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(Onze heures vingt-neuf minutes)
La Présidente (Mme Hovington): M. le député
de Rimouski, veuillez vous asseoir.
Je déclare la séance ouverte et je rappelle le mandat de
la commission pour cette séance, qui est de procéder à des
audiences publiques sur l'enseignement collégial
québécois.
Est-ce que nous avons des remplacements?
Le Secrétaire: Je n'ai aucun remplacement, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. Alors, aujourd'hui,
ce matin, nous entendrons l'Association pour la recherche au collégial.
Nous suspendrons après avoir entendu ce premier groupe pour reprendre
à 15 heures avec le collège de Bois-de-Boulogne; à 16
heures, avec le Comité de concertation cégep-université en
esthétique et histoire de l'art et le sous-comité
pédagogique d'esthétique et d'histoire de l'art; à 17
heures, collège de Rosemont; à 18 heures, suspension pour
reprendre à 20 heures avec le cégep de Sept-îles; à
21 heures, cégep de Saint-Jérôme; à 22 heures,
cégep de Drummondville, pour ajourner à 23 heures. (11 h 30)
Alors, nous avons ce matin devant nous l'Association pour la recherche
au collégial, représentée par Mme Jacqueline Giard,
présidente. Bonjour, Mme Giard, et bienvenue à vous tous et
à vous toutes à la commission de l'éducation. Voulez-vous
nous présenter les personnes qui vous accompagnent?
Association pour la recherche au
collégial
Mme Giard (Jacqueline T.): Oui, Mme la Présidente. Mme la
ministre de l'Enseignement supérieur, Mmes et MM. les membres de la
commission parlementaire sur l'éducation, mesdames et messieurs, je me
permets de vous présenter d'abord les membres de la
délégation de l'Association pour la recherche au
collégial. À ma droite, M. Pierre Lavoie, directeur du Centre
spécialisé en pâtes et papiers au cégep de
Trois-Rivières; à sa droite, M. Pierre Labelle, ingénieur,
professeur et chercheur au Centre spécialisé des matériaux
composites rattaché au cégep de Saint-Jérôme et
aussi un chercheur qui a huit ans d'expérience comme chercheur
industriel; à ma gauche, M. Yvan Cloutier, professeur de philosophie et
chercheur du collège de Sherbrooke et membre du conseil d'administration
du Fonds FCAR, et, à sa gauche, M. Arturo Sangalli, professeur de
mathématiques et chercheur au collège Champlain, campus de
Lennoxville, et trésorier de l'ARC.
La Présidente (Mme Hovington): Allez-y, Mme Giard, vous
avez 20 minutes pour nous présenter votre mémoire.
Mme Giard: Je vous remercie. En tout premier lieu, je tiens
à remercier les responsables de cette commission parlementaire d'avoir
accepté d'entendre l'Association pour la recherche au collégial.
Par le moyen de cette commission, le gouvernement du Québec s'est
associé l'ensemble des parties intéressées à
l'éducation dans la recherche de moyens susceptibles d'améliorer
la formation dispensée dans les collèges et, en
définitive, de rendre plus cohérent et plus efficace l'ensemble
de notre système scolaire. À titre de principal regroupement des
chercheurs du collégial, l'ARC apprécie être du nombre. La
recherche en tant que telle n'est pas un des objets de cette commission
parlementaire. Cependant - et je n'en veux pour preuve que les quelque 35
mémoires, soit 15 % du total, qui, si mes renseignements sont exacts,
ont traité de la recherche - il n'est plus possible de parler
d'enseignement collégial d'une façon un tant soit peu exhaustive
sans aborder le sujet de la recherche. Nous tenterons donc, au cours de l'heure
qui suit, de partager avec les membres de cette commission les résultats
de notre réflexion sur la place de la recherche dans les
collèges, sur le rôle qu'elle y a joué à ce jour,
ainsi que sur la contribution qu'elle est susceptible d'apporter au cours des
mois et des années à venir à la solution des
problèmes évoqués en rapport avec l'enseignement
collégial.
Parlons d'abord de la place de la recherche dans les collèges.
Les cégeps font partie de l'ordre d'enseignement supérieur, ils
relèvent du même ministère, leur régime
pédagogique s'apparente davantage à celui de l'université
qu'à celui du secondaire et, surtout, la formation qui y est
dispensée, que l'on parle du secteur technique ou
préuniversitaire, représente déjà le début
de la spécialisation. Les finalités de l'enseignement
supérieur, le Conseil supérieur de l'éducation le
rappelait dans le tout récent rapport qu'il a déposé
devant cette commission, sont le développement des compétences
générales et professionnelles des jeunes et des adultes, le
développement des connaissances scientifiques et de leurs applications
et, enfin, le développement de la société. Ces
finalités commandent les trois grandes fonctions que sont
l'enseignement, la recherche et les services à la collectivité,
mais, contrairement à ce que l'on pourrait croire, ces trois fonctions
ne sont pas ordonnées respectivement à une finalité qui
leur serait propre. Au
contraire, chacune concourt à l'atteinte des trois.
La mission première des collèges, comme d'ailleurs celle
des universités, en est une d'enseignement et c'est envers leurs
étudiants que les professeurs ont leur principale responsabilité.
La formation dispensée dans les collèges comporte des composantes
générales et spécialisées d'importance à peu
près égale, alors que la formation dispensée dans les
universités réserve une place plus importante à la
spécialisation, surtout aux cycles avancés. Toutefois, au
collège comme à l'université, à cause de la nature
et du niveau des connaissances enseignées, à cause des objectifs
de formation et à cause également des compétences des
professeurs, la transmission du savoir est indissociable de la production et de
l'application du savoir et même de la diffusion de la culture sous toutes
ses formes.
La recherche occupe une place plus Importante à
l'université. Tous les établissements universitaires sont
engagés en recherche et, en principe, tous les professeurs, à
l'exception des chargés de cours, poursuivent des travaux de recherche.
Pour ce qui est des collèges, environ un tiers sont engagés de
façon continue dans tous les champs de la recherche et un tiers
réalisent plus occasionnellement des projets de recherche dans l'un ou
l'autre champ. On estime à environ 300, soit 3 % de l'ensemble des
professeurs, le nombre de professeurs au collégial engagés
annuellement en recherche subventionnée. La recherche existe donc dans
les collèges d'abord et avant tout parce qu'ils sont une composante du
système d'enseignement supérieur, parce qu'enseignement et
recherche, à ce niveau, vont naturellement de pair, parce que les
autorités des ministères et des collèges, reconnaissant ce
fait, ont mis en place les conditions favorables à la recherche et parce
que les chercheurs ont su actualiser le potentiel de cette conjecture.
Parlons maintenant des réalisations et des retombées de la
recherche pratiquée dans les collèges. La recherche a
été et est encore un outil de développement important pour
le réseau des collèges. La recherche appliquée en
pédagogie existe depuis 20 ans et elle a alimenté une
réflexion profonde et fructueuse sur les caractéristiques et les
problèmes spécifiques au niveau collégial. Toutes les
grandes problématiques ont été abordées:
échecs et abandons, aide au cheminement scolaire, difficultés
d'apprentissage, maîtrise de la langue d'usage, pour ne nommer que
celles-là. Mentionnons au passage que, pour son cinquième
colloque qui aura lieu au collège de Sherbrooke en avril prochain, l'ARC
a choisi le thème de l'abandon des études collégiales
avant la diplomation afin de faire le point et de stimuler la recherche sur ce
sujet. Tous ces travaux ont contribué à façonner une
pédagogie collégiale originale et novatrice dont les
caractéristiques principales sont l'utilisation intensive du plan de
cours comme outil didactique, l'aide à l'apprentissage intégral
Atlas, l'utilisation de l'ordinateur et l'élaboration de didactiques
propres aux disciplines enseignées. En recherche pédagogique, les
collèges ont assumé une responsabilité que les
universités n'étaient pas prêtes à assumer il y a 20
ans.
La recherche et le transfert technologique réalisés dans
les centres spécialisés ont, pour leur part, été la
source d'un rapprochement entre les établissements d'enseignement et le
monde du travail, particulièrement celui des petites et moyennes
entreprises manufacturières. Les activités de ces centres sont
modelées sur l'activité régionale et les retombées
se font sentir aussi bien sur le développement économique que sur
la mise à jour des connaissances et sur la formation des
étudiants.
Pour ce qui est de la recherche disciplinaire, qui est de plus en plus
interdisciplinaire et même interinstitutionnelle, son plus grand
mérite est de garder les enseignants en contact avec l'avancement des
connaissances dans la discipline enseignée. Ceci les rend plus aptes
à assumer l'initiation aux méthodologies propres aux divers
champs disciplinaires qui seront appelés à prendre de plus en
plus d'importance dans les programmes de formation préuniversitaires.
Enfin, ces travaux débouchent parfois sur des applications industrielles
prometteuses, permettant ainsi à la recherche fondamentale de jouer son
rôle de locomotive de la recherche appliquée. Mais il serait faux
de prétendre qu'on peut distinguer facilement les retombées des
divers types de recherche pratiqués dans les collèges. D'une
part, à cette époque où l'exploitation commerciale des
découvertes et la mise en valeur des résultats de recherche
revêtent une importance croissante, les distinctions entre recherche
fondamentale et appliquée deviennent de plus en plus floues. On parle
aussi de recherche orientée, on parle de recherche créative.
D'autre part, on assiste graduellement à l'émergence d'un champ
multi-displinaire où il existe une interdépendance étroite
entre la recherche, l'innovation, le transfert technologique et même
l'enseignement.
La recherche a apporté une contribution importante à
l'étude des problèmes identifiés en rapport avec
l'enseignement collégial actuel et constituera, à n'en pas
douter, un outil puissant pour l'étude des questions qui ne manqueront
pas d'accompagner le développement futur des collèges. Mais sa
contribution la plus importante est peut-être la valorisation de la
connaissance scientifique, la création d'une ambiance propice à
l'étude, à l'éveil de la curiosité intellectuelle
et au développement de l'esprit scientifique. Le Québec, dit-on,
a un urgent besoin de techniciens et de scientifiques, mais, pour que les
jeunes choisissent ces orientations, ils doivent côtoyer chez leurs
professeurs des gens qui ont l'expérience de la pratique et de la
recherche dans ces domaines. Les collèges n'oeuvrent pas à la
formation proprement dite des chercheurs, mais la recherche au collégial
peut fournir à nos
jeunes des modèles susceptibles de les orienter et de les guider
dans leur choix de carrière. Enfin, nous faisons valoir que la pratique
de la recherche est également accompagnée de retombées
significatives au plan du perfectionnement et de la mise à jour des
connaissances des enseignants. Cette mise à jour leur permet d'adapter
leurs enseignements; elle constitue également une occasion de
ressourcement pour les autres enseignants qui oeuvrent dans le milieu. Il en
résulte un intérêt renouvelé pour la profession
enseignante qui dispose de bien peu de moyens au collégial pour contrer
le désengagement et stimuler le développement professionnel. (11
h 40)
On nous permettra enfin de rappeler que les collèges ne sont pas
des institutions repliées sur elles-mêmes, mais en relation
constante avec leur milieu. C'est pourquoi la recherche qui y est
pratiquée contribue non seulement au développement des
collèges, mais elle apporte aussi une contribution non
négligeable aux réseaux de recherche québécois. Si
l'on se reporte aux débuts des collèges, on est forcé
d'admettre que les acquis des collèges en recherche sont loin
d'être négligeables. La recherche est reconnue comme fonction
connexe à l'enseignement dans les conventions collectives de travail.
Des programmes de subvention ont été mis sur pied à
l'intention des chercheurs des collèges: le programme PAREA doté
de 33 ETC et 350 000 $, le programme PART doté de 30 ETC et 1 200 000
$.
L'accès à d'autres programmes a été
amélioré, en particulier l'accès aux programmes
Équipes et Centres de recherche du Fonds FCAR qui sont
présentement dotés de 21 ETC et 250 000 $, ainsi qu'un nouveau
programme de soutien aux chercheurs subventionnés dans les programmes
fédéraux ou autres, dont les ressources seront augmentées
graduellement à 15 ETC. Autre acquis, une infrastructure de soutien
à la recherche existe déjà dans un certain nombre de
collèges. Les centres spécialisés sont dotés,
à cette fin, de 30 ETC et de 1 500 000 $, des mesures fiscales ont
été formulées à l'intention des entreprises et des
services locaux de soutien à la recherche existent dans une douzaine de
collèges. Enfin, les orientations ministérielles en
matière de recherche ont été précisées.
Elles sont à l'effet de continuer à soutenir un volet de
recherche-développement pédagogique, d'accroître le soutien
à la recherche technologique et d'inciter les chercheurs en recherche
disciplinaire à s'intégrer au sein d'équipes et de centres
universitaires de recherche ou, le cas échéant, à des
équipes à maîtrise d'oeuvre collégiale.
Le financement total de source gouvernementale québécoise
pour la recherche dans les collèges est de l'ordre de 10 000 000 $.
Cette somme est répartie entre la recherche disciplinaire à 18%,
pédagogique à 22% et technolo- gique à 60 %. Permettez-moi
de ne pas préciser ici quelle fraction de la dépense
intérieure brute du budget de la recherche et développement au
Québec cette somme représente. Vous me croirez sur parole quand
j'affirme que la recherche dans les collèges ne coûte pas
cher.
Parlons maintenant des conditions de développement de la
recherche. Ces conditions font l'unanimité de l'ensemble des
intervenants dans le réseau, dans les collèges, à la
Fédération des cégeps et au Conseil des collèges,
pour ne mentionner que ces organismes. À ce jour, le ministère de
l'Enseignement supérieur et de la Science et les collèges ont
adopté une attitude plutôt pragmatique par rapport à la
recherche. Ils se sont appliqués surtout à définir des
créneaux propres aux collèges en matière de recherche,
à favoriser une meilleure utilisation du potentiel de recherche du
personnel des collèges et son accès aux organismes
subventionnâmes, mais sans modifier la mission elle-même qu'ils
jugeaient «irréaliste et inefficace de calquer sur le
modèle universitaire». J'emprunte ici les mots de Mme la
ministre.
Cette conduite a produit des résultats concrets et tangibles dont
le principal est sûrement l'intégration des collèges au
système québécois de la recherche. Mais, pour cette raison
même et pour de multiples raisons qu'il serait trop long d'évoquer
ici, dans son mémoire présenté récemment à
cette commission parlementaire aussi bien que dans celui qu'elle
présentait en 1991 au Conseil des collèges, l'ARC soutient que le
temps est venu de reconnaître que les collèges ont une mission en
recherche. Faut-il l'intégrer à la mission de formation? La
formulation, selon nous, reste à déterminer. Sur ce point comme
sur bien d'autres, nous sommes confiants que les autorités
ministérielles, en collaboration avec les collèges et les
chercheurs, sauront trouver les dispositions légales qui accorderont
à la recherche une reconnaissance qui permettra la prise en charge
rationnelle et systématique de cette activité par la
communauté collégiale et par ses dirigeants. Nous sommes
toutefois convaincus que ce qui a retardé la reconnaissance de la
recherche dans les collèges, c'est qu'on a pris pour acquis que le
mandat de recherche des collèges devait être identique à
celui des universités. Or, selon nous, il n'en est rien. Au contraire,
nous croyons que ce mandat servirait mal la cause des collèges et de la
recherche qui y est pratiquée. Nous affirmons donc qu'il faut continuer
à développer un modèle organisationnel de la recherche
approprié à l'ordre collégial.
Sans nous étendre sur le sujet, précisons les
caractéristiques principales du modèle que nous
préconisons: engagement dans la recherche résultant d'un choix
personnel et non d'une obligation à l'engagement, maintien d'une
tâche d'enseignement, participation à la vie départementale
et collégiale, dégagement d'enseigne-
ment conditionnel à l'obtention d'une subvention, regroupement au
sein d'équipes, accent sur le développement des
compétences et définition des rôles et
responsabilités de chacun des intervenants dans ce dossier.
Nous parlions à l'instant du financement, le talon d'Achille de
tout le système de recherche. Convenant qu'il serait inopportun de
revendiquer ici une augmentation des ressources, nous n'en avons pas moins
signalé que plus permettrait de faire plus et probablement mieux. Les
collèges devront s'investir, à court terme, dans de nouveaux
champs de recherche institutionnelle, entre autres, en ce qui regarde les
programmes, le perfectionnement des enseignants et l'évaluation. De
plus, il faudra bien, un jour, accorder aux collèges engagés en
recherche des sommes destinées à financer une infrastructure
légère de soutien à la recherche afin que les chercheurs
des collèges aient accès aux technologies de pointe en
matière de communications et de coopération. Ces sommes
pourraient accompagner les subventions de recherche, de façon à
ne financer, à cet effet, que les collèges où la recherche
est effectivement pratiquée. Enfin, mentionnons que la diminution des
ressources au Fonds FCAR n'a permis de financer directement que 40 chercheurs
en 1992-1993 contre 58 en 1991-1992. Mais l'augmentation des ressources des
programmes de subvention n'est pas le seul moyen d'augmenter le financement de
la recherche au collégial. Un accès élargi aux programmes
de subvention auxquels les professeurs du collégial n'ont que peu ou pas
accès actuellement, ce qui serait facilité par une reconnaissance
de la recherche, produirait aussi les effets souhaités. Mais, à
long terme, les ressources en recherche au collégial devront être
augmentées et non simplement déplacées ou
réaffectées d'un volet à l'autre.
Reste la relève du système. Un programme soutenant
l'établissement de nouveaux chercheurs est nécessaire pour
favoriser à la fois l'émergence de nouveaux chercheurs et
l'excellence dans les autres programmes. On pourrait privilégier
l'intégration de ces nouveaux chercheurs à des équipes
déjà constituées et l'expérience des chercheurs
chevronnés serait ainsi réinvestie au collégial dans la
formation des jeunes chercheurs.
En conclusion, permettez-moi de reconnaître qu'au cours des ans un
consensus social s'est formé autour de la recherche dans les
collèges. De plus en plus, on en reconnaît la
légitimité non seulement à cause de la pertinence et de
l'excellence des travaux, mais parce que le Québec, conformément
à sa politique scientifique, doit exploiter tout son potentiel en la
matière, où qu'il soit et quel qu'il soit. Dans ce domaine,
l'heure n'est plus aux chasses gardées, comme en témoigne la
multiplicité des lieux où s'exerce désormais la recherche.
Les universités québécoises continuent à être
au coeur du système québécois de la recherche. En
1992-1993, 85 % des chercheurs subventionnés par le programme
équipes du fonds fcar oeuvrent dans les universités
québécoises. des 15 % restants, 6 % sont rattachés
à l'extérieur du québec, 2,8 % sont des chercheurs sans
affiliation institutionnelle reconnue, 2,2 % sont des chercheurs de
collège, 2,7 % des chercheurs en milieu gouvernemental et 1,3 % des
chercheurs en milieu industriel. même si les chercheurs des
collèges sont relativement peu nombreux, c'est parfois leur
présence même qui, dans certaines régions, permet à
une équipe d'atteindre la fameuse masse critique dont il est souvent
question.
Les cégeps, nous direz-vous, auront des défis importants
à relever au cours des années à venir, défis au
sujet desquels nous n'avons pas élaboré énormément
dans cette présentation. Nous affirmons notre confiance dans l'avenir
des cégeps. À travers les imperfections et les ratés du
système, l'expertise se construit graduellement et le réseau
montre des signes évidents de maturité. La recherche est une
composante essentielle de l'environnement collégial. Elle a
constitué une force vive dans le développement des cégeps
et les collèges où elle existe sont actuellement les fleurons du
réseau. Mme la ministre, mesdames et messieurs, si la recherche
n'existait pas dans les collèges, il faudrait de toute urgence l'y
implanter.
La Présidente (Mme Hovington): Merci, Mme Giard. Alors, je
reconnaîtrai maintenant Mme la ministre de l'Éducation et de
l'Enseignement supérieur et de la Science. (11 h 50)
Mme Robillard: Merci, Mme la Présidente. Je suis heureuse
d'accueillir les membres de l'Association pour la recherche au
collégial. De fait, vous avez tout à fait raison, plusieurs
intervenants au niveau de cette commission nous ont parlé de la
recherche au collégial. Alors, je pense que vous vous deviez aussi de
déposer un mémoire. Vous avez sûrement lu aussi les
positions différentes des intervenants, que ce soit pour la
reconnaissance de la mission en tant que telle ou contre cette reconnaissance
officielle de la mission. Nous avons eu aussi ces prises de position, on doit
dire, surtout en provenance du milieu universitaire. Alors, c'est
sûrement une question qui est sur la table au niveau de cette commission
parlementaire.
Quand je lis votre mémoire, ce que j'en comprends, c'est que vous
êtes en accord - et, si je me suis trompée, vous me le dites, Mme
Giard - avec les orientations ministérielles qui ont été
édictées concernant le rôle de la recherche au
collégial, et que j'avais transmises publiquement lors d'une allocution,
en février 1991, à l'assemblée générale de
la Fédération des cégeps où, là, je disais
de façon très claire qu'il y avait trois axes au niveau de la
recherche du collégial. Il s'agissait de consolider et de confirmer la
recherche et développement pédago-
gique pour laquelle il y a une expertise qui est
développée depuis des années au niveau du
collégial. C'était le premier axe. Le deuxième,
c'était l'affermissement et le développement de la recherche et
développement et du transfert technologique. Alors, là, vraiment,
je dirais, une insistance et un accent sur la recherche et développement
technologique. Le troisième axe était donc la contribution du
potentiel collégial au circuit existant de la recherche universitaire et
autre. Là, on fait plus référence à la recherche
libre à caractère disciplinaire ou interdisciplinaire, comme vous
l'avez dit.
Alors, ce que je comprends, c'est que l'Association est en accord avec
ces orientations. Par ailleurs, vous prônez d'inscrire dans la mission
môme des collèges la mission recherche, mais vous me dites
très clairement que ce n'est pas de transposer au collégial le
mandat de recherche à l'université. J'aimerais ça que vous
élaboriez davantage sur ça, Mme Giard, parce que, quand je
regroupe l'ensemble de vos demandes dans le mémoire, j'ai l'impression
que ça ressemble, à certains égards, à la recherche
universitaire. En tout cas, peut-être que j'ai une mauvaise perception,
mais vous voulez qu'on l'inscrive donc dans la mission même des
collèges. Vous déplorez les effets de la disparition du programme
spécifique au niveau du Fonds FCAR, si j'ai bien compris. Vous me faites
aussi un plaidoyer sur la recherche fondamentale et la recherche libre. Vous
vous inquiétez du glissement de la recherche en faveur de la recherche
technologique au niveau du collégial. Vous me demandez aussi de
définir le statut d'enseignant chercheur et les paramètres de sa
tâche, beaucoup d'éléments qui ressemblent à la
recherche universitaire, à ma compréhension.
Quand vous avez énoncé, tout à l'heure, vos
différents critères qui feraient la spécificité de
la recherche au niveau du collégial, II me semble que c'est strictement
le premier critère qui était basé sur le volontariat du
professeur à faire de la recherche, qui semblait un peu différent
de ce qui se passe dans le monde universitaire. Par ailleurs, vous appuyez
aussi votre thèse sur le fait que la deuxième année du
secteur préuniversitaire correspond à la première
année de l'université partout ailleurs en Amérique du
Nord, mais on sait très bien que les «junior colleges» ou
les «university colleges» au niveau américain font peu de
recherche, un petit peu comme notre Université Bishop, ici, à
Sherbrooke, qui ne fait que du premier cycle et n'est pas du tout
concentrée sur la mission recherche. Alors, vous voyez un peu. J'ai de
la difficulté à saisir exactement ce que vous qualifiez de
spécificité de la mission recherche que vous voulez voir inscrire
dans la Loi sur les collèges.
Mme Giard: Je vais répondre brièvement et je vais
laisser à mes collègues aussi la possibilité de
répondre. Vous avez raison quand vous dites que nous sommes largement
d'accord avec les orientations ministérielles. C'est quelque chose qui a
dérivé, d'après nous, du vécu de la recherche dans
les collèges et c'est quelque chose qui correspond bien à la
situation d'enseignement que nous avons dans les collèges. Donc, vous
avez raison de mentionner ça. Quand nous mentionnons le glissement de
ressources de la recherche fondamentale vers la recherche technologique, nous
ne nous opposons pas au financement que vous consentez a la recherche
technologique. Au contraire, nous nous en réjouissons. Mais nous
aimerions que ces financements-là ne soient pas un déplacement de
ressources d'un volet à l'autre, mais que, lors d'une prochaine
augmentation des ressources, on ait une injection de ressources nouvelles
plutôt qu'un déplacement. Vous me corrigerez si je me trompe, mais
je crois que c'est largement admis qu'il y a un certain nombres d'ETC qui ont
été reportés de la recherche fondamentale à la
recherche technologique. Mais nous nous réjouissons du financement que
vous accordez à la recherche technologique.
Pour ce qui est du modèle, il est exact que la différence
fondamentale entre ce que nous préconisons pour le collégial et
ce qui existe à l'université, c'est le fait que la recherche,
dans les universités, fait partie de la tâche principale des
profs, est intégrée à la tâche. C'est pour ça
que la tâche d'enseignement est moins élevée et que, donc,
tous les professeurs sont, en principe, supposés faire de la recherche.
Nous ne verrions pas d'intérêt à transposer cette
situation-là au niveau collégial parce que nous savons qu'elle
cause un certain nombre de problèmes, même dans les
universités, bien qu'il soit évident que, comme la recherche a
moins d'ampleur dans les collèges qu'elle n'en a à
l'université, il est probable que le problème aurait aussi moins
d'ampleur.
Donc, engagement, suite à une décision personnelle, dans
la recherche, parce qu'on a un intérêt, parce qu'on y voit une
possibilité de mieux accomplir son rôle de professeur, qu'on a des
aptitudes, qu'on a une inclination pour ça. Donc, dégagement
d'enseignement seulement lorsqu'on a présenté un projet et que le
projet est accepté. Autrement dit, la situation actuelle dans les
programmes PAREA, PART et recherche technologique. Ça, c'est sûr
que c'est la différence fondamentale. Les autres différences
proviennent principalement du fait que nous tenons beaucoup à ce que la
recherche soit harmonisée aux autres activités des
collèges. Donc, nous ne voulons pas créer un petit monde de la
recherche dans les collèges, mais nous voulons que les chercheurs
restent intégrés à la vie départementale, à
la vie du collège. On veut qu'il y ait un échange entre les gens
qui font de la recherche et les gens qui ne font pas de recherche, mais qui
font uniquement de l'enseignement. On veut que les chercheurs prennent
avis de leur département quand ils présentent des projets.
On veut qu'ils échangent avec leur département pour recevoir un
feedback au moment où leurs travaux progressent. On veut que les gens
autour des chercheurs soient impliqués de cette façon-là
dans la recherche, et c'est peut-être une caractéristique,
là, qui est présente dans certains milieux universitaires,
à des degrés divers, là.
La Présidente (Mme Hovington): Merci.
Mme Giard: Je ne sais si M. Cloutier voudrait
compléter.
M. Cloutier (Yvan): Je crois que la recherche est toujours de la
recherche. Elle répond aux mêmes conditions au niveau de
l'épistémologie, qu'on soit à l'université, qu'on
soit dans un collège ou que ce soit une recherche dans un
ministère, ici. Ce qui est différent, ce sont les conditions de
la recherche et les orientations de la recherche. Dans le cas de la recherche
pédagogique, il y a une spécificité de la recherche
collégiale, parce que ce sont des chercheurs qui sont issus même
du milieu et qui répondent aux besoins du milieu. Alors, je crois qu'il
y a une spécificité. Pour ce qui est de ia recherche
technologique, Pierre Labelle pourra vous en parler, mais elle est axée
davantage sur l'industrie manufacturière et l'enracinement dans les
régions. Pas besoin de vous parler des bénéfices sur
l'enseignement. Le fait qu'il y ait des chercheurs qui soient des enseignants,
au niveau de ia qualité de l'enseignement, ça, ça vous est
sans doute connu.
Il y a la recherche fondamentale qui, elle, répond aux
mêmes exigences. La différence, c'est qu'il n'y a pas de grosses
installations, il n'y a pas d'équipement dans les collèges. De
toute manière, la recherche, maintenant, elle est interinstitutionnelle.
Je ne me souviens pas du pourcentage des subventions du Fonds FCAR, mais c'est
de plus en plus élevé. C'est interuniversité, avec des
centres de recherche spécialisés. Alors, le chercheur
collégial, à ce moment-là, il contribue à la masse
critique des chercheurs. Alors, je pense que c'est beaucoup plus, comme Mme
Giard le disait, au niveau des conditions et du milieu d'où
émerge cette recherche. (12 heures)
Mme Robillard: Si on abordait, justement, le volet de la
recherche et développement technologique. Vous avez une recommandation
plus précise, à la page 21 de votre mémoire, et j'aimerais
peut-être entendre des représentants des centres
spécialisés ou ceux qui y travaillent comme
professeurs-chercheurs. Vous nous dites ici que, dans certains milieux, on
soutient que le mandat de recherche n'est pas assez précis, au niveau
des centres spécialisés. Pourriez-vous élaborer
davantage?
M. Lavoie (Pierre): Dans les faits, disons, au niveau de la
mission des collèges, on nous dit toujours et souvent que la mission
première d'un collège d'enseignement général et
professionnel, c'est, d'abord et avant tout, la formation d'une
clientèle qui est spécifique avec des professeurs, des gens qu'on
embauche aussi avec des compétences spécifiques sur le plan
pédagogique, bien sûr, mais aussi sur le plan scientifique et sur
le plan professionnel. Si, effectivement, on reconnaissait de façon
claire aux collèges que ia recherche fait partie de leur mission, il
serait, à ce moment-là, beaucoup plus aisé aux
collèges eux-mêmes d'organiser cette recherche-là, sans la
mettre en concurrence avec l'acte d'enseigner. Autrement dit, les
collèges seraient beaucoup plus à l'aise pour gérer cette
chose-là, un peu comme la formation comme telle.
Mme Robillard: Oui, mais là je vous arrête.
Ça, c'est l'énoncé de base de votre mémoire, mais,
ici, ce que vous me dites, c'est que le mandat des centres
spécialisés n'est pas assez précis. Pourquoi? Pourquoi me
dites-vous ça dans votre mémoire?
Mme Giard: Je pense qu'il y avait...
Mme Robillard: Au bas de la page 21, le dernier paragraphe.
Mme Giard: Oui, c'est ça. Ce qui était
évoqué dans ce texte, c'est un peu la question qu'on entend
circuler un peu comme quoi on ne sait pas quelles sont les frontières du
champ d'action des centres spécialisés dans le domaine de la
recherche et leur interaction, par exemple, avec l'entreprise privée,
par contre. Alors, je pense que M. Labelle avait quelque chose à dire
à ce sujet.
M. Labelle (Pierre): Bien, quelque chose à dire... Au
niveau du mandat des centres spécialisés, celui-ci doit
s'intégrer dans une politique avec cinq volets fondamentaux qui incluent
le transfert technologique, la formation dans un champ spécifique
où le centre spécialisé se doit d'oeuvrer. Il est
important de noter qu'actuellement les centres spécialisés
occupent un créneau de marché complémentaire dans la
relation industrie-université qu'il doit y avoir. C'est-à-dire
que, par leur position très près de l'entreprise, les centres
spécialisés occupent... Le créneau de marché
très près du plancher, en ce qui les concerne, oeuvre beaucoup au
virage technologique du Québec. Quand on parle de
spécificité, c'est réellement le domaine d'application qui
doit être visé.
La Présidente (Mme Hovington): Vous vouliez ajouter
quelque chose, M. Lavoie?
M. Lavoie: Oui. Effectivement, dans plu-
sieurs collèges, en ce qui a trait au mandat des centres
spécialisés, on s'est senti obligé de définir quel
était le domaine de l'éducation des adultes et quel était
le domaine des centres spécialisés parce qu'à un moment
donné on a utilisé la notion de transfert technologique et, dans
certains collèges, on disait: Bien, le transfert technologique, ce n'est
pas de la formation nécessairement, c'est de l'activité de
recherche appliquée pour l'industrie en général et tout
ça. Par exemple, chez nous, à Trois-Rivières, on a
très bien défini quel est le champ de l'éducation des
adultes, au niveau de la formation, et quel est le champ du centre
spécialisé au niveau de la formation pointue, dans ce
sens-là.
Mme Robillard: Ça me semble tellement différent
comme mission. Je ne comprends pas qu'il y ait une confusion dans les
rôles...
M. Lavoie: C'est parce que, quand on prend l'idée de
transfert technologique...
Mme Robillard: Bien oui.
M. Lavoie: ...à ce moment-là, pour nous, les
centres spécialisés, ça comprend la partie de formation
adaptée à l'usine et qui, bien souvent, sort des activités
de recherche qui sont faites en faveur de l'industrie. C'est comme ça
qu'on le prend, de façon générale, alors que, dans
certains collèges, bien, on limite plutôt à
l'éducation des adultes toute activité de formation, même
pointue.
La Présidente (Mme Hovfngton): Je reconnaîtrai
maintenant le porte-parole de l'Opposition officielle, M. le
député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Oui, Mme la Présidente. Je vous salue
officiellement, heureux que vous soyez là, mais vous avez
été témoin qu'on a été un peu distraits.
C'est qu'il y a une cérémonie importante en haut qui relate le
200e anniversaire du parlementarisme et on souhaitait nous voir monter en haut.
Je leur ai répondu que nous étions en démocratie vivante
et, dans ce sens-là, je pense qu'à notre participation il est
préférable d'être avec vous présentement, parce que
c'est important de temps en temps d'avoir des gestes qui témoignent que
le Parlement, effectivement, c'est une institution largement
démocratique et recevoir des Intervenants qui viennent s'exprimer sur
l'avenir de l'ordre collégial, que ce soit dans sa dimension recherche
ou autre, je pense que ça fait partie de l'expression de la
démocratie vivante.
Très heureux que l'Association pour la recherche au
collégial soit venue exprimer son point de vue, son témoignage
sur un volet important. Si je vous cite, vous dites: On ne peut pas imaginer
que l'ordre collégial n'ait pas intégré à sa
dimension la dimension recherche.
D'entrée de jeu, quand on regarde le bilan que vous relatez -
c'est assez Impressionnant, ces réalisations; vous n'avez quand
même pas un bilan négatif, selon vous, dans votre mémoire -
les projets sont là. «De nombreux projets d'une grande
qualité ont été réalisés dans les
domaines...» Je ne les reprends pas, mais vous avez cité une
série de domaines pédagogiques intéressants. Vous indiquez
que vous avez développé une pédagogie collégiale
centrée sur l'étudiant. Très intéressant.
Deuxièmement: «Quant à la recherche fondamentale - je vous
cite toujours - elle se pratique à peu près dans toutes les
disciplines et sur les sujets les plus variés. Enfin, sous la
poussée des centres spécialisés, la recherche
technologique a connu un essor remarquable au cours des cinq dernières
années.» Comme portrait, c'est intéressant,
sincèrement. C'est même très bien. Mais je pouvais
comprendre que, d'entrée de jeu, vous avez mentionné
également, au début de votre mémoire: Au tout début
de la création des collèges, on ne pouvait pas intégrer la
dimension recherche parce que, un, elle n'était pas
développée et tout ça, et vous arrivez avec une
première recommandation. Boni Justement, parce qu'on en fait et qu'on a
un bilan intéressant, nous souhaitons que dorénavant,
formellement, on inscrive la mission recherche - parce que c'est de même
que vous vous exprimez: «que la recherche soit nommément
intégrée à la mission des collèges».
Première question. Moi, je n'ai pas beaucoup de
difficultés avec ça. Votre mémoire est assez explicite.
Là où j'ai de la difficulté, c'est de ne pas être
capable d'imaginer très concrètement ce que j'appellerais les
changements majeurs que ça créerait au niveau des milieux
d'enseignement collégiaux, des institutions collégiales si,
effectivement, le législateur décidait, nommément dans une
modification à la loi des collèges, d'inscrire cette mission de
recherche. Qu'est-ce que ça changerait concrètement, si je me
réfère au bilan que vous avez et aux réalisations que vous
faites - et là je ne parle pas du volet financement, j'y reviendrai;
c'est uniquement pour que vous ayez l'occasion de l'exprimer, je n'ai pas de
trouble avec ça, mais profitez de votre présence en commission -
au-delà d'une reconnaissance formelle? Parce que, moi, une
reconnaissance formelle, s'il n'y a pas de changements majeurs au niveau des
institutions suite à ce fait que l'on vous reconnaîtrait la
mission de recherche, je dis: Alors, pourquoi réclamer ça
puisque, depuis 10 ans, 15 ans, vous en faites? Le bilan est très
positif. Vous avez une série de projets qui se rapprochent de cette
réalité au niveau des apprentissages, des approches didactiques.
«De nombreux logiciels éducatifs ont été
conçus. On a développé...» et ainsi de suite. Je
m'arrête là. Je pense que vous comprenez très bien le sens
de la question. J'aimerais que vous soyez vraiment plus précis. Comment
lisez-vous aujourd'hui: Demain matin,
vous avez la reconnaissance du statut? Qu'est-ce qu'il y a de
changé dans les institutions collégiales,
concrètement?
Mme Glard: Je pense que la légitimation de la recherche
dans les collèges aurait pour effet de lui donner un statut plus
officiel. On irait plus loin du côté de l'intégration aux
activités des collèges parce que, dans les collèges, il y
a des gens qui font de la recherche et des gens qui ne font pas de recherche
actuellement. Si on fait de la recherche, c'est parce qu'on est
intéressé, on a des aptitudes et on a réussi à
obtenir des subventions. Si on n'en fait pas, ça peut être pour
différentes raisons, pour des choix tout à fait légitimes.
On peut choisir l'enseignement, s'en tenir à l'enseignement et
être un excellent professeur. C'est un choix professionnel tout aussi
défendable. (12 h 10)
Mais, actuellement, la recherche n'étant pas une des
activités officielles des collèges, les gens qui ne font pas de
recherche ont tendance à considérer ça comme une
activité plus accessoire, de moindre importance. On peut en profiter,
à toutes les occasions qui se présentent, pour la reléguer
derrière en disant que, de toute façon, toutes les ressources qui
sont accordées au soutien de la recherche dans les collèges sont
prises dans des budgets qui devraient servir à autre chose puisque,
théoriquement, la recherche n'existe pas. Alors, il y a cet
aspect-là de légitimité de la recherche pour les gens qui
oeuvrent dans les collèges, mais ne font pas de recherche. Tout à
l'heure aussi, j'ai mentionné qu'il y avait un tiers environ des
collèges qui sont largement engagés dans tous les champs de
recherche, peut-être un autre tiers qui sont engagés dans
certaines activités. Et il y a le dernier tiers qui ne font que peu ou
pas de recherche. Bon. On s'entend pour dire que la recherche crée quand
même une ambiance, un environnement propice à l'étude. Je
ne me répéterai pas sur ça. Les collèges où
la recherche est absente sont dépourvus, donc, de cet avantage-là
du point de vue de l'enrichissement de l'environnement. Ce serait une
incitation pour probablement un plus grand nombre d'institutions à
effectivement s'engager et soutenir la recherche.
M. Gendron: Toujours à peu près dans le même
sens, vous avez indiqué: On en fait - c'est le collège qui parle
- de la recherche, le moment est venu de le reconnaître - on vient d'en
discuter un peu - formellement. On fait l'hypothèse que le
législateur décide de le faire. Vous avez dit au tout
début: II faudrait des mandats de recherche différents,
appropriés à l'ordre collégial. Pas de trouble avec
ça. On ne disconvient pas que c'est requis, d'après moi, que vous
ayez un mandat de recherche différent. Croyez-vous, comme certains le
prétendent, que les dangers sont quand même grands, que ce soit
dans la recherche fondamentale, technologique ou appliquée, qu'il y ait
énormément de conflits avec ceux qui, dans la
société québécoise, ont hérité
à même leur loi constitutive ou constituante des mandats de
recherche, c'est-à-dire le milieu universitaire? Si la
démonstration est facilement faisable que... Il ne s'agit pas
d'énoncer que ça requerrait des mandats de recherche
différents, mais vous êtes en mesure de faire clairement la preuve
que l'ordre collégial peut avoir une série de mandats de
recherche et d'aucune façon le monde universitaire ne pourrait
prétendre qu'il y a dédoublement.
Est-ce que vous avez assez de réflexion de faite pour que cette
conviction-là soit clairement exprimée et qu'on puisse supposer
que, si le législateur décide, avec raison, je pense, compte tenu
que vous en faites pas mai, d'institutionnaliser le mandat, on ne soit pas,
dans quelques années, dans des batailles à n'en plus finir, des
conflits de juridictions qui vont faire que tout ce qu'on va faire, c'est
répartir le même budget qui existe aujourd'hui à deux
quémandeurs - et ce n'est pas péjoratif - qui veulent faire de la
recherche appliquée, technologique ou autre?
M. Cloutier: Je crois que, déjà, il y a une bonne
réponse, une bonne vole dans le document sur le développement
scientifique au Québec, où on parle davantage d'une recherche
interinstitutionnelle, d'une recherche qui est capable de s'intégrer
à la recherche internationale. Il y a plusieurs lieux de recherche, les
universités. Il y a des organismes de recherche. Je crois qu'il faut les
voir dans une complémentarité. C'est entendu que, sur le pian
juridique, les universitaires vont, par intérêt corporatif,
défendre leur point de vue. Mais, quand il s'agit de sélectionner
des chercheurs collégiaux, n'ayez pas peur, ils vont les chercher.
Je pense que la méconnaissance de la qualité d'excellence
des chercheurs collégiaux est peut-être due au fait qu'on a
été en marge pendant un certain temps. L'ancien programme ACC
faisait que les chercheurs collégiaux oeuvraient dans un créneau
parallèle. Ils étaient évalués très souvent
par des chercheurs universitaires, mais le réseau était
parallèle. Maintenant que les chercheurs collégiaux sont
intégrés à des équipes, l'évaluation se fait
par des chercheurs universitaires. L'expérience que j'en ai, au
comité de programmes du Fonds FCAR qui regroupe les présidents
des comités, c'est la surprise de constater la qualité de ces
chercheurs que le réseau collégial a générés
avec les années. Pour eux, c'est une contribution. Si ce
chercheur-là, universitaire, se retrouvait comme recteur,
peut-être qu'il vous tiendrait un autre discours. Là, il y a les
dimensions institutionnelles, je crois, et une politique scientifique qui a un
aspect très intéressant qui est de créer des
habitus de la recherche. d'ailleurs, ça a impressionné
plusieurs lecteurs. on parle que déjà, dans le secondaire et le
collégial, il faut développer des habitus de la recherche.
M. Gendron: Mais, regardez, prenez ça bien amicalement, je
n'ai pas votre expérience comme chercheur, je n'en suis pas un. Vous me
citez un document que je connais comme titre; comme contenu, je suis assez
honnête pour dire que je n'en connais pas à ce point le contenu,
d'une façon fine, pour être capable de dire: Bien, je ne pense
pas, par exemple, que ce soit aussi précis que vous semblez l'affirmer.
Moi, de me dire que vous allez être complémentaire, bien, par
définition, je veux dire, on ne peut pas s'opposer à ça,
mais ça ne me convainc pas.
Je reprends ma question très clairement. Je suis un peu plus
précis, là. Je regarde ce que vous faites: des approches
didactiques, de la recherche dans le domaine de l'enseignement, de
l'apprentissage. Bon, le monde universitaire m'a dit la même chose, qu'il
faisait exactement la même chose. J'arrête là parce que je
pourrais continuer. Il y a peu de domaines ou de champs où je vois une
spécialisation à l'ordre collégial. C'est la
prétention de l'ordre universitaire: Nous, on a la mission recherche et
on l'exerce dans l'ensemble du champ de maximiser ce que j'appellerais la
réussite scolaire au sens large du terme, avec tout ce que ça
comporte, les logiciels, ainsi de suite, les apprentissages. Bon,
j'arrête là.
Mais je repose ma question. Moi, je prétends que, dans une
société comme la nôtre, il y a un certain volume de
recherche qu'il est nécessaire de faire et il y a un certain nombre de
crédits qu'on doit affecter à la recherche. Ceci étant
dit, ce n'est pas en ouvrant une mission additionnelle que j'ai la garantie
qu'il va se faire plus de recherche et qu'elle va correspondre davantage aux
besoins de l'ordre spécifique qui la réclame. Là, c'est
l'ordre collégial qui réclame spécifiquement un mandat de
recherche. C'est là-dessus que j'aurais aimé que vous me donniez
des précisions. Est-ce que ça risque d'être conflictuel,
qu'on se partage le volume de recherche qui se fait? La différence,
c'est probablement que, si vous l'aviez, la mission recherche, la mission
universitaire abandonnerait certains créneaux pour vous les laisser,
mais, au net, dans la société québécoise, nous
aurions exactement le même volume de recherche, les mêmes sujets de
recherche traités. C'est ça que je vous demande. Est-ce que vous
croyez que, quand je m'exprime comme ça, je suis dans l'erreur?
M. Lavoie: On demande, si cette fameuse reconnaissance est faite
pour l'enseignement collégial, qu'on ajoute à la recherche, entre
autres, tous les volets d'application des sciences fondamentales. Par exemple,
en technologie, et ça s'applique tout aussi bien en pédagogie, il
ne suffit pas de faire de la recherche fondamentale et de savoir où on
va, encore faut-il trouver le moyen de l'appliquer dans la pratique. Ce qu'on
fait, notamment au niveau des centres spécialisés et dans
certains collèges qui ont développé des bureaux de
recherche appliquée et ainsi de suite, c'est qu'effectivement on prend
la connaissance, on l'amène avec des arguments technologiques au niveau
de l'utilisateur et on l'aide à l'appliquer dans la pratique, ou bien
pour créer des emplois, ou bien pour développer des
procédés et assurer le développement du Québec.
Alors, on travaille sur l'application de façon très explicite.
Quand on touche au fondamental, on y touche parce qu'on en a besoin pour
peaufiner notre technologie et ainsi de suite.
Donc, au niveau des cégeps, en particulier sur le plan de la
technologie telle qu'on la pratique dans des centres spécialisés
aujourd'hui, on ajoute à la recherche qui se faisait. On s'en va dans le
champ et on aide les gens à se camper vis-à-vis des nouvelles
connaissances technologiques et des nouveaux moyens scientifiques. Ça,
c'est quelque chose qu'on fait. Quand on disait, tout à l'heure... Parce
que je n'ai pas couvert le deuxième plan de cette
précision-là du mandat, mais souvent on dit: Où
s'arrête la recherche appliquée et où commence la recherche
fondamentale? Est-ce qu'on va mettre tout le monde à jouer dans la
recherche fondamentale et ainsi de suite?
