Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
(Dix heures neuf minutes)
Le Président (M. Bradet): Alors, je déclare la
séance de la commission de l'éducation ouverte. Je vous rappelle
le mandat. Le mandat de cette commission pour cette séance est de
procéder à des auditions publiques dans le cadre des
consultations particulières sur le projet de loi 82, Loi modifiant la
Loi sur les collèges d'enseignement général et
professionnel et d'autres dispositions législatives.
Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Ho-vington
(Matane) par M. Lafrance (Iberville); M. Parent (Sauvé) par M. Benoit
(Orford).
Organisation des travaux
Le Président (M. Bradet): Alors, merci beaucoup. Je vous
fais la lecture de l'ordre du jour: à 10 heures, nous entendrons la
Conférence des recteurs et des principaux des universités du
Québec; à 11 heures, la Centrale de l'enseignement du
Québec; suspension à midi. Nous reprendrons à 15 heures
avec le Bureau d'information et de communication de la coalition
collégiale; à 16 heures, l'Association nationale des
étudiantes et étudiants du Québec; à 17 heures,
l'Association des manufacturiers du Québec; suspension à 18
heures. Reprise à 20 heures avec la Commission-Jeunesse du Parti
libéral du Québec et, à 21 heures, le Comité
national des jeunes du Parti québécois. Alors, l'ordre du jour
est-il adopté? Adopté. (10 h 10)
Alors, nous recevons donc la Conférence des recteurs et des
principaux des universités du Québec. Je veux souhaiter la
bienvenue à M. Gervais, le recteur de l'Université Laval et
président de la conférence des recteurs. Bienvenue à cette
commission. M. le recteur, vous avez 20 minutes de présentation et,
auparavant, je vous demanderais de nous présenter les gens qui vous
accompagnent. Merci.
Auditions
Conférence des recteurs et des principaux des
universités du Québec (CREPUQ)
M. Gervais (Michel): Très bien. À ma droite, M. le
Président, M. Jacques L'Écuyer, qui est vice-président
à l'Université du Québec.
Le Président (M. Bradet): Bonjour.
M. Gervais: À ma gauche et à mon extrême
gauche, M. Jean-Guy Ouellet, qui est vice-recteur aux études à
l'Université de Sherbrooke, et M. Jacques Bordeleau, qui est directeur
général de la conférence des recteurs.
Le Président (M. Bradet): Alors, messieurs, bonjour. Vous
pouvez y aller, M. le président.
M. Gervais: Alors, M. le Président, Mmes et MM. les
membres de la commission, je veux d'abord vous remercier d'avoir invité
la CREPUQ à participer aux consultations particulières de la
commission de l'éducation sur le projet de loi 82, Loi modifiant la Loi
sur les collèges d'enseignement général et professionnel
et d'autres dispositions législatives. Vous savez sans doute toute
l'importance que nous accordons, comme partenaires naturels des collèges
en formation postsecondaire, à ce projet de réforme de
l'enseignement collégial.
Je dois dire que c'est avec beaucoup d'intérêt et non moins
de satisfaction que nous avons pris connaissance des dispositions que contient
ce projet de loi. On voit mal qu'il puisse en être autrement, d'ailleurs,
alors qu'y figurent en bonne place, exactement posées, les conditions
nécessaires du virage que nous avons appelé ici même, en
novembre dernier, pour s'assurer que le diplôme d'études
collégiales soit reconnu comme l'attestation fiable d'une formation de
qualité et propre à ce niveau d'enseignement. ces dispositions
émergent d'une convergence très forte des souhaits qu'un large
éventail de groupes et d'organismes ont exprimés devant les
membres de votre commission au cours de l'automne dernier pour «faire le
point sur l'enseignement collégial québécois». il
serait peu utile d'en plaider encore une fois le bien-fondé. c'est
pourquoi je me bornerai à souligner les éléments de la
réforme que les établissements universitaires, pour leur part,
jugent spécialement opportuns. je le ferai en me référant
au document élaboré par le ministère de l'enseignement
supérieur et de la science et intitulé «des collèges
pour le québec du xxie siècle», en même temps qu'au
texte du projet de loi 82. '
II paraît difficile, en effet, de ne pas dire un mot de la
Commission d'évaluation de l'enseignement collégial, ne serait-ce
que pour en saluer l'éventuelle mise en oeuvre. S'agissant d'une
composante aussi vitale des «mesures de renouveau», j'ose
espérer que votre commission nous accordera cette liberté,
même si le projet de législation qui en propose la création
n'est pas l'objet, semble-t-il, des présentes consultations.
D'emblée, le gouvernement situe le projet de réforme dans
la perspective d'une «stratégie éducative
de la réussite» et propose un ensemble de mesures propres
à soutenir la persévérance dans les études
jusqu'à l'obtention du diplôme postulé, dans des
délais raisonnables. La première de ces mesures précise
les seuils d'admissibilité aux programmes conduisant au diplôme
d'études collégiales. Ainsi, le nouveau régime des
études collégiales prévu à l'article 18 stipulerait
que, désormais, le diplôme d'études secondaires, qui donne
accès général au collège, doit comporter la
réussite des cours de langue d'enseignement, de langue seconde et de
mathématiques de cinquième année, d'histoire et de
sciences physiques de quatrième année.
Comme le rappelle le document du ministère, il s'agit là
de cours obligatoires dont la réussite est déjà
prévue aux règles de sanction définies par le
régime pédagogique du secondaire. Et, s'il y avait de quoi se
scandaliser, comme certains ont pu le faire, c'est de la lenteur avec laquelle
ces règles sont implantées bien plus que de leur prétendu
élitisme. En fait, les seuils d'admissibilité correspondent
à des exigences minimales de formation intellectuelle et culturelle dans
des matières de base, et il est permis de penser qu'ils assureront une
préparation adéquate et suffisante à la réussite
des études collégiales. Si je peux me permettre ici une
suggestion, je crois que, là-dessus, il y aurait lieu de faire un peu
plus d'information. Je crois que la chose n'a pas été comprise
par bien des intervenants dans le dossier.
Dans une réforme de l'envergure de celle qui est proposée,
la mesure envisagée a le mérite de commencer par le commencement,
encore que d'aucuns situent plus avant l'origine du problème. C'est
reconnaître cette vérité élémentaire que
l'ordre collégial ne fonctionne pas en vase clos, que l'éducation
est une responsabilité collective et largement partagée. En
l'occurrence, les jeunes accèdent au collège avec la formation
qu'ils ont acquise au terme d'un parcours de 11 années dans un
système scolaire dont on a trop décrié les misères
pour s'abstenir d'en évoquer l'avenir et peut-être d'y insuffler
quelque espoir.
Et je voudrais, si vous le permettez, rappeler brièvement qu'il y
a deux ans le ministère de l'Éducation a amorcé les
travaux d'une vaste réforme visant à renouveler et à
valoriser la profession enseignante. Cette réforme a un impact
considérable sur nos établissements du fait qu'ils assument la
responsabilité de former les futurs enseignants. De l'éducation
préscolaire à l'éducation des adultes, en passant par
l'enseignement primaire et secondaire, l'adaptation scolaire et l'enseignement
professionnel, tous les programmes de formation en enseignement devront
être révisés en fonction des exigences définies par
le ministère de l'Éducation pour chacun des champs
d'activité de la profession. Polyvalence et intégration des
compétences disciplinaires et psychopédagogiques, intensification
des stages de formation pratique en milieu scolaire conduits dans le cadre de
protocoles d'association avec des commissions scolaires et des écoles et
placés sous la supervision de maîtres dûment formés
à cette fin, voilà sommairement tracées les grandes lignes
des révisions en cours. Les nouveaux programmes devront obtenir
l'agrément d'un organisme externe autonome avant d'être
officiellement reconnus par la ministre comme donnant accès à la
profession.
Il ne semble pas que ces actions aient beaucoup retenu l'attention en
dehors des milieux directement concernés. Situées en amont du
système éducatif, elles ne produiront leur effet qu'à long
terme, mais nous sommes convaincus qu'elles exerceront une influence profonde
et déterminante sur la capacité de notre société
à répondre aux défis qui attendent l'école de
demain. Vous me direz que ces propos sont hors d'ordre; je prétends
qu'au contraire la question est fondamentale et qu'il faudra, si l'on veut
atteindre les objectifs ambitieux d'accès aux études et aux
diplômes que le Conseil supérieur de l'éducation a
fixés pour le collégial, accentuer en toute priorité les
efforts déjà consentis.
Des nombreux volets que prévoit la stratégie de la
réussite, celui qui viserait à soutenir et développer
l'organisation de sessions d'accueil et d'intégration pour les
clientèles dites à risques et pour les étudiantes et les
étudiants qui en manifesteraient le besoin nous paraît
singulièrement pertinent. Aménagées en souplesse,
liées à un encadrement pédagogique accru et assorties
d'activités d'orientation et de mise à niveau appropriées,
ces mesures d'organisation scolaire de la première session vont
certainement faciliter la transition et augmenter les chances de
réussite. Bien entendu, il est nécessaire d'assurer un
encadrement pédagogique adéquat pendant toute la durée des
études. Ici, notre mémoire entre un peu dans les détails
et vous me permettrez de sauter quelques paragraphes.
À coup sûr, l'une des pièces maîtresses de la
réforme se retrouve dans les composantes de formation
générale des programmes conduisant au D.E.C. Les changements
proposés répondent aux souhaits que nous avons exprimés
par rapport aux exigences attendues d'une formation de qualité propre au
niveau d'enseignement collégial. L'application résolue des
principes de cohérence, d'intégration et de
complémentarité à l'organisation des cours de formation
générale, la définition des thématiques ou domaines
retenus, la détermination centralisée des objectifs et standards,
le partage équilibré des responsabilités dans le choix des
activités d'apprentissage, bref, cet ensemble de mesures nous
paraît de nature à favoriser l'acquisition des bases
élargies d'une formation intellectuelle solide.
Ces éléments de la réforme s'inspirent largement
des recommandations que le Conseil des collèges avait formulées
dans son avis sur «L'enseignement collégial: des priorités
pour un renouveau de la formation» au sujet de l'approche programme dont
nous avons nous-mêmes appuyé fortement l'adoption lors des
consultations de l'automne dernier sur l'avenir de l'enseignement
collégial. C'est par l'action structurée et convergente d'un
ensemble intégré d'activités d'enseignement autour de
pôles communs et complémentaires de formation que doit s'articuler
la finalité éducative du collège. Certes, au plan de la
conception et de l'organisation générale des programmes
d'études, la réforme projetée
souligne avec force la pertinence de cette orientation. Par ailleurs, on
sait que chaque collège devra se doter d'une politique
d'évaluation des apprentissages qui, entre autres volets, comporterait
l'instauration d'une épreuve synthèse à la fin de chaque
programme d'études. Cependant, nous estimons qu'il y aurait lieu de
faire un pas de plus en instaurant un mécanisme qui garantisse la mise
en oeuvre de l'approche programme.
Il s'agirait peut-être, par exemple, d'aménager un lieu de
coordination interdisciplinaire qui puisse soutenir efficacement les
concertations nécessaires et favoriser la participation active des
responsables: enseignants et directions pédagogiques. C'est qu'en effet
le programme constitue ce noyau central autour duquel viennent se greffer
toutes les activités propices à une formation de qualité.
Il délimite un lieu naturel d'insertion des mécanismes de gestion
pédagogique, des procédures d'évaluation et des diverses
mesures d'accueil, d'encadrement et d'orientation dont la mise en oeuvre est
primordiale pour la persévérance et la réussite dans les
études. Il procure enfin un climat favorable à
l'épanouissement d'un sentiment d'appartenance qui est un puissant
facteur de motivation et d'émulation.
Mais peut-être faut-il considérer que ce mandat de
coordination ferait naturellement partie des attributions
réservées à la commission des études dont la mise
en place est prévue à l'article 17 du projet de loi. Quoi qu'il
en soit et puisque je viens de la nommer, j'ajouterai que nous voyons d'un
très bon oeil la création d'une telle instance. Les fonctions
qu'elle est chargée d'accomplir sont importantes puisqu'elle devra
aviser le conseil d'administration sur toute question relative aux programmes
d'études dispensés par le collège, à
l'évaluation des apprentissages, des programmes d'études et de
leur application, aux règles et critères d'admission, de
même qu'aux procédures de sanction des études. C'est le
conseil d'administration du collège qui institue la commission des
études et qui en nomme les membres selon les règles de
composition énoncées à l'article 17. Il nous semble que
l'application de cet article, qui est laissée à leur
discrétion, offre aux collèges la possibilité de se doter
d'un outil de première valeur pour assurer la qualité de la
formation, pour consolider l'approche programme et pour progresser vers
l'excellence académique. On devrait y retrouver, entre autres, les
meilleurs éléments du corps professoral. Ce dispositif, nous
semble-t-il, offre un gage satisfaisant de transparence, d'autonomie et de
représentativité pour permettre à la commission d'assumer
efficacement son rôle. (10 h 20)
Je voudrais, en guise d'intermède, saluer au passage la
pertinence de la disposition proposée au paragraphe d de l'article 18,
selon laquelle le régime des études collégiales peut
«confier aux collèges la responsabilité d'évaluer
les apprentissages, sous réserve de ce qui peut être prévu
par ailleurs au régime, notamment en ce qui a trait au pouvoir du
ministre d'imposer des épreuves uniformes». Je confesse le plaisir
avec lequel nous avons accueilli la mesure envisagée, au sujet de
laquelle le document du ministère précise que «c'est
d'abord l'actuel test de français qui, lorsque cela pourra être
fait pour les deux langues d'enseignement, pourrait évoluer vers une
épreuve portant sur les objectifs et les standards propres au
collégial en langue d'enseignement et littérature». Nous
espérons que l'échéancier prévu pour l'implantation
de cette mesure, soit le printemps 1996, pourra être respecté.
Il y a longtemps que nous tentons de rompre l'isolement
véritablement systémique dans lequel nous ont placés les
insuffisances linguistiques observées chez les nouvelles cohortes
d'étudiants qui, chaque année, se présentent à nos
portes. Alors, voici enfin formellement introduite la solution que nous avons
préconisée et qui assujettirait l'octroi du D.E.C. à la
maîtrise attestée de la langue d'enseignement. Nous ne pouvons que
nous en féliciter et souhaiter qu'elle provoquera l'effet
d'entraînement nécessaire sur les exigences de la formation en
langue dispensée à l'école primaire et secondaire.
Il est rassurant de constater qu'un obstacle majeur à la
réalisation des objectifs d'une formation collégiale de
qualité l'absence de mécanismes rigoureux
d'évaluation sera enfin levé puisque le projet de
réforme prévoit, en effet, que chaque collège devra
adopter une politique d'évaluation des apprentissages et des programmes
d'études. Et c'est à une Commission d'évaluation de
l'enseignement collégial, véritable pierre d'assise de la
réforme, que serait confiée la mission d'évaluer ces
politiques et leur application, d'évaluer aussi la mise en oeuvre des
programmes d'études établis par le ministère, compte tenu
des objectifs et standards qui leur sont assignés, de même que les
objectifs, les standards et la mise en oeuvre des programmes d'études de
l'établissement.
Le statut et le mandat de cet organisme sont proches parents de ceux que
les établissements universitaires ont donnés à leur propre
Commission de vérification de l'évaluation des programmes,
instituée en 1991 en vertu d'une politique adoptée dans le cadre
de la conférence des recteurs. Cette Commission est chargée
d'examiner la conformité des politiques et procédures
d'évaluation en vigueur dans nos établissements avec les
conditions et les normes d'évaluation convenues selon les termes de la
politique. La Commission a d'abord élaboré son «Protocole
de vérification» en y intégrant les outils et
critères d'évaluation son cadre de référence
définis dans la politique de la CREPUQ. Un premier rapport de
vérification sur «L'évaluation périodique des
unités d'enseignement et de recherche de PUnhter-sité
McGill» a été rendu public en décembre dernier. Il
en paraîtra bientôt un deuxième consacré à
«L'évaluation périodique des unités d'enseignement
et de recherche de l'Université de Montréal». En outre, les
travaux de vérification de l'évaluation des programmes de
l'Université Laval sont déjà très
avancés.
C'est une question sur laquelle il y aurait beaucoup à dire. Ce
qui est certain, c'est que la Commission exerce déjà une
influence notable sur les actions des établissements universitaires dans
ce domaine. Ceux qui
n'avaient pas encore adopté de politique institutionnelle
d'évaluation périodique des programmes ont pris les dispositions
nécessaires pour combler cette lacune. Ailleurs, la politique existante
est complétée et élargie à l'ensemble des
programmes, ou encore elle est révisée et mise à jour
à la lumière de la politique-cadre établie par la
CREPUQ.
En ce qui concerne les processus, il est important qu'au départ
l'évaluation d'un programme d'études spécifique soit
confiée à une instance dûment désignée
à cette fin par l'établissement et dont la composition respecte
des critères d'équilibre entre les membres qui exercent des
responsabilités directes dans le programme en cause et ceux qui
proviennent d'autres programmes, champs d'études ou secteurs
disciplinaires. Mais surtout, au-delà de la consultation d'experts
externes, dont personne ne contestera la nécessité, les
responsables du programme les enseignantes et les enseignants
seraient appelés à porter un regard critique sur l'ensemble de
leurs activités, à en jauger les forces et les faiblesses,
à confirmer des orientations, à déterminer des
priorités d'action. Cet exercice bilan ou autoévaluation
est une première étape, essentielle, de
l'évaluation, le fondement sur lequel repose tout l'édifice; car
ceux et celles qui y contribuent seront aussi, par un juste retour des choses,
les dépositaires des recommandations retenues au terme du processus
d'évaluation pour améliorer la qualité et la pertinence du
programme dont ils assument la responsabilité.
C'est pourquoi il est indispensable que le collège puisse, autant
que possible, mobiliser la collaboration effective de celles et de ceux qui
participeront à la mise en oeuvre de la politique institutionnelle
d'évaluation. Il faut compter que cette action rencontrera diverses
résistances, au début surtout, d'autant que l'application
rigoureuse d'une telle procédure exige qu'on y consacre le temps et
l'énergie nécessaires. L'évaluation procure de nombreux
bénéfices, dont les plus immédiats sont
intrinsèques à la dynamique interne de réflexion et de
questionnement qu'elle induit au sein des unités impliquées et de
l'établissement lui-même.
Par ailleurs, on sait que la Commission d'évaluation de
l'enseignement collégial pourra recommander au ministre d'habiliter un
établissement d'enseignement à décerner le diplôme
d'enseignement collégial. À ce propos, nous nous interrogeons sur
le libellé de l'actuel projet de loi 83 et nous nous demandons si les
pouvoirs de cette commission d'évaluation sont assez explicitement
définis pour pouvoir aller jusqu'à cette possibilité
d'habiliter un établissement d'enseignement à décerner le
diplôme d'enseignement collégial. Nous pourrons revenir
là-dessus à la période de questions, si vous le souhaitez.
En situant résolument le projet de réforme dans la perspective
d'une responsabilisation accrue du collège, cette proposition
innovatrice devrait stimuler puissamment l'ensemble des personnels, et
particulièrement les responsables académiques, à
promouvoir le renouveau proposé.
C'est, pour conclure, le voeu que nous formulons en
réitérant notre appui enthousiaste à la réforme et
notre volonté d'y apporter la contribution requise, notamment dans le
domaine de l'évaluation, tout en poursuivant les collaborations
déjà engagées, entre autres dans les projets
d'expérimentations conjointes pour définir les approches
pédagogiques et les contenus du programme de sciences de la nature, pour
réviser les programmes d'arts et lettres et pour élaborer un
programme de formation polyvalente de type «Liberal Arts».
Avant de terminer, je voudrais aborder brièvement une question
particulière qui intéresse directement nos établissements:
il s'agit de l'abolition du Conseil des universités, prévue
à l'article 29 du projet de loi 83, Loi sur la Commission
d'évaluation de l'enseignement collégial et modifiant certaines
dispositions législatives. Les établissements universitaires
seraient en droit de s'inquiéter de cette décision, compte tenu
du rôle essentiel qu'a joué cet organisme dans l'économie
du système universitaire. Ils auraient cependant mauvaise grâce
à le faire si, comme les dispositions modificatives du projet de loi 83
le laissent entrevoir, des responsabilités similaires étaient
attribuées au Conseil supérieur de l'éducation qui jouit
lui-même d'une grande crédibilité. Par ailleurs, le
regroupement des diverses fonctions consultatives pourrait favoriser la
coordination interordres.
Il importe cependant de s'assurer que la nouvelle commission de
l'enseignement universitaire qu'incidemment nous souhaiterions voir
désigner «Commission de l'enseignement et de la recherche
universitaires», pour mieux refléter l'intégralité
de la mission des universités disposera de ressources suffisantes
pour jouer pleinement son rôle. Et, pour notre part, ce rôle
devrait privilégier les éléments de prospective, et
notamment les études sectorielles, de façon à
éclairer véritablement l'état et les besoins du
système universitaire.
Enfin, les universités tiennent à rendre hommage au
Conseil des universités pour le rôle primordial qu'il a
joué dans l'évolution du système universitaire
québécois. Plus souvent qu'autrement, ses avis ont
été suivis par les divers ministres qui se sont
succédé pour le plus grand bénéfice de
l'enseignement et de la recherche universitaires. Son apport a
été inestimable et sa présence a permis d'assurer un
précieux équilibre dans l'économie de notre
système. Nous formulons le souhait et, à vrai dire, nous sommes
convaincus que le Conseil supérieur de l'éducation saura prendre
la relève.
Mesdames et messieurs, je vous remercie de l'attention que vous avez
prêtée aux réflexions et commentaires qu'au nom des
établissements universitaires du Québec j'ai eu l'honneur de vous
soumettre. Et, maintenant, nous sommes disposés à répondre
à vos questions.
Le Président (M. Bradet): Alors, merci beaucoup, M. le
président. Nous en sommes à la période d'échanges
avec nos invités et, sans préambule, Mme la ministre de
l'Enseignement supérieur et de la Science. Vous avez 20 minutes.
Mme Robillard: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord
saluer les représentants de la Conférence des recteurs et des
principaux des universités du Québec et vous remercier d'avoir
à nouveau accepté de venir à cette commission
parlementaire sur l'éducation. Je pense que c'était important que
nous ayons le point de vue des universités. De la même
manière, hier, nous avons reçu le point de vue de la
Fédération des commissions scolaires. Je pense que c'est
très important qu'on voie le point de vue aussi des autres ordres
d'enseignement. (10 h 30)
Je note, M. le président, M. Gervais, que, de façon
générale, la conférence des recteurs a un appui favorable
au renouveau proposé, mais j'aimerais qu'on aille plus loin dans
certaines de vos affirmations au niveau de votre mémoire. Et je
commencerais peut-être par la commission d'évaluation parce que,
au niveau de la commission d'évaluation, vous le dites très bien
dans votre mémoire, vous considérez que c'est la
«véritable pierre d'assise de la réforme». C'est
votre affirmation, à la page 7 du mémoire. Pourquoi?
M. Gervais: Écoutez, je pense que l'une des raisons pour
lesquelles vous avez lancé cette réforme, c'était pour
répondre aux multiples critiques dont faisait l'objet l'enseignement
collégial. Et, s'il en est une qui était constante et
émanait, je dirais, de l'ensemble des groupes, c'est l'absence de
politique claire d'évaluation dans les collèges. Et voici que la
réforme qui est maintenant envisagée comble cette lacune et, en
outre, institue un mécanisme qui va permettre vraiment d'instaurer dans
les faits cette politique d'évaluation.
Certains des commentateurs du projet de loi laissent entendre que cette
Commission n'aura pas de grands pouvoirs. Je pense que c'est bien mal
connaître ce que c'est que l'évaluation. Imaginez un rapport d'une
commission d'évaluation sur l'un ou l'autre cégep, qui fait
état publiquement de lacunes importantes; je puis vous assurer que le
collège visé verra à modifier les choses. Et là ce
sera plus sérieux, si vous voulez, que les sondages de
L'actualité ou de Maclean's ou de revues semblables;
ça, ça viendra de gens autorisés à faire ce genre
de commentaires. Je crois donc que c'est avec raison que nous disons que c'est
la pierre d'assise de la réforme.
En outre, comme vous le mentionnez dans le document «Des
collèges pour le Québec du XXIe siècle», cette
Commission pourrait recommander au ministre d'habiliter un établissement
d'enseignement à décerner le diplôme d'enseignement
collégial. C'est là un changement très fondamental et une
ouverture vers quelque chose d'extrêmement intéressant, qui
placerait l'un ou l'autre collège dans la même situation où
se trouvent les universités qui décernent elles-mêmes leurs
diplômes. Donc, je pense qu'il est facile de voir que ce mécanisme
est extrêmement important et est, à vrai dire, la clé de
voûte, peut-être, de l'application de la réforme
envisagée.
Je ne sais pas si l'un ou l'autre de mes collègues voudrait
ajouter... M. L'Écuyer?
M. L'Écuyer (Jacques): Fondamentalement, il revient
toujours à l'établissement lui-même d'assurer la
qualité des enseignements et des programmes qu'il offre. Lorsqu'on est
en période où l'on bâtit les programmes, où on
développe les programmes et disons que, dans le passé,
dans les universités, ça a été la même
situation on est plus porté à s'attarder à la mise
en place de modèles, de programmes, etc. à l'engagement de
professeurs adéquats. Mais, tôt ou tard, il faut en venir à
se doter de mécanismes qui nous permettent d'assurer le public en
général et les étudiants de la qualité des
enseignements, des programmes qui sont offerts, des diplômes que,
éventuellement, nous décernons. Et, dans cette optique-là,
une commission d'évaluation est bien plus qu'une commission qui fait la
sanction; c'est aussi une commission qui aide les établissements. C'est
comme ça que nous agissons, que la Commission que nous avons dans les
universités agit. C'est comme ça que les comités
d'accréditation dans d'autres pays agissent. C'est en même temps
une sanction, en même temps une aide. Et, dans ce sens-là, c'est
un élément absolument essentiel de la réforme.
Nous y voyons en tout cas, c'est très clair dans notre
mémoire l'élément clé de la réforme
parce que, quel que soit le cadre dans lequel on oeuvre, si nous n'avons pas
une assurance, alors, à ce moment-là, nous avons des
problèmes. Et il nous semble que la commission nationale
d'évaluation devrait permettre...
Mme Robillard: Est-ce que, M. L'Écuyer, le mandat, tel que
décrit dans le projet de loi, de cette commission d'évaluation
vous semble suffisant? Et je m'explique, parce que d'autres intervenants sont
venus ici, en commission parlementaire, nous demander d'élargir le
mandat au-delà des programmes d'études parce qu'il est
très bien ciblé sur les programmes d'études
d'élargir le mandat à une évaluation de
l'établissement lui-même, globalement, et, en plus aussi, d'avoir
le mandat au niveau des encadrements nationaux, si je peux les qualifier ainsi.
Donc, sur les politiques, les directives et les règlements du
ministère de l'Enseignement supérieur, que la Commission ait une
droit de regard aussi. Est-ce que vous avez regardé ça? Est-ce
que vous avez une réflexion particulière sur le mandat, en tant
que tel, de cette Commission?
M. L'Écuyer: Je dirais deux choses. La première,
c'est qu'il me semble important, dans ce type d'organisme, de distinguer les
aspects administratifs des aspects qui sont d'ordre académique. Il y a
eu des problèmes très sérieux aux États-Unis
lorsque, par exemple, on a voulu mandater les comités d'agrément,
les commissions d'agrément je ne sais pas comment on les appelle
exactement pour évaluer, par exemple, la façon dont les
collèges ou les universités géraient les programmes de
bourses. On estimait qu'il n'y avait pas suffisamment de recouvrement des
dettes, etc. Alors, ça, c'est le
genre de choses qu'il ne faut pas mêler lorsqu'on fait
l'évaluation. L'aspect administratif, c'est une chose; l'aspect
académique, c'en est une autre. Et je pense que la commission nationale,
de ce point de vue là, est bien ciblée sur les programmes.
Cependant, lorsqu'on examine la question des n'appelons pas
ça les pouvoirs pouvoirs de recommandation, oui, effectivement,
il faut peut-être êfre attentif à bien interpréter
les mandats. Actuellement, les mandats sont assez spécifiques. Us sont
sur les politiques d'évaluation des apprentissages, les politiques
institutionnelles d'évaluation relatives aux programmes d'études,
la mise en oeuvre des programmes, les objectifs, les standards et la mise en
oeuvre... On dit, par ailleurs, que la Commission peut faire des commentaires
sur les standards et les objectifs établis par le ministère.
Dans la mesure où on s'attend à ce que la Commission,
éventuellement, fasse des recommandations en ce qui concerne la
possibilité d'octroyer le D.E.C. par le collège lui-même,
ça, c'est une recommandation qui me paraît tout à fait
majeure et ça doit signifier ou ça doit être
interprété comme étant la reconnaissance que le
collège est en mesure de garantir lui-même la qualité de
ses programmes. Parce qu'on ne ferait pas ça pour, j'imagine, un ou deux
ans. Je veux dire, une reconnaissance comme ça, ça n'est
qu'exceptionnellement que ce sera retiré. Alors, dans un contexte comme
ça, il me semble, en tout cas, que la Commission devrait avoir le
pouvoir de regarder aussi comment se fait la gestion de l'enseignement, la
gestion académique des programmes, quels sont les mécanismes, par
exemple, avec lesquels le collège est en mesure de garantir la
qualité de l'enseignement.
Autre question qui me paraît importante aussi, c'est la question
de la politique de formation du collège. Les programmes, c'est une
chose. Il y a une politique de formation. Un collège peut, par exemple,
adopter différentes méthodes pour accélérer ou pour
encadrer ou pour suivre le progrès des étudiants. Enfin, on peut
vouloir former... Enfin, je ne vais pas entrer dans le détail, mais une
institution peut se donner une espèce de projet éducatif,
là. Et ça, ça devrait aussi pouvoir être
examiné par la Commission. En fait, le collège n'est pas
simplement un instrument; il doit aussi avoir sa propre philosophie de la
formation. Et on sait très bien que, d'un collège à
l'autre, déjà, il y a des approches dans ce sens-là.
Alors, il me semble important que la Commission puisse examiner ces
questions-là aussi.
M. Gervais: Et ce que nous nous disions ce matin, justement,
c'était que, s'il fallait que quelqu'un se mette à
interpréter de façon restrictive l'article 13 du projet de loi
83, qui donne les mandats de la commission d'évaluation, peut-être
la priverait-on de la possibilité d'examiner des aspects comme ceux que
vient d'évoquer M. L'Écuyer, par exemple, la politique en ce qui
a trait à la pédagogie, à l'innovation pédagogique,
le fonctionnement de la commission des études dans un collège.
Tout cela, ce sont des éléments qui devraient être pris en
compte lorsque la Commission aura à faire une recommandation d'octroyer
à un collège donné le pouvoir de décerner ses
diplômes. (10 h 40)
Mme Robillard: Merci. C'est très clair. C'est un point de
vue intéressant à regarder de près. M. Gervais, comme le
temps passe, je veux absolument aborder avec vous une dimension je pense
que vous êtes presque les seuls à l'aborder celle de
l'abolition du Conseil des universités. Alors, j'aimerais ça
entendre le point de vue encore plus détaillé de la
conférence des recteurs. J'ai bien vu, aux pages 8 et 9, que vous
sembliez en accord en autant que le conseil supérieur aussi
reçoive des nouvelles responsabilités. Et vous dites surtout que
le rôle devrait privilégier des éléments de
prospective, de fait, comme les études sectorielles; vous parlez des
études sectorielles. Est-ce que vous avez été à
même d'examiner les propositions, aussi, qui sont dans le projet de loi?
Et est-ce que vous avez des suggestions supplémentaires à nous
faire, le cas échéant?
M. Gervais: Bon. Écoutez, pour ce qui est de l'abolition
du Conseil des universités, il est clair qu'il y avait dans notre
système une anomalie. Nous avions, d'un côté, un Conseil
supérieur de l'éducation qui avait une Commission de
l'enseignement supérieur qui était consultative auprès du
gouvernement et, de l'autre, un Conseil des universités et un Conseil
des collèges. Et, en cette ère de rationalisation
nécessaire, il nous semble normal qu'on envisage de supprimer l'un des
deux termes de la duplication.
Quand nous parlons d'attribuer au Conseil supérieur de
l'éducation des pouvoirs similaires à ceux que la loi attribue au
Conseil des universités, nous pensons principalement aux trois premiers
alinéas de l'article 3 de l'actuelle Loi sur le Conseil des
universités, à savoir: «a) étudier les besoins de
l'enseignement supérieur en tenant compte des besoins culturels,
scientifiques, sociaux et économiques du Québec, ainsi que des
ressources humaines et matérielles et des effectifs étudiants;
«b) proposer les objectifs qui doivent être poursuivis, à
court et à long terme, pour que soit assuré le
développement de l'enseignement supérieur et réviser
périodiquement ces objectifs; «c) donner au ministre de
l'Enseignement supérieur et de la Science des avis sur le
développement des institutions universitaires et sur la création
de nouveaux établissements d'enseignement supérieur.»
Incidemment, à ce propos-là, je crois qu'il serait prudent
de donner explicitement au Conseil supérieur de l'éducation le
rôle de devoir se prononcer dans l'éventualité où il
y aurait proposition de création d'un nouvel établissement
d'enseignement supérieur au Québec. Pour les autres
alinéas de la loi, nous ne pensons pas que cela devrait être
transféré au Conseil supérieur de l'éducation.
Écoutez, suggérer les normes relativement à la
standardisation des méthodes comptables, c'est déjà fait
depuis longtemps. Et il y aurait eu lieu, de toute façon,
de revoir cette loi du Conseil des universités pour en enlever ce
qui était devenu caduc.
Je ne sais pas si mon collègue, M. L'Écuyer, a des
commentaires à ajouter. Je vous rappelle qu'il a déjà
été président du Conseil des universités et je
pourrais peut-être lui donner l'occasion de saluer au passage cette
institution, peut-être pour la dernière fois.
Le Président (M. Bradet): M. L'Écuyer.
M. L'Écuyer: M. le Président, effectivement, il
était devenu, je pense, assez clair que certaines des dispositions de la
loi du Conseil des universités requéraient des modifications
importantes. Pour avoir été président et en avoir
discuté avec les ministres, il y a des éléments, par
exemple, en ce qui concerne le financement, qui avaient certainement leur
pertinence au moment où le Conseil a été
créé, mais qui étaient devenus beaucoup moins pertinents
à mesure que se développaient des relations plus directes ou que
les crédits devenaient moins disponibles. Alors, les avis qu'on devait
rendre sur le niveau de l'enveloppe, et même sur le partage au cours des
dernières années, ne devenaient pas nécessaires avec la
même régularité. On devait le faire annuellement, à
chaque fois.
Toutes ces questions-là nécessitaient un ajustement. Et je
pense que le transfert, dans l'esprit que vient de mentionner M. Gervais, est
tout à fait pertinent. C'est évident que, pour ma part, j'ai
gardé beaucoup d'attachement pour le Conseil des universités,
mais je dois reconnaître que, dans la perspective où nous sommes
actuellement, dans le contexte où nous sommes actuellement, il y a
nécessité d'une certaine rationalisation.
Mme Robillard: M. Gervais, quelles sont les raisons qui vous
poussent à nous suggérer d'inclure dans le mandat du Conseil
supérieur de l'éducation l'obligation, dans le fond, pour la
ministre de le consulter sur l'établissement de tout nouvel
établissement universitaire?
M. Gervais: Écoutez, pour être très clair, je
crois qu'il y a eu dans le passé et qu'il pourrait y avoir dans l'avenir
des pressions politiques très fortes dans telle ou telle région
du Québec pour instituer une université ou une constituante de
l'Université du Québec, ou que sais-je encore. Et je pense qu'il
serait sage de faire en sorte qu'un organisme consultatif puisse examiner ces
projets pour faire à la ministre ou au ministre les recommandations
appropriées. Ça peut devenir, à mon avis, politiquement
très difficile pour un ministre ou une ministre de l'Enseignement
supérieur et de la Science de résister à certaines
pressions politiques voulant mener à la création de nouveaux
établissements universitaires. Or, il me semble qu'à
l'époque où nous sommes nous devrions essayer de consolider le
système universitaire existant plutôt que de songer à
créer de nouveaux établissements. Et il m'apparaîtrait
prudent de confier explicitement au Conseil supérieur de
l'éducation la responsabilité qu'avait explicitement le Conseil
des universités à cet égard.
Mme Robillard: Alors, c'est peut-être un article de la loi
128 sur les établissements universitaires où, de fait, il y avait
une obligation pour la ministre de consulter le Conseil des universités
par rapport à...
M. Gervais: Probablement que ce serait la façon de le
faire.
Mme Robillard: Parfait, merci.
Le Président (M. Bradet): Je reconnais maintenant le
critique officiel de l'Opposition en matière d'éducation, M. le
député de Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: Oui, M. le Président, d'abord, quelques
remarques et questions portant sur les seuils d'admissibilité, les
seuils d'admission au cégep. Dans votre mémoire, vous dites, et
je vous cite: «Et, s'il y avait de quoi se scandaliser, comme certains
ont pu le faire, c'est de la lenteur avec laquelle ces règles sont
implantées bien plus que de leur prétendu élitisme.»
Fin de la citation.
En réalité, tous les intervenants sont d'accord pour le
rehaussement des exigences à la fin du secondaire pour l'obtention du
diplôme d'études secondaires. Le problème n'est pas
là, et vous ne semblez pas l'identifier. C'est pourquoi je voudrais vous
questionner là-dessus, parce que le problème, c'est le double
D.E.S*; c'est ça, le problème qui a été
signalé par à peu près tout le monde. En appliquant la
proposition ministérielle, on va se retrouver avec un diplôme
d'études secondaires qui donne accès au collégial, au
collège, et un diplôme d'études secondaires qui ne
mène nulle part. Et j'aimerais, justement, savoir ce que vous pensez de
ça. Ce n'est pas sur le rehaussement des exigences, tout le monde est
d'accord là-dessus; il s'agit d'en déterminer l'ampleur,
évidemment, puis le niveau. C'est sur la forme, la façon dont le
gouvernement a décidé d'agir à ce sujet-là en
créant pratiquement deux D.E.S., un qui conduit au collégial et
l'autre qui ne mène nulle part, dans un cul-de-sac. Qu'est-ce que vous
en pensez, de cette façon de faire?
Le Président (M. Bradet): M. Gervais.
M. Gervais: Avec votre permission, je vais demander à M.
Ouellet de répondre à cette question.
Le Président (M. Bradet): M. Ouellet.
M. Ouellet (Jean-Guy): Votre question est très pertinente.
La difficulté que nous avons actuellement, c'est le profil à
l'entrée qui est différent. On peut avoir des étudiants
qui entrent présentement au niveau collégial et qui ont
réussi des nombres très variables
d'unités, donc qui ont une préparation qui n'est pas la
même, qui n'est pas de même niveau et qui n'est pas de même
contenu. Et, face à ça, c'est difficile d'avoir, je dirais, des
profils à l'entrée qui sont différents alors qu'à
la sortie on voudrait avoir des profils qui sont similaires. Et ça,
ça cause un nombre important de problèmes en termes de
prévoir actuellement, je dirais, an niveau collégial, des
activités qui vont permettre de rehausser un niveau qu'on aurait
dû avoir à l'entrée. Et, dans ce sens-là, tout comme
on a des programmes au niveau collégial qui ne mènent pas
nécessairement au niveau universitaire, il faudra probablement envisager
des étudiants qui auront, disons, une reconnaissance de
compétence au secondaire, mais n'auront pas accès au niveau
collégial. (10 h 50)
Et, actuellement, nous sommes pris dans le dilemme. On nous parle du
taux d'abandon, du taux d'échec important au niveau collégial; il
est important aussi au niveau secondaire, et on essaie de rehausser les
standards de sortie au niveau collégial. Et ça, je pense qu'on en
a la preuve au niveau universitaire actuellement: il y a des carences, il y a
des déficiences importantes chez les étudiants que nous
accueillons. Et je pense que la seule façon de remédier
réellement à ça, c'est de rehausser autant à
l'entrée du collégial que durant le programme. Et je pense qu'il
va falloir un seuil d'accessibilité qui va probablement être une
marche plus élevée qu'actuellement pour être capable de
rencontrer les nouvelles exigences de qualité que l'on veut donner
à la formation collégiale.
M. Brassard: On est d'accord avec ça; tout le monde est
à peu près d'accord avec ça. Mais, moi, ma question porte
sur la façon dont le gouvernement et le ministère de
l'Enseignement supérieur veulent y arriver. C'est en créant,
à toutes fins pratiques, deux D.E.S., un qui va donner accès
à l'enseignement collégial et l'autre pas. Donc, il y aura un
D.E.S. dévalorisé, un D.E.S. qui ne conduit nulle part. Et ce
n'est pas sur le rehaussement sur le rehaussement, tout le monde est
d'accord c'est sur la façon dont le gouvernement s'y prend pour y
arriver.
M. Gervais: Peut-être, si vous permettez. Je pense que nous
sommes tout à fait conscients qu'il y a, au niveau secondaire, des
problèmes importants, peut-être même plus importants que
ceux qu'on retrouvait au niveau collégial. Maintenant, un
éléphant, ça se mange une oreille à la fois, et je
crois que, dans le cas présent, le gouvernement a décidé
de s'attaquer à la question de l'enseignement collégial, mais il
est certain, à mon avis, qu'il devra regarder aussi du côté
de l'enseignement secondaire. Et c'est la raison pour laquelle nous avons, dans
notre mémoire, un passage qui porte sur ce que nous sommes en train de
faire comme effort avec le ministère de l'Éducation pour
améliorer tout le secteur de la formation des enseignants et des
enseignantes. Mais on ne peut pas tout faire en même temps. C'est
sûr que cette question-là que vous soulevez, qui est pertinente,
devra être examinée dans un effort de rehaussement de la
qualité de la formation et de l'encadrement au niveau secondaire. Parce
que, pour beaucoup d'observateurs, et j'en suis, les principaux
problèmes de notre système d'éducation ne sont pas au
niveau universitaire, ne sont pas non plus au niveau collégial, ni
même au niveau primaire, mais beaucoup plus au niveau secondaire. Et je
pense bien qu'il va falloir, dans un avenir prochain, s'y attaquer.
