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Version finale

34e législature, 3e session
(17 mars 1994 au 17 juin 1994)

Le mercredi 11 mai 1994 - Vol. 33 N° 6

Étude détaillée du projet de loi n° 2, Loi concernant certaines dispositions dérogatoires dans des lois relatives à l'éducation


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Table des matières

Remarques préliminaires

Motion proposant de tenir des consultations particulières

Étude détaillée

Remarques finales


Autres intervenants
M. André J. Hamel, président
M. André Beaudin
Mme Huguette Boucher Bacon
M. Bernard Brodeur
M. Henri-François Gautrin
*M. Côme Dupont, ministère de l'Éducation
*Témoin interrogé par les membres de la commission
________________

Journal des débats


(Onze heures trente-neuf minutes)

Le Président (M. Hamel): Alors, je déclare la séance de la commission de l'éducation ouverte. Le mandat de la commission est de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 2, Loi concernant certaines dispositions dérogatoires dans des lois relatives à l'éducation. M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?

Le Secrétaire: Il n'y a aucun remplacement, M. le Président.

Le Président (M. Hamel): Merci, M. le secrétaire. M. le ministre, avez-vous des remarques préliminaires?


Remarques préliminaires


M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: Fort brièvement, M. le Président, puisqu'on a discuté de cette question en Chambre pour l'adoption en première lecture, la semaine dernière. Alors, c'est une décision de renouveler une clause garantissant les droits historiques des catholiques et des protestants pour les cinq prochaines années compte tenu du fait que, dans notre réalité scolaire, une très grande majorité de nos concitoyens sont membres de ces deux communautés religieuses. Et c'est là l'esprit qui doit présider à notre débat. On a quand même démontré clairement en Chambre que la liberté de religion était tout à fait respectée dans notre système scolaire au niveau de l'école particulièrement et que nous voulions protéger les droits des parents à avoir la capacité d'avoir un contrôle réel sur leur projet éducatif local dans chacune de leurs écoles. Alors, c'est là les motifs que nous avons pour faire en sorte de demander à la Chambre d'adopter une clause «nonobstant» sur ces cinq lois qui touchent le ministère de l'Éducation.

Le Président (M. Hamel): Merci, M. le ministre. M. le député de Lac-Saint-Jean, avez-vous quelques remarques préliminaires?


M. Jacques Brassard

M. Brassard: Oui. M. le Président, j'ai une vingtaine de minutes, je suppose, j'imagine, pour mes remarques préliminaires?

Le Président (M. Hamel): Vingt minutes.

(11 h 40)

M. Brassard: M. le Président, je ne veux pas prolonger indûment le débat, mais il reste que, même si c'est un projet de loi qui comporte peu d'articles, c'est un projet de loi qui, je dirais, se situe dans un débat beaucoup plus large qui a cours au Québec, qui a repris au Québec d'une certaine façon. Ce débat-là est de nouveau apparu au moment où la Cour suprême a rendu son jugement, en juin 1993. Mais c'est clair aussi que, à partir du moment où le gouvernement a déposé son projet de loi, le projet de loi 2 visant à reconduire la clause dérogatoire prévue dans la Charte canadienne des droits, ça a relancé aussi ce débat-là. C'est un débat de fond au sein de la société québécoise et c'est un débat qu'on devra tenir, qui devra avoir non seulement un caractère public, mais qui devra permettre à tout le monde de se prononcer parce que ça implique évidemment des valeurs fondamentales dans une société comme la nôtre, et on ne pourra pas indéfiniment l'éviter.

La Cour suprême, rappelons-le, s'appuie forcément sur la Constitution canadienne. On n'a pas le choix. Ses jugements, ce n'est pas de la poésie, ce n'est pas de la fiction, non plus. La Cour suprême a à interpréter la Constitution canadienne, en l'occurrence, l'article 93 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique qui date, comme on le sait, de 1867. Et c'est évident que, dans son jugement, elle ne considère pas comme illégale ou inconstitutionnelle la mise en place de commissions scolaires linguistiques. On peut s'en réjouir, c'est déjà un acquis intéressant, mais il reste qu'elle est obligée de tenir compte de l'article 93 et, donc, à ce moment-là, de reconnaître qu'on ne peut pas toucher aux commissions scolaires confessionnelles, particulièrement celles de Québec et de Montréal. Et le droit à la dissidence est également clairement reconnu, le droit à la dissidence pour les minorités religieuses catholiques et protestantes, et ça, sur tout le territoire québécois. Bon!

Alors, à partir de ce moment-là, je pense qu'il faut à la fois en évaluer et en identifier les conséquences: ça va donner quoi, ça, maintenant, la mise en vigueur de la loi 107, enfin, des dispositions concernant les structures scolaires? Ça va donner quoi sur le territoire québécois, particulièrement à Montréal? On va se retrouver avec quelles structures scolaires et ça va avoir quoi comme impact concret pour les élèves et les parents? Et là, c'est évident que c'est à ce niveau-là que se situe vraiment le débat, parce qu'on en arrive avec des conséquences que je qualifie d'absurdes, parce que ça ouvre la voie...

Puis peu importe ce que le comité Kenniff va déposer comme recommandations. Lui aussi, le comité Kenniff ne peut pas faire abstraction de la loi, pas plus qu'il ne peut faire abstraction du jugement de la Cour suprême. Il est obligé de fonctionner à l'intérieur de ces balises et, donc, sa marge de manoeuvre n'est pas absolue, bien au contraire. Donc, il ne pourra pas faire des recommandations qui font fi à la fois du jugement de la Cour suprême et des dispositions de la loi. Il ne pourra pas.

Là, c'est clair que, quant à nous, et on n'est pas seuls à le dire, il y a toute une série d'organisations et d'intervenants dans le monde de l'éducation, encore une fois, particulièrement à Montréal, qui, s'exprimant sur le sujet, indiquent et prévoient que l'on se dirige carrément vers ce que Jean-François Lisée appelait dans son livre «Le Tricheur» – à un moment donné, il utilise beaucoup d'images – l'«Absurdistan». Il parlait de l'«Absurdistan». Il parlait évidemment d'un autre sujet et d'un autre dossier, de Bélanger-Campeau et de ses suites. Je ne sais pas où il se situe sur la carte géographique, mais il parlait de l'«Absurdistan». Et j'ai l'impression que, dans le domaine des structures scolaires, à cause du carcan constitutionnel et des dispositions de la loi 107, on va se retrouver en «Absurdistan».

D'abord, à cause de la superposition inévitable des structures confessionnelles et des commissions scolaires linguistiques. Parce que, là, c'est ça, la Cour suprême a dit: Oui, vous pouvez mettre en place des commissions scolaires linguistiques, mais, attention, ne touchez pas aux commissions scolaires confessionnelles qui sont là. Donc, ça va se superposer, forcément. Si on va de l'avant avec des commissions scolaires linguistiques, elles vont s'ajouter à celles qui sont là. Alors, là, on arrive avec une superposition, une multiplication de structures scolaires à la fois confessionnelles et linguistiques et, forcément, chacune de ces structures va avoir son réseau d'écoles. Elle va avoir des écoles sous sa responsabilité.

Alors, la commission scolaire catholique va continuer d'avoir ses réseaux, francophone et anglophone, deux. La commission scolaire protestante va continuer d'avoir son double réseau: francophone et anglophone protestant. Puis, là, les commissions scolaires linguistiques – il y en a une anglophone, puis il y en a une francophone – elles vont avoir leur réseau public d'écoles neutres, laïques, non, peut-être oui, mais peut-être plus aussi parce qu'il y a des dispositions dans la loi qui font en sorte, en vertu de je ne sais pas quel article, 200, 221, 222, que la commission scolaire linguistique pourrait avoir à la fois des écoles laïques, mais des écoles à statut catholique et des écoles à statut protestant.

Il peut y avoir trois réseaux dans une commission scolaire linguistique, plus trois réseaux du côté de la commission scolaire anglophone. Là, ça commence à faire du monde à la messe, hein? Ça commence à faire drôlement beaucoup de réseaux d'écoles publiques. Je ne compte pas les écoles privées qui sont quand même assez nombreuses, les écoles juives, bon, et toutes les autres écoles privées. Là, c'est vraiment l'«Absurdistan», pour parler comme Jean-François Lisée. On est en pays «Absurdistan».

