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Version finale

34e législature, 2e session
(19 mars 1992 au 10 mars 1994)

Le mardi 2 mars 1993 - Vol. 32 N° 35

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation générale sur l'avant-projet de loi modifiant le Code des professions et d'autres loi professionnelles


Journal des débats

 

(Dix heures douze minutes)

Le Président (M. Gobé): Bonjour. La commission de l'éducation va maintenant entreprendre ses travaux. Je constate, d'ailleurs, qu'il y a le quorum. Donc, la séance étant ouverte, je vous rappellerai le mandat de notre commission qui est, pour cette journée, de tenir des auditions publiques, ou de procéder à des auditions publiques sur l'avant-projet de loi intitulé Loi modifiant le Code des professions et d'autres lois pro-fessionelles.

M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements à cette séance?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Comme remplacement, Mme Boucher Bacon (Bourget) est remplacée par M. Philibert (Trois-Rivières) et M. Bradet (Charlevoix) par M. Bergeron (Deux-Montagnes).

Le Président (M. Gobé): Très bien. Merci beaucoup. Je vais donc maintenant faire lecture de l'ordre du jour, et nous procéderons à son adoption, s'il y a lieu, par l'ensemble des membres de la commission. Alors, à partir de 10 heures ce matin, nous allons entendre la Conférence des recteurs et des principaux des universités du Québec; par la suite, à 11 heures, les représentants de l'Ordre des arpenteurs-géomètres du Québec; à 12 heures, M. Mario Goulet.

Nous suspendrons à 12 h 30, afin de reprendre nos travaux à 14 heures. Et là nous entendrons les représentants de l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec; par la suite, à 15 heures, les représentants de la Corporation professionnelle des conseillers et conseillères d'orientation du Québec; puis, vers 16 heures, les représentants de la Corporation professionnelle des infirmières et infirmiers auxiliaires du Québec; enfin, à 17 heures, l'Ordre des techniciens en radiologie du Québec.

Nous suspendrons de 18 heures à 20 heures, où nous entendrons, par la suite, l'Ordre des architectes du Québec et, à 21 heures, pour terminer la journée, la Corporation professionnelle des ergothérapeutes du Québec, ce qui mettra fin à nos travaux vers 22 heures ce soir.

Est-ce que l'ordre du jour, tel que lu et annoncé, est adopté par les membres de la commission?

Mme Caron: Adopté.

Le Président (M. Gobé): Donc, l'ordre du jour est adopté. Il n'y a pas de déclarations d'ouverture, celles-ci ayant été faites avant-hier, lors de la première séance. Je demanderai donc, maintenant, aux représentants de la Conférence des recteurs et des principaux des universités du Québec de bien vouloir prendre place — ce qui est fait, d'après ce que je peux voir. Donc, vous pouvez vous présenter, ainsi que les gens qui vous entourent, monsieur, et vous commencerez, par la suite, votre intervention. Vous avez 20 minutes pour ce faire, et une discussion de 20 minutes de chaque côté de la table s'engage par la suite avec un peu de latitude sur les minutes, si tout va bien.

Alors, vous avez la parole.

Conférence des recteurs et des principaux des universités du Québec (CREPUQ)

M. L'Écuyer (Jacques): Je suis Jacques L'Écuyer, vice-président de l'Université du Québec et président du Comité des affaires académiques de la Conférence des recteurs; à ma gauche, Mme Irène Cinq-Mars, qui est vice-rectrice adjointe à l'Université de Montréal, et, à ma droite, M. Jean-Guy Ouellet, qui est vice-recteur à l'Université de Sherbrooke.

Nous allons traiter essentiellement, ce matin, des relations universités-corporations, puisque c'est le point, dans le projet de loi, qui nous intéresse de façon particulière.

Alors, je commencerai, si vous me permettez, en lisant notre mémoire, et je me permettrai, s'il reste un peu de temps, d'ajouter quelques phrases tirées d'une lettre que le président de la Conférence adresse au président de l'Office des professions, qui traite essentiellement du même sujet.

Les dispositions de l'avant-projet de loi, qui retiennent ici l'attention, sont celles qui se rapportent aux modalités de la collaboration entre les corporations professionnelles et les établissements d'enseignement universitaire.

Nous exposerons ci-après, dans un premier temps, le régime législatif actuellement en vigueur aux termes du Code des professions et, dans un deuxième temps, les modifications proposées par l'avant-projet de loi. À l'heure actuelle, les corporations professionnelles et les établissements d'enseignement universitaire voient les modalités de leur collaboration déterminées par le gouvernement, qui a adopté certains règlements à cet effet.

L'article 184, paragraphe b, du Code des professions prévoit ce pouvoir réglementaire dans les termes suivants: «184. Le gouvernement, après consultation de l'Office, du Conseil des universités, des établissements d'enseignement et de la corporation intéressée, peut, par règlement:

«a) déterminer les diplômes délivrés par les établissements d'enseignement qu'il indique qui donnent ouverture à un permis ou à un certificat de spécialiste; «b) fixer les modalités de la collaboration de la corporation avec les autorités des établissements d'enseignement du Québec visés au paragraphe a, notamment dans l'élaboration des programmes d'études conduisant à un diplôme donnant ouverture à un permis ou à un certificat de spécialiste et dans la préparation des examens ou autres mécanismes d'évaluation des personnes effectuant ces études.»

À ce jour, le gouvernement a fixé les modalités de la collaboration entre les corporations professionnelles et les établissements d'enseignement à l'égard de 18 corporations professionnelles. Le mode de collaboration retenu est celui des comités de la formation, qui sont composés, en principe, d'un nombre égal de représentants des établissements d'enseignement, des corporations professionnelles et des étudiants. Certains comités incluent également des représentants du ministère directement intéressé par le domaine de la formation.

Dans le cas de chaque corporation professionnelle à l'égard de laquelle un règlement du gouvernement établit un comité de la formation, le règlement détermine les établissements d'enseignement qui sont représentés au sein du comité et prévoit le mode de désignation du ou des représentants de chaque parti. Les règlements que nous avons consultés indiquent que, lorsqu'une université donnée a droit à un siège au sein d'un comité de formation, elle désigne elle-même son représentant et détermine de la même façon qui, au sein de l'établissement, détient l'autorité pour désigner ce même représentant.

Trois dispositions de l'avant-projet de loi doivent être lues conjointement afin de comprendre les modifications proposées et d'en mesurer l'impact. D'abord, le projet d'article 12, 3e alinéa, paragraphe 8°, dit: «L'Office doit, notamment: «8° Donner au gouvernement son avis sur tout diplôme qui donne ouverture à un permis ou à un certificat de spécialiste délivré par une corporation après avoir consulté notamment: «a) les établissements d'enseignement et la corporation intéressée; «b) la Conférence des recteurs et des principaux des universités du Québec et le Conseil des universités, s'il s'agit d'un diplôme de niveau universitaire; «c) le Conseil des collèges, s'il s'agit d'un diplôme de niveau collégial; «d) le ministre de l'Éducation, s'il s'agit d'un diplôme de niveau secondaire; «e) le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science, s'il s'agit d'un diplôme de niveau collégial ou de niveau universitaire».

Par la suite, le projet d'article 12.1 dit: «L'Office peut, par règlement: «2° fixer les modalités de la collaboration de la corporation intéressée avec les autorités des établisse- ments d'enseignement du Québec visés dans un règlement pris en application de l'article 184, notamment dans l'élaboration et la révision des programmes d'études conduisant à l'obtention d'un diplôme donnant ouverture à un permis ou à un certificat de spécialiste et dans la préparation des examens ou autres mécanismes d'évaluation des personnes effectuant ces études. «L'Office doit, avant de fixer les modalités visées au paragraphe 2° du premier alinéa, consulter notamment les personnes et organismes mentionnés — précédemment — aux sous-paragraphes a à e du paragraphe 8° du troisième alinéa de l'article 12.» Celui qu'on vient de lire.

Finalement, le projet d'article 184 dit: «Le gouvernement peut, par règlement et après avoir obtenu l'avis de l'Office — des professions — donné conformément au paragraphe 8° du troisième alinéa de l'article 12, déterminer les diplômes délivrés par les établissements d'enseignement qu'il indique qui donnent ouverture à un permis ou à un certificat de spécialiste.»

L'effet conjugué de ces trois modifications, en ce qui a trait à la collaboration entre les corporations professionnelles et les établissements d'enseignement universitaire, se présente comme suit. Ce ne serait plus le gouvernement, mais plutôt l'Office des professions, qui détiendrait le pouvoir de fixer par règlement le mode de la collaboration entre une corporation professionnelle et les autorités des établissements universitaires. Comme à l'heure actuelle, les établissements universitaires susceptibles d'être visés sont ceux dont les diplômes donnent ouverture à un permis ou à un certificat de spécialiste au sens du Code des professions, selon ce que détermine le gouvernement par règlement pris en vertu de l'article 184, dans sa version actuelle et dans sa version projetée, qui sont toutes deux précitées.

Finalement, avant de fixer les modalités visées par le projet d'article 12.1, 2°, l'Office des professions devrait consulter, notamment dans le cas d'un diplôme de niveau universitaire: les établissements d'enseignement et la corporation intéressée; la Conférence des recteurs et des principaux des universités du Québec; le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science, ainsi que le prévoit le dernier alinéa du projet d'article 12.1, qui renvoie lui-même au projet d'article 12, troisième alinéa, paragraphe 8°.

Donc, comme à l'heure actuelle, la collaboration entre une corporation professionnelle et des établissements universitaires porterait, dans le cas d'un diplôme donné, sur l'élaboration et la révision des programmes d'études conduisant à l'obtention d'un diplôme donnant ouverture à un permis ou à un certificat de spécialiste, et la préparation des examens et d'autres mécanismes d'évaluation des personnes effectuant ces études. Le projet d'article 12.1 ne donne aucune précision, ni sur la nature des modalités que pourrait fixer l'Office des professions au sujet de la collaboration entre une corporation professionnelle et les établissements universitai-

res, ni sur l'objet de la consultation des établissements, de la CREPUQ et du ministère, à laquelle devrait se livrer l'Office des professions selon le dernier paragraphe du projet d'article 12.1. À cet égard, les termes de l'avant-projet de loi sont généraux et laisseraient à l'Office des professions la discrétion d'élaborer elle-même les détails de son intervention.

En conclusion, nous avons souligné plus haut les modifications proposées par l'avant-projet de loi, à savoir principalement: le transfert à l'Office des professions du pouvoir réglementaire de fixer les modalités de la collaboration; l'obligation faite à l'Office de consulter certains organismes et intervenants avant d'exercer ce même pouvoir, dont la CREPUQ; le pouvoir discrétionnaire de l'Office des professions de déterminer les matières sur lesquelles la consultation devrait porter et, à cet égard, le rôle de chacun des organismes et intervenants, et d'établir les conditions réelles et pratiques de la collaboration. Sur ce plan, la discrétion de l'Office des professions ne serait toutefois ni plus ni moins importante que celle actuellement dévolue au gouvernement par l'article 184, paragraphe b, du Code des professions.

Les établissements universitaires du Québec estiment que les orientations générales dont s'inspire l'avant-projet de loi sont de nature à favoriser le dialogue et la collaboration avec les corporations professionnelles. En particulier, les liens de coopération étroits et fructueux que, dans le cadre de la CREPUQ, ils ont noués avec l'Office des professions les incitent à envisager de façon positive les dispositions proposées par cette législation. Il faut dire qu'à cet égard les discussions engagées au cours des derniers mois, à l'occasion des consultations de l'Office sur les modalités de collaboration entre les établissements d'enseignement et les corporations professionnelles, nous paraissent orientées dans la bonne direction et sont encourageantes.

Pour leur part, les établissements universitaires ont déjà lancé, dans plusieurs champs d'activité professionnelle, d'importants travaux de concertation qui témoignent de leur volonté de favoriser le dialogue. Nous estimons que les principes qui ont guidé l'élaboration de l'avant-projet de loi pourront contribuer à promouvoir les objectifs de collaboration que nous poursuivons.

Si vous me le permettez, je me permettrai d'ajouter quelques paragraphes, comme je le disais tout à l'heure, d'une lettre au sujet, justement, des modalités de collaboration que le président de la Conférence des recteurs doit adresser au président de l'Office des professions.

Parlant des hypothèses de collaboration élaborées, la lettre dit: L'hypothèse élaborée par l'Office viserait à favoriser le dialogue et la collaboration entre les corporations professionnelles et les établissements d'enseignement. De notre point de vue, il s'agit là d'un objectif prioritaire auquel nous souscrivons d'autant plus aisément que nous partageons le diagnostic établi par l'Of- fice en la matière. Les difficultés que rencontrent la collaboration entre les corporations professionnelles ne datent pas d'hier, et l'évolution plus récente de cette problématique n'est guère encourageante si l'on en juge par le nombre croissant de dossiers en sciences comptables, en psychologie, en droit notarial, en ergothérapie et en physiothérapie, notamment, dont la trajectoire a atteint un stade que l'on pourrait qualifier de critique. À l'évidence, il est nécessaire que des solutions soient trouvées rapidement pour régulariser une situation dont les effets se répercutent, en première instance, sur les étudiants qui optent pour une carrière professionnelle et y engagent leur avenir en poursuivant des études dans un programme donnant ouverture, entre guillemets, à un permis ou à un certificat de spécialiste.

Il nous apparaît cependant que, pour atteindre l'objectif souhaité, la solution éventuellement retenue, quels qu'en soient, par ailleurs, les mérites, devra reposer sur la réalisation d'une condition fondamentale, que soient clairement déterminées les responsabilités et juridictions respectives des corporations professionnelles et des établissements universitaires. La question du partage des responsabilités constitue un obstacle majeur et incontournable à la mise en oeuvre de mécanismes de collaboration satisfaisants. Nous sommes convaincus qu'à défaut de clarifier les principes qui sous-tendent cette question préalable, nos efforts risquent de ne pas produire les résultats escomptés.

J'ajouterai que, dans son avis de 1984, sur le rôle de l'université dans la formation professionnelle, le Conseil des universités propose, à la section 2.1, un modèle de partage des responsabilités en matière de formation professionnelle, dont les bases nous paraissent toujours valides, et qui mériterait d'être retenu. (10 h 20)

Et, plus loin, le président de la CREPUQ ajoute: Au plan des modalités, nous sommes favorables à l'idée que les membres des comités de formation soient désignés par l'autorité la plus élevée de leur organisme. En ce qui nous concerne, il est essentiel de s'assurer que nos représentants — c'est-à-dire les représentants des universités — soient en mesure d'adopter des points de vue qui tiennent compte des grands paramètres de gestion et de développement qui orientent les directions académiques de nos établissements.

C'est pourquoi nous appuyons la proposition de l'Office selon laquelle les délégués des établissements universitaires auprès des comités de formation, donc les interlocuteurs des universités auprès des corporations, soient désignés par la Conférence des recteurs et des principaux des universités du Québec.

On affirme clairement ici notre accord avec les propositions de l'Office à l'effet que la consultation de la CREPUQ soit une consultation nécessaire et obligatoire. Je rappelle que, dans l'avis de 1984, justement, du Conseil des universités, c'était un point que le Conseil reprochait aux universités, de ne pas avoir adopté ou de ne pas avoir su adopter, dans le passé, en

matière de collaboration avec les corporations professionnelles, des points de vue cohérents et concertés, ce que, depuis, je pense, nous avons largement corrigé au sein de la CREPUQ. C'est la raison pour laquelle nous appuyons grandement cette disposition de l'Office et ses intentions de consulter et de se référer à la CREPUQ, pour ce qui concerne les points de vue universitaires. Voilà, M. le Président.

Le Président (M. Gobé): Merci beaucoup. M. le ministre, vous avez maintenant une période de 20 minutes.

M. Savoie: Merci, M. le Président.

Permettez-moi tout d'abord de saluer les représentants de la Conférence des recteurs et des principaux des universités du Québec. Le mémoire qui a été déposé touche des éléments qu'on n'a pas eu l'occasion encore de discuter à cette commission. Ce qu'on constate, toutefois, c'est qu'il y a un accord sur le principe et les orientations générales, qui visent, évidemment, à maintenir un niveau d'excellence au niveau de la formation universitaire, pour 18 corporations professionnelles, et à maintenir des niveaux d'échanges entre les corporations, l'Office et, évidemment, la Conférence des recteurs.

Vous soulignez dans votre mémoire qu'il n'y a pas de précisions sur la nature des modalités que pourrait fixer l'Office, ni sur l'objet de la consultation obligatoire à laquelle il devra se livrer, ni sur d'autres éléments. Est-ce que vous avez des suggestions sur les mécanismes de consultation qui pourraient être utilisés, d'une façon précise?

M. L'Écuyer: Bien, l'Office nous a fait déjà des propositions en ce sens: la mise sur pied de comités de formation, avec laquelle... Nous sommes tout à fait d'accord que la collaboration avec les corporations professionnelles devrait se faire dans le cadre de ces comités de formation. Les comités qui ont été mis de l'avant, ou la proposition de l'Office est que ces comités soient des comités opérationnels, composés d'un nombre restreint de personnes, d'un nombre égal de représentants des universités et des corporations professionnelles, ce qui nous paraît tout à fait correct. Nous ne demandons pas que toutes les universités soient représentées, toutes les universités impliquées dans une formation, mais plutôt que nous ayons un groupe de personnes qui soient mandatées par la Conférence des recteurs pour représenter les universités québécoises auprès des corporations. Alors, évidemment, ce seront habituellement des professionnels, mais ça n'exclut pas que d'autres personnes aussi puissent s'intégrer. Mais il s'agit de groupes restreints.

Ce qui, par ailleurs, nous importe beaucoup, ce sont les mandats de ces comités-là, les comités de formation professionnelle. La proposition actuelle de l'Office va très loin. Il propose que les comités de formation professionnelle aient des mandats d'évaluation ou de suivi de chacun des programmes de formation. Sans être en désaccord complet avec cette proposition, nous ne voudrions pas, par ailleurs, que toute modification, même mineure, doive être approuvée par chacun des comités de formation. Mais nous sommes tout à fait d'accord que, lorsque nous procédons à des modifications majeures de nos programmes de formation ou, de toute façon, à intervalles réguliers, ces comités de formation puissent, soit directement ou soit dans le cadre d'évaluations ou d'accréditations, parce que vous savez que nous avons plusieurs programmes qui sont accrédités professionnellement... Alors, que ces comités aient un droit de regard et puissent exprimer leur opinion sur les programmes qui devraient être reconnus comme donnant accès à la profession ou non. Alors, c'est vraiment dans le cadre de ces comités-là.

C'est une dimension qui, pour nous, est extrêmement importante, que nous puissions discuter au niveau des programmes, que la collaboration ne se fasse pas, disons, par voie de sanction, sous forme, par exemple, d'examens finals ou autres, qui sont souvent très, très difficiles à administrer. Vous savez, il y a certaines corporations qui imposent des examens dont la facture est même externe au Québec, qui sont très, très difficiles à suivre. Alors, il faut qu'on comprenne bien, avec les corporations, qu'on s'entende sur les standards, c'est-à-dire le type de compétence qu'ils attendent de nous, mais, inversement, il faut que les corporations comprennent que nous avons un mandat, de par la loi, qui nous oblige à garantir nos diplômes, à assurer que nos diplômes sont d'une qualité appropriée, et non seulement sur le plan professionnel, parce que nous formons des professionnels, bien sûr, mais nous formons aussi des citoyens.

Donc, il y a une dimension plus large, plus générale, et toutes nos universités ont des objectifs de formation qui dépassent, bien entendu, les créneaux plus étroits des corporations professionnelles. Alors, c'est un peu dans le cadre de ces comités que nous souhaitons que ces choses soient abordées, soient discutées ouvertement, franchement. Nous sommes tout à fait ouverts à une collaboration dans ce sens.

M. Ouellet (Jean-Guy): Peut-être, pour ajouter à ce que M. L'Écuyer disait, dans la lettre que le président de la Conférence, je pense, vous a adressée — ou est sur le point de le faire — à M. Mulcair, il y a une condition fondamentale pour que ces comités fonctionnent: je pense que c'est de mieux délimiter les responsabilités et juridictions respectives. Ce qu'on semble voir dans beaucoup de professions, c'est un peu un envahissement du territoire des établissements d'enseignement et de formation par les corporations professionnelles, avec des conditions supplémentaires.

Je peux vous donner certains exemples. Celui des sciences comptables, où un étudiant, avec un profil de formation, qui peut être variable, a accès à un examen de la corporation immédiatement après avoir reçu son

diplôme de l'université. Cet examen, bien souvent, est dissocié, au niveau de l'évaluation, du processus de formation. Donc, cet examen est contrôlé entièrement par une corporation. Les éléments du contenu de l'examen sont connus, les paramètres pour l'évaluer le sont moins, ce qui a pour effet que c'est presque un deuxième jugement consécutif à une attestation que les établissements de formation, dont elles ont la responsabilité et le mandat... et ça, ça place, je pense, nos étudiants, nos récents diplômés, dans des situations de plus en plus difficiles. On n'a qu'à regarder les résultats récents de nos étudiants québécois à ces examens, et je pense qu'on a des résultats assez catastrophiques. Ça nous apparaît de plus en plus difficile de préparer ces étudiants, parce qu'on a effectivement dissocié la formation de l'évaluation.

Les juridictions nous apparaissent importantes. Les comités, je pense, sont importants, et ces comités, dans la nouvelle formule, lorsqu'on parle d'une représentation identifiée par la CREPUQ, ce sont les établissements d'enseignement qui identifient ces personnes et qui ont la responsabilité, pour ces établissements, de siéger sur les comités. Ce qu'on a vu, dans le passé, bien souvent, c'est des professeurs qui proviennent des universités, mais qui n'ont pas nécessairement le mandat de représenter les universités. Ça, c'est toute une différence, très fondamentale, dans le niveau et la qualité de la représentation.

Donc, là-dessus, on a l'exemple que je vous donnais en sciences comptables. On en a un autre, que je pourrais vous donner, qui est en droit notarial, où on a un examen. Récemment, on a mis sur pied un groupe de travail des directions des facultés de droit, et la recommandation est unanime à l'effet d'éliminer cet examen-là, et pour des motifs tout autres. Ce n'est pas parce que le processus amène un taux d'échec très important, c'est qu'il a un effet sclérosant sur les programmes, parce qu'on est trop obligé de s'aligner sur un contenu d'examen qui fait que la refonte des programmes devient très difficile. Donc, c'est pour d'autres motifs, mais on en arrive quand même à une situation qui demande que l'on se repositionne, je pense, respectivement au niveau des corporations et des établissements.

C'est à souhaiter que ces comités de formation, si on réussit à bien départager les responsabilités, nous amènent à, disons, mieux cheminer et à mieux préparer, je pense, nos futurs professionnels à avoir accès réellement à une profession. Actuellement, on peut s'interroger sur toutes les conditions supplémentaires d'accès à la profession, et, bien souvent, on a un mélange avec l'intégration professionnelle et toutes sortes de conditions assorties à l'intégration professionnelle. (10 h 30)

M. Savoie: La situation au Québec, donc, évolue. On constate, bon, des échanges, qu'il y a des difficultés ici et là, mais rien de substantiel. Alors, je me demandais, vis-à-vis, par exemple, d'autres pays, la France ou peut-être certains États aux États-Unis, si vous avez des points de comparaison. Est-ce que les structures et les approches sont semblables, ou est-ce qu'il y a des différences considérables quant à la relation entre les corporations et les universités?

M. L'Écuyer: Écoutez, il y a des similitudes très importantes avec ce qui se passe aux États-Unis, où vous avez des organismes d'agrément professionnel qui ont des relations avec les corporations professionnelles. Nous sommes, de ce point de vue là, très nord-américains, et il est important que nos professionnels soient formés suivant des standards qui sont les standards nord-américains. Sur ce plan-là, nous sommes tout à fait d'accord. C'est une préoccupation extrêmement importante et, en même temps, très préoccupante. Il faut comprendre que ces standards-là s'élaborent souvent par comparaison d'une province à l'autre, d'un État américain à l'autre, et, graduellement, vous avez ou vous risquez d'avoir des espèces de concertations internationales sur les standards qui nous imposent, effectivement, et qui imposent au gouvernement aussi, des coûts très considérables. Quand vous allongez d'une année, comme dans certains cas — on a des requêtes — s'il faut allonger d'une année la formation professionnelle, alors cette dimension-là apparaît immédiatement dans les budgets des universités et ailleurs.

Donc, sur le plan nord-américain, on a beaucoup de similitudes avec ce qui se passe ailleurs. Le plan européen est un peu plus complexe, puisque vous avez des diplômes qui sont des diplômes d'État, dans certains cas. C'est plus difficile de faire le mariage avec ce qui se produit ailleurs. Il peut y avoir, d'ailleurs, des différences de standard d'un pays à l'autre.

Je pense qu'on peut donner un exemple de très bonne concertation entre les universités et une corporation professionnelle. C'est le cas du génie, où on a, depuis longtemps, de bonnes relations, qui ne se traduisent pas, comme disait M. Ouellet, par un examen final qui vient contrôler, mais qui... La Corporation des ingénieurs travaille directement avec nous sur les programmes. Il y a d'autres corporations qui sont du même genre, mais je vous donne celle-là, à titre d'exemple. Si on a des corrections à apporter à nos programmes, bien, ils nous signalent un peu les exigences ou les standards. Nous nous efforçons de faire ça, de telle sorte que l'ingénieur qui sort, ici, au Québec, avec un diplôme universitaire, il est automatiquement admis à la profession. Il y a un «juniorat» — ça, c'est très bien comme condition supplémentaire, si vous voulez — une intégration à la pratique graduelle. Mais ce n'est pas la même situation que celle qu'on trouve effectivement en sciences comptables, où vous avez un examen qui nous est imposé, dont on connaît mal la façon de faire, qui est très difficile et qui impose à nos étudiants des contraintes.

Il faut bien le dire, on a quelquefois l'impression que certaines conditions supplémentaires — je dis bien l'impression, peut-être que les représentants des corpo-

rations pourront nous corriger là-dessus — que ces conditions supplémentaires servent à faire une espèce d'écrémage, si on peut dire, de la... Et, ça, c'est très mauvais pour nos étudiants. Je pense qu'on n'a pas le droit de faire ce genre de chose aux étudiants. Ou soit qu'on est pris, disons, un peu en otage par des corporations qui veulent augmenter le prestige de leurs diplômes en augmentant, en imposant des exigences supplémentaires aux programmes de formation. Ça aussi, c'est un peu un problème. Vous connaissez le cas des sciences comptables, où vous avez trois corporations à l'intérieur du champ. Ce n'est pas toujours très facile de dialoguer.

M. Savoie: C'est ça. Ce contexte existe, comme vous l'avez mentionné, à travers l'Amérique du Nord, en grande partie.

M. L'Écuyer: II existe avec des modalités. Évidemment, aux États-Unis, vous n'avez pas l'équivalent, habituellement — vous me corrigerez peut-être, le président de l'Office est à côté, là — mais je ne crois pas qu'il y ait, de façon générale, d'équivalent de l'Office des professions.

M. Savoie: Non, non.

M. L'Écuyer: Ce sont plutôt des comités d'accréditation.

M. Savoie: On parlait des examens universitaires...

M. L'Écuyer: Voilà!

M. Savoie: ...vis-à-vis des examens d'entrée au sein d'une corporation. On a ça, par exemple, pour les comptables aux États-Unis. On a également ça pour «the American Bar».

M. L'Écuyer: Voilà. Les vétérinaires, etc.

M. Savoie: Oui, c'est ça. Chacun, finalement, cherche à délimiter, comme vous l'avez mentionné. Oui, Mme Cinq-Mars.

Mme Cinq-Mars (Irène): J'aimerais intervenir là-dessus, parce que je pense qu'il y a un élément qui déborde le cadre spécifique de l'avant-projet de loi, mais qui est quand même important. Ce dont on parle, ici, c'est la raison pour laquelle on est donc en faveur de ce projet, c'est que ça va impliquer le dialogue. Il y a une culture du dialogue à instaurer, je pense, dans notre milieu, ici, au Québec. On vient de donner l'exemple du génie où ce dialogue-là existe, et il y a d'autres corporations, je pense, où c'est à mettre en place.

Donc, dans ce sens-là, l'avant-projet a des méri- tes. Cette culture du dialogue veut dire comprendre justement les objectifs réciproques et les juridictions réciproques, mais ça veut dire aussi être souple dans la révision des comités de formation. C'est pourquoi, je pense, on propose de restreindre la composition du comité à des délégués qui sont représentatifs de leurs organismes réciproques; pas nécessairement ouvrir aux employeurs, aux étudiants, tout ça, ces gens-là peuvent être consultés à l'occasion des projets, mais ça veut dire aussi être efficace. Alors, dans ce sens-là, je pense qu'on a beaucoup de travail à faire.

Tant mieux si les principes qui sont ici nous amènent à cheminer vers ce dialogue et cette concertation. C'est une culture à instaurer ici, je pense. Il y a eu beaucoup de méfiance, si je peux dire, de part et d'autre — pour être moi-même une professionnelle, je peux en parler — mais ceci nous amènera sur la bonne voie, je pense. C'est un pas dans la bonne direction.

Le Président (M. Gobé): Mme la députée de Terrebonne, vous avez la parole.

Mme Caron: Merci, M. le Président.

Alors, Mme Cinq-Mars, M. L'Écuyer, M. Ouel-let, je vous remercie pour votre présentation. J'ai peut-être une déformation professionnelle, mais, comme exenseignante, il m'apparaît que, finalement, au niveau de la formation, on n'est jamais suffisamment exigeant. On peut toujours aller plus loin, on peut toujours souhaiter une amélioration du système, et, à cet égard, je pense que ça m'apparaît être, pour la protection du public, le meilleur élément, c'est-à-dire la formation. Même si on a un bon système disciplinaire, je pense qu'il faut se souhaiter à tous, comme utilisateurs des services des professionnels, que nos professionnels soient d'abord et avant tout compétents, pour que nous n'ayons pas à déposer des plaintes. Ça m'apparaît être primordial.

Je pense qu'il va falloir — et vous l'avez bien mentionné, Mme Cinq-Mars — travailler au niveau de la culture du dialogue, pour tenter de toujours améliorer ce système, tant au niveau de la formation... et j'irais même plus loin, au niveau de la formation continue. Je pense, en particulier, à certaines professions. Si les professionnels ne font pas de la formation continue, au bout de quelques années, même si le diplôme était excellent au moment où les étudiants l'ont reçu, ils sont dépassés. Si on se contente de ça, on n'assure pas la protection du public.

L'avant-projet de loi amène un transfert — vous l'avez bien défini, vous le répétez dans votre conclusion — c'est le transfert à l'Office des professions du pouvoir réglementaire de fixer les modalités de collaboration, pouvoir qui appartenait au gouvernement, jusqu'à maintenant. Ma première question sera à l'effet... Qu'est-ce qui vous porte à croire que ce transfert de pouvoir serait plus efficace? (10 h 40)

M. L'Écuyer: Essentiellement, nous travaillons,

depuis déjà plusieurs mois — et j'ajouterais plusieurs années — de concert avec l'Office et nous avons l'impression que c'est vraiment au niveau de l'Office des professions que la compréhension des problèmes que nous pouvons vivre, dans ce domaine, est probablement la plus claire, la plus nette. De ce point de vue, notre relation avec l'Office, c'est une très, très bonne relation. L'Office a un rôle vis-à-vis des corporations professionnelles; il est aussi en mesure de comprendre le type de besoin et, donc, de favoriser le rapprochement. C'est l'interlocuteur immédiat des corporations professionnelles, plus que le gouvernement, qui est tout de même placé à un niveau déjà plus loin, plus lointain, et avec lequel nous avons moins directement des relations. Nous sommes tout à fait... Nous serions tout à fait satisfaits, sur ce plan, que l'Office, dans ce type de domaine, jouisse de responsabilités plus larges que celles qui lui sont reconnues, actuellement. Je ne sais pas si mes collègues veulent ajouter des choses là-dessus?

Mme Cinq-Mars: Je pense que le concept du rapprochement dont vous venez de parler, c'est peut-être une idée clé, là, qui permet, dans le fond, de, j'allais dire, formaliser ce qui est une pratique, depuis quelques années. Aussi, le fait que les comités de formation vont être révisés dans cette perspective, ça va nécessiter une sensibilisation auprès des différents professionnels, dans les différentes corpos et... On pourrait penser, même, par extension, que les associations professionnelles aussi, même si elles n'y étaient pas obligées, pourraient s'inspirer de ce modèle. Donc, il y a là un mécanisme, j'allais dire, d'éducation qui va être très formateur pour tout le monde.

Mme Caron: Vous nous avez, évidemment, fait part de l'importance de ce dialogue, d'établir des liens harmonieux — puis, je pense que vous avez parfaitement raison. Je me dis que, pour établir des liens harmonieux, il faut déjà qu'au point de départ les différents intervenants considèrent que la structure qu'on leur propose est une structure qui répond à ce besoin d'harmonie.

Sur ce chapitre du pouvoir réglementaire, puis, principalement sur l'article 12.1, pour fixer les modalités de la collaboration entre la corporation intéressée et les autorités des établissements d'enseignement du Québec, dans le mémoire du Conseil interprofessionnel, on nous dit, et je les cite, c'est très court: «En vertu de l'article 12.1, l'Office peut, par règlement, forcer, en quelque sorte, la collaboration entre les corporations professionnelles et les établissements d'enseignement du Québec en lieu et place du gouvernement. Compte tenu de la consultation en cours, menée par l'Office, le Conseil est d'avis d'en attendre les résultats, les corporations nous ayant signifié leur responsabilité première dans ce dossier.»

Effectivement, depuis qu'on a commencé les audiences, plusieurs corporations semblaient un peu réfractaires à ce transfert de pouvoir et semblaient un peu inquiètes, là, de l'élaboration de cette nouvelle structure. Alors, ça m'apparaît, peut-être, un des éléments qui peut, peut-être, un peu, nuire à l'harmonie, là, que nous souhaitons tous.

M. L'Écuyer: On ne sait pas exactement quelles sont les raisons des corporations. Ce qu'on peut vous dire, par ailleurs, c'est que, dans le contexte actuel, nous avons, nous, du point de vue des universités, beaucoup de difficultés, parce que, justement, nous estimons que la concertation ne se fait pas bien avec les corporations. Vous savez, quand une corporation vous dit ça, il peut y avoir des raisons qui ne sont pas tout à fait... Écoutez, on ne veut pas prêter de mauvaises intentions, mais il faut comprendre que, dans les 18 comités ou corporations, où ces choses existent actuellement, dans bien des cas, vous avez des corporations où, disons, les représentants universitaires, dans le passé — nous en prenons notre responsabilité là-dessus, c'est très clair — ont quelquefois été... Par exemple, des professeurs — M. Ouellet le signalait — impliqués dans le même domaine, ça fait des relations qui sont de type très incestueux et qui nous amènent finalement des problèmes, plus de problèmes qu'autre chose.

Je ne veux pas donner d'exemple précis là-dessus, mais vous en avez tous en tête. On a eu des facultés qui étaient des espèces de royaumes à l'intérieur de l'université. Nous ne pouvons pas gérer l'université de cette façon-là, et nous ne pourrons plus le faire. C'est la raison pour laquelle nous avons bien l'intention, quel que soit le type de modalités qui seront mises de l'avant dans le futur, de le faire d'une façon beaucoup plus concertée et organisée que nous ne l'avons fait dans le passé. Donc, de ce point de vue là, nous allons certainement prendre nos responsabilités. Nous croyons que l'Office peut jouer un rôle extrêmement utile, parce que c'est un organisme avec lequel on peut dialoguer de façon directe. J'ai tout le respect pour le gouvernement, mais je ne trouve pas le même type d'interlocuteur, si je peux me permettre, comme ça, au niveau du gouvernement. Peut-être que... Mais j'ai cru comprendre que l'Office, à bien des égards, a des mandats du gouvernement, justement, pour exercer ce type de responsabilité.

Bon! Si les corporations préfèrent qu'éventuellement le gouvernement prenne, détermine lui-même ce type de relations, passe encore, mais c'est évident qu'on craint un peu une certaine politisation à ce moment-là, et ce n'est pas des problèmes qui sont faciles à régler. C'est des problèmes qui sont très difficiles, souvent, à cause des impacts de différentes natures. Nous, on préférerait que ce soit remis à un organisme qui a des responsabilités plus directes et qui est plus en mesure de favoriser le rapprochement, le dialogue, comme on le disait tout à l'heure.

Mme Caron: Je pense que l'élément essentiel que vous nous apportez, c'est qu'effectivement, peu importe

la structure, de toute façon, il va falloir que cette concertation-là, elle existe. Elle est nécessaire, et on a peut-être même certains retards au niveau de certaines corporations.

Au niveau des 18 comités existant présentement, parmi ces 18 corporations, vous touchez à des corporations à champ exclusif et à des corporations à titre réservé. Le partage, il est de combien?

M. L'Écuyer: Je n'ai vraiment pas d'idée du partage exact entre... mais nous touchons à tous les types de corporations. Par exemple, il y a des comités comme tels... Mon Dieu! Il y en a en psychologie, il y en a en urbanisme, je crois, en médecine, sûrement, en droit...

Mme Caron: Personnellement, si c'était possible de nous faire parvenir les 18 qui sont déjà en place, j'apprécierais. Oui?

M. L'Écuyer: O.K.

M. Ouellet: Peut-être un point là-dessus. L'existence et la fonctionnalité des comités, je pense qu'il y a tout un écart entre les deux. Je pense qu'il y a beaucoup de comités où on a effectivement des représentants, mais qui ne se réunissent pas, et où le climat, actuellement, disons, n'est pas des plus sains. Lorsque vous disiez tout à l'heure que l'article 12.1 pourrait un peu, à un certain moment donné, forcer la collaboration, je pense qu'actuellement il y a des temps morts, dans plusieurs corporations, entre les établissements d'enseignement et les membres qu'ils ont désignés. Je pense que ce nouveau cadre pourrait possiblement raviver un peu certains de ces comités, qu'on pourrait appeler un peu fantômes, dans le sens qu'ils ne sont pas fonctionnels. Donc, la liste ne vous aiderait peut-être pas nécessairement, et je pense qu'il faudrait voir s'ils sont fonctionnels ou non, opérationnels ou non.

Mme Caron: Oui, Mme Cinq-Mars, vous voulez ajouter? (10 h 50)

Mme Cinq-Mars: Comme je le disais, tout à... Bon, il y en a très peu qui, actuellement, fonctionnent à satisfaction. On a mentionné le génie, la médecine; il y a un comité de formation en architecture qui est formé, mais qui, jusqu'à l'année dernière, était un peu cahin-caha. L'important, comme dit M. Ouellet, c'est qu'on a ici un cadre, mais il ne suffit pas. C'est sûr que, comme je le disais tout à l'heure, on aura besoin, je pense, d'un processus de sensibilisation. Et nous sommes prêts, je pense, comme CREPUQ, à jouer notre part là-dedans, pour inciter, pour amener les gens à comprendre les ojectifs visés ici et à mieux fonctionner. Il y a un problème de fonctionnement aussi qu'il va falloir regarder.

Mme Caron: Quand je vous parlais de cette liste, c'est qu'en fait je me disais qu'il aurait été intéressant, afin de pouvoir avoir une vision d'avenir, de connaître, finalement, comment ça fonctionne, actuellement, les 18 comités, si, effectivement, il n'y a que des noms de comités et que ça ne fonctionne pas du tout. Je pense que, pour avoir... Ça aurait été intéressant d'avoir un portrait de la réalité actuelle. Je pense que ça aurait pu nous guider.

M. L'Écuyer: On peut certainement vous envoyer quelques informations à ce sujet-là. Ce que je vous dirais, par ailleurs, c'est qu'en termes réels, dans la pratique de tous les jours, vous avez des comités qui sont effectivement de bons comités, qui fonctionnent bien. C'est plutôt l'exception que la règle. Et, pour vous donner juste un exemple de la difficulté de gérer ça, vous avez parlé des corporations, je vous dis, on n'a rien, absolument... On souhaite un dialogue, mais un dialogue réel avec les corporations. Ce qui se passe, dans bien des cas... J'ai un cas, en particulier, en tête: celui de la psychologie. À une certaine époque, vous aviez, à la tête de la Corporation professionnelle des psychologues, des gens qui souhaitaient voir s'implanter au Québec un modèle, qui était celui du doctorat, Ph.D., un doctorat de troisième cycle, comme donnant accès à la Corporation. C'est un peu, je crois, le modèle américain, ou une partie du modèle américain qu'on souhaitait transposer ici.

À ce moment-là, qu'est-ce qui se passe? Il y a évidemment les psychologues... Chez nous, on a des membres de la Corporation professionnelle des psychologues dans nos universités. Ces gens-là sont en contact avec la profession, bon, élaborent, et, tout à coup, on se retrouve, dans l'une ou l'autre de nos universités, avec un projet de doctorat comme le diplôme donnant accès à la corporation professionnelle. Là, tout à coup, les gens nous disent: Ah! on a l'appui de la corporation, la corporation veut ça, sauf que ce n'est pas la corporation qui détermine, c'est le ministre, et sur recommandation de toute une série d'intervenants, dont le Conseil des universités, dont les universités respectives et la consultation menée par l'Office.

Moi, je n'appelle pas ça — et nous n'appelons pas ça — de la coopération. Ce n'est pas organisé. C'est ça qui est le problème qu'on a avec les corporations, c'est que c'est des choses qui ne sont pas organisées. Tout à coup, on se retrouve devant un projet qui émane de l'un ou l'autre de nos établissements, qui a été élaboré souvent en concertation avec l'un ou l'autre de nos professeurs et des corporations. Et ça, on ne peut pas gérer ça, et on n'en veut plus de ce genre de choses. Le message qu'on est en train de vous dire, c'est: Nous sommes intéressés à dialoguer correctement, sur une base organisée et suivie avec les corporations. Dans ce sens-là, le projet de l'Office nous intéresse, si ça peut nous permettre d'en arriver à ceci.

Mme Cinq-Mars: Est-ce que je peux me permet-

tre de compléter?

Mme Caron: Oui, bien sûr.

Mme Cinq-Mars: Le projet, tel que nous l'avons compris, s'appuie quand même sur un diagnostic, également, qui nous a été présenté, qui a été discuté à la CREPUQ et que nous avons partagé, sur les difficultés encourues par les comités de formation. Parmi les difficultés — on en a mentionné certaines — il y a les missions des comités de formation aussi, qui étaient ambiguës, probablement interprétées de façon restrictive par certains, de façon trop large par d'autres. Alors, ici, encore une fois, il y a des balises, et on a mentionné ce sur quoi il fallait quand même faire attention; c'était le principe de la juridiction réciproque, des responsabilités réciproques.

Une fois que ça, c'est clarifié et qu'on n'a pas ici des mécanismes qui vont se superposer ou interférer sur ce qui existe déjà dans le système des universités, et qui ont comme objectif la qualité de la formation — je pense, par exemple, au processus d'évaluation auquel nous nous assujettissons maintenant — une fois que tout ça est démêlé, je pense qu'il y a des bénéfices à retirer du projet qui est proposé ici. On parlait aussi de la difficulté d'obtenir l'unanimité, et c'était dû — concernant les décisions à prendre — au problème de représentativité. Je pense que, ce qu'on a mentionné ici, comme étant nos réserves, faisait partie également du diagnostic établi par l'Office, et qu'on partageait.

Mme Caron: Je comprends que le diagnostic, selon vous, était vraiment bien posé. Lorsque M. L'Écuyer fait référence à certaines présidences, c'est évident que, dès qu'on parle de relations entre corporations, universités ou entre corporations et Office, entre corporations, universités ou gouvernement, peu importe, c'est évident que les personnes qui détiennent les postes, qui ont à faire cette négociation influencent toujours directement ces relations-là, et elles peuvent être plus ou moins productives, dépendamment des personnalités qui sont en place. Et ça, je pense qu'on a des exemples régulièrement. Vous avez raison là-dessus.

Au niveau des délais. Actuellement, lorsqu'il y a des changements à faire au niveau de la formation — si vous vouliez nous préciser — est-ce que c'est toujours très long? En tout cas, ça nous apparaît des processus très longs, au niveau des modifications. Est-ce qu'il y a des exceptions?

M. L'Ecuyer: Ça dépend beaucoup de la chose. S'il s'agit de créer un programme, c'est toujours très long, parce qu'une création de programme, il faut passer... On a des comités très stricts pour évaluer la qualité de nos programmes, et, de toute façon, il faut toujours soumettre à la ministre de l'Enseignement supérieur le projet de programme, pour fins de financement. Donc, habituellement, un nouveau programme, c'est deux ans minimum pour l'implanter, à partir du moment où il sort de chez nous.

Maintenant, quand c'est des modifications, quand une corporation, par exemple, dit, arrive avec... Après une bonne étude, quand on conclut, par exemple, avec une corporation, qu'au lieu de tel type de programme on aurait besoin de tel autre, nous pouvons fonctionner assez rapidement. À ce moment-là, nous ne procédons pas par les mêmes étapes. S'il s'agit d'une modification qui n'entraîne pas d'allongement ou de changement de niveau de programme, c'est quelque chose qui peut se faire dans des délais relativement brefs, d'un an. Il s'agit de s'entendre, et c'est ça que nous souhaitons. Mais, s'il faut créer un nouveau programme, ou s'il faut allonger un programme, bien, évidemment, la ministre de l'Enseignement supérieur, pour des raisons bien évidentes, veut avoir son mot à dire parce que, évidemment, ça va coûter des choses au gouvernement. À ce moment-là, il faut soumettre un projet d'allongement, et c'est plus...

Le Président (M. Gobé): Alors, merci, monsieur, madame.

Mme Cinq-Mars: Est-ce que je peux dire juste une petite chose? Je m'excuse, M. le Président.

Le Président (M. Gobé): Oui. Allez-y madame.

Mme Cinq-Mars: Parce que c'est important. Il ne faut pas penser, donc, que ces comités de formation là peuvent, à chaque année, réévaluer et revoir des programmes. C'est complètement irréaliste et ce n'est pas efficace. Ce n'est pas nécessaire, en fonction des objectifs prévus ici.

Le Président (M. Gobé): Alors, merci. Merci, Mme la députée de Terrebonne.

M. le député de Rimouski, vous m'aviez fait signe. Avez-vous une...

M. Tremblay (Rimouski): Est-ce qu'il reste du temps ou pas?

Le Président (M. Gobé): Rapidement pour vous, connaissant la clarté de vos interventions et leur rapidité habituelle.

M. Tremblay (Rimouski): Oui, oui, oui. Alors, M. le Président, si je comprends bien le rapport de la Conférence des recteurs, eux, ils seraient favorables à la disposition de l'avant-projet, à savoir que l'Office serait l'organisme coordonnateur des comités de formation et, par conséquent, plus expéditif, d'une part, et, en même temps, aurait une espèce de mandat pour forcer les corporations et les universités à s'asseoir à une table et à essayer de... C'est un peu ça votre... Parce que ce serait plus expéditif, à mon sens, beaucoup plus effica-

ce. C'est une question d'efficacité. C'est ça qu'on doit comprendre? Très bien. J'ai compris. Merci.

Le Président (M. Gobé): Merci, M. le député de Rimouski.

M. le ministre, il vous reste 1 minute et 37 secondes.

M. Savoie: II est chanceux, lui. Franchement... Tout simplement pour remercier les gens de la CREPUQ, souligner également qu'il va y avoir des modifications apportées à 12.3, pour qu'on puisse inclure la Fédération des cégeps. J'aimerais dire, finalement, expliquer également que le mécanisme demeure toujours sous le contrôle du gouvernement. Même s'il y a une réglementation qui va être créée, cette réglementation est sujette à l'approbation du gouvernement, et ainsi de suite. Alors, il n'y a pas vraiment de transfert à l'Office de façon aveugle. Il y a un contrôle continu avec suivi, et les mécanismes d'échanges entre les corporations, les universités et l'Office, c'est une relation qui est trop délicate, qui est trop importante pour ne pas la soumettre à la surveillance du gouvernement. À cause des enjeux, c'est trop fondamental pour notre société.

À date, ce qu'on constate, c'est que, finalement, l'orientation qui est donnée, comme a eu l'occasion de le souligner le député de Rimouski, c'est la bonne voie, c'est effectivement une collaboration, une centralisation au niveau des tables, des échanges — ça semble être souhaité — et, que, malgré des différends que je considère normaux entre les corporations et les universités, il est peut-être même souhaitable qu'il y ait ce frottement, cette friction, de temps à autre, pour justement permettre, là, que le but — il faut bien le reconnaître — d'une université, c'est une chose, comme l'a indiqué M. L'Écuyer, et le but d'une corporation, une autre, et que, finalement, la société y trouve un intérêt, peut-être, lorsque la formation universitaire excelle et lorsque l'application corporative excelle aussi.

Alors, j'ai trouvé le mémoire intéressant et il y a des éléments là-dedans qui seront certainement retenus. On apprécie grandement votre présence ici ce matin. Je vous remercie. (11 heures)

Le Président (M. Gobé): Merci, M. le ministre.

Mesdames, messieurs, merci. Votre audition est maintenant terminée; vous pouvez donc vous retirer.

Je vais suspendre les travaux, mais, auparavant, je vais demander aux représentants de... Pardon. Nous avions annoncé, dans l'ordre du jour de ce matin, à partir de 11 heures, l'Ordre des arpenteurs-géomètres du Québec, mais il y a changement à l'ordre du jour, et nous allons maintenant recevoir la Corporation professionnelle des ergothérapeutes du Québec. Je leur demanderais de bien vouloir se présenter en avant. Je suspends la commission pour une minute.

(Suspension de la séance à 11 h 2)

(Reprise à 11 h 5)

La Présidente (Mme Hovington): La commission reprend ses travaux en recevant la Corporation professionnelle des ergothérapeutes du Québec — bonjour et bienvenue — représentée par Mme Françoise Rollin-Gagnon, présidente — bonjour madame — M. Réjean Pedneault, directeur général — bonjour — et Mme Nicole Ebacher, secrétaire. Bonjour.

Ebacher. Moi, j'ai connu un évêque qui s'appelait Mgr Ebacher. Est-ce que c'était parent?

Mme Ebacher (Nicole): J'ai la chance que ce soit mon oncle.

La Présidente (Mme Hovington): Ah! Ça me fait plaisir. Alors, bienvenue. Vous avez 20 minutes pour nous présenter votre mémoire. C'est Mme Rollin-Ga-gnon qui fera la présentation?

Corporation professionnelle des ergothérapeutes du Québec (CPEQ)

Mme Rollin-Gagnon (Françoise): Oui.

La Présidente (Mme Hovington): Nous vous écoutons.

Mme Rollin-Gagnon: Mme la Présidente, M. le ministre responsable de l'application des lois professionnelles, Mme la députée du comté de Terrebonne, MM. les députés membres de cette commission, je vous ferai part de quelques commentaires qui étaient contenus dans le mémoire qu'on a soumis et répondrai, par la suite, à vos questions.

Les membres du bureau de la Corporation ont pris connaissance du mémoire du Conseil interprofessionnel face à l'avant-projet de loi faisant l'objet des travaux de la commission et ils appuient généralement la critique qui est faite par cet organisme des propositions qui y sont contenues.

Dans son mémoire, la Corporation a surtout voulu insister sur les aspects qui lui sont apparus les plus préoccupants, compte tenu de son histoire, de sa culture propre et des responsabilités qu'elle exerce tant à l'égard de la profession elle-même qu'à l'égard de ses membres et du public.

La Corporation estime que l'avant-projet de loi ne répond pas à ses attentes à l'égard des carences du système actuel et en souhaite un remaniement fondamental. Nous considérons que cet avant-projet présente des risques face à l'équilibre des pouvoirs des divers acteurs du système professionnel et qu'il ne règle pas les problèmes liés au contexte économique et social profondément transformé dans lequel oeuvrent les professionnels au Québec. Après une brève présentation de notre profession, j'apporterai quelques critiques des dispositions de l'avant-projet se rapportant au titre réservé, au pou-

voir législatif de la Corporation, à la discipline de même qu'à la répartition des pouvoirs entre les différents acteurs du système.

L'ergothérapie ayant été élevée au rang de profession reconnue, il nous apparaît important de fournir à la commission quelques renseignements se rapportant aux activités professionnelles de nos membres ainsi qu'au caractère propre de notre corporation. Nos activités professionnelles sont décrites au Code des professions comme comportant tout acte qui a pour objet le traitement d'une personne en vue d'améliorer son indépendance fonctionnelle, principalement par l'utilisation d'activités de travail et autres activités humaines courantes. L'ergothérapeute est donc un professionnel de la santé oeuvrant, entre autres, dans le domaine de la réadaptation et qui vise, principalement par l'activité, l'autonomie maximale de la personne dans la vie de tous les jours. C'est par le biais d'entrevues, d'observations, de tests standardisés ou cliniques que l'ergothérapeute remplit ses responsabilités.

Le processus ergothérapique comprend plusieurs étapes distinctes allant de la réception d'une demande à l'évaluation, au traitement, au suivi ainsi qu'à l'évaluation des programmes d'intervention. L'ergothérapeute intervient auprès d'enfants, d'adultes et de personnes âgées présentant des problématiques variées en santé mentale ou en santé physique. Les services d'ergothérapie sont, entre autres, dispensés dans les centres hospitaliers, les centres de réadaptation, centres d'hébergement et de soins de longue durée, centres de jour, milieux scolaires, CLSC, ainsi qu'en pratique privée.

Notre corporation compte 1530 membres et est affiliée à l'Association canadienne des ergothérapeutes qui regroupe 6000 membres. Par son affiliation à cette Association, la profession canadienne est représentée à la Fédération mondiale des ergothérapeutes qui se compose de professionnels de 33 pays. L'âge moyen des ergothérapeutes québécois, qui sont des femmes à 92 %, est de 32 ans et la formation universitaire, de trois années. En plus de ses employés réguliers, la Corporation compte sur le travail d'une centaine de fidèles bénévoles. la cotisation est de 350 $ pour un budget annuel d'opération d'environ 600 000 $. selon nos estimations, une proportion de 40 % du budget, soit une somme d'environ 240 000 $, est annuellement allouée par la corporation directement aux activités de surveillance de l'exercice de la profession ou de la protection du public. effectivement, notre corporation croit que les activités suivantes: l'admission, l'information au client, les activités d'inspection professionnelle, l'établissement de normes de pratiques, l'édition, la publication et la diffusion d'une revue professionnelle ainsi que la formation continue, contribuent à la prévention des fautes professionnelles et, ainsi, à la protection du public de façon significative. (11 h 10)

En ce qui concerne le titre réservé, l'insatisfaction d'une majorité de corporations, dont la nôtre, face à leur statut de titre réservé n'est un secret pour personne. Les solutions adoptées jusqu'à maintenant par le gouvernement ont essentiellement visé, sur le plan législatif, à tenter de réduire la confusion que pouvaient créer les titres équivalents. Une solution de ce type est encore proposée dans Pavant-projet sous étude. Il s'agit de l'article 95, qui introduit un nouvel article, 183, au Code des professions, et qui, pour en mesurer la portée, doit être lu avec l'article 2 du projet de loi 72 qui se trouve devant l'Assemblée nationale. Une telle approche pourrait être valable sans le rôle ambigu des employeurs gouvernementaux de nos membres qui, en permettant les doubles appellations dans les conventions collectives auxquelles sont soumis les ergothérapeutes, viennent en quelque sorte réduire à néant l'effet de ces propositions.

Nous estimons que le fait de réserver de nouveaux titres, abréviations ou initiales, à la fois dans la loi et par règlement, dans deux projets législatifs différents, démontre à quel point le problème est présent et les solutions envisagées complexes. Pour la Corporation, une proposition de ce type n'en est pas une pour la clientèle desservie par les ergothérapeutes dans le réseau de la santé et des services sociaux qui doit accepter, souvent à son insu, d'être traitée par deux catégories de personnel: des professionnels dont la compétence est vérifiée, les ergothérapeutes, soumis au secret professionnel et à des obligations déontologiques strictes, et par d'autres personnes, les titres équivalents, qui, depuis 1974, profitent gratuitement du statut des ergothérapeutes pour continuer d'oeuvrer dans les mêmes activités que nos membres sans les mêmes contrôles ni les mêmes obligations vis-à-vis du public.

Les modifications proposées, à notre avis, ne diminueront en rien la fréquence des informations dont sera saisi le syndic quant à l'utilisation illégale du titre, et il sera toujours aussi impuissant à agir, compte tenu du contexte mentionné précédemment.

Enfin, à l'heure où le gouvernement songe à proposer la reconnaissance de certains thérapeutes alternatifs, il vaudrait mieux qu'une solution à cette question du statut des corporations à titre réservé soit mise de l'avant au préalable afin d'éviter d'ajouter à la confusion et à la frustration actuelle.

Parlant du pouvoir réglementaire, c'est en 1984 que les corporations, par le Conseil interprofessionnel, avait soumis au ministre responsable de l'époque un rapport sur le processus d'adoption des règlements des corporations. Il aura fallu près de 10 ans pour que l'administration réagisse sur cet important aspect du rôle des corporations en proposant, quant à lui, un processus d'adoption qui, malgré certaines améliorations, risque de perpétuer les principales critiques du système actuel que sont les délais et l'ingérence indue.