M. Brassard: Bien. Une autre question que je voulais vous poser,
qui fait apparaître ce que je considère peut-être un peu
comme une contradiction. Vous semblez donner votre assentiment, vous donnez
votre assentiment, si je vous comprends bien, à ce qu'on appelle
maintenant la taxe à l'échec imposée aux étudiants
qui échouent un certain nombre de cours, cinq pour les programmes
préuniversitaires et sept pour la formation technique. Et, en même
temps, en page 5, vous souhaitez que la durée des études au
niveau collégial soit raccourcie, que le cheminement des
étudiants et étudiantes soit accéléré. Vous
dites: «C'est près du double de la durée normale d'un tel
programme: compte tenu des objectifs que poursuit la réforme, nous
considérons qu'un tel rythme d'études est insuffisant pour
assurer l'intensité nécessaire à des apprentissages
solides.» Donc, il faudrait que l'étudiant chemine plus
rapidement, termine ses études à l'intérieur d'une
durée plus courte que ce n'est le cas présentement.
Or, on nous a fait remarquer puis, moi, je suis d'accord avec
ça; je suis convaincu que ça va avoir cet effet-là
que la pénalité financière, la taxe à
l'échec, va avoir l'effet suivant chez beaucoup d'étudiants: pour
éviter d'atteindre le nombre d'échecs qui aurait pour effet de
les pénaliser, de les châtier financièrement, beaucoup
auront tendance à s'inscrire à moins de cours et, donc, à
prolonger la durée de leurs études. Ça a été
signalé par plusieurs, y compris par les étudiants. Ils ont dit
que beaucoup d'étudiants, pour éviter les cinq échecs et
la pénalité financière qui y est rattachée, vont
s'inscrire à moins de cours; donc, ils vont allonger leur cheminement.
Alors, est-ce que vous avez pris conscience de cette dimension ou de cette
contradiction? Vous êtes à la fois pour la pénalité
financière qui, de toute évidence, va conduire un certain nombre
d'étudiants à allonger la durée de leurs études,
alors qu'en même temps vous constatez que cette durée-là
est trop longue et qu'il faudrait la réduire.
M. Gervais: D'abord, je dois préciser que nous ne donnons
pas notre aval à cette mesure; nous ne faisons qu'y
référer en disant: Cette disposition a soulevé la
controverse et, si nous nous risquons à l'aborder, c'est uniquement pour
en situer l'application par rapport à celle de l'article 18 selon lequel
le régime des études collégiales peut prévoir que
le ministre détermine la date limite au-delà de laquelle un
étudiant pourrait abandonner un cours sans qu'un échec ne soit
porté à son
bulletin. Il nous apparaissait qu'il y avait là un danger que, si
la période d'abandon était trop courte, quelqu'un se retrouve
avec cinq échecs très rapidement et se voie ainsi
pénalisé pour le reste de ses études.
Mais, sur votre question comme telle, je vais demander à... Mes
collègues m'ont signifié qu'ils avaient quelque chose à
dire là-dessus. Je vais leur céder la parole. M.
L'Écuyer.
M. L'Écuyer: M. le Président, je pense qu'il y a
deux points qu'il faut garder en tête par rapport à cette mesure.
Comme disait M. Gervais, finalement, la pénalité, nous n'y
accordons pas... Nous n'avons pas nécessairement émis une
position dans un sens ou dans l'autre. Cependant, en termes d'implication
et ça, c'est l'élément qui nous paraît
important c'est très important que l'étudiant s'implique
dans ses études, et s'implique fortement dans ses études. Un
rythme trop allégé, qui n'est pas loin du mi-temps, ça
nous paraît dangereux. L'expérience que nous avons,
l'expérience mesurée à l'université, c'est que ce
ne sont pas les étudiants à temps plein qui abandonnent, qui
changent ou dont le taux de déperdition est élevé; ce sont
presque toujours les étudiants qui fréquentent à mi-temps
ou qui fréquentent marginalement, si je peux me permettre l'expression,
l'université. Alors, nous avons tendance à dire: Au niveau des
collèges, faites attention; si votre régime des études est
trop allégé, vous risquez, de toute façon, une perte
élevée due au fait que l'étudiant ne s'implique pas. Il ne
faut pas oublier, quand même, qu'en matière de formation
l'implication de l'étudiant, c'est le premier facteur.
Le deuxième point va un peu dans le même sens.
L'expérience, si vous voulez, de plusieurs établissements, de
plusieurs organismes d'évaluation, c'est que, là où les
attentes sont élevées les étudiants
«perforaient» mieux, de façon générale. Et,
dans ce sens-là, je pense que c'est important qu'au niveau des
collèges on ait des attentes claires, précises en termes
d'implication des étudiants, en termes des exigences que demande la
formation. Alors, c'est dans ce sens-là qu'il faut comprendre notre
intervention. Je comprends qu'on peut avoir des inquiétudes, et je pense
que c'est tout à fait légitime. Nous sommes, par ailleurs, fort
conscients qu'au niveau universitaire où il y a des frais de
scolarité, ce ne sont pas, non plus, les frais de scolarité qui
ont eu une incidence majeure sur le taux de fréquentation et de
déperdition. (11 heures)
M. Brassard: De toute façon, je comprends très bien
ce que vous dites et je comprends très bien votre mémoire dans ce
sens-là, concernant la durée des études. Mais, comme vous
nous dites également que vous ne vous êtes pas prononcés
sur la taxe à l'échec, je veux simplement vous signaler, si vous
avez l'intention de le faire, d'éviter de tomber dans la contradiction,
parce que c'est évident que la taxe à l'échec va avoir un
effet sur la durée des études de plusieurs étudiants.
C'est clair qu il y en a plusieurs qui vont avoir tendance, pour éviter
le châtiment financier relié aux échecs, à
s'inscrire à moins de cours et, donc, à prolonger la durée
de leurs études.
Une voix: M. Ouellet.
M. Ouellet: Nous, je pense qu'on dit ceci des deux choses, dans
le sens que c'est la notion de seuil minimal pour être
considéré à temps plein. Normalement, par exemple, en
préuniversitaire, un D.E.C., ça se fait en quatre trimestres.
Maintenant, avec la possibilité de quatre cours, on pourrait allonger
ça jusqu'à sept trimestres, ce qui nous apparaît un seuil
minimal trop bas pour être considéré à temps plein.
Si on fait la comparaison, dans la plupart des universités, quelqu'un,
pour être considéré à temps plein, doit avoir 12
crédits. Mais 12 crédits, ça allonge la formation d'une
année; donc, on a 8 trimestres plutôt que 6. Mais, ici, au
collège, alors qu'on devrait faire ça dans deux ans, on permet de
le faire dans trois ans et demi et d'être considéré
à temps plein, ce qui nous apparaît démesuré et
prépare mal à assumer une charge de travail au niveau
universitaire après ça, qui doit être beaucoup plus
grande.
M. Brassard: Une question concernant le Conseil des
universités. Je constate que vous ne porterez pas le deuil très
longtemps, que vous allez assister aux funérailles et porter sa
dépouille en terre sans trop de douleur. Je prends acte. Cependant, il
reste qu'il y a beaucoup des mandats vous l'avez abordé tout
à l'heure du Conseil des universités qui ne seront pas
transférés au Conseil supérieur de l'éducation. Je
pense, en particulier, à tout ce qui concerne l'article 4 où le
Conseil des universités était tenu de soumettre un avis sur tout
plan que le ministère de l'Enseignement supérieur «entend
mettre en oeuvre pour le développement de l'enseignement
supérieur et de la recherche universitaire, à chaque phase
majeure de son élaboration; les budgets annuels de fonctionnement et
d'investissements des établissements d'enseignement supérieur;
les mesures qu'il entend adopter pour assurer la coordination entre les
établissements d'enseignement supérieur; des règles
relatives à la standardisation des méthodes comptables; la
répartition entre les établissements [...] du montant global des
crédits annuels dégagés pour fins d'enseignement
supérieur et de recherche universitaire».
Vous ne souhaitez pas que ces mandats actuels du Conseil des
universités soient transférés au Conseil supérieur
de l'éducation?
M. Gervais: Écoutez, beaucoup de ces mandats
étaient, comme je le disais tantôt, caducs et n'étaient pas
appliqués. Exemple: les budgets annuels de fonctionnement et
d'investissements des établissements d'enseignement supérieur. Je
ne me souviens pas, pour ma part, que le budget de l'Université Laval
ait été soumis au Conseil des universités, jamais. D'autre
part, je dirais que, depuis quelques années, s'est établi un mode
de
fonctionnement entre le ministère de l'Enseignement
supérieur et de la Science et les établissements d'enseignement
supérieur qui, à mon avis ce mode de fonctionnement
est beaucoup plus direct et est empreint d'une volonté de collaboration
et de dialogue qui rendent, à mon avis, superflus certains des mandats
qui étaient confiés ici au Conseil.
Mais je crois que celui qui a présidé le Conseil dps
universités pendant un certain nombre d'années est sans doute
plus à même que moi de répondre à votre question. M.
L'Écuyer, peut-être.
M. L'Écuyer: Juste pour dire, effectivement, qu'il y a une
certaine frustration que j'avais lorsque j'étais au Conseil, surtout les
dernières années, parce que le développement de la
conférence des recteurs a fait que beaucoup des questions dont vous
parlez, les questions, par exemple, de répartition, les questions au
niveau d'enveloppes, font l'objet de discussions directes entre la
conférence des recteurs et le ministère, de telle sorte que,
quand la demande d'avis arrive au Conseil des universités, bien, les
carottes sont cuites. Il n'y a pas grand-chose que vous pouvez faire.
Et, dans un contexte comme ça, je pense que ce n'est pas une
utilisation rationnelle, si vous voulez, des crédits publics de
continuer ce type d'opération. J'avais déjà discuté
de cette question-là avec M. Ryan, par exemple, au moment où il
était ministre de l'Enseignement supérieur, et c'était une
question qui était préoccupante parce que, finalement, on devait
consacrer beaucoup d'énergie chaque année à produire ces
avis à des moments où, manifestement, ils n'avaient pas une
grande implication.
Par ailleurs, le Conseil supérieur devrait pouvoir, compte tenu
des mandats qu'on lui reconnaît, de temps à autre analyser, par
exemple, dans le cadre de l'état et des besoins, le niveau de
l'enveloppe, si besoin est. S'il y a des problèmes de
répartition, ces choses-là peuvent s'aligner, mais ne devraient
pas faire l'objet d'une demande stricte, annuelle, régulière, du
type de celles que le Conseil des universités recevait.
Donc, dans ce contexte-là, il me semble que, déjà
depuis plusieurs années enfin, depuis certainement six ou sept
ans il y avait une volonté de revoir graduellement ces
mandats-là. C'est pour ça que ça ne nous inquiète
pas trop, trop. Mais je vous dirai que c'est important, par ailleurs, que le
Conseil supérieur dispose des moyens, comme nous le disons, pour
être en mesure de porter, à intervalles qu'il jugera à
propos, des jugements et de formuler des avis sur l'ensemble des questions, y
compris les questions financières, y compris le développement de
la recherche. Et nous l'avons signalé aussi.
M. Brassard: Nous, ça nous inquiète. Je vais vous
dire pourquoi. Parce que la conférence des recteurs peut bien prendre la
relève ou prendre le relais, si vous préférez, pour
certains de ses mandats, sauf que, la plupart du temps, ça se fait en
catimini entre la conférence des recteurs et le ministère de
l'Enseignement supérieur; tandis que, là, au moins,
c'étaient des avis publics dont on pouvait prendre connaissance. Vos
discussions, puis vos échanges sur la répartition des budgets, on
n'en a pas beaucoup d'éléments entre les mains. Ça ne se
fait pas sur la place publique. Tandis que, là, le Conseil des
universités devait donner un avis, puis tout avis du Conseil des
universités est public. Pour nous, c'est important.
M. Gervais: Mais, encore fois, si vous me permettez, M. le
Président...
Le Président (M. Gobé): Oui, en terminant.
Très bien.
M. Gervais: En terminant, c'est que nous sommes tout à
fait d'avis que le Conseil supérieur de l'éducation pourrait,
s'il le jugeait à propos, donner des avis à la ministre, par
exemple, sur le financement des universités, sur la répartition
de l'enveloppe, sur le budget d'investissements. Le problème, c'est que,
de la façon dont c'était fait, annuellement, etc., c'était
inefficace. Et on pense que ce dont le gouvernement a besoin et le
public en général c'est beaucoup plus d'avis à
moyen terme sur l'état et les besoins de l'enseignement
supérieur, sur les ressources qui y sont affectées. Et je pense
que le Conseil supérieur de l'éducation, s'il joue bien son
rôle, pourra répondre à ces attentes-là.
Le Président (M. Gobé): Merci beaucoup. Ceci met
donc fin à votre présentation. Au nom de tous les membres de
cette commission, je vous remercie de vous être déplacés et
d'être venus nous rencontrer pour nous faire part de vos commentaires.
Alors, vous pouvez maintenant vous retirer et j'appellerai les
conférenciers suivants, soit les représentants de la Centrale de
l'enseignement du Québec, afin qu'ils prennent place en avant. Et, pour
ce faire, je vais suspendre les travaux quelques minutes. La commission est
maintenant suspendue.
(Suspension de la séance à 11 h 9)
(Reprise à 11 h 12)
Le Président (M. Gobé): Alors, mesdames et
messieurs, la commission de l'éducation reprend maintenant ses travaux.
Il nous fait plaisir d'accueillir les représentants et la
représentante de la Centrale de l'enseignement du Québec qui vont
maintenant nous présenter leur mémoire. Alors, Mme la
présidente, bonjour. Si vous voulez présenter les personnes qui
vous accompagnent, ça serait utile pour les membres de la
commission.
Centrale de l'enseignement du Québec
(CEQ)
Mme Pagé (Lorraine): Sûrement, M. le
Président. Alors, Mme la ministre, Mmes et MM. les
députés, permettez-moi donc de vous présenter les
personnes qui m'accompagnent: M. Réal Trottier, président de la
Fédération des enseignantes et enseignants de cégep; M.
Jacques Pétrin, vice-président de la Fédération du
personnel de soutien; à l'extrémité, M. Edouard Dagenais,
vice-président de la Fédération des professionnelles et
professionnels des collèges et des universités; et, enfin, M.
François Beauregard, à côté de moi, conseiller
à la CEQ.
Le Président (M. Gobé): Alors, madame, messieurs,
bonjour. Mme Pagé, vous pouvez commencer votre présentation.
Mme Pagé: Merci. Lors de notre intervention devant la
commission parlementaire en novembre dernier, la CEQ avait clairement fait son
choix, le choix des cégeps, et elle faisait également le choix de
leur évolution. Autrement dit, nous étions attachés
à l'institution collégiale, nous l'avons dit, et nous
étions ouverts aux changements. Je dirais même plus, nous
étions désireux de changements afin de nous permettre d'adapter
les cégeps aux réalités d'aujourd'hui et de demain. Nous
avons trouvé, dans le projet gouvernemental, certaines réponses
aux propositions que nous avons formulées. Je les mentionnerai
brièvement en indiquant les éléments qui, selon nous,
devraient être clarifiés ou complétés. Cependant,
d'autres aspects nous apparaissent carrément inacceptables, et nous
réclamons des modifications substantielles à certains chapitres
du projet.
Vous avez déclaré, Mme la ministre, que votre projet
n'était pas coulé dans le ciment. Alors, nous voulons profiter de
l'ouverture que vous avez manifestée pour proposer des
améliorations à cette réforme afin que nos cégeps
puissent mieux relever les défis qui leur sont posés. Nous sommes
probablement assez en faveur du changement pour vouloir nous assurer qu'il
puisse s'opérer correctement. Dans un premier temps, je mentionnerai les
principaux points d'accord avec le projet de réforme des cégeps
en signalant au passage certaines précisions qui devraient, selon nous,
être apportées.
La CEQ se réjouit de l'orientation fondamentale, du projet
gouvernemental, qui consiste à refaire le choix des cégeps et
à réaffirmer leur rôle essentiel dans la
société québécoise. De la même
manière, nous accueillons favorablement la décision de maintenir
la polyvalence de la formation dans les institutions collégiales et la
polyvalence au sein des institutions collégiales. Nous avons noté
avec satisfaction que le gouvernement a retenu, en principe du moins, les
objectifs quantitatifs d'accessibilité et de réussite qui ont
été mis de l'avant par le Conseil supérieur de
l'éducation. Mais, au-delà de la vague invitation aux
différents acteurs à placer ces objectifs en horizon à
leur action des prochaines années, nous nous interrogeons sur les moyens
concrets qui seront mis en oeuvre pour atteindre ces objectifs.
En matière de formation professionnelle, nous avons
souligné notre accord avec la poursuite de campagnes de revalorisation
et la création de nouvelles places. Nous reconnaissons l'utilité
d'une articulation plus fonctionnelle des cégeps avec le marché
du travail, mais il ne faut pas oublier que la mission des cégeps est de
former des citoyennes et des citoyens responsables et non seulement de
préparer une main-d'oeuvre pour le marché du travail. Les
mécanismes mis en place pour favoriser une meilleure articulation avec
le marché du travail doivent donc garantir expressément
l'intégrité de la mission des institutions
collégiales.
Nous souscrivons à la décentralisation vers les
cégeps de l'élaboration des contenus de cours en formation
professionnelle et à l'accélération du processus de
révision des programmes techniques. Nous sommes en accord avec le
regroupement des filières courtes sous une seule et même
appellation. Toutefois, la formule de fractionnement en modules, telle qu'elle
est proposée dans le projet gouvernemental, soulève plusieurs
inquiétudes, notamment quant à la confusion qu'elle pourrait
créer tant chez les élèves que chez les employeurs et
quant aux conséquences d'un éventuel fractionnement des
apprentissages qui répondrait davantage aux besoins des entreprises
qu'à ceux des élèves.
Dans le dossier de la rationalisation des options, nous invitons le
gouvernement à faire preuve de prudence. Notamment, nous l'invitons
à définir des seuils de viabilité distincts selon les
régions et à voir à l'arrimage des options avec les
politiques de développement régional.
Nous avons affirmé notre accord avec l'implantation de l'approche
programme. Nous souscrivons donc à l'invitation qui est lancée
aux collèges à cet égard et au choix que le gouvernement
fait de ne pas imposer de structure uniforme. Mais nous nous inquiétons
du silence du projet gouvernemental sur les conditions à réunir
et sur les moyens à octroyer pour assurer la réussite de
l'approche programme, car celle-ci, à notre sens, constitue la plus
importante réforme pédagogique à mettre en oeuvre dans les
cégeps.
Nous souscrivons à la transformation de la commission
pédagogique en commission des études, mais nous invitons le
gouvernement à apporter les correctifs nécessaires pour assurer
la représentation de toutes les catégories de personnel. C'est
cela, entre autres, qui sera garant de la réussite de l'approche
programme.
Pour ce qui est de l'évaluation, nous sommes d'accord avec le
choix de maintenir dans les collèges la responsabilité
fondamentale de l'évaluation des apprentissages et avec l'introduction
d'épreuves synthèses, mais nous nous opposons au projet
d'instaurer des examens nationaux. Nous ne croyons pas que la qualité de
l'enseignement collégial soit nécessairement rehaussée par
l'ajout d'examens standardisés. On verse assez facilement dans la
normalisation, comme on le voit au niveau secondaire. Donc, il ne nous
apparaît pas opportun de mettre en place ces examens nationaux.
Nous accordons notre appui à la création d'un organisme
externe et neutre d'évaluation des collèges, à
la condition que celui-ci ait le mandat de prendre en compte, dans ses
évaluations, les moyens qui ont été mis à la
disposition des cégeps pour réaliser leur mandat
pédagogique et qu'il soit aussi habilité à faire des
recommandations à ce sujet à la ministre. Nous estimons que la
commission d'évaluation ne devrait toutefois pas avoir le pouvoir de
recommander à la ministre d'habiliter un établissement à
décerner le diplôme d'études cpllégiales.
Enfin, nous sommes favorables au regroupement des fonctions
consultatives au sein du Conseil supérieur de l'éducation. Selon
nous, une telle fusion est de nature à permettre le développement
d'une vision globale du système éducatif, ce qui nous fait
cruellement défaut par les temps qui courent.
Je voudrais maintenant vous faire part de nos inquiétudes et des
modifications que nous jugeons indispensables pour que le projet soit
acceptable, et plus particulièrement: la réflexion d'ensemble sur
notre système d'éducation, les exigences d'admission aux
études collégiales, la place du personnel dans cette
réforme, les ressources nécessaires pour la réaliser et
les finalités de l'enseignement collégial. (11 h 20)
Lors de la commission parlementaire de novembre, nous avions
insisté sur la nécessité d'une réflexion d'ensemble
sur le rôle et la mission de notre système d'éducation
à l'orée du XXIe siècle. Nous avons soutenu qu'une
réflexion limitée à l'enseignement collégial,
dissociée d'une analyse globale du système éducatif,
risquait de faire évoluer les différents ordres d'enseignement
sur des voies parallèles. La ministre a fait fi de nos
préoccupations, et cela n'a fait que braquer, à notre avis,
inutilement les milieux concernés. Conséquence: les modifications
qui sont proposées à la formation générale commune
des cégeps ne reçoivent ni l'aval des enseignantes et des
enseignants, ni l'aval des étudiantes et des étudiants. On
transforme le curriculum collégial, qui ne peut pourtant se concevoir
sans sa dimension de complémentarité avec la formation
secondaire, sans attendre les résultats de la démarche de
réaménagement du curriculum secondaire. On aborde en
parallèle les différents ordres d'enseignement sans se
préoccuper d'assurer la cohérence de la formation et du
cheminement des élèves.
Pour cette raison principalement, la CEQ ne peut donner son appui aux
modifications actuellement proposées à la formation
générale commune. C'est pourquoi nous réinsistons et
invitons le gouvernement à confier au Conseil supérieur de
l'éducation le mandat de produire un avis sur le curriculum secondaire,
collégial, universitaire pour assurer la cohérence de la
formation. Et nous demandons l'instauration d'un moratoire sur ces
modifications jusqu'à la conclusion des travaux du CSE. De toute
façon, le projet gouvernemental montre bien qu'on ne peut pas
procéder dès septembre prochain. Je pense qu'il y aurait tout
lieu de faire un véritable débat sur cette question, d'avoir une
vision cohérente, d'empêcher les voies parallèles, les
contradictions. On n'a sûrement pas les moyens de se payer une
réforme contradictoire.
Par ailleurs, la CEQ est d'accord pour définir plus nettement la
formation préuniversitaire collégiale comme la première
étape d'une démarche qui conduit à l'obtention du
baccalauréat, mais cela ne doit pas se faire au prix d'une rupture
marquée entre le secondaire et le collégial.
Au chapitre de l'éducation des adultes, nous déplorons
vivement le fait que le gouvernement n'ait retenu aucune des recommandations
pressantes que nous lui avons adressées pour apporter des correctifs aux
graves problèmes vécus dans ce secteur. On disait du secteur de
l'éducation des adultes que c'était le tendon d'Achille du
système collégial; il semble bien qu'il va le demeurer.
Les exigences d'admission, autre élément. Nous avons
déjà indiqué notre accord avec les objectifs
d'accessibilité et de réussite. Nous avons également fait
connaître notre accord avec la nécessité d'exigences
accrues pour l'obtention du diplôme d'études secondaires, mais la
hausse brutale des seuils d'admissibilité envisagée vient, selon
nous, contredire dans les faits les objectifs d'accessibilité. Nous
avons analysé avec le plus grand soin toute la question des normes
d'admission au collégial et le régime de sanction des
études secondaires. Les conclusions de notre analyse sont formelles:
cette hausse des exigences d'admission trop élevée, trop rapide,
accompagnée d'aucun plan, ni d'aucune mesure qui vise
l'amélioration de la réussite dans les matières
concernées conduira nécessairement à la
dévalorisation du diplôme d'études secondaires et à
l'exclusion de milliers de jeunes, sans pour autant résoudre les
problèmes vécus dans les cégeps.
L'expérience vécue dans les années quatre-vingt
avec le relèvement de la note de passage devrait inciter le gouvernement
à la prudence. Est-ce un choix judicieux de fermer les portes de
l'enseignement collégial à des milliers de jeunes? Le
gouvernement a-t-il vraiment mesuré les conséquences sociales
d'une telle décision? Nous avons la profonde conviction que
l'amélioration de la formation ne saurait être atteinte par le
seul rehaussement des normes de sanction des études secondaires et
d'admission aux études collégiales. Nous rejetons donc la
proposition gouvernementale de hausse des conditions d'admission et nous
recommandons qu'on procède à un relèvement, mais à
un relèvement progressif des exigences.
Le gouvernement semble reconnaître en principe, dans son projet,
la nécessité de faire de la réussite scolaire une
priorité. Il propose la mise en place de sessions d'accueil et
d'encadrement, mais où sont les moyens concrets? Comment le gouvernement
concilie-t-il son discours en faveur de la réussite avec les nouvelles
compressions budgétaires qui vont venir diminuer l'enveloppe qui sert
à financer les services aux étudiantes et aux étudiants,
l'aide à l'apprentissage et les services d'orientation?
Ce n'est pas, non plus, en décourageant les étudiants qui
connaissent des difficultés par l'imposition
d'une taxe à l'échec qu'on va parvenir à favoriser
l'accès et à accroître la réussite. Le moins que
l'on puisse dire, c'est que c'est une mesure antipédagogique sortie bien
plus des bureaux du Conseil du trésor que des bureaux de la ministre de
l'Éducation et de l'Enseignement supérieur. Cela créera
une brèche dans la gratuité scolaire et engendrera tout
simplement de nouveaux revenus. Il faut maintenir la gratuité non pas
par prudence, mais il faut la maintenir pour que le Québec donne un
signal clair à la jeunesse québécoise que le niveau de
scolarité collégial est aujourd'hui un minimum souhaitable pour
le plus grand nombre. Nous recommandons donc et nous demandons au gouvernement
de renoncer à la taxe à l'échec et d'instaurer la
gratuité complète des études collégiales.
Parmi les lacunes identifiées, il y en a une plus que toute autre
qui jette une ombre sur le projet gouvernemental, c'est l'absence de
considération pour le personnel enseignant, le personnel professionnel
et le personnel de soutien du réseau collégial, et le peu de
place accordée à leurs préoccupations et à leurs
revendications légitimes. Le développement, dans le projet
gouvernemental, qui concerne le personnel se trouve en page 40 de
l'énoncé de politique du gouvernement, c'est la page blanche. En
fait, quand il est question du personnel dans ce projet, c'est soit pour
l'évaluer, soit pour le contrôler, soit pour réduire sa
place et son pouvoir dans des instances consultatives et décisionnelles.
À l'heure ou tous s'entendent pour affirmer l'amélioration de la
qualité des services, qui doit passer par une meilleure gestion des
ressources humaines, la CEQ déplore une erreur de perspective aussi
fondamentale. Et je dois dire que les membres de la CEQ, qui avaient fait
preuve d'ouverture à l'automne dernier, ne méritaient pas de
connaître un tel traitement dans les intentions gouvernementales.
Le diagnostic établi récemment par le Conseil
supérieur de l'éducation sur la gestion en éducation est
sévère: le modèle bureaucratique actuel est inefficace. La
gestion de l'éducation, telle qu'exercée, ne peut assurer de
façon adéquate la mise en oeuvre de services adaptés aux
besoins nouveaux de formation, ni appuyer de façon efficace l'action
pédagogique des maîtres en tant qu'acteurs
privilégiés de cette formation. Il est inconcevable que l'on
veuille aujourd'hui réduire la participation du personnel au conseil
d'administration des institutions collégiales. On ne peut pas à
la fois réclamer un engagement profond du personnel et au même
moment tout mettre en oeuvre pour le cantonner à la
périphérie des centres de décision. C'est pourquoi nous
invitons le gouvernement à assurer le maintien de la proportion actuelle
de représentation du personnel dans les conseils d'administration afin
d'y garantir la représentation de toutes les catégories de
personnel. L'affirmation du rôle primordial des partenaires
oubliés que sont le personnel enseignant, le personnel professionnel et
le personnel de soutien constitue une exigence incontournable de tout projet de
changement réel à l'enseignement collégial. La
réforme ne pourra se faire si nous n'en sommes pas partie prenante. Le
changement se fera avec nous ou il ne se fera pas. C'est le message sans
équivoque que nos membres nous ont demandé de vous
transmettre.
Quelques mots maintenant sur les ressources nécessaires pour la
réussite du renouveau des cégeps. Je dois vous dire en toute
franchise que l'attitude d'ouverture au changement manifestée par notre
organisation et ses membres est mise en péril par certains choix
politiques et budgétaires du gouvernement. Des éléments
importants du projet, qui ont notre accord en principe, telles l'implantation
de l'approche programme, les sessions d'accueil et d'encadrement et
l'évaluation des programmes, obtiennent un appui mitigé quand on
voit l'insuffisance des moyens et des ressources. Combien de cégeps
seront en mesure de mener à bien les transformations proposées
dans le contexte budgétaire que nous connaissons? Ces transformations
sont exigeantes, elles nécessitent des outils adéquats, du temps,
des ressources. La CEQ ne peut que déplorer les compressions
budgétaires de près de 20 000 000 $ qui ont été
annoncées récemment. Ces compressions, qui s'ajoutent aux autres
compressions dans un réseau qui est en développement,
sèment un doute sérieux sur la volonté réelle du
gouvernement de donner aux collèges les moyens de relever les nouveaux
défis. Nous invitons le gouvernement à renoncer à
l'imposition de ces nouvelles compressions et à opter pour l'allocation
de moyens et de ressources nécessaires à la mise en oeuvre d'une
stratégie visant à accroître la réussite. (11 h
30)
Je voudrais attirer votre attention sur un dernier aspect qui constitue
à notre avis une lacune majeure au projet. Il s'agit de la vision
restrictive de la mission et de la finalité de l'enseignement
collégial. Les impératifs économiques sont à ce
point présents et dominants qu'ils supplantent les autres dimensions de
la formation collégiale. Tout se passe comme si, obnubilé par les
difficultés économiques du Québec, le gouvernement voulait
faire table rase de la vision humaniste de l'éducation, réduire
la mission de l'enseignement collégial à sa seule dimension
économique.
Nous invitons le gouvernement à lever toutes les
ambiguïtés en réaffirmant clairement les
responsabilités des cégeps québécois dans la
promotion des valeurs fondamentales, dans le développement de toutes les
potentialités de l'être humain et dans la promotion, de
l'égalité entre les femmes et les hommes.
Le problème, voyez-vous, ce n'est pas qu'on affirme la
nécessité de faire du Québec une société
à valeur ajoutée. Le problème, c'est de ne parler que de
cette seule dimension. Le Québec doit devenir une société
à valeur ajoutée, soit, mais aussi une société
à développement social ajouté, une société
à démocratie ajoutée, une société à
solidarité ajoutée.
En conclusion, je veux rappeler que la CEQ et ses membres ont
consacré beaucoup d'énergie à ce projet de réforme.
Ils souhaitent vivement des changements qui permettront d'améliorer la
qualité de la formation
dispensée aux jeunes et aux adultes qui fréquentent les
collèges. Mais cette réforme ne pourra être acceptable et
acceptée que dans la mesure où des modifications seront
apportées, et il y en a quatre: créer les conditions d'une
réflexion globale sur l'ensemble de notre système
d'éducation avant de modifier le programme de formation de base commune;
deuxièmement, renoncer à une hausse brutale des conditions
d'admission au cégep au profit d,'une augmentation graduelle des
exigences; troisièmement, associer toutes les catégories de
personnel à la démarche et, enfin, consentir aux collèges
les ressources nécessaires pour mener à bien ces transformations.
C'est à ce prix et à ce prix seulement que nous pourrons
envisager une réforme réussie et vraiment vivre le changement
collégial. Je vous remercie.
Le Président (M. Gobé): Très bien, Mme la
présidente. Mme la ministre, vous avez maintenant la parole pour une
période de 20 minutes.
Mme Robillard: Merci, M. le Président. Je salue les
membres de la Centrale de l'enseignement du Québec. J'ai lu avec
intérêt votre mémoire et j'aimerais qu'on profite vraiment
de ces 20 minutes pour aller un peu plus loin dans certaines de vos
réflexions. Si je comprends, Mme la présidente, vous êtes
toujours ouverte au changement?
Mme Pagé: Je l'ai affirmé en commençant, Mme
la ministre.
Mme Robillard: Bon. Alors, vous avez dit aussi que
l'élément que vous considériez le plus important pour
vous, c'était l'approche programme. Ça vous apparaissait
fondamental dans tout ce renouveau collégial. Vous avez dit que vous y
souscriviez; vous souscrivez aussi à la commission des études.
Pourriez-vous être plus explicite sur les demandes de la CEQ en regard de
cette instance de la commission des études, sur la façon dont
vous verriez qu'on réussisse ensemble, justement, ce mandat de la
commission des études, toujours en rapport avec l'approche
programme?
Mme Pagé: Je disais tout à l'heure que l'approche
programme, pour nous, c'est fondamental. Je dirais que c'est la
véritable réforme pédagogique dans le projet de renouveau
qui est soumis. Donc, nous souscrivons à l'approche de la ministre, qui
n'a pas défini les structures, les modalités pour uniformiser
l'implantation de l'approche programme. Il y a lieu de reconnaître
l'autonomie des cégeps là-dedans. Il y avait lieu aussi de ne pas
profiter de l'approche programme pour mettre à mort les
départements. À notre avis, les deux peuvent cohabiter:
l'approche programme et le maintien des structures départementales.
Donc, jusque-là, ça va bien.
Mais, en même temps, comme il n'y a pas de moyens, que c'est
exigeant d'implanter l'approche programme... Et la tournée que j'ai
faite dans les collèges du Québec me le confirme: dans les
endroits où on le fait, où on l'implante, c'est exigeant en
termes de moyens, de ressources humaines, de lieux de collaboration entre les
différents partenaires, les enseignants des différentes
disciplines, d'une part, à l'intérieur d'un même programme,
mais aussi pour la collaboration, le travail d'équipe avec les
professionnels, avec le personnel de soutien, puisqu'on a des techniciens dans
certains profils de formation. Donc, là, nous constatons qu'il y a un
manque de moyens, qui pourrait mener certains cégeps mieux nantis
à pouvoir operationaliser la mise en oeuvre de l'approche programme;
d'autres cégeps avec moins de moyens ne réussiraient pas à
faire cette réforme pédagogique d'envergure au sein de notre
réseau collégial. C'est le premier ordre de préoccupations
que nous avons.
Le deuxième ordre concerne la commission des études. Le
premier élément sur lequel je veux attirer votre attention, c'est
que cette commission des études ne prévoit pas la présence
des différentes catégories de personnel. On ne peut pas appeler
au travail d'équipe et mettre en place une nouvelle structure sans
assurer, au sein de cette nouvelle structure, la condition première au
travail d'équipe, c'est-à-dire la présence des
différents partenaires. Il faut la garantir.
Et je laisse maintenant François Beauregard, le rédacteur
du mémoire, compléter sur l'élément de la
commission des études.
Le Président (M. Gobé): M. Beauregard, vous avez la
parole.
M. Beauregard (François): En substance, on trouve que la
commission des études s'inscrit dans la logique du renouveau qui est
centré sur les programmes. Donc, si on centre les cégeps
davantage sur les programmes, il est normal qu'on crée une structure
où on va discuter de programmes qui vont être plus
cohérents et plus renforcés. Mais, au cours des débats, ce
que les membres nous ont demandé de vous demander comme question,
particulièrement le personnel de soutien, c'est: Est-ce qu'on a notre
place, nous, dans cette commission des études? Est-ce que les
professionnels ont leur place dans cette commission des études? Et, si
nous avons notre place, pourquoi ne pas le dire? D'ailleurs, je vous avoue
qu'il y avait un peu la même interrogation concernant le conseil
d'administration. Alors, les techniciens, par exemple, qui travaillent dans les
laboratoires, nous disent: Nous avons notre mot à dire dans l'approche
programme. L'approche programme, ce n'est pas seulement réunir des profs
de disciplines différentes, mais c'est aussi permettre aux
différentes catégories de personnel de travailler en
équipe. Et, si c'est ça, le concept de base de l'approche
programme, il me semble qu'il devrait y avoir une place pour le personnel de
soutien et le personnel professionnel.
Mme Robillard: Et que ce soit nettement identifié dans le
projet de loi.
M. Beauregard: Et que ce soit nettement identifié.
Mme Robillard: Parfait. Alors, je saisis bien. Mme Pagé,
vous nous avez parlé aussi de votre position en regard de la formation
technique. Vous étiez en accord avec la décentralisation de la
responsabilité au niveau des activités d'apprentissage, mais vous
avez une inquiétude en regard des modules, et j'aimerais bien la saisir.
Parce que, vous le savez, c'est très bien dans le renouveau
collégial, Mme Pagé... D'ailleurs, ça ne s'applique pas
à l'ensemble des programmes ça serait impossible
mais, dans certains programmes, on pourrait le faire. L'avantage qu'on y voit,
c'est que, premièrement, ça nous permettrait des passerelles
beaucoup plus harmonieuses entre les diplômes d'études
professionnelles du secondaire. Pour les jeunes qui veulent s'en aller au
niveau des techniques, on pourrait même reconnaître d'emblée
un module complet qu'on pense, par exemple, à secrétariat
et techniques de bureau donc, favoriser les passerelles avec certains
programmes. Deuxièmement, ça nous permettrait peut-être
d'avoir des troncs communs au niveau de certaines familles de programmes
techniques. Et, troisièmement, ça pourrait permettre,
peut-être, justement aux adultes qui sont déjà sur le
marché du travail, aux personnes déjà sur le marché
du travail, qui voudraient venir faire des modules et retourner sur le
marché du travail, ça pourrait aussi, donc, leur permettre un
accès plus souple. Mais, malgré tout ça, vous avez des
réserves. Alors, pourriez-vous me spécifier ça?
Mme Pagé: Oui. M. Beauregard va vous compléter
ça.
M. Beauregard: Bon, alors, vous avez remarqué que, dans le
mémoire, nous n'avons pas rejeté l'approche des modules. Nous
sommes en interrogation et en questionnement.
Mme Robillard: Ah! O.K.
M. Beauregard: II faut faire une nuance.
Mme Robillard: Des inquiétudes?
M. Beauregard: Oui, nous avons des inquiétudes et nous
avons des interrogations. Premièrement, nous voyons d'un très bon
oeil qu'on puisse créer une passerelle entre le secondaire et le
collégial, comme vous l'avez bien mentionné tantôt dans
l'exemple de secrétariat et techniques de gestion de bureau. On pense
que c'est une bonne façon de valoriser la formation professionnelle que
de contribuer à en faire une filière continue. Et on souhaite,
d'ailleurs, que les finissants du collégial au niveau du D.E.C. puissent
continuer d'avoir accès aux universités, comme ils le font dans
une assez forte proportion depuis un bon bout de temps.
Cette question-là des modules, je vous avouerai humblement que ce
n'est pas un débat que nous avons mûrement réfléchi.
Le Conseil des collèges avait abordé cette question-là
dans son document sur le renouveau. Et, récemment, au mois de mars, dans
un document que nous avons reçu en avril, le Conseil des collèges
n'a pas fait un avis, mais une première réflexion, si j'ai bien
compris le titre. Donc, c'est quelque chose d'un peu récent, qui n'a pas
été discuté largement avec nos membres; il faut situer
ça dans ce contexte-là.
Mais les principales craintes étaient les suivantes. D'une part,
on sait très bien qu'au niveau des filières courtes, A.E.C.,
C.E.C. et D.P.E.C, il y avait une confusion sur le marché du travail. On
l'a bien vu à la commission parlementaire, en novembre. Vous avez
vous-même interrogé les gens des chambres de commerce, le Conseil
du patronat, qui, finalement, vous ont dit que ce qu'ils reconnaissaient, c'est
le D.E.C. Et je me souviens même d'avoir lu un avis du Conseil des
collèges, qui s'intitulait «Et si on parlait des adultes» et
qui disait que, même dans les politiques d'embauché du
gouvernement, on ne favorisait pas ces filières courtes là, ce
qui était une contradiction puisque le gouvernement émettait des
diplômes et qu'il ne les reconnaissait pas lui-même.
Peut-être que les choses ont changé depuis le temps; ça
fait quelques années que cet avis-là a été fait.
Donc, il y a un problème de reconnaissance sur le marché du
travail. Et là le gouvernement nous dit: II y a de la confusion chez
l'employeur: D.P.E.C, A.E.C, C.E.C (11 h 40)
Mme Robillard: Donc, vous ne voulez pas de confusion au niveau de
la reconnaissance des modules. .
M. Beauregard: Première des choses... Mme Robillard:
C'est ça?
M. Beauregard: ...c'est que vous regroupez ça sous une
seule appellation pour réduire la confusion ce que j'ai bien
compris de votre document mais, d'un autre côté, vous
créez de nouveaux modules auxquels ne seront pas rattachés
vraiment les diplômes, mais...
Mme Robillard: non.
M. Beauregard: ...auxquels on va donner une certaine
reconnaissance.
Mme Robillard: O.K. Alors, si je comprends bien, vous êtes
en interrogation sur ça. On va avoir l'occasion d'en discuter.
M. Beauregard: Et le deuxième élément, c'est
qu'on craignait un peu que ce ne soit une incitation pour les jeunes à
sortir du marché du travail, avec leurs modules...
Mme Robillard: Mais ce n'est pas l'objectif.
