackburn): M. Stronach.

M. Stronach (Gary): O.K. Là, il y a deux sujets: l'un, ce sont les fruits des activités de levée de fonds, et l'autre, 88 et 89, c'est des services qui sont offerts et ce que nous chargeons.

M. Ouimet: C'est ça.

M. Stronach (Gary): Je pense que, connaissant les règles du jeu dès le début, on est très conscients que, si on offre un service et on facture, et il y a des recettes, il y a cause et effet. On leur a donné les services; donc, au niveau de la comptabilité, en anglais, tu as du «in» et tu as du «out». Ça fait qu'il faudrait comprendre que oui, c'est pris à même le budget de l'école, mais les recettes vont à la commission scolaire, et qui seraient affectées, amputées du budget de l'école; amputées du budget de l'école, mais l'école aura déjà procédé à payer ces services-là. Ça fait que je pense que le fait que... Il faudrait regarder le conseil d'établissement à ce moment-là en étant des gens qui sont prêts à assumer des responsabilités, à offrir des services, sachant que tout ce qui va être chargé, s'il y a charge... Moi, je ne suis pas sûr qu'il va y en avoir tant que ça, parce qu'ils vont être obligés d'être... il va falloir qu'ils considèrent les autres parents qui sont derrière, pas juste les quatre, cinq, six ou sept qui siègent à la table. Mais, s'ils entreprennent de négocier une entente avec quelqu'un de l'extérieur, à ce moment-là, que les montants soient imputés du budget, oui, dans le sens que s'ils ont été payés à même le budget de l'école. Est-ce qu'on se comprend? C'est du «in-out»; on paye mais on rembourse. On le voit comme une façon... comme ça, pour ne pas confondre avec l'autre que, ça, ces recettes-là doivent servir vraiment aux orientations qui seront données par le conseil d'établissement.

M. Ouimet: O.K. Ça va.

La Présidente (Mme Blackburn): Ça va? Bien. Mme la ministre, une brève question et une conclusion.

Mme Marois: Oui, d'accord. Je vais juste revenir pour qu'on soit bien clair. Je ne veux pas qu'on ait d'ambiguïté une fois qu'on aura terminé la commission. Je reviens toujours sur ma question: «L'acte d'établissement qui met plus d'un immeuble à la disposition de l'école doit bénéficier d'un nombre équivalent de conseils d'établissement.» C'est qu'à ce moment-là il faut comprendre que l'acte d'établissement devra se faire par immeuble...

M. Stronach (Gary): Oui.

Mme Marois: ... – O.K., on se comprend – pour que ça permette ce que vous souhaitez, et, à ce moment-là, c'est possible et c'est permis.

M. Stronach (Gary): C'est ça.

Mme Marois: J'essaie de relire l'article 83 avec... «Le conseil d'établissement détermine» au lieu de «approuve». On dit: «Le conseil d'établissement détermine l'orientation générale proposée par le directeur général...» Vous garderiez le reste de l'article, si vous proposez cela. Vous êtes d'accord avec ce que je dis maintenant. Parce que l'article 83, il dit ceci: «Le conseil d'établissement approuve l'orientation générale proposée par le directeur de l'école en vue de l'enrichissement ou de l'adaptation», puis ça continue. Et, dans le fond, vous, vous dites: «Le conseil d'établissement détermine l'orientation générale proposée par le directeur général...»

M. Stronach (Gary): Je m'excuse, c'est mon téléphone qui sonne, j'ai oublié de le fermer, je m'en excuse.

Mme Marois: Ah! on vous le pardonne. On vous le pardonne, M. le président.

La Présidente (Mme Blackburn): On vous le pardonne.

Une voix: Vous le fermez comment?

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Marois: Voilà.

La Présidente (Mme Blackburn): Vous enlevez la batterie.

M. Stronach (Gary): Sans réponse. Donc, je pense que, pour être logique avec notre pensée, ce serait difficile de déterminer l'orientation proposée par le directeur d'école. L'un propose, l'autre détermine: il y aurait comme un conflit, il y aurait de l'ingérence qui se ferait. Nous autres, on voudrait que ça se lise: «Le conseil d'établissement détermine l'orientation générale de l'école en vue de l'enrichissement ou de l'adaptation par les enseignants des objectifs...»

Mme Marois: D'accord.

M. Stronach (Gary): Parce qu'on parle d'orientation globale, générale.

Mme Marois: O.K. Alors, on regardera comment cela est possible.

M. Stronach (Gary): Je vous ferai remarquer, Mme la ministre... Il y a une chose qui nous a laissés peut-être un peu perplexes, c'était le fait que nulle part dans le projet de loi il n'y a place pour des propositions parentales. C'est toujours sur proposition du directeur d'école. Et c'est une des places où on dit: On a notre mot à dire. Et «déterminer», pour nous, veut dire: si on a une bonne idée et qu'on peut l'amener comme proposition. Et on peut en déterminer, avoir un impact, au lieu de juste approuver ou adopter des propositions d'un tiers.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, M. Stronach.

Mme Marois: Ça va. Je vous remercie pour votre présence à notre commission. Ce que vous nous proposez nous permettra encore, sûrement, de resserrer un certain nombre de choses. Je ne dis pas qu'on retiendra tout ce que vous nous proposez – il faut que je sois claire aussi. J'essaie toujours de préserver les équilibres. Mais on réétudiera certains articles à la lumière cependant de ce que vous nous proposez. Je vous remercie de ce que je considère quand même comme étant un appui à l'esprit général et à bon nombre d'aspects de la loi qui vous agréent. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Blackburn): M. le député de Marquette, quelques mots.

M. Ouimet: Oui. Merci, M. Stronach, Mme Bherer. Le souhait que j'émets, c'est que la vie qui va se dérouler au sein du conseil d'établissement sera comme vous l'anticipez et que nous l'anticipons, sinon on apportera des correctifs en cours de route, j'espère.

M. Stronach (Gary): Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Blackburn): Oui, M. Stronach.

M. Stronach (Gary): ...en terminant, moi, je voudrais juste vous dire ceci. Dans les propos de Mme Bherer au début, quand elle vous a dit c'était quoi, le souci des parents, ce n'est pas une soif du pouvoir, mais un intérêt accru pour la vie de leurs enfants.

Mme Marois: Nous sommes d'accord.

M. Stronach (Gary): Une chose qui nous a fait réagir un peu, puis je la garde pour la fin, juste comme une idée que je vous lance. Après maintes et maintes années pour faire valoir la place des parents dans l'équipe-école, nulle part dans la loi on ne retrouve ces deux mots-là. L'équipe-école, on l'a valorisée pendant des années. On souhaite vraiment que l'arrivée du conseil d'établissement va faire en sorte que c'est la vraie équipe-école, on le souhaite. Puis, comme M. le député de Marquette l'a dit, je pense, on aura les preuves. Si le conseil d'établissement redevient vraiment l'équipe-école, je pense que tout le monde pourrait bien y arriver. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Blackburn): M. Stronach, Mme Bherer, merci de votre participation aux travaux de cette commission. Nous suspendons quelques instants pour donner le temps aux témoins de quitter la table et aux représentants de l'Association québécoise des commissions scolaires de prendre place à la table des témoins.

(Suspension de la séance à 20 h 57)

(Reprise à 20 h 58)

La Présidente (Mme Blackburn): Mesdames, messieurs, tel que prévu, la commission reprend ses travaux avec l'Association québécoise des commissions scolaires. J'inviterais son président, M. Edwards, que je salue avec les personnes qui l'accompagnent, à présenter les personnes qui l'accompagnent. Par la suite, une vingtaine de minutes de présentation de votre mémoire, et suivra l'échange avec les membres de la Commission. Alors, la parole est à vous, et c'est un plaisir de vous retrouver ici.


Association québécoise des commissions scolaires (AQCS)

M. Edwards (Ron): Thank you very much, Madam. I'd like to introduce Elizabeth Annesley, our immediate past president.

La Présidente (Mme Blackburn): Bonsoir, madame.

M. Edwards (Ron): Jeff Polenz, our executive director, and Ann Cumyn, our first vice-president.

La Présidente (Mme Blackburn): Bonsoir, madame.

M. Edwards (Ron): And I'd like to say thank you very much for taking the time to see us. During the hearings which were held this past September on the draft bill modifying the Education Act, the Québec School Boards Association clearly indicated that it was in favor of a major definition of the roles and responsibilities among the different levels of the educational system. We continue to support this move towards a more decentralized governance system, where school boards and schools will have more autonomy to adapt the services and programs to the needs of students and the local community.

(21 heures)

In general, Bill 180 sets out a more manageable sharing of powers between the governing board, the school principal and the school board, and more clearly establishes guidelines that strike a better balance between the need for a degree of provincial uniformity in the curriculum and the need for schools to have a latitude to develop their own local projects. This tidier definition of responsibilities reassures those who feared that the decentralizing powers to the school level would result in a great deal of disparity among the schools.

It's not our intention to present a detailed analysis of the proposed legislation, but rather we would like to briefly discuss the issues which require amendment. I'd like to ask Elizabeth Annesley to take over at this stage.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci. Oui, madame.

Mme Annesley (Elizabeth): Merci. L'école et le conseil d'établissement. Le projet de loi propose un conseil d'établissement élargi et permet une plus grande participation du personnel enseignant. Par contre, nous craignons que la représentation des parents au nouveau conseil d'établissement ait été diluée. Par exemple, au niveau secondaire, la présence de deux étudiants au conseil d'établissement pourrait signifier que les parents – avec potentiellement seulement deux postes – pourraient facilement se retrouver isolés sur certaines questions.

Nous demandons que la ministre amende l'article 13 modifiant l'article 43 de la loi pour lire que le nombre de parents représentés au conseil doit être égal au nombre total de sièges accordés aux représentants des autres groupes ayant le droit de vote au conseil d'établissement. Ceci assurerait un meilleur équilibre entre les groupes qui constituent le conseil d'établissement, surtout au niveau secondaire.

Par respect pour le rôle des parents au regard de certains aspects de la vie scolaire, nous recommandons d'amender l'article 13 modifiant l'article 74 de la loi pour que les règles de conduite et les mesures de sécurité soient sujettes à la consultation des parents de l'école avant l'approbation finale par le conseil d'établissement.

Les commissaires d'école sont des représentants élus de leur communauté. Pour cette raison, nous rejetons les nouvelles limites proposées concernant la participation d'un commissaire d'école au conseil d'établissement. Selon le projet de loi, le commissaire d'école pourrait participer aux séances seulement s'il est autorisé par le conseil d'établissement. Cette restriction constitue un recul par rapport aux dispositions de l'avant-projet de loi et vient en contradiction avec la décision de la ministre d'inclure les membres de la communauté au conseil d'établissement.

Le conseil d'établissement, selon l'article 13 du projet de loi modifiant l'article 89 de la loi, pourrait conclure des contrats pour la fourniture de biens ou de services pour son école. En dernière analyse, c'est la commission scolaire, comme entité légale, qui sera responsable pour tout contrat signé par les conseils d'établissement, mais la commission scolaire, mis à part le fait de donner des principes généraux, n'aura aucune possibilité d'approuver ou de rejeter quelque contrat que ce soit que le conseil d'établissement aura décidé de conclure. Nous exprimons de sérieuses réserves concernant les problèmes potentiels que cette disposition pourrait engendrer.

Nous questionnons la décision de ne pas inclure dans le projet de loi le mécanisme qui permettait au conseil d'établissement de déléguer temporairement certains pouvoirs à la commission scolaire. Comme nous l'avons exprimé dans notre mémoire sur l'avant-projet de loi, cette mesure donnait une alternative sécuritaire dans les cas où: le conseil d'établissement s'avérerait inopérant; et/ou le directeur d'école pourrait avoir besoin d'un appui supplémentaire de la part de sa commission scolaire.

Vu les responsabilités accrues conférées au directeur d'école, nous acquiesçons aux mesures transitoires qui permettraient à une commission scolaire d'implanter progressivement les dispositions de l'article 13 et spécifiquement les articles 96.2 et 96.11 de la loi.

Concernant les règles de passage des élèves et particulièrement le passage de l'enseignement primaire à l'enseignement secondaire, nous indiquons que certains problèmes pourraient survenir dans le cas où la décision du directeur d'école de retenir un élève pour une année additionnelle serait en contradiction avec la politique de la commission scolaire établie en vertu de l'article 68 modifiant l'article 233 de la loi.

À la prochaine page. Centres de formation professionnelle et centres d'éducation aux adultes. Nous nous interrogeons sur l'intention du législateur et sur l'interprétation à donner à l'article 99, au chapitre IV du projet de loi, qui indique que «pour l'application de l'article 72 de la Charte de la langue française, le centre de formation professionnelle est assimilé à une école en ce qui concerne les personnes visées à l'article 1» de la Loi sur l'instruction publique».

Nos commissions scolaires offrent présentement de nombreux programmes de formation professionnelle en anglais à une clientèle jeune, 16 ans et moins, et adulte. Cette nouvelle disposition semble donc indiquer que tout nouvel étudiant de moins de 19 ans inscrit dans un programme offert en anglais dans un centre de formation professionnelle devra dorénavant détenir un certificat d'admissibilité en vertu de la Charte de la langue française. Si tel est l'effet des articles 99 et 1, notre Association signale, pour sa part, son opposition ferme à cette formulation, qui viendra miner toute tentative des nouvelles commissions scolaires anglophones de promouvoir leurs services de formation professionnelle.

Une deuxième question touche l'obligation qu'a chaque centre de formation professionnelle ou d'éducation des adultes de créer un conseil d'établissement. Pour des raisons organisationnelles, les centres de formation professionnelle et d'éducation des adultes, dans le secteur anglophone, sont souvent fusionnés et partagent le même immeuble. Nous sommes d'avis que la commission scolaire, après avoir consulté les parents, les enseignants et les étudiants concernés, devrait avoir l'option de former un seul conseil d'établissement pour ces deux centres.

La commission scolaire. Plusieurs ajustements dans le projet de loi permettent une définition plus claire du rôle de la commission scolaire quant au contrôle de l'atteinte des objectifs fixés aux écoles pour la réussite éducative et au respect du régime pédagogique. Le projet de loi reconnaît aux commissions scolaires la responsabilité d'assister les écoles dans la coordination et l'évaluation de leur mission éducative.

L'article 19 du projet de loi n° 180, modifiant l'article 145.1 de la loi, accorde aux membres du comité des parents le droit de désigner des substituts pour siéger à la place des commissaires représentants du comité de parents lorsque ceux-ci sont empêchés de participer à une séance du conseil des commissaires ou du conseil exécutif. Nous demandons que cet article soit retiré du projet de loi. Ce privilège n'est accordé à aucun autre commissaire, et les commissaires représentants du comité de parents sont des membres à part entière du conseil des commissaires, sans droit de vote, assermentés et rémunérés comme les autres membres.

De plus, on peut imaginer les nombreux problèmes que cette disposition pourrait engendrer si les personnes siégeant à la place des commissaires représentants du comité des parents changeaient constamment. Les séances de conseil des commissaires sont publiques et, dans le cas où les commissaires représentants du comité de parents seraient absents, tout parent est libre de se présenter à la réunion et de poser des questions.

