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(Dix heures deux minutes)
Le Président (M. Bradet): Alors, je déclare la
séance de la commission de l'éducation ouverte et vous rappelle
le mandat de cette commission, ce matin. Le mandat de la commission pour cette
séance est de procéder à l'interpellation du
député de Lac-Saint-Jean adressée à la ministre de
l'Éducation sur le sujet suivant: La réforme de l'enseignement
primaire et secondaire.
Est-ce qu'il y a des remplacements, M. le secrétaire?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Tremblay
(Rimouski) est remplacé par M. Doyon (Louis-Hébert).
Le Président (M. Bradet): Merci. Je vous rappelle les
règles de l'interpellation et me permets de vous rappeler le
déroulement de la séance. Dans un premier temps, le
député qui a demandé l'interpellation, le
député de Lac-Saint-Jean, aura un temps de parole de 10 minutes,
suivi de la ministre pour également 10 minutes. Par la suite, des
périodes de cinq minutes seront allouées selon la séquence
suivante: un député de l'Opposition officielle, la ministre, un
député du groupe ministériel. Vingt minutes avant 12
heures, j'accorderai 10 minutes de conclusion au ministre et un temps
équivalent au député de Lac-Saint-Jean. Je vous signale
également que si un intervenant ne prend pas ou n'écoule pas
totalement les périodes de cinq ou de 10 minutes qui lui sont
allouées, cela ne réduit pas pour autant la durée de
l'interpellation. Et, finalement, le débat ne peut, à moins d'un
consentement, dépasser 12 heures, quelle que soit l'heure du
début des travaux de la commission.
Sur ce, M. le député de Lac-Saint-Jean, vous avez...
M. Brassard: M. le Président. Le Président (M.
Bradet): Oui?
M. Brassard: Selon les coutumes... Je sais que vous venez
d'énoncer la règle que c'est à midi que ça se
termine, mais il y a une coutume qui fait qu'on fait, dans une interpellation,
deux heures. Donc, là, il y a quatre minutes. Est-ce qu'on s'entend au
départ pour qu'on fasse deux heures?
Le Président (M. Bradet): Alors, s'il y a consentement, on
prendra les quatre minutes et on finira à 12 h 4. Ça va, M. le
député de Lac-Saint-Jean, vous avez la parole pour 10
minutes.
Exposé du sujet M. Jacques Brassard
M. Brassard: M. le Président, la ministre de
l'Éducation a la ferme intention de faire avancer l'école. Beau
projet, n'est-ce pas? Noble et louable intention, également. Et cela
prend la forme de huit propositions touchant des points importants et devant
donner lieu à des décisions à court terme. Il semble que
ça presse, il y a le feu quelque part, il faut annoncer les
décisions dès ce printemps. Et puis en même temps elle
dévoilait aussi, dans le même document, une série d'actions
découlant de ces orientations, et, à la fin, elle posait un
certain nombre de questions, des questions importantes portant sur des points
majeurs. Je pense, entre autres, au contenu prioritaire de la formation, le
rééquilibrage de la grille matières, l'accès
à la formation professionnelle, des questions soumises à la
consultation, des questions de fond. D'abord, je dois dire, M. le
Président, qu'il faut reconnaître que le diagnostic et les
orientations aussi bien que les objectifs font assez rapidement consensus. Cela
vient s'inscrire, d'ailleurs, dans la foulée du plan Pagé, fendu
public il y a deux ans, je pense, et cela s'inscrit aussi dans la foulée
des analyses et des avis du Conseil supérieur de l'éducation. Le
plan Pagé, par exemple, je vous rappellerai... Je vous fais juste une
citation qui m'apparaît importante pour indiquer que ça s'inscrit
dans la foulée du plan Pagé, c'est-à-dire le plan d'action
sur la réussite éducative; il a pris ce nom-là dans le
milieu. Il nous faut assurer, disait-on, à tout prix la réussite
éducative de nos jeunes. Que l'on parle de formation
générale ou de formation professionnelle, le nombre
d'élèves qui sortent des écoles publiques et
privées avec leur diplôme en poche doit donc augmenter de
façon marquée, et ce, sans rien sacrifier sur le plan de la
qualité de la formation. Cela suppose la mise en place, de toute
urgence, de mécanismes capables de faire revenir à l'école
les élèves qui l'ont quittée en claquant la porte, d'y
garder ceux et celles qui risquent de la quitter sans diplôme, et de
prévenir, à long terme, le décrochage des
élèves qui font face, dès le début de leurs
études, à l'échec scolaire. Un beau défi, on en
conviendra, qu'il faut évidemment relever avec succès.
Le Conseil supérieur de l'éducation, quant à lui,
dans son dernier rapport sur l'état et les besoins de
l'éducation, signalait qu'il était urgent de donner un second
souffle et de procéder à ce qu'il appelait un nouveau bond en
avant en matière d'éducation, avec comme objectif de conduire le
plus grand nombre de personnes, d'élèves, vers une
réussite éducative de qualité. De là, dans le
document de la ministre, la confirmation de l'objectif du plan d'action de M.
Pagé,
de son prédécesseur, c'est-à-dire faire en sorte
que 80 % des élèves réussissent à obtenir un
diplôme d'études secondaires.
Voilà, M. le Président, de beaux principes qui, lorsqu'on
les énonce devant qui que ce soit, déclenchent habituellement des
applaudissements approbateurs. Et je suis sûr que c'est
déjà arrivé à plusieurs reprises à Mme la
ministre. Mais je pense que ce n'est pas tout d'énoncer de beaux
principes, encore faut-il qu'on puisse les incarner correctement dans des
actions appropriées. Et comme nous le verrons au cours de ces deux
heures d'interpellation qui viennent, c'est précisément à
ce niveau, au niveau des actions ou de l'incarnation des principes dans la
réalité, que nos divergences et nos inquiétudes vont se
manifester, puisque plusieurs de ces actions proposées nous apparaissent
soit insuffisantes, ou encore difficiles d'application, ou carrément
inadéquates, et même, dans certains cas, les actions sont tout
simplement manquantes.
Mais avant d'aborder quelques-uns de ces sujets, M. le Président,
je pense qu'il convient de dire quelques mots sur la démarche
proposée par Mme la ministre. Il y a en effet ce que j'appelle, moi,
carrément, cette pseudo-consultation, cette prétendue
consultation, qui m'apparaît, quant à moi, en tout cas,
inacceptable et inappropriée dans les circonstances et irrespectueuse
des intervenants, et j'ai parlé récemment de bousculade, de
véritable bousculade et aussi, par conséquent, de
véritable mascarade de consultation. Imaginez que le délai qu'on
accorde à tous les acteurs pour qu'ils examinent ces propositions, pour
qu'ils organisent une consultation de leurs membres, ce délai-là
est de six semaines. Pas deux mois, pas trois mois, pas quatre mois, six
semaines, donc à peine un mois et demi, et suivi de trois jours de
consultation qui vont se dérouler en dehors de l'enceinte parlementaire,
en dehors du Parlement, trois jours: deux à Montréal, une
journée à Québec. Mais rassurons-nous, la
démocratie va y trouver son compte, parce qu'il y aura, en même
temps, un sondage. Ah, voilà! Quelle faveur! Quelle condescendance! On
va faire un sondage. On va sonder les reins et les coeurs, on va confier
ça à une firme de sondage professionnelle. (10 h 10)
Alors, M. le Président, l'importance des problèmes,
l'importance des sujets et l'importance, aussi, des défis auxquels nous
sommes confrontés en éducation primaire et secondaire aurait
pourtant requis la tenue d'un débat large, d'un débat public,
ouvert, démocratique, assorti d'une démarche pas mal plus
rigoureuse. En lieu et place, on aura plutôt droit à une
consultation limitée, inspirée d'une démarche, à
notre avis, viciée et incohérente.
Je pense qu'il y a lieu de s'interroger sur les motifs qui ont
amené le ministère, qui ont amené la ministre à
choisir ce type de démarche et ce délai extraordinairement court
pour consulter les intervenants.
Est-ce qu'on croit sincèrement que le délai de six
semaines qu'elle laisse aux intervenants sera vraiment suffisant pour analyser
de façon adéquate ces proposi- tions, compte tenu, encore une
fois, de l'ampleur et de l'importance des sujets abordés? Qu'on pense
à la sanction des études, qu'on pense au profil de sortie, qu'on
pense à l'accès à la formation professionnelle. Ce sont
des sujets de taille» des sujets vastes, substantiels. Six semaines
seulement, je ne comprends pas qu'on puisse en arriver à la conclusion,
du côté ministériel, que c'est un délai tout
à fait suffisant pour aller au fond des choses et permettre aux
intervenants d'aller au fond des choses.
Le traitement de ces sujets nécessiterait, bien au contraire, de
larges consultations afin d'établir de nouveaux consensus sociaux, parce
que c'est important qu'en bout de piste on dégage de véritables
consensus sociaux sur des sujets aussi cruciaux, aussi majeurs. À
défaut de tenir une telle consultation, je pense que ça ne pourra
qu'affecter négativement la qualité du travail accompli par les
groupes et aussi la profondeur et la qualité des échanges.
Je vous le dis carrément, M. le Président, il y a lieu de
s'interroger sérieusement sur les motifs de l'empressement
ministériel. Ma foi, c'est à se demander si elle n'est pas
guidée par un agenda électoral beaucoup plus que par des
préoccupations de nature pédagogique. Pourquoi, également,
a-t-elle jugé utile d'écarter la tenue d'une commission
parlementaire pour débattre des orientations proposées? Je vous
signale qu'en ce qui concerne ce qu'elle appelle le renouveau au cégep,
il y a eu deux commissions parlementaires: une qui a procédé
à une large consultation générale, et une autre qui a tenu
des audiences particulières une fois que les projets de loi ont
été déposés. Il me semble que, dans le cas du
primaire-secondaire, je ne vois pas pourquoi le raisonnement ne vaut pas et
qu'on a décidé de mettre au rancart le processus parlementaire
pour examiner... Je sais bien qu'on me dira qu'il n'y a pas de projet de loi,
mais ce n'est pas une raison suffisante, à mon avis.
Alors, M. le Président, je conclus, puisqu'il ne me reste plus de
temps, en disant qu'on est en face d'une bousculade en matière de
démarches, et que sur des sujets aussi majeurs, il y aurait lieu
d'être un peu plus respectueux des intervenants du monde de
l'éducation.
Le Président (M. Bradet): Merci, M. le
député de Lac-Saint-Jean. Mme la ministre, vous avez la parole
pour 10 minutes.
Réplique de la ministre Mme Lucienne
Robillard
Mme Robillard: M. le Président, je pense qu'il est
très important de situer le document «Faire avancer
l'école» dans une démarche globale qui vise le renouveau,
non seulement de l'enseignement primaire et secondaire mais aussi le renouveau
collégial, et je pourrais même dire le renouveau au plan
universitaire. Il faut absolument situer ce document qui est devant nous
sous
forme de proposition ministérielle, le situer dans une
démarche beaucoup plus globale et cohérente de l'action
gouvernementale en matière d'éducation.
Rappelons-nous, M. le Président, qu'en mars 1992, lors du
discours inaugural, le gouvernement a annoncé son intention très
ferme de renouveler l'enseignement collégial, de poser des actions, de
même au niveau des ordres d'enseignement primaire et.secondaire. Et,
immédiatement après, quelques mois plus tard, mon
prédécesseur, ministre de l'Éducation, annonçait le
plan d'action de la réussite scolaire, le document «Chacun ses
devoirs». Et, immédiatement, dans la même année, nous
avons fait une commission parlementaire, donc aux mois de novembre et
décembre 1992, sur l'ordre d'enseignement collégial, commission
parlementaire très large et ouverte, débat qui était
permis, je dirais, sur tous les sujets qui préoccupaient la population
par rapport à cet ordre d'enseignement là.
Et, très rapidement après cette commission parlementaire
de six semaines, les intentions ministérielles ont été
déposées publiquement le 6 avril 1993, et nous avons tenu une
autre commission parlementaire pour consulter les gens sur ces intentions
ministérielles dès le mois de mai. Et, au mois de juin de cette
année, nous avons pris des disions. Donc, en juin 1993, le gouvernement
a statué sur le renouveau de l'enseignement collégial et, le 1er
novembre de cette année, le même gouvernement, par
l'intermédiaire, cette fois-ci, de la ministre donc, il s'agit de
propositions ministérielles soumet à la consultation des
propositions au regard de l'enseignement primaire et secondaire.
M. le Président, si je rappelle ces dates très
précises, c'est pour vous signifier que nous avions examiné
justement la nécessité d'apporter des changements dans divers
ordres d'enseignement. L'an dernier et nous avons terminé la
démarche cette année en juin, comme je viens de le rappeler
nous avons choisi l'ordre d'enseignement collégial pour apporter
des actions très précises, et, en même temps, nous lancions
le plan de réussite pour les ordres d'enseignement primaire et
secondaire.