M. Beauregard: ...et que ces modules-là n'aient pas de
reconnaissance sur le marché du travail, comme déjà les
A.E.C., qui sont implantés depuis plusieurs années, et les C.E.C.
ont de la difficulté à se faire reconnaître. , Mme
Robillard: Parfait.
M. Beauregard: Alors, c'est les deux ordres d'interrogations que
nous avons, Mme la ministre.
Mme Robillard: Parfait. On aura sûrement l'occasion d'en
discuter plus avant parce que, je vous le dis, ce n'est pas applicable dans
l'ensemble des programmes. Mais nous avons, de fait, commencé à
travailler sur certains des programmes où on voit des avantages
évidents, mais c'est un chantier de travail en cours
présentement.
Mme Pagé, le temps file. Il y a deux autres sujets que je veux
absolument aborder avec vous. D'abord, la formation
générale...
Mme Pagé: Oui.
Mme Robillard: D'abord, le contenu de la formation
générale, parce que la position de votre centrale, c'est de me
demander un moratoire sur la formation générale. Vous
n'êtes pas sans savoir que la CSN est venue me faire des recommandations
sur le contenu de la formation générale, que la
Fédération autonome du collégial est venue me faire des
recommandations très précises sur le contenu de la formation
générale, que même les professeurs d'éducation
physique, hier soir, se sont prononcés sur un contenu de formation
générale. Demain, je pense bien que les philosophes vont faire de
même. Je ne comprends pas la position de la Centrale de l'enseignement du
Québec de me demander un moratoire sur la formation
générale. Pourquoi ne vous êtes-vous pas positionnés
sur un contenu? Si vous n'étiez pas en accord avec celui-là,
pourquoi ne pas faire des recommandations sur un autre contenu? Et, soyons
clairs, Mme Pagé, il n'y aura pas de moratoire sur la formation
générale. Alors, j'ai besoin de vos suggestions.
Mme Pagé: Alors, s'il n'y a pas de moratoire sur la
réflexion autour de ce que devrait être la formation au
cégep, compte tenu de ce qu'elle doit être au secondaire et compte
tenu de ce qu'elle doit être au primaire je vais avoir l'air de
dire peut-être une insignifiance, mais c'est surtout une évidence
on ne prend pas les jeunes à 20 ans pour les faire finir
l'école à 6 ans. C'est le contraire. On les prend à 6 ans
et on les fait finir à 20 ans. Et là, on nous demande de faire
une réflexion éducative, pédagogique, en prenant ça
par la fin du processus éducatif, en prenant ça pour un ordre
d'enseignement seulement et en faisant un exercice qui ressemble plus à
un jeu de blocs qu'à une réflexion sur quelles sont les
compétences qu'on demande à un jeune d'avoir à la fin de
son parcours scolaire. Et, quand on pose la question et la réflexion
comme cela, elles ne débouchent et elles ne peuvent déboucher
qu'à venir dire: Mais, Mme la ministre, c'est le statu quo. Parce qu'on
n'a pas créé les conditions pour faire la réflexion comme
elle doit se faire, comme elle aurait dû se faire et comme elle devrait
se faire dans l'avenir.
Et, dans ce contexte-là, quand on regarde ça, bien,
là, vous nous demandez de procéder à un assaisonnement: un
petit peu plus de philosophie, un petit peu plus d'éducation physique,
un petit peu moins de langue seconde, un petit peu moins de français,
jouons un peu dans la carte des cours complémentaires. Nous pensons que,
ça, ce n'est pas un débat éducatif. C'est un travail
d'improvisation, et nous ne souscrirons pas à une approche comme
ça. Si la ministre ne veut pas se donner les moyens de faire une
réflexion en profondeur et porteuse d'un projet éducatif en
prenant les bonnes mesures pour le faire, eh bien, comme les arguments que nous
avons entendus ne nous ont pas convaincus que l'éducation physique ne
méritait pas sa place au collège, que nous n'avons pas vu dans
l'approche autour de la philosophie quelque chose qui est porteur d'avenir,
ça sera ce qui est là. On ne commencera pas à jouer avec
des blocs d'heures, des blocs d'unités pour on ne sait quelles
considérations pédagogiques et éducatives.
Mme Robillard: Mme Pagé, vous savez sûrement que la
réflexion sur le contenu de la formation générale ne date
même pas de l'automne dernier au niveau de la commission parlementaire;
c'est une réflexion qui durait depuis plusieurs mois, pour ne pas dire
au moins deux ans, étant donné aussi toute l'opération qui
avait été menée par le Conseil des collèges, qui
avait un objectif très clair, c'était de regarder le contenu de
la formation. Il y a eu une vaste opération de mobilisation partout dans
le réseau collégial, et de réflexion aussi sur des
contenus, de sorte que même le Conseil des collèges, dans son
avis, avait été capable de se positionner sur un nouveau contenu
de formation générale.
Et, même dans votre mémoire, à la page 15, vous
êtes capables d'établir très clairement des objectifs ou
des finalités de l'enseignement collégial en tant que tels, qui
s'adressent à tous nos jeunes ou aux adultes qui fréquentent les
collèges. Ces objectifs-là, je pense, rejoignent les objectifs
qui sont aussi dans le renouveau collégial, à la page 17. Si vous
êtes capables de vous entendre sur des objectifs, pourquoi n'avez-vous
pas été capables d'aller jusqu'au niveau des moyens?
Mme Pagé: Parce que les conditions pour le faire, les
conditions pour pouvoir initier cette réflexion-là de
façon globale n'ont pas été réunies. Je dirais
même que tout a bien mal commencé à partir du moment
où on a eu des fuites qui n'ont servi, pendant un temps, qu'à
rendre très insecure une bonne partie des enseignantes et des
enseignants au niveau collégial, à mettre en opposition des
enseignants de certaines disciplines, certains
voyant du temps acquis pour leur discipline, d'autres voyant du temps
réduit pour leur discipline; un climat d'insécurité, le
sentiment que ça procédait rapidement, presque dans
l'improvisation quant à la justification de certaines orientations, sans
pouvoir faire les jonctions avec une réflexion qui s'entreprend à
peine pour l'école secondaire, alors que beaucoup d'intervenants qu'on a
pu entendre dans le débat public ont pointé du doigt une
réalité de l'école secondaire quant à l'atteinte de
certains objectifs qu'on poursuit dans notre système
éducatif.
Et là, quand tout cela est mal engagé, quand les
conditions ne sont pas réunies, dans le laps de temps qu'on a, vous nous
demandez de faire un débat en profondeur pour nous donner un
système éducatif, pas de la fin du XXe siècle, du
début du XXIe siècle. Mme la ministre, on ne peut pas faire,
nous, ce que la ministre elle-même n'a pas réussi à faire.
Et ce que nous pensons, c'est que vous avez des organismes-conseils qui sont
là pour avoir une réflexion globale. Vous prévoyez
même donner le mandat à un seul organisme pour favoriser,
dites-vous, cette cohérence et cette vision globale. Bien, je pense
qu'à partir du moment où on veut agir sur la formation au
collège, qu'on annonce qu'on va commencer à
réfléchir sur l'école secondaire. Quand on aura fait
ça, on nous dira, bien, qu'il faut parler de l'école primaire.
Là, ce n'est pas un pain enveloppé, ça, le système
de formation, une tranche à la fois! Il faut regarder ça dans son
ensemble. Et, comme vous n'avez pas l'intention de procéder, de toute
façon, pour septembre prochain, nous pensons qu'il y aurait un espace
utile, l'année prochaine, pour faire la réflexion correctement en
mettant en oeuvre une démarche qui ne mettra pas en opposition des
ordres d'enseignement ou qui ne les mettra pas sur des voies parallèles.
(11 h 50)
Mme Robillard: Très souvent, les centrales syndicales
accusent le gouvernement de mettre des comités ou des commissions
parlementaires sur pied pour ne pas prendre de décisions, d'analyser,
d'analyser, d'analyser et de ne jamais passer à l'action. L'impression
qui se dégage, que je retiens, moi, Mme Pagé, c'est que c'est
votre centrale qui me demande de faire une réflexion globale sur tous
les ordres d'enseignement à partir de la prématernelle jusqu'au
doctorat. Vous me demandez un moratoire sur la formation générale
au niveau du cégep et, dans le fond, vous n'êtes pas d'accord pour
qu'on procède à des décisions qui devront s'actualiser sur
le terrain à court terme, mais vous voulez qu'on reporte encore la
réflexion. Des analyses ont été faites depuis fort
longtemps, tant au niveau collégial qu'au niveau secondaire ou à
l'ordre universitaire, des analyses d'experts. Et ce qui manque tout le temps,
c'est la décision pour passer à l'action. Et j'ai l'impression
que c'est encore ça que vous me demandez: reporter ça, analyser,
alors que le gouvernement a décidé d'agir. Alors, j'ai comme un
problème en regard, en tout cas, de la formation
générale.
Mme Pagé: Si vous en avez un, nous en avons un, Mme la
ministre. Ce n'est pas tout de décider, il faut prendre la bonne
décision.
Mme Robillard: Vous avez tout...
Mme Pagé: Et, à notre avis, ce n'est pas la bonne
que vous prenez.
Mme Robillard: Alors, c'est ça. Alors, si vous jugez que
ce n'est pas la bonne décision, quelle autre décision? Mais ne me
reportez pas aux calendes grecques...
Mme Pagé: Ah! Je ne vous reporte pas...
Mme Robillard: ...avec une réflexion globale sur le
système d'enseignement.
Je voulais parler des seuils d'admission, mais je suis certaine que mon
collègue de l'Opposition va le faire.
Le Président (M. Gobé): Mais il vous restera, pour
revenir, deux, trois minutes, Mme la ministre, par la suite.
Alors, M. le député de Lac-Saint-Jean, vous avez une
vingtaine de minutes, vous aussi.
M. Brassard: Bien, M. le Président. En fait, ce que la
ministre a bien de la misère à comprendre, c'est qu'elle a
commencé par le mauvais bout. C'est ça qu'elle se refuse à
accepter. Je comprends pourquoi, évidemment. C'est difficile de
reconnaître qu'on a amorcé une réflexion trop parcellaire
sur un seul ordre d'enseignement qui est en sandwich entre deux autres, puis
qu'on n'a pas réfléchi sur les deux autres, ni en aval ni en
amont. C'est dur à reconnaître. Vous devez le comprendre un peu,
Mme Pagé, aussi. Soyez comprehensive un petit peu.
Vous avez fait une tournée des cégeps. Moi, je reviens
là-dessus, parce que vous avez abordé dans votre mémoire
la question du climat dans le réseau des établissements. Et vous
êtes en mesure d'en parler, je pense, non seulement avec conviction, mais
avec connaissance, en connaissance de cause parce que vous avez fait une
tournée dans le réseau. Et j'aimerais ça que vous me
disiez quel est le climat qui prévaut actuellement,
particulièrement au sein des personnels, y compris, bien sûr, le
personnel enseignant. Il semble que ce* ne soit pas un climat très,
très sain, ni très propice à initier des changements
substantiels.
Mme Pagé: Quand nous avons commencé la
tournée à l'automne, au moment où la première
commission parlementaire se tenait, les membres de la CEQ qui participaient
à ces rencontres s'étaient vraiment placés dans une
démarche de changement. Le cégep a 25 ans. Il est temps
d'opérer des changements. Notre société a
évolué. Les cégeps doivent évoluer, entre autres
dans la formation à dispenser, entre autres dans
des pratiques pédagogiques, entre autres dans des jonctions avec
les autres ordres d'enseignement. Il y avait donc cet esprit d'ouverture. Je
dirais que les livres étaient grands ouverts.
Les choses ont commencé à se gâter un peu
après les fêtes quand les premières fuites ont
commencé à couler parce que, là, on n'avait pas
l'impression, entre autres au chapitre de la formation fondamentale, qu'on
serait capable de faire la réflexion correctement en faisant les liens
avec l'ensemble des disciplines, mais aussi avec le type de formation qui peut
se donner à d'autres ordres d'enseignement.
Quand les compressions budgétaires ont été
annoncées, à peu près au même moment où on
nous parlait de nouvelles mesures comme les sessions d'accueil et
d'encadrement, par exemple, et que ces compressions budgétaires se
traduisaient dans les cégeps par une annonce à l'effet que,
malgré la hausse de clientèle, l'année prochaine il n'y
aurait pas plus de conseillers en orientation, il n'y aurait pas plus d'aides
pédagogiques, les gens ont commencé à trouver qu'il y
avait des contradictions entre les compressions budgétaires et les
intentions annoncées au projet gouvernemental.
Quand on a rajouté à cela les appels à la
productivité, le gel salarial, la diminution de la place dans les
organismes de consultation, là, on a trouvé que la
productivité commençait à avoir un goût pas mal
amer. On avait l'impression qu'il fallait être deux fois moins
présents dans certains endroits, faire deux fois plus à cause des
compressions budgétaires, mais en se faisant dire en même temps
que ce n'était pas suffisant parce qu'il fallait envisager autre chose
au chapitre de nos conditions de travail. Ce qui fait que le vent d'espoir, le
goût de renouveau qui était présent de façon
très forte, très affirmée dans nos rangs à
l'automne est allé non pas en se renforçant, mais en
s'étiolant. Et je pense que les personnes qui en portent la
responsabilité, ce ne sont pas les centrales syndicales, c'est le
gouvernement. Quand on veut opérer un processus de changement, on
crée les conditions d'un processus de changement. Ça va ensemble,
ça. Mais on ne peut pas, en même temps, donner le coup de
bâton et faire rajouter la carotte en avant. Les gens ne sont pas des
ânes. Les ânes avancent comme ça, mais pas le monde. Et
c'est le sentiment qu'on a présentement.
M. Brassard: Vous réclamez, comme pas mal d'intervenants,
que la mission des cégeps soit enrichie elle est trop restrictive
dans l'énoncé de politique gouvernementale que l'on
définisse davantage les finalités de l'ordre d'enseignement
collégial. C'était réclamé par beaucoup de monde,
cet automne. Plusieurs faisaient référence à ce qu'on
appelle la formation fondamentale. Vous, dans votre mémoire, vous
référez plutôt aux valeurs fondamentales et au
développement intégral de la personne en formation dans le
réseau collégial, et vous considérez que la
définition qu'on donne de la mission du cégep est beaucoup trop
restrictive, beaucoup trop centrée sur la formation de la main-
d'oeuvre, finalement, ou sur les qualifications à obtenir pour
s'intégrer sur le marché du travail.
Pourtant, le Conseil des collèges abordait largement cette
question-là et demandait, justement, que la formation fondamentale
devienne l'axe intégrateur des programmes; on ne pouvait pas adopter
l'approche programme sans qu'on ait une claire définition de la mission
et aussi de la formation fondamentale comme telle. Puis il y avait une
définition très détaillée, je dirais, dans le
rapport du Conseil des collèges à ce sujet-là. Et puis je
constate que vous demandez un moratoire sur la formation
générale, pour les raisons qu'on sait, en demandant que le
Conseil supérieur de l'éducation se penche là-dessus en
considérant les trois ordres d'enseignement, donc l'ensemble du
système.
Si je vous comprends bien, c'est que la proposition gouvernementale en
matière de formation générale, vous n'y avez pas
trouvé ce n'est pas évident, en tout cas ces
valeurs fondamentales qui doivent faire partie de la mission des cégeps.
Vous n'y avez pas trouvé cette formation fondamentale
réclamée comme axe intégrateur des programmes ce
n'est pas évident et, partant de là, on a votre
proposition de moratoire. Est-ce que je vous comprends bien?
Mme Pagé: Si la réflexion sur la formation de base,
c'est une réflexion éducative, une réflexion sociale,
bien, elle doit se conduire comme cela. Quelles sont les justifications
éducatives, pédagogiques, sur l'ajout d'heures de
français, l'ajout d'heures de langue seconde, la diminution de
l'éducation physique, la diminution de la philosophie, sinon de nous
dire: Bien, il faudrait la rendre un petit peu plus polyvalente, on n'a pas
plus d'heures et, voilà, on a joué à peu près comme
ça? Mais, ça, ça ne donne pas du souffle à une
réforme. Ça ne donne pas du sens à une réforme.
Ça ne donne pas de la portée à une réforme.
Si on veut vraiment aborder cette question-là, il faut l'aborder
en créant les conditions qui permettent de l'aborder, pour faire le
débat correctement, sur le fond, en se demandant: Quelles sont les
compétences sociales que l'on demande à un jeune de
posséder quand il termine son collège? Et ça ne peut pas
être conçu, ça ne peut pas être élaboré
sans qu'on ne fasse précédemment ou en même temps la
réflexion sur ce qui a précédé le collège,
c'est-à-dire l'école secondaire. On nous demande de faire de
l'improvisation. L'éducation ne supporte pas d'improvisation. (12
heures)
La ministre nous dit: Tout le monde m'en a parlé depuis
longtemps. Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'il y a peut-être bien du
monde qui en a parlé, mais il n'y a pas grand monde qui est d'accord
avec ce qu'elle propose. Ça doit être parce qu'il y a un
problème. Les enseignantes et les enseignants ne sont pas d'accord, les
élèves ne sont pas d'accord et plusieurs leaders d'opinion ne
sont pas d'accord. Je lisais encore dans la presse ce matin que des gens qui
ont vécu dans le système scolaire pendant longtemps ne sont pas
d'accord non
plus avec certains éléments de cette réforme. Donc,
il doit bien y avoir là quelque chose qui mérite qu'on prenne le
temps de prendre les bonnes décisions. Les calendes grecques, là,
c'est long. J'enseignais l'histoire, moi; c'est long, les calendes grecques. Ce
n'est pas de ça qu'on parle aujourd'hui. De toute façon, il faut
faire une réflexion pour l'école secondaire, paraît-il,
l'année prochaine. Mais, alors, joignons les deux et entreprenons une
démarche cohérente. L'éducation ne supporte pas
l'incohérence et l'improvisation. Il me semble que ça tombe sous
le sens.
M. Brassard: Le meilleur exemple, c'est l'ajout de deux cours
d'anglais langue seconde au niveau collégial parce qu'on estime que les
élèves qui terminent leur secondaire n'ont pas une connaissance
ou une maîtrise suffisante de l'anglais langue seconde. Avant d'ajouter
deux cours, il faudrait peut-être voir à ce qu'au niveau
secondaire on s'entende sur le niveau de compétence à atteindre
en matière de langue seconde, par exemple.
Mme Pagé: Le gouvernement est très
préoccupé par la langue seconde par les temps qui courent.
M. Brassard: En effet.
Mme Pagé: Non seulement il faut s'assurer qu'il y en aura
au collège, mais il faudra favoriser l'immersion au primaire aussi.
Ça semble être la finalité éducative de l'heure, par
les temps qui courent.
M. Brassard: Oui. Dans votre mémoire et vous
êtes probablement un des seuls organismes qui se penche là-dessus
de façon plus détaillée vous abordez la question de
la gestion des collèges. Et vous n'êtes pas très tendres.
Vous citez, d'ailleurs, abondamment le dernier avis du Conseil supérieur
de l'éducation sur la gestion dans le système scolaire, qui
affirme que le mode de gestion qui prévaut, qui domine, c'est un mode de
gestion bureaucratique. Si je vous comprends bien, l'énoncé de
politique gouvernementale n'aura pas pour effet de modifier, d'aucune
façon, ou de changer ou de substituer au mode de gestion bureaucratique
un autre mode de gestion plus fondé sur la participation et la
concertation des principaux acteurs. Là-dessus, il n'y a pas beaucoup de
progrès.
Mme Pagé: Je pense que c'est un des oublis notables de
toute la réflexion que l'on fait présentement. Tout le monde est
interpellé. Les élèves sont interpellés sur leur
cheminement, sur leur réussite, sur leur échec. Les enseignantes
et les enseignants sont interpellés puisqu'en touchant toute la
formation de base on vient interpeller les enseignantes et les enseignants. On
interpelle les autres personnels sur certaines pratiques pédagogiques ou
éducatives, que ce soit par les sessions d'accueil, d'encadrement, bon,
ainsi de suite. Mais il y a un groupe qui n'a pas été
interpellé dans cette réflexion-là, c'est les
gestionnaires eux-mêmes. Et, dans beaucoup d'établissements, on a
oublié qu'on était des gestionnaires d'un établissement
éducatif, d'un établissement scolaire, d'un établissement
collégial, ce qui fait que la règle, c'est d'être un bon
gestionnaire, un bon administrateur, mais, au niveau de la gestion
éducative, la préoccupation n'est pas très
présente. On a mis sous la loupe beaucoup de facettes de notre
réseau collégial, mais cette facette-là a
complètement échappé à l'examen. Et nous pensons
que nous ne pouvons pas créer une nouvelle dynamique pour réussir
un renouveau dans les collèges sans questionner en même temps le
type de gestion dans les collèges et les rapports qui existent entre les
catégories de personnel, mais aussi entre les différentes
catégories de personnel et les gestionnaires eux-mêmes.
Le Conseil supérieur de l'éducation y est allé d'un
avis éclairant sur le mode de gestion qui existe dans le secteur public,
particulièrement dans le secteur de l'éducation. Et nous croyons
qu'il faut saisir la balle au bond, profiter du fait qu'on veut aller dans le
renouveau pour aller dans le renouveau aussi au chapitre de la gestion. Il y a
là une capacité de synergie et de dynamique renouvelée et
renouvelante qu'il faut saisir. Et c'est pour ça que nous questionnons
cet élément-là, que nous croyons que ça doit faire
partie des intentions gouvernementales de dire: Là aussi, il y a une
attention à apporter. Et les gestionnaires doivent se soumettre au
même processus d'autocritique et de changement dans les comportements
qu'on demande à toutes les autres catégories de personnel et aux
élèves eux-mêmes.
M. Brassard: Et ce n'est pas en réduisant la place des
personnels au sein des instances comme la commission des études ou le
conseil d'administration qu'on va favoriser la mise en place d'un nouveau mode
de gestion.
Mme Pagé: C'est le contraire. M. Brassard: C'est le
contraire.
Mme Pagé: C'est la réaffïrmation d'un ancien
mode de gestion...
M. Brassard: II y a recul, il y a régression.
Mme Pagé: ...où, le personnel, mon Dieu, si.on
pouvait faire sans! On est pris un peu pour faire avec, mais si on pouvait donc
faire sans, on aimerait ça. Mais ça ne peut pas marcher comme
ça. Ça peut de moins, en moins marcher comme ça et
ça sera de moins en moins comme ça. C'est comme un rendez-vous
obligé d'apprendre à faire du personnel, pas des partenaires
oubliés, des partenaires recherchés. Et, malheureusement, ce
n'est pas ça.
M. Brassard: Est-ce que vous ne trouvez pas curieux
également que non seulement on réduise la place des personnels au
sein de ces instances, mais que,
désormais, ce ne sont plus les organisations
représentatives de ces personnels qui auront la fonction de choisir et
de désigner leurs représentants au sein de ces instances? Vous
avez noté que, comme organisation syndicale, vous n'aurez plus aucun
rôle à jouer pour désigner les personnes
représentant les personnels, aussi bien au conseil d'administration
qu'à la commission des études. Gomment vous percevez cette
curieuse démarche? »
Mme Pagé: C'est la logique qui est présente dans
lés silences qui prévalent autour de la question du personnel.
Alors, non seulement on a diminué leur nombre, non seulement on ne
prévoit pas la présence des catégories, mais, de la
même façon, on banalise la façon dont ils seront
désignés. On essaie plus de transformer ça en foire
d'empoigne qu'en autre chose, alors que, si on voulait vraiment faire de ces
gens-là des partenaires pour que ça ne soit pas qu'une
réforme, mais que ce soit un changement réussi, on aurait choisi
une tout autre approche, une tout autre approche.
Il y a des choses qui sont très parlantes. On peut bien nous
dire, des fois: On a des problèmes économiques, vous comprenez,
et, parce qu'on a des problèmes économiques, parce qu'on a des
problèmes de finances publiques, ça explique certains sacrifices
qu'on vous demande. Mais, quand arrivent les moments où il n'y a pas de
sacrifices à demander, où il y a juste à affirmer la place
qu'on veut donner, la place qu'on reconnaît, la place qu'on sollicite et
qu'on ne trouve que des silences ou quelques murmures, bien, là, on est
bien obligé de comprendre.
M. Brassard: Merci.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. le
député de Lac-Saint-Jean. Le timing est parfait.
M. Brassard: Ah oui?
Le Président (M. Gobé): Mme la ministre, il vous
reste deux minutes et demie, trois minutes pour remercier, peut-être, ou
pour une autre petite question.
Mme Robillard: Ah, peut-être pour une question de
clarification. Vous avez une recommandation qui touche la sanction des
études...
Mme Pagé: Oui.
Mme Robillard: ...au niveau du secondaire, avec un rehaussement
progressif...
Mme Pagé: Oui.
Mme Robillard: ...des exigences. Vous identifiez des
matières, même. Je n'ai vu nulle part, à moins que
ça ne m'ait échappé, votre position sur les sciences
physiques de quatrième.
Mme Pagé: Oui, bien vous ne l'avez pas vue... Le
diplôme d'études secondaires, à notre avis, doit comporter
la réussite des cours de français et de langue seconde de
cinquième secondaire...
Mme Robillard: Oui.
Mme Pagé: ...il doit comporter la réussite des
mathématiques de quatrième...
Mme Robillard: De quatrième.
Mme Pagé: ...secondaire dans une première
étape, avec une évaluation au bout d'un certain temps. Et nous
n'avons pas mis comme condition d'obtention d'un D.E.S. les sciences physiques
parce que, si on ajoutait la réussite en sciences physiques en plus de
la réussite en mathématiques, ce serait encore faire le choix de
l'exclusion d'un certain nombre d'élèves.
Et je sais, Mme la ministre et je voudrais conclure
là-dessus, peut-être que vous avez indiqué
déjà dans un débat qu'en ne voulant pas rehausser les
exigences c'était faire part d'un manque de confiance en la
capacité des jeunes. Je veux vous dire que les enseignantes et les
enseignants de la CEQ, les professionnels de la CEQ font confiance aux jeunes.
Ils leur font confiance à un tel point qu'ils travaillent auprès
des jeunes à tous les jours de leur vie professionnelle, pendant de
très longues années de leur propre vie. Ils font confiance aux
jeunes. Nous savons qu'ils sont capables de faire plus et de faire mieux. Et,
en ce sens, nous sommes pour un rehaussement des exigences. (12 h 10)
Mais il n'y a pas lieu, et c'est antipédagogique, de
procéder à un rehaussement brutal des exigences. Ça ne
pourra que décourager et exclure. Et ce que nous voulons, c'est aller
vers la voie d'un rehaussement des exigences accompagné d'aide, de
soutien, de façon progressive. Et, comme cela, nous aurons fait le choix
de ce que d'aucuns appellent l'excellence, mais nous aurons fait en même
temps le choix de la réussite. Et une société ne peut pas
être excellente si elle ne conjugue pas l'excellence et la
réussite.
Le Président (M. Gobé): Merci, madame.
Mme Robillard: Aucun problème avec cette affirmation.
Le Président (M. Gobé): Sur ces bons mots, je vais
donc maintenant suspendre les travaux, la commission ayant accompli son mandat
pour la matinée. Et je ne donnerai pas d'heure de reprise, car nous
n'avons pas reçu les ordres de la Chambre. Mais probablement vers 15
heures. La commission est maintenant suspendue pour cette matinée.
(Suspension de la séance à 12 h 11)
(Reprise à 15 h 51)
Le Président (M. Gobé): La commission de
l'éducation va maintenant entreprendre ses travaux pour la
période de l'après-midi. Je rappellerai brièvement quel va
être notre ordre du jour. Tout d'abord, les représentants du
Bureau d'information et de communication de la coalition collégiale; par
la suite, les représentants de l'Association nationale des
étudiantes et étudiants du Québec et, pour terminer cet
après-midi, les représentants de l'Association des manufacturiers
du Québec. Alors, sans plus attendre, je demanderais aux
représentants du Bureau d'information et de communication de la
coalition collégiale de bien vouloir se présenter, et vous
commencerez votre présentation sans plus attendre.
Bureau d'information et de communication de la
coalition collégiale (BICCC)
M. Hamel (Stéphane): Merci, M. le Président. Merci
à Mme la ministre et au critique de l'Opposition. J'aimerais d'abord
vous présenter les membres qui sont à cette table.
Premièrement, à ma gauche, Toby Gélinas, qui est
attaché de presse de la coalition collégiale et président
du Québec Union of Anglophone Colleges, et Sébastien McQuade, qui
est porte-parole national de la coalition collégiale. À ma
droite, Francis Arkinson, qui est responsable du contenu à la coalition
collégiale; Frédéric Lapointe, qui est président
sortant de la Fédération étudiante collégiale du
Québec; et moi-même, Stéphane Hamel, qui suis coordonnateur
général de la coalition collégiale.
Le présent mémoire a pour mission de faire connaître
les réactions de l'ensemble des collégiens et collégiennes
face à la réforme de l'enseignement collégial
québécois proposée par le ministère de
l'Enseignement supérieur et de la Science. Comme il se doit, ces
réactions font suite à une profonde réflexion menée
globalement depuis maintenant quelques mois, celle-ci ayant été
déclenchée par une foule de mesures de renouveau qui semblent,
selon nous, mettre en péril des caractéristiques essentielles du
réseau collégial québécois. Par surcroît, ce
qui demeure déplorable et inacceptable, c'est que le ministère,
jusqu'à présent, n'a pas su tenir compte des décisions,
des attentes et des positions des étudiants, alors que nous sommes les
premiers intéressés par cette réforme. Ce mémoire
est donc une tentative supplémentaire de faire connaître aux
dirigeants de ce projet non seulement nos réactions, mais aussi nos
opinions et nos recommandations, et cela, dans un seul objectif: bonifier la
réforme.
Sans rejeter l'idée d'effectuer une réforme des
cégeps, les étudiants déplorent le fait que cette
démarche ne soit que partielle. Ainsi, la coalition collégiale
croit fermement que le succès d'une réforme doit passer par un
examen global du système collégial, du système
d'éducation. Agir en ce sens et réformer les autres niveaux
d'enseignement permettrait une plus grande harmonisation et l'atteinte de
l'excellence.
Il est, pour nous, inconcevable qu'un gouvernement prenne des
décisions d'ordre majeur en matière d'éducation par
rapport à une situation économique difficile et qui
s'échelonne sur un espace-temps limité. C'est pour cette raison
que, nous, étudiants, croyons que c'est de visions à long terme
que doit s'inspirer le remaniement de l'éducation. La priorité
est sans nul doute l'accessibilité à l'éducation
qui est, selon nous, le facteur clé d'une réussite sociale et
économique et la gratuité intégrale peut maintenir
et accroître celle-ci. Donc, dans une optique de renouveau et de
progrès, la coercition financière n'aurait pas sa place.
Du côté des changements à la formation
générale, nous considérons que la place offerte à
la formation générale doit se composer de disciplines
vouées au développement des connaissances fondamentales, voire
essentielles. En ce sens, il y a une place évidente à la
maîtrise renforcée de la langue maternelle. À ses
côtés, on retrouve la santé physique, ainsi que la rigueur
de la pensée et l'ouverture d'esprit adaptée au monde
d'aujourd'hui.
La loi 82 touche d'autant les étudiants: un conseil
d'administration avec plusieurs irritants, une commission d'études
inconnue, des pouvoirs habilitant à réglementer, les mandats des
principaux cadres améliorés et, enfin, une commission
d'évaluation qui pourrait avoir de grandes vertus, mais, ainsi
proposée, est pour nous très inquiétante.
Pour faire suite à notre présentation, j'inviterais
Francis Arkinson à vous parler du curriculum de la formation
générale.
Le Président (M. Gobé): Vous avez la parole, M.
Arkinson.
M. Arkinson (Francis): Merci. M. le Président, Mme la
ministre et membres de la commission, bonjour.
Alors, comme vous le savez probablement tous, la vitesse à
laquelle se développe notre société ne fait
qu'entraîner la spécialisation des étudiantes et des
étudiants. Malgré cela, nous croyons que ce type de formation ne
doit pas être favorisé au détriment d'une solide formation
générale. Et, comme l'a dit tout à l'heure mon
collègue, cette dernière doit se composer de disciplines
vouées au développement de connaissances fondamentales, voire
essentielles. En ce sens, il est évident que la maîtrise de la
langue maternelle est au premier plan et qu'à ses côtés on
retrouve le maintien de la sainte physique, ainsi que la rigueur de la
pensée et l'ouverture d'esprit. Par le fait même, nous sommes
convaincus que les trois disciplines en place présentement
répondent très bien aux objectifs que je viens de mentionner,
quoique certaines améliorations peuvent et doivent être
apportées à l'intérieur de ces cours.
En somme, ce qui demeure le plus important, c'est qu'on assure le
maintien du tronc commun tel qu'il est et qu'on effectue non pas un enlignement
vers les concentrations, mais plutôt un élargissement pour
atteindre un plus grand champ de connaissances générales
en matière de langue maternelle, d'éducation physique et, plus
spécifiquement, de philosophie, car nous savons à quel point
cette discipline est en mesure d'aborder les problématiques les plus
générales et les plus fondamentales de l'humanité de
manière systématique. Seule la philosophie permet la recherche
d'un sens à- toutes les activités et idéologies humaines
pour les faire coexister de façon à ce qu'un individu soit
capable de s'impliquer dans une société de plus en plus
polyvalente et diversifiée, où les changements
s'accélèrent.
Cela dit, nous considérons que, pour son bien et sa
réussite, la société québécoise doit
à nouveau dire oui à quatre cours de philosophie, car il est
essentiel qu'on donne aux étudiantes et aux étudiants les moyens
de mener une réflexion libre, cohérente et argumentée dans
notre société de plus en plus complexe. Bon, nous savons
très bien que certaines personnes ont pu remettre en question la place
de la philosophie au collégial, et nous croyons que cette remise en
question découle probablement de lacunes trop longtemps
négligées à l'intérieur des cours de philosophie.
Toutefois, les étudiantes et étudiants ainsi que les enseignantes
et enseignants affirment qu'ils sont prêts à relever le
défi de redresser les cours de philosophie dans les collèges,
cela parce qu'ils savent à quel point l'enseignement de cette discipline
ouvre l'esprit des étudiants. Elle leur permet d'acquérir une
certaine conscience sociale pour contribuer à l'avancement de leur
société et elle tente aussi de réduire au plus haut
degré les préjugés et l'ignorance.
Alors, si on dit oui à la philosophie, on doit bien comprendre
que son enseignement se compose d'apprentissages et de notions essentiels. La
négligence d'un de ceux-ci entraînerait inévitablement la
perte d'aspects indispensables propres à la philosophie. En ce sens,
nous sommes convaincus que le minimum temporel nécessaire pour
réaliser ces apprentissages est de quatre cours se suivant dans une
séquence logique qui permettrait une évolution constante de la
complexité, ainsi qu'un suivi plus cohérent des capacités
et des aptitudes philosophiques.
Et c'est justement ce à quoi votre proposition ne répond
pas vraiment, et c'est ce qui la rend tout à fait inacceptable. Il n'y a
aucune séquence logique de suivi. De plus, vous négligez un bon
nombre d'aspects indispensables à la formation globale des individus, ce
qui rend votre proposition incompatible à nos attentes. Alors, il nous
apparaît indispensable que vous révisiez vos orientations, cela en
faisant appel aux connaissances des enseignantes et enseignants, ainsi qu'en
consultant les étudiantes et étudiants, ce que vous n'avez pas
vraiment fait jusqu'à présent. Après tout, c'est nous qui
sommes les premiers intéressés par cette réforme.
Abordons maintenant la situation du français. Ça fait
maintenant plusieurs années que les intervenants du milieu de
l'éducation dénoncent la médiocrité du
français écrit et parlé d'un bon nombre
d'étudiantes et d'étudiants. Au cours des dernières
années, des centres d'aide en français ont vu le jour dans les
collèges, mais cette mesure ne semble pas tout à fait suffisante
pour enrayer les énormes carences dont souffrent les étudiantes
et étudiants. Sommairement, ceci explique pourquoi tant de
recommandations font état de mesures correctives en français.
Heureusement, le ministère de l'Enseignement supérieur et de la
Science a su tenir compte de ces recommandations, et nous sommes très
heureux de voir que vous en avez fait une priorité de votre
réforme. Mais, comme plusieurs le disent, il est impératif que de
sérieuses mesures correctives soient aussi déployées au
secondaire, car nous savons très bien que c'est à ce niveau que
se situe la véritable source du problème.
En ce qui a trait à l'apprentissage des langues modernes et de la
langue seconde, il est indéniable que la connaissance de celles-ci sera
un atout pour les futurs travailleurs et travailleuses. C'est pour cette raison
que la coalition collégiale s'est penchée sur le problème
et qu'elle apporte ses positions au gouvernement. Majoritairement, les membres
de la coalition collégiale ont convenu de l'importance des langues.
Cependant, les étudiants et étudiantes refusent
catégoriquement l'idée d'implanter des cours d'anglais
obligatoires. Nous savons très bien, avec l'expérience du
secondaire, qu'en anglais un étudiant obligé est très
souvent un étudiant désintéressé. D'autre part,
plusieurs affirment que ces cours obligatoires prendraient
inévitablement une forme secondarisée, et nous connaissons quand
même assez bien l'inefficacité de ces cours. (16 heures)
Tout compte fait, nous croyons fortement que la meilleure façon
de susciter de l'intérêt chez les étudiants et
étudiantes en matière de langues modernes et de langue seconde,
c'est en les sensibilisant sur l'importance de la connaissance de celles-ci,
tout en leur laissant le choix. En ce sens, nous considérons que les
cours complémentaires demeurent la voie idéale pour
l'apprentissage de la langue seconde et de langues modernes. Comme nous en
avons fait mention, nous sommes convaincus que l'efficacité de
l'éducation dans ce domaine dépend, à toutes fins
pratiques, de la motivation liée à la liberté de choix
qu'on accorderait aux étudiantes et aux étudiants. D'ailleurs,
nous sommes les mieux placés pour affirmer qu'un étudiant
conscient de ses besoins en rapport avec son orientation et qui fait le choix
de s'inscrire à un cours de langues modernes ou de langue seconde
accordera une attention particulière à celui-ci et il sera
beaucoup plus porté à progresser, contrairement à un
étudiant à qui on impose le cours.
Conséquemment, la coalition collégiale recommande qu'au
lieu d'obliger les étudiantes et étudiants le ministère de
l'Enseignement supérieur et de la Science s'engage plutôt à
sensibiliser les jeunes à faire l'apprentissage d'une langue moderne ou
d'une langue seconde, cela dans le but de répondre aux besoins de ceux
et celles qui considèrent que ces apprentissages sont essentiels
à leur formation personnelle et professionnelle. Alors, nous
recommandons que les cours de langue seconde et les cours de langues modernes
soient seulement offerts en cours complémentaires.
De plus, Mme la ministre, vous venez dire, lors de la période de
questions à l'Assemblée nationale, que vous entendez
améliorer l'apprentissage de la langue seconde au primaire et au
secondaire. Alors, pourquoi venir en mettre en plus au collégial, alors
que le travail devra être fait au secondaire et au primaire? Mais ce qui
demeure le plus aberrant, Mme la ministre, c'est que vous
«priorisez» des objectifs de bilinguisme sur des objectifs de
santé en retranchant des cours d'éducation physique pour
introduire des cours de langue seconde obligatoire. Mme la ministre, posez-vous
la question: Qu'est-ce qui est le plus essentiel dans la formation d'un
individu? Sa santé physique et mentale ou son bilinguisme? Franchement,
Mme la ministre, posez-vous la question: Qu'est-ce qui est le plus essentiel?
Merci.
M. Hamel (Stéphane): Pour faire suite à la
présentation, nous allons entrer dans la loi 82. Principale pièce
législative du renouveau proposé, le projet de loi modifiant la
Loi sur les collèges d'enseignement général et
professionnel et d'autres dispositions législatives fut attentivement
étudié en fonction des orientations gouvernementales et des
positions prises par les étudiants face à la réforme
attendue de l'enseignement collégial. Ce projet nous touche
essentiellement dans la mission des collèges, dans le conseil
d'administration, dans la commission des études dont nous avons
discuté hier, dans les pouvoirs habilitant le gouvernement à
réglementer et, enfin, dans les mandats des principaux cadres et autres
dispositions administratives.
Dans la mission des collèges, plusieurs regroupements ont
réclamé un ajustement de cette mission en fonction de cette
réalité qui s'est imposée au cours des années: les
collèges se sont incrustés dans le milieu et dispensent de plus
en plus de services à la communauté. Plus
particulièrement, les collèges eux-mêmes tenaient à
être reconnus dans leur action, à laquelle est en grande partie
reliée la question du financement de ces activités. Et la
ministre a répondu à ces attentes.
Les étudiants ont toujours opté pour une grande
implication des collèges dans leur milieu, particulièrement le
milieu communautaire, pour peu que cet élargissement ne porte pas
atteinte au haut niveau de services dont bénéficient les
étudiants. En effet, les étudiants et leurs associations
étudiantes travaillent depuis longtemps à l'amélioration
de leur propre vie communautaire, d'abord, et même à
l'amélioration du milieu environnant par de nombreux comités de
toutes sortes.
Conséquemment, les étudiants sont favorables à
cette reconnaissance de l'action des collèges, avec quelques
réserves, toutefois. Puisque les crédits semblent ne pas suivre
cet élargissement des pouvoirs des institutions, il apparaît
évident que certains devront faire les frais des nouvelles vocations
institutionnelles, particulièrement les étudiants. De même,
la reconnaissance du pouvoir de mettre à la disposition de la
communauté les installations pour des fins scientifiques ou sportives
peut poser des problèmes de disponibilité de ces mêmes
installations pour les étudiants; on pourrait prendre exemple sur la
disponibilité des gymnases qui sont déjà
surexploités.
Dans le conseil d'administration, attendu l'importance de premier ordre
de cette instance, il est normal que la composition, le processus de nomination
et le rôle de ses membres aient porté à débat.