Au niveau du collège, que ce soit en technologie ou en
pédagogie, on touche aux disciplines, on touche aux connaissances par la
pratique de la science comme telle. Quand on va, comme je viens de le dire,
jusqu'au fondamental, c'est purement et simplement pour nous aider à
mieux appliquer ces connaissances.
M. Gendron: Excusez, mais très concrètement et
amicalement, est-ce que ça veut dire... Parce qu'à un moment
donné il faut se parler et être sûrs qu'on comprend les avis
que nous recevons, si on veut les intégrer dans la réflexion et
probablement plus dans la rétention des décisions. Il y a des
gens qui nous ont dit: Recherche fondamentale, ça, c'est logique, c'est
le monde universitaire. Recherche appliquée-Non, non. Je veux juste
poser la question. Je les vois opiner du bonnet négativement. (12 h
20)
Très sérieusement, ça signifie que vous êtes
des demandeurs pour une recherche totale. Si elle doit être fondamentale,
elle sera fondamentale, appliquée ou technologique. Vous voulez, dans la
recommandation, que le mandat de recherche soit vôtre à l'ordre
collégial, sans distinction, sans nuance, et on départagera
après entre celle qui est faite par le monde universitaire et celle qui
serait faite par le monde collégial ou l'ordre collégial. C'est
bien ça? Je veux bien comprendre votre...
M. Sangalli (Arturo): Oui, effectivement, mais, pour l'ordre
collégial, en volume, ça va rester modeste par rapport à
la recherche universitaire. Pour répondre à deux de vos
questions, la première: Qu'est-ce qui arriverait s'il n'y avait pas de
reconnaissance officielle? bon, on craint que les acquis qu'on a
démontrés jusqu'ici disparaissent. Il n'y a pas de garantie que
tous les efforts et tous les accomplissements faits jusqu'ici vont continuer
parce qu'ils ont été réalisés un peu grâce
à la bonne volonté de certains directeurs de collège, de
certains collègues, de...
M. Gendron: D'accord. Mais comment avoir des inquiétudes
quant à la garantie quand on a un bilan aussi positif?
Sincèrement.
M. Sangalli: Ça, c'est vous qui...
M. Gendron: Non. C'est vous qui l'avez dit dans votre
mémoire.
M. Sangalli: Oui. Mais c'est vous qui voyez dans les acquis une
garantie. Moi, je serais plus tranquille si ces acquis étaient reconnus
officiellement. Parce que les gouvernements changent, les fonctionnaires aussi.
Alors, on peut se trouver demain avec une tout autre réalité.
M. Gendron: Nous, on le souhaite, mais on sait que ce ne sera pas
demain.
M. Sangalli: Bon. Des voix: Ha, ha, ha!
M. Sangalli: Pour revenir à votre question: Est-ce qu'il y
aurait plus de recherche si on reconnaissait cette mission aux collèges?
je dirais sans hésitation oui. Mais la qualité aussi y gagnerait
parce que, si les fonds sont limités, la compétition se ferait
entre, d'une part, un grand nombre d'universitaires et un plus modeste nombre
de profs de collège, mais, d'autre part, l'argent irait a ceux qui sont
les plus capables et qui présentent les projets les plus valables et
importants.
M. Gendron: Compte tenu de votre expérience et pour des
raisons de temps, je voudrais poursuivre avec une autre question sur le
financement. Si on avait à vous le demander, aujourd'hui, au-delà
des quantums et des pourcentages, au niveau collégial, avec le bilan que
vous avez, vous estimez à combien - et je ne veux pas
nécessairement un chiffre très, très, très
précis aux crédits budgétaires - présentement,
l'argent qui est retenu par l'ordre collégial pour fins de recherche?
C'est des centaines de milliers de dollars? C'est des millions de dollars?
C'est combien? Est-ce que vous êtes en mesure d'estimer à peu
près combien d'argent actuelle- ment l'état
québécois véhicule en recherche, indépendamment de
sa qualification, qu'elle soit appliquée, fondamentale, technologique ou
autre, à l'ordre collégial?
Mme Giard: On parle de 10 000 000 $ pour le financement de source
gouvernementale. Bien sûr, ça, ça n'inclut pas la part des
entreprises dans la recherche technologique, ça n'inclut pas les
subventions de source fédérale et ça n'inclut
peut-être pas les subventions d'autres ministères que le
ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science, mais
elles sont, de toute façon, beaucoup moins considérables. Nous
estimons actuellement à 10 000 000 $ le financement de la recherche dans
les collèges. Ça, ça inclut les budgets de fonctionnement
de la recherche et les dégagements d'enseignement dont les chercheurs
doivent bénéficier pour pouvoir faire la recherche. Notre
recommandation est à l'effet de - et c'est une recommandation qui est
endossée largement dans le réseau - doubler ce montant-là
sur les 10 prochaines années, par exemple, donc, d'y aller avec une
augmentation graduelle.
M. Gendron: O.K. Quand vous parlez de doubler le budget actuel,
vous pariez de doubler ce que vous venez d'indiquer.
Mme Giard: Oui. Voilà.
M. Gendron: Je vous remercie beaucoup.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. Mme la ministre.
Mme Robillard: Ça va très bien. Moi,
j'apprécie beaucoup que vous soyez venus témoigner en commission
parlementaire. Le seul point à ma réflexion, c'est... Vous le
savez, j'ai déjà pris position sur la recherche au
collégial. J'ai publiquement dressé les orientations en
matière de recherche au collégial. Là, ce que vous nous
apportez de plus, c'est de dire une reconnaissance officielle. Je veux tout de
suite rassurer M. le professeur que, même si les gouvernements changent,
la question de l'éducation se situe au-dessus de toute partisanerie.
Soyez assuré que...
M. Gendron: En commission.
Mme Robillard: Pas en Chambre. Pas en Chambre. Dans le fond des
dossiers, je suis certaine que mon collègue va être d'accord avec
moi. Mais ce que vous apportez aujourd'hui, c'est de dire: II faudrait le
reconnaître formellement. Comment le faire sans faire une duplication par
rapport à ce qui se passe à l'ordre universitaire? Et là,
moi, je ne voudrais absolument pas que ce soit dans ce contexte-là.
Donc, vous suscitez la réflexion chez les membres de la commission.
Merci bien d'être venus témoigner.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, merci, au nom des
membres de la commission de l'éducation, d'être venus nous
présenter votre mémoire. La commission va suspendre ses travaux
jusqu'à 15 heures cet après-midi.
(Suspension de la séance à 12 h 26)
(Reprise à 15 h 6)
Le Président (M. Tremblay, Rimouski):
Alors, mesdames et messieurs de la commission, nous allons poursuivre
notre travail et je demanderais au cégep de Bois-de-Boulogne de se
présenter. Vous êtes déjà là, mesdames et
messieurs. On vous demanderait, M. le président, de nous
présenter les personnes qui vous accompagnent.
Collège de Bois-de-Boulogne
M. Lachance (Bernard): M. le Président, Mme la ministre de
l'Enseignement supérieur et de la Science, M. le critique officiel de
l'Opposition en matière d'éducation, Mmes et MM. les membres de
l'Assemblée nationale, permettez-moi d'abord de vous remercier, au nom
du collège de Bois-de-Boulogne de nous accueillir à cette
commission.
J'ai le plaisir de vous présenter les membres de la
délégation de la communauté collégiale de
Bois-de-Boulogne. Ces personnes ont tenu plusieurs séances de travail
à l'intérieur d'un comité-conseil et ont accepté de
venir partager leur réflexion avec vous. D'abord, la
vice-présidente du conseil d'administration du collège, à
ma droite, Mme Sylvie Desjardins, qui siège à titre de membre
socio-économique. Mme Desjardins est commissaire industrielle à
la Commission d'initiative et de développement économiques de la
ville de Montréal. C'est aussi une ancienne étudiante du
collège. Elle remplace le président du conseil, M. Edgard Delvin,
qui regrette de ne pouvoir participer à vos travaux aujourd'hui. Mme
Sylvie Desjardins est accompagnée, aujourd'hui, de Mmes Martine Blache,
à mon extrême gauche, conseillère pédagogique
à l'éducation des adultes, et Danielle Schmouth, professeure en
soins infirmiers, ainsi que par MM. Georges Beaulieu, à ma gauche,
secrétaire du comité et conseiller au développement
institutionnel et Louis-Mathieu Loiselle, étudiant en lettres, qui est
à mon extrême droite. M. Beaulieu est le rédacteur du
mémoire du collège. Je me présente, Bernard Lachance, je
suis le directeur général du collège. J'agirai comme
meneur de jeu de notre délégation et j'inviterai mes
collègues à fournir, au fil des questions, des témoignages
ou des commentaires complémentaires à mes propos. Alors, sans
plus tarder, j'aimerais...
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): M. le meneur de jeu,
permettez-moi de vous signifier que vous avez une heure pour vous faire
entendre, partagée comme ceci: 20 minutes pour vous, 20 minutes pour le
parti ministériel et 20 minutes pour l'Opposition.
Et nous avons le privilège d'avoir parmi nous le
député de votre circonscription, M. Bordeleau, qui est ici
présent. Alors, vous pouvez y aller, M. Lachance.
M. Lachance: J'aimerais céder la parole à Mme
Sylvie Desjardins qui vous livrera un résumé de la
réflexion faite par le collège dans te cadre de ces travaux. Mme
Desjardins.
Mme Desjardins (Sylvie): M. le Président, Mme la ministre
de l'Enseignement supérieur et de la Science, M. le critique officiel de
l'Opposition en matière d'éducation, Mmes et MM. les membres de
l'Assemblée nationale, à la suite de l'annonce faite par la
ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science, Mme Lucienne
Robillard, de la tenue de ces audiences, le conseil d'administration de notre
collège a considéré qu'il était essentiel que
l'ensemble de la communauté collégiale de Bois-de-Boulogne
réalise une démarche de réflexion.
Il nous apparaissait, en effet, primordial que le point de vue qui vous
serait présenté reflète la vision de notre
communauté. Comme cette commission doit être suivie d'un
énoncé d'intention gouvernemental qui amènera sans doute
des changements, nous pensions aussi qu'il serait important que notre
communauté ait déjà amorcé le processus de
réflexion qui devra accompagner une réforme. Nous avons donc
constitué un comité composé de 14 personnes
représentant les différents groupes qui interviennent directement
dans la vie de notre collège. (15 h 10)
Pour donner suite aux interrogations soulevées par la ministre de
l'Enseignement supérieur et de la Science lorsqu'elle a annoncé
la tenue de la commission, le comité a piloté une large
consultation dans la communauté. Le mémoire que nous vous avons
soumis au début d'octobre vous présente assez fidèlement,
pensons-nous, l'état de notre réflexion collective à ce
moment-là. Chacune des recommandations a été
débattue et adoptée à l'unanimité au conseil
d'administration du collège. Ce mémoire est donc institutionnel.
Il vous présente à la fois l'autoportrait de notre
communauté, de nos interventions et des valeurs qui nous animent. Il
vous présente aussi les préoccupations majeures qui nous habitent
et quelques pistes pour l'avenir.
Nous avons suivi les travaux de la commission. Nous savons que des
questions que nous soulèverons aujourd'hui ont déjà
été largement traitées. Nous essaierons donc d'aller
à l'essentiel et à ce qui nous semble un peu original, en vous
disant que cet essentiel pour nous, ce sont
d'abord les étudiants, ces étudiants qui doivent gagner
leur cégep, qui doivent le vivre, parce qu'à notre point de vue
le cégep s'impose.
Un portrait rapide de notre collège, M. le Président, vous
permet de constater que nous avons un peu plus de 3000 étudiants
réguliers répartis en huit programmes de formation, quatre
programmes préuniversitaires et quatre programmes techniques qui ont,
dans certains cas, plusieurs voies de spécialisation. Nous avons, bon
an, mal an, quelque 10 000 étudiants adultes inscrits dans un grand
nombre de programmes de formation, dont plusieurs étant inscrits dans un
processus de perfectionnement dans le cadre d'activités de formation sur
mesure. De fait, nous avions, l'an dernier, 160 entreprises clientes pour
lesquelles nous avons construit, développé ou simplement offert
des activités et des programmes de formation.
Que ce soit à l'enseignement technique, à l'enseignement
préuniversitaire ou en formation sur mesure, nous croyons que
l'étudiant doit être le centre de nos préoccupations.
À travers nos activités quotidiennes, nous tentons de promouvoir
le souci du travail bien fait, la persévérance à la
tâche, la rigueur alliée à la souplesse, l'autonomie et la
responsabilisation, le respect des autres et le respect des autres cultures, la
maîtrise de la langue, l'harmonisation et l'ouverture au monde. Nous
croyons que, si on a droit au cégep, on doit aussi le mériter
avant et pendant son séjour au collège. La pratique nous
démontre qu'il est essentiel que les étudiants aient atteint un
certain niveau de connaissances et de préparation avant d'arriver au
collège. Nous essayons, par des tests avant l'entrée, de
dépister les difficultés des étudiants. Nous avons mis en
place, depuis plusieurs années, des activités de rattrapage. Nous
pensons que cela doit être maintenu et encouragé, même si
cela est très exigeant.
Mais nous avons aussi, expérience à l'appui,
réalisé qu'il y a un certain seuil en dessous duquel tous les
efforts de rattrapage sont presque vains. Une étude menée par des
professeurs de français nous a montré notamment que,
malgré des mesures concrètes et importantes d'encadrement et de
pédagogie corrective, à peine 20 % des étudiants soumis
à un tel régime d'appoint arrivaient à s'en sortir. Les
autres, soit 80 %, n'auraient pas les bases requises en français pour
rattraper le reste de la cohorte.
D'autre part, nous croyons que, pour l'ensemble des étudiants, en
plus des nombreuses activités d'accueil et d'intégration
déjà organisées par notre collège et, à
notre connaissance, par la plupart des collèges du réseau, il
serait important d'offrir à chaque étudiant, à son
arrivée au collège, des activités d'introduction à
la vie collégiale et, entre autres, à la méthodologie du
travail intellectuel. Mais le cégep, ça se gagne aussi quand on y
est et, à cet égard, nous pensons qu'il y a lieu de parfaire les
mécanismes actuels d'évaluation des apprentissages et de soutenir
l'expérimentation de formes diverses d'évaluation de
synthèse.
D'autre part, pour répondre à des besoins en enseignement
coopératif, pour tenir compte des besoins différenciés des
étudiants et des rythmes variables d'apprentissage, de
difficultés temporaires que peuvent rencontrer des étudiants,
nous souhaitons que les étudiants puissent avoir la possibilité
réelle d'utiliser la période d'été pour faire des
ajustements individuels, par exemple à la suite d'un changement
d'orientation ou d'un échec, ou encore dans le cadre de projets
spéciaux tels que les stages en milieu de travail.
La réforme qui suivra la commission parlementaire devra
être centrée sur l'étudiant. Nous affirmons que la mission
de l'éducation collégiale est de former des individus autant que
de former des travailleurs. Le collège est un lieu de passage entre
l'adolescence et l'âge adulte, entre le secondaire et
l'université, entre le secondaire et le marché du travail, entre
le marché du travail et un changement dans sa carrière. Cela
impose la nécessité de déterminer le point de
départ, le seuil ou le diagnostic, la nécessité de fixer
le point de sortie du curriculum; d'où l'importance de fixer des
exigences claires d'entrée et de sortie pour chaque ordre d'enseignement
et de les diffuser largement auprès de la population. Cela impose
également la nécessité de s'assurer que les
étudiants perçoivent tout au long de leur curriculum la
pertinence et la raison d'être des disciplines générales
dans leur formation.
En ce qui a trait aux étudiants adultes, M. le Président,
permettez-nous de vous souligner à quel point il nous semble qu'ils sont
peu ou pas considérés, que ce soit au niveau de l'accès
à des cours, de l'offre de cours ou encore sur le plan des conditions
aussi terre à terre que le refus du Conseil du trésor de financer
les locaux pouvant les accueillir. Ainsi, depuis quatre ans, la diminution des
groupes subventionnés autant par la CFP ou la DGEC est de 119, ce qui
correspond environ à 2400 étudiants adultes de moins qui auraient
pu poursuivre une formation. Pour eux, contrairement aux autres
étudiants, le problème de l'accès demeure entier.
Nous affirmons aussi dans notre mémoire que le collège se
vit, que le collège est, en quelque sorte, un laboratoire de la vie.
Nous croyons que le collège québécois doit offrir un cadre
propice à l'apprentissage de la vie par les études et par les
autres expériences de la vie étudiante, les études
demeurant le principal catalyseur du développement personnel et la
source de la compétence, mais la vie étudiante étant un
laboratoire merveilleux. D'ailleurs, lorsque nous interrogeons nos anciens
étudiants sur les expériences les plus significatives de leur
passage au collège, ils font souvent référence à
des expériences vécues en marge de la pédagogie.
Cette question a été soulevée par quelques
regroupements d'étudiants qui se sont présentés à
la commission parlementaire. Nous croyons qu'il y a lieu de valoriser le temps
des études, de favoriser l'engagement des étudiants dans la vie
étudiante et, donc, de reconnaître les activités de la vie
étudiante comme faisant partie intégrante de la mission des
collèges et de prévoir au bulletin de l'étudiant une
mention de la réalisation de telles activités.
Cela, M. le Président, parce que dans tous les discours, dans les
interventions que nous avons remarquées d'interlocuteurs aussi
prestigieux que le Conseil des collèges, il en a été
finalement fait peu mention. Nous constatons que cette partie de la formation
des étudiants, difficilement normalisable, est souvent le premier objet
des réductions et des compressions, et le mode de financement par
période d'enseignement/semaine pondérée pourrait, en bout
de course, faire abstraction de la vie de celui ou de celle qui
fréquente le collège, l'étudiant.
Nous passons rapidement sur des questions qui ont été
largement abordées à la commission, telles que l'approche
programme, le tronc commun obligatoire, pour nous arrêter sur cette
importante question de la responsabilisation des collèges. Notre
collège a misé sur la responsabilisation de ses unités de
travail, celle du département, de ses employés et aussi de ses
étudiants qu'il accompagne dans leur cheminement. Nous pensons que le
ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science doit faire
de même avec ses collèges qui ont atteint, pensons-nous, la
maturité nécessaire pour assumer pleinement l'ensemble de leurs
responsabilités. Aussi, insistons-nous sur le fait qu'il faille aider
les collèges à mettre progressivement en place des
mécanismes institutionnels d'évaluation des apprentissages,
allant jusqu'aux examens de synthèse, et à procéder
systématiquement à l'évaluation de leurs
procédés et méthodes. Nous pensons aussi qu'il est
Important de laisser aux collèges le soin d'ajuster et de
développer, en compagnie des entreprises et des autres acteurs de la
formation, une partie importante des contenus des programmes de formation. (15
h 20)
Bien sûr, il doit y avoir un tronc commun qui permette de garantir
l'acquisition par tous les étudiants d'un minimum d'acquis fondamentaux
et qui permette aussi des interfaces, des changements de programmes. Des
objectifs communs des programmes devraient être, autant que faire se
peut, concentrés dans la première année. Par la suite, il
serait souhaitable que les collèges puissent développer et
adapter, au fur et à mesure des changements qui se font de plus en plus
rapides, les contenus de leurs programmes. A cet égard, notre
collège mène actuellement, avec des regroupements d'entreprises
en services financiers et en commerce international, des expériences
fort intéressantes.
Pour renforcer davantage l'autonomie et responsabiliser davantage les
collèges, nous croyons également que le ministère devrait
envisager des formules de financement sur plusieurs années, qu'il
devrait décentraliser certaines enveloppes gérées
nationalement, telles que les enveloppes liées à la recherche ou
au perfectionnement, qu'il devrait aussi donner à chaque collège
les crédits suffisants pour le renouvellement graduel des
équipements technologiques. En contrepartie, nous croyons que chaque
collège devrait rendre compte publiquement et annuellement de ses
activités, que cela se fasse par l'examen d'un organisme externe ou
encore par des audiences publiques du ministère.
Enfin, Mme la ministre, nous voulons insister sur l'importance des
personnels qui composent notre collège, de leurs qualifications, de la
qualité de la relation que ces éducateurs doivent maintenir avec
les étudiants, du temps qu'ils doivent avoir à leur consacrer. Un
problème important et bientôt urgent: le renouvellement du
personnel actuel de nos collèges. Il sera nécessaire que les
collèges disposent des clés pour transférer les
compétences développées par le personnel actuel aux
nouveaux enseignants et aux futurs professionnels, pour planifier le
développement et choisir leurs ressources humaines. Il faut donc revoir
les mécanimes actuels qui donnent peu de latitude aux collèges.
La profession d'éducateur a été beaucoup
dévalorisée par notre société depuis 10 ans. Cela
est anormal. Dans les grandes sociétés modernes, les
éducateurs sont grandement respectés. Il faut qu'il en soit ainsi
au Québec. Il faut que la profession d'éducateur, dans toute sa
noblesse, redevienne attrayante pour les femmes et les hommes les plus
dynamiques et les plus compétents de notre société.
En conclusion, M. le Président, nous ne prétendons pas que
tout soit actuellement parfait. Nous savons qu'il y a encore place à
l'amélioration. Vous pouvez donc compter sur un corps professoral qui a
atteint une grande maturité, qui est capable d'autonomie et de
responsabilité suffisantes, à notre point de vue, pour s'engager
avec vous dans une réforme. Sachez, de plus, que les étudiants
que nous côtoyons chaque jour dans nos établissements ont à
coeur de collaborer à l'amélioration de leur milieu de formation.
Ils ont les idées claires et l'enthousiasme de la jeunesse. Ils sont
aussi réalistes et exigeants. Il est cependant essentiel que cette
réforme se fasse en associant tous les intéressés, en
tenant compte du vécu des uns et des projets des autres.
Notre collège, quant à lui, doit être en mesure
d'assumer aussi pleinement ses responsabilités. Cela pourrait même
nous conduire à l'émission de nos propres diplômes. Cette
réforme devra être bien planifiée. Elle devra s'articuler
correctement aux autres ordres d'enseignement et aux besoins des autres
intervenants. Elle devra
aussi s'inspirer d'une certaine vision futuriste et laisser, par
exemple, s'implanter dans les collèges des programmes qui soient aussi
des projets éducatifs, des projets favorisant l'engagement des
étudiants, les préparant à vivre dans une
société où ils devront apprendre continuellement et
s'adapter aussi continuellement.
Le collège, c'est le temps des études et de la vie
étudiante. Le collège, c'est le lieu qui prépare des
étudiants à s'engager au service de la société.
Voilà pourquoi nous vous recommandons de retenir comme critère de
décision conduisant à la réforme de l'enseignement
collégial la nécessité de maintenir constamment
l'étudiant au centre des préoccupations des collèges, bien
entendu, mais aussi du ministère et du gouvernement. Ce ne sont
là que quelques éléments de notre réflexion. Les
membres de notre délégation et moi sommes maintenant
disposés à répondre à vos questions sur ces sujets
et sur l'ensemble des éléments soulevés par notre
mémoire. Merci de votre attention.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski):
Alors, Mme Desjardins, je vous remercie de votre présentation. Je
vais maintenant céder la parole à Mme la ministre de
l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Science. Mme la
ministre.
Mme Robillard: Merci, M. le Président. Bienvenue aux gens
de Bois-de-Boulogne, à toute l'équipe, parce que je
m'aperçois que le mémoire a fait l'objet, justement, d'une large
participation au sein du collège, jusqu'à l'acceptation par le
conseil d'administration. Je pense que c'est toujours important de voir un
mémoire entériné par les différentes instances du
collège, il me semble qu'il a une signification encore plus
prononcée que d'autres.
Donc, je suis très heureuse que vous ayez décidé de
produire ce mémoire, sachant un peu ce qui se passe aussi à
Bois-de-Boulogne. Je me souviens très bien de ma visite chez vous. Je
trouve qu'à l'intérieur de votre mémoire vous avez fait
ressortir, je dirais, votre spécificité par la façon de le
présenter et la place aussi que vous donnez aux étudiants.
Ma première question serait, je dirais, sur les
originalités de Bois-de-Boulogne, et vous l'avez très bien
mentionné au point de départ quand vous nous avez dressé
le portrait de votre institution. À la page 5 de votre mémoire,
je me réfère à certaines des caractéristiques. Je
me souviens très bien qu'au dernier test de français, le 13 mai
1992, Bois-de-Boulogne s'est situé, au niveau des résultats,
au-dessus de la moyenne provinciale. Et, dans cette page, vous nous indiquez
très bien que vous avez une politique extrêmement précise
relativement à la valorisation de la langue française chez vous.
J'aimerais ça, d'une façon très, très
synthétique, que vous nous indiquiez les éléments de cette
politique.
M. Lachance: M. le Président, Mme la ministre,
effectivement, le collège a élaboré et adopté, l'an
dernier, une politique de valorisation de la langue française, qui
faisait suite à une réflexion amorcée, je dois le dire,
depuis presque une dizaine d'années, et un certain nombre d'actions qui
ont été entreprises au fil des ans.
La caractéristique de Bois-de-Boulogne, bien sûr, c'est que
nous avons une clientèle qui est d'origines ethniques variées.
Nous avons, effectivement, en tout cas, nous avions dans notre dernier
recensement, celui qu'on a fait en 1990, 23 % de nos étudiants qui
étaient nés à l'étranger et 35 % de nos
étudiants sont d'origines ethniques autres que francophone. Alors,
déjà, ça vous montre un peu les particularités, les
difficultés qu'on peut rencontrer dans notre collège. Nous avons
donc dû faire des démarches à la fois pour intégrer
ces clientèles-là, leur permettre de vraiment s'adapter à
notre milieu, et aussi pour leur donner tous les outils pour développer
leurs capacités langagières.
Dans les faits, on a aussi établi, depuis des années, un
mécanisme qui nous permet de valider, de vérifier, avant
l'entrée au collège, les compétences linguistiques de nos
étudiants. J'ai quelques chiffres que j'ai apportés avec moi. On
a constaté notamment qu'il y a eu une amélioration par rapport
à la qualité langagière de nos étudiants, puisque,
il y a deux ans, en 1990, c'est 20 % de nos étudiants qui devaient,
à l'entrée, suivre des cours de rattrapage ou des cours de
français langue seconde et, maintenant, le pourcentage est rendu
à 12 %, ce qui nous semble indiquer une amélioration de la
qualité et ce qui modifie un peu l'organisation.
Donc, nous avons deux politiques. Une première qui est une
déclaration d'intention sur l'éducation interculturelle, qui a
été faite pour, je dirais, donner les grandes orientations de
notre collège en ce qui a trait à l'Intégration des
étudiants des communautés ethniques. Dans cette
déclaration d'intention, nous disons, bien sûr, que nous devons
favoriser l'éducation interculturelle, mais nous disons aussi que notre
collège est un collège francophone qui doit promouvoir la culture
québécoise, la culture française et la langue
française. Donc, nous nous identifions clairement comme un
collège qui fait la promotion et qui croit, je dirais, aux valeurs de la
culture québécoise et de la culture française. (15 h
30)
Deuxièmement, nous avons adopté une politique
linguistique. Ça ne s'est pas fait sans heurts: ça s'est fait, je
dois dire, au fil des expérimentations. Cette politique-là
prévoit des mesures pour identifier les difficultés
langagières de nos étudiants, des mesures correctrices,
d'accompagnement. Alors, il y a des cours de français langue seconde,
des cours de français correctif, mais il y a aussi des activités
d'accom-
pagnement par un Service d'aide à la langue française.
Mais cette politique-là va plus loin. Elle précise notamment que,
dans l'embauche du personnel, nous devons maintenant vérifier la
qualité du français écrit, du français oral de nos
employés ou de nos futurs employés. Elle précise aussi que
nous devons mettre en place des programmes de perfectionnement pour les
personnels pour les aider. Et elle va jusqu'à prévoir des
mécanismes pour développer des outils. Par exemple, en
français langue seconde, nous sommes en train de finaliser une recherche
sur les difficultés langagières de certains groupes ethniques et
nous sommes en train de développer des actMés
particulières de formation pour ces étudiants-là. Alors,
des mesures qui sont vraiment très ciblées. Je ne sais pas, Mme
la ministre, si ça répond à votre question.
Mme Robillard: Oui, merci, M. Lachance. Vous avez aussi, à
Bois-de-Boulogne, une charte des droits des étudiants. Alors, j'aimerais
peut-être entendre M. Loiselle (Louis-Mathieu) nous parler du contenu de
cette charte-là et comment les étudiants réagissent au
fait d'avoir une telle charte à Bois-de-Boulogne.
M. Loiselle (Louis-Mathieu): Mme la ministre, M. le
Président, je dois dire que, présentement, l'association, depuis
le début de l'année, a quelques difficultés, ce qui fait
que cette charte-la est malheureusement mal connue des étudiants.
Cependant, il y a quand même plusieurs étudiants qui sont venus
nous voir, qui sont venus en prendre connaissance - même si elle est
diffusée dans l'agenda, dans le guide étudiant - qui sont venus
demander des détails. On a, d'ailleurs, une conseillère
pédagogique qui travaille beaucoup, beaucoup à partir de cette
charte-là et qui prévoit, bon, informer un peu plus.
Mme Robillard: Qu'est-ce qu'il y a dans cette
charte-là?
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Les droits et
libertés de l'étudiant.
M. Loiselle: Merci, M. le Président. Des voix: Ha,
ha, ha!
M. Loiselie: Cette charte-là, peut-être que ma
conseillère pédagogique serait plus en mesure de vous
répondre là-dessus, mais je pourrais tout de même vous
dire... Pardon?
M. Gendron: Vous êtes équipé, une
conseillère pédagogique pour vous.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Loiselle: Mais je peux quand même tenter de
répondre.
Mme Robillard: Les grandes lignes. Je ne veux pas le
détail, les grandes lignes.
M. Loiselle: Cette charte-là fait état des droits
qui sont absolument essentiels. Ce n'est pas très compliqué, mais
ça va dans les grandes lignes des droits qu'un étudiant se doit
d'être conscient qu'il a face à ses professeurs, face à
l'évaluation dont il fait l'objet, face à d'autres
employés. Et il y a quand même une dimension, même si le nom
ne le dit pas, de grande responsabilité des étudiants. Il y a
quand même des responsabilités qui transparaissent à
travers cette charte-là. C'est ce que je peux vous répondre.
Mme Robillard: Donc, c'est une charte des droits et des
responsabilités aussi. C'est ça que vous me dites, là?
M. Loiselle: Je n'irais pas jusque-là. Non. J'ai dit que
certaines responsabilités transparaissaient, mais ce n'est pas l'objet
de la charte.
M. Gendron: C'est comme un contrat d'assurance, c'est
écrit en plus petit.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Robillard: Oui, M. Lachance.
M. Lachance: Pour préciser un petit peu, cette
charte-là a été adoptée il y a déjà
plus d'une dizaine d'années. D'abord, il y a des mécanismes de
diffusion, quand même. Dans le guide de l'étudiant, que nous
remettons à chaque étudiant avant son entrée au
collège, la charte est comprise, de même que dans le guide-agenda
qui est remis au début de l'année. Et cette charte-là
Indique quels seront les droits de nos étudiants, effectivement. Elle
prévolt aussi des mécanismes de recours et elle tente d'habiliter
les étudiants à utiliser ces mécanismes de recours
lorsqu'ils croient que leurs droits sont effectivement entachés. Et je
dois dire qu'elle est accompagnée d'un certain nombre de mesures, je
dirais, pour faire de l'action éducative contre le racisme. Nous avons
publié, chez nous, un guide contre la discrimination raciale. Nous avons
diffusé aussi et nous avons un comité qui travaille contre le
harcèlement sexuel. On a un certain nombre de mesures comme cela qui
sont davantage, dans le fond, axées sur les droits de certains groupes
ou sur le respect des droits des autres.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Très bien. Je
vais maintenant reconnaître le critique officiel de l'Opposition, le
député d'Abitibi-Ouest. M. le député...
M. Gendron: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): ...et
critique.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Tremblay, Rimouski):
Constructive.
M. Gendron: C'est parce que vous le connaissez moins que je le
connais, alors...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Gendron: On n'est jamais certain qu'il a fini.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Gendron: Chers amis... Merci, M. le Président.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Gendron: Sincèrement, je suis heureux que vous soyez
des nôtres. Je tenais, moi, dès la présentation de cette
commission parlementaire, à ce que nous puissions entendre le plus grand
nombre de collèges. Je pense que tous les collèges qui ont pris
la peine de préparer un mémoire, surtout quand on l'a fait
collégialement comme le vôtre, ça valait la peine que nous
puissions avoir l'occasion de les entendre, comme membres de cette commission.
Ça fera sûrement plaisir également à la CEQ de voir
que, dans la présentation, il y a au moins l'égalité
souhaitée, en termes de société: trois
représentants de la gent féminine et trois représentants
masculins. C'est parce que, ça, vous ne le savez pas, mais ils avaient
fait un petit relevé et ils étaient très inquiets, avec
raison, en disant: «L'importante faiblesse de la représentation
féminine n'illustre en rien la place que les femmes occupent dans la
sphère de l'enseignement et est porteuse d'un message éducatif et
démocratique dont on ne peut que se désoler» en
dénonçant la sous-représentation. Alors, vous venez
équilibrer un petit peu leurs statistiques. Merci beaucoup.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Gendron: Trêve de plaisanteries. Vous avez un excellent
mémoire, dans son contenu. Vous avez une forme visuelle
intéressante parce que, rapidement, dans le mémoire, on peut
très bien comprendre les points sur lesquels vous avez tenu à
nous éclairer davantage. Et tout cégep qui se donne la peine de
faire une vingtaine de recommandations, quelles qu'elles soient, mérite,
je pense, notre considération comme membres de cette commission parce
que c'est sûrement un apport contributif important à la
réflexion qui nous anime.
Quelques questions, rapidement, pour profiter le plus de votre
présence. Dans la troisième recommandation, vous êtes le
deuxième ou le troisième cégep qui, à ma
connaissance, fait une recommandation de ce type. Par contre, pour qu'elle soit
appréciée davantage, j'aimerais, rapidement, que vous
l'interprétiez d'une façon un peu plus précise. De dire
«que chaque étudiant, à son arrivée au
collège, bénéficie d'activités d'introduction
à la vie étudiante collégiale comprenant - moi, je trouve
que c'est important, ça a été remarqué par
plusieurs - entre autres, la méthodologie du travail
intellectuel», est-ce à dire formellement que vous souhaitez
l'offrir comme cours obligatoire? Est-ce que vous pensez que ça devrait
être quelque chose qui soit réglementé ou si c'est une
initiative du collège, dont vous êtes? J'aimerais avoir plus de
précisions.
M. Lachance: M. le député d'Abitibi-Ouest, je peux
vous dire, pour vous rassurer, que la clientèle du collège de
Bois-de-Boulogne est composée à plus de 60 % de jeunes femmes qui
se destinent à des carrières fort prometteuses et qui, sans
doute, pourront corriger la situation dont vous parliez et que la CEQ a
énoncée.
Alors, dans les faits, oui, nous constatons, au collège, que les
étudiants qui arrivent chez nous sont inégalement
préparés au travail intellectuel, comme ils sont
inégalement préparés à la vie collégiale.
Dans ce sens-là, nous pensons qu'il faut instaurer, de façon
institutionnelle, un cours ou, tout au moins, des activités
d'introduction à la méthodologie intellectuelle. Je vais laisser
la parole à M. Beaulieu, qui va vous présenter, de façon
plus complète, la réflexion que nous avons faite
là-dessus.
M. Beaulieu (Georges): Sur la question de la méthodologie,
il y a deux aspects qu'il faut signaler. Il y a une carence
légère qu'on constate chez un certain nombre d'étudiants
qui arrivent du secondaire, qui ne sont pas tous passés par des
écoles qui les ont bien préparés à travailler d'une
façon systématique, rigoureuse, organisée. Là, il y
a une carence normale qu'il faut combler et on pense qu'on peut la combler,
comme on le fait pour les questions de langue, par des moyens, des mesures
légères, des mesures de type atelier, des formules comme
ça. On ne pense pas que ça mérite d'être reçu
sous la forme de cours et que ça doit être traité par des
cours et par des mesures créditées, avec crédits. Mais il
faut s'en occuper, il faut avoir les ressources pour le faire, comme il faut
des ressources pour s'occuper des questions de langue, des questions de
valorisation de la langue dans le collège.
Il y a l'autre aspect de la méthodologie qui est un petit peu
plus difficile et qui est toute la question des méthodes, des techniques
que chacune des disciplines doit' enseigner et, finalement, passablement de
disciplines sont là pour apprendre à travailler et apprendre
à apprendre.
Donc, il faut s'en occuper et ça pourrait supposer que ce soit ou
par un cours de méthodologie, formellement, ou, peut-être de
façon plus intéressante, à l'intérieur de chacun
des premiers cours de la session d'un étudiant. (15 h 40)
M. Gendron: Mais regardez, M. Beaulieu, je m'excuse, ça
va, là, mais, très rapidement, ce que je voulais
apprécier, c'est lorsqu'un collège fait une recommandation au
ministère: Vous devriez faire ceci... Là, vous êtes en
train de m'expliquer l'utilité, la nécessité et le
bien-fondé d'agir à ces égards-là, et j'en suis, je
n'ai aucun problème avec ça. Je trouvais juste intéressant
d'évaluer si, effectivement, il y aurait lieu de le systématiser
un peu plus pour que ça devienne une orientation au ministère.
Là, vous me dites: Non, on ne veut pas que ça soit dans les cours
obligatoires. C'est parce que, à un moment donné, nous, il va
falloir conclure et traduire ça concrètement.
M. Beaulieu: Oui.
M. Gendron: Je n'ai rien contre la recommandation, mais, en ce
qui me concerne, selon ce que vous êtes en train de me dire, elle
s'appliquerait moins au ministère. C'est une indication que vous
souhaitez que les collèges soient sensibles à cette
réalité-là et vous allez prendre les dispositions pour y
remédier. Est-ce que c'est de même que je dois lire votre
recommandation?
M. Beaulieu: On peut conclure de deux façons. On peut
conclure en mettant un cours, formellement; on peut conclure en changeant la
pondération des cours de première session, de première
année, pour arriver à avoir des ateliers d'entraînement au
travail intellectuel. On pourrait organiser des visites en bibliothèque,
on pourrait organiser du travail de laboratoire. Ça suppose des moyens.
Donc, on peut changer la pondération d'un certain nombre de cours qui
sont des cours d'introduction.
M. Lachance: II y a quand même des hypothèses qu'on
émettrait. Il y a même des hypothèses qu'on a
émises, d'ailleurs, lors d'un colloque qui a eu lieu sur la
qualité de la langue française. C'est que, éventuellement,
la pondération de certains cours - on pense, entre autres, à
certains cours de français - puisse être modifiée et qu'il
y ait, dans la pondération, une partie des travaux pratiques de
laboratoire qui soit centrée sur la méthodologie; donc, au lieu
d'avoir des cours 303, d'avoir, par exemple, un cours 323.
M. Gendron: Merci. L'autre point que je veux toucher, toujours
rapidement, mais uniquement pour l'apprécier d'une façon plus
serrée, vous avez eu l'honnêteté d'indiquer que vous avez
suivi les débats. Vous savez ce qui s'est passé ici. Donc, il n'y
a pas beaucoup de collèges qui n'ont pas parlé de la
nécessité de l'évaluation. Par contre, là-dessus,
il faut, d'après moi, être encore plus précis et plus
serré et, vous ayant, j'aimerais ça que vous appréciiez le
commentaire que je vais faire.
Je pense qu'il n'y a pas beaucoup de collèges qui ne
réclament pas, et avec raison, plus d'autonomie. Je pense que, si jamais
la ministre - et je souhaite qu'elle le fasse, je le dirai d'une façon
plus pointue demain - effectivement donne pas mal plus d'autonomie aux
collèges, par définition, plus d'autonomie, ça prend un
élément de contrepoids. Et comme l'élément de
contrepoids, d'après moi - à moins que je ne connaisse rien
là-dedans, et c'est possible - il faut absolument qu'on envisage des
évaluations externes. En termes très clairs, un collège
qui me dit: Écoutez, laissez-nous ça, moi, je dis: Je ne te le
laisse pas, pas parce que je ne veux pas, c'est parce que c'est normal que tu
en fasses, de l'évaluation. Un collège qui me dirait qu'il ne
fait pas d'évaluation chez lui, je «feelerais» inquiet pour
l'avenir. Mais, à partir du moment où il y a 1 200 000 000 $ de
fonds publics, il faut redonner vraiment plus de crédibilité dans
l'évaluation globale de ce qui se passe dans les collèges. Alors,
pourquoi, à la recommandation 4, vous semblez, vous autres, opter
davantage pour «laissez-nous ça», ce qui n'est pas vraiment
une évaluation externe? Alors, j'aimerais ça que vous me disiez
pourquoi vous pensez que ça serait mieux «laissez-nous
ça», alors que, moi, l'autonomie, j'en suis, mais, par
définition, plus je vous donnerais d'autonomie, plus ça
requerrait, selon moi, un organisme externe d'évaluation pour faire un
peu de contrôle a posteriori, qui est l'avenir moderne des gestions des
gouvernements qui ont de l'allure. Donc, ce n'est pas pour demain.
M. Lachance: M. Gendron, nous allons un peu plus loin que la
recommandation 4, plus loin dans le mémoire, parce que nous demandons
carrément d'émettre les diplômes de nos étudiants.
Nous disons aussi, un peu plus loin, qu'en contrepartie il va falloir que nous
rendions des comptes. On ne sait pas encore quel mécanisme va être
établi, mais on pense qu'il doit y avoir un mécanisme. Ça
peut être un organisme externe. Il semble que ce soit l'approche qui soit
favorisée par bon nombre d'intervenants.
Si on prend l'exemple de l'émission des diplômes, ce qu'on
souhaiterait, c'est qu'il y ait un mécanisme d'accréditation des
collèges, programme par programme, c'est-à-dire qu'on ait, dans
le fond, comme collège, à passer régulièrement un
examen sur nos procédés, un examen sur les objectifs que nous
avons, sur la façon dont on s'y prend pour, évidemment, faire la
prestation, la formation, mais, aussi, l'évaluer, et que, après
avoir passé ces examens-là, l'organisme accrédite le
collège et dise: Oui, ce collège-là
peut, dans ce programme-là, émettre lui-même les
diplômes. Et on est prêts à retourner devant cet
organisme-là régulièrement pour rendre des comptes, pour
dire: Voici comment nous avons procédé, et recevoir aussi, bien
sûr, une évaluation formative, c'est-à-dire recevoir de cet
organisme-là des conseils, des avis qui vont nous permettre
d'améliorer le fonctionnement du collège.
M. Gendron: J'aimerais demander à M. Loiselle: Vous
êtes en collège I ou collège II?
M. Loiselle: Collège III. Des voix: Ha, ha, ha!
M. Gendron: Tant mieux! J'aimerais vous demander, M. Loiselle:
Dans la révision de la formation de base, vous, avez-vous une opinion
sur le maintien ou pas des cours d'éducation physique et de philosophie?
J'aimerais ça vous entendre un peu. Si vous êtes en collège
III, vous avez eu, comme formation de base, philosophie et éducation
physique. Est-ce que vous avez apprécié ces cours? Est-ce que
vous croyez qu'ils doivent faire partie intégrante de la formation de
base? Qu'est-ce que vous en pensez?
M. Loiselle: Je vais parler à titre personnel, bien
évidemment.
M. Gendron: Oui, c'est ce que je vous demande.
M. Loiselle: Pour ce qui est de l'éducation physique,
d'après moi, il n'y a aucun doute qu'il est essentiel d'avoir
l'éducation physique pour la santé, donc, d'éduquer
à prendre soin de son corps en même temps que de son esprit.
Peut-être que ça ne nécessite pas quatre cours.
Peut-être que ça pourrait être resserré, mais je
crois que c'est essentiel.
M. Gendron: Essentiel, et vous voulez que ça reste
obligatoire?
M. Loiselle: Certainement. M. Gendron: Merci.
Continuez.
M. Loiselle: Pour ce qui est de la philosophie, je pense,
personnellement, que les cours de philosophie, aujourd'hui, ne sont pas
très bien ancrés dans les programmes, pas très bien
ancrés dans la réalité qu'on vit dans d'autres cours.
Alors, je pense que la philosophie doit rester. Que ça garde ce
nom-là ou que ça prenne un autre nom, mais que le fond reste le
même, mais beaucoup mieux ancré en rapport avec les autres
apprentissages qu'on peut faire au cégep. Je crois, encore là,
que la philosophie ou quelque chose d'autre est essentiel.
M. Gendron: Juste pour poursuivre, si vous aviez un jugement
à porter sur la qualité de la formation de base que vous avez
reçue, est-ce que vous trouvez que vous avez reçu une assez bonne
formation de base? Est-ce que vous trouvez que la formation de base qu'on
dispense dans les collèges - je sais bien que je vous le demande
à vous; vous êtes dans un collège spécifique - c'est
une formation de base qui est assez qualifiante, qui répond aux
exigences d'avenir?
M. Loiselle: Je crois sortir bientôt avec une formation de
base assez solide. Peut-être pas assez gratifiante, à mon
goût, mais assez solide.
M. Gendron: Merci. Dans la même veine, sur la formation de
base, est-ce que le directeur général ou quelqu'un d'autre...
Effectivement, dans votre recommandation 9, toujours pour l'apprécier
à sa juste valeur: «Le collège recommande au
ministère de confirmer l'importance de la formation
générale en maintenant un tronc commun formé par les
grandes disciplines éducatives». Un tronc commun formé par
les grandes disciplines éducatives, est-ce que c'est celles que nous
connaissons ou si vous en envisagez d'autres? En termes clairs, rapidement, il
y a deux façons, je pense, d'améliorer la formation de base: ou
bien on retouche légèrement le tronc commun qu'on connaît
et on l'adapte à la réalité d'aujourd'hui, ou bien on n'y
touche pas du tout et on complète ou on élargit la formation
générale par des cours complémentaires plus d'appoint, qui
correspondent davantage aux besoins d'aujourd'hui. Laquelle des formules
privilégiez-vous?
