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(Dix heures quatre minutes)
Le Président (M. Gobé): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Mesdames et messieurs, bonjour. La commission de l'éducation va
maintenant entreprendre ses travaux. Je déclare donc la séance
ouverte. Je vous rappellerai le mandat de notre commission qui est de
procéder à des auditions publiques sur l'avant-projet de loi Loi
modifiant le Code des professions et d'autres lois professionnelles. M. le
secrétaire, auriez-vous quelques remplacements?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Bradet
(Charlevoix) est remplacé par M. Doyon (Louis-Hébert), M. Gautrin
(Verdun) par M. Philibert (Trois-Rivières) et, finalement, M. Parent
(Sauvé) par M. Kehoe (Chapleau).
Le Président (M. Gobé): Alors, bienvenue à
cette commission, messieurs.
Je vais donc maintenant faire lecture de l'ordre du jour pour nos
travaux de cette matinée. Dès ce matin, à 10 heures, nous
entendrons les représentants des audioprothésistes du
Québec. Par la suite, aux environs de 11 heures, les
représentants de la Corporation professionnelle des
inhalothérapeutes du Québec. Et ceci mettra fin... Ah! Pardon.
Et, à midi, M. Jacques Roy. Cette dernière intervention mettra
fin à nos travaux pour la journée, donc pour la semaine.
Il n'y a pas de remarques préliminaires, bien entendu, les
déclarations d'ouverture ayant été faites. Alors, est-ce
que l'ordre du jour est adopté par les membres de la commission?
Mme Caron: Adopté.
Le Président (M. Gobé): M. le député
de Louis-Hébert, est-ce que l'ordre du jour est adopté?
M. Doyon: Moi, d'habitude je saute ça parce qu'on prend
pour acquis que personne ne conteste jamais. Alors, quand je préside, je
ne perds pas de temps avec ça.
Une voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Gobé): M. le député
de Louis-Hébert, on vous demande si l'ordre du jour est adopté,
on ne vous demande pas votre commentaire. Je pense que, si vous prenez
ça à la rigolade, peut-être qu'il y a des gens qui le
prennent au sérieux...
M. Doyon: Vous m'avez posé une question et je vous ai
répondu.
Le Président (M. Gobé): ...qui sont en face de nous
et qui sont là pour prendre ça au sérieux.
Alors, l'ordre du jour est adopté. Je demanderai donc aux
représentants de l'Ordre des audioprothésistes du Québec
de bien vouloir prendre la parole.
Ordre des audioprothésistes du
Québec
M. Lauzon (Yvon): Merci, M. le Président. Je voudrais
saluer M. le ministre, M. le président de l'Office des professions et
les membres de la commission. Si vous me permettez, j'aimerais faire une
intervention en deux temps. Dans un premier temps, je voudrais un peu
résumer la profession des audioprothésistes qui est une
profession à champ exclusif, un peu méconnue à travers
toutes les professions et, dans un deuxième temps, Me Jean-Guy
Villeneuve commentera directement notre mémoire.
Mais, avant tout, j'aimerais vous présenter les gens qui
m'accompagnent ici ce matin. Manon Beau-champ, qui est administratrice à
l'Ordre des audioprothésistes, M. Gilles Tremblay, qui est
trésorier, et, bien entendu, Me Jean-Guy Villeneuve, qui est notre
conseiller juridique.
L'Ordre des audioprothésistes et la profession
d'audioprothésiste doivent leur existence à cette réforme
du droit professionnel. En effet, la Loi sur les audioprothésistes du
Québec a été adoptée en juin 1973. La profession
d'audioprothésiste est un produit intégral d'une telle
réforme et l'Ordre estime s'être constamment inspiré, dans
l'exécution de ses responsabilités, des principes de base qu'on
retrouve dans le Code des professions actuel et dans la Loi sur les
audioprothésistes.
Les audioprothésistes sont des professionnels de la
déficience auditive qui oeuvrent essentiellement en pratique
privée. Ils assument auprès de la population malentendante les
services professionnels complets reliés à la correction et
à la déficience auditives, par l'appareillage au moyen de
prothèses auditives, de toute personne malentendante.
Leur formation unique en Amérique du Nord fait l'objet d'un
intérêt constant et accru de plusieurs intervenants, tant aux
États-Unis qu'au Canada. Citons le cas de l'Alberta qui a reconnu la
profession d'audioprothésiste en se basant sur le modèle
québécois. L'Ordre a d'ailleurs collaboré avec les
autorités albertaines dans le dossier.
Le rôle de l'audioprothésiste est défini à
l'article 7 de la Loi sur les audioprothésistes qui se lit comme
suit:
Constitue l'exercice de la profession d'audioprothésiste tout
acte qui a pour objet de vendre, de poser, d'ajuster ou de remplacer des
prothèses auditives. La personne malentendante doit obtenir une
attestation de son besoin prothétique d'un médecin, d'un
audiologiste et d'un orthophoniste. En termes concrets, le travail de
l'audio-prothésiste comprend l'évaluation des besoins
prothéti-ques et la sélection de l'aide auditive
appropriée ainsi que les différents actes, tests,
contrôles, évaluations et entrevues ayant trait à
l'ajustement et à la correction auditives, compte tenu de la
déficience du bénéficiaire de ses milieux de vie et de ses
besoins. Il comprend également la pose et les différents actes
ayant trait à l'embout auriculaire: prise d'empreintes, fabrication
d'embouts et ajustement final.
De plus, son travail professionnel comporte l'éducation
prothétique par laquelle il informe le bénéficiaire sur le
fonctionnement de la prothèse, la manipulation, l'opération,
l'entretien et le rendement optimal de la prothèse en diverses
situations.
Il fait également un suivi et un bilan postappareillage avec les
différentes vérifications électroacoutisti-ques,
lesquelles font partie de l'entraînement et du suivi régulier que
l'audioprothésiste effectue auprès de son client malentendant. on
évalue la population ayant une déficience auditive au
québec à environ 264 000 personnes. en l'an 2000, on
évalue à 323 000 le nombre de personnes ayant une
déficience auditive. selon les statistiques danoises, 80 % des ces
personnes peuvent être appareillées de façon optimale. les
20 % restants peuvent être appareillés avec un rendement non
optimal, mais avec un certain degré de satisfaction. je termine. les
audioprothésistes sont au nombre de 160 et couvrent toutes les
régions sociosanitaires du québec par l'entremise de 80 bureaux
principaux. c'est une profession en constant développement. leur nombre
est passé de 95 à 160 dans les six dernières
années. plus de 60 % ont moins de 10 ans de pratique et 50 % sont des
femmes.
Alors, si vous le permettez, M. le Président, je passerais
maintenant la parole à Me Villeneuve. (10 h 10)
M. Villeneuve (Jean-Guy): Alors, je vais, pour la
présentation du mémoire proprement dit, suivre le document en
vous y référant, mais, évidemment, je vais le
résumer dans ses points saillants en vous indiquant un peu, au fur et
à mesure des sujets traités, l'endroit où vous pouvez
retrouver les arguments ou la position de l'Ordre sur la question.
À titre de commentaire général, en page 2, on
formule sensiblement la même position que le Conseil interprofessionnel
à l'effet que les modifications en profondeur qui sont
véhiculées dans l'avant-projet de loi ne sont pas
appuyées, malheureusement, sur une étude en profondeur ou sur une
opération de réflexion publique où tous les intervenants
du système ont été préalablement conviés
dans cette opération.
Alors, on souhaite vivement, comme le Conseil interprofessionnel, que ce
processus de réflexion ou d'étude, qui aurait dû, on le dit
avec respect, précéder le dépôt de Pavant-projet de
loi, puisse se faire pour, je pense, tirer un profit maximum des
échanges et de l'étude qui pourra être faite à cette
occasion.
Sur la question, maintenant, des différents sujets, en page 4, on
traite du rôle de l'Office des professions tel que prévu dans
l'avant-projet de loi. Là aussi vous allez reconnaître,
évidemment, des positions qui vous ont sans doute été
énoncées à plusieurs reprises. On estime que la conception
du rôle de l'Office va trop loin dans le sens qu'il risque de
créer définitivement, par un transfert ou une addition de
pouvoirs importants, un déséquilibre du système
professionnel. Alors, on estime aussi que ça va au-delà de la
fonction générale de l'Office qui est de surveiller ou de
s'assurer que les corporations professionnelles assument leurs
responsabilités. C'est un pouvoir de surveillance et on confère
des pouvoirs qui vont bien au-delà de cela. On estime aussi que c'est un
petit peu particulier que l'on transfère, par exemple on le verra
en détail des pouvoirs réglementaires du gouvernement
à l'Office des professions. C'est particulier et c'est inopportun et on
dira pourquoi. C'est sur la question, surtout, de la formation
professionnelle.
Alors, en pages 5 et 6, on traite spécifiquement des pouvoirs
d'enquête qui sont conférés à l'Office par rapport
à la situation actuelle. Ici, les pouvoirs qui sont
conférés à l'Office sont assez particuliers dans le sens
qu'on dira que les pouvoirs de commission d'enquête... Il y a beaucoup
d'organismes administratifs qui ont des pouvoirs de commission d'enquête.
Cependant, il faut dire que ces organismes qui ont des pouvoirs de la nature
d'un commissaire d'enquête, qui sont des pouvoirs d'enquête
très importants, sont, généralement, des tribunaux quasi
judiciaires, c'est-à-dire que ce sont des organismes qui exercent des
fonctions quasi judiciaires qui ont besoin, dans le cadre de leurs fonctions,
de ces pouvoirs d'enquête là. Et, souvent, on pourrait dire que ce
sont des pouvoirs d'enquête qui sont exercés de manière
passive, dans le sens que, pour exercer leurs pouvoirs d'enquête, ils
sont saisis d'une demande, d'une requête, d'une plainte, etc. Donc, les
tribunaux administratifs, généralement, qui sont dotés de
pouvoirs de commission d'enquête répondent à la notion de
tribunal et ils exercent selon un processus qui est judiciaire et qui respecte
les droits des parties. Ici, c'est bien différent; on a un organisme de
surveillance qui peut agir, en quelque sorte, faire un rapport au gouvernement
pour ensuite se faire nommer, en quelque sorte, tuteur.
On a aussi un organisme, je pense... Dans les pouvoirs d'enquête
qui sont conférés, on franchit une étape qu'on qualifie de
dangereuse lorsqu'on donne à l'Office le pouvoir d'aller enquêter
directement dans les cabinets de professionnels et d'aller ouvrir les dossiers
des clients de ces professionnels. Alors, c'est totalement et avec
beaucoup de respect, on le dit injusti-
fié, ce pouvoir-là. Ça, c'est conféré
par les articles 15.1 et 192 de Favant-projet de loi. Ce n'est pas très,
très clair, mais c'est clair, dans notre interprétation
c'est comme ça que c'est dit que l'Office a accès aux
dossiers et aux cabinets des professionnels, aux dossiers des clients dans ce
qui est proposé dans l'avant-projet de loi, et c'est une avenue... On ne
voit pas à quels besoins cela répond, parce que ceux qui doivent
avoir accès aux dossiers des professionnels, ce sont d'abord les
instances disciplinaires et les instances d'inspection professionnelle au sein
même de la corporation.
Il y a des particularités comme, par exemple, au niveau de
l'audioprothèse; parce qu'il y a un régime d'assurance-maladie
partiel, les enquêteurs de la Régie, dans le cadre de
l'application de la Loi sur l'assurance-maladie, ont accès aux dossiers
des professionnels. Mais c'est dans des pouvoirs pointus et spécifiques,
pour contrôler les paiements qu'ils font et vérifier si les
services qui ont été chargés ont été
fournis. Alors, c'est dans un cadre très précis. Donc, cette
avenue-là n'est pas pertinente au rôle de l'Office et elle est,
à notre avis, dangereuse, dans le sens que le droit à la
confidentialité est en danger par cette avenue et les libertés
fondamentales des bénéficiaires, le respect à leur vie
privée et ainsi de suite doivent primer sur, à mon avis, toute
forme d'opportunité administrative qui, au surplus, n'est pas
fondée sur ce plan-là on le dit avec beaucoup de respect.
Sur la question... D'autant plus que le projet de loi permet à l'Office
de déclencher, à discrétion, ses enquêtes. Il suffit
qu'il estime que quelqu'un ou une corporation ou un de ses organismes n'assume
pas ses fonctions et il déclenche son enquête. Il n'a même
pas besoin de la permission du gouvernement là-dessus. Je m'excuse, je
confonds avec le pouvoir de tutelle. Il peut déclencher son
enquête presque de façon, non pas seulement presque, de
façon purement discrétionnaire, à toutes fins pratiques.
Alors, sur ce point-là, nous sommes respectueusement contre ces
amendements.
Au niveau de l'article 8, on traite du pouvoir de tutelle. Il y avait
déjà 8 et 9 ainsi que 10. Je vous réfère en page...
Disons, d'abord, au préalable, qu'il y a une forme de pouvoir de tutelle
qui existe dans le Code des professions actuel où l'Office peut,
évidemment, avec, je pense, l'accord du gouvernement, exercer une
tutelle pour des raisons d'incapacité financière d'une
corporation professionnelle. Alors, ça, ça existe
déjà. Cependant, les pouvoirs de tutelle sont beaucoup plus
élargis. Encore là, ils sont presque illimités, dans le
sens qu'il suffit que l'Office décide je ne dirais pas que
ça va se produire comme ça, parce qu'il faut présumer de
sa bonne foi et on n'en doute pas mais l'Office peut décider, un
bon matin, sur la foi d'informations qui sont plus ou moins fallacieuses ou
bien fondées ou difficiles à vérifier, qu'une corporation
n'exerce pas ses fonctions et il fait un rapport au gouvernement et il demande
une tutelle et le gouvernement lui donne la permission. Tout ce
processus-là peut se passer, d'ailleurs, de façon... sans que la
corporation professionnelle soit impliquée.
En tout cas, on pourra toujours dire qu'on pourrait le faire
administrativement, mais il n'y a rien qui, dans la loi, obligerait, par
exemple, le gouvernement, lorsqu'il reçoit un rapport de demande de
tutelle, que la corporation soit là. Donc, c'est très dangereux,
à notre avis, pour les droits des corporations professionnelles et c'est
très dangereux sur le plan légal parce que ce processus-là
pourrait être attaqué très facilement devant les tribunaux
parce qu'on n'aurait pas respecté les règles de justice naturelle
là-dessus et qui devraient s'appliquer, à mon avis.
L'autre point que l'on juge un petit peu... peu orthodoxe dans le projet
de loi, c'est que l'Office est en conflit d'intérêts, en quelque
sorte, dans ce dossier-là des pouvoirs de tutelle, parce que c'est lui
qui agit un peu comme je ne dirai pas «officier rapporteur»,
on ne le dit pas dans un sens péjoratif mais c'est lui qui
décide de faire un rapport au gouvernement pour déclencher une
tutelle et c'est lui qui est le tuteur éventuellement. Donc, il demande
au gouvernement: Voici, cette corporation-là ne marche pas droit, elle
mérite la tutelle, alors je voudrais avoir votre accord
là-dessus. Dès que le gouvernement est d'accord, c'est l'Office
qui est tuteur de droit. Alors, il y a là, évidemment, à
notre avis, un manque d'objectivité qui est véhiculé dans
la loi. On ne parle pas, encore là, sur le plan subjectif, on parle sur
le plan objectif. Il y a là un manque, justement, de neutralité,
de garantie que les droits vont être respectés et que le processus
ne sera pas partial. Parce que, l'Office, par lui-même, est à la
fois requérant pour me demander la tutelle, et il est tuteur si sa
requête est accueillie. Tout ça ça peut se faire en
catimini. On ne dit pas que ça va se faire, mais c'est ce que la loi
permet. (10 h 20)
Alors, on termine là-dessus. Au niveau du processus d'adoption
des règlements, en page 11 et suivantes, on dit tout simplement que,
encore là, avec beaucoup de respect pour l'Office, on estime qu'on n'est
pas d'accord à ce qu'il soit substitué au gouvernement en ce qui
concerne l'approbation de certains règlements.
Au niveau du rôle de l'Office dans le processus
réglementaire, en page 12, où on estime qu'il y a des
problèmes qui devraient être discutés, à tout le
moins, dans cette opération de réflexion pour que le rôle
de l'Office dans la réglementation soit revisé parce
qu'actuellement c'est un des problèmes qui est assez courant. C'est que
les délais d'approbation des règlements de corporations
professionnelles sont absolument inacceptables, et on le dit de façon,
on le constate de façon objective. Ce n'est pas nécessairement,
encore là, un jugement négatif. Cependant, on doit admettre que
l'Office, à notre humble avis, dans ce processus-là, l'a
utilisé pour... en bloquant des règlements, parce qu'il y avait
des litiges ou des divergences de vues avec la corporation professionnelle.
Évidemment, il oppose son pouvoir de consultant, en quelque sorte,
enfin, une force
d'inertie de la corporation professionnelle, mais le règlement
est gelé pendant des années ou des mois parce que,
évidemment, on ne réussit pas à résoudre ou
à s'entendre avec l'Office. Or, on estime que ça, c'est un peu
détourner le processus d'approbation de sa finalité. Ça
devrait être examiné.
Le pouvoir supplétif, également. On estime, comme le
Conseil l'a dit, que le pouvoir supplétif ne devrait être
exercé que pour des questions majeures et juridiques, et non pas des
questions de mérite sur le contenu, ou de conception de la protection du
public sur le contenu d'un règlement. On estime que la corporation
professionnelle est l'autorité responsable de protéger le public.
S'il y a une divergence de vues avec l'Office sur ce point de vue là, on
estime que c'est la corporation professionnelle qui devrait prévaloir en
termes de points de vues et non l'Office. Parce que c'est elle qui a la
responsabilité.