Plusieurs questions se sont posées au cours des dernières
années, tels les conflits d'intérêts provenant du
traitement des conditions de travail, du manque de compétence des gens
appelés au rôle d'administrateur, de l'absence chronique de
certaines catégories de membres, de l'équilibre interne-externe,
etc.
Suite aux changements proposés, seuls les étudiants ne
sont pas touchés par la diminution des sièges de l'interne. Leur
présence est même bonifiée par le remplacement de la notion
d'étudiant adulte par étudiant préuniversitaire technique.
On se rappellera que l'étudiant adulte ne siégeait pratiquement
jamais au conseil d'administration. De plus, le remplacement de deux parents
par deux diplômés du collège, qui sont potentiellement
parents eux-mêmes, est très intelligent puisque ceux-ci
comprennent la dynamique interne de l'institution. De plus, ils ont
testé la formation reçue dans le milieu universitaire comme dans
le milieu du travail. Si les étudiants sont satisfaits des modifications
à ce niveau, ils s'interrogent cependant sur le processus devant mener
à la nomination de ces anciens étudiants.
Si la disparition du directeur des services aux étudiants et le
confinement du personnel du collège à seulement trois
sièges sont regrettés par les étudiants, la place
potentiellement indue donnée aux entreprises est, selon nous,
très irritante. Deux sièges seraient directement
réservés par la ministre pour les entreprises oeuvrant dans un
domaine correspondant aux programmes techniques offerts par le collège
moyennant peut-être une contribution à la caisse
électorale du parti au pouvoir? et deux seraient nommés
après une consultation des groupes socio-économiques
régionaux, soit d'autres entreprises.
Si la pertinence d'inclure le milieu économique visé par
les programmes techniques ne saurait être remise en cause, la cooptation
directe du conseil d'administration lui-même serait
préférable à un processus discutable. De plus, le titre
«socio-économique» devrait être remplacé par
«sociocommunautaire», de façon à s'assurer que les
administrateurs désignés ne proviennent pas de corporations
à but lucratif. En effet, ,les gens provenant des milieux culturels,
scientifiques, sportifs ou populaires ont une contribution intéressante
à apporter à la conduite des affaires d'un cégep,
particulièrement lorsqu'il s'agit de domaines non industriels comme la
formation culturelle et fondamentale.
Enfin, les mandats des principaux cadres. Essentiellement, les
associations étudiantes collégiales du Québec manifestent
leur accord avec la limite imposée à la durée du mandat du
directeur général ou du directeur des études du
collège. Sans porter vraiment atteinte à l'avenir professionnel
des individus concernés, puisque probablement, le jeu de la chaise
musicale s'effectuera,
on abaissera ainsi le risque de stagnation, le risque de conflit
pérennisé avec le personnel et enfin les risques de
contrôle sur toute l'institution.
Maintenant, passons à la session d'intégration.
M. McQuade (Sébastien): Pour nous, cette session est la
bienvenue, mais sera-t-elle au rendez-vous? Une telle session d'encadrement et
d'orientation s'avère spuvent nécessaire pour certains
étudiants. Mais pourront-ils tous en bénéficier dès
septembre, peu importe la situation géographique? Nous en doutons
fortement. De plus, qu'arrive-t-il au soutien et à l'encadrement
à la suite de cette session? Cela semble des plus nébuleux. Les
étudiants ne se retrouvent pas uniquement en difficulté à
la première session et, conséquemment, si le gouvernement vise
une plus grande responsabilisation, cela doit logiquement mener à une
plus grande demande et utilisation des services de soutien et
d'encadrement.
Dans cette optique, nous ne pouvons que constater l'incohérence
des politiques du ministère qui tendent à réduire les
ressources affectées à ces programmes de plus en plus en demande.
Selon le propre aveu de membres de la direction de mon cégep, ce manque
de res-, sources se traduit par le refus d'étudiants aux services d'aide
à l'apprentissage dû à l'engorgement directement lié
au manque de financement. Conséquemment, les 44 associations
étudiantes de la coalition collégiale réclament un
financement accru des activités d'encadrement des étudiants de la
part du gouvernement, de même qu'une vigilance accrue face aux
dépenses liées à l'encadrement du personnel; et cela
s'explique par la forte augmentation du personnel cadre versus les autres
catégories d'employés, apparente depuis plusieurs
années.
Le gouvernement veut introduire de petites mesures de promotion: le
petit bottin des pratiques institutionnelles réussies et la promotion
des centres d'aide. Il dit vouloir maintenir le financement des centres, mais
il coupe de 13 700 000 $ dans ces mêmes services. Au sujet des objectifs
de qualité que le ministère veut implanter, il ne les respecte
même pas. Récemment, M. le Président, le cégep du
Vieux-Montréal a subi une coupure de 1 900 000 $ pour avoir misé
sur la qualité en évitant un engorgement des services offerts
à sa population, en n'augmentant pas le nombre d'étudiants.
Où est donc la logique?
En conclusion, le désinvestissement majeur du gouvernement en
matière d'enseignement supérieur depuis les dernières
années nous donne le droit de douter du désir et de la
volonté gouvernementale d'assurer l'avenir des jeunes futurs
payeurs de taxes, je tiens à le souligner et, par le fait
même, l'avenir du Québec.
M. Arkinson: Et enfin, le ticket modérateur. Le
gouvernement affirme que la gratuité scolaire au collégial est
maintenue. La notion de gratuité, particulièrement depuis
quelques années, doit être relativisée, attendu les
coûts parallèles supportés par l'étudiant, les frais
spéciaux annuels de l'ordre de 50 $ à 100 $ et l'achat de volumes
et d'équipement représentant facilement 200 $ à 500 $ par
année. Si ce ticket justifie le gouvernement de sabrer dans les
ressources disponibles pour l'étudiant qui en a besoin, la
réaction de celui-ci ne peut être que le refus du système,
soit le décrochage. Qu'est-ce qui va en ressortir? (16 h 10)
D'après nous, cette mesure est loin de nous défaire des
étudiants abuseurs et, de plus, n'aide pas les étudiants en
difficulté. Elle ne fera que donner l'impression à l'individu
qu'il a le droit d'étudier et de profiter du système comme bon
lui semble puisqu'il paie ce qui lui revient. D'autre part, cette taxe, si on
peut l'appeler ainsi, aura sûrement pour effet de responsabiliser les
parents sur la nouvelle façon que trouve toujours le gouvernement
d'aller chercher de l'argent dans leurs poches. Mais, comme tout le monde le
sait ici, ça ne doit pas vous inquiéter puisque les
élections auront sûrement lieu avant le premier paiement des frais
de scolarité.
Le Président (M. Gobé): Le temps est maintenant
écoulé. Si vous voulez conclure, s'il vous plaît.
M. Arkinson: Je suis à la fin. J'ai justement trois
questions. Vous affirmez bien vouloir étudier sérieusement notre
proposition. Pourtant, les médias ont rapporté hier que vous
l'avez rejetée du revers de la main. Qu'en est-il aujourd'hui? Vous
vouliez encadrer les étudiants; pourtant, vous déresponsabilisez
le système. Pourquoi? Vous vouliez éliminer les abuseurs; en
fait, vous éliminez les pauvres en difficulté scolaire. Pourquoi?
C'est les questions qu'on se pose.
Et je voudrais juste, avant de terminer, laisser la parole, pour deux
petites minutes, au cégep anglophone qui a des demandes
spécifiques à vous faire.
Le Président (M. Gobé): Alors, rapidement, parce
que le temps est maintenant dépassé.
M. Gélinas (Toby): Bonjour. L'Association des
collèges anglophones du Québec représente cinq
associations étudiantes, nommément celles de John Abbot, Dawson,
Vanier, Marianopolis et Champlain, Saint-Lambert.
À cause des particularités du curriculum du système
collégial anglophone, nous sommes arrivés à des positions
spécifiques à notre situation. Selon le modèle de la
proposition de la ministre, nous avons divisé les cours en trois blocs.
Le premier de ceux-ci concerne la promotion de la liberté de choix, ce
que nous avons déjà le privilège d'avoir. Dans ce bloc,
nous incluons trois cours de langue d'enseignement, deux cours
d'«humanities», un cours de langue seconde nommément
le français et trois cours d'éducation physique. La
pondération demeure la même pour ces cours. Comme aujourd'hui, les
élèves auraient à choisir les cours de ce bloc parmi une
gamme élaborée de cours avec un contenu déterminé
localement. En ce qui concerne les cours d'éducation physique, les
élèves auraient à choisir trois cours dans au
moins deux des quatre catégories. Donc, nous retenons et
préservons l'esprit de notre système qui nous est si cher.
Le deuxième bloc que nous proposons est voué
entièrement à l'accomplissement des trois objectifs suivants:
premièrement, la maîtrise de la langue d'enseignement et de la
langue seconde; deuxièmement, l'augmentation du niveau de
compétence linguistique relatif au programme spécifique dans
lequel les étudiants et étudiantes sont inscrits; et,
troisièmement, l'harmonisation du passage entre le secondaire et le
cégep. Les cours, dans ce bloc, auraient des objectifs, méthodes
et contenus déterminés par la ministre. Ce bloc inclurait un
quatrième cours de langue d'enseignement, un troisième cours
d'«humanities» et un deuxième cours de langue seconde. De
plus, il y aurait un quatrième cours d'éducation physique, comme
celui proposé par la ministre: santé et hygiène de vie.
Les quatre cours que je viens de nommer seraient pris par les étudiants
au cours de leur premier trimestre. Là encore, la pondération
demeurerait la même.
Le troisième bloc dans notre curriculum proposé
correspondrait à celui déposé par la ministre dans son
projet de loi. En établissant un curriculum comme celui que je viens de
décrire, nous atteignons les objectifs de la ministre, tout en
préservant le haut niveau de liberté que nous jugeons si
important.
Mr President, Mrs Robillard and members of the parliamentary commission,
more than a year after the official announcement of the cegep reform, a final
decision on the fate of the cegep system seems closer at hand. We look forward
to a renewal of our educational system but fear that change might bring
undesirable results.
It is important to remember that 25 years ago, one of the main focuses
of the cegep system was to serve the students. Since then, there have been many
changes to Quebec's social, political and economic life. In order for the cegep
system to fulfill its initial goals, it should attempt to keep up with these
changes and to meet the new needs that colleges face. The «Bureau
d'information et de communication de la coalition collégiale»
feels that the best way to discover these new needs and to find out what
changes must be made is to seek out the opinions of the people who are the
primary participants in college life, and that, Mrs Robillard, is the students.
Thank you.
Le Président (M. Gobé): Merci beaucoup. C'est
très bien et je vous remercie d'avoir été assez bref; le
temps était dépassé, mais vous n'en avez pas
abusé.
Mme la ministre, vous avez maintenant la parole pour des questions
à nos invités.
Mme Robillard: Merci, M. le Président. Je voudrais saluer
le Bureau d'information et de communication de la coalition collégiale.
M. Hamel, M. le coor-donnateur de ce Bureau, nous n'avions pas eu le plaisir de
vous entendre l'automne dernier. Je pense que le
BICCC n'existait pas à ce moment-là, à ma
connaissance. J'aimerais ça que vous nous fassiez part de votre
«membership». Combien de collèges au Québec
représentez-vous et cela veut dire combien d'étudiants, pour
qu'on ait une idée de votre Bureau?
M. Hamel (Stéphane): Exactement, nous avons 44
associations étudiantes membres du BICCC, ce qui représente plus
de 100 000 étudiants.
Mme Robillard: 44. Autant dans les collèges privés
que publics?
M. Hamel (Stéphane): Publics et anglophones. Une
voix: Et privés.
M. Hamel (Stéphane): Et privés, bien sûr.
Mme Robillard: Et privés?
M. Hamel (Stéphane): Oui, oui, oui, privés
aussi.
Mme Robillard: Privés et publics, 44; donc, 100 000
étudiants, vous dites.
M. Hamel (Stéphane): Environ.
Mme Robillard: Environ. Bon, intéressant. Alors, je pense
que c'est important qu'on le réalise, c'est le groupe que vous
représentez. Et je vois aussi qu'au sein de votre Bureau, donc, par M.
Gélinas, il y a un regroupement des collèges anglophones. C'est
ce que je comprends.
M. Hamel (Stéphane): Exactement.
Mme Robillard: Et qui a des prises de position peut-être
pas complètement différentes, mais plus adaptées à
la réalité des collèges anglophones.
M. Hamel (Stéphane): Exactement. Comme vous le savez, les
cultures des collèges anglophones et francophones sont très
différentes. Les demandes spécifiques sont faites en fonction de
leur culture et de leur système, de leur structure et de leurs besoins,
bien sûr. ,
Mme Robillard: Bon. Alors, si vous me le permettez, M. Hamel,
pour les membres de la commission, c'est peut-être la seule occasion que
nous avons de discuter en direct avec des représentants des
collèges anglophones; tous les autres groupes qui sont venus ici ne nous
ont pas présenté un point de vue particulier. Alors, j'adresserai
peut-être mes questions en premier à M. Gélinas pour bien
comprendre le scénario que vous présentez au niveau de la
formation générale, parce que je pense que c'est la partie
importante de votre mémoire, au regroupement des étudiants des
collèges anglophones.
D'abord, pourriez-vous m'expliquer, M. Gélinas, le fait que, pour
beaucoup de cours dont tous les cours du premier bloc, vous suggérez que
les objectifs soient fixés par le gouvernement, mais que non seulement
au niveau des contenus, mais des méthodes aussi ça soit
décidé localement? Vous savez que, dans le projet de renouveau,
il était question d'objectifs standard d'activités
d'apprentissage. Et vous dites: On veut reconduire ce qu'on vit dans nos
collèges anglophones. Alors, pourriez-vous m'éclairez sur ce
sujet-là? Pourquoi faites-vous ce choix?
M. Gélinas: Dans le système anglophone
présentement, nous avons le choix entre plusieurs cours. C'est comme
ça pour nos cours de langue d'enseignement, nos cours d'anglais et pour
nos cours de philosophie, nommément «humanities». Nous avons
une sélection, peut-être, de 120 cours, et les étudiants
peuvent prendre 4 de ces 120 cours, très différents et
très distincts, qui explorent une grande variété de
sujets. Alors, le système anglophone et les étudiants du
système anglophone sentent que cette liberté de choix a une
importance et joue un grand rôle dans le développement des
étudiants anglophones. C'est un privilège qu'on a et c'est une
des revendications principales qu'on a de ne pas perdre le beau système
qu'on a aujourd'hui. Alors, c'est pour ça que je suis ici aujourd'hui,
en train de vous proposer un système qui est un compromis entre vos
objectifs et ce que nous voulons de notre système.
Mme Robillard: Et vous nous suggérez, par ailleurs, M.
Gélinas, dans le curriculum que vous nous proposez, d'avoir quand
même deux cours de langue seconde. Pourriez-vous nous expliquer les
raisons?
M. Gélinas: Nos étudiants réalisent qu'ils
sont dans une province dont la majorité des personnes parle le
français. C'est important pour eux d'avoir une connaissance forte et
comprehensive de la langue française et, donc, ils nous ont
demandé de faire la demande pour deux cours de français.
Mme Robillard: Maintenant, au niveau de la langue d'enseignement
donc, de l'anglais vous dites que vous ne changez pas la
pondération des cours, si je vous ai bien compris, ce qui veut dire
qu'on n'augmente pas le nombre d'heures de travaux pratiques pour les cours
d'anglais. Pourquoi?
M. Gélinas: C'est vrai. On ne croit pas qu'on pourrait
augmenter la qualité de la langue d'enseignement simplement en
augmentant le nombre d'heures d'un cours d'anglais. Il faut viser les objectifs
pour atteindre les buts qu'on a, notamment l'amélioration de la langue
et la qualité de la grammaire et de la langue parlée. Et, donc,
en visant les objectifs de 25 % de notre curriculum, on pourrait atteindre
votre objectif qui est d'améliorer la langue des étudiants. C'est
pour ça. (16 h 20)
Mme Robillard: Et vous faites un autre choix surprenant ou, en
tout cas, différent de celui des professeurs d'«humanities».
Vous faites un choix, dans le curriculum, d'avoir trois cours
d'«humanities» au lieu de quatre comme c'est le cas à
l'heure actuelle.
M. Gélinas: Mais il faut mettre les deux cours de
français quelque part. Alors, on a décidé qu'on pourrait
sacrifier peut-être un cours complémentaire et un cours
d'«humanities» pour les remplacer par deux cours de
français. Alors, on croit vraiment que c'est une balance qui est
raisonnable. On a quand même trois complémentaires et trois
«humanities», et on croit que c'est assez.
Mme Robillard: Dans l'autre partie de votre mémoire
bon, je comprends bien que vous êtes contre la mesure financière
pour les étudiants vous nous parlez aussi des seuils d'admission
au cégep. Pourriez-vous m'expliciter? C'est à la page 7 de votre
annexe; ce que j'y lis, c'est que vous êtes en accord avec le
rehaussement des seuils d'admission au cégep, mais que vous aimeriez
voir des mesures au niveau du secondaire pour aider les étudiants.
Est-ce que c'est le cas? Pourriez-vous nous faire part de votre
réflexion, si vous avez discuté de ce sujet-là en
détail?
M. Gélinas: Notre position est la même que celle de
nos collègues des cégeps francophones. On sent que ça
serait acceptable de rehausser les critères d'admission pour entrer dans
le cégep, en autant que les étudiants puissent bien travailler
pour atteindre ces objectifs. Et la seule façon dont ils peuvent avoir
les outils avec lesquels ils peuvent rencontrer des objectifs plus hauts,
ça serait d'avoir une restructuration du système secondaire dans
laquelle le curriculum serait plus compréhensif face à ces
buts.
Mme Robillard: Parfait. Merci beaucoup, M. Gélinas. M.
Hamel, concernant la formation générale, la position du BICCC,
vous avez une insistance particulière sur l'enseignement du
français, dans votre mémoire. Vous allez jusqu'à dire
qu'il faudrait avoir un examen institutionnel à l'entrée au
collège. Est-ce exact? Et, si oui, à ce moment-là, que
faisons-nous, là? Dans la réalité concrète, vous
savez très bien qu'un étudiant de secondaire V, à la fin
de son année de secondaire V, a un examen de français. Et
là, vous dites: Dès qu'il entre au collège, au mois
d'août suivant, un autre examen pour mesurer son degré de
compétence. Est-ce le cas? Comment vous faites ça,
concrètement, là, et comment vous reliez l'examen de
français de fin de secondaire V avec le nouveau à
l'entrée?
M. Hamel (Stéphane): Je vais laisser répondre la
personne qui a rédigé, justement, cette partie-là.
M. Arkinson: Bon, comme j'en ai fait mention, la première
des choses, c'est que, justement, dans la réalité, le
français au secondaire et la qualité de
l'enseignement du français au secondaire ne sont pas suffisants.
Et puis, étant donné qu'on parle seulement de réforme du
collégial et non de réforme globale du système
d'éducation, on doit prendre des mesures en conséquence. Alors,
nous considérons, justement pour faire des corrections au début
même du collégial, pour ne pas que l'étudiant ait des
problèmes tout le long de son cheminement, qu'on lui fasse passer un
autre examen qui serait peut-être un peu plus d'ordre collégial.
Et, s'il échoue, qu'il ait un cours crédité de
perfectionnement à la première session pour éviter les
embûches qui pourraient survenir à la suite de son
cheminement.
M. Hamel (Stéphane): Je pourrais compléter en
disant que, justement, au cégep de Sorel-Tracy en ce moment, on fait ce
genre de pratique là. On dépiste tout de suite les
étudiants à risques dans la langue maternelle. Alors, dans ce
sens-là, nous intervenons tout de suite. Et c'est dans ce
cadre-là que nous allons aider l'étudiant, et non dès que
l'étudiant a échoué son premier cours de français.
Nous le déterminons tout de suite, par un examen institutionnel qui sera
accepté par le ministère, un examen qui aura pour but, comme je
l'ai dit, de dépister les étudiants, tout simplement.
M. McQuade: J'aimerais aussi rajouter le fait que cette
mesure-là n'est pas une mesure qui doit exclure l'étudiant au
départ. C'est une mesure, dans notre esprit d'encadrement et de suivi
qu'on veut mettre de l'avant à travers les propositions qu'on vous fait,
pour dépister les étudiants qui sont en difficulté pour,
justement, intervenir auprès d'eux pour leur permettre une meilleure
réussite au collégial.
Mme Robillard: Mais vous ne pensez pas que certains des
collèges, à l'heure actuelle, utilisent le test du secondaire,
qui est passé à la fin du secondaire, justement pour identifier
des jeunes qui ont des problèmes? Et c'est à ce moment-là
qu'on offre soit des cours de mise à niveau, soit de
bénéficier des centres d'aide à l'apprentissage en
français parce que, justement, on regarde les résultats
détaillés du test de français passé à la fin
du secondaire V. Et je voudrais seulement faire une mise au point: c'est
très clair dans le renouveau, à la page 20, qu'on indique que les
objectifs des cours de français seront revus aussi au niveau du primaire
et du secondaire. Alors, voulez-vous m'expliquer ça, là?
M. Lapointe (Frédéric): Donc, Mme la ministre,
lorsqu'on parle des cours d'anglais qui peuvent se donner de façon
optionnelle présentement au collégial, les professeurs, les
collèges ne calculent pas la force de l'étudiant en fonction de
ses résultats au secondaire, et ils font bien. Alors, nous, ce qu'on
présente, finalement, c'est que l'institution, ce qu'elle fait pour
l'anglais, elle pourrait très bien le faire pour le français de
façon à très bien évaluer la capacité de
l'étudiant à «performer» selon sa langue.
Vous n'êtes pas sans savoir que, pour les tests, les notes du
secondaire au niveau du français sont pondérées:
production orale, expression orale, expression écrite, production
écrite, et ainsi de suite. Donc, il serait nécessaire,
spécifiquement pour les besoins du collégial, de procéder,
oui, à un test de classement comme pour l'anglais, de façon
à savoir quel étudiant peut vivre des problèmes et quelles
mesures, dans une situation d'intégration, par exemple, peuvent
être prises pour effectuer une mise à niveau.
Mme Robillard: Je peux vous dire que les cégeps qui
utilisent déjà le test de français du secondaire,
justement pour bien cibler les étudiants qui ont des difficultés,
utilisent le test avec correction, sans pondération ou sans
normalisation. Ça se fait présentement. C'est parce que votre
suggestion fait que l'étudiant va passer deux examens en l'espace de
deux mois sur le même sujet. C'était dans ce contexte-là
que je voulais voir pourquoi vous suggériez ça.
M. McQuade: moi, en entrant dans mon premier cours de
français, cette année, j'ai eu un examen, une dictée
écrite qui m'a classé, où mon prof me disait: les gens qui
«perforaient» en haut de cinq fautes d'orthographe, peut-être
que vous devriez penser à aller faire un petit tour au centre d'aide en
français. donc, c'est à ce niveau-là, je pense, qu'on en
parle. c'est un examen, oui, institutionnel, mais qui va permettre une
meilleure détection selon les ressources. parce que, souvent, les
étudiants peuvent passer un cours avec une moyenne de 70 % et être
très faibles en orthographe, mais excellents en composition ou
excellents en expression orale. donc, souvent, avec ces tests de classement
là, au niveau secondaire, il est très difficile de
déterminer si l'étudiant a vraiment des problèmes au
niveau de son orthographe, au niveau de sa grammaire, et de sa syntaxe. c'est
plus pour ça qu'on insiste là-dessus.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. McQuade. Merci,
Mme la ministre. M. le député de Lac-Saint-Jean, vous avez la
parole.
M. Brassard: Donc, ce test-là aurait pour fin ou pour
objectif de dépister. C'est un test de dépistage, si je comprends
bien. Ce n'est pas un seuil d'admission; ça ne bloque pas
l'accès, c'est un test de dépistage.
M. Hamel (Stéphane): Aucunement. Ça ne touche
aucunement l'accessibilité au système collégial. '
M. Lapointe: Et ça s'inscrit dans toutes nos mesures qui
visent à remplacer, évidemment, le ticket modérateur comme
incitatif à la réussite qui, selon nous, n'est pas efficace.
Nous, on préfère dépister les faibles et les supporter.
C'est, d'ailleurs, l'objet de nos mesures.
M. Brassard: De façon à pouvoir les intégrer
à des cours de mise à niveau si cela est requis ou
nécessaire.
M. Lapointe: C'est ce que la ministre dit dans ses propres
textes. Lorsqu'elle identifie les consensus et les objectifs de la
réforme, elle parle de soutenir la présence auprès de
l'étudiant, alors qu'elle propose un ticket modérateur. Nous, on
dit: II faut avoir des mesures pour identifier les étudiants à
problèmes rapidement pour apporter les correctifs, pour leur soumettre
les ressources de l'institution pour qu'ils puissent effectivement
réussir, alors que, malheureusement, ce qu'on voit, c'est qu'on
pénalise ceux qui échouent plutôt que de les aider. Nous,
on propose de les aider et évidemment, on pourra en parler
d'exclure ceux qui ne s'aident pas eux-mêmes ou sont au collégial
pour d'autres raisons que les études collégiales. Dans ce
sens-là, on arrive à réaliser les objectifs mêmes du
ministère et à satisfaire les réels consensus de la
commission parlementaire, ce que ne fait pas le ticket modérateur,
évidemment. (16 h 30)
M. Brassard: Et, si j'ai bien compris la ministre, il y a
déjà des cégeps qui ont mis en oeuvre cette pratique, qui
le font déjà.
M. Lapointe: Oui.
M. McQuade: Non, mais, en fait, il y en a, effectivement, mais ce
n'est pas une pratique institutionnalisée partout, là; c'est fait
à la pièce, d'un côté comme de l'autre. Ce qu'on
vise, en fait, par les mesures d'encadrement qu'on propose, c'est
d'institutionnaliser, de mettre à l'intérieur du réseau
ces mesures d'encadrement là, de suivi, d'aide aux étudiants qui
sont en difficulté. Je veux dire, comme le soulignait M. Lapointe, que
la mesure proposée actuellement n'offre aucun service d'aide aux
étudiants ou de dépistage pour les empêcher de se rendre
à cinq échecs. Ce qu'on veut, c'est mettre en place des
programmes qui vont les soutenir dans leurs études, et c'est de
ça qu'ils ont besoin. Et ce n'est pas évident, un étudiant
qui tombe du jour au lendemain de l'école secondaire, qui arrive
à 16, 17 ans au niveau collégial. Tout à coup, on lui
donne un billet et on lui dit: Tiens, tu es un adulte; maintenant, va te
débrouiller dans le gros monde, là. Je pense qu'il y a une
certaine adaptation à avoir. On ne devient pas adulte à minuit,
la veille de sa fête, là.
M. Lapointe: Et je rappellerai qu'avec la mesure qui est
censée pallier à l'encadrement, donc la mesure de
responsabilisation, la responsabilisation, elle est douteuse puisque toute
personne qui sera sur le programme de prêts et bourses verra ses bourses
majorées de l'équivalent des droits de scolarité qui
seront perçus. Donc, il n'y a pas d'impact financier sur sa condition
économique, ce qui est bien, mais ça n'aura évidemment pas
d'impact au niveau de la responsabilisation. Et à ces 40 %, si on ajoute
tous les étudiants riches ou qui ont des parents riches, qui n'auront
pas à payer ces frais de scolarité là ou pour qui ils
seront insignifiants, on se demande dans quelle mesure il y aura une
responsabili- sation de masse. Et ces mesures-là, qu'on vous propose,
deviennent d'autant plus nécessaires. Il faut aussi discuter d'une
mesure qui, nécessairement, malgré le fait qu'on se le cache,
exclura des gens. Le ticket modérateur, bon an, mal an, exclura de 1 %
à 2 % des étudiants. Et ce ne seront pas les abuseurs, ce seront
les étudiants pauvres en difficulté scolaire. Est-ce que
l'éducation devient un outil de justice sociale, dans un tel contexte?
Il y a lieu d'en douter.
M. Brassard: Maintenant, je reviens à la formation
générale. Vous êtes favorables au maintien des quatre cours
de philosophie et au maintien des quatre cours d'éducation physique, tel
que ça existe actuellement dans l'enseignement collégial. Vous
représentez une centaine de milliers d'élèves du niveau
collégial; donc, on peut dire que vous êtes, d'une certaine
façon, représentatifs d'une large proportion des étudiants
et étudiantes. Il y a eu des consultations, j'imagine, pour en arriver
à une position comme celle-là. Donc, est-ce que vous pourriez
nous expliquer pourquoi et pour quelles raisons, selon vous, il est essentiel,
si on veut que la formation collégiale soit de qualité et
s'inscrive bien dans la perspective d'une formation fondamentale, que les cours
de philosophie soient maintenus, de même que ceux d'éducation
physique?
M. Hamel (Stéphane): Comme vous le savez, nos
revendications, quand on les a faites, on les a faites légitimement.
Comment on a fait? Bien, comme vous l'avez lu dans les journaux vous les
avez sûrement vus nous avons fait des journées
d'études. Justement, on voulait demander l'opinion des étudiants:
Qu'est-ce que vous pensez réellement de l'éducation physique, de
la philosophie, du français? Qu'est-ce qu'on devrait faire avec
ça? On a fait des journées d'études à travers les
collèges; il y en a eu au moins une trentaine qui les ont faites. Et
qu'est-ce qui en est ressorti? C'est justement les propositions qu'on demande,
soit quatre cours de philosophie, quatre cours d'éducation physique, un
renforcement du français et une actualisation de la philosophie. C'est
ce qui en est ressorti. Je pourrais laisser continuer Francis dans le
pourquoi.
M. Arkinson: Alors, sur le pourquoi, tout d'abord, de la
philosophie, je pense, et j'en ai fait mention dans mon exposé tout
à l'heure, que nous vivons dans une société de plus en
plus compliquée, où des idées et des projets et toutes les
autres choses du genre s'affrontent en public. Et nous devons donner aux
étudiants les moyens de pouvoir participer à ces débats
publics là pour, évidemment, l'avancement de notre
société. Et, je veux dire, la philosophie, justement, nous permet
d'avoir une rigueur de pensée, une argumentation cohérente, mais
aussi elle nous permet la compréhension de toutes les idéologies
qui circulent en arrière de ces projets et de ces idées. Et c'est
pour ça, entre autres, qu'on demande quatre cours de philosophie, car,
comme je l'ai dit tantôt, le monde est de plus en plus complexe et plus
le monde
deviendra complexe, plus nous allons devoir prendre de temps pour le
comprendre.
En ce qui a trait à l'éducation physique, maintenant,
comme je l'ai dit tantôt, c'est essentiel, l'éducation physique,
et plusieurs statistiques d'organismes très crédibles le
démontrent. Et c'est pour ça qu'on doit poursuivre l'enseignement
de quatre cours d'éducation physique au collégial. Ça
développe des habitudes de vie pour les futurs travailleurs et
travailleuses qui, dans le monde dans lequel nous vivons, doivent justement
développer ces habitudes. Et puis, je veux dire, d'une certaine
façon, si nous n'agissons pas en ce sens, il va y avoir une
improductivité de la part des futurs citoyens et citoyennes, car ils ne
seront pas en mesure, physiquement, de poursuivre dans leur profession.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. Arkinson. Mme la
députée de Terrebonne, vous avez une question à poser?
Mme Caron: Si vous voulez compléter.
M. McQuade: Je tiendrais aussi à vous rappeler la remarque
que j'ai faite dans la première consultation sur le déficit de la
CSST. Je pense qu'il y a quelque chose de très important aussi à
noter: Des sociétés modernes ont décidé d'investir,
ont fait le choix d'investir, à l'intérieur des entreprises, dans
des programmes d'activité physique. Je pense au Japon, à
l'Allemagne. Donc, pourquoi ces pays, qui sont des leaders mondiaux... Pourquoi
le Québec, à ce moment-là, devrait-il devenir comme un
pays sous-développé en termes d'éducation physique? Je
pense qu'il faut suivre la vague de ces pays-là et investir dans une
bonne santé physique et mentale pour permettre aux gens de bien
«performer» dans leur vie.
Le Président (M. Gobé): Merci. Mme la
députée de Terrebonne.
Mme Caron: Merci, M. le Président. Je vais commencer par
un commentaire, là, que j'ai vraiment le goût de vous dire suite
à vos différentes propositions. Je pense que les jeunes, autant
cet automne que maintenant, ont démontré à quel point ils
étaient responsables. Vous ne faites pas que rejeter les propositions;
vous proposez des alternatives et ces alternatives-là sont vraiment en
vue d'une responsabilisation. Parce que c'est vrai, ce que vous dites.
Responsabiliser, poser un vrai geste pédagogique, c'est d'abord et avant
tout prévenir, donner du soutien, de l'encadrement aux jeunes, et ce
n'est pas une mesure financière. Et je pense que vous avez fait un
excellent travail là-dessus.
Au niveau de l'éducation physique, votre question, elle
était bien posée: Qu'est-ce qui est essentiel, dans la vie?
Qu'est-ce qui est essentiel? D'avoir des jeunes et des adultes en santé,
physique et mentale, ou de faire d'autres choix? Je pense que la base
même de la vie, c'est d'avoir des êtres en santé, autant en
santé physique que mentale et c'est vraiment une base essentielle
et des gens responsables, et que la responsabilité, ça ne
se mesure pas avec le portefeuille.
Ce matin, la Centrale de l'enseignement du Québec est venue nous
dire à quel point, lorsqu'on voulait faire une réforme et
lorsqu'on voulait faire des changements et qu'on voulait que ça soit
réussi, il fallait que ceux qui visent ces changements-là y
prennent part et les acceptent. On est venu nous dire qu'au niveau du climat,
cet automne, du côté des enseignants, on souhaitait un changement,
on souhaitait des renouveaux, qu'on était fier d'embarquer dans ce
changement-là et qu'au fil des mois on s'était senti un peu
écarté; on trouvait que la place des enseignants et des
enseignantes n'était plus là et que ce goût de la
réforme n'était plus là.
Moi, j'aimerais que vous nous disiez, au niveau des étudiants et
des étudiantes présentement, vous vivez ensemble, vous
savez ce qu'ils pensent comment ils se sentent, là, maintenant,
devant cette réforme-là. Est-ce qu'ils ont vraiment le goût
de s'embarquer, malgré tout ce qu'ils ne veulent pas? Comment vous
pensez que ça va se vivre?
M. Hamel (Stéphane): C'est sûr que, nous je
pourrais dire comme un de vos collègues, M. Bouchard on n'a pas
trouvé les solutions faciles. On a essayé d'aller plus loin, de
gratter plus loin. Comment on se sent là-dedans? On se sent un peu
bafoués, dans le sens que ce n'est pas juste pour tout le monde, ce
n'est pas équitable pour tout le monde. Alors, quand on trouve une
manière facile, qu'est-ce que ça donne? Si on trouve tout le
temps des manières faciles de régler des choses, bien, le
système va finir par tomber tout seul. Vous comprenez la manière
dont on peut se sentir. C'est pour ça que nous apportons de nouvelles
propositions qui, selon nous, sont très légitimes. Et, en plus de
les tester tous les jours, on a amené quelque chose de concret. Alors,
je pourrais laisser... (16 h 40)
M. McQuade: ii y a aussi le fait que tout ce processus de
réflexion qui a eu lieu depuis deux, trois mois, même un an dans
certaines organisations, fait que, oui, effectivement, on s'est rendu compte
des lacunes qu'il y avait au niveau du système collégial, sauf
qu'on se rend compte, au fur et à mesure, que nos revendications, entre
autres en ce qui a trait à la gratuité scolaire, n'ont pas
été écoutées malgré qu'elles aient fait,un
consensus très large lors de la commission parlementaire. "
Je pense aussi à la façon dont le ministère, entre
autres la ministre, a qualifié notre action dans les mois derniers,
d'action hâtive, irréfléchie et toutes sortes d'autres
commentaires qu'on a entendus, qui nous font dire, quelque part: Sommes-nous
vraiment écoutés par les élus? Dans le fond, dans quelques
années, c'est probablement plusieurs des étudiants du
cégep qui vont être assis à vos places. Et je pense que
vous avez vous-mêmes bénéficié d'un système
d'éducation, vous avez vous-mêmes été
étudiants quelque part dans votre vie.
Donc, je pense que de ne pas porter une attention plus poussée
à ce que les étudiants ont à dire, c'est un peu renier son
propre passé. Je veux dire, vous aussi, vous avez eu des affaires
à dire quand vous étiez jeunes, et je pense que, en
développant une communication plus importante entre les
générations, on ne pourrait qu'améliorer la
société, en bout de ligne. , Mme Caron: Vos propositions
ont démontré que vous n'avez pas peur des efforts. Au contraire,
vous proposez même des choses qui sont souvent plus difficiles que ce qui
est proposé dans la réforme. Hier, les éducateurs et les
éducatrices au niveau de l'éducation physique sont venus
présenter certains scénarios et un de ces scénarios
proposait, pour maintenir les quatre cours d'éducation physique, de
passer de 26 2/3 unités à 28 unités. Votre réaction
à vous, devant cette proposition-là?
M. Hamel (Stéphane): Frédéric.
M. Lapointe: Justement, ça a fait l'objet d'une vive
argumentation entre nous et le cabinet de la ministre. C'est que, pour les
étudiants, faire de l'éducation physique, ce n'est pas un surplus
de charge, c'est surtout un temps à consacrer. Ce n'est en aucun cas un
surplus de charge. Alors, enlever de l'éducation physique et ajouter
d'autres cours, cela constitue effectivement un surplus de charge. Alors, nous,
ce qu'on dit: Si vous voulez, effectivement, nous donner plus de travail,
donnez-nous plus de travail, mais ça ne change absolument rien de nous
enlever de l'éducation physique, ça ne nous enlève pas de
travail. Sauf qu'il y a une chose, c'est que, lorsqu'on fait moins
d'éducation physique et les étudiants universitaires sont
là pour en témoigner lorsqu'on est moins en forme, on est
moins productifs et on est moins aptes à faire face à nos
exigences scolaires. Ce n'est pas nécessairement une bonne idée
de réduire les heures consacrées à l'éducation
physique lorsqu'on prétend vouloir atteindre un meilleur niveau de
réussite chez les étudiants.
Mme Caron: Je vous remercie.
Le Président (M. Gobé): Merci, Mme la
députée.
Alors, messieurs, au nom des membres de la commission, je tiens à
vous remercier. Ceci met donc fin à votre intervention. Nous vous
remercions. La commission a pris bonne note de vos recommandations et de vos
commentaires. Vous allez pouvoir vous retirer.
Je vais suspendre quelques minutes afin de permettre au groupe suivant,
soit les représentants de l'Association nationale des étudiantes
et étudiants du Québec, de bien vouloir venir prendre place en
avant. Alors, la commission est suspendue.
(Suspension de la séance à 16 h 44)
(Reprise à 16 h 46)
Le Président (M. Gobé): Si vous voulez bien
regagner vos places! J'inviterais les gens qui ont des conciliabules à
tenir à bien vouloir les tenir à l'extérieur de cette
enceinte.
Alors, bonjour, bienvenue parmi nous. Il me fait plaisir de vous
accueillir cet après-midi. Sans plus attendre, je demanderai au
porte-parole de votre organisation de bien vouloir présenter les gens
qui l'accompagnent et, par la suite, vous pourrez commencer votre exposé
sans plus attendre. Vous avez la parole, monsieur.
Association nationale des étudiantes et
étudiants du Québec (ANEEQ)
M. Noël (Éric): Merci, M. le Président.
Bonjour, Mme la ministre, M. le critique de l'Opposition. Je vous
présente ici Mme Claire Graveline, qui est officière à
l'Organisation des femmes dans l'ANEEQ; M. Charles Benoit, membre du Conseil
central de F ANEEQ; et moi-même, Éric Noël, membre aussi du
Conseil central de l'ANEEQ.
Le Président (M. Gobé): Bonjour. Vous pourriez
répéter votre nom, s'il vous plaît?
M. Noël: Le mien?
Le Président (M. Gobé): Oui, le vôtre.
M. Noël: Éric Noël.
Le Président (M. Gobé): Ah! Parce que nous avions
d'autres noms sur notre liste.
M. Noël: Oui, ça a été modifié
à la dernière minute.
Le Président (M. Gobé): Vous remplacez donc Mme
Anite de Carvalho. C'est ça?
M. Noël: Oui.
Le Président (M. Gobé): Très bien. Merci.
Votre poste, c'est quoi, dans l'organisation?
M. Noël: Moi, je suis au conseil exécutif. Donc, je
suis membre automatiquement du Conseil central de l'ANEEQ.
Le Président (M. Gobé): D'accord. C'est pour les
besoins de la transcription et de l'enregistrement des débats. Merci,
monsieur. Vous pouvez commencer.
M. Noël: Donc, je vous présente ici le mémoire
de l'ANEEQ. La réforme des cégeps forme un bloc et, en ce sens,
l'ANEEQ la rejette en bloc en renvoyant la ministre faire ses devoirs et
regarder l'ensemble du
réseau québécois de l'éducation. Le rejet en
bloc, ce n'est pas un rejet du revers de la main. C'est la réponse qui
convient le mieux au projet de réforme de l'enseignement
collégial une fois qu'on s'est donné la peine de l'analyser en
détail. Ce que la ministre Robillard compte faire adopter d'ici la fin
de la session parlementaire en juin, c'est un projet de réforme mauvais,
pernicieux et antidémocratique. Cela confirme ce que plusieurs pensent
du gouvernement, à savoir qu'il est mauvais, pernicieux et
antidémocratique. «Après 25 ans d'un régime
remarquablement stable, il est normal qu'on veuille faire le point et
identifier les ajustements qui s'imposent», lit-on au tout début
du document ministériel. Ça part mal! Trois lignes, trois
mensonges. Le premier: les cégeps n'ont pas été
remarquablement stables et ont plutôt subi plusieurs transformations. Le
deuxième: la ministre ne fait pas le point; il n'y a même aucune
ébauche de bilan dans ce document. Le troisième: les ajustements
dont il est question dans le document constituent un véritable
chambardement.