M. Lachance: D'abord, nous pensons qu'il doit y avoir,
effectivement, un tronc commun qui soit concentré surtout en
première année pour faciliter les changements de programmes et
que ce tronc commun doit être constitué particulièrement
des cours de formation de base. Nous pensons, M. le représentant de
l'Opposition, qu'il est important de maintenir les grandes disciplines que nous
connaissons, mais qu'il y a, je dirais, des modifications importantes à
faire. Tout à l'heure, Louis-Mathieu vous parlait de philosophie; nous
savons qu'il y a actuellement une démarche nationale qui se fait pour
que s'établisse une véritable séquence. Nous pensons,
effectivement, qu'en philosophie il faut habiliter les étudiants
à développer des compétences au niveau du raisonnement
formel et qu'il faut aussi être capables de le faire au niveau de
l'éthique, des valeurs. Et, à ce niveau-là, il va falloir
probablement travailler pour que cette réflexion se fasse dans le cadre
d'une approche programme, programme par programme, dépendant du domaine
dans lequel on s'en va.
Et c'est la même chose du côté de l'éducation
physique, avec une préoccupation d'abord de
santé qui, à notre point de vue, de toute façon,
sera économiquement rentable pour la société
québécoise à moyen et à long termes, en
travaillant, d'une part, sur les habiletés de base au niveau de la
condition physique, mais aussi en habilitant les étudiants à se
doter d'une bonne condition physique, toute leur carrière durant, dans
des domaines particuliers.
M. Gendron: Vous avez placé avec raison les ressources
humaines de façon importante dans votre mémoire, ressources
humaines de qualité et de valeur. Et, à un moment donné,
dans votre recommandation 13 - ce n'est pas parce que je n'aime pas la
recommandation 13, je l'adore - vous dites à Mme la ministre: N'oubliez
pas qu'au coeur de toute réforme des cégeps il va falloir que
vous placiez l'intervenant principal, c'est-à-dire la relation
maître-élève. Et un peu plus loin, dans votre conclusion,
à la toute fin, vous revenez avec l'importance de l'élève
- et là, je ne veux pas vous citer - de l'étudiant, à la
page 28, et vous avez raison. (15 h 50)
La difficulté que j'ai pour apprécier encore
convenablement votre recommandation... Quand les éléments de
consensus, à date, c'est davantage la formation de base, les
habiletés langagières, ainsi de suite - vous les savez autant que
moi, vous dites que vous avez suivi ça - j'ai de la difficulté
à voir comment on ferait ça, dans les éléments de
réforme, s'assurer qu'on place au coeur de la réforme la relation
maître-élève. J'aimerais ça que vous me traduisiez
ça plus concrètement. Comment on va faire? Qu'est-ce qu'on
retient, dans les éléments de réforme, pour s'assurer que
cette excellente recommandation se traduise concrètement. Qu'est-ce
qu'on corrige?
M. Lachance: Alors, M. Gendron, je pense que la première
chose qu'on doit dire, ce n'est pas nécessairement dans la
réforme, c'est peut-être en modifiant les règles du jeu
actuelles qu'on pourrait, entre autres, permettre des changements importants.
Un problème qu'on rencontre, et concret, là, celui dont on vous a
parié tout à l'heure, c'est celui du remplacement de nos
enseignants qui vont quitter, qui ont acquis, après 25 ans, une
compétence tout à fait remarquable. Il va falloir penser à
des systèmes où on va recueillir ces
compétences-là, les garder et les transférer à des
nouveaux professeurs qui entrent dans le système, dans
l'institution.
Alors, le problème qu'on a, actuellement, c'est que, lorsqu'on
forme, qu'on prépare un jeune professeur, qu'on l'initie
progressivement, qu'on l'habilite à exercer son rôle, à
travailler avec les étudiants, on ne peut pas lui garantir qu'il va
rester à notre emploi. Dans les faits, ce qu'on vit, comme institution,
lorsqu'on rouvre des postes, par exemple, de professeur, on volt arriver,
à la place de ces jeunes professeurs-là qu'on a
préparés depuis quelques années, des professeurs qui nous
viennent d'autres collèges, qui ont un statut de professeur en
disponibilité, ce qui fait qu'on se retrouve devant des ressources qui
n'ont pas été habilitées ou préparées en
fonction de nos propres besoins, des besoins institutionnels. Ça, c'est
un exemple parmi d'autres. C'est des changements de cette nature-là
qu'il va falloir faire, des changements qui sont assez concrets, qui ne seront
peut-être pas nécessairement inscrits dans la réforme qui
s'en vient, mais qui sont importants.
M. Gendron: Ma conclusion, il me reste de la place pour une autre
petite question rapide. Après 12 ans de constriction - c'est ça
que je lis, là - ou de sacrifices budgétaires importants, vous
auriez à faire le choix entre étendre la gratuité ou
l'accessibilité réelle aux adultes, qu'ils soient à temps
complet ou à temps partiel, parce que, moi, je considère que,
compte tenu du phénomène de retour aux études des adultes,
il faut mettre l'accent plus qu'on ne l'a fait à ce niveau-là...
Par contre, vous aviez également une recommandation liée au
financement qui portait sur les budgets alloués aux équipements
support, aux équipements soutien. À tort ou à raison, il
n'y a pas beaucoup de collèges qui sont venus nous dire qu'ils
étaient vraiment dans une situation précaire au niveau des
équipements. Vous, vous le faites avec une recommandation très
claire à la page 18. Ma question, c'est: Entre la 19 et la 18, s'il y a
de l'argent neuf, est-ce qu'on le met à 19 ou à 18?
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Mme
Desjardins, une courte réponse, s'il vous plaît. Non, M.
Lachance.
M. Lachance: Vous me posez une question extrêmement
difficile, parce qu'on peut recevoir plus d'étudiants, mais, si on n'a
pas les équipements adéquats, on va pouvoir difficilement leur
donner un suivi. Ce qui est important, M. Gendron, c'est que ces
étudiants adultes là, je pense qu'ils sont prêts à
payer, soit dit en passant, un montant, là. Quand on leur chargeait 1 $
de l'heure, ce n'était pas un problème si grave que ça.
Les étudiants à temps partiel adultes sont prêts à
payer un petit bout. Là, le problème, c'est qu'on vient de se
faire imposer 1 $ de plus. Là, on est rendu à 2 $ et plus, 2,50
$. Alors, là, on commence à avoir un ressac important.
Et l'autre problème, c'est qu'on se fait couper des enveloppes
à la CFP et à la DGEC. Cette année, nous, on a perdu 43
groupes-élèves dans une seule année. Ça veut dire
800 étudiants qui sont privés de formation, ce qui est
extrêmement important. Alors, si on avait tout au moins le support qu'on
a, même si on charge 1 $
de l'heure, pour les étudiants à temps partiel, c'est
vivatrfe, c'est acceptable. Je pense que les adultes acceptent de payer un
petit bout. Le problème, c'est qu'un petit bout, ce n'est pas tout; et
là on est rendu à 2,50 $ l'heure, dans certains cours, soit aussi
cher qu'à l'université, et on ne peut pas émettre de
reçus, parce que ce ne sont pas des frais de scolarité, ce sont
des frais administratifs.
M. Gendron: Alors, je vous remercie beaucoup, parce qu'un
cégep riche, dans un comté riche, qui perd 43
groupes-élèves, ça m'aide, moi, pour mes
éléments de conclusion. Merci beaucoup.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Très bien. Je
vais maintenant...
M. Lachance: On n'est pas si riche que ça.
M. Gendron: Bien non. Je comprends. Imaginez les pauvres,
à c't'heure.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Très
bien.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Je vais
reconnaître maintenant le député de l'Aca-die, M.
Bordeleau, pour une question, M. le député, ou deux.
M. Bordeleau: Onze minutes.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Très
bien.
M. Bordeleau: C'est ça, M. le Président, qu'il nous
reste? Merci, M. le Président. Alors, je dois vous dire que, tout
d'abord, je suis très heureux que vous soyez venus faire une
présentation à la commission parlementaire. Comme
député du comté de l'Acadie où il y a trois
cégeps qui sont installés: Bois-de-Boulogne, Saint-Laurent et
Vanier, je dois vous dire que je vais faire attention pour ne pas créer
de remous et de conflits, mais je pense qu'on peut sûrement dire que
Bois-de-Boulogne a un esprit tout à fait particulier. D'ailleurs, le
député d'Abitibi-Ouest mentionnait tout à l'heure
l'équilibre de la délégation. Je dois lui dire que c'est
à l'image du comté et généralement, quand il y a
quelque chose d'équilibré, ça donne des bons
résultats, à Bois-de-Boulogne comme dans le comté.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bordeleau: Alors, juste un point auquel le
député d'Abitibi-Ouest faisait référence tout
à l'heure. Il parlait de la relation maître-élève.
Pour avoir eu beaucoup de contacts, depuis trois ans, avec la direction du
cégep de Bois-de-Boulogne, il y a une particularité, je pense,
à laquelle vous faites référence dans votre
mémoire, qui n'est pas sortie, je pense, suffisamment. Quand on parle de
la relation maître-élève, il y a toute la question de
l'encadrement. Dans le mémoire, à la page 14, vous faites
référence à une longue pratique que vous avez et à
certaines manifestations d'encadrement. J'aimerais peut-être que vous
nous en parliez un peu plus, parce que ça me semble être une
particularité assez importante de Bois-de-Boulogne et probablement qu'un
des facteurs de réussite aussi de Bois-de-Boulogne, c'est son
encadrement des étudiants. J'aimerais peut-être que, de
façon plus concrète, vous nous expliquiez ce que ça
implique, cet encadrement-là, en termes de ressources humaines, de
ressources financières et puis dans quelle mesure vous évaluez
que l'importance que vous accordez à l'encadrement, à
Bois-de-Boulogne, a un impact sur les résultats que les
élèves obtiennent à Bois-de-Boulogne.
M. Lachance: Rapidement, d'abord, dire que le choix qu'on a fait
au collège, ça a été de concentrer dans les
services aux étudiants l'ensemble des suivis du dossier et du
cheminement de l'étudiant, que l'encadrement commence un an avant
l'entrée, puisqu'on visite 65 écoles, dès l'automne, et
qu'on reçoit deux fois avant le début, c'est-à-dire en
mars et en juin, tous les étudiants qui sont inscrits au collège.
Par la suite, nous avons, avec la collaboration des profs, tous les profs sont
dans le coup, des mécanismes pour identifier, après un certain
nombre de semaines, les étudiants qui sont en difficulté. Chaque
fois qu'un étudiant est identifié plus d'une fois, on a une
mécanique qui fait qu'il est automatiquement rencontré par un
aide pédagogique individuel ou un conseiller pour prendre,
jusqu'à un certain point, en charge son cheminement. Évidemment,
l'encadrement se termine par une session d'examens obligatoires à la fin
de la session, qui est assez rigoureuse, je dirais assez traditionaliste aussi;
c'est une session d'examens telle qu'elle existait il y a 25 ans, il n'y a pas
eu beaucoup de modifications là-dessus, qui est très
exigeante.
Donc, je résume, là, parce qu'il y a beaucoup d'autres
mesures. On a des services d'aide en langue française, en
mathématiques, en chimie, dans un certain nombre de matières
où les étudiants ont des difficultés. Il y a
évidemment aussi beaucoup d'activités d'accueil dans chaque
département d'enseignement où les profs sont impliqués,
beaucoup d'activités de contact individuel étudiant,
élève. On a aussi ce qu'on appelle des journées de
récupération où les profs doivent être
présents et où les étudiants... Au lieu d'avoir une
semaine de relâche, une coupure complète, un congé, c'est
réparti à toutes les deux semaines pendant la session, de telle
sorte que les étudiants doivent et peuvent profiter de
ces journées-là pour faire le rattrapage
nécessaire, rencontrer leurs profs, faire, dans le fond, des
apprentissages individualisés qui leur permettent de
rééquilibrer leur fonctionnement.
Ce sont toutes des mesures comme celles-là qui sont très
attentives à la personne où, évidemment, on suit chacun de
nos élèves. Chaque élève est suivi par un aide
pédagogique individuel et ils sont répartis par ordre
alphabétique. Aussi bêtement que ça. Aussitôt qu'un
étudiant est identifié en difficulté, il y a le
mécanisme de suivi qui entre en ligne de compte. Je résume, M. le
député.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Très
bien.
M. Bordeleau: Merci.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): M. le
député, une autre question? (16 heures)
M. Bordeleau: Oui, s'il vous plaît, M. le Président.
Avec ce mode d'encadrement là, dans votre mémoire, à la
page 11, vous faites référence à une autre
réalité souvent qui est inquiétante quand on parte du
collège. À la fin du paragraphe où vous parlez justement
d'un encadrement pour étudiant responsable, vous dites, à la
toute dernière phrase: «De façon générale, la
majorité des étudiants parcourt toutefois le cursus scolaire dans
le temps prévu, et c'est ce que nous encourageons fortement».
Est-ce que vous avez des données plus précises sur le nombre
d'étudiants qui terminent, disons, à l'intérieur des
délais prévus? Et est-ce que vous pouvez comparer ça, par
exemple, à d'autres institutions collégiales ou à la
moyenne, un peu, que vous pouvez observer à ce niveau-là?
M. Lachance: Je dois dire, M. le député,
là-dessus, que nous avons le privilège de recevoir une excellente
clientèle à l'enseignement préuniversitaire. Dans trois
programmes préuniversitaires, nous faisons le choix de nos
étudiants, ce qui, évidemment, nous favorise un petit peu. Par
contre, au niveau de l'enseignement technique, nous aurions beaucoup de place
encore pour accueillir beaucoup d'étudiants, et là nous devrons
faire beaucoup plus d'encadrement.
Ceci étant dit, en fait, sur la mécanique qu'on a
établie, je vais demander à Georges de répondre à
la question.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Beaulieu: Pouvez-vous répéter, s'il vous
plaît?
M. Bordeleau: Oui. Disons que je fais référence
à la phrase où vous dites: «De façon
générale, la majorité des étudiants parcourt
toutefois le cursus scolaire dans le temps prévu».
M. Lachance: Alors, au Bois-de-Boulogne...
M. Bordeleau: Alors, ça veut dire quoi,
concrètement?
M. Lachance: ...c'est 70 % qui obtiennent leur diplôme, 80
% dans les délais prévus, à peu près.
M. Beaulieu: 70 %, 80 %.
M. Lachance: Alors, en comparaison avec le réseau, c'est
peut-être de 10 % supérieur, mais je mets ça en relation,
quand même, avec la qualité de la clientèle qu'on
reçoit au collège, une excellente clientèle,
particulièrement dans les programmes préuniversitaires où
on reçoit beaucoup d'étudiants, de partout.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Très bien.
Alors, M. le député de l'Acadie, pour une dernière...
M. Bordeleau: Une dernière question.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): ...petite
question.
M. Bordeleau: Oui. Encore là, toujours sur la question de
l'encadrement, il y a l'autre volet qui est le volet, au fond, de la
compétence du corps professoral et, à la page 18 du
mémoire, vous faites référence à la formation
à la pédagogie collégiale, vous faites
référence à des travaux qui se font à
l'Université de Sherbrooke et à une autre université dont
je ne me souviens plus. Est-ce que vous avez des données, des choses que
vous pouvez nous mentionner sur l'importance que ça a, la formation
à la pédagogie? Et je pense en termes de formation continue au
niveau du corps professoral de Bois-de-Boulogne.
M. Lachance: Bien, le programme PERFORMA, en fait, a
été développé par trois collèges,
Maisonneuve, Sherbrooke et Bois-de-Boulogne, au tout départ, et il y a
déjà 80 professeurs sur 200 qui ont tout à fait
terminé ce qu'on appelle le C.P.E.C, le certificat. La majorité
ont suivi une bonne partie des cours. Maintenant, ce qu'on constate, c'est que
nous sommes quand même des cordonniers assez mal chaussés, que
nous n'avons pas suffisamment de ressources pour permettre à nos
enseignants de se perfectionner. Il va falloir trouver des formules, notamment
au niveau de l'enseignement technique, pour permettre à nos enseignants
de faire des stages pratiques en milieu de travail et, du côté
pédagogique, je pense qu'il va falloir penser à l'instauration
d'un mécanisme national qui soit un peu plus systématique, compte
tenu du fait que nous aurons un nombre important de nouveaux enseignants qui
vont rentrer dans le
circuit d'ici cinq ans. Il faudra penser à un mécanisme un
peu plus permanent de développement et de perfectionnement
pédagogique de nos enseignants. Là-dessus, je vais laisser la
parole aussi à Georges Beaulieu qui a été un des
initiateurs de C.P.E.C. PERFORMA.
M. Beaulieu: Oui. J'aimerais dire aussi qu'il y a une autre forme
de perfectionnement qui s'est pratiquée dans le collège, chez
nous, et dans d'autres collèges aussi, qui a été la
recherche pédagogique et l'innovation pédagogique par des
recherches, par des travaux de développement pédagogique. Ce
n'est pas négligeable, ça. Il y a des professeurs qui aiment bien
prendre du perfectionnement traditionnel ou du perfectionnement en exercice,
comme il s'est fait avec l'Université de Sherbrooke, mais il y a un
certain nombre de professeurs aussi qui veulent développer d'autres
types de compétences, et c'est souvent par la réponse à
certaines questions d'enseignement par le moyen de la recherche
pédagogique qu'ils trouvent un perfectionnement.
On peut constater chez nous qu'il y a eu deux voies de perfectionnement:
un perfectionnement par la recherche, par l'innovation, par la réponse
à un certain nombre de questions et par du développement, et il y
a eu un perfectionnement par des formules avec des universités. Ce n'est
pas négligeable. Il y a eu aussi un certain nombre de travaux qui ont
été faits dans la plupart des grandes disciplines qu'on a chez
nous, le français, la philosophie, les soins infirmiers. Mme Schmouth a
été auteure de rapports très intéressants en
recherche en soins infirmiers. Alors, tout le programme de soins infirmiers a
été élaboré à ia suite de cinq recherches
qui ont été finalement pilotées par des professeurs. Je
pense que ça a été des sources de perfectionnement
extrêmement intéressantes. Il y a des coûts à ce
genre de choses là, mais c'est très rentable en bout de ligne. Je
crois qu'il faudrait peut-être injecter des fonds dans la recherche
pédagogique au collégial, comme on l'a fait jusqu'ici, et
même plus.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski):très bien, m.
beaulieu. je vais maintenant reconnaître mme la ministre pour le mot de
la fin. mme la ministre.
Mme Robillard: Une courte question, M. le Président.
À la page 10, vous nous recommandez des examens de synthèse.
Est-ce que ce seraient des examens de synthèse pour chaque programme?
Est-ce que les résultats de ces examens de synthèse seraient
nécessairement portés au bulletin de l'étudiant et
deviendraient une condition sine qua non pour avoir le diplôme
d'études collégiales, selon vous?
M. Lachance: Alors, Mme la ministre, effectivement, en fait,
quand on parle d'évaluation, il y a différentes formes
d'évaluation, et l'évaluation synthèse porte davantage sur
ce qu'on peut appeler l'évaluation terminale. Nous pensons qu'il doit y
avoir un examen de synthèse dans chaque cours, premièrement, et
autant que possible nous souhaiterions que, lorsque ce cours est
donné...
Mme Robillard: Pour chaque programme?
M. Lachance: Chaque cours. Je vais commencer par les cours et je
vais aller un peu plus loin après. Le premier niveau, c'est au niveau de
chaque cours et, ce qui est une difficulté actuellement, c'est d'arrimer
les professeurs qui enseignent le même cours à un groupe
d'étudiants. On pense que ces examens-là doivent être
communs. Alors, chez nous, au collège, on a actuellement 50 % des
examens qui sont communs. Maintenant, je pense qu'il est important qu'on
instaure à l'échelle des programmes, effectivement, un examen de
synthèse. Maintenant, quelle forme il va prendre, ça, il faudra
regarder. C'est pour ça qu'on parle d'expérimentation. Au
Département de soins infirmiers, il se fait déjà des
choses intéressantes là-dessus. Mme Schmouth pourrait vous en
parler.
Nous, on pense qu'il faudra, dans certains cas, que ça
s'accompagne d'activités d'intégration de synthèse.
Ça veut dire qu'on ne pourra pas faire d'examens s'il n'y a pas, dans
certains programmes, des activités d'intégration. Par exemple, en
sciences humaines, on a même avancé l'idée qu'il y ait,
dans ce programme-là, un cours d'intégration qui serait une
espèce de cours terminal qui se terminerait par un examen qui ferait une
espèce de bilan de l'ensemble des compétences acquises et de la
compréhension aussi des interrelations qu'il y a entre ces
compétences-là par l'élève. Alors,
évidemment, la formule peut être variable d'un programme à
l'autre. Par exemple, en soins infirmiers, le fait qu'ils aient un stage en fin
de course, en fin de troisième année, c'est, à notre point
de vue, un excellent moyen pour faire, je pense, une évaluation
synthèse. Je ne sais pas si Mme Schmouth voudrait rajouter
là-dessus.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Mme
Schmouth.
Mme Schmouth (Danielle): Est-ce que j'ai le temps?
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Oui, allez!
Mme Schmouth: Alors, finalement, dans notre programme,
l'intégration des apprentissages se fait non seulement par des examens
en fin de cours, des examens de synthèse, mais, comme M. Lachance le
mentionne, par l'observation clinique
des étudiants en stage et aussi par des travaux que les
étudiants présentent, où ils démontrent
l'intégration de ces apprentissages-là. Donc, la question
d'intégration des apprentissages dépasse le seul mode d'examen.
Il y a d'autres modes par lesquels on peut aussi évaluer
l'intégration de ces apprentissages. Merci.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Très bien.
Mme la ministre.
Mme Robillard: II me reste à vous remercier d'être
venus en commission parlementaire et d'avoir pris tout ce temps. Je sais
très bien que, quand on prépare un mémoire, ça
demande du temps de réflexion et d'analyse. Alors, merci d'avoir
participé à nos travaux à la commission de
l'éducation.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski):
Alors, mesdames et messieurs, nous vous remercions de votre
présentation et bon voyage de retour.
J'appelle le prochain groupe à se préparer, le
Comité de concertation cégep-université en
esthétique et histoire de l'art et le sous-comité
pédagogique d'esthétique et histoire de l'art. Si vous voulez
vous préparer, s'il vous plaît. Je suspends pour une minute la
commission.
(Suspension de la séance à 16 h 9) (Reprise à 16 h
11)
Le Président (M. Tremblay, Rimouski):
Mesdames et messieurs du Comité de concertation
cégep-université en esthétique et histoire de l'art et
sous-comité pédagogique d'esthétique et histoire de l'art,
est-ce que vous êtes présents?
Des voix: Oui.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski):
Mesdames, messieurs, est-ce qu'on pourrait avoir l'identification de
votre porte-parole, s'il vous plaît?
M. Saint-Hilaire (Jean-Claude): C'est moi.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Vous êtes
M...
M. Saint-Hilaire: Jean-Claude Saint-Hilaire.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): M.
Saint-Hilaire. Alors, M. Saint-Hilaire, nous avons une heure pour vous
entendre, partagée comme suit: vous avez 20 minutes, en principe, pour
présenter votre mémoire, le parti ministériel aura 20
minutes pour vous questionner et le parti de l'Opposition, 20 minutes. Alors,
voilà le cadre de fonctionnement. Nous vous demandons, dans un premier
temps, de nous faire part de votre mémoire et de nous présenter
aussi les personnes qui vous accompagnent. Alors, M. Saint-Hilaire.
Comité de concertation
cégep-université
en esthétique et histoire de l'art et
sous-comité pédagogique
d'esthétique
et histoire de l'art
M. Saint-Hilaire: Alors, M. le Président, Mme la ministre,
mesdames et messieurs de la commission parlementaire, nous remercions d'abord
les membres de cette commission d'avoir bien voulu nous entendre. Tout de
suite, je vous présente, ici, Mme Hélène Martineau, du
cégep François-Xavier-Garneau; vous avez ensuite Mme Johanne
Lamoureux, de l'Université de Montréal, M. Pierre Filteau, du
cégep de Sainte-Foy, et moi-même, du cégep de Sainte-Foy.
Je voudrais aussi ajouter qu'il y a avec nous, dans les gens qui nous
supportent, M. Michel Lessard, de l'Université du Québec à
Montréal, de même que Mme Geneviève Rocher, qui
elle-même est historienne de l'art, qui ont participé à ces
mémoires-là.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski):
Toutes les personnes qui sont en arrière, c'est votre «fan
club»? C'est quoi, là?
M. Saint-Hilaire: Un peu, si vous voulez. Des voix: Ha,
ha, ha!
M. Saint-Hilaire: On a pensé à être
supportés parce qu'on est un peu intimidés.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski):
Alors, M. le président, on va vous entendre.
M. Saint-Hilaire: Nous voulons, d'abord, rappeler l'importance de
la dimension culturelle dans la formation des jeunes et également le
rôle du langage visuel comme l'un des langages fondamentaux dans la
société actuelle, de même que les conséquences de
son oubli. Bien entendu, je fais référence ici au rapport du
Conseil des collèges paru au printemps dernier. Nous constatons que,
dans tous les débats entourant la réforme des cégeps et
les régimes pédagogiques, seule la langue orale et écrite
a été considérée comme outil essentiel de
communication et de pensée. Or, nous croyons sincèrement que,
dans ces débats, l'importance du langage visuel est totalement
sous-estlmée. Pourtant, l'environnement visuel médiatique et
audiovisuel actuel est de plus en plus présent. Pire encore, les
systèmes de câblodiffusion nous mettent en contact avec une
culture visuelle et sonore anglo-américaine de plus en plus
prégnante et envahissante.
Bien entendu, à la fin des années soixante, lorsque le
ministère de l'Éducation initia le régime
pédagogique actuel, on ne pouvait pas prévoir le
développement exponentiel des médias,
de la bande dessinée, de la publicité, de la mode, du
design, de la télématique, de la télévision, des
jeux vidéo et des bandes vidéographiques. Jamais n'avons-nous
autant été sollicités et bombardés par les Images
que maintenant! Dans ce contexte, est-il acceptable que la formation
générale de niveau collégial, en l'an 2000, ne donne pas
à l'étudiant les habiletés de base nécessaires
à la compréhension et au décodage de la langue visuelle en
tant qu'outil de communication et de pensée?
Voici quelques éléments de base, maintenant, pour ce qu'on
pourrait appeler la formation générale. Vous comprenez que je ne
vous lis pas notre mémoire. On a fait une synthèse et j'aime
autant vous le présenter comme ça. Vous l'avez déjà
lu, de toute manière; alors, on présente quelque chose de
neuf.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Ça va,
très bien, M. Saint-Hilaire.
M. Saint-Hilaire: D'accord, merci. Dans les
sociétés occidentales actuelles, les communautés
européenne, anglo-saxonne et américaine investissent
considérablement dans la diffusion et la promotion de la culture
visuelle et de l'histoire nationale et internationale. Posons-nous la question:
Une petite communauté francophone, cultu-rellement distincte, dans
l'environnement humain et social nord-américain, peut-elle se permettre
de considérer que l'histoire des cultures visuelles, et notamment de la
sienne, la nôtre, ne fasse pas partie de la formation
générale de base? L'initiation à la culture du visuel et
la connaissance du patrimoine artistique apparaissent faire partie des
éléments fondamentaux d'une formation générale.
Celle-ci reconnaît tirer ses racines du passé culturel, plus
vaste, tout en aspirant non seulement à la connaissance du monde, mais
bien au plaisir de cette connaissance.
Si on regarde maintenant ce qui se passe dans le milieu actuel de
l'enseignement, on pourrait dire ceci: Dans l'actuel régime
pédagogique, la contribution de notre discipline a été
extrêmement réduite, voire même annulée. Seuls les
cours complémentaires permettent à un nombre très
restreint d'élèves d'y avoir accès. Ceci tend à
renforcer les propos de Mme Lise Bissonnette, dans son editorial du 23 mai 1992
- vous l'avez sûrement lu - intitulé «La solitude d'un
scénario». Donc, l'apport de la discipline n'aura
été considéré essentiel que - je dirai bien
«que» - à l'intérieur des programmes, dans les champs
de l'art seulement, en arts appliqués et en arts plastiques.
Enfin, une discrimination existe quant à l'accessibilité
à une formation de base dans le champ de la culture visuelle, surtout
lorsqu'on s'éloigne des grands centres et que l'on observe ce qui se
passe en région. Allons faire un petit tour dans les réglons
maintenant. De nombreux cégeps n'offrent aucun cours de base
associé au champ de la culture visuelle. Cette disparité et cette
discrimination sont amplifiées par le manque d'équipement
culturel dans ces régions et par un grand nombre de difficultés
matérielles qui limitent le dynamisme culturel dans ces mêmes
milieux.
Est-il normal que de telles disparités régionales
existent, encore aujourd'hui, je dirais même? Les institutions
muséales et culturelles ne peuvent rejoindre qu'une portion très
restreinte de la population. Elles peuvent cependant jouer pleinement leur
rôle si les clientèles sont déjà
sensibilisées à l'école. Convaincue de l'importance de la
production artistique comme phénomène culturel dans l'histoire
des sociétés, convaincue de l'importance du contact avec les
manifestations de la culture ancienne et contemporaine, cette clientèle
potentielle pourra dynamiser tout le milieu culturel du Québec,
c'est-à-dire ses équipements, ses travailleurs culturels et les
médias qui en sont dépendants.
D'autre part, les cégeps n'ont malheureusement pas tous les
équipements et les ressources pour jouer le rôle de moteur
culturel dans leur milieu. Dans un tel contexte, il faudrait que le
cégep participe au moins à la formation de base des
étudiants dans le champ de la culture du visuel et devienne un
réel - mais, là, j'insiste là-dessus - un réel
complément et un partenaire de taille dans le tissu culturel
québécois.
Quelques thèmes, maintenant, et objectifs de la formation
générale. Regardons ça. Si l'on ne possède pas les
outils essentiels au décodage de l'image et des objets visuels qui en
sont le support, nous prétendons ceci: nous ne pouvons comprendre et
interpréter pleinement l'expression des valeurs morales et
éthiques, l'ouverture au monde et à la diversité des
cultures, les grands problèmes et les grands défis de notre
temps, ainsi que la dimension historique de l'expérience humaine. Dans
notre monde contemporain, l'image recèle maintenant une foule de valeurs
qui sont véhiculées de manière symbolique. Nous vivons
dans une société complexe qui fabrique des images porteuses de
messages, directs ou indirects, et nous devons nous doter d'outils pour lire
clairement ses intentions. Il ne faut pas oublier qu'une image parle à
tous les individus et est porteuse d'une dimension universelle, que sa lecture,
au premier niveau ou au deuxième niveau, peut en changer
considérablement le sens. L'élève doit maîtriser les
outils de base pour analyser et développer sa pensée critique par
rapport aux productions visuelles. La finalité même des objectifs
de formation générale commande une mise en contact avec la
connaissance des cultures artistiques, sans distinction et sans discrimination
entre les clientèles des programmes préuniversitaires et
techniques. (16 h 20)
Ouvrons des guillemets: «Ouvrir les horizons sur le temps et
l'espace, prendre conscience
d'enjeux et d'interactions dans le monde d'aujourd'hui, ainsi que
réfléchir sur les valeurs culturelles et démocratiques de
notre société et sur le rôle du citoyen» - fermons
ces guillemets - comme nous le rappelle le rapport du Conseil des
collèges, rejoint, mais alors là, exactement, les
finalités de notre discipline.
Ces finalités incluent forcément la prise de conscience de
l'état de la production artistique dans l'histoire en relation avec une
culture donnée et le développement d'outils
méthodologiques de base pour la mise en contact avec l'objet, tant d'un
point de vue analytique que critique. On renvoie alors à l'histoire les
différents secteurs de la culture matérielle, tels
l'architecture, la peinture, la sculpture, le mobilier, la mode vestimentaire,
l'illustration, le design des objets de l'environnement - on peut en mettre
encore un peu - la publicité, le design graphique, l'infographie et,
pourquoi pas, la bande dessinée, le vidéoclip, le monde de
l'image, en fin de compte, qui évolue, qui est en perpétuelle
mutation.
Les axes politiques, sociaux, économiques, scientifiques et
technologiques, transculturels même sont différentes lunettes pour
aborder l'étude de la production visuelle et artistique d'une
société. Ils font comprendre les valeurs de cette
société et en proposent des facettes qui pourraient être,
pour une fois, stimulantes et parfois même inattendues. Nous convenons
qu'il y a là une dimension souhaitable pour la formation des citoyens,
adaptée à la réalité des modes de fonctionnement
économique et politique en mutation et de plus en plus universels. Ceci,
bien entendu, en grande partie par le développement des mass
médias.
Vous avez raison. Nous croyons aussi que de nouvelles composantes
doivent faire partie de la formation générale, telles la culture
scientifique et technologique ou les grandes questions de la
société. Mais ces diverses dimensions ne doivent pas être
développées à l'exclusion d'une formation sur la culture,
de la production visuelle, qu'elle soit contemporaine ou ancienne.
L'esthétique, les arts, l'image et surtout, mais alors là surtout
leur application dans le monde moderne s'appuient d'abord sur l'imaginaire et
le sensible, lesquels, associés à des méthodes rigoureuses
de connaissance, d'observation et d'analyse, peuvent avoir l'effet d'un vent
frais dans notre monde dominé par le rationalisme, le fonctionnalisme et
le «technicisme». Faisons place aux mystères objectifs,
disait Paul Emile Borduas, et, je vous le rappelle, il le disait en 1948.
Il faut se poser la question: Quelle serait l'importance de la
contribution des arts visuels et de la culture artistique dans le projet de
formation générale au cégep? Nous croyons que ce qui
importe le plus à cette étape de la formation d'un
élève, c'est sa capacité à entrer sans
intermédiaire en contact avec les éléments qui
caractérisent le contenu de la production artistique,
c'est-à-dire ses contextes, ses valeurs, ses symboles, les
émotions esthétiques, la réalité matérielle
de l'objet et ses arguments critiques. La langue visuelle constitue une
réalité qui exige absolument des stratégies de
connaissance, des outils d'analyse et de réflexion critique
différents de ceux utilisés par la langue orale ou écrite.
Qu'elle soit maternelle ou seconde, la langue visuelle serait-elle une
troisième langue, à un moment donné, qu'on pourrait
maîtriser? Sous-estimer, voire ignorer l'image et l'oeuvre d'art en tant
que langue actuelle et prégnante, en tant que véhicule
déterminant dans le mode de fonctionnement social, culturel et politique
nous apparaît un oubli de taille. Le risque est alors de faire de
l'élève un éternel consommateur d'images, un
récepteur passif, non discriminant, éternellement ravi,
impuissant à saisir le mode d'organisation du message visuel, ses
finalités et son mode de représentation symbolique. Aussi, nous
croyons, par contre, qu'un citoyen responsable, capable de développer un
jugement analytique sur la réalité Imagée et artistique
dans son environnement, doit pouvoir compter sur des moyens rigoureux et
efficaces lui permettant d'observer et d'effectuer les choix qui contribuent
à l'exercice de son autonomie personnelle, sociale et
professionnelle.
Voici donc la proposition que nous vous soumettons: il nous
apparaît primordial que soit mis en place, à l'intérieur du
bloc de formation générale, un cours dans le champ de
l'esthétique et de l'histoire de l'art. Ce cours permettrait à
l'élève du collégial d'acquérir les rudiments de la
langue et de la grammaire visuelles et, du même coup,
l'élève pourrait acquérir les outils nécessaires
à la perception et à l'analyse de l'image historique et actuelle,
artistique et fonctionnelle, tout en lui laissant la porte ouverte vers des
explorations plus engageantes qu'un simple poste de télévision.
Un tel cours pourrait s'Inspirer largement des cours déjà
existants - je dis bien s'inspirer - présentés par notre
mémoire, à la page 25, c'est-à-dire la perception de
l'oeuvre d'art et le sens de l'oeuvre d'art. Il y a une courte description dans
le mémoire.
Nous tenons enfin à préciser que nous croyons à une
formation générale et fondamentale élargie et solide pour
tous les élèves au Québec, mais à condition que
cette formation intègre tous les éléments essentiels - pas
seulement quelques-uns, tous - déterminant et caractérisant les
fondements mêmes des sociétés modernes. C'est en ce sens,
Mme la ministre, messieurs, mesdames de la commission, que nous intervenons
afin de rappeler l'importance de la langue visuelle dans notre monde
moderne.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski):
Alors, M. Saint-Hilaire, nous vous remercions de votre
présentation qui a été fort bien comprise.
M. Saint-Hilaire:je vous remercie. j'aimerais pouvoir continuer
sur ma lancée. il me semble qu'il doit rester encore quelques minutes,
peut-être.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Oui, oui, oui, vous
pouvez y aller pour des commentaires supplémentaires.
M. Saint-Hilaire:je laisserais la parole à m. filteau, qui
est représentant du comité conjoint
cégep-université, qui s'est penché aussi sur ces
questions.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski):
Alors, M. Felteau?
M. Saint-Hilaire: Filteau.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski):
Filteau, très bien.
M. Filteau (Pierre): M. le Président, Mme la ministre,
messieurs, mesdames de la commission, je vais essayer de vous faire un
résumé du résumé parce que, avec le temps qui
passe, je ne voudrais surtout pas empiéter sur la période des
questions. Il reste que le Comité de concertation
cégep-université est un comité qui, depuis trois ans,
essaie de toutes sortes de façons d'établir des liens entre le
milieu universitaire et le milieu collégial. Ces liens-là, bien
sûr, au départ, ils étaient plutôt ténus dans
le sens où on ne peut pas dire que le dialogue était très
élaboré. Mais, en fait, grâce à des
réflexions, entre autres, sur la formation fondamentale, le rôle
de l'histoire de l'art dans ce domaine-là, grâce aussi à
des questionnements sur le travail qu'on fait aux deux niveaux, je crois que
depuis trois ans les liens se sont vraiment resserrés entre les deux
niveaux d'enseignement, et c'est un peu ce qui était recherché au
départ.
Vous avez aussi, je crois, pu percevoir, à travers
l'amoncellement de documentation qu'on vous a fait parvenir, un peu l'ampleur
du travail qui a été effectué dans ces trois
années-là. J'espère que vous avez pu trouver
là-dedans matière à réflexion. En fait, ce qu'on
cherchait surtout à travers ces documents-là, c'était
à vous faire percevoir l'intérêt qu'on tentait de
développer, c'est-à-dire, par exemple, de mieux ajuster
l'enseignement des cours d'histoire de l'art au niveau collégial aux
attentes des universitaires pour ce qui est d'une formation préalable.
Et, deuxièmement, aussi on tentait de comprendre quels étaient
les modes de fonctionnement des universitaires d'une université à
l'autre. Parce qu'on s'est rendu compte finalement que, si on fait le tour des
universités au Québec, les types d'exigences au niveau des
prérequis, aussi la façon de développer le programme, de
l'encadrer et même aussi la clientèle étudiante sont
très différents d'une université à l'autre.
L'autre aspect qui aussi nous intriguait, c'était de voir ce qui
se passait du côté de l'histoire de l'art en rapport avec les
milieux où on enseigne les arts et où l'histoire de l'art sert
davantage comme, on pourrait dire, domaine de services, c'est-à-dire un
cours de services ou de complément. Alors, ça a été
l'objet, en fait, de notre dernière enquête, celle qui s'est faite
l'an passé où, après avoir rencontré les gens de
design, d'architecture, les gens aussi dans le domaine des arts plastiques, des
arts appliqués, par exemple, dans le secteur des communications
visuelles, alors on a réussi à avoir un tableau d'ensemble sur le
rapport avec l'histoire de l'art. Globalement, si on résume donc cette
action-là, ça nous a permis, d'abord, d'avoir une meilleure
connaissance de ce qui se passait en milieu universitaire et,
deuxièmement, peut-être d'être mieux armés, mieux
équipés pour poser une réflexion sur le milieu
collégial et son développement.
Je vous lirai donc un peu de la conclusion de cette partie-là.
Cette consultation à plusieurs volets nous semblait donc essentielle
pour permettre aux enseignants d'histoire de l'art, dans les années
à venir, d'intervenir efficacement aux deux niveaux d'enseignement de
leur discipline. Il s'agissait, de plus, de participer à la
réflexion qui s'amorçait sur l'enseignement collégial et
sur la redéfinition des cours de formation générale. (16 h
30)
Nous voulions aussi intervenir dans la réforme des programmes en
arts et lettres, qui avait été annoncée au niveau
collégial et qui était un peu gardée sur la glace depuis
quelque temps, afin d'assurer une formation visuelle de base à ces
utilisateurs du langage visuel. Et nous voulions enfin tenter de
répondre de la meilleure façon possible aux attentes des milieux
universitaires en ce qui concerne la formation fondamentale préalable en
esthétique et en histoire de l'art. Alors, les trois rapports vous ont
été déposés et je peux vous dire que, bien
sûr, dans la composition ou dans la rédaction comme telle de notre
mémoire pour le CCCU, on a puisé abondamment dans ces
commentaires des universitaires en rapport avec notre domaine.
J'enchaînerai avec un aspect qui touche davantage le milieu de
l'éducation actuel et son rapport avec l'histoire de l'art. Depuis la
réforme scolaire des années soixante-dix jusqu'à
maintenant, le système politique et social a d'abord
considéré que la responsabilité du contact d'un individu
avec la production visuelle, ainsi que l'amorce du développement d'un
point de vue analytique pouvaient se limiter aux activités
prévues dans les cours d'arts plastiques obligatoires au programme de
première et de deuxième année du secondaire. Conservant la
même orientation, les niveaux d'enseignement supérieurs ont
privilégié le développement de la culture orale et
écrite, comme l'a dit M. Saint-Hilaire tout à l'heure, en
excluant, à toutes fins pratiques, sauf dans le champ
spécialisé des arts, la mise en place de cours d'introduction et
de sensibilisation qui auraient permis l'acquisition d'une culture visuelle de
base, ainsi que l'usage d'outils méthodologiques permettant d'en
observer les diverses formes et d'en décoder minimalement le sens.
Dans la société québécoise et dans la
société nord-américaine, de même que dans l'ensemble
du monde occidental, il est indéniable que, depuis les 20
dernières années, tous les champs de production imagée,
autant ceux voués à la production d'objets matériels
qu'à la production artistique, ont envahi les divers lieux de
l'activité sociale, économique, scientifique et politique,
à tel point que la production artistique, la communication visuelle et
la culture sociétale ne font plus qu'un. Comment un jeune citoyen en
phase de développer sa capacité à effectuer des choix
s'appuyant sur un système de valeurs et sur un esprit critique peut-il
construire son univers de référence dans une perspective juste et
unifiée? Comment peut-il, sans support méthodologique et sans
encadrement, développer une vision analytique, globale et
cohérente?
J'en viens tout de suite aux propositions que vous fait le Comité
du CCCU. Alors, il y en a...
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): M.
Filteau...
M. Filteau: Oui.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): ...dois-je vous dire
que vos 20 minutes sont écoulées? Mais ce n'est pas un
problème pour dépasser, sauf qu'il y aura moins de temps pour le
questionnement. Alors, je voudrais vous demander de...
M. Filteau: Ça va. D'accord. Alors, je vais plutôt
résumer, donc, les propositions pour éviter de trop
déborder. Ce qu'on propose, c'est, d'abord, que la formation dans le
champ des arts, pour ce qui est de l'ensemble des étudiants, se fasse
d'abord au niveau collégial et qu'on n'attende pas le niveau
universitaire pour entreprendre une éventuelle
récupération. Deuxièmement, ce qu'on propose, c'est que ce
cours-là soit orienté, bien sûr, vers la culture du visuel
et une initiation aux méthodes qui permettent d'avoir accès au
langage de l'image et à son histoire. La troisième proposition
vise à ce que l'esthétique et les arts en tant que
thématique fassent partie du champ des disciplines à
prévoir dans le bloc de formation générale des programmes
préuniversitaires et dans le bloc de formation générale
des programmes techniques, et ce, au même niveau que la langue et la
littérature, la philosophie, l'éducation physique, les langues
modernes. Enfin, nous proposons que ces cours-là entrent à
l'intérieur, justement, des deux cours déjà existants
à l'intérieur de nos grilles, c'est-à-dire La perception
des oeuvres d'art et Le sens des oeuvres d'art. Et, ça, c'est une
proposition qui recoupe, d'ailleurs, ce qu'on a dit tout à l'heure. Ce
qu'on vous dit aussi, c'est qu'il serait intéressant, donc, de faire une
fusion de ces deux cours-là et de tenter, justement, à partir de
ça, de développer le double point de vue de l'approche de
l'oeuvre par sa dimension plastique, mais aussi au niveau de la
signification.
Alors, je vous remercie, M. le Président et les membres de la
commission, de m'avoir permis de prolonger mon exposé.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Très bien,
très bien, M. Filteau. On vous remercie de votre excellente
présentation. La même chose pour M. Saint-Hilaire. Vous avez
été très dynamiques au niveau de la présentation.
Je vais maintenant reconnaître Mme la ministre de l'Éducation, de
l'Enseignement supérieur et de la Science. Mme la ministre.
Mme Robillard: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord
remercier le Comité de concertation cégep-université et le
sous-comité pédagogique. En vous lisant, j'avais l'impression que
je revenais un peu au ministère de la culture. J'ai gardé un
très bon souvenir de mon passage à ce ministère et, dans
le fond, ce que vous soulignez, c'est le lien entre éducation et
culture, qui doit toujours exister. Si j'ai bien compris aussi, il s'agit de
deux mémoires séparés, mais j'ai l'impression que ce sont
les mêmes auteurs collégiaux ou presque, je dirais. En tout cas,
vous visez les mêmes objectifs et les recommandations sont très
semblables en tant que telles.
Mais, au point de départ, j'aimerais ça vous entendre de
façon, je dirais, plus précise, là. Qu'est-ce que vous
n'aimez pas dans la recommandation du rapport du Conseil des collèges?
Parce qu'à plusieurs reprises vous en parlez.
Mme Martineau (Hélène): En fait...
Le Président (M. Tremblay, Rimouski):
Madame, est-ce que vous pourriez vous identifier, s'il vous plaît,
pour les fins de l'enregistrement?
Mme Martineau: Oui, bien sûr. Alors, il s'agit
d'Hélène Martineau, enseignante au niveau collégial.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Très bien,
Mme Martineau.
Mme Martineau: Alors, il faut bien comprendre que, en fait, il ne
s'agit pas d'aimer ou de ne pas aimer. Nous souscrivons d'emblée au
projet qui est mis de l'avant à l'effet de résou-
dre des problèmes dont la plupart d'entre nous avons pris
conscience au niveau collégial dans le cursus de formation
générale et de résoudre ces grandes difficultés
qu'ont connues les étudiants et qu'également connaissent les
milieux de l'enseignement quant à l'atteinte des objectifs de formation
au niveau collégial. Nous en sommes et nous voulons absolument que ce
soit bien clair.
