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(Onze heures trente-six minutes)
La Présidente (Mme Hovington): Nous avons le quorum. Je
déclare donc la séance ouverte. Je rappelle le mandat de la
commission pour cette séance, qui est de procéder à des
auditions publiques sur l'enseignement collégial
québécois. Est-ce que nous avons des remplacements, M. le
secrétaire?
Le Secrétaire: Oui, Mme la Présidente. Mme Boucher-Bacon
(Bourget) par Mme Loiselle (Saint-Henri).
La Présidente (Mme Hovington): Merci. Alors, aujourd'hui,
le mercredi 2 décembre, nous entendons ce matin, avec, malheureusement,
une demi-heure de retard due aux travaux de la Chambre, la Commission-Jeunesse
du Parti libéral du Québec; 12 heures, le Comité national
des jeunes du Parti québéccs, pour suspendre à 13 heures;
14 heures, la Jr>'ne Chambre de commerce du Québec
métropolitain; 15 heures, le cégep de
i'Abitibi-Témiscamingue et l'Université du Québec en
Abitibi-Témiscamingue; 16 heures, le collège O'Sullivan de
Montréal; 17 heures, le collège de Maisonneuve; 18 heures,
suspension; 20 heures, la Fédération des associations de parents
des cégeps du Québec inc.; 21 heures, le groupe de jeunes
appartenant aux communautés noires de Montréal; 22 heures, les
Instituts de technologie agro-alimentaire de Saint-Hyacinthe et de La
Po-catière, pour ajourner, finalement, à 23 heures ce soir.
M. Gendron: Mme la Présidente-La Présidente (Mme
Hovington): Oui, M. le député d'Abitibi-Ouest.
Une voix:...
M. Gendron: Non, au rythme auquel ça roule là, on
va attendre longtemps. Non, je voudrais tout simplement vous indiquer, Mme la
Présidente, qu'il faudrait régler tout de suite... Moi, je ne
peux pas travailler, là. Ce n'est pas de votre faute, ce n'est de la
faute à personne, mais, moi, je veux entendre la Commission-Jeunesse du
Parti libéral du Québec une heure, ça nous met à 12
h 40, et j'aimerais suspendre. Puis, on réaménagera pour le reste
du temps, bien sûr en vérifiant si le Comité national des
jeunes du Parti québécois... Je n'ai pas eu le temps de le faire,
mais, comme ils vont être ici à l'heure du dîner, je
préférerais qu'ils passent après la période du
dîner et puis on réaménagera le reste de l'horaire, parce
que je ne finirai pas à 13 h 40 pour recommencer à 14 heures.
C'est ça qui est prévu dans nos travaux. Alors, moi, je
suggérerais qu'on entende pendant une heure la Commission-Jeunesse du
Parti libéral et que, en revenant à 14 heures, le premier
mémoire qu'on entendra, ce soit celui de la commission-jeunesse du Parti
québécois.
Mme Robillard: Mme la Présidente, là, il n'y a
aucune objection. Je pense qu'on peut très bien réaménager
l'horaire du reste de la journée, et quand même avec l'objectif,
Mme la Présidente, de toujours terminer à 23 heures ce soir.
M. Gendron: Oui, moi aussi.
La Présidente (Mme Hovington): Donc, si je comprends bien,
nous suspendons jusqu'à midi.
Mme Robillard: Non, on fait une heure.
La Présidente (Mme Hovington): Ah! Là, on fait une
heure immédiatement.
M. Gendron: Mais oui, on fait une heure.
La Présidente (Mme Hovington): Ah! Bien oui, à 12 h
40. Ensuite, on suspendra. D'accord. J'ai le consentement des deux
côtés?
Mme Robillard: Oui.
La Présidente (Mme Hovington): D'accord. Nous avons donc
devant nous la Commission-Jeunesse du Parti libéral du Québec
représentée par M. Nicolas-Pierre Drapeau.
Commission-Jeunesse du Parti libéral du
Québec
M. Drapeau (Nicolas-Pierre): C'est ça. La
Présidente (Mme Hovington): Bonjour. M. Drapeau: Bonjour.
La Présidente (Mme Hovington): M. Claude Éric
Gagné.
M. Gagné (Claude Éric): Bonjour.
La Présidente (Mme Hovington): Bonjour. Et Mme Sophie
Galluccio.
Mme Galluccio (Sophie): Bonjour.
La Présidente (Mme Hovington): Qui d'entre vous trois sera
le porte-parole ou la porte-
parole? Vous êtes deux...