Sur la stabilité. Cette réforme de l'enseignement
collégial n'est pas la première, car, oui, il y a eu des
réformes depuis 25 ans. On pense ici au régime pédagogique
de 1984, aux révisions des programmes de formation professionnelle, de
sciences humaines et de sciences de la nature. On pense aussi au nouveau mode
d'allocation des ressources, au récent test de français, au
changement au calendrier scolaire, etc. Les réformes des
dernières années dans le réseau collégial
n'étaient donc que des esquisses de celle qui nous est livrée
maintenant.
Sur le bilan, maintenant, une question surgit inévitablement
à chaque fois qu'on referme le document ministériel qui
présente la réforme: Mais où est le bilan sérieux,
rigoureux et détaillé de la situation du réseau
collégial auquel on aurait été en droit de s'attendre? Non
seulement la ministre s'est pointée à la commission parlementaire
de l'automne dernier sans présenter ses positions, mais voilà
qu'elle se permet de tout chambarder en se contentant, ça et là,
de répéter quelques lieux communs ou de fournir quelques
données sans discuter les questions qu'elles soulèvent.
Sur les ajustements. Le projet de réforme de l'enseignement
collégial donne l'impression de modifier surtout le régime
pédagogique et le cheminement scolaire des étudiantes et des
étudiants. Mais, dans les faits, il va beaucoup plus loin: il transforme
radicalement et en profondeur le rôle même des cégeps. Les
collèges du XXIe siècle que propose la ministre, ce sont des
collèges utilitaires, avec tout ce que cette notion peut avoir de
réducteur lorsqu'elle prend place dans les discours gouvernementaux
à la mode. Les collèges peuvent pourtant être autre chose
que des usines à former, au général, des bureaucrates en
puissance et, au professionnel, des techniciennes et des techniciens sur mesure
pour les entreprises environnantes. (16 h 50)
Au cours des dernières années, les collèges avaient
été appelés à explorer la voie de
1'«efficience», pour reprendre les mots de la ministre.
Aujourd'hui, ils y sont poussés sans possibilité de retour. Le
projet de réforme proposé sonne le glas d'une formation
générale véritable, formation qui, bien qu'imparfaite,
avait jusqu'à ce jour constitué un point d'ancrage contre la
dérive utilitariste.
Enfin, pour sa réforme, la ministre ne s'inspire pas des
principes les plus élémentaires pour une éducation
accessible et de qualité. Non, elle suit plutôt la direction que
lui pointe du doigt le Conseil du trésor, ce rouleau compresseur qui
s'en prend aux programmes sociaux, aux conditions de travail des
employés de l'État, etc., bref, à tout ce qui inspire un
peu la justice sociale.
Les rumeurs les plus sombres qui circulaient depuis quelques semaines au
sujet de l'enseignement collégial ont toutes été
confirmées. Pendant que des étudiantes et des étudiants
faisaient la grève dont moi la ministre n'avait
cessé de dire: Attendez ma vraie réforme. Vous vous battez contre
des hypothèses de travail. Vous aurez le temps de réagir. Ses
projets de loi servent la médecine de cheval que les rumeurs avaient
annoncée. Vous aurez le temps de réagir, disait la ministre. La
commission parlementaire qui étudie les deux projets de loi de la
réforme se tient en pleine période d'examens de fin
d'année. Vous aurez le temps de réagir, disait la ministre. Ces
projets de loi seront adoptés d'ici quelques semaines, alors que les
cégeps seront déserts et que les étudiantes et les
étudiants seront à la recherche d'un rarissime emploi
d'été.
Ce processus de réforme foncièrement vicié ne
pouvait qu'accoucher d'une réforme elle-même foncièrement
malhonnête. Dans presque tous les cas, la ministre a réussi
à faire exactement le contraire de ce qu'elle affirme. Elle tord les
mots comme jamais* il n'eut été possible de penser qu'ils soient
tordus. En voici quelques exemples. La ministre prétend inscrire plus
clairement dans la loi la notion de gratuité scolaire. Ce n'est que pour
mieux y inscrire des frais pour celles et ceux qui auront eu cinq échecs
au général ou sept échecs au professionnel. La ministre
prétend renforcer la formation générale; au contraire,
elle l'atrophie, elle la dénature. La ministre prétend
responsabiliser les collèges en procédant à une
décentralisation; pourtant, dans les faits, elle augmente sa mainmise
sur le contenu des cours, ne se contentant plus de fixer les standards
nationaux, mais déterminant aussi les activités d'apprentissage.
Elle met également en place une kyrielle de mesures d'évaluation
qui poussent les collèges à une concurrence stérile.
La ministre parle aussi de renouveau, alors qu'elle l'empêche
depuis des années en coupant des dizaines et des dizaines de millions de
dollars dans le réseau collégial. La ministre prétend
vouloir faire sa réforme avec . les membres du corps professoral, mais,
concrètement, elle réduit leur liberté académique
et les «minorise» sur les instances où ils et elles avaient
une certaine possibilité d'intervention, comme sur les commissions
pédagogiques qui sont maintenant des commissions des études.
La ministre prétend rejeter les examens nationaux, tout en se
préparant à en administrer un pour remplacer l'actuel test de
français. Ce nouvel examen national serait une condition de diplomation.
La ministre prétend aussi favoriser une accessibilité plus large
à l'enseignement collégial. Cependant, elle augmente les
préalables du secondaire. On comprend ici que la ministre aura
préféré hausser la barre à l'admission plutôt
que d'augmenter les ressources du réseau collégial pour venir en
aide aux étudiantes et aux étudiants. La ministre, aussi,
prétend faire des cégeps de véritables
établissements d'enseignement supérieur. Concrètement,
elle leur impose des pratiques du niveau secondaire. La ministre est en train
de secondariser les cégeps.
Finalement, pour la formation technique, la ministre promet «des
programmes plus souples et adaptés aux besoins du marché du
travail» à la page 22 et c'est là seulement
qu'elle joint les actes à la parole. Dans son document, souplesse est
une notion récurrente qui n'est pas loin de rimer avec formation
hyperpointue ou formation à rabais ou tout simplement formation sur
mesure pour l'entreprise à côté du cégep.
En clair, la ministre lance les messages suivants. Aux étudiants
et aux étudiantes: Si vous parvenez à entrer au cégep,
performez à tout prix ou payez. Aux professeurs: Vos bebelles, puis dans
vos cours; le reste, on s'en occupe. Aux collèges: Faites-vous
concurrence. Et attention à l'évaluation: on vous a à
l'oeil. Aux entreprises: Servez-vous! Bon appétit!
Il est évident que la réforme proposée pour
l'enseignement collégial est beaucoup plus qu'un simple changement du
régime pédagogique. Il faut, en effet, réaffirmer ici
qu'il s'agit aussi et surtout d'un changement majeur au niveau du rôle
même des cégeps. La gratuité scolaire fissurée, la
formation générale atrophiée, la formation technique
à la merci des entreprises, la décentralisation
piégée, voilà tous des éléments qui nous
incitent à rejeter en bloc et la lettre et l'esprit de cette
réforme.
Parlons maintenant de l'accessibilité au cégep. La
ministre fait une équation spécieuse lorqu'elle dit:
Accessibilité égale réussite, égale obtention d'un
diplôme dans des délais raisonnables. Que la ministre
s'intéresse au problème du décrochage devrait nous
réjouir. Au contraire, cela nous inquiète. Pour augmenter le taux
de réussite, la ministre n'augmente pas les ressources des
collèges, elle impose plutôt des mesures pour barrer la route aux
plus faibles: frais de scolarité et hausse des préalables du
secondaire.
La gratuité scolaire, c'est un pas important pour la
démocratisation de l'éducation, c'est un rempart contre un
système qui ne serait réservé qu'à une
élite. La gratuité, c'est un des moyens indispensables pour
donner une chance à tout le monde. Une chance, mais une seule, dit
aujourd'hui la ministre. Après ça, tu paies. Il faut voir avec
quelle timidité le document ministériel défend la
gratuité scolaire. Deux timides petits paragraphes surmontés d'un
timide intertitre: «La gratuité scolaire maintenue». Rien
que ça, dans un document de près de 40 pages. Et la
gratuité scolaire est défendue du bout des lèvres. On lit
dans le document ministériel: «En regard des objectifs
d'accessibilité, le maintien de la gratuité apparaît
actuellement comme une affaire de prudence», à la page 16. Une
affaire de prudence, actuellement!
Je vais maintenant laisser la parole à Claire Gra-veline qui va
nous parler des frais de scolarité.
Le Président (M. Gobé): Allez-y, madame.
Mme Graveline (Claire): Merci. La ministre connaît
l'efficacité de ses éventuels nouveaux frais puisqu'elle
abolirait le tristement célèbre article 33. Cet article du
Règlement sur le régime pédagogique du collégial
permet actuellement aux cégeps de ne pas réadmettre les
étudiantes et étudiants qui, pendant une session, n'ont pas
réussi plus de la moitié de leurs cours. Qu'il s'agisse de frais
de scolarité ou de l'article 33, les deux mesures sous-tendent qu'il y a
de l'abus et qu'il faut de la coercition. Les étudiantes et
étudiants pourraient donc abuser de l'éducation comme d'autres
abusent du pouvoir et de la confiance. Mais, quand on regarde les chiffres
comme il faut, il y a tout le contraire de l'abus. Le problème, c'est
qu'il y a beaucoup de gens qui décrochent, qui abandonnent, qui ne
terminent jamais leurs études. Et des frais ne régleront pas le
problème; ils l'accentueront.
Les étudiantes et étudiants qui seront obligés de
payer des frais travailleront encore davantage et augmenteront les risques
d'échecs. D'autres, pour éviter les échecs, voudront
prendre moins de cours, alors que le nouveau mode de financement du
réseau collégial réduit le budget des cégeps
où les étudiantes et étudiants prennent moins de cours.
Par ailleurs, après six sessions au général, le
régime d'aide financière n'accorde plus de bourse. Les
étudiantes et étudiants qui auront rallongé leurs
études pour réduire les échecs seront donc poussés
à travailler davantage, ce qui augmentera le risque d'avoir des
échecs. On voit facilement le cercle vicieux.
Ce dernier point mérite qu'on s'y arrête quelques instants.
La ministre semble se satisfaire de l'accessibilité aux femmes au
collégial. Nous pensons, de notre côté, que, même si
elles ont un taux d'accès meilleur que celui des hommes, les femmes
vivent un problème important, celui des ghettos d'études. Nous
préconisons un éclatement de ce ghetto. Nous pensons que le
système doit permettre aux femmes qui le désirent de prendre des
risques, de choisir des programmes non traditionnels. Et, pour que cela puisse
fonctionner, il faut que les femmes aient l'assurance de pouvoir se
réaligner facilement dans le cas d'une série d'échecs ou
suite à une mauvaise orientation au départ.
Dans les programmes où les hommes sont fortement majoritaires, le
harcèlement sexuel, phénomène déjà
très répandu, est parfois encore plus criant. De plus, il y a
généralement peu de femmes qui y enseignent, ce qui rend la
situation davantage difficile pour les étudiantes. Notons que la
personne qui devra payer
pour ses cours ne pourra peut-être même pas se faire
rembourser si elle décidait de les annuler. L'article 16 du projet de
loi 82 propose un alinéa qui se lit comme suit: «Le gouvernement
peut, par règlement: f) déterminer les cas dans lesquels
l'abandon d'un cours donne droit à un remboursement de tout ou partie
des frais de scolarité.» Une fois que la ministre aura fait avaler
la pilule des frais après cinq échecs, pourquoi ne parlerait-elle
pas de frais pour le secteur général qui conduit, de toute
façon, à des études universitaires où il y en a,
des frais? Une fois que la brèche est faite dans la gratuité,
tout devient possible. (17 heures)
Par ailleurs, les 50 $ pour les cours, dont parle la ministre, sont
fixés par le règlement et peuvent être augmentés
n'importe quel mercredi matin par le Conseil des ministres. Des frais de
scolarité de plus en plus élevés pourront donc venir
s'ajouter à des frais spéciaux et autres frais de toutes sortes
déjà facturés à l'ensemble des collégiens et
collégiennes, et qui, eux aussi, ne cessent de croître.
Parlons un peu des préalables au secondaire. La ministre, pour
augmenter le taux de réussite au collégial, hausse la barre
à l'admission. Si la ministre veut que les étudiantes et
étudiants du secondaire arrivent au collégial mieux
préparés, il faudrait plutôt qu'elle regarde comment
enrichir la formation donnée au secondaire. Mais, comme elle a choisi de
réformer les cégeps en vase clos, sans se pencher sur le reste de
l'éducation...
À écouter la ministre Robillard, il ne faudrait pas
s'inquiéter de ce que les échecs seront punis, parce qu'elle a
pensé à tout et qu'il y aura une session d'accueil et
d'intégration pour les cas problématiques. Cette session est un
leurre. D'abord, ce type de session existe déjà; la ministre n'a
donc rien inventé. Si, après cinq années d'études
secondaires, une personne n'a pas encore choisi un programme malgré tous
les cours de choix de carrière, il n'est pas sûr que le tout se
réglera en deux mois au cégep. Les cours d'orientation du
secondaire gagneraient à être améliorés, à
condition qu'il soit possible pour les étudiantes et étudiants de
faire un choix si tôt. Et si le problème d'orientation
découlait aussi d'un certain manque de motivation, comment une session
avec quelques cours de français, d'anglais, de philosophie pourrait-elle
permettre à une étudiante ou à un étudiant de
découvrir de nouveaux horizons dans les matières jamais vues au
secondaire? La session d'intégration cache une autre intention de la
ministre: celle d'éliminer dans la pratique le passage d'un programme
à un autre.
Mise en relation avec la nouvelle définition de la
gratuité scolaire, la session d'intégration soulève une
autre question. L'article de la loi se lirait comme suit: «Un
collège ne peut exiger de droits de scolarité pour l'enseignement
qu'il dispense, dans le cadre d'un programme d'études
collégiales, à l'étudiant à temps plein dans un tel
programme.» Pour bénéficier de la gratuité, il
faudrait donc être inscrit ou inscrite dans un program- me, alors que ce
document ministériel spécifie que les étudiantes et
étudiants en session d'accueil et d'intégration ne seraient pas
encore inscrits dans un programme spécifique du collège. La
session d'accueil et d'intégration sera-t-elle gratuite? Avouons que, vu
à travers ces textes, ça n'est pas évident.
Parlons un peu des différentes clientèles. La ministre
Robillard parle des collèges du XXIe siècle, mais elle n'a aucun
mot pour les communautés culturelles; tout au plus une petite photo en
haut de la page 9 du document ministériel. Pourtant, les collèges
de l'avenir seront multiethniques ou ils ne seront pas. Non,
décidément, les communautés culturelles ont
été oubliées, carrément oubliées. Les
personnes handicapées ont, elles aussi, été
oubliées. Le modèle de performance à tout prix les exclut
de facto. Il faut actuellement un courage énorme pour se lancer, avec un
handicap majeur, dans des études qui peuvent durer de longues
années. On se serait attendu, là aussi, à ce que la
ministre propose quelques mesures.
Les femmes, là-dedans? Il va falloir que le gouvernement
arrête déjouer à l'autruche et reconnaisse...
Le Président (M. Gobé): Mme Graveline, je vous
demanderais de bien vouloir conclure. Votre temps est maintenant
écoulé.
Mme Graveline: Merci.
Le Président (M. Gobé): S'il vous plaît.
Mme Graveline: ...une fois pour toutes que les femmes subissent
une oppression spécifique. Il ne suffit pas de dire, comme la ministre,
que les femmes sont majoritaires au collégial et qu'il faut les pousser
dans des secteurs de pointe où elles sont
sous-représentées. Si l'on veut vraiment instaurer des mesures
qui aideront les femmes à étudier, il est primordial que chaque
collège ait une politique visant à contrer le harcèlement
sexuel.
Le Président (M. Gobé): Alors, merci. Et je vais
maintenant passer la parole à Mme la ministre pour...
Une voix: M. le Président...
Le Président (M. Gobé): Oui, je m'excuse, monsieur,
mais le temps est réparti en périodes de, 20 minutes et vos 20
minutes sont maintenant dépassées. Nous allons donc aller
maintenant selon le règlement et l'ordre de la Chambre. Parce que,
voyez-vous, en commission parlementaire, le temps de chaque groupe qui vient
témoigner est réparti pour éviter, justement, que des
groupes ne prennent plus de temps et que d'autres attendent ici des heures.
Parce qu'il y a un groupe qui vous suit, qui est l'Association des
manufacturiers du Québec, qui est arrivé depuis ce midi aussi, et
on a déjà un petit peu de retard comme commission. Alors, on se
doit donc d'être assez strict et respectueux du temps. Ça fait
partie des règles non seulement du Parlement, mais
de la société en général.
Alors, Mme la ministre, vous avez la parole.
Mme Robillard: Merci, M. le Président. Comme je n'ai pas
entendu de proposition sur le renouveau collégial et que je n'en ai lu
aucune, non plus, dans le mémoire présenté par
l'Association nationale des étudiantes et étudiants du
Québec, M. le Président, je n'ai pps de questions.
Le Président (M. Gobé): C'est bien, Mme la
ministre. Alors, nous allons donc maintenant...
M. Noël: M. le Président, je pourrais peut-être
répondre à...
Le Président (M. Gobé): Je m'excuse, M. Noël,
mais Mme la ministre n'ayant pas de question à vous poser, nous allons
donc passer maintenant au temps de parole dévolu à M. le
représentant de l'Opposition officielle. M. le représentant, vous
avez la parole.
M. Brassard: Oui, M. le Président, j'ai, moi, quelques
questions, surtout des éclaircissements, évidemment, quant aux
positions que vous exprimez dans votre mémoire. D'abord, est-ce que vous
pourriez nous indiquer davantage que dans votre mémoire ce qui fonde
votre opposition à l'instauration d'un bloc de cours de formation
générale adaptés au programme? C'est le deuxième
bloc, là, dans la proposition ministérielle. Est-ce qu'on
pourrait savoir pourquoi vous vous opposez à ce bloc de cours, qu'il y
ait des cours dans la formation générale qui soient, selon
l'expression même du document ministériel, adaptés au
programme? Pourquoi cette opposition?
M. Noël: C'est très simple. Lorsqu'on parle,
premièrement, de formation générale, on ne parle pas de
formation générale particulière. Je ne sais pas si les
gens ont lu, dans le mémoire, qu'est-ce que ça veut dire,
«générale particulière». C'est deux mots qui,
normalement, ne vont pas ensemble. Le bloc de formation générale
particulière, qu'est-ce que ça veut dire? Si on prend l'exemple
des cours de français, bien, des cours de français, ça
deviendrait un cours, disons, de spécialisation par programme.
C'est-à-dire qu'un cours de français, disons, dans un programme
de techniques policières, par exemple, ça serait un cours de
français pourquoi? Pour apprendre comment écrire une
contravention ou, pour les techniques de comptabilité, comment
écrire une facture?
C'est-à-dire que la ministre sacrifie la formation
générale qui est mise à la disposition de toutes les
étudiantes et de tous les étudiants pour spécialiser,
justement, cette formation générale dans chaque programme. Le
français, c'est un outil de communication avant tout. - La philosophie,
c'est un outil pour penser, ce n'est pas un outil pour chaque programme.
C'est-à-dire que le français, c'est une langue qui est
utilisée pour communi- quer et non pas une langue pour être
utilisée dans chaque programme spécifique. Les cours de
français doivent rester des cours de français. Un cours de
français, c'est un outil pour communiquer entre les gens, tout
simplement.
M. Benoit (Charles): Je voudrais me permettre d'ajouter qu'en
fait le rôle de la formation théorique dans une matière,
c'est d'apprendre la langue de cette matière-là. Alors, si je
suis en sciences pures, mes cours de théorie, en sciences pures,
m'apprennent la langue des sciences pures. Alors, même chose si je suis,
en principe, en électrotechnique. Dans mes cours de théorie,
j'apprends la langue précise de cette matière-là. Et si on
transpose... Alors, pour nous, le cours de français adapté, en
fait, c'est une perte en ce qui concerne les cours de français, la
formation dite générale en français. Pour nous, ça
représente une perte à ce niveau-là.
M. Noël: Je pourrais peut-être terminer en disant que,
par rapport à la philosophie aussi, la logique et l'histoire, quoi qu'en
dise la ministre, des cours d'éthique appliqués à chaque
discipline, ça a un nom, ça s'appelle la déontologie, tout
simplement. C'est-à-dire que les programmes où existent des
corporations professionnelles ou des législations, l'invasion dans les
cours de philosophie... Bien, ces intervenants-là vont investir du temps
dans ces cours-là. Donc, ce n'est plus des cours de philosophie qu'on va
avoir ou des cours d'éthique, ça va être des cours de
déontologie. (17 h 10)
M. Brassard: Est-ce à dire que vous êtes
opposés à ce qu'on appelle l'approche programme, à l'effet
qu'il y ait, je dirais, des objectifs de programmes, qui recouvrent
également les disciplines appartenant à la formation
générale, et que tout cela forme un tout qui soit même
coordonné via un lieu de concertation interdisciplinaire?
Êtes-vous opposés à ça?
M. Benoit (Charles): L'approche programme, en principe, ça
n'existe nulle part et ça n'existe pas comme projet clairement
défini sur lequel tout le monde s'entend et sur lequel tout le monde va
travailler. Alors, c'est un peu difficile d'être contre à ce
stade-ci, on doit l'avouer. Maintenant, c'est certain qu'il y a des besoins de
cohérence au niveau de la formation, au niveau des programmes. Je pense
que c'est un consensus là-dessus. Mais, est-ce que cette
cohérence-là doit se faire en inféodant aux disciplines la
formation générale? Nous, on ne le croit pas.
M. Noël: Je pourrais peut-être ajouter
là-dessus que la ministre, ou je ne sais pas de quelle instance
ça vient directement, mais ils ont décidé de couper les
budgets et les subventions accordés justement à tous les
départements, à toutes les approches programmes, si vous voulez,
au niveau national. Il y avait une rencontre à chaque année, par
programme, du genre: tous les gens qui donnent des cours... Merci pour le mot;
je cherchais
le mot: une concertation par discipline au niveau national; les
subventions ont été coupées cette année.
M. Brassard: Quand on regarde la place des entreprises dans la
réforme, la conclusion qui s'impose à la lecture de votre
mémoire, c'est que cette place occupée par les entreprises ou
qu'occuperaient les entreprises dans le réseau de l'enseignement
collégial vous agace au plus haut point, c'est le moins qu'on puisse
dire. Est-ce que vous pourriez nous dire, selon vous, quelle serait la
véritable place de l'entreprise dans l'ordre d'enseignement
collégial?
M. Benoit (Charles): On aimerait bien, d'abord, qu'elles
participent au financement un peu, premièrement. En second lieu, je
crois que le problème des entreprises, c'est qu'il n'y a pas de culture
de formation dans les entreprises québécoises, règle
générale, si on parle globalement. Il n'y a pas de culture de
formation. Et là on leur livre les cégeps. Alors, on leur livre
la formation technique au collégial, et c'est une forme
déguisée de subvention aux entreprises. On ne vise pas tellement
la formation du personnel que, finalement, les besoins très
immédiats, très précis, très aigus des entreprises,
et c'est là qu'est le problème.
Alors, les entreprises, effectivement et c'était une
boutade, tantôt, mais je crois que c'est sérieux profitent
d'une bonne formation générale, mais je pense que, dans leur
culture, la formation, ce n'est tellement pas important qu'elles sont
prêtes à sacrifier ce qui est du général pour leurs
petits besoins quotidiens. Elles n'ont non seulement pas de vision de la
formation, mais, en plus, elles n'ont pas de vision à long terme.
M. Noël: Là-dessus aussi, on pourrait ajouter que ce
que la ministre propose, ça va être une formation vraiment
hyperpointue, c'est-à-dire que, si une entreprise est tout près
d'un cégep si on prend l'exemple de Lionel-Groulx, l'entreprise
General Motors est juste à côté les étudiants
et étudiantes, disons en robotique ou en électrotechnique, vont
être formés selon les besoins de GM, au lieu d'avoir une bonne
formation de base en électrotechnique et que, effectivement, ces
étudiantes-là, ces étudiants-là puissent se
promener à travers le Québec avec leur D.E.C. dans les mains et
dire: J'ai un D.E.C. en électrotechnique. Ensuite, il arrive en
entreprise et c'est ce qui se fait en ce moment en
électrotechnique et il a l'extra de formation spécifique
à une machine ou à la façon de fonctionner de
l'entreprise.
C'est-à-dire qu'on n'est pas rendu au point où on doit
indiquer à l'étudiant: Sur cette machine, à droite, le
bouton rouge, c'est pour mettre «on», «off». Ce qu'on
dit à la ministre, c'est qu'on va donner, par rapport aux techniques,
bien sûr, une bonne formation générale en
électrotechnique, une bonne base pour que cet étudiant ou cette
étudiante-là puisse se promener d'une entreprise à l'autre
sans problème. La formation doit se faire dans les entreprises, la
formation plus pointue, bien sûr.
M. Brassard: Mais ça veut dire que vous n'êtes pas
très favorables, par conséquent, à ce qu'on appelle la
formation en alternance études-travail ou à des stages dans
certaines entreprises. C'est évident que les stages vont se faire dans
les entreprises les plus importantes qui se retrouvent dans le milieu
environnant du cégep. Donc, vous n'êtes pas très d'accord
avec ces formules.
M. Benoit (Charles): C'est-à-dire que, pour nous, c'est
l'ensemble de la formation qui est livrée aux entreprises.
Évidemment, des stages en entreprise, je crois que, bon,
là-dessus, les gens y sont plutôt favorables, enfin, il faudrait
voir. Mais c'est qu'on ne parle plus de stages à ce moment-ci; on parle
de l'ensemble de la formation et de l'ensemble du contrôle sur la
formation donné aux entreprises. Alors, c'est plus que des stages et,
dans ce sens, c'est dans l'ampleur que ça nous inquiète.
M. Brassard: J'aurais une dernière question, quant
à moi, à poser à mademoiselle...
Mme Graveline: Madame.
M. Brassard: ...à Mme Graveline. C'est ça?
Le Président (M. Gobé): C'est ça.
M. Brassard: Dans votre mémoire, il y a une partie qui m'a
fait sursauter, qui concerne le harcèlement sexuel dans les
établissements collégiaux. Et, à la lecture du
mémoire, on conclurait que ça a pris ou que ça a une
ampleur étonnante et même surprenante dans le réseau. Sur
quoi vous appuyez-vous pour faire une affirmation pareille?
Mme Graveline: Bon, écoutez, moi, je fais
déjà partie d'un comité contre le harcèlement
sexuel au cégep de Granby, Haute-Yamaska. Ça fait trois ans que
je suis dans ce cégep-là, puis j'en ai vu, des cas, et je suis
sûre que vous resteriez surpris des cas que j'ai pu voir. Les
professeurs, quand ils sont dans la classe, ce n'est pas possible les choses
qui peuvent se passer. Je pourrais vous donner un exemple un peu extrême.
Il y a un professeur qui est entré dans une classe à Granby et,
dans le cadre d'un cours de philosophie, il a dit: Toutes les filles devraient
se faire violer au cours de leur vie, parce que c'est une bonne façon...
Je ne me souviens pas de l'expression qu'il avait prise pour ça, mais,'
je veux dire, ça, c'est courant, ce n'est pas quelque chose... Il ne
faut pas le cacher. Puis, ça, c'est un manque dans tous les
cégeps. Certains cégeps, par exemple, ont un comité contre
le harcèlement sexuel, ils ont des choses comme ça. Ce n'est pas
l'ensemble des cégeps qui l'ont, puis c'est nécessaire, je pense.
Quand on voit une réforme comme ça, des collèges, c'est
nécessaire aussi qu'on voie le côté du harcèlement
sexuel. C'est un fait d'actualité. Ça ne date pas d'hier, puis,
de jour en jour, j'en vois de plus en plus.
M. Brassard: Est-ce que de pareils comités existent dans
tous les cégeps?
Mme Graveline: Un comité comme ça, si vous voulez,
c'est le cégep qui décide d'en former un s'il en voit la
nécessité. Il y a certains cégeps où les
professeurs ne sont pas tout à fait d'accord avec l'idée d'avoir
un comité contre le harcèlement sexuel parce que, en grande
partie, c'est les professeurs qui sont touchés. Puis, les plaintes,
c'est souvent à cause de certains professeurs. Donc, il y a bien des
cégeps qui ont de la difficulté à faire implanter
ça chez eux à cause, justement, des syndicats à
l'intérieur, soit au niveau de l'administration ou au niveau du syndicat
des professeurs.
M. Noël: Je pourrais peut-être rajouter
là-dessus. C'est que, justement, on voit, avec des
éléments aussi importants que ça, la place des femmes dans
le réseau collégial, ce qui se passe exactement, que ce soit les
places pour les personnes handicapées ou que ce soit les places pour les
gens qui viennent des minorités ethniques. On voit ici que, dans cette
réforme, il manque beaucoup d'éléments.
Ce que l'on demande à la ministre, c'est de faire,
premièrement, un bilan sérieux du système
d'éducation à tous les niveaux: primaire, secondaire,
collégial et universitaire. Tant et aussi longtemps qu'il n'y aura pas
de bilan de fait, sérieux, précis, on ne pourra pas faire de
réforme du système d'éducation ici, au Québec.
Jamais on ne peut réussir à réformer le système
d'éducation d'une façon qui peut être la bonne en y allant
par pièces, en y allant par petits morceaux, doucement, tranquillement.
Ce n'est pas la bonne façon de procéder parce que, oui, il y a
interrelation entre primaire, secondaire, collégial, universitaire. On
ne peut nier ces interrelations-là. La première étape
à faire c'est ce qu'on demande au gouvernement, ce qu'on demande
aux intervenants et intervenantes c'est de faire un bilan du
système d'éducation à tous les niveaux d'étude.
C'est la première chose qui doit être faite avant d'instaurer une
réforme ou quoi que ce soit, à n'importe quel niveau. Merci.
Le Président (M. Gobé): Alors, merci beaucoup. Cela
met donc fin à votre intervention. Vous pouvez donc maintenant vous
retirer et je demanderai au groupe suivant, soit les représentants de
l'Association des manufacturiers du Québec, de se présenter en
avant. Et la commission est maintenant suspendue.
(Suspension de la séance à 17 h 20)
(Reprise à 17 h 23)
Le Président (M. Gobé): La commission va maintenant
reprendre ses travaux. Il me fait plaisir de vous accueillir à cette
table en avant, à cette commis- sion. Alors, je demanderais au
porte-parole de votre groupe de bien vouloir présenter les gens qui
l'accompagnent et de se présenter lui-même par la suite, et,
après, bien, nous pourrons commencer les travaux.
Association des manufacturiers du Québec
(AMQ)
M. Charland (Gaston): II me fait plaisir de... Je vais
peut-être commencer en me présentant, Gaston Charland, de
l'Association des manufacturiers du Québec. Je suis responsable de tout
ce qui s'appelle le dossier formation et apprentissage au niveau des
entreprises manufacturières. À ma droite, j'ai Éric Hubar
Meunier, qui est directeur de la recherche et analyse à l'Association
des manufacturiers du Québec; j'ai aussi Jean McMaster, directeur de la
formation chez IBM Canada; à ma gauche, j'ai M. André Goyette,
directeur de la formation chez Alcan.
Le Président (M. Gobé): Messieurs, bienvenue. Vous
avez maintenant la parole pour une période d'environ 20 minutes.
M. Charland: Je voudrais procéder à la brève
lecture de notre mémoire. En premier lieu, l'Association des
manufacturiers du Québec est heureuse de constater que le gouvernement
reconnaît, par les projets de loi 82 et 83, ainsi que par le projet de
règlement sur le régime des études collégiales, la
nécessité d'apporter des modifications substantielles au
réseau collégial pour atteindre des objectifs mieux
adaptés à la réalité du marché du
travail.
Lors de notre présence en commission parlementaire au mois de
novembre 1992, nous avions exprimé la nécessité que le
réseau d'éducation puisse répondre adéquatement
à un besoin principal des manufacturiers: «la capacité
d'obtenir, autant à travers le programme régulier de
l'enseignement que pour le programme d'éducation aux adultes, du
personnel compétent, préparé et adapté à la
réalité de l'industrie manufacturière». Ce personnel
constitue et constituera, pour les années à venir, l'actif
premier de l'entreprise. Nous avions également souligné que ce
besoin ne s'exprime pas seulement en termes de compétence, mais aussi en
fonction d'un calendrier serré de réalisation.
Le gouvernement propose, dans son exposé sur la formation
technique, des programmes plus souples et mieux adaptés aux besoins
dictés par le marché du travail. Plusieurs éléments
apportés par l'Association des manufacturiers du Québec ont
été retenus et notre analyse nous permettra de bien
évaluer si ces éléments s'inscrivent dans une
démarche qui permettra d'atteindre les objectifs identifiés par
les manufacturiers. Ce premier pas d'une trajectoire commune de formation
technique ne peut être suffisant que dans la mesure où cette
réorganisation des programmes atteint pleinement toutes les exigences du
secteur privé.
Dans cette perspective, nous avions exposé la volonté des
manufacturiers de voir instaurer l'approche
qualité pour les études techniques. Ce concept vise
à identifier les besoins du client, c'est-à-dire que les
étudiants, étudiantes et les travailleurs, travailleuses en
emploi aient la formation nécessaire pour leurs rôles
immédiats et futurs dans l'entreprise. Est-ce que les services fournis
à travers le réseau collégial sont en mesure de
répondre à ce besoin? Est-ce que les moyens utilisés dans
l'enseignement permettent d'acquérir le savoir-faire requis? Est-ce que
la méthode d'évaluation proposée garantit une
certification de la qualité des services offerts en fonction de ce
besoin? Un autre élément doit être examiné: Quel est
le processus envisagé pour produire, à travers une
stratégie de mobilisation des ressources humaines, l'engagement du
personnel pour atteindre cet objectif de qualité?
On doit pouvoir répondre à ces questions pour
déterminer l'efficacité du système proposé. Nos
commentaires tenteront de vous présenter le point de vue de
l'Association des manufacturiers du Québec sur plusieurs
éléments de cette réflexion. En premier, nous
établirons succinctement les besoins des clients en révisant les
services fournis, les moyens utilisés et la responsabilisation du
personnel. En deuxième lieu, nous commenterons la méthode
d'évaluation en apportant des commentaires sur les pouvoirs réels
de la commission d'évaluation. Nous terminerons notre exposé en
traitant de diverses dispositions qui ont engendré des commentaires de
la part des manufacturiers.
Les besoins des clients. La formation technique nécessite, nous
en convenons, une formation générale qui permet à un
étudiant ou à un travailleur d'assumer pleinement ses
responsabilités sociales. Cependant, les innovations technologiques de
l'industrie manufacturière déterminent les besoins actuels et
futurs autant de l'étudiant que du travailleur. En effet, la
compétitivité des entreprises repose en grande partie sur la
présence d'une main-d'oeuvre qualifiée. L'étudiant actuel
d'un cégep rejoindra les rangs du marché du travail dans un
délai normal de trois années. Ce groupe doit pouvoir combler un
besoin en main-d'oeuvre qualifiée qui doit apprendre les nouvelles
techniques et qui sera tenue de se perfectionner tout au long de sa
période de vie active. De même, le travailleur en emploi se voit
présentement dans l'obligation de se perfectionner pour être en
mesure d'assumer pleinement ses responsabilités dans l'entreprise. Ce
processus de formation continue évoluera graduellement au fur et
à mesure qu'il y aura une diminution de nouveaux candidats sur le
marché du travail. Une préoccupation croissante sera donc de
conserver la main-d'oeuvre active plus longtemps. Dans ce contexte, la
formation technique doit être ouverte, adaptable et orientée vers
les besoins du marché du travail.
Les moyens mis en oeuvre constituent des éléments
susceptibles de rejoindre cet objectif. La redéfinition des programmes
par la méthode de compétence correspond à l'obligation de
savoir-faire. L'approche modulaire permettra également, autant à
l'étudiant qu'au travailleur, de progresser sur cette voie de formation
continue. De plus, l'attestation d'études collégiales, qui
s'inscrit dans un cadre moins rigide, favorisera la mise sur pied de programmes
rejoignant les besoins du secteur privé et servira de base pour adapter
ceux-ci aux exigences de la formation continue elle-mêmes dictées
par les réalités du marché. (17 h 30)
Par conséquent, le processus de reconnaissance des acquis
expérientiels deviendra de plus en plus important. Il faut s'assurer que
ce processus soit efficace afin d'éviter des retards inutiles et
coûteux. L'expérience actuelle de l'industrie
manufacturière nous révèle que cette étape de la
formation technique dépend souvent du dynamisme et de
l'expérience de l'organisation chargée de reconnaître ces
acquis. En effet, souvent, les employés d'un cégep doivent
assumer le rôle de juge et partie en regard de la reconnaissance des
acquis et de l'offre de cours. La présence d'un système
renouvelé, bâti sur la méthode par compétence
bonifiera l'expérience acquise sur le marché du travail en autant
qu'il y ait un partenariat efficace avec le monde du travail qui pourra exercer
un certain contrôle sur l'administration du régime.
Dans la même optique, les liens nécessaires avec
l'industrie nous permettent de nous interroger sur la valeur réelle du
comité national des programmes d'études techniques. Le
gouvernement a institué une Société
québécoise de développement de la main-d'oeuvre pour
«favoriser la participation des divers intervenants aux
activités de développement de la main-d'oeuvre des
établissements publics d'enseignement». Cette
Société a pour rôle d'identifier les besoins et de
favoriser la concertation de comités sectoriels de main-d'oeuvre.
Comment peut-on alors justifier la mise sur pied d'un comité national
des programmes qui aurait un effet duplicateur avec les activités de la
Société?
De plus, les modifications apportées au conseil d'administration
d'un collège prévoient la nomination de «deux personnes
nommées par le ministre et choisies au sein des entreprises de la
région oeuvrant dans les secteurs d'activités économiques
correspondant aux programmes d'études techniques mis en oeuvre par le
collège». Le gouvernement prévoit également une
personne «parmi celles proposées par le conseil régional de
la société régionale de développement de la
main-d'oeuvre de la région où est situé le
collège». Les manufacturiers ont de fortes réserves sur
cette façon de procéder. Il est illusoire de croire que, dans le
contexte économique actuel, nous puissions convaincre des dirigeants
d'entreprises d'être présents à autant de conseils
.où leurs intérêts feront l'objet de discussions.
Quelle est la portée réelle des responsabilités que
nous demanderons aux entreprises d'assumer? À notre avis, il serait
préférable de centraliser l'intervention de l'industrie
manufacturière et cette centralisation peut s'effectuer en respectant
les mécanismes déjà institués par la
société québécoise. Le gouvernement aurait avantage
à limiter les structures de l'enseignement pour favoriser une pleine
participation des entreprises,
motivées par des résultats tangibles dans leur secteur
d'activité. Toutefois, si le gouvernement décidait de
procéder à la création du comité national des
programmes, des directives claires et précises devraient être
émises pour s'assurer que le comité agisse en pleine
cohésion avec les divers mécanismes de la
Société.
Étant donné le besoin de coordination entre le MESS et le
MEQ, l'harmonisation des programmes secondaire-collégial constitue un
autre élément d'inquiétude. Ce problème a
été souligné à maintes reprises par les
intervenants en commission parlementaire. Des mesures concrètes
devraient être prises pour remédier à l'épineux
problème que constitue le partage des champs de responsabilité.
Un maillage réussi devrait permettre une meilleure cohésion dans
une région donnée en ce qui concerne les programmes offerts. Dans
le même sens, la hausse des critères d'admission au
collégial, que nous appuyons, ne doit pas se traduire par une tendance
à allonger les programmes au niveau secondaire en formation
professionnelle.
Responsabilisation. Cette nouvelle vision de l'enseignement par
compétence nécessite la mobilisation des ressources humaines. Sur
ce point, beaucoup de questions méritent une attention
particulière. En premier, les programmes par compétence modifient
la méthode dite par discipline. Deuxièmement, la
non-imputabilité des chefs de département doit être
corrigée. Troisièmement, la commission des études doit,
dans un délai rapide, remplacer la commission pédagogique.
Quatrièmement, le mode d'organisation du travail devra être
révisé pour permettre une plus grande souplesse pour s'adapter
aux programmes par compétence. Cinquièmement, la carte des
options techniques doit s'appliquer tant à l'éducation des jeunes
que des adultes.
Toutes ces modifications sont conditionnelles à l'acceptation de
modifications importantes aux conventions collectives. Le gouvernement peut-il
garantir que ces modifications seront acceptées? Plusieurs
interrogations peuvent être soulevées relativement à la
déclaration du gouvernement à l'effet qu'«aucun
élément de renouveau proposé n'entraîne en soi des
modifications aux conventions collectives en vigueur».
L'évaluation. L'Association des manufacturiers du Québec
se déclare particulièrement favorable à l'institution
d'une commission d'évaluation. Nous sommes d'accord avec le principe
qu'un organisme indépendant atteste une reconnaissance ou une
certification sur la capacité d'un organisme à livrer un produit
de qualité. Son pouvoir déclaratoire constitue, à notre
avis, un premier pas dans un processus d'évaluation efficace. Son
rôle devrait être ultérieurement modifié pour
permettre à la Commission d'exercer éventuellement un pouvoir de
sanction. La recommandation au ministre pourrait être remplacée
par un pouvoir de sanction, en donnant au ministre le pouvoir d'intervenir dans
un délai de temps donné s'il est en désaccord avec la
décision de la Commission.
Les dispositions diverses. Les cours obligatoires d'une langue seconde
répondent aux exigences du mar- ché du travail. Ces cours de base
obligent l'étudiant à prendre conscience de ces exigences.
Étant donné la grande diversité de la clientèle, il
y aurait sans doute possibilité de permettre à des
étudiants qualifiés, en raison de leurs connaissances
antérieures, d'être libérés de cette obligation.