Pourquoi avoir choisi d'abord l'ordre d'enseignement collégial,
M. le Président? D'abord, c'est important de se rappeler que le
collège se situe entre le secondaire et l'université. C'est un
maillon fort important, et il était clair que si nous apportions des
changements à cet ordre d'enseignement, il y aurait
nécessairement des pressions en amont et en aval pour apporter des
changements aux autres ordres d'enseignement. Je vous rappellerai aussi, M. le
Président, qu'il était très clair à ce
moment-là que les intervenants dans le milieu collégial avaient
fait un pas majeur en déclarant qu'il y avait une
nécessité de changement au niveau de l'ordre
collégial.
M. le Président, c'est la première étape vers un
changement. Il faut d'abord dire: Oui, un changement est nécessaire.
Après ça, on se pose la question: Quel changement? Mais cette
étape-là est essentielle au point de départ. L'ordre
d'enseignement collégial était prêt à faire cette
étape-là, et nous avons procédé au changement.
Pendant cette période de changement, on se rappellera tous ce qui
s'est passé quand les intervenants sont venus en commission
parlementaire. Plusieurs ont affirmé que des changements étaient
aussi nécessaires aux ordres d'enseignement primaire et secondaire. On a
même apporté des exemples très précis en commission
parlementaire, et on a même affirmé: Mme la ministre, pourquoi ne
pas toucher aussi aux ordres d'enseignement primaire et secondaire?
M. le Président, aussitôt que les travaux ont
été terminés, j'ai annoncé que, oui, on apporterait
des changements au niveau des ordres d'enseignement primaire et secondaire.
J'étais heureuse de constater que les intervenants du milieu primaire et
secondaire voulaient aussi des changements dans ces ordres d'enseignement. Il
était aussi très clair que, quand nous avons apporté ces
changements à l'ordre d'enseignement collégial, nous avions
regardé l'ensemble du système. (10 h 20)
Quel était ce système que nous avions mis en place il y a
30 ans au Québec? Nous sommes retournés aux travaux d'analyse de
l'époque. Nous avons regardé même quels étaient les
objectifs visés très clairement dans le rapport Parent. Nous
avons regardé les bilans qui ont été faits au cours des
années, et c'est comme ça que nous avons réussi à
apporter des changements à l'ordre d'enseignement collégial tout
en conservant la cohérence du système. Cette fois-ci, nous
mettons de l'avant des changements au niveau des ordres d'enseignement primaire
et secondaire, qui se situent en continuité, d'abord avec le plan de
réussite scolaire et aussi en continuité avec ce que nous avons
fait au niveau de l'ordre d'enseignement collégial. Je pense qu'il faut
reconnaître cette cohérence dans les changements qui sont
proposés par le présent gouvernement au niveau de notre
système d'éducation.
Quand nous avons lancé le plan d'action sur la réussite
éducative, en juin 1992, M. le Président, il était
très clair à ce moment-là que nous aurions besoin,
à une certaine étape de ce plan d'action, d'apporter aussi des
changements à certaines règles qui encadrent l'activité
pédagogique et qui déterminent aussi le type de formation
à offrir aux jeunes. Déjà, à ce moment-là,
on le savait qu'il faudrait aller toucher au contenu de la formation, au cadre
de la formation, et c'est souvent ces règles-là, M. le
Président, qui font qu'on soutient la démarche vers la
réussite ou qu'on bloque cette marche vers la réussite. Il faut
aider cette réussite des jeunes au niveau des ordres d'enseignement
primaire et secondaire, non seulement l'atteinte de la réussite, mais
l'atteinte de la qualité de la réussite. Et ça, M. le
Président, c'est vraiment le coeur des propositions
ministérielles: non seulement viser la réussite de nos jeunes,
mais viser la qualité de la réussite de nos jeunes. Le
défi est là, M. le Président, réussir à la
fois qu'un nombre plus élevé de jeunes obtiennent leur
diplôme d'études secondaires, mais que ce diplôme
d'études secondaires soit aussi un diplôme crédible pour le
jeune, qu'une fois qu'il l'a en poche, il signifie quelque chose pour ce
jeune-là. Donc, la qualité de la réussite.
Quant au processus qui est en cours, au processus de consultation, M. le
Président, j'aurai peut-être l'occasion d'y revenir. Je vous
mentionnerai que toutes ces questions qui sont incluses dans le document
«Faire avancer l'école» sont débattues depuis
plusieurs années dans le système d'éducation primaire et
secondaire. Ce sont des questions qui ont fait l'objet de rapports, d'avis,
d'enquêtes, de publications par le Conseil supérieur de
l'éducation. Alors, ce n'est pas des sujets nouveaux, M. le
Président, ce sont des sujets qui ont été longuement
analysés. On se doit d'arriver à une décision, et
l'urgence, M. le Président, c'est l'urgence d'agir pour la
réussite de nos enfants.
Le Président (M. Bradet): Merci, Mme la ministre. Alors,
nous entreprenons maintenant la période du débat,
c'est-à-dire 80 minutes en alternance avec des cinq minutes. M. le
député de Lac-Saint-Jean, vous avez la parole.
Argumentation M. Jacques Brassard
M. Brassard: M. le Président, rapidement, encore une fois,
sur la démarche, je vous signale que tous les intervenants ont
signalé, se sont exprimé là-dessus et ont dit que le
délai était trop court et que la démarche était
pour le moins cavalière. Par exemple, je vous donne l'exemple de
l'Association des commissions scolaires de la région
LavalLaurentidesLanaudière, qui exhorte la ministre à
repousser les échéances actuellement prévues et qui
considère que les délais sont tels qu'il serait, et je les cite,
«périlleux, voire téméraire de s'engager dans une
consultation à la vapeur sur une étape aussi
stratégique».
Bon. Ceci étant dit, je voudrais quand même aborder un
autre sujet, M. le Président, le sujet de la sanction des études.
Bon. Ce sera la fin du régime transitoire en juin 1997. Il y aura de
nouvelles règles, des exigences accrues. Par exemple, le jeune, pour
obtenir son diplôme du secondaire, devra maintenant, à ce
moment-là, réussir ses mathématiques secondaire V et
physique secondaire IV, en plus des autres qu'il doit réussir
maintenant. En les appliquant je pense qu'il convient de le signaler
en les appliquant telles quelles, ces règles-là, on aura
une aggravation de l'hécatombe: une hausse des abandons scolaires, une
augmentation du nombre des exclus et de l'armée des sans-diplôme.
Si on applique ces règles-là aux diplômés de 1992,
ce n'est plus 56 583 qu'on aurait eus, c'est 43 085, donc 13 498
diplômés en moins.
Alors, il y a unanimité chez les intervenants, y compris du
côté de l'Opposition officielle je vous le signale, M. le
Président: Nous sommes d'accord pour hausser les exigences, mais il ne
suffit pas de hausser davantage les exigences pour que, comme par magie, les
résultats s'améliorent. Prétendre, comme la ministre dans
son document, que les jeunes sont capables de répondre à des
attentes élevées lorsqu'on leur en propose, c'est faire preuve de
naïveté. Tous les acteurs sont unanimes, si la hausse des exigences
n'est pas accompagnée de mesures de soutien, de mesures d'appui, par
exemple un plan d'action visant la réussite en sciences et en
mathématiques... Étant donné qu'on aura des exigences
nouvelles en mathématiques et en sciences, il nous semble qu'il faudrait
un plan d'action visant la réussite dans ces matières afin de
diminuer les risques d'échec.
Il faut diversifier les approches pédagogiques. Dans son
document, Mme la ministre indique que la voie technologique est donnée
comme exemple. Or, dans le plan d'action de M. Pagé, on était pas
mal plus explicite. On souhaitait que la voie technologique, graduellement,
soit accessible à tous les milieux scolaires de façon à ce
qu'elle touche, dans environ cinq ans, à peu près un
cinquième des élèves de troisième et de
quatrième années du secondaire, c'est-à-dire 20 %.
On ne retrouve rien dans le document ministériel. Est-ce qu'on a
abandonné ces objectifs-là? Comme le disait la présidente
de la CEQ, Mme Pagé, la ministre fait comme si la décision de
hausser la barre du saut en hauteur de cinq à six pieds suffisait
à elle seule pour améliorer la performance des sauteurs.
Ça, c'est ce qu'on appelle la pensée magique.
Tous les acteurs le signalent avec raison, cette question
également de la sanction des études soulève un
véritable débat de société puisqu'il en va de la
mission même des divers ordres d'enseignement, il en va des
finalités du système d'éducation, il en va
également des valeurs qu'on veut inculquer à nos jeunes et aussi
du curriculum à mettre en place. D'où l'importance d'une
réflexion globale, d'insérer ce débat dans une vision
d'ensemble du système et de placer cette question dans une juste
perspective.
La Fédération des commissions scolaires avait raison de
signaler, par exemple, et je la cite. C'est un document du 23 avril 1993: II
est très difficile de traiter des règles de sanction des
études secondaires sans débattre de la finalité du cours
secondaire, qui nous semble être autre chose qu'une transition vers le
cégep. Il est très difficile de traiter des règles de
sanction des études sans circonscrire l'évolution de la
répartition des matières et des modifications aux règles
de sanction des études secondaires ou de la répartition des
matières qui constituent des changements majeurs nécessitant de
larges consultations et des analyses approfondies.
Cette question de la sanction des études, M. le Président,
est directement, elle est intimement liée à la définition
des profils de sortie qui est une dimension essentielle de toute politique
éducative. On en parle dans son document, mais, les profils de sortie,
c'est une sorte de comité des sages qui aura la tâche de les
mettre au point. Ça, c'est mettre la charrue devant les boeufs, M. le
Président.
Le Président (M. Bradet): Merci, M. le
député de Lac-Saint-Jean. Mme la ministre, vous avez cinq
minutes.
Mme Lucienne Robillard
Mme Robillard: M. le Président, qu'il me soit permis de
revenir sur le processus de consultation sur les propositions qui sont devant
nous. M. le Président, nous avons devant nous huit propositions, pas 43,
huit propositions et quatre questions. Huit propositions qui ont fait l'objet
de débats depuis des années dans le milieu scolaire. Qu'on pense
à l'enseignement du français, à l'enseignement de la
langue seconde, qu'on pense justement aux règles de sanction, M. le
Président. Nous sommes en régime transitoire depuis 1981; vous ne
me direz pas qu'on n'a pas examiné ces situations depuis 12 ans. (10 h
30)
Tous ces sujets-là ont été largement
débattus, M. le Président. Ce qu'on fait, c'est qu'on met sur la
table huit propositions précises. On cible des actions très
concrètes où les analyses ont été faites au fil des
années, et le temps est venu de la décision. Nous mettons sur la
table ces propositions le 1er novembre, nous enclenchons une vaste consultation
pendant six semaines. Il est très clair que ça demande un effort
aux milieux de l'enseignement primaire et secondaire pour regarder de
près encore une fois ces types de propositions là, parce que les
décisions seront prises au début de l'année 1994. En
même temps, on demande un avis au Conseil supérieur de
l'éducation. On va rencontrer des jeunes du secondaire sur ce
sujet-là. Nous aurons des journées de consultation publique au
mois de décembre.
M. le Président, j'ai beaucoup de difficulté à
saisir la demande de l'Opposition par rapport à ce processus de
consultation. Quand, l'an dernier, j'avais annoncé une commission
parlementaire pour l'ordre d'enseignement collégial, l'Opposition me
disait: Mais ce n'est pas la bonne formule. Ce n'est pas adéquat. On
devrait faire une commission d'enquête, une espèce de rapport
Parent II. Mme la ministre, vous n'avez pas déposé de document,
au point de départ, sur vos intentions. Des critiques par rapport au
processus de l'an passé.
Cette année, j'avance un document ministériel sur des
intentions, avec des consultations publiques. Encore une fois, on me dit: Bien,
cette fois-ci, il faut un débat de société. Il faut
presque des états généraux. M. le Président, si
j'écoutais l'Opposition, pour le système d'éducation, pour
apporter des changements dans le système d'éducation, j'aurais
drôlement des problèmes. Ce n'est jamais le bon temps, ce n'est
jamais la bonne démarche et ce n'est jamais le bon objet. Nous aurions
des difficultés. Que se passerait-il pour nos jeunes qui ont un urgent
besoin qu'on agisse, M. le Président? Qu'on regarde exactement ce qui se
passe au niveau des résultats scolaires. Ce n'est plus le temps de faire
des vastes commissions d'enquête, pendant quatre ans, cinq ans, six ans,
avec des décisions qui seraient reportées à l'an 2000. Il
y a des objets très précis qui sont sur la table, qui ont
été analysés. Je pense qu'on sait exactement ce qu'on doit
faire, que les professeurs le savent aussi, ce qu'ils doivent faire. Ils
constatent des résultats autant que nous et regardent ce qui ne va pas.
Il s'agit qu'on réussisse à établir un consensus avec le
monde scolaire pour passer à l'action. C'est toujours un peu ce qui
manque dans le monde de l'éducation. On est capable de
s'auto-évaluer. On est capable de s'autocriti-quer. C'est un
système qui s'auto-évalue régulièrement. Mais il
faut aussi le passage à la décision et à l'action. M. le
Président, c'est ce que nous allons faire.