Et je le signalais dans mon intervention en deuxième lecture: Quand on pense que les sociétés ont des problèmes financiers, que les États ont des problèmes budgétaires, que les ressources sont de plus en plus rares, qu'on vit dans une économie de rareté de ressources, donc, qu'il faut rationaliser, couper, restreindre, réduire les dépenses. Là, si on va jusqu'au bout de la logique de la loi et de la logique de la décision de la Cour suprême, si on va jusqu'au bout de cette logique-là, c'est évident qu'on n'est pas dans un processus de rationalisation, c'est évident. C'est clair qu'on n'est pas dans un processus de simplification, non plus. Là, ça va coûter sans doute plus cher. On ne me fera pas accroire que...

Si vous ajoutez des structures et si vous n'en enlevez pas, si vous ajoutez des structures à celles qui existent déjà, si vous multipliez le nombre des réseaux d'écoles, c'est clair que ça va coûter plus cher à gérer, ça va coûter plus cher à administrer. Ça entraîne des coûts. Alors, bon, on va à l'encontre, là, d'un mouvement qu'on retrouve un peu partout, dans toutes les sociétés modernes et contemporaines, qui consiste à rationaliser les dépenses et à les restreindre le plus possible. Donc, je pense, M. le Président, que, sur le strict plan administratif, ce n'est pas une voie souhaitable à prendre que celle d'appliquer la loi 107 dans ses dispositions concernant les structures scolaires; ce n'est pas une bonne voie à prendre.

(11 h 50)

Deuxièmement, et c'est là-dessus qu'insistent toujours la plupart des intervenants, c'est toute la question de l'école montréalaise, parce que, au fond, c'est l'école montréalaise qui est surtout impliquée. Ailleurs au Québec, on peut toujours s'arranger; même dans la ville de Québec aussi, mais, à Montréal, là, l'école montréalaise est directement mise en cause, parce que l'école montréalaise s'est vu accorder, depuis quelques années – ça fait quand même longtemps, mais surtout depuis quelques années – une mission, une vocation tout à fait majeure dans la société québécoise, qui est celle de l'accueil et de l'intégration des enfants d'immigrants.

C'est là que ça se fait. C'est là que ça se fait, ce n'est pas à Alma, ce n'est pas à la commission scolaire du Lac-Saint-Jean ou à la commission scolaire de la Mauricie que l'accueil et l'intégration des enfants d'immigrants se fait. Il y en a peut-être quelques-uns, mais c'est à Montréal que ça se fait, c'est là que ça se fait. Et, déjà, il y a des problèmes actuellement. Déjà, il y a des problèmes d'accueil et d'intégration, des problèmes de taille. Il suffit de lire l'avis du Conseil supérieur de l'éducation sur cette question précise et ses recommandations. Il suffit de prendre connaissance aussi de certains documents ou déclarations du Conseil scolaire de l'île de Montréal, de la CECM. Dans beaucoup d'écoles montréalaises, il y a un gros problème; c'est le problème de la densité des enfants d'immigrants. Il y a certaines écoles où il y en a plus de la moitié qui sont originaires de diverses communautés. Alors, là, ça risque de compromettre...

Déjà, actuellement, ça risque de compromettre la mission qu'on confie à l'école d'accueillir et d'intégrer à la société québécoise les enfants d'immigrants. Si, dans l'école, il n'y a pas suffisamment d'enfants – utilisons l'expression, pour les besoins de la discussion – de Québécois de souche, s'il n'y en a pas suffisamment à l'école, on aura des problèmes à intégrer. L'intégration va se faire difficilement.

Ce que les intervenants disent – et je pense qu'ils ont raison de le signaler – c'est que, si on applique la loi 107, ça va empirer, ce phénomène-là. Ce phénomène va s'aggraver. Pourquoi? Parce que les francophones ou les Québécois de souche vont avoir plutôt tendance, peut-être, possiblement – je pense que c'est une hypothèse qui est tout à fait plausible, c'est probablement ça qui arriverait – à inscrire leurs enfants dans les écoles de la Commission des écoles catholiques, donc dans la commission scolaire confessionnelle. Et les Québécois appartenant à des communautés ethniques ou qui sont arrivés récemment, les immigrants, vont avoir plutôt tendance à les inscrire, évidemment, dans les écoles de la nouvelle commission scolaire linguistique. Là, il risque de se produire le phénomène suivant, c'est qu'on va avoir des écoles où ce n'est plus 50 %, ce qui cause déjà un problème d'intégration, mais où ça va être 75 %, peut-être 80 % et plus d'enfants d'immigrants qui vont être là. Là, ça veut dire que la mission d'intégration et d'accueil est impossible à assumer; elle est tellement difficile à assumer que ça devient finalement impossible.

C'est ce phénomène et ce danger-là, en quelque sorte, qui a été largement signalé par beaucoup d'intervenants. Il y a même une coalition qui s'est formée de toute une série d'organismes qui demandaient de ne pas appliquer les dispositions de la loi 107 telles qu'on les retrouve actuellement.

Alors, moi, je pense que, d'abord, il faut faire un débat au Québec. Il faut que le débat se fasse. Le débat doit se faire, pour ce qui est de la structure, sur la question suivante: Est-ce qu'on accepte qu'au Québec les structures scolaires soient déconfessionnalisées, complètement déconfessionnalisées, et qu'on ne retrouve, sur le territoire québécois, y compris Montréal, que des structures déconfessionnalisées et, sur une base uniquement linguistique, des commissions scolaires linguistiques seulement? C'est ça, le premier débat de fond à faire, et on en a déjà longuement débattu à maintes reprises, mais il n'est pas réglé, ce débat-là. Il va falloir qu'on le règle et, moi, je... Vous connaissez notre position, M. le Président, celle de mon parti aussi; au dernier Conseil national, il y a eu une résolution dans ce sens-là qui a été adoptée unanimement. C'est très clair que, pour nous, si on veut un système scolaire moderne, adapté à l'état de la société québécoise, à son stade d'évolution, c'est évident qu'il ne faut que des commissions scolaires linguistiques, pas d'autres choses, des commissions scolaires linguistiques seulement.

L'autre débat, évidemment, de fond, aussi, qui doit se faire également, c'est, bon, le statut de l'école. Ça aussi, il doit se faire, ce débat-là et, pour qu'il se fasse, bien, il faut qu'il se fasse démocratiquement, évidemment. C'est clair qu'on ne peut pas le faire en vitesse, à toute vapeur, en catimini, parce que c'est des questions trop majeures pour ça. Elles sont majeures. Moi, je reconnais, là, écoutez, que ce n'est pas anodin, ça; on n'est pas dans le détail et dans le secondaire; on est dans le fond. C'est la question du statut de l'école.

Est-ce qu'on doit, pour maintenir le statut confessionnel de l'école, recourir aux clauses dérogatoires prévues dans les chartes? C'est une question de fond sérieuse, une question sérieuse. Et la CEQ, je le voyais récemment, à son congrès, a lancé dans ses rangs un débat là-dessus, qui a suscité des... qui est controversé. La proposition des instances dirigeantes de la CEQ, c'est d'en arriver à une école commune laïque. Mais ça n'a pas été reçu unanimement; même à leur congrès, il y a eu des dissidences. Donc, c'est controversé et c'est normal que ce soit controversé. Quand on touche à des valeurs de fond, ce n'est pas anormal qu'il y ait controverse, qu'il y ait même des tensions et même un peu de passion. C'est tout à fait normal.

Mais il reste que ce débat-là doit se faire et il n'est pas fait. Et on ne peut pas, je pense, faire comme s'il avait été fait. On ne peut pas faire comme s'il avait été fait et aller de l'avant avec la mise en vigueur de la Loi sur l'instruction publique. Ça ne m'apparaîtrait pas correct dans les circonstances. Il faut donc que le débat se fasse et qu'on essaie, évidemment, dans toute la mesure du possible – ce ne sera pas simple ni facile, sans doute – de dégager des consensus. Moi, je pense que, sur la question des structures et de la déconfessionnalisation des structures, la société québécoise en est arrivée à un consensus, je suis à peu près certain de ça. Elle est arrivée à un consensus sur les structures. Sur le statut de l'école, ça, je pense que c'est plus controversé.