Concernant les délais, notre expérience, au fil des années, nous indique que le délai moyen entre l'adoption d'un règlement par la Corporation et son approbation par le gouvernement est d'environ trois années,

bien qu'en certaines circonstances ce délai ait pu être considérablement réduit. Si on s'explique mal, à l'article 95.1, l'instauration d'un régime particulier pour des règlements, tels la procédure d'inspection professionnelle et les stages de perfectionnement, nous estimons inadéquate la rédaction de l'article 95.2 qui ne prévoit aucun processus spécifique dans l'hypothèse de la formulation d'un avis contraire de l'Office. Nous constatons en outre que, ni le contenu ni la limite de cet avis contraire ne sont précisés. Nous craignons que de telles orientations laissent place à l'arbitraire.

Au sujet de l'admission, alors qu'avant la réforme des professions une large discrétion était confiée aux corporations en la matière, il apparaît de plus en plus évident qu'un retour à une certaine discrétion est maintenant approprié. Cependant, la méthode préconisée, visant à réagir au cas par cas en introduisant des éléments de discrétion selon l'actualité, nous semble inadéquate.

Concernant plus particulièrement les pouvoirs de l'Office, du gouvernement et de la Corporation en matière de reconnaissance de diplômes, de comités de formation et de conditions supplémentaires, les solutions proposées nous semblent discutables. Tout en reconnaissant le rôle des maisons d'enseignement dans la formation de base, il n'en reste pas moins que le contrôle de la compétence assumé par la Corporation sur l'ergothé-rapeute s'exerce pendant toute la vie professionnelle de ce dernier, et non seulement à l'occasion de ses études. Cette lourde responsabilité confiée à la Corporation ne se trouve nulle part assise confortablement dans la loi. Nous estimons que c'est à la Corporation, en étroite collaboration avec le gouvernement, et sous réserve des consultations appropriées, de déterminer les règles du jeu dans ces domaines, compte tenu de ses obligations. Une autre avenue, plutôt bureaucratique, telle qu'envisagée aux articles 4 et 5 de l'avant-projet, aurait pour effet, non seulement de rendre infantile l'ensemble de nos activités, mais encore de remettre en question le fondement même du corporatisme, soit l'autoréglemen-tation.

En bref, concernant le processus d'adoption des règlements, ces derniers devraient entrer en vigueur sur adoption ou dépôt auprès du gouvernement qui ne pourrait s'y opposer qu'à l'intérieur d'un délai et d'un avis motivé. L'avis en question devrait suggérer les avenues correctives possibles.

Traitant du pouvoir disciplinaire, nous croyons qu'en résumé les propositions se rapportant au processus disciplinaire dans l'avant-projet visent à contrôler et à encadrer la discrétion du syndic de ne pas porter plainte et à faire rapport à l'Office lorsque son enquête dépasse 60 jours.

À notre avis, ces propositions, en plus de mettre en doute la confiance accordée au syndic par la loi et par ses pairs, font état d'une méconnaissance profonde du rôle et des activités courantes de notre syndic. En effet, l'expérience vécue à la Corporation par le syndic est à l'effet qu'une forte proportion de ses interventions concernent l'usurpation du titre réservé, l'information quant au champ de pratique des ergothérapeutes, ainsi que des conditions plutôt administratives dans lesquelles ceux-ci exercent. Dans ce contexte, et compte tenu de son rôle, il nous apparaît, en effet, que c'est au syndic et à lui seul qu'incombe la décision de saisir ou non le comité de discipline du cas d'ergothérapeutes faisant l'objet de soupçons.

Nous souhaitons qu'il demeure autonome dans l'exercice de ses fonctions en regard de la loi et de nos règlements. Les mécanismes actuels, octroyant au président un rôle de surveillance générale des affaires de la Corporation et au bureau un pouvoir directif vis-à-vis du syndic, nous apparaissent à la fois propices à préserver à ce dernier toute la discrétion nécessaire à la poursuite de ses activités et permettent, en outre, par le biais du président, ou à l'initiative du bureau lui-même, de saisir directement le comité de discipline de toute plainte qui paraît justifiée. Toute personne pouvant également porter elle-même une plainte disciplinaire contre un membre de notre profession, sans pour autant qu'elle soit justifiée, comme c'est le cas pour le syndic ou pour le bureau, on ne peut que s'interroger sur les motifs de modifications au système prévues dans l'avant-projet.

L'ensemble des dispositions actuelles nous apparaissent donc assurer la protection du public dans le contexte où la discipline demeure la justice de la profession et où, à cause de son autonomie par rapport aux justices civile et pénale, une personne ayant subi un dommage suite aux agissements d'un ergothérapeute conserve tous ses autres recours.

Enfin, les traditions variant considérablement d'une corporation à l'autre dans cette matière, il est important de ne pas imposer une règle générale pour solutionner des problèmes spécifiques. Si, en effet, des aménagements s'avèrent nécessaires dans le cas de certaines professions, que l'on ait recours à des ajustements dans le système plutôt que d'alourdir inutilement et sans évaluation un processus qui, quant à nous, donne de bons résultats.

En ce qui concerne la répartition des pouvoirs, la Corporation considère qu'un des éléments majeurs de la réforme des professions des années soixante-dix fut incontestablement la participation du public à l'administration des affaires des corporations. En ce qui concerne notre organisme, le rôle actif joué par les administrateurs nommés au sein du bureau a toujours été pertinent, et nous sommes particulièrement heureux de leur apport. (11 h 20)

Quant à l'Office, il se voyait conférer, dans cette même réforme, un rôle de surveillance et de contrôle dont la fonction principale est de voir à ce que chaque corporation professionnelle s'acquitte adéquatement de sa tâche de protection du public. Cette mission de surveillance de la part de l'Office s'exerce principalement en veillant à ce que chaque corporation établisse ses règlements obligatoires, d'une part, et par l'exercice

d'une surveillance particulière sur l'administration financière des corporations, d'autre part.

Comme on le sait, le fait pour une corporation d'avoir effectivement exercé ses pouvoirs réglementaires ne la met pas nécessairement à l'abri de toute intervention de l'Office, qui, à l'égard des règlements essentiels à la protection du public, est investie d'un pouvoir d'intervention qui va de la modification à la substitution. Traditionnellement, c'est sur le ministre responsable et sur le gouvernement que le contrôle ultime du système repose, par leur pouvoir d'approbation de règlements des corporations et de l'Office et par leur pouvoir de tutelle sur les corporations déficitaires.

C'est cet équilibre entre l'idéologie technocratique et le corporatisme traditionnel qui nous semble maintenant remis en question, tant par le rôle de plus en plus interventionniste joué par l'Office que par les termes de Favant-projet et plus particulièrement par certains articles qui permettraient à l'Office de se substituer au mécanisme d'une corporation et qui doteraient cet organisme de pouvoirs d'enquête au cas où, par sa seule appréciation, une corporation n'assumerait pas la protection adéquate du public.

Notre corporation s'oppose vigoureusement à un tel dérapage. Nous sommes d'avis que ces pouvoirs, à cause du contenu essentiellement sociopolitique de la notion de protection du public, auraient l'effet d'une mise en tutelle constante et permanente des corporations professionnelles. Ces nouveaux pouvoirs ne peuvent en outre qu'avoir une influence néfaste sur la portée même du rôle accru que voudrait se donner l'Office à l'égard de l'ensemble de la réglementation professionnelle.

En bref, pour le bien du système en général et pour l'équilibre nécessaire entre les divers intervenants, nous préconisons que l'Office revienne à un rôle de surveillant du système chargé de faire rapport annuellement au gouvernement ou de façon ponctuelle en cas de déviation grave de la part d'une corporation. Quant au gouvernement, par le ministre responsable, il devrait conserver son rôle d'initiateur sur toute forme d'enquête ou de tutelle, le tout assorti des garanties nécessaires de légalité et d'équité qu'offrent les lois de ce pays.

En conclusion, l'avant-projet de loi faisant l'objet des travaux de la commission est décevant en ce que, sans évaluation et sans consultations préalables, il propose des changements majeurs dans l'équilibre des pouvoirs au sein du système. Ce qui est plus grave, c'est qu'en proposant au gouvernement d'étendre son contrôle sur l'ensemble des activités d'une corporation, la bureaucratie s'attaque d'abord et avant tout à la spécificité et à la culture de notre corporation. En effet, en invoquant la protection du public non pas en référence aux devoirs spécifiques incombant à notre corporation en vertu du Code des professions mais comme prétexte d'ingérence générale, le pouvoir technocratique vise un contrôle absolu. De plus, aucune solution valable n'est prévue concernant ce qui nous apparaît être les carences fondamentales du système, soit le statut des corporations à titre réservé, l'absence de leadership des corporations en matière d'admission et, par voie de conséquence, le flottement des liens entre les conditions d'admission et la formation de base.

En bref, l'avant-projet tel que déposé remet en question le dialogue et la concertation en instaurant plutôt un régime de contrôle qui nous semble outrancier. Quant à nous, c'est dans une société démocratique et libre que nous souhaitons continuer à exercer notre profession. Je vous remercie.

La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup.

M. le ministre, vous avez la parole.

M. Savoie: Oui, merci, Mme la Présidente. Heureux de vous voir parmi nous, Mme la présidente, même pendant cette semaine de relâche où, effectivement, nous devons gagner durement nos sous. Heureux également de constater l'intérêt que porte la Corporation professionnelle des ergothérapeutes à notre avant-projet de loi.

Quelques commentaires, tout d'abord. Vous avez peut-être manqué des bouts la semaine passée. On a eu l'occasion d'élaborer que, effectivement, il y a eu un bon nombre de consultations. Il y a eu, d'ailleurs, des consultations sur un espace de trois ans sur différents éléments. Donc, votre corporation a certainement été consultée à plus d'une reprise, de même que l'ensemble des intervenants au dossier. On ne voudrait pas que ça plane comme quoi qu'il n'y a pas eu de consultations. On peut facilement vous déposer l'ensemble des documents de consultations qui, ma foi, sur le bureau, dépassent largement les micros.

Alors, il y a eu un travail de réflexion considérable et, finalement, au niveau de votre rapport, on constate qu'il y a des éléments qui sont favorables à l'orientation donnée, bien qu'il y ait une inquiétude de votre part qui est largement partagée. Je pense que tout le monde est d'accord pour dire que ce qui nous préoccupe, c'est que nous sommes à la recherche, finalement, d'un équilibre, un équilibre entre les attentes du public pour avoir un meilleur service et une meilleure protection de la part d'un corporatisme qui serait peut-être trop exigeant et, d'autre part, effectivement, des corporations qui cherchent à maintenir, finalement, le statu quo.

L'ensemble des corporations ont pris un peu la même position que vous, c'est-à-dire de dire: Bien, il y a des éléments là-dedans qui sont favorables et largement avantageux pour l'évolution du monde corporatif. Il y a des éléments, toutefois, qui soulèvent des inquiétudes. Vous, par exemple, au niveau de la tutelle, du pouvoir d'enquête, vous dites: Bien, ça doit rester au niveau gouvernemental. Il doit y avoir des balises au niveau gouvernemental et, là-dessus, on a eu l'occasion de se prononcer et de dire qu'effectivement il y aurait un mécanisme d'établi afin d'éviter des abus, afin de

s'assurer que, par exemple, une structure technocratique, comme vous l'avez mentionné, développe trop de pouvoirs. Ça, nous sommes aux aguets de ça également. Je pense que c'est largement protégé, ce sera largement protégé dans le projet de loi que nous allons déposer.

Finalement, l'avant projet constitue une dernière étape de consultations formelles où tous et chacun peuvent présenter un point de vue sur Favant-projet de loi.

Je voudrais aborder avec vous surtout la réglementation. Je pense que vous partagez la vision que c'est lourd comme structure. C'est lourd comme approche, là. On parle de plusieurs mois avant qu'un règlement puisse traverser l'ensemble des étapes. Vous cherchez quelque chose de plus court. On présente quelque chose de plus court sauf pour les endroits où ça touche, par exemple, le public. Lorsque la protection du public est mise en jeu, bien, là, on exige un contrôle gouvernemental. Une autorisation de votre corporation ou de l'Office n'est pas suffisante. On veut, effectivement, que le gouvernement se penche là-dessus. Lorsqu'on parle de code de déontologie, lorsqu'on parle de discipline, lorsqu'on parle de mesures semblables, on insiste pour que la protection du public soit...

Vous, vous dites que non seulement on doit arriver et prendre cette orientation d'allégement du processus, mais que, également, le processus d'adoption des règlements devrait entrer en vigueur suivant l'adoption du dépôt auprès du gouvernement, qui ne pourrait s'y opposer, en tout ou en partie, qu'à l'intérieur d'un certain délai. Ce que j'ai fait, moi, c'est que j'ai biffé le mot «gouvernement» et j'ai mis «l'Office». Il me semble que ça a plus de bon sens, là, quand on enlève le mot. Finalement, ce que vous visez, ce n'est pas le gouvernement, c'est l'Office des professions. C'est ça?

Mme Rollin-Gagnon: Je pense que votre préoccupation est de dire: Est-ce qu'on partage cette préoccupation-là?

M. Savoie: C'est ça.

Mme Rollin-Gagnon: Si c'était l'Office, je pense que vous avez raison. Par rapport au gouvernement, ce qu'on croit quand même, c'est que la plupart des règlements, quand on les envoie au gouvernement, souvent on s'est inspiré, disons, des règlements-cadres, et il devrait y avoir un minimum de points qui présentent encore un problème.

M. Savoie: C'est-à-dire que, quand vous envoyez des règlements au gouvernement, finalement, vous les envoyez à l'Office.

Mme Rollin-Gagnon: Dans le fonctionnement actuel.

M. Savoie: Oui.

Mme Rollin-Gagnon: Au niveau de la réforme, on suivra quelle sera la procédure indiquée.

M. Savoie: C'est ça. Ce qui est proposé, finalement, c'est un allégement des mécanismes pour, justement, dire: Bien, il y a des choses que le gouvernement, que le Conseil des ministres, que le comité ministériel permanent sur les affaires culturelles et sociales n'est pas obligé de regarder, le Bureau des lois beaucoup moins aussi. Finalement, ça peut se traiter un peu à l'interne. Que vous fassiez passer, par exemple, le nombre de représentants de PAbitibi-Témiscamingue de un à deux, vous savez, c'est assez discrétionnaire comme approche. Finalement, on ne souhaite pas que ça suive tout le parcours nécessairement sur cet élément-là. On vous donne, finalement, avec un minimum de contrôle, un droit final sur l'ensemble de cette réglementation-là.

Mais, sur une réglementation substantielle, par exemple, des modifications à votre code de déontologie ou, par exemple, l'administration de la discipline chez vous, ça, tout le monde va se pencher là-dessus pour assurer la protection. Je pense que, là-dessus, il y a un consensus. Vous êtes d'accord avec cette orientation-là, grosso modo? (11 h 30)

Mme Rollin-Gagnon: Oui. Je pense que notre préoccupation aussi c'est de dire que les corporations professionnelles, dans l'évolution du système, ont maintenant beaucoup plus de maturité. Et, dans plusieurs réglementations, entre autres dans la formation, dans les diplômes d'accès, nous, on croit que c'est les corporations qui devraient faire entendre leurs besoins, leurs demandes et leurs recommandations.

M. Savoie: Bon, bien, en tout cas, c'est une position, là. Je pense que c'est... Au niveau disciplinaire, vous avez 1530 membres, je crois. Vous en avez combien, en pratique privée?

Mme Rollin-Gagnon: environ 10 %, sauf qu'il y en a...

M. Savoie: Mais 150, là, à peu près, qui sont à leur compte.

Mme Rollin-Gagnon: Oui, sauf que la plupart qui sont en pratique privée n'exercent pas en pratique privée à temps plein.

M. Savoie: C'est ça. C'est de l'occasionnel, puis...

Mme Rollin-Gagnon: Donc, ça, c'est un volet de l'évolution de notre pratique qu'on suit de près. Entre autres, bon, récemment, notre comité de législation a commencé à travailler pour préparer un règlement sur l'assurance-responsabilité, des recommandations, comme

ça, qui sont dans l'avant-projet, nous, on est d'accord parce que, ayant de plus en plus un groupe de professionnels en pratique privée, on se rend compte qu'au niveau de la protection du public ça oblige la Corporation à être active...

M. Savoie: À être plus active. Oui. C'est ça, oui.

Mme Rollin-Gagnon: ...pour agir de façon proactive dans d'autres types de dossiers.

M. Savoie: C'est ça. Et j'imagine que la majorité des gens, en pratique privée, sont concentrés dans le secteur de Montréal.

Mme Rollin-Gagnon: Pas nécessairement. M. Savoie: Non?

Mme Rollin-Gagnon: Non, pas nécessairement, parce que...

M. Savoie: Ils doivent être assez bien éparpillés, là, à travers le territoire.

Mme Rollin-Gagnon: Oui, parce que, récemment, la Corporation a fait un bottin — c'était une demande de la population — de personnes en pratique privée, parce que les services d'ergothérapie, il y a quand même une pénurie, au Québec...

M. Savoie: D'accord.

Mme Rollin-Gagnon: ...et, quand on a demandé qui désirait s'annoncer dans ce bottin, on en a eu à travers tout le Québec.

M. Savoie: d'accord. finalement, vous avez un système... donc, 90 % étant à l'emploi, surtout, des établissements de santé, au québec, j'imagine que les mécanismes de contrôle sont beaucoup moins importants que s'il y avait 90 %... et ça explique peut-être pourquoi vous n'avez quasiment pas de plaintes, là, à toutes fins pratiques, de la part de la clientèle.

Mme Rollin-Gagnon: Tel que je l'ai indiqué dans la présentation, les demandes qu'on a et qu'on réfère, quand même, au syndic, parce qu'on trouve que c'est important d'aller plus loin que la simple question d'information sur ce que fait un ergo... On sait que le syndic, à ce moment-là, voit pourquoi est-ce que vous désirez savoir ça, est-ce qu'il s'est passé quelque chose. On les lui réfère et le syndic, quand même, par la suite, donne l'information voulue. Mais le fait que les gens pratiquent dans un réseau de services de santé et services sociaux où il y a des contrôles, où il y a des personnes qui reçoivent aussi des plaintes, nous, effectivement, on l'identifie comme un des facteurs pour lesquels on a moins de demandes et de plaintes en tant que tel.

M. Savoie: On parle de combien de plaintes, à peu près, par année? Est-ce que vous avez une idée?

Mme Rollin-Gagnon: Nous, on estime à une trentaine les demandes qui nous parviennent et qu'on dirige vers le syndic. On leur dit qui est le syndic, on donne les coordonnées du syndic. Si la question de base concerne le rôle de l'ergothérapeute, à ce moment-là, parfois, ils sont satisfaits de l'information de base qu'on peut avoir donnée, expliquant ce que fait un ergothéra-peute. Mais, elle, elle nous dit que, sur les 30, disons, acquis, on a... Parce que c'est souvent des plaintes verbales...

M. Savoie: Oui.

Mme Rollin-Gagnon: ...ou des demandes verbales. Sur les 30 demandes verbales, il y en a peut-être une quinzaine qui communiquent avec elle et, de ça...

M. Savoie: O.K.

Mme Rollin-Gagnon: ...les plaintes écrites sont peut-être cinq par année ou à peu près.

M. Savoie: Cinq par année. Mme Rollin-Gagnon: Oui.

M. Savoie: C'est ça. Cinq par année depuis à peu près 20 ans, grosso modo?

Mme Rollin-Gagnon: Moi, je pense que oui.

M. Savoie: Oui. Finalement, ça n'a jamais fait l'objet d'une décision, par exemple, du comité de discipline, ni de la part du tribunal parce que, finalement, aucune des plaintes ne s'est avérée fondée. C'est ça?

Mme Rollin-Gagnon: On n'a eu aucune demande du syndic de traduire quelqu'un devant le comité de discipline. On fait quand même de plus en plus d'inspections professionnelles et on fait, aussi, des inspections particulières. Donc, comme on expliquait tantôt, le fait que les gens sont dans le réseau de la santé et des services sociaux, ça arrive qu'un employeur, disons, demande une inspection particulière et là, à ce moment-là, ils sauraient qu'ils peuvent avoir recours à la Corporation pour ça.

M. Savoie: Et, au niveau du comité des plaintes, justement, qui est proposé, j'imagine que, si on avait un comité des plaintes pour couvrir plusieurs corporations professionnelles, par exemple, où le nombre de plaintes est très peu élevé, à ce moment-là, vous seriez intéressés à ce comité des plaintes en question ou à ce que...

Mme Rollin-Gagnon: Je n'ai entendu aucune proposition en ce sens-là, quand j'étais ici, à l'effet d'un comité pour plusieurs types de corporations. J'ai entendu des recommandations où un comité pourrait être un comité qui pourrait entendre un plaignant, admettons, qui ne serait pas satisfait du syndic, pour voir si, à ce niveau-là, ils trouveraient, eux, qu'il y a matière. À ça, je pense qu'on serait favorable. Je pense aussi que le comité consultatif dont il a été question dans le mémoire du CIQ, nous, on n'y verrait pas d'objections non plus.

M. Savoie: Non, c'est ça. Mais disons que le comité consultatif suscite beaucoup de questionnements. Si on devait revenir à un comité des plaintes, par exemple pour trois, quatre, cinq corporations impliquées au niveau de la santé, où le nombre de plaintes est finalement très peu élevé — on parle de cinq chez vous, six par année, sans jamais avoir de décision sur 20 ans — finalement, c'est une structure qui serait lourde chez vous. Peut-être que le fait de vous allier, de vous mettre cinq ou six ensemble autour d'un même comité des plaintes, à ce moment-là, pourrait peut-être régler cette structure-là où on cherche justement à exercer auprès du public une surveillance additionnelle au niveau des plaintes provenant du public. Vous n'avez pas de cri du coeur fondamental là-dessus, là.

Mme Rollin-Gagnon: Ma préoccupation, c'est que chacune, quand même, des corporations, même si on dit qu'on est dans la santé, a un type de pratique avec, j'imagine, des rapports avec la clientèle qui sont variables. Si je compare notre type d'intervention avec les travailleurs sociaux ou avec d'autres types de professionnels, il y a quand même des différences quant aux situations qui sont susceptibles de se produire.

Où je trouve que la collaboration est quand même importante et l'échange, il y a maintenant des comités qui... Je sais qu'au niveau du CIQ ils travaillent à savoir s'il y a des abus sexuels, s'il y a des indécences sexuelles, ce qui pourrait être fait, ou des choses comme ça. Je pense que la collaboration dont vous parlez, on peut l'atteindre via différents comités de travail qui sont susceptibles d'être mis sur pied ou qui existent déjà, et, à ça, on participe de façon active.

M. Savoie: D'accord. Je présume que les éléments auxquels vous ne touchez pas dans votre mémoire ne suscitent pas vraiment de débat fondamental au sein de votre corporation professionnelle et qu'en conséquence la notion de contrôle, par exemple, sur un ergo-thérapeute qui pourrait être reconnu ailleurs et exclu ailleurs de cette Corporation-là et qui pourrait faire l'objet d'une exclusion ici, au Québec, ne présente pas de difficultés. Des choses comme ça...

Mme Rollin-Gagnon: Naturellement, notre corporation, on ne peut pas prétendre qu'on a une expérience dans le système professionnel aussi étendu, en tout cas, que certaines personnes qui sont venues ici vous parler et qui ont un vécu relatif à des exemples comme vous citez. Alors, si on a touché les points que je vous ai présentés dans le mémoire, c'est ceux sur lesquels on avait pris le temps...

M. Savoie: C'est ça.

Mme Rollin-Gagnon: ...de s'arrêter...

M. Savoie: D'accord.

Mme Rollin-Gagnon: ...et, dans ce contexte-là, ce qu'on a vraiment essayé de faire ressortir, c'est toute la problématique du titre réservé parce que, là, vous parlez de protection du public, et j'entends les gens qui ont présenté des mémoires parler beaucoup du système disciplinaire, et je pense que, si la perception du public est à cet effet-là, qu'il y a matière à réviser, vous avez une responsabilité dans ce sens-là. Nous, la protection du public, le problème qu'on vit, c'est le fait qu'il peut y avoir des personnes qui pratiquent l'ergothérapie qui ne sont pas membres chez nous et on se sent très démuni par rapport à ces personnes-là. La syndic, quand on lui parle, elle nous dit que la moitié des demandes qui lui parviennent touchent le titre réservé.

M. Savoie: Oui, c'est ça, mais, avec l'avant-projet de loi, on parle d'assurance, on parle de mécanismes de contrôle pour la protection du public, on parle d'obligations et de droits qui, finalement, sont imposés auprès de votre corporation. Il est certain que la contrepartie va être justement une surveillance accrue au niveau de ceux qui n'en font pas partie, par d'autres mécanismes, et on ne peut pas créer d'obligations sans également créer des droits, là.

Mme Rollin-Gagnon: S'il y avait des sanctions qu'on pouvait utiliser pour les personnes qui usurpent, ça pourrait être quelque chose de très important pour nous d'avoir accès à ce moyen-là. Mais, à votre question tantôt, de dire si la balance des points qu'on ne touche pas, on adhère, je pense que, les préoccupations qui ont été émises par le conseil interprofessionnel dans certains domaines où il demandait qu'une évaluation soit plus poussée, on adhérait à ce principe-là.

M. Savoie: Ça va, Mme la Présidente. La Présidente (Mme Hovington): Ça va? M. Savoie: Oui.

La Présidente (Mme Hovington): Alors, je vais reconnaître Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Merci, Mme la Présidente.

Alors, moi aussi, je vais vous saluer, Mme la

Présidente de nos travaux.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. (11 h 40)

Mme Caron: Contrairement, par contre, à l'avis du ministre qui nous dit que ces travaux nous font durement gagner notre vie, j'espère, Mme la Présidente, que vous allez plutôt partager mon avis à l'effet que nos travaux sont passionnants et que vous allez bien profiter de ces travaux avec nous.

La Présidente (Mme Hovington): Je crois qu'il disait ceci dans le cadre de la semaine de relâche. Il pensait peut-être à la famille, à certaines familles de députés qui étaient privées de leur père ou de leur mère. C'était plutôt dans ce sens-là, je crois bien.

Mme Caron: Ah! mais ça, ils le sont à l'année, Mme la Présidente.

M. Savoie: C'est intéressant, comme commentaire.

Mme Caron: Mme Rollin-Gagnon, M. Pedneault, Mme Ebacher, vous savez, ce qui est intéressant, c'est que chaque corporation professionnelle, finalement, apporte un élément différent. J'ai lu l'ensemble des mémoires et il y a toujours de nouveaux points qui sont ajoutés. Ça, je pense que c'est extrêmement important parce que, au point de départ, on aurait pu croire, justement, que nos travaux auraient pu être une répétition continuelle des mêmes points. Oui, il y a des éléments qui reviennent, mais chaque mémoire, chaque présentation, qu'elle soit des associations de consommateurs, qu'elle soit des associations professionnelles, des corporations professionnelles, du Protecteur du citoyen ou d'individus qui vont venir partager avec nous leur point de vue, il y a toujours des éléments nouveaux qui sont ajoutés et chacun a fouillé un domaine un petit peu plus particulier.

Vous avez aussi une distinction. Votre corporation professionnelle regroupe, vous le mentionnez, à 92 % des femmes et peu de corporations professionnelles ont très majoritairement des postes occupés par des femmes. Je pense que ça, c'est un élément différent. Là-dessus, ces corporations professionnelles là aussi vivent un certain problème au niveau, je pense, de la connaissance. On ressent plus une méconnaissance des corporations professionnelles à titre réservé et, plus particulièrement — parce que j'ai rencontré les différentes corporations professionnelles — lorsque justement, majoritairement, ce sont des postes occupés par des femmes. Et je pense que ça, on le ressent, on le voit un petit peu partout.

Je regarde même juste au niveau des attachés politiques dans un bureau de député, si vous entrez dans un bureau d'attaché politique, s'il y a une femme, les gens vont plutôt penser qu'elle fait le secrétariat et, s'il y a un homme dans le bureau, qu'il est attaché politique. Si vous êtes à l'hôpital et qu'on rencontre une ergothérapeute, ce n'est pas évident qu'on va tout de suite croire que c'est une ergothérapeute. On va plutôt penser que c'est une assistante à des soins. C'est la même chose du côté des hygiénistes dentaires, il y a un problème. Les gens vont plutôt penser que c'est une assistante au dentiste et non une hygiéniste dentaire qui a tous ses titres. Alors, à cet égard-là, je pense que votre mémoire est intéressant aussi.

Vous nous avez dit qu'il y avait 10 % de personnes, de professionnels, qui travaillaient en privé, occasionnels. Vous avez dit aussi qu'il y en avait dans les centres, dans les centres hospitaliers, dans les centres d'accueil, etc., dans le milieu scolaire et, aussi, dans les CLSC. Est-ce que vous pouvez nous faire une autre répartition? Centres hospitaliers, disons, milieu scolaire et CLSC, le pourcentage serait de combien?

Mme Rollin-Gagnon: dans les clsc, on estime qu'on a environ 175 ergothérapeutes, donc c'est moins de 10 %. dans le milieu scolaire, je dirais que c'est environ 5 %. la balance travaille dans le réseau de la santé et des services sociaux. on en a environ 30 % du montant qui reste dans le service santé et les services sociaux qui sont en santé mentale. donc, la majorité travaille plutôt en réadaption fonctionnelle, ce qu'on appelle la santé physique, pour les membres.

Mme Caron: Je pense que vous avez bien expliqué au niveau des plaintes, aussi. Ça nous explique pourquoi il y a peu de plaintes, finalement, qui se retrouvent au niveau de votre syndic. Vous avez bien souligné, et dans votre mémoire ça ressort à quelques reprises, le fait d'être à titre réservé et vous avez même ajouté en annexe les minutes du colloque sur le titre réservé et le nouvel élément qui s'ajoute, c'est-à-dire l'intégration des thérapeutes alternatifs. Est-ce que vous pouvez élaborer un petit peu plus là-dessus vos craintes par rapport à ce nouvel élément?

Mme Rollin-Gagnon: On sait qu'il y a une commission parlementaire qui va être bientôt sur les thérapies alternatives. On sait que les orientions que l'Office avait données dans ce dossier-là étaient à l'effet que certaines de ces thérapies-là pourraient avoir un statut de titre réservé et que les corporations actuelles pourraient avoir à gérer, pour leurs membres qui seraient compétents dans ces approches-là, un titre additionnel.

Alors, pour nous, on peut voir qu'une réglementation qu'on devrait se donner, à savoir quels seraient les critères d'admission pour ce nouveau titre là, on pourrait travailler ça, comme on l'a fait pour notre propre titre réservé à nous, mais, par rapport à la protection du public qui serait assurée à l'extérieur, on y voit les mêmes embûches et difficultés possibles. Donc, on se dit: Est-ce que ce serait mieux qu'il y ait des actes partagés ou des actes réservés? Si on ne peut pas avoir

accès à un champ exclusif, est-ce qu'il pourrait y avoir une nouvelle forme de statut qui assurerait quand même davantage la protection du public? Ce serait important de le préciser avant d'entrer dans d'autres types de gestion, parce que vous savez comme moi qu'il y a quand même beaucoup d'autres individus qui demandent l'accès aux corporations professionnelles, et ce n'est pas actuellement quelque chose qui semble toujours être possible.

Mme Caron: Du côté des thérapeutes alternatifs, chez vous, ce serait quel type de thérapie qui pourrait être approchante?

Mme Rollin-Gagnon: Nous, on a déjà soumis un mémoire pour les thérapies alternatives et les domaines qui sont le plus près de nos ergothérapeutes, c'est la psychothérapie et l'ostéopathie.

Mme Caron: À la page 11 de votre mémoire, deuxième paragraphe, vous nous dites: «C'est cet équilibre entre l'idéologie technocratique et le corporatisme traditionnel qui nous semble maintenant remis en question tant par le rôle de plus en plus interventionniste joué par l'Office au cours des dernières années dans les affaires de notre corporation que par les termes de Favant-projet». Alors, moi, je voulais vous entendre sur le rôle interventionniste, de plus en plus interventionniste joué par l'Office au cours des dernières années dans les affaires de votre corporation. Est-ce qu'il y a des problèmes particuliers à votre corporation?

Mme Rollin-Gagnon: Nous, notre dossier avec lequel on a travaillé beaucoup récemment, c'est l'intégration des stages de formation à la formation de base des ergothérapeutes. Actuellement, le Québec est la seule province où toute la formation clinique n'est pas donnée pendant la formation de base. Donc, dans les autres provinces au Canada, les ergothérapeutes graduent après quatre années de cours universitaires, alors qu'au Québec ce n'est pas le cas. Donc, la Corporation doit avoir des exigences de compléter cette formation clinique. Et, au cours des années, on a quand même consenti beaucoup d'efforts pour faire la démonstration — ce qui, quand même, avance; c'est un dossier qui avance bien — où on souhaiterait que les gens qui graduent de l'université aient une compétence reconnue au niveau canadien comparable à ceux du Québec.

Alors, j'écoutais avec beaucoup d'intérêt les commentaires de nos prédécesseurs ici, à la table, qui expliquaient que les conditions supplémentaires ne devraient pas exister. Je ne connais pas les détails et les conditions supplémentaires d'autres corporations, mais, chez nous, nous, on est convaincus que ce n'est pas une condition supplémentaire à une formation de base complétée, mais c'est vraiment pour compléter la formation.

Dans ce dossier-là, on a dû démontrer régulièrement et à répétition que ce n'était pas une condition supplémentaire.

Mme Caron: Je pense que les tables de concertation vont devoir tenir compte de la réalité de chacune des corporations professionnelles au niveau de la formation, parce que c'est très différent d'une corporation à l'autre. Vous avez ajouté dans votre mémoire, en annexe, à l'annexe D, le règlement sur le permis d'exercice d'un ergothérapeute. Et j'avoue que c'a suscité ma curiosité. Est-ce que vous pouvez me donner certaines précisions sur cette réalité-là? (11 h 50)

Mme Rollin-Gagnon: C'est vraiment relatif au dossier que je viens de vous présenter, à savoir que, pour nous, compte tenu que, d'année en année, on faisait des démarches auprès des universités pour faire intégrer cette formation-là, la Corporation ne souhaitait pas adopter un propre règlement concernant l'accès et le permis de l'exercice parce qu'on savait très bien que c'était une situation qui était temporaire. Mais on a dû procéder à présenter un projet.

Mme Caron: Je vous remercie de cette précision. Vous avez fait part aussi, en page 10, de toute la question des coûts de procédure pour le public. C'est évident que ça touche peu votre corporation professionnelle. Est-ce qu'il y a eu des plaignants qui ont dû aller au comité de discipline en privé?

Mme Rollin-Gagnon: Non.

Mme Caron: Absolument pas au cours des années. Donc, cette procédure-là, vous en avez parlé plus au niveau général. Bon. «Si la question des coûts de la procédure pour le public est à ce point préoccupante pour le législateur, qu'il envisage plutôt de faciliter l'aide juridique dans les cas où il estime qu'une telle aide doit être accordée, comme il le fait d'ailleurs dans d'autres domaines du droit.» Donc, ce serait plus une mesure pour l'ensemble des corporations professionnelles plus que...

Mme Rollin-Gagnon: Oui, parce qu'on réalise que, si le gouvernement veut réviser le Code pour que ce soit plus transparent, plus flexible et moins coûteux, il y a sûrement des ajustements qui sont nécessaires d'être apportés. Nous, ce qu'on a essayé de faire ressortir, c'est que notre réalité à nous n'est pas la même, et c'est dans ce sens-là qu'on parle de notre culture à nous et de notre expérience à nous. Par contre, s'il y a d'autres moyens qui peuvent être amenés comme ajustements, et là il y en a un qui était proposé, on pense qu'on ne doit pas changer toute la structure du système avant une évaluation qui tient compte de la réalité de chacune des corporations.

Mme Caron: C'est un élément qui a attiré mon attention parce que, depuis une semaine maintenant, j'ai

la responsabilité de l'aide juridique qui s'est ajoutée. Donc, il semblerait qu'il va y avoir une réforme bientôt au niveau de l'aide juridique. Donc, ça pourrait être un élément qu'on pourra regarder au cours de cette réforme-là puisque vous en avez fait part. Je pense que c'est un élément intéressant qu'on peut retenir.

J'avais aussi une question concernant — page 5 — le rôle ambigu des employeurs gouvernementaux de vos membres. Vous nous dites, selon l'article 95 qui introduit le nouvel article 183, qui doit être lu avec l'article 2 du projet de loi 72: «Une telle approche pourrait être valable sans le rôle ambigu des employeurs gouvernementaux de nos membres qui, en permettant les doubles appellations dans les conventions collectives auxquelles sont soumis les ergothérapeutes, viennent en quelque sorte réduire à néant l'effet de ces propositions.» Est-ce que vous pouvez expliquer davantage?

Mme RoIIin-Gagnon: En annexe, vous aviez la comparaison des pages dans des conventions collectives qui stipulent que la personne, qu'elle soit membre d'une corporation, disons, avec le titre d'ergothérapeute ou un titre équivalent, a les mêmes conditions de travail. Donc, il n'y a pas vraiment d'incitatifs pour une personne à demeurer membre quand sa permanence lui est acquise. Alors, même si un employeur... Et, nous, on a fait beaucoup d'efforts pour encourager les employeurs à en faire une condition d'emploi et, d'ailleurs, on a eu du succès. Les gens, souvent, exigent qu'ils soient membres de la Corporation au moment où ils les embauchent, mais, par la suite, la convention collective permet aux gens de ne pas y appartenir et il n'y a pas vraiment de changement dans leurs conditions de travail. Donc, quelque part, l'employeur par la suite ne peut pas exiger que les personnes maintiennent leur appartenance et le gouvernement qui accepte de signer ces conventions collectives là ne nous facilite pas la tâche, encore là, dans le contexte que nous n'avons pas un exercice exclusif.

Mme Caron: Comme il y a effectivement plusieurs de vos membres qui travaillent dans des centres hospitaliers, en milieu scolaire, au niveau des CLSC, l'employeur est donc très souvent le gouvernement.

Mme RoIIin-Gagnon: Ce sont des établissements de la santé et de services sociaux.

Mme Caron: Et la condition, il faut qu'ils soient membres au moment de l'engagement.

Mme Rollin-Gagnon: Souvent.

Mme Caron: Souvent. Est-ce que toujours il faut qu'ils soient membres au moment de l'engagement? Parce que je sais que, dans certaines corporations professionnelles, l'employeur étant le gouvernement, il n'exige pas nécessairement que les employés soient membres de la corporation professionnelle.

Mme Rollin-Gagnon: Nous ne pensons pas que tout le monde l'exige. Ce qu'on sait, c'est que, nous, en tout cas, une de nos responsabilités est d'insister auprès des employeurs avec qui ont travaille. D'ailleurs, quand on a des annonces de postes, des choses comme ça, les gens avec qui on fait affaire comprennent que c'est une protection pour leur clientèle.

Mme Caron: Est-ce que vous ne croyez pas qu'un gouvernement qui se trouve à être employeur et qui est responsable aussi d'un système professionnel de qualité ne devrait pas s'obliger, comme premier critère, à engager et à maintenir que les professionnels soient membres d'une corporation professionnelle?

Mme Rollin-Gagnon: Moi, je pense que ce serait certainement un point important pour faciliter aux corporations d'assumer leur rôle.

Mme Caron: Parce que, autrement, le gouvernement accepte qu'une partie de ces professionnels qu'il engage ne soit pas soumise aux mêmes règles de protection du public.

Mme Rollin-Gagnon: On partage cette inquiétude-là.

Mme Caron: Je vous remercie beaucoup. Dernière question. Vos cinq demandes écrites par année que vous avez, environ, ça touche principalement quel genre de plaintes et est-ce que vous pouvez, est-ce que le syndic a les moyens d'intervenir sur ce genre de plaintes là?

Mme Rollin-Gagnon: Les moyens qu'a le syndic sont de faire vraiment son enquête. On sait que les enquêtes peuvent exiger que la personne aille rencontrer le professionnel, aille rencontrer l'employeur, dans certains cas, et on sait que, nous, on a des consultations juridiques que le syndic doit prendre pour accomplir son travail. En termes de thèmes qui sont touchés dans les plaintes, c'est souvent des thèmes où les gens disent: L'ergothérapeute n'a pas bien évalué mon besoin parce que, finalement, lorsqu'elle a traduit ce besoin-là, disons, à l'Office des personnes handicapées du Québec, je n'ai pas obtenu l'adaptation dont j'avais besoin. Elle n'a pas bien représenté mes intérêts.

Alors, souvent, le syndic dit: C'est une demande où la personne, en bout de ligne, n'a pas eu le service concret auquel elle se serait attendue de la part de l'ergothérapeute. Ça peut être ça. Ça peut être aussi des conditions dans lesquelles les ergothérapeutes exercent. Par exemple, il y a des employeurs qui demandent: Est-ce que vous avez des spécialités dans votre profession? Nous, on sait que des gens exercent dans des champs en particulier, tel que je vous expliquais, mais on n'a pas

de spécialité à proprement dit. Donc, il y a des personnes qui vont porter plainte, les employeurs, disant que les ergothérapeutes refusent de traiter tel type de clientèle parce que n'ayant pas eu suffisamment d'expérience avec cette clientèle. Et ça ça se passe beaucoup en régions éloignées, où il y a peut-être une ergothérapeute pour tout un territoire, et la personne peut avoir des enfants en paralysie cérébrale, des enfants en pédopsychiatrie, en gériatrie, fabriquer une orthèse, la pratique est très différente.

Alors, là, il y a des gens ou des employeurs qui nous disent: Elle refuse de traiter tel type de clientèle, et puis ils portent plainte sur cette base-là. Dans ce contexte-là, ce que le syndic fait, c'est que souvent elle explique qu'on n'a pas de champ de spécialité, sauf que, si la personne n'a pas pratiqué depuis un certain temps, l'employeur a une responsabilité de fournir une mise à jour des connaissances. Et on agit comme médiateur. C'est pour ça que les recommandations que le Conseil interprofessionnel faisait, de dire qu'il pourrait y avoir différents types de mécanismes, dont un mécanisme de médiation professionnelle, pour nous, en tout cas, ce serait certainement... C'est beaucoup ça que fait la syndic chez nous.

Mme Caron: Parce que chez vous, au niveau des services que les citoyens n'obtiennent pas, par exemple, au niveau de l'Office des personnes handicapées du Québec, même si c'était une structure indépendante, autonome, la personne n'aurait pas plus satisfaction puisque la réponse ne vient pas de Fergothérapeute, mais bien de l'Office des personnes handicapées du Québec.

Mme Rollin-Gagnon: Vous avez raison. Mme Caron: Je vous remercie beaucoup.

La Présidente (Mme Hovington): Alors, merci beaucoup.

M. le député de Rimouski, ça va, tout est sous contrôle?

M. Tremblay (Rimouski): Si vous me donnez deux minutes, madame, je pourrais apporter mon propos, mais, si vous ne me les donnez pas, c'est libre à vous, madame. Vous êtes maître de vos décisions.

La Présidente (Mme Hovington): Je ne vous les donne pas parce qu'il est midi. Votre temps est écoulé.

M. Tremblay (Rimouski): Alors, moi, Mme la Présidente, je m'inscris en faux... Pardon?

La Présidente (Mme Hovington): Je ne vous les avais pas données, M. le député de Rimouski.

M. Tremblay (Rimouski): Alors, je m'en excuse, madame.

La Présidente (Mme Hovington): Mais peut-être une minute rapide, rapide. Si la réponse est rapide aussi. Allez-y.

M. Tremblay (Rimouski): Juste un commentaire au sujet de votre conclusion: «L'avant-projet de loi faisant l'objet des travaux de la commission est décevant en ce que, sans évaluation et sans consultation préalables...» Nous sommes dans un avant-projet, Mme Gagnon, dans un premier temps. Donc, un avant-projet, ce n'est pas le projet de loi. Et nous avons reçu 60 rapports. Si, ça, ce n'est pas de la consultation, je ne sais pas qu'est-ce que c'est. Voici. (12 heures)

L'autre chose, moi, je suis pour la liberté et l'autonomie des corporations. Je pense qu'il n'y a pas de problème avec ça. Je pense qu'on doit être dans une société libre et démocratique, sauf que ma liberté à moi, elle arrête lorsque j'empiète sur la liberté de l'autre. Nous devons protéger le public, ne serait-ce que celui qui, pour toutes sortes de raisons, ne peut pas avoir accès à être entendu et en même temps à être jugé ou encore que son cas soit apprécié par quelqu'un. Lorsque vous me dites que le processus disciplinaire de l'avant-projet vise à contrôler davantage la discrétion du syndic, etc., là, je dois dire qu'à défaut, par la Corporation, de bien exercer son rôle de protection du public, à défaut de ça, pourquoi un organisme comme l'Office des professions n'aurait-il pas le mandat ou le pouvoir d'agir? En quoi ça peut vous brimer dans l'exercice de votre profession?

La Présidente (Mme Hovington): Rapidement, rapidement.

Mme Rollin-Gagnon: Moi, je pense que ce qui a été démontré ici, dans les auditions que j'ai faites, surtout par les groupes de consommateurs... Je pense qu'il y a certainement des aménagements au système qui ont besoin d'être faits. Dire qu'il n'y a pas eu de consultation, ce qui, nous, en tout, nous a surpris, c'est qu'on avait entendu qu'il y avait eu des groupes de travail où le CIQ, l'Office et le gouvernement avaient travaillé pour des propositions, et ce n'est pas ce qui a été présenté à l'avant-projet. Alors, nous, c'est là-dessus.

Je sais qu'on a eu à répondre à plusieurs questionnaires — et on l'a toujours fait d'une façon sérieuse, disciplinée et dans les délais demandés — sur le système disciplinaire, le pouvoir de réglementation, sauf que, quand on nous a dit... D'ailleurs, quand le ministre est venu nous présenter qu'il y avait eu ce dépôt, il nous a dit: On présente la version de l'Office, et c'est ça qui nous a surpris.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. Alors, ceci met fin à cette audition. Merci d'être venus. Au

revoir. Bonne journée.

J'inviterais M. Mario Goulet, s'il vous plaît, à bien vouloir prendre place.

(Consultation)

La Présidente (Mme Hovington): Est-ce que M. Goulet pourrait prendre place, s'il vous plaît? Alors, M. Goulet, bonjour et bienvenue à cette commission. Vous avez 10 minutes pour nous présenter votre mémoire et 20 minutes seront divisées entre les deux groupes parlementaires.

M. Mario Goulet

M. Goulet (Mario): Merci, Mme la Présidente. M. le ministre, madame, MM. les députés, moi, je suis ici d'abord en tant que juriste spécialisé en droit disciplinaire. Comme je l'ai fait dans mon mémoire, je me contenterai de développer sur ces aspects-là en reprenant, en gros, le même plan, c'est-à-dire que je parlerai d'abord de la spécificité du droit disciplinaire parce que je trouve que c'est la base importante pour expliquer les commentaires que j'ai formulés par rapport aux modifications proposées.

Je pense qu'il importe, à la base, de toujours réaliser que nous sommes dans un contexte de droit administratif. Le droit disciplinaire a sa spécificité. Il n'est pas une poursuite civile. Il n'est pas comme une poursuite pénale, dans le sens qu'il ne vise pas à punir. Il ne vise pas à remplacer l'instance civile en octroyant des dommages. Il vise plutôt à corriger des comportements qui sont hors normes professionnellement, d'où la raison, entre autres, pour laquelle il est administré par les pairs.

Lorsqu'on parle de droit administratif, on parle, bien sûr, d'une procédure publique, contradictoire et impartiale, mais aussi, étant donné la protection du public et parfois le fait que la profession d'un individu pourrait être affectée, la célérité s'impose également et, surtout en droit administratif, la souplesse, de sorte que, par exemple, en droit disciplinaire, les règles de preuve sont différentes de celles en droit civil. On admet le ouï-dire, par exemple. Le professionnel est contraignable devant l'instance disciplinaire. Il y a aussi souplesse dans l'application du principe de l'égalité de la faute, c'est-à-dire que ça prend normalement un texte sur lequel on s'appuie pour vérifier s'il y a eu une faute ou non, mais ce texte peut être rédigé en termes très généraux ou alors suffisamment larges pour couvrir un paquet d'événements qui n'est pas spécifiquement prévu dans un texte de loi.

Alors, dans le processus administratif, dans l'administration de la preuve, on reconnaît cette souplesse-là, en général, lorsqu'il s'agit de la preuve ou d'autres moyens de procédure, excepté lorsqu'on arrive, par exemple, dans des situations où un professionnel est accusé d'avoir perpétré un acte suffisamment grave pour qu'il y ait des conséquences très importantes sur sa profession. Alors, à mesure que les conséquences risquent d'être importantes pour le professionnel lui-même, on va exiger ce que la preuve appelle une preuve claire et convaincante dans ces domaines-là.

Je souligne ce fait dès maintenant, en particulier parce qu'on se rend compte, lorsqu'on étudie l'ensemble du processus disciplinaire, qu'à partir du moment où on se rapproche de plus en plus de la sanction disciplinaire, à mesure on constate un phénomène de pénalisation du droit disciplinaire, ce qui n'est pas en soi mauvais dans la mesure où la protection du public est toujours assurée, en premier lieu. Je pense que c'est l'objectif fondamental de la loi, bien qu'il doive, par ailleurs, y avoir un équilibre avec les droits de professionnels.

Ceci étant, si cette preuve claire et convaincante, par exemple, se rapproche de la preuve hors de tout doute en matière pénale, à ce moment-là, on comprendra que, si une personne, par exemple, se plaint d'avoir été victime d'abus sexuel, seule dans le cabinet d'un médecin ou de quelque autre professionnel, le fardeau de la preuve va être très difficile à rencontrer pour cette personne-là, à chaque fois que le témoignage du professionnel sera crédible en lui-même.

Lorsqu'on tombe dans la deuxième étape, c'est-à-dire lorsque le processus disciplinaire constate qu'il y a eu faute et, maintenant, il doit déterminer quelle serait la sanction appropriée, alors là, ce phénomène de pénalisation du droit disciplinaire, il joue à 100 %, c'est-à-dire que, dans les modalités d'application ou les conditions de la sanction disciplinaire, on retrouve — et la loi y contribue souvent — une rigidité qui est propre à un système différent un peu du système administratif. Par exemple, les tribunaux interprètent la loi comme imposant aux différents comités de discipline d'imposer une sanction pour chacun des chefs d'accusation, c'est-à-dire que, si vous avez une personne qui a perpétré un ensemble de fautes d'un même genre, le comité de discipline ne peut pas régler ça comme un tout et imposer une sanction globale. Il ne peut pas davantage, toujours en se basant sur des principes de droit pénal, imposer des sanctions consécutives, c'est-à-dire qu'encore notre même professionnel intimé, qui commet un même genre de fautes, qui mériterait, en général, des radiations d'une même longueur, chacune des radiations devra commencer à la même date; chacune d'elles, toutes ces radiations devront commencer à la même date.

Alors là, également, on a un problème, c'est-à-dire que ça peut être... Les comités de discipline ont beaucoup, beaucoup de misère à s'astreindre à ça, même si le tribunal y revient souvent, parce que c'est perçu souvent comme un passe-droit pour la personne qui commet plusieurs infractions en même temps. (12 h 10)

De la même manière, on empêche le comité de discipline d'imposer des sanctions conditionnelles. Dans le mémoire, j'ai donné un exemple par rapport au General Médical Council, en Angleterre, où on peut suspen-

dre une personne pour un certain laps de temps et, à l'intérieur de ce laps de temps là, vérifier si la personne est apte à réintégrer l'exercice de la profession. Qu'on pense, par exemple — c'est souvent le cas dans le monde infirmier ou de la santé en général — à ceux qui doivent suivre des cours de désintoxication. Si la loi pouvait accorder la possibilité d'imposer, comme condition, de prouver que nous sommes aptes à réintégrer la profession, ce serait sûrement un gros plus, ou on peut penser aussi à des examens de réadmission.

Évidemment, ça pose un problème ici, du fait que la discipline et l'inspection professionnelle sont séparées. Peut-être qu'il y aurait lieu ici, par rapport à ce type de problème là justement, de voir s'il n'y aurait pas moyen de travailler dans une meilleure collaboration. Tout ça pour dire que, lorsqu'on vient au niveau des conditions et des modalités de la sanction, on est vraiment dans le domaine pénal au niveau de notre conception de la manière dont ça devrait se faire. C'est d'autant plus vrai lorsque le Tribunal des professions, par exemple, observe quels sont les critères d'évaluation du caractère approprié d'une sanction. Autrement dit, lorsque le Tribunal des professions se demande: Est-ce que les comités de discipline ont bien appliqué les bons critères? alors le tribunal en appel va observer les facteurs objectifs, c'est-à-dire la gravité de la faute en soi du professionnel, et un ensemble de facteurs subjectifs exactement de la même manière, comme s'il s'agissait de droit pénal.

Les implications de ça sont à deux niveaux. En ce qui concerne les facteurs objectifs, étant donné qu'on se situe un peu dans un esprit de droit pénal au niveau de la sanction, les comités de discipline et, surtout, le Tribunal des professions vont exiger une quasi-relation mathématique entre les fautes et le type de sanctions qu'on donne habituellement pour ce genre de faute là. Mais ça, c'est plutôt probablement un avatar d'une construction plus générale. Alors, lorsqu'un comité de discipline veut se démarquer par rapport à un type de sanctions qu'on impose habituellement pour tel type de fautes, objectivement parlant, il doit avoir des raisons et des motifs très sérieux pour s'écarter de ça.

La Présidente (Mme Hovington): ... M. Goulet: Seulement une?

La Présidente (Mme Hovington): II vous reste une minute.

M. Goulet: Alors, le plus important, quant à moi, c'était par rapport aux facteurs subjectifs. Toutes sortes de facteurs comme l'âge, les moyens financiers, les coûts, etc., peuvent être tenus en compte pour alléger une sanction. J'ai même déjà vu l'obligation, dans une jurisprudence, de rembourser la RAMQ comme étant considérée comme un facteur subjectif autorisant le tribunal à réduire une sanction, de là les critiques que je fais et, surtout, les propositions, parce que, dans ma conception à moi, il n'y a aucun problème d'ordre structurel en ce qui concerne le Tribunal des professions.

Les vrais problèmes sont dans l'administration de la preuve et de la procédure. Et si, par exemple, en modifiant les modalités de l'imposition de la sanction, en disant, par exemple en matière policière, que la gravité objective et le dossier disciplinaire devraient être les principaux facteurs tenus en compte par rapport à la sanction... Bien, cette confiance du public, je ne crois pas qu'elle revienne, quoiqu'il y ait déjà un pas très important qui a été fait dans la loi au niveau de l'accès au rôle, au dossier, etc. Je pense que c'est difficile d'être plus transparent que ça, surtout si on considère, par ailleurs, que les comités de discipline sont reconnus comme étant des tribunaux impartiaux et indépendants. Je vois mal comment le simple ajout d'une structure pourrait aider en ce qui concerne la perception que le public pourrait avoir du système disciplinaire dans son ensemble.

La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup, M. Goulet.

M. le ministre.

M. Savoie: Tout simplement, Mme la Présidente, pour saluer M. Goulet qui, évidemment, est un des premiers à présenter un mémoire seul. On sait que ce n'est pas toujours facile. Vous savez que, pour chacun des mémoires, l'Office présente une espèce de résumé avec, évidemment, les solutions, les propositions et commentaires de la part du proposant. Il y a aussi un petit commentaire qui va vous faire un petit velours: «Ce mémoire, bien que succinct, est solidement motivé. Les suggestions qu'il contient devraient être sérieusement envisagées, notamment à l'égard du niveau de preuves, des critères dont un comité de discipline doit tenir compte pour décider de la sanction et du rôle du Tribunal des professions en appel.» Alors, je pense que c'est l'Office des professions qui vous donne une étoile. Ha, ha, ha! Il faut le dire parce que ce n'est pas toujours facile de présenter, effectivement, un mémoire seul, comme ça, et de présenter, finalement, une certaine réflexion, comme un citoyen doit le faire de temps à autre.

Mais mon questionnement était surtout au niveau des structures. Vous dites, comme ça, là, que, finalement, les structures proposées telles quelles, dans l'avant-projet de loi, ne méritent pas d'être retenues, c'est-à-dire que, finalement, tout ce qu'elles font, c'est qu'elles créent un alourdissement substantiel du fonctionnement.

Je ne sais pas si vous avez suivi ce qui s'est dit au cours des trois derniers jours, finalement, que la commission a siégé. Il y a eu comme une précision qui s'est faite et un allégement, un peu. Est-ce que vous êtes au courant de ce qui s'est dit, un peu?