Quant à la sanction des études et aux nouvelles
règles de sanction des études, M. le Président, mon
adjoint parlementaire et député de Sherbrooke s'est fortement
préoccupé de cette question-là. Alors, je lui laisserai le
plaisir d'apporter ses commentaires sur les règles de sanction des
études.
Le Président (M. Bradet): Merci, Mme la ministre. M. le
député de Sherbrooke, vous avez la parole.
M. André J. Hamel
M. Hamel: Merci, M. le Président. Je suis heureux
d'intervenir aujourd'hui dans le cadre de l'interpellation demandée par
le député de Lac-Saint-Jean sur le sujet qu'il nomme: «La
réforme de l'enseignement primaire et secondaire».
«Réforme», dit-il. Je ne sais pas où le critique de
l'Opposition a pris ce terme, certainement pas dans le document rendu public le
1er novembre, puisque, comme moi, M. le Président, votre lecture n'aura
pas permis de déceler une seule fois ce terme de
«réforme» dans les 39 pages du document ministériel.
Peut-être le critique l'a-t-il confondu avec un autre texte?
Peut-être saurons-nous lequel aujourd'hui?
Toutefois, il y a quelques jours, alors que je préparais mon
intervention de ce matin, j'ai relu avec intérêt le document de la
ministre de l'Éducation et députée de Chambly et les
commentaires qui ont suivi sa publication, document intitulé
«Faire avancer l'école». Et j'ai notamment lu avec plaisir
un editorial paru dans un journal très connu dans la circonscription de
Lac-Saint-Jean, soit Le Quotidien, et, en parlant du document
«Faire avancer l'école», l'éditorialiste
écrivait ceci: «La ministre de l'Éducation poursuit ainsi,
et de brillante façon, le grand dépoussiérage de
l'instruction publique qu'elle a entrepris avec les cégeps». Et M.
Néron poursuivait en disant: «L'augmentation des standards
d'excellence pourrait permettre au système québécois
d'éducation de récupérer un peu de son lustre perdu.' Ce
pas dans la bonne direction est susceptible de contrer la fâcheuse
tendance du nivellement par le bas.» Fin de la citation. On parlait ainsi
implicitement de la septième proposition du document de la ministre et
qui porte, en page 25, sur la révision des règles d'obtention du
diplôme d'études secondaires. Ce sera donc l'objet de ma
présente intervention.
Les règles d'obtention du diplôme d'études
secondaires, voilà bien, M. le Président, un sujet qui a fait
l'objet de nombreuses discussions, de volumineuses
études et d'avis répétés depuis près
de quinze ans. Il y a un an, presque jour pour jour, débutaient à
l'Assemblée nationale deux séries de consultations publiques de
près de 10 semaines sur l'enseignement collégial
québécois. À maintes reprises, les intervenants
invités ont critiqué les règles de sanction qui
s'appliquent actuellement pour l'obtention du diplôme secondaire, le
D.E.S.: disparités considérables entre un diplôme de 130
unités et un diplôme de 180 unités, nous disaient les uns;
doutes sur la fiabilité du diplôme, nous répétaient
les autres, et presque tous déploraient l'absence des
mathématiques et des sciences dans la liste des matières
obligatoires pour la sanction. Au total, plus d'une vingtaine d'intervenants se
disaient favorables à un rehaussement des exigences.
Mais quel est le problème? Il est simple, M. le Président.
Nous sommes, depuis plus d'une décennie, en régime dit
transitoire. En effet, en 1981, le gouvernement d'alors, dont faisaient partie
le critique et député de Lac-Saint-Jean et le
député de L'Assomption, ce gouvernement a adopté des
règles de sanction fort appropriées. Malheureusement, le 6
février 1981, ils ont manqué de courage pour appliquer le
principe élémentaire qui doit inciter nos jeunes à
réussir les principales matières obligatoires de secondaire IV et
V pour obtenir leur diplôme de secondaire. Simple, c'était trop
simple pour eux, M. le Président. Ils ont alors créé un
nouveau diplôme inadéquat, un diplôme de style
gruyère parce que composé d'une grande variété de
tout.
Cette situation a beaucoup trop duré, M. le Président, et
en conclusion, très rapidement, il me semble que nos amis d'en face, qui
rêvent d'un Québec dans un monde nouveau, devraient
réaliser, comme devrait le faire le critique de l'Opposition en
matière d'éducation, qu'un diplôme d'études
secondaires fiable et crédible, un diplôme de qualité,
quoi, on le doit aux jeunes du Québec et on le doit au Québec du
XXIe siècle. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bradet): Merci, M. le
député de Sherbrooke. M. le député de
Lac-Saint-Jean, vous avez cinq minutes.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: Oui, M. le Président, juste un petit
détail en passant. L'accroissement des règles de sanction qui ne
s'appliquent toujours pas s'est fait aussi en 1990, hein! Le
prédécesseur de Mme la ministre, M. Ryan, a accru les exigences
en mathématiques, en termes de sanction des études, en 1990. Je
pense que c'est important de le signaler.
M. le Président, je voudrais aborder un sujet important qui a
fait, je pense, les manchettes, c'est le sujet des formes d'encadrement. Bon.
Tout le monde reconnaît qu'il faut sans doute faire des efforts pour
mieux encadrer les élèves, particulièrement ceux des trois
premières années du secondaire. La ministre a, semble-t-il,
découvert une son i de recette miracle, une formule magique: le
titulariat. D'abord, il convient de signaler, M. le Président, qu'elle
n'est pas la première à faire cette découverte. On peut
remonter très loin. Je lisais récemment, dans L'école
québécoise, 1979, qu'on proposait justement des groupes
stables de même que le titulariat comme formes d'encadrement
privilégiées. C'était en 1979, il y a 15 ans de ça,
presque. Quatorze ans. Plus récemment, le plan d'action de son
prédécesseur, M. Pagé, également recommandait,
privilégiait et proposait: premièrement, des groupes stables pour
les trois premières années du secondaire et, deuxièmement,
des professeurs titulaires de classes. Donc, ce n'est pas une nouvelle
invention, c'est tout au plus une redécouverte. (10 h 40)
Mais, le plan Pagé était pas mal plus explicite que le
brouillon de Mme la ministre. À la page 9 du plan Pagé, on peut
lire ce qui suit: «Puisque le titulariat remet en cause certaines
pratiques inscrites dans les conventions collectives contrairement
à ce qu'elle m'affirmait en Chambre il n'y a pas si longtemps
notamment celles découlant des champs de spécialisation et des
règles d'affectation, le ministère de l'Éducation
sollicite l'accord de ses partenaires afin de mettre en place des mesures pour
faciliter l'implantation de la formule du titulariat au profit
des élèves des premières classes du secondaire.»
Alors, il ne faut pas être aveugle, M. le Président, 11 ne
faut pas non plus être faussement candide. les conventions collectives,
particulièrement le chapitre v et le chapitre viii, paralysent,
entravent la propagation, la diffusion du titulariat. c'est connu de tout le
monde dans le milieu de l'éducation. et sa diffusion ne sera possible...
parce que, comment se fait-il qu'en 14 ans ça ne s'est pas
propagé plus que ça? il y a une raison à ça. sa
diffusion ne sera possible que si elle est précédée d'une
négociation avec les organismes syndicaux, portant sur l'organisation du
travail dans les écoles secondaires en particulier. et d'ailleurs la ceq
est d'accord pour ça. elle était d'accord, elle réclamait
même que l'on amorce des négociations en matière
d'organisation du travail et qui auraient pu porter, entre autres, sur la mise
en place du titulariat. on a préféré, du côté
du gouvernement, tout simplement reporter les conventions collectives pour une
autre période. sinon, si on ne fait pas ça, ça va demeurer
lettre morte, comme est demeurée lettre morte la proposition de
l'école québécoise en 1979, comme est demeurée
lettre morte la proposition du plan d'action de la réussite scolaire de
m. pagé. ce n'est pas une recette miracle, il faut sans doute autre
chose aussi.
Le Conseil supérieur de l'éducation parle d'un
accompagnement éducatif. Il faut plus que ça. Il faut le suivi du
cheminement des élèves, diagnostic au bon moment, soutien
à l'orientation et au choix scolaire et professionnel, mesures d'accueil
et de mise à niveau à des moments stratégiques. M. le
Président, c'est nulle part dans le document. Et il faut
reconnaître que ça va se dégrader encore davantage. Il y
aura de moins en moins de mesures d'appui et de soutien quand on pense que la
loi 198 prévoit une réduction des personnels de 12 % d'ici 1998.
dans ces conditions, comment prendre
au sérieux, comment juger crédible la prétention
ministérielle de mettre en place le titulariat et d'atteindre 80 % de
taux de réussite?
Le Président (M. Bradet): Merci beaucoup, M. le
député. Mme la ministre.
Mme Lucienne Robillard
Mme Robillard: M. le Président, un mot d'abord pour
compléter l'intervention sur les règles de sanction. Il y a
plusieurs propositions pour réviser les règles de sanction dans
le document «Faire avancer l'école», et je n'ai pas entendu
le point de vue de l'Opposition sur chacune de ces propositions-là. Il
faut bien remarquer que les propositions indiquent très clairement qu'il
s'agirait maintenant de faire un cumul des unités seulement en
quatrième et en cinquième secondaire, que quatrième et
cinquième secondaire, ça totalise. 75 unités, qu'on
exigerait la réussite de 54 unités et, troisièmement,
qu'il y aurait des matières obligatoires à être
réussies, dont celles de la langue maternelle, la langue seconde, les
mathématiques, les sciences physiques, l'histoire du Québec et du
Canada. Mais, quatrièmement, M. le Président, et ça, il ne
faut jamais l'oublier dans l'analyse de la proposition qui est sur la table,
pour appliquer de telles règles de sanction, il faut
nécessairement revoir le contenu des cours de mathématiques de
quatrième et de cinquième années.
Voilà, M. le Président, la pierre d'achoppement, je
dirais, pour plusieurs de nos jeunes. Et les résistances, à
l'heure actuelle, à de telles règles de sanction, c'est à
cause du contenu des cours de mathématiques actuels de cinquième
année. Alors, il faut lire la proposition dans son ensemble, y inclus la
quatrième action qui dit de revoir les cours de mathématiques.
Voilà pour la proposition sur les règles de sanction.
Quant aux commentaires de l'Opposition concernant le titulariat, M. le
Président, encore une fois, il faut relire la proposition telle qu'elle
est libellée dans notre document. On y lit: Procéder, au premier
cycle du secondaire, à la formation de groupes d'élèves
stables voici l'objectif sous la responsabilité principale
d'un titulaire ou d'un tuteur. Relisons: Procéder à la formation
de groupes d'élèves stables.
Que veut-on dire, M. le Président? Ce qu'on veut dire, c'est que
les enfants qui arrivent à l'ordre d'enseignement secondaire, qui
arrivent du primaire, ce sont des enfants qui ont 12 ans il faut se le
rappeler qui vont demeurer au premier cycle du secondaire de 12 à
15 ans. Ce sont des enfants qui ont besoin d'une certaine autonomie, mais qui,
en même temps, ont besoin d'un encadrement, qui ont besoin d'une
stabilité. Une stabilité, d'abord par leur groupe de
référence, par le groupe d'élèves, le groupe auquel
ils appartiennent. C'est ce dont il s'agit. Il faut un peu se promener dans nos
écoles secondaires, à l'heure actuelle, pour réaliser
comment, dans certaines non pas dans toutes, parce que certaines ont
déjà procédé à la formation de groupes
stables les enfants se retrouvent à l'âge de 12 ans, en
secondaire I, avec des professeurs différents pour chacune des
matières, avec des changements de locaux, avec des changements de
groupes d'élèves. Les enfants, à cet âge, ont besoin
d'une plus grande stabilité. C'est le coeur de cette
proposition-là.
En même temps qu'une stabilité de leur groupe
d'élèves, qu'ils aient aussi une figure de
référence, qu'ils sentent que, dans cette école-là,
dans cette école secondaire, il y a un professeur, un enseignant qui est
responsable de ce groupe d'élèves, qui assure justement le
cheminement de chacun, qui leur donne un coup de main s'ils ont des
difficultés. C'est ça aussi le soutien à
l'élève, des mesures d'encadrement de l'élève.
C'est ça aussi, c'est une formule... Ce n'est pas la formule magique, M.
le Président, mais c'est une condition importante pour que nos enfants
sentent qu'ils ont un groupe d'appartenance et qu'ils ont un adulte enseignant
responsable d'eux, à qui se référer s'ils ont des
difficultés.
En même temps, vous allez retrouver dans le document d'autres
mesures aussi pour aider l'enfant. Quand on parle d'une évaluation
rigoureuse à la fin du troisième cycle, c'est aussi une des
mesures qui est suggérée, que les autorités locales,
après le secondaire III, procèdent à une évaluation
rigoureuse, c'est-à-dire où en est rendu l'élève.
Il ne s'agit pas de lui donner un diplôme; jamais, M. le
Président. Il ne faut pas donner le message à nos jeunes que, le
secondaire III, c'est suffisant dans la vie.
Le Président (M. Bradet): Alors, merci beaucoup, Mme la
ministre.
Mme Robillard: Mais il faut faire cette évaluation
après le secondaire III pour les aider.