M. Gagné: Effectivement, la porte-parole. Mme
Galluccio: C'est moi.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, si vous voulez bien
commencer, vous avez 20 minutes pour nous faire part de votre
mémoire.
Mme Galluccio: Alors, bonjour à tous. Mon nom est Sophie
Galluccio. Je suis membre de l'exécutif de la Commission-Jeunesse du
Parti libéral du Québec. Mes collègues sont Claude
Éric Gagné, coordonnateur jeunes, et Nicolas-Pierre Drapeau,
représentant régional de la région de Lanaudière
à l'exécutif de la Commission-Jeunesse, qui est membre aussi
depuis 1988.
Alors, vu l'importance de l'enseignement collégial, les jeunes
libéraux ont décidé de prendre part activement à la
réforme des cégeps. Le processus menant à la
rédaction du document fut le suivant: une première rencontre en
assemblée du conseil des jeunes, d'où nous avons lancé
l'idée et le débat, et une deuxième tournée de
consultation à la grandeur du Québec, à laquelle j'ai
personnellement participé cet été. Suite à cela, il
y a eu la rédaction du mémoire présenté au
congrès jeune, quelques petits amendements ont été
apportés et puis le document a été adopté par plus
de 800 jeunes. (11 h 40)
Alors, pour dresser un véritable bilan des résultats et de
la performance des cégeps, il faut revenir aux objectifs ayant
mené à leur création. Le premier, c'était d'assurer
l'accès de tout le monde à l'enseignement postsecondaire. Donc,
à ce niveau-là, aucun problème, la gratuité a
été là pour permettre à un plus grand nombre de
personnes, un plus grand nombre de jeunes d'y prendre part, d'avoir cette
opportunité-là. Les résultats ont été
probants. Ça a engendré une augmentation importante de la
scolarisation des jeunes Québécois.
Le deuxième objectif, c'était de diminuer l'échec
et les abandons. Jusqu'ici, les cégeps n'ont pas su empêcher un
taux élevé d'abandon scolaire, ce qui a engendré un
prolongement indu et coûteux des études. Suite à cela, il y
avait aussi de favoriser une meilleure orientation des étudiants en leur
donnant la possibilité de modifier leur cheminement académique.
On visait une répartition de 40 % au secteur préuniversitaire et
de 60 % au secteur professionnel. Par contre, avec les problèmes
d'orientation, le tiers des diplômés n'ont pas obtenu leur
diplôme dans leur champ d'études primaire, d'origine. Donc, cet
objectif-là n'a jamais été atteint. On voulait aussi
hausser le niveau des études et uniformiser le passage des études
secondaires aux études supérieures afin de mieux préparer
les étudiants à entreprendre des études
universitaires.
Donc, la Commission-Jeunesse s'est penchée sur les
problèmes des cégeps, et nous croyons qu'un virage important,
qu'un virage s'impose. En 1967, quand le gouvernement du Québec a
décidé de faire cohabiter le secteur professionnel et le secteur
préuniversitaire, c'était excellent. Alors, on est le seul
État à s'être doté d'un niveau d'enseignement entre
le secondaire et l'universitaire. Remettre en question ce choix-là, ce
serait s'engager dans un débat de structure.
Il faut regarder trois paramètres. Le premier, c'est
l'enseignement dans son volet technique, qui est là pour répondre
aux exigences du marché du travail, donc former des travailleurs plus
polyvalents et plus performants dans les secteurs de pointe. Le deuxième
paramètre, c'est que le secteur général doit rehausser la
qualité de sa formation pour améliorer l'encadrement. Cependant,
les ressources de l'État sont limitées, nous en sommes
conscients, et il faudrait qu'elles soient investies en fonction des
étudiants et non consacrées à l'amélioration...
Voir à ne pas investir l'argent dans de nouvelles immobilisations ou
modifications structurelles du réseau mais le canaliser en fonction des
étudiants. Donc, en misant sur l'expérience des 25
dernières années, il faut effectuer une révision de
l'enseignement collégial pour répondre aux besoins de la
société québécoise. Donc, la Commission-Jeunesse
propose que le gouvernement du Québec, en s'appuyant sur
l'expérience acquise au cours des 25 dernières années et
sur les structures actuelles, entreprenne une révision en profondeur de
l'enseignement collégial.
M. Gagné: Pour parler maintenant d'un autre aspect de
cette réforme, on parle des cégeps