Le Président (M. Hamel): Il vous reste une minute, M. le député.

M. Brassard: Il reste une minute? Je termine en disant, M. le Président, que le ministre, dans son discours, signalait que les parents choisissaient, dans une très large proportion, en vertu de la loi – c'est au tout début, là, parce qu'il y a la question de l'option – l'enseignement religieux catholique et qu'il y en avait une minorité qui choisissaient plutôt l'enseignement moral. C'est un phénomène, évidemment, qu'il faut prendre en compte dans le débat. Mais je pense que la question de l'option, à partir du...

(12 heures)

D'ailleurs, je vous signale que les dispositions sur l'option, elles ne sont pas en foncé. Bien oui, parce que, dans la loi, toutes les dispositions de la loi qui étaient soumises pour jugement aux tribunaux...

Le Président (M. Hamel): M. le député.

M. Brassard: ...étaient en foncé.

Le Président (M. Hamel): Oui, oui, d'accord. C'est terminé. Terminez.

M. Brassard: Les commissions scolaires étaient en foncé. Ça, c'était en suspens, en attendant le jugement de la Cour suprême. Mais les dispositions sur l'option, l'enseignement optionnel, moral ou enseignement religieux, ce n'était pas en foncé, ça. Donc, je prends pour acquis – je ne sais pas, les juristes pourront me le dire – à ce moment-là, que ça ne contrevenait pas aux chartes.

Le Président (M. Hamel): Ça va?

M. Brassard: Ça ne contrevenait pas aux chartes.

M. Chagnon: Mais à la Constitution.

M. Brassard: Oui, mais la Charte est dans la Constitution.

M. Chagnon: C'est 93 qui est la partie qui est ombragée.

Le Président (M. Hamel): M. le ministre, vous ne me rendez pas la tâche facile, là.

M. Brassard: Non, non, non. En tout cas, c'est à clarifier, mais il reste que ce n'était pas en suspens et ça ne contrevenait pas aux chartes.

M. Chagnon: Parce qu'il y a une clause «nonobstant».

M. Brassard: Par conséquent, donc, je pense qu'on peut fort bien imaginer une école québécoise commune...

M. Chagnon: Parce qu'il y a une clause «nonobstant» dans cette loi-là.

Le Président (M. Hamel): Me permettriez-vous, bien humblement, d'intervenir pour vous signaler que la période des remarques préliminaires est terminée?

M. Chagnon: Je voulais juste ajouter ça. Peut-être que ça change la conclusion du député, qui peut continuer.

M. Brassard: Non, ça va. Moi, je terminais là-dessus, en concluant tout simplement que le débat doit se faire et que, si on l'évite aujourd'hui, si on l'écarte aujourd'hui, ça ne doit pas signifier qu'il ne doit pas se faire. Il va devoir se faire un jour ou l'autre.

Le Président (M. Hamel): Merci, M. le député de Lac-Saint-Jean. Y a-t-il d'autres députés qui auraient des remarques préliminaires? Du côté ministériel, il n'y en a pas. Mme la députée de Terrebonne.


Mme Jocelyne Caron

Mme Caron: Merci, M. le Président. M. le Président, depuis bientôt cinq ans je participe à l'étude de projets de loi et je peux vous assurer que j'en ai fait plus que ma large part; j'ai participé à de nombreux projets de loi: réforme du Code civil, réforme du Code des professions, qu'on espère encore pour bientôt, ça s'en vient, réforme de l'aide juridique, réforme des cégeps.

Je pense que le principe qui doit toujours nous guider... Et c'est là qu'est toujours le danger, c'est de s'en tenir à des textes de loi, à des principes, à des propositions de légistes souvent différentes les unes des autres, en oubliant la réalité, ce qui est vécu sur le terrain. Et le danger est toujours là. Qu'on se parle de n'importe quel sujet, il faut toujours ramener ce qui va se passer sur le terrain concrètement pour les gens et toujours se poser la question si, finalement, on est mieux de ne rien changer, pour le moment, ou si on doit effectivement effectuer des changements qui risquent d'être plus dommageables, finalement, pour la population.

Dans le cas de la loi que nous avons devant nous, évidemment, ce dont on s'aperçoit en premier, c'est qu'on vient bouleverser certaines structures, et je pense qu'on a souvent tendance à vouloir régler nos problèmes par des modifications de structures. Et, plus on augmente les structures, bien, souvent, plus on augmente les problèmes. Et là, on ouvre la porte à se retrouver avec une série de commissions scolaires, effectivement, toute la kyrielle que mon collègue – et là je ne le répéterai pas – a présentée. On va se retrouver devant toute une série de commissions scolaires différentes, un nombre impressionnant, évidemment, et on va retrouver le problème principalement à Montréal, ça, c'est clair. On ne le retrouvera pas dans les régions. On peut le retrouver un peu à Québec, mais principalement à Montréal. Et cette série de structures différentes va, évidemment, coûter des sous au plan administratif, va être difficile à gérer et ne viendra pas régler les erreurs du passé.

On sait que les Québécois francophones ont quand même subi des préjudices sérieux du fait qu'ils se sont limités, dans le passé, à des commissions scolaires confessionnelles et que, presque automatiquement, finalement, on ne laissait pas de choix aux personnes immigrantes qui arrivaient chez nous. Automatiquement, à cause de la religion, on les dirigeait du côté des commissions scolaires protestantes. Et, au niveau de l'intégration, je vous avoue qu'on en paie encore les conséquences.

Par contre, en se retrouvant avec nos commissions scolaires confessionnelles et nos commissions scolaires linguistiques en même temps, et toute la série qu'on va retrouver, c'est évident, on le voit encore une fois, que le clivage va se faire et que l'intégration ne sera pas réglée; au contraire, on va l'accentuer. Alors qu'on est dans une période où, au niveau de l'éducation, il faut apporter des changements importants au niveau de la qualité de l'enseignement et qu'il faut, en plus, à Montréal, régler des problèmes d'intégration, on va s'ajouter des problèmes administratifs, d'administration, et des coûts importants.

Si ce qu'on vient proposer venait régler l'erreur du passé, moi, j'avoue que je l'endosserais, mais ce n'est pas ça qu'on retrouve du tout. Et qui, évidemment, va être le plus pénalisé? Bon, les contribuables, au niveau des coûts administratifs que ça va engendrer, mais les étudiants, les étudiantes et les enfants. Et, en ajoutant toutes ces modifications-là, c'est évident que – les jeunes, actuellement, vivent déjà, et on a pu le déplorer amplement lors de la Commission de protection des droits de la jeunesse, des problèmes d'instabilité chronique au niveau des familles – là, on va ajouter de l'instabilité au niveau de nos institutions scolaires.

Personnellement, ça m'inquiète beaucoup parce que je pense que nos actions doivent toujours être guidées en fonction de ceux qui reçoivent les services. Et ceux qui reçoivent les services, ce sont évidemment les enfants, les jeunes, les étudiants et les étudiantes qu'on retrouve dans nos écoles, et c'est là qu'il faut que notre action porte.

Évidemment, je pense que, du côté des commissions scolaires, notre parti avait été assez clair à l'effet que ce que nous souhaitions, c'était évidemment des commissions scolaires linguistiques. Et, au niveau du statut de l'école, c'est vrai que le débat n'est pas fait, le débat n'est pas terminé et ne doit pas se faire à la hâte. Et, là aussi, je pense qu'il va falloir tenir compte des idéologies et des besoins des parents aussi, de ce que les parents souhaitent comme éducation dans leurs écoles pour leurs enfants.

Pour avoir enseigné durant neuf ans dans des écoles, à l'élémentaire, et avoir eu à donner l'enseignement religieux et l'avoir fait d'une manière qui était considérée comme innovatrice, à l'époque, et qui se faisait en parfaite collaboration avec les parents... Et, au Québec, on est portés à se dire, évidemment, que, bon, la religion occupe moins de place qu'elle en occupait. Par contre, les parents tiennent d'autant plus, parce qu'elle occupe moins de place dans leur propre vie, à ce que l'enseignement se fasse dans les écoles, et en laissant un choix.

