Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
(Dix heures quatre minutes)
Le Président (M. Bradet): Je vous souhaite la bienvenue.
Je déclare la séance de la commission ouverte et vous rappelle le
mandat de cette commission, qui est de procéder à des auditions
publiques dans le cadre des consultations particulières sur le projet de
loi 82, Loi modifiant la Loi sur les collèges d'enseignement
général et professionnel et d'autres dispositions
législatives.
Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
La Secrétaire: Aucun remplacement, M. le
Président.
Organisation des travaux
Le Président (M. Bradet): Merci beaucoup. Alors, je vous
rappelle l'ordre du jour d'aujourd'hui, qui est: à 10 heures, la
Fédération étudiante collégiale du Québec;
à 11 heures, nous recevrons le Conseil du patronat du Québec;
à midi, la Fédération autonome du collégial, et
suspension à 13 heures. À 16 heures, la Fédération
des commissions scolaires du Québec; à 17 heures, la
Confédération des éducateurs et éducatrices
physiques du Québec. Est-ce que l'ordre du jour est adopté?
Adopté.
Alors, notre premier groupe, c'est la Fédération
étudiante collégiale du Québec. Je vous souhaite la
bienvenue, Mme la présidente, Mme Stéphanie Vennes. Je vous
rappelle que vous avez 20 minutes pour faire votre présentation et que
le reste du temps, c'est-à-dire les 40 minutes qui restent, c'est
l'échange avec les groupes parlementaires. Je vous demanderais, avant de
débuter, de nous présenter les gens qui vous accompagnent.
Auditions Fédération étudiante
collégiale du Québec (FECQ)
M. Lapointe (Frédéric): Alors, merci, M. le
Président. Mme la ministre, M. le critique de l'Opposition, vous avez,
à votre droite, Stéphane Hamel, qui est coordonnateur
général du bureau d'information et de communication, le BICCC;
ici, Ugo Lippe, qui est coordonnateur à la pédagogie à la
FECQ; moi-même, ancien président de la FECQ et porte-parole de
celle-ci sur les questions afférentes à la réforme;
Stéphanie Vennes, qui est la nouvelle présidente de la FECQ, Yan
Thérrien, le nouveau vice-président de la FECQ, et
Sébastien McQuade qui, comme vous le savez, est porte-parole du
BICCC.
Alors, M. le Président, c'est avec plaisir qu'au bout d'un an de
travaux la FECQ vous dépose un autre mémoire sur la question de
la réforme ou du renouveau, comme on l'appelle maintenant, de
l'enseignement collégial québécois. Il ne faut pas
s'étonner que le mémoire ne soit pas un mémoire
déposé au nom de la FECQ, mais au nom de la coalition
collégiale. En effet, 44 associations étudiantes réunies
en coalition collégiale ont demandé à la FECQ de
défendre leur position, ce que nous avons fait. C'est donc dans un cadre
très élargi que la réflexion, qui a certes
été très productive, a eu lieu, puisque ce mémoire
est plus étoffé que notre dernier et on a touché aussi des
dizaines de milliers d'étudiants par les journées d'études
dont vous avez entendu parler. Il s'agit donc d'un mémoire on ne peut
plus représentatif des étudiants.
Évidemment, on ne pourra parler de l'ensemble du mémoire;
nous parlerons de trois parties en particulier: de l'éducation physique,
de l'évaluation collégiale et de la réforme
vis-à-vis des étudiants en termes d'accessibilité, de
cheminement et de réussite. Alors, concernant l'éducation
physique, Yan Thérrien vous présentera le mémoire.
Le Président (M. Bradet): Merci,
Frédéric.
M. Thérrien (Yan): Bonjour, M. le Président.
Bonjour, Mme la ministre. Bonjour, M. le critique de l'Opposition. Tout
d'abord, l'éducation physique est-elle d'une importance secondaire? Pour
avoir une vision actuelle de l'éducation physique, nous avons dû
faire une légère rétrospective. Premièrement, nous
en avons conclu que l'éducation physique comportait des valeurs
fondamentales très importantes comme celles de la famille, du
succès, de la condition physique, de la liberté, du confort, de
l'amour, de l'amitié, de l'intimité, de la popularité, de
l'esprit sportif. Toutes ces valeurs sont très importantes à un
individu pour pouvoir se développer de façon continuelle et de
façon privilégiée dans une société. En plus
de l'adaptation individuelle d'un ensemble d'activités physiques
régulières modérées, l'éducation physique
s'adapte dans son évaluation à chaque physiologie et à
chaque comportement de chaque étudiant. dans la partie théorique
des cours d'éducation physique qui, soit dit en passant, n'est pas
reconnue par le ministère, nous pouvons voir que des connaissances
fondamentales sur le corps humain sont apportées. cette partie
théorique, comme je le disais juste avant, n'est pas reconnue à
l'intérieur de ces cours, et c'est une chose que nous déplorons.
les étudiants l'ont démontré et, à très
forte majorité, 90 % sont très satisfaits de
leurs cours d'éducation physique.
Des rapports comme ceux que l'UNESCO a produits favorisaient
l'éducation physique jusqu'à l'université afin de pouvoir
permettre une éducation et un apprentissage efficaces tout au long des
études pour les étudiants. Votre gouvernement est en pleine
campagne pour l'augmentation des heures d'activité physique chez les
jeunes. Donc, si vous vouliez aller de l'avant en régressant et en
coupant dans les cours d'éducation physique, selon nous, ce serait
inacceptable et ce serait enlever les chances de performance académique
au niveau des étudiants.
La principale raison pourquoi les étudiants ne sont pas
portés à pratiquer un certain nombre d'heures d'éducation
physique, c'est le manque de temps. Et c'est alors pourquoi nous
considérons que les cours d'éducation physique obligatoires sont
très importants au collégial. Elle constitue un certain minimum
qui devrait être pratiqué par tous les individus dans une
société et, selon nous, elle ne doit pas être
enlevée.
Le ministère prétend pouvoir mettre les installations
sportives à la disposition des étudiants. Et, pourtant, dans le
mémoire, on a pu voir très clairement que ces installations
seraient mises à la disposition de la communauté environnante.
Déjà, les étudiants éprouvent des
difficultés à pouvoir obtenir du matériel sportif pour
pouvoir pratiquer en dehors des heures scolaires. (10 h 10)
L'amélioration de la productivité et la qualité de
vie sont des facteurs importants qui sont véhiculés dans
l'éducation physique, de même que la santé et le
bien-être. Je crois, Mme la ministre, qu'il serait important et
même primordial de conserver ces cours d'éducation physique afin
de permettre à une jeunesse, nous, les futurs travailleurs de demain, de
pouvoir avoir accès à la meilleure éducation possible et
de se trouver dans une condition physique favorable pour pouvoir terminer nos
études. Merci.
Le Président (M. Bradet): Alors, merci.
M. Lapointe: Pour passer à la deuxième partie
concernant l'évaluation, Ugo Lippe la présentera.
Le Président (M. Bradet): M. Lippe.
M. Lippe (Ugo): Bonjour, M. le Président, Mme la ministre,
M. le critique de l'Opposition. Actuellement, dans le réseau
collégial, les étudiants sont les seuls à se faire
évaluer par l'entremise des politiques d'évaluation des
apprentissages. Nous sommes un petit peu contents de ce qui est venu, de
l'instauration de certaines évaluations à d'autres niveaux. Ce
qui a motivé un petit peu ces changements, c'est le besoin, en fait,
d'amélioration. Attester l'évaluation qu'un étudiant
reçoit, ça demande aussi que les gens qui attestent cette
évaluation, c'est-à-dire les professeurs, et que les programmes
comme tels, comme entités, puissent être, eux aussi,
évalués. Et nous jugeons que les meilleurs pour pouvoir
évaluer ça, c'est ceux qui en bénéficient, donc les
étudiants.
Les gens en ont assez, d'après nous, de payer pour des
résultats qui sont intangibles à leurs yeux, qu'ils ne voient
pas. On pense qu'avec une évaluation plus approfondie ça va
permettre que la population puisse voir réellement pourquoi elle paie.
Et, d'après nous, la population va être contente de payer pour une
éducation si elle peut voir les résultats. Par contre, on pense
qu'il serait vraiment important que, dans ces processus d'évaluation,
les étudiants soient inclus. Pourquoi? Parce que les étudiants
sont les premiers concernés par l'application des programmes. Nous
sommes très contents, en passant, du fait qu'il y ait
l'évaluation des programmes.
Un autre point où on a un petit peu de critiques malgré
qu'il y ait un premier pas qui soit fait, c'est pour l'évaluation du
personnel. On juge que c'est bon, c'est un premier pas de fait, mais que
ça ne va pas assez loin. En 14 ans d'existence, le Conseil des
collèges n'a pas réussi à faire appliquer de façon
fonctionnelle des politiques d'évaluation des apprentissages dans
l'ensemble des collèges. Alors, on se demande, ici il n'y a
aucune structure qui en favorise l'application combien de temps
ça va prendre avant d'avoir des structures fonctionnelles pour
l'évaluation du personnel. On juge aussi que l'étudiant est le
mieux placé pour savoir si l'enseignement est effectivement
dispensé comme il le faut puisque, encore là, c'est lui qui en
bénéficie.
Au sujet de la loi 83, la commission d'évaluation n'a que trois
membres. Le danger que l'on voit par rapport à ça, c'est qu'on
remet le pouvoir, si on veut, entre les mains de trop peu de personnes. On est
conscients qu'il y a une volonté pour diminuer, si on veut, les
coûts. Par contre, on pense qu'en remettant ça entre les mains de
trois personnes on laisse un petit peu des jugements qui pourraient être
assez arbitraires et pas assez objectifs.
Il y a une autre partie qui nous dérange, c'est l'article 19 de
la même loi sur, on pourrait dire, l'accès que les commissaires
peuvent avoir à toute information qu'ils peuvent aller chercher dans les
institutions. On se demande quelle assurance ont les institutions, les
étudiants ou les autres personnes qui pourraient être
concernées par ça que la confidentialité des
renseignements va être respectée. Si je me souviens bien, c'est
cet automne qu'on écrivait dans certains journaux que le Québec
était en lice pour le prix «Big Brother», de l'auteur George
Orwell. Maintenant, si on voit que des lois d'un gouvernement vont à
rencontre de certaines autres lois qui protègent l'accès à
l'information, on se demande jusqu'à quel point on va réussir
à respecter la confidentialité.
Un autre aspect comme on l'avait demandé, on en est
relativement satisfait c'est l'autonomie pour les techniques à
caractère industriel. Par contre, on aurait aimé avoir une
approche réseau pour garantir l'accès à
l'université de façon raisonnable. C'est-à-dire que,
quelle que soit la région, quel que soit le collège, l'ac-
ces à l'université soit le même. Et, dans la
même ligne de pensée, on pense que, dans l'évaluation des
institutions, de la façon dont ça se fait actuellement, le
problème est qu'on va se retrouver avec des cégeps en
région qui vont être moins bien cotés, et
l'accessibilité à l'université risque de le payer
cher.
M. Lapointe: Alors, M. le Président, on passe maintenant
au troisième aspect que nous traiterons aujourd'hui: le renouveau
proposé aux étudiants: une stratégie de réussite ou
d'économie? Alors, je rappellerai à la commission qu'en
matière d'accessibilité, de cheminement et de réussite, le
renouveau vise trois objectifs: ajuster les stratégies de poursuite de
la qualité dans les collèges devenus des institutions à
fréquentation de masse; diversifier et adapter les pratiques
pédagogiques des collèges pour rejoindre des populations aux
modes de fréquentation et aux profils personnels de plus en plus
variés; et aussi intensifier la présence et l'appui auprès
des étudiants en quête d'orientation personnelle et
professionnelle. Il est évident que nous souscrivons à ces trois
objectifs.
La ministre et le gouvernement proposent certaines mesures pour viser
ces objectifs-là, entre autres, de préciser les seuils
d'admissibilité préciser dans le sens de hausser, bien
sûr donc, d'introduire de nouvelles obligations pour les
étudiants qui veulent accéder à l'ordre collégial.
Il y a aussi une reconnaissance des études professionnelles du
secondaire par modules de l'enseignement technique. On introduit une
première session sous le signe de l'accueil et de l'intégration.
On veut promouvoir les pratiques institutionnelles axées sur la
réussite, maintenir la gratuité scolaire, mais introduire une
mesure financière visant la responsabilisation et l'incitation à
la réussite. Je tiens à souligner que, concernant la
première session sous le signe de l'accueil et de l'intégration,
la promotion des pratiques institutionnelles, de même que le ticket
modérateur ou les frais de scolarité pour fins de
modération, il n'y a aucune mesure réglementaire qui est
prévue à ce jour, même s'il était affirmé au
début du processus que tout serait sur la table. Donc, la
réaction des étudiants au renouveau proposé est
globalement négative. Vous savez pertinemment pourquoi le ticket
modérateur a occupé une très grande place dans les
réflexions des étudiants, à raison, d'ailleurs.
Concernant les seuils d'admission, on s'interroge très vivement
sur la pertinence de hausser des seuils préalablement à la tenue
d'une révision globale du système d'enseignement ou,
minimalement, de l'ordre concerné, c'est-à-dire l'ordre
secondaire. Conséquem-ment, les associations étudiantes exigent
un examen en profondeur de l'éducation, particulièrement du
niveau secondaire, avant de procéder à une sérieuse hausse
des exigences pour l'admission au collège. On s'interroge encore sur les
motivations qui ont amené le gouvernement à effectuer une
révision à la pièce de l'enseignement
collégial.
Donc, la mesure puisqu'elle n'est pas harmoni- sée avec le
secondaire qui introduit un double D.E.S., selon nous, est plutôt
mauvaise, parce que le D.E.S., lorsque l'étudiant l'atteint, c'est bien
pour pouvoir poursuivre ses études. Le D.E.S. en soi ne donne pas
grand-chose, sinon de pouvoir être admis à de petits
métiers, à moins que l'étudiant n'ait une formation
jugée pertinente reconnue par le collège, ce qui est
aléatoire. L'étudiant qui n'a pas réussi les cours
fixés, mais qui a tout de même son D.E.S. se retrouve dans un
cul-de-sac, ce qui est dommage.
Au niveau des études secondaires pleinement reconnues, on a la
modulation des programmes techniques; cette initiative est saluée. Au
niveau de la session d'intégration et des mesures promouvant la
réussite, on s'interroge sur l'impact de ces mesures-là sur la
réalité dans un contexte où les ressources
affectées à l'encadrement des étudiants diminuent. Alors,
on rappelle qu'il ne se fait rien sans ressources, même si dans les
textes on énonce de bien bonnes volontés. Conséquemment,
on propose un financement accru de l'encadrement des étudiants de la
part du gouvernement et aussi une vigilance accrue face aux dépenses
liées à l'encadrement du personnel qui augmente plus ou, selon le
cas, diminue moins que l'encadrement des étudiants. On s'interroge
à savoir si les collèges sont là pour les étudiants
ou pour leur personnel. (10 h 20)
Concernant la mesure-choc, comme on pourrait l'appeler, du ticket
modérateur, bien sûr, on la considère honteuse, inutile,
provocatrice et perverse. Je n'aurai pas le temps de vous réciter la
somme d'arguments qu'il y a contre cette mesure-là; je dirai simplement
que c'est une mesure honteuse, la preuve étant que le gouvernement ne
dit pas à la population ce qu'est réellement cette mesure. Dans
la loi, c'est clairement une introduction de droits de scolarité, alors
que, dans le public, on teinte ça de rose en affirmant que c'est un
ticket accélérateur. Nous croyons que, si le gouvernement croyait
lui-même que cette mesure est fondamentalement bonne, il n'utiliserait
pas de telles techniques de vente pour pouvoir la faire passer face à la
population.
Cette mesure-là est aussi passablement méprisante, parce
que ce gouvernement-là met fin à la gratuité scolaire pour
des étudiants qui étudieraient à temps plein. Et, aussi,
il est odieux d'imposer une amende à l'échec. Un étudiant
qui échoue a normalement suffisamment de problèmes d'ordre
économique, par exemple et la dernière chose dont il a
besoin, c'est bien d'un boulet à sa réinsertion dans le
système. Il y a aussi un autre aspect, c'est que de faire payer un
étudiant lorsqu'il échoue, ça enlève un peu tout le
côté réprobation sociale qui peut entourer l'échec.
Bon. L'étudiant paie pour son échec, ça va, on ne
s'occupera pas trop de lui, il a payé pour sa peine, bon, alors que ce
qui serait effectivement très efficace, c'est qu'il y ait une pression
sociale sur l'étudiant pour qu'il réussisse. Et le ticket
modérateur, malheureusement, diminue cette pression sociale
là.
La mesure est aussi infiniment inefficace et discri-
minatoire parce que, foncièrement, une mesure financière
touche différemment les étudiants selon leur portefeuille.
Comment est-ce qu'on peut appliquer une mesure dans le système
d'éducation en fonction du portefeuille des étudiants? On le
sait, les étudiants du collégial ont un revenu moyen de moins de
6000 $, ce qui cache une réalité qui est autre,
c'est-à-dire que plusieurs étudiants doivent subvenir à
leurs besoins avec moins de 3000 $ alors que d'autres accumulent 12 000 $ sous
l'aile protectrice d'un parent. Donc, pour une bonne partie de la population
étudiante, le ticket modérateur est un obstacle incontournable
à la poursuite de leurs études, alors que pour les autres le
ticket modérateur est passablement insignifiant et ne constitue en rien
une mesure de responsabilisation.
Alors, face à ça, on pourrait toujours augmenter ou
réduire le ticket modérateur. Cependant, il n'y aura que deux
tendances remarquées. Si on réduit le ticket modérateur,
ça en augmente l'insignifiance et, si on l'augmente, ça augmente
l'exclusion, ce qui est passablement intolérable socialement. Donc,
comment on peut affirmer faire de l'éducation un outil de justice
sociale lorsqu'on introduit une discrimination sur une base financière?
C'est un ticket, aussi, que nous considérons foncièrement inutile
parce que les étudiants, d'une part, réussissent de mieux en
mieux et que l'effet responsabilisant d'une telle mesure est douteux,
très douteux. Il est aussi douteux que l'État réalisera de
grosses économies avec un tel ticket modérateur. Les
étudiants, vous le savez, apprennent vite. Puisqu'ils ont à payer
pour leurs échecs, ils se désinscriront des cours qu'ils
considèrent les plus difficiles. Ils prendront des sessions
allégées, ce qui provoquera une affectation de professeurs
inutiles. Et rappelez-vous que 1 % de la masse salariale des enseignants, c'est
5 000 000 $. Ce que vous croyez économiser sera diminué, nous le
croyons. Donc, les étudiants réussissent déjà de
mieux en mieux. C'est une mesure qui est injuste. C'est une mesure qui est
très perverse pour le système même. On se demande encore
pourquoi le gouvernement l'a introduite, cette mesure-là.
Mais nous avons fait, parallèlement à cette
critique-là, une réflexion sur des alternatives qui pourraient se
comparer avantageusement. Et, sans prétention, nous croyons que ce que
nous proposons ne peut pas être refusé, du moins en fonction des
objectifs avoués du gouvernement. Donc, ces mesures-là,
évidemment, ne visent pas à pénaliser les étudiants
financièrement; elles visent à les responsabiliser par un
encadrement. Elles sont de quatre ordres. Premièrement, plus qu'une
invitation, une incitation très marquée des institutions à
offrir une session d'orientation et à y convier les étudiants
à risques. Mme la ministre, vous vous fiez aux institutions pour tenir
de telles sessions. Ce qui risque d'arriver, comme dans le cas de l'article 33,
c'est que ce sera très inégal dans le réseau. Les effets
seront aussi très inégaux. Et, attendu la diminution des
ressources allouées à l'enseignement collégial, on se pose
la question à savoir s'il y aura effectivement un encadrement de ces
étudiants-là. Il faudra aussi rendre visibles les coûts de
la formation à l'étudiant, mais non pas par une mesure
pénalisante, par exemple, afficher sur le bulletin de l'étudiant
le coût de sa formation jusqu'à maintenant. C'est facile. On sait
qu'est-ce que ça coûte, un cours. C'est rendre visibles les
coûts de l'enseignement, et ça vise une conscientisation positive
et, de fait, beaucoup plus efficace de l'étudiant aux coûts de sa
formation pour la société.
Des relevés de mi-session pour fins de dépistage et le
parrainage par les pairs. C'est simplement systématiser une mesure qui
existe déjà dans certains collèges de qualité,
c'est-à-dire qu'on procède à l'identification des
étudiants en difficulté et qu'on tente de les orienter dès
la mi-session vers les ressources qui sont mises à leur disposition. Et
nous considérons que, puisque les étudiants qui décrochent
sont des étudiants isolés, la première ressource sur
laquelle ils peuvent compter, c'est sur leurs pairs, c'est sur les autres
étudiants, et que nous devons inciter à cette
collaboration-là entre les étudiants.
Quatrièmement, une véritable épée de
Damoclès forçant l'utilisation maximale des ressources de
l'institution et des capacités personnelles de l'étudiant, ce que
ne fait pas le ticket modérateur, bien sûr. Donc, ça
consiste, comme c'était le cas avec l'article 33, à forcer
l'étudiant à s'entendre avec le collège lorsqu'il a
atteint, cette fois-ci, un certain nombre d'échecs. Nous reprenons les
mesures de la ministre sur cet aspect-là. Donc, l'étudiant qui a
accumulé plus de cinq échecs devra s'entendre avec l'institution
sur la poursuite de ses études. Alors, l'institution pourra beaucoup
plus facilement encadrer l'étudiant, le soumettre, selon les
problèmes qu'il vit, à de la consultation psychologique, à
un centre d'apprentissage en français, à des cours de mise
à niveau et ainsi de suite. Nous croyons que c'est beaucoup plus
favorable à la réussite qu'une pénalité
financière.
Le Président (M. Bradet): M. Lapointe, il vous reste
quelques minutes pour conclure, s'il vous plaît.
M. Lapointe: En quelques minutes, ce sera rapide. Donc,
ultimement, cette mesure peut prévoir, oui, la suspension de
l'étudiant de l'institution. L'étudiant ira
réfléchir pendant six mois sur les vertus de l'enseignement
collégial en testant le marché du travail pendant six mois. Nous
croyons qu'un étudiant qui reviendra au niveau collégial suite
à cette espèce de renvoi qui sera une mesure d'expulsion et qui
permettra vraiment d'exclure du réseau les véritables abuseurs,
ce que le ticket modérateur ne permet pas... Avec le ticket
modérateur, un étudiant qui veut profiter du système peut
le faire éternellement, s'il le souhaite, à 50 $ le cours. Quand
on sait ce que ça coûte, un cours du collégial pour
l'État, c'est une mesure qui est inefficace et qui ne garantit pas aux
contribuables que ses fonds sont utilisés à bon escient.
Considérant ces faits, nous croyons que nos pro-
positions sont sans précédent dans le mouvement
étudiant, doivent être examinées très attentivement
par la ministre et, je le crois en toute honnêteté, doivent
être acceptées. Alors, rapidement, une conclusion par
Stéphanie Vennes.
Mme Vennes (Stéphanie): Alors, voilà, aujourd'hui,
on vous a présenté les principaux points, les principaux
irritants que les étudiants ont dégagés du projet de
réforme, du document ministériel. On tient à souligner,
tout d'abord, que la Fédération a accueilli avec beaucoup, mais
alors, là, beaucoup d'enthousiasme l'annonce que le Québec se
lançait dans l'élaboration d'un projet de réforme pour le
palier de l'enseignement collégial, et ce, parce que les
étudiants du Québec la réclamaient, cette
réforme-là et on le constate tous les jours parce qu'on
est étudiants nous-mêmes parce qu'ils sont de plus en plus
soucieux de la qualité de leur formation, autant personnelle
qu'académique et que les lacunes de leur formation se font de plus en
plus présentes, et ils en sont conscients.
On a reçu, effectivement, le projet de réforme, et on a
constaté qu'il y a certains éléments au sein de ce
projet-là qui sont inacceptables pour les étudiants, à
l'instar d'autres instances, composantes et intervenants du milieu
collégial. Donc, effectivement, certains aspects de la réforme
sont avantageux pour les étudiants qu'on pense à la
nouvelle composition du conseil d'administration du collège sur
d'autres, on n'est pas tout à fait d'accord, mais on les accepte
qu'on pense à la commission d'évaluation dont Ugo vous a
parlé tout à l'heure et d'autres, par contre, sont
purement et simplement inacceptables. Et, alors, là, on fait
référence au ticket modérateur et à la
réduction des cours d'éducation physique.
Vous êtes en mesure de savoir, M. le Président, que,
heureusement, on ne réforme pas l'enseignement collégial de
façon très, très fréquente, que les enjeux sont
cruciaux et que les étudiants le savent; ils en sont très
conscients, et ce, parce qu'on considère une telle réforme, un
projet réformant une mesure sociale qui est l'éducation, comme
étant un projet de société pour la société
québécoise. Par contre, sous certains aspects, le projet de
réforme nous offre, aux étudiants présents et futurs, des
perspectives d'avenir plutôt sombres. Donc, dans cette optique et dans
l'intérêt des étudiants du Québec, la
Fédération étudiante collégiale du Québec et
le Bureau d'information et de communication de la coalition collégiale
ne peuvent pas souscrire à un tel avenir pour la classe étudiante
et pour la société québécoise également. (10
h 30)
Je tiens à souligner en terminant que, nous, la
Fédération, les étudiants et les associations
étudiantes, on va être là l'automne prochain, on va
être là l'automne suivant et l'autre d'après pour juger de
l'efficacité de la réforme. Et, si elle ne va pas dans le sens
des intérêts des étudiants du Québec, eh bien, on ne
courbera pas l'échiné aussi facilement. On n'espère pas
que ce sera comme ça; on espère, au contraire, accueillir
l'éventuel projet de réforme, qui sera modifié par le
gouvernement, avec enthousiasme et puis avec confiance.
Le Président (M. Bradet): Je vais être obligé
de vous arrêter...
Mme Vennes: J'ai deux phrases à dire.
Le Président (M. Bradet): ...et de vous demander de
conclure. Votre conclusion...
Mme Vennes: Très bien.
Le Président (M. Bradet): ...pour qu'on puisse passer aux
échanges, s'il vous plaît.
Mme Vennes: Mais, pour cela, pour qu'on accueille favorablement
le projet de réforme je reprends le thème du
présent mémoire il faudra la réformer, Mme la
ministre, votre réforme. Alors, je vous remercie.
Le Président (M. Bradet): Alors, merci beaucoup. Nous
passons donc à la période d'échanges. Je demanderais
immédiatement à Mme la ministre de l'Enseignement
supérieur et de la Science d'y aller.
Mme Robillard: Merci, M. le Président. Mme la
présidente de la Fédération étudiante
collégiale du Québec et messieurs, bienvenue aux travaux de la
commission. Je suis très heureuse d'entendre le point de vue
étudiant, parce que, si nous procédons à ce renouveau
collégial, c'est d'abord et avant tout pour vous, pour les jeunes qui
suivent leurs études collégiales et pour tous ceux et celles
aussi qui, comme vous, comptent sur l'ordre d'enseignement collégial
pour avoir un diplôme, une formation de qualité d'abord et un
diplôme crédible aussi dans la vie.
Le message que j'entends de la Fédération... Vous avez
conclu, Mme la présidente, en disant: Mme la ministre, réformez
votre réforme. Moi, ce que j'entends, c'est qu'il y a des
éléments avec lesquels vous êtes en accord et d'autres
où vous voulez des changements. Vous avez des réserves sur
certains éléments et des réajustements et des suggestions
très précises. C'est dans ce sens-là. Je n'ai pas
l'intention de réformer ma réforme; j'ai l'intention de la
bonifier, si vous m'en convainquez, et c'est dans ce sens-là qu'on
travaille ensemble aujourd'hui.
Abordons directement la réussite des études, parce que je
pense que c'est l'élément essentiel et c'est le défi
majeur que nous avons, à l'ordre d'enseignement collégial non
seulement d'y accéder, mais d'y réussir. Alors, vous l'avez
abordé dans votre mémoire. Vous l'avez très bien
noté, il y a différents facteurs à la réussite
scolaire. Alors, vous avez apporté des suggestions sur ces
différents facteurs en réponse au renouveau collégial. Si
vous voulez, on va les aborder ensemble.
Le premier, c'est, quand vous arrivez à l'ordre collégial,
d'être bien préparé. C'est d'abord un facteur de
réussite. Alors, j'aimerais bien que vous m'explicitiez si vous
êtes, oui ou non, en accord avec la précision des seuils
d'admission à l'ordre collégial. Ce que j'en retiens, de votre
lecture, c'est que, oui, vous seriez d'accord, mais il faudrait être
mieux préparé au secondaire ou donner des mesures de soutien au
secondaire. Peut-être que je vous ai mal lus.
M. Lapointe: Vous avez très bien compris... Le
Président (M. Bradet): M. Lapointe.
M. Lapointe: ...Mme la ministre. Effectivement, nous sommes tous
des anciens élèves du secondaire et, pour être
passés à travers le système, on est très bien
placés pour l'évaluer et nous pouvons vous dire, Mme la
ministre, que le dynamisme que vous avez insufflé au milieu
collégial par votre réforme, il est indéniable,
indépendamment du résultat, que ce dynamisme est beaucoup plus
nécessaire au niveau secondaire et que c'est surtout là que nous
devrions concentrer nos efforts. Et il aurait été, selon nous,
très bénéfique non pas de concentrer nos efforts sur un
niveau, mais bien sur l'ensemble du réseau de façon à ce
que ce soit l'éducation dans son ensemble qui soit bonifiée et
non pas des mesures de rattrapage au collégial.
Mme Robillard: Oui. Alors, M. Lapointe, je vais vous dire: Soyez
patient. Soyez patient, M. Lapointe. Nous allons terminer le collégial
bientôt. La pression est très forte sur les autres ordres
d'enseignement, mais soyez certain que je vais y venir aussi, au secondaire.
Mais parlez-moi des seuils d'admission à l'ordre d'enseignement
collégial, là.
M. Lapointe: Mme la ministre, vous auriez pu faire le choix
d'obliger les étudiants du secondaire à poursuivre ces
cours-là ou à obtenir ces cours-là pour obtenir leur
diplôme. Vous n'avez pas fait ce choix-là. Vous avez fait le choix
du double D.E.S., c'est-à-dire qu'un étudiant peut avoir son
diplôme d'études secondaires sans pouvoir accéder au niveau
collégial. Et nous croyons que vous avez introduit ce double D.E.S.
parce que vous ne voulez pas réformer maintenant l'enseignement
secondaire. Alors, nous, ce qu'on vous dit: II faut réformer le
secondaire; et le double D.E.S. est difficilement envisageable et n'est
foncièrement pas souhaitable.
Mme Robillard: Est-ce...
M. Lapointe: conséquemment, il faut procéder
à la réforme du secondaire de façon à ce que, oui,
ces cours-là deviennent des préalables au d.e.s. et que le
secondaire soit prêt à former les étudiants pour qu'il y en
ait non pas 66 % qui obtiennent leur d.e.s., mais bien 70 % et 75 %, comme
ça devrait être le cas dans une société
décente, mme la ministre. et ce n'est pas en fixant des seuils
d'admission au collégial qu'on va régler ces
problèmes-là, mais bien en réformant le secondaire. Et
c'est ce qu'on demande.
Mme Robillard: Alors, est-ce que je comprends bien que vous
seriez en accord pour la réussite obligatoire, je dirais, pour obtenir
le diplôme d'études secondaires, justement, des matières
qui sont indiquées dans le diplôme?
M. Lapointe: Conformément au texte, nous sommes favorables
à toute hausse de la qualité par la hausse des exigences, dans
une seule mesure: dans la mesure où les étudiants y sont
suffisamment bien préparés.
Mme Robillard: O.K.
M. Lapointe: C'est la seule position qui émane de notre
Fédération et qui comprend à peu près toutes les
questions que vous pouvez poser.
Mme Robillard: Parfait. Alors, je vous saisis très bien
dans cette recommandation-là. Maintenant, expliquez-moi pourquoi, si
jamais on retenait votre suggestion, à ce moment-là, vous me
suggérez, en plus, une propédeutique au collégial pour des
étudiants moins équipés au plan académique. Parce
que c'est ce que vous faites à la page 47 de votre mémoire.
M. Lapointe: mais tout à fait: si on remarque qu'un
étudiant, qui a passé son secondaire avec une moyenne entre 60 %
et 70 %, sans propédeutique a seulement 10 % de chances, mme la
ministre, d'obtenir son d.e.s., est-ce qu'on le laisse évoluer à
sa guise dans le réseau, prendre 90 % des chances de perdre son temps et
de décrocher? non. vous conviendrez avec moi que, s'il y a des
étudiants à risques de par leur niveau de réussite au
secondaire, il faut absolument leur offrir et les convier vous appelez
ça une propédeutique à ces sessions d'orientation,
de mise à niveau, de completion de leur formation, dans leur
intérêt même et dans l'intérêt même de la
société, vous comprendrez.
Mme Robillard: Alors, mais pourquoi une propédeutique?
Parce que le sens est très différent. Vous savez que, dans le
renouveau collégial, c'est une session d'accueil et d'intégration
pour les jeunes qui ont des difficultés d'orientation
peut-être pas nécessairement des difficultés scolaires
mais pour les autres aussi qui ont des difficultés
d'apprentissage. Donc, ça devra inclure des cours de mise à
niveau.
M. Lapointe: Des cours de mise à niveau.
Mme Robillard: Mais ce n'est pas dans le contexte ou dans
l'approche d'une propédeutique, par exemple, pour ne pas allonger d'une
autre session le cours préuniversitaire; alors que la
propédeutique veut dire, nécessairement, allonger.
M. Lapointe: Mais vous savez, Mme la ministre, allonger d'une
session les études collégiales d'un étudiant qui a 90 % de
chances de ne pas se rendre au bout, même pour l'État, c'est
très payant, parce qu'un étudiant qui n'a pas les moyens de
réussir son D.E.C., il ne prend pas cinq sessions, il risque de prendre
cinq ans. Donc, c'est une mesure d'investissement très profitable pour
l'institution qui aura un étudiant qui finira plus rapidement et qui
finira, point; et pour l'État aussi, qui ne perd pas son investissement
dans l'étudiant et qui retire les bénéfices beaucoup plus
rapidement qu'il ne l'aurait fait normalement.
Mme Robillard: Donc, vous êtes en accord avec une
propédeutique non créditée dans les études? C'est
ça que ça veut dire aussi, une propédeutique.
M. Lapointe: Bien, lorsqu'on fait des mises à niveau qui
sont extérieures aux programmes, c'est plutôt difficile de les
créditer autrement que par les cours complémentaires. Mais vous
souhaitez les abolir; donc, foncièrement, ils ne seraient pas
crédités.
Mme Robillard: Parfait. Alors, venons-en aux autres mesures. Vous
nous parlez du bulletin de mi-session. Vous savez que, dans plusieurs
collèges, c'est déjà la pratique. Vous voudriez voir
ça systématisé, si je comprends bien, afin de rendre
visibles les coûts à l'étudiant. Bon, je retiens bien
ça. Maintenant, venons-en à votre position sur l'article 33,
où vous affirmez très clairement que, selon votre point de vue,
selon la Fédération, l'expulsion d'un étudiant est
préférable au décrochage.
M. Lapointe: Mme la ministre... Mme Robillard: Ça,
je vous lis... M. Lapointe: Oui. Mme Robillard: ...à la
page 48. M. Lapointe: Tout à fait, tout à fait. Mme
Robillard: Alors, parlez-m'en.