Et ça amène, d'ailleurs, à notre humble avis, le
ministre dans des situations difficiles, ce processus d'approbation des
règlements parce qu'il est un peu appelé à jouer l'arbitre
de conflits entre l'Office et la corporation. Et il n'y a personne qui y gagne
dans ce processus-là. Donc, sur le processus, il devrait y avoir
d'adoption ou d'approbation des règlements des corporations un
encadrement et même une discussion préalable avec les corporations
professionnelles pour trouver un mécanisme plus satisfaisant.
Au niveau des sujets proprement dits, nous sommes tout à fait
d'accord avec le règlement suggérant que la tenue des dossiers et
la cessation d'exercice soient rendues obligatoires. L'Ordre est d'accord,
donc, avec cette modification qui est proposée à l'article 91.
L'Ordre est toutefois moins en accord avec les normes d'équivalence des
diplômes à l'effet que ce règlement devienne obligatoire.
On dit, avec beaucoup de respect, encore une fois, que ce règlement, ce
pouvoir réglementaire est d'ailleurs un anachronisme dans la loi et
devrait même disparaître du Code des professions. Non seulement il
ne devrait pas être obligatoire, mais il devrait disparaître parce
qu'il existe déjà des mécanismes de reconnaissance de
l'équivalence des diplômes au niveau de la réglementation
et on estime qu'aujourd'hui, avec la nécessité de valoriser la
formation professionnelle et l'éducation professionnelle, il n'y a
aucune justification à ce qu'on ait des mécanismes qui permettent
de court-circuiter ou de faire des raccourcis pour avoir des permis de
corporations professionnelles.
Je pense que c'est un compromis qui va à l'encontre, à
notre humble avis, des orientations où, d'ailleurs, on demande aux
jeunes d'être formés, d'avoir les qualifications. On ne voit pas
pourquoi il y aurait des possibilités, parce que quelqu'un a
travaillé sur le tas pendant des années, qu'il puisse avoir un
raccourci pour avoir un permis de corporation professionnelle. S'il a de
l'expérience pertinente, qu'il aille la faire reconnaître à
l'université ou au cégep pour obtenir son diplôme.
Le Président (M. Gobé): Alors, merci, monsieur.
Cela met fin à votre temps, si vous voulez conclure rapidement...
M. Villeneuve: Oui, je vais...
Le Président (M. Gobé): ...votre
énoncé, car je devrai passer la parole à M. le
ministre.
M. Villeneuve: Je vais terminer rapidement, M. le
Président. Nous sommes finalement tout à fait d'accord avec le
mécanisme de conciliation des différends. On pense que c'est une
mesure positive qui va venir apporter des solutions à des
problèmes réels qui cadrent mal avec l'aspect disciplinaire ou
l'aspect inspection professionnelle. Il suffirait, évidemment,
d'améliorer la notion de «différend» peut-être,
pour la rendre plus précise. On est moins d'accord avec le comité
d'examen des plaintes parce qu'on pense que, malgré les objectifs
louables qui sont recherchés, ce n'est pas un mécanisme qui va
apporter... c'est un mécanisme qui va plutôt alourdir le
système.
Et on termine là-dessus, sur la formation professionnelle. On
pense que les mécanismes actuels sont tout à fait adéquats
et on ne pense pas que l'Office ait les ressources et l'expertise pour donner
des avis sur les diplômes. Je pense que le ministère de
l'Éducation, de l'Enseignement supérieur, le Conseil des
universités et autres organismes ont plus de ressources pour donner des
avis éclairés au gouvernement là-dessus. D'ailleurs,
l'Office joue un rôle consultatif dans le cadre actuel, et il devrait,
à notre humble avis, demeurer dans ce rôle-là. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Gobé): Alors, merci beaucoup. M.
le ministre vous avez la parole.
Document déposé
M. Savoie: Oui, merci M. le Président. Tout d'abord, M. le
Président, je voudrais déposer le rapport, une espèce de
condensé de l'article qu'on a eu l'occasion de citer hier, les
photocopies du texte «Psychotherapists' Sexual Involvement with
Clients».
Le Président (M. Gobé): Alors, à la demande
de M. le ministre, le document est déposé. Je mentionnerai qu'il
est en langue anglaise; si des personnes en voulaient la traduction, vous irez
voir le secrétariat de la commission.
M. Savoie: Et...
Le Président (M. Gobé): La traduction en langue
française, bien entendu.
M. Savoie: Alors, merci, M. le Président. Alors, je
comprends que le dossier est déposé et qu'il pourra
faire l'objet d'examen par les membres de la commission si tel est leur
voeu. Je me permettrai tout d'abord de saluer les gens de la Corporation
professionnelle des audioprothésistes, le président, de
même que les gens qui l'accompagnent, Mme Beauchamp, M. Tremblay, de
même que Me Villeneuve, avec qui nous avons eu l'occasion
d'échanger à plusieurs reprises, de souligner, pour les membres
de la Corporation, que, selon leur rapport annuel 1990-1991, il y a 142
audioprothésistes en règle au Québec j'imagine que
le chiffre est un peu plus élevé en 1992-1993 qu'ils ont
un budget de fonctionnement de 122 000 $, donc, sérieusement là,
on parle vraiment de la plus petite corporation, ou à peu près,
au Québec, avec une cotisation d'environ 600 $ par année, et que,
pour le rapport 1990-1991, on parle de 26 demandes retenues pour enquête,
et 12 plaintes ont été portées devant le comité de
discipline. Et, de façon générale, les
audioprothésistes sont assez actifs au niveau de la discipline. On
constate d'une façon constante des décisions au niveau du
comité de discipline de même que du Tribunal des professions,
peut-être un peu moins, là, mais certainement devant le
comité de discipline au cours des dernières années. On
présume que les données pour votre rapport annuel 1991-1992,
lorsqu'il sera déposé, va contenir des éléments
semblables.
M. Lauzon: Oui.
M. Savoie: Est-ce qu'on pourrait avoir une idée, pour
1991-1992, est-ce que vous avez ça en main ou est-ce que...
M. Lauzon: Je ne l'ai pas en main. Je peux vous dire qu'on a
peut-être été beaucoup plus actifs, là, au niveau de
1991-1992, puisqu'on a eu beaucoup de plaintes, là, par rapport à
un professionnel en particulier, qui a été l'objet d'une
radiation et d'une amende de tout près de 25 000 $, donc par le Tribunal
des professions. Alors, on est toujours très actifs. Évidemment,
ça se maintient toujours à peu près dans le même
nombre de plaintes...
M. Savoie: C'est ça qu'on voulait savoir. M. Lauzon:
...c'est à peu près 26 ou 25.
M. Savoie: Donc à peu près 26 demandes retenues
pour enquête et...
M. Lauzon: Oui.
M. Savoie: ...à peu près autant de plaintes
portées devant le comité de discipline. C'est ça?
M. Lauzon: Oui. C'est sensiblement la même chose... (10 h
30)
M. Savoie: Oui.
M. Lauzon: ...au cours de toutes les années.
M. Savoie: C'est ça. Et c'est un ratio qui est
très, très élevé parce que d'habitude... Je veux
dire, pour 142 membres, avoir 26 demandes retenues pour enquête... Est-ce
qu'il y a une explication générale sur le type?
M. Lauzon: Bien, vous savez, nous sommes un peu dans une
situation particulière. Donc, notre clientèle, parce qu'on voit
tout près de 90 000 personnes par année dans nos bureaux, c'est
une clientèle sourde, une clientèle, évidemment, qui a des
problèmes de communication. Alors, très souvent, la plainte ne
vient pas dans le même sens que pour d'autres professionnels, j'imagine.
Alors, comme c'est une question de prothèse, de faire réentendre
les gens et de les faire «recomprendre», les plaintes viennent
très souvent dans ce sens-là, c'est-à-dire qu'il y a un
problème de communication qui peut se développer plus facilement
chez nous que dans d'autres corporations, évidemment, parce que le
principe de la prothèse auditive... Les gens s'attendent très
souvent à une meilleure qualité, si on veut. La prothèse
auditive, ça compense un besoin. Alors, les gens peuvent s'attendre
à un meilleur rendement. Alors, souvent, les plaintes sont
formulées dans ce sens-là. Évidemment, il y a toujours les
plaintes concernant le coût de la prothèse, le coût du
professionnel, qui sont traitées. Mais, dans l'ensemble, ce sont des
problèmes de... Je dirais que ce sont des problèmes de
communication entre le professionnel et le bénéficiaire de la
prothèse auditive, et c'est inhérent à notre
profession.
Évidemment, aussi, comme nous sommes très peu nombreux,
vous avez entre les professionnels comme la compétition est
relativement forte vous avez aussi les plaintes entre professionnels:
les plaintes sur la publicité, sur le code de déontologie, etc.
Alors, c'est un peu pourquoi les plaintes sont peut-être plus
élevées par rapport au nombre de professionnels. Il faut penser
aussi au nombre de personnes dans les bureaux. Si on regarde 26 plaintes sur 90
000 personnes, ce n'est quand même pas élevé.
Évidemment, nous, on a toujours considéré que la
discipline était quelque chose de prioritaire chez nous. Alors, si on
regarde la portion du budget qui va à la discipline à tous les
ans, on en a fait une question très prioritaire. C'est le tiers du
budget, bon an mal an ou à peu près.
M. Savoie: Le tiers du budget.
M. Lauzon: On dépense 20 000 $, 25 000 $ pour la
discipline. On peut vous dire que l'an passé, d'après mon
trésorier, ça a été 39 000 $, donc... Mais,
évidemment, il y avait un cas précis là.
M. Savoie: D'accord. Alors, on va avoir votre
rapport annuel bientôt?
M. Lauzon: II est sous impression. Donc, vous devriez avoir
ça d'ici deux semaines, à l'Office.
M. Savoie: D'accord. Je vous remercie. Au niveau,
évidemment, de vos commentaires concernant le pouvoir d'enquête,
le pouvoir de tutelle, bien, c'est ça. C'est qu'il y a eu une
évolution constante au niveau de la commission. On a eu l'occasion de
faire le point à plusieurs reprises avec plusieurs corporations. Je ne
sais pas si vous avez été mis au courant de nos interventions au
niveau du pouvoir de tutelle ou pouvoir d'enquête.
M. Villeneuve: Non, non, M. le ministre. On n'a pas...
M. Savoie: O.K. D'accord. C'est ça. C'est que... Il est
très clair qu'au niveau du pouvoir de tutelle, par exemple...
Évidemment, l'autorisation se fait par le gouvernement. Ça ne
présente pas de difficultés. Également, que le pouvoir de
tutelle ne veut pas dire, par exemple, que c'est un membre de l'Office qui va
devenir président de la corporation en attendant des élections.
Ça veut tout simplement dire qu'il va y avoir des mécanismes
d'établis, donc, que les craintes devraient, en partie en tout cas, en
ce qui concerne le pouvoir de tutelle, se dissiper en tenant compte des
éléments que vous avez soulevés dans votre mémoire.
Le mécanisme, tel qu'il a été proposé,
évidemment, va faire l'objet de certaines clarifications suite aux
mémoires, suite aux échanges que nous avons eus avec les
différentes corporations. Mais c'était toujours l'intention de
créer un mécanisme de tutelle, de l'étendre dans une
politique visant à assurer au maximum la protection du public.
Il y a également, au niveau du pouvoir d'enquête, des
balises qui ont été déterminées au fur et à
mesure qu'on avançait dans l'enquête. Plusieurs
éléments qui ont fait l'objet de recommandations de la part de
votre Corporation ont été analysés, déjà,
ont fait l'objet d'échanges et on a convenu, je pense, au fur et
à mesure qu'on avançait, d'y apporter des correctifs pour
satisfaire aux exigences, je pense, dans l'ensemble du fonctionnement du monde
professionnel.
Ce ne sont pas seulement les corporations ni le Conseil
interprofessionnel. C'est un peu tout le monde autour de la table qui nous a
permis d'arriver, je pense, à quelque chose d'équitable pour,
bien sûr, ne jamais mettre en cause la relation entre le client, le
professionnel et l'accès... Je pense que ce sont des
éléments qui ont été clarifiés et je pense
à l'avantage... Je suis certain que Me Villeneuve, une fois qu'il va
connaître le texte final, va être d'accord avec l'ensemble des
orientations retenues. Je ne pense pas que ça va présenter des
difficultés pour les membres de la Corporation non plus. On
connaît la grande expérience de Me Villeneuve dans le monde des
corporations professionnelles.
Au niveau du processus d'adoption d'un règle- ment, là
encore, des modifications seront apportées pour assurer une
équité au niveau de la réglementation. Je pense que vous
êtes d'accord avec l'orientation de l'allégement du processus
réglementaire qui présente des avantages considérables
pour vous et, évidemment, certains des commentaires sur les
procédures de conciliation de différends seront analysés
d'une façon plus serrée avant le dépôt du projet de
loi.
Ce qui nous amène à notre comité d'examen des
plaintes. On comprend qu'on doit donner naissance à un mécanisme
qui va permettre à un citoyen d'avoir un accès direct et
immédiat, physique, avec d'autres qu'un syndic. On parle de citoyens,
deux citoyens, pour recevoir des explications sur un comité de cinq,
dont trois professionnels, deux citoyens siégeant, probablement au
nombre de trois, ce qui va lui permettre d'échanger avec eux, de
recevoir des explications et de lui donner également, de la part de
personnes non professionnelles, des explications à son
questionnement.
C'est un élément important. On dit toujours en droit qu'il
doit y avoir, dans les faits, l'application de la justice, mais qu'il doit
aussi avoir apparence, et on pense qu'on va répondre, pour une bonne
partie des plaintes qui sont déposées, à ces deux
critères avec ce comité des plaintes là. Les
difficultés que vous soulevez au niveau du financement,
évidemment, pour nous, il est très important que le financement
soit des plus abordables pour les corporations. On ne pense pas créer
une structure particulièrement lourde. On pense que, sur une base
mensuelle, les coûts vont être très inférieurs
à ce qui a été proposé à la commission. On a
entendu des centaines de milliers de dollars, des approches comme ça,
des coûts énormes. Tout simplement, pour vous rassurer, le
mécanisme qui sera retenu sera des plus acceptables pour l'ensemble des
corporations et c'est ce qui est recherché, on pense, par le public.
J'ai... Évidemment, au niveau de votre corporation, comme vous
dites, beaucoup d'actes, avec un public: 90 000 gestes posés. Vous
êtes 142. Le fonctionnement, j'imagine, doit vous sembler lourd à
cause de votre petit nombre et également à cause du champ que
vous occupez, un peu particulier dans le monde professionnel, dans le sens
qu'on n'est pas 60 000, comme avec les infirmiers et infirmières. Ce
n'est pas la même approche du tout.
Au niveau de la réglementation, en dehors de ce pouvoir que vous
questionnez, au niveau de l'Office et auquel on a cherché à
répondre, le règlement fixant les normes d'équivalence et
de formation, par exemple, vous considérez que c'est inacceptable que
les questions d'ordre d'équivalence et de formation deviennent un
règlement obligatoire et je me demandais si on ne pourrait pas en avoir
un petit peu plus long là-dessus.
M. Villeneuve: Oui. D'abord, il y a des raisons d'ordres
juridique et aussi historique, par exemple, qui sont particulières
à la Corporation professionnelle des audioprothésistes. On
estime, en tout cas, on est peut-
être allés plus loin que d'autres, dans le sens qu'on pense
que ça ne devrait même pas être dans le Code comme
règlement optionnel, mais, à tout le moins, c'est sûr que
l'Ordre va vivre avec un règlement optionnel. D'abord, historiquement,
en 1973, il n'y avait pas de formation d'audioprothésiste qui se donnait
au Québec parce qu'on commençait à zéro. La
profession a été reconnue par législation et il y avait
eu, donc, un mécanisme d'entrée, si vous voulez, de tous les
audioprothésistes pratiquants. Il y avait un mécanisme pour leur
permettre de passer des examens et d'accéder et d'obtenir le permis. (10
h 40)
Donc, en 1973, le ménage, si vous voulez, il y a eu le
mécanisme transitoire où la clause grand-père a
été instaurée dans la Loi sur les
audioprothésistes. Par la suite, on a instauré, comme M. le
président l'a dit, un cours de formation professionnelle qui est
très reconnu et très envié en Amérique du Nord, au
collège de Rose-mont, et l'Ordre a collaboré très
étroitement à monter ce programme de formation et continue de
travailler en étroite collaboration avec le collège. Donc, depuis
1979, c'est devenu un cours... En tout cas, je ne sais pas si c'est 1979, mais,
en tout cas, au début des années quatre-vingt. Donc, il y a un
mécanisme de reconnaissance des jeunes, des futurs
audioprothésistes qui existe au Québec avec une maison
d'enseignement reconnue, un diplôme reconnu. Donc, on estime que c'est le
moule qui doit être emprunté en toute équité pour
les jeunes qui veulent se destiner à la profession
d'audioprothésiste.
On se demande un peu ce que vient faire l'équivalence de
formation dans le contexte des audioprothésis-tes dans ce cadre
précis là. Et on parle quand même d'une petite profession.
Donc, il n'y a pas beaucoup de pertinence à avoir un gros
mécanisme comme ça pour, peut-être, une personne qui
pourrait avoir des velléités d'avoir une équivalence de
formation. Ce qu'on dit dans ces moments-là, c'est: Écoutez, il y
a un moule de formation, si vous avez déjà des expertises, allez
les faire reconnaître dans notre maison de formation qui est au
Québec et qui va vous les reconnaître, qui va vous donner les
crédits. Puis, ce qui vous manque, bien, faites comme tout le monde,
passez votre cours et obtenez votre diplôme. Puis, pour les candidats
externes, il y a un mécanisme d'équivalence des diplômes
qui est accepté, qui a été adopté par l'Ordre et
qui s'applique, je crois. Donc, pour les candidats qui viennent de
l'extérieur, les audioprothésistes d'autres juridictions, il y a
un mécanisme légal qui leur permet l'accès au permis par
voie d'équivalence.
