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(Quinze heures six minutes)
Le Président (M. Gobé): Mesdames et messieurs, si
vous voulez regagner vos places, la commission de l'éducation va
maintenant entreprendre ses travaux. Bien entendu, nous avons quorum et je le
constate, donc, je déclare la séance comme étant
ouverte.
Je vous rappellerai brièvement le mandat de notre commission
aujourd'hui qui est, pour cette séance, de procéder à des
auditions publiques sur l'avant-projet de loi, Loi modifiant le Code des
professions et d'autres lois professionnelles.
M. le secrétaire, avez-vous des remplacements?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Bradet
(Charlevoix) par M. Bergeron (Deux-Montagnes), M. Fradet (Vimont) par M.
Philibert (Trois-Rivières) et M. Tremblay (Rimouski) par Mme
Bégin (Bellechasse).
Le Président (M. Gobé): Bon. Nous allons donc
maintenant prendre connaissance de l'ordre du jour et je demanderai, suite
à sa lecture, aux membres de la commission s'ils l'adoptent. À 15
heures, donc dès maintenant, nous allons entendre l'Association
coopérative d'économie familiale du centre de Montréal;
à 16 heures, l'Ordre des optométristes du Québec; à
17 heures, l'Ordre des comptables agréés du Québec. Nous
suspendrons de 18 heures jusqu'à 20 heures, pour reprendre les auditions
avec l'Ordre des opticiens d'ordonnances du Québec; à 21 heures,
nous terminerons avec l'Ordre des chiropraticiens du Québec.
Est-ce que les membres de cette commission adoptent l'ordre du jour tel
que lecture en a été faite?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Gobé): Donc, l'ordre du jour est
maintenant adopté. Est-ce qu'il y a des déclarations d'ouverture
de part et d'autre? Je ne vois pas non plus. Alors, je convierais donc les
prochains intervenants, soit les représentants de l'Association
coopérative d'économie familiale du centre de Montréal,
à bien vouloir venir prendre place en avant.
Bonjour, messieurs dames. Pour les besoins de l'enregistrement des
travaux, je vais donc faire lecture des gens qui vous accompagnent, et, s'il y
a une personne supplémentaire, il serait intéressant de
connaître son nom. Alors, Mme Louise Rozon, directrice, au milieu. C'est
vous qui êtes la porte-parole, je pense? Alors, bonjour, madame.
Mme Rozon (Louise): Bonjour.
Le Président (M. Gobé): M. Bélanger. M.
Bélanger (André): Oui, c'est moi.
Le Président (M. Gobé): Bonjour, M.
Bélanger. Mme Marie Roy. Bonjour, madame. M. Claude Zan-chettin.
Bonjour, monsieur. Madame?
Mme Galasso (Marie-Blanche): Mme Marie-Blanche Galasso,
présidente de l'Association des victimes d'erreurs médicales.
Le Président (M. Gobé): Bonjour, madame. Bienvenue
parmi nous. Vous pouvez maintenant commencer votre présentation. Je vous
rappelle auparavant que vous avez pour ce faire environ 20 minutes et que, par
la suite, 20 minutes seront imparties au côté ministériel
et au côté de l'Opposition. La règle de l'alternance est
généralement respectée et je crois que, dans une
discussion comme celle-ci, on peut faire preuve d'une certaine latitude lorsque
tout se déroule bien. Vous avez donc maintenant, madame, la parole.
Association coopérative d'économie
familiale du centre de Montréal (ACEF-Centre)
Mme Rozon: Merci, M. le Président. M. le ministre,
messieurs et mesdames les membres de la présente commission, nous vous
remercions de nous donner l'opportunité de présenter aujourd'hui
notre mémoire.
L'ACEF-Centre est une association de consommateurs qui
s'intéresse, depuis plusieurs années, aux difficultés
éprouvées par le public lorsqu'il porte plainte contre un
professionnel auprès de sa corporation professionnelle. Ainsi, nos
observations sur l'avant-projet de loi se fondent principalement sur les
difficultés pratiques vécues par le public face au système
disciplinaire, ainsi que sur les résultats d'une enquête
récente que nous avons réalisée pour le magazine qu'on
publie, qui est le magazine Consommation. (15 h 10) afin de
connaître d'une façon plus précise l'opinion du public face
au système disciplinaire, nous avons commandé un sondage à
la maison crop en janvier 1993. il ressort clairement de nos recherches et des
plaintes reçues à l'acef-centre que le système
disciplinaire actuel des corporations professionnelles manque
d'impartialité, de transparence et de crédibilité. les
résultats du sondage crop-acef-centre révèlent notamment
que seulement 8 % des citoyens font tout à fait confiance aux
corporations professionnelles, alors que
45 % d'entre eux leur font peu ou pas du tout confiance pour assurer la
protection du public. De ces personnes qui font peu ou pas confiance, 56 % de
ces citoyens exprimaient leur point de vue en précisant que les
corporations sont là avant tout pour protéger leurs membres, 18 %
relevaient un manque d'impartialité et 9 % avaient connu personnellement
une mauvaise expérience avec une corporation professionnelle.
Il va sans dire que les corporations souffrent d'un grave
problème d'image. Les corporations professionnelles ne sont toutefois
pas du même avis. Nos recherches démontrent qu'il y a un
écart considérable entre la vision du public et celle des
corporations professionnelles vis-à-vis de la crédibilité
et de l'impartialité du système disciplinaire actuellement en
place. D'ailleurs, les membres de la présente commission, vous
êtes sûrement déjà en mesure de constater cette
différence de perception. Le manque de confiance du public s'explique
principalement, à notre avis, par le fait que les corporations sont
placées devant une importante contradiction: elles sont à la fois
juge et partie et tiraillées entre leur rôle de protection du
public et celui de protection de leurs membres, au point où la
protection du public vient parfois après et souvent après celle
de leurs membres.
La commission Castonguay-Nepveu soulignait, d'ailleurs, l'importance, il
y a 20 ans, de distinguer le droit professionnel, qui a pour but premier la
protection du public, du droit du travail qui a pour but la défense des
intérêts économiques et sociaux des professionnels. Cette
distinction n'a malheureusement pas vu le jour, et force nous est de constater
que les corporations ne s'acquittent pas adéquatement de leur mandat de
protection du public.
Les délais dans le traitement des plaintes sont excessivement
longs. À titre d'exemple, Mme Langlois a porté plainte le 22
août 1990 contre deux psychologues auprès de la Corporation des
psychologues. Elle affirme, dans sa plainte, avoir été
abusée, méprisée et humiliée par les deux
psychologues lors d'une semaine intensive de thérapie de groupe. Elle a
fait des cauchemars et souffert d'insomnie après cette thérapie.
À ce jour, sa plainte n'a toujours pas été traitée,
soit deux ans et demi plus tard. de plus, lorsqu'on réalise que plus de
93 % des plaintes du public sont jugées non fondées,
d'importantes questions se posent. est-il possible qu'autant de citoyens logent
des plaintes non fondées? les enquêtes réalisées par
le syndic lui ont-elles permis dans tous les cas de prendre une décision
éclairée? le public en doute sérieusement, surtout
lorsqu'il n'a pas eu la chance de confronter la version du professionnel. du
point de vue de la protection du public, une réforme du système
disciplinaire professionnel s'impose donc.
L'ACEF-Centre souscrit entièrement aux objectifs de
l'avant-projet de loi, mais ne croit pas que les modifications proposées
puissent permettre de les atteindre entièrement. L'avant-projet de loi
accroît la participation du public, la transparence du système et
son accessibilité, mais n'apporte pas, à notre avis, une
réponse satisfaisante au problème majeur identifié par le
public, soit le manque d'impartialité des décideurs. Pour que le
système soit réellement crédible aux yeux du public, il
faut renforcir non seulement l'accessibilité et la transparence du
système, mais également l'indépendance et
l'impartialité des décideurs.
L'ACEF-Centre recommande principalement que la gestion du système
disciplinaire des professionnels relève d'une instance
indépendante des corporations, soit l'Office des professions. Cet
organisme devrait avoir le mandat de recevoir et de traiter les plaintes du
public portées contre un professionnel. Chaque plainte serait
étudiée par un syndic issu de la corporation concernée,
mais payé par l'Office, qui en déterminerait par ailleurs les
devoirs et les fonctions. Ces syndics devraient être nommés par un
comité de sélection formé d'un représentant de
l'Office des professions, d'un représentant du public et de la
corporation concernée.
Concernant le comité d'examen des plaintes, ce comité
devrait jouer le rôle d'une instance d'appel des décisions du
syndic, et c'est le citoyen qui devrait décider d'en appeler ou non de
la décision du syndic. Il devrait être composé de cinq
membres et d'au moins deux membres du public non membres d'une corporation
professionnelle.
Le comité de discipline devrait, quant à lui,
obligatoirement être composé d'un membre du public. De plus, les
règles de procédure dans le cadre des enquêtes devraient
être clairement établies et divulguées au plaignant. Une
preuve claire et convaincante devrait notamment être jugée
suffisante en matière disciplinaire. Il est extrêmement important
que le plaignant puisse avoir la chance de confronter la version du
professionnel.
Dans le but de garantir aux citoyens un traitement équitable et
juste de leurs dossiers, l'ACEF-Centre recommande également que le
service de conciliation et d'arbitrage des comptes d'honoraires, ainsi que des
différends relève de l'Office des professions. Or, si
l'avant-projet de loi devait entrer en vigueur dans sa forme actuelle, il
n'aurait pas pour effet, à notre avis, de renforcir
l'impartialité et l'indépendance des décideurs, ni
d'augmenter, par le fait même, la confiance du public. Il est
extrêmement important que, dans le cadre des décisions que vous
avez à prendre, vous portiez une attention particulière aux
critiques du public, puisque, à travers le système disciplinaire,
c'est avant tout lui qu'on cherche à protéger.
Je vais maintenant laisser la parole aux personnes qui nous ont
accompagnés aujourd'hui et qui vont vous expliquer pourquoi elles ne
font pas confiance aux corporations professionnelles pour protéger le
public. Alors, dans un premier temps, je vais laisser la parole à Mme
Marie Roy.
Le Président (M. Gobé): Mme Roy, vous avez la
parole. C'est seulement la présidence qui peut vous
laisser la parole, la présidence présidant les travaux,
mais c'est un lapsus certainement, madame.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Gobé): Alors, je vous donne la
parole, madame.
Mme Roy (Marie): Vous êtes gentil, monsieur. Alors, c'est
tout un défi de pouvoir, en cinq minutes, faire le tour d'un cas qui a
duré des années. J'ai préparé quelques notes pour
essayer d'en oublier le moins possible.
C'est en mai 1991, et à titre purement privé, que j'ai
rencontré le syndic de la Chambre des notaires pour lui faire part
d'événements purement privés dont j'avais
été témoin et victime. Cependant, je ne peux vous cacher
que la citoyenne que je suis est aussi diplômée en psychologie et
en droit, et qu'elle ne peut faire abstraction de cela dans ses propos.
Je rappellerai, d'abord, brièvement les faits. En mai 1991, j'ai
rencontré le syndic de la Chambre des notaires pour lui faire part des
conduites de quatre notaires et lui demander de porter plainte devant le
comité de discipline. La plainte ne portait pas sur un fait
isolé, mais sur toute une série d'actes qui, combinés les
uns avec les autres, me semblaient aller à rencontre de la nature
même de la profession de notaire et de sa fonction d'officier public. Je
faisais appel à la Loi sur le notariat, qui exige des notaires la
probité la plus scrupuleuse, et au code de déontologie, plus
particulièrement à l'impartialité, au
désintéressement, aux relations notaire-client, aux relations
entre notaires, et plus particulièrement à la réception
d'actes par complaisance permise pour les notaires.
Ces questions étaient relatives à des matières qui
sont le pain quotidien des notaires: contrats d'achat de
propriétés, actes d'hypothèque, conventions matrimoniales,
rédaction et interprétation de contrats, bref, des actes que le
citoyen ordinaire et le grand public sont amenés à traiter par
l'intermédiaire des notaires. La seule et unique question à
laquelle je demandais au syndic et au comité de discipline de
répondre était strictement déontologique. J'étais
parfaitement consciente qu'il ne s'agissait pas de réclamer quoi que ce
soit en termes monétaires.
Cette question était: L'ensemble des conduites et des
comportements de la notaire et des autres notaires impliqués est-il
celui qu'aurait eu tout notaire désintéressé, sans parti
pris, de la plus scrupuleuse probité que lui impose la Loi sur le
notariat, tout notaire qui aurait observé le devoir imposé par
l'honnêteté et la justice selon les critères de conscience
professionnelle? À cette seule et unique question, je n'ai pas eu de
réponse satisfaisante et je n'en aurai sans doute jamais. Le syndic
adjoint a fait enquête et a conclu que plusieurs des conduites semblaient
dérogatoires. Il a fait rapport au syndic en chef qui s'est
déclaré d'accord avec le syndic adjoint, mais a conclu qu'il ne
porterait pas plainte, même s'il eût été
préférable que les notaires s'abstiennent d'intervenir dans mes
affaires personnelles, ce qui est en soi une dérogation. Je conservais
mes droits de recours en droit commun, m'ont-ils dit, et je n'avais donc aucun
préjudice.
La décision du syndic m'a semblé mal fondée et j'ai
par la suite demandé au comité administratif de la Chambre des
notaires d'exercer son pouvoir d'ordonner au syndic de porter plainte. Ma
demande a été adressée à la fois au
président de la Chambre des notaires et au directeur
général de la Chambre des notaires. C'était le 14
février 1992, un jour de Saint-Valentin. Je n'ai eu depuis aucune
nouvelle, ni de l'un, ni de l'autre, pas même un accusé de
réception.
J'ai soumis le dossier à l'Office des professions ce même
14 février. J'ai compris que le pouvoir de surveillance qu'il semblait
avoir se limitait à vérifier si les formalités
élémentaires avaient été respectées. Un
pouvoir de surveillance à qui il n'a pas poussé une seule dent
depuis sa naissance. En prime, j'ai eu droit à quelques
dépliants.
Quant au Protecteur du citoyen, il n'avait, lui non, plus aucun pouvoir
d'intervention.
La question que je posais est donc demeurée sans réponse
et le demeurera sans doute; je n'ai pas l'intention de déposer une
plainte privée. Pourtant, elle aurait sans doute été
d'utilité pour le public et pour la profession. (15 h 20)
De deux choses l'une: ou bien les conduites que je décrivais
étaient conformes à la pratique courante du notaire ordinaire; ma
plainte n'était alors pas fondée. Mais alors, dans un esprit de
protection du public, il serait important que les clients sachent qu'en
consultant un notaire il peut très bien leur arriver ce qui m'est
arrivé. Je disais: De deux choses l'une. L'autre pendant de
l'alternative, c'est que ces pratiques étaient dérogatoires et il
était donc, à ce moment-là, tout autant dans
l'intérêt du public que dans celui de la profession qu'elles
soient entendues et sanctionnées.
Plusieurs clients, plusieurs citoyens ordinaires sont victimes de ces
pratiques et de ces fautes. Plusieurs n'en prennent probablement jamais
conscience, croyant que c'est comme ça que ça doit se passer.
D'autres sont conscients que ça n'a pas d'allure, mais ils prennent leur
mal en patience, ne sachant quoi faire d'autre. Certains en informent quelque
organisme qu'ils croient capable de faire quelque chose; aucun n'est capable de
faire quelque chose. Quelques-uns demandent une enquête au syndic et,
dans quelques cas, enfin, le syndic porte plainte.
Plus de 500 dossiers, pas de budget ni de personnel. Il y a
là-dedans des fraudes de millions, me disait personnellement le syndic.
Je compatis et je comprends que les dossiers de fraudes de millions soient sur
le dessus de la pile; ils sont plus préoccupants, sans doute. Il ne
faudrait pas encore hausser la cotisation des notai-
res pour l'assurance-responsabilité. Mais les dossiers d'en
dessous, ceux qui proviennent plus probablement de citoyens ordinaires, ceux
qui risquent moins d'être éclaboussants pour l'image ou
coûteux pour le fonds d'indemnisation, ces dossiers-là sont-ils
traités de façon à réellement protéger le
citoyen contre des notaires ou d'autres professionnels?
On me disait aussi: II n'y a aucun préjudice, madame, puisque
vous avez encore tous vos droits de propriétaire indivis; allez donc les
faire valoir. On excipe de la judiciarisation de la plainte par la
judiciari-sation d'autre chose. Mes droits de propriétaire indivis,
c'est une chose. Mon droit et le droit des autres citoyens ordinaires d'avoir
un notaire et un notariat scrupuleusement probes et
désintéressés, c'est autre chose, et c'est ce seul droit
que je voulais faire valoir à la Chambre des notaires, corporation
professionnelle devant agir dans l'intérêt de ses membres et dans
l'intérêt du public. On dit généralement que nul ne
peut servir deux maîtres, surtout quand l'un des maîtres, c'est
soi-même.
S'il y a plainte, madame, il y aura peut-être une
réprimande. Vous allez gagner quoi? Je ne suis pas à la loto
judiciaire de la responsabilité. Les seuls qui aient à gagner
dans une plainte disciplinaire, c'est la profession et le public. Un syndic
n'est pas habilité à recevoir une action en responsabilité
ni en dommage; chacun son métier et sa juridiction.
Que de joyeuses perspectives! Et tout ça pour avoir le droit
d'être entendue par un comité de discipline, le simple droit
d'être entendue éventuellement, si et peut-être. Et entendue
par qui? Par d'autres professionnels de la corporation et, cette fois, dans un
contexte procédural. On sait ce qu'on peut faire de remises, de
procédure, etc. Joignons à cela l'autre réjouissante
perspective qu'est l'attitude méprisante de certains Augustin Roy
à l'égard de ceux et peut-être surtout de celles qui osent
porter plainte. Je cite un article: «Le président de la
Corporation des médecins, le docteur Augustin Roy, affirme que le
système de traitement des plaintes du public est parfaitement
adéquat et que Mme P.B., qui ose prétendre le contraire, n'est
qu'une faiseuse de troubles».
Il apparaîtra qu'il n'est pas très étonnant qu'il
n'y ait pas plus de plaintes privées en droit disciplinaire qu'en droit
criminel, et qu'il ne faille pas mesurer la santé disciplinaire d'une
profession au nombre de plaintes privées portées contre elle, et
encore moins au nombre de plaintes privées où le citoyen aurait
gain de cause contre le professionnel. Plus de 80 % des citoyens abandonnent
leur recours faute d'argent, d'énergie et de temps; c'était le
thème d'une campagne publicitaire de la Chambre des notaires.
La justice naturelle repose sur plusieurs principes, dont les plus
fondamentaux sont: nemo judex in sua causa, c'est-à-dire qu'on ne peut
être juge et partie; audi alteram partem, c'est-à-dire qu'on doit
entendre les parties. On dit aussi que non seulement justice doit être
faite, mais qu'il doit aussi y avoir apparence de justice, ce qui ne veut pas
dire simulacre de justice. Ces principes fondamentaux que se doivent de
respecter les instances judiciaires et quasi judiciaires, à partir de la
Cour suprême jusqu'aux tribunaux administratifs, je ne peux comprendre en
vertu de quoi un syndic ou une corporation pourraient y faire exception. Si les
qualités essentielles du magistrat sont l'impartialité et
l'indépendance, qu'est-ce qui peut en dispenser les corporations
professionnelles? Tant que les corporations professionnelles agiront comme si
elles avaient le pouvoir discrétionnaire et non le devoir
impératif de contrôler scrupuleusement l'observance des codes
d'éthique et de sanctionner les écarts de conduite de leurs
membres, elles ne pourront, quant à moi, prétendre veiller
à l'intérêt du public et du citoyen. Je vous remercie.
Le Président (M. Gobé): Merci, Mme Roy. Mme Rozon,
avez-vous d'autres intervenants qui veulent...
Mme Rozon: Oui, j'aimerais laisser la parole à Mme
Marie-Blanche Galasso.
Le Président (M. Gobé): D'accord, madame. Je vous
avertis, par contre, qu'il reste à peu près quatre minutes pour
votre intervention, mais, avec le consentement des parlementaires,
peut-être que nous allons vous laisser terminer votre présentation
et, après, nous passerons aux interventions de chaque côté.
Est-ce qu'il y a consentement pour ce faire?
Une voix: Consentement.
Le Président (M. Gobé): Oui? Alors, vous avez deux,
trois minutes de plus, madame, pour pouvoir faire votre
présentation.
Mme Galasso: Au nom de l'Association des victimes d'erreurs
médicales et en mon nom personnel, je vous demande que la loi concernant
les plaintes soit modifiée. Lorsque nous faisons une plainte à la
Corporation professionnelle des médecins du Québec, nous avons
l'impression de ne pas être crus et de ne pas être pris au
sérieux. Nous avons aussi l'impression que la Corporation est là
pour se protéger et non pour protéger le public. Lorsque les
dossiers ne reflètent pas la vérité ou qu'ils sont
incomplets, la Corporation ne peut pas donner une réponse
adéquate au patient parce qu'il manque des éléments. C'est
pourquoi nous demandons que les plaignants soient impliqués dans le
traitement des plaintes. Le système des plaintes et le système
disciplinaire devront être réévalués,
étudiés et corrigés le plus tôt possible afin de
rendre justice un jour à ceux qui y ont droit. J'espère que le
tout sera pris en considération et que vous apporterez des modifications
à la loi concernant les plaintes publiques.
Je ne sais pas si j'ai quelques minutes...
Le Président (M. Gobé): Oui. Allez-y, madame.
Oui, oui.
Mme Galasso: Oui?
Le Président (M. Gobé): Oui, oui, je vous
avertirai.
Mme Galasso: Lorsque j'ai eu cet accident par un médecin,
j'ai été huit mois couchée sur le dos parce que j'ai eu
des problèmes très graves. Je devais rester couchée sur le
dos, je ne pouvais pas écrire. J'ai été longtemps que je
ne pouvais pas écrire. J'ai téléphoné à la
Corporation pour demander qu'ils m'accordent une entrevue pour aller leur
raconter ce qui s'était passé, parce que je ne pouvais pas
écrire du tout. Ils m'ont dit non. Ils m'ont dit: II faut que tu
écrives ta plainte, il faut que la plainte soit faite par écrit.
C'est alors que j'ai commencé à écrire un mot à la
fois, couchée sur le dos, comme ça. Puis la plainte, lorsqu'elle
a été finie, bien, je l'ai mallée. Ils m'ont
répondu, puis ils m'ont dit que c'était tout correct, ce qui
était écrit dans le dossier. Moi, j'ai fait une autre plainte
après pour leur dire que le dossier, il était incomplet, puis ce
n'était pas tout vrai, ce qui était écrit dedans.
Là, eux, ils m'ont demandé... Ils voulaient avoir des preuves.
Ça fait que là, moi, je me suis dit... Je trouvais ça pas
mal long et j'ai fondé ma propre association. Je voulais en
connaître plus et j'ai vu des membres qui sont dans la même
difficulté que moi, la même difficulté. Puis c'est pour
ça que je suis venue aujourd'hui, pour vous demander si vous pouvez
faire quelque chose.
Le Président (M. Gobé): Merci, madame. Mme
Galasso: Merci.
Le Président (M. Gobé): Mme Rozon, c'est là
tout le temps qui vous était imparti pour votre présentation.
Vous allez pouvoir maintenant dialoguer avec les parlementaires des deux
côtés. Alors, si vous avez d'autres points à faire venir,
peut-être que vous pourrez les faire venir au moment de la discussion.
Alors, sans plus attendre, je demanderai à M. le ministre de bien
vouloir faire son intervention et vous avez, pour ce faire, environ une
vingtaine de minutes...
M. Savoie: Ça va, M. le Président.
Le Président (M. Gobé): ...moins une ou deux qui
ont été prises peut-être par le groupe. (15 h 30)
M. Savoie: Vous êtes bien gentil. M. le Président,
permettez-moi, tout d'abord, de saluer les gens de l'Association
coopérative d'économie familiale du centre de Montréal,
avec les représentants. Le mémoire, évidemment,
appuyé par des témoignages, je pense que ça fait bien
ressortir les points essentiels - je pense que mes collègues vont
partager ce point de vue - les difficultés, ce qui nous a finalement
amenés, en échangeant avec l'Office des professions, à
structurer un projet de loi dans son ensemble visant, justement, à
améliorer le système disciplinaire au Québec et,
également, touchant d'autres aspects: la réglementation, les
structures, pour justement procéder à une plus grande
démocratisation, peut-on dire, de l'ensemble du fonctionnement du
système professionnel.
Alors, c'est un mémoire, là, bien étoffé; on
a bien apprécié en faire la lecture. On a apprécié
également les détails, une bonne connaissance, finalement, de
l'avant-projet de loi qui a été présenté à
l'Assemblée nationale et une reconnaissance, finalement, des efforts qui
sont faits conjointement par l'Office et le gouvernement, justement, pour
rencontrer certaines des inquiétudes de la population que vous
représentez, tout au moins en partie, ici aujourd'hui.
Il y a quelques questions très sommaires. Tout d'abord, au niveau
du sondage que vous avez effectué au mois de janvier, est-ce qu'il est
possible d'en recevoir copie, de ce sondage, pour qu'on puisse l'examiner,
là, et l'avoir au dossier, tout simplement?
Mme Rozon: Oui, il n'y a pas de problème, on peut vous le
faire parvenir.
M. Savoie: Oui. Ce serait utile, finalement, pour notre dossier.
On l'apprécierait grandement. Je présume que, sur la
réglementation, ça va. Je présume également que
l'orientation qui est donnée de nommer des citoyens, par exemple, au
niveau de la structure de l'Office, deux citoyens en plus des cinq, bien que
ça ne soit peut-être pas suffisant, c'est un pas dans la bonne
direction. C'est ce qu'on a compris du mémoire, c'est ce qu'on a compris
également de l'orientation. Est-ce que c'est exact, ça?
Mme Rozon: Oui, je pense qu'à ce niveau-là, au
niveau de la structure de l'Office, il n'y a pas de problème majeur.
M. Savoie: Bon.
Mme Rozon: Mais, pour répondre vraiment aux
inquiétudes du public, pour être en mesure de corriger la
situation, je crois qu'il est important de revoir plus en profondeur le
système disciplinaire qui est actuellement en place. Je pense que ce que
propose l'avant-projet de loi, c'est d'améliorer le système.
C'est sûr qu'il y a des points positifs, et on les a soulignés
dans notre mémoire, mais on croit que ça ne va pas assez
loin.
M. Savoie: D'accord.
Mme Rozon: Je pense que la principale objection à la
proposition qu'on peut faire, et qui est, d'ailleurs, faite par d'autres
organismes aussi, c'est que ça peut coûter plus cher à
l'État. On a donc ouvert aussi la
porte à ce qu'il y ait une possibilité que ce
système disciplinaire, même s'il relève de l'Office des
professions, puisse être, par ailleurs, défrayé par les
professionnels via une taxe spéciale; donc, il est possible que le
système soit impartial, indépendant, sans que ça
coûte nécessairement plus cher, vraiment, à
l'État.
M. Savoie: D'accord. Au niveau du comité des plaintes,
vous avez vu la structure, vous êtes d'accord avec l'orientation, en
autant qu'il y ait des modifications, vous dites, vraiment, comme
mécanisme d'appel. Vous ne voyez pas d'objection, non plus, à ce
qu'il n'y ait pas de comité des plaintes, par exemple, auprès de
certaines corporations professionnelles, là où, effectivement, le
nombre de plaintes ne le mérite pas, mais qu'on puisse établir
une structure analogue beaucoup plus légère.
Mme Rozon: Oui. Je pense qu'il y a effectivement des corporations
professionnelles où il y a très peu de plaintes et où les
professionnels en question n'ont pas à transiger directement avec le
public. Je pense que ça serait, à ce moment-là, inutile de
créer des instances qui seraient très, très peu
utilisées. Il y a d'autres corporations... Et déjà,
à l'égard des plaintes qui sont formulées
présentement par le public, il est possible d'identifier des
corporations où les professionnels font affaire d'une façon
beaucoup plus officielle avec le public et où les plaintes sont plus
nombreuses.
M. Savoie: D'accord. O.K. Avant de passer la parole à la
députée de Terrebonne, tout simplement, là, avec le cas de
Mme Roy, évidemment, et de Mme Galasso, on était familiers dans
le sens que Mme Roy était déjà au dossier. Pour Mme
Galasso, évidemment, on a eu l'occasion de correspondre; des
vérifications additionnelles seront faites suite à la
présentation de cet après-midi.
Finalement, le problème fondamental, c'est que ça
soulève, là, toute la question du jugement par les pairs, le
fait, là, qu'il n'y a pas l'apparence de justice. C'est ce que Mme Roy
soulignait surtout, je pense, et Mme Galasso, là, le fait que
c'était difficile d'accès. Cette apparence de justice est quelque
chose qui a, finalement, déterminé l'orientation qu'on a voulu
donner pour les fautes légères; ça a été
l'approche. Au niveau des fautes lourdes, je pense qu'on a - et ça n'a
pas été soulevé encore ici à cette commission -
cherché, là, à faciliter la tâche grandement aux
citoyens et aux citoyennes, par exemple, en assumant certains frais, en donnant
accès aux citoyens à certains coûts, là, lorsqu'il y
avait gain de cause, sauf pour cas de futilité, là.
L'orientation, je suis certain, est bienvenue. Ce que je constate toutefois,
c'est que vous autres, vous dites: Bien, en plus de cela, les syndics, vous
allez les sortir des corporations professionnelles, vous allez les
déposer auprès de l'Office et là chaque plainte sera
étudiée par un comité de trois. C'est ça?
Mme Rozon: Non. Chaque plainte sera étudiée par le
syndic et c'est plus la nomination du syndic qui serait faite par un
comité de sélection qui serait formé de trois
personnes.
M. Savoie: C'est ça.
Mme Rozon: Le syndic serait une seule personne.
M. Savoie: II va relever, finalement, dans les faits, de l'Office
des professions.
Mme Rozon: Je pense qu'une des choses importantes qui ressort des
plaintes qu'on a reçues, c'est que les gens n'ont pas l'impression que
leur parole compte lorsqu'ils déposent une plainte auprès d'une
corporation professionnelle. Puis, ça, c'est un élément
important; le public a l'impression qu'on ne le croit pas. Et, quand on regarde
les statistiques à l'égard des plaintes qui sont effectivement
jugées fondées par les syndics, bien, ce n'est pas
étonnant qu'on n'ait pas cru beaucoup de personnes. Lorsque le syndic
reçoit la plainte, le plus souvent, il va voir le professionnel et lui
demande sa version des faits. Évidemment, le professionnel va donner une
version qui n'est peut-être pas nécessairement juste, qui peut
l'être aussi, mais, si le plaignant n'a pas la chance de confronter les
informations du professionnel, bien, souvent, ça se clôt
là. Donc, tout dépendant, si le syndic accorde plus d'importance
à la parole du professionnel, c'est sûr qu'il va lui donner raison
et qu'il va rejeter la plainte sur la foi de la version du professionnel. Et
ça c'est un fonctionnement qui est, à la base,
problématique.
M. Savoie: O.K., d'accord. Avant de le remettre, je suis bien
familier avec le fait que vous aviez déjà un sommaire de votre
sondage, mais on en voulait un petit peu plus. On va revenir avec vous
là-dessus tout à l'heure, après la commission.
Le Président (M. Gobé): Mais il y a une chose que
je dois demander avant, c'est s'il y a des membres de la formation
ministérielle qui désirent adresser la parole ou poser des
questions, car il reste du temps. Non? Donc, je vais maintenant passer la
parole à Mme la députée de Terrebonne qui est porte-parole
officielle de l'Opposition en cette matière.
Madame, vous avez la parole.
Mme Caron: Merci, M. le Président. Alors, bienvenue, Mme
Rozon, la directrice de l'ACEF-Centre de Montréal, M. Bélanger,
Mme Roy, Mme Galasso et M. Zanchettin. Je vais peut-être vous donner la
chance de prendre la parole tantôt par une question pour que vous
puissiez un peu exprimer ce que vous aviez à dire en venant à
cette commission.
M. Zanchettin (Claude): C'est gentil, madame,
je l'apprécie.
Mme Caron: Vous avez, je pense, fait une très bonne
description. Ça m'apparaît important qu'on entende des
témoignages aussi pour nous permettre de connaître un petit peu
plus la problématique qui est vécue par les citoyens et les
citoyennes au moment où ils ont à porter plainte. Je pense que,
ça, c'est important, ça doit nous guider pour identifier des
lacunes. Vous nous avez aussi présenté d'importantes
modifications intéressantes, je pense, au niveau de l'importance de
l'information. Je pense que c'est clair pour tout le monde qu'au niveau de
l'information il y a un manque flagrant. Du côté des règles
de procédure, du soutien pour ceux qui ont à déposer une
plainte, ça apparaît essentiel aussi d'offrir également des
services au niveau de la conciliation, puisque, souvent, on pourrait, par de la
conciliation, réussir à régler le problème; ajouter
une participation du public au niveau des différentes instances pour
permettre une plus grande transparence, ça m'apparaît aussi
important. au niveau du sondage qui est à l'annexe 2 et qui touche les
institutions bancaires et autres sujets divers, dont celui-là, j'avoue
qu'il y a des éléments qui nous démontrent à quel
point, finalement, il y a un manque de confiance de la population en
général envers l'ensemble des instances. et là je
m'explique. quand je vois dans votre mémoire, à la page 4, que
«54 % des personnes interrogées faisaient confiance aux
associations de consommateurs pour assurer la protection du public», moi,
je vous avoue que ça me pose problème. que seulement 54 % du
public nous disent qu'ils accordent leur confiance aux associations de
consommateurs, qui sont des associations à but non lucratif, qui n'ont
pas d'intérêts de profession à défendre, ça
m'inquiète. et, quand j'ajoute ces données-là au sondage
qui a été sorti par léger & léger en septembre
1991: 71,4 % des québécois considèrent que la justice
protège davantage les riches, 71,4 %, ce sont des chiffres encore plus
impressionnants que les 45 % de personnes qui n'ont pas confiance aux
corporations professionnelles. et là je me dis: on se parle du
système judiciaire. (15 h 40) quand on décortique un peu plus, on
parle des juges, la confiance des juges: 63 % lorsque les personnes ont
déjà été impliquées dans une affaire
judiciaire, 63 %. et la confiance envers les notaires, qui était dans le
même sondage, lorsqu'ils avaient eu affaire avec un notaire: 63,4 %.
On a aussi questionné concernant les médias. Les
médias obtiennent 46,1 % des opinions favorables concernant leur
travail. Puis, là, si vous arrivez au monde politique, eh bien,
ça descend encore plus.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Caron: Donc, je pense qu'il y a une crise de confiance
à tous les niveaux. Les gens ont l'impres- sion que notre système
de justice, il n'est plus accessible, ils ont l'impression qu'il n'est
accessible qu'à une catégorie de la population qui a les moyens
de se le payer. Alors, quand on arrive au niveau du système
disciplinaire des professionnels, c'est normal, je pense, qu'on arrive à
la même crise de confiance.
