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(Dix heures dix minutes)
Le Président (M. Gobé): Mesdames et messieurs, si
vous voulez bien prendre place et faire le silence, la commission de
l'éducation va entreprendre ses travaux.
Bonjour à tout le monde. Il me fait plaisir de vous accueillir ce
matin et, sans plus tarder, je vais vous informer du mandat de notre
commission, qui est de tenir des consultations particulières sur le
projet de loi 82, Loi modifiant la Loi sur les collèges d'enseignement
général et professionnel et d'autres dispositions
législatives. La séance est donc maintenant ouverte. Y a-t-il des
remplacements, Mme la secrétaire?
La Secrétaire: Aucun remplacement, M. le
Président.
Organisation des travaux
Le Président (M. Gobé): Alors, je vais maintenant
faire lecture de l'ordre du jour. Ce matin, dès 10 heures, nous allons
entendre la Fédération des cégeps; par la suite, à
11 heures, l'Association des collèges privés du Québec;
nous suspendrons à midi pour reprendre à 15 heures où nous
entendrons la Confédération des syndicats nationaux; à 16
heures, la Chambre de commerce du Québec et la Chambre de commerce du
Montréal métropolitain; à 17 heures, nous entendrons les
représentants de La Confédération des caisses populaires
et d'économie Desjardins du Québec; nous suspendrons à 18
heures pour reprendre à 20 heures où nous entendrons l'Institut
canadien d'éducation des adultes; à 21 heures, ce sera le tour
des représentants de la Fédération des associations de
parents des cégeps du Québec et nous ajournerons aux alentours de
22 heures.
M. Brassard: M. le Président...
Le Président (M. Gobé): M. le député
de Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: ...en dehors des groupes qui sont prévus pour
ces audiences particulières, aujourd'hui, vous venez de les
nommer...
Le Président (M. Gobé): C'est exact.
M. Brassard: ...mais pour demain, jeudi et vendredi, est-ce que
le Secrétariat des commissions a reçu d'autres demandes d'autres
groupes qui ne font pas partie de cette liste-là et qui auraient
souhaité être entendus?
Le Président (M. Gobé): Oui. On m'informe qu'en
effet un certain nombre de demandes ont été envoyées pour
témoigner devant la commission, mais on me fait savoir aussi que la
Chambre a décidé... L'ordre de la Chambre a
déterminé les groupes qui seraient entendus. Et, pour cette
journée d'aujourd'hui, je viens de faire, donc, lecture de l'ordre du
jour et cet ordre est exécutoire vu que c'est un ordre de la
Chambre.
M. Brassard: Est-ce que la commission pourrait prendre
connaissance ou avoir entre les mains les demandes de groupes qui ne font pas
partie de la liste retenue par la motion adoptée en Chambre?
Le Président (M. Gobé): Oui. Je ne vois pas de
problème parce que c'est du domaine public de toute façon. On
pourra vous le faire parvenir, M. le député. Il faudra
peut-être faire un peu de recherche et on ne veut pas faire attendre les
gens qui attendent pour témoigner.
M. Brassard: D'accord.
Le Président (M. Gobé): Donc, je pourrai vous le
faire parvenir plus tard dans le courant de la session.
M. Brassard: Et comment va-t-on disposer de ces demandes?
Le Président (M. Gobé): Pour les groupes qui sont
déjà désignés, c'est un ordre de la Chambre. La
commission, en séance de travail, peut déterminer les horaires,
peut déterminer le temps, peut déterminer les groupes. Alors, il
faudrait peut-être voir, s'il y avait des demandes
supplémentaires, à ce que la commission et ses membres qui sont
souverains puissent se prononcer là-dessus. Mais je fais remarquer qu'il
est déjà arrivé ce genre de situation et qu'à ce
moment-là c'est l'ordre de la Chambre qui avait prévalu, n'ayant
pas d'entente entre les membres de la commission. Donc, ça veut dire
que, si nous n'avons pas le consentement unanime de tous les membres de cette
commission, nous ne pourrons malheureusement déroger en quoi que ce soit
à l'ordre de la Chambre. Alors, il y a déjà eu un peu de
jurisprudence là-dessus, mais...
M. Brassard: Alors, vous allez déposer ces
demandes-là.
Le Président (M. Gobé): Oui, oui, certainement. Mme
la secrétaire en a pris note et, dès qu'elles seront disponibles,
il me fera plaisir de les faire distribuer à chacun des membres de la
commission.
M. Brassard: Très bien.
Le Président (M. Gobé): L'ordre du jour, si je
comprends bien, pour cette première journée est donc
adopté.
Normalement, selon l'ordre de la Chambre, il n'y a pas de temps
prévu pour des déclarations d'ouverture car nous devions
commencer à 10 heures pour entendre le premier groupe. Mais je crois
qu'il serait bienséant que chacun des partis puisse s'adresser quelques
minutes aux gens qui sont ici pour cette première journée et,
donc, faire quelques déclarations. Et, s'il y a consentement des
membres, nous allons déroger un petit peu à cet horaire
très strict de 10 heures pour prendre peut-être 5 ou 10 minutes de
chaque côté pour des déclarations d'ouverture. Y a-t-il
consentement?
M. Brassard: Quelques minutes.
Le Président (M. Gobé): Quelqes minutes, oui,
n'excédant pas une dizaine de minutes maximum, en se fiant à la
bonne volonté de chacun des membres. Alors, on commence par vous,
madame, ou par vous, M. le député de Lac-Saint-Jean?
M. Brassard: Généralement, on ne commence pas par
le...
Le Président (M. Gobé): Bien, vu que ce n'est pas
dans l'ordre du jour, on laisse ça au libre choix de chacun des
deux.
Déclarations d'ouverture M. Jacques
Brassard
M. Brassard: Très rapidement, M. le Président. Je
n'ai pas l'intention d'entrer dans le détail ou d'aborder le fond des
choses. Je pense qu'on va le faire en échangeant avec nos
invités. Je commencerai d'abord par regretter, quant à moi,
qu'à la suite d'échanges avec les ministériels, et
particulièrement le leader du gouvernement, nos propositions, à
nous, de l'Opposition, n'aient pas été toutes retenues. Le
gouvernement ayant d'abord proposé une liste d'intervenants ou
d'invités qui nous apparaissait, quant à nous, insuffisante, nous
avons proposé un certain nombre d'autres groupes. Plusieurs ont
été retenus, nous en sommes fort heureux. Je pense à la
fédération des associations de parents, à l'ANEEQ, aux
professeurs d'éducation physique, aux professeurs de philosophie.
Mais nous avions aussi demandé que les conseils soient
invités, le Conseil permanent de la jeunesse, le Conseil
supérieur de l'éducation, le Conseil des collèges et le
Conseil des universités, quatre organismes qui ont un rôle aviseur
majeur dans notre système d'éducation qui ont d'ailleurs, pour la
plupart, rédigé et rendu publics des rapports très
substantiels, très étoffés sur l'ordre d'enseignement
collégial. Je pense, en particulier, au Conseil permanent de la
jeunesse, au Conseil supérieur de l'éducation et au Conseil des
collèges. Il aurait été extrêmement utile,
bénéfique et enrichissant qu'on puisse les avoir comme
invités. Malheureusement, le gouvernement a refusé d'entendre ces
organismes dont le mandat principal est pourtant d'aviser, de conseiller le
gouvernement.
Je dirais aussi, en terminant, M. le Président, que nous
souhaitons, quant à nous, que cette consultation ne soit pas futile, que
ce ne soit pas une consultation bidon, pour la forme, pour la galerie, et que
les projets de loi et la proposition de régime pédagogique,
à la fin du processus, à la fin des audiences
particulières, soient exactement la même chose que ce qu'on avait
sous les yeux, devant nous, au début. Si c'est ça, je pense qu'on
conclura, quant à nous, que cette consultation a été tenue
uniquement pour la forme, pour la galerie. J'espère que ce n'est pas le
cas. J'espère que ce n'est pas une consultation qui sera futile. Les
intervenants ont quand même, sur bien des points, des réticences,
dans certains cas même des oppositions très fermes relativement
à telle ou telle proposition de renouveau de l'ordre de l'enseignement
collégial proposée par la ministre; j'espère que ces
remarques, que ces commentaires, que ces suggestions seront prises en compte et
que ça va donner lieu à des amendements, à des
modifications aussi bien aux projets de loi qu'au régime
pédagogique collégial.
Si ce n'est pas le cas, on devra conclure qu'on a passé une
semaine ensemble pour strictement rien, que c'a été tout à
fait futile et inutile. J'espère que ce n'est pas le cas et
j'espère que cette consultation particulière sera enrichissante
et utile pour tout le monde et, d'abord et avant tout, évidemment, pour
le gouvernement qui fait des propositions et qui a déposé des
projets de loi à l'Assemblée nationale.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. le
député de Lac-Saint-Jean. Mme la ministre, vous avez maintenant
la parole pour quelques minutes de remarques préliminaires.
Mme Lucienne Robillard
Mme Robillard: M. le Président, Mmes et MM. les membres de
la commission, c'est avec beaucoup de plaisir que je me retrouve avec vous
aujourd'hui au sein de la commission de l'éducation, je dois vous dire
avec beaucoup de fierté, beaucoup de fierté parce que nous avons
terminé nos travaux de la commission parlementaire large et ouverte de
l'automne dernier le 18 décembre. Le 6 avril, le gouvernement
déposait ses intentions en regard du renouveau collégial et, le
11 mai, nous nous retrouvons, dans des consultations particulières sur
le renouveau collégial. Alors, j'en suis fière parce que je pense
que tous les travaux qui ont été menés à date, de
tous les intervenants du réseau collégial, nous ont permis,
justement, de déposer ce renouveau collégial. C'est très
clair que, si nous avons décidé de procéder à
une commission parlementaire particulière qui débute
aujourd'hui, c'est parce que nous voulions entendre le point de vue des
différents intervenants. Ce n'est donc pas une commission parlementaire
bidon. D'ailleurs, j'ai été moi-même à même de
constater, à la lecture des différents mémoires, comment
plusieurs groupes ont fait une réflexion en profondeur. (10 h 20)
Par ailleurs, je tiens à vous dire que le renouveau
collégial, ce sont quand même des intentions gouvernementales
fermes qui sont là et que, donc, on devra me convaincre d'apporter des
ajustements. Et je pense que le danger qui nous guette peut-être,
ensemble, c'est d'apporter des ajustements à la pièce. Et il va
falloir être très prudents avec ça parce que le renouveau
collégial, c'est un système cohérent d'ensembles et, si on
apporte des ajustements, il faut regarder l'impact sur tous les autres
éléments.
Ce sera mon intention aussi de donner suite à cette commission
parlementaire dans le cadre du processus législatif qui suivra. Donc, M.
le Président, cette commission parlementaire, aujourd'hui, ce n'est pas
une formalité. Tout n'est pas coulé dans le béton mais,
par ailleurs, ce n'est pas, non plus, un château de cartes. Bons travaux
à tout le monde!
Le Président (M. Gobé): Alors, merci, Mme la
ministre.
Documents déposés
Juste avant d'inviter les prochains intervenants à venir prendre
place en avant, j'aimerais, pour répondre à la demande de M. le
député de Lac-Saint-Jean, déposer devant cette commission
deux demandes qui ont été faites pour être entendues:
l'association des étudiants du campus de l'Université de
Montréal et la Fédération des travailleurs du
Québec. Et je rappellerai que cette commission est une consultation
particulière et non pas une consultation générale et
qu'à ce titre, les invitations, ça ne se passe pas comme dans le
même cas, c'est-à-dire qu'il n'y a pas d'avis publics mis dans les
journaux pour inviter les gens à venir témoigner. C'est limitatif
étant donné que c'est une commission particulière, des
audiences particulières. Alors, le document est donc
déposé avec le consentement de tout le monde? Et vous pourrez en
obtenir copie, M. le député de Lac-Saint-Jean.
Voilà! Ceci met donc fin aux préliminaires de notre
commission et, sans plus attendre, maintenant, j'inviterais les
représentants de la Fédération des cégeps à
bien vouloir venir prendre place en avant, le plus rapidement possible.
Auditions
J'en profiterai pour rappeler, pendant que vous prenez place, aux
membres de la commission que nous allons avoir une enveloppe d'une heure pour
chaque groupe; 20 minutes étant allouées à la partie qui
vient porter témoignage, pour expliquer son mémoire ou sa
présentation. Par la suite, 20 minutes sont réparties pour chaque
groupe de parlementaires, du gouvernement et de l'Opposition, et on va faire en
sorte de se tenir autant que possible dans le temps pour éviter que
cette commission ne déborde les horaires et qu'on ne finisse plus.
Bonjour, messieurs, madame. Je demanderais au représentant officiel, au
porte-parole de votre groupe, de bien vouloir se présenter et
présenter les gens qui l'accompagnent.
Fédération des cégeps
M. Leduc (Pierre): Avec plaisir, M. le Président. À
ma droite, M. Pierre Parent, le vice-président de la
Fédération des cégeps et le président du conseil
d'administration du cégep de Rosemont. M. Parent est aussi le directeur
du bureau de développement de l'Université du Québec
à Montréal. À sa droite, Mme Louise Chené,
directrice des services pédagogiques du cégep de Sainte-Foy et la
présidente de la Commission des affaires pédagogiques de la
Fédération des cégeps. À ma gauche, M. Gerald
Brown, membre du conseil d'administration de la Fédération des
cégeps et le directeur général de John Abbott College. Et
moi-même, Pierre Leduc, directeur général du cégep
de Maisonneuve et président de la Fédération des
cégeps.
Le Président (M. Gobé): Alors, madame, messieurs,
bonjour. Vous pouvez donc maintenant commencer votre présentation.
M. Leduc: M. le Président, Mme la ministre de
l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Science, Mmes
et MM. les députés, membres de cette commission, la
Fédération des cégeps vous remercie de l'avoir
invitée à participer aux travaux de cette commission qui se
réunit à nouveau pour discuter d'enseignement collégial.
Nous sommes heureux d'avoir ici l'occasion de contribuer à rendre les
projets de loi et de règlement déposés encore plus
adaptés à la situation et aux besoins de l'enseignement
collégial, et des citoyens et citoyennes qui fréquentent le
réseau.
L'avis que nous avons préparé est le fruit d'une large
consultation et de délibérations prolongées du personnel
de direction des collèges et des présidents et présidentes
des conseils d'administration. Le dossier de la réforme a
été également l'objet d'échanges et de discussions
au sein de chacun des cégeps avec les différentes
catégories de personnel, les divers départements d'enseignement.
Il a été à l'ordre du jour des réunions des
commissions pédagogiques des conseils d'administration. Nous en avons
discuté avec plusieurs de nos partenaires socio-économiques et
à un nombre considérable de tribunes publiques. Tout comme
à l'automne dernier, ce fut l'occasion d'une réflexion
très féconde sur les enjeux de l'ordre collégial. L'avis
que nous déposons traduit les choix explicites et significatifs
à
l'intérieur desquels entend évoluer le réseau des
cégeps.
D'entrée de jeu, nous vous disons que la Fédération
des cégeps retrouve dans les textes ministériels soumis à
la consultation l'essentiel de ses propres préoccupations à
l'endroit du devenir des cégeps. Les priorités de
développement que nous avions mises au point lors des travaux de la
commission en novembre, les pôles d'intégration dont nous
étions convenus ont pour la plupart, sinon tous et toutes, trouvé
leur place dans les intentions gouvernementales et dans les textes qui en ont
émané.
Cela nous agrée. Nous sommes donc avec ces projets en terrain
solide, un terrain que nous avions reconnu et balisé. Le système
d'enseignement collégial, qui a 25 ans, s'est trouvé, au fil des
ans, un peu engoncé dans des formules trop arrêtées, trop
rigides. Il fallait obligatoirement faire bouger la machine,
déverrouiller quelques issues. C'est ce que permettront les projets
ministériels et ce n'est pas leur moindre mérite.
Nous sommes très heureux qu'au terme de ces travaux de
réévaluation du collégial le cégep apparaisse
encore, sinon davantage, comme un choix judicieux pour le Québec
d'aujourd'hui. Voilà un acquis qui n'émergeait pas de
façon aussi évidente dans le, paysage socio-économique du
Québec, il y a à peine un an.
Des collèges d'enseignement supérieur. Nous retenons
surtout de ces travaux qu'avec le renouveau annoncé les cégeps
seront davantage intégrés au réseau de l'enseignement
supérieur. Les cégeps seront dorénavant dotés d'une
plus grande autonomie, notamment à l'égard de la gestion de leurs
programmes d'enseignement, ce qui constitue l'essentiel de leur mission. Chaque
établissement devra assumer ses propres choix à l'égard
des objectifs et des standards nationaux de compétence et cette
responsabilité conduira chaque établissement à pouvoir
émettre, à terme, ses propres diplômes.
De plus, même si la mission des cégeps demeure
inchangée, la loi reconnaît aux corporations plusieurs pouvoirs
complémentaires qui ne sont de fait que la consécration des
compétences développées par les collèges depuis
1967, en formation de la main-d'oeuvre, en transferts technologiques, en
recherche, en développement régional, en coopération
internationale, etc. Bref, les cégeps seront dorénavant mieux
reconnus comme des établissements autonomes et responsables, avec des
champs d'intervention diversifiés, avec des pouvoirs d'intervention
crédibles. Cela marque un changement appréciable.
Il faut noter cependant que les textes ministériels, tout en
consacrant cette nouvelle personnalité des cégeps, semblent par
ailleurs vouloir resserrer l'encadrement administratif et financier. Dans notre
mémoire, nous relevons cette tendance à oublier parfois la voix
consultative des collèges, à réglementer sur les
règlements qu'un collège doit se donner, même s'il s'agit
de matières nettement du ressort des établissements. Les
collèges entendent plutôt se définir plus comme des
partenaires et des partenaires responsables et moins comme des succursales du
pôle central.
Par ailleurs, ces cégeps autonomes devront, à titre
d'établissements publics responsables, rendre compte de leurs
performances à une commission d'évaluation dont les rapports
seront publics. C'est la contrepartie, souhaitée par les
établissements eux-mêmes, de leur marge de manoeuvre accrue. Le
réseau des collèges avait clairement pris position sur ce dossier
et la formule retenue par le ministère nous agrée. Nous estimons
cependant que le mandat de la Commission doit être élargi pour
inclure également l'impact des politiques et des mesures
ministérielles sur la gestion des programmes par les collèges,
aussi bien que l'impact des ressources affectées par le ministère
aux programmes mis en oeuvre par les établissements. On ne peut, de
fait, séparer la mise en oeuvre des programmes de leur base
administrative et financière. Voilà donc une première
ligne de fond qui se dégage assez nettement de l'ensemble des facettes
de cette réforme: autonomie et responsabilités accrues,
imputabilité, comptes à rendre. C'est à cette enseigne que
logeront désormais les cégeps. À ce seul titre, le
changement est marquant. (10 h 30)
De nouvelles exigences de formation. La qualité de la formation
constitue une autre ligne de fond de cette réforme. Les collèges
entendent maintenir et améliorer leurs standards et leurs exigences, et
les projets ministériels viennent consigner cette volonté.
Faut-il rappeler qu'il s'agit ici du seul et vrai but des cégeps et que,
si l'on se réjouissait il y a un instant de la responsabilité
accrue des cégeps, ce n'est que dans la perspective où ils
pourront donner un enseignement crédible, un service à la
cité qui soit vraiment au-dessus de tout soupçon?
Les conditions d'accès aux collèges seront
dorénavant plus exigeantes. Maintenant, certaines matières de
base seront obligatoirement réussies à la cinquième
secondaire, de sorte qu'elles soient de meilleurs gages de succès au
collégial et même à l'université. Ces nouvelles
exigences devraient limiter la propension à l'abandon, à
l'échec, au décrochage. Bien mieux encore, à la
perspective de pouvoir continuer les études au collégial sera
maintenant intégré, dès le secondaire, un discours
où l'on valorise l'effort, la réussite, l'excellence. Mais nous
souhaitons qu'à moyen terme tous les élèves du secondaire
soient ainsi appelés à réussir ces matières de base
pour avoir accès au diplôme d'études secondaires qui est la
porte d'entrée du collégial.
Une fois arrivés au collège, les élèves qui
présentent encore des risques élevés d'échec ou
ceux et celles qui sont aux prises avec des problèmes d'orientation ou
de mise à niveau pourront jouir de mesures particulières
d'encadrement et de soutien. C'est la systématisation de ce que les
collèges avaient déjà commencé de mettre en oeuvre
depuis quelques années. La Fédération appuie cette mesure
particulière, à condition que le contenu de ces sessions
d'appoint soit déterminé par les collèges eux-mêmes,
en fonction des besoins spécifiques des clientèles qu'ils
reçoivent. Voilà une mesure de soutien au cheminement
professionnel des élèves à laquelle nous
souscrivons d'emblée.
La formation générale. Elle était assez lourdement
critiquée. Elle sera, elle aussi, modifiée. C'était une
formation un peu figée dans quelques disciplines parallèles. On a
souligné qu'elle manquait de rigueur, qu'elle ne prenait pas en compte
les programmes auxquels étaient inscrits les élèves,
qu'elle aurait intérêt à élargir un peu ses
horizons. Le projet sur la table tente de corriger ces lacunes. La
Fédération appuie l'ensemble des mesures proposées
à ce chapitre qui devraient rendre plus crédibles les
démarches d'apprentissage proposées.
Nous sommes d'accord, parce que les champs abordés seront
effectivement un peu plus variés, parce que les programmes des
élèves interviendront dans l'enseignement d'une partie des cours
obligatoires, parce qu'une table de concertation nationale réunissant
les gens des collèges et leurs partenaires et il s'agit ici d'une
demande formelle de notre part devra définir un cadre plus
rigoureux pour l'ensemble de la formation générale. Et nous
sommes d'accord enfin parce qu'un contrôle national en langue maternelle
pourrait éventuellement être mis au point et que la
réussite de cet examen terminal sera préalable à
l'obtention du diplôme lui-même. Bref, nous retrouvons dans le
projet des objectifs de rigueur, d'adaptation et d'élargissement que
nous cherchions dans cette refonte nécessaire d'une composante
essentielle de nos projets de formation.
Il faudra bien veiller, cependant, à investir toute la
compétence des gens des collèges eux-mêmes dans
l'entreprise de redéfiniton des objectifs et des standards de cette
composante, sinon des activités elles-mêmes. Il faudra faire de
même, en particulier, avec les collèges anglophones pour la mise
au point des nouveaux cours d'«humanities», de leurs cours
d'anglais langue maternelle et de français langue seconde.
C'est en formation spécifique que l'approche programme doit
prendre toute sa dimension. Et cette approche, qui est du ressort des
collèges, se trouve quand même comme validée par la
nouvelle exigence d'une épreuve synthèse sur l'ensemble d'un
programme, épreuve que l'élève doit réussir,
à notre avis, pour avoir droit à son diplôme
d'études collégiales. Le programme apparaît
également comme un élément prépondérant en
étant au coeur du mandat de la nouvelle commission des études.
Cette dernière sera d'ailleurs composée, entre autres
participants, de responsables de programmes.
La Fédération souscrit à cette option sur le
programme vu comme l'axe intégrateur des démarches
d'apprentissage proposées aux élèves. C'est la
façon pour les collèges de corriger l'impression, au demeurant
fondée, que la formation reçue dans nos établissements
était comme éclatée en plusieurs approches
parallèles et indépendantes, ce qui accentuait les facteurs de
dispersion chez les élèves, les facteurs de
désappropriation de leur projet de formation, et qui jouait à
rencontre d'un éventuel projet éducatif pour
l'établissement lui-même. La réforme proposée vient
donc tenter de remédier à cette lacune majeure.
Il fallait aussi rénover les conditions de réussite au
collégial, un peu comme il fallait, nous l'avons vu, resserrer les
conditions de réussite au secondaire. C'est ainsi qu'on peut aborder la
question des droits de réinscription pour les élèves ayant
accumulé un certain nombre d'échecs. La Fédération
favorisait la mise au point d'une balise à l'exercice de la
gratuité scolaire dans la perspective d'une responsabilisation accrue
des élèves à l'égard de leur propre projet de
formation et également afin de contrer les tendances à la
surconsommation. La mesure proposée ici est présentée, de
plus, comme une incitation à la réussite. Cette mesure nous
semble acceptable, mais il faudrait cependant qu'elle prenne davantage en
compte les difficultés d'orientation des élèves au
début du collégial en n'intégrant pas dans son calcul les
échecs en formation spécifique en première session. De
plus, les droits de réinscription devraient demeurer au collège
et servir au développement de programmes d'encadrement des
élèves et de soutien à leur réussite.
Et, pour terminer sur ce sujet, nous estimons que la mise en oeuvre de
la mesure préconisée par le ministère ne devrait pas
enlever aux collèges le pouvoir de réglementer la
réinscription de leurs élèves à partir d'un
jugement et de critères proprement pédagogiques, tout comme c'est
déjà le cas sur le plan disciplinaire et tout comme est
habilitée à exercer ce pouvoir toute corporation autonome et
responsable.
Enfin, relativement à la formation collégiale dans son
ensemble, nous sommes heureux de voir qu'enfin nos programmes
préuniversitaires se feront en harmonisation avec nos partenaires des
universités dans la perspective d'un programme intégré
menant à un premier diplôme universitaire et que tous ces
programmes auront un poids relativement équivalent.
Pour ce qui est du secteur technique, nous rappelons expressément
qu'il devrait être mieux soutenu par les entreprises, notamment par le
biais d'incitatifs fiscaux qui faciliteraient le développement et
l'implantation des stages et des programmes d'enseignement
coopératif.
Nous tenons, par ailleurs, à souligner que le projet
ministériel n'accorde guère plus qu'une portion congrue aux
étudiants à temps partiel, nommément aux adultes qui,
comme individus, veulent améliorer leur employabilité et leur
formation en suivant par milliers des cours du soir, le plus souvent.
L'élargissement de l'enveloppe autorisée pour le financement de
ces cours est un élément positif, certes, mais relativement
timide.
De façon générale cependant, par l'ensemble des
mesures et des orientations relatives à la formation des
élèves, le projet ministériel rejoint des objectifs de
crédibilité accrue des collèges, d'exigences
resserrées, d'intégration de projets de formation à
l'intérieur des établissements et avec nos partenaires. Avec les
amendements que nous suggérons, les textes de base proposés
devraient permettre aux collèges de faire résolument les
corrections de parcours souhaitées et devenues nécessaires.
Les conditions de mise en oeuvre et de réussite.
On l'aura remarqué, une bonne partie, sinon l'essentiel de ces
mesures de renouveau consiste à redéfinir de nouveaux objectifs,
à établir des standards, à modifier des angles d'approche,
à recréer de nouvelles synergies autour de ces objectifs. En
somme, ce n'est pas une révolution dans les structures, dans les
organigrammes ou dans les systèmes, mais c'est surtout une nouvelle
façon de faire et de voir les choses. Et en cela, le projet est,
à notre point de vue, très valable, sauf qu'il risque fort de
demeurer à l'état de projet souhaitable si les conditions de mise
en oeuvre ne sont pas minutieusement prises en compte. Nous l'avons
souligné l'automne dernier, nous trouvons impérieux de le redire
aujourd'hui. (10 h 40)
D'abord, les ressources humaines. Ce projet est un projet
d'établissements d'enseignement. Tout changement souhaité
nécessitera beaucoup de concertation, mais également beaucoup
d'investissements auprès des gens des collèges pour qu'ils
s'approprient et qu'ils développent le savoir-faire nécessaire
à la gestion, à l'évaluation, au développement des
programmes, le savoir-faire requis également pour mettre au point de
nouvelles mesures, de nouvelles formules, de nouveaux projets d'encadrement et
de soutien des élèves.
Il faut dès maintenant prévoir des programmes
précis de recyclage et de perfectionnement, au besoin des programmes de
résorption des ressources humaines ou de mise à la retraite.
À tous égards, il faut des mesures respectueuses des personnes et
adaptées aux circonstances. En somme, il faut un programme de
changements planifiés dont les grandes lignes cependant échappent
aux responsabilités des établissements eux-mêmes pris un
à un.
Relativement au perfectionnement, il est clair que la gestion de ce
programme doit être rapidement décentralisée et que les
ressources qu'on y affecte doivent être accrues, à très
court terme, jusqu'à 2 % de la masse salariale, à notre avis.
Nous ne voulons pas, en somme, que l'investissement immense d'énergie et
de savoir-faire que le réseau et plusieurs intervenants ont fait dans ce
projet de réforme tourne court parce qu'on aurait mal planifié la
façon de faire le changement et le calendrier des opérations.
L'échéancier prévu doit procéder d'une
évaluation adéquate du processus de changement et intégrer
les lenteurs inhérentes à ce type d'opération. Et cela est
d'autant plus important à noter que le calendrier n'intègre
nullement quelque processus d'harmonisation de la réforme avec les
contraintes des contrats collectifs de travail. Il nous semble donc qu'il faut
bien apprécier le temps de bien faire les choses et toutes les choses,
mais ceci n'enlève en rien l'urgence d'agir promptement dans
l'intérêt des personnes qui fréquentent les
collèges.
Par ailleurs, cette réforme donne de nouvelles
responsabilités, de nouveaux mandats aux collèges. Elle
préconise de nouveaux objectifs de réussite, elle mise sur la
prise en charge par les collèges du développement, de la gestion
et de l'évaluation de leurs programmes. Cela ne peut se faire sans
l'ajout marqué de res- sources au-delà des ressources
d'enseignement proprement dites; des ressources ponctuelles pour l'implantation
de la réforme de l'ordre d'environ 18 000 000 $ ou 19000 000 $
répartis sur trois ou quatre ans, des ressources récurrentes pour
la mise en oeuvre de cette réforme à même les budgets des
allocations particulières actuellement centralisées. or, le
contexte économique actuel a pour effet que le gouvernement impose aux
cégeps, en ce printemps 1993, une des plus sévères
compressions budgétaires des 15 dernières années. cela
peut déstabiliser tout le projet souhaité de cette immense
entreprise de réforme.
L'on voit ici l'intérêt de créer, comme nous l'avons
indiqué dans le mémoire, un lieu de discussions entre le
ministère et les collèges sur le financement.
Voilà donc, mesdames et messieurs, l'essentiel de l'avis de la
Fédération des cégeps à l'endroit du projet. Il y
a, dans ce train de mesures, les éléments d'un renouveau
significatif des collèges à la condition qu'on y tienne un
meilleur compte de l'autonomie des collèges, mais tout le projet peut
être en quelque sorte fragilisé par des conditions de mise en
oeuvre trop discrètes ou par le manque de ressources
supplémentaires adéquates.
Cela dit, les collèges sont fiers d'avoir collaboré
étroitement à la configuration de leur avenir par ce lourd
investissement d'énergie, de savoir-faire et de sens de la perspective.
Nous sommes à pied d'oeuvre pour la suite des choses. Je vous remercie
à nouveau de nous avoir invités à cette table et je me
ferai maintenant un plaisir, en compagnie de mes collègues,
d'échanger avec vous sur le dossier.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. Leduc. Nous
allons donc entreprendre la période de discussions de 20 minutes
réparties de chaque côté de cette commission. Mme la
ministre, vous avez la parole. Je mentionnerai aux membres que vous
n'êtes pas obligés de prendre vos 20 minutes d'un seul trait. on
peut venir et repartir. mme la ministre, vous avez la parole.
Mme Robillard: Merci, M. le Président. Ça me fait
plaisir de saluer les représentants de la Fédération des
cégeps, madame et messieurs. Je vois que la Fédération des
cégeps accueille très favorablement le projet de renouveau. Je
note aussi que vous avez très bien saisi les enjeux qui sont
sous-jacents à cette réforme, cette vision du collège
québécois qui est là. Quand on affirme très
clairement que le collège québécois appartient à
l'ordre d'enseignement supérieur qu'il partage avec les
universités, ça veut dire des exigences très
particulières en termes d'autonomie, oui, mais en termes de
qualité, d'exigences. Et, dans ce sens-là, je vois que vous avez
très bien saisi les enjeux, et c'est ce dont il s'agit.
J'ai parcouru votre mémoire, malheureusement, tard hier soir.
Alors, vous me permettrez de vous questionner sur certains
éléments pour clarifier davantage la prise de position de la
Fédération des cégeps. D'abord, ça m'apparaît
très important que, comme Fédération des
cégeps ou comme direction des cégeps, vous mettiez en
lumière le fait qu'il faut la participation de tous et chacun pour
réussir ce renouveau de l'enseignement collégial, donc, de
l'ensemble des personnes qui sont impliquées dans les cégeps du
Québec. Et, M. le Président, vous avez fait, à la page 18,
une ouverture importante, et j'aimerais vous entendre, quand vous nous dites
que les voies tracées dernièrement par le Conseil
supérieur de l'éducation vous apparaissent
particulièrement prometteuses pour impliquer tout le personnel des
cégeps. On se rappellera qu'il s'agit du dernier rapport annuel du
Conseil supérieur de l'éducation, qui porte justement sur
l'approche de gestion de nos maisons d'enseignement, qu'il faut un
renouvellement de l'approche de gestion. Et là vous me dites: C'est fort
prometteur, ce que le Conseil nous dit. J'aimerais ça vous entendre, si
la Fédération a commencé à réfléchir
dans ce sens-là.
M. Leduc: Nous avons continué de réfléchir
sur ce dossier, Mme la ministre. C'est essentiellement... En tout cas,
l'allusion au rapport du Conseil supérieur, on le retient davantage
comme une invitation à s'investir dans cette orientation-là.
Parce que ce projet-là, c'est une projet, comme je l'ai laissé
entendre dans ma présentation, qui ne mise pas beaucoup sur la
révolution des structures, mais sur l'intégration des personnels
et des équipes dans les collèges. Chaque collège devient
une équipe qui prend en main son enseignement, notamment, aussi bien que
sa mission. Donc, le foyer, le point de convergence, ce sont les
établissements. Pour faire cela, il nous faut absolument
développer des sentiments d'appartenance. Il nous faut développer
des complicités avec nos personnels. Et nous disons résolument
que, selon l'invitation du Conseil supérieur, c'est là-dedans que
nous voulons aller de l'avant, par les moyens... Et les moyens sont nombreux.
Je ne les préciserai pas ici, bien sûr.
Cela dit, c'est une philosophie de gestion à laquelle nous
adhérons totalement, qu'il n'est pas, par ailleurs, toujours
aisé, dans le contexte que nous avons vécu, de mettre en oeuvre.
C'est un acte de foi que nous faisons dans cette façon de gérer
nos établissements. Au-delà de cela, peut-être que mes
collègues pourraient compléter ma réponse. Mais je ne peux
que dire que c'est une orientation générale qui nous
apparaît fondamentale pour qu'une réforme comme celle-là
puisse avoir des lendemains.
Mme Robillard: Est-ce à dire que vous concluez que
l'approche de gestion des collèges a besoin d'un renouveau?
M. Leduc: L'approche de gestion... Ce n'est pas tellement la
gestion comme telle que la conception qui s'est dégagée,
peut-être, des collèges au cours des années qui a fait que
les collèges ont été très souvent des pièces
détachées plus que des corporations et des équipes
intégrées. C'est davantage cela. Si vous voulez en faire un
problème de gestion, oui, je veux bien, mais très global dans le
sens que ça fait partie de l'ensemble des responsabilités de tous
les personnels des collèges que de s'accrocher à un projet comme
celui-ci. (10 h 50)
Mme Robillard: Je suis heureuse de constater cette ouverture de
la part de la direction des collèges.
M. le Président, j'aimerais ça qu'on revienne aussi sur la
partie qui concerne la réussite des études dont la
première mesure, comme vous le savez, vise la précision des
seuils d'admissibilité. Je saisis que la Fédération est
d'accord avec le rehaussement des exigences d'admission au collège et,
en même temps, vous me demandez, que les règles de sanction
prévues à l'article 69 du régime pédagogique du
secondaire soient rapidement mises en application. Pourriez-vous m'expli-quer
ça?
M. Leduc: Pour que, éventuellement, tous les
étudiants du secondaire et non pas seulement ceux qui viennent au
collégial puissent avoir un diplôme d'études secondaires
plus exigeant, que tout le monde ait réussi ces matières de base
que, dorénavant, les gens qui voudront aller au collégial devront
avoir réussies.
Mme Robillard: Alors, tel quel, tel que le régime
pédagogique avait été modifié, comme vous le savez,
en 1981, vous n'avez pas fait une réflexion particulière sur
ça. Vous me dites: L'article 69 tel quel, qu'il soit appliqué
à la sanction des études au niveau du secondaire.
M. Leduc: Exactement, pour améliorer les conditions de
réussite au collégial. Mme Chené, vous vouliez intervenir
là-dessus?
Mme Chené (Louise): Tout ce que je peux dire, c'est qu'il
y a un calendrier d'application de ce projet de régime
pédagogique du secondaire. Je crois qu'actuellement l'application en est
prévue pour 1997. Ce que nous disons, c'est que nous saluons
l'opportunité que vous nous donnez d'avoir des élèves
mieux préparés pour entrer au collégial à partir de
1995, mais que nous souhaitons, effectivement, que le calendrier prévu
s'applique.
Mme Robillard: J'aimerais ça vous entendre aussi
concernant l'encadrement des étudiants. Quand vous me dites que, pour
favoriser un meilleur encadrement des étudiants, il faudrait envisager
la possibilité d'établir des pondérations
différentes au niveau des cours, pourriez-vous être plus
explicites?
M. Leduc: Je vais demander à Mme Chené de vous
répondre, madame.
Mme Chené: Tout d'abord, permettez-moi de vous dire, Mme
la ministre, que c'est une dimension technique qui nous préoccupe
lorsque nous faisons cette recommandation, et nous la faisons maintenant,
puisque
vous aurez bientôt à définir les objectifs et les
standards des cours de formation générale.
Vous me permettrez de vous signaler qu'il ne s'agit pas de modifier le
nombre total d'heures d'enseignement donné à un
élève, mais d'en répartir autrement la pondération,
c'est-à-dire le découpage.
Vous me permettrez aussi d'utiliser un exemple pour plus de
clarté dans notre situation actuelle et non pas dans notre
situation future. Actuellement, les élèves doivent suivre quatre
cours de langue et littérature dont la pondération relative est
de 45 heures chacun. Ce que nous disons, c'est que, si, au lieu de quatre cours
de 45 heures, il y avait trois cours de 60 heures, pour un même nombre
d'heures d'enseignement de 180, nous obtiendrions deux avantages importants. Le
premier, c'est que le découpage durant la semaine d'une période
de quatre heures en deux-deux est plus rentable pédagogiquement que le
découpage en deux-un ou en trois. Et le deuxième avantage
extrêmement important, c'est que le professeur rencontrant plus souvent
les mêmes élèves, d'une part, en aurait moins, puisque sa
charge est établie par le nombre d'heures-contact qu'il a avec ses
élèves et, d'autre part, pourrait donc, de ce fait, mieux les
encadrer.
Ce que nous disons aussi, c'est que c'est une hypothèse de
travail que nous voudrions voir développer avec la DGEC pour qu'on en
analyse les possibles impacts. Mais nous pensons que le moment est
privilégié pour ce faire et qu'avec une mesure qui
n'entraîne aucun coût additionnel on peut renforcer la relation
maître-élèves.
Mme Robillard: Merci bien, Mme Chené.
Quant à la formation générale, au contenu de la
formation générale, dans votre mémoire, vous dites que
vous êtes en accord avec certaines réserves, une réserve
concernant, par exemple, les moyens d'apprentissage en éducation
physique fixés par le niveau ministériel, mais aussi concernant
la composante complémentaire où vous me dites: II ne faudrait pas
indiquer le nombre de crédits parce que vous dites: Utilisons le
mot «crédits» au lieu d'«unités» aussi
à chacun des domaines. Pour-riez-vous m'expliquer comment, dans
un tel système, à ce moment-là, on pourrait être
assuré de la complémentarité? Parce que c'est ça,
l'objectif. Il ne faudrait pas que la complémentarité, ce soit
dans un seul domaine, non plus.
M. Leduc: Ce serait également possible, selon nous,
madame, que la complémentarité s'applique dans un seul domaine.
C'est pour cela, d'ailleurs, qu'on demande essentiellement que le total soit
indiqué, mais non pas la répartition entre chacun des domaines.
Pour, par exemple, favoriser une formation complémentaire dans un
groupe, disons une mineure en langues, quelqu'un prendrait pour parler
en des termes qu'on comprend trois cours de langues. C'est une formation
qu'on peut estimer comme complémentaire à une forma- tion
scientifique. En tout cas, autant, en termes d'enracinement et
d'approfondissement, que de faire deux cours dans une discipline et un
troisième dans une autre discipline. Le troisième on
pourrait dire, l'étudiant va à peine aborder une discipline
pendant un seul cours pourrait être taxé aussi,
peut-être, un peu de papillonnage ou de superficiel. Il pourrait. En tout
cas, on ne l'interdit pas, mais on voudrait, par ailleurs, que ce soit possible
de s'appesantir un peu plus lourdement dans une formation
complémentaire. Voilà la raison.
Mme Robillard: Parfait.
Le Président (M. Gobé): Merci, Mme la ministre. Je
vous mentionne qu'il vous reste à peu près sept minutes encore
pour revenir. M. le député de Rimouski, vous avez demandé
la parole? On va la passer maintenant à M. le député de
Lac-Saint-Jean et, par la suite, nous retournerons à vous et je vous
rappelle que votre temps est sur le temps imparti à la ministre. M. le
député de Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: D'abord, M. le Président, je demanderais que
le mémoire complet de la Fédération des cégeps soit
déposé à cette commission. Ce que nous avons, nous, entre
les mains, seulement, et ce qui a été déposé au
Secrétariat des commissions, seulement, c'est le résumé de
cinq pages; ce qui veut dire que je n'aurai pas le privilège de vous
questionner sur la page 18 ou 22. Moi, ça s'arrête à
cinq.
Le Président (M. Gobé): M. le député
de Lac-Saint-Jean, en effet, je ferai une demande, comme président de
cette commission, pour que tous les mémoires puissent être au
moins déposés au moment du témoignage du groupe
invité afin que l'ensemble des parlementaires puisse en prendre
connaissance et ainsi participer aux travaux dans le meilleur
intérêt de la commission. Alors, peut-être qu'il y a eu un
oubli.
M. Brassard: Je vais quand même...
Le Président (M. Gobé): Si on pouvait le faire
distribuer rapidement, M. Leduc, ce serait important pour les membres de cette
commission. Alors, je vous remercie. M. le député de
Lac-Saint-Jean, vous avez la parole.
M. Brassard: Oui. Je vais quand même faire un effort pour
poser quelques questions.
M. Leduc: Le mémoire a été
déposé hier soir, à 16 heures, M. le Président.
Le Président (M. Gobé): La commission ne l'a pas
reçu, M. Leduc.
M. Leduc: Ça a été déposé
auprès de la commis-
sion hier après-midi.
Le Président (M. Gobé): Ma secrétaire m'a
informé qu'elle ne l'avait pas reçu.
M. Brassard: Bon. De toute façon, on va l'avoir entre les
mains. Ma première question porte sur les ressources financières,
M. Leduc. Dans un communiqué qui est paru récemment et qui
concernait, évidemment, les crédits 1993-1994 vous l'avez
d'ailleurs signalé de nouveau tout à l'heure vous
mentionniez que la compression de 20 000 000 $ prévue pour le
réseau des cégeps en 1993-1994, dans les crédits
gouvernementaux, constituait une des pires compressions en 15 ans. D'autre
part, l'autre jour, en commission parlementaire, interrogeant la ministre sur
les ressources qu'elle comptait injecter pour mettre en vigueur ses
propositions de renouveau, elle a parlé de 52 000 000 $ en vitesse de
croisière, au bout de cinq ans.
Vous mentionniez, dans votre communiqué, que cette compression
brutale, une des pires en 15 ans, pouvait avoir des effets négatifs sur
la mise en route, sur la mise en vigueur des propositions de renouveau,
particulièrement en matière d'encadrement et de services aux
étudiants. La ministre, elle, dans les réponses qu'elle nous
faisait l'autre jour en commission parlementaire, disait qu'il n'y avait pas de
lien à faire entre cette compression et la mise en vigueur des
propositions de renouveau; ce qui n'était pas le cas de votre part, en
tout cas, si je lis bien votre communiqué, quand vous dites que cette
enveloppe sert à financer les services aux étudiants, comme
l'accueil, l'aide à l'apprentissage, l'orientation, mais aussi les
dépenses incompressibles comme l'électricité et le
chauffage.
Ma question, très simple: Est-ce que la ministre a réussi
à vous convaincre qu'il n'y avait pas de lien entre la compression de 20
000 000 $ cette année et les ressources qu'elle compte, au fil des ans,
injecter dans le réseau pour financer ses propositions? Est-ce qu'elle a
réussi à vous convaincre qu'il n'y avait pas de lien du tout
entre les deux? (11 heures)
M. Leduc: Dans le montant de 52 000 000 $ dont Mme la ministre a
parlé, il y a un premier montant qui affecte la session
d'intégration des nouveaux étudiants, la fameuse session au
début du collégial. C'est une première injection,
indépendamment des compressions budgétaires, mais
intégrée à la réforme qui devrait nous soutenir.
Cela dit, ce que nous disons, cependant, c'est que ça nous prendrait, et
c'est ce que j'ai répété tantôt, un budget
supplémentaire pour accorder une certaine marge de manoeuvre aux
collèges pour implanter cette réforme relativement mineure, mais
essentielle dans le contexte de rareté des ressources que nous
connaissons.