M. Lapointe: Lorsque, par une mesure financière, vous
amenez un étudiant dans un cul-de-sac où la volonté de
l'étudiant n'est plus le critère à la poursuite de ses
études, vous commettez un acte qui, évidemment, n'est pas
apparent. C'est facile, pour une institution, de dire: Bon, on impose un ticket
modérateur et, s'il y en a qui décrochent, bien, on ne les voit
pas. Ce n'est pas dérangeant, ça. C'est toujours
dérangeant de dire à un étudiant: Tu n'es pas ici pour
poursuivre des études; va réfléchir pendant six mois et tu
nous reviendras plus en forme. C'est beaucoup plus odieux, mais c'est beaucoup
plus prendre ses responsabilités, par contre, et l'effet sur
l'étudiant est différent.
Vous savez, lorsqu'on dit à un étudiant: Écoute, tu
as des difficultés financières, tu as trébuché,
c'est bien dommage, mais tu n'as pas les moyens de continuer ou bien lorsqu'on
dit à un étudiant: Tu n'as pas fait tes devoirs, tu n'as pas
travaillé, on considère que tu es de mauvaise foi, parce que tu
ne t'es pas soumis aux activités auxquelles on t'a enjoint de te
soumettre et, conséquemment, on croit que tu ne dois pas poursuivre tes
études collégiales avant, bon, une session, on propose une
suspension, là, de six mois, l'effet sur l'étudiant est
très différent. Et ça a aussi un effet sur l'institution,
c'est-à-dire qu'elle devient responsable de la conduite des
études d'un étudiant alors que, par votre ticket
modérateur, vous déresponsabilisez les institutions du
cheminement des étudiants. Nous, ce qu'on souhaite, c'est les
responsabiliser. (10 h 40)
Alors, évidemment, ça suppose un peu plus de travail de
l'institution, un peu plus de travail des gens qui sont supposés
effectuer ces tâches-là. Ça suppose aussi d'être plus
centré sur l'étudiant, plus préoccupé de lui, alors
que le ticket modérateur, c'est une façon de s'en laver les mains
et de dire: Bon, bien, s'il en a les moyens, bien, qu'il reste dans le
collégial pendant 10 ans; s'il n'en a pas les moyens, on est bien
débarrassés de ce pauvre fainéant. Je considère que
l'attitude qui sous-tend l'application du ticket modérateur est
très dommageable, de même que l'effet sur l'étudiant,
l'effet démobilisateur. Alors, nous, ce qu'on propose, c'est, au
contraire, que l'étudiant soit pris en main par l'institution d'ici
à ce qu'il se prenne en main lui-même.
Mme Robillard: J'espère! Alors, si je comprends bien votre
position, à la Fédération, vous seriez d'accord pour
l'expulsion des étudiants qui accumulent trop d'échecs?
M. Lapointe: Ce n'est pas tant l'expulsion de l'étudiant
qui accumule trop d'échecs comme l'expulsion d'un étudiant qui ne
se soumet pas au cheminement qui lui est soumis par l'institution. Donc,
lorsque, par exemple, l'étudiant tombe sous l'article... Ce ne sera
peut-être pas 33, mais, s'il accumule plus de 5 échecs ou plus de
10 échecs, selon le cas, lorsqu'il échoue, par exemple, 11 cours,
l'institution peut lui dire: Écoute, c'est quoi, ton problème? Tu
as un problème affectif? Donc, je t'enjoins d'aller te soumettre
à un service de consultation psychologique. Tu as des problèmes
de méthodologie? Je t'enjoins de suivre un cours de méthodologie.
Tu as des problèmes en français? À la fin de chaque cours,
de chaque travail, sers-toi du centre de ressources en français. Donc,
on force l'étudiant à utiliser les ressources du milieu, ce qui
est extrêmement important. On force aussi l'étudiant à
utiliser toutes ses propres ressources. La réussite, il l'a au fond de
lui-même. Et, parfois, oui, il faut le forcer à utiliser ses
propres ressources, ce que le ticket modérateur ne fait pas.
Donc, si, au bout de ce cheminement-là, Fétu-
diant, soit ne se soumet pas aux exigences de l'institution, soit
n'offre pas à l'institution une perspective d'amélioration de ses
réussites et c'est bien la première fois qu'un mouvement
étudiant le propose, je le disais eh bien, oui, Mme la ministre,
cet étudiant-là, je crois, a besoin de réfléchir
pendant six mois. Et il y va de la crédibilité, aussi, de
l'institution. On ne doit pas laisser des étudiants suivre des cours
à leur guise et en échouer à leur guise. L'institution
doit avoir des dents par rapport à ces étudiants-là et par
rapport à un autre genre d'étudiants qui sont les
véritables abuseurs du système, que vous n'excluez pas. Qu'on
pense aux gens qui sont là pour les avantages fiscaux d'avoir un statut
d'étudiant ou de ceux qui sont là pour vendre soit certaines
idées, soit certaines substances. Donc, cette mesure-là permet
d'identifier les réels profiteurs du système et permet de
récupérer tout ce qui est récupérable, alors que
votre mesure, Mme la ministre, discrimine en fonction du portefeuille, ce qui
est inacceptable.
Mme Robillard: Qu'est-ce qui arrive de ce jeune homme ou de cette
jeune fille expulsés?
M. Lapointe: Eh bien, comme c'est présentement le cas avec
l'article 33, comme on vit avec ces gens-là, bien, soit il passera six
mois chez ses parents à se faire sermonner ce qui n'est parfois
pas mauvais soit il testera le marché du travail pendant six mois
sans avoir un D.E.C. et, à ce moment-là, il pourra se rendre
compte qu'un D.E.C, c'est beaucoup plus utile. Et, lorsqu'il raccrochera le
système parce qu'il pourra le faire; il n'a pas à avoir
les moyens de le faire, il le fera bien, je peux vous garantir, pour
l'avoir vécu moi-même avec certains de mes amis qui,
personnellement, sont tombés sous le coup de l'article 33 et ont
été expulsés, que ces étudiants-là
deviennent de véritables bourreaux de travail, et ils ne veulent surtout
pas, surtout pas échouer et sortir du réseau sans diplôme
d'études collégiales. Donc, ça favorise la
réussite, ça favorise l'effort et non pas le décrochage et
la démobilisation.
Mme Robillard: Pourriez-vous aussi me clarifier la position de
votre Fédération concernant la date d'abandon des études?
Parce que, à la page 24 de votre mémoire, vous parlez d'un
minimum de 15 jours, alors que, à l'heure actuelle, vous le savez,
depuis l'an dernier, nous l'avons fixée au 20 septembre, ce qui veut
dire à peu près 4 semaines. Là, vous me parlez de 15
jours. Est-ce qu'il y a une position ferme de la Fédération sur
ce sujet-là?
M. Lapointe: Elle est ferme. Ce qu'on remarque, c'est que c'est
le 20 dans certaines institutions; dans d'autres institutions, dans les faits,
c'est plus rapproché. La date limite d'abandon, dans certaines
institutions, ça a été le 12. Donc, nous, ce qu'on veut,
c'est que, par règlement, puisque vous pouvez le faire, il y ait une
certaine garantie pour les étudiants qu'ils auront le temps d'avoir au
moins un contact avec l'enseignant, d'avoir le plan de cours et de pouvoir
évaluer le contenu du cours de façon à pouvoir s'en
retirer, donc annuler leur cours et non pas l'abandonner, de pouvoir annuler un
cours qui ne correspond pas à leurs besoins. Donc, nous demandons
strictement qu'il y ait une garantie que l'étudiant aura le temps
nécessaire pour pouvoir évaluer la pertinence du cours en regard
de ses besoins.
Mme Robillard: Et c'est à ce moment-là que vous
dites: Minimalement, 15 jours.
M. Lapointe: Exactement. On croit qu'en 3 semaines ouvrables,
donc en 15 jours de classe c'est le sens de la proposition
généralement, c'est suffisant pour que l'étudiant... Mais,
encore là, on parle bien d'un minimum. C'est qu'au-delà de
ça, au-delà des 15 jours, on considère que c'est un
préjudice grave à la conduite des études des
étudiants.
Le Président (M. Bradet): Merci, M. Lapointe. Je reconnais
maintenant M. le député de Lac-Saint-Jean, critique officiel de
l'éducation.
M. Brassard: Alors, madame et messieurs, je vous remercie d'avoir
témoigné devant nous ce matin et aussi pour votre mémoire.
Je ne peux pas dire que vous m'avez convaincu que la taxe à
l'échec est une mauvaise solution, je l'étais déjà,
mais j'espère, par votre argumentation très articulée,
très étoffée, très substantielle, que vous avez
réussi à convaincre la ministre que ce n'est pas la voie à
suivre et qu'il faut plutôt regarder du côté des
alternatives que vous proposez, qui m'apparais-sent des pistes
extrêmement intéressantes.
Tout à l'heure, la ministre vous posait la question: Qu'est-ce
qui arrive de l'étudiant expulsé en vertu de l'article 33? Je
pourrais aussi vous poser la question: Qu'est-ce qui arrive de
l'étudiant éjecté parce qu'il n'est pas capable de payer
la taxe à l'échec?
M. Lapointe: À ce moment-là, à moins qu'il
ne réussisse à se dénicher un emploi très payant,
puisque le ticket modérateur s'applique ad vitam aeternam, lorsque
l'étudiant devra revenir à ses études, bien, cet
étudiant-là ne pourra pas raccrocher à moins d'en avoir
les moyens, ce qui risque d'être long. Et, à ce que je sache, le
critère pour poursuivre des études collégiales, ce n'est
pas d'en avoir les moyens financiers.
Il y a aussi un autre aspect, et je n'ai pas assez insisté
là-dessus, c'est que, présentement, on nous affirme que ce sera
50 $ par cours; or, on n'a même pas de projet de règlement
à cet effet-là. On nous affirme que le nombre des échecs
sera diminué un peu à la manière du permis de conduire,
c'est-à-dire qu'au-delà d'une bonne conduite on perd des points
d'inaptitude. Encore là, c'est à voir, parce qu'il n'y a pas de
projet de règlement de déposé. Présentement, c'est
encore un chèque en blanc, et un chèque en blanc qu'on ne sera
pas, surtout pas, en mesure de faire au gouvernement, et ce chèque en
blanc la population ne devrait pas permet-
tre qu'il soit fait dans une réforme où le ticket
modérateur est un aspect extrêmement important et dont
l'application peut être problématique. Mais on ne parlera pas de
l'application, on est contre la mesure en soi.
M. Brassard: En fait, ce que vous nous dites et ce que vous dites
à la commission, c'est qu'il y a des étudiants qui ont des
problèmes de nature pédagogique, des problèmes de
cheminement, des problèmes d'orientation, des problèmes
d'apprentissage et que, si on veut les aider à régler ces
problèmes-là, c'est en imaginant des solutions de même
nature, c'est-à-dire de nature pédagogique, et non pas en leur
imposant un châtiment financier. C'est pourquoi vous dites: II faudrait
regarder du côté d'une application souple et utile de l'article
33. Ce que je sais, c'est que dans certains cégeps on applique
déjà, avec évidemment des intentions pédagogiques,
l'article 33 de façon souple et un peu dans le sens que vous l'indiquez.
Est-ce qu'il y a des expériences dans ce sens-là et est-ce
qu'elles pourraient être utiles pour aller plus loin et même songer
à généraliser cette application?
M. Lapointe: La première partie de votre question...
Évidemment, il est un peu contradictoire de régler un
problème de cheminement académique par une mesure à
caractère financier. Ça, il n'y a pas à en faire une
très grosse démonstration. On lance un message assez
étrange aux étudiants, c'est-à-dire: Si vous avez des
problèmes d'ordre pédagogique et que vous êtes riche, il
n'y a pas de problème; si vous avez des problèmes
pédagogiques et que vous êtes pauvre, bien, vous êtes exclu.
Ce n'est pas vraiment un critère, la richesse ou la pauvreté,
à savoir si on a besoin d'aide ou besoin d'être encadré.
Ça ne devrait pas intervenir au cours des études d'un
étudiant; l'étudiant a suffisamment de problèmes comme
ça. (10 h 50)
Conséquemment, effectivement, il faut envisager des mesures
pédagogiques pour les encadrer. Et notre mesure est différente de
tout ce qui peut s'appliquer présentement dans le réseau, en ce
sens qu'elle ne s'applique pas en fonction de la réussite d'un
pourcentage de cours au cours d'une session, mais bien d'un nombre
d'échecs absolu. Pourquoi est-ce qu'on introduit cela? C'est que les
étudiants, par exemple, à temps partiel qui échoueraient
deux cours, trois cours à chacune de leurs sessions doivent aussi
être récupérés. Ils ont des problèmes de
cheminement académique assez évidents. Donc, cette
mesure-là touche tous les étudiants, indépendamment qu'ils
soient réguliers ou à temps partiel.
Il y a aussi un autre avantage, c'est que l'étudiant qui a un
cheminement normal au sens qu'il réussit toujours dans la
majorité de ses cours, mais qui en échouerait, par exemple, trois
sur sept à chaque session, bien, cet étudiant-là a
manifestement un problème de cheminement et il serait
récupéré par une telle mesure. Conséquemment, elle
est déjà meilleure que ce que toutes les institutions peuvent
avoir développé jusqu'à maintenant en termes de mesures
d'encadrement conséquemment à l'article 33. Et,
déjà, dans les institutions qui appliquent cet article-là,
il y a des effets substantiels. Les étudiants sont soit
récupérés et réussissent, soit suspendus et
réussiront plus tard ou ils ne reviendront pas parce qu'ils n'ont rien
à faire dans l'enseignement collégial.
Conséquemment, il y a lieu de croire que, à partir des
objectifs mêmes de la ministre, qui sont d'offrir aux étudiants un
meilleur encadrement, une meilleure orientation et de les inciter à la
réussite, à moins qu'il n'y ait d'autres orientations qui
sous-tendent l'imposition du ticket modérateur, notre mesure
réalise beaucoup mieux les orientations ministérielles que la
mesure qu'elle propose elle-même.
Donc, il y a peut-être lieu de lever le voile sur les
réelles motivations du ticket modérateur. Selon moi, il n'y a pas
de réelle motivation autre que ce qui est énoncé. C'est
juste que les gens qui ont développé cette position-là,
cette mesure-là ne sont pas dans le cégep, ne sont pas sur le
terrain. Et on est juge de ce qu'on voit. Les étudiants, par ce qu'ils
jugent, par ce qu'ils voient, savent que ces mesures-là ne seront pas
bonnes, et c'est pour ça que c'est notre responsabilité de venir
vous le dire et de vous proposer des alternatives qui, comme je l'ai dit, sont
sans précédent pour un mouvement étudiant
collégial. Admettre que les étudiants ont des problèmes de
cheminement, c'est rare chez les étudiants; et surtout d'envisager des
mesures assez coercitives comme celles-ci, d'avoir l'honnêteté,
pour des étudiants, d'appuyer de telles mesures, c'est rare. Et, en
supplément, je dirais que l'attitude actuelle des étudiants
qui est très positive, je considère peut être
mise en cause par une étude qui pourrait être négative de
la part du gouvernement. Donc, ça devra être étudié
très attentivement et je crois qu'en toute honnêteté
ça ne pourra être refusé.
M. McQuade (Sébastien): M. Brassard, j'aimerais juste
rajouter quelque chose au niveau des institutions qui appliquent l'article 33.
Je pense qu'au cégep du Vieux-Montréal, entre autres, les
statistiques récentes que j'ai vues sur l'application, depuis
déjà plusieurs années, de l'article 33 nous portent
à croire qu'il y a récupération d'un grand nombre
d'étudiants. Je peux prendre un exemple. Je n'ai pas les statistiques
exactes devant moi, mais environ 350 à 300 étudiants sont
placés annuellement, ou par session, sur l'article 33 et, de ça,
il y en a entre 100 et 150 qui sont, si on veut, expulsés du
système. Donc, on récupère au-delà de 200
étudiants à chaque session par cet article-là.
M. Brassard: En apportant des mesures de soutien.
M. McQuade: Oui, oui, en apportant des mesures de soutien et
d'encadrement.
M. Brassard: En les accompagnant mieux dans leur cheminement.
M. McQuade: Exactement.
M. Brassard: En matière d'évaluation, vous avez
certaines réticences concernant la proposition ministérielle. En
particulier, vous semblez plus que réticents, sinon opposés,
à l'épreuve synthèse par programme. Pourquoi?
M. Lippe: Le problème qu'on voit, c'est que, bon, bien
entendu, l'épreuve synthèse comme telle peut avoir certains
effets qui vont être bons; qu'on pense à être sûr que
l'étudiant a bien atteint tous les objectifs qui sont fixés par
le programme ou à d'autres exemples comme ça. Le problème
qu'on voit, par contre, c'est lorsqu'on arrive à des examens qui
seraient trop théoriques. Si on pense, entre autres, au français,
actuellement, de la manière qu'il est évalué, on rentre
dans des choses qui... L'étudiant n'est pas assez formé pour
l'examen qu'il a à passer. Si on pense aussi aux examens... Et là
je prends un exemple du secondaire: c'est que, en géographie, en
secondaire III, pendant, on pourrait dire, les trois quarts de l'année,
on forme l'étudiant et on le prépare à l'examen, et
uniquement à l'examen. Il ne passe pratiquement aucun temps pour
apprendre, comme telle, la matière; ce qu'il apprend, c'est à
faire l'examen. Et ce dont on a vraiment peur, c'est que l'étudiant,
comme tel, avec le professeur, pendant tout son collégial, se
prépare à passer l'examen de la ministre et qu'il ne passe pas
à travers, en fait, les objectifs, on pourrait dire, qui sont d'ordre
plus général.
M. Brassard: Que ça devienne une obsession.
M. Lippe: C'est ça. Un autre aspect, si je peux finir
là-dessus, c'est que, moi, je me vois mal en tout cas, je me
demande comment je pourrais mettre un concept là-dessus faire une
évaluation d'un cours de philosophie. Je pense que la philosophie comme
telle, c'est un petit peu apprendre à penser. Alors, je me demande
comment on peut évaluer si un étudiant a appris à penser
ou s'il n'a pas appris à penser.
M. Brassard: Sur la commission des études, vous avez un
certain nombre de remarques. Vous participez, dans plusieurs cégeps,
à la commission pédagogique. Vous êtes
représentés à la commission pédagogique. Est-ce que
vous avez une expérience positive de votre participation à la
commission pédagogique? Est-ce que vous croyez qu'il y a lieu de
maintenir cette instance plutôt que d'y substituer une autre instance qui
s'appellerait la commission des études, dont la composition pourrait
être fort différente?
M. Lippe: Le problème qu'on voyait ou plutôt qu'on
voit actuellement à la commission pédagogique, c'est que ce n'est
pas assez efficace, si on peut dire. Les dossiers traînent trop. Avec ce
que la ministre propose, on se trouve, en fait, un petit peu à
régler le problème. Par contre, il y a des choses qui ne sont pas
assez définies, comme les responsables de programmes. Est-ce que les
responsables de programmes sont des cadres ou si ce sont des professeurs ou
quelqu'un qui serait élu au sein du comité de programmes,
à l'intérieur des étudiants ou des professeurs? Est-ce que
c'est, en fait, un cadre, ou un professeur, ou un étudiant? On ne voit
pas du tout par qui ils sont représentés. Et l'effet pervers
qu'on prévoit là-dedans, c'est si c'était un cadre parce
que, là, on se retrouverait avec une commission pédagogique qui
serait uniquement dirigée et dont les décisions seraient
uniquement prises par le directeur des études, l'ancien directeur des
services pédagogiques.
M. Brassard: Éducation physique. Bon, vous êtes pour
le maintien des quatre cours, mais dans l'éventualité où
il y aurait réduction des cours, vous ne croyez pas à la
proposition de la ministre à l'effet que les installations sportives
demeureront à la disposition des étudiants. Vous affirmez que ce
qui va se produire plutôt, c'est que ce nouveau temps de
disponibilité des installations va être loué, que les
cégeps, pour avoir des revenus supplémentaires, vont les louer.
J'aimerais que vous m'expliquiez un peu ce que vous voulez dire par
là.
M. Thérrien (Yan): Bien, déjà, M. Brassard,
on éprouve certaines difficultés, pour les étudiants,
à obtenir les installations sportives en dehors des heures de cours.
Quelques exemples...
M. Brassard: Les installations sont louées?
M. Thérrien (Yan): Elles sont louées à la
communauté. Comme c'est très bien dit dans le mémoire,
c'est la disponibilité à la communauté. Et on peut prendre
des exemples, comme au Vieux-Montréal où les installations
sportives du collège sont régies par la ville. Plusieurs
institutions, comme ça, prêtent leurs institutions au municipal.
Déjà, pour un étudiant, dans la perspective où les
cours seraient diminués, des études montrent qu'un certain nombre
de cours soit quatre heures, environ, d'activité physique par
semaine devraient être maintenus. Ça, c'est des
études prouvées sur les conditions physiques. Et, si les cours
sont diminués, on diminue donc le nombre d'heures d'activité
physique.
Et la principale raison pour laquelle un étudiant ne pratique pas
beaucoup d'activités physiques, c'est le manque de temps. Et, à
l'extérieur des heures de cours, déjà, le soir, par
exemple, c'est extrêmement difficile d'obtenir un local pour pratiquer
une activité physique, compte tenu que c'est sous location
présentement. Dans la réforme, on voit clairement que la
disponibilité... que ces structures sportives là vont être
davantage mises à la disposition de la communauté. Alors, dans
ça, nous, on voit encore la porte qui se referme sur
l'accessibilité des structures. (11 heures)
M. Lapointe: Un dernier détail, si vous me permettez, M.
le Président. Hier, la Fédération des cégeps a
affirmé que les cégeps étaient favorables au ticket
modérateur. Cependant, il y a quelque chose que je dois
absolument porter à votre attention. Les collèges sont des
corporations dirigées par leur conseil d'administration et non pas leurs
directeurs généraux; ces conseils d'administration là sont
formés, entre autres, de professeurs, d'étudiants et de parents,
3 composantes qui sont fermement opposées au ticket modérateur et
qui forment 11 sièges sur 20 sur l'actuel conseil d'administration.
Conséquemment, je tiens à vous aviser que la décision qui
a été prise par la Fédération des cégeps a
été prise par quelques dizaines de directeurs
généraux et qu'elle n'est nullement représentative du
cégep lui-même qui ne se limite pas aux directeurs
généraux. Merci.
Le Président (M. Bradet): Alors, merci. M. le
député de Sherbrooke, je vous ferai remarquer qu'on a du temps
pour, peut-être, une question rapide et une réponse rapide.
M. Hamel: Très bien, M. le Président. Merci. Une
question à M. Lippe. Vous avez mentionné tantôt, dans votre
exposé, certaines inquiétudes concernant la composition de la
commission d'évaluation, à l'effet qu'elle soit à trois
membres. Quelles sont vos suggestions alternatives?
M. Lippe: Suggestions alternatives. Sans trop exagérer,
sans passer à 10 membres, je pense qu'à entre 5 et 10 membres on
se trouve à avoir une certaine objectivité. Le problème
qu'on voit avec trois membres, avec un quorum de deux personnes, c'est que
c'est très facile de prendre des décisions qui ne sont pas
représentatives alors qu'avec plusieurs... Quand on dit que 2
têtes valent mieux que 1, bien, 10 têtes valent mieux que 3!
M. Hamel: Vous iriez jusqu'à 10? Vous ne trouvez pas que
c'est un peu...
M. Lippe: Bien, c'est ça. Je comprends quand même
les préoccupations du gouvernement, actuellement, de couper dans les
dépenses. D'accord? Moi, je pense qu'on devrait, au minimum, avoir cinq
membres d'accord? et que, bien entendu, pour avoir une certaine
objectivité, une bonne moyenne serait de sept.
Une voix: Dans les textes... M. Hamel: Merci. Ça
va.
Le Président (M. Bradet): M. le député de
Lac-Saint-Jean, il nous reste trois minutes.
M. Brassard: Toujours concernant l'évaluation, vous
déplorez l'absence des étudiants dans le processus
d'évaluation des enseignements. Comment vous voyez votre implication ou
votre participation dans un processus d'évaluation des apprentissages et
des enseignements?
M. Lippe: Si on veut prendre des exemples de ce qui se fait dans
les universités, c'est qu'il y a des gens qui passent dans les classes
pour faire une certaine évaluation. Autrefois, on appelait ça
l'évaluation des enseignements on a justement
déposé un avis que la ministre a reçu, là-dessus
maintenant, ça s'appelle l'évaluation des programmes. En
général, à quelques exceptions près, puisqu'on ne
parle pas du personnel, ça revient pratiquement aux objectifs qu'on
avait, donc l'évaluation des programmes. On pense que ça pourrait
très bien se faire, bien entendu, par d'autres façons, mais,
entre autres aussi, par des étudiants qui sont dans les classes. On
mentionne aussi, dans notre mémoire, que les étudiants sont
prêts à contribuer là-dedans. Donc, on est prêts, si
on veut, à prêter nos membres pour procéder à cette
évaluation, comme ça se fait dans les universités. On juge
aussi que c'est la façon la plus objective d'évaluer. On est les
personnes qui bénéficient des programmes; donc, on est les
personnes qui sont les mieux placées pour les évaluer.
M. Brassard: Vous ne pensez pas que vous allez passer de
l'évaluation des programmes à l'évaluation des profs, que
le saut peut se faire?
M. Lippe: Bon. Il faut comprendre et on a une certaine
argumentation là-dessus aussi qu'on est pour l'évaluation
des profs. La ministre, et je pense que c'est très important, les
distingue. Donc, il y a l'évaluation du personnel, d'un
côté, et l'évaluation des programmes, d'un autre
côté. D'accord? Je pense, moi, que l'évaluation des
programmes, c'est surtout sur le contenu, sur ce qui se passe, bien entendu,
dans la classe, mais sur l'individu comme tel, je ne pense pas... C'est
sûr qu'il va toujours y avoir des exceptions, il va toujours y avoir des
gens qui sont plus ou moins honnêtes et qui veulent un petit peu faire
les fins finauds. Je pense qu'en majorité du temps les gens sont
honnêtes et vont vraiment faire un bon jugement de ce qu'ils ont
reçu comme enseignement. D'après moi, ça devrait aller
plus loin que ça, si je peux en profiter...
M. Brassard: Pas juste le contenu, mais aussi...
M. Lippe: Oui, c'est ça.
M. Brassard: ...la méthodologie...
M. Lippe: Exactement.
M. Brassard: ...les méthodes utilisées.
M. Lippe: C'est ça.
Le Président (M. Bradet): Alors, M. Lippe, Mme la
présidente, il me reste à vous remercier, la
Fédération étudiante collégiale du Québec,
de l'éclairage que vous avez su apporter à nos travaux.
Mme Robillard: Oui. Si vous permettez, M. le... Le
Président (M. Bradet): Oui.
Mme Robillard: ...Président, je veux vous remercier
particulièrement et vous assurer que je vais étudier vos
propositions de façon très attentive, que j'ai noté aussi
que vous étiez rassurés par la définition
d'«étudiant à temps plein», dans le projet de loi, et
vous dire de ne pas vous inquiéter: dans le processus législatif,
je vais aussi déposer les projets de règlement. Alors, ce ne sera
pas un chèque en blanc au gouvernement, M. Lapointe. En plus, je partage
avec vous vos préoccupations pour le secondaire. Alors, sûrement
que nous aurons l'occasion de travailler à nouveau ensemble.
Le Président (M. Bradet): Alors, merci. La commission va
suspendre ses travaux quelques minutes pour permettre au Conseil du patronat de
prendre place.
(Suspension de la séance à 11 h 6)
(Reprise à 11 h 10)
Le Président (M. Bradet): La commission reprend ses
travaux. Nous en sommes au Conseil du patronat du Québec. Alors,
bienvenue au Conseil du patronat. M. Dufour est le président. M. Dufour,
je pense qu'on n'a pas à vous expliquer la procédure. Ha, ha, ha!
Je voudrais juste vous signifier que vous avez 20 minutes pour faire votre
présentation et peut-être nous présenter les gens qui vous
accompagnent.
Conseil du patronat du Québec (CPQ)
M. Dufour (Ghislain): Merci, M. le Président. Je vous
présente justement mes collègues. À mon extrême
gauche, M. Robert Chamberland, qui est un homme d'affaires, courtier en
immeubles et membre du conseil d'administration du cégep de Limoilou. On
sait qu'il se fait beaucoup de formation professionnelle; alors, ça nous
a intéressés d'avoir quelqu'un, dans notre
délégation, de ce secteur-là. M. Gaston Lafleur est
président du Conseil québécois du commerce de
détail et M. Jacques Garon, à ma droite, est le directeur de la
recherche socio-économique au Conseil du patronat.
Le Président (M. Bradet): Alors, bienvenue, messieurs.
M. Dufour (Ghislain): Alors, un premier mot, M. le
Président, pour remercier les membres de la commission de nous avoir
invités à venir présenter nos commentaires dans ce
dossier.
Il faut vous rappeler que nous avions fait valoir, lors des audiences de
la commission sur l'enseignement collégial tenues en octobre, que,
malgré certaines failles évidentes, l'enseignement
collégial, tant pour les jeunes que pour les adultes, est un acquis pour
la société québécoise. Pour le CPQ, c'est donc
d'évolution, de consolidation et d'évaluation, plutôt que
de révolution, qu'il faut parler. À ce titre, nous avons
favorablement accueilli, dans l'ensemble, les orientations et les mesures de
renouveau proposées par le MESS. En effet, pour le CPQ, deux objectifs
généraux devaient guider la réforme, à savoir
donner plus de crédibilité aux institutions collégiales et
donner plus de valeur aux diplômes, tant face aux universités
qu'au marché du travail, d'où la nécessité de
procéder à une véritable réforme.
Nos commentaires, aujourd'hui, porteront sur les orientations d'avenir
et les mesures proposées plutôt que sur les projets de loi,
laissant aux spécialistes de l'enseignement collégial le soin de
formuler leurs critiques à ce sujet. Nous examinerons successivement
quelques objectifs que nous nous étions fixés en termes de
valorisation de l'enseignement collégial, la réforme
proposée par rapport aux objectifs que nous avions établis et les
interrogations que suscitent certains éléments de la
réforme.
Alors, rapidement, M. le Président, c'était quoi, nos
principaux objectifs lorsqu'on s'est présentés en commission
parlementaire l'automne dernier? C'était, d'abord, de donner une solide
formation de base à tous les élèves et il nous
apparaît que, maintenant, ce n'est plus remis en question dans la
société d'aujourd'hui. Il s'agit, par ailleurs, de faire en sorte
que les cégépiens améliorent leurs communications
écrites et orales, ainsi que leur capacité d'analyse et de
synthèse, qu'ils sachent prendre des décisions, résoudre
des problèmes et qu'ils développent certaines aptitudes
nécessaires à leur em-ployabilité.
De façon plus précise, je rappelle certains des
éléments que nous portions à votre attention à ce
moment-là: que les candidats à l'enseignement technique aient
préalablement acquis une formation générale
adéquate et que les cours du tronc commun soient adaptés à
l'enseignement technique; deuxièmement, que l'on développe
davantage la reconnaissance des acquis partout où elle peut s'appliquer,
en évitant cependant les duplications possibles entre les
collèges; que l'on améliore le processus de révision des
programmes de formation technique afin que ces derniers ne soient jamais
déphasés par rapport aux nouvelles technologies; que l'on
renforce les mécanismes d'évaluation des apprentissages; que l'on
renforce les services d'aide de toutes sortes offerts aux étudiants afin
de réduire les échecs et les abandons; que l'on améliore
les liens entre les collèges et les entreprises, notamment en
matière de stages; que l'on fasse en sorte que les frais des entreprises
reliés à l'accueil de stagiaires soient admissibles au
crédit d'impôt à la formation; et, finalement, que l'on
crée un centre de liaison cégeps-industries.
Alors, qu'en est-il, M. le Président, du projet proposé
par le MESS par rapport à ces principaux objectifs que nous venons de
résumer? Je voudrais d'abord exprimer, de façon très,
très synthèse, huit points d'accord, bien identifiés comme
étant huit principaux points
d'accord. Je ne veux pas dire qu'il n'y en a pas d'autres. Le premier,
bien sûr, c'est la réussite des études et augmenter le taux
de diplomat ion. Pour nous, il est essentiel de l'accroître, ce taux de
diplomation collégiale, et nous appuyons l'objectif de 60 %, en l'an
2000 qu'a déjà proposé le Conseil supérieur de
l'éducation. Bien qu'il soit difficile de cerner de façon
précise tous les facteurs qui contribuent aux échecs et aux
abandons scolaires, nous pensons néanmoins que les mesures
proposées en matière d'accueil et d'intégration des
élèves lors des premières sessions, l'aide accrue en
matière d'orientation, les règles plus précises
d'admissibilité aux programmes techniques et la reconnaissance
généralisée des acquis seront des outils très
valables pour guider les étudiants dans une période de transition
difficile pour certains d'entre eux. Par ailleurs, en précisant quels
cours doivent réussir les élèves du secondaire pour
être admissibles au collégial, on s'assure que les
étudiants du secondaire sont mieux préparés à
suivre les programmes des collèges. Mais, pour le CPQ,
l'établissement de seuils d'admissibilité
déterminés ne devrait pas être un frein à
l'accessibilité, mais un outil d'accroissement du taux de
réussite scolaire.
Deuxième point d'accord, évidemment, M. le
Président, c'est cette question d'une meilleure formation
générale. Nous accueillons très favorablement
l'augmentation du temps consacré aux cours de langue et de
littérature, de même que l'importance accrue accordée
à la langue seconde. Une formation commune enrichie et plus
cohérente dans tous les programmes d'études menant au D.E.C.
permettra aux cégépiens d'acquérir une formation
générale davantage adéquate, ce que réclament de
plus en plus les entreprises. Et je voudrais simplement vous rappeler ce
sondage qui a été fait par la firme TPF&C, il y a à
peu près un an, qui dit que maintenant, dans les principaux
critères d'embauché, c'est la qualité du français
qui prime au Québec. C'est même un prérequis qui est plus
fort que la compétence. On vous demandait régulièrement:
Êtes-vous compétent? Maintenant, on demande: Savez-vous lire et
écrire en français? Et ça, c'est un changement radical
dans la société québécoise.
Troisième point d'accord, une meilleure harmonisation avec
l'université et le secondaire. En ce qui a trait à
l'harmonisation des programmes préuniversitaires de l'enseignement
collégial avec ceux des universités, la formation d'un
comité de liaison de l'enseignement supérieur et de
l'enseignement collégial permet d'espérer une révision
systématique de tous les programmes pour assurer la continuité et
l'articulation efficace des deux niveaux d'enseignement. Nous sommes
également favorables à la proposition selon laquelle une liste
des formations acquises au secondaire sera constituée pour permettre de
mieux définir les complémentarités entre les deux niveaux
de formation. On évitera, de cette façon, les chevauchements
actuels. De plus, la possibilité d'accéder par modules au D.E.C.
technique est, selon nous, un nouvel outil pédagogique qui sera d'une
très grande utilité pour améliorer l'arrimage entre la
formation professionnelle au secondaire, puis technique au
collégial.
Quatrièmement, une meilleure adéquation entre les besoins
du marché du travail et le contenu des programmes. Selon le document,
des ressources additionnelles seront affectées à la
révision accélérée des programmes techniques en
relation avec les exigences des industries, ce qui constitue un effort tout
à fait louable. Nous aurions tout de même souhaité, M. le
Président, un engagement plus précis à cet égard et
des modalités plus simples que le cadre d'un comité national des
programmes d'études techniques sur lequel, d'ailleurs, on reviendra tout
à l'heure.
Point d'accord: meilleure promotion de la formation technique. Le
document d'orientation du MESS souligne la nécessité de
promouvoir la formation technique, ce que le CPQ juge très important. En
effet, pour attirer les étudiants et les étudiantes en grand
nombre, les campagnes de valorisation et de promotion auprès de la
clientèle étudiante du secondaire et de la population en
général doivent se poursuivre de façon continue. Le
Québec aura, en effet, de plus en plus besoin, au cours des prochaines
années, d'une jeune main-d'oeuvre compétente dans des domaines
très variés. Il semble, à cet égard, que les
efforts récents commencent à porter fruit et il faut, quant
à nous, les intensifier. Je voudrais souligner notre accord avec les
olympiades de la formation professionnelle qui, depuis quatre ans, sont
devenues maintenant une façon de valoriser la formation
professionnelle.