M. Goulet: Vaguement. On m'a rapporté certaines interventions.

M. Savoie: Oui.

M. Goulet: Est-ce que vous parlez plus précisément du comité d'examen des preuves, par exemple?

M. Savoie: Oui. C'est ça, oui. Le fait que, par exemple, ce ne sera pas nécessairement à chaque corporation, bien sûr.

M. Goulet: Le gros problème que j'ai avec ça, M. le ministre, c'est que, si on regarde... J'ai étudié l'ensemble des décisions disciplinaires et des décisions du Tribunal des professions. C'est que, si je prends dans le monde de la santé, par exemple, à peu près la moitié des plaintes concernent les cas d'incompétence grave. Si vous mettez un membre du public qui est là, alors que l'essence même de l'octroi d'un statut particulier par rapport à l'exercice d'une profession, c'est cette incapacité de M. Tout-le-Monde de décider, et que vous avez un médecin spécialiste, par exemple, qui avait une intervention chirurgicale à effectuer, le syndic décide de ne pas porter plainte, on se ramasse devant ce comité, ce membre du public, il me semble, ipso facto, disqualifié, non compétent pour décider de la validité de la plainte. Mais ça, prendre tout ça d'un côté, je sais que c'est une question... c'est une réponse, pardon, insatisfaisante.

L'autre élément de réponse, c'est lorsqu'on parle de la preuve. Évidemment, ce que les citoyens ne savent pas, c'est que, bien souvent, j'imagine que le syndic ne portera pas plainte parce que, étant donné la gravité de l'accusation et les éléments qu'il a, lui, en main, il va se dire: Je fais perdre de l'argent et du temps à plusieurs personnes pour rien. Alors, il y a un dosage, ici encore, à faire, d'après moi. Mais, en ce qui concerne plus particulièrement ce comité d'examen, c'est... Je n'ai rien contre la plus grande apparence possible, quoique je croie que ce qui a été décidé, par ailleurs, ce qui est inclus dans le projet, me semble suffisant à cet égard. Si on donnait la chance aux gens intéressés d'avoir accès au rôle, de voir comment ça se passe, je pense qu'il y aurait un gros acquis pour la crédibilité du système. Ceci étant la question de la preuve mise à part qui fait que les citoyens peuvent avoir parfois l'impression que les professionnels se protègent entre eux.

Il y a aussi le fait qu'en soi ce rôle que pourrait jouer ce membre du public, dans un contexte où on donne un statut particulier à l'exercice de certaines formations, parce que les autres ne sont pas habiles à juger de ça... Si je pense que, dans le monde de la santé, 50 % des plaintes, c'est des questions d'incompétence grave, j'ai un gros problème avec la logique qui sous-tend le système proposé, sans parler des coûts et du temps, évidemment. On pourrait imposer des limites à tout le monde sans ajouter une nouvelle structure en termes de temps à dépenser, mais en termes de coûts, aussi. Il y a ça.

M. Savoie: Oui. C'est ça. C'est comme... On me fait remarquer qu'effectivement le problème n'est pas ce que le syndic décide d'entendre, mais plutôt ce que le syndic décide de ne pas entendre. C'est ça qui va être surtout examiné, au niveau du comité des plaintes.

M. Goulet: Oui.

M. Savoie: Un autre commentaire, si vous me le permettez, avant de remettre la parole à la députée de Terrebonne. Les citoyens, sur un comité comme ça, vous semblez dire: Ah! ils n'ont pas la compétence. C'est dangereux, ça, comme orientation...

M. Goulet: C'est ça.

M. Savoie: ...parce que les citoyens, finalement, peuvent décider de votre vie ou de votre mort, lors d'un procès. Mettez-en 12 ensemble, puis, eux autres, ils peuvent décider de l'orientation constitutionnelle d'un pays. Finalement, là, il y a... Je partageais un peu cette option, de dire: Ah! il faut faire attention, il faut avoir un plus grand respect pour les spécialistes. Je peux vous dire toutefois que, depuis que je suis en politique, j'ai développé un plus grand respect pour les citoyens que pour les spécialistes.

M. Goulet: Je n'en doute pas. Mais j'en reviens à la finalité du droit. Il ne s'agit pas d'octroyer des dommages, il ne s'agit pas de punir quelqu'un pour ce qui est répréhensible, à tout le moins pour ce qui est perçu comme étant répréhensible dans la société. C'est le rôle du jury en matière pénale. Le jury, on l'a éliminé en matière civile lorsqu'il s'agit d'octroyer des dommages, je veux dire... Dans un contexte d'une procédure rapide...

M. Savoie: Oui, mais... Oui.

M. Goulet: ...où, entre autres dans le monde de la santé, on a surtout à juger de l'incompétence des citoyens, on a ici l'ajout d'une structure qui pose problème par rapport à la finalité de leurs droits. Étant donné qu'on dit: Vous aurez un statut particulier parce que vous êtes les seuls professionnels aptes à juger dans votre domaine, que le citoyen décide de... Je n'ai pas d'objection...

M. Savoie: Profonde...

M. Goulet: ...à tel point que ça m'horripile de voir un citoyen là-dessus...

M. Savoie: Non. (12 h 20)

M. Goulet: ...mais c'est plutôt l'ensemble. C'est qu'on ajoute un autre comité de cinq personnes avec tout ce que ça implique derrière et pour peut-être donner bonne image face à la population. Mais ce citoyen-là, ou, dans certaines circonstances, peut-être deux, son rôle, de toute façon, est très ténu par rapport à ce qui est proposé. Alors, c'est sur la question, surtout, d'ajout de structures que j'ai des problèmes, plus que le fait que, dans cette structure-là, il y ait également des citoyens. Quoique cette présence-là, également, me semble un peu contradictoire par rapport aux objectifs visés par la loi. Mais, encore là, ça, je ne veux pas en faire une guerre non plus.

L'autre aspect, peut-être, intéressant, si on parle d'ajout de structure ou de complexification des choses, c'est que, si on s'interroge sur la place de l'amende qui pourrait être donnée aux citoyens, encore là, ça pose énormément de problèmes théoriques. Est-ce que, comme en droit civil, par exemple, on va se mettre à convoquer des experts pour évaluer les dommages? Est-ce qu'on va hausser artificiellement les amendes pour que ça équivaille aux dommages que peut-être la personne aurait eus au civil? Vous allez avoir un paquet de problèmes théoriques à résoudre, avec ça. Encore là, vous risquez d'alourdir une procédure, du fait que le débat risque de se déplacer sur la question de l'évaluation des dommages.

Encore là, ce n'est pas la finalité du droit disciplinaire. Théoriquement, lui, il doit viser à corriger des comportements hors normes dans l'exercice de certaines professions et non à rembourser des dommages. Alors, encore là, vous ajoutez des structures qui risquent de poser problème. Tout ce que je dis, c'est que, dans Pavant-projet de loi, vous avez fait des propositions afin de maximiser la transparence. Il semble qu'on soit d'accord avec moi, à l'Office. Il y a des normes de preuve ou de procédure qu'il y aurait lieu de modifier. Je pense qu'avant de chambarder le système et d'ajouter des structures il faudrait peut-être donner une chance... C'est quand même un jeune régime qu'on connaît, il n'a que 20 ans sous cette forme-là. Alors, peut-être qu'il faudrait donner la chance au coureur en apportant, pour débuter, les modifications qui chambardent le moins possible.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Merci, Mme la Présidente.

Me Goulet, je tenais particulièrement à vous entendre au cours de ces audiences parce que votre mémoire de maîtrise, en 1992, touche exactement le sujet que nous abordons, c'est-à-dire le droit disciplinaire des corporations professionnelles, les fautes et les sanctions. Ça m'apparaissait extrêmement intéressant d'avoir votre point de vue là-dessus puisque vous avez vraiment fouillé largement la question.

Lorsque vous parlez d'inquiétude que, finalement, par l'avant-projet, on ne change que l'image et qu'effectivement les citoyens et citoyennes, très rapidement, au bout de quelques mois, vont se rendre compte que, finalement, on n'a pas changé leur réalité, c'est simplement l'image, vous n'êtes pas le seul à partager cet avis-là. Le Protecteur du citoyen a indiqué ses craintes, les associations de consommateurs aussi et les corporations professionnelles elles-mêmes. Donc, là-dessus, je pense qu'il y a quand même assez un consensus sur les craintes que, finalement, on ne touche qu'à l'image. Il ne faudrait surtout pas. On a le même problème au niveau du réseau collégial qui a 20 ans, lui aussi, et qui doit ajouter des éléments nouveaux.

La perception du public — je pense que vous le démontrez bien dans votre mémoire — finalement, c'est le fait qu'on soit dans un contexte de droit administratif et qu'on ne fait pas nécessairement la différence entre la faute disciplinaire et la faute pénale. Dans le fond, souvent, le citoyen, ce qu'il souhaiterait, c'est que ce soit jugé comme une faute pénale. Ça lui apporterait vraiment une satisfaction parce que c'est vraiment cet élément-là qu'il recherche.

L'autre élément du mémoire, que vous avez bien souligné aussi ce matin, c'est concernant les sanctions. C'est évident que ce n'est pas satisfaisant pour un citoyen ou une citoyenne qui porte plainte, et qu'il y a plusieurs infractions, et qu'on regarde la sanction qui n'est pas cumulative. Il n'y a pas non plus de sanctions conditionnelles, ce qui serait aussi beaucoup plus satisfaisant pour les citoyens et les citoyennes, s'il y avait des conditions qui étaient apportées. L'exemple que vous avez donné, je pense, était excellent.

Et souvent, l'autre élément que j'ai trouvé dans votre mémoire, c'est la gravité de la faute. Je pense que, très souvent, les citoyens et les citoyennes, ce qui les frustre beaucoup, c'est qu'on a souvent l'impression que, pour des fautes très graves, les sanctions sont vraiment minimes. À ce moment-là, la réaction, évidemment, du citoyen ou de la citoyenne qui a porté plainte, il se dit: Mais ça ne m'a rien donné de porter plainte; c'est une faute très grave et la sanction est tellement minime que, effectivement, le système fait que les professionnels se protègent entre eux et qu'on n'a jamais gain de cause.

Alors, je pense que l'ensemble du portrait, vous l'avez vraiment bien défini. Là-dessus, votre contribution, je pense qu'elle est extrêmement importante. Vous n'avez pas eu le temps, évidemment, en 10 minutes, de présenter l'ensemble de votre réflexion. J'espère que tous les membres ont eu la chance de lire, parce que c'était vraiment des éléments de réflexion dont on devra tenir compte.

Je vais vous poser une question bien simple: Pour que les citoyens puissent ressentir véritablement, pas seulement corriger l'image, sentir vraiment qu'ils ont justice, vous, quelles seraient les modifications qu'il faudrait apporter, selon vous, pour que le citoyen et la citoyenne sentent qu'ils ont vraiment justice, compte

tenu de tous les éléments qui font que, là, ils n'ont pas cette impression-là? Où doit-on surtout corriger? Plus au niveau de l'administration de la preuve? Sur la procédure? Ça serait quoi les éléments que vous souhaiteriez voir modifier?

M. Goulet: Le problème, c'est que, souvent, la perception peut être négative, mais dépendamment de l'expérience qu'aura vécue le citoyen dans le cadre du système. Chaque fois, par exemple... Et, maintenant, on commence à en parler, on commence à exiger des interventions beaucoup plus sévères en ce qui concerne, par exemple, les fautes à connotation sexuelle. Il est sûr que toutes les citoyennes ou citoyens — parce que c'est possible aussi — dans ce cas-là, qui auront à faire face, par exemple, à des problèmes de preuve ou de procédure, c'est là que va blesser le bât, pour eux autres. Pour d'autres personnes, ça peut être cette impossibilité d'assumer un suivi par rapport au professionnel. Là, on va tomber dans les modalités d'imposition de la sanction. J'aurais beaucoup de misère à dire que... En tout cas, pour ce qui concerne les quatre ou cinq éléments que je considère principaux, que j'ai mis en conclusion, j'aurais beaucoup de misère à les hiérarchiser, entre guillemets. Dépendamment des problèmes qui peuvent se poser par rapport à tel ou tel groupe de citoyens, je pense que ce sont tous des éléments qui seraient importants. (12 h 30)

Si on prend, par exemple en ce qui concerne la détermination de la sanction, le fait qu'on s'intéresse, surtout en matière policière, à la gravité objective de la faute et de la teneur du dossier disciplinaire, ça, je pense que ça a été un plus en ce qui concerne la déontologie policière, qui aurait avantage, encore là, à être importé en matière disciplinaire des corporations professionnelles. Donc, il y a la preuve, il y a la possibilité d'avoir un suivi.

Finalement, lorsqu'on demande des modalités plus souples en ce qui concerne la sanction, c'est un peu antinomique par rapport à ajouter des structures ou des choses comme ça. Il y a des aspects très intéressants, comme je l'ai souligné, dans l'avant-projet de loi, mais il y a aussi des éléments qui m'apparaissent secondaires par rapport à ces différents éléments que j'ai retenus ici, en conclusion, mais sans pouvoir vraiment leur donner une hiérarchie d'importance. Je pense, de toute façon, que ça rentre dans la même logique et que ça pourrait être adopté tout en faisant d'autres modifications si on tient à avoir un organisme de surveillance par rapport au syndic, par exemple. Ce n'est pas antinomique.

Mme Caron: Plusieurs corporations professionnelles nous ont fait part qu'elles auraient peut-être besoin, pour que le syndic puisse accomplir son rôle dans de meilleures conditions, d'une clause omnibus qui pourrait couvrir certaines situations qui ne sont pas couvertes. Est-ce que vous croyez que ça serait un élément à retenir?

M. Goulet: Je voudrais savoir à quel type de situations vous faites référence en particulier: l'inspection professionnelle, par exemple...

Mme Caron: C'est que souvent, par exemple — je vais vous donner l'exemple des ingénieurs parce que c'est le premier exemple qui me vient à l'esprit — le syndic des ingénieurs nous dit: J'ai des plaintes sur les délais, c'est-à-dire que le professionnel, après un an, n'a toujours pas remis de plan à la cliente ou au client, et, lorsque la personne dépose plainte, je n'ai pas de pouvoir pour inscrire cette plainte-là dans le dossier du professionnel. Je ne peux pas lui dire: Vous avez une date limite pour donner satisfaction à la cliente. Il nous disait: Si j'avais une clause, un genre de clause omnibus qui pourrait couvrir l'ensemble, je pourrais, à ce moment-là, intervenir et donner satisfaction.

M, Goulet: On pourrait sans doute élargir leurs pouvoirs, quoique, si on regarde les dispositions relatives au syndic, il a des pouvoirs énormes. Il peut entrer dans nos bureaux et peut vérifier tous nos dossiers.

Mme Caron: Mais il ne peut pas vous obliger à donner satisfaction.

M. Goulet: II ne peut pas nous obliger à donner satisfaction. Ça, c'est évident. Mais, je ne sais pas, il me semble avoir lu dans un texte, à un moment donné, qu'il y avait possibilité que le syndic donne lui-même des réprimandes. Après un certain nombre de réprimandes, ça pourrait être publicisé, ça aussi. Je veux dire, il y a sûrement des avenues à considérer de ce côté-là qui, sans doute, aussi pourraient... On parlait d'une meilleure perception du syndic au sein de la population.

La Présidente (Mme Hovington): Alors, en conclusion.

Mme Caron: Je vous remercie beaucoup, Me Goulet.

M. Goulet: Je vous en prie.

La Présidente (Mme Hovington): M. le ministre, vous avez une conclusion pour Me Goulet? Non.

M. Savoie: Tout simplement le remercier, encore une fois, pour avoir présenté son mémoire.

La Présidente (Mme Hovington): Alors, merci, au nom des membres de la commission, d'être venu nous présenter votre bon mémoire, Me Goulet. La commission va suspendre ses travaux jusqu'à 14 heures cet après-midi.

(Suspension de la séance à 12 h 34)

(Reprise à 14 h 3)

La Présidente (Mme Hovington): La commission de l'éducation va débuter ses travaux. Nous recevons, cet après-midi, l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec, représenté par Mme Gyslaine Desrosiers, qui est la présidente. C'est vous?

Mme Desrosiers (Gyslaine): Exactement.

La Présidente (Mme Hovington): Bonjour, madame. Bienvenue à la commission de l'éducation. Si vous voulez bien nous présenter vos collègues.

Ordre des infirmières et infirmiers du Québec (OIIQ)

Mme Desrosiers: Oui, Mme la Présidente. Je suis accompagnée, à l'extrême droite, par Me Hélène D'Anjou, conseillère juridique.

La Présidente (Mme Hovington): Bonjour.

Mme Desrosiers: À ma droite immédiate, Me Claudette Ménard, directrice des services juridiques.

La Présidente (Mme Hovington): Bonjour.

Mme Desrosiers: À ma gauche immédiate, Mme Danielle Poulin, syndic de l'Ordre.

La Présidente (Mme Hovington): Bonjour.

Mme Desrosiers: Et, à l'extrême droite, Mme Pierrette Lange, secrétaire adjointe.

La Présidente (Mme Hovington): Bonjour. Alors, allez-y, Mme Desrosiers. Vous avez 20 minutes pour nous présenter votre mémoire.

Mme Desrosiers: Oui. Merci, Mme la Présidente.

Alors, Mme la Présidente de la commission de l'éducation, M. le ministre, Mme la représentante de l'Opposition, l'Ordre des infirmières vous remercie de l'opportunité de vous présenter son mémoire. L'Ordre est une corporation professionnelle qui aura bientôt 75 ans d'existence et possède avec ses 63 000 membres le «membership» le plus important de toutes les corporations professionnelles au Québec.

D'emblée, nous tenons à réaffirmer notre attachement à l'organisation et aux valeurs véhiculées par notre système professionnel. Notre organisme a toujours pris au sérieux son mandat de protection du public. Il l'a exercé rigoureusement au cours des années. Le fait d'une pratique privée plus développée chez les infirmières a permis que nous développions une certaine culture de tolérance face à la multiplication des contrôles d'État. De fait, nos rapports avec l'Office des professions et avec le ministre responsable de l'application des lois professionnelles ont toujours été des plus harmonieux. Nous avons l'intention de maintenir et d'améliorer cette collaboration. C'est pourquoi nous appuyons de façon générale ce qui, dans l'avant-projet de loi, bonifie le système professionnel et ses acquis fondamentaux en permettant, de façon tangible, des améliorations de la protection du public sur certains points. Par ailleurs, certaines dispositions de l'avant-projet de loi ont provoqué chez nous, à l'instar des autres corporations, l'instauration d'un climat de méfiance que nous regrettons.

Par exemple, l'attribution de pouvoirs discrétionnaires rattachée à des mesures aussi importantes que l'enquête et la mise en tutelle sur les corporations professionnelles, vraiment, nous apparaît vexatoire. Nous sommes étonnés de l'énormité de ces propositions qui nourrissent la présomption que les corporations professionnelles faillissent à leur mandat. À cet égard, nous sommes déçus du discrédit que le gouvernement élève à l'égard des professionnels. De façon plus spécifique, en ce qui concerne les infirmières qui ne sont pas des professionnels à haut revenu, les infirmières cotisent pour 9 000 000 $ par année dans la protection du public. Déjà, elles considèrent ce montant comme exorbitant. Elles n'endosseront sûrement pas des propositions gouvernementales lourdes ou bureaucratiques qui ne donneraient pas d'évidence de gains tangibles pour la population. On risque vraiment, chez les infirmières, une désaffection complète à l'égard du système professionnel. Alors, voilà pour les commentaires d'introduction.

De façon plus particulière, notre présentation portera sur les deux axes principaux retenus dans l'avant-projet, c'est-à-dire, d'une part, l'imputabilité des instances et, d'autre part, l'augmentation de la transparence du système professionnel, particulièrement du mécanisme disciplinaire. Alors, nos commentaires, d'abord concernant l'imputabilité des instances professionnelles. Lors de la réforme du système professionnel, en 1973, le gouvernement a créé les corporations. Pour protéger le public, il s'est doté d'un organisme de surveillance qui est l'Office. Alors, à notre avis, l'avant-projet de loi modifie sensiblement les paramètres de base du système professionnel en déplaçant le centre de gravité vers l'Office par un élargissement de son mandat et un accroissement de ses pouvoirs sur les corporations professionnelles. L'Office devient ainsi titulaire de responsabilités majeures sous l'angle de sa substitution aux corporations professionnelles dans certaines fonctions quasi judiciaires, administratives et réglementaires.

L'Ordre des infirmières tient à signifier au ministre qu'il ne peut endosser l'économie générale de l'avant-projet de loi dans cet aspect-là que constitue ce transfert de responsabilités. Ces modifications attribuent des pouvoirs, à notre avis, excessifs à l'Office des professions et remet en cause l'équilibre du système professionnel. Si cette proposition était retenue, l'autonomie et l'autogestion des corporations seraient désor-

mais pure illusion. Il faut également ajouter que le contexte du dépôt du projet de loi 67, où le gouvernement ne financerait plus l'Office des professions, et ce contexte-là de délestage de certaines responsabilités gouvernementales nous inquiètent également, compte tenu de la présentation conjuguée et de l'avant-projet et du projet de loi.

Concernant le pouvoir de tutelle, le Code des professions confie déjà au gouvernement le pouvoir d'ordonner la mise en tutelle d'une corporation lorsque celle-ci présente une situation financière déficitaire. L'exécution de cette tutelle est déléguée à l'Office des professions. L'avant-projet élargit l'assiette des motifs qui donne ouverture à la tutelle en y ajoutant la situation où la corporation fait défaut d'exécuter son mandat conformément aux normes qui la régissent. Sur ce point, nous sommes d'accord.

Il y a également un autre aspect, un autre élément de motif qui est l'éventualité où elle n'assure pas une protection adéquate du public. Sur l'ajout de ce dernier motif de mise en tutelle, nous sommes en désaccord, parce que le concept de protection adéquate du public confère une discrétion excessive à l'Office des professions pour déclencher le mécanisme de mise en tutelle, parce que ce concept n'a jamais été cerné par une définition et ne fait référence, dans l'avant-projet de loi, à aucun critère permettant d'identifier son contenu. Nous sommes d'avis que les balises que contient le droit professionnel comportent suffisamment de moyens pour permettre aux corporations d'assurer la protection du public. Si ce n'est pas le cas, le législateur doit ajuster les obligations des corporations et non ajouter des pouvoirs de contrôle discrétionnaires à l'Office.

Par ailleurs, le pouvoir d'ordonner la mise en tutelle d'une corporation ne repose que sur le seul rapport de l'Office des professions et le Code ne prévoit aucun mécanisme permettant aux corporations de faire valoir leur point de vue sur cette question lorsqu'elles sont mises en cause. En effet, l'intervenant qui soumet la recommandation d'imposer une tutelle en devient l'exécutant et se retrouve dans une situation de juge et partie au processus de mise en tutelle. L'Ordre des infirmières soutient que la corporation doit avoir le droit d'intervenir avant sa mise en tutelle, compte tenu de son mandat de protéger le public, mandat, on le rappelle, dont elle est directement imputable au gouvernement. (14 h 10)

Un aspect concernant la détermination des diplômes qui donne ouverture au permis d'exercice, l'avant-projet de loi maintient l'attribution au gouvernement du pouvoir de déterminer les diplômes qui donnent ouverture à un permis d'exercice, sauf qu'il le soumet au seul avis de l'Office des professions. Or, le poids de cet avis dans la décision du gouvernement confirme, de façon claire, que la maîtrise d'oeuvre du processus menant à la détermination des diplômes est confiée à l'Office des professions. Les corporations se trouvent ainsi marginalisées dans le processus puisqu'elles deviennent noyées dans une série d'intervenants que l'Office devra consulter, et ce, malgré le fait qu'elles conservent, en aval, le mandat de garantir la qualité de l'exercice professionnel.

Nous sommes convaincus que le gouvernement doit continuer à déterminer les diplômes, après une consultation directe auprès des corporations concernées. En effet, les corporations sont mieux dotées que l'Office en ressources et en mécanismes de contrôle de la qualité de la formation, des services et de la compétence des professionnels.

À l'heure actuelle, le gouvernement détermine les modalités de collaboration entre la corporation professionnelle intéressée et les établissements d'enseignement pour l'élaboration, pour la révision des programmes d'études et pour la préparation des examens et d'autres mécanismes d'évaluation des personnes qui effectuent ces études. L'avant-projet confie dorénavant cette responsabilité à l'Office des professions. L'Ordre est en désaccord avec cette modification, notamment en raison de la diversité des professionnels en cause, de leur champ d'activité spécifique et de la nécessité de préserver la culture intrinsèque et les valeurs inhérentes à chaque profession. Il revient aux corporations professionnelles de s'assurer que leurs membres reçoivent une formation adéquate qui s'arrime avec une pratique professionnelle de qualité.

Pour protéger adéquatement le public, chaque corporation doit pouvoir faire valoir directement au gouvernement les besoins d'évolution prospective de la formation des professionnels qui la composent. En conséquence, ce mandat justifie que la corporation chapeaute le mécanisme de collaboration afin de documenter, d'expliquer, de justifier l'adéquation ou l'inadéquation de la formation constatée avec l'exercice de la profession. La fixation, par l'Office des professions, des modalités de collaboration, à notre avis, outrepasse sa fonction de veiller à ce que chaque corporation assure la protection du public.

L'avant-projet, également, augmente considérablement les pouvoirs d'enquête que détient déjà l'Office des professions sur les corporations professionnelles dans la mesure où les motifs qui donnent ouverture à une enquête s'étendent aux situations où la corporation n'assure pas une protection adéquate du public. L'Ordre s'oppose à l'inclusion de cette formulation qui permet à l'Office de faire enquête s'il croit que la protection du public n'est pas assurée, ce dont il peut déterminer le contenu à sa seule discrétion. Par ailleurs, les moyens qui seront mis à la disposition de l'Office pour exécuter son enquête s'étendront aux pouvoirs considérables accordés aux commissions d'enquête et permettront aux enquêteurs nommés par l'Office d'accéder aux dossiers de la corporation et à ceux des professionnels au détriment des droits fondamentaux que sont le droit au secret professionnel et le droit à la vie privée.

L'Ordre des infirmières propose que les motifs de faire enquête sur une corporation professionnelle soient restreints à la situation financière, tel que c'est le cas

présentement, et à celle où elle ne s'acquitte pas des devoirs qui lui sont imposés par le Code des professions, les lettres patentes et les règlements qui la régissent. Ces normes incluent déjà l'obligation d'assurer la protection adéquate du public. De plus, avant de faire une enquête sur une corporation, l'Office devrait être tenu de soumettre un rapport détaillé au ministre responsable de l'application des lois professionnelles, rapport lui expliquant les motifs justifiant une telle enquête.

En matière de contrôle sur la réglementation des corporations professionnelles, l'avant-projet suggère un élargissement du mandat de l'Office des professions. L'adoption de certains règlements dépendra de l'approbation finale de l'Office sans qu'il soit nécessaire de recourir à l'approbation du gouvernement. Par ailleurs, l'Office pourra recommander et imposer des modifications à tous les règlements de la corporation alors qu'actuellement ce pouvoir ne s'adresse qu'aux règlements que la corporation est tenue d'adopter. De plus, le pouvoir de substitution de l'Office s'adressera désormais à tous les règlements que la corporation est tenue d'adopter. L'Ordre des infirmières est d'accord avec le principe d'un contrôle de la réglementation en autant qu'il s'agit d'un contrôle sur les délais spécifiques et dans la mesure où il se limitera aux règlements qui, selon nos recommandations, touchent directement la protection du public.

Concernant la réglementation par les corporations, nos attentes étaient orientées vers une plus grande délégation de responsabilités à l'endroit des corporations professionnelles, dans les matières qui ne concernent pas directement la protection du public. Notre expérience confirme que la procédure de réglementation s'avère extrêmement longue, particulièrement à l'étape de l'étude par l'Office des projets de règlements adoptés par le bureau. L'approbation par le gouvernement souffre, hélas, également de délais considérables puisqu'elle doit être soumise à l'examen du Bureau des règlements. Certains règlements que nous avons élaborés, adoptés et soumis à l'Office demeurent toujours en suspens. Il s'agit, à notre avis, d'une grave lacune qui donne lieu à des situations où la corporation se retrouve dans un vide juridique, mettant en péril plusieurs décisions que le bureau doit prendre pour accomplir sa mission de protection du public.

L'assouplissement proposé dans l'avant-projet de loi voulant que l'Office soit le bout de la chaîne d'approbation ne suffit pas, à notre avis, à rendre plus efficace le processus d'adoption des règlements puisque c'est précisément à cette étape que le mécanisme se trouve constamment retardé. Pour pallier à cette lacune, l'Ordre des infirmières propose que le législateur déréglemente l'ensemble des sujets de délégation législative pour restreindre l'objet de la réglementation aux matières qui touchent directement la protection du public, notamment le Fonds d'indemnisation et les comptes en fidéicommis, le code de déontologie, l'arbitrage des comptes, l'arbitrage des différends, l'autorisation d'actes et la révocation de l'immatriculation.

Pour favoriser l'exercice de cette délégation, il faut retenir, à notre avis, la procédure la plus simple possible, à savoir le dépôt du projet de règlement à l'Office 60 jours avant son adoption par le bureau, selon les modalités proposées à l'article 95.2 de l'avant-projet. Ces modalités excluent l'application de la Loi sur les règlements et prescrivent un délai à l'intérieur duquel l'Office devra formuler son avis. Quant aux autres fonctions rattachées aux autres matières, elles doivent être confiées aux corporations professionnelles par délégation administrative de sorte que les corporations puissent s'en acquitter par résolution. Ces fonctions pourraient être assorties d'obligations ou de discrétions selon le poids de la responsabilité qui leur est rattachée.

Alors, dans l'exercice de ce pouvoir, l'Ordre propose que le bureau de la corporation soit tenu de déposer la résolution à l'Office des professions dans un délai spécifique et que certaines résolutions déterminées par le législateur fassent l'objet d'une publication dans la Gazette officielle. Par ailleurs, les matières sur lesquelles le bureau réglemente à sa discrétion pourraient faire l'objet d'une résolution qui n'aurait pas besoin d'être déposée à l'Office.

Concernant d'autres aspects, nous avons applaudi à l'introduction du principe de la réciprocité des jugements en matière criminelle et disciplinaire pour assurer l'intégrité professionnelle des personnes admises à la profession. Nous avons endossé cette proposition. Concernant, maintenant, tout le second volet de l'avant-projet de loi touchant la transparence du système professionnel, l'avant-projet accorde une grande importance au principe de la transparence par le contrôle sur les nominations. Nous avons endossé cette proposition de nomination de deux personnes du public à l'Office des professions.

Concernant les mécanismes disciplinaires, l'avant-projet suggère que le syndic d'une corporation professionnelle soit désormais tenu d'informer l'Office au moyen d'un rapport détaillé, lorsque son enquête n'aura pas été terminée dans les 60 jours de la réception d'une demande d'enquête. L'Ordre des infirmières soumet que cette mesure n'ajoute rien à la transparence du système disciplinaire. Les exigences proposées nous apparaissent bureaucratiques et, vraiment, font dévier ceux qui doivent y répondre de leur mandat principal en raison de l'alourdissement administratif que cela comporte. Nous avons proposé, dans notre mémoire, d'autres mesures.

Concernant le comité d'examen des plaintes, l'avant-projet fait une proposition. Nous endossons le principe d'un encadrement plus étroit des fonctions du syndic afin de mettre en relief la responsabilité des corporations professionnelles à l'égard du public. Toutefois, nous soutenons que le mécanisme proposé est trop lourd et disproportionné avec la transparence et l'efficacité recherchées par ce moyen. Dans l'éventualité où le comité d'examen des plaintes conseille systématiquement le syndic sur toutes les demandes en matière disciplinai-

re, Favant-projet opère un déplacement de la responsabilité du processus d'enquête du syndic vers le comité d'examen des plaintes.

De plus, le fait que le comité redonne un avis au syndic lorsque ce dernier conclut qu'une demande d'enquête ne justifie pas de porter plainte alourdit le processus d'enquête et constitue une redondance de fonction. Selon les propositions de Favant-projet, le comité d'examen des plaintes constitue avant tout un mécanisme de contrôle des activités du syndic plus qu'un moyen assurant une véritable transparence du système professionnel. (14 h 20)

À notre avis, les fonctions de ce comité devraient davantage être consultatives, soit celles d'un comité aviseur destiné à supporter le syndic dans l'exercice de ses fonctions. Ce comité aurait le pouvoir de donner un avis motivé au syndic, avis que ce dernier ne serait pas tenu de suivre, mais, toutefois, il y aurait véritablement une pression morale importante sur le syndic et ça préserverait son autonomie qui lui est nécessaire dans l'exercice de ses fonctions.

Concernant la plainte privée, nous avons appuyé la proposition d'allégement du mécanisme qui donne au plaignant privé la possibilité d'avoir un accès direct au système disciplinaire. Ces mesures équilibrent les moyens des intervenants et ajoutent une transparence réelle au système disciplinaire. C'est vraiment une proposition intéressante.

L'accès au rôle d'audience du comité de discipline. Nous nous sommes ralliés aux propositions de l'avant-projet de loi qui favorisent l'accès au rôle d'audience et aux dossiers du comité de discipline car elles constituent, selon nous, un élément valable de transparence. Notre corporation a appuyé également la proposition voulant que le comité de discipline soit désormais tenu de décider si une ordonnance radiant un membre du tableau, révoquant, limitant ou suspendant le droit d'exercice, soit ou non publiée dans un journal circulant dans le lieu où l'intimé a son domicile professionnel. Il s'agit, à notre avis, d'une mesure significative d'exemplarité et de transparence tout à fait justifiée lorsqu'elle a pour objet de sanctionner les infractions les plus lourdes.

Enfin, nous avons proposé au législateur un dernier point qui portait sur une proposition voulant que le Tribunal des professions constitue désormais une instance pénale de premier rang dans les matières autres que disciplinaires. Les décisions relatives à l'exercice illégal et à l'usurpation de titre seraient particulièrement visées par cette nouvelle compétence du Tribunal des professions, compétence qui s'ajouterait à sa juridiction d'appel en matière disciplinaire. Nous nous appuyons sur le fait qu'à l'heure actuelle les décisions statuant sur les litiges mettant en cause l'exercice illégal d'une profession sont souvent prononcées par des tribunaux de droit commun en matière criminelle et pénale. Nous ne voulons pas remettre en cause la compétence ou l'effica- cité du système judiciaire, mais, cependant, nous croyons qu'un tribunal spécialisé en droit professionnel serait beaucoup plus qualifié pour se prononcer sur ces questions qui ont trait à l'exercice professionnel et à l'interprétation des dispositions législatives et réglementaires qui définissent les champs de pratique. Alors, l'instauration d'une juridiction pénale de premier rang en matière professionnelle aurait pour effet d'assurer un droit professionnel plus cohérent et une jurisprudence mieux articulée sur l'ensemble des questions.

Je conclus, Mme la Présidente. Notre organisme confirme son adhésion non équivoque au principe sur lequel se fonde notre système professionnel, à savoir l'imputabilité des corporations professionnelles eu égard à leur autogestion et la protection du public. Nous sommes convaincus que les acquis de notre organisation professionnelle québécoise doivent non seulement être protégés, mais renforcés. Nous sommes d'avis que, si des ajustements s'avèrent nécessaires, ils doivent s'inscrire dans la perspective des paramètres originaux et en les bonifiant. Cependant, nous invitons le gouvernement à reprendre l'écriture de cet avant-projet de loi dans le sens des propositions que nous vous avons soumises afin de maintenir et renforcer l'imputabilité des corporations en regard de la protection du public.

Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Hovington): Merci, Mme Desrosiers.

M. le ministre, vous avez la parole.

M. Savoie: Oui. Merci, Mme la Présidente.

Je vais saluer comme il le faut les représentantes de l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec, leur souligner que le mémoire qui a été déposé constitue pour nous une source de réflexion, qu'ils présentent non seulement une critique mais également des orientations quant à des solutions qu'ils jugent acceptables. Peut-être indiquer à mes collègues de l'Assemblée nationale de même qu'à la présidente qu'il y a, dans l'Ordre, 63 714 membres et qu'ils fonctionnent avec un budget de 10 000 000 $, que, comme corporation, ils jouissent d'une excellente réputation en ce qui concerne l'administration de leurs affaires et de dire que leur présence ici aujourd'hui avec leur mémoire finalement soutient l'orientation générale d'une bonne participation et une volonté de maintenir une forte participation de leur corporation professionnelle dans le fonctionnement général de cette structure au Québec.

Ceci étant dit, je pense qu'il y a eu dans vos commentaires... Vous avez abordé des éléments qui, effectivement, ont fait l'objet de plusieurs discussions depuis le début des travaux de cette commission. On parle de tutelle. Vous dites: Ah! ça menace finalement l'autonomie, c'est finalement un bâton qui n'est peut-être pas nécessaire à ce moment-ci et, s'il devient nécessaire, il faudrait qu'il soit balisé davantage. À date, les discussions que nous avons eues semblent se dessiner

clairement dans cette orientation-là. Je ne pense pas que ça présente des difficultés. On pense qu'effectivement, lorsqu'il y a transgression au niveau de la loi, par exemple, c'est finalement une source de persuasion qui est intéressante.

Au niveau de l'enquête, évidemment, vous arrivez un peu avec la même approche, en disant: Écoutez, on n'est pas pour signer un chèque en blanc à l'Office. On pense que ça va à rencontre. Ça aussi, c'est partagé. L'avant-projet de loi n'est qu'un avant-projet et c'est pour discussion. Vous nous arrivez avec des balises, et, là aussi, je pense qu'avec la majorité des intervenants on a constaté qu'il se dessinait un consensus autour d'un principe d'acceptation de l'enquête, mais, là encore, balisé. C'est le balisage qui va être difficile à évaluer au fur et à mesure qu'évoluent les travaux de la commission, mais, finalement, on est à peu près dans le même champ.

Au niveau de la certification, on a eu une rencontre ce matin, une présentation de la part de la Conférence des recteurs. Pour la Conférence des recteurs, je voudrais préciser: des recteurs, mais impliqués au niveau de la structure des professions, donc qui doivent faire une réflexion et échanger d'une façon constante avec les corporations professionnelles, qui, eux, évidemment, acceptent l'orientation qui est présentée, mais, par contre, en exigeant une plus grande collaboration et des échanges à un niveau beaucoup plus élevé et que l'orientation générale proposée par l'Office est acceptable.

Je ne voudrais pas, à ce moment-ci, aborder avec vous justement ces critères de détermination. Vous avez touché à un problème qui est important. Ce qui m'intéresse particulièrement et ce qui a fait l'objet de beaucoup d'échanges, c'est le comité des plaintes. On est revenu sur ce sujet à plusieurs reprises. Au niveau du comité des plaintes, ce qui semble se dessiner, c'est que, effectivement, un comité des plaintes, pour certaines corporations qui ont très peu de plaintes, sans parler d'ingérence de la part du gouvernement... Le gouvernement ne cherche pas ça, il cherche à avoir des corporations qui se développent pleinement. Ce qu'on cherche à obtenir avec le comité des plaintes, c'est un mécanisme qui va permettre, par exemple, aux citoyens, de se faire expliquer par ce comité-là, d'une façon importante, sévère, la nature du refus ou l'ordre donné au syndic de reprendre la plainte. On y voyait un mécanisme qu'on appelait, entre guillemets, de démocratisation, dans ce sens qu'on ne fait pas affaire qu'avec des membres de la même corporation. Il y a des citoyens qui sont présents, et on y voyait un avantage.

Là où il y a très peu de plaintes, on pourrait peut-être les regrouper. On pourrait peut-être avoir plusieurs corporations qui se regrouperaient autour du même comité des plaintes, dans le but justement de réduire. Il y a certaines corporations, par exemple, qui ont seulement cinq plaintes par année — on a eu une présentation ce matin, à cet effet-là — il y en a d'autres qui en ont trois. On y voyait là, peut-être par secteur, secteur santé, secteur administration, un avantage. Évidemment, les infirmières, vous avez 63 714 membres. Il y a du stock, il y a du volume, et vous êtes actifs au niveau de la discipline. Ce n'est pas une affaire que vous prenez à la légère. Je pense que votre dossier démontre très clairement que vous êtes présents et que vous prenez ça à coeur.

Maintenant, est-ce que vous voyez un allégement, une balise de cette nature-là comme quelque chose qui pourrait influencer vos hésitations vis-à-vis du comité des plaintes?

Mme Desrosiers: La proposition, telle qu'elle est soumise dans l'avant-projet de loi, nous apparaissait très lourde: un comité de cinq personnes, et il y avait une certaine ambiguïté dans l'énoncé comme tel de l'avant-projet de loi. Est-ce qu'il s'agit d'un comité qui sert de boîte à lettres à tout ce qui rentre à l'Ordre des infirmières avant même que... Des fois, ce sont des questions où il s'agit de... Il y a une demande d'enquête, mais qui n'est absolument pas à caractère disciplinaire. Alors, est-ce que le comité... Alors, la proposition n'était pas très claire. Il nous apparaissait très onéreux de faire siéger cinq personnes de façon régulière pour faire le tri sur des sujets qui, de toute façon, ne pourront jamais aller en discipline.

Nos infirmières sont, dans la grande majorité, syndiquées. Des fois, on peut recevoir une demande d'enquête qui touche le fardeau de la tâche ou qui, en fait, n'a rien à voir avec les matières disciplinaires. Est-ce que ce comité-là devrait siéger? Et, à ce moment-là, ça ne donne aucun bénéfice en termes de protection du public. (14 h 30)

Alors, où doit intervenir le comité d'examen des plaintes? Il faut que la demande d'enquête soit qualifiée comme étant disciplinaire d'abord; ensuite, le fait qu'un comité puisse procéder à des préenquêtes, c'est comme... On ne peut quasiment pas imaginer. Ce n'est pas des gens payés à temps plein. Comment ce comité-là peut-il procéder à une préenquête et, éventuellement, donner un avis éclairé au syndic? Il y a là un aspect qui ne nous apparaissait pas très opérationnel. C'est pourquoi la proposition qu'on fait, c'est de mettre un poids moral sur le syndic à l'effet qu'il y ait un comité aviseur aux plaintes. Autrement dit, une fois qu'une demande d'enquête est qualifiée comme étant disciplinaire, le syndic fait enquête et en arrive à prendre une décision pour aller en comité de discipline ou non.

Évidemment, toutes les demandes d'enquête refusées par le syndic comme ne devant pas aller en discipline pourraient être analysées par ce comité-là et faire valoir au syndic soit de réanalyser certaines dimensions... On pourrait faire valoir certains points. À ce moment-là, on pense que, oui, il y aurait un certain bénéfice sur le plan de la transparence. Mais, encore là, ce qu'il faut toujours se demander, c'est qu'est-ce que ça va véritablement donner.

Les plaintes, actuellement, il y a des dispositions dans le Code des professions qui obligent actuellement le syndic à donner des explications à une personne qui fait une demande d'enquête; il y a déjà une disposition. Si certaines corporations ne l'appliquent pas, il faudrait voir exactement ce qui en est, mais il y a des dispositions, il n'y a pas une personne qui fait une plainte chez nous qui ne reçoit pas une explication sur le fait que la plainte soit retenue ou pas retenue. Pourquoi? Qu'est-ce qui en est? La syndic serait en mesure de vous expliquer. Mais, des fois, les gens de bonne foi font une demande d'enquête et puis il n'y aurait pas matière à preuve. Enfin, c'est une procédure quasi judiciaire; il ne faut pas impunément l'utiliser à très grands frais. De bonne foi, il y a des explications qui peuvent se donner, mais, de façon rigoureuse, dès que c'est qualifié de façon disciplinaire, le processus s'enclenche, mais quelle est la garantie de résultat en regard de ça? Est-ce que ça ferait en sorte que toutes les plaintes vont nécessairement aboutir davantage au comité de discipline?

On pense, malgré tout, que la proposition qu'on vous fait, c'est de préserver la capacité pour le syndic et les syndics adjoints de faire enquête; parce que ça, un comité ne peut pas faire enquête ou faire une amorce de préenquête, ce n'est pas fonctionnel.

On a fait une proposition à l'effet que le syndic puisse faire rapport au bureau de ses activités, le nombre de demandes d'enquête reçues, etc. Et, quand même, sur le bureau, nous autres, on a 28 personnes sur le bureau, dont 4 nommées par l'Office des professions. Ces gens-là poseraient des questions, voudraient savoir pourquoi sur x demandes d'enquête reçues... Alors, il y aurait comme deux niveaux qui feraient en sorte qu'on sentirait une amélioration, en tout cas en termes de transparence.

M. Savoie: C'est beau? Oui. Le fonctionnement du comité des plaintes, on voit ça comme un élément essentiel pour justement l'élément transparence, l'élément recours à quelqu'un qui n'est pas membre de cette corporation. C'est là que ça présente tous ces avantages.

Mme Desrosiers: II faut savoir qu'est-ce qu'on cherche à corriger. Est-ce que la population se plaint de ne pas avoir de réponse sur les demandes qu'elle pose? Si c'est ça, il y a déjà des mécanismes. Bon. On peut les améliorer. Par ailleurs, est-ce que la population se plaint véritablement sur les sanctions? Si c'est les sanctions qui sont mises en cause, ça échappe complètement au syndic, c'est le comité de discipline qui en dispose; on ne peut pas influencer ce processus-là.

M. Savoie: Ce n'est pas les sanctions, ni les réponses, c'est surtout l'approche, finalement, de déposer une plainte auprès d'une infirmière pour contester ce que fait une autre infirmière et se voir refuser, pour des motifs souvent assez techniques, et sentir qu'il y a là autre chose qu'uniquement l'application d'un Code de déontologie, sentir que d'autres éléments peuvent entrer en jeu.

Et, finalement, le comité, ce qu'il vient faire, c'est qu'il vient suppléer à cet élément-là. Je prétends que le temps va nous dire si effectivement il y a des décisions importantes qui sont retournées par le comité des plaintes.

Mme Desrosiers: Écoutez, la proposition telle qu'elle est sur la table dans l'avant-projet de loi, elle ne pourrait pas être appliquée, en tout cas, dans notre corporation, il y aurait des coûts énormes. Ça se chiffrerait par centaines de mille dollars. Pour quels bénéfices? Alors, il faut vraiment s'assurer que le mécanisme mis de l'avant apporte des réponses pour l'ampleur du problème. C'est pour ça qu'on fait une suggestion d'un comité des plaintes, mais allégé...

M. Savoie: D'accord.

Mme Desrosiers: ...vous savez, et qui répondrait, je pense, aux objectifs de transparence que vous avez comme gouvernement.

M. Savoie: Des centaines de milliers de dollars...

Mme Desrosiers: Écoutez, réunir cinq personnes pour faire l'analyse, trier, poser des questions, retourner. Vous savez, on ne met pas sur la table des cas comme ça. Je veux dire, il y a des dossiers qui se montent. C'est un mécanisme qui est lourd. Et il faut que vous vous rappeliez que, nous autres, nous oeuvrons dans le domaine de la santé et que l'instauration de la loi 120 prévoit toute une mécanique pour que la population en général puisse porter plainte. On soupçonne que, dans les années qui s'en viennent, il va y avoir vraiment une augmentation générale du nombre de plaintes puisqu'on s'en va dans un système où c'est la possibilité de déposer des plaintes. Évidemment, ce n'est pas à caractère disciplinaire tout le temps, mais il va y avoir une invitation plus grande à la population de ce côté-là, sur laquelle on est susceptibles, les infirmières, d'avoir une... On pense que ça peut éventuellement augmenter le nombre de plaintes...

M. Savoie: Oui, c'est ça.

Mme Desrosiers: ...qui restera à déterminer parce que, comme je vous le dis, tant que la plainte n'est pas qualifiée comme étant disciplinaire, juste ça en soi, c'est un exercice.

M. Savoie: C'est ça. Et le formulaire, de quelle...

Mme Desrosiers: Et puis il y a des frais d'avocat, il y a des frais d'expertise. Chaque fois qu'on fait préenquête, il y a des frais d'expertise, quand même.

M. Savoie: L'évaluation... C'est sûr qu'il va y avoir une vérification très serrée au niveau des coûts et on va certainement vous revenir là-dessus parce que, finalement, comme vous l'avez mentionné, il y a 63 000 membres. Mais les coûts ne sont certainement pas aussi importants que vous semblez le croire.

Au niveau du formulaire, de quelle façon vous voyez ça, l'utilisation du formulaire pour déposer une plainte?

Mme Desrosiers: Un formulaire standard, là, élaboré par l'Office?

M. Savoie: Oui, c'est ça.

Mme Desrosiers: On pense que oui, ça peut être une proposition intéressante, valable.

Mme Ménard (Claudette): Oui, mais sans en faire l'unique accès.

M. Savoie: Non, non, ce n'est pas...

Mme Ménard: Ça peut être un des volets. On se questionnait aussi sur les formulaires. Quand vous vous référez, dans l'avant-projet de loi, à tous les recours, faire des formulaires sur tous les recours, on ne comprend pas exactement, parce que «tous les recours», il y en a plusieurs. Les formulaires multipliés pour tous les types de recours, ça, ça nous apparaît s'en aller on ne sait pas exactement où. Comme tels, les formulaires, ça nous laisse assez... On endosse ça, il n'y a pas de problème, en autant qu'on puisse se servir d'autres alternatives.

M. Savoie: D'accord. C'est beau, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. le ministre.

Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Merci, Mme la Présidente.

Bienvenue à l'Ordre des infirmières et des infirmiers du Québec. Personnellement, je pense que, lorsqu'on parle du système disciplinaire et lorsqu'on limite le problème de l'insatisfaction des citoyens et des citoyennes au fait que le syndic soit membre de la corporation, on passe à côté du problème, parce que les insatisfactions sont de plusieurs ordres. Il y a des insatisfactions, évidemment, parce qu'on n'obtient pas satisfaction et qu'on peut dire que c'est effectivement parce que c'est un pair qui a jugé, sauf qu'il y a des insatisfactions aussi au niveau des délais.

Il y a des insatisfactions au niveau du manque de suivi. La personne dit: On dépose une plainte et on n'a pas de suivi. On ne nous reparle pas, on ne nous interroge pas jusqu'à la décision. Il y a des insatisfactions sur le manque de précisions lorsqu'une plainte est rejetée, il y a aussi des insatisfactions à cause de la nature même des plaintes qui ne sont pas nécessairement couvertes par le système disciplinaire et il y a aussi des insatisfactions par rapport aux sanctions, il ne faut pas se le cacher. (14 h 40)

Donc, l'ensemble de ces insatisfactions, on les retrouve au niveau du système professionnel. Le sondage des ACEF parlait de 45 %, mais il ne faut pas oublier qu'on le retrouve aussi, cet ensemble de reproches, pour notre système de justice aussi, à 71,4 %, et ce n'est pas seulement, à ce moment-là, parce que c'est des pairs qui vont juger. Ce n'est pas ça la raison, c'est toutes les autres raisons que je vous ai données: les délais de notre système de justice, le manque de précision, la nature des plaintes, l'insatisfaction, les sanctions. Donc, cette insatisfaction-là, on ne peut pas la limiter à un seul point, et je pense que le système proposé dans l'avant-projet de loi, justement, se limite à un point et ne viendra pas régler l'ensemble des insatisfactions de la population. Et, moi, c'est ce qui m'inquiète actuellement le plus.

Vous êtes une corporation qui, évidemment, regroupez le plus grand nombre de membres, donc vous avez une grande expertise. 90 % de vos membres sont en milieu institutionnel, donc sont suivis de très près par tout le système aussi. Lorsque vous dites que le législateur doit ajuster les obligations des corporations et les obligations, aussi, du syndic, quand on dit qu'il faut peut-être être plus précis dans le cas de certaines corporations, plutôt que d'ajouter des pouvoirs de contrôle à l'Office, je pense que vous percevez bien, quant à moi, là, la réalité.

Sur les demandes d'enquête qui ont été retenues à votre corporation en 1990-1991, on nous parle de 113 demandes d'enquête retenues, 9 qui ont suivi au comité de discipline. Vous avez bien fait, Mme Desrosiers, la distinction à l'effet que les demandes d'enquête ne sont pas toujours de nature disciplinaire. Est-ce que vous avez des chiffres à nous donner, des pourcentages à nous donner là-dessus, sur le nombre de demandes d'enquête qui, finalement, ne touchent pas le système disciplinaire?

Mme Desrosiers: Je vais inviter Mme Poulin.

Mme Poulin (Danielle): Bon. Si on regarde le rapport annuel de l'année passée, on voit que nous avons eu un total de 166 demandes d'enquête qui pouvaient faire l'objet d'une enquête disciplinaire au départ; par contre, il y en a 53 là-dessus qui n'ont pas fait l'objet d'une enquête disciplinaire parce qu'elles ne mettaient pas en cause un acte dérogatoire, par exemple. Alors, il y en a eu 113 qui ont fait l'objet d'une enquête et, de ces 113, 25 plaintes ont été déposées devant le comité de discipline.

Mme Caron: Les plaintes qui ne touchaient pas des actes dérogatoires, c'était quel genre de plaintes?

Mme Poulin: Bon. Dans les demandes d'information, à titre d'exemple, je pourrais vous dire que j'ai reçu des copies de griefs de syndicats qui se plaignaient d'un manque de personnel dans un centre hospitalier. Alors, ce sont des questions plutôt d'ordre administratif qui ne nous concernent pas sur le plan de la déontologie professionnelle.

Un autre exemple. On a parfois des infirmières qui font l'objet de mesures disciplinaires de la part de leur employeur; par mesures disciplinaires, entendons en termes administratifs. Alors, l'infirmière qui est suspendue ou congédiée, parfois, par désir de vengeance, elle fait une demande d'enquête à l'Ordre des infirmières pour se plaindre de son infirmière chef ou de la directrice des soins infirmiers. Évidemment, on n'est pas un syndicat, on n'est pas là pour agir comme arbitre ou s'ingérer dans les fonctions administratives des hôpitaux, par exemple. Alors, ce sont des demandes d'enquête qu'on ne peut pas mener plus loin. On explique aux gens que, malheureusement, nous n'avons pas de pouvoir d'intervenir sur un plan administratif et qu'ils devraient s'adresser à d'autres instances pour les aider, s'il y a lieu.

Mme Caron: Oui, sûrement. À votre corporation, il y a sûrement beaucoup de plaintes qui peuvent arriver du côté administratif, chose qu'on ne retrouve pas nécessairement dans d'autres corporations professionnelles.

Au niveau des plaintes du public, est-ce que le pourcentage est élevé?

Mme Poulin: Si on regarde le rapport annuel, on voit: Public bénéficiaire-membres de la famille, 28. C'est quand même un nombre qui peut être assez élevé. Par contre, les demandes qui nous sont faites vont parfois relever des sujets suivants. Par exemple, les gens nous demandent un avis juridique; alors, on les réfère ailleurs. Ou des demandes qui peuvent concerner l'admission à la profession. Par exemple, ils veulent savoir: Est-ce qu'une telle personne est inscrite au tableau des normes? Alors, on les réfère à différents autres services. Ce sont des plaintes à peu près comme ça qui ne sont pas retenues pour enquête. On ne fait tout simplement que donner l'information et référer le dossier à qui de droit.

Mme Caron: Mais 28 plaintes de la part du public sur 63 000 membres, ce n'est pas très élevé.

Mme Desrosiers: Oui, mais, comme vous le disiez tantôt, nous autres, nos infirmières sont majoritairement en milieu institutionnel, elles ne sont pas en pratique privée et l'encadrement est très serré, les protocoles sont standardisés, les fonctionnements, etc., ce qui fait que... Et, déjà, comme je vous le disais tantôt, il demeure que la population a déjà accès à la possibilité de faire des plaintes auprès de l'institution. Alors, avant de faire une plainte à caractère disciplinaire contre une infirmière, ils vont probablement d'abord se plaindre à l'hôpital, au directeur, à un peu tout le monde et, éventuellement, si c'est de nature disciplinaire, on en vient à une instance un petit peu plus lointaine, là, dans ce processus-là.

Mme Caron: Vous nous avez fait part, Mme Desrosiers, des problèmes de l'exercice illégal de la profession, et qu'il devrait y avoir juridiction au niveau du Tribunal des professions. Est-ce que vous pouvez nous préciser un peu le type de problèmes que vous avez, à ce niveau-là?

Mme Ménard: Bon, écoutez, vous savez, ces plaintes-là sont entendues devant le tribunal de droit commun en matière pénale. Alors, quand, par exemple, on se présente pour une poursuite en exercice illégal, bien, c'est assez... On se présente devant un tribunal de gens qui n'ont aucune expertise pour qualifier les champs d'exercice. Alors, c'est relié à ça, à l'utilisation des titres, à une discussion sur les contenus des champs d'exercice. Alors, ça ne nous apparaît pas... On se retrouve des fois avec des décisions qui sont assez surprenantes et aussi, pas tout à fait adéquates pour nous permettre de trouver des solutions à ces problèmes d'exercice illégal.

Nous, la proposition qu'on fait, et je pense qu'il y en a d'autres qui l'ont retenue aussi, qui l'ont apportée, cette proposition-là — je ne dis pas que le gouvernement va la retenir — il nous apparaît, si le Tribunal des professions exerçait une juridiction de première instance dans ces matières-là, que ça nous permettrait aussi d'avoir des décisions plus cohérentes par rapport aux champs d'exercice, leur contenu, et aussi de développer une jurisprudence plus adéquate, plus précise en rapport avec ces questions-là.