Il ne faudrait pas, je pense bien, faire de lien immédiat et
très rapide entre: il y a une réforme ou il n'y en a pas, il y a
des ressources ou il n'y en a pas. Il y a des choses là-dedans, je l'ai
dit tantôt, qui sont davantage de l'ordre d'une nouvelle façon de
faire et de voir les choses. Cela dit, il faut quand même que nous
puissions disposer d'une marge de manoeuvre. Et c'est ce que nous demandons,
indépendamment des compressions budgétaires pour les trois ou
quatre prochaines années, qu'il y ait un minimum d'investissements
à chaque année, dans chaque collège, pour que nous
puissions donner un premier tour de roue.
Là-dessus, je demanderais à M. Parent de compléter
la réponse.
M. Parent (Pierre): Je pourrais peut-être ajouter que la
coupure de 20 000 000 $ cette année, elle est dure, mais c'est
l'accumulation des coupures qui fait mal à un système comme celui
des collèges. Ça fait 15 ans qu'il y a des coupures. Vous savez
que les coupures ne peuvent s'adresser qu'à une partie du budget des
collèges, puisqu'il y a des enveloppes qui forment la majorité
des budgets des collèges qui sont protégées. Et c'est pour
ça que nous souhaitons mettre sur pied, avec le ministère, une
commission mixte de partenaires pour mieux prévoir les situations
économiques, comme il existe au primaire et au secondaire.
Pour les administrations de collèges, chaque printemps annonce
une déstabilisation des organisations, parce que l'organisation de
l'enseignement, d'une année à l'autre, doit se faire au
printemps, et on a toujours l'annonce des coupures à la dernière
minute. C'est le système qui est fait comme ça. Nous proposons au
gouvernement de changer la façon de faire et de s'associer annuellement
au ministère pour revoir le financement.
Je termine en disant, également, qu'il serait très utile
d'essayer d'examiner la situation qui est faite particulièrement
à certains collèges, parce qu'il est très facile d'opposer
le fait qu'il y a un certain nombre de collèges qui, par une gestion
individuelle, ont accumulé des surplus. Mais d'autres collèges
et ça, ça va bien, c'est un signe de très bonne
gestion de la part de certains collèges souffrent plus que
d'autres de ces coupures, et c'est là-dessus, à mon avis, que
devraient porter les discussions avec le ministère.
Ce n'est pas toujours évident de discuter l'ensemble d'un
système sans regarder les situations qui sont faites dans certains
collèges, et je prends l'exemple d'un collège voisin de celui de
Rosemont, le collège du Vieux-Montréal.
M. Brassard: Vous parlez d'injection d'argent neuf, en quelque
sorte. Est-ce que vous l'avez chiffrée et est-ce que ça doit
être combiné, cette injection-là, avec une annulation des
compressions?
M. Leduc: On l'a chiffrée de façon très
provisoire rien que, comme je l'ai laissé entendre tantôt, pour
donner un premier tour de roue. C'est entre 75 000 $ et 100 000 $ par
collège pendant trois ou quatre ans, ce qui fait environ 18 000 000$ ou
19 000 000$ sur quatre ans. Ça nous apparaîtrait une mince marge
de manoeuvre qui nous permettrait de partir l'opération,
d'intégrer des enseignants, d'autres personnels dans
l'élaboration de ce que nous devons faire, dans la réalisation de
nos nouveaux mandats. On ne peut pas, du jour au lendemain, assumer totalement
des fonctions et des responsabilités qui, auparavant, étaient au
ministère. Ces ressources-là deviennent essentielles pour nous.
Nous ne les avions pas. Il faudrait qu'on puisse disposer de quelques-unes.
Le Président (M. Gobé): M. le député
de Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: Vous parlez bien de 18 000 000 $ à 20 000 000
$ par année dans le réseau.
M. Leduc: Non, sur quatre ans. M. Brassard: Sur quatre
ans? M. Leduc: Oui.
M. Brassard: Est-ce que ça se combine avec l'annulation
des compressions prévues cette année?
M. Leduc: C'est un dossier à part.
M. Brassard: Ah, vous ne faites pas de lien entre les deux.
M. Leduc: C'est-à-dire que les compressions sont
difficiles à vivre, mais, indépendamment de ces
compressions-là, nous disons...
M. Brassard: Mais ça n'aura pas d'effet sur les
propositions de renouveau.
M. Leduc: ...que, pour mettre en oeuvre la réforme, nous
aurions besoin d'une marge de manoeuvre supplémentaire.
M. Brassard: Mais vous avez changé d'avis, là.
Ça n'aura pas d'effet, les compressions, sur les propositions de
renouveau.
M. Leduc: Les compressions ont toujours un effet néfaste
sur les établissements.
M. Brassard: Y compris sur les propositions de renouveau.
M. Leduc: Sur les établissements. Donc, ça rend
tellement plus difficiles les propositions de renouveau que nous demandons
quelques allégements.
M. Brassard: Deuxième question, M. le Président.
Dans votre communiqué premier sur les orientations de renouveau de
l'enseignement collégial, concernant les seuils d'admission, vous dites,
et je vous cite: La proposition gouvernementale à ce sujet
c'est-à- dire au sujet du diplôme d'études secondaires
soulève deux questions d'importance. Parce qu'elle ne semble pas
rendre les cours annonciateurs de la réussite au collégial
obligatoires pour tous les élèves du secondaire, ne
constitue-t-elle pas un risque de voir s'instaurer deux types de D.E.S., un
diplôme d'études secondaires fort qui ouvre la-porte aux
études supérieures et un diplôme d'études
secondaires éventuellement plus faible qui ne l'ouvre pas? Bon,
voilà la question que vous posiez. Vous l'avez résolue,
d'après ce que je peux voir?
M. Leduc: Non, mais c'est le risque que l'on courrait au
Québec effectivement, si cette mesure-là n'était pas une
mesure ponctuelle. C'est pourquoi nous disons qu'il faudrait qu'à terme,
et on l'a évoqué tantôt, le calendrier d'implantation des
nouvelles règles de sanction du diplôme d'études
secondaires soit appliqué. Cela dit, de façon très
pragmatique, dans l'immédiat en tout cas, le plus
immédiat, c'est 1995, sem-ble-t-il il faudrait que nous
commencions déjà à l'appliquer. Alors, dans l'intervalle,
donc, ça va faire une pression sur les étudiants du secondaire
pour qu'ils valorisent leur cheminement scolaire et qu'ils se forcent un peu
pour réussir, parce que ce n'est pas évident que tout le monde,
avec un diplôme d'égale valeur, puisse réussir son
collège. Il faut que ce discours-là soit déjà,
dès aujourd'hui, véhiculé et diffusé au secondaire.
Mais le problème serait un problème majeur si on le prenait comme
une solution arrêtée et définitive. Pour nous, c'est une
solution pragmatique, une solution ponctuelle, provisoire.
M. Brassard: Comme ça doit s'appliquer en 1995, à
la suite du dépôt du rapport d'un comité, qui devrait
être remis au mois de juin normalement si les échéances
sont respectées, concernant le curriculum au secondaire et le
régime des sanctions au secondaire, si on avait le temps de s'entendre,
après un débat quand même public, parce que c'est une
question majeure, fondamentale, sur une revalorisation du D.E.S., du
diplôme d'études secondaires, le rehaussement des exigences, et
que ce nouveau D.E.S. valorisé puisse s'appliquer en 1995, tel que
prévu pour les nouveaux seuils d'admission à l'accès au
collégial, je comprends bien que votre préférence,
à ce moment-là, irait pour une sorte de... je dirais pour que le
régime des sanctions au secondaire soit similaire au seuil d'admission
au collégial, qu'il y ait une sorte de confusion entre les deux.
M. Leduc: Oui.
M. Brassard: C'est ça votre préférence. (11
h 10)
M. Leduc: Oui, bien sûr, mais vous comprendrez
également que ça fait 15 ans que cela nous est promis. Alors, je
comprends aussi que le ministère veuille précipiter les choses
pour sauver, notamment, les standards du niveau collégial. Il y a un
intérêt certain à dire,
d'entrée de jeu: II faudrait qu'en 1995 ça fonctionne pour
ceux qui veulent venir au collégial. Cela dit, ce que vous
évoquez est effectivement une perspective intéressante.
M. Brassard: D'autre part, toujours à ce sujet, il y a eu
des simulations de faites, vous le savez, par le ministère. Si on
prenait les diplômés du secondaire de 1992, qu'on leur appliquait
les seuils d'admission qu'on compte mettre en vigueur en 1995, au
collégial, il y en aurait quelque 13 000 qui se buteraient à une
porte fermée dans les collèges. Vous dites qu'il faut le faire
quand même, parce que vous semblez adopter le discours de la ministre,
dans le sens où vous dites: Avisons les étudiants, on va les
avertir, on va les informer adéquatement qu'ils vont devoir mieux
performer, mieux réussir, réussir plus de cours obligatoires, et
ça va avoir des effets bénéfiques.
Vous croyez vraiment que le simple fait de les aviser, que le simple
fait de les informer, d'informer les étudiants du secondaire,
actuellement, disons, en secondaire III, que, pour avoir accès au
collégial, en 1995, ils vont devoir réussir plus de cours que ce
n'est prévu pour l'obtention de leur D.E.S., leur diplôme
d'études secondaires qu'ils vont devoir réussir: langue seconde,
secondaire V, mathématiques, secondaire V, sciences physiques,
secondaire IV, qu'ils vont devoir réussir tout ça... Vous semblez
croire que le simple fait de les aviser et de les informer, ça va avoir
un effet bénéfique et ça va réduire le nombre des
étudiants qui se buteraient à des portes fermées parce que
ne respectant pas les seuils d'admission. Le simple fait de les aviser, vous
pensez que ça va avoir des effets bénéfiques.
M. Leduc: Les aviser et les soutenir.
M. Brassard: Ah! Les soutenir.
M. Leduc: et leur faire comprendre que, effectivement, c'est un
discours d'exigences, d'effort et de réussite. par ailleurs, il faut
bien savoir aussi que, parmi ceux qui sont au collégial, parmi ceux qui
ont trop d'échecs, au moins 50 % viennent de la catégorie
d'élèves qui, justement, ne réussissaient pas ce genre de
cours dont maintenant on veut qu'ils soient réussis. alors, est-ce que
c'était un service à leur rendre, à ces
élèves-là, de les admettre, portes grandes ouvertes, avec
une formation moindre? est-ce que c'est un service à leur rendre que de
les décourager une fois qu'ils sont entrés au collégial et
qu'ils se butent non pas à une porte fermée, mais à un
constat d'échec?
M. Brassard: Je vous dirais, M. Leduc, que vous avez
utilisé le terme, le verbe approprié, tout à l'heure: les
aviser et les soutenir. Je sais bien que vous vous intéressez d'abord
à l'ordre d'enseignement collégial, c'est tout à fait
normal, vous êtes président de la Fédération des
cégeps, mais toute hausse d'exigences pour ce qui est du diplôme
d'études secondaires devra être accompagnée de mesures de
soutien appropriées pour, justement, éviter l'hécatombe.
S'il n'y a pas ces mesures de soutien, ça va être
l'hécatombe, comme ça aurait été le cas en 1992, si
on avait appliqué ces seuils.
Concernant ce que certains ont appelé «la taxe à
l'écheo, dans votre communiqué, vous dites que vous vous
êtes exprimés en commission parlementaire pour le maintien de la
gratuité scolaire, mais avec des balises. Elle soutient toujours cette
position en ce qui concerne la mesure limitative mise de l'avant par le
gouvernement. Les étudiants qui accumulent plus de cinq échecs au
secteur préuniversitaire et plus de sept échecs au secteur
technique devront payer 50 $ par cours. La Fédération veut
analyser davantage les impacts de cette mesure avant de se prononcer
définitivement.
Or, vous vous prononcez définitivement. Vous approuvez la mesure
ministérielle. Je suppose et je présume que, par
conséquent, vous avez fait une analyse d'impact.
M. Leduc: Oui. L'analyse d'impact que nous avons faite, c'est
que, la mesure, elle avait le mérite, effectivement, de ne pas
pénaliser les changements d'orientation, de ne pas pénaliser le
temps. C'est ça qui est important. À 16 ou 17 ans, ils ont le
droit de se tromper. Ils ont le droit de changer d'orientation. Il ne faut pas
les pénaliser en termes de nombre de sessions où ils sont au
collège. Mais il y a peut-être lieu cependant de soutenir leur
responsabilisation, leur motivation, en les incitant à réussir.
Et, dans ce sens-là, la mesure nous apparaît acceptable. Nous
recommandons cependant que, pour la formation spécifique de la
première session, précisément pour protéger encore
davantage le droit à l'erreur, si je peux m'exprimer ainsi, ou le
changement d'orientation, les échecs qui seraient malencontreusement le
sort des étudiants, eh bien, ne comptent pas. Alors, voici un impact qui
nous apparaît... En tout cas, il y a moins d'impacts négatifs de
cette façon-là. Donc, c'est une mesure qui nous apparaît
acceptable en termes de responsabilisation et pour éviter, bien
sûr, la surconsommation.
M. Brassard: Vous savez très bien, M. Leduc, qu'un
étudiant qui se trompe d'orientation, très souvent, ça se
traduit concrètement par des échecs.
M. Leduc: Voilà!
M. Brassard: Bien. Alors, vous dites que ce n'est pas une mesure
qui va pénaliser ceux qui se trompent d'orientation. Il y a beaucoup
d'étudiants qui se trompent d'orientation et la façon de se
tromper d'orientation, c'est d'échouer.
M. Leduc: Mais l'essentiel des changements d'orientation, c'est
en première session. Et c'est précisément pour cette
raison-là que nous demandons que les échecs de première
session dans la formation spécifique ne soient pas comptabilisés,
pour protéger le change-
ment d'orientation. Et une autre façon pour le protéger,
c'est ce que je disais tantôt, c'est de prendre une mesure qui ne
s'applique pas au nombre de sessions, mais qui s'applique davantage à
des échecs à des cours.
Le Président (M. Gobé): En terminant, M. le
député de Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: Une analyse d'impact, d'abord et avant tout,
ça doit essayer d'évaluer le nombre d'étudiants
touchés. Est-ce que, dans votre analyse d'impact de cette mesure, vous
avez évalué le nombre d'étudiants qui pourraient
être touchés par cette taxe à l'échec?
M. Leduc: Elle a déjà été faite
depuis longtemps. C'est qu'on parle de 25 % des étudiants.
M. Brassard: De 25 %.
M. Leduc:c'est ce qu'on a vu, qu'il y avait actuellement dans le
réseau 25 % des étudiants qui avaient plus de cinq échecs.
ce n'est pas lié à cette mesure-là, mais actuellement
c'est comme cela et on estime que, bien sûr, avec cette mesure-là,
il y en aurait moins.
Le Président (M. Gobé): Alors, voilà.
Maintenant, le temps est malheureusement dépassé
légèrement. Il reste sept minutes du côté
ministériel.
Mémoire déposé
Mais, auparavant, j'ai fait faire quelques recherches pour retrouver le
mémoire de la Fédération et, semble-t-il, il aurait
été déposé à un endroit qui n'est pas un
endroit habituel et on ne le trouve pas. Alors, j'en ai quand même
reçu une copie et, à titre de président de cette
commission pour ce jour, je dépose donc parce qu'il faut le
déposer; s'il n'est pas déposé, il n'est pas
déposé le mémoire de la Fédération
des cégeps, mémoire sur le projet ministériel de
réforme de l'enseignement collégial présenté
à la commission de l'éducation. Donc, il est là,
maintenant, déposé et il sera numéroté
officiellement, il portera le numéro 2D. Alors, c'est fait. M. le
député de Lac-Saint-Jean. Je suis désolé de vous le
transmettre avec ce retard. On me dit qu'il a été
déposé hier, vers 14 h 10. Par contre, la date requise
était le 4 mai, mais on peut comprendre que les groupes qui sont
bénévoles puissent avoir du retard et un peu de délai. Il
reste maintenant sept minutes, M. le député de Rimouski.
M. Tremblay (Rimouski): Oui, M. le Président. Madame,
messieurs, lorsque la ministre a rendu publique sa réforme, à
l'article 3.4, «Des partenariats renouvelés et
resserrés», on lisait ceci: C'est pourquoi il est proposé
que les pouvoirs du collège s'exercent aussi dans des activités
de formation de la main-d'oeuvre, de recherche, de transfert technologique,
d'aide à l'entreprise, de développement régional, etc. Je
ne sais pas si vous avez pris connaissance du projet de loi 82. Dans les notes
explicatives du début, il est dit: «Le projet de loi autorise de
façon explicite les collèges à exercer des
activités concernant la recherche appliquée, l'aide technique
à l'entreprise, l'innovation technologique, le développement
régional, les services à la communauté», etc. Donc,
nous avions une recommandation dans la réforme proposée par Mme
la ministre. Bien plus, nous la traduisons dans un projet de loi.
Moi, je voudrais savoir, étant donné que vous avez tout
l'historique des cégeps, maintenant, avec cette nouvelle
possibilité, est-ce qu'on ne vous donne pas là un instrument par
excellence afin de mieux intégrer et d'avoir des meilleures mesures de
synergie qui pourraient se développer au plan régional et au plan
provincial entre les entreprises, d'une part, et le transfert technologique,
les recherches en sciences appliquées, etc.? Est-ce que ce n'est pas
là un moyen formidable qu'on donne aux cégeps pour
s'extérioriser, sortir de leur boîte? (11 h 20)
M. Leduc: Exactement. Mais, de toute façon, c'est
exactement ce que nous avons commencé à faire et fait depuis bien
des années. Le projet de loi vient officialiser le tout et éviter
qu'on nous reproche de le faire, à l'occasion.
M. Tremblay (Rimouski): Mais, avec le fait qu'on vous y autorise
dans le projet de loi, vous serez mandatés maintenant et vous serez des
interlocuteurs autorisés pour descendre dans le milieu industriel ou
autre pour pouvoir créer des synergies d'application.
M. Leduc: Très juste.
M. Tremblay (Rimouski): Et ça, à mon sens, c'est un
point très important, ce que vous n'aviez pas antérieurement.
M. Leduc: Exact.
M. Tremblay (Rimouski): Très bien. Merci.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. le
député de Rimouski. Mme la ministre, il vous reste à peu
près trois minutes et demie.
Mme Robillard: Est-ce que la Fédération pourrait
expliciter son point de vue sur la commission des études?
M. Leduc: Sur la commission des études. Nous trouvons
intéressante la création de la commission des études. Nous
trouvons intéressant que l'essentiel de la mission de cette commission,
ce soit les programmes d'enseignement. Nous trouvons intéressant que ce
soit le conseil d'administration d'un collège qui prenne en main,
à partir d'une composition minimale qui est déterminée par
la loi, la composition finale de cette commission.
II faut bien dire que, dans beaucoup de collèges, il y a
déjà des commissions pédagogiques qui ressemblent
étrangement à ce que feront dorénavant les commissions des
études. Cette nouvelle façon de procéder, maintenant, va
faire que les expériences intéressantes des anciennes commissions
pédagogiques puissent être diffusées dans l'ensemble du
réseau. Je ne vous cacherai pas cependant qu'il y a là quelques
ambiguïtés, dans les premières années, à tout
le moins, relativement à la présence simultanée de
commissions pédagogiques prévues par les conventions collectives
et d'une commission des études prévue par le projet de loi. C'est
là que les synergies devront s'exercer de façon
privilégiée, au sein des établissements, pour
éviter des pertes d'énergie inutiles.
Mme Robillard: Alors, M. le président de la
Fédération, il me reste à vous remercier à nouveau
d'avoir fait cette réflexion sur le projet déposé par le
gouvernement et soyez assuré que nous allons relire avec attention votre
mémoire, de même que ses annexes qui sont très
détaillées et pointues, et que nous allons sûrement y
donner suite à quelques égards. Sûrement que ça va
alimenter la réflexion ministérielle sur les changements à
apporter. Merci beaucoup.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. la ministre.
M. Brassard: M. le Président...
Le Président (M. Gobé): Oui, M. le
député de Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: Bien, je voudrais simplement, moi aussi, remercier
la Fédération et les assurer que je vais lire leur
mémoire.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Gobé): Alors, merci, M. le
député de Lac-Saint-Jean. Merci. Ceci met fin à votre
intervention, M. Leduc et les gens qui vous accompagnent. Vous pouvez donc
maintenant vous retirer. Je vais suspendre une minute afin de permettre au
groupe suivant, soit les représentants de l'Association des
collèges privés du Québec, de prendre place en avant. La
commission est suspendue.
(Suspension de la séance à 11 h 23)
(Reprise à 11 h 26)
Le Président (M. Gobé): Si vous voulez bien
regagner vos places, la commission de l'éducation reprend ses travaux.
Nous allons donc accueillir maintenant les représentants de
l'Association des collèges privés du Québec, à qui
je demanderais de bien vouloir prendre place. S'il vous plaît,
pouvez-vous continuer les conciliabules à l'extérieur? Merci. Je
demanderais aux représentants de l'Association des collèges
privés du Québec de bien... Je vais les présenter, vu
qu'ils sont juste deux. M. Benoit Lauzière, président, et M. Guy
Forgues, vice-président. Bonjour, messieurs. Il me fait plaisir de vous
accueillir ici à cette commission encore une fois. Et, sans plus
attendre, je passerai la parole à celui d'entre vous qui en est le
porte-parole, le représentant.
Association des collèges privés du
Québec
M. Lauzière (Benoit): Je crois que vous avez
déjà entre les mains la totalité, qui consiste en quelques
pages, huit pages, de notre réaction. L'invitation était à
l'effet de parler de la loi 82, de discuter de la loi 82, mais je comprends que
c'est un peu plus élargi et que nous pouvons nous exprimer sur toute
chose, dans le fond, qui découle du projet de renouveau de
l'enseignement collégial.
Je voudrais presque commencer un peu par une blague. J'ai entendu une
bonne partie de ce qui a été présenté et je dirais:
Bon, la loi 141 qui gouverne les institutions d'enseignement privées
nous oblige à nous justifier à l'existence, entre autres, pour le
critère de complémentarité et d'enrichissement. On est
obligés de se conformer à la loi, même en étant
présents ici, en faisant peut-être un témoignage un peu
différent quant à sa teneur et quant à son état de
satisfaction généralisé relativement au renouveau
proposé.
On se souviendra que la ministre avait qualifié et je
pense que logiquement elle avait raison compte tenu de ce que nous disions
nos propos d'excessifs quand nous nous sommes présentés au
mois d'octobre. Il faut se souvenir que notre angle d'abordage, nos propos du
mois d'octobre consistaient essentiellement à dire, en moins de mots
possible, pour qu'il y ait le moins d'ambiguïtés, le moins
d'auberges espagnoles possible, que, pour redonner, pour favoriser une
dynamique de développement dans les institutions, il ne fallait pas
proposer un renouveau mur à mur ou envahir davantage de terrain, si je
puis dire, ou proposer des orientations généreuses, mais suivies
d'une série de réglementations supplémentaires, mais il
fallait remettre le système sur sa tête ou sur ses pieds, si vous
voulez, c'est-à-dire partir des institutions et essayer de quitter, de
s'éloigner de l'esprit de système qui consiste à penser
que tout renouveau ou toute amélioration va d'abord s'attaquer au
système, à des choses qui s'appliquent à tous ou à
peu près en même temps.
Bon, notre propos, notre angle d'abordage ayant été
celui-là, notre réaction d'aujourd'hui, évidemment, se
comprend à partir de cet angle d'abordage là où nous ne
proposions pas des mesures ponctuelles, valables pour tous, mais où nous
proposions que l'essentiel, si je puis dire, des programmes, de la gestion des
institutions parte des institutions et que ce soit sur une base de
responsabilité allant jusqu'à l'évaluation externe,
c'est-à-dire celle des résultats, et que chaque
institution...
D'ailleurs, je le dis en passant parce que c'est un exemple qui illustre
ça, on voyait, je pense que c'est dans le journal Le Devoir de la
fin de semaine, un petit article d'un professeur du collège des arts
libéraux, qui dépend de l'université Concordia, qui
exprimait dans une lettre ouverte, je dirais en les concrétisant,
l'essentiel de nos propos, montrant que, quand on sort d'un certain formalisme,
quand on sort d'un jeu d'unité ou de définition nominale des
choses, dans une institution donnée, on regarde les ressources que nous
avons, on regarde ce qui nous entoure et on s'adapte, en quelque sorte, et au
niveau même de la formation générale et non pas seulement
de la formation technique. (11 h 30)
Donc, en regard des projets de loi 82 et 83 et du règlement des
études, notre position avait l'air effectivement radicale, mais enfin
et c'est ce que nous disons aussi, et je pense qu'il faut aussi en tenir
compte c'est la responsabilité gouvernementale de faire ses
choix. Il a fait ses choix et nous disons des choses un peu plus pointues
aujourd'hui, de façon peut-être un peu plus précise que
pas, puisqu'on est un peu dans le dernier droit là-dedans. Au
gouvernement, et Mme la ministre l'a bien dit en début de séance,
les orientations fondamentales ont été posées et je pense
que l'idée n'est pas de reprendre tout ça à zéro
aujourd'hui. Mais, comme il y a des améliorations quand même
possibles, même dans ce qui nous déplaît, en gros, comme
texte, il nous semble qu'il faut le dire en espérant qu'il y aura des
améliorations qui redonneront un petit peu ce que nous demandions au
mois d'octobre.
Je veux m'exprimer d'abord sur les questions relatives au régime
pédagogique. Elles découlent évidemment, en partie, de la
loi et de l'article 10 du projet de loi qui modifie l'article 18. Ensuite, je
parlerai de l'évaluation et, en dernier, d'un certain nombre
d'éléments peut-être d'ordre plus mineur, mais qui sont
pour nous significatifs, justement, d'un partage de responsabilités.
L'article 10 qui modifie l'article 18 de la loi, c'est l'article qui
gouverne la répartition des pouvoirs entre le ministère et les
collèges et dont dépend le règlement du régime des
études. Et c'est un cas significatif, nous semble-t-il, où
l'expression est peut-être un peu forte, mais enfin le pire et le
moins bon sont plus présents, mais où le meilleur est
également possible, et il nous intéresse beaucoup.
Respectueuse de la compétence des institutions d'enseignement
supérieur je fais remarquer ça parce que c'est quand
même significatif même si quelqu'un pourrait dire que ce n'est pas
la fin du monde la loi actuelle habilite le gouvernement à
adopter des règlements généraux concernant les programmes
d'études. Non seulement le projet de loi 82 fait-il sauter l'adjectif
«généraux» qui nous semblait très signifiant,
mais il multiplie les objets et les précisions comme s'il s'agissait
d'une convention collective de travail. En cas de doute, qu'on se
réfère au fruit de cet arbre qu'est le règlement sur le
régime des études collégiales. C'est la pièce
maîtresse du renouveau.
Et, ici, on ne discute pas des intentions, et c'est ça qui est
souvent le problème; nous l'avons vécu et je pense qu'un citoyen
qui a un peu vécu l'a vécu à plusieurs reprises. C'est
toujours une chose, dans le fond, la présentation des projets de loi.
Ici, on se réfère au livre jaune de présentation, au
moment de la présentation publique. Nous n'en n'avons pas,
évidemment, contre les intentions ou les orientations du genre: assurer
l'accessibilité des études collégiales, renforcer la
formation générale commune, valoriser la formation technique,
rénover les programmes pour leur donner plus de cohérence, etc.
Bon. Vous connaissez comme moi les grandes balises et les grandes orientations,
et nous sommes tout à fait d'accord, évidemment, avec cela. Mais,
quand on atterrit au projet de loi et au libellé, et c'est cela qui va
nous gouverner, c'est à partir de cela qu'il va y avoir des
précisions, des demandes, des discussions, des contestations, le cas
échéant. Ce ne sera pas évidemment le discours qui a
présenté cela de magnifique façon.
Alors, première surprise, et la contradiction nous semble un peu
grosse, entre l'élargissement... Toujours dans le cadre, donc, du
partage des pouvoirs précisés, balisés et plus que
balisés par l'article 10 du projet de loi 82, c'est qu'il y a au moins
une contradiction qui nous semble énorme entre l'élargissement
annoncé et le fait que pour plus de la moitié ce n'est pas
peu dire de la formation générale, c'est le ministre qui
va définir non seulement les objectifs et les standards, mais les
activités d'apprentissage. Et c'est bien marqué
«les»; ce n'est pas des activités d'apprentissage
quelconques, c'est «les». Pour plus de la moitié de ce qui
est au coeur, dans le fond, de ce qui spécifie, de ce qui est même
une idée-force du renouveau, c'est-à-dire le renforcement de la
formation générale. C'est pour le moins contraire à
l'orientation qui était la nôtre, qui allait, mais
diamétralement, dans le sens contraire.
Il serait gênant, à mon sens, à notre sens
les institutions d'enseignement collégial constituent maintenant,
dit-on, plus nettement l'ordre d'enseignement supérieur, dans une
première étape d'un contiuum universitaire de ne pas
souligner ce qui nous apparaît une nette contradiction, d'autant plus que
la formation générale, si on l'oppose... Enfin, je ne veux pas
sombrer dans les discussions d'école sur la formation fondamentale, mais
on l'opposait... Je sais bien que la dichotomie est un peu factice, et le
Conseil supérieur de l'éducation l'avait bien soulevé,
mais, enfin, si on distingue un peu les choses, formation
générale et formation spécialisée ou de
concentration, c'est que dans la formation générale il y a les
blocs de cours qu'on annonce. Pour plus de la moitié, le ministre
définit le contenu, les activités d'apprentissage, et les cours
complémentaires sont réduits en nombre et la
réglementation est plus poussée.
Alors, là-dessus, je pense qu'il y a au moins une contradiction
entre ce qu'on appelle l'élargissement de l'autonomie de ce
niveau-là et, pour cette dimension-là
en tout cas, le moins qu'on puisse dire, c'est ce que j'appelle une
secondarisation du niveau. Et, à cet égard-là, il nous
semble qu'on devrait revenir un peu à ce qui était de l'ordre de
l'intention très bien annoncée à la page 7 du document de
présentation publique du renouveau et situer un peu les
responsabilités des deux ordres d'intervention, c'est-à-dire
objectifs et standards, si possible sans tomber dans les discussions
d'école du type docimologie dont on connaît les ravages à
un autre niveau. Alors, il ne faudrait pas reprendre ça à ce
niveau-ci. Alors, objectifs et standards pour le ministère et les moyens
et l'ordre des moyens nettement, évidemment, aux institutions.
Quant aux cours complémentaires c'est la suggestion que
nous vous faisons il suffirait d'indiquer que le collège
détermine la composante de formation complémentaire dans une
perspective d'équilibre et de complémentarité. Et les
collèges n'ont pas besoin, n'ont jamais eu besoin s'ils en ont
déjà eu besoin, c'est grave à ce niveau-là, mais ce
n'est pas en péchant par excès à un niveau
supérieur, je pense, que ça règle le problème
de commencer à définir ce que ça voudrait dire pour
des grands enfants, des grands adultes du préuniversitaire
«complémentaire», pour ensuite envoyer une commission pour
dire: Woops! Ce n'est pas complémentaire. Les gens sont assez
intelligents, assez grands pour faire ça eux-mêmes.
Des ouvertures nouvelles. Nous les soulignons aussi. Je pense qu'elles
nous apparaissent excellentes et les collèges privés se sont
battus toujours pour ce genre de dispositions, et nous sommes très
heureux de les retrouver dans la loi, à l'article 18 au paragraphe b) et
ensuite reproduites, si je peux dire, retraduites dans le règlement des
études proposé, à savoir une autorisation, avec ou sans
conditions, par le ministre donc de reconnaître comme des programmes
conduisant au diplôme d'études collégiales des programmes
d'études autres que ceux qu'il a établis et de prévoir que
le ministre peut déléguer à un collège, aux
conditions qu'il détermine, tout ou partie de sa responsabilité
en matière de sanction des études prévue.
Il y a là, me semble-t-il, des ouvertures réelles telles
qu'elles sont écrites là. Nous verrons dans la pratique si elles
sont aussi réelles qu'annoncé, mais ce n'est quand même pas
peu de chose de dire qu'elles sont libellées, à notre sens, tout
à fait correctement et, donc, prometteuses à ce titre dans la
loi, non seulement dans le régime des études, mais dans la loi.
Et ça, c'est ce que j'appelle une petite flamme d'espérance, une
lueur d'espoir qui est grosse de cheminements singuliers et qui pourrait
peut-être permettre un tas de choses qui ne semblent pas si faciles dans
le régime commun.
Toute la question de la diplomation également, la
possibilité, en tout cas, de diplomation par les institutions nous
intéresse également au plus haut point.
Le régime des études. Ce que je viens de dire a trait au
partage des responsabilités. Si on regarde quelque peu le contenu... Ce
n'est peut-être pas l'endroit le plus approprié pour aller dans
les détails. Nos directeurs des services pédagogiques ont
étudié, ont rencontré même les fonctionnaires du
ministère. Ils sont en train de se faire une tête là-dessus
afin d'acheminer en temps utile, donc, dans les jours qui viennent, des
remarques sur le règlement des études. En passant, nous
préférons nettement cette appellation, règlement des
études, comme directeurs des études, d'ailleurs. C'est beaucoup
plus ça que des directeurs de services administratifs
pédagogiques comme tels.
Si on va au contenu, ce qu'on remarque, c'est qu'il y a des
déplacements d'unités qui peuvent être et c'est ce
que j'essayais de souligner en peu de mots très significatifs ou
ne pas être très significatifs. C'est selon. Et les questions qui
sont posées actuellement et les réponses qui sont données
montrent bien qu'on est dans le vague. C'est qu'il y a des déplacements
d'unités entre les disciplines, mais c'est pour des domaines
désignés par des thèmes très généraux
et ça soulève un certain nombre de questions. S'il y a des
réponses satisfaisantes pour tout le monde à ces
questions-là, nous en serons très heureux, mais ça
soulève des questions.
Et la première question que je soulève ça
semble peut-être un peu iconoclaste parce qu'on a accordé beaucoup
d'importance dans le débat public sur moins de philosophie, bon
c'est la relation qu'il y a, par exemple, entre un constat
général de maîtrise insuffisante de la langue maternelle et
le fait d'ajouter une unité, deux tiers. A priori, je sais très
bien que dans les discussions publiques parfois c'est un peu tabou. Qui dit
plus de français, par définition, c'est une solution. Mais,
là, c'est très spécifique. C'est plus de français
à un niveau donné et dans un bloc obligatoire. (11 h 40) ii faut
mettre ça en balance avec, par exemple, les coûts de mise à
niveau et il faut mettre ça en balance avec un diagnostic au terme
duquel on pourrait dire: ce n'est peut-être pas à ce
niveau-là qu'il fallait d'abord augmenter. si oui, c'est dans quels
modules? ça veut dire quoi au juste? il y a un tas de choses qui sont
à définir là-dedans. c'est assez difficile de se prononcer
sur le fond du contenu puisque, à l'heure où on se parle, nous
n'en savons rien ou si peu, et les questions qui sont demandées à
ceux qui sont responsables de ça montrent bien qu'il y a beaucoup de
choses à définir, parce que les activités d'apprentissage
des 50 % et plus de la formation générale, disons, entre nous,
qu'elles ne sont pas faites, c'est le moins qu'on puisse dire. tant mieux si
ça va se faire dans les plus brefs délais, mais, nous, nous
sommes contre l'idée de définir les activités
d'apprentissage pour ce niveau d'enseignement pour la formation
générale.
Je soulève également quelques questions sur le
régime. Par exemple, si on regarde l'article 9 du règlement des
études qui traite des cours complémentaires, il y a deux ou trois
impossibilités, en tout cas, qui ne sont peut-être pas
évidentes. Elles vont peut-être être levées, mais,
compte tenu que, dans les cours complémentaires, il faut prendre
ça dans trois des cinq domaines et que,
dans chaque domaine, c'est deux unités, le fait d'avoir voulu
aller un peu fort en mathématiques précises à ce
niveau-là a des effets qu'on peut difficilement prévoir. Enfin,
les questions sont soulevées. On se demande si nos étudiants en
sciences humaines vont pouvoir compléter leur formation en
mathématiques. Quand on nous répond que le langage
mathématique, ce n'est pas évident même que ça
comprend mathématiques, est-ce que ça comprend l'informatique?
Est-ce que c'est dans science et technologie? Tout ça est à
venir. Et je pense que le fait de donner suite à une suggestion que nous
faisions tout à l'heure, de définir largement le niveau de
responsabilité pour les cours complémentaires, renverrait
à ceux qui connaissent ça sur le terrain toutes les
possibilités, connaissant leur monde comme on dit, de donner les cours
complémentaires dont les gens ont véritablement besoin, sans
d'abord penser à investir trop de temps dans une mathématique
dont on peut douter, en tout cas, qu'on comprenne bien le contenu, quand on
joue seulement avec ces unités-là.
Il y a quelques questions. Il y a une autre question qui a
été soulevée avant nous. Je ne sais pas si elle a
été soulevée dans ces termes-là, mais, enfin, je le
mentionne. C'est une question qui n'est pas dans le rapport
déposé, c'est la question de la disparition de l'article 33 du
régime pédagogique actuel qui permettait à un
collège d'autoriser de façon spéciale... Autrement dit,
l'article 33 disait à peu près ceci: Un étudiant qui n'a
pas réussi la moitié de ses cours devait avoir une autorisation
spéciale pour continuer, ce qui permettait un encadrement et des
décisions différentes un peu variées.
Et, actuellement, la question se soulève: Est-ce qu'un
collège, compte tenu que cet article-là a été
enlevé et que l'article pas correspondant... mais, dans la loi 82, toute
la question des frais de scolarité, ça peut donner à
penser que, tant et aussi longtemps qu'on peut payer, il y a presque une
impossibilité, pour des raisons pédagogiques... Bon. Il s'agirait
de savoir si c'est vrai ou pas. C'est une question que je pose plutôt
qu'une affirmation que je fais.
La commission d'évaluation. Je vais un peu plus rapidement. Il
faut soulever la question du risque c'est le moins qu'on puisse dire
couru que la commission d'évaluation soit une commission assez
«papivore», dans le fond. Et, si on regarde tout le trajet fait par
la commission d'évaluation du Conseil des collèges, même si
je sais que les commissaires vont avoir plus d'autorité... Mais ce n'est
pas parce qu'on leur donne plus d'autorité dans la loi qu'il y a plus de
neurones et plus de muscle dans le réel. Il y a comme une distance,
comme disait Kant, entre la cruche réelle qu'on ne peut pas toujours
pendre sur une anse dessinée. Alors, là-dessus, je pense qu'il
faut être très prudents.
Quant à nous, ce que nous disons essentiellement, c'est que
et on répète ici ce qu'on disait au mois d'octobre
l'évaluation des collèges, c'est l'évaluation des
diplômés. Ce n'est pas l'éternel examen et
l'évaluation des papiers d'accompagnement du cheminement de
l'étudiant. D'ailleurs, si je ne m'abuse, la commission il faudra
analyser ça, il faudra tirer quelques conséquences de cela
d'évaluation du Conseil des collèges, après avoir
examiné beaucoup de ces choses pendant une décennie, a quand
même remarqué, à un moment donné, qu'il y avait 90
institutions sur 110 dans le dernier rapport annuel, en tout cas
qui avaient une telle politique, que 44 ou 50 les appliquaient correctement,
mais avouaient très lucidement, à un moment donné, que
ça ne donnait pas beaucoup plus de connaissances sur l'application
réelle dans une classe, autrement dit.
C'est pour ça qu'il faut revenir à quelque chose qui ne
mange pas beaucoup de pain, qui n'est pas très créateur
d'emplois, mais qui, je pense, doit être exploité. Et Mme la
ministre a commencé à le faire et le fait par tout ce qu'on
appelle la voie des indicateurs. C'est que là on s'attaque
effectivement, me semble-t-il, au seul objet ou, en tout cas, et de beaucoup le
plus important objet d'une évaluation des institutions de ce
niveau-là particulièrement, c'est l'évaluation des
résultats. Et la qualité, la valeur d'un diplôme, c'est
celle qui est reconnue par les institutions d'enseignement supérieur
comme les universités ou le marché du travail où vont nos
étudiants.
Il faut d'abord s'attaquer profondément à cela et ensuite,
peut-être, quand ça ne va pas, faire le tour des politiques
d'évaluation de toutes sortes qui auraient été faites ou
mal faites. Mais, vous savez, pour vous donner des exemples, bien avant qu'il y
ait même la moindre politique d'évaluation, dans la plupart des
collèges, il y avait des sessions d'examens complètes. Je pense
que c'est à peu près inversement proportionnel à la suite
des choses depuis 20 ans.
Gratuité scolaire. Nous le disons, nous l'avons assez dit, nous
nous sommes assez mouillés là-dessus; je pense être un peu
beaucoup critiqué, bon, ce n'est pas très, très populaire,
mais nous sommes tout à fait d'accord. On pense que c'est un pas timide,
je dirais, dans la bonne direction. On a toujours soutenu qu'une
responsabilité de tous les étudiants était un facteur de
productivité et un facteur de qualité. Parce qu'il faut quand
même dire les choses; il ne faut pas faire de
«juvenolâtrie», comme on a dit, et nous trouvons malheureux.
.. Je vais employer un terme qui a été employé par un
ex-premier ministre célèbre en qualifiant de déliquescents
un certain nombre de propos. Il me semble qu'il y a quelque
déliquescence à ne pas voir qu'un étudiant adulte, pour
lequel les contribuables paient 8200 $ et plus par année... C'est
ça que ça coûte, une année de gratuité au
niveau collégial. Qu'il y ait un branle-bas ou une volonté
d'organiser un branle-bas général et de jouer au martyr, à
la veuve et à l'orphelin parce que, après un cinquième
échec et un septième au professionnel, il y a quelque implication
des responsabilités financières, ça, j'avoue que ça
nous étonne beaucoup. D'autant plus qu'on sait que c'est exigible, et la
règle veut qu'après une session, ce soit effacé et qu'il y
ait un retour à la gratuité.
Alors, moi, là-dessus, je pense que c'est parler à des
adultes, à des étudiants quand on dit qu'après un
cinquième échec, dans un contexte où on tire des
contribuables 8200 $ par année à juste titre parce qu'il
faut investir là-dedans il y a quelque... À 17, 18, 19
ans, je pense qu'on doit apprendre à faire au moins ce que fait
n'importe qui qui est sorti rapidement du cours secondaire quand il va à
la banque, quand il va retirer de l'argent...
Le Président (M. Gobé): Alors, M.
Lauzière... M. Lauzière: Oui?
Le Président (M. Gobé): ...votre temps est
maintenant écoulé. Si vous voulez conclure. Vous pourrez
continuer la discussion en dialoguant avec...
M. Lauzière: Oui, je vous en prie. Je voudrais juste
conclure rapidement...
Le Président (M. Gobé): Oui, oui.
M. Lauzière: ...si vous me donnez deux minutes, si vous me
permettez, pour attirer l'attention juste sur la durée des mandats des
D.G., des DSP et sur les états financiers. Les remarques qui sont
là ne veulent que montrer dans quel sens il ne faut pas aller quand on
veut réglementer davantage.
Le Président (M. Gobé): S'il y a consentement de
part et d'autre, il n'y a pas de problème.
M. Lauzière: Bon, alors, j'arrive à la conclusion.
Je pense que vous m'avez demandé d'aller à la conclusion. Je
conclus de tout cet exercice que la seule façon d'éviter les
effets pervers d'une réglementation ou d'une bureaucratisation inutile,
je pense, c'est de revenir à ce sur quoi nous insistions en octobre
1992. Et, aussi curieux que cela puisse paraître au moment où je
le dis, il me semble que quelques au pluriel, cela va de soi
modifications sur le partage des responsabilités, sur la question du
comité d'évaluation amélioreraient grandement, à
notre sens, le projet de loi parce que, j'insiste, ce sont ces textes-là
qui vont nous gouverner.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. Lauzière.
Mme la ministre.
Mme Robillard: Merci, M. le Président. Je vous reconnais
bien, M. Lauzière, à la lecture de ce document. Je ne peux pas
dire que j'ai reconnu les collèges privés, mais je vous ai bien
reconnu à la lecture de ce document. M. Lauzière, combien de
membres avez-vous à l'Association des collèges privés du
Québec.
M. Lauzière: Tous les collèges privés du
Québec: 27.
Mme Robillard: Donc, 27 sont membres de l'Association.
M. Lauzière: Et 27, et non pas seulement M.
Lauzière, ont écrit ce qu'ils ont écrit en octobre
1992.
Mme Robillard: Alors, pourriez-vous, pour le
bénéfice des membres de cette commission, nous expliquer quel
processus vous avez suivi auprès de vos 27 membres et est-ce que les 27
membres ont entériné ce texte que j'ai entre les mains? (11 h
50)
M. Lauzière: Le processus qui a été suivi
est le suivant. Nous avons, en octobre 1992, déposé un texte qui
justifie totalement chacune des remarques qui sont là. En octobre 1992.
On n'a pas, donc, fait... On n'a pas, je ne dirai pas ni le temps ni les
moyens, mais, enfin, en termes d'efficacité, comme ce qui a
été proposé pour l'essentiel, parce qu'on sait que la loi
82 ne nous gouverne pas directement, mais le régime pédagogique
qui en découle, donc, nous avons appliqué, et on a fait le test
avec un certain nombre de consultations... On a tout simplement fait
dériver... Je pense, par exemple, à la formation
générale. On n'avait pas besoin, nous, dans le fond, de se
répéter entre nous et de se reprêcher entre convertis que
ça allait à rencontre directement de ce que nous demandions en
octobre 1992, de voir défini ministériellement le contenu des
cours de plus de la moitié de la formation générale.
Ça, je vous garantis qu'on n'en avait pas besoin. Pour la commission
d'évaluation, on avait fort insisté sur la suprême
importance des résultats. Donc, toutes ces choses-là...