Cependant, dans le projet du Conseil des collèges, on constate
que le champ prévu pour cette formation générale de base,
le champ des disciplines concernées par un véritable et
fondamental... Vous m'excuserez d'emprunter l'expression; je sais qu'elle se
prête à plusieurs interprétations, mais, malgré
tout, on y croit, dans son sens le plus strict. On sait que plusieurs
disciplines peuvent être amenées, de façon très
pertinente, à contribuer à ce projet de formation fondamentale.
De notre point de vue, on aurait pu en identifier peut-être, comme vous
l'avez fait, huit, neuf dont l'apport était indispensable.
Considérons-le comme tel. Cependant, ce qu'on a constaté dans le
projet du Conseil des collèges, c'est qu'il y avait des dimensions qui
étaient nettement privilégiées comme faisant partie d'une
formation obligatoire pour tous les étudiants dans une formation
générale. Et on inclut, évidemment, la formation
générale des étudiants qui sont dans le secteur technique
et préuniversitaire. Et nous constatons - vous l'avez constaté
également - que l'apport, la contribution du champ des arts, plus
précisément du champ des arts visuels, a glissé dans cette
portion des cours qui pourraient être offerts de façon tout
à fait optionnelle - enfin, si je reprends les mots du projet du Conseil
des collèges - ou enfin plus ou moins, j'oserais dire, accessible dans
un projet de cursus qui serait à structurer selon les révisions
qu'on apportera au régime pédagogique. Donc, ce serait plus ou
moins facultatif, plus ou moins lié soit à des connaissances
déjà acquises ou aux acquis socioculturels d'un milieu
précis, qui feraient qu'un étudiant s'intéresserait plus
particulièrement à la question des arts ou des
mathématiques, en l'occurrence aussi puisque nous étions mis -
vous me «prêterez» l'expression - sur le même pied que
les mathématiques. (16 h 40)
Sauf qu'on ne peut pas considérer que la contribution des arts
dans la formation générale puisse être située au
même niveau puisqu'on sait très bien qu'un accès direct par
l'étudiant au champ des arts et de la culture du visuel aura
été, à toutes fins pratiques, complété
à la deuxième année de secondaire et que, par la suite, ce
ne sera que par le biais d'illustration, d'application dans d'autres
disciplines: en histoire, en sciences sociales, en littérature, en
lettres et peut-être en philosophie. On lui aura fait l'illustration de
ce que donne une forme de pensée, une forme d'intervention, des valeurs,
etc. Et, nous, on dit: Ce n'est pas du tout la même chose. Il s'agit
là d'une autre façon d'aborder la culture du visuel et c'est trop
indirect pour qu'on puisse penser qu'un citoyen, en bout de course, dans sa
formation générale, soit capable d'assumer son rôle de
citoyen actif dans le champ culturel, de porteur de cette vie culturelle et,
à la limite - vous me permettrez de vous le dire - d'être un bon
père de famille et d'être capable d'intéresser ses enfants,
ses commettants à ce qu'est sa culture. Nous trouvons que c'est
insuffisant et c'est dans ce sens-là qu'on formulerait nos
réserves.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Très bien,
Mme Martineau. Mme la ministre.
Mme Robillard: Comment vous expliquez à l'heure actuelle
que si peu d'étudiants choisissent des cours en arts dans le bloc des
cours complémentaires?
Mme Martineau: Oh! Toute une question! Je voudrais vous dire que
nous n'avons pas de réponse, mais ce n'est pas le cas.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Martineau: Vous savez, dans les collèges, il y a une
énorme disparité; dans les collèges, j'entends dans le
réseau collégial. Cette disparité, d'ailleurs, n'existe
à peu près pas au niveau des collèges privés, ce
qui est assez gênant pour nous du réseau public, mais, enfin,
passons. Dans les collèges publics, il y a d'énormes
disparités régionales dans l'offre de cours et l'accès
à des cours possible pour les étudiants en formation
générale de base quant aux champs des cours
complémentaires. Et, selon les ressources du milieu ou les traditions
liées au passage du régime pédagogique classique au
collégial, les collèges se sont retrouvés avec des
ressources humaines qu'ils ont exploitées selon les possibilités,
selon les étapes de transition prévues, etc. Et, dans ce
contexte, certains collèges peuvent offrir à leurs
étudiants des cours en esthétique et histoire de l'art, d'autres
pas. Alors, il s'agit d'un niveau, mettons, réseau.
Au niveau local, on est pris dans une situation où
l'étudiant doit faire un choix entre une assez bonne quantité de
cours complémentaires qui, finalement, se distribuent dans un
très grand nombre de disciplines. Et l'étudiant - vous le
connaissez sans doute probablement comme nous - à certains
égards, est un explorateur, un explorateur des meilleures conditions
pour, finalement, passer à travers cette étape qu'il trouve si
difficile, si exigeante, si épineuse, si... bon, etc. Il cherche souvent
le cours complémentaire qui lui permettra d'atteindre des objectifs de
formation dans les conditions les plus faciles. Et, depuis toujours - c'est un
constat culturel, societal aussi - on associe culture en général
et culture du visuel en particulier à un champ où il serait plus
facile d'atteindre des objectifs dap-
prentissage et où tout serait plus gratuit, plus simple,
où les notions méthodologiques n'auraient pas leur place comme
dans un autre cours. Et là le drame, c'est quand il vient suivre nos
cours et qu'il réalise que, oui, il y a des objectifs d'apprentissage
très précis et, oui, il y a des échecs dans nos
disciplines et, oui, nous avons un cursus très précis,
très clair et nous répondons aux exigences de formation de niveau
collégial. Alors, évidemment, il peut être appelé
à faire d'autres choix plus gratifiants et plus simples.
Mme Robillard: M. Filteau, au niveau de votre
«rapport», j'aimerais ça qu'on discute ensemble de votre
première proposition, dans le fond, où vous nous indiquez
très clairement que vous voulez que ça fasse partie du bloc de
formation générale, autant dans les programmes
préuniversitalres que dans les programmes techniques, dans le fond, que
la culture du visuel soit intégrée dans le bloc obligatoire.
Mais, pour nous faire cette recommandation-là, vous nous
présentez l'argumentaire sous forme d'attendus. Là, j'ai beaucoup
de difficultés à faire le lien entre vos attendus et la
conclusion. Je vous lis. Le premier attendu, c'est que vous me signifiez qu'il
y a beaucoup de diversité dans les orientations des programmes dans les
milieux universitaires, au niveau des programmes de l'histoire de l'art, on
s'entend bien. Le deuxième attendu, vous me dites: il y a une
diversité des structures d'encadrement de ces programmes, universitaires
toujours, difficilement comparables. Ensuite, vous me dites qu'il y a peu de
concertation entre les universités par rapport aux exigences de ces
programmes-là - vous me parlez toujours des programmes de histoire de
l'art - et que, dans les milieux universitaires, on met l'accent davantage sur
les fonctions de recherche et de rayonnement que sur l'enseignement en tant que
tel. Et, ensuite, vous me dites: La diversité des clientèles
étudiantes.
Pour solutionner ce problème des cours, des programmes de
l'histoire de l'art à l'université, vous me dites: Un cours de
culture visuelle obligatoire pour tout le monde au collégial. Je ne
comprends pas.
M. Filteau: Je vais laisser une universitaire répondre
à cette question-là, si vous le permettez, et j'ajouterai, si
possible, des commentaires, mais Mme Johanne Lamoureux se fera un plaisir de
répondre à cette question-là.
Mme Lamoureux (Johanne): Mme la ministre, vous avez
souligné un point particulièrement crucial du
«rapport». Au niveau universitaire, la discipline de l'histoire de
l'art a pour but bien précis de former des historiens de l'art. Elle
doit partir de zéro généralement parce que, depuis la
deuxième année, les étudiants n'ont été
sensibilisés à rien du tout ou, enfin, à un peu
d'expérimentation de plasticine, de couleur, enfin des choses qui sont
encore de l'ordre du vécu plutôt que de l'ordre de l'apprentissage
de modèles importants. Ça, c'est la formation universitaire et
elle a des buts précis qui visent à former des
spécialistes de la discipline.
Ce qu'on propose, c'est donc non pas d'organiser la
représentation des arts au programme collégial en fonction de
ceux qui deviendraient des historiens de l'art spécialisés ou de
ceux qui seraient en design, en architecture et qui auraient un besoin de ces
disciplines-là, mais, compte tenu de tout ça, de penser
plutôt l'apport et la contribution de la discipline de l'histoire de
l'art dans le cadre d'une formation générale du citoyen, qui
serait bonne non seulement en vertu des attentes des milieux universitaires
pour ceux qui doivent, qui veulent ou qui aspirent à devenir des
historiens de l'art, mais aussi pour tous les citoyens dans leur vie
quotidienne. Nous croyons vraiment que la discipline a une contribution
à apporter à cause de la sensibilisation au domaine visuel,
à la culture du visuel qu'elle apporte dans des fonctions aussi diverses
que la fonction de consommateur, la fonction parentale dans la transmission
d'un savoir, dans la protection des enfants exposés à une
imagerie de plus en plus violente a la télévision, par exemple,
chose qui apparaît catastrophique, et on peut se demander pourquoi, dans
notre société... J'ai vu M. le Président sursauter
quand...
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): II ne faut pas
interpréter mon sursaut, madame.
M. Gendron: II fait toujours ça pour rien.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Ça n'a rien
à voir. Madame, continuez.
Mme Lamoureux: Quand Mme Martineau a mentionné que notre
discipline pouvait avoir une contribution importante dans la fonction
parentale, j'ai senti un frémissement de doute vous parcourir. Et je
trouve, quant à moi...
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Robillard: Mme Lamoureux, je vous arrête tout de suite.
C'est parce qu'elle a utilisé l'expression «un bon père de
famille».
Mme Lamoureux: Ah oui!
Mme Martineau: Ça aurait pu être une bonne
mère de famille.
Mme Robillard: Et, nous, les femmes députées, on
reprend toujours cette expression.
Mme Lamoureux: Ah oui? Mme Robillard: Oui.
Mme Martineau: Nous viserons à la doubler maintenant,
comme le fait la féminisation.
Mme Robillard: Parfait. Merci, madame.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Mme
Lamoureux, si vous voulez continuer, s'il vous plaît.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Lamoureux: Oui, j'aurai énormément de
mérite, mais je vais conclure. Les contes d'enfants du Moyen Âge,
par exemple, offraient des images d'une violence inouïe qu'on a
complètement oubliée. Barbe-Bleue avait sept femmes qu'il
décapitait, et les contes nous disent que leur tête se mirait dans
une flaque de sang. Une violence énorme! Peau d'Ane était victime
d'Inceste par son père. Il y a des images d'une grande violence dans ces
contes-là, qui est apparue domestiquée maintenant, et on a le
sentiment que la violence est une chose nouvelle dans nos cultures. À
mon avis, ce qui effraie les parents, ce contre quoi ils en ont et ce pourquoi
ils voudraient qu'on protège les enfants de la violence, c'est qu'ils
n'ont aucune autre culture visuelle à opposer à la culture
télévisuelle. Il n'y a aucune banque d'images, aucun autre
rapport à l'image, aucune manière d'«historiser»
cette violence-là. On est en train de façonner des
illettrés visuels.
Souvent, pour expliquer l'analphabétisme de nos
sociétés, on dit: C'est normal, on est dans une
société d'images. Mais quelle est l'excuse qu'on invoquera dans
50 ans quand on se fera reprocher d'avoir été, en plein milieu
d'une société de l'image, des illettrés visuels? On n'aura
aucune excuse. C'est un des modes dominants par lesquels notre culture
s'exprime et, pourtant, bien qu'il nous envahisse dans tous les domaines de
notre vie, on refuse de former systématiquement les étudiants,
peu importe la vocation à laquelle ils se destinent. Et c'est dans ce
sens-là qu'on distingue la formation au cégep et la formation
à l'université dans le mémoire qui vous est
présenté.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski):
Alors, M. Filteau, je pense que vous n'avez pas besoin d'ajouter.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Filteau: C'est ce que je prévoyais.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Oui? Alors, je vais
maintenant reconnaître le critique de l'Opposition officielle, le
député d'Abitibi-
Ouest, et sans commentaires vis-à-vis de la présidence, M.
le député.
M. Gendron: Je vous le promets. J'ai envie sérieusement,
quand même, d'ajouter le même commentaire. Sérieusement,
après la prestation si convaincante de Mme Lamoureux, j'aurais un peu de
difficulté à questionner vos recommandations. Mais,
au-delà de ça, sincèrement, je vous remercie d'être
là, l'équipe, de nous donner une autre vision importante du
développement de la culture visuelle. Je pense que s'en imprégner
et en être imbu, c'est une réalité qu'il est important de
rappeler. (16 h 50)
Dans votre mémoire, entre autres, quand j'en ai pris
connaissance, à la page 12, d'une façon plus
générale, vous indiquez comment vous percevez le
développement social et culturel, les perspectives politiques, les
quatre besoins de formation. Et là, plus concrètement, vous
dites: «Une formation collégiale de qualité dont: une
formation pertinente qui permet aux élèves d'acquérir des
compétences en lien avec les besoins socio-économiques»,
ainsi de suite. Il me semble que c'est des objectifs que nous visons tous. Et,
à la page 13, vous avez dit: «Que les priorités de
développement de l'enseignement collégial passent par: une
formation générale élargie et solide pour tous les
élèves». Il n'y a pas beaucoup de gens qui ne souhaitent
pas ça. Là où on a des difficultés, et qui que nous
soyons, c'est qu'à un moment donné, on aura beau utiliser les
arguments les plus convaincants, il faut, je pense, dégager ce qui nous
apparaît être davantage retenu par une plus large clientèle
possible, ce que j'appelle un tronc commun de disciplines qui doit faire partie
d'une formation de base.
Et la réalité que vous décrivez est très
intéressante - moi, je le dis comme je le pense, vous me corrigerez; je
suis convaincu que vous êtes plus habilités à me corriger -
pour des spécialistes de ces questions-là, des gens qui ont fait
énormément de réflexion et qui sont capables de faire les
adaptations, comme vous les avez faites d'une façon extraordinaire
tantôt, entre ce qu'on appelle les images difficiles, la violence
d'aujourd'hui. Un très grand nombre de gens ont la prétention que
c'est neuf, que c'est nouveau et qu'il y a vraiment un phénomène
qui s'accentue en termes d'images plus violentes. Vous, vous nous rappelez:
Non, ce n'est pas vrai. Pour ceux qui ont de la culture, on a
déjà vu ça dans de la littérature ancienne, ainsi
de suite. Je ne mets pas ça en cause, mais il me semble que l'objectif
de parfaire la formation de base doit, par voie de conséquence... Et
vous l'avez dit, là, je vous cite: On privilégie et on discrimine
certaines disciplines dans un tronc commun. Vous avez raison. Je ne veux pas
m'obstiner là-dessus, vous avez raison. Je trouve que vous avez
complètement raison.
La difficulté que j'ai, c'est quand vous arrivez, à la
page 14, avec votre recommandation. Vous dites: «II est proposé
que "l'esthétique et les arts" en tant que thématique - bon, en
tant que thématique, je n'ai pas de trouble - fasse partie des champs ou
disciplines à prévoir dans le bloc de formation
générale des programmes préuniversitaires». Des gens
sont venus nous dire: Même chose en formation technique parce qu'on ne
veut pas de formation à rabais. Je suis d'accord là-dessus,
sincèrement. Je n'ai aucun trouble avec ça, moi. Je veux que les
gens, qu'ils soient en formation technique ou en formation
préuniversitaire, aient la meilleure formation de base possible. Mais,
là, j'ai un problème. Comment on réaménage
ça, concrètement? Parce que, là, je ne veux pas
commencer...
Certains sont venus nous dire: II faudrait mettre un peu plus d'accent
sur les mathématiques. C'est inconcevable que des jeunes de
collège n'aient pas une formation de niveau collégial en
mathématiques. Parfait! On entend ça. D'autres nous ont dit: En
sciences... Les professeurs de chimie nous ont fait une méchante crise,
avec raison, en disant que la chimie avait littéralement
été réduite, atténuée. On est passé
de 300 heures-cours à 180. Ça n'a pas de mosus de bon sens!
Alors, moi, j'ai un maudit problème. Tu sais, je veux dire...
Sérieusement, je vous ai écoutés attentivement, j'ai lu
vos papiers, mais je ne suis pas capable encore de voir vraiment, dans le
Québec que je connais, pour l'ensemble des jeunes, qu'il faille les
obliger à passer par ce que j'appelle le développement, requis
pour certains, souhaitable pour le plus grand nombre, mais non obligatoire pour
tous, d'habiletés plus grandes dans ce que vous appelez la culture du
visuel. Je ne prétends pas que ça appartient - je peux me
tromper, je veux que vous me convainquiez de l'inverse - à la
société de convenir qu'il faut inclure ça dans une
formation de base de niveau collégial obligatoire par rapport à
d'autres réalités. En philosophie, j'y tiens. L'expression du
langage, la meilleure maîtrise du français, ça aussi, c'est
bon pour être bon père de famille, pour bien des raisons, puis,
là, je n'ai pas le temps de les développer. Les cours
d'éducation physique, peut-être moins dans la pratique des sports,
mais dans la nécessaire société de loisirs dans laquelle
on s'en va... Et, dans loisirs, j'inclus loisirs culturels, et les arts, et la
muséologie, et tout ça.
Et je reviendrai sur le beau petit témoignage que vous faites
pour les gens des régions. Je vous dis qu'on a des méchants
problèmes, les gens des régions! J'en suis un, j'y reviendrai
tantôt. Alors, là, j'arrête. J'aimerais ça que vous
me disiez pourquoi, vraiment, on serait capables de discriminer d'autres
disciplines qui sont dans le tronc commun et assez objectivement de convenir
qu'on y arrive plus, en termes de développement fondamental d'une
personne, avec la culture visuelle qu'avec la philosophie, par exemple.
Mme Lamoureux: Vous me faites un peu sursauter. Cette
fois-ci...
Le Président (M. Tremblay, Rimouski):
Alors, Mme Lamoureux.
Mme Lamoureux: ...c'est moi qui sursaute. Oui, Mme Lamoureux, de
l'Université de Montréal.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Très bien.
C'est pour les fins d'enregistrement, madame.
Mme Lamoureux: Je suis un peu surprise de vous entendre
évoquer l'éducation physique et le rôle que ces disciplines
peuvent jouer dans une civilisation des loisirs. Mon eminent collègue,
M. Lessard, me rappelait, avant que nous entrions ici, que, durant les sept
dernières années, les gouvernements québécois et
fédéral ont investi 750 000 000 $ dans le béton des
musées. Quels sont les usagers qu'on prévoit pour ces
différents musées? Est-ce qu'on a prévu les former d'une
manière quelconque ou si on s'imagine uniquement que c'est à
grands coups de publicité et d'expositions qu'on va les...?
C'est-à-dire qu'on a, d'une part, une société qui valorise
ça, mais qui ne donne pas véritablement à tous les moyens
de s'y intéresser. Pourquoi, si on a tellement d'argent à mettre
dans le béton des institutions, on ne s'assure pas qu'on forme des
citoyens vraiment intéressés à jouir des institutions
mises à leur disposition?
Mais, cela dit, j'ai l'air d'impliquer, à ce moment-là,
que c'est seulement quand on visite un musée qu'on ferait usage des
connaissances que nous voulons dispenser dans la formation qu'on annonce, et ce
n'est pas le cas. La façon dont nous avons conçu et dont nous
avons réfléchi à la contribution de notre discipline,
c'est vraiment de manière à indiquer que les actes les plus
quotidiens que l'on fait sont influencés par le type de savoir qui s'y
verrait enseigné.
Vous me parlez de la philosophie. La philosophie est une branche
extraordinaire; l'esthétique est une branche de la philosophie. Elle
apprend aux étudiants à jongler avec les concepts abstraits;
c'est bien, ils en auront besoin. Mais ils ont aussi besoin, compte tenu des
conditions concrètes et du milieu de vie pragmatique dans lequel on vit,
que ça se mesure à de l'objet, que ça s'incarne dans la
culture matérielle. Et, à mon avis, l'histoire de l'art a plus de
chance de conduire les gens à la philosophie que la philosophie n'a de
chance d'amener des citoyens à être de plus en plus
conscientisés comme consommateurs, comme électeurs et dans toutes
les diverses fonctions qu'un citoyen a à exercer. Dans ce
sens-là, je suis persuadée qu'on
touche un niveau beaucoup plus fondamental avec la culture visuelle.
Le problème, c'est que les gens s'imaginent que, parce qu'ils ont
deux yeux, ils voient. Les yeux, c'est quelque chose d'extraordinaire. Les gens
savent que ce n'est pas tout le monde qui a deux oreilles et de l'oreille, mais
les gens sont tous persuadés que, si on a deux yeux, on voit, alors
qu'on sait bien que ce n'est pas ça, que l'image est beaucoup plus
mystérieuse que ça. Et on a besoin dans notre
société d'une discipline qui à la fois puisse nous faire
passer de I'affect au concept. Parce que, si vous regardez le schéma qui
vous a été distribué...
M. Gendron: Je l'ai vu, je l'ai regardé attentivement.
Mme Lamoureux: ...le schéma allongé, oui, il montre
bien qu'on arrive à l'art par l'affect, on est touché. Et c'est
comment faire en sorte que les étudiants sortent du niveau juste
émotif: j'aime ça, je n'aime pas ça, je ne le sais pas, de
cette espèce d'inarticulation tellement caractéristique des
étudiants, de la matière étudiante avec laquelle on
travaille, et qu'ils arrivent, à partir de là, à porter un
jugement. Ça a des influences, ça fait d'eux des citoyens
critiques parce qu'ils sont partis d'un objet réel, d'une image
donnée. Et rien ne peut acheter, dans les autres disciplines,
l'acquisition de cette pratique du jugement, parce qu'elle va s'exercer dans
presque tous les secteurs où le visuel est en jeu - et on vous les a
énumérés, ils sont nombreux - mais aussi dans tous les
autres secteurs.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Ça va. Mme
Martineau, peut-être, pour ajouter.
Mme Martineau: Oui. Et, pour répondre à un aspect
plus précis de votre question concernant l'applicabilité de notre
proposition au niveau collégial dans l'organisation d'un nouveau cursus
pédagogique ou d'un cursus remodelé, corrigé,
réformé, peu importe, il faut quand même reconnaître
une chose: si on parle des mathématiques, si on parle de la chimie ou si
on parle de la biologie ou de quelque science de la nature que ce soit,
disons-le tout cru et tout net, si les étudiants recevaient dans leur
formation générale au niveau collégial un seul cours de 45
heures, ils ne feraient que rattraper très minimalement ce qu'ils n'ont
pas eu d'acquis au niveau secondaire, et peut-être antérieur si on
pense au contexte social dans lequel ils baignent, au contexte culturel de leur
milieu. Et ce n'est pas le cas pour les autres disciplines dont la contribution
est essentielle. (17 heures)
Qu'on parle de perte dans la réorganisation d'un cursus dans le
cas de certaines disciplines, j'en conviens et je comprends très bien
qu'on puisse argumenter à l'effet qu'il s'agit là dune perte
déterminante qui pourrait avoir des incidences importantes sur la
formation de nos ouvriers, de nos techniciens, de notre main-d'oeuvre, etc., de
nos créateurs, dans le champ de l'économie et de la production.
Nous en convenons tous. Mais, dans le cas de la formation par rapport à
la culture du visuel, nous partons à moins 15. Je voudrais quand
même attirer l'attention là-dessus. C'est ce que disait Mme
Lamoureux, vous savez, c'est presque un non-sens de penser qu'on attend de nos
jeunes qu'ils fassent mieux que nous, mais nous ne prenons pas la
responsabilité de leur donner minimalement ce dont ils ont besoin pour
exercer leur jugement, discriminer, faire des choix et être des citoyens
à part entière, pas seulement dans le champ de la pratique de la
langue orale, écrite, ou dans le champ de la pensée critique par
rapport aux idées, mais aussi par rapport au monde dans lequel ils
s'inscrivent. Alors, il y a donc un choix, oui, il y a donc une
sélection à faire, il y a donc des priorités à
établir. Je ne crois pas que nous puissions considérer la
contribution de la culture du visuel au même plan et au même niveau
que les autres contributions dont le Conseil des collèges, entre autres,
et d'autres intervenants ont fait l'analyse. Je nous le rappelle.
M. Gendron: Bien, on tenait à vous faire venir pour nous
en convaincre. Alors, j'espère que...
Mme Martineau: J'espère que je vous en ai convaincu.
M. Gendron: J'espère que la ministre est convaincue du
bien-fondé.
Une dernière question, toujours dans le temps qui file. Vous avez
semblé porter un jugement assez sévère dans l'offre de
cours complémentaires au niveau des régions et vous avez
expliqué, dans votre mémoire, qu'il existait une très
grande disparité, et je vous cite: «Cette disparité et
cette discrimination sont amplifiées par le manque d'équipement
culturel dans les régions et certaines difficultés
matérielles», et ainsi de suite.
Deux choses, rapidement. Vous avez l'air à oublier une
réalité: les gens de régions ont l'habitude de se
déplacer dans les grands centres pour, effectivement, être plus en
contact avec une série d'institutions, par exemple, les institutions
muséales et autres. Je pense qu'il y a beaucoup plus de gens des
régions qui se déplacent dans ces grands centres pour avoir
accès à de la culture visuelle qui, effectivement, est absente et
manque dans les régions.
Mais ma question sur l'offre de cours complémentaires... On a
reçu au moins - je n'ai pas le nombre intégral ici - une
quinzaine de cégeps des régions, et on va en recevoir encore un
ou deux, et, à ma connaissance - on a assez
d'éléments pour me corriger si j'étais dans
l'erreur - il n'y a pas beaucoup de cégeps des régions qui ont
fait des représentations fortes et qui ont réclamé ce que
vous réclamez, et là je vous cite: «l'accessibilité
à une formation de base dans le champ de la culture visuelle».
Moi, je dis: On est obligé, quand même, à partir du
moment où ça ne l'est pas, de tenir compte un peu de la
réalité et je pense qu'il faut prendre en compte plusieurs
réalités. Moi, j'en prends une, dans la région de
l'Abitibi-Témiscamingue. Je sais que, si je donne plus de chances
à des jeunes de se former chez moi, le taux de rétention est de
80 %. Si je les envoie en ville, c'est l'inverse. Je veux dire, sur 100 jeunes
qui vont parfaire leur formation collégiale ou universitaire en ville,
II nous en revient 15. SI, la formation, je la donne chez nous, j'en retiens
75. Je suis obligé de tenir compte de cette réalité dans
l'offre de cours complémentaires. Là, je fais juste vous
demander: Comment se fait-H qu'aucun cégep, même dans les cours
complémentaires, n'ait senti le besoin de réclamer, dans l'offre
de cours complémentaires, cette nécessité? Je le
répète, Mme Lamoureux: On sent que vous savez de quoi vous
parlez, vous êtes excessivement convaincante. Mais, moi, je dis: Les
représentants, les gens qui développent l'explication assez
claire de tout l'apport extraordinaire que peut donner une culture des arts
visuels dans la formation fondamentale, vous n'êtes pas nés
d'hier, comment se fait-il que ça n'aurait pas eu plus de
débordement?
M. Saint-Hilaire: Si vous me permettez, je répondrais
à cette question...
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): M.
Saint-Hilaire, oui.
M. Saint-Hilaire: ...peut-être pas complètement,
mais, du moins, certains jalons. Bien entendu, ici, nous sommes
représentants de la Coordination provinciale d'esthétique et
d'histoire de l'art. J'ai été mandaté par ma Coordination
pour faire un mémoire et le présenter ici. Vous conviendrez
probablement avec moi que les gens qui ont dû se présenter ici
devant vous, qui proviennent des cégeps des régions, par exemple,
c'étaient probablement des administrateurs, des pédagogues ou, du
moins, des cadres, ou peu importe, représentant des services
pédagogiques et tout cela. Or, il est connu, et c'est de source claire,
que les artistes se ramassent assez rarement dans ces postes-là. Je
crois qu'il y a des gens qui sont préoccupés par cela et il y a
des gens qui le sont moins. Ceci dit, on ne peut pas être contre la
vertu, mais je crois que cette préoccupation du langage visuel, il y a
certaines personnes dans le réseau, que ce soit universitaire, que ce
soit en arts plastiques, en arts appliqués ou en histoire de l'art, qui
sont très préoccupées par ça et qui voient plus
loin qu'un cadre accroché sur le mur. Il faut vraiment voir ça de
cette manière-là.
Pour compléter ce qu'on disait tout à l'heure
également, la discipline Esthétique et histoire de l'art, ce
qu'elle propose, ce n'est pas de donner un petit polissage culturel sur la
formation d'un étudiant et de lui dire: Ah! tiens, Picasso, c'est ce
monsieur-ci et Léonard de Vinci, en 1500, était encore vivant. Ce
n'est pas ça qu'on a envie de faire. Bien entendu, il y a un
élément culturel. Oui, je pense que c'est important. Et cet
élément culturel, on pourrait parler du sujet du cours, mais le
réel objet d'un tel cours va beaucoup plus loin que ça. C'est,
un, d'apporter des capacités de faire des synthèses aux
étudiants. Lorsqu'on regarde des oeuvres... Bon, vous les avez... Je
crois que c'est beaucoup plus global que ce que vous dites.
L'autre problème des cours complémentaires, je pense que
vous devez être conscients de cela, c'est que, souvent, c'est une
espèce de roulette, les cours complémentaires,
dépendamment du corps professoral à l'intérieur d'une
boîte, du nombre d'étudiants qui sont dans cette
institution-là. Je vous donne un exemple: au cégep de Sainte-Foy,
sur 6000 étudiants, on offre, par session, quatre cours
complémentaires en esthétique et histoire de l'art, ce qui fait
environ une possibilité de 160 étudiants sur 6000. Tantôt,
on posait des questions. C'est sûr qu'il y a des gens qui s'inscrivent
à 150, parfois, à des cours et il y a 40 personnes qui vont
rentrer. En plus, ce n'est pas nécessairement le premier choix,
ça va être le troisième. C'est la roulette, souvent. Donc,
on a un problème à ce niveau-là, bien entendu.
Mme Lamoureux: Si je peux me permettre de donner une
réponse...
Le Président (M. Tremblay, Rimouski):
Madame, le temps nous limite, malheureusement, mais je vais vous
autoriser pour une minute, peut-être, maximum. Je vais demander à
Mme la ministre de conclure après.
Mme Lamoureux: D'accord. Je vais juste dire qu'une des raisons
probables de ce manque de demande auquel Mme la ministre a déjà
fait allusion, c'est qu'on vit dans une société où la
définition de la culture est vraiment marquée par une
hégémonie accordée à la langue. Je pense que les
gens ne reconnaissent pas eux-mêmes l'importance du visuel et
qu'écarter cet élément-là, c'est plus que commettre
une erreur pédagogique, c'est commettre une erreur historique, parce que
c'est vers ça qu'on s'en va aussi. Vous avez la possibilité
d'infléchir le cours des choses, indépendamment de la demande qui
vous est faite, et je pense que ce serait la bonne décision à
prendre.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Très
bien. Alors, je vais maintenant reconnaître Mme la ministre pour
les mots de la fin. Mme la ministre.
Mme Robillard: Merci, M. le Président. Je veux vous
remercier. Je pense qu'on voit le sens de votre engagement, la croyance
très ferme que vous avez dans vos énoncés. Ça pose
aussi le problème de: comment faisons-nous aussi pour les autres formes
d'art, et non seulement les arts visuels? Parce que vous avez axé
ça beaucoup sur les arts visuels, et je pense que vous êtes les
professeurs dans cette discipline-là. Je pense qu'on peut se poser la
question aussi pour d'autres formes d'art et comment nos jeunes y sont
sensibilisés.
Alors, merci d'avoir provoqué la réflexion chez les
parlementaires. Merci d'être venus.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski):
Mesdames, messieurs, merci et bonne chance. J'espère que vos
propos seront entendus.
Je demanderais au collège de Rosemont de se présenter, pas
à la barre, mais à la table.
(Suspension de la séance à 17 h 9) (Reprisée 17 h
11)
Le Président (M. Tremblay, Rimouski):
Mesdames, messieurs, nous allons reprendre nos
délibérations. Je demanderais au collège de Rosemont
d'être présent ici. Vous y êtes déjà? Alors,
M. le président du conseil d'administration, M. Parent, si vous voulez
nous présenter les personnes qui vous accompagnent, s'il vous
plaît.
Collège de Rosemont
M. Parent (Pierre): M. le Président du tribunal ou M. le
Président de la commission parlementaire, Mme la ministre de
l'Enseignement supérieur et de la Science, M. le représentant de
l'Opposition officielle, membres de la commission parlementaire, à votre
invitation, je vais vous présenter les membres de notre
délégation. À ma droite, Mme Danielle Garcia, directrice
générale par intérim du collège de Rosemont;
à sa droite, M. Michel Choquette, directeur des services
pédagogiques par intérim; à ma gauche immédiate, M.
Robert Meilleur, directeur du Centre collégial de formation à
distance; et, enfin, M. Louis Lavoie, directeur des affaires publiques et
corporatives.
Mme la Présidente, j'aimerais profiter de l'occasion pour saluer
minimalement l'endurance dont vous avez fait preuve au cours de cette
commission parlementaire qui se déroule depuis le 4 novembre dernier.
J'ai eu l'occasion déjà de participer à la
délégation de la Fédération des cégeps et
vous avez l'air tout aussi frais et dispos qu'au premier jour.
M. Gendron: Mettez-en pas trop, c'est presque une timide.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Parent (Pierre): Mais les personnages politiques sont
habitués à dégager une bonne image. Exact.
M. Gendron: Ah! C'est mieux que ce que je pensais que vous auriez
dit. Que ce soit de la ministre...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Gendron: ...ou du critique officiel, là, je n'aurais
pas été d'accord.
M. Parent (Pierre): Jamais. La tenue évidente d'une
commission parlementaire, 25 ans après la création du
réseau collégial, est un moment historique, vous le savez, mais
nous sommes très fiers d'y être associés. Nous aimerions,
aujourd'hui, insister précisément sur trois
éléments de notre mémoire, à savoir: la
responsabilité partagée du réseau à l'égard
de l'accessibilité, deuxièmement, la formation collégiale
à distance et, enfin, des éléments sur la souplesse
nécessaire dans les processus de gestion et d'allocation des ressources
d'encadrement.
J'aimerais, tout d'abord, vous présenter le collège de
Rosemont. On parle souvent de réseau collégial, mais chaque
collège a ses caractéristiques, a sa personnalité.
Celui-ci regroupe une clientèle fort diversifiée comprenant 3000
étudiants et étudiantes à l'enseignement régulier,
10 000 étudiants-cours à l'éducation des adultes et 12 000
étudiants-cours en formation à distance sous l'égide du
Centre collégial de formation à distance que nous avons le mandat
de gérer de la part du ministère de l'Enseignement
supérieur et de la Science. Il est à noter que 25 % ou
près de 25 % de notre clientèle se déclarent d'origine
multiethnique, que la proportion d'étudiants à l'enseignement
préuniversitaire est de 59 % par rapport à 41 % à
l'enseignement technique. Il y a une statistique fort éloquente que je
ne pourrais pas expliquer, mais qui peut porter à réflexion: le
partage entre les femmes et les hommes au niveau de l'enseignement
régulier est le suivant: en septembre, 61,4 % de nos étudiants
à temps plein étaient des femmes et 38,6 % étaient des
hommes, alors qu'à l'éducation des adultes 48 % étaient
des femmes et 62 % étaient des hommes.
Le collège de Rosemont se situe présentement au milieu
d'un effort de redressement extraordinaire amorcé depuis 1988. Le
redressement s'opère au niveau de la qualité de sa
clientèle, à savoir que le cégep est devenu un
cégep de deuxième tour pour la première fois depuis une
quinzaine d'années et que la moyenne des admis est à la hausse
dans la majeure partie de ses programmes. Pour prendre ce virage, le
collège a mis de l'avant une série de mesures et de moyens
importants, et ce, grâce, en très grande partie, à une
vision partagée du cheminement de l'institution par l'ensemble des
ressources. Parmi ces moyens, on retrouve aujourd'hui le développement
de mesures d'encadrement accrues, tels le centre d'aide en mathématiques
et le centre d'aide en français, des journées d'accueil pour les
nouveaux étudiants, la création de nouvelles formations dont le
groupe d'excellence en sciences, le programme communications, l'option gestion
en commerce international, en techniques administratives. Plus encore, des
ressources-cadres et de soutien à l'équilibre budgétaire
de l'institution en 1991-1992 y ont participé en donnant 1 % de leur
salaire, et ceci est, pour nous, un fait déterminant qui prouve qu'une
vision commune au sein d'une maison d'enseignement peut susciter de grandes
choses et de façon très concrète.
Toutes ces mesures ont été le fruit d'initiatives
réalisées rapidement, sans passer par un long processus
administratif. Voilà un signe probant d'une institution qui a
retroussé ses manches. Le collège de Rosemont travaille toujours
avec acharnement à sa remontée et ce n'est qu'une question de
temps avant que les indicateurs du ministère de l'Enseignement
supérieur et de la Science et les palmarès qui en
découlent reflètent cette nouvelle réalité de notre
maison d'enseignement.
Notre mémoire, il faut le dire, a été adopté
de façon majoritaire par le conseil d'administration et il a
été dénoncé par le syndicat des professeurs de
notre institution. Vous constaterez, à la lueur des réflexions
que nous vous proposons aujourd'hui, que certaines des positions novatrices
peuvent susciter de telles réactions.
Alors, le premier thème que je voudrais aborder est donc
l'accessibilité, et nous considérons que ce doit être une
responsabilité partagée. Le système actuel à
l'égard de l'admissibilité présente souvent un mirage aux
étudiants qui ont peu de chances de réussir en raison d'une
préparation insuffisante aux études collégiales ou
postsecondaires. Qui plus est, ces étudiants sont souvent admis dans des
programmes les destinant à des études universitaires. Quel
paradoxe! Dans les régions urbaines, avec une concentration de maisons
d'enseignement collégial, les missions des cégeps en place se
sont teintées peu à peu de caractéristiques arbitraires
directement liées à l'accessibilité: tel cégep
accueille traditionnellement des étudiants forts, tel cégep
accueille les plus faibles. (17 h 20)
Existe-t-il vraiment des différences objectives qui viennent
justifier de telles distinctions? À notre avis, non. Pourtant, la
réalité est celle d'une segmentation des clientèles et de
l'orientation des étudiants plus forts vers certains collèges.
À ce vice, à notre avis, s'ajoute celui du choix des programmes
des étudiants forts et faibles, le programme des sciences de la nature
accueillant les plus forts et celui des sciences humaines, sans maths, les plus
faibles. L'accueil des clientèles plus faibles doit-il reposer sur les
épaules de quelques maisons d'enseignement seulement? Pour ces maisons,
la tâche deviendrait, à ce titre, plus lourde pour les professeurs
et l'atmosphère plus difficile pour les étudiantes et les
étudiants. Le jumelage d'étudiants forts et faibles au sein d'une
même institution est sain et enrichissant pour les uns et les autres.
À preuve, les centres d'aide en mathématiques et en
français qui favorisent le cheminement des uns et des autres grâce
au tutorat par les pairs.
L'ouverture possible d'un nouveau cégep public sur IHe de
Montréal suscite, pour nous, cette interrogation quant au
redéploiement des clientèles dans la région
métropolitaine. Un support financier additionnel des clientèles
faibles serait louable, mais ne devrait pas confirmer la vocation
particulière de certaines maisons d'enseignement, à moins que le
ministère répartisse cette responsabilité à
l'ensemble des cégeps dans les régions métropolitaines. Il
y a un risque important, à notre avis, de croire qu'on peut
évaluer un cégep uniquement par son taux de diplomation, mode
d'évaluation qui suscitera éventuellement un nivellement vers le
bas des objectifs pédagogiques.
Le deuxième thème que nous voudrions aborder dans notre
présentation est celui de la formation à distance qui est,
à notre avis, une voie d'avenir, une voie intégrée, mais
complémentaire au réseau. Nous sommes probablement la seule
institution qui aborde ce dossier, puisque nous sommes l'institution à
qui a été confié le mandat de gérer au niveau du
Québec la formation à distance. Nous croyons, à cet
égard, que le ministère, évidemment, a fait un choix
éclairé en singularisant la formation à distance de niveau
collégial et nous remercions Mme la ministre d'avoir fait confiance
à notre institution pour relever ce défi à la lueur de
l'expérience que nous avions dans ce secteur auparavant.
Depuis sa création, le Centre collégial de formation
à distance, géré par le collège, a réussi de
nombreuses alliances stratégiques avec, notamment, Radio-Québec,
pour des cours de formation dans le cadre de la nouvelle émission
«Pousse-Pousse»; Vidéoway, filiale de Vidéotron, pour
la création de modules d'apprentissage interactifs en français et
en mathématiques; le ministère de l'Agriculture et de
l'Alimentation du Québec qui s'est associé à nous; le
réseau collégial, via l'embauche de ressources Morales, de
concepteurs et conceptrices pour des cours. Nous avons fait des ententes pour
la passation des examens avec les autres cégeps. Nous avons
créé un programme spécial pour les sports-études
avec le cégep de Maisonneuve et l'Université de Moncton, pour un
projet de coopération internationale au Nicaragua; avec le cégep
Ahuntsic, pour la formation à distance auprès des Forces
armées canadiennes; et avec la
Télé-université et la Direction de la formation à
distance pour la tenue d'un colloque en janvier 1993 sur la formation à
distance. Bref, à cet égard, nous pouvons confier à une
institution du réseau un mandat national et cette institution-là
l'assumera avec les autres réseaux. Il ne s'agit pas, pour exercer une
mission nationale, d'y avoir une organisation centrale.
Ce qui est plus intéressant, c'est que la popularité de la
formation à distance n'est plus à faire; 8000
étudiants-cours dès la première année, 12 000 en
1992-1993 et des prévisions de l'ordre de 27 000 étudiants-cours
en 1995-1996. Il s'agit d'un mode non seulement adapté, mais
également rentable et économique. C'est un excellent moyen de
rejoindre les clientèles des régions périphériques
actuellement peu ou mal desservies ou les clientèles ayant une
disponibilité différente de nos clientèles
régulières adultes ou jeunes, et cela, sans investissement dans
la construction de campus. À preuve, le Centre collégial de
formation à distance réussira à dispenser de la formation
à plus de 27 000 étudiants en 1995-1996 avec un budget probable
de 7 000 000 $, soit un budget quatre fois moindre qu'un cégep ayant une
clientèle de même envergure à temps complet.
La formation à distance est, selon nous, également un
outil privilégié pour favoriser une plus grande diplomation des
Québécois et des Québécoises pour qui un, deux ou
trois cours permettraient, pour les uns, de compléter un diplôme
d'études collégiales, pour les autres, d'être un
déclencheur pour un retour aux études collégiales.
Il est important de constater que la pénétration du
marché de la formation à distance repose sur l'utilisation accrue
des nouvelles technologies de communication qui sont maintenant à notre
disposition. Ces technologies deviennent également essentielles afin de
dispenser certains cours professionnels. Le Centre collégial de
formation à distance serait mieux servi par un mode de financement
différent. Actuellement, le financement se fait par enveloppe
fermée, alors que le dynamisme et la popularité de la formation
à distance s'en trouvent ainsi - ou risquent - pénalisés.
Nous sommes convaincus d'avoir jusqu'à maintenant mené à
bien ce projet depuis sa création et que les perspectives d'avenir qui
s'offrent au Centre seront bien servies par notre institution.
Le dernier volet de notre mémoire que je voudrais aborder est
peut-être celui qui, sous toutes réserves, le distingue le plus,
je pense, des mémoires d'autres collèges. Il s'agit de la
souplesse nécessaire, selon nous, dans les processus de gestion et les
modes d'allocation des ressources d'encadrement. Nous écrivions, dans
notre mémoire, que l'organisation de la gestion pédagogique des
collèges souffre de sa trop grande rigidité et mérite
qu'on la repense.
Philippe Gribeauval, ex-directeur général de notre
institution, ajoutait dans sa lettre parue dans Le Devoir du 3
décembre dernier: «Les cégeps étouffent sous le
poids de leur organisation et de la rigidité des conventions
collectives». Ce que nous souhaitons, c'est que le conseil
d'administration et l'administration d'un cégep puissent retrouver une
certaine souplesse dans les processus de gestion et les modes d'allocation des
ressources d'encadrement puisqu'elles sont responsables de la pédagogie,
mais non, dans les faits, imputables de celle-ci. Je m'explique.
Les coordonnateurs départementaux, présentement,
maintiennent leur appartenance syndicale et doivent en même temps exercer
un contrôle sur leurs pairs. C'est, à notre avis, illusoire qu'une
telle structure puisse être efficace. Cette réflexion de notre
part ne remet nullement en cause la compétence des professeurs qui
occupent ces fonctions présentement, mais le maintien de leur
appartenance syndicale, dans le contexte actuel, encarcane, à notre
avis, le processus de la coordination départementale.
Les cégeps comptent parmi les organisations les plus pauvres au
chapitre de l'encadrement de leurs ressources humaines. Deux ou trois adjoints
pour encadrer au-delà de 200 professeurs pour des cégeps de
moyenne envergure, c'est unique au réseau collégial. Les
collèges ne peuvent, toutefois, dans cette foulée, renoncer
à exercer une gestion pédagogique efficace et rigoureuse, ni la
faire porter uniquement par les quelques cadres de la Direction des services
pédagogiques. Ainsi, cela apparaît une condition minimale d'exiger
que, suivant le modèle de certaines universités, le professeur
appelé à devenir coordonnateur départemental quitte
temporairement son unité syndicale pour exercer ce rôle de cadre
auprès de ses collègues. Par ailleurs, les coûts de la
coordination départementale sont énormes pour le bienfait,
à notre avis, qu'on en rçtire sur le plan institutionnel. La
gestion pédagogique ne serait-elle pas rendue plus efficace si elle
était assurée, du moins en partie, et cela à notre
recommandation, par un nombre plus grand d'adjoints à la Direction des
services pédagogiques? Cet ajout de ressources pourrait être
financé, d'ailleurs, à même l'enveloppe actuelle consentie
à la coordination départementale.