Le Président (M. Bradet): Merci. Alors, je reconnais
maintenant le député de Louis-Hébert.
M. Réjean Doyon
M. Doyon: Merci, M. le Président. Vous ne vous surprendrez
pas que le député de Louis-Hébert s'intéresse
à ces matières d'éducation, le comté de
Louis-Hébert est particulièrement axé sur le domaine de
l'éducation. Je vous rappellerai tout simplement la présence de
trois cégeps, de l'Université Laval, bien sûr, et de
nombreuses écoles d'enseignement primaire et secondaire qui
préparent à ces cours qui se donnent à des niveaux
supérieurs.
Ce sur quoi je voudrais porter mon attention, c'est de constater, avec
la ministre, qu'il y a une détermination de la part du gouvernement
d'améliorer, de changer le système d'éducation. On a
cerné des problèmes, on est allé voir au fond des choses
et on a fait connaître des orientations claires et fermes qui vont
être soumises à une consultation. On a aussi posé des
questions précises. (10 h 50)
D'une façon particulière, ce que je voudrais porter
à votre attention, M. le Président, c'est la direction
proposée par le gouvernement, par ma collègue, la ministre de
l'Éducation, et c'est la priorité des priorités. Elle en a
fait la proposition numéro 1 de son document ministériel, et
cette proposition se lit comme suit: C'est de renforcer l'enseignement du
français, langue maternelle, en mettant davantage l'accent sur le
français écrit et sur les structures de la langue. C'est simple
comme proposition, mais c'est aussi lourd de conséquences. Donc, le
projet accorde une plus grande importance à la langue écrite,
à la maîtrise du langage de base.
Le document ministériel cerne des problèmes de fond. Il
fait le constat de lacunes évidentes dans l'enseignement du
français au primaire et au secondaire. Il reconnaît
l'inquiétude du public en général sur ce sujet. Il met
donc davantage l'accent sur l'écriture et la lecture, et il favorise
l'apprentissage plus systématique de la grammaire et la
fréquentation d'oeuvres littéraires de qualité. Il indique
que les compétences à acquérir seront
précisées très rapidement, et il propose une
épreuve diagnostique d'écriture applicable au début de la
cinquième année du primaire et de la quatrième
année du secondaire, et une épreuve ministérielle à
la fin de la troisième année du secondaire.
Concernant les approches pédagogiques, il suggère de
laisser une marge de manoeuvre accrue aux spécialistes de l'enseignement
qui sont plus à même de cerner ce qui convient mieux à
leurs élèves.
La ministre reconnaît aussi qu'il est urgent que les
pédagogues se réapproprient les rôles qui leur reviennent
elle en parlait tout à l'heure. J'ai entendu de nombreux
enseignants exprimer leur satisfaction de retrouver davantage d'autonomie et de
responsabilités dans les visées ministérielles. Le projet
présenté leur procure un défi stimulant.
Je me réjouis de constater l'accueil favorable
réservé par la Fédération des commissions scolaires
aux propositions de la ministre. Pour la Fédération,
l'amélioration du français écrit est une mesure fort
attendue, et à la Centrale de l'enseignement du Québec, le projet
est accueilli avec ouverture. Mme Pagé parle même
«d'agréable surprise», entre guillemets. La
Fédération des cégeps également s'est dite
intéressée par les orientations ministérielles, entre
autres parce qu'elles mettent l'accent sur la maîtrise de la langue
maternelle.
Donc, je dis oui, M. le Président, et j'applaudis à la
démarche entreprise où on a laissé de côté
les éternels débats de structure souvent préconisés
par nos amis de l'Opposition. Ils s'en font d'ailleurs une
spécialité et ça se continue ce matin. Vous en êtes
témoin.
Ma collègue et mon gouvernement ont plutôt
décidé de s'attaquer au contenu et d'agir, décision
parfaitement responsable. On a voulu recentrer l'école sur sa fonction
première, sur l'enseignement. Donc, chacun ses devoirs. En soumettant
ses orientations ministérielles et en lançant sa consultation, la
ministre de l'Éducation donne le ton. L'Opposition devra aussi faire ses
devoirs. Je le suggère humblement. L'Opposition devrait éviter de
s'enliser dans une critique négative, mais plutôt chercher
à collaborer positivement, et à nous permettre d'avancer ensemble
et de faire avancer l'école pour le meilleur profit de nos jeunes au
Québec.
La nécessité d'un redressement de la trajectoire dans
l'enseignement du français, langue d'enseignement au primaire et au
secondaire, a été clairement démontrée. Des
messages ont été lancés et ont été entendus
partout. L'OCDE, je vous dirais tout simplement, dans une étude parue en
1992, soulignait ce qui suit: II y a un recul depuis 25 ans au niveau des
aptitudes de base. Les résultats obtenus avec le Canadian Test of Basic
Skills test d'aptitudes de base mis au point par Nelson Canada
font ressortir une dégradation de 6 % depuis 1966 dans les aptitudes de
base. On constate que c'est un phénomène pour l'ensemble des
aptitudes de base, mais surtout pour l'aptitude linguistique.
Je pourrais parler longuement, M. le Président, c'est
déjà terminé. Mais ce que je dis, en laissant la parole au
suivant, c'est que, pour le gouvernement du Québec, la maîtrise de
la langue maternelle est fondamentale. La génération montante est
en droit de s'attendre à une formation de qualité, et c'est ce
que nous sommes en train de faire, M. le Président.
Le Président (M. Bradet): Merci, M. le
député de Louis-Hébert. M. le député de
Lac-Saint-Jean.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: M. le Président, je dirai d'abord que le
député de Louis-Hébert ne m'a pas écouté
beaucoup, parce que je n'ai pas dit un mot sur les structures. Il
prétend qu'on s'acharne et qu'on consacre un temps inouï aux
débats sur les structures. Je n'en ai pas dit un mot, puis je n'ai pas
l'intention d'en parler non plus.
J'ai l'intention de parler des sujets qu'on retrouve justement dans le
document ministériel, puis je reviens sur deux. La sanction des
études. Ce qu'on dit, M. le Président, puis ce que les principaux
acteurs du monde de l'éducation disent mais il semble que la
ministre fait semblant de ne pas entendre ou de ne pas prendre conscience de
cette dimension-là c'est: Oui à la hausse des exigences.
Tout le monde est d'accord là-dessus. Mais tout le monde dit en
même temps, du même souffle: Si vous ne faites que cela, vous
aggravez l'armée des exclus, vous augmentez le taux d'échec.
Donc, vous n'atteignez pas l'objectif que vous poursuivez, de faire
réussir plus de monde, de s'approcher et d'atteindre 80 % de taux de
réussite. Tout le monde est d'accord avec cet objectif-là aussi,
mais si, en même temps, vous haussez les exigences, il est
évident, il est clair, la CEQ le dit, la Fédération des
commissions scolaires le dit, tout le monde le dit, les cadres également
le disent: Si vous haussez les exigences, il faut, attention!, que vous
accompagniez cela de mesures de soutien, de mesures d'appui pour mieux
accompagner le cheminement des élèves, mieux dépister ceux
qui ont des difficultés d'apprentissage et faire les corrections qui
s'imposent. Sinon, vous allez avoir plus d'échecs, plus
d'abandons, plus de décrocheurs, plus de non-diplômés.
C'est ça que le monde dit. Et dans son document, on retrouve de
nouvelles règles de sanction des études, de nouvelles exigences
accrues, mais il n'y a rien qui nous permet de croire qu'il y aura un train de
mesures d'accompagnement, de soutien, d'appui, pour permettre aux
élèves de passer à travers et de réussir,
malgré la hausse des exigences. Et ça, c'est angoissant.
Je peux bien rappeler ce qu'on a fait, là, et reconnaître
que oui, on a peut-être erré. Quand on a haussé de 50 %
à 60 % le pourcentage requis pour réussir, la note de passage,
ça a provoqué une hausse des abandons et une hausse
d'insuccès, c'est évident. Et, là, à ce
moment-là, il faut peut-être reconnaître qu'on n'a
peut-être pas suffisamment mis en place, en même temps, des mesures
de soutien et d'appui pour permettre aux élèves de passer
à travers une telle hausse des exigences. C'est le même
phénomène qui va se produire, là, et je constate que le
ministère, le gouvernement n'est pas conscient de ça et il ne
prend pas les mesures qui s'imposent. Ça, c'est inquiétant.
Quant aux formes d'encadrement, M. le Président, d'abord le
tutorat, là, il est répandu très largement, parcv qu'il
peut s'appliquer sans qu'on touche aux conventions collectives. Moi, dans ma
commission scolaire, au Lac-Saint-Jean, le tutorat est partout. On l'a mis en
place partout, le tutorat, et je suis d'accord pour qu'on augmente les groupes
stables au niveau des trois premières années du secondaire. Je
suis d'accord avec ça, parce que, comme le disait le plan Pagé,
ça permet à l'élève de mieux s'identifier à
son groupe. Je suis d'accord pour que le titulariat se propage davantage, parce
que cette formule permet d'établir avec ceux-ci, c'est-à-dire
avec les maîtres, les élèves, une relation durable et
empreinte de chaleur humaine. Elle concourt à créer un esprit de
groupe, un climat de confiance.
Je suis d'accord avec ça, mais comment se fait-il qu'on disait
ça il y a 15 ans et que ce n'est pas plus répandu? C'est parce
que c'est bloqué! C'est bloqué par les conventions collectives.
Il faut reconnaître ça. Et la CEQ dit: Assoyons-nous à la
table de négociation et amorçons une négociation
sérieuse, non pas sur les conditions salariales, mais sur l'organisation
du travail dans les écoles, pour justement permettre de mettre en
oeuvre, dans les écoles, davantage de titulaires, de classes stables.
C'est ça qu'elle dit. Je suis convaincu que si vous ne faites pas
ça, le titulariat ne sera pas plus répandu qu'il ne l'est
présentement.
Voilà ce que je dis, voilà ce dont il faut prendre
conscience, et il faut que ce soit suivi d'une négociation
sérieuse avec les intervenants syndicaux. Ce n'est pas un
mystère, ça, et d'autant plus que les organisations syndicales
lancent un appel, la réclament, cette négociation. Alors,
faisons-là! Ça va peut-être être difficile, j'en
conviens, mais au moins, on va négocier, pour une fois, sur autre chose
que des conditions de salaire, des régimes de retraite, des
règles d'affectation, etc. On va négocier sur quelque chose
d'important sur le plan pédagogique: l'organisation du travail dans
l'école elle-même.
Le Président (M. Bradet): Alors, merci, M. le
député. Mme la ministre. (11 heures)
Mme Lucienne Robillard
Mme Robillard: oui, m. le président. si on revient sur le
sujet de la règle de sanction des études secondaires, je suis
heureuse d'entendre l'opposition dire oui à la hausse des exigences.
c'est ce que j'ai compris: oui à la hausse des exigences.
peut-être même que l'opposition est d'accord pour dire oui aux
exigences qui sont indiquées dans le document «faire avancer
l'école». ça, je n'ai pas encore entendu ça, mais ce
que j'entends, c'est: ne faites pas l'erreur que nous avons commise. nous avons
décidé d'augmenter la note de passage de 50 % à 60 % et
nous avons provoqué des échecs supplémentaires parce que,
en quelque part, nous n'avons pas bien géré cette décision
ou sa mise en application.
M. le Président, quand on regarde l'ensemble du document
«Faire avancer l'école», il est clair qu'un rehaussement des
exigences pour obtenir son diplôme d'études secondaires... Et je
pense que tous et chacun vont être d'accord pour qu'en 1993 on exige la
réussite d'un cours de mathématiques de secondaire V avant de
penser à s'en aller au niveau collégial, ou même s'en aller
dans l'exercice d'un métier. Il y a une nécessité à
ce que l'apprentissage du langage de base que sont les mathématiques, ce
soit fait pour tout le monde, même pour ceux qui s'en vont sur le
marché du travail. Nous savons qu'à l'heure actuelle, sur 100
jeunes qui commencent le secondaire I, 67 s'en vont au collégial, ou 63,
si ma mémoire est bonne; 63 s'en vont au collégial. Trente-sept,
donc, le cours secondaire est le cours terminal pour eux. Et si j'exclus ceux
qui décrochent avant la fin du diplôme secondaire, ça veut
dire qu'ils ont terminé leurs études. Pour tous ces jeunes, il
faut, je pense, des cours de mathématiques. Pour se débrouiller
dans la vie, dans quelque métier que ce soit, dans quelque profession
que ce soit, il faut l'acquisition d'un langage de base en
mathématiques. Pour ceux qui continuent au collégial, alors,
là, il faut voir exactement les exigences, dépendamment de la
filière qu'ils vont choisir.