Nous sommes favorables à des dispositions du projet de loi qui reconnaissent que, même si la politique d'une commission scolaire devrait favoriser l'intégration dans les classes ordinaires d'un élève handicapé ou en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage, ceci n'est pas toujours possible. Le projet de loi reconnaît que chaque situation est unique et accorde aux commissions scolaires et aux directeurs d'écoles, la flexibilité nécessaire pour bâtir, en collaboration avec les parents de l'équipe-école, un plan d'intervention adapté aux besoins de l'élève. L'article 70 du projet de loi et l'article 13 modifiant l'article 96.9 de la loi.

(21 h 10)

Il est bien connu que les commissions scolaires coopèrent sur une base régulière avec les municipalités et les MRC. Cependant, lorsqu'il y a une obligation légale de le faire, il y a là raison d'exprimer notre inquiétude. Les municipalités n'ont pas le mandat de superviser ou de surveiller, d'aucune manière, la gestion des bâtisses scolaires ou la répartition des élèves dans les écoles. Par le projet de loi n° 180, les conseils provisoires et les nouvelles commissions scolaires soumettraient désormais l'information sur les prévisions des effectifs ainsi que le plan triennal d'allocation et de destination des immeubles. Nous demandons à la ministre d'indiquer clairement son intention en incluant cette mesure dans le projet de loi.

Compte tenu de l'étendue du territoire des futures commissions scolaires anglophones, on peut facilement imaginer les nombreux problèmes administratifs reliés à la transmission et à l'explication de cette information aux nombreuses MRC et aux centaines de municipalités que certaines de nos nouvelles commissions scolaires recouvrent. Si cette disposition est une tentative d'ouvrir la porte à la possibilité qu'à l'avenir les MRC et les municipalités deviennent impliquées dans la gestion des biens immobiliers des commissions scolaires, nous mettons en garde la ministre que ce genre de scénario est inacceptable et impraticable dans le secteur des commissions scolaires anglophones.

En regard des dispositions concernant les directeurs généraux, nous nous interrogeons sur l'effet de la modification proposée à l'article 200 de la loi, article 42 du projet de loi n° 180. Bien que nous convenions que la suspension, le congédiement et la résiliation du contrat du directeur général devraient se faire par le vote d'au moins les deux tiers des membres du conseil des commissaires, nous recommandons que soit maintenue l'actuelle exigence du deux tiers des votes pour embaucher un directeur général et que la présente disposition demandant le vote majoritaire pour le renouvellement du mandat du directeur général soit aussi retenue.

L'Association québécoise des commissions scolaires a déjà indiqué que l'échéance de septembre 1998 pour l'implantation de la nouvelle répartition des pouvoirs et responsabilités était irréaliste, compte tenu des multiples autres changements qui sont présentement en cours. Les modalités d'application progressive prévues dans le projet de loi n° 180 permettent une transition moins radicale et plus harmonieuse. Les écoles et les commissions scolaires assumeront ainsi graduellement leurs nouvelles fonctions et pouvoirs.

M. Edwards (Ron): Of major concern to the Québec School Boards Association is the Minister's decision to appropriate the power to decide whether or not a school board can open a dedicated school to a particular project and to establish conditions regarding its operation. This runs contrary to the whole notion of decentralization and is surprising in a bill which aims to give local communities the power to adapt services to their local needs.

If parents were to decide that they wanted to dedicate a school to a particular project and if, from a planning point of view, an organizational point of view, the school board determined such a project met certain needs, we cannot see why the Minister would be required to approve such a project. In our view, the limited number of such projects currently operating in the public system is a testament to the prudent and balanced approach that school boards have used to date.

A second area of concern centers on the notion of school closures. Article 49 of Bill 180, modifying article 212 of the LIP, states that the school board, after consultation with the parents' committee and subject to the Minister's possible orientation, establishes its school closure policy. Again, we question the pertinence of the Minister's involvement in this area, particularly in light of the fact that school boards are increasingly required to manage a school system characterized by fewer financial and human resources.

We welcome the Minister's decision to legislate the creation of a number of advisory committees. Bill 180 indicates that both the Programs Council and the Teacher Resource Evaluation Committee will include representatives from the English-language sector. Given the important mission of these two committees to make recommendations with respect to programs of study and instructional material and, in the light of the proposed changes to the curriculum and the move to linguistic school boards, the Québec School Boards Association is currently reflecting on other mechanisms and other models which could be proposed to the Ministry to allow the English school board education community greater influence and control over these two important aspects of its educational mission.

In conclusion, it is important that the Ministry of Education acknowledges that the success of these proposed changes, along with the curriculum reform recently announced, depends on school boards having enough leeway and flexibility to adapt the organization of its programs and services to meet local needs.

The Québec School Boards Association welcomes the direction of the proposed changes in the division of the powers among the schools, the school boards and the Government. In many respects, the proposed legislation builds upon what was previously outlined in the draft bill and represents a more manageable sharing power between the school and the school board. We would ask that the Minister pay careful attention to our concerns and recommendations that we have made, in order that they can insure that this reform can be implemented successfully. Thank you very much.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, M. Edwards. La parole est maintenant à Mme la ministre de l'Éducation. Madame.

Mme Marois: Merci, Mme la Présidente. Alors, bienvenue à notre commission. Bonsoir, messieurs dames. Ça me fait plaisir de vous rencontrer à nouveau. D'abord, je veux vous remercier pour toutes les remarques que vous faites concernant un certain nombre d'améliorations que nous avons apportées au projet de loi. Entre autres, je sais que vous inquiétait beaucoup la question de la rapidité avec laquelle nous allions procéder. Donc, vous remarquez qu'effectivement on a prévu que certains articles s'appliqueront progressivement. Alors, je vous remercie aussi de le mentionner et je pense qu'il était raisonnable de procéder ainsi. On l'avait dit aussi lors de la commission parlementaire.

Par ailleurs, vous vous inquiétez d'un certain nombre de choses, dont, entre autres, la question qui est soulevée à la page 3 de votre document. Vous dites: Le conseil d'établissement pourrait conclure des contrats pour la fourniture de biens et services pour son école. Vous dites: «En dernière analyse, c'est la commission scolaire, comme entité légale, qui sera responsable pour tout contrat signé par les conseils d'établissement, mais la commission scolaire, mis à part le fait de donner les principes généraux, n'aura aucune possibilité d'approuver ou de rejeter quelque contrat que ce soit...»

Est-ce que vous souhaitez que nous proposions des amendements qui viendraient encadrer cela autrement? Évidemment, nous pensons plutôt à des choses d'assez peu de conséquences, mais qui pourraient amener l'école ou l'établissement, effectivement, à louer une salle, à permettre d'utiliser ses équipements, etc. Mais, enfin, je vous pose la question sur ce que vous souhaiteriez que nous ajoutions au projet de loi.

À la page 4, vous dites que le forum de participation que nous offrons aux parents ressemble au conseil d'école existant. Vous avez raison mais, en même temps, il est facultatif et à la volonté des parents. Alors, c'est peut-être utile qu'on en change le nom, quand ce ne serait que pour nous assurer qu'on ne confonde pas. Un conseil d'établissement ou une assemblée générale de parents pourrait décider que ses représentants au conseil d'établissement cela suffit et qu'il ne se donne pas de forum.

Un troisième élément que vous soulevez et, évidemment, sur lequel vous vous inquiétez, c'est la transmission aux municipalités de vos projets d'investissement ou de vos plans d'investissement. Nous, il nous apparaissait ici que cela pouvait permettre et faciliter, évidemment, je dirais, les utilisations des locaux, bien sûr, mais plus que ça, de voir un peu le tout dans une perspective de planification sans voir par là cependant une mainmise de l'un ou l'autre, de la municipalité sur la commission scolaire ou inversement.

(21 h 20)

Je comprends que vos commissions scolaires sont grandes et que ça n'a pas la même portée que pour une commission scolaire francophone dont le territoire correspond, à toutes fins pratiques, à la MRC. Mais, enfin, je ne vois pas votre inquiétude, quand même, quand il ne s'agirait au moins que de les informer, parce qu'il n'y a pas d'autorisation à demander, c'est leur transmettre l'information. Enfin, si vous voulez élaborer un peu plus sur cette question-là, je reviendrai pour le reste un peu plus tard.

La Présidente (Mme Blackburn): Alors, trois questions. Qui prend la balle?

Mme Marois: Si vous voulez... If you want to give a response in English, there is no problem, you know that.

La Présidente (Mme Blackburn): Mme Cumyn.

Mme Cumyn (Ann): Oui. Je vais répondre à la première. La première, c'est au sujet de contrats que le conseil d'établissement pourrait faire avec les autres affaires pour un service. Pour nous, si vous voulez avoir un amendement pour dire que chaque contrat doit être approuvé par la commission scolaire, il n'y a pas de problème, mais on pourrait avoir un contrat pour un service qui est peut-être en contradiction avec les liens, les choses générales d'une commission scolaire, avec la politique générale d'une commission scolaire.

Mme Marois: D'accord.

Mme Cumyn (Ann): Quand on fait un contrat au nom de la commission scolaire, ça donne au bureau des affaires le droit de dire: Moi, je suis avec un contrat de quelque commission scolaire sans que la commission scolaire ait aucune idée qu'il y a un contrat qui est donné en son nom.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien.

Mme Cumyn (Ann): La deuxième question, je m'excuse, mais je n'entends pas exactement ce que vous avez remarqué, mais peut-être...

Une voix: The last question.

Mme Cumyn (Ann): Je passe à la dernière question, et on demande à quelqu'un d'autre pour la deuxième. Pour la transmission aux MRC, dans la loi, on a la liste pour le plan triennal qu'on envoie aux MRC et aux municipalités qui sont sur le territoire. Il y a beaucoup de municipalités dans lesquelles il n'y a pas d'écoles, dans notre commission scolaire. Est-ce qu'il est utile de donner aux municipalités où la prochaine école est à peut-être 50 km de la municipalité... ou peut-être juste les municipalités où il y a une école?

Mme Marois: D'accord. C'est tout à fait...

La Présidente (Mme Blackburn): M. Polenz...

Mme Marois: Est-ce que M. Polenz veut ajouter des choses sur ça?

La Présidente (Mme Blackburn): M. Polenz, vous vouliez ajouter des informations?

M. Polenz (Jeff): Oui. Je pourrais ajouter, à cette question-là. Je pense que notre inquiétude irait beaucoup plus loin que le simple geste de transmettre des renseignements aux municipalités.

Mme Marois: Oui. Je sens ça.

M. Polenz (Jeff): Sans savoir que ça fait quand même quelques mois qu'on jongle, dans plusieurs quartiers, avec l'idée de confier la gestion des immeubles scolaires à une instance intermédiaire autre que les commissions scolaires. Notre inquiétude, c'est effectivement qu'en mettant une disposition de même dans une loi on vient donner un signal un peu dangereux, selon notre avis, à l'effet que, d'ici quelques mois, un an, deux ans, à un moment donné, on va transférer la gestion, la responsabilité de gérer les immeubles scolaires à une autre instance. Je pense que, dans le fond, c'est ça, notre message, là-dessus.

Mme Marois: Alors, je comprends votre crainte. D'abord, il y a une première chose. Évidemment, il ne s'agirait pas de transmettre à la municipalité ou à toutes les municipalités de votre territoire tous les changements qui pourraient survenir, parce qu'évidemment votre territoire est immense et couvre plusieurs municipalités de façon générale.

Maintenant, il faut bien voir aussi que, par la loi, on confirme l'existence de la commission scolaire, ses pouvoirs, son autorité, etc. Et je comprends la crainte que vous manifestez. Il y a eu des débats sur ça depuis un an ou deux. Mais, ici, la loi vient, je pense, enfin, confirmer très clairement ce rôle et cette responsabilité. Donc, j'espère que cela atténue un peu ces craintes, mais je comprends que vous puissiez les manifester encore.

Mon autre question, en fait, la deuxième, c'était plutôt de l'ordre d'un commentaire. C'était sur la notion du comité de parents qu'on remplace par un forum de participation, dans la loi. Mais la différence, par rapport à la loi actuelle, c'est que ce n'est pas obligatoire. Si les parents décident de ne pas se donner un forum de participation, ils peuvent le faire, tandis que, dans la loi actuelle, il y a automatiquement un conseil d'orientation et un comité de parents. Alors, c'est ça, la nuance que l'on faisait. Et c'est pour ça que, dans la loi, on préférait le préciser et nommer le comité autrement, pour que ça clarifie bien que c'était quand même différent de ce qu'on connaît maintenant. Alors, c'était la nuance que je voulais apporter. Moi, ça va, pour l'instant, je pourrai revenir. Il y a une autre question qui me préoccupe, si notre collègue...

La Présidente (Mme Blackburn): Bien. Merci, Mme la ministre. M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Merci, Mme la Présidente. Bienvenue, M. Edwards, Mme Annesley, M. Polenz et Mme Cumyn. La préoccupation que vous avez... Bien sûr, ce n'est pas pour rien que vous soulevez la dernière préoccupation par rapport à l'obligation qui vous est faite de transmettre votre plan triennal et toutes les autres dispositions qui peuvent en découler aux municipalités, aux centaines pour ne pas dire aux milliers de municipalités. Il y en 1 400 au Québec. Il y a combien de commissions scolaires linguistiques anglophones? Neuf. Ça fait lourd, neuf, par rapport à 1 400 municipalités, villages, etc. C'est lourd de demander ça à neuf commissions scolaires.

Par ailleurs, on semble vouloir vous rassurer, dans la loi actuelle, le projet de loi n° 180. Il y a eu des débats au niveau de la pertinence du maintien des commissions scolaires. Le gouvernement, semble-t-il, pour l'instant, a tranché qu'on les maintient, mais on n'est pas sans savoir non plus qu'il y a un programme politique puis qu'il y a eu des engagements électoraux qui ont été pris en 1992, qui confiaient la gestion des bâtiments, qui confiaient la gestion du transport. Et, jusqu'à tout récemment, le transport scolaire devait échapper aux commissions scolaires. On n'est pas dupes de ça. Il y a eu des forces qui se sont installées pour faire reculer le gouvernement. Mais la tentation puis...

L'orientation politique, elle est tracée depuis belle lurette, au sein de cette formation politique. Là, c'est la théorie des petits pas. Tranquillement, on donne plus de place et plus de pouvoirs aux écoles, on diminue les pouvoirs de la commission scolaire. La ministre a rapatrié des pouvoirs qui existaient dans la Loi sur l'instruction publique, qui étaient également reconnus dans l'avant-projet de loi. Et oups! elle en a rapatrié quelques-uns, d'autres ont été confiés aux conseils d'établissement. Alors il y a quand même la théorie des petits pas, là, on voit ça se profiler à l'horizon.