Mme Robillard: Alors, je vous interromps, M. Lauzière.
Est-ce à dire que, pour la présentation d'aujourd'hui, vous
n'êtes pas retourné auprès de vos 27 membres?
M. Lauzière: En assemblée générale,
non. On ne réunit pas l'assemblée générale... C'est
marqué: Notes pour le témoignage de M. Lauzière.
Mme Robillard: Est-ce que ce document a été
entériné par l'exécutif de l'Association?
M. Lauzière: M. Guy Forgues qui est vice-président,
ici...
Mme Robillard: Par l'ensemble des membres de l'exécutif de
l'Association?
M. Lauzière: On n'a pas fait de réunion
là-dessus.
Mme Robillard: Pas de réunion.
M. Lauzière: Pas de réunion là-dessus. Quand
on fait un mémoire...
Mme Robillard: Parfait.
M. Lauzière: ...et que les gens pensent qu'il y a des
choses qui découlent directement, on n'a pas besoin de se mettre
à 27 pour faire ça.
Mme Robillard: Donc, le texte n'a pas été... C'est
ce que je voulais savoir, au point de départ, M. Lauzière.
M. Lauzière: Tout à fait. Puisqu'il n'y a rien de
nouveau par rapport à 1992, il n'y a pas eu de processus nouveau.
Mme Robillard: Donc, est-ce que c'est la position de M.
Lauzière, ça?
M. Lauzière: C'est la position qui découle
directement... Je comprends, madame, qu'il serait intéressant de diviser
entre nous, mais c'est la position qui découle directement du
mémoire, en 1992, qui a été adopté à
l'unanimité. Et, il y a quelques mois, nous avions demandé que,
pour les objectifs, pour les orientations, ce soit le ministre et que ce soient
les institutions pour les contenus. Alors, dans le privé, on n'a pas cru
bon de refaire l'exercice au complet pour dire la même chose en plus
concret.
Mme Robillard: Oui. Alors, vous me permettrez de trouver dommage
que les 27 collèges privés du Québec n'aient pas
étudié dans le détail le renouveau collégial tel
que déposé le 6 avril pour que j'aie la réaction de
l'ensemble. Je comprends que vous vous reportez à votre mémoire
de l'automne passé, mais, entre-temps, vous avez les intentions
gouvernementales. Moi, je trouve ça dommage que l'ensemble des
collèges privés ne l'ait pas étudié.
M. Lauzière: Je peux ajouter que nos directeurs des
services pédagogiques l'ont fait pour le régime
pédagogique et les remarques vont être acheminées.
Mme Robillard: Est-ce que je comprends... C'était une
autre de mes questions. Vous indiquez: L'Association présentera au
ministère, dans les jours qui viennent, suite à l'analyse faite
par les directeurs des études, nos vues sur le régime des
études.
M. Lauzière: Oui. Ils se sont réunis la semaine
dernière. Ils ont même rencontré vos fonctionnaires pour
avoir un certain nombre de réponses.
Mme Robillard: Donc, nous allons recevoir un autre document?
M. Lauzière: Oui, tout à fait.
Mme Robillard: Sur le régime des études.
M. Lauzière: Oui, parce que nous n avons pas
été invités ici à ce titre, dans l'invitation que
nous avons reçue.
Mme Robillard: M. Lauzière, dans votre présentation
d'aujourd'hui, je ne vous ai pas entendu parler de façon
spécifique de la mesure financière pour les étudiants, qui
est une mesure que j'ai qualifiée de responsabilisante et incitative
à la réussite. Je ne vous ai pas entendu sur comment on pourrait
appliquer cette mesure-là dans le réseau privé.
M. Lauzière: Comment on pourrait appliquer cette
mesure-là dans...
Mme Robillard: Dans le réseau privé.
M. Lauzière: Bien, elle s'applique déjà.
Nous chargeons des frais de scolarité et c'est un incitatif remarquable
pour éviter... Et ce n'est pas une question de niveau
socio-économique, je préviens tout de suite, parce que ça
se démontrerait assez rapidement. Nous exigeons déjà des
frais de scolarité. Mais on n'a pas pensé, nous, à
l'application, parce que, là où ça s'applique, c'est dans
les collèges publics. C'est dans la loi 82, n'est-ce pas? Et ça
ne gouverne pas directement les collèges privés. Mais, dans les
collèges privés, on a...
Mme Robillard: Alors, que fait-on avec les étudiants du
secteur privé qui accumulent un nombre important, élevé,
d'échecs, 11, 12, 13, 15 échecs à leur bulletin scolaire?
Que fait-on? Malgré le fait qu'il y ait des droits de scolarité,
malgré le fait que l'article 33 soit bien dans le régime
pédagogique actuel, que fait-on?
M. Lauzière: Dans les collèges... Je ne connais pas
exactement ce qui se fait dans tous les collèges. Ce que je peux vous
dire, cependant, c'est que le fait même d'exiger des frais de
scolarité c'était bien notre propos d'octobre
freine, a l'effet nettement accélérateur à puissance 2, si
je puis dire, des frais de scolarité exigés après le
cinquième échec. Parce que, quand quelqu'un s'implique, quand le
parent paie ou l'étudiant lui-même, mais a fortiori quand c'est le
parent aussi, il y a comme une conversation «pré-cinq
échecs», disons. Mais, cela dit, chaque collège a ses
dispositions là-dessus. Il y a des règlements dont je ne connais
pas le contenu. Mais nous nous arrangeons avec ça et, le cas
échéant, comme on peut soit augmenter, soit retarder, exactement
comme ça existait dans les collèges publics... L'application de
l'article 33 avait pour effet, entre autres, qu'un collège pouvait
demander, exiger qu'un étudiant qu'on avait refusé de reprendre
à temps plein soit repris à temps partiel pour une session, ce
qui avait exactement l'effet qui sera celui des frais de scolarité du
cinquième échec.
Mais, quand vous disiez, Mme la ministre, qu'on ne s'est pas
prononcés sur ce qui arriverait dans les collèges privés,
je pense avoir souligné assez nettement
que nous étions tout à fait d'accord avec cette mesure, en
disant même que, pour nous, c'était un pas dans la bonne
direction. On est tout à fait d'accord avec cette mesure-là.
Mme Robillard: Je n'ai pas d'autres questions, M. le
Président.
Le Président (M. Gobé): Très bien, merci,
Mme la ministre. M. le député de Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: Je suis surpris, cependant, qu'elle ne vous ait pas
demandé si vous aviez consulté vos collèges pour savoir
si, sur ce que vous dites sur la taxe à l'échec, vous
étiez le porte-parole de tous les collèges. Ça
m'étonne parce que, quand vous êtes en désaccord avec son
projet, elle met en doute votre représentativité. Quand vous
êtes en accord avec ses propositions, vous êtes donc
représentatif de votre réseau! C'est un peu étonnant.
Ceci étant dit, M. Lauzière, si je vous comprends bien,
à la fois concernant... Parce que vous avez un discours sur l'autonomie
qui détonne avec celui de la Fédération des cégeps.
On se demande si ça concerne le même projet. La
Fédération des cégeps est venue nous dire qu'il y avait
une marge d'autonomie accrue qui était consentie aux
établissements dans ce projet-là. Vous, vous dites que c'est
plutôt le contraire; en matière d'autonomie, on régresse,
on recule. Alors, il y a quelque chose d'un peu curieux, deux réactions
différentes face à la même proposition. Mais, quand je
regarde ce que vous dites sur l'autonomie, aussi bien concernant la formation
générale que concernant... Et, quand je regarde aussi ce que vous
dites concernant l'évaluation, ça devrait être
l'évaluation des résultats, l'évaluation des
diplômés. Je ne sais pas si je me trompe, mais j'ai l'impression
que, pour vous, le concept de réseau n'a pas d'importance, pas beaucoup
d'importance. Il faut quand même qu'il y ait un certain nombre
d'éléments communs si on veut qu'il y ait un réseau de
cégeps, et non pas tout simplement une addition d'établissements
éparpillés sur le territoire. Je ne vois pas comment ce concept
de réseau peut s'incarner, sinon par le biais d'une certaine formation
de base commune aux établissements. est-ce que je comprends bien qu'en
parlant de la formation commune vous dites qu'on va trop loin, que 50 % des
cours de formation commune, dont les objectifs, les standards et les
activités d'apprentissage sont déterminés par la ministre,
pour vous, c'est trop? ce serait quoi, ce que vous souhaiteriez en cette
matière?
M. Forgues (Guy): Ce qu'on soulève, c'est qu'il nous
apparaît intéressant que le ministère s'assure d'objectifs
et de standards communs au niveau de l'enseignement collégial, mais que
les activités d'apprentissage pourraient être du ressort de chacun
des établissements. Il faut s'entendre sur ce vers quoi doit concourir
un étudiant ou une étudiante lorsqu'il commence, et surtout
lorsqu'il termine son cours collégial. Les meilleures façons pour
y parvenir, pour l'amener à rencontrer ces objectifs, ces
standards-là, on pense que c'est d'abord une responsabilité
d'établissement. Ça devrait être d'abord une
responsabilité d'établissement.
M. Brassard: Alors, ce qui est prévu pour le
deuxième bloc et les cours complémentaires, ce qui est
prévu pour la formation technique, c'est-à-dire que les
activités d'apprentissage relèvent des établissements,
pour vous, ça devrait être général pour tous les
blocs de formation. (12 heures)
M. Lauzière: C'est le cas de le dire, c'est le niveau du
réseau. Il ne s'agit pas seulement d'un réseau, c'est un
réseau d'institutions, de collèges. C'est un niveau
préuniversitaire, c'est une filière préuniversitaire,
autant général et techniques. C'est pour ça qu'il nous
semble important de répéter, de redire ça. Les
institutions, une fois évacués tous les pouvoirs qui s'y sont
installés de l'extérieur d'une certaine façon et
Dieu sait que ce n'est pas que le pouvoir politique il y a tout ce qu'il
faut pour définir les activités d'apprentissage à un
niveau supérieur d'enseignement, pensez donc! Et c'est ça qui
respecte, justement, les enracinements propres, les cheminements propres, les
ressources humaines qui sont là. Et c'est pour ça que je vous
référais à ce qui se passe, je disais, au collège
des arts libéraux. C'est la vie, c'est la santé quand ça
se passe comme ça. Il faut, cependant et l'autonomie n'est pas un
alibi dans notre cas, Dieu sait qu'il y ait des objectifs et des
standards de définis. Mais l'ensemble des moyens... Je vais vous donner
un exemple, les cours. Même quand on parle français, philo, c'est
nominal ça. Ce qui est intéressant, c'est de voir dans une
institution donnée comment on fait les combinaisons d'activités
avec les ressources qui sont là en histoire, en politique, en philo.
M. Brassard: Enfin, convenez que ça peut avoir comme
risque la dilution de la notion même de réseau.
M. Lauzière: Je ne le crois pas. Je réagis, je ne
le crois pas, parce que, s'il était vrai... D'ailleurs, on l'a bien
diagnostiqué, un des problèmes, c'est l'esprit de système,
l'esprit de réseau, le mur à mur. Et, dans les conventions
collectives et dans le reste, on sait que ce n'est pas bon. Et même, je
dirais, des centrales syndicales en reviennent aujourd'hui et voient
l'intérêt qu'il y a à composer plus sur le terrain un
certain nombre de choses différentes. Parce que, dès que les
objectifs... On se comprend bien, il ne s'agit pas que chaque collège
subventionné comme les collèges privés ou totalement
subventionné comme les collèges publics dise: Bon, un coup qu'on
a l'argent, on fait ce qu'on veut. Bien non. On dit: II y a des objectifs et
des standards. Ça va loin. Si objectifs veut dire plus qu'orientations,
s'ils y a des objectifs de réseau ou de niveau, s'il y a même des
standards pour la mesure de ces objectifs-là, je vous dis
qu on n est pas dans 1 anarchie totale, là, quand on dit qu'il
faut que...
M. Brassard: Une autre question sur l'évaluation. Je ne
veux pas prendre tout le temps, je veux laisser du temps à ma
collègue. Sur l'évaluation, vous qualifiez la Commission de
monstre bureaucratique et vous souhaitez seulement que l'évaluation ne
porte que sur les diplômés, sur les résultats. C'est donc
dire que, pour vous, il ne serait pas requis, utile ou pertinent
d'évaluer les programmes, les établissements. Est-ce que vous ne
craignez pas qu'en évaluant uniquement les résultats vous allez
aboutir à ces espèces de tableaux d'honneur qu'on a vus parfois
apparaître dans certaines revues? Et ça risque d'être assez
malsain pour le réseau.
M. Lauzière: M. Brassard, je vous avouerai, mais
là-dessus avec pondération, en mettant deux ou trois bouts de
phrases entre guillemets, qu'il faut savoir que les
«affreusetés», qu'on qualifie de telles, qui sont parues
comme évaluation des institutions, peut-être pas complètes,
peut-être qu'elles ne répondaient pas à toutes les
règles de l'art, ça a été un très puissant
stimulant pour aller du côté, par exemple, des indicateurs, et
d'un certain nombre d'objets qui ont trait aux résultats. Ça a
été de très bons stimulants. Alors, dans ce
sens-là, je ne blâmerais pas trop... Maintenant, c'est un
résultat, les palmarès, ce n'est pas ça qui est important;
c'est l'idée que c'est l'évaluation des résultats. Et,
là-dessus, c'est une question d'accent. Il est fortement mis, oui, mais
il est étonnant, en tout cas...
Après tout ce qu'on sait, ce qu'on ne peut pas ne pas savoir
parfois d'une certaine inutilité de l'évaluation des politiques,
je pense qu'il serait mieux, qu'il est largement temps peut-être
d'indiquer davantage l'importance qu'on met à l'évaluation des
résultats. Et, je le dis, pour nous, ce n'est pas par voie d'exclusion,
il n'y aurait que les résultats bruts, bruts, bruts et aucun examen quel
qu'il soit. Mais, là, il y a un accent très fort de mis. Si on
regarde l'article «mission et pouvoirs» de la commission
d'évaluation, le moins qu'on puisse dire c'est qu'un accent très
fort est mis sur la revue et l'examen de la mise en application des politiques
une par une. Ce qui n'est pas... Qu'un collège se donne des politiques,
écoutez un peu, nous le prêchons et nous sommes tout à fait
d'accord avec ça. C'est tout autre chose; il peut y avoir des politiques
différentes et vous savez comme moi qu'il n'y a pas toujours, c'est le
moins qu'on puisse dire, une adéquation entre le nombre de papiers qui
s'appellent politiques et l'efficacité des résultats.
M. Brassard: Ça va, pour le moment, M. le
Président.
Le Président (M. Gobé): Ça va pour le
moment, M. le député de Lac-Saint-Jean?
M. Brassard: Moi, ça va. Ma collègue de Terre-
bonne aura...
Le Président (M. Gobé): O.K. Il vous reste 11
minutes après.
M. Brassard: Parfait.
Le Président (M. Gobé): Est-ce qu'il y a d'autres
membres de cette commission qui désireraient poser des questions? Non.
Mme la députée de Terrebonne.
Mme Caron: Merci, M. le Président. Je pense que c'est
important, la distinction que vous faites lorsque vous dites qu'il y a une
différence entre les intentions et la loi et les règlements,
qu'il faut évidemment se baser sur la loi, sur les règlements, et
non seulement sur les intentions et sur les orientations qui sont
présentées. Contrairement à la Fédération
des cégeps, vous dites qu'effectivement il y a moins d'autonomie et que
ce qui avait été réclamé par l'ensemble des
cégeps et des collèges privés, c'était davantage
d'autonomie. Vous avez donné des exemples au niveau des cours. Vous avez
donné aussi, très brièvement, à la fin vous
n'avez pas pu vraiment développer d'autres exemples concernant
les états financiers, concernant la durée du mandat du directeur
général, les budgets des corporations de services. Est-ce que
vous pouvez puisque vous n'avez pas eu le temps d'élaborer
tantôt expliciter davantage ces points-là?
M. Lauzière: Oui. C'est quelques exemples, dans le fond
et vous devez savoir que ça ne nous lie pas, les collèges
privés; donc, je ne voulais pas faire un énoncé
très long là-dessus qui soulèvent des questions qui
vont toujours dans le même temps. Pourquoi un pas de plus? Par exemple,
quelles études, quelles observations a-t-on pu faire que, après
10 ans, un DSP, un D.G. serait moins bon? Pourquoi ne pas laisser ça aux
collèges, à l'institution? On dit: Préuniversitaire,
adultes. Pourquoi ils ne seraient pas capables, entre adultes consentants, de
définir ça, de dire: Oui, un troisième, quatrième
mandat. Parce que, si c'était vrai, comme je vous dis, on va le faire
pour les autres personnels. Je ne sais pas où on va s'arrêter. Je
comprends qu'il y a une difficulté. Mais je trouve que parfois un
remède crée une difficulté plus grande et un petit peu
moins d'espace de liberté. Je pense qu'il faudrait enlever
ça.
Pour les états financiers, nous sommes tout à fait
à 102 milles à l'heure d'accord pour toute reddition de
comptes sur l'utilisation de fonds publics. Mais, là, il s'agit de fonds
privés. Ils doivent même soumettre leur budget, si je comprends
bien. Même chose pour le budget des corporations. Il y a
déjà quatre moyens plutôt qu'un pour vérifier ce qui
est fait avec cet argent-là. Alors, pourquoi demander de déposer
un budget pour ces... Il n'y a pas de péché mortel
là-dedans. Il n'y a pas de choses très graves, mais c'est des
choses qui, lorsqu'elles sont additionnées, montrent qu'il y a une
tendance contre laquelle il faut aller. Et vous le savez, nous
le savons, les fonctionnaires, les ministères et à
cet égard, on n'est pas exempt de tout péché
là-dessus leur tendance, c'est toujours de dire: II s'est
posé un problème, on met un point, on met des choses, ça
crée un autre problème et, finalement, ça fait un...
Mme Caron: Je voudrais revenir aux frais de scolarité.
Dans les collèges privés, est-ce que vous pouvez nous dire si le
pourcentage de jeunes qui ont plus de cinq échecs est sensiblement le
même que celui qu'on retrouve au niveau des cégeps?
M. Lauzière: Je ne le crois pas, mais je ne connais pas le
pourcentage exact. Peut-être que mon collègue le connaît. Je
sais qu'il est nettement plus bas, mais pour les raisons obvies dont je vous
parlais tout à l'heure. C'est que le seul fait de devoir contribuer, ou
pour le parent ou pour l'étudiant lui-même, de s'impliquer
financièrement, pas si fortement que ça, parce qu'il y a tout un
mythe qui court là-dessus. On sait très bien que, dans l'ensemble
des écoles secondaires privées du Québec, c'est de l'ordre
de 1000 $ ou 1100 $ et peut-être de 1300 $, 1400 $ au collégial.
Quand on regarde les dépenses qui se font tous azimuts, on sait
très bien que ce n'est pas si énorme. Mais, cela dit, le seul
fait des frais de scolarité... Et c'était la prétention de
notre mémoire, en octobre 1992, pas rédigé de la
même façon, mais qu'une implication financière, quelle
qu'elle soit, si je puis dire, de l'étudiant, je pense, aurait un effet
accélérateur. Mais, cela dit, le choix gouvernemental a
été fait: la gratuité scolaire demeure et un incitatif; on
ne peut pas être contre ça.
Mme Caron: Vous comprendrez, M. Lauzière, qu'il
m'apparaît extrêmement important d'avoir une précision
là-dessus. La ministre, tantôt, faisait référence
à 11, 12, 13 échecs possiblement qu'on pouvait retrouver,
parfois. Je pense que ça serait important d'avoir des chiffres de votre
côté et de savoir aussi, parce que vous avez déploré
la disparition de l'article 33 qui était effectivement une mesure qui ne
s'appuyait pas uniquement sur la capacité de payer... Ce qu'on retrouve
avec ce qu'on a qualifié depuis le début de «taxe à
l'échec», c'est évidemment une taxe qui est apportée
à l'étudiant. Donc, on se base uniquement sur la capacité
de payer du jeune. Celui qui est capable de payer, il peut continuer, alors que
l'article 33 était beaucoup plus au niveau pédagogique aussi.
Est-ce qu'à votre connaissance cet article 33, dont vous déplorez
la disparition, a été utilisé dans votre réseau?
Très fréquemment ou... (12 h 10)
M. Forgues: oui. tous les collèges actuellement suivent
le régime pédagogique. une des dispositions de ce
régime-là, c'est l'article 33, et tous les collèges ont
des politiques de réadmission des étudiants qui ne
réussissent pas 50 % de leur charge d'études. la question qu'on a
soulevée concernant l'article 33, c'était de dire: le fait que
ça n'apparaisse plus maintenant dans le régime des études,
est-ce que ça vient nier la possibilité pour un collège de
gérer ces réadmissions? Si les gens nous disent: Non, l'article
33, de fait, n'était qu'un incitatif, ça ne vous obligeait pas,
et le fait que, maintenant, l'article 33 ne soit plus là, ça ne
vous empêche pas de..., nous, on se contente très bien de
ça.
Mme Caron: Mais avez-vous des données sur...
M. Forgues: Effectivement, on est tout à fait d'accord
avec vous pour dire qu'il n'y a pas que sur l'aspect financier qu'il faut que
le dossier des admissions et des réadmissions des élèves
se gère. Il y a, effectivement, beaucoup d'implications au niveau
pédagogique. Et, dans tous les collèges, l'article 33
s'applique.
Maintenant, si vous me demandez si on a des études statistiques
concernant le nombre d'élèves, par exemple sur le nombre
d'échecs au niveau collégial, on peut vous dire que les
études qu'on a regardées font que les indices de performance des
collèges montrent que les élèves du secteur privé,
normalement, réussissent plus rapidement. Ils sont diplômés
en plus grand nombre qu'au niveau des collèges publics. Or, une des
grandes différences qui existent entre les collèges privés
et les collèges publics, c'est les frais de scolarité.
Mme Caron: Et la grande différence qui existe, c'est
évidemment au niveau de la sélection et au niveau des choix aussi
qui peuvent se faire.
M. Forgues: Madame, pas du tout.
M. Lauzière: Au collégial, madame, vous savez comme
moi, et je pense que ce n'est mis en doute par personne, qu'il y a des
collèges publics, par exemple, qui sélectionnent plus que le
collège dont je suis directeur, qui est supposé être un
collège de riches, qui est Brébeuf. Alors, c'est-à-dire
qu'il y a des mythes qui courent là-dessus.
Mais, pour la question de l'article 33, je vais vous poser une question.
D'avis juridique, enfin, je n'en ai pas. Je ne peux pas affirmer que la
disparition de l'article 33 empêche de, mais c'est une question que
j'aimerais voir clarifiée. C'est pour ça que je le dis comme tel
dans le texte. C'est vraiment une question qui mérite d'être
clarifiée. Et il a été utilisé. Il a
été utilisé dans les collèges publics et, je le
disais, à plusieurs... J'ai déjà été dans un
collège public et nous l'utilisions, et c'était excellent.
Mme Caron: Je vous remercie.
Le Président (M. Gobé): Alors, merci beaucoup. Mme
la ministre, un mot de conclusion?
Mme Robillard: Merci, M. Lauzière, et j'ai hâte de
recevoir le texte de vos directeurs des études parce que, qu'on
s'entende bien, je pense que, dans le renouveau collégial, les
collèges privés sont surtout visés et
par la commission d'évaluation vous avez jugé que
c'est un mille-pattes et par le régime des études. Alors,
ça serait très, très, très important, à
court terme, que vous me déposiez votre opinion sur le régime des
études.
Le Président (M. Gobé): Merci, madame. M. le
député de Lac-Saint-Jean, un mot de remerciement?
M. Brassard: Oui. Merci beaucoup d'être venus et de
contribuer aux travaux de cette commission.
Le Président (M. Gobé): Merci, monsieur. Merci,
madame. M. Lauzière, M. Forgues, merci beaucoup. Ceci met fin à
nos travaux pour cette matinée. Alors, je vais donc suspendre les
travaux à cet après-midi, 15 heures. La commission est
suspendue.
(Suspension de la séance à 12 h 14)
(Reprise à 15 h 11)
Le Président (M. Gobé): La commission de la
culture... de l'éducation excusez-moi, j'étais dans une
autre commission va maintenant entreprendre ses travaux. Je vous
rappellerai le mandat de notre commission aujourd'hui et pour les jours qui
suivent. Alors, notre mandat est de tenir des consultations
particulières sur le projet de loi 82, intitulé Loi modifiant la
Loi sur les collèges d'enseignement général et
professionnel et d'autres dispositions législatives.
Alors, nous allons débuter notre travail de cet après-midi
par l'audition des représentants de la Confédération des
syndicats nationaux. Par la suite, nous entendrons les représentants de
la Chambre de commerce du Québec et de la Chambre de commerce du
Montréal métropolitain et, à 17 heures, les
représentants de la Confédération des caisses populaires
et d'économie Desjardins du Québec; et nous suspendrons à
18 heures pour le souper.
Alors, sans plus attendre, les représentants de la
Confédération des syndicats nationaux sont priés de bien
vouloir venir prendre place en avant et de s'y installer. Et j'en profiterai
pour rappeler brièvement les mesures qui régissent les temps de
parole. Alors, une période de temps d'une heure, 60 minutes, est
allouée pour l'ensemble du débat et se répartit de la
façon suivante: 20 minutes pour les témoins ou le groupe qui
présente son mémoire, afin de l'expliquer et de le
présenter aux parlementaires; par la suite, une période de temps
de 40 minutes, réparties également entre le gouvernement et
l'Opposition, afin de discuter avec les représentants de ce groupe. Et
je précise que les temps de réponse des gens du groupe sont
inclus dans les 20 minutes utilisées, à ce moment-là, par
le parlementaire ou par le ministre. Cela, donc, je pense, est adopté
par tout le monde comme comportement, comme application. Et je demanderai donc
aux représentants de la Confédération des syndicats
nationaux de bien vouloir présenter leur porte-parole et les gens qui
l'accompagnent.
Confédération des syndicats nationaux
(CSN), Fédération nationale des enseignants et des enseignantes
du Québec (FNEEQ) et
Fédération des employées et
employés des services publics (FEESP)
M. Larose (Gerald): Merci, M. le Président. Mme la
ministre, messieurs et mesdames de la deputation, je vous présente,
à ma gauche, le président de la Fédération
nationale des enseignants et des enseignantes du Québec, affiliée
à la CSN, M. Denis Choinière; le responsable des communications
pour le secteur de l'éducation, M. Marc Laforge. À ma droite, de
la Fédération des employées et employés des
services publics, représentant le secteur des employés de soutien
dans le réseau scolaire et le réseau des cégeps, M.
Magella Poirier, et le secrétaire général de cette
Fédération, M. François Juneau.
Le Président (M. Gobé): Vous pouvez maintenant
commencer votre présentation.
M. Larose: Alors, on peut ne pas partager toutes les opinions de
la CSN, mais je pense que personne ne conteste son caractère
représentatif dans le monde du travail, plus particulièrement
dans le secteur de l'enseignement, particulièrement au niveau des
cégeps, tant chez les professeurs que chez les employés de
soutien. Et, à ce chapitre, notre organisation je pense qu'on a
eu l'occasion de vous le souligner s'est livrée dans les
dernières années à un travail en profondeur d'analyse,
d'articulation de plates-formes en même temps que de consultation des
membres, de débats larges. Et le dépôt d'un projet de
réforme a été une occasion supplémentaire de faire
le tour de toute cette question.
Pour la CSN comme pour bon nombre de groupes dans la
société, l'éducation est le premier lieu d'investissement
pour une société, plus particulièrement pour une
société telle que la nôtre. Je rappellerai que, dans le
monde arabe, les Palestiniens, pour survivre, investissent d'abord dans
l'éducation, que les Israéliens, de la même façon,
pour survivre, investissent aussi dans l'éducation et, pour combattre
les Palestiniens, ferment les universités et les écoles.
Ça demeure un lieu stratégique du développement des
peuples. Notre propre histoire canadienne nous a révélé
comment il était important de fermer les écoles dans l'Ouest si
on voulait rapidement exercer une certaine hégémonie.
Les défis dans le secteur de l'éducation pour les
années qui viennent sont de taille. On peut les rappeler, soit: de
rehausser la scolarisation, de combattre l'abandon, d'intégrer les
clientèles nouvelles. Tout le secteur de l'éducation des adultes
prend une importance capitale. Bref, il y a des défis colossaux à
relever. Ça suppose la mobilisation et la mise à contribution de
tous les personnels, mais aussi ça suppose de nouveaux investis-
sements, des ressources additionnelles.
Je vais commenter le projet sous trois aspects. Le président de
la fédération des enseignants commentera un certain nombre
d'autres sujets, de même que Magella Poirier pour les employés de
soutien.
Le premier et je veux être clair toutes les mesures
que recèle la réforme visant à accorder moins de place au
personnel, moins de poids dans les consultations ou les lieux de
décision, où on vise à les soumettre davantage aux
directions pour qu'en bout de ligne ils se sentent moins responsabilisés
sont des propositions qui sont à contre-courant, qui sont
contre-productives, probureaucratiques, prohiérarchiques. C'est une
fausse facilité de croire qu'en centralisant un certain nombre de
décisions on va rehausser la performance des institutions. La CSN
propose, dans tous les secteurs de l'activité humaine, la
débureaucratisation des activités et la démocratisation de
ces mêmes activités. On va toujours viser l'aplatissement des
pyramides, la réduction de la course à parcourir entre le constat
et la décision à prendre. On va toujours faire des propositions
pour que, globalement, la part des ressources accordée aux services
directs à la clientèle à desservir soit toujours plus
grande par rapport à celle qui devrait servir à l'encadrement de
la prestation des services. C'est le premier point.
Le deuxième point, c'est concernant l'accessibilité. On ne
reviendra pas sur le rôle capital que la création des
cégeps a joué dans la démocratisation de
l'éducation supérieure, mais, même si on peut constater,
encore aujourd'hui, qu'il y a un déficit en termes de scolarisation pour
la jeunesse québécoise comparativement aux autres provinces et
à d'autres sociétés, à nôtre avis, il faut
toujours plus favoriser le développement de mesures de support,
d'encadrement et de stimulation pour favoriser non seulement l'accès,
mais le maintien aux études de la jeunesse québécoise. (15
h 20)
Là-dessus, quatre points. D'abord, nous exprimons notre accord
total à la mise en place des sessions d'accueil et d'intégration.
Nous pensons que la réussite est liée très souvent aux
premiers succès connus quand on entre dans le réseau. C'est le
premier point. Deuxièmement, nous pensons qu'il faut combattre ce
sentiment largement répandu, qui correspond vraisemblablement à
la réalité, qu'ont les étudiants d'être
laissés à eux-mêmes ou d'être dans un réseau
essentiellement composé d'une activité où on donne des
cours. Et, donc, ils voudraient se sentir plus encadrés, plus
stimulés. Là-dessus, nous sommes d'avis qu'il faudrait
réviser les tâches et surtout trouver une organisation du travail
qui implique tous les personnels. Toujours au chapitre de
l'accessibilité, le troisième point: une attention
particulière aux passerelles entre le niveau secondaire et le niveau des
cégeps. Nous sommes d'accord avec le rehaussement des exigences, mais il
faut prêter une attention très vigilante pour faire en sorte que,
dans ce passage, on n'en laisse pas sur le carreau; donc, des activités
d'encadrement et de support au niveau du secondaire pour permettre,
précisément, le passage au niveau des cégeps. On ne veut
surtout pas deux types de diplômes ou un type de diplôme guillotine
qui ferait en sorte que ça fermerait la porte à l'entrée
des cégeps. Quatrième élément au niveau de
l'accessibilité, c'est concernant les frais. On ne sait plus comment les
appeler modérateurs, orienteurs, accélérateurs
mais ils vont tous dans la même direction, de toute façon:
c'est de trouver une porte de sortie pour une certaine catégorie de
population. Nous sommes royalement contre. Ce sont des économies de
bouts de chandelle qui vont générer des coûts sociaux plus
exorbitants. Là-dessus, une approche comptable est invariablement une
approche qui nous mène à une catastrophe.
Le troisième point sur lequel je veux apporter un commentaire,
c'est sur l'éducation des adultes. On sait que cette clientèle
est appelée à s'accroître à l'intérieur du
réseau et on sait que l'évolution du marché du travail
nous oblige à développer une interaction beaucoup plus
serrée entre les institutions d'enseignement et les milieux de travail.
Trois remarques à ce chapitre. D'abord, une stratégie de
reconnaissance des acquis. Il faut mettre en place un dispositif souple et
simple qui permette de reconnaître rapidement les acquis; 40 % de cette
clientèle disent qu'on n'en a pas du tout tenu compte pour
l'évaluation de leur propre admission. Deuxièmement, il faut
trouver le moyen d'introduire une certaine flexibilité dans les parcours
pour faire en sorte que les individus aux expériences ou à la
formation très précises puissent aller plus vite ou avoir un
format qui leur convienne davantage. Troisième élément, il
est évident que, avec la place que ça va prendre dans le futur,
ce secteur de l'éducation devrait connaître une stabilisation au
niveau de ses ressources. On sait que pratiquement la totalité du
personnel enseignant a un statut précaire; 35 % du personnel de soutien
ont aussi un statut précaire.
Alors, à la fois sur l'accessibilité, la formation des
adultes et la place que les personnels doivent occuper dans les cégeps,
ça résume le commentaire d'introduction que j'ai fait, et je
demande à Denis de compléter pour sa Fédération.
Denis Choinière.
Le Président (M. Gobé): M. Choinière, vous
avez la parole.
M. Choinière (Denis): Bonjour. Nous ne le
répéterons jamais assez, l'avenir des cégeps est
indissociable de l'implication des profs et de leur syndicat. Ceci est d'autant
plus important que la réforme s'inscrit dans une politique plus large de
décentralisation et propose d'accorder aux collèges des pouvoirs
accrus. Les profs sont au coeur du processus éducatif. Se passer de leur
compétence et de leur expérience serait priver le réseau
des cégeps et la société québécoise d'une
expertise indispensable. Leur autonomie professionnelle et leurs
responsabilités doivent être reconnues. Une réforme
basée sur le renforcement des gestionnaires et sur la mise à
l'écart des profs est vouée à l'échec et nuirait au
développe-
ment de la qualité de la formation. Bref, une participation
indispensable des profs.
Mais qu'en est-il dans la réforme proposée?
Premièrement, la commission des études. Ce changement a comme
effet de contourner la représentation syndicale. Pour nos membres, la
commission pédagogique a fait ses preuves. Si elle doit être
remplacée par une commission des études, celle-ci doit être
formée selon les mêmes modalités que la commission
pédagogique et ses mandats doivent couvrir nommément ceux
dévolus à cette dernière, c'est-à-dire toute la
question de l'organisation de l'enseignement et du développement de la
vie pédagogique.
Deuxièmement, la mise à l'écart des profs de la
révision des programmes. Il est fondamental que les personnes devant
dispenser un enseignement soient consultées, tant au niveau national
qu'au niveau local, sur le contenu des programmes. C'est pourquoi nous voulons
maintenir les coordinations provinciales et nous revendiquons la mise sur pied
de tables nationales de coordination des programmes regroupant une ou un
représentant de chacune des disciplines concernées.
Troisièmement, la diminution du nombre et l'exclusion des
débats des profs du conseil d'administration, c'est une façon
d'occulter les points de vue des enseignantes et des enseignants. Nous nous
opposons à ces modifications.
Quatrièmement, l'introduction de nouveaux pouvoirs à
l'article 18.02. Nous nous inquiétons vivement des impacts de cet
article sur les conditions de travail et sur la possible restriction du champ
du négociable. En conséquence, nous demandons que cet article
soit précisé ou retiré.
Cinquièmement, le perfectionnement. Celui-ci et le recyclage sont
essentiels à une démarche centrée sur la qualité de
l'enseignement. Pour nos membres, l'enjeu actuel concerne le montant
alloué et une gestion paritaire des politiques de perfectionnement,
ainsi que des enveloppes distinctes par catégorie de personnel.
Abordons maintenant la question de la formation. Une discipline permet
d'appréhender la réalité en fonction d'un aspect
spécifique. C'est une division nécessaire du savoir, tant du
point de vue pédagogique que du point de vue méthodologique. Le
maintien de la notion de discipline reste donc fondamental en enseignement
supérieur. C'est pourquoi nous voulons que tous les cours, y compris
ceux du bloc 3, soient rattachés à des disciplines.
Un aspect intéressant de la réforme est l'augmentation du
nombre d'unités en langue d'enseignement et en littérature, ce
qui permettra de mieux encadrer les élèves. Pour nous, un accent
particulier devra être mis sur la littérature. En ce qui a trait
aux cours de langue seconde, compte tenu de la formation antérieure,
l'ajout d'un seul cours au collégial serait suffisant afin de permettre
une formation plus diversifiée sur le plan littéraire et
culturel. Sur les 200 mémoires présentés en commission
parlementaire cet automne, 10 seulement préconisaient la diminution du
nombre de cours en éducation physique. Nous croyons nécessaire et
justifié que soient maintenus les quatre cours d'éducation
physique, car c'est à cet âge que les jeunes prennent conscience
de l'importance de bonnes habitudes de vie.
L'enseignement de la philosophie vise à former
l'élève en développant l'argumentation, le raisonnement
logique, l'esprit critique, l'ouverture au monde. Cette formation s'inscrit
dans un cheminement à l'intérieur de chacune des sessions. En ce
sens, il est nécessaire de maintenir quatre cours de philosophie, ou
d'«humanities» pour les cégeps anglophones.
Il demeure capital que les enseignantes et les enseignants continuent
d'être associés par leur département et leur coordination
provinciale à l'établissement des objectifs, des standards et des
apprentissages pour tous les cours, ce qui est loin d'être explicite dans
l'énoncé de politique.
Nous partageons vivement l'objectif de valoriser la formation
professionnelle. Pour ce faire, cette formation doit être accessible et
de qualité. En conséquence, l'établissement de la carte
des programmes et la réduction de leur nombre ne doivent pas se
réduire à un jugement de nature administrative, en fonction d'un
seuil de viabilité appliqué de façon mécanique. Il
faut tenir compte de la diversité des besoins régionaux.
Afin de ne pas créer de disparité entre les mêmes
programmes dispensés dans plusieurs établissements, de permettre
le transfert d'un élève d'un collège à l'autre, de
permettre la mise sur pied de passerelles entre le cégep et
l'université, nous proposons que le pourcentage de cours
déterminés par le ministère soit d'au moins 50 %, tant
pour la formation professionnelle que pour la formation
préuniversitaire. Quant à la modulation du D.E.C. technique
proposé, nous insistons pour que la formation générale
s'inscrive de manière mieux articulée dans les programmes de
formation technique, jusqu'à l'obtention du D.E.C, mais nous nous
opposons fermement à ce que la mise en place de séquences ou
modules pour les jeunes fasse l'objet d'une certification qui aurait comme
conséquence de faire quitter aux jeunes l'école. (15 h 30)
Quant aux cours professionnels et préuniversitaires
déterminés localement, ils doivent être choisis dans une
banque de cours déterminés par le ministère, dont la
pondération est précisée. Les département doivent
demeurer pleinement responsables de la définition des objectifs, de
l'application des méthodes pédagogiques et de
l'établissement des modes d'évaluation spécifiques
à chacun des cours.
L'ajout d'unités dans certains programmes
préuniversitaires constitue une étape intéressante pour
des programmes préuniversitaires de poids équivalent. Il est
nécessaire que soient bien identifiés les objectifs de formation
entre les niveaux collégial et universitaire de manière à
permettre une meilleure harmonisation et à éviter des
chevauchements inutiles, tout en respectant une relative autonomie des ordres
d'enseignement.
En conclusion, nous tenons à souligner que dès 1988 nous
proposions un large débat sur l'ensemble du
système d'éducation au Québec. Ce projet qui se
trouve maintenant devant nous contient certains éléments
positifs. D'autres n'obtiennent pas notre accord, comme, par exemple,
l'évacuation des profs des lieux de décision et de consultation;
le manque de ressources, surtout pour le nécessaire encadrement
pédagogique des élèves; la possibilité pour les
collèges de déterminer les contenus des cours et des
pondérations, d'émettre leurs propres diplômes et ainsi
d'entrer dans une compétition entre eux, entre chacun d'eux, par
exemple, avec l'introduction de frais de scolarité.
Ceci ne veut absolument pas signifier que nous ne voulons pas de
changements. Nous croyons profondément que certains de ceux
proposés ne permettent pas, dans les prochaines années, de
relever les principaux défis du système d'éducation au
Québec. Et Gérald en a nommé quelques-uns que je prends la
peine de répéter: rehausser le niveau de scolarisation, combattre
les abandons et les échecs scolaires, intégrer les nouvelles
populations, développer l'éducation des adultes et la formation
continue. Nous serons toujours prêts à discuter et à mettre
en place des changements qui, concrètement, relèveront ces
défis. Selon nous, la réforme, telle que proposée, ne
permet pas de le faire. C'est le message clair que nos membres m'ont
demandé de vous transmettre.
Le Président (M. Gobé): Alors, merci, M.
Choi-nière. C'est là tout le temps qui vous était
imparti.
M. Larose: Si vous permettez, il y aurait aussi une petite
contribution des employés de soutien. Malheureusement, on n'en parle pas
beaucoup dans la réforme, et je tiendrais à ce qu'on...
Le Président (M. Gobé): Oui, M. Larose. Alors, je.
pense qu'en effet on peut leur donner peut-être trois, quatre, cinq
minutes, quelque chose comme ça. Deux minutes? Alors, allez-y.
M. Poirier (Magella): Alors, Mme la ministre, le message que je
viens vous livrer aujourd'hui, eh bien, c'est un message de quelque 4000
employés de soutien qui travaillent dans les collèges au
Québec, parce que nous sommes, encore une fois, les grands
oubliés du système, et toutes les discussions qui entourent ce
débat l'ont démontré amplement jusqu'à
présent. Pourtant, on l'a répété à plusieurs
reprises, et je viens vous le répéter aussi, notre travail est
essentiel à l'apprentissage des élèves.
Vous dites que le renouveau proposé doit progressivement devenir
celui des acteurs de première ligne eh bien, on en est, des
acteurs des première ligne; on est en direct avec les
élèves et susciter dès lors leur adhésion et
leur entendement. Dans ce cadre, comment peut-on adhérer à un
renouveau alors que la nouvelle commission des études, telle que
proposée, ne nous fait aucune place? On voit là un exemple de
non-reconnaissance de notre travail au niveau de la commission des
études.
Pour ce qui est de la diminution du nombre des membres du personnel au
conseil d'administration, bien, ça nous inquiète drôlement
parce que rien ne nous indique que, dans le projet de loi actuel, il y a une
place pour nous. J'aimerais savoir si c'est oui qu'on veut nous écarter
des centres de discussion. Si c'est non, bien, j'aimerais qu'on nous dise
où est notre place à ce niveau-là.
On avait mentionné dans notre mémoire, l'automne dernier,
la nécessité que la formation soit adéquate afin de
répondre aux nouvelles exigences du travail, et qu'en conséquence
les budgets au niveau de la formation soient augmentés. Alors, dans le
projet, vous ne faites mention que du transfert aux collèges des sommes
allouées au perfectionnement. Aucune augmentation. Pour nous, ce n'est
pas suffisant. .
Quant à la question du développement des ressources
humaines qui doit être au centre du renouveau, tel que mentionné
dans votre document «Des collèges pour le Québec du XXIe
siècle», il est urgent que celui-ci implique la création
d'un cadre d'activité qui permettra au personnel de s'intéresser,
de participer à la réalisation des objectifs et à la
solution des problèmes et de tirer satisfaction de son travail. Les
cégeps doivent offrir un milieu stimulant qui soit un endroit de
développement où chaque employé et élève
peut se réaliser par un travail valorisant.
J'espère, Mme la ministre, que vous tiendrez compte de nos
préoccupations et que votre projet sera modifié en
conséquence. Merci.
Le Président (M. Gobé): Alors, merci, M. Poirier.
Merci, M. Larose et M. Choinière. Mme la ministre, vous avez donc
maintenant votre temps de parole pour 20 minutes.
Mme Robillard: Merci, M. le Président. Je veux d'abord
remercier les représentants de la CSN d'être venus à
nouveau devant cette commission parlementaire, et je vois que vous avez fait un
exercice de réflexion qui vous amène à conclure sur
certains éléments que vous jugez positifs, sur d'autres où
vous avez des réserves et sur d'autres que vous rejetez
complètement. Donc, je reçois votre analyse d'une façon
nuancée, et je retiens les propos de M. Choinière au niveau de sa
conclusion, où il conclut aussi qu'il y a une nécessité de
changement. C'est bien ce qu'il a dit, bien qu'il se positionne, par rapport
à certains éléments de changement, pour ou contre,
dépendamment du jugement qu'on en fait. Alors, le temps d'échange
va peut-être permettre de préciser certaines de vos
inquiétudes ou interrogations, ou, en tout cas, que je comprenne
davantage le point de vue qui est apporté par la CSN.
D'abord, M. Larose, vous avez dit très clairement au point de
départ que vous étiez en accord avec certains
éléments du renouveau collégial qui favorisent la
réussite des études. Comme exemple, vous avez donné les
sessions d'accueil et d'intégration. Mais vous avez parlé aussi
des seuils d'admission, de la précision des
seuils d'admission. Et je lis bien, à la page 19 de votre
mémoire, que vous nous dites que «l'idée d'harmoniser et
d'augmenter les exigences d'admissibilité aux études
collégiales se justifie mais avec prudence». Et là vous
nous parlez des écarts entre ceux qui détiennent 130
unités et d'autres 180 et des problématiques que ça
occasionne. Pourriez-vous être plus explicite concernant cette
idée? Parce que, vous le savez très bien, dans le renouveau, les
seuils sont précisés. Est-ce que vous êtes en accord ou non
avec les seuils qui sont précisés? Sinon, qu'est-ce que vous
suggérez? Parce que vous dites: Oui, il faut rehausser les exigences,
mais avec prudence. J'aimerais ça vous entendre davantage sur cette
question.