Parce que l'option, ce n'est pas nouveau, je la vivais lorsque j'étais enseignante; il y avait peu de jeunes qui choisissaient l'enseignement moral. Ce nombre a augmenté avec les années, mais il reste quand même un noyau extrêmement important de parents qui se disent: Bien, justement, parce que je ne pratique pas, mais que je suis toujours croyant et que je ne me sens plus habilité à donner cet enseignement-là à mes jeunes, mais ça fait partie de mon héritage et je veux qu'ils connaissent cet enseignement-là, donc je vais confier cet enseignement-là à l'école. Il faut dire aussi que l'enseignement religieux, comme les autres enseignements, ça a changé dans nos écoles. Et je vous disais que je le faisais d'une manière très innovatrice, mais parce que ça répondait à de nouveaux besoins aussi sur la façon de le faire, l'enseignement religieux.

Alors, pour moi, c'est évident que ce débat-là, nous aurons à le faire, mais nous aurons à le faire aussi dans chacune des régions, dans chaque école et en parfaite concertation avec les enseignants et les enseignantes, avec les directions d'écoles et avec les parents, évidemment, qui ont un rôle important, surtout, je pense, au niveau de l'élémentaire, lorsqu'on parle de cet enseignement-là. Au niveau du secondaire, il y a toujours des choix, évidemment, qui sont là.

(12 h 10)

Je pense qu'on doit, par contre, éviter de se retrouver dans toute cette série de commissions scolaires qu'on risque de trouver et qu'on aura à vivre réellement dans les écoles et réellement avec les enfants. Et, au niveau de l'intégration, ça ne vient aucunement régler le problème. Alors, je pense que là-dessus, on peut être clairs pour souhaiter, le plus vite possible, des commissions scolaires linguistiques, une définition de statut de chacune des écoles à partir d'un débat. Mais, au niveau des structures comme telles, je pense que la loi 2 ne vient aucunement régler le problème. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Hamel): Merci, Mme la députée de Terrebonne. Alors, il n'y a pas d'autres remarques préliminaires?


M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: M. le Président, je devrais avoir droit à – je ne sais pas comment on appelle ça – une remarque «postliminaire», rapidement quand même, parce que c'est quand même une chose importante qu'on fait là. Le député de Lac-Saint-Jean et la députée de Terrebonne, je pense...

Mme Caron: Oui.

M. Chagnon: ...ça pouvait être «Terremauvaise», c'est Terrebonne – ont beaucoup parlé de la loi 107 et des commissions scolaires linguistiques, mais le projet de loi qu'on étudie là est d'abord davantage relatif au sujet sur lequel la députée de Terrebonne prétend que le débat n'est pas encore terminé. Moi, je pensais que le débat avait été fait, en fin de semaine, au Conseil national du Parti québécois, c'est-à-dire qu'on devait «déconfessionnaliser» non seulement les commissions scolaires, mais les écoles aussi. C'est comme ça que j'ai compris ça, moi. Alors, si c'est le cas, le débat est fait, au moins au Parti québécois. Mais peut-être que ce n'est pas le cas, non plus. J'ai peut-être mal compris parce que, là, c'est au niveau des écoles qu'on fonctionne davantage, avec la loi 2, là; c'est strictement et particulièrement pour conserver les droits historiques des catholiques et des protestants au niveau des écoles. Alors, c'est là où ça se passe, l'action.

Lorsqu'on parle de l'éventualité de coûts administratifs qui feraient en sorte de faire augmenter la pression sur les dépenses publiques en matière d'éducation parce qu'il y aurait ce qu'on appelle des réseaux d'écoles, il n'a jamais été question d'avoir des réseaux d'écoles catholiques, protestantes et neutres. Ce sont des écoles qui seront administrées éventuellement dans des commissions scolaires linguistiques, mais leur appartenance, leur solidarité, leur homogénéité se formeront sur le critère de la langue et non pas de la confession, comme c'est le cas actuellement. Alors, ce n'est pas une création d'un réseau d'écoles catholiques, protestantes et neutres dont il s'agit; de toute façon, toutes ces écoles existent au moment où on se parle et ne fonctionnent qu'en réseaux parce qu'elles sont catholiques ou protestantes, dans le cas des écoles qui sont administrées par des commissions scolaires catholiques et protestantes. Les modifications qui sont suggérées dans l'avenir vont faire en sorte que, que l'on soit catholique, protestant ou n'ayant pas de définition confessionnelle, les écoles se retrouveront sous le même chapeau d'une commission scolaire linguistique.

Mme la députée nous parle beaucoup du vécu sur le terrain. Le vécu sur le terrain, ça veut dire à Terrebonne, en 1993, madame, à l'école Jeunes du monde – vous connaissez? Oui, école primaire de 363 élèves – bien, on a suivi les règlements du ministre de l'Éducation, qui prévoient qu'on doive faire un choix, localement, qu'on puisse définir combien de parents d'élèves pourraient choisir quel type de statut les écoles pourraient avoir. Eh bien, dans le secteur chez vous, la très grande majorité des gens – je le cherche là, je ne l'ai pas, c'est le seul que je n'ai pas ici – a choisi d'avoir une école de statut confessionnel catholique.

Mme Caron: Une majorité de gens a choisi.

M. Chagnon: Alors, quand vous allez voter contre ce projet de loi là, madame, dites-vous bien que, désormais, vous restreindrez, vous abolirez la capacité des parents de votre localité, qui ont choisi le statut d'école catholique pour l'école Jeunes du monde... Et non seulement vous restreindrez, mais vous annihilerez leur capacité de choisir d'avoir une école à statut confessionnel catholique. C'est exactement ça que vous allez faire si vous votez contre la loi 2, madame. C'est exactement ça. C'est la seule garantie que les parents ont pour déterminer le type d'école, la seule garantie, madame.

Faites-vous-le expliquer par n'importe qui qui connaît ça un peu, faites-vous-le expliquer par votre collègue historien, M. Brassard, qui a une connaissance qui sort des limites de l'ordinaire du secteur de l'éducation – il a enseigné longtemps, il a été près des milieux de l'éducation longtemps – sur cette clause «nonobstant». Je ne parle pas du restant du monde dont vous avez parlé, mais de la question de la valeur et de l'importance de la clause «nonobstant» sur les cinq lois dont nous parlons aujourd'hui. Le député de Lac-Saint-Jean a souligné, à la fin mars, que la protection des droits historiques des catholiques et des protestants faisait partie de notre histoire et qu'il importait de faire en sorte de l'adopter. Il était, à ce moment-là, en faveur de la clause dérogatoire. Bon. Il a pu y avoir des modifications à l'intérieur du parti, puis, moi, je peux comprendre ça, mais il vous l'expliquera, ce que ça veut dire exactement. Et je ne suis pas certain que vous allez avoir toujours la même idée.

Parce que c'est exactement ça que vous vous apprêtez à faire. Vous vous apprêtez à empêcher les parents de l'école de Terrebonne, des écoles de Sainte-Thérèse, et là je pourrais vous en donner... En 1993, selon le modèle de consultation, qui est une espèce de référendum chez les parents qui vont utiliser les écoles, à Sainte-Thérèse, l'école Renaissance, à Blainville, l'école Gabrielle-Roy à Boisbriand, l'école Jean-Jacques-Rousseau à Boisbriand, qui est une école secondaire de 1000 élèves, elles ont toutes unanimement choisi d'avoir une école à statut confessionnel catholique. Que l'on aime ça ou pas, là. Je ne fais pas d'exégèse; je vous signale que c'est ça, les faits et la réalité des choses.

Je vous signale que, si vous votez contre la loi 2, vous direz aux parents de tout ce monde-là, comme aux parents de Cap-Rouge, à l'école des Grandes-Marées, comme aux parents de l'école Jean-Duceppe à Repentigny, comme aux parents de l'École d'éducation internationale à Saint-Hubert, comme aux parents – parce qu'on parlait aussi de l'école de Montréal et des problèmes d'intégration d'allophones, ça vous préoccupe et ça nous préoccupe vivement – de l'école Félix-Leclerc, sur la rue Darlington à Montréal, où 84,3 % des élèves sont des allophones et pour lesquels 53 % des parents demandent que leurs enfants aient l'enseignement religieux; aux parents de l'école Henri-Beaulieu, à Saint-Laurent, où 86,7 % des élèves sont allophones, allophones, 86,7 %... Pourtant, pour 65 % des élèves, leurs parents ont demandé qu'ils suivent un cours d'enseignement religieux catholique.