Donc, on ne pense pas que ce soit pertinent pour les
audioprothésistes d'en faire un règlement obligatoire parce que
ça ne répond pas à un besoin et on pense que ce n'est pas
très valorisant ou ça ne va pas dans le sens des idées qui
sont véhiculées au niveau de la formation professionnelle
actuellement. On ne pense pas qu'il y ait vraiment de besoins ou de personnes
qui pourraient être préjudiciées actuellement, dans des cas
précis qu'on connaît pour devenir audioprothésiste au
Québec.
Le Président (M. Gobé): M. le ministre.
M. Savoie: Je vais revenir. Il reste seulement deux minutes.
Le Président (M. Gobé): Mme la
députée de Terrebonne.
Mme Caron: Merci, M. le Président. M. Lauzon, M.
Villeneuve, Mme Beauchamp, M. Tremblay, bienvenue. Je pense que la
présentation de votre corporation, M. Lauzon, était
nécessaire parce que c'est une corporation professionnelle qui est
très peu connue; peu connue de la population, mais je dirais peu connue
aussi du système parlementaire et je pense que vous allez cependant
être beaucoup plus connus à partir du 1er avril, à partir
du moment où les gens pourront bénéficier des services
avec Fassurance-maladie. Donc, ce sera un petit peu différent, votre
profession devrait être davantage connue.
L'expérience, évidemment, de M. Villeneuve lui a permis de
nous présenter les principaux points qui sont contestés par les
corporations professionnelles d'une manière beaucoup plus
précise, je dirais. Vous avez bien su faire ressortir le rôle de
l'Office, le rôle que l'Office devrait continuer à jouer. Au
niveau du pouvoir d'enquête, vous avez bien fait ressortir aussi les
différences entre un organisme de surveillance et, finalement, les
tribunaux administratifs. Au niveau de la tutelle, l'importance de la
présence de la corporation professionnelle concernée, je pense
que ça, c'est le droit le plus strict. Et c'est important de le faire
parce que, depuis quelques jours, le ministre nous dit que la situation a
évolué, que sa pensée a évolué, mais c'est
sûr qu'on n'a pas vu de textes. Alors, tant qu'on n'a pas un texte final
dans les mains, même si on nous parle d'intentions, il faut qu'on puisse
examiner un texte qui va aller avec ces intentions et qui va répondre
aux préoccupations que vous avez mentionnées.
Du côté du processus réglementaire je lisais
votre mémoire en page 12, vous nous dites: Dans les cas où
il existe des divergences entre l'Office et la corporation professionnelle sur
un règlement ou sur une disposition d'un règlement, le processus
d'approbation peut être bloqué pendant des mois, voire des
années. Et, là, je me disais: Souvent, lorsqu'on parle du
processus réglementaire, on parle des retards. Et, évidemment, la
réponse, habituellement, c'est de nous dire que le retard ne se fait pas
à l'Office. Le retard, il est souvent au ministère de la Justice
ou à une autre instance. Il peut être, il y en a qui disent: au
bureau du ministre, mais le ministre nous a dit que ça, c'est rare,
très rare.
Mais il y a aussi d'autres retards réglementaires et c'est de ces
retards-là que vous parlez aussi. De ceux-là, on n'en parle pas
souvent. Il y a effectivement, parfois,
opposition entre le désir des corporations professionnelles, au
niveau de la réglementation, et l'Office des professions. Ça
aussi, ça arrive.
Souvent, quand il y a des différends et que ça touche
plusieurs corporations professionnelles, alors, à ce moment-là,
ça, c'est pas mal plus long et, là, on se parle des
années. Bon, vous avez sûrement eu cette
expérience-là, mais je pense principalement du côté
des professions comptables. Ce n'est pas seulement un problème au niveau
d'une réglementation qui est en attente au ministère de la
Justice. C'est vraiment un problème de fond. C'est vraiment un
problème au niveau du contenu, une opposition entre des corporations
professionnelles et une décision, finalement, politique qui n'est pas
prise, à savoir à qui on va accorder ces pouvoirs-là.
Alors, ce sont deux types de retards, au niveau du processus
réglementaire.
Avec votre expérience, M. Villeneuve, comment, dans les deux
types de processus réglementaire, on pourrait avancer les travaux?
Comment on pourrait améliorer?
M. Villeneuve: Oui, c'est une très bonne question. Il
faudrait peut-être, à tout le moins...Il y a des raisons, comme
vous l'avez mentionné, qui, dans le processus, retardent, qui sont des
raisons techniques. Il faut que ça soit filtré au Comité
de législation. C'est normal. Il y a la question de l'adoption en
version anglaise, aussi, qui contribue, souvent, à retarder le processus
parce que, évidemment, les corporations ne sont pas dotées de
système de traduction ou d'expertise de traduction. C'est fait ici
à l'interne. Donc, ça prend beaucoup de temps. Et ça, il
ne faut pas l'imputer au système ou au gouvernement ou à
l'Office, ces retards normaux sont d'ordre technique.
Les retards dont vous parlez... que c'est le défi là,
c'est quand il y a des divergences de points de vue entre l'Office et la
corporation professionnelle qui ont pour effet de bloquer. Évidemment,
la formule magique n'est pas facile, mais, moi, je verrais à tout le
moins qu'il y ait... d'abord, des délais pour que l'Office donne ses
couleurs à la corporation professionnelle à partir du
dépôt du règlement adopté par la corporation
professionnelle. (10 h 50)
L'Office devrait répondre, donner sa position dans un
délai, disons, raisonnable, mais qui pourrait être de rigueur. Il
restera toujours que, s'il y a des illégalités, des
irrégularités au plan technique, le Comité de
législation va permettre de les régulariser. On pourrait
peut-être faire exception dans les questions de légalité ou
d'ultra vires ou d'abus. On pourrait peut-être faire exception pour ne
pas soumettre à ce délai des questions grossières qui,
dans le règlement, sont manifestement illégales, ultra vires ou
abusives pour ne pas que, évidemment, des choses graves soient
favorisées par une question de délai impératif. Mais je
pense qu'il devrait au moins y avoir un délai général
impératif raisonnable où l'Office devrait faire connaître
sa position.
Secondairement, je pense que, s'il y a divergence de fond, chaque
position a son mérite, il devrait donc y avoir un mécanisme pour
dénouer l'impasse. Donc, est-ce que ce sera le ministre? Est-ce que ce
sera le Comité de législation? Je pense qu'il faudrait qu'il y
ait un mécanisme supplémentaire pour permettre de dénouer
les litiges sur le contenu, sur le mérite du contenu d'un
règlement, outre les questions de légalité proprement
dites. Je vous avoue que, sur ce point-là, il faudrait que je
réfléchisse davantage et qu'il y ait une réflexion, que
d'autres experts, un peu, collaborent pour trouver quel serait ce
deuxième mécanisme pour dénouer l'impasse, mais je ne
pense pas que ce soit, que ça devrait être l'Office qui ait le
dernier mot. Ça, c'est clair, parce que l'autorité qui adopte le
règlement et qui a la responsabilité, c'est la corporation
professionnelle. On peut évidemment...elle peut, elle aussi, avoir de la
partialité, elle peut être protectionniste et on trouve
qu'elle est protectionniste dans le règlement ça, je pense
qu'il faut qu'il y ait une autorité comme l'Office qui lui dise, mais,
si on ne réussit pas à se réconcilier dans un certain
délai, il devrait y avoir une autre autorité qui vient avoir un
vote, qui ait une voix prépondérante sur le contenu, qui
dénoue le litige ou qui donne un avis qui, après un certain
temps, devient obligatoire. Mais ça serait un avis externe à
l'Office et à la corporation professionnelle, après le
mécanisme du délai. C'est un peu des débuts de solution
très humblement exposés. Je n'ai pas...
Mme Caron: Je les apprécie beaucoup. Je pense que, juste
le fait de donner aussi un délai à l'Office et aussi de faire
intervenir, ensuite, l'Office ou le Conseil interprofessionnel ou le ministre
devrait pouvoir arriver à asseoir les corporations professionnelles
opposées et ça aussi, dans un délai... parce qu'on ne peut
pas laisser perdurer les situations des années et des années.
Dans certains dossiers, c'est ce qui se passe actuellement et, ça, c'est
toujours déplorable.
Concernant le comité des plaintes, je ne peux pas ne pas rappeler
qu'il y a unanimité à dire que ce comité des plaintes ne
vient aucunement régler le problème qui a été
soulevé et, ça, ce ne sont pas seulement les corporations
professionnelles qui le disent. Alors, je vais reciter le Protecteur du
citoyen: Le Protecteur du citoyen note que tant par sa composition que par son
fonctionnement les deux, composition et fonctionnement ce
comité risque d'alourdir le processus par l'ajout d'une bureaucratie
inutile, coûteuse, complexe et qui n'améliore pas le
système actuel. Je pense que c'est assez clair!
Même chose du côté des associations de consommateurs.
Hier, je parlais de l'ACEF et, là, la Fédération nationale
des associations de consommateurs: La création d'une telle instance
et on fait référence au comité des plaintes
au sein de chaque corporation professionnelle, telle que proposée dans
l'avant-projet de loi, ne
constituerait pas une garantie pour les citoyens et citoyennes que le
système de traitement des plaintes des corporations professionnelles
serait crédible et impartial.
Finalement, on nous propose une structure qui est jugée, autant
par les corporations professionnelles, que par les associations de
consommateurs, que par le Protecteur du citoyen, comme une structure tout
à fait inutile qui ne vient aucunement répondre au
problème qui a été exprimé. Alors, je pense que de
continuer à dire que c'est la solution, il n'y a que le ministre qui dit
que c'est la solution, là. À date, tous ceux qu'on a entendus
nous ont dit, finalement, qu'on ajoutait une structure, mais qu'on ne venait
pas régler le problème. Je pense qu'il va falloir qu'il y ait des
réflexions qui se fassent là-dessus au cours des semaines qui
vont suivre.
Vous nous avez parlé du mécanisme de conciliation et, vu
que vous n'avez pas eu le temps dans votre présentation de le faire,
j'aimerais vous entendre sur les possibilités de ce mécanisme de
conciliation qui pourrait probablement apporter, quant à lui, beaucoup
plus de satisfaction du côté du public.
M. Villeneuve: Oui, avec votre permission. Oui, madame. C'est un
point très pertinent. L'Ordre s'est prononcé favorablement au
niveau du mécanisme proposé, parce qu'il y voit une contribution
positive au problème qui est soulevé souvent, un peu ce qu'on
pourrait appeler de l'aliénation du public face au système, bien
souvent, ou de frustration qu'on rencontre aussi d'ailleurs lorsqu'on fait
affaire avec l'appareil judiciaire. Il y a évidemment un peu de
méconnaissance du système, mais il y a aussi du fondement sur ces
problèmes-là, donc, sur cette pensée du public. Donc, ce
mécanisme-là est favorablement accueilli par l'Ordre, parce que,
d'abord, l'arbitrage de comptes, l'expérience qui a été
vécue par l'Ordre des audioprothésistes, c'est que les comptes
sont quand même généralement des comptes de petits
montants, disons, de moins de 1000 $ bien souvent ou la plupart du temps.
Même dans les cas d'appareillages binauraux...ça peut
dépasser 1000 $.
Donc, il y a un intérêt économique qui est minime et
qui fait que le mécanisme de conciliation et d'arbitrage de comptes est
inapproprié. Donc, l'élargir dans un mécanisme de
conciliation ou d'arbitrage de différends pour, peut-être,
permettre, si vous voulez, d'avoir un mécanisme d'ordonnance qui est
plus souple comme l'arbitrage de griefs, par exemple, où les arbitres
ont des pouvoirs importants de solution. Donc, à ce moment-là,
l'imagination joue davantage que des pouvoirs juridiques encadrés et
ça va permettre à l'Ordre de pouvoir véhiculer, par
exemple, ces cas-là qui ne tombent pas dans le mécanisme
disciplinaire, parce qu'il n'y a pas une faute déontologique. Il y a
quelque chose là, mais il n'y a pas une faute déontologique. Il y
a une insatisfaction sur la qualité des services, mais on ne peut pas
déceler une incompétence qui justifie une enquête en
règle sur le professionnel.
M. le président l'a évoqué, souvent, c'est des
attentes du citoyen qui sont peut-être plus grandes que ce que la
prothèse peut lui fournir et souvent, même, le mécanisme de
conciliation va permettre de régler ces problèmes
d'incompréhension et, si nécessaire, par exemple, s'il y a des
chicanes sur le remboursement parce que, finalement, le malentendant ne peut
s'habituer à porter une prothèse, il l'a porté pendant
quelques mois, le professionnel ne veut pas la reprendre, il dit: Je vous ai
fourni tous les services, la prothèse est usagée, alors, moi,
j'ai accompli mon devoir et je vous ai donné des bons services, j'ai
tenté de vous aider à vous adapter à votre
prothèse, alors je ne veux pas... légalement et
sincèrement je n'ai pas à vous rembourser. Le client est
frustré, alors la seule solution dans ces cas-là, c'est de dire:
Allez à la Cour des petites créances ou allez à la Cour du
Québec si vous voulez avoir un remboursement.
Ce mécanisme-là va permettre de cheminer dans le
système de façon plus souple, plus économique, et
peut-être donner satisfaction par la conciliation et, si
nécessaire, l'arbitrage, régler ce genre de cas là qui est
très courant dans une profession qui fait affaire directement avec le
public, individuellement, malentendant par malentendant.
Donc, dans ce sens-là, on dit que c'est une mesure très
positive. Il faudrait peut-être définir le mot
«différend», pour ne pas que ce soit trop large, mais il y a
moyen de le définir, c'est une mésentente qui concerne des
services professionnels ou en relation avec l'exercice de la profession et la
relation juridique entre un professionnel et son client. Je pense que c'est
assez large pour pouvoir tout toucher... des choses qu'ils n'auront pas dans
l'inspection professionnelle ou dans la discipline et où le syndic est
pris avec et ne sait pas quoi faire avec, en disant: La seule réponse,
allez à la Cour des petites créances, nous, on ne peut rien
faire.
Mme Caron: Je suis personnellement convaincue qu'on
réglerait beaucoup au niveau de l'insatisfaction parce que, très
souvent, c'est beaucoup plus au niveau de la qualité des services, mais
ce ne sont pas des fautes qui relèvent du code de déontologie,
c'est uniquement au niveau de la qualité des services. Et je vais
prendre juste pour exemple, la semaine dernière, à mon bureau de
comté, il y a un citoyen qui arrive et il dit: Je suis furieux contre le
gouvernement, ils m'ont obligé à changer de lunettes! Et
là je lui dis: Le gouvernement vous a obligé à changer de
lunettes! Il dit: Bien oui! Je suis allé chez l'optométriste et
c'est payé par le gouvernement et ils m'ont dit que ma vue était
changée et ils m'ont obligé à changer de lunettes et je
vois moins bien. Alors, bon, finalement, son problème, même s'il
était allé à l'Office des professions, il y avait un
ajustement au niveau de ses lunettes, donc c'est beaucoup plus au niveau de la
qualité du service. Mais la perception, cette fois-là,
n'était pas contre les professionnels, elle était contre le
gouvernement qui l'avait obligé à changer de lunettes parce que
c'était lui qui payait, ce qui risque
peut-être de vous arriver à partir du 1er avril.
Alors, je vous remercie beaucoup pour votre contribution aux travaux. On
a apprécié beaucoup votre présence.
Le Président (M. Gobé): Merci, madame. M. le
ministre, il vous restait deux minutes. (11 heures)
M. Savoie: Plus rapidement, M. le Président,
peut-être pour souligner qu'il y a... Sur l'ensemble des
règlements qui sont à traiter avec l'Ordre des
audioprothésistes, on est en train de faire une analyse sans exception
sur les sept règlements. Le processus réglementaire,
évidemment, les corporations ont souvent raison de questionner le
processus, on soulève souvent des interrogations. C'est vrai que
l'échange est particulièrement long, mais il faut savoir qu'on
joue avec une réglementation qui touche le grand public et qu'en
conséquence, dans la structure actuelle, les étapes...
Évidemment, le plus qu'il y a de monde, le plus qu'il y a
d'échanges et de contestations, le plus qu'il y a d'opinions qui peuvent
intervenir, un jugement qu'on peut toujours plaider. Mais, de façon
générale et je pense que la majorité des
corporations vont être d'accord avec ça c'est que, les
choses fonctionnent relativement bien, compte tenu de la lourdeur du processus,
et la réforme qui est proposée vise à l'alléger
encore davantage, en éliminant toute une série d'intervenants,
avec le seul souci de s'assurer que, évidemment, il va y avoir un
«check and balance» au niveau des règlements qui ne se
rendront pas jusqu'à la décision du Conseil des ministres, ce
qu'on va faire.
On voudrait vous remercier pour avoir pris le temps de préparer
un mémoire, de vous être présentés ici devant nous.
On sait qu'on va avoir l'occasion de se revoir dans un contexte aussi charmant
que l'autofinancement. Et, évidemment, au fur et à mesure qu'on
va avancer avec le projet de loi qu'on espère pouvoir déposer au
mois de juin, si tout va bien, à moins d'obstacle majeur, on va compter
encore sur votre bonne volonté, votre bonne foi dans le
déroulement de cette réforme. Je vous remercie.
Le Président (M. Gobé): Merci. Cela met fin
à votre intervention. Vous pouvez donc maintenant vous retirer. Je vais
demander aux représentants de la Corporation professionnelle des
inhalothérapeutes du Québec de bien vouloir venir se
présenter. Je vais suspendre les travaux deux minutes pour ce faire.