M. Larose: Nous, on craint beaucoup qu'on n'en arrive à
des exigences à deux vitesses, c'est-à-dire qu'on relève
les exigences d'entrée dans les cégeps, ce qui, dans les faits,
laisserait sur le carreau tout un type de clientèle. Quand on regarde
derrière ce type de clientèle, les origines de cette
clientèle, on sait déjà qui n'ira pas au cégep.
Parce qu'on a connu ça, dans le passé, dans d'autres
structurations d'éducation. Donc, ce qu'on dit: Oui, il faut voir au
relèvement de la qualification pour entrer au cégep, mais, pour
une certaine catégorie de cette population, il faut développer
des stratégies de support pour faire en sorte qu'elle puisse
également se qualifier.
Alors, je demanderais peut-être à Denis de donner les
précisions, parce que le débat s'est surtout fait dans son
secteur quant aux unités, là. Mais, nous, à la CSN, ce
qu'on vise, c'est que le régime soit un régime
démocratique au sens où il appartient au réseau de
développer les mécanismes et les supports pour permettre au
maximum de personnes de pouvoir avoir accès au cégep, et non pas
qu'il y ait un marqueur de type social qui ferait que, pour ceux qui passent
par la filière, notamment, de la formation professionnelle, bien,
automatiquement, dans les faits, ça s'arrêterait là. Ils
sont diplômés, mais avec une guillotine, c'est-à-dire
qu'ils ne passeront jamais au niveau des cégeps. Alors, ça, pour
nous, ça serait grave comme régime.
Le Président (M. Gobé): Allez-y, M.
Choinière.
M. Choinière: Donc, en complément et en
résumé, nous sommes d'accord pour le rehaussement des exigences
du secondaire, mais ceci doit se concrétiser par un seul D.E.C., un seul
D.E.S., pas deux D.E.S., tel que proposé. Il s'agit de faire en sorte
que tout le monde ait les mêmes exigences pour obtenir un D.E.S., et que
ça soit la seule condition d'entrée au cégep, et prendre
le temps nécessaire, dans un calendrier d'application, pour obtenir
cette hausse des qualifications, et donner les appuis nécessaires au
secondaire pour permettre aux gens du secondaire d'atteindre des nouveaux
objectifs, et donner aussi les ressources nécessaires au
collégial dans la période d'adaptation. (15 h 40)
Mme Robillard: M. Choinière, est-ce que vous êtes
allé plus loin dans la réflexion? Comment on fait ça? Vous
dites: Oui, rehausser les exigences, et là, si je comprends bien, vous
voulez qu'on axe plus sur la sanction des études du secondaire. Un seul
D.E.S., dites-vous. Mais, dans cette sanction des études, à ce
moment-là, quelles sont les matières que vous jugez essentielles?
Et n'oublions pas l'objectif: c'est qu'on veut que ces jeunes soient mieux
préparés à réussir au collégial.
Êtes-vous allé plus loin dans la réflexion que seulement
dire ça, là, que vous voulez seulement un D.E.S.?
M. Choinière: Nous sommes d'accord avec les
matières et disciplines proposées dans votre projet
d'énoncé de politique, mais nous devons le faire dans les
contraintes et de la façon dont je viens de l'expliquer il y a quelques
minutes: prendre le temps pour que les étudiants au secondaire
atteignent ces objectifs-là, mettre les ressources nécessaires,
n'avoir qu'un seul D.E.S. et donner au collégial la possibilité
de donner les cours d'appoint pendant toute la période d'adaptation,
mais avec les matières telles que proposées.
Mme Robillard: Bon! Parfait! Alors, ça, c'est plus clair.
Merci, M. Choinière. Si nous parlions un peu ensemble de la formation
technique. D'abord, vous le savez, par différentes mesures dans le
renouveau collégial, nous décentralisons une plus grande
responsabilité académique vers les professeurs des
collèges. Cette fois-ci, dans la formation technique, vous me dites
très clairement: Mme la ministre, ne décentralisez pas 100 % des
responsabilités académiques aux professeurs pour fixer les
activités d'apprentissage, décentralisez-en seulement à 50
%, gardez 50 % au plan provincial. Est-ce que je comprends bien, là?
Est-ce que c'est ça? Et qu'est-ce qui justifie votre prise de position
sur ce manque de décentralisation?
M. Choinière: Actuellement, c'est 75 %
déterminés par le ministère et 25 % par le collège.
En proposant au moins 50 %, comme dans la formation préuniversitaire,
mais aussi pour la formation professionnelle, on agrandit la marge de manoeuvre
des collèges. Donc, on fait droit un peu à ce qui est
proposé dans l'énoncé de politique. Par contre, pour nous,
ce n'est pas un ensemble de collèges, le réseau collégial;
c'est un réseau collégial, et on doit garder un enseignement
professionnel de réseau. Comme je l'indiquais dans ma
présentation, pour éviter des disparités entre les
différents programmes dispensés dans plusieurs
établissements, pour permettre le transfert, par exemple, d'un
élève d'un région à l'autre, pour permettre un
meilleur passage entre le professionnel collégial et
l'université, on estime qu'il doit y avoir une certaine
uniformité et on pense que, par les 50 %, c'est une bonne façon
d'atteindre à la fois les deux objectifs: une certaine souplesse pour le
collège, mais en maintenant aussi un certain encadrement pour que le
réseau collégial et les différents pro-
grammes dans les différents établissements aient une
dimension uniforme.
Ensuite, j'aimerais aussi répondre par rapport aux professeurs
parce que, d'après nous, on ne comprend pas du tout
l'énoncé de politique de la même façon. Je ne pense
pas que les responsabilités sont décentralisées vers les
professeurs; elles sont décentralisées vers les collèges.
Ce n'est pas du tout la même chose. Et, dans votre proposition, vous
confiez à une nouvelle commission des études le rôle de
déterminer ces questions-là. Et, sur cette commission des
études là, par une réponse, ce matin, de votre part,
à la Fédération des cégeps, il était
très clair que la grande différence entre ce qui existe
aujourd'hui et la nouvelle proposition, c'est que le collège doit
déterminer les personnes qu'il veut bien mettre dessus. Donc, pour nous,
ce n'est pas un transfert aux profs. Et, quand on regarde aussi ce qui arrive
avec les coordinations provinciales, même dans le secteur technique, on
ne comprend pas que c'est une décentralisation vers les professeurs.
Mme Robillard: M. Choinière, qui sont les
spécialistes au plan académique dans un collège? Quand on
parle de donner des responsabilités académiques aux
collèges, qui sont les mieux placés pour s'occuper des
responsabilités académiques, hein? Ça me paraît
assez évident; ça m'apparaît évident que ce sont les
profs. Je veux dire, entendons-nous clairement, là.
Maintenant, ma question portait sur la décentralisation des
responsabilités, justement, d'activités d'apprentissage au niveau
du secteur technique. Vous m'apportez vos arguments, mais vous savez
sûrement que 75 % de nos programmes techniques du collégial sont
donnés dans quatre cégeps ou moins. Vous ne pensez pas qu'au lieu
de garder cette responsabilité-là de façon
centralisée à mon ministère les quatre cégeps qui
donnent le même programme pourraient se concerter au niveau de la
détermination des activités d'apprentissage au lieu de
recentraliser la responsabilité à 50 % au niveau du
ministère? Ça ne vous apparaît pas possible sur le terrain
même?
M. Choinière: Pour nous, encore une fois, les
cégeps, c'est un réseau de cégeps, et ça doit
relever de la responsabilité de votre ministère. Si vous voulez
réunir des représentants ou des représentantes des
cégeps pour faire mieux le travail, c'est ça qu'on
réclame, et que ça soit confié à des profs dans des
lieux qu'on appelle les coordinations provinciales, on est d'accord. C'est
ça qu'on réclame. Or, ce qui est proposé, ce n'est pas
exactement ça. Jusqu'à maintenant, depuis quelques années,
dans la révision des programmes, ce ne sont pas les représentants
des profs qui sont réunis; c'est ceux que le collège ou le
ministère veut bien désigner pour le faire. S'il est vrai, et je
suis d'accord avec vous, que ceux qui sont responsables de la vie
pédagogique dans une école, dans un cégep, c'est les
profs, je pense que la première chose à respecter de ce
groupe-là, c'est de parler avec leurs représentants et non pas de
se donner le pouvoir de les nommer à leur place.
Mme Robillard: Maintenant, M. Larose ou M. Choinière,
comme vous voulez, là je suis toujours au niveau de la formation
technique est-ce que je comprends, par vos affirmations, que vous
êtes en accord avec les modules en formation technique? La seule
réserve que vous avez, c'est sur la certification. J'ai bien saisi
ça. Vous aimeriez mieux l'utilisation du bulletin scolaire et non pas
une certification différente. Mais* au niveau du principe du module,
est-ce que je considère que la CSN est en accord avec ce
principe-là?
M. Choinière: En ce qui concerne le module de passerelle
entre le secondaire et le collégial, c'est évidemment oui, comme
réponse. Sur la question d'organiser d'une façon plus
serrée la formation générale avec la formation technique
par blocs qu'on pourrait appeler modules ou pas, pour que les étudiants
aient un suivi plus intéressant, autrement dit qu'ils ne fassent pas
strictement leur formation technique et laissent de côté la
formation générale, on est d'accord avec cette
philosophie-là. Et on est, oui, extrêmement en désaccord de
concrétiser ça par une certification, parce que ça va
avoir comme effet, d'après nous, de faire quitter, pour les jeunes, le
collège. Et on dit bien «pour les jeunes». Pour les adultes,
on pourrait travailler à la mise en place de tels types de modules.
Le Président (M. Gobé): Alors, merci, M.
Choinière. Mme la ministre, vous me faites signe que, pour l'instant...
Alors, il vous restera du temps par la suite. J'aimerais mentionner, avant que
M. le député de Lac-Saint-Jean commence, que, vu que le
député de Jacques-Cartier est arrivé, s'il en faisait la
demande, je verrais à aménager un peu de temps, car, quand j'ai
annoncé la répartition du temps, vous n'étiez pas
là. Donc, je l'ai réparti équitablement entre les deux
groupes. Et, si vous le désirez, M. le député de
Jacques-Cartier, faites-le-moi savoir et je verrai à vous laisser un peu
d'espace pour faire valoir vos questions. Alors, M. le député de
Lac-Saint-Jean, vous avez la parole.
M. Brassard: Oui, M. le Président. Dans le livre jaune, il
est indiqué que le renouveau proposé doit progressivement devenir
celui des acteurs de première ligne et susciter dès lors leur
adhésion et leur engagement; à défaut de quoi,
d'importants pans de l'ensemble pourraient bien produire des résultats
fort limités. Il y a donc tout un discours, d'ailleurs pas uniquement
dans ce document-là, mais également un discours
ministériel, sur la mobilisation des ressources humaines, et
particulièrement et évidemment sur l'implication centrale et
essentielle de l'acteur principal dans un système d'éducation,
c'est-à-dire l'enseignant. (15 h 50)
II y a ce discours-là, d'une part; on le retrouve dans le
document. Et, en même temps, quand on regarde le projet de loi, on se
rend compte qu'il y a ré-
duction de la place des enseignants au conseil d'administration,
réduction de la place des enseignants dans la nouvelle commission des
études dont on ne sait pas trop comment ça va être
composé, alors que la commission pédagogique, elle, on sait
comment elle est constituée. Alors, ma première question c'est:
Est-ce que vous constatez, vous aussi, d'après votre mémoire,
qu'il y a une sorte de contradiction entre le discours et les dispositions
législatives concernant l'implication et la participation des acteurs au
renouveau, particulièrement, évidemment, l'acteur clé que
constitue l'enseignant?
M. Larose: Depuis que le débat sur la réforme des
cégeps est enclenché, j'avoue être à la recherche
d'une certaine argumentation ou logique qui pourrait supporter semblable
proposition. En effet, dans l'ensemble des secteurs, compte tenu de la
mondialisation de l'économie, compte tenu de la croissance des rapports
concurrentiels entre les différents secteurs, tout le monde a
découvert les vertus, à un moment donné, de faire en sorte
que la main-d'oeuvre soit peut-être la richesse première à
être soignée dans les entreprises et dans les secteurs industriels
et, donc, qu'il fallait avoir un encadrement et une façon de fonctionner
qui feraient en sorte que ces gens seraient responsabilisés,
motivés, etc., et, donc, qu'ils occupent les lieux de consultation et de
décision. Et, même dans cette réflexion-là, je vous
avouerai que, nous, on a beaucoup référé dans le
débat à ce qui se passait dans les cégeps, et que
c'était une manière d'organiser le travail qui faisait en sorte
que les professeurs étaient largement impliqués dans la
détermination des objectifs et la conduite des opérations.
Et ce qu'on nous propose, c'est un recul, c'est une marche en
arrière. Et, moi, j'avoue et la ministre va peut-être
m'éclairer là-dessus que je veux voir quel est le
rationnel qui fait en sorte qu'on peut proposer le retrait du personnel non
seulement enseignant, mais du personnel tout court du C.A. d'une commission
pédagogique transformée. Il va y avoir des profs. Ce n'est pas
ça qui est le problème. C'est: à qui ils parlent, eux
autres? De qui ils relèvent? Avec qui ils sont en dynamique?
J'ai l'impression que, d'une structure qu'on avait voulue verticale,
parce que c'est celles-là qui sont maintenant productives, on se
ramène avec une structure qui va être pyramidale, qui va
être hiérarchique et, donc, nous voilà replongés
dans une dynamique de bureaucratisation de l'institution. Alors,
là-dessus, j'avoue, oui, qu'il y a une contradiction des loustics
diraient que ce n'est pas le seul secteur, effectivement, mais... une
contradiction nette entre ce qu'on nous annonce et les moyens qu'on nous
propose. Je dirais que c'est un petit peu la même chose, là. Je ne
veux pas être méchant, mais on parle d'accessibilité et, en
même temps, on met un ticket. Je dis: II y a quelque chose qui... Il y a
peut-être un bout que je n'ai pas lu, mais il y a des bouts que je ne
comprends pas.
Mais, sur l'organisation du travail, moi, je prétends qu'il y a
là quelque chose de très grave. Pas pour le respect du monde,
etc. Pour l'efficacité de l'organisation des institutions, à mon
avis, c'est majeur. Les cégeps vont se bureaucratiser et, contrairement
à ce qu'on dit vouloir décentraliser ils vont
effectivement se centraliser et répondre à une approche bien
différente, j'ai l'impression, à la longue, par rapport aux
approches qu'on a connues à venir jusqu'à maintenant.
Le Président (M. Gobé): M. le député
de Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: Entre autres, l'article 12 du projet de loi vous
exclut des délibérations lorsque les personnels sont
considérés en conflit d'intérêts. Je ne sais pas,
mais il me semble que, pour un enseignant, à peu près tous les
sujets qui vont se traiter au conseil d'administration, ça
l'intéresse au plus haut chef, et il va être
considéré en conflit d'intérêts presque tout le
temps. Donc, il va être quasiment dehors tout le temps du conseil
d'administration. Cette notion de conflit d'intérêts dans
l'article 12, j'ai de la misère à la percevoir. L'avez-vous
très clairement perçue, vous autres aussi?
M. Larose: Dans le secteur privé, quand on procède
à une réorganisation en profondeur du travail, le premier
débat qu'on fait, c'est la transparence économique. On met les
livres sur la table. Le deuxième débat c'est
peut-être le troisième, mais disons celui qui va suivre tout de
suite après c'est effectivement d'être organisé pour
que les salariés puissent suivre la «game» pour
prendre un terme latin de a à z. O.K.? Présence au conseil
d'administration.
On arrive dans le secteur des cégeps. On n'y fabrique pas de la
moutarde, ni des bretelles, c'est un service public. Comme le disait la
ministre tantôt, les premiers artisans, ça demeure les
professeurs. Rien dans la vie des cégeps n'est indifférent aux
professeurs, y compris leurs conditions de travail. Mais ça serait un
conflit d'intérêts que, lorsqu'on a en débattre... À
ce que je sache, ils n'ont pas la majorité. Ça, c'est comme quand
on reprochait aux journalistes de couvrir des activités syndicales parce
qu'ils étaient syndiqués. À ce moment-là, ils ne
devront jamais parler du droit des locataires ou des droits des
propriétaires, parce qu'ils sont au moins locataires ou
propriétaires. Moi, il me semble qu'il faut avoir une approche autrement
plus large et responsable.
M. Choinière: J'ajouterais, sur la question, que,
actuellement, la loi prévoit le fait que les gens n'ont pas le droit de
voter lorsqu'ils sont en conflit d'intérêts. Mais les gens ont le
droit de participer aux débats. Or, il y a depuis plusieurs
années une définition de ce que ça veut dire, être
en conflit d'intérêts, et cette définition-là,
même par la Fédération des cégeps, est assez large,
et même très large. Alors, lorsqu'on se fait proposer qu'avec la
même définition parce que la loi n'intervient pas sur un
changement de définition on va maintenant nous exclure des
débats, c'est une tout
autre paire de manches. Et là on ne comprend pas.
M. Brassard: L'autre question que je voudrais aborder, c'est la
question de la formation commune ou de la formation générale.
Bon, vous proposez non seulement une autre approche, mais une autre
composition, si vous voulez, des disciplines et des cours, qui est
différente du jeu de blocs proposé par la ministre. Je ne pense
pas qu'il y ait lieu de considérer ça comme un sacrilège.
Le jeu de blocs de la ministre, ce n'est pas les versets coraniques, ce n'est
pas intangible, puis intouchable. Et, moi, ce que je trouve intéressant
dans votre approche, c'est que ça maintient, évidemment, le
nombre de cours de philosophie, puis le nombre de cours d'éducation
physique, et c'est, évidemment, sur le contenu des cours, les objectifs,
les standards que vous attirez l'attention plutôt que sur la suppression
de cours. En tous cas, moi, je trouve ça intéressant comme
approche.
D'autre part, vous indiquez également et, ça aussi,
ça m'apparaît intéressant qu'en matière de
langue maternelle ce n'est pas une responsabilité exclusive des
professeurs de littérature et de langues de s'en préoccuper, de
la maîtrise de la langue. Ça doit être une
préoccupation de tous les enseignants, dans toutes les disciplines. Et,
enfin, vous indiquez également qu'un cours de langue seconde, ça
serait suffisant. Comment en êtes-vous arrivé à la
conclusion qu'un cours de langue seconde... Parce que, là,
évidemment, c'est quasiment devenu un péché mortel, par
les temps qui courent, que de prétendre qu'il faut réduire le
nombre d'heures consacrées à la langue seconde. Mais comment en
êtes-vous arrivés à la conclusion qu'un cours de langue
seconde ce serait suffisant dans le contexte actuel? Et pourquoi
réclamez-vous le maintien des quatre cours de philosophie, des quatre
cours d'éducation physique, tout en acceptant cependant que la
pondération soit différente pour la langue maternelle? (1.6
heures)
M. Choinière: D'abord, nous partageons et nous
avons fait part de cette préoccupation-là dès la
commission parlementaire de l'automne l'idée qu'il faut renforcer
et élargir la formation générale. Nous avons
proposé et nous prenons acte que l'énoncé de
politique fait droit, en partie, à notre demande d'utiliser les
actuels cours complémentaires de telle sorte qu'on pourrait resserrer la
règle de choix des étudiants dans ces cours
complémentaires là pour qu'ils soient beaucoup plus dans
l'optique d'élargir la formation générale. Donc, on
partage la proposition qui est déjà sur la table.
Quant à la question de la langue seconde, à notre
connaissance, rendus au collégial, les jeunes ont suivi et vont suivre
au moins 800 heures d'apprentissage de la langue seconde. On ne pense pas que
c'est un autre 45 heures ou un autre 90 heures d'apprentissage de la langue qui
va changer quelque chose. Par contre, nous sommes d'accord avec un
élargissement de la formation générale permettant aux
jeunes et aux adultes qui suivent des cours de prendre contact avec la
littérature anglaise, littéraire. Donc, un cours de 45 heures
pour ouvrir les horizons d'une autre culture par rapport aux poètes, aux
écrivains et ainsi de suite, on trouve ça quelque chose qui
pourrait être intéressant. Donc, pour nous, c'est beaucoup plus un
cours de littérature de langue seconde qu'un cours d'apprentissage de la
langue.
Ensuite, sur la question des cours de philosophie et d'éducation
physique, vous avez très bien saisi notre position. Nous croyons
qu'à l'intérieur des cours actuels et des possibilités de
changements de contenu, avec tout le travail que ces deux groupes de
professeurs ont mis sur la table dans les dernières années, nous
pouvons atteindre facilement l'objectif d'élargissement et de
renforcement de la formation générale. Nous croyons, au
contraire, que de couper dans ces cours-là enlève quelque chose
dans la formation générale.
Le Président (M. Gobé): M. le député
de Lac-Saint-Jean, vous avez la parole.
M. Brassard: Justement, concernant les cours
complémentaires, je comprends que vous êtes d'accord avec le fait
que l'étudiant pourra, par ce biais-là, aborder des champs et des
disciplines qui ne font pas nécessairement partie de son programme, du
programme qu'il a choisi, ce qui, à ce moment-là, aura pour
effet, comme vous dites, d'élargir sa formation générale.
Est-ce que vous avez eu des garanties à l'effet que la diversité
et la multiplicité des cours complémentaires seront
réduites pour qu'on en arrive à corriger un peu, disons, des
abus, en tout cas l'anarchie plus ou moins créatrice, là, qui
régnait dans ce secteur-là, dans ce domaine-là?
M. Choinière: C'était la proposition qu'on mettait
sur la table...
M. Brassard: Cet automne.
M. Choinière: ...cet automne, en commission parlementaire,
de restreindre les champs dans lesquels les élèves pourront
prendre leurs cours complémentaires et surtout de faire en sorte que
leurs choix soient en dehors des grands champs de leur spécialisation,
de leur concentration ou de leurs cours généraux. Donc, avec ce
principe-là de resserrer soit le nombre et les champs et de les mettre
vraiment articulés par rapport aux autres, on est d'accord. Mais, je
tiens à le souligner, pour nous, les cours que devront suivre les
élèves, c'est des cours qui sont liés à des
disciplines. On ne veut pas que ce soient des champs, des étiquettes.
Par exemple, culture artistique, ça peut être un cours d'histoire
de l'art, ça peut être un cours de philosophie de l'art, ça
peut être un cours d'une autre discipline. Mais on veut que les cours,
dans ce troisième bloc-là, restent attachés à des
disciplines, tout en étant d'accord pour que ces disciplines-là
soient réparties dans certains champs.
M. Brassard: Je reviendrai.
Le Président (M. Gobé): Très bien, M. le
député de Lac-Saint-Jean. Il vous reste quatre minutes. Mme la
ministre, il vous reste sept minutes.
Mme Robillard: Vous avez terminé? Oui. M. Larose, si on en
venait à votre suggestion au niveau de la composition du conseil
d'administration, où vous nous suggérez d'inclure deux membres en
provenance du milieu culturel, il faut dire que c'est assez innovateur comme
suggestion dans l'ensemble des mémoires que j'ai lus. J'aimerais
ça vous entendre sur ça.
M. Larose: D'abord, je vous dirai que la catégorie
socio-économique, en tout cas, pour voir passer tous ceux qui sont
nommés là-dessus, c'est une catégorie très
restreinte, contrairement à la terminologie. C'est toujours les
mêmes personnes, hein, qui représentent les mêmes
intérêts. C'est vrai dans les cégeps, c'est vrai dans les
CLSC, c'est vrai... Bien, là, ça va peut-être être
moins vrai, compte tenu que, maintenant, il y a un processus
démocratique un peu plus large. Il faudra voir à l'exercice. Le
milieu culturel, d'entrée de jeu, je vous dirai que c'est un milieu
lui-même, j'allais dire, amplificateur ou lui-même reproducteur au
plan de la formation, au plan de l'information. Alors, qu'ils aient une
responsabilité particulière dans le réseau des
cégeps, il me semble que ça serait d'abord leur reconnaître
officiellement un rôle réel qu'ils ont dans la
société. Et peut-être qu'il pourrait y avoir aussi des
dynamiques encore plus intéressantes entre le milieu des cégeps
et le milieu de la culture dans les régions, dans les quartiers. Alors,
je pense que c'est tellement rare qu'on les voie impliqués d'une
façon systématique que ça pourrait être au
bénéfice de tous.
Mme Robillard: Alors, à ce moment-là, M. Larose,
sûrement qu'on diminue la représentation d'autres groupes pour
faire place à deux représentants du milieu culturel. Alors,
où appliquons-nous cette diminution?
M. Larose: Bien, dans les socio-économiques; on pourrait
les substituer aux socio-économiques. Je ne sais pas si on s'entend bien
sur qui sont les socio-économiques, concrètement, dans les
cégeps.
Mme Robillard: À ce que je peux comprendre,
socio-économique, il y a deux mots, là? Social,
économique. Ce que vous dites, c'est surtout des représentants
économiques qui sont là? Très peu du milieu social?
M. Larose: Très peu du milieu communautaire, très
peu de la vie de quartier. Ça a beaucoup à faire avec les
élites locales: tous du bon monde, mais qui ont plusieurs tribunes pour
s'exprimer. Et, à notre avis, un réseau comme les cégeps,
ça doit être la propriété de la communauté
et, donc, qu'il y ait une diversification systématique dans la
représentation et qu'on oblige, notamment, à ce qu'il y ait une
présence du secteur culturel, ça risque d'être une
rentrée d'air frais intéressante.
Mme Robillard: J'aimerais demander au représentant des
employés de soutien: Comment se fait-il que vous ayez conclu, à
la page 11 de votre mémoire, qu'il n'y aurait aucun employé de
soutien à la commission des études? Parce que vous l'affirmez:
«II n'y aurait aucun employé de soutien à la commission des
études!»
M. Poirier: Alors, pour ce qui est de la commission des
études, quand on regarde, c'est trois membres du personnel... Non,
ça, c'est le C.A. Je m'excuse, madame. Alors, à la commission des
études, c'est le directeur des études qui est le
président, si j'ai bien la liste devant moi; il y a «des membres
nommés par le conseil et choisis parmi les responsables des programmes
d'études et parmi les enseignants du collège», et il y a
les «étudiants du collège nommés conformément
à l'article 32 de la Loi sur l'accréditation et le financement
des associations d'élèves ou d'étudiants». Alors, je
ne vois pas d'employés de soutien là.
Mme Robillard: Alors, la première phrase, qui dit:
«La Commission doit comprendre au moins»...
M. Poirier: Au moins...
Mme Robillard: ...ça veut dire que, nécessairement,
elle se doit d'inclure, cette commission-là, des professeurs, le
directeur des études et des étudiants, mais que la composition
n'est pas spécifiée, comme vous l'avez vu dans l'article de loi;
elle serait déterminée par le conseil d'administration des
établissements. (16 h 10)
M. Poirier: Oui. Mais, quand on regarde aussi la composition du
conseil d'administration, il y a trois personnes en ce moment: il y a une
représentation au niveau des employés de soutien...
Mme Robillard: Oui.
M. Poirier: ...avec une représentation au niveau des
professionnels non enseignants, et il y a trois personnes au niveau du corps
professoral. Ce qui fait cinq personnes représentant, entre autres, les
organisations dites syndicales dans un établissement. Maintenant, ce
serait diminué à trois pour le C.A. Alors que, là, ce
serait nommé par le conseil d'administration; ça ne veut pas
nécessairement dire non plus qu'il y aurait une personne, un
employé de soutien qui serait nommé au conseil
d'administration.
Mme Robillard: Est-ce que je dois comprendre par vos
représentations que vous considérez que le rôle des
employés de soutien dans les cégeps n'est pas
évalué à sa juste valeur par l'ensemble des autres
personnels des cégeps?
M. Poirier: Oui, madame.
Le Président (M. Gobé): Alors, merci. C'est
là, malheureusement, tout le temps qui vous était imparti,
madame. Vous l'avez même un peu dépassé, mais la discussion
devait se terminer quand même dans le même fil.
Alors, M. le député de Lac-Saint-Jean, il vous reste
quatre minutes et demie. Pour environ cinq minutes, vous avez donc la
parole.
M. Brassard: Oui, très bien. Une remarque rapide sur le
conseil d'administration aussi bien que sur la commission des études.
Comme vous êtes une centrale syndicale, une fédération
syndicale, est-ce que vous voyez, dans la façon dont on composerait et
le conseil d'administration et... Parce que le conseil d'administration
prévoit une assemblée générale du personnel;
ça n'a rien à voir avec les syndicats. La commission des
études, c'est le conseil d'administration qui la constitue; ça
n'a rien à voir avec les syndicats, non plus. Est-ce que vous y voyez
une volonté très arrêtée d'exclure l'instance
syndicale de la participation active à la mise en place et à la
composition des instances que sont la commission des études et le
conseil d'administration?
M. Larose: Ça ne serait pas la première place
où ça s'exprimerait comme volonté. Je dirais que c'est un
peu comme l'éditorialiste du journal La Presse qui, pour
souligner la fête des travailleurs, le 1er mai dernier, avait des bons
mots pour les travailleurs qui étaient au salaire minimum, qui
n'étaient pas organisés, qui vivaient des conditions
pénibles, mais tous ceux qui se sont sortis de leur situation, qui se
sont organisés, qui se sont donné un rapport de force devenaient
des bêtes noires. Je dirais que, dans les institutions des cégeps,
quand les artisans se donnent des représentants, instaurent une
dynamique intéressante, on dirait qu'on devient moins
intéressants alors que c'est précisément là qu'on
devient efficaces, qu'on devient productifs. Ça suppose, au point de
départ, qu'on reconnaisse que les personnels, pour être
productifs, doivent s'équiper et, donc, qu'on reconnaisse leur
organisation. Les institutions toutes les institutions, pas rien que les
cégeps, mais l'ensemble des services publics doivent apprendre
à vivre avec les organisations représentatives des travailleurs;
c'est ça qui est porteur d'avenir.
Puis je dirais que, dans le débat qu'on fait avec votre
collègue, président du Conseil du trésor, c'est un peu
ça qu'on veut lui dire: c'est que, s'il veut les contourner, ça
va un certain temps, mais, à terme, c'est contre-productif et ça
coûte cher à la société. Il vaut mieux
négocier, il vaut mieux s'entendre, il vaut mieux reconnaître et,
en bout de ligne, il y a des rapports sains dans une société
démocratique comme la nôtre. Alors, dans les cégeps, on
devrait reconnaître les organisations syndicales.
M. Brassard: Une question rapide. Évidemment, on n'aura
pas le temps de l'aborder, mais c'est la question de l'éducation des
adultes que vous considérez comme la grande oubliée de la
proposition de renouveau. Je l'avais signalée également dans mes
remarques sur les propositions de la ministre. Qu'est-ce qui, pour vous,
devrait être considéré prioritairement pour, au moins,
qu'on commence à reconnaître la place majeure de
l'éducation des adultes dans le réseau collégial?
Qu'est-ce qui devrait être fait en priorité et qui devrait, au
moins, apparaître dans les propositions de changements de l'ordre
d'enseignement collégial?
M. Larose: Si, à la faveur de cette préoccupation
de l'éducation des adultes, qui va prendre plus de place, et toujours
plus, dans les années qui viennent, on pouvait réfléchir
plus globalement sur l'ensemble de notre système d'éducation...
Parce que, qu'on le veuille ou pas, l'interaction entre le marché du
travail et les institutions d'enseignement va se complexifier. À notre
avis, il va falloir qu'on aborde ça de front. Il va falloir que les
institutions, pas seulement les cégeps, mais au niveau secondaire aussi,
aient une stratégie autrement plus musclée, plus articulée
pour faire face à cette réalité je le
répète qui va devenir de plus en plus importante compte
tenu de l'évolution du marché du travail. Dans le cadre de la
présente réforme, effectivement, je pense qu'il manque des
grands, grands bouts pour, d'abord, procéder à une certaine
stabilisation des ressources et opérer l'établissement des
grandes stratégies. Mais, pour moi, on peut se reprendre,
c'est-à-dire que ce n'est pas avec cette réforme-là que
tout le débat devra s'arrêter. Il va falloir qu'on reprenne
ça...
Le Président (M. Gobé): Merci.
M. Larose: ...dans les mois qui viennent, les années qui
viennent.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. Larose. Merci, M.
le député de Lac-Saint-Jean. Merci, Mme la ministre. Alors, au
nom des membres de cette commission, je tiens à vous remercier, M.
Larose, vous et les gens qui vous accompagnent. Ceci met donc fin à
votre intervention. Vous pouvez vous retirer, et je vais suspendre les travaux
de la commission quelques minutes, le temps de permettre aux
représentants de la Chambre de commerce du Montréal
métropolitain et de la Chambre de commerce du Québec de venir
prendre place. Alors, la commission est suspendue pour deux ou trois
minutes.
(Suspension de la séance à 16 h 16)
(Reprise à 16 h 19)
Le Président (M. Gobé): Messieurs, si vous voulez
regagner vos places, la commission de l'éducation reprend maintenant ses
travaux. Alors, merci.
Nous allons maintenant entendre la Chambre de commerce du Québec
et la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, qui sont
représentées par M. Jacques Girard, président du
Comité éducation, M. Bernard Roy et M. Denis Beauregard. Alors,
sans plus attendre, si vous voulez commencer votre intervention et, par la
suite, on discutera avec chacun des côtés de cette commission pour
une période de 20 minutes. M. Roy, vous avez la parole.
Chambre de commerce du Québec (CCQ) et Chambre
de commerce du Montréal métropolitain
M. Roy (Bernard): M. le Président, Mme la ministre, Mmes
et MM. les membres de la commission... M. le Président, rassurez-vous,
M. Girard et moi ne sommes pas venus ici aujourd'hui pour vous entretenir du
dossier de l'Hôtel-Dieu.
Le Président (M. Gobé): Non, mais nous pourrons
nous reprendre plus tard, si vous voulez. (16 h 20)
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Roy: J'aimerais, très brièvement, faire quelques
remarques liminaires avant de demander à Jacques Girard de commenter
plus à fond le mémoire conjoint qui a été
déposé devant vous par la Chambre de commerce du Québec
ainsi que par la Chambre de commerce du Montréal
métropolitain.
Comme président de la Chambre de commerce du Montréal
métropolitain, je suis heureux de vous remercier de l'occasion qui nous
est donnée de commenter les modifications qui ont été
proposées au système d'enseignement collégial
québécois par la ministre de l'Enseignement supérieur et
de la Science, qui est également ministre de l'Éducation. Comme
en fait foi le mémoire que nous avons préparé, comme je
l'ai dit il y a un instant, conjointement avec la Chambre de commerce du
Québec, nous accueillons favorablement l'ensemble des mesures qui sont
proposées.
Nous avons indiqué, dans notre mémoire qui a
été déposé l'automne dernier lors des
séances de la première commission parlementaire, que nous tenions
à ce que certains éléments importants du réseau des
collèges et de l'enseignement qui s'y donne soient revus en profondeur,
sans pour autant que le système fasse l'objet d'une remise en question
globale. Selon nous, c'est le résultat qui se dégage des
propositions qui font l'objet de la présente commission. En effet, les
modifications qui ont été proposées touchent autant
l'autonomie dont doivent bénéficier les collèges que le
contenu de l'enseignement dispensé, notamment au chapitre de la
formation de base dont doivent bénéficier tous les
étudiants. On doit reconnaître à la ministre le
mérite d'avoir bien identifié les domaines où des
changements s'imposent et de soumettre des propositions qui, dans la majeure
partie des cas, vont permettre de relever le niveau de l'enseignement
collégial.
En tant qu'organisme qui regroupe des gens d'affaires de la grande
région de Montréal, nous nous réjouissons d'autant plus de
cette démarche que la compétitivité de notre
économie dépend directement je pense que tout le monde en
convient de la qualité de la formation et de l'éducation
dispensées dans nos maisons, dans nos institutions d'enseignement. Le
mouvement est lancé, et la Chambre croit qu'il faut poursuivre le
travail à tous les niveaux d'enseignement. Le fait que la ministre
assume également les responsabilités qui sont dévolues au
ministre de l'Éducation nous permet d'espérer que, prochainement,
des mesures correctrices seront apportées notamment au niveau secondaire
qui, on doit le reconnaître, a tout autant besoin que le cégep
d'une révision importante.
Je cède maintenant la parole à Jacques Girard, qui est le
président du Comité éducation de la Chambre de commerce du
Québec, qui va commenter en détail les éléments les
plus importants qui sont mis en relief dans notre mémoire.
M. Girard (Jacques): Merci, M. Roy. M. le Président, comme
M. Roy vient tout juste de vous le dire, nous sommes très heureux de
pouvoir à nouveau faire valoir notre point de vue aujourd'hui devant les
membres de cette commission parlementaire. Comme vous le savez, les deux
chambres de commerce attachent beaucoup d'importance à
l'éducation et elles attachent, par voie de conséquence,
beaucoup d'importance à cette commission parlementaire et
à la formation que reçoivent et que recevront, au cours des
prochaines années, les jeunes et également les adultes qui
fréquentent les cégeps, et ce, tant pour ce qui est du secteur
préuniversitaire que du secteur professionnel.
Nous disons d'entrée de jeu que nous sommes d'accord avec les
mesures proposées par la ministre dans le document intitulé
«Des collèges pour le Québec du XXIe siècle».
Plusieurs des mesures proposées dans ce document rejoignent nos
préoccupations et nos recommandations, lesquelles, d'ailleurs,
étaient partagées par plusieurs autres groupes qui sont venus
témoigner devant cette commission parlementaire. Et ce pourquoi nous les
avions évoquées plus tôt cet automne, ce pourquoi nous
sommes heureux de les retrouver dans le document, c'est que ces mesures,
à notre avis, vont dans le sens d'une amélioration de la
formation, vont dans le sens d'exigences accrues et, pour tout dire, de la
reconnaissance de l'importance de l'effort qu'il faut consacrer aux
études. L'éducation, c'est un processus qui ne peut pas
être que joyeux; c'est un processus qui doit être rigoureux et, au
terme de ce processus, il est essentiel d'avoir appris. Et il est plus que
jamais essentiel d'avoir appris et d'avoir appris beaucoup si nous voulons
être compétitifs sur le plan international. Aucune
société moderne ne peut y échapper.
Je vais maintenant aborder, M. le Président, si vous me le
permettez, successivement quelques-uns des points qui nous paraissent les plus
importants, à la fois dans notre mémoire et dans le document
rendu public
plus tôt ce printemps. Nous sommes, tout d'abord, tout à
fait d'accord avec le renforcement des exigences pour permettre l'accès
au cégep. Et, si vous le voulez bien, je vous réfère
à la page 6 de notre mémoire, au troisième paragraphe,
qu'il vaut la peine, je pense, de relire: «II est heureux que l'ensemble
des modifications proposées par la ministre visent d'abord à
favoriser l'atteinte de taux de réussite plus élevés et
non seulement à permettre l'accès au collège au plus grand
nombre d'étudiants possible. C'est là, croyons-nous, un choix
politique qui mérite d'être souligné et qui rejoint tout
à fait ce qu'écrivait la Chambre dans son mémoire de
l'automne: "Ce n'est pas tout de fréquenter l'école ou le
collège. Encore faut-il y apprendre quelque chose et y réussir en
fonction des critères reconnus sur la scène mondiale".»
Donc, il nous paraît tout à fait normal de renforcer les
exigences, tout à fait normal d'exiger que certains cours aient
été réussis, notamment pour ce qui est de la langue
première, des mathématiques, de l'histoire et des sciences
physiques. Cela, je le répète, nous paraît naturel, normal,
souhaitable.
La démocratisation de l'enseignement est, bien sûr, un
acquis, et probablement l'acquis le plus important. Il est maintenant heureux
de constater qu'un très grand nombre, pour ne pas dire la
totalité, des jeunes Québécois et des
Québécoises ont accès à l'enseignement
collégial. Par ailleurs, le fait d'avoir complété son
secondaire, à notre avis, ne donne pas nécessairement le droit de
façon automatique d'accéder au collège. Encore faut-il
avoir fait des études secondaires dignes de ce nom, encore faut-il avoir
réussi un nombre de cours minimal et encore faut-il avoir réussi
dans les matières qui sont jugées essentielles et fondamentales.
Et je pense que ce deuxième principe ne remet absolument pas en question
le principe de la démocratisation, mais qu'il vient compléter
celui de la démocratisation.
Par ailleurs, je pense qu'il est important également de revoir,
comme l'a dit M. Roy au tout début de son intervention, ce qui se passe
au secondaire, d'y revoir la qualité de la formation et la hauteur des
exigences. Autant pensons-nous qu'il n'était pas possible ou pas
souhaitable de revoir d'un seul coup l'ensemble du réseau de
l'éducation, autant nous sommes d'accord avec la démarche qui a
été adoptée, c'est-à-dire d'abord de s'attaquer
à des problèmes précis qui avaient été
identifiés au niveau collégial. Il nous semble, M. le
Président, que le temps est maintenant venu d'adopter la même
démarche pour ce qui est du niveau secondaire et d'identifier, là
également, quels sont les problèmes véritables et quels
sont les remèdes qui pourraient être apportés rapidement,
toujours dans le même sens, afin d'améliorer la qualité de
l'enseignement, et ce, dans la même perspective: donner aux jeunes du
Québec la meilleure formation possible pour les rendre les plus
compétents possible.
Nous estimons que toute la question de la gestion des personnels dans le
réseau collégial n'est abordée que de façon
ancillaire dans le document qui a été rendu public par la
ministre. Et nous pensons qu'à un moment ou l'autre il faudra aborder ce
problème avec le même courage, de telle sorte que la majeure
partie de la gestion des collèges ne soit pas nécessairement
régie par les conventions collectives. Nous pensons également que
les cégeps devraient avoir une marge de manoeuvre plus grande que celle
dont ils disposent à l'heure actuelle pour ce qui est de l'allocation
relative à la coordination départementale. (16 h 30)
Pour ce qui est de la formation de base, je l'ai dit plus tôt,
nous sommes d'accord avec les mesures qui sont proposées, et je
réfère, là, plus précisément à la
page 9, dernier paragraphe, de notre mémoire: «...le resserrement
proposé en ce qui a trait à la formation générale
complémentaire semble de nature à assurer à tous les
étudiants une formation beaucoup plus convenable dans une
société où il est difficile, sinon impossible, de prendre
une part active sans un minimum de connaissances dans les grandes
sphères d'activités. De plus, il semble que l'orientation
proposée donnera une importance accrue à l'apprentissage des
langues modernes, ce qui s'inscrit tout à fait dans le contexte de la
mondialisation des marchés.»
Pour ce qui est de l'intégration des étudiants et des
sessions d'accueil et d'encadrement, nous sommes tout à fait d'accord
avec cette proposition qui devrait normalement permettre à ceux qui ont
de la difficulté à choisir le domaine dans lequel ils veulent
aller au cégep de prendre un temps d'adaptation et ensuite de choisir en
meilleure connaissance de cause, ce qui, par voie de conséquence,
devrait normalement avoir pour effet de réduire le taux d'abandon et de
réduire le taux d'échec. Et c'est la raison pour laquelle nous
disons, à la page 7 du mémoire, que c'est avec satisfaction que
nous prenons acte de la proposition visant à mettre sur pied des
sessions d'accueil et d'intégration des étudiants dans tous les
collèges. «Ces sessions doivent fournir un meilleur encadrement
pédagogique, mais également offrir aux étudiants une aide
accrue en matière d'orientation, pour ceux qui en ont besoin.» Ce
n'est pas le cas de la totalité, mais c'est le cas d'un nombre
significatif d'entre eux. Nous nous plaisons à souligner
l'intérêt de cette initiative.
Pour ce qui est du ticket accélérateur, nous nous
étions prononcés en sa faveur l'automne dernier et nous nous
proposons à nouveau, aujourd'hui, en faveur de l'instauration d'un tel
ticket qui, à notre avis, encore une fois, ne remet pas en question la
gratuité, ne remet pas en question la démocratisation, ne remet
pas en question l'accessibilité, mais souligne tout simplement aux
étudiants que l'on ne peut pas entrer au cégep comme on entre
dans une cafétéria et qu'une fois inscrit on a la
responsabilité de suivre ses cours et qu'on a également la
responsabilité de réussir les cours auxquels on est inscrit. Je
pense qu'il est important de souligner que, dans les autres provinces
canadiennes, ce n'est pas l'entièreté du réseau
collégial qui est gratuite, mais une partie seulement et, à ce
que je sache, les statistiques démontrent que le taux de réussite
ou le taux d'accès au
collégial n'est pas inférieur à ce qu'il est au
Québec. Au contraire, dans d'autres provinces, il est supérieur
à ce qu'il est au Québec. Donc, cette mesure, à notre
avis, ce n'est pas une mesure comptable ou ce n'est pas d'abord une mesure
monétaire; c'est une mesure de nature à responsabiliser les
étudiants.