Ça, c'est les faits. Encore une fois, je n'en fais pas l'exégèse; je vous dis: Ce sont les faits. À tous ces parents-là, en votant contre la loi 2, vous dites: Désormais, vous n'aurez plus le droit de choisir, si vous avez une possibilité d'inclure dans votre projet éducatif des valeurs religieuses. Parce que, à partir du moment où vous aurez un individu, dans une classe, dans une école, quelque part au Québec, qui décidera de poursuivre l'école ou la commission scolaire, solidairement, de façon à exclure les valeurs religieuses qui ne sont pas conformes à une neutralité parfaite, tel que le prévoit, finalement, la Charte des droits, puisqu'on ne peut pas, dans notre charte, promouvoir une confession par rapport à une autre, il interdirait – on peut le présumer, on peut le voir venir à l'avance, facilement – la cour interdirait à une école de garder un statut confessionnel dans ces conditions-là et, aussi, de donner des cours d'un enseignement religieux particulier.

Eh bien, madame, monsieur, vous vous trouvez actuellement dans une situation où, si vous voulez faire le débat, faites-le, faisons-le, mais, pour faire le débat, il va nous falloir adopter la loi 2, la loi qui nous amène certaines dispositions dérogatoires donc, qui crée une clause «nonobstant» pour protéger les droits des uns et des autres là-dedans. C'est la seule façon de faire le débat.

Et on n'a pas beaucoup le choix. On n'a pas beaucoup le choix parce que le débat, je soutiens qu'il se fait et qu'il peut se faire quotidiennement, compte tenu que les prescriptions de notre droit scolaire prévoient déjà que les parents non seulement sont consultés pour définir le statut confessionnel de leur école, mais peuvent le remettre en question quand ils le veulent. Les parents non seulement sont consultés au primaire... Ils ne sont pas consultés. C'est eux qui décident. Vous avez enseigné, vous vous le rappelez. Alors, ce sont les parents qui décident pour leurs enfants quel type d'enseignement ils auront: religieux ou moral. Et 90 % des enfants à travers le Québec, à l'élémentaire, prennent un enseignement religieux parce que leurs parents l'ont choisi, et 70 % au secondaire parce que les enfants eux-mêmes choisissent. Eh bien, c'est ces choix-là que vous remettez en question en votant contre la loi 2. Merci, M. le Président.

(12 h 20)

M. Brassard: Est-ce que je pourrais poser une question au ministre, M. le Président?

Le Président (M. Hamel): Oui, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: J'aimerais savoir si l'article 5 de la Loi sur l'instruction publique... L'article 5 prévoit, justement, l'option, permet l'option soit d'un enseignement moral et religieux, catholique ou protestant et l'enseignement moral. Et il y a même une disposition où on a «le droit de choisir, à chaque année, l'enseignement moral et religieux d'une confession autre que catholique ou protestante lorsqu'un tel enseignement est dispensé à l'école». Bon, pour ce qui est du primaire et des deux premières années du secondaire, les parents exercent ce choix pour leurs enfants. Bon. C'est la clause sur l'option.

M. Chagnon: Ce dont je parlais.

M. Brassard: Oui. Est-ce qu'il y a eu des avis juridiques au moment où on a adopté la loi? Maintenant que la loi est en application, est-ce qu'il y a des avis juridiques qui indiquent que cet article 5 contrevient aux chartes? Est-ce que ça contrevient aux chartes?

M. Chagnon: M. le Président, je vais demander...

Le Président (M. Hamel): M. le ministre.

M. Chagnon: ...à notre éminent membre du contentieux d'y répondre, Me Côme Dupont.

Le Président (M. Hamel): Me Dupont, si vous voulez vous...

M. Dupont (Côme): Lorsque la loi 107 a été adoptée, la question se posait à savoir si ces dispositions qui accordent des privilèges aux catholiques et aux protestants sont protégées par la Constitution canadienne. Le cas échéant, on n'aurait pas besoin d'une clause dérogatoire. Mais on avait un doute là-dessus. C'est pour ça que les clauses dérogatoires ont été adoptées, pour protéger l'article 5, notamment. Depuis le jugement de la Cour suprême dans l'affaire du renvoi sur la loi 107, il est clair que les droits des catholiques et des protestants, en dehors des commissions scolaires dissidentes et des commissions scolaires confessionnelles de Québec et de Montréal, ne sont pas protégés par la Constitution canadienne. Et, si on veut les maintenir dans la loi tels qu'ils existent depuis 100 ans, ça nous prend une clause dérogatoire telle qu'elle existe depuis 1982. Et ça, indépendamment que les structures soient linguistiques ou confessionnelles. Alors, dès qu'on veut accorder à une confession religieuse des privilèges qu'on n'accorde pas à une autre confession religieuse, il nous faut la clause dérogatoire, sauf si c'est dans une commission scolaire confessionnelle, au sens de l'article 122 de la loi, ou dans une commission scolaire dissidente.

M. Chagnon: Comme Greenfield-Park.

M. Dupont (Côme): Dans ces cas-là, les privilèges accordés aux catholiques et aux protestants sont protégés par l'article 93 et n'ont pas besoin de protection contre la Charte, puisque l'article 29 de la Charte protège ces privilèges, à l'encontre de la Charte canadienne des droits. Mais l'article 29 ne s'applique qu'aux privilèges garantis par l'article 93 et non pas aux autres privilèges qui ne sont pas garantis par 93, mais garantis par la loi statutaire elle-même.

Le Président (M. Hamel): Merci, Me Dupont.

M. Brassard: Oui, mais c'est parce que, sur l'article 5 précisément, je ne parle pas des autres, sur le statut, là, je pense que, oui, c'est clair que ça constitue un privilège évident, sur le statut.

M. Chagnon: Le droit de pouvoir choisir son cours. C'est ça.

M. Brassard: Moi, c'est sur le droit, sur le choix. Étant donné qu'il y a choix, étant donné qu'il y a option et que les parents sont tout à fait libres de choisir uniquement l'enseignement moral pour leur enfant, est-ce que l'article 5, de façon spécifique, contrevient aux dispositions des chartes?

Le Président (M. Hamel): Me Dupont.

M. Dupont (Côme): Il faut bien lire la clause dérogatoire. La clause dérogatoire dit: «Les dispositions de la présente loi qui accordent [...] des privilèges à une confession religieuse...» Donc, ce n'est pas une disposition qui met à l'abri l'exercice de la liberté de conscience et de religion; c'est une disposition qui met à l'abri le droit à l'égalité prévu par l'article 10 de la Charte québécoise et l'article 15 de la Charte canadienne, dans l'exercice du droit à la liberté de religion. Or, l'article 5 accorde un privilège aux seuls catholiques et protestants. Eux autres ont le droit de choisir entre l'enseignement moral, l'enseignement catholique ou l'enseignement protestant. Mais toutes les autres religions doivent prendre l'enseignement moral. Je doute que les musulmans ou les juifs prennent l'enseignement catholique.

Évidemment, on peut dire que ce choix entre l'enseignement moral et l'enseignement catholique et protestant est donné à tout le monde. En pratique, il est donné juste aux catholiques et aux protestants. Donc, il s'agit là d'un privilège accordé aux catholiques et aux protestants, et ce privilège va à l'encontre du droit à l'égalité garanti par l'article 15 de la Charte canadienne, dans l'exercice de la liberté de religion garantie par l'article 2a de la Charte canadienne. Alors, c'est pour ça que la clause dérogatoire est rédigée de cette façon-là. Toute disposition de la loi qui accorde ainsi un privilège à une confession religieuse s'applique indépendamment des articles 2a et 15 de la Charte canadienne.