La structure départementale, à notre avis, doit coller
davantage aux besoins des programmes, ce qui peut vouloir signifier ne pas
être nécessairement segmentée par discipline. Ladite
segmentation risque, à notre avis, de baliser d'écueils toute
réforme sur le contenu des programmes et sur l'atteinte d'objectifs
nouveaux. (17 h 30)
La gestion, selon nous, doit se faire, évidemment, de
façon éclairée, soucieuse de définir un nouveau
terrain d'entente entre les
gestionnaires et les professionnels de l'enseignement. Un terrain
d'entente sur des critères bien définis par Paul Inchauspé
dans son ouvrage «L'avenir du cégep», notamment, et je cite:
«respecter pour la gestion l'autonomie du professeur, favoriser chez lui
une meilleure compréhension des objectifs institutionnels, encourager sa
créativité à l'intérieur de ces objectifs et,
enfin, appuyer cette créativité pour l'amener à des
réalisations concrètes». Paul Inchauspé, dans son
ouvrage, traite de façon nouvelle la relation à établir
entre le gestionnaire et le professeur en affirmant: «L'un est
nécessaire pour coordonner efficacement les activités de
l'établissement, l'autre, pour lui donner de la vigueur».
Nous sommes convaincus que tout projet de réforme quant à
la coordination départementale ne pourra se faire que si elle repose sur
une meilleure mobilité entre les corps d'emplois, sur de meilleures
passerelles, et ce, dans le respect des droits acquis à
l'intérieur des conventions collectives.
Toujours dans la foulée de notre analyse quant au processus de
gestion dans les cégeps, nous constatons que les cégeps doivent
compter parmi les seules organisations à gérer des budgets de 15
000 000 $ et plus sans avoir un pouvoir décisionnel effectif sur le
choix de leurs ressources humaines, notamment les professeurs. Dans les faits,
les règles des conventions collectives font qu'en cas de
désaccord le choix des pairs prime celui de l'employeur. L'embauche d'un
professeur représente un investissement de 1 500 000 $ sur une
période de 20 ans. La maison d'enseignement doit jouer un rôle
plein et entier dans le processus d'embauché dans le respect des
objectifs institutionnels. De plus, l'administration d'un cégep doit
exercer sa responsabilité institutionnelle à l'égard de
l'évaluation de ses ressources humaines. L'évaluation n'est pas,
selon nous, un processus coercitif; au contraire, l'évaluation permet de
définir des objectifs institutionnels auxquels se greffe l'apport
très important de chacune des ressources humaines de la maison
d'enseignement. Ce processus permet de préciser la mission commune dont
peut se doter une institution et au sein de laquelle. une ressource
professorale exerce le rôle moteur.
Enfin, sur les budgets, nous croyons, pour faciliter la planification de
l'organisation d'une institution d'enseignement collégiale, que le
financement budgétaire sur un horizon de trois ans, par exemple,
permettrait de planifier nos opérations et notre développement
à plus long terme, à la lueur d'une planification
stratégique reposant sur les besoins de nos clientèles. Le
ministère, d'ailleurs, se commet déjà pour une
période de cinq ans pour un certain nombre de centres, comme le CRI M et
le CQVB.
En conclusion, questionner l'avenir du réseau collégial
n'a jamais eu dans l'esprit des gens du collège de Rosemont une autre
résonance que celle qui signifie interroger notre qualité, notre
efficacité, notre productivité. C'est dans cet esprit que nous
avons souscrit à l'entreprise de déposer un mémoire, et
cela, très conscients d'abord de notre mission de formation et que rien
ne peut se faire sans un climat stimulant pour nos ressources humaines. En
présentant ce mémoire, nous exprimons explicitement notre
croyance en l'avenir du réseau collégial et en la
nécessité de restaurer sa valeur par des ajustements
nécessaires. Certains des procédés et des approches du
réseau des collèges font montre d'archaïsme. Il faut donc
les moderniser pour les adapter aux réalités nouvelles.
En guise de conclusion, nous croyons que les administrations des
cégeps n'ont pas toujours exercé ce qu'on peut qualifier, en
termes pointus, leur droit de gérance depuis une quinzaine
d'années en raison du contexte politique. Il est important d'exercer
à nouveau ce droit avec doigté, évidemment, puisque la
population, et vous le ressentez beaucoup plus que nous, va obliger de plus en
plus les administrations des cégeps à être imputables et
responsables des résultats scolaires de leurs clientèles. Il est
temps que les collèges assument les pouvoirs décisionnels dans
les choix de leurs ressources humaines et dans leur capacité d'organiser
efficacement le travail.
Des changements au sein du réseau peuvent se réaliser,
nous le croyons, mais ils demandent un ralliement essentiel des ressources
humaines. Nous croyons avoir fait la preuve que des projets institutionnels
peuvent être partagés par l'ensemble des ressources lorsque le
dialogue amène une vision commune des objectifs à atteindre. Par
contre, il faut introduire dans le système une plus grande souplesse, ce
qui favoriserait le dialogue et aplanirait les conflits.
Il faut profiter, à notre avis, du momentum créé
par la commission parlementaire. La période d'analyse et de renouveau
qui suivra cette commission peut être propice à mettre sur la
table certains projets de réforme pour fins de discussion. Souhaitons
qu'au niveau national et dans chaque institution nous pourrons, avec les
représentants de tous les personnels, particulièrement les
enseignants, convenir des principaux changements essentiels, et cela, avant et
en dehors du processus de négociation traditionnel dans le
système public québécois qui a été plus
générateur de conflits que de progrès. Merci.
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup, M. Parent.
Alors, je reconnaîtrai Mme la ministre de l'Éducation et de
l'Enseignement supérieur et de la Science.
Mme Robillard: Merci, Mme la Présidente. Bienvenue aux
gens du collège de Rosemont. M. Parent, vous avez été avec
nous au début des travaux et vous êtes à nouveau avec nous
à la fin des travaux. Alors, nous apprécions votre
participation, de même qu'à toute l'équipe. Je pense
que c'est probablement à cause de votre troisième point
exposé devant nous que le syndicat du collège de Rosemont a
dénoncé votre mémoire. Est-ce exact?
M. Parent (Pierre): Oui, et la résolution était
très claire. Je pense que le syndicat, pas seulement pour cette
raison-là, déplorait que notre projet de mémoire n'aborde
pas les questions d'ordre pédagogique. Nous avions convenu que ces
questions étaient largement traitées dans d'autres
mémoires au niveau national et au niveau des cégeps. Et,
également, le syndicat regrettait que nous abordions la question de
l'embauche des enseignantes et des enseignants et le rôle des
responsables de la coordination départementale. Mais les
représentants des autres corps d'emplois ont voté en faveur du
mémoire au conseil d'administration.
Mme Robillard: M. Parent, vous avez dit, en conclusion, qu'on ne
pourra procéder à un renouveau ou à une réforme de
l'enseignement collégial sans la participation de tous et de toutes, et
donc aussi de nos professeurs, de nos enseignants et de nos enseignantes.
Comment pensez-vous qu'on pourrait mettre en application vos recommandations
qui touchent surtout le troisième point, au niveau de la souplesse
souhaitée, au niveau de la récupération du droit de
gérance? Parce que, ça, je l'ai bien entendu. J'aimerais
ça, d'ailleurs, que vous m'explicitiez pourquoi vous dites que depuis 15
ans il n'y a presque plus de droit de gérance, dû au contexte
politique, avez-vous dit. J'aimerais ça vous entendre davantage sur
ça. En somme, comment, concrètement, vous pensez qu'on pourrait
arriver à mettre en place ces recommandations-là?
M. Parent (Pierre): Mme la ministre, je crois que, lorsqu'on
utilise la notion de droit de gérance, on utilise une vieille
terminologie patronale-syndicale. Comme observateur de la scène
sociopolitique et économique du Québec, je pense qu'il y a un
changement énorme dans l'exercice des règles du jeu, des rapports
entre les syndicats et les patrons dans le secteur privé. Et, de
ça, vous avez des exemples très patents dans la région de
Sorel, par exemple. Vous avez des exemples très patents pour une
entreprise qui est Cascades. Je pense que, dans le secteur public, nous n'avons
pas abordé encore de façon très large de nouvelles notions
du partage de la responsabilité de la gestion de nos institutions
publiques. Je crois que la rareté des ressources et
l'imputabilité de plus en plus forte qui sera exigée de la part
de nos institutions d'enseignement exigeront qu'on essaie de sortir des
rapports de force non seulement qui sont à tous les trois ans dans les
négociations, mais qui sont également souvent présents
quotidiennement dans les collèges. Je crois qu'il faut, pour vous
autres, parce que c'est vous qui êtes détenteurs de l'information
qui vous a été transmise ici, profiter des ouvertures qui vous
ont été faites par beaucoup de groupes de personnels, incluant
les enseignants, pour les associer très rapidement aux changements que
vous souhaitez et à la façon dont vous souhaitez qu'ils soient
introduits dans le milieu. (17 h 40)
Personnellement, je trouve très important de convenir avec les
représentants des syndicats des changements et des conditions d'exercice
de ces changements avant la négociation des conventions collectives. Je
suis profondément convaincu que le processus de négociation n'est
pas propice pour faire avancer les choses sur le plan institutionnel, et ce
n'est pas fait pour ça. Une négociation de convention collective,
c'est fait d'abord pour négocier les conditions de travail de personnes,
et c'est tout à fait légitime. Dans l'histoire du public et du
parapublic, donc celle du collégial au niveau du Québec, les
négociations ont été trop souvent l'occasion pour revoir
les processus ou les rapports de gestion et de développement de nos
institutions.
Mme Robillard: Vos recommandations allant jusqu'à - si
j'ai bien compris - l'engagement de vos professeurs au niveau local, au niveau
de chacun des cégeps, avec peut-être même la fixation des
conditions de travail, est-ce que vous êtes allés jusqu'à
réfléchir sur les changements que ça nécessiterait
au niveau des conventions collectives?
M. Parent (Pierre): Non, non. Nous n'avons eu ni
l'énergie, ni les moyens, ni le temps d'examiner chacun des points des
conventions collectives. Comme le mémoire de la Fédération
des cégeps le suggérait - je pense que d'autres organismes l'ont
suggéré et, dans le fond, ça fait plusieurs années
que beaucoup de gens le suggèrent - il faut essayer de rapetisser la
portée et le nombre de clauses des conventions collectives qui
deviennent des instruments de gestion quotidienne dans les cégeps. Je
pense que, dans les cégeps, il faut développer un niveau de
confiance suffisant, un niveau de responsabilité de chacun des groupes
sur le plan institutionnel, sur le plan professionnel, pour pouvoir vraiment
faire de la gestion des ressources humaines et non de la gestion de conventions
collectives.
Mme Robillard: Je ne peux passer sous silence le rôle qui
vous est dévolu dans la formation à distance pour l'ensemble du
réseau collégial. J'aurais peut-être deux questions
spécifiques, soit à vous, M. Parent, ou à M. Meilleur. Il
y a eu une progression faramineuse des inscriptions au niveau de la formation
à distance. Tantôt, vous avez dit que, parfois, cette formation
permet à des jeunes de régions peu ou mal desservies d'avoir
accès aux études
ou permet à des gens qui ont moins la disponibilité de se
rendre sur les lieux de compléter des études. J'aimerais savoir
si vous avez présentement une étude des caractéristiques
de la clientèle qui s'adresse au centre de formation à distance,
premièrement. Deuxièmement, est-ce que vous avez établi
des liens de collaboration avec la Télé-université?
M. Parent (Pierre): M. Meilleur.
M. Meilleur (Robert): Actuellement, parce qu'on a quand
même débuté nos activités en avril 1991, donc il y a
un an et demi, on a quand même quelques données sur les
caractéristiques de notre clientèle. D'abord, notre
clientèle, elle est féminine aux deux tiers; on retombe donc aux
mêmes statistiques que l'enseignement régulier. Les deux tiers de
la clientèle ont en bas de 30 ans, donc on parie de jeunes adultes. En
termes de provenance géographique, on pénètre toutes les
régions du Québec, à peu près de la même
façon que la population est répartie sur le territoire. Ce qui
attire les étudiants à la formation à distance, c'est sans
doute aussi ce mode d'apprentissage qui fait appel à leur autonomie et
à leur rythme d'apprentissage. Dans le fond, ils sont
intéressés par cette forme d'enseignement individualisé.
Donc, d'une part, cette clientèle est attirée par la formation
à distance et il y a aussi toute cette clientèle qui n'a pas
accès à la formation non pas pour des raisons
géographiques, mais pour des raisons de travail, pour des raisons de
famille ou des raisons de ce type-là. Cependant, on pense que, pour bon
nombre d'étudiants et d'étudiantes, c'est aussi une façon
de raccrocher, de retourner aux études d'une façon quand
même propice à un rythme particulier d'apprentissage. Donc, Ils
font quelques cours à distance et, par la suite, souvent, ils vont
réintégrer, à ce moment-là, les études dans
des institutions collégiales.
Quant aux liens qu'on voudrait développer avec les autres
réseaux de l'enseignement à distance, à savoir la DFD pour
le niveau secondaire et la Télé-université pour le
réseau universitaire, on est en train d'organiser, les trois organismes,
un colloque qui se tiendra au mois de janvier, à Montréal. Je
pense qu'on va développer de plus en plus des liens, parce que, quand
même, on a un objectif commun, c'est l'enseignement à distance, et
ça nous permet de penser, éventuellement, un jour, à des
rapprochements dans divers domaines, autant administratifs que
pédagogiques, au niveau des méthodes, peut-être, au niveau
du développement des technologies. Je pense qu'il y a là un
espoir important, du côté de la formation à distance, qu'on
puisse allier nos forces, les trois institutions. Je pense qu'il y a une voie
d'avenir là. Je pense qu'à la formation à distance le
partenariat est comme un peu le mot clé. Je pense qu'il faut travailler
beaucoup en partenariat avec les autres institutions, avec les collèges,
avec les organismes, parce que les ressources sont rares. je pense qu'il faut
travailler beaucoup de ce côté-là.
Mme Robillard: On doit le faire, M. Meilleur.
M. Meilleur: Absolument. Mme Robillard: On doit le
faire.
La Présidente (Mme Hovington): M. le député
d'Abitibi-Ouest, porte-parole de l'Opposition.
M. Gendron: Merci, Mme la Présidente. Je voudrais saluer
les gens du cégep de Rosemont. Après avoir passé à
l'ouest, revenir un peu à l'est, c'est important. Je tenais, je l'a! dit
à quelques autres directions de cégep, à entendre le plus
grand nombre de cégeps qui ont eu l'amabilité de nous aider,
comme membres de cette commission, dans la réflexion. Donc, merci pour
votre contribution.
Vous avez développé davantage trois
éléments: formation à distance, éducation des
adultes et enseignement régulier. Pour ce qui est de la formation
à distance, Mme la ministre y a touché, je n'y reviendrai pas.
J'aurais une couple de questions.
Je suis heureux, cependant, que vous ayez donné autant d'emphase
et d'importance au secteur de l'éducation des adultes. Je pense que
c'est un secteur qui, pour toutes sortes de raisons que vous expliquez
très bien: changement de société, de conjoncture,
nécessité d'une formation continue, d'appoint, et ainsi de suite,
prendra de plus en plus de place. Vous parlez très clairement dans votre
mémoire de reconnaître l'éducation des adultes comme une
composante essentielle de la mission éducative des collèges.
J'aimerais ça que vous nous expliquiez un peu plus concrètement
ce que ça implique pour le collège de Rosemont et ce qu'il
faudrait changer très concrètement pour qu'effectivement vous
vous perceviez comme étant un collège qui dispose d'une
reconnaissance explicite quant à la composante de plus en plus forte et
de plus en plus essentielle d'une bonne formation à l'éducation
des adultes.
M. Parent (Pierre): Mme Garcia.
Mme Garcia (Danielle): Merci. Alors, Mme la Présidente, en
ce qui concerne l'éducation des adultes, c'est vrai que nous avons
écrit que c'est une composante de plus en plus importante des
collèges. Effectivement, la scolarisation de nos jeunes, elle ne se fait
pas toujours en continuité. On sait qu'on parie de décrochage, on
parle d'arrêt volontaire pour réfléchir, pour s'orienter;
ça existe dans nos sociétés, on vit ça
de plus en plus. On parie de changements technologiques qui demandent du
recyclage. On parie aussi des exigences du marché du travail, d'une
scolarité plus forte, toujours accrue. Alors, ces questions
sociologiques, psychologiques, des questions technologiques et
économiques font que nous voyons que l'éducation des adultes
devient un lieu important de formation et de formation qui se continue.
Alors, nous, on se dit: Elle a sa place entière à
l'intérieur du collège. Ce n'est pas un ajout à
côté, c'est une place entière à l'intérieur
du collège et c'est aussi un lieu où l'éducation des
adultes peut faire le lien avec le marché du travail, les entreprises.
Et l'éducation des adultes peut arriver à faire faire, à
l'intérieur de l'enseignement régulier, des changements qui sont
nécessaires quelquefois dans certains domaines de connaissance. Donc,
c'est une entité à part entière et, chez nous, on veut le
faire de cette façon-là. On a fait de l'harmonisation des
registrariats et on travaille pour que l'éducation des adultes soit
à l'intérieur de notre établissement. Elle est comme une
plaque tournante, effectivement, et c'est une composante essentielle. (17 h
50)
Maintenant, comment est-ce qu'on peut changer? Qu'est-ce qu'on peut
changer? C'est que cette façon de gérer, cette façon
d'alimenter mutuellement, on la préconise continuellement et on le fait.
À ce moment-là, le financement est différent. Il s'agit
d'étudier les façons de le faire. Mais on souhaiterait que le
financement, au moins pour une partie de l'enseignement à
l'éducation des adultes, qui touche ce que, nous, on appelle et ce qu'on
appelle aussi dans le mémoire du Conseil des collèges, la
formation initiale, soit fait à enveloppe ouverte, selon les besoins qui
seront précisés dans nos sociétés, avec
peut-être des modalités qu'on pourrait définir plus
précisément, en étudiant ce modèle-là d'une
formation initiale qui peut se prendre à l'enseignement régulier
ou, à cause des changements dans nos sociétés, qui
pourrait se prendre aussi à l'éducation des adultes. En ce qui
concerne le recyclage et la fonction de travail, probablement qu'à ce
moment-là, la personne étant en emploi, son employeur pourrait
contribuer, parce que les retombées reviennent dans le monde de
l'emploi.
M. Gendron: Je vous remercie. Je pense que c'est M. le directeur
général ou le président... M. Parent, vous êtes le
président du conseil, hein?
M. Parent (Pierre): Oui, absolument.
Mme Garcia: M. Parent est le président du conseil.
M. Gendron: O.K. Alors, c'est vous, M. Parent, qui avez
mentionné que le cégep étouf- fe... Vous faisiez une
citation dans votre mémoire. À un moment donné, vous avez
dit: Quelqu'un l'a affirmé, soit avec raison ou pas, ce n'est pas
ça que je veux évaluer. Mais vous dites: «Les cégeps
étouffent sous le poids de leur organisation et de la rigidité
des conventions collectives». Laissons quelques minutes la
ridigité des conventions collectives que je connais assez bien, je sais
qu'elles sont rigides. J'aimerais ça que vous m'expliquiez davantage;
est-ce que le cégep de Rosemont prétend que, lui aussi,
étouffe sous le poids de son organisation? Parce que c'est ça, le
jugement qui avait été porté: les cégeps
étouffent sous le poids de leur organisation. Et il donnait deux
raisons: nous autres, notre organisation est trop lourde - c'est ce que Je
déduis, mais j'aimerais vous entendre là-dessus - et il y a
également l'autre pendant qui est la rigidité des conventions
collectives. Mais, uniquement sur le poids de votre organisation, quand vous
prétendez que les cégeps étouffent, pourriez-vous
être plus explicite et quelles sont les raisons précises? Manque
d'autonomie, trop de contraintes, trop de mesures tatillonnes du
ministère, des fonctionnaires...
M. Parent (Pierre): Mais, d'abord, M. le...
M. Gendron: ...de M. Lanoux?
M. Parent (Pierre): Ha, ha, ha! Non.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Gendron: C'était pour qu'il suive, là!
M. Parent (Pierre): Non, absolument pas. Vous savez, c'est
difficile de distinguer le poids des conventions collectives du fait que les
administrations étouffent. Les conventions collectives sont devenues
tellement détaillées, lourdes qu'elles ne laissent plus d'espace
entre les directions de collège et les enseignants et les autres
personnels. C'est d'abord pour cette raison-là que nous croyons que les
administrations des collèges étouffent dans l'administration,
souvent.
Deuxièmement, dans un certain nombre de recommandations de la
Fédération des cégeps sur une meilleure clarification des
responsabilités des programmes sur le plan ministériel et sur le
plan de l'institution, à mon avis, nous allons aérer le climat de
l'exercice de la fonction principale d'un collège, soit de personnaliser
la formation qu'il a à assumer auprès de sa clientèle dans
des cadres nationaux.
Moi, je pense qu'une des résultantes - nous le souhaitons - des
travaux de la commission parlementaire, c'est de mieux clarifier les
rôles distincts des institutions de celui du ministère de
l'Éducation ou du gouvernement à l'intérieur du
système d'éducation. Souvent, c'est des circonstances qui ont
introduit un certain nombre
de règles; on s'y ajuste. Prenons juste l'exemple, par exemple,
d'il y a deux ans. Nous avons reçu, je pense, au début du mois de
mai, nos règles de financement pour la prochaine année et nous
étions obligés, de par les conventions collectives, de
négocier avec nos personnels de soutien avant le 1er juin les
affectations. Ça ne donne pas suffisamment de temps, ce type de rapport
spontané d'en haut vis-à-vis les institutions, pour nous
permettre de bien gérer nos ressources, surtout nos ressources
humaines.
M. Gendron: Merci. Je voudrais également revenir, pas
parce que je n'ai pas été attentif, en tout cas, je ne pense pas;
je suis fatigué peut-être, mais j'ai été attentif.
Vous avez dit: On n'a pas pu complètement exercer notre droit de
gérance dû au contexte politique - M. Parent - dans les 15
dernières années. Dans l'explication que vous avez donnée,
il me semble que c'était plus lié à une espèce de
réflexion qui aurait été faite au niveau syndical dans le
secteur privé, mais qui n'aurait pas été faite dans le
secteur public. En tout cas, j'écoutais vos explications; il me semble
que c'est ce que vous avez dit. J'ai de la misère à porter un
jugement sur l'appréciation que vous en faisiez tantôt, à
savoir que c'était dû au contexte politique. Je ne suis pas
capable de voir le lien. Est-ce que c'est moi qui n'ai pas compris? Si vous
voulez être plus explicite.
M. Parent (Pierre): D'abord, dans le secteur privé, c'est
la nécessité qui a changé les rapports de force, qui les a
rendus plus sous une forme de partage de la mission et partage des moyens. Dans
toutes les conventions collectives qui ont été
négociées depuis la fin des années soixante - j'ai
été personnellement au ministère de l'Éducation
pendant à peu près 18 ans - à chaque fin de ronde de
négociations, et vous le savez beaucoup mieux que moi, c'est toujours
des intérêts d'ordre économique - et, par rapport au
rapport de force, c'est tout à fait normal - qui ont prévalu et,
en second lieu, les conséquences sur le plan de la gestion
pédagogique. C'est à ça que je réfère
lorsque je parle du contexte politique.
Deuxièmement, c'est très clair que, dans le
développement des bureaucraties depuis 25 ans dans les
sociétés occidentales et particulièrement au
Québec, les syndicats, particulièrement dans le public, ont
développé une force énorme et très bien
articulée et très intelligente, et les directions de cégep
ont souvent eu peur de confrontations avec le pouvoir des bureaucraties
syndicales qui étaient très, très fortes. Une institution,
un collège - je parlais tout à l'heure du niveau d'encadrement
des institutions - ce sont des institutions qui ont un niveau d'encadrement
très fragile et, souvent, les directions de cégep ont choisi de
ne pas faire de confrontation avec leur personnel, n'étant pas, dans le
fond, assez fortes pour faire face au pouvoir syndical. Je suis convaincu que
les choses sont en train de changer. Je suis convaincu que les
mentalités sont en train de changer. La nécessité n'est
pas aussi forte que celle qui s'est imposée dans le secteur
privé, mais, par rapport à ce qu'on a pu entendre souvent au
cours de la commission parlementaire, à ce que j'ai pu constater dans
les coupures de presse, je suis certain qu'il y a une ouverture pour changer le
type de rapport de force dans lequel on a vécu depuis 25 ans. Et,
à cet égard, le gouvernement a une responsabilité
primordiale pour amorcer, déclencher et permettre ce
changement-là, et j'espère que les directions de cégep s'y
associeront.
M. Gendron: M. le député de Jacques-Cartier veut
continuer à utiliser mon droit de parole en son nom. Alors, ça me
fait plaisir.
La Présidente (Mme Hovington): M. le député
de Jacques-Cartier.
M. Cameron: Merci, M. le député d'Abitibi-Ouest.
Merci, Mme la Présidente. Merci pour le mémoire très
intéressant et très clair et, je pense, très important. Je
n'ai pas exactement une question, mais des commentaires.
I want to say that I agree very strongly with the positions put forward
In this memorandum and that, coming from a cegep of a very different kind, I
would still say that many of the points made would apply. For example, to make
a clear statement of educational purposes for the cegep that always gets the
approval of the union means probably we either never make one, or you make one
that is so general that it is of no use, or you take years to get that
agreement. It is also useful to remember that a failure to obtain agreement
from the union does not necessarily mean that a large number of teachers are in
disagreement with the position put forward by the college. On the contrary,
many of them are quite glad to hear it is said, even if it is not said by their
union. (18 heures)
Finally, I would also like to add that the point about entrance of
students - who is admitted in the language issue - also applies for Anglophones
and, as it is said quite correctly here, this is not just a question of elitism
or something to do with social advantages. For example, with John Abbott
College in the West Island with a clientele that is suburban Anglophone
affluent, supposedly with every advantage that does not apply for students so
often at a college like Rosemont, I would say about 35 % of our students have
serious problems in literacy at the minimal level. I am not talking about
reading or writing well, I am talking about reading or writing at all. This is
the most important problem that we face in education and most of the other
briefs that deal with other aspects of
cegep education will not matter unless we address this one. In the
United States, it has been demonstrated by frequent tests that the one kind of
educational test that really shows anything about anyone success in ordinary
life is a test of their general ability with the English language. Those who do
well on it, broadly speaking, say, in middle life, will hold the higher
positions in executive offices, in Government, in academia, and so on, and
those who do not do well will not do well including in fields that do not seem
to be about language. Many of our students do not realize this. Therefore, I
think it is important that not too much be made of the failure of agreement
from the union and rather that one should concentrate on the main points made
by the college. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup, M. le
député de Jacques-Cartier. Mme la députée de
Bourget.
Mme Boucher Bacon: Je vous remercie, Mme la Présidente. Je
tiens à remercier les gens du collège de Rosemont pour leur
apport, pour un éclairage partial et réaliste. Je trouve que vous
avez été un petit peu durs à votre égard lorsque
vous avez dit: Bien, nous, on n'est peut-être pas un collège de
premier tour. Je tiens à vous rassurer et à vous dire que vous
assumez très bien votre rôle de mission éducative. Parce
qu'on oublie souvent qu'on ne naît pas appris et instruit, et on oublie
aussi le contexte du lieu de naissance et aussi le contexte
socio-économique. Alors, ça, ça veut dire que, oui, il y a
des étudiants qui sont moins forts dans votre collège, mais qui
ont besoin de vous.
Je tiens à rendre hommage ici, cet après-midi, à
Mme Garcia et à M. Choquette. Lorsqu'un député est
confronté, justement, à des étudiants qui ont des
difficultés et souvent dans un contexte humanitaire difficile, compte
tenu de la région de Montréal-Est, je n'ai pas à
élaborer plus explicitement... Alors, je tiens à vous remercier.
Lorsqu'on a besoin de vous, ça prend des collèges de
deuxième tour où on donne un apport, au moins une
possibilité à l'étudiant de ne pas rater sa session ou de
pouvoir compléter son éducation et sa formation. Alors, soyez
rassurés, oui, la population reconnaît que vous donnez les moyens
d'accéder, comme vous le dites bien en page 3, à un niveau
supérieur d'enseignement et d'avoir les connaissances, les
habiletés techniques et le sens de l'autonomie requis pour la vie en
société. Et ça, je pense que c'est tout à votre
honneur.
Je reviens, après flatterie, à la page 5 pour vous
poser... Pardon?
La Présidente (Mme Hovington): Rapidement, parce qu'il est
déjà 18 h 5.
Mme Boucher Bacon: Je reviens à la page 5, à
l'enseignement régulier, où vous parlez d'«éta-lon
de mesure». Je suis sûre que vous n'avez pas parlé du
député d'Abitibi-Ouest, en termes d'étalon ou de mesures.
Alors, je voudrais rentrer sur l'étalon de mesure: la langue et le
contrôle de la qualité. Lorsque vous dites: Le collège de
Rosemont suggère...
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Boucher Bacon: c'est parce qu'on se fait des petites blagues
comme ça. on s'aime bien. «qui aime bien châtie bien»!
je n'ai pas dit que vous étiez un cheval. ha, ha, ha!
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Hovington): S'il vous plaît!
Mme Boucher Bacon: Le collège de Rosemont suggère
d'exiger de l'étudiant qu'il fasse la preuve de l'atteinte de seuils de
compétence et, minimalement, d'établir un étalon de mesure
pour la maîtrise de la langue. Alors, pensez-vous que des examens
nationaux d'entrée au collège seraient appropriés?
M. Parent (Pierre): Mme Garcia.
Mme Garcia: Lorsque nous avons rédigé le
mémoire, nous étions et nous sommes encore très
préoccupés par la préparation des étudiants qui
nous venaient du secondaire. Mais je pense que cet élément a
été largement discuté ici. On essayait de trouver une
façon de voir à quel moment l'étudiant qui nous vient du
secondaire est prêt à entrer à l'intérieur de nos
programmes collégiaux. On sait que le D.E.S., actuellement, il est
très bon comme diplôme, mais II n'est pas univoque. Il y a
certains diplômes, certains D.E.S. qui ne valent pas... La valeur n'est
pas univoque. Alors, on cherchait un seuil. On ne l'a pas défini, le
seuil. On n'a pas dit: Ça devrait être d'avoir atteint tel
élément en mathématiques, tel niveau en français,
en anglais. On a simplement dit: Un bon critère pour vérifier si
l'étudiant peut, avec profit, entrer ou être admis à
l'intérieur de nos programmes collégiaux - parce qu'on s'inscrit
a un programme - c'est la qualité, la maîtrise de la langue. Donc,
pour nous, c'était si l'étudiant peut démontrer ça
et qu'il y a des moyens de le démontrer, c'est ce qu'on voulait dire.
Est-ce qu'on pensait à des examens nationaux? On ne pensait pas à
des examens nationaux, mais on pensait à une vérification qui
nous permettrait d'établir ce seuil. On s'est dit aussi: En ce qui nous
concerne, si on demande au collégial de nous fournir des
étudiants qui ont atteint ce seuil, nous, lorsque l'étudiant a
cheminé dans notre programme, on devrait aussi être garants d'un
seuil de compétence.
Pour les programmes techniques, c'est bien entendu que c'est
différent parce que nous avons l'accréditation des associations
médicales, par exemple. L'étudiant va sur le marché du
travail et, tout de suite, il est évalué.
En ce qui concerne la préparation à l'université,
ce à quoi nous pensions, et ça va en concordance avec le
mémoire de la Fédération, on pensait à un examen
synthèse de fin de programme. Parce que, lorsqu'on parle du
collégial, on parle toujours de programme de formation. Alors, on
pensait à un examen synthèse, pas nécessairement à
des examens nationaux, mais à un examen de synthèse. On a aussi
élaboré, mais on n'a pas écrit, pensant peut-être
à préparer les étudiants à passer des examens qui
pouvaient ressembler aux préparations qu'on fait pour aller dans les
grandes écoles en France. On prépare un examen, mais
l'étudiant qui veut se présenter à cet examen-là,
c'est libre à lui de le faire.
Les examens nationaux. Il peut y avoir certains inconvénients
à de grands examens nationaux. On peut dire, par exemple: genre de
bourrage de crâne, genre de travail... Ça demande beaucoup de
réflexion. Mais ce sur quoi on voulait vraiment appuyer, c'est
qu'à la fin du secondaire il y ait des acquis bien clairs sur lesquels
on puisse compter et qu'à la fin du collégial il y ait aussi des
acquis bien clairs, sous forme de compétences et de capacité de
travail, sur lesquels on peut compter, et que le diplôme d'études
collégiales ait cette valeur pour toute la population et que le
diplôme d'études secondaires ait aussi cette valeur pour toute la
population. C'était ce qui sous-tendait nos préoccupations. Nous
ne sommes pas allés dans la partie très technique, très
précise de comment on le fait. Mais c'est vraiment une
préoccupation de ce qu'on appelait atteindre un seuil à la fin
d'un ordre d'enseignement.
La Présidente (Mme Hovington): Merci, Mme Garcia.
Mme Boucher Bacon: Merci.
La Présidente (Mme Hovington): C'est tout le temps que
nous avions. Alors, en conclusion, Mme la ministre.
Mme Robillard: Merci, Mme la Présidente. Je tiens à
remercier les autorités du collège de Rosemont et, de
façon particulière, à remercier le président du
conseil d'administration pour la clarté de ses propos,
l'honnêteté de ses propos, la précision de ses propos. Je
suis certaine que ça pourra nous éclairer dans la suite à
apporter aux travaux de la commission parlementaire. Merci bien.
La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. Parent, et merci
à toute votre équipe.
Alors, la commission suspend ses travaux jusqu'à 20 heures, ce
soir.
(Suspension de la séance à 18 h 10)
(Reprise à 20 h 5)
La Présidente (Mme Hovington): Nous reprenons nos travaux
avec le cégep de Sept-îles, à qui je souhaite la bienvenue
ici, à Québec, et spécifiquement à la commission de
l'éducation. Qui sera le porte-parole du cégep?
Cégep de Sept-îles
M. Besnier (Hubert): Moi-même, Hubert Besnier, ainsi que M.
Octave Deraps, le directeur général.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, voulez-vous
présenter les personnes qui vous accompagnent, s'il vous
plaît?
M. Besnier: Alors, M. Deraps, le directeur général;
M. Christian Gagnon, le directeur des services éducatifs; M. Yan Jalbert
- qui est au bout, là - étudiant, membre du conseil
d'administration; Mme Martine Lavoie-Gonthier, profes-seure, et, à ma
gauche immédiate, M. Louis Rioux, président du Centre de
concertation sur les ressources humaines et la technologie, employé
cadre à la minière Québec-Cartier.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, vous avez 20 minutes
pour nous présenter votre mémoire. Nous vous écoutons.
M. Besnier: Alors, Mme la Présidente, Mme
Claire-Hélène Hovington, Mme la ministre, Mme Lucienne Robillard,
M. le député de Duplessis, M. Denis Perron, je prends ce soir la
relève du président du conseil d'administration, M. Marcel
Blouin, retenu par ses tâches comme directeur général de la
ville de Sept-îles. Je me dois, au nom de tous mes collègues, de
remercier la commission pour avoir prolongé ses travaux et avoir bien
voulu entendre le mémoire du collège de Sept-îles.
Le mémoire que nous avons déposé à la
commission et que nous présentons ce soir est un véritable
mémoire de collège puisque tous les groupes qui forment
l'établissement, y compris les étudiants, ont participé
à sa préparation. C'est aussi, dans une bonne mesure, le
mémoire de la région que nous desservons puisque nous en avons
soumis une version préliminaire à une cinquantaine de
partenaires, organismes scolaires, entreprises, monde municipal, et que nous
avons tenu compte de leurs commentaires et suggestions dans la rédaction
de la version approuvée par notre conseil d'administration. Nous sommes
donc heureux de vous présenter ce mémoire en
compagnie de quelques représentants de ces différents
partenaires de l'interne et de l'externe. Maintenant, j'inviterais le directeur
général, M. Octave Deraps, à vous faire la
présentation du mémoire.
La Présidente (Mme Hovington): M. Deraps, allez-y.
M. Deraps (Octave): Mme la Présidente, notre
établissement, le collège de Sept-îles, dessert la partie
est de la Côte-Nord et le secteur du fer dans le Nouveau-Québec.
Port-Cartier, Fermont, Schefferville et Blanc-Sablon sont les sommets du
quadrilatère qui constitue notre territoire naturel. La population de
notre région atteint 55 000 personnes dont une partie importante est
concentrée dans l'axe Sept-Îles-Port-Cartier, le reste habitant
deux petites villes et plusieurs villages dispersés sur le territoire.
Trois groupes culturels importants composent la population: les francophones en
constituent les trois quarts, les autochtones près de 15 % et les
anglophones, surtout présents à l'est de Natashquan, 10 %.
L'étendue du territoire et la faiblesse des moyens de
communication, autant en termes de transport qu'en termes de diffusion de
l'information, constituent des freins au développement de la
région. La population étudiante de notre collège - environ
800 étudiants réguliers - est à l'image de la population
régionale: une majorité francophone, un nombre relativement
important d'autochtones - des Montagnais surtout - et un contingent
d'anglophones qui reçoivent leur formation préuniversitaire dans
leur langue maternelle. La prestation de services à ces trois
clientèles distinctes et aux communautés auxquelles elles
appartiennent constitue l'un des traits caractéristiques de notre
collège.
Le mémoire que nous vous présentons traite peu des grandes
questions qui ont été abordées devant la commission par
les personnes et les organismes qui nous ont précédés.
Nous avons choisi de concentrer notre réflexion sur notre
réalité de collège de taille modeste, implanté dans
une région immense et éloignée des grands centres. C'est
de cela que nous avons choisi de vous entretenir, bien que les enjeux plus
vastes qui ont été abordés devant vous nous concernent
directement et nous intéressent au plus haut point. Nous avons fait ce
choix pour une raison. Nous avons entrepris un travail dans notre région
et nous souhaitons être en mesure de le poursuivre, avec l'appui de notre
ministre, quels que soient, par ailleurs, les changements qui découlent
des travaux de cette commission. (20 h 10)
Et quel est-il, ce travail que nous avons entrepris? Essentiellement, on
peut le résumer en quelques mots: rendre l'enseignement collégial
accessible à une clientèle diversifiée, soutenir les
élèves dans leur démarche de formation et contribuer au
développement de notre région d'autres façons. Nous
aimerions donc vous présenter l'essentiel de nos préoccupations
et de nos défis dans ces deux domaines, et vous faire part de l'impact
qu'ils ont sur nos ressources humaines.
D'abord, notre clientèle. Notre collège a comme objectif
de rendre les études collégiales accessibles au plus grand nombre
de résidents de notre région. Cette politique d'ouverture, que
nous considérons inscrite dans la mission même des collèges
publics et qui fait partie de l'énoncé de planification
stratégique récemment adopté par notre conseil
d'administration à la suite d'une vaste consultation, cette politique,
dis-je, se traduit par l'accueil d'une clientèle diversifiée non
seulement sur le plan de la provenance, mais aussi sur celui de la culture et
de la préparation aux études supérieures.
L'enseignement postsecondaire dans notre région remonte à
1971 seulement, puisque, avant l'ouverture du collège régional de
la Côte-Nord auquel notre collège a succédé, aucun
établissement de formation supérieure n'était
présent sur le territoire. La tradition de poursuivre ses études
au-delà du secondaire est donc récente dans la population en
général et, de façon particulière, chez les
autochtones et chez les anglophones de la Basse-Côte-Nord. Nous devons
donc poursuivre notre travail de sensibilisation et de promotion de
l'enseignement supérieur dans notre région, et surtout dans ces
dernières communautés.
Notre option pour l'accessibilité favorise l'entrée au
collège d'étudiants appartenant aux trois groupes culturels qui
ont des formations antérieures variées et que nous devons mener
au succès. Cela implique des mesures d'accueil et d'intégration
aux études collégiales qui prennent plusieurs formes: cours de
mise à niveau, programmes d'intégration au collégial,
suivi particulier, etc., mesures que notre établissement a mises sur
pied et qu'il souhaite maintenir, voire améliorer. Notre
clientèle autochtone, quant à elle, nécessite une approche
et un soutien particuliers en raison du fait qu'elle en est, à toutes
fins pratiques, à ses premiers pas en matière de formation
collégiale et surtout en raison des différences profondes entre
sa langue et sa culture, d'une part, et la langue et la culture qui
caractérisent la vie dans les collèges. Il y a là un
défi majeur pour ces étudiants et, bien sûr, pour
l'établissement qui les accueille.
Ces caractéristiques de notre population étudiante et les
besoins spécifiques qui sont les siens justifient, croyons-nous, la
recommandation que nous adressons au gouvernement de maintenir dans ses
politiques d'allocation des ressources la possibilité d'accorder
à notre établissement un soutien financier qui tienne compte
notamment de ses responsabilités envers les communautés
autochtones et anglophones de la région, et qui prenne en
considération les contraintes qui
découlent de la nature même du territoire où il doit
remplir sa mission.
Nous aimerions maintenant vous parler un peu de notre rôle dans le
développement régional. Notre collège est le seul
établissement d'enseignement supérieur dans la région.
Cela explique pour une bonne part le rôle majeur qu'il est appelé
à jouer et qu'il entend continuer à jouer dans le
développement régional. L'absence d'université
élargit la gamme des interventions que le collège est
amené à conduire dans ce domaine et fait en sorte que c'est vers
lui que se tournent individus, entreprises et organismes pour obtenir du
support dans leur développement. Cette situation est certes stimulante
pour ¦ l'établissement et son personnel. Elle crée
cependant une pression supplémentaire sur eux puisque plusieurs facettes
de ce rôle de service à la collectivité ne sont
présentement reconnues ni dans la loi ni dans les modalités de
financement.
La prestation des activités de formation constitue la
première manière, et de loin la plus importante, utilisée
par notre collège pour contribuer au développement de notre
région. En dispensant la formation préuniversitaire, le
collège permet aux citoyens de la région de poursuivre chez eux
pendant deux ans leurs études postsecondaires. Cela contribue à
l'enracinement des jeunes dans leur milieu et favorise le retour en
région des diplômés universitaires. La formation technique,
quant à elle, fournit à nos entreprises une main-d'oeuvre
qualifiée originaire du milieu et formée sur place, ce qui permet
une plus grande stabilité de la force de travail de nos entreprises.
À cet égard, notre collège et ses partenaires
industriels attendent avec beaucoup d'impatience la décision de Mme la
ministre d'autoriser l'implantation du programme de techniques d'analyse
d'entretien au collège de Sept-îles, et ce, pour l'automne
prochain. Maintenant que toutes les étapes administratives ont
été franchies, nous attendons cette décision qui viendra
couronner plusieurs années de travail, de concertation et de mise en
commun des ressources dans notre milieu. Elle viendra aussi fournir à la
région immédiate de notre collège et à toute la
Côte-Nord un outil indispensable à la poursuite de son
développement industriel. Nous nous permettons d'insister pour que la
décision soit prise sans plus tarder, étant donné
l'urgence d'organiser la mise sur pied du programme et, surtout, de
procéder au recrutement des étudiants.
Le cheminement de ce dossier depuis le printemps dernier,
c'est-à-dire depuis la rencontre fructueuse tenue entre les
représentants du milieu, c'est-à-dire le collège et ses
partenaires du monde syndical et du monde industriel, et les autorités
de la Direction générale de l'enseignement collégial, nous
semble un bon exemple de la manière dont doivent être
considérés les besoins d'une région et nous souhai- tons
que le ministère s'en inspire pour traiter dorénavant les
questions de maintien ou d'implantation de programmes, principalement dans les
collèges de région. Nous comprenons et nous partageons les
objectifs de rationalisation du gouvernement. Nous demandons toutefois à
l'État de s'assurer que la poursuite de ces objectifs ne résulte
pas en l'application de normes générales, comme un nombre minimum
d'étudiants par programme, normes qui seraient applicables sans
distinction à tous les établissements et à toutes les
régions du Québec.
La formation des adultes constitue une autre manière pour le
collège de contribuer au développement de notre milieu. Nous
avons en ce domaine une pratique inspirée par nos objectifs
d'accessibilité à la formation collégiale. C'est pourquoi
nous allons, dans toute la mesure du possible, dispenser les activités
là où se trouvent les besoins, les grandes distances et les
difficultés de communication empêchant la clientèle de se
rendre au collège elle-même. Nous dispensons donc
régulièrement des cours à Fermont, à
Havre-Saint-Pierre, à Port-Cartier et ailleurs sur le territoire. Il va
sans dire que cette façon de faire a des impacts importants sur les
ressources humaines et financières de notre établissement et nous
souhaitons être en mesure de poursuivre notre travail en ce domaine avec
le concours des organismes publics concernés par la formation des
adultes.
Notre établissement a une belle tradition de collaboration avec
les entreprises et les organismes du milieu. Cette collaboration a pris, dans
le passé, plusieurs formes, dont la mise sur pied, dès le milieu
des années soixante-dix, d'un régime d'enseignement
coopératif. Nous poursuivons, d'ailleurs, notre coopération en ce
domaine puisque nous avons conclu avec des entreprises de notre région
les ententes requises pour implanter la formule d'alternance
travail-études dans le programme d'électrotechnique.
Autre exemple de collaboration collège-milieu, notre programme
d'informatique comprend une session complète de stages en milieu de
travail. Nous travaillons aussi étroitement avec nos partenaires pour
harmoniser le contenu de nos programmes techniques aux réalités
de notre économie régionale, mais la réglementation
actuelle des études nous laisse peu de marge de manoeuvre. C'est
pourquoi nous recommandons que les collèges aient davantage de
possibilités d'ajuster leurs programmes aux besoins locaux et
régionaux, tout en assurant l'atteinte des objectifs globaux, selon ce
que prévoit, d'ailleurs, l'article 13 du règlement sur les
régimes pédagogiques, article que nous souhaitons voir appliquer
dès l'an prochain sans nouveau délai.
Dans le même but de supporter le développement de nos
entreprises et, en particulier, de nos PME, nous estimons essentiel que les
collèges soient chargés, surtout dans les régions et dans
les secteurs où il n'existe pas de centres
spécialisés, de réaliser des activités de
recherche technologique et d'assurer le transfert des résultats de ces
recherches vers les entreprises de leur territoire. À l'heure où
tout le monde s'accorde sur l'urgence d'investir massivement en recherche et en
développement au Québec, nous souhaitons vivement que le
Québec tire davantage profit des importantes ressources humaines et
technologiques qui sont présentes dans tous les collèges du
réseau en intégrant ce volet dans leur mission.