Donc, pour aider ces jeunes à réussir, M. le
Président, on doit revoir le contenu des cours de mathématiques
de quatrième et de cinquième. Non seulement on va faire ça
dans le document «Faire avancer l'école», dans la
proposition qui est sur la table, mais, si vous regardez au fil des
propositions, vous allez voir que même au niveau primaire et au niveau
secondaire, le message de fond qui se dégage, c'est de dire: Au fur et
à mesure que le jeune avance dans ses différentes classes, il
faut être capable d'identifier de l'évaluer,
donc ses forces et ses faiblesses et de l'aider et de lui donner
des cours de rattrapage ou de mise à niveau. C'est pour ça que
vous voyez apparaître des examens diagnostiques, des examens
ministériels. Les examens diagnostiques sont des outils pour les
professeurs pour évaluer les forces et les faiblesses, pour être
capable, après le secondaire III, de faire une évaluation
rigoureuse: Quelles sont les forces et les faiblesses du jeune? A-t-il besoin
de rattrapage, de mise à niveau pour que quand il entrera en secondaire
IV il soit capable de réussir? Regardons l'ensemble du document, et vous
allez voir que les mesures de soutien aux jeunes, la promotion de ces mesures
de soutien est partout présente dans ce document pour aider nos jeunes
à réussir.
Alors, si on est tous d'accord pour rehausser les exigences, je pense
aussi que tous ensemble on devrait être capable de trouver les moyens
pour accompagner nos jeunes dans cette réussite, vers une
qualité, je dirais, encore plus grande de la réussite.
Le Président (M. Bradet): Alors, merci, Mme la ministre.
M. le député de Sherbrooke.
M. André J. Hamel
M. Hamel: Merci, M. le Président. J'aimerais, dans les
quelques prochaines minutes, tracer un bref portrait d'ensemble de la formation
professionnelle. À l'aube de l'an 2000, la réponse au besoin de
formation professionnelle généré par l'évolution
technologique, économique et sociale du Québec s'impose comme un
défi.
Au cours des dernières années, la formation
professionnelle a fait l'objet d'une entreprise majeure de rénovation et
de modernisation. En effet, en 1986, un plan de relance de la formation
professionnelle au secondaire vise à former une main-d'oeuvre de
qualité pour répondre aux besoins du marché du travail,
correspondant aux attentes de compétence technique et d'adaptation
sociale formulées par les entreprises. À cette occasion, le
ministère de l'Éducation élargira également sa
politique d'accessibilité afin de permettre à tout adulte
d'accéder gratuitement à une formation professionnelle
sanctionnée par un diplôme d'études secondaires. Le mandat
était clair. Il s'agissait de redonner de la visibilité sociale
à la formation professionnelle et de lui octroyer la place qui lui
revient dans le contexte économique actuel. En d'autres termes, il
fallait mettre sur pied une structure et des modalités de fonctionnement
qui répondent à ces besoins.
C'est au cours de l'année 1991-1992 que des rencontres de
concertation avec le réseau se sont tenues pour établir la carte
des enseignements. Les commissions scolaires ont été
initiées à un effort de rationalisation afin de doter chaque
région d'une offre de services de formation professionnelle mieux
adaptée aux besoins socio-économiques régionaux. De plus,
de façon à ce que les centres de formation professionnelle
puissent être réaménagés, équipés et
utilisés selon les besoins d'im- plantation des nouveaux programmes, une
restructuration majeure de 240 000 000 $ a été ainsi consentie
depuis le début de la relance, et ce, au secondaire seulement.
Le 22 octobre dernier, la ministre Lucienne Robillard proposait une
approche intégrée de la formation professionnelle et technique.
Cette intégration des formations du secondaire et du collégial
constituent la condition préalable pour que le système scolaire
poursuive une démarche adéquate aux nouvelles attentes des
jeunes, des travailleurs, des entreprises, des régions et des
collectivités locales. La nomination récente d'un sous-ministre
adjoint responsable de l'ensemble des engagements ministériels en
formation professionnelle au secondaire et en formation technique au
collégial constitue un élément majeur pour atteindre
l'harmonisation souhaitée en ce domaine. Je partage donc les
orientations ministérielles qui nous amènent tout
particulièrement à investir dans la compétence.
Nous sommes invités par Mme la ministre de l'Éducation, de
l'Enseignement supérieur et de la Science, au-delà des
progrès accomplis, à trois objectifs: soit améliorer
l'accès à la formation afin de permettre à un plus grand
nombre de travailleurs et de travailleuses d'acquérir des
compétences professionnelles et techniques qui répondent aux
attentes et aux besoins du marché de l'emploi; harmoniser les offres de
service en complémentarité avec le réseau collégial
afin de faciliter le cheminement scolaire et la poursuite des études;
enfin, resserrer les liens de collaboration avec tous les partenaires
socio-économiques.
Les réseaux secondaire et collégial offrent une
diversité de services qui s'adressent à une très large
clientèle. Les deux réseaux ont évolué en
parallèle cherchant à adapter continuellement leurs services
à la demande. Aujourd'hui, ils partagent plusieurs problèmes
communs qui proviennent, pour beaucoup, de l'absence d'une vision
intégrée de la formation professionnelle et technique. En mettant
en évidence cette recherche de la qualité partagée par le
monde du travail et celui de l'éducation, nous favorisons
également le rapprochement de deux mondes qui ont tout à gagner
à être partenaires. Il nous faut donc tous ensemble continuer
à relever le défi de l'excellence et assurer à nos
élèves, jeunes et adultes, des services de grande qualité.
Et je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Bradet): Merci beaucoup, M. le
député de Sherbrooke. M. le député de
Lac-Saint-Jean.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: M. le Président, un dernier mot sur toute la
question de la sanction des études, sujet majeur. Tout à l'heure,
la ministre nous parlait des mathématiques. Ça va devenir une
matière obligatoire, qu'on devra réussir, là, à
partir de 1997. Dans son document, à la page 23, je vais vous lire un
paragraphe: «Pour se garder les portes ouvertes, les élèves
sont
souvent pratiquement obligés de suivre un plan ou un profil de
formation unique, celui des sciences et des mathématiques
avancées. Même si leur intérêt et leur
compétence vont vers d'autres champs d'études, cette
concentration prématurée en sciences et mathématiques
devient un outil de sélection des élèves les plus
performants sans égard à la pertinence de ces matières
pour leur avenir». (11 h 10)
Page 24: «En clair, il est urgent de mettre l'accent sur d'autres
branches du savoir que les sciences et les mathématiques».
Malgré ce qu'elle dit, elle annonce qu'il faudra réussir les
mathématiques de secondaire V pour obtenir son diplôme
d'études secondaires. Ça veut dire quoi, ça? Ça
veut dire qu'il faut s'entendre d'abord sur les profils de sortie avant de
prendre des décisions en matière de sanction des études.
C'est ça que ça veut dire. Il faut s'entendre sur: Qu'est-ce
qu'un élève, à la fin du secondaire, doit acquérir
comme connaissances, comme habiletés et comme habitudes? C'est ça
qu'il faut décider. Là, on le voit, elle est incertaine sur les
mathématiques qu'on doit imposer à tout le monde. En même
temps, du même souffle, dans le même document, elle décide
qu'il faut réussir les mathématiques du secondaire V pour oltenir
un diplôme. Il y a là une incohérence, et surtout, encore
une fois, j'en profite pour le dire: II faut mettre la charrue après les
boeufs. Donc, décider des profils de sortie. Après ça, tu
décides de la grille matières, et, après ça, tu
décides de la sanction des études. Ça, c'est le monde
à l'envers qu'elle décide de privilégier.
Deuxièmement, quant aux mesures de soutien, le document tout
récent c'est encore tout chaud, là de la
Fédération des commissions scolaires nous dit ceci, en page 3:
Ces compressions on parle des compressions budgétaires se
sont en partie traduites par des réductions de personnels tels
psychologues, travailleurs sociaux, orthopédagogues, conseillers
d'orientation, orthophonistes, psycho-éducateurs. Dans l'enveloppe
«autres personnels», les compressions depuis 1986-1987 totalisent
83 000 000 $. À ce tableau, ajoutons des fermetures d'école, des
retards dans l'entretien des équipements, des coupures dans les moyens
d'enseignement: bibliothèques, équipement micro-informatique,
activités complémentaires. Comment pensez-vous qu'un
élève qui a des difficultés d'apprentissage va pouvoir
cheminer convenablement et se rendre au diplôme avec une telle
réalité et sans nous dire qu'on va changer cette
réalité là?
J'aborde, M. le Président, la question de l'apprentissage du
français et de la langue seconde. On indique qu'on souhaite renforcer
l'apprentissage du français et de la langue seconde. Nous sommes
évidemment d'accord avec ces deux objectifs. Ça fait
l'unanimité. Mais, il y a certains silences de la ministre qui nous
inquiètent, particulièrement quant aux moyens mis de l'avant
relativement à ces apprentissages.
Vendredi dernier, elle annonçait, elle faisait connaître
les grandes orientations du programme révisé de français
et du primaire qui sera diffusé cet automne: accent renouvelé sur
l'écriture et la lecture; étude plus systématique de la
grammaire; recours accru aux oeuvres d'auteurs reconnus. Ça a
suscité un certain scepticisme et certaines inquiétudes chez les
professeurs concernés, les professeurs de français.
Au-delà du fait qu'ils se disent échaudés par les
multiples réformes passées, plusieurs d'entre eux ont fait
ressortir la nécessité de disposer de plus de ressources, de plus
de temps, afin de livrer adéquatement leur matière et de
répondre aussi aux nouvelles orientations prescrites. De même,
soulignent-ils des lacunes majeures au niveau des bibliothèques
scolaires et des manuels mis à la disposition des élèves.
À ce sujet-là, les intentions de la ministre sont plutôt
nébuleuses. Les bibliothèques scolaires, par exemple, sont, dans
bien des cas, dans un état de délabrement avancé. Il
faudrait un plan vigoureux d'investissement pour les rendre conformes ou
convenables en fonction du nouveau programme de français qu'elle compte
mettre en oeuvre.
J'aborderai un peu plus tard, M. le Président, la question de
l'immersion en matière d'enseignement de la langue seconde.
Le Président (M. Bradet): Merci, M. le
député de Lac-Saint-Jean. Mme la ministre.
Mme Lucienne Robillard
Mme Robillard: M. le Président, le député de
l'Opposition parle d'incohérence entre la sixième proposition,
qui est la proposition pour accroître la diversification des cours en
quatrième et en cinquième secondaire, et la septième
proposition du document ministériel, qui est de réviser les
règles d'obtention du diplôme d'études secondaires.
M. le Président, il ne s'agit pas d'incohérence, il s'agit
sûrement d'une mauvaise compréhension par le député
de Lac-Saint-Jean du contenu de chacune de ces propositions, qui ne visent pas,
mais absolument pas, les mêmes objectifs. Je pense qu'au niveau des
règles de sanction, M. le Président, j'ai expliqué
suffisamment qu'il était tout à fait normal d'exiger la
réussite de cours de sciences et de mathématiques pour obtenir
son diplôme d'études secondaires, tout en étant
assuré que ces cours sont de bon niveau. Et, donc, on regarde le contenu
de ces cours.
La proposition no 6, M. le Président, vise à
accroître la diversification des cours en quatrième et en
cinquième secondaire. Pourquoi? À l'heure où on se parle,
M. le Président, on le sait très bien, il y a un problème
d'orientation chez nos jeunes. Qu'est-ce qui se passe quand ils arrivent en
secondaire IV? La majorité de nos jeunes ne connaissent pas leur
orientation future, et c'est comme si on leur demandait: Fixez votre
orientation future et choisissez vos options en conséquence. Et, si vous
ne le savez pas, c'est quoi, votre orientation future, laissez-vous toutes les
portes ouvertes et, donc, choisissez la filière, la voie royale des
sciences et des mathématiques les plus fortes parce que, nous
le
savons, nous avons différents niveaux de mathématiques au
niveau de secondaire IV et de secondaire V donc, choisissez la voie
royale et, donc, toutes les portes vont vous être ouvertes quand vous
allez arriver au niveau du collégial.
Bien, M. le Président, à mon point de vue, c'est
complètement fausser le rôle fondamental des options. Les options
sont là pour que le jeune puisse explorer, expérimenter divers
champs de connaissance. Et c'est en explorant, en expérimentant ces
champs de connaissance qu'il va découvrir son orientation. C'est souvent
quand nous sommes en contact avec une discipline, un champ de connaissance,
avec un professeur qui nous influence, un maître, un bon maître,
que, tout à coup, on découvre notre intérêt, on voit
nos habiletés, et ça nous aide à fixer notre orientation
future. Il faut donc que le jeune, en secondaire IV et V, pour l'aider dans son
orientation, soit exposé à plusieurs options et non pas seulement
à la fameuse voie royale des sciences et des mathématiques. C'est
le sens de la sixième proposition: essayons d'accroître la
diversification.
Et j'irais même plus loin, M. le Président. Dans la
dernière partie du document, on pose des questions très
précises et on revient justement sur ce temps disponible pour
accroître les options en secondaire IV. On dit: II y a quelques
années, on a augmenté le temps d'enseignement au niveau des
sciences et des mathématiques, ce qui a fait qu'on a réduit le
nombre d'unités disponibles au niveau des options pour un jeune. On n'a
plus, au moment où on se parle, que quatre unités disponibles en
secondaire IV au niveau des options. Je dis: Est-ce suffisant? Il me semble que
non, M. le Président. Si on veut que les options soient des champs
d'exploration pour notre jeune, des champs d'expérimentation qui vont
l'aider à choisir son orientation future, il faut absolument diversifier
les options en secondaire IV et secondaire V.