Mme Poulin: Ça fait quand même assez particulier, quand on va au tribunal pour une question d'exercice illégal ou d'usurpation du titre d'infirmière, et qu'on passe entre deux personnes qui ont été accusées pour avoir conduit avec les facultés affaiblies et un paquet de choses comme ça, et que le juge nous demande: Bon, c'est quoi, ça? Donnez-moi les articles du Code des professions. Cinq chefs à 500 $, vous ne trouvez pas que c'est trop? Pauvre petite infirmière! Et puis tout ça. Alors, on est un peu mal à l'aise, et notre procureur se doit d'expliquer au juge l'importance du Code des professions et comment on doit l'appliquer en vertu de l'article 188, etc. Alors, ça devient un petit peu, parfois, un cours de droit, où le procureur enseigne au juge un petit peu ce qu'est la nature du Code des professions. C'est très particulier. On se sent un peu dans un mauvais tableau, là, quand on doit présenter une poursuite en exercice illégal.

Mme Ménard: À toutes fins pratiques, on ne considère pas que c'est un forum adéquat pour nous donner des réponses.

Mme Caron: Oui, je pense que vous l'avez bien exprimé. Au tout début de votre intervention, Mme Desrosiers, vous nous avez souligné, et j'en ai pris note immédiatement à ce moment-là, que vous craigniez, avec l'application de certaines propositions de l'avant-projet de loi — vous avez fait référence aussi au projet de loi 67, au niveau du financement — une certaine désaffection de vos membres. Moi, j'aimerais vous entendre davantage là-dessus.

Mme Desrosiers: Bien, comme je vous le disais tantôt, nous ne sommes pas une profession à exercice libéral, ce qui fait en sorte que les infirmières ont déjà beaucoup de contrôle. On en parlait tantôt, elles sont contrôlées sur le plan administratif, dans leur exercice, que ce soit en CLSC, en hôpital ou en centre d'hébergement de soins de longue durée. Alors, nous exerçons toutes les obligations que le Code nous oblige déjà, et elles sont emportées dans cette vague de mépris à l'égard des professionnels. (14 h 50)

Nous autres, on reçoit beaucoup de commentaires d'infirmières qui considèrent que l'Ordre des infirmières, justement, est un organisme très sévère. Alors, on est déjà — et ça, là, je n'exagère pas là-dessus — considéré comme un organisme sévère. Il faut quand même comprendre que les professionnelles, si elles veulent véritablement s'inscrire à l'intérieur du cadre professionnel québécois, elles doivent comprendre que la protection du public, ce n'est pas strictement punitif à l'intention des professionnelles.

Nous, on est bien prêtes à continuer à faire de la discipline et de l'inspection. On a fait deux fois le tour de la province, de tous les établissements de santé de la province de Québec dans les 10 dernières années. Alors, on en fait, de l'inspection, et on aide les infirmières à améliorer leurs standards de pratique; elles nous ont vues sur place.

Mais c'est plus que ça, la protection du public. Il faut qu'à un moment donné le professionnel sente qu'il y a également un élément de soutien au développement de sa pratique. Alors, si on renchérit les mécanismes qui risquent de nous coûter très cher, s'il faut, l'année prochaine, mettre des mécanismes qui nous coûtent très cher, les infirmières vont dire: Non, des augmentations de cotisation pour supporter un système qui, de toute façon, est déjà amplement suffisant en ce qui les concerne, pourquoi paieraient-elles pour des mécanismes qui, finalement, n'apporteront rien à la protection du public en ce qui concerne leur exercice? C'est pour ça que j'insistais, qu'on s'est fait insistant également sur une dimension très sous-estimée dans l'avant-projet de loi touchant la possibilité pour les corporations d'agir en amont de l'exercice professionnel, pas seulement en aval, sur le plan punitif.

Quand on parle d'agir en amont, il faut se garder de l'argent pour le soutien à la formation continue, il faut se garder de l'argent pour faire les représentations qui s'imposent, donner des avis au ministre en matière de qualité des soins, etc., il faut garder des fonds pour autre chose que des dimensions punitives ou à caractère strictement coercitif. Les infirmières, actuellement, nous l'expriment, et ce n'est pas de la surenchère, là, que je fais présentement, c'est des plaintes écrites où on nous dit... Comme je le disais tantôt, les infirmières ne sont quand même pas, dans la hiérarchie des professions, les mieux payées au Québec. Donc, il demeure qu'il faut, à un moment donné, s'interroger sur le retour sur l'investissement dans la protection du public; il faut être certains que ça donne quelque chose, il ne faut pas seulement qu'il y ait «apparence de».

Mme Caron: Vous nous avez parlé également de règlements en suspens au niveau de l'Office des professions. Est-ce que vous pouvez nous donner un peu le nombre de règlements en suspens et puis les délais d'attente?

Mme Desrosiers: Nous en avons quelques-uns, là, présentement: le règlement sur les conditions supplémentaires au diplôme, il y a également un règlement sur les équivalences de diplômes. Enfin, on en a quelques-uns comme ça. Notamment, on est en vide juridique sur un règlement en particulier. J'inviterais Me Ménard, peut-être, à préciser là-dessus.

Mme Ménard: II y en a quelques-uns, peut-être six, sept, là. Ils ne sont pas tous d'une égale importance, mais je pense qu'ils sont assez importants, notamment un qu'on s'est empressé de travailler l'année dernière pour vraiment se mettre à jour, concernant les conditions supplémentaires, et je pense que vous avez ça dans votre tiroir de gauche, M. le ministre, pour nous donner une réponse là-dessus. Ce qui fait que nos membres, actuellement... On a 400 personnes, par exemple, qui viennent de passer des examens, et pour lesquelles on n'avait aucun appui juridique pour exiger cet examen-là, là, en janvier. Alors, il y en a 400 qui ont passé ça, il y en a d'autres qui sont en attente de stage. Je dois dire que l'Office nous a donné un bon coup de main sur ce règlement-là, qui posait beaucoup de difficultés, et il y a eu une bonne collaboration avec le niveau des services juridiques. Il faut dire que ça bloque à un autre niveau, parce qu'il y a des problèmes aussi avec ce règlement-là, mais ça, c'en est un, exemple.

Il y aussi le règlement sur les normes d'équivalence de diplômes. Alors, ça, c'est peut-être l'exemple le plus patent. En 1978, on avait déjà adopté, par le bureau, un règlement établissant les normes d'équivalence de diplômes pour les gens qui viennent de l'étranger. Alors, à cause de toutes sortes de difficultés, ce règlement-là a été mis de côté. Le bureau a adopté un

règlement, a adopté des normes pour établir des équivalences de diplômes, des dossiers ont été étudiés provenant de toutes sortes de pays étrangers, qui prenaient jusqu'à un mois pour élaborer les normes d'équivalence. Alors, ce règlement-là, on en a déposé un en 1989, et il est encore là en attente. Ce qui fait qu'on applique des normes sur simple résolution, sur la simple décision du bureau d'élaborer ces normes-là, et c'est un peu dans le sens de notre proposition d'allégement que, le bureau ayant ça comme fonction, il a pris ses responsabilités, a développé des normes et les applique, même si on est dans un vide juridique comme tel.

On questionne, à ce niveau-là, la pertinence de la réglementation pour toutes sortes de sujets. Alors, on pense que ça devrait être plus encadré, donner des responsabilités aux corporations mais alléger par la suite le mécanisme. Ça, ce sont deux exemples que je considère assez importants. Il y en a d'autres, mais je pense qu'il n'y a pas lieu d'élaborer là-dessus.

Mme Caron: Au niveau de la formation, au niveau des diplômes, est-ce que vous faites partie des 18 corporations qui ont déjà un comité de formation qui est en place?

Mme Desrosiers: Non, nous n'en avons pas parce que c'a connu différentes péripéties dans le passé.

Mme Caron: Est-ce que ça vous apparaît une structure qui pourrait être intéressante?

Mme Desrosiers: La proposition qu'on fait, c'est que la corporation professionnelle, forte du fait qu'elle est imputable directement auprès du gouvernement de la protection du public sur le service professionnel rendu par ses membres, devrait elle-même chapeauter un mécanisme de collaboration en regard de la révision. Écoutez, comme je le disais tantôt, nous allons sur le terrain constater, quand on fait de l'inspection professionnelle ou d'autres activités, certaines lacunes et on pense qu'on est l'instance la mieux placée pour chapeauter le mécanisme de collaboration. Voilà le premier aspect de notre proposition.

Et, deuxièmement, il faut que la corporation ait un droit d'accès direct au gouvernement pour faire valoir ses propositions en matière de détermination des diplômes, compte tenu, encore là, que, si la protection du public a un sens, ce sens-là commence d'abord par la formation des professionnels. Il faut que la corporation puisse se faire entendre directement au gouvernement. Ça nous apparaît comme un non-sens d'envoyer la corporation se noyer dans un mécanisme où elle va être assise avec des instances comme le Conseil des universités ou d'autres instances qui, elles-mêmes, ont déjà accès direct au gouvernement pour faire des recommandations en matière de diplômes. Alors, il faut vraiment que les corporations, comme je le disais, puissent, de façon claire, spécifique et directe, faire entendre leurs recommandations.

Et, comme je le disais tantôt, une corporation professionnelle n'est pas en conflit d'intérêt, d'aucune manière. On n'enseigne pas, on n'a pas à préserver des programmes ou quoi que ce soit et on ne fait pas la prestation du service non plus. Donc, on va sur place, observer dans les milieux, les difficultés ou les nécessaires ajustements que la formation exigerait pour que les professionnels puissent s'adapter aux besoins de la population. C'est vraiment un point majeur et qui nous a vraiment étonnés parce que ça dépasse le mandat de l'Office des professions. On ne comprend pas qu'est-ce que ça vient faire dans le mandat original de l'Office qui, lui, doit veiller à ce que, nous, on réponde vraiment à notre mandat de protection du public. Ça nous apparaît s'arroger d'une certaine responsabilité administrative qui ne les concerne pas. Et on dit ça de bonne foi. Vraiment, il faut regarder les faits tels qu'ils sont.

Mme Caron: Dernière question au niveau du système disciplinaire, petite question: Vous appuyez la proposition à l'effet qu'il pourrait y voir un comité aviseur ou consultatif — parce qu'il semble que le terme «aviseur» n'est pas tellement français — pour conseiller le syndic. L'Ordre des optométristes ajoute, dans sa proposition, la possibilité d'un ombudsman, d'un protecteur du citoyen qui pourrait recevoir, lui, les plaintes qui seraient rejetées autant par le syndic que par le comité aviseur, qui permettrait de donner une instance au plaignant pour déposer sa plainte à nouveau. Est-ce que vous avez des objections à ce mécanisme-là? (15 heures)

Mme Desrosiers: Si le gouvernement est prêt à le financer... Mais, franchement, quand une plainte n'est pas retenue... S'il y a effectivement un comité qui revoit et donne avis au syndic sur toutes les demandes d'enquête non retenues par le syndic, le syndic va avoir quand même à étoffer grandement et justifier... Il ne faut pas oublier que le système disciplinaire est très judiciarisé, ça prend des preuves, ça prend des témoins. Une personne se plaint du comportement d'un professionnel, mais, quand ça va arriver en discipline, ça va être sous une forme quasi judiciaire. Il doit y avoir preuve, il doit y avoir... Alors, à ce moment-là, en quoi l'ombudsman pourrait-il apporter une amélioration? Je ne sais trop. On ne s'est pas donné la peine d'examiner cette option-là. Peut-être qu'il faudrait qu'on le fasse au mérite, mais on revient toujours à... Il ne faut pas mettre de l'avant des instances ou des structures sans avoir vraiment une évidence que ça va véritablement améliorer le système, sinon cet ombudsman-là sera inondé de demandes d'enquête qui sont absolument irrecevables sur le plan disciplinaire, imaginez!

Mme Caron: Je vous remercie beaucoup, Mme Desrosiers.

La Présidente (Mme Hovington): M. le député

de Rimouski, il reste deux minutes au côté ministériel.

M. Tremblay (Rimouski): II me reste toujours deux minutes, moi!

La Présidente (Mme Hovington): Ah bon!

M. Tremblay (Rimouski): Mme la présidente, c'est seulement une petite interrogation au sujet de votre proposition 2, «sur la transparence du système professionnel, nous recommandons». C'est marqué: «De retrancher à l'article 128, tel que proposé dans F avant-projet de loi, l'obligation pour le secrétaire du comité de discipline de prêter assistance, pour la formulation d'une plainte, à toute personne qui le requiert et de la remplacer par l'obligation d'informer le plaignant sur les déboursés que ce dernier peut avoir à encourir dans le déroulement de la plainte.»

Je trouve ça un peu curieux venant de votre corporation, pour qui j'ai beaucoup d'admiration, qu'à un moment donné vous disiez: Le citoyen qui n'est pas capable de remplir la plainte... Est-ce que c'est comme ça qu'on doit l'interpréter ou pas?

Une voix: Non.

M. Tremblay (Rimouski): Moi, je vous ferais seulement une boutade. Quand vous me dites: Regardez les déboursés simplement, c'est que ça fait peur. Regardez les déboursés, il y a eu tellement de déboursés, ne faites pas de plainte! J'ai interprété ça de cette manière-là.

Mme Ménard: Non. Je pense que votre interprétation n'est pas tout à fait celle qu'on voulait mettre de l'avant, la proposition. On considère que la secrétaire du comité de discipline, c'est une fonction assez neutre, il ne faudrait pas non plus se voir taxer de partialité par rapport à la rédaction d'une plainte. Ce qu'on dit, c'est que la personne qui veut porter une plainte, elle devrait avoir accès à un expert et les frais pourraient être déboursés... Ça pourrait faire partie des déboursés qui seraient adjugés au moment de la plainte pour laisser vraiment le rôle de la secrétaire du comité de discipline neutre. Mais, au contraire, la proposition, c'est de permettre la consultation d'un expert, d'un juriste pour l'aider. Et ça, ça pourrait faire partie des déboursés qui seraient adjugés.

M. Tremblay (Rimouski): Oui, parce que vous savez...

Mme Ménard: Alors, c'est loin d'être...

M. Tremblay (Rimouski): ...que, dans les bureaux de députés, on rencontre beaucoup de citoyens qui viennent à nos bureaux et, vraiment, avec la paperasse, ils ne savent pas comment s'y prendre. Alors, quand on peut les aider... Vous savez, les pauvres citoyens, des fois, c'est tellement compliqué, la réglementation, c'est tellement compliqué de porter une plainte que, à un moment donné, ils préfèrent ne pas le faire; des fois, ils sont pénalisés par ça. Moi, je pense qu'on devrait le rendre le plus accessible possible à toute la population.

Mme Ménard: Oui.

Mme Desrosiers: Oui, mais déjà, la proposition, quand même, d'avoir des formulaires normalisés et standardisés, ça va quand même aider. Si vous adjoignez à cette proposition-là celle dont Me Ménard vient de faire état, vraiment il y aurait une grosse amélioration dans le système.

M. Tremblay (Rimouski): Très bien.

La Présidente (Mme Hovington): M. le ministre.

M. Savoie: Merci. Très rapidement, pour vous dire que l'Office a fait une évaluation que le coût, pour le fonctionnement du comité des plaintes pour votre ordre, est de l'ordre de 24 000 $. Mettons une erreur, mettons-le à 50 000 $, on est quand même loin! Alors, c'est pour vous dire qu'il y a des raisons pour échanger ensemble.

Le deuxième élément, c'est que, moi, je n'ai pas de dossier en suspens avec votre ordre dans un...

Mme Desrosiers: Ça veut dire qu'ils sont dans un autre tiroir.

M. Savoie: ...tiroir à gauche quelque part. Le dernier que j'ai reçu est en date du 20 janvier 1993; je pense qu'il y a un problème avec le Bureau des lois.

Mme Desrosiers: Pour ce qui est de la question des dépenses, je pense que ce serait onéreux de faire ici l'état... On a regardé vraiment les frais de déplacement, les frais de séjour, les jetons de présence, les honoraires, les frais de déplacement des témoins experts, etc., l'augmentation du personnel... Parce qu'il y avait, évidemment, tous les coûts reliés au comité d'examen des plaintes...

M. Savoie: Oui.

Mme Desrosiers: ...et, si la proposition, telle qu'elle est sur la table, du délai de 60 jours était retenue, pour nous autres, ça voudrait dire des frais immenses.

M. Savoie: Je pense qu'il y a...

Mme Desrosiers: Peut-être, à ce moment-là, sur

le plan administratif...

M. Savoie: C'est ça.

Mme Desrosiers: ...il faudrait faire...

M. Savoie: II faudrait peut-être s'asseoir et examiner ça de plus près.

Mme Desrosiers: Oui, parce qu'on a fait vraiment un exercice sérieux là-dessus.

M. Savoie: Serré, oui. D'accord. Alors, tout simplement pour vous remercier de la présentation de votre mémoire, vous assurer qu'on va tenir compte de certaines des interventions.

Si je comprends bien, sur les autres éléments, ce que je présume, c'est que vous n'êtes pas nécessairement d'accord avec les autres éléments que vous n'avez pas pu aborder dans votre mémoire, mais que, d'une façon générale, l'orientation du projet de loi, ça vous va.

Mme Desrosiers: Bien, à vrai dire, comme on vous l'a dit dès le départ, en autant que Fimputabilité des corporations professionnelles est maintenue, c'est ce principe-là qu'on trouve très important. Rajoutez-nous des obligations si nécessaire, on y répondra, mais ne pas s'en aller vers une bureaucratie de contrôle sans bénéfice pour la population, c'est vraiment le message qu'on vous réitère.

M. Savoie: Fiez-vous sur moi, Mme la présidente, vous allez voir.

La Présidente (Mme Hovington): Au nom des membres de la commission de l'éducation, permettez-moi de vous remercier d'être venues nous présenter votre mémoire. Très apprécié. Bonne journée!

J'inviterais maintenant la Corporation professionnelle des conseillers et conseillères d'orientation du Québec à bien vouloir venir prendre place, s'il vous plaît.

Nous avons la Corporation professionnelle des conseillers et conseillères d'orientation du Québec représentée par Mme Louise Landry. Vous êtes la présidente?

Mme Landry (Louise): Oui, madame.

La Présidente (Mme Hovington): Bonjour et bienvenue à la commission.

Mme Landry: Bonjour.

La Présidente (Mme Hovington): Voulez-vous nous présenter vos compagnon et compagne, s'il vous plaît?

Corporation professionnelle des

conseillers et conseillères d'orientation du Québec (CPCCOQ)

Mme Landry: À ma droite, Mme Martine Lacha-rité, qui est secrétaire générale de la Corporation, et, à ma gauche, M. Jean-Hugues Poirier, qui est syndic de notre corporation.

La Présidente (Mme Hovington): Bonjour et bienvenue. Vous avez 20 minutes pour nous faire part de votre mémoire.

Mme Landry: Merci. D'abord, notre corporation a 30 ans cette année; elle a été créée par un bill privé en 1963, à titre réservé. Nous regroupons un peu plus de 1500 membres travaillant dans le secteur public, parapu-blic et dans les organismes et entreprises privées. Près du quart des conseillers et conseillères d'orientation offrent des services en cabinet privé au moins à temps partiel.

Au cours des années, les corporations professionnelles ont acquis une maturité et une expertise dans l'exercice de leurs pouvoirs et de leurs responsabilités. Ces acquis professionnels, croyons-nous, méritent d'être reconnus et mis à contribution dans tout projet de modification du système professionnel actuel.

De nombreuses interrogations demeurent quant à l'opportunité et aux motifs des changements suggérés. Plusieurs des modifications proposées dans Favant-projet de loi semblent être des tentatives de réponse à des problèmes ponctuels particuliers ne concernant pas la majorité des corporations professionnelles. De plus, les implications financières des modifications proposées sont aussi très importantes et nous apparaissent parfois injustifiées.

Nous partageons entièrement les objectifs du ministre de rendre le système professionnel plus transparent, plus souple, moins coûteux et plus accessible. Nous considérons que certaines modifications sont souhaitables pour mettre à jour et améliorer le fonctionnement du système professionnel. Cependant, les modifications proposées dans Pavant-projet compromettent l'atteinte de ces objectifs puisque plusieurs de ces modifications vont dans le sens contraire et ne feraient qu'alourdir le système et le rendre plus coûteux. C'est pourquoi nous espérons que le projet de loi qui suivra la présente consultation sera très différent de l'avant-projet de loi.

La plupart des critiques en provenance du public semblent porter sur le système disciplinaire. Cet aspect mérite une analyse sérieuse et nous sommes tout à fait disposés à y participer. Cependant, il ne faudrait pas oublier que la protection du public n'est pas exclusivement reliée au système disciplinaire, de nombreux autres mécanismes sont prévus au Code et fonctionnent efficacement. Mentionnons simplement la formation de base et la formation continue, les modalités de délivrance de

permis et d'équivalence, le code de déontologie, les règlements sur la tenue des dossiers, les cabinets de consultation, la conciliation, l'arbitrage des comptes, l'inspection professionnelle, l'assurance-responsabilité professionnelle, cette dernière étant obligatoire depuis 1983 pour tous nos membres. (15 h 10)

Nous offrons aussi des services de consultation à nos membres sur toute question déontologique ou réglementaire qui soulève des interrogations dans leur pratique. Il est à noter qu'au cours du dernier exercice financier notre corporation a consacré plus de 600 000 $ pour remplir ses obligations, et ce, sans compter le bénévolat constant de plus de 80 conseillers et conseillères d'orientation et la contribution bénévole sporadique aussi d'une cinquantaine d'autres, et ce, d'autant plus que notre budget d'opération provient presque exclusivement des cotisations des membres. Nous pouvons certainement affirmer que les professionnels que nous regroupons prennent leur rôle très au sérieux.

Par ailleurs, nous retrouvons des représentants du public au bureau et au comité administratif. Dans notre cas, nous tenons à souligner l'excellent travail qu'ils accomplissent. Ils jouent activement leur rôle et quelques-uns ont même participé à d'autres comités de travail ad hoc sur des sujets où il nous apparaissait pertinent d'avoir un représentant du public. Leur rôle demeure précieux lors des discussions entourant notamment la répartition des ressources humaines et financières aux différents programmes et dans l'établissement des priorités d'un plan d'action en s'assurant que l'accent est toujours mis d'abord sur la protection du public et non sur l'intérêt des membres.

Concernant l'affirmation souvent véhiculée dans les médias que les membres des corporations professionnelles sont juge et partie sur les comités de discipline, on oublie souvent de mentionner que ces comités de discipline sont présidés par des avocats nommés par le gouvernement et dont le rôle est d'assurer l'application des principes de justice et d'encadrer les professionnels membres du comité. On oublie souvent également de mentionner que les professionnels sont parfois plus sévères envers leurs pairs que ne le serait le public parce qu'ils veulent protéger leur réputation et leur crédibilité.

Nous croyons que toute modification au Code des professions devrait respecter l'esprit du législateur défini dans les articles 12, 23 et 62 précisant les rôles respectifs de l'Office, des corporations et des bureaux.

Quant au pouvoir d'enquête, les modifications projetées aux articles 14 et 15 du Code confèrent une extension telle de l'autorité de l'Office des professions sur les corporations et sur certaines de leurs instances que cela nous apparaît abusif et même contraire à l'esprit du Code des professions et au principe de l'autogestion. Une telle attitude nie le fondement même du système professionnel basé sur l'autodiscipline et la responsabilisation des diverses instances des corporations.

Nous sommes d'avis que l'Office devrait plutôt jouer efficacement le rôle qui lui est dévolu, soit celui de surveillance, d'assistance, d'aide et non de substitut aux corporations, le pouvoir d'enquête et de tutelle devant émaner du gouvernement lui-même qui, nous en sommes persuadés, utilisera ce pouvoir avec prudence et circonspection et le déléguera à l'Office dans les situations qu'il jugera appropriées.

L'utilisation de tels pouvoirs exige un recul et une saine distance, ce qui n'est pas toujours le cas dans les relations entre l'Office des professions et les dirigeants des corporations professionnelles. Nous croyons qu'il y aurait lieu de trouver des mécanismes intermédiaires permettant à l'Office de jouer efficacement son rôle de surveillance avant d'envisager des mesures aussi extrêmes.

Le secret professionnel, qui est une des pierres d'angle du système professionnel, est d'ailleurs remis en question par l'application des nouveaux mécanismes contenus dans l'avant-projet de loi. Cette situation nous apparaît inacceptable. Ainsi, dans le cadre des auditions disciplinaires et des enquêtes prévues dans l'avant-projet, on prévoit une dérogation explicite au secret professionnel. Ces nouvelles dispositions ne seraient sûrement pas de nature à favoriser la protection du public. Au contraire, les confidences faites à un professionnel risquent de se retrouver sur la place publique.

Nous nous inquiétons également du précédent que cela crée lorsque les lois professionnelles dérogent elles-mêmes à un des éléments importants qui les constituent, à savoir une garantie absolue de respect du secret professionnel envers tout renseignement de nature confidentielle que les clients confient aux professionnels.

Concernant l'article 12, 5°, du pouvoir de réglementation, que l'Office fixe par règlement les règles de conservation, d'accès, de protection des renseignements confidentiels des dossiers détenus par une corporation, nous souhaitons que cette question fasse l'objet de discussions avec les corporations et avec le Conseil.

Nous recommandons cependant que cette disposition soit étudiée en concertation avec celle prévue au projet de loi 68, Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, qui prévoit des dispositions à cet effet. Nous allons d'ailleurs faire des représentations à la commission de la culture sur cette question immédiatement en sortant d'ici.

Concernant la réglementation, nous nous réjouissons de trouver dans l'avant-projet de loi des modifications quant au mécanisme d'adoption des règlements des corporations. Cela constitue certes un allégement de la procédure et diminuera sensiblement les trop longs délais encourus dans l'approbation des règlements.

De nouvelles dispositions obligeraient les bureaux des corporations professionnelles à reconnaître, aux fins de la délivrance d'un permis, l'équivalence de la formation d'une personne qui ne détient pas un diplôme requis à cette fin. Bien que ce règlement soit facultatif, depuis 1981 notre corporation a un règlement sur les normes

d'équivalence pour la délivrance d'un permis. Il s'adresse aux candidats ne détenant pas le diplôme prévu au règlement sur les diplômes donnant ouverture au permis de pratique. Cependant, il y est précisé clairement que le bureau tient compte, notamment, du fait que les candidats détiennent un ou plusieurs diplômes obtenus au Québec ou ailleurs. À défaut d'un diplôme légalement reconnu, l'établissement de l'équivalence de formation comporte de nombreux risques quant à la valeur réelle de la formation reçue, particulièrement celle reçue hors contexte d'un établissement scolaire reconnu.

Alors, nous recommandons que le libellé de cet article de l'avant-projet de loi précise qu'il s'agit bien de l'équivalence de la formation d'une personne qui détient un diplôme autre que celui requis à ces fins, sinon ça amène de la confusion. Il y a déjà beaucoup de confusion dans ce que les gens croient, dans ce que le public croit et, parfois, ça semble laisser croire qu'on n'a pas besoin d'avoir de diplôme. Alors, ça nous apparaît dangereux. Il faudrait que le libellé soit clair à cet effet-là.

Le volet des mécanismes disciplinaires reçoit une attention particulière dans l'avant-projet de loi. Nous sommes très conscients qu'une certaine lourdeur entoure l'exécution des tâches actuelles relevant du comité de discipline et du syndic. Nous sommes favorables à la mise sur pied de mécanismes de transparence en matière disciplinaire. Nous croyons cependant que le mécanisme proposé par le biais du comité d'examen des plaintes constitue une expression de non-confiance injustifiée à l'égard de l'ensemble des syndics des corporations professionnelles. De plus, cette nouvelle procédure occasionnerait des délais supplémentaires importants dans le traitement des plaintes, sans compter les incidences financières qu'elle entraîne.

Tel que proposé, le comité constitue un mécanisme rigide et très lourd en obligeant automatiquement une seconde étude du dossier et même une seconde enquête pour tous les cas de plainte, peu importent leur nature et leur gravité. Dans notre cas, nous recevons peu de plaintes du public et aucune insatisfaction ne nous a été rapportée quant au traitement des plaintes reçues. Le syndic procède aux enquêtes et, lorsqu'il le juge approprié, dans le cas de mésententes mineures ou d'incompréhension entre le client et le professionnel, il agit en tant que conciliateur. Plusieurs cas se sont réglés de cette façon, à la satisfaction du plaignant. Cette façon de procéder constitue un mécanisme flexible, rapide et efficace de résolution des conflits. Il va de soi que cette procédure ne s'applique pas dans les cas de manquements déontologiques; elle s'applique uniquement dans les cas de plaintes mineures et peut aussi donner lieu à des recommandations au professionnel, de façon à éviter de telles situations à l'avenir.

Aussi, au lieu d'un comité d'examen des plaintes automatique, nous recommandons un comité aviseur qui aurait pour fonction de conseiller le syndic dans les cas complexes ou, en tout temps, à sa demande, composé d'au plus trois personnes, dont deux membres et un administrateur nommé représentant le public. Un délai de 60 jours nous apparaît irréaliste et non justifié pour le traitement de certaines enquêtes complexes qui peuvent impliquer des délais parfois importants et hors du contrôle du syndic. Nous sommes d'avis que cela ne ferait qu'alourdir le processus de traitement des plaintes et occasionnerait des délais supplémentaires.

Nous sommes d'avis qu'il existe des mécanismes beaucoup plus souples et moins lourds pour connaître les délais de traitement des plaintes et ainsi être en mesure de poser les actions qui s'imposent. Par exemple, nous suggérons la tenue d'un registre des plaintes comportant un suivi de chacune des étapes du traitement de la plainte. Ce registre pourrait être déposé au bureau de la corporation qui agira, au besoin, selon les situations données. Le rapport annuel soumis à l'Office pourrait également contenir des données du registre à titre d'information pour rendre compte des délais encourus dans les différentes étapes du traitement des plaintes par la corporation. Là où il n'existe pas, le rôle d'audience peut s'avérer un mécanisme de transparence important pour le public.

Le nouvel article 118 permettrait l'accès au dossier disciplinaire à compter de la tenue de l'audience en comité de discipline. On signale également que le comité peut d'office ou sur demande interdire l'accès à certains renseignements. Ce dernier pouvoir peut difficilement s'appliquer si le dossier est accessible à compter de la tenue de l'audience, puisque le comité de discipline n'aurait pas eu l'occasion nécessairement de se prononcer pour restreindre l'accès à certains renseignements qui pourraient porter indûment préjudice à l'une des parties. Nous recommandons de modifier cet article et de permettre l'accès au dossier seulement au moment où le comité de discipline a rendu sa décision et a eu l'occasion d'établir, en toute connaissance de cause, les modalités qu'il fixe pour l'accès au dossier concerné. (15 h 20)

Finalement, nous croyons qu'en matière disciplinaire d'autres voies peuvent être utilisées pour améliorer tant le fonctionnement que la transparence. Par exemple, il y aurait lieu de discuter du processus de sélection des syndics et de se pencher sur l'élaboration de critères en cette matière. Il serait pertinent de mettre sur pied des journées de formation pour les syndics et même pour les secrétaires de corporations, puisque ces fonctions sont uniques et qu'aucun programme de formation, ni emploi antérieur ne préparent adéquatement à remplir ces fonctions. Il serait également profitable d'organiser des journées de rencontre annuelles et des colloques permettant aux syndics des différentes corporations de discuter des problèmes particuliers qu'ils rencontrent. Leur tâche est extrêmement exigeante, complexe et délicate, et plusieurs d'entre eux se retrouvent isolés et sans assistance. Il nous apparaît qu'une formation spécifique et des rencontres annuelles leur permettraient d'améliorer

constamment leur compétence en la matière et feraient progresser le système professionnel.

De plus, des mécanismes comme le registre des plaintes, le rôle d'audience et l'accès au dossier disciplinaire fourniraient des informations pour permettre à l'Office des professions de jouer son rôle de surveillance des corporations professionnelles et pour informer le public adéquatement sur le traitement des plaintes.

Un problème majeur se situe au niveau de la perception qu'a le public du traitement qui est fait des plaintes disciplinaires. À cet égard, nous croyons que l'Office a un rôle important à jouer et devrait envisager une vaste campagne d'information publique sur cette question, devrait informer régulièrement les associations de protection des consommateurs, le Protecteur du citoyen et la population des motifs pouvant justifier de porter une plainte ainsi que des motifs pouvant entraîner le refus de porter une plainte devant un comité de discipline ou pouvant occasionner des délais en cette matière.

Il semble y avoir souvent confusion quant à la recevabilité d'une plainte et quant à son traitement. Les citoyens connaissent mieux leurs droits et s'en prévalent, mais il semble y avoir aussi des attentes parfois irréalistes face au système disciplinaire parce qu'ils ne savent pas jusqu'où les recours peuvent aller et ils n'ont pas d'information sur qu'est-ce qui est recevable et non recevable.

Par ailleurs, certaines difficultés particulières sont rencontrées par les corporations professionnelles à titre réservé. La modification proposée à l'article 183 ne solutionne aucunement ces difficultés. La première de ces difficultés est reliée au titre lui-même. Elle est causée par le fait que les conventions collectives, particulièrement dans les secteurs public et parapublic, comportent une double appellation pour les postes normalement occupés par des membres de corporations professionnelles. ainsi, dans le secteur de l'éducation, où on retrouve 60 % de nos membres, la même description de tâche comporte deux titres, l'un étant «conseiller d'orientation» et l'autre «conseiller en formation scolaire», lorsque la personne n'est pas membre de notre corporation professionnelle. il est plutôt ironique de constater que le gouvernement déjoue ses propres lois.

Les conséquences sont nombreuses. Évidemment, cela n'incite pas les professionnels à devenir et à demeurer membres de leur corporation professionnelle et à payer une cotisation annuelle pour se faire surveiller alors qu'ils peuvent l'éviter sans aucune conséquence.

D'autre part, cela rend difficile l'application par les membres de certains règlements, dont notamment les dispositions reliées à la transmission des dossiers professionnels soumis à des règles strictes de confidentialité, provoquant ainsi des conflits sérieux entre collègues de travail occupant les mêmes fonctions, mais dont certains sont membres et d'autres pas.

Une autre difficulté se pose lorsque nous désirons assumer nos responsabilités en matière d'inspection professionnelle avec vigueur. Nous avons assisté, impuissants, à la démission de certains membres suite à une inspection professionnelle un peu serrée où le rapport du comité d'inspection prévoyait un suivi pour vérifier la mise en oeuvre de ses recommandations par le conseiller d'orientation. Il arrive également parfois que des collègues ou des confrères d'un membre inspecté démissionnent par crainte de se faire prendre en défaut lors de l'inspection professionnelle.

La même situation se produit à la suite des sanctions disciplinaires, la démission étant la meilleure façon d'éviter les conséquences des réprimandes, des amendes et autres sanctions. Les amendes et frais imputés aux professionnels déclarés coupables sont d'ailleurs virtuellement impossibles à récupérer après leur démission. Les démissionnaires continuent évidemment à exercer le même rôle professionnel, dans le même milieu, et nous ne pouvons plus assurer la protection du public. Comme la décision n'entraîne aucune conséquence sur le plan de l'emploi, les démissions sont tout de même fréquentes. Les conséquences pour la Corporation sont doubles: d'une part, impossibilité de protéger le public traitant avec les nombreux ex-membres qui continuent d'être perçus comme des professionnels reconnus et régis par le Code et, d'autre part, la perte de revenu pour l'accomplissement de son mandat de protection du public.

Nous recommandons donc qu'une étude approfondie soit entreprise sur les difficultés rencontrées par les corporations à titre réservé dans l'accomplissement de leur mandat de protection du public.

En conclusion, nous sommes d'avis que des ajustements et des modifications aux lois professionnelles pourraient permettre d'en améliorer l'efficacité, la souplesse, la transparence et l'accessibilité, tout en réduisant les coûts pour chacune des parties impliquées. Cependant, plusieurs des dispositions prévues à l'avant-projet de loi ne permettront pas d'atteindre ces objectifs. L'élément le plus positif de l'avant-projet de loi porte sur les modifications projetées dans les mécanismes d'adoption de la réglementation.

Pour terminer, nous tenons aussi à rappeler que nous avons été très déçus de constater qu'aucune attention n'a été accordée aux difficultés particulières provoquées par le statut des corporations à titre réservé et qu'aucune mesure n'a été envisagée pour leur fournir des moyens supplémentaires pour protéger efficacement le public. Merci.

La Présidente (Mme Hovington): Merci, Mme Landry.

M. le ministre.

M. Savoie: Oui. Merci, Mme la Présidente.

On a pu constater qu'effectivement la Corporation a consacré un temps considérable pour nous présenter un mémoire, un mémoire qui se veut à la fois critique et constructif, mais qui soulève aussi... Il y a eu des éléments dans votre présentation que je n'ai pas su retrou-

ver dans votre mémoire écrit et qui ont allumé plusieurs petites lumières, entre autres sur le processus de sélection et de formation de syndic. Est-ce que vous avez ça?

Mme Landry: Oui.

M. Savoie: Est-ce que vous pouvez nous entretenir un petit peu là-dessus?

Mme Landry: Je peux vous en parler un peu. Vous savez que les délais qui nous sont impartis, quand on reçoit un avant-projet de loi, ne sont pas très longs pour rédiger un mémoire.

M. Savoie: Oui.

Mme Landry: Surtout quand il y a beaucoup de commissions parlementaires en même temps qui nous concernent, on ne se retrouve pas toujours avec la possibilité d'aller aussi loin qu'on le voudrait. Bon. On réagit, dans un premier temps, et ensuite on essaie aussi de sortir des suggestions.

Nous, en discutant ensemble, on s'est rendu compte que, oui, pour les syndics, c'est une job difficile à faire, en termes ordinaires. Ce n'est pas une job qui est facile. Il n'en existe pas, de formation. Ce n'est pas toujours clair, comment choisir un syndic, non plus. Alors, bon, on s'est dit: Si on pouvait en discuter ensemble, s'entendre sur ces choses-là, s'entraider, essayer d'établir certains critères de sélection qui pourraient être utilisés par l'ensemble des corporations, quand on sélectionne ces gens-là qui sont tout de même des employés de la Corporation, qui sont engagés dans certains cas horaires, bénévoles, temps plein — il y a toutes les modalités — sauf que les qualités que ça prend à ces personnes-là en termes de rigueur, en termes de connaissance de certains éléments légaux qui s'apprennent, bien sûr... Il y a des choses que ça prend; il y a des qualités qu'on doit retrouver chez ces gens-là. Alors, si ensemble on essayait de les établir et de penser à un programme de formation spécifique... Ça n'existe pas ailleurs, ça.

M. Savoie: Oui, c'est ça. Pensez-vous, par exemple, qu'au niveau du processus de sélection non seulement la corporation en question doit examiner le processus de sélection, mais qu'également quelqu'un d'autre pourrait regarder ce processus de sélection?

Mme Landry: Bien sûr, ça peut être fait conjointement.

M. Savoie: Oui?

Mme Landry: Écoutez, c'est une chose qu'on peut discuter conjointement, les corporations, l'Office, les représentants du public. C'est une discussion qui peut être... Bon. On se rend compte aussi que le public ne se sent pas nécessairement écouté. Il y a beaucoup de reproches qui sont vraiment une question, on s'en rend compte, de manque d'information. Là, je ne dis pas qu'il n'y a jamais de manque dans le système disciplinaire, mais il y a une bonne partie des problèmes aussi qui sont une question de perception'. Ils ont l'impression...

M. Savoie: C'est ça. Pensez-vous, par exemple, que si, un syndic, bien sûr, en plus d'être payé, d'être choisi et d'être démis également par la corporation, il y avait une surveillance de quelqu'un de l'extérieur, qui pourrait également participer au processus de sélection et de démission du syndic, ça ferait plaisir au syndic, dans le sens qu'il se sentirait un petit peu plus confortable dans l'exécution de son mandat?

Mme Landry: Personnellement, pour moi, dans ma corporation, ça ne poserait pas de problème. Je ne voudrais pas parler au nom de l'ensemble des corporations, par exemple, là.

M. Savoie: Non, non, mais, pour vous, vous pensez que ça...

Mme Landry: Évidemment, il faudrait voir les modalités, tout ça, là, mais...

M. Savoie: Oui, c'est ça. C'est intéressant, ça, comme observation, et c'est la première fois qu'on entend ça ici. Et c'est quelque chose, évidemment, qu'on est en train d'examiner pour voir si, effectivement, il n'y a pas quelque chose de ce côté-là. (15 h 30)

Au niveau de plusieurs éléments dans le mémoire, des commentaires au niveau, par exemple, du comité des plaintes, l'enquête, la tutelle, vous comprenez, j'espère, qu'il y a eu une évolution depuis le dépôt de l'avant-projet de loi. On commence à baliser, ça commence à prendre forme, il commence à y avoir un ralliement autour de certains éléments, de certaines balises, que ça présente de moins en moins de difficultés au fur et à mesure qu'on avance et avec la conséquence que les mémoires vieillissent très rapidement dans leur approche.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Savoie: C'est un peu normal, hein? C'est justement le résultat de ce genre d'exercice qui donne les résultats les plus probants dans ces espèces de face à face.

Mme Landry: Si je peux me permettre.

M. Savoie: Oui.

Mme Landry: Le pouvoir de tutelle, moi, ça ne

me fait pas peur. J'ai l'impression que... Bon. J'ai honnêtement le sentiment de bien faire notre job comme corporation.

M. Savoie: C'est ça.

Mme Landry: Alors, ce n'est pas quelque chose qui m'inquiète.

M. Savoie: Louis insiste pour que je sois convaincu de ce fait-là.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Landry: Sauf que ce que je trouve ennuyeux dans ce genre de formulation là, c'est l'image que ça donne à la population: Ils font tout ce qu'ils veulent et, tout à coup, on arrive avec la matraque. Il n'y a rien entre les deux.

M. Savoie: Oui, c'est ça. Mais c'est parce qu'on a l'impression, déjà, que le public exige la matraque.

Mme Landry: II exige quelque chose. Ça ne veut pas dire qu'il exige la matraque.

M. Savoie: Oui, c'est ça. J'ai toujours été fasciné par un nommé Roosevelt, le premier. Je pense que son «motto» était: «Walk softly but carry a big stick.» J'ai toujours trouvé ça intéressant comme approche, pour des organismes de surveillance. Évidemment, il faut marier les deux: «Walk softly», pas seulement se promener avec un gros bâton.

Un registre des plaintes, c'est intéressant. C'est intéressant. Je pense qu'on va s'asseoir et qu'on va y réfléchir sérieusement. Il y a quelque chose dans cette approche-là.

Évidemment, il y a toute la question des titres réservés. Vos commentaires, évidemment, vont dans le sens de plusieurs autres. Effectivement, les corporations à titre réservé se sentent un peu menacées par le fait qu'effectivement on ne porte pas suffisamment attention dans le projet de loi à certains problèmes spécifiques qu'elles ont. On est en train de regarder ça aussi. Avec raison, je pense que vous touchez un problème qu'on espérait pouvoir régler à court terme et les problèmes sont considérables. Mais on va faire un effort additionnel au niveau des titres réservés pour voir si on ne serait pas en mesure de répondre à certains de vos commentaires.

Le bureau d'examen des plaintes, évidemment, c'est toujours un peu la même approche. On pense à un comité, on pense à des structures. On a entendu, tout à l'heure, les infirmières critiquer les coûts qui étaient considérables, que c'était un alourdissement. On pensait peut-être à un comité des plaintes, par exemple, pour certaines corporations, sur une base sectorielle: regrouper santé ensemble, regrouper peut-être certaines corpo- rations au niveau des orientations ensemble, donc réduire les coûts, et quand même permettre à un citoyen, qui veut aller en appel d'une décision du syndic ou qui pense que le syndic a mal exécuté l'analyse du dossier, de se présenter là et d'être reçu non seulement par des professionnels — il ne faut pas se leurrer, là; un avocat, pour eux autres, c'est du pareil au même — mais également par des citoyens, d'échanger avec eux autres. Il se sentirait peut-être beaucoup plus confortable et ça changerait peut-être l'attitude de plusieurs citoyens qui se plaignent et qui, finalement, reçoivent une fin de non-recevoir. Et, souvent, quand il y a une réponse, parce qu'il n'y a pas toujours de réponse, quand il y a une réponse, la réponse est souvent technique, est souvent bête, est souvent technique, froide, et ils aimeraient ça échanger un peu. Parce que ça transfère la notion d'apparence. Je me demandais si vous étiez d'accord avec ça, en plus.

Mme Landry: Un comité d'examen des plaintes, c'est sûr qu'en soi, même si on le mettait sur pied nous-mêmes, à la quantité de plaintes qu'on a chez nous, ce n'est pas un mécanisme qui serait d'une lourdeur épous-touflante, sauf qu'il faudrait définir aussi quand les plaignants auraient accès à ce comité-là. Ce n'est pas automatiquement parce que leur plainte est refusée. Des fois, c'est juste pas recevable et on n'a pas juridiction. Est-ce qu'il va falloir amener ça au comité des plaintes? Alors, il faudrait baliser aussi, sinon ça devient ridicule. Juste donner un recours pour donner un recours, une apparence, ça fait lourd un peu, juste pour les apparences.

Mais il y a quand même d'autres mécanismes et, là-dessus, j'inviterais notre syndic à vous faire part d'une réflexion là-dessus qu'on a faite.

M. Savoie: Parfait. J'allais justement lui demander, aussi. Oui.

M. Poirier (Jean-Hugues): Merci. Si on s'assure, au départ, d'un certain processus de transparence, on va éviter énormément de problèmes et de conflits par la suite parce que tout réside, comme vous l'avez dit tantôt, dans la perception que le public a. Alors, nous, la façon dont nous procédons, il y a des étapes: on reçoit la plainte, il y a un accusé de réception et il y a automatiquement une communication avec le plaignant. Que ce soit téléphonique, que ce soit des rencontres, il y a automatiquement une communication. Déjà, le plaignant ne se sent pas délaissé. Alors, on le considère. Peut-être parce qu'on est dans les relations humaines un peu plus que d'autres types de professionnels, ça nous est plus naturel, mais indépendamment de ça.

Il y a aussi rencontre lorsqu'il y a matière, je veux dire, assez sérieuse, il y a rencontre de l'intimé. Et là la poursuite de l'étude du dossier de l'enquête se fait. Et le syndic, l'analyse de la plainte, il voit la... Parce qu'on dit: C'est quoi? Le syndic, il n'est pas juste, il ne

porte pas plainte au niveau du comité de discipline. Bien, il faut penser qu'il doit appliquer une certaine grille d'analyse qui est le code de déontologie. Dans notre code de déontologie, on a peut-être 70, 80 articles, règlements, si vous voulez, sur lesquels on doit appliquer une certaine grille. Où il y a plainte, il y a fondement ou il n'y a pas fondement. Et, par la suite, dans le processus, on rend compte, je rends compte de la décision, de mon analyse aux parties. S'il y a poursuite au niveau du comité de discipline ou bien s'il n'y a pas suffisamment... Si c'est une plainte mineure, bien, à ce moment-là, comme on disait tantôt, ou qu'il n'y a pas de fondement, je fais de la conciliation, si vous voulez, comme telle, et jusqu'ici, le plaignant, on a eu satisfaction dans l'ensemble des plaintes. C'est pour ça qu'il faudrait s'astreindre, dans notre cheminement disciplinaire, à des étapes dans lesquelles automatiquement et obligatoirement le plaignant est impliqué. Et ça, ça apparaît très important.

M. Savoie: Oui. Ma question était... Ha, ha, ha!

M. Poirier: Peut-être, je n'ai pas répondu dans le processus.

M. Savoie: C'est ça. Ha, ha, ha! Ma question était: S'il y avait allégement du mécanisme, par exemple, en permettant un regroupement, est-ce que vous pensez que ça pourrait satisfaire aux dirigeants de la Corporation?

M. Poirier: Bien, encore là, nécessairement, il faut pousser l'étude de cette question. Il y aurait peut-être certaines plaintes qu'on ne pourrait pas regrouper, je dirais. Par exemple, dans la déontologie concernant la Corporation professionnelle des conseillers par rapport à celle des comptables ou celle des ingénieurs, il y a des points communs, mais il y a aussi des points spécifiques, ce qui fait qu'une plainte qui pourrait porter sur tel élément, en termes d'appel, bien, dans un regroupement, qui serait plus à l'aise pour juger de la plainte? C'est des précisions qu'il faudrait voir. C'est pour ça qu'on favorisait plutôt, dans une première étape, un comité aviseur qui peut conseiller le syndic ou qui pourrait peut-être, occasionnellement, recevoir des plaintes, mais il faudrait trouver le processus et la mécanique pour se servir de ce comité en termes d'appel. Parce que, actuellement, le mécanisme qu'on utilise, c'est le mécanisme qui existe déjà, le comité d'appel, la plainte privée.

M. Savoie: D'accord. Merci.

La Présidente (Mme Hovington): Ça va?

M. Savoie: Ça va.

La Présidente (Mme Hovington): Mme la dépu- tée de Terrebonne.

Mme Caron: Merci, Mme la Présidente.

Mme Landry, Mme Lacharité, M. Poirier, je vous remercie de votre présentation. Votre mémoire est effectivement intéressant au niveau des pistes de solution. Vous avez fait des efforts particuliers pour dégager de nouvelles pistes de solution, et je pense qu'à cet égard c'est passablement intéressant pour nous.

Vous nous avez précisé que vous partagiez les objectifs du ministre, et je pense que tous les mémoires que j'ai entendus jusqu'à maintenant, autant notre formation politique... Au niveau des objectifs, lorsqu'on parle d'avoir un système accessible, peu coûteux, transparent, efficace, je pense qu'on partage, tous, ces objectifs-là, et, jusqu'à maintenant, Favant-projet de loi, selon les commentaires qu'on a entendus, ne répond pas à ces objectifs, et il faut se trouver un système qui va répondre à ces objectifs.

Parmi les propositions que vous avez ajoutées, la formation du syndic est, évidemment, un élément important. La formation des syndics avait été aussi soulevée par le Conseil interprofessionnel du Québec qui souhaitait même organiser des sessions de formation au niveau des syndics, et je pense que l'exposé que vous nous avez fait, M. Poirier, démontre bien certaines lacunes par rapport à d'autres corporations professionnelles qu'on a pu entendre. (15 h 40)

Vous nous dites: Au niveau des étapes, chez nous, nous envoyons un accusé de réception. Dans beaucoup de cas, il semble que l'accusé de réception, ce soit une mesure qui arrive après un délai extrêmement long. Et parfois même pas d'accusé de réception, c'est la décision qui arrive au lieu d'un accusé de réception après un délai très long. Vous avez aussi ajouté: Nous prenons le temps de rencontrer la personne ou de téléphoner à la personne. Alors, les cas particuliers que nous avons eus ici, les gens nous disaient: Nous, on aurait aimé pouvoir s'exprimer suite au dépôt de notre plainte; on aurait voulu pouvoir exprimer notre point de vue, mais on n'a pas pu le faire; on ne nous l'a pas demandé, on a consulté uniquement le professionnel.

Alors, vous avez très bien compris — peut-être parce que, justement, comme vous le disiez, vous êtes au niveau des relations humaines — qu'il fallait effectivement demander aux gens de s'exprimer sur leurs plaintes, que ce soit par téléphone ou par rencontre, et que c'était un élément majeur, plutôt que de recevoir une décision par la poste, qui est un rejet, avec des explications plus ou moins brèves et qui ne donnent pas satisfaction à ce moment-là. Je pense que vous nous donnez des éléments importants pour un syndic qui veut éviter 1 ' insatisfaction.

Vous avez parlé aussi de possibilité de conciliation, et je pense que, ça aussi, c'est un élément important à conserver.

Mme Landry nous a parlé aussi de l'importan-

ce — et ça non plus, ce n'était pas dans le mémoire — de l'information. Je pense qu'autant les corporations professionnelles que l'Office des professions et le gouvernement vont avoir un travail extrêmement important à faire au niveau de l'information du public, afin que les gens connaissent bien le système, décident d'y recourir et qu'on corrige les choses moins agréables pour les gens.

Vous avez aussi une proposition intéressante sur la tenue d'un registre des plaintes, qui pourrait peut-être davantage répondre que le délai de 60 jours puisqu'il y aurait un suivi par le bureau de la corporation, un suivi par l'Office au moment du rapport annuel et, automatiquement, un suivi par le gouvernement puisqu'il y a toujours l'étude des crédits. Donc, ce serait bien suivi.

Et, moi, j'avoue que j'ai bien apprécié votre demande d'étude approfondie sur les corporations à titre réservé. Pour moi, c'est une des plus grandes lacunes de l'avant-projet de loi qu'on a devant nous. On ne peut pas dire que le projet de loi ne porte pas suffisamment sur les titres réservés, il ne porte pas du tout sur les titres réservés, il ne règle pas du tout ce problème-là. Et, aux pages 20 et 21 de votre mémoire, c'est très clair, vous donnez de bons exemples, très, très simplement, des problèmes qui sont vécus par les corporations à titre réservé. J'avoue que je partage votre analyse là-dessus et que, effectivement, il faut une étude approfondie si on veut vraiment assurer la protection du public.

En page 16, vous nous dites, concernant le système disciplinaire: «Une certaine lourdeur entoure l'exécution des tâches actuelles relevant du comité de discipline et du syndic.» Et là vous faites référence au processus judiciaire. Peut-être M. Poirier ou Mme Landry, qu'est-ce que trouvez de lourd dans le système actuel?

M. Poirier: Bien, lorsque nous allons en discipline, les procureurs doivent se rencontrer pour décider quand on va faire l'audition. C'est déjà un délai. Il y a tout le processus: les procureurs, l'enregistrement des débats, etc. C'est vraiment une petite cour; alors, tout est organisé en conséquence. À ce moment-là, peut-être qu'il y aurait des situations où le syndic aurait pu faire de la conciliation antérieure. Utiliser ce mécanisme pour radier à vie une personne et le même mécanisme pour faire un reproche et une amende de 500 $, peut-être qu'il y a une nuance à faire entre les deux. C'est dans ce sens-là qu'on dit que c'est lourd, que tout le système passe par ce type d'engrenage comme tel. Peut-être qu'il faudrait alléger quelque part.

Mme Caron: Finalement, on utilise le même système, peu importe la faute, la lourdeur de la faute.

M. Poirier: Si vous voulez.

Mme Caron: Et, au niveau des délais, finalement, vous aussi, vous êtes victime, au niveau du comité de discipline...

M. Poirier: De discipline et de l'audition, parce que, aussi, les procureurs et même les témoins, eux autres aussi ont d'autres charges, ils ne sont pas toujours uniquement consacrés à ces dossiers-là.

Mme Caron: Ma collègue des Chutes-de-la-Chaudière voulait vous poser quelques questions. Alors, si Mme la Présidente le permet, je vais...

La Présidente (Mme Hovington): Oui, allez-y.

Mme Carrier-Perreault: Merci, Mme la Présidente.

Moi, je remarque que ça fait 30 ans que vous existez comme corporation. J'ai pris note que vous aviez 1500 membres. Compte tenu du champ, en fait, de la clientèle, si on veut, potentielle, on peut dire que c'est quand même très peu. En termes de pourcentage, je ne sais pas si vous êtes en mesure de dire exactement combien de gens font partie de la Corporation par rapport à l'ensemble, si on veut, des gens qui pratiquent votre profession. Est-ce que vous avez une idée de ça?

Mme Landry: On n'a pas une idée précise à ce niveau-là. Sûrement que, si on avait un statut, par exemple, d'exercice exclusif, on aurait au minimum le double de membres. C'est difficile d'avoir des chiffres précis dans ça, surtout qu'il y a des gens qui sont formés au niveau du baccalauréat, mais pas nécessairement à la maîtrise, alors qu'on exige la maîtrise à l'admission. Mais certainement qu'on doublerait. Il y a certainement à peu près autant de personnes qui font de l'orientation en dehors, l'orientation dans son sens large, évidemment.

Mme Carrier-Perreault: c'est un fait que les gens qui pratiquent en établissement, je pense à ceux qui sont dans les commissions scolaires ou au niveau de l'université, et d'autres, aussi, qui font de la pratique en entreprise, il y a déjà quand même un certain encadrement qui fait que peut-être, quelque part, on peut dire: oui, il y a une protection du public parce qu'il y a des gens qui encadrent, à toutes fins pratiques, ces professionnels-là. quand on parle de la pratique privée, c'est quand même très peu, le pourcentage de membres que vous avez, 8,6 %. de ce côté-là, juste sur ce point-là, yw rapport à l'ensemble des bureaux de conseillers d'orientation, ça veut dire quoi, chez vous, le «mem-bership»?