Sixièmement, une autonomie accrue pour les collèges.
Jouissant d'une autonomie accrue, les établissements d'enseignement
collégial auront l'entière responsabilité de la
définition des activités d'apprentissage. Pour le CPQ, cette
mesure est d'autant plus justifiée que ce sont les collèges qui
sont les mieux placés pour évaluer, de concert avec l'industrie,
les besoins locaux du marché du travail. Par ailleurs, l'enrichissement
de la politique d'évaluation des apprentissages contribuera certainement
à valoriser davantage le D.E.C. général et technique.
Septièmement, meilleure évaluation des collèges. Le
MESS a répondu à l'un des objectifs que nous avions
mentionnés lors des audiences de la commission de l'éducation en
octobre dernier, à savoir la formation d'une commission
d'évaluation de l'enseignement collégial. Nous étions
toujours très déçus de voir que cette évaluation
des cégeps se faisait, depuis deux ou trois ans, par la seule revue
L'actualité. Cet organisme d'évaluation externe,
composé de trois commissaires nommés par le gouvernement, aurait
un pouvoir déclara-toire de caractère public et ferait des
recommandations au ministère concerné, ainsi qu'aux
collèges. Nous pensons que, de par son mandat, cette commission
conférera un véritable sceau de qualité au D.E.C, tant
auprès des universités que, bien sûr, des employeurs. (11 h
20)
Finalement, une amélioration dans les mécanismes de
fonctionnement des collèges. Les mécanismes de
fonctionnement des collèges nous semblent nettement
améliorés. C'est le cas de l'article 6 du projet de loi 82
dans le fond, c'est l'article 2 qui réfère à l'article 6
qui accorde des pouvoirs accrus aux collèges. C'est
également le cas de la composition proposée des conseils
d'administration qui seraient dorénavant majoritairement composés
de personnes de l'extérieur et, notamment, de deux représentants
des entreprises desservies par les programmes des cégeps, ce qui
concrètement vient intensifier ce lien entre les cégeps et le
marché du travail.
À noter, M. le Président, qu'au moment même
où il rendait son document public le MESS répondait positivement
à la démarche conjointe de la Fédération des
cégeps et du CPQ, démarche entreprise il y a à peu
près deux ans, visant à créer un centre de liaison
cégeps-industries pour assurer des liens étroits et suivis entre
les collèges et les entreprises, de même que pour
développer la formation en alternance. Le CPQ s'en réjouit
grandement et veut remercier la ministre.
Nonobstant ces nombreux accords, il reste qu'il y a certains
éléments de la nouvelle stratégie qui suscitent chez nous
des interrogations non pas des oppositions, mais des interrogations
ce que semble rechercher le gouvernement à l'occasion de cette
commission parlementaire.
Premièrement, le comité national des programmes
d'études techniques. Au sein de ce comité, on retrouverait des
représentants des employeurs et des syndicats, des intervenants du
gouvernement et d'autres partenaires. Je dois dire, d'entrée de jeu, que
nous n'avons aucune objection de principe à la mise sur pied d'un tel
comité. Nos seules interrogations sont les suivantes: Est-ce qu'on va
s'assurer que ça ne deviendra pas rapidement une autre superstructure
coûteuse et inefficace? À tout ce qui s'appelle création de
nouvelles agences d'État, de nouveaux conseils, de nouveaux organismes,
vous savez notre réaction qui est presque viscérale; alors, on
l'interroge.
Bien sûr, deuxièmement, on se demande quels seront les
liens qui seront entretenus entre le comité national et la
Société québécoise de développement de la
main-d'oeuvre. On comprend que les missions sont tout à fait
différentes. Dans un cas, on s'occupe des jeunes; dans l'autre cas, on
s'occupe des adultes. Mais le jeune devient vite un adulte quand il entre sur
le marché du travail. Ça va être quoi, les liens,
connaissant surtout comment va être grosse la structure de la
Société québécoise de développement de la
main-d'oeuvre?
Les stages en entreprise. Le document d'orientation suggère de
généraliser les stages pour les étudiants et les
étudiantes dans la plupart des programmes et, plus
particulièrement, dans les programmes de formation technique, et ce,
à l'initiative des collèges eux-mêmes. Nous sommes tout
à fait d'accord avec cette mesure qui nécessite une collaboration
et une planification constantes avec les entreprises. C'est une démarche
déjà amorcée et que l'on doit poursuivre. Cependant, il
nous semblerait tout aussi important de souligner l'importance des stages pour
les formateurs. Une formation technique de qualité ne peut
résulter que dans la compétence des formateurs et ces derniers
doivent également s'adapter à l'évolution rapide des
technologies dans pratiquement tous les domaines. Il faut donc accorder
beaucoup d'importance au perfectionnement des enseignants. Le document du MESS
est plutôt timide à ce sujet.
Par ailleurs, pour inciter plus d'entreprises à offrir des
stages, particulièrement les PME, nous insistons, depuis deux ou trois
ans, sur l'opportunité d'offrir aux entreprises un crédit
d'impôt à la formation. Nous savons très bien qu'une
demande comme celle-là s'adresse non pas à la ministre Robillard,
mais au ministre des Finances, mais ça fait deux fois qu'on le demande,
conjointement avec la CEQ, d'ailleurs, et avec la Fédération des
cégeps. On ne sait pas ce qui se passera lors du prochain budget, mais
on est vraiment en demande et on peut voir que, quand le CPQ et la CEQ
s'associent pour demander ce genre de chose là, il y a sûrement
unanimité dans la société québécoise. Ce
crédit d'impôt, tout comme la création d'un centre de
liaison cégeps-industries dont on parlait tout à l'heure, sera
cependant insuffisant pour développer les stages à un niveau de
développement proche de celui que l'on connaît dans la plupart des
pays européens. Le gouvernement ne devrait-il pas alors accroître
davantage sa contribution financière aux collèges en ce domaine
précis de l'organisation des stages en milieu de travail?
L'éducation des adultes. M. le Président, le bilan des
cégeps en ce qui a trait à l'éducation des adultes, en
général, vu par nous, est positif. Les cégeps s'adaptent
bien au défi de la formation continue qui va continuer d'attirer un
nombre croissant d'adultes qui désirent s'adapter à un
marché du travail en mutation constante. Il faut donc poursuivre la
politique d'ouverture des établissements d'enseignement collégial
envers les adultes pour leur permettre de se perfectionner, voire même de
changer de carrière. En somme, il faut favoriser l'accès des
adultes aux collèges. Or, le document d'orientation est muet sur ce
point et nous nous inquiétons de ce silence. Il faudrait, selon nous,
que la clientèle adulte puisse également avoir accès, par
exemple, aux services d'orientation et aux services d'encadrement que l'on
propose aux étudiants réguliers, bien sûr, sous une forme
différente, mais, dans le contexte des taux de chômage actuels et
des jeunes qui sont en chômage, on devrait pouvoir leur fournir, à
ces jeunes adultes, un certain nombre de services. Bien plus, on nous dit
régulièrement que les frais de scolarité sont
élevés je parle des frais de scolarité pour les
adultes et qu'ils sont un frein aux démarches individuelles de
formation et de perfectionnement. Il s'agit donc, pour nous, d'un dossier
à repenser presque complètement.
Finalement, le financement de la nouvelle stratégie. C'est bien
sûr que mettre en oeuvre ce programme-là, ça va
dépendre dans une large mesure des budgets qui vont être
consacrés aux cégeps. Or, on sait bien que, dans les derniers
crédits, il y a eu une compression de plus ou moins 20 000 000 $. Nous
proposons donc
que le gouvernement prévoie un budget ponctuel, réparti
sur quelques années, pour la mise en place de la réforme. Sans
budget spécial, croyons-nous, l'échéancier de mise en
oeuvre des nouvelles mesures risque de ne pas être respecté,
malgré l'intention du gouvernement de faire adopter dès ce
printemps par l'Assemblée nationale les dispositions législatives
relatives au nouveau régime des études collégiales.
En conclusion, donc, nous accueillons favorablement le projet
gouvernemental de renouveau de l'enseignement collégial et nous sommes
plus particulièrement satisfaits de l'importance accordée par la
réforme au secteur de l'enseignement technique. Le CPQ reçoit
également positivement les recommandations qui visent l'augmentation du
taux de diplomation, l'amélioration de la formation
générale, l'accroissement du temps consacré aux langues
maternelles et aux langues secondes, l'intégration plus harmonieuse des
jeunes en milieu collégial, l'accroissement de l'autonomie
accordée aux cégeps en matière de contenu de certains
programmes et de stages, l'harmonisation des programmes avec
l'université et le secondaire, de même que l'adéquation
entre les besoins du marché du travail et le contenu des programmes
techniques, ainsi que la promotion de la formation technique.
Le CPQ avait également recommandé, à l'instar
d'autres groupes, la mise sur pied d'un organisme externe pour évaluer
les politiques d'apprentissage, les programmes, ainsi que les objectifs et les
normes établis par les collèges, de même que, on s'en
rappellera, l'organisation pédagogique et la gestion des cégeps.
Cette recommandation a également été retenue et nous nous
en réjouissons. Nous souhaitons, par ailleurs, que le comité
national des programmes d'études techniques ne devienne pas rapidement
une autre superstructure coûteuse et inefficace, et nous souhaitons que
ce comité entretiendra des liens étroits avec la
Société québécoise de développement de la
main-d'oeuvre, tout comme nous souhaitons que le MESS se penche davantage sur
tout le dossier de l'enseignement collégial aux adultes et sur le
financement des stages en entreprise.
Finalement, rappelons que le succès de la réforme
proposée repose sur le financement adéquat des cégeps. Au
moment où le gouvernement cherche à contrôler
l'augmentation de ses dépenses, cet élément revêt
d'autant plus d'importance que les budgets alloués se sont
déjà révélés très serrés. Il y
a lieu de souhaiter, à tout le moins, qu'un budget ponctuel, je
répète, réparti sur quelques années la
Fédération des cégeps parle de 10 000 000 $ sur une
période de 4 ans; on ne peut pas l'évaluer, mais eux parlent de 2
500 000 $, à peu près, par année soit
accordé aux collèges pour la mise en place de la réforme.
Autrement, il y a lieu de croire, M. le Président, Mme la ministre, que
la réforme proposée ne se fera pas et que l'on en demeurera aux
énoncés de belles intentions, ce qui serait, quant à nous,
très malheureux, compte tenu, surtout, de l'importance pour la formation
technique qui a retenu l'attention du Conseil du patronat.
Le Président (M. Gobé): Alors, merci, M. le
président du Conseil du patronat. Permettez-moi, vu que je suis
arrivé en cours de route, de vous saluer, ainsi que les gens qui vous
accompagnent. Je vais donc maintenant passer la parole à Mme la ministre
de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur. Vous avez, madame,
une période de 20 minutes à votre disposition.
Mme Robillard: Merci, M. le Président. Je veux, à
mon tour, saluer les membres du Conseil du patronat. Je note avec satisfaction
votre appui favorable au renouveau collégial, de façon globale,
bien que vous ayez certaines inquiétudes sur des points, mais
peut-être que la rencontre d'aujourd'hui va nous permettre de clarifier
certaines de ces inquiétudes. (11 h 30)
M. Dufour, quelle ne fut pas ma surprise de voir que le Conseil du
patronat ne se positionne pas en regard de la mesure financière qu'on
qualifie de responsabilisante et d'incitative à la réussite au
niveau du chapitre de la réussite des études! Pourquoi ma
surprise? Parce que je me souviens très bien de votre passage à
la commission de l'éducation, l'automne dernier, où nous avions
eu une discussion sur le sujet, où, vous-même, vous nous avez fait
part d'une réflexion auprès de vos membres, d'abord sur des
droits de scolarité, en tant que tels, à l'ordre d'enseignement
collégial, si les membres du CPQ étaient en faveur ou pas, et
vous aviez finalement conclu devant les membres de cette commission que l'heure
n'était peut-être point venue à des droits de
scolarité, si je me souviens bien. Mais, par ailleurs, vous nous aviez
parlé aussi de limites à la gratuité, si mes souvenirs
sont bons. Alors, vous voyez que, dans ce projet de renouveau, il y a une
mesure financière qui est là, il y a un signal qui est
donné aux étudiants. Qu'est-ce que le CPQ en pense?
M. Dufour (Ghislain): C'était
délibéré de ne pas en parler parce que, dans un groupe
comme le nôtre, ce n'est pas ce qui ressort de ce document-là. Ce
qui ressort de ce document-là, c'est l'aspect valorisation de
l'enseignement technique, et on s'est accrochés à nos
préoccupations. Je peux comprendre que les étudiants aient
beaucoup parlé de ce ticket lors de leur présentation
antérieure; c'est normal, selon les groupes. Ce que nous avions dit en
commission parlementaire, au mois d'octobre, c'est qu'on avait fait un sondage
auprès de la population en général, un sondage CROP, et la
population ne se déclarait pas favorable à des frais de
scolarité «at large». Nous qui avions peut-être des
velléités de le recommander, nous nous sommes abstenus. Mais nous
avions parlé, tout comme la Chambre de commerce et d'autres groupes, des
éternels étudiants. Vous vous rappelez? On avait dit, à ce
moment-là, qu'il faudrait probablement voir dans quel contexte on situe
ceux-là.
Ce que l'on dit, finalement, sur ce projet du gouvernement, c'est que
c'est bien sûr qu'il y a des coûts pour la société
dans le domaine de l'éducation et, ces coûts-là
étant assumés par l'ensemble de la société,
il faut, à un moment donné, établir des normes, il
faut établir des paramètres. Alors, vous établissez un
paramètre après cinq ou sept échecs, et c'est
évident que, nous, on ne peut pas être en désaccord avec
ça. Évidemment, on peut trouver d'autres formules qui tenteraient
de réaliser les mêmes objectifs. Les étudiants, tout
à l'heure, ont proposé un certain nombre de formules. Est-ce que
ça réalise vos objectifs? Je ne le sais pas. Je ne peux pas
l'analyser. Mais c'est évident qu'il faut être en accord, à
un moment donné. C'est un peu partout dans la société que,
quand on dépasse certaines normes, il y a des choses qui se passent, et
je pense que la société est en demande face à ça.
Ce que l'on voudrait peut-être dire, donc: Accord général
de principe avec ça, sous réserve que, si on peut trouver autre
chose qui fatigue moins les étudiants et qui rejoint les mêmes
objectifs, nous, on va être d'accord.
Il y a peut-être une chose qui n'a pas été dite
souvent et dont, nous, on a pris connaissance il n'y a pas tellement longtemps:
c'est quand même l'article 38 du projet de loi qui dit que cette
mesure-là ne s'appliquerait qu'à compter du 1er janvier 1994.
Est-ce que nous avons bien compris? Parce qu'on a entendu beaucoup de
cégépiens autour nous dire: Ça n'a pas de bon sens, j'ai
déjà quatre échecs. Si j'en rate un, j'ai un
problème. Si on comprend bien la proposition, c'est que tout ce qui est
le passé est le passé et on commence le 1er janvier 1994. Alors,
ça, je pense qu'on devrait le dire un peu plus et ça rendrait
peut-être moins déraisonnable la norme qui semble être
contestée beaucoup par les jeunes.
Mme Robillard: Alors, à ce point de vue, vous avez raison,
M. Dufour. Il y a deux choses qui sont peu dites publiquement:
premièrement, qu'on commence à compter les échecs
seulement à compter du 1er janvier 1994, donc que tout le monde part
à zéro, et, deuxièmement, aussi, que cette mesure
financière n'est pas éternelle pour toute la fin des
études; elle est liée aussi à la réussite d'autres
cours. Et ça, on en verra la mécanique plutôt au niveau du
projet de règlement. Bon. Alors, je comprends bien votre prise de
position sur cette mesure-là.
Avant d'aborder le secteur technique, parce que vous avez insisté
beaucoup sur cette dimension en tant que CPQ, vous avez quand même une
affirmation très claire au niveau des mécanismes
d'évaluation. Nous donnons davantage de responsabilités
académiques aux collèges, de façon particulière
dans le secteur technique, justement, une décentralisation à 100
% des activités d'apprentissage au niveau des collèges, mais, en
contrepartie, il y a un mécanisme d'évaluation d'abord qui doit
se faire au sein de chacun des collèges, mais aussi par une commission
externe d'évaluation, et ça fait l'objet d'un projet de loi
très précis. Certains, depuis nos audiences d'hier, nous
recommandent même d'élargir le mandat de cette commission
d'évaluation. Est-ce qu'il y a eu une réflexion
particulière, au CPQ, sur le mandat de la commission
d'évaluation?
M. Dufour (Ghislain): Pas dans le cadre de ce projet de loi. On
en avait beaucoup parlé, si vous vous rappelez, nous, lorsqu'on est
venus vous voir à l'automne, on vous avait même donné des
modèles américains d'évaluation. Alors, on n'a pas
regardé ça de façon plus précise parce que, nous,
on est d'accord avec le principe. Maintenant, qu'est-ce qui doit être
évalué? Je sais que la Chambre de commerce, hier, a dit que
même vos propres directives, vos propres réglementations devraient
être évaluées. On est tout à fait d'accord, nous
autres aussi, avec ça parce que, pour siéger sur d'autres
boîtes, il y a tellement d'interventions, des fois, ministérielles
par réglementation, directive, etc., qu'on peut envahir facilement le
champ de compétence d'un organisme du genre de ce conseil
d'évaluation. Alors, il faut l'étendre le plus possible et on
verra, à l'usage, s'il y a des choses qui doivent être
retranchées.
De façon générale, chez nous, c'est ferme,
ça doit être une évaluation la plus large possible des
activités globales, donc des programmes, incluant les profs. Vous vous
rappellerez que, nous, on a toujours été d'accord avec les
évaluations de profs, et l'évaluation aussi des politiques et
réglementations gouvernementales, pourquoi pas? Parce que vous allez
demander à ce conseil d'évaluation d'évaluer des choses
qui peuvent être drôlement chambardées par des politiques et
réglementations qui viennent du ministère. Alors, il faudrait
qu'il y ait un arrimage entre tout ça. Est-ce que tu veux ajouter,
Jacques?
Mme Robillard: Alors, M. Dufour, ça va. Abordons donc la
formation technique en tant que telle et vos inquiétudes, parce que
ça revient à un ou deux endroits dans votre mémoire, par
rapport au comité national des programmes techniques. J'aimerais vous
entendre davantage sur ça parce que, justement, ce que vous voulez,
c'est que ce soit une structure souple, légère et efficace, qu'on
ne s'embourbe pas dans une très grande structure lourde. C'est justement
l'objectif qui est poursuivi par la mise en place de ce comité national
des programmes techniques, comité sur lequel la ministre elle-même
ou son représentant va siéger, comité où vous nous
dites aussi: Assurez-vous des liens avec la Société
québécoise de développement de la main-d'oeuvre. Des
liens, oui, mais soyons très clairs: le mandat est très
différent. Le mandat n'est pas différent par rapport à la
clientèle jeune ou adulte, mais le mandat est différent par
rapport au fait que le comité national des programmes techniques, c'est
une table académique, si je peux me permettre l'expression, où on
va se préoccuper du contenu des programmes d'études, ce qui n'a
rien à voir avec le mandat de la Société
québécoise de développement de la main-d'oeuvre qui, elle,
n'a pas de mandat sur des programmes d'études au plan académique.
Alors, c'est un mandat complètement différent. Qu'il y ait un
lien, j'en suis, mais le mandat, à mon point de vue, s'il n'est pas
suffisamment clarifié, qu'on me le dise. Il n'y a pas de duplication de
mandat là. Alors que la Société québécoise
de développement de la main-d'oeuvre s'occupe
des programmes de main-d'oeuvre, ici il s'agit de programmes
académiques donnés par les collèges dans le champ des
études techniques. Alors, expliquez-moi un peu où sont vos
inquiétudes.
M. Dufour (Ghislain): Bon, il y a deux volets à votre
question. Il y a d'abord la création même de ce comité
national. Nous sommes très heureux de vous entendre dire que vous voulez
garder ça simple, souple, le moins coûteux possible. C'est ce
qu'on exprime clairement dans notre mémoire. Vous vous rappelez, l'an
passé, quand certains de vos collègues, par exemple, ont voulu
mettre sur pied je pense simplement à M. Paradis l'Office
de protection de l'environnement, on s'est dit: Pas de nouvelle boîte,
pas de nouvelle structure. Alors, on est prudents face à ça, mais
vous nous rassurez quand vous nous dites ce que vous venez de nous dire. (11 h
40)
Sur la question des liens avec la Société
québécoise de développement de la main-d'oeuvre, je dois
avouer que, lors des réactions préliminaires au
dépôt du document, nous avions drôlement interrogé le
comité national, disant: Bien, là, on embarque carrément
dans les plates-bandes de la Société québécoise de
développement de la main-d'oeuvre avec laquelle, vous le savez, on n'est
pas particulièrement en amour. Alors, ce n'était pas pour lui
donner plus de mandats. Sauf que, après analyse du document et
après explications obtenues notamment du sous-ministre, on est
très clairs, maintenant, à la page 7, lorsqu'on dit: «II
faudra s'assurer [...] qu'il entretiendra des liens étroits avec la
Société québécoise de développement de la
main-d'oeuvre, dont le mandat est de veiller au développement de la
main-d'oeuvre en emploi.»
Donc, je pense que cette crainte que l'on avait vue dans nos documents,
au tout début, parce que les chevauchements dans ces
organisations-là... On en parle tellement des chevauchements entre
l'Éducation, l'Enseignement supérieur, etc., qu'on ne voulait
surtout pas répéter ça là, et c'était notre
crainte. Je pense que maintenant, analyse faite, c'est deux mandats tout
à fait différents, et on est d'accord. Mais il faudra des liens
pareil parce que, comme je le disais tout à l'heure, le jeune qui est au
comité national, un jour, il vient vite, lui, là, sous la
responsabilité de la Société québécoise de
développement de la main-d'oeuvre, dès qu'il tombe sur le
marché de l'emploi et que mon ami Gaston, lui, va le former en
entreprise, puis, pour le former en entreprise, souvent il va l'envoyer aussi
au cégep. Alors...
Mme Robillard: M. Dufour, vous avez salué la mise sur pied
du centre de liaison cégeps-industries.
M. Dufour (Ghislain): Oui.
Mme Robillard: Est-ce que ce centre de liaison va avoir un lien
avec la Société québécoise de développement
de la main-d'oeuvre?
M. Dufour (Ghislain): Définitivement, sauf que c'est le
même problème que celui que vous venez de mentionner avec le
comité national. Le centre de liaison va s'occuper des jeunes, au
départ, en tout cas, parce qu'on ne veut pas élargir sa mission
trop, trop, là. Ça sera surtout les jeunes au collégial,
surtout pour les fins de stages on s'entend tous que c'est pour les fins
de stages alors que la société québécoise de
la main-d'oeuvre a des adultes, bien sûr, qui vont dans les
cégeps, mais ça ne sera pas notre première priorité
parce qu'ils n'ont pas besoin de faire de stages, ils sont déjà
en situation de travail. Mais, comme vous me retournez finalement votre
préoccupation comité national-Société
québécoise de développement de la main-d'oeuvre, je vous
fais la même réponse: II y aura des liens très
étroits entre le centre de liaison cégeps-industries et la
Société québécoise de développement de la
main-d'oeuvre. Ça vous préoccupait?
Mme Robillard: Oui. M. Dufour, je note aussi, justement, votre
ouverture pour des stages en entreprise. Par ailleurs, vous demandez à
nouveau que les entreprises bénéficient d'un crédit
d'impôt. Mais, au-delà de cette demande pour les entreprises
d'avoir un crédit d'impôt, vous me dites quand même qu'il
faudrait accroître la contribution financière aux collèges
dans l'organisation des stages.
M. Dufour (Ghislain): Oui.
Mme Robillard: Comment se fait-il? Pourquoi? Comment?
Combien?
M. Dufour (Ghislain): Pourquoi, comment, combien. Restons au
niveau du principe d'abord. Ce n'est pas automatique que les entreprises sont
réceptives à recevoir des stagiaires, on le sait tous. On a
beaucoup de comités de travail à ce sujet-là chez nous et
ce n'est pas toujours clair que, même quand on en accepte, on est
prêts à cheminer avec eux dans ce qu'on doit appeler vraiment un
stage et à ne pas les utiliser pour faire du travail autre. Alors, ce
n'est pas facile. On a besoin, donc, d'un certain nombre de mesures, et les
trois mesures les plus importantes pour nous sont donc le crédit
d'impôt, ça aiderait car il y a des coûts. Demandez à
Gaston, là, il y a des coûts lorsqu'il reçoit dans ses
entreprises des stagiaires. Par définition, il y a de l'encadrement,
c'est utile. Deuxièmement, le centre de liaison va être axé
là-dessus, les stages, et je pense qu'on pourra faire des choses
très, très concrètes, mais on vous dit: N'abdiquez pas
toutes vos responsabilités, dans le fond. Comme vous avez donné
la formation technique en totalité ou à peu près
maintenant au cégep, c'est eux autres qui vont avoir la
responsabilité de faire les stages et l'alternance
études-travail, bien, on va avoir besoin de budgets pour faire ça
parce que notre centre sera trop limité. Gaston, tu veux ajouter?
M. Lafleur (Gaston): Oui. Mme la ministre, je
pense qu'un aspect important aussi, c'est que, quand on parle de
crédit d'impôt, pour nous dans l'entreprise, ça signifie
aussi une certaine forme de leadership au niveau du gouvernement. Ce serait
trop facile que vous disiez aux entreprises: Écoutez, arrangez-vous avec
les cégeps et favorisez la création de stages.
Déjà, on a beaucoup de difficultés à inclure une
nouvelle culture de développement de la main-d'oeuvre qui est
déjà en place. Si on veut ajouter là-dessus le principe
d'un stage en entreprise pour les étudiants, je pense qu'il faut
reconnaître aussi que le gouvernement doit donner un son de cloche sur la
manière dont il veut «prioriser» cet aspect-là dans
le cadre de la formation professionnelle. Le crédit d'impôt
devient pour nous, évidemment, un signe très clair d'une
volonté du gouvernement d'appuyer ces efforts-là, mais c'est
évident que ça ne sera pas facile et ça va devoir se
créer de jour en jour, de mois en mois et d'année en
année.
Mme Robillard: M. Lafieur, pourriez-vous être plus
précis sur les dépenses que ça occasionne pour
l'entreprise? Vous le savez sûrement, certaines de nos entreprises ont
déjà commencé à ouvrir leurs portes à des
stagiaires et il n'y a pas de crédit d'impôt au moment où
on se parle.
M. Lafieur: Oui, effectivement. Mme la ministre, pour
répondre à votre question, il y a des entreprises qui voient un
intérêt majeur, à cause d'une rareté de
main-d'oeuvre ou de spécialistes, à encourager, si vous voulez,
les stages de formation pour permettre une intégration éventuelle
de candidats qui seraient qualifiés. Par contre, lorsqu'on parle en
général de l'instauration dans le cadre des programmes
pédagogiques de stages de formation, le problème est tout autre.
D'autre part, Mme la ministre, je pense qu'il faut être conscients aussi
que ce n'est pas... Si on regarde l'ensemble des entreprises au Québec,
une très large proportion de ces entreprises-là se qualifient au
niveau de la PME. À ce moment-là, si on veut vraiment avoir un
programme qui soit généralisé, pas seulement
régionalisé, mais généralisé, et qu'on
touche à l'ensemble des secteurs de formation professionnelle
disponibles, soit au niveau secondaire ou au niveau du cégep, on va
devoir arriver avec une certaine assurance que le programme qui inclurait du
stage puisse effectivement se mettre en application dans l'ensemble des
secteurs visés.
Alors, c'est évident qu'il y a des cas de réussite, oui.
Il y a des cas aussi qui sont extrêmement reliés aux
intérêts des entreprises. Mais, si on pense à
généraliser cet aspect-là, pour nous, ça
apparaît important qu'il ne faudrait pas, comme on dit bon, une
expression utilisée dans d'autres situations faire du pelletage,
mais plutôt démontrer une proactivité au niveau de votre
ministère, au niveau des politiques gouvernementales pour inciter
vraiment à donner des sons de cloche positifs que c'est une forme de
partenariat qui serait établie, de telle manière qu'on puisse
vraiment la développer, cette fameuse culture-là qui nous manque
tellement au niveau du développement de la formation professionnelle
chez nos entreprises.
Le Président (M. Gobé): Merci, M...
M. Dufour (Ghislain): On pourrait peut-être demander, M. le
Président...
Le Président (M. Gobé): Oui.
M. Dufour (Ghislain): ...à M. Chamberland, qui vit
ça, qui reçoit des stagiaires peut-être, c'est quoi les
coûts.
Le Président (M. Gobé): C'est sur le temps de Mme
la ministre, M. Chamberland, avec l'invitation de Mme la ministre.
M. Chamberland (Robert): Je partage un peu l'idée de M.
Lafieur. C'est que, dans certains domaines où on a besoin de former de
nouveaux travailleurs, de nouveaux employés, ça peut être
intéressant, mais, dans d'autres secteurs où on forme pour
d'autres, je pense qu'à un moment donné, pour aider à la
progression de ces programmes-là, on a besoin d'aide au niveau des
crédits d'impôt. Ça, je suis d'accord là-dessus. Je
pense que c'est très important aussi.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. Chamberland.
À la limite, il vous restera quelques minutes encore, mais je pense que
M. le député de Lac-Saint-Jean aimerait maintenant pouvoir, lui
aussi, s'adresser aux représentants du Conseil du patronat. M. le
député, vous avez la parole.
M. Brassard: Question très, très rapide sur le
comité national des programmes d'études techniques. Hier, la
Chambre de commerce a exprimé les mêmes réserves, les
mêmes inquiétudes que ça devienne une structure lourde, un
monstre bureaucratique. Est-ce que la ministre vous a convaincus que ce serait
souple et efficace?
M. Dufour (Ghislain): La ministre a affirmé que ce serait
souple et efficace.
M. Brassard: Voilà. Mais qu'est-ce qui fait que, dans le
milieu des affaires la Chambre de commerce hier, vous aujourd'hui
on soit si inquiets de voir naître quelque chose de lourd et même
de monstrueux? (11 h 50)
M. Dufour (Ghislain): C'est l'expérience passée, M.
le Président, M. Brassard. On regardait, l'autre jour, les
crédits qui ont été accordés à la nouvelle
Société québécoise de développement de la
main-d'oeuvre qu'on voulait toute petite, tant et aussi longtemps, au moins,
qu'on n'aurait pas eu les transferts fédéraux. Là,
ça valait la peine. Mais un budget de 55 000 000 $, c'est beaucoup.
Puis-je vous parler de la CSST?
M. Brassard: Ha, ha, ha! De grâce, de grâce!
M. Dufour (Ghislain): Ça devient très facile,
finalement, de grossir ces mécaniques, et c'est la lumière rouge
qu'on allume, finalement, non pas qu'on ait une objection de principe.
Actuellement, ça se fait au niveau régional, ça se fait
sur une base sectorielle, mais les cégeps font presque toujours affaire
avec les mêmes entreprises. Dans votre coin, ils font affaire avec les
grandes entreprises de pâtes et papiers, ils font affaire avec Alcan;
à Montréal, ils font affaire avec Bell. Ils font toujours affaire
avec les mêmes entreprises parce qu'ils ont créé des
contacts, puis ils savent ce que ces entreprises vont répondre. Mais
c'est plus grand que ça, le territoire; alors, il faut faire monter au
niveau national ces préoccupations. Moi, je ne sais pas comment elle va
être bâtie, cette table, mais j'espère qu'on fera affaire
avec des gens qui représentent des secteurs. Autrement dit, si on veut
faire des curriculum pédagogiques dans le textile, bien, on fera affaire
avec l'institut des textiles, les mines avec l'association des mines, de
façon à apporter la meilleure expertise possible. Donc, sur le
principe, ça va, mais vous savez très bien nos
préoccupations face à ces organismes qui grossissent très
vite. Le meilleur exemple, c'est la Société
québécoise de développement de la main-d'oeuvre, 55 000
000 $.
M. Brassard: Je reviens sur la question du crédit
d'impôt, parce qu'à chaque fois qu'il s'agit d'impliquer les
entreprises dans une activité donnée,
recherche-développement, formation professionnelle, là c'est
organisation de stages pour des étudiants, on a toujours
immédiatement recours au crédit d'impôt. Malheureusement,
je ne pense pas que l'expérience soit très concluante. En
matière de recherche et développement, on ne peut pas dire que
ça marche très bien. En matière de formation
professionnelle, on a connu, récemment, des chiffres... On ne peut pas
dire que ça marche très bien, non plus. Il y a des fonds
très gros, très substantiels qui sont prévus dans les
livres des crédits, mais on s'est rendu compte, au bout d'un certain
nombre d'années, que ça se périme, ça devient des
crédits périmés, pour une très, très large
part. Donc, pourquoi, dans le cas des stages en entreprise, pensez-vous que la
formule du crédit d'impôt, ça va marcher, cette fois, alors
qu'en matière de formation professionnelle, puis de
recherche-développement on ne peut pas dire que ce soit très,
très concluant, puis que ça marche très bien?
M. Dufour (Ghislain): Non. Je dois vous donner parfaitement
raison. En recherche et développement, on n'utilise pas les 350 000 000
$ qui ont été mis là. On a des propositions très
concrètes, nous. Il faudrait, par exemple, que ça s'applique
davantage aux PME que ça ne l'est actuellement. Donc, ça
permettrait une ouverture. Quand vous parlez de l'argent périmé
c'est le débat qui a été fait à
l'Assemblée nationale il n'y a pas longtemps c'est le programme
de formation des travailleurs en entreprise où beaucoup d'argent est
resté là. Le ministre dit que c'est parce que le programme n'a
pas atteint sa maturité, donc, n'est pas connu. Je dis ce que le
ministre a dit.
Nous, ce que l'on suggère, dans le fond, c'est que, si c'est vrai
qu'il y a 275 000 000 $ de crédits qui sont là, puis qu'on en
prend 25 000 000 $, 50 000 000 $, bien, voilà qu'il y a de la marge pour
un autre programme qui serait les crédits d'impôt aux stages. On
pense que celui-là fonctionnerait plus parce que, là, vous allez
avoir les cégeps qui sont directement impliqués, qui vont venir
nous en vendre. Le centre de liaison va vouloir aussi en vendre. Si vous ne le
faites pas, si vous n'avez pas cet incitatif, c'est plat à dire, mais
les entreprises, elles n'embarqueront pas facilement. Il y a des coûts,
des coûts d'encadrement, des coûts réels à recevoir
un stagiaire. Alors, il faut ce genre d'incitation. Mais, comprenons-nous bien,
il s'agit de crédit d'impôt et non pas de subvention. Ce n'est pas
une subvention parce que tu reçois un stagiaire.
M. Brassard: Je vous comprends bien. Vous dites que ça ne
marche pas très bien du côté de la formation de la
main-d'oeuvre. Il y a beaucoup de crédits périmés. Le
ministre...
M. Dufour (Ghislain): C'est ce que vous avez fait comme
débat. Je ne suis pas allé vérifier, moi.
M. Brassard: Non, mais le ministre lui-même l'a reconnu.
Alors, il doit le savoir. Ce que vous proposez, finalement, c'est: Pourquoi ne
pas prendre une partie de ces crédits-là et initier un nouveau
programme qui ne serait pas spécifiquement du développement de la
main-d'oeuvre, de la formation de la main-d'oeuvre, et qui serait
affecté aux stages en entreprise, en concertation avec les
cégeps?
M. Dufour (Ghislain): Au départ, vous avez raison, tant et
aussi longtemps que le rythme de croisière du programme de formation des
travailleurs en entreprise... Je veux dire tant et aussi longtemps qu'on
n'atteindra pas les 250 000 000 $, au lieu de périmer les 250 000 000 $,
bien, on pourrait faire un autre programme pour les stages. Le jour où
on dépensera les 250 000 000 $ en formation...