Et, donc, vous le voyez, il y a une très bonne cohérence
entre la sixième proposition et la septième proposition.
D'ailleurs, M. le Président, j'oserais dire qu'il y a une
cohérence totale dans l'ensemble de ce document.
Le Président (M. Bradet): Merci, Mme la ministre. M. le
député de Louis-Hébert.
M. Réjean Doyon
M. Doyon: Oui. Je m'attacherai pendant quelques instants, M. le
Président, à faire le lien entre le rapport sur le curriculum et
le document ministériel «Faire avancer l'école».
Depuis le lancement du Plan d'action sur la réussite éducative,
intitulé «Chacun ses devoirs», les milieux scolaires se sont
mobilisés autour de cet objectif qu'est celui de favoriser la
réussite du plus grand nombre d'élèves. Cette mobilisation
s'est avérée importante et a déjà donné lieu
à des réalisations tangibles sur le plan de l'encadrement, de
l'aide aux devoirs et aux leçons, d'une participation accrue des parents
et de la motivation des enseignants et enseignantes, de ceux et de celles qui
ont un rôle capital à jouer auprès de notre jeunesse.
Dès le départ de cette entreprise de ralliement, il
était clair qu'elle devait s'accompagner d'une opération visant
un réexamen du curriculum. En effet, la réussite éducative
a beau dépendre directement du bon vouloir de l'élève, de
l'action conjuguée de Féquipe-école, du soutien de la
famille et de la communauté, il n'en demeure pas moins qu'elle est
étroitement liée aux exigences du système de formation.
(11 h 20)
C'est donc dans ce contexte que le ministère de
l'Éducation a proposé en août 1992, à la table de
mise en oeuvre, la création d'un groupe de travail sur le curriculum
scolaire dont le mandat a été de rechercher avec ses partenaires
les voies et les moyens à prendre pour assouplir ou
réaménager le curriculum, autrement dit le cadre d'organisation,
les programmes, les grilles matières, l'évaluation, et au
secondaire, la sanction des études. Ce groupe devait donc amener les
partenaires du monde scolaire à la table des recommandations visant
à varier la pédagogie, à dynamiser la vie scolaire,
à améliorer l'encadrement des élèves et,
finalement, à bonifier la qualité des services éducatifs
dans les écoles du Québec.
Le devis de travail du comité sur le curriculum était
imposant. Trente-trois objets d'assouplissement touchant à la fois
l'éducation préscolaire, l'enseignement primaire et secondaire
ont été étudiés. En juin dernier, le rapport de ce
comité de la table de mise en oeuvre sur la réussite
éducative a été déposé à la ministre,
un rapport qui n'a pas été sans susciter des réactions de
par la nature même de certaines recommandations, je dirais de celles sur
lesquelles le consensus n'est pas encore atteint au moment où nous nous
parlons.
La ministre de l'Éducation a pris connaissance de ce document
avec un grand intérêt, vous le savez, à l'instar d'autres
avis d'enquêtes, études actuellement disponibles, ce qui l'a
conduite à déposer le fruit de sa réflexion le premier
jour de novembre, une réflexion qui démontre des orientations
ministérielles précises et donc une volonté très
claire de passer à l'action, qui démontre aussi son souci
d'établir des consensus et, ce faisant, de laisser place à la
discussion, à la consultation, entre autres concernant les voies de
solutions sur lesquelles tout n'a pas encore été dit.
Certains sujets abordés dans le document ministériel
«Faire avancer l'école» ont également
été traités par le comité sur les ajustements au
curriculum. Qu'il suffise de penser à la création d'un premier
cycle de trois ans au secondaire, histoire d'assurer une meilleure
homogénéité et de centrer davantage sur la formation
générale de base. Bien que traduites différemment, les
préoccupations du comité quant à la
nécessité de limiter le nombre d'objectifs à être
atteints dans chacun des programmes d'études plus de 6000 au
secondaire tant à l'importance de prioriser les exigences,
c'est-à-dire de démêler l'essentiel de l'accessoire et
d'uniformiser la terminologie employée afin de mieux se
comprendre, ces préoccupations sont aussi celles de la ministre, qui a
indiqué sa volonté d'associer les partenaires, les
personnalités du monde de l'éducation et des secteurs de la vie
socio-culturelle et économique à la définition de profils
de sortie réalistes et fonctionnels. Il ne fait aucun doute qu'il faut
rendre plus explicite la visée de formation, qu'il faut savoir
clairement et exactement ce que les jeunes devraient savoir à la fin du
primaire et du secondaire, et, en ce sens-là, les propositions
ministérielles rejoignent justement les suggestions formulées
à la ministre par le comité.
En ce qui a trait aux matières obligatoires pour la sanction des
études, un autre objet analysé par le comité, le document
ministériel va un peu plus loin que la recommandation. En effet, nos
fils et nos filles devraient dorénavant réussir le programme de
sciences physiques de quatrième secondaire ainsi que le programme de
mathématiques de cinquième, en plus, cela va de soi, des
programmes d'enseignement de langues maternelle et seconde et d'histoire.
À l'aube de ce XXIe siècle où le défi technologique
oblige nos jeunes à être bien préparés, le
caractère obligatoire du cours de sciences physiques m'apparaît
incontournable.
C'est cLnc dans tout cet esprit-là, M. le Président, que
nous devons envisager et évaluer les actions proposées par la
ministre, qui nous donne les orientations encore plus nettes du plan d'action
sur la réussite éducative. Il ne fait aucun doute pour moi que
l'exercice auquel la ministre convie ceux et celles qui s'intéressent
à l'éducation est d'une importance capitale, puisqu'il vise
à faire avancer l'école et à lui permettre, finalement, de
répondre aux besoins de notre temps.
Le Président (M. Bradet): Merci, M. le
député de Louis-Hébert. M. le député de
Lac-Saint-Jean.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: M. le Président, comme je l'ai indiqué
tout à l'heure, j'aimerais, dans le cinq minutes qui suit, aborder toute
la question de l'immersion. Vous savez comment on en est arrivés
là. Je vous le rappelle succinctement. Le printemps dernier, le
gouvernement a décidé de triturer et, je dirais même, de
saboter la Charte de la langue française pour en faire plutôt une
charte des langues officielles, le ministre responsable de la Charte devenant
en quelque sorte le commissaire aux langues officielles. Et dans ces
amendements ou ces modifications qu'on a apportées à la Charte de
la langue française, on permettait et on permettra désormais
à la ministre de l'Éducation d'introduire un amendement
c'est ce qu'elle fait dans le régime pédagogique qui va
lui permettre de faire en sorte que l'immersion comme méthode
d'enseignement de la langue seconde puisse être utilisée de
façon générale par les commissions scolaires et dans les
écoles du système d'éducation.
Notre opposition farouche à cette mesure, le printemps dernier,
n'a pas, d'aucune façon, été atténuée.
Bien au contraire, nous sommes toujours opposés à cette
formule tout en étant d'accord pour faire en sorte que l'apprentissage
de la langue seconde dans notre système primaire et secondaire soit
nettement amélioré et pour faire en sorte, entre autres, que le
temps minimal pour l'enseignement de l'anglais soit garanti et que la
méthode de l'enseignement intensif ou des bains linguistiques puisse
être utilisée davantage dans le système scolaire.
Mais l'immersion, c'est non! C'est non pour bien des raisons et pas
seulement, comme certains pourraient le penser, pour des raisons uniquement
politiques, pour des raisons de nature pédagogique et sociale. Cette
méthode d'immersion, comme vous le savez, ce n'est pas comme
l'enseignement intensif. Avec l'enseignement intensif vous
accélérez les cours dans les diverses autres disciplines pour
pouvoir réserver un temps donné à l'enseignement de
l'anglais, mais uniquement à l'enseignement de l'anglais. L'immersion,
ce n'est pas ça. Vous prenez un certain temps dans l'année
scolaire et vous enseignez toutes les matières en anglais c'est
ça, l'immersion soit la géographie, l'histoire ou peu
importe. Vous enseignez en anglais. Ça, ça a été
illustré par la CEQ, entre autres, qui s'y connaît quand
même; elle regroupe les enseignants, donc les pédagogues. Elle est
venue nous dire en commission parlementaire: Ça, c'est risqué et
c'est dangereux de s'engager dans cette voie-là parce que vous risquez
de faire en sorte que les objectifs en matière d'apprentissage de la
langue seconde en arrivent à primer sur les objectifs à atteindre
en matière d'apprentissage dans les autres matières, que ce soit
ça qui prédomine et qu'on finisse par négliger les
objectifs dans les autres matières. C'est un risque réel et c'est
un danger réel. Donc, la CEQ disait: Sur le plan pédagogique,
vous errez. N'allez pas dans cette direction-là.
D'autre part, tous les intervenants de la CECM, l'île de
Montréal, les enseignants, les cadres, les directeurs, les
professionnels, tous les intervenants de la CECM sont venus dire: Attention,
danger! Sur le territoire de la CECM, sur le territoire de l'île de
Montréal, il y a des milliers et des milliers de jeunes, enfants
d'immigrants, dont le français n'est pas la langue maternelle, qui sont
déjà, par conséquent, en immersion actuellement en
français dans les écoles de la CECM. Si vous leur permettez une
seconde immersion, vous risquez la confusion linguistique et vous risquez de
manquer l'objectif que vous poursuivez, soit l'intégration des enfants
d'immigrants dans la société québécoise.
D'autre part, l'immersion est pas mal impraticable parce que, là,
il va falloir des profs qui sont capables d'enseigner les autres
matières en anglais, ce qui n'est pas évident. C'est non
seulement impraticable, mais je pense que vous avez fait une erreur en amendant
la Charte de la langue française...
Le Président (M. Bradet): Merci, M. le
député.
M. Brassard: ...en cette matière. Malheureusement, vous ne
le reconnaissez pas.
Le Président (M. Bradet): Merci, M. le
député de Lac-Saint-Jean. Mme la ministre.
Mme Lucienne Robillard
Mme Robillard: M. le Président, je suis heureuse de
constater qu'à tout le moins le député de l'Opposition est
en accord avec l'objectif, ce qui est visé dans le document «Faire
avancer l'école» en regard de l'apprentissage de la langue
seconde. Il y a une proposition très claire dans le document qui dit de
renforcer l'apprentissage de la langue seconde, et différentes actions
sont indiquées. Si j'ai bien saisi le député de
l'Opposition, il est en accord avec le fait de garantir un temps minimal. C'est
ce qu'il a dit pour l'enseignement de la langue seconde. (11 h 30)
Donc, c'est une proposition qui est très claire dans le document
«Faire avancer l'école». Pourquoi? Parce que nous remarquons
qu'au moins deux tiers de nos commissions scolaires ne respectent pas le temps
indiqué dans le régime pédagogique. Nous le savons, c'est
un temps à partir de la quatrième année du primaire, c'est
un temps de deux heures-semaine, ce qui veut dire, pour les trois
années, quatre, cinq, six du primaire, 216 heures de cours au niveau de
l'anglais comme langue seconde, et la moyenne, au moment où on se parle,
est de 162 heures. Donc, il y en a qui en font beaucoup moins. Il y a une
variation qui se produit.
Et là il y a une clé importante. Parce que toutes les
recherches le disent, M. le Président, une des clés importantes,
un des facteurs de succès pour l'apprentissage d'une langue seconde,
c'est la durée de l'exposition à cette langue, le temps
d'exposition à cette langue, donc il faut y accorder le temps. Donc, un
temps garanti. L'Opposition me dit oui. On parle aussi de l'enseignement
intensif, la formule de l'enseignement intensif au niveau du primaire,
promouvoir cette formule-là d'enseignement intensif qui a fait ses
preuves. Pourquoi cette façon, cette méthode a fait ses preuves?
Justement parce qu'il y a un temps d'exposition intensif, M. le
Président, que pendant cinq, six mois on enseigne l'anglais, donc on
parle l'anglais dans les classes pendant cinq à six mois, et on
s'aperçoit que cette intensité est importante pour apprendre plus
facilement et plus rapidement. Encore une fois, c'est la durée de
l'exposition, c'est d'être exposé à une autre langue, c'est
ça qui nous aide dans l'apprentissage d'une langue seconde.
Et une proposition supplémentaire: les échanges
interlinguistiques et l'immersion. Ça, j'ai entendu des commentaires du
député de l'Opposition sur l'immersion avec toutes ses craintes
qu'il a, mais je n'ai rien entendu sur les échanges interlinguistiques.
Au moment où on se parle, il y a des échanges qui se font au
Québec de classes de jeunes de quatrième et de cinquième
secondaire avec des classes de jeunes dans d'autres provinces canadiennes pour
une période de cinq à six mois, où ils vont apprendre
exactement ce qu'ils devraient apprendre au Québec, mais ça se
fait en anglais. Ce qu'on dit dans le document, c'est que, si on le fait avec
d'autres provinces canadiennes, pourquoi ne pas le faire aussi chez nous au
Québec. Et c'est dans ce cadre-là aussi que l'immersion est
avancée.