La mesure financière visant la responsabilisation et l'incitation
à la réussite constitue un minimum auquel souscrit l'Association
des manufacturiers du Québec. En plus, les dispositions de l'article 33
devraient être maintenues pour assurer que la direction des
collèges exerce un certain contrôle dans les cas particuliers
où l'étudiant décide de poursuivre des cours malgré
les coûts minimums.
La mise en place des programmes nouveaux nécessite une
présence assidue de l'entreprise qui doit allouer à ses experts
le temps nécessaire pour participer à ces programmes. Aussi, ces
programmes augmentent le coût que doivent supporter les manufacturiers.
Les diverses formules de formation en alternance ou de stages en entreprise
entraînent des déboursés pour les entreprises
participantes. Le gouvernement devrait considérer l'établissement
de crédits d'impôt pour les dépenses des entreprises dans
les activités suivantes: les dépenses reliées à la
délégation des experts en provenance des entreprises pour toutes
les activités liées à leur participation, à la
confection des programmes et à leur application. Ceci constituera un
incitatif à l'engagement des entreprises. Les dépenses
reliées aux stages en entreprise devraient être également
admissibles.
Conclusion. En terminant, l'Association des manufacturiers veut
souligner l'urgence d'organiser la formation technique en fonction des besoins
de l'industrie manufacturière. Comme nous vous l'avons
témoigné, cette urgence est engendrée par une obligation
de résultat à court terme. Par contre, il faut garder à
l'esprit que l'évolution de l'industrie nécessitera d'autres
ajustements dans un délai rapproché. Les cours devront être
éventuellement disponibles sur une plus grande période, s'adapter
aux horaires de l'entreprise et permettre un recyclage et un perfectionnement
continus. L'organisation de stages en entreprise pour les professeurs devra
être considérée. En somme, des ajustements majeurs seront
requis ultérieurement pour compléter cette réforme de
l'enseignement collégial.
Voici le mémoire que nous avions à vous
déposer.
Le Président (M. Gobé): Alors, merci, M. Char-land.
Maintenant, Mme la ministre, vous avez la parole pour des questions.
Mme Robillard: Merci, M. le Président. Je salue les
membres de l'Association des manufacturiers du Québec et je vous
remercie d'être revenus en commission parlementaire une deuxième
fois, sur le même sujet, pour vous prononcer sur le renouveau
collégial.
Ce que je comprends de l'Association des manufacturiers du
Québec, c'est que, de façon globale, il y a un appui au renouveau
collégial, particulièrement dans
le domaine technique, mais que vous avez des points d'interrogation ou
des inquiétudes sur des sujets très précis. J'aimerais
ça les comprendre vraiment, et c'est pour ça qu'on va en discuter
ensemble aujourd'hui. (17 h 40)
D'abord, il y a vos inquiétudes sur le comité national des
programmes techniques, telles qu'indiquées à la page 6 de votre
mémoire, et, surtout, votre crainte de duplication, si c'est ça,
là, avec la Société québécoise de
développement de la main-d'oeuvre. Je voudrais bien saisir où est
votre inquiétude, parce que, dans ma tête, il est tout à
fait clair que ce sont deux mandats complètement différents. Il
doit y avoir un lien entre les deux, mais les mandats de base sont
différents. Alors que la société québécoise
s'occupe des programmes de main-d'oeuvre, avec toute une structure qui est dans
un projet de loi, comme vous le savez, ici, on parle d'un comité
national des programmes techniques. Donc, la société
québécoise est axée sur des programmes de main-d'oeuvre,
alors que ce comité-ci est un comité que je peux qualifier
d'académique, qui s'occupe de programmes d'études
académiques.
Quand on spécifie, dans le document sur le renouveau
collégial, que, au niveau de ce comité-là, la ministre,
d'ailleurs, qui va être présente au comité, va soumettre,
par exemple, les objectifs et les standards de tous les programmes techniques
parce que, vous savez, on décentralise la responsabilité
des activités d'apprentissage, mais on conserve la responsabilité
des objectifs et des standards va regarder le calendrier des
révisions de programmes et d'ajouts de programmes, va regarder la carte
intégrée des programmes techniques et secondaires sur l'ensemble
du territoire, c'est vraiment un comité qui est
«focussé» sur les programmes académiques, sur le
contenu des programmes académiques. Alors, où est votre
crainte?
M. Charland: Bon, écoutez, je pense que je vais essayer de
vous expliquer d'une façon sommaire notre préoccupation. Notre
démarche avec la Société québécoise de
développement de la main-d'oeuvre est une démarche où nous
regroupons les forces du marché à l'intérieur d'un
organisme dont l'objectif est d'être capable de faire des
démarches dans le domaine de la formation de la main-d'oeuvre. Une
partie importante de ces démarches-là nous est fournie par un
organisme qui s'appelle les cégeps comme tels. La démarche que
nous favorisons est de dire: Bien, nous avons des gens qui sont, à
l'intérieur de la société québécoise, des
clients qui déterminent un petit peu quelles sont les exigences à
l'intérieur de leurs entreprises et, ensuite, s'adressent au niveau du
réseau collégial pour que ces exigences-là soient
complétées en fonction des besoins qu'ils rencontrent.
On s'aperçoit que ce lien-là qu'on essaie de créer
présentement est quelque chose qui peut être le plus efficace. On
s'aperçoit que, si on veut avoir des étudiants qui vont recevoir
une formation au niveau collégial, qui, lorsque leur formation va
être complétée, vont entrer dans les entreprises et vont
être déjà dans un milieu connu, ce qu'on doit faire, c'est
de s'impliquer à partir du départ. Et la façon de
s'impliquer à partir du départ, on se dit: Présentement,
il y a une société québécoise sur laquelle on a
accepté de siéger et, à partir de cet organisme-là,
pour un secteur industriel donné, on va identifier nos besoins pour les
années à venir. À partir des besoins, on va travailler
à identifier les qualifications des personnes dont on a besoin et,
ensuite, on va se retourner de bord et demander aux gens qui ont l'expertise de
faire les gestes nécessaires, soit de développer des programmes
pour que les gens puissent acquérir des compétences. C'est de
cette façon que l'Association des manufacturiers du Québec veut
travailler avec les cégeps.
C'est pour ça que, lorsqu'on voit le comité national, on
se dit: Bien, voilà, ça ne répond pas à la
dynamique qu'on veut créer. Si on veut développer
réellement des gens, au niveau des entreprises, qui s'impliquent dans le
domaine de la formation, il va falloir trouver des moyens qui vont leur
permettre de transmettre leurs exigences et aussi d'être
écoutés et, après ça, d'être en mesure de
savoir des réponses qui répondent directement aux critères
de l'entreprise manufacturière.
Mme Robillard: Alors, écoutez, M. Charland, je pense qu'il
va falloir qu'on discute peut-être encore plus longuement de ce
sujet-là, parce qu'il m'apparaît, à mon point de vue, qu'il
y a peut-être une confusion dans la perception du rôle de la
Société québécoise de développement de la
main-d'oeuvre. Elle est peut-être là, la confusion. C'est dans ce
contexte-là qu'on va peut-être avoir à rediscuter ensemble,
parce qu'il est très clair que, que ce soit le secondaire au plan de sa
formation professionnelle ou le secteur technique au collégial, par
exemple, quand il y a la révision des programmes par compétence
et que, justement, là il faut identifier les compétences que la
personne devra avoir une fois rendue sur le marché du travail, ça
se fait nécessairement avec les gens du milieu du travail. Prenons cet
exemple-là. Donc, la révision des programmes par
compétence, ce n'est pas la société
québécoise qui va faire ça. Parlons des objectifs et des
standards des programmes académiques. Ce n'est pas la
société québécoise qui va faire ça. Il y a
un lien entre les deux, mais il n'y a pas de duplication de mandats. Ce qu'il
est important d'assurer, c'est toujours le lien. Alors, c'est dans, ce
contexte-là.
Suite à votre exposé d'aujourd'hui, je pense que ça
va être nécessaire qu'on se parle de façon plus
détaillée, parce que, de fait, ce sont peut-être les
mêmes intervenants qui siègent au niveau de la
société québécoise que certains intervenants,
aussi, qu'on pourrait retrouver au comité national, et c'est
peut-être là votre inquiétude. Mais, en plus, vous amenez
la notion de la composition du conseil d'administration. Dans votre
mémoire...
M. Charland: Bien, écoutez...
Mme Robillard: ...vous dites: De plus, la composition du conseil
d'administration, et vous concluez en disant: «Les manufacturiers ont de
fortes réserves sur cette façon de procéder.» Je ne
sais pas si c'est par rapport au C.A. ou au comité national. Et vous
dites: On voudrait centraliser. Pourriez-vous m'expliquer ça?
M. Charland: Écoutez, je pourrais peut-être
l',expliquer. C'est que je vous ai fait part un petit peu de notre
démarche au niveau de la formation, comment on pense pouvoir être
capables d'impliquer les entreprises. Dans ce sens-là, nous autres, on
fait le raisonnement suivant. On se dit: Bien, si on demande aux entreprises
impliquées dans un secteur donné avec un cégep
donné d'aller siéger sur ce cégep-là, ce n'est pas
comme ça qu'on va réussir à être capables de dire
aux gens: Bien, venez travailler tous ensemble dans un domaine où on va
élaborer, pour un secteur donné, la formation. Ça va
être plutôt deux initiatives qui vont se prendre en même
temps, touchant le même client.
Si vous avez raison, Mme la ministre, et que vous nous dites: Eh bien,
écoutez, c'est au niveau du cégep que ça doit être
fait, ce que je vous dis, dans le document, c'est: Si, toutefois, c'est le cas
et que vous décidez de procéder de cette façon-là,
nous autres, on veut s'assurer que, lorsque les besoins des manufacturiers ont
été identifiés, les manufacturiers puissent avoir une
influence au niveau des programmes qui vont répondre à leurs
exigences et que ça soit fait en fonction de cette façon de
procéder là. Et c'est pour ça que, dans notre document, on
vous a fait part de l'approche qu'on souhaitait que le gouvernement prenne
à notre égard.
La raison fondamentale de ça, c'est que les entreprises ont
certains besoins. Si on veut que les entreprises s'impliquent, on doit
s'assurer qu'elles pourront avoir une voix au chapitre lorsque les programmes
vont être faits, pour s'assurer que ça réponde vraiment aux
besoins de l'entreprise. Et tout le monde va être gagnant, parce que les
gens auront la formation qui sera appropriée, les entreprises vont
s'impliquer de plus en plus et les résultats seront, avec les
années qui s'en viennent, des résultats qui satisferont la
population.
Maintenant, ce qu'on ne veut pas je vais peut-être
répondre par l'inverse, ça va être encore plus facile de
comprendre c'est que, à un moment donné, on arrive avec
deux structures. Et là, c'est notre inquiétude. Peut-être
que c'est mal fondé, mais c'est notre inquiétude qu'on arrive
avec deux structures. Une de ces structures-là fait que le temps qu'on
passe à travers une, qu'on arrive à travers l'autre et,
après ça... C'est deux groupes qui décident et, ensuite,
c'est un groupe qui recommande. Là, je vous dis qu'on a des
inquiétudes sur la pertinence, surtout que, si vous vous souvenez,
lorsqu'on a fait notre première présentation, on vous a
mentionné que les programmes, présentement, entre autres,
ça prenait cinq à sept ans sur certains chapitres avant qu'ils
soient corrigés. Nous autres, on vous dit... (17 h 50)
Mme Robillard: Parfois, c'est plus long, M. Charland.
M. Charland: Pardon?
Mme Robillard: Parfois, c'est plus long.
M. Charland: O.K. Vous me rassurez, là. Je pensais que je
vous avais offensée.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Charland: Nous autres, les manufacturiers viennent nous voir,
ils s'adressent à nous et ils nous disent: Écoutez, on veut bien
et c'est là, peut-être, le message qu'il faut comprendre
être capables de fonctionner avec les cégeps, sauf qu'il
faut se donner les éléments qui vont nous permettre de
réussir. Et cinq ans, je m'excuse, mais nos directeurs d'usine, nos
présidents de compagnie nous disent: C'est inacceptable.
Mme Robillard: Ça va plus vite que ça.
M. Charland: Pas pour nous autres. C'est inacceptable pour tout
le monde.
Mme Robillard: Vous avez raison. Vous avez tout à fait
raison, M. Charland. Alors, ça m'amène à l'autre sujet:
votre inquiétude sur l'harmonisation secondaire-collégial. Vous
l'aviez aussi soulevé à la commission parlementaire de l'automne,
vous y revenez, malgré le fait qu'il y a certaines mesures dans le
renouveau collégial, et là vous me dites: II faudrait des mesures
concrètes pour remédier à ce problème
d'harmonisation secondaire-collégial. C'est en bas de la page 7 de votre
mémoire. Est-ce que l'Association des manufacturiers a des suggestions
concrètes à me faire sur ce sujet-là?
M. Charland: Écoutez, c'est du domaine de
l'administration. Ce que je réalise, c'est qu'il y a un groupe ou une
équipe qui travaille au niveau de l'harmonisation des programmes
secondaire-collégial et, moi, je vous dis: II y a des résultats
qui se manifesteraient plus rapidement peut-être si on essayait d'ouvrir
la discussion avec des organismes externes. Je ne sais pas si vous l'avez fait
à ce moment-ci, mais les commentaires que nous avons chez les
manufacturiers, c'est qu'il y a encore une zone grise entre les deux
organismes. Je n'ai pas l'autorité pour prendre dés
décisions entre le secondaire et le collégial, sauf que, nous
autres, on s'aperçoit qu'il y a un problème. Et ce que je vous
mentionne, c'est que ce qui arrive présentement, c'est que vous nous
dites que vous allez mettre des critères d'admission au
collégial. Nous avons dit que nous les appuyons, mais on s'interroge un
petit peu sur ce qui va se passer avec les programmes au niveau secondaire. On
a un petit peu d'inquiétude à ce niveau-là. Ça fait
que c'est une préoccupation que nous avons.
Par contre, nous ne sommes pas des spécialistes
dans ce domaine-là et ce que nous vous communiquons, surtout,
c'est peut-être de vous assurer que, lorsqu'on s'adresse soit à un
cégep, soit à une commission scolaire, on soit en mesure d'avoir
les services et qu'on ne se fasse pas dire: Bien, écoute, tes cours de
secrétariat, moi, je vais les donner et les autres, je vais les donner,
et que, en plus et là, j'espère qu'on n'est pas trop
écoutés on se fasse dire: Bien, moi, je suis capable
d'aller chercher une subvention à l'extérieur. À un moment
donné, vous savez comme moi qu'il y a d'autres particularités
dans ce dossier-là, et on ne peut pas se permettre de se faire
négocier comme ça.
Ce qui est important pour les manufacturiers, c'est d'avoir les
services. Quand on mentionne J'approche qualité, c'est ça,
essentiellement, c'est d'avoir les services. Et, nous autres, on est
prêts à reconnaître que vous les donnez. Ça, c'est un
des problèmes auxquels on vous demande d'apporter une attention
particulière.
Mme Robillard: Votre analyse est tout à fait exacte, M.
Charland. On a des problèmes dans ce domaine-là. Ils sont
identifiés. Il y a certaines mesures qui sont dans le renouveau
collégial, mais, au-delà de ça, il y a aussi un plan
d'action qui se prépare pour la prochaine année pour arriver
à cet objectif d'harmonisation entre les deux réseaux, au niveau
de la formation professionnelle de façon toute particulière.
Le Président (M. Gobé): Merci, Mme la ministre. M.
le député de Lac-Saint-Jean, vous avez maintenant la parole.
M. Brassard:. Très brièvement, j'aimerais
être bien sûr, d'abord, de votre vision des choses. Vous dites, en
page 4 de votre mémoire: «La formation technique nécessite
[...] une formation générale qui permet à un
étudiant ou un travailleur d'assumer pleinement ses
responsabilités sociales. Cependant, les innovations technologiques de
l'industrie manufacturière déterminent les besoins actuels et
futurs autant de l'étudiant que du travailleur.»
J'ai lu votre mémoire et j'ai eu l'impression un peu
désagréable que vous privilégiez de façon
très nette une formation technique très pointue. En
matière de formation générale, ça doit aller plus
loin que de permettre d'assumer ses responsabilités sociales. Il faut
que l'étudiant en formation technique puisse être capable, comme
le disait le Conseil des collèges, de maîtriser un certain nombre
de capacités génériques transdisciplinaires,
transférables: maîtrise de la langue eii tant qu'outil de
communication de pensée; capacité intellectuelle d'analyse, de
pensée logique, de raisonnement, de synthèse, de
résolution de problèmes, de critique rationnelle, de jugement;
méthode de travail intellectuelle et disposition à apprendre
constamment par soi-même. C'est ce qu'on appelle la formation
fondamentale.
Et j'espère me tromper, mais la formation générale,
j'espère que vous ne la souhaitez pas uniquement pour permettre
d'assumer ses responsabilités sociales.
Ça doit être plus que ça. Ça doit être
beaucoup plus que ça et ça doit permettre, justement, à un
étudiant ou à une étudiante en formation technique
d'être en mesure, maîtrisant cet ensemble de capacités
intellectuelles, de s'adapter aux changements technologiques, et non pas
simplement de les former pour des tâches précises et, donc, de
leur donner une formation très pointue. Je pense que ça ne doit
pas être la mission des cégeps. En tout cas, c'est ma vision des
choses. On doit leur donner une formation technique spécialisée,
oui, mais la formation de base doit aller bien au-delà que de leur
permettre d'assumer des responsabilités sociales. Bien au-delà de
ça.
M. Charland: Écoutez, je vais laisser la parole à
mon confrère, M. Goyette, qui est spécialiste dans ce
secteur-là depuis un certain nombre d'années et qui a fait, entre
autres, les réseaux d'enseignement. Ça fait qu'il connaît
aussi les deux parties du dossier. Je peux vous dire que l'approche des
entreprises est une approche, au contraire, qui n'est pas limitative. On a
besoin d'une main-d'oeuvre qui va être de plus en plus ouverte, sauf
qu'il faut que ça réponde à nos besoins. Et, quand je vous
parle d'une main-d'oeuvre qui doit être de plus en plus ouverte, je peux
vous donner un exemple. La résolution de problèmes, ce n'est pas
quelque chose qui est enseigné, à ma connaissance, comme tel au
niveau des cégeps. Là, présentement, on est rendu qu'on va
asseoir, dans certaines entreprises, les travailleurs et travailleuses ensemble
pour qu'ils résolvent des problèmes, puis on s'aperçoit
qu'ils n'ont pas la connaissance de base. Ça fait que, à un
moment donné, la difficulté provient du fait... On se dit: Ils
ont un D.E.C., ils sont qualifiés, comment se fait-il qu'ils n'ont pas
au moins appris à résoudre des problèmes? Mais c'est que
ça ne fait pas partie de la même réalité. C'est pour
ça qu'on dit que ça doit être orienté en fonction de
la réalité du marché du travail. Ça va leur rendre
service.
Maintenant, peut-être que mon confrère pourrait ajouter des
choses intéressantes sur ce domaine-là.
M. Goyette (André): Je crois, bien sûr, qu'il y a la
formation dite générale fondamentale pour former le citoyen, mais
nous croyons aussi qu'on peut former également le citoyen au-delà
d'activités de formation en langues, en philosophie, en éducation
physique et en français. Je crois qu'il faut s'éloigner de ce que
j'appellerais peut-être un certain préjugé ou
stéréotype de la formation technique qui va nettement
au-delà d'une vision purement utilitariste de la formation. Parce que la
formation technique peut aussi contribuer, je crois, au développement de
l'individu, au développement de son identité professionnelle, de
sa contribution à la société. Et on sait que, quand
même, la formation à l'activité de travail est une
dimension importante de valorisation personnelle.
Je reviens un peu à la formation technique. Pour avoir
participé à une consultation, la vision de la formation technique
que l'on entrevoit, nous, les manufactu-
riers, ce n'est pas seulement un aspect strictement opérationnel
ou technique, mais elle comprend également des compétences
sociales afin de pouvoir travailler en équipe, de pouvoir contribuer
à l'amélioration ou à l'optimisation des processus qui
sont, somme toute, des activités qui font appel à des
habiletés beaucoup plus larges et beaucoup moins techniques, au sens
où on peut l'entendre, que d'appuyer sur un bouton «on/off»,
cpmme je l'ai entendu cet après-midi. (18 heures)
Le profil des compétences du travailleur de demain, de l'an 2000,
c'est aussi être capable de développer des compétences
dites d'affaires, de s'engager dans un projet d'entreprise, de comprendre les
dimensions de comptabilité, de finance, donc d'avoir une dimension
au-delà de sa dimension instrumentation, électricité et
autres, qui est strictement technique. Donc, on a des attentes à ce que
les programmes de formation, loin d'avoir un caractère très
pointu, puissent développer à la fois le citoyen et à la
fois un travailleur qui puisse contribuer au succès de son
entreprise.
M. Charland: On comprend vos préoccupations et soyez
assurés qu'on les partage.
M. Brassard: D'autre part, quand vous dites: II faut
répondre aux besoins de l'entreprise, il faut aussi cependant, en
contrepartie, que l'entreprise s'implique. Et on sait on en a
discuté hier avec le Conseil du patronat qu'en matière de
stages dans les milieux de travail, aussi bien que pour ce qui est de la
formation dite en alternance, on ne peut pas dire que l'entreprise
québécoise réponde vraiment, pleinement et de façon
acceptable à l'appel. Il y a pas mal plus de stagiaires qu'il peut y
avoir de stages, là, actuellement dans les entreprises.
Vous recommandez, comme le Conseil du patronat, d'ailleurs, hier,
l'établissement d'un crédit d'impôt, une incitation de
nature financière pour, justement, que les dépenses
reliées aux stages puissent être admissibles à un
crédit d'impôt. En plus, également, vous voulez que soient
admissibles les dépenses reliées à la
délégation des experts en provenance des entreprises pour toutes
les activités liées à la confection des programmes et
à leur application. Est-ce que vous croyez vraiment que la formule du
crédit d'impôt pourrait avoir les effets souhaités et
entraîner, générer, provoquer une plus grande participation
des entreprises particulièrement des PME parce que je pense qu'il
y a un problème surtout du côté des PME à la
mise en place de stages pour les étudiants en formation technique?
M. Charland: Bon, écoutez, si je réponds à
votre question de stage, si je réponds à votre question au niveau
de la formule des crédits d'impôt, ce que, nous autres, nous
demandons dans le document, c'est que les dépenses reliées aux
stages en entreprise devraient être également admissibles. C'est
notre point de vue. Maintenant, ce qu'il faut comprendre de ce qui est
mentionné dans notre document, c'est qu'on se dit c'est toujours
dans l'approche de favoriser l'implication des entreprises que c'est
afin de reconnaître les entreprises qui le font un peu plus, et on pense
que la formule au départ a un certain intérêt. On pense
qu'il y a une certaine période de temps qui va être
nécessaire avant de pleinement atteindre le rythme qui a
été prévu et on dit que, si on continue à
étendre la formule, tel que vous l'a mentionné, vous me dites, le
Conseil du patronat, et si on ajoute d'autres activités à
ça, on va motiver les entreprises qui sont prêtes à faire
certains efforts en leur donnant une sorte d'incitatif et ça va avoir un
effet d'entraînement. L'effet d'entraînement va inciter les
entreprises à être plus présentes.
Après ça, écoutez, est-ce qu'on aura strictement
à discuter d'une question de crédits d'impôt? Notre
objectif est que, en fin de compte, les entreprises participent, les
entreprises investissent beaucoup plus en formation que les crédits
d'impôt qu'ils reçoivent. Et je pense que le raisonnement que nous
faisons, c'est que l'investissement en ressources humaines est un
investissement rentable. Nous croyons que le crédit d'impôt est
peut-être la première étape nécessaire pour
être capable d'atteindre ce résultat-là.
Ça fait que c'est nos commentaires, à ce moment-ci. Il y a
peut-être un de mes confrères...
M. Hubar Meunier (Éric): Juste rapidement, c'est qu'une
chose est certaine: si on veut que le crédit d'impôt soit une
mesure à tout le moins incitative ou efficacement incitative, il faut
s'assurer, et particulièrement dans le cas des PME, qu'on ne soit pas
confrontés à un déluge de papier pour obtenir ces
crédits. Et on sait que, dans plusieurs autres programmes où ces
crédits sont disponibles, au bout de la ligne quand on fait l'exercice,
on se rend compte que ça nous coûte peut-être plus cher
à essayer de les obtenir que ce que ça vaut. Alors, à tout
le moins, si on veut que ce soit un incitatif, c'est une chose qu'il faudrait
regarder très étroitement.
M. Charland: Écoutez, c'est un bon point que j'allais
oublier, mais c'est peut-être pour ça aussi qu'on est très
prudents.
M. Brassard: L'éternel problème de la paperasse
administrative. Une dernière question, M. le Président.
Là, je vous trouve un peu raides, en page 11. Vous voulez la conjugaison
et la combinaison de la taxe à l'échec, puis de l'article 33.
Là, ça va cogner dur. Dans le fond, je lis ce
paragraphe-là, puis ma conclusion, c'est que, au fond, ce que vous
voulez, c'est les expulser, les éjecter du réseau.
M. Charland: Écoutez, ce n'est pas du tout notre objectif
parce qu'on est conscients qu'il y a un coût social qui est relié
à ça. Ce qu'on se dit, c'est que la mesure financière
visant la responsabilisation et l'incitation à la réussite
constitue un minimum auquel souscrit
l'Association des manufacturiers du Québec. Je suis convaincu que
vous allez comprendre que, lorsqu'on dit minimum, ce n'est pas en termes
d'argent, mais il faut faire quelque chose. On est conscients de ça. Ce
qu'on mentionne, c'est que, en plus, les dispositions de l'article 33 devraient
être maintenues pour assurer que la direction des collèges... On
parle d'essayer de leur donner un peu plus de responsabilités au niveau
des collèges. Est-ce qu'il est possible, avec la nouvelle
procédure d'attestation où ils doivent se présenter devant
le bureau de... Excusez, le terme m'échappe.
Mme Robillard: La commission d'évaluation?
M. Charland: Excusez-moi, la commission d'évaluation.
Bien, s'ils arrivaient, puis s'ils soumettaient quelque chose d'intelligent et
qu'ils voulaient s'impliquer et prendre des décisions dans les cas qui
sont difficiles ou abusifs j'ai peur des expressions comme telles
qu'ils aient quelque chose, un raisonnement et que ce soit fait selon une
procédure qui permette qu'on puisse contrôler de quelle
façon s'est faite l'application de l'article 33, est-ce que ça ne
serait pas quelque chose d'encore approprié? Maintenant, ma crainte que
les gens utilisent la procédure de l'article 33 est peut-être
très mince étant donné que, à date, l'article 33
est en vigueur et qu'on s'apercevait qu'il fallait procéder à
d'autres solutions pour corriger le problème.
M. Brassard: C'est parce que le paragraphe, tel qu'il est
écrit, moi, je l'ai compris de façon telle que l'étudiant
qui subit 5 échecs est soumis à des frais de scolarité de
50 $ par cours.
M. Charland: C'est ça.
M. Brassard: Bon. Et là, ce que vous dites, c'est que
celui qui paie, là, le cégep devrait essayer d'appliquer
l'article 33 pour l'éjecter du réseau.
M. Hubar Meunier: Ce qu'on dit tout simplement, c'est que les 50
$ additionnels, c'est certainement une mesure, d'ailleurs, à laquelle on
souscrit, sauf que, si ça fait 15 échecs, puis qu'il paie
toujours ses 50 $, il y aurait peut-être lieu, à un moment
donné, de penser que c'est peut-être un peu abusif, puis il y a
peut-être des moyens de contrôle ou un certain contrôle que
pourrait exercer le cégep. C'est dans ce sens-là qu'il est
écrit, le paragraphe.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. le
député. Merci, M. Charland, ainsi que les gens qui vous
accompagnent. Au nom des membres de cette commission, nous avons
apprécié votre présentation. Ceci met donc fin aux travaux
de cette journée. Je vais suspendre les travaux à ce soir, 20
heures, en cette salle. La commission est donc maintenant suspendue.
(Suspension de la séance à 18 h 8)
(Reprise à 20 h 4) .
Le Président (M. Bradet): Alors, la commission de
l'éducation reprend ses travaux. Nous écouterons, ce soir, la
Commission-Jeunesse du Parti libéral du Québec et le
Comité national des jeunes du Parti québécois. Alors, M.
Claude Éric Gagné, président de la Commission-Jeunesse du
Parti libéral du Québec, bienvenue à la commission. Je
vous avertis que vous avez 20 minutes pour faire votre intervention.
Auparavant, j'aimerais que vous nous présentiez les gens qui vous
accompagnent.
Commission-Jeunesse du Parti libéral du
Québec (CJPL)
M. Gagné (Claude Éric): Merci, M. le
Président. Tout d'abord, Martin Ménard, à ma gauche,
représentant des jeunes de l'Est de Montréal, ainsi que Claude
Béchard, qui est coordonnateur de la Commission-Jeunesse pour les
affaires politiques.
Alors, je vous remercie beaucoup. Je suis heureux d'être ici
aujourd'hui en tant que président de la Commission-Jeunesse.
J'étais venu déposer le mémoire, il y a quelques mois, sur
le premier dépôt qu'il y avait eu. J'avais déposé...
Avec trois jeunes, on était venus déposer un mémoire.
Depuis ce temps-là, beaucoup d'eau a coulé sous les ponts.
Évidemment, il y a eu le dépôt de la réforme,
réforme que nous avons fait suivre à l'ensemble de nos jeunes
pour pouvoir en discuter, pour pouvoir faire une consultation sur les grands
points de cette réforme-là. Ça nous a menés
à la rédaction, évidemment, d'une position pour, en
commission parlementaire aujourd'hui, vous arriver avec certaines
recommandations à la ministre pour une bonification de cette
réforme-là.
Alors, évidemment, pour la Commission-Jeunesse, c'est très
important, je l'avais déjà dit, cette réforme-là
des collèges. Depuis 25 ans que les collèges sont en action, il
n'y avait jamais eu de changements importants. Présentement, Mme la
ministre va faire des changements importants et, nous, à la
Commission-Jeunesse, on est impliqués dans le dossier depuis le
début. Bien avant le dépôt de la réforme,
évidemment, l'année dernière, il y avait eu un
congrès des jeunes qui avait pris un certain nombre de positions suite
à une tournée et, aujourd'hui, bien, on vient ici pour amener
certaines recommandations à la ministre.
Alors, je passerais maintenant la parole à Martin.
t
Le Président (M. Bradet): Alors, M. Ménard..
M. Ménard (Martin): Alors, comme Claude Éric l'a
mentionné, nous avons déposé un mémoire en
décembre dernier. Ce mémoire comprenait sept
éléments jugés essentiels par les jeunes libéraux
dans l'établissement de la réforme de la ministre.
Le premier élément important de notre mémoire
était de faire des cégeps des partenaires du développement
régional. Nous avions trois axes sur lesquels on
voulait que la réforme se base, sur lesquels on voulait que le
milieu collégial s'engage, c'est-à-dire dans des
sociétés régionales de développement, dans des
structures de développement régional et des stratégies de
développement des structures industrielles. De plus, nous avions convenu
qu'il fallait revaloriser le secteur technique auprès de la population
québécoise. En gros, la ministre a bien inclus nos
recommandations dans sa réforme, et nous en sommes très
satisfaits.
Le deuxième élément important était la
consolidation de la formation fondamentale. La ministre, dans sa
réforme, a bien repris les recommandations de la Commission-Jeunesse et
y a même ajouté quelques points. Les points que nous avions
demandés à la ministre, c'était: un cours additionnel en
langues et littérature se rapportant au domaine de formation; une
meilleure définition des objectifs des cours de français et de
philosophie; et une redéfinition du système de cours
complémentaires. De plus, la ministre a ajouté deux cours
complémentaires en langue seconde, dont un se rapportant au domaine de
formation, ce qui nous satisfait également.
Le troisième élément important de notre
mémoire était pour éviter le prolongement indu des
études. À cette époque, nous demandions à la
ministre un plan d'action visant à améliorer la réussite
scolaire par un resserrement de l'encadrement des étudiants; par une
réforme des programmes d'orientation au secondaire; et, finalement, par
une amélioration des ressources consacrées aux services
d'orientation. De son côté, la ministre a décidé
d'élaborer une session d'accueil et d'intégration pour les
nouveaux inscrits qui sont indécis et ont des difficultés au
secondaire, et aussi d'amener les frais accélérateurs.
Le quatrième élément important de notre
réforme était de faire un secteur technique branché sur
les besoins du marché du travail. Nous avions amené, à
l'époque, certains points qui étaient de faire des
filières décloisonnées au niveau professionnel; d'inclure
dans la formation technique un stage en entreprise; et, finalement, d'assurer
une mise à jour continue des programmes techniques en impliquant les
cégeps et les entreprises. En général, tous ces points ont
été bien repris dans la réforme.
Le cinquième élément était de resserrer les
exigences au niveau préuniversitaire. Nous demandions qu'on
réduise la banque de cours offerts afin d'uniformiser les
différents programmes. De plus, nous demandions aussi un examen
synthèse pour chaque concentration. Ces points sont revenus dans la
réforme.
Le sixième élément, c'était la mesure de la
qualité de l'enseignement. Nous demandions, à l'époque,
que les programmes et les établissements collégiaux soient
évalués par un intervenant indépendant, ce qui a
été repris dans la réforme par la Commission
d'évaluation de l'enseignement collégial. De plus, les
professeurs seront aussi évalués par les cégeps. (20 h
10)
Le septième et dernier élément était le
finance- ment du réseau collégial. La Commission-Jeunesse a
toujours proposé que le principe actuel de gratuité des
études collégiales soit maintenu. De son côté, la
ministre a décidé d'instaurer son ticket
accélérateur.
Je vais passer la parole à Claude pour qu'il vous donne les
propositions de la Commission-Jeunesse.
Le Président (M. Bradet): M. Béchard.
M. Béchard (Claude): Comme Martin l'indiquait, M. le
Président, la Commission-Jeunesse avait plusieurs propositions qui ont
été écoutées par la ministre et certaines se
retrouvent effectivement dans son projet de réforme. Cependant, on a
remarqué qu'il y a certains éléments qui
mériteraient peut-être d'être approfondis. Il faudrait
peut-être aller un petit peu plus loin, profiter du contexte pour aller
de l'avant et ajouter certains éléments qui reflètent la
pensée des jeunes qu'on a consultés au cours de la
dernière année.
Premièrement, le point qu'on avait, qui était
peut-être un des plus importants, c'est l'apport que les cégeps
ont au niveau du développement économique des régions.
Souvent, le cégep, c'est le centre de formation le plus avancé
dans une région périphérique, et on sait, avec la
dernière réforme du développement régional de M.
Picotte, que les régions doivent faire un effort de planification
stratégique pour déterminer leurs forces, leurs faiblesses et en
arriver à préparer une planification stratégique.
À ce niveau-là, nous, on croyait bon que la ministre
indique dans sa réforme que les cégeps devaient participer aux
nouveaux conseils régionaux de développement. Même si ce
n'est pas inscrit comme tel dans la réforme, les intervenants
régionaux ont reconnu l'apport des cégeps et, après un
premier bilan des conseils régionaux de développement, on
remarque que la majorité ont, au sein de leurs instances, des
représentants des cégeps et des collèges. Donc, sur ce
point-là, on ne peut que féliciter les intervenants
régionaux de leur décision de faire prendre part les
cégeps à leur processus de planification stratégique.
Ensuite, au niveau de la formation fondamentale, nous, ce qu'on dit,
c'est qu'on est d'accord avec le fait que les objectifs des cours de
philosophie et de français soient déterminés par la
ministre au niveau national afin d'éviter les écarts importants
qui existaient entre les cours qui étaient offerts dans les
différents cégeps de la province. Avec une telle
détermination d'objectifs, on croit que les écarts entre les
cégeps vont être réduits, puis, à ce
niveau-là, pour être certains que les écarts soient
réduits et que les changements proposés puissent avoir comme
objectif l'amélioration de la formation des étudiants, nous, on
espère seulement et on propose que les conventions collectives, qui sont
très rigides au niveau des enseignants dans les collèges, ne
viendront pas freiner ce processus d'amélioration constante des
programmes.
Ensuite, au niveau des mesures qui incitent à la réussite,
Claude Éric va poursuivre.
M. Gagné: Au niveau de la réforme, on amène
l'idée de la création d'une session d'intégration pour les
étudiants. Pour la Commission-Jeunesse, c'est une session qui est
accueillie favorablement. Par contre, il est important que ces
établissements d'enseignement supérieur élaborent une
formule qui permettra de tenir compte à la fois des résultats
académiques des étudiants obtenus au niveau secondaire, ainsi que
de ceux obtenus au cours de la session d'intégration pour les
étudiants désirant s'inscrire dans un secteur d'études
collégiales contingenté.
Par ailleurs, la Commission-Jeunesse tient à souligner que
plusieurs des changements de choix de carrière qui sont faits par les
étudiants du niveau collégial sont faits une fois la
première session de cours terminée. Souvent, les étudiants
qui font ces changements sont des étudiants qui n'avaient pas de
problèmes particuliers au niveau du secondaire et qui étaient
fixés quant à leur choix de carrière. Donc, les
changements d'orientation peuvent survenir après que les
étudiants ont eu leur premier contact avec le réseau
d'enseignement collégial.
Donc, pour la Commission-Jeunesse, on verrait d'un bon oeil que cette
session-là soit élargie à l'ensemble des étudiants
parce que, comme je vous l'ai dit tout à l'heure, certains
étudiants arrivent au collège et n'ont pas de problèmes au
niveau des difficultés d'apprentissage, mais, par contre, ils se rendent
compte plus tard qu'ils ont fait un mauvais choix. Donc, peut-être que,
en «élaborant» cette formation-là à tous les
étudiants qui entrent au collège, ça pourrait favoriser,
justement, qu'on évite que des étudiants passent deux ans dans un
programme où ils ne se sentent pas bien. Alors, cette session d'accueil
devrait comprendre des cours de formation générale pour les
étudiants du secteur préuniversitaire et, au secteur technique,
à ces cours de formation générale pourraient s'ajouter des
cours plus particuliers au choix de l'étudiant de façon à
ne nuire à personne, donc, pour que tous les étudiants puissent
en bénéficier.
La Commission-Jeunesse avait fait une demande concernant un plus grande
nombre d'orienteurs, les API. Ce qu'on demande à la ministre, c'est que,
dans sa réforme, il y ait plus d'argent alloué pour la formation
des API, plus d'API aussi qui soient amenés au niveau du collège
pour vraiment orienter les étudiants dans les bons choix. Ça,
c'est une mesure qu'on avait demandée, et on demande à la
ministre d'en rajouter encore plus parce qu'on considère que c'est
extrêmement important de bien orienter l'étudiant quand il arrive
au collège. Au niveau aussi du secondaire car, vous savez,
l'orientation, ce n'est pas juste une question au collège, ça
doit se préparer à l'avance. On doit le faire aussi à
partir du secondaire, et c'est très important que les API des
collèges participent à l'élaboration des programmes
d'orientation au niveau secondaire.
Maintenant, concernant le financement du réseau, la
Commission-Jeunesse est en faveur d'une mesure qui serait vraiment axée
sur la réussite scolaire des étudiants, sur la performance et qui
donnerait les mêmes chances à tous les étudiants, peu
importe leur statut financier. Ceci permettrait d'atteindre les objectifs
fixés par le ministère. Tous connaissent actuellement l'article
33 du règlement sur le régime pédagogique des
collèges. Les difficultés d'uniformité dans l'application
de ce régime sont les principales raisons pour lesquelles la
réforme propose de l'abroger.
Sans proposer son application telle qu'elle devrait se faire
présentement, la Commission-Jeunesse favorise plutôt une mesure
basée sur cet article. Ainsi, à partir des principes
suggérés par la ministre (cinq échecs au secteur
préuniversitaire, sept au secteur technique), la Commission-Jeunesse
propose que le ministère de l'Éducation élabore un
processus axé sur la réussite des étudiants et basé
sur la performance académique de chacun. La démarche pourrait
être basée sur la performance, comme c'est le cas dans le
réseau de l'enseignement supérieur au niveau des
universités, et inciterait les étudiants à travailler au
niveau de leurs études. Il faut avouer que les emplois disponibles
nécessitent un haut niveau de performance pour celui qui veut les
obtenir. Alors, il faut que cette notion soit implicite dans la formation. Pour
atteindre ces objectifs, il est essentiel que l'étudiant puisse compter
sur une orientation, un encadrement et un soutien continu tout au long de ses
études. L'argent dépensé à ces niveaux
représente un investissement et une économie autant pour
l'étudiant que pour la société
québécoise.
M. Béchard: Ensuite, on peut poursuivre un peu en ce qui a
trait au secteur technique branché sur les besoins du travail. C'est
extrêmement important pour nous que les cégeps et le secteur
technique du cégep soient branchés sur les besoins qu'ont les
entreprises, soit manufacturières ou de haute technologie, par rapport
aux étudiants du cégep. C'est ainsi qu'on est parfaitement
d'accord avec la ministre lorsqu'elle parle de mettre en place un comité
national des programmes d'études techniques qui réunira des
employeurs, des syndicats, des ministères qui conseilleront le
gouvernement dans le but de lier la formation technique aux besoins du
marché du travail. Je pense que c'est un exemple de concertation qui
devrait être suivi et qui devrait être appliqué à
d'autres domaines. d'autre part, on reconnaît aussi que c'est un pas dans
la bonne direction qu'on commence à regarder un peu du côté
d'une filière décloisonnée, au secteur technique, entre le
secondaire et le collégial. il y aurait peut-être lieu, aussi, de
commencer à regarder ce qui pourrait se faire entre le collégial
et le secteur universitaire. ; '
Par ailleurs, la Commission-Jeunesse souhaite voir les entreprises
s'ouvrir davantage à l'accueil d'étudiants qui sont à
terminer leurs études collégiales techniques, c'est-à-dire
déjà, peut-être, à la dernière session
d'étude des étudiants, les placer dans le bain,
c'est-à-dire de leur faire faire un stage en entreprise qui sera d'une
durée qui pourrait varier de un mois à trois mois. Pour ce faire,
on sait que certaines entreprises ne sont pas très chaudes à
cette idée. Cependant, il y aurait peut-être
lieu d'inciter les entreprises à le faire en mettant en place des
mesures financières, que ce soit fiscales ou autres, afin de favoriser
les stages en entreprise.