M. Brassard: On ajoutera des crédits, à ce
moment-là.
M. Dufour (Ghislain): ...bien, on ajoutera des
crédits.
M. Brassard: Maintenant, ça suppose aussi, comme vous le
dites, que le gouvernement devra accroître sa contribution
financière aux collèges pour mettre en branle l'organisation des
stages en milieu de travail. Parce que, ce que vous dites à propos des
entreprises, c'est vrai. Elles ne sont pas portées spontanément
à prévoir et à accueillir des stagiaires. Il y a beaucoup
de
résistance au niveau des entreprises. Vous êtes le premier
à le reconnaître. Ça veut dire, à ce
moment-là, que les établissements doivent dégager quelques
ressources humaines, des espèces de missionnaires qui vont concevoir des
stratégies en fonction des programmes techniques qu'ils offrent et
carrément aller voir les entreprises, les inciter, les convaincre de
faire des places aux stagiaires. Donc, le crédit d'impôt doit
être accompagné de ressources permettant aux collèges de
mettre en branle une véritable stratégie de stages en
entreprise.
M. Dufour (Ghislain): Oui, parce que, quand on parle du
crédit d'impôt, c'est le volet entreprise.
M. Brassard: C'est ça.
M. Dufour (Ghislain): Mais, après ça, il y a tout
le volet cégep, comme vous le dites, où il va falloir les
planifier, ces stages-là, les bâtir, en collaboration avec le
ministère.
M. Brassard: Et assurer le suivi de tout ça. M. Dufour
(Ghislain): C'est ça. Jacques, oui.
M. Garon (Jacques): Oui, juste, M. le Président, ajouter
un mot là-dessus. C'est qu'on ne part tout de même pas de
zéro sur ce plan-là. Il y a beaucoup de collèges qui ont
déjà initié des programmes non pas de stages, mais de
véritable alternance travail, programmes dans lesquels les
étudiants sont payés par l'entreprise. Et ça, ça
commence à se développer de plus en plus. C'est vrai que c'est
sous l'égide d'un programme fédéral, mais rien ne nous
permet de croire...
M. Brassard: C'est un autre modèle, ça. Ça,
c'est un autre modèle, l'alternance.
M. Garon (Jacques): Oui, mais... C'est ça, l'alternance.
Et c'est de ça un peu qu'on parle parce que ce sont les entreprises,
pour l'essentiel, qui ne veulent pas des stages de deux semaines, qui ne
servent ni l'étudiant les professeurs ne sont pas du tout
d'accord avec ça ni même les entreprises. Donc, on parle de
véritable alternance travail. C'est ça qui, au cheminement d'un
certain nombre de collèges, semble indiquer beaucoup de succès.
Alors, je pense, enfin, nous pensons qu'il faudrait plutôt bâtir
là-dessus. Le crédit d'impôt à la formation peut
être un incitatif supplémentaire pour ouvrir non pas uniquement
les grandes entreprises et les moyennes, mais peut-être, demain et
après-demain, les petites entreprises à un changement de culture
générale pour accueillir pas seulement les stagiaires
étudiants, mais aussi les formateurs.
M. Brassard: Et les formateurs, j'allais le dire aussi. Ce que
vous signalez à juste titre, c'est que les professeurs en formation
technique doivent aussi faire des stages, vont devoir faire des stages. Il va
falloir également organiser ce perfectionnement, si l'on veut, des
professeurs.
M. Dufour (Ghislain): M. Lafleur.
M. Lafleur: Oui. M. le Président, M. Brassard, j'aimerais
juste vous rappeler que, quand on parle de généraliser les stages
en entreprise, ce qu'on demande, en contrepartie, c'est d'intégrer les
entreprises dans le processus d'éducation et de formation. Les
cégeps bénéficient actuellement, déjà, de
subventions du gouvernement. On demande aux entreprises d'y participer sans
leur donner une forme d'incitatif qui ne pourrait probablement pas compenser
les coûts directs en ressources humaines, en adaptation d'espaces pour la
formation, etc. Je pense que c'est quasiment une nécessité. Si on
demande autrement aux entreprises d'agir comme des missionnaires ou d'avoir la
vocation de l'enseignement et de l'éducation, je pense que c'est
rêver en couleur. (12 heures)
Par contre, comme le disait tantôt M. Dufour, cet
incitatif-là n'est bien qu'un incitatif. En fait, il y a beaucoup plus
de travail que ça à faire au niveau des entreprises, au niveau
d'une culture. Mais si on n'a aucun élément qui nous permette, au
niveau gouvernemental, de nous orienter, je pense que ça va être
difficile d'établir ce genre de partenariat qu'on essaie de
créer.
M. Brassard: Merci. En matière d'éducation des
adultes, vous signalez, avec raison d'ailleurs, rejoignant ainsi plusieurs
autres intervenants dont l'Institut canadien d'éducation des adultes qui
était parmi nous hier soir, que le document ministériel est
passablement muet sur cet aspect des choses considéré pourtant
par plusieurs comme un des enjeux majeurs en matière d'éducation
pour les années qui viennent. Vous dites qu'il faudra, notamment, que
les adultes aient accès à des services d'orientation et
d'encadrement, ce qui n'est pas vraiment le cas actuellement. Mais on mettait
en lumière, hier soir, une réalité que vous connaissez
sans doute, c'est qu'à cause des formes de financement accessibles en
matière d'éducation des adultes et, particulièrement, de
formation de la main-d'oeuvre il arrive que ce qui domine en cette
matière dans le réseau des cégeps, c'est des cours de
formation de la main-d'oeuvre et de formation dite sur mesure, donc,
très adaptée à telle entreprise et financée
généralement dans le cadre de l'entente Québec-Canada sur
le développement de la main-d'oeuvre ou encore par le ministère
de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation
professionnelle, et très peu de formation qualifiante donnant
accès à un diplôme, très peu, parce qu'il y a des
problèmes de financement. Est-ce que vous estimez qu'en matière
d'éducation des adultes il faut, comme le disait hier l'Institut
canadien, un meilleur équilibre dans l'offre des formations et il faut
que les adultes aient non seulement accès à de la formation sur
mesure, mais aient également accès à une formation
qualifiante pouvant conduire
à un diplôme d'enseignement collégial?
M. Dufour (Ghislain): Oui, oui. Tout à fait d'accord.
D'autant que le jeune qui termine le cégep, qui s'en va sur le
marché du travail, qui perd son emploi un an ou deux plus tard, il
devient un adulte. Et c'est ce jeune adulte-là qui est sur le
marché du travail actuellement qui a peut-être eu un diplôme
de cégep, mais qui ne sait pas tellement bien lire, bien écrire.
Alors, lui, même s'il a un diplôme, il a déjà une
formation de base, mais il faut la compléter. D'autres veulent
continuer, justement, à aller chercher... Parce qu'on sait très
bien que les exigences du marché du travail deviennent de plus en plus
importantes. Ça prend un diplôme du collégial. On parle de
50 % de la main-d'oeuvre, je pense, qui, en l'an 2000, devra avoir un
baccalauréat. Alors, c'est évident que, oui, on est ouverts
à ça. Comment faire l'équilibre entre les deux? Je ne le
sais pas, là, mais ça ferait l'objet de cette réflexion
dont on parle quand on dit que le ministère ne s'est pas penché
beaucoup là-dessus.
M. Brassard: Mais c'est certainement, en tout cas, par le biais
du financement. Parce que, actuellement, les effets pervers qu'on constate,
c'est à cause des formes et des modes de financement. Alors, c'est de ce
côté-là qu'il faut certainement regarder, si on veut
parvenir à un meilleur équilibre dans l'offre de formation pour
les adultes.
M. Dufour (Ghislain): Mais, par ailleurs, je ne veux pas
paraître négatif quant à la formation sur mesure, parce que
vous savez qu'à Montréal les cégeps...
M. Brassard: Ah! Non, non! Je ne suis pas du tout contre
ça, remarquez bien, là. Comprenons-nous bien. Je suis, au
contraire, très favorable à ce genre de formation, puis je ne
voudrais pas que ça disparaisse, bien au contraire, bien au
contraire.
M. Dufour (Ghislain): Montréal, d'ailleurs, est un bel
exemple de regroupement des cégeps pour le dossier de la formation sur
mesure. Ils ont mis ensemble des ressources et tu peux savoir qui le donne,
quelles sont les conditions où on le donne, et c'est excellent comme
structure.
M. Brassard: Absolument. Merci.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. le
député de Lac-Saint-Jean. M. le député de
Jacques-Cartier.
M. Cameron: Merci, M. le Président. M. Dufour, I would
like to return to your first point of agreement with the general orientation,
that is to increase the number of diplomas, along the lines also supported by
the Superior Council of Education, to 60 % by the year 2000. Before I ask what
I want to ask, I should explain something. The following paragraph says that it
is diffi- cult to decide exactly why students fail or leave. I would say, as
someone who has taught in the college system for 20 years, that that is the
wrong approach to the whole problem, that the more interesting method would be
to try to study why the bottom third of the students who stay in stay in. That
is, what people can forget about the entire cegep system, not just as a
Québec phenomenon, but in terms of modern education, is that it is
trying to keep people in school as a proportion of the population that is
higher than ever before in history, higher than any other kind of society that
has ever existed and where people of that age group, in past societies, have
entered into apprenticeship systems or, not as the case may be, have worked as
labours or whatever, but, in any case, have not been in formal educational
institutions.
When you carry out surveys, for instance, and you ask dropout students
why they have dropped out, very few students are going to tell you the reason.
They may say for a job or something of that sort, but the point is that very
few of them are going to say: Because school was a disaster for me, right from
the first year or two. I always hated it, I hated teachers. I cannot read, I
cannot write. I detest cegep and I want to leave as fast as I can, and the only
reason I am still here is to try to keep my family happy. So, they will list
five other reasons, but that is the central reason for a very large proportion
of students going.
If you want 60 %, you can mean two very different things. You can mean
either you would like to see the standards in the system steadily rise, which,
in fact, can produce a higher and higher proportion of success, because with
higher standards throughout, higher entrance standards, higher standards to
stay in, you will have more students who, in fact, will probably be successful
students. But, on the other hand, you mean that the students who have had
difficulty traditionally or unfortunate circumstances and so on will almost
certainly be excluded. Or, else, you can say that what you are really trying to
do is get 60 % of Québec society of that age level through the college
system, which is a very different intention. In that case, you can say: The
more courses in introductory orientation, the more courses in remedial French
or remedial English, the more courses in remedial study approaches, or what
have you, no matter how necessary this is, this will be done because that is
the intent, but you cannot do both.
In terms of a given amount of ressources, for example, to teach French
or English, you can do so mainly with the idea that you have entirely competent
students who are mainly learning advanced courses in literature and so forth,
or you can assume they do not know even their maternal language and that what
you have to give them is just that, but you have only so many teachers. You
cannot have them simultaneously doing Molière or Yves Beauchemin and,
you know, like elementary language instruction. What do you see as the priority
of the cegep system in terms of this?
M. Dufour (Ghislain): I will ask Jacques Garon to answer this
very specific question.
M. Garon (Jacques): M. le Président, ce n'est pas une
réponse facile parce que, dans notre esprit, c'est très
précis. Ce n'est pas 60 % de la population québécoise que
l'on veut atteindre ici; c'est 60 % de la population étudiante
collégiale que nous visons, tout comme le Conseil supérieur de
l'éducation, pour accéder à un diplôme
collégial en l'an 2000. pour ce faire, ce n'est pas une mesure qui va
probablement le faire, mais un ensemble de mesures qui sont à l'origine
de la réforme proposée par le gouvernement. vous dites que ce
serait plus facile de considérer pourquoi un tiers des étudiants
réussissent très bien plutôt que de considérer
pourquoi peut-être 30 % ou 35 % d'étudiants subissent un
échec. mais je pense qu'il a été démontré
par de nombreuses études que les particularités de ces
étudiants ne se résument pas à un seul paramètre.
il y a énormément de circonstances, et, dépendant de quels
étudiants on interroge, ils vont vous répondre
différemment sur la question. (12 h 10)
Je pense qu'il est plus facile d'avoir des mesures de nivellement par le
haut. Et, vous l'avez signalé, plus on augmente la qualité de
l'enseignement, le niveau de l'enseignement, pas seulement au collégial,
mais probablement au secondaire, plus on a des chances d'intéresser
peut-être une plus grande partie des étudiants. Et ce n'est pas
uniquement un problème qui s'adresse aux étudiants; c'est presque
un problème societal, à la limite. Mais on aura plus de chance,
à notre avis, d'augmenter le taux de réussite de la diplomation
des étudiants au collégial si un certain nombre de mesures qui
sont proposées ici le sont. par exemple, le document du gouvernement
signale qu'il y a un certain nombre de cours obligatoires qui doivent
être véritablement sanctionnés au niveau des études
secondaires par les étudiants du secondaire. or, il semble que ce n'est
pas le cas partout. ça, c'est un minimum qu'on devrait exiger, et je
pense que là le document ministériel a raison. par ailleurs, on
se propose aussi d'accroître les mesures d'encadrement en première
année de collégial. alors, je pense qu'on ne peut pas,
peut-être, souhaiter des miracles, mais, en tout cas, c'est toujours
positif comme démarche pour pouvoir accéder, si possible,
à ce 60 % de diplomation, en l'an 2000, des étudiants
collégiaux.
Le Président (M. Gobé): Alors, merci
beaucoup...
M. Cameron: Could I answer that very briefly, quickly? Just one
point, fast, and that is, I know there is a long list of reasons, but I still
maintain that the main one is this overall academic difficulty. If a student
quits school because his parents are breaking up, he is much more likely to do
it if he is barely surviving anyway. And, if he is an honour student, he stays
in even if his parents break up. The explanation is still that the student left
because of a breakup in the family.
M. Dufour (Ghislain): That is a comment and not a question.
M. Cameron: That is all.
Le Président (M. Gobé): Merci beaucoup. Cette
intervention met donc fin à votre présention, M. le
président du Conseil du patronat. Je tiens à vous remercier au
nom de tous les membres de cette commission. Vous pouvez donc maintenant vous
retirer et j'inviterai les représentants du groupe suivant, soit ceux de
la Fédération autonome du collégial, à bien vouloir
se présenter en avant. Je vais suspendre deux minutes pour ce faire.
(Suspension de la séance à 12 h 12)
(Reprise à 12 h 14)
Le Président (M. Gobé): Mesdames et messieurs, si
vous voulez bien reprendre vos places, la commission de l'éducation va
maintenant reprendre ses travaux. J'inviterais les gens qui ont des
conciliabules à tenir à bien vouloir les tenir à
l'extérieur de la salle. S'il vous plaît! S'il vous plaît!
Alors, merci.
Il nous fait plaisir d'accueillir les représentants de la
Fédération autonome du collégial. Je vous informe que vous
avez 20 minutes pour faire votre présentation. Par la suite, une
discussion s'engagera entre Mme la ministre, M. le député de
Lac-Saint-Jean, pour l'Opposition, et d'autres membres de la commission, s'ils
le désirent, pour une période de 40 minutes. Alors, vous pouvez
maintenant présenter les gens qui vous accompagnent et commencer, sans
plus attendre, votre présentation.
Fédération autonome du collégial
(FAC)
M. Duffy (Michel): M. le Président, à ma droite,
Mme Selma Tischer, enseignante en techniques d'éducation en services de
garde, cégep Vanier; M. Jean Murdock, enseignant en sciences politiques
au cégep de Jonquière et vice-président de la
Fédération; je m'appelle Michel Duffy, je suis enseignant en
langues et littérature au cégep de Valleyfield et je suis
président de la Fédération; à ma gauche, M.
Jean-Guy Desmarais, enseignant en mathématiques au cégep
André-Laurendeau et secrétaire-trésorier de la
Fédération; enfin, M. Jacques Beaulieu, enseignant en philosophie
au collège de Jonquière.
Le Président (M. Bradet): Bienvenue, madame, messieurs.
Allez-y, M. le président.
M. Duffy: Merci. M. le Président, Mme la ministre, Mme la
députée, MM. les députés, membres de
cette commission, la Fédération autonome du
collégial est une organisation syndicale regroupant 3500 enseignantes et
enseignants de cégep. Elle est présente dans la plupart des
grandes régions du Québec et est à l'image de sa
dualité linguistique.
Encore un mot, M. le Président, en conclusion de ce
préambule, pour remercier les membres de la commission de
l'éducation d'avoir bien voulu nous entendre sur les projets de loi 82,
83, et sur le projet de règlement sur le régime des études
collégiales.
À la commission de l'éducation, tenue en novembre dernier,
sur l'avenir des cégeps, la FAC a fait connaître les positions des
enseignantes et des enseignants, fondées sur les principes de
démocratisation et d'accessibilité aux études
collégiales. Il était ressorti de cet exercice de consultation de
nos membres, outre des recommandations précises, nombre de
témoignages sur ce qu'il fallait à tout prix préserver de
l'enseignement collégial public d'ici, à savoir que, si le
réseau québécois avait connu une expansion si
considérable, c'est qu'il s'était construit autour de
l'idéal de l'égalité des chances.
Mais voilà que le temps a passé et que les consensus de
ces audiences se sont transformés en projets de loi. Nous entendons
participer à ces consultations particulières dans un esprit
d'ouverture. Les récents événements ont suscité de
nouveaux débats et, si notre conception de l'enseignement
collégial s'en est trouvée quelque peu changée, nous
estimons que les projets de loi 82 et 83 doivent être modifiés,
voire améliorés, si l'on veut que le renouveau de cet
enseignement entraîne l'adhésion du milieu enseignant.
Aussi, dans notre mémoire, nous abordons, dans l'ordre, les
perspectives suivantes. D'abord, un préalable à la
réussite de la réforme: la participation des enseignantes et des
enseignants; puis, l'accessibilité et la réussite scolaire;
ensuite, la formation offerte; enfin, la question de l'évaluation et les
recommandations de modifications au projet de loi 83.
La participation des enseignants ou l'autonomie professionnelle. La
principale caractéristique de cette autonomie est une très forte
interaction reliant les enseignants à l'usager de leur travail,
l'élève, la très forte motivation que procure ce rapport
à l'élève, lequel est au fondement de la pratique
enseignante et des projets professionnels qu'elle nourrit. Elle naît
d'une conscience et d'une connaissance aiguës de la condition
étudiante. Cet intérêt et cette motivation pour le travail
s'alimentent de la grande latitude laissée aux professeurs dans la
conception et la réalisation de leur travail. De même,
l'effervescence de l'organisation, qui naît et s'entretient de rapports
multiples, d'interrelations coordonnées, d'objectifs partagés,
d'efforts canalisés dans des choix qui apparaissent à tous, doit
se perpétuer dans des structures qui favorisent l'engagement.
La FAC considère que les enseignants doivent être au centre
des structures et de l'activité pédagogique, et ce, en
concertation avec les autres groupes concernés. Et, tout en trouvant
souhaitable l'implantation de l'ap- proche programme, nous estimons qu'elle
doit prendre appui sur les orientations développées par les
départements. Cela nous amène à demander qu'on
prévoie un mécanisme de délégation de pouvoir pour
le ou la responsable de programme dont le statut demeure celui de
professeur.
Dans le même ordre de préoccupations, revendiquons-nous une
représentation majoritaire des enseignants à la nouvelle
commission des études, ainsi qu'une représentation significative
des élèves. Au conseil d'administration, dont la
responsabilité est de proposer des projets qui correspondent à la
conciliation des points de vue, nous comprenons mal cette méfiance
à l'égard du corps professoral et des autres personnels dans la
portion congrue de représentativité qui leur est faite, comme
nous déplorons le caractère excessif de la mesure sur les
conflits d'intérêts qui évince de la séance tout
membre du personnel dès qu'il est question de discuter de ses conditions
objectives de travail. (12 h 20)
À l'extérieur de l'institution, nous demandons à la
ministre de maintenir et de financer adéquatement les comités
pédagogiques, de confirmer aussi dans la loi l'existence du
comité national des programmes d'études techniques et d'y assurer
la représentation des syndicats, notamment ceux de l'enseignement.
L'accessibilité et la réussite scolaire. D'abord, la
gratuité. Ce dernier sujet, largement traité aux premières
audiences de la commission de l'éducation, a permis que se dégage
le consentement de presque tous, à savoir que l'enseignement
collégial doit rester la responsabilité financière
première de l'État avec ce corollaire important de
l'inopportunité d'instaurer des droits de scolarité dans un
contexte où l'on cherche à attirer des secteurs importants de la
population aux études supérieures et à encourager la
persévérance des élèves qui s'y trouvent
déjà.
En outre, on ne peut pas encore parler au Québec d'une
véritable égalité des chances pour tous les segments de la
population. En effet, le conseil supérieur a déjà fait
ressortir avec justesse que la poursuite des études et la
persévérance jusqu'à la réussite demeurent
significativement moins prononcées dans les milieux
défavorisés. Aussi, la FAC se montre favorable aux
précisions inscrites dans la loi 82, à l'article 24,
empêchant les collèges d'exiger des droits de scolarité aux
élèves à temps plein.
Quant à la mesure visant à imposer des droits de
scolarité aux élèves ayant cumulé trop
d'échecs, elle risque d'avoir des effets négatifs pour ceux et
celles qui éprouvent des difficultés de cheminement et qui
souvent sont les mêmes qui disposent de peu de ressources
financières ou ont besoin de concilier études, travail et
responsabilités familiales. Le coût social et économique de
tels frais modérateurs ne serait sans doute pas compensé s'il
conduisait ces élèves à l'abandon des études,
à devenir d'éternels perdants, décrochage aux
conséquences, bien sûr, surchargeantes pour les finances
publi-
ques, avec le cortège de maux sociaux qui l'accompagnent:
chômage, augmentation de l'assistance sociale, pessimisme moral des
jeunes, absence de perspectives, exclusion, etc.
Quant à l'admissibilité, la FAC constate avec satisfaction
que la ministre a tenu compte des critiques soulevées cet automne
relativement aux exigences du D.E.S. pour entrer au cégep. Nous nous
inquiétons, toutefois, du silence sur les moyens qu'on entend prendre
pour faciliter aux élèves du secondaire l'atteinte des nouveaux
seuils. Quel message envoie-t-on alors à tous ces élèves
dont le diplôme n'est ni professionnel, ni suffisant pour le
collège? Il y en aurait plus du quart dans cette situation. Avant
d'instituer de nouveaux préalables à l'admission aux
études collégiales, nous demandons qu'on mette en place des
mesures de soutien à l'apprentissage nécessaires à
l'atteinte de ces nouvelles exigences.
Ensuite, tout en nous disant d'accord avec la première session
d'accueil et d'intégration, nous proposons que les modalités en
soient définies par la commission des études. Nous aimerions
entendre des engagements clairs de la ministre au sujet des ressources qu'elle
est prête à consentir à sa réalisation.
De même, nous demandons de continuer d'offrir, selon les besoins
identifiés, des cours de mise à niveau, des cours d'appoint, des
cours de méthodologie du travail scolaire pour les élèves
qui en ont besoin et d'assurer aux services qui soutiennent les
départements dans leur travail les ressources suffisantes: services
professionnels, services aux étudiants, services de soutien à
l'apprentissage, services de bibliothèque, alors qu'on les sait
particulièrement touchés depuis 10 ans par de nombreuses
restrictions budgétaires.
Sur la formation offerte: la formation générale. Il est
dit, dans le projet de loi, que la ministre a la responsabilité de
déterminer les objectifs et les standards de tous les cours des blocs 1,
2 et 3, ainsi que les activités d'apprentissage du bloc 1. La FAC
recommande que les comités pédagogiques soient responsables de
déterminer, avec le MESS, les activités d'apprentissage de la
formation générale. Une fois ces modes d'organisation de
l'apprentissage déterminés, que les départements puissent
aménager ces activités en fonction de leurs besoins propres.
Sur la formation générale commune on prierait les
membres de la commission de se référer au tableau de la page 33
pour suivre, peut-être, plus facilement nous croyons certes au
fait de préserver, de renforcer et d'élargir ce type de formation
à l'heure de la mondialisation des marchés où les
compétences de formation fondamentales doivent être
transférables et où il nous faut éviter les
spécialisations hâtives. Il nous semble paradoxal que, pour
accroître la polyvalence, on introduise un bloc de formation
générale particulière. Nous recommandons de
l'abandonner.
Quant à la langue d'enseignement, nous partageons
entièrement la position de la ministre qui considère qu'un
renforcement de la formation générale passe par une augmentation
du temps alloué à la langue d'enseignement. Cependant, il ne
suffit pas d'ajouter un cours ou d'augmenter le nombre d'heures à
l'apprentissage; il faut s'assurer de mettre en place les conditions
nécessaires, soit l'introduction, dans la pondération, de travaux
pratiques. Cela réduit le ratio élèves-maître de 150
à 90 et rend possible un encadrement du travail hebdomadaire. Nous
proposons qu'il y ait trois cours communs à tous les programmes dont la
pondération serait de 3-2-3.
Au sujet de la langue seconde, la FAC reconnaît que, dans le
contexte mondial et surtout québécois des années 2000, il
est concevable d'introduire la langue seconde dans la formation
générale. Nous nous interrogeons sur le bien-fondé d'une
trop grande spécialisation en rattachant le deuxième cours
à un programme. Ne devrait-on pas viser l'acquisition d'habiletés
intellectuelles et langagières qui serviront l'élève tout
au long de sa vie?
À propos de la philosophie, des «humanities», la FAC
considère que l'on devrait maintenir la place de la philosophie dans la
formation générale en respectant la séquence de
développement des habiletés intellectuelles en philosophie telle
qu'elle a été élaborée en quatre cours par le
comité pédagogique de cette discipline. S'il s'avère
impossible de maintenir les huit unités, nous proposons que les six
unités prévues soient réparties en trois cours de
pondération 2-2-2. En faisant ce choix, nous maintenons les 12 heures
actuellement consacrées à cet enseignement, ce qui permet de
respecter les objectifs d'apprentissage définis par le comité
pédagogique, nous préservons la contribution essentielle que la
philosophie et les «humanities» apportent à la formation des
élèves. Puis nous pensons que la présence structurelle de
travaux pratiques consacre le fait que les enseignants de philosophie sont les
mieux placés pour collaborer avec ceux qui enseignent la langue au
renforcement de la formation fondamentale. Outre que cette pondération
abaisse le ratio maître-élèves de 150 à 120, elle
permet d'améliorer la qualité de l'encadrement.
L'éducation physique. L'importance de l'activité physique
dans le développement intégral de la personne et pour la
santé physique et mentale des élèves milite en faveur du
maintien du caractère obligatoire de quatre cours d'éducation
physique. Les études, l'absence de contraintes et les pressions
exercées par le travail rémunéré font que bon
nombre d'élèves délaisseront l'éducation physique
devenue facultative.
La décision de réduire la place de l'éducation
physique va à l'encontre de la tendance actuelle qui veut que les
entreprises préoccupées par le concept de la qualité
totale considèrent l'activité physique comme un investissement
rentable. Des employés en forme sont plus productifs, moins absents et
utilisent beaucoup moins les services de santé. Pourquoi en serait-il
autrement des élèves des cégeps? Huit heures
d'éducation physique, c'est un investissement collectif dans la
santé, une mesure de prévention visant à réduire
les coûts que nous devons assumer dans les services de santé.
Au sujet de la formation préuniversitaire, d'accord avec les
mesures de revalorisation et de resserrement annoncées par la ministre,
la FAC forme le voeu que les programmes préuniversitaires tendent
à avoir le même nombre d'unités que les sciences de la
nature, et que l'épreuve synthèse où l'activité
d'intégration prenne la forme d'un cours crédité dont le
financement débute cet automne.
Sur la formation technique, nous avons vu, dans les intentions
ministérielles, une volonté de relever les défis qui
confrontent ce secteur de l'ordre collégial. Nous nous disons d'accord
avec le choix des activités d'apprentissage laissé aux
collèges, sauf sur un minimum à déterminer qui permet aux
élèves de changer, en cours d'études, de programme ou de
collège et qui reconnaît aux professeurs compétence et
autonomie dans l'élaboration des programmes menant au D.E.C. ou à
l'A.E.C.
De même, sommes-nous d'accord avec cette formule modulaire du
D.E.C. et l'excellente analyse qu'en fait le Conseil des collèges, mais
nous recommandons qu'elle soit réservée à des personnes
qui ont quitté momentanément les études ou qui
présentent un cheminement scolaire particulier. Et, aussi, nous sommes
d'accord avec les programmes d'alternance travail-études, dans la mesure
où l'entreprise se dit intéressée à recevoir les
stagiaires et dans la mesure où le gouvernement du Québec prendra
le relais du financement dégressif de ces programmes.
De l'évaluation, maintenant. Dans les orientations d'avenir
présentées par la ministre le 6 avril dernier, on définit
ainsi le mandat des trois commissaires responsables de la future commission:
«porter un jugement formel de qualité sur la manière dont
les collèges remplissent leurs responsabilités
académiques». Et plus loin nous lisons: «Une telle
évaluation des politiques institutionnelles et, surtout, des programmes
d'études tels qu'ils sont offerts couvre, en fait, un vaste
ensembïede réalités institutionnelles, y compris
l'enseignement et sa gestion, l'organisation pédagogique, la
maîtrise des apprentissages par les étudiants, voire la
performance des diplômés sur le marché du travail ou leurs
résultats à l'université. L'évaluation des
programmes effectivement offerts est toujours aussi, à sa
manière, une évaluation de l'établissement et de ses
pratiques.» (12 h 30)
Cette orientation, bien qu'elle eût pu répondre en partie
aux insuffisances d'évaluation relevées par le Conseil des
collèges dans «Priorités pour un renouveau de la
formation», néglige l'évaluation de l'administration
centrale du réseau collégial, c'est-à-dire lois,
règlements, politiques, programmes et pratiques de gestion. Mais, pis
encore, elle n'est même pas traduite dans le projet de loi 83 qui
crée une commission d'évaluation et non de
l'évaluation dont la seule finalité consiste à
rendre des comptes, aux articles 13 à 21, dans l'oubli d'autres
finalités majeures avec lesquelles elle devra avoir des liens de
complémentarité, de régulation et de synergie, à
savoir améliorer et gérer. En son article 22, la Commission ne
soumet qu'un bilan de ses activités pour l'année scolaire
précédente. Il n'est nullement question d'un rapport sur
l'état et les besoins de l'ordre collégial.
De là à penser que cette évaluation engendrera du
formalisme et des effets pervers, il n'y a qu'un pas, pensons-nous, en relisant
l'avis du Conseil des collèges, et je cite: «...un regard externe
qui paralyserait plutôt que de stimuler, qui détournerait toutes
les énergies vers la reddition de comptes au détriment de
l'amélioration de la qualité et d'une gestion saine et
efficace». D'où notre déception. Cette reddition de
comptes, propre à la délégation et à
l'imputabilité, sera toujours incomplète qui néglige le
caractère formatif d'une évaluation éclairante. Nous
souhaitons que les recommandations que la Commission peut faire «à
l'établissement d'enseignements propres à rehausser la
qualité de ses politiques d'évaluation» puissent d'abord
porter sur des mesures de formation des maîtres susceptibles
d'améliorer la qualité de l'enseignement et l'atteinte des
objectifs pédagogiques précis.
En conclusion, M. le Président, ces remarques constituent les
priorités mises de l'avant par la FAC dans le cadre des audiences
particulières de la commission de l'éducation. Au terme de
celles-ci, le gouvernement du Québec, en adoptant les lois 82 et 83,
privilégiera des points de vue et des mesures qui détermineront
l'avenir de l'enseignement collégial québécois. Ces
politiques, bien qu'elles seront votées sur une toile de fond
économique difficile, ne doivent pas revêtir que des aspects
d'épargne des fonds publics; elles doivent être des gages
d'avenir.
Est-il nécessaire de souligner encore le caractère
stratégique de l'éducation pour un pays, stratégique au
point de vue de la constitution de la main-d'oeuvre productive et
créatrice, de l'effet d'entraînement que l'éducation
suscite dans toute la société, du développement
intellectuel des citoyennes et citoyens conscients et capables de participer
aux grands débats? Il semble bien que oui, surtout à une
époque où la récession économique amène la
société à concevoir le débat pédagogique en
termes d'efficacité, de rentabilité et de performance ou à
le remodeler à partir des seules exigences de l'emploi; à une
époque où on écoute plus volontiers le discours
quantitatif qui fait «s'incliner les gouvernements», nous dit
Julien Gracq, que ceux qui défendent la relation éminemment
privilégiée entre maîtres et élèves, et le
fait qu'il faudrait la privilégier encore bien davantage; à une
époque où on invite l'Etat à se décharger de ses
responsabilités sur les échelons locaux.
Le mémoire de la FAC a été rédigé
dans un esprit prospectif. Nous prions les membres de cette commission de le
recevoir comme la contribution de celles et ceux qui oeuvrent au coeur de
l'enseignement collégial et qui croient que le développement
social, économique et culturel du Québec passe d'abord par son
système d'éducation, d'où notre insistance pour qu'on en
augmente plus que jamais les moyens et la puissance de rayonnement.
Le Président (M. Bradet): Merci, M. le président.
Mme la ministre.
Mme Robillard: Merci, M. le Président. Je veux saluer les
membres de la Fédération autonome du collégial et leur
dire combien j'apprécie leur esprit d'ouverture pour participer à
cette consultation particulière. Et je me dois, M. Duffy, de vous dire,
en toute honnêteté, que j'ai fortement apprécié la
qualité de votre mémoire. On s'aperçoit qu'il y a eu des
analyses réfléchies auprès de vos membres et que vous
arrivez avec des suggestions en mesurant, justement, les impacts sur l'ensemble
du renouveau collégial qui est là sur la table. Malheureusement,
on a seulement 20 minutes pour échanger. J'ai l'impression que j'aurais
besoin d'un peu plus de temps avec vous pour aller plus loin dans des
recommandations même très pointues que vous nous faites, mais
essayons d'aborder quelques éléments ensemble.
D'abord, vous nous parlez, dans votre premier chapitre, de la
participation des enseignantes et des enseignants à ce renouveau
collégial, et j'en suis. Vous abordez, à ce moment-là,
différents éléments. Le premier, c'est les lieux de
représentation pour les enseignants et les enseignantes. Et, M. Duffy,
dans une de vos recommandations, vous dites que vous êtes favorables
à l'implantation de l'approche programme et que vous souhaitez un lieu
de concertation interdisciplinaire. Est-ce que vous êtes allés
plus loin dans cette réflexion-là?
Le Président (M. Bradet): M. Duffy.
M. Duffy: Bien, on pense que, si la commission des études,
effectivement, prend effet, elle pourrait être ce lieu d'échanges
interdisciplinaires, mais, ce faisant, on pense aussi qu'elle nécessite
absolument la participation de ceux-là et celles-là mêmes
qui donnent l'enseignement, si vous voulez, aux jeunes. Et, dans ce qu'on a pu
lire à propos de la composition de cette commission, la part qui est
réservée aux professeurs, sans qu'elle soit définie ou
délimitée en termes numériques, ne nous apparaît
pas, d'emblée, primordiale ou, comment dire, devant,
éventuellement, peser plus lourd sur la décision
pédagogique qui s'ensuivra. Bon.
Ce lieu d'échanges interdisciplinaires, d'ailleurs, c'est un
petit peu en lien avec ce qu'on dit plus loin du curriculum. On ne voyait pas
nécessairement la nécessité du deuxième bloc. On
pense que les départements bien représentés par leurs
porte-parole peuvent faire ce travail de concertation interdisciplinaire dans
ce lieu qui s'appellerait la commission des études, mais on pense qu'on
doit être à la fois prépondérants et qu'on doit,
pour garder ce qui fait notre autonomie professionnelle, garder cette
espèce d'atout qui fait qu'on a la décision, je dirais, ultime
sur ce qui est le meilleur pour nos élèves.