Mais n'oublions pas, M. le Président, qu'il y a trois conditions
pour utiliser la méthode. C'est une méthode entre d'autres. Ce
n'est pas la clé magique. C'est une méthode entre d'autres. Il y
a trois conditions: d'abord, l'accord des parents, que les parents soient en
accord que leur enfant aille en immersion; deuxièmement, qu'il y ait un
temps maximal pour le temps de l'immersion; et, troisièmement, que les
commissions scolaires aussi décident d'organiser des classes
d'immersion. Et donc, M. le Président, s'il y a des commissions
scolaires qui, à cause de leur milieu environnant, à cause des
élèves qui sont dans leurs écoles, à cause du fait
qu'ils ont un pourcentage élevé d'enfants allophones dans leurs
écoles, qu'il y aurait un risque trop grand, ces commissions scolaires
peuvent très bien décider de ne pas utiliser cette
méthode. C'est dans ce sens-là, de mettre à la disposition
de tous les enseignants toutes les méthodes possibles pour
améliorer l'apprentissage de la langue seconde.
Le Président (M. Bradet): Merci beaucoup, Mme la ministre.
M. le député de Sherbrooke, vous avez la parole pour cinq
minutes.
M. André J. Hamel
M. Hamel: Merci, M. le Président. L'éducation est
au coeur même de la mission fondamentale du gouvernement du
Québec. Un seul chiffre suffit pour illustrer l'effort
considérable que les Québécoises et
Québécois y consacrent. Ainsi, selon Statistique Canada, nous
investissons annuellement 25,60 % de notre produit intérieur brut, et
ce, uniquement pour l'enseignement primaire et secondaire. C'est plus que nos
voisins ontariens et que l'ensemble de nos compatriotes du reste du pays. Il
s'agit donc d'un effort colossal du gouvernement du Québec.
À ce titre, sans même parler de l'importance que joue
l'éducation pour l'avenir du Québec, il est tout à fait
normal de scruter les gestes posés par la ministre de l'Éducation
et députée de Chambly. Je crois très sincèrement
que le document de consultation «Faire avancer l'école»,
déposé le 1er novembre dernier et ayant pour objet le renouveau
des ordres d'enseignement primaire et secondaire s'attaque vraiment aux
problèmes de fond de l'éducation et, ce faisant, permettra
d'accroître la qualité de la réussite éducative des
jeunes Québécoises et Québécois.
Il n'y a pas que le député de Sherbrooke qui le dit, M. le
Président. Qu'il me suffise de citer l'éditorialiste du journal
La Presse, Mme Agnès Gruda, qui indiquait récemment que le
document de la ministre de l'Éducation, Mme Lucienne Robillard, est
réalisé avec beaucoup de doigté et une bonne dose de
courage. Et je cite: Mme Robillard a bel et bien l'intention de s'attaquer de
front aux problèmes les plus aigus du secondaire
avec des options claires et des choix pas toujours faciles. Bref,
l'essentiel est là. Fin de la citation.
La démarche de ma collègue de Chambly s'inscrit dans un
souci de continuité des mesures prises en vue d'accroître la
réussite éducative au Québec. Et, de poursuivre Mme Gruda,
et je cite: Mme Robillard a choisi clairement de resserrer les exigences. En
effet, il ne sera plus possible d'obtenir son diplôme de fin
d'études sans avoir réussi les trois quarts des cours de
quatrième et cinquième secondaire. Entre deux options, Mme
Robillard prend celle de la qualité, accompagnée d'une
série de mesures destinées à mieux encadrer les jeunes
pour les aider à rencontrer des attentes plus élevées. Fin
de la citation.
L'une des autres mesures préconisées, M. le
Président, c'est le titulariat ou le tutorat pour les
élèves du premier cycle du secondaire. Je crois, comme plusieurs,
que cette mesure est très importante dans l'atteinte des objectifs
fixés. Je ne suis d'ailleurs pas le seul à le penser puisque
nombreux sont ceux qui croient en la nécessité d'assurer le plus
possible l'organisation de groupes stables lorsqu'on a des élèves
qui ont de 12 à 15 ans. En effet, on rapportait, au lendemain du
lancement du document «Faire avancer l'école», que M. Garry
Stronach, le président de la Fédération des comités
de parents du Québec, organisme qui représente environ 40 000
parents, se disait heureux que le document ministériel
«priorise» le titulariat. Je suis convaincu que, par la
présentation du document ministériel «Faire avancer
l'école», ma collègue de Chambly répond à un
grand nombre de préoccupations des différents intervenants du
monde de l'enseignement, comme en ont fait foi de nombreux articles
publiés au lendemain de cette présentation. Et je ne fais que
mentionner les réactions favorables de la Fédération des
commissions scolaires, de la Fédération des cégeps, et
même de la CEQ, Mme Pagé, qui qualifiait le document
ministériel d'«agréable surprise».
Je terminerai, M. le Président, avec les propos fort pertinents
et remarquables du chroniqueur du journal Le Soleil, M. Vincent Cliche,
qui écrivait samedi dernier, parlant des gestes de ma collègue,
tant au collégial qu'au primaire et au secondaire, et je cite: «Le
tout s'est fait à la pièce, mais chaque pièce trouve sa
place dans le puzzle. Le résultat est cependant là: la
révolution s'est faite en douceur.» Fin de la citation, et bravo,
Mme la ministre, et merci, M. le Président.
Le Président (M. Bradet): Merci beaucoup, M. le
député de Sherbrooke. M. le député de
Lac-Saint-Jean.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: Oh! C'était dangereux pour la ministre,
là, de se faire assommer par les coups d'encensoir, M. le
Président.
Une dernière remarque sur l'immersion; je n'ai pas eu le temps de
le dire tout à l'heure: avant de généraliser ou de
permettre l'utilisation à une grande échelle d'une telle
méthode, avec aussi peu de balises, il nous semble que la prudence nous
dicterait de procéder d'abord à quelques projets-pilotes pour
vérifier convenablement l'efficacité de la méthode et les
impacts également de cette méthode, particulièrement dans
des milieux fragiles comme les milieux à forte concentration d'enfants
d'immigrants.
Les dernières cinq minutes, M. le Président, je voudrais
les consacrer à la gestion pédagogique. C'est le huitième
objectif du document. La ministre vise à promouvoir la gestion
pédagogique qui met en valeur les responsabilités
professionnelles des enseignants et des enseignantes ainsi que celles des
directeurs et des directrices d'école. Cette proposition veut aller dans
le sens qui est réclamé par tout le monde scolaire, et l'analyse
du Conseil supérieur de l'éducation, l'analyse du modèle
de gestion qui prévaut depuis trop longtemps dans notre système
d'éducation constitue une condamnation sans équivoque et sans
appel de ce modèle de gestion. (11 h 40)
C'est dans un avis ou son rapport annuel de 1991-1992. Un modèle,
nous dit le Conseil supérieur, un modèle bureaucratique,
centralisé, tatillon, hiérarchisé. Un modèle de
gestion qui génère un volume de transactions qu'on peut qualifier
de kafkaïen ou de surréaliste. En un an, on a
dénombré 757 communications en provenance du ministère
vers les commissions scolaires, avec évidemment des répercussions
dans les écoles. Une centralisation qui conduit à une
standardisation des conduites et à un désengagement des milieux.
C'est le constat du Conseil supérieur de l'éducation. Une
centralisation qui, évidemment, fait obstacle à une prise en
charge autonome au sein des établissements.
Dans son rapport de l'an dernier, le Conseil dit, et je le cite:
À tous les paliers de la structure, on reproche ouvertement à
l'appareil administratif d'être devenu centralisateur, contrôleur,
démobilisateur tant il a favorisé et même promu des
pratiques axées sur la mécanique des opérations et le
respect des règles au détriment de l'engagement des acteurs. Fin
de la citation.
C'est une condamnation sans appel, M. le Président. Il faut donc
changer le modèle de gestion dans notre système
d'éducation. Il faut une véritable révolution en
matière de gestion en prenant appui sur une dynamique proprement
éducative et non pas exclusivement à prédominance
administrative. Inutile de vous dire que cette révolution, ce
renversement de perspective n'apparaît pas dans le document
ministériel. Il y a beaucoup de timidité à cet effet.
Il ne suffit pas, en effet, de vouloir reconnaître une plus grande
marge de manoeuvre dans la gestion pédagogique pour les enseignants et
les enseignantes. Encore faut-il s'assurer qu'ils sont correctement
outillés et préparés pour ce faire en leur donnant
accès à du perfectionnement. Comment sortir de
l'uniformité des pratiques pédagogiques si on ne permet pas au
personnel enseignant de prendre connaissance des différentes approches
pédagogiques et des récentes découvertes en
matière d'apprentissage? Pour ça, il faut
évidemment une politique de perfectionnement. il ne suffit pas
d'affirmer que la direction doit exercer un véritable leadership
pédagogique. encore faut-il alléger la tâche administrative
des directeurs et des directrices d'école. je vous signale que la
tâche d'un directeur d'école, c'est 50 % de temps consacré
à régler des problèmes psychosociaux; c'est 30 %
consacré à des contrôles, à des suivis
administratifs; et c'est à peine, parfois moins, 20 % pour faire de
l'animation pédagogique. c'est ça la réalité dans
le monde scolaire.
Ce n'est pas sérieux de prétendre que, dans le document
ministériel, le virage en matière de gestion, le virage tant
réclamé s'y retrouve. Il n'apparaît nullement dans le
document. Il y a des velléités bien timides, reconnaissons-le,
mais pour l'essentiel, c'est de la poudre aux yeux qui ne dupe personne.
Le Président (M. Bradet): Merci beaucoup, M. le
député de Lac-Saint-Jean. Je vous rappelle que nous en sommes
à la conclusion de cette interpellation: deux périodes de 10
minutes. Mme la ministre, vous avez la première pour conclure. Vous avez
10 minutes.
Conclusions Mme Lucienne Robillard
Mme Robillard: M. le Président, j'ai lancé il y a
quelques jours une vaste consultation sur l'enseignement primaire et secondaire
au Québec, sur ce qui fait exactement le coeur de l'école en tant
que telle, sur des propositions, des actions à mener à court
terme pour vraiment être capable d'augmenter la réussite de nos
élèves, de maintenir le cap sur la réussite de nos
élèves, mais en même temps, de le faire sous le signe de
l'exigence et de la qualité.
M. le Président, je pense que le diagnostic qui est posé
dans le document «Faire avancer l'école» est partagé
par plusieurs personnes dans notre société: par les parents,
d'abord et avant tout, mais aussi par les intervenants du monde scolaire.
On dit que l'école est rendue à une étape qui est
trop embarrassée, trop embarrassée par trop d'objectifs, trop de
programmes, trop de règles, et qu'il y a encore dans notre
système scolaire quatre problèmes de fond auxquels il faut, je
pense, de toute urgence, s'attaquer. D'abord, l'acquisition insuffisante des
connaissances de base. Je pense qu'on peut le noter chez la plupart de nos
élèves qui terminent l'école. La faible capacité de
l'école de susciter l'intérêt des jeunes: il est clair
qu'il y a des facteurs extrascolaires qui entrent en ligne de compte, mais
l'école elle-même doit se requestionner pour être capable de
motiver les jeunes, de susciter leur intérêt à la poursuite
de leurs études. C'était le deuxième problème de
fond, M. le Président. Le troisième problème: une absence
d'une vision claire de formation à donner au fil des ans. On a tellement
développé d'objectifs et de règles qu'on oublie la
visée centrale, la vision fonda- mentale qu'on doit avoir dans la
formation qu'on donne. Et le dernier problème: un manque de souplesse
dans la gestion pédagogique.
À partir de ces problèmes de fond, M. le Président,
nous avons devant nous huit propositions très claires et quatre
questions, quatre pistes à explorer. Huit propositions, dont trois
s'adressent au contenu de la formation, quatre aux cadres de la formation et,
la dernière, à la gestion pédagogique. Les trois
premières sur le contenu de la formation: renforcer l'enseignement de la
langue maternelle, le français; la deuxième, renforcer
l'enseignement de la langue seconde; et la troisième, être capable
de déterminer très clairement les profils de sortie. Que veut-on
que les enfants, à la fin du primaire et du secondaire, sachent? Quelles
sont les connaissances qu'ils doivent avoir? Quelles sont les habiletés,
les compétences et quel est leur savoir-être, comment ils doivent
être à la fin du primaire et du secondaire? Les trois
premières actions centrées, donc, sur le contenu de la
formation.
Les quatre suivantes sont centrées sur le cadre de la formation.
Premièrement, la césure des cycles; que le premier cycle soit
secondaire I, II, III et le cycle suivant, secondaire IV et V. Les enfants de
12 à 15 ans, d'une part, et les enfants de 16, 17, d'autre part, je
pense que ça correspond aussi à l'évolution psychologique
des enfants au niveau de la préadolescence et de l'adolescence.
Deuxième proposition: vraiment marquer des
caractéristiques de ce premier cycle en tant que tel et, donc,
être capable de faire une évaluation rigoureuse de ce premier
cycle, d'axer sur la formation générale, d'encadrer les
élèves sous forme de groupes stables.