(Suspension de la séance à 11 h 2)
(Reprise à 11 h 3)
Le Président (M. Gobé): Alors, mesdames et
messieurs, bonjour. La commission reprend ses travaux. Je demanderais au
représentant de votre Corporation de bien vouloir se présenter et
de présenter les gens qui l'accompagnent.
Corporation professionnelle des
inhalothérapeutes du Québec (CPIQ)
M. Vézina (Jocelyn): Merci, M. le Président. Mon
nom est Jocelyn Vézina. Je suis président de la Corporation
professionnelle des inhalothérapeutes du Québec. J'aimerais vous
présenter les gens qui m'accompagnent aujourd'hui. D'abord, à mon
extrême gauche, le syndic de la Corporation, M. Jean-Claude Beau-dry, une
membre du comité de discipline de la Corporation, Mme Line Fortin, qui
est aussi une inhalothéra-peute pratiquante au centre hospitalier
Pierre-Boucher. Pour amener un petit peu de fraîcheur à la
commission, M. le ministre, nous avons décidé d'inviter avec
nous, Mme Michèle Rocheleau qui est une administratrice nommée
par l'Office des professions pour nous accompagner, et, enfin, Me André
Thauvette qui est le procureur de la Corporation.
Le Président (M. Gobé): Messieurs et mesdames, vous
pouvez commencer votre intervention. Vous avez 20 minutes pour ce faire. Par la
suite, 20 minutes de chaque côté de cette commission. Vous avez la
parole.
M. Vézina: M. le Président, pour avoir
été présent pendant les sept jours de la commission, je
n'ai pas l'intention de reprendre à peu près toute
l'argumentation qui a été donnée par les autres
corporations professionnelles parce qu'on a quand même entendu beaucoup
de choses. Ce qui me fait particulièrement plaisir, c'est d'avoir
entendu que le ministre s'apprêtait à faire des modifications
assez intéressantes. Je vais aller choisir quelques points particuliers
dans notre mémoire sur lesquels j'aimerais vous entretenir. d'abord,
nous sommes dans une situation particulière puisque nous sommes au code
des professions depuis 1984. nous n'avons pas été inclus dans la
réforme de 1973. nous sommes une corporation à titre
réservé qui regroupe actuellement 2200 membres dont 76 % sont des
femmes. la majorité de nos membres travaillent en milieu institutionnel
pour la plus grande majorité et, ce qui est particulier
également, c'est qu'on travaille dans des secteurs d'activités
qui sont très variés; en inhalothérapie, en
anesthésie également, en fonction respiratoire, soins intensifs,
en pédiatrie, néo-natalogie et nous avons plusieurs de nos
membres qui travailent également en services de soins à
domicile.
La Corporation aura, en 1992-1993, des revenus de 520 000 $. Comme
toutes les autres corporations du Code nous avons, évidemment, nos
mécanismes de protection du public. J'aimerais vous donner quelques
détails concernant particulièrement notre comité
d'inspection professionnelle qui visite annuellement entre 230 et 300
personnes. Le comité est assisté par neuf enquêteurs qui
représentent différentes spécialités du milieu
d'activité.
Nous avons mis sur pied, également, le comité des normes
de pratique concernant la pratique et la mise à jour, notamment en
ventilation artificielle, et nous avons dernièrement
présenté et adopté des normes de pratique concernant la
préparation des médicaments. Ces normes ont été
préparées en collaboration avec l'Ordre des pharmaciens du
Québec et l'Association des pharmaciens des établissements de
santé.
Je dois vous dire que, comme les autres corporations, après une
visite d'inspection professionnelle, nous sommes très, très
attentifs au suivi des recommandations et, lorsqu'il s'agit de recommandations
majeures, souvent, il y a des visites supplémentaires.
Je passerai tantôt, si vous le désirez, M. le ministre
parce que je sais que les chiffres des syndics vous tiennent à
coeur je laisserai peut-être tantôt la parole à mon
syndic, si vous avez de l'information supplémentaire qui vous
intéresse concernant les plaintes qui sont déposées chez
nous.
Je dois dire au départ que nous appuyons le mémoire du
Conseil interprofessionnel, mais nous conservons à l'esprit, là,
suite à notre expérience de cette semaine, toute
l'évolution idéologique qui a été manifestée
par les membres de la commission au cours de cette audience.
Nous désirons vous entretenir plus particulièrement de
cinq points importants qu'on retrouve à l'intérieur de notre
mémoire, soit: la formation de nos membres, notre statut de corporation
à titre réservé on en a parlé hier, je
voudrais vous en reparler aujourd'hui la discipline, la
réglementation et l'équilibre des pouvoirs.
Au sujet de la formation de nos membres, M. le Président, il
existe une formation en inhalothérapie, au Québec, depuis 1964,
et cette formation est actuellement dispensée dans cinq cégeps au
Québec, et on peut dire que ces cégeps sont fort
éloignés géographiquement et pédagogiquement. C'est
pourquoi nous désirons insister particulièrement au niveau de
notre formation, puisque, pour la protection du public, nous considérons
que c'est tout à fait fondamental d'avoir un système
d'éducation qui nous permette d'évoluer au plan technologique.
Nous devons avouer, M. le Président, que nous sommes un peu surpris que
notre... on est surpris des difficultés qui ont été
associées à notre réglementation dans le domaine de la
formation, compte tenu de notre obligation à des standards
élevés dans les services, tels qu'ils sont dispensés par
nos membres à la population du Québec. Nous devons donc vous dire
que nous sommes en désaccord avec l'article 5 de l'avant-projet, qui
vise à confier à l'Office des professions des pouvoirs accrus en
ce domaine.
Nous croyons que c'est à notre Corporation d'agir comme
maître d'oeuvre en la matière. La voie réglementaire, en
cette délicate harmonie de la liaison entre formation de base et
formation professionnelle et où le gouvernement et la Corporation
doivent être étroitement associés, s'étant
avérée généralement stérile, nous croyons
que d'autres voies doivent absolument être cherchées. Je fais
référence, M. le Président parce que je vois qu'il
semble y avoir des questions en avant référence
particulièrement aux articles du Code qui prévoient la
collaboration entre les maisons d'enseignement et la corporation
professionnelle. Quant à nous, c'est un mécanisme qui ne
fonctionne pas, qui n'a jamais fonctionné, et, dans un contexte
où, actuellement, notre programme est en voie de révision... (11
h 10)
Concernant le titre réservé, on en a discuté
longuement hier, M. le Président, tout au long de la journée, et
la présidente de la Corporation professionnelle des
physiothérapeutes, à la fin de son exposé, vous a
demandé si vous étiez prêt à prendre un engagement.
Vous n'avez pas répondu, malheureusement; je vais vous reposer la
même question tantôt. Mais j'aimerais simplement vous citer, comme
on le fait dans le mémoire, et je crois que c'est effectivement
très important... Il y a eu une évaluation qui a
été faite par l'Office des professions sur le
phénomène de la délégation des actes et
ça touche particulièrement notre Corporation, parce qu'on est
à titre réservé et qu'il y a des actes médicaux qui
nous sont délégués et le rapport de l'Office, son
évaluation faisait partie de. son rapport annuel de 1986-1987. Et on dit
là-dedans que l'Office a transmis à la commission Rochon un
document de travail sur le mécanisme de la délégation des
actes, établissant la problématique rencontrée lors de
l'application du mécanisme.
Dans ce document, l'Office suggère comme solution de rechange la
révision de la nécessité du maintien de l'actuelle
exclusivité de champs d'exercice aussi exhaustifs que ceux qui ont
été accordés aux professions de la santé,
privilégiant plutôt la reconnaissance d'actes précis ou de
catégories d'actes qui requièrent une expertise
particulière pour être posés avec un minimum de risques
pour le public. En attendant l'application de cette première mesure
jugée fondamentale, l'Office a aussi suggéré, à
titre provisoire, soit la redéfinition des champs évocateurs des
professions de la santé afin d'en habiliter les membres à poser
les actes pour lesquels on leur reconnaît une compétence, soit
l'introduction, dans les lois médicales et dentaires, d'un article
prévoyant la sauvegarde des droits d'exercice pour des intervenants qui
pourraient par ailleurs bénéficier, dans le contexte actuel,
d'une autorisation réglementaire de poser des actes exclusivement
réservés aux médecins et aux dentistes.
Je reprends une petite partie de mon mémoire, M. le
Président, j'espère que vous allez me le permettre, pour vous
dire que nous avons inclus également, à la page 4, qu'avec le
temps, bien qu'ayant constitué une certaine protection pour notre
profession et il faut dire qu'on est coincés entre deux
géants exclusifs que sont les professions médicales et de nursing
le mécanisme de délégation des actes est devenu,
à notre avis,
un frein, non seulement à notre développement, mais encore
à la stabilité, à la continuité des secteurs
fondamentaux de nos activités professionnelles. Alors, nous croyons,
étant donné qu'on parle de réforme, que la commission
devrait se pencher sur ces mécanismes-là, surtout sachant que la
semaine prochaine, et on en a parlé hier, la commission sur les
thérapies alternatives, ce serait peut-être le bon temps de faire
un petit peu de ménage là-dedans.
Concernant la discipline, évidemment, nous sommes en
désaccord avec l'encadrement bureaucratique des fonctions du syndic.
Ça, nous tenons à préserver au syndic... Nous ne
désirons pas que le syndic soit encadré au plan bureaucratique.
Il faut considérer là-dedans que le syndic est souvent saisi
d'affaires qui sont excessivement complexes qui mettent en jeu divers aspects
de l'exercice de la profession et il pourra vous en parler tantôt. Nous
croyons que, en ce qui nous concerne, à notre Corporation, les auditions
de même que le caractère public de l'audition assurent au
système disciplinaire de notre Corporation, je le spécifie, toute
la transparence voulue.
Au sujet de la révision d'une décision du syndic rejetant
une plainte, si une telle mesure s'avérait essentielle au gouvernement,
cette révision pourrait être confiée à une division
du comité de discipline tel que le prévoit actuellement la loi de
la police. Le Protecteur du citoyen en a parlé, je pense, mercredi. Nous
croyons, à ce niveau-là, qu'on pourrait, à
l'intérieur du comité de discipline, étendre les pouvoirs
du comité de discipline pour lui permettre, avec des
représentants du public, d'entendre les plaignants, ce qui, à
notre avis, éviterait des délais déraisonnables. Tel que
vous en avez parlé, donner un recours avec un comité d'examen des
plaintes, nous croyons que ça va entraîner des délais tout
à fait déraisonnables et je ne crois pas que ça serve bien
la population comme Mme la députée le disait tantôt. Alors,
nous en avons discuté et c'est suite, peut-être, à
l'évolution des travaux de la commission que nous avons discuté
également, hier soir, de la possibilité, pour un comité de
discipline, d'étendre son membership à des représentants
du public et nous n'y voyons aucune espèce d'objection, M. le
ministre.
Nous avons aussi pris en considération le fait qu'on ait
suggéré un formulaire de plainte. Nous sommes en accord avec le
principe, en considérant également que le plaignant, comme
d'autres corporations vous l'ont souligné, devrait être
aidé, s'il devait écrire sa plainte, par un représentant
de l'Office des professions et non pas par une secrétaire de
comité ou par un secrétaire de comité de discipline.
Nous avons... Le Barreau l'a souligné, je crois, concernant le
formulaire de plainte, une seule chose qui nous tracasse un petit peu, c'est
que, actuellement, concernant les plaintes qui sont écrites et
déposées, la jurisprudence est assez large dans la façon
dont la plainte est rédigée. Alors, on se pose aussi la question
à savoir si, en remplissant un formulaire, il y avait des erreurs, des
vices de formulaires, est-ce que les tribunaux ne seraient pas plus stricts,
à ce moment-là, comme l'a soulevé le Barreau? Ce serait
dommage que des plaintes puissent être rejetées parce que,
à ce moment-là, le formulaire aurait été mal
rempli. Alors, peut-être que la commission devrait se pencher
là-dessus. L'Office a suffisamment de juristes pour vérifier s'il
ne peut pas y avoir un problème au niveau du formulaire, là, qui
serait, dans certains cas, mal rempli.
Concernant la discipline, M. le Président, je veux tout
simplement ajouter, à la toute fin, que, nous, on ne veut pas que la
discipline soit... Elle est actuellement très, très publique et
on ne veut pas perdre de vue que la discipline professionnelle juge, sur le
plan des obligations déontologiques, du seul professionnel visé
par la plainte... un rapport essentiellement privé, soumis au secret
professionnel et où l'État n'est pas invité. Il nous
apparaît important de conserver le secret professionnel dans
l'établissement des plaintes tant et aussi longtemps que l'individu en
question n'est pas amené vis-à-vis la discipline.
Concernant la réglementation, les propositions de l'avant-projet
concernant le processus d'adoption des règlements ne nous apparaissent
pas, comme à d'autres, répondre adéquatement aux irritants
actuels qui, à cause d'une mécanique qui s'est emballée,
n'ont de cesse d'alimenter des tensions inutiles. À notre avis, le
processus d'adoption des règlements, M. le Président, se doit
d'être révisé et nous croyons que certains
règlements, plusieurs des règlements qui sont adoptés
devraient entrer en vigueur sur adoption par le bureau. Nous croyons que tout
contrôle bureaucratique du processus devrait être limité
à une vérification de la conformité du texte
réglementaire au texte de la loi ou au texte de la loi habilitante et,
en cas de non-conformité, un avis motivé pourrait être
transmis à notre organisme dans un délai raisonnable, et
j'appuie, M. le ministre, sur le délai raisonnable.
Concernant l'équilibre des pouvoirs ce sera mon dernier
point, M. le Président, avant de conclure nous considérons
avoir toujours compris les principes de la réforme de 1974 comme
étant le maintien du rôle du gouvernement dans certains secteurs
et la création du financement d'un organisme de surveillance à
caractère «technocrafique» excusez-moi; je savais que
j'en manquerais un technocratique. Quant aux corporations existantes et
à celles qui allaient être formées, suite à cette
réforme, on les autorisait à continuer à se gouverner par
leurs propres lois. L'architecture de toute nouvelle répartition des
pouvoirs devrait, selon nous, continuer de refléter ces principes. (11 h
20)
M. le Président, en conclusion, nous estimons, en effet, comme
professionnels de la santé, que les frustrations du public, dans notre
domaine, se situent ailleurs qu'à rencontre du professionnalisme de nos
membres. Le coût du procès et l'accès du public à la
justice civile, en cas d'erreur médicale présumée ou
réelle, de même
que l'insatisfaction générale du même public face
à tout le processus judiciaire dans ce domaine particulier nous
apparaissent toujours défrayer la manchette, sans que des solutions
concrètes soient pour autant mises de l'avant par le
législateur.
En somme, nous ne croyons pas que le fait d'introduire une forme de
compensation pour le plaignant privé, en matière disciplinaire,
ou un contrôle illimité des corporations par l'État
s'adresse adéquatement à cette troublante question de
l'indemnisation et du support des victimes d'accidents ou d'erreurs survenus
à l'occasion d'une intervention médicale.
M. le Président, je vous remercie de m'avoir donné la
parole.
Le Président (M. Gobé): Je vous remercie beaucoup.
M. le ministre, vous avez la parole.
M. Savoie: Merci, M. le Président. D'abord saluer les
membres de la Corporation professionnelle des inhalothérapeutes et les
remercier d'avoir pris le temps de préparer un mémoire et
d'échanger. Je voudrais féliciter M. Vézina
également, le remercier pour avoir participé à l'ensemble
des travaux de la commission. Je pense qu'il a été un des rares,
avec le président, je pense, du Tribunal des professions, de même
que les officiers du CIQ, président et directeur général,
à avoir suivi, tout au long de nos travaux, les
délibérations de la commission, ce qui a permis, finalement, de
présenter un mémoire un petit peu plus à point que
plusieurs autres, parce qu'il savait ce qui se passait ici. Il avait suivi
ça. Un petit peu plus optimiste.
M. Vézina: Up to date.
M. Savoie: Up to date. Optimiste aussi, on va dire. Et souligner
également que Mme Rocheleau, je pense que c'est la seule fois qu'on a un
membre...
M. Vézina: On dit une corporation particulière, M.
le ministre.
M. Savoie: Oui. Est-ce que c'était ça, la surprise?
M. Vézina: C'était ça.
M. Savoie: C'était ça, la surprise. C'est ça
que j'ai pensé. Alors, c'est agréable quand même,
effectivement, c'est intéressant. Ça fait changement avec les
conseillers juridiques qu'on a eus régulièrement depuis le
début! Rien de personnel, là.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Savoie: C'était tout simplement pour le souligner. Vous
constaterez qu'on est à la fin d'un processus qui a été
particulièrement long et difficile, quoiqu'il nous en reste encore toute
une journée, le 16, je pense.
Bon, bien, effectivement, c'était intéressant cette
fois-ci parce qu'on s'est échangé un petit peu... Je pense que
vous connaissez bien l'orientation. Le nombre des membres, comme il l'a
mentionné, à peu près 2000, moins de 2000, 1900; on en a
1725 en 1991-1992; cotisations régulières, 230 $; un budget
d'à peu près 500 000 $ et, ce qui est intéressant aussi,
compte tenu qu'on a le syndic avec nous autres, c'est qu'il y a une demande
retenue pour enquête, en 1990-1991, on a 8 demandes en 1991-1992. Pour
les plaintes portées devant le comité de discipline, on n'en
avait pas en 1990-1991 et on en avait 2 en 1991-1992. Remarque que les chiffres
en tant que tels n'ont pas vraiment de signification, je tiens à le
souligner, ce n'est pas... C'est tout simplement pour nous donner le tableau
et, ensuite, en questionnant, on est capables de mieux saisir le tableau et
ça va certainement soulever des orientations quand on va arriver avec le
projet de loi, ça s'enchâsse dans le discours.