Vous avez un autre exemple. Vous avez parlé tantôt d'un enseignement religieux autre que catholique et protestant. Effectivement, la commission scolaire peut offrir, à la demande d'un groupe de parents, un enseignement religieux confessionnel autre que catholique et protestant. C'est l'article 228. Le cas échéant, l'article 5 accorde aux parents, aux enfants de ces parents, le droit de choisir entre l'enseignement moral et cet autre enseignement confessionnel. Ce droit est un privilège religieux et lui aussi a besoin d'être protégé par la clause dérogatoire, parce que c'est un privilège accordé à une troisième ou une quatrième ou une cinquième religion.

M. Chagnon: Est-ce qu'il y a d'autres questions?

M. Brassard: Non, là-dessus, ça va. Je voulais avoir cette précision.

Le Président (M. Hamel): Merci, Me Dupont. M. le député de Lac-Saint-Jean, ça va? M. le ministre.

M. Chagnon: En deux mots, on ne fait pas ça pour des raisons vaguement idéologiques. Vous comprendrez le bénéfice, pour l'ensemble de la société, de protéger ces droits-là.

Le Président (M. Hamel): Est-ce qu'on peut conclure? La période dite des remarques préliminaires est terminée.

M. Brassard: Oui.

Le Président (M. Hamel): Oui? Merci. Est-ce qu'il y aurait une motion préliminaire?

M. Brassard: Oui, j'en aurais une, M. le Président...

Le Président (M. Hamel): Oui, M. le député de Lac-Saint-Jean.


Motion proposant de tenir des consultations particulières

M. Brassard: ...que je vous dépose et qui se lit comme suit: «Il est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure la commission permanente de l'éducation tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi 2, Loi concernant certaines dispositions dérogatoires dans des lois relatives à l'éducation, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi et qu'à cette fin elle mandate le comité directeur afin qu'il établisse la liste des groupes qui devraient être entendus.»

Le Président (M. Hamel): Merci, M. le député de Lac-Saint-Jean. Alors, évidemment, la motion est recevable. Comme c'est une motion de forme, l'auteur a 30 minutes pour son intervention.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: Je ne prendrai sûrement pas 30 minutes, M. le Président, parce que je ne fais pas, non plus, ça dans un but dit d'obstruction ou de «filibuster». C'est dans un but bien précis; c'est que je pense que ce projet de loi, de même que toutes les dispositions de la Loi sur l'instruction publique qui y sont reliées directement ou indirectement – vous le savez, M. le Président, vous lisez les journaux comme moi – ont suscité beaucoup d'intérêt et de controverse aussi, je pense, donc, ont enclenché un débat. Et il y a beaucoup d'organisations, d'organismes tout à fait reconnus dans le milieu de l'éducation qui se sont prononcés là-dessus ou qui ont exprimé des réflexions, ont fait des déclarations sur cette question, sur le projet de loi, de même que sur la Loi sur l'instruction publique, également. Et, particulièrement, évidemment, ça tournait autour de la restructuration scolaire sur l'île de Montréal.

(12 h 30)

Avant d'entreprendre l'étude détaillée – je ne pense pas que ça prenne une éternité pour adopter le projet de loi; compte tenu du nombre des articles, on ne s'éternisera pas là-dessus, c'est évident – et de renvoyer le tout à l'Assemblée nationale pour adoption, il m'apparaîtrait opportun, pertinent et, ma foi, aussi, démocratique d'inviter un certain nombre de groupes. Il ne s'agit pas de consultations larges et ouvertes, mais de consultations particulières; donc, d'inviter un certain nombre de groupes, d'organismes, d'intervenants majeurs dans le milieu de l'éducation pour qu'on puisse, au cours d'une journée, par exemple, peut-être une journée et demie, enfin, les entendre, échanger avec eux sur leurs points de vue et leurs positions à l'égard du projet de loi et de tout ce qui l'entoure.

Je pense, entre autres, évidemment, à la CEQ, à l'Alliance des professeurs. Je pense à la CECM, au MEMO, qui est un parti politique scolaire, à la Fédération des directeurs d'école, à l'Association des cadres scolaires. Il y a aussi, évidemment, le CEPGM, la Fédération des commissions scolaires, je l'ai signalée tantôt. L'Assemblée des évêques pourrait être invitée également. Ils n'ont pas dit un seul mot là-dessus. Je pense que ça concerne directement l'Église et la confession catholique. Le Mouvement laïque du Québec, bon, le Conseil scolaire de l'île de Montréal. Il y a un certain nombre d'organismes qui mériteraient d'être entendus, M. le Président, sur ce projet de loi qui, comme je l'ai dit en remarques préliminaires, est majeur, particulièrement aussi sur la mise en vigueur des dispositions de la loi 107 concernant la structuration scolaire sur l'île de Montréal.

C'est dans ce but-là que j'ai déposé cette motion préliminaire pour qu'on tienne très rapidement des audiences particulières, au plus tard, peut-être... On pourrait s'entendre – comme c'est des audiences particulières, ce n'est pas nécessaire qu'il y ait les délais formels requis, ce n'est pas nécessaire qu'il y ait des mémoires; c'est beaucoup plus souple qu'une consultation générale – pour qu'on puisse échanger avec un certain nombre d'organismes directement intéressés et qui ont des choses à dire sur cette question.

Voilà. Je ne prends pas mes 30 minutes. C'est juste pour justifier cette motion.

Le Président (M. Hamel): Merci, M. le député de Lac-Saint-Jean. M. le ministre.


M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: M. le Président, c'est une idée qui pourrait être intéressante, sauf que d'autres sont passés avant nous déjà, M. le député de Lac-Saint-Jean. En 1987, il n'y a pas très longtemps, au moment où on a étudié des modifications aux règlements du comité catholique, on a fait quatre jours de commission parlementaire où les intervenants que vous avez évoqués ont été invités, d'une part, pour discuter des questions relatives aux confessions, à la confession catholique dans ce cas-là. On a aussi, l'année suivante, donc en 1988, ce qui est encore plus près de nous, passé 101 heures en commission parlementaire pour l'étude de la loi 107, où 117 organismes ont été invités, où, en tout cas, 117 organismes ont présenté un projet de mémoire, et plusieurs d'entre eux ont été entendus.

Le député nous convie à un exercice qui, finalement, est une redondance de ce qui a déjà été fait. Je peux fournir au député, s'il le juge à propos, la liste complète des mémoires de chacun de ces organismes et nous saurons, à ce moment-là... Évidemment, le député pourra les lire. Il comprendra véritablement la vision de chacun de ces groupes. Ça me ferait plaisir de les lui offrir, d'ailleurs.

M. Brassard: Je vais attendre que vous les lisiez.

M. Chagnon: Oui, mais j'en ai lu plusieurs, à l'époque, moi. Ça fait partie du plaisir que j'ai eu, à l'époque. Je le faisais en parallèle avec mes autres activités de l'autre commission parlementaire sur laquelle je siégeais. Mais plusieurs des groupes qui ont plaidé devant cette commission-là, qui sont venus présenter leur mémoire devant cette commission-là m'avaient envoyé leur mémoire. J'en ai lu plusieurs.

Quant à la loi 107, M. le Président... Mais, d'abord, encore une fois, je le répète, le débat de fond a eu lieu. Il y a eu 101 heures de commission parlementaire sur le sujet. On voudrait revenir sur le débat, mais le débat a été fait. En ce qui concerne l'application de la loi 107, je sais que le député sait qu'il y a un groupe de travail qui travaille, qui travaille bien, qui travaille fort et qui rendra public son rapport, en principe, quand? Fin juin.

M. Brassard: Ah bon!

M. Chagnon: Je peux vous annoncer ça, là. Fin juin, on a le comité Kenniff, du nom de Patrick Kenniff, qui est recteur de l'Université Concordia, qui regroupe chacune des entités scolaires qui sont concernées particulièrement, entre autres, par l'article 93, sans compter les fédérations catholique et protestante qui se réunissent et qui travaillent sur des modèles d'application de la loi 107, qui vont faire en sorte, je le dis tout de suite, d'éviter ce dont le député, ce dont la députée nous ont fait part tout à l'heure: une espèce d'«Apocalypse Now», là, quand tout le monde sera...