Et c'est très central, je pense, dans tous nos appels, si je peux
dire, à cette adhésion ou à cette participation de faire
en sorte qu'on y soit correctement repré- sentés et, je dirais
aussi, solidement écoutés. Je pense que, si on va chercher...
Parce qu'on cherche, aussi, à remettre au plan local des
responsabilités accrues. Je pense que, si on veut que ça marche,
la première condition, c'est d'aller chercher l'adhésion des gens
qui sont là. Et on pense que, nous, notre adhésion, compte tenu
de la pratique qu'on a vécue depuis 25 ans maintenant, nécessite
justement cette espèce d'investissement très riche et très
proche dans la relation maître-élèves. Et c'est là
qu'on trouve notre intérêt et notre motivation. C'est ce premier
cercle-là qui détermine tout le reste. Si ce qui se fait
là n'est pas, d'une certaine manière, de concert avec d'autres,
déterminé par les enseignantes et les enseignants, on a
l'impression qu'on est exclus, au fond, de l'essentiel. Et c'est le sens qu'on
peut donner aux mots «concertation interdisciplinaire» et à
la participation majoritaire qu'on y revendique.
Mme Robillard: Parfait. Donc, vous pensez à la commission
des études, mais avec, comme vous avez dit, une présence
majoritaire des enseignants et des enseignantes au niveau de la commission.
C'est ce que je voulais spécifier.
Quant à la recommandation, toujours dans les lieux de
représentation et vous devez faire référence
à la commission des études aussi du responsable de
programme, où, là, vous spécifiez de façon
très claire que l'enseignant ou l'enseignante soit membre de
l'unité d'accréditation, M. Duffy, est-ce que vous avez
examiné aussi la modalité de fonctionnement, que vous connaissez
sûrement, dans les universités par rapport à la nomination
d'un doyen et ce qui se passe dans son statut le temps qu'il est doyen et,
quand il a terminé son terme, qu'il retourne professeur? Vous, vous ne
faites pas ce choix-là. Pourquoi?
M. Duffy: Bien, on pense que, tout en étant professeur, on
est d'abord responsable, et qu'être responsable de son enseignement ou
d'un programme qui circonscrit son enseignement, ça ne pose pas de
difficultés. On ne voudrait pas qu'il se crée d'autres
réalités décisionnelles ou bureaucratiques; je ne sais pas
trop comment les qualifier, mais, en tout cas, un lieu de décision
intermédiaire entre, à nouveau, les professeurs et les
décisions qui se font au sujet de l'enseignement. On se demande dans
quelle mesure ça serait productif.
Actuellement, nous avons déjà de nos représentants,
que nous élisons en assemblée départementale, qu'on nomme
les coordonnateurs, les coordonnatrices de département, qui font
très bien cet ouvrage de représentation auprès d'autres
instances, des collèges. Ça varie, évidemment, d'un lieu
à l'autre, mais ces gens-là demeurent des professeurs et, que je
sache, on n'a pas eu vraiment à se plaindre ni de la qualité de
leur représentativité jusqu'à présent, ni, non
plus, du travail qu'ils faisaient. Alors, on se dit: Pourquoi ça ne
serait pas, encore là... Et ce serait, je pense, une façon de
reconnaître leur travail. Il y aurait là une forme de
reconnaissance qui serait, je pense, hautement appréciée, si
on
disait, effectivement: Vous êtes vraiment les responsables. Si
c'était confirmé dans le texte qui va définir ce qu'on
appelle la commission des études, je pense qu'on sentirait là
qu'il y a de la considération pour le travail accompli et celui qu'il
restera à accomplir. (12 h 40)
Mme Robillard: Alors, je n'examine pas avec vous la commission
des études, je pense que nous en avons suffisamment parlé. Au
niveau du conseil d'administration, je prends bonne note de vos demandes.
Pour-riez-vous me clarifier la dernière de ces demandes-là,
surtout quand vous me parlez d'un centre d'études collégiales?
J'ai de la difficulté à saisir la dernière de vos
recommandations, quand vous spécifiez, de façon
particulière, au C.A. d'un cégep qui a un centre d'études
collégiales.
M. Duffy: Au fond, c'est que nous avons quelques collèges
qui ont des centres d'études, comme on les appelle, et ces
gens-là aimeraient non pas qu'on ajoute des sièges
nécessairement, mais aimeraient être représentés.
Évidemment, nous, on demande trois sièges afin qu'on nous redonne
le poids que nous avions avant, et ils aimeraient être
représentés à un de ces trois postes-là. C'est
parce que, actuellement, dans les assemblées où ça se
dessine, ces décisions-là, les gens doivent faire en sorte de ne
pas voter pour un de leurs membres pour laisser une place à quelqu'un
d'autre à l'extérieur. Alors, s'il y avait là quelque
chose qui leur était précisé, je pense qu'ils
apprécieraient, eux aussi.
Mme Robillard: Parfait, ça va, M. Duffy. Maintenant,
abordons l'admissibilité au cégep et la question des seuils
d'admission pour que je saisisse bien votre recommandation qui est en haut de
la page 10.
M. Duffy: Oui.
Mme Robillard: Vous dites: On est d'accord avec la hausse des
conditions d'admission, mais vous voulez qu'il y ait un travail, au
ministère de l'Enseignement supérieur et au ministère de
l'Éducation, c'est ce que je comprends, pour que, avant de mettre en
application ces mesures, il y ait des mesures de soutien à
l'apprentissage au niveau du secondaire. Est-ce à dire, de façon
très précise, que vous êtes en accord avec les seuils
d'admission qui sont précisés, ce qui veut dire la
réussite des cours obligatoires de IV et de V, mais, vous dites,
à une condition: qu'il y ait des mesures de soutien au niveau de
l'Éducation? Est-ce que c'est dans ce sens-là que je dois
comprendre? Pouvez-vous m'expliciter?
M. Duffy: Vous avez partiellement bien compris notre point de
vue, mais, évidemment, la question est complexe et elle arrive à
un moment donné d'un parcours ou d'un cursus qui est celui du
secondaire, dont on sait, par ailleurs, que bien des gens aimeraient discuter
plus en profondeur, parce qu'on a peut-être détecté,
là aussi, des difficultés.
Tout le monde est d'accord pour avoir des élèves qui
arrivent à son ordre d'enseignement mieux préparés. Quand
les gens de l'université viennent ici, ils nous jettent facilement la
pierre en disant: On commence à s'impatienter de ceci, de cela, de la
qualité de la langue. Je ne dis pas que nous émettons les
mêmes réserves à propos de nos collègues du
secondaire. Au contraire, nous comprenons tout à fait bien leur
situation. On aimerait, au fond, que ça ne s'applique pas de
façon absolue et qu'il y ait peut-être un rehaussement graduel des
seuils, qui ne freinerait pas l'accès. Je pense que, actuellement, il se
fait peut-être des études où on essaie de déterminer
quel est le bagage suffisant ou nécessaire pour qu'un
élève puisse réussir des études collégiales
ou puisse, à tout le moins, y entrer. Je ne sache pas que ces
études-là soient tout à fait terminées. Je pense
que ça demanderait aussi un débat public assez large sur cette
question-là.
On sait que les techniques humaines, par exemple, dans les
collèges ne demandent pas aux jeunes d'avoir réussi les
mathématiques V, par exemple. Ils font très bien dans ces
techniques de loisir ou techniques humaines à d'autres niveaux sans
avoir nécessairement cette compétence en mathématiques V.
Alors, de refuser ces gens-là parce que... Je pense que ce sont des
choses qui sont très discutables.
Alors, il y a un double problème, là. Il y a un
problème, d'abord, de réussite au secondaire, qu'on
connaît, qui est assez public aussi comme débat, mais il y a aussi
le problème de hausser la qualité des exigences, tout en essayant
de maintenir les seuils de réussite et de les augmenter. On aimerait
bien que tout ça ait lieu, mais on n'aimerait surtout pas que ça
empêche des gens d'entrer au collège à cause d'une
règle un peu arbitraire, un peu brutalement appliquée et
imposée. Et cette période de transition pourrait prendre
facilement cinq ans pour donner la chance à toute une cohorte de
s'ajuster à de nouveaux seuils qu'on veut leur faire franchir
éventuellement..
Mme Robillard: Parfait. Alors, vous permettez, M. le
Président?
Le Président (M. Bradet): Oui.
Mme Robillard: La formation générale. Alors,
là, vous nous arrivez avec une nouvelle proposition de formation
générale et, de fait, vous nous avez référés
à votre tableau de la page 33, et avec raison, bien que vous
l'explicitiez dans votre document. Par ailleurs, je pense bien que, au niveau
de la proposition de la FAC, à la page 33, dans les cours
complémentaires, je devrais lire non pas «langage
mathématique», mais «mathématiques et
informatique»?
M. Duffy: C'est cela.
Mme Robillard: C'est bien ça, n'est-ce pas? Alors,
écoutez, la nouvelle proposition que vous mettez
sur la table, tant au niveau du nombre d'heures de cours qu'au niveau de
la pondération, suppose, si j'ai bien saisi, qu'il n'y a pas, dans la
formation générale, de cours adaptés à des
programmes. C'est d'abord un choix que vous faites quand vous
redéfinissez l'ensemble. Vous l'affirmez à plusieurs
égards, d'ailleurs. Au point de départ, au niveau de la langue
d'enseignement, au niveau de la langue seconde, vous n'êtes pas en accord
avec le fait d'avoir, dans la formation générale, une partie
adaptée à un programme ou, peut-être plus justement,
à une famille de programmes. Et ça, c'est fondamental. Je veux
comprendre pourquoi vous vous êtes positionnés comme
ça.
M. Duffy: Bien, c'est peut-être d'abord l'étiquette
qui nous a accrochés. Vous savez, parfois on est fragiles sur les
appellations, les mots. Cette formation générale
particulière nous semblait un petit peu antinomique dans les termes.
Comment être à la fois général et particulier? Mais,
cela dit, on pense que la formation générale doit rester
absolument source de polyvalence et source aussi d'apprentissages fondamentaux.
Ça rejoint nos préoccupations sur la formation fondamentale qui
consiste à donner aux élèves les habiletés
supérieures et génériques: l'analyse, le raisonnement,
l'expression correcte de leur pensée, etc. On se dit que* de toute
façon, comme nous sommes favorables à l'approche programme, il a
lieu, à partir de ces lieux de concertation, que les professeurs,
effectivement, ajustent leur enseignement. Je pense que c'est la qualité
d'un bon enseignant que d'ajuster son enseignement aux gens qu'il a devant lui.
Mais de l'instaurer d'emblée ou d'entrée de jeu...
J'essaie de voir, par exemple, littérature et langue en
électrotechnique, s'il y a des ouvrages qui nous viennent
spontanément à l'esprit qui conviendraient davantage. Même
si on élargit ça à la famille, ce n'est pas si
évident. Mais je pense que, tout naturellement, les gens qui donnent ces
disciplines-là, sachant à qui ils s'adressent, vont, bien
sûr, essayer d'intéresser d'abord, de faire aimer ce qu'ils font
et, par conséquent, d'impliquer les élèves dans leur
approche et dans leur définition. Alors, pourquoi la bloquer, là,
précisément, comme un bloc à part?
Il y avait aussi la possibilité que, si elle est trop
spécialisée, cette formation générale, quand
quelqu'un change de programme ou de collège, il doive peut-être la
refaire aussi. Elle ne conviendrait peut-être plus tout à fait,
à ce moment-là. Et vous comprenez aussi, avec la façon
dont on articule les trois cours, et autant de philo que de français,
que ça supposerait qu'il y aurait peut-être une session où
il y aurait une discipline de moins qui s'enseignerait. S'il y en a trois sur
quatre, par exemple, ça pourrait se terminer par la philosophie et
commencer par le français, les 3-2-3, donner une bonne base et faire en
sorte que tous les élèves, à ce moment-là,
bénéficient presque d'une session d'accueil et
d'intégration, ayant une discipline de moins sur laquelle se concentrer
et y attachant davantage d'importance parce que d'une pondération
accrue. Je pense que ça pourrait être un stimulant assez puissant,
et c'est une façon d'y arriver que d'enlever un peu, peut-être,
ces unités qui étaient dans le bloc 2.
Le Président (M. Bradet): Alors, merci, M. le
président. M. le député de Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: Je voudrais revenir sur quelques sujets, d'abord sur
la place et la participation des enseignants au sein des diverses instances qui
existent déjà, mais qui seraient largement modifiées par
le projet de loi s'il était adopté, entre autres, la commission
des études et le conseil d'administration. Vous vous objectez à
ce que les enseignants qui siégeraient sur ces instances soient
nommés par le conseil d'administration. (12 h 50)
Je vous signale je pense que c'est important de le signaler et de
le faire remarquer à la ministre qu'il y a une sorte
d'incohérence et de contradiction dans les articles 7 et les articles 4
du projet de loi 82 en ce qui a trait à la composition de la commission
des études et du conseil d'administration. Pour les étudiants, on
stipule très clairement que les étudiants qui vont siéger
sur ces 2 instances seront désignés en vertu de l'article 32 de
la Loi sur l'accréditation et le financement des associations
d'élèves et d'étudiants, c'est-à-dire:
«L'association ou le regroupement d'associations d'élèves
ou d'étudiants accrédité peut, seul, nommer les
élèves ou étudiants qui, en vertu d'une loi, d'un
règlement [...] sont appelés à siéger», etc.
C'est l'association étudiante accréditée qui, en
assemblée générale, nomme ses membres qui vont participer
à la commission des études et au conseil d'administration. Mais
les organisations syndicales, là, c'est danger, ça. Ça,
là, ce n'est pas bon. C'est inquiétant, ça. Il y a une
méfiance, là, évidente à l'égard des
organisations syndicales, puisqu'on ne leur accorde pas le même droit
qu'aux associations étudiantes.
Un peu paradoxal, vous l'admettrez, et je comprends j'aimerais
vous entendre là-dessus pourquoi vous décelez une
méfiance pour le moins évidente, là, à
l'égard des organisations syndicales, dans les établissements
collégiaux, qui, actuellement, désignent, en assemblée
générale, ceux ou celles qui vont participer à la
commission pédagogique ou au conseil d'administration du
cégep.
M. Duffy: Bien, c'est pour ça qu'on fait la
recommandation, effectivement, d'y être de plein droit et de plein
gré aussi. On n'a pas très bien compris, à partir du texte
de loi, comment la nomination, éventuellement, pourrait se faire. On
parle d'une assemblée large qui réunit peut-être même
en même temps tous les personnels, là. Ce n'est pas,
habituellement, comme ça que les choses se passent. Chacun est assez
scrupuleux de sa juridiction et de ses prérogatives.
Alors, si, évidemment, on retrouve des sièges qu'on a
déjà, à savoir trois actuellement, si jamais on ramenait
le nombre à ce qu'il était auparavant, on aime-
rait bien, effectivement, pouvoir nommer nous-mêmes, dans nos
assemblées générales, ceux qui vont nous
représenter. Parce que le conseil d'administration, bien sûr,
c'est un lieu de gestion, mais c'est aussi un lieu de conciliation des points
de vue. On n'est quand même pas dans une fabrique, là. On est dans
une maison d'éducation, d'enseignement. Alors, on pense que ça
fait partie de la délégation représentative tout à
fait normale que de revendiquer cette forme de nomination pour nos
collègues. Encore là, jusqu'à présent, même
si parfois ceux ou celles qui nous représentent font des critiques
pointues, avisées, de certaines pratiques ou de certaines gestions, je
pense que c'est toujours dans la perspective, finalement, d'améliorer
les choses. Ils sont souvent bien renseignés sur ce qui se vit dans les
collèges. Qu'on les restreigne à la portion congrue, bien, c'est
un peu ce qu'on appelait cette méfiance.
M. Brassard: D'autre part, pour ce qui est de la commission des
études, vous revendiquez une majorité, comme c'est le cas
présentement au sein des commissions pédagogiques. On parle
aussi, dans le projet de loi actuel, des responsables de programmes
d'études. Bon, c'est une fonction qui, pour le moment, en tout cas, en
vertu de nos lois, n'existe pas. C'est tout à fait nouveau.
Évidemment, c'est dans la perspective de la mise en place de ce qu'on
appelle l'approche programme, où l'on peut présumer ou
déduire qu'il y a aura un lieu de concertation par programme et un
responsable de programme d'études, ce qui n'élimine pas les
départements et les responsables de départements. Ce que vous
nous suggérez ou ce que vous souhaitez, c'est que ce responsable de
programme d'études soit désigné de la même
façon que les chefs de départements actuellement. Est-ce que je
vous comprends bien?
M. Duffy: En fait, il n'est pas exclu que ça soit aussi le
responsable de département qui soit le responsable de programme. Il y a
des collèges où, dans un département, il y a
déjà presque un programme. Je pense...
M. Brassard: Souvent en formation technique, par exemple.
M. Duffy: Oui. Et, en sciences humaines, bien, c'est tout le
programme des sciences humaines qui regroupe aussi plusieurs disciplines. Il y
a là une responsable de département, une coordonnatrice qui fait
cette fonction.
M. Brassard: Est-ce que vous êtes d'accord pour que les
membres nommés ou les membres constituant la commission des
études soient choisis parmi les responsables des programmes
d'études et parmi les enseignants? Pour ce qui est des enseignants,
là, je connais votre position. Ça doit être
l'assemblée générale syndicale qui les désigne.
Mais, là, il y a aussi la présence de responsables de programmes
d'études. Actuellement, dans la commission pédagogique, ce sont
des enseignants seulement. Ce n'est pas automatique, mais il peut arriver qu'il
y ait des chefs de département parmi ces enseignants-là. C'est
par inadvertance, si vous me permettez l'expression. Là, ce n'est pas ce
qu'on suggère. C'est qu'il faudra qu'il y ait des responsables de
programmes d'études et des enseignants.
M. Duffy: M. Desmarais va apporter un complément, si vous
permettez, M. le Président.
Le Président (M. Bradet): M. Desmarais.
M. Desmarais (Jean-Guy): Alors, dans la mesure où les
responsables de programmes sont des enseignants, comme on le souhaite, quand on
parle de la majorité, évidemment, on compte ces gens-là.
L'ensemble des personnes, enseignants à titre d'enseignants et
enseignants à titre de responsables de programmes, constituerait, selon
nous, la majorité. Évidemment, on...
M. Brassard: Désignés par l'assemblée
générale du syndicat.
M. Desmarais: Tout à fait.
M. Brassard: O.K. Pour ce qui est du D.E.S., tout à
l'heure vous avez eu un échange; je suis parfaitement d'accord et, sur
ça, vous rejoignez plusieurs intervenants qui disent que, si on rehausse
les exigences du D.E.S., il faut que ce soit obligatoirement accompagné
de mesures de soutien pour éviter l'hécatombe ou la plus large
exclusion. Mais est-ce que vous êtes aussi d'accord pour que ces
exigences-là apparaissent au D.E.S., au diplôme d'études
secondaires, et qu'on n'ait pas un diplôme d'études secondaires
accompagné de seuils d'admission en plus pour accéder au
collège, que ça apparaisse, que ce soit inclus,
intégré au diplôme d'études secondaires?
M. Duffy: Dans le cas où ça n'apparaîtrait
pas, j'imagine, si je pousse votre raisonnement, que ces gens-là ne
pourraient pas accéder au collège. C'est ça? Ça
ferait un D.E.S. à deux voies?
M. Brassard: Bien oui.
M. Duffy: Évidemment, on est contre le principe de cela.
Ça nous semble tout logique que, après avoir été
promu, après un ordre d'enseignement, on puisse, ma foi, accéder
au suivant. Il y a déjà des passerelles, je pense, plus
facilitantes au secteur professionnel, et le D.E.C. modulaire peut aussi
faciliter ce courant-là. Ce serait très étonnant que ceux
qui ne sont pas au professionnel et qui n'auraient pas, non plus,
accumulé ces obligations de réussite dans certains cours ne se
retrouvent nulle part. Je pense que c'est ça la pierre d'achoppement
dans tout ça. Qu'on hausse, par la base, des exigences et qu'on donne
à ces gens-là les moyens de
les... C'est un peu comme si on disait à un athlète
olympique que, tout à coup, il faut qu'il saute 10 cm de plus pour
être admis aux Jeux, alors qu'il s'est entraîné toujours en
fonction de cela. Je pense qu'il faut lui donner les moyens de,
éventuellement, faire le saut.
Alors, c'est ça qui nous inquiète, qu'il y ait un vide,
que vous appelez hécatombe, enfin, qu'il y ait un manque à gagner
pour un grand nombre d'entre eux.
M. Brassard: En matière d'évaluation, vous faites
des propositions substantielles pour modifier les choses. J'aimerais ça
qu'on puisse en parler quelque peu. D'abord, sur la nomination des
commissaires, vous souhaitez que ce soit précédé d'une
consultation des principaux acteurs et que le nombre, aussi, soit plus
élevé que trois. (13 heures)
M. Duffy: Que ce soit précédé d'une
consultation large, je pense que ça ne ferait que rehausser ou augmenter
la crédibilité des personnes qui pourraient être retenues
ensuite si elles font déjà consensus dans tous ces
milieux-là. Je pense que leur prestige serait d'autant plus grand et
qu'on aurait davantage la conviction que, cette commission-là, elle est
là aussi au service de tous ces intervenants. C'est une question de
crédibilité, finalement. Même chose, peut-être, pour
le nombre. On ne voudrait pas, non plus, que ça devienne ce que d'aucuns
ont qualifié déjà d'appareil qui prend des proportions...
Ce n'est pas cela, non plus, sauf que, trois, ça nous apparaît peu
pour cet ensemble de fonctions que, nous, on souhaiterait voir accomplir par
une vraie commission d'évaluation qui prendrait en compte aussi les
besoins éventuellement et l'amélioration du réseau.
M. Brassard: C'est ça que vous proposez également.
C'est que vous élargissez sa mission, en particulier, évidemment,
en stipulant que seraient désormais objet d'évaluation les
orientations et la gestion du ministère de l'Enseignement
supérieur et de la Science. Ça a été demandé
également par plusieurs intervenants. C'est un peu anormal que les
grands encadrements, les politiques, les règlements, les directives
soient soustraits à l'évaluation. Donc, que ce soit
également objet d'évaluation, mais ça, c'est un peu
nouveau, je pense que vous êtes le premier organisme à recommander
cela que les besoins soient également évalués:
financement, perfectionnement, conditions d'exercice de la profession
enseignante, service à la société. Pourquoi?
M. Duffy: La question d'évaluation dans notre
Fédération chemine, je dirais, depuis deux ans. On a fait, je
pense, des progrès considérables. Au départ, c'est un mot
qui en effraie plusieurs, quand il n'a qu'une acception, c'est-à-dire
celle de la sanction. On a développé autour de ce
concept-là toutes sortes d'autres nuances, en particulier, qui gravitent
autour de la conception de la formation, c'est-à-dire de
l'évaluation formative, celle qui permet qu'on s'améliore
après une évaluation raisonnable et rationnelle des besoins. On
essaie de ne pas isoler, par exemple, un objectif d'apprentissage du reste de
son contexte. Ça doit prendre en compte les réalités
d'encadrement, les clientèles. Ça doit prendre en compte aussi
les politiques du collège. Il ne faut pas que les gens se sentent tout
à coup piégés, comme étant cités à
procès, parce qu'ils enseignent dans une institution d'État.
Il y avait des choses, je pense, dans cette loi... On n'a pas
insisté, mais, enfin, cette possibilité d'entrer, par exemple,
moyennant un préavis raisonnable. Il y a des gens qui pensent même
qu'ils vont venir voir dans nos cours comment on enseigne Sartre ou, enfin, je
ne sais pas, moi. On se dit: Oui, bon, d'accord, ils sont invités, c'est
public, mais est-ce que c'est ça qu'on désire?
Alors, on souhaiterait que toute la question du financement, du
perfectionnement aussi, qui est une problématique sérieuse, je
pense, dans l'enseignement collégial et pas que pour les gens du secteur
professionnel, soit prise en compte par cette Commission-là. Si on veut
atteindre les objectifs supérieurs, si on veut faire en sorte que les
jeunes aient davantage de diplômes et réussissent dans des
délais encore plus courts, je pense que ça suppose que les
méthodes s'améliorent, et que les gens puissent se maintenir en
perfectionnement un peu continu dans l'exercice de leur métier.
Alors, c'est un petit peu tout ça, les besoins dont on parle.
Évaluer quelqu'un et ne pas lui donner les moyens, au fond, de se
refaire ou de se remettre, c'est très délicat comme situation. On
trouve que c'est même un peu antidémocratique. Le sens profond de
l'évaluation, c'est de donner à tout le monde la chance, au fond,
de se reprendre; sinon, ce n'est plus de l'évaluation, c'est un peu de
la sanction ou de l'exclusion.
M. Brassard: De corriger ses lacunes.
M. Duffy: Alors, c'est vrai pour les politiques d'apprentissage,
pour les programmes. On se dit: Pourquoi ce ne serait pas vrai pour tout le
réseau, les composantes?
M. Brassard: D'autre part, cependant, vous êtes en
désaccord avec le pouvoir qu'on pourrait accorder à cette
Commission de permettre à un établissement de décerner les
diplômes. Vous êtes en désaccord avec cela. Est-ce que vous
pourriez vous en expliquer?
M. Duffy: Bien, c'est que nous avons la position tout à
fait opposée de M. Lauzière, après avoir consulté
nos membres.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Duffy: Nous trouvons que, tout à coup, si des
collèges se mettent à décerner leurs diplômes parce
qu'ils auront montré patte blanche à cette Commission-là,
bon, ça va créer quoi, à moyen terme, à court
terme, sinon accentuer ce qu'on déplore déjà, ce jeu
des
concurrences, des citations aux bilans positifs, pour ne pas aller plus
loin?
M. Brassard: Deux classes de cégeps, les cégeps qui
décernent les diplômes, puis les autres.
M. Duffy: II pourrait y avoir les affranchis et ceux qui ne le
sont pas encore, ceux qui ne seront pas assez forts en évaluation.
Enfin, on trouve que ce n'est peut-être pas la façon, non plus, de
faire adhérer tout le monde à ces mécaniques et à
ces processus-là. On pense que les collèges sont là pour
répondre de façon démocratique aux besoins de la
population, et il y a déjà des collèges de premier,
deuxième, troisième tour. Il y a des collèges qui
sélectionnent très vivement leur clientèle, et ça,
ça nous agace aussi, un peu profondément. Alors, on trouve que le
diplôme serait comme un ajout à ce qui se fait déjà,
un petit peu, dans ce sens-là.
M. Brassard: J'examinais votre proposition en matière de
formation générale. Vous supprimez le bloc 2 qui doit être
constitué de cours adaptés au programme. Je trouve que vous avez
une bonne réponse permettez-moi de le dire à ce
sujet-là quand vous dites: Pas besoin d'inscrire dans le programme
pédagogique que l'enseignant doit adapter son enseignement au groupe
qu'il a devant lui. Je pense que c'est inhérent à un bon
pédagogue. Un bon pédagogue se doit de le faire. S'il ne le fait
pas, il ne le fera probablement pas plus, même si on l'écrit dans
le régime pédagogique. C'est parce qu'il n'est pas bon. Ce que je
trouve intéressant, remarquez, dans votre proposition, c'est les
changements de pondération, de sorte que le nombre d'heures est
augmenté, mais en permettant aux étudiants de faire davantage de
travaux. Cependant, je comprends bien que votre préférence en
matière de philosophie, par exemple, c'est le maintien des quatre cours
actuels.
M. Duffy: Oui, en accord avec ce que la coordination
disciplinaire de philosophie défend, et je pense que vous pourrez
l'entendre sous peu sur ces questions-là. En admettant qu'on refuse de
ramener ce quatrième cours, qui fait l'objet de bien des débats,
on se disait qu'on pourrait toujours, à tout le moins,
récupérer les 12 heures de cours, ce qu'ils donnent actuellement.
Ça fait 3 cours, mais 12 heures. Vous voyez? Ça fait un
encadrement supérieur, aussi, pour ces élèves-là.
Au fond, ce n'est pas juste un jeu mathématique; je pense qu'il y a des
préoccupations pédagogiques derrière cette
formule-là. Je pense que tout le monde est conscient que, si on enseigne
à moins d'élèves, on peut mieux les encadrer,
particulièrement dans des disciplines qui ne sont pas faciles à
donner.
C'est quelque chose qui commence à cheminer beaucoup dans les
cours de formation générale, la pondération. On a
envié longuement nos collègues des mathématiques qui
avaient pu, eux, bénéficier de cette pondération 3-2 et
qui se sont gardé un nombre d'élèves relativement
décent, si je puis dire, alors que d'autres montaient dans les 180, 200.
Alors, évidemment, ce jeu-là permet de récupérer
bien des choses et surtout de préserver les 12 heures qui pourraient
s'articuler, sans doute, compte tenu du cursus qu'en philosophie on
défend, un peu autrement, mais quand même globalement et
totalement.
Quant aux heures qui suivent habituellement les pondérations, le
travail fait à la maison, c'est bien relatif, il faut en convenir.
Ça ne mesure pas, non plus, nécessairement le travail qui se fait
à l'extérieur du cours. Ça dépend beaucoup des
circonstances, des semaines, des moments de la session. Alors, le nombre
d'unités, tel qu'on le formule, nous apparaît pertinent, enfin,
intéressant pédagogiquement, à bien des égards. (13
h 10)
Dans les faits, je pense que, dans les cours généraux, il
s'est créé depuis quelques années une pratique,
c'est-à-dire une manière d'atelier à même les cours.
On conçoit mal, à moins d'être superperformant,
d'intéresser un jeune, je ne sais pas, de 18, 19 ans, pendant 3 heures
avec un cours magistral, et 15 fois pendant une session.
M. Brassard: II faut être très, très bon.
M. Duffy: Ça demande une certaine présence, si vous
me permettez l'expression. Alors, les gens se sont fait des pratiques qui font
qu'il y a des ateliers qui sont créés dans les cours. Au fond,
ça ne ferait que confirmer la pratique, je pense, qui se vit par la
plupart des enseignants du général.
Le Président (M. Bradet): Alors, M. le
président...
M. Brassard: Oui, juste une petite question...
Le Président (M. Bradet): Oui, rapidement, parce
que...
M. Brassard: ... sur la langue seconde. Vous êtes d'accord
avec la proposition gouvernementale. Hier, la CSN ou la FNEEQ, je ne dirais pas
votre adversaire, l'autre centrale syndicale...
M. Duffy: Ce sont nos collègues.
M. Brassard: Vos collègues, bon. Eux autres se montraient
réticents et suggéraient même juste un cours. Qu'est-ce qui
fait que vous êtes, vous, d'accord? Est-ce que vous ne pensez pas qu'il
faudrait, avant, regarder ce qui se fait au secondaire où même,
semble-t-il, le nombre d'heures prévu au régime
pédagogique n'est pas atteint? Est-ce qu'il n'y a pas un travail
préalable à faire de ce côté-là avant
d'accepter qu'il y ait ces deux cours obligatoires de langue seconde au
collégial?
M. Duffy: Bien, ce qui se fait... Auparavant, c'est sûr que
c'est à revoir, à reconsidérer. Il y a même
l'école élémentaire où, parfois, le cours
d'anglais ne se donne pas, faute d'enseignant ou d'enseignante. Alors, il y a
bien des choses à regarder. D'un autre côté, ne donner
qu'un cours, est-ce que c'est pertinent? On peut en discuter aussi d'un point
de vue pédagogique ou d'apprentissage. Quant aux deux, ma foi, tant
qu'à en donner, donnons-en un peu et donnons-le bien, si possible.
Ça, je n'en doute pas.
Mais on pense que cette proposition de formation générale,
telle qu'on la formule, comporte une bonne part d'enseignement de la langue,
que ce soit de la langue maternelle ou de la langue seconde aussi. Ça
constitue plus de la moitié de ce qu'on appelle la formation
générale fondamentale. On pense que la plupart des apprentissages
passent par là aussi, apprentissages et pratiques éventuellement.
Alors, si c'est à prendre globalement, bon, on serait d'accord. C'est
sûr que, s'il faut introduire autrement un cours de philo, à ce
moment-là, il pourrait y avoir peut-être une discussion. C'est
parce que, ça, c'est des choses qui se mettent à la place
d'autres affaires, hein? Il faut bien se le dire.
M. Brassard: Oui. Moi, c'était surtout sur le
caractère obligatoire que je vous interrogeais.
M. Duffy: Oui.
Le Président (M. Bradet): Alors, M. le président,
notre temps est écoulé. Là-dessus, j'aimerais vous
remercier de l'éclairage que vous avez apporté à nos
travaux. La commission suspend donc ses travaux jusqu'au prochain avis de la
Chambre. Bon dîner à tous.
(Suspension de la séance à 13 h 14)
(Reprise à 16 h 12)
Le Président (M. Gobé): Alors, mesdames et
messieurs, la commission de l'éducation va maintenant entreprendre ses
travaux pour cette séance S'il vous plaît! Merci
pour la séance de l'après-midi. Nous allons commencer par
entendre, maintenant, les représentants de la Fédération
des commissions scolaires du Québec. Par la suite, nous entendrons les
représentants de la Confédération des éducateurs et
éducatrices physiques du Québec.
Document déposé
Avant d'entamer notre travail, j'aimerais mentionner et informer les
membres M. le député de... de la commission que
j'ai reçu une demande de l'Association des étudiantes et
étudiants des 2e et 3e cycles de l'Université McGill, à
l'effet de déposer un petit mémoire qu'ils nous adressent. Je
vous en fais lecture: «Pourriez-vous, s'il vous plaît, distribuer
aux membres de la commission permanente sur l'éducation une copie de la
lettre que notre association a fait parvenir à Mme
Robillard, ministre de l'Enseignement supérieur, concernant la
réforme des cégeps. Nous souhaiterions déposer
formellement ce document afin de contribuer à l'étude du projet
de loi en question. Veuillez recevoir, monsieur, l'expression de mes sentiments
les plus sincères.»
Mme Robillard: Avec plaisir, M. le Président.
Le Président (M. Gobé): Alors, y aurait-il
consentement? Donc, je vais déposer ce document et il va être
numéroté... Madame, quel numéro?
La Secrétaire: 4D.
Le Président (M. Gobé): 4D, et que distribution en
soit faite à tous les membres de la commission.
M. Brassard: M. le Président...
Le Président (M. Gobé): M. le
député...
M. Brassard: ...là-dessus, là, je ne veux pas
prendre beaucoup de temps, mais c'est la troisième demande, là.
Il va falloir, à un moment donné, que la commission en
dispose.
Mme Robillard: Une demande de dépôt de document?
Le Président (M. Gobé): De dépôt de
document.
M. Brassard: Non, non, mais c'est une demande... Ah, je pensais
que...
Le Président (M. Gobé): De dépôt de
document.
M. Brassard: ...c'était la demande de McGill, de...
Le Président (M. Gobé): Non, non, je peux vous
en... C'est l'Association des étudiants...
M. Brassard: Ah, dépôt de document! O.K.,
très bien.
Le Président (M. Gobé): ...des 2e et 3e cycles qui
désire envoyer...
M. Brassard: Mais, pour les deux autres, là, qui avaient
demandé, eux, à comparaître, là, il va falloir qu'on
en dispose.
Le Président (M. Gobé): Que nous fassions une
séance de travail de cette commission pour en discuter, une
séance à huis clos, comme ça se passe naturellement,
là, pour en discuter.
M. Brassard: Très bien.
Le Président (M. Gobé): Alors, s'il y avait une
demande formelle...
M. Brassard: Au comité directeur?
Le Président (M. Gobé): Au comité
directeur.
M. Brassard: C'est les deux leaders, aussi, je pense, qui
sont...
Le Président (M. Gobé): Et des leaders... M.
Brassard: ...bien concernés. Le Président (M.
Gobé): ...c'est ça. M. Brassard: O.K. En tout cas,
on...
Le Président (M. Gobé): C'est ça. Donc, le
comité directeur, la présidente en titre...