Par ailleurs, il serait aussi souhaitable de voir des entreprises qui
oeuvrent en région apporter un soutien aux cégeps, que ce soit au
niveau monétaire, pour leur permettre d'acquérir certains
équipements ou, encore, leur fournir certains équipements qui
pourraient être utiles à la formation des étudiants.
Le cinquième point a trait au resserrement des exigences au
secteur préuniversitaire, c'est-à-dire le secteur
général. Ce secteur représente souvent des écarts
importants entre les établissements d'enseignement collégial.
Certains finissent avec un D.E.C. en sciences humaines qui ne correspond
absolument pas au même D.E.C. qui est donné dans un autre
collège. Donc, pour remédier un petit peu à ce
problème, la ministre proposait un examen synthèse qui devait
être élaboré par les établissements d'enseignement
collégial. (20 h 20)
Nous, ce qu'on propose, c'est que, bien que ce soit toujours mis en
place, puis élaboré par l'établissement d'enseignement
collégial, je pense qu'il y aurait lieu que le ministère se
penche sur la mise en place de cet examen, sur son élaboration, pour
faire en sorte que certains objectifs et certaines questions se retrouvent dans
tous les collèges, dans toutes les régions, pour vraiment
permettre à la fois d'évaluer les étudiants, puis aussi
d'évaluer l'enseignement qui est dispensé par les
établissements.
En ce qui a trait à la mesure de la qualité, aux
différentes mesures d'évaluation, que ce soit autant au niveau
des établissements, des professeurs et des collèges, nous, on
favorisait, justement, une évaluation plus serrée des
établissements. Ce qu'on souhaite, en plus, c'est qu'il y ait vraiment
des mesures qui soient prises à l'établissement. Je pense qu'il
faut se garder une marge de manoeuvre pour faire en sorte que les actions qui
vont être prises pour corriger la situation, bien, il y ait un
résultat au bout, que ce soit vraiment quelque chose de tangible.
Ensuite, finalement, la Commission-Jeunesse, en plus des points qui
étaient dans la réforme, comme on l'a dit au début,
souhaiterait peut-être voir la ministre aller peut-être un petit
peu loin sur certains dossiers. Pour ce faire, Claude Éric va poursuivre
l'exposé.
M. Gagné: Maintenant, on amène un point où
on demande à la ministre d'aller un peu plus loin concernant certains
points. La ministre, évidemment, donne la place à plus
d'étudiants sur le conseil d'administration des collèges. La
Commission-Jeunesse est parfaitement d'accord avec ça et, nous, ce qu'on
demande, c'est qu'on pourrait même étendre le rôle des
collèges concernant, justement, le rôle de ces étudiants
face au conseil d'administration. Alors, ce qu'on demande, c'est que, afin de
faciliter l'intégration des étudiants au niveau des
différents organismes, il serait souhaitable que la ministre de
l'Enseignement supérieur et de la Science, en collaboration avec les
collèges, développe une banque de noms d'étudiants
intéressés à siéger au sein des conseils
d'administration des organismes publics et privés présents dans
la région de l'établissement. Cette mesure simple et peu
coûteuse permettrait de rapprocher les différents organismes et
les étudiants.
Alors, ce qu'on demande ici, c'est quelque chose de nouveau. On demande
que la ministre se serve des collèges qui sont présents dans
chacune des régions du Québec, qu'on se serve de cette
création d'une banque de noms pour favoriser que les étudiants
aillent au niveau des conseils d'administration, tant au niveau de l'entreprise
privée qu'au niveau des entreprises publiques.
La Commission-Jeunesse verrait d'un bon oeil qu'il y ait fusion entre le
ministère de l'Enseignement supérieur et le ministère de
l'Éducation, une fusion qui serait, évidemment, permanente.
Au-delà de ça, la Commission-Jeunesse verrait aussi à ce
que la formation professionnelle, qui est présentement au niveau du
ministère de M. Bourbeau, soit intégrée dans un seul
ministère qui serait le ministère de la formation et de
l'enseignement au Québec. Alors, ce qu'on demande au gouvernement, c'est
qu'il y ait un seul ministère qui touche à la formation et
à l'enseignement au Québec.
Les trois niveaux d'enseignement étant en étroite
collaboration, la Commission-Jeunesse soulève la nécessité
de débuter un processus d'analyse et même de révision de
l'enseignement aux niveaux primaire et secondaire. On sait que la ministre
amène une réforme au niveau des collèges. Pour la
Commission-Jeunesse, on pense que c'est un pas de fait, mais il reste d'autres
pas à faire. Je pense qu'il serait important, qu'il serait même
primordial pour l'avenir du Québec, qu'il y ait d'autres
réformes, que cette réforme-là se fasse aussi au niveau du
secondaire et aussi au niveau du primaire, vous savez. Je pense que les trois
ne peuvent pas se faire... Elles sont en interrelation, évidemment.
Là, on a une réforme concernant les collèges, mais il
devra y avoir une réforme aussi au niveau du secteur secondaire et au
niveau du secteur primaire. Ça, c'est l'avis de la
Commission-Jeunesse.
En conclusion, rapidement, la connaissance est la plus grande richesse
d'une société. À l'aube de l'an 2000, avec la
globalisation des marchés et la concurrence féroce des
marchés internationaux, le Québec n'a d'autre choix, s'il veut
garder sa qualité de vie, que de mieux former sa population. Le
défi de l'éducation est maintenant lancé. À l'heure
où la formation devient priorité, il nous faut une réforme
axée sur la réussite. Merci.
Le Président (M. Bradet): Alors, merci beaucoup,
messieurs, de votre présentation. Nous en sommes à la
période d'échanges avec nos invités et je reconnais
immédiatement Mme la ministre de l'Enseignement supérieur et de
la Science pour 20 minutes.
Mme Robillard: Merci, M. le Président.
Bienvenue aux membres de la Commission-Jeunesse du Parti libéral
du Québec. Nous sommes très heureux de vous avoir avec nous ce
soir, à nouveau, on doit dire, parce que c'est une suite de la
commission parlementaire de l'automne dernier. Maintenant que les intentions
gouvernementales sont sur la table, je ne sais pas si je peux le conclure, mais
je vois que, sur plusieurs mesures, vous démontrez un appui au renouveau
collégial. Par ailleurs, vous aimeriez qu'on aille plus loin dans
certaines et peut-être avez-vous certaines réserves aussi
concernant des mesures spécifiques. Alors, on va essayer de regarder
ça ensemble.
Commençons donc par la place des jeunes sur les instances
décisionnelles. Vous venez de souligner, M. Gagné, que vous
êtes satisfaits de la place qui est donnée aux instances
décisionnelles, et vous me faites une recommandation assez originale et
nouvelle d'avoir une banque de noms d'étudiants dans chacune des
régions du Québec. Je dois vous avouer que je ne saisis pas bien
cette recommandation-là. Est-ce à dire que ce serait une banque
de noms de jeunes à partir du cégep, mais que ces
jeunes-là pourraient être nommés sur des conseils
d'administration de toute la région concernée? Comment vous voyez
ça?
M. Gagné: Bien, écoutez, ce qu'on dit exactement,
comme vous venez de dire, c'est que le collège est un organisme
gouvernemental qui touche à la formation, qui est présent,
évidemment, dans la très grande majorité des
régions au Québec. Les cégeps forment des jeunes
administrateurs, des jeunes qui entrent à l'université, des
techniciens aussi. Alors, ce qu'on dit, nous, c'est que, évidemment,
dans votre réforme vous faites beaucoup de place au niveau du conseil
d'administration pour les jeunes. Vous enlevez l'étudiant du cours du
soir et vous remplacez ça par des étudiants à temps
partiel. C'est quelque chose de très bien. C'est des jeunes qui sont
là et aussi il y a les jeunes qui ont déjà
été dans les collèges qui vont siéger sur le
conseil d'administration. Donc, là, on sent une volonté de votre
part de faire plus de place aux jeunes concernant les conseils d'administration
des collèges.
Nous, ce qu'on dit, à la Commission-Jeunesse, c'est qu'on
aimerait que cette volonté-là soit présente partout dans
les différentes sphères de la société
québécoise, vous savez, que ce soit au niveau de certaines
entreprises privées qui ont des conseils d'administration, que ce soit
au niveau du secteur public. Le collège pourrait, par le biais,
évidemment... Il est en contact direct avec les étudiants. Les
étudiants qui seraient intéressés à participer
à un conseil d'administration donneraient leur nom au collège et
les entreprises désireuses d'avoir un point de vue jeune sur leur
conseil d'administration et des jeunes de qualité pourraient faire
appel, justement, à cette banque de noms là pour recruter les
jeunes qui feraient éventuellement partie des conseils d'administration,
tant au niveau privé qu'au niveau public ou parapublic.
Mme Robillard: Pour vous assurer d'une pré- sence jeune
sur plusieurs conseils d'administration dans une région, là, que
ce soit, je ne sais pas, moi, des hôpitaux ou des organismes publics
comme ça, mais aussi des organismes privés. C'est dans ce
sens-là.
M. Gagné: Exactement. On considère, à la
Commission-Jeunesse, qu'il devrait y avoir des jeunes sur tous les conseils
d'administration. C'est fondamental. Présentement, on voit des
hôpitaux où il n'y a aucun jeune sur le conseil d'administration.
Je sais qu'en Estrie il y a eu un gros travail qui a été fait,
des jeunes ont été placés sur des conseils
d'administration dans plusieurs endroits, et on aimerait que ça soit
étendu à toutes les régions du Québec. C'est
important que les jeunes soient partout. Ils font partie intégrante des
décisions qui sont prises, que ce soit au niveau de l'enseignement
collégial, que ce soit au niveau d'un hôpital ou peu importe le
service ou la compagnie.
Mme Robillard: Bon, c'est peut-être une idée
intéressante à regarder. Si on revenait maintenant au niveau des
mesures de réussite scolaire. Vous l'abordez au niveau de votre
mémoire, vous parlez de la session d'accueil et d'intégration, et
vous dites que vous aimeriez que cette session-là soit donnée, je
ne sais pas si c'est de façon obligatoire, à tous les jeunes qui
entrent au niveau collégial. Là, j'ai un peu de difficulté
à comprendre pourquoi. Parce que cette session-là, elle est
vraiment conçue pour les jeunes qui peuvent avoir deux types
différents de difficultés, soit un jeune qui n'a aucune
difficulté au niveau des activités d'apprentissage, de son
apprentissage, mais qui a des problèmes d'orientation ou soit l'autre
qui a des problèmes d'apprentissage et qui a besoin d'une aide
supplémentaire et de cours de mise à niveau. On sait qu'il y a
une partie de jeunes aussi qui arrivent au cégep, qui n'ont pas
nécessairement de problèmes d'orientation, qui savent très
bien où ils s'en vont. Je ne sais pas, moi, le jeune qui est admis en
techniques policières au premier semestre et qui veut s'en aller dans ce
domaine-là, ou en techniques aéronautiques ou en n'importe quelle
technique, qui est décidé ça fait longtemps et c'est
ça qu'il veut devenir, un technicien, et qui n'a pas de problèmes
d'apprentissage, pourquoi je lui ferais suivre une session d'accueil et
d'intégration?
M. Béchard: Moi, Mme la ministre, j'ajouterais
peut-être qu'il y a une autre catégorie d'étudiants dont
j'ai heureusement ou malheureusement fait partie. *
Mme Robillard: Ah bon!
M. Béchard: C'est que, souvent, on part du secondaire, on
n'a aucun problème académique, on sait exactement vers quel
secteur on veut aller, puis, après avoir suivi deux ou trois cours dans
ce secteur-là, à la première session, on se rend compte
qu'on est complètement à côté, qu'on n'a pas les
aptitudes pour le faire, ni pour le réussir. Donc, ce qui arrive, c'est
qu'on
abandonne des cours ou on a des échecs. Donc, à ce
moment-là, nous, ce qu'on propose, c'est: la première session
d'intégration, qui est déjà proposée, dont le
processus commence déjà à être étudié,
pourquoi ne pas l'étendre à tout le monde, sans punir ceux qui
savent exactement où ils s'en vont? Cette session pourrait comprendre
les cours de formation générale de base, certains cours
complémentaires et aussi, pour que l'étudiant voie vraiment
à quoi va ressembler son orientation, certains cours, par exemple, au
secteur technique, d'ans le domaine où il veut s'en aller.
Donc, il y aurait une première session qui lui permettrait
à la fois de s'établir dans le cégep, de prendre contact
avec l'établissement, de s'intégrer dans le réseau et
aussi de tester un peu son orientation, de voir si elle a toujours lieu
d'être la même et, si elle est la même, les cours qu'il a
suivis là, les cours de formation générale, n'auront pas
à être suivis plus tard et, ainsi, il ne perd pas
nécessairement de temps, contrairement à l'étudiant qui
abandonne ou échoue des cours, qui souvent va prendre une session de
plus pour terminer ses études au niveau collégial. (20 h 30)
Mme Robillard: Pourtant, ce qu'on remarque quand on regarde les
changements d'orientation de jeunes et dernièrement on a sorti
une étude sur les changements d'orientation ce sont surtout les
jeunes qui s'orientent en sciences de la nature, de façon toute
particulière, pensant que c'est la voie royale à tout; une fois
rendus en sciences de la nature, en étant en contact avec d'autres
champs de connaissances ou en ayant certaines difficultés, ces
jeunes-là, de façon très particulière, changent
d'orientation très rapidement. Mais il y a des secteurs, je peux vous
dire, des secteurs techniques, où on voit très peu de changements
d'orientation. C'est pour ça que j'ai toujours hésité
à rendre ça, de façon générale, obligatoire
pour tout le monde parce qu'il y a une partie des jeunes qui est très
bien orientée quand elle arrive au cégep. Ce n'est pas la
majorité, mais il y en a une partie qui est très bien
orientée.
Le Président (M. Bradet): M. Béchard.
M. Béchard: C'est pour ça qu'on souhaite,
justement, que cette partie de jeunes qui est bien orientée ne soit pas
punie, mais plutôt qu'ils puissent vraiment sonder, je dirais, le
terrain, qu'ils voient vraiment à quoi va ressembler leur programme
pour, par la suite, poursuivre sans être pénalisés, sans
avoir à reprendre de session supplémentaire. Si jamais il y a un
changement d'orientation, qu'on fasse en sorte que, là aussi,
l'étudiant ne soit pas puni par les un ou deux cours qu'il a pris pour
regarder quels étaient ceux vraiment reliés à son
orientation. S'il décide de changer, ces cours-là peuvent devenir
des cours complémentaires ou autres, sans le pénaliser sur la
durée de ses études.
Mme Robillard: Alors, parlons donc, justement, d'une autre mesure
qui est dans le renouveau collégial, qui est la mesure financière
aux étudiants qui ont accumulé des échecs. Ce que je lis
dans votre mémoire, c'est que vous êtes surpris que les mesures
incitatives ne soient pas basées sur la performance plutôt que sur
la capacité de payer. Alors, là, vous allez m'expliquer
ça. Qu'est-ce que c'est qu'une mesure incitative basée sur la
performance académique de chacun, selon vous autres?
M. Béchard: Nous, ce qu'on favoriserait, c'est que,
bien... L'objectif de base, qui est la réussite des études, nous,
on est parfaitement d'accord avec ça. C'est exactement ça qu'on
veut, que ça soit basé sur l'étudiant et sur sa
réussite. Cependant, on trouve dommage que, dans des
établissements collégiaux qui sont qualifiés
d'établissements d'enseignement supérieur, les étudiants
ne soient pas comme tels évalués sur leur performance et sur
leurs capacités académiques, mais plutôt, en cas
d'échec, sur leurs capacités, je dirais, justement, de payer pour
poursuivre leurs études. Par exemple, au niveau universitaire, on sait
qu'on n'a absolument pas besoin de couler un cours à l'université
pour se ramasser avec une lettre plus ou moins élogieuse qui nous invite
gentiment à quitter l'établissement, puis c'est un
établissement d'enseignement supérieur. Comme le cégep, on
est parfaitement d'accord avec vous quand vous dites que c'est un
établissement d'enseignement supérieur.
Mme Robillard: Vous ne vous attendez pas à des droits de
scolarité comme à l'université?
M. Béchard: Non, absolument pas. Ha, ha, ha! Des voix:
Ha, ha, ha!
M. Béchard: Cependant, ce qu'on se dit, c'est: Au secteur
collégial, quelle sera la perception de nos partenaires
économiques si les techniciens qu'on forme, nous, au Québec, on
les forme à partir... Si l'étudiant, au bout de 5 ans, a eu 62 %
de moyenne dans une technique, qu'il a eu 8 ou 9 échecs, mais,
finalement, qu'il a son diplôme, quelle est la valeur de ce
diplôme-là sur le marché du travail? Comment il va faire
pour se trouver un emploi? Est-ce que c'est vraiment l'aider?
Alors, nous, ce qu'on proposerait plutôt, ça serait de
mettre en place toutes les ressources nécessaires pour l'aider,
l'étudiant, quand il a des problèmes. C'est-à-dire que,
après une première session, selon les normes de base que vous
avez fixées, c'est-à-dire cinq échecs au secteur
général et sept échecs au secteur technique, on dresse un
premier bilan avec lui. On l'invite à rencontrer une personne-ressource
qui est un orienteur; on a dit tantôt qu'on voulait avoir plus de
ressources au niveau des orienteurs justement pour combler peut-être un
petit peu à ce niveau-là. On fait un bilan avec lui. On regarde
ce qui va, ce qui ne va pas. Est-ce que c'est un mauvais choix de
carrière? Est-ce que c'est une
situation particulière qui a fait en sorte qu'il a eu des
échecs comme ça? Tout de suite, on tente de le réorienter
ou de l'aider. Si ça se poursuit au cours d'une deuxième session,
bien, là, on dit à l'étudiant: Peut-être qu'il
faudrait avoir recours à un système de tutor at ou à
quelque chose comme ça, pour vraiment l'aider à poursuivre ses
études, puis à réussir encore une fois. Puis, si,
finalement, après avoir eu vraiment le sentiment d'avoir investi dans la
formation de l'étudiant, l'étudiant n'a pas, je dirais, les
ressources nécessaires au niveau académique pour poursuivre dans
ce secteur-là, on l'invite à changer de programme ou à
réorienter sa carrière. Donc, c'est un peu de dire qu'il faut que
ce soit le réseau et le système qui investissent dans
l'étudiant et non pas l'inverse.
Le Président (M. Bradet): Merci. Alors, M. le
député de Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: Merci, M. le Président. Un petit retour sur
la session d'accueil et d'intégration. Qu'est-ce que vous voyez comme
impact de cette session d'accueil et d'intégration sur les programmes
dont l'admission est contingentée? C'est quoi, l'impact que vous
identifiez?
M. Béchard: Au niveau, justement, des secteurs dont
l'admission est contingentée, on a une proposition dans notre
mémoire qui va justement dans ce sens-là. C'est-à-dire,
à la fois pour ne pas pénaliser l'étudiant qui prend cette
session-là, si elle est au choix, ou, si elle est obligatoire, qui suit
cette session-là, que, pour être admis dans un programme
contingenté, on tienne à la fois compte des notes qu'il a eues
à cette première session d'intégration et des notes aussi
qu'il a eues au niveau secondaire, de son résultat final. Donc, un
mélange des deux pour ne pénaliser personne, qu'il l'ait pris
volontairement ou non, puis pour qu'il ait accès à ces programmes
contingentés quand même par la suite.
M. Gagné: Ça serait peut-être pour ajouter.
En fait, c'est ça. Ce qu'on dit, c'est éviter que
l'étudiant soit favorisé s'il décide de choisir une
session d'intégration par rapport à un étudiant qui
n'aurait pas choisi de le faire. Vous savez, l'étudiant qui ne choisit
pas de le faire et qui a sa moyenne du secondaire, qui se ferait passer par un
étudiant qui, lui, en session d'intégration, s'est servi de cette
session-là pour pouvoir entrer dans un secteur où c'est
contingenté. Alors, dans un souci qu'il y ait une justice pour les deux,
c'est que, quand viendra le temps de passer à la technique qu'il
choisira, l'étudiant pourra, à ce moment-là, tenir compte
des deux notes.
M. Brassard: Si je vous comprends bien, vous êtes en
désaccord avec une espèce de punition financière pour les
étudiants qui subissent trop d'échecs. Ce que vous recommandez
plutôt, c'est de mettre en place un certain nombre de mesures de soutien,
d'encadrement qui vont permettre à cet étudiant qui connaît
trop d'échecs de se ressaisir et de poursuivre avec succès son
cheminement à travers les études collégiales. En cela, je
pense que vous rejoignez plusieurs intervenants, en particulier du monde
étudiant, qui ont comparu hier et qui privilégiaient que l'on
maintienne l'article 33, mais que, avant de l'appliquer brutalement, je dirais,
ce soit précédé d'un programme d'aide à
l'étudiant connaissant des difficultés de façon à
lui permettre de se ressaisir, comme je disais, et de poursuivre avec
succès son cheminement. C'est ça vraiment votre vision des
choses?
M. Gagné: Vous savez, l'article 33, c'est un article qui,
évidemment, présentement, s'il était appliqué,
serait assez brutal pour une bonne partie des étudiants dans le
réseau collégial. Nous, ce qu'on dit, c'est qu'on veut que ces
mesures-là favorisent l'excellence des étudiants, tout comme les
objectifs poursuivis par la ministre. On reconnaît aussi, tout comme la
ministre, que l'État, à un moment donné, n'a pas la
capacité de payer indûment des échecs pour des
étudiants. On est d'accord avec ça aussi. On est dans un contexte
de finances publiques qui n'est pas facile.
Maintenant, nous ce qu'on dit, c'est que, comme Claude l'a
expliqué tout à l'heure et je pense qu'on a bien compris, il
devrait y avoir un processus qui s'adresse aux étudiants où on
vient aider l'étudiant qui est en difficulté. Donc, après
cinq ou sept échecs concernant la technique, on vient aider
l'étudiant, on vient lui apporter un support. Suite à ça,
s'il n'y a pas encore de changement, on peut mettre un tuteur qui vienne
l'aider. Ça peut être un tuteur, ça peut être un
étudiant, aussi, qui n'est pas en difficulté qui puisse venir
aider un autre étudiant. Vous savez, ça peut être une
mesure qui n'est pas coûteuse. En bout de ligne, si l'étudiant,
évidemment, n'est vraiment pas dans sa branche et n'est pas capable de
le reconnaître, on essaiera de trouver avec lui des solutions pour
réorienter son choix, finalement. (20 h 40)
M. Brassard: À deux ou trois reprises dans votre
mémoire également, quand vous référez à la
formation fondamentale et aux propositions ministérielles concernant la
formation générale, vous dites que ça suscite chez vous
des interrogations, mais ce n'est pas tellement plus précis que cela.
Quel genre d'interrogations ça suscite chez vous, cette proposition
ministérielle concernant la formation générale? Parce que
vous êtes assez précis en ce qui a trait à l'enseignement
de la langue maternelle, de la philosophie, de l'éducation physique sur
le plan des principes, mais en quoi consistent tes interrogations sur la
proposition ministérielle en cette matière?
M. Béchard: D'abord, on est conscients que vous avez
parlé de langue maternelle. Effectivement, je pense qu'ajouter des cours
de langue maternelle, c'est excellent. Lorsqu'on parle de protection de la
langue française et tout, c'est fondamental. Je pense que c'est à
l'école qu'on apprend à bien parler, à bien lire notre
langue. Donc, on ne peut pas être contre une telle
mesure. Par contre, on est conscients aussi que, si on ajoute un cours
en formation en langue maternelle et aussi des cours de langue seconde, il va
falloir faire certains réajustements dans les horaires et dans le
programme de formation générale de l'étudiant pour que
ça ne soit pas une surcharge, mais plutôt une réorientation
de sa formation.
Donc, qu'on le veuille ou non, ça va nécessiter certains
mouvements de professeurs. Il y a certains professeurs qui devront se
réajuster, avoir la formation continue, la formation constante pour
pouvoir répondre, justement, à ces ajustements-là. Puis,
nous, notre crainte, dans ce cas-là, c'est qu'on sait que les
conventions collectives, au niveau du secteur collégial, sont
très rigides, puis notre peur, c'est un peu, justement, que,
malgré ces bonnes volontés-là, bien, on tombe un petit
peu, je dirais, au neutre, justement, parce qu'on n'a pas les personnes pour
les donner.
C'est un très bon geste d'avoir une formation fondamentale plus
forte en français et, si possible, en langue seconde. Je pense que tout
le monde reconnaît que ça va être absolument
nécessaire, dans les prochaines années, pour obtenir un emploi
étudiant, de parler couramment deux langues et, si possible, très
bien. Donc, pour réussir à avoir ces cours supplémentaires
là, je pense qu'il y a certains cours qui devront être
réajustés dans les horaires et, pour ce faire, il y a certains
professeurs qui devront, eux aussi, se réajuster et avoir une formation
qui est constante et continue pour que la formation qu'ils offrent aux
étudiants réponde vraiment aux besoins des étudiants.
Parce qu'on veut, d'abord et avant tout, une réforme qui est
basée sur les étudiants. Donc, il ne faut pas non plus que les
conventions collectives deviennent un frein à tous les espoirs qui sont
dans cette réforme-là.
M. Brassard: Donc, est-ce que vous êtes d'accord avec la
réduction des cours de philosophie et aussi la réduction de
moitié des cours d'éducation physique? Est-ce que vous êtes
d'accord avec cette proposition?
M. Gagné: Concernant les cours de philosophie,
évidemment, le contenu des cours et ça, je pense que
plusieurs groupes de jeunes sont venus le dire ici est important. La
philosophie, c'est important pour les jeunes au niveau du collège, et
presque unanimement les groupes de jeunes l'ont dit. Dans la réforme,
évidemment, on enlève un cours de philosophie, on met le contenu
des cours qui sont présentement donnés dans les trois cours qui
seront présents et on redonnera, pour les étudiants qui le
voudront, le cours de philosophie de façon optionnelle. Donc, pour la
Commission-Jeunesse, il n'y a pas de problème avec ça.
Concernant les cours d'éducation physique, évidemment,
nous, on favorise d'abord les cours en langue première, de nouveaux
cours. Il y a des cours en langue seconde, aussi, qui devront être
importants au niveau du collège. C'est dans la réforme. Pour la
Commission-Jeunesse, au niveau des cours d'éducation physique,
évidemment, l'éducation physique, c'est essentiel pour la
jeunesse québécoise, mais est-ce que c'est essentiel de
créditer ces cours-là? Bon, en première session, la
première année que l'étudiant sera au collège,
évidemment, ses cours seront crédités, mais, dans la
deuxième année, je pense que c'est à l'étudiant...
Puis, pour l'avoir personnellement vécu, si on avait mis à ma
disposition les infrastructures aux heures où j'aurais pu vouloir y
aller, j'aurais probablement fait plus d'éducation physique que j'en ai
fait. Je pense que c'est ça qui serait important, évidemment. Ce
serait de mettre à la disponibilité des étudiants les
infrastructures.
Et, dans la réforme des cours, des cours en langue
première et en langue seconde, c'est très important qu'il y en
ait plus, parce qu'on voit les difficultés qu'ont les étudiants
présentement à écrire leur français et souvent,
dans certains cas, à parler une autre langue que leur langue
maternelle.
M. Brassard: II semblerait que en tout cas, c'est ce que
nous disaient hier les éducateurs et éducatri-ces physiques
de mettre à la disposition des élèves les
équipements en éducation physique, ça posait des
problèmes de gestion et des problèmes d'horaires assez
importants.
Vous soulevez aussi la nécessité d'amorcer, d'enclencher,
puis de compléter, évidemment, aussi une réflexion, une
analyse et aussi une révision de l'enseignement aux niveaux primaire et
secondaire. Est-ce que ça vous amène également à
porter un jugement et à porter une évaluation sur les nouveaux
seuils d'admission au collège qui viennent s'ajouter au diplôme
d'études secondaires, où l'étudiant devra non seulement
détenir son diplôme d'études secondaires, mais devra aussi
avoir réussi un certain nombre d'autres cours de niveau secondaire?
M. Gagné: Premièrement, peut-être pour
revenir sur le commentaire que vous avez fait concernant les problèmes
d'horaires des éducateurs physiques, je vous dirai que, quand on parle
d'ouvrir les centres de conditionnement physique aux étudiants, c'est
quelque chose qui est très important. Vous savez, la réforme,
à mon avis, elle doit être faite d'abord et avant tout pour
l'étudiant et non pas pour les problèmes de conventions et
d'horaires des enseignants. Donc, quand on dit qu'il devra y avoir, dans les
collèges, des heures pour que les étudiants puissent intervenir
et faire du conditionnement physique, c'est essentiel. Et ça, pour la
Commission-Jeunesse, c'est quelque chose. La réforme doit être
faite avant tout pour les étudiants et non pas être bloquée
à cause de différentes rigidités dans les conventions.
M. Brassard: On s'est peut-être mal compris
là-dessus. Ce n'était pas nécessairement un
problème d'horaires des enseignants; c'était un problème
bien plus de disponibilité des équipements. Le cégep
souvent louant à l'extérieur du cégep ses
équipements, c'est un problème de disponibilité des
équipements. C'est ça
qu'ils nous ont signalé, en tout cas, qui existait dans plusieurs
cégeps.
M. Gagné: Nous, ce qu'on dit, c'est qu'il faudra, de toute
évidence, et c'est de très grande importance, que ces
équipements-là soient mis d'abord et avant tout à la
disposition des étudiants.
Passons au deuxième point de votre intervention concernant la
réforme au niveau du secteur secondaire et du secteur primaire.
Évidemment, beaucoup de travail a été fait au niveau du
collège, et je pense qu'on le reconnaît. Maintenant, il devrait y
en avoir aussi qui soit fait au niveau du secondaire et du primaire, vous
savez, au niveau des seuils d'accessibilité. Pour la
Commission-Jeunesse, je pense que ce qui est important, c'est que les
étudiants qui arrivent au collège arrivent à tout le moins
avec des connaissances qui soient relativement uniformes, qu'il n'y ait pas de
disproportion entre certains diplômes d'études secondaires et
d'autres d'étudiants qui auraient fait des choix de cours de
mathématiques fortes et d'autres de chimie forte, et patati, patata. On
se ramasse avec des diplômes de valeurs un peu différentes. Donc,
le point que je vous dirai là-dessus, qui est très important pour
nous autres, c'est qu'on essaie de favoriser le plus possible qu'il y ait une
uniformité dans les jeunes qui arrivent au collège pour qu'ils
puissent partir sur un pied d'égalité avec les autres, donc
qu'ils arrivent avec une formation équitable pour chacun.
M. Brassard: Dernière question, M. le Président.
Vous recommandez la fusion des deux ministères, Éducation et
Enseignement supérieur, intégration en un seul, et aussi que la
formation professionnelle, qui actuellement est au ministère de la
Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu, soit rattachée
à ce nouveau ministère constitué de deux. Il y a
sûrement une justification. Je la devine, là, mais j'aimerais que
vous me l'indiquiez.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Gagné: Écoutez, concernant la fusion des
ministères de l'Enseignement supérieur et de
l'Éducation...
M. Brassard: Bourbeau ne sera pas bien content de ça,
là, mais en tout cas. Ha, ha, ha!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Gagné: Donc, la ministre présentement cumule les
deux fonctions. On a souvent vu dans l'histoire les ministres cumuler les deux
fonctions, mais je pense que ça devrait devenir, de façon
permanente, un ministre qui s'occupe de l'éducation et de la formation
aussi. Je pense que c'est quelque chose qui se touche. On ne peut pas arriver,
à un moment donné, puis courir deux lièvres en même
temps. Quand on décide de parler de formation, que ce soit au niveau
professionnel, au niveau secondaire ou au niveau de la formation
professionnelle du ministre Bourbeau, je pense que, pour la
Commission-Jeunesse, on verrait tout ça dans un même
ministère qui s'occuperait de l'éducation et de la formation.
M. Brassard: Merci. (20 h 50)
Le Président (M. Bradet): Ça va. Mme la ministre,
il restait quelques minutes à votre côté.
Mme Robillard: Oui, si vous me le permettez, M. le
Président, au niveau du secteur préuniversitaire, vous me faites
une recommandation surtout sur l'examen. Vous mettez l'examen synthèse
à l'intérieur du . secteur préuniversitaire, à la
page 31 de votre mémoire, et là vous me faites une
recommandation. D'abord, je veux vous dire que l'obligation d'avoir un examen
synthèse est pour l'ensemble des programmes dans le renouveau
collégial et non seulement pour le préuniversitaire. Est-ce que
vos inquiétudes sont strictement sur le fait qu'on pourrait avoir des
examens synthèses différents d'un collège à l'autre
dans le secteur préuniversitaire ou si vous avez les mêmes
inquiétudes pour le secteur technique? Est-ce pour ça que vous
proposez que ce soit fait conjointement avec le ministère?
M. Béchard: Je vous dirais, d'abord, que nos
inquiétudes relevaient du secteur surtout préuniversitaire, parce
que, souvent, il y a des programmes à l'université où des
étudiants, qui viennent de collèges différents avec
normalement la même formation, ont reçu une formation
académique qui diffère beaucoup. Ce qui fait que souvent la
première session d'université est une session, je dirais,
d'intégration et d'accueil, pour parler en termes de niveau
collégial. Ça retarde un petit peu la formation de
l'étudiant, et les professeurs de l'université ne trouvent pas
ça très drôle parce qu'ils sont obligés de faire une
espèce de mise à niveau entre leurs étudiants.
Donc, si on contrôlait au niveau du secteur
préuniversitaire au cégep à la fin des études, avec
un examen qui a été fait en collaboration entre les institutions
d'enseignement et le ministère, certaines grandes orientations qui
permettraient, là, de voir, vraiment, de juger tous les étudiants
sur le même niveau, on se dit que, en aval, probablement, les professeurs
du niveau collégial donneraient une formation qui vise à
rencontrer un -peu les objectifs du ministère. Donc, dans chaque
établissement, on retrouverait une formation qui, je ne dirais pas,
s'équivaut totalement, mais qui a certaines ressemblances.
En ce qui a trait au secteur technique, c'était peut-être
moins évident comme étant une recommandation comme telle, mais,
par contre, il faut être conscients aussi que c'est important que deux
techniciens qui finissent avec le même diplôme aient aussi
certaines qualifications de base qui se ressemblent. Je pense que les
employeurs en seraient très reconnaissants. Donc, pour ce faire, autant
à ce niveau qu'au secteur
préuniversitaire, c'est important que le ministère
collabore avec les établissements pour fixer certaines normes de base en
ce qui a trait à l'évaluation finale à l'aide d'un examen
synthèse.
Mme Robillard: Alors, vous recommandez ça même si,
dans le renouveau collégial, vous avez bien vu que l'ensemble des
objectifs et des standards est fixé ppur tous les cégeps, tant au
plan universitaire qu'au plan technique. Au plan universitaire, il y a une
décentralisation des responsabilités des activités
d'apprentissage, mais seulement pour 50 % et non pas pour la totalité,
justement pour garder les éléments de comparabilité. Et,
en plus, dans le renouveau collégial, on dit: La conception des
programmes préuniversitaires du collégial devra se faire avec
aussi les universités, donc des professeurs de cégep avec des
professeurs d'université, pour vraiment qu'il y ait une
continuité. C'est un programme de cinq ans, dans le fond, ce n'est pas
un programme de deux ans. C'est deux ans au cégep, trois ans à
l'université. Nous avons commencé déjà à le
faire sous forme de projet-pilote, par exemple, en sciences de la nature.
Alors, malgré tout ça, vous dites que les examens
synthèses devraient être faits avec le ministère.
M. Béchard: Nous, on pense que ce serait seulement de
suivre le même processus étant donné qu'il y a
déjà une collaboration entre le ministère au niveau de la
fixation des objectifs de base qui est faite avec les universités.
Alors, pourquoi ne pas, au niveau des examens synthèses, retrouver le
même type de collaboration entre le ministère et, entre autres,
les établissements d'enseignement collégial et, si possible, les
universités aussi? On contrôlerait la qualité de
l'évaluation au début, au milieu, au passage entre le
cégep et l'université et aussi à la fin de
l'université.
Mme Robillard: Quelle est la position de la Commission-Jeunesse
du Parti libéral sur la commission d'évaluation?
M. Gagné: Écoutez, on salue la création de
cette commission-là. Évidemment, en plus de ça, il y aura
des jeunes qui siégeront sur cette commission-là. Je pense que
c'est un bon moyen de faire participer les étudiants dans
l'élaboration et l'évaluation des cours qui seront
donnés.
M. Béchard: Si je peux ajouter, peut-être, à
ce niveau-là, une de nos préoccupations est aussi de voir le
résultat qui va survenir suite, justement, à l'étude des
programmes qu'aura faite cette commission d'évaluation. Qu'est-ce qui va
arriver avec... Disons qu'il y a deux ou trois programmes qui ont une mauvaise
cote. Est-ce que la ministre ou le ministère va se réserver une
marge de manoeuvre pour, justement, corriger la situation? C'est un peu notre
position. L'évaluation des programmes, on la demandait. On demandait
l'évaluation des établissements, des programmes et des profes-
seurs. Dans les trois cas, notre position, c'est de dire oui à
l'évaluation, mais il faudrait savoir aussi quelles sont les mesures,
quelle est la marge de manoeuvre qu'on se garde pour corriger la situation
après avoir évalué les programmes d'enseignement.
Mme Robillard: Parfait. Ça va, M. le Président.
Alors, il me reste à vous remercier d'être venus rencontrer les
membres de la commission de l'éducation, ce soir. Merci bien.
Le Président (M. Bradet): Alors, merci, messieurs. Nous
allons suspendre quelques minutes pour permettre au prochain groupe de prendre
place.
(Suspension de la séance à 20 h 56)
(Reprise à 20 h 59)
Le Président (M. Bradet): À l'ordre, s'il vous
plaît! Alors, la commission reprend ses travaux. Nous accueillons donc le
Comité national des jeunes du Parti québécois. M. le
président Christian Picard, ainsi que les gens qui vous accompagnent,
bienvenue à cette commission. Vous avez 20 minutes pour nous faire votre
présentation. Auparavant, pourriez-vous nous présenter les gens
qui vous accompagnent?
Comité national des jeunes du Parti
québécois
M. Picard (Christian): Merci beaucoup, M. le Président.
Donc, c'est avec un grand plaisir que le Comité national des jeunes du
Parti québécois vous propose cette réflexion sur les
propositions du gouvernement du Québec pour un renouveau de
l'enseignement collégial. Le comité national des jeunes est une
instance qui a pour but de donner une voix et une tribune officielles aux
jeunes du Parti sur les, grands enjeux et débats qui animent la
société québécoise et sur les préoccupations
propres à notre génération. C'est pour ça qu'on est
ici aujourd'hui. (21 heures)
Donc, je suis accompagné, à ma gauche^ de Jean-Mathieu
Potvin, qui est secrétaire exécutif du comité national des
jeunes et qui nous entretiendra sur la formation fondamentale, la session
d'accueil et les nouvelles exigences d'admission au collégial. À
ma droite, Marc Dean, qui est vice-président du comité national
des jeunes, développera plutôt le côté des frais de
scolarité et des propositions alternatives à ceux-ci. Pour ma
part, en plus d'introduire, je vais conclure la présentation.
Suite aux nombreux épisodes qui ont précédé
ce projet de loi, nous nous sommes posé la question suivante: Pourquoi,
après avoir dévoilé sa réforme à coups de
ballons politiques, la ministre a tant attendu avant de confirmer ces ballons
en déposant une fois pour toutes sa réforme? La réponse
pourrait être bien simple: elle voulait peut-être profiter de la
fin de la session
collégiale. La seule raison qui devait pousser la ministre dans
cette voie, c'est qu'elle n'a peut-être simplement pas confiance en son
produit.
Donc, en plus de craindre notre réaction, les jeunes, on
considère que la ministre ne respecte pas l'ensemble de la jeunesse
québécoise, et ce, en refusant d'entendre, ici même, le
Conseil permanent de la jeunesse à cette commission parlementaire,
Conseil permanent de la jeunesse qui a été créé par
ce même gouvernement. Ce manque de respect, on l'espère, ne
deviendra pas une tradition, mais, quand on regarde les réalisations du
dernier gouvernement, quand on voit le sort qui a été
réservé à l'ancienne, entre parenthèses,
Commission-Jeunesse... Et que dire aussi au sujet de la prochaine commission
parlementaire sur la langue, où, à ce jour, aucun groupe de
jeunes n'a été invité. Malheureusement, cette
réforme, d'après nous, semble s'inscrire dans cette voie.
Sur ce, je vais donc passer la parole à Jean-Mathieu Potvin, sur
la formation fondamentale, la session d'accueil et les nouvelles exigences
d'admission au collégial.
M. Potvin (Jean-Mathieu): Bonsoir. Vous avez probablement
constaté, en octobre dernier, dans notre mémoire, que la
formation fondamentale est au coeur de nos préoccupations. Nous sommes
très satisfaits par les éléments de la définition
qu'a donnée le ministère à ce sujet, en avril 1993. On
pouvait notamment retenir que la formation générale devait
permettre à l'élève de: maîtriser sa langue;
être capable de communiquer dans cette langue et également dans
une autre, notamment l'anglais; être capable d'émettre des
opinions autonomes et critiques, de maîtriser les règles de base
de la pensée rationnelle, de comprendre les spécificités
des approches du réel qui sous-tendent les grands domaines du savoir. En
fait, cette définition nous enchante. Nous la voyons même comme un
objectif qui devrait sous-tendre tout le réseau d'enseignement du
Québec.