Lorsqu'on regarde le pourcentage des plaintes traitées, vous nous
arrivez avec des chiffres, surtout au niveau de la Corporation des
médecins, je pense, avec 6 % de plaintes traitées. J'ai fait
ressortir le pourcentage de plaintes traitées par l'Office de la
protection du consommateur pour essayer de comparer un petit peu comment on y
arrivait. Eh bien, en 1989-1990, seulement 8,22 % des plaintes ont
été acceptées par l'Office de la protection du
consommateur. Sur 174 822 plaintes, 14 369 seulement. En 1991, 10%, puis, en
1992, 11 %. si j'arrive aux plaintes du protecteur du citoyen, là, le
pourcentage est plus fort, mais on a enlevé complètement les
demandes d'information. on arrive, en 1989-1990, avec 42 % des plaintes
acceptées; donc, pas la moitié. en 1990-1991, 46 % puis, en
1991-1992, 41 %. et si on regarde, au niveau du protecteur du citoyen, plus
spécifiquement ses interventions sur les professions, sur l'office, il y
en a eu 3 en 1990, 5 en 1991-1992, 4 qui sont actuellement en traitement, puis
une qui a été rejetée.
Moi, ça me dit qu'il va falloir, après cette
commission-là, s'asseoir avec les associations de consommateurs,
s'asseoir avec les groupes qui représentent des victimes, s'asseoir avec
les corporations professionnelles et essayer d'aller beaucoup plus loin - avec
le Protecteur du citoyen aussi - parce que c'est une crise de confiance
générale et je pense qu'il va falloir qu'on donne de
véritables solutions, pas seulement des apparences de solution.
Vous avez bâti - là, j'arrive à ma question -
beaucoup votre document sur l'importance de l'impartialité, puis je
pense que c'est normal, et sur une indépendance. Et moi, là
où j'ai des restrictions, c'est que les syndics, s'ils sont
nommés et payés par l'Office des professions, il faut lier
ça au fait - et vous le soulevez vous-mêmes - que ce serait des
taxes qui seraient payées par les corporations professionnelles. Et,
moi, j'ai de la misère à voir comment l'impartialité va
être plus grande. Que les syndics soient payés directement par les
corporations professionnelles ou qu'ils soient payés par une taxe
spéciale aux professionnels, j'ai de la difficulté à voir
comment ça va être plus impartial.
On sait qu'au niveau du gouvernement le projet de loi 67 sur le
financement de l'Office est déjà sur la table et on veut faire
payer complètement le fonctionnement de l'Office par les corporations
professionnelles. Alors, je ne vois pas comment ça va devenir plus
impartial. Est-ce que vous pouvez m'aider un petit peu là-dessus?
Mme Rozon: Je pense qu'il peut y avoir des mécanismes.
Bon, il n'y a pas de solution miracle, on
l'admet, puis ce n'est pas, non plus, cette solution-là qui est
une solution miracle. Par contre, on croit qu'il peut y avoir des
mécanismes qui assurent quand même l'impartialité et
l'indépendance de l'Office, même s'il y a une taxe
spéciale. Tous les citoyens doivent payer des taxes. Si, à cause
de la profession que le citoyen exerce, ça occasionne des coûts
supplémentaires à l'État, il peut être juste que ce
citoyen ait à payer une taxe supplémentaire pour assurer la
protection du public à l'égard de sa profession, et sans que la
Corporation ait un contrôle sur l'Office des professions. Ça
pourrait être une taxe non pas versée à l'Office, mais
à l'État directement, qui irait dans le fonds consolidé,
et cet argent serait redistribué ensuite à l'Office des
professions.
On n'a pas nécessairement de réponse précise
à savoir comment ça pourrait fonctionner dans les faits, mais on
croit qu'il peut y avoir une possibilité à ce
niveau-là.
Mme Caron: Moi, je vous avoue que j'ai beaucoup de
difficultés, à voir en quoi ça va être plus
impartial. Actuellement, les corporations professionnelles paient par leurs
cotisations 70 000 000 $ pour la protection du public directement dans les
corpos et le gouvernement paie 3 500 000 $ pour le fonctionnement de l'Office.
La loi 67 va faire en sorte que ce sera une taxe un peu spéciale, comme
vous le dites, mais pour l'ensemble du fonctionnement de l'Office, qui va
être répartie directement aux corporations professionnelles.
Alors, moi, l'impartialité de l'Office, je ne la vois pas, à
partir du moment où ce ne sont que les corporations professionnelles qui
vont payer la facture.
M. Bélanger (André): À partir du moment
où vous avez une obligation, pour obtenir le permis de pratiquer, de
payer votre cotisation, cette cotisation devient un paiement automatique,
à la manière d'un poste de péage sur une autoroute
à l'époque où il y en avait, et cette taxe - parce que le
mot «taxe» n'est peut-être pas approprié - cette
répartition différente de la cotisation, cette portion de la
cotisation pourrait être remise au gouvernement et, de là, remise
à l'Office des professions. Par ailleurs, les corporations
professionnelles se voyant allégées du fardeau de la protection
du public, la somme d'argent que les professionnels auront à payer sera
la même ou pourrait être légèrement
supérieure. Il n'y aurait pas nécessairement de problème
au niveau de l'impartialité, en tout cas, à notre avis.
Mme Caron: Vous êtes sûrement au courant que, parmi
les 41 corporations professionnelles, il y en a 20 qui sont à titre
réservé. Ce qui veut dire que ces professionnels ne sont
aucunement obligés d'être membres d'une corporation; ils ne sont
donc pas assujettis à ce moment-là, s'ils ne sont pas membres, au
système disciplinaire et ne le seront pas plus parce que le
système va relever de l'Office. Est-ce qu'on doit prévoir un
mécanisme particulier? C'est quand même près de la
moitié des corporations professionnelles qui sont à titre
réservé, donc, où ils ne sont absolument pas
obligés d'être membres d'une corporation.
Mme Rozon: Est-ce que vous croyez, si l'Office prenait en charge
le système disciplinaire, que les professionnels n'auraient plus le
goût d'être membres d'une corporation? Je pense qu'à ce
niveau-là il faudrait évaluer éventuellement l'impact
d'une telle implication.
M. Bélanger (André): Écoutez, est-ce que le
but des...
Mme Caron: Non seulement ça, je me dis qu'actuellement
tous ces professionnels offrent des services à la population du
Québec et n'assurent aucune protection. Tous les professionnels qui ne
sont pas membres des corporations à titre réservé, parce
que c'est une base volontaire, ne sont soumis à aucun système
disciplinaire. Je pense que c'est un problème sérieux, qui est
important, puisque ça touche la moitié des corporations et que
Favant-projet de loi n'y touche absolument pas. J'aimerais que vous continuiez
à y penser un petit peu - parce que ça ne faisait pas partie de
votre réflexion- pour essayer de nous proposer des choses
là-dessus; je pense que ça pourrait être
intéressant.
Tel que convenu, ma question va, évidemment, aller à M.
Zanchettin sur ce que vous aviez comme message à nous transmettre en
participant à cette commission. Je vous laisse libre de nous faire part
des commentaires que vous vouliez nous soumettre. (15 h 50)
M. Zanchettin: Je ne sais pas si vous voulez que je vous parle de
la faute médicale qui est à l'origine de la plainte que j'ai
faite à la corpo, mais, si vous permettez, juste sur ce dernier point
que vous avez soulevé, Augustin Roy dit que l'exercice disciplinaire
dans la corpo, ça coûte 6 0C0 000 $ par année. Il s'agit de
savoir si ces 6 000 000 $ sont bien dépensés ou pas. En tant que
personne ayant eu affaire avec cette Corporation, je dis qu'ils sont mal
dépensés pour les raisons suivantes. J'imagine que vous savez
c'est quoi le cas qui est à l'origine de... O.K. Si le fait, pour un
médecin, de ne pas faire de réanimation sur un enfant au bout de
quelques minutes d'une noyade, et qu'à la place de le réanimer il
envoie faire une autopsie et perd du temps avec le coroner, et qu'il dit aux
parents quoi faire pour l'enterrement, etc., etc., si ça, ce n'est pas
une faute assez lourde, assez importante pour qu'elle mérite
d'être acheminée jusqu'au comité de discipline, que faut-il
que le médecin fasse pour que ce médecin-là soit
traîné devant un comité de discipline? C'est ça la
question. Ce que je dis, c'est qu'actuellement ils ne le font pas. En tant que
citoyen, je ne peux pas, en toute honnêteté, me sentir
protégé par ce système-là.
Que le Dr Augustin Roy dise que le médecin a bien agi, moi, je
suis d'accord avec lui, c'est son métier de protéger les
médecins. Qu'il m'attaque personnelle-
ment en disant que les citoyens feraient mieux de s'occuper de leurs
enfants plutôt que de poursuivre un médecin, ça, je peux le
prendre, mais qu'en même temps il ait le culot de dire qu'il est
là pour défendre le public, ça, je ne le prends pas. C'est
juste ça que je veux dire. Je ne suis pas membre de l'ACEF, mais il me
semble que, dans le mémoire des ACEF, tout ce qu'ils veulent dire, sans
entrer dans les technicalités, c'est: Pourquoi on ne créerait pas
un organisme autonome - pas composé exclusivement de médecins,
mais autonome - où les médecins auraient leur mot à dire,
mais où le public aussi aurait son mot à dire? C'est cet
organisme-là qui déciderait si, oui ou non, un tel médecin
a commis une faute et une faute assez sérieuse pour qu'il s'en explique
devant un comité de discipline. Ça, c'est le point, madame.
Il y a beaucoup d'autres points sur lesquels je pourrais vous manifester
ma frustration. Il se trouve que je fais une poursuite au civil contre ce
médecin-là. Et, dans les interrogatoires avant procès, on
l'a eue, la version du médecin sur les faits. Je vous donne juste un
petit exemple pour voir comment ça fonctionne. Version du médecin
à l'interrogatoire médical. Il dit qu'il a fait un examen
médical extraordinaire sur le petit, que ça a duré un
quart d'heure, que c'était extraordinaire comme examen médical.
Dans les faits, qu'est-ce qu'il a fait ce médecin-là? Jamais le
petit n'a ouvert les yeux. Il a dit: II est mort; il n'y a plus rien à
faire avec ça. O.K. pour ton enterrement. Très bien. C'est quoi,
la version que ce médecin-là a donnée à la
Corporation quand la Corporation est allée l'interroger? Je ne le sais
pas moi, je n'ai jamais su. Aujourd'hui, au moment où on se parle -
l'accident est arrivé en 1984 et on est en 1993 -je ne sais toujours pas
la version donnée par ce médecin-là à la
Corporation.
Alors, Mme Roy, quand vous disiez tout à l'heure qu'il y a un
principe élémentaire de justice qui consiste à audi
alteram partem, à écouter l'autre partie, ça veut dire
que, s'il y a deux personnes dans un litige, la moindre des choses est que la
personne qui administre le système - que ce soit un syndic, que ce soit
qui vous voulez, ça, ce n'est pas important - ait moindrement le souci
de dire: C'est quoi, ta version, M. le médecin? C'est quoi, ta version,
M. l'usager? Et, après, qu'elle prenne une décision. Or, ce n'est
pas le cas.
Mieux que ça, quand ils vous rendent justice... Vous avez dans
l'annexe, à la dernière page dans le mémoire, la lettre
que le syndic m'a envoyée. Jamais, au grand jamais, ce syndic n'a
daigné expliquer pour quelle raison la plainte était
rejetée. J'ai fait envoyer une lettre par mon avocat. Il a dit:
Monsieur, de quoi vous vous occupez? C'est confidentiel, le processus
disciplinaire, je n'ai pas à vous rendre compte de ça.
Voilà l'histoire. Vous ne savez rien, ni pendant l'enquête, ni
après l'enquête. Ce que je dis, c'est que ça, ce n'est pas
une façon humaine, transparente d'administrer la justice. Je ne peux pas
croire qu'avec 6 000 000 $ on ne soit pas capable de mettre sur pied un
système qui soit plus juste et qui ait apparence de justice.
Et ce que je vous souhaite, en tant que représentants du peuple,
c'est que vous ayez assez de courage pour vous tenir debout devant les
corporations. Merci.
Le Président (M. Gobé): Alors, merci, monsieur. Il
vous reste deux minutes, madame.
Mme Caron: Deux minutes, ce n'est pas beaucoup.
Le Président (M. Gobé): Ah, on peut dire bien des
choses.
Mme Caron: Je pense que vous nous avez clairement
démontré, et je pense que dans le mémoire Mme Rozon aussi
le ressortait, l'importance - et ça a été demandé
aussi par la FNACQ - lorsqu'on rejette une plainte, qu'on donne au moins les
informations, que ce soit fait d'une manière claire et précise,
et qu'effectivement, d'une part ou de l'autre, on puisse s'exprimer, on puisse
suivre le processus jusqu'à la fin; ça, je pense que vous avez
parfaitement raison.
C'est évident que, si on veut aussi véritablement
protéger le public, il va falloir aussi se protéger au niveau de
la compétence. Le système disciplinaire aura beau être le
plus efficace, le plus transparent, les citoyens ne seront pas à l'abri
de l'incompétence de certains professionnels, c'est évident. Et
ça, l'incompétence, on la voit partout, donc, dans ce
monde-là aussi.
Au niveau des différentes corporations, il y a aussi à
poursuivre le travail qui est déjà commencé concernant de
la formation continue, concernant l'émission des permis, pour s'assurer
qu'au niveau de la qualité et des soins qu'on reçoit ce soit
important.
Juste une petite précision au niveau des corporations. La
Corporation des médecins, ce n'est pas une corporation à titre
réservé, c'est une corporation où les médecins sont
vraiment obligés d'être membres. Elle ne fait pas partie des 20
corporations. Alors, je vous remercie beaucoup pour vos informations.
Mme Galasso: Est-ce je peux demander une question avant de
partir?
Le Président (M. Gobé): Oui, allez-y. À qui
vous allez poser votre question, madame?
Une voix: Ce n'est pas terminé, madame. Le
Président (M. Gobé): À qui, à qui...
Mme Caron: C'est terminé pour mon côté. Ha,
ha, ha!
Le Président (M. Gobé): À qui voulez-vous
poser la question, madame? Allez-y, dites-moi à qui vous voulez la
poser.
Mme Galasso: Bien, à madame.
Le Président (M. Gobé): Allez-y, posez-la-lui. Il y
a consentement.
Mme Galasso: Oui. J'aimerais savoir pourquoi on ne peut pas aller
personnellement à la Corporation professionnelle des médecins,
parce qu'il y a beaucoup de gens qui ne savent pas écrire, aussi, il y
en a qui ne savent pas comment s'exprimer pour écrire. Comme moi,
j'étais trop malade, je ne pouvais pas arriver et me servir de mes bras,
comprenez-vous? J'aurais aimé ça y aller. Alors, pourquoi on ne
peut pas y aller? Pourquoi? C'est ça que je veux savoir. Pourquoi on ne
peut pas aller en personne là? Qu'est-ce que c'est qu'il y a qui fait
qu'on ne peut pas y aller? Pourquoi?
Mme Caron: c'est que, présentement, le système
n'accepte que des plaintes écrites qui sont faites. elles peuvent,
évidemment, être écrites par quelqu'un d'autre, là.
ça aurait pu être quelqu'un qui est près de vous qui aurait
pu écrire la plainte, là. c'est sûr qu'avec un formulaire,
ce serait peut-être plus facilitant. mais on ne touche pas encore... et,
dans le mémoire, on le mentionnait bien, il y a quand même 25 %
d'analphabètes au québec, et ces 25 % d'analphabètes ont
besoin aussi d'un soutien bien particulier pour pouvoir exprimer leurs
plaintes, et ça...
Mme Galasso: Mais vous ne m'avez pas répondu. Pourquoi on
ne peut pas y aller en personne?
Mme Caron: C'est que le système, présentement, ne
le permet pas.
Mme Galasso: II ne le permet pas?
Mme Caron: Ça ne se fait pas de cette
façon-là, présentement.
Mme Galasso: Ah! O.K. Mais pourquoi il ne le permet pas?
Pourquoi?
Mme Caron: II a été bâti comme ça,
mais il va falloir le corriger, c'est ce que vous venez nous dire.
Mme Galasso: II va falloir le corriger, oui.
Le Président (M. Gobé): Alors, merci. Merci
beaucoup, madame.
Mme Galasso: Merci.
Le Président (M. Gobé): Merci, Mme la
députée de Terrebonne. M. le ministre, il vous reste six, sept
minutes à peu près.
M. Savoie: Oui, merci, M. le Président. Bien, heureux de
constater, tout au moins, que vous êtes d'accord avec le principe d'une
réforme; même si ça ne contient pas tout ce que vous
voulez, au moins, vous êtes d'accord avec l'orientation, la
poussée qui est donnée. Vous êtes d'accord également
avec l'autofinancement; je pense que c'est une excellente chose. Je suis
certain qu'on va prendre le temps d'éclairer la députée de
Terrebone bientôt sur cet élément-là, de même
que sur certains autres. L'autofinancement, évidemment, peut assurer une
protection. Je pense que c'est ça qu'on va chercher à
démontrer dans un autre projet de loi et je ne voudrais pas en faire
l'objet de discussions à ce moment-ci.
Pour la réponse à madame, il est très clair que
ça nous demande un écrit pour ouvrir une plainte. Avec le
comité des plaintes, ce qu'on cherche à faire, c'est justement
vous donner accès à la corporation. Le rôle du
comité des plaintes, ça va être de recevoir l'individu et,
à ce moment-là, il va y avoir justement deux citoyens qui ne font
pas partie de la corporation professionnelle, qui vont être nommés
là justement pour assurer non seulement qu'il y ait justice, mais qu'il
y ait apparence de justice aussi, dans le sens que ce ne sera pas seulement des
professionnels qui vont passer à l'étude de votre dossier. Votre
association demande justement que le rôle de ce comité-là
soit développé. On parle d'un comité d'appel, on parle de
lui accorder plus de pouvoirs, et on parle de donner plus de pouvoirs au
syndic. Alors, mercredi et jeudi, on a eu l'occasion d'examiner un peu plus,
avec notre questionnement, le rôle du syndic et l'interface qu'il pouvait
y avoir de temps à autre avec les corporations; ça a
été intéressant.
Mais vous pouvez être sûrs qu'au niveau du projet de loi,
bien qu'il puisse vous sembler qu'on ne va pas assez loin, au moins, là,
c'est dans la bonne direction. On va chercher à établir des liens
plus étroits avec le fonctionnement de la discipline, à
alléger le processus pour vous en vous enlevant des frais, au niveau,
par exemple, du comité de discipline de même que du tribunal,
à vous organiser ça d'une façon mieux structurée.
Je pense que c'est ça qu'on veut, ici. (16 heures)
Et, finalement, l'ACEF arrive avec des recommandations de poids, bien
structurées, dans un mémoire qui démontre bien qu'elle
connaît son dossier et qu'elle a fait une étude poussée sur
les réformes. Bon. Vous arrivez avec des recommandations, conciliations
qui sont intéressantes, qu'on va certainement regarder.
Je veux revenir encore une dernière fois sur la notion de syndic.
C'est fondamental, ça. Vous dites que les syndics, finalement, peuvent
continuer à être payés par la corporation professionnelle.
Vous voulez absolument que ce soit payé par l'Office, que le salaire
soit payé par l'Office pour un syndic. Alors, finalement, ça va
revenir dans une espèce de pot où ça va être
difficile à faire. On y a réfléchi un peu.
Ce qui est proposé dans la réforme, c'est
qu'évidemment les syndics continuent de relever de la corpo-
ration professionnelle, mais on va chercher à s'assurer d'une
plus grande indépendance dans le fonctionnement. Et, avec le
comité des plaintes, on pense qu'on crée un mécanisme
d'équilibre, on pense que ça crée un mécanisme
d'équilibre. Mais qui paie le salaire? Pensez-vous que c'est
déterminant pour...
Le Président (M. Gobé): M. Bélanger, oui,
vous avez la parole.
M. Bélanger (André): Là, vous parlez du
comité des plaintes comme étant une instance d'appel, mais le
comité des plaintes est une nouvelle structure à
l'intérieur des mêmes corporations. On parle encore d'une nouvelle
structure, mais dépendante des corporations de la même
façon. On n'a pas de système transparent ou impartial, en
apparence, du moins. On parle du salaire des syndics, mais, si vous voulez
conserver le syndic, au moins, nommez-lui un comité d'examen des
plaintes qui ne soit pas à l'intérieur des corporations.
Ça ne tient pas debout. Vous avez un tribunal d'appel qui est dans la
même bâtisse que le syndic. On n'a absolument aucune apparence de
justice.
M. Savoie: Mais vous comprendrez que le problème
fondamental, c'est que, par exemple, pour justement faire une révision
d'une plainte qui n'a pas été acceptée par un syndic,
ça demande, bien sûr, des citoyens, et c'est ce qui va se
produire, hein. Il y a des citoyens sur le comité des plaintes pour
réviser la position du syndic, mais ça nous prend aussi des
professionnels pour nous dire si, effectivement, il était capable... On
ne peut pas demander, par exemple, à une autre corporation de juger de
la valeur de l'acte posé par un autre professionnel. C'est très
difficile. Ça demande trop de...
Mme Rozon: Je pense que, pour assurer une indépendance,
une impartialité, c'est important quand même que, par exemple, le
syndic soit nommé par une instance indépendante des corporations
et payé par les corporations. Je pense que, quand on fait face,
règle générale, aux tribunaux, ce n'est pas pour
rien...
M. Savoie: Et payé...
Mme Rozon: On ne demande pas les mêmes règles
d'indépendance qu'on retrouve, par exemple, dans les tribunaux.
M. Savoie: Oui, j'ai manqué... Et payé par? Mme
Rozon: Et payé par l'État. M. Savoie: Et payé
par l'État.
Mme Rozon: C'est ça. Bon, par l'Office des professions.
Ça revient au même.
M. Savoie: Oui. Par quelqu'un d'autre que la corporation.
Mme Rozon: C'est ça. C'est un élément
important pour assurer au citoyen le fait que sa plainte va être
traitée d'une façon juste et équitable. Le syndic est
placé devant une contradiction. Souvent... Je pense que, par rapport au
fonctionnement actuel, on ne peut pas leur demander presque de faire mieux. Ils
sont en conflit par le fait qu'ils ont à juger leurs propres
collègues, et le fait qu'ils soient à l'intérieur de la
corporation ajoute à ce conflit-là un élément
extrêmement important.
C'est sûr que la proposition qu'on formule, c'est toujours des
professionnels qui vont avoir à juger un acte professionnel. Mais le
fait que ce professionnel soit indépendant de la corporation, ça
ajoute un élément extrêmement important et qui va donner
une plus grande impartialité. Les citoyens vont avoir plus confiance
dans ce système-là. Je pense que bon, déjà, on...
En fait, c'est un élément extrêmement important et qu'il ne
faut pas négliger.
M. Savoie: C'est parce que le problème qu'on a, c'est la
réalité. Les mécanismes, les options qui se
présentent, finalement, au niveau d'une réforme comme ça
sont limités; on n'en a pas 36. On est d'accord pour dire que l'argent
peut venir de l'État ou de la corporation professionnelle. L'apparence
n'est pas vraiment fondamentale en tant... Le contrôle, par exemple, sur
la nomination d'un syndic, ça, ça serait certainement une
ratification du nom qui a été soumis. Ça serait
déjà quelque chose, ça.
Mme Rozon: C'est déjà un pas en avant, le fait que
le syndic soit nommé par un comité de sélection
formé d'un membre du public, d'un membre de l'Office et de la
corporation au lieu que ce syndic soit nommé uniquement par le bureau de
la corporation, comme c'est le cas présentement.
Et l'autre chose que je voulais souligner, par rapport au comité
d'examen des plaintes, tel que l'article est stipulé dans l'avant-projet
de loi, il se pourrait qu'on se retrouve avec un comité d'examen des
plaintes où il y aurait seulement un membre du public non membre d'une
corporation professionnelle. Alors, si votre intention est de former ce
comité-là avec deux membres du public non membres d'une
corporation professionnelle, il faudrait modifier l'article en
conséquence parce qu'il y a une porte ouverte à ce que ce soit le
cas. Et là, c'est sûr que... Bon, déjà, deux membres
du public sur cinq, ce n'est pas beaucoup. Un, c'est très
problématique.
M. Savoie: D'accord. Je vous remercie. C'est une bonne
présentation.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. le ministre.
Merci, Mme la députée de Terrebonne. Mme Rozon et
les gens qui vous accompagnent, nous vous remercions, au nom de tous les
membres de cette commission. Nous avons été impressionnés
par votre présentation. Et cela met donc fin à votre
audition.
Vous pouvez donc maintenant vous retirer, et je vais suspendre une
minute, le temps de permettre au groupe suivant, soit les représentants
de l'Ordre des optométristes du Québec, de prendre votre place.
La séance est suspendue pour une minute.
(Suspension de la séance à 16 h 6)
(Reprise à 16 h 8)
Le Président (M. Gobé): Mesdames et messieurs, si
vous voulez bien reprendre votre place, nous allons poursuivre nos travaux.
Alors, il nous fait plaisir d'accueillir maintenant l'Ordre des
optométristes du Québec, et son représentant est M.
Michael Chaiken. Bonjour, M. Chaiken. Il nous fait plaisir de vous revoir
à cette commission.
M. Chaiken (Michael): Bonjour, M. le Président.
Le Président (M. Gobé): Maintenant, je vous
prierais de bien vouloir présenter peut-être les gens qui vous
entourent et vous pourrez commencer votre intervention sans plus attendre.
Ordre des optométristes du
Québec
M. Chaiken: M. le Président de la commission de
l'éducation, M. le ministre responsable de l'application des lois
professionnelles, mesdames et messieurs les députés membres de la
commission, mon nom est Michael Chaiken et j'assume la présidence de
l'Ordre des optométristes du Québec. Je vous présente,
à ma droite, Mme Christiane Charbonneau, directrice
générale de la corporation; à ma gauche, M. Claude Gareau,
directeur général de l'Ordre pendant 35 ans et maintenant notre
conseiller et aviseur; enfin, à mon extrême gauche, Me Daniel
Lavoie, notre conseiller juridique.
Au nom de l'Ordre des optométristes du Québec, nous vous
remercions de l'opportunité que vous nous offrez d'échanger avec
vous sur l'avant-projet de loi modifiant le Code des professions et d'autres
lois professionnelles. M. le Président, l'Ordre des optométristes
a comme première responsabilité d'assurer la protection du public
dans le domaine des soins oculovisuels. Il l'assume principalement au moyen de
l'inspection professionnelle, de l'admission à l'exercice de la
discipline, de la formation continue et de l'information au public. (16 h
10)
Cela dit, l'Ordre des optométristes est d'accord avec
l'idée d'une réforme du système professionnel vivement
souhaitée par le ministre responsable. Il reconnaît que
l'organisation professionnelle québécoise mérite des
aménagements qui rendraient le système plus transparent, plus
souple, plus accessible et moins coûteux.
En dépit de l'absence de la publication d'une étude
approfondie sous forme de livre vert, blanc ou autre par les auteurs de
l'avant-projet et considérant la portée des changements
proposés au Code des professions, l'Ordre a travaillé avec
acharnement à la préparation de son mémoire malgré
les délais très courts qui lui ont été
alloués. Parce qu'il prend la réforme très au
sérieux, l'Ordre des optométristes a émis ses commentaires
sur chacune des modifications proposées à l'avant-projet. Il a
également recommandé des modèles de fonctionnement aux
chapitres disciplinaires et réglementaires qui permettraient à
notre corporation de mieux faire son travail avec moins de délais et
plus d'efficacité.
Après l'analyse de l'avant-projet, nous constatons
d'emblée, M. le Président, que bon nombre d'articles
proposés sont de nature à améliorer l'organisation
professionnelle québécoise. Ainsi, l'obligation de faire
connaître au secrétaire de l'Ordre tous les endroits où
exerce un optométriste, de même que l'établissement d'un
formulaire d'enquête et d'un formulaire de plainte font partie des
mesures que nous accueillons favorablement.
Toutefois, l'Ordre des optométristes considère que
l'avant-projet, dans son ensemble, ne constitue pas véritablement une
réforme, c'est-à-dire un changement apporté dans le
système professionnel en vue d'améliorer son efficacité,
mais s'identifie davantage à une révolution par le
caractère radical et soudain des changements importants qui sont
préconisés. N'oublions pas, M. le Président, que
l'objectif primordial de la réforme de 1973 consistait à assurer
une meilleure protection du public grâce à un système
d'autogestion professionnelle.
D'ailleurs, il est certainement très approprié de rappeler
les propos tenus par l'honorable Claude Ryan, alors ministre responsable de
l'application des lois professionnelles, à l'occasion d'une allocution
intitulée «Le système professionnel québécois
à l'heure de 1987», et je cite: «Nous reconnaissons que le
système professionnel doit reposer sur la libre organisation des
professions elles-mêmes et que toute la base de notre système, ce
doit être le contrôle des professions par leurs propres membres.
Voilà un principe que nous devons conserver».
Il continuait, M. le Président, en disant: «Nous avons
inscrit, à la base de l'édifice québécois des
professions, le principe de l'autorégulation des professions par leurs
propres membres. Les organes directeurs des professions détiennent en
conséquence des pouvoirs considérables sur l'activité
professionnelle de leurs membres. Ce régime m'apparaît logique et
cohérent. Je n'ai pas l'intention de le coiffer d'une loi qui viendrait
en modifier l'esprit.»
C'est dans cette perspective que l'Ordre des optométristes est
d'avis que la compétence du professionnel, son respect du code de
déontologie, l'adhésion à des
normes de pratique reconnues par l'ensemble de sa profession et le fait
d'être évalué dans son exercice professionnel par ses pairs
constituent encore aujourd'hui les éléments de base du
professionnalisme au Québec et la meilleure, sinon la seule garantie de
la protection du public consommateur de services professionnels.
Il ne faut donc pas se surprendre si nous nous élevons
vigoureusement contre la poursuite de certains objectifs que l'on retrouve dans
l'avant-projet, qui visent à réduire l'autonomie des corporations
professionnelles en conférant plus de pouvoirs à l'Office des
professions. En effet, M. le Président, il existe une contradiction
majeure entre la vocation de l'Office et les pouvoirs qu'on s'apprête
à lui accorder. L'article 12 du Code des professions stipule que
l'Office a pour fonction de veiller à ce que chaque corporation assure
la protection du public. Or, dorénavant, l'avant-projet de loi
accorderait à l'Office le pouvoir d'approuver et, ultimement, de
modifier à sa guise tout règlement de notre corporation, sans
même avoir obtenu notre consentement.
En conséquence, l'Office imposerait sa conception de la
protection du public, une conception définie nulle part et pas toujours
partagée par notre corporation. Cela dit, l'Office serait susceptible
également de changer la façon même d'exercer
l'optométrie sans avoir à modifier notre loi. De plus, les
articles 13.1 et 14 doteraient l'Office de pouvoirs de tutelle très
larges, affichant une absence totale de confiance de la part du gouvernement
à l'égard des corporations professionnelles.
Ainsi, sans aucun contrôle de l'Assemblée nationale,
l'Office des professions pourrait prendre en main une profession tout
entière en s'appuyant sur un mandat gouvernemental qui lui serait
confié à la suite d'un rapport dont l'Office lui-même
serait le seul auteur. Contrairement à certains pouvoirs de tutelle
gouvernementale qui existent dans des domaines particuliers comme la
santé, l'éducation et les affaires municipales, il faut se rendre
compte ici que c'est un organisme qui n'a aucun compte à rendre
directement à l'Assemblée nationale qui prendrait la gouverne de
toute une profession. Ce nouveau pouvoir de tutelle tout à fait
singulier dans la législation québécoise serait vu comme
une véritable épée de Damoclès constamment brandie
sur le système professionnel québécois, et ce, sans aucun
droit d'appel de la part de la corporation concernée.
Pour leur part, les articles 15 à 15.4 confèrent à
l'Office un très vaste pouvoir d'enquêter, de
pénétrer au siège social, de prendre connaissance et copie
de tout document ou dossier, au-delà même du secret professionnel
des membres de la corporation. L'Office des professions pourrait, a priori,
faire légalement ce que nos chartes canadienne et
québécoise des droits fondamentaux interdisent aux corps
policiers du pays.
Il est certain que les corporations professionnelles, dans
l'intérêt du public, seraient obligées de contester la
constitutionnalité de certaines de ces dispositions, surtout
lorsqu'elles libèrent un professionnel de son obliga- tion de respecter
le secret professionnel. Pareil «Big Brotherism» constitue, aux
yeux de l'Ordre des optomé-tristes, un danger véritable et tout
à fait inégalé dans le monde des services professionnels.
L'avant-projet, tel que rédigé, conduira rapidement à
l'exercice par l'Office de pouvoirs de réglementation et de
contrôle que l'État avait délégués aux
corporations dans le meilleur intérêt du public. L'Ordre des
optométristes s'oppose donc vigoureusement à ces
modifications.
Dans un autre ordre d'idées, M. le Président, avec
l'expérience vécue des 20 dernières années, l'Ordre
des optométristes est en mesure aujourd'hui de faire une
évaluation du système disciplinaire et pénal prévu
au Code des professions et de suggérer au législateur une
réforme qui permettrait de rencontrer en grande partie les attentes de
la population. Les changements au système disciplinaire contenus dans
l'avant-projet nous semblent insuffisants et difficilement applicables. C'est
pourquoi nous suggérons d'aller un peu plus loin, incorporant une
réforme des instances pénales ayant juridiction en matière
professionnelle. Un tel système intégré pourrait, à
notre avis, mieux servir le client plaignant.
À la page 50 de notre mémoire ou encore à la page
16 de son résumé, l'Ordre des optométristes
présente un modèle schématisé du système
qu'il propose. L'intégration du système disciplinaire et
pénal rencontre deux grands objectifs. Premièrement, il maintient
les trois piliers actuels du système disciplinaire en les
renforçant. Ainsi, le Tribunal des professions s'enrichit d'une
juridiction additionnelle qui favorise l'élaboration d'un
véritable droit professionnel spécialisé. Les
comités de discipline sont supportés sur le plan logistique par
un greffe unique et, enfin, les syndics restent libres sur le plan
décisionnel tout en s'assurant un support consultatif additionnel. (16 h
20)
Deuxièmement, ce système intégré permet
d'ajouter de la transparence et de l'impartialité au système
disciplinaire actuel. Ainsi, un comité aviseur est créé,
lequel inclut un administrateur provenant du public. Apparaît aussi un
ombudsman des services professionnels nommé par le gouvernement. Cet
ombudsman révise l'enquête du syndic à la demande du
plaignant. Si ce dernier est insatisfait, il peut agir à la place du
syndic devant le comité de discipline lorsqu'il considère qu'une
plainte est fondée et que le syndic ne veut pas la déposer.
M. le Président, avec le système suggéré par
l'Ordre, il est possible d'aménager le système disciplinaire
à l'avantage du public sans tomber dans la bureaucratisation
préconisée dans l'avant-projet. Aussi, nous éviterons les
conséquences inacceptables telles que le fait de forcer un syndic
à déposer une plainte quand ce dernier n'est pas d'accord pour le
faire. L'ajout de l'ombudsman dans le système permettrait un droit
d'appel au citoyen dès que le syndic refuse de déposer une
plainte. Sans bouleverser tout le système, voici une réponse
logique et appropriée à une demande justifiée de
la part des groupes qui représentent les consommateurs.