Troisième proposition: diversifier le secondaire IV et le
secondaire V dans l'optique de permettre aux jeunes d'être capables de
mieux s'orienter. Et, dernière proposition: revoir les règles de
sanction des études. Donc, quatre propositions qui sont
concentrées sur le cadre de la formation. Et ce cadre de la formation
est très important, M. le Président, pour aider les jeunes
à réussir, à les soutenir dans leur marche vers la
réussite.
Dernière proposition qui est sur la table: toute la question de
la gestion pédagogique. Alors, là, aujourd'hui, on en a peu
parlé, mais il m'apparaît que c'est une des propositions
très importantes du document «Faire avancer l'école»
à l'effet que le ministère de l'Éducation a un rôle
très précis et que les professeurs et les directeurs
d'écoles ont aussi un rôle très précis et qu'on doit
leur permettre d'actualiser toutes leurs responsabilités
professionnelles.
M. le Président, à l'heure où on se parle, on se
demande pourquoi nos professeurs dans les écoles primaires et
secondaires, pour devenir professeurs, sont allés se chercher une
formation de niveau universitaire. Pourquoi? Pourquoi je pose cette question?
À l'heure actuelle, nos professeurs sont tellement entourés de
toutes sortes de règles, d'objectifs, de guides, de guides du guide,
qu'on les considère presque comme de simples exécutants. Si on
maintient ces règles du jeu là, M. le Président, on n'a
pas besoin de faire un cours universitaire pour devenir professeur. Je connais
très peu de professions au Québec, qui
ont exigé une formation universitaire où la marge de
manoeuvre du professionnel, dans son acte professionnel est si limitée
que celle de la profession enseignante. Nos professeurs ont une formation
universitaire. Ils savent très bien comment enseigner, quelles sont les
meilleures méthodes d'enseignement. (11 h 50)
L'État, via le ministère de l'Éducation, doit se
concentrer sur son rôle de fixer les compétences à
acquérir, les contenus à enseigner. Mais, M. le Président,
les professeurs sont tout à fait capables de décider des
méthodes d'enseignement par rapport aux élèves qu'ils ont
devant eux. On sait très bien que le portrait des élèves
est diversifié à l'échelle du Québec, et qu'ils
peuvent choisir exactement ce dont les élèves ont besoin. Donc,
l'État n'a pas besoin d'être un État pédagogue. Les
pédagogues sont dans les classes. Ce sont des professionnels
compétents qui peuvent utiliser toutes leurs capacités, leur
plein potentiel.
Toute la dernière proposition, M. le Président, vise
à revoir le système de gestion pédagogique pour retourner
aux professeurs, pour permettre aux professeurs de se réapproprier leurs
responsabilités qui, je pense, à tort... Le ministère en
tête a tort, lui qui, au fil des années, a diminué cette
responsabilité de nos professionnels de l'enseignement. C'est le coeur
de la proposition 8, M. le Président, que les professionnels de
l'enseignement soient reconnus comme tels, et que c'est eux les maîtres
on le dit bien. À partir de ce moment-là...
Vous le savez très bien qu'à l'heure actuelle nous avons
différentes mesures pour, je dirais, rénover aussi la formation
des maîtres à l'enseignement universitaire. Nous sommes
présentement à regarder tous les cours qui sont donnés, la
formation qui est donnée à l'université pour nos futurs
maîtres. Je pense que ça, c'est la clé du succès. Si
on veut une qualité de réussite chez nos élèves, il
faut absolument que nos maîtres aussi soient très
compétents. Alors, dans ce sens-là, il y a des actions qui sont
en cours.
M. le Président, nous savons tous que nous devons le
ministère, les commissions scolaires, les professeurs, les directeurs
d'école, les parents donner un coup de barre, tous ensemble, pour
vraiment aider nos jeunes à réussir. Il me semble que c'est la
priorité de nos priorités. Une société ne peut pas
continuer à se développer si sa population n'est pas instruite.
Alors, c'est la priorité, non seulement du ministère de
l'Éducation, mais de l'ensemble du gouvernement actuel, de donner une
priorité à la qualité de la réussite à
l'école. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bradet): Merci beaucoup, Mme la ministre.
En conclusion, M. le député de Lac-Saint-Jean.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: M. le Président, j'ai voulu, à
l'occasion de cette interpellation, d'abord, évidemment, signaler ce qui
m'apparaît être des insuffisances dans le document et les
propositions ministérielles, mettre en relief la minceur, le peu de
substance qu'on y retrouve, le fait qu'on est en face d'un énoncé
décevant, inachevé et sans grande vision stimulante. J'ai voulu
également mettre en évidence la démarche cavalière,
à toute vapeur, qu'on veut instaurer pour en arriver à des
changements et qui vise probablement à permettre à Mme la
ministre de se présenter aux élections en se glorifiant de
quelques fleurs artificielles à son chapeau.
Je pense qu'il faut aussi, dans les quelques minutes qui me restent,
mettre en relief les carences, les manques, les omissions qu'on peut constater
dans le document ministériel. Premièrement, à peu
près rien de prévu pour le primaire. Encore une fois, je ne veux
pas faire honte à Mme la ministre, M. le Président, mais il
faudrait presque relire au complet le chapitre du plan d'action de son
prédécesseur concernant le préscolaire et le primaire.
C'est à ce stade c'est indiqué là-dedans
que, nous dit-on, la porte de l'abandon scolaire commence à
s'entrouvrir. Il faut donc faire un effort sérieux de dépistage,
un effort systématique de dépistage, et de correction aussi des
difficultés d'apprentissage. C'est capital pour la réussite
éducative.
Et on ne peut pas échapper, à ce point de vue là,
au problème du niveau des ressources. Dans le dernier numéro de
Vie pédagogique, il y avait un dossier spécial sur l'aide
aux élèves en difficulté d'apprentissage, une table ronde
avec des enseignants, et regardez la constatation qu'on y fait: En ce qui
concerne le soutien de la part des personnes-ressources il s'agit
d'ortho-pédagogues, de psychologues, d'orthophonistes, etc. les
enseignants le jugent nettement insuffisant. C'est eux, là, qui sont
dans le bain, qui sont dans le milieu, là. Lorsqu'il y a beaucoup
d'élèves en difficulté dans l'école, le temps
consacré aux études de cas et à l'évaluation occupe
presque toute la tâche de sorte qu'il n'en reste plus guère pour
l'intervention auprès de l'élève. De plus, le nombre de
personnes-ressources ne cessant de diminuer, ces dernières ne peuvent
plus jouer leur rôle véritable, ce qui pourrait bien amener les
administrateurs à conclure que ces ressources ne sont pas efficaces
alors qu'on maintient leur nombre sous le seuil nécessaire pour
répondre aux besoins. C'est ça, la réalité au
niveau du primaire et du préscolaire: pas suffisamment de ressources
pour corriger les problèmes.
Deuxièmement, M. le Président et tout ça est
escamoté, là, parce qu'on n'en parle pas; dans le document
ministériel, le primaire et le préscolaire, là, ils sont
complètement absents deuxième absence: il n'y a pas de
véritable politique de perfectionnement des maîtres. C'est
pourtant essentiel; si on veut que la diversité des approches
pédagogiques devienne une réalité, il faut absolument
permettre aux enseignants et enseignantes d'avoir accès à ces
nouvelles approches pédagogiques. Ce n'est pas prévu, d'aucune
façon.
Troisièmement, rien de plus, non plus, sur les nouvelles
technologies de l'information. On sait pourtant que les études, les
expérimentations, les recherches qui
ont été effectuées, ici ou ailleurs, aussi bien en
Europe qu'aux États-Unis ont permis de constater que l'accès
à ces technologies, la micro-informatique en particulier, et leur
utilisation par les élèves amélioraient, facilitaient,
enrichissaient les apprentissages tout en contribuant à la
réduction du décrochage scolaire. C'est démontré.
Ce n'est pas comme l'immersion, là, où il n'y a pas
d'études du tout; dans ce cas-là, il y en a, des études et
des expérimentations. Les nouvelles technologies de l'information
facilitent l'intégration des connaissances, développent l'esprit
de synthèse, favorisent leur autonomie, permettent de varier les
méthodes d'apprentissage et d'acquérir des méthodes de
travail variées.
Alors, quel est le bilan, quelle est la réalité en cette
matière dans le réseau scolaire, dans le système scolaire?
Il y a un grand nombre d'appareils qui sont devenus désuets; le parc des
micro-ordinateurs est considéré comme insuffisant et en
état de désuétude; les mesures de remplacement des
micro-ordinateurs ont disparu, ont été abandonnées; les
mesures de soutien à l'achat de logiciels éducatifs,
abandonnées. Il est impérieux, M. le Président, compte
tenu de la présence massive de ces nouvelles technologies de
l'information dans toutes les sphères de la société, de
repenser les approches pédagogiques et de se doter d'une politique
intégrée sur les trois fronts que sont la formation des
personnels, les équipements, les logiciels en même temps que la
nécessité absolue d'atteindre une masse critique dans ces trois
secteurs. Je n'apprends rien au sous-ministre; il a tout ce qu'il faut sur son
bureau à cet effet pour mettre en place et en vigueur un
véritable plan d'action en matière de nouvelles technologies de
l'information.
Évidemment, il faudrait de l'argent et des ressources. Sur cinq
ans, on prévoit à peu près de 240 000 000$ à 250
000 000$. Et c'est là qu'est le problème, M. le Président.
Quand on regarde le document de Mme la ministre et quand on tient compte des
lacunes, des carences dans son document, on se bute toujours à la
question des ressources, au problème des ressources. Tout ce qui
exigerait l'ajout de ressources a été mis de côté de
façon systématique. Ah! je conviens qu'il y a des choses dans le
système qui peuvent se faire sans ajout de ressources; j'en conviens: la
concertation, changer les modes de gestion, ça peut faire en sorte qu'il
y ait des choses qui puissent se faire sans qu'on ajoute de nouvelles
ressources financières. (12 heures)
Mais il y a deux orientations de fond qui doivent nous guider en
matière de changements dans le système scolaire si on veut
être crédibles, si on veut être pris au sérieux:
d'abord, la première, l'éducation est un service public
c'est rappelé avec vérité par le Conseil supérieur
de l'éducation et doit redevenir une priorité pour le
développement d'une société moderne et
démocratique, et ça doit se traduire concrètement par un
financement adéquat de l'éducation. Ce n'est pas le cas
présentement. Depuis quelques années, depuis plusieurs
années, on coupe, on sabre dans les dépenses en matière
d'éducation. La ministre a beau claironner que l'éducation est
une priorité, c'est un discours, devant la réalité, qui
sonne creux et qui sonne faux.
Deuxième orientation. Le Conseil supérieur de
l'éducation le rappelait, l'éducation doit être
considérée comme un investissement. C'est mieux qu'une
dépense, c'est un investissement pour la société. La CEQ
rappelait que le sous-investissement à l'éducation coûte
plus cher à notre société que les économies que le
gouvernement prétend permettre. C'est on ne peut plus vrai, hein! En
coupant dans le réseau scolaire, dans le système de
l'éducation, en coupant depuis des années... Puis, on a
coupé encore l'an dernier. J'aurais cru, l'an dernier, qu'on aurait
arrêté la machine à couper pour faire en sorte qu'on puisse
croire le gouvernement quand il dit que l'éducation c'est une
priorité. Au contraire, ça a continué de plus belle. Ce
qui fait d'ailleurs que le plan d'action en matière de réussite
éducative, qui prévoit 42 000 000 $, a été en
quelque sorte annulé d'une certaine façon par les coupures qu'on
a imposées au système. On a donné d'une main, puis on a
enlevé de l'autre. Alors, il y a eu presque une annulation
évidente, qui a été signalée d'ailleurs par la
plupart des intervenants.
Il faut que ce soit considéré comme un investissement,
l'éducation. Mme Pagé disait: L'éducation coûte
peut-être cher, mais on pourrait ajouter que l'ignorance coûte
encore plus cher. Ce n'est pas le cas présentement. On ne sent pas, on
ne constate pas que, pour ce gouvernement, l'éducation est une
priorité, d'abord, et que l'éducation est un investissement.
Quand on regarde également troisièmement ce
qui se passe avec la loi 198, comment peut-on croire ce gouvernement, qui nous
dit que l'éducation est une priorité et doit être un
investissement quand on se prépare, en appliquant la loi 198, à
sabrer de nouveau, à réduire de nouveau dans les personnels et
les personnels essentiels pour la réussite éducative.
Alors, malheureusement, M. le Président, malgré les beaux
discours et les professions de foi généreuses de Mme la ministre,
la démonstration est loin d'être faite que les
préoccupations éducatives priment sur les considérations
budgétaires à courte vue pour ce gouvernement. Merci.
Le Président (M. Bradet): Merci beaucoup, M. le
député de Lac-Saint-Jean. Alors, il me reste à vous
remercier tous qui avez participé de près ou de loin à
cette interpellation.
La commission ayant accompli le mandat qui lui avait été
confié, j'ajourne donc les travaux sine die. Merci.
(Fin de la séance à 12 h 3)