La première question que j'ai pour vous, c'est: Vous aviez fait un exercice dans le cadre de l'avant-projet de loi, à savoir que vous aviez identifié les pouvoirs qui avaient été décentralisés du ministère de l'Éducation vers les commissions scolaires, et je me demande si vous avez fait le même exercice, if you compared the powers that are being decentralized from the Ministry of Education to the school boards, because you did that exercise on the draft bill, in terms of the brief that you tabled before us, and you had said at the time that there were, I think, only four or perhaps five powers that were being decentralized. Now, we saw that, between the draft bill and the current bill, some of those powers have been recuperated by the Minister of Education. So, I'm wondering what is your feeling, in terms of the decentralization process from the Ministry to the school boards.

M. Edwards (Ron): I don't think it is as great as we anticipated. We did not expect these other two, which we talked about, actually. So, I would say that we are slightly disappointed.

M. Ouimet: So, it's a decentralization that went in one direction: from school boards – I don't know what the expression is in English, «conseil d'établissement», is it school council...

Une voix: Governing board.

M. Ouimet: ...governing boards – in favor of governing boards. The other issue you raise is the Minister's decision to appropriate the power to decide whether or not a school board can open a school dedicated to a particular project and to establish conditions regarding its operation.

(21 h 30)

You indicate in your brief that it runs smack against the entire notion of decentralization. What kind of an impact and what kind of a signal does that send to the boards that you represent, in terms of the possibilities that they have to create schools with particular projects that have been able to, for one thing, keep your good students and to compete with the private school network? What kind of message does that send?

M. Edwards (Ron): I think they will be disappointed, actually, that there is no change on that. And we were hoping, when we came today, that there would be a change, actually, and that the Minister would reflect on it and make a decision which would come back again to the previous item, because, based on the fact of how many school boards have actually made that application, I think it's really not required. And we are really careful in reviewing the situation and making sure that we are not depriving local children when we do such a thing as that.

Mme Blackburn: Mme Cumyn, souhaitiez-vous ajouter quelque chose?

Mme Cumyn (Ann): Yes. The schools, as I understand it, have been put into the hands of the school community, which includes the parents. Parents in particular want to have schools that respond to what they perceive as the needs of their children and, at the same time, respecting the education that is provided or ordained by the Ministry. And it seems that, if the Minister's approval has to be asked for a particular project... One, what is a particular project? Every school has its educational project. And how far does it have to go before it has to be considered particular?

And, two, if one is really asking the community to respond to the needs of their community – and our community is, very, very much – then we believe that that decision should be made at the community level with the blessing of the school board, who would see that there wasn't, if you like, a proliferation of the same type of school. You have special schools, you have some fine arts schools, both in the French and English communities, in Montréal. Obviously, a school board wouldn't permit every school to be a fine arts school. But there will be need for some particular direction in some of the areas, so that this direction is accessible to all the parents within a school board, as far as is possible. And we really feel that that should belong to a community decision, along with the school board, rather than a ministerial decision.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, Mme Cumyn. M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Dernière question. On the governing boards, the fact that there are up to a maximum of 20 people that will be sitting around the table of that board, do you foresee any potential problems in terms of its operation, in terms of its functioning? And, in light of the fact that, as has been pointed out by another group of people, the principal will be there without right to vote, without real say in what's going to go on, I'm wondering if that does not raise an interesting dilemma, because half of the governing boards will be his employees during the day and, at night, when the time comes to make decisions on whatever the governing board is supposed to decide on, he sort of becomes the employee of the governing board who is there to make those decisions and tell him what to do. I don't know if I'm making myself clear.

The school principal is technically the boss of the teachers during the day and he is also the boss of the members of the personnel of the school. At night, when the governing board gets together to make decisions, he does not have the right to vote, that principal. He is there, and he listens, and he does whatever information, duties and obligations he has. But the teachers and the members of his personnel become his bosses at that point in time because they will tell him what the decisions of the governing board will be. Do you see any potential problem there?

La Présidente (Mme Blackburn): Mme Annesley.

Mme Annesley (Elizabeth): That poses a potential problem. The whole structure of the governing body is new. And the other area that we mentioned tonight, which is of greater concern to us, I guess, right now, is the role of the commissioner. The commissioner is a duly elected representative of the community, one of the community members, and yet the commissioner's role is being greatly reduced in this structure.

So you have the principal, on the one hand, who plays a different role in the daytime as does he or she in the evening. You have the commissioner, too, who has to take on another role. Many of us are very active in the school and contribute on a monthly, daily, weekly basis, and to now have to be invited to join, to not have the right to vote, etc., changes the whole culture, shall we say, of the participating body.

I guess another fear we have is that the more people you try to bring in to the operation of the school, particularly from outside the school, the less chance we have of attracting those people. And then you know what problems does that bring. So we have some questions, and you've raised one of them. But the role of the commissioner is of great importance to us, in terms of the way it's being drawn out right now.

M. Ouimet: He doesn't have the right to vote and he attends upon invitation, I believe. What's curious is the powers that MNAs have, all my colleagues. We have an automatic right to enter into a school. And it's peculiar that the commissioner, who is elected to manage schools, cannot enter a school unless he is invited! So there is a discrepancy there, I'll tell you that. As MNA, I do want to keep my right to go into a school, in terms of just seeing what goes on there, but I find also that the commissioner who must wait for an invitation... that greatly diminishes his role. And it's peculiar that they are elected to manage schools, we are elected to govern the province and not to manage schools, yet we have a right that they don't.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien. Mme Cumyn.

Mme Cumyn (Ann): On your point about the principal and playing the dual role, I think part of our concern comes with the composition of the governing body. If the principal is a good leader, and most of the things that he or she has to bring to the governing board are things that have already been agreed to by the school team – they are done with consultation with the staff... So I would expect that the things that come to the governing board ought to have the support of the school staff behind them.

Where I or some of us have the biggest concern is not that the teachers will do an about-turn and vote otherwise on the governing board than they did in the staff room earlier in the day. I have a real concern about the balance of power. Because, under the composition that is in the «avant-projet de loi», it could be in a high school, if there are only four members of staff that wish to be part of that governing board, you put those four on one side, there isn't anybody from day-care in high school – we don't have day-care – you have two students on the other side, and, therefore, you could only have two parents. I don't know about you, but I know that my students at home very seldom vote with their parents. Teenagers don't. And, therefore, my feeling is that, whatever the staff proposes by the principal will carry the day. And that's one of the reasons why we've recommended that the parents have parity to everybody else having the vote on the council.

M. Ouimet: Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Blackburn): M. le député de Sauvé, pour quelques minutes.

M. Parent: Oui, Mme la Présidente, rapidement. Moi, je voudrais interroger la ministre, je voudrais que la ministre me donne un éclairage. Dans l'avant-projet de loi, je ne me souviens pas d'avoir vu cette espèce de restriction vis-à-vis des commissaires d'école concernant la facilité qu'ils ont d'avoir accès à leurs établissements. Quel est le but, Mme la Présidente, que la ministre ait mis ça dans la loi? Est-ce qu'il y a une raison particulière?

(21 h 40)

Mme Marois: D'abord, une première chose qu'il faut dire, c'est que les séances du conseil d'établissement seront publiques, alors le commissaire peut toujours être là comme il veut, il n'y a rien qui l'empêchera. Il n'y a rien qui empêche quelqu'un qui a un lien avec l'école d'être là, à partir du moment où les séances sont publiques.

Cependant, ce que l'on dit, c'est que, pour participer aux délibérations, on souhaite que ce soit sur invitation, au sens où on a défini pour les uns et les autres des rôles spécifiques au sein du conseil d'établissement. Et le commissaire, qui, lui, est élu au niveau de la commission scolaire, a un autre rôle et une autre responsabilité que celle qui est confiée au conseil d'établissement. C'est d'ailleurs l'objet du projet de loi. On se comprend?

L'objet du projet de loi, c'est de faire en sorte que la commission scolaire conserve des rôles de planification des ressources, d'allocation des ressources et de contrôle et d'évaluation. Et l'établissement offre les services éducatifs, décide du projet éducatif, décide des contenus, même, en sus de ceux que le curriculum prévoit et toutes autres matières reliées au projet éducatif. Alors, c'est évident que, si, automatiquement, le commissaire siège sur le conseil d'établissement, dans le fond, on dit: Ça n'a plus d'importance, les rôles des uns et des autres, quand on élit, alors qu'il y en a une importance, et on la décrit bien dans le projet de loi.

Cependant, notre intention n'est pas d'empêcher que le commissaire puisse assister aux débats. Et, par ailleurs, pour bien marquer la différence des rôles, parce qu'il y en a une, différence, là, on dit: Ce sera sur invitation qu'il pourra participer aux débats. Alors, il y a donc une logique dans la loi, qui est très clairement fondée et établie. On peut être en désaccord avec cette logique, on peut ne pas l'aimer, on peut s'y opposer, mais il y en a une.

M. Parent: Le problème, Mme la Présidente, c'est la logique que je ne comprends pas.

Mme Marois: Il y a une différence dans les rôles des uns et des autres.

La Présidente (Mme Blackburn): Alors, si vous le permettez, on pourra, M. le député de Sauvé, revenir avec ces questions au moment de l'étude du projet de loi article par article. Mme la ministre, une autre question?

Mme Marois: Attendez un peu. Oui, j'en ai une autre.

M. Ouimet: Je ne sais pas si on avait épuisé tout notre temps, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Blackburn): Passablement.

Mme Marois: Oui, je pense que vous avez pas mal épuisé votre temps.

M. Ouimet: Correct. Vous savez qu'on est très équitables, de ce côté-là, nous.

La Présidente (Mme Blackburn): On essaie de bien partager le temps. Alors, Mme la ministre, une dernière question et une conclusion?

Mme Marois: Oui. Moi, c'est à la page 6 de votre document, où vous parlez de la question des programmes de formation professionnelle qui s'offriront, évidemment en anglais, mais, à ce moment-là, à une clientèle jeune, comme vous le mentionnez, et adulte, bien sûr, mais à celle des jeunes. C'est évident que la Charte de la langue française va s'appliquer. Je ne peux pas vous dire des choses qui iraient à l'encontre de nos propres lois. Alors, il faudra donc formellement être admissible à l'école anglaise, comme jeune évidemment, pour être admis à la formation professionnelle chez les jeunes, soit jusqu'à 18 ans. Et ça, c'est très clair, la Charte, sur ça, ne présente aucune ambiguïté. Par ailleurs, comme, de façon générale, ceux et celles qui s'inscrivent – chez les jeunes – sont généralement des jeunes qui sont déjà dans l'école, normalement ils sont donc admissibles à l'enseignement en anglais.

Une voix: ...

Mme Marois: C'est plutôt la règle. Ce serait vraiment l'exception. Tandis que chez les adultes, évidemment, ce critère-là ne joue plus, d'aucune façon. C'est parce que, dans votre document, vous soulevez cette question, mais je pense qu'il faut être clair maintenant, sinon...

La Présidente (Mme Blackburn): M. Polenz, vous vouliez réagir?

M. Polenz (Jeff): Non, je pense que j'ai eu la réponse qu'on demandait.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien.

Mme Marois: Voilà.

La Présidente (Mme Blackburn): Alors, en conclusion, Mme la ministre.

Mme Marois: Je vous remercie. On a eu des échanges intéressants. Il y a des éléments que je n'ai pas repris, qui sont à votre mémoire, qu'on va étudier correctement. Je vois que vous soulevez la question de la commission, des programmes, etc. On va être sensible à ce que vous soulevez comme questions et à un certain nombre d'autres points de vue que vous élaborez, et on essaiera dans la mesure du possible d'en tenir compte – je ne fais pas de promesses, cependant, comme je ne l'ai pas fait à aucun autre groupe non plus – si nous pouvons le faire et compte tenu de l'équilibre à maintenir dans la loi. Je vous remercie pour votre présentation.

La Présidente (Mme Blackburn): M. le député de Marquette, en conclusion.

M. Ouimet: Oui, Merci, Mme la Présidente. Je remercie les représentants de l'Association québécoise des commissions scolaires pour la qualité de leur mémoire. Je sais que tous les membres n'ont pas eu beaucoup de temps pour rédiger et tout assimiler. C'est un processus qui va très, très, très rapidement. Je ne suis pas sûr qu'on est en mesure d'évaluer tous les impacts de tout ce qui est prévu dans le projet de loi. Quand on sait qu'un directeur d'école est patron le jour, mais que, le soir, il suit les orientations de ses employés, c'est curieux cette affaire-là. Mais je vous remercie, et on aura l'occasion de l'explorer davantage en commission parlementaire. Je pense que ça avait échappé à la ministre. Merci.

La Présidente (Mme Blackburn): M. le président, souhaitez-vous ajouter quelques mots?

M. Edwards (Ron): Non.

La Présidente (Mme Blackburn): Non? Bien. Alors, Mme Cumyn, M. Polenz, M. Edwards et Mme Annesley, merci de votre participation aux travaux de cette commission.

Alors, nous suspendons quelques instants et nous reprendrons avec la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse.

(Suspension de la séance à 21 h 47)

(Reprise à 21 h 49)

La Présidente (Mme Blackburn): Nous reprenons nos travaux, tel que prévu, avec les représentants de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse.

Permettez-moi d'abord de vous souhaiter la bienvenue. La porte-parole, je pense, c'est Mme Stoddart. Alors, Mme Stoddart, si vous voulez bien nous présenter les personnes qui vous accompagnent. Vous connaissez les règles: une vingtaine de minutes pour la présentation de votre mémoire, suivie d'un échange avec les parlementaires membres de cette commission. Alors, la parole est à vous.


Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (CDPDJ)

Mme Stoddart (Jennifer-Anne): Merci, Mme la Présidente. Mme la ministre, MM. et Mmes les députés, merci de nous accueillir ce soir, si tard. Je vous présente mes collègues: à ma droite, Mme Muriel Garon, de la direction de la recherche...

La Présidente (Mme Blackburn): Bonsoir, madame.

(21 h 50)

Mme Stoddart (Jennifer-Anne): ...qui est l'auteur de l'annexe à notre mémoire dont vous avez une copie; Me Pierre Bosset, qui travaille sur les positions de la Commission sur la Loi sur l'instruction publique notamment; à ma gauche, Me Philippe Robert de Massy, qui est le juriste et le conseiller juridique à la Commission, qui s'est occupé beaucoup de litiges en matière d'intégration scolaire, au cours des dernières années.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, madame.

Mme Stoddart (Jennifer-Anne): MM. et Mmes les députés, on est très reconnaissants de cette occasion de parler du sujet de l'intégration scolaire des enfants. Vous savez que la Commission, depuis 15 ans, a travaillé de façon inlassable pour faire la promotion des droits des enfants handicapés dans le milieu scolaire. Ça a été un dossier majeur, tant au point de vue des recherches menées par la Commission – Mme Garon a publié pour la Commission un livre important sur le sujet – tant au niveau des enquêtes, qui ont été nombreuses, suite à de nombreuses plaintes de parents d'enfants dont les droits avaient été bafoués, suite à de nombreuses recherches sur le sujet. Donc, nous espérons voir dans le projet de loi qui nous est soumis l'aboutissement des efforts de la Commission pour reconnaître les normes d'intégration pour les enfants handicapés.