Passons maintenant au processus réglementaire. M. le
Président, depuis l'entrée en vigueur du Code des professions,
les corporations professionnelles ont éprouvé à moult
reprises des délais interminables avant l'approbation finale de leurs
règlements. Pour alléger leur processus, l'Ordre des
optométristes propose trois niveaux d'approbation. Premièrement,
les règlements adoptés par la corporation et approuvés par
le gouvernement. Dans l'intérêt du public, l'Ordre des
optométristes est d'opinion que le gouvernement doit conserver son
pouvoir réglementaire dans les cas suivants: le code de
déontologie, le règlement sur les diplômes donnant
ouverture aux permis, le règlement sur la conciliation et l'arbitrage
des comptes et le règlement sur la délégation des
actes.
Dans ces cas, l'Office pourrait émettre son avis au gouvernement
et à la corporation concernée dans un délai raisonnable,
par exemple, en dedans de 120 jours. Il serait aussi très souhaitable,
M. le Président, dans les cas où l'Office et/ou le gouvernement
décide d'apporter des modifications à des règlements
adoptés par une corporation, que ce dernier soit consulté afin
d'éviter des actions judiciaires regrettables comme celles que l'Ordre
des optométristes a connues dans le passé.
Deuxièmement, il y a des règlements adoptés par le
bureau, maintenant, et déposés à l'Office. En vue
d'assouplir le processus réglementaire, le gouvernement devrait confier
aux corporations professionnelles l'adoption de certains règlements dont
le dépôt à l'Office n'appellerait pas une approbation de sa
part, mais constituerait uniquement une transmission de documents. Il
s'agirait, notamment, des règlements que vous trouverez aux pages 57 et
58 de notre mémoire.
Troisièmement, nous croyons que plusieurs règlements
peuvent être adoptés par simple résolution du bureau comme,
par exemple, le serment de discrétion, la formation des comités
de la corporation, etc. Enfin, l'Ordre estime que le conseil
interprofessionnel, sans assumer un rôle actif dans le processus
réglementaire, pourrait aider les corporations en leur fournissant les
aides techniques et les informations dont elles auraient besoin pour assumer
leurs responsabilités.
En ce qui a trait à la Loi sur l'optométrie, M. le
Président, et sous réserve des commentaires exprimés dans
notre mémoire, notre corporation endosse la majorité des
amendements apportés. Néanmoins, l'Ordre des optométristes
est en total désaccord avec la suppression du paragraphe b de l'article
7 de sa loi. En effet, nous nous opposons à ce que l'Office des
professions scinde la relation qui existe depuis 20 ans entre le gouvernement
et notre corporation professionnelle en matière de réglementation
des diplômes ainsi qu'au niveau des modalités de collaboration
entre l'Ordre et l'École d'op-tométrie de l'Université de
Montréal.
M. le Président, nous saisissons l'occasion, aujourd'hui, pour
signaler aux membres de la commission que tout changement à la Loi sur
l'optométrie est d'abord rédigé par l'Office des
professions. Du fait que notre notion de protection du public ne correspond pas
toujours à celle de l'Office, nous vivons des situations qui, à
notre avis, ne sont pas dans l'intérêt de la population.
À titre d'exemple, nous avons de la difficulté à
comprendre pourquoi il a fallu tant d'années avant que l'Office
décide de rédiger des modifications à notre loi pour
permettre l'utilisation des médicaments diagnostiques par les
optométristes. Nous remercions, d'ailleurs, le ministre responsable
d'avoir agi avec détermination pour mettre fin à cette situation
en introduisant, l'année dernière, le projet de loi 413. Nous
remercions également les membres de la commission de l'éducation
d'avoir apporté certains changements que l'Ordre avait proposés
avant son adoption par l'Assemblée nationale.
Nous espérons, M. le Président, que les citoyens du
Québec n'auront pas à attendre autant d'années avant de
bénéficier de l'expertise et du professionnalisme des
optométristes québécois au chapitre des médicaments
thérapeutiques. Déjà 32 États américains
permettent aux optométristes de soigner certaines maladies oculaires,
avec des résultats très satisfaisants. Aussi plusieurs provinces
canadiennes s'apprêtent à agir de la même manière.
L'Ordre des optométristes verrait d'un bon oeil toute disposition allant
dans ce sens dans un avenir rapproché.
En conclusion, M. le Président, la réforme proposée
par l'avant-projet de loi ne tend pas vers une amélioration du
système ni vers une meilleure harmonisation de ses intervenants, mais ne
fait qu'augmenter les pouvoirs de l'Office des professions. À notre
avis, le système professionnel québécois aura de la
difficulté à survivre longtemps si jamais certaines des
dispositions de l'avant-projet de loi sont adoptées.
Qui d'autre qu'un professionnel est en mesure de réglementer sa
profession, de reconnaître les actions fautives de ses confrères
ou consoeurs, de participer activement à l'inspection professionnelle de
ces derniers ou de veiller à l'excellence des programmes
académiques des nouveaux professionnels? Ce qui permet le bon
fonctionnement du système actuel, c'est le travail acharné, ardu
et honnête des professionnels qui prennent au sérieux leur
rôle de protecteur du public à l'intérieur de la
corporation professionnelle.
M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les
députés membres de la commission, en terminant, l'Ordre des
optométristes vous demande de considérer sérieusement les
commentaires qui se trouvent à l'intérieur de son mémoire
afin d'améliorer notre système professionnel, permettant une plus
grande confiance de la part de la population, tout en misant sur l'expertise
des professionnels eux-mêmes. Nous vous remercions.
Le Président (M. Gobé): Alors, merci beaucoup, M.
Chaiken. Je passe maintenant la parole à M. le ministre. Vous avez 20
minutes, monsieur.
M. Savoie: Oui. Merci beaucoup, M. le Président.
Simplement, M. le Président, au début, saluer les membres de la
corporation que nous avons eu l'occasion, effectivement, de rencontrer à
plusieurs reprises au cours de l'année, n'est-ce pas? Comme vous l'avez
mentionné, on a eu l'occasion, effectivement, de traiter avec eux autres
de plusieurs dossiers et de voir au grain au niveau de plusieurs lois en ce qui
concerne la corporation professionnelle des optométristes.
Il y a, évidemment, un avant-projet de loi qui a demandé
beaucoup de travail, on le constate, et la présentation
particulièrement claire, je ne veux pas faire mon pédant, mais
disons que je l'ai appréciée, je sais que ça demande du
travail. Il faut toujours souligner que, finalement, ça se fait un peu
à vos frais et que c'est toujours des plus bienvenus.
On constate, en gros, que, pour l'ensemble, ça va. La grande
majorité... Évidemment, il y a toujours des affaires au niveau de
la réglementation; on a les inquiétudes que vous avez. On aura
l'occasion d'«adresser» ça, je pense, pour certains des
commentaires, en tout cas, au cours de la semaine. Je ne pense pas
qu'aujourd'hui, compte tenu de l'évolution des travaux de la commission,
on devrait se pencher sur des questions précises au niveau de la
réglementation.
Vos plus grandes inquiétudes, évidemment, se situent au
niveau, d'une part, de la tutelle, deuxièmement, du pouvoir
d'enquête de l'Office et, troisièmement, d'une espèce de
développement des pouvoirs de l'Office au niveau des corporations en
disant, bon, que ça va brimer les droits des corporations, finalement,
d'assumer leurs fonctions au sein de la société. (16 h 30)
Je crois que M. Chaiken a assisté, la semaine passée,
à la présentation des mémoires. Il a été ici
une bonne partie du temps, sinon tout le temps. Il a donc pu constater
l'évolution du dossier, par exemple, au niveau de la tutelle, dans le
sens qu'il y avait une difficulté de saisir les mécanismes
impliqués au niveau de la tutelle, dans le sens que ça serait,
bien sûr, la tutelle déclarée par le gouvernement et non
pas par l'Office. La tutelle n'impliquerait pas, évidemment, qu'un
membre de l'Office deviendrait ipso facto le président de l'Ordre en
attendant l'autre élection; ça serait, bien sûr, la mise en
tutelle avec la nomination de membres par le gouvernement, qui pourraient
provenir de la même corporation professionnelle pour ramener,
évidemment, la corporation. Il y avait là des mécanismes
extraordinaires. Ça se faisait en vertu d'une loi adoptée par
l'Assemblée nationale et contrôlée par le Conseil des
ministres, là. Est-ce que ces explications ont pu modifier votre
position au niveau de la tutelle?
M. Chaiken: Pas tout à fait, M. le ministre. En effet, ce
qui nous inquiète, c'est qu'il y a un rapport qui sera
rédigé par l'Office sur une corporation ou la manière dont
une corporation va s'acquitter de ses devoirs de protection du public.
D'ailleurs, nulle part on n'a défini ce concept de protection du public.
D'autre part, ce n'est pas toujours l'Office qui a raison, à mon avis,
sur la conception de la protection du public. Je peux vous dire que, dans le
passé, l'Ordre des optométristes a même eu, à
quelques occasions, des frottements avec l'Office sur ces notions.
Alors, vous nous demandez si, à l'intérieur de
l'avant-projet, ça va pour nous. Ça ne va pas. Parce que...
M. Savoie: Non. Avec les explications fournies, là.
M. Chaiken: Bien. Il faudrait, en fin de compte...
M. Savoie: Parce qu'on constate... Oui.
M. Chaiken: ...qu'on voie les textes rénovés, dans
le fond, avant qu'on puisse procéder à une deuxième
analyse. Ce que nous voulons éviter, c'est ceci: l'Office, serait
l'auteur d'un rapport, et le gouvernement prend ce rapport-là et, en fin
de compte, met en tutelle une corporation sans qu'on entende même la
corporation, d'une part.
M. Savoie: Ah, bien non, là! Il n'y a personne qui a dit
ça, là. Ça, c'est une mauvaise présomption de votre
part.
M. Chaiken: Mais, moi, je présume avec ce qui est
écrit. Alors, dans ce qui est écrit dans la loi, il n'y a pas de
prévision d'un droit d'appel. Alors, si vous voulez en mettre un,
mettez-le et on va, évidemment, à ce moment-là, regarder
les possibilités.
J'ai assisté à certaines comparutions, la semaine
dernière, et je comprends très bien les inquiétudes que
vous avez, en fin de compte, quand il y a une corporation qui ne s'acquitte pas
de ses devoirs, qui refuse d'appliquer le Code, par exemple. Vous devez, comme
responsable ultime de la protection du public, agir.
M. Savoie: C'est ça.
M. Chaiken: En tant que ministre responsable, vous avez la
responsabilité de le faire et il faut que vous vous dotiez de moyens
pour le faire.
M. Savoie: C'est ça.
M. Chaiken: Ce que nous demandons, simplement, c'est d'avoir des
moyens justes et équitables pour la corporation, également, et ce
n'est pas ça qui est écrit à l'intérieur de
Favant-projet dont on parle aujourd'hui.
M. Savoie: Oui. C'est-à-dire que le bat de baseball a
dû sonner une corde, là. L'image du bat de baseball a dû
sonner une corde, chez vous.
M. Chaiken: Bien, j'aimerais bien mieux, M. le ministre, qu'au
lieu d'avoir un bâton de baseball dans les mains on essaie de travailler
avec une corporation qui serait...
M. Savoie: C'est ça, oui.
M. Chaiken: ...déficitaire ou déficiente au niveau
de ses acquittements de protection du public. Si vous jugez ou si l'Office
juge, d'ailleurs, qu'une corporation ne s'acquitte pas véritablement de
ses obligations de protection du public, essayez de l'aider. Au lieu de prendre
un bâton de baseball et de le brandir sur sa tête continuellement,
il y a certainement des moyens d'intervention pour aider ces corporations.
M. Savoie: Oui. On ne parle pas d'un bâton de baseball pour
frapper sur la tête. C'est tout simplement qu'on utilisait l'exemple...
Ça a évolué, la semaine passée, dans le sens que,
finalement, là, face à une corporation qui était
récalcitrante à appliquer la loi, on n'avait aucun recours, en
bout de piste. Il n'y avait pas de mécanisme qui avait été
étudié et accepté par l'ensemble.
Et là, je peux vous dire que je pense qu'il y a un consensus qui,
en tout cas, se développe autour du mécanisme qui pourrait
être utilisé si jamais on retenait la notion de tutelle,
là, c'est-à-dire comme elle peut exister ailleurs. Sans dire que
les corporations l'acceptent, là, je pense que, quand même, elles
voient que ce n'est pas si négatif que ça, finalement, en bout de
piste, que c'est peut-être attendu par plusieurs. Au niveau du pouvoir
d'enquête de l'Office, là aussi, vous avez opposé une fin
de non-recevoir dans le sens que vous dites: Bon, le pouvoir est trop grand. Il
faudrait le baliser davantage. Dans quel sens vous voyez ces balises? Quelles
sortes de balises vous voyez?
M. Gareau (Claude): Notre inquiétude, M. le
Président, c'est la suivante. D'abord, je voulais vous dire que je n'ai
pas assisté, la semaine dernière, parce qu'en me rendant à
la commission j'ai fait trois tonneaux entre Mont-Laurier et Québec.
M. Savoie: Trois tonneaux? Une voix: De voiture. M.
Savoie: Ah oui?
M. Gareau: Et je suis très heureux d'être ici,
aujourd'hui.
M. Savoie: Bien oui. Bien oui. Ça a passé proche,
hein?
M. Gareau: J'ai été très malchanceux. C'est
pour ça que je ne sais pas quelle est exactement l'idée qui s'est
dégagée de la commission parlementaire, la semaine
dernière.
Notre inquiétude, c'est que, dans l'avant-projet de loi, on ne
retrouve pas de critères, de normes ou de paramètres en vertu
desquels l'Office des professions, suivant sa conception de
l'intérêt public, pourrait faire une recommandation au
gouvernement et au ministre pour que le gouvernement, par la suite, prenne la
décision de placer une corporation en tutelle. D'autre part, on ne voit
pas, non plus, dans cet avant-projet de loi la possibilité pour la
corporation de se faire entendre auprès d'une instance quelconque et
d'en appeler, s'il y avait lieu.
M. Savoie: Oui. Bien, on en a discuté assez longuement
pour chercher à établir des balises. Comme je vous l'ai
mentionné, c'est qu'il semble se dessiner un consensus sur les
mécanismes qui pourraient se développer, qui seraient, en tout
cas, acceptables si jamais le mécanisme de tutelle était retenu,
tant des notions de justice, d'application des règles de droit, comme
entendre l'autre; je ne pense pas qu'on ait besoin d'entrer dans des
mécanismes en tant que tels au niveau de la loi. Ça pourrait se
faire facilement par le biais d'une réglementation. Un mécanisme
pour, effectivement, être en mesure d'imposer une obligation à une
corporation, par exemple, de respecter la loi, d'imposer une obligation de
fournir des documents dans des cas extrêmes. Je ne parle pas de
situations courantes, là. L'Office avait... Il y avait
déjà un pouvoir de tutelle qui était prévu dans la
loi en cas de difficultés financières. On ne s'en est jamais
servi en 20 ans.
Là, ce qu'on constate, c'est le besoin de mettre de la pression
pour le respect de certains articles, par exemple, du code de
déontologie, pour forcer les corporations à développer des
structures pour protéger le public lorsqu'il y a... On a soulevé
ça au niveau d'interférences au niveau du travail du syndic, des
choses comme ça.
M. Chaiken: Pour répondre aux questions que vous aviez, M.
le ministre, concernant les pouvoirs d'enquête, nous trouvons abusifs ces
pouvoirs-là de pénétrer à n'importe quelle heure
raisonnable. Et, encore, je reviens à l'idée de plutôt
travailler, je dirais, comme des partenaires avec l'Office et avec le
gouvernement pour le bon fonctionnement du système qui vise, finalement,
à protéger le public. Pour quelle raison on va permettre à
quelqu'un de l'Office d'aller systématiquement chez l'une et chez
l'autre corporation de cette façon-là? Pourquoi? Et j'ai entendu
d'autres corporations dire qu'elles ont déjà invité les
gens de l'Office à venir voir leurs choses, et ils ne sont jamais venus
depuis 20 ans. Pourquoi? Il pourrait y avoir peut-être un
mécanisme de vérification et, d'ailleurs, c'est le rôle de
l'Office de veiller à ce que les corporations remplissent leur mission
de protection du public.
Il ne faut pas perdre de vue que nous avons un
système basé sur l'autogestion des corporations. Ou bien
on y croit ou on n'y croit pas. Et ce qui semble évident dans
l'avant-projet, c'est que les auteurs de l'avant-projet n'y croient pas. C'est
une modification majeure au niveau de la réglementation. On permet, par
exemple, à l'Office, avec l'article 12.4, de modifier à sa guise
tout règlement d'une corporation professionnelle. Nous trouvons
ça anormal à l'intérieur d'un système basé
sur l'autorégulation. Si le gouvernement, si l'Assemblée
nationale décide qu'on change le système et qu'on veut faire un
système étatique, bien, c'est une autre paire de manches. Mais,
à ce moment-là, il faudrait trouver des professionnels qui
voudraient participer pour vous aider à remplir cette
mission-là.
M. Savoie: On va revenir vers la fin, nous autres. M. Gareau:
Je pourrais ajouter?
M. Savoie: Non. C'est parce que tu es sur mon temps. Ha, ha,
ha!
M. Gareau: Excusez. Ha, ha, ha!
M. Savoie: Peut-être que, M. le Président...
Le Président (M. Gobé): Oui, monsieur. Vous avez
terminé, M. le ministre?
M. Savoie: Oui. Merci.
Le Président (M. Gobé): Alors, vous reviendrez par
la suite. Il vous reste trois ou quatre minutes. (16 h 40)
M. Savoie: Merci. Vous comprendrez, hein? Il me reste seulement
trois, quatre minutes. On pourra échanger à la fin.
Le Président (M. Gobé): Alors, Mme la
députée de Terrebonne, vous avez, vous, 20 minutes.
Mme Caron: Merci, M. le Président. Alors, si vous voulez
ajouter, je vous le permets.
M. Gareau: Bien, je voulais ajouter ceci. C'est que nous
comprenons très bien que le gouvernement, qui est responsable de la
protection du public, à un moment donné, prenne des dispositions
pour que les corporations professionnelles remplissent leur mandat, mais ce qui
nous trouble, c'est que l'avant-projet de loi va au-delà de ça,
et ça commence dès l'article 2 où, au lieu de donner
à l'Office une responsabilité sur 41 corporations
professionnelles, on étale la responsabilité de l'Office aux 240
000 professionnels du Québec. On continue ensuite à l'article
15.4, à l'article 149, à l'article 192, où on peut obtenir
les dossiers des professionnels en venant au niveau des corporations
professionnelles. Ça, c'est un «bug» pour nous autres.
Mme Caron: Ce qu'il m'apparaît, M. le Président,
c'est que, finalement, on ressent exactement, mais exactement la même
chose du côté des consommateurs et du côté des
corporations professionnelles. En fait, les deux se disent: Le système
qui est là, on n'y a pas vraiment confiance; ça nous
inquiète. On ressent exactement la même chose de ce
côté que les corporations professionnelles qui nous disent:
L'Office des professions est juge et partie lorsqu'il a à imposer la
tutelle, et c'est vrai. Le passé étant garant de l'avenir, vous
avez une certaine méfiance parce que vous avez eu, effectivement,
certains frottements.
Du côté des consommateurs, c'est exactement la même
chose. Le ministre nous dit: Jamais en 20 ans on ne s'est servi du pouvoir de
tutelle, mais là on va lui donner plus de dents. Ça va être
un système plus rigoureux. Bien, pourquoi on ne s'en est pas servi avant
si on en avait besoin? Or, pourquoi le système actuel, on ne lui a pas
mis plus de dents, puis on ne l'a pas utilisé davantage? Je pense que
tout le monde peut être placé dans le même état de
bien saisir ce que les uns et les autres ressentent, parce que je pense que
vous ressentez tous exactement la même chose.
Votre mémoire est intéressant parce que vous avez,
d'abord, fait un travail article par article, ce qui est important, parce que
c'est beau d'entendre des commentaires et des réflexions de la part du
ministre, mais le texte de loi de l'avant-projet est clair, et c'est
là-dessus qu'on doit se prononcer et non seulement sur des
réflexions. Concernant certains frottements dans le passé, je
pense que la loi 413 en est un bel exemple, un projet de loi qui a
été présenté par l'Office des professions, qui
n'allait pas nécessairement dans le sens de ce que le ministre
souhaitait ni que l'Opposition souhaitait, et nous avons dû partir de ce
projet de loi pour le modifier, l'amender et pour donner, finalement, une
protection au public. Votre mémoire touche donc une partie de
l'avant-projet de loi article par article.
Vous nous faites aussi part des articles qui touchent plus
précisément la Loi sur l'optométrie. Vous touchez aussi,
à ce moment-là, je pense, un élément
extrêmement important, l'importance de la collaboration entre le
gouvernement et les corporations professionnelles au niveau de la
réglementation des diplômes. Au niveau de la profession,
là, je pense que c'est capital, cet élément-là, et
qu'il faut vraiment le maintenir, que c'est la meilleure façon d'assurer
la protection du public au niveau de la formation.
Je sais que votre corporation travaille aussi beaucoup au niveau de la
formation continue, parce que c'est un élément majeur. C'est
important d'avoir un bon système de plaintes, mais c'est important que
nos professionnels soient compétents pour qu'on n'ait pas besoin de se
plaindre. Je pense qu'au niveau de la santé, surtout, c'est capital.
Vous présentez aussi le processus réglementaire, ce qui
est intéressant, parce que c'est une des faiblesses. Autant les
consommateurs se plaignent des délais pour
recevoir réponse à leurs plaintes, autant les corporations
professionnelles se plaignent au niveau de la réglementation. Souvent,
c'est des règlements qui permettraient une meilleure protection du
public, mais les délais de l'Office de 4 ans, 5 ans - dans certains cas,
on dépasse les 10 ans - font que le public n'est pas
protégé pendant ce temps-là, et ce n'est pas
évident qu'on le sait toujours.
Vous nous proposez un modèle de système disciplinaire qui
est différent de ce qu'on a eu jusqu'à maintenant. Je vais,
évidemment, profiter de votre passage pour vous faire parler davantage
de ce modèle-là qui est intéressant. L'ajout de
Fombudsman, d'un genre de protecteur, là, au niveau des services
professionnels, ça m'apparaît un élément nouveau qui
mérite peut-être d'être étudié davantage. Vous
nous parlez aussi d'un greffe commun.
Moi, j'aimerais que vous précisiez: À ces diverses
instances-là, est-ce que vous êtes prêts à toujours
ajouter... Alors, je pense, par exemple, aux comités avi-seurs, parce
que, pour le comité de discipline, vous nous dites: «La
composition et le mode de nomination actuels sont conservés».
Est-ce que vous seriez prêts à ajouter à toutes ces
instances-là une participation du public pour que, vraiment, au niveau
du comité de discipline aussi, le public soit
représenté?
M. Chaiken: Je pense que la réponse à cette
question hypothétique pourrait être discutée. Ce que je ne
comprends pas, c'est qu'à l'intérieur des comités de
discipline, dans le déroulement d'une séance, il n'y ait jamais
un membre du public vraiment présent. On se pose la question: Est-ce
que, d'un côté, ces gens-là sont aptes à participer
au comité de discipline? Il ne faut pas, d'ailleurs, oublier que le
président du comité, c'est un avocat. Alors, pour nous, ce n'est
certainement pas un membre de notre corporation. Alors, il y a une certaine
impartialité évidente qui est là.
Pourquoi on ne voit pas, du fait que ces séances sont publiques,
une plus grande participation de la part du public, des ACEF et des choses
comme ça? On ne veut pas critiquer ces associations, mais est-ce que ces
conceptions sont vraiment fondées? J'ai écouté, tout
à l'heure, la présentation, qui était, d'ailleurs,
très intéressante, les témoignages personnels très
touchants, mais est-ce que c'est vrai que cette perception de protéger
une profession est vraiment là? Je ne suis pas convaincu de
ça.
Pour les questions de parler de notre système disciplinaire que
nous avons proposé, je vais avec l'accord du président, je lui
demanderais de céder la parole à Me Daniel Lavoie, qui
était l'auteur de ce système-là, qui nous l'a
proposé et, avec un certain nombre de discussions, on vous l'a
présenté à l'intérieur de notre mémoire.
Le Président (M. Gobé): M. Lavoie, vous avez la
parole.
M. Lavoie (Daniel): Oui, M. le Président. Merci. Je
voudrais simplement ajouter à ce que vient de dire le président
de la corporation des optométristes que, quant à la
présence du public dans les organes du modèle qu'on vous
suggère, au niveau des comités aviseurs, il y a un administrateur
nommé qui s'y trouverait. Donc, ça a été
prévu.
Au niveau de Fombudsman des services professionnels, qu'on l'appelle
comme tel, qu'on l'appelle un super-syndic, qu'on l'appelle un commissaire,
comme le journaliste Gilles Lesage l'a plutôt vu dans Le Devoir de
samedi dernier, ça n'importe pas. Ce qui est important, c'est de voir
derrière ce nouvel organe un plus grand souci au niveau de la
perception, parce que je pense qu'ici on est à un niveau de perception
plutôt qu'à un niveau de problèmes de fond. C'est tout
aussi important dans notre société et c'est encore tout aussi
important dans un système de justice.
Mais, si je reviens à la structure qu'on vous suggère,
l'ombudsman des services professionnels, vous aurez noté qu'il pourrait
intervenir à la demande d'un plaignant privé et si,
effectivement, le plaignant privé le convainquait que le syndic n'avait
pas raison de ne pas poursuivre la plainte qu'il lui aurait
déposée, bien, il pourrait agir à la place du syndic pour
prendre fait et cause au niveau du plaignant privé.
Alors, je pense que ça traduit bien la présence du public,
et elle est déjà acquise au niveau du Tribunal des professions,
puisque ce sont des juges de la Cour du Québec. Elle est
déjà acquise au niveau du comité de discipline parce que
le président est un membre extérieur à la corporation
professionnelle concernée et, en associant, au niveau du syndic, un
support qu'on a voulu appeler un comité aviseur, où la personne,
le plaignant privé pourrait être appelé à donner des
informations complémentaires, je pense que, par réalisme, par
expérience, on arrive à un certain équilibre qui atteint
la perception au niveau de l'impartialité et de la transparence. (16 h
50)
Ce n'est pas parfait encore, mais, dans ça comme dans autre
chose, il faut évoluer graduellement et, nous, c'est ce que nous
pensions, que c'était une façon d'évoluer graduellement
pour solutionner un problème qui semble présent. Sans faire le
partage des torts, de ceux qui ont tort et de ceux qui ont raison, s'il y a de
vrais problèmes au niveau du fond, à savoir si les professionnels
sont ci, sont ça, bon, je pense qu'on est à un niveau de
perception, puis c'est ça qu'il faut corriger. Il faut réajuster
le tir du système disciplinaire et on vous suggère, en même
temps, de toucher au système pénal à l'intérieur du
même service. Je pense qu'il faut le régler, le problème de
perception. On ne le réglera jamais de façon parfaite, mais il
faut l'améliorer.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. Lavoie.
Madame.
Mme Caron: Merci, M. le Président. Oui, votre
modèle me semblait intéressant parce que effectivement, on trouve
un peu, à toutes les instances, une participation du public et je la
voyais manquante uniquement au comité de discipline. Alors, c'est pour
ça que je vous posais la question, si vous étiez d'accord pour
l'ajouter là, parce que l'ombudsman, ou qu'on l'appelle le commissaire,
là, c'est une protection et ça permet que la plainte puisse se
poursuivre sans que la personne, le plaignant soit obligé d'aller en
privé, ce qui est quelque chose d'extrêmement difficile,
compliqué et pénible et peut être très coûteux
aussi. Alors, je me disais: II manque seulement, au niveau du comité de
discipline, une présence du public.
Et, peut-être pour exprimer pourquoi les gens n'y vont pas, bien,
au nombre de comités de discipline qui existent, avec le nombre de
corporations, c'est évident que les associations de consommateurs ne
peuvent pas couvrir toutes les plaintes. Il faut, pour que ça se fasse,
je pense, d'une manière correcte, qu'une personne précise soit
nommée pour s'assurer que ça se fait toujours, pas seulement que
les gens puissent assister s'ils ont le goût d'y assister. Je pense que
c'est un petit peu la différence qu'il faut apporter
là-dessus.
Vous nous avez parlé aussi du secret professionnel. Je pense que
la commission, qui étudie actuellement le projet de loi 68, touche
à l'importance de la protection de la vie privée et des
renseignements personnels. Donc, il va falloir qu'il y ait une certaine
harmonisation entre ce qui va se décider au niveau du Code des
professions et le projet de loi 68.
Du côté des plaintes qui touchent les
optométris-tes, si on regarde la liste qui a été
présentée dans le mémoire de l'ACEF, les
optométristes ont reçu, en 1990-1991, des demandes
d'enquête. Il y en a eu 28 et 4 qui ont été transmises au
comité de discipline.
M. Savoie: Demandes d'enquête retenues.
Mme Caron: Retenues. Oui, c'est ce que j'ai dit. Et quatre sont
allées au comité de discpline. Est-ce que vous considérez
qu'actuellement le syndic de votre corporation... Parce que, dans certaines
corporations, on s'est aperçu, et les syndics sont venus nous le dire,
que, même si c'était une instance extérieure qui aurait
à décider, ils sont limités sur les causes qu'ils peuvent
accepter. Finalement, ce serait une instance extérieure, puis elle
devrait les rejeter pareil parce que ça ne fait pas partie des causes
qui peuvent être acceptées. Est-ce que, chez vous, vous vivez ce
problème-là?
M. Chaiken: Je crois que la réponse, c'est oui, et je vous
donnerais un exemple. Il y a souvent des différends entre un citoyen et
un professionnel, un optomé-triste; on demande des remboursements, par
exemple, et, actuellement, du moins, notre syndic ne croyait pas que
c'était une possibilité qu'il porte plainte, parce qu'il n'y
avait pas de faute disciplinaire. C'était une question que, par exemple,
une lunette n'a pas donné les résultats que le patient
s'attendait d'avoir. À ce moment-là, c'était
peut-être plutôt au niveau de la Cour des petites créances
où la personne a été dirigée.
Je vais vous donner mon interprétation, avec le règlement
d'arbitrage et conciliation des comptes. J'aimerais bien voir ce genre de
choses là réglées à ce niveau-là, à
l'intérieur de ce comité-là; on pourrait éviter des
processus judiciaires et régler la plupart des choses à
l'amiable. Nous, ça sera acceptable et bien, autant pour
l'optométriste que pour la personne impliquée, la population.
Mme Caron: Oui. Parce que, souvent, l'insatisfaction est
plutôt parce que la plainte est rejetée, mais, souvent, ça
ne fait pas partie des plaintes qui peuvent être acceptées,
même si c'est une instance extérieure, il n'aura pas satisfaction
davantage. Est-ce que vous seriez en faveur... Certains nous ont fait part
d'une proposition de clause plus ouverte, omnibus, un peu, qui permettrait de
pouvoir répondre quand même, peu importe le type de plainte.
M. Chaiken: Je pense que la réponse serait oui et,
possiblement, même à l'intérieur du comité aviseur
que nous avons suggéré, il serait peut-être possible de
régler un certain nombre de ces différends que le syndic ne peut
pas déposer, parce que ce n'est pas une plainte disciplinaire contre le
code de déontologie, par exemple, mais il existe un problème
évident entre un patient et son optométriste et il faut que
quelqu'un le règle. C'est possible que le comité aviseur aide le
syndic ou qu'il fasse ce genre de travail là. Et aussi, comme je disais
tout à l'heure, il y a le comité sur la conciliation et
l'arbitrage de comptes, et nous verrions, nous, d'un bon oeil que ce
comité-là puisse traiter ces cas-là. Je pense qu'on
réglerait la majorité des problèmes que nous avons.
Évidemment, on n'a pas toujours les mêmes problèmes. Il y a
d'autres corporations qui semblent avoir des problèmes beaucoup plus
graves que ce que nous vivons.
Mme Caron: Est-ce que vous faites une différence au niveau
des corporations professionnelles qui sont à exercice exclusif et les
corporations professionnelles qui sont à titre
réservé?
M. Gareau: Bien, il n'y a aucun doute, si vous me permettez, M.
le Président, que l'on fait une différence, et je puis ajouter
que nous sommes heureux d'être dans une profession à exercice
exclusif. Les corporations à titre réservé ont les
mêmes obligations, les mêmes responsabilités que les
corporations à exercice exclusif. Cependant, il y a beaucoup de demandes
qui leur échappent et peut-être qu'il y en aura encore plus
tantôt. On verra. Et la protection du public, à ce
moment-là, à mon avis, est moindre. Ce n'est pas la faute des
corporations comme telles. Ça fait longtemps
que je suis dans le système, mais ça fait longtemps que
l'Office essaie de trouver un moyen de resserrer la protection du public pour
les corporations à titre réservé, mais ce n'est pas
facile. Il n'y a pas de solution miracle. Il y a eu des amendements au Code et
j'espère qu'il y en aura d'autres dans un avenir rapproché.
Mme Caron: Parce que ça m'apparaît important. On
touche près de la moitié des corporations professionnelles et on
n'en fait pas part dans Favant-projet. On sait très bien, lorsqu'on
rencontre les corporations une à une, qu'il y a, effectivement, un
problème et, si on décide de toucher au Code des professions,
c'est un problème qui est majeur et puis, si on n'y touche pas, je pense
qu'on passe à côté. Je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Gobé): Alors, merci, Mme la
députée. M. le ministre, quelques réflexions?
M. Savoie: Oui, oui. Tout simplement pour revenir, justement, sur
les données du rapport annuel 1990-1991. Vous avez parlé des 28
demandes retenues. Vous avez eu combien de demandes d'enquête en tout?
Est-ce que vous avez une idée de l'ordre de grandeur?
Une voix: C'est quelle année?
M. Savoie: 1990-1991. 100, 200 ou 50? Tout simplement l'ordre de
grandeur. Je ne veux pas le chiffre exact parce que je sais que c'est
difficile.
M. Chaiken: Nous avons notre rapport annuel ici. On...
M. Savoie: Oui, mais ce n'est pas dans votre rapport annuel parce
que vous ne nous fournissez pas cette information-là.
M. Chaiken: Je peux vous dire qu'en 1991-1992...
M. Savoie: Oui.
M. Chaiken: ...ce qui est plus récent, il y a eu environ
500 appels au niveau du syndic, surtout au niveau de l'information, quels sont
les droits...
M. Savoie: Oui. D'accord. M. Chaiken: ...quels sont les... M.
Savoie: Et combien...
M. Chaiken: Toutes sortes d'informations. Est-ce que c'est
nécessaire, par exemple...
M. Savoie: Des demandes d'enquête.
M. Chaiken: ...pour un optométriste, de donner une
ordonnance? ça, ce sont ces genres de choses qu'on avait à
traiter. il y a aussi des demandes et réclamations dont je parlais tout
à l'heure que le syndic ne peut pas traiter, actuellement, et ce qu'on
aimerait voir traiter, à l'intérieur d'un système, pour
régler ça rapidement, le plus rapidement possible, pour une
meilleure protection du public. il y avait 30 plaintes, en tout, qui ont
été déposées au niveau du syndic, d'après
les chiffres que j'ai ici, dont 3 plaintes qui ont été
déposées par le syndic au comité de discipline. il y en
avait 19 qui étaient encore à l'étude, 2 retirées
par le plaignant et 6 qui ont été rejetées par le syndic
sur 30. alors, quand même, il n'en a pas rejeté, comme on dit
ailleurs, 95 % ou 97 %. ce n'est pas vrai, chez nous.