M. Brassard: «Absurdistan».

M. Chagnon: «Absurdistan», excusez-moi. Alors, l'«Absurdistan», ce nouveau néologisme; c'est un pléonasme vicieux.

M. Brassard: Il n'est pas de moi, il est de Lisée.

M. Chagnon: Il est de Lisée? Ah bon! On le prête à Lisée. Afin que cet «Absurdistan» ne puisse pas avoir lieu. Alors, M. le Président, en bref, je pense que nous devrions continuer l'étude de notre projet de loi article par article.

Le Président (M. Hamel): Merci, M. le ministre. Y a-t-il d'autres parlementaires qui souhaiteraient intervenir? Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Oui, très brièvement.

Le Président (M. Hamel): Vous avez un maximum de 10 minutes, bien entendu.

Mme Caron: Oh, je ne prendrai même pas 10 minutes, M. le Président.

Le Président (M. Hamel): Je vous en suis reconnaissant.


Mme Jocelyne Caron

Mme Caron: Moi, je vous avoue que je comprends mal la réponse du ministre de nous dire qu'il y a eu des consultations en 1987, de nous dire qu'on a étudié le projet de loi 107 durant une centaine d'heures, oui, en 1988. Bon. Mais on se retrouve en 1994, là. Il y a quand même six ans, hein, qui ont passé. C'est vrai qu'il ne s'est pas passé beaucoup, beaucoup de choses, là; on a eu des reculs, mais, quand même, il y a six ans depuis les dernières consultations. Et c'était sur la loi 107 dans son entier, là; ce n'était pas sur le point particulier uniquement, là. Ceux qui sont venus en commission parlementaire ont parlé durant une centaine d'heures, mais de tout ce qui touchait évidemment la loi 107. Mais il y a quand même eu six ans et, si on regarde la réaction des groupes, la réaction des gens sur le terrain suite au dépôt de la loi 2, bien, je pense qu'il y aurait quand même lieu d'entendre les principaux groupes sur le sujet.

La situation, elle change, vous l'avez dit vous-même. Vous donniez comme exemple, tantôt, une école à Terrebonne; il faut dire qu'il y a au moins sept écoles sur le territoire même de Terrebonne, plus des écoles, évidemment, sur les territoires avoisinants où les jeunes se rendent. Et la situation a effectivement changé entre le moment où, moi, j'enseignais, si on parle de 1973 à 1982... C'est une période de neuf ans et ça avait changé, de 1973 à 1982. En neuf ans, il y avait des choses qui avaient changé; au niveau des jeunes et aussi au niveau des choix des options, il y avait un changement. Si je regarde les changements entre 1982, au moment où j'ai laissé, et aujourd'hui – donc, on parle de 12 ans – il y a eu aussi des changements au niveau des pourcentages de gens qui faisaient des choix d'option et il y a eu des changements au niveau de la population, aussi, là-dessus. Donc, moi, je pense qu'après six ans ça ne serait pas un abus de prendre une journée pour entendre les principaux groupes concernés sur ce projet-là, qui est majeur, qui est important. Alors, je ne pense pas qu'une journée, c'est un abus, là, après six ans.

Le Président (M. Hamel): Merci, Mme la députée de Terrebonne. Y a-t-il d'autres parlementaires qui souhaiteraient intervenir? Non? Merci. Alors, écoutez...

M. Brassard: J'ai le droit de réplique?

M. Chagnon: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Hamel): Oui, M. le député de Lac-Saint-Jean. Allez-y, nous vous écoutons.

Une voix: Vous n'en manquez pas une.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Brassard: Ah bien, absolument pas! Il faut exercer tous ses droits...

M. Chagnon: Absolument.

M. Brassard: ...pleinement.

M. Chagnon: C'est ce que souhaitent faire les catholiques et les protestants.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: Non, moi, c'est pour – ha, ha, ha! – aller dans le même sens que ma collègue de Terrebonne, qui a parfaitement raison de dire: Écoutez, je pense que la réponse du ministre est quand même assez faible, dans le sens qu'il dit, c'est vrai, qu'il y a eu une centaine de mémoires quand on a examiné et étudié la loi 107. Mais ça portait sur l'ensemble de la loi, d'abord, les mémoires, et puis Dieu sait qu'il y en a, des sujets, là-dedans, sur l'autonomie des commissions scolaires, bon, et les droits des professeurs, les droits des enfants, les régimes pédagogiques. Enfin, bref, il y a à boire et à manger là-dedans pour bien longtemps et, forcément, cette consultation-là, qui était générale, portait sur l'ensemble des dispositions de la loi.

Mais, depuis, il y a eu des événements qui se sont produits et, en particulier, le jugement de la Cour suprême sur toutes les dispositions qui étaient suspendues. Il a eu lieu, il a été rendu public en juin 1993. Ça, c'est un événement déterminant, un événement clé nouveau, et c'est ce qui fait d'ailleurs que, depuis ce temps-là, c'est le grand débat, la grande discussion. D'ailleurs, la meilleure preuve, c'est que le ministre a jugé utile de mettre sur pied un comité pour regarder comment on applique ça, comment on met ça en vigueur, ces dispositions-là.

(12 h 40)

M. Chagnon: Mais qui n'a rien à voir avec la loi 2.

M. Brassard: Ah bien, écoutez, je regrette, mais la loi 2, ça concerne une disposition majeure de la loi 7 qui porte sur la suspension des droits des chartes, de la Charte canadienne...

M. Chagnon: La loi 107.

M. Brassard: La loi 107, excusez. La suspension des droits de la Charte canadienne, c'est une clause dérogatoire. Il me semble que, comme cette clause dérogatoire porte sur la suspension des droits pour que soient protégés les privilèges confessionnels...

M. Chagnon: À l'école.

M. Brassard: J'en conviens, mais vous ne me ferez pas accroire que... Actuellement, le débat qui fait rage dans le milieu montréalais, ça porte sur la confessionnalité des structures scolaires.

M. Chagnon: Des commissions scolaires...

M. Brassard: Des commissions scolaires.

M. Chagnon: ...pas des écoles.

M. Brassard: Je sais que vous pouvez faire des distinctions, compartimenter les choses, mais il reste que, comme c'est un projet de loi qui amende la loi 107, il me semble qu'il y a là une belle occasion, pour des parlementaires et pour une commission parlementaire de l'éducation, d'échanger avec les intervenants des milieux de l'éducation, surtout de Montréal, sur toute cette question qui est débattue présentement, la question de la confessionnalité des structures scolaires. Même s'il n'y a pas un lien, même si le projet de loi 2 ne porte pas spécifiquement et particulièrement là-dessus, il reste que le projet de loi 2 porte sur les droits et les privilèges des confessions, catholique et protestante. Ça, je pense que ça fait... Et le débat qui fait rage actuellement à Montréal porte sur la confessionnalité des structures scolaires, des commissions scolaires. On est quand même dans la même mouvance, dans la mouvance de la confessionnalité.

M. Chagnon: Juste un petit aparté, M. le Président. Il ne s'agit pas d'amender la loi 107 puisque l'on reconduit les éléments de la loi 107 en faisant ça.

M. Brassard: Oui, bon, enfin, c'est vrai. Une distinction un peu subtile...

M. Chagnon: Qui n'est pas sibylline, qui n'est pas byzantine.

M. Brassard: Ouf! Ça frôle le byzantinisme.

M. Chagnon: Ce n'est pas la même chose, amender et reconduire.

M. Brassard: Enfin, on reconduit, mais on reconduit une disposition de la loi 107.

M. Chagnon: Oui, c'est ça.

M. Brassard: Donc, on se trouve à jeter un petit coup d'oeil sur la loi 107 et, comme on sait qu'à Montréal, actuellement, il y a toute la question des structures scolaires et de la confessionnalité des structures scolaires, il me semble que ce serait une belle occasion d'inviter ces groupes pour qu'on puisse discuter. C'est ça, la commission parlementaire; ça doit être un lieu d'échanges, un lieu de débats et, aussi, comme c'est la commission parlementaire de l'éducation, ça doit, je pense, être un forum de discussions et de débats sur les problèmes actuels d'éducation.

Il y en a un là, drôlement actuel, qui est même très controversé actuellement dans le milieu montréalais. Et ma motion visait justement à faire en sorte que la commission parlementaire, en échangeant avec ces groupes-là, intervienne dans ce débat et essaie de faire avancer les choses afin d'avoir, en tout cas, un éclairage plus approprié sur toute cette question complexe et controversée.