Dans notre mémoire sur l'avant-projet de loi que nous avons déposé plus tôt cette année, nous avons attiré votre attention sur trois aspects qui, sous l'angle des droits et libertés de la personne, méritent une considération spéciale: l'égalité des chances, l'éducation aux droits et l'intégration scolaire des enfants qui présentent une déficience intellectuelle. Sur chacune de ces questions, la Commission constate que le projet de loi n° 180 comporte, par rapport à l'avant-projet, des changements notables.

Au chapitre de l'égalité des chances, la Commission note avec satisfaction l'introduction formelle du critère de la proximité géographique pour l'inscription dans une école ainsi qu'un meilleur encadrement de la possibilité de créer une école pour un projet particulier. Soucieuse toutefois d'éviter que l'enrichissement des contenus académiques entraîne une plus grande stratification sociale, la Commission réitère sa conviction à l'effet que cet enrichissement des contenus doit s'accompagner de mesures concrètes de soutien à l'école publique et à ses diverses clientèles de façon à résorber les écarts de performance et de réussite entre les groupes sociaux.

En ce qui concerne l'éducation aux droits de la personne, la Commission relève que le projet de loi énonce désormais clairement la mission de l'école en regard de la socialisation de l'enfant. Comme le souligne avec justesse le récent projet de politique sur l'éducation interculturelle déposé conjointement par la ministre de l'Éducation et le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration, la socialisation vise à transmettre à l'enfant les valeurs qui fondent notre société démocratique. Les droits de la personne et ses responsabilités qui en découlent, héritage commun de l'humanité, occupent une place prééminente parmi ces valeurs et doivent inspirer l'ensemble de la vie scolaire. À ce titre, la Commission estime qu'ils devraient faire explicitement partie du mandat de socialisation confié à l'école par la loi.

C'est en regard de l'intégration scolaire des enfants présentant une déficience intellectuelle, toutefois, que la Commission désire formuler les observations les plus détaillées. Dans un premier temps, la Commission tient à souligner deux changements positifs intervenus par rapport à l'avant-projet de loi.

D'une part, les références aux faiblesses de l'élève présentes dans l'avant-projet en ce qui concerne le plan d'intervention destiné à l'élève handicapé ainsi que l'adaptation des services éducatifs ont disparu. Le projet de loi n° 180 renvoie désormais aux besoins et aux capacités de l'élève. Ce changement est conforme aux politiques du ministère de l'Éducation et répond aux préoccupations exprimées par la Commission.

D'autre part, la possibilité de faire dispenser les services éducatifs par une autre commission scolaire est maintenant mieux encadrée. La commission scolaire dont relève l'enfant devrait normalement démontrer qu'elle n'a pas les ressources nécessaires pour dispenser elle-même les services. De plus, l'entente entre deux commissions scolaires devrait favoriser la prestation des services le plus près possible du lieu de résidence des élèves. La Commission se réjouit de ces changements et apprécie l'écoute dont ses recommandations ont fait l'objet.

Dans le cadre de la présente consultation, cependant, la Commission souhaiterait attirer l'attention du législateur sur l'écart qui subsiste, à son avis, entre l'engagement ministériel en faveur de l'intégration en classe ordinaire, d'une part, et la formulation du projet de loi, d'autre part. Elle aimerait, à cet égard, formuler des recommandations propres à assurer une meilleure convergence des normes législatives et des politiques ministérielles en matière d'intégration scolaire des enfants présentant une déficience intellectuelle.

D'abord, la politique ministérielle, c'était un engagement en faveur de l'intégration en classe ordinaire. Adoptée dès 1992, on y lit: «La classe ordinaire est, pour la grande majorité des élèves, un lieu particulièrement propice aux apprentissages, à cause, entre autres choses, de la stimulation que constitue la fréquentation d'autres jeunes. Elle est, de plus, un moyen privilégié d'insertion dans la société. Elle devrait donc être le premier moyen utilisé par toutes les commissions scolaires.»

La politique ministérielle se prononce donc sans ambiguïté pour la classe ordinaire comme lieu privilégié d'instruction pour les élèves handicapés. Cette orientation concorde d'ailleurs avec l'ensemble des politiques gouvernementales relatives à l'insertion sociale des personnes handicapées.

Il importe de préciser, ici, comme pour les élèves qui n'ont pas de handicap, que l'intégration en classe ordinaire ne signifie pas que l'élève handicapé passe nécessairement tout son temps en classe ordinaire. Je trouve ça important de le souligner, parce que, souvent, on nous dit que nous n'avons pas des attentes ou des visions réalistes. Donc, on veut vous expliquer exactement ce que ça veut dire pour nous, l'intégration scolaire. Ça veut dire qu'il peut y avoir des modulations pour chaque élève, qu'il peut y avoir des choses qui sont enseignées en dehors de la classe ordinaire. Elle suppose que l'élève handicapé bénéficie d'une appartenance véritable à un groupe ordinaire, avec les adaptations requises. Il se peut fort bien que certaines activités d'apprentissage gagnent à être faites dans un groupe plus restreint d'élèves ayant le même besoin d'apprentissage ou dans un rapport individuel avec un enseignant ou un éducateur spécialisé.

J'aimerais maintenant passer les grandes lignes de la jurisprudence récente relative à la norme d'intégration scolaire. D'abord, au Québec, l'affaire Rouette, de 1993, dans laquelle le Tribunal des droits de la personne conclut: «En représentant dans le contexte scolaire le cadre de référence de l'ensemble des apprentissages auxquels sont conviés les élèves, la classe ordinaire constitue la norme d'égalité à laquelle une mesure d'adaptation peut éventuellement s'ajouter de même que le principe général par rapport auquel la validité d'une mesure dérogatoire doit être appréciée.»

L'année suivante, la Cour d'appel du Québec confirmait le statut privilégié de l'intégration en classe ordinaire comme mode d'adaptation des services éducatifs et disait: «L'intégration en classe ordinaire demeure un moyen privilégié d'adaptation des services éducatifs aux besoins d'apprentissage et d'insertion sociale des élèves en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage.» Et on reconnaît ainsi la politique ministérielle de 1992.

Le dernier développement jurisprudentiel est le jugement très récent de février 1997 de la Cour suprême du Canada dans une affaire qui s'appelle Eaton, une affaire ontarienne, mais dans laquelle la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse du Québec est intervenue. Dans cette affaire, la Cour suprême se réfère à des études et à des politiques ministérielles ontariennes et reconnaît l'intégration en classe ordinaire, avec les adaptations requises, comme la norme imposée par le droit à l'égalité.

Et je cite. La Cour suprême dit: «L'intégration devrait être reconnue comme la norme d'application générale en raison des avantages qu'elle procure habituellement, mais une présomption en faveur de l'enseignement intégré ne serait pas à l'avantage des élèves qui ont besoin d'un enseignement spécial pour parvenir à cette égalité.» Cette norme d'égalité impose aux commissions scolaires le fardeau d'examiner les possibilités d'adapter la classe ordinaire avant de considérer une autre forme de placement.

Et la Cour suprême continue: «Une instance décisionnelle – par exemple, la commission scolaire – doit déterminer si le cadre intégré peut être adapté pour répondre aux besoins spéciaux d'un enfant en difficulté. Lorsque ce n'est pas possible, c'est-à-dire lorsque des aspects du cadre intégré qui ne peuvent pas raisonnablement être modifiés empêchent de répondre aux besoins spéciaux de l'enfant, le principe de l'arrangement exigera un placement spécial à l'extérieur de ce cadre.»

Donc, on reconnaît les deux principes: la norme de l'intégration et la possibilité de faire l'enseignement en dehors de la classe ordinaire, de façon exceptionnelle, afin de favoriser l'apprentissage de l'enfant handicapé.

(22 heures)

J'aimerais ensuite vous entretenir brièvement de l'étude de la Commission faite par Mme Garon, dont vous avez un exemplaire, et vous souligner les résultats remarquables de cette étude, qui démontre, en regardant les 154 commissions scolaires sur le territoire du Québec, qu'il y a une variation remarquable dans les pratiques d'intégration scolaire. Tellement remarquable qu'on trouve qu'une commission scolaire sur cinq au Québec n'intègre aucun élève handicapé au-delà de la maternelle. Par contre, il y a des commissions scolaires qui vont jusqu'à intégrer 75 % des enfants. Qu'est-ce que ça nous suggère?

L'étude nous révèle aussi qu'il n'y a pas de variation ou qu'il n'y a pas de lien constant entre d'autres facteurs dont on pourrait penser qu'ils influent sur le taux d'intégration des élèves. C'est-à-dire que ce n'est pas la taille géographique d'une région, ce n'est pas les ressources, ce n'est pas le nombre d'élèves, ce n'est pas l'importance de la commission scolaire, ce n'est pas le nombre d'enfants handicapés qui semble avoir une corrélation directe avec l'intégration. On ne peut que tirer comme conclusion que les politiques d'intégration scolaire relèvent des directives, et donc de la volonté et des choix que fait chaque commission scolaire, et non pas d'obstacles qui sont innés à la problématique de l'intégration scolaire elle-même.

Vous me permettrez maintenant de passer à ce qu'on perçoit comme étant quelques lacunes dans le projet de loi actuel et on aimerait vous faire quelques suggestions pour le bonifier.

Les disparités qui viennent d'être identifiées au sein des commissions scolaires vont clairement à l'encontre de la politique ministérielle, et la Commission, donc, estime nécessaire de faire très clairement dans le texte de la loi de l'intégration en classe ordinaire une norme législative claire. Donc, dans cette perspective, on attire votre attention sur deux articles en particulier.

D'abord, l'article 235. Le projet de loi propose de remplacer le premier alinéa de l'article 235 de la loi par une disposition disant que l'organisation des services éducatifs aux élèves handicapés a pour but de favoriser leur intégration dans les classes ordinaires «chaque fois que cela est possible, profitable à l'élève et propre à faciliter ses apprentissages et son insertion sociale». C'est le libellé exact actuel. Cette triple condition, d'être possible, profitable et propre à faciliter les apprentissages, oblige à démontrer pour chaque élève le bien-fondé d'un placement en classe ordinaire. Le moins qu'on puisse dire, c'est que cette formulation ne constitue pas une indication claire que la classe ordinaire doit constituer la norme pour tous les élèves handicapés. L'expérience, aussi bien que les études, montre bien pourtant que l'intégration en classe ordinaire est possible, profitable à l'élève et propre à faciliter ses apprentissages et son insertion sociale dans la très grande majorité des cas. La Commission, qui note avec un très grand étonnement que cette formulation s'inspire d'un règlement adopté à une époque où l'intégration était loin d'être la norme et qui est abrogé depuis, craint que l'article 235, tel que proposé, ne conforte dans leur attitude les commissions scolaires qui demeurent réfractaires à l'intégration en dépit des énoncés clairs de la politique ministérielle.

Ensuite, les articles 96.12 et 96.13. Le projet de loi donne au directeur d'école le pouvoir d'autoriser un élève n'ayant pas atteint les objectifs de l'éducation préscolaire à redoubler cette année d'enseignement, et je cite, «s'il existe des motifs raisonnables de croire que cette mesure permettra à l'enfant de s'intégrer dans une classe régulière de l'enseignement primaire». Un pouvoir semblable lui est confié à l'égard d'un enfant qui n'a pas atteint les objectifs ni maîtrisé les contenus notionnels obligatoires de l'enseignement primaire lorsque cette mesure permettrait à celui-ci «de s'intégrer à une classe régulière de l'enseignement secondaire».

La loi prévoit déjà des dispositions semblables, bien que le pouvoir d'autoriser le redoublement appartienne actuellement à la commission scolaire plutôt qu'au directeur d'école. Ces dispositions ne visent pas spécifiquement les enfants handicapés. C'est probablement pourquoi elles ont pu échapper jusqu'ici à l'attention des intervenants favorables à l'intégration en classe ordinaire. Pourtant, la formulation des articles 96.12 et 96.13 risque de créer un obstacle à cette intégration. En effet, en semblant établir un lien entre l'atteinte des objectifs et la maîtrise des contenus notionnels obligatoires, d'une part, et l'intégration en classe régulière, d'autre part, on risque de prêter au législateur l'intention de faire de la capacité de rencontrer les exigences du programme la condition d'accès à la classe ordinaire. Or, exclure un enfant handicapé de la classe ordinaire pour le motif que sa déficience intellectuelle l'empêche de rencontrer les normes de réussite définies pour les autres élèves, c'est précisément l'exclure sur la base de son handicap, et c'est ce qu'on veut éviter. La Commission considère que la formulation des articles 96.12 et 96.13 risque de condamner à la ségrégation les élèves qui présentent une déficience intellectuelle, et ce, même en présence d'une disposition qui reconnaîtrait, conformément à la politique ministérielle, la classe ordinaire comme la norme.

Donc, nous terminons et je vous invite à regarder nos propositions aux articles 10 et 11. On est allés aussi loin que de vous faire des propositions précises parce que c'est un sujet sur lequel nous avons passé beaucoup de temps, beaucoup d'efforts à la Commission, et je pense que la formulation exacte est extrêmement importante. Donc, on vous adresse les recommandations suivantes.

Premièrement, à l'égard des articles 96.12 et 96.13, la Commission recommande que ces articles, qui ne visent pas spécifiquement les élèves handicapés, soient amendés de façon à éviter qu'un lien soit créé entre l'atteinte des objectifs académiques d'un programme et l'intégration en classe ordinaire, et on vous suggère des formulations. Vous remarquerez qu'on remplace l'exigence, la mesure d'aller en classe ordinaire, par les mots «permettra à l'enfant d'atteindre ces objectifs» et «permettra à l'élève d'atteindre ces objectifs et de maîtriser ces contenus», ces objectifs qui sont propres à lui et non pas nécessairement la finalité de pouvoir suivre le programme régulier d'une classe ordinaire. On pense que ça ajoute à la clarté de la loi.

La Présidente (Mme Blackburn): Mme Stoddart, je voudrais juste vous rappeler que votre temps est presque écoulé.

Mme Stoddart (Jennifer-Anne): Très bien. J'ai presque terminé.

La Présidente (Mme Blackburn): Alors, si vous voulez conclure. J'ai le douteux privilège d'être obligée de ramener les gens dans les délais impartis. Alors, je vous remercie.

Mme Stoddart (Jennifer-Anne): C'est très bien, Mme la Présidente. Donc, je termine en vous soulignant, à la page 11 de notre mémoire, les quelques changements qu'on vous suggère. Vous voyez un libellé plus simple du premier paragraphe de cet article-là, 235, ainsi qu'une façon remaniée, un ordre différent de proposer les paragraphes 1°, 2°, 3° et 4°, ainsi qu'une formulation un peu modifiée du paragraphe 4° de cet article.