Mme Landry: II y a 8 % de nos membres qui en font à temps plein, mais il y en a 24 % qui en font à temps partiel aussi, à part d'un autre emploi. Alors, c'est quand même un peu plus de monde. Des services d'orientation, actuellement il y a beaucoup de monde qui en offre parce que c'est un besoin important et il y a de moins en moins de services publics. Alors, on n'a pas calculé. On est en train, justement, de faire, pour

cette année, les vérifications dans les bottins au niveau, entre autres, de l'usurpation de titres, et on se rend compte qu'il y en a beaucoup.

Mme Carrier-Perreault: au début de l'exposé, vous nous disiez qu'il y avait peu de plaintes du public chez vous. les plaintes du public, à toutes fins pratiques, viennent de ces 8,6 % de gens qui sont en pratique privée, j'imagine?

M. Poirier: II y en a quelques-unes, aussi, des institutions comme telles.

Mme Carrier-Perreault: Oui.

M. Poirier:il y en a un pourcentage qui sont, justement, de la clientèle qui a quitté, c'est-à-dire des conseillers qui ne sont plus membres, je dirais environ 25 %. vous posiez la question: combien y a-t-il de conseillers qu'on a formés, en gros, qui ne sont plus membres de la corporation? il y en a plusieurs, mais il y en a qui sont encore, si vous voulez, dans le milieu. et, souvent, on a des plaintes du public, ou même, encore il y a 15 jours, d'un étudiant de niveau cégep d'avoir vraiment été induit en erreur concernant des choix de cours. il a perdu un semestre. mais ce n'était pas un conseiller, c'était un autre type de professionnel qui s'affiche, bon, et ça crée un véritable problème à ce niveau-là. il y en a un pourcentage.

Mme Carrier-Perreault: Vous avez des plaintes du public de gens qui ne sont pas membres de votre corporation. C'est ce que vous êtes en train de...

M. Poirier: Oui, oui.

Mme Landry: Oui, mais les gens sont convaincus qu'ils sont membres...

M. Poirier: Mais oui.

Mme Landry: ...alors ils portent plainte auprès de chez nous.

M. Poirier: C'est ça.

Mme Landry: On a l'odieux de leur dire: Non, ils ne sont pas membres, eux autres; on ne peut rien faire.

Mme Carrier-Perreault: Ce problème-là nous a été soulevé par d'autres...

Mme Landry: Puis on ne peut pas les empêcher de faire de l'orientation.

M. Poirier: C'est ça. La première étape, la première chose que l'on fait, c'est qu'on va dans le bottin pour voir s'il est membre en règle. Sinon... Mais j'explique quand même au plaignant. Mais on n'a pas de recours.

Mme Carrier-Perreault: Alors, c'est facile de comprendre les préoccupations que vous soulevez de façon très claire, comme, je pense, autant le ministre que ma collègue vous l'ont mentionné. Quand on a aussi peu de possibilités de contrôle, ce n'est pas évident qu'on est capables d'en arriver à faire quelque chose.

Quand vous dites: II y a des problèmes pour lesquels on fait des plaintes, et tout ça... Quand on veut faire de l'inspection professionnelle, quand on veut être vigoureux et être sévères, les gens démissionnent tout simplement. Est-ce que vous avez des cas? C'est arrivé à quelques reprises?

Mme Landry: Oui.

Mme Carrier-Perreault: Avez-vous fait beaucoup d'inspections chez vous?

Mme Landry: Actuellement, on en fait en moyenne 70 par année et, à chaque année, il y a des suivis qui s'ajoutent aussi. Et il y en a eu, des cas. Je ne saurais dire combien, mais il y a eu des cas de démission. Peut-être que Martine est plus au courant. (15 h 50)

Mme Lacharité (Martine): Oui. Peut-être, je pense, à 1 ou 2... On recommande 4 ou 5 suivis sur les 70 inspections, puis c'est peut-être arrivé à 2 reprises où il y a eu vraiment démission, il y a eu 2 démissions. Puis il y a aussi l'effet d'entraînement. Ça, on n'a pas de chiffres, mais, dans des milieux, on retrouve d'autres conseillers d'orientation qui, aussi, ont vu ce qui s'était passé ou qui, par crainte, ont aussi démissionné. On suppose ça, mais, là, c'est... Il y a eu comme un vent, dans ce milieu-là, de craintes, d'appels de gens qui n'ont pas renouvelé leur cotisation l'année suivante.

Mme Carrier-Perreault: Écoutez. J'écoute ça, ça fait quelques jours que je suis la commission parlementaire et, honnêtement, je me demande ce qui peut attirer les gens dans une corporation professionnelle quand ils ne sont pas obligés, évidemment, d'être membres pour pratiquer leur métier. Je me dis: Tu es soumis à des inspections, des vérifications, tu peux avoir des obligations de rendre des comptes ailleurs et, en plus, déjà, par rapport aux encadrements que tu peux avoir dans d'autres milieux, tu paies une cotisation. Et on se rend compte qu'avec la loi 67 ça a l'air que ça va augmenter. Alors, qu'est-ce que ça peut être l'attrait pour une personne d'être membre d'une corporation?

Mme Lacharité: Décrit comme je l'ai décrit là, ça semble très épouvantable, sauf que c'est sûr que l'attitude qu'on veut avoir, c'est beaucoup d'éducation qu'on veut faire auprès de nos membres parce qu'on sait

toujours qu'on peut les perdre, à la limite, si... Ça fait que c'est sûr que l'attitude est de... On essaie de les aider dans leur pratique professionnelle, de leur donner des outils; par exemple, la tenue de leurs dossiers, le contact avec leurs clients, les difficultés qu'ils peuvent avoir au niveau des différentes problématiques. Les clientèles s'alourdissent de plus en plus, vous le savez. Il y a de plus en plus de gens en chômage, d'assistés sociaux. Alors, les conseillers interviennent à ces niveaux-là. Alors, il y a beaucoup de difficultés.

Faire des recommandations pour de la formation continue; je pense qu'on ajuste notre inspection dans ce sens-là aussi et on se doit aussi de dire qu'il y a des lacunes et qu'il y a des manquements, et effectuer des suivis. Alors, c'est pour ça que, oui, on essaie de dire que c'est important pour la protection du public. Les gens ont un recours, sauf qu'évidemment ils sont devant le fait: Ça me coûte très cher, puis je suis inspecté, et je suis soumis à toutes sortes de contrôles. C'est évident.

Mme Carrier-Perreault: Je vous remercie. Mme Landry: II faut jouer sur la fierté aussi. Mme Lâchante: C'est ça, l'appartenance.

M. Poirier: C'est ça le prix à payer pour avoir le statut professionnel. Ça en est un prix.

Mme Carrier-Perreault: Mais, quand les gens peuvent pratiquer leur profession quand même, est-ce que...

M. Poirier: C'est parce qu'il y a des mécanismes ailleurs qui jouent contre ou... Il y a des clarifications à faire. Il y a de...

Mme Carrier-Perreault: Est-ce que vous iriez jusqu'à suggérer — vous n'êtes pas aussi clairs que ça — mais est-ce que vous iriez jusqu'à suggérer que les gens qui pratiquent une profession où il existe une corporation à titre réservé, que tous ceux qui pratiquent leur profession devraient obligatoirement faire partie d'une corporation?

Mme Landry: Parmi les gens qui donnent des services directs à la population, oui.

Mme Carrier-Perreault: Ça va.

Mme Landry: Si notre objectif, c'est de protéger le public, il faut avoir le moyen de le faire.

La Présidente (Mme Hovington): Merci. C'est tout? Ça va.

M. le ministre, il reste sept minutes.

M. Savoie: Oui, c'est ça, hein? Merci, Mme la Présidente. Rien n'est gratuit, hein, finalement. On constate que, pour avoir le statut de professionnel, comme l'a indiqué le syndic, il faut être prêt à en assumer certains coûts.

Ce que je constate, c'est qu'il faut bien comprendre qu'au niveau du projet de loi, bien qu'il n'y ait pas d'article ou de développement spécifique au niveau des corporations à titre réservé, on vous impose des obligations. On a eu l'occasion de le souligner, je crois que c'est ce matin ou hier, qu'on ne peut pas se mettre dans une position où on impose des obligations et que ça ne donne pas naissance à des droits. Non seulement ils sont obligés de payer plus cher, mais ils sont obligés, par exemple, de penser en termes d'assurance-responsabilité, ils sont obligés de payer le syndic qui constitue une visite régulière. Tous ces éléments-là font en sorte qu'évidemment on impose des obligations. Il faudrait, en contrepartie, que les obligations donnent naissance à certains droits au niveau de la corporation professionnelle, et c'est l'orientation, et c'est ce qui, un peu, gêne un développement spécifique au niveau des corporations à titre réservé.

D'une façon générale, je pense que ce que je retiens, c'est des commentaires, des suggestions et des recommandations qui sont intéressants à développer. Le registre m'a fait sourire; ça me fait penser à ça et à d'autres choses aussi. Il y a, évidemment, l'histoire du syndic; c'est la première fois qu'on avait l'occasion de l'aborder. La formation, la sélection, il y a des éléments intéressants là-dedans. Évidemment, le problème des titres réservés et, d'une façon générale, le comité des plaintes, bien, là, il faudrait que ce soit... Ça ne peut pas être tel quel, tel que prévu, un par corporation, et on l'installe d'une façon assez bête, et ça, à travers le monde professionnel. Mon Dieu! il y a toutes sortes de choses qu'on pourrait aborder. La réglementation, je pense que vous y voyez des éléments d'une façon favorable.

Mme la Présidente, on va remercier la Corporation professionnelle, nécessairement, pour avoir présenté un mémoire que j'ai beaucoup apprécié.

Mme Landry: Merci.

La Présidente (Mme Hovington): Alors, au nom des membres de la commission de l'éducation, merci beaucoup de votre collaboration. J'inviterais maintenant la Corporation professionnelle des infirmières et infirmiers auxiliaires du Québec à bien vouloir venir prendre place, s'il vous plaît. Nous allons suspendre une minute.

(Suspension de la séance à 15 h 56)

(Reprise à 16 heures)

La Présidente (Mme Hovington): La commission de l'éducation va reprendre ses travaux avec la Corpora-

tion professionnelle des infirmières et infirmiers auxiliaires du Québec représentée par M. Régis Paradis, qui est le président.

M. Paradis (Régis): Bonjour.

La Présidente (Mme Hovington): Bonjour, M. le président, M. Paradis. Voulez-vous nous présenter vos collègues, s'il vous plaît?

Corporation professionnelle des infirmières et infirmiers auxiliaires du Québec (CPIIAQ)

M. Paradis (Régis): Oui, avec plaisir, Mme la Présidente. Il s'agit tout d'abord, à ma droite, de Mme Monique Beaudoin, conseillère juridique à notre corporation, et, à ma gauche, de M. Paul J. Thériault, qui est le directeur général. Moi-même, Régis Paradis, je suis le président de la Corporation.

La Présidente (Mme Hovington): Nous faisons distribuer le texte de votre mémoire aux membres de la commission.

M. Paradis (Régis): Merci.

La Présidente (Mme Hovington): Vous avez 20 minutes pour nous présenter votre mémoire.

M. Paradis (Régis): Merci, Mme la Présidente.

M. le ministre, Mmes et MM. les membres de la commission de l'éducation, nous sommes heureux de vous présenter aujourd'hui l'essentiel de notre mémoire sur cet avant-projet de loi. Puisqu'il s'agit principalement d'une proposition visant à amender le système disciplinaire, nous débuterons nos représentations par cet aspect et, par la suite, nous entendons vous faire part des préoccupations propres à notre corporation professionnelle en regard du système professionnel dans son ensemble.

L'un des principaux objectifs visés par la réforme du Code des professions est de rendre le système disciplinaire plus transparent, plus efficace, plus souple, plus accessible, moins coûteux et, nous croyons, certes avec l'intention de mieux servir la population. Nous avons été guidés par les mêmes motivations dans la présentation... dans la préparation, dis-je bien, de notre mémoire. Bien qu'en accord avec certaines des mesures proposées, la Corporation ne croit pas que l'avant-projet de loi permettra d'obtenir tous les résultats attendus et voici pourquoi.

La première modification importante est la création au sein de chaque corporation professionnelle d'un comité d'examen des plaintes composé de cinq personnes dont deux choisies parmi les administrateurs nommés par l'Office comme représentants du public. L'article 122.2 de Favant-projet de loi accorde à ce comité le pouvoir de reprendre au complet l'enquête menée par le syndic. Ce mécanisme entraînera des effets contraires à ceux désirés, soit une lourdeur et des coûts excessifs, ainsi que des délais inutiles. Le fait que ce comité comprenne deux représentants du public n'améliorera en rien la transparence puisque ces personnes sont choisies parmi les administrateurs nommés au bureau de la corporation, personnes qui ne peuvent jouir de toute l'apparence d'impartialité requise.

Le comité d'examen des plaintes aurait le pouvoir de demander au syndic de porter une plainte devant le comité de discipline, alors que le syndic a initialement jugé qu'il n'y avait pas lieu de le faire. Dans un pareil cas, peut-on croire que le syndic aura toute la même motivation que lorsqu'il considère la plainte justifiée? L'existence d'un tel comité ne rendra pas, non plus, les poursuites devant le comité de discipline plus accessibles pour les plaignants. La Corporation croit qu'il est préférable de bien informer le public et de lui faciliter la tâche pour déposer une plainte dans les cas où le syndic refuse de le faire.

L'amendement prévu à l'article 128 de l'avant-projet de loi accordant une immunité au plaignant privé, amendement avec lequel la Corporation est d'accord, va certainement permettre une meilleure accessibilité au système disciplinaire. Quant à l'objectif de transparence, nous croyons que le remplacement d'un membre de la profession par un membre du public au comité de discipline pourrait satisfaire à l'objectif visé. Nous tenons à faire un court commentaire sur quelques autres modifications à apporter au niveau de la discipline.

L'article 128, paragraphe 3°, de l'avant-projet de loi prévoit que le secrétaire du comité de discipline doit prêter assistance à un plaignant privé dans la formulation d'une plainte. Considérant que le secrétaire du comité de discipline est un employé de la corporation, nous croyons qu'il ne jouit pas de toute l'indépendance et de l'impartialité nécessaires pour assumer cette fonction et qu'on ne peut lui faire jouer le rôle de conseiller juridique auquel pourrait s'attendre un plaignant privé dans les circonstances. Par conséquent, nous sommes en désaccord avec cette modification.

La Corporation suggère que l'article 141 ne soit pas modifié, laissant aux corporations professionnelles le choix d'enregistrer les audiences du comité de discipline selon le mode qui leur convient le mieux, et il est possible que l'enregistrement par voie mécanique soit moins coûteux, si on exclut l'achat des équipements requis, mais ce système est souventefois moins fiable, des parties de témoignages étant souvent inaudibles.

À l'article 151 de Favant-projet de loi, la Corporation est d'accord avec le fait que le plaignant privé ne puisse être condamné aux déboursés que si le professionnel est acquitté sur chacun des chefs d'accusation de la plainte, mais croit également que l'exigence «de mauvaise foi» devrait être retirée.

La Corporation endosse l'article 154.1 obligeant le comité de discipline à rendre sa décision dans les 90 jours de la prise en délibéré. De fait, nos délais à la

Corporation sont inférieurs à 90 jours.

Elle approuve également l'augmentation des amendes. Cependant, elle propose que l'article 158.1 soit élargi de façon à permettre que l'amende puisse être versée même à un tiers lorsque le comité de discipline le juge opportun compte tenu de la nature de l'infraction. C'est une pratique que la Corporation a déjà testée dans un centre hospitalier, où l'amende a été redonnée au comité des bénéficiaires de l'endroit, et c'est une mesure qui a été excessivement appréciée.

La création du nouveau recours en rétractation prévue à l'article 161.1 ne nous apparaît pas nécessaire en matière disciplinaire considérant qu'il existe déjà un recours utile, soit l'appel devant le Tribunal des professions. On ne fait, de cette manière, qu'accroître, croyons-nous, la judiciarisation. Nous tenons tout de même à souligner aussi que l'article 161.1 ne précise aucun délai pour déposer une requête en rétractation.

Enfin, en ce qui a trait à l'article 175 de l'avant-projet de loi, la Corporation ne croit pas que le Tribunal des professions devrait pouvoir retourner un dossier au comité de discipline pour que ce dernier impose une sanction. Cela entraînerait des délais et des coûts inutiles.

Dans un autre domaine que celui du système disciplinaire, précisons d'abord que la Corporation, à l'instar de plusieurs autres corporations professionnelles, est insatisfaite de la manière dont l'Office des professions assume son rôle. Elle croit que l'Office devrait être ramené à son mandat premier de surveillance des corporations professionnelles sans lui accorder aucun pouvoir additionnel qui ne soit appuyé par une analyse complète et sérieuse du système professionnel déjà en place.

Dans un deuxième temps, sur l'aspect de la réglementation, soulignons qu'il y a trop de règlements obligatoires. Ceux-ci devraient être limités à ce qui touche de très près à la protection du public. L'adoption des autres règlements pourrait être laissée à la discrétion des corporations selon leurs besoins particuliers. Alors, il y a quatre règlements qui sont passés, dans l'avant-projet de loi, de facultatifs à obligatoires, comme la tenue de dossiers, la tenue de cabinets, les normes d'équivalence de formation et l'assurance-responsabilité professionnelle. Il y a également un nouveau règlement obligatoire, soit celui de la conciliation des différends. La Corporation est contre le fait que le règlement sur l'assurance-responsabilité professionnelle soit devenu obligatoire, parce qu'elle couvre déjà ses membres contre leur responsabilité.

En ce qui concerne le processus d'adoption et d'approbation des règlements, nous croyons qu'il devrait être accéléré en imposant des délais à l'Office des professions pour procéder à ses recommandations, et voici quelques exemples sur les délais très longs. Par exemple, le règlement sur les élections et celui sur les affaires du bureau ont été transmis à l'Office le 18 octobre 1989 et ils ont été publiés dans la Gazette officielle du Québec le 14 octobre 1992, trois ans après. Le règlement, maintenant, sur l'inspection professionnelle a été transmis le 31 octobre 1989 et, au moment où on se parle, il n'est pas encore publié dans la Gazette officielle du Québec. Donc, on se dirige vers plus de trois ans, peut-être même quatre ans.

L'Office ne devrait pas, non plus, pouvoir refuser l'approbation d'un règlement pour le motif qu'il n'est pas conforme au modèle type adopté pour l'ensemble des corporations.

On peut constater que les modifications majeures de l'avant-projet de loi touchent principalement la discipline. Toutefois, nous considérons que la présente réforme proposée est extrêmement silencieuse à l'égard de plusieurs autres irritants pour les professionnels. Nous croyons qu'il n'est pas acceptable de conserver plus longtemps les deux types de professions prévues au Code des professions, soit les professions d'exercice exclusif et celles à titre réservé.

Quand on parle de protection du public, on ne peut pas permettre que certains professionnels puissent être exclus de l'application du Code des professions. C'est pourtant le cas de toutes les professions à titre réservé dont les professionnels n'ont pas l'obligation d'être membres pour exercer. (16 h 10)

Un autre aspect relié directement au monopole d'exercice est la délégation d'actes. En vertu du Code des professions et de leurs lois particulières, certaines corporations professionnelles d'exercice exclusif avaient l'obligation de déléguer, parmi les actes qui leur étaient réservés, certains actes pouvant être posés par d'autres personnes que leurs membres. Ce mécanisme de délégation d'actes, initialement prévu pour assurer une meilleure protection du public et pour intensifier la collaboration interprofessionnelle, a plutôt permis à certaines corporations de raffermir leurs pouvoirs au détriment de l'efficacité collective.

Dans le cas plus particulier des infirmières auxiliaires, leur pratique professionnelle est dépendante de l'interprétation de l'application de deux règlements de délégation d'actes: l'un sur les actes infirmiers délégués par l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec et l'autre sur les actes médicaux provenant de la Corporation professionnelle des médecins. Alors que le premier reçoit une application extrêmement restrictive, le second n'est pour ainsi dire jamais appliqué quant aux infirmières auxiliaires.

Ce processus a entraîné un phénomène de déqualification important ainsi qu'une perte d'autonomie professionnelle pour les infirmières auxiliaires. En plus de restreindre les infirmières auxiliaires au niveau de l'application des règlements de délégation d'actes, les établissements de santé utilisent aussi l'article 37p du Code des professions, lequel détermine les activités professionnelles permises aux infirmières auxiliaires. Cet article mentionne que les infirmières auxiliaires peuvent dispenser les soins infirmiers que requiert le traitement

des malades. Comme le terme «soins infirmiers» n'est pas défini par aucun texte de loi ou de règlement, les établissements de santé interprètent également cette disposition de façon restrictive. De plus, le terme «malades» utilisé à cet article ne correspond pas, non plus, à la pratique professionnelle des infirmières auxiliaires qui, de tout temps, ont fait de la prévention, travaillé en pouponnière, en salle d'accouchement, en milieu scolaire et également en industrie. Nous croyons donc que l'article 37p du Code des professions devrait refléter cette réalité de la pratique professionnelle des infirmières auxiliaires et que la définition de leur champ de pratique professionnelle devrait être élargie de façon à englober l'ensemble des activités des clientèles reliées à l'exercice de la profession.

Ces derniers points concernant le processus de délégation d'actes et la définition du champ d'exercice sont particulièrement importants et rejoignent nos recommandations qui ont déjà été faites à la commission des affaires sociales et à la commission sur le budget et l'administration des services publics. Compte tenu des coûts du système de santé, des modifications à ce sujet s'imposent afin de permettre une utilisation maximale des ressources et une complémentarité interprofessionnelle tout en visant des soins de santé de qualité pour la population.

Afin de vraiment améliorer le système professionnel, la réforme du Code des professions aurait dû réviser, à notre avis, la nécessité de conserver deux types de professions, le processus de délégation d'actes ainsi que les champs d'exercice, et plus particulièrement celui des infirmières auxiliaires.

Avant de terminer, nous tenons à aborder un autre objectif visé par la réforme du Code des professions, soit celui d'alléger le fardeau financier du gouvernement. Afin d'atteindre cet objectif, le gouvernement a décidé de transférer entièrement les coûts d'opération de l'Office des professions aux corporations professionnelles. Comme le ministre a choisi de traiter cet aspect dans un projet de loi différent sans tenir de consultation, il ne nous restait donc que cette commission parlementaire pour exprimer notre désaccord, désaccord sur la manière de procéder et, également, désaccord sur le financement de l'Office des professions par les corporations professionnelles.

Il faut d'abord que les professionnels régis par le Code des professions assument déjà le financement de leurs corporations professionnelles dont le mandat premier est la protection du public, et, dans ce sens, nous considérons qu'ils n'ont pas à payer davantage pour un organisme gouvernemental qui contrôle leurs corporations. En deuxième lieu, le projet de loi 67 prévoyant le financement de l'Office des professions ne précise aucun droit de regard par les corporations professionnelles sur le rôle que doit jouer l'Office sur sa structure organisa-tionnelle ainsi que sur ses dépenses. On a juste le droit de payer, au fond. On n'a pas droit de regard, absolument pas, tel que la loi 67 le prévoit.

Enfin, il faut savoir que la répartition des coûts telle que proposée par le Conseil du trésor est inéquitable pour notre corporation et que les enjeux sont critiques pour l'ensemble des corporations professionnelles à titre réservé. Comme nous l'avons déjà mentionné, les professionnels n'ont pas l'obligation d'être membres des corporations professionnelles à titre réservé pour exercer leur profession. Vous comprendrez facilement que le risque de leur désaffection est grand s'ils se voient transférer des coûts additionnels. Vous conviendrez aussi que les bases de calcul du transfert des coûts doivent être différentes pour les corporations professionnelles à titre réservé qui ne jouissent pas du même statut et des mêmes privilèges que les corporations d'exercice exclusif.

On peut constater à l'annexe de notre mémoire l'impact du transfert des coûts pour notre corporation. La hausse de cotisation assumée par nos membres, un des groupes les moins bien rémunérés, sera de 11,5 %, alors que la moyenne de l'ensemble des corporations sera de 5,6 %. Les infirmières auxiliaires seront donc contraintes à payer 12,70 $, pour un total de 250 000 $ annuel, alors que, par exemple, les infirmières ne paieront que 5,61 $ et les ingénieurs 10,37 $. De plus, il faut retenir que ces deux dernières corporations sont à exercice exclusif.

En conclusion, M. le Président, la Corporation professionnelle des infirmières et infirmiers auxiliaires du Québec soumet dans son mémoire les recommandations suivantes:

Qu'une analyse sérieuse du système professionnel en place soit effectuée et qu'une consultation générale soit tenue avant de procéder à toute modification importante;

Que l'Office soit ramené à son rôle premier de surveillance des corporations professionnelles sans lui octroyer de pouvoirs additionnels qui ne soient appuyés par une analyse en profondeur;

Que le processus d'adoption des règlements soit accéléré en imposant des délais à l'Office des professions pour procéder à ses recommandations;

Que les règlements reliés à la protection du public demeurent obligatoires et que les corporations professionnelles aient un pouvoir discrétionnaire quant à l'adoption des autres règlements;

Que le pouvoir réglementaire des corporations professionnelles demeure sous leur unique responsabilité, sans les obliger à adopter des règlements qui ne répondent pas à leurs besoins spécifiques;

Que soient révisés dans la présente réforme la nécessité de conserver deux types de professions, le processus de délégation d'actes ainsi que le champ d'exercice des infirmières auxiliaires;

Que ne soit pas retenu le comité d'examen des plaintes et que soit examinée la possibilité d'inclure un représentant du public au sein du comité de discipline;

Enfin, que le financement de l'Office des professions ne soit pas transféré aux corporations profession-

nelles.

Merci beaucoup, M. le Président. Ça conclut.

Le Président (M. Hamel): Merci, M. le président.

J'inviterais maintenant le ministre titulaire à procéder aux échanges.

M. Savoie: Merci, M. le Président.

Tout d'abord, permettez-moi de saluer les gens de la Corporation professionnelle des infirmières et infirmiers auxiliaires du Québec. Bien sûr, on n'en est pas à notre première rencontre depuis deux semaines, je pense, dans un autre contexte.

M. Paradis (Régis): Trois semaines, M. le ministre.

M. Savoie: Trois semaines.

M. Paradis (Régis): Exact. Le 9 février.

M. Savoie: Le 9 février?

M. Paradis (Régis): Oui, exact.

M. Savoie: C'est ça. Dans le contexte de «Vivre selon nos moyens», je pense.

M. Paradis (Régis): Exact.

M. Savoie: Oui, c'est ça. Vous avez présenté un mémoire, d'ailleurs, très intéressant.

Au niveau de votre mémoire aujourd'hui, vous revenez, vous touchez à plusieurs éléments, vous touchez au financement. Simplement pour rassurer vos membres que le mécanisme de participation pour les frais de fonctionnement de l'Office n'est pas encore déterminé. Il y a des chiffres qui circulent; on peut les présumer comme faux. Ce n'est pas terminé encore. Vous pouvez peut-être leur dire que ce qui est proposé sur la table actuellement, c'est ça. Mais il ne faudrait pas voir ça comme une solution définitive, et probablement qu'il va y avoir des changements en cours de route. Vous pourriez également dire à vos membres que le financement n'est pas sur la table.

M. Paradis (Régis): Je suis d'accord, mais... (16 h 20)

M. Savoie: Je voulais également vous montrer des rapports de consultation, parce qu'on parlait qu'il y avait eu absence de consultation, les trois volumes ici, sur l'autofinancement, les différents éléments: la correspondance, les consultations, les documents produits et les rencontres qu'on a eues concernant l'autofinancement. Simplement pour vous dire qu'il y a eu des échanges là-dessus. Il y a eu des échanges considérables là-dessus. Ce n'est pas quelque chose qui tombe dans les airs comme ça, là, un jour. Ça a fait partie d'une réflexion. Le but de notre rencontre aujourd'hui n'est pas de parler de ça, n'est-ce pas? C'est pour parler d'autre chose, et quelque chose d'aussi important que «Vivre selon nos moyens», finalement, le financement.

On vous remercie pour votre mémoire. Vous touchez à des points et vous avez des orientations qui nous intéressent, des questionnements aussi qu'on voudrait... un questionnement qu'on voudrait partager avec vous. Vous dites que les deux citoyens seront choisis par la corporation, sur le comité des plaintes?

M. Paradis (Régis): Dans Favant-projet de loi, ce qui semble se dégager, M. le ministre, c'est qu'effectivement, sur le comité des plaintes, il y aurait deux personnes qui sont déjà nommées par l'Office et qui sont membres du bureau d'administration de la corporation. Dans ce sens-là, ce que nous disons, c'est que ces gens-là seraient pour le moins en conflit de rôles, jusqu'à un certain point. Alors, finalement, ça n'augmente pas tellement la transparence dans ce cas-là.

M. Savoie: O.K. Si c'était le cas, vous seriez dans le mille; effectivement, il y aurait un conflit. Mais ce n'est pas le cas. Ce ne sera pas deux citoyens, disons, choisis par la corporation. Ça, c'est bien sûr. On ne voudrait pas créer cette situation-là, non plus.

M. Paradis (Régis): De la façon dont c'est rédigé dans F avant-projet de loi, vous conviendrez avec moi que ça laisse prétendre... ça laisse croire cela.

M. Savoie: Ça pourrait laisser... Oui, ça pourrait laisser croire ça.

M. Paradis (Régis): D'accord.

M. Savoie: Je voulais tout simplement vous le spécifier. Puis, si c'était le cas, par exemple, si on n'avait pas deux citoyens... Vous avez suivi, je veux croire, un peu l'évolution du dossier, vous avez pu au moins prendre connaissance de la présentation qu'ont faite certains intervenants non membres de corporations professionnelles, ou non-corporations professionnelles, où on dit qu'il y a un problème de fond au niveau de la perception, au niveau de l'interface qu'ils ont, par exemple, avec le syndic, les mécanismes de discipline. Vous ne sentez pas que le comité des plaintes est un début de solution à ça?

M. Paradis (Régis): Nous ne croyons pas, et, là-dessus, je vais laisser M. Thériault faire ses commentaires.

M. Savoie: M. Thériault. D'accord.

M. Thériault (Paul J.): M. le Président, pour commencer, le comité des plaintes, on trouve que c'est

un mécanisme lourd sur le plan administratif et aussi coûteux. On a des estimés très rapides, et on rejoindrait très facilement ce qui a été avancé par l'Ordre des infirmières tantôt.

M. Savoie: Par nous ou par eux?

M. Thériault: Par l'Ordre des infirmières.

M. Savoie: O.K., par l'Ordre. D'accord.

M. Thériault: À moins que vous soyez membre de cet Ordre-là, ce que je ne pense pas.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Thériault: L'Ordre des infirmières, tantôt, a parlé d'au-delà de 100 000 $ de fonctionnement au niveau du comité des plaintes.

M. Savoie: Oui.

M. Thériault: Nous, on présume que ça pourrait facilement jouer dans les centaines de milliers de dollars.

On a un comité administratif actuellement, qui se réunit une dizaine de fois par année. Le coût de fonctionnement du comité administratif est de 25 000 $. Un comité des plaintes devrait se réunir au moins une fois par mois et, dans certains cas, devrait aller chercher des expertises, et peut-être faire même enquête ou reprendre certains éléments d'enquête, ce qui nous laisse présager que ça pourrait coûter beaucoup plus cher qu'un comité administratif au niveau de la corporation. Donc, il y a effectivement une question de coûts là-dedans. Que ce soit assumé par l'Office ou la corporation, ça va être le même payeur en bout de ligne.

M. Savoie: C'est ça.

M. Thériault: Maintenant, l'autre élément que M. Paradis a soulevé tantôt, c'est la notion de conflit de rôles. Mais je pense que vous avez clarifié cette question-là par rapport à la personne qui interviendrait.

M. Savoie: C'est ça. Est-ce qu'on pourrait clarifier tout de suite l'argent? Je peux vous dire que, si ça coûte 100 000 $, par exemple, ou 150 000 $, avec l'opération, ça n'aura pas lieu. Est-ce qu'on peut s'entendre là-dessus?

M. Thériault: O.K. Par contre, on comprend très bien, on saisit très bien la préoccupation du consommateur de services qui veut avoir un accès au processus disciplinaire d'une corporation. Nous, on prétend que notre syndic et les syndics des corporations font bien leur travail; même si on peut penser autrement, je pense qu'il faut le dire, ça.

Maintenant, si on veut donner la perception que le processus disciplinaire est facilement accessible, on pourrait convenir... Et, d'ailleurs, dans Pavant-projet de loi, il y a un élément là-dedans qui est très — et on l'a souligné dans notre mémoire — valable, c'est celui de rendre la personne non attaquable sur le plan judiciaire si elle dépose une plainte face à une corporation professionnelle. Je pense que ça, c'est un élément important. Donc, la personne qui engage un processus comme celui-là, elle sera vraiment intouchable, si on veut, par la corporation elle-même.

Mais on peut faire plus que ça. On peut aussi, dans le contexte de plaintes privées, si les gens ne sont pas satisfaits de la réponse du syndic ou du processus de plaintes d'une corporation professionnelle, favoriser le dépôt de plaintes privées. Il y a des mécanismes que vous proposez, le fait d'avoir des formulaires, mais aussi de publiciser auprès du grand public que ce mécanisme-là existe, que c'est possible de déposer des plaintes privées auprès du comité de discipline. Évidemment, la question que vous allez me dire: Ça va coûter de l'argent aux plaignants, donc ça va être une barrière. Pour ceux qui n'ont pas suffisamment d'argent, on pourrait peut-être penser à l'aide juridique disponible pour ce genre de cause. Donc, ça vient briser des barrières pour rendre accessible un mécanisme qui, dans le fond, est un tribunal. Dans ce contexte, nous, on prétend que la plainte déposée au privé, ce serait intéressant.

Et l'autre partie, qui est pour favoriser une plus grande transparence, ce serait de faire participer un membre du public au comité de discipline. Sur les deux professionnels qui y siègent avec le président, on enlèverait un professionnel pour le remplacer par un homme du public. On sait que le président est déjà un avocat nommé par le gouvernement. Donc, les professionnels seraient en minorité au niveau du comité de discipline. C'est dans le sens d'ouvrir au niveau de la transparence par rapport au processus disciplinaire comme tel.

M. Savoie: ce qu'on a eu comme critique au niveau du comité de discipline, ce n'est pas tellement la structure comme, par exemple, les coûts. on pense qu'on s'est adressé à certains problèmes au niveau du comité de discipline. là où il y a le gros des problèmes, c'est au niveau du citoyen et son premier contact, c'est-à-dire le syndic, parce que c'est là qu'on constate — je pense que les chiffres ont été très éloquents... combien de plaintes avez-vous? ah! on en a 1000. et combien de plaintes sont retenues? ah! 5%, 7%, 2 %; ça varie, comme ça. donc, il y a un groupe qui se fait, finalement, refuser, dans le sens que le syndic ne procède même pas à l'enquête. et on trouve que le morceau est en... deuxièmement, lorsque le syndic procède, fait un examen sommaire, on passe donc de l'ordre de 2 %, 5 %, 7 % et on tombe dans les fractions, c'est-à-dire que, par exemple, sur 15 plaintes retenues par un syn-

die, il y en a à peine 1, ou 2, ou 3 qui vont être retenues pour continuation. Alors, c'est là que le premier contact se fait et c'est là qu'il y a plus de refus.

Et ce qu'on se disait, c'est que le citoyen qui reçoit un avis disant que sa plainte ne peut pas être retenue en vertu de l'article 10.4 du code de déontologie de la loi une telle, il ne sent pas... il n'a pas l'impression qu'il y a eu apparence de justice. Il y a peut-être eu justice sur le fond. On ne critique pas la décision du syndic. Ça a toujours été notre préoccupation... Ce n'était pas de critiquer le travail du professionnel qui a fait le dossier, c'est, on l'a toujours souligné, qu'il y avait un problème d'apparence. Alors, dans notre système, il faut qu'il y ait justice, mais il faut également qu'il y ait apparence de justice. Et là on constate qu'il n'a pas ce sentiment-là et, en plus de cela, les mécanismes d'appel sont limités parce qu'il fait affaire, nécessairement, là, avec toujours le même professionnel.

Nous, ce qu'on s'est dit, c'est qu'en allant vers un organisme, une structure sur laquelle il y aurait deux citoyens, par exemple, sur un comité, à ce moment-là, il risque de se faire parler avec le même langage, il risque de poser des questions de façon beaucoup plus franche et de se faire répondre. Le citoyen qui veut s'occuper de son dossier va avoir tendance à avoir plus de réponses, et le comité pourra également faire une petite enquête, comme vous l'avez mentionné. Il pourrait demander au syndic de reprendre son travail, parce que, des fois, on découvre des choses lorsqu'il y a eu des explications additionnelles. Ça pourrait être intéressant. (16 h 30)

Et, si vous arrivez et vous dites: Bon, on devrait alléger la structure, envoyer ça ailleurs, on trouve que ça ne règle pas le problème. Et là je ne parle pas de votre corporation professionnelle; on parle de toutes les corporations professionnelles, d'une façon générale. Il y en a qui en ont beaucoup. Il y en a qui ont du travail. Il y en a, des interventions. On se dit: Bien, mon Dieu, le citoyen a certainement le droit d'avoir d'autres choses qu'uniquement un contact avec un collègue de l'autre, ou une collègue, au moins, c'est le minimum. C'est pour ça que l'idée du comité des plaintes nous fait tellement sourire. On pense qu'il y a là un mécanisme qui respecte l'autonomie des corporations professionnelles. On pense qu'il y a là un mécanisme qui donne satisfaction au citoyen, parce qu'il ne rencontre pas que les pairs, il rencontre des gens pareils comme lui, et que l'échange, c'est un mécanisme d'appel qui n'est pas coûteux, qui est léger, finalement, mais qui a aussi des dents, ce n'est pas là pour la frime, et que ça peut... C'est pour ça.

Finalement, la notion de coûts, on n'a pas eu vraiment d'argumentation structurée disant: Non, on ne peut pas le faire. On a eu des critiques dans le style: Pour nous, ce n'est pas applicable parce qu'on n'a pas assez de plaintes. On le savait, ça. Peut-être établir des mécanismes de collection pour certains secteurs.

Mais, au niveau des infirmières auxiliaires, vous en avez combien de plaintes par année, vous autres?

M. Paradis (Régis): Nous en avons une moyenne... J'aimerais, si vous...

M. Savoie: Non, non, mais répondez à ma question.

M. Paradis (régis): je vais y répondre, mais je... o.k., je vais y répondre puis je vais attirer votre attention sur autre chose par la suite. c'est que, écoutez, nous en avons... les plaintes écrites varient de 40 à 60 par année, je dirais, les plaintes écrites que nous recevons. maintenant, les plaintes retenues pour enquête pourraient varier, je dirais, sur l'ensemble, de... on n'a pas les pourcentages, mais je dirais facilement 50 % à 60 %. maintenant, les plaintes déposées devant le comité de discipline, bien là, ça varie, ça varie de 5 % à 60 %. évidemment, on ne choisit pas les plaintes, ça dépend de quelle nature elles sont. donc, dans ce sens-là, on ne choisit pas les plaintes. il y en a un certain nombre qui vont au comité de discipline, ça dépend de la nature de la plainte, dans certains cas. on voit aussi, c'est arrivé que ce soit l'établissement qui veuille se servir de la corporation pour régler des litiges, des différends au niveau du travail.

J'aimerais attirer votre attention, M. le ministre, sur la porte d'entrée au niveau des plaintes. C'est que 98,3 % de nos 20 000 membres — parce que notre corporation est la troisième plus importante parmi les 41 corporations professionnelles — travaillent en institution. Donc, les institutions ont l'habitude de ces mécanismes-là et de traiter avec les corporations professionnelles. Donc, à ce niveau-là, ça cause moins de problèmes. Et, ce que je peux assurer, c'est que, chez nous, l'ensemble des plaintes sont reçues par écrit, sont traitées. Il y a une préenquête qui se fait par le syndic et là on voit que c'est le syndic, finalement, qui décide s'il y a lieu ou pas de retenir la plainte...

M. Savoie: Oui. Regardez...

M. Paradis (Régis): ...pour enquête et d'aller, par la suite, au niveau du comité de discipline.

M. Savoie: Oui. Ce qu'on a comme chiffres, nous...

M. Paradis (Régis): Oui.

M. Savoie: ...c'est qu'il y a une soixantaine de plaintes écrites. Donc, ça exclut les plaintes téléphoniques que vous pouvez recevoir puis que vous pouvez régler rapidement. Vous en avez 18 qui ont été retenues pour enquête. Il y a eu 18 enquêtes, 4 en discipline et 14 dossiers. Donc, nous, on évalue ça à 3 jours de travail pour le comité des plaintes. Trois jours. On parle par année, là.

M. Paradis (Régis): Pour l'ensemble, c'est étonnant. Je ne connais vraiment pas votre formule de calcul, mais ça m'étonne extrêmement, finalement, que vous puissiez en arriver à une journée...

M. Savoie: On arrive à trois jours.

M. Paradis (Régis): ...à un nombre de jours si peu élevé.

M. Savoie: Oui, mais disons qu'il y en a 18 qui sont retenus par le syndic. Ça fait 18 enquêtes.

M. Paradis (Régis): Là, il nous semble qu'on n'a pas les mêmes chiffres parce que, nous, nulle part, on n'a ce chiffre-là. Si on prend au cours de l'année 1992-1993, par exemple, bien que l'année ne soit pas terminée, nous avons déjà reçu des plaintes écrites, 34, et il y en a 29 qui ont été retenues pour enquête. Et, au moment où on se parle, il y en a 7 qui ont été déposées devant le comité de discipline. Donc, 29. Il faut maintenant... Pour le comité de plaintes, là où ça l'intéresse, le comité de plaintes, c'est 29 moins le nombre qui a été déposé au comité de discipline, où on arrive à 22. Donc, 22 pour une année, ça nous apparaît au moins un minimum de 10 rencontres du comité de discipline, M. le ministre. Donc, c'est impossible qu'il n'y ait que 3 journées de travail, absolument impossible.

M. Savoie: Oui. Je vais vous donner les données selon votre rapport annuel. Vous aviez, par exemple, les demandes reçues, informations et enquêtes: en 1990-1991, 29; 1991-1992, 32. Demandes retenues pour enquête: 18 en 1990-1991 et 21 en 1991-1992. Plaintes portées devant le comité de discipline: 4 et 3.

Donc, si le comité des plaintes devait siéger, il devrait retenir les demandes reçues, informations et enquêtes. Selon votre rapport, il y en a 32 pour 1991-1992 et 29 pour 1990-1991. Ça, c'est les demandes reçues, ce n'est pas les demandes retenues, là. Donc, c'est ça qu'on dit, là, on parle de 3 jours par année, en gros, qui pourraient être examinés par le syndic. Mettons que, dans le 29, 32, ça exclut des téléphones qui pourraient peut-être se rendre au comité des plaintes une fois que le mécanisme va être un petit peu plus connu, mettons-le à 70 et arrivons avec 10 jours de travail, pour le comité des plaintes, par année, c'est une journée par mois.

M. Paradis (Régis): Mais, M. le ministre, je trouve extrêmement étonnant que vous arriviez à des chiffres comme ça. Je vous ai fourni des exemples, tout à l'heure, où un règlement pour adoption, quand c'était porté à l'attention de l'Office, prenait jusqu'à trois et quatre ans; et là vous me dites que, chez nous, finalement, les corporations, ça pourrait aller très rapidement, qu'en trois ou quatre jours on pourrait régler le tout. Donc, ça m'apparaît extrêmement étonnant que, dans un cas, les délais soient si longs et que, pour nous, on pourrait faire si rapidement. Alors, finalement, il y a une dichotomie là-dedans, là, qui m'étonne un peu de votre part, je dois vous avouer.

M. Savoie: Alors, là, on s'en va sur les règlements, si je comprends bien, là. On change de dossier.

M. Paradis (Régis): Non. Bien non, mais je pense...

M. Savoie: Oui. Ha, ha, ha!

M. Paradis (Régis): ...que ça méritait d'être souligné, quand même.

M. Savoie: oui, c'est vrai qu'effectivement il y a des dossiers, il y a certains dossiers de règlement qui, dans certains cas, peuvent prendre deux ans, trois ans, lorsqu'il faut refaire la rédaction à quelques reprises, les échanges, tout ça, lorsqu'il y a une contestation, on doit le réviser, des fois. mais la majorité des règlements, certainement depuis trois ans, depuis que je suis là, disons, la majorité, on pourrait peut-être parler de 90 % des dossiers qui sont réglés facilement, à l'intérieur de quoi...

Une voix: De six à huit mois.

M. Savoie: De a à z, là, du début à la fin, là, six mois, y compris la publication, là; sept mois, la majorité. En tout cas, il y a des exceptions, vous avez raison qu'il y a des exceptions, mais on ne peut pas fonctionner sur des exceptions. On comprend vos critiques au niveau du comité des plaintes et vos hésitations là-dedans, mais il faut bien comprendre que jamais, jamais on ne voudrait arriver au niveau de votre ordre et imposer un fonctionnement de 100 000 $, là, comme on pourrait le laisser croire ici à cette commission. Jamais! Ce n'est pas compliqué, la réponse, c'est non. On prévoit bien moins que ça. C'est parce qu'on cherche, là, finalement... Je pense que c'est un petit peu comme... C'est moins poussé que l'échange que nous avons eu, par exemple, avec les infirmiers-infirmières. On avait dit qu'il y aurait contact pris pour, justement, clarifier les chiffres, parce qu'on ne veut pas faire ce genre d'échange là si ça doit donner ce résultat-là.

Avec vous, ce que je suis en train de vous dire, c'est que je suis en train de chercher à vous démontrer que, finalement, c'est beaucoup plus léger que vous ne pensez, comme structure; mais on la veut efficace. C'est sûr qu'il y a des coûts, là. Je ne dis pas qu'on va vous envoyer un chèque, là. Je dis qu'il y a un coût, mais le coût n'est pas énorme, il est minime.

M. Paradis (Régis): Oui. On n'est pas d'accord, évidemment, sur votre estimé des coûts. Ce qu'il faut retenir également, M. le ministre, c'est que les plaintes,

on ne choisit pas d'où elles proviennent. Elles peuvent aussi bien venir du Bas-Saint-Laurent, de la Gaspésie, de la Côte-Nord, de l'Abitibi-Témiscamingue, ou autres. Donc, le syndic, il a affaire à se déplacer jusqu'à deux et trois fois, justement, imaginez-vous, et, par la suite, le comité des plaintes... Encore une fois, on manque d'information. On ne le sait pas, justement, d'où vont provenir ces gens-là. Il va falloir également payer pour le déplacement, la main-d'oeuvre additionnelle pour tout ça, l'expertise au niveau juridique. Donc, on en arrive très facilement...

Et, si on en a 22, comme en 1992-1993 — on n'a pas terminé l'année, mais, quand même — on arrivait à 22 plaintes qui seraient soumises au comité des plaintes, réunissez-les, je ne sais pas, moi, pour deux plaintes à chaque mois ou quelque chose, bon, on arrive pratiquement avec un comité administratif parallèle, là; à peu près le même rythme, ou presque, finalement, de réunion. Alors, multipliez maintenant les coûts. On ne sait pas qui va siéger là-dessus. Si c'est des gens qui gagnent 150$, 200$ par jour, il va falloir les... Bien, dans certains cas, ça arrive, ça existe; il va falloir évidemment payer pour cela, les déplacements également. Alors, finalement, je peux difficilement être d'accord, M. le ministre, avec l'évaluation et l'estimé des coûts que vous en faites...

M. Savoie: D'accord.

M. Paradis (Régis): ...tant au niveau monétaire que...

M. Savoie: Oui.

M. Paradis (Régis): ...que de jours.

Le Président (M. Hamel): Alors, voici, la période d'échanges avec le côté ministériel est maintenant terminée. Je laisserai la parole à Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Merci, M. le Président.

Alors, je souhaite la bienvenue, évidemment, à la Corporation professionnelle des infirmières et infirmiers auxiliaires du Québec. Je voudrais vraiment qu'on recentre le débat sur la protection du public. Quand on se parle de protection du public, je ne pense pas que ce soit un concours d'efficacité à calculer si vous avez 70 demandes, qu'il y en a 20 qui ont été acceptées au comité de discipline, et que, là, il y en a 50, et que vous allez pouvoir les faire en 5 jours ou en 10 jours. Je ne pense pas que ce soit ce que le public souhaite quand il parle de protection du public. (16 h 40)

Lorsque le Protecteur du citoyen et les associations de consommateurs sont venus nous parler de protection du public, ce qu'ils dénonçaient au niveau de l'avant-projet de loi, ce n'était pas ces coûts. Ce qu'ils dénonçaient, c'est qu'ils disaient que cette structure-là n'apportait pas la protection du public qu'ils souhaitaient. Alors, c'est un élément, évidemment, les coûts que vous risquez de subir, mais je ne voudrais vraiment pas que, au niveau de la protection du public, on se laisse éloigner sur cet élément-là.

Je voudrais qu'on revienne à un de vos éléments que vous aviez bien ciblés et qui n'étaient pas une question de coûts, à la page 9. Quand on parle de protection du public, on ne peut pas permettre que certains professionnels puissent être exclus de l'application du Code des professions. Je pense que ça, c'est un élément majeur dont on n'a pas tenu compte au niveau de l'avant-projet de loi, mais vous parlez vraiment de protection du public. Et ça, ça aurait été intéressant que l'avant-projet de loi, lui aussi, soit conscient à ce niveau-là.

Vous nous avez également parlé de l'importance du rôle de l'Office, de redéfinir le rôle de l'Office si on veut un système efficace. Et, si on veut, toujours dans le but d'assurer la protection du public, que l'Office puisse remplir son véritable rôle de surveillance au niveau des corporations professionnelles, nous devrons, évidemment, nous interroger et essayer d'établir le rôle de l'Office des professions. Et ce n'est pas évident que les nouveaux rôles qu'on donne à l'Office des professions dans l'avant-projet de loi vont lui permettre de bien faire son rôle de surveillance auprès des corporations professionnelles, puisqu'on déborde et que, vous nous l'avez bien dit, au niveau des règlements, lorsqu'on se parle d'attente de trois ans, de quatre ans, ce n'est pas évident qu'à ce moment-là on se parle de protection du public et d'efficacité.

Vous avez fait certaines suggestions intéressantes. Vous nous avez souligné aussi un problème qui n'a pas été abordé beaucoup dans cette commission, c'est-à-dire la délégation d'actes. Vous nous dites, en page 10: Ce mécanisme de délégation d'actes, initialement prévu pour assurer une meilleure protection du public et pour intensifier la collaboration interprofessionnelle, a plutôt permis à certaines corporations de raffermir leurs pouvoirs au détriment de l'efficacité collective. Alors, au niveau de la délégation d'actes, vous souhaitez une réflexion; vous souhaitez qu'il y ait l'élaboration de nouvelles définitions. Est-ce que vous pouvez clarifier un petit peu les intentions à ce sujet-là?

M. Paradis (Régis): Certainement. Ce qu'on veut, essentiellement, c'est que puisse être élargi... Et je pense, également, que la question est excellente et je voudrais revenir sur ce que vous disiez aussi, c'est que, nous aussi, on déplore extrêmement et énormément, finalement, que la consultation dans l'avant-projet de loi n'ait pas porté sur autre chose que l'avant-projet de loi que nous connaissons et le financement. Je pense qu'on aurait pu, effectivement, regarder les rigidités interprofessionnelles qui sont posées par le Code, actuellement. Je pense que, dans ce sens-là, on aurait pu aussi tenter de les rendre plus transparentes, parce que, évidem-

ment, c'est une volonté du Code.

Maintenant, effectivement, je veux revenir, essayer de clarifier au niveau de la pratique professionnelle des infirmières auxiliaires. Alors, Mme la députée, il y a à peine une dizaine d'années, les infirmières auxiliaires étaient autorisées à poser 102 actes infirmiers professionnels. Avec des règlements et des règlements de délégation, on est venu restreindre de façon tellement importante, à cause d'une déqualification, d'une perte d'autonomie et autres, qu'on en arrive justement à 16 actes infirmiers seulement que peuvent poser... C'est un gaspillage de main-d'oeuvre éhonté et énorme qui, comme on le soulignait à la commission parlementaire sur la dette publique, coûte extrêmement cher à l'État. On dit qu'il est venu le temps, 13 ans après l'adoption de ce règlement-là, il est grandement temps, justement, de le réviser.

Il y aurait des façons relativement simples, à mon humble avis, de le réviser. Il faudrait qu'il y ait des possibilités de concertation, de conciliation s'il le faut, et, nous, nous sommes tous ouverts à cela bien évidemment, mais il faut à tout prix que... D'ailleurs, des spécialistes se sont déjà penchés sur la question, soit Gilles Dussault de l'Université de Montréal en 1983, et il disait, déjà trois ans après l'adoption des règlements, que ça ne fonctionnait pas et ça ne fonctionnera jamais parce que les corporations qui délèguent veulent essentiellement raffermir leur mainmise, leur tutelle, enfin, sur les corporations qu'elles se font déléguer. Et, dans ce sens-là, je pense qu'on pourrait économiser énormément d'argent. On en parle, de rationalisation, tout le temps, bien que, dans ce cas-ci, comme je le mentionnais, on ne parle pas de rationalisation, on parle de transfert des coûts. Bon.

Mais, ceci dit, je pense qu'il y aurait énormément d'économies à faire si on pouvait, et si l'avant-projet de loi l'avait prévu, réviser les mécanismes de délégation d'actes.

Mme Caron: Au niveau des relations interprofessionnelles, qui devra avoir cette responsabilité-là, à votre avis? Est-ce que ce serait plutôt au niveau du Conseil interprofessionnel, au niveau de l'Office, au niveau du gouvernement?

M. Paradis (Régis): Je pense, savez-vous, que les trois pourraient mettre l'épaule à la roue et je pense qu'effectivement ça ferait peut-être un heureux mélange pour en arriver à un résultat satisfaisant. Je pense que l'Office des professions pourrait jouer un rôle important là-dedans, et ils l'ont déjà d'ailleurs à l'intérieur de leur mandat, bien que ce ne soit pas très, très efficace. Il est certain que le gouvernement pourrait avoir un peu plus de volonté politique là-dessus, et non seulement de la volonté, mais aussi poser des gestes politiques parce que, comme je le disais déjà, on présume que le courage, ils l'ont déjà. Alors, reste maintenant la volonté et les gestes.

Mme Caron: Vous avez répondu à une question que j'ai posée à quelques corporations professionnelles, c'est à savoir si elles étaient prêtes à remplacer un de leurs membres sur le comité de discipline par un membre du public. Alors, vous avez été très clairs là-dessus. Vous êtes en accord avec ça.

Du côté de l'assistance, vous parlez évidemment du problème du secrétaire du comité de discipline pour apporter assistance à la personne qui désire déposer une plainte. Je comprends votre argumentation, mais je considère aussi qu'il faut qu'on apporte une assistance au plaignant. Qui devrait apporter cette assistance, selon vous? On sait que c'est dans plusieurs cas... Bon, on a 25 % d'analphabètes au Québec, on sait qu'il y a aussi des personnes qui ne sont pas familières. Lorsque tu déposes une plainte pour la première fois, ce n'est pas évident. Ce n'est pas évidemment facile. Lorsqu'il y a aussi... Il y a eu le regroupement pour les personnes qui ont des difficultés au niveau de la santé mentale qui nous disent que, là aussi, il y a des plaintes à déposer, qu'il y a besoin d'assistance. À qui pourrait-on confier ce rôle d'assistance?

M. Paradis (Régis): Me Beaudoin va vous répondre là-dessus, Mme la députée.

Mme Beaudoin (Monique): On ne s'est pas vraiment penché, soit dit en passant, sur qui pourrait aider, mais on est d'accord que les plaignants privés soient aidés effectivement. Sauf que le secrétaire, lui, devrait rester neutre dans les circonstances. Ça pourrait être un personnel de l'Office des professions, ça pourrait être... Il y a plusieurs moyens, j'imagine, d'arriver à une solution.

Mme Caron: Mais vous n'avez pas d'objection.

Mme Beaudoin: Non. On n'a pas du tout d'objection.

Mme Caron: Vous nous avez également fait part de certaines recommandations au niveau des amendes. Alors, je pense que ça aussi c'est intéressant, et c'était partagé par quelques corporations professionnelles. Vous nous avez également parlé de recommandations concernant le projet de loi 67. C'est évidemment, vous l'avez dit, la tribune que vous devez utiliser, puisqu'il n'y aura probablement pas d'autres tribunes pour faire part de vos commentaires à ce sujet-là. J'avoue que je partage votre analyse au niveau de la loi 67 concernant le financement parce que je pense que le gouvernement doit conserver un rôle de protection du public et ne peut se dégager complètement de son rôle et que, se dégager complètement financièrement, c'est aussi se dégager de son rôle, alors qu'il ne s'en dégage pas au niveau de la protection des consommateurs pour l'achat des biens. (16 h 50)

On sait que l'Office de la protection du consom-

mateur coûte 14 000 000 $, que l'Office des professions coûte 3 500 000 $. Donc, au niveau des services professionnels, je pense qu'on devrait plutôt essayer, tel que vous en avez fait part dans votre mémoire, de se recentrer sur le rôle, le mandat de l'Office des professions, quitte à ce que ça amène certaines coupures, mais que ça devienne très efficace, plutôt que de se dégager complètement de cette nécessité de protéger le public, je pense, au niveau du gouvernement. Alors, vos commentaires sur ce sujet-là, je vous avoue que je les partage amplement.