Comme vous le savez, les deux chambres de commerce et je l'ai dit
d'entrée de jeu veulent s'impliquer davantage et s'impliquent
davantage dans le domaine de l'éducation, et nous sommes heureux que,
par certaines des mesures proposées, au conseil d'administration et, de
façon générale, à l'intérieur des
cégeps, une place plus large soit faite aux gens des affaires. Je peux
vous assurer que, de notre côté, nous avons déjà
pris des mesures pour communiquer avec la plupart de nos membres, leur
demandant de se saisir de l'occasion et de s'intéresser de façon
concrète à ce qui se passe dans les cégeps et
également dans les écoles, ne serait-ce qu'en se rendant
disponibles pour siéger au conseil d'administration, ne serait-ce qu'en
organisant des visites de leurs entreprises par les étudiants qui sont
dans les écoles et dans les cégeps, et qu'eux-mêmes, les
hommes et les femmes d'affaires, se rendent dans les écoles secondaires
et dans les cégeps pour voir d'un peu plus près ce qui se
passe.
Pour ce qui est de la formation professionnelle, des liens accrus avec
l'entreprise nous paraissent tout à fait souhaitables; des liens avec le
secondaire qui seront mieux articulés qu'ils ne l'étaient
jusqu'à maintenant, ça nous paraît être là une
orientation qui va dans un sens favorable; et la plus grande autonomie
accordée aux institutions collégiales nous paraît
également aller dans le bon sens. Pour ce qui est de la plus grande
autonomie, je vous réfère à la page 11 de notre
mémoire, au premier paragraphe: «Le fait de laisser à
chaque institution le choix des moyens les plus appropriés pour
atteindre les objectifs fixés par la ministre aura, croyons-nous, un
impact intéressant sur le nombre de stages en entreprise, de même
que sur la qualité de ces stages.» La Chambre rappelle d'ailleurs
qu'elle a déjà commencé ce que je viens de dire
à inciter systématiquement les chambres locales à
s'y intéresser.
Le financement des collèges et la performance. Il est
recommandé d'instituer une commission d'évaluation de
l'enseignement collégial. Cette recommandation est tout à fait
bien reçue par les deux chambres et elle répond à des
recommandations que nous avions faites. Par ailleurs, nous souhaiterions que
vous alliez un peu plus loin et qu'au-delà de l'évaluation des
enseignements l'on puisse procéder également à
l'évaluation des institutions elles-mêmes. Donc,
l'évaluation des enseignements est, de toute évidence, le pas le
plus important, mais nous estimons qu'il faudrait franchir un pas additionnel
et aller à l'évaluation des institutions elles-mêmes.
M. le Président, je pense que ça fait là le tour
des points majeurs sur lesquels nous voulions insister cet après-midi.
Je vous remercie de votre attention.
Le Président (M. Gobé): Alors, je vous remer- cie.
Est-ce qu'il y a d'autres intervenants de votre côté? Non?
Une voix: Non.
Le Président (M. Gobé): Très bien. Nous
allons donc maintenant passer à la période des questions, en
effet. Je passerai donc la parole à Mme la ministre de
l'Éducation. Madame, vous avez la parole.
Mme Robillard: Merci, M. le Président. Je salue les
membres de la Chambre de commerce du Québec et de la Chambre de commerce
du Montréal métropolitain. Je suis très heureuse que vous
ayez analysé le renouveau collégial qui est sur la table
présentement et je note votre appui général à
l'ensemble des mesures.
J'aimerais bien comprendre, M. Roy ou M. Girard, le sens de votre phrase
de la conclusion à la page 18, la dernière phrase de la page 18:
«En conséquence, l'appui de la Chambre à ces propositions
est fonction de la mise en application de l'ensemble de la
démarche.» Qu'est-ce que vous voulez me dire?
M. Roy: Mme la ministre, on a tenté, à l'aide de
certains exemples qui précèdent le membre de phrase, de dire dans
quelle mesure, pour nous, tout ça forme un tout cohérent et que
toutes ces composantes-là sont imbriquées les unes aux autres,
avec le résultat que, par exemple, si vous devez donner suite à
l'orientation annoncée dans votre document à l'effet de donner
une plus grande marge d'autonomie aux collèges, il nous apparaît,
à nous, que la contrepartie de tout ça, c'est qu'il y ait un
système d'évaluation efficace. En somme, si les deux ne vont pas
de pair, nous, à ce moment-là, on a des problèmes à
appuyer ou à embrasser cette partie-là, cette
orientation-là que vous proposez. Même chose pour le ticket
accélérateur. La contrepartie du ticket serait d'offrir et de
donner des meilleurs services d'orientation et d'encadrement. Si on laisse
tomber les meilleurs services d'encadrement et d'orientation, on a un
problème avec le principe du ticket accélérateur. C'est le
sens à donner à cette dernière phrase.
Mme Robillard: Je comprends bien. Merci, M. Roy.
J'aimerais revenir avec vous sur les conditions d'admission au
collège que vous avez discutées dans votre mémoire
à partir de la page 5. La Chambre se dit en accord avec la
nécessité de rehausser les conditions d'admissibilité aux
programmes qui conduisent au diplôme d'études collégiales,
mais vous énoncez aussi quelques réserves ou quelques
inquiétudes, et j'aimerais vous entendre davantage sur ça,
surtout quand vous affirmez que des mesures sont souhaitables pour rehausser le
niveau de l'enseignement professionnel au secondaire. C'est ce que je vois
apparaître dans le milieu de la page 5. Pourriez-vous élaborer sur
ce sujet-là? (16 h 40)
M. Girard: Ça rejoint ce que nous avons dit
tantôt. Dès le moment où les exigences pour entrer
au collégial sont plus considérables, certains allèguent
que nous faisons face à deux diplômes au secondaire, à un
D.E.S. qui permet l'entrée au collégial et à un D.E.S. qui
ne permet pas l'entrée au collégial. Nous avons dit que nous
étions d'accord avec ce choix, mais qu'il faudrait néanmoins
prendre des mesures de telle sorte que ceux qui ne réussissent pas tous
les cours puissent éventuellement les réussir. Et c'est là
que nous avons dit également que les exigences de façon
générale au secondaire devraient être
améliorées.
Pour ce qui est de la formation professionnelle, on se demande
également s'il n'y a pas lieu de revoir de façon
systématique certains secteurs de la formation professionnelle au
secondaire. Dans le document «Des collèges pour le Québec
du XXIe siècle», vous faites des propositions à l'effet
qu'une articulation plus grande se fasse entre le secondaire et le
collégial. Ça nous semble aller dans le bon sens, mais il nous
paraît néanmoins essentiel de revoir la qualité de ce qui
se fait au secondaire. C'est dans ce sens-là qu'il faut comprendre ces
phrases et ces paragraphes.
Mme Robillard: Et de façon particulière au niveau
de l'enseignement professionnel? Est-ce que c'est ça, le diagnostic de
la Chambre?
M. Girard: Sûrement pour ce qui est de l'enseignement
professionnel, parce que l'enseignement professionnel nous préoccupe de
façon particulière, mais non pas uniquement pour l'enseignement
professionnel.
M. Roy: M. Beauregard. . M. Beauregard (Denis): Si vous me
permettez, M. le Président, j'ajouterais peut-être ceci. À
partir du moment où on rehausse les conditions d'admissibilité au
cégep, on risque, comme on l'a dit tantôt, de provoquer certaines
choses au niveau secondaire. Alors, les gens qui n'auront pas réussi
tous les cours de base ne seront plus admissibles au cégep. Par
ailleurs, il y a quelque temps déjà, nous avons rehaussé
les conditions d'admissibilité au secteur professionnel secondaire.
Alors, là, le risque qui se présente, croyons-nous, est le
suivant: c'est qu'il va falloir trouver des façons de s'occuper des gens
qui tombent entre les deux voies et qui, manifestement, peut-être, ne
pourront jamais accéder au collège, et n'ont pas non plus ce
qu'il faut pour aller au niveau professionnel tel qu'on l'a requalifié.
Alors, qu'est-ce qu'on fait de ces gens-là? Est-ce que ça devient
des abandons...
Mme Robillard: C'est une belle question.
M. Beauregard: C'est une belle question. Et je sais que vous
êtes très bien entourée pour trouver des réponses
à tout ça.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Beauregard: Nous, enfin, on a une connaissance limitée
de ce milieu-là. Alors, on voit le problème et on veut être
certains que le problème ne passe pas inaperçu.
Mme Robillard: Au niveau des mécanismes
d'évaluation, si je saisis bien, la Chambre est en accord avec les
différents mécanismes d'évaluation et, comme vous venez de
le dire, c'est en contrepartie aussi au fait qu'on donne plus de
responsabilités académiques et, donc, un système
d'évaluation plus rigoureux. Mais vous dites: Allons donc plus loin au
niveau du mandat de la commission d'évaluation c'est comme
ça que j'ai compris votre message en spécifiant deux
sujets particuliers: premièrement, qu'elle reçoive le mandat de
l'évaluation globale des institutions, mais aussi que la Commission
puisse émettre des recommandations sur les politiques, les directives du
ministère en tant que telles. Quels seraient les avantages pour vous
d'avoir ces deux mandats-là supplémentaires à la
Commission?
M. Girard: II nous apparaît que de soustraire au jugement
ou au mandat de la Commission certaines des directives ou des politiques qui
sont émises par le ministère ne contribue pas au renforcement de
l'évaluation et ne touche qu'une des deux parties essentielles. On veut
bien responsabiliser les cégeps et, si les cégeps sont
responsabilisés, ils doivent l'être à l'égard de
tous les secteurs où ils ont une responsabilité. Et les
directives qui sont émises par le ministère de l'Enseignement
supérieur sont néanmoins appliquées par les cégeps
eux-mêmes, par les directions des cégeps. Pourquoi ces directives
ou ces politiques, pourquoi ces orientations ne seraient-elles pas
également soumises à la commission d'évaluation? Nous ne
voyons pas, à vrai dire, de bonnes raisons pour que cette partie
échappe à la commission d'évaluation. On pense que la
Commission devrait avoir le mandat global de juger ce qui se fait dans les
cégeps, mais à la fois les orientations et les directives qui
sont émises par le ministère et qui tombent sous la
responsabilité des cégeps quant à leur application.
Autrement, on pense qu'il y a un secteur non négligeable qui ne serait
pas évalué et que ça ne va pas dans le sens d'une
évaluation véritable des enseignements qui sont dispensés
dans les collèges.
Mme Robillard: Alors, ça va pour la partie qui touche au
ministère, aux politiques, aux orientations du ministère.
Maintenant, à quoi ça ressemblerait, selon vous, une
évaluation globale des institutions? Parce que c'est le second volet
où vous demandez un élargissement.
M. Girard: Nous ne sommes pas nécessairement entrés
dans les détails et nous ne nous sommes pas arrêtés
à proposer une mécanique. On sait, par ailleurs, qu'il existe des
systèmes où on évalue les institutions. Il existe des
systèmes aux États-Unis où on évalue les
institutions elles-mêmes. D'ailleurs, jusqu'à un certain
point, le ministère de l'Enseignement supérieur le fait
pour ce qui est des universités, tout au moins pour un secteur
spécifique, en tenant compte du taux de diploma-tion. Et,
déjà, ça nous paraît une voie intéressante.
On pense que cette voie-là, qui a été adoptée pour
les universités, pourrait l'être également pour les
collèges et on pense qu'en allant au-delà de l'évaluation
des enseignements qui sont dispensés et en allant à
l'évaluation de l'ensemble des politiques et des résultats d'un
collège on créerait une émulation plus grande et on
donnerait probablement plus de force à plusieurs des dispositions qui
sont contenues dans le document que vous avez rendu public. Ça va dans
le sens, à notre avis, de la décentralisation, de la
responsabilisation, de l'amélioration de l'atteinte de l'excellence et
d'une plus grande autonomie.
Mme Robillard: Est-ce que je dois faire un lien avec votre autre
recommandation à l'effet de lier le financement des collèges
à leur performance? Vous nous parlez de ça à la page 15.
Est-ce que, M. Roy ou M. Girard, vous êtes allés un peu plus loin
dans cette idée-là? Ça pourrait être quoi, selon
vous?
M. Girard: Dans la mesure où, précisément,
on évalue les enseignements, dans la mesure où on évalue
les autres politiques d'une institution, où on évalue globalement
une institution, pourquoi l'institution qui est la mieux jugée ne
bénéficierait-elle pas de son excellence au plan du financement?
Être bon, c'est intéressant. Il y a une reconnaissance au fait
d'être bon et au fait d'être reconnu bon ou excellent. Mais on se
demande si, précisément, il ne serait pas intéressant,
pour maintenir et développer cette excellence, qu'il y ait, comment je
dirais, un intérêt financier à atteindre l'excellence. Nous
savons que ce n'est pas nécessairement facile d'y arriver, mais on pense
que ça vaut la peine d'y réfléchir.
Mme Robillard: Alors, est-ce que vous pensez à la formule,
justement, qu'on a mise en application au niveau universitaire, de financer par
diplôme, par type de diplôme, un montant d'argent par...
M. Girard: Ça, c'est une voie qui nous paraît
intéressante, effectivement.
Mme Robillard: Et la Chambre a réagi positivement à
cette mesure-là...
M. Girard: Tout à fait.
Mme Robillard: ...au niveau universitaire?
M. Girard: Oui.
M. Beaurégard: C'est ce qu'on disait d'ailleurs, si vous
me permettez, dans notre mémoire de l'automne, où nous
recommandions d'appliquer ce moyen-là à l'enseignement
collégial. L'idée étant aussi d'essayer de trouver des
moyens d'allouer plus de ressources aux gens qui ont des meilleurs
résultats, de façon à permettre aux meilleurs, justement,
de disposer de plus en plus de ressources pour bâtir des centres
d'excellence. C'est ça qui est l'idée, au fond, qui sous-tend
cette recommandation-là.
Mme Robillard: Quant à la représentation au niveau
des conseils d'administration, vous me dites dans votre mémoire,
à la page 13, que le processus de nomination, de façon
particulière des gens du milieu des affaires, est nébuleux et
souvent mis en branle à la dernière minute. Parlez-moi de
ça s'il y a un problème.
M. Girard: On nous dit qu'effectivement le processus est souvent
mis en branle à la dernière minute, que des consultations sont
faites auprès de personnes et que les résultats de ces
consultations ne sont pas toujours communiqués, que les gens ne sont pas
informés ou que ceux qui ont fait les recommandations ne sont pas
nécessairement informés des choix qui ont été
faits. Et, à vrai dire, on se demandait s'il était absolument
essentiel que tous les membres du conseil d'administration soient nommés
par la ministre ou s'il ne pourrait pas y en avoir un certain nombre qui soient
nommés par cooptation.
Mme Robillard: O.K. Ça va.
Le Président (M. Gobé): Oui, M. le
député de Lac-Saint-Jean, vous avez la parole.
M. Brassard: M. le Président, je reviens sur un point qui
m'apparaît essentiel, pages 5 et 6, c'est concernant les conditions
d'admission au collège. En tout cas, moi, ce que vous dites là me
rappelle toujours que plusieurs intervenants avaient demandé que le
débat ou que la réflexion porte sur l'ensemble du système
d'éducation et non pas uniquement sur un ordre d'enseignement en
particulier, celui qui se situe en sandwich entre les deux autres. Quand vous
dites: Bon, très bien, rehaussez les exigences, je pense que tout le
monde est d'accord là-dessus, nous aussi. Il n'y a pas de... En tout
cas, il y a très peu d'intervenants qui sont contre le rehaussement des
exigences. (16 h 50)
Mais vous dites: «Par ailleurs, pour éviter que cette
initiative qui vise à accroître le taux de réussite au
collège n'entraîne une hausse du nombre d'abandons au secondaire
et même presque une véritable hécatombe des
mesures de renforcement doivent être mises en place auprès des
élèves du secondaire qui en auraient besoin.» Vous indiquez
également plus loin: «...plusieurs étudiants se retrouvent
sans aucune possibilité de poursuivre des études qui
conviendraient à leurs capacités. Le ministère a la
responsabilité de développer des voies valables pour ces
étudiants et de les rendre accessibles, étant bien entendu que
tout le monde ne
peut avoir accès de facto aux études
supérieures.» Moi, je pense que vous avez raison d'insister
là-dessus, c'est absolument essentiel. Si on rehausse les exigences du
diplôme d'études secondaires, il faut absolument que ce soit
accompagné, et même précédé dans certains
cas, de mesures de soutien, de renforcement pour éviter, justement, que
les exclusions s'amplifient.
Et la réponse que vous donniez tout à l'heure quand vous
disiez: II y a quand même aussi un certain nombre de jeunes qui ont de la
difficulté à cheminer dans les voies qui sont
générales ou régulières et il faudrait innover,
initier, mettre en place d'autres voies de cheminement. En tout cas, moi, je
pense que vous avez raison; ça m'apparaît important, puis
ça indique tout simplement qu'on aurait dû réfléchir
sur l'ensemble du système et non pas uniquement sur un ordre
d'enseignement. Mais, en tout cas, vous alertez. C'est le bouton d'alarme sur
lequel vous pesez qui m'apparaît important.
Est-ce que vous avez une idée de ce que pourraient être ces
nouvelles voies? Il est question... Par exemple, il y a des
expérimentations concernant ce qu'on appelle la voie technologique qui
permettrait peut-être à un certain nombre d'étudiants, de
jeunes, de mieux cheminer; ça correspondrait mieux à leurs
capacités, puis à leur intérêt. Mais vous êtes
tout à fait d'accord, si on rehausse les exigences, qu'il faut qu'il y
ait une opération, une action vraiment articulée au niveau
secondaire pour éviter l'hécatombe et éviter
l'accroissement des exclusions.
M. Girard: Tout à fait, et on pense, en fait, que
l'opération qui a été menée au collégial
et nous l'avons dit tantôt, tant M. Roy que moi-même
doit être menée également au secondaire. Pour ce qui est
des voies précises qui devraient être adoptées pour
s'occuper de ces étudiants et de ces étudiantes qui risquent de
tomber entre deux chaises, comme on l'a dit tantôt, nous n'avons pas,
aujourd'hui, de propositions précises à faire.
Par ailleurs, il y a quand même un élément qui est
intéressant qui consiste désormais à pouvoir
reconnaître au collégial les acquis du secteur professionnel au
secondaire. Il y a donc là une voie qui nous paraît
intéressante et qui est très sûrement une voie d'avenir.
Est-ce qu'il existe d'autres voies? Possiblement, et c'est celles-là
qu'il faudra trouver.
M. Brassard: D'autres voies ou des mesures aussi d'encadrement,
de soutien pour ceux qui sont engagés dans le cheminement
régulier.
M. Girard: Mesures d'encadrement et de soutien, parce qu'il est
évident que le taux d'échec et le taux d'abandon sont beaucoup
trop élevés et que le problème est particulièrement
grave je pense qu'il faut le souligner, particulièrement grave
et il a tendance à s'aggraver chez les garçons, à
l'heure actuelle.
M. Beauregard: Si vous permettez, je pense qu'il faudrait...
M. Brassard: Oui.
Le Président (M. Gobé): Allez-y, M. Beauregard.
M. Beauregard: ...peut-être partir, enfin, je dirais, du
début et nous attaquer très rapidement à toute la question
de l'orientation des élèves au niveau secondaire. Je pense qu'il
y a un paquet de problèmes qui partent de là. Je ne veux pas
caricaturer, mais les services d'orientation dans l'ensemble du réseau,
disons qu'il y a des trous là-dedans; il y a beaucoup de travail
à faire là. Moi, je pense que le problème commence
là. Alors, donc, première mesure, et ça, ça doit
être fait très, très rapidement.
Deuxième chose, on parle de voies possibles. Il y a
peut-être moyen de développer puis, là, il y aurait
peut-être lieu d'y aller avec des projets-pilotes, pour commencer
un système bien encadré de partage de temps entre l'école
et le travail, dans certaines conditions, pour faire en sorte que les jeunes
qui, manifestement, sont absolument réfractaires aux murs d'une
école... Et ça existe, ça, il y en a; les boutons leur
poussent à la minute où ils rentrent à l'école,
puis, là, on se demande comment on va leur faire réussir des
cours, mais sans... Alors, il y a des pays où ça existe, un
partage de temps, mais très structuré, très suivi. Il ne
s'agit pas, non plus, de les envoyer ailleurs qu'à l'école, tout
simplement. Alors, concevoir des programmes de partage de temps, je pense que
ça pourrait être une voie qui pourrait être
examinée.
M. Brassard: Bien. Bon, je ne reviens pas sur
l'évaluation, je pense que vous en avez parlé. Nous aussi, on
pense qu'il y a un oubli, là, surprenant. Les grands encadrements, les
directives, politiques ont été écartés. Pourtant,
le Conseil des collèges avait été très clair dans
tout son chapitre sur l'évaluation: il faut que ça fasse partie
également du mandat de la commission d'évaluation. Bon, on est
d'accord là-dessus aussi.
Mais vous exprimez des réticences, plutôt des
inquiétudes, vous êtes perplexes devant la mise en place du
comité national des programmes d'études techniques. À la
page 17 de votre mémoire, vous dites: «...la Chambre est
inquiète quant à certaines modalités de l'instrument
proposé. N'y a-t-il pas lieu de s'interroger sérieusement sur la
lourdeur que risque d'entraîner une telle structure en regard des
résultats qui peuvent en découler?» Est-ce que vous
pourriez vous exprimer un peu, davantage sur ces inquiétudes que
provoque chez vous la mise en place d'une telle instance?
M. Girard: Les inquiétudes sont liées au fait que
la mise en place de structures globales ou de structures à la largeur du
Québec entraîne très souvent des lourdeurs, entraîne
très souvent un grossissement rapide de
l'institution, une espèce de bureaucratisation excessive de
l'institution. On s'est interrogés, on a tenté de voir s'il y
avait vraiment une autre solution, d'autres possibilités. Il nous
était impossible d'en proposer une concrètement, mais il nous a
quand même semblé nécessaire d'attirer l'attention sur le
fait que cette structure devrait être une structure légère,
une structure souple, une structure qui peut s'adapter aux changements et non
pas une structure qui s'alourdit à un rythme considérable au fil
des mois et qui finit par perdre le sens des raisons pour lesquelles elle a
été créée. Au fond, c'est une espèce de
réaction instinctive face aux ensembles considérables ou aux
grandes structures qu'on crée en toute bonne foi, mais qui
s'avèrent, finalement, tellement lourdes qu'elles sont incapables de
répondre aux besoins et de faire les analyses essentielles, parce qu'on
y retrouve aussi très souvent, dépendant de la composition, des
antagonismes qui font que ces organismes se retrouvent bloqués en raison
de divergences fondamentales d'intérêts ou de points de vue. Je
pense que ce sont là les éléments qui nous
inquiétaient.
M. Brassard: Quand vous parlez de mécanisme souple et
efficace, là, vous n'avez pas d'idée précise?
M. Beauregard: En fait, l'expérience a appris aux gens
d'affaires que, généralement, les démarches qui
fonctionnent le mieux, enfin, sur ce terrain-là, sont les
démarches qui sont le plus près possible du problème
à régler, et que la mise en place de tables nationales,
généralement, mène à pas grand-chose après
beaucoup d'efforts. Et, surtout, je pense que ce qu'il faudrait éviter,
c'est que ces tables-là ne deviennent le prolongement des tables de
négociation, et que la formation professionnelle et les programmes
deviennent, enfin, une espèce de lieu où on continue à
négocier ce qu'on n'a pas réussi à obtenir dans le cadre
des vraies négociations. Il y a des tables qui ont déjà
dégénéré de cette façon-là. (17
heures)
Donc, l'expérience nous apprend que, quand il y a un
problème dans un secteur donné, puis, ici, on parle vraiment de
programmes... Alors, s'il y a un problème dans un secteur donné
avec les programmes, si on parle d'aéronautique, par exemple, et qu'il y
a des problèmes à ce niveau-là, mettons donc ensemble les
gens du secteur et laissons-les travailler sur des choses qu'ils connaissent,
et qu'ils règlent les vrais problèmes. On pense que ce serait
plus productif que de mettre en place ces grandes choses-là.
M. Brassard: Une dernière question, quant à moi.
S'il reste du temps, mes collègues pourront l'utiliser. Ça
concerne les stages et la formation en alternance. Dans son document, la
ministre indique que c'est une bonne chose, que c'est bien, qu'il y a
unanimité sur la nécessité d'une telle formation, mais
ça se limite à ça. Et je vous cite la dernière
phrase: «Le renouveau pro- posé invite à aller plus avant
dans cette direction.» J'imagine que vous êtes d'accord avec la
formation en alternance, avec les stages en entreprise. Bon, je pense que oui;
ça, c'est connu. Mais est-ce que vous êtes satisfaits de ce qu'on
retrouve dans le document ministériel sur cette question-là?
Est-ce que vous vous seriez attendus...
M. Roy: Je dirais que ça reste...
M. Brassard: ...à avoir au moins quelques
éléments d'une stratégie à mettre en vigueur, puis
un certain nombre d'objectifs également en cette matière, pour
essayer d'aller plus loin? Ou si on se contente de dire: C'est beau, c'est
bien?
M. Roy: II y a quand même là l'expression d'un
désir, d'un voeu, d'une volonté, on l'espère, de pouvoir
mettre quelque chose en place qui favoriserait, justement, une des
recommandations que nous avons faites l'automne dernier. Maintenant, est-ce
qu'on aurait préféré avpir quelque chose de plus
précis, de plus articulé? Évidemment, il aurait
été plus facile pour nous, à ce moment-là,
d'applaudir, je présume, à cette initiative. Mais, ceci
étant, si, dans les faits, la ministre prend les mesures ponctuelles
pour donner suite à cette expression d'intention de sa part, je pense
qu'on ne peut pas être contre la vertu. En réponse à votre
question, évidemment, c'eût été
préférable d'avoir quelque chose de peut-être un petit peu
plus élaboré et précis. Mais on peut difficilement
s'inscrire en faux contre cette volonté de vouloir faire quelque chose.
As-tu quelque chose à ajouter?
M. Beauregard: Peut-être juste préciser.
Le Président (M. Gobé): allez-y, m. beauregard.
M. Beauregard: Dans la lignée de l'autonomie qu'on veut
donner aux collèges en matière de stages comme en matière,
tantôt, de tables de révision de programmes, j'ai l'impression
qu'en matière de stages on a tout intérêt à faire en
sorte que les collèges devenus plus autonomes s'organisent avec les
entreprises de leur milieu. À ce niveau-là, je pense que la
direction est donnée, c'est-à-dire que les collèges, ayant
des outils pour travailler, devront aller sur le terrain et faire ça.
Moi, je vois plus les stages s'organisant à ce niveau-là
qu'à un niveau ministériel, entre guillemets. Je pense que, dans
ce domaine-là, moins le ministère va s'en mêler, mieux
ça va aller, enfin, parce qu'on sait que les...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Beauregard: J'ai dit: «Dans ce
domaine-là».
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Beauregard: Parce que les stages, en fait, ça doit
être conçu vraiment sur mesure pour répondre à des
besoins très spécifiques, et les besoins, selon les secteurs
industriels, selon les régions également, ne sont pas du tout les
mêmes en matière de stages. Alors, dans ce sens-là, plus
ça va être collé sur le collège, mieux ça va
être, je pense.
M. Roy: Et on a donné plusieurs exemples.
M. Brassard: Je suis d'accord avec vous là-dessus, sauf
que je me dis: Étant donné, comme on peut le lire dans le
document ministériel, qu'on a plus de stagiaires potentiels que de lieux
de stages, il y a un problème de participation des entreprises.
M. Beauregard: Oui.
M. Brassard: Ça veut dire, probablement... Je suis pas mal
d'accord avec vous pour dire que ça doit originer des lieux, des
établissements.
M. Beauregard: C'est ça.
M. Brassard: Mais ça veut dire aussi des ressources pour
mettre en oeuvre une stratégie, puis impliquer, puis embarquer les
entreprises. Ce n'est pas évident que les ressources sont là
actuellement.
M. Roy: On a donné plusieurs exemples, à la page 21
du mémoire que nous avions produit l'automne dernier, du type de
relations qui existent présentement, actuellement, entre les
collèges et le milieu des affaires, qui, à mon sens, sont
porteuses d'espoir pour favoriser davantage les échanges et les stages.
Par exemple, le cégep de Trois-Rivières, le cégep de
Victoriaville, le cégep Édouard-Montpetit, le cégep de
Saint-Hyacinthe, le cégep de La Pocatière, le cégep de
Bois-de-Boulogne et le cégep de Maisonneuve; il y a là quand
même, à mon sens, de bonnes illustrations de ce qui peut se faire,
évidemment, davantage sur ce plan-là.
M. Girard: Et, surtout, je pense que nous sommes convaincus d'une
chose, nous sommes convaincus qu'il s'en fait plus qu'on ne veut bien le dire
habituellement et qu'on n'est pas nécessairement conscients de ce qui se
fait, un; ensuite, qu'il n'est pas possible d'avoir un modèle unique et
qu'il n'est surtout pas possible d'importer carrément d'un autre pays ce
qui se fait pour tenter de l'appliquer ici. On parle sans arrêt du
modèle allemand. On pense que ce n'est pas possible d'appliquer ce
modèle-là qui est lié à la tradition allemande. On
pense qu'il faut surtout inventer des choses qui nous soient propres, qui
soient adaptées. C'est pourquoi on pense que ça doit se faire au
niveau local et qu'il n'y a pas un modèle unique. On pense qu'il faut
tenir compte de la réalité industrielle aussi du Québec.
Il y a un nombre important de grandes entreprises, mais il y a un nombre encore
plus important de moyennes et de petites entreprises, et il faut voir comment
ces entreprises peuvent accueillir des étudiants, et ce n'est pas
nécessairement suivant le modèle de la plus grande entreprise.
Mais il y a des possibilités, à des coûts raisonnables.
M. Brassard: Ça va pour le moment.
Le Président (M. Gobé): Très bien. Alors, il
va rester à peu près quatre minutes pour votre côté.
Mais je dois auparavant vous informer, de chaque côté, que M. le
député de Jacques-Cartier m'a fait savoir qu'il voulait
intervenir. Vu qu'il est député indépendant, nous devons,
en toute équité, lui réserver une partie du temps,
d'autant plus qu'il n'en n'abuse pas souvent. Alors, sans plus tarder, je
passerai donc la parole à M. le député de Jacques-Cartier;
par la suite, à M. le député de Rimouski qui a
demandé la parole, à Mme la députée de Terre-bonne
et, s'il reste du temps, j'aurai une question, une petite intervention à
faire. Mais, s'il ne reste pas de temps, bien, la présidence se
sacrifiera. Alors, M. le député de Jacques-Cartier, vous avez la
parole.
M. Cameron: Merci, M. le Président. You are applying the
wisdom of Salomon. I will try to be brief. I would like to return to the issue
of excellence and competitiveness, especially in talking about evaluating
cégeps. Now, you dealt with this partly already in talking about the
«stages». But, for example, I think both my colleague opposite and
I, who have taught in the cegep system for many years, would tell you that to
compare cégeps is not only difficult in the obvious way because of the
regional geographic aspect, it goes deeper than that. The problem is that there
is not any consensus in our society about what is wanted from an educational
institution, and to no small extent, if you are going to talk about excellence
and competitiveness for Quebeckers, I think you have to talk about individual
Quebeckers, that is the students, not the educational institution.
For instance, if you compare the quality of my cegep with several of the
other anglophone ones, John Abbott, it would come out very well. I would love
to boast that that was because of the quality of my teaching or that of my
colleagues, but I think that that is only to a minor extent the reason. The
reason is essentially that we get students from a more or less affluent,
comfortable suburban area, usually with parents who also have college level
education or more, with the right kind of support and motivation. It would be
unfair to compare the college even with Dawson, for instance, which has to deal
with students downtown who are doing things like working 40 hours a week in a
pizza parlour and taking classes in the evening, and there are comparable
things for the francophone colleges.
So, it seems to me each evaluation of a cegep will always depend more on
deciding what is good for the student than what is good in terms of the
college. Could you respond to that?
M. Girard: Je pense qu'on est tout à fait d'accord avec
vous sur le fait que c'est d'abord l'excellence des étudiants que l'on
vise, et c'est précisément la raison pour laquelle on veut
évaluer la qualité des enseignements. Là-dessus, nous
sommes tous d'accord. Mais il est évident que l'excellence des
étudiants ou que l'excellence de l'enseignement est également.
liée à la qualité de l'enseignement qui est
dispensé par les professeurs. Ça me paraît évident,
et c'est pourquoi on recherche des membres du corps professoral qui soient le
mieux formés possible, qui soient le plus intéressés
possible aux étudiants et qui donnent le meilleur enseignement possible.
On ne peut pas nier la qualité nécessaire de l'enseignement et la
qualité nécessaire des enseignants et des enseignantes, des
professeurs. Mais il y a aussi l'excellence de l'encadrement d'une institution,
l'excellence des politiques que se donne une institution.
L'élément le plus important, c'est sans aucun doute la
qualité de l'enseignement. La qualité des professeurs est
importante et la qualité de l'enseignement pris globalement est
également importante. (17 h 10)
Bien sûr, il existe des contraintes, puisque le réseau
collégial est un réseau public, et la contrainte, c'est
d'accepter le plus grand nombre d'étudiants. Mais, déjà,
on tient compte de ce problème en rehaussant les conditions d'admission.
Il n'est pas dit que tous les meilleurs étudiants aillent
nécessairement dans tel ou tel cégep. Les étudiants ont
quand même la possibilité de choisir le cégep où ils
vont. Il n'y a pas nécessairement de répartition territoriale,
tout au moins dans les grandes villes. À l'extérieur des grandes
villes, ils peuvent être plus naturellement portés à aller
au cégep de leur région, parce que, autrement, ça
entraîne des frais considérables. Mais il y a également le
régime des prêts et bourses qui peut pallier les
difficultés économiques d'une certaine façon.
Donc, je pense que l'évaluation des institutions ne peut pas
être mise de côté pour les éléments que vous
avez évoqués. Je pense, néanmoins, que les
éléments que vous évoquez sont importants et qu'on doit en
tenir compte à l'intérieur d'un réseau public
d'enseignement. Mais, personnellement, ça ne change pas ma conviction
qu'il est essentiel, au-delà de l'évaluation des enseignements,
d'aller à l'évaluation des institutions elles-mêmes dans la
mesure où elles jouissent de l'autonomie nécessaire pour
atteindre cette excellence.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. Girard. M. le
député de Rimouski.
M. Tremblay (Rimouski): Oui. M. le Président, je suis
très heureux de constater que la Chambre de commerce du Québec et
la Chambre de commerce du Montréal métropolitain sont tout
à fait d'accord avec la réforme telle que proposée, en
tout cas en partie ou dans sa globalité. Ce que je déplore, c'est
que la presse ait fui avec la CSN au moment où on avait un
«rapport» tellement favorable. Ceci dit...
Le Président (M. Gobé): Revenez au sujet, M. le
député.
M. Tremblay (Rimouski): M. le Président, la Chambre de
commerce du Montréal métropolitain et celle du Québec
disent, à la page 9, au sujet de la formation de base et de
l'enseignement d'une langue seconde: «De plus, il semble que
l'orientation proposée donnera une importance accrue à
l'apprentissage des langues modernes, ce qui s'inscrit tout à fait dans
le contexte de la mondialisation des marchés.» Et,
nécessairement, la Chambre est heureuse de l'importance accrue
accordée à l'apprentissage d'une langue seconde. C'est ce que le
«rapport» dit. Je pense que la réforme répond en
partie aux attentes exprimées par le chef de l'Opposition. Il a
déjà dit qu'il botterait le derrière à ceux et
celles qui ne voudraient pas apprendre l'anglais. Mais là n'est pas ma
question.
Vous dites, dans votre conclusion à la page 19: «La Chambre
tient à préciser que, selon son évaluation, les ressources
actuellement dévolues à l'enseignement collégial au
Québec sont suffisantes et qu'une meilleure répartition des fonds
déjà disponibles devrait suffire pour assurer le financement des
modifications proposées.» Autant que je sache, je pense que c'est
au-delà de 1 200 000 000 $ que l'on souscrit...
Une voix: 1 400 000 000 $.
M. Tremblay (Rimouski): ...1400 000 000$ pour l'enseignement
collégial. Un élève nous coûte 51 $ par jour. Moi,
je voudrais savoir de vous... Parce que, depuis sept ans que je suis ici,
depuis sept ans que je siège à cette commission, on m'a toujours
dit qu'il y avait 40 000 000$, 44 000 000$, 45 000 000$, 50 000 000 $ de
surplus accumulés dans les cégeps de la province. Ce n'est pas
énorme, dois-je vous dire, mais toujours il manque des ressources
financières. Mais, vous autres, lorsque vous dites qu'il y a
suffisamment de ressources financières, sur quoi vous vous basez pour
dire ça?
Le Président (M. Gobé): M. Girard, M. Roy? Qui veut
répondre?
M. Girard: II nous apparaît que le réflexe
spontané lorsqu'on propose une réforme, c'est toujours d'exiger
plus d'argent. On pense qu'il faut arrêter d'avoir ce réflexe si
on veut véritablement réduire le niveau des dépenses
publiques. Donc, la première réaction, c'est de dire: Ne
demandons pas d'argent additionnel. La deuxième réaction, c'est
de dire: Puisque nous décentralisons, puisque nous allons augmenter les
responsabilités dans chacun des cégeps, habituellement avec une
décentralisation et une responsabilisation accrue, il découle des
économies possibles. Dans les entreprises, quand on rationalise et quand
on fait disparaître des niveaux hiérarchiques, quand on donne une
plus grande responsabilité aux entités locales, on le fait
non
pas parce que c'est agréable à faire, mais on le fait dans
une perspective bien précise: réduire les dépenses,
augmenter les profits. Donc, on pense que cette réforme-là peut
être envisagée dans la même perspective. On est incapables
de dire et je ne pense pas que ce soit notre rôle de le dire
si les sommes d'argent à l'intérieur du système
sont parfaitement bien réparties et s'il ne devrait pas y avoir des
transferts d'un poste à l'autre. Mais on dit: Globalement, comme
réaction, n'ayons pas la réaction traditionnelle qui consiste
à dire, un, plus d'argent et, deuxièmement, si, effectivement, on
décentralise et on responsabilise, une partie de l'argent devrait
être utilisée de façon plus efficace.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. Girard. Merci, M.
le député de Rimouski. On dépasse un peu, vu qu'on a
donné une enveloppe de temps à M. le député de
Jacques-Cartier. Vous avez le temps, vous aussi, madame, de poser une
question.
Mme Caron: Merci, M. le Président. Votre mémoire
s'intitule «S'inscrire au collège pour réussir». Il y
a toute une partie dans le renouveau pédagogique qui a été
quelque peu négligée. Vos prédécesseurs ont mis un
chapitre complet sur l'éducation des adultes, la grande oubliée,
et je pense que, comme employeurs, vous avez sûrement un
intérêt à ce que l'éducation des adultes au
cégep soit valorisée et qu'on accorde certaines mesures compte
tenu de l'importance du recyclage des travailleurs en emploi et des personnes
qui sont sur le marché du travail. Du côté de
l'éducation des adultes, votre mémoire n'en fait pas part, mais
est-ce qu'il y a certaines recommandations que vous pourriez faire pour
améliorer la proposition qui est sur la table qui tient peu compte de
l'éducation des adultes?
M. Girard: En fait, pour ce qui est de l'éducation des
adultes, nous ne nous y sommes pas arrêtés de façon
particulière, ni l'automne dernier, ni cette fois-ci. On a voulu centrer
notre attention sur d'autres éléments qui nous paraissaient
importants. À la lecture du document «Des collèges pour le
Québec du XXIe siècle», on peut avoir l'impression que
l'éducation des adultes est oubliée, mais je ne pense pas que
ça corresponde à la réalité. Il y a quand
même un nombre important et un nombre croissant d'adultes qui sont
inscrits dans les cégeps, qui ont accès tant aux programmes
préuniversitaires qu'aux programmes professionnels. Je ne pense pas
encore une fois, nous n'avons pas regardé systématiquement
ce qu'il en est qu'il y ait nécessairement des mesures nombreuses
à prendre pour ce qui est de l'éducation des adultes. On pense
que, déjà, le réseau collégial est largement ouvert
aux adultes. On pense que c'est une bonne chose et on pense que c'est excellent
que les adultes puissent suivre des cours généraux, puissent
suivre des cours d'appoint, et je pense que de plus en plus d'entreprises se
servent, d'ailleurs, des cours de perfectionnement qui sont dispensés
par les cégeps pour les employés qui travaillent chez elles.
Mais, encore une fois, on ne voit pas nécessairement d'oublis
fondamentaux par rapport à l'éducation des adultes.
Mme Caron: Merci.
Le Président (M. Gobé): Merci. J'aurais
moi-même, M. Roy, peut-être une question, mais je n'aurai
probablement pas le temps. Mais vous pouvez peut-être faire le
commentaire.
En effet, à la page 9, lorsque vous faites valoir votre support
ou intérêt pour l'acquisition de nouvelles connaissances, et
particulièrement des langues vivantes, des langues modernes, on se rend
compte qu'on ne fait qu'aller dans un grand courant international qui veut que,
de plus en plus, nos jeunes qui vont sortir des écoles, et de
l'enseignement supérieur en particulier, aient des connaissances
importantes de différentes langues, que ce soit l'anglais, l'allemand ou
d'autres langues. On voit d'ailleurs que notre mère patrie linguistique
ou culturelle qu'est la France connaît actuellement un certain nombre de
problèmes, ayant des diplômés qui parlent très mal
ou ne maîtrisent pas très bien un certain nombre de langues. On
voit que, sur le commerce extérieur, sur l'exportation non seulement des
cerveaux, de nos techniciens, de nos ingérieurs, de nos cadres, mais
aussi de nos produits, c'est certainement un handicap.
J'aurais voulu en discuter plus longuement parce qu'on sait que vous
êtes à la base de toute cette activité économique
internationale, comme chambres de commerce, par vos membres; malheureusement,
il n'y a pas beaucoup de temps. Et ce que j'aimerais dire, c'est que
peut-être dans la prochaine commission parlementaire qui aura lieu la
semaine prochaine, qui va parler peut-être d'immersion, de choses comme
ça, vous puissiez intervenir et faire valoir ces points-là. (17 h
20)
M. Roy: Très bien, M. le Président. Nous avons
effectivement été convoqués pour la semaine prochaine.
Nous avons l'intention de participer à ce nouveau débat. On a,
par ailleurs, demandé un report à la semaine suivante et
j'espère que notre demande sera exaucée parce que nous ne serions
pas en mesure, dès la semaine prochaine, de nous faire entendre et de
produire un mémoire sur une question qui est fort complexe, qui est
difficile et qui est importante pour le Québec.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. le
président. Au nom de tous les membres de cette commission, je tiens
à vous remercier d'être venus devant nous aujourd'hui. Ceci met
donc fin à votre présentation. Merci beaucoup.
Je vais donc suspendre les travaux quelques minutes pour permettre au
groupe suivant, soit les représentants de La Confédération
des caisses populaires et d'économie Desjardins, de s'installer.
(Suspension de la séance à 17 h 21)
(Reprise à 17 h 24)
Le Président (M. Gobé): Les représentants de
La Confédération des caisses populaires et d'économie
Desjardins du Québec, vous avez la parole. Monsieur ou madame, je ne
sais pas qui est le porte-parole, je vous prierais de bien vouloir
présenter les gens qui vous accompagnent.
La Confédération des caisses populaires
et d'économie Desjardins du Québec (CCPEDQ)
M. D'Amours (Alban): Très bien. Merci, M. le
Président. Mon nom est Alban D'Amours, je suis premier
vice-président à la confédération des caisses
Desjardins. À ma droite, M. Yves Morency, directeur associé aux
affaires stratégiques; à ma gauche, Mme Joëlle Noreau,
analyste senior à la Confédération, et M. Edgar Joly,
à sa gauche, responsable des études stratégiques à
la Confédération.
C'est avec plaisir que nous répondons à l'invitation qui
nous est adressée et que nous vous livrons les commentaires du Mouvement
Desjardins sur le projet de loi 82. Desjardins sait bien que la survie des
entreprises dépend du niveau des compétences et des connaissances
de sa main-d'oeuvre actuelle et future. Voilà pourquoi la question de
l'enseignement collégial rejoint ses préoccupations d'employeur,
d'acteur de premier plan dans l'industrie des services financiers et, enfin, de
partenaire majeur impliqué dans le développement
économique et social du Québec.
À notre avis, le projet de réforme touche un nombre
important de sujets abordés en commission parlementaire même s'il
demeure timide à certains égards. Nous aurions souhaité,
à l'occasion, des engagements plus fermes à l'égard de
quelques-unes des préoccupations énoncées en commission
parlementaire par Desjardins. Après lecture du projet de loi 82 et du
document support publié en parallèle, nous avons choisi de
présenter nos commentaires selon chacune des cibles stratégiques
retenues pour appuyer le renouveau de l'enseignement collégial.
Le Mouvement Desjardins souscrit à l'objectif «d'assurer
aux jeunes et à l'ensemble de la population un enseignement
collégial de calibre et d'une qualité qui leur permettent de se
mesurer aux meilleurs standards de compétence», tel qu'il est
formulé dans l'introduction aux cibles stratégiques. Desjardins a
d'ailleurs souligné en commission parlementaire que l'environnement
concurrentiel des entreprises élève substantiellement les
standards de qualité et crée des pressions sur les plans de la
rentabilité et de la productivité. Ces défis seront
rencontrés grâce à des employés qualifiés,
ouverts au changement et sensibles à la qualité.
Nous croyons que la recherche de l'excellence et de la qualité
sont des objectifs incontournables dans le contexte de
compétitivité actuel. C'est pourquoi nous réitérons
notre recommandation d'instaurer une démarche de qualité dans le
réseau des collèges. La création de la Commission
d'évaluation de l'enseignement collégial est déjà
un pas dans cette direction. La démarche qualité suppose
également une consultation accrue de la clientèle desservie, un
questionnement des façons de faire et une mobilisation des
employés, ce qui pourrait accélérer la mise en place de la
réforme. L'objectif est d'apporter des améliorations sur une base
continue à tous les paliers de décision qui profiteront
directement aux étudiants et à l'ensemble de la
société.