Je vous remercie beaucoup pour votre attention, surtout à cette heure tardive. Je sais à quel point votre horaire est chargé. Je me permets de vous rappeler que vous envisagez des changements extrêmement importants dans la Loi sur l'instruction publique, au Québec, et c'est un moment extrêmement propice de clarifier cette question de l'intégration des élèves handicapés dans les écoles ordinaires. Je vous remercie beaucoup.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, Mme Stoddart. Comme vous avez pu le constater, en dépit de l'heure tardive, il y a un intérêt certain. Alors, pour amorcer l'échange avec les membres de la Commission des droits de la personne, Mme la ministre de l'Éducation. Madame.

(22 h 10)

Mme Marois: Merci, Mme la Présidente. Je veux remercier la Commission, d'abord, pour avoir souligné et remarqué les changements que nous avions apportés et qui vont dans le sens de ce que nous avait recommandé d'ailleurs la Commission. On l'avait déjà un peu dit lorsque la Commission des droits est venue faire des représentations au moment de l'avant-projet de loi, parce que j'étais tout à fait sensible à cela, et on le retrouve donc au projet de loi.

Il y a d'autres éléments aussi que vous nous soulignez et sur lesquels nous travaillons. Je ne peux pas à ce moment-ci formellement vous dire quels amendements nous apporterons, parce qu'il y a encore certaines améliorations à apporter à ce que nous faisons, entre autres, à la page 6, lorsque vous notez l'instance décisionnelle qui doit déterminer si le cadre intégré peut être adapté pour répondre aux besoins spéciaux d'un enfant en difficulté, bon, etc. Alors, on travaille actuellement à certaines améliorations de ce côté-là.

Maintenant, je voudrais revenir sur les articles 96.12 et 96.13. On va l'étudier, ce que vous nous recommandez comme proposition d'amendements, mais je veux cependant donner le sens et l'esprit que nous interprétons quant à ces deux articles.

Quand on dit: «Le directeur de l'école peut, sur demande motivée des parents d'un enfant», et là ce n'est vraiment pas fonction du fait qu'un enfant, par exemple, aura eu des difficultés en soi avec la commission scolaire de son propre chef... va agir. Dans le cas présent, c'est vraiment le parent qui le souhaite, et j'imagine qu'à ce moment-là certains parents pourraient souhaiter. Dans ce cas-ci, ça ne s'adresse pas nécessairement justement à des enfants handicapés ou à des jeunes handicapés – vous le dites aussi. Et, souvent, ce sont des cas plutôt de mésadaptation socioaffective, où on a des jeunes qui ne réussissent vraiment pas à atteindre les objectifs fixés dans le curriculum, et donc qui nous demandent une autorisation, même dans certains cas plus précis, pour réorienter l'enfant vers d'autres projets. Et, ici encore, je fais la remarque, c'est cependant «sur demande motivée des parents d'un enfant». Or, des parents pourraient souhaiter que le jeune ne se retrouve pas dans une classe ordinaire. Même s'il s'agissait d'enfants handicapés, on pourrait le souhaiter et ça pourrait être même souhaitable – vous le dites vous-même, je pense, au début du texte. Ces précisions étant apportées, il reste cependant que les amendements que vous proposez vont être étudiés à leur mérite et on va voir si on peut améliorer et bonifier ce qui est là.

Par ailleurs, à la page 11, notre fameux article 235. L'interprétation que nous faisons de la proposition que vous nous faites, c'est que vous le formulez vraiment comme un droit absolu, ou cela donne comme effet qu'il s'agit, une fois qu'on l'a lu, d'un droit absolu qui est reconnu sans balises, alors qu'au début de votre document vous dites bien que vous ne souhaitez pas nécessairement qu'il n'y ait aucune balise, parce qu'il faut qu'il y en ait. Et j'avoue que je suis un petit peu plus mal à l'aise avec cela. Je vous le mentionne et j'aimerais que vous...

Mme Stoddart (Jennifer-Anne): Peut-être que je peux vous rassurer.

La Présidente (Mme Blackburn): Mme Stoddart, oui. Nous vous écoutons.

Mme Stoddart (Jennifer-Anne): Je peux vous rassurer, Mme la ministre. Ce n'est pas un droit absolu. La Commission reconnaît elle-même que ce n'est pas un droit absolu. C'est une norme. Découle du droit d'égalité la norme de l'intégration. Ça ne veut pas dire que tous les enfants handicapés doivent être en classe ordinaire tout le temps, c'est un droit absolu et ils ne peuvent pas bouger de là. Donc, c'est pour clarifier cette norme qui est ce droit d'être intégré en premier lieu, de passer la plupart de son temps, sauf très grande exception, dans la classe ordinaire, de garder la classe ordinaire comme le lieu commun d'apprentissage de tous les enfants, sauf exception.

C'est en regard de ce droit-là qu'on fait des formulations. Ce n'est pas parce qu'on ne reconnaît pas, pour beaucoup d'enfants avec différentes sortes de handicaps, la nécessité de l'apprentissage en dehors de la classe ordinaire. Et je peux attirer votre attention, Mme la ministre, sur le fait qu'au quatrième paragraphe, que nous reproduisons en bas de la page 11 justement, on reconnaît dans la phrase «lorsque leur intégration aux classes ordinaires ne s'avère pas possible» qu'il ne s'agit pas d'un droit absolu.

La Présidente (Mme Blackburn): Mme la ministre.

Mme Marois: C'est par là que vous venez le nuancer, ce droit.

Mme Stoddart (Jennifer-Anne): C'est ça. On le nuance nous-mêmes dans la suggestion, la jurisprudence, la nuance. Donc, loin de nous de créer un droit absolument absolu qui ne connaît aucune exception. C'est la norme d'égalité qu'on propose.

Mme Marois: D'accord.

La Présidente (Mme Blackburn): Mme la ministre.

Mme Marois: Parce qu'il est évident que, pour nous, il faut qu'il y ait des nuances et des balises. On n'a pas besoin de s'en parler très longuement, vous-même l'admettez. Il peut même aller contre l'intérêt d'un jeune ou d'un jeune adulte d'être intégré dans la classe ordinaire et il faut qu'il y ait des interventions spécialisées, un suivi plus personnalisé, etc., qui nous amènent à poser des gestes qui vont faire que le jeune va se retrouver dans une classe spécialisée ou avec une approche particulière. Et ça, il faut garder ces possibilités-là et c'est pour ça qu'on reste quand même prudents dans ce que l'on fait, en progressant cependant et en affirmant le fait que notre perspective, c'est d'abord et avant tout l'intégration dans la classe ordinaire. D'ailleurs, je pense qu'on ne le dit pas beaucoup, mais, pour les gens peut-être qui nous écoutent, ce n'est pas inutile de se rappeler: les jeunes handicapés physiques, de façon générale, ils sont déjà intégrés dans la classe ordinaire. C'est vraiment tout à fait exceptionnel, et dans des cas de multi-handicaps, où il y a des barrières telles qu'on ne peut le faire. Mais cela reste actuellement la norme et la règle que l'intégration, et on en est d'ailleurs très fiers et très heureux.

Alors, voilà. Moi, je ne veux pas pour l'instant pousser plus loin notre discussion. Je pense que je saisis bien ce que vous souhaitez. Nous allons l'étudier attentivement. Et je comprends que vous dites: Ici, regardez, il y en a une, balise, et elle nous apparaît répondre aux objectifs que nous poursuivons chacun à notre façon et chacun selon nos responsabilités.

Mme Stoddart (Jennifer-Anne): Merci, Mme la ministre, pour cette écoute. Est-ce que ma collègue, Mme Garon, pourrait ajouter quelque chose?

Mme Marois: Oui, certainement.

La Présidente (Mme Blackburn): Oui. Alors, Mme Garon, nous vous écoutons.

Mme Garon (Muriel): Oui, je serai très brève. Je voudrais simplement souligner que ce que la Commission souhaite, c'est qu'il y ait une obligation dans toutes les commissions scolaires d'établir cette politique et l'organisation des services en classe ordinaire, alors que, dans la formulation antérieure où on retenait les quatre mêmes membres, ces quatre possibilités ont toujours été interprétées comme des alternatives, c'est-à-dire comme une alternative, où une commission scolaire pouvait choisir soit d'intégrer, soit d'organiser ses services en classe ordinaire, soit de les organiser à l'extérieur, ce qui donne les résultats que nous avons observés dans notre étude.

Mme Marois: D'accord.

Mme Garon (Muriel): Et, au fond, en maintenant les quatre alinéas, comme vous l'aviez fait, on demeurait dans un certain flou, le flou passé.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, Mme Garon.

Mme Marois: Excusez-moi, Mme la Présidente. Je suis d'accord que chaque commission scolaire ait l'obligation de se donner une politique d'intégration, on se comprend. Alors, là, on verra comment on pourra nuancer et bonifier ce que nous faisons.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien. Merci, Mme la ministre. M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Oui, merci, Mme la Présidente. Bienvenue aux représentants de la Commission des droits de la personne. Je serai très bref parce que le mémoire est très clair, et je veux laisser une grande partie du temps qui nous est alloué à mon collègue critique dans le dossier des personnes handicapées.

Mais, précisément, ma question s'adresse peut-être à Mme Garon. On entend la ministre dire qu'elle souhaite que chaque commission scolaire se donne une politique d'intégration. Mais ce serait beaucoup plus clair si la loi le prévoyait d'emblée, ça ferait obligation à l'ensemble des commissions scolaires. Et c'est ce que je comprends lorsque je lis les dispositions de l'article... les recommandations que vous faites par rapport à 235 et à 96.12 et 96.13. On peut bien vouloir lancer la balle aux commissions scolaires, mais, comme législateurs, nous avons une responsabilité, et vous nous renvoyez à assumer nos responsabilités et à l'indiquer clairement dans le libellé de l'article. Et même si on veut vouloir rassurer la population que l'intégration se fait dans toutes les commissions scolaires, l'étude que vous avez publiée en septembre dernier, Mme Garon, démontre carrément que c'est vrai dans certains cas, mais, dans d'autres cas, ce n'est carrément pas vrai. À la page 6, vous faites référence à l'autre extrême: 24 commissions scolaires n'intègrent aucun enfant. Donc, ça aussi, il faut le dire, là.

Alors, peut-être, la question que je vous poserais: Est-ce que c'est parce qu'il y a un problème sur le plan législatif ou est-ce qu'il y a un problème sur le plan des ressources pour ces commissions scolaires là? Pourquoi, dans le cas des 24 commissions scolaires, n'y a-t-il pas d'intégration? Ou est-ce que c'est une combinaison des deux?

Mme Garon (Muriel): Bien, vous savez très bien comment sont distribuées les ressources pour l'adaptation scolaire, elles sont...

M. Ouimet: Oui, pour éclairer les gens qui nous écoutent, pour reprendre ce que la ministre disait.

La Présidente (Mme Blackburn): Mme Garon.

Mme Garon (Muriel): Les ressources sont distribuées au prorata de l'existence de problèmes d'adaptation, qui existent dans les commissions scolaires. Je ne reprendrai pas la formule dans le détail, mais il y a des allocations qui sont faites en fonction de la présence d'élèves présentant des difficultés dans chacune des commissions scolaires. Et nous savons que cette évaluation génère des budgets absolument importants; il y a 1 000 000 000 $ sur les 5 000 000 000 $, en tout cas en 1992-1993 – c'est probablement davantage maintenant – qui sont alloués.

(22 h 20)

Il y a toutefois un problème, c'est que, même si les commissions scolaires doivent faire état, sont tenues par la loi d'indiquer quels sont les montants qui sont alloués à l'adaptation scolaire, il n'existe pas de comptabilité claire qui permet de savoir quels sont les montants qui sont reçus et si l'ensemble des montants reçus sont effectivement affectés. La comptabilité est telle et est tellement confuse qu'il est impossible de déterminer avec précision si les ressources sont effectivement bien dépensées à ce poste du budget.

Donc, vous demandez quelle est la cause. Nous pensons que ce ne sont pas les ressources. Nous sommes convaincus que l'article 235 de la loi antérieure... de la loi actuelle plutôt, n'était pas suffisamment précis et qu'il a donné la possibilité d'une interprétation à l'effet que les commissions scolaires choisissent l'une ou l'autre approche et qu'elles s'en sont prévalues très largement, d'où cette disparité que nous observons.

La Présidente (Mme Blackburn): La commission de l'éducation en arrivait sensiblement aux mêmes conclusions quant à l'absence de transparence sur l'utilisation des sommes consacrées aux enfants handicapés, en difficulté d'adaptation et d'apprentissage. D'ailleurs, je pense que le ministre aura peut-être l'occasion de le dire, je pense qu'il devait sensiblement modifier et simplifier les règles d'attribution de ces budgets.

Alors, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce et qui est aussi le porte-parole officiel de l'opposition dans le dossier des personnes handicapées.

M. Copeman: Merci, Mme la Présidente. À mon tour de souhaiter la bienvenue aux représentants de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse. Je dois vous dire que je suis un peu inquiet par la réponse de la ministre tantôt au sujet de l'article 235, inquiet parce que je crois sincèrement que la ministre partage l'objectif de l'intégration scolaire – je n'ai pas de doute là-dessus... Là où je suis un peu inquiet, c'est parce qu'elle semble dire que le nouvel article 235, tel que rédigé dans le projet de loi n° 180, va atteindre ses résultats. Vous, vous semblez dire que ce n'est pas si clair, et de là mon inquiétude. La ministre est d'accord. Elle a, pour utiliser une expression d'un de ses ex-collègues, opiné du bonnet à un moment donné, quand on parlait de la nécessité d'intégrer puis de s'assurer... Mais est-ce que la façon dont le nouvel article 235 est formulé est assez claire, pour vous, d'assurer une obligation de baliser?

Nous sommes tous d'accord, hein, il ne s'agit pas d'une façon universelle, mais est-ce que vous êtes confiants que, tel que rédigé, l'article 235 est assez clair quant à l'obligation des commissions scolaires d'intégrer jusqu'au maximum, je dirais, les enfants handicapés?

La Présidente (Mme Blackburn): Oui, Mme Stoddart.

Mme Stoddart (Jennifer-Anne): Non, nous ne sommes pas confiants à 100 %, sinon on ne serait pas venus exprès pour vous parler de façon extrêmement précise sur le libellé d'articles, ce qu'on fait rarement. En général, on vous parle plutôt de principes. Cette fois-ci, on est allés au-delà à cause de notre expérience, je pense, assez vaste au cours des années dans les litiges portant sur la définition de la norme d'égalité et l'obligation d'intégration d'enfants handicapés. Donc, nous attirons à l'attention de la ministre une formulation qu'on pense pour rectifier quelques problèmes qu'on voit.

Je demanderais à mon collègue Me Philippe Robert de Massy, qui a une vaste connaissance de ces articles-là, d'expliquer plus précisément nos préoccupations.

La Présidente (Mme Blackburn): Oui, M. Robert de Massy.