Il faut aussi ajouter que nous avons eu un problème avec le
président de notre comité de discipline. Depuis deux ans, il y a
beaucoup de cas. Et on remercie, d'ailleurs, le président de l'Office
qui a réglé, en fin de compte, le problème, parce que le
président de notre comité ne rendait pas les jugements, et il y a
encore des jugements en suspens. (17 heures)
M. Savoie: Bon. On a fermé la porte là-dessus,
mais, effectivement, c'est le cas. Alors, finalement, c'est ça: 28 pour
1990-1991 et, ensuite, une trentaine pour 1992.
M. Chaiken: Une trentaine de plaintes déposées.
M. Savoie: C'est ça. Mais pensez-vous que ce serait
nécessaire de modifier la réglementation pour qu'on connaisse
également le nombre de plaintes non pas retenues, mais tout simplement
déposées auprès de la corporation professionnelle?
M. Gareau: Nous, il n'y a pas objection.
M. Savoie: Non? Il n'y a pas de problème avec
ça?
M. Chaiken: Absolument pas. On est pour la vertu, comme tout le
monde. Et on voudrait être le plus transparents possible. Il n'y a pas de
problème à ce niveau-là.
M. Savoie: Oui. Bien, c'est ça. Alors, on vous remercie
pour la présentation et on constate effectivement, ià, que, pour
l'ensemble, ça va. Il y a des bibites ici et là, mais, pour
l'ensemble, ça va. Des problèmes au niveau, également, de
la tutelle, mais je pense qu'avec les explications fournies ça dissipe
des inquiétudes, au moins en partie. Comme je l'ai mentionné pour
les autres, là, au niveau de l'ensemble de la réforme, je pense
qu'il y a une prise de conscience, en tout cas, certainement, dans votre
présentation, pour la protection du public, qui est intéressante,
et la recherche, comme nous, de solutions. On vous remercie.
Le Président (M. Gobé): Alors, merci beaucoup,
messieurs. Ceci met fin à votre audition. Nous avons
apprécié votre témoignage. Je vais donc maintenant
suspendre les travaux une minute, afin de permettre aux représentants de
l'Ordre des comptables agréés du Québec de bien vouloir
venir prendre place en avant. Alors, la commission est suspendue.
(Suspension de la séance à 17 h 1)
(Reprise de la séance à 17 h 3)
Le Président (M. Gobé): Mesdames et messieurs, si
vous voulez bien prendre place et faire silence, la commission reprend ses
travaux.
Alors, je souhaite la bienvenue aux représentants de l'Ordre des
comptables agréés du Québec, et je demanderai au
président ou à leur représentant - pardon, ou à
leur représentante - de bien vouloir se présenter, et de
présenter la personne qui l'accompagne. Vous pourrez procéder
à votre présentation sans plus tarder. Vous avez la parole.
Ordre des comptables agréés du
Québec
M. Jacques (Richard): Merci, M. le Président. Sans plus
tarder, je vais me présenter. Richard Jacques, directeur
général et secrétaire général de l'Ordre des
comptables agréés. Je suis accompagné de ma
collaboratrice, Ginette Lussier-Price, qui est directrice de l'inspection et
des affaires professionnelles à l'Ordre des comptables
agréés.
Le Président (M. Gobé): Bonjour, madame. Vous avez
la parole.
M. Jacques: Merci, M. le Président. Alors, dans un premier
temps, j'aimerais, Mmes et MM. les membres de la commission, tout d'abord, vous
remercier de l'opportunité offerte de venir présenter le
mémoire de l'Ordre des comptables agréés sur
l'avant-projet de loi modifiant le Code des professions. Après une
brève présentation, nous serons disponibles pour répondre
à toutes vos questions.
Lorsque cet avant-projet de loi a été
présenté en décembre dernier, après l'avoir
analysé et devant l'importance des modifications qu'il contient, nous
avons cru de notre devoir d'en commenter le contenu. Notre position est
clairement établie dans le mémoire que nous avons
déposé à cette commission. Dans un premier temps, nous
aimerions vous soumettre quelques commentaires généraux pour
passer par la suite à des sujets plus spécifiques qui, de toute
façon, ont tous le même fil conducteur.
Tout d'abord, quelques commentaires sur le système professionnel
actuel. Au Québec, l'orientation qui a été
privilégiée est un système basé sur l'autogestion
des corporations. Depuis la semaine dernière, tous ceux qui ont
défilé devant cette commission ont été unanimes:
notre système fonctionne généralement bien, il a fait ses
preuves et on le cite même en exemple comme un modèle à
suivre. Tous reconnaissent aussi que l'organisation professionnelle a atteint
un stade de maturité. Nous souscrivons d'emblée à tous ces
commentaires. Toutefois, rien n'est jamais parfait et l'expérience
passée nous a permis d'identifier certaines faiblesses que nous aurions
avantage à corriger si nous voulons continuer à avoir un
système modèle. Tous s'entendent aussi sur les grands objectifs
à atteindre au niveau de notre système professionnel. Il doit
être plus transparent, il doit être plus souple, il doit être
plus accessible, et toujours en maintenant un niveau d'efficacité et un
coût le plus bas possible. Le problème réside dans
l'équilibre que nous devons rechercher entre tous ces objectifs,
très louables lorsque pris individuellement.
Chacune des modifications proposées dans l'avant-projet de loi
qui nous a été présenté touche un de ces objectifs,
mais nous avons essayé d'y trouver une orientation, un fil conducteur,
une priorité, sans succès. Nous y trouvons un ensemble de mesures
hétéroclites pour boucher des trous, pour pallier à
certains commentaires négatifs venant souvent d'intervenants mal
informés du fonctionnement du système professionnel.
L'opinion de l'Ordre des comptables agréés du
Québec sur la situation actuelle et sur l'orientation à
privilégier est très claire. Premièrement, le
système professionnel actuel comporte toutes les bases et tous les
mécanismes nécessaires pour assurer une protection
adéquate du public. Le gouvernement se réserve l'approbation des
règlements touchant les critères d'accès à la
profession, le code de déontologie, l'inspection professionnelle, et ce
sont les règlements qui représentent le coeur de l'exercice d'une
profession. De plus, le gouvernement encadre le processus disciplinaire
à l'intérieur du Code des professions. Aussi par une
présence du public. Comme on le sait, des représentants sont
choisis par l'Office, siègent au bureau des corporations et un avocat
indépendant préside le comité de discipline.
Deuxièmement, selon nous, les principales modifications à
apporter à ce système professionnel seraient pour en
améliorer l'efficacité. Alors, comment le rendre plus efficace?
Premièrement, par une plus grande responsabilisation des corporations
professionelles, principalement au niveau de leur réglementation.
Deuxièmement, quant au volet disciplinaire, par un renforcement du
rôle du syndic et du comité de discipline, par des modifications
permettant d'accélérer le processus de règlement de
plaintes, principalement par une déjudicia-risation du processus.
Alors, M. le Président, il est bien évident que, lorsque
nous voyons, dans l'avant-projet de loi, des mesures, tel un comité
d'examen des plaintes qui ne fera, selon nous, qu'allonger les délais,
qu'entraîner des coûts additionnels, que nous voyons l'obligation
du syndic d'informer l'Office sur les plaintes non traitées,
ce qui peut être vu comme un affaiblissement du rôle du
syndic, lorsqu'on voit aussi l'attribution de pouvoirs accrus pour l'Office,
que ce soit au niveau des pouvoirs d'enquête, des pouvoirs de tutelle,
nous ne pouvons qu'être en désaccord avec ces recommandations, car
elles vont, selon nous, à rencontre de l'objectif de base qui devrait
être d'améliorer l'efficacité du système tout en
préservant l'équilibre entre les divers intervenants.
Permettez-moi maintenant de commenter certains aspects plus
spécifiques de l'avant-projet de loi pour illustrer l'orientation et
l'approche que nous souhaiterions voir adopter par le gouvernement et par
l'Office.
Tout d'abord, sur le rôle et les pouvoirs de l'Office. À ce
sujet, l'avant-projet de loi est très clair. Le rôle de l'Office
serait modifié par un élargissement de ses pouvoirs via des
instruments de contrôle afin de régir l'administration des
corporations, via des pouvoirs d'enquête et de tutelle, via un certain
droit de regard sur le processus disciplinaire, et aussi par une
responsabilité accrue dans l'assouplissement du processus
réglementaire. (17 h 10)
Tel que déjà exposé, nous sommes fermement
convaincus que nous devrions aller à l'opposé de cet
élargissement de pouvoirs pour l'Office. Le système a atteint un
niveau de maturité avancé, les corporations professionnelles ont
démontré qu'elles étaient responsables et qu'elles ont
toutes inscrit dans leur mission de base la protection du public. Il est donc
temps de passer à une nouvelle phase. Il est en effet temps de
transférer aux corporations une plus grande part de
responsabilité et d'alléger encore plus le rôle de l'Office
pour en faire vraiment un organisme de surveillance dit léger.
Nous croyons ainsi que les coûts d'exploitation de l'Office
pourraient être réduits sensiblement, ce qui, en soi, est un
objectif louable dans le contexte économique actuel et le contexte de
déficit gouvernemental très élevé. C'est ainsi que
nous souscrivons aux mesures d'assouplissement du processus
réglementaire annoncé dans l'avant-projet de loi. Plus de
règlements seront du ressort des corporations, ce qui va dans
l'orientation que nous préconisons. Toutefois, nous croyons que le
gouvernement pourrait aller encore plus loin dans cette
délégation.
Et ce qui nous a surpris dans l'annonce de ces mesures, c'est le fait
que l'Office se verrait attribuer encore plus de responsabilités
qu'actuellement dans le processus, ce que nous trouvons injustifié.
N'oublions toujours pas que des représentants du public siègent
aux instances décisionnelles des corporations. Si ces
représentants externes jouent bien leur rôle et si l'Office est
ouvert à conseiller les corporations dans la révision de leur
réglementation, nous croyons que toute mesure de contrôle
additionnelle est superflue et peut devenir une entrave à
l'efficacité des corporations.
Autre aspect spécifique qu'on aimerait traiter: la transparence
du processus disciplinaire. Dans un objectif d'améliorer la transparence
du système disciplinaire, on y introduit un palier intermédiaire
entre le syndic et le comité de discipline, le comité d'examen
des plaintes, où siégeraient deux représentants du public.
Ceci, à notre avis, va à rencontre d'un objectif
d'efficacité accrue. Le fonctionnement sera beaucoup plus lourd
qu'actuellement et entraînera des délais additionnels. Nous
croyons que la situation actuelle, où le syndic a toute l'autonomie
voulue et n'est astreint à aucune pression administrative de sa
corporation, et où le président du comité de discipline
est un avocat d'expérience nommé par l'Office, assure toute la
transparence nécessaire au système, d'autant plus que tout
plaignant non satisfait de la décision du syndic peut porter plainte
directement au comité de discipline. S'il y a, par contre, un volet
où le public a raison de se plaindre, c'est en ce qui concerne le temps
que ça peut prendre au comité de discipline avant de pouvoir
rendre un jugement. La situation actuelle, où les tactiques dilatoires
sont monnaie courante, souvent farfelues, et ne font qu'entraver le
déroulement des audiences, nous semble par contre des plus dommageables.
Nous trouvons tout à fait inadmissible de prendre des années pour
pouvoir finaliser une cause.
Nous recommandons donc, dans notre mémoire, que le processus
disciplinaire soit déjudiciarisé pour le rendre plus
expéditif en renforçant le rôle du comité de
discipline. Nous recommandons aussi, dans notre mémoire, d'autres
mesures qui, selon nous, auraient pour effet d'améliorer la protection
du public, tout d'abord, en élargissant la juridiction disciplinaire aux
cabinets et aux candidats à l'exercice de la profession; en simplifiant
le processus pour les cas de radiation provisoire pour permettre une
décision rapide et efficace du comité de discipline; en
permettant la radiation pour non-paiement d'amende et en rendant possibles des
sanctions dans le cas d'usurpation de titre.
Dans le mémoire que nous vous avons déposé, nous
avons analysé et commenté toutes les modifications
proposées dans l'avant-projet de loi. Notre conclusion est que cet
avant-projet de loi devrait être retiré. Dans notre
présentation, cet après-midi, nous avons tenté d'illustrer
que les modifications proposées allaient, pour la plupart, à
rencontre de la ligne directrice que nous souhaiterions privilégier,
c'est-à-dire une plus grande responsabilisation des corporations,
entraînant une plus grande efficacité, une meilleure protection du
public, et ainsi continuer à faire du système professionnel
québécois celui qui est cité comme modèle. Nous
voyons le système professionnel comme un partenariat, car tous les
intervenants - que ce soit le gouvernement, l'Office des professions, le
Conseil interprofessionnel et les corporations - ont un objectif commun: la
protection du public. Tout projet de modification du Code des professions
devait donc être élaboré conjointement par tous les
partenaires pour que les préoccupations particulières de chacun
soient bien considérées.
Il nous semble alors très préoccupant que cet avant-projet
de loi ait été décrié unanimement par les 41
corporations professionnelles qui sont quand même, avouons-le,
bien placées pour commenter le contenu. Toutefois, pour certains
organismes représentant les consommateurs, le système actuel ne
leur semble pas comporter toute l'intégrité, l'objectivité
et la transparence qu'ils souhaiteraient. Ceci aussi nous semble
préoccupant, car, si le public n'est pas convaincu que notre
système professionnel est juste et équitable, alors nous n'aurons
pas atteint notre but. Si nous sommes tous convaincus qu'il a ces
caractéristiques, nous avons alors un sérieux problème au
niveau de l'information de la population sur tous les efforts que nous pouvons
déployer pour assurer cette protection du public.
Alors, à la lumière de la situation actuelle et
considérant tout ce qui a été présenté
devant cette commission, nous recommandons au gouvernement de retirer cet
avant-projet de loi et de créer un groupe de travail restreint où
seraient représentés tous les partenaires, et qui aurait comme
mandat d'élaborer rapidement un projet de modification du Code des
professions, et ce, en plusieurs phases, s'il le fallait, dans la mesure
où ça s'insère dans un plan global bien articulé,
avec des objectifs clairement définis. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. Jacques. Je vais
maintenant demander à M. le ministre de bien vouloir procéder
à son intervention. M. le ministre.
M. Savoie: Oui, M. le Président. Permettez-moi de saluer
l'Ordre des comptables agréés du Québec,
représenté par son directeur général, de même
que par la directrice de l'inspection et des affaires professionnelles. Un
mémoire, M. le Président, qui, finalement, constate que tout va
bien et qu'on n'a pas besoin de changements. Je pense qu'ils se sont fait
dédoubler par les changements qu'ils ont eus au cours des
dernières semaines, au niveau de la compréhension du projet de
loi. Ils ont fait un travail considérable. Ils ont soulevé des
points assez pertinents. Je présume que le mémoire a fait l'objet
d'examen au sein des différents comités de l'Ordre et,
finalement, que le mémoire que nous avons devant nous constitue une
espèce de consensus sur l'ensemble du positionnement.
Permettez-moi aussi de constater qu'il y a une grande différence
entre votre discours et la réalité, hein? C'est le premier
commentaire, aussi brutal que le vôtre, aussi direct que le vôtre.
On ne commencera pas à trébucher dans les fleurs du tapis; vous
ne l'avez pas fait et je n'ai pas l'intention de le faire. Mais je pense que,
si vous n'êtes pas capables de constater qu'effectivement il y a des
problèmes fondamentaux qu'il faut «adresser» à court
terme, il y a quelque chose qui se comprend difficilement. Aussi, des aveux se
font ici, au sein même de cette commission, et se sont faits, la semaine
passée, assez clairs que le problème était majeur.
Deuxièmement, c'est qu'il n'y a pas d'unanimité au sein
des corporations professionnelles quant à l'orien- tation à
suivre. Il n'y en a pas. On dit qu'il y en a, mais ce n'est pas vrai. On a
constaté qu'il y en a qui sont en faveur du comité de discipline,
qu'il y en a qui sont contre. On dit qu'il y en a qui sont en faveur d'un
pouvoir de tutelle, il y en a qui sont contre. Un pouvoir d'enquête...
Tout est une question de dosage, et c'est ce qu'on cherche ici.
L'Office, après deux ans et demi, trois ans d'efforts, propose
une modification à la réglementation. J'ai refusé de la
déposer comme projet de loi. J'ai dit qu'on va l'approcher, tout au
mieux, comme avant-projet de loi et que, là, on va en discuter ensemble.
Après cette discussion, après vos commentaires, on fera les
modifications qui vont s'imposer, je pense, au niveau du projet de loi.
Je pense qu'on est en train, finalement... Il n'y aura pas de retrait de
ce projet de loi, il faut que ce soit bien clair. Je pense que ce que vous
voulez, c'est que ce soit discuté. C'est ce qu'on est en train de faire.
On passe un peu tout le monde. Enfin, tous ceux et celles qui ont fait la
demande, on les reçoit. On examine avec eux la nature du projet de loi.
On reçoit vos commentaires. Vous avez mis du travail là-dedans,
hein, le rapport, analysé, détaillé, transmis sur des
graphiques. On constate l'argumentation pour, l'argumentation contre. (17 h
20)
C'est sûr que, les comptables agréés, c'est une
corporation senior. Il n'y a pas de doute là-dessus. Elle est là
depuis longtemps, elle en mène large au niveau de plusieurs secteurs.
Elle a une grande crédibilité auprès de plusieurs. Alors,
c'est pour ça qu'on est un peu surpris. On aurait pensé que,
peut-être, ils auraient pu constater que ce qui existe pour eux n'est
peut-être pas la même chose pour les autres corporations. J'imagine
que vous avez été assez présents au niveau, par exemple,
du Conseil interprofessionnel pour savoir que, lorsqu'on arrive, des fois,
à demander à une corporation de respecter la loi, on se fait
renvoyer, on se fait dire: Bien, pas tout de suite; peut-être,
l'année prochaine, qu'on va respecter la loi. Vous êtes au
courant, évidemment, de différents points de vue, comme
ça, qui, finalement, nous disent, bien, là, de peut-être
resserrer les vis un peu après 20 ans d'existence et peut-être de
réenligner un peu le bateau pour qu'il fonctionne mieux.
Et, c'est pour ça qu'on a trouvé le ton du mémoire
dur. On a trouvé la position très conservatrice vis-à-vis
ce qu'on a pu constater de la part de l'opinion du public demandant des
changements. Et on a pu constater, je pense, pour la majorité des
intervenants, une volonté de dire: Oui, on est d'accord avec un certain
changement, mais on voudrait ça comme ça, puis ça, de
telle façon, puis, chez vous, moins. Je me demandais pourquoi. Est-ce
que l'Ordre des comptables a regardé surtout ce que ça pourrait
faire pour vous ou est-ce que vous avez regardé ce que ça
pourrait faire pour le système professionnel, d'une façon
générale?
Le Président (M. Gobé): M. Jacques.
M. Jacques: Écoutez, c'est bien évident, M. le
ministre, quand on regarde un projet comme ça, que la première
lunette avec laquelle on le regarde, c'est la nôtre. On serait bien mal
placés de commencer à émettre des opinions sur ce projet
de loi, basées sur ce que les autres corporations font. Alors, l'opinion
qu'on vous donne ici, c'est vraiment la nôtre. C'est bien
évident... Vous disiez tantôt que vous semblez trouver notre
position un peu conservatrice. On est quand même dans un secteur
où on ne peut pas dire qu'on est débordés de plaintes au
niveau de notre comité de discipline ou au niveau de notre syndic.
Alors, il y a le secteur d'activités qui est drôlement important.
Et, dans tout ça, il y a peut-être un point qui, aussi,
malheureusement, a peut-être été... C'est un peu pour
ça qu'on dit: Laissons plus de latitude aux corporations parce que les
corporations sont tellement différentes l'une de l'autre. C'est vrai
qu'il y a quand même des éléments de base qui sont les
mêmes et où l'Office et le gouvernement doivent - et ça,
doivent avec un D majuscule - mettre leur pied par terre, doivent
réglementer, doivent approuver des règlements des corporations,
ceux que j'ai énumérés tantôt, ceux qui sont
vraiment le coeur de l'exercice de chaque profession. Mais, par la suite, on
dit: Laissons à chaque corporation plus de liberté pour
réglementer vraiment ce qui peut être relié à ses
particularités propres. C'est pour permettre, à ce
moment-là, que les corporations aussi se sentent... On parlait de
partenariat, et j'entendais les intervenants qui étaient avant nous, ils
ont soulevé ça aussi. Dans un partenariat, je pense qu'il faut
aussi respecter tout le monde autour d'une table. Et, nous, on dit: On est
prêts à jouer notre rôle là-dedans, mais il faut nous
donner les responsabilités qui vont avec. On est bien convaincus aussi
qu'on doit rendre des comptes en bout de ligne, parce que, si on se fait donner
des responsabilités, à un moment donné, il faut être
capable de rendre des comptes. Et ça, il y a différents
mécanismes de rapports, de divulgation d'information qui sont
déjà prévus par l'Office. Alors, à ce
moment-là, on se dit: Allons dans cette direction-là.
M. Savoie: Vous avez été consultés sur
plusieurs des modifications qui sont proposées dans l'avant-projet de
loi. On a eu l'occasion d'échanger avec vous sur différents
éléments. Les craintes que vous manifestez au niveau de ces
changements-là, c'est... Par exemple, le comité des plaintes
«adresse», en tout cas, aux yeux de plusieurs, des problèmes
réels. Le comité des plaintes est là justement pour donner
une plus grande transparence, donner un mécanisme d'appel à
différents citoyens. Finalement, ce que vous dites, c'est que, chez
vous, ce problème-là existe moins et, en conséquence, vous
n'avez pas besoin de ces structures-là. Est-ce que c'est exact,
ça?
Mme Lussier-Price (Ginette): Je voudrais simplement souligner que
nous avons déjà un comité consultatif du syndic, qui est
là pour aider le syndic lorsqu'il en sent le besoin. Cependant, le
syndic n'est aucunement lié par les décisions du comité
consultatif, il va de soi, puisqu'il est quand même autonome. Alors,
nous, on dit: On n'a pas besoin d'un comité d'examen des plaintes, parce
qu'on a déjà un comité consultatif. Lorsqu'on en a besoin,
on s'en sert.
M. Savoie: Oui, c'est ça. Et j'imagine que le citoyen peut
s'adresser à ce comité consultatif?
Mme Lussier-Price: Non. Le citoyen, s'il n'était pas
satisfait, à la rigueur, il pourrait formuler une plainte au
président de l'Ordre. Ce serait possible. Si, par exemple, il
considère que sa demande est mal traitée, si les délais
sont trop longs, il pourrait formuler une plainte au président de
l'Ordre, qui est la personne de qui relève le syndic.
M. Savoie: S'il voulait s'adresser à quelqu'un, se faire
entendre de vive voix, une présence physique, puis se faire expliquer
par du monde pourquoi on peut retenir sa plainte, j'imagine qu'il n'y a pas de
mécanisme.
Mme Lussier-Price: II n'y a rien qui empêche de rencontrer
le syndic.
M. Savoie: Oui. Oui, oui, mais...
Mme Lussier-Price: Ça peut se faire à l'occasion,
et ça se fait.
M. Savoie: C'est ça. Mais vous comprenez que c'est
ça, le problème. C'est que la seule rencontre qu'il a, c'est avec
le syndic. Pas parce que j'en veux au syndic, mais c'est parce que le
citoyen... On avait dit qu'au niveau du fond le système fonctionnait. Au
niveau des apparences, on avait des problèmes, parce que le citoyen
s'adressait à un syndic d'une corporation, qui est un comptable
agréé. C'est M. Morcel, ça, le C.A.? À ce
moment-là, pouvoir rencontrer deux citoyens et un comptable
agréé, et échanger avec eux, même de façon
sommaire, sur la nature de la plainte, se faire expliquer pourquoi ça ne
peut pas être retenu, vous ne pensez pas qu'il y a un
élément, là, pour le citoyen, pour se faire dire: Bon,
ben, au moins, il y a eu une tentative honnête.
Mme Lussier-Price: Ça dépend de ce qu'on vient
rechercher. Je pense que le citoyen ne vient pas chercher des dommages...
M. Savoie: Non, non.
Mme Lussier-Price: Le citoyen vient s'assurer que le
professionnel a exercé de façon correcte. Et, que ce soit un
citoyen ou que ce soit un représentant du public, je veux dire, ce n'est
pas eux qui, nécessairement, vont savoir si les règles ont
été suivies. C'est
vraiment les pairs, en fin de compte, de la corporation.
M. Savoie: Oui. Mais vous ne pensez pas que, si quelqu'un
dépose une plainte et que le syndic dit: Non, ce n'est pas recevable, il
va se sentir lésé?
Mme Lussier-Price: II peut toujours...
M. Savoie: S'il pouvait se tourner vers un comité d'examen
des plaintes, à ce moment-là, il pourrait recevoir les
explications nécessaires.
Mme Lussier-Price: II peut y aller sous forme de plainte
privée. On en a eu - quoi? - une quinzaine depuis huit ans.
M. Savoie: Vous en recevez combien de plaintes? Puis, je ne dis
pas de plaintes retenues. D'une façon générale, vous en
recevez combien par année, pour les 15 000 C.A.?
Mme Lussier-Price: Alors, là, je serais
intéressée à vous donner certaines statistiques qui ne
couvrent pas simplement les plaintes reçues, mais bien un peu de la
médecine préventive que l'on fait. Alors, si on regarde au niveau
du syndic, cette année, on va rejoindre 2000 appels qui sont
répartis à peu près moitié-moitié entre le
public, d'une part, et, d'autre part, des confrères qui viennent se
renseigner sur ce que devrait faire un professionnel ou comment il devrait agir
dans telle circonstance. De plus, au niveau des plaintes reçues par le
syndic, par année, on en reçoit environ 140 et, dépendant
des années, entre 15 et 30 sont soumises au comité de discipline.
D'accord?
M. Savoie: Effectivement, on constate... Alors, vous dites qu'il
y a à peu près 1000 citoyens qui appellent...
Mme Lussier-Price: Pour se renseigner.
M. Savoie: ...échangent avec le syndic ou un de ses
adjoints, pour discuter avec eux. Et là, vous dites: Sur les 1000 qui
sont présentées, il y en a 140 qui sont retenues.
Mme Lussier-Price: Non, non. Les 1000, ce sont des gens qui
s'informent.
M. Savoie: Oui.
Mme Lussier-Price: Les 140, ce sont des gens qui déposent
des plaintes. Ça peut être suite à un appel. Ils ont
décidé...
M. Savoie: Ah, O.K., qui déposent une plainte.
Mme Lussier-Price: ...qu'il y avait matière...
M. Savoie: 140 dépôts de plaintes.
Mme Lussier-Price: Oui.
M. Savoie: Combien sont retenues pour étude?
Mme Lussier-Price: Entre 15 et 30.
M. Savoie: Entre 15 et 30.
Mme Lussier-Price: Oui.
M. Savoie: donc, 10 % sont retenues pour étude.
M. Jacques: Pas pour étude, pour présentation au
comité de discipline.
Mme Lussier-Price: Pour présentation au comité de
discipline.
M. Savoie: Pour présentation au comité de
discipline.
Mme Lussier-Price: Oui. Parce que...
M. Jacques: Les 140 sont étudiées par le
syndic.
M. Savoie: Sont étudiées.
M. Jacques: Oui.
M. Savoie: Et là, il y en a qui se règlent en cours
de route. Il y a de l'arbitrage qui se fait, il y a des échanges, tout
ça. Il y a des mécanismes assez construc-tifs. C'est ça,
on avait des données au niveau de l'utilisation, par exemple, du
comité de discipline et du Tribunal des professions. Évidemment,
on voit que vous êtes là. Ce n'est pas... Évidemment,
j'imagine que ça pourrait être un petit peu plus fort, mais vous
êtes là. Ha, ha, ha! Et il y a un autre phénomène,
également, c'est que ça baisse tout le long, au niveau du
comité. Mais, effectivement, il peut y avoir des mécanismes qu'on
ignore, qui font en sorte que ça fonctionne relativement mieux que
d'autres.
Mme Lussier-Price: C'est peut-être pour ça qu'on
paraît peut-être rejeter d'emblée plusieurs des
propositions, parce qu'on ne sent pas le besoin de ces
mécanismes-là, chez nous. Cependant, ce qu'on aimerait, de la
part de l'Office, de la part du gouvernement, c'est de nous faciliter notre
travail en nous fournissant, je ne sais pas, moi, des trucs comme des ententes,
par exemple, avec le surintendant des faillites, pour qu'on soit
informés des gens qui font faillite, au niveau des comptables
agréés: de nous informer, soit avec une entente par le
ministère de la Justice, qui nous donnerait l'information lorsqu'un
membre, par exemple, est traduit au criminel ou des choses comme ça.
Alors, à ce moment-là, ça
nous permettrait de faire notre travail correctement, et tout le monde
serait jugé sur un même pied plutôt que d'avoir simplement
ceux qu'on voit dans les journaux, ou qui nous sont dénoncés. Je
pense que tout le monde serait traité de façon beaucoup plus
équitable, à ce niveau-ci. (17 h 30)
M. Savoie: Ça, c'est que, finalement, il y a des
mécanismes comme ça qui peuvent peut-être être
présentés par le biais du code de déontologie, là.
Ce qu'on cherche à avoir, évidemment, c'est des corporations
pleines de santé, avec une grande autonomie, se développant
rapidement au sein de l'exercice de leurs fonctions, occupant tout le champ
qu'elles doivent occuper pour donner un bon rendement au niveau
économique, au niveau de la protection du public, au niveau de la
formation continue. On veut ça, là, on souhaiterait ça,
mais on constate qu'il y a une lacune importante au niveau de la perception de
plusieurs problèmes. On ne parle pas de problèmes de fond, au
niveau des structures; on parle de problèmes de fonctionnement, de
citoyens qui se sentent, finalement, mis de côté. Et, lorsqu'on a
des problèmes de fond - ça arrive là - on n'est pas
vraiment capables d'intervenir, là.
On change ça et on pensait que, peut-être, finalement, pour
le meilleur fonctionnement du monde des corporations professionnelles, l'Ordre
des comptables agréés prendrait un petit peu plus les devants,
là, serait un petit peu plus positif sur ces contrôles-là,
pas nécessairement pour une corporation qui est là depuis
très longtemps, qui a un appareil assez important, mais dans le sens de
protéger d'une façon générale le fonctionnement et
l'image des corporations au Québec.
M. Jacques: Mais, comme on le mentionnait dans notre
présentation d'introduction, nous sommes fermement convaincus
qu'actuellement le système - en autant que, nous, on est
concernés, il faut bien le réaliser - comporte tous les
éléments de base pour vraiment bien protéger le public. Et
tantôt-j'aimerais revenir sur votre commentaire sur le comité
d'examen des plaintes - vous sembliez dire que c'était uniquement pour
rassurer la personne qui aurait fait appel au syndic et qui se serait fait
refuser sa plainte, mais, nous, on ne l'a pas vu comme ça dans le projet
de loi. Tel qu'il est rédigé, le projet de loi, c'est pas mal
plus compliqué, lourd que ce que vous mentionnez là.
M. Savoie: C'est ça, il faut appeler le syndic...
M. Jacques: Alors, là, on change peut-être
d'orientation. Et, si on change d'orientation, c'est peut-être
différent. Comme je le mentionnais un peu dans la conclusion de la
présentation, on considère qu'il y a peut-être beaucoup
d'information à faire auprès du public. Et, si le public, comme
on le mentionnait, perçoit que le système n'est pas juste et
équitable, et qu'il y a des problèmes, il y a peut-être un
gros problème au niveau de l'information, de la communication des
différentes possibilités qui sont ouvertes aux gens, aux
consommateurs. Il y a peut-être ça aussi, le palier sur lequel il
faut travailler.
M. Savoie: Le comité des plaintes a plusieurs fonctions.
Ça va, M. le Président, pour le moment.
Le Président (M. Gobé): II vous reste trois
minutes, M. le ministre, pour terminer votre...
M. Savoie: On va demander... On passe.
Le Président (M. Gobé): ...intervention. Un peu
plus tard, comme d'habitude. Donc, je demanderais à Mme la
députée de Terrebonne de bien vouloir prendre la relève.
Madame.
Mme Caron: Merci M. le Président. Alors, peut-être
d'entrée de jeu, moi, je tiens à préciser qu'au niveau du
comité des plaintes, tel que proposé dans l'a-vant-projet de loi,
non seulement les corporations professionnelles ne sont pas d'accord, mais le
Protecteur du citoyen n'est pas d'accord, et je vais le citer. Le Protecteur du
citoyen estime que la plupart des moyens proposés ne permettront pas
d'atteindre les objectifs d'accessibilité, d'indépendance,
d'impartialité, de transparence, qui sont les fondements d'un
système de discipline professionnelle véritablement axé
sur la protection du public.
Donc, non seulement les corporations, le Protecteur du citoyen, mais
même chose du côté des ACEF. Alors, on peut les citer:
L'avant-projet de loi, s'il devait entrer en vigueur dans sa forme actuelle,
n'aurait ni pour effet d'augmenter la confiance et la protection du public, ni
de régler le conflit qui déchire actuellement les corporations
professionnelles, entre leur rôle de protection du public et leur
rôle de protection de leurs membres.
Et, du côté de ma formation politique, c'est
évidemment la même chose, M. le Président. Le comité
des plaintes, tel que proposé... Je suis parfaitement en
désaccord avec un comité des plaintes qui simplement tenterait de
faire croire aux citoyens qu'on a effectivement réglé le
problème dont ils nous font part depuis des années.
Concernant votre mémoire, j'avoue que, moi, j'avais pris en note
des éléments que vous proposez, qui viennent resserrer le
système et qui démontraient, en tout cas, qui m'apparaissaient
démontrer, que vous ne trouviez pas que tout allait parfaitement dans le
meilleur des mondes. Alors, moi, j'avais toute une série que j'avais
notée au moment de l'intervention du ministre. Je pense que le fait de
proposer un groupe de travail restreint, c'est reconnaître qu'il y a
effectivement un problème et qu'il faudrait peut-être s'asseoir
avec l'ensemble des intervenants pour le régler. Dire qu'il y a un
sérieux manque d'information, c'est aussi reconnaître
qu'il y a effectivement un problème.
Dans votre mémoire, plus particulièrement - et là,
je cite une série de propositions - vous demandez qu'il n'y ait pas
d'amende maximum, que, effectivement, un syndic puisse, au niveau des
pénalités, donner des montants d'amende selon les fautes. Vous
nous proposez - et c'est, à ma connaissance, à date, le seul
mémoire qui en parle - un processus de révision périodique
du Code. Donc, ne pas attendre que les problèmes continuent de
s'accumuler, mais qu'on puisse réagir régulièrement.
Ça, je pense qu'on l'a fait au niveau de la réforme du Code civil
aussi. On propose un processus de révision constant.