Toutefois, grande est notre déception lorsqu'on s'attarde aux
moyens retenus par la ministre pour atteindre l'excellence. On déchante
rapidement face à ces mesures qui apparaissent bien minces. En
réalité, c'est plutôt d'une véritable cure
d'amaigrissement qu'il est question, un amaigrissement budgétaire. Dans
son projet, le ministère conserve les quatre cours de langue et de
littérature, ajoute deux cours de langue seconde. Cette mesure est
intéressante, nous en convenons, mais nous considérons que les
vrais problèmes d'apprentissage de la langue se situent bien avant le
niveau collégial. Le cégep, en fait, devrait être un lieu
où les élèves approfondissent leurs connaissances
déjà maîtrisées. Nous comprenons mal les raisons qui
poussent la ministre à ne pas attaquer le problème de front,
à sa source, aux niveaux primaire et secondaire. C'est là que le
bobo se trouve. Rendu au niveau collégial, le bobo deviendra
gangrène, avec tous les problèmes d'amputation que ça
pourra causer à moyen et à long terme à la
société québécoise.
Sur la question de l'abolition des deux cours d'éducation
physique, qui, d'ailleurs, semble, à notre avis, absolument sans
fondement, tout a été probablement dit lors de cette commission,
pas plus tard qu'hier. Je n'insisterai pas davantage sur ce sujet, mais
simplement pour souligner que, pour la majorité des
élèves, ces cours représentent à la fois un moment
de détente, une façon de se réaliser et même de se
dépasser, un lieu d'apprentissage, mais aussi un moment
privilégié pour pratiquer des sports qui, n'eût
été le cégep, ne seraient pas à la portée de
ces élèves.
Dans la réforme, aussi, on propose une session d'accueil ou
d'intégration pour les nouveaux inscrits indécis ou en
difficulté. Le fait, pour nous, d'instituer une telle session nous
ferait craindre que ces mesures se réalisent au détriment des
autres étudiants, compte tenu de l'insuffisance du nombre de conseillers
en orientation et du nombre d'API, les fameux aides pédagogiques
individuels. Ce que nous avons, évidemment, proposé ne pourra
être réalisable qu'en injectant dans le système
d'enseignement les ressources financières, mais aussi la volonté
politique nécessaire. Au Québec, on compte environ 1 API pour
1000 élèves. On compte aussi en moyenne c'est une moyenne,
ça pourrait être plus bas encore ou plus élevé
1 professeur pour 160 élèves. Est-ce possible pour ces
derniers de remplir leur rôle qui est aussi de dépister les
élèves qui entretiennent certaines lacunes au plan
académique? En fait, on ne le croit pas du tout. Par une augmentation du
nombre de personnels d'encadrement et d'enseignement, on ne marginaliserait pas
les nouveaux inscrits, on ne négligerait pas non plus les inscrits
réguliers. Tant dans le secteur professionnel que général,
l'élève serait certainement mieux accompagné, et ce, tout
au long de son «financement», donc pas seulement à son
entrée, et les élèves, évidemment, qui en ont
besoin.
Au sujet des nouvelles exigences d'admission au cégep, on ne peut
que souscrire au principe selon lequel il faut resserrer les critères
d'entrée au cégep. Il faut que les élèves soient en
mesure de répondre à cela, mais le ministère ne semble
guère s'en soucier. En se fiant à la simulation du
ministère de l'Éducation du Québec de notre tableau 1, qui
est inclus dans notre mémoire, on multiplie le nombre
d'élèves exclus étant donné que l'hypothèse
4 a été retenue, et d'autant plus que, selon la même
proposition, il serait possible d'obtenir un diplôme d'études
secondaires sans nécessairement répondre aux exigences
d'accession au niveau collégial. Ils vont où, ces
élèves-là, après? Dans quelles statistiques on les
retrouve?
Ainsi, on crée un genre de «no-man's land». Les
élèves qui terminent le secondaire sans pouvoir entreprendre le
collégial vont artificiellement gonfler le taux de réussite
à la fin du cégep et, par le fait même, on fausse le taux
de décrochage scolaire. En d'autres mots, on met une espèce de
sépulcre blanchi sur une situation qui pourrit de plus en plus par
l'intérieur. De l'extérieur, des beaux chiffres qui nous disent
que le décrochage scolaire va diminuer, mais, à
l'intérieur, une
jeunesse qui agonise et une qualité d'éducation en chute
libre. on se demandait comment la ministre pouvait sérieusement vouloir
faire passer le taux d'échecs au collégial de 60 % à 70 %;
je crois que maintenant on l'a trouvé, c'est en maquillant les
statistiques.
Là-dessus, je vais passer la parole à Marc.
Le Président (M. Bradet): M. Dean.
f
M. Dean (Marc): Moi, je vais traiter plus de la question
financière. Alors, les coûts de la réforme sont autour de
52 600 000 $, selon ce qu'a annoncé la ministre. On pourrait croire que
le gouvernement investit de nouvelles sommes dans l'éducation. Pourtant,
lors de l'étude des crédits du gouvernement, le président
du Conseil du trésor a annoncé une ponction de 19 000 000 $ dans
le budget des cégeps pour la prochaine année financière.
La Fédération des collèges parle de ponctions
échelonnées sur les 10 dernières années pour un
total de 100 000 000 $. On doit donc parler, dans ce cas-ci, d'un manque
à gagner pour les cégeps plutôt que d'un investissement. On
donne d'une main et on enlève avec l'autre. À cela s'ajoute ce
que les uns ont appelé la taxe à l'échec, les autres, le
ticket accélérateur du décrochage, les 50 $ par cours, ce
qui va toucher plus de 25 % des étudiantes et étudiants; la
rationalisation au niveau du nombre de professeurs de philo et
d'éducation physique; le passage de 125 à 100 programmes de
formation technique; et, enfin, des nouveaux seuils d'admissibilité au
cégep pour les étudiantes et étudiants du secondaire, qui
engendreront une diminution de peut-être plus du quart des
étudiantes et étudiants de nos cégeps, si on se fie au
tableau 1, justement, qui est dans notre mémoire. (21 h 10)
Alors, pour nous, on peut conclure que la réforme Robillard n'est
pas autre chose que des coupures déguisées et une atteinte sans
précédent au principe de l'accès universel et gratuit
à une éducation collégiale de qualité. Cette
réforme n'est qu'un aménagement administratif qui repousse encore
à plus tard la résolution des problèmes actuels. si on
aborde la question de la situation financière de l'étudiante et
de l'étudiant, on se rend compte que la majorité des
étudiantes et étudiants, c'est-à-dire environ 70 %,
travaillent en même temps qu'ils sont aux études. ils et elles
constituent une main-d'oeuvre travaillant à bon marché puisqu'ils
et elles acceptent des conditions de salaire minimum. pour remplir leurs
obligations financières, c'est-à-dire le logement, la bouffe, les
vêtements, transport, frais de scolarité, livres, loisirs, ils et
elles doivent souvent travailler un trop grand nombre d'heures pour arriver, ce
qui met en péril la réussite de leurs études dans les
délais prescrits. pour pallier à cette situation, la ministre ne
fait rien d'autre, sinon imposer une taxe à l'échec et
reconfirmer la définition de l'étudiante et l'étudiant
à temps plein, qui est aussi celle prise en compte par l'aide
financière.
L'attitude de ce gouvernement est méprisante pour toutes les
Québécoises et tous les Québécois, jeunes et moins
jeunes, qui éprouvent des difficultés à se faire une place
au soleil. Pour les étudiantes et les étudiants en
difficulté, on leur impose une taxe de 50 $ par cours
échoué, puis, ensuite, on les accuse d'être profiteurs du
système. On réserve le même sort aux assistés
sociaux en les accusant d'être des fraudeurs parce qu'ils et elles ne
réussissent pas à se trouver un emploi. Je vais dire comme on
disait quand on était enfants dans nos jeux: Celui qui le dit, c'est lui
qui l'est. Ce gouvernement est le véritable fraudeur. Il a failli
à sa tâche d'être un stimulateur de l'effort collectif pour
former des gens compétents et réduire le chômage qui
condamne de plus en plus de citoyens et citoyennes à la
pauvreté.
Alors, pour terminer la section que je développe, nous du
Comité national des jeunes du Parti québécois avons fait
connaître quelques propositions de rechange en rapport avec les mesures
qui nous sont déjà proposées. Alors, au lieu de taxer
l'échec, il serait beaucoup plus opportun de réduire la dette des
étudiantes et étudiants qui finissent dans les délais
prescrits. Cette mesure existe déjà à la maîtrise et
au doctorat. Elle a l'avantage d'être incitative et non
répressive. Alors, pourquoi ne pas l'étendre au cégep et
au baccalauréat?
Une autre suggestion: des crédits d'impôt aux entreprises
qui contribueraient au financement des cégeps. Aussi, une autre
proposition... Ça fait longtemps que, nous, les jeunes du Parti
québécois, on parle de l'impôt postétudes
supérieures qui pourrait être un moyen contributoire au
financement de nos institutions scolaires. En gros, ce que ça veut dire,
c'est qu'on ferait une abolition des frais de scolarité au cégep
et à l'université. Il y aurait un accès universel à
la bourse pour que l'étudiante et l'étudiant se consacrent
à leurs études, puis, plus tard, on lèverait un
impôt spécial, lorsque l'étudiante ou l'étudiant
occupera un emploi après avoir terminé ses études. Cet
impôt-là serait proportionnel à ses revenus d'emploi,
suivant les règles de l'impôt progressif, c'est-à-dire qui
gagne plus paie. Cet impôt serait payé par l'étudiante et
l'étudiant pendant un temps déterminé qu'on verra par
rapport aux modalités d'application futures.
Ça fait que c'est, en résumé, ce qu'on propose
comme alternative à ce qui est proposé, puis je repasse la parole
à Christian qui conclura notre exposé.
M. Picard: Merci, Marc. Donc, dans notre mémoire de
l'automne dernier, nous estimions que, plus de 25 ans après la
réforme en profondeur du système d'éducation, le temps
était venu d'en dresser un bilan. Donc, si nous sommes d'accord avec
certaines mesures proposées par le gouvernement pour un renouveau de
l'enseignement collégial, nous croyons cependant que les vraies
questions demeurent sans réponses.
Pour nous, le système d'éducation doit être revu et
corrigé dans son ensemble et non à la pièce. La
réforme proposée semble relever de l'idéologie du
nid-de-poule, c'est-à-dire que l'on tente de répondre à
des problèmes structurels par des mesures hautement
ponctuelles. L'augmentation des heures de cours consacrées
à l'apprentissage du français, afin de répondre à
une carence qui relève davantage d'un autre ordre d'enseignement, en est
un bon exemple. Cette réforme se situe dans la droite ligne du
gouvernement libéral, de la rationalisation et du désengagement
de l'État dans les secteurs les plus fondamentaux de la
société québécoise.
Nous estimons donc, suite à une proposition qui a
été adoptée par notre congres du comité national
des jeunes, qu'il faut à tout prix convoquer des états
généraux de l'éducation afin que les divers intervenants
puissent faire part au gouvernement de leur vision à court, moyen et
long terme de l'ensemble et là, je souligne de l'ensemble
de notre système d'éducation. Dans ce mémoire, nous avons
tenu à mettre l'accent sur les frais de scolarité, puisque cette
mesure semble être la plus dévastatrice pour l'avenir de
l'éducation.
Enfin, une remarque finale. Le fait que la mobilisation chez les
élèves est à son plus bas depuis 25 ans nous
préoccupe beaucoup. Pour nous, ce n'est pas le signe d'une acceptation
en bloc de la réforme, sinon un signe alarmant quant aux objectifs de la
formation générale de base. Peut-on parler d'un échec?
Beaucoup d'élèves interrogés par les médias
n'avaient pas entendu parler de la réforme; on n'en avait aucune
opinion. Nous aurons une main-d'oeuvre docile et peu critique et peu
revendicatrice, mais avec quel pouvoir d'achat? On doit se poser la question:
Quel genre de citoyennes et citoyens aurons-nous? Merci.
Le Président (M. Bradet): Alors, merci beaucoup de votre
présentation. Nous sommes à la période d'échanges.
Mme la ministre, vous avez 20 minutes.
Mme Robillard: Merci, M. le Président. Je voudrais saluer
les représentants du Comité national des jeunes du Parti
québécois et vous dire que nous sommes heureux de vous entendre
ce soir, M. le président. J'aurais peut-être quelques remarques
à faire sur vos mots d'introduction, d'autant plus que, habituellement,
en commission parlementaire, ce n'est pas la tribune où on fait de la
partisanerie politique, mais vos mots d'introduction étaient directement
orientés comme ça. Et je tiens à vous préciser, M.
Picard, que: un, la ministre qui vous parle n'a pas fait d'essais de ballons
politiques je l'ai dit très clairement et je le redis
publiquement ce soir devant vous deux, que les audiences de la
commission parlementaire de l'automne dernier se sont terminées le 18
décembre et que le gouvernement a déposé ses intentions
gouvernementales fermes le 6 avril. Du 18 décembre au 6 avril, il n'y a
pas beaucoup de temps pour un renouveau de cette importance-là.
Alors, je dois vous dire que, en plus, c'est en réponse à
des demandes très pressantes de jeunes que le gouvernement dépose
au plus vite, au plus vite ses intentions gouvernementales, ce que nous avons
fait. Je pense que tous les processus réguliers démocratiques ont
été respectés, et je ne permettrai pas que vous me disiez
que je n'ai pas respecté les jeunes dans les processus de consultation.
En dernier lieu, je ne veux surtout pas entendre parler de la
Commission-Jeunesse de mon parti et du sort que mon parti a
réservé à la Commission-Jeunesse, d'autant plus que vous
avez dû faire de nombreux efforts dans votre propre parti pour avoir une
place dans vos structures décisionnelles. Mais, moi, si je tiens cette
commission parlementaire au nom du gouvernement, c'est pour discuter de
formation collégiale et non pas de partisanerie politique. Parce que nos
travaux qui sont ici présentement, de même que la somme d'heures
de travail que nous avons mises, les parlementaires, à l'automne, c'est
pour les jeunes du Québec que nous faisons ça.
Alors, moi, ce soir, je veux vous entendre sur le coeur de la formation:
les programmes d'études au collégial. Je veux vous entendre, et
vous avez sûrement réfléchi sur ça, sur ce que vous
pensez du renouveau collégial dans les programmes de formation. Par
exemple, qu'est-ce que vous pensez de la formation préuniversitaire, de
toute l'orientation qui est donnée au préuniversitaire dans ce
renouveau collégial là, une orientation nouvelle, un ajustement
avec ce qui se passe à l'université, le continuum du deux plus
trois, l'ajustement du poids des programmes aussi par rapport aux sciences de
la nature ou aux sciences humaines ou aux arts et lettres? Vous savez tout ce
qu'il y a dans le renouveau collégial. Je ne vous ai pas entendu parler
de ça. J'aimerais ça vous entendre. Êtes-vous en accord
avec ça?
M. Picard: Évidemment, comme je l'ai précisé
plus tôt, on a décidé de mettre l'accent surtout sur les
frais de scolarité au collégial, pour la raison que j'ai
émise en conclusion, que ça allait être une mesure
dévastatrice dans notre système d'éducation. Donc, nous
avons, comme vous l'avez demandé d'ailleurs, amené des solutions
pour remplacer cette proposition qui ne nous semble pas du tout
intéressante. (21 h 20)
Mais, pour y revenir rapidement, pour nous, il est quand même
important de souligner le fait que le Conseil permanent de la jeunesse n'a pas
été invité, et c'est un organisme très important,
qui a émis énormément d'avis au gouvernement, qui sont des
avis d'une qualité à souligner. Il est important pour nous de
souligner que le Conseil permanent de la jeunesse n'a pas été
invité ici. Selon le gouvernement, c'est le représentant de la
jeunesse.
On a mis l'emphase sur les frais de scolarité. Pour ce qui est
des programmes, Jean-Mathieu pourra-1 en parler. Sur plusieurs
points, nous sommes d'accord, mais nous ne les avons pas énoncés.
Il y a plusieurs points dont on ne parle pas. Notamment, quand on parle des
cours d'anglais, vous devez comprendre qu'on est d'accord avec ça,
puisque c'était dans notre mémoire de l'automne dernier. Donc, il
y a des choses qui se retrouvent dans le renouveau qui étaient dans
notre mémoire, les cours d'anglais. Pour ce qui est des cours de
philosophie, comme Jean-Mathieu le disait, on est d'accord,
et, pour plusieurs autres points, on est d'accord aussi. Mais on peut
préciser quand même certains points, si vous le voulez, notamment
pour ce qui est de la Commission, si je me retrouve, là...
M. Potvin: La commission d'évaluation des collèges,
chargée d'évaluer les cégeps. Dans ce sens-là, on
s'interroge encore sur le rôle de cette commission-là qui aurait
trois super-commissaires. C'est vrai que ces gens-là vont avoir une
batterie de fonctionnaires derrière eux, mais on se demande... Au niveau
de l'évaluation, nous, on s'attendait... Et au même titre, au
sujet de l'instauration d'une épreuve synthèse à la fin de
chaque programme, au niveau de chaque cégep, on aurait
préconisé davantage des examens nationaux. Parce que, dans le cas
de la philosophie ou des choses comme ça une question à
laquelle on s'est attardé dans notre mémoire en octobre on
demandait aussi un contrôle plus serré dans ce sens-là, au
niveau de l'application des programmes à l'échelle nationale. Un
étudiant d'un cégep de la Rive-Sud de Montréal n'avait pas
nécessairement le même bagage de connaissances qu'un
étudiant de la région de Québec. Et, lorsqu'on arrive
à l'université et qu'on a besoin de ce minimum de savoir, qui est
essentiel, à notre avis, pour la formation générale, il y
a une disparité d'un établissement à l'autre.
Et on les attend impatiemment, ces examens nationaux, plutôt que
de faire du cas par cas et de laisser une marge, de laisser les professeurs de
philosophie naviguer d'une bouée à l'autre, quand ils ne les
torpillent pas à coups de canon, et appliquer le programme de
façon très large. On se rend compte que la majorité des
étudiants ne rencontre pas les beaux objectifs qui sont dressés
par le programme. Dans ce sens, on voudrait un contrôle du
ministère plus accru pour que les étudiants partent au moins sur
un pied d'égalité et, lorsqu'ils arrivent à
l'université, bien, bon sens, qu'ils soient au courant des grands
courants de pensée politique qui se raccrochent à leur
domaine.
Au sujet de cette possibilité-là, vous parlez de 1996, de
mettre un examen, une épreuve nationale uniforme en langue et
littérature. À mon avis propre, ce ne serait pas
nécessaire si les problèmes au niveau de la langue et de la
littérature étaient corrigés beaucoup plus tôt. Au
collège, on devrait approfondir davantage ces sujets et un peu
élargir l'éventail qui s'offre aux étudiants. Ce n'est pas
normal que, au niveau collégial, on soit encore pris pour apprendre des
règles de grammaire élémentaires et d'orthographe. Le
problème se trouve ailleurs.
Et dans ce sens-là je vais réitérer ce que
j'ai dit tout à l'heure on comprend mal pourquoi la
réforme, même si on la dit pressante, ne s'est pas faite d'une
manière globale. C'est vrai que c'est difficile de brasser un gros
édifice qui s'appelle le système d'enseignement au Québec.
Il y a des choix qu'une société doit se donner, puis je pense
qu'on arrive à cette étape-là, cruciale. Que ce soit
à l'aube de l'an 2000 ou à l'aube de 1994, ça presse.
Mme Robillard: Alors, si on revenait à la formation
générale...
M. Potvin: Oui.
Mme Robillard: ...ce que je comprends, c'est que vous êtes
en accord avec les deux cours de langue seconde, tel que vous venez de le dire.
Au niveau de la philosophie, dans votre document de l'automne dernier, vous
préconisiez deux cours de philosophie, si je me souviens bien. Dans le
renouveau, il y a en trois. Est-ce que vous êtes en accord avec
ça?
M. Picard: Oui, on est satisfaits de cette mesure-là. Les
problèmes qu'on identifiait tantôt au niveau des cours de
philosophie étaient expliqués dans notre mémoire, puis
repris par le projet de renouveau du collégial. Donc, on est d'accord
avec cette mesure-là. Quand on est d'accord, on n'a pas de
problème à le dire.
Mme Robillard: L'automne dernier aussi, vous nous aviez fait des
suggestions concernant des mécanismes de concertation avec...
M. Picard: Avec les CLESEC.
Mme Robillard: Oui, et aussi avec le monde du travail. Vous
parliez d'un mécanisme de concertation État, cégep,
entreprise pour vraiment qu'il y ait une collaboration. Vous avez vu, dans le
renouveau collégial, qu'il y a la mise sur pied d'un comité
national des programmes techniques. Est-ce que vous avez eu l'occasion
d'étudier ça? Et est-ce que vous pensiez à une formule
semblable quand vous nous avez suggéré ça, l'automne
dernier?
M. Picard: Justement, moi-même, j'étais ici, mais je
n'étais pas à la table. La discussion avait porté
longuement sur ce sujet-là.
Mme Robillard: Oui.
M. Picard: Je crois que les objectifs qu'on voulait atteindre
avec la proposition qu'on avait dans notre mémoire ont été
largement atteints à ce titre-ci.
Mme Robillard: Bon. Je voudrais que...
M. Picard: Excusez-moi de vous interrompre, Mme là
ministre. C'est pour ça qu'on aurait pu reprendre notre mémoire
au complet et le reporter dans ce mémoire-là. Évidemment,
par souci d'efficacité, on a cru bon de noter ce qui ne nous plaisait
pas et ce qu'on aimerait voir...
Mme Robillard: Changer...
M. Picard: ...à la place. Je crois que c'est l'exercice
qui est le plus intéressant, puis je ne voulais pas
vous faire lire, évidemment, 40 pages de ce que vous avez
déjà lu précédemment.
Mme Robillard: M. Picard, pourriez-vous m'apporter une
explication sur votre recommandation à la page 17, la recommandation 2
qui touche le perfectionnement des enseignants? Ce que je comprends, c'est que
vous voulez que le gouvernement investisse dans le perfectionnement des
enseignants. Mais, là, vous dites: Non seulement pour maintenir leurs
connaissances à jour, mais pour rattraper le retard. Est-ce que vous
considérez que nos enseignants présentement ont du retard dans
leurs connaissances? Est-ce que les jeunes vous disent ça? D'où
ça vient, cette idée?
M. Picard: Ça vient de la consultation qu'on a
effectuée auprès des étudiants, surtout dans la formation
technique, où ils nous ont dit que plusieurs enseignants c'est la
consultation qu'on a faite étaient trop loin du marché
réel de l'entreprise. Donc, c'est des étudiants qui ont
passé au collégial, qui sont rendus sur le marché du
travail. Ils nous disaient que les professeurs à ce niveau-là
n'avaient pas assez de liens directs avec l'entreprise et n'étaient pas
à l'affût des nouvelles technologies et de ce qui se passe de
nouveau dans l'entreprise. Donc, c'est suite à cette recommandation
qu'on a mis cette recommandation-là dans notre mémoire.
Mme Robillard: Est-ce que, au niveau de la session d'accueil et
d'intégration, vous avez des recommandations particulières
à nous faire? (21 h 30)
M. Picard: Bien, la recommandation qu'on peut faire, c'est de
convoquer des états généraux de l'éducation pour,
évidemment, réformer et améliorer les niveaux primaire et
secondaire. Parce que, d'après nous, si les niveaux primaire et
secondaire répondaient aux attentes, on n'aurait pas besoin d'avoir une
session d'accueil ou d'intégration. Donc, pour nous, la proposition
qu'on fait encore, c'est d'avoir des états généraux de
l'éducation pour voir l'éducation dans sa globalité et non
à la pièce. C'est qu'en ce moment on fait une réforme au
collégial; ensuite, on va en faire une au secondaire. Nous, ce qu'on
aimerait et ce qu'on croit important, c'est qu'il y ait un élan, qu'il y
ait un esprit à toute cette réforme-là, puis on croit
qu'en ce moment il n'y a pas un esprit intéressant pour amener ce
renouveau-là. On doit avoir un esprit semblable à la commission
Parent si on veut une deuxième étape, parce que, d'après
nous, on a atteint les objectifs pour ce qui est de la démocratisation
de l'éducation, puis on doit passer maintenant à un nouveau stade
sans, toutefois, toucher aux objectifs atteints par le rapport Parent.
Le Président (M. Bradet): Ça va. Alors, M. le
député de Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: Oui, d'abord, une première remar- que en
passant, parce que je ne comprends pas les propos préliminaires de la
ministre. Je ne vous ai pas entendu, d'aucune façon, dire un seul mot
sur la Commission-Jeunesse du Parti libéral. Vous avez parlé du
Conseil permanent de la jeunesse.
Mme Robillard: On va faire sortir les galées.
M. Brassard: Oui, oui, on parlait du Conseil permanent de la
jeunesse, qui n'était pas invité à cette commission.
Effectivement, d'ailleurs, on l'avait demandé, nous, comme Opposition
officielle, que le Conseil permanent de la jeunesse soit invité. C'est
un organisme aviseur du gouvernement. Il a, vous avez raison, soumis un
mémoire très étoffé, très substantiel
l'automne dernier à cette même commission, et il aurait
été intéressant de l'entendre s'exprimer sur les
principales propositions de la réforme que nous examinons.
J'ai constaté, tout à l'heure, qu'il y avait un
désaccord entre la Commission-Jeunesse du Parti libéral et la
ministre sur la taxe à l'échec. Je me dois de constater que,
entre moi-même et vous, il y a un désaccord sur la présence
ou sur la place de la philosophie dans la formation générale,
puisque, si je comprends bien, autant vous êtes favorable à ce
qu'on maintienne les quatre cours d'éducation physique, autant vous
êtes, semble-t-il, d'accord avec la proposition ministérielle de
ramener à trois le nombre de cours de philosophie.
M. Picard: Certainement. C'est que, évidemment, on se base
beaucoup sur nos expériences, et je dois dire que notre
expérience au niveau des cours de philosophie a été
désastreuse, puisque... Évidemment, si on regarde la
publicité qui est parue aujourd'hui dans Le Devoir, on peut
remarquer qu'on décrit les buts, les auteurs qu'on est supposé
voir et étudier. Donc, on a fait une petite consultation interne pour
voir quels étaient ces auteurs, si on les avait vus, nous, ces
auteurs-là. Sur à peu près une vingtaine d'auteurs
recensés dans la publicité, la moyenne était de quatre
à cinq auteurs vus par nos membres. Je dois dire que, au niveau de ces
auteurs-là, on a aimé les auteurs, mais c'est le cours qui nous a
déçus, à ce niveau-là.
On croit qu'il doit y avoir des réajustements, comme l'a dit
Jean-Mathieu précédemment, au niveau des cours de philosophie. Et
on a entendu, évidemment, toutes sortes d'histoires sur les cours de
philosophie. Dans notre premier mémoire, on enlevait deux cours de
philosophie, et c'était à cause des carences qu'il y avait au
niveau de l'enseignement de la philosophie où, même dans un
même cégep, la formation de philosophie 101 n'était pas la
même, la formation de philosophie 201 n'était pas la même,
etc. Dans le même cégep, on ne retrouvait pas les mêmes
cours. On ne retrouvait pas les mêmes auteurs et même les
mêmes buts. Donc, pour nous, ce sont des problèmes assez
importants, puis on croit que les trois cours de philosophie proposés
par la ministre, c'est intéressant, à ce niveau-là.
J'espère qu'on va tenir compte de ça et qu'on va essayer de
pallier aux
carences de l'enseignement au niveau de la philosophie.
M. Brassard: Enfin, voilà une opinion. Moi, je pense
plutôt que ce n'est pas en... On peut à la fois reconnaître
les carences et les lacunes de l'enseignement d'une discipline et que ça
ne se traduise pas nécessairement par la suppression de cours. On
pourrait garder les quatre cours, puis en resserrer les contenus, en
préciser davantage les objectifs. Enfin, chacun a ses
désaccords.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Brassard: II y a un désaccord du côté
ministériel sur la taxe à l'échec, il y en a un autre chez
nous pour ce qui est de la présence de la philosophie. C'est tout
à fait démocratique. Voilà! C'est tout à fait
bénéfique. Ça veut dire que...
M. Picard: Ce qu'on a toujours souhaité.
M. Brassard: ...et les jeunes du Parti libéral et les
jeunes du Parti québécois peuvent prendre des positions sans
être mis en tutelle par l'aile parlementaire ou par les instances
dirigeantes du parti. Très bien. Très bien. Mais on est toujours
en désaccord quand même.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Picard: Au moins, on s'entend sur la philosophie de
l'éducation.
M. Brassard: Voilà!
M. Picard: C'est très important.
M. Brassard: Sur les seuils d'admission, je comprends bien que
vous êtes d'accord pour rehausser les exigences, mais que ça passe
par le canal du diplôme d'études secondaires pour éviter de
créer deux D.E.S.: un qui mène au collégial, puis l'autre
qui ne mène nulle part ou dans un «no man's land», pour
employer l'image que vous avez utilisée.
M. Potvin: En fait, on se rend compte que ça va engraisser
un peu une poche statistique. Ces gens-là, on ne les retrouvera nulle
part. Les deux qualités de D.E.S., un D.E.S. qui ne mène nulle
part... Peut-être qu'on les retrouvera sous les statistiques de
l'assurance-chômage, ces gens-là.
M. Brassard: Ou du BS.
M. Potvin: Oui, mais, là, je n'osais pas aller aussi loin.
Pour le reste, resserrer les critères, je pense qu'on s'entend tous
là-dessus. Il y a trop de gens qui arrivent au collégial sans
avoir tous les outils en main pour progresser davantage. Mais, ça,
ça dépend des autres ordres d'enseignement. On a entendu de la
bouche de la ministre d'être patients à ce sujet-là, mais,
s'il y a une période de transition qui se fait attendre, ça
risque d'être assez grave aussi, à moyen terme.
Une voix: Peut-être que Marc veut ajouter. Le
Président (M. Bradet): M. Dean.
M. Dean: Peut-être un petit commentaire additionnel. C'est
que le cégep est supposé être un peu une transition entre
le secondaire et l'université. Bien, là, ça veut dire
qu'on va avoir une transition de plus avec la session d'accueil. Moi, je le
vois comme ça, en tout cas. On rajoute une transition du secondaire
à la session d'accueil jusqu'au cégep et, ensuite, à
l'université, au lieu de régler les problèmes qui
pourraient être réglés au secondaire. C'est comme ça
que...
M. Brassard: Enfin, ce que vous dites, c'est que la session
d'accueil pourrait être appelée quasiment à
disparaître si l'enseignement secondaire était revalorisé
ou révisé.
M. Dean: Oui.
Une voix: Nous espérons que c'est le but.
M. Brassard: En tout cas, la nécessité se ferait
moins sentir. Quant à ce qu'on appelle désormais la taxe à
l'échec, vous êtes opposés à cette mesure-là
pour les raisons que vous invoquez. Vous rejoignez ainsi la Commission-Jeunesse
du Parti libéral et toutes les associations, les regroupements
étudiants, bien du monde, les centrales syndicales également.
Hier, la fédération universitaire...
Une voix: Non, du collégial.
M. Brassard: ...la Fédération étudiante
collégiale recommandait que, à la place, on conserve l'article 33
qui permet à un établissement collégial d'expulser un
étudiant, qu'on conserve cet article-là, mais qu'on l'accompagne
ou, avant de le mettre en application, pour les élèves qui
connaîtront des échecs, donc qui auront des difficultés
d'apprentissage ou d'orientation, qu'il soit précédé de
mesures d'aide, d'encadrement, de soutien de nature pédagogique,
évidemment, pour leur permettre de passer à travers et de
reprendre leur cheminement vers le diplôme. Les étudiants, hier,
présentaient cela comme une alternative plus équitable parce que
ne faisant pas appel à la capacité financière, comme
l'indiquait tout à l'heure la Commission-Jeunesse du Parti
libéral. Est-ce que vous êtes d'accord avec cette façon de
voir les choses? (21 h 40)
M. Picard: Bien, juste avant de passer la parole à Marc,
on a eu l'occasion, rapidement, de lire ce que la FECQ proposait dans son
mémoire, puis je dois dire que cette proposition-là,
multipliée par nos propositions, semble être une très bonne
mesure de rechange au ticket
orienteur ou modérateur ou accélérateur.
M. Dean: C'est ça. C'est que, nous aussi, on dit, à
la page 8 de notre document, qu'on est en faveur du maintien de l'article 33 et
qu'on devrait aussi mettre des mesures de soutien appropriées pour
appuyer les efforts de l'élève qui veut se ressaisir. Alors, on
en fait déjà mention à la page 8, deuxième
paragraphe, de notre document. On ne voit pas de problème là.
M. Picard: Nous n'avons pas précisé comment
ça allait s'imbriquer, mais...
M. Brassard: II y a une procédure qui est proposée
par la Fédération.
M. Picard: Ça nous paraît très
intéressant et, avec un incitatif comme on le propose dans notre
mémoire, c'est-à-dire exactement la même chose qu'à
la maîtrise et au doctorat, les étudiants qui termineraient leurs
études dans les délais raisonnables verraient une
réduction de leur endettement. Donc, cette mesure incitative, avec cette
proposition-là plus détaillée de la FECQ, nous semble
très intéressantes. C'est tout.
M. Brassard: Vous êtes convaincus qu'une mesure incitative
de cette nature-là c'est-à-dire la
généraliser, finalement, car elle existe déjà pour
les étudiants de deuxième cycle à l'université
généralisée aux étudiants de premier cycle
et aux étudiants de niveau collégial... Il y en a combien: 35 %,
40 % qui ont accès et ont recours au système de prêts et
bourses au niveau collégial, à peu près, la
proportion?
M. Picard: II faudrait vérifier dans notre mémoire,
mais il me semble que ça approche les 50 %.
M. Brassard: C'est une proportion assez élevée.
Donc, vous pensez que, en généralisant cette mesure-là,
ça va avoir des effets bénéfiques et vraiment incitatifs
à raccourcir la durée des études.
M. Picard: pour nous, c'est important, puisque,
évidemment, et le projet de loi reconnaît ce fait, depuis la
création des cégeps, il y a eu un changement de la façon
de vivre de l'étudiant. on doit noter ici que 60 % des étudiants
qui reçoivent de l'aide financière ne reçoivent pas de
contribution parentale. donc, ces étudiants-là ont deux choix:
soit qu'ils poursuivent leurs parents ou soit qu'ils vont travailler.
évidemment, les étudiants ont besoin de cet argent-là,
puisque, dans le calcul, c'est considéré comme... c'est un
problème de calcul, finalement, mais, cet argent-là, ils en ont
besoin pour leurs besoins, je veux dire, de nourriture, de logement, etc., ce
qui fait que ces étudiants travaillent beaucoup plus qu'un autre
étudiant qui travaille pour le plaisir de travailler ou pour se payer
les choses de la fin de semaine.
Donc, cet étudiant-là travaille beaucoup plus et on
remarque, selon les chiffres du Conseil permanent de la jeunesse, qu'un
étudiant qui travaille plus de 15 heures par semaine voit ses notes
descendre dramatiquement. On considère que ces
étudiants-là, donc, qui ne reçoivent pas de contribution
parentale, seraient énormément défavorisés par le
ticket orienteur de 50 $, évidemment, puisqu'ils tombent dans un cercle
vicieux, et le ticket accélérateur va justement
accélérer cette mesure-là.
Donc, pour les autres étudiants, comme, d'après les
chiffres mêmes du ministère, ça fonctionne très bien
au niveau de la maîtrise et du doctorat, pourquoi ne pas étendre
cette mesure-là, qui est incitative et qui ne pénalise pas les
étudiants qui ont des difficultés? Ça, c'est très
important pour nous. Pénaliser des étudiants qui ont de la
difficulté, pour nous, c'est totalement inacceptable. On doit, comme le
précise notre mémoire et comme le précise la proposition
de la FECQ, plutôt aider au niveau de l'encadrement, puisqu'on sait qu'au
cégep, au collégial, c'est un des grands problèmes. Donc,
on doit aider, au niveau de l'encadrement, ces étudiants-là au
lieu de les taxer.
Pour ce qui est des autres étudiants qui ont peut-être
moins de problèmes, qui n'échouent pas nécessairement leur
cours, mais qui le prenne à quatre cours par session, on croit qu'une
mesure incitative, à ce titre-là, pourrait être très
intéressante. Et, si ça fonctionne aussi bien qu'au doctorat et
à la maîtrise, je crois qu'on va avoir fait des gains importants
au niveau du collégial.
M. Brassard: II y a beaucoup d'intervenants, évidemment,
qui souhaitent et qui ont recommandé vivement que l'on ne se contente
pas d'une réflexion sur un seul ordre d'enseignement, celui du
collégial, mais qu'on fasse une réflexion globale sur le
système d'éducation, sur tous les ordres d'enseignement, sur la
mission de chacun des ordres, les finalités de chacun des ordres, parce
que, comme vous le dites, il y a un arrimage important entre tous les ordres
d'enseignement. Ça, ça revient souvent. Le moyen d'y arriver,
évidemment, diffère. Hier, Mme Pagé, de la CEQ,
recommandait que l'on confie cette tâche ou cette fonction, cette
mission, si vous voulez, au Conseil supérieur de l'éducation, que
l'on demande au Conseil supérieur de l'éducation de
réfléchir là-dessus et de donner, ensuite, un avis sur
toute cette question portant sur l'ensemble du système
d'éducation.
Vous, votre proposition, c'est ce que vous appelez les états
généraux, une convocation de ce qu'on appelle les états
généraux de l'éducation, où l'on procéderait
à cette réflexion et à ce débat public. J'aimerais
savoir comment vous voyez cette opération-là, comment vous voyez
cette structure-là. Est-ce que vous ne pensez pas que ça pourrait
être trop lourd? Tout le monde est d'accord pour faire une
réflexion globale sur le système d'éducation, ça,
je pense qu'il y a un consensus là-dessus, mais pourquoi avez-vous
privilégié, vous, ce moyen: les états
généraux de l'éducation?
M. Picard: La raison est bien simple j'en ai
parlé un petit peu plus tôt c'est au niveau de
l'esprit des changements qu'on doit apporter à l'éducation. C'est
que, en ce moment, on a une réforme pour le collégial et on va
probablement avoir une autre réfor-mette pour le secondaire. Et, quand
on regarde le rôle qu'a eu le rapport Parent dans la Révolution
tranquille au Québec, on peut se dire que l'éducation a un impact
majeur sur le reste de la société québécoise. On a
vu le nombre de diplômes augmenter, le nombre de francophones au
Québec qui... On le sait, il y avait un gros problème de
scolarisation pour les francophones, et cette démocratisation-là
du rapport Parent a permis aux francophones d'augmenter leur niveau de
scolarisation.
Évidemment, ça s'est fait dans un esprit concret, un
esprit très intéressant où on a vu une vaste consultation
et où... Évidemment, nous n'étions pas là à
ce moment-là, mais, par ce qu'on a vu, par les impacts que cette
commission-là a donnés, nous croyons... Évidemment, nous
pensons que l'éducation est à la base d'une
société. Évidemment, nous, on est pour le plein emploi.
Donc, l'éducation est à la base de ce plein emploi-là, la
formation. Donc, pour nous, nous croyons que des états
généraux de l'éducation, c'est-à-dire une
commission, si on veut, qui mobiliserait l'ensemble de la société
et pas seulement les parlementaires, un peu comme la commission
Bélanger-Campeau, peut-être en plus efficace, ça serait
important. Et là, je le recommande encore une fois, si c'était
pour être des états généraux de l'éducation,
s'il vous plaît, contrairement à la commission
Bélanger-Campeau qui a encore oublié d'avoir au moins un jeune,
sur les états généraux de l'éducation, si vous
voulez bien avoir au moins un jeune sur la commission, je pense que ça
serait bienvenu. (21 h 50)
Donc, c'est pour donner cet esprit-là d'éducation qui est
à la base de notre société, une société qui
a une formation fondamentale, une société qui est solide, comme
on le disait dans notre conclusion, c'est-à-dire qui est critique, qui
sait ce qui se passe autour d'elle; donc, une société plus
performante, plus forte, plus confiante en elle. Donc, pour nous, les
états généraux de l'éducation, c'est un esprit dans
lequel la société québécoise devrait se mobiliser
pour arriver à un consensus où toute la société
devrait se diriger pour avoir un meilleur système d'éducation. Et
on croit que, 25 ans après le rapport Parent, on a besoin d'un nouveau
virage, celui-là vers la qualité de l'enseignement. Suite,
évidemment, à la démocratisation de l'enseignement, on
doit maintenant passer à la qualité de l'enseignement, et ce, pas
seulement un niveau à la fois, mais on doit, évidemment, observer
l'ensemble, la globalité de notre système d'éducation.
Le Président (M. Bradet): Alors...
M. Picard: Et si je peux rajouter, je joins ma voix à la
Commission-Jeunesse qui a parlé d'une réunification des deux
ministères. C'est aussi une proposition qu'on a adoptée
là-dessus. Même si c'est le Parti québé- cois qui,
en 1985, a désunifié, si on veut, ce ministère-là,
les problèmes, à ce moment-là, étaient probablement
différents, mais, aujourd'hui, nous devons reconnaître que ces
deux ministères-là doivent être remis ensemble.
Le Président (M. Bradet): Alors, il me reste à vous
remercier de votre présentation, à remercier les membres de la
commission, ainsi que les gens qui nous ont suivis toute la journée.
Donc, bon voyage de retour. La commission ajourne donc ses travaux à
demain, 10 heures.
(Fin de la séance à 21 h 52)