M. Brassard: La commission en dispose d'abord. Le
Président (M. Gobé): Voilà, c'est ça. M.
Brassard: Bien.
Le Président (M. Gobé): Alors, sans plus attendre,
nous allons maintenant entendre le premier groupe de cet après-midi, les
représentants de la Fédération des commissions scolaires
du Québec. Je demanderais à la représentante de bien
vouloir se présenter et de présenter aussi les membres qui
l'accompagnent.
Fédération des commissions scolaires du
Québec (FCSQ)
Mme Drouin (Diane): Merci, M. le Président. Alors, je suis
Diane Drouin, présidente de la Fédération des commissions
scolaires. Aujourd'hui, m'accompagnent la première
vice-présidente, Mme Lise Lemieux; le deuxième
vice-président, M. Marc Sabourin; M. Fernand Paradis, qui est le
directeur général; et M. Berthier Dolbec, qui est le conseiller
au dossier, chez nous.
Le Président (M. Gobé): Excusez, madame,
j'étais en conciliabule avec ma secrétaire pour régler un
petit détail. Vous avez donc la parole, vous pouvez commencer.
Mme Drouin: Alors, je vous remercie de nous avoir invités
à venir vous rencontrer aujourd'hui. De prime abord, je dois vous dire
que, comme Fédération des commissions scolaires, nous accueillons
le projet avec satisfaction, parce qu'on constate qu'il y a quand même
plus d'une vingtaine des recommandations que nous vous avions
présentées à l'automne, sur 28, qui ont été
retenues. Alors, ça dénote de l'écoute et on en est bien
contents.
Je veux dire aussi que, pour nous, c'est important qu'il y ait une
réforme de l'enseignement collégial. On appuie également
la recherche d'une meilleure réussite des élèves au niveau
des études collégiales. On souhaite aussi une amélioration
à l'arrivée au cégep. Il y a différentes formules
qui sont présentement sur la table et nous, aujourd'hui, on voudrait
faire ressortir particulièrement les aspects du projet gouvernemental
qui sont en lien avec notre réseau. Toutefois, nous tenons à vous
rappeler que l'essentiel ou ce qui est plus complet se retrouve quand
même dans notre mémoire que nous vous avions
présenté à l'automne et vous pourriez le consulter si
besoin est.
Alors, nous allons traiter aujourd'hui, je disais, de points qui sont
directement reliés à notre réseau. J'aimerais attirer
votre attention sur trois points particuliers, c'est-à-dire l'admission,
l'harmonisation secondaire-collégial et l'implication dans le
milieu.
Au niveau de l'admission des étudiants, c'est peut-être le
point qui nous préoccupe particulièrement. Alors, nous rappelons
au gouvernement du Québec que le cours collégial est un ordre de
transition entre la scolarité obligatoire et la scolarité
universitaire. Nous soutenons que le cours collégial doit prendre appui
sur le cours secondaire. Tout projet de formation nouvelle doit prendre appui
sur la formation antérieure. C'est un principe reconnu par toutes les
écoles de pédagogie. On construit de nouvelles compétences
à partir des compétences acquises auparavant. On intègre
de nouvelles expériences à son répertoire personnel, dans
la mesure où l'on prend conscience de ses expériences
antérieures.
C'est pourquoi la Fédération des commissions scolaires
s'oppose à l'ajout d'exigences supplémentaires reliées
à l'obtention du diplôme d'études secondaires pour
l'admission au collège. Nous soutenons qu'une telle mesure aurait pour
effet d'instituer deux classes de diplômes, ce qui n'est pas souhaitable.
De plus, les règles de sanction des études secondaires ne doivent
pas être définies en fonction de l'accès au
collégial, mais plutôt en fonction d'un profil de fin
d'études secondaires, qui est à redéfinir, bien sûr.
Nous soutenons que plusieurs mesures envisagées dans cette
réforme de l'enseignement collégial vont contribuer à
rehausser le taux de succès des études. Donc, cette mesure
supplémentaire d'exigences nous apparaît inappropriée.
Particulièrement, je voudrais attirer votre attention au fait
que, quand il est question d'arrimage ou d'harmonisation,
particulièrement entre le collège et l'université, dans
l'énoncé même de politique, à la page 22, il nous
semble que les règles du jeu sont un peu différentes. On y lit,
et je cite: «Bien plus que la réussite de cours préalables
nommément pointés, c'est l'atteinte d'objectifs de formation
clairs et définis en concertation qui est garante des continuités
et des articulations.» Alors, on se questionne: Comment pourrions-nous
éviter ce même principe lorsqu'il s'agit d'arrimage et
d'harmonisation entre le secondaire et le collégial?
Toutefois, la Fédération des commissions scolaires
est d'accord pour que soit rehaussé, de façon large et
générale, le diplôme d'études secondaires et pour
que le diplôme d'études secondaires acquière une meilleure
crédibilité et remplace le plus possible les préalables
actuellement exigés. Notre proposition concernant l'accroissement de ces
exigences est la suivante:
Que la comptabilisation des unités pour fins de sanction des
études ne débute qu'en quatrième secondaire;
Que l'élève doive obtenir 75 % de toutes les unités
pour les matières obligatoires et optionnelles suivies en
quatrième et en cinquième secondaire. Les unités de langue
maternelle ou langue d'adoption et de langue seconde de cinquième
secondaire, les unités de mathématiques ou de sciences physiques
en quatrième secondaire devant être réussies.
Nous avons également d'autres propositions qui s'adressent plus
particulièrement à la ministre de l'Éducation, puisqu'on
traite de sanction des études. Vous les avez dans notre mémoire
et je pense qu'on aura peut-être d'autres occasions pour en reparler. (16
h 20)
II serait important, donc, que le diplôme d'études
secondaires continue d'être l'exigence de base pour accéder
à la formation technique au collégial. De plus, il faudra
aménager des passerelles qui permettraient à des
détenteurs d'un diplôme d'études professionnelles
d'accéder à une spécialisation au collégial sans
avoir à refaire les mêmes apprentissages. De même, la
formation professionnelle de la main-d'oeuvre devra faire l'objet d'une
étroite coordination de la part des ministres de l'Éducation et
de l'Enseignement supérieur, de la Main-d'oeuvre, de la
Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle, ainsi que
des autres titulaires de ministères à vocation industrielle ou
économique. Cette coordination est nécessaire pour permettre aux
commissions scolaires et aux cégeps de s'acquitter efficacement de leurs
missions. Cette recherche de cohérence et d'efficacité au sommet
devra permettre d'éviter la duplication et la concurrence.
Enfin, un important effort de promotion et de revalorisation de la
formation professionnelle s'impose au Québec. Nous avons eu, d'ailleurs,
des olympiades, la semaine dernière. Je pense qu'on est sur la bonne
voie et qu'on devrait continuer à encourager cette formule-là et
bien d'autres. Nous souhaitons donc vivement que de nouveaux efforts de
concertation soient initiés à tous les paliers pour
éliminer le plus possible les duplications entre les ordres secondaire
et collégial en formation professionnelle, ainsi que les effets
néfastes d'une compétition entre ces ordres.
Plusieurs dispositions du projet de loi 82 favoriseront le
renouvellement de la formation technique au collégial. Il y a lieu de
s'en réjouir et d'encourager le gouvernement à procéder
à ces nouveaux aménagements. Toutefois, les commissions scolaires
aussi desservent une communauté locale et régionale. Que le
gouvernement s'assure de la participation des collèges et des
commissions scolaires à la planification de la forma- tion
professionnelle de la main-d'oeuvre aux niveaux provincial, régional et
local.
La Fédération recommande également que les
aménagements nouveaux, qui vont faciliter l'exercice de la mission des
collèges dans la formation professionnelle de la main-d'oeuvre, soient
rendus possibles également aux commissions scolaires. Je voudrais vous
citer, entre autres, l'article 9 du projet de loi, qui, je dirais, au niveau du
collégial, lui donne plus de pouvoirs. Je pense que ce serait important
que les commissions scolaires aient la même chose. Ainsi, une commission
scolaire devrait disposer des aménagements législatifs et
réglementaires lui permettant d'établir un centre d'incubateur
industriel dans un domaine répondant aux besoins identifiés par
les organismes responsables du développement industriel et du
développement de la main-d'oeuvre de la région. On agit à
des niveaux différents, mais on est tous les deux partenaires dans un
même milieu.
Pour compléter ce qu'on verrait au niveau de l'harmonisation
secondaire-collégial, nous voulons vous rappeler que le cours
collégial prend appui sur le cours secondaire. La place qu'occupe le
collégial provient en partie de la suppression d'une année
à la durée du cours primaire-secondaire. Il importe de
considérer le bagage de connaissances des étudiants arrivant au
collégial comme le seuil exigible. Une autre recommandation. Pour
éviter aux élèves une orientation prématurée
en troisième secondaire, afin de rencontrer les exigences
éventuelles pour l'admission au collégial, nous recommandons une
révision complète de la liste des préalables pour ne
conserver que ceux pédagogiquement justifiables.
Quant à la formation professionnelle, nous soutenons qu'une
duplication des contenus de formation entre le secondaire et le
collégial existe dans plusieurs secteurs. Une analyse des contenus de
programmes et des tâches à exercer sur le marché du travail
s'impose pour éviter qu'une formation de même niveau soit
dispensée dans les deux ordres. Il y a des expériences
régionales qui ont été faites à partir de la
Classification canadienne descriptive des professions; on pourrait s'en
inspirer.
Sans vouloir répéter les arguments du Conseil
supérieur de l'éducation et ceux du Conseil des collèges,
qu'on nous permette de souligner la nécessité d'un leadership
gouvernemental pour résoudre les problèmes d'harmonisation
auxquels les deux ordres sont confrontés, en formation
générale comme en formation professionnelle.
En termes de conclusion, j'aimerais vous questionner, à savoir si
nous avons suffisamment insisté sur les problèmes d'arrimage
entre les ordres secondaire et collégial. Je ne l'ai pas fait
verbalement, mais je pense que vous avez reçu notre mémoire et je
ne voulais pas le reprendre au complet. Je voudrais vous assurer, Mme la
ministre, que le réseau des commissions scolaires souhaite participer
à la mise en oeuvre de la réforme de l'enseignement
collégial. La clé du succès consiste à y associer
les commissions scolaires et les collèges, car
c'est dans le milieu que s'accomplit la mission de formation de nos
concitoyens. Voilà.
Le Président (M. Gobé): Alors, merci, Mme Drouin.
Nous allons maintenant passer à l'étape suivante, soit celle de
la discussion et du questionnement. Alors, Mme la ministre, vous avez, pour ce
faire, vous ou d'autres membres de notre groupe parlementaire, 20 minutes.
Madame, vous avez la parole.
Mme Robillard: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord
saluer les membres de la Fédération des commissions scolaires
Mme Drouin, la présidente et vous dire combien je suis
heureuse que vous ayez accepté de participer aux travaux de notre
commission, encore une fois, cette fois-ci. Vous le savez, j'étais tout
à fait consciente, en rénovant l'enseignement collégial,
nécessairement, qu'il y aurait un élément de pression en
amont et en aval qui se ferait sur les autres ordres d'enseignement, dont le
secondaire. Vous l'illustrez bien par certaines parties de votre
mémoire. Je vois que, d'entrée de jeu, vous mettez sur la table
toute la question, fort délicate, de l'harmonisation
secondaire-collégial, surtout en formation professionnelle et technique,
mais aussi au niveau de l'enseignement général, pour qu'il y ait
une meilleure continuité.
Alors, Mme Drouin, si vous voulez, on va reprendre ensemble les sujets
que vous nous apportez aujourd'hui, qui vous touchent directement. Je note avec
plaisir votre appui global au renouveau collégial. Vous dites qu'on a
suivi beaucoup de vos recommandations de l'automne dernier, et c'est vrai, mais
vous avez des interrogations sur des points très précis. Alors,
on va profiter de notre période d'échanges pour aller un peu plus
loin. Vous ne serez pas surprise qu'on aborde ensemble les seuils d'admission
au collégial. C'est une question, je pense, qui touche tout le
secondaire et je sais qu'à la Fédération vous avez
réfléchi sur ce sujet. C'est pourquoi vous m'arrivez avec une
suggestion très précise, à la page 8 du document, et je
voudrais très bien la saisir, cette recommandation que vous me faites.
D'abord, la recommandation que vous me faites, ce n'est pas
nécessairement de choisir la voie de préciser les seuils
d'admission au collégial, mais plutôt de m'at-taquer directement
au régime de sanction des études du secondaire. Est-ce que c'est
ça, en partant?
Mme Drouin: C'est exact, parce que notre crainte
là-dessus, c'est qu'on voie s'instaurer deux diplômes
d'études secondaires: un qui serait un diplôme terminal et l'autre
qui serait un diplôme qui permettrait l'accès au collégial.
C'est là notre plus grande crainte parce que, pour nous, il est
important que, comme je le détaille un petit peu plus en page 7, le
collégial s'appuie sur ce qui s'est fait auparavant. Pour nous, le
diplôme d'études secondaires, on le souhaite rehaussé
comparativement à ce qu'il est actuellement, mais que ce soit le seuil
admissible pour permettre l'entrée au collégial. Qu'on ne se
retrouve pas avec deux formules de diplômes.
Mme Robillard: Donc, votre choix porte sur la sanction des
études au niveau du secondaire. Vous dites que vous êtes d'accord
pour rehausser les exigences au niveau de la sanction du diplôme
d'études secondaires; en somme, le problème qu'on traîne
depuis au-delà de 10 ans, depuis qu'on a un nouveau régime
pédagogique au secondaire, depuis 1981, mais qui n'a jamais
été mis en application, n'est-ce pas? Nous sommes toujours en
régime transitoire. Alors, là, vous avez, je pense bien, à
cause du renouveau collégial, accéléré la
réflexion strictement sur la sanction des études, bien qu'il y
ait beaucoup d'autres choses qu'on pourrait regarder dans l'ensemble du
curriculum. Mais, au niveau de la sanction des études, donc, vous me
faites une recommandation à l'effet qu'on considère strictement
les unités, d'abord, de quatrième et de cinquième?
Mme Drouin: Oui.
Mme Robillard: quand vous dites qu'on considère 75 % des
unités obligatoires, j'aimerais ça, pour le
bénéfice des membres de la commission, que vous explicitiez
davantage. qu'est-ce que ça veut dire, ça? combien
d'unités obligatoires?
Mme Drouin: Écoutez, à ce moment-là, je vais
demander à M. Dolbec de vous donner ces détails-là, qui
sont plus techniques.
Le Président (M. Gobé): Allez-y, monsieur.
M. Dolbec (Berthier): alors, comme on le sait, si on se base sur
le régime pédagogique actuel, dans une année scolaire, un
étudiant peut accumuler jusqu'à 36 unités pour fins de
sanction. alors, dans la proposition qui est sur la table, on dit au moins 75
%. un étudiant qui est en secondaire iv devrait avoir acquis au moins 75
% des unités pour l'ensemble des cours qu'il suit en secondaire iv, les
avoir réussies. la même chose en secondaire v. (16 h 30)
Alors, quand on s'est rencontrés ici, au mois de novembre, on
disait que la simple idée que quelqu'un pourrait avoir
échoué la majorité des cours de secondaire V, sauf le
français ou la langue maternelle, et quand même obtenir le
diplôme d'études secondaires, c'était un petit peu
effrayant. Alors, on convient que les unités qui s'accumulent en
secondaire I, II et III, ça a peu de signification lorsque vient le
moment de décider de décerner le diplôme d'études
secondaires. On convient de ça. Deuxièmement, si on
décerne un diplôme d'études secondaires à quelqu'un
qui a réussi au moins 75 % des unités dans tous les cours qu'il a
suivis en secondaire IV et en secondaire V, on a affaire à un
diplôme énormément plus significatif. Puis, on peut, par la
suite, ajouter les mentions incluant la langue maternelle ou langue d'adoption,
la langue seconde de secondaire V, les sciences physiques de secondaire IV ou
les mathématiques de secondaire IV.
Mme Robillard: alors, ce que vous dites, c'est 75 % des
matières obligatoires et optionnelles, n'est-ce pas?
M. Dolbec: Optionnelles.
Mme Drouin: Incluant celles qui sont dûment
mentionnées comme étant réussies.
Mme Robillard: Mais, de façon obligatoire, celles que vous
mentionnez, dans le fond, si je lis bien: la langue comme telle, la langue
maternelle, la langue seconde de cinquième, les unités de
mathématiques ou de sciences physiques.
Mme Drouin: Oui.
Mme Robillard: Le «ou» étant important, ce que
je veux savoir: dans vos scénarios, en calculant le nombre
d'unités, est-ce que quelqu'un, à ce moment-là, pourrait
obtenir son diplôme d'études secondaires sans avoir réussi
le cours de mathématiques de IV et de V?
M. Dolbec: Oui, cette hypothèse-là, c'est ce
qu'elle signifie.
Mme Robillard: Ça veut dire que quelqu'un entre à
l'ordre d'enseignement collégial avec son dernier cours de
mathématiques réussi de secondaire III. C'est possible dans le
scénario?
Mme Drouin: C'est possible dans le scénario, parce qu'il
nous est apparu que les sciences physiques ou les mathématiques
développent une même logique de pensée. Le cours secondaire
étant un cours, je dirais, de formation de base, ce qui est important,
c'est de développer aussi des habiletés. Alors, ces
habiletés-là nous paraissaient se rejoindre autant dans les
sciences physiques que dans les mathématiques pour avoir un
diplôme qui donne accès au collégial. Remarquez bien que,
quand on arrivera au niveau collégial, bien sûr que les profils
pourront être différents. C'est une base qu'on demande de
respecter et, ensuite, dépendamment des différents sujets qui
seront traités au niveau collégial, bien là, bien
sûr, qu'il pourra y avoir des profils différents.
Mme Robillard: Alors, je vous avoue, comme ça, très
simplement et directement que, comme ministre de l'Éducation, j'ai un
peu de difficulté à percevoir qu'un diplôme d'études
secondaires pourrait être obtenu sans aucunes mathématiques, ni en
quatrième ni en cinquième. Je ne sais pas là, il faudrait
qu'on... L'argumentaire n'est pas très, très
développé. Je ne sais pas si vous avez une réflexion et
que vous pourriez m'envoyer des documents. Tout le monde, je pense, et avec
raison... Vous savez très bien les choix qui ont été faits
dans les dernières années: l'apprentissage des langages de base,
qui sont tellement essentiels dans toutes les sphères de la vie, que ce
soit la langue maternelle, la langue seconde ou le langage
mathématique... Je ne parle pas du niveau, mais ce que vous me dites,
très clairement, c'est que quelqu'un pourrait entrer au collégial
et n'avoir qu'un cours de maths de secondaire III. Là, je vois de graves
problèmes parce que, en même temps, il y a une demande très
forte aussi pour qu'on fasse un élagage des préalables, qu'on
arrête que ce soit un autre ordre d'enseignement qui donne des commandes,
je dirais, concernant des préalables très précis. Alors,
là, quant au plan pédagogique, on va voir la
nécessité d'avoir des langages de base, dont celui des
mathématiques. Je vous avoue que j'ai certaines inquiétudes. En
tout cas, c'est ma réponse spontanée, mais, si vous avez une
réflexion plus articulée, plus détaillée, moi,
j'apprécierais lire quelque chose de votre part sur ça.
Mme Drouin: Bien, écoutez, je pense que la situation
actuelle est encore beaucoup plus faible que ce que vous décrivez.
Actuellement, on vit des choses qui sont difficiles. Comme réflexion sur
ce que vous nous demandez, ce qu'il est important de définir, c'est
quelles habiletés de mathématiques sont nécessaires pour
entreprendre des études collégiales. Je pense que c'est la
question de fond. À partir de ça, on regarde à travers les
programmes, parce qu'on peut avoir des gens qui sont très doués
pour les arts, des gens qui sont très doués en traduction, qui
auront, je dirais, certaines habiletés, certaine logique de
pensée qu'ils auront développées à travers la
physique ou les mathématiques, qui pourront entreprendre des
études jusqu'à l'université aussi, sans avoir
nécessairement les mathématiques de secondaire V, telles qu'on
les connaît actuellement. Alors, c'est un petit peu ça qui nous a
amenés à vous présenter cette formule-là.
Quand vous parlez de préalables, je vous disais tout à
l'heure que les profils pourront être différents selon les choix
des étudiants au collégial. On vous a bien dit dans notre
mémoire que, pour nous, on était d'accord avec certains
préalables, mais qui étaient péda-gogiquement
justifiables. On ne veut pas de préalables mis sur la table, comme on en
a connu et comme on en a encore, qui sont là permettez-moi
l'expression pour contingenter tout simplement. Mais, si on nous dit
que, dans telle matière au collégial, on a besoin de tels
préalables parce que l'étudiant aura à poursuivre,
à ce moment-là, on accepte les préalables, mais pas des
préalables pour tasser des gens parce que, tout simplement, on veut
respecter certaines balises au collégial. Je pense que,
là-dessus, c'est peut-être les éléments de
réflexion que je peux vous laisser.
Mme Robillard: Alors, parfait. Si jamais vous avez des textes
supplémentaires à la Fédération, moi,
j'apprécierais les recevoir, l'argumentation sous-jacente qui vous a
amenés, dans le fond, à choisir ce scénario-là.
Vous abordez aussi toute la question de l'harmonisation
secondaire-collégial, et vous nous donnez un
exemple, Mme Drouin, qui s'est vécu dans votre région, je
pense bien, MauricieBois-Francs Drummond, en concluant que certains
programmes du collégial sont injustifiables et qu'ils devraient
être au secondaire. J'imagine que vos amis du collégial pourraient
nous faire la démonstration inverse, que certains programmes du
secondaire devraient être au collégial. Comment la
Fédération voit cette opération? Parce que, la
dernière fois, vous m'en avez parlé aussi. Vous l'avez vu dans le
renouveau collégial. Oui, il faut absolument agir sur tout ce
domaine-là. Mais, moi, j'aimerais ça voir si la
Fédération a réfléchi au processus et comment elle
peut s'impliquer dans ce processus d'harmonisation de la formation
secondaire-collégial, avec, naturellement, vos vis-à-vis de la
Fédération des cégeps.
Mme Drouin: Je pense qu'on n'y arrivera pas autrement que par la
concertation. Bon, on accorde le leadership au gouvernement. Bien sûr,
c'est à lui d'établir les grandes orientations, mais il faudra
que les commissions scolaires et les collèges soient associés
dans cette démarche-là. Bien sûr qu'il y a des documents
qui existent. On a l'habitude de dire qu'au secondaire on forme des ouvriers
certifiés ou des ouvriers spécialisés; c'est une
formulation qui est utilisée. Il y a quand même l'étude
à laquelle on fait référence. C'est qu'il y a des
critères d'établis sur un pointage, par exemple, de 1 à
10, en disant: Quels sont les éléments dont on a besoin? Telle
profession demande quoi comme habiletés, demande quoi comme exigences?
À partir de ça, on peut dire que telle formation relève du
secondaire et que telle autre pourrait relever du collégial. Bon, comme
je disais, au secondaire, ça peut être ce qu'on appelle des
ouvriers certifiés, alors qu'au collégial on utilise plutôt
le terme «technicien».
Des exemples quand on parle de duplication. Au niveau de la bureautique,
c'est peut-être là qu'on en retrouve le plus. Est-ce que, le
traitement de texte, ça s'enseigne au collégial, au secondaire ou
à l'université? Certaines universités accordent des
crédits pour des cours de traitement de textes. Alors, je pense que
c'est là-dessus qu'on voudrait qu'il y ait un ménage qui soit
fait. Je ne sais pas, moi, est-ce qu'une formation d'agent de
sécurité, ça relève du collégial ou si
ça ne relèverait pas du secondaire, si on compare à
d'autres professions ou à d'autres métiers qui sont
exercés? (16 h 40)
Alors, c'est tout ça qui, vraiment, actuellement, nous cause
problème, parce que, au lieu d'agir en complémentarité,
souvent, on agit en concurrence et on est dans les mêmes milieux. C'est
difficile à vivre, c'est difficile à comprendre pour la
population et c'est difficile à comprendre pour les employeurs. De ce
côté-là, il nous apparaît qu'il y a peut-être
un grand ménage à faire et on souhaite y participer. Bien
sûr que je pense que c'est important que vous vous associiez les
collèges et les commissions scolaires pour essayer de déterminer
ces jonctions-là.
Mme Robillard: Alors, comptez sur nous pour le faire, Mme
Drouin.
Mme Drouin: En nous y associant?
Mme Robillard: Les deux ministères sont déjà
à l'oeuvre pour établir un plan d'action, en y associant
nécessairement les commissions scolaires et les cégeps. Nous
allons y procéder dans l'année qui vient.
Mme Drouin: D'accord.
Mme Robillard: Concernant justement cette préoccupation au
niveau de la formation technique, Mme Drouin, vous nous suggérez,
à la page 10, d'aménager des passerelles entre le diplôme
d'études professionnelles et la formation technique du collégial.
Est-ce que, dans le renouveau collégial, tel que c'est décrit au
niveau des modules, vous avez étudié ça de près?
Est-ce que c'est une formule qui vous agrée, qui permet justement cette
passerelle?
Mme Drouin: M. Dolbec l'a étudié plus
profondément.
M. Dolbec: Effectivement, je pense que cette approche d'une
sanction par modules favoriserait grandement l'arrimage entre la formation
professionnelle au secondaire et la formation technique au
collégial.
Le Président (M. Gobé): C'est tout, Mme la
députée?
Mme Robillard: Pour le moment.
Le Président (M. Gobé): Alors, il vous reste quatre
minutes et quelques secondes. Mais, étant donné que le groupe
d'en face n'a pas pris tout son temps, il peut être, selon les traditions
et les règlements, réparti entre les membres de la commission
pour dialoguer. Donc, on pourra revenir un peu plus tard.
M. le député de Lac-Saint-Jean, c'est maintenant votre
tour, pour une période...
M. Brassard: Oui.
Le Président (M. Gobé): ...d'un peu plus de 20
minutes.
M. Brassard: Oui, bien, je ne prendrai...
Le Président (M. Gobé): Mais vous n'êtes pas
obligé de la prendre d'un seul coup, non plus.
M. Brassard: ...pas tout mon temps, mais mes collègues
vont prendre la relève, parce qu'il faut que j'aille de l'autre
côté faire une intervention sur un sujet bien actuel.
Concernant la formation générale, je suis parfaite-
ment d'accord avec votre approche, d'abord, pour faire en sorte que ce
soit le diplôme d'études secondaires qui soit le billet
d'entrée, si vous voulez, à l'ordre d'enseignement
collégial. Il s'agit de savoir quelle est la nature et l'ampleur de la
hausse des exigences qu'on y intègre. Je pense que c'est là toute
la question. Entre autres, évidemment, vous allez sûrement
comprendre que l'ancien professeur d'histoire est un peu perplexe à
l'effet que, dans votre hypothèse, l'histoire n'apparaisse pas.
Mme Drouin: C'est vrai. M. Brassard: Pourquoi?
Mme Drouin: Écoutez, je pense qu'on a voulu couvrir
certaines matières, mais, quand on exige 75 % des matières
réussies, il serait difficile de ne pas réussir l'histoire et
d'arriver à maintenir 75 % des matières réussies.
M. Brassard: C'est toujours possible parce que, dans toutes les
hypothèses examinées par le fameux comité sur le
régime des sanctions, l'histoire est toujours là. Elle est dans
le régime transitoire aussi, puis elle est dans toutes les autres
hypothèses. Ce que vous demandez, ça ressemble beaucoup à
l'hypothèse 2, sauf que l'histoire est disparue. Ça me surprend,
ça m'étonne et j'ai de la misère à comprendre
ça.
D'autre part, ce que vous dites aussi, c'est soit mathématiques,
soit sciences physiques. Il y a un choix, c'est un ou l'autre. C'était
toute la question, tout le sujet de la discussion que vous aviez tout à
l'heure avec Mme la ministre. Mais, tout ça tous ces
échanges, puis ce qu'on a eu également avec d'autres intervenants
indique bien que votre dernier considérant est tout à fait
essentiel, en page 9, quand vous dites: «Que soit signifié au
ministère de l'Éducation que des modifications aux règles
de sanction des études secondaires ou à la répartition des
matières constituent des changements majeurs nécessitant de
larges consultations et des analyses approfondies.» Les
considérants précédents aussi portent là-dessus. On
ne peut pas traiter des règles de sanction sans débattre de la
finalité du cours secondaire. «Il est très difficile de
traiter des règles de sanction [...] sans circonscrire
l'évolution de la répartition des matières.»
Ça signifie que ce que beaucoup réclament, c'est un
débat, puis une réflexion sur l'ordre d'enseignement secondaire
et forcément aussi sur les règles de sanction, puis sur la valeur
du diplôme d'études secondaires. Mais comment vous voyez
ça, ces larges consultations et ces larges analyses approfondies? Vous
voyez ça de quelle façon? Est-ce que vous y avez
réfléchi? Est-ce que ça pourrait impliquer, par exemple,
le Conseil supérieur de l'éducation, une commission
parlementaire? De quelle façon vous voyez ça?
Mme Drouin: Au départ, je vais vous dire tout de suite
qu'on ne souhaite pas reprendre tous les débats de structure qu'on a
connus dans les dernières années, au niveau des commissions
scolaires. Je pense que, ça, c'est très clair.
M. Brassard: Vraiment un débat là-dessus,
là, sur le...
Mme Drouin: C'est exact. On ne veut pas, non plus, une
réforme, je dirais, de table rase, genre commission royale
d'enquête, mais je pense qu'il est important... On est ouverts à
l'idée de réexaminer les contenus, je pense, les orientations
fondamentales, les grands encadrements. Bon, on parle de curriculum, on parle
de répartition de matières, on parle de sanction des
études, bien sûr, et aussi de «priorisation» de grands
objectifs. Actuellement, dans nos programmes, on a énormément
d'objectifs. Alors, lesquels demeurent importants? Formation fondamentale,
ça veut dire quoi? Ça comporte quoi? Qui devrait être
consulté? Je pense qu'il y a des organismes de consultation, mais, quand
on parle de consultation élargie, dans notre esprit, on se dit que,
l'éducation, je pense que tout le monde a un peu quelque chose à
dire là-dedans. Il faudrait qu'un peu tout le monde soit
consulté. On vous laisse le moyen d'y arriver, mais, pour nous,
ça nous apparaît important qu'il y ait une consultation
élargie qui soit faite sur ces grandes orientations-là. On est
ouverts à ça.
M. Brassard: Par exemple, est-ce que vous seriez favorables
à ce que le gouvernement demande un avis au Conseil supérieur de
l'éducation sur ces sujets-là?
Mme Drouin: Ça peut être cette forme-là,
comme ça peut être plus élargi. Le Conseil supérieur
de l'éducation...
M. Brassard: Mais, à la suite de l'avis, il pourrait y
avoir, après ça, après coup, une consultation.
Mme Drouin: Oui.
M. Brassard: Une combinaison des deux.
Mme Drouin: Oui, oui.
M. Brassard: C'est clair qu'on n'est pas obligés d'aller
jusqu'à la mise en place d'une commission royale d'enquête, comme
dans les années soixante, avec la commission Parent. Je ne pense pas
que... Non, non. Il n'y a personne qui réclamait ça, mais tout le
monde réclamait, cependant, une réflexion et un débat
là-dessus. La preuve est faite: ça fait juste deux jours qu'on
examine les propositions gouvernementales et à peu près tout le
monde souhaite aller dans cette direction-là. En tout cas, moi, je pense
que je suis d'accord avec la Fédération sur cette
question-là. Pour les autres questions, mes collègues prendront
le relais. Merci.
Le Président (M. Gobé): Mme la
députée de
Terrebonne. Peut-être, en tenant compte de la règle de
l'alternance, voir si, de l'autre côté, il n'y aurait pas de...
Peut-être que vous vouliez parler, Mme la députée? Non. Je
m'excuse. Alors, vous avez la parole, Mme la députée de
Terrebonne.
Mme Caron: Merci, M. le Président. Alors, moi aussi, Mme
Drouin, je m'inquiétais beaucoup de l'absence d'obligation pour le cours
d'histoire, d'autant plus que la plupart des mémoires que nous avons
entendus cet automne rappelaient l'importance d'une formation
générale. Parmi les lacunes qu'on déplorait au niveau de
la formation, au niveau des cégeps, on revenait beaucoup avec le
français, mais aussi avec des problèmes au niveau de la culture.
Je pense que, dans une formation générale, l'histoire est
essentielle. Comme le cours d'histoire se donne au secondaire, ça
réapparaissait extrêmement important qu'on le retrouve.
Dans votre mémoire, en page 11, vous avez, dans le dernier
paragraphe, souligné l'importance de la participation des
collèges et des commissions scolaires. À la lecture de ce
paragraphe, je voudrais vous questionner sur la façon de faire dans
certaines régions du Québec qui n'ont pas nécessairement
la chance d'avoir un collège qui existe dans un environnement
géographique spécifique. C'est vrai que, normalement, la plupart
des collèges existent dans un environnement géographique
spécifique et qu'ils desservent une communauté locale et
régionale essentiellement, et les commissions scolaires aussi, sauf que,
si on regarde autour de Montréal, dans la couronne de Montréal,
plus spécifiquement où je me retrouve, sur la rive nord, il n'y a
pas de collèges qui desservent une communauté locale,
régionale essentiellement. Nos jeunes se retrouvent dans divers
cégeps, dans une dizaine de cégeps. Ils sont donc
éparpillés sur le territoire, autant dans Lanaudière, dans
les Laurentides, dans Laval et dans Montréal. Au niveau des commissions
scolaires, comment on pourrait arriver à permettre une participation
avec cette dizaine de cégeps là, parce que, là aussi, on a
plusieurs commissions scolaires qui sont touchées? Est-ce que vous avez
regardé un petit peu cet angle-là?
Mme Drouin: Bon, écoutez, c'est certain qu'au niveau du
Québec il y a certaines régions qui se définissent plus
facilement que d'autres. Quand on tombe dans la région de
Montréal, c'est peut-être plus difficile de circonscrire des
régions. Il y a les régions administratives qui existent, autant
du côté de la rive nord que de la rive sud. C'est peut-être
par là qu'il faut passer. (16 h 50)
Nous, ce qu'on souhaite, c'est que, quand on parle de
développement, de formation de la main-d'oeuvre, c'est important que les
cégeps et les commissions scolaires soient impliqués. De plus en
plus, on assiste, je dirais, à des contacts entre les industries, autant
pour la formation des jeunes que pour la formation des adultes, pour le
perfectionnement des travailleurs. Il nous apparaît important que, dans
toute cette révision-là, les commissions scolaires et les
cégeps soient associés. Là aussi, on dit que le projet de
loi fait une ouverture aux cégeps pour les centres de transfert
technologique. On trouve ça bien, mais on se dit qu'il y a aussi des
centres d'incubateurs industriels qui peuvent être mis en place par des
commissions scolaires. Cette ouverture législative que l'on fait aux
cégeps, on aimerait la retrouver aussi au niveau des commissions
scolaires, parce qu'il y a beaucoup de commissions scolaires, via leurs
services de formation professionnelle ou d'éducation des adultes, qui
établissent des contacts avec des entreprises et qui souhaiteraient
avoir un peu plus de latitude. Alors, c'est dans ce sens-là qu'on se dit
que c'est un tout indissociable dans un milieu. Je pense qu'il est important
que les cégeps, les commissions scolaires, les industries travaillent en
concertation.
Mme Caron: Je suis d'accord avec vous, sauf que, nous, dans notre
réalité quotidienne, c'est sûrement dû au fait qu'il
n'y a pas de cégep bien spécifique pour toucher notre commission
scolaire, finalement. Vous parlez des régions administratives, mais nos
jeunes se retrouvent dans des cégeps situés dans quatre
régions administratives différentes et, à ce
moment-là, la commission scolaire n'a presque plus de rôle. Ces
jeunes-là, elle ne les retrouve pas. C'est même difficile
d'obtenir des données pour savoir où ils sont, ces
jeunes-là. Est-ce qu'il y aurait un moyen d'établir un lien, vous
croyez?