La réussite des études, première cible. Dans le
document support au projet de renouveau, on peut lire que, «pour
être admis à un niveau d'études, il est normal d'avoir
réussi l'essentiel obligatoire du niveau précédent».
Desjardins ne peut qu'être en accord avec ceci. Cependant, nous voudrions
nous assurer que les élèves du secondaire en études
professionnelles puissent compter sur une formation reconnue sur le
marché du travail. Les objectifs devront être définis
clairement et rapidement pour éviter les désillusions tant chez
les employeurs que chez les employés sur le marché du
travail.
Au chapitre de la reconnaissance des acquis, nous sommes heureux que
l'approche par compétences ait été retenue. En effet,
l'approche par compétences facilite une évaluation rigoureuse des
acquis, notamment auprès de la clientèle adulte. De plus, dans la
mesure où cette approche est généralisée à
tous les programmes et qu'une évaluation appropriée sanctionne
l'acquisition de compétences précises, les passerelles entre les
programmes pourraient être simplifiées et identifiées
rapidement.
La mesure visant la responsabilisation face aux études et
l'incitation à la réussite ne nous apparaît pas excessive.
L'instauration de frais pour chacun des cours après cinq échecs
dans le cas du programme préuniversitaire et sept échecs dans le
programme d'études techniques doit être perçue comme un
signal plutôt qu'une pénalité. Cette procédure ne
doit, en aucun cas, constituer un mode de financement des études
collégiales. La gratuité scolaire est, pour nous, un principe
fondamental. C'est pourquoi nous préférons une mesure de cet
ordre plutôt qu'une mesure qui s'appliquerait au nombre de sessions, ce
qui pénaliserait les étudiants qui ont un cheminement plus long.
Il serait souhaitable de prévoir une évaluation des impacts de
cette mesure sur la réussite scolaire, ou l'abandon, afin de s'assurer
de pouvoir apporter des correctifs au besoin. Au-delà de cette mesure,
il faut cf'abord s'intéresser à la réussite des
étudiants et faire en sorte que les échecs à
répétition soient minimisés, sinon éliminés.
Cette question est liée de près avec celle de la formation
reçue au secondaire que nous avons abordée
précédemment.
Autre cible, des programmes d'études cohérents, exigeants
et adaptés aux besoins. «Une formation générale
commune, enrichie et plus cohérente», ce sont là des propos
semblables à ceux qu'a tenus Desjardins lors de la commission
parlementaire de l'automne. Nous ne commenterons pas le contenu des
modifications qui sont proposées. Toutefois, nous sommes favorables
à l'augmentation du nombre de cours en langue d'enseignement
et littérature. Desjardins appuie la mise en place de
mécanismes d'évaluation et de suivi pour mesurer l'atteinte des
objectifs poursuivis dans les programmes. Il souhaite, d'ailleurs, qu'un
processus de révision souple puisse permettre de corriger rapidement le
tir si les objectifs ne sont pas rencontrés. Nous souhaitons que la
révision des composantes de la formation générale des
programmes se fasse rapidement. (17 h 30)
Le choix d'une articulation plus nette entre le collège et
l'université ne pourrait être contesté. Nous souhaitons
qu'une formation générale modifiée permette de faciliter
les arrimages. À notre avis, il faudra procéder à
l'établissement d'objectifs de formation clairs et partagés
à l'intérieur de chaque programme entre les collèges et
les universités afin de faciliter cette harmonisation des programmes
préuniversitaires et universitaires.
On souhaite «un éventail de programmes à simplifier
et à rationaliser». Desjardins est favorable à cet exercice
puisqu'il a lui-même recommandé de réviser l'ensemble des
programmes techniques afin de permettre un élagage. Il va de soi que
Desjardins s'intéresse particulièrement aux programmes qui
traitent de conseils financiers et d'applications informatiques. Au-delà
de la refonte des programmes, nous demeurons préoccupés par une
plus grande souplesse des modalités proposées favorisant
l'accessibilité de différentes clientèles et facilitant
les expériences de rapprochement avec les milieux de travail.
À la lecture du document support, on constate que les programmes
d'établissement (attestation d'études collégiales)
pourront être élaborés avec une marge de manoeuvre
considérablement accrue. Desjardins s'intéresse à cette
modification qui contribue à rapprocher les collèges et les
entreprises, et les besoins du milieu. Toutefois, nous soumettons certaines
questions qui nous concernent particulièrement à titre
d'employeur oeuvrant partout au Québec
Pour un même besoin, comment s'assurer qu'il y ait harmonisation
dans la rationalisation des développements de programmes
d'établissement, les A.E.C., qui préparent à des emplois
similaires sur le territoire du Québec?
Comment s'assurer d'une homogénéité au niveau de la
détermination des objectifs à atteindre et des standards
recherchés? Par exemple, la formation en conseil financier serait-elle
comparable qu'elle soit donnée à Gaspé ou à Hull?
La formation dispensée devrait être équivalente partout au
Québec pour mettre en oeuvre, pour faciliter la mobilité tant
souhaitée par les employeurs et les employés. Une formation
reconnue dans tous les collèges qui la dispensent évite,
évidemment, des déplacements coûteux aux étudiants
et, donc, au gouvernement. Ainsi, les étudiants qui ont tendance
à se concentrer dans les collèges qui ont la meilleure
réputation, bien, on pourrait en partie éliminer ces
problèmes.
Comment faciliter aux étudiants ayant obtenu une attestation une
transition vers un D.E.C. qui soit réali- sée dans un esprit de
reconnaissance des compétences déjà acquises? Cela se
présente davantage à l'égard des adultes en emploi qui
retournent aux études.
La réduction du nombre d'appellations de diplômes de niveau
collégial pour ne retenir que le diplôme d'études
collégiales, D.E.C, et l'attestation d'études collégiales
évitera, à notre avis, la confusion. Nous souhaitons être
associés à la révision des différents programmes
dont l'objectif est la formation dans le domaine du conseil financier. Notre
mémoire déposé à la commission de
l'éducation contenait, d'ailleurs, une recommandation qu'on pouvait lire
ainsi: «accroître les relations entre les collèges et leurs
milieux respectifs pour l'élaboration et la révision des
programmes de formation». Notre intention n'est pas de dicter la
façon de faire, mais de clarifier les besoins en matière de
formation financière.
Nous accueillons favorablement les deux mesures visant la promotion de
la formation technique. La valorisation de la formation technique est une
préoccupation de Desjardins. Il a d'ailleurs fait valoir son
intérêt pour la question lors du dépôt du
mémoire.
Cette troisième cible stratégique concernant des
responsabilités académiques accrues pour les
établissements et, corrélativement, un dispositif
d'évaluation plus rigoureux nous suggère les commentaires
suivants. Us seront brefs. Nous sommes d'accord avec la proposition de
centraliser au niveau ministériel la définition des objectifs et
des standards et de décentraliser les activités d'apprentissage
au niveau des collèges. Les mécanismes d'évaluation
proposés tant au niveau de chaque collège qu'au niveau de
l'ensemble du réseau nous conviennent. Nous constatons que le mandat de
la Commission d'évaluation de l'enseignement collégial respecte
certains principes de base en gestion: autonomie, transparence et
imputabilité.
Enfin, quatrième cible, des partenariats renouvelés et
resserrés. La confirmation de la mission des collèges et
l'exercice de leurs pouvoirs, notamment dans les activités d'aide
à l'entreprise et de développement régional, nous
satisfont. Il s'agit, d'ailleurs, de deux aspects abordés par Desjardins
en commission parlementaire. Nous souhaitons que la latitude dont disposeront
les collèges leur permettra d'accroître les actions
déjà entreprises.
Nous saluons avec satisfaction la présence de deux membres
nommés parmi des personnes oeuvrant au sein d'entreprises au conseil
d'administration de chaque collège. La représentation
prévue, tant au sein des conseils d'administration des collèges
qu'au sein de la société régionale de développement
de la main-d'oeuvre, est un pas dans la direction des arrimages
souhaités entre les ministères.
L'idée d'une carte intégrée des enseignements
professionnels et techniques nous semble utile. Elle a de bonnes chances de
servir comme point de repère auprès des employeurs. Le mois
d'août 1994 nous semble cependant lointain, et nous espérons que
cette échéance ne sera pas dépassée.
La formation d'un comité national d'études techniques est
intéressante, mais nous émettons des réserves. Cette
action répond partiellement à la recommandation de Desjardins
d'associer les entreprises qui ont participé à
l'élaboration des programmes à l'évaluation de
l'efficacité de ces derniers. Il aurait été
intéressant de connaître le mode d'opération du
comité, du moins dans ses grandes lignes, et d'identifier les types de
membres recherchés par secteur d'activité, parmi les
collèges, les milieux du travail, socio-économique et autres.
Voilà, en somme, le fondement de nos réserves.
Lorsqu'il est question de stimuler le partenariat avec l'entreprise, on
parle de stages en alternance avec la formation. Permettez-nous de
référer à nouveau au mémoire que nous avons
déposé où nous recommandions de soutenir la
création de programmes techniques incluant des stages en milieu de
travail selon le modèle coopératif. Le document de support ainsi
que le projet de loi sont très peu explicites à ce sujet. Nous
aurions aimé quelques précisions sur les possibilités de
stages pour les enseignants. À cet effet, nous avions recommandé
de mettre en place des mécanismes pour réaliser les stages de
perfectionnement d'enseignants au sein d'entreprises, selon les
disponibilités de ces dernières.
Quelques questions en suspens, à notre avis. Nous sommes
conscients que le programme de renouveau ne peut viser toutes les cibles
à la fois. Pourtant, un sujet abordé en commission parlementaire
trouve peu d'écho dans le projet de loi, c'est celui de l'encadrement
des étudiants. Le façonnement d'une «tête bien
faite» et de citoyens responsables passe également par le
sentiment d'appartenance qu'ils développent face à leur
institution. Il ne semble pas qu'il y ait de mesures concrètes pour
renforcer la mission des collèges comme milieu de vie pour les
étudiants. C'est, à notre avis, un des volets de ce que l'on
appelle l'éducation. Nous avions insisté sur cet aspect lors de
notre audience à la commission de l'éducation en novembre
dernier. Nous nous demandons si les sessions d'accueil et d'intégration
pourront suffire à la tâche.
La réforme de l'enseignement collégial deviendra majeure
seulement si les quatre cibles stratégiques sont atteintes et si on
effectue des suivis constants. C'est par la réalisation de ces deux
conditions que nous aurons des collèges pour le Québec du XXIe
siècle.
Enfin, le suivi constant des objectifs permettra de réviser
périodiquement les actions entreprises et de s'adapter à
l'évolution de la société québécoise dans un
contexte de mondialisation. Il ne faudra plus désormais 25 ans pour se
pencher à nouveau sur ces grandes questions.
Voilà l'essentiel de nos commentaires sur le projet de renouveau
de l'enseignement collégial.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. D'Amours. Mme la
ministre, vous avez la parole.
Mme Robillard: Merci, M. le Président. Je veux d'abord
saluer les représentants de La Confédération des caisses
populaires et d'économie Desjardins et vous remercier d'être venus
en commission parlementaire pour étudier le renouveau collégial.
J'aimerais approfondir certains des énoncés de votre
mémoire.
D'abord, au niveau de la réussite des études, M. D'Amours
et là je réfère surtout à la page 2 de votre
mémoire vous dites très clairement que vous voulez vous
assurer que les élèves du secondaire en études
professionnelles puissent compter sur une formation reconnue sur le
marché du travail. J'aimerais ça que vous m'explicitiez. Est-ce
à dire que présentement, si quelqu'un a un D.E.P., un
diplôme d'études professionnelles, par exemple, à la
confédération des caisses, vous ne reconnaissez pas ce
diplôme-là? (17 h 40)
M. D'Amours: Non...
Mme Robillard: Qu'est-ce que je comprends, là:
«puissent compter sur une formation reconnue sur le marché du
travail»? Ils existent présentement, les diplômes
d'études professionnelles, dans plusieurs champs d'activité.
M. D'Amours: Oui.
Mme Robillard: Alors, qu'est-ce qui est sous-jacent à
votre recommandation?
M. D'Amours: Dans cette démarche que vous nous proposez,
nous réaffirmons cet élément-là. Nous l'avons
mentionné dans notre mémoire de novembre; nous le
réitérons. Nous croyons donc que cette
préparation-là, cette diplomation devrait permettre cette
reconnaissance. Il y a un certain nombre d'éléments techniques.
Peut-être que Mme Noreau pourrait expliquer davantage.
Mme Noreau (Joëlle): Dans le projet de réforme, le
projet de renouveau, on parle beaucoup de hausser les seuils dont, notamment,
l'admissibilité au collégial. Notre idée est aussi qu'on
engage des gens qui, à un moment donné, ont une formation du
secondaire. Puis il ne faudrait pas mettre de côté la formation
professionnelle obtenue au secondaire et ne mettre les efforts que sur les gens
qui se rendent au collégial.
Mme Robillard: Mais soyez encore plus précis.
Présentement, il y a des élèves... Est-ce que la
Confédération engage des élèves du secondaire qui
ont un diplôme d'études professionnelles, au moment où on
se parle?
Mme Noreau: À la Confédération, moins.
Peut-être plus au niveau des caisses.
Mme Robillard: Est-ce qu'on est satisfait de la formation de ces
étudiants-là?
Mme Noreau: On est obligés, d'un certain
côté,
d'amener une certaine formation propre à Desjardins. On ne peut
pas demander aux gens qui sortent du secondaire d'avoir une autonomie
très grande au niveau de la manipulation des caisses et de toutes ces
choses-là. Cependant, notre préoccupation est à l'effet
que, comme on souhaite mettre des efforts pour les gens qui se rendent au
collégial, on souhaiterait aussi qu'on n'oublie pas les gens qui
finissent au niveau professionnel au secondaire.
Mme Robillard: Qu'on hausse les exigences, là aussi, au
niveau du diplôme d'études professionnelles?
Mme Noreau: On n'irait pas jusque-là, mais, s'il y a des
efforts qui sont faits, notamment pour les gens qui se rendent jusqu'au
collégial, si ces efforts-là peuvent être investis aussi
pour les gens qui finissent au secondaire, on souhaiterait que ces
gens-là puissent en bénéficier également.
Mme Robillard: Est-ce à dire que vous êtes en accord
avec les seuils d'admission qui sont précisés dans le renouveau
collégial ou si vous avez des réserves?
M. D'Amours: Non. À l'égard des seuils d'admission,
non. Nous sommes totalement d'accord avec ce que vous proposez, vous avancez
dans votre orientation. Ces seuils d'admission vont nous permettre, finalement,
le passage d'un niveau à un autre, d'une part, puis,
deuxièmement, ils nous assurent aussi de la qualité de la
diplomation à chaque niveau. Lorsque nous employons des
étudiants, des diplômés du secondaire dans les caisses, au
niveau technique, il est bien évident que nous devons, chez nous aussi,
poursuivre leur formation à certains égards au niveau
professionnel. Dans ce contexte-là, il est bien clair que cette
formation professionnelle, lorsque nous la donnons, cette expérience
qu'ils acquièrent chez nous aussi pourraient être reconnues dans
un profil de formation ultérieur lorsqu'ils accèdent au
cégep. Et ces acquis au niveau de la compétence, nous accueillons
cette orientation-là avec beaucoup de satisfaction parce qu'elle permet
d'intégrer les efforts de formation que nous faisons, nous,
auprès de nos employés, surtout, évidemment, des
étudiants adultes qui veulent cheminer vers un diplôme
collégial.
Mme Robillard: M. D'Amours, à la page 4 de votre
mémoire, vous soulevez d'excellentes questions. Je ne peux pas dire que
j'ai des réponses à toutes ces questions-là. Vous nous
parlez de l'harmonisation des nouveaux programmes d'établissement, des
attestations d'études collégiales, et vous soulevez la question:
Comment on va harmoniser ça dans différentes régions du
Québec si c'est pour répondre à des emplois similaires?
Vous savez sûrement que présentement, dans le système
actuel, il y a des attestations d'études collégiales, il y a des
certificats d'études collégiales. En plus, les cégeps font
aussi beaucoup de formation sur mesure. Est-ce qu'à date vous avez
noté des problèmes semblables sur le territoire? Etant
donné que vous avez des caisses dans tous les coins du Québec,
peut-être que vous avez été à même de
constater que, par rapport à des besoins similaires, quand vous faisiez
une demande de formation au niveau du cégep, on vous répondait
différemment d'un endroit à l'autre. Est-ce que ma
question...
M. D'Amours: Je dois vous dire que nous nous plaçons ici
dans la perspective d'un renouveau. Lorsque nous nous sommes
présentés en commission parlementaire, vous vous rappelez sans
doute que nous avons été critiques par rapport aux programmes
actuels qui sont disponibles dans les cégeps et, en particulier,
à l'égard de la formation professionnelle et de la formation des
conseillers financiers. Nous avions donc pris des initiatives avec certains
cégeps pour faire en sorte que les enseignements dont nos
employés ont besoin puissent être offerts par les mêmes
cégeps. Nous avons élaboré avec eux les programmes de
formation et signé des ententes. Ce que nous souhaitons, dans le cadre
du renouveau que vous proposez, où vous accordez beaucoup plus
d'autonomie aux cégeps, ce avec quoi nous sommes d'accord... Nous
pensons, cependant, que cette autonomie-là doit être
exercée sous l'éclairage ou sous l'orientation de normes, de
standards, finalement, qui sont établis pour l'ensemble du
Québec. Parce que, au-delà de cette autonomie régionale,
il y a lieu aussi de retenir l'importance d'une formation reconnue partout
assurant, donc, cette mobilité. Il est clair que, si on s'en tient
à cette autonomie que l'on favorise et que l'on permet aux cégeps
de développer des programmes de formation dans le domaine du conseil
financier, et qu'on arrive avec des conseillers financiers formés en
Gaspésie qui ont une formation inégale et de qualité ou de
contenu différent de celle offerte dans la région de Hull, nous
allons créer la tour de Babel. Alors, vous voyez, nous voulons le
meilleur des deux mondes, c'est bien clair, mais nous pensons qu'il peut
être atteint.
Mme Robillard: Vous avez sûrement noté que, dans le
renouveau collégial, les nouvelles attestations d'études
collégiales, comme on les appelle, à être données
par les cégeps devront être données dans des domaines
où ils donnent déjà le diplôme d'études
collégiales et que, pour ces diplômes-là,
nécessairement, il y a des objectifs et des standards nationaux qui ont
été établis. Est-ce que, ça, ça vous
apparaît suffisant ou pas?
M. D'Amours: Oui, ça, ça nous apparaît
suffisant, parce que les étudiants bénéficieront d'une
formation de qualité évaluée en fonction de ces
standards-là, mais, en même temps, nous allons nous assurer que la
formation... Et, bien entendu, cela signifie qu'il faut revoir ces programmes,
rationaliser ces programmes, comme nous l'avons souhaité, et
peut-être introduire de nouveaux programmes mieux adaptés. Je
pense que l'exercice doit être fait à cet égard-là.
Ce qui était fait auparavant, à notre sens, ne nous satisfait pas
totale-
ment, parce que, rappelez-vous, nous avons souhaité que vous
fassiez cette rationalisation parmi les programmes.
Mme Robillard: Remarquez, ceci n'empêcherait pas qu'un
collège donne quand même une attestation. S'il ne donne pas le
diplôme d'études collégiales dans ce domaine-là, il
pourrait très bien s'affilier ou collaborer avec un autre cégep
qui le donne, ce diplôme d'études collégiales. Donc,
là, les objectifs et les standards nationaux pourraient être
respectés.
M. D'Amours: Voilà une autre façon d'atteindre
l'objectif que nous proposons.
Mme Robillard: Que vous poursuivez. M. D'Amours, vous avez des
inquiétudes ou des réserves sur le comité national
d'études techniques. Pourriez-vous me faire part de vos réserves?
Est-ce que, comme la chambre de commerce, vous craignez que ce soit une
structure lourde, qu'elle ne soit pas souple? Quel est le sens de vos
réserves?
M. D'Amours: Nos réserves tiennent au fait que
l'idée est intéressante, sauf qu'on ne sait pas trop comment,
finalement, ça va s'articuler et quels résultats on doit attendre
de ce comité national. Lorsqu'on se réfère au texte que
vous avez publié, j'ai peine à... Par exemple, j'avais
noté un endroit où, finalement, après avoir
élaboré sur les rôles de ce comité, on conclut qu'il
n'est pas consultatif. Dans une première lecture, lorsqu'on aborde la
question, on dit: Bon, bien, voilà une façon de mettre ensemble
les partenaires et d'aller chercher auprès d'eux des avis pour nous
conseiller. À tout le moins, voilà un premier niveau. Dans le
texte, on dit: Bon, bien, ils ne feront même pas ça. Alors, on se
dit, après avoir essayé de comprendre davantage: À quoi
va-t-il servir, finalement? (17 h 50)
Vous terminez le texte en disant: Elle situerait d'emblée ses
actions au niveau des orientations d'ensemble, assumant et élargissant
ainsi la portée de certaines questions qui étaient jusqu'ici
examinées à la Commission de l'enseignement professionnel. Alors,
où est-ce que vous le situez? Il n'est pas consultatif. C'est un petit
peu ça, l'embarras.
Mme Robillard: On aura sûrement l'occasion d'en reparler,
M. D'Amours. Il n'est pas consultatif parce que la ministre, ou le
représentant de la ministre, est directement à la table, ce qui
n'est pas le cas...
M. D'Amours: Ça m'avait intrigué.
Mme Robillard: ...d'un conseil consultatif qui envoie des avis
à la ministre ou qui fait des recommandations. La ministre est
présente à la table.
M. D'Amours: Ça m'a intrigué, ça,
madame.
Mme Robillard: Que ce soit elle ou son représentant,
ça veut dire qu'elle participe directement au comité. Maintenant,
naturellement, c'est un comité qui est concentré sur les
programmes académiques. C'est un comité académique, entre
guillemets. Donc, même au niveau des objectifs et des standards des
programmes techniques, le comité devra s'y pencher et les regarder pour
l'ensemble de la province, et là vous avez vu les autres mandats,
même au niveau de la répartition géographique ou du
calendrier de révision des programmes. Alors, je veux que ce soit une
table d'action rapide, efficace, loin d'être lourde. Alors, c'est pour
ça que, quand je vois des réserves, j'aime bien les comprendre
même si toutes les modalités ne sont pas encore
arrêtées au moment où on se parle. Mais c'est dans ce
sens-là qu'on y travaille.
Alors, ça va. Excusez-moi, M. le Président.
Le Président (M. Gobé): Non, madame.
M. D'Amours: J'ajouterais, M. le Président, qu'il y a un
des aspects qui nous a un petit peu intrigués: la présence de la
ministre sur le Comité. Vous l'avez souligné, je n'étais
pas assez audacieux pour le faire, mais la présence de la ministre peut,
dans ce genre de comité là, amener à concevoir ce
comité comme devant être expéditif, efficace. La ministre,
qui va se présenter à ce comité-là, elle va arriver
avec un sens de l'écoute probablement très
développé. Mais quels résultats va-t-elle rechercher, ou
va-t-il rechercher, avec l'usage des personnes autour de la table? Va-t-il
chercher des conseils des personnes qui entourent la ministre ou le ministre?
C'est tout ça, là. On n'arrive pas trop à comprendre.
Alors, on sait que vous aurez les réponses plus tard.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. D'Amours. M. le
député de Lac-Saint-Jean, vous avez maintenant la parole.
M. Brassard: Oui, M. le Président. Madame et messieurs,
à la page 7 de votre mémoire, vous indiquez qu'en matière
de stages en milieu de travail et de formation en alternance, «le
document de support ainsi que le projet de loi sont très peu explicites
à ce sujet». C'est le moins qu'on puisse dire. Il y a un voeu, une
intention, tout au plus, et une invitation à aller dans cette
direction-là. Alors, je comprends que vous auriez
préféré avoir des éléments plus
précis en matière de mise en oeuvre d'une politique de stages et
de formation en alternance. Vous parlez de modèle coopératif,
vous parlez également de possibilité de stages pour les
enseignants. C'est une dimension intéressante qui n'apparaît pas,
particulièrement en formation professionnelle, les stages pour les
enseignants; donc, tout ça, ça concerne la politique de
perfectionnement. Enfin, bref, si je vous comprends bien, cette
partie-là de l'énoncé de politique vous apparaît
nettement insuffisante et mériterait d'être davantage
articulée et précisée pour qu'on sache un peu
plus où on s'en va dans cette matière-là pourtant
jugée essentielle surtout dans le milieu des affaires et dans les
milieux socio-économiques.
M. D'Amours: Nous reconnaissons les mérites de la formule
de ces stages, pour l'avoir pratiquée. À Desjardins, nous l'avons
pratiquée à différents niveaux. Nous la pratiquons au
niveau secondaire; des étudiants du secondaire font actuellement des
stages chez nous et ils y trouvent un avantage considérable. Pour les
professeurs, à mon sens, s'il y avait des façons de les organiser
dans le cadre de protocole avec les collèges et les maisons
d'enseignement, il y aurait, je pense, un avantage considérable. Parce
que, si on souhaite le rapprochement, si on souhaite instaurer une approche
qualité, ça commence par une bonne lecture des besoins de
l'étudiant d'abord, mais aussi des besoins du milieu de travail et, dans
ce sens-là, le rapprochement, à travers les stages, constitue une
technique de lecture.
M. Brassard: Une autre question...
Le Président (M. Gobé): Allez-y, M. le
député.
M. Brassard: ...parce que ma collègue des
Chutes-de-la-Chaudière a également une question à poser;
ça porte sur la formation générale, la formation commune.
Vous avez choisi de ne pas commenter le contenu des modifications
proposées au niveau de la formation générale commune, les
trois blocs, et, bon, les cours retranchés. Est-ce qu'on peut savoir
pourquoi? Vous ne vous sentiez pas compétents pour porter un jugement ou
une évaluation sur la proposition? Pourquoi vous avez choisi de ne pas
vous prononcer là-dessus, sauf pour la langue seconde, je pense,
là?
M. D'Amours: Sauf pour la langue d'enseignement et la
littérature, et on se permet ce commentaire-là: Dans le domaine
de la langue et des connaissances générales, que des efforts
additionnels soient apportés à l'intérieur des programmes,
ça nous apparaît dans le sens logique d'une formation
générale plus solide.
En ce qui a trait aux autres suggestions qui sont faites, aux
modifications proposées, en général, nous croyons qu'elles
vont dans le bon sens. Mais nous ne voulons pas nous mettre au milieu d'une
polémique, à savoir si moins de cours de philosophie ou plus de
cours de philosophie, ou d'éducation physique, ou autres, constitue la
véritable réponse. Ce que nous avons souligné lorsque nous
sommes venus en commission parlementaire, c'est que nous voulions que les
programmes développent des habiletés chez ces étudiants,
et des habiletés générales. Nous les avons
énumérées, ces habiletés, dans notre mémoire
du mois de novembre et nous avons soumis à la commission que les cours
devant composer des programmes devaient être choisis par des
spécialistes, mais qu'ils devaient, par ailleurs, répondre
à ces attentes que nous avons formulées en termes de
résultats de formation, à savoir des habiletés. Nous
avions souligné, comme habiletés recherchées, la
capacité d'apprendre à apprendre, la capacité d'analyser
et de faire des synthèses, l'habileté à communiquer,
l'habileté à travailler en groupe, la capacité de faire
appel à des experts autour de soi, l'habileté à
solutionner des problèmes, le développement permanent d'une
curiosité intellectuelle, le sens de l'éthique, la
capacité d'autonomie et le sens de l'innovation. Alors, voilà,
ça devrait donner lieu à ce produit-là.
M. Brassard: Bien.
Le Président (M. Gobé): Mme la
députée...
M. Brassard: Oui, je comprends ce que vous voulez dire, mais je
ne suis pas certain que vous devriez faire confiance à la ministre pour
atteindre ces objectifs-là.
Le Président (M. Gobé): Ha, ha, ha! Mme la
députée des Chutes-de-la-Chaudière, vous avez la
parole.
Mme Carrier-Perreault: Je vous remercie, M. le Président.
Moi aussi, c'est à la page 7 de votre mémoire que j'ai
accroché quand vous dites: «Le façonnement d'une
"tête bien faite" et de citoyens responsables passe également par
le sentiment d'appartenance qu'ils développent face à leur
institution.» Effectivement, lors de la commission parlementaire, les
groupes qui sont venus nous rencontrer et qui sont venus s'exprimer, surtout
les groupes de jeunes à ce moment-là, je pense au Conseil
permanent de la jeunesse et aux autres groupes d'étudiants nous
ont expliqué comment c'était important de sentir qu'il y avait un
milieu de vie dans le collège, qu'ils avaient beaucoup de
difficultés à retrouver ce milieu de vie et à
développer, justement, ce sentiment d'appartenance là.
Vous avez aussi des questions. Vous vous demandez si les sessions
d'accueil et d'intégration pourront suffire à la tâche.
Moi, non plus, je ne suis pas trop convaincue. Qu'est-ce que vous auriez
aimé souhaiter comme mesures concrètes pour qu'on retrouve
vraiment ces mesures-là dans la loi 82? Quel genre de mesures?
Pourriez-vous être un petit peu plus clairs là-dessus? (18
heures)
M. D'Amours: D'abord, en termes d'encadrement des
étudiants, on n'est pas sûrs, avec ce qui est prévu dans le
projet que nous avons sur la table, qu'il y a suffisamment d'encadrement de
prévu et que cet encadrement-là soit destiné à
mieux situer l'étudiant dans son milieu, pour que l'étudiant
apprenne à vivre en société dans son école.
D'abord, à travers sa vie familiale, les valeurs familiales qu'il
développe vont l'amener, finalement, à vivre en
société, mais on le retrouve plus longtemps, finalement, à
l'école, très souvent, que dans son milieu familial, en train
d'échanger sur les valeurs d'une société, de les pratiquer
à l'école. Il passe ses grandes journées à le
faire. Alors, on voudrait qu'il soit bien
encadré, qu'il puisse avoir une occasion d'apprendre à
vivre en société.
Il y a des activités qui peuvent être prévues
à cet effet. Par exemple, je vais faire une incursion dans les
programmes, on a réduit le nombre de cours en éducation physique.
Alors, on croit que, pour certains, c'est une bonne décision et, pour
d'autres, c'est une mauvaise décision. Moi, je vois ça par
rapport à cette intégration. Il n'est pas nécessaire,
à mon avis, de créditer des cours en éducation physique
pour assurer une meilleure intégration. Cependant, il serait souhaitable
que les maisons d'enseignement développent des activités
d'éducation physique, peut-être hors programme, de sorte que ce
soit une activité bien encadrée et qui permette un
développement de la personne. Ce n'est pas nécessaire d'accorder
des crédits pour permettre le développement de la personne. M.
Joly voudrait ajouter quelque chose.
M. Joly (Edgar): J'aimerais ajouter, si vous permettez. On parle
dans votre document, à la page 15, d'une première session sous le
signe de l'accueil et de l'intégration. Ce qu'on entend souvent, c'est
que c'est dans la deuxième session qu'il y a des problèmes.
Mme Carrier-Perreault: Ce n'est pas notre document.
M. Joly (Edgar): Ce n'est pas votre document, je comprends.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Joly (Edgar): Je m'excuse, je devrais dire: Dans le document
de la ministre. Excusez-moi.
Le Président (M. Gobé): Ne vous inquiétez
pas; un jour, il va être le leur aussi. Ils vont se rallier.
M. Joly (Edgar): Dans le document de Mme la ministre, on parle
d'une première session sous le signe de l'accueil et de
l'intégration, et, moi, ça m'a frappé, parce que je me
suis dit: Pourquoi pas un suivi? C'est les mêmes choses, c'est les
mêmes professeurs, c'est les mêmes gens, ça ne coûte
probablement pas beaucoup plus cher, et ça permet de continuer à
suivre et à voir le cheminement de l'étudiant, parce que c'est
là que le cheminement change et souvent, oups! on les perd. Le
décrochage, il se fait probablement plus dans la deuxième que
dans la première année.
Mme Carrier-Perreault: C'est intéressant. Merci.
Le Président (M. Gobé): Très bien. Merci
beaucoup. N'ayant plus d'interventions, au nom des membres de la commission, je
tiens à vous remercier, et soyez assurés que nous prendrons bonne
note de vos remarques et considérations. Alors, bonne soirée!
Ceci met fin aux travaux de notre commission pour cet après-midi.
Je vais donc suspendre les travaux jusqu'à ce soir, 20 heures. Bon
appétit à tout le monde! (Suspension de la séance à
18 h 4)
(Reprise à 20 h 12)
Le Président (M. Bradet): Alors, la commission reprend ses
travaux. Je demanderais au prochain groupe, l'Institut canadien
d'éducation des adultes, de bien vouloir prendre place, s'il vous
plaît. J'aimerais vous rappeler le temps qui est alloué pour la
période de présentation et celle des échanges. Comme
ça a été convenu, vous aurez 20 minutes pour votre
présentation et il restera 40 minutes pour les échanges avec les
parlementaires, c'est-à-dire, si le Parti Égalité
intervient, ça veut dire 20 minutes, 20 minutes, 20 minutes. Est-ce que,
M. Cameron, vous allez intervenir?
M. Cameron: Peut-être trois minutes. Le Président
(M. Bradet): Oui? D'accord. Une voix: C'est réparti en
trois.
Le Président (M. Bradet): C'est ça. D'accord.
Alors, Mme la présidente, Mme Blais, est-ce que vous pourriez
nous présenter les gens qui vous accompagnent?
Institut canadien d'éducation des adultes
(ICEA)
Mme Blais (Madeleine): Oui. Bonsoir, M. le Président. Je
désire vous présenter Mme Diane Laberge, la directrice
générale de l'Institut canadien d'éducation des adultes;
M. Jean-Pierre Hébert, membre du comité sur les politiques en
éducation des adultes de l'Institut; Mme Louise Carrier, membre aussi du
comité de l'ICEA sur les politiques; et Mme Marie Leclerc,
chargée de projets à l'ICEA.
Alors, je vous remercie d'avoir accepté de...
Le Président (M. Bradet): Juste avant, Mme la
présidente...
Mme Blais: Oui. Je m'excuse.
Le Président (M. Bradet): Vous nous avez demandé,
je pense, un dépôt de document qui est un ajout au mémoire
de l'institut canadien.
Mme Blais: Oui, c'est exact. Mémoire
déposé
Le Président (M. Bradet): Alors, comme il s'agit d'un
ajout au mémoire, votre document est donc déposé.
Mme Blais: Ça va. Je vous remercie.
M. Brassard: Allez-y, Mme la présidente.
Mme Blais: Je peux y aller maintenant. Ça va? Je vous
remercie d'avoir invité l'ICEA à prendre la parole dans le cadre
de cette consultation restreinte. Dans le cadre de cette commission, notre
intervention portera, dans un premier temps, sur l'orientation de la
réforme. Nous traiterons ensuite de la mission et des objectifs des
cégeps, puis des cibles du renouveau touchant les adultes, en
référant au fur et à mesure à certaines de nos
recommandations dont nous déposons ce soir, à cette commission,
le texte adopté par nos instances hier.
À la suite de la consultation générale qui a eu
lieu cet automne, nous avons été préoccupés et
anxieux de voir ce que la réforme allait changer pour les adultes qui
étudient dans les cégeps. L'ICEA est globalement resté sur
sa faim et nous croyons que les adultes le seront aussi, car, bien
qu'introduisant certaines mesures d'accessibilité, la réforme
proposée apporte peu d'améliorations aux services à la
population étudiante adulte. Et, pourtant, nous disons oui à une
réforme des collèges.
Nous avions fait état, cet automne, des améliorations que
nous souhaitions voir apporter à la contribution spécifique de
l'enseignement collégial, parlant pour les adultes du besoin des
cégeps comme tremplin pour l'avenir. Nous sommes ainsi en accord avec
une réforme des cégeps et nous appuyons sans conteste
l'idée d'une adaptation des cégeps à l'évolution de
la société et d'une réactualisation de leur mission, de
leurs finalités, objectifs, cibles et moyens. Nous disons donc oui au
choix renouvelé de l'enseignement collégial
québécois.
J'aimerais souligner dès maintenant certaines mesures qui
représentent du point de vue des adultes des pas en avant. Ainsi,
l'expérimentation d'un cheminement scolaire modulé en formation
technique incluant une part de formation générale nous
apparaît intéressante pour les adultes. La hausse graduelle de
l'enveloppe destinée à la formation technique à temps
partiel à compter d'août 1993 permettra de commencer à
restaurer l'accessibilité des programmes complets de formation. Et nous
appuyons la précision des règles d'admissibilité aux
programmes courts qui porteront une même appellation, celle d'attestation
d'études collégiales.
Cependant, nous voyons des lacunes importantes à la
réforme. Nous disons non à un projet éducatif à
courte vue.. L'ICEA questionne en particulier les limites du projet
éducatif proposé. Nous croyons que l'adaptation de l'enseignement
collégial ne doit pas s'inspirer des seules réalités
économiques immédiates, mais bien de l'ensemble des changements
qui interviennent aux plans politique, démocratique, économique,
culturel et social et qui teintent la demande sociale en éducation.
De plus, l'ICEA considère que la réforme aura des effets
pervers. La réduction de l'accès à l'admission et la
tarification des échecs viennent en effet en contradiction avec les
objectifs de scolarisation et d'appui à la réussite scolaire.
Nous refusons l'incohérence de ces mesures qui risquent de créer
de nouvelles exclusions. Il faut viser, à notre avis, une scolarisation
plus poussée du plus grand nombre.
Enfin, la principale déception de l'ICEA est que les adultes
demeurent, dans ce projet, des étudiants de seconde zone. Rien ne vient
répondre à l'ampleur des besoins exprimés en commission
parlementaire à l'égard de la situation des services
d'éducation des adultes, de l'absence de disponibilité des
services complémentaires et des conditions d'accès et
d'apprentissage des adultes. Et, pourtant, l'un des consensus de cet automne
sur lesquels s'appuie la réforme est à l'effet «d'affermir
le leadership éducatif en éducation permanente et en formation
des adultes et de poursuivre ainsi la scolarisation et la hausse des
qualifications de la main-d'oeuvre québécoise, en mettant
l'accent sur la maîtrise des compétences générales
transférables et en assurant un financement adéquat de l'offre
à temps partiel». C'était une citation de la
réforme.
La mission et les objectifs des cégeps. Une mission à
actualiser. Nous nous réjouissons qu'aient été
affirmés les objectifs et les finalités de l'enseignement
collégial et qu'ait été confirmée la structure
polyvalente des cégeps. L'ICEA donne son appui à la
définition du collège québécois en tant que
«lieu de culture, de connaissances fondatrices et de formation large et
ouverte». Nous considérons, cependant, que le rôle des
collèges dans le développement régional n'a pas
été considéré à sa juste mesure. Poursuivre
des activités en développement régional devrait faire
partie de la mission et des priorités de développement des
cégeps, incluant la mise en oeuvre de services à la
collectivité. L'éducation populaire doit aussi continuer de faire
partie de la mission des cégeps en tant que volet non scolaire de leur
action éducation et contribuant ainsi au développement
régional, étant entendu pour l'ICEA que le développement
régional est à la fois le développement économique,
social et culturel.
L'éducation permanente et l'éducation des adultes. S'il
est vrai que le Québec et la plupart des sociétés
avancées sont à l'heure de l'éducation permanente et de la
formation continue et si le collège québécois est au coeur
de ce processus comme le soutient le document d'orientation de la
réforme, l'ICEA considère que l'éducation des adultes
devrait être placée au rang des priorités pour les
prochaines années. Nous demandons que l'État confie aux
collèges une mission claire en éducation des adultes qui soit
inscrite dans la Loi sur les collèges. (20 h 20)
Soulignons que la notion de formation continue est souvent
employée dans son sens plus étroit en rapport avec les
compétences socioprofesionnelles. Il devra être explicitement
établi dans les orientations de la réforme que la notion de
formation continue à laquelle on réfère recouvre
l'ensemble des activités de formation des personnes qui ont
déjà quitté l'école et qu'elle n'est pas
limitée aux programmes en relation avec l'emploi et la
carrière.
Nous croyons que seul un cadre clair pourra permettre d'imprimer un
deuxième souffle aux services
destinés aux personnes adultes et de corriger
l'inadéquation inquiétante des besoins des adultes en
matière de formation, des réponses qu'apportent les cégeps
à ces besoins et de la mission d'un réseau public
d'éducation comme celui des collèges d'enseignement
général et professionnel.
Il y a des objectifs à poursuivre. Le projet de réforme
semble avoir pris bonne note, tout au moins au niveau du discours, que
l'accessibilité n'est toujours pas également acquise dans toutes
les régions du Québec et que toutes les catégories
socio-économiques ne sont pas également
représentées dans la population étudiante.
Cependant, il persiste diverses formes d'exclusion auxquelles ne
s'attaque pas la réforme. Nous l'avons souligné cet automne, bon
nombre d'adultes demeurent peu ou moins rejoints tout simplement parce qu'ils
ne répondent pas aux critères d'admission des programmes de
formation offerts aux adultes, c'est-à-dire que l'offre de service faite
aux adultes est largement déterminée par le financement de
programmes spécifiques s'adressant aux prestataires de la
sécurité du revenu ou de l'assurance-chômage, ou encore
à l'entreprise. Les travailleuses et travailleurs à statut
précaire ou peu qualifiés, ainsi que les membres des
communautés culturelles, les femmes à la maison sont trop souvent
peu rejoints par le système d'éducation. Nous souhaitons vivement
que le projet de renouveau amène des solutions à cette situation
et poursuive vigoureusement un objectif d'équité, en plus des
objectifs de scolarisation, démocratisation, acessibi-lité et
hausse des qualifications fixés au cégep.
Il manque à la réforme des objectifs opérationnels
pour baliser la mission des collèges en éducation des adultes.
L'ICEA considère que les cégeps ont des responsabilités
à l'égard de la formation de la population adulte qui ne
concernent pas que les programmes de main-d'oeuvre et ne sauraient se
résumer à un accroissement de l'accès des adultes au
secteur régulier. Ce volet de leur mission devra s'inscrire dans la
planification de chaque établissement et constituer un projet
véritable du réseau collégial dans une perspective
d'éducation permanente qui favorise la mise en oeuvre de projets communs
entre le secteur régulier et le secteur des adultes et un accès
équitable aux ressources du collège pour l'ensemble de la
population étudiante.
Pour que le collège québécois puisse assouplir et
adapter ses pratiques et ses modes d'organisation pour servir
adéquatement et équitablement le nombre croissant de demandeurs
de formation continue, le cadre de financement des services d'éducation
des adultes est à revoir. Les cégeps devront disposer de plus de
ressources financières pour être à même d'assurer des
mandats élargis et redéfinis envers les différentes
catégories de population. Le financement de l'ensemble des services
offerts aux adultes devra être révisé en
conséquence. soulignons que l'éducation des adultes est
appelée à jouer un rôle de plus en plus grand dans
l'économie. en effet, 70 % de la main-d'oeuvre active de l'an 2000 est
déjà sortie de l'école. nous croyons que l'état
québécois doit résolument considérer les
dépenses en éduca- tion notamment comme un investissement
productif et rentable à court, moyen et long terme.
Les cibles de la réforme sont en deçà des ambitions
du renouveau. Certaines mesures prévues par la réforme risquent
d'avoir des impacts pour la population étudiante adulte inscrite dans
une démarche de formation, en particulier celles relatives à la
réussite des études. Pour l'ICEA, une stratégie d'appui
à la réussite en éducation doit viser la réussite
du plus grand nombre en s'appuyant sur l'amélioration des conditions
d'accès au collège. Une telle stratégie qui s'adresse
aussi bien aux jeunes qu'aux adultes ne saurait comprendre des freins à
l'accessibilité et à la réussite scolaire et devrait
s'appliquer à la totalité du cheminement de formation, ce qui
implique, notamment, la mise en place de services complémentaires. La
nécessité de renforcer les fonctions d'orientation et
d'encadrement des étudiants avait d'ailleurs fait consensus lors de la
commission parlementaire. À ce propos, il est absolument inconcevable
que le gouvernement du Québec, dans ses derniers crédits,
s'attache à couper encore une fois en éducation et opère,
en enseignement collégial, une réduction des dépenses du
personnel non enseignant, poste budgétaire qui recoupe les
activités de soutien et d'encadrement des étudiants, et cela, au
moment même où l'on met de l'avant des pratiques favorisant la
persévérance et la réussite scolaires.
Tel qu'envisagé, le rehaussement des seuils pour
l'admissibilité aux programmes conduisant au diplôme
d'études collégiales comporte une dimension fortement
discriminatoire. Nous n'admettons pas que le besoin d'harmoniser les exigences
de diplomation du secondaire avec les conditions d'admissibilité au
collégial puisse conduire à exclure des étudiants plus
faibles. Nous croyons même que l'application de ces nouveaux seuils
à partir du mois d'août 1995 est prématurée. Nous
recommandons que l'on procède d'abord à un examen du bagage de
formation jugé pertinent et essentiel à la fin du cours
secondaire et qu'un débat public se tienne sur les problèmes et
les défis propres à cet ordre d'enseignement. La réforme
de l'enseignement collégial ne devrait, en aucune manière,
renforcer l'exclusion et la marginalisation.