Alors, pour les inhalothérapeutes, on a un dossier, pour
1991-1992, on a une décision de la part du comité de discipline,
depuis 1984, c'est une corporation récente. La question qui nous vient
à l'esprit, la première question qui nous vient à
l'esprit, on a eu droit, hier vous avez participé à
ça on a joué avec des analyses assez
détaillées sur ce qui se passe, par exemple, au niveau des gens
qui sont impliqués en thérapie, que ce soit psychologues,
médecins, psychiatres, travailleurs sociaux, infirmiers,
infirmières, sur le haut, haut niveau de harcèlement sexuel qui
existe dans différentes corporations. Les inhalothérapeutes, vous
êtes présents au niveau des centres hospitaliers, je me demandais
si vous aviez fait une réflexion là-dessus. Est-ce qu'il y a eu
un comité d'étude? Est-ce que vous avez examiné ça
ou si, comme pour la majorité des corporations, c'est encore un domaine
relativement nouveau que vous êtes en train d'examiner?
M. Beaudry (Jean-Claude): Oui, évidemment, vous
m'excuserez si je commets des impairs. C'est ma première
expérience.
M. Savoie: Bien oui.
M. Beaudry: Je suis en poste depuis 14 mois, je tiens à le
mentionner aussi, ce qui pourrait peut-être vous aider à
comprendre mon inhabileté à certains moments.
M. Savoie: D'accord.
M. Beaudry: Effectivement, on a eu neuf plaintes.
Évidemment, je n'ai pas, comme mon confrère, passé la
semaine au parlement. Alors, je n'ai pu approfondir la question et je ne
m'attendais pas non plus à avoir la question, mais je me suis quand
même attendu à ça dans la cause précédente
quand je vous ai entendu poser la question, et j'ai fait un plan. Je peux vous
dire que, d'après les sujets, les neuf plaintes qu'on a eues,
on n'en a eu aucune à caractère sexuel.
M. Savoie: C'est ça, oui. C'est justement ça. Si
vous n'en aviez pas à caractère sexuel... mais on sait que le
harcèlement sexuel est très élevé dans le domaine
de la santé. Est-ce que ça ne donne pas lieu à
réfléchir un peu? Est-ce que les gens déposent des
plaintes ou n'en déposent pas, ou est-ce qu'on ignore une
activité, finalement, où la protection du public est mise en jeu?
Finalement, est-ce qu'il y a quelque chose qui ne marche pas dans votre
système?
M. Beaudry: Vous me posez une question sur quoi, là?
M. Savoie: Pardon?
M. Beaudry: Sur quoi vous me posez une question?
M. Savoie: Bien, je pose la question, par exemple, au niveau
des...
M. Beaudry: Est-ce que vous me demandez si j'ai reçu des
plaintes à caractère sexuel que j'ai ignorées?
M. Savoie: Non, non, ce n'est pas ça du tout. Je ne
présume pas de la mauvaise foi. Je voudrais que ce soit bien clair,
là. Tout ce que je cherche à voir c'est...
M. Beaudry: Si on a réfléchi à la question.
M. Savoie: Oui, c'est ça. M. Beaudry: D'accord.
M. Savoie: Est-ce que vous avez pensé que,
peut-être, il y a des membres... On pense, par exemple, aux infirmiers et
infirmières.
M. Beaudry: Je peux vous affirmer qu'on a amené la
réflexion à ce sujet-là avec l'apparition des
médecines douces.
M. Savoie: Oui.
M. Beaudry: Parce que... Justement, je suis en train de
préparer un document avec le comité d'inspection professionnelle
là-dessus parce qu'il y a certains de nos membres qui sont sensibles aux
médecines douces et ça passe de la réflexologie aux
massages. Justement, j'ai soulevé la question, je l'ai soumise à
notre procureur puis je lui ai dit que, si, éventuellement, on stipulait
là-dessus, il faudrait s'attendre, peut-être, à avoir des
plaintes de cet ordre-là. On est en train de se prononcer. On se penche
sur la question présentement. Mais, étant donné que, dans
notre cas, ça n'a jamais fait l'objet de plaintes
précédemment, c'est certain qu'on n'a pas été
amenés à réfléchir à ça avant.
Maintenant, étant donné que ce phénomène-là
existe, c'est certain qu'on achemine une réflexion. On ne sait pas
encore ce que vont être nos conclusions, mais très certainement
qu'on est très sensibles à ça. Comme mon confrère
vous l'a dit tantôt, il y a 76 % de nos membres qui sont des femmes,
alors, on est très sensibles, d'ailleurs, à cette
question-là, d'autant plus que la majeure partie de nos membres sont des
femmes.
M. Vézina: II y a peut-être moins de
harcèlement sexuel lorsque les corporations...
M. Savoie: À cause qu'il y a des femmes, c'est
peut-être un petit peu moins, mais il reste quand même 24...
M. Vézina: Par contre, il y a d'autres professionnels
aussi dans les établissements avec qui on travaille. Ça peut
arriver.
M. Savoie: M. Vézina, est-ce que ça fait longtemps
que vous travaillez dans les centres hospitaliers?
M. Vézina: Ah oui.
M. Beaudry: Pour ma part, personnellement? Est-ce que c'est
à moi que vous posez...
M. Savoie: Bien, je le demandais à Me Vézina. Vous,
est-ce que vous avez travaillé dans un centre hospitalier?
M. Beaudry: Oui, oui, ça fait 20 ans que je travaille dans
un centre hospitalier.
M. Savoie: 20 ans. M. Vézina, ça fait
combien de temps?
M. Vézina: Moi, j'ai été
particulièrement... Je ne suis plus en clinique depuis 5 ans, mais j'ai
été 17 ans, entre autres, où j'ai travaillé dans
à peu près tous les secteurs, particulièrement en
anesthésie.
M. Savoie: Ah oui! Le chiffre de 10 % qui a été
avancé, qu'est-ce que ça vous dit, ça?
M. Vézina: Moi, j'ai lu l'article. J'ai lu les journaux ce
matin, M. le ministre. Je ne peux pas m'imagi-ner ça, en tout cas.
Ça m'apparaît drôlement exagéré. Il y a
peut-être des groupes où il y en a beaucoup, mais on ne peut pas
dire, généralement... Pour moi, c'est...
M. Savoie: C'est énorme, hein?
M. Vézina: ...soufflé. Ça n'a pas de bon
sens. On a l'impression d'en voir partout. Moi, j'ai été dans le
milieu, je suis encore dans un milieu clinique, dans
un gros hôpital de Montréal, et je peux vous dire, M. le
ministre, qu'on ne voit pas ça quotidiennement. Alors, je suis à
la fois surpris des chiffres qui ont été annoncés...
M. Savoie: C'est vrai que c'est... (11 h 30)
M. Vézina: ...surtout qu'on est en minorité des
hommes dans le secteur hospitalier. Il y a beaucoup moins d'hommes que de
femmes. On devrait, il me semble, le voir davantage, mais je trouve que c'est
énorme.
M. Savoie: c'est énorme, hein? c'est ça, ils disent
que c'est 12 %, par exemple, dans d'autres... dans certains autres milieux, ils
donnent 12 % pour le clergé, par exemple. c'est énorme!
M. Vézina: Remarquez que... Je dois cependant vous dire
que peut-être que c'est plus connu aujourd'hui que ça
l'était à l'époque, et les gens sont peut-être un
petit peu plus sensibilisés à ça, mais, quand même,
j'ai déjà entendu parler que, bon, M. Untel, Mme Unetel-le...
ça, ça existe; mais c'est devenu maintenant beaucoup plus
important, c'est un sujet qui est très, très, très
important, qui doit être pris très au sérieux et c'est
peut-être pour ça qu'on est plus sensibilisés, maintenant,
à ce phénomène-là; mais ça m'apparaît
drôlement important. Je ne peux pas... Peut-être certaines
professions, particulièrement... Mais quand j'entendais, hier je
ne sais pas si c'était le Conseil du statut de la femme qu'il y
avait plusieurs avocats qui se faisaient payer en nature lorsqu'ils
divorçaient, même ça, j'ai de la misère à...
j'ai de la difficulté à croire ça.
M. Savoie: C'est ça, hein? Bien, c'est ça, c'est
des... c'est-à-dire qu'on sait que ça se fait, parce qu'on en
entend parler. Mais on n'a jamais vu de chiffres, et les chiffres qui ont
été présentés à la commission, on me dit, on
me confirme, que là où il y a des études, dans certains
États, aux États-Unis, là où il y a des
études, on parle encore de 10 %. C'est beaucoup, c'est vraiment... et
c'est ça. Évidemment, là, on n'est pas dans des
vérités absolues, là, on est dans du plausible et du
probable, comme je le mentionnais hier, mais sauf que je me demandais si,
effectivement, dans un contexte de protection du public, quand on a 1500
membres qui travaillent dans un contexte hospitalier où, effectivement,
les données, là, sont particulièrement plus lourdes, si
vous avez... je veux dire, les femmes ne sont pas à l'abri non plus,
là, c'est parce que le pourcentage baisse de beaucoup, mais il y en a
quand même, là.
M. Vézina: Ah oui.
M. Savoie: Ça ne disparaît pas, là.
M. Vézina: Non, définitivement...
M. Savoie: Oui.
M. Vézina: ...comme le syndic vous le disait tantôt,
là, il y a une réflexion qui est faite, avec une inspection
concernant des cas particuliers auxquels il faisait référence
tantôt, et on va sûrement se pencher sur ce
phénomène-là, c'est...
M. Savoie: Oui, c'est ça.
M. Vézina: Je vous dis, honnêtement, que c'est
surprenant. Alors, ça m'apparaît important, là, qu'on s'y
arrête de façon très sérieuse.
M. Savoie: c'est ça, c'est ça. c'est stressant, un
peu, je pense, comme reproche, surtout... alors, c'est ça. j'imagine que
c'est ce qui va se produire avec plusieurs corporations professionnelles aussi,
cette espèce de réflexion qui doit se faire, dans un contexte
où on modifie la structure disciplinaire, dans un contexte où ces
données-là ont circulé et selon... en tout cas, le
meilleur conseil que je puisse obtenir me dit qu'effectivement c'est autour de
10 %, 12 %, 13,9 % dans certains cas. tu sais, ça, ça fait
réfléchir, et puis j'imagine que ça va... vous nous
êtes arrivés aussi avec une autre petite surprise, pour faire
compétition à mme roche-leau, vous nous avez dit que... des
citoyens sur le comité de discipline... je pense que vous êtes le
seul à faire cette recommandation-là de façon aussi
précise.
M. Vézina: Nous suggérons je vais vous dire
comment on le voit: Actuellement, notre comité de discipline est
formé de trois personnes nous verrions une personne du public. Et
la raison, M. le ministre, c'est qu'il faut... au comité de discipline,
l'expertise professionnelle est fondamentale. Ça, on a des cas qui sont
assez complexes, actuellement, pour dire que... Mme Fortin pourrait
peut-être témoigner là-dessus, il y a eu des cas... et je
pense que l'expertise se doit de demeurer. Maintenant, il faut faire attention
pour ne pas créer une structure vous savez, M. le ministre
qui me fait penser un peu à la structure d'un règlement
d'arbitrage, dans les milieux syndicaux, où on a un assesseur syndical,
un assesseur patronal et on a un arbitre, un président qui est
normalement un avocat. Ça fait que c'est un contre un, et quand la
décision est rendue contre l'employé, bien, l'assesseur syndical
décide que, lui, il est dissident; quand c'est contre l'employeur,
l'assesseur patronal est dissident, et, en fin de compte, c'est toujours
l'avocat qui décide, qui rend la décision.
Une voix: C'est ça.
M. Vézina: Dans le cas de la discipline, on pense... Nous,
on est ouverts à ce qu'il y ait une personne du public. On n'est pas, on
n'est pas... On n'a rien à cacher au niveau de la discipline. Je pense
qu'il n'y a
vraiment rien à cacher non plus à ce niveau-là
à la condition qu'on puisse garder, évidemment, le secret
professionnel.
M. Savoie: C'est intéressant aussi, les notes concernant
le formulaire et les clés du pouvoir. Étant donné qu'on a
un membre non professionnel dans un conseil d'administration d'une corporation
professionnelle, je me demandais comment vous voyiez votre rôle? Est-ce
que vous sentez que l'orientation qu'on donne d'amener plus de citoyens va
améliorer le système ou si vous pensez que ça va maintenir
à peu près le statu quo comme résultat?
Mme Rocheleau (Michèle): Pour améliorer le
système, je ne suis pas certaine de ça. Je ne me prononcerais pas
sur ça parce qu'actuellement moi, je trouve, où je suis, à
la Corporation, ça va très bien. Ça va très bien en
ce sens que je suis respectée. Je pose des questions, on me
répond. Il n'y a pas de cachette envers moi. À toutes les
questions que je pose, on me donne une réponse. Alors, je suis à
l'aise. Évidemment, à la Corporation, on est trois
administrateurs nommés, mais je ne le sais pas... Vous savez, il
faudrait que je m'y penche davantage parce que ce n'est pas en mettant beaucoup
plus de gens que ça règle les problèmes
généralement. Je pense que c'est peut-être mieux d'en
mettre moins et de mettre des gens de qualité.
M. Savoie: Oui.
Mme Rocheleau: Parce qu'à mon sens, vous savez, le public
est bien protégé, mais il est très mal informé
vis-à-vis des corporations. On ne sait jamais à qui s'adresser
quand on en a besoin. Je ne pense pas que ce soit le fait d'incorporer encore
plus de gens qui va changer quelque chose.
M. Savoie: Non, c'est ça. Est-ce que vous pensez, par
exemple, que de remplacer certains professionnels par des citoyens non
professionnels ça va améliorer les choses?
Mme Rocheleau: Je ne suis pas en mesure de vous
répondre.
M. Savoie: Vous n'êtes pas en mesure. Mme Rocheleau:
Non, je regrette.
M. Savoie: Votre expérience à date? Ça fait
combien de temps que vous y êtes?
Mme Rocheleau: J'ai assisté à trois bureaux. Je
suis là depuis juin l'an passé.
M. Savoie: Ah bon!
Mme Rocheleau: Oui, c'est tout récent... M. Savoie:
C'est tout récent.
Mme Rocheleau: ...mais je peux vous dire que je suis
emballée.
M. Savoie: Oui?
Mme Rocheleau: Ah oui! C'est très, très
enrichissant. Je vous réponds égoïstement. Pour moi, c'est
très enrichissant.
M. Savoie: Bon!
Mme Rocheleau: Oui, oui.
M. Savoie: Et vous posez des questions en masse?
Mme Rocheleau: Ah oui! À part de ça, on s'entend
bien. Il y a une bonne communication.
M. Savoie: Vous ne vous laissez pas trop endormir par la
Corporation, là?
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Rocheleau: Non, j'essaie de me réveiller.
Évidemment, je ne peux pas être à l'affût de tout
parce qu'en se rencontrant trois fois par année c'est difficile de tout
suivre.
M. Savoie: C'est ça.
Mme Rocheleau: Non, non, il n'y a pas de cachette. On est
à l'aise et ça va bien.
M. Savoie: Oui, ça va bien.
Mme Rocheleau: C'est une belle expérience. Je suis bien
contente de vivre ça.
M. Savoie: Je vais revenir un petit peu plus tard, M. le
Président.
Le Président (M. Gobé): Mme la
députée de Terrebonne. (11 h 40)
Mme Caron: Merci, M. le Président. M. Vézina, Mme
Fortin, M. Beaudry, M. Thauvette, Mme Rocheleau, je vous remercie de votre
présentation. Je vais commencer un petit peu avec une des phrases du
ministre qui nous dit: Les chiffres n'ont pas de signification. Ensuite, on a
passé 10 bonnes minutes à parler des chiffres, à parler
des pourcentages au niveau des problèmes d'abus sexuels, parce que,
là aussi, je pense, il faut faire la différence. On semble
confondre agression sexuelle, harcèlement et abus sexuels, parce que
ce
qu'on est venu nous présenter, hier, le mémoire du Conseil
du statut de la femme fait bien les distinctions. Parce que quand on se parle
d'agression sexuelle, à ce moment-là, c'est la cour criminelle.
quand on se parle de harcèlement sexuel, c'est un petit peu les chiffres
qu'on avait au niveau des universités, c'était assez
catastrophique, on se parlait de 80 %. ce n'était pas 10 % à
l'université, c'était 80 %. lorsqu'on parle d'abus sexuel, ce
sont des relations sexuelles, finalement, entre thérapeutes et clientes
surtout, mais ça pourrait être entre thérapeutes et
clients.
Là, ce n'est pas la même chose, et le Conseil du statut de
la femme le définissait bien, à l'effet qu'il se crée une
relation d'aide entre deux personnes et cette promiscuité peut faire
qu'effectivement il y ait des sentiments qui se développent. Alors,
là, on se parle carrément de problèmes très,
très humains. il faut faire les distinctions, et, dans le mémoire
du conseil du statut de la femme, c'est évident que... au niveau de nos
chiffres on se parle de 10 % dans les interdits, dans les interdictions; si on
mettait les interdictions de parole, bien, là, le chiffre serait
sûrement même plus que 10 %, là. et si les chiffres du
conseil du statut de la femme nous disent 5 % à 12 %, bien, entre 5 % et
12 % il y a une très grande marge, là. les chiffres des
états-unis, c'est bien, oui. les chiffres de l'ontario, oui. mais il y a
toujours des distinctions et, au québec, on n'a pas de recherches
précises là-dessus. ça serait une chose à faire, je
pense qu'il va falloir le faire.