Vous nous parlez aussi de resserrer, au niveau des accusations
criminelles, et en page 19, vous nous dites: «Comment pourrait-on garder
au sein de la corporation un membre dont les antécédents
criminels pourraient porter atteinte à sa crédibilité
professionnelle?» Donc, à l'ensemble de la corporation. Vous nous
avez également fait part de l'importance d'accélérer le
processus de règlement des plaintes, et effectivement le comité
tel que proposé fait le contraire. C'est une des insatisfactions des
citoyens, les longueurs. Madame Lussier-Price nous parlait aussi, au niveau des
ententes qui sont demandées pour vous permettre d'aller chercher les
professionnels qui sont en faute, d'ententes avec le ministère de la
Justice ou autres. Vous nous avez aussi parlé d'étendre un petit
peu le processus au niveau des radiations provisoires. Je pense que, ça
aussi, c'est un élément important.
Vous nous avez parlé aussi, en page 12, des candidats à
l'exercice de la profession, et vous élargissez en disant: «II
serait souhaitable que le Code ait aussi juridiction sur les
sociétés de personnes, constituées en corporation ou non,
afin qu'en cas de faute elles subissent des sanctions disciplinaires».
Là aussi, on en a qui nous échappent. Je pense que tous ces
éléments-là, finalement, c'est afin de reconnaître
que le système n'est pas parfait et qu'il y a des choses... Puis,
j'aurais peut-être pu en citer d'autres, là, mais c'est celles que
j'ai ressorties lorsque vous nous avez présenté votre
mémoire.
Vous avez parlé également de l'assistance au plaignant, en
page 17. Vous précisez que, peut-être, effectivement, vu que le
secrétaire est rattaché à la corporation, il y aurait, en
apparence, au moins, là, conflit d'intérêts et que
ça pourrait manquer d'objectivité. Je pense que c'est vrai. Bon,
vous nous parlez de l'Office ou d'un autre organisme, mais est-ce que vous
êtes prêts, tel que l'avait souhaité, je pense, par exemple,
la Fédération nationale des associations de consommateurs,
à ouvrir ça à une tierce personne ou à des
associations de protection de consommateurs pour aider les plaignants à
compléter leurs plaintes?
M. Jacques: Écoutez, on n'a pas d'objection fondamentale.
Nous, le seul point qu'on voulait faire ressortir dans notre mémoire,
c'était que, par l'associa- tion de la secrétaire du
comité de discipline à ce processus-là, on trouvait que
c'était vraiment la mettre un peu en porte-à-faux face à
son rôle au niveau du comité de discipline. Alors, tout ce qu'on
dit, c'est que, s'il y a un rôle qui peut être joué
auprès des consommateurs là-dessus, il doit être
joué à l'extérieur de la corporation, que ce soit par
l'Office ou d'autres organismes, mais il faudrait s'entendre sur qui peut et
devrait jouer ce rôle-là de la façon la plus efficace
possible.
Mme Caron: Donc, lorsque vous dites: «L'Office ou un autre
organisme», vous êtes prêts à ouvrir, là,
à un autre type d'organisme. Procédure de conciliation, en page
16. J'aimerais que vous me précisiez... Vous nous dites: «Une
procédure de conciliation des différends entre les membres de
l'Ordre et leurs clients pourrait s'avérer quelque peu
irréalisable étant donné la nature des services qui sont
offerts par nos membres». Est-ce que vous pouvez me préciser
ça un petit peu?
Mme Lussier-Price: C'est que la nature des services rendus par un
comptable agréé, c'est généralement
l'émission d'un rapport du vérificateur sur des états
financiers. Généralement, lorsque l'état financier est
émis, des décisions sont prises et, bon, ça peut
entraîner des décisions financières, en fin de compte,
plusieurs choses. Et le fait de remplacer les états financiers par
d'autres états financiers, ce n'est peut-être pas souhaitable, et
ce n'est peut-être pas réalisable. O.K.? Le tort aurait
été commis, là, si... De plus, les états
financiers, lorsqu'ils sont produits, sont signés par les
administrateurs, alors, comme preuve d'acceptation des états financiers.
Alors, il y a déjà une entente, si vous voulez, au départ.
Donc, ce serait très difficile de refaire un état financier,
parce qu'il faudrait s'assurer que tous les gens qui se sont appuyés sur
ces états financiers là sont avertis, et ce n'est pas
nécessairement facile de contrôler ces états financiers
là. On n'est pas d'une personne à une personne, on est plusieurs.
(17 h 40)
Mme Caron: Je vous remercie de ces précisions. Vous avez
parlé également du dépôt d'une plainte, en page 15.
«L'Ordre ne croit pas que le syndic devrait être obligé de
déposer une plainte à la demande du bureau.» Bon, parce
que, en fait, s'il considère qu'il n'y a pas faute, il peut
difficilement la défendre. Est-ce que vous seriez en accord avec une
proposition qui ressemble à celle, par exemple, du groupe qui vous a
précédés - l'Ordre des optométristes - qui nous
parle peut-être d'un ombudsman ou d'un protecteur qui pourrait, lui,
présenter une demande?
M. Jacques: J'ai peut-être un peu de réserves
là-dessus parce que, encore là, il faudrait garder le
système le plus simple possible. Et, dans la mesure - et je dis bien
dans la mesure - où tout le monde est confiant et conscient que le
syndic a vraiment les coudées franches, qu'il est capable de faire son
travail de façon
intègre, pourquoi mettre un autre intervenant dans le dossier? Et
c'est un peu ce qu'on mentionne là-dedans. Si le bureau a à avoir
un doute quelconque, il peut demander au syndic de faire enquête, mais
laissons le syndic prendre sa décision en bout de ligne. Et de
mêler une tierce partie dans le dossier nous semble un peu dangereux.
Mme Caron: Mais, qu'est-ce que vous proposez? Lorsque le citoyen,
par exemple, le plaignant, n'est pas d'accord ou est insatisfait d'une
décision, il lui faut un autre recours.
M. Jacques: Le recours qui est prévu, c'est d'aller
directement au comité de discipline.
Mme Caron: Avec les problèmes au niveau des coûts et
tout ça.
M. Jacques: II y a peut-être des façons ou des
assouplissements qui pourraient être prévus pour ces
problèmes-là, mais la base est là.
Mme Caron: Vous avez un comité consultatif. Par rapport au
syndic, est-ce qu'il y a souvent des décisions qui sont changées
ou est-ce que, votre comité consultatif, ça arrive qu'il demande
au syndic d'accepter une plainte?
Mme Lussier-Price: Le comité consultatif est là
simplement pour clarifier ou donner une interprétation à un
article du code de déontologie. Il n'est pas là pour prendre une
décision à la place du syndic. Le syndic, s'il a une
interrogation sur la façon d'interpréter un règlement, il
va consulter le comité consultatif.
Mme Caron: Donc, c'est un comité qui donne des
informations plutôt juridiques, là.
Mme Lussier-Price: Bien, pas juridiques. Ce sont des comptables
agréés, là.
Mme Caron: C'est des comptables aussi?
Mme Lussier-Price: Oui. Ha, ha, ha! Maintenant, j'aimerais
ça...
Mme Caron: Que des comptables sur votre comité
consultatif?
Mme Lussier-Price: Oui, je pense, sauf un, c'est ça, qui
est le représentant du public.
Mme Caron: Ah bon! Vous avez un représentant du public.
O.K.
Mme Lussier-Price: C'est ça.
M. Jacques: Mais, en fait, l'objectif du comité est
uniquement d'appuyer le syndic dans ses démarches, de telle sorte que,
lorsque le syndic a certains doutes ou certaines réserves, ou n'est pas
tout à fait sûr de l'orientation qu'il voudrait prendre avec un
dossier, c'est l'instance qu'il va consulter pour aller se valider, d'une
certaine façon, ou aller chercher l'expertise qu'il n'a peut-être
pas dans un dossier bien particulier.
Mme Lussier-Price: J'aimerais simplement rajouter une chose. Vous
dites: Lorsqu'un plaignant n'est pas satisfait de la décision du syndic.
Il faut se rappeler que le syndic donne toujours au plaignant les raisons pour
lesquelles il refuse de porter plainte. En vertu de 123, le syndic donne les
raisons au plaignant et, généralement, ça le satisfait,
sauf-on l'a vu, là - qu'en quelques années on en a eu 15 qui se
sont présentés d'eux-mêmes.
Mme Caron: C'est peut-être important d'apporter cette
précision, parce qu'on s'est aperçu que, dans beaucoup de
corporations professionnelles, les plaignants considéraient que,
lorsqu'ils recevaient un rejet de leur plainte, on ne précisait
pas...
Mme Lussier-Price: Ce n'est pas le cas.
Mme Caron: ...les décisions. Donc, chez vous, on
précise.
Mme Lussier-Price: Ce n'est pas le cas.
M. Jacques: Et, quand on parlait- tantôt, de
mécanismes, de nécessité de bien informer les gens, la
population, le consommateur, le public, c'est un exemple, ça. C'est bien
évident que, si ce n'est pas bien fait... C'est déjà
prévu, de toute façon, et on se doit de respecter ça.
Mme Lussier-Price: Simplement rajouter que, surtout, encore en
vertu de 123, le syndic donne les raisons, mais aussi invite l'individu, s'il
n'est pas satisfait, à déposer une plainte lui-même. Alors,
je pense qu'on lui donne toutes les informations dont il a besoin pour se faire
justice.
Mme Caron: Comme vous êtes directrice de l'inspection et
des affaires professionnelles, du côté de votie système
d'inspection professionnelle, chez vous, est-ce qu'il y a un nombre
défini de comptables ou si vous faites une inspection à chaque
année?
Mme Lussier-Price: Oui. On fonctionne par bureau, si vous voulez,
parce que les comptables agréés se réunissent surtout en
bureaux pour pratiquer leur profession, et nous faisons le tour de tous nos
gens, en pratique, sur un cycle de cinq ans. Maintenant, à
l'intérieur d'un cycle de cinq ans, un professionnel peut être
inspecté plus d'une fois. Ça dépend des
résultats et, chez nous, l'inspection professionnelle n'est pas une
visite de courtoisie. Il y a des sanctions qui sont imposées à
nos membres, lorsqu'on considère qu'ils ne respectent pas les normes, et
on s'assure qu'ils prennent les moyens pour rectifier la situation.
Mme Caron: Donc, lorsque vous nous dites qu'une personne ou un
bureau peut être visité à une deuxième reprise,
là, au cours des cinq ans, c'est-à-dire qu'il y a un suivi
si...
Mme Lussier-Price: Absolument.
Mme Caron: ...ça ne va pas bien. Ça pourrait
être un élément qu'on pourrait retenir, là,
peut-être, pour l'ensemble, pour resserrer un peu plus l'inspection
professionnelle.
Mme Lussier-Price: Lorsque j'ai parlé de médecine
préventive tout à l'heure, je pense que, nous, on voit
l'inspection comme étant un mécanisme qui informe ou qui forme
nos gens lorsqu'ils en ont besoin. On considère que ça
fonctionne, en tout cas, généralement assez bien, depuis 1976 que
c'est en existence.
M. Jacques: Je voudrais juste rajouter un petit commentaire
là-dessus, c'est que je pense que vous avez un point important. On
parlait des différents aspects de la profession, qui sont le coeur de la
profession, et l'inspection professionnelle en est un. Avec l'évolution
qu'on a connue au cours des dernières années, l'évolution
des normes, etc., on a l'intention, nous, à titre d'exemple, de ramener
le cycle d'inspection professionnelle de cinq ans à quatre ans,
justement parce qu'on est conscients que ce rôle-là de la
corporation professionnelle doit être amplifié, d'une certaine
façon. Alors, on va aller inspecter aux quatre ans plutôt qu'aux
cinq ans, dorénavant.
Mme Caron: Je pense que c'est un élément important,
et on aurait peut-être intérêt à resserrer pour
l'ensemble des corporations professionnelles. Vous nous avez également
parlé du rôle du Conseil interprofessionnel. En page 10, vous nous
dites: «Si [...] un besoin existe, nous suggérons que le Conseil
interprofessionnel puisse être appelé à intervenir. Il
serait donc souhaitable que cet organisme soit habilité à
intervenir à titre d'arbitre entre l'Office et les corporations.»
Donc, est-ce que vous pensez que le Conseil interprofessionnel pourrait aussi
être une instance, là, qui devrait être
considérée, non seulement entre l'Office et les corpos, mais
qu'on devrait peut-être davantage l'utiliser entre les corpos et le
gouvernement?
Mme Lussier-Price: Je pense que c'est un lien entre le
gouvernement et les corporations, effectivement. Si on veut garder la balance,
là, oui.
Mme Caron: Puisque c'est une table où les 41
corporations...
Mme Lussier-Price: C'est ça.
Mme Caron: ...professionnelles sont représentées,
ça m'apparaît être un lien qui pourrait être davantage
utilisé au niveau du gouvernement.
Mme Lussier-Price: C'est un forum très
intéressant.
Mme Caron: Peut-être une dernière question
concernant le rôle du syndic. Dans quelques corporations, on nous a
parlé que certains problèmes ne peuvent pas être
acceptés par le syndic, parce que ça ne fait pas partie,
là, de ses tâches. Est-ce que, chez vous, il y a des
problèmes qui vous échappent au niveau du syndic?
Mme Lussier-Price: Est-ce que vous voulez parler de la clause
omnibus? O.K. C'est parce qu'il y a deux types de choses qu'il faut regarder.
Il y a les plaintes qui peuvent être déposées et qui sont
plus du ressort des tribunaux civils. Il y aurait la clause omnibus qui serait
intéressante à avoir, pas qu'on ait eu des cas jusqu'à
présent, mais je pense que, oui, ce serait intéressant de
l'avoir, et on la demande, d'ailleurs.
Mme Caron: Je vous remercie beaucoup. Mme Lussier-Price:
Merci.
Le Président (M. Gobé): Vous avez terminé,
Mme la députée?
Mme Caron: Pour le moment, oui, ça va.
Le Président (M. Gobé): Alors, très bien,
merci beaucoup. M. le ministre, il vous reste deux ou trois minutes, en
conclusion.
M. Savoie: Peut-être une dernière question. Ah oui,
j'ai regardé, là. Pour le comité consultatif, le syndic,
finalement, il n'y a pas vraiment de rencontre avec le public, hein, ou avec
des gens. Non?
M. Jacques: Non, comme on le mentionnait, c'est uniquement un
rôle de support auprès du syndic.
M. Savoie: C'est ça, législatif,
réglementaire auprès du...
M. Jacques: C'est ça.
M. Savoie: ...syndic, c'est ça. Il ne rencontre pas les
citoyens.
M. Jacques: Non.
M. Savoie: Bon. Comment expliquez-vous le fait que le nombre de
décisions disciplinaires soit en baisse du tiers chez vous,
comparé, par exemple, à il y a 10 ans, alors que, pour toutes les
autres corporations professionnelles, ça a augmenté par 25 fois,
5 fois, 15 fois, 90 %? La seule où l'on constate qu'il y a une baisse
importante, c'est l'Ordre des comptables agréés. À quoi
vous avez attribué ces interventions? (17 h 50)
M. Jacques: Depuis 10 ans?
M. Savoie: Depuis 10 ans, oui. Si on compare 1982 à 1992,
vous avez, par exemple, en termes de décisions disciplinaires, une
baisse de 33 %. Si on compare, par exemple, 1987 avec 1992, vous avez une
baisse de 60 %, alors que tout le monde, tous les autres sont à la
hausse.
M. Lussier-Price: Je pense qu'une partie de la réponse
vient du fait que plusieurs causes mettaient... Excusez. J'ai les chiffres ici.
O.K.
M. Savoie: On pourrait peut-être l'inviter à
répondre. Je n'ai pas de problème à entendre le syndic,
là.
Mme Lussier-Price: Oui. M. Morcel? M. Savoie:
Oui.
Le Président (M. Gobé): Si vous voulez vous
présenter pour les fins d'enregistrement de votre nom au Journal des
débats.
M. Morcel (Raymond): Mon nom est Raymond Morcel. Je suis le
syndic de la corporation, M. le ministre.
Le Président (M. Gobé): Alors, M. Morcel, vous avez
la parole. Il reste deux minutes.
M. Morcel: oui. suite à votre question, m. le ministre, je
voulais simplement vous dire que, des statistiques récentes que j'ai
prélevées moi-même, au cours des 8 dernières
années, nous avons eu, au total, 1126 dossiers d'enquête ouverts
suite à des interventions du public ou de membres. là-dessus, le
syndic a déposé 91 plaintes devant le comité de
discipline, ce qui représente 8 %. mais quand vous parlez d'une
diminution, j'ai de la difficulté à vous suivre, parce que, si je
prends, par exemple, l'année 1989-1990, il y a eu 138 dossiers
d'enquête ouverts et le syndic a déposé 10 plaintes. en
1990-1991, il y a eu 99 dossiers ouverts et il y a eu 3 plaintes. mais, en
1991-1992, il y a eu 110 dossiers et on a eu 15 plaintes, j'entends
déposées devant le comité de discipline par le syndic.
alors, je ne vois pas, là, les données...
M. Savoie: Par exemple, pour les décisions du
comité de discipline, en 1992, vous en avez 12; en 1987, il y en avait
30; en 1982, il y en avait 18.
M. Morcel: Oui. Je crois...
M. Savoie: On constate, là, qu'il y a une baisse...
M. Morcel: Oui.
M. Savoie: ...constante. Je pourrais vous donner ça
année par année.
M. Morcel: M. le ministre, ça, c'est... Oui. Non, non, je
vous suis. La secrétaire du comité de discipline est ici,
d'ailleurs, pour, peut-être, vous fournir des données
additionnelles. C'est qu'on a toujours en inventaire, au début de chaque
année financière dont on fait état dans notre rapport, les
causes qui sont en suspens. Quand vous avez des causes, par exemple, qui
peuvent prendre de 10 à 15 jours d'audience, ce n'est pas sûr
qu'elles se terminent dans le courant d'une année. Vous avez, comment
dirais-je, un décalage dans le temps, là, ou une période
de rattrapage, ce qui fait que, dans une année donnée, par
exemple, le syndic peut déposer, disons, 6 plaintes devant le
comité de discipline, alors qu'il y a eu 12 auditions.
M. Savoie: O.K. Moi, je pensais qu'il y avait peut-être
l'établissement d'un mécanisme de consultation ou d'un
mécanisme arbitral qui permettait de régler rapidement les
plaintes qui pourraient être déposées.
M. Morcel: Dans toutes les plaintes relatives à la
conciliation des honoraires, si c'est ce à quoi vous faites allusion,
évidemment, il y a une espèce de constante, chez nous, là.
Dans les 8 dernières années, on en a eu 640, c'est-à-dire
80 par année, et ça, c'est un feu nourri. Les plaintes arrivent
et les dossiers sont sortis. C'est un feu vraiment nourri. Il n'y a pas de
variation saisonnière là-dedans, c'est quelque chose de continu.
Mais, sur le plan disciplinaire, vous avez une variété
considérable de plaintes qui sont déposées par le syndic
auprès du comité de discipline. Il y en a qui sont en vertu de
l'article 145 du Code des professions, où le processus est très
rapide. Il suffit de déposer le jugement au criminel, devant le
comité de discipline et la plainte est entendue, la sanction est rendue.
Vous en avez d'autres qui sont déposées en vertu de l'article
2.02.01 du code de déontologie. Encore là, ce sont des plaintes
quasi automatiques, c'est les actes jugés dérogatoires à
la dignité de la profession et, en l'occurrence, ce sont les infractions
aux lois sur les valeurs mobilières et aux lois fiscales. Encore
là, jugement obtenu, le syndic n'a qu'à déposer cette
plainte devant le comité, et la représentation à faire est
seulement sur sanction. Mais, à l'inverse ou en revanche, je peux vous
dire qu'il y a présentement, devant le comité de discipline, une
cause qui en
est rendue à sa quinzième journée d'audience... M.
Savoie: C'est très rare.
M. Morcel: ...Alors, c'est tout partout, et de tout calibre.
M. Savoie: Ça varie énormément, oui.
Finalement, c'est qu'à c't'heure, avec 15 000, on parle
évidemment du nombre imposant de professionnels sur le marché
québécois. Ce n'est pas parce que vous avez plus de monde que
vous avez nécessairement plus de plaintes.
M. Morcel: II y a une chose qu'il faudrait peut-être
observer, M. le ministre. Comme vous le savez fort bien, l'incidence
disciplinaire est en matière déontologique. Les comptables
agréés sont déjà, pour ceux qui se conduisent mal,
l'objet de poursuites par leurs clients ou par des tiers devant les tribunaux
civils.
M. Savoie: Oui.
M. Morcel: Là, je n'ai pas de statistiques que je puisse
vous offrir.
M. Savoie: Ah, mais j'en ai, moi. Au niveau des
États-Unis, c'est catastrophique, surtout les montants des
réclamations. D'ailleurs, ça crée un problème sur
lequel on va être obligés de se pencher.
M. Morcel: Alors, les revendications que le public peut avoir
à l'endroit d'un comptable agréé sont ou bien sur le plan
des honoraires, sur la conciliation ou la qualité des services rendus,
ou, disons, un comportement impropre eu égard au code de
déontologie. Alors, souventefois, la plainte ou, enfin, l'objet de la
démarche de l'intervenant, c'est une restitution financière pour
un travail mal fait. Et, à ce moment-là, ce sont les tribunaux
civils, ce qui explique peut-être une bonne partie de nos
disparités avec d'autres corporations professionnelles.
M. Savoie: D'accord. M. Morcel, ça fait combien de temps
que vous êtes syndic?
M. Morcel: Trois ans, M. le ministre.
M. Savoie: Ça fait trois ans. Est-ce qu'avant ça
vous étiez également impliqué au niveau de l'organisation
de...
M. Morcel: Bien, j'ai été président de
l'Ordre. M. Savoie: Oui.
M. Morcel: J'ai fonctionné sur un nombre
considérable de comités, mais j'ai été en pratique
profession- nelle pendant 30 ans, avec un cabinet international, en fait. Je
suis à l'Ordre depuis... Je commence ma quatrième
année.
M. Savoie: Comme syndic. M. Morcel: C'est ça.
M. Savoie: Et, dans l'exécution de votre mandat, vous
trouvez que vous avez suffisamment d'indépendance et d'autonomie pour
fonctionner?
M. Morcel: Je n'ai pas de problèmes, M. le ministre. Je
suis fier et content de le dire.
M. Savoie: Oui, bien, on s'attend à ça. De l'Ordre
des comptables agréés, on s'attendrait à rien de moins. Je
pense que ça, c'est...
M. Morcel: Oui. Non. Je peux vous dire que j'ai toute la
liberté d'action dont j'ai besoin. J'ai le support dont j'ai besoin. Je
n'ai pas de doléances à formuler.
M. Savoie: Est-ce que vous entendez parler d'où ça
va moins bien, des fois?
M. Morcel: Je dois vous dire bien sincèrement que je n'ai
pas entendu, de mes propres oreilles, des syndics venir se confier à moi
et me dire qu'ils ont des problèmes avec leur bureau ou leur
comité administratif.
M. Savoie: Oui, mais...
M. Morcel: Moi, personnellement, je ne le sais pas. Je n'ai pas
eu de confidences à cet égard-là. Il peut y en avoir,
d'autres ont pu vous le dire, mais je témoigne ici en personne
honnête et je vous dis que, moi, personnellement, il n'y a personne qui
est venu me dire qu'il y avait tel, tel, tel problème avec son
président ou...
Le Président (M. Gobé): Alors, merci beaucoup. Le
temps est maintenant dépassé, M. le ministre. Mme la
députée de Terrebonne, vous m'avez fait signe. Vous aviez un
commentaire? Il vous reste 2 minutes et demie, 45 secondes.
Mme Caron: Alors, je vais continuer à m'adres-ser au
syndic, puisqu'on a la chance de l'avoir avec nous. Au niveau des sanctions qui
sont imposées, je pense que vous nous avez aussi démontré
que, finalement, chez vous, certaines plaintes, c'est carrément des
recours civils. Donc, vous ne les avez pas au niveau de vos plaintes. Il y a
aussi, évidemment, parmi vos membres, des C.A. qui sont sûrement
au niveau de l'enseignement ou au privé. Donc, ça peut varier
aussi. Au niveau des sanctions qui sont imposées...
M. Morcel: Par notre comité de discipline? Mme Caron:
Oui.
M. Morcel: Oui. Bon, écoutez, en réponse à
la question du ministre, je vous ai dit que j'avais trois ans
d'expérience. J'ai vu toute la panoplie des sanctions. J'ai vu des
réprimandes mineures, j'ai vu des réprimandes
sévères, j'ai vu des réprimandes assorties d'amendes. J'ai
vu des radiations temporaires et j'ai vu des radiations permanentes.
Mme Caron: Est-ce qu'on essaie, chez vous, dépendamment de
la faute, de donner les mêmes sanctions, les mêmes types de
sanctions? Si c'est le même ordre de fautes, est-ce qu'on donne les
mêmes sanctions ou...
M. Morcel: Je ne puis, à cet égard-là,
qu'être un observateur. Je ne suis pas à l'intérieur du
comité de discipline. Je croirais que les membres du comité de
discipline essaient d'établir une certaine -je ne sais pas quel mot
employer, là - péréquation ou, en fait, essaient
d'établir quelque chose qui soit équilibré dans la
dispen-sation de leurs sanctions. Je pense que je serais en mesure de vous dire
que ce qui m'est apparu, à date, comme étant les sanctions
imposées par notre comité de discipline, était
proportionné à la faute. (18 heures)
Mme Caron: Je vous posais la question parce que nous avons
reçu un mémoire - et nous entendrons, d'ailleurs, cette semaine,
l'auteur du mémoire - qui nous parle à ce chapitre-là et
fait la distinction, finalement, au niveau du Tribunal des professions et au
niveau d'une instance qui serait davantage au niveau des recours civils, que
c'est vraiment différent comme mécanisme de sanction.
M. Morcel: Entre le civil, vous dites, et le... Oui.
Évidemment, pour nous, les comptables agréés, non
seulement il y a une différence au niveau des sanctions, mais la
substance des causes n'est pas la même. Si vous vous présentez au
civil face à un comptable agréé, c'est que vous voulez
récupérer des sous. Vous avez été
lésé, vous avez été trompé par des
états financiers mal vérifiés, mal dressés ou,
enfin, par une action impropre du comptable, tandis que, lorsque vous vous
plaignez auprès du syndic de la corporation et que celui-ci, suite
à son enquête, juge qu'il y a lieu de porter plainte devant le
comité de discipline, le plaignant n'en retire rien sauf la
satisfaction, peut-être, d'avoir fait en sorte que le membre ne
répétera pas ces gestes-là à l'égard
d'autres membres du public. Donc, les sanctions ne sont pas analogues.
Par contre, je pense que, sur le plan économique, c'est
déjà une sanction assez sévère que de suspendre un
comptable, ne serait-ce que pour quelques mois. Vous avez une clientèle
à maintenir, vous avez une face à conserver, une
crédibilité à conserver. Si on vous dit: Vous, pendant
trois mois, monsieur, vous n'aurez plus le droit de signer quelque document que
ce soit en tant que comptable agréé, ça peut être un
joli problème. Évidemment, encore plus lorsqu'on pense aux
radiations plus longues, à plus forte raison lorsqu'il s'agit de
radiations permanentes et même de révocation de permis, parce que
j'en ai vu une depuis mon entrée en fonction. Alors, nous avons eu toute
la gamme... et des amendes, évidemment, aussi. Toute la gamme des
sanctions prévues à l'article 186 du Code des professions, je
peux dire que je les ai vues.
Mme Caron: Je vous remercie beaucoup. M. Morcel:
Bienvenue, madame.
Le Président (M. Gobé): Merci, monsieur. Mme, MM.
les représentants de l'Ordre des comptables agréés du
Québec, nous vous remercions, au nom des membres de cette commission.
Ceci met fin à nos travaux pour cet après-midi. Je vais donc
suspendre jusqu'à 20 heures ce soir. La commission est maintenant
suspendue. Bon appétit à tout le monde!
(Suspension de la séance à 18 h 2)
(Reprise à 20 h 4)
Le Président (M. Gobé): La commission de
l'éducation va maintenant reprendre ses travaux. Nous allons donc
entendre ce soir, à partir de maintenant, l'Ordre des opticiens
d'ordonnances du Québec et, par la suite, l'Ordre des chiropraticiens du
Québec. Alors, sans plus attendre, constatant que nous avons le quorum
nécessaire, je demanderais à l'Ordre des opticiens d'ordonnances
du Québec de bien vouloir prendre place et se présenter; par la
suite, vous pourrez prendre la parole.
Ordre des opticiens d'ordonnances du
Québec
M. Paquette (Marcel): M. le Président, Mmes et MM. les
membres de la commission, il me fait plaisir de vous présenter, à
ma droite, M. Claude Lalonde, secrétaire et syndic de la corporation des
opticiens d'ordonnances, et, à ma gauche, Me Jean Lanctot, procureur
pour la corporation des opticiens d'ordonnances. Mon nom est Marcel Paquette,
je suis président de la corporation.
Le Président (M. Gobé): Bonjour, messieurs.
Maintenant, sans plus attendre, vous pouvez commencer votre
présentation. Vous avez 20 minutes pour ce faire. Par la suite,
l'Opposition et le gouvernement auront chacun une vingtaine de minutes pour
dialoguer, discuter avec vous. Ce n'est pas coulé dans le béton.
On est
là pour discuter et s'entendre ensemble. Une minute ou deux d'un
bord ou de l'autre, ce n'est pas rigide à ce point-là. Alors,
vous avez la parole.
M. Paquette: Je vous promets, de toute façon, de respecter
mes 20 minutes.
Le Président (M. Gobé): Je vous en prie, vous
pouvez en faire 19 comme 21, on ne vous arrêtera pas.
M. Paquette: Non, je préférerais en faire 15 et
laisser davantage de temps aux questions.
Le Président (M. Gobé): Comme vous le voulez.
M. Paquette: M. le Président, «220 000
professionnels québécois posent plus d'un million d'actes chaque
jour. On ne peut donc s'étonner que des erreurs surviennent
parfois». Cette affirmation de la revue Justice du mois d'octobre
1991 démontre à elle seule l'importance du rôle de la
corporation professionnelle et des mécanismes de contrôle pour
assurer au public l'accès à une gamme importante de services de
qualité. Évidemment, le contrôle de la qualité de
l'acte professionnel ne peut assurer l'élimination de tous les
différends qui peuvent, à l'occasion, intervenir entre le
professionnel et le public. Aussi, des mécanismes d'intervention que
nous connaissons sont mis à la disposition du public.
Malgré les efforts incontestés des corporations, il arrive
que les recours ne rendent pas justice soit au public, soit aux professionnels
et, à l'occasion, aux corporations professionnelles. Par ailleurs, les
cas réels d'injustice sont très peu nombreux et nous sommes
persuadés que ces quelques cas pourraient être solutionnés
en apportant au Code des professions certains ajustements aux mécanismes
entourant la discipline et le traitement des demandes provenant du public.
De nombreuses demandes d'intervention sont annuellement traitées
par les corporations et sont solutionnées à la satisfaction du
public. Malheureusement, aucune publicité n'est faite de ces cas.
À l'inverse, ce sont les cas médiatisés qui retiennent
l'attention et qui jettent un discrédit sur l'ensemble du système
professionnel. Malgré tout, cette mauvaise presse faite au
système professionnel et aux rôles des corporations
professionnelles aura eu le mérite de provoquer la réflexion
nécessaire à l'actualisation des mécanismes mis à
la disposition des corporations, leur permettant d'exercer plus efficacement
leur mandat de protection du public.
L'Ordre des opticiens d'ordonnances souscrit sans réserve aux
objectifs que s'est fixés le ministre responsable de l'application des
lois professionnelles autant qu'à ceux de la présente commission.
L'Ordre des opticiens d'ordonnances, qui a été, à
plusieurs occasions, aux prises avec la plupart des irritants du système
disciplinaire, croit qu'il doit être considéré comme un
intervenant privilégié. Son expérience et son expertise en
matière disciplinaire et de traitement des demandes du public peuvent
être fort utiles aux travaux de la commission. En effet, l'Ordre des
opticiens d'ordonnances existe depuis 1940 comme corporation professionnelle.
En 1973, lors de la réforme des professions, son statut de corporation
professionnelle à exercice exclusif fut confirmé par l'adoption
de la Loi sur les opticiens d'ordonnances. L'Ordre compte aujourd'hui 692
membres et administre un budget annuel de 425 000 $, faisant en sorte que ses
membres comptent parmi ceux dont les obligations financières envers leur
corporation sont les plus élevées. Malgré ses ressources
limitées, l'Ordre des opticiens d'ordonnances s'est toujours
acquitté avec diligence de ses obligations découlant de son
mandat de protection du public, ayant pu compter sur la collaboration de la
grande majorité de ses membres.
L'expérience de notre corporation dans ses relations avec le
public nous amène à faire la distinction suivante. Les demandes
adressées par le public aux corporations professionnelles ne sont pas
toutes de nature disciplinaire. Plusieurs d'entre elles sont des demandes
d'information ou d'intervention qui ne conduisent pas à une mesure
disciplinaire. Un autre type de demandes provenant du public est plus
spécifique et peut s'apparenter à une dénonciation. C'est
ce type de demandes qui déclenche le plus fréquemment le
processus d'enquête prévu au Code des professions et les
obligations qui en découlent.
L'absence de dispositions prévues au règlement sur la
rédaction des rapports annuels entraîne une distorsion de
l'information qui contribue à alimenter une certaine critique de la
performance des corporations professionnelles en matière de traitement
des demandes du public. Par ailleurs, peu d'intervenants ont fait ressortir que
bon nombre d'enquêtes du syndic sont initiées sans qu'il y ait
nécessairement participation ou intervention du public. Il y a,
effectivement, des modifications à apporter au système
disciplinaire.
Cependant, depuis plusieurs années, l'Ordre des opticiens
d'ordonnances a soulevé l'absence d'une procédure permettant le
règlement de différends qui ne nécessite pas toujours une
intervention disciplinaire. Ainsi, nous accueillons donc très
favorablement une réglementation permettant le règlement de ce
type de différends. Jusqu'à ce jour, ces différends ont
été soumis à une conciliation volontaire qui a toutefois
permis de solutionner plusieurs demandes.
Outre la question des différends, l'avant-projet de loi propose
plusieurs modifications qui visent à apporter les ajustements
nécessaires pour rendre le système professionnel plus performant.
Très rapidement, tous les intervenants au dossier ont constaté
que le Code des professions est un tout et que toute modification au
système disciplinaire et tout aménagement aux mécanismes
de traitement des demandes provenant du public devaient tenir compte des autres
mesures de protection du public. (20 h 10)
Essentiellement, l'Ordre des opticiens d'ordonnances partage les points
de vue énoncés par le Conseil interprofessionnel du Québec
dans son mémoire présenté à la commission de
l'éducation.
En ce qui a trait plus particulièrement aux modifications
proposées par l'avant-projet de loi, l'Ordre des opticiens d'ordonnances
considère que l'Office des professions possède actuellement tous
les pouvoirs nécessaires pour s'acquitter de sa fonction qui consiste
à veiller à ce que chaque corporation assure la protection du
public. Aucune justification précise n'a été
apportée pour expliquer une modification aussi importante au rôle
et aux pouvoirs de l'Office des professions. L'Ordre des opticiens
d'ordonnances est donc en désaccord avec la modification du rôle
et des pouvoirs de l'Office des professions tel que proposé dans
l'avant-projet de loi.