Nous voulons, avant de terminer, insister sur l'importance que nous
attachons au développement de nos ressources humaines. Les
caractéristiques de notre clientèle, que nous avons
décrites sommairement au début de cette présentation,
notre volonté collective de mener à la réussite tous ceux
et celles qui sont prêts à consacrer les efforts
nécessaires constituent déjà un défi majeur pour
notre personnel en termes d'adaptation aux nouveaux besoins et aux
réalités de ces clientèles diversifiées. À
cela s'ajoute notre rôle dans le développement social, culturel et
économique de notre milieu, rôle multiforme, exigeant et changeant
lui aussi comme nous vous l'avons présenté. (20 h 20)
Nous pensons également aux nombreuses modifications qui ont cours
ou qui s'annoncent dans les différents programmes de formation
préuniversitaire ou technique, en plus des changements profonds qu'on
peut anticiper à la veille de la clôture de cette commission.
D'entrée de jeu, nous souhaitons que, dans la planification de ces
changements, il soit tenu compte, en priorité, de l'impact de ces
modifications sur les ressources humaines des collèges. Nous
espérons également que les modalités d'implantation des
nouvelles mesures prévoiront que les personnes oeuvrant sur le terrain
aient le temps et les moyens requis à une réelle prise en charge
de ces changements.
En ce qui concerne plus spécialement notre établissement,
nous sommes conscients de la pression que créent sur nos ressources
humaines les défis actuels et à venir. Nous estimons essentiel,
pour le développement de notre établissement et pour le maintien
de services de qualité à notre population, d'être en mesure
de bien préparer nos employés aux nouvelles exigences de leurs
fonctions et de les supporter efficacement dans leur développement.
À cet égard, nous comptons que nous soient rendues disponibles
des ressources spécifiques nous permettant d'offrir à notre
personnel une qualité de préparation et un degré
d'implication tout à fait comparables à ce qui sera possible aux
employés des collèges des grands centres.
En conclusion, Mme la Présidente, nous vous avons
présenté quelques-uns des enjeux et des préoccupations de
notre établissement et, dans une bonne mesure, les préoccupations
et les enjeux de notre région. Nous avons un certain nombre d'acquis sur
lesquels nous souhaitons prendre appui pour continuer notre travail, mais ces
acquis demeurent fragiles, tout au moins dans certaines parties de notre
population et dans certains secteurs de notre territoire. C'est pourquoi nous
devons, même après 20 ans, considérer comme essentielle la
poursuite de nos objectifs d'accessibilité à l'enseignement
collégial, de persévérance aux études et de
réussite. C'est pourquoi aussi nous souhaitons recevoir de l'État
un support qui tienne compte de notre réalité et du rôle
que joue notre collège dans le développement de sa région.
Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Hovington): merci, m. deraps. alors, je
vais reconnaître maintenant mme la ministre de l'éducation et de
l'enseignement supérieur et de la science.
Mme Robillard: Merci, Mme la Présidente. Bienvenue aux
gens de Sept-îles. Ça me fait plaisir de vous revoir et je suis
contente que vous ayez décidé de présenter un
mémoire à la commission parlementaire sur l'éducation.
Étant donné que, je pense, vous avez une réalité
qui vous est propre, très particulière, si ce n'est que par la
clientèle que vous desservez, je pense que c'était tout à
fait pertinent que le cégep de Sept-îles se présente
à nos audiences. Je suis donc très heureuse de vous accueillir
et, M. le directeur général, sachez que je reçois bien vos
messages que vous m'avez transmis ce soir, de façon particulière
le programme de techniques d'analyse d'entretien que vous attendez depuis
plusieurs mois. On me dit que, d'ici quelques semaines, le dossier doit monter
à mon bureau. Alors, je pense bien que vous allez avoir des nouvelles
à court terme, au début de l'année 1993.
M. Besnier, je pense, vous êtes au conseil d'administration?
M. Besnier: Oui, madame.
Mme Robillard: Oui? À titre de membre
socio-économique?
M. Besnier: C'est ça.
Mme Robillard: Est-ce que vous êtes président du
conseil?
M. Besnier: Non, c'est Marcel Blouin qui est le président
du conseil, mais il n'a pas pu se rendre pour des raisons de budgets
municipaux. Il est directeur de la ville de Sept-îles. Alors, je suis son
délégué.
Mme Robillard: M. Besnier, au niveau de^ la réflexion qui
a été faite au cégep de Sept-îles concernant cette
commission parlementaire, est-ce que les membres du conseil ont émis
certaines opinions sur le rôle même du conseil ou sur la
composition du conseil d'administration?
M. Besnier: Oui. Mme la ministre, on a une préoccupation.
D'abord, on représente un immense territoire qui a plus de 500 milles,
entre Rivière-Pentecôte et Blanc-Sablon, et, évidemment, il
y a certains secteurs de cet immense territoire qui ne sont pas
représentés au conseil d'administration. Alors, le conseil
d'administration se résume un petit peu, il est composé de gens
de Sept-îles et de Port-Cartier. Alors, on souhaiterait
énormément avoir, à ce conseil d'administration, des
représentants de la communauté anglophone de la
Basse-Côte-Nord ainsi que des représentants amérindiens
parce qu'on a plusieurs réserves indiennes sur notre territoire.
Évidemment, c'est la lacune. De façon particulière, pour
ce cégep-là en particulier, on essaie d'envisager une meilleure
participation au conseil d'administration. Maintenant, on peut dire que le
conseil d'administration, par contre, représente bien les divers
intervenants de la société. Les compagnies minières, les
grandes compagnies y sont présentes, les syndicats y sont
présents, les membres du corps professoral, tous les intervenants y sont
présents, sauf qu'on a cette lacune-là. Vous savez, comment faire
participer les gens de la Basse-Côte-Nord qui sont à plus de 200
ou 300 milles et ne sont pas reliés par route à Sept-îles?
C'est tout un problème. Comment faire participer les Naskapis de
Schef-ferville à notre conseil d'administration quand ils sont à
400 milles au nord de Sept-îles? C'est une préoccupation.
Mme Robillard: M. Rioux.
M. Rioux (Louis): Oui, madame.
Mme Robillard: Pourriez-vous m'expliquer ce qu'est le Centre de
concertation sur les ressources humaines et la technologie et votre lien avec
le cégep de Sept-îles?
M. Rioux: Le Centre de concertation sur les ressources humaines
et la technologie émane d'un rapport qui a été
déposé par la firme SECOR et commandé par le CADC de la
Côte-Nord. Pour faire un petit historique, suite à ce rapport, un
comité d'adaptation de la main-d'oeuvre a été mis sur pied
en 1989. Pendant deux ans, une concertation s'est établie entre les
différents partenaires socio-économiques, notamment la grande
entreprise, la moyenne entreprise, la PME, le Groupement
québécois d'entreprises, les chambres de commerce, les syndicats,
la FTQ-Métaljo, la commission scolaire, le cégep de
Sept-îles, etc. Suite aux travaux du CAMO, la principale recommandation
suite à cette concertation qui a été établie... Et
on pense que c'est pour une première fois - c'est une première,
je crois - qu'une concertation de la sorte a pu se mettre sur pied entre tous
ces différents par- tenaires-là. Suite à ça, la
recommandation principale a été de mettre sur pied un centre de
concertation. Il fallait que cette concertation-là se continue. Un
centre a été mis sur pied au mois de juillet 1992, qui comprend
tous les partenaires économiques. Et, au conseil d'administration,
siègent quatre représentants des membres employés, quatre
représentants des employeurs, trois représentants
institutionnels, deux représentants de membres affiliés.
Le Centre, sa mission est d'aider les entreprises à
améliorer la gestion et le développement de leur main-d'oeuvre et
de leurs ressources humaines et de les soutenir dans l'adaptation de ces
ressources lors de l'introduction de changements technologiques et de
méthodes de production. Dieu sait si, au niveau de la Côte-Nord,
face à la compétition, toutes les grandes entreprises et les PME
n'ont pas d'autre choix que d'aller vers une haute technologie. Cette
technologie-là, elle s'installe, elle fonctionne. Il faut que la
main-d'oeuvre qui nous est fournie par le cégep de Sept-îles soit
une main-d'oeuvre qualifiée et qui rencontre les besoins du milieu.
Mme Robillard: Donc, à l'heure actuelle, M. Rioux, est-ce
que vous êtes satisfait des services donnés par le cégep de
Sept-îles, dans le milieu?
M. Rioux: Très satisfait, sinon je ne serais pas ici ce
soir pour appuyer le cégep de Sept-Iles. J'aimerais vous dire, face aux
représentants du cégep ici, que, déjà, il y a un
maillage très, très serré qui s'est établi entre
notre industrie et le cégep. Il y a énormément de travail
de fait actuellement et ce travail-là, il faut que ça se
continue. Ce qui a été fait à date, on le supporte, et non
seulement on le supporte, il faut que ça continue et que ça
s'améliore encore plus. (20 h 30)
Mme Robillard: C'est très particulier chez vous, au
cégep de Sept-îles, où vous avez une clientèle
francophone, une clientèle anglophone et une clientèle
autochtone, les trois clientèles. Sur place, sur vos lieux mêmes,
vous dispensez des services aux trois clientèles. J'aimerais ça
entendre un peu l'étudiant qui est avec vous, M. Jalbert. Comment
ça se vit, ça, sur le campus collégial, des
étudiants autochtones, des étudiants anglophones et francophones
sur le même campus? Comment ça se passe, les relations entre les
étudiants?
M. Jalbert (Yan): Eh bien, les relations au niveau des diverses
communautés sont quand même assez bonnes. Il y a certaines petites
lacunes, par exemple, au niveau de l'intégration de la communauté
autochtone qui est beaucoup plus... qui est isolée. Il y a une sorte
d'isolement qui se produit du côté des anglophones et des
francophones, qui viennent en majorité de la région de
Sept-îles et des villages de la Basse-Côte-Nord, et des
communautés autochtones qui
viennent surtout de réserves un peu partout sur le territoire.
Afin de répondre à ça, il y a un comité qui est en
voie de formation. On est rendu maintenant à l'étape du choix des
personnes qui seront impliquées au niveau du comité. Il y a des
personnes des trois communautés qui sont représentées au
cégep qui seront sur ce comité, éventuellement, pour
essayer de trouver une solution, un moyen de parvenir à une meilleure
intégration de toutes les communautés parce qu'on se rend compte,
lorsqu'on regarde les activités sociales qui se passent, par exemple, au
cégep, ou les diverses activités sportives ou des choses comme
ça, qu'il y a une séparation. Le côté anglophone et
francophone va être beaucoup plus lié qu'on peut l'être, par
exemple, avec le côté autochtone. On peut prendre l'exemple, cette
année, d'activités, de soirés sociales qui ont eu lieu.
Les autochtones avaient leur soirée où tout le monde était
invité, mais la majorité de la communauté autochtone s'est
ramassée là. Il n'y avait pas grand représentants des
autres communautés à cette soirée tandis que, du
côté des soirées, peut-être, d'un peu plus grande
envergure, on ne voit presque pas d'autochtones. C'est peut-être à
ce niveau-là. C'est sûr qu'il y a une barrière culturelle,
une barrière linguistique aussi, à certains niveaux, mais c'est
ça. Le comité va se pencher là-dessus au courant de la
prochaine session pour essayer de trouver des solutions à cette
barrière psychologique qui existe et des moyens de mieux intégrer
les diverses communautés aux fins du collège.
Mme Robillard: M. le directeur général, dans votre
mémoire, vous suggérez que la mission des collèges soit
modifiée en tant que telle pour y inclure la responsabilité de
contribuer au développement social, économique et culturel des
collectivités locales et régionales. Vous nous suggérez
ça dans votre mémoire. J'ai l'impression que le cégep de
Sept-îles fait déjà ça. C'est ce qu'il fait depuis
une vingtaine d'années. Pourquoi voulez-vous voir inscrite cette
mission-là dans la loi des collèges?
M. Deraps: Vous avez raison, Mme la ministre, de dire que nous le
faisons. Effectivement, nous tentons de le faire au meilleur de notre
connaissance et au meilleur de nos ressources. Mais, pour répondre
à votre question, je commencerais par dire, d'abord, que ce n'est pas
simplement une question de financement. Il nous apparaît que c'est,
d'abord, une question de légitimité. Tant que le rôle de
soutien au développement régional ou de service à la
collectivité ne sera pas inclus dans la loi, c'est un peu comme si les
collèges tentaient de s'attribuer eux-mêmes des
responsabilités que l'État ne leur a pas confiées.
Deuxièmement, ça nous apparaît aussi être une
question de logique dans le sens suivant. Les collèges, vous le savez,
sont présents sur tout le territoire québécois. Ils ont
des ressources humaines, physiques, technologiques très importantes. Ces
ressources-là peuvent servir au développement de leur
région respective de plein droit. Et on se demande pourquoi on ne
pourrait pas en tirer profit davantage.
Et, troisièmement, c'est finalement une question de justice dans
le sens suivant. Les collèges, ceux des régions en particulier,
comme le nôtre, sont très sollicités par leur
environnement. Les citoyens et les organismes, conscients qu'il s'agit de
ressources mises à la disposition des régions par les pouvoirs
publics et donc à même les deniers publics, veulent utiliser ce
potentiel de ressources. Les collèges sont amenés donc à
consacrer beaucoup d'énergie et de ressources à ces secteurs
d'activité là. Or, ils le font sans recevoir de la part de
l'État québécois un support adéquat et sans pouvoir
s'appuyer sur leur loi constitutive pour valoriser ce rôle chez leur
personnel, ni pour avoir accès aux fonds des différents
organismes subventionnaires.
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup. Alors, pour
reconnaître le député de Duplessis, qui n'est pas membre de
la commission de l'éducation, j'ai besoin du consentement des deux
côtés de la table.
M. Tremblay (Rimouski): On a une certaine hésitation.
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Hovington): Est-ce que vous voulez
qu'on suspende pour réfléchir?
Mme Robillard: Avec plaisir, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, je vous reconnais,
M. le député de Duplessis. Vous avez la parole.
M. Perron: Je voudrais remercier le député de
Rimouski pour sa bonne grâce, ainsi que vous de la vôtre, Mme la
Présidente, et Mme la ministre est particulièrement
intéressante à ce sujet-là, puisqu'elle a d'emblée
accepté que je participe à la commission.
Je voudrais, d'abord, remercier, au nom de ma formation politique, les
personnes qui sont présentes devant la commission. Comme je connais
assez bien le domaine de l'enseignement sur la Côte-Nord et en
particulier dans la partie du comté de Duplessis, j'ai plusieurs
questions à poser en rapport avec la situation actuelle du cégep
de Sept-îles par rapport au territoire lui-même qui est couvert,
parce qu'on sait que c'est un territoire qui est extrêmement vaste.
Est-ce que, actuellement, vous avez des points de service qui sont
établis à l'extérieur de Sept-îles
par rapport aux clientèles visées? On a parlé de la
clientèle autochtone, de la clientèle anglophone et aussi de la
clientèle au niveau de la formation professionnelle dans
différents secteurs d'activité. Est-ce que vous avez actuellement
des points de service?
M. Deraps: Pour l'éducation des adultes, on va dispenser
des cours dans plusieurs villes du territoire, même plusieurs villages du
territoire, mais on n'a pas de points de service permanents, si c'est ça
le sens de votre question. Lorsqu'il y a un besoin qui est manifesté,
les services de l'éducation des adultes, dans toute la mesure du
possible, se rendent desservir ces gens-là. Ce n'est pas imaginable, je
ne pense pas que ce soit tellement possible d'imaginer qu'on puisse aller
dispenser des programmes à l'enseignement régulier ailleurs
qu'à Sept-îles, compte tenu déjà de la faible
clientèle que nous avons. Vous savez, on est un collège
d'à peine 800 étudiants, un des plus petits du réseau.
C'est déjà difficile de faire vivre plusieurs programmes
professionnels. Il faut attirer les étudiants en nombre suffisant.
Alors, pour le secteur de l'éducation des adultes, on peut envisager
d'aller à l'extérieur, mais pas pour le reste.
M. Perron: Combien avez-vous de demandes actuellement où
vous donnez des services vers l'extérieur de Sept-îles, au niveau
de la formation professionnelle, par exemple? On comprend que, le
général, vous pouvez difficilement faire ça, mais au
niveau de la formation professionnelle? Havre-Saint-Pierre ou quoi?
M. Deraps: C'est-à-dire que j'apporterai une petite
correction: ce n'est pas nécessairement en formation technique, ni en
formation préuniversitaire, c'est au secteur de l'éducation des
adultes. Donc, c'est en formation discontinue, si on veut, en formation
à temps partiel. Alors, les principaux besoins viennent,
évidemment, des deux villes, de Fermont où on est très
présents à l'éducation des adultes, on dispense chaque
année une bonne dizaine de contenus de cours qui sont des cours, pour la
plupart, de formation professionnelle, mais quelques cours de formation
générale aussi, du genre les arts plastiques ou des cours de
langues, etc. Ensuite, le deuxième volume en importance, c'est
Port-Cartier, puis Havre-Saint-Pierre. Au total, on dispense, chaque
année, je dirais, environ 25 cours à l'extérieur de
Sept-îles.
M. Perron: Si on regarde l'avenir, par exemple, les
prévisions que vous avez pour l'avenir justement reliées au
centre dont parlait tout à l'heure M. Rioux suite à une question
qui a été posée par Mme la ministre, est-ce que vous avez
des intentions d'élargir vos activités en donnant de la formation
de façon plus prononcée à l'extérieur de
Sept-îles, pour empêcher que les clientèles... On sait que
les coûts de transport sont énormes; c'est plus facile de
déplacer des enseignants ou enseignantes vers l'extérieur que de
prendre un nombre d'étudiants adultes, puis de les amener à
Sept-Hes, ce qui représente des coûts énormes. Est-ce que
vous avez des projections et dans quel domaine?
M. Deraps: II faut comprendre, d'abord, que, pour
l'éducation des adultes, surtout en matière de formation
professionnelle, le collège se situe, comme tous les collèges du
réseau, en réponse à des besoins, des besoins qui sont
identifiés soit par des individus ou des entreprises, mais
principalement des besoins qui sont identifiés par la Commission de
formation professionnelle, enfin, la future société de
développement de la main-d'oeuvre. Alors, ce n'est pas possible pour
nous, donc, de prévoir à l'avance dans quel domaine, par exemple,
on sera appelés à dispenser des cours, dans quel programme ou des
choses comme ça. (20 h 40)
Ce que j'ajouterais, par contre, c'est que s'il est exact, comme vous le
dites, que ça coûte moins cher de déplacer un professeur
vers les centres, vers les besoins, que de déplacer les adultes vers le
collège. Il n'en reste pas moins que ça entraîne des
coûts importants en termes de temps pour les ressources humaines et en
termes de dépenses. Vous connaissez le coût des
déplacements dans notre région, déplacements qui doivent
se faire en avion dans la plupart des cas, surtout si on pense à
Fermont. Alors, nous avons, bien sûr, l'intention de continuer et
d'accélérer notre pénétration de ces
milieux-là, mais il y a des limites qui nous sont imposées par la
disponibilité des ressources.
Par ailleurs, il y a aussi des questions reliées aux
investissements. Il y a des types de cours que nous pouvons dispenser à
l'extérieur de la ville de Sept-îles très facilement. Il y
a d'autres types de cours qui nécessitent des équipements de
laboratoire pour lesquels c'est beaucoup plus difficile et, évidemment,
il n'est pas question d'aller dispenser de l'enseignement et de rabaisser la
qualité de la formation qu'on dispense dans ces villes secondaires
là. Donc, les cours qu'on va donner, on s'assure d'être capables
de les donner et d'avoir sur place l'équipement. C'est possible dans des
domaines comme l'informatique, puisque dans ces régions-là il y a
des parcs informatiques que nous pouvons louer, dans certains domaines, dans le
domaine des contrôles industriels, par exemple, parce que nous avons
acquis des équipements mobiles que nous pouvons déplacer sur le
territoire, mais, dans certains autres types de formation, nous sommes un peu
plus limités.
M. Perron: Une autre question, Mme la Présidente. Dans le
cadre de la formation générale, vous avez trois
clientèles; francophone,
autochtone et anglophone. Quelle est la proportion de la
clientèle... le nombre de francophones, le nombre d'anglophones, le
nombre d'autochtones à l'intérieur du cégep sur les
quelque 800 étudiants et étudiantes que vous avez?
Une voix: M. Gagnon va répondre.
M. Gagnon (Christian): Au niveau des clientèles, nous
accueillons environ une soixantaine d'élèves anglophones. Nous
accueillons, du côté autochtone, autour de 75 élèves
autochtones, dont une cohorte de 25 élèves qui sont dans un
programme spécifique d'intégration aux études
collégiales, et la balance des élèves sont des
élèves francophones.
M. Perron: Dans votre mémoire, au niveau de la formation
générale, vous parlez de responsabilités
particulières par rapport à la clientèle autochtone et
anglophone. Est-ce que vous pourriez élaborer davantage sur cette
question-là très précise? D'autre part, avant que vous
répondiez, je voudrais informer les membres de cette commission:
lorsqu'on parle des coûts de transport, partir de Sept-îles, aller
à Scheffer-ville, aller retour, en avion parce qu'il n'y a pas de route,
356 milles, ça coûte 950 $. Lorsque vous arrivez à l'autre
bout, l'hôtellerie, c'est 90 $ à 150 $ par jour, à part de
la nourriture. Lorsqu'on part de Sept-îles et qu'on s'en va à
Blanc-Sablon, qui est à plus de 300 milles à l'est de
Sept-îles, il en coûte près de 900 $ aller retour. Tout
ça pour vous dire que, quand on parle de déplacer des
clientèles vers les grands centres ou de déplacer des enseignants
et des enseignantes vers ces régions-là, ce n'est pas un cadeau
au niveau des coûts. C'est très, très dispendieux. Et,
d'ailleurs, on le sait, les personnes qui sont là voyagent assez souvent
et, moi, je voyage assez souvent. Je pense que vous vous rendez compte comment
ça peut coûter dans une grande région comme
celle-là. C'est important, à ce moment-là, d'avoir les
ressources financières pour le faire, surtout au niveau de la formation
professionnelle parce qu'il y a des endroits où il ne s'en donne
vraiment pas. Il y a beaucoup de décrochage scolaire dans ces
coins-là. À l'est de Havre-Saint-Pierre, le décrochage
scolaire, c'est régulier, c'est systématique, à 14 ans, 15
ans, surtout dans les endroits où il y a des pêcheurs. Les jeunes
commencent à pêcher aussitôt qu'ils ont sept ou huit ans et
là, très souvent, ils oublient d'aller à l'école au
mois de juin et, au mois de septembre, ils oublient de recommencer
l'école. C'est les habitudes des milieux aussi. Alors, est-ce que vous
pourriez répondre à cette question-là concernant les
autochtones et les anglophones, les particularités?
M. Gagnon: Je pourrais commencer par quelques
particularités concernant la clientèle anglophone. Comme vous
venez de l'indiquer fort à propos, M. Perron, nos interventions dans le
domaine de la clientèle anglophone, notamment celle de la
Basse-Côte-Nord, visent d'abord à intéresser cette
clientèle à poursuivre des études supérieures. Nous
venons encore de compléter une tournée des villages de la
Basse-Côte-Nord et la personne qui est chargée de l'information
scolaire dans ce dossier m'indiquait, pas plus tard qu'hier, un relevé
assez serré des possibilités d'élèves qui semblent
être intéressés à poursuivre leurs études au
niveau supérieur. Sur une soixantaine d'élèves qui ont
été rencontrés, on parlait d'une possibilité de 10
élèves. La plupart des autres élèves semblent
vouloir tout simplement ou ne pas compléter leurs études
secondaires ou carrément compléter leurs études, leur
D.E.S., mais rester dans leur village. Ça vous donne déjà
une idée du type d'interventions spécifiques que nous avons
à faire pour intéresser ces personnes à venir dans notre
établissement.
D'autre part, pour cette clientèle spécifique, on doit
avouer que, parfois, le saut est toujours très grand de passer du
village à la ville, quoique là-dessus à Sept-îles,
bien qu'étant une ville bien organisée et bien structurée,
le choc culturel pour ces élèves n'est pas aussi grand que celui
qu'ils auraient s'ils se trouvaient au choc de la grande ville, soit
Québec ou Montréal, ce qui nous oblige, donc, de façon
très particulière, à assurer un encadrement très
serré de ces élèves.
Du côté autochtone, comme vous le savez, nous desservons
essentiellement les six grandes communautés de notre territoire: Uashat,
Malio-tenam, Schefferville, Mamit Innuat et Betsiami-tes. Dans ces cas
précis...
M. Perron: Excusez. Avez-vous de la clientèle de
Kawawachikamach, des Naskapis?
M. Gagnon: Nous avons, l'an dernier, accueilli trois
élèves naskapis à l'intérieur de nos
programmes...
M. Perron: Anglophones.
M. Gagnon: ...dispensés en langue anglaise. Exactement. Et
nous avons une tournée qui se prépare pour le mois de janvier
dans ce secteur. Ce qui est particulier dans ce secteur, c'est que nous
négocions avec chacune des communautés. Alors, nous entretenons
des liens spécifiques avec chacun des agents de liaison pour, à
la fois, bien sûr, promouvoir les études supérieures, mais,
en même temps et surtout, assurer un encadrement spécifique pour
chacun des élèves, mais avec la collaboration de ces propres
communautés. À cet égard, nous avons, depuis l'an dernier,
parti un programme expérimental que nous appelons, dans notre langage,
un PPECU, un programme préparatoire aux études collégiales
et universitaires, qui accueille essentiellement une
clientèle adulte, une clientèle qui n'a pas
complété son secondaire V et qui, dans notre
établissement, avec la collaboration de la commission scolaire de
Sept-îles, complète, pour une partie, son secondaire V et
entreprend des études, quelques cours de niveau collégial.
Lorsque je vous indique que nous y portons une attention
particulière, et ce, grâce au soutien que nous accorde le
ministère, nous avons, dans le cas de ces deux clientèles, un
suivi - j'allais vous dire «personnalisé» - de chacun des
dossiers. Nous réussissons à accueillir ces élèves.
Le deuxième défi que nous avons par la suite, c'est d'assurer
leur persistance aux études, leur persévérance, et, par la
suite, bien sûr pour ceux qui persévèrent, nous avons la
responsabilité d'essayer de les conduire vers la réussite. Et,
là-dessus, je peux vous indiquer que, dans l'ensemble, depuis 1984 que
nous travaillons de façon très active, notamment avec la
clientèle autochtone, nous sentons une progression assez
intéressante, notamment dans le choix que font les élèves
de leurs programmes de formation. Au début de nos interventions,
l'essentiel du choix de cours, du choix de programmes des élèves
autochtones se dirigeait beaucoup vers les sciences humaines. (20 h 50)
Notre cohorte de l'an dernier, pour près de 40 %, avait choisi
des programmes professionnels, ce qui est, d'ailleurs, un défi, bien
sûr, pour ces personnes et, en même temps, également un
défi pour les enseignants qui les accueillent dans des domaines, donc,
relativement complexes. C'est un bon signe également puisque cela veut
dire que, dans nos communautés où la prise en charge de
l'éducation a été faite, les élèves nous
arrivent de mieux en mieux préparés. Et j'ajouterais enfin, pour
compléter, que, dans les deux cas, pour ces communautés, nous
avons, bien sûr, c'est notre responsabilité, mis sur pied des
services complémentaires pour assurer l'essentiel d'une vie
étudiante la plus harmonieuse possible. Et, à cela, s'ajoute un
programme d'aide pour faciliter le transport et le logement de ces
étudiants.
M. Perron: Mme la Présidente, une autre question. Je
remarque que, dans votre mémoire, vous n'avez pas touché du tout
la question de l'éducation physique. Je pense que vous êtes
informés qu'il y a certains représentants et
représentantes qui sont venus Ici, en commission, et sont allés
aussi loin que de demander l'abolition de ça dans les cégeps.
Puis, en passant, moi, je suis contre cette idée-là - clairement
contre - parce que je pense qu'à l'intérieur des cégeps on
doit non seulement donner de l'éducation au niveau de la formation
professionnelle, puis au niveau de la formation générale, mais on
doit aussi donner des activités physiques aux jeunes pour qu'ils
puissent plus s'en sortir. Quelle est votre position là-dessus, comme
conseil d'administration ou comme direction de cégep?
M. Deraps: Alors, M. le député, je dois vous dire
que vous avez bien lu le mémoire. Effectivement, nous n'en parlons pas,
d'éducation physique. Et la raison est simple, c'est que c'est un
mémoire de collège, préparé, comme vous l'a
indiqué M. Besnier, par une contribution venant de tous les groupes, y
compris les étudiants, qui constituent le collège. Alors, nous
n'avons pas abordé cette question-là. Donc, nous n'avons pas
établi de consensus. Ce que je peux vous dire, c'est une opinion assez
personnelle ou, si vous voulez, l'opinion actuelle de la direction du
collège, donc qui est sujette à modification, d'une part, lorsque
les orientations ministérielles seront sur la table et, d'autre part,
lorsque nous aurons... Parce que nous croyons que les orientations
générales laisseront une certaine marge de manoeuvre aux
collèges. Alors, lorsque ces orientations-là seront connues, nous
devrons faire nos propres choix institutionnels. C'est à ce
moment-là que, avec les personnes concernées - donc avec nos
ressources humaines - nous allons nous asseoir pour discuter de ces
questions-là.
Je pourrais, par contre, ajouter qu'il nous apparaît, à ce
moment-ci, approprié que, dans la formation générale, une
certaine place soit faite pour des apprentissages relatifs à la
santé, au bien-être physique et mental, au corps, à ses
systèmes et au rôle important joué par l'activité
physique dans ces éléments-là. Est-ce que ces
éléments de connaissance ou d'apprentissage nécessitent
deux heures ou quatre heures ou huit heures par semaine? Nous n'avons pas fait
cette évaluation-là. Il nous apparaît, par contre, que
présentement, dans notre programmation institutionnelle en
éducation physique, il y a un certain nombre de véhicules
intéressants pour les éléments de connaissance dont je
viens de parler.
Par ailleurs - et ce que je vais dire déborde, évidemment,
la stricte question de l'éducation physique - nous devrons aussi
réfléchir - et je pense que la commission a entendu beaucoup de
mémoires qui en ont parié - sur un certain nombre de
connaissances, nouvelles peut-être, actuellement absentes du curriculum
des études collégiales, auxquelles on devra faire place. De
quelle manière on réussira à y faire place? Je pense que
de ça dépend beaucoup la réponse à votre question
et peut-être à d'autres questions concernant aussi d'autres
disciplines.
M. Perron: Est-ce qu'on pourrait avoir l'opinion de
l'étudiant qui est à la table, sur l'éducation
physique?
M. Jalbert: Sur la question de l'éducation physique, je
voudrais me détacher un peu de ce qui a été
peut-être apporté par la Fédération des
cégeps qui est venue présenter un mémoire ici, qui
demandait d'alléger les programmes, mais sans spécifier aucune
manière de les alléger. Donc, on pouvait présumer que,
peut-être, les cours de philosophie ou d'éducation physique
allaient être coupés. Là-dessus, personnellement, je veux
le dire en mon nom personnel, je crois que les cours d'éducation
physique, au niveau du cégep, sont peut-être... Le cégep
est une institution de formation pour préparer les étudiants au
futur, au marché du travail, éventuellement au secteur
professionnel ou bien aux études postcollégiales,
c'est-à-dire à l'université. Je crois que c'est une
occasion, c'est la dernière occasion, peut-être, d'inculquer aux
étudiants, aux jeunes qui sont encore au niveau collégial des
habitudes de vie, je pense, qui sont de plus en plus nécessaires dans
notre société où le stress est très fort et
très imposant au niveau du milieu du travail, par exemple. Alors, je
pense que c'est une manière un peu de montrer aux étudiants, de
montrer aux jeunes qu'il y a, dans la vie, des manières de relaxer, de
se changer les idées, de laisser passer leur stress et de prendre de
bonnes habitudes de vie parce que la vie... En tout cas, je pense que c'est
important. La santé passe avant bien des dossiers scolaires.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, M. le
député de Duplessis, votre temps est écoulé.
M. Perron: Je ne peux même pas poser une autre question,
Mme la Présidente?
La Présidente (Mme Hovington): Non. On vous a reconnu,
mais il ne faut pas abuser.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Perron: Mme la Présidente, vous êtes raide en
étoile, aujourd'hui.
La Présidente (Mme Hovington): Ah oui, la discipline!
Alors, en conclusion, Mme la ministre.
M. Perron: Mais on n'a pas un laps de temps...
Mme Robillard: Est-ce que j'ai le temps pour une autre
question?
M. Perron: Je m'excuse, Mme la ministre, on n'a pas un laps de
temps pour la durée de...
Mme Robillard: Oui, vous avez eu 20 minutes.
La Présidente (Mme Hovington): On a chacun 20 minutes.
M. Perron: C'est une heure?
Mme Robillard: Vous avez pris 20 minutes.
La Présidente (Mme Hovington): C'est 20-20-20, il reste 5
minutes à la ministre.
M. Perron: Oh! Elle nous a joué un tour, elle n'a pas pris
tout son temps tout à l'heure.
Mme Robillard: Ha, ha, ha!
M. Perron: J'aurais eu d'autres questions, mais qu'est-ce que
vous voulez!
M. Tremblay (Rimouski): C'était très
intéressant par rapport aux questionnements qu'on a eus
antérieurement.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Robillard: Je pense que le...
Une voix: II ne faudrait pas charrier, non plus, là.
La Présidente (Mme Hovington): Un peu de discipline,
là, autour de la table. Mme la ministre.
Mme Robillard: Merci, Mme^ la Présidente. Je pense que le
cégep de Sept-îles a joué un rôle concernant le taux
de scolarisation de la population de Sept-îles et les environs de
Sept-Iles. Vous l'affirmez, d'ailleurs, dans votre document, qu'il y a une
hausse de la scolarisation. Est-ce que vous êtes au fait des
dernières statistiques concernant les taux de scolarisation de la
population?
M. Gagnon: Nous n'avons pas en main les dernières
données de Statistique Canada de façon spécifique sur la
question. Nous abordons la question lorsque nous faisons cette affirmation,
cependant, et je vais faire référence principalement à la
connaissance que nous avons des communautés autochtones. Nous savons
qu'en 1984, au niveau des communautés montagnaises qui
fréquentaient notre établissement, nous avions à peine,
bon an, mal an, quatre ou cinq étudiants. Depuis que nous avons
entrepris un effort systématique, notre clientèle
d'étudiants provenant des communautés autochtones a toujours
varié entre 50 et 75 étudiants. Bon nombre d'étudiants ont
obtenu leur diplôme; beaucoup encore, malheureusement, ont
décroché.
Cependant, ce que nous pouvons observer, c'est que nous
réussissons à toucher une proportion de plus en plus grande
d'élèves qui obtiennent maintenant leur D.E.S. et qui, autrefois,
décidaient tout simplement de rester dans leur communauté.
Mme Robillard: Alors, il me reste à vous remercier, les
gens du cégep de Sept-îles et les
gens de la communauté socio-économique, d'être venus
témoigner à notre commission parlementaire. Soyez certains que
nous aurons besoin de votre collaboration aussi pour les suites de cette
commission parlementaire. Merci bien d'être venus.
M. Besnier: Mme la Présidente, Mme la ministre et les
membres de la commission, on vous remercie de votre bienveillante attention.
Et, Mme la ministre, on attend de vos nouvelles au début de
l'année 1993. (21 heures)
Mme Robillard: C'est bien ça, M. Besnier. Vous m'avez
très bien comprise. Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Hovington): Alors, en tant que
présidente, au nom des membres, je vous félicite de votre
mémoire et je suis témoin qu'il y a un engagement ferme de la
ministre pour le début de 1993.
M. Besnier: On n'aura qu'à communiquer en face, de l'autre
côté du fleuve.
La Présidente (Mme Hovington): Ha, ha, ha! Absolument.
Alors, bon retour chez vous et passez de joyeuses fêtes. Au revoir.
Alors, j'inviterais le deuxième groupe, qui est le cégep
de Saint-Jérôme, à bien vouloir venir prendre place, s'il
vous plaît. Nous allons suspendre une minute.
(Suspension de la séance à 21 h 1)
(Reprise à 21 h 3)
La Présidente (Mme Hovington): J'inviterais les
représentants du cégep de Saint-Jérôme à bien
vouloir prendre place rapidement, s'il vous plaît. La commission va
poursuivre ses travaux. M. le député de Rimouski, un peu de
discipline. Si vous voulez bien regagner votre siège. Ha, ha, ha!
Alors, nous avons, en face de nous, M. Raymond Deschamps, qui est
président du conseil.
Cégep de Saint-Jérôme M. Deschamps (Raymond):
Oui, bonjour.
La Présidente (Mme Hovington): Bonjour, M. Deschamps. Nous
avons M. Claude Lalonde, directeur général.
M. Lalonde (Claude): Bonsoir.
La Présidente (Mme Hovington): Bonsoir. M. Paul Bourbeau,
directeur des services pédagogiques.
M. Bourbeau (Paul): Bonsoir.
La Présidente (Mme Hovington): Bonsoir, M. Bourbeau. Et M.
Robert Ducharme, professeur.
M. Ducharme (Robert): Bonjour.
La Présidente (Mme Hovington): Où sont les femmes?
Les hommes ont encore le pouvoir, à Saint-Jérôme. Ha, ha,
ha!
M. Lalonde: Malheureusement. Mais nous avons été le
premier cégep, quand même, à engager, dans le temps, une
femme comme DSP.
La Présidente (Mme Hovington): Ah! Bien, je vous
félicite. Alors, vous avez 20 minutes pour nous présenter votre
mémoire.
M. Lalonde: D'accord. Alors, Mme la Présidente, Mme la
ministre, M. le porte-parole de l'Opposition, Mmes et MM. les
députés... Oui, comme vous venez de le dire et comme j'ai pu
remarquer tout à l'heure que vous étiez très stricts sur
le temps, alors nous allons entrer tout de go dans le sujet et vous dire, comme
beaucoup d'autres avant nous, j'imagine, que les cégeps, nous
souhaitons, évidemment, ardemment qu'ils demeurent parce qu'ils ont
réalisé des objectifs importants, notamment celui de
l'accessibilité, bien sûr, des garçons et aussi des filles
- l'accessibilité des filles aux études supérieures est
passée par les cégeps, à notre avis - et l'objectif aussi
d'uniformisation du passage aux études supérieures, entre autres.
Ils doivent demeurer aussi, à notre avis, parce que les
Québécois ont consenti, depuis 25 ans, des sommes énormes
pour mettre sur pied un réseau. Nous ne voyons pas comment, aujourd'hui,
on pourrait dire: Bien, on met tout ça de côté et on
recommence à neuf. Et, en fin de compte, moi, je dirai aussi que,
à mon avis, les cégeps ont accompli un travail remarquable.
Je me souviens qu'au début des cégeps, en 1968 et 1969,
j'ai eu l'occasion de faire trois voyages, un dans les Pays-Bas, un en
Angleterre et un en Russie, pour étudier les systèmes
d'éducation. Et, après toutes ces années, me rappelant ce
que j'ai vu et entendu, il m'apparaît très clair que ce qu'ont
réalisé les cégeps est remarquable. C'est parti d'un
projet audacieux et innovateur et, après 25 ans, il me semble que les
réalisations sont vraiment remarquables. J'ai lu, il y a quelques
semaines, un editorial qui disait que la commission parlementaire permettait
tout juste à ceux qui travaillent dans le monde de l'éducation de
s'encenser mutuellement. Je ne suis pas de cet avis, évidemment, et je
pense qu'on a beaucoup de difficultés à se trouver bien bons et
qu'il faut le dire. Et, quant aux coups d'encensoir, ce n'est pas demain le
jour où, à mon avis, les Québécois vont
s'étouffer, suffoquer dans la fumée des coups d'encensoir qu'on
se donne. Quand on est bon, je pense qu'il faut se le dire.
Ceci dit, notre mémoire traite d'un certain nombre de
thèmes. Je vais en évoquer, rapidement, sept devant vous, mais
vraiment rapidement parce qu'on a peu de temps. Le premier thème
concerne la présence et ia place relative de l'enseignement
général et de l'enseignement technique. Bien sûr, la
coexistence des deux a posé des problèmes, notamment celui de
!a... On a toujours remarqué que l'un des enseignements, l'enseignement
technique, a été toujours quelque peu dévalué par
rapport à l'enseignement préuniversitaire.
Une deuxième chose, c'est que nous constatons aussi que,
probablement à cause des multiples programmes techniques et aussi des
programmes préuniversitaires ensemble, beaucoup d'étudiants ont
de ia difficulté à arrêter leur orientation. Compte tenu de
ça, nous, nous disons qu'il y a peut-être des solutions, en tout
cas, qui peuvent aider à résoudre le problème. D'abord,
pourquoi ne pas songer à quelque chose qui ressemblerait à un
programme conjoint, un programme où, pendant un an, les étudiants
pourraient profiter d'un enseignement, évidemment,
général, bien sûr, mais aussi d'un enseignement
scientifique et technique? Et, au bout de cette année-là, au
terme de cette année-là, l'étudiant aurait à
choisir entre, évidemment, un programme technique et un programme
préuniversitaire. Évidemment, il y aurait peut-être un peu
de perte, parce que l'étudiant aurait suivi peut-être quelques
cours de trop au moment où il choisirait d'aller dans le programme
technique ou dans le programme préuniversitaire, mais il perdrait peu de
chose et ça lui permettrait d'arrêter son choix. Nous affirmons
ça parce que nous constatons que bon nombre d'étudiants ont de la
difficulté à faire leur choix, à arrêter ieur
orientation.
Il faudrait aussi, à notre avis, pour améliorer la
coexistence des deux, bien sûr, et donner un peu plus de tonus aux
programmes techniques, améliorer ces programmes et, lorsque nous les
améliorons et que nous les révisons, utiliser davantage les
employeurs de façon beaucoup plus systématique, de manière
à leur faire dire ce qu'ils ont à dire pour que nos programmes
soient beaucoup plus cohérents, beaucoup plus pertinents.
Et, enfin, on pense aussi qu'il faudrait probablement réduire le
nombre des programmes techniques. 130, c'est beaucoup; c'est énorme, 130
programmes techniques. On se demande si on ne pourrait pas regrouper des
programmes par familles et ménager des voies de sortie. On se demande
encore comment on peut faire coexister ou exister ensemble, dans un pays de 6
000 000 d'habitants, 133 programmes techniques. En tout cas, ça nous
pose un problème de ce côté-là et il nous
apparaît qu'une solution comme celle-là pourrait peut-être
faciliter les choses.
Un deuxième thème que nous avons développé
concerne le rôle des collèges dans le développement de la
main-d'oeuvre. Nous pensons que les collèges peuvent jouer un
rôle. D'abord, première chose, dans la mesure où il y a des
stratégies industrielles - par exemple, prenons les grappes
industrielles - dans la mesure où ces stratégies se prolongent
dans des orientations gouvernementales en faveur d'un développement
économique régional, nous pensons que les cégeps
pourraient chercher à se définir en fonction de ces orientations
gouvernementales. Ça, ça nous apparaît important. (21 h
10)
Deuxième chose, je pense qu'il ne faudrait pas avoir peur, pour
le gouvernement, de sensibiliser les cégeps aux grands enjeux. Par
exemple, on a beaucoup entendu parler, pendant deux ou trois ans, du
libre-échange. On s'est demandé, nous, en cours de route de la
discussion, comment le cégep pourrait s'impliquer là-dedans une
fois le libre-échange signé. On a même
éprouvé le besoin de faire venir un spécialiste de la
question - ça a été Bernard Landry - et on lui a
demandé de nous en parler en fonction d'un cégep, comment on
devrait réagir devant ça. Et je sais que la
Fédération, aussi, a fait la même chose par rapport
à l'ensemble des cégeps. Nous éprouvons le besoin
d'être partie liée des grands enjeux du gouvernement.
Je pense qu'un des objectifs visés par ia commission
parlementaire, c'est, entre autres, de revivifier les cégeps. Je suis
d'accord avec ça, mais, pour les revivifier, une des façons
serait de les rendre partie liée, je ne dis pas de projets de
société, je ne suis pas rendu là, mais au moins de grands
enjeux. Ils sont capables de les prendre, je pense.
Et, en troisième lieu, nous pensons que les cégeps doivent
aussi participer aux tables régionales. Bientôt, la
société de développement de la main-d'oeuvre. Bon,
là, il y a une difficulté qui se pose pour les cégeps, on
le sait. Nous autres, on veut y participer, mais on nous a répondu que
sur la table ne sont admis que des gens élus; donc, les cégeps
n'ont pas leur place. Je me suis ouvert là-dessus, d'ailleurs, à
M. Lanoux. Je sais qu'il va en parler. Les tables régionales issues de
la réforme Picotte. Ça, c'est une autre table où on peut
avoir une influence, où on peut s'enligner sur le développement
de la main-d'oeuvre.
Un troisième thème que nous avons développé
concerne la structure générale des programmes. Là-dessus,
nous disons, premièrement, oui, bien sûr à une formation
générale élargie qui donne sa place aux langues, aux arts,
aux lettres, aux sciences et aux technologies. Évidemment, ça va
supposer des aménagements dans le bloc des cours obligatoires, c'est
bien certain, mais je pense qu'il faut en arriver là. On ne peut pas
additionner les cours Indûment. Il faut, à un moment donné,
faire des choix et je pense qu'on est rendus là, étant
donné l'importance
d'une formation générale. Et, ici, nous sommes tout
à fait d'accord, d'ailleurs, avec le rapport de la
Fédération, sur la solution qu'elle présente.
En second lieu, toujours en ce qui concerne le contenu et la structure
générale des programmes, nous pensons aussi qu'il faut
procéder à un renouvellement de l'enseignement technique,
même si celui-ci est bien valable. Un renouvellement de l'enseignement
technique, ça veut dire: d'abord, l'instauration d'une culture
technologique dont les assises seraient une meilleure formation
générale - on vient d'en parler - sur les méthodes de
documentation, l'histoire des technologies, la résolution de
problèmes, les méthodes de recherche et l'écriture de
rapports; en second lieu, une révision et une évaluation des
programmes en faisant participer - j'en ai parlé tout à l'heure -
les employeurs. Enfin, nous pensons qu'il faudrait améliorer la formule
des stages. Un quatrième point: on pense aussi qu'il serait utile
d'introduire les programmes courts: A.E.C., C.E.C., D.P.E.C. Et permettez que,
pour ces deux points-là, je fasse intervenir M. Bourbeau, qui est le
directeur des services pédagogiques, rapidement.