Si on parle de la violence dans les métropoles, violence en
général, la violence à New York et la violence à
Montréal, ce n'est pas du tout les mêmes chiffres. Je veux bien
croire que nos voisins américains vivent souvent les mêmes
réalités mais c'est différent. Et je pense que, comme vous
le mentionniez tantôt, M. Vézina, il y a sûrement des
professions où il y en a plus que ces 10 % là, et il y a
même aussi des professions où il n'y en a presque pas. Ça
dépend beaucoup du type de services qu'on rend. C'est évident que
si on décide d'agir au niveau du Code des professions, tel que le
proposait le Conseil du statut de la femme, au niveau général,
certaines professions au niveau du règlement particulier, je pense qu'on
viendrait baliser. Mais il va falloir faire des études aussi, faire des
recherches et essayer de mettre des groupes de travail lorsque ce sont des
professions qui sont davantage à risques, comme disait les CALACS
hier.
Votre présentation, M. Vézina, est intéressante
parce que, effectivement, votre expérience des jours
précédents vous a permis de nous donner certaines informations
très spontanément, au niveau de l'inspection professionnelle, des
types de questions qu'on posait régulièrement. J'ai bien
aimé aussi vos réponses, Mme Rocheleau, à savoir si,
effectivement, d'ajouter des gens au niveau du public, ça venait changer
la perception. Moi non plus, je n'ai pas l'impression, dans le sens
qu'effectivement, comme vous le disiez, c'est une expé- rience
enrichissante, extraordinaire pour les personnes qui la vivent. Est-ce que
ça fait qu'au niveau de la population en général on pense
que c'est plus ouvert, que c'est plus accessible? Ce n'est pas évident
que ça se rend jusque-là.
Vous proposez l'ajout de personnes du public au comité de
discipline. Je trouve ça intéressant. Vous n'êtes pas les
premiers à le proposer. Le Protecteur du citoyen le proposait aussi,
certaines corporations l'ont proposé. Moi, je l'ai demandé
à plusieurs corporations si elles étaient prêtes à
le faire et je pense que la plupart nous ont dit que, oui, elles étaient
prêtes à le faire. Et c'est évident qu'au niveau du nombre
il y aura à prendre une décision là-dessus parce qu'il
faut aussi, lorsque c'est un comité de discipline, pouvoir juger au
niveau de la compétence de l'acte. Bon, il y a la partie
crédibilité à juger parfois et, ça, je pense que
tout le monde peut le faire. Mais au niveau de la compétence de l'acte,
des fois, ça peut être un petit peu plus difficile. Moi, je me
mettais à la place de... Moi, comme citoyenne, si j'avais à
siéger sur un comité de discipline, par exemple, par rapport
à un psychiatre dont le client dirait qu'il a eu trop de
médicaments, je suis loin d'être convaincue que je serais capable
de décider. Ce n'est pas évident. Là-dessus, il va falloir
qu'on balise au niveau du nombre, je ne pense pas qu'on puisse se rendre
jusqu'à accepter une majorité du public, ce que demandaient les
ACEF parce que là je pense qu'au niveau de la compétence
ça va être beaucoup trop difficile.
Vous avez apporté un élément sur la formation des
inhalothérapeutes qui n'est pas uniforme dans les cinq collèges
d'enseignement. Vous nous dites bien que c'est fort éloigné,
à la fois géographiquement et pédago-giquement, et que
ça semble soulever de sérieuses difficultés au niveau de
la réglementation, puis la voie actuelle des comités là,
ça ne semble pas donner de résultats. Moi, j'aimerais vous
entendre un peu plus sur ce problème bien, bien concret, parce que
ça m'apparaît essentiel. Quand on parle de protection du public,
c'est, d'abord, d'avoir des personnes compétentes. Donc, la formation
est essentielle.
M. Vézina: Alors, d'abord, M. le Président, en
réponse à Mme la députée, c'est que nous avons, les
inhalothérapeutes, une formation collégiale qui se donne, comme
je le disais, dans cinq cégeps, et nous avons une entente de
réciprocité avec l'Association canadienne, c'est-à-dire le
reste des provinces canadiennes. Il faut dire, au départ, que le
Québec, c'est la province où il y a le plus d'inhalos dans tout
le Canada, plus qu'en Ontario. Alors, il y a des révisions de
programmes. Au niveau collégial, ça n'arrive pas à tous
les deux ans et à tous les trois ans. Les changements technologiques
sont très rapides en ce qui concerne l'inhalo et on s'aperçoit
que, souvent, nos étudiants qui arrivent en stage, il y a parfois des
notions qui ne sont pas tout à fait à date. Dans le reste du
Canada, les écoles sont... Majoritairement, ce sont des instituts ou des
écoles privées ou,
entre autres, en Colombie-Britannique, je pense,
particulièrement, à Kamloops où ça relève de
l'Université de Colombie-Britannique, il y a possibilité pour eux
de faire les améliorations aux programmes assez rapidement. Alors,
ça permet aux jeunes d'être continuellement à date. Au
Québec, de par la structure collégiale et les révisions de
programmes, ça ne se fait pas, de telle sorte que certains
établissements, certains cégeps... J'ai eu une lettre, justement,
la semaine passée, qui m'a confirmé ça je vous
disais tantôt que le programme est actuellement en voie de
révision au niveau collégial et il y a un cégep qui
a écrit, et j'ai eu copie de la lettre, pour dire que, la
révision, il y aurait un nouveau programme l'année prochaine,
mais que, eux autres, ils l'appliquaient déjà. Alors, ça
vous démontre jusqu'à quel point, je pense, les enseignants
puis en tant que corpo professionnelle, on n'a aucune espèce
d'autorité, même pas à être entendus. Je pense que
c'est dans ce sens-là que c'est un manque flagrant.
On dit que le mécanisme prévu au Code quant à la
collaboration entre les établissements puis les corporations, en ce qui
nous concerne, ça ne fonctionne pas. Et j'ai l'impression, Mme la
députée, que le mécanisme, c'est beaucoup plus facile pour
les corporations qui ont une formation universitaire. Autrement dit, on peut
passer plus facilement, parler avec les gens de l'université qu'on peut
le faire avec les collèges. Et c'est un petit peu ça, notre
problème.
Mme Caron: C'est un petit peu... Vous me rappelez la commission
sur la loi 17, c'est un petit peu ce que l'Ordre des dentistes nous avait dit,
ils ne pouvaient pas parler aux denturologistes, parce que les denturolo-gistes
avaient une formation collégiale. Alors moi, je m'inquiétais de
savoir comment ils pouvaient parler à leurs patients, parce que... Ce
n'est pas évident.
M. Vézina: Ils enlèvent leurs dentiers.
Mme Caron: Ha, ha, ha! C'est sûr qu'ils ont tous une
formation universitaire. Au niveau des stages, le stage, est-ce qu'il est trop
court? Est-ce que... Au niveau du stage, s'il y a des changements
technologiques très rapides, est-ce que c'est suffisant pour que vous
arriviez à corriger le manque?
M. Vézina: Oui, c'est ça. C'est qu'il y a
même certains cégeps qui donnent des semaines de stages de plus
que le programme le prévoit. Maintenant, le problème qui existe,
c'est le problème qu'on entend, puis qui se discute actuellement, la
réforme au niveau de l'éducation. C'est que le programme
collégial, il y a de plus en plus de choses qui se passent en inhalo,
puis il n'y a pas plus de temps au niveau du programme. Alors, ça
crée un problème au niveau du programme, du contenu
lui-même, comment on compresse et ce qu'on met un petit peu plus de
côté, de telle sorte que la formation clinique, vous le mentionnez
et vous le devi- nerez, est tout à fait fondamentale et c'est d'ailleurs
une des raisons, aussi, pourquoi nous avons exigé à la
Corporation que les centres qui offrent la formation clinique soient
accrédités par un organisme indépendant. À ce
moment-là, on vérifie la qualité des stages cliniques et
aussi des cours de formation théorique.
Mme Caron: Je vous remercie, M. Vézina. Concernant le
titre réservé, c'est intéressant parce que, bon, il n'y en
a pas beaucoup, et, aussi, en plus, la délégation des actes
médicaux, ce qui vient ajouter et compliquer votre existence. J'ai
particulièrement apprécié le texte de l'Office des
professions, dans le rapport annuel de 1986-1987, où on prenait une
position assez claire, en tout cas, sur le mécanisme de la
délégation des actes et depuis, bon, ça fait sept ans et
il n'y a rien, il n'y a pas eu de changement à ce niveau-là.
Puisqu'on touche à la réforme du Code des professions, ça
serait peut-être le temps, là, de regarder ce qui est
arrivé avec ce mécanisme qui était proposé. Vous le
vivez comment? Au niveau des solutions par rapport à ça, chez
vous, là, bien bien concrètement, terre à terre,
là?
M. Vézina: Concrètement. Bon. La solution est
simple. C'est qu'on a créé deux catégories de professions.
C'est ça, le problème. Alors, une catégorie qui
détient tous les pouvoirs, que ce soit dans n'importe quel champ
d'activités, là. Je ne parle pas juste en santé; en
génie, en aménagement, c'est la même chose; en droit,
moins, peut-être. Là, on a créé deux
catégories de professions et on dit: Bon! Bien, là, partez avec
votre titre réservé et entrez particulièrement dans
le domaine de la santé et faites votre place là-dedans! On
va vous donner une formation, vous allez obtenir un permis, faites votre
place!
Alors, là, les gens, quand on essaie de se faire une place, et
ça vaut pour toutes les autres corporations à titre
réservé, il faut qu'à un moment donné il y ait
quelqu'un qui se tasse à quelque part pour qu'on puisse passer et avoir
notre petite place. Actuellement, à notre avis, parce qu'on le vit
régulièrement, le fait que les corporations de la santé ne
soient pas plus reconnues, c'est que les champs sont tellement solides qu'on ne
peut pas tellement évoluer là-dedans et ça crée, en
plus, des conflits, des frictions interprofessionnelles. On voit très
bien qu'à certains endroits quelqu'un veut faire le travail de l'autre
et l'autre veut faire le travail de l'autre. (11 h 50)
Alors, c'est sûr qu'en santé il va toujours y avoir des
zones grises comme on appelle, mais le mécanisme qui avait
été prévu justement dans le rapport annuel, c'est un
mécanisme qui était, disons, mitoyen. Ce n'est pas la perfection,
mais ça permet quand même de reconnaître la
compétence de certains professionnels vis-à-vis de leur champ
d'activités parce que, si on prend les définitions des champs
évocateurs des corporations à champ exclusif, Mme la
députée, vous allez vous aper-
cevoir que ça couvre à peu près tout. Alors, quand
tout est couvert, on a le droit de tout faire et on n'a pas besoin
nécessairement non plus d'avoir à prouver sa compétence.
On a un permis et, là, on entre partout.
Alors, ça crée des tensions dans le milieu, dans certains
endroits, il y a des endroits où ça va très bien, d'autres
endroits où il y a des tensions. Vous avez sûrement et je
vais vous le rappeler parce que ça me revient en mémoire
connu le phénomène du centre hospitalier Anna-Laberge à
Châteauguay, à l'ouverture, au moment où on n'a pas
été capables d'ouvrir parce que les anesthésistes
voulaient avoir des inhalothérapeu-tes et que l'administration, elle,
voulait mettre des infirmières. C'est un exemple du quotidien à
ce niveau-là.
Alors, la solution, c'est de revoir toute la situation des titres
réservés et, en ce qui me concerne, une corporation
professionnelle, ça devrait être une corporation professionnelle
à champ exclusif, quitte à ce que, les champs, ça va
toujours se chapeauter un petit peu. Quand on parle de ça, on fait
toujours sursauter les gens de l'entourage ou les gens du gouvernement:
Ça n'a pas de bon sens. Mais, Mme la députée, si vous
regardez strictement au Québec, toutes les professions, je veux dire les
métiers où ça prend une licence et il n'y a personne qui
peut pratiquer ça, quand on sait que ça prend une licence
spéciale pour être professeur de conduite automobile, vous saviez
ça, ça prend une licence spéciale pour être soudeur
à haute pression, ça, c'est des champs d'exclusivité, il
ne faut pas se cacher ça.
Alors, comment se fait-il que, dans un domaine aussi important qu'en
santé on n'a pas pensé à trouver une solution pour que,
justement, ces gens-là... Et vous en avez entendu toute la semaine,
elles ont de la difficulté, les corporations, à faire respecter
et à protéger le public dans les cas où les membres ne
font pas partie de la corporation. La solution est très simple, Mme la
Présidente. Il va toujours y avoir des médecins dans un
hôpital, il va toujours y avoir des infirmières. On vit pareil
ensemble! Il va toujours y avoir des physios, il va toujours y avoir des ergos,
il va toujours y avoir des technologistes médicaux, des techniciens en
radiologie. On est obligés de vivre ensemble parce qu'on n'est pas assez
intelligents et formés pour faire tout ça. Ça prend des
spécialistes dans tous les domaines. Alors, on pourrait régler
facilement ce problème-là.
Mme Caron: J'ai bien apprécié vos commentaires,
c'était particulièrement intéressant. Ça va
être à conserver.
M. Vézina: Dans les archives.
Mme Caron: Bien, j'espère que le ministre va le conserver.
En tout cas, moi, je vais retenir vos commentaires, sûrement poser des
questions au moment de l'étude des crédits, alors, je
préviens déjà le ministre au niveau de l'Office, et
peut-être rappeler en même temps qu'on espère qu'on va
déposer bientôt le rapport de l'Office des professions pour
préparer notre étude des crédits.
M. le Président, vous me faites signe qu'il me reste deux
minutes. Ah! Mon Dieu, ce n'est pas beaucoup, ça, deux minutes. Dans
votre conclusion, je pense qu'il y avait un message particulièrement
important aussi à retenir. Les sondages l'ont démontré, le
coût des procès, l'accès à la justice civile en cas
d'erreur médicale, c'est un problème. Et c'est le problème
qui pose le plus de difficultés, le plus de frustration, finalement, au
niveau de la population, je pense. Le problème de l'indemnisation, du
support des victimes d'accidents, des erreurs survenues à l'occasion
d'une intervention médicale et on a eu des exemples au cours de
la semaine je pense que là... et ce n'est pas le système
disciplinaire en soi qui est à revoir à ce moment-là.
C'est vraiment d'essayer d'apporter une solution concrète
là-dessus. Comme vous avez l'air d'être très bon au niveau
du concret, est-ce que vous avez des pistes sur ce sujet-là?
M. Vézina: Enfin, je pourrais vous référer
à... Je ne suis pas un juriste, malheureusement, mais, quand même,
j'ai ramassé un petit quelque chose dans un traité de droit de la
santé et des services sociaux. C'a été écrit par un
monsieur qui est très connu en droit, Molinari. Il a fait une
étude sur les perspectives d'évolution du régime de
responsabilité. Je pourrais vous en laisser une copie, si ça vous
intéresse. Je ne le lirai pas parce que je sais que votre temps est
écoulé mais on dit particulièrement là-dedans qu'au
Canada il n'y a eu aucune étude d'envergure qui semble avoir
été menée dans le but d'évaluer l'ensemble de la
situation. Ce qu'il prétend, c'est qu'il y a peut-être lieu de
procéder à une articulation nouvelle des théories de la
responsabilité civile qui prenne en compte, d'une part, les
impératifs d'une indemnisation adéquate des préjudices
causés et, d'autre part, d'une actualisation des principes juridiques et
de son fondement. En termes concrets, ce n'est pas facile de dire: Cette
faute-là, ça vaut tant de dollars. Quand on l'a inclu, Mme la
députée, dans notre mémoire, ce passage-là, c'est
que, à force de voir ce qui passait dans les journaux, à la
télévision, on s'aperçoit que, souvent, les victimes qui
poursuivent un professionnel en discipline ont l'impression ça
s'est parlé, les ACEF en ont parlé, elles ont même
demandé que les amendes leur reviennent qu'elles vont être
indemnisées, alors que ce n'est pas le cas.
Cependant, je crois qu'il y a lieu de se pencher sérieusement sur
un mécanisme en cas d'erreurs. Notre corpo, les gens chez nous, on a une
assurance-responsabilité professionnelle. Il faut donc trouver un
mécanisme pour ne pas qu'il y ait d'abus de la part du monde, des gens,
parce qu'il peut y avoir de l'abus flagrant. On sait qu'il y en a qui souvent
veulent faire de l'argent avec des erreurs mais, aussi, il y a des fautes qui
se passent qui ne sont pas nécessairement... il faut qualifier la faute
et la négligence et débroussailler ça. Mais je n'ai
pas de solution, je n'ai pas de liste de prix que je pourrais vous
remettre aujourd'hui.
Le Président (M. Gobé): Merci beaucoup. Cela mettra
fin à votre intervention, madame.
Mme Caron: Merci beaucoup.
Le Président (M. Gobé): M. le ministre, il vous
reste à vous deux minutes.
M. Savoie: Seulement deux minutes, M. le Président?
Le Président (M. Gobé): Oui. M. Savoie:
Oui?
Le Président (M. Gobé): C'est pas assez pour
vous?
M. Savoie: On a grandement apprécié la
qualité de votre intervention, ce matin. On constate que vous avez
à coeur, finalement, non seulement le fonctionnement de votre
corporation mais également l'ensemble du monde professionnel. Tout
simplement pour vous rappeler que et je pense que vous avez pu le
constater avec moi au niveau de la discipline, on va être
obligés d'apporter des correctifs importants. Je pense que vous le
constatez facilement aussi. Je pense que, comme vous l'avez souligné, il
va falloir se mettre à réfléchir sur le harcèlement
sexuel, sur les interventions et sur des mécanismes qui vont faire en
sorte que le citoyen qui se plaint, non seulement qu'on va intervenir lorsqu'il
va se plaindre mais on va chercher à établir des
mécanismes pour empêcher le développement d'un nombre
significatif de plaintes, parce que ce qui nous préoccupe, non seulement
porte sur l'absence de plaintes il n'y en a pas beaucoup de plaintes,
vous l'avez constaté vous-même, il n'y en a pas beaucoup
mais ça peut cacher une réalité. C'est ça.