M. Robert de Massy (Philippe): Sur ma connaissance, je serais beaucoup plus modeste...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Robert de Massy (Philippe): ...mais enfin. Je vais essayer, si vous me permettez, de partager avec vous l'expérience des dernières années et à la fois sur le plan judiciaire, ça me permettrait aussi peut-être de revenir très, très sommairement à cette mention des articles 96.12 et 96.13 et pourquoi on y attache de l'importance. C'est que, quand on a à interpréter une loi, si la disposition qui, au premier chef, doit établir la règle – ici, ce serait l'article 235 évidemment, vers lequel on se tournerait d'abord, c'est 234 et 235... 234: l'obligation d'adapter. D'ailleurs, nous avons remarqué que ce n'est plus «adapter aux besoins des élèves», mais c'est «adapter aux besoins de l'élève», et donc il y a un souci d'individualisation des formules d'adaptation qui est tout à fait approprié. Mais, si on se tourne vers 235 et qui ne procure pas une règle assez claire, on va regarder ailleurs dans la loi, partout dans la loi, et on va tomber... ceux qui veulent justifier le fait que des élèves, et surtout les élèves qui ont une déficience intellectuelle, puisque, par définition, leur écart par rapport à la norme va croître avec l'âge... ils vont trouver ces deux articles qui font un lien entre la rencontre des objectifs du programme et l'intégration en classe ordinaire, puisqu'on parle d'intégration en classe ordinaire, c'est-à-dire que cette année additionnelle qu'on leur ferait faire leur permettrait d'être intégrés en classe ordinaire. Ça veut dire que, s'ils ne rencontraient pas les normes du programme, ils ne pourraient pas être en classe ordinaire. Alors, c'est très, très indirectement. C'est simplement parce qu'on a mis là les mots «classe ordinaire» ou «classe régulière» que les deux articles posent problème.

Alors, nous suggérons qu'il faut éliminer cette difficulté-là parce que, sans aucun doute, à mon avis, et je vous parle d'expérience, ça servira pour nourrir l'argumentation des personnes qui disent: Mais, si l'élève ne peut pas fonctionner au même rythme que les autres, il ne doit pas être en classe ordinaire. Et c'est ça, le principal obstacle de l'intégration des élèves qui ont une déficience intellectuelle. Pour intégrer ces élèves-là, les commissions scolaires qui les intègrent tous ou presque, qui ont des taux d'intégration de presque 100 % – parce qu'il y en a, on les a évoquées tout à l'heure – elles tolèrent que des élèves dans une classe ne fassent pas tous exactement la même chose. Qu'il y ait des adaptations aussi qui soient faites au programme, etc.

Donc, c'est une question qui est au coeur, ça. C'est l'obstacle principal, cette question du programme et de la capacité de satisfaire ces exigences, parce que c'est toujours comme ça qu'on justifie. On dit: Bien, écoutez, c'est normal que l'élève soit dans une autre classe, il ne peut pas faire la même chose que les autres. Et donc il faut que nous arrivions à comprendre que, pour favoriser l'intégration de ces élèves-là, il faut absolument tolérer qu'on ait à leur égard des exigences qui soient moindres. Autrement, ils seront toujours à l'écart des autres.

Alors, l'article 235, tel qu'il était rédigé, il nous inquiète parce qu'on revient à une règle de 1981. En 1981, ce n'était pas du tout la même situation. On était juste après le rapport COPEX. On commençait à favoriser l'intégration, mais surtout pour les élèves qui avaient des déficiences physiques ou sensorielles. On n'était pas du tout rendu à penser à l'intégration pour les élèves qui avaient une déficience intellectuelle. Et quand on disait qu'il fallait le faire chaque fois que c'était à l'avantage de l'élève et de nature à favoriser ses apprentissages, c'est qu'on était encore, en 1981, à penser... la présomption est en faveur de la ségrégation pour ces élèves-là, au fond, et c'est exceptionnellement qu'on les intègre, si on pense que ça va être favorable pour eux.

Or, les choses ont changé. Le ministère de l'Éducation lui-même, en 1992, a dit: C'est favorable pour presque tous les élèves. Alors donc, il faut que ça se reflète dans la loi, ça. Il y a un changement de paradigme ici, si vous me permettez l'expression. On change de «beat» complètement là. On pense intégration. Avant ça, on pensait ségrégation pour les élèves handicapés. Alors, au fond, c'est ce que dit aussi la Cour suprême.

(22 h 30)

Je vous mets en garde contre une interprétation, que peut-être on pourrait être tenté de faire, de cette fameuse phrase où on dit que, sans être – comment ils disent? – sans être une présomption en faveur... On dit – vous l'avez au bas de la page 5: «L'intégration devrait être reconnue comme la norme d'application générale.» Remarquez ici qu'on reprend exactement les termes de la juge Rivet, en première instance, au Tribunal des droits de la personne, quand elle parlait de la norme d'égalité et ce que la Cour d'appel a refusé de retenir. Mais, ensuite, on dit: «La présomption...» on n'est pas prêt à reconnaître une présomption. Pourquoi il a dit ça, le juge Sopinka? et il l'explique dans son jugement, il dit: Je ne veux pas une présomption parce que je ne veux pas que, automatiquement, on mette les élèves handicapés en classe ordinaire. Les élèves handicapés, il faut évaluer leurs besoins. Donc, je ne veux pas une présomption, parce qu'à ce moment-là les commissions scolaires risquent de ne pas tenir compte des besoins d'adaptation et de les mettre en classe ordinaire sans adapter. Mais il dit: La norme doit être l'intégration, quand même. La norme, ça veut dire qu'on évalue l'élève à partir de la situation intégrée, on dit: Est-ce qu'on peut adapter la classe ordinaire?

C'est clair, dans la deuxième situation que vous avez à la page 6, la commission scolaire doit d'abord déterminer si le cadre intégré peut être adapté. Or, nous savons que, la plupart du temps, il peut être adapté, le cadre ordinaire. La preuve, c'est qu'il y a des commissions scolaires qui intègrent 100 % des élèves dont nous vous parlons. Alors, il faut s'étonner, s'inquiéter qu'il y en ait qui ont 0 % d'intégration pour cette même catégorie d'élèves.

Alors, lorsque ça n'est pas possible, de poursuivre le juge Sopinka, c'est-à-dire lorsqu'il y a des aspects du cadre intégré qui ne peuvent pas répondre à certains besoins de l'élève, là, on peut se tourner vers d'autres possibilités. Mais je suis convaincu que les personnes qui ont de l'expérience en matière d'adaptation scolaire conviendront que la plupart du temps on trouve des moyens d'adapter. Excusez-moi, peut-être, d'avoir pris beaucoup de temps.

La Présidente (Mme Blackburn): Alors, une autre question, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: Ce que je retiens, Mme la Présidente, c'est que peut-être il y aura des effets pernicieux un peu inattendus dans 96.12 et 96.13, quand il est lu en fonction quasiment des autres articles de loi. Mais j'insiste beaucoup sur la notion d'«inattendu». Je ne pense pas que...

M. Robert de Massy (Philippe): Ce n'est pas du tout ce qu'on...

Mme Stoddart (Jennifer-Anne): C'est ce qu'on convient, oui.

M. Copeman: C'est ça.

Mme Stoddart (Jennifer-Anne): On veut juste mettre le législateur en garde, au cas où cet effet inattendu, finalement, serait présenté en défense à un tribunal et que «de façon inattendue» devienne une norme jurisprudentielle.

M. Copeman: Oui, tout à fait. Très bien. Juste pour conclure là-dessus, encore une fois, je pense que votre témoignage est très important pour nous autres, et d'autant plus parce que je pense qu'on partage tous le même objectif. Il s'agit de savoir comment on se rend là. Et je pense que la mise en garde que vous faites, au niveau de l'article 235, doit être prise au sérieux par la ministre et ses légistes.

Moi, je vous dis, en tout cas, qu'on va suivre ça de près, rendu à l'étude détaillée, parce que je pense très humblement que vous avez fait la preuve que 235, tel que rédigé, laisse la porte trop ouverte à la notion ou permettra peut-être à des commissions scolaires de continuer la pratique qu'on voit présentement, de ne pas intégrer un assez grand nombre de leurs élèves handicapés.

Entre autres – mon collègue pourrait peut-être réagir, le député de Marquette – quand je regarde une conclusion à l'étude de Mme Garon, page 10, qu'au niveau secondaire la Commission des écoles catholiques de Montréal ne déclare aucune intégration pour ses 284 élèves du secondaire, élèves handicapés, je trouve ça désolant, il y a quelque chose qui ne va pas.

Une voix: ...

M. Copeman: Oui, je comprends, mais il y a quelque chose qui ne va pas.

Une voix: Vous avez raison.

M. Copeman: Il y a quelque chose qui ne va pas et il va falloir qu'on se fie sur votre témoignage expert pour corriger ça.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, M. le député. Le temps qui vous était imparti est écoulé, ce qui n'empêche pas, si vous souhaitez réagir brièvement aux remarques et aux propos du député de Notre-Dame-de-Grâce, que vous pouvez le faire. Ça va?

Mme Stoddart (Jennifer-Anne): Ça va.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien. Alors, quelques remarques de conclusion, Mme la ministre?

Mme Marois: Certainement, Mme la Présidente. D'abord, je veux remercier la Commission des droits pour la qualité de son mémoire et lui réitérer le fait que nous allons analyser chacune des propositions et voir comment nous pouvons resserrer un certain nombre d'articles dans le sens de la volonté que nous avons, en gardant cependant, et je pense que vous êtes d'accord aussi, une certaine latitude au sens d'être capable d'évaluer des situations qui seraient même néfastes à l'enfant ou au jeune, si on l'intégrait. Alors, je pense qu'il faut avoir ces balises. Mais je comprends bien aussi les réserves ou les craintes que vous nous exprimez quant à l'effet pervers de certains articles, si soit on ne les resserre pas ou on ne les replace pas dans un ensemble où on saisit bien leur portée. Alors, je vous remercie beaucoup de votre contribution.

La Présidente (Mme Blackburn): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: Merci, Mme la Présidente. Je n'ai pas grand-chose à dire, sauf que, vu que nous sommes devant le projet de loi sur l'instruction publique et devant la commission de l'éducation, ce que je constate, c'est que, tel que rédigé, vous ne donnez pas de note de passage à l'article 235, et il va falloir qu'on travaille sur l'amélioration pour lui donner une note de passage avant que le projet de loi soit adopté.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, M. le député. Dre Garon, Me Bosset, Mme Stoddart et M. Robert de Massy, merci de votre participation aux travaux de cette commission. Comme il y a un grand bout de chemin qui a été fait quand même depuis la première présentation que vous avez faite au moment de la première consultation, je ne doute pas que, s'il y a possibilité de renforcer les dispositions... La ministre a été tout oreille et extrêmement attentive. Alors, votre présence chez nous, même s'il est tard un peu, n'a pas pour autant été non attendue, elle a été écoutée et reçue. Merci.

Nous suspendons quelques instants, le temps de laisser aux témoins le temps de quitter la table et au prochain groupe de prendre place à la table.

(Suspension de la séance à 22 h 37)

(Reprise à 22 h 40)

La Présidente (Mme Blackburn): Mesdames, messieurs, nous reprenons nos travaux et, tel que prévu, nous entendrons maintenant l'Association des services de garde en milieu scolaire.

Alors, M. Lafrance, j'imagine, d'abord, je vous souhaite la bienvenue à cette commission. Et, même s'il est tard, vous le pourrez constater, ou peut-être l'avez-vous déjà constaté, ça n'entame en rien l'attention des membres de cette commission non plus que leur intérêt. Alors, je vous inviterais à présenter la personne qui vous accompagne. Vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire, et ce sera suivi d'une période d'échange avec les membres de la commission. Nous vous écoutons.


Association des services de garde en milieu scolaire du Québec (ASGEMSQ)

M. Lafrance (Daniel): Bonjour, madame. Mme Brigitte Guy, présidente de l'Association, c'est elle qui va faire lecture du mémoire.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien. Alors, Mme Guy, bonsoir.

Mme Guy (Brigitte): Bonsoir. Alors, compte tenu de l'heure tardive et sûrement de la capacité d'écoute qui est diminuée, de tout le monde, je vais m'exempter de vous faire lecture d'un texte et je vais vous exposer brièvement les principaux points qui, dans le projet de loi n° 180, nous posent problème et nous inquiètent.

Alors, d'entrée de jeu, je tiens tout de même à remercier les gens de cette commission de nous recevoir une deuxième fois pour nous permettre de clarifier ces différents points. Je commencerai par dire qu'à la lecture attentive du projet nous avons été très heureux de constater qu'on y retrouvait l'obligation aux commissions scolaires d'organiser à la demande du conseil d'établissement de l'école des services de garde dans leur établissement. C'est une demande que nous réclamons depuis plus de 10 ans, alors nous nous en réjouissons grandement.

Concernant les points sur lesquels on souhaiterait, bien sûr, avoir des éclaircissements, je me limiterai d'abord, dans un premier temps, à vous exposer, je dirais, quatre points majeurs et, dans un deuxième temps, à aller rapidement sur quelques articles qui, à notre sens, comportent des ambiguïtés.

La première interrogation concerne l'absence d'une définition des services de garde en milieu scolaire. On ne trouve aucunement de définition dans tout le texte de loi. Comme on vous le disait au mois d'août, quand nous sommes venus, on sait que la Loi sur les services de garde à l'enfance, dans laquelle les services de garde étaient enchâssés et étaient définis... Les services de garde comme les autres services étaient définis dans cette loi qui maintenant est abolie. Donc, nous nous retrouvons sans définition nulle part. Et vous savez que maintenant nous relevons essentiellement du ministère de l'Éducation. Et la loi qui va donc nous régir ne nous définit pas. Alors, nous, on aimerait avoir une explication là-dessus.

La deuxième interrogation, c'est: Où sommes-nous classifiés? Dans la loi, on parle de services éducatifs, on parle de services extrascolaires – c'est d'ailleurs une terminologie qu'on avait proposée – le terme a été retenu, mais on ne nous retrouve pas, les services de garde ne sont pas inclus dans les services extrascolaires. Mais où sont-ils? Alors, c'est un autre vide qu'on ne s'explique pas. Alors, on aimerait bien avoir une explication sur ce point-là également.

Un autre point concerne toute la gestion des services de garde. Dans notre mémoire, on proposait que les services de garde soient rattachés, si vous voulez, en termes d'obligation, aux conseils d'établissements. Alors, on avait suggéré que, dans les pouvoirs et fonctions reliés aux services de garde, on retrouve au niveau du conseil d'établissement, d'une part, et au niveau du directeur d'école les responsabilités qui s'y rattachent. Or, dans la loi, il n'y a rien non plus. Alors, la question qu'on se pose: Est-ce qu'on va continuer avec le statu quo?

On vous en avait fait part, la dernière fois. On sait qu'il y a des problèmes au niveau des commissions scolaires, qui, de plus en plus, se servent allégrement dans ces budgets à d'autres fins. Alors, la lecture qu'on fait actuellement de la loi: s'il n'y a rien de clarifié, ça veut dire que le bal continue. Et, pour nous, c'est devenu inacceptable. Alors, c'est une autre clarification qu'on aimerait avoir.