Mme Drouin: Mme Lemieux.
Mme Côté-Lemieux (Lise): En fait, ce ne sera
peut-être pas une réponse directe à la question. C'est
parce que, pendant que Mme Drouin élaborait la réponse,
j'essayais de voir... C'est parce qu'il y a une autre réalité
aussi dont il faut tenir compte: à la fois les commissions scolaires et
les collèges d'enseignement professionnel sont quand même
confinés soit dans la carte des options ou soit dans des champs qui leur
sont spécifiques. Alors, de toute manière, sauf dans des
régions vraiment très, très, très
géographiquement distinctes où il n'y a qu'un collège, je
pense que, dans des régions, que ce soit celle de Montréal ou
même dans la région ici, de Québec, c'est bien sûr
qu'une commission scolaire doit probablement se concerter avec un ensemble
d'institutions collégiales et même avec d'autres commissions
scolaires. Parce que les options ne sont pas les mêmes aussi,
c'est-à-dire que tu peux avoir une affinité avec un cégep
dans un domaine et avec un autre cégep, dans un autre domaine. Mais, je
vois bien que je ne réponds pas exactement à la question.
Mme Caron: Je vous remercie.
Le Président (M. Gobé): Oui, Mme la
députée des Chutes-de-la-Chaudière.
Mme Carrier-Perreault: Oui, merci, M. le Prési-
dent. Dans le même ordre d'idée, vous parlez
d'aménager des centres d'incubateurs industriels et tout ça. Ici,
en commission parlementaire, les collèges sont venus nous exprimer,
justement, qu'ils étaient des moteurs du développement
régional. Ils étaient accompagnés
généralement de plusieurs intervenants du milieu
économique de leur région, quand ils sont venus nous rencontrer
là-dessus. Je sais que, les commissions scolaires, vous en faites des
choses au niveau de la formation professionnelle. Il y a des cours qui sont
commandés aux commissions scolaires par le biais des CFP, par exemple.
Ma collègue vous parlait de quand il n'y en a pas, de cégep, et
tout ça. Quand il y a un cégep là, je me pose la
question comment vous faites pour arrimer tout ça? Dans la page
précédente, vous disiez qu'il fallait éliminer le plus
possible les effets néfastes de compétition entre les ordres.
Alors, comment ça se vit, ça? Je me pose des questions par
rapport aux commentaires que vous avez faits précédemment.
Mme Drouin: Je pense que, ce qu'on souhaite, c'est que le
créneau de chacun soit bien défini. Ça n'empêche pas
de travailler ensemble. Vous avez justement, dans votre milieu, je pense, un
bel exemple de concertation avec un centre intégré qui est en
train de se préparer. Je pense qu'on peut très bien agir de
concert, et le niveau collégial, et le niveau secondaire, mais chacun
avec son créneau bien défini. M. Dolbec, vous voulez ajouter?
M. Dolbec: Si vous me le permettez, je peux vous amener un autre
exemple pour répondre à votre question. Dans la région de
Portneuf, on a, parmi nos expériences récentes, la compagnie
Lauralco qui a implanté une aluminerie et qui a
bénéficié du support de la commission scolaire
régionale Tardivel pendant deux ans avant l'ouverture de l'usine pour
identifier les travailleurs potentiels et s'assurer d'une formation
adéquate pour qu'ils soient capables de remplir les exigences des
emplois de cette nouvelle industrie-là. Dans la même
région, on peut citer la mise en place de services aux entreprises
conjointement par la commission scolaire et le cégep Garneau. Alors, je
pense que c'est des exemples qui peuvent répondre. Il en existe dans
plusieurs autres régions, des exemples comme celui-là.
M. Paradis (Fernand): On pourrait citer, également
vous permettez, Mme la Présidente le cas de la Côte-Nord
où on s'est donné un mécanisme de coordination entre les
commissions scolaires et le collège pour faire en sorte que chacun ait
une plage bien définie de travail et qu'on ne se pile pas sur les pieds,
comme on le dit en langage populaire.
Mme Carrier-Perreault: II y a des choses qui existent
déjà, mais, quand vous parlez d'aménager des centres
d'incubateurs, de la possibilité, pour vous autres, d'aménager ce
genre de centres là, ça aurait l'air de quoi concrètement,
puisque déjà il existe des choses précises au niveau de la
formation professionnelle? Mme Drouin: M. Dolbec.
M. Dolbec: C'est que, si on introduit dans une loi des
«provisions» pour que, les établissements collégiaux,
il leur soit reconnu des rayons d'action plus formels et que ça va
au-delà des initiatives des collèges présentement, nous
autres, ce qu'on dit, c'est qu'il faudrait qu'il y ait des aménagements
législatifs équivalents pour que, les commissions scolaires, on
leur reconnaisse d'une façon plus formelle un rayon d'action
similaire.
Mme Drouin: II reste que, dans certaines régions du
Québec ou dans certains milieux, il n'existe pas de collège. Par
contre, la commission scolaire, elle est là, elle est bien
implantée et pourrait suppléer. Parce qu'il y a beaucoup plus de
commissions scolaires que de collèges et, dans certains milieux plus
éloignés, la commission scolaire prend souvent l'initiative de
formules comme ça parce que le collège n'existe pas, non plus.
Alors, ça pourrait être un créneau qui pourrait être
versé aux commissions scolaires.
Mme Carrier-Perreault: Je vous remercie.
Le Président (M. Gobé): Est-ce là tout? Bien
oui, Mme la députée de Terrebonne, vous avez la parole. Il vous
reste deux, trois minutes.
Mme Caron: Merci, M. le Président. Nous avons eu des
représentations de plusieurs groupes qui ont souligné le silence
du renouveau pédagogique sur l'éducation des adultes. On sait
à quel point c'est un élément important de plus en plus au
niveau des collèges. Est-ce que vous croyez qu'il y aurait lieu
d'ajouter certaines mesures concernant l'éducation des adultes?
M. Dolbec: Je pense que, dans les deux prochaines années,
on va connaître des réflexions énormément
renouvelées sur toute la mission des établissements concernant
les adultes. La Fédération a commencé, il y a quelques
semaines, une réflexion qui va s'intensifier aux niveaux local et
régional sur la formation continue des citoyens comme une valeur
ajoutée dans nos environnements locaux, dans nos communautés
locales. Je pense que ça va avoir énormément de
répercussions sur la mission des collèges également.
Maintenant, à ce moment-ci, il serait un petit peu difficile de vous
définir un nouveau programme pour les adultes comme tels.
Mme Caron: Je vous remercie.
Le Président (M. Gobé): Bon. Alors, est-ce
là toute votre intervention, Mme la députée de
Terrebonne?
Mme Caron: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Gobé): Mme la
députée des Chutes-de-la-Chaudière, pour vous, c'est
terminé aussi? Mme la ministre, quelques mots en terminant?
Mme Robillard: Oui. Il me reste à remercier les gens de la
Fédération des commissions scolaires et Mme Drouin. Je
souhaiterais que les travaux intensifs continuent concernant la sanction des
études, en collaboration avec le ministère de l'Éducation.
Je pense qu'on se doit d'aller un peu plus loin au niveau de la recommandation
que vous nous avez faite dans votre mémoire. Sachez que j'y porterai
personnellement attention. Merci bien.
Le Président (M. Gobé): Alors, Mme Drouin, ainsi
que les personnes qui vous accompagnent, au nom de tous les membres de cette
commission, je tiens à vous remercier. Cela met fin à votre
intervention et à votre présentation. Vous allez donc pouvoir
vous retirer et, pour ce faire, je vais suspendre les travaux quelques minutes.
J'inviterai en même temps les représentants de la
Confédération des éducateurs et éducatrices
physiques du Québec à bien vouloir se présenter en avant.
Je suspends les travaux pour quelques minutes.
(Suspension de la séance à 16 h 59)
(Reprise à 17 h 19)
Le Président (M. Gobé): Je demanderais à
tous les parlementaires de bien vouloir regagner leur place. Je vois que nous
avons une foule assez nombreuse. Donc, il me fait plaisir d'accueillir... Pour
le bénéfice et l'information des membres de la commission, je
mentionne que les personnes qui sont en haut sont des professeurs
d'éducation physique venant d'à peu près toutes les
régions du Québec. Us sont dans ces tribunes avec l'accord de la
présidence de la commission, suite à une discussion et à
un accord entre le parti gouvernemental et le parti de l'Opposition, car nous
jugions intéressant que vous puissiez participer, du moins assister
à cette séance de la commission qui vous concerne. (17 h 20)
Je rappellerai quand même qu'il est d'usage et de tradition que,
dans les commissions parlementaires, le public qui assiste ne parle pas,
maintienne le silence autant que possible et évite d'intervenir d'une
façon ou d'une autre. Je souhaiterais, suite à l'entente qu'il a
pu y avoir entre les partis pour que vous puissiez assister... Je n'ai pas vu
cette tribune-là ouverte en haut, je pense, depuis les audiences de
Bélanger-Campeau. Alors, voyez-vous, ça fait quelque temps.
Alors, je souhaiterais que nous puissions respecter cette tradition, ce qui
permettra à d'autres groupes qui en feront la demande plus tard de
pouvoir bénéficier des mêmes accords et des mêmes
largesses et latitudes. Alors, bienvenue parmi nous. Il nous fait plaisir de
vous accueillir.
Maintenant, sans plus tarder, je demanderais au porte-parole de la
Confédération des éducateurs et édu- catrices
physiques du Québec de bien vouloir présenter les gens qui
l'accompagnent et, par la suite, bien, nous commencerons nos travaux.
Confédération des éducateurs et
éducatrices physiques du Québec (CEEPQ)
M. Delaney (Robert): C'est bien. Merci beaucoup, M. le
Président. Mme la ministre, M. le critique de l'éducation pour
l'Opposition, Mmes et MM. les députés, j'ai avec moi aujourd'hui
M. René Larouche, qui est le président de la
Confédération des éducateurs et éducatrices
physiques du Québec; à ma gauche, Serge Laferrière, qui,
lui, est professeur d'éducation physique au cégep de
Bois-de-Boulogne; à sa gauche, Hélène O'Bomsawin, qui est
professeur d'éducation physique au cégep d'Alma; et, à mon
extrême gauche, M. Pierre Brodeur, qui, lui, est professeur
d'éducation physique au cégep Saint-Jean-sur-Richelieu.
Le Président (M. Gobé): Alors, mesdames, messieurs,
bienvenue parmi nous. M. Delaney, vous pouvez commencer votre
présentation.
M. Delaney: Merci beaucoup. Avant de commencer, nous avons
reçu aujourd'hui des pétitions des étudiants et
étudiantes du niveau secondaire, secondaire V, qui se sont
prononcés en faveur de l'éducation physique au niveau
collégial et du maintien des quatre cours. On voudrait savoir si c'est
possible de déposer les pétitions.
Le Président (M. Gobé): M. Delaney, le
règlement ne permet pas, dans une commission comme celle-ci, d'en
déposer. Par contre, ce que je peux faire et ce que je vais faire, avec
le consentement de mes collègues, je vais suspendre une minute ou deux,
le temps que Mme la ministre puisse recevoir cette pétition. Comme on le
sait, nous, les politiciens, ce n'est pas facile, faire des pétitions,
c'est beaucoup de travail. Pour respecter ceux qui ont pris la peine de le
faire, disons que je suspends les travaux quelques minutes.
M. Delaney: Merci beaucoup. Je voudrais souligner qu'il y a 6500
étudiants et étudiantes qui ont choisi de signer la
pétition.
Le Président (M. Gobé): C'est suspendu, M.
Delaney.
(Suspension de la séance à 17 h 23)
(Reprise à 17 h 24)
Le Président (M. Gobé): La commission reprend
maintenant ses travaux. Je vous remercie. Mme la ministre a pris possession de
ce que vous aviez à lui remettre, dans son cadre de ministre et non pas
la commission. Cette commission n'avait pas à recevoir cette
pétition.
Maintenant, je vous passe la parole. Je vous rappelle que vous avez une
période de 20 minutes pour faire votre présentation. Par la
suite, 20 minutes seront allouées à chaque côté, au
côté gouvernemental et au côté du critique officiel
de l'Opposition, pour dialoguer et discuter. Si vous ne prenez pas vos 20
minutes, elles seront réparties équitablement entre les 2
formations pour discussion. Alors, vous avez maintenant la parole.
M. Delaney: Merci beaucoup. Vous n'êtes sûrement pas
sans savoir que c'est avec un peu d'appréhension que nous attendions le
projet de réforme au niveau collégial, mais c'est avec beaucoup
d'intérêt que nous avons lu le document d'orientation. En le
lisant, nous avons constaté l'existence de propos intéressants
pour les élèves, ainsi que pour le niveau collégial. On
parle ici des sessions d'orientation, de l'accent mis sur la langue maternelle
et la langue seconde. C'est avec une attention particulière que nous
avons lu les objectifs quantitatifs en matière de scolarisation. On
voyait ici la possibilité d'intervenir auprès d'un pourcentage
plus élevé de la population québécoise, mais, avec
les coupures proposées, ça demeure une question qu'on pose ici
aujourd'hui: Comment atteindre nos objectifs?
La présentation que nous allons faire aujourd'hui sera en deux
parties. La première partie, concernant les principaux arguments
supportant notre position, sera faite par M. Laferrière. La
deuxième partie, je vais la faire, porte sur les recommandations et les
scénarios, et la conclusion. Durant la période de questions,
étant donné que tout le monde sur le comité, ici, a des
responsabilités en termes de réponses à des dossiers
particuliers, je vais soit répondre ou identifier la personne qui aura
la responsabilité d'y répondre.
Alors, sans plus tarder, je passerais la parole à M.
Laferrière.
Le Président (M. Gobé): Alors, vous avez la parole,
je vous en prie.
M. Laferrière (Serge): Nous ne reprendrons pas
l'argumentation que nous avons présentée en novembre 1992. Nous
considérons que peu de dossiers ont été aussi
documentés et que les données que nous avons avancées
n'ont pas été réfutées. Aujourd'hui, contre toute
logique, contre toutes les données scientifiques disponibles, contre le
désir des étudiants, on veut faire croire que l'éducation
physique est moins nécessaire et qu'on pourrait remplacer deux des
quatre cours par des activités physiques pratiquées librement. Au
sujet du consensus que nous annonce la ministre, nous pouvons affirmer sans
hésiter qu'en ce qui concerne l'éducation physique le consensus
qui se dégage actuellement est plutôt favorable au maintien des
quatre cours obligatoires. Des 219 mémoires présentés,
seulement 10 étaient contre.
Nous considérons que cette réduction du temps
accordé à l'enseignement de l'éducation physique est une
solution de facilité et un compromis qui repose sur des motifs non
fondés. Aussi, avant qu'une décision soit arrêtée,
nous voulons attirer l'attention des membres de cette commission sur la valeur
des motifs avancés pour justifier cette réduction et en
dégager les conséquences pour les étudiants. Nous
désirons également vous proposer des solutions possibles qui
permettraient l'atteinte des objectifs de la réforme sans nuire aux
objectifs de formation poursuivis en éducation physique.
Le projet de réforme considère que la pratique libre
d'activités physiques peut remplacer certains cours obligatoires
d'éducation physique. Cette considération témoigne, pour
le moins, d'un manque d'information sur l'enseignement de l'éducation
physique. Vous n'ignorez pas que les collèges ont une mission et des
objectifs précis en éducation physique. Ces objectifs ne peuvent
être atteints à travers la pratique libre d'activités
physiques, même lorsque celles-ci sont supervisées par un
éducateur physique, puisque le contexte d'intervention ne respecte pas
certains critères d'ordre pédagogique. À titre d'exemple,
lorsqu'on veut créer de la motivation et développer l'autonomie
chez l'élève, l'apprentissage adéquat d'une
activité physique nécessite que le professeur enseigne dans un
contexte où il lui est possible d'intervenir en considérant les
activités d'apprentissage, la reconnaissance et la gratification, le
travail en équipe, l'évaluation formative et l'évaluation
sommative.
Les cours obligatoires d'éducation physique représentent
une possibilité privilégiée d'obtenir une meilleure
performance intellectuelle. Pour agir efficacement sur les attitudes et
modifier des comportements, il faut offrir l'occasion d'exercer ces
comportements dans différents contextes. Les 120 heures d'intervention
constituent un minimum pour permettre Fauto-évaluation qui joue un
rôle prépondérant dans l'apprentissage d'ordre affectif;
agir sur la motivation qui incite à pratiquer l'activité physique
de façon régulière et continue; permettre à
l'élève de connaître différentes expériences
de succès; prendre conscience des progrès réalisés
et éprouver de la satisfaction. en ce qui concerne les motifs
invoqués, la proposition de réduire de 50 % l'éducation
physique repose, entre autres, sur l'affirmation que «l'importance de
l'activité physique pour la santé physique et mentale, les
pratiques implantées dans les collèges et l'âge des
étudiants qui arrivent du secondaire militent en faveur d'un maintien de
certaines activités physiques obligatoires». l'éducation
physique ne se limite pas strictement à la pratique d'activités
physiques. lorsqu'on parle d'éducation physique, il s'agit
d'enseignement, d'apprentissage d'habiletés, d'acquisition d'habitudes
de vie, d'attitudes positives face à la pratique d'activités
physiques et de valeurs relatives à la santé, à
l'éducation et à la qualité de vie. la pratique des
activités récréatives offertes actuellement dans les
collèges ne vise pas l'atteinte des objectifs poursuivis dans les cours
d'éducation physique en matière de santé globale ou de
formation multidimen-sionnelle. de plus, elles ne touchent qu'une faible
proportion d'étudiants. (17 h 30)
Un autre motif invoqué: «dans les systèmes
d'enseignement supérieur canadiens et étrangers, il n'y a
généralement pas d'activités physiques obligatoires et
créditées». Certains éléments de cet
énoncé sont inexacts et plusieurs documents démontrent le
contraire. Selon PUNESCO, plusieurs pays obligent les étudiants inscrits
aux paliers postsecondaire et universitaire à suivre des cours
d'éducation physique. Il en est de même pour plusieurs pays de
l'OCDE qui exigent que cet enseignement soit dispensé jusqu'à
l'âge de 18 ans, c'est-à-dire l'équivalent de la
deuxième année de cégep. Il importe de tenir compte que
l'enseignement de l'éducation physique est obligatoire aux
États-Unis jusqu'à la douzième année,
c'est-à-dire niveau collège I, et qu'on tend de plus en plus
à le rendre obligatoire et crédité durant les
années de formation ultérieures. une étude
effectuée en 1988 auprès de 1130 collèges publics et
universités atteste que l'enseignement de l'éducation physique
est obligatoire pour tous les élèves du premier cycle dans 65 %
des institutions et qu'on exige la réussite de cette discipline pour
l'obtention du diplôme. l'examen des données comptabilisées
à l'échelle des états-unis démontre que cette
obligation connaît une hausse constante depuis la fin des années
soixante-dix. de 1978 à 1988, ce taux s'est accru de 57 % à 65
%.
L'UNESCO recommande que l'enseignement de l'éducation physique
soit obligatoire du primaire jusqu'à l'université. Amputer de 50
% l'enseignement de l'éducation physique au collégial, c'est
aller à rencontre du modèle nord-américain, ainsi que des
tendances mondiales que privilégient les pays qui se situent dans le
peloton de tête et qui ont reconnu à sa juste valeur le rôle
majeur que l'éducation physique joue sur l'amélioration de la
santé et la formation fondamentale de l'être humain. Nous risquons
de manquer le train de la mondialisation si nous accordons aussi peu
d'importance à l'état de santé de notre population, avec
ses conséquences sur le fardeau fiscal des contribuables, sur son taux
de scolarisation, son taux de productivité et, surtout, sur sa
qualité de vie.
Autre motif: «le cours obligatoire crédité
étant un moyen parmi d'autres, il est impossible d'identifier le rapport
entre exercice physique et santé à un rapport nécessaire
entre cours obligatoire d'éducation physique et santé». Le
rapport entre la pratique de l'activité physique et
l'amélioration de la santé a maintes fois été
démontré par de nombreuses études conduites à
l'échelle mondiale. L'activité physique qu'on pratique
résulte d'apprentissages acquis lors des cours d'éducation
physique dispensés en milieu scolaire ou civil.
En milieu scolaire, les cours d'éducation physique
crédités constituent le meilleur moyen de favoriser la pratique
régulière de l'activité physique. L'effet
d'entraînement de la pratique de l'activité physique sur les
autres habitudes de vie pour prévenir les problèmes de
santé a déjà été démontré.
Créditer ces cours dans la formation générale commune,
c'est s'assurer qu'un certain nombre d'activités d'apprentissage sont
réalisées et évaluées. Combien d'étudiants
s'inscriraient aux cours de français ou de mathématiques s'ils
étaient optionnels? Certains apprentissages ne peuvent être
laissés au hasard des activités libres.
Motif 4: «la diminution du nombre de cours crédités
n'entraînerait pas la diminution de l'accès aux équipements
sportifs qui continueraient d'être accessibles et où pourraient
oeuvrer des spécialistes de l'éducation physique». Ici, il
ne faudrait pas confondre accessibilité des locaux avec augmentation de
fréquentation. Les deux cours d'éducation physique seraient
remplacés par des cours théoriques, ce qui aurait comme
conséquence d'augmenter la charge de travail intellectuel de
l'étudiant sans toutefois augmenter ses temps libres pour
fréquenter les plateaux d'éducation physique. Le nombre d'heures
de cours moyen d'un cégépien, qui est d'environ 28 heures par
semaine, le nombre d'heures d'études, ainsi que les nombreuses heures de
travail en dehors du collège ne lui laissent pas beaucoup de temps libre
pour pratiquer des activités physiques.
Lorsqu'on parle d'où pourraient oeuvrer des spécialistes
de l'éducation physique, parce que les professeurs d'éducation
physique ne limitent pas leur action à un rôle de transmetteur de
connaissances théoriques, mais agissent aussi sur les attitudes, les
habitudes et les valeurs, ils pourraient être relégués
à un rôle de surveillant. Est-il nécessaire de vous
rappeler que les éducatri-ces et éducateurs physiques sont les
seuls professeurs de collège à posséder autant de
formation en psychopédagogie? Penser affecter ces professeurs à
une tâche de surveillance, c'est sous-estimer leur potentiel. Les
éducateurs et éducatrices physiques ne sont pas des surveillants,
mais des pédagogues.
Autre motif invoqué: «le nombre de dispenses actuellement
accordées en éducation physique par les collèges publics
et privés témoigne d'une prise en compte souple de ce type
d'enseignement obligatoire». Les quelques dispenses accordées ne
constituent que des cas d'exception. Bien que nous ne disposions pas de
données précises au sujet du nombre d'élèves
impliqués, il nous semble abusif de faire du nombre de dispenses un
motif de réforme. Il n'apparaît pas très sérieux de
justifier la réduction des cours d'éducation physique sur des cas
ne représentant qu'une faible minorité. Un tel critère ne
peut, en aucune façon, fonder une politique générale. Lors
d'un sondage effectué auprès des départements
d'éducation physique, nous avons pu constater que seulement 1 % à
1,5 % des étudiants reçoivent des dispenses ou des
équivalences.
Autre motif: «les universités ne tiennent pas compte des
résultats obtenus en éducation physique, la cote Z les excluant
même de ces calculs». Cet argument est partiellement faux. Les
universités tiennent compte des résultats obtenus en
éducation physique puisqu'elles exigent que les élèves de
cégep aient obtenu leur D.E.C. pour être acceptés dans un
programme. Or, pour obtenir un D.E.C, il faut avoir réussi les cours
d'éducation physique. Le fait qu'on ne tienne pas compte des
résultats obtenus en éducation physique dans le calcul de la
moyenne de l'élève, ou de la cote Z, n'explique en rien
l'importance qu'on accorde à cette discipline. Ce sont plutôt des
considérations statistiques qui justifient un tel choix.
On peut s'étonner que le ministère invoque un tel motif
pour justifier la réduction des cours obligatoires d'éducation
physique puisque l'utilisation de la cote Z dans le système d'admission
des universités québécoises est plutôt marginale.
Des exemples, comme la cote Z pondérée par l'Université de
Montréal et les examens d'admission en français,
démontrent qu'on fait très peu confiance à cette technique
de sélection. Quand les universités font la sélection des
candidats possibles pour leurs différentes facultés, elles ne
tiennent peut-être pas compte de la note d'éducation physique dans
la cote Z. Il ne faudrait pas s'en étonner puisque le cours
d'éducation physique ne fait pas partie de ces cours dont la note sert
à des fins de sélection. Sa raison d'être, au cégep,
répond plutôt à des besoins de formation. La formation
offerte dans le développement multidimensionnel et
intégré, dans l'amélioration de la santé globale et
dans l'apprentissage d'activités physiques ne peut naturellement pas
servir à des fins de sélection pour les universités.
Autre motif invoqué: «la suppléance convenue il y a
25 ans est moins nécessaire aujourd'hui, maintenant que les
équipements sont largement répandus dans les écoles et
dans les centres sportifs de toute nature». Premièrement, il ne
s'agit pas de suppléance, mais bel et bien de la mission et des
objectifs des collèges qui sont des institutions de formation. Il suffit
de lire les documents ministériels pour s'en rendre compte.
Deuxièmement, il y a confusion grave entre, d'une part, l'enseignement
dont l'objet est de faire acquérir des connaissances, des
habiletés, des attitudes, des habitudes et des comportements et, d'autre
part, la pratique qui est une forme d'application des apprentissages. Retrouver
une telle confusion dans un document du ministère de l'Enseignement
supérieur et de la Science est étonnant et décevant. Nous
pourrions appliquer le même raisonnement à l'enseignement du
français ou de n'importe quelle autre discipline sous prétexte
que le réseau de biblothèques et de librairies s'est largement
développé depuis une vingtaine d'années. Personne ne
songerait à réduire l'enseignement du français sous
prétexte que l'accès à la lecture est maintenant plus
facile. Quels résultats aurions-nous, sur le plan de la maîtrise
de la langue française si on coupait de moitié l'enseignement de
cette matière en invoquant le prétexte que les
bibliothèques continueraient d'être accessibles où
pourraient oeuvrer des spécialistes du français? (17 h 40)
Autre motif: «la formation en langue est suffisamment prioritaire
pour qu'on consente à lui faire de la place». Cet argument qui
invoque qu'on devrait diminuer l'enseignement de l'éducation physique
pour faire de la place à la formation en langue ne devrait pas
être utilisé dans une institution qui se préoccupe de la
formation de l'être humain. La langue et la santé sont des valeurs
primordiales que tout système d'éducation se doit de
préserver et de promouvoir. Les étudiants qui arrivent au
cégep ne possèdent pas le niveau recommandé et souhaitable
de condition physique. Leur condition physique est aussi mal en point que leur
connaissance de la langue.
Quant à l'apprentissage d'une langue seconde, a-t-on vraiment
évalué l'efficacité des méthodes d'enseignement
utilisées aux niveaux primaire et secondaire avant de proposer une
solution de rattrapage au collégial? De nombreuses études
démontrent une amélioration de la réussite scolaire, et
ce, pour toutes les disciplines académiques, dans les institutions
scolaires où l'on accorde davantage d'importance à
l'éducation physique.
Les conséquences d'une telle réforme. Vous allez
possiblement prétendre que nous exagérons les conséquences
de la réduction du nombre de cours d'éducation physique afin de
faire valoir notre point de vue. Personne n'est en mesure d'affirmer avec
certitude les conséquences néfastes de cette réduction,
mais il est possible, cependant, de prévoir des conséquences
probables. Vous ne pouvez vous attendre à ce que l'état de
santé des étudiants soit amélioré en diminuant
l'action d'un des moyens considérés comme ayant des effets
positifs significatifs. Ce n'est certainement pas en réduisant les cours
d'éducation physique, que plus de 90 % des étudiants veulent
conserver, que vous allez améliorer la vie collégiale et
favoriser l'intégration sociale des jeunes. Quand une réforme
ignore une valeur aussi fondamentale que la motivation des étudiants, il
ne faudra pas s'étonner si le décrochage et les taux
d'échec risquent d'augmenter. Toute mesure préventive vaut mieux
qu'une mesure coercitive.
Après 30 ans d'enseignement, dont la qualité et la valeur
sont reconnus, on dit aux professeurs d'éducation physique que leur
rôle au sein du système scolaire n'est plus aussi
nécessaire et qu'on pourrait s'en passer. L'intérêt que
nous accordons à la santé et au mieux-être des
élèves nous incite à nous opposer avec fermeté
à toute réduction du nombre de cours d'enseignement de
l'éducation physique. Nous ne pouvons pas limiter notre action aux
dimensions intellectuelles et physiques. Il nous faut aussi agir sur les
dimensions affectives et sociales.
Nos stratégies d'intervention requièrent la planification
de situations d'apprentissage qui offrent un contexte propice à
l'atteinte de tels objectifs de formation. Tout ce processus d'apprentissage
exige un temps considérable. Les quelque deux unités et deux
tiers dont nous disposons actuellement constituent un minimum pour nous assurer
d'atteindre tous nos objectifs et, en particulier, ceux qui concernent la
prévention des problèmes de santé. Afin que les
apprentissages réalisés puissent être
transférés à la vie en société, il importe
qu'ils soient réalisés dans une variété de
contextes. Les quatre cours actuels offrent quatre contextes différents
et permettent ainsi d'atteindre l'ensemble des objectifs de l'éducation
physique au collégial récemment approuvés par la ministre,
le 12 avril 1992. Notre évaluation
confirme, en effet, que l'aménagement actuel des 4 cours
d'éducation physique permet aux étudiants d'être mis en
contact avec 95,5 % de ces objectifs ministériels. des cours
d'éducation physique offerts sur quatre sessions ne permettent pas
seulement d'agir de façon plus efficace sur des attitudes positives
à l'endroit de l'activité physique, mais augmentent aussi chez
l'étudiant, pendant quatre sessions, ses chances de réussite en
favorisant un travail intellectuel plus efficace. aucune évaluation n'a
encore démontré que ces objectifs jugés essentiels
pourraient être atteints en diminuant de quatre cours à deux cours
d'éducation physique.
Le Président (M. Gobé): Oui, M. Delaney. M.
Delaney: La partie des recommandations.
Le Président (M. Gobé): Je dois vous mentionner, M.
Delaney, que les 20 minutes qui vous étaient allouées sont
maintenant écoulées, mais je viens de consulter rapidement les 2
côtés de la commission et on m'a fait signe qu'il y avait
consentement pour que vous puissiez dépasser et continuer.
Une chose que j'aimerais mentionner: vous avez entendu une petite
cloche, il y a quelques minutes, c'était pour un quorum en Chambre, et
probablement que la prochaine cloche qui va sonner, ça va être
pour appeler les députés à un vote. À ce
moment-là, je vais devoir suspendre la commission, car le
règlement fait en sorte qu'aucune commission ne peut siéger
pendant un vote et, en plus de ça, les parlementaires qui sont là
ont le goût d'aller voter sur le projet de loi. Donc, je suspendrai,
à ce moment-là, jusqu'à la fin du vote. Nous reviendrons
pour continuer et nous dépasserons le temps imparti de quelques minutes,
mais il y a consentement des deux côtés de cette Chambre pour ce
faire, étant donné l'importance de votre prestation, de "votre
témoignage et aussi tous les gens qui vous accompagnent. Alors, vous
avez la parole à nouveau.
M. Delaney: Merci beaucoup. Nous rappelons, premièrement,
la nécessité de maintenir dans leur intégrité les
objectifs ministériels actuels approuvés par la ministre de
l'Enseignement supérieur et de la Science le 14 avril 1992; de maintenir
le minimum de 2 unités et 2/3, c'est-à-dire 4 cours et 120
heures, qui constituent le programme obligatoire d'éducation physique et
qui représentent actuellement 3 % à 5 % des quelque 50 à
90 unités de formation de l'élève; de conserver le
caractère obligatoire et crédité des cours
d'éducation physique. Nous voulons aussi vous faire part de notre
intention de travailler à l'établissement d'un programme-cadre
et, si nécessaire, de faire les ajustements appropriés; d'adapter
le contenu de certains cours aux objectifs de l'approche programme.
Les propositions de scénarios. La CEEPQ, comme plusieurs
organismes qui participent à cette commission, veut vous faire part de
trois scénarios qui permettent à la fois de respecter l'esprit de
la réforme, ainsi que les besoins maintes fois exprimés par les
élèves et les experts au sujet du maintien de quatre cours
obligatoires d'éducation physique.
Dans le premier scénario, nous vous proposons d'augmenter le
nombre d'unités dans le bloc de formation générale. Le
projet de réforme dit qu'il faut réduire le nombre
d'unités de certaines disciplines afin d'élargir et d'enrichir la
formation générale de l'élève. Nous
considérons que le meilleur moyen d'élargir et d'enrichir cette
formation, c'est d'augmenter le nombre d'unités, c'est-à-dire
d'ajouter une unité et un tiers dans le bloc 1 pour compléter le
nombre d'unités nécessaires en éducation physique.
Dans le deuxième scénario, nous vous proposons de modifier
la pondération accordée à certains cours. Compte tenu que
les exigences en langue d'enseignement et en langue seconde seront
augmentées pour accéder au collège, nous proposons un
scénario visant à récupérer une unité et un
tiers dans les nouveaux cours attribués à ces disciplines pour la
redistribuer à l'éducation physique. Le fait de réduire de
deux tiers le nombre d'unités allouées à ces cours ne
risque pas de compromettre les objectifs de la réforme concernant ces
deux disciplines. Le consensus qui s'était établi sur la
nécessité d'améliorer la langue d'enseignement et la
littérature, ainsi que de favoriser la connaissance d'une langue seconde
est toujours maintenu.
Dans le troisième scénario, nous vous proposons de
réaménager les cours à l'intérieur des blocs. On
doit également se questionner sur la pertinence de placer les deux cours
de langue seconde dans les blocs 1 et 2, compte tenu du fait que l'importance
de ce besoin varie d'une région à l'autre, d'un cégep
à l'autre, d'un individu à l'autre. Il serait
préférable de placer le deuxième cours de langue seconde
dans le bloc 3, ce qui permettrait de consacrer une unité et un tiers
à l'éducation physique dans le bloc 1. Notons que cette
proposition laisserait deux tiers d'unité à distribuer dans la
formation générale. Ça pourrait être ajouté
à la langue seconde qui apparaît dans le bloc 1, portant de deux
unités à deux unités et deux tiers le nombre
d'unités pour la langue seconde.
En conclusion, compte tenu de la faiblesse des arguments qui ressemblent
plutôt à des prétextes pour justifier une réduction
des cours d'éducation physique; compte tenu du consensus clair qui s'est
dégagé en faveur du maintien des quatre cours d'éducation
physique; compte tenu du fait que les premiers intéressés,
c'est-à-dire les élèves pour qui les collèges
existent, veulent, dans une proportion de plus de 90 %, conserver ces cours;
compte tenu du fait que la réduction proposée ne découle
d'aucune étude ou évaluation, nous demandons aux membres de la
commission de l'éducation et à la ministre de l'Enseignement
supérieur et de la Science de renoncer à cet aspect de la
réforme qui ne comporte que des effets négatifs qui affecteront
non seulement l'enseignement de l'éducation physique dans les
collèges, mais auront aussi un impact sur l'ensemble de
l'éducation physique dans notre système scolaire et
sur notre société. Merci. (17 h 50)
Le Président (M. Gobé): Merci, M. Delaney. Merci,
M. Laferrière. Ceci met donc fin à la présentation de
votre mémoire ou de votre position. Nous allons maintenant aborder la
phase de discussion avec les parlementaires et avec Mme la ministre. Donc, sans
plus attendre, nous allons commencer, pour une période de 20 minutes. Si
la cloche sonne, je devrai, comme je vous l'ai mentionné auparavant,
suspendre et vous nous excuserez, le temps d'aller accomplir notre devoir de
parlementaires.