Et l'autre élément qui nous préoccupe aussi, c'est
de commencer à établir des mécanismes de formation,
d'information au personnel pour empêcher que la situation se maintienne,
parce que ce qu'on veut faire, on veut que ça se résorbe, on veut
qu'il y ait une pression à la baisse. Alors, si vous avez des
commentaires là-dessus, ça me fera plaisir de les entendre. (12
heures)
M. Vézina: Je peux vous poser une question? Je vais poser
la question du départ. J'aimerais vous entendre sur les titres
réservés.
M. Savoie: Ha, ha, ha! Vous m'avez entendu hier soir, je pense.
On va faire tout en notre possible. C'est comme je vous dis là. Il y a
une différence entre une volonté... La volonté ne peut pas
être uniquement politique. Ça demande de la concordance de
plusieurs choses. On peut penser à un dicton d'Hippocrate qui dit: L'art
est long, la vie, courte. Il faut non seulement faire ce qu'on doit, mais il
faut que les choses, les assistants et le hasard y concordent. C'est un peu
ça, l'affaire.
Si l'on présente ce dossier-là, il faut absolument qu'on
soit en mesure de chercher un consensus minimal et c'est ce qu'on va
tâcher de faire. On va y aller de l'avant dans cette direction-là,
je vous le dis, il n'y a pas de doute là-dessus. On va chercher à
faire une percée parce que, là, on nous arrive avec
l'autofinancement. Là, on nous arrive avec des modifications importantes
au niveau de la discipline et on veut que ça se resserre. On veut
là que ce soit présent.
Le premier rôle d'une corporation n'est pas d'aller chercher 1600
membres, n'est pas de se taper un salaire de 70 000 $ par année, mais
c'est de protéger le public. Ça, il faut que ça devienne
un petit peu plus.. Il faut monter ça de deux ou trois crans, facilement
là, dans le discours des corporations. Vous n'êtes pas une
association, vous êtes une corporation professionnelle. Vous êtes
là pour protéger le public. C'est sûr que, si l'on vous
impose des obligations additionnelles, il y a une contrepartie à
ça. La contrepartie, c'est les droits additionnels. Il faut que
ça aille ensemble. Les vieux différends qui sont là depuis
15 ou 20 ans, il va falloir en clarifier certains.
Maintenant, il ne faudrait pas voir là que je prends un
engagement de le faire ou que ... Ce que je vous dis là, c'est qu'il y a
des limites. On vit dans une démocratie. Une démocratie ça
veut dire que, le pouvoir, il est étendu. Il n'y a personne qui a le
pouvoir absolu dans une vraie démocratie. Ce qu'on va chercher à
faire, c'est qu'on va chercher à essayer de coordonner les forces. On va
essayer de trouver ce qui est faisable et on va essayer de faire ce qui est
faisable avec les ressources dont nous disposons.
Il nous reste quand même une autre journée de travail de la
commission sur cet avant-projet de loi. D'ici au 16, on aura le temps de
mûrir un peu là. Il y a du monde qui nous entoure, des
mémoires, la CIQ, on va s'asseoir avec ces gens-là et faire une
couple de pas dans la bonne direction. Et puis le 16, je pense que, lors des
remarques de clôture, on devrait être en mesure de faire un tout et
d'essayer d'aligner ça pour le dépôt du projet de loi.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. le ministre. Ceci
met donc fin à votre intervention. Je vous remercie de vous être
déplacés. Vous pouvez donc vous retirer. Je vais demander
à l'intervenant suivant, soit M. Jacques Roy, professeur, de bien
vouloir venir prendre place et je vais suspendre deux minutes.
(Suspension de la séance à 12 h 3)
(Reprise à 12 h 5)
Le Président (M. Gobé): À l'ordre, s'il
vous
plaît! La commission de l'éducation reprend maintenant ses
travaux. Et il nous fait plaisir d'accueillir M. Jacques Roy, professeur. M.
Roy, je vous avise que vous avez une période de 10 minutes pour faire
votre présentation. Par la suite, M. le ministre et le comité
ministériel auront une période de 10 minutes pour discuter avec
vous et la même règle s'applique en ce qui concerne l'Opposition
officielle, donc, à Mme la députée de Terrebonne ou
à sa collègue, si elle le désire. M. Roy, vous avez la
parole.
M. Jacques Roy
M. Roy (Jacques): Merci. Alors, M. le Président, Mmes et
MM. de la commission, je vous remercie de me donner l'occasion de m'exprimer
sur une situation que j'ai toujours trouvée inacceptable. En effet, le
mémoire que je vous ai soumis ne traite pas expressément des
modifications annoncées dans le présent avant-projet de loi, mais
plutôt de l'esprit dans lequel s'amorce la réforme du Code des
professions et des lois professionnelles.
Comme le soulignait M. le ministre Savoie, dans la section
spéciale du Devoir du 18 septembre dernier, la réforme du
Code des professions qui sera sous peu proposée à
l'Assemblée nationale vise à mettre le système
professionnel à l'heure des nouveaux enjeux concurrentiels, tout en
s'assurant que les grands principes du professionnalisme soient
entièrement sauvegardés. De plus, le ministre affirme que le
respect de ces grands principes passe, plus que jamais aujourd'hui, par une
définition claire des champs de compétences.
Mon mémoire se colle à cet énoncé politique
et a pour objectif premier de vous sensibiliser à une situation qui a
généré de nombreux conflits interprofessionnels, situation
inacceptable dans un contexte comme celui de l'application du Code des
professions et des lois constitutives des corporations professionnelles.
En 1989, lorsque j'ai quitté la fonction de secrétaire de
l'Ordre des opticiens du Québec, après y avoir oeuvré
durant 14 ans, il m'est clairement apparu que plusieurs des problèmes
auxquels les administrateurs de l'Ordre ont eu à faire face ou à
élucider au cours de ces années prenaient leur source dans le
chevauchement des activités professionnelles que les opticiens partagent
avec les optométristes et les médecins ophtalmologistes. Ce
chevauchement est, à mon avis, une erreur historique qui a
été maintes fois dénoncée par différentes
commissions d'enquête et par plusieurs organismes
paragouvernementaux.
Permettez-moi de vous citer quelques extraits d'une de ces
enquêtes, soit celle de l'Office de la protection du consommateur de
1985. Dans le rapport découlant de cette enquête, le comité
d'experts, suite à une enquête approfondie dans le domaine
oculo-visuel, recommande un nouveau partage dans l'exercice des professions
d'opticien, d'optométriste et d'ophtalmologiste. À partir de
centaines d'entrevues et d'analyses de divers documents, les experts de l'OPC
notent qu'il y a un chevauchement dans les pratiques professionnelles. Pour
chacune des activités, on retrouve au moins deux catégories et
parfois même quatre catégories de professionnels. Compte tenu du
fait qu'il subsiste un niveau d'ambiguïté élevé sur
le rôle de chacun des professionnels, l'Office de la protection du
consommateur propose une réorganisation du système des soins
oculo-visuels et de la rémunération des professionnels
concernés de façon à ce que le partage des rôles
respectifs des différents professionnels oeuvrant dans ce secteur ne
porte plus à confusion.
Ce rapport est déjà vieux de 8 ans et, comme les autres,
il est demeuré lettre morte. Historiquement, cette situation devait
être corrigée à la suite du rapport de la commission
d'enquête sur la santé et le bien-être social de 1970, qui a
servi à l'élaboration de Favant-projet de loi créant de
toutes pièces le Code des professions et les lois constitutives des
corporations professionnelles. Ces lois, adoptées en 1973, avaient,
comme premier principe, la protection du public. Cependant, le ministre du
temps, pour se conformer à certaines réalités, soit le
nombre peu élevé d'opticiens, la faiblesse de leur
répartition régionale et de leur formation académique, a
décidé de faire marche arrière par rapport à son
projet initial qui limitait substantiellement le chevauchement des trois
professions de l'optique.
Dans son recul, le ministre n'a pas appliqué un
élément important du principe de la protection du public, soit
qu'un professionnel ne peut à la fois prescrire et vendre. La politique
n'est pas étrangère à de telles concessions. Lors de la
présentation en deuxième lecture du projet de loi sur
l'optométrie devant l'Assemblée nationale, M. Claude Castonguay,
alors ministre des Affaires sociales du Québec, a fait un long
exposé sur la situation de la couverture des soins optiques au
Québec. Au sujet du changement apporté au projet en
première lecture, projet qui éliminait, à toutes fins
pratiques, le chevauchement, M. Castonguay s'est exprimé en ces termes:
«Le travail en commission parlementaire est ce qui nous a indiqué
la nécessité de réviser notre position à cet
égard. Je ne veux pas dire que nous le faisons pour une question de
fond, mais pour nous conformer à certaines réalités. Je
crois que, comme objectif à long terme et à moyen terme, la
version originale était supérieure à la version
réimprimée.» (12 h 10)
Nous sommes dans un secteur où les besoins sont grands. Nous
sommes dans un secteur où un travail de collaboration entre
professionnels de diverses qualifications s'impose et où, si cette
collaboration existait, si le travail beaucoup plus étroit entre
professionnels de diverses catégories s'effectuait, la population en
bénéficierait hautement.
Est-ce que toutes ces situations répondaient à une
certaine réalité? Après 20 ans, il est permis de
s'interroger sur les vrais motifs du législateur qui, tout en voulant
davantage ventiler l'administration des corporations
professionnelles, a pourtant consenti à certaines d'entre elles,
notamment l'optométrie, des avantages évidents lesquels, par
surcroît, n'ont pas été nécessairement
utilisés par la suite pour la protection du public, raison d'être
du Code des professions et des lois professionnelles. Cette erreur historique
de 1973 a permis aux opto-métristes de conserver leur mainmise sur la
distribution des lentilles ophtalmiques sur tout le territoire du
Québec.
La question qu'on est en droit de se poser aujourd'hui, c'est: Pourquoi,
en 1973, le ministre Caston-guay n'a-t-il pas prévu un mécanisme
de transition pour corriger une situation qui, selon ses propres mots,
«devait être corrigée à moyen ou long terme»?
L'analyse de la situation démontre, hors de tout doute, qu'au lieu de
favoriser l'accessibilité des services de l'opticien à toute la
population québécoise le chevauchement de compétences des
deux professions l'a restreinte. Les optométristes ont tout fait pour
empêcher une meilleure répartition des services de l'opticien,
utilisant l'arme dissuasive par excellence, l'ordonnance. Pas d'ordonnance, pas
d'opticien. Toute tentative pour doter les optométristes d'un code de
déontologie spécifiant que l'optométriste doit, dans tous
les cas, remettre au patient l'ordonnance sans que ce dernier en fasse la
demande a toujours reçu une forte opposition de la part des
optométristes.
Même après 20 ans, la remise de l'ordonnance n'est toujours
pas obligatoire et fait encore l'objet de vives contestations de leur part. La
première conséquence directe du chevauchement, c'est que, encore
aujourd'hui, une très grande majorité d'opticiens exercent leur
profession principalement dans les villes où il y a une forte
concentration de population. L'opticien, ne pouvant poser les actes
professionnels qui lui sont réservés par la loi que sur
ordonnance, il s'installe donc aux endroits où il y a possibilité
pour le public d'obtenir l'ordonnance que devrait, en principe, lui remettre
l'optométriste sans aucune réticence. 11 est évident que,
dans les plus petites villes, les optométristes contrôlent
facilement la circulation des ordonnances, voire même n'en remettent
aucune. Dans les plus grands centres, à cause de la concurrence, le
public est en meilleure position pour exiger son ordonnance et consulter le
professionnel de son choix.
C'est pour cette raison que, 20 ans plus tard, il est encore impensable,
voire même suicidaire, pour des jeunes opticiens et opticiennes d'ouvrir
un bureau ou une boutique d'optique dans une localité de leur choix. Je
crois que l'optométrie va continuer d'utiliser cet argument de la
mauvaise répartition provinciale des opticiens dont elle est, d'une
certaine façon, le maître d'oeuvre, afin de ne pas perdre le champ
de compétences partagées qu'elle a obtenu en 1973 au
dépens des opticiens.
De plus, en 1973, lors de ses représentations auprès du
législateur, l'optométrie a brandi le spectre du monopole et,
curieusement, elle a été la première à
décrier la déréglementation professionnelle mise de
l'avant par l'Office des professions, laquelle permet une publicité sur
les prix des services professionnels, éliminant, d'une certaine
façon, tout risque de monopole. Sur ce point, l'optométrie a
toujours cru qu'un groupe peut indûment ostraciser un marché et
déterminer par consensus le prix d'un produit ou d'un service. Le
marché de l'offre et de la demande constitue un vaste système
d'information. Si des entraves ne lui sont pas imposées, comme le refus
de remettre l'ordonnance, ce système décide avec une exactitude
et une vitesse stupéfiantes de la valeur réelle de tout bien ou
service, c'est-à-dire le prix que paiera le public, où que ce
soit dans le monde. Les décisions fondées sur cette information
ont toutes les chances d'être justes. Plus une corporation
professionnelle a la mainmise sur ce processus et s'oppose au libre jeu des
lois du marché, plus la qualité de l'information en pâtit
et plus le risque d'erreur dans les décisions fondées sur cette
information est grand. L'absence d'information pour le consommateur limite sa
liberté de consommation et de choix.
L'exposé de François Laçasse sur des
mécanismes de distribution des médicaments et prothèses
dans le rapport de la commission Castonguay-Nepveu de 1970 est très
révélateur et encore d'actualité parce qu'on n'en a pas
tenu compte en 1973. M. Laçasse écrit: «Cet effet
absence d'indépendance prend place dans la mesure où le
système de contrôle de soins de qualité, s'exerçant
sous la forme que nous connaissons, vise à garantir pour chaque acte et
bien vendus une uniformité ou un seuil de qualité. Le cas plus
évident des optométristes nous fait toucher du doigt les limites
d'un tel système de contrôle: on ne peut pas
légiférer la vertu ni une organisation optimale de soins dans le
contexte de lois régissant diverses corporations professionnelles. On
est donc obligés d'avoir recours à des moyens indirects comme
celui de tenter de minimiser les cas de conflits d'intérêts,
d'éviter la tentation au praticien.»
En conclusion, je crois que la population du Québec n'est plus
dupe des slogans médiatiques de certaines corporations professionnelles,
notamment l'optométrie, qui se targue d'être la grande protectrice
du public dans le domaine oculo-visuel.
La seule solution que la population est présentement en mesure de
se payer est la rationalisation des tâches, des fonctions et des
formations des trois professionnels de l'optique, de façon à
accroître leur productivité dans leur domaine spécifique et
ce, pour le meilleur intérêt de cette population.
Cette solution passe par l'élimination du chevauchement et par
une délimitation claire des champs de compétences des trois
professions du domaine oculo-visuel. Cette solution peut paraître
utopique, surtout qu'après 20 ans tout le monde a
développé une certaine forme de résistance à
l'inacceptable. De plus, toutes les enquêtes qui ont porté sur le
chevauchement des professions du domaine oculo-visuel depuis 1973 n'ont pas
reçu l'attention à laquelle on était en droit de
s'attendre.
Face aux méandres législatifs, tout porte à croire
qu'un mémoire de plus n'y changera pas grand-chose. Je persiste
cependant à croire qu'un jour ou l'autre ce qui devait être fait
sera fait. Je vous remercie, M. le Président ainsi que les membres de la
commission de m'avoir donné l'opportunité d'exprimer librement
mon opinion.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. Roy. M. le
ministre, vous avez 10 minutes
M. Savoie: Merci, M. le Président. Je voudrais remercier
M. Roy d'avoir pris le temps de nous rédiger un mémoire et de
venir le présenter. Ce n'est pas toujours facile, même si on est
professeur au collège Édouard-Montpetit. Il a abordé, non
pas les questions qui touchent, à proprement parler, à la
réforme en tant que telle, mais à un élément de la
réforme qui est quand même une espèce de rationalisation,
si l'on veut, et une harmonisation de certains champs d'exercices à
l'intérieur même du monde professionnel, ce qui est
intéressant comme approche.
Il a dit en faisant sa conclusion, que, bon, effectivement, là,
tôt ou tard, ça va se faire, et vous avez raison. Vous avez
raison, mais ça va être tard! Ha, ha, ha!
M. Roy: Avant l'an 2000?
M. Savoie: Pardon?
M. Roy: Avant l'an 2000?
M. Savoie: Je ne sais pas. Mais vous connaissez, je pense, fort
bien ce qui anime ce monde ophtalmique et les difficultés qu'on a, les
«opti», les «opto» et les «ophta». Il faut
non seulement aimer faire du grec pour les comprendre, mais il faut avoir
également beaucoup de patience parce qu'il y a effectivement trois
corporations qui sont une à côté de l'autre et qui
occupent, à toutes fins pratiques, chacune un champ spécifique,
mais ils se touchent. Il y a des limites et, même, il y a des croisements
importants. Il y a des frictions assez substantielles d'une façon
constante entre les trois corporations à un milieu important qui...
évidemment, ont beaucoup d'interfaces avec le public, et d'une
façon constante.
Les ophtalmologistes, depuis trois ans, je pense que j'ai pu les
rencontrer sept, huit ou neuf fois. Les optométristes, ça ne se
compte plus. Ça fait longtemps que j'ai arrêté de compter
le nombre de rencontres que j'ai eues avec les optométristes et les
opticiens, bien, plusieurs rencontres avec les opticiens d'ordonnances. Et,
justement, à cause des chevauchements qui existent au niveau de leur
profession. Évidemment, comme vous l'a souligné M. Roy, un jour,
il va falloir y voir. Et peut-être qu'un jour ça va se faire, mais
il y a un ingrédient qui manque. C'est une espèce de situation,
un contexte social qui permet la solution d'un problème comme
celui-là. Ça va peut-être venir.