L'introduction d'une pénalité financière qui
prétend viser la responsabilisation et l'incitation à la
réussite ne nous apparaît pas une mesure dont le caractère
pédagogique fasse consensus. Pour l'ICEA, il faut intervenir et
prévenir avant que des échecs en nombre problématique
s'accumulent. Pénaliser la persévérance ou la durée
des études ne saurait remplacer l'accompagnement et le soutien. Il vaut
mieux privilégier la participation à la formation comme mode de
responsabilisation, assurer une présence pédagogique d'un bout
à l'autre du cheminement scolaire et réduire le laxisme en cas
d'échec. On devrait également augmenter l'accessibilité
financière des études.
Il faut aussi renforcer les mesures d'accessibilité. Nous sommes
en accord avec le fait que la règle qui prévaut actuellement pour
l'admission dans les program-
mes conduisant au certificat d'études collégiales
s'applique désormais à l'ensemble des programmes courts,
c'est-à-dire avoir interrompu les études pendant au moins deux
sessions consécutives ou une année scolaire. Éviter que
les jeunes ne soient incités à privilégier des programmes
de courte durée à des programmes complets continue de nous
apparaître une raison valable. Nous espérons, de plus, que
l'harmonisation de la certification contribuera à clarifier la nature de
cette formation auprès des employeurs et à la revaloriser, de
même qu'à augmenter les espoirs de débouchés pour
les adultes engagés dans des démarches de recyclage et de
perfectionnement.
Le maintien du mode de soutien financier à la reconnaissance des
acquis dans le réseau collégial nous inspire, par ailleurs, des
réactions mitigées. Le fait que l'on systématise le
financement expérimenté avec les projets-pilotes devrait
favoriser une généralisation et une consolidation de ces
expériences. Cela n'abaissera certainement pas les coûts
élevés imposés aux adultes. Assurer un réel
développement de la reconnaissance des acquis nécessitera d'y
affecter des ressources régulières et permanentes. Il faudra
viser à ce que la reconnaissance des acquis soit intégrée
dans l'ensemble des politiques et règlements pédagogiques de
chaque collège et à ce que le personnel enseignant soit
sensibilisé et formé à son rôle dans ce processus.
De plus, une politique générale en reconnaissance des acquis
devra être élaborée, tenant compte des bilans qui seront
faits des expériences-pilotes réalisées ces
dernières années, ainsi que des acquis et expériences des
autres réseaux. (20 h 30)
D'autres mesures sont envisagées pour faciliter
l'intégration des nouveaux inscrits à l'enseignement
collégial, telles que l'organisation d'une première session
d'accueil et d'intégration constituée de cours obligatoires et
prévue pour août 1993. Des règles administratives et
financières spécifiques seraient établies afin de
favoriser un encadrement pédagogique et une aide accrue à
l'orientation. Compte tenu de ce que nous avons déjà
exprimé sur les besoins d'encadrement et de soutien, cela nous
apparaît à court terme un pas en avant. Il faudra, cependant, que
cette mesure soit rendue disponible aux personnes adultes, qu'elles
étudient à temps partiel ou à temps complet.
L'ICEA est également favorable aux cours de mise à niveau
permettant une démarche de rattrapage pour les étudiantes et
étudiants qui en éprouveraient le besoin. Nous considérons
que les mesures de soutien pédagogique développées dans
plusieurs cégeps devraient aussi être
généralisées et que le financement récurrent
annoncé à leur appui devrait être systématisé
et maintenu envers et contre toute restriction budgétaire.
L'accès gratuit aux études collégiales constitue
toujours pour l'ICEA un enjeu central. Aussi, est-il pour nous fort important
que cette gratuité soit reconnue formellement pour tous les
étudiants inscrits à temps plein, qu'il s'agisse d'un programme
complet ou d'un programme d'établissement. Mais il serait aussi primor-
dial que cet accès à la gratuité soit élargi
graduellement aux étudiants à temps partiel qui constituent une
forte proportion de la population étudiante adulte. L'ICEA constate que
c'est la mesure qui peut faire pencher la balance du côté d'une
plus grande accessibilité pour les adultes.
Par ailleurs...
Le Président (M. Bradet): Je m'excuse, Mme la
présidente, je voudrais juste vous signaler qu'il reste deux minutes
à votre temps.
Une voix: ...
Le Président (M. Bradet): Vous pouvez le donner? D'accord.
Alors, continuez. On prendra ça sur le temps des échanges avec
nos parlementaires.
Mme Blais: Par ailleurs, l'enveloppe budgétaire
destinée à l'offre de formation technique à temps partiel
sera progressivement haussée, à compter d'août 1993, mais
dans une proportion qui nous paraît très timide compte tenu des
reculs enregistrés et du besoin de rétablir une offre de
formation à temps partiel mieux adaptée à la demande
croissante.
Nous considérons globalement comme un acquis l'importance
réaffirmée de la formation générale. L'ICEA tient
en particulier à faire connaître son appui à
l'enrichissement de la formation générale commune dans tous les
programmes conduisant au diplôme d'enseignement collégial et
à sa réactualisation en trois composantes. Le fait d'identifier
les objectifs de formation en rapport avec les programmes et les disciplines
nous fait croire que les adultes pourront trouver une cohérence nouvelle
entre les différents cours et leur projet personnel.
Face à l'articulation plus étroite entre le collège
et l'université pour ce qui est des programmes d'études
préuniversitaires et conscient que la création d'un cheminement
plus continu favorisera une scolarisation de niveau universitaire, l'ICEA
croit, cependant, important que demeurent distincts la mission et les objectifs
de chaque ordre d'enseignement de façon à ce que soit
préservée l'intégrité de chacun. Nous
considérons que le secteur technique devrait aussi être
défini comme pouvant être préuniversitaire et
préparer à une formation professionnelle plus poussée.
La formation technique. L'évolution du marché du travail
et les sensibilités croissantes des entreprises à l'importance de
la formation générale font en sorte que les préoccupations
pour une formation à caractère qualifiant et transférable
gagnent du terrain. Nous recommandons, par conséquent, qu'une dimension
qualifiante soit introduite dans toutes les formations techniques courtes et
que ces formations soient inscrites comme étape d'un cheminement de
formation qui puisse bénéficier d'une forme de reconnaissance
sociale.
Les modules de formation. Nous appuyons l'idée que soit
expérimenté l'accès au D.E.C. technique par
modules de formation à l'intérieur de certains programmes
devant être autorisés par la ministre, chaque module devant
comporter obligatoirement une composante de formation générale.
Cela favoriserait, entre autres, une souplesse dans le cheminement de la
formation et permettrait une harmonisation avec les programmes d'études
du secondaire comportant une part de chevauchement avec le collégial. Il
s'agit là d'une passerelle fort bienvenue pour les adultes comme pour
les jeunes. Nous demandons, cependant, que soit établi un mode de suivi
spécifique auprès des personnes et des jeunes en particulier qui
s'inscrivent dans un tel cheminement.
Les attestations menant aux programmes d'établissement,
maintenant. Les transformations apportées aux formations courtes
constituent aussi une réorganisation intéressante, en ce sens
qu'elles viennent clarifier la nature de ces programmes mal connus des
employeurs et des adultes eux-mêmes. Signalons pourtant une restriction
majeure: les collèges seraient dorénavant autorisés
à développer ces programmes dans les seuls domaines
d'études techniques pour lesquels ils sont autorisés à
offrir un programme conduisant au D.E.C. L'ICEA ne peut être totalement
d'accord avec cette approche. Nous croyons que d'autres critères
devraient être pris en considération tels que la
possibilité pour une région d'offrir des formations en lien avec
le développement de la structure de l'emploi. Il y aura des bilans
à tirer du fonctionnement en parallèle de modules de formation et
de programmes techniques d'établissement. L'ICEA souhaite que les
milieux concernés y soient associés.
La rationalisation des options professionnelles. L'ICEA est, par
ailleurs, soucieux que la révision des programmes techniques tienne
compte des réalités socio-économiques et des
caractéristiques des régions éloignées ou en
périphérie des grandes villes pouvant nécessiter le
maintien d'une offre diversifiée de formation et le développement
de programmes d'établissement dans un nouveau domaine de formation
spécifique.
L'ICEA considère, enfin, qu'il faut développer une vision
plus large de la formation technique et des milieux avec qui établir des
rapports de partenariat. Nous croyons qu'il faut s'efforcer de
développer une complémentarité entre les institutions
d'enseignement et les milieux de travail, quels qu'ils soient, et non pas
uniquement à la réalité immédiate de
l'entreprise.
Une vision d'avenir en éducation avec les adultes. En conclusion,
nous croyons qu'il est essentiel que soit redéfini un projet
d'enseignement collégial où les adultes soient participants
à part entière avec leur bagage d'expérience à
titre d'étudiant, de travailleur et de citoyen, un projet pour le XXIe
siècle qui s'inscrive dans une véritable perspective
d'éducation permanente, un projet collectif auquel se trouvent
associés les premiers concernés, les étudiantes et
étudiants, jeunes comme adultes, le personnel de l'enseignement et la
communauté desservie par les établissements.
On parle dorénavant pour les cégeps de partenariat, de
concertation, mais les adultes n'y seront plus nommément
représentés et, pas plus que les jeunes, ils n'auront de voix au
comité national des programmes d'études techniques. Et, pourtant,
on dit que «les étudiantes et les étudiants sont au centre
de toute l'action éducative» et qu'ils sont «les premiers
agents de leur formation». Selon l'ICEA, on devrait donc les retrouver
aux instances de décision sur les orientations, la gestion et les
contenus des programmes. Nous faisons, par conséquent, la demande que la
participation des étudiants adultes au conseil d'administration des
collèges soit maintenue, tel que stipulé par la présente
Loi sur les collèges, et que leur participation soit également
prévue au comité national des programmes d'études
techniques. Nous avons déposé ce soir des recommandations,
notamment, à l'effet que la mission des cégeps en
éducation des adultes soit affirmée, qu'une véritable
stratégie de la réussite soit mise en oeuvre, que le financement
de l'enseignement et des services aux adultes soit révisé, que la
participation des étudiants adultes soit prévue dans les diverses
instances et qu'on assure une formation aux adultes adaptée à
leurs conditions et qui tienne compte de leurs acquis et compétences. Je
vous remercie.
Le Président (M. Bradet): Merci beaucoup, Mme la
présidente. Nous en sommes à la période d'échanges
avec nos invités et je reconnais Mme la ministre de l'Enseignement
supérieur et de la Science.
Mme Robillard: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord
saluer les membres de l'Institut canadien d'éducation des adultes et les
remercier d'avoir fait une autre analyse du projet de renouveau
collégial qui est sur la table.
Mme Blais, vous avez vu, autant dans le projet de loi qui est devant
l'Assemblée nationale que dans le régime des études qui a
été prépublié à la Gazette officielle,
qu'à nulle part on ne parle, dans ce texte de loi ou dans ce texte
de règlements, de jeunes ou d'adultes. Vous avez vu ça, j'en suis
certaine.
Mme Blais: C'est évident.
Mme Robillard: Dans le fond, et c'est pour ça que
j'aimerais vous entendre sur ça, autant dans la Loi sur les
collèges que dans le régime des études, nous n'avons pas
fait de distinction quant à la notion: qui est jeune, qui est adulte.
Nous nous sommes beaucoup plus orientés sur la notion de temps plein ou
de temps partiel, que ce soit même pour l'adulte qui est sur le
marché du travail et qui décide de suivre des cours au niveau
collégial; je ne sais pas comment vous définissez votre adulte,
entre guillemets, mais vous avez vu que le projet de loi est orienté
dans ce sens-là. Quelle est la réaction de l'ICEA devant
ça, globalement, sans rentrer dans les mesures? (20 h 40)
Mme Blais: Je pense qu'il est assez clair, à partir du
mémoire qu'on a déposé, que l'on regrette que les adultes
ne soient pas présents, ni dans le régime pédago-
gique, ni dans le projet de loi. Bien sûr que, dans notre
perspective, nous, on ne parle pas nécessairement de jeunes tout court;
nous pensons en termes de jeunes adultes et d'adultes, et nous
considérons que les besoins des adultes sont différents de ceux
des jeunes adultes. Il nous aurait semblé important de faire cette
distinction-là particulièrement au niveau des services offerts
aux adultes, qui doivent être différents, selon nous, qui doivent
être spécifiques, adaptés aux besoins des adultes. Bien
sûr que nous regrettons que ceci n'ait pas été inclus,
introduit, ni dans le projet de loi, ni dans le régime, et c'est
pourquoi nous demandons que la mission des collèges tienne compte,
indique très clairement qu'elle doit aussi rejoindre les adultes qui ont
besoin de formation.
Mme Laberge (Diane): Si je peux me permettre, Mme Robillard,
d'ajouter...
Mme Robillard: Oui.
Mme Laberge: ...en fait, on a titré «Les adultes,
ces oubliés de la réforme». Je pense que, pour nous, ce qui
est important, c'est qu'il y a une différence à faire entre, je
dirais, une première formation qu'on se donne et quand on revient aux
études en termes de perfectionnement, même si, après 18
ans, on est considéré adulte. Quand on est dans un cheminement de
la première formation, il y a déjà une différence
de quand on revient aux études et qu'on doit travailler, qu'on a des
conditions, un environnement différent. On parle de reconnaissance des
acquis. On parle, je dirais, de mesures pour faciliter l'accessibilité.
On ne parlera pas de développement des compétences sans permettre
aux gens qui travaillent d'avoir accès à des études dans
des conditions au moins aussi bonnes que les jeunes qui sont en première
formation, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui, et on pourrait avoir de
multiples exemples. Je pense que, s'il y avait des véritables approches,
je dirais, des perspectives d'éducation permanente où il y aurait
des cycles continus, ce serait quelque chose. On ne pense pas que c'est le cas.
Et, nous, on a réagi fortement à ce qu'ils soient enlevés
du texte de loi, en fait qu'on ne voie plus nommément les adultes, parce
qu'on sait que dans la réalité, actuellement, déjà,
c'est de seconde zone et qu'on a peur que ça le demeure.
Mme Robillard: Mais ce n'était pas, non plus, auparavant,
dans les anciens textes de loi, comme vous le savez, et c'est peut-être
ça, là, que j'aimerais discuter avec vous dans le principe
même, au point de départ. Parce que, vous l'avez vu, l'ensemble
des mesures s'adresse autant aux jeunes adultes, que vous dites, qu'aux
adultes. Par exemple, quand on parle de l'accès aux modules, quand on
parle de la reconnaissance des acquis ou d'autres mesures vous en avez
soulevé, qui sont à l'intérieur, ce n'est pas suffisant
selon vous ils sont présents. Ça veut dire qu'on s'adresse
quand même à cette clientèle-là, mais sans faire une
distinction, parce que je ne sais pas comment on pourrait la définir,
cette clientèle adulte. Parce que vous avez aussi une clientèle
qui revient, mais qui revient en formation initiale aussi, pas
nécessairement dans un cadre de perfectionnement. Vous avez aussi
l'adulte qui est sur le marché du travail, qui a 35 ans et qui
décide de venir se chercher une formation initiale de niveau
collégial. Et, vous le savez, dans le monde universitaire, cette
distinction-là apparaît très peu.
Mme Laberge: Et c'est un problème pour les
étudiants adultes dans les universités aussi. On peut prendre
plein d'exemples personnels. Je ne pense pas qu'il faut... En tout cas,
à titre d'exemple, moi, j'étudie à l'université et,
comme étudiante adulte à l'université, je peux vous dire
que je n'ai pas du tout accès aux mêmes services que si
j'étais une étudiante à temps plein à
l'université, de jour, dans le cadre régulier...
Mme Robillard: À temps plein, vous avez dit.
Mme Laberge: ...normal, tout fait. Ah, mais c'est sûr que
temps plein, temps partiel est une distinction, mais ce n'est pas la seule. Ce
n'est pas la seule, parce que, pour qu'un adulte qui a une famille puisse
retourner aux études, par exemple, à temps plein, faut-il encore
qu'il y ait les conditions d'un véritable congé-éducation,
qu'il y ait des mesures d'accessibilité pour pouvoir se permettre
d'arrêter de travailler. Il y a des conditions différentes d'un
jeune adulte et d'un adulte qui a 35 ans, même quand on est à
temps plein ou à temps partiel. Je pense qu'il pourrait y avoir des
compléments très concrets sur les difficultés que
rencontrent les adultes qui sont à temps plein par nos collègues
qui travaillent dans les cégeps. En tout cas, j'invite...
Mme Carrier (Louise): Bien, moi, je pourrais ajouter que...
Le Président (M. Bradet): Mme Carrier.
Mme Carrier: ...après 19 ans d'expérience avec les
adultes, puis, lors de la réforme au collégial, je les ai
consultés et je suis allée les voir pour leur demander comment
ils voyaient cette réforme-là, ils se considèrent absents
complètement de cette réforme, et on ne considère pas
leurs besoins spécifiques, leurs expériences. Ils n'ont pas de
services adaptés. Au niveau même des horaires, disons, de
conditions, d'encadrement, de suivi, de services de deuxième ligne, de
besoins d'orientation, de besoins d'aide pédagogique, c'est constamment,
toutes les semaines, qu'on se rend compte que les adultes n'ont aucune
réponse à ces besoins-là. Ils se considèrent
toujours comme une clientèle un peu avec un aspect mercantile où
on leur fait payer leurs cours et où ils n'ont aucun service, aucun de
leurs besoins n'est répondu. Ou, si on le fait, on le fait parce qu'on
prend un peu sur le bras de faire ces choses-là, un peu en augmentant
notre tâche de professionnel. Mais, comme
telles, ces choses-là ne sont pas réelles et n'existent
pas.
Mme Robillard: Alors, Mme Blais, revenons donc peut-être
à la notion de gratuité. Justement, dans les recommandations que
vous avez déposées ce soir, il y a deux recommandations touchant
la gratuité; d'abord, la gratuité pour le temps partiel. Vous
nous recommandez ça, ce qui n'est pas le cas dans les intentions
gouvernementales. Mais la première recommandation que vous nous faites:
que l'accès gratuit aux études collégiales soit reconnu
formellement pour tous les étudiants inscrits à temps plein dans
un programme d'études, c'est-à-dire à au moins quatre
cours, qu'il s'agisse d'un programme complet ou d'un programme
d'établissement, c'est tel quel dans le projet de loi. C'est exactement
ça, et ça, c'est une nouveauté de penser que, pour les
étudiants à temps plein, inscrits même dans un programme
d'établissement, ce sera gratuit. Alors, est-ce que...
Mme Leclerc (Marie): Oui, effectivement, toutes les
recommandations qui sont là ne sont pas des condamnations du projet de
loi.
Mme Robillard: Non, non, je pensais que c'était une...
Mme Leclerc: Peut-être que ce n'est pas écrit en
bonne et due forme, mais, effectivement, nous appuyons cet
avancé-là par rapport à une systématisation. Ce que
nous avons su, c'est que, dans certains cas, dans certains cégeps,
c'était déjà appliqué sans nécessairement
que ce soit formel et que, dans d'autres, ça ne l'était pas du
tout. Donc, il y a des endroits où ce sera un progrès, il y en a
d'autres où c'est déjà la coutume. Mais, effectivement,
nous acquiesçons à cet avancé-là dans le projet de
loi. C'est un aspect intéressant.
Mme Robillard: O.K. C'est pour renforcir ce qui est
déjà présent.
Mme Leclerc: Oui, absolument, et nous tenons à ce que
ça y reste.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Robillard: Ah bon! Parfait.
Mme Laberge: On dit aussi: L'ICEA est en appui avec celle-ci et
recommande en plus que l'accès à la gratuité soit
élargi graduellement.
Mme Robillard: Parfait.
Mme Laberge: C'est ça, l'esprit.
Mme Robillard: Parfait. Alors, on se comprend bien. Si on revient
à la notion de modules en tant que tels, modules surtout au niveau de la
formation techni- que, ce que je comprends de votre position, c'est que vous
êtes en accord, je pense, avec le principe des modules, à moins
que je vous aie mal saisis.
Mme Laberge: Oui, on est en accord.
Mme Robillard: Mais, en même temps, vous me demandez de
faire un bilan attendez un peu que je retrouve ça, je pense que
c'est à la page 27 de votre mémoire des expériences
exploratoires dans le domaine de l'agriculture, par exemple. Est-ce que vous
avez présentement des inquiétudes à ce
sujet-là?
Mme Leclerc: Nous avons des inquiétudes, mais aussi peu
d'informations. Ce que nous avons pu consulter comme document d'appui aux
modules était effectivement intéressant, mais mince. Nous avons
nous-mêmes, à FICEA, des représentants de l'Union des
producteurs agricoles qui nous ont parlé avec grand intérêt
des expériences qui se passent en milieu agricole, sauf que ces
expériences-là ne sont pas connues. Et les discussions que nous
avons eues à l'intérieur de nos instances nous montraient qu'il y
aurait intérêt à ce que ce soit davantage débattu et
qu'on en voie les pour et les contre, de ces modules-là. La
compréhension que nous avons du projet de loi nous dit que ce sera en
expérimentation pour cinq ans, effectivement, si on a bien compris
l'idée, que ces programmes, ces nouveaux modules seront autorisés
par la ministre, donc à quelque part choisis de façon très
attentive.
Mais nous aimerions que nous avancions à pas prudents et,
étrangement, nous avons plus d'inquiétudes du côté
des jeunes que du côté des adultes pour l'accès à
cette formule-là. Nous aimerions qu'il y ait une forme de suivi qui soit
fait des gens qui s'engagent dans ces cheminements-là. Il y a même
des résistances, on le sait, par rapport à l'accès des
jeunes à des formules courtes. Donc, notre souci c'est que,
effectivement, ça ne soit pas une porte de sortie pour les jeunes du
système scolaire, mais plutôt une porte de raccrochage pour ceux
qui, de toute façon, débarquaient. Je m'exprime de façon
un peu raccourcie, là... (20 h 50)
Mme Robillard: Non, c'est...
Mme Leclerc: Donc, nous aimerions être davantage
outillés par rapport à cette nouvelle formule, mais nous la
trouvons intéressante.
Mme Robillard: Parfait, parfait. Si c'est dans ce sens-là,
vous avez tout à fait raison. Ce n'est pas l'objectif d'orienter les
jeunes vers la formation courte. Vous avez vu, d'ailleurs, à cet
effet-là, et je pense que vous le soulevez, qu'on précise les
seuils d'admission pour l'attestation d'études collégiales,
justement pour ne pas orienter nos jeunes. Par ailleurs, le fait que nous ayons
des modules au niveau de la formation technique... D'abord, qu'on se comprenne
bien, ce ne sera pas possible dans tous les programmes...
Une voix: C'est clair.
Mme Robillard: ...en partant, là. Alors, ça, on le
sait d'avance. Par ailleurs, là où ce sera possible, il y a
sûrement des avantages, d'abord pour permettre la passerelle du
diplôme d'études professionnelles du secondaire au niveau
collégial, parfois même de reconnaître un module pour
quelqu'un qui aurait suivi son cours d'études professionnelles au niveau
collégial. Qu'on pense au cours de secrétariat ou au cours de
techniques de bureau, par exemple. Vous voyez un peu ce que je veux dire.
Alors, en agriculture, on est arrivé à ça. Ou bien, aussi,
ça nous aidera pour des adultes qui sont sur le marché du travail
et qui veulent venir, temporairement, faire un module et retourner sur le
marché du travail. Mais là il faudra que le module corresponde
à une fonction de travail. Et vous avez bien vu aussi qu'on veut qu'il y
ait une partie de formation générale...
Des voix: Générale.
Mme Robillard: ...à l'intérieur du module. Bon.
Alors, c'est dans ce cadre-là qu'on travaille présentement. Je ne
m'étendrai pas davantage sur le sujet, mais c'était l'idée
de base.
Mme Leclerc: J'aimerais juste...
Le Président (M. Bradet): Mme Leclerc, oui.
Mme Robillard: Oui.
Mme Leclerc: Mme la ministre, j'aimerais juste vous faire une
observation. C'est que vous-même, si je puis me permettre, vous avez fait
la distinction. À l'intérieur d'un projet comme celui des
modules, on n'a pas le choix de faire une distinction entre jeune et adulte.
Peut-être que c'est un retour de balancier que je vous fais, en faisant
observer que, veux, veux pas, il y a des caractéristiques qui vont
toujours demeurer dans le système scolaire au niveau des cheminements,
et je pense, nous pensons qu'il faut continuer de les considérer.
Mme Robillard: C'est très clair qu'on a le jeune qui est
en formation continue de la prématernelle jusqu'à
l'université et on a de plus en plus, maintenant, une clientèle
diversifiée, on le sait. Il y a des personnes qui vont sur le
marché du travail et qui reviennent étudier. On a des gens qui
reviennent étudier à temps plein aussi, ce qui était moins
le cas il y a quelques années. Dans le fond, il faut être capable
d'accueillir cette diversité de clientèle au niveau de l'ordre
collégial. Alors, je n'ai aucun problème avec ce que je viens
d'affirmer dans le sens que, oui, il faut être capable de les accueillir
dans l'ensemble de nos programmes, et c'est dans ce sens-là qu'on a
travaillé, pour permettre une plus grande accessibilité.
Par ailleurs, Mme Blais je vois que le temps passe
à la page 11 de votre mémoire, quand vous me parlez du
collège comme lieu de culture, vous affirmez, à la fin de cet
item-là, «le collège lieu de culture», que vous
craignez que, dans le document d'orientation, on secondarise davantage cet
aspect de la mission des cégeps ou des collèges. J'aimerais que
vous m'explicitiez ça.
Mme Blais: Je vais demander à Mme Laberge. Le
Président (M. Bradet): Mme Laberge.
Mme Laberge: En fait,- c'est qu'on a vu beaucoup de choses sur la
notion de développement régional, développement
économique, formation liée aux besoins de l'entreprise, formation
liée aux besoins du marché du travail, qui sont toutes, à
notre avis, des choses importantes. Mais, quand il y a des choses qui sont plus
systématisées, elles concernent ces aspects-là. Et
l'énoncé sur le collège lieu de culture est plus un
énoncé qu'on n'a pas vu se concrétiser dans des formes
assez pratiques, je dirais, que ce soit dans la loi, dans le règlement
ou alors même dans l'énoncé d'orientation. On voulait
rappeler que, s'il y a quelqu'un qui est bien pour cette ouverture-là au
sens large, c'est-à-dire de l'éducation dans tous les lieux et
dans toutes les sphères de la vie pour les jeunes comme pour les
adultes, et qui ouvre sur l'apprentissage, sur les connaissances et sur la
culture de son milieu... Bien, on a peur que, si ce qui est
déterminé, c'est qu'on se consacre à l'économie,
cette intention-là demeure une intention. C'est vraiment de cet
ordre-là.
Mme Robillard: Une dernière question. Vous permettez, M.
le Président?
Le Président (M. Bradet): Oui, madame.
Mme Robillard: Oui? Une dernière question sur la
reconnaissance des acquis. Je pense que vous en parlez. Au niveau du projet de
renouveau collégial, il en est question aussi. On met de l'argent
supplémentaire dans ce domaine-là. Mais vous avez quand
même des craintes, et c'est sur ça que je veux vous entendre,
parce que vous me dites dans votre mémoire que le mode de soutien
financier à la reconnaissance des acquis, qui est à l'essai
présentement dans les collèges, ça vous pose des
inquiétudes, ou vous avez une réaction mitigée par rapport
à ce soutien financier qui est donné, qui est à l'essai
présentement, alors qu'on regarde comment aider davantage. Alors, s'il y
a un problème de ce côté-là, j'aimerais bien vous
entendre.
M. Hébert (Jean-Pierre): D'abord, je pense qu'on est tout
à fait d'accord, on reconnaît l'importance que le ministère
de l'Enseignement supérieur a accordée à développer
un nouveau mode de financement pour la reconnaissance des acquis. C'est un peu
lui donner ses lettres de noblesse. On est aussi heureux que le minis-
tère de l'Enseignement supérieur ait reconnu la
reconnaissance des acquis comme un processus pédagogique à part
entière. Je pense que c'est deux pas importants qui se sont faits dans
les deux dernières années.
Le mode de financement. On sait que le processus de la reconnaisance des
acquis se développe en six étapes de façon bien
précise et bien systématique. On sait que le mode de financement
actuel ne finance que deux de ces aspects, que deux étapes de ce
processus-là, qui sont ceux de l'évaluation des dossiers en
reconnaissance d'acquis et l'organisation de la formation manquante.
Présentement, on peut dire que la recherche en reconnaissance des
acquis, le développement en reconnaissance des acquis n'est pas rendu
très, très loin dans l'organisation de la formation manquante. On
sait que c'est une étape très importante, mais on est rendu
très peu loin au niveau de se doter d'outils qui vont nous permettre de
faire la formation manquante. Donc, le financement, finalement, au bout du
compte, n'existe en grande partie que pour l'aspect évaluation.
On sait que la plupart des gens qui travaillent en reconnaissance des
acquis dans les collèges, ce sont des personnes à temps partiel,
ce sont des personnes à statut précaire. Donc, le service se
donne dans des moments très courts, souvent très brefs, et pas
longtemps. Donc, l'accès est, en définitive, assez réduit
pour les personnes de pouvoir utiliser ce service de reconnaissance des
acquis.
On sait aussi l'importance que ça prend de plus en plus, surtout
dans la région de Montréal où il y a toute la
problématique des communautés culturelles et des immigrants qui
veulent venir faire reconnaître leur dossier et on possède
très peu d'outils pour le faire. On sait aussi que ce n'est pas
économique de payer des gens pour apprendre deux fois des choses qu'ils
savent déjà. Alors, pour toutes ces raisons-là, je pense
que c'est très important, c'est une priorité. La reconnaissance
des acquis, pour employer l'expression d'une personne du ministère de
l'Enseignement supérieur, c'est la queue qui brasse tout le chien...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Hébert: ...parce que, au bout de la ligne, ça
touche à tous les programmes de niveau collégial.
Mme Robillard: Qui parle comme ça à mon
ministère? Ha, ha, ha!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Hébert: Je pense que c'est avant que vous arriviez, Mme
la ministre.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Robillard: Non, mais vous avez raison. On a encore des pas de
géant à faire de ce côté-là, au niveau de la
reconnaissance des acquis.
M. Hébert: C'est que, voyez-vous, ça touche
à tous les programmes, dans toutes les disciplines. Ça requiert
les services de tous les enseignants parce que ce sont les experts de contenu,
ce sont eux qui font les évaluations. Ça touche à tous les
coordonnateurs de tous les départements. Alors, c'est une tâche
importante. C'est souvent la seule porte d'entrée à des personnes
pour pouvoir venir poursuivre des études. C'est souvent la façon
de les mobiliser et de les stimuler à poursuivre un projet de formation,
de se réintégrer dans des nouvelles tâches, de
transférer leurs compétences et de pouvoir avoir une
reconnaissance officielle de leur expérience et de leurs apprentissages.
Donc, c'est une clientèle très, très importante, et je
pense que la priorité que vous y accordez dénote aussi cette
importance. Sur ce chapitre-là, nous ne pouvons en aucun point
être en désaccord avec vous.
Mme Robillard: Merci.
Le Président (M. Bradet): Merci, M. Hébert. M. le
député de Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: Merci, M. le Président. Mesdames et monsieur,
je pense que votre mémoire est important compte tenu du fait, justement,
que, dans l'énoncé de politique, il n'y a à peu
près rien sur l'éducation aux adultes. J'espère que votre
mémoire va constituer une contribution précieuse pour permettre
justement d'ajouter, sinon un chapitre, en tout cas quelques paragraphes bien
étoffés sur ce sujet-là, parce que le titre que vous lui
donnez est tout à fait pertinent, «Les adultes, ces oubliés
de la réforme». Il y avait aussi, cet après-midi, un
chapitre du mémoire de la CSN qui, effectivement, allait aussi dans le
même sens. (21 heures)
Si on pouvait retrouver dans l'énoncé de politique ne
serait-ce que les objectifs opérationnels qu'on peut retrouver dans
votre mémoire à la page 15, si le ministère et le
gouvernement prenaient en compte ces objectifs opérationnels, je pense
qu'on aurait fait d'énormes progrès, parce que le nombre des
adultes qui fréquentent les cégeps ne doit pas nous faire
illusion, il nous fait illusion d'une certaine façon. Ça a
été largement signalé par le Conseil des collèges,
en particulier, qui indiquait qu'à cause du mode de financement
vous le signalez aussi, d'ailleurs les collèges s'étaient
surtout orientés vers une formation très fortement axée
sur le perfectionnement de la main-d'oeuvre et l'adaptation aux changements
technologiques, ce qui avait pris la forme concrète de formation sur
mesure, et très peu de formation qualifiante, et même il y avait
une impossibilité quasi pratique pour la plupart des adultes d'avoir
accès pratiquement, concrètement au D.E.C., à un
diplôme d'études collégiales.
Je vous cite, page 218, le Conseil des collèges: «Au
collégial, le D.E.C. est la seule sanction d'études qui soit
largement reconnue dans la population et sur le marché du travail, et
les possibilités d'y accéder sont à
peu près nulles dans le secteur de l'éducation des
adultes.» À peu près nulles, à cause des offres, et
à cause aussi du financement via l'entente Canada-Québec, via le
ministère de la formation, de la Main-d'oeuvre. On s'est surtout
centré... Et les collèges, évidemment, n'avaient pas
tellement le choix non plus, sinon il n'y avait pas de financement, ils se sont
centrés, concentrés sur la formation sur mesure.
Bon, j'en arrive à vos objectifs opérationnels. Moi, je
pense qu'ils sont clairs, ils couvrent pas mal tout le terrain, et ça
aurait aussi pour effet d'assurer un équilibre dans l'offre de
formation. Au fond, ce que vous nous dites, c'est qu'il y a un
déséquilibre actuellement pour ce qui est des adultes, il y a un
déséquilibre très flagrant dans l'offre de formation aux
adultes. Est-ce que vous pouvez confirmer ou...
Mme Blais: Je pense qu'on ne peut pas nier ce que vous venez de
nous dire. En fait, c'est la teneur des différentes recommandations
qu'on a faites et, entre autres, de nos objectifs opérationnels. Il
s'agit d'essayer d'offrir davantage aux adultes, non seulement à ceux
qui sont prêts à étudier à temps plein, mais aussi
à ceux qui doivent étudier à temps partiel pour toutes
sortes de raisons, et aussi une offre de service qui soit diversifiée,
qui ne soit pas uniquement centrée sur la formation liée au
travail, mais aussi sur la formation de type général.
M. Brassard: Est-ce que la seule façon ou la façon
principale d'y arriver, à ce meilleur équilibre, c'est le
financement? Est-ce que c'est par le financement?
Mme Laberge: Je dirais qu'on avait beaucoup
développé, dans le mémoire qu'on a déposé
cet automne, la question du financement. Je pense qu'on avait bien
montré que l'offre de service qui est faite aux adultes en
éducation des adultes, dans les services spécifiques ou auxquels
ils peuvent avoir accès, est définie, évidemment, par le
mode de financement. On dit encore aujourd'hui qu'il y a des exclus. Bien, les
exclus! Aujourd'hui, on voit que c'est de plus en plus difficile pour une
personne adulte, qu'on va continuer de nommer, nous, adulte, qui veut
s'inscrire dans une formation de son choix à temps partiel, d'y trouver
accès. C'est plus simple actuellement d'être soit prestataire
d'assurance-chômage, soit prestataire d'aide sociale, soit employé
dans une entreprise, parce que les clients, actuellement, des cégeps, ce
n'est pas les adultes, ce n'est pas nécessairement...
Dans le cas de l'éducation des adultes, c'est l'achat de cours
pour les prestataires d'assurance-chômage, l'achat de cours pour les
prestataires d'aide sociale et l'achat de cours pour les entreprises en
formation sur mesure. Donc, c'est sûr que le client, l'adulte individuel
qui veut faire un choix en cheminement, se recycler à son rythme, se
donner une nouvelle formation et prendre le temps, c'est difficile pour lui
d'arriver dans la bonne case au bon moment, à la bonne période et
dans le cégep qui offre, par hasard, la formation qu'il veut à
temps partiel, le soir où il peut le faire dans son horaire de travail.
C'est sûr que le cadre de financement a imposé un
développement. C'est sûr qu'il pourrait aussi imposer un
redressement. Il peut venir des redressements d'un choix politique aussi, qui
vont induire les financements.
M. Brassard: Oui, une volonté politique au départ,
mais qui doit avoir des effets de changements sur le mode de financement si on
veut arriver à ce meilleur équilibre dans l'offre de
formation.
Vous dites que vous questionnez tout particulièrement le cadre de
réalisation et la stratégie éducative de cette
réforme; de même, les orientations et les mesures
envisagées semblent à la remorque d'une logique économique
à courte vue. Est-ce que vous pourriez vous . expliquer
là-dessus? Est-ce que ça rejoint les propos ou les remarques
qu'on vient de faire?
Mme Laberge: Je prendrais les premiers mots de votre question,
puis, après, je passerais la parole à Marie sur ça.
Quand vous dites qu'on a un questionnement sur la stratégie, pour
nous, effectivement, une des questions qui nous ont beaucoup, je dirais,
inquiétés, c'est tout le choix. On parle de stratégie de
réussite éducative, mais, nous, on ne la voit pas tant que
ça. La question actuellement de faire que le diplôme
d'études secondaires, qui est habituellement préalable à
l'entrée au collégial, ne donne pas automatiquement entrée
au collégial et qu'il y ait deux niveaux de D.E.S., pour nous, c'est
consacrer deux filières. C'est consacrer, je dirais, l'exclusion au
départ. Donc, ce n'est pas, pour nous, une voie afin de choisir la
réussite. Pour nous, il faudrait avoir une vraie stratégie de
réussite qui permette donc, quand on accueille les gens, de leur
permettre d'avoir les conditions de la réussite. On pense qu'il faut
plus soutenir la persévérance et soutenir l'encadrement des gens
qui ont accès au niveau collégial, et on est inquiets de cette
tendance-là.
Cette tendance-là, d'ailleurs, viendrait, je dirais, consacrer la
tendance qu'on voit déjà dans le marché du travail de
dualisation de la société, c'est-à-dire il y a des emplois
pour ceux qui ont des diplômes du collégial ou de
l'université et il y a la précarité pour les autres qui
vont avoir moins. Alors, on serait très inquiets que le système
d'éducation serve à ça, à consacrer la
préparation, je dirais, pour un double marché du travail, en
fait. Puis je pense qu'il y a un bout de ça qui pourrait se
référer aussi à la vision économique qu'on voit
derrière.
Mme Leclerc: La critique de la vision économique à
courte vue, je pense, vient aussi du fait que, derrière un discours sur
la formation continue qui aurait pu nous faire espérer qu'il y ait une
vision, justement, plus globale de perspective d'une offre de formation
équilibrée, d'une offre qui, à la fois, assure un
caractère
qualifiant, mais aussi un caractère d'adaptation...
Derrière le discours sur la formation continue, nous, on ne
considère pas avoir retrouvé les mesures à l'appui de ce
discours-là. Et ça nous a semblé, donc, de la courte vue
parce que, après un énoncé intéressant au niveau de
certaines orientations, on en est arrivé à des mesures
ponctuelles qui intervenaient à certaines étapes données
d'un cheminement scolaire, d'une part, et, d'autre part, qui mettaient de
l'avant, qui continuaient de mettre de l'avant pour les adultes une adaptation
immédiate au marché du travail, mais sans plus de correctifs pour
ce qui est du reste. Ça, c'est une chose.
L'autre chose qui n'est pas nécessairement de la courte vue comme
telle, mais qui est présente dans les ajouts en termes de pouvoirs
possibles à exercer, c'est curieux d'entendre parler de
développement à l'intérieur d'un énoncé qui
met de l'avant la culture, mais de n'en entendre parler que sur le plan
économique. Et c'est le sens des recommandations que nous faisons dans
la première page du dépôt d'aujourd'hui, c'est de dire:
Bon, mais, si nous parlons de développement, parlons de
développement économique, social et culturel, parlons de
concertation avec tous les agents qui interviennent et, donc, pas seulement les
agents économiques. On a l'impression qu'il y a une partie de la
réforme qui s'en va, donc, vers l'ajustement et une autre partie qui
s'en va vers une plus grande qualification peut-être pour les jeunes.
Mais, les adultes, on dirait qu'ils tombent dans le milieu.
M. Brassard: Mme la députée de Terrebonne.
Le Président (M. Bradet): Mme la députée de
Terrebonne.
Mme Caron: Merci, M. le Président. Je pense que votre
mémoire est extrêmement important, parce que l'éducation
des adultes est une des principales réponses si on veut régler
nos problèmes économiques et si on veut se doter d'une politique
de plein emploi. Et ça va toujours augmenter. L'éducation des
adultes au niveau collégial, ce ne sera pas en perte, ça va
être en augmentation continue, d'autant plus qu'on va se retrouver dans
les années à venir, et pour très longtemps, dans une
société où il va toujours y avoir du recyclage, où
les gens ne pourront plus occuper le même emploi toute leur vie. (21 h
10)
Vous y êtes revenus à plusieurs reprises, autant dans vos
recommandations que dans votre mémoire; Mme Carrier nous en a
parlé un peu au niveau de son expérience très
concrète qu'il faut mettre en oeuvre des services... Dans les
recommandations, vous dites: des services souples et flexibles adaptés
aux caractéristiques des adultes. Vous êtes revenus à
plusieurs reprises là-dessus, sur des services qu'il fallait mettre en
oeuvre. Pouvez-vous nous donner les principaux services qu'il serait vraiment
essentiel de mettre en oeuvre rapidement pour les adultes?
Mme Carrier: Les adultes ont besoin de services d'accueil, de
services de référence, du service d'orientation, de services
d'aide pédagogique, d'accompagnement, d'étude de dossier, de
services de suivi de leur cheminement andragogique; ensuite, des services,
même dans certains cas, plus spécifiques d'aide personnelle, parce
que, de plus en plus, on a des clientèles qui ont des problèmes
personnels, donc des services psychologiques, de relation d'aide. Actuellement,
les adultes n'ont pas ces services-là.
M. Hébert: Ce qu'on peut constater, c'est que, finalement,
les adultes paient très cher pour aller chercher de la formation,
c'est-à-dire pour acheter un cours. Ils paient, puis ils s'en vont
s'asseoir, ils s'en vont recevoir une formation dans un domaine bien
précis, sans qu'on tienne compte de leurs horaires, de leur condition
d'adulte; ils ont souvent terminé une journée de travail et ils
doivent prendre ça à des heures qui, souvent, ne sont pas
toujours les plus avantageuses et qui ne facilitent pas nécessairement
l'intégration. Ça coûte cher. Ça coûte cher
pour un adulte de payer cours par cours pour arriver à aller se
diplômer. C'est assez, un peu spécial de voir comment on traite un
client qui paie si cher, qu'on le traite avec si peu de convenance, parce que,
parallèlement à ça, il n'a droit à aucun service
d'information scolaire, aucun service d'orientation, aucune aide ou assistance
au niveau de la gestion de son projet de formation ou de la gestion de son
projet de carrière, aucune assistance au niveau de la
transférabilité des compétences qu'il a
développées depuis de nombreuses années. Il connaît
très, très peu le système dans lequel il se retrouve
après plusieurs années, parce que ce système-là est
en mutation et en évolution, il se transforme beaucoup. Il n'y a
personne qui l'accueille, et ceux qui le font, ils le font au-delà de
leurs tâches la plupart du temps, parce qu'on ne paie pas de ressources
à ce niveau-là pour pouvoir leur donner ces services-là
auxquels ils ont droit. Donc, c'est la situation actuelle dans laquelle se
retrouvent les adultes.
Et on dit: On veut s'installer, nous, dans une perspective du XXIe
siècle. Mais le XXIe siècle, ça va être beaucoup
d'adultes qui vont vouloir changer d'emploi parce que, dans 50 ans d'ici, leurs
emplois n'existeront plus, ou peut-être dans 20 ans. Donc, tout le
recyclage de la main-d'oeuvre, tout le haussement du niveau de la
qualification, tous les ajustements qui concernent les nouvelles technologies,
l'adaptation à de nouveaux métiers ou à de nouvelles
réalités, l'adulte est, en fin de compte, laissé à
lui-même pour faire le ménage là-dedans et choisir un
cours. Je pense qu'on lui en met beaucoup sur les épaules. Sans vouloir
mettre trop d'importance sur l'adulte lui-même, sur les
spécificités d'un adulte, je pense qu'on doit tenir compte de
cette réalité-là qui lui est propre et un peu
particulière.
Le Président (M. Bradet): Oui, Mme Blais. Mme Blais:
J'aimerais ajouter qu'on a souvent
tendance à penser que, parce que ce sont des adultes, ils n'ont
pas besoin de services, que seuls les jeunes ont besoin de services. Moi, je
suis professeure à l'Université de Montréal, j'enseigne
auprès d'étudiants adultes à la maîtrise et au
doctorat et, régulièrement, je rencontre des étudiants qui
ont des besoins similaires à ceux dont on vient de parler au niveau
collégial. Lorsqu'on ne leur offre pas ces services-là, ils les
réclament, et je crois qu'ils sont en droit de réclamer des
services qui les aident à cheminer dans leur projet éducatif. Et
c'est ce qu'on demande pour le cégep.
Mme Caron: Je vous remercie beaucoup. Je pense que c'était
extrêmement précis comme réponse.
Le Président (M. Bradet): Alors, il n'y a pas d'autres
interventions. Comme mot de la fin, Mme la ministre.
Mme Robillard: II me reste à remercier les
représentants de l'institut canadien de nous avoir soumis leurs
réflexions. Sachez que sûrement on va en tenir compte dans les
suites à donner au renouveau collégial. Merci.
Le Président (M. Bradet): Merci beaucoup.
M. Brassard: Ah bien, nous prenons bonne note que Mme la ministre
va en tenir compte.