Alors, Mme la ministre, vous avez maintenant la parole pour une
période d'environ 20 minutes.
Mme Robillard: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord
saluer les membres de la Confédération des éducateurs et
éducatrices physiques du Québec et leur dire que j'ai lu avec
attention leur nouveau mémoire présenté devant les membres
de cette commission. J'ai vu aussi que, à la fin du mémoire, vous
aviez étudié l'ensemble de la formation générale.
Quand on fait des choix de cours à l'intérieur de la formation
générale, il faut les situer dans une perspective de l'ensemble
du contenu, ce que vous avez fait dans la présentation de vos
scénarios, si j'ai bien compris. Parce que c'est très clair, et
vous le mentionnez, le message de base que nous avions reçu à la
commission parlementaire de l'automne dernier en regard de la formation
générale, c'était un élargissement de cette
formation et un renforcement de la formation générale. Alors,
dans ce contexte-là, le gouvernement a fait de nouveaux choix que vous
avez dans le renouveau collégial.
Alors, si vous voulez, M. Delaney, dans un premier temps, j'aimerais
ça regarder avec vous vos scénarios pour bien les comprendre et
voir ce qui motive les nouveaux choix que vous me présentez, aussi, de
contenu de formation générale. Au-delà du fait que vous me
recommandez toujours deux unités et deux tiers d'éducation
physique, donc quatre cours, c'est toute la configuration de la formation
générale, quand on commence à modifier des unités.
C'est dans ce contexte-là que j'aimerais bien comprendre les choix
sous-jacents à vos scénarios.
D'abord, le premier scénario, je ne le discuterai pas longtemps.
Ce que je comprends, c'est un ajout. Alors, là, on passe la formation
générale à 28 unités, étant donné
qu'on ajoute 1 unité et 1/3, n'est-ce pas?
M. Delaney: Oui.
Mme Robillard: Donc, le premier scénario, c'est un ajout.
Est-ce à dire que les professeurs d'éducation physique ou les
membres de votre confédération, vous êtes en accord avec
les autres contenus de la formation générale qui sont
là?
M. Delaney: Si je comprends bien et c'est dans le
mémoire ou je l'ai mentionné au début nous sup-
portons l'idée de mettre un accent davantage sur la langue maternelle et
d'introduire un accent, une emphase sur la langue seconde. Nous sommes
complètement d'accord avec ça. La seule chose, c'est qu'on s'est
posé des questions, à savoir si on devait tasser
complètement ou, maintenant, la moitié des cours
d'éducation physique. Alors, nous avons essayé, en consultant des
gens qui connaissaient mieux les pondérations, les contenus de cours de
langue maternelle et de langue seconde que nous autres, de voir si ce serait
possible d'arriver à des objectifs semblables sans nécessairement
tasser l'éducation physique. Alors, c'est ça qui nous a
amenés à proposer...
Premièrement, étant donné qu'il est censé y
avoir des changements au niveau secondaire, des augmentations en termes de
niveau, pour avoir accès au niveau collégial, de langue
maternelle, de langue seconde et, je crois aussi, des maths, mais que, pour ce
qui concerne ces deux matières-là, on risque d'avoir des
étudiants mieux préparés, alors, on se posait la question:
Est-ce que c'est vraiment nécessaire d'en mettre autant, au niveau
collégial, sur la langue maternelle et la langue seconde? Est-ce qu'on
pourrait aller en chercher là? C'est pour ces raisons-là qu'on a
proposé le deuxième scénario, alors qu'on allait chercher
deux tiers à la fois.
Mme Robillard: Mais, M. Delaney, restons au premier
scénario pour quelques minutes.
M. Delaney: Oui.
Mme Robillard: Ça veut dire aussi, si vous l'avez
regardé dans une optique de formation générale, dans le
fond, avec quel bagage de connaissances tout jeune ou tout adulte qui
fréquente le cégep doit-il sortir du cégep, qu'il soit en
préuniversitaire ou en technique? Vous aviez là une configuration
nouvelle de la formation générale dont une partie était
adaptée au programme, et nettement un resserrement au niveau des cours
complémentaires aussi. Dans le fond, ma question, c'était de
dire: Outre les langues, parce qu'on va y revenir aux scénarios 2 et 3,
en regard des autres choix qui sont faits dans les autres blocs, la
confédération des éducateurs est en accord avec ces
choix-là qui sont faits. Est-ce que je dois conclure ça du
premier scénario?
M. Delaney: Oui.
Mme Robillard: Oui. Parfait. Alors, allons au deuxième
scénario. Donc, là, ce que vous faites comme choix de
deuxième scénario, vous maintenez le même nombre
d'unités, mais je pense que vous voulez diminuer le nombre
d'unités au niveau des langues. Ce que je voudrais bien comprendre,
parce que vous m'avez marqué «à déterminer»
dans la colonne de droite, est-ce que c'était le sens que vous voulez
diminuer les unités qu'on accorde dans le renouveau au niveau des
langues?
M. Delaney: Oui. Pour les raisons mentionnées
tout à l'heure, que je viens juste de mentionner, concernant la
préparation de l'élève; on risque d'avoir un
élève ou une élève qui est mieux
préparé. Alors, on pensait qu'on pourrait aller chercher deux
tiers d'unité dans chacune de ces matières-là. Par contre,
où nous ne voulions pas nous prononcer, c'est en termes de la
pondération des unités: où les mettre par après,
parce que nos expertises ne sont pas en termes de langue maternelle et de
langue seconde. C'est pour ça qu'on laissait «à
déterminer». On laisse les gens qui ont les compétences
dans ces matières-là déterminer combien d'unités
ils garderaient pour la langue d'enseignement et littérature et combien
pour la langue seconde.
Mme Robillard: Mais vous auriez pu très bien faire le
choix, par exemple, de diminuer le nombre d'unités au niveau des cours
complémentaires et de laisser les unités en langue. Donc, vous
avez fait un choix entre langue, n'est-ce pas...
M. Delaney: Oui.
Mme Robillard: ...et éducation physique. Est-ce que c'est
bien là que votre choix s'est situé?
M. Delaney: Oui, en tenant compte que les changements, comme je
l'ai mentionné tout à l'heure, allaient se faire au niveau
secondaire.
Mme Robillard: Ah! Pour vous, le seul fait qu'on va exiger
maintenant la réussite obligatoire, par exemple, du cours de langue
maternelle au niveau du secondaire et de langue seconde pour l'admission au
collège, ça vous apparaît suffisant, et c'est pour
ça que vous faites ce choix-là au niveau de la langue.
M. Delaney: Oui.
Mme Robillard: Oui?
M. Delaney: Oui.
Mme Robillard: C'est bien dans ce sens-là.
M. Delaney: C'est bien dans ce sens-là.
Mme Robillard: Alors, au troisième scénario, vous
me surprenez parce que, là, vous diminuez le nombre d'unités de
formation générale. Alors, selon votre scénario 3, on se
retrouve non seulement... Présentement, on a 26 unités et 2/3, et
certains groupes veulent nous les faire augmenter, mais là, avec votre
scénario 3, on les diminue. Est-ce bien ça, et pourquoi?
M. Delaney: Lorsque ça a été publié,
ça... C'est pour ça que j'ai mentionné tout à
l'heure que cette proposition laisserait deux tiers d'unité à
distribuer. Alors, on ne les enlève pas. Ils restent à
distribuer, ces deux tiers-là. Ce que j'ai suggéré...
Étant donné que le troisième scénario enlève
ou place un cours de langue seconde dans le bloc 3, on proposait que les deux
tiers soient rajoutés à la langue seconde qui est incluse
à l'intérieur du bloc 1, ce qui ferait que... Ça, c'est
les cloches?
Le Président (M. Gobé): Terminez votre
réponse. Alors, voilà, la cloche redoutée ou attendue,
dépendant par qui, sonne maintenant. Je vais donc devoir suspendre nos
travaux et je vais le faire jusqu'à la fin du vote. Alors, ça
peut être 10 minutes, 7, 8 minutes, 15 minutes, jusqu'à la fin du
vote. La commission est suspendue. Vous pouvez rester ici.
(Suspension de la séance à 18 heures)
(Reprise à 18 h 14)
Le Président (M. Gobé): Alors, mesdames et
messieurs, s'il vous plaît! J'apprécierais que tout le monde
puisse regagner sa place. S'il vous plaît! Alors, merci beaucoup. La
cloche a sonné, la récréation est maintenant finie. On va
pouvoir reprendre nos travaux. Et, Mme la ministre, je vous redonne la parole
que vous aviez lorsque nous avons suspendu nos travaux.
Mme Robillard: Merci, M. le Président. M. Delaney, nous
étions sur le scénario 3, n'est-ce pas? Alors, je pense que vous
étiez en train de m'expliquer le fait que, selon votre scénario
3, il y a une diminution au niveau du nombre d'unités, mais vous me
disiez que les deux tiers manquants s'ajoutaient. Et là, je pense que je
vous ai perdu. Pourriez-vous reprendre cette explication-là?
M. Delaney: Les deux tiers pourraient s'ajouter et, encore, je
voudrais souligner le fait que nous ne sommes pas des experts en termes de
scénarios possibles. Lorsqu'on a discuté avec plusieurs personnes
et qu'on a fait des enquêtes, on a su qu'il y a au moins une centaine de
scénarios qui ont été étudiés par plusieurs
personnes. Nous autres, on en est venus à trois et c'est fort probable
qu'il en existe d'autres. Ce qui nous a motivés à faire
ça, c'est qu'à plusieurs reprises vous nous avez mentionné
d'apporter des solutions. Ce qui nous inquiète, c'est que
l'éducation physique soit amputée et on croit qu'il existe des
possibilités. On pourrait étudier les trois qu'on vous propose
là ou peut-être qu'il y en a d'autres. On sait qu'il y a des
syndicats qui en ont proposé d'autres. Il s'agirait de déterminer
le meilleur pour qu'on puisse, à la fois, atteindre les objectifs de la
réforme et aussi atteindre les objectifs en éducation
physique.
Mme Robillard: Oui, je comprends bien ça, M. Delaney,
mais, quand même, dans votre mémoire... Et je l'avais dit
très clairement, je ne voudrais pas strictement apporter des ajustements
à la pièce, en augmenter
un certain nombre et de ne pas regarder l'impact sur l'ensemble. Et
c'est ce que vous avez fait dans vos scénarios. Si nous augmentons le
nombre d'unités en éducation physique, quel autre choix
faisons-nous dans la configuration de la formation générale?
Parce que c'est ce dont il s'agit, de faire le choix de tous les cours qui sont
dans la formation générale. C'était là l'enjeu,
avec le message de base, de l'élargir, cette formation-là, et de
la renforcer. Alors, c'est dans ce contexte-là que s'est faite la
réflexion.
C'est pour ça que je vous pose des questions sur vos
scénarios. Je pense que vous avez quand même fait un effort.
Même si vous me dites que vous n'êtes pas un spécialiste
dans les unités, ça va, je n'ai pas de problème avec
ça, mais vous avez quand même fait des choix au niveau du contenu
des cours ou des thématiques. C'est pour ça qu'au point de
départ je vous posais la question sur le contenu général.
Donc, je sentais que vous étiez en accord même avec les choix
qu'on a faits au niveau de la philosophie ou des thématiques dans les
cours complémentaires.
Étant donné que, dans vos scénarios 2 et 2, ce que
vous faites, c'est que vous rétablissez les cours d'éducation
physique, mais toujours en rapport avec la langue, soit la langue maternelle ou
soit la langue seconde, vos choix se sont faits dans ce contexte-là.
C'est pour ça que je voulais très bien les saisir.
M. Delaney: Alors, pour le troisième, juste pour
compléter, on croyait que les 2/3 qui manquent justement sur le document
que vous avez pourraient être rajoutés à la langue seconde,
ce qui porterait la langue seconde dans le premier bloc à 2 et 2/3, ce
qui ferait qu'il y aurait 60 heures de langue seconde de moins, comparé
avec le projet de réforme. Je crois que la Fédération
nationale des enseignants et enseignantes du Québec a
présenté, hier, une alternative qui allait dans ce
sens-là, qui diminuait, peut-être, de 90 heures, si je ne me
trompe pas.
Mme Robillard: Oui. Et la Fédération autonome du
collégial en a présenté une autre...
M. Delaney: C'est ça. Alors...
Mme Robillard: ...qui incluait tous les cours de langue seconde.
Alors, vous voyez comment c'est difficile quand on regarde l'ensemble du
contenu...
M. Delaney: Oui.
Mme Robillard: ...de la formation générale, et
c'est dans ce contexte. Ça va. Je saisis bien, M. Delaney.
M. Delaney: O.K. Alors, étant donné que personne
n'a la réponse pour dire exactement le nombre de cours, surtout en
termes de langue seconde, dont on a besoin pour atteindre les objectifs,
là, on pensait que, si on pouvait atteindre les standards, avec un cours
de deux unités et deux tiers, ça pourrait suffire. Si jamais on
n'atteint pas les standards avec la proposition qu'on a, on pourrait exiger ou
demander à l'élève de prendre un deuxième cours de
langue seconde, mais dans le bloc 3. C'est dans ce sens-là qu'on a fait
la proposition.
Mme Robillard: Parfait. Alors, ça va pour les
scénarios. Je saisis bien le raisonnement qui vous a animés pour
faire ces choix, M. Delaney. Revenons à certaines de vos
recommandations, de façon spécifique, à la page 31 de
votre mémoire. À la recommandation 5, je voudrais bien saisir le
contenu de la recommandation quand vous dites: «Que le gouvernement
prenne les dispositions pour qu'un programme quotidien d'éducation
physique soit appliqué à tous les niveaux du système
d'enseignement dans les meilleurs délais.» Expliquez-moi
ça, là. Et est-ce que ça va de la prématernelle
jusqu'au doctorat?
M. Delaney: Pas nécessairement. Dans tout les
systèmes scolaires, que ça soit au Canada, aux États-Unis,
il y a des choix à faire. Vous êtes ici et vous devez faire des
choix, et vous avez des choix dans la réforme que vous nous avez
présentée. Dans plusieurs provinces, on s'aperçoit qu'il y
a des gouvernements qui prennent des décisions qui vont dans ce
sens-là, qui introduisent des programmes d'éducation physique
quotidienne de qualité c'est le titre du programme au
niveau primaire et au niveau secondaire, et ils croient augmenter davantage
l'accès à l'éducation physique en continuant d'offrir des
programmes semblables. Maintenant, nous autres, sachant très bien que ce
n'est pas nécessairement le moment opportun pour proposer qu'on passe de
quatre cours à l'éducation physique quotidienne, on a
proposé tout simplement que ça pourrait être
intéressant et que ça pourrait être utile, étant
donné les études qui existent déjà, qui
démontrent que la performance à l'école peut être
améliorée si on fournit à l'élève la
possibilité de faire de l'éducation physique sur une base
quotidienne; et là, on a l'étude de Pierre-de-Coubertin,
Trois-Rivières, etc.
Le Président (M. Gobé): Alors, merci, M. Delaney.
Mme la ministre me fait signe que, pour cette période-ci, elle a
terminé, mais elle reviendra par la suite; il lui reste un peu de temps.
Et nous allons donc maintenant demander à M. le porte-parole de
l'Opposition officielle de bien vouloir commencer sa période de 20
minutes. M. le député, vous avez la parole.
M. Brassard: Oui. Je voudrais souhaiter la bienvenue, moi aussi,
aux représentants de la Confédération des
éducateurs et éducatrices physiques du Québec, et
également les remercier pour le dossier très étoffé
qu'ils ont constitué sur l'éducation physique dans le
réseau collégial. (18 h 20)
Moi, je veux quitter les scénarios, là, parce que je pense
qu'on s'embourbe. Je n'ai pas l'impression que
c'est votre responsabilité de vous substituer à la
ministre et de concevoir comment les unités et les cours vont s'agencer.
Je pense que votre responsabilité, en tant qu'éducateurs et
éducatrices physiques, c'est de venir nous faire la preuve, la
démonstration qu'il faut maintenir les quatre cours d'éducation
physique dans le réseau collégial comme des cours
crédités obligatoires. C'est ça, je pense, que vous
êtes venus faire, et c'est là-dessus, moi, que je veux insister.
Parce que, s'il y a eu peut-être auparavant, il y a quelques
années, un certain laxisme en matière d'éducation
physique, comme il y en a eu peut-être également aussi dans
d'autres disciplines dans un réseau qui naît, qui se forme,
qui se met en place, c'est un peu normal qu'il y ait des dérapages
il reste que, depuis quelques années, il y a eu un travail de
resserrement quant au contenu et quant aux objectifs, de sorte qu'en 1992, je
pense, le ministère a sanctionné, en matière
d'éducation physique, des objectifs ministériels. Vous les
reproduisez dans votre mémoire. Je ne les cite pas. Il y en a 22,
là, mais ça porte sur le savoir, le savoir-faire et le
savoir-être. Il y a 22 objectifs ministériels. Ça veut donc
dire que le ministère assume ces objectifs-là, les a
assumés, les accepte, les a approuvés et a demandé aux
établissements collégiaux de les implanter et de faire en sorte
que les départements d'éducation physique s'organisent pour les
atteindre. C'est, je pense, d'ailleurs, ce travail-là qui est en cours,
travail d'implantation des objectifs ministériels.
Alors, la question, moi, que je vous pose, c'est: Est-ce que ces
objectifs ministériels sont toujours souhaitables, est-ce qu'il faut les
maintenir et est-ce que vous avez absolument besoin de 120 heures, donc de 4
cours crédités obligatoires, pour faire en sorte que les
étudiants et les étudiantes du réseau collégial
puissent les atteindre?
M. Delaney: Pour répondre à la première
question, lorsqu'on parle d'implantation des objectifs, je céderais la
parole à M. Laferrière.
Le Président (M. Gobé): Alors, M.
Laferrière, vous avez la parole.
M. Laferrière: Ça me fait plaisir. Pour atteindre
ces objectifs-là qui concernent particulièrement des attitudes
par rapport à la pratique de l'activité physique, qui concernent
également le développement d'habitudes de vie pour
prévenir les problèmes de santé et qui touchent aussi
d'autres facteurs dans le domaine affectif, tels que l'estime de soi, la
confiance en soi, la capacité à communiquer, à travailler
en équipe, la capacité à s'adapter à d'autres
personnes, à s'adapter à des environnements variés,
ça suppose que chacun des cours soit structuré en
conséquence. Il faut prévoir des situations d'apprentissage qui
requièrent l'utilisation d'outils tels que des fiches
d'évaluation formative, où l'étudiant peut observer et
apporter des corrections à ses comportements.
Il faut que l'étudiant ait d'abord l'occasion, en laboratoire,
dans le cours d'éducation physique, d'exercer ses comportements pour
pouvoir identifier ceux qui méritent d'être corrigés et
ceux qui méritent d'être améliorés. Et ça, en
deux cours, c'est-à-dire en deux contextes différents, c'est loin
d'être suffisant, alors que, dans quatre contextes différents,
lorsqu'il est exposé à un cours à dominante de
conditionnement physique, à un autre de sport correctif, à un
autre de sport plutôt individuel ou à une autre forme
d'activité telle que techniques de relaxation, l'étudiant peut
davantage atteindre l'ensemble de ces 22 objectifs. Si on nous coupe la
moitié de nos moyens, ça veut dire beaucoup moins
d'activités d'apprentissage structurées qui permettent
d'atteindre ces objectifs-là et, à ce moment-là, nous ne
pouvons définitivement pas rejoindre l'ensemble des 22 objectifs.
Et, pour répondre à la deuxième question, à
savoir si c'est de quatre cours dont on a besoin, je céderais la parole
à M. Pierre Brodeur, du cégep Saint-Jean-sur-Richelieu.
Le Président (M. Gobé): Alors, M. Brodeur, vous
avez la parole.
M. Brodeur (Pierre): II faut peut-être remettre ça
aussi dans le contexte historique du Québec. Le bloc des quatre cours de
philo, quatre cours de français, quatre cours d'éducation
physique, ça visait, à l'origine, la formation
générale qui était partagée par tous les
élèves d'un même cégep, qu'ils soient du
professionnel ou du général, sur deux ans, quatre sessions.
Ça devenait des lieux où il y avait de ces échanges qu'on
voulait même dans l'esprit des collèges d'enseignement
général et professionnel. On voulait qu'il y ait une rencontre
entre ces deux champs d'études.
Au plan pédagogique, compte tenu des objectifs
ministériels et des objectifs de la formation fondamentale, compte tenu
des expériences et des situations éducatives qui sont
proposées sous forme de programmes organisés dans les
collèges parce que les collèges n'offrent pas simplement
un éventail libre de cours qu'on choisit un peu n'importe comment
la tendance a été de travailler avec des blocs ou avec des
scénarios de cours que les élèves pouvaient choisir.
compte tenu aussi de l'expérience accumulée et des études,
donc, par ceux qui observent les pratiques d'éducation physique et aussi
par les élèves qui témoignent, dans le contexte qu'on
connaît, sur la valeur et la portée de cette gestion d'une
éducation physique sur 2 ans, on sait, par exemple, que plus de 90 % des
élèves se disent actuellement satisfaits des cours
d'éducation physique. je peux vous dire qu'il y a 25 ans, ce
n'était pas nécessairement le cas. quand on a commencé
à enseigner l'éducation physique dans les collèges, il
fallait faire la preuve de l'éducation physique. il fallait même
travailler à développer des attitudes positives envers
l'éducation physique. on a obtenu ce que j'appelle un résultat
pédagogique dans le domaine de l'éducation, c'est cette attitude
envers... et c'est pour ça que
les élèves, d'une part, sont satisfaits et demandent de
maintenir les cours d'éducation physique.
Une autre enquête même un peu plus étonnante,
celle-là nous dit que 70 % des anciens élèves des
cégeps, quand on les questionne, nous disent que l'éducation
physique et les mathématiques comptent parmi les activités les
plus formatrices qu'ils ont eues au collège; mathématiques et
éducation physique. Nous, on était un peu satisfaits d'un
résultat comme celui-là, même qu'on ne s'y attendait pas.
(18 h 30)
Actuellement aussi, dans les collèges, il faut voir les
percées de la formation fondamentale à laquelle
l'éducation physique est adaptée. Nous n'avons pas il faut
bien le reconnaître les contraintes de programmes qui
mènent à l'université. Nous n'avons pas les contraintes
des antécédents ou des prérequis. Nous prenons la
population étudiante telle qu'elle est et nous travaillons avec elle au
plan éducatif. Et, ce travail, ce n'est pas un travail qui peut se faire
spontanément dans une session. C'est un travail qui se fait pendant le
passage de l'élève au cégep. Et un des avantages, c'est
que, sur quatre périodes, il y a cet éventail d'activités.
Il y a aussi la multiplication des occasions où des élèves
du général, du professionnel, garçons ou filles de tous
les groupes d'études, peuvent se rencontrer et participer à des
expériences éducatives.
Mais je ne pourrais pas vous faire une démonstration
scientifique, coulée dans le béton, pourquoi quatre cours. Il
vient un moment donné où il faut continuer à exercer un
choix à partir de valeurs et d'une orientation qu'on a en
éducation.
M. Brassard: Oui mais, moi, ce que je vous demandais, c'est
qu'à partir du moment où les objectifs ministériels sont
maintenus à moins qu'on nous dise: On les fait sauter, les
objectifs c'est de quatre cours dont vous avez besoin pour les atteindre
raisonnablement. Mais vous faisiez allusion, tout à l'heure, aux filles,
aux étudiantes. On nous dit que c'est peut-être encore davantage
important pour les étudiantes, pour les femmes, l'éducation
physique au collégial. Je ne sais pas si c'est parce qu'elles ont
peut-être moins tendance ou qu'elles sont peut-être moins
portées à ce genre d'activité. Qu'en est-il
exactement?
Mme O'Bomsavvin (Hélène): Par le fait que le projet
de réforme aura un impact sur la représentation des femmes dans
le corps professoral, il en va de même sur les étudiantes du
réseau collégial. En effet, les étudiantes en formation
auront peine à s'identifier à des modèles féminins
dans un secteur traditionnellement masculin. Aussi, nous verrons
disparaître du curriculum en éducation physique plusieurs cours
répondant spécifiquement aux attentes et aux besoins des filles
et des femmes qui, elles, vont rester, par exemple, la danse contemporaine, la
relaxation, le mouvement expressif, l'autodéfense, etc., ce qui aura
pour conséquence de diminuer la diversité des expériences
et des variétés de contextes permettant d'assurer une poursuite
dans l'avenir et de garder les filles plus actives. Il en est de même
concernant la typologie des cours qui facilitent des conditions mettant en
présence le décloisonnement des stéréotypes
masculins et féminins, par exemple, par les sports de plein air ou les
activités collectives où on sait que les femmes peuvent assurer
un certain leadership qui développe la confiance en soi et
l'autonomie.
En plus la méconnaissance du rôle de l'éducation
physique dans la formation fondamentale vient obnubiler l'apport de notre
discipline au développement des étudiants et plus
particulièrement des étudiantes au collégial. De nombreux
adultes de retour aux études nous font part de leur grande satisfaction
face à l'accès à cette dimension privilégiée
qu'est le rapport au corps. On sait que le rapport au corps est quelque chose
de très intime et on se pose la question: Comment ça va se passer
s'il y a beaucoup moins de femmes dans les départements
d'éducation physique, entre autres?
Mais toute cette formation exige du temps pour observer,
expérimenter et intégrer de nouvelles compétences en
matière de comportement visant le concept de soi qui est au coeur
même de la définition qu'une personne a d'elle-même. La
perception de soi par le mouvement amène la personne à être
en mesure de consolider l'identité. Nous, en éducation physique,
nous faisons cela présentement. Développer sa conscience
corporelle permet ainsi de raffiner et d'améliorer l'usage que l'on fait
de soi-même dans la vie courante et dans la vie professionnelle et,
enfin, d'arriver à des accomplissements plus élevés, ce
qui fait place à la véritable contribution de l'éducation
physique au curriculum des collèges, nous permettant ainsi de viser
l'excellence, comme le souhaite Mme la ministre.
M. Brassard: je voudrais revenir un peu aux raisons
invoquées par la ministre dans le document, l'énoncé de
politique, pour ramener de quatre à deux les cours d'éducation
physique. bon, je vous avoue que je n'ai pas été très
impressionné, moi, non plus, par les raisons invoquées. mais, en
particulier, j'aimerais vous entendre sur quelques-unes de ces
raisons-là. on dit que, «dans les systèmes d'enseignement
supérieur canadiens étrangers, il n'y a
généralement pas d'activités physiques obligatoires et
créditées». vous l'avez invoquée, cette
raison-là, tout à l'heure, mais j'aimerais avoir peut-être
davantage de précisions, de même que sur cette espèce
d'énoncé lorsqu'on dit que «le cours obligatoire
crédité étant un moyen parmi d'autres, il est impossible
d'identifier le rapport entre exercice physique et santé à un
rapport nécessaire entre cours obligatoires d'éducation physique
et santé». qu'est-ce que vous pensez de ces motifs invoqués
par le gouvernement pour réduire de 50 % les cours d'éducation
physique?
M. Delaney: Pour ce qui est du premier que vous avez
mentionné, ce qui se passe au Canada, puis à l'étranger,
on considère, premièrement, que c'est imprudent de comparer un
niveau comme le collégial ou le
postsecondaire sans tenir compte de ce qui se passe dans l'ensemble du
système scolaire. Le résultat qu'on peut avoir chez un
élève, ce n'est pas simplement le résultat de deux
années ou de quatre cours, mais c'est l'ensemble du système
scolaire, c'est-à-dire ce qui se passe en éducation physique au
niveau primaire, au niveau secondaire, au niveau collégial,
universitaire.
Maintenant, lorsqu'on regarde les choix qui ont été faits
ailleurs au Canada, c'est certain qu'il n'existe pas d'éducation
physique au niveau postsecondaire. Mais, si, au lieu de dire postsecondaire, on
parle de préuniversitaire, puis qu'on se compare aux autres provinces,
on trouve là qu'on est déficients. Lorsqu'on regarde en
matière d'éducation physique, éducation à la
santé, c'est clair qu'on a beaucoup moins d'heures en éducation
physique pour nos élèves comparé aux élèves
à l'extérieur. lorsqu'on regarde dans d'autres pays, aux
états-unis, là, on trouve de l'éducation physique aux
niveaux primaire, secondaire, collégial et universitaire. au niveau
universitaire, c'est crédité dans 65 % des universités et
des collèges qui comptent 4 ans d'études, mais c'est certain
qu'ici au canada il y a très peu d'éducation physique rendu au
niveau postsecondaire. mais, comme je vous dis, c'est les choix qui ont
été faits.
Nous autres aussi, on a fait des choix. On a choisi d'avoir deux heures
au niveau primaire, deux heures au niveau secondaire, deux heures au niveau
collégial. Maintenant, si on coupe les heures au niveau collégial
sans tenir compte de ce qui se passe aux autres niveaux, nos
élèves vont être encore plus déficients qu'ils ne le
sont actuellement en matière d'éducation physique.
Pour ce qui est de la deuxième question, je céderais la
parole à Pierre Brodeur, s'il vous plaît. La deuxième
question, c'est concernant le...
M. Brassard: Le rapport, là... M. Delaney: Oui.
M. Brassard: ...entre exercice physique et santé qu'on dit
impossible d'identifier au rapport nécessaire entre cours obligatoires
d'éducation physique et santé.
M. Brodeur: Oui. Ce n'est pas simple de se sortir de ça
parce que c'est une sorte d'exigence indémontrable, d'une certaine
façon, qui est, à la limite, démagogique. On pourrait se
poser d'autres questions. Quel rapport y a-t-il entre l'enseignement de la
philosophie et la pensée rationnelle du peuple? On pourrait se demander:
Quel rapport entre l'enseignement de la chimie et de la physique et l'esprit
scientifique dans la population? On ne peut que démontrer la
contribution mais ça, on peut le faire plus ou moins
grande à un champ d'action social ou à un état quelconque
dans la population, mais certainement pas un lien de cause à effet. Dans
le domaine social, il est très difficile de faire ce genre de relation
de cause à effet, entre autres, sur l'effet de deux heures ou trois
heures sur la vie d'une personne.
Mais pourquoi exiger une telle démonstration de la part de
l'éducation physique seulement on pourrait s'interroger
là-dessus et pas des autres contenus d'enseignement relativement
à leur champ d'action social? Il y a comme une façon de
procéder avec l'éducation physique... Je ne sais pas si ça
relève de préjugés ou de méconnaissance, mais on a
des exigences envers l'éducation physique qu'on n'a pas
nécessairement envers les autres matières et les autres contenus
de l'enseignement collégial.
Maintenant, si on cherche un rapport nécessaire, c'est un rapport
nécessaire de l'ordre de l'histoire d'une société et d'une
culture qui fait que les citoyens vivent plus longtemps en meilleure
santé, avec une meilleure qualité de vie, que les conditions dans
lesquelles ils vivent sont là pour contribuer à la fois à
leur santé, à leur éducation, à leur culture et
même à leur travail. Et parfois on fait des choix pour
répondre à leurs besoins au-delà de l'utilité
immédiate ou de la démonstration scientifique qui, je l'avoue,
est très difficile à faire. (18 h 40)
Le Président (M. Gobé): Alors, c'est...
M. Brassard: Ça va?
Le Président (M. Gobé): Oui, si vous avez une
petite question rapide, mais je vais devoir passer la parole à M. le
député de Jacques-Cartier. Je vais vous laisser quand même
conclure, M. le député de Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: Ça concernait l'accès aux
équipements sportifs. Une fois qu'on aura coupé de 50 % les
cours, est-ce que vous êtes bien convaincus que les étudiants et
étudiantes vont continuer de fréquenter les équipements
sportifs et de se livrer à des activités physiques?
M. Larouche (René): En fait, le processus de participation
ne se limite pas à un seul facteur. Quand on analyse le taux de
participation des individus, il faut regarder un ensemble
d'éléments. Il faut surtout regarder le processus. Ce n'est pas
tout de laisser les magasins ouverts le soir ou les fins de semaine pour dire
que les gens vont aller magasiner, ou de laisser les bibliothèques
ouvertes pour dire que les gens vont aller lire ou consulter des volumes
davantage.
Donc, c'est un des facteurs et c'est un des facteurs relativement peu
importants quand on regarde certaines recherches. Entre autres, en Ontario,
ça correspond, chez les gens qui ne participent pas, uniquement à
20 % des motifs invoqués. Le principal motif, autant chez les hommes que
chez les femmes et chez les étudiants, c'est le manque de temps et le
manque d'argent. Et on est confrontés là à un
problème majeur qui est beaucoup plus important que de dire: Bien,
«open house», laissons les gymnases et les piscines ouverts et les
gens vont participer de toute façon.
Imaginons un scénario probable: 12 étudiants se
présentent un matin à 9 heures pour jouer au badminton, 14
au basketball, 18 au volleyball. Comment on va pouvoir gérer la pratique
libre des activités physiques dans un tel désordre
pédagogique et simplement administratif? Donc, si on regarde le
processus de participation, vous avez, en annexe A, une étude qui a
été faite dans les cégeps du Québec, à
savoir: est-ce que les gens participent ou ne participent pas? Quels sont les
motifs? Et, simplement l'ouverture des locaux, c'est un facteur relativement
mineur.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. le
député de Lac-Saint-Jean. M. le député de
Jacques-Cartier, vous avez une question?
M. Cameron: Merci. On voit aujourd'hui beaucoup de profs
d'éducation physique et, je suppose, beaucoup aussi avec la permanence,
n'est-ce pas? Si la réforme a lieu telle quelle ou à peu
près, est-ce qu'on voit ici les professeurs d'anglais et de
français de demain?
M. Delaney: Je n'ai pas tout à fait saisi la question, je
m'excuse. Oh! Vous parlez de nos professeurs d'éducation... Ce qui
semble être la proposition dans la réforme, c'est que les
professeurs d'éducation physique vont servir à faire de
l'encadrement, de l'orientation, etc., sauf que c'est loin d'être
précis. Puis, lorsque j'ai posé des questions pour savoir
exactement quelle sorte d'encadrement et quelles étaient nos expertises
qui nous permettraient de faire un tel travail, je n'avais pas de
réponse.
Ce n'est pas prévu actuellement qu'on enseigne la langue
maternelle ou la langue seconde. Peut-être qu'il pourrait y avoir du
perfectionnement qui permettrait à certains éducateurs physiques
d'enseigner une autre matière.
Le Président (M. Gobé): Merci. Mme la ministre, il
vous restait à peu près trois minutes.
Mme Robillard: M. le Président, merci. Vous l'avez dit,
choisir, dans le fond, c'est dire ce qu'on juge le plus prioritaire, le plus
important, dépendamment des valeurs et des orientations. Dans ce cas-ci,
le gouvernement a choisi d'accorder la priorité à la
maîtrise des langues, une priorité no 1 pour les jeunes du
Québec. Alors, vous comprendrez bien que, vos propositions, je vais les
examiner, mais sûrement pas en diminuant l'enseignement des langues;
c'est la priorité no 1. Alors, je pense qu'il faut les regarder dans un
autre cadre et ça nous amène à examiner l'ensemble du
contenu de la formation générale, à ce moment-là.
Sachez que votre mémoire d'aujourd'hui a été
analysé en détail. Mais vous nous avez soumis d'autres documents
aujourd'hui. On a reçu une chemise complète. Nous ferons aussi
une analyse très sérieuse de toutes les argumentations que vous
nous apportez en commission parlementaire. Merci bien d'être venus.
Le Président (M. Gobé): Alors, M. Delaney, ainsi
que tous les gens qui vous accompagnent et tous les gens qui sont dans les
tribunes, je tiens à vous remercier au nom de tous les membres de cette
commission. Je veux dire que je fus fortement impressionné par
l'atmosphère de cette commission et je souhaite que ça puisse
porter fruit. Ceci met fin à nos travaux, et je vous remercie
d'être venus. La commission est maintenant ajournée à
demain, 10 heures.
(Fin de la séance à 18 h 46)