La quatrième concerne la qualité des services de garde. C'est une préoccupation qui est très grande pour nous. C'est une chose, de les mettre en place, mais ensuite de s'assurer – on est rendus à 930 services – que, dans ces services-là et ceux à venir, on ait un minimum de qualité... Aucune norme actuellement, non plus, ne nous régit. Alors, on aimerait savoir de la part de Mme Marois ce qu'il y a de prévu. Si rien n'apparaît dans la loi, apparaîtra-t-il quelque chose ailleurs? Et où est-ce que ce sera?

Donc, ce sont là les quatre interrogations majeures que nous avons. Outre ça, il y a quelques questions de clarification. Je ne sais pas si vous préférez, Mme Marois, qu'on discute d'abord de ces questions-là, puis on passerait à des questions qui sont, je dirais, un peu plus secondaires. C'est plutôt des formulations.

La Présidente (Mme Blackburn): D'accord. Vous pourriez peut-être terminer votre exposé et, au moment où la ministre réagira, elle pourra répondre aux différentes interrogations.

Mme Guy (Brigitte): D'accord. Alors, au niveau de l'article 42, en ce qui a trait à la composition du conseil d'établissement, ça aussi, on a été très heureux de voir que, nommément, il y a un membre du personnel des services de garde qui se retrouve au conseil d'établissement.

Par contre, à l'article 49, où il est question de nommer ce membre-là, il y a ambiguïté. Il est dit que les membres du personnel de soutien affectés à l'école et, s'il en est, les membres affectés aux services de garde se réunissent pour élire leur représentant. Et, là, on le retrouve au singulier. Alors, qu'est-ce qu'il faut comprendre? Est-ce qu'on retrouve à nouveau les membres du personnel de garde à l'intérieur du personnel de soutien ou s'ils ne font qu'un et qu'ils ne se nomment qu'un représentant? Pour nous, si ce n'est pas ce que voulait dire l'article 42, quatrième alinéa, il nous apparaît qu'il faudrait que ce soit libellé de façon plus claire à l'article 49.

Autre chose. À l'article 256, où il y a obligation d'organiser des services de garde, il est bien dit que ça doit être dans les locaux attribués à l'école. Or, on sait que, dans certaines écoles, il n'y a aucun espace. Et actuellement, il y a à peu près 13 % des services de garde existants qui ont loué des espaces soit dans un édifice de la municipalité ou dans le sous-sol de l'église, etc., donc ils ont trouvé à se loger ailleurs. Et notre crainte, par rapport au libellé de l'article, c'est que, si on dit qu'ils doivent être organisés dans les locaux attribués à l'école, dans certains milieux, on se serve de ça pour dire: On est désolé, mais on ne pourra pas mettre en place un service de garde, parce qu'il est dit qu'il faut que ce soit dans les locaux attribués à l'école. Donc, à mon avis, il faudrait peut-être dire: En priorité, ou encore: Il est possible de l'organiser aussi, à l'extérieur de ces locaux, s'il n'y a vraiment pas disponibilité.

Dernier article, c'est le 258, où on dit que la commission scolaire peut engager du personnel et conclure des ententes, toujours pour les fins du service de garde. Alors, qu'est-ce que cela signifie? Est-ce que ça veut dire qu'on peut engager des contractuels autres que le personnel syndiqué pour venir faire, par exemple, l'aide aux devoirs et aux leçons à l'intérieur du service de garde ou pour toute autre activité? Alors, nous, ça nous apparaît dangereux, et on aurait besoin aussi de clarification sur cet article-là. Alors, en gros, ça fait le tour des questions auxquelles on aimerait avoir des réponses.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, Mme Guy. Mme la ministre.

Mme Marois: Oui.

La Présidente (Mme Blackburn): Alors, vous avez là six questions.

Mme Marois: Oui. Alors, merci, Mme la Présidente. On va essayer de clarifier tout ce qui peut se clarifier sur les questions plus pointues, plus précises, puis je vais revenir ensuite aux questions de fond. Alors, je vous remercie de votre présentation.

(22 h 50)

D'abord, la question de représentation. Pour nous, il apparaît clairement et sans ambiguïté – on va revérifier pour être bien sûr, au plan légal, que ça dit bien ce que l'on veut dire – nous souhaitons, voulons et avons mis dans la loi le fait que le personnel du service de garde nomme un membre spécifique au conseil d'établissement. Et ce n'est pas du personnel autre que ceux du service de garde amalgamés avec les autres personnels. On se comprend? Donc, c'est vraiment un personnel qui vient du personnel des services de garde; ça, c'est très clair. Et d'ailleurs, s'il n'y a pas de services de garde, le poste est inoccupé, tel que la loi le dit, tel que la loi est libellée. On va s'assurer que c'est bien étanche. Mais, pour nous, c'est très clair, c'est ce qu'on souhaitait et c'est ce qu'on veut que la loi aussi, surtout, confirme.

Maintenant, offrir des services dans les locaux attribués à l'école. Encore là, la notion d'école ne signifie pas un bâtiment. On dit bien, «les locaux attribués à l'école», donc ça peut être des locaux à côté, de l'autre côté de la rue, etc. On se comprend aussi, ce n'est pas dans l'école nécessairement, parce que c'est attribué à l'école.

Mme Guy (Brigitte): Mais, si c'est un local qui appartient à la municipalité, vous...

Mme Marois: Cela pourrait être un local qui soit attribué à l'école par la commission scolaire pour les fins des services de garde en milieu scolaire, après entente avec la municipalité. À ce moment-là, ça deviendrait des locaux attribués à l'école aux fins des services de garde.

La Présidente (Mme Blackburn): Ça va?

Mme Guy (Brigitte): O.K.

Mme Marois: Donc, effectivement, nous ne signifions pas ici que ce sont les locaux intra-muros de la bâtisse, si on veut, mais les locaux de l'école, la notion d'école étant plus large que la bâtisse. Et c'est attribué, d'ailleurs. On a bien dit «attribué»; ça apporte aussi l'autre nuance.

Par ailleurs, pour nous, le personnel du service de garde est du personnel de la commission scolaire; on ne souhaite pas qu'il en soit autrement. Est-ce qu'on le dit assez clairement? Est-ce qu'il faut préciser? Mais cela est clair dans notre tête. Ça, ça fait la question sur le personnel, les locaux attribués à l'école, la nomination d'un représentant, je pense que c'étaient les questions plus précises qui étaient soulevées. Oui. Ça va.

Maintenant, par ailleurs, pour les aspects plus fondamentaux que vous nous apportez. D'abord, la première chose, quand même, je dirais, c'est un net progrès – parce que je me souviens d'autres batailles, à d'autres moments – qu'il soit fait obligation à la commission scolaire d'offrir des services de garde, alors qu'on a toujours mis cela comme une possibilité. Je pense qu'ici cela confirme l'importance que nous accordons à l'implantation de ces services. Nous ne retenons pas, à ce moment-ci, la notion de services de garde comme des services complémentaires ou comme des services éducatifs, au sens du régime pédagogique.

Nous nous sommes donné un pouvoir par la loi créant le ministère de la Famille et de l'Enfance et venant modifier la Loi sur les services de garde. Nous nous sommes donné un pouvoir d'établir par règlement des normes relatives à la prestation des services de garde en milieu scolaire. Et je réfléchis à cela depuis un certain temps. Vous nous avez fait des représentations auxquelles nous sommes sensibles. On a dû clarifier. Je vais vous dire, la question d'obligation, ça nous a pris un certain temps avant de la clarifier, avec ses conséquences, et d'en décider ainsi. Alors, ça a été une première étape à franchir.

Une fois celle-ci franchie, nous savons maintenant que nous devons préciser, par ailleurs, les rôles, les responsabilités, les tâches, les règles d'encadrement, le fonctionnement. Et nous sommes d'avis qu'effectivement il faudrait édicter un règlement pour ce faire, ce qui nous donnera évidemment, à ce moment-là, l'occasion de creuser davantage un certain nombre de questions que vous soulevez et d'attentes que vous avez.

Et je peux comprendre, à ce moment-ci, parce que je vous connais suffisamment pour savoir cela et je vous fréquente depuis suffisamment longtemps pour savoir cela, que vous soyez parfois un peu mécontents et un peu mal à l'aise avec ces manques de clarification ou ces orientations qui ne sont pas encore suffisamment claires. Mais Rome ne s'est pas construit en un jour, c'est à peu près tout ce que je peux vous dire, à ce moment-ci, compte tenu qu'il nous fallait d'abord prendre des décisions sur des orientations majeures. Je crois que nous les avons prises.

Il reste une autre étape, bien sûr aussi importante à franchir, qui est celle de mieux définir un certain nombre de règles, d'encadrements, de normes relatives à la prestation de services de garde en milieu scolaire. Et pour cela, je vous ai déjà dit à plusieurs reprises que nous allions nous rendre disponibles. Je crois qu'ayant accompli un certain nombre de tâches actuellement au ministère on pourra accorder une priorité très certainement à cette rédaction et à ce projet auquel je souhaiterais que vous soyez associés.

Je ne sais pas ce que je peux ajouter de plus, à ce moment-ci. Je reste toujours convaincue que ce que vous faites dans l'école pourrait être élargi. Et la prestation de services pourrait être offerte ou ouverte, par exemple, à l'aide aux devoirs et aux leçons et à d'autres aspects comme celui-là de la vie éducative de l'école.

Je ne sais pas si, à ce moment-ci, il y a d'autres commentaires ou questions. Dans la mesure du possible, j'essayerai d'y répondre. Mais je sais sans, je pense, trop me tromper, quelles sont un certain nombre de vos attentes. Votre mémoire présenté originellement était assez clair aussi sur certains aspects. Nous donnons réponse positive à certains de ces aspects, négative à d'autres, mais ce qui n'est pas suffisamment clair, à ce moment-ci, nous le clarifierons par l'intermédiaire de règlements, tel que le prévoit la loi, d'ailleurs.

La Présidente (Mme Blackburn): Mme Guy, est-ce que ça répond à toutes vos questions? Pas nécessairement de façon satisfaisante, mais est-ce que ça répond?

Mme Marois: Ça, c'est autre chose. Ha, ha, ha! Ça, c'est autre chose!

Mme Guy (Brigitte): Quand vous dites que votre intention est d'édicter un règlement, vous avez parlé de normes, d'encadrement, de fonctionnement, etc., est-ce à dire que c'est à l'intérieur de ce règlement-là que vous définirez aussi ce qu'est le service de garde? Parce qu'on n'a toujours pas de définition.

Mme Marois: Oui, c'est ça. Moi, je pense qu'il faudrait qu'apparaisse un article, sans doute, à la loi, pour nous... D'abord, il y a un article habilitant pour les règlements, qui est déjà à la loi du ministère, mais qui venait modifier la loi de l'instruction publique. Et la loi actuelle de l'instruction publique, malgré qu'elle soit vague, prévoit quand même en disant que la commission scolaire peut fournir des services de garde en milieu scolaire aux enfants qui sont dispersés dans ses écoles. Alors, il y a quand même un article qui, évidemment, définit peu de choses, il dit votre existence, mais la voie réglementaire pourrait nous permettre d'aller plus loin. Et, éventuellement, s'il faut remodifier l'article de loi, nous pourrions y revenir.

Mme Guy (Brigitte): Mais est-ce qu'il y a un empêchement, actuellement, de mettre une définition dans la loi?

La Présidente (Mme Blackburn): Mme la ministre.

Mme Marois: Pas vraiment, sauf qu'on resterait encore, à mon point de vue, à ce moment-ci, peut-être trop vague, compte tenu de ce que nous souhaiterions éventuellement faire avec les services de garde en milieu scolaire. Et j'aimerais mieux que, dans le fond, dans ce cas-là, nous prenions le temps nécessaire, quitte à ce que nous revenions éventuellement amender la loi, si ça s'avérait utile et souhaitable de le faire.

La Présidente (Mme Blackburn): Pour le moment, si je comprends la ministre, vous allez procéder par le biais de règlement.

Mme Marois: C'est ça.

(23 heures)

La Présidente (Mme Blackburn): Bien. M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Merci, Mme la Présidente. Je vais poser quelques questions, faire quelques commentaires, mais je veux m'assurer qu'il y a assez de temps pour mon collègue le député de Jacques-Cartier, critique en matière de politique familiale et responsable de toute la question des services de garde, avec le consentement de la ministre.

La Présidente (Mme Blackburn): Je vous taquine. Sans doute qu'ils vont accorder leur consentement. Alors, vous faites votre présentation, M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Je vais faire mes commentaires, maintenant que j'ai son consentement.

Mme Marois: Non, non, je suis d'accord pour que votre collègue de Jacques-Cartier intervienne, bien sûr.

M. Ouimet: Dans la lettre du 27 novembre que vous adressiez à la ministre de l'Éducation...

La Présidente (Mme Blackburn): ...

Mme Marois: Non, non, je pense que c'est un autre événement.

M. Ouimet: Et une autre lettre qui vous a été adressée le 27 novembre, j'imagine? Vous n'y alliez pas avec le dos de la cuillère, en indiquant que les intervenants en services de garde en milieu scolaire sont très insatisfaits et au bord de la colère. Vous faites référence à l'absence d'une définition de «service de garde en milieu scolaire». J'étais content d'entendre votre question à la ministre. Pourquoi ne pas l'inclure à ce moment-ci, alors que...

Vous savez, la dernière fois que nous avons modifié la Loi sur l'instruction publique, ça remonte à un certain nombre d'années. On a adopté le projet de loi 109. Mais on ne fait pas ça régulièrement à toutes les sessions, toucher à une loi, il faut le faire lorsque l'occasion se présente. Et l'occasion se présente. Et je pense que la ministre ne devrait pas rater l'occasion. Parce que vous avez soulevé un grand nombre de questions, auxquelles je ne suis pas sûr que vous ayez obtenu des réponses claires.

Vous faites référence aussi, dans votre lettre, à l'absence, depuis plusieurs mois, de consultation ou de concertation de la part de la ministre sur l'ensemble de ces questions-là. Le problème, avec des règlements, vous le savez, c'est que les règlement ne sont pas adoptés à l'Assemblée nationale, mais sont adoptés par le gouvernement, par le Conseil des ministres. Et l'opposition n'est pas là pour exercer son rôle de vigilance et de surveillance à l'égard du gouvernement.

La Présidente (Mme Blackburn): M. le député, là-dessus, je suis obligée de corriger l'impression qu'on risque de laisser. Il peut y avoir des commissions parlementaires sur des règlements. Ce n'est pas courant, ça ne se fait pas chaque fois...

M. Ouimet: Je n'en ai pas vu en trois ans, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Blackburn): Mais, sur demande d'un député, par exemple, je l'ai déjà fait, alors que j'étais à l'opposition, et je l'avait obtenu. Pourquoi je sais que ça se fait? Parce que le règlement est publié, il a 45 jours pour réagir.

M. Ouimet: Vous aviez un bon parti face à vous, à ce moment-là.

La Présidente (Mme Blackburn): Et, pendant ces 45 jours, il y a possibilité...