Parmi vos recommandations, vous nous proposez, en première recommandation, une analyse sérieuse du système professionnel en place, donc qui tiendrait compte des éléments qui n'ont pas été pris en compte au moment de Favant-projet de loi, et qu'une consultation générale soit tenue avant de procéder à toute modification importante. C'est évident que le ministre nous a clairement indiqué à quelques reprises que, pour lui, la consultation générale, elle a eu lieu. Donc, pour répondre à cette recommandation, comment vous voyez l'application d'une consultation générale? Est-ce que ce serait plutôt un groupe de travail, une table de travail qui regrouperait autant corporations professionnelles que consommateurs, que Protecteur du citoyen, Office, gouvernement?

M. Paradis (Régis): M. Thériault va commenter, madame.

M. Thériault: II y a des éléments d'insatisfaction de part et d'autre. M. Paradis parlait de la question de délégation d'actes. On a soulevé d'autres éléments du problème. Lorsqu'on parle de consultation générale, ça peut prendre la forme d'un livre blanc, par exemple. Ça peut prendre la forme d'un livre blanc qui nous propose une vision renouvelée du système professionnel. Je veux simplement rappeler un commentaire qu'a fait M. Cas-tonguay lorsqu'il s'est présenté devant la commission: ce qui avait présidé à la mise en place du Code, à un moment donné, c'était de regrouper sous un organisme parapluie, qui est le Code, des professionnels qui étaient rattachés à différents ministères.

Ce même phénomène existe encore aujourd'hui. Regardons l'Inspecteur général des institutions financières avec la Loi sur les intermédiaires de marché, comme exemple. Ces gens-là doivent fonctionner de la même façon que les professionnels qui sont régis par le Code. Donc, il y a encore des exceptions aujourd'hui. Est-ce qu'on veut les maintenir ou est-ce qu'on veut... Donc, dans l'ensemble il y a un ensemble de problèmes qu'on peut revoir. Je me dis: Après 20 ans d'existence, il y a peut-être lieu de revoir le système professionnel, pas dans le sens de remettre, parce que l'expérience nous démontre qu'il a offert un bon service à la population du Québec dans son ensemble... Il y a peut-être des choses à corriger, à modifier, et de proposer une révision renouvelée, et ceci, peut-être le livre blanc pourrait être une démarche intéressante pour permettre le temps de regarder et considérer les éléments qui y sont et de générer les discussions et une synergie qui entoure le système professionnel.

Mme Caron: Je pense que vous avez raison là-dessus. D'ailleurs, au niveau de la même commission, lorsqu'on a fait l'étude du réseau collégial qui a lui aussi 20 ans, on arrivait aux mêmes conclusions à l'effet qu'on devrait avoir une vision globale, et non d'essayer de transformer le système par petits secteurs, par petits changements, sans vérifier les incidences de ces changements-là.

Mme la Présidente, si vous le permettez, je permettrais à ma collègue des Chutes-de-la-Chaudière de poser quelques questions.

La Présidente (Mme Hovington): Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière, vous avez la parole.

Mme Carrier-Perreault: Oui, je vous remercie, Mme la Présidente.

Une toute petite question. Je voudrais revenir, moi, à l'aspect de la réglementation. Voyez-vous, le dossier des corporations, c'est un dossier que, moi, personnellement, je connaissais très peu. Je commence à me familiariser un petit peu plus avec ce dossier-là, mais il y a des bouts qui m'échappent. J'entendais le ministre tantôt qui nous disait qu'il y avait eu une grande amélioration, que, normalement, les règlements sont produits en six, ou sept, ou huit mois, a-t-il dit il y a quelques minutes. Pourtant, moi, je peux vous dire que, depuis qu'on est ici, on a entendu toutes sortes de délais différents et vraiment dans le même sens que vous. C'a commencé avec la Corporation professionnelle des médecins. M. Roy nous a parlé, à ce moment-là, de quatre ans, six ans ou quelque chose comme ça, avant que le règlement proposé par la Corporation aboutisse et finisse par paraître dans la Gazette officielle.

Moi, j'aimerais savoir vraiment comment ça fonctionne. Qu'est-ce qui se passe à partir du moment où la Corporation dépose le règlement. Vous l'envoyez à l'Office? Est-ce que vous avez des communications? Est-ce qu'on vous donne un suivi constant de l'évolution ou du cheminement, si on veut, de votre réglementation? Et, compte tenu que, vous autres, vous en avez un depuis trois ans... En fait, il a fini par paraître en octobre dernier, mais j'aimerais savoir s'il a été réécrit au complet, ce règlement-là? Est-ce qu'il y a des changements majeurs généralement quand on aboutit avec le règlement en bout de ligne?

M. Paradis (Régis): Me Beaudoin va vous répondre là-dessus, Mme la députée.

Mme Beaudoin: Alors, deux des règlements dont on parle qui ont pris trois ans, c'était une réécriture

complète. Celui sur l'inspection professionnelle qui, maintenant, dépasse les trois ans et qui n'a pas été publié du tout, c'est quelques modifications seulement. Alors, vous voyez, ce n'est pas vraiment standard, là. Celui-là a vraiment, je ne sais pas, je ne me souviens plus par coeur, là, mais quelques articles modifiés dans le règlement, et ce n'est pas une réécriture complète. Je ne sais pas où c'est rendu. On a, voyez-vous, un suivi de la réglementation qui arrive, je pense, aux trois mois, ou mensuellement, aux trois mois, et on nous donne ici... Bien, il y a des colonnes, là. C'est ce qu'on reçoit, là, comme suivi de la réglementation. Alors, on nous dit où c'est rendu.

Mme Carrier-Perreault: À tous les trois mois, vous dites que vous recevez un document...

Mme Beaudoin: Un document qui s'appelle... Mme Carrier-Perreault: ...de l'Office. Mme Beaudoin: Oui.

Mme Carrier-Perreault: C'est l'Office qui vous fait parvenir ça.

Mme Beaudoin: C'est ça, qui s'appelle: «Suivi de la réglementation», où on met des notes dans les colonnes où le règlement est rendu, sauf que, dans la colonne «Suivi», là, il n'y a pas beaucoup de détails. Avant que les publications paraissent, on ne sait pas toujours où c'est rendu quand c'est là-bas. On sait que c'est adopté par chez nous, et que c'est transmis, et, après, ça revient dans les versions anglaise et française — on doit adopter les deux versions, maintenant — et ça retourne à l'Office. Après ça, ça va un peu plus rapidement, c'est les publications. Là, ça se déroule dans les... Dans l'année, on réussit à avoir le règlement. C'est avant que c'est long.

Mme Carrier-Perreault: Le suivi se fait sur un formulaire. Est-ce que, par rapport à ce formulaire-là, vous voyez, je ne le sais pas, moi, l'évolution? Vous dites que ça fait trois ans, presque quatre ans que vous en avez un...

Mme Beaudoin: Non.

Mme Carrier-Perreault: ...avec des modifications mineures, là, vous avez l'air de me dire.

Mme Beaudoin: II y a quelques détails, je peux vous lire. C'est marqué: Vérification version anglaise transmise par courrier. Alors, on sait qu'il y a une vérification de la version anglaise qui est en train de se faire. Mais c'est long, ces processus-là, c'est très long. Vous voyez, le plus court... Au début, en 1987, on a transmis un projet de règlement pour modification, très, très simple: un article qui a été abrogé, un seul dans un règlement...

Mme Carrier-Perreault: II a été abrogé.

Mme Beaudoin: Abroger un article, une disposition seulement dans un règlement, et c'a pris un an et demi. Mais il n'y avait pas de point majeur, il n'y avait rien; juste l'abrogation d'un article, et ça a pris un an et demi, à ce moment-là.

Mme Carrier-Perreault: Ça veut dire qu'il n'y avait pas, à ce moment-là, de négociation intercorporations, il n'y avait pas...

Mme Beaudoin: II n'y avait rien. On n'a pas su qu'est-ce qui s'était passé. Les délais sont longs, et on ne sait pas vraiment pourquoi.

La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup. Alors...

Mme Carrier-Perreault: Merci.

La Présidente (Mme Hovington): ...c'est la fin de cette période. Merci au nom des membres de la commission de l'éducation d'être venus nous présenter votre mémoire qui fut très apprécié.

Une voix: ...

La Présidente (Mme Hovington): Merci bien. Alors, j'appellerai maintenant l'Ordre des techniciens en radiologie du Québec à bien vouloir prendre place, s'il vous plaît.

Je ne voudrais pas bousculer personne, mais je voudrais bien, s'il vous plaît, respecter l'horaire. Alors, j'appellerais maintenant l'Ordre des techniciens en radiologie du Québec à bien vouloir prendre place.

Bon, alors, j'ai une demande de suspension urgente de deux minutes. Je m'excuse.

(Suspension de la séance à 17 heures)

(Reprise à 17 h 2)

La Présidente (Mme Hovington): La commission reprend ses travaux avec l'Ordre des techniciens en radiologie du Québec, représenté par M. Michel Vail-lancourt, qui est le président. Bonjour, M. Vaillan-court.

M. Vaillancourt (Michel): Bonjour, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Hovington): Voulez-vous nous présenter votre collègue?

Ordre des techniciens en radiologie du Québec (OTRQ)

M. Vaillancourt: Certainement. Alors, ça me fait plaisir de vous présenter M. Alain Cromp, directeur général de l'Ordre des techniciens en radiologie, ainsi que moi-même, Michel Vaillancourt, président de cette même corporation.

La Présidente (Mme Hovington): Alors, bonjour et bienvenue à la commission de l'éducation.

M. Vaillancourt: Merci.

La Présidente (Mme Hovington): Vous avez 20 minutes pour nous faire part de votre mémoire.

M. Vaillancourt: D'accord, Mme la Présidente. Alors, Mme la Présidente de la commission, M. le ministre, Mmes et MM. les membres de la commission de l'éducation, je tiens tout d'abord à vous remercier de nous avoir offert l'opportunité de vous présenter les commentaires et les recommandations de l'Ordre des techniciens en radiologie du Québec sur l'avant-projet de loi modifiant le Code des professions.

D'entrée de jeu, nous tenons à vous donner un aperçu de qui nous sommes. Le premier regroupement officiel des techniciens en radiologie remonte à 1941, alors qu'était créée, par lettres patentes, la Société des techniciens en rayons X de la province de Québec. En 1961, le législateur constituait en corporation, par l'adoption d'une loi privée, la Société des techniciens en radiologie médicale du Québec. Plus près de nous, dans la foulée de l'adoption du Code des professions, le gouvernement créait l'Ordre des techniciens en radiologie du Québec et lui conférait le champ exclusif de pratique que nous lui connaissons encore aujourd'hui. l'ordre compte, maintenant, 3500 membres, dont 90 % sont des femmes et dont 85 % oeuvrent en milieu hospitalier. il est aussi important de noter que tous les techniciens en radiologie sont des salariés. les techniques radiologiques couvrent trois champs distincts d'application, soit le radiodiagnostic, où nous connaissons 3000 membres, la médecine nucléaire, 350 membres, et la radio-oncologie, 150 membres. nous sommes donc une corporation modeste quant au nombre de professionnels, mais, malgré cela, nous estimons jouer pleinement notre rôle de protection du public.

Donc, en 1973, le gouvernement du Québec, par l'adoption du Code des professions, offrait à la population du Québec un nouveau contrat professionnel. Tout en précisant et en maintenant le principe de l'autogestion des professionnels, le Code des professions prenait une orientation résolument nouvelle et originale, celle de la protection du public. Il est certes normal qu'après 20 ans de fonctionnement du système, une évaluation soit rendue nécessaire. Il ne faudrait pas perdre de vue que le système actuel, malgré quelques accidents de par- cours, a démontré une très bonne performance. Ce système fait aussi l'envie de nos voisins canadiens et américains et est souvent cité en exemple pour son avant-gardisme et son originalité.

C'est dans ce contexte que l'Ordre des techniciens en radiologie du Québec propose d'effectuer des modifications et ajustements qui sont devenus nécessaires, sans toutefois rompre l'équilibre actuel de ce système, fruit d'une vingtaine d'années d'efforts et de compromis de toutes les parties intéressées. À cet égard, nous partageons avec le législateur un grand nombre de préoccupations qui ont été retenues dans l'avant-projet de loi. Notre corporation a pu remplir son rôle de protection du public sans difficultés majeures. À cet égard, nous souhaitons porter à votre attention les différentes actions menées par l'Ordre des techniciens en radiologie en cette matière.

Dans le cadre de notre programme d'inspection professionnelle, entre 1986 et 1992, nos inspecteurs ont rencontré dans leur milieu respectif près de 2800 de nos membres. Ces inspections ont donné lieu à plusieurs types de recommandations qui ont permis d'améliorer la qualité des actes posés par nos professionnels. Actuellement, ayant complété une vérification de l'ensemble des techniciens en radiologie, nous développons de nouveaux outils d'inspection qui nous permettront, nous en sommes convaincus, d'améliorer le processus général d'inspection, d'assurer un meilleur suivi des recommandations faites et d'aider encore davantage nos membres à parfaire leur exercice professionnel.

En matière de formation continue, l'Ordre a aussi développé un programme souple et varié d'activités de perfectionnement qui sont offertes sous forme de cours ou de sessions intensives. Depuis 1984, près de 1600 techniciens en radiologie se sont inscrits à ce programme. Plus concrètement, au cours de cette même période, nous avons enregistré 3678 inscriptions à des cours et 384 à des sessions intensives de formation. S'ajoute à cela une participation annuelle d'environ 500 techniciens en radiologie aux activités scientifiques de notre congrès et aux colloques régionaux.

Il est intéressant de souligner ici qu'en quelques occasions l'Office des professions, par la voix de son président, a noté l'excellence du travail accompli par l'Ordre des techniciens en radiologie dans les champs de l'inspection professionnelle et de la formation continue. En plus de ces deux volets importants de la protection du public, l'Ordre assure aussi la compétence de ses membres par un contrôle rigoureux de l'admission à la profession. En ce sens, nous exigeons — et cela depuis 1961 — la réussite des examens d'admission pour tous les candidats à cet exercice professionnel.

Passons maintenant à un autre élément important de la protection du public qui captive au plus haut point l'intérêt de cette commission, la discipline. Si l'on observe les statistiques de l'Ordre des techniciens en radiologie, on constate que le nombre de demandes d'enquête est relativement bas. Ainsi, en 1989-1990, 5

demandes ont été faites et aucun cas n'a été porté en discipline; en 1990-1991, 3 demandes, aucun cas n'a été porté en discipline; en 1991-1992, 5 demandes, 3 cas ont été portés en discipline, et finalement, en 1992-1993, 10 demandes d'enquête ont été faites. À ce jour, 1 cas a été porté en discipline et 6 dossiers demeurent à l'étude par le syndic. Nous croyons que ce nombre relativement peu élevé de demandes d'enquête s'explique par de multiples facteurs. en premier lieu, nous soumettons que les actions préventives liées à l'inspection professionnelle et à la formation continue portent fruit. deuxièmement, les services offerts par nos membres étant défrayés par l'état, il ne peut y avoir de litige portant sur des honoraires. finalement, 85 % de nos membres pratiquent leur profession en centre hospitalier où nous savons tous qu'il existe plusieurs mécanismes de règlement des plaintes.

Dans un autre ordre d'idées, mais toujours en matière de protection du public, nous désirons également attirer votre attention sur le fait que, depuis 1976, l'Ordre a contracté pour ses membres une police d'assurance-responsabilité professionnelle dont les limites vont au-delà des exigences minimales requises par le règlement. Finalement, l'Ordre a mis récemment à la disposition du public dans les centres hospitaliers et les cabinets privés de radiologie plusieurs dépliants qui expliquent aux usagers les services rendus par les techniciens en radiologie. De même, toujours dans un souci de communication avec le public, nous avons développé quelques documents audiovisuels qui précisent différentes facettes des techniques radiologiques.

Alors, comme je le mentionnais précédemment, nous avons rempli sans difficulté majeure notre rôle de protection du public. Nous sommes toutefois conscients que la société québécoise a subi une profonde évolution dans ses habitudes de consommation ainsi que dans les nouveaux rapports qu'elle a développés avec les producteurs de biens et de services. De même, une information plus complète et plus détaillée des droits des consommateurs de services professionnels ont entraîné de nouveaux réflexes et des remises en question du système professionnel actuel. Nous croyons que des modifications législatives devraient être introduites pour répondre à ces nouvelles attentes du public sans toutefois sacrifier ou réduire le principe de l'autogestion. (17 h 10)

Ainsi, nous partageons l'idée de voir davantage notre corporation à l'écoute du public consommateur afin de rendre plus transparente notre mission de protection du public. Nous souscrivons aussi sans réserve à l'idée de rendre le système professionnel plus souple et plus efficace. Cet objectif doit être atteint. Dans ce contexte et en première analyse, nous pourrions être favorables à préciser les responsabilités de l'Office des professions, notamment en matière de surveillance des corporations. Cependant, nous sommes tout à fait contre l'idée de transférer des pouvoirs actuels des corporations à l'Office, comme nous nous opposons aussi à ce que l'Office des professions puisse se substituer, d'une manière ou d'une autre, aux corporations professionnelles. Nous ne croyons pas qu'une telle orientation garantirait un système plus souple et plus efficace. Nous croyons, au contraire, que cela risquerait de saper les fondements mêmes du système actuel qui, encore une fois, doit s'ajuster, mais ne pas être sabordé.

Nous souhaitons aussi signaler au législateur notre inquiétude face aux coûts importants qu'engendreraient les modifications structurelles proposées, notamment dans le budget de fonctionnement de l'Office des professions du Québec. Nous croyons que, si des argents supplémentaires doivent être investies pour satisfaire aux exigences nouvelles d'efficacité et de transparence, il sera sans doute plus rentable de le faire là où l'action est essentielle dans les corporations professionnelles.

J'inviterais maintenant M. Cromp à poursuivre la présentation.

M. Cromp (Alain): Alors, dans ce mémoire, nous avons choisi de nous en tenir aux éléments que nous jugions problématiques ou avec lesquels nous sommes clairement en désaccord. Veuillez aussi considérer que nous recevons plutôt favorablement les articles de l'avant-projet de loi que nous avons choisi de ne pas commenter. Voici les principaux éléments sur lesquels nous voulons attirer particulièrement l'attention de la commission.

Concernant la composition de l'Office, nous sommes en accord avec l'intention du législateur d'augmenter la crédibilité de l'Office en y ajoutant la contribution de non-professionnels pour siéger au sein du conseil d'administration. Nous trouvons toutefois que la répartition des membres, proposée au deuxième alinéa de l'article 6, ne fait qu'alourdir l'Office, en plus d'augmenter les coûts de fonctionnement. Nous pensons que le législateur pourrait atteindre le même résultat, tout en maintenant les coûts de fonctionnement, en substituant un des membres actuels par un non-professionnel. Nous recommandons donc que l'Office soit composé de cinq membres, le cinquième membre ne devant pas être membre d'une corporation professionnelle.

Quant au pouvoir de l'Office, nous nous objectons au pouvoir confié à l'Office d'adopter un règlement au nom d'une corporation. Nous croyons que l'Office pourrait avoir recours à des mécanismes de pression pour obliger les corporations à adopter les règlements qu'elles doivent adopter, mais, en aucun cas, l'Office ne devait avoir la possibilité de se substituer à elle.

De plus, nous nous objectons au cinquième paragraphe de l'article 12 relativement à la conservation des dossiers, parce que cela constitue une atteinte à l'autonomie des corporations professionnelles. Nous considérons que l'Office devait avoir le mandat de s'assurer que les corporations professionnelles adoptent un tel règlement, mais non pas dicter un tel règlement aux corporations.

Concernant le formulaire des plaintes, nous acceptons l'idée de mettre à la disposition du public un formulaire de plainte tel que proposé aux articles 122 et 126. Nous désirons toutefois que la rédaction d'un tel formulaire demeure l'entière responsabilité de chaque corporation, ceci afin de s'assurer que les informations pertinentes propres à chaque profession soient comprises dans le formulaire. Nous recommandons que l'Office ait comme mandat de veiller à ce que chaque corporation établisse et rende disponible un formulaire de demande d'enquête pour les plaignants.

Relativement à la tutelle de l'Office, nous mettons le législateur en garde devant un tel pouvoir octroyé à l'Office. Dans un premier temps, nous considérons comme essentiel que la corporation puisse être entendue au même titre que l'Office avant que le gouvernement décide de placer celle-ci sous le contrôle de l'Office des professions. Le libellé actuel de l'article 14 ne permet pas, selon nous, une analyse juste et équitable d'une situation problématique soulevée par l'Office auprès du gouvernement. De plus, nous nous interrogeons sur le rôle que pourrait jouer l'Office lorsque celui-ci se substituerait au comité d'inspection professionnelle ou au syndic d'une corporation. Il est totalement inconsidéré de penser que l'Office peut, entre autres, se substituer au comité d'inspection professionnelle d'une corporation.

Nous recommandons au législateur de mettre en place une procédure permettant aux corporations, à propos desquelles l'Office déposerait un rapport défavorable au gouvernement, d'être entendues par le gouvernement avant qu'une décision finale soit rendue. Nous nous opposons également fortement à la possibilité pour l'Office de se substituer au comité de discipline, au syndic ou au comité d'inspection professionnelle. Nous considérons également comme essentiel que le gouvernement établisse des indications quant à la durée de la tutelle ainsi que les motifs précis pouvant conduire à une telle tutelle de l'Office.

Concernant la notion de maître de stage, nous sommes fortement préoccupés par l'intention du législateur concernant l'ajout de l'article 34, 3e paragraphe. Nous nous questionnons sur la portée d'une telle disposition relativement à la protection du public. Nous nous voyons dans l'obligation de souligner au législateur que les maîtres de stage en radiologie enseignent la pratique de la profession en milieu clinique sur des êtres vivants à l'aide de radiations ionisantes ou avec des radio-isotopes.

Nous soulignons également au législateur que les maîtres de stage en radio-oncologie utilisent dans leur enseignement pratique de fortes doses de radiations pour traiter les patients. Il est, selon nous, irresponsable de permettre une exception afin que les enseignants, et plus particulièrement les maîtres de stage, puissent poser des actes réservés à la profession sans être membres de la corporation. Dans l'objectif de protection du public, nous insistons pour que toute personne utilisant la radia- tion sur des êtres vivants soit membre d'une corporation professionnelle afin d'être redevable de ses gestes. Nous devons pouvoir intervenir par le biais de l'inspection ou de la discipline également pour les professeurs et les maîtres de stage.

Concernant les candidats ayant complété leur formation, article 34, paragraphe 7°, nous sommes en désaccord avec cet article. Nous considérons que seuls les candidats en formation devraient faire exception quant à l'obligation d'être inscrits au tableau des membres pour pratiquer la profession ou exécuter des actes réservés au professionnel. La possibilité qu'offre cet article fait en sorte qu'une personne n'étant ni sous la juridiction d'un collège, ni sous la juridiction de la corporation puisse réaliser des examens radiologiques. Que fait-on de la protection du public? Comment le syndic ou l'inspection pourrait-elle intervenir en cas de manquements? Sur la base de quelle assurance-responsabilité le candidat pourrait-il garantir la réclamation d'un patient lésé?

Les candidats ayant complété leur formation collégiale et ayant subi les examens d'admission de la corporation obtiennent leur droit de pratique deux semaines après la séance d'examens. Nous ne croyons pas qu'il soit nécessaire de légiférer pour un faux problème.

Concernant la conciliation des différends, nous questionnons une telle démarche qui ne fait qu'alourdir le travail des corporations professionnelles et multiplier les recours pour les plaignants. Nous voulons rappeler au législateur qu'il existe déjà des mécanismes de conciliation et d'arbitrage des comptes, le syndic, l'inspection professionnelle et le comité d'examen des plaintes proposé dans l'avant-projet de loi. De plus, le plaignant peut également déposer une plainte privée devant le comité de discipline.

Relativement au processus réglementaire, nous sommes d'accord avec l'allégement proposé du processus réglementaire. Toutefois, nous questionnons grandement le libellé de l'article 95.1 qui donne le pouvoir à l'Office des professions d'approuver ou non notre règlement sur l'inspection professionnelle ou sur le perfectionnement.

En utilisant le terme «peut» dans le libellé, l'Office n'est pas tenu de les approuver. Nous souhaiterions que le législateur prévoie, en cas de désaccord entre la corporation et l'Office sur un règlement soumis à son approbation en vertu de l'article 95.1, un mécanisme d'appel pour la corporation. N'oublions pas que l'Office doit s'assurer que les corporations jouent leur rôle de protection, mais non se substituer à celles-ci.

Nous sommes inquiets du pouvoir confié à l'Office dans l'article 95.2. En effet, afin de retarder tout règlement pouvant être adopté par le bureau en regard de l'article 95.2, l'Office n'a qu'à formuler un avis contraire. Encore une fois, nous considérons que le législateur transfère le mandat d'autogestion des professionnels par les professionnels à l'Office des professions. Nous croyons que les corporations professionnel-

les ont atteint la maturité en termes de réglementation et qu'ainsi l'article 95.2 devrait prévoir seulement l'obligation pour les corporations de déposer à l'Office tout règlement adopté en vertu de l'article 95.2.

Le comité des plaintes. Nous sommes favorables à l'idée d'implanter un comité d'examen des plaintes, même si ce comité accroîtra de façon significative les délais et les coûts reliés à l'administration des plaintes disciplinaires. C'est le prix que nous sommes prêts à payer pour assurer la transparence du système disciplinaire. Toutefois, nous émettons certaines réserves quant au mandat suggéré par l'avant-projet de loi. Nous considérons que le mandat du syndic doit demeurer le même, avec toute la latitude actuelle si on veut maintenir le concept d'autogestion du système professionnel par les membres.

Nous considérons comme non conforme à la mission des corporations la substitution du pouvoir de syndic par un comité d'examen des plaintes. De plus, le mécanisme suggéré dans l'avant-projet de loi comporte, selon nous, des incohérences quant au rôle de ce comité. Pourquoi le comité intervient-il seulement lorsque le syndic décide de ne pas porter plainte devant le comité de discipline? Le comité pourrait jouer le même rôle-conseil, selon nous, dans le cas où le syndic souhaite déposer une plainte devant le comité de discipline. Le comité pourrait, alors, valider ou non la décision du syndicat et permettre à celui-ci de rendre la meilleure décision possible.

Nous nous interrogeons, également, sur la procédure qui permettra au comité de se substituer au syndic dans les cas où celui-ci décide de ne pas porter plainte devant le comité de discipline. Si on exige que le syndic dépose une plainte qu'il a préalablement refusée, on peut se demander avec quelle conviction il la défendrait. (17 h 20)

Notre recommandation irait plutôt dans le sens que le comité d'examen des plaintes soit un comité-conseil au syndic. Le comité aurait comme mandat de conseiller le syndic pour tous les cas de plaintes, même celles que le syndic souhaiterait déposer devant le comité de discipline. Nous ne sommes pas favorables à l'obligation du syndic de justifier son temps d'enquête auprès de l'Office et trouvons en plus le délai d'enquête trop court pour être conforme à la réalité. Nous considérons également que le mandat de contrôle du syndic revient aux corporations professionnelles elles-mêmes.

Les articles 23 et 62 du Code des professions sont formels et sans équivoque à cet égard: la corporation a comme mission d'assurer la protection du public. Le bureau est chargé de l'administration générale des affaires de la corporation et de veiller à l'application des dispositions du Code, de la loi et des règlements. Prévoir l'obligation pour le syndic de rendre compte directement à l'Office des professions concernant les demandes d'enquête constitue un changement fondamental à la philosophie du système professionnel actuel auquel nous ne pouvons souscrire.

Nous recommandons que, selon la procédure prévue au troisième alinéa de l'article 123, le syndic bénéficie de 120 jours pour terminer son enquête et qu'à l'expiration d'un délai de 15 jours celui-ci en informe le bureau de sa corporation. De cette façon, le bureau jouerait pleinement son rôle et serait redevable ultime-ment devant l'Office pour son mandat de protection du public.

Nous considérons de plus comme inapproprié le mandat d'assistance confié au secrétaire du comité de discipline pour la formulation d'une plainte privée. Nous croyons que le plaignant privé devrait compléter un formulaire standard de plainte disponible à la corporation ou que celui-ci devrait consulter un avocat pour lui venir en aide. Nous ne croyons pas que le secrétaire du comité de discipline possède les qualifications pour venir en aide au plaignant dans la rédaction d'une plainte contre un professionnel. Il est de plus injuste de soumettre le secrétaire du comité de discipline à l'odieux d'une plainte qui pourrait contenir des erreurs ou des irrégularités et qui pourrait également nuire au plaignant privé.

Finalement, nous considérons injustes pour le professionnel les conditions émises pour que le plaignant privé assume les déboursés dans l'éventualité où le professionnel est acquitté. De notre avis, le comité de discipline doit avoir l'autorité de décider de condamner aux déboursés en tout ou en partie le plaignant privé quand le professionnel a été acquitté. La recommandation contenue dans l'avant-projet de loi ne tient pas compte du fait que, même si la plainte n'est pas de mauvaise foi, il peut arriver que le plaignant augmente les coûts par son attitude ou par ses remises. Dans ce cas, il devrait aussi en assumer les coûts. Cette appréciation doit demeurer sous la responsabilité du comité de discipline.

Merci de votre attention.

La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. Cromp, M. Vaillancourt.

Alors, M. le ministre, vous avez la parole.

M. Savoie: Merci beaucoup, Mme la Présidente.

Tout d'abord, permettez-moi de saluer les membres de la corporation des techniciens en radiologie du Québec. Ce n'est pas la première fois qu'on a l'occasion de les entendre. J'ai déjà eu l'occasion d'échanger, il y a deux ans, sur un dossier fort intéressant. Et ils nous présentent un mémoire qui contient plusieurs recommandations précises quant au projet de loi. On nous propose, par exemple, d'intervenir d'une façon spécifique. Ils nous disent que, pour ce qui n'est pas compris dans les recommandations, on doit présumer qu'il y a un accord de principe au niveau du projet de loi. Mais on trouve l'approche, évidemment, agréable puisque ça se traite facilement et ça nous permet d'en porter une évaluation rapide.

De maintenir la composition de l'Office à cinq membres dont un non-membre d'une corporation profes-

sionnelle, ce n'est pas la première fois qu'on voit ça. Je pense que c'est la deuxième fois ou la troisième fois qu'il nous est présenté un mémoire dans lequel ils disent: Ce n'est pas nécessaire de passer à sept, c'est de le maintenir à cinq, pour des raisons d'efficacité, je présume, ou de coûts.

M. Vaillancourt: D'efficacité et de coûts. En fait, ce sont là les deux éléments qui nous préoccupaient.

M. Savoie: Et, par exemple, de maintenir la composition à cinq, mais, au lieu d'avoir un membre, un non-membre d'une corporation professionnelle, peut-être en avoir deux? Deux sur cinq au lieu de un sur cinq?

M. Vaillancourt: Disons que notre proposition n'allait pas aussi loin que ça.

M. Savoie: Oui. C'est ça.

M. Vaillancourt: Je pense que, si on veut assurer quand même une équité pour les professsionnels, ce serait important qu'au niveau de l'Office des professions il y ait quand même une majorité de professionnels. Alors, on pensait qu'on pouvait atteindre un certain équilibre en plaçant une personne qui serait non-membre d'une corporation.

M. Savoie: Effectivement, c'est une proposition... Le fait d'introduire quelqu'un qui est non-membre d'une corporation professionnelle, de façon générale, ça a été bien reçu. Je pense que la majorité des recommandations ont été favorables, et c'est quelque chose qui a donné, je pense, une bonne orientation à l'ensemble du projet de loi.

Au niveau de la réglementation, vous avez plusieurs recommandations. On en constate un bon nombre. Et ce que vous cherchez, finalement, c'est a établir un mécanisme pour empêcher que les dossiers soient arrêtés au niveau de l'Office, dans le sens que les projets de règlement, au lieu d'être acheminés, comme on le sait maintenant, à travers tout l'appareil gouvernemental, y compris le Conseil des ministres, à ce moment-là, vous, vous dites: Oui, mais, si c'est pour arrêter à l'Office, il faudra avoir un mécanisme d'appel. C'est ça?

M. Vaillancourt: C'est ce que nous avons proposé, oui, effectivement.

M. Savoie: Vous ne sentez pas que ça pourrait être un mécanisme de plus dans le...

M. Vaillancourt: Bien, en fait, si on regarde la répartition, actuellement, dans le système actuel, on avait l'ensemble des règlements qui s'en allait au gouvernement. Alors, dans ce qui est proposé dans Pavant-projet de loi, un certain nombre demeurerait au gou- vernement, un certain nombre d'autres deviendraient dévolus à l'Office des professions. Alors, c'est quant à cette portion-là qu'on dit: Si jamais, pour une raison quelconque, il y a un différend qui oppose une corporation à l'Office des professions et que les deux parties maintiennent leur différend ou leur objection, à ce moment-là, qui va trancher le débat? Et c'est dans ce sens-là qu'on dit qu'il serait souhaitable d'avoir une intervention, possiblement, du ministre ou du gouvernement pour finaliser le...

M. Savoie: Et vous prévoyez quoi au juste, comme mécanisme, là?

M. Vaillancourt: Comment on le voit?

M. Savoie: Oui, le mécanisme d'appel en question.

M. Vaillancourt: Bien, en fait, on n'a pas articulé de chose précise comme telle autour de ça. Ce qu'on souhaitait, c'était d'éviter un imbroglio qui ferait qu'on se ramasserait dans un cul-de-sac éventuellement, et qui serait peut-être non satisfaisant, autant pour l'Office que pour la corporation concernée. Alors, on se disait que l'éventualité d'avoir le législateur, le ministre ou le gouvernement comme étant la personne qui pourrait, en définitive, prendre la décision lorsqu'il n'y a pas d'entente... Mais, évidemment, nous ne pensons pas que ce mécanisme-là pourrait être utile souvent. Ça pourrait arriver, des cas d'exception, mais, si une exception se présentait, on aurait une façon de résoudre la difficulté.

M. Savoie: Alors, vous pensez que, finalement, le ministre lui-même pourrait trancher dans le...

M. Vaillancourt: Oui, c'est un des éléments qu'on croyait possible.

M. Savoie: Oui, moi aussi, je trouve ça. Des voix: Ha, ha, ha!

M. Savoie: Je trouve ça bien intéressant, d'ailleurs. C'est un peu l'orientation qu'on y voyait, justement, pour régler des cas d'impasse.

Au niveau du comité des plaintes, une approche rafraîchissante: tout le monde doit passer au comité des plaintes, pour tout le monde qui est refusé, tous les actes doivent être examinés au niveau du comité des plaintes.

M. Vaillancourt: Remarquez que cette ouverture-là, évidemment, nous la faisons dans le sens qu'on vous a donné tout à l'heure des statistiques qui concernent les demandes d'enquête à l'Ordre des techniciens en radiologie. Alors, il est clair que, dans une situation comme la nôtre, ce serait faisable.

M. Savoie: Ce serait faisable.

M. Vaillancourt: Bon. Peut-être que, dans des corporations qui reçoivent plusieurs centaines de plaintes annuellement, le mécanisme serait plus complexe, mais on pense que ça aurait avantage, quand même, de donner un appui systématique au syndic, une consultation systématique au syndic, parce qu'il y a certaines situations ou certains cas où c'est parfois très difficile de prendre position.

M. Savoie: Non, j'ai trouvé ça intéressant. Je me demande si ça va être aussi populaire avec les infirmiers et infirmières auxiliaires, par exemple.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Cromp: Je voudrais peut-être juste ajouter que l'ouverture qu'on fait à ce niveau-là, c'est toujours dans le sens de dire que le comité, c'est un comité-conseil, et que le syndic reste maître de sa décision. Je pense que la nuance est importante. C'est vraiment un comité qui va conseiller. On a vu, depuis le début de cette commission, que les syndics ont beaucoup de difficultés à rendre une décision. Souvent, ce n'est pas évident, seul à prendre position, et on pense qu'un comité pourrait aider le syndic à prendre sa décision, mais que, ultime-ment, la décision doit revenir au syndic.

M. Savoie: C'est bon, Mme la Présidente. Je vais revenir un petit peu plus tard.

La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. le ministre.

Mme la députée de Terrebonne, c'est à vous.

Mme Caron: Merci, Mme la Présidente.

Alors, bonjour, M. Vaillancourt, M. Cromp. Vous avez fait une étude particulière au niveau des articles, article par article, et, effectivement, ça se travaille très bien. Avant de questionner là-dessus, j'aimerais revenir sur certaines informations que vous avez données, un peu en préambule, dans votre présentation. Vous avez insisté beaucoup sur les moyens que vous avez utilisés pour améliorer, disons, la prévention et la protection du public. Vous nous avez parlé de l'inspection professionnelle, que, de 1986 à 1992, 2800 membres ont été vus sur les 3500, et vous avez ajouté que vous vous êtes dotés de nouveaux outils qui vont vous permettre, là, d'améliorer l'inspection professionnelle. Est-ce que vous pouvez nous faire part de ces nouveaux outils? (17 h 30)

M. Vaillancourt: Tout à fait. Remarquez que ça va être assez technique, mais quand même. En fait, actuellement, jusqu'à tout récemment, notre inspection était basée sur deux parties distinctes, c'est-à-dire une première portion qui était une évaluation de type dépar- temental, c'est-à-dire que, lorsqu'on se rendait dans un service radiologique d'un hôpital quelconque, on faisait une évaluation systématique de la disponibilité des équipements, de tout ce qui pouvait entourer, si vous voulez, les gestes ou les actes de techniques radiologiques qui étaient faits par nos membres. Alors, donc, c'est un volet dit départemental.

Le second volet consistait en une inspection des dossiers, c'est-à-dire que les inspecteurs qui se rendaient sur place visionnaient de façon aléatoire un certain nombre de dossiers radiologiques, variant en nombre évidemment en fonction de l'importance du nombre de membres inspectés, et on s'assurait que des dossiers de tous les membres inspectés étaient présents dans cette cueillette-là.

Quand je dis qu'on est en train de développer des nouveaux outils, un des nouveaux qu'on vient de mettre en place tout récemment, c'est un troisième volet à cette inspection-là qu'on appelle, nous, précisément l'inspection technique, c'est-à-dire que les inspecteurs passent une certaine durée de temps auprès des membres pendant leur exercice professionnel, de visu, sur place. Alors ça, c'est un élément nouveau qui fait que chacune des inspections va augmenter en termes de durée. C'est ce qu'on constate avec cette nouvelle application là qui est mise en place depuis maintenant près d'une année et qui fait en sorte que nos inspecteurs peuvent passer, dans des grands centres, jusqu'à quatre, parfois cinq jours dans le même centre hospitalier. Ça, c'est un des éléments.

Parallèlement à ça, on a revu aussi tous nos outils d'inspection, notamment tout ce qu'on appelle le guide d'inspection, tout ce qu'on appelle aussi une espèce de document qu'on a complété au cours des derniers mois qui est disponible à tous nos membres, qui constitue les éléments principaux de la pratique, comment la corporation fixe ses paramètres d'une bonne pratique. Ça aussi, c'est un nouvel élément qui vient de s'ajouter et il y en aurait quelques autres que je pourrais ajouter.

Mme Caron: Je vous remercie beaucoup. Vous nous avez également parlé de la formation continue, l'importance de l'examen au niveau de l'admission, ce qui n'est pas toujours partagé du côté des universités. L'information du public, vous avez insisté beaucoup là-dessus. Et, évidemment, lorsque vous nous avez parlé de votre système disciplinaire, il y a très peu de plaintes: 1989-1990, 5 plaintes, 0 devant le comité de discipline; 1990-1991, 3 plaintes, 0 devant le comité de discipline; 1991-1992, 5 plaintes, 3 devant le comité de discipline; 1992-1993, 10 plaintes, 1 devant le comité de discipline, à date, et 6 à l'étude. C'est évident qu'il ne peut pas, compte tenu qu'il n'y a pas de litige d'honoraires... Vous l'avez dit vous-même, c'est dans des centres hospitaliers, donc il doit y avoir très peu de plaintes du public comme tel.

M. Vaillancourt: En fait, les plaintes que nous

recevons viennent majoritairement de la part du public, bien entendu. Pour quelle raison elles...

Mme Caron: Mais ça ne peut pas être un grand nombre, là.

M. Vaillancourt: Non. En fait, comme je l'ai mentionné, c'est que, compte tenu des mécanismes que vous avez vous-même resignalés, on pense qu'il y a plusieurs plaintes, sans doute, qui s'arrêtent au niveau, je dirais, des milieux où nos membres travaillent, finalement. Alors, de ce point de vue là, il arrive, à l'occasion, que certaines de ces plaintes-là, qui, en premier lieu, ont été analysées auprès de l'employeur, se retrouvent à la table du syndic, parce que, dans certaines situations, ces plaintes-là sont assez sérieuses et elles doivent mettre en cause notre système disciplinaire.

Mme Caron: Bon. Je vais y aller du côté des questions. Vous avez élaboré — et il y a quelques corporations professionnelles qui en ont parlé, mais nous n'avons pas tellement questionné là-dessus — sur les maîtres de stage, sur les enseignants et sur le risque de l'avant-projet de loi concernant la protection du public. Vous avez élaboré en page 12 et vous avez élaboré aussi au niveau de la page 14 sur les candidats en formation aussi. Ce serait seulement les candidats en formation qui seraient les exceptions pour l'obligation d'être inscrits au tableau. Est-ce que vous croyez que c'est dans votre champ de pratique seulement, ces dangers d'ouvrir la porte comme exception aux maîtres de stage et aux enseignants?

M. Vaillancourt: C'est assez difficile pour moi de répondre pour les autres secteurs d'activité. Remarquez que, en ce qui concerne notre activité propre, je préférerais peut-être que M. Cromp puisse répondre à votre question, à cet aspect-là. Il est plus familier avec cette partie-là.

M. Cromp: Un peu comme le président le mentionne, je pense que c'est difficile de voir pour les autres corporations. Je pense, effectivement, que les corporations qui sont du domaine de la santé seraient particulièrement touchées par cette modification-là. En somme, on ne comprend pas l'intérêt du législateur d'ajouter cet article-là. On a essayé de voir à quoi on voulait faire référence, ce qu'on voulait régler avec un amendement de cette nature, et on pense que, si on voulait régler un certain problème qu'on ne connaît pas, on en a créé un important pour nous autres, qui est la protection du public, parce qu'on se retrouve devant une situation où des gens pourraient utiliser de la radiation sur des êtres vivants sans qu'on n'ait aucun mécanisme de contrôle sur eux autres.

Mme Caron: Je vous avoue que, lorsque j'ai lu votre mémoire, je trouvais que l'exemple peut-être nous sensibilisait plus, parce que, effectivement, c'est extrêmement dangereux. Et, quand un avant-projet de loi a été demandé pour améliorer la protection du public, on peut s'interroger sur ces articles qui amènent, finalement, l'objectif contraire du projet de loi.

Vous avez parlé aussi au niveau de la conciliation. Là, je vous avoue que je me questionnais un petit peu sur... Vous semblez un peu vous objecter à la procédure de conciliation qui est proposée à l'avant-projet de loi. Vous nous dites que vous avez déjà des mécanismes suffisants au niveau de... Mais, dans votre cas, il n'y a pas d'arbitrage de comptes, on l'a déjà dit. Donc, pourquoi vous vous opposez à cette procédure de conciliation entre différends?

M. Vaillancourt: En fait, ce n'est pas une objection majeure, là. Nous, ce qu'on dit, c'est qu'on pense que, à l'intérieur d'une corporation comme la nôtre, il n'est pas utile ou vraiment nécessaire d'avoir ce genre d'outil là, puisque, comme on l'a mentionné tantôt, on a quand même un nombre de plaintes relativement peu élevé et que tout ça peut s'arranger, je dirais, directement par les mécanismes qui existent déjà. La question du comité des différends, pour nous, n'apporterait que peu de chose, comme telle — on le pense, en tout cas — à la qualité des services qu'on offre déjà à la population.

M. Cromp: II y a peut-être un élément qu'on peut ajouter à cette réponse-là. Il faut comprendre que, effectivement, il n'y a pas énormément de plaintes qui sont déposées. Par contre, toutes les plaintes sont enquêtées d'emblée. Les personnes sont rencontrées par le syndic, peu importe la nature de la plainte. Deuxièmement, si on tient compte du fait qu'on ajoute au syndic le comité d'examen des plaintes à titre conseil, on ne pense pas que l'ajout d'un autre comité qui va venir faire de la conciliation de différends pour nous devrait être présent dans un amendement de cette nature-là.

Mme Caron: Concernant le comité des plaintes, j'avoue que moi aussi, lorsque j'ai lu en page 21, au début: «Nous sommes favorables à l'idée d'implanter un comité d'examen des plaintes», je me suis dis: Bon! une exception au niveau des corporations professionnelles. Mais, par contre, lorsqu'on lit la page 22 et qu'on regarde le mandat que vous lui donnez, finalement, ça revient à ce que les autres corporations professionnelles ont proposé, c'est-à-dire davantage un comité consultatif.

M. Vaillancourt: C'est essentiellement ce que l'on croit, nous aussi. On pense que, effectivement, il y aurait un intérêt à avoir un comité-conseil pour le syndic, que ce comité-là pourrait rendre des services, je pense, notamment dans les dossiers lourds. Il y aurait donc un intérêt pour ça. Par contre, on pense que le mandat initial du syndic, prévu actuellement au Code

des professions, selon nous, doit être maintenu, parce qu'on n'est pas certain du tout qu'un comité, ça changerait quelque chose, et on se demande dans quelle mesure ça ne fera pas alourdir un peu le système. Enfin, on peut toujours se poser la question.

Il y a un autre élément peut-être qui n'a pas été touché jusqu'à maintenant, du moins je ne l'ai pas entendu. Dans l'hypothèse où, par exemple, un tel comité siégerait de façon réduite et que, à ce moment-là, ce serait, par exemple, des membres du public qui seraient majoritairement représentés au sein de ce comité-là et qu'on lui accorderait les pouvoirs annoncés ou prévus dans l'avant-projet de loi, ça serait évidemment remettre en question, dans une condition comme ça, évidemment, qui peut-être n'arrivera jamais, toute la question de la discipline par les pairs.

Le ministre, tout à l'heure, faisait référence aussi à un autre élément, à savoir s'il y aurait la possibilité de mettre ensemble différents comités pour plusieurs corporations. Là aussi, ça me pose un peu le même questionnement, à savoir comment ces comités-là pourraient avoir l'expertise précise d'une corporation professionnelle dans un tel contexte. C'est un peu ça, nos éléments de réflexion, actuellement, par rapport à ce comité. (17 h 40)

Mme Caron: Vous avez aussi, en page 26, touché à l'aide, à l'assistance. Vous aussi, vous vous objectez au niveau du secrétaire. Je pense que vous définissez quand même assez bien que, effectivement, s'il y avait erreur ou irrégularité, ça pourrait nuire au plaignant. Évidemment, au niveau du secrétaire, ça peut poser problème. Mais, vous ne vous objectez pas... Vous nous dites: Nous croyons qu'il pourrait remplir un formulaire standard ou consulter un avocat. Vous ne croyez pas qu'il y aurait lieu d'offrir quand même une aide au plaignant avant l'utilisation, avant d'utiliser les services d'un avocat?

M. Vaillancourt: C'est toujours embêtant.

Mme Caron: Même si ce n'est pas offert par votre corporation, ça pourrait peut-être être offert par l'Office des professions ou par des associations de consommateurs ou autres.

M. Vaillancourt: On ne s'objecte pas au fait que le plaignant puisse avoir de l'aide pour remplir sa plainte. Ce à quoi on s'objecte, c'est au fait que ce soit le secrétaire du comité de discipline qui puisse collaborer à la rédaction de la plainte, parce qu'on pense que, encore une fois, ça pourrait peut-être poser des difficultés dans la nature de la neutralité, je pense, que le secrétaire du comité de discipline doit avoir. Par contre, maintenant, qui pourraient être les personnes ressources utiles? Nous ne nous sommes pas vraiment penchés sur cette réflexion-là. La question est posée. Peut-être qu'il y a différentes hypothèses possibles. Il faudrait prendre le temps d'y réfléchir, effectivement.

Mme Caron: Disons que, si on émet une hypothèse qu'il y a une personne ressource à l'Office des professions pour offrir le service directement au plaignant, ça vous apparaît une mesure...

M. Vaillancourt: Première analyse, moi, je ne vois pas de difficultés avec une hypothèse semblable.

Mme Caron: Je vous remercie beaucoup. M. Vaillancourt: Ça m'a fait plaisir.

La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup.

Oui, Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière.

Mme Carrier-Perreault: Merci, Mme la Présidente.

Tout au long de votre mémoire, ce que vous essayez de faire ressortir, et ça revient à plusieurs reprises, je pense, vous essayez de mettre en perspective le rôle des corporations par rapport au rôle de l'Office. Et ce que vous craignez — c'est tout le long, je pense — ça transparaît, et j'ai remarqué cette phrase-là: Ne peut se substituer. Le mot «substituer» revient souvent, et, en fait, vous rejoignez la plupart des corporations qui sont venues ici témoigner à venir jusqu'à date. Très clairement, vous avez peur d'être mis en tutelle et ça revient partout.

Par rapport à l'inspection, là vous allez encore plus loin. Vous dites: «II est totalement inconsidéré de penser que l'Office peut, entre autres, se substituer au comité d'inspection professionnelle d'une corporation». Pourquoi l'expression est plus forte dans le cas de l'inspection? Parce que, ailleurs, on voit: II ne serait pas adéquat, ou des choses comme ça. On voit des nuances à certains niveaux, mais, au niveau de l'inspection, on dit: totalement inconsidéré. Y a-t-il une raison particulière?

M. Vaillancourt: La raison particulière, je pense, est la suivante. C'est qu'il ne nous semble pas possible que des personnes qui ne sont pas des membres de la corporation puissent assurer quelque chose d'équitable en matière d'inspection professionnelle ou en matière de discipline. On pense que, effectivement, ce n'est pas possible si on veut avoir une équité en matière d'inspection professionnelle. Il est toujours possible que quelqu'un puisse penser à faire un règlement au nom de quelqu'un d'autre, mais on ne pense pas que ce soit possible, et vraiment pas possible, de faire de l'inspection en techniques radiologiques si on ne connaît pas les techniques radiologiques d'une façon minimale.

Mme Carrier-Perreault: C'est très clair. Ce que vous dites, c'est qu'il n'y a personne d'autre que la corporation qui a l'expertise pour faire vraiment une véritable inspection. Par ailleurs, quand on regarde la

loi comme telle, le Code comme tel, on se rend compte que, au chapitre de l'inspection professionnelle, on nous dit qui doit être sur un comité et tout ça, mais il n'y a pas vraiment de marche à suivre, il n'y a pas d'obligation précise concernant la fréquence ou autres. Pensez-vous qu'il y aurait lieu, peut-être, de resserrer? Parce qu'il me semble qu'il y a quand même certaines nuances, par rapport à ce chapitre-là, si on veut, par rapport à l'inspection, dépendant des corporations.

M. Vaillancourt: Évidemment, c'est toujours difficile de parler pour les autres.

Mme Carrier-Perreault: Eh bien, parlez pour vous.

M. Vaillancourt: Si on parle pour nous, en fait, on croit bien que nous avons excellemment fait nos travaux d'inspection professionnelle au cours des années. On est toujours à l'affût d'améliorer, d'ajouter, de rendre service davantage à nos membres, sans pour autant qu'il y ait de précision particulière, dans le Code des professions, à savoir sur la fréquence, sur le processus à mettre en place. Et ce serait, je pense, extrêmement difficile, au sein d'une loi, de préciser, pour chacune des corporations professionnelles, quelle devrait être la nature de leur inspection, à quelle fréquence elle devrait être faite, parce que, encore une fois, dans certaines situations, il va arriver que nous retournions visiter des gens trois mois après y être allés une première fois et, dans d'autres cas, ça peut faire en sorte qu'on y retourne cinq ans après. Alors, tout ça est assez difficilement codifiable.

Évidemment, c'est, on pense, un des éléments moteurs d'une corporation professionnelle, en termes de crédibilité, en termes d'efficacité, l'inspection professionnelle, et on pense qu'il devrait être à coeur de toutes les corporations professionnelles de s'acquitter de cette fonction-là de la façon la plus honorable possible et la plus efficace possible.

Mme Carrier-Perreault: À ce chapitre-là, l'Office pourrait peut-être effectuer son mandat de surveillance de façon accrue au niveau de l'inspection. C'est dans ce sens-là?

M. Vaillancourt: C'est intéressant que vous reveniez sur cet élément-là, parce que, en fait, dans notre mémoire, ce qu'on a voulu dire, d'une façon très claire, c'est que l'Office, on lui reconnaît tout à fait le droit, même le devoir, de surveiller les corporations professionnelles. Là où on n'est pas d'accord avec l'avant-projet de loi, c'est quand on dit: L'Office pourrait se substituer. On est d'accord à ce qu'on donne des dents, si on peut appeler ça comme ça, à l'Office, pour assurer son rôle de surveillance des corporations professionnelles, mais sans pour autant que l'Office puisse se substituer, soit en matière de réglementation ou, comme on le mentionnait tout à l'heure, en matière d'inspection.

Mme Carrier-Perreault: Je vous remercie.

La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup.

M. le ministre, est-ce que vous vouliez ajouter quelque chose?

M. Savoie: Merci, Mme la Présidente.

Tout simplement pour remercier les membres de la corporation d'avoir pris le temps de préparer un mémoire qui se travaille si bien et d'avoir pris le temps, également, de venir nous le présenter, ce mardi soir. Je peux vous dire que les recommandations qui y sont formulées seront examinées lors de la révision de l'avant-projet de loi. Et j'imagine qu'on aura vos commentaires par écrit, aussi, lors du projet de loi. Merci.

M. Vaillancourt: Ça sera avec plaisir.

La Présidente (Mme Hovington): Alors, M. Cromp, M. Vaillancourt, merci beaucoup, au nom des membres de la commission de l'éducation, d'être venus nous présenter votre mémoire. Merci, au revoir.

M. Vaillancourt: Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Hovington): La commission suspend donc ses travaux jusqu'à 20 heures, ce soir.

(Suspension de la séance à 17 h 48)

(Reprise à 20 h 1)

La Présidente (Mme Hovington): La commission de l'éducation va poursuivre ses travaux. Nous recevons à 20 heures, ce soir, l'Ordre des architectes du Québec. Bonsoir, messieurs, dames. Si vous voulez bien vous présenter aux membres de la commission.

Ordre des architectes du Québec (OAQ)

M. Nantel (Bruno): Je suis Bruno Nantel. Je suis secrétaire et directeur général de l'Ordre des architectes.

La Présidente (Mme Hovington): Bonsoir.

M. Laviolette (André): André Laviolette, syndic de l'Ordre des architectes.

La Présidente (Mme Hovington): Bonsoir.

Mme Michaud (Josette): Josette Michaud. Je suis la présidente de l'Ordre des architectes.

Mme Laurendeau (Louise): Louise Laurendeau, conseiller juridique.

La Présidente (Mme Hovington): Bonsoir. Alors, bienvenue à la commission de l'éducation. Ça nous fait plaisir de vous y recevoir. Vous avez 20 minutes pour nous présenter votre mémoire.

Mme Michaud: Juste une chose, Mme la Présidente. Je crois que je ne sais pas qui vous êtes.

La Présidente (Mme Hovington): Moi, je suis la députée de Matane et vice-présidente de la commission de l'éducation. Ça me fait plaisir de vous y recevoir.

Mme Michaud: Enchantée.

La Présidente (Mme Hovington): Je crois que vous connaissez tous les membres de la commission. Vous avez le ministre, ici, à ma droite, le député de Rimouski, qui est là, et le député de LaFontaine. Dans l'Opposition, vous avez la députée de Terrebonne et la députée des Chutes-de-la-Chaudière.

Mme Michaud: Bonsoir.

La Présidente (Mme Hovington): Vous avez le député de Jacques-Cartier, qui siège comme indépendant, et vous avez ici M...

M. Mulcair (Thomas J.): Mulcair.

La Présidente (Mme Hovington): Comment vous prononcez votre nom?

M. Mulcair: Mulcair.

La Présidente (Mme Hovington): M. Mulcair, qui est le président de l'Office.

Mme Michaud: Alors, Mme la Présidente, M. le ministre responsable des corporations professionnelles, Mme la députée de Terrebonne, M. le président de l'Office, Mmes, MM. les membres de la commission, au nom des 2600 membres de l'Ordre des architectes et de ses 1000 stagiaires, je vous remercie de nous recevoir et de nous permettre d'exposer notre point de vue sur l'avant-projet de loi modifiant le Code des professions.