Par ailleurs, il revient à la corporation professionnelle
d'assurer la protection du public. C'est ce que nous dit l'article 23 du Code
des professions. Comme l'a souligné Mme la députée de
Terrebonne lors de l'ouverture de la présente commission, il y aurait
lieu de s'interroger sur la portée de la notion de protection du public.
En effet, l'évolution de l'exercice de la profession justifierait que le
législateur précise la portée de la notion de
«contrôler l'exercice de la profession par ses membres» en
prenant soin de mentionner que ce contrôle porte également sur le
contexte opérationnel. Cela enlèverait toute
ambiguïté, permettant ainsi à la corporation d'être
plus efficace dans l'exercice de ses devoirs. L'Ordre des opticiens
d'ordonnances demande donc à la commission de préciser la
portée de la notion de «contrôler l'exercice de la
profession par ses membres» en spécifiant que ce contrôle
porte également sur le contexte opérationnel.
Aussi, aucun article du Code des professions ne devrait limiter les
pouvoirs de contrôle de l'exercice de la profession par la corporation.
L'article 34, tel que rédigé dans l'avant-projet de loi, laisse
entrevoir une possibilité de perte de contrôle de l'exercice de la
profession en créant une réglementation pouvant être
incitative à l'exercice d'une profession par des personnes autres que
les professionnels. L'Ordre des opticiens d'ordonnances considère que
l'article 34 du Code des professions actuellement en vigueur est suffisant. Par
ailleurs, si le libellé proposé s'avère essentiel pour
quelques corporations, le Code devrait prévoir que l'absence de
règlements ne donnerait pas pour autant le droit de prétendre
pouvoir exercer une profession sans être membre de la corporation.
Par ailleurs, le principe de l'autogestion des corporations
professionnelles ne doit pas mettre en péril les libertés
individuelles. L'article 45 de l'avant-projet de loi donne au bureau un pouvoir
discrétionnaire qui doit être réservé au
comité de discipline, tel que prévu à l'article 155 de
l'avant-projet de loi. Le bureau doit exercer une fonction purement
administrative lors du contrôle de l'émission du permis ou de
l'inscription au tableau des membres en s'assurant que le candidat ren- contre
toutes les conditions de délivrance du permis ou d'inscription au
tableau. L'Ordre des opticiens d'ordonnances suggère que l'article 45 de
l'avant-projet de loi fasse l'objet d'une révision et que le refus
d'accorder un permis ou une inscription au tableau soit uniquement en vertu
d'un diplôme jugé non équivalent.
Par ailleurs, la protection du public commande que la corporation
professionnelle puisse joindre un membre dans des délais raisonnables.
L'Ordre des opticiens d'ordonnances suggère à la commission de
réduire à 10 jours le délai accordé à un
professionnel pour faire connaître au secrétaire de la corporation
son domicile professionnel.
La publicité. La Cour suprême du Canada a reconnu que la
publicité faisait partie du discours commercial et que celui-ci
était un droit protégé par la Charte des droits et
libertés. La Cour suprême précisait par ailleurs, dans
l'affaire Rocket, le rôle des corporations professionnelles en ces mots:
«Certes, compte tenu de l'importance de promouvoir le professionnalisme
et de prévenir la publicité irresponsable et trompeuse, un
objectif qui doit l'emporter sur la protection de tout intérêt
commercial des professionnels, il incombe aux corps professionnels à
titre de devoir impératif d'adopter des règlements
appropriés qui réalisent cette fin sans restreindre
indûment la liberté d'expression de leurs membres». Dans cet
esprit, nous croyons que le législateur devrait déterminer, dans
le Code des professions, des restrictions communes supplémentaires pour
prévenir la publicité irresponsable et trompeuse. Même si
certaines restrictions n'étaient applicables qu'aux membres de certaines
corporations, les avantages d'une réglementation uniforme en
matière de publicité professionnelle seraient énormes
considérant qu'un tel règlement doit pouvoir passer le test
constitutionnel. L'Ordre des opticiens d'ordonnances suggère à la
commission de déterminer à la suite des articles 60.1, 60.2 et
60.3 les restrictions applicables à toute publicité faite par un
professionnel.
En ce qui concerne la procédure de destitution prévue
à l'article 85, la règle d'autogestion des corporations et
l'autonomie dont doit jouir le syndic d'une corporation devraient guider la
commission dans la rédaction de cet article. L'Ordre des opticiens
d'ordonnances recommande à la commission de limiter l'application des
règles de destitution décrites à l'article 85 de
l'avant-projet de loi au seul cas de destitution du syndic et des syndics
adjoints et des personnes visées par règlement adopté en
vertu du paragraphe a de l'article 94.
En ce qui concerne l'équivalence de formation, on conviendra que
la qualité et l'étendue de la formation sont des
éléments essentiels à la protection du public.
L'équivalence de diplôme peut être mesurée de
façon objective, considérant qu'il y a un point de
référence et de comparaison, c'est-à-dire le ou les
diplômes déterminés par le gouvernement comme donnant
accès à l'exercice de la profession. Cependant, lorsqu'il s'agit
d'équivalence de formation, il est impossible de référer
à une
norme comparative tel un diplôme émis par une institution
d'enseignement reconnue. L'Ordre des opticiens d'ordonnances recommande
à la commission de maintenir facultative l'adoption du règlement
sur l'équivalence de formation, tel que prévu à l'article
86 g de l'avant-projet de loi, en s'assurant toutefois que l'absence de
réglementation ne puisse permettre quelque revendication que ce soit en
matière d'équivalence de formation.
Par ailleurs, une proposition de modification touchant la cotisation
annuelle pique notre curiosité. L'ajout des mots «le cas
échéant» combiné à la nouvelle ponctuation du
texte de l'article 86 k de Favant-projet de loi pourrait avoir des
conséquences sur son interprétation. Au-delà de cette
modification qui pourrait n'être que technique, le financement des
corporations professionnelles devrait faire l'objet d'une réflexion en
profondeur. De toute façon, un jour ou l'autre, l'équité
commandera que ce financement tienne compte spécifiquement des lieux
d'exercice auxquels le public a un accès direct, ce qui pourrait
déboucher sur l'émission par la corporation d'un permis
d'opération, comme c'est le cas dans d'autres secteurs.
En ce qui concerne la déontologie, et tel que nous l'avons
souligné précédemment, les règles
déontologiques prévues à l'article 87 ne devraient pas
être diluées par des règles applicables à la
publicité. Avant de persister à considérer les
restrictions en matière de publicité comme étant des
règles de déontologie, il faut revoir la notion de
déontologie dans le contexte évolutif de notre
société. Il faut rappeler ici que la publicité s'adresse
au grand public alors que le mandat de la corporation est de s'assurer de la
protection du public qui s'adresse à un professionnel pour obtenir ses
services. L'Ordre des opticiens d'ordonnances suggère qu'une
réflexion en profondeur sur la déontologie professionnelle soit
initiée.
Concernant la conciliation et l'arbitrage des comptes, l'Ordre des
opticiens d'ordonnances croit qu'il faut éviter dans la mesure du
possible la multiplication des comités. À cette fin, l'Ordre des
opticiens d'ordonnances recommande à la commission de modifier le Code
des professions pour permettre le règlement des différends par la
procédure prévue au règlement de conciliation et
d'arbitrage des comptes.
Par ailleurs, une question qui nous préoccupe plus
particulièrement ces jours-ci, c'est le dossier «client»
qu'un professionnel a en sa possession et qui doit être accessible en
tout temps au client. Parmi les cas de cessation d'exercice, la faillite est
aujourd'hui une réalité. Même si le professionnel qui fait
faillite demeure membre de la corporation, des problèmes importants se
posent quand vient le temps d'avoir accès aux dossiers
«clients» et aux travaux en cours. L'Ordre des opticiens
d'ordonnances demande à la commission de prendre les dispositions
nécessaires à l'article 91 de l'avant-projet de loi pour garantir
le droit du public d'avoir accès à son dossier et au travail en
cours en y prévoyant les cas de faillite.
Quant au processus réglementaire, il doit être
simplifié pour assurer son efficacité. L'Ordre des opticiens
d'ordonnances s'en remet aux recommandations du Conseil interprofessionnel du
Québec et appuie toute modification susceptible de réduire les
délais et les coûts reliés à l'adoption des
règlements. (20 h 20)
Enfin, l'efficacité du processus disciplinaire dépend en
grande partie de l'organisation qui entoure le traitement des plaintes. Au
cours des dernières années, les comités de discipline ont
fait face à toutes sortes de difficultés qui ont
considérablement diminué leur efficacité, la confiance du
public et des professionnels eux-mêmes. Les frustrations du public sont
également partagées par la grande majorité des opticiens
qui n'ont jamais été traduits devant le comité de
discipline et qui trouvent, eux aussi, que la discipline est onéreuse
pour la corporation et que les résultats sont trop souvent
décevants.
Plusieurs causes peuvent expliquer les difficultés
qu'éprouvent les comités de discipline: la nature des questions
traitées en discipline; les contestations de toutes sortes, dont le
pouvoir d'enquête du syndic, le pouvoir du syndic de porter plainte, la
nomination des membres du comité de discipline, l'indépendance
judiciaire du président et des membres du comité de discipline,
le remplacement d'un membre rendu inapte à siéger, la
contestation de la juridiction du comité, les requêtes en vertu de
la Charte des droits et libertés; enfin, les décisions
portées en appel, les requêtes en évocation et les
délais occasionnés par les remises d'auditions.
L'avant-projet de loi prévoit certaines dispositions
inacceptables et inapplicables. Une analyse plus approfondie nous
apparaît nécessaire avant de procéder à la
rédaction d'un projet de loi qui pourrait apporter des solutions plus
immédiates. L'Ordre des opticiens d'ordonnances recommande donc à
la commission de procéder, dans les plus brefs délais, aux
modifications jugées essentielles pour assurer la bonne marche du
système professionnel et de confier à un groupe de travail
multi-disciplinaire, regroupant des professionnels impliqués dans le
milieu, l'analyse des mécanismes susceptibles de mieux répondre
aux attentes du public et des professionnels.
En terminant, quant aux modifications suggérées à
la Loi sur les opticiens d'ordonnances, nous croyons qu'il serait judicieux de
considérer les demandes qui ont déjà été
formulées par la corporation et qui visent à mieux
protéger le public. Par exemple, l'article 17 de la Loi sur les
opticiens d'ordonnances, qui exclut du champ d'exercice exclusif les lunettes
de protection pour fins industrielles, devrait être revu
prioritairement.
Dans ce même contexte, vous me permettrez de vous inviter à
lire notre mémoire concernant la vente de lunettes de lecture
prêtes à porter au sujet de laquelle l'Office tient actuellement
une consultation sur Pà-pro-pos d'en libéraliser la vente.
Le Président (M. Gobé): M. Paquette, rapidement, si
vous voulez terminer parce que le temps est maintenant
écoulé.
M. Paquette: Ah! Je suis parfait dans mon temps. L'Ordre des
opticiens d'ordonnances, M. le Président, remercie la commission de
l'éducation de lui avoir permis d'être entendu et de participer
à l'amélioration des mécanismes de protection du public.
Je vous remercie.
Le Président (M. Gobé): Je vous remercie. Vous
étiez très bien «timé», en effet. Je vais donc
maintenant demander à M. le ministre de bien vouloir commencer son
intervention. Vous avez, M. le ministre, approximativement 20 minutes.
M. Savoie: Merci, M. le Président, j'apprécie vos
précisions. Il me fait plaisir, tout d'abord, de saluer les
représentants de l'Ordre des opticiens d'ordonnances à cette
soirée de travail de la commission et particulièrement de prendre
connaissance avec eux du résumé de leur mémoire et des
recommandations que nous avons eu le temps d'examiner. Il y a des
éléments, évidemment, qui sont présentés
dans votre mémoire, qui ont suscité un accueil favorable. Il y a
des éléments là-dedans, des orientations, qu'on trouve
intéressants et qui seront retenus. Vous comprenez que dans 20 minutes,
incluant votre temps de réponse, on ne peut pas toucher à tout et
qu'il faut cerner certains éléments.
Tout simplement pour vous rappeler aussi qu'il y a certains
éléments là-dedans qui, finalement, ne suscitent pas de
problèmes. On comprend vos inquiétudes au niveau de l'article 86,
mais ce n'est pas fondé; il n'y a pas de plan machiavélique, je
vous assure. Par contre, les commentaires, par exemple, au niveau de 87, vont
mériter une certaine réflexion. Sur l'article 45, finalement, qui
est lié également à 155, j'aimerais ça vous
entendre davantage, parce que j'ai de la misère, de la difficulté
à vous saisir au niveau de 45. Dans vos commentaires au niveau de 45,
vous suggérez que «l'avant-projet de loi fasse l'objet d'une
révision et que le refus d'accorder un permis ou une inscription au
tableau soit uniquement en vertu d'un diplôme jugé non
équivalent», et non pas, par exemple, en vertu d'une
décision d'un tribunal canadien déclarant coupable d'une
infraction criminelle l'inscription au niveau du tableau, des choses comme
ça. Je comprends mal votre orientation.
M. Paquette: M. le Président, nous pensons que cette
disposition-là ferait en sorte que, très rapidement, le bureau de
la corporation se verrait traduit devant les tribunaux, soit par une
procédure de mandamus, pour forcer le bureau de direction à
émettre un permis de pratique et nous croyons que le bureau, à ce
moment-là, exercerait un rôle qui serait, à notre avis,
réservé à une instance judiciaire, c'est-à-dire de
se pencher sur une question de type légal. Si vous me permettez, je vais
permettre peut-être à notre procureur de mieux vous expliquer les
conséquences de cet article-là, selon nous.
Le Président (M. Gobé): Si vous voulez vous
présenter, nous dire votre nom pour l'enregistrement des
débats.
M. Lanctot (Jean): Jean Lanctot, procureur de l'Ordre.
Le Président (M. Gobé): Vous avez la parole, M.
Lanctot.
M. Lanctot: Très rapidement, M. le Président. Nos
inquiétudes sont fondamentalement d'ordre constitutionnel
vis-à-vis d'une possible contestation qui serait basée
essentiellement sur ceci. On sait qu'une décision d'un comité de
discipline d'une instance étrangère... On sait que le
Québec est souverain en matière d'instance disciplinaire en
matière professionnelle. Alors, on pourrait imaginer qu'une instance
étrangère puisse radier un individu pour des motifs qui ne
susciteraient ici aucune plainte de la part d'une corporation professionnelle
ou du syndic. Sur cette simple constatation, il serait possible, à notre
avis du moins, qu'une personne qui se voit refuser un permis ici, au
Québec, puisse, probablement en se basant sur la Charte,
déterminer qu'on a bafoué ses droits fondamentaux en ne tenant
pas compte du fait que, par exemple, ici même au Québec, elle
n'aurait pas pu être radiée. Ça comporte plusieurs
difficultés qu'on ne rencontre pas. Et, très rapidement, par
exemple en matière criminelle, on sait qu'il y a des dispositions qui
existent, qui sont là, qui ne posent pas problème dans la mesure
où l'aspect criminel, évidemment, est de juridiction
fédérale. Maintenant, en matière disciplinaire, chaque
province peut avoir sa propre réglementation, peut avoir sa propre
façon de procéder au niveau disciplinaire, de sorte qu'en faire
une adéquation ici, au Québec, ça nous apparaît
susceptible de poser problème.
M. Savoie: Oui, c'est ça, on de la misère...
Justement, je me demande si, des fois... J'étais justement en train de
discuter de ça. C'est que, bien sûr, c'est balisé avec le
«peut», d'une part. Ce n'est pas un «doit», hein?
D'autre part, ce qu'on cherchait à faire, justement, c'est vous donner
un pouvoir d'intervention dans le cas, par exemple, où vous avez un
opticien qui veut se faire inscrire chez nous suite à un
déménagement, par exemple, au niveau de l'Alberta. Et là,
en Alberta, par exemple, il a fait l'objet d'une décision disciplinaire
définitive rendue hors du Québec entraînant une radiation
du tableau qui, au Québec, pourrait être imposée par un
comité de discipline: par exemple, harcèlement sexuel, fraude.
C'est ça, le sens de 45. Vous avez d'abord, au début, une
décision du tribunal suite à une infraction criminelle; un
tribunal étranger, ensuite; et, ensuite, on s'embarque au niveau des
décisions disciplinaires.
Et, à 155, vous avez le cas de quelqu'un qui est
déjà membre et qu'on veut «clairer», parce
qu'il était également membre au Québec comme il
l'était, par exemple, en Ontario. Vous avez des opticiens qui sont dans
cette situation-là au Québec. Alors, le type, à un moment
donné, serait trouvé coupable, par exemple, d'une infraction, pas
au niveau criminel - il me semble que c'est assez clair - mais au niveau, par
exemple, des opticiens en Ontario, où le gars a été
trouvé coupable de harcèlement sexuel, bang! à la porte!
Le gars revient, il continue à pratiquer chez nous. On n'a pas de porte,
là. Vous n'avez pas de porte s'il n'y a pas 155. (20 h 30)
M. Lanctot: Je pense qu'on est conscients de ce que ça
veut corriger.
M. Savoie: Oui.
M. Lanctot: Là-dessus, il n'y a pas de cachette.
M. Savoie: C'est clair.
M. Lanctot: Je pense qu'on connaît le problème que
ça veut corriger. Là où on en est, c'est sur la
possibilité de contestation et, nous, on voit que, entre autres, les
procédures peuvent différer d'une province à l'autre au
niveau de comment ça se comporte au niveau d'un comité de
discipline, et on parle ici d'une juridiction, d'un tribunal hors
Québec. Or, c'est assez large.
M. Savoie: Oui, mais c'est marqué «peut».
M. Lanctot: II y a le «peut», effectivement, qui
laisse une discrétion.
M. Savoie: Oui. Bon, on peut. Si c'est parce que le gars a 9
orteils au lieu de 10, le «peut» peut jouer, hein? C'est ça,
le sens qui est donné avec un «peut». Ce n'est pas
d'obligation, ce n'est pas ipso facto: le type a été
condamné à l'extérieur, il va être condamné
chez nous. Je pense que c'était ça qui était visé
par 45 et on cherche dans... On va prendre vos commentaires en réflexion
lorsqu'on va réviser l'avant-projet de loi et on va certainement
regarder encore une fois vos commentaires. On pensait qu'avec le
«peut», ce n'était pas trop pire.
M. Lanctot: M. le ministre, si vous me permettez juste une
remarque.
M. Savoie: Oui.
M. Lanctot: Vous savez, il y a plusieurs dispositions qui,
pourtant, nous apparaissaient très, très claires...
M. Savoie: Oui.
M. Lanctot: ...et qui nous ont amenés parfois même
jusqu'en Cour suprême. M. Savoie: Oui. Des voix: Ha, ha,
ha! M. Lanctot: Alors, vous savez... M. Savoie: Oui, mais,
là...
M. Lanctot: Notamment sur un mandamus, sur une disposition qui
était très claire.
M. Savoie: Oui. C'est bon pour vous, ça, maître,
mais...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Savoie: ...par contre, au niveau de 45 - et je pense que tout
le monde va être d'accord avec ça - c'est que, finalement, on ne
veut pas voir une situation où, effectivement, quelqu'un qui pratique
à l'extérieur et également chez nous puisse continuer
à pratiquer, nonobstant le fait qu'il a été trouvé
coupable parce qu'on n'avait pas cette disposition législative. On l'a
introduite, on l'a balisée par «peut», et là vous me
dites: Peut-être encore...
M. Paquette: M. le Président, si vous me permettez, sur
votre temps toujours, le «peut», effectivement, nous agace aussi un
petit peu dans le sens que ça laisse au bureau un pouvoir
discrétionnaire qui, à notre avis, relève d'un
comité de discipline ou d'une cour de justice. Ça implique que
des débats auraient lieu à un bureau de direction sur la
pertinence ou la non-pertinence d'émettre ou pas un permis. Et ça
place les membres du bureau de direction, à mon avis, dans une situation
autre qu'une situation administrative; ça les place dans une situation
qui s'apparente à une cour de justice: de reconnaître que la faute
est grave ou pas. Je comprends qu'il peut y avoir des fautes où c'est
très évident, mais il peut se produire des situations où
c'est moins évident, puis que les membres du bureau soient
partagés. Et on ne voudrait pas que la corporation soit
blâmée de ne pas exercer son mandat de protection du public en
acceptant une personne qui a été radiée dans une autre
province et sur la bonne foi d'une décision prise par les membres du
bureau. Encore une fois, je le rappelle, j'ai l'impression que c'est une
question qui relève plutôt des tribunaux québécois
puisqu'il s'agit d'accepter ou pas un professionnel au Québec. En tout
cas... Mais, par contre, on vous fait confiance à la relecture et
à la vérification que vous pourrez en faire.
M. Savoie: On va tenir compte de ça dans notre
révision pour être sûrs qu'on couvre votre objection.
Un autre élément qui m'intéresse, c'est votre
perception, justement, du pouvoir d'enquête qui est
proposé dans le projet de loi. Vous voyez ça comment,
l'exécution de ce pouvoir d'enquête?
M. Paquette: Si vous me permettez, je vais permettre à mon
secrétaire et syndic de répondre à cette question, Claude
Lalonde.
M. Lalonde (Claude): Vous référez à quel
article de l'avant-projet de loi, M. le ministre?
M. Savoie: 15, je crois.
M. Lalonde: Le pouvoir d'enquête de l'Office?
M. Savoie: Oui. Le pouvoir d'enquête de l'Office, oui.
M. Lalonde: À mon avis, l'Office, dans les dispositions
actuelles du Code des professions, a suffisamment de pouvoirs d'enquête
et a suffisamment de moyens, de mécanismes pour surveiller l'exercice
des corporations. Est-ce que c'est nécessaire d'aller plus loin? Encore
là, je ne me sens pas compétent pour vous répondre
à cette question-là, mais j'ai l'impression que c'est suffisant
à l'heure actuelle dans le Code actuel. D'ailleurs, on a toujours tenu
compte de cette possibilité-là, que l'Office puisse intervenir
dans nos dossiers. Je n'ai jamais cru que ça ne pouvait jamais arriver,
là. Mais ce n'est jamais arrivé, par exemple, à ma
connaissance.
M. Savoie: Oui, vous pensez que l'Office pourrait vous demander,
par exemple, vos dossiers concernant tels cas...
M. Lalonde: Oui.
M. Savoie: ...et que vous serez obligé de les lui
transmettre.
M. Lalonde: Ah! Je ne verrais pas d'objection à soumettre
mon dossier à quelqu'un de l'Office qui voudrait vérifier la
conduite d'un dossier au même titre que...
M. Savoie: Mais, là, c'est parce que vous êtes une
bonne corporation.
M. Lalonde: Oui.
M. Savoie: Mais pensons à quelqu'un d'autre d'abord,
pensons à quelqu'un qui dit non. Est-ce que l'Office, à ce
moment-là, exécute son pouvoir de surveillance?
M. Paquette: Nous, on pense, M. le Président, qu'une bonne
façon d'avoir la collaboration des corporations, c'est justement de ne
pas mettre des fusils dans le dos. Nous pensons que cet article-là
pourrait, au contraire, créer une tension et diminuer la collaboration
qui peut exister entre l'Office et les corporations. Moi, je vous le dis, comme
président de la corporation des opticiens, je ne demande pas mieux que
d'avoir la visite annuelle, «biannuelle», à tous les trois
mois de représentants de l'Office avec qui on pourrait échanger,
à qui on pourrait même transmettre certaines doléances et
de qui on pourrait même obtenir de l'appui sur certains dossiers. Dans ce
sens-là, si on place un article trop fort, trop puissant, j'ai
l'impression que ça pourrait nous placer, et probablement la corporation
des opticiens aussi, sur la défensive, ce qui ne nous apparaît pas
être l'idéal dans la situation actuelle.
Par contre, je vous avouerai honnêtement que notre réserve
sur les nouveaux pouvoirs de l'Office n'est pas à l'effet qu'on a peur
que l'Office, demain matin, rentre dans la corporation, et on est
persuadés qu'il y aurait un minimum d'organisation, de procédure
pour permettre un certain nombre d'échanges préalablement
à la tutelle ou quoi que ce soit. C'est surtout qu'on ne voudrait pas
qu'un article vienne fausser, vienne nuire aux bonnes relations qui doivent
exister entre l'Office et les corporations professionnelles. Bon.
M. Savoie: D'accord.
M. Paquette: En tout cas, je ne veux pas prendre de votre temps
davantage.
Le Président (M. Gobé): M. le ministre, vous avez
terminé pour l'instant?
M. Savoie: Pour l'instant, M. le Président.
Le Président (M. Gobé): II vous reste quatre
minutes et demie.
M. Savoie: Vous êtes bien gentil, M. le
Président.
Le Président (M. Gobé): Mme la
députée de Terrebonne, il vous reste, à vous, 20
minutes.
Mme Caron: Merci, M. le Président. Vous nous informez sur
certains points qui ne font pas partie de l'avant-projet de loi. Vous nous
dites que le Code des professions doit être, évidemment, un tout
et, en conclusion, vous nous parlez de certains éléments qui
n'ont pas été abordés et qui, normalement, devraient faire
partie de ce tout de la réforme. Je fais référence plus
précisément à la pratique illégale, à la
publicité, aux conflits interprofessionnels, et ce sont,
évidemment, des élément importants au niveau des
corporations professionnelles, qui n'ont pas été touchés
au niveau de la réforme. Et on aurait pu ajouter, évidemment,
tous les problèmes reliés aux corporations à titre
réservé. Vous proposez un groupe de travail multidisciplinaire en
page
26 et, dans votre proposition, ce groupe-là pourrait regrouper
des professionnels impliqués dans la discipline. Est-ce que vous ne
croyez pas que le groupe de travail multidisciplinaire devrait aussi regrouper
des représentants du public, des membres d'associations de
consommateurs, par exemple, ou le Protecteur du citoyen?
M. Paquette: Écoutez, on n'a sûrement pas
d'objection à ce que le public soit représenté sur un
groupe de travail, ce qui nous permettrait peut-être d'atteindre un
résultat encore meilleur. Dans ce sens-là, on n'a aucune
réserve là-dessus.
Mme Caron: O.K.
M. Paquette: C'est peut-être un oubli de notre part de ne
pas l'avoir mentionné, de ne pas même y avoir pensé.
Là-dessus, on lève notre chapeau.
Mme Caron: Je voulais juste m'assurer que vous n'aviez pas
d'objection pour que le groupe soit vraiment multidisciplinaire. Vous nous avez
parlé aussi, en page 4 et ça revient en page 24 - et là,
je voudrais vous entendre un petit peu plus là-dessus - des irritants,
et là je vous cite: «L'Ordre des opticiens d'ordonnances qui a
été à plusieurs occasions aux prises avec la plupart des
irritants du système disciplinaire croit qu'il doit être
considéré comme un intervenant privilégié».
Et c'est rare qu'on a une corporation professionnelle qui nous parle des
irritants du système disciplinaire. En page 24, vous revenez aussi
là-dessus. «Les frustrations du public sont partagées par
la grande majorité des opticiens qui n'ont jamais été
traduits devant le comité de discipline et qui trouvent, eux aussi, que
la discipline coûte trop cher à la corporation et que les
résultats sont décevants.» Pouvez-vous nous faire part un
peu de ces irritants? (20 h 40)
M. Paquette: De par la nature des services et des produits que
nous dispensons au public, vous allez comprendre que plusieurs moyens sont
utilisés en défense pour permettre aux intimés de s'en
tirer et, ce qu'on dirait, jusqu'à un certain point, c'est de bonne
guerre. Cependant, ça a placé la corporation dans une situation
où elle a dû défendre à maintes reprises un certain
nombre d'articles du Code des professions, l'article 117, entre autres, les
articles 123, 26. En tout cas, il y a une dizaine d'articles du Code des
professions que l'ordre des opticiens a dû défendre
régulièrement depuis quelques années, et c'est
effectivement des irritants, parce que, d'abord, défendre un article du
Code des professions, c'est engageant, parce qu'il faut faire un bon travail
parce que ça va servir de jurisprudence et, deuxièmement,
ça occasionne des délais excessifs parce que la plupart des
décisions qui sont rendues sont portées en appel par l'une ou
l'autre des parties. Alors, ce sont effectivement des irritants qui nous
permettent d'avoir une certaine expertise sur les articles du Code qui,
actuellement, ne rendent pas service au public, ne rendent pas service aux
corporations, ni à leurs membres. Notre procureur pourrait
peut-être élaborer davantage sur les principaux irritants, sur
cette question.
M. Lanctot: Très rapidement, M. le Président. On
peut penser immédiatement, par exemple, à la disposition qui
s'attaque aux problèmes causés par l'incapacité d'un
membre en cours d'instance disciplinaire. Entre autres, l'ordre des opticiens a
vécu cette situation-là dans deux instances disciplinaires,
avant, évidemment, les modifications qui sont maintenant
proposées par le Code et sur lesquelles je vais revenir rapidement.
Alors, ces deux instances-là, donc, qui ont avorté avant terme,
si je peux me permettre l'expression, ont amené des coûts,
évidemment, et aucun résultat pour le public qui s'était
plaint. On constate que les modifications essaient d'«adresser» ce
problème-là. Nous avons, par exemple, quant à cette
disposition, certaines interrogations à savoir: Qu'arrive-t-il lorsqu'un
des membres du comité de discipline devient incapable en cours
d'instance, avant même que toute décision soit rendue et avant
même que l'enquête soit terminée? Est-ce que l'enquête
doit se poursuivre avec les deux autres membres? Il faudrait peut-être
que l'article le prévoie de façon spécifique et non pas
uniquement que les deux membres puissent rendre une décision. Alors, on
a employé le terme «expertise», mais c'est de cette
expérience qu'on a pu bénéficier, entre autres.
On peut parler également, rapidement, des dispositions concernant
l'article 117 sur la nomination des membres du comité de discipline.
À deux reprises, l'Ordre des opticiens d'ordonnances du Québec a
dû défendre la constitution des comités de discipline quant
à leur conformité avec l'article 23 de la charte
québécoise des droits et libertés. Dans les deux cas, on a
eu raison quant à cet aspect. Mais c'est de ce type d'expérience
qu'on voulait vous parler dans le mémoire.
Mme Caron: Je trouve ça important parce que plusieurs des
éléments que vous ressortez là, aux pages 24 et 25,
finalement, même si on change la structure, risquent de toujours
être des irritants au niveau de la protection du public.
Il y a un autre élément que je voudrais aborder avec vous.
C'est, évidemment, un sujet qui me préoccupe beaucoup. Dans mes
notes d'ouverture, j'ai regretté qu'on n'ait pas touché à
cet aspect-là; j'en ai fait part aussi l'année dernière
à quelques reprises. C'est la publicité dont, en page 15 et en
page 20, vous relevez, vous aussi, l'importance. Vous nous dites, en page 15:
«...dans le Code des professions, des restrictions communes -
«supplémentaires», avez-vous ajouté dans votre
lecture tantôt - pour prévenir la publicité irresponsable
et trompeuse». Donc, vous demandez qu'il y ait des restrictions
applicables à la publicité faite par un professionnel. À
la fin de la page 20, vous nous dites: «Si, par ailleurs, le
législateur décidait de ne pas opter pour des
règles communes en matière de restriction publicitaire
pour les professionnels, l'Ordre croit qu'il devrait retirer aux corporations
cette responsabilité de réglementer la publicité
professionnelle et confier à un autre organisme le contrôle d'une
telle activité». Lorsque vous dites «un autre
organisme», vous voyez ce contrôle-là par quel
organisme?
M. Paquette: Écoutez, je pense, M. le Président,
qu'on préfère d'emblée que la réglementation en
matière de publicité qui doit prévoir les restrictions
imposées à un professionnel dans l'exercice de sa profession soit
couverte par un règlement uniforme pour l'ensemble des corporations, tel
que proposé aux articles 60.1, 60.2, 60.3 et suivants. Et, d'ailleurs,
cette idée-là vient, je dirais, jusqu'à un certain point,
de l'Office des professions qui, à la suite de l'analyse des
règlements de publicité de l'Ordre de optométristes et de
l'ordre des opticiens, a proposé un projet de réglementation
commune dans lequel les mots «optométriste» ou
«opticien» étaient remplacés par les mots «un
professionnel». On s'est aperçu, finalement, que, peu importe la
profession que nous exerçons, il y a un type de publicité qui
sera toujours inacceptable, selon l'opinion de la grande majorité: une
publicité qui a un caractère douteux ou une publicité qui
fait des promesses non mesurables. Dans ce sens-là, nous avons
pensé que ce serait une économie importante de temps,
d'énergie, d'argent, si ces restrictions-là étaient
applicables à toutes les corporations.
Nous avons fait le parallèle un petit peu avec le
règlement de la Loi sur la protection du consommateur, que vous
connaissez bien, Mme la députée. On se rend compte qu'il y a un
seul règlement pour couvrir l'ensemble des commerçants qui
offrent des produits et des services de toute nature, qu'il y a un certain
nombre d'articles dans cette réglementation-là qui ne
s'appliquent pas à certains, mais qui s'appliquent à d'autres. Je
fais référence, par exemple, aux odomètres pour les
automobiles. Évidemment qu'un vendeur de vidéos a peu de... Bon.
Mais on se rend compte qu'une seule et unique réglementation a une
portée beaucoup plus grande, et j'imagine que quelqu'un qui voudrait
contester un article de ce règlement-là y penserait deux fois si
c'était un article du Code des professions, contrairement à un
article d'un règlement d'une corporation professionnelle et je dirais,
en passant, d'une petite corporation professionnelle à petit budget qui
veut éviter à tout prix de se rendre en Cour suprême pour
défendre un article jugé essentiel pour la protection du
public.
Ce qu'on veut, on veut un règlement efficace. Ce qu'on veut, on
veut un règlement qui va nous permettre de faire de la discipline et
même en matière de publicité s'il le faut, mais on ne veut
pas faire juste de la discipline en matière de publicité. On a
d'autres cas de discipline à s'occuper. Depuis deux ans, depuis le
jugement Rocket et Price, nous n'avons pris aucune procédure
disciplinaire en matière de publicité. Tout ce qu'on a fait,
c'est qu'on a traité les vieilles causes qui étaient au Tribunal
des professions. Tout ça pour dire que, malgré tout, notre
comité de discipline a été occupé durant ces deux
années-là, mais on a fait de la discipline, avec un grand D, qui
se rapportait à de la déontologie professionnelle: qualité
des gestes, qualité des actes, impolitesse, compétence, etc. Et
on pense qu'il est important que les corporations professionnelles ne soient
pas embourbées par une discipline en matière de publicité
qui ferait en sorte que tous les budgets, toutes les ressources passeraient
à défendre un ou des articles du règlement de
publicité ou des restrictions en matière de publicité, au
détriment du traitement des vrais problèmes du public, des vrais
problèmes de discipline qui sont, à notre avis, des
problèmes reliés à la déontologie.