M. Bourbeau (Paul): Merci. Concernant les stages, d'une
façon plus particulière, on suggère d'améliorer et
de renforcer les stages en entreprise pour les étudiants. On est
d'accord pour développer les stages coopératifs d'alternance
travail-études. D'ailleurs, chez nous, on a déjà
commencé dans un programme et nous allons poursuivre dans un
deuxième programme. Là-dessus, je me permettrai quand même
deux remarques. Je pense qu'en regard de l'implantation des stages d'alternance
travail-études, qui sont nouveaux - je pense à des
collèges qui depuis deux ans sont embarqués dans cette nouvelle
expérience - on compte beaucoup sur le leadership du MESS pour nous
donner un coup de main. On sait qu'il y a un certain financement qui est fait
par le fédéral, mais on va avoir besoin d'un leadership fort de
la part du MESS pour vraiment arriver à changer cette culture-là
et arriver à implanter les stages coopératifs dans nos
collèges. Ça supposera certainement aussi certaines
considérations lors de l'étude des conventions collectives en
regard de la coordination des ressources pour assurer le succès de ces
stages d'alternance travail-études.
On suggère aussi d'organiser des stages sabbatiques en milieu de
travail pour les enseignants. On trouve ça important, avec
l'évolution technologique, évolution qui est rapide en regard de
la technologie, plus particulièrement, qu'on puisse être capables
de maintenir une certaine actualisation de nos programmes et, pour ça,
que nos enseignants puissent aller en stage régulièrement. On
sait qu'il y a déjà des programmes qui sont existants, mais je
pense que c'est important de maintenir beaucoup d'attention sur ces
stages-là pour les enseignants.
On propose aussi, dans un deuxième temps, d'introduire des
programmes courts qui permettent une plus grande souplesse et aillent au rythme
aussi des différentes populations étudiantes dans une
démarche de formation continue. Bien sûr, on pense, entre autres,
à ce qui vous a déjà été
suggéré - on est en accord avec ça - une certaine
modulation du D.E.C., A.E.C., C.E.C. Ça pourra supposer, bien sûr,
qu'une certaine révision des structures des programmes soit faite.
Ça pourra peut-être supposer aussi que, en regard du maintien de
certains aspects de formation fondamentale et de culture
générale, on soit capable de voir certains A.E.C. et certains
C.E.C. aussi dans cette même perspective-là. Mais je pense que
l'idée d'arriver avec un certain nombre de programmes courts et
d'être ouverts à une certaine modulation du D.E.C. pourrait
à la fois permettre à beaucoup plus d'étudiants d'arriver
à rencontrer les objectifs du D.E.C, d'un D.E.C polyvalent, et aussi de
maintenir une certaine orientation progressive et aussi une formation
continue.
M. Lalonde: Toujours concernant les programmes techniques, nous
pensons que les cégeps doivent, à l'intérieur d'une
région, se discipliner davantage, en ce qui concerne les programmes,
pour la répartition des programmes à l'intérieur d'une
région. À notre avis, les cégeps doivent passer de la
compétition à la concertation. Ça nous apparaît
clair et évident.
Concernant les programmes universitaires, nous disons deux choses. La
première, le programme des sciences humaines a fait l'objet d'une
révision. Elle nous apparaît saine. On est passé de 400
cours, dans ce programme des sciences humaines, à quelque 45, 50. Il
nous apparaît nécessaire de laisser la chance à cette
révision de bien s'installer, de faire son expérience. Notre
effort devrait, à notre avis, porter sur les sciences de la nature, en
souhaitant que ça ne prenne pas, disons, 10 ans pour y arriver. Je dis
ça sans amertume, mais, enfin, il ne faudrait pas que ça prenne
10 années.
Un autre thème que nous avons développé concerne
l'harmonisation interordres. Là-dessus, nous avons des choses à
dire concernant le secondaire - on est partie liée avec eux - et des
choses concernant le cégep. Concernant le secondaire, nous pensons que
le secondaire a des responsabilités importantes, car c'est vraiment au
secondaire que se prennent les habitudes qui favorisent la réussite.
Donc, on se dit: On ne serait pas d'accord avec une solution comme une
propédeutique. Celle-ci, à notre avis, permettrait aux jeunes qui
se traînent les pieds au secondaire de dire: Bon, je me reprendrai au
collégial dans la propédeutique. Et cette propédeutique
engendre des coûts supplémentaires qui sont inadmissibles,
à notre avis.
Au niveau secondaire, nous souhaiterions un D.E.S avec 150 unités
- je pense qu'on n'est pas
les seuls à l'avoir dit - pour, en tout cas, les étudiants
au secondaire qui aspirent à aller aux études supérieures.
On est d'accord qu'un D.E.S. pourrait se terminer avec 130 unités, comme
c'est le cas maintenant, pour les étudiants, par exemple, qui ne
prévoient pas poursuivre dans les études supérieures.
Ce qui fait qu'on appuie cette proposition, on a chez nous
l'expérience d'un programme qu'on a appelé le programme DEFI qui
vient en aide aux étudiants qui arrivent du secondaire, mais qui ont 70
% et en bas de 70 %. C'est un programme qui leur permet d'améliorer leur
rendement. Et on se rend compte, à l'expérimentation de ce
programme-là, qu'en effet les étudiants qui viennent du
secondaire devraient avoir davantage d'unités, en tout cas, pour un
certain nombre. (21 h 20)
Du côté du cégep, on a aussi des
responsabilités. C'est au cégep d'établir un pronostic de
succès aux étudiants qui arrivent au cégep et c'est au
cégep d'assumer la responsabilité d'encadrer les jeunes.
Là-dessus, on a l'expérience, chez nous, de ce qu'on a
appelé le plan d'aide. Ça fait déjà trois ans qu'on
applique ce plan d'aide. On a procédé à la deuxième
édition de ce plan d'aide. On ne se dit pas: Bon, il faudrait prendre
les étudiants forts. On prend les étudiants, au cégep de
Saint-Jérôme, qui ont un D.E.S. Ça a été une
politique que nous avons adoptée dès le début, et on ne
changera pas là-dessus. Mais on pense aussi que c'est notre
responsabilité d'accompagner les jeunes dans leur cheminement par un
encadrement. Évidemment, pour des jeunes, aussi, qui... On est contre le
fait qu'il y ait une propédeutlque, mais on n'est pas contre des cours
d'appoint, par exemple, qu'on pourrait donner à des jeunes.
Un cinquième thème concerne l'évaluation. Bon,
là-dessus, bien sûr, on est d'accord avec l'évaluation et
on la souhaite. Mais, pour qu'il y ait évaluation, il faudrait, dans un
premier temps, établir des standards. Un professeur qui est en
première année du primaire peut arriver à la fin de
l'année et dire: Je suis content, j'ai appris à mes
élèves à écrire. Un professeur, à la fin de
son année avec des étudiants de cégep, peut dire: Bien, je
crois que cette année j'ai réussi à apprendre à mes
élèves à écrire. Mais, dans les deux cas,
évidemment, c'est différent. Il y a des niveaux, il faut des
standards. Donc, de l'évaluation, mais aussi par un organisme externe,
bien sûr, comme ça a été suggéré
souvent.
Ici, j'ajouterai comme réflexion ceci. Il nous apparaîtrait
important, dans la mesure où on conçoit un système
d'évaluation, d'évaluer les institutions sur un projet
éducatif de l'institution. Je me rappelle, il y a deux ans, avoir
participé à un colloque organisé par la
Fédération sur l'évaluation. Et un des
conférenciers avait Intitulé sa conférence - permettez que
j'en cite juste quelques lignes: «La complexité et les
perspectives de l'évaluation en enseignement supérieur dans les
pays de l'OCDE». Après avoir fait un long cheminement sur tout ce
qui se faisait dans les pays de l'OCDE, il arrive à une première
conclusion. «Une conclusion semble alors se dégager pour nous:
face aux difficultés de l'évaluation, une seule technique,
jusqu'ici, s'est affirmée avec certaine prétention à la
rigueur, celle des indicateurs de performance. Pourtant, il y a une
réserve à faire: le système est lourd et manifeste une
tendance à la prolifération. Il risque souvent de conduire
à une inversion du processus, l'outil devenant plus important que le
résultat.»
Et il continue son exposé en disant: «On découvre,
dans les pays de l'OCDE, une autre tendance, celle qui consiste à
évaluer les institutions à partir d'un projet
d'établissement. La notion de projet d'établissement, dit-il,
devient essentielle. Elle est prise en compte explicitement dans
l'expérience française de politique contractuelle. Elle se
retrouve en République fédérale allemande lorsqu'il est
possible de financer un établissement sur la base de ses propositions de
développement. Elle est présente en Espagne dans le souci de
favoriser l'émergence d'une stratégie
d'établissement.»
L'évaluation, le monde en a peur. Mais, quand on évalue
une institution sur un projet d'établissement, ça me paraît
dynamisant et il me semble, à moi, que les gens s'embarquent beaucoup
plus facilement. Il s'agit toujours, à mon avis, dans la réforme
à laquelle nous voulons procéder, de ne pas oublier d'embarquer
les gens, de dynamiser, aussi, les gens dans cette réforme-là. Il
faudrait que les gens, après 25 ans, reprennent le collier, mais avec
une énergie supplémentaire. Je pense qu'avec des attitudes comme
celles-là, des mesures comme celles-là, ça pourrait
considérablement aider.
La Présidente (Mme Hovington): En conclusion, parce qu'il
reste 30 secondes. À moins qu'on ne raccourcisse le temps d'intervention
pour vous laisser le temps de bien finir votre mémoire. Alors, le
consentement est unanime. On va raccourcir notre temps d'intervention pour vous
laisser le temps de finir.
M. Lalonde: d'accord. alors, il y a un autre thème sur
lequel on voudrait intervenir, c'est la situation des enseignants, et je pense
qu'ici le dsp pourrait intervenir, là. vas-y, paul.
M. Bourbeau (Paul): Dans un premier temps, on propose - c'est une
proposition qui, on l'espère, alimentera un petit peu les débats
et la commission - d'instaurer un système de grades pour les enseignants
en fonction de leur participation à différents projets
pédagogiques reliés, entre autres, à l'enseignement,
à la production de matériel didactique, à l'innovation,
à la recherche, à l'encadrement et à l'engagement
communautaire. Entre autres, en relation avec l'accueil de nouvelles et
de nouveaux enseignants, on pense que ça peut être un aspect
important de motivation de permettre un cheminement de carrière à
ces enseignantes et à ces enseignants-là. Et le fait d'occuper,
toujours en concordance et en relation avec une tâche d'enseignement,
d'autres fonctions permettrait aussi de cheminer dans la carrière
d'enseignant. Donc, tout en faisant de l'enseignement, les enseignants
pourraient participer à des projets pédagogiques, faire de
l'enseignement, faire de la production de matériel didactique et de la
recherche aussi.
Donc, on propose d'instaurer, dans un premier temps, un système
de grades pour les enseignantes et les enseignants. On se propose aussi de
redéfinir la tâche des enseignantes et des enseignants de
manière à y inclure la participation au projet éducatif du
collège. Je pense qu'on devra retrouver un point dans cette
définition de tâche qui va jusqu'à une certaine
contribution individuelle des enseignantes et des enseignants au projet
éducatif du collège. Pour être capable de rencontrer les
objectifs du projet éducatif il faut absolument qu'à
l'intérieur des départements, avec les professeurs aussi qui en
font partie, on puisse apporter une contribution positive. Donc, on devra
redéfinir la tâche en tenant compte de ça.
Enfin, on propose aussi, sur la situation des enseignants, de valoriser
la fonction de coordination départementale, que de plus en plus les
responsables de la coordination départementale soient nommés en
tenant compte de critères d'intérêt, de dynamisme et de
leadership dans la réalisation des objectifs du collège. Il y a
quelque chose, dans nos systèmes de gestion des collèges, d'un
peu utopique quand on pense que c'est une administration très
centralisée qui va être capable de rendre un projet
éducatif jusque dans les classes. Or, il faut absolument qu'on puisse
compter sur les partenaires que sont les responsables de la coordination
départementale. Et on dit, là-dessus, qu'il y aurait vraiment une
réflexion à faire pour valoriser cette fonction-là et
trouver des gens qui seraient intéressés, à partir de leur
intérêt, de leur dynamisme et de leur leadership.
M. Lalonde: En terminant, un mot sur un thème que nous
avons écrit, la recherche. Les professeurs qui sont dans les
cégeps ont plus de 20 années de scolarité, bien sûr.
Ils ont aussi plus de 20 ans d'expérience. Rendus à ce stade de
leur vie, dans leur profession d'enseignant, ils ont le goût de faire des
choses par eux-mêmes, de créer des choses; d'où
l'importance que peut prendre la recherche dans une institution d'enseignement
supérieur comme l'est un cégep. Et nous pensons que ce serait un
moyen magnifique de s'impliquer là-dedans en injectant,
évidemment, des sommes d'argent probablement plus importantes pour la
recherche. Il faudrait, à notre avis, donner la chance à ces
professeurs de, justement, produire pour les institutions des choses qui
ressortent de leur expérience. Enfin, on le vit constamment tous les
jours; je pense que Mme la ministre l'a signalé, d'ailleurs, aux prix du
ministre, dernièrement. Elle a vraiment très bien reconnu le
travail que font les professeurs, et c'est un fait. Ils sont rendus à un
stade de leur vie professionnelle où ils peuvent produire des choses.
Encore faut-il leur en donner les moyens.
On a établi chez nous, depuis une dizaine d'années, en
puisant dans nos quelques surplus, quand il nous en reste, des sommes d'argent,
un petit programme qui permet à des professeurs, un par un ou par
groupe, par département, de produire un projet, de courts projets. Il
faut que ça dure une année. Et on en a eu plusieurs. Et on se
rend compte de l'intérêt des professeurs pour cette
activité. À notre avis, il faudrait la développer et
donner toute sa chance à cette dimension dans une institution comme
l'est un cégep.
Je vous remercie beaucoup. J'espère qu'on n'a pas pris trop de
temps.
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup. Alors, je
reconnais Mme la ministre de l'Éducation et de l'Enseignement
supérieur et de la Science.
Mme Robillard: Merci, Mme la Présidente. Bienvenue aux
gens du cégep de Saint-Jérôme, à toute
l'équipe. Je dois vous dire que j'ai trouvé votre mémoire
fort intéressant. Vous couvrez plusieurs dimensions. M. le directeur
général, vous ne nous avez pas parié de votre sous-centre
à Mont-Laurier, mais je vois que dans...
M. Lalonde: Vous en avez entendu parler?
Mme Robillard: Oui. Ha, ha, ha! Je vois que dans le
mémoire aussi vous en avez parié. Alors, je suis très
heureuse que vous veniez à la commission faire part de votre
expérience, mais surtout dégager des perspectives pour l'avenir.
Et je pense que vous vous êtes engagés, dans votre mémoire,
justement, à ouvrir des portes pour le renouveau de l'enseignement
collégial. (21 h 30)
M. le président du conseil d'administration, M. Deschamps, est-ce
que, dans toute cette réflexion, au collège de
Saint-Jérôme, les membres du conseil ont émis des opinions
en ce qui concerne le rôle du conseil d'administration et sa
composition?
M. Deschamps: Je dois vous dire que, depuis plusieurs
années, ça revient périodiquement, le rôle du
conseil d'administration. À plusieurs occasions, on se repose la
question si on n'est pas des «rubber stamps». On peut dire que,
depuis deux ans, au cégep de Saint-Jérôme, on a
peut-être trouvé des nouvelles façons de travailler et on
s'implique davantage dans le rôle ou on prend un rôle qui n'est
peut-être pas écrit, mais on participe beaucoup plus aux
décisions qui sont prises, autant au niveau pédagogique que
financier.
Mme Robillard: Au niveau de la composition, est-ce que vous avez
eu certaines opinions d'émises par vos membres?
M. Deschamps: La composition, c'est que... Je pense à une
chose qu'on devrait établir. Le fameux règlement 12 des
cégeps devrait être défini beaucoup plus clairement afin de
nous éviter des querelles intestines, des fois, qui font mal et qui sont
difficiles à revivre après, lorsque ça s'est
passé.
Mme Robillard: L'article 12 de la loi.
M. Deschamps: L'article 12 de la loi qui dit que certains membres
du conseil d'administration n'ont pas le droit de vote lorsque ça touche
des points. Ça, ça soulève énormément
d'amertume, à certaines occasions, dans les conseils d'administration.
Je pense aussi qu'il faudrait faire attention, les socio-économiques, de
ne pas se retrouver encore avec trop de membres qui proviennent d'autres
institutions paragouverne-mentales ou, même dans l'éducation, qui
sont du secondaire ou de l'universitaire. Si on veut réellement que les
socio-économiques jouent un rôle très poussé, il
faut qu'on nomme beaucoup plus les gens de l'industrie privée et du
secteur privé, si on veut faire jouer vraiment le rôle du conseil
d'administration.
Mme Robillard: M. Lalonde, vous nous avez parlé des
problèmes d'harmonisation, surtout avec le secondaire. Naturellement,
comme beaucoup d'autres intervenants, vous avez fait une réflexion sur
le contenu, je dirais, du diplôme d'études secondaires, qui est
très variable selon les étudiants qui vous arrivent, les
écarts étant très grands. Mais vous êtes
allés plus loin que d'autres intervenants, parce que, vous, vous avez
statué. Je me rappelle qu'à plusieurs occasions mon
collègue d'Abitibi-Ouest posait la question: Mais combien
d'unités? Vous, vous êtes allés à 150 unités.
Mais, M. Lalonde, vous ne m'avez pas parlé du contenu. Parce que, moi,
150 unités, vous savez, si on rajoute 5 cours d'éducation
physique, ça ne vous aidera pas beaucoup, ça.
M. Lalonde: Non.
M. Bourbeau (Paul): D'abord, je pense qu'on voulait être
compris là-dessus. Il ne s'agit pas de dire qu'on ne veut pas faire les
efforts pour accueillir les différents étudiants qui nous
arrivent avec le diplôme d'études secondaires. On est conscients
là-dessus qu'on a une mission sociale et les étudiants qui ont
leur diplôme d'études secondaires, on veut les accueillir. Entre
autres, une des exigences qu'on met aussi, c'est la question du
français. Vous l'avez évoquée à plusieurs reprises,
c'est une urgence, fa question de la maîtrise de la langue.
Là-dessus, il y a des conditions particulières d'encadrement des
étudiants pour ce qui est du français.
Ce que nous voulons dire, c'est qu'il y a des limites à la suite
d'un pronostic de succès que nous avons à poser, parce que les
étudiants que nous admettons, nous les admettons dans un programme
donné. À partir de ça, on dit qu'il y a certaines limites
à accepter des étudiants, en termes de préparation aux
études collégiales. Et ce que l'on constate souvent, c'est que,
quand il y a un minimum d'unités, puisqu'on a, pour prendre le langage
des étudiants que nous accueillons, un diplôme d'études
secondaires à géométrie variable, à 130... Et,
d'ailleurs, les études du SRAM l'ont montré, aussi. Dans le
rapport du SRAM, depuis trois ans, c'est évoqué. Je pense que
vous avez pris contact avec les conclusions de ces rapports-là. Les
étudiants qui ont 130 unités ne réussissent pas leurs
études collégiales. Alors, ce qu'on dit, c'est que, dans certains
cas, on pourra référer des étudiants au secondaire pour
consolider leur formation, mais, dans d'autres cas, on est prêts à
donner des cours d'appoint ou à les entrer peut-être dans un
programme nouveau qui permettrait une orientation progressive pour les amener
dans des programmes donnés.
Mme Robillard: Mais, dans le fond, M. Bourbeau, ma question
était à l'effet que... Ce n'est pas juste une question de nombre
d'unités.
M. Bourbeau (Paul): C'est une question aussi de secteur.
Les...
Mme Robillard: C'est une question de contenu, alors que, vous,
vous êtes allés strictement sur une recommandation de nombre
d'unités. Pour moi, ça ne résout pas le problème.
C'était dans ce sens-là, ma question.
M. Bourbeau (Paul): Ah! Sur les langues, sur les siences aussi,
plus particulièrement, on sait les difficultés que nos
étudiants ont en mathé-mathiques et aussi pour la question des
sciences. On pense que souvent, en secondaire III plus particulièrement,
ils évincent rapidement la question des sciences. Or, qu'on ait des
étudiants qui nous arrivent avec un certain bagage ou en fonction d'un
curriculum au secondaire, c'est beaucoup plus équilibré. Ils ont
touché aux sciences, ils ont touché aussi à une bonne
formation en français et possiblement aussi à une langue
complémentaire, l'anglais.
Mme Robillard: Merci, M. Bourbeau. M.
Lalonde, Vous avez évoqué la nomination des membres sur
les sociétés régionales de développement de la
main-d'oeuvre. Vous m'avez quelque peu surprise parce que vous savez
très bien que la loi ne dit absolument pas qu'il faut absolument que ce
soit un élu qui siège au niveau de la société
régionale de développement de la main-d'oeuvre. Je pense que le
premier critère, c'est la compétence, qu'il soit élu ou
non, qu'il soit D.G., qu'il soit D.S.P., n'importe quoi, quelqu'un qui est
compétent et qui connaît le développement de la
main-d'oeuvre. Alors, moi, j'aimerais bien savoir qui vous a transmis cette
information.
M. Lalonde: Eh bien, c'est au niveau de la Commission de
formation professionnelle de la main-d'oeuvre de notre région. C'est la
réponse qu'on nous avait donnée. Parce qu'on s'intéressait
déjà à notre implication à ce niveau-là et
on voulait savoir comment il fallait s'y prendre pour y participer, puis on
nous a répondu: Écoutez, vous ne pourriez pas, comme
cégep, y participer parce que vous n'êtes pas des élus.
Alors, je suis content de savoir ça.
Mme Robillard: Alors, nous allons clarifier cette question, M.
Lalonde, parce que, je vous le dis, c'est une question de compétence
d'abord et avant tout. Si vous avez un élu au conseil d'administration,
c'est ce que je comprends, là... Un élu, en tout cas, c'est
quelqu'un de nommé au niveau du conseil d'administration. Un élu,
pour un cégep, ce n'est quand même pas comme à une
commission scolaire où vraiment il y a un élu au niveau des
commissaires.
M. Lalonde: C'est ça. Un élu au sens où ils
le sont dans les commissions scolaires, Mme la... C'est de cette
façon...
Mme Robillard: Puis, au niveau des cégeps, ce serait
quoi?
M. Lalonde: C'est justement...
Mme Robillard: Ah bon!
M. Lalonde: ...on ne serait pas des élus.
Mme Robillard: Bien voyons! Alors que la loi oblige qu'il y ait
un représentant du milieu collégial. Vous voyez, là, il y
a une aberration. Alors, on va...
M. Gendron: Dans ce cas-là, ce n'est pas la
première. Ha, ha, ha! Je ne veux pas revenir, là, mais il y a
plusieurs aberrations dans cette loi-là.
Mme Robillard: Le droit de parole n'est pas à mon
collègue. Alors, on va regarder cette question.
M. Lalonde: Merci.
Mme Robillard: M. Ducharme, vous êtes professeur?
M. Ducharme: Oui.
Mme Robillard: Professeur dans quelle discipline?
M. Ducharme: En psychologie.
Mme Robillard: En psychologie. Votre D.S.P. nous a fait des
recommandations par rapport aux professeurs.
M. Ducharme: Oui. On s'était un petit peu entendu à
l'effet que je les fasse, mais, comme le temps pressait, comme il a
peut-être un esprit de synthèse plus grand que le mien, on s'est
fait signe.
Mme Robillard: Oui. Alors, donnez-moi votre point de vue.
M. Ducharme: C'est très clair que, en ce qui me concerne,
on ne pourra rien faire de la réforme de l'enseignement collégial
si on ne réussit pas à mettre les enseignants dans le coup. C'est
vrai de notre mémoire, mais c'est aussi vrai des résultats des
travaux de votre commission. À cet égard, moi, j'endosse
pleinement la recommandation fondamentale de notre mémoire à
l'effet que ça prend un projet éducatif, un projet
d'établissement. Et chez nous, dans notre projet d'établissement,
depuis quelques années - on doit dire que ça fait peut-être
sept ou huit ans que ça marche relativement bien dans nos
collèges; avant ça, on pourrait dire bien d'autres choses -
depuis sept ou huit ans, on se donne un projet éducatif basé sur
la formation de qualité. Les orientations qui se terminent, qui ont
porté sur la formation fondamentale, ont alimenté les discussions
dans le collège depuis cinq ans. Et j'ai travaillé
personnellement beaucoup à la mise en oeuvre du plan d'aide à
l'apprentissage, qui est un projet d'encadrement des étudiants dans le
collège.
Alors, on s'est donné un projet éducatif qu'on souhaite
enrichir précisément sous l'inspiration de la commission et des
travaux du Conseil des collèges et de ceux du Conseil supérieur
de l'éducation, entre autres. Et ce projet éducatif là, il
ne pourra se réaliser que si les enseignants y participent. Nous
constatons - et là, j'en ferai une critique - que ce sont toujours les
mêmes enseignants qui participent à ces comités. Chez nous,
il y a une douzaine de comités en chantier qui réunissent grosso
modo une soixantaine de personnes, mais 60 personnes qui peuvent
peut-être se réduire à 30 personnes parce qu'il y en a qui
sont sur 2 ou 3 comités. Et c'est ces gens-là qui font
marcher les collèges. Les autres, je ne voudrais pas être
trop sévère à leur endroit, mais plusieurs limitent leur
participation au projet en donnant un minimum, pendant que d'autres donnent le
maximum. Il n'y a pas de distinction entre ceux qui donnent le minimum et le
maximum. (21 h 40)
C'est un petit peu ce que notre mémoire propose. Il serait
peut-être temps qu'on en arrive, comme on l'a fait à Rochester,
à calculer la contribution de chacun à l'établissement des
objectifs d'un projet éducatif et qu'on pense, comme ça se fait
dans les universités et les universités ne semblent pas mal s'en
porter, à promouvoir ceux dont la motivation et le rendement sont
supérieurs aux autres.
La Présidente (Mme Hovington): merci beaucoup. je
reconnaîtrai maintenant le porte-parole de l'opposition officielle, m. le
député d'abitibi-ouest.
M. Gendron: Oui. Je voudrais saluer les gens du cégep de
Saint-Jérôme. J'ai été un de ceux qui ont
contribué à allonger la liste, en souhaitant que tous les
collèges qui s'étaient donné la peine de produire un
mémoire aient l'occasion d'être entendus. Alors, je suis
très heureux que vous soyez là. Je ne change pas d'avis;
même s'il y a des choses qui sont reprises, c'est important d'avoir un
certain dégagement de consensus. Mais plus il sera largement
exprimé, plus j'ai l'impression que la ministre sera dans l'obligation
d'y donner suite. On y reviendra demain matin, aux conclusions.
Votre mémoire, je pense qu'il est intéressant à
plusieurs égards. Il se colle passablement, cependant, à celui du
Conseil des collèges et ce n'est pas un mal en soi, là; il n'y a
pas de problème avec ça. Il a quand même des
particularités intéressantes. Moi, en tout cas, M. Lalonde,
j'étais très heureux de vous entendre, tantôt, quand vous
avez affirmé que le cégep se doit d'être conscient qu'il a
la responsabilité d'accompagner les jeunes dans leur cheminement et par
les mesures d'encadrement. C'est quand même des éléments
sur lesquels j'ai insisté énormément et, moi, qu'un
collège en ait pleinement conscience et prenne des dispositions pour le
faire, je trouve ça honorable, parce que ça devrait nous
préoccuper davantage de maximiser la réussite scolaire. Et la
réussite doit sûrement commencer par des mesures d'accompagnement
plus grandes, des mesures d'encadrement plus significatives, parce que c'est
ça que les jeunes nous disent: On se sent perdus, un peu
désoeuvrés, ainsi de suite.
J'aurais plusieurs commentaires à faire. Je ne les fais pas pour
échanger davantage. Première chose, ce serait une
vérification. Est-ce que je vous aurais bien compris lorsque vous auriez
dit, selon moi - c'est peut-être la fatigue - qu'il faudrait
définir les programmes techniques en fonction des politiques
gouvernementales? J'ai cru vous citer. J'aimerais savoir juste, d'abord, si
c'est exact que vous avez affirmé ça. Si c'est ça,
j'aimerais des précisions.
M. Lalonde: Oui, un petit peu dans ce sens-là,
c'est-à-dire que j'en parlais au moment où nous avons
développe le thème de la participation, du rôle que les
cégeps pourraient jouer dans le développement de la
main-d'oeuvre. Alors, nous, nous disons que, dans la mesure où les
stratégies industrielles, comme, par exemple, les grappes industrielles
développées par le gouvernement, se prolongent dans des
orientations gouvernementales en faveur du développement des
régions - par exemple, on pourrait dire que les grappes industrielles,
ça voudrait dire, dans la région de l'Abitibi, telle et telle et
telle choses sur lesquelles il faudrait insister - les cégeps pourraient
chercher à se définir en fonction de ces orientations
gouvernementales. On s'enligne là-dessus et, si chacun des cégeps
dans les régions fait la même chose, il y a une espèce de
concertation qui se fait sur l'ensemble du territoire du Québec en
rapport avec la formation. Donc, on favorise, à ce moment-là, le
développement de la main-d'oeuvre en rapport avec les stratégies
du gouvernement. Ça, je trouverais ça intéressant.
M. Gendron: En tout cas, moi, je voulais vous le faire
préciser; vous l'avez fait et ce n'est pas plus grave que ça.
Moi, si c'était notre gouvernement qui était au pouvoir, j'aurais
des réserves, j'aurais des réticences. D'ailleurs, c'est
très neuf. Vous êtes, à ma connaissance, les seuls à
proposer ça, et ce n'est pas parce que c'est original que ce n'est pas
bon. Moi, le danger que j'y vois, c'est que la plupart des régions
veulent avoir l'opportunité d'adapter, entre autres, la formation
technique à leurs particularités régionales et il
m'apparaît que ça doit être beaucoup plus endogène
qu'exogène comme problématique. Ça doit venir du milieu et
c'est probablement plus sécurisant pour la rétention, par la
suite, des jeunes, si, effectivement, les collèges de régions
offrent des programmes qui sont plus liés aux besoins des milieux. Ce
n'est pas incompatible, parce que je vous comprends quand même quand vous
dites: En autant qu'elle se poursuive et que la stratégie des
gouvernements aille dans la problématique du développement des
régions. Et, quand elle se prolonge dans le développement des
régions, bon, on s'accorde. Ça, c'est un premier commentaire.
Trois, quatre questions. Une première. Vous avez, je pense, avec
raison, selon moi, indiqué qu'il y aurait des dangers assez
sérieux d'envisager une propédeutique, parce que vous avez dit:
Ça donnerait un mauvais signal. Et, moi - il faut se brancher à
des places, là - je partage
votre avis. Cependant, la question est la suivante. À ma
connaissance, votre même prétention qu'une propédeutique
pourrait donner un mauvais signal par rapport à l'effort - et on
regardera ça, on a un an pour l'envisager - j'ai de la difficulté
à la concilier avec votre recommandation, à un moment
donné, de faire une espèce d'année de cohabitation des
deux formations. Ce n'est pas bête, mais j'ai l'impression qu'il y
aurait, là encore, le même genre de signal pour la non-obligation
du secondaire de faire pas mal plus, en termes de choix de carrière,
pour que ça devienne sérieux, que ça soit dispensé
par des profs de façon très sérieuse et que rapidement on
convienne, au secondaire, qu'il faut qu'il y ait plus de jeunes qui soient en
mesure, peut-être pas de définir définitivement... Parce
que tout le monde réclame une formation générale plus
large. Alors, y compris pour ceux qui choisiront la formation technique, il y
aurait lieu de donner des cours de formation générale. Ça,
ça nous a été dit presque par tout le monde. Est-ce que,
vous, vous voyez une contradiction ou s'il n'y en a pas entre les deux?
M. Lalonde: Non, c'est-à-dire que, dans le cas d'une
propédeutique, nous autres, nous avons compris qu'il faudrait installer,
dans les cégeps, la possibilité pour un étudiant qui
arrive du secondaire de reprendre des choses, de se mettre à jour dans
sa formation qui n'était pas complétée au niveau
secondaire. Donc, on reprend des choses du niveau secondaire. On lui donne une
chance au cégep de compléter ce qu'il n'a pas réussi
à compléter au secondaire.
Dans le cas du programme conjoint, ce n'est pas du tout la même
chose, à notre avis. C'est pour permettre aux jeunes d'arrêter
leur orientation. Ils ne sont pas certains. Est-ce que je vais rester dans un
programme technique ou si je vais m'en aller du côté d'un
programme préuniversitaire? Beaucoup hésitent et, de fait,
beaucoup changent en cours de route. On leur donne la chance pendant un an de
vivre un programme conjoint qui leur permet de sentir un peu les deux
programmes - programme préuniversitaire et programme technique - et de
faire un choix après une année. Donc, pour eux, il s'agit de
faire des études de type collégial dans ce programme conjoint
là.
M. Gendron: O.K. J'ai dit que je reviendrais sur le nombre
d'unités, mais pas tellement parce que vous l'avez fixé à
150, à moins, encore là, que je me trompe, mais j'ai
essayé d'être très, très attentif et je l'ai
noté. Vous avez dit: À 150, nous, on trouve que ça serait
une alternative intéressante. Mais ma question, c'est qu'il y a toujours
deux orientations. Il y a un certain nombre de gens qui nous ont dit: II faut
rehausser le nombre d'unités afin d'avoir un D.E.S., un diplôme
d'études secondaires, plus qualifiant, un meilleur contenu,
première thèse. Et là, il y en d'autres qui ont dit: On
peut le laisser tel qu'il est, pour celles et ceux qui ne choisiraient pas le
cégep. Vous comprenez? Moi, je suis plus de la thèse: On touche
à ça et on le rehausse pour tous. On maintient un seul seuil
d'entrée, qui est un D.E.S. relevé ou rehaussé. Ceux qui
ne vont pas au collège bénéficieront d'un D.E.S. plus
intéressant et ceux qui décident d'aller au collège auront
une meilleure préparation. Est-ce que, dans votre évaluation,
vous avez regardé cette hypothèse que je viens d'évoquer
ou si, tout simplement, vous préférez la vôtre, à
savoir: ceux et celles qui choisiront le collège, soyons plus exigeants
pour eux?
M. Lalonde: Oui. On maintient la nôtre, parce qu'on pense
que le système public s'adresse quand même à une masse de
jeunes. Et, parce qu'il s'adresse à une masse de jeunes, on ne fait pas
de choix à l'entrée. Au niveau secondaire, il nous apparaît
important de maintenir la possibilité pour les jeunes d'accéder
et de terminer des études secondaires. Donc, à ce
moment-là, si on exigeait pour tout le monde d'avoir un D.E.S. de 150,
peut-être qu'on en éliminerait un certain nombre en partant.
Alors, il devrait être possible pour un jeune de faire son secondaire et
de le terminer avec 130 unités.
M. Gendron: Mais est-ce que vous ne croyez pas - parce que je
sens que vous avez de l'expérience - compte tenu du retour massif des
adultes au collège, pour toutes sortes de raisons... Et, moi, je ne suis
pas un futurologue, je n'ai pas de boule de cristal, mais j'ai l'impression
qu'on est là-dedans pour plusieurs années, pour plusieurs raisons
que ce n'est pas le moment d'exposer ici. Moi, je prétends que le risque
serait moindre - et je voulais avoir votre point de vue -
éventuellement, en rehaussant le D.E.S. pour tout le monde, d'en
échapper quelques-uns, mais d'en récupérer davantage qui
auraient moins besoin de tant de cours de mise à niveau pour aller
parfaire leur formation quand ils nous reviendraient massivement aux adultes.
C'est l'orientation et c'est de même partout. C'est massif, aux adultes.
Je voulais savoir si vous avez fait ce lien-là. (21 h 50)
M. Lalonde: Oui, on en a parlé, mais on
préfère quand même notre hypothèse, dans le sens
où, moi, je suis quand même très attaché à la
démocratisation de l'enseignement, telle qu'elle a été
réalisée à partir des années soixante, qui donne la
chance au plus grand nombre d'avoir accès à des études,
et, là-dessus, je suis prêt à faire des concessions, si
vous voulez.
M. Gendron: Sur la formation de base, vous avez dit - encore
là, je pense vous citer correctement: II faut faire des
aménagements dans la formation de base, tout en l'élargissant.
C'est dans votre présentation sommaire, c'est de même
que je vous ai entendu intégralement. Mais, pour nous -
«nous» est un peu restrictif de notre côté - pour eux,
qui auront probablement à prendre des décisions, je le
souhaite... Quand on a à concrétiser ça, la formation de
base, vous savez qu'il y a un tronc commun. Tout le monde souhaite
l'élargir. Il y a deux voies pour l'élargir: celle de retoucher,
d'une façon mineure, le tronc commun que vous connaissez autant que moi
ou, l'autre voie, où on ne touche pas tellement au tronc commun, mais
où on offre une meilleure grappe de cours à option,
réduits, en ce qui me concerne, parce qu'il y en a trop. Mais ceux qu'on
garderait correspondraient plus aux besoins de l'ère moderne de 1992.
À quelle thèse êtes-vous le plus attaché?
M. Lalonde: C'est ça. À la thèse telle
qu'elle a été défendue par la Fédération. Je
pense qu'on colle pas mal là-dessus. On colle là-dessus.
Ça nous apparaît intéressant. Pour ce qui est de
l'éducation physique, je me permets...
M. Gendron: Oui.
M. Lalonde: ...d'en parler un petit peu.
M. Gendron: Oui, je le souhaite. Oui, parce que, moi, je n'ai pas
de trouble avec l'éducation physique.
M. Lalonde: D'accord.
M. Gendron: La ministre a l'air d'avoir bien du trouble,
mais...
M. Lalonde: Là-dessus, ça m'a fait
réfléchir un petit peu, parce que c'est quand même une
formation, personnellement, que je crois bien importante. Personnellement, je
trouve que les jeunes Québécois - je travaille auprès des
jeunes depuis pas mal longtemps - ont des aptitudes particulières pour
être spectateurs, souvent. J'aime beaucoup le leitmotiv qui est sorti et
qu'on entend depuis quelques années, Participac-tion. J'aime beaucoup
ça pour les jeunes Québécois. En éliminant
l'éducation physique, ça me fait un peu peur là-dessus.
Et, en élargissant ma réflexion, je me disais, parce que je crois
nécessaire de donner une formation générale
élargie... Puisqu'il faut faire un choix, je me demande s'il n'y aurait
pas lieu de faire un peu davantage au niveau secondaire, en ce qui concerne la
formation physique, l'éducation physique, parce que là se
prennent véritablement les habitudes. Est-ce qu'on ne devrait pas
être un peu plus exigeants là, peut-être en ajoutant des
heures de cours?
J'ai vu des expériences quand même assez extraordinaires,
assez fantastiques, qui font réfléchir, celle du collège
Notre-Dame, par exemple, qui est bien particulière, mais, aussi, je me
rappelle, dans le temps, du collège Saint-
Laurent où, pour les jeunes, il y avait quand même quatre
heures d'éducation physique par semaine. Et les jeunes que j'ai
interrogés et qui sont allés, par exemple, au collège
Notre-Dame - je m'excuse de le nommer, mais c'est une expérience qui a
été attachante de ce point de vue là - ils sont tous
rassortis très, très grandis, me semble-t-il, en tout cas, de la
formation qu'ils ont reçue là, au niveau secondaire.
C'est pourquoi je crois qu'on a raison de penser qu'il faut
élargir la formation générale au collégial, donc de
couper dans des choses. Il faut faire des sacrifices quelque part. Il ne
faudrait pas diminuer indûment la formation physique, l'éducation
physique, sans y réfléchir mûrement, à mon point de
vue, en tout cas.
M. Gendron: En tout cas, moi, personnellement, je suis content
que vous en parliez, ayant moi-même enseigné pendant plusieurs
années au secondaire. Sauf, bien sûr, dans certaines institutions
privées, je ne crois pas qu'on puisse effectivement offrir cette
initiative ou ce goût de la nécessité d'avoir des cours
d'éducation physique, bien sûr, axés beaucoup plus sur la
préoccupation santé et de développer la mentalité
que c'est important dans sa formation de base que sur la pratique sportive. Il
faut distinguer. Alors, au secondaire, je pense qu'on va être
obligés, pour toutes sortes de raisons, pour l'avoir vécu
moi-même pendant des années, d'en rester beaucoup plus à la
pratique sportive.
M. Lalonde: Bon, en tout cas, si vous le permettez, il y a quand
même des...
M. Gendron: Oui, oui, je veux échanger avec vous.
M. Lalonde: O.K. On a un avantage immense, au Québec. En
tout cas, je le constate, quand on visite les écoles secondaires ou les
cégeps, on est équipé. Là-dessus, franchement, on
n'a pas de raison de manquer notre coup. Au cégep, on tente, depuis
quelques années, nous, un programme, dans le domaine du parascolaire,
qu'on a appelé «Les activités physiques
d'excellence». Alors, on engage des moniteurs, qui sont
particulièrement bien équipés dans ce domaine, et ils
animent des équipes sportives ou d'éducation physique dans
plusieurs secteurs, avec des budgets qu'on a accrus et qu'on va chercher dans
un bingo. Il y a quelque 100 000 $ qu'on va chercher là pour
étoffer ces équipes-là et favoriser, chez les jeunes de
niveau collégial, des activités de type parascolaire, parce qu'on
y croit. Je crois qu'il y a possibilité de faire quelque chose dans le
domaine du parascolaire. Donc, on pourrait, me semble-t-il, peut-être
diminuer au niveau des cours au niveau collégial en favorisant ce type
d'activité. Mais je souhaiterais qu'en même temps, si on le fait,
on regarde aussi attentivement si, au niveau secon-
daire, on ne pourrait pas faire un peu plus.
M. Gendron: Deux autres questions rapidement.
La Présidente (Mme Hovington): II vous reste une
minute.
M. Gendron: J'aimerais demander à M. le
représentant de l'équipe professorale... À moins que je me
trompe, dans votre mémoire, il y avait une volonté, à un
moment donné - je ne voudrais pas faire d'erreur, mais vous me
corrigerez - de renforcer l'assemblée départementale et, en
même temps, on a suggéré de privilégier l'approche
programme. J'aimerais ça vous entendre là-dessus.
M. Ducharme: Eh bien, c'est-à-dire que le mémoire
ne parle pas de renforcer l'assemblée départementale. Je ne sais
pas...
M. Gendron: Le département.
M. Ducharme: Non. Je pense qu'on parle en faveur de l'approche
programme, mais on ne se compromet pas à l'égard de l'approche
départementale. Bien sûr, c'est une question importante. Nous en
avons parlé. La réflexion n'est pas terminée
là-dessus, vous vous en doutez. Comment parvenir à
développer des approches programmes si on maintient avec autant de
rigueur l'approche départementale qui a prévalu jusqu'à
maintenant dans l'enseignement collégial? Je pense qu'il va falloir
faire des pas vers l'approche programme. C'est-à-dire les
départements vont devoir céder des pouvoirs à ce qui
pourrait devenir des familles de programmes ou des programmes qui
regrouperaient des départements. Les structures ne sont pas encore
imaginées, mais j'imagine que vous avez dû avoir des suggestions
à cet égard-là.
M. Gendron: Oui. En tout cas, en conclusion, je pense que vous
avez raison. Là, je le vois. Vous proposez une valorisation du
rôle des coordonnateurs départementaux. Mais, moi, en tout cas,
indépendamment de ça, en conclusion, je pense que votre remarque
était pertinente. Si on veut maximiser un peu le succès des
changements importants qui doivent se faire, c'est évident que
l'équipe professorale doit être dans le coup, compte tenu qu'il y
a plusieurs mémoires qui nous ont dit, dans l'ordre, que toute
réforme doit «prioriser» le premier élément le
plus fondamental, qui est l'élève. Il y en a plusieurs qui ont
pensé que le deuxième, c'était les professeurs. Alors,
indépendamment de l'ordre, que ce soit l'un ou l'autre, je pense que
l'un et l'autre sont très concernés par toute réforme et,
dans ce sens-là, j'espère que, dans la rétention des
solutions, on tienne compte de l'implication nécessaire et importante
des équipes profes- sorales.
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup. Je
reconnaîtrai maintenant M. le député de Prévost.
M. Forget: Merci, Mme la Présidente. Je voudrais vous
féliciter de votre mémoire. Remarquez bien que le collège
de Saint-Jérôme, en plus d'être à Mont-Laurier, il a
quand même tout le domaine des matériaux composites
également.
Alors, M. le directeur, M. Lalonde, vous avez soulevé un point
tout à l'heure où je voudrais avoir plus d'explications. Vous
avez parlé de la table de développement régionale, de la
participation des collèges. C'est quoi, exactement? Vous voudriez que
les collèges s'impliquent davantage?
M. Lalonde: Oui. D'accord. On sait, d'abord, que, depuis quelques
années, dans les régions, on parle beaucoup - d'ailleurs, je ne
dirais pas avec la bénédiction, mais avec l'incitation du
gouvernement - de développement endogène. Bon, on se sent de plus
en plus des responsabilités bien précises concernant le
développement de notre région. Et je pense que chacun des
cégeps doit faire de son mieux là-dedans, doit apporter sa
contribution et de la meilleure façon possible.
Alors, on a rencontré, l'an passé, je me rappelle, M.
Picotte, qui est venu nous parler de la réforme, qui est fort
intéressante. D'ailleurs, la table régionale est
déjà en place et on pense que le cégep, en y participant,
peut apporter une contribution importante, surtout s'il maintient sa
participation là. On rencontre régulièrement l'ensemble
des partenaires, les décideurs de la région. On peut donc faire
quelque chose d'important là, de même que pour cette autre table
qui serait la société de développement de... On pense
qu'il faut être là si on veut apporter une contribution du point
de vue de ce qu'on peut apporter en ce qui concerne la formation.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. Alors, en
conclusion, Mme la ministre.
Mme Robillard: Oui. Eh bien, il me reste strictement une minute
pour vous remercier, l'équipe du cégep de
Saint-Jérôme, d'avoir pris la peine de faire cette
réflexion et cette analyse. Et soyez certains que ça va
éclairer les travaux de cette commission pour décider aussi pour
le futur. Merci bien.
M. Deschamps: C'est à notre tour de vous remercier de nous
avoir permis de participer. Merci.
M. Lalonde: Nous souhaitons d'heureuses fêtes à tout
le monde. Reposez-vous bien. (22 heures)
La Présidente (Mme Hovington): À vous
aussi et à toute votre famille. Au revoir.
J'inviterais maintenant le cégep de Drummondville à bien
vouloir prendre place, s'il vous plaît.