Vous parlez d'erreur historique. Bien oui, effectivement, une erreur
historique a peut-être donné naissance à cette
situation-là. Toutefois, cette situation existe dans plusieurs
provinces. Elle existe également dans plusieurs États aux
États-Unis. C'est une situation qui est assez répandue en
Angleterre, aux États-Unis, au Canada et dans toutes les provinces; les
optométristes, les opticiens et les ophtalmologistes. Vous-même
vous êtes opticien, je crois?.
M. Roy: Je suis opticien, oui.
M. Savoie: Oui. C'est ça. Et vous ne proposez aucune
suppression pour les opticiens?
M. Roy: Pardon?
M. Savoie: Vous proposez, par exemple, pour les ophtalmologistes,
la suppression, au premier alinéa de l'article 39... pour qu'ils ne
puissent vendre des verres, des lunettes. Vous proposez également des
modifications pour les optométristes, mais vous ne proposez rien pour
les optométristes.
M. Roy: Pour les optométristes?
M. Savoie: Pour les opticiens, excusez.
M. Roy: C'est assez difficile de proposer d'autres choses
là!
M. Savoie: Oui.
M. Roy: Parce que c'es^ le minimum qu'ils peuvent avoir.
M. Savoie: C'est la vente et l'ajustement... M. Roy: C'est
le minimum.
M. Savoie: II y a un secteur qui est en train de se
développer. J'ai toujours pensé que ça pouvait apporter
une solution. C'est toute la question de la multidiscipli-narité,
où il pouvait y avoir des échanges entre opticiens,
optométristes et ophtalmologistes.
(12 h 20)
M. Roy: Actuellement, il existe une multidiscipli-narité
entre les opticiens et les optométristes, mais elle n'est pas
acceptée par les optométristes. Vous en êtes bien
conscient. Ils ont dû vous le dire. Elle est, de fait, par le contexte
commercial, un contexte de marché beaucoup plus qu'un contexte
corporatif, si je peux utiliser cette expression. Les optométristes qui
font des examens de la vue dans les bureaux d'opticiens, pour donner cet
exemple-là, le font parce qu'ils n'ont pas d'autre place pour aller
faire des examens de la vue. Et,
encore hier, j'ai rencontré un opticien dans son bureau qui me
faisait la remarque suivante. Il dit: J'ai des optométristes qui
viennent faire des examens de la vue dans mon bureau et je peux te dire
très franchement, au moment où je te parle, ils me traitent comme
leur porteur d'eau puis, pourtant, je leur fournis quand même leur
gagne-pain, jusqu'à un certain point. C'est moi qui fais entrer les
clients dans mon bureau, c'est moi qui leur amène l'eau au moulin et,
pour eux, je suis un moins que rien et s'ils avaient la chance de ne pas avoir
à faire d'examen de la vue dans mon bureau, demain matin, c'est
sûr qu'ils n'en feraient pas. Donc, ça se fait de fait à
cause du contexte du marché ou à cause du contexte commercial,
mais juridiquement ils ont essayé, je sais qu'ils ont essayé de
faire...
Il y a eu des lettres ou des rencontres avec l'Office des professions
là-dessus. Je sais que, en 1986, M. Desgagnés, qui était
président de l'Office, avait écrit aux optométristes,
d'une façon claire, que ce n'était pas illégal, mais je
doute fort qu'il démorde là-dessus. Et je peux vous donner un
autre exemple: un opticien qui a téléphoné à
l'Association des optométristes pour avoir un optométriste, parce
qu'ils gardent une liste de personnes qui se cherchent des emplois et il a
donné son nom. Il a dit: Moi, je cherche un optométriste. Et ils
lui ont demandé son nom, son adresse. Ils ont dit: Oubliez ça,
monsieur, on ne vous fournira pas la chance d'avilir un de nos membres. Cloue!
Ça fait que ça, ça veut tout dire. Cette
situation-là, elle existe parce qu'on n'a pas le choix et elle va
exister tant qu'on aura toujours ce chevauchement-là.
M. Savoie: Non, non. C'est beau, ça.
Le Président (M. Gobé): Deux minutes.
M. Savoie: Oui. Je vais revenir après madame.
Le Président (M. Gobé): Mme la
députée de Terrebonne.
Mme Caron: Merci, M. le Président. Bonjour, M. Roy.
M. Roy: Bonjour, madame.
Mme Caron: Bienvenue à cette commission. Vous touchez,
effectivement, un problème qui n'a pas été abordé,
là. On l'a abordé un tout petit peu avec...
M. Roy: Les précédents. Oui.
Mme Caron: ...ceux qui vous ont précédé.
C'était la première fois qu'on l'abordait avec M. Vézi-na.
Le chevauchement, les activités professionnelles et c'est évident
que, lorsqu'on parle de réforme du Code des professions, ce point qui
pose beaucoup de frictions, qui amène beaucoup de tension, de conflits
entre les corporations professionnelles, c'est un des éléments
qu'il faut effectivement regarder. Vous avez fait part que, dans chacune des
activités, on peut retrouver deux catégories, puis même
jusqu'à quatre, et c'est vrai, de professionnels. Le tableau, à
cet égard, est particulièrement significatif au niveau des champs
puis, là, je ne vois vraiment pas ce que le ministre pouvait vouloir
vous enlever, quand on regarde le tableau, parce que...
M. Roy: On est sur la dernière ligne.
Mme Caron: Bien, c'est ça! Vous êtes sur la
dernière ligne, là.
M. Roy: C'est ça. Ha, ha, ha!
Mme Caron: Si on l'enlève, vous n'êtes plus
là du tout. Vous disparaissez complètement. Alors...
M. Roy: C'est ce que les optométristes veulent, de toute
façon, là!
Mme Caron: C'est ça. Donc, c'est sûr que le tableau,
là, je pense que ça nous permet de vraiment bien visualiser.
Peut-être profiter de votre passage pour poser une question: Au niveau
des plaintes, est-ce que, selon vous, il y a effectivement beaucoup de plaintes
de la part des consommateurs parce qu'ils n'ont pas nécessairement
l'ordonnance, donc, le choix d'aller voir quelqu'un d'autre?
M. Roy: Disons que je ne travaille pas à la Corporation,
là. Je ne pourrais pas vous donner la réponse aujourd'hui. On en
a eu dans la période où j'étais à la Corporation,
jusqu'en 1989. On avait plusieurs plaintes de ce côté-là,
surtout des ordonnances incomplètes ou des ordonnances où il n'y
avait presque rien d'écrit dessus et personne ne pouvait la remplir
parce qu'elle était incomplète. Aujourd'hui, je ne sais pas. Je
ne pourrais pas vous dire, là. Il faudrait le demander à la
Corporation.
Mme Caron: Vous avez été là de quelle
année à quelle année?
M. Roy: De 1975 à 1989.
Mme Caron: C'est une période, quand même, assez
longue, là, 14 ans.
M. Roy: Oui. C'est une période où... constructive
et où on a vécu beaucoup de frictions avec des
optométristes, énormément de frictions.
Mme Caron: Hier, l'Ordre des agronomes nous parlait qu'ils ont
mis sur pied parce qu'ils ont certains problèmes, aussi, bon, qui
sont peut-être moins accentués, là, avec les
médecins vétérinaires qu'ils
ont mis sur pied un comité conjoint pour essayer de regarder
ensemble, lorsqu'ils ont des problèmes, puis essayer de réduire
les tensions. Du côté de votre secteur particulier, est-ce que
vous pensez que ça pourrait être une piste de solution?
M. Roy: Je peux vous dire que...
Mme Caron: Ou c'est trop...
M. Roy: Non, non, non.
Mme Caron: Les tensions sont trop fortes?
M. Roy: Non. Bien, peut-être que oui. En 1981, de 1981
à 1986, on a eu... il y avait des rencontres avec les
optométristes, entre opticiens et optométristes auxquelles j'ai
assisté. On a eu, peut-être, une quinzaine de rencontres,
facilement. Et la vraie dernière rencontre... en tout cas, dont je me
souviens, il y en a peut-être eu une autre après, mais une des
dernières qu'il y a eu, elle a eu lieu en 1986, la veille où
l'Ordre des optométristes, conjointement avec l'Université de
Montréal, déposait une injonction contre la formation au
collège Édouard-Montpetit. Alors, ça a été
pas mal la dernière dont je me souviens. On a eu une réunion
puis, le lendemain matin, on recevait l'injonction. Plus méprisant que
ça, ce n'est pas possible, à mon avis. Je m'excuse du mot,
là, mais ce n'est pas possible. Autant on pouvait être souriants
la veille, autant on était... C'est parce qu'on descend de haut,
à ce moment-là. Les espérances sont tellement
bafouées que ça devient... c'est révoltant. Je ne dis pas
que, aujourd'hui, je suis révolté, là. J'ai eu le temps de
vivre ça.
Mme Caron: Oui.
M. Roy: Mais c'est vraiment révoltant.
Mme Caron: Je vous remercie, M. Roy. M. le Président, si
vous permettez, ma collègue des Chutes-de-la-Chaudière aurait une
petite question.
Le Président (M. Gobé): D'accord, madame.
Excusez-moi. J'étais distrait par votre collaboratrice. Oui. Vous avez
la parole.
Mme Carrier-Perreault: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Gobé): II vous reste quelques
minutes; vous pouvez en profiter.
Mme Carrier-Perreault: Oui. Alors, écoutez, le ministre,
je pense qu'il a été conscientisé. En tout cas, il est de
plus en plus conscientisé du problème qui arrive avec certains
chevauchements et tout ça, au niveau des corporations, surtout, les
titres réservés par rapport aux grandes corporations à
titre exclusif qui ont à peu près le champ entier de... Ils
peuvent avoir juridiction à peu près dans tout. C'est vrai au
niveau de la santé. Je pense que c'est assez évident. On voit ce
qui se passe avec certains groupes vis-à-vis la Corporation des
médecins, par exemple. On le voit encore ces jours-ci avec les
sages-femmes, là, où, à la minute où ils sentent
qu'il y a un groupe qui peut prendre une partie de leur travail, là,
ça devient une chasse gardée, et puis là il ne faut pas du
tout que ça glisse. On le voit aussi à d'autres niveaux. Il y a
beaucoup de monde qui ont fait leur cours en droit, qui sont inscrits dans leur
corporation, qui sont au Barreau et qui peuvent oeuvrer dans beaucoup d'autres
champs de compétences qui sont réservés à d'autres
titres, d'autres corporations.
Le ministre nous dit: Oui, il faut se pencher là-dessus. C'est un
réel problème. Effectivement, je pense qu'il y a une partie des
gens qui échappent carrément à un contrôle, en plus,
par rapport aux corporations à titre réservé, entre
autres. En tout cas, il y a toutes sortes de problèmes qui
découlent de cette situation-là. Par ailleurs, il vous dit
comment ce ne sera pas facile. Vous avez remarqué, là, il dit: On
est en démocratie et c'est vrai que les lobbies sont puissants. Je pense
qu'on n'a pas besoin de vous apprendre ça. Vous êtes
sûrement très conscient. D'ailleurs, vous en faites état
à plusieurs reprises.
Vous dites que, en 1973, à la page 4 de votre texte de
présentation, vous vous posez des questions pourquoi le ministre n'a pas
prévu un mécanisme de transition pour corriger une situation qui
devrait être corrigée à moyen terme et à long terme.
Compte tenu que le ministre nous dit que c'est une situation qui devra
être corrigée à moyen ou à long terme, qu'est-ce que
ce serait, pour vous, un mécanisme de transition, parce que je pense que
ça va nous en prendre, aussi? Est-ce que vous avez une idée,
là? Qu'est-ce que c'est que vous voulez nous dire par mécanisme
de transition?
M. Roy: Mécanisme de transition... Je prends l'exemple,
ça s'est appliqué avec les pharmaciens et les médecins,
à un moment donné. Le médecin, dans les régions,
pouvait vendre des médicaments et, lorsqu'une pharmacienne ou un
pharmacien arrivait dans la place, le médecin cessait de vendre des
médicaments. En tout cas, il y avait un mécanisme de ce
genre-là. On pourrait avoir un autre genre de... L'objectif, ce n'est
pas nécessairement de tuer l'optométrie, là. Ça,
j'espère que vous n'avez pas ça dans la tête,
là.
Mme Carrier-Perreault: On va avoir de la misère.
Des voix: Ha, ha, ha!
(12 h 30)
M. Roy: Mais l'objectif, c'est vraiment d'arriver à faire
prendre conscience à un groupe que, lorsque tu as un secteur qui est
très, très privilégié, à un moment
donné, il faut que tu acceptes qu'on t'a donné un privi-
lège un jour et que, maintenant, il y a des personnes
qualifiées pour le faire, alors qu'à ce moment-là on
trouvait qu'ils n'étaient pas assez compétents ou assez nombreux
pour le faire. Maintenant, il faut que tu te tasses. Et le mécanisme, ce
serait: On se donne... Je ne sais pas, on peut donner 10 ans ou 5 ans en disant
que tous les nouveaux optométristes qui arrivent sur le marché ne
font plus perdre la partie qui est la pose, l'ajustement et la vente de
lentilles ophtalmiques.
Et ceux qui sont déjà en place, qui le font, ils le
conservent pendant 10 ans et, après 10 ans, il faut qu'ils
l'abandonnent. On ne peut pas dire qu'on étrangle personne avec
ça. C'est juste une question d'organisation sur le temps. Après
10 ans, c'est sûr que ça va faire une pression au début
mais, avec le temps, les gens vont s'habituer à travailler ensemble et
ils vont finir par travailler ensemble d'une façon convenable et
raisonnable. Ça, c'est une vision que j'ai. Ce n'est pas
nécessairement partagé par tout le monde, mais ça serait
une façon de le faire, quand je parle de mécanisme à long
terme. Et si on l'avait fait au début, aujourd'hui on ne serait pas ici
pour parler de la même chose. Parce que le temps passe vite quand
même.
Le Président (M. Gobé): Excusez-moi, je pensais que
vous aviez terminé. Il vous reste 35 secondes, madame.
Mme Carrier-Perreault: Le temps passe vite, effectivement.
Écoutez, quand vous parlez de ça, ça serait sur entente,
c'est quoi le mécanisme, ou c'est quelque chose qu'on pourrait
retrouver, par exemple, dans une loi ou dans le Code des professions ou...
M. Roy: Moi, à mon avis, on le trouverait dans une loi.
C'est parce que l'entente, actuellement, je peux vous dire que ce serait
très, très difficile.
Mme Carrier-Perreault: Ça ne marchera pas.
M. Roy: J'aime autant vous dire que non et les positions sont
trop... L'idéologie est ancrée d'une façon profonde chez
les optométristes là-dessus. L'opticien... pour eux, c'est... Je
peux même vous faire juste un petit mot facile, ça, c'est un
commentaire, une proposition de l'Association des optométristes: Force
nous est de constater que les opticiens d'ordonnances sont un
intermédiaire artificiel qui ne peut, dans sa fonction actuelle,
être d'aucun apport au système de soins existant. Cela confirme ce
que nous avons vu, les opticiens d'ordonnances ne sont pas nés d'un
besoin social. Autrement dit, on est un accident de la nature.
Le Président (M. Gobé): Alors, M. Roy,
c'était tout le temps qui était imparti. M. le ministre a
donné quelques secondes de plus, madame, vous avez pris un peu de ses
secondes. On connaît sa générosité proverbiale pour
faire en sorte que les débats se fassent le plus facilement possible. M.
le ministre, vous avez la parole.
M. Savoie: Oui, M. Roy, évidemment, forcer une
réflexion à ce moment-ci sur un sujet important, parce que
ça ne touche pas seulement, finalement, comme on a eu l'occasion de le
mentionner, la discipline de la vision, mais également une certaine
orientation qu'on pourrait éventuellement chercher à
accélérer au niveau du monde professionnel.
Ce que je compte faire, c'est... je compte transmettre copie de votre
mémoire au président de la Corporation des optométristes
de même qu'au président de l'Association des ophtalmologistes. Je
suis certain que ça va leur faire plaisir d'en prendre connaissance,
avec une note leur disant que ce qu'il faut regarder, c'est
l'élément derrière, c'est-à-dire une meilleure
collaboration entre les trois corporations qui travaillent dans le monde de la
vision au Québec. Bien, là, j'imagine que les opticiens vont en
prendre connaissance sans trop de difficulté, je ne pense pas que...
Une voix: ...
M. Savoie: Bien oui, c'est ça. Et dire que vous avez
suscité, comme l'a souligné Me Lambert, une volonté
d'approfondir, finalement, une réflexion sur le monde du
multiprofessionalisme comme du monde multidisciplinaire, les impacts et les
répercussions que ça pourrait avoir sur un meilleur
Québec. Je suis très conscient du fait que vous vous
présentez ici avec une volonté ferme de participer à un
débat important pour la société québécoise
et je veux vous dire qu'on l'apprécie. C'est toujours chaleureux pour
nous tous de voir quelqu'un faire un effort pour améliorer le sort de
notre collectivité.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. le ministre.
Merci, M. Roy.
M. Roy: Oui, merci.
Le Président (M. Gobé): Alors, ceci met fin
à nos travaux pour la journée et pour la semaine aussi. Je tiens
à remercier tout le personnel qui a participé et je vais donc
maintenant ajourner les travaux à mardi 16 mars, à 10 heures le
matin, en cette salle. S'il y avait changement, le secrétariat de la
commission en avisera les intervenants. Alors, bonne fin de semaine à
tout le monde. La commission est maintenant ajournée.
(Fin de la séance à 12 h 35)