Je comprends que ça peut être antidéontologique
d'annoncer un produit tout croche et qui ne donne pas le résultat
escompté. Je comprends tout ça. Mais c'est un débat qui,
à mon sens, devrait être complètement distant de la
déontologie professionnelle, puisque la déontologie
professionnelle veut contrôler l'acte professionnel. Encore une fois,
lorsqu'un opticien d'ordonnances fait de la publicité, il s'adresse
à un grand public qui n'a pas encore demandé de service à
un professionnel. Dans ce sens-là, je vous avouerai - et, M. le
Président, soyez assuré que notre expérience
là-dessus est assez grande pour le savoir - que la publicité peut
nous entraîner dans des frais importants et, je dirais, qui ne rendent
pas un service équivalent à la population. (20 h 50)
Mme Caron: Je trouvais ça important de vous entendre
là-dessus, parce que vous êtes une des rares corporations
professionnelles à avoir abordé le sujet et je pense que c'est un
sujet extrêmement important. Lorsqu'on parle de protection du public, la
publicité est un élément essentiel, et on avait clairement
démontré... Vous avez fait référence à ma
connaissance de la Loi sur la protection du consommateur; c'est,
évidemment, un autre de mes dossiers. Lors de l'étude du projet
de loi 102, on avait clairement démontré que, finalement, en ne
mettant pas de règles communes précises, les consommateurs
pouvaient être protégés davantage pour l'achat de
biens-j'avais donné l'exemple du tournevis - que pour des services de
professionnels. Et ça touche souvent à la santé ou
à des éléments extrêmement importants pour les
consommateurs, je pense, et ça, ça m'apparaissait une des lacunes
de la protection du public. Alors, je suis contente que vous ayiez
abordé ce sujet-là dans votre document, et votre exposé
allait beaucoup plus loin, et je vous en remercie.
Vous nous avez fait part aussi que l'intervention du syndic se fait
souvent aussi sans la participation du public et que peu de corporations en ont
fait état. L'exception, c'est peut-être l'Ordre des pharmaciens
qui avait clairement démontré par un exemple que très,
très souvent l'Ordre devait intervenir, mais à partir de demandes
extérieures au public.
Je vais laisser, pour le moment, la parole à ma collègue
des Chutes-de-la-Chaudière, M. le Président, si
vous le permettez...
Le Président (M. Gobé): Oui, madame.
Mme Caron: ...pour qu'elle puisse poser quelques questions.
Le Président (M. Gobé): Oui, certainement, avec
plaisir, madame.
Mme Carrier-Perreault: Je vous remercie, M. le Président.
Justement, comme ma collègue vient de vous le mentionner, vous avez
parlé d'enquête initiée sans l'intervention du public.
Alors, vous avez parlé de ça dans votre exposé. Par
ailleurs, dans votre mémoire, vous parlez aussi de l'inspection
professionnelle qui se fait chez vous, tel qu'il est proposé dans le
Code des professions. Vous expliquez très bien la façon dont on
doit composer un comité et tout ça, mais le processus à
suivre, la façon de faire, la fréquence et tout ça, ce
n'est pas précisé, au moment où on se parle, dans le Code
des professions. On sait que plusieurs nous ont expliqué la façon
dont ils procédaient. J'aimerais ça vous entendre. Chez vous,
comment ça se fait? Est-ce que vous partez d'une liste? Comment vous
procédez?
M. Paquette Chez nous, le programme d'inspection professionnelle,
c'est un programme qui fait en sorte que tous les bureaux d'opticiens
d'ordonnances sont visités sur une période de cinq années.
Cependant, lorsque, suite au rapport du comité d'inspection
professionnelle, il y a des recommandations ou des demandes dites expresses,
comme on les appelle, pour apporter des correctifs, le comité
d'inspection professionnelle prévoit une deuxième visite trois
mois après la première de façon à s'assurer que les
correctifs ont été apportés. Ce qui fait qu'il y a
certains professionnels qui peuvent recevoir, durant la même
année, deux visites du comité d'inspection professionnelle, et
peut-être même davantage si la recommandation du comité
d'inspection professionnelle est à l'effet de faire une enquête
plus spécifique, soit sur la compétence ou soit sur un
problème particulier. Chez nous, les problèmes particuliers, ce
sera, par exemple, au niveau des techniques d'ajustement de lentilles
cornéennes, des techniques de soin apporté à l'ajustement
des lentilles cornéennes. Alors, si le comité d'inspection
professionnelle perçoit un problème quelconque, à ce
moment-là, il peut recommander une enquête
particulière.
Mme Carrier-Perreault: Vous dites que c'est trois mois, le
délai que vous donnez pour se réajuster.
M. Paquette: Nous accordons généralement trois
mois; donc, la visite a lieu dans les semaines qui suivent, après les
trois mois. On laisse trois mois au bureau visité et qui a reçu
les recommandations pour apporter les correctifs nécessaires, à
moins que ce soient des choses dramatiques, mais ça n'arrive pas
très souvent. Des choses dramatiques, on ne connaît pas ça
tellement.
Mme Carrier-Perreault: Et, généralement, j'imagine
que vos recommandations sont suivies. Avez-vous eu des réprimandes plus
sévères ou des actions à prendre après ces trois
mois-là? Est-ce que c'est déjà arrivé chez
vous?
M. Paquette: Je dois vous avouer que le comité
d'inspection professionnelle a été très bien reçu
de la part de nos membres et, généralement, nos membres acceptent
les recommandations qui leur sont faites parce que, généralement,
ce sont des recommandations qui sont de nature à les aider même
dans leur pratique professionnelle. Donc, je dois vous avouer simplement
qu'à date nous n'avons jamais eu de problème majeur à
faire respecter une ou des recommandations issues du comité d'inspection
professionnelle.
Mme Carrier-Perreault: Je vous remercie. Dans un autre ordre
d'idées, si je peux me permettre, à la fin de votre
mémoire, vous nous avez expliqué qu'il y avait des
recommandations qui étaient inacceptables, d'autres qui étaient
trop lourdes, d'autres trop coûteuses, et vous êtes allé
plus loin en disant qu'il y en avait qui étaient tout simplement
inapplicables. Disons que, depuis le début de cette commission,
ça fait plusieurs groupes, plusieurs corporations professionnelles qui
défilent ici et qui viennent, justement, dire au ministre qu'il y a
plusieurs de ses recommandations qui sont inacceptables, qui sont
coûteuses, qui vont être lourdes, qui vont créer des
délais supplémentaires. Mais vous, vous allez plus loin, vous
dites qu'il y en a qui sont carrément inapplicables. Alors, moi,
j'aimerais ça que vous me donniez de façon plus concrète
des exemples de ces recommandations inapplicables.
M. Paquette: Écoutez, on a soulevé un certain
nombre d'articles qui font référence à ça. À
l'article 123.3°, entre autres, ou troisième alinéa, on
parle, à ce moment-là, du délai de 60 jours. Nous, on
pense que c'est mal comprendre pourquoi et pour qui l'enquête est tenue.
Le délai de 60 jours peut exercer une pression qui nous apparaît
trop grande, au niveau du délai, pour nous permettre d'arriver à
la conclusion d'une enquête complète. À l'article 128,
troisième alinéa, l'assistance au public. De mémoire,
c'est l'assistance du secrétaire du comité. On pense que
ça pourrait devenir facilement une cause de rejet advenant que la
personne qui assiste le public n'ait pas toute la formation ou les
connaissances nécessaires pour formuler une plainte qui ait de l'allure.
On pense que cette plainte-là, formulée avec l'aide ou
l'assistance du secrétaire ou de la secrétaire du comité
de discipline, pourrait être carrément rejetée pour faute
de vice ou pour faute de présentation.
À l'article 141, deuxième alinéa,
l'enregistrement
des auditions. Écoutez, c'est un problème
d'équipement, de technique, de responsabilité et de garde de ces
documents-là. On pense que, devant un appel au Tribunal des professions,
la disparition ou le bris d'une cassette pourrait carrément placer la
corporation dans un dilemme et qu'on pourrait possiblement se voir pris
à recommencer l'audition. Il y a actuellement des mécanismes qui
ne coûtent pas si cher que ça; ce sont les notes
sténographiques que l'on commande au besoin. Ça coûte un
minimum, selon le temps, pour prendre l'audition de ces notes et elles sont
commandées uniquement si la cause est portée en appel pour fins
de préparation du dossier au Tribunal. Donc, on pense que la
mécanique actuelle est préférable à celle
proposée.
À l'article 151, troisième alinéa, on pense qu'au
niveau des frais et déboursés il y a des frais qui ne sont pas
là et qui devraient être là, c'est-à-dire les frais
de signification et les frais d'audition. À l'article 158,
deuxième alinéa, la remise des amendes, le fait que le public
puisse se voir rembourser par la corporation l'amende qui a été
imposée au professionnel, on dit que c'est peut-être laisser au
public une fausse impression lorsqu'on sait que, très souvent, l'amende
ne représente que 10 % ou 20 % des coûts réels qui ont
été engagés pour obtenir cette amende-là.
L'objectif, ce n'était pas de faire de l'argent avec des amendes, mais
l'objectif, c'était de s'assurer de discipliner un membre. On pense que
ça pourrait être dangereux pour le public qui verrait possiblement
là une opportunité de se voir remettre des amendes, alors qu'il
pourrait se voir imposer des frais exorbitants, de plusieurs milliers de
dollars, pour aller chercher un petit 1000 $ ou un petit 2000 $,
indépendamment de la gravité des cas, évidemment.
L'article 161.1, la rétractation d'une décision. On dit:
Peut-être qu'il faudrait préciser les délais. C'est
après combien de temps qu'une décision peut être
rétractée? Au bout de deux ans, est-ce qu'on va être
obligé de remettre l'amende à celui qui a payé l'amende
parce qu'il y a eu une rétractation? Cela devient, selon nous, une
instance d'appel. Si c'est une instance d'appel, donnons donc un délai
à quelque part, comme on en a pour faire appel de décisions.
Le Président (M. Gobé): Rapidement, si vous voulez
conclure. Cela met fin au temps qui était imparti à Mmes les
représentantes de l'Opposition.
Mme Carrier-Perreault: Quoi? le temps est fini? Oh!
Le Président (M. Gobé): Pardon?
Mme Caron: Notre temps est déjà
écoulé. Alors, MM. Paquette, Lalonde et Lanctot, je vous remercie
beaucoup au nom de ma formation politique.
Le Président (M. Gobé): Vous pouvez rapidement
terminer, madame, je vous en prie.
Mme Carrier-Perreault: Ça va. C'est correct.
Le Président (M. Gobé): Vous avez terminé,
oui? Alors, il restait, M. le ministre, trois à quatre minutes, trois
minutes et demie, je pense, pour vous. Si vous voulez terminer.
M. Savoie: Oui, merci, M. le Président. Alors, très
rapidement. Finalement, c'est qu'au niveau du Code il y a des articles qui
concernent la publicité, et vous nous dites: On pourrait peut-être
s'étendre davantage au niveau de l'article 60 et des suivants concernant
les règles de publicité au niveau du Code ou bien trouver un
autre mécanisme. C'est ça, hein?
M. Paquette: Ou bien trouver un autre mécanisme. Mais je
vous avouerai que nous privilégions la première proposition.
M. Savoie: Si, par exemple, on prenait les mécanismes de
publicité et qu'on les transférait à l'Office de la
protection du consommateur, comment est-ce que vous voyez ça,
là?
M. Paquette: Nous, on n'a pas d'objection comme telle,
là.
M. Savoie: Vous n'avez pas d'objection à ça. (21
heures)
M. Paquette: On n'a pas d'objection comme telle à partir
du moment où on a des outils qui sont efficaces. En matière de
publicité, vous allez comprendre, M. le Président, que les causes
disciplinaires sont toujours plus difficiles à traiter que les causes
déontologiques pures. Donc, en autant, nous, qu'on aura des outils
efficaces, une réglementation plus imposante... On croit
sincèrement qu'une réglementation uniforme dans le Code des
professions a plus de poids que 41 réglementations différentes
qui vont devoir, un jour ou l'autre, défiler l'une après l'autre
devant les tribunaux supérieurs pour faire la preuve que les
restrictions imposées sont justes et raisonnables dans une
société libre et démocratique. Ça, c'est la Cour
suprême qui nous a donné cette obligation-là, et c'est
clair. À partir du moment où il y a des gros sous en jeu
lorsqu'il y a principalement des produits qui sont impliqués, qui
accompagnent les services qui sont dispensés par les opticiens
d'ordonnances, bien, c'est évident qu'il y a des gros sous en jeu et que
ces gros sous-là font en sorte qu'on peut s'attendre à des
contestations.
Ce n'est pas de la mauvaise foi de l'ordre des opticiens. Ce n'est pas
que l'ordre des opticiens ne veuille pas s'occuper de ce dossier-là,
mais on se dit: Si on doit défendre, nous, les opticiens, notre petit
règlement de publicité, bien, là, on pourrait le
défendre avec l'Ordre des optométristes puisque, fort
probablement, on aurait un règlement uniforme, l'ordre des opticiens et
l'Ordre des optométristes, à la suggestion de l'Office.
C'est très brillant, mais on se dit: Pourquoi, si c'est possible
entre les opticiens et les optométristes, ce n'est pas possible pour
l'ensemble des corporations professionnelles, tout simplement?
M. Savoie: Je pense que c'est beau, M. le Président.
Alors, je vous remercie beaucoup d'avoir présenté votre
mémoire. Évidemment, comme je vous dis, il y a des
éléments là-dedans qui seront retenus. Il y a d'autres
affaires, évidemment, qui pourraient faire l'objet d'échanges
additionnels lorsqu'on aura notre projet de loi en main. Vous constaterez
peut-être que certains des commentaires pourraient faire l'objet
d'éclaircissements.
M. Paquette: Nous en prendrons connaissance avec beaucoup de
plaisir, M. le ministre.
Le Président (M. Gobé): Alors, merci, M. le
ministre. MM. Paquette, Lalonde et Lanctot, au nom des membres de la
commission, je vous remercie d'avoir représenté l'Ordre des
opticiens d'ordonnances du Québec. Ceci met fin à votre audition.
Vous pouvez donc maintenant vous retirer. Je vais suspendre les travaux une
minute afin de permettre aux représentants de l'Ordre des
chiropraticiens du Québec de prendre votre place. La commission suspend
ses travaux pour quelques minutes.
(Suspension de la séance à 21 h 2)
(Reprise à 21 h 5)
Le Président (M. Gobé): Mesdames et messieurs, la
commission de l'éducation reprend maintenant ses travaux. Il nous fait
plaisir d'accueillir ce soir, comme dernier intervenant, l'Ordre des
chiropraticiens du Québec. Ses représentants sont maintenant
assis en face de nous. Je vois qu'il y a deux noms marqués sur notre
liste et vous êtes quatre. Alors, M. le président, M. Danis, je
vous laisserai le soin de présenter les collègues qui vous
accompagnent.
Ordre des chiropraticiens du Québec
M. Danis (Normand): D'accord, M. le Président. Tout
d'abord, bonsoir, M. le ministre, Mmes et MM. les commissaires. En premier
lieu, j'aimerais vous remercier de nous donner l'opportunité de
présenter les grandes lignes de notre mémoire. Alors, à ma
droite, j'ai le Dr Claude Pilon, syndic de la corporation; à mon
extrême gauche, le Dr Daniel Boisvert, vice-président de l'Ordre
des chiropraticiens du Québec, et, à ma gauche, ici, Me Louise
Taché-Piette, procureure de l'Ordre. Alors, soyez rassurés,
étant donné l'heure tardive, nous serons brefs et concis. Ainsi,
on aura plus de temps pour pouvoir échanger.
Le Code des professions, dont l'adoption remonte à 1973, faisait
suite aux recommandations formulées par la commission Castonguay-Nepveu
à la suite d'une longue consultation sur les besoins de la population
québécoise en matière de protection face aux services
professionnels. C'est avec étonnement que l'Ordre des chiropraticiens du
Québec a pris connaissance des importants changements que
présente Favant-projet de loi déposé devant
l'Assemblée nationale par le ministre responsable de l'application des
lois professionnelles. Notre corporation se demande sur quel constat
d'échec du système professionnel le ministre responsable de
l'application des lois professionnelles s'appuie pour proposer de tels
changements. N'ayant eu connaissance d'aucune étude sur le degré
d'efficacité du système professionnel en général et
de la perception qu'en a le public, l'Ordre des chiropraticiens du
Québec s'oppose aux changements proposés dans Favant-projet de
loi sur les rôles respectifs de l'Office des professions et des
corporations professionnelles.
Si cet avant-projet de loi devenait loi, d'organisme de surveillance
qu'il est en vertu du présent Code, l'Office des professions du
Québec deviendrait un organisme inquisiteur et décideur qui
aurait même le pouvoir de se substituer aux éléments les
plus importants des corporations professionnelles. Il y a lieu de se demander
où l'Office pourrait puiser la compétence qui lui serait
essentielle à l'exercice des fonctions auxquelles il entend se
substituer. En effet, les changements proposés auraient, s'ils
étaient adoptés, des répercussions jusque dans les
structures fondamentales de notre système professionnel,
réduisant le principe de l'autogestion des corporations professionnelles
au simple devoir de mettre en pratique les décisions, les directives et
les règlements de l'Office des professions du Québec.
En matière disciplinaire, les propositions de Favant-projet de
loi concernant l'institution d'un comité d'examen des plaintes ne
sauraient répondre adéquatement aux problèmes que pose la
nature discrétionnaire des pouvoirs du syndic puisque ce comité
ne serait autre chose qu'un simple dédoublement des fonctions du syndic.
Il serait beaucoup plus préférable, à notre avis, qu'un
tel comité soit responsable de recevoir et de traiter les plaintes des
personnes, et uniquement des personnes insatisfaites de la décision d'un
syndic.
Par ailleurs, certaines propositions de Favant-projet de loi, telle
l'imposition d'un délai aux délibérés du
comité de discipline, de même que la possibilité pour ce
comité de siéger à deux membres en cas d'incapacité
du troisième, sont de nature à accroître
l'efficacité du système disciplinaire. En matière de
réglementation, nous avons remarqué que l'Office propose certains
accommodements dans le but d'alléger le processus d'adoption et de mise
en vigueur des règlements professionnels. Ces mesures sont, à
notre avis, insuffisantes puisque la majorité des délais dans ce
domaine sont dus à des lenteurs inexplicables de l'Office dans la
transmission de ses avis au Conseil des ministres. Nous proposons qu'un
délai précis soit imposé à l'Office des pro-
fessions pour émettre son avis à l'égard des
règlements professionnels qui lui sont soumis et qu'à
l'expiration de ce délai toute omission de sa part soit
considérée comme un avis favorable.
L'Ordre des chiropraticiens du Québec a également pris
connaissance des modifications proposées dans l'avant-projet de loi pour
sa loi constituante. L'Ordre des chiropraticiens s'élève contre
la proposition de supprimer son pouvoir de tenir un examen professionnel. Cet
examen, qui n'a jamais été pour l'Ordre des chiropraticiens du
Québec un moyen de contingenter l'admission de nouveaux membres, est
essentiel au contrôle de la compétence des nouveaux
chiropraticiens, compte tenu de l'indépendance des institutions
d'enseignement face aux corporations professionnelles. De plus, l'Ordre
déplore que l'avant-projet de loi demeure entièrement silencieux
sur les demandes de modification de l'article 12 de la Loi sur la chiropratique
qu'il a transmises à l'Office des professions du Québec au cours
des 10 dernières années. Le caractère discriminatoire de
l'interdiction pour les chiropraticiens d'utiliser le titre de docteur et de
faire mention de spécialités est évident. Il ne saurait
être maintenu en vigueur dans le contexte de bonification auquel
prétend l'avant-projet de loi.
L'Ordre des chiropraticiens recommande donc que l'avant-projet de loi
modifiant le Code des professions et d'autres lois professionnelles fasse
l'objet d'une nouvelle rédaction pour tenir compte des besoins
réels du public et du contexte particulier dans lequel les
professionnels évoluent. Pour ce faire, nous recommandons, dans un
premier temps, quant aux structures du système professionnel, que toutes
les dispositions accordant à l'Office des professions du Québec
des pouvoirs qui vont au-delà de ses pouvoirs actuels de surveillance,
de recommandation et de tutelle soient retirées de l'avant-projet de
loi. (21 h 10)
Deuxièmement, en matière réglementaire, d'abord,
que le pouvoir de recommandation de l'Office des professions à
l'égard des règlements des corporations professionnelles soit
limité à un examen de la légalité des
règlements; deuxièmement, toujours en matière
réglementaire, que l'on oblige l'Office des professions à
transmettre au gouvernement son avis sur les règlements des corporations
professionnelles dans les 90 jours de leur réception et qu'une copie de
cet avis soit transmise à chacune des corporations concernées;
troisièmement, qu'à défaut pour l'Office de transmettre au
gouvernement son avis dans les 90 jours de la réception d'un
règlement celui-ci sera considéré comme approuvé
par l'Office; quatrièmement, que le règlement sur
l'équivalence de formation soit facultatif, de même que le
règlement proposé sur le comité d'arbitrage des
différends, eu égard à la situation particulière
qui prévaut dans ces deux domaines à l'intérieur de chaque
corporation professionnelle.
En troisième lieu, en matière disciplinaire, que toute la
section de l'avant-projet de loi qui concerne le comité d'examen des
plaintes soit reconsidérée; que cette section soit
remplacée par l'institution d'un comité qui aura pour fonction
d'étudier le cas de toute personne insatisfaite du traitement de sa
demande par le syndic, de demander des explications au syndic et de soumettre
au bureau de la corporation professionnelle le cas de toute personne sur lequel
le comité serait en désaccord avec le syndic; que le
président du comité de discipline puisse être
remplacé en cas d'incapacité de sa part de terminer l'audition
d'une plainte; quatrièmement, qu'en cas de remplacement du
président du comité de discipline par le gouvernement celui-ci
soit habilité à terminer l'audition des plaintes qui lui auront
été soumises.
En ce qui concerne la Loi sur la chiropratique, que soit conservé
le pouvoir de l'Ordre des chiropraticiens du Québec de soumettre les
candidats à l'exercice de la profession à un examen professionnel
et, deuxièmement, que l'article 12 de la Loi sur la chiropratique soit
modifié pour supprimer l'interdiction faite au chiro-praticien
d'utiliser le titre de docteur avant son nom, ainsi que celle de faire
état des spécialités qu'il pourrait détenir.
Je vous remercie de votre attention. Il me fera plaisir de
répondre à vos questions.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. le
président. Ceci mettant fin à votre intervention, je demande
à M. le ministre de bien vouloir prendre la parole. M. le ministre.
M. Savoie: Merci beaucoup, M. le Président. Je veux
remercier les membres de l'Ordre des chiropraticiens du Québec d'avoir
pris le temps, d'abord, d'étudier l'avant-projet de loi, d'y
présenter un ensemble de réflexions, de commentaires, de
recommandations et de prendre le temps, évidemment, de se rendre ici et
de faire la présentation sur les éléments qui sont
très importants, finalement, pour l'avenir du monde professionnel.
En matière réglementaire, il y a des recommandations.
Ça touche certains mémoires qui nous ont été
présentés. Ce qui nous intéresse surtout... Je pense qu'au
niveau de la matière réglementaire on va tenir compte des
recommandations. Vous comprendrez que j'ai seulement 20 minutes. Je ne peux pas
toucher à tout. Je vais me concentrer sur la matière
disciplinaire. Le nerf de la guerre, en bonne partie, est là. Je pense
qu'on peut présumer qu'il y a plusieurs éléments qui
peuvent faire l'objet d'un accord de la part de l'Ordre, du moins en principe,
peut-être avec des ajustements ici et là.
Ce qui nous intéresse, c'est le comité des plaintes, ce
soir. Au niveau du comité des plaintes, vous arrivez, à la page
11, et vous dites: Bon, on n'est pas d'accord avec le comité des
plaintes, mais on est d'accord avec une structure peut-être beaucoup plus
«lousse». On parle d'un ombudsman peut-être, une structure
semblable, quelque chose de plus léger qu'un comité des
plaintes,
justement, pour entendre toute personne qui voudrait en faire la
demande. Ça a fait l'objet d'une certaine réflexion, quelque
chose de plus léger. Mais ce que nous constatons, pour répondre
à votre question à la page 2, c'est qu'effectivement le
problème est beaucoup plus important que vous ne semblez le
présenter, dans le sens que le mécontentement au niveau surtout
des fautes légères, ça a été ça,
l'élément principal, finalement, d'une partie de la
réforme au niveau disciplinaire. Le mécontentement au niveau des
professions, c'est considérable, et pas sur la structure, pas au niveau
des comités de discipline, ni non plus au niveau du Tribunal des
professions, mais au niveau du contact direct du citoyen avec le syndic, un
refus. Là, la critique, c'est: Qu'est-ce qu'on fait, après
ça? C'est ça qu'on voulait régler.
Vous autres, vous nous dites: Arrivez donc avec une structure
légère, quelqu'un qui va faire du PR, finalement, répondre
aux questions, échanger. Nous autres, ce qu'on voulait faire, c'est lui
en donner un petit peu plus. On voulait lui dire: Bon, examinez ça, par
exemple, et c'est surtout ça qui est visé. Il y a d'autres
mécanismes qui sont là aussi, qui sont intéressants et qui
n'ont pas vraiment fait l'objet de critiques, de quelques questionnements, bien
sûr, mais ce qu'on voulait, c'est que Mme Unetelle ou M. Untel se
présente devant un syndic et dise, par exemple: Le chiro en question m'a
mal traité. Le syndic la reçoit, l'examine: Non, madame, vous
avez été bien traitée. On ne peut pas vous entendre. On ne
peut pas retenir votre... La perception de cette dame, c'est qu'elle a
été refusée par un collègue. Ah oui! Je le sais,
ils sont allés à l'école ensemble. C'est un peu... On ne
pourra jamais se débarrasser complètement de ça.
Mais, ce qu'on voulait, par exemple, c'est qu'il y ait un autre endroit
où il pourrait y avoir des citoyens et, également, quelqu'un de
la compétence de cette profession pour entendre cette madame. On pense
que ça va élever le taux... Et ça prend, finalement, une
capacité de mordre. On disait que ça n'avait pas beaucoup de
dents, là, mais, finalement, ça en a. Il faut être capable
d'intervenir et de dire au syndic: Refais ton travail parce qu'il y a quelque
chose. Les explications que nous a fournies madame nous démontrent qu'il
y a quelque chose. Reprenez votre travail. Ou bien dire à madame: Non,
c'est lui qui avait raison. Et là, elle se le fait expliquer pas
nécessairement par un membre de la corporation, mais bien par un
citoyen.
Alors, c'est lourd. Au début, la réaction des corporations
professionnelles, c'est de dire: C'est trop lourd. Évidemment, on ne
peut pas imposer ça à tout le monde, mais personne n'a
parlé d'imposer ça à tout le monde. On visait certaines
corporations. C'est sûr que les audioprothésistes, ou une autre
corporation semblable qui a très peu de plaintes, très peu
d'interaction avec le public, n'ont pas besoin d'un comité des plaintes.
On pourrait en former un, établir un mécanisme à la
satisfaction de ces comités-là. Mais, par exemple, pour le
vôtre, là, c'est intéressant. Vous autres, vous avez une
interaction constante avec le public et vous avez, évidemment, un nombre
considérable, là, pas extraordinaire, mais considérable,
de gens qui vous appellent et vous disent: Bon, bien, on m'a chargé trop
cher, tout ça. Ce qu'on veut faire, justement, c'est traiter non
seulement le fonds, il faut continuer à surveiller le fonds, mais
traiter également l'apparence. C'est ça, le problème,
comme vous l'avez souligné dans votre mémoire: un problème
où le citoyen ne semble pas satisfait de l'apparence qui lui est
présentée dans le traitement de sa plainte.
M. Danis: Bon. Notre intervention, d'abord, vise un point bien
particulier. C'est que le syndic doit, automatiquement, présenter un cas
qu'il refuse à ce comité. Quand vous me dites qu'il y a une
grande perception du public à l'effet qu'il est mal traité, etc.,
ce n'est pas notre expérience. Alors, nous, on dit ceci: Si, une fois
que le syndic a expliqué la raison du refus à cette personne,
elle veut toujours aller devant une autre instance, il pourrait y avoir un
comité des plaintes qui entend seulement les personnes qui, une fois
mises au courant du refus et de la raison du refus, veulent aller à ce
comité, et non pas un automatisme.
M. Savoie: Obligatoire. Ça, c'est une nuance.
M. Danis: Bien oui. C'est ce qu'on apporte, d'ailleurs.
M. Savoie: Oui.
(21 h 20)
M. Danis: Alors, entre «le syndic doit» et «la
personne peut», c'est ça, la nuance et la lourdeur,
également, de tout le mécanisme. Parce que c'est sûr qu'il
y a plus de plaintes refusées qu'acceptées. Pourquoi? Parce que
les gens ont une moins bonne connaissance du système professionnel et,
des fois, ils demandent des garanties de résultat, quand on sait que,
dans le monde de la santé, on ne peut pas les donner. Bon. Ça,
c'est le premier point.
Dans un deuxième temps, chez nous, quand quelqu'un se fait dire
que le syndic juge qu'il n'y a pas matière à porter plainte
devant le comité de discipline, automatiquement, il se fait expliquer le
mécanisme qu'il peut porter plainte directement au comité de
discipline et qu'on va même l'assister, sauf que ce n'est pas le syndic
qui va porter la plainte parce que, selon son jugement, il n'y a pas
matière à porter plainte. Le citoyen a déjà un
mécanisme d'action ou d'intervention pour aller lui-même au
comité de discipline, et ça a été notre politique
de toujours expliquer et d'assister la personne. Je crois que, depuis 1973,
c'est arrivé à deux occasions.
Une voix: Oui.
M. Danis: Deux occasions. Le syndic a toujours assisté la
personne pour porter sa plainte devant le
comité de discipline. On arrive avec une autre structure avant,
de toute façon, le droit du citoyen d'aller directement devant le
comité de discipline. Alors, moi, je me pose la question: Le syndic dit
non; le comité des plaintes, qui, selon nous, devrait être
uniquement pour ceux qui insistent pour y aller parce qu'ils ne sont pas
satisfaits des explications du syndic, décide la même chose que le
syndic. On arrive au même aboutissement, sauf que ça a
été plus long. Est-ce que justice est plus rendue parce qu'on a
ajouté un mécanisme? C'est ça, la question, et on va
refaire la même enquête que le syndic.
J'aimerais ajouter également que je ne comprends pas que vous
ayez une certaine perception que le syndic est limité dans ses moyens
pour faire enquête. Il peut consulter le président, le conseil
d'administration, le bureau, des experts, des avocats. Avant de porter un avis
final, une opinion finale, il peut consulter tous ces gens-là. Le
comité des plaintes va consulter qui de plus? C'est ma question, et il y
a toute une lourdeur administrative derrière ça. Je ne vois pas
en quoi le syndic est limité dans ses moyens de se faire une opinion.
C'est dans ce sens-là.
M. Savoie: C'est ça. Le problème fondamental, c'est
que le citoyen ne traite qu'avec un autre chiroprati-cien et là le
comité des plaintes, pour la première fois, advenant qu'il est...
Sa prétention, c'est que sa demande est refusée non pas sur un
point de réglementation ou en vertu du code de déontologie ou en
vertu de la loi, mais pour un vocabulaire qu'il ne comprend guère. Tout
ce qu'on veut faire, c'est lui permettre une autre porte structurée avec
des pouvoirs où il va recevoir, dans sa langue, les explications
nécessaires par quelqu'un qui n'est pas chiropraticien. C'est ça,
là.
M. Danis: Vous avez peut-être une autre
réalité. Chez nous, automatiquement, quand il y a un refus, il y
a l'explication du syndic et le procureur de l'Ordre appelle le plaignant ou la
plaignante pour lui expliquer. Ce n'est plus un chiropraticien ou une
chiropraticienne.
M. Savoie: On ne parle pas de personnes
désintéressées, là.
M. Danis: Non, non, mais quand même.
M. Savoie: C'est déjà ça, parce qu'il y en a
qui tout simplement refusent, sans explication.
Mme Taché-Piette (Louise): Déjà, vous avez
l'article 123, M. le ministre. Avant de considérer d'apporter de
nouvelles institutions, puis de nouveaux comités, j'en suis que le
comité d'examen des plaintes peut avoir une utilité lorsque les
gens sont insatisfaits, mais il faut voir d'abord à ce que les articles
qui sont déjà dans le Code des professions soient bien
appliqués. L'article 123 oblige le syndic, lorsqu'il refuse de porter
une plainte devant le comité de discipline, à donner à la
personne une explication sur les motifs pour lesquels la plainte que la
personne a déposée ne sera pas portée devant le
comité de discipline. Là, il y a une obligation de la part du
syndic qui a tout un travail à faire pour l'expliquer à la
personne pour qu'elle comprenne que ce n'est pas parce que le syndic ne veut
pas transmettre sa plainte, c'est parce que, par exemple, il n'y a pas
matière à plainte.
M. Savoie: Oui, on est familiers avec 123. Une constatation,
c'est que ça n'est pas suffisant. C'est ça, l'affaire.
M. Danis: Peut-être ailleurs, mais, chez nous...
Mme Taché-Piette: C'est pour ça que, comme
supplément, le comité peut avoir une utilité lorsqu'une
personne n'est pas satisfaite des explications du syndic, et ça, comme
vous le faisiez ressortir, ça se peut.
Le Président (M. Gobé): M. le député
de Sauvé.
M. Parent: M. le Président, merci. M. le président
de l'ordre des chiros, il me fait plaisir de vous rencontrer et de vous
féliciter, d'abord, pour tout le travail que vous avez fait. Je dois
dire que vous m'avez impressionné, l'ordre des chiros, par le
cheminement que vous avez fait faire à votre profession depuis une
dizaine d'années. Vous avez vaincu et traversé des
barrières qui ont été mises en place, je n'ai pas peur de
le dire, par, peut-être, l'ordre des médecins qui se sont
approprié, comme dirait La Fontaine, un chimérique empire sur les
soins de la santé au Québec. Il y a des gens qui sont
passés ici, devant nous. Je pense, entre autres, aux
optométristes qui ont eu à franchir un pas en avant. Aujourd'hui,
les chiros, en plus d'avoir valorisé votre profession auprès de
la population du Québec, vous avez fait en sorte qu'elle soit tellement
valorisée que même le monde universitaire l'a reconnue et
qu'à compter de septembre prochain, malgré le fait que le projet
de loi ne vous reconnaît pas le droit de vous affubler du titre de
docteur, l'Université du Québec à Trois-Rivières
donnera un cours au niveau du doctorat dans le domaine de la chiropraxie.
Alors, je pense que vous avez aidé le domaine de la santé
à se déscléroser, à élargir ses horizons et
à faire en sorte de reconnaître et d'aider les autres personnes
qui oeuvrent dans le même domaine que vous à se faire
reconnaître et à faire avancer les soins de la santé au
Québec.
M. Danis: Je vous remercie de vos bons mots.
M. Parent: Dans votre présentation, vous sem-blez craindre
une intervention indue de la part de l'Office des professions à
l'intérieur d'un domaine que vous croyez être le vôtre en
exclusivité. À un certain endroit, vous dites: «D'organisme
de surveillance qu'il est en vertu du présent Code, l'Office [...]
deviendrait un
organisme inquisiteur et décideur qui aurait même le
pouvoir de se substituer aux éléments les plus importants des
corporations...». J'aimerais ça que vous élaboriez un peu
sur ça et que vous nous donniez des exemples.