Alors, nous poursuivons avec le cégep de Drummondville,
représenté par M. Paul G. Lemire, directeur
général. Bonsoir, M. Lemire. Il y a M. Rémi Blanchard,
président du conseil d'administration - bonsoir, M. Blanchard - M. Roch
Nappert, directeur des services pédagogiques - bonsoir - et - il m'en
manque, ha, ha, ha! -M. Pierre Dagenais, directeur général de la
Société de développement économique de
Drummondville.
Cégep de Drummondville M. Dagenais (Pierre): Bonsoir.
La Présidente (Mme Hovington): Bonsoir. Et une dame,
enfin, Mme Maryse Camirand, représentante des élèves au
conseil d'administration. Bonsoir, madame.
Mme Camirand (Maryse): Bonsoir.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, vous avez 20 minutes
pour nous présenter votre mémoire. Nous vous écoutons.
M. Blanchard (Rémi): Mme la Présidente, Mme la
ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science et ministre de
l'Éducation, Mmes et MM. les membres de la commission parlementaire de
l'éducation, le cégep de Drummondville vous remercie vivement de
l'accueillir à cette commission parlementaire. Vos travaux ont
suscité jusqu'ipi beaucoup d'intérêt et nul doute
marqueront-ils profondément l'avenir de l'enseignement collégial
au Québec. En ce sens, nous nous sommes sentis interpellés et
nous avons soumis un mémoire qui reflète les principales
orientations souhaitées à partir de l'expérience de plus
de 20 ans d'enseignement collégial public à Drummondville et
à partir de la réalité régionale fort dynamique de
chez nous.
À cet égard, il me plaît de souligner que le
mémoire du cégep a reçu l'appui officiel des trois
organismes représentatifs de la réalité régionale
invités à prendre connaissance de notre avis, à savoir: la
municipalité régionale de comté de Drummond, la Chambre de
commerce de Drummond et la Société de développement
économique de Drummondville. Le directeur général, M.
Dagenais, est d'ailleurs ici avec nous ce soir.
Le mémoire présenté en est un de collège, en
ce sens qu'il a été adopté par le conseil
d'administration. Rédigé par la direction du cégep, il est
issu d'un groupe de travail où les représentants des diverses
catégories d'employés ont pu soumettre leurs points de vue.
L'absence de représentants étudiants tient davantage d'un
concours de circonstances que d'une stratégie volontaire. Elle est due
au moment où cette consultation a été effectuée,
soit de la mi-août à la mi-septembre, et au fait que
l'exécutif de l'association étudiante était
décimé par le départ de ses principaux officiers vers
l'université ou le marché du travail. Mais, depuis ce
temps-là, on a fait le plein, vous voyez, avec beaucoup de
distinction.
Avec votre autorisation, Mme la Présidente, j'inviterais
maintenant le directeur général du cégep à vous
faire part des principaux éléments du contenu de notre
mémoire.
M. Lemire (Paul G.): Mme la Présidente, Mme la ministre,
Mmes et MM. les membres de la commission, le long parcours que vous avez
franchi sur l'enseignement collégial depuis le début de novembre
et la qualité des interventions qui vous ont été
adressées nous empêchent toute prétention à
l'originalité. Vous nous excuserez pour la redite. Vous voudrez y voir
plutôt un renforcement d'orientations vivement souhaitées.
Le message du cégep de Drummondville à cette commission
parlementaire porte davantage sur des éléments qui prennent
racine dans sa réalité ou son vécu que sur les sujets
touchant l'ensemble du réseau collégial au Québec. Le
cégep de Drummondville n'est pas étranger à ces derniers,
mais nous avons pu exprimer notre point de vue par les regroupements auxquels
nous participons. Le cégep partage, par exemple, les positions de la
Fédération des cégeps.
Le cégep de Drummondville a développé son
mémoire autour de trois axes principaux: la présence du
cégep dans son milieu régional, les programmes d'études et
l'organisation pédagogique et, enfin, le financement. La présence
du cégep dans son milieu est d'abord vue sous l'angle de
l'accessibilité des personnes aux études collégiales. Si
le cégep a pu concourir à l'atteinte de l'objectif de
démocratisation de l'enseignement collégial, cela tient, pour une
bonne part, au fait de sa proximité de la population desservie. Une
étude maison réalisée en 1982 établissait le
fondement de ce constat et les statistiques récentes concernant certains
programmes le confirment. En corollaire, l'absence de champ d'enseignement
professionnel dans un cégep hors des grands centres urbains
accroît le surnombre de l'effectif étudiant dans le champ de
l'enseignement général correspondant. L'exemple vécu
à Drummondville porte sur l'absence de techniques humaines dans le
profil d'enseignement professionnel offert. On peut croire que les
élèves aspirant à un programme dans le champ des
techniques humaines vont aller étudier dans un cégep environnant
offrant de tels programmes. Et Dieu sait si, lorsque nous sommes au coeur du
Québec, il y en a, des cégeps, tout autour. Mais en regardant les
statistiques, on se rend compte que le surnombre en sciences humaines, de
même que le pourcentage réduit des élèves de
notre
zone géographique fréquentant les programmes de techniques
humaines dans d'autres régions reflètent l'absence de la
mobilité présumée. Nous nous opposons donc à toute
mesure qui aurait pour effet d'éloigner physiquement la population de
son collège. Un autre argument en faveur du développement du
profil des programmes d'enseignement professionnel dans les collèges
nous est donné, particulièrement depuis deux ans, alors que l'on
observe une croissance accélérée des effectifs
étudiants. Les capacités d'accueil dans les programmes
professionnels étant plus limitées, on constate une accentuation
de la proportion des effectifs de l'enseignement général sur
l'enseignement professionnel.
Dans un autre ordre d'idées, l'accessibilité aux
études supérieures est aussi liée à la
capacité économique de le faire. Les parents se plaisent à
nous rappeler que supporter leur enfant au cégep, ce n'est pas gratuit,
même s'il n'existe pas de frais de scolarité comme tels. Nous
disons que la capacité intellectuelle et l'intérêt de
l'individu doivent demeurer les critères de base d'accessibilité
aux études collégiales et que les programmes d'aide
financière de l'État continuent de supporter les
élèves qui n'en auraient pas les moyens financiers. Que des
mesures soient prises pour éviter des abus, nous en convenons
facilement, tout en maintenant qu'il doit y avoir place pour des ajustements ou
des réorientations scolaires, et des situations exceptionnelles
qu'aucune règle générale ne saurait encadrer.
Au cours des ans, la présence du cégep dans le milieu
s'est manifestée par le développement de services de formation
aux dirigeants et au personnel des entreprises et organismes de la
région. Nous souhaitons la reconnaissance officielle de ce rôle
dans la loi des cégeps. Nous demandons la simplification des structures
et des programmes d'assistance aux entreprises en matière de formation
de la main-d'oeuvre. Nous souscrivons aussi à l'objectif d'un guichet
unique de services offerts par les diverses instances publiques et
parapubliques. La souplesse orga-nisationnelle s'impose comme
caractéristique de ce secteur d'activité. Enfin, les programmes
subventionnés doivent davantage prendre en compte l'environnement
fonctionnel de la petite entreprise.
Les programmes d'études et l'organisation pédagogique font
l'objet de la deuxième partie du mémoire présenté.
En formation initiale, le cégep de Drummondville recommande un
équilibre entre la formation générale et la formation
spécialisée, mais la préoccupation d'une formation
générale et polyvalente doit primer s'il faut faire un choix. Le
cégep souscrit au partage des responsabilités entre le
ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science et les
cégeps préconisé par la Fédération des
cégeps. Ainsi, le ministère déterminerait les objectifs
terminaux des programmes, identifierait les compétences à
développer et les standards à atteindre et autoriserait les
établissements à offrir des programmes. Les établissements
seraient responsables de la réalisation des programmes, de
l'organisation de l'enseignement et de la sanction des études. Ces
mesures seraient accompagnées d'exigences formelles à rendre des
comptes et de mécanismes et de structures pour vérifier et
attester de la qualité des établissements et de leurs actions
pédagogiques. (22 h 10)
Notre mémoire laisse entrevoir comment le cégep de
Drummondville exercerait ses prérogatives en matière de gestion
des programmes d'études et d'organisation pédagogique, si on lui
en confiait la responsabilité. C'est ainsi que nous mettrions de l'avant
des choix laissés aux élèves, correspondant à des
profils ou à des thématiques à l'intérieur d'un
champ ou d'une discipline, plutôt que de simples choix de cours plus ou
moins articulés entre eux. Pour illustrer ce propos dans le domaine de
l'apprentissage des langues modernes, disons que, plutôt que de prendre
un cours d'anglais, un cours d'espagnol et un cours d'allemand, le cégep
de Drummondville proposerait à ses élèves de choisir entre
trois cours d'anglais, trois cours d'espagnol ou trois cours d'allemand. Les
possibilités de maîtrise d'une langue nous semblent
sérieusement accrues au regard du butinage possible dans le cadre
actuel.
L'élève du collégial chemine à
l'intérieur d'un programme de formation. Le constat ou l'apparence qu'il
soit souvent seul à vivre cette réalité a amené la
direction des services pédagogiques du collège à donner un
coup de barre vers ce que l'on a appelé l'approche programme. L'ensemble
du personnel enseignant et des services pédagogiques a consacré
quelques journées d'études et des séances de travail pour
changer la focalisation du champ disciplinaire isolé ou du cours pointu
vers une vue d'ensemble du programme et des élèves qui y
cheminent. Le cégep de Drummondville s'estime fortuné de pouvoir
compter sur une structure départementale qui colle d'assez près
à plusieurs, pour ne pas dire à la plupart, des programmes
d'enseignement. Il reste que les règles établies dans les
conventions collectives au sujet de la coordination départementale et
des responsabilités du département constituent des freins
sérieux à l'exercice d'une autorité stable, d'une
responsabilité assumée et d'une imputabilité
crédible.
Un autre volet sur lequel nous attirons l'attention dans notre
mémoire est celui de l'harmonisation interordres d'enseignement et de la
concertation avec les établissements supérieurs de la
région. À cet égard, le cégep de Drummondville peut
se féliciter d'appartenir à une région et a une ville
où la concertation avec de nombreux partenaires a dépassé
le discours et se vérifie sur le terrain. La charte de collaboration
entre les quatre cégeps de la région Mauricie-
Bois-Franc-Drummond et l'Université du Québec à
Trois-Rivières a donné lieu non seulement à des
échanges profitables pour les divers intervenants ou intervenantes de
nos établissements, mais à des projets concertés, utiles
à l'ensemble du développement régional. À titre
d'exemple, mentionnons l'harmonisation des pratiques en matière
d'admission relative à la maîtrise du français ou la
création du Centre d'entrepre-neuriat du Coeur du Québec. Au plan
local, la concertation avec la commission scolaire des Chênes et la ville
de Drummondville se poursuit depuis la création du cégep. Cela
s'est traduit par l'articulation de services complémentaires et le
partage d'équipement. Plus timidement, il faut l'avouer, nous avons
mené avec la commission scolaire des échanges sur les
problématiques propres à certains programmes d'enseignement,
comme le français, les mathématiques et les sciences.
Par ailleurs, nous prétendons participer à une des tables
de concertation éducation-main-d'oeuvre les plus actives au
Québec. Toutefois, les autorités locales ou régionales
pourront déployer tous les efforts utiles de concertation et
d'harmonisation, elles ne remplaceront pas le nécessaire arrimage au
plan national où résident encore les responsabilités
décisives en matière d'établissement, de modification ou
de développement des programmes d'enseignement. L'harmonisation
interordres d'enseignement au plan national continuera d'être une
nécessité, même si un exercice de décentralisation
vers les établissements collégiaux devenait
réalité.
D'autres phénomènes à dimension macroscopique ou
à l'échelle de l'ensemble du système d'éducation au
Québec obligent à des concertations au plan national. Ainsi, les
objectifs de croissance des taux de réussite scolaire, établis en
septembre dernier par l'ex-ministre de l'Éducation, vont se traduire par
un afflux appréciable de candidats et de candidates aux études
collégiales. Une planification serrée des effets d'un tel impact
sur les plans à la fois quantitatif et qualitatif est requise pour
éviter de déplacer le problème du secondaire au
collégial, advenant l'atteinte des mesures préconisées.
L'acuité de la problématique des échecs et des abandons au
collégial est déjà suffisamment vive sans qu'il soit
besoin de l'amplifier.
Avant de laisser le chapitre de la vie pédagogique, le
cégep de Drummondville revient à la charge et insiste pour
signifier que l'autorisation et le maintien des programmes d'enseignement
professionnel dans les cégeps hors des grands centres urbains
obéissent à des réalités différentes de
celles observées dans les métropoles où la
complémentarité des programmes offerts d'un collège
à l'autre ne compromet pas l'accessibilité. Dans les
régions, l'existence de programmes professionnels complets, par
opposition à des cours partiels ou à des formations sur mesure,
exerce un effet de synergie sur le développement économique
régional. La masse critique nécessaire à cette influence
vient souvent de la vitalité d'un programme de l'enseignement ordinaire
où les ressources permanentes se retrouvent, même si l'entreprise
est desservie par le biais de l'éducation des adultes. Dans le
même ordre d'idées, un programme d'enseignement professionnel qui
éprouve des difficultés à rencontrer ce que l'on appelle
les seuils de viabilité d'un programme en ce qui regarde le nombre
d'élèves inscrits dans le programme concourt bien souvent
à dispenser des cours complémentaires fort utiles qui n'auraient
pas la même qualité sans le noyau de base venant du programme
professionnel. Chez nous, le programme d'informatique illustre bien ce
propos.
Le dernier chapitre de notre mémoire porte sur le financement. Je
résume rapidement la teneur de nos propos. Je dirais trois choses.
Premièrement, les compressions budgétaires
répétées des 13 dernières années nous ont
contraints à une situation telle que même l'augmentation
substantielle des effectifs étudiants ne génère pas
suffisamment de ressources pour éviter d'opérer selon une
prévision budgétaire déficitaire. Dans un petit ou moyen
cégep, l'équilibre budgétaire doit maintenant passer par
la fermeture de services puisque, a quelques exceptions près, les postes
occupes sont à caractère unique. Dans ce contexte, réduire
un poste signifie la fermeture du service rendu. Nous reconnaissons la
responsabilité de l'État de gérer selon l'étendue
de notre richesse collective. C'est pourquoi nous réclamons que la part
consacrée à l'enseignement collégial soit établie
en fonction d'un pourcentage stable de l'ordre de 0,75 % du produit
intérieur brut. Nous aurons là un indice mesurable de la
volonté d'investir ou de désin-vestir en enseignement
collégial.
En deuxième lieu, nous prenons parti pour le maintien de la
gratuité scolaire au collégial, comme nous l'avons dit en parlant
d'accessibilité. De plus, nous souscrivons à la demande de la
Fédération des cégeps de l'étendre aux adultes qui
ont le mérite de revenir aux études, même à temps
partiel, dans des programmes, par ailleurs, subventionnés sur la base
principale du nombre de périodes-étudiants-semaines. Nous pouvons
difficilement expliquer autrement que par l'argument d'autorité
pourquoi, par exemple, l'élève de 18 ans qui suit un cours
complémentaire d'informatique à l'intérieur de sa
formation initiale dite à temps complet n'a pas à défrayer
de frais de scolarité alors que son voisin ou sa voisine de 24 ans qui
effectue un retour aux études, mais à raison de deux cours par
semaine, doive défrayer des frais de scolarité.
L'édification du Québec de l'an 2000 empêche la poursuite
de ce type de politique réductrice. Avant de penser à remettre le
Québec en emploi, ne faut-il pas le remettre en bonne partie en salles
de classe?
Le troisième et dernier élément au sujet du
financement est un cri du coeur et de l'esprit
des gestionnaires locaux à l'administration centrale. Le message
peut se traduire ainsi: Plus le contexte budgétaire et financier est
difficile, plus l'administration centrale devrait fournir aux gestionnaires
locaux les moyens de gérer avec prévoyance et longueur de vue. On
éviterait ainsi les improvisations de dernière minute que ne
manque pas de provoquer la communication des règles et des enveloppes
budgétaires le 15 juin pour application équilibrée le 1er
juillet suivant. Nous estimons raisonnable de connaître le 1er avril,
date du début de l'année financière du gouvernement, les
règles et les budgets que nous aurons à gérer au
début de l'année financière de nos
établissements.
Je conclurai cette présentation en vous disant que les attentes
sont grandes dans notre cégep quant aux retombées des travaux de
cette commission parlementaire. Nous souhaitons vivement que les
retombées rencontrent l'assentiment le plus large possible des divers
agents et des partenaires de l'enseignement collégial au Québec.
Notre expérience nous invite, toutefois, à un réalisme qui
nous fait dire qu'il y aura des résistances, comme cela est
inévitable dans tout processus de changement majeur. Notre
expérience - et c'est aussi notre conviction profonde -nous rappelle que
tout changement significatif va nécessiter une mobilisation des
personnes concernées dans le réseau collégial. (22 h
20)
La collaboration de la direction du cégep de Drummondville dans
la mise en place de ces mesures vous est assurée, Mme la ministre. Nous
souhaitons vivement que la nature des changements apportés, les
modalités, les stratégies et les ressources requises à
leur mise en oeuvre prennent en compte le travail de concertation et de
mobilisation qui devra être aussi fait par les directions locales. Ainsi,
nous semble-t-il, l'aventure renouvelée de l'enseignement
collégial au Québec constituera-t-elle un défi stimulant
et valorisant pour ceux et celles qui y oeuvrent comme élèves ou
éducateurs et éducatrices, et rencontrera-t-elle les attentes
légitimes de la société québécoise envers
son réseau collégial. C'est notre voeu le plus cher avec ceux de
Joyeux Noël et de Bonne année que nous vous offrons en terminant.
Merci.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. Une très
belle conclusion. Alors, Mme la ministre, je vous reconnais maintenant.
Mme Robillard: Merci, Mme la Présidente. Bienvenue aux
gens du collège de Drummondville. Je suis assurée que les membres
de cette commission n'oublieront pas votre visite au sein de cette commission.
Soyez-en assurés. Vous avez dit, M. Lemire, que peut-être vous
avez redit des choses, mais je peux vous dire que les membres de la commission
vont se souvenir que vous êtes le dernier groupe à venir lors des
auditions de cette commission. Par ailleurs, c'était important de redire
les messages. Vous l'avez souligné et je peux vous dire que, même
les groupes que nous n'avons pas entendus au sein de cette commission, pour
avoir lu les mémoires, vont exactement dans le même sens global
des recommandations que nous avons reçues ici. Je pense que c'est
important de le faire savoir parce qu'il y a vraiment des consensus, je pense,
qui se sont dégagés. Alors, merci aux autorités de
Drummondville d'avoir présenté un mémoire.
M. Blanchard, vous vous doutez bien que la première question est
pour vous, comme président du conseil, n'est-ce pas? M. Blanchard,
quelle est la réflexion des membres du conseil sur un renouveau de
l'enseignement collégial, mais, de façon particulière, sur
le rôle et la composition du conseil?
M. Blanchard: II est bien sûr que le plan de travail du
cégep et les projets pédagogiques qui sont soumis au conseil
d'administration sont pas mal plus intéressants à étudier
que l'approbation du budget ou l'approbation des obligations ou d'autres choses
semblables. Au collège de Drummondville, Mme la ministre, on n'a pas
tellement de problèmes en regard de l'échantillonnage des groupes
représentés, ni de la représentativité des membres
du conseil d'administration. Cependant, si vous deviez recommander à
votre gouvernement d'en changer la composition, le nombre de
représentants des gens de l'externe au collège ne devrait pas
diminuer, mais plutôt augmenter.
Mme Robillard: Merci, M. Blanchard. M. Dagenais, si vous
êtes venu accompagner le collège de Drummondville ce soir, au nom
de la Société de développement économique,
sûrement que vous avez un message à nous livrer.
M. Dagenais: C'était, d'abord, pour démontrer que
la Société de développement économique endossait
totalement le «rapport». On l'a fait d'une façon officielle.
Également, pour appuyer les dires de M. Lemire lorsqu'il a parlé
de l'importance d'avoir des programmes complets en enseignement professionnel
et qui s'harmonisent avec le développement économique local.
C'est très important dans les centres périphériques
d'avoir... C'est l'institution d'enseignement de plus haut savoir qu'on a. On
n'a pas de constituante de l'Université du Québec dans nos villes
qui ont quand même une progression industrielle importante. Drummondville
en est un exemple. Il y a 400 PME et, la formation professionnelle, on compte
sur nos institutions d'enseignement pour la faire, en collaboration avec,
évidemment, la CFP ou nos futures sociétés de formation.
Donc, c'est dans cet esprit-là que la société de
développement a appuyé le cégep.
Également, M. Lemire a mentionné qu'on a une table
éducation et main-d'oeuvre qui est un
modèle du genre au Québec. Il y a une collaboration
extraordinaire. J'ai un adjoint, moi, qui siège sur plusieurs
comités du cégep, et vice versa. M. Lemire, d'ailleurs, est un
membre de notre conseil d'administration; donc, vous voyez la proximité
entre le cégep, qui est un outil de développement
économique chez nous, et la Société de
développement économique.
Mme Robillard: Alors, le partenariat, ça se vit chez
vous.
M. Dagenais: Absolument. Mme Robillard: Sans
difficulté.
M. Dagenais: Sans difficulté parce qu'on considère
que, dans le Québec de demain, la formation de la main-d'oeuvre est
l'enjeu majeur et c'est dans cet esprit-là qu'on appuie toute initiative
qui peut venir de notre cégep, l'enseignement terminal dans notre
communauté.
Mme Robillard: Est-ce que les gens de la Société de
développement économique se sont penchés de façon
particulière sur leur contribution en matière de stages pour les
étudiants dans votre région?
M. Dagenais: Tout à fait. C'est une préoccupation
d'arrimer l'éducation qui se fait tant au niveau secondaire que
cégep et la collaboration avec les industries. Je vous dirai que ce
n'est pas nécessairement facile de le faire parce que les industriels
ont une perception assez particulière de ces stages. On entend,
évidemment, toutes sortes de philosophies là-dessus. Il y a des
gens de la PME qui n'osent pas investir dans le temps qu'il faut pour donner
des stages aux étudiants. Il y en a d'autres qui nous disent: II
faudrait que les gens viennent chez nous et qu'on nous donne les fonds
nécessaires pour le faire. Mais c'est une préoccupation qu'on a.
On a déjà eu, à certains niveaux, des succès au
niveau des stages, pas nécessairement avec le cégep, mais,
à l'heure actuelle, on se préoccupe beaucoup de cet aspect
d'arrimer industrie et éducation.
Mme Robillard: Mme Camirand, comme étudiante - M. Lemire,
tantôt, nous a parlé d'un cri du coeur, je pense, des
gestionnaires par rapport aux autorités centrales - est-ce qu'il y a
aussi un cri du coeur des étudiants au collège de Drummondville?
Si oui, lequel? Quelle est la place des étudiants dans le collège
de Drummondville?
Mme Camirand: C'est évident, Mme la ministre, qu'il y a un
cri du coeur un peu de partout. D'ailleurs, c'est ce qui est
reflété ici. Moi, j'axerais ma réponse là-dessus un
petit peu sur, oui, c'est important, la place des étudiants au
cégep de Drummondville. Oui, c'est important que les jeunes prennent
leur place au sein de ces institutions-là parce que, majoritairement,
c'est pour nous autres, les jeunes, les cégeps. C'est là que
notre formation est. C'est là qu'on apprend, que l'éducation nous
est décernée majoritairement. Donc, moi, je vois un grand
rôle de la part des étudiants de ce côté-là.
Si j'avais un message spécial à lancer au ministère,
c'est, bien sûr, de continuer à aller voir ce qui se passe chez
les jeunes, de continuer à venir voir ici, au conseil d'administration,
ce qui se passe, mais de continuer aussi du côté des jeunes parce
que c'est important. Il faut toujours rester connecté à cette
clientèle-là parce que les jeunes sont faciles à
démotiver. Il s'agit de les motiver, de les embarquer et de croire en ce
qu'on fait. Moi, personnellement, au cégep, j'y crois. Si je suis
là, c'est parce que j'y crois. Donc, c'est important de toujours
continuer à voir le côté des jeunes. C'est un peu
ça, moi, que je veux apporter.
Mme Robillard: II y a une association d'étudiants au
cégep?
Mme Camirand: Oui, madame, accréditée. Le
rôle de l'association étudiante est un petit peu comme partout
ailleurs. Ce n'est pas seulement de critiquer ce qui se passe au conseil
d'administration; c'est d'être objectif, de voir les bons
côtés comme les mauvais côtés. C'est comme venir ici,
il y a des bons côtés et il y a des mauvais côtés, on
analyse. C'est d'être critique et d'être ouvert aux nouvelles
idées, d'être ouvert aux changements, d'être ouvert à
tout ce qui peut être nouveau dans notre domaine, c'est un peu
ça.
Mme Robillard: Merci, Mme Camirand. M. Lemire, j'aimerais que
vous nous parliez de votre charte de collaboration...
M. Lemire (Paul G.): Oui.
(22 h 30)
Mme Robillard: ...qui existe depuis plusieurs années. Quel
est le contenu de cette charte-là? Qu'est-ce que ça vous permet
de faire, les quatre cégeps ensemble? Parce que, tantôt, j'ai vu
que vous étiez présent et vous avez dû entendre vos
collègues du cégep de Saint-Jérôme espérant
que cesse la compétition entre les cégeps et que ce soit plus de
la concertation. Vous, vous avez une charte de collaboration non seulement les
quatre cégeps ensemble, mais aussi avec la constituante de
l'Université du Québec. Donc, parlez-nous-en un peu.
M. Lemire (Paul G.): Avec plaisir parce que je pense que c'est un
modèle intéressant de concertation entre les
établissements d'enseignement supérieur. Donc, depuis 1985, les
quatre collèges et l'Université du Québec à
Trois-
Rivières ont manifesté publiquement, officiellement - ce
qu'on a appelé une charte de collaboration - leur intention de se
concerter sur un certain nombre d'éléments qui touchent
l'ensemble du développement de l'enseignement supérieur dans la
région.
Ça a pris diverses formes au cours des années. Je pense
qu'un temps fort que nous avons vécu de cette concertation s'est
développé autour du sommet socio-économique de la
région 04, en 1988-1989. Il y a un certain nombre de projets qui ont
été retenus dans le cadre de cette démarche de
développement régional parce que les établissements
d'enseignement supérieur s'étaient concertés entre eux
plutôt que d'essayer de tirer un peu chacun de leur côté sur
différents objets qui pourraient s'apparenter. Un exemple, je pense,
très éloquent d'une réussite dans ce cadre-là a
été la mise en place du Centre d'entrepreneuriat du Coeur du
Québec. Chacun des établissements avait des visées
concernant le support à l'entrepreneuriat régional, mais sous des
formes de projets, je dirais, un peu sectoriels ou locaux.
La Table de concertation de l'enseignement supérieur nous a
permis de mettre en commun ces différentes initiatives locales et de
présenter un projet commun, finalement, au sommet
socio-économique qui, effectivement, a été retenu et qui,
depuis, produit des choses quand même très intéressantes
dans ce qu'on a appelé les quatre antennes que sont les quatre
cégeps du milieu et aussi avec l'Université du Québec
à Trois-Rivières. La problématique de l'admission - j'en
faisais état tout à l'heure - des élèves en regard
de la maîtrise de la langue a posé des difficultés.
Certains collèges pensaient refuser carrément les
élèves qui n'avaient pas tel niveau de maîtrise, etc.
Là, il y a eu une harmonisation qui s'est faite, de sorte que, dans les
quatre cégeps - et le directeur des services pédagogiques
pourrait en parler de façon plus éloquente - il y a donc une
concertation greffée autour de cette Table. Ce que ça a permis
aussi, c'est que nous ne nous en sommes pas tenus à des concertations au
niveau de la direction des établissements, mais nous avons voulu faire
descendre la concertation à des niveaux où des
départements de l'université avec des départements de
collège ont pu se concerter sur les problématiques d'arrimage des
différentes disciplines, notamment en français et en
sciences.
Il y a un projet particulier qui émane aussi, qui va
peut-être se développer dans d'autres collèges
présentement... projet particulier, donc, de déconcentration de
l'enseignement universitaire vers Drummondville, puisque nous avons au
cégep de Drummondville un secteur, je dirais, spécifique de
développement en musique. L'Université du Québec à
Trois-Rivières viendrait offrir la première année de
l'enseignement de la musique a Drummondville pour faire en sorte que la
clientèle qui est déjà présente dans notre
établissement n'aurait pas à se déplacer, pourrait
poursuivre une année additionnelle d'études universitaires, donc,
dans un sous-centre.
La Présidente (Mme Hovington): M. le député
d'Abitibi-Ouest, vous avez la parole.
M. Gendron: Mme la Présidente, je voudrais saluer d'une
façon particulière les représentants et la
représentante étudiante du cégep de Drummondville. Je le
redis, mais, comme c'est le dernier, ce n'est pas grave de le dire, j'ai
insisté pour que tous les mémoires de cégeps soient
entendus. Alors, j'ai contribué à vous ajouter à la liste.
Je pense que c'est important, à partir du moment où vous avez
fait l'effort de préparer un mémoire, d'avoir l'occasion
d'échanger avec vous.
Vous êtes le dernier, mais vous avez fait vos devoirs. Je pense
qu'un collège qui arrive avec 44 recommandations a sûrement des
choses à dire. Dans vos recommandations, il y a des
éléments très intéressants, très pertinents
qu'on n'aura pas le temps d'approfondir, mais qui, une chose est certaine,
devraient éclairer les membres de cette commission et sûrement
servir de base d'appui à certaines recommandations que la ministre nous
fera sans doute.
Un autre commentaire. Vous avez parlé un peu de votre
modèle de concertation au niveau de la charte de collaboration entre les
deux instances. Là, vous êtes le dernier mémoire, ce soir,
mais vous n'êtes pas le seul, heureusement, parce qu'on a eu droit,
à un moment donné, à un concerto d'éloges mutuels
entre le D.G. du collège de l'Abitibi et le recteur de
l'université qui sont venus pairer pour mutuellement se congratuler. Je
m'amuse un peu avec le député. L'heure le permet. Mais,
sérieusement, je trouve que c'est quand même une démarche
très intéressante et je pense que c'est des choses qu'on voit
davantage dans les régions. Je ne sais pas pourquoi ce n'est pas plus
ouvert à d'autres - parce que la réalité des
régions, là-dessus, n'est pas différente du reste du
Québec - d'avoir compris qu'il y a lieu, des fois, de mutuellement
s'offrir des services qui permettent d'éliminer ou de réduire un
certain nombre de difficultés entre les deux ordres. De l'avoir
regroupé au niveau de l'enseignement supérieur, je trouve que
c'est intéressant parce qu'il y a nécessité
d'étroite collaboration.
Quelques questions que j'aimerais vous poser. La recommandation 7 - ce
n'est pas parce que ce n'est pas clair - j'aimerais ça que vous me
disiez si vous la pratiquez vous-même, comme collège, parce que,
là, j'aurais des problèmes. «Que la capacité
intellectuelle et l'intérêt de l'individu demeurent les
critères de base d'accessibilité aux études
collégiales», et je m'arrête là, parce que, avec le
reste, je n'ai pas de trouble. J'aimerais que vous m'expliquiez ça
davantage, parce que j'ai peur, là. Vous avez de bonnes
grilles d'évaluation, si c'est ça, vos critères
d'accueil; moi, je pensais que c'était le D.E.S., le diplôme
d'études secondaires, indépendamment de son nombre
d'unités. Alors, quand vous recommandez que, dorénavant,
«la capacité intellectuelle et l'intérêt de
l'individu demeurent les critères de base de l'accessibilité aux
études collégiales», comment évaluez-vous ça
et est-ce que vous le pratiquez au collège de Drummondville?
M. Lemire (Paul G.): Je pense que ça ne s'oppose pas
à ce que cette capacité intellectuelle soit dans un
système établi et reconnu par un D.E.S. Il y a quand même
aussi, à l'éducation des adultes, un certain nombre de
cheminements particuliers qui n'ont pas nécessairement passé ou
ont passé dans des temps antérieurs assez lointains dans des
formules peut-être différentes, de sorte que la personne qui est
en mesure de démontrer sa capacité intellectuelle
d'accéder à des études collégiales devrait
être accueillie au niveau d'un cégep, et c'est ce que nous
pratiquons.
M. Gendron: Juste pour nous éclairer, admettez-vous que,
pris dans son sens général comme ça, vous voulez
probablement signifier là l'accueil au niveau des adultes? Comment
fait-on pour évaluer concrètement la capacité
intellectuelle et l'intérêt de l'individu? On a eu beaucoup de
jeunes. Vous êtes au courant que vous êtes le dernier. Moi aussi,
j'ai lu beaucoup de mémoires. On en a entendu plusieurs. Il y a beaucoup
de jeunes qui sont venus nous dire qu'ils ne savaient pas trop, quand ils
décidaient d'entreprendre des études collégiales, ce
à quoi ils s'engageaient. Il y a eu énormément de
critiques exactes, avec raison, selon moi, concernant l'insuffisance des
formations dispensées au niveau secondaire. Donc, s'il y avait une
formule pour les réévaluer sur la base autre que le diplôme
d'études secondaires, c'était ça que je voulais
apprécier.
M. Lemire (Paul G.): Là-dessus, M. le
député, je voudrais vous dire que c'est le deuxièmement,
je dirais, de cette proposition-là qui était le sens principal
que nous visions. Or, quelqu'un qui a ce qu'il faut pour venir au
collégial, en termes de compétences intellectuelles,
évidemment, sanctionnées par un D.E.S. lorsque quelqu'un est dans
un cheminement continu que l'on connaît maintenant, effectivement,
ça doit être encore là la pièce maîtresse.
M. Gendron: On sent, et les questions de Mme la ministre
permettaient de le vérifier un peu, la concertation qui existe entre les
différents intervenants, mais, moi, étant un type de la
région de l'Abitibi-Témiscamingue, je connais la valeur de la
présence du collège dans le développement régional.
Donc, ces aspects-là, c'est évident qu'au niveau de la
concertation vous la vivez et vous la pratiquez, mais, à la
recommandation 11, j'aimerais savoir si vous faites cette recommandation parce
que ça vous pose des problèmes particuliers eu égard,
entre autres, à la petite et moyenne entreprise. Vous semblez exprimer
que les règles de subvention de la formation et les critères ne
permettent pas de stimuler et d'encourager davantage la PME, que ce serait
davantage offert pour la grande entreprise. Comme vous êtes un
cégep de région, je vous comprends, mais je voulais savoir:
Est-ce que, effectivement, vous trouvez que les petites et moyennes entreprises
ont de la difficulté à avoir accès à des programmes
de formation à votre collège? (22 h 40)
M. Lemire (Paul G.): Effectivement, il y a eu des
difficultés sérieuses. Je donne un frein à la petite
entreprise: lorqu'on a établi, par exemple, que, pour accéder
à certains programmes subventionnés, il fallait suivre un minimum
de 80 heures de formation. Pour un dirigeant d'entreprise ou même pour un
employé d'une petite entreprise qui compte trois ou quatre personnes,
lui demander de sortir pendant 80 heures, ça veut dire d'arrêter
sa production pendant un mois. Ça ne favorise pas la formation des gens
de petite entreprise, tandis que, pour une grande entreprise, je dirais, se
passer pendant un mois de quelqu'un qui est en multiples exemplaires dans
l'entreprise, ça ne compromet pas...
M. Gendron: On m'indique que c'est un vote. On va y aller. On va
juste poursuivre quelques minutes. Ils nous attendront. S'ils ne' nous
attendent pas, ce n'est pas grave parce que, nous, on a du temps à
passer avec vous autres parce qu'on ne vote pas ce soir.
M. Tremblay (Rimouski): Vous avez une responsabilité de
parlementaire.
M. Gendron: Je l'exerce, M. le député de
Rimouski.
La Présidente (Mme Hovington): Est-ce qu'on a encore deux
minutes, M. le représentant du whip?
Une voix: Non, malheureusement pas.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, nous allons
suspendre et revenir pour la conclusion de votre mémoire,
malheureusement. Excusez-nous.
(Suspension de la séance à 22 h 41) (Reprise à 22 h
54)
La Présidente (Mme Hovington): La commission peut
reprendre ses travaux.
Une voix: On a coupé des discours. Des voix: Ha,
ha, ha!
La Présidente (Mme Hovington): Ils ne seront pas
transcrits.
Une voix: Les micros étaient éteints.
La Présidente (Mme Hovington): C'est ça! Alors, il
vous restait 13 minutes, M. le député d'Abitibi-Ouest, dans votre
intervention.
M. Gendron: Mme la Présidente, je voudrais poursuivre.
Vous avez également fait une recommandation, la recommandation 35,
à la page 33. Mais, avant d'aller spécifiquement à la
recommandation, j'aimerais avoir votre point de vue. Vous semblez poser un
diagnostic, en tout cas, pour éviter que le problème du
décrochage au niveau collégial ne devienne peut-être aussi
difficile qu'il l'est au niveau secondaire, de toute suite avoir des mesures
d'affectation de ressources importantes pour contrer le phénomène
du décrochage scolaire. Alors, avant de jaser de votre recommandation,
j'aimerais avoir une espèce d'évaluation chez vous. Si vous aviez
à porter un jugement sur le niveau de décrochage au
collégial chez vous, vous l'évalueriez à combien?
M. Nappert (Roch): J'aimerais que la question soit
précisée en termes de décrochage. Les étudiants qui
terminent avec...
M. Gendron: Oui.
M. Nappert: Je dirais que c'est très...
M. Gendron: Le pourcentage, c'est simple. Établir le
pourcentage d'étudiants que vous acceptez en admission versus ceux qui
sortent de là avec un diplôme. Vous devez sûrement avoir des
données. Vous existez depuis plusieurs années. Donc, vous devez
avoir un peu de données concernant vos élèves qui
abandonnent le collégial sans obtenir le D.E.C.
M. Nappert: De façon générale, il y a trois
élèves sur cinq qui débutent des études
collégiales qui complètent, dans un D.E.C. ou un autre des...
C'est, cependant, très variable d'un programme à l'autre.
Normalement, on va observer dans les programmes de sciences pures et
appliquées, sciences de la santé, des taux de diplomation de 65
%, souvent avec des taux de diplomation qui vont être de l'ordre de 45 %
dans le temps minimum requis. Cependant, quand on va vers des programmes comme
les programmes de sciences humaines sans mathématiques, on peut avoir,
à ce moment-là, des taux de 35 % ou 38 % de diplomation dans le
programme.
Mais, de façon générale, trois élèves
sur cinq complètent. Cependant, ça, ce n'est pas dans le temps
minimum requis. Ça va compléter dans une période... Des
données différentes, c'est après cinq ans d'observation.
Ce qu'on peut observer aussi, peut-être une donnée statistique qui
est assez significative... On a fait des études depuis quelques
années au niveau du premier trimestre d'études
collégiales. Il n'y a que deux élèves sur cinq qui
complètent le premier trimestre d'études collégiales sans
un échec ou un abandon à leur cheminement scolaire. Il n'y en a
que deux sur cinq, donc, qui se situent dans une démarche d'allongement
de cheminement scolaire, de cours d'été, des alternatives comme
ça.
M. Gendron: Moi, je n'ai pas de trouble avec ça, mais j'ai
un peu de difficulté parce que, immédiatement avant vous - puis
je pense que vous étiez dans la salle quand on a reçu les gens de
Saint-Jérôme - le directeur général disait: C'est
notre responsabilité d'accompagner les jeunes dans leur cheminement et
dans des mesures d'encadrement afin de maximiser la réussite scolaire.
Moi, je ne dis pas que vous ne devez pas lancer, encore là, un appel
à l'État d'être vigilant et de soutenir des mesures
d'encadrement et tout ça, mais je ne suis pas sûr que ce soit une
voie que je privilégierais, de mettre les mêmes ressources pour
contrer le phénomène de décrochage au collégial que
l'État québécois doit mettre et c'était urgent...
Puis, selon moi, il n'y en a pas assez. Entre le financement au secteur
privé puis le décrochage, j'aurais privilégié le
décrochage, c'est bien évident, parce que le problème est
pas mal plus collectif et massif. Ça n'a pas été le choix
de ce gouvernement. Ça, c'est son affaire. C'est à nous de
l'apprécier. Mais, si on revient à votre recommandation 35, je
pense que mettre autant de ressources financières pour contrer le
phénomène du décrochage, moi, j'aurais d'autres
priorités au collégial. C'est un peu ça que je voulais
apprécier davantage avec vous.
M. Lemire (Paul G.): Ce que l'on veut dire, et je pense qu'il
faut le préciser, ce n'est pas nécessairement d'ajouter un autre
type de ressources professionnelles quelconques qui viendraient s'occuper
spécifiquement du décrochage. Ce que l'on dit, c'est des mesures
du type de celles qui ont été injectées dans les
conventions collectives à la dernière ronde de
négociations, qui nous permettent maintenant de faire de l'encadrement
des étudiants avec des ressources professorales globalement
données au collège, mais non spécifiquement
allouées dans un programme précis pour faire justement ce qu'on
appelle de l'encadrement pédagogique. C'est de ce type de mesure qu'on
souhaite le maintien.
M. Gendron: Ah bien, ça, c'est très
intéressant. Sincèrement, c'est très intéressant.
Combien vous en avez, des ressources qui sont déga-
gées - parce que c'est ça que ça veut dire en gros
- de tâches spécifiques, d'actes d'enseignement et qui sont
affectées à des mesures d'encadrement et de soutien
pédagogique? Combien vous en avez, des ressources collégiales
comme ça?
M. Nappert: Au plan de la convention, on en a 1,5 ETC qui est
alloué au collège annuellement. Le collège,
évidemment, dans ses ressources, alloue aussi l'équivalent de
0,75 ETC additionnel au niveau de professeurs. Alors, 2,25 ETC qu'on alloue
dans différents projets d'encadrement. On a un centre d'aide en
français que le collège supporte.
M. Gendron: Oui.
M. Nappert: À l'intérieur du 1,5 ETC, dans une
approche programme, normalement, on appuie par des dégrèvements
des libérations de profs dans des environnements comme le
département d'informatique, l'électrotechnique, le
département de bureautique; alors, des projets d'encadrement des
élèves qui sont à risque par des profs. Un programme de
tutorat.
M. Gendron: Pour éviter que le Journal des
débats ne vous appelle, là, les ETC, c'est des
équivalents temps complet?
M. Nappert: Oui.
M. Gendron: Parce qu'ils vont vous appeler ce soir, quelque part,
pour fins d'enregistrement des débats. Ils ne savent pas ce que c'est,
des ETC.
Ça va, là, je comprends mieux. Mais je pense que la
formule d'avoir du personnel-ressource pour des mesures de soutien est
sûrement à être encouragée et est
intéressante. Il y a également votre recommandation à la
page 45, votre recommandation 42, c'est ça. Là, je ne veux pas
faire un débat sur le produit intérieur brut, mais, en fric
là, en argent concret... «Que le financement de l'enseignement
collégial continue de constituer une priorité majeure
d'investissement...» Bonne chance, là, pour votre recommandation,
mais ça représenterait quoi, ça, si jamais le gouvernement
décidait d'aller dans le sens de votre recommandation? Quelle masse
d'argent y a-t-il là, pour apprécier un peu plus? (23 heures)
M. Lemire (Paul G.): Ce que nous avons observé, c'est que,
dans les statistiques qui nous ont été fournies, l'effort majeur
qui a été fait dans les dernières années, c'est
rendu à 0,77 % du PIB. Actuellement, on est à 58 %, je pense, pas
58 %, mais 0,58 %. On dit: II y a là un indicateur assez précis
du niveau d'investissement qu'une collectivité fait dans un de ses
projets de société.
M. Gendron: À quelle époque vous avez
été à 0,77 %, 0,78 %?
La Présidente (Mme Hovington): Alors que vous étiez
ministre de l'Éducation.
M. Gendron: Non, non. J'étais au primaire, secondaire.
M. Lemire (Paul G.): Je n'ai pas tous mes documents de
référence ici, malheureusement, M. Gendron.
M. Gendron: Non, non, mais ce n'est pas pour ça. C'est
pour être capable d'évaluer si c'est sur une période
très longue. C'est plus pour ça, là, sincèrement.
C'est il y a une dizaine d'années, une quinzaine d'années?
M. Lemire (Paul G.): En 1982-1983, qu'on médit.
M. Gendron: C'est ça. Alors, ça s'inscrit dans la
problématique, malheureusement, générale de
réduction des 10 dernières années de l'aide
financière à l'éducation, peu importent les ordres
d'enseignement. C'est ça que ça traduit. C'est ça que je
voulais apprécier avec vous.
M. Lemire (Paul G.): C'est ça.
M. Gendron: Mais ça représente un écart si
fort que ça déjà, 20 points, 0,20 %.
M. Lemire (Paul G.): Oui.
M. Gendron: 77 % contre 58 %, à peu près. Vous,
vous ne savez pas la masse monétaire que ça peut
représenter pour le collégial? 300 000 000 $? 300 000 000 $ de
réduction. Oui, bien, c'est vrai, c'est parce qu'on peut le compter avec
1 200 000 000 $, c'est ça?
Mme Robillard: 1 300 000 000 $.
M. Gendron: 1 300 000 000 $ que c'est rendu?
Mme Robillard: Oui.
M. Gendron: C'est important de voir qu'il y a une
réduction de 300 000 000 $. Ça commence à...
M. Lemire (Paul G.): On le sent dans les' collèges, de
toute façon. On a été comprimés depuis 12 ans.
M. Gendron: Mais, à certains égards, ça n'a
pas été si pire que ça. Ça a permis d'accumuler un
certain nombre de surplus. Alors, ça vous a permis d'être de
meilleurs gestionnaires.
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Hovington): Mon Dieu, la belle
conclusion!
M. Gendron: On vous remercie beaucoup.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, en conclusion, Mme
la ministre.
Mme Robillard: Je pense que mon collègue d'Abitibi-Ouest
est très fatigué. Messieurs, merci beaucoup. Merci au
collège de Drummondville d'avoir pris ce temps non seulement de faire le
mémoire, mais de venir le partager avec nous ce soir. Merci de votre
participation aux travaux de la commission.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, bon retour chez vous
et je vous souhaite de joyeuses fêtes au nom de tous les membres de la
commission de l'éducation, à vous et à vos familles.
Bonsoir. La commission de l'éducation ajourne ses travaux jusqu'à
demain, après les affaires courantes.
(Fin de la séance à 23 h 3)