M. Ouimet: Vous aviez un bon parti face à vous.

La Présidente (Mme Blackburn): ...de demander qu'il y ait la tenue d'une commission parlementaire. Mais il y a toujours la possibilité, pour les organismes et personnes concernées, de réagir au règlement. Je vous en informe aussi, en même temps, parce que c'est important que vous saisissiez l'occasion, quand elle se présentera, de réagir au projet de règlement.

M. Ouimet: Vous êtes très gentille. Il y a d'autres questions que vous avez également soulevées concernant la qualité des services qui doivent être dispensés dans les services de garde en milieu scolaire. J'aimerais peut-être que vous puissiez élaborer là-dessus, au niveau de la qualité des services, les ratios entre les personnes responsables du service et les enfants qui sont sous leur responsabilité. Et puis, par la suite, je vais céder la parole à mon collègue, qui va y aller avec des questions beaucoup plus pointues, plus techniques sur le projet de loi.

La Présidente (Mme Blackburn): Oui, alors, c'est M. Lafrance? Nous vous écoutons.

M. Lafrance (Daniel): Vous avez abordé la question sous deux angles. Vous avez fait référence à une lettre de Mme Guy, au sujet de l'insatisfaction des éducatrices et des éducateurs en services de garde en milieu scolaire. Je pense qu'il faut situer ça dans le contexte de ce projet de loi et de la politique qu'a dévoilée la ministre, au printemps dernier, sur toute l'intervention auprès des enfants de quatre ans, la création des CPE, le changement, la création du ministère de la Famille, les maternelles cinq ans à temps plein par le MEQ, etc. Ça, ça crée un changement fondamental de travail pour les gens qui sont en scolaire.

On sait que la clientèle des enfants de cinq ans qui fréquentaient à mi-temps l'école jusqu'à juin 1997 était donc présente aux services de garde pour le reste de la journée. Alors, ça, ça été perçu chez certains comme un désaveu du travail qu'ils faisaient. Et la démarche de l'Association, suite à tout ça, ça a été de dire: O.K., sur l'ensemble, on est d'accord avec cette politique-là, c'est une politique qui nous apparaît intéressante et pour les quatre ans et moins et pour les cinq ans, mais on continue de croire qu'il faut qu'il y ait des gens intéressés, intéressants, formés, qui font un travail de qualité, qui assurent plus que du gardiennage auprès des enfants en scolaire. Et un des moteurs pour les aider à être là, à avoir le goût d'être là, c'est qu'on leur offre un terrain de travail, des possibilités, un champ de pratique qui a été réduit par la politique de Mme Marois.

Alors, nous espérons un développement, une attribution de mandat aux services de garde en milieu scolaire, qui va servir de moteur, comme je le dis, pour que des gens restent, que des gens de qualité, bien formés, intéressés par l'éducation demeurent dans ce domaine de travail là et non pas qu'ils quittent parce qu'ils n'y a pas d'avenir et parce qu'il n'y a pas de champ de pratique. Alors, il y a une insatisfaction chez certains, il y a une angoisse chez d'autres, de savoir: Mais quel avenir j'ai, moi, dans ce milieu-là, si on ne définit pas mieux ce que j'ai à y faire? d'une part.

Pour ce qui est d'un règlement à venir, je pense qu'on achète l'idée qu'il peut y avoir un règlement qui va définir ces choses-là. Nos craintes sont que... Vous savez que l'Office avait ce pouvoir de réglementation là depuis 1980 et quelques et il ne l'a jamais exercé. Donc, on est tout à fait ouvert à l'idée qu'un règlement vienne. Mais viendra-t-il? Parce que le pouvoir de réglementation ne fait pas qu'il y a une réglementation. Pour nous, c'est toute la question, donc: Quand ça va arriver? Si vous nous dites: Dans l'année, dans les deux ans, on va parler de ça, alors on vous dit: O.K., c'est correct, on va attendre. Mais, si ça prend les 17 années depuis que ce pouvoir a été accordé à la ministre qui était avant la ministre responsable de l'Office, là, on se dit: Non, ça ne marche pas. On peut dire aux gens que nous représentons: Laissons le temps aux choses de s'installer. Mais on ne peut pas leur dire: Ça se pourrait que ça arrive, mais on ne sait pas quand. Cette insatisfaction-là, elle est réelle puis elle est assez vertement exprimée, par moments.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien. Maintenant, je reconnaîtrais M. le député de Jacques-Cartier, avec le consentement des membres de cette commission, à titre de porte-parole officiel de l'opposition dans le dossier des services de garde. C'est bien ça?

M. Kelley: Oui. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Bienvenue. J'ai juste une couple de questions. Je partage beaucoup les inquiétudes que vous avez exprimées quant au manque de définition. C'est bien beau de mettre une obligation dans la loi, mais obliger de faire quoi? Et je pense qu'il y avait un article fort intéressant dans Le Devoir , au mois d'octobre, selon lequel les services de garde en milieu scolaire oscillent entre le meilleur et le pire. Et il y a toute une gamme de questions, nous avons déjà discuté de ça, quant à la formation des professionnels, quant aux locaux – il n'y a pas d'exigences – quant aux ratios qui sont mis en place.

Alors, avez-vous des recommandations plus précises quant à ces trois exigences? Si on se dirige vers une définition, c'est quoi, l'obligation qui est créée dans ce projet de loi? C'est quoi, un service de garde en milieu scolaire?

La Présidente (Mme Blackburn): Mme Guy.

Mme Guy (Brigitte): La définition que nous avons proposée dans notre mémoire nous apparaissait assez large. Mme Marois, tout à l'heure, disait: Si on met une définition maintenant, peut-être que – ce que j'en comprenais – on va se limiter si, dans l'avenir, on veut lui donner un sens plus large. Mais je vais me permettre de vous la lire et, à notre avis, elle est suffisamment large pour donner de la place à beaucoup de développement.

(23 h 10)

Alors, on disait: «Un service de garde en milieu scolaire, c'est un service qui reçoit des enfants du préscolaire et du primaire en dehors des heures et des jours de classe, de façon régulière ou sporadique et à qui il offre un encadrement et un programme d'activités favorisant leur développement global. Il assure la santé, la sécurité et le bien-être des enfants qu'il reçoit, en complémentarité avec la famille.»

Alors, si on envisage une perspective d'un rôle élargi, qui serait une prise en charge d'un ensemble de services dans l'école, à notre avis, la définition qu'on en donne là ne nous empêcherait pas de le faire. Si, par exemple, on vous disait: Prendre en charge l'encadrement et l'animation des dîners, ça fait partie de la définition qu'on a ici pour assurer la sécurité, le bien-être de l'enfant, l'éducation, si on nous confiait le parascolaire, l'aide aux devoirs et aux leçons, ça pourrait être inclus dans cette définition aussi. Et du même coup, on pourrait au moins dire qu'actuellement avec la loi, il y a un minimum de définition qui nous apparaît large, mais qui ne nous empêcherait pas par la suite de l'assortir d'un règlement où les normes de qualité seraient davantage précisées.

Et ça m'amène à répondre à la deuxième partie de votre question. Oui, on a réfléchi depuis un certain nombre d'années sur ce que pourraient être ces normes de qualité. Ce qu'on se dit: on ne voudrait pas être régis par un règlement qui est aussi rigide, je dirais, que celui qu'on connaît en garderie, pour une bonne raison, c'est qu'on retrouve ce service-là à l'intérieur d'une maison d'enseignement qui, a priori, devrait avoir la préoccupation des enfants. Donc, quand on parle de normes, on parle d'une formation minimale collégiale pour les gens qui y travaillent, on parle d'un ratio qui soit respecté, 1-15 pour le préscolaire et 1-20 pour le primaire, on parle également d'espace adéquat.

On l'a soulevé, le problème. Les services de garde grandissent, grossissent, grossissent, et on est très exigu. Est-ce que c'est ça, une qualité de services, d'avoir 150 enfants qui sont dans des bouts de corridors ou des petits dans un local de classe? Moi, je pense qu'il va falloir qu'on prenne des décisions là-dessus aussi. Si on consent que le service de garde accueille, encadre et fournit des services à un nombre important d'enfants, il va falloir qu'on leur fasse de l'espace. Et ça, c'est laissé à la volonté des milieux. Donc, c'est des éléments de réponse. Bien sûr qu'il faudrait s'asseoir puis le regarder davantage en profondeur. Mais c'est les éléments essentiels qu'on verrait dans une réglementation.

M. Kelley: Et l'autre chose que je trouve manquante dans le projet de loi, c'est le rôle des parents. Parce qu'on le voit dans l'article 42, on parle de mettre une place sur le conseil d'établissement pour un représentant du personnel d'un service de garde en milieu scolaire. Mais, pour une certaine équité, parce que souvent il y a deux côtés à une histoire, et, je pense, si un membre du personnel est là, c'est important d'avoir un représentant des parents utilisateur des services au conseil d'établissement. Et c'est quelque chose qu'on ne voit pas. Peut-être, parmi les parents qui sont élus sur le conseil d'établissement, il y aura un utilisateur, mais ce n'est pas nécessaire. Et, moi, je trouve que c'est un certain équilibre qu'on veut établir, s'il y a un membre du personnel sur le conseil d'administration. Je pense qu'il faut laisser une place pour les parents aussi, étant donné l'importance qu'on a donnée aux parents dans le projet de loi que nous avons adopté avant l'été concernant les garderies, où le rôle des parents était primordial.

Mme Guy (Brigitte): À cet égard-là, dans notre mémoire du mois d'août, on demandait que, parmi les parents qui seraient au conseil d'établissement, il y en ait minimalement un qui soit un utilisateur du service de garde. Et on déplore que ça n'ait pas été retenu.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien. Alors, 30 secondes.

M. Kelley: Pour les légistes qui sont ici, sur le point qu'on a soulevé, les locaux, je veux attirer l'attention de la ministre sur la version anglaise de ça. À l'article 88, le nouveau 256, on parle de: «At the request of the governing board of a school, a school board must organize, in the manner agreed with the governing board, childcare on school premises». C'est beaucoup plus limitatif que la définition que la ministre a donnée. L'explication qu'elle a donnée en français à «locaux attribués», elle a dit que ça peut être dans le sous-sol de l'église, à côté, ou dans une... Mais, en anglais, c'est précis, c'est «on school premises». Alors, peut-être qu'il y a un arrimage à faire, si on veut que la version anglaise donne la définition plus large que la ministre a donnée dans sa réponse tantôt.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien. Merci, M. le député de Jacques-Cartier. Mme la ministre, en conclusion.

Mme Marois: Alors, en conclusion, je vais quand même me permettre une petite remarque, qui va être la suivante. Je vais amener un amendement pour prévoir que, dans l'article 454.1, qui était l'article modifié en juin dernier par la loi de la famille et de l'Office des services de garde... Je vais ajouter un amendement qu'on va formuler correctement, pour être bien certain, en disant que le gouvernement peut, par règlement, définir la nature, les objectifs et établir des normes relatives à la prestation des services de garde en milieu scolaire. On va proposer cela. On reviendra, au moment où il y aura une intervention possible lorsque nous aborderons la question des services de garde. Et j'ai vérifié avec mon équipe. Je m'engage formellement, Mme la Présidente, à ce que, d'ici le début juin, nous ayons travaillé à une proposition et à un projet de règlement et à ce que ce projet soit prêt pour le début juin concernant les services de garde en milieu scolaire. Et je suis imputable et généralement responsable, alors...

La Présidente (Mme Blackburn): Alors, pour votre information, le projet de règlement est obligatoirement publié dans la Gazette officielle , un délai, si ma mémoire est fidèle, de 45 jours au cours duquel vous pouvez faire des recommandations, des propositions à la ministre pour fins de modification, avant qu'il ne soit publié dans sa forme finale.

Mme Marois: Je pense que c'est tout à fait juste, et c'est pertinent que Mme la Présidente le rappelle, mon intention étant, cependant, que vous soyez consultés tout au long de la préparation de ce règlement.

Mme Guy (Brigitte): Est-ce que vous pourriez, Mme Marois... Je m'excuse, le libellé, quand vous dites que vous allez amender...

Mme Marois: Oui, mais là je suis un peu prudente parce que mes juristes se méfient toujours un peu de moi, en disant: Mettez bien les caveats utiles, parce que la rédaction finale pourrait peut-être être un peu différente, pour être sûr que tout est correct par rapport à nos règles de rédaction des lois. Mais cela pourrait se lire comme suit ou dans cet esprit-là: Le gouvernement peut... Ça, ça existe déjà dans notre loi, à 454.1. Alors, on ajouterait, dans le fond: Définir la nature et les objectifs.

L'article, tel qu'il est libellé, il dit ceci: «Le gouvernement peut, par règlement, établir des normes relatives à la prestation des services de garde en milieu scolaire.» Ce qui est déjà là, c'est: «Le gouvernement peut, par règlement», et nous ajouterions: définir la nature, les objectifs et établir des normes relatives à la prestation des services de garde en milieu scolaire.

Mme Guy (Brigitte): Et tout ce qui est relatif à la gestion...

Mme Marois: Apparaîtrait...

Mme Guy (Brigitte): ...apparaîtrait là-dedans.

Mme Marois: Voilà, dans les règlements.

La Présidente (Mme Blackburn): Dans les règlements. Bien. En conclusion, M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Que je vais partager avec mon collègue le député de Jacques-Cartier. Je le dis amicalement à la ministre, j'espère pour les représentants qui sont nos invités que la ministre sera ministre de l'Éducation jusqu'au mois de juin et que, si c'est un engagement, ça soit un engagement au nom du gouvernement. Parce qu'il y a des rumeurs, vous savez, qui circulent sur la colline parlementaire. Alors, je ne voudrais pas que vous partiez avec un engagement d'une personne, j'espère que ça sera au nom du gouvernement. Et je vais céder la parole à mon collègue de Jacques-Cartier.

La Présidente (Mme Blackburn): Avec les sondages, ça me surprendrait qu'il soit renversé.

M. Ouimet: On te voit à la santé, semble-t-il, Pauline.

Mme Marois: Je ne sais pas à quelles rumeurs...

La Présidente (Mme Blackburn): Alors, quelques brèves remarques, Mme Guy, en conclusion?

Mme Guy (Brigitte): Alors, on vous remercie. Je peux dire que votre dernière conclusion nous réjouit, et c'est ce qu'on voulait entendre. Et on va être très contents d'être associés à la démarche. Merci.

(23 h 20)

La Présidente (Mme Blackburn): Alors, merci, Mme Guy, M. Lafrance. Comme vous avez pu le constater, ce que je vous disais au moment où je vous donnais la parole, ce n'est pas parce que l'heure est tardive que l'attention n'est pas entièrement là. Et, comme vous avez pu le constater, votre participation aux travaux de cette commission aura été fort fructueuse. Merci.

La commission de l'éducation ajourne ses travaux jusqu'à demain, 5 décembre, à 11 heures, dans la même salle. Merci et bonne fin de soirée.

(Fin de la séance à 23 h 21)


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