Le Président (M. Bradet): Alors, nous allons suspendre les
travaux quelques minutes pour permettre au prochain groupe de prendre
place.
(Suspension de la séance à 21 h 15)
(Reprise à 21 h 17)
Le Président (M. Bradet): Je demanderais à la
Fédération des associations de parents des cégeps du
Québec de bien vouloir prendre place, s'il vous plaît. Mme la
présidente, Mme Lessard, bienvenue à la commission. J'aimerais
d'abord que vous nous présentiez les gens qui vous accompagnent et,
ensuite, vous aurez 20 minutes pour présenter votre mémoire.
Fédération des associations de parents
des cégeps du Québec (FAP)
Mme Lessard (Marina): Avant de commencer, j'aimerais dire comment
est-ce qu'on les aime, ces enfants-là. Quand je pense que vous pourriez
être devant la télévision ce soir, regardant au moins des
feuilletons, et que je vous vois assis là, alors j'ai toute mon
admiration pour la deputation qui veut bien, à cette heure-ci, continuer
à écouter ce que pourraient dire des parents, ce que vous savez
déjà, dans le fond. Alors, je vous félicite, je trouve
ça... Je pourrai le dire à mes petits-enfants au moins.
J'aimerais vous présenter, à ma gauche, ma deuxième
vice-présidente je dis «ma», c'est déjà
très possessif, c'est très maternel Mme
Thérèse Mathieu, de Drummondville; mon premier
vice-président, M. Wilfrid Lanoix, de Joliette; le commandant Georges
Boilard, de Chicoutimi, qui est un délégué; et notre
secrétaire, M. Roland Déziel, que vous connaissez
déjà. J'aimerais signaler que, dans la salle, vous avez des gens
de Matane, de Montréal, de Limoilou et de Gar-neau. Eux aussi, je les
félicite, parce que j'ai l'impression que, demain matin, ils doivent
travailler très tôt et venir nous épauler, c'est
déjà un geste très magnanime et très gratuit. Mais,
ça, ça ne rentre pas dans mes 10 minutes, hein? Non? Merci.
J'ai intitulé mon texte il n'est pas très long, il
a juste trois pages... Décrocher les parents partenaires des
cégeps en temps de déficit est un défaut de gestion
publique. «Pourquoi madame la ministre?»
M. le Président, Mme la députée-ministre, mesdames
et messieurs de la deputation de l'Assemblée nationale et membres de la
commission parlementaire de l'éducation, la Fédération des
associations de parents des cégeps, qui regroupe 24 associations
à travers le Québec, devrait être considérée
par l'État comme un interlocuteur privilégié pour tout ce
qui a trait à l'enseignement collégial. Les préoccupations
de nos membres rejoignent, en effet, celles de l'ensemble des parents, et nous
parlons donc au nom de près de 118 000 parents dont les enfants sont
inscrits au collège public. (21 h 20)
C'est avec enthousiasme que la Fédération a
participé l'automne dernier à la commission parlementaire sur
l'avenir de l'enseignement collégial convoquée par Mme Lucienne
Robillard, ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science. Nous
avions alors soumis on était peut-être, probablement, un
peu idéalistes une quarantaine de recommandations qui, du point
de vue des parents, contribueraient à humaniser la formation
collégiale, tout en leur assurant l'excellence recherchée. Nous
demandions aussi d'augmenter et de continuer à assumer notre rôle
particulier afin de faire contrepoids à une approche trop bureaucratique
et trop économiste de la formation. Car, nous, parents, nous n'oublions
jamais que les jeunes, avant d'être de simples numéros et de
futurs producteurs, sont des êtres humains qui ont d'abord besoin d'une
formation globale dans un climat de vie humanisante.
Aujourd'hui, en regard de votre geste décrocheur des parents
partenaires de nos cégeps, nous venons dire notre déception,
voire, pour certains parents, une légitime colère
ça arrive chez les parents face à l'article 8 du projet de
loi 82, cet article qui a pour but de réduire de 50 % la
représentation des parents sur les conseils d'administration quand il y
aurait eu lieu de l'augmenter.
Pour nous, les parents partenaires, c'est une plus-value. Nous ne
comprenons pas que notre deputation n'ait pas compris que les parents sont les
premiers tenants des droits de notre système d'éducation,
qu'ils
sont les meilleurs valideurs directs de la formation
générale, qu'ils sont les ombudsmans naturels contre les abus du
système social. Ce sont les ambassadeurs de promotion des cégeps
les plus convaincants auprès de la population ordinaire, comme dirait
Marilyn.
Nous ne comprenons pas pourquoi vous ne retenez pas l'actuelle formule
gagnante de nos relations d'égal à égal, d'un partenariat
établi à long terme et entretenu par les parents, des parents qui
veulent demeurer disponibles à la gestion collégiale. Pourtant,
les parents forment le moteur même du monde socio-économique. Par
ailleurs, les socio-économiques n'ont pas tous la préoccupation
de parents. Ici, je préviens une question. On va me dire: Les
socio-économiques sont des parents. C'est vrai. Je dirais: Si les
marguerites sont des fleurs, les fleurs ne sont pas toutes des marguerites.
Les parents ne comprennent pas ce qui pousse les décideurs
à opter pour un autre modèle administratif qui se prive d'un
nombre convenable de parents actifs au sein d'une gestion participative et
légitime. Pourquoi, Mme la députée-ministre, pourquoi
mesdames et messieurs de la deputation de la commission parlementaire, cette
décision de réduire le nombre de ceux qui forment le plus grand
bassin d'individus de notre milieu culturel, les parents? Voilà la
principale question que nous sommes venus débattre avec vous. Vous
comprendrez sûrement qu'en regard de cela, qui, à toutes fins
pratiques, signifie l'érosion du consultatif, puis la disparition de
notre influence sur les cégeps, influence déjà
insatisfaisante, les autres dispositions du projet de loi, dont certaines
suscitent des réactions négatives et positives, nous paraissent,
disons, d'une importance relative. Car, voyez-vous, chers membres de la
deputation de cette commission parlementaire, au-delà de la simple
mathématique, au-delà même du fait qu'ici ce sont les
parents qui sont touchés, cette décision du gouvernement est
lourde de signification. Peut-être que mon ami Brassard pourrait dire que
je fais du théâtre. Mais ce n'est pas du théâtre.
C'est très sérieux.
On éclipse les seuls membres externes élus du C.A.
Élus. Ce drainage de la consultation populaire est l'imposition d'un
virage radical qui est contraire à la mentalité systémique
inhérente à la première mission des cégeps.
L'éjection de la moitié des parents du conseil d'administration
est donc un pas décisif du système sur les premiers responsables
de l'éducation, les parents. Le système se ferme à
ceux-ci. Au profit de qui? Les élus perdent-ils en faveur du pouvoir de
la bureaucratie? Pourquoi alors accentuer ce virage bureaucratique? Dans
plusieurs cégeps, en véritables partenaires, les parents, les
étudiants, les enseignants peuvent actuellement faire front commun au
C.A. pour influencer les décisions.
Dorénavant, je ne dis pas les D.G., mais un directeur
général sera entouré majoritairement
d'«outsiders» je m'excuse de l'expression souvent peu
soucieux du processus d'éducation relié à une
véritable stratégie de la réussite des études. Ce
modèle de gestion accentuera le rôle des mandataires du
système. On me posera la question: Qui sont les mandataires du
système? Je pourrais répondre. Qui donc prendra les
intérêts du jeune lui-même, de la qualité de vie dans
les cégeps publics, de la formation générale? Les parents
jouent un rôle crucial dans la motivation, l'orientation, l'encadrement
des jeunes, ainsi que dans l'information de l'ensemble des parents. Mme
Robillard est sûrement d'accord avec leur rôle. Je le sais parce
qu'elle l'a dit plusieurs fois, d'autant plus qu'il y a une publicité du
ministère de l'Éducation, dont elle est titulaire,
destinée à faire la lutte au décrochage scolaire qui
claironne à haute voix: L'école, c'est à la maison que
ça commence! Non, c'était comme ça: L'école, c'est
à la maison que ça commence. J'ai vu une photo qui était
comme ça, c'est ça. Je la trouvais superbe, d'ailleurs.
N'est-il pas curieux de constater tous ces doigts pointés vers
les coupables que seraient les parents? C'est les parents qui sont coupables de
décrocher, de ne pas aider les enfants, de ne pas les soutenir. En
revanche, n'est-il pas curieux de voir axer sur l'avenir une réforme qui
néglige de leur donner noblement, aux parents, une place de choix au
sein de la gestion collégiale, en nous évinçant des
conseils d'administration? Pourquoi alors allez-vous créer de toutes
pièces une nouvelle catégorie de décrocheurs, soit les
parents partenaires qui seront décrochés par la loi?
L'expérience des 25 dernières années a
démontré que les parents sont utiles, discrets moi, un peu
moins, par exemple, mais je vais redevenir discrète après
au coeur de la vie collégiale. Ils sont assidus aux séances du
conseil d'administration et dans les divers comités. Pourquoi les
évincer et manifester ainsi une absence de démocratie, je dirais,
des gens ordinaires, contraire à la vocation collégiale?
Avez-vous quoi que ce soit à nous reprocher? Curieusement, on sait qu'en
période de déficit on ne peut se priver de la présence
active de ressources issues du milieu ordinaire. Alors, pourquoi, pourquoi
promouvoir un modèle de réforme qui présenterait un
grossier défaut de gestion?
Il y a également un fait troublant qui émerge de Fine
pointe. En effet, il aurait été facile d'intégrer deux
nouveaux représentants du milieu de l'entreprise sans
nécessairement éjecter deux parents. Et c'est drôle, parce
que, au moment où j'ai lu Fine pointe, Alcan disait: On n'a plus
d'emplois; ne vous fiez pas sur nous autres, on n'a plus d'emplois. Ah! Mais,
curieusement, le gouvernement a décidé, par la même
occasion, de réduire de 20 à 18 le nombre des membres du conseil
d'administration. Pourquoi? Pourquoi pas 22? Pourquoi pas 24? Pourquoi pas 26,
si ce n'est d'un meilleur équilibre qui est recherché? (21 h
30)
II est un fait réel et certain: en situation de crise scolaire,
d'abandon et de difficultés pour la future génération, la
loi doit soutenir la représentation parentale, les personnes qui veulent
aider le système, en rendant efficace, vigoureux, le principe de
représentation des parents au sein de la gestion. Raccrocher tout parent
disponible demeure donc socialement un impératif majeur lié
à la responsabilité de cette présente commission,
et je m'adresse à toute la deputation. J'ai évolué,
hein! depuis un mois.
Au nom des parents partenaires, la Fédération attend de
Mme la députée-ministre et de notre deputation membre de cette
commission des réponses aux questions suivantes. C'est nous, maintenant,
qui aimerions poser des questions, parce que nous allons avoir des
réponses.
Pourquoi, pour un nombre anémique, indécent et une
durée inconvenable de mandat, vous, membres de cette commission,
avez-vous vidé de son sens et de son pouvoir le principe de
représentation des parents? Deux parents, c'est du maquillage!
Pourquoi, dans une ligne de cohérence avec le nouveau Code civil
vous savez qu'en 1994 le Code civil va dire: On est parent à vie,
puis on est enfant à vie; ça va être adopté
notre deputation ne raccroche-t-elle pas les parents en leur donnant une place
noble? On n'est pas ici en quêteux. Nous autres, ce soir, on pourrait
être ailleurs, comme vous, d'ailleurs. O.K.? Donc, si on est ici... Puis
on n'est pas dans une situation de négociation; on vient dire: II faut
donner une place noble aux parents et un rôle actif afin qu'ils soient un
apport désiré dans leur propre système.
Pourquoi la réforme change-t-elle sa philosophie de gestion en se
refermant aux parents des cégeps? Nous ne sommes ici avec vous, chers
ombudsmans des parents parce que les députés sont les
ombudsmans des parents que pour connaître ces réponses.
Merci.
Le Président (M. Bradet): Merci, Mme la présidente.
Mme la ministre.
Mme Robillard: Merci, M. le Président. Alors, . je salue
avec plaisir les représentants de la Fédération des
associations de parents des cégeps. Mme Lessard, on vous reconnaît
bien dans votre représentation. Mme Lessard et chers parents, je vais
vous demander un effort extraordinaire pour le premier cinq minutes
d'échanges. Vous, les parents qui siégez sur les conseils
d'administration à l'heure actuelle, qui connaissez la vie
pédagogique des collèges, qui savez exactement quel type de
formation est donné à nos jeunes présentement dans les
collèges, vous avez devant vous un projet de renouveau collégial.
Plusieurs mesures sont dans ce renouveau. Il y en a une qui touche à la
composition des conseils d'administration; nous allons y revenir dans cinq
minutes, si vous voulez bien.
Mais j'aimerais, Mme Lessard, entendre le point de vue des parents sur
le coeur de la formation, parce que c'est ce dont il s'agit aussi dans le
renouveau collégial, et je n'ai pas vu dans votre mémoire,
malheureusement, ce que vous en pensiez, ni de tous les autres articles ou de
toutes les autres mesures. Je pense que vous soulignez en partant que le
renouveau présente plusieurs aspects avantageux pour notre
société. C'est tout. Dites-moi dans cinq minutes ensuite,
on parlera des conseils d'administration ce que vous en pensez, de ce
renouveau collégial, en termes de contenu de programmes de
formation.
Mme Lessard: Alors, comme c'est cinq minutes, nous sommes cinq,
nous avons une minute chacun. Vous allez donc avoir cinq
témoignages.
Mme Robillard: J'aimerais bien.
Le Président (M. Bradet): Oui, M. Déziel.
M. Déziel (Roland): Bonsoir. Moi, ce que j'ai vu dans le
projet de réforme ou de renouveau collégial, c'est qu'il a mis
l'accent sur, d'abord, le rajustement des programmes afin de faciliter ou de
promouvoir l'insertion. Si vous voulez, dans le mot «insertion», je
voudrais souligner le sens de lien ou de préparation du cégep
dans le milieu environnant avec la mégaentreprise et la PME. Ensuite de
ça, j'ai vu également les préalables qu'il fallait exiger
de nos jeunes. À ce point de vue là, moi, je trouve ça
excellent. Pour moi, c'est très bien, puis on s'y attendait, d'ailleurs.
Mais je ne trouve pas que que ça devrait être incompatible avec la
présence des parents sur un conseil d'administration, parce que le
parent, sur le conseil d'administration, se sent utile et voudrait continuer
à participer à la vie humaine et à la vie intellectuelle
de nos jeunes. Alors, moi, dans l'ensemble, je trouve la réforme
très bien, mais le sujet principal qui nous inquiète maintenant,
c'est le retrait de deux parents sur le conseil d'administration.
Voilà.
Le Président (M. Bradet): Merci. M. Boilard.
M. Boilard (Georges): Je pense, comme parents, que nous pouvons
déceler une belle orchestration entre les préoccupations d'ici
quelques années de l'orientation de nos jeunes au niveau
académique. Cependant, je suis convaincu que cette démarche doit
se faire de corps avec les parents et, dans la réforme, c'est
peut-être cette dimension-là... Nous sommes confrontés
quotidiennement à des parents d'adolescents qui nous disent ou qui
croient que la société s'occupe des enfants. Ils ne croient plus
qu'ils ont quelque chose à apporter aux adolescents, les jeunes de
l'âge de fréquenter les cégeps. Je pense que nous nous
devons de considérer la complémentarité qui doit exister
entre la formulation présente et l'implication future des parents. Cette
dimension-là, selon moi, est très importante. Ce soir, une des
raisons pourquoi nous avons très peu touché à l'ensemble
des recommandations, c'est que, si nous, comme parents, nous sommes ici, c'est
pour venir défendre notre survie. Je pense que, si nous ne pouvons
obtenir cette dimension-là de la réforme, la balance est utopique
au niveau des parents. Donc, c'est notre survie qu'on vient défendre ici
ce soir.
Le Président (M. Bradet): Oui, M. Lanoix.
M. Lanoix (Wilfrid): Merci. Bonsoir. Alors,
j'acquiesce à la demande de Mme la ministre. Je veux bien parler
et faire quelques observations et commentaires au sujet de la réforme
sachant que, tantôt, on aura l'occasion de revenir sur notre
priorité.
J'ai lu avec beaucoup d'intérêt les textes qui
émanent de la ministre et également les deux projets de loi,
puis, globalement, je vois plusieurs points positifs dans la réforme.
Par exemple, pour ce qui est des exigences d'admission, personnellement, je
souscris à ça. J'ai déjà eu l'occasion... Je me
suis permis d'envoyer un document à Mme la ministre, dans lequel
document je fais état de ces considérations-là. Je ne veux
pas faire de redites à ce sujet-là, sauf que, étant
d'accord avec le rehaussement des standards, là où ça
achoppe un peu dans mon esprit, c'est qu'il faudrait, pour que ça ait
plus de chances d'avoir de la réussite, qu'il y ait une réforme
simultanée avec l'autre ordre d'enseignement, c'est-à-dire le
secondaire. Si cette réforme n'est pas simultanée, il va se
créer une sorte de vacuum, si vous voulez, puis l'écart va se
creuser. Cela étant dit, donc, pour ce qui est des exigences, ça
va.
Autre chose. Pour ce qui est de la philosophie, nous aurions
souhaité le maintien des quatre cours de philosophie pour contribuer
à la formation intégrale du cégépien et de la
cégépienne. Pour ce qui est de la promotion du français,
nous souscrivons à ça entièrement, à ce qui se
dessine et qui se projette pour l'enseignement du français à
l'avenir dans les cégeps. Voici en gros. Je crois que mes 60 secondes
sont écoulées.
Le Président (M. Bradet): Mme Mathieu. (21 h 40)
Mme Mathieu (Thérèse): Mme la ministre et la
deputation, j'abonde dans le sens de M. Boilard qui disait tout à
l'heure qu'on ne peut pas dissocier... C'est vrai que, peut-être, dans le
projet de la réforme moi, je l'ai parcouru, peut-être pas
en entier il y a des choses que je trouve très pertinentes, par
exemple étoffer davantage la formation technique et au niveau du ticket
accélérateur. Mais, moi, je suis ici, ce soir, en tant que
parent. Évidemment, je ne suis pas dans le domaine scolaire, je suis
dans le domaine hospitalier, mais ce qui me préoccupe comme mère
et comme famille monoparentale, c'est peut-être la santé mentale
de mon jeune. En même temps, je me disais: Si vous évincez 50 %
des parents des conseils d'administration, à ce moment-là, la
voix des parents sera diminuée. Alors, évidemment, moi, c'est
comme parent, et j'y crois. En tout cas, je pense que c'est quand même
important qu'on tienne compte de ce que les parents demandent ce soir.
Merci.
Le Président (M. Bradet): Merci.
Mme Robillard: Merci. Mme Lessard, revenons à la
composition du conseil d'administration, l'objet principal de votre
mémoire. Est-ce que la Fédération des associations de
parents des cégeps du Québec me recommande toujours six parents
au conseil d'administration?
Mme Lessard: Pourquoi pas? Mais on accepterait quatre.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lanoix: Mais le chiffre 6 demeure.
Mme Lessard: Mais je sais qu'on va partir avec un cadeau. Je sais
que vous allez nous en donner quatre.
Mme Robillard: Mme Lessard, vous savez très bien que nous
sommes en commission parlementaire. Il n'y a pas de décisions
gouvernementales qui sont prises ici, ce soir.
Mme Lessard: Mais vous êtes la deputation.
Mme Robillard: On est là pour discuter avec vous. J'y vais
de mémoire, là. Dans le «rapport» que vous nous avez
déposé à l'automne, est-ce que ce n'était pas six
personnes que vous nous recommandiez?
Mme Lessard: Oui, oui. Je vais vous dire pourquoi on a
pensé ça. C'est que, depuis une dizaine d'années, on voit
un schéma organisational qui s'installe un petit peu. Bon. Nous autres,
on l'a connu dans les universités où on avait beaucoup plus de
socio-économiques, et je l'ai vu un peu dans les milieux hospitaliers.
Et, quand j'ai vu arriver ça au niveau des cégeps, on en a
discuté dans nos forums à nous et on se disait: S'il n'y avait
pas eu de crise scolaire, s'il n'y avait pas eu de décrochage scolaire,
si tout allait bien, à ce moment-là peut-être qu'on
n'aurait pas le même discours.
Mais c'était très drôle, dans notre recherche,
à un moment donné, on s'est dit: Comment ça se fait? C'est
vrai qu'il y a même des parents qui ne sont pas d'accord que les parents
soient là. On a même des gens de certaines radios qui ont dit:
Bien, ça ne nous intéresse pas, les parents. Qu'est-ce que c'est
ça? Qu'est-ce qu'ils viennent faire là? Alors, on a
commencé à faire une analyse un peu de ce qui se passait et on
s'est dit: Bon, c'est vrai qu'il y a beaucoup de couples qui n'ont pas
réussi, parce que, dans une certaine génération, il y a
beaucoup de couples qui ont fait deux, trois, quatre mariages et, après
ça, ça a marché. Il y a des relations avec l'enfant qui
n'ont pas marché, non plus. Par contre, nous, on connaît toute une
série de parents où ça va bien, ils s'occupent de leurs
enfants, il y a une belle relation. On se disait: Ces gens-là, si on
était capables d'aller les chercher et de les remotiver. Alors, on s'est
dit: Bien, dans le fond, si la loi leur donne leur place de noblesse, pourquoi
pas six parents?
Et les parents sont en même temps socio-économiques. Ils le
sont aussi. Mais, si, par exemple, vous me dites: Bien oui, les
socio-économiques sont parents, ça n'a pas du tout la même
portée. Quand je suis assise ici comme parent, je n'ai pas le même
chapeau que si j'étais une socio-économique. À ce
moment-là, je vais
vous apporter des arguments: les jeunes me rapportent à la maison
comment ils sont mal pris, souvent, avec des évaluations. Tout à
l'heure, on parlait de certains points dont on aurait pu parler. Vous allez
avoir un système d'évaluation qui est très
intéressant. Ce qui m'inquiète un petit peu, ça va
être le développement d'outils incroyables. J'ai jusque appris,
à Chicoutimi, dernièrement, qu'ils ont vu que, pour être en
sciences humaines, pour être travailleuse sociale, ils utilisaient les
instruments de la cote Z. Alors, vous voyez, il y a des choses qui se font
d'une façon très bizarre dans les histoires de contrôle.
mais est-ce qu'il y a quelqu'un qui va aller contrôler la relation
maître-étudiant? quand, à un moment donné, un jeune
va être en face d'un professeur qui est plus ou moins pédagogue et
qu'il échoue à chaque fois qu'il est avec ce
professeur-là, ou il y en a peut-être 40 % de ces jeunes qui vont
échouer, est-ce qu'on a des recours à ça? ça, on
aurait pu vous en parler. bien, au conseil d'administration, quand les parents
vont arriver avec des cas comme ça, je pense qu'ils peuvent avoir une
autre dimension que le socio-économique qui, lui, est vraiment loin de
ce processus d'apprentissage.
Mme Robillard: Mme Lessard, vous avez sûrement pris
connaissance d'autres mémoires qui nous sont présentés ici
à la commission parlementaire...
Mme Lessard: Bien sûr.
Mme Robillard: ...dont celui d'un groupe d'étudiants, la
Fédération étudiante collégiale. Malheureusement,
je ne l'ai pas avec moi. Mais ces étudiants, représentés
par la Fédération étudiante collégiale, saluent le
choix du gouvernement de remplacer deux parents par deux diplômés.
Qu'en dites-vous?
Mme Lessard: Bon. Moi, je trouve que, si nous sommes ici, nous
avons un certain recul, et je fais la différence entre
l'expérience et la connaissance: l'expérience est un retour sur
la connaissance. Et je ne pense pas... Moi, à 20 ans, j'aurais dit la
même chose. Et nous sommes ici des gens qui ont au moins 20 ans de recul
par rapport à ces jeunes-là, et je pense que c'est nous qui
sommes bien placés pour dire ce que les parents peuvent apporter. Et ces
mêmes étudiants qui saluent de très haut, j'aimerais
ça les rencontrer quand ils viennent me quêter une bourse, on va
en reparler; quand ils veulent avoir un emploi pour que je les encadre, on va
en reparler. C'est un petit jeu qui se joue à deux, ça. Nos
enfants, ils essaient ça et ils se rendent compte qu'ils sont mieux de
ne pas trop jouer à ça. C'est drôle que le Code civil va
essayer d'arranger ce qui a été dérangé pendant un
bout de temps. Alors, je me dis: Ça, ça vaut ce que ça
vaut. Pour moi, ce n'est pas un argument.
C'est un petit peu comme quand j'étais jeune, que j'avais un
«chum» et que ma mère disait: Tu sais, aïe! le
chaperon, il va partir avec toi. Je disais: Ma mère, je n'ai pas besoin
de toi, hein? Dans le fond, je pense que ma mère avait raison, parce que
je l'aimais bien, ce «chum-là» et je ne sais pas ce qui me
serait arrivé, moi, à 12, 13 ans. Alors, quand des jeunes nous
disent ça, il faudrait creuser, il faudrait avoir des arguments un peu
plus rationnels à leur donner et, à ce moment-là, il faut
leur montrer... Vous savez, il faut montrer aux jeunes qu'on est capables de
faire équipe avec eux. Mais ce n'est pas facile de faire équipe
avec les enfants et on n'a pas de recette; on a juste l'amour, avec quelques
connaissances. Mais, si on est ici, nous autres, c'est parce qu'on les aime,
qu'on sait qu'on est capables de leur apporter quelque chose et qu'on sait
qu'un système qui évacue les gens qui sont là avec coeur
et avec compétence, c'est un système qui va s'appauvrir. Et on ne
voudrait pas ça, parce que je sais que vous ne voulez pas ça.
Le Président (M. Bradet): Merci, madame. M. le
député de Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: Oui, M. le Président. D'abord, mettons les
choses au clair. Quand vous nous disiez, Mme Lessard: Mmes, MM. les
députés, pourquoi avez-vous réduit la place des parents?
pas coupable, hein!
Mme Lessard: Non?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Brassard: Non.
Mme Lessard: Mais vous êtes nos élus.
M. Brassard: Oui. Je comprends bien, mais on n'est absolument pas
responsables et on n'a rien à voir avec l'énoncé, les
propositions en matière de renouveau.
Mme Lessard: Ça me prend des preuves. Mais vous nous avez
fait venir.
M. Brassard: C'est Mme la ministre qui a élaboré ce
projet-là, et je voudrais bien que ce soit très clair
là-dessus. Ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas des choses qui
sont bonnes là-dedans; il y en a sans doute quelques-unes avec
lesquelles on est d'accord, mais on n'a aucunement participé à
l'élaboration...
Mme Lessard: Alors, vous allez défendre les parents.
M. Brassard: Ah bien... Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Lessard: Alors, vous allez être un ombudsman.
M. Brassard: Vous avez besoin de défenseurs,
peut-être que vous allez en trouver de ce côté-ci,
peut-être. Au fond, si je vous comprends bien, vous vous sentez
rejetés. Vous vous sentez un peu mis de côté par le fait
qu'il y a une disposition législative dans le projet de loi où
l'on refait complètement la composition du conseil d'administration et
où on réduit, de quatre à deux, la présence des
parents. Cette disposition et cette proposition de la part du gouvernement, au
fond, si je vous comprends bien, vous la considérez comme un rejet, un
certain rejet...
Mme Lessard: Un défaut de gestion. (21 h 50)
M. Brassard: ...de la part du gouvernement et, donc, une certaine
absence de reconnaissance de la contribution des parents à
l'administration des cégeps par le biais de leur présence au
conseil d'administration. Sauf que la question que je me pose et que je vous
pose aussi... Vous êtes quand même présents; vous passeriez
de quatre à deux, mais votre présence est quand même
là. Qu'est-ce qui fait que, pour vous, une présence minimum de
quatre... Vous disiez: Pourquoi pas six? Ce serait mieux, mais, enfin, je
comprends bien que vous réclamez une présence minimum de quatre
parents. Pourquoi, selon vous, une présence minimum de quatre parents
est-elle requise pour bien assurer une participation des parents à la
gestion des établissements collégiaux? Une présence de
deux n'atteindrait pas cet objectif, si je vous comprends bien. J'aimerais que
vous m'expliquiez pourquoi vous tenez tant... J'ai bien compris que vous y
teniez beaucoup, mais j'aimerais que vous m'expliquiez pourquoi vous tenez tant
à ce que ce soit un minimum de quatre et qu'on ne doit pas aller en
deçà de cela, en deçà de quatre.
Mme Lessard: D'accord.
Le Président (M. Bradet): Mme Lessard.
Mme Lessard: Oui, probablement que mon collègue m'aidera
aussi, parce que je pense que... J'ai envie de vous dire quelque chose. Quand
je fais du gâteau, puis que je ne mets pas assez de gras, c'est comme
trop en mettre. Quand ce n'est pas assez, ce n'est pas bon, hein! En tout cas,
moi, j'aime ça quand il y en a un peu.
M. Brassard: Ça ne lève pas.
Mme Lessard: Hein?
M. Brassard: Ça ne lève pas.
Mme Lessard: Ça ne lève pas. Puis, quand il y en a
trop... Trop de sucre, ce n'est pas bon, hein! Bon. Ça veut donc dire
que les parents sont les seuls élus. Un D.G. qui voudrait, là,
O.K.? pourrait aller chercher tout son monde, mais, les parents, il ne pourra
pas parce qu'il faut qu'il fasse l'assemblée générale des
parents et là il y a quatre personnes qui sont des parents qui viennent
de toutes sortes de milieux. Si vous nous demandiez nos curriculum, à
nous, bien, savez-vous que c'est des compétences qu'on donne
gratuitement aux cégeps, ça? Moi, je pourrais être ailleurs
aujourd'hui. J'ai un Ph.D., O.K.? Je pourrais être ailleurs, puis faire
de la consultation. Le commandant Boilard pourrait être ailleurs, puis
faire autre chose. M. Déziel, c'est la même chose. On donne
ça, nous autres, aux cégeps, et on vient de toutes sortes de
milieux différents. Mais c'est une richesse extraordinaire, ça.
Alors, je vais vous poser une autre question en bon jésuite: Pourquoi
vous descendez le conseil d'administration à 18, à ce
moment-là?
M. Brassard: Ce n'est pas moi, encore là, qui fais
ça.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Lessard: Pourquoi pas 20?
M. Brassard: Ce n'est pas moi. Ce n'est pas moi.
Mme Lessard: Ha, ha, ha! Pourquoi pas 22? Pourquoi?
M. Brassard: Ce n'est pas moi.
Mme Lessard: Alors, nous autres, on dit: Pourquoi deux parents?
Puis M. Boilard pourrait rajouter quelque chose parce qu'on a
réfléchi à cette chose. C'est que ce n'est pas suffisant.
Vous savez, un cégep, ça a besoin souvent qu'il y ait quelqu'un
au comité de gestion. C'est important qu'il y en ait un au comité
exécutif. Moi, j'ai été sur deux renouvellements de
mandat. Et, alors, les socio-économiques, pensez-vous qu'ils se
dérangent, eux autres? Bien, voyons! Ce n'est pas payant, ça,
d'aller siéger sur des comités comme ça. C'est qui qui y
va? Les parents. Parce que, eux autres, c'est important, ils sont là pas
longtemps. Et ça fait qu'à quatre parents on est capables d'aller
aider nos cégeps, et ça, c'est important. C'est pour ça
qu'avec six on aurait peut-être une chance d'avoir un parent à la
commission des études. Mais, ça, c'est du rêve. Mais,
peut-être, ça peut arriver.
J'aimerais que mon collègue Boilard, parce qu'on en a
discuté, prenne la parole là-dessus.
Le Président (M. Bradet): M. Boilard.
M. Boilard: Pour répondre à votre question, M. le
député, peut-être en deux volets. Dans un premier temps, je
suis appelé, personnellement, à véhiculer des genres de
réforme ou des projets pour améliorer notre service à la
population, et nous avons vite constaté que, si nous nous employons
à véhiculer unilatéralement ces projets-là sans la
participation de la base qui est la population, à peu près la
majorité de ces projets-là sont
voués à l'échec. Il nous faut absolument impliquer
nos populations. Et ici, au niveau des cégeps, la base, nous croyons que
les parents en sont les représentants privilégiés. Donc,
si on veut aller plus loin dans cette démarche, il nous faut une
présence des parents.
Maintenant, la présence des parents avec un mandat de deux ans.
Je suis un de ceux qui ont un an de fait au niveau d'un C.A. et, avant de tout
comprendre les rouages du système en général, quoi, on
peut parler de six mois à peu près. Contrairement aux
socio-économiques qui peuvent être là pour trois ans, nous,
nous sommes là pour deux ans seulement.
La disponibilité, également, des parents. Mme la ministre
parlait tantôt de la préoccupation des étudiants, qu'il ne
semblait pas, pour eux autres, y avoir de problème à voir
réduire la présence des parents. Effectivement, ça nous
arrive que la mobilisation des parents n'est pas facile. Cependant, toute cette
dimension présence au conseil d'administration nous assure il y a
un peu une symbolique en arrière de ça un
élément de motivation. Et, question de disponibilité,
comme Mme Lessard disait, on pourrait... Tout le monde, les parents, nous avons
autre chose à faire, et il faut nous impliquer. Il faut nous impliquer,
c'est la base. Donc, à ce moment-là, il y a une
disponibilité qu'il faut se procurer et, si nous réduisons
seulement à deux parents, il est fort possible que la
représentativité, à ce moment-là, des parents soit
à peu près nulle. Parce qu'il ne faut pas oublier que, parmi
toutes les autres préoccupations de la vie, la démarche des
parents au niveau des conseils d'administration, ce n'est pas
nécessairement toujours les quatre parents à chacun des conseils.
Donc, c'est à cette dimension-là, je pense, qu'il faut prendre
garde pour garder une valeur, une essence même à la
présence, une continuité des parents. Parce que deux ans, c'est
rapidement passé.
M. Brassard: Oui, oui. Allez-y.
M. Lanoix: M. le Président, pour faire suite à
l'intervention de M. Brassard qui disait qu'on se sentait rejetés, le
mot «rejet» est un mot quand même qui est assez
marqué. Mais, disons, on peut employer le mot
«éconduit» ou le verbe «éconduire» au
lieu de «rejet». Aussi, peut-être qu'on peut se demander la
question: Est-ce qu'il n'y aurait pas, face aux parents, dans le réseau
scolaire, à quelque ordre d'enseignement que ce soit, au primaire, au
secondaire ou au collégial c'est le collégial qui nous
intéresse ici ce soir des préjugés qui perdurent?
Bon.
Alors, si on croit qu'il est souhaitable de maintenir une bonne
deputation de parents au C.A. des cégeps, c'est qu'à
l'observation on s'aperçoit que, dans la gestion, les parents ont des
sensibilités que les socio-économiques n'ont pas. Ce n'est pas
que je veuille ici faire le procès des socio-économiques. Ce sont
des gens qui ont de bons jugements, qui ont des compétences, mais qui
ont d'autres sensibilités. Et même on a souhaité dans la
plupart des cégeps au Québec qu'il se crée un
comité permanent cégep-industrie. Disons qu'on ne décrie
pas le projet d'inviter deux membres qui viennent des entreprises. Mais, encore
une fois, la présence des parents fait que et c'est comme un
comité de vigie, dans un sens positif du mot avec les
sensibilités qu'ils ont, qu'ils amènent, ils ont des
préoccupations pédagogiques plus que les
socio-économiques. Les socio-économiques ont des
compétences peut-être plus pointues quand il s'agit de la
bâtisse, des budgets d'investissement. Les parents sont
intéressés à ça, mais ils reviennent
instinctivement à des préoccupations de vie étudiante, de
vie pédagogique dans les cégeps. Ils sont les gardiens,
jusqu'à un certain point, de la pédagogie, de la qualité
de la pédagogie dans les cégeps.
Le Président (M. Bradet): Oui, allez-y, M.
Déziel.
M. Déziel: Moi, je voudrais intervenir en soulignant deux
volets, en tout cas, à la question. Tout à l'heure, Mme la
ministre nous a dit que les étudiants ne désiraient pas voir ou
bien qu'ils étaient heureux de voir deux parents remplacés par
des diplômés. Ça m'a surpris que nos jeunes connaissent si
peu leurs parents, parce que les parents sont diplômés. Ils ont
appartenu, eux aussi, à un système qui leur permettait
d'étudier et de passer par des études supérieures. Alors,
je comprends difficilement que les étudiants réagissent de cette
façon-là. (22 heures)
Dans un deuxième temps, quatre têtes, ça
présente beaucoup plus d'idées que deux. D'ailleurs, beaucoup de
directeurs généraux de nos collèges nous ont dit, à
beaucoup de parents des associations, qu'ils tenaient beaucoup à la
présence des parents dans le cégep. Us ont même fait appel
aux associations de parents pour rédiger leur mémoire à
l'occasion du renouveau ou de la réforme des collèges. Ils sont
venus nous consulter, nous demander comment on voyait, nous, le cégep,
comment on voulait réagir à ça.
Enfin, je terminerais par ça, on ne verra jamais, je pense, en
tout cas, des parents en conflit d'intérêts à
l'intérieur d'un cégep. Il s'est produit, en tout cas, chez moi,
chez nous, dans la Mauricie, qu'un soir où il fallait voter nous
étions six ou sept personnes à voter, parce que toutes les autres
étaient en conflit d'intérêts. Les quatre parents votaient,
plus deux autres. Alors, jamais les parents ne sont en conflit
d'intérêts. Alors, je pense que nous avons intérêt,
intérêt, intérêt, à garder leur
présence au sein des C.A. D'ailleurs, c'est bénéfique, et
ils sont très motivés étant donné que ce sont nos
jeunes qui sont là, au cégep, puis nous voulons qu'ils aient une
vie harmonieuse là, au cégep.
Parfois, quand il y a 100 professeurs dans un collège je
dis «parfois» il va se produire que certaines personnes,
certains enseignants, certains professeurs soient infidèles à
leur mission pédagogique, puis ça inquiète les jeunes et
ça inquiète les parents. Alors, si les jeunes sont incapables de
parler parce qu'ils ont peur
de subir un échec, bien, les parents peuvent intervenir par une
voie peut-être parallèle à la leur, et ça peut
produire des effets et des effets bénéfiques. Moi, je verrais
à conserver, en tout cas, le minimum de quatre parents sur le conseil,
d'autant plus que ça ne cause absolument aucune dépense et du
collège et du ministère, leur présence. Puis...
Le Président (M. Bradet): Est-ce qu'il y a consentement
à ce qu'on dépasse 22 heures? Oui? O.K.
M. Lanoix: Si vous me permettez, M. le Président. ..
Le Président (M. Bradet): Oui, M. Lanoix.
M. Lanoix: ...très rapidement, tantôt, je rappelais
un vocable, «rejet»; on a parlé du verbe
«éconduire». Mais, là, je dis que, nous, comme
parents, on est à l'aise, c'est-à-dire que, quand nous
siégeons dans un cégep public, on ne se sent pas du tout des
intrus, alors qu'on serait porté à croire que certains
intervenants nous voient peut-être un peu comme ça. Ça fait
partie des préjugés que je voulais, tantôt, porter à
votre attention.
Et, aussi, l'importance de maintenir un minimum de sièges au C.A.
On a recommandé à la ministre six sièges dans le
mémoire de novembre. C'est que, si on réduit à deux,
même si les parents de certains cégeps avaient les idées
les plus brillantes au monde, avaient les recommandations les plus, comment
dirais-je, à propos à présenter, ils n'auraient que
très, très peu de chances que leurs idées, si vous voulez,
soient réalisées à un bon moment, soient acceptées.
Quand il se produira un vote, il n'y aurait pratiquement aucune chance que la
voix des parents soit entendue. À ce moment-là, à deux,
selon nous, ils n'ont qu'un rôle de figurant.
Le Président (M. Bradet): Merci, M. le
député de Jacques-Cartier.
M. Cameron: Merci, M. le Président. Je voudrais demander
quelque chose en anglais, mais veuillez répondre en français,
s'il vous plaît.
I should explain first that I have been a professor at cegep for 20
years, and I have also been on the Board of Governors, and I have also been a
parent with two students who have gone through cegep, and I would like to ask
you this. It was my impression that parents wanted very much to be involved
with the cegep 20 years ago, and they will probably want to be again 20 years
from now for very different reasons, but they are not that worried about it
right now, and the reason they are not is because the professors are now the
same age as the parents. When the cégeps started, except for a small
group of professors from the «collèges classiques» and the
universities, the average cegep professor was only six years older than the
students, which meant that many Québec parents lived in terror of what
was happening to their young people and wanted to get on the Board of Governors
for exactly that reason. Now, the professors' own children are attending cegep,
and not only does that mean they have that kind of view, it means that in terms
of the input of parents, their friends and neighbours and so forth, even if
they do not sit as parents on the Board of Governors, will tell them quite
directly what they want done. And the same thing is true for the
administration.
In other words, I am agreeing that parents should definitely have a
powerful input in what happens in the cegep, but is it necessarily the case
that that must be as can form a representation? You see, 20 years from now, I
think that they will want the parents again because, this time, the parents
will be afraid that the professors and the administrators are all a bunch of
old cracks. But, right now, they are more or less in step.
M. Lanoix: L'observation que je peux apporter suite à
votre intervention, et je la fais peut-être glisser un petit peu, c'est
que, voyez-vous, de nos jours, depuis quelques années, de plus en plus
il y a une sorte de consensus social qui se dessine et qui se renforcit, puis
qui va dans le sens suivant. Que ce soit le secteur public ou le secteur
privé, ce que l'on recherche puis à bon droit, c'est
souhaitable de le faire on recherche plus de participation de la part du
citoyen, du Québécois et de la Québécoise. On
souhaite plus d'implication, plus d'engagement, plus de partenariat.
Finalement, on a eu l'époque où c'était
l'État-providence, tout ça. On comprend qu'il faut mettre
l'épaule à la roue. Alors, c'est dans ce sens-là que notre
dialectique, entre autres, s'avance et c'est dans cette
foulée-là, si vous voulez, qu'on amène notre argumentation
en plus de toutes les considérations qu'on a amenées
jusqu'à maintenant et qu'on va peut-être vous amener d'ici
quelques moments.
Le Président (M. Bradet): Mme Lessard.
Mme Lessard: On va les enlever, les parents. Vous êtes
d'accord avec ça?
Le Président (M. Bradet): M. le député de
Lac-Saint-Jean.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Brassard: Mme Lessard, vous savez très bien que je ne
suis pas d'accord avec ça.
Mme Lessard: Bien, alors, si vous n'êtes pas d'accord, il
faut en mettre assez.
M. Brassard: Vous pourriez peut-être invoquer, dans votre
argumentation, la présence pas mal plus substantielle des parents dans
l'enseignement primaire et secondaire, dans les écoles, au niveau des
commissions scolaires. Il me semble qu'en parallèle, au niveau des
cégeps, on va dans le sens contraire.
Mme Lessard: J'aimerais ajouter quelque chose. Vous savez, moi,
je fais de la supervision dans les écoles secondaires et au primaire,
parce que je suis en sciences de l'éducation, et la mentalité qui
se développe du partenariat parental au niveau du système
obligatoire n'est pas du tout la même chose qu'au cégep. Au
cégep, il y a une fraternité. Un parent qui veut aider son
cégep pour un court temps parce qu'on le sait, nous autres,
à la Fédération, on a suffisamment de témoignages
là-dessus il y a un phénomène
d'égalité très intéressant, de partenariat
très intéressant. C'est sûr qu'il y a certains parents,
peut-être, dont on pourrait discuter. Mais c'est tellement
précieux, cette formule gagnante là. Écoutez, on ne serait
pas là, nous autres, si, justement, il n'y avait pas cette
qualité d'intervention.
Maintenant, il y a une chose qui est certaine aussi, et là je
vais faire plaisir à M. Brassard: la mentalité de participation
est spécifique au SaguenayLac-Saint-Jean; c'est une question de
survie, et je suis de là. Quand vous allez dans la région de
Montréal, c'est une autre mentalité. Ça, c'est l'ombudsman
du Québec qui m'a dit ça, parce que je suis allée voir
l'ombudsman dans ma démarche. Je vais vous dire ça un petit peu,
O.K.? Alors, on m'a bien fait comprendre, on a eu une bonne discussion.
À Montréal, le parent, c'est plus difficile d'aller le chercher
parce qu'il y a beaucoup de gens ethniques et ce n'est pas la même
mentalité qu'on a chez nous, dans le sens que c'est plutôt le
lobbying, se passer des contrats, les «slates». C'est un mot
nouveau que j'ai appris, la «slate», tu sais, quand ils font des
élections, des choses comme ça. La région de la Beauce est
différente aussi. Mais, dans la fédération des parents,
j'ai redécouvert ce principe de participation qui existe chez nous et
j'ai trouvé ça superbe. (22 h 10)
Ces parents-là, quand on les retrouve dans les cégeps...
J'ai des confidences des cégeps, d'Alma, j'en ai même un peu de
Rimouski, j'en ai d'un peu partout, et le parent partenaire a cultivé ce
phénomène de participation de grande qualité, et
ça, ce serait dommage de le perdre. Mais on peut les enlever, ce n'est
pas grave! Ce n'est pas grave, ça. On peut les enlever, les parents. Il
n'y a rien là.
Le Président (M. Bradet): Alors, Mme Lessard, ainsi que
votre groupe, il me reste à vous remercier pour votre contribution
à nos travaux. Le temps est malheureusement écoulé.
J'aimerais remercier aussi les membres de cette commission, et vous souhaiter
un bon voyage de retour. Il me reste à ajourner les travaux à
demain, 10 heures.
(Fin de la séance à 22 h 11)