Je commencerai par une confidence. Je vous avouerai que nous avons été surpris d'apprendre, récemment, par la voix des journaux, qu'un de vos anciens collègues qualifie de ronron l'exercice auquel nous nous livrons en ce moment. En fait, je crois qu'il s'agit de M. Séguin, mais, enfin, on reviendra là-dessus, c'est une parenthèse. Peut-être par naïveté ou encore par un vieux fond d'enthousiasme, nous persistons, pour notre part, à voir ici un exercice de démocratie saine et direc- te.

Le mémoire que nous avons officiellement déposé il y a une quinzaine de jours se voulait succinct. Il n'a donc pas commenté les aspects de l'avant-projet de loi qui nous semblent bénéfiques. Très rapidement, je me permets de vous souligner ici le net avantage que procureraient, à notre avis, les points suivants: une représentation du public au sein de l'OPQ, l'obligation de l'assu-rance-responsabilité professionnelle et la possibilité de transfert des dossiers criminels et disciplinaires extérieurs à la province de Québec. Toutefois, dans le cas des services en architecture, certaines des mesures proposées risquent d'engendrer des difficultés sans améliorer la relation entre le public et notre corporation. Avant de vous les souligner, j'ouvre une parenthèse pour vous rappeler que la relation de confiance qui existe entre l'architecte et son client est une relation de confiance mutuelle. Je m'explique.

Pour mener à bien un service professionnel qui s'échelonne sur plusieurs mois, et parfois même sur plusieurs années, l'architecte doit avoir tout autant confiance en son client que le client doit avoir confiance en l'architecte. C'est pour cela que les services d'architecture sont rendus dans le cadre d'ententes contractuelles très définies et que, en conséquence, l'une et l'autre des parties se trouvent tout à la fois liées et protégées par les dispositions du contrat d'engagement de l'architecte. Il ne faut pas perdre de vue non plus que la concrétisation des services d'architecture passe presque inévitablement par l'intermédiaire d'un tiers, à savoir les entrepreneurs en construction. Ces considérations teintent les commentaires spécifiques que vont maintenant vous livrer le syndic de l'Ordre, l'architecte André Laviolette, qui vous parlera des points relatifs à la discipline, et, par la suite, notre conseiller professionnel, Me Louise Laurendeau.

M. Laviolette.

M. Laviolette: Merci. D'entrée de jeu, nous tenons à affirmer que l'Ordre des architectes du Québec souscrit, sans aucune hésitation, à l'objectif visé par l'avant-projet de loi, d'améliorer l'efficacité du processus disciplinaire. Cependant, et de façon unanime avec le Conseil interprofessionnel et avec les 41 autres corporations professionnelles, nous aimerions faire valoir à la commission que certains changements proposés ne nous apparaissent pas atteindre les objectifs recherchés.

Comme l'a souligné le Conseil dans son mémoire, il faut d'abord répéter que la protection du public n'est pas assurée par le seul mécanisme disciplinaire. Établissons d'abord que, chaque année, des millions d'actes professionnels sont posés par les 250 000 professionnels du Québec et qu'une infime proportion d'entre eux semble poser des problèmes. Parmi ces problèmes, le CIQ tient à faire remarquer que, et je cite un extrait de leur mémoire, «seul un faible pourcentage d'entre eux sont de nature disciplinaire, de façon globale, chez toutes les professions, et, de façon plus particulière

aussi, à l'Ordre des architectes du Québec. C'est l'expérience que nous en vivons depuis l'instauration du système».

À notre avis, il faut ensuite reconnaître que, en plus de leur fonction statutaire, les syndics des corporations jouent un rôle prépondérant au niveau du public. Ils assurent le lien entre le système professionnel et le public. Ils fournissent énormément d'information au public. Ils indiquent les recours. Ils interviennent dans nombre de situations conflictuelles entre clients et professionnels et même entre professionnels. Ils agissent comme conciliateurs, médiateurs. Ils font des recommandations quant à des problèmes particuliers. Et les syndics, comme celui qui vous parle, prennent en considération toutes les informations qui leur viennent. Il ne faut pas s'étonner que la grande frustration du public ou des clients insatisfaits survienne lorsqu'ils se rendent compte qu'ils n'obtiennent pas réparation d'un préjudice qu'ils considèrent avoir subi en étant mal servis par un professionnel. Il ne faut pas s'en étonner, car il faut bien comprendre que la nature même du système disciplinaire n'est pas de rendre justice ou de rendre réparation à un plaignant, mais bien d'établir qu'un professionnel, qu'un architecte, ayant mal agi, est traduit devant son comité de discipline et qu'il en subit des sanctions s'il est trouvé coupable.

Alors, je pense, tout d'abord, qu'il faut établir qu'un nombre important des dossiers qui arrivent à l'Ordre des architectes, comme dans les autres corporations d'ailleurs, a trait aux honoraires ou, encore, relève tout simplement des tribunaux civils, où ni les corporations ni les syndics n'ont mandat d'intervenir. En second lieu, lorsqu'il s'agit de demandes qui relèvent effectivement de la conduite des architectes, il faut savoir aussi que la plainte en discipline est une mesure extrême et que d'autres traitements, disons, entre guillemets, qu'on pourrait qualifier de moins visibles que la plainte disciplinaire, sont utilisés et qu'ils concourent, tout autant que la plainte disciplinaire, à l'efficacité de la discipline. C'est donc ainsi que le syndic peut réussir à régler certains litiges, ou bien qu'il peut conclure qu'il n'y a pas de fondement suffisant pour porter une plainte en discipline, ou que son enquête peut tout simplement démontrer qu'il n'y a eu aucune infraction à quelque réglementation que ce soit.

Donc, en fait, moi, je dirais que les attentes du public sont parfois trop grandes. Ce n'est pas parce qu'une plainte n'est pas portée devant le comité de discipline qu'elle n'est pas traitée de façon adéquate. Toutes les plaintes reçues reçoivent le même traitement, sauf que le résultat n'est pas le même dans tous les cas. Il y a des dossiers qui vont en discipline, d'autres qui n'y vont pas, pour les raisons que je viens d'invoquer. Alors, nous croyons que c'est cette perception du public qui crée de la méfiance et de l'incompréhension, et c'est ce qui fait que la crédibilité du système disciplinaire est mise en doute et que les professionnels sont accusés de laxisme et accusés de se protéger entre eux.

Alors, à mon avis, une première conclusion s'impose. Nous croyons, à l'Ordre des architectes du Québec, que l'objectif de transparence qui est recherché et qui est valable pourrait être en partie atteint si la nature et la portée du système disciplinaire étaient clairement expliquées par une meilleure information, afin de dissiper les malentendus que je viens d'invoquer. Et cette responsabilité, à mon sens, incombe aux différents intervenants du système professionnel, autant à l'Office des professions du Québec qu'aux corporations professionnelles et qu'aux organismes de protection des consommateurs, etc. (20 h 10)

Alors, dans l'optique de ce qui précède, il nous semblerait déraisonnable que tous les dossiers où le syndic a conclu qu'ils ne relèvent pas de la discipline soient soumis à ce que l'avant-projet propose, un comité d'examen des plaintes. Je signale à la commission qu'il existe, depuis 1988, à l'Ordre des architectes du Québec, un comité aviseur au syndic, un comité que le syndic consulte au besoin lorsqu'il est en face de dossiers qu'il considère comme étant plus complexes et qu'il souhaite obtenir l'avis d'architectes qui forment ce comité, d'architectes d'expérience, et auxquels il peut se référer au besoin. Les qualités et les avantages de ce comité, pour nous, à l'Ordre des architectes, sont qu'il est efficace et souple et qu'il répond aux besoins actuels, par opposition au projet de loi, où ce comité-là serait institué d'office et instituerait une procédure lourde, administrativement parlant et en coûts. Alors, n'ayant pas trop l'habitude, je vais prendre une gorgée d'eau avant de sécher sur place. Ha, ha, ha! Ça ne sera pas long. Ha, ha, ha!

Alors, donc, pour réaliser l'objectif d'amélioration du processus disciplinaire, nous croyons que le mémoire du groupe de travail des syndics des corporations professionnelles qui a été présenté au ministre en juin 1992 est important à plus d'un titre. Déjà, dans ce mémoire, il est question de la situation actuelle qui est déjà vécue depuis l'instauration du système disciplinaire par les différentes corporations. Et les syndics font état de l'abus des procédures qui peuvent parfois complètement enrayer, paralyser le système disciplinaire, les procédures légales que les avocats en défense des intimés sont dans leur bon droit d'utiliser, le système étant ainsi fait.

Ils parlent aussi des délais importants qui ont retardé l'administration de la discipline, en somme, et c'est peut-être une deuxième conclusion qu'il faut tirer, une judiciarisation à outrance qui est, peut-être, le handicap majeur de l'administration de la discipline qui a nui à son efficacité. Alors, nous croyons donc que tous ces facteurs contribuent à miner la crédibilité du système et la confiance que le public peut avoir dans le système disciplinaire.

Ce mémoire des syndics, à notre avis, ne peut être ignoré pour plus d'une raison. D'abord, ce sont les syndics qui vivent, en première ligne et au jour le jour, les difficultés du système. Ils en connaissent donc mieux

que quiconque les lacunes, et ils sont les mieux placés, je pense, pour porter une évaluation critique du système, le vivant de l'intérieur. J'occupe personnellement le poste de syndic à l'Ordre des architectes depuis 1975. J'ai donc pu vivre, de façon personnelle, les problèmes auxquels j'ai fait référence précédemment. Je pense, dans un deuxième temps, qu'il serait sûrement injuste de faire porter le blâme de l'échec du système sur les corporations. Je pose la question: Pourquoi remettre en question le principe de l'autogestion et du jugement par les pairs, alors que les véritables causes sont ailleurs, dans l'abus des procédures et dans les délais interminables? Je pense que c'est une question à se poser avant de passer aux actes dans l'adoption du projet de loi.

En somme, nous ne croyons pas, à l'Ordre des architectes du Québec, que le manque de confiance du public fait ressortir la nécessité de mettre en place des mécanismes indépendants des corporations, pas plus que nous ne croyons que les principes d'autogestion et de jugement par les pairs — et ces principes-là étaient à l'origine de l'instauration du système en 1973 — ne comportent plus, aujourd'hui, des garanties d'efficacité pour être maintenus, à la condition, bien évidemment, que le contexte dans lequel ces principes-là pourraient être mis en valeur soit amélioré, comme je viens d'essayer de la démontrer dans les minutes qui précèdent. C'est à ce titre-là, comme activité disciplinaire, que j'aimerais faire valoir ces points-là à la commission. Je vais maintenant demander à Me Laurendeau, conseiller juridique de l'Ordre, de poursuivre.

Mme Laurendeau: Les pouvoirs de l'Office. Les pouvoirs additionnels qui sont octroyés à l'Office lui confèrent un vaste pouvoir d'enquête sur les activités des 41 corporations professionnelles et lui accordent une discrétion complète sur la façon dont les corporations mènent leurs affaires. La rédaction de l'article 15.1 semble très subjective pour conférer des pouvoirs aussi importants à l'Office. Aucune balise n'est fixée pour préciser les circonstances donnant ouverture à ce pouvoir d'enquête. L'Ordre des architectes croit que les pouvoirs actuels de l'Office lui permettent de s'acquitter adéquatement de ses fonctions de surveillance.

En effet, l'Office peut adopter des règlements au lieu et place des corporations qui tarderaient à le faire. Cela nous paraît suffisant. Mais aller jusqu'à prévoir un pouvoir de substitution aux bureaux, aux comités administratifs, aux comités d'inspection professionnelle, aux syndics est difficile à concevoir, vu la variété des corporations qui composent le système professionnel. Il s'agit là d'instances décisionnelles importantes dont les décisions sont propres à chaque corporation, en fonction de l'activité qu'elle régit. Comment avez-vous prévu exercer ce pouvoir, pour être en mesure de prendre les décisions qui s'imposent au sein d'un bassin potentiel de 41 corporations professionnelles qui sont toutes aussi différentes les unes des autres? Nous nous posons sérieusement la question.

La conciliation des différends. La rédaction de l'article 88.1 ne permet pas de cerner l'ampleur qu'une telle obligation comporte. Néanmoins, nous croyons que l'adoption obligatoire d'un règlement sur la conciliation des différends n'est pas souhaitable, considérant, encore une fois, la diversité des activités professionnelles de chaque corporation. Pour certaines, il se peut qu'un tel mécanisme soit tout à fait pertinent, alors que, pour d'autres, il pourrait s'avérer une source d'ennuis considérable.

En architecture, le service professionnel implique l'intervention de plusieurs personnes dont les relations peuvent donner ouverture à une multitude de conflits. C'est donc dire que les problèmes entre le client et l'architecte peuvent provenir d'un fait qui ne leur est pas attribuable, mais qui est tout de même à la source du conflit qui les oppose. La mise sur pied obligatoire d'un mécanisme de conciliation des différends risque de créer un véritable tribunal de la construction, ce qui n'est évidemment pas souhaitable. Nous croyons que les mécanismes qui existent déjà, soit le recours à l'arbitrage ou à la médiation professionnelle, offrent une meilleure solution à la résolution des conflits.

L'Ordre des architectes se questionne sur la perception du public relativement à une procédure de résolution de conflits qui émanerait de la corporation professionnelle. Déjà, il semblerait que les consommateurs aient une réticence profonde quant à l'objectivité d'une corporation professionnelle sur la discipline de ses membres. Ne croyez-vous pas qu'il en serait de même dans le cadre d'une conciliation des différends? Nous le croyons. Les corporations professionnelles ne doivent pas se substituer aux tribunaux. Déjà, elles ont le mécanisme de l'arbitrage des comptes, de l'inspection professionnelle et de la discipline qui représentent trois fonctions clés dont les ressources humaines et budgétaires qui y sont consacrées sont importantes. Une structure additionnelle comme celle proposée dans l'avant-projet de loi vient taxer les corporations professionnelles d'une lourde responsabilité qui ne devrait pas relever d'elles, à toutes fins pratiques.

L'assouplissement du processus réglementaire. L'Ordre des architectes souscrit à l'objectif visé par cet assouplissement réglementaire mais croit qu'il ne va pas encore assez loin. Par exemple, les règlements touchés par l'article 95.2 sont celui sur les affaires du bureau et celui sur les élections. Dans la mesure où des balises sont inscrites dans le Code des professions, nous croyons que plusieurs autres règlements pourraient bénficier de l'assouplissement du processus d'adoption des règlements qui est visé par cet article. Or, nous aimerions que soient rajoutés d'autres règlements à saveur administrative, tels la tenue des bureaux, la cessation d'exercice et la conciliation et l'arbitrage des comptes. Pour aller encore plus loin, nous croyons que le règlement sur les autres conditions et modalités de délivrance des permis pourrait également être visé par ce processus d'assouplissement.

Les corporations professionnelles sont mieux placées que quiconque pour évaluer les exigences supplémentaires dont un candidat doit être titulaire pour être à même d'exercer une profession de façon autonome et compétente. Le dépôt à l'Office saura sans doute rassurer le public à l'effet que la corporation professionnelle n'a pas agi pour des motifs qui soient tout à fait farfelus. Toutefois, pour augmenter les pouvoirs de l'Office dans ces matières, il faut qu'une procédure soit prévue afin que la réglementation puisse cheminer rapidement. Ainsi, l'Office serait tenu de motiver, par écrit, ses objections, et ce, dans un certain délai. (20 h 20)

Mme Michaud: Avant de conclure, je tiens à répéter que nous souscrivons à l'intention fondamentale de l'avant-projet de loi qui vise à assurer, par la mise sur pied de certains mécanismes, une protection accrue du public. Mais l'Ordre des architectes du Québec estime que travailler à la protection du public ne se limite pas à définir les conditions d'accès à la profession, ni à contrôler les conditions d'exercice de ses membres. Pour nous, travailler à la protection du public, c'est tout à la fois poursuivre nos discussions avec la Régie du bâtiment au sujet de la Loi sur le bâtiment et au sujet de l'adoption du Code national du bâtiment. C'est aussi intensifier nos entretiens avec le ministère de l'Industrie et du Commerce dans le dossier des grappes industrielles. C'est également faire progresser nos démarches sur les conditions internationales de l'exercice de l'architecture dans le cadre des accords de libre-échange nord-américains et c'est, bien sûr, travailler en partenariat avec le ministère de la Culture.

En effet, en matière d'architecture, nous croyons que nous devons, tant dans l'intérêt du public que dans l'intérêt de nos membres, susciter et encourager la production architecturale. On ne peut aider l'émergence de l'art et de la recherche sans assortir les mesures de contrôle de mesures d'émulation. C'est dire avec combien de réserve nous étudions les mesures annoncées par l'Office des professions pour confectionner des outils d'évaluation de notre performance en nous jugeant à partir de critères réducteurs. Notre position charnière entre l'industrie de la construction et le domaine culturel nous convainc tant de la particularité de l'exercice de notre profession que de la manière distincte dont notre corporation doit accomplir ses fonctions.

En résumé, nous espérons que la refonte du Code des professions limitera au minimum les mesures de contrôle partagées par l'ensemble des membres de la corporation, tout en amenant chacune des professions à préciser, pour son propre compte, les mesures de contrôle et d'émulation de ses membres. Finalement, nous espérons que les travaux qui entourent la refonte du Code remettront à l'ordre du jour les discussions que nous avons amorcées avec l'Office des professions, il y a maintenant six ans, au sujet de la révision de la Loi sur les architectes et qu'on apportera sous peu les modifications nécessaires pour favoriser l'application de cette loi que vos prédécesseurs ont instituée pour protéger le public en matière d'architecture. Merci.

La Présidente (Mme Hovington): Alors, merci beaucoup. Vous avez dépassé un petit peu le temps, mais je n'ai pas osé vous interrompre parce que c'était très intéressant et je sentais que vous en veniez à la fin. Alors, on va se diviser en parties égales le reste de l'heure.

Alors, M. le ministre, vous avez la parole.

M. Savoie: Merci, Mme la Présidente.

Tout d'abord, je voudrais remercier l'Ordre des architectes du Québec d'avoir bien voulu nous présenter un mémoire ce soir et, évidemment, de nous soulever des points, en ce qui concerne la discipline, le processus réglementaire qui est proposé, qui, évidemment, a suscité certaines discussions. On voudrait, également, souligner que, de façon générale, le mémoire touche à quelques points qu'on trouve importants pour les travaux de cette commission.

Il y a tout d'abord le processus disciplinaire. On comprend bien que, finalement, au niveau de l'Ordre des architectes, on a un processus qui n'est pas identique à une autre corporation professionnelle qui a des échanges d'une façon constante avec le public — vos clients sont parfois des citoyens, mais, d'une façon générale, se sont souvent des sociétés, des corporations, des gouvernements — et que les travaux qui vous sont demandés sont souvent considérables. Néanmoins, vous comprenez que c'est une espèce de réflexion générale et particulière en même temps. Ce qui nous intéresse surtout, c'est le général.

Vous dites que, chez vous, vous avez un comité aviseur au syndic, et que c'est composé d'architectes, et que, finalement, ce comité aviseur peut conseiller le syndic. C'est exact, ça?

M. Laviolette: Oui. Ce comité-là a été constitué, disons, aux alentours de 1988, je dirais. On essayait de s'en rappeler, un peu plus tôt, mais ça date d'à peu près quatre à cinq années. Au départ, le but recherché de ce comité-là, c'était — et ça rejoint, je pense, en partie, et cinq années avant le projet de loi, les objectifs qui sont recherchés dans le projet de loi — un comité que le syndic pourrait consulter dans des situations où la discrétion de syndic, qui lui permet de décider s'il y a matière à plainte ou s'il n'y a pas matière à plainte dans une situation donnée, n'était pas suffisamment claire pour qu'il puisse se sentir... pour que je puisse me sentir suffisamment à l'aise pour les déterminer de façon claire et nette.

M. Savoie: Et c'est composé de combien d'architectes, ça?

M. Laviolette: Ce comité-là est composé uniquement d'architectes. C'est sûrement, j'allais dire, une

chose qu'on verrait d'un oeil agréable qu'il y ait, pour des motifs de transparence additionnelle, un représentant du public là-dessus, quoique je n'en verrais pas tellement l'utilité, mais ça ne serait pas, disons, un empêchement. Donc, il est composé uniquement d'architectes et...

M. Savoie: De combien d'architectes? M. Laviolette: De cinq ou six architectes. M. Savoie: Cinq ou six architectes.

M. Laviolette: Et c'est aussi des architectes d'expérience variée. On essaie d'avoir des architectes représentatifs de différents aspects de la profession.

M. Savoie: D'accord. Finalement, ce n'est pas du tout la même orientation qu'un comité des plaintes, qui vise...

M. Laviolette: Pas du tout.

M. Savoie: Non.

M. Laviolette: C'est un comité consultatif.

M. Savoie: C'est ça. C'est à l'interne et...

M. Laviolette: II est consulté au besoin et sur demande du syndic.

M. Savoie: D'accord. Alors, finalement, vous dites que, au niveau du processus disciplinaire, bon, vous êtes d'accord avec les orientations, mais le projet de loi ne rejoint pas l'objectif visé, que le comité des plaintes, c'est une structure assez lourde, ou, en tout cas, une structure technocratique qui ne donnera pas le résultat escompté.

M. Laviolette: Une créature... J'ai manqué votre deuxième qualificatif.

M. Savoie: Oui, je ne me rappelle pas de... Je cherchais votre vocabulaire, là. Ha, ha, ha!

M. Laviolette: Ah! notre vocabulaire. M. Savoie: Oui.

M. Laviolette: Nous, nous considérons que ce qui est proposé va venir... Il y a plusieurs facettes, évidemment, à ça, mais la première qui me vient à l'esprit, c'est que ça va venir ajouter un niveau d'administration, si on veut, un niveau administratif supplémentaire aux activités d'exercice de la discipline, en ce sens que — vous le connaissez tous, l'article en question — si le syndic conclut qu'il n'y a pas matière à plainte — je dis ça un peu de mémoire — il doit obligatoirement soumettre le dossier à ce comité-là...

M. Savoie: C'est ça. (20 h 30)

M. Laviolette: ...qui, à un autre niveau — et c'est une crainte, je pense, qui est la nôtre et partagée aussi par toutes les professions — se faisant, viendrait un peu, beaucoup, passionnément — ça dépend peut-être des situations concrètes — jouer le rôle de décision ou d'interprétation qui est dévolu au syndic.

Sans aller jusque-là, nous, à l'Ordre des architectes, mais le CIQ, lui, parlait peut-être d'ingérence ou de manque de confiance au syndic. Disons que, personnellement, je ne le verrais pas comme ça parce que j'ai toujours eu la conscience professionnelle, je pense, de mener des dossiers dans l'objectif qui était demandé par le Code des professions, en vue de la protection du public. Alors, que d'autres instances examinent ça, personnellement, je n'ai pas d'objection. Mais je pense beaucoup plus que c'est sur le fond qu'on peut se questionner, sur la validité d'instaurer un tel niveau additionnel d'examen de plaintes.

Je pense très sincèrement, M. le ministre, qu'on va complètement louper l'objectif recherché. On ne va qu'accroître et augmenter les délais, l'administration et la solution à des problèmes disciplinaires en instaurant un système comme ça. Et, en disant ça, je ne parle même pas de l'autre aspect du projet de loi qui nous tarabiscoté, celui, pour le syndic, de l'obliger à faire des rapports à l'Office des professions dans des cas similaires à ceux qu'on vient d'invoquer.

M. Savoie: Vous avez combien de demandes d'enquête chez vous? Pas retenues, là, mais tout simplement de plaintes.

M. Laviolette: Par année? M. Savoie: Oui.

M. Laviolette: Moi, je dirais que, bon an, mal an, on reçoit quelques centaines de demandes. Je ne dis pas... Vous, vous utilisez le mot «enquête»...

M. Savoie: De plaintes.

M. Laviolette: De plaintes... Disons que j'appellerais plutôt ça des demandes d'information...

M. Savoie: D'accord.

M. Laviolette: ...qui, dans une certaine proportion, vont devenir des enquêtes disciplinaires...

M. Savoie: D'accord.

M. Laviolette: ...et, dans une proportion moin-

dre, vont devenir des plaintes disciplinaires. Alors, quelques centaines.

M. Savoie: Quelques centaines? M. Laviolette: Oui.

M. Savoie: Et vous en retenez... Comme je vois ici, vous en retenez à peu près 25, finalement.

M. Laviolette: Dossiers. M. Savoie: Dossiers, oui.

M. Laviolette: Oui. C'est que plusieurs dizaines d'autres sont ceux que j'ai invoqués un peu dans la présentation que j'ai faite et ne sont pas de matière disciplinaire.

M. Savoie: D'accord. Ça relève, finalement, par exemple, des recours...

M. Laviolette: Des tribunaux civils, des recours en responsabilité civile, de questions de compétence aussi ou d'inspection professionnelle qui sont donc relayées à l'inspection professionnelle.

M. Savoie: C'est parce que le temps nous manque un peu. Au niveau de la réglementation, vous avez recommandé qu'il faut toujours motiver un refus. On m'avise que, effectivement, on va porter un soin particulier au niveau de la réglementation pour assurer que, effectivement, un refus soit toujours motivé et qu'en conséquence ça va éviter de créer des irrégularités au niveau du traitement de certains dossiers.

On demande également, je pense, au niveau de la réglementation encore, une plus grande discrétion, c'est-à-dire que vous voulez que ce soit plus étendu au niveau de l'autonomie, finalement, de la corporation professionnelle d'intervenir. La liste qui est prévue, je pense, cherche à s'assurer que tous les éléments qui concernent la protection du public, les questions d'ordre public également, soient sous le contrôle, en tout temps, du gouvernement. Et là, finalement, vous dites: Bien non, il faudrait ramener quelques éléments additionnels sous le contrôle des corporations professionnelles, entre autres voies. J'imagine que c'est parce que vous vivez une situation particulière. C'est ça ou...

Mme Laurendeau: Non. C'est...

M. Savoie: Ah! Vous, vous êtes «in house» ou vous êtes...

Mme Laurendeau: Oui. C'est que, à toutes fins pratiques, on considère que, même lorsqu'un projet de règlement est acheminé ou doit aboutir au gouvernement, c'est après consultation de l'Office. On sent que l'Office fait les recommandations et que le gouvernement, généralement, les suit, ces recommandations-là. Je vois, dans la façon dont mes dossiers de règlement sont traités, que la position de l'Office est souvent celle du gouvernement. On trouve que l'Office des professions fait bien son travail en ce sens-là et que ça pourrait même être élargi pour éviter les délais additionnels qu'entraînent les publications et l'aboutissement final au Conseil des ministres. Nous croyons que l'Office représente très bien les vues du gouvernement en cette matière et que ça pourrait être facilement délégué à l'Office des professions.

La Présidente (Mme Hovington): Ça va.

Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Merci, Mme la Présidente.

Alors, mesdames et messieurs, je vous remercie d'avoir participé — et je reprends vos mots — «à cet exercice de saine démocratie», parce que je pense que c'est le but de l'exercice pour étudier cet avant-projet de loi. Vous nous avez fait part de particularités à votre ordre, et je vais poser mes questions surtout sur ces différences.

Vous nous dites qu'à l'Ordre des architectes, les contrats, finalement, ce sont des ententes contractuelles. Donc, évidemment, les deux parties doivent signer ces ententes, ce qui fait qu'au niveau du système disciplinaire ça peut être un peu différent des autres.

M. Laviolette nous a dit que, souvent, au niveau des plaintes, il pouvait y avoir insatisfaction parce qu'il n'y a pas nécessairement réparation. Et, souvent, vous touchez des demandes surtout sur les honoraires. Est-ce que votre mécanisme, votre comité d'arbitrage des comptes arrive à régler dans une proportion intéressante, là, à la satisfaction des plaignants, les problèmes reliés aux honoraires?

M. Laviolette: Je n'ai peut-être pas été assez clair, madame, en ce sens que j'ai dit que la question des honoraires était une question parmi d'autres qui pouvaient nous arriver, mais elle ne prend pas une importance plus grande que les autres. Il y a très peu de cas ou de demandes reliées aux honoraires qui nous viennent, peut-être une dizaine ou une douzaine de dossiers par année, officiellement, là, qui vont en conciliation et arbitrage, peut-être quelques autres qui peuvent être réglés au téléphone. Mais ce n'est pas ça qui est le principal des demandes qui nous viennent de l'extérieur; ça n'a pas un accent comme celui que vous avez pu percevoir, là, cet aspect-là.

Mme Caron: Peut-être parce que vous l'avez nommé en premier...

M. Laviolette: Peut-être.

Mme Caron: ...alors je lui ai accordé...

M. Laviolette: C'est peut-être...

Mme Caron: ...une priorité. Ha, ha, ha!

M. Laviolette: Oui, mais ce n'était pas plus important, ça, que d'autres choses.

Mme Caron: II y a un élément dans votre mémoire qui m'est apparu important. Vous nous dites que, finalement, dans votre secteur, il y a d'autres personnes qui sont touchées au niveau des travaux, par exemple l'entrepreneur. Alors, pour le consommateur qui utilise vos services, ça pose effectivement un problème lorsqu'il y a insatisfaction, c'est-à-dire de trouver qui peut être responsable, si faute il y a, ou de l'architecte, ou de l'entrepreneur, ou parfois même, peut-être, d'autres professionnels qui peuvent être reliés à ces travaux-là. Pour le consommateur, comment il peut faire la différence, là, s'y retrouver au niveau du système pour déposer des plaintes?

Mme Michaud: Écoutez, je peux commencer à élaborer une réponse. Je crois que, si jamais un consommateur s'adressait à l'Ordre, il parlerait au syndic qui, assez rapidement, verrait, d'après la nature de la demande qu'il fait, si l'affaire relève de la discipline ou alors relève plutôt des tribunaux civils. Et, assez souvent, il faut comprendre que les architectes ne rendent pas leurs services en se faisant payer d'avance, et, le plus souvent, on va se trouver face à un cas où un consommateur, que ce soit un individu ou une corporation, refuse de payer les honoraires à l'architecte parce qu'il a un litige avec lui sur certaines façons dont les services ont pu être rendus. On peut imaginer un cas où il y aurait eu, par exemple, un délai sur un chantier, où le bâtiment qui avait été promis par l'entrepreneur général au 1er juin n'est pas prêt, et l'entrepreneur général peut dire qu'il n'y va pas de sa faute, parce qu'il y va des conditions de chantier; il pourrait dire que c'est la faute de l'architecte qui a amené telle ou telle procédure qui allonge le chantier. L'architecte pourrait dire: Non, c'est la faute de l'entrepreneur général qui a négligé de faire venir au chantier tels et tels matériaux, et il pourrait aussi dire que c'est la faute du client.

Enfin, quand une situation comme ça se présente, vous comprendrez que, bon, immédiatement, là, on n'est pas juste en termes de discipline et en termes d'exercice strict de la profession, et, assez souvent, ce que les gens font si le litige est assez grand et s'ils ne veulent pas avoir recours aux tribunaux, ils vont aux procédures ordinaires d'arbitrage, ils vont à l'institut d'arbitrage. Il y a des arbitres en matière de construction qui sont des architectes, qui sont nommés soit en conciliation, soit en arbitrage, et qui, à l'intérieur d'un cadre qui n'est pas celui de l'Ordre, rendent le service d'essayer d'emmener les parties à s'entendre, essaient de débrouiller à qui revient la faute et, finalement, la chose peut se régler autrement que devant les tribunaux.

Mais ce n'est pas l'Ordre qui se mêle de ça. Ça se passe dans un organisme qui a ses fonctions, qui marche très bien et qui rend ce service-là au public. Alors, il est possible que, pour certains services professionnels, ce service-là ne soit pas disponible ou que les gens n'y recourent pas. Mais, dans le domaine de la construction, c'est là que les litiges à trois parties, ou même, souvent, à deux parties, vont se régler, et pas devant la corporation qui, elle, se limite à juger ou à statuer sur les choses qui relèvent de la discipline.

Alors, c'est ce qu'on craint le plus là-dedans, c'est d'essayer d'embrouiller les choses en voulant dire: Bon, vous allez rendre des services que vous devriez peut-être rendre, alors que, dans le fond, il existe des organismes pour rendre ces services-là. Le règlement des différends, un peu plus loin que le strict compte de l'architecte à son client, il y a des mécanismes pour faire ça, et on pense que c'est bien mieux que ce ne soit pas nous qui fassions ça. (20 h 40)

Le seul avantage que je pourrais voir à l'affaire, c'est que peut-être qu'un consommateur s'imaginerait que l'Ordre va faire siéger trois arbitres pendant trois jours et que ça ne coûtera pas un sou. Mais, vous savez, les gens qui sont dans le monde de la construction, on n'en est pas à régler les problèmes de combien coûtent trois arbitres pendant trois jours. On parle de montants qui sont différents, et les gens sont prêts à aller en arbitrage et à payer ce que ça représente.

Alors, personnellement, nous ne voyons pas qu'il y aurait avantage à ce que nous allions très avant dans le règlement des différends, parce que la frontière ne serait pas assez claire entre ce qui relève de la corporation professionnelle et ce qui relève vraiment de l'arbitrage et des tribunaux par la suite.

Mme Caron: Je me souviens qu'au niveau de votre profession ça causait effectivement problème au moment de l'étude de la loi 125, la réforme du Code civil, et on avait eu de très longs débats à ce sujet-là, parce que, effectivement, ça posait certains problèmes.

Vous nous avez dit, M. Laviolette, que, finalement, les syndics étaient les mieux placés pour connaître les difficultés du système, et je pense que vous avez raison à ce niveau-là. Alors, selon vous, quelles sont les principales difficultés auxquelles vous devez vous confronter comme syndic?

M. Laviolette: Quelles sont-elles? Je les ai évoquées—j'ai essayé, en tout cas, dans la présentation que j'ai faite. Je pense que les difficultés sont — comment les qualifier, donc — externes au système lui-même. Le système disciplinaire qui a été installé en 1973 établissait des règles très précises, là, dans le Code des professions, les articles 114 et suivants: comment les comités de discipline étaient constitués, de quelle façon, la procédure, et tout ça. C'était — je dis bien «c'était», parce que l'expérience de 20

ans nous démontre qu'il faut le voir autrement aujourd'hui, d'où l'exercice valable qu'on est en train de faire — je pense, un bel ensemble théorique qui avait à faire ses preuves. Il a fait ses preuves jusqu'à un certain point. Où il a eu et subi des ratés, je pense, comme je l'ai dit, c'est que... C'est comme si c'était le défaut de sa qualité, parce que ce système-là voulait instaurer un système de justice fondé — je ne veux pas jouer à l'avocat, là, parce que je ne suis pas avocat, je suis architecte — sur des principes de justice naturelle, donc donner à l'intimé architecte tous les droits auxquels il pouvait avoir droit dans sa défense.

Bien, ce système-là, qui est un peu entre deux systèmes, le pénal qui, lui, est différend, et d'autres sortes de systèmes sur lesquels je ne peux pas comparer, bien, ça a amené que les avocats — parce que c'est très souvent des avocats qui défendent les intimés, et à juste titre aussi; ceci n'est pas une critique — ont très rapidement, comme le disent les mémoires, les autres mémoires que vous avez reçus, vu les failles de ce système-là et vu toutes les possibilités qu'ils pouvaient utiliser pour retarder, empêcher et peut-être même parfois faire complètement avorter le résultat même de l'exercice de savoir si un architecte était trouvé coupable ou pas, en ce sens que ce sont les abus de procédures, comme je les ai évoqués aussi, ou la judiciarisation à outrance. Et ce n'est pas le fait principalement chez nous, les architectes; c'est beaucoup plus grave dans d'autres corporations, mais on l'a vu, nous aussi. Il y a eu des appels devant le Tribunal des professions. Il y a des dossiers qui ont été là, sur la table, pendant des années, parce qu'il y avait toutes sortes de brefs d'évocation de ceci, de cela. Les règles du jeu étaient ainsi faites qu'elles permettaient ça.

À mon avis à moi, c'est là qu'est la principale faiblesse, le handicap majeur du système disciplinaire. C'est pour ça que je dis que c'est à l'extérieur du système. Ce n'est pas que les corporations ou les syndics ne veulent pas que le comité de discipline trouve un architecte coupable. C'est que, même si le désir est là, il se heurte à des défauts de procédure qui font qu'on n'arrive pas à l'objectif recherché. Je dis bien «trop souvent», mais je ne généralise pas, mais trop souvent, c'est ça qui se passe.

Mme Caron: Si on prend un exemple précis à partir de vos plaintes de 1990-1991 où vous avez eu 43 demandes d'enquête reconnues par le syndic et 3 plaintes transmises au comité de discipline, est-ce que les 40 plaintes, finalement, c'est parce que ce n'était pas de votre juridiction? Est-ce que c'est parce que c'étaient des plaintes qui ne faisaient pas partie du code de déontologie? Pourquoi autant de plaintes ont été rejetées?

M. Laviolette: Vous faites probablement allusion au rapport annuel de l'Ordre des architectes pour cette année-là. Si c'est un extrait du rapport annuel que vous avez, la réponse est là. Je pense qu'on l'a fait par colon- nes. Il y a x dossiers qui sont fermés pour insuffisance de preuves, x qui sont fermés pour absence d'infraction et un autre nombre qui sont fermés pour correction de la situation, par exemple. Alors, je n'ai pas les proportions pour l'année en cours, mais ce sont trois motifs de fermeture de dossiers, la plainte étant le quatrième; les trois dossiers qui sont dans la discipline sont différents et utilisés pour décider qu'un dossier n'est pas une matière disciplinaire ou qu'il arrive à sa conclusion de cette façon-là.

Mme Caron: Quand vous dites «absence d'infraction», est-ce que c'est parce que ce sont des infractions qui ne sont pas dans votre code de déontologie? Est-ce que ça se peut que ce soient des infractions quand même mais que votre loi ne les couvre pas?

M. Laviolette: Bien, qu'il ne les prouve pas ou ne les trouve...

Mme Caron: Ne les couvre. Couvre.

M. Laviolette: Ne les couvre pas. Bien, si elle ne les couvre pas, c'est une absence d'infraction, évidemment.

Mme Caron: C'est ça que je veux savoir. Est-ce qu'il y a beaucoup de plaintes qui ne sont pas couvertes?

M. Laviolette: Oui, j'essaie de voir des exemples, là.

Une voix: Qui sont non fondées. M. Laviolette: Non fondées? Une voix: Oui, qui sont... M. Laviolette: Oui.

Une voix: Bien, le cas récent de l'Hôtel-Dieu qui est trop éloigné.

M. Laviolette: Oui. Celui-là me vient à l'idée. On peut peut-être amener un exemple qui est très d'actualité. L'Hôtel-Dieu de Montréal, est-ce qu'il doit déménager ou rester sur son site actuel?

Une voix: On a notre expert ici.

M. Laviolette: Oui, qui?

Une voix: M. Gobé.

Mme Caron: C'est un très bon exemple. Allez-y.

M. Laviolette: Bon. Alors, je vais demander à M...

M. Gobé: Si vous le permettez, Mme la Présidente, je vais répondre à la question.

M. Laviolette: Ha, ha, ha!

Mme Caron: Je n'ai pas posé la question au député de LaFontaine, là. Ha, ha, ha!

Une voix: C'est un exemple.

La Présidente (Mme Hovington): II est en train de... Veuillez continuer, s'il vous plaît.

M. Laviolette: Alors, ça va illuster très bien la question de madame. On peut se demander: Est-ce que les architectes qui ont été engagés, dans un premier temps, pour déménager l'Hôtel-Dieu ou faire les plans pour déménager PHôtel-Dieu ont commis une infraction à quelque règlement, par exemple, qui n'existe pas, de ne pas tenir compte du besoin de Montréal de garder cet hôpital-là? Alors, moi, je dirais que, si ce dossier-là me venait, comme syndic, une enquête pour déterminer si les architectes ont mal agi, je dirais: Dossier fermé, parce qu'il n'y a pas d'infraction. Alors, ce serait un exemple de ce genre-là. Et on pourrait poser la question, peut-être. Est-ce que les architectes de la Coalition, eux, ont mal agi? Ça dépend qui pose les questions, là.

Mme Caron: Toujours. Ha, ha, ha!

M. Laviolette: Alors, c'est dans ce sens-là que ça peut être un exemple pour dire: II n'y a pas d'infraction dans une situation donnée. Alors, le dossier est définitivement fermé, et pour cause, il n'y a pas d'infraction. Je pense qu'un tiers des dossiers...

Mme Caron: On ne sait pas si le déménagement est arrêté aussi, là, mais, ça, on va savoir ça un petit peu plus tard.

M. Gobé: ...mais ce n'est pas le cas, vous allez voir. Vous allez être surprise la semaine prochaine.

Mme Caron: Alors, on va continuer... Des voix: ...

La Présidente (Mme Hovington): S'il vous plaît, s'il vous plaît!

Mme la députée de Terrebonne, vous avez toujours la parole.

Mme Caron: Merci, Mme la Présidente.

Vous nous avez parlé aussi, en conclusion, du problème qui, finalement, est vécu par votre ordre à cause de la pratique illégale de l'architecture. Et ce domaine-là n'a pas été abordé par l'avant-projet de loi. Qu'est-ce que vous souhaitez, à ce niveau-là?

Mme Michaud: Bon. Enfin, je suis contente d'être ici pour l'expliquer assez rapidement. Nous avons des difficultés dans l'application de notre loi parce qu'il y a un libellé qui pose des interprétations différentes par les différents juges devant lesquels les cas sont posés. Et, depuis le départ, enfin depuis des années, nous savons qu'il y a une faute dans le libellé qui doit être modifiée. (20 h 50)

D'autre part, nous avons aussi avancé et déposé un projet de loi pour modifier cette loi-là parce que nous croyons que l'existence de la Loi sur les architectes, c'est pour protéger le public en matière d'architecture, et il faut non seulement que la loi soit claire, mais qu'en plus elle soit applicable. Et, donc, nous demandons des modifications — peut-être pas entrer dans le détail — dans le texte même de la loi. Et, aussi, nous cherchons des modifications pour la rendre opérante, c'est-à-dire que nous savons très bien que, une loi comme ça, les architectes et l'Ordre des architectes, sur le boulevard René-Lévesque, à Montréal, ne peuvent pas savoir ce qui se passe sur tous les chantiers de construction de la province. On sait que la Régie du bâtiment a 700 personnes à son emploi et ne sait même pas ce qui se passe sur les chantiers de construction. On est face à un travail au noir un peu partout. Et, nous, nous croyons que, si certains mécanismes étaient adoptés, la loi pourrait devenir opérante assez facilement.

Nous croyons que, s'il y avait un lien entre la Régie du bâtiment, la Loi sur le bâtiment et la Loi sur les architectes, si on était convaincu que, pour aboutir à des plans et devis bien faits, ça prend des gens qui sont formés pour faire ça et qui connaissent toutes les facettes et de la construction, et de la réglementation municipale, et de la réglementation en matière de bâtiments, et des besoins des clients, et du fonctionnement des édifices, et des besoins culturels des gens, si on était convaincu de ça, on établirait un lien entre la loi des architectes et la Loi sur le bâtiment, par exemple. On pourrait imaginer qu'un entrepreneur en bâtiments qui agirait avec des plans qui ne sont pas signés et scellés par un architecte du Québec, il pourrait éventuellement avoir des points de démérite et, à la limite, contribuer à perdre sa licence. Je vais assez loin. Il y a des mécanismes de liaison comme ça.

On sait que, dans les États américains, quand ils adoptent un code de construction, c'est bien clairement dit dans les dispositions administratives que le code doit être appliqué en conformité avec la loi des architectes de l'État. Nous autres, on n'a pas de lien entre les deux. On a d'un bord la Loi sur les architectes, et après ça on a des lois sur le bâtiment, et après ça on a des codes de construction, puis il n'y a pas de bras qui relie tout ça.

Alors, ce que l'Ordre essaie de faire depuis un certain temps, c'est d'aller vers les municipalités et de leur expliquer que, si elles adoptaient des codes de construction ou des mesures réglementaires dans les municipalités pour dire qu'elles émettront les permis en

conformité avec la loi des architectes, au moins, on saurait qu'il y a des agents dans les municipalités qui la font respecter et qui s'assurent qu'il y a des professionnels qui rendent des services appropriés.

Mais on se trouve face aux municipalités qui nous disent: Ah! vous savez, votre loi est bien ambiguë. Franchement, on n'est pas capables de voter ça. Des fois, le juge dit que c'est 100 000 $ de construction. Des fois, il dit que c'est 100 000 $ de je ne sais quoi. Des fois, ils dit que c'est 100 000 $ d'honoraires. Et puis, il nous renvoie à nos bureaux parce qu'il s'imagine que ce n'est pas applicable. Alors, on n'avance pas. Alors, nous, on croit qu'il faut avancer avec ça.

La Présidente (Mme Hovington): D'accord. Votre temps est écoulé.

Mme Garon: Je vous remercie beaucoup.

La Présidente (Mme Hovington): II vous reste quelques minutes, M. le ministre.

M. le député de Rimouski, vous aviez...

M. Tremblay (Rimouski): Oui. Très brièvement. Je vais passer la parole à mon collègue après, mais très brièvement. Vous appartenez à une des lois professionnelles les plus vieilles, je pense, après les agronomes, je crois.

Mme Michaud: 1974.

M. Tremblay (Rimouski): Depuis votre existence, combien y a-t-il eu d'architectes radiés de votre ordre? Parce qu'on voit souvent des avocats radiés de l'Ordre. On voit des ingénieurs. Des architectes, moi, je n'ai pas vu ça souvent. Est-ce qu'il y en a?

M. Laviolette: À vie?

M. Tremblay (Rimouski): Radiés à vie, oui. Puis il y en a qui sont radiés pour deux ans, trois ans?

M. Laviolette: On en a eu. Moi, je ne peux parler que depuis l'avènement du Code des professions. Avant ça, je ne pourrais pas dire, mais, depuis 1973, il y en a eu...

M. Tremblay (Rimouski): Pour des fautes professionnelles.

M. Laviolette: ...une demi-douzaine, peut-être, qui ont subi des sanctions de radiation.

M. Tremblay (Rimouski): Radiation à vie ou...

M. Laviolette: Non, non, pas à vie. Il n'y en a pas eu.

M. Tremblay (Rimouski): Non. Radiation pour un certain nombre d'années. O.K.

Mme Laurendeau: Excusez. Les avocats sont radiés, la plupart du temps, parce qu'ils utilisent l'argent qu'ils détiennent en fidéicommis à d'autres fins.

M. Tremblay (Rimouski): Mais pas pour des fautes professionnelles. Parce que vous, là...

Mme Laurendeau: C'est très rare que...

M. Tremblay (Rimouski): Vous vous trouvez toujours en arbitrage, soit avec l'entrepreneur, ou encore avec le Code du bâtiment, ou encore avec des ingénieurs, ou avec d'autres ordres. Vos différends, finalement, se règlent là, avec un arbitre, la plupart du temps.

Mme Michaud: Ou devant les tribunaux.

M. Tremblay (Rimouski): Ou devant les tribunaux, oui. Mais, lorsqu'on arrive avec une faute professionnelle, c'est lorsqu'on a passé toutes ces étapes-là. Finalement, vous arrivez en bout de ligne, là, il y a une faute professionnelle, peut-être, qui pourrait être...

Mme Michaud: On pourrait imaginer des fautes professionnelles, quand même, qui ne sont pas soumises à nous, mais un architecte pourrait signer des certificats de paiement erronés pour faire plaisir à l'entrepreneur général. Si on apprenait ça, on le radierait, mais ça ne se produit pas.

M. Tremblay (Rimouski): Oui.

Mme Michaud: On n'est pas dans une position pour créer des dommages à nos clients, aucunement.

M. Tremblay (Rimouski): Non, non. O.K.

La Présidente (Mme Hovington): M. le député de LaFontaine, quelques minutes seulement.

M. Gobé: Oui, merci Mme la... Comment, madame?

La Présidente (Mme Hovington): Quelques minutes seulement qu'il reste.

M. Gobé: Oui, oui. Certainement, je n'y manquerai pas. Merci, Mme la Présidente.

Une voix: II est respectueux des présidents.

M. Gobé: Oui, certainement. Pour assumer votre position à l'occasion, je dois reconnaître l'importance de maintenir le temps.

La Présidente (Mme Hovington): On perd déjà du temps, là.

M. Gobé: J'ai une question que j'aimerais vous poser. Lorsqu'il y a des grands projets qui vont en appel d'offres public, des projets gouvernementaux ou municipaux au Québec, est-ce que l'Ordre des architectes est appelé à siéger sur les comités de sélection à l'occasion, ou la corporation des architectes?

Mme Michaud: Pas la corporation. M. Gobé: Pas la corporation?

Mme Michaud: Nos membres, oui, mais pas la corporation en tant qu'entité.

M. Gobé: Si des gens...

Mme Michaud: La corporation pourrait difficilement, je crois, procéder comme ça. Ce n'est pas notre fonction de déterminer qui est le plus compétent de nos membres, ou le plus agréable au gouvernement. Ha, ha, ha! Je pense que... Je ne pense pas qu'on... Enfin, je m'avance un peu, là...

Une voix: Le terme est fort.

Mme Michaud: ...mais ça ne nous a jamais été demandé. Mais je crois que nous serions très inconfortables d'avoir à faire ça.

M. Gobé: Non, mais je ne vous parle pas de comités gouvernementaux, je parle... Il y a des comités de sélection qui vont juger les appels d'offres de certains. Alors, on remarque qu'il y a des représentants du ministère, des représentants des ingénieurs et il y en a, des architectes.

Mme Michaud: À titre...

M. Gobé: Qui nomme ces représentants? Ce n'est pas le gouvernement qui les nomme, c'est... Est-ce que c'est l'Ordre des architectes?

Mme Michaud: Oh non, ce n'est... M. Gobé: La corporation des architectes? Mme Michaud: Non, non. Une voix: Bon.

Mme Michaud: Je ne sais pas qui les nomme, mais ce n'est pas nous.

M. Laviolette: C'est le donneur d'ouvrage qui nomme les personnes qui seront présentes au comité d'évaluation, là, des appels d'offres, je pense bien. Dans le cas du gouvernement, c'est des comités de sélection qui sont nommés par le gouvernement. Ils peuvent aller chercher des gens autant de l'extérieur que de l'intérieur, là, mais l'Ordre ne participe pas à ce genre de nominations là sur les comités de sélection.

M. Gobé: Jamais?

M. Laviolette: À moins qu'on ne nous le demande.

M. Gobé: Ma question, ce n'est pas une question piège, c'est juste parce que...

M. Laviolette: Oui.

M. Gobé: ...la question... Je vous dirai la raison après, de ma question.

Mme Michaud: Écoutez...

M. Gobé: Ça a dû arriver. C'est arrivé, vous le savez.

Mme Michaud: Oui, quand même, juste un... Rapidement, on sait que nos gouvernements nous ont demandé très récemment de fournir des noms d'architectes qui pourraient siéger, par exemple, au ministère de la Culture, sur l'attribution des bourses en architecture. Alors, bon, quand on fournit une liste de 30 personnes éventuelles qui nous semblent avoir beaucoup d'expérience et qui voudraient bien avoir la grâce de faire ça pour le gouvernement, parce que c'est plus un service qui est rendu au gouvernement que n'importe quoi d'autre, et puis à la profession aussi, mais ce sont des choses... Dans des cas comme ça, nous fournissons des listes; autrement, le gouvernement connaît...

M. Gobé: Ma question était... Mme Michaud: ...assez bien la... M. Gobé: ...la suivante...

Mme Michaud: ...qualification de nos membres, oui.

M. Gobé: ...c'est que, advenant que...

Mme Michaud: Oui.

M. Gobé: ...ces nominations...

La Présidente (Mme Hovington): En conclusion.

M. Gobé: ...soient...

La Présidente (Mme Hovington): En conclusion.

M. Gobé: ...reconnues par le gouvernement et qu'il y ait plainte après, sur la décision, sur la nomination, comment pouvez-vous être le juge et le «nominateur» en même temps?

M. Laviolette: On n'est pas «nominateur», justement.

M. Gobé: Bien, si vous envoyez une liste de noms et qu'un des noms est nommé, et qu'il y a par la suite une récrimination, une plainte contre ces gens-là... C'est vous qui les avez envoyés; c'est difficile pour vous, après, d'aller...

Mme Laurendeau: On fait une liste, mais c'est à eux de choisir parmi la liste qui est envoyée.

M. Gobé: Mais je présume que vous n'envoyez pas n'importe quel nom.

M. Savoie: Alors, je vous remercie beaucoup pour la présentation de votre mémoire. J'avais des questions également à adresser, finalement, sur le... qui pouvaient s'adresser immédiatement au syndic. Malheureusement, le temps nous manque, là, si je comprends bien. On aura peut-être l'occasion d'échanger au...

La Présidente (Mme Hovington): II vous reste... M. Savoie: ...téléphone.

La Présidente (Mme Hovington): II vous reste deux minutes, quand même.

M. Savoie: Ah oui?

La Présidente (Mme Hovington): Vous pourriez reposer une question.

M. Savoie: II me reste deux minutes? La Présidente (Mme Hovington): Oui.

M. Savoie: Ah! Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je m'excuse.

Une des choses qu'on était en train d'examiner: Vous, vous êtes syndic depuis 1975?

M. Laviolette: Oui.

M. Savoie: Ça fait 18 ans.

M. Laviolette: Ne le dites pas trop fort.

M. Savoie: Vous savez qu'on est en train de voir un peu le fonctionnement, et une des choses qui ont été présentées à cette commission, c'est la possibilité, peut-être, d'intervenir d'une façon modeste au niveau, par exemple, de l'embauche et de la formation d'un syndic; au lieu de laisser uniquement le champ libre à la corporation, peut-être avoir un pouvoir de surveillance là-dessus également. Qu'est-ce que vous pensez de ça, vous?

M. Laviolette: Je manque un peu ce que vous dites, là: Intervenir...

Mme Michaud: Dans la formation des syndics. M. Laviollette: ...dans la formation?

M. Savoie: Oui, oui, la formation et le choix d'un syndic pour une corporation.

Une voix: Puis l'embauche.

M. Laviolette: Dans une corporation?

M. Savoie: C'est-à-dire que la corporation embaucherait le syndic, mais il y aurait un processus de ratification du nom, là, de même que pour sa démission.

M. Laviolette: Par l'Office? M. Savoie: Peut-être. M. Laviolette: Oui. M. Savoie: Oui.

M. Laviolette: C'est une bonne question, là. Elle ne m'est jamais venue à l'esprit.

M. Savoie: Non?

M. Laviolette: Je n'aurais pas d'opinion à vous donner aujourd'hui, mais c'est sûr que les syndics qui ont une expérience de l'administration de leur secteur d'activité pourraient sûrement être d'une utilité dans un processus, peut-être, d'embauché...

M. Savoie: Bon.

M. Laviolette: ...ou de recommandation, ou d'évaluation de candidatures. Mais je pense qu'il faut aussi dire, du même souffle, que les syndics sont nommés par la corporation, en tout cas, jusqu'à ce jour, et que ce privilège-là ou ce devoir-là...

M. Savoie: Oui.

M. Laviolette: ...incombe à la corporation elle-même.

M. Savoie: C'est ça. Ce serait maintenu, ça. M. Laviolette: Oui.

M. Savoie: Mais, par contre, il y aurait comme une espèce de comité consultatif, là.

Mme Michaud: Mais, est-ce qu'il serait composé d'architectes, votre comité consultatif?

M. Savoie: Non.

Mme Michaud: Mais comment... Enfin, c'est ça, c'est tout ça qui est le débat, dans le fond.

M. Savoie: Oui.

(21 heures)

Mme Michaud: Les corporations professionnelles sont créées parce qu'on pense que les gens qui sont dans le métier connaissent le métier; et ils sont identifiés de cette façon-là.

M. Savoie: C'est ça, oui.

Mme Michaud: Et après, on nous dit: Non, vous ne connaissez pas ça assez bien, et on voudrait venir nommer à votre place. Mais on se demande comment le gouvernement pourrait nommer à notre place.

M. Savoie: On ne voudrait pas nommer.

Mme Michaud: On ne sait pas. C'est ça qu'on ne comprend pas.

M. Savoie: On ne voudrait pas nommer. C'est purement hypothétique, à ce moment-ci. On ne fait qu'examiner ça, tout simplement. Pour qu'on puisse embaucher tel syndic, par exemple, il y aurait une espèce de consultation.

La Présidente (Mme Hovington): Là, le temps est presque écoulé, M. le ministre.

M. Savoie: D'accord, mais ça m'a donné... Au moins, finalement, il n'y a pas eu de réaction. On n'a pas déchiré sa chemise ipso facto sur le coup de la proposition. C'est intéressant, et on aura l'occasion d'échanger à nouveau là-dessus.

M. Laviolette: Par définition, les syndics doivent faire preuve de beaucoup de retenue dans l'exercice de leurs fonctions, alors il n'y a pas eu de chemise ou d'éclat...