M. Danis: En ce moment - et ça, c'est toujours selon notre
avis - l'Office des professions détient des pouvoirs d'enquête qui
devraient être suffisants. Là, on peut penser à 12 t, si ma
mémoire est bonne, et à l'article 15 du Code des professions qui
est présentement en vigueur. Il peut demander des dossiers et faire des
enquêtes sur un cas bien particulier. Je ne suis pas dans le secret des
dieux, mais j'aimerais savoir combien de fois l'Office a utilisé ces
pouvoirs-là et combien de fois il a essuyé un non ou un refus
d'avoir accès à ces dossiers et de pouvoir faire son
enquête. À ce moment-là, je dirais: II y a un marasme
incroyable dans le monde professionnel. Chez nous, ils ne sont jamais venus.
J'entendais les médecins, l'autre fois; ils n'y sont jamais allés
et ce n'est pourtant pas la corporation la moins citée dans les
médias. L'Office des professions a déjà ces pouvoirs, il
ne les utilise pas, il en veut plus. Alors, en boutade, je dirais: On peut lui
en donner plus, mais ça ne changera pas grand-chose s'il ne les utilise
pas. Mais je me demande, à ce moment-là, pourquoi ne pas inciter
l'Office des professions à utiliser les pouvoirs existants et, à
ce moment-là, il n'y en aura pas, de problème. Il n'y aura pas
cette perception que les corporations ont des choses à cacher, etc. Si
on ne demande pas à des gens d'ouvrir les livres, c'est évident
que les gens n'ouvrent pas les livres parce que personne ne le leur a
demandé.
Alors, on arrive et on veut - et ce serait une première - qu'un
organisme de surveillance se substitue à l'organisme surveillé.
Si la GRC faisait ça, ce serait drôle, à certaines
occasions. À ce moment-là, on arrive devant un abus de pouvoir
parce que, pour un règlement, l'Office pourrait entrer dans la porte et
saisir tous les documents qu'il veut, pas pour un cas particulier, pour faire
une grande enquête. Les pouvoirs qu'il avait avant, et sous la sanction,
bien sûr, du gouvernement, étaient suffisants, à notre
avis. Je crois que c'est aller trop loin et mal utiliser ce qui est
déjà existant. C'est notre avis, du moins, à ce
niveau-là.
M. Parent: Merci. À un autre endroit, M. Danis, de votre
mémoire, vous nous dites: «L'Ordre des chiro-praticiens
s'élève contre la proposition de supprimer son pouvoir de tenir
un examen professionnel». Est-ce que vous voulez dire là-dedans
qu'un élève qui est diplômé soit de Palmer ou de
l'Université du Québec à l'avenir, avant de pouvoir
exercer sa profession, devra se soumettre à un examen ou, si vous voulez
parler des gens qui viennent de l'extérieur, avant de leur
émettre un permis d'exercice, ils devront passer un examen? Ça
veut dire quoi, ça? (21 h 30)
M. Danis: En ce moment, il y a 16 institutions d'enseignement qui
décernent des doctorats en chiropra-tique reconnus par le gouvernement
du Québec. Il y a toujours eu des examens parce que, justement, ces
institutions-là n'étaient pas au Québec. Nos
premières collations de grades n'auront pas lieu avant cinq ans, au
Québec. Alors, pendant ce temps-là, la seule façon de nous
assurer que le candidat maîtrise bien ses connaissances pour la pratique
de la profession chiropratique au Québec, c'est de lui faire passer un
examen.
Il faut bien comprendre qu'entre une institution d'enseignement et une
corporation professionnelle les examens n'ont pas le même objectif.
L'institution d'enseignement s'assure périodiquement de l'acquisition
par les étudiants de connaissances transmises dans le cadre de
l'enseignement théorique et pratique. La corporation professionnelle,
par l'examen professionnel, s'assure de la capacité des candidats
à appliquer les connaissances acquises auprès de l'institution
d'enseignement dans le contexte de l'exercice de sa profession. Alors, le but
n'est pas le même. Et on le voit, il y a des exemples concrets. Est-ce
qu'une corporation peut travailler avec une institution d'enseignement et
incorporer les examens sur plusieurs années ou la dernière
année, de façon à ce que, en finissant le cours, l'examen
de la corporation soit déjà passé? On n'a aucun
problème avec ça, mais la capacité d'exercice de sa
profession aura été examinée par la corporation. C'est
là un devoir essentiel de la corporation et ce n'est pas une
responsabilité d'une institution d'enseignement. L'objectif est de
permettre l'acquisition de connaissances et non pas de tester la
capacité d'exercer une profession. C'est dans ce sens-là que,
nous, on dit: Un, les gens viennent de l'extérieur et, deux, les examens
n'ont pas le même objectif. Alors, pourquoi l'enlever?
J'aimerais ajouter à ceci que nous aurions très
apprécié avoir été consultés sur le sujet.
Quand on parle de concertation, de consultation, j'aimerais ça qu'on
m'explique comment on peut enlever un examen à une corporation
professionnelle et qu'on l'apprend dans un avant-projet de loi.
M. Parent: Merci, M. Danis. Une dernière question, si vous
le permettez, M. le Président. Rapidement.
Le Président (M. Gobé): Rapidement, en
terminant.
M. Parent: À votre connaissance, M. Danis, lorsqu'un
avocat qui a étudié en Europe ou lorsqu'un médecin qui a
étudié dans une autre province qu'au Québec veut venir
exercer au Québec, est-ce que c'est l'Office des professions qui
l'examine ou si c'est la corporation professionnelle à laquelle il veut
adhérer qui l'examine?
M. Danis: C'est, et j'espère que ça le demeurera,
la corporation professionnelle.
M. Parent: Merci. Terminé, M. le Président.
Le Président (M. Gobé): Très bien, M. le
député de Sauvé. Mme la députée de
Terrebonne, vous avez 20 minutes.
Mme Caron: Merci, M. le Président. Vous avez abordé
plusieurs points dans votre mémoire. Je vais peut-être commencer
avec ce manque de consultations que vous avez abordé, en page 15,
concernant les modifications à la Loi sur la chiropratique. Donc,
puisque vous n'étiez pas au courant qu'on supprimait ces articles 8 et 9
qui vous permettent l'examen professionnel, ça signifie que vous n'avez
pas eu non plus... Est-ce que vous avez eu les justifications à cette
suppression?
M. Danis: Elles ne sont pas valables, à nos yeux. Mme
Caron: Que sont-elles, ces justifications?
M. Danis: Le contingentement, pour éviter un
contingentement d'une profession. Alors, expliquez-moi, avec 45 sièges
universitaires par année, comment la corporation peut contingenter. Le
contingentement est déjà fait de façon splendide. En plus,
j'aimerais spécifier que jamais plus de 10 % des étudiants n'ont
échoué l'examen lors des périodes d'examens à
l'Ordre des chiropraticiens du Québec. Alors, ce n'est pas un
contingentement; c'est strictement une assurance que le candidat possède
bien toutes les capacités d'exercer sa profession correctement et de
façon efficace.
Mme Caron: Ça m'apparaît important, compte tenu de
tous les éléments que vous avez élaborés en page 16
et que vous nous avez reprécisés tantôt. Concernant le
titre de docteur, je pense que vous partagez le problème avec quelques
corporations professionnelles, dont les optométristes. Vous partagez
aussi avec eux ce désir d'ajouter un ombudsman pour les plaintes
où le plaignant serait insatisfait. Contrairement à ce que disait
le ministre, je pense que ce n'est pas évident que le Protecteur du
citoyen serait heureux d'entendre qu'un ombudsman, finalement, c'est quelqu'un
qui fait du PR. Je pense que ça va beaucoup plus loin. Le Protecteur du
citoyen doit être là pour, justement, donner satisfaction à
des plaignants qui ne sont pas satisfaits. À cet égard-là,
lorsque vous apportez la nuance qu'il ne faut surtout pas qu'automatiquement
toutes les plaintes se retrouvent à cette instance-là et qu'on
doit déposer les plaintes uniquement lorsque le plaignant décide
de déposer cette plainte, vous n'êtes pas les seuls à faire
cette mention-là, il faut le rappeler au ministre, c'est important. Le
Protecteur du citoyen en a bien fait mention dans son mémoire et les
associations de consommateurs aussi. On ne souhaite pas que ça
amène une bureaucratie encore plus grande et que les délais
soient encore plus longs. Je pense que ce n'était pas le but
recherché pour personne.
Pour l'article 123, vous nous avez clairement défini, Mme
Taché-Piette, que vous précisez à chaque plaignant les
raisons de la décision. Vous les contactez et vous le faites selon
l'article 123. Pour plusieurs corporations, selon les associations de
consommateurs, mais ce n'est pas la majorité, là, on nous dit
que, souvent, les raisons ne sont pas suffisamment précises, que ce
n'est pas suffisamment clair. Lorsque l'article 123 n'est pas bien
appliqué, est-ce à dire que c'est l'Office qui doit, à ce
moment-là, bien assurer son rôle de surveillant de l'application
et que, finalement, c'est l'Office qui, dans le cas de ces
corporations-là, n'est pas intervenu pour s'assurer que l'article 123
était respecté?
Mme Taché-Piette: Ça peut être l'Office,
ça peut être aussi la corporation. Il ne faut pas oublier que le
syndic est un employé de la corporation et que son surveillant et patron
premier, c'est le bureau, c'est le comité administratif. D'abord,
lorsqu'une personne est nommée syndic, j'imagine que le bureau de la
corporation devrait voir à ce que le syndic ait accès à de
la documentation, ait accès aussi à une personne-ressource qui va
pouvoir lui expliquer son rôle, ses obligations en vertu du Code et,
également, la procédure et la façon d'agir avec les gens
qui portent plainte. Ça, c'est le rôle de la corporation. Si la
corporation ne le fait pas, évidemment, l'article 12 du Code
prévoit que c'est la responsabilité de l'Office des professions
de voir à ce que la corporation le fasse. Mais l'Office a l'obligation
de veiller à ce que chaque corporation exécute ses obligations
justement en tant que patron du syndic, en tant que supérieur du syndic.
Alors, les deux peuvent être fautifs. Le patron premier, la
responsabilité première, selon moi, est celle du bureau de la
corporation, cependant.
Mme Caron: Ça va un peu dans le sens de M. Danis,
tantôt, qui nous disait que, finalement, il y a des
éléments qui sont là, on ne les utilise pas et on veut en
ajouter d'autres.
Mme Taché-Piette: Oui.
Mme Caron: On a vu exactement la même chose au niveau de
cette même commission de l'éducation, lorsqu'on a
décidé de hausser le plafond pour les collèges
privés, pour aller chercher de l'argent chez les parents, alors que le
plafond actuel n'est pas utilisé. Alors, on a haussé le plafond,
mais le plafond actuel n'était pas utilisé.
Est-ce que vous croyez que, l'article 123 tel quel, il faudrait y
ajouter d'autres balises ou est-ce qu'il est suffisamment clair pour...
Mme Taché-Piette: L'article 123 tel quel dit que le
syndic, lorsqu'il veut refuser une plainte, lorsqu'il prend la décision
de ne pas porter plainte devant le comité de discipline, doit donner une
décision motivée. Moi, je suis, et l'Ordre des chiropraticiens
aussi, d'ac-
cord avec le ministre lorsqu'il dit que ce n'est pas parce que le syndic
va donner des raisons à une personne, va bien lui expliquer les raisons
pour lesquelles il porte plainte que la personne va nécessairement
être satisfaite. Elle peut être insatisfaite, et c'est là
qu'un organisme - appelons-le un organisme d'appel, appelons-le un om-budsman
ou un comité des plaintes - pas obligatoire et pas dans tous les cas,
peut certainement être utile. Un organisme auprès duquel une
personne insatisfaite va pouvoir se faire entendre, va pouvoir dire: Je suis
allée voir le syndic, il m'a donné des explications, mais je ne
suis pas satisfaite de ces explications. Je crois quand même que je
devrais aller devant le comité de discipline exposer mon cas, et voici
pourquoi je ne suis pas satisfaite. À ce moment-là, cet
organisme-là pourra voir si le syndic a bien exécuté ses
obligations.
Mme Caron: Vous nous avez mentionné - très peu de
corporations l'on fait - que, lorsqu'il y avait eu plainte privée, vous
aviez apporté assistance au plaigant pour amener sa plainte au niveau du
comité de discipline. Comment s'est traduite cette assistance-là?
(21 h 40)
Mme Taché-Piette: C'est-à-dire qu'on ne dit pas
simplement à une personne: Bon, pour telle raison, je crois qu'il n'y a
pas matière à plainte, alors le syndic décide qu'il ne
portera pas plainte. Si vous voulez porter plainte, allez-y vous-même. Ce
n'est vraiment pas rendre service à la personne et c'est vraiment la
laisser seule. Si la personne a, dans les quelques cas... Je crois,
effectivement, de mémoire, qu'il y en a eu deux où la personne a
dit: Bien, moi, je comprends ce que le syndic m'a dit, mais je ne suis pas
d'accord avec lui. Je veux aller devant le comité et je veux, moi,
exposer mon cas devant le comité. À ce moment-là, à
l'Ordre des chiropraticiens, ce qu'on m'a demandé de faire, c'est tout
simplement d'expliquer à la personne comment elle devait le faire,
comment elle devait, en d'autres termes, rédiger sa plainte, à
qui elle devait l'envoyer. Ce n'est pas très compliqué. La
procédure de plainte devant le comité de discipline n'est pas
compliquée. Elle devait l'envoyer au secrétaire du comité
de discipline qui, lui, a vu à transmettre les avis, à
transmettre les lettres recommandées. Oui, les personnes ont eu de
l'assistance de cette façon-là, on ne les a pas laissées
en plan.
Mme Caron: L'assistance est venue de votre rôle de
procureure...
Mme Taché-Piette: C'est ça.
Mme Caron: ...et non de la part du syndic...
Mme Taché-Piette: Exactement.
Mme Caron: ...qui avait déjà rendu une
décision.
Mme Taché-Piette: Oui.
Mme Caron: Du côté du syndic, est-ce que vous
considérez que vous avez suffisamment de moyens? Certains syndics nous
ont dit qu'ils étaient limités au niveau des moyens pour vraiment
donner réponse aux plaignants. Est-ce que, pour votre corporation, vous
avez suffisamment de moyens?
M. Pilon (Claude): Présentement, je crois que oui. Depuis
six ans, je pense que le seul dilemme se situe, souvent, au niveau de l'argent.
Les gens veulent un remboursement de frais. C'est souvent la première
raison de la plainte du patient. C'est évident qu'en tant de syndic on
n'a pas le pouvoir, et le comité de discipline non plus, de demander un
remboursement. C'est souvent la raison majeure de la plainte qui est faite au
syndic, en tout cas, la raison peut-être pas mentionnée, mais la
raison majeure de porter plainte.
Mme Caron: Le pourcentage de ces plaintes-là, si vous
vouliez chiffrer le pourcentage des plaintes qui touchent le remboursement de
frais?
M. Pilon: Les plaintes écrites ou... Les plaintes
écrites, là?
Mme Caron: Si vous avez d'autres chiffres.
M. Pilon: Le pourcentage, c'est quoi? Peut-être 25 %
à 30 % des gens qui demandent un remboursement.
Mme Caron: Est-ce qu'une procédure de conciliation,
ça vous apparaît un élément intéressant?
M. Pilon: Présentement, la conciliation telle quelle nous
permet, en tant que syndic, d'agir si la personne n'a pas payé et
désire ne pas payer. Lorsque le client a payé, on n'a pas le
pouvoir de demander du chiropraticien un remboursement. La conciliation,
présentement, nous permet de le faire strictement lorsque le patient
décide de ne pas payer les frais encourus.
M. Danis: Là-dessus, j'aimerais ajouter qu'une nouvelle
réglementation, qui, d'ailleurs, a paru dans la Gazette officielle,
concernant le comité d'arbitrage des comptes va changer ça.
Alors, même s'il a déjà payé, il va y avoir une
possibilité de remboursement.
Mme Taché-Piette: Ce règlement-là devrait
être en vigueur sous peu et ça va vraiment améliorer de
beaucoup le problème de remboursement d'honoraires et de conflits en
matière d'honoraires.
Mme Caron: J'ai l'impression que c'est une des grandes raisons
d'insatisfaction dans plusieurs corporations professionnelles, je parle de la
part des plaignants.
Mais, ce règlement-là, vous l'ajoutez dans votre
corporation professionnelle?
Mme Taché-Piette: C'est un règlement de la
corporation, que la corporation a d'ailleurs adopté depuis plusieurs
années. Si ma mémoire est bonne, ce règlement-là a
été adopté il y a peut-être deux ans et il devrait
entrer en vigueur sous peu. Il a été récemment
publié dans la Gazette officielle. Il va étendre de
beaucoup le pouvoir du comité d'arbitrage.
Mme Caron: Vous nous avez parlé des délais dans le
processus réglementaire; on retrouve ça en page 12 de votre
mémoire et je pense que vous le précisez bien.
«L'expérience vécue, en matière de
réglementation par les corporations professionnelles, demeure à
bien des égards traumatisante. Des délais dans l'acheminement des
recommandations de l'Office au gouvernement en vue d'obtenir l'entrée en
vigueur des règlements que réclamaient des corporations
professionnelles ont parfois atteint quatre à cinq ans! Ces
délais ont entraîné de facto des retards dans l'application
de ces règlements et ainsi nuisent au bon fonctionnement des
corporations professionnelles concernées» et, évidemment,
nuisent à la protection du public. Je pense que c'était important
d'ajouter cet élément-là, qu'il faudrait aussi, si nous
touchons au Code des professions, ajouter des délais de la part de
l'Office des professions sur ces réglementations. Au niveau des
délais, vous avez fait des recommandations. Est-ce que vous croyez que
les 90 jours qui sont proposés, c'est suffisant pour l'ensemble des
règlements ou s'il faudrait faire certaines catégories?
M. Danis: En fait, c'est 30 de plus que ce que l'Office nous
offre. Je crois que, oui, ce serait suffisant en ce sens que, si la demande est
prise sérieusement et que les gens se mettent au boulot, je ne vois pas
pourquoi, en 90 jours, ils n'y arriveraient pas. Nous, notre avis, c'est, bien
sûr, qu'ils se prononcent sur la légalité uniquement de la
demande. En 90 jours, ça devrait, normalement, permettre d'arriver
à une décision positive ou négative, mais à une
décision.
Mme Caron: Évidemment, si la décision est
négative, vous avez toujours la possibilité de revenir.
M. Danis: Écoutez, je crois qu'il faut développer
de plus en plus le partenariat, c'est-à-dire que, si l'Office voit un
vice, ce n'est pas de le faire en cachette et d'aller dire: Bon, c'est
négatif, ils ont fait une erreur à tel endroit. C'est de revenir
à la corporation, que les deux s'entendent, et dire: Qu'est-ce qu'on
peut corriger? Quand tout le monde s'entend, la demande peut être refaite
et, à ce moment-là, ça s'en va au Conseil des ministres
rapidement. C'est dans ce sens-là qu'on voit un mécanisme de
système professionnel où seraient absents tous les vices de
technicalité et de retards incroyables.
Mme Caron: Au niveau du partenariat, vous ne semblez pas avoir
ressenti ça au cours des dernières années, en tout cas si
on regarde en page 7, quatrième paragraphe: «C'est un fait, par
ailleurs, que l'attitude de certains représentants de l'Office des
professions au cours des dernières années n'a pas favorisé
un climat d'échanges et de confiance qui lui permettrait aujourd'hui
d'assumer une telle transformation en douceur et de devenir un véritable
organisme-ressource».
M. Danis: En fait, oui, il y a eu des difficultés qu'on
s'expliquait mal et qu'on s'explique encore mal. Pour nous, ce serait tellement
plus simple d'agir avec efficacité et dans un esprit de concertation.
Par contre, ce n'est pas ce qu'on a vécu. Alors, à ce
moment-là, ça devient difficile de faire confiance, et ça
doit être le même sentiment de l'autre côté. Alors,
à chaque fois qu'on a une question, on est un peu inquiets de la
réponse qu'on devrait donner parce qu'on se demande: Est-ce qu'il y a
anguille sous roche? Alors, ça devient un esprit de méfiance
plutôt qu'un esprit de confiance. Je crois que ça devrait
être tout à fait l'inverse.
Mme Caron: Le député de Sauvé soulignait
tantôt votre lutte épique contre une corporation plus puissante,
disons. Ce que vous soulignez au niveau du climat d'échanges, on l'a
ressenti à plusieurs reprises. Lorsque, finalement, deux corporations
étaient touchées et que certaines corporations étaient
là depuis longtemps, disons à caractère un petit peu plus
élitiste, effectivement, au niveau des relations avec l'Office,
c'était beaucoup plus difficile. Je regarde, bon, peut-être,
chiropraticiens avec médecins, denturologistes, dentistes,
optométristes, ophtalmologistes. Bon, on pourrait continuer longtemps.
On a toujours senti que, dans tous ces mémoires-là, il y a
effectivement un petit peu plus de méfiance, disons,
d'expériences plus difficiles. Est-ce que vous pensez que c'est
relié...
M. Danis: En fait, non. Je n'accuserais pas l'Office. Je ne
pointerais pas du doigt l'Office pour les relations qui peuvent exister entre
deux corporations professionnelles. Peut-être qu'il aurait pu dresser une
table de concertation, c'est possible. Je vous avouerai que le Conseil
interprofessionnel le fait très bien. On a l'occasion
régulièrement de se rencontrer et de se faire part mutuellement
de nos opinions sur certains dossiers. Mais, sur ce point-là, non, je ne
dirais pas que l'Office a été un élément marquant
dans la relation qui existe entre les corporations professionnelles, du moins
selon notre expérience.
Mme Caron: Lorsqu'il y a deux corporations professionnelles qui
sont touchées - parce que, ça, on ne l'a pas abordé; les
opticiens d'ordonnances en ont parlé dans leur mémoire -
lorsqu'il y a deux ou trois corporations qui sont touchées - vous parlez
de table de concertation, peut-être - est-ce qu'il y aurait un
élément qu'on
pourrait ajouter dans le système actuel? Parce qu'on sait que ces
conflits-là perdurent très longtemps, des années
très souvent. Est-ce qu'il n'y aurait pas un mécanisme qui
pourrait faciliter?
M. Danis: En fait, la meilleure table dans la province, si je
peux m'exprimer ainsi, ce serait le Conseil interprofessionnel parce qu'on est
assuré que toutes les corporations y siègent et il doit y avoir
échanges. C'est le but du Conseil interprofessionnel. Alors,
peut-être qu'il pourrait y avoir une structure via le Conseil
interprofessionnel pour faciliter différents dossiers. Ça
pourrait même être inscrit au Code, qu'il y a une mission bien
particulière pour le Conseil interprofessionnel dans ce sens-là.
Ça ne serait absolument pas vilain. Ce serait probablement un ajout au
système. (21 h 50)
Mme Caron: Je vous remercie.
Le Président (M. Gobé): Je vous remercie, Mme la
députée. Vous avez quelque chose à dire encore?
Mme Caron: Encore un petit peu?
Le Président (M. Gobé): Je voyais que vous me
regardiez avec un sourire.
Mme Caron: II me reste du temps.
Le Président (M. Gobé): Avez-vous une question? Il
vous reste à peu près une minute et demie.
Mme Carrier-Perreault: Oh!
Le Président (M. Gobé): Peut-être deux, en
laissant un peu traîner le temps.
Mme Carrier-Perreault: Oui, j'aurais une petite question.
Le Président (M. Gobé): Je vous en prie.
Mme Carrier-Perreault: L'inspection professionnelle, on n'en a
pas discuté et il n'en a pas tellement été question dans
votre mémoire. J'aimerais vous entendre. Qu'est-ce qui se fait chez
vous, là-dessus? Comment ça se passe, etc.?
M. Danis: Quand ça va bien, on est moins porté
à en parler. C'est peut-être ça, la difficulté.
L'inspection professionnelle, nous, on a un plan quinquennal,
c'est-à-dire que, tous les cinq ans, tous les bureaux de chiropra-ticien
sont visités par l'inspecteur. Bien sûr, deux formes
d'enquête: enquête spéciale versus enquête
régulière. Donc, lorsque quelqu'un appelle pour dire qu'il peut y
avoir un problème à tel endroit, ça devient enquête
spéciale et c'est fait sur-le-champ; sinon, c'est au sort que les noms
sont tirés et, à ce moment-là, tout le monde est
visité en dedans de cinq ans. Ça fonctionne très bien.
Mme Carrier-Perreault: Quand vous décelez une anomalie ou
une façon de faire qui est incorrecte, mettons, vous avez un
délai de combien de temps pour que le professionnel...
M. Danis: En fait, il y a un formulaire. Le chiro-praticien a un
mois pour, par écrit, confirmer que la chose a été
corrigée. Donc, il doit s'engager par écrit. S'il ne le fait pas,
automatiquement il y a une enquête spéciale, il y a un retour de
l'enquêteur sur les lieux.
Mme Carrier-Perreault: Autrement dit, vous prenez par
écrit Ja parole de votre professionnel qui vous dit: O.K., c'est beau,
c'est réglé.
M. Danis: Non. C'est qu'il s'engage. Alors, à ce
moment-là, il y a des enquêtes-surprises, si vous voulez,
c'est-à-dire que l'enquêteur va y retourner, mais, là, pas
dans un délai fixe.
Mme Carrier-Perreault: Sans préavis.
M. Danis: Sans préavis, si vous voulez. S'il a menti sur
sa déclaration, à ce moment-là, le comité
d'inspection professionnelle présente son rapport au conseil
d'administration et le conseil d'administration décide de ce qui va
advenir.
Mme Carrier-Perreault: C'est déjà arrivé ou
si, généralement, les gens se soumettent dans un mois et...
M. Danis: C'est arrivé deux fois depuis que je suis
à l'Ordre, deux fois.
Mme Carrier-Perreault: Je vous remercie.
Le Président (M. Gobé): Mme la
députée, merci.
Je rajouterai rapidement, M. le président, que, dans votre
corporation, les membres devant charger au consommateur les frais de
consultation, il est de votre intérêt, à titre non
seulement de thérapeute, mais aussi d'opérateur de bureau,
d'administrateur de bureau de chiropraticien, que la réputation soit la
meilleure pour votre corporation et les services que vous donnez; sinon, les
gens n'iraient pas payer. Ce n'est pas comme certaines corporations où
l'argent est fourni par l'État avec une carte de crédit
illimité où, là, si on n'est pas content, on peut aller en
voir un autre ad vitam aeter-nam. Alors, je crois que, dans votre cas, votre
témoignage est certainement éloquent en ce qui concerne la
rigueur des mécanismes de protection de l'intégrité de
votre profession.
M. Danis: Je vous remercie.
Le Président (M. Gobé): Vous êtes
probablement un exemple dans ce domaine-là. Peut-être que
ça pourrait servir d'inspiration à de futures réformes au
niveau de la santé.
M. le ministre, vous avez la parole.
M. Savoie: Merci, M. le Président. Est-ce que vous avez
dit, tout à l'heure, que le patron du syndic, c'est le bureau?
Le Président (M. Gobé): Exact.
Mme Taché-Piette: Certainement. Le supérieur du
syndic, oui.
M. Savoie: Le supérieur du syndic. Qui peut lui donner des
directives, c'est ça?
Mme Taché-Piette: Oui, certainement.
M. Danis: Je m'excuse, M. le ministre, mais le bureau peut exiger
du syndic de prendre une plainte.
M. Savoie: Oui, effectivement. Parce qu'il peut lui exiger...
M. Danis: C'était dans le sens large également que
le bureau peut destituer un syndic, ce que l'Office ne pourra jamais faire
parce qu'il n'est pas l'employeur.
Mme Taché-Piette: Quand je parlais, M. le ministre, de
supérieur du syndic, évidemment, c'est pour les questions
administratives qui ont trait justement et qui, éventuellement, peuvent
mener jusqu'à la destitution d'un syndic qui n'accomplirait pas ses
tâches. Ça n'allait pas du tout jusqu'à entrer dans la
discrétion du syndic, etc.
M. Savoie: C'est-à-dire que, finalement - ça, c'est
un autre point de critique qu'on a souvent entendu, excusez - effectivement,
vous pouvez destituer un syndic qui ne fait pas bien son travail.
Mme Taché-Piette: Son travail.
M. Savoie: Le contraire peut être vrai aussi.
M. Danis: Mais, comme l'a dit M. le Président, ce n'est
pas dans l'intérêt de la profession.
M. Savoie: C'est ça. M. Danis: Voilà!
M. Savoie: C'est ça. Vous constatez quand même que
ça constitue pour nous, d'après les critiques qu'on a
reçues, un problème, un point d'inquétude. D'ailleurs, il
y a une question que je me posais. Je regardais le ta- bleau des
décisions disciplinaires et je me demandais si vous pouviez m'offrir des
explications. Par exemple, en 1981, il y a eu 24 décisions
disciplinaires en ce qui concerne le comité de discipline; en 1982, 18;
en 1984, 36. On arrive en 1987 et là il y a 0; 1988, 3; 1989, 8; 1990,
2; 1991, 3 et 1992, 0. C'est comme si, à compter de 1987, il y avait une
rupture. C'est quoi, l'explication à cette donnée-là?
M. Danis: Bien, j'aimerais vous dire que c'est parce qu'il n'y a
plus de problèmes, mais ce serait faux. C'est tout simplement que...
M. Savoie: Oui, c'est ça. Ça, on le savait.
M. Danis: ...depuis un certain jugement de la Cour suprême
- la plupart des décisions disciplinaires concernaient la
publicité - étant donné que, maintenant, la
publicité est beaucoup plus large...
M. Savoie: Ça s'est réglé, ça, en
1986. C'est ça.
M. Danis: Bien, ce n'est pas que ça s'est
réglé, c'est qu'on n'a plus le droit d'intervention.
M. Savoie: C'est ça.
M. Danis: Alors, à ce moment-là, c'est ce qui
explique la baisse...
M. Savoie: C'est ça. Ça s'est réglé
en 1990-1991, finalement. Mais c'est parce que, à compter de 1987, vous
tombez à 0 ou 3, vous tombez bien en bas de 5. Est-ce qu'il y a eu, par
exemple, au niveau des plaintes, une baisse importante au cours des cinq ou six
dernières années?
M. Danis: Je pourrais demander à monsieur le syndic. Je
crois que c'est...
M. Savoie: Monsieur le syndic, est-ce que...
M. Pilon: Moi, j'ai noté, pour les quatre dernières
années...
M. Savoie: Oui.
M. Pilon: ...que ça se maintient. Je ne vois pas... Les
chiffres que vous prenez de zéro plainte, j'aimerais ça...
M. Savoie: C'est-à-dire zéro décision
disciplinaire. Je travaille avec les décisions disciplinaires.
Une voix: Ce n'est pas la même chose.
M. Danis: Je vais vous donner une explication. D'ailleurs,
ça a valu une intervention auprès de l'Office,
parce que notre président de comité de discipline ne
retournait pas les appels et n'était plus disponible. On a
demandé à l'Office d'intervenir de façon à ce qu'il
soit remplacé parce que, là, le système n'était
plus efficace, ce que l'Office a fait. On l'en remercie, d'ailleurs.
M. Savoie: Vous dites que c'est à cause des...
Une voix: Mais ça part de 1987.
M. Savoie: Oui. Ça remonte à 1987, là.
Mme Taché-Piette: Oui. Il y a eu, durant ces
années-là, M. le ministre, plusieurs plaintes qui ont
été entendues, mais, de mémoire, je pense que c'est cette
année-là où nous n'avons eu aucun jugement de rendu,
aucune décision du comité de discipline.
M. Savoie: Oui. En tout cas... Il semble y avoir autre chose
parce que, finalement, ça commence en 1987 et il a été
nommé quand?
Une voix: 1989.
M. Savoie: En 1989, me dit-on.
Une voix: Attendez.
M. Savoie: Au niveau du nombre... Non. On dirait que, de 1987...
Je cherche, tout simplement, là. C'est parce que normalement...
M. Danis: Non. Ça a été vraiment des
délais qui étaient incontrôlables
M. Savoie: Oui. C'est ça.
M. Danis: .. .et c'était surtout dû à la
disponibilité du président du comité.
M. Savoie: Est-ce qu'il y a une stabilité au niveau, par
exemple, des plaintes depuis quatre ou cinq ans? Est-ce que c'est à la
hausse ou si c'est à la baisse?
M. Danis: Dans la nature des plaintes ou dans le nombre?
M. Savoie: Dans le nombre. M. Danis: Oui. Ça se
maintient.
M. Savoie: C'est parce que ce n'est pas fourni dans votre rapport
annuel. Ce que vous fournissez, finalement, ce sont les plaintes qui ont
été reçues et sur lesquelles il y a eu enquête.
M. Pilon: Moi, j'ai les rapports de 1989 à 1992...
M. Savoie: Oui.
M. Pilon: ...puis on stipule les demandes d'enquête...
M. Savoie: Oui.
M. Pilon: ...et les plaintes au comité de discipline.
M. Savoie: Oui. Ce sont les plaintes qui m'intéressent.
Tout simplement les personnes qui appellent et qui demandent que vous
interveniez.
M. Pilon: C'est ça. Ça joue, toujours des plaintes
écrites, de 40 à 50 par année.
M. Savoie: 40 à 50.
M. Pilon: C'est-à-dire de... Attendez. C'est ça.
Ça joue de 30 à 50 par année.
M. Savoie: C'est ça. Depuis quatre ans, quatre ou cinq
ans.
M. Pilon: Depuis quatre ou cinq ans.
M. Savoie: C'est ça. Et c'est pas mal constant,
là...
M. Pilon: Oui.
M. Savoie: ...au niveau du nombre des plaintes. Ensuite de
ça, les plaintes portées devant le comité de discipline,
ça varie entre 8 et 12, là, 7 et 10.
M. Pilon: en pourcentage, entre 15 % et 31 %.
M. Savoie: Entre 15 % et 31 %. Oui. 7 sur 49, ça fait 1/7.
C'est ça.
Le Président (M. Gobé): Alors, M. le ministre,
avez-vous terminé?
M. Savoie: Non. Tout simplement pour remercier l'Ordre. On
constate, évidemment, qu'il y a une volonté de voir se
développer une meilleure harmonie entre vous-mêmes et l'Office. Je
pense que la réforme va présenter cette possibilité. On va
tenir compte de certaines des réflexions que vous avez faites à
ce comité. Évidemment, le mémoire que vous avez
déposé à la commission va être regardé de
nouveau et, comme dans tous les cas, on va chercher, dans la mesure du
possible, à répondre aux interrogations et à y donner
suite dans un projet de loi qui va tenir compte, finalement, de
l'indépendance des corporations professionnelles, mais également
de la protection du public.
M. Danis: Merci.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. le ministre.
Merci, M. le président. Alors, ceci va mettre fin aux travaux de la
commission pour cette journée. Je tiens à remercier tous les
participants de la commission, du côté de l'Opposition, du
gouvernement et du secrétariat. Ceci met donc fin à nos travaux.
Je vais ajourner à demain matin, 10 heures, dans cette salle. La
commission est ajournée.
(Fin de la séance à 22 heures)