Le Président (M. Hamel): Merci, M. le député de Lac-Saint-Jean. Y a-t-il d'autres commentaires? Est-ce que nous pouvons maintenant disposer de la motion déposée par le député de Lac-Saint-Jean?

M. Brassard: Oui, par un vote nominal, s'il vous plaît.


Mise aux voix

Le Président (M. Hamel): Vote nominal, très bien. Alors, M. le député de Lac-Saint-Jean. M. le secrétaire.

M. Chagnon: Vous me surprenez.

Le Secrétaire: M. Brassard (Lac-Saint-Jean)?

M. Brassard: Oui.

Le Secrétaire: Mme Caron (Terrebonne)?

Mme Caron: Pour.

Le Secrétaire: M. le ministre?

M. Chagnon: Je suis contre.

Le Secrétaire: M. Beaudin (Gaspé)?

M. Beaudin: Contre.

Le Secrétaire: Mme Boucher Bacon (Bourget)?

Mme Boucher Bacon: Contre.

Le Secrétaire: M. Brodeur (Shefford)?

M. Brodeur: Contre.

Le Secrétaire: M. Gautrin (Verdun)?

M. Gau trin : Contre.

Le Secrétaire: M. Hamel (Sherbrooke)?

Le Président (M. Hamel): Contre.

Le Secrétaire: Alors, deux pour et six contre, M. le Président.

Le Président (M. Hamel): Merci, M. le secrétaire. Nous avons donc disposé de la motion. J'appelle maintenant l'article 1 du projet de loi 2.


Étude détaillée

Alors, l'article 1 se lit comme suit: «Les articles 32 de la Loi sur le Conseil supérieur de l'éducation (L.R.Q., chapitre C-60), 284 de la Loi sur les élections scolaires (L.R.Q., chapitre E-2.3), 727 de la Loi sur l'instruction publique (L.R.Q., chapitre I-13.3), 771 de la Loi sur l'instruction publique pour les autochtones cris, inuit et naskapis (L.R.Q., chapitre I-14) et 18 de la Loi sur le ministère de l'Éducation et de la Science (L.R.Q., chapitre M-15) sont édictés de nouveau et, conséquemment, se lisent comme suit:

«Les dispositions de la présente loi qui accordent des droits et privilèges à une confession religieuse ont effet indépendamment des dispositions du paragraphe a de l'article 2 de la Loi constitutionnelle de 1982 (annexe B de la Loi sur le Canada, chapitre 11 du recueil des lois du Parlement du Royaume-Uni pour l'année 1982) et de l'article 15 de cette loi.»

M. Brassard: Ça, ça prenait fin à quelle date?

M. Chagnon: Le 30 juin...

M. Brassard: Le 30 juin 1994?

M. Chagnon: ...1994. C'est pour ça que ça entre en vigueur le 1er...

M. Brassard: Ça veut dire que c'est cinq ans. Donc, ça nous reporte maintenant, à partir de 1994, jusqu'en...

M. Chagnon: Au 30 juin 1999.

M. Brassard: ...1999.

M. Chagnon: Je pense que l'article, M. le Président...

Le Président (M. Hamel): Est d'une clarté...

M. Chagnon: ...est relativement facile à comprendre. On a discuté de bien d'autres choses, mais, quand on vient à l'article comme tel, on sait de quoi il retourne. Alors, je n'aurai pas d'autres choses à ajouter.

Le Président (M. Hamel): Merci, M. le ministre. M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: Sur division, M. le Président.

Le Président (M. Hamel): Alors, l'article 1 est adopté sur division. J'appelle l'article 2. «La présente loi entrera en vigueur le 1er juillet 1994.» Commentaires?

M. Chagnon: Sur division aussi?

M. Brassard: Bien sûr.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Hamel): L'article 2 est adopté sur division. Alors, j'appelle le titre du projet de loi, Loi concernant certaines dispositions dérogatoires dans des lois relatives à l'éducation.

M. Brassard: Sur division.

M. Chagnon: J'aimerais peut-être conclure par un petit mot.

Le Président (M. Hamel): M. le ministre.

M. Chagnon: Simplement, M. le Président, en concluant, rapidement ...

Le Président (M. Hamel): On n'a pas tout à fait fini.

M. Chagnon: Excusez-moi.

M. Brassard: Sur division.

Le Président (M. Hamel): Adopté sur division. Alors, j'appelle l'ensemble du projet de loi.

M. Brassard: Sur division.

Le Président (M. Hamel): Sur division. M. le ministre, vos commentaires.


Remarques finales


M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: Je voudrais tout simplement resignaler que ce que nous faisons fait en sorte de conserver les droits historiques et des catholiques et des protestants, et permet aux parents, dans chacune des écoles, de pouvoir continuer d'avoir un véritable projet éducatif local qui puisse relancer des valeurs ou démontrer qu'on défend des valeurs localement, des valeurs judéo-chrétiennes, un peu comme vous l'avez vécu dans les écoles où vous avez enseigné sûrement, madame, puisque vous enseigniez aussi la religion.

Et le débat dont on parle, qui se fera au niveau de l'école, va continuer à se faire dans les années à venir. Toute notre organisation, l'économie de notre droit scolaire est très ouverte sur la liberté de religion et permet aux parents de pouvoir avoir aujourd'hui un choix, par exemple, de statut confessionnel, et, dans un an ou dans deux ans, de changer d'idée et de redemander de modifier ces statuts. Alors, on a une grande ouverture sur le plan de l'organisation des différentes religions dans nos écoles. Il n'en demeure pas moins que, historiquement, les droits des catholiques et des protestants doivent garder une certaine prépondérance puisqu'ils sont encore largement majoritaires dans notre système. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Hamel): Merci, M. le ministre. M. le député de Lac-Saint-Jean, avez-vous des remarques?

M. Brassard: M. le Président, mes dernières remarques porteraient sur...

M. Chagnon: Je tiens à remercier les membres de cette commission aussi, évidemment, d'un côté comme de l'autre, qui ont travaillé sur ce dossier.

(12 h 50)

Le Président (M. Hamel): Merci, M. le ministre.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: Mes remarques finales, M. le Président, porteraient sur le comité Kenniff qui, comme on vient de l'apprendre, doit remettre son rapport à la fin juin. Je voudrais m'assurer que ce rapport sera l'objet d'une discussion publique et je voudrais m'assurer que la commission parlementaire de l'éducation soit partie prenante de ce débat. Est-ce que le ministre pourrait nous indiquer, aujourd'hui, qu'il a l'intention de soumettre le rapport du comité Kenniff à la commission parlementaire de l'éducation pour examen et discussion?

Le Président (M. Hamel): M. le ministre.

M. Chagnon: C'est une bonne question. Elle me prend un peu au dépourvu, dans le sens que je n'y avais pas songé jusqu'à ce moment. Je vous dis tout de suite que je remettrai personnellement une copie du rapport du comité Kenniff au député de Lac-Saint-Jean, mon critique, presque aussitôt que je l'aurai, probablement. Évidemment, le document sera rendu public et, à ce moment-là, le débat va être public. Est-ce que la commission parlementaire voudra refaire des séances sur ce sujet? Peut-être. Moi, je ne peux pas me risquer, au nom des membres de la commission parlementaire, à dire s'il y aura des séances particulières d'information et de consultation sur les résultats du rapport Kenniff, mais j'imagine que la commission va vouloir se pencher sur cette question-là à ce moment-là. Ça pourrait être un des sujets qui pourraient intéresser la commission. Maintenant, je n'exclus rien puisque je ne connais pas, évidemment, le contenu du rapport Kenniff. Peut-être le rapport Kenniff arrivera-t-il avec une approche qui fera l'unanimité, M. le député, et qui permettra...

M. Brassard: On verra bien.

M. Chagnon: Bien, alors, c'est ça, il faut voir...

M. Brassard: On verra bien.

M. Chagnon: On verra.

Le Président (M. Hamel): Alors, merci. La commission de l'éducation, ayant rempli son mandat, ajourne ses travaux sine die. Merci.

(Fin de la séance à 12 h 52)


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