M. Savoie: Non, mais je parlais surtout de la présidente.

M. Laviolette: Ah bon! O.K.

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Hovington): Alors, au nom des membres de la commission de l'éducation, laissez-moi vous remercier d'être venus nous présenter votre excellent mémoire. Merci de votre collaboration. Au revoir.

Mme Michaud: Merci. Bonsoir.

La Présidente (Mme Hovington): Alors, j'inviterais l'Ordre des arpenteurs-géomètres du Québec à bien vouloir prendre place, s'il vous plaît. Alors, nous avons l'Ordre des arpenteurs-géomètres du Québec avec nous, représenté par M. Gaétan Groleau, membre du comité administratif.

Ordre des arpenteurs-géomètres du Québec (OAGQ)

M. Groleau (Gaétan): C'est ça, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Hovington): Bonsoir M. Groleau. Et vous avez avec vous M. Gilles Legault, syndic.

M. Legault (Gilles): Bonsoir, madame.

La Présidente (Mme Hovington): Bonsoir, et bienvenue à la commission. Vous avez 20 minutes...

M. Groleau: Merci.

La Présidente (Mme Hovington): ...pour nous présenter votre mémoire.

M. Groleau: Merci. Mme la Présidente, M. le ministre, mesdames et messieurs de la commission, l'Ordre des arpenteurs-géomètres du Québec désire rapidement vous remercier et est très heureux que cette distinguée commission lui consacre une période de temps pour échanger sur cet avant-projet de loi modifiant le Code des professions. Et j'entame directement l'exposé.

L'Ordre des arpenteurs-géomètres du Québec souscrit entièrement aux propos contenus au mémoire du Conseil interprofessionnel du Québec. Notre corporation s'autogère depuis plus de 111 ans, et jamais nous n'avons eu à déplorer une situation où nos dirigeants ont été pris en flagrant délit de non-protection du public. Le gouvernement a voulu nous confier le soin de protéger le public en régissant l'admission à la pratique et la pratique elle-même. Tout va à merveille, pourquoi le modifier? L'Office des professions peut témoigner de l'excellent travail exécuté par l'Ordre des arpenteurs-géomètres du Québec afin de remplir adéquatement les prescriptions du Code des professions.

L'Ordre des arpenteurs-géomètres du Québec s'interroge sur les raisons motivant d'aussi nombreux changements au Code des professions. Nous avons, dans notre loi, depuis plus de 100 ans, le contrôle sur l'admission des nouveaux membres. Vous nous le subordonnez à l'Office des professions. Pourquoi? Le système a toujours très bien fonctionné, et voilà que vous le perturbez au profit d'un organisme gouvernemental qui veut justifier son existence. Le comité des plaintes est aussi un moyen d'augmenter la lourdeur du système et de fournir à l'Office des situations inutiles où ils sauront justifier leur présence onéreuse. Le système fonctionne bien actuellement, on peut l'améliorer, mais il ne faut pas le détériorer en l'alourdissant.

Dans ce mémoire, nous désirons ajouter nos commentaires portant sur des aspects particuliers des modifications suggérées et nous voulons nous attarder aux changements concernant notre loi sur les arpenteurs-géomètres et le comité des plaintes.

En conclusion, nous sommes en faveur d'améliorations au système. Nous sommes contre une réforme faite en vitesse et sans consultation profonde du milieu. Nous sommes contre des modifications visant à résoudre des cas particuliers. Les conséquences sont lourdes monétairement, et une réflexion appropriée est de mise.

L'Ordre des arpenteurs-géomètres du Québec a été créé en 1882. Depuis lors, nous avons maintenu pour le public les plus hauts standards de qualité de nos actes professionnels. Nous avons maintenu des contrôles sur la pratique de nos membres. Nous nous sommes autogérés depuis toujours, et cela fonctionne. L'arrivée du Code des professions a permis simplement de démontrer l'efficacité de notre système d'autogestion.

Nous sommes actuellement 950 membres. Nous payons la troisième cotisation la plus élevée parmi les ordres professionnels. Nous sommes donc très sensibles à toute initiative pouvant augmenter ce fardeau. Les charges prévues au Code des professions sont lourdes. Nous sommes peu nombreux à payer et la récession a fait des dommages. Nous avons la sensibilité de payer à fleur de peau. Nous vous demandons de tenir compte de la diversité des corporations professionnelles. Si vous désirez régler des comptes particuliers avec certaines, n'imposez pas un fardeau inutile à toutes les autres. Nous avons toutes des particularités différentes, et s'imaginer qu'un seul moule peut satisfaire les exigences particulières de chacune est une erreur. Les mesures doivent être d'ordre général et doivent établir un cadre assez large pour permettre une évolution appropriée de chacune.

Commentaires généraux concernant l'admission à la profession. Nous contrôlons l'admission à la profession à partir de notre loi. Le mécanisme est simple: nous faisons passer des examens écrits et oraux et nous exigeons un stage de formation professionnelle, tout cela dans le seul but de nous assurer des candidats de qualité pour garantir à nos clients un service effectué selon les plus hauts standards des règles de l'art.

Nous ne contingentons pas. Nous contrôlons la qualité de la formation et de la préparation des candidats.

Nous tenons au pouvoir des examens dans notre loi; c'est sécurisant. Il nous a été donné par le législateur, et nous tenons à ce qu'aucun intermédiaire ne s'infiltre entre lui et nous. Nous sommes assez matures pour le posséder; nous l'avons prouvé par l'épreuve du temps et nous ne voulons pas le subordonner au pouvoir de l'Office des professions. Vous nous enlevez une partie de ce que nous sommes. Nous ne voulons pas exister à travers l'Office des professions. Nous voulons demeurer l'Ordre des arpenteurs-géomètres du Québec, avec le plein contrôle sur l'admission de nos membres.

Nous pratiquons une profession reconnue au Québec, nous voulons en être redevables au gouvernement représentant le public acheteur des services professionnels. Cette affirmation n'exclut pas la nécessité d'avoir un organisme de surveillance des ordres professionnels. Nous privilégions un organisme réduit à la taille strictement nécessaire à remplir un rôle de surveillance et non un organisme qui coûte 3 000 000 $ par an.

En ce qui a trait au comité des plaintes, la dénomination de ce comité est déficiente. Une plainte, au sens du Code, est celle qui est dûment portée par le syndic ou une autre personne, de façon formelle, au comité de discipline. Les écrits ou demandes du public auprès du syndic sont des demandes d'enquête ou des récriminations. Le terme «plainte> est employé dans l'avant-projet de loi selon deux sens différents: la plainte formelle et la plainte d'un client auprès d'un syndic.

Ce comité des plaintes aura un travail énorme. Il révisera ce qui est déjà réglé et que les clients, en grande majorité, ont déjà trouvé acceptable. C'est un travail inutile et onéreux. En revanche, un comité réviseur des décisions du syndic, sur demande du plaignant, serait souhaitable pour démontrer la transparence du système aux personnes n'ayant pas été satisfaites des décisions du syndic. Nous pourrions exiger du syndic de mentionner l'existence de cette possibilité de recours dans toute correspondance finale dans un dossier. Si l'introduction de ce comité vise à régler des cas particuliers, nous vous prions de ne pas en faire payer le prix aux corporations qui s'acquittent bien de leurs responsabilités. Le coût inhérent à l'implantation d'un semblable comité est considérable.

Et maintenant, nos commentaires sur certains articles de Pavant-projet de loi. À l'article 12, entre autres, on dit que — vous êtes sûrement au courant — l'Office doit notamment établir un formulaire de demande d'enquête, un formulaire de plainte propre à favoriser l'exercice de tout recours. Nos commentaires sont, sur ce sujet, que ces formulaires sont plus compliqués que le système que nous employons actuellement et qui consiste en une simple lettre. L'enquête complète les renseignements manquants. (21 h 10)

À l'article 12.1, l'Office peut, par règlement,

adopter des règles concernant la conduite de ses affaires et fixer les modalités de la collaboration de la corporation intéressée avec les autorités des établissements d'enseignement du Québec. Nous nous interrogeons sur le véritable pouvoir de l'Office de prescrire aux établissements d'enseignement, cégeps ou universités, des modalités de collaboration. Ces organismes sont aux prises avec des syndicats d'enseignants et des contraintes budgétaires qui font en sorte que tout changement au programme d'enseignement nécessite un temps considérable et des coûts quelquefois élevés. Nous croyons utopique l'application de cet article.

À 15.1, où on dit que l'Office peut enquêter sur toute corporation, pour nous, il s'agit d'un nouveau pouvoir d'enquête allant au-delà de la mission de surveillance. Il y a d'attachés à ce pouvoir des coûts qui seront défrayés par les corporations professionnelles.

À 15.2, vous dites que la personne peut prendre connaissance et copie de tout document au dossier. Il s'agit encore, pour nous, d'un nouveau pouvoir incompatible avec la fonction de surveillance de l'Office des professions. Il y aura des coûts inhérents.

À 15.3, vous nous dites qu'il est interdit d'entraver toute personne qui effectue une enquête. Il s'agit d'un trop grand pouvoir pour un organisme de surveillance, à notre avis. L'enquête sur une corporation professionnelle pourrait être faite par un commissaire nommé spécifiquement par le gouvernement.

À l'article 34, on spécifie que l'article 32 n'empêche pas la personne qui a réussi un programme d'études conduisant à l'obtention d'un diplôme de faire un acte réservé à un professionnel. Nos commentaires là-dessus sont que nous comprenons que nos examens d'admission disparaissent et que nous serions obligés d'admettre un candidat qui aurait le diplôme requis donnant accès à l'Ordre des arpenteurs-géomètres du Québec. Nous sommes complètement opposés à cette mesure. Nous avons le devoir de contrôler la qualité des candidats, et ce n'est pas avec le faible pouvoir sur les universités et la collaboration déficiente avec les établissements d'enseignement que nous réussirons à contrôler l'admission. Le système actuel est satisfaisant.

À l'article 86, on dit que le bureau, par résolution, collabore à l'élaboration et à la révision des programmes d'études. À notre avis, le mot «collabore» est nettement insuffisant. Il est, par expérience, impossible de faire bouger une université. Les contraintes de syndicats et de budgets sont énormes. Cet article de l'avant-projet est utopique. Il faut revoir le processus d'élaboration, plutôt.

À 86.01, le bureau peut former des comités, déterminer leurs pouvoirs. Nous comprenons que nous aurons ici le pouvoir de recréer notre comité des examinateurs que Favant-projet fait disparaître. Ce comité aurait les mêmes pouvoirs que ceux existant actuellement dans notre loi. Pourquoi ce changement inutile, sinon une subordination à l'Office des professions?

À 88.1, on dit que le bureau doit déterminer une procédure de conciliation des différends. C'est une excellente initiative. Ce comité allégerait le travail du syndic. En revanche, une utilisation abusive de ce comité peut facilement survenir, les requérants pouvant être nos membres ou le public. Des coûts supplémentaires seront à prévoir.

À 94, vous dites que le bureau peut, par règlement, établir des règles concernant la conduite de ses affaires et déterminer les modes de communication. En c, vous avez supprimé l'aspect conservation de dossiers et, en d, supprimé la tenue de bureau. Nous sommes contre la suppression des paragraphes c et d, parce qu'il est nécessaire d'établir des normes de tenue de bureau et de conservation du greffe, à notre avis.

Au même article, en e, on disait de définir les différentes classes de spécialité au sein de la profession et de déterminer, en i, les autres conditions et modalités de délivrance des permis. Pour nous, le pouvoir que l'avant-projet de loi nous enlève sur les examens d'admission se retrouve dans cet article. Pourquoi le subordonner à l'Office des professions? Nous possédons ce pouvoir, et tout va bien. Pourquoi réparer ce qui n'est pas brisé?

À 95.2, un règlement ne peut être adopté en vertu des paragraphes que si le secrétaire de la corporation en a transmis le projet à l'Office au moins 60 jours avant la date prévue pour son adoption. Nos commentaires, c'est que nous sommes d'accord avec cet allégement du processus d'adoption des règlements.

À 118, le bureau de chaque corporation nomme le secrétaire de son comité de discipline. Il tient un rôle d'audience, et le rôle d'audience est accessible au siège social. Nous sommes en plein accord avec cet éclaircissement des règles concernant la tenue d'un rôle pour le comité de discipline.

À 122.1, un comité d'examen des plaintes est constitué au sein de chacune des corporations. Ce comité n'est pas un comité des plaintes, à notre avis, c'est un comité d'examen des demandes d'enquête.

Et, à 122.2, avant de conclure qu'une demande d'enquête ne justifie pas de porter une plainte devant le comité de discipline, le syndic, dans les cinq jours de la fin de son enquête, demande l'avis du comité d'examen des plaintes et, dans les 60 jours de la date de la demande d'avis, le comité d'examen des plaintes rend son avis. Tous les délais mentionnés ici ne tiennent pas compte de la réalité des activités d'un syndic et des contraintes inhérentes à l'enquête sur un dossier. Les délais sont nettement insuffisants.

Une analyse systématique de toutes les décisions du syndic est une aberration, à notre avis. C'est un travail inutile et très coûteux. Nous avons, à l'Ordre des arpenteurs-géomètres, environ 150 demandes d'enquête par an, la ventilation des récriminations étant approximativement la suivante: 70 % se résolvent après une rencontre et des explications au client; 10 % sont des insatisfactions non justifiées que le client n'admettra jamais; 10 % sont des insatisfactions justifiées mais

mineures et 10 % se retrouvent en discipline.

Nous aurions besoin du comité aviseur pour environ 20 demandes possibles par an. Sur ces 20 demandes, nous supposons que le client désirerait se faire entendre par le comité dans environ 5 à 10 cas par an, ce qui est raisonnable, conforme à la réalité et acceptable par le système.

À 122.3, le syndic informe le comité d'inspection professionnelle sur l'exercice de la profession par un professionnel qui doit faire l'objet d'une vérification. C'est une excellente modification. Elle permettrait au comité d'inspection professionnelle d'être plus précis et pertinent dans ses enquêtes.

À 123, on dit que, si le syndic n'a pas terminé son enquête dans les 60 jours, il doit, dans les 15 jours de l'expiration, etc. Complètement inapplicable, à moins de coûts astronomiques. Les délais font fi de notre réalité du terrain. C'est utopique. Des malades meurent dans les hôpitaux en attente de disponibilité de soins, et vous nous demandez des délais de 60 jours pour satisfaire quelqu'un qui croit que sa clôture est mal située?

À 124 et 128, une plainte peut être portée par toute autre personne, laquelle ne peut être poursuivie en justice en raison d'actes accomplis de bonne foi dans l'exercice de ce pouvoir. Le secrétaire du comité de discipline doit prêter assistance.

Nos commentaires sont: Nous avons des personnes qui veulent porter plainte contre des arpenteurs-géomètres décédés ou bien contre des arpenteurs qui ont vu leur rapport d'expertise entériné par la Cour supérieure et que l'on persiste à vouloir poursuivre au comité de discipline. On utilise le mécanisme des comités de discipline pour faire pression sur l'expert arpenteur-géomètre officiant à un bornage afin de modifier ou d'influencer ses conclusions. On l'accuse alors de partialité, de subjectivité, de faux, etc. Dans tous les cas connus, l'arpenteur-géomètre s'en est sorti, mais à quel prix? Des frais d'avocat considérables, du temps consacré à sa défense en face d'individus qui profitent allègrement du système. Et vous voulez qu'on leur prête assistance?

Cette obligation est trop large. Il faut la restreindre. Que l'on soumette cette personne au comité aviseur du syndic afin que ce comité l'entende et ordonne, s'il y a lieu, au secrétaire du comité de discipline d'aider cette personne à rédiger cette plainte. On pourrait faire aussi affaire avec les gens de l'ACEF ou les associations de consommateurs.

À 138, on parle de la constitution du comité de discipline selon une liste d'avocats que dresse le gouvernement après une consultation du Barreau. On est d'avis que ces nominations devraient être approuvées par un comité de présidents de corporations professionnelles ou de syndics, au préalable.

Au même article 138, on dit aussi que le comité de discipline peut siéger en division, et le bureau peut déléguer ce pouvoir de nomination au secrétaire du comité de discipline. À notre avis, déléguer ce pouvoir au secrétaire du comité de discipline n'est pas souhaitable. Cette personne est l'employée de l'Ordre et peut être soumise à des pressions. Le bureau, en réunion, doit garder ce pouvoir et nommer les membres du comité de discipline.

À 141, on dit que l'audience est enregistrée et, à défaut d'entente, l'audience est enregistrée par voie mécanique. Nos commentaires sont que l'enregistrement mécanique n'est pas disponible facilement, qu'il faudrait garder l'obligation de procéder par sténographe officiel, à défaut d'entente.

À 151, on dit que le comité peut condamner le plaignant ou le professionnel aux déboursés des frais d'enregistrement, des frais d'expertise et, en cas de condamnation, des frais de déplacement. Ma suggestion pourrait être que vous pourriez ajouter les frais de transcription des auditions aux déboursés.

Le comité de discipline rend sa décision dans les 90 jours de la prise en délibéré. Et comment! Nous attendons des mois avant d'avoir une décision. Voilà une saine recommandation.

À 161, le professionnel radié du tableau, ou dont le droit d'exercer des activités professionnelles a été limité ou suspendu, peut demander son inscription par requête adressée au comité de discipline. Selon nous, il faudrait prévoir que l'opinion du syndic et sa présence soient un minimum nécessaire avant de rendre une décision.

En conclusion, la Loi sur les arpenteurs-géomètres, c'est une grosse entité pour nous. Nous sommes contre toute modification à notre loi. Elle est notre identité depuis trop longtemps pour que l'on accepte facilement la disparition des pouvoirs essentiels à la protection du public. Nous sommes contre toute modification à notre loi. Elle est notre identité. Nous sommes en faveur d'un comité réviseur des décisions du syndic, sur demande du plaignant. Nous demandons le maintien de la diversité des ordres professionnels. Il ne faut pas régler des cas particuliers sur le dos de l'ensemble.

Nous sommes contre un changement du rôle de surveillance de l'Office. Nous payons déjà trop cher. Et, comme le dirait ce proverbe latin que vous connaissez sûrement: «If it is not broken, do not fix it», que je vous traduirai par: «On est toujours pour la transparence et l'amélioration, en autant que ça ne coûte rien.»

Merci de votre écoute. (21 h 20)

La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup, M. Groleau.

M. le ministre, vous avez la parole.

M. Savoie: Oui. Merci, Mme la Présidente.

Je voudrais tout d'abord saluer les représentants de l'Ordre des arpenteurs-géomètres, qui ont pris le temps de rédiger un mémoire et de nous faire certains commentaires qu'on aura l'occasion de commenter ensemble. Merci à M. Groleau pour sa présentation, et j'aimerais souligner la présence de M. Legault, le syn-

die de la corporation.

Les arpenteurs-géomètres, tout simplement pour les fins du dossier, en 1991-1992, le rapport annuel nous dit qu'ils étaient 930 membres. Ils ont des revenus de l'ordre de 1 000 000 $ pour la gestion de leur corporation professionnelle, et c'est une corporation, effectivement, qui est là depuis longtemps, sur la scène québécoise des officiers publics partagée seulement par quelques corporations professionnelles au Québec.

Des commentaires au niveau de la consultation. Vous avez été consultés. Vous avez été consultés sur différents éléments. Je pense, par exemple, à une lettre qui vous a été adressée, à laquelle vous avez répondu. Au niveau de la consultation, par exemple, on posait différentes questions concernant — je ne sais pas, moi — l'abrogation de pouvoirs déjà prévus à l'article 94i du Code des professions. Vous avez répondu que vous étiez d'accord avec l'abrogation: Nous sommes d'accord avec l'abrogation, c'étaient vos commentaires. Dans votre mémoire, vous nous dites: On est contre l'abrogation. Vous comprendrez que ça devient mêlant par bouts. Mais on comprend qu'il y a eu un changement d'idée et on comprend que, peut-être, dans l'ensemble de la révision, vous avez jugé bon de ne pas maintenir votre position d'être pour. Ce n'est pas pire que ça.

Vous permettrez... Je trouve que les commentaires sont plutôt durs, hein. On sent toujours un sens de l'humour, c'est toujours agréable, mais, en tout, c'est dur, des affirmations assez gratuites parfois. Vous revenez toujours sur le fait: «If it is not broken, do not fix it». Notre position, c'est que: «It is so broken, it does not work». C'est un peu ça, la concertation qui se fait. Il faut intervenir, je pense, peut-être pas au niveau des structures, mais certainement au niveau du fonctionnement, faire un effort de sensibilisation, faire un effort d'intervention pour rallier, finalement, l'ensemble des corporations professionnelles à des approches qui peuvent donner des résultats.

Il y a un questionnement qui peut se faire. Si on regarde la feuille de route de votre corporation, ça s'applique à vous comme à d'autres. Mais vous comprendrez que, pour quelqu'un de l'extérieur, un citoyen qui regarde ça, il a le droit de se poser des questions. Vous dites que vous recevez combien de plaintes par année, de demandes d'information et d'enquête? Peut-être que M. Legault pourrait...

M. Legault: Environ 150.

M. Savoie: Environ 150. C'est ça. Demandes... C'est-à-dire, ça, là, c'est... Non, non, les demandes reçues d'information, pas les demandes retenues, simplement ce que vous recevez comme demandes d'information et d'enquête.

M. Legault: Les 150 sont des demandes écrites qui ne tiennent pas compte des demandes verbales.

M. Savoie: Oui, c'est ça, mais, de façon générale, en dehors de ce qui est écrit. Là, ce que vous avez, dans 140 pour l'année 1991-1992, 114 pour 1990-1991, c'est 140 demandes retenues pour enquête.

M. Legault: C'est ça.

M. Savoie: Combien de demandes générales?

M. Legault: Elles sont toutes là-dedans, là. Elles sont toutes là-dedans. Dans les 140, il y en a une grande partie, comme on le mentionnait...

M. Savoie: Oui.

M. Legault: ...environ 70 % qui... au départ, la personne appelle ça une plainte, mais aussitôt qu'on lui donne les renseignements nécessaires, ça satisfait la personne en question et...

M. Savoie: D'accord.

M. Legault: ...ça fait 70 % de réglé.

M. Savoie: O.K. Alors, on va fonctionner avec vos données, là. Ici, on parle de 140 demandes écrites.

M. Legault: Oui.

M. Savoie: Pour enquête.

M. Legault: Oui.

M. Savoie: C'est parce que les autres corporations, ce qu'elles nous donnaient comme information, je présumais que c'était assez étendu, comme pratique. On va recevoir, par exemple, 400 demandes. Là-dessus, il y en a 140 qui entrent par écrit, parce que ce n'est pas tout le monde qui... Il y a des gens qui téléphonent, veulent avoir l'information. Bon. Alors, finalement, les 140, ce sont les citoyens intervenants qui ont écrit une lettre, uniquement. Alors, finalement, là, les demandes reçues, les demandes d'information, ça risque d'être nettement supérieur, ça.

M. Legault: Ah! nettement supérieur. Il y a... Excusez-moi.

M. Savoie: On parle de quoi? 400, 500?

M. Legault: Ah, mon Dieu! Une dizaine par jour, en moyenne.

M. Savoie: Pardon?

M. Legault: Une dizaine de demandes de renseignements ou... Ça commence...

M. Savoie: Par jour de travail, là.

M. Legault: ...par certaines récriminations, mais qui sont, cette fois-là, verbales, au téléphone.

M. Savoie: On parle, disons, de 2000 personnes, parce qu'il y a 200 jours ouvrables, à peu près...

M. Legault: 2000 personnes qui se posent des questions.

M. Savoie: Bon. 2000 personnes qui se posent des questions; 140 déposent une plainte écrite.

M. Legault: Déposent un document écrit.

M. Savoie: O.K. Document écrit. 49 sont réglés dans le rapport pour 1991-1992 et 1 plainte est portée devant le comité de discipline. Une sur 2000 appels, sur 140 plaintes écrites. Vous comprendrez que ça s'explique, là. Et je pense que M. Groleau a cherché à l'expliquer; il a cherché à donner, à fournir... Et, entre nous, ça peut se comprendre, du moins pour une partie, là. Mais vous comprendrez que le citoyen qui regarde ça, on va regarder les chiffres de 1990-1991: 114 demandes retenues pour enquête, 114; 30 enquêtes réglées et 2 plaintes portées devant le comité de discipline. C'est ça. Alors, c'est parce qu'il n'y en a pas beaucoup, là.

M. Legault: Vous avez...

M. Savoie: Et on se demande... Effectivement, on peut partager vos explications, mais ce n'est pas ça, le fait. Le fait n'est pas les explications qu'on pourrait fournir. Le fait n'est pas ce qu'on pourrait écrire là-dessus. Le fait, c'est que les chiffres sont là et qu'un citoyen qui regarde ça, là, froidement, n'importe qui qui regarde ça froidement trouve que, sur 140 demandes retenues, qu'il y en ait 1 qui ait fait l'objet d'une plainte, ça fait curieux un peu, hein. On se demande si, effectivement, le mécanisme de la protection du public joue pleinement, là, dans un cas comme ça. C'est un peu ça, et l'exercice est un peu là.

On va revenir, là. Je ne cherche pas des explications. Je comprends que ça peut s'expliquer mathématiquement. On peut arriver au total, puis il y a des choses encore en suspens, peut-être. Mais vous comprendrez que sur deux ans et trois ans — et on a des données, là, depuis le départ — bien, ça ne fait pas une tonne. Tu sais, on ne sent pas, là, qu'il y a une évolution ou qu'il y a eu des abus au niveau de l'utilisation du comité de discipline ni du tribunal, parce que le comité de discipline, en 1987, 0; 1988, 5; 1989, 1. Ce n'est pas... Tu sais, ce n'est pas... C'est un peu ça.

Et on avait discuté, et on avait échangé sur la notion de perception, le fait que le public s'attendait à ce que, effectivement, lorsqu'il présente une plainte, ça donne des résultats, soit une lettre disant: Bien, on ne vous reçoit pas — de la part du syndic — pour tel motif. Et puis, là, il n'y a plus d'endroit, vraiment, pour s'adresser, à moins d'aller au comité de discipline, au tribunal. C'est des processus qui sont lourds pour le citoyen, pour une personne qui, finalement, n'a pas d'expérience de ces corporations. Alors, c'est pour ça qu'on avait pensé au comité des plaintes. Et on regarde vos commentaires sur le comité des plaintes, puis on voit que ce n'est pas très favorable. Ha, ha, ha!

M. Legault: Non. Ha, ha, ha! Mais, là, c'est parce que...

M. Savoie: Je veux dire, ce n'est pas favorable du tout. Oui, mais je n'ai pas tout à fait terminé.

M. Legault: C'est ça. O.K.

M. Savoie: Je vais vous laisser la chance d'intervenir.

M. Legault: Je fais juste prendre des notes.

M. Savoie: Oui.

M. Legault: C'est parce que je bous.

M. Savoie: C'est parce que je suis un petit peu sur une erre d'aller, là, et ça va bien.

M. Legault: Allez-y. (21 h 30)

M. Savoie: Je dis ça comme ça, là. Au niveau de votre corporation, par exemple, je crois que c'est la seule corporation où le syndic est également directeur général et également secrétaire de la corporation. C'est exact, ça?

M. Legault: Je ne sais pas si c'est la seule.

M. Savoie: Ah! je crois que c'est la seule. Je crois que c'est unique au niveau des corporations professionnelles où le directeur général est également secrétaire et également syndic d'une corporation professionnelle. Bon. C'est un mécanisme qui peut fonctionner, parce que j'imagine qu'il est assisté, j'imagine qu'il y a d'autres intervenants. Je ne dis pas, là, que, ipso facto, il y a des problèmes. Tout ce que je vous dis, c'est que, pour quelqu'un qui regarde ça de l'extérieur, ce n'est pas quelque chose qui est particulièrement, de prime abord, à l'abri de tout soupçon de difficultés au niveau de l'application du code de déontologie.

C'est un peu ça, et c'est ça qu'on cherche à déterminer ensemble pour que, justement, le public se sente plus «sécure». Le citoyen qui arrive et qui dépose une plainte... Je ne parle pas d'un hold-up, je parle de quelque chose de relativement simple où il s'attend à un comportement professionnel. Il ne l'a pas reçu, il dé-

pose une plainte. S'il se fait refuser parce que ce n'est pas couvert par le code ou qu'il n'y a pas suffisamment de preuves, bien, il n'y a pas de mécanisme. Il dit: Bon, bien oui, j'ai adressé une plainte, mais ça n'a pas été retenu. C'est un arpenteur-géomètre qui m'a dit que, non, mon idée n'était pas bonne, effectivement, que ce n'était pas une bonne orientation. Vous comprendrez que l'apparence laisse à désirer.

M. Groleau: Juste pour commencer. M. le ministre, notre mémoire peut paraître un peu dur...

M. Savoie: Dur, oui.

M. Groleau: ...peut-être, mais on est pour la transparence dans tout ça, sûrement. Et je pense que, Gilles, tu voudrais compléter et répondre. Tu bouillais tantôt, là...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Savoie: Je pense que quelqu'un est mieux de répondre, hein.

M. Legault: J'ai retenu, M. le ministre, si vous me permettez, quatre volets à votre question. Le premier volet, c'est sur le nombre de plaintes que j'aimerais avoir juste le temps de vous expliquer rapidement. Le deuxième, c'est sur le fameux comité des plaintes et, le troisième, c'est le rôle de directeur général, secrétaire, syndic. Ça va? Le quatrième, je l'ai relié avec le deuxième pour aller plus rapidement. Bon.

Les 140 plaintes de l'Ordre des arpenteurs-géomètres, mis à part les 10 appels par jour de gens insatisfaits ou de gens qui posent des questions, arrivent à l'Ordre des arpenteurs-géomètres. Il y a des dossiers qui sont ouverts pour les 140. Il y a des lettres envoyées au plaignant immédiatement, en lui disant: Oui, madame, nous avons votre dossier, il y a un numéro de dossier qui vous est donné. Voici votre numéro de dossier. Si vous faites appel à nous, mentionnez-le. Bon. Immédiatement, il y a un avertissement à Farpenteur-géomètre, lui disant: On a reçu une plainte sur tel sujet; veuillez, dans les 10 jours, nous donner votre avis. Ça va?

Les plaintes reviennent. Suite à ça, étant donné que le syndic a aussi 15 adjoints à temps partiel dans la province de Québec, chacun de ces dossiers-là est confié à des syndics adjoints dans la province, dans le lieu, ou à peu près l'endroit, pour que ça coûte moins cher et aussi pour que ce syndic adjoint là n'ait en tête que deux, trois ou cinq dossiers à s'occuper. Et, à ce moment-là, le soir, en se couchant, il pense à son dossier sans que ça ne coûte rien à l'Ordre des arpenteurs-géomètres. Il s'occupe donc de ses dossiers, quatre ou cinq, et il prend contact avec la madame. Je l'appelle une madame, ça peut être un monsieur. Il prend contact avec la madame et avec l'arpenteur-géomètre pour régler le problème spécifiquement, de personne à per- sonne, en allant même sur les lieux, en regardant les documents, et tout ça. et ça, là, c'est pour ça qu'on se retrouve avec peu de plaintes qui vont cheminer jusqu'au comité de discipline, parce qu'on prend le temps d'aller — et le système est fait pour — expliquer à chacune des personnes. mais, attention! attention! nous ne sommes pas tous des anges. il y a, à l'intérieur de ça, des démons, et les démons viennent au comité de discipline dans la proportion des autres ordres professionnels, environ 6 96, 7 % ou 8 %. o.k.? parce que, règle générale, on est sécuritaire.

Mais, ce que je voulais vous dire aussi au niveau des six, sept, huit ordres professionnels... Là, je suis en train de perdre mon fil. Bref, les 140 sont analysés une par une, et la conclusion est faite. Une fois qu'on a décidé d'aller en discipline, il y a un comité aviseur du syndic, formé de syndics adjoints et, règle générale, du procureur de l'Ordre. On regarde la plainte, on regarde chacun des chefs et on dit: Bien, là, écoute, on ne peut pas passer autrement, il faut qu'il passe par là, il doit être mis en face de la faute qu'il a commise. Et là le processus disciplinaire s'enclenche.

Savez-vous là où on a des problèmes? C'est là que ça commence, les problèmes. Parce que, avant, on n'en a pas, de problèmes. Nous contrôlons tout ça. Les syndics adjoints vont voir les clients, vont voir les arpenteurs-géomètres, refont les rapports, écrivent au client, au plaignant. Tout va bien. C'est lorsqu'on dépose une plainte en discipline que le mal commence, qu'on commence à avoir du mal, qu'on commence à avoir des difficultés, des problèmes. Les délais sont énormes. Je ne sais pas, moi, par exemple au mois d'avril l'année passée, nous sommes allés à Hull pour un cas extrêmement difficile, un cas spécial. On attend encore le jugement. Et c'était en avril l'année passée.

Dernièrement, la semaine dernière, au comité de discipline, nous avons poursuivi un arpenteur-géomètre. Il a plaidé coupable sur les sept chefs. Parfait, c'est très bien, ça va aller vite, cette fois-là. Tout le monde retourne chez lui. Quinze jours après, l'avocat de l'arpen-teur-géomètre fait une requête en disant: Mon arpenteur-géomètre, les sept chefs, il a plaidé coupable par erreur. Il ne savait pas que c'était grave. Il ne savait pas ce qu'il pouvait avoir comme conséquence. Mais vous savez qu'on est en délibérations pour pouvoir peut-être recommencer à partir de zéro pour lui donner toute la chance possible. Alors, c'est là que le système est enrayé, à mon avis, où on a le plus de difficultés.

M. Savoie: Et comment ça...

M. Legault: Et ça évite... Excusez-moi, M. le ministre. Ça n'incite pas un syndic à mettre des plaintes dans le système.

M. Savoie: D'accord. C'est parce que c'est ça, là. On constate que... C'est parce que, nous, ce que

nous avons ici, c'est une plainte déposée, portée devant le comité de discipline pour l'année 1991-1992. Une. Et nous en avons...

M. Legault: Je m'excuse. À quelle page, M. le ministre?

M. Savoie: Non, c'est dans votre rapport annuel. M. Legault: Oui, à quelle page? 15?

M. Savoie: Bien là, c'est un résumé, une fiche synthèse à partir de votre rapport annuel.

M. Legault: Parce que... Je ne veux pas... C'est plus qu'une plainte, là. C'est...

M. Savoie: C'est plus qu'une plainte?

M. Legault: C'est marqué: «Un dossier est en préparation pour le comité de discipline».

M. Savoie: Oui.

M. Legault: Mais, en préparation pour le comité de discipline, il y avait d'autres causes. Cette année, les causes suivantes ont été entendues. Il y en avait deux. Il y avait eu trois causes d'inscrites en comité de discipline. On les voit, les noms sont là.

M. Savoie: Oui. Combien? Trois?

M. Legault: Trois, et une en préparation. Et il y en avait deux qui dataient des années suivantes. À la page 15 de notre rapport annuel.

M. Savoie: Bon. J'ai la page 15 de votre rapport. Quarante-neuf dossiers sont clos, ça marche. Vous avez 52 dossiers en cours d'enquête, c'est-à-dire que ça compte... Un dossier est en préparation.

M. Legault: Est en préparation. M. Savoie: C'est ça.

M. Legault: Les autres étaient déjà en comité de discipline.

M. Savoie: O.K. Et, ensuite, vous avez 38 dossiers qui sont des lettres que les clients vous envoient pour mettre de la pression sur...

M. Legault: C'est ça.

M. Savoie: ...le professionnel. Ce sont des demandes d'arbitrage. Oui. Et 40 dossiers perdurent des années précédentes. C'est ça?

M. Legault: C'est ça.

M. Savoie: Alors, c'est ça. Cette information que nous avons à partir de votre rapport annuel, c'est qu'il y a une plainte portée devant le comité. Et c'est ce que votre rapport annuel nous dit.

M. Groleau: Mais, si vous allez un peu plus bas, M. le ministre, il y a les causes en discipline dans le rapport.

M. Savoie: Un peu plus bas. Les causes...

M. Legault: «Les causes suivantes sont inscrites au comité de discipline».

M. Savoie: Ah oui! D'accord. C'est beau. Je vois ça, qu'il y a... Les causes suivantes sont inscrites au comité de discipline: une, deux et trois. O.K. Ça fait que, finalement, vous avez quatre causes...

M. Legault: L'année passée, oui.

M. Savoie: ...devant le comité de discipline, et non pas une, comme dans le rapport qu'on a ici.

M. Legault: Est-ce que je peux faire juste une parenthèse?

M. Savoie: Oui.

M. Legault: Et ça, là, j'avais pris ça en note. Ce serait extrêmement intéressant que quelqu'un de l'Office vienne nous rencontrer pour pouvoir tirer des chiffres de notre rapport annuel. À un moment donné, il y a eu des taux, là, ou des barèmes de sortie, ou des indices. Le tableau, un fameux tableau d'indices. Mais il y avait, à l'intérieur de ça, des interprétations du rapport annuel sans qu'on ne vienne chercher la vraie information chez nous. Peut-être qu'on n'est pas assez clairs dans notre rapport annuel, je l'avoue. Mais j'aimerais ça, de temps en temps, que quelqu'un de l'Office vienne s'asseoir à nos bureaux et qu'on passe un avant-midi à faire le tour. Excusez-moi, je referme ma parenthèse, M. le ministre.

M. Savoie: Non. C'est parce que le rapport...

M. Legault: Mais vous avez raison pour le rapport.

M. Savoie: ...a été transmis à l'Ordre pour approbation. Au niveau, justement, des syndics, le comité des plaintes, je présume que, si c'est bien balisé, si c'est un petit peu mieux défini, ça ne présentera pas de difficultés avec votre corporation professionnelle. C'est ça?

M. Legault: Absolument pas.

M. Savoie: Bon...

M. Legault: Je m'excuse...

M. Groleau: Non, non. C'est beau. (21 h 40)

M. Legault: Absolument pas, parce que le comité — non pas des plaintes, on va l'appeler le comité aviseur du syndic — va tout simplement permettre de mettre...

M. Savoie: Non, non, non. M. Legault: ...en lumière... M. Savoie: Non, non. M. Legault: ...les efforts.

M. Savoie: On n'appellera pas ça le comité aviseur, on va appeler ça le comité des plaintes.

M. Legault: Mais ce n'est pas une plainte encore, M. le ministre.

M. Savoie: Non, mais c'est ce que nous proposons dans le projet de loi; c'est ça que je veux dire.

M. Legault: O.K. Mais, celui-là.... M. Savoie: Oui.

M. Legault: ...d'une façon systématique... Là, je n'ose pas employer des termes aussi forts que dans le mémoire...

M. Savoie: Oui.

M. Legault: ...mais ce n'est pas réaliste. Ça va coûter une fortune de réviser les 140 dossiers ou les 130 qui ont été réglés. Réviser ça d'une façon systématique par un comité de plusieurs personnes où vont siéger des gens du public... Je n'ai pas de problème avec les gens du public; au contraire, la transparence sera là, mais c'est l'argent et le temps. On va manquer de temps et d'argent.

M. Savoie: Oui, j'imagine que...

La Présidente (Mme Hovington): Je manque de temps pour vous, M. le ministre.

M. Savoie: Oui, je manque de temps, hein. La Présidente (Mme Hovington): Oui.

M. Savoie: Oui, on reviendra là-dessus. Les coûts ne sont pas aussi élevés que ça. Je pense qu'on peut faire la démonstration; si c'était élevé, on ne le ferait pas. Je présume que toute question, par exemple, concernant la nomination ou la destitution d'un syndic, soumettre ça à un organisme qui pourrait se prononcer en tant que comité aviseur, ça ne reçoit pas beaucoup d'avis favorables chez nous, que ce soit le Tribunal des professions ou quelqu'un d'autre, l'Office ou un autre mécanisme comme ça.

M. Legault: Pour la nomination d'un syndic?

M. Savoie: Oui, la nomination ou la destitution d'un syndic.

M. Legault: J'ai peut-être mal saisi la question.

M. Savoie: Oui, j'imagine. Dans le sens qu'on parle... Deux secondes encore? Merci, madame, vous êtes gentille. On parle surtout au niveau de syndics, pour assurer l'indépendance...

M. Legault: Ah oui!

M. Savoie: ...l'autonomie, l'intégrité du syndic.

M. Legault: Oui.

M. Savoie: On est en train de discuter, de voir — ce n'est pas dans Favant-projet de loi, c'est tout simplement pour échanger avec vous — la possibilité, par exemple, que la nomination, la destitution et même, peut-être, des cours de formation de syndics relèvent non seulement de la corporation... La nomination relèverait de la corporation, mais elle pourrait être sujette, par exemple, à approbation également par quelqu'un de l'extérieur de la corporation pour assurer une plus grande indépendance au niveau du syndic.

M. Legault: Tout à fait d'accord. M. Savoie: Oui?

M. Legault: Personnellement, je suis là depuis 1988...

M. Savoie: Oui.

M. Legault: ...et la première qualité d'un syndic, c'est d'être capable d'aimer les gens avec qui il fait affaire, le M. Tout-le-Monde, le public.

M. Savoie: D'accord.

M. Legault: Lorsqu'on les aime, le travail se fait automatiquement. Mais, bon Dieu qu'on est seuls! On est complètement seuls, et la formation se fait sur le tas. Je ne suis pas avocat, je suis arpenteur-géomètre; je ne suis pas notaire non plus...

M. Savoie: D'accord.

M. Legault: ...alors ma formation juridique vient de ce que je connais comme arpenteur-géomètre, mais de ce que j'ai appris aussi en grandissant comme syndic, alors que, si j'avais eu des cours, si j'avais eu de l'aide, si j'avais eu une forme quelconque d'aide, ça aurait été beaucoup plus rapide, peut-être.

M. Savoie: C'est ça. Un mécanisme, peut-être une structure quelconque, soit de l'Office ou du Conseil interprofessionnel.

M. Legault: Tout à fait.

M. Savoie: Le Tribunal, ça ne présente pas de difficultés...

M. Legault: Tout à fait.

M. Savoie: ...pour la protection...

La Présidente (Mme Hovington): Vous avez presque décrit le travail d'un député, monsieur: Seul...

M. Savoie: Sans parler d'un ministre.

La Présidente (Mme Hovington): ...isolé, apprendre sur le tas, aimant les gens.

M. Legault: Ah bien, ça...

La Présidente (Mme Hovington): Merci. Je reconnais la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Merci, Mme la Présidente.

Pendant que vous faisiez votre description, moi, je pensais aussi à mon ancien travail d'attachée politique, effectivement, où on doit apprendre et aimer les gens, écouter, essayer de régler des problèmes aussi, toujours.

M. Groleau, M. Legault, je vous remercie de votre présentation. On peut dire que votre mémoire et les commentaires sont clairs, ils sont directs. Je vais citer seulement deux exemples. Alors, au niveau de l'Office, en page 1: «Le système a toujours très bien fonctionné et voilà que vous le perturbez au profit d'un organisme gouvernemental qui veut justifier son existence.» Et, au niveau des universités, en page 6, je dois dire que, dans les commentaires, l'ensemble des institutions d'enseignement sont touchées aussi: «Le mot "collabore" est nettement insuffisant. Il est, par expérience, impossible de faire bouger une université. Les contraintes de syndicats et de budgets sont énormes.» Donc, l'article est utopique.

Du côté du système de formation, justement, c'est évident qu'il faut qu'il y ait un lien avec les établissements d'enseignement. Comment vous la voyez, cette... Comment on peut les établir, ces liens-là?

M. Groleau: Nous autres, ce qu'on préconise, peut-être, ce serait de refaire le processus d'élaboration parce que, actuellement, je peux vous dire qu'on est en constante discussion avec les universités pour essayer d'améliorer les programmes. Et, juste par expérience ou par... Cette année, admettons, on a eu 10 % des gens qui sont passés à la corporation. Ça vous montre... Nous autres, on veut bien que le cours soit très bon et qu'on ait une qualité, mais pas à n'importe quel prix. O.K.?

Mme Caron: 10 % seulement?

M. Groleau: 10 %. c'est des chiffres partiels que je vous donne, là, en gros, mais c'est très peu. quand on vous disait, tantôt, qu'on ne contingente pas, ça se fait quasiment naturellement. on arrive devant des gens, des fois, et on se pose vraiment des questions. on se dit: qu'est-ce qu'on fait avec ça?

Mme Caron: Mais comment vous pouvez expliquer un si faible taux?

M. Groleau: Pardon? Comment...

Mme Caron: Comment on peut expliquer un taux aussi faible, là?

M. Groleau: Bien, on l'explique chez nous par les cours qui n'ont peut-être pas évolué, d'une certaine manière. On a des professeurs qui sont là, comme on l'expliquait tout à l'heure, bien souvent, avec des conventions collectives, et puis... Même entre les professeurs, on sent qu'il y a de l'animosité, et ça ne change pas comme ça devrait. Ça n'évolue pas comme on voudrait. Donc, comment se battre contre ça? Je ne sais pas quels sont les moyens que vous pouvez donner, nous donner pour qu'on puisse agir et avoir vraiment une orientation claire pour les autres... Je ne sais pas.

Mme Caron: Vous nous avez parlé également, toujours à la même page, du comité des examinateurs...

M. Groleau: Oui.

Mme Caron: ...qui disparaît avec l'avant-projet, et on le recrée aussi, là.

M. Groleau: On le recrée.

Mme Caron: C'est quoi, votre comité des examinateurs?

M. Groleau: Le comité des examinateurs, c'est le comité formé d'arpenteurs-géomètres, qui rédige les examens d'admission à la corporation.

Mme Caron: O.K.

M. Groleau: Donc, par le fait même, avec le nouveau projet de loi, ce que vous faites, vous nous redonnez de la formation de comité qu'on a déjà.

Mme Caron: je vais revenir à vos plaintes. lorsque vous faites la ventilation des récriminations, sur les 150 demandes d'enquête par an, les 10 % d'insatisfactions justifiées mais mineures, c'est sur celles-là aussi que vous agissez au niveau des syndics adjoints, lorsque vous décidez de rencontrer les gens et que vous faites de la conciliation, finalement?

M. Legault: vous savez que ce sont les pires à répondre, celles-là, les 10 %, ou à peu près, de plaintes qui sont justifiées mais non justifiables d'aller mettre le système disciplinaire en branle pour ça. et ça, là, c'est ça qui empêche de dormir un syndic, veuillez me croire. celles qui sont graves, on dort bien. il n'y a pas de problème, parce que la preuve est faite. c'est clair, on y va. mais, lorsque ça baisse en gravité et lorsqu'il faut choisir à la ligne de division, là, choisir si on y va ou si on ne va pas en discipline, bon dieu qu'il y a beaucoup de paramètres qui nous viennent à l'esprit, et la décision est très difficile à prendre, à ce moment-là. et celles-là font partie du comité aviseur.

Mme Caron: Et les autres 10 % des insatisfactions non justifiées, selon vous, et que le client ne l'admettra jamais? Est-ce que vous croyez qu'il y aurait lieu quand même d'offrir une tribune pour ces gens-là afin d'aller vérifier à un autre organisme si, effectivement, leur insatisfaction, elle est non justifiée? Je pense à un ombudsman ou...

M. Legault: Madame, si quelqu'un voulait s'en occuper, ça serait parfait, mais vous savez que c'est très difficile, ces cas-là. Ce sont les cas les pires.

Mme Caron: Le comité réviseur, le comité réviseur que vous proposez, c'est un peu le comité aviseur que propose le Conseil interprofessionnel. Voyez-vous certaines modifications ou si c'est le même...

M. Legault: Non, en gros, ça possède la même philosophie et les mêmes règles, si je peux dire, en autant que ce soit sur demande. C'est ça qui est important, parce qu'il y a des clients qui sont vraiment satisfaits et n'ont pas besoin de remonter, de remettre en cause la décision du syndic. (21 h 50)

Mme Caron: Avant de demander à la présidente de passer la parole à ma collègue des Chutes-de-la-Chaudière, j'aimerais peut-être juste faire éclaircir: le type de plaintes que vous avez, est-ce que c'est surtout des particuliers ou des organismes?

M. Legault: Je ne sais pas, moi; 95 %, 99 %, ce sont des particuliers.

Mme Caron: Ce sont des particuliers. M. Legault: Oui.

Mme Caron: Et le type de plaintes qu'on retrouve chez vous?

M. Legault: II y en a beaucoup qui contestent les conclusions du travail de l'arpenteur-géomètre. Aïe! Ce n'est jamais là que ma borne va, voyons donc! Ça n'a pas d'allure! Ce n'est pas là, c'est deux pieds à côté. Alors, là, avant de faire entendre — comment dirais-je — de lui faire part de tout le raisonnement, il y a quelques arpenteurs-géomètres qui perdent patience et les envoient à l'Ordre. Alors, l'Ordre répond à ces gens-là et explique que ce sont des choses possibles dans l'arpentage. Alors, donc, les conclusions contestées comptent pour un certain nombre. Les communications déficientes également. C'est que ça peut être au niveau des conclusions, ça peut être au niveau de la procédure, ça peut être au niveau des retards, des délais. Dans une période économique intense, et surtout l'été, les retards, on en a beaucoup à l'Ordre: Je lui ai demandé ça, je ne l'ai pas eu. Qu'est-ce que je fais? Attends une seconde, je te réponds. Et, sur l'autre ligne, on appelle l'arpenteur-géomètre: Qu'est-ce que tu fais avec Mme Unetelle? Ah oui! Je vais lui envoyer le devis. Parfait, merci.

Mme Caron: Encore une, madame? Ha, ha, ha!

M. Legault: Et on reprend ça, et Mme Unetelle a son document.

Mme Caron: Est-ce qu'il y a plus de femmes qui se plaignent chez vous? Ha, ha, ha!

M. Legault: Je me fais avoir souvent, mais il y a beaucoup de femmes.

Mme Caron: Oui?

M. Legault: Oui, parce que, en fait... Bien, écoutez, peu importe, je n'entre pas là-dedans.

Mme Caron: C'est que le mari leur demande de téléphoner.

M. Legault: II y a beaucoup de femmes. Il y a autant d'hommes que de femmes.

Mme Caron: Alors, je vais passer la parole à ma collègue qui est responsable de la condition féminine, Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Hovington): Ha, ha, ha!

Vous avez la parole, Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière.

Mme Carrier-Perreault: Merci, Mme la Présidente.

Disons que, moi, je n'avais pas l'intention de vous parler des femmes en particulier; je voulais quand même vous parler de votre mémoire. C'est vrai que vous avez un style assez particulier. C'est direct, c'est tranchant. Que ça soit dur, comme le dit le ministre, c'est sûr qu'il y a des choses qui sont peut-être moins faciles à prendre que d'autres, mais vous le dites aussi quand vous trouvez ça bon. Il y a des mesures où vous êtes très clairs aussi, vous dites carrément que c'est une excellente mesure, et c'est aussi clair que quand ce n'est pas bon. Disons que vous avez l'avantage d'être constant dans votre style.

Là où j'ai été quand même un peu surprise, je vais vous dire, c'est de voir la façon aussi catégorique que vous avez en ce qui concerne le formulaire, par exemple; le formulaire peut-être un peu moins, mais en ce qui concerne l'assistance apportée, là, dans le cas d'aider les gens pour les plaintes, et tout ça. C'est à la page 11 de votre mémoire. Et, là-dessus, on a vu quand même des groupes. Si, à plusieurs endroits, votre mémoire rejoint, dans un style peut-être un petit peu différent, un petit peu moins feutré, plusieurs des mémoires qu'on a entendus ici, à ce niveau-là, il y a un petit écart, parce que, déjà, au niveau du formulaire, beaucoup sont disposés à l'utiliser. Il y en a même qui disaient que les deux façons, soit par lettre ou par formulaire... Et, pour ce qui est de l'assistance, dans certains cas on en donne déjà; on dit que ça se fait déjà dans certaines corporations. Alors, je ne sais pas, mais j'aimerais ça que... Avez-vous eu des expériences à ce point difficiles pour que vous soyez aussi catégoriques au niveau de l'assistance, par exemple?

M. Legault: Concernant le formulaire, c'est qu'on trouve que la lettre, c'est vraiment très, très facile, une lettre, et un formulaire peut peut-être faire se rebiffer certaines personnes. Mais ce n'est pas plus profond que ça. Si c'est imposé, on utilisera soit l'un, soit l'autre avec plaisir, mais, par expérience avec les gens avec qui on parle des dizaines de fois au téléphone, une simple lettre, un petit mot, et là mon dossier est ouvert et, ensuite, on complète. Alors, c'est pour ça que la lettre a cet avantage de ne pas créer de contraintes. Ça, c'est pour la lettre.

Votre deuxième volet était pour...

Mme Carrier-Perreault: L'assistance.

M. Legault: L'assistance. Nous vivons, à l'Ordre des arpenteurs-géomètres, des cas spéciaux. Nous avons — on le vit actuellement — quelqu'un, là, qui vit dans une maison ordinaire, au Québec, et qui circule comme n'importe quelle autre personne, qui poursuit avec acharnement deux vieux arpenteurs-géomètres de 80 années et plus. Voilà deux ans, il a poursuivi ces deux personnes-là, et la poursuite était complètement farfelue. Les membres du comité de discipline ont été obligés de suspendre en plein cours de séance pour aller rire en arrière et revenir sur les lieux, en avant, après. Il voulait faire témoigner Pythagore. Alors, ça n'avait ni queue ni tête, mais cette personne-là a fait dépenser de l'argent aux arpenteurs-géomètres et à plusieurs personnes du système. Un des deux arpenteurs-géomètres est décédé depuis. Il a repris ses deux plaintes, parce qu'il a eu son jugement, et il poursuit toujours l'arpenteur-géomètre décédé. On a beau lui dire: Monsieur, il est mort, il rapplique avec sa plainte en bonne et due forme.

Et vous voulez qu'on aide ces gens-là? Ça ne marche pas. Il y a quelque chose là-dedans... C'est trop large comme possibilité. Il faut la restreindre. Et le moyen qu'on a trouvé de la restreindre, c'est: C'est très bien. Vous voulez vous en occuper, de cette personne-là? Je vous la donne. Occupez-vous de ce monsieur-là, faites-lui rédiger une plainte structurée et amenez-la. Mais on n'aura jamais une plainte structurée de ce genre de personne.

Mme Carrier-Perreault: Oui, je comprends que vous pouvez avoir des cas particuliers.

M. Legault: Oui. Il y en a.

Mme Carrier-Perreault: Ça, je peux convenir que vous êtes en train de nous raconter quelque chose d'assez particulier, mais ça ne doit pas toujours être le cas, quand même.

M. Legault: Non. Il y a...

Mme Carrier-Perreault: II doit y avoir des gens qui ont besoin réellement de...

M. Legault: Oui. Ceux-là, vous avez raison, par contre.

Mme Carrier-Perreault: Bon.

M. Legault: Mais, attention! Il y a juste un autre cas. Parce que les arpenteurs-géomètres font des bornages. Les arpenteurs-géomètres agissent, dans un bornage, comme un juge. Savez-vous ce que c'est que d'agir comme un juge? C'est de plaire à l'un et de déplaire à l'autre. Et, à ce moment-là, l'autre, si on a affaire à un virulent, qu'est-ce qu'il fait? Là, il poursuit l'arpenteur-géomètre pour faux, introduction de faux, manque d'objectivité, et le reste. Vous savez qu'on a des gens qui ont dépensé entre 10 000 $ et 20 000 $ pour aller se défendre contre des gens qui en voulaient à l'arpenteur-géomètre qui ne les avait pas fait gagner dans un bornage. Et on a des cas précis qu'on peut vous soumettre. Ça va pour ceux-là.

Le dernier cas que vous avez soulevé: la personne qui, vraiment, a besoin d'aide. Mais savez-vous ce

qu'elle fait, la personne qui a vraiment besoin d'aide? Elle appelle le syndic avec un petit mot. On lui aide. On l'aide à aller voir vraiment ce qu'elle a comme plainte, comme matière, et on épouse son problème; puis c'est nous-mêmes qui portons la plainte en discipline. Les seules personnes qui passent par-dessus la tête du syndic sont celles qui n'ont pas réussi à convaincre le syndic du bien-fondé de leur plainte. Mais toutes celles qui ont réussi à convaincre le syndic du bien-fondé de leur plainte, le syndic ou le syndic adjoint, sont en discipline, et c'est nous qui prenons fait et cause pour elles.

La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup.

Mme Carrier-Perreault: Bon. Ça va. Merci.

La Présidente (Mme Hovington): Alors, M. Groleau, est-ce que vous aviez une conclusion à apporter. Non? Ça va? Alors, M. Groleau, M. Legault, je vous remercie, au nom des membres de la commission de l'éducation, d'être venus nous présenter votre mémoire. ..

M. Groleau: Ça nous a fait plaisir.

La Présidente (Mme Hovington): ...incisif...

M. Legault: Merci.

La Présidente (Mme Hovington): ...mais on n'a pas tout su sur les femmes. C'est dommage.

M. Groleau: Nous savons que vous allez faire le partage des choses. Merci.

La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup, et bonsoir. La commission de l'éducation ajourne ses travaux jusqu'à demain matin, 10 heures.

(Fin de la séance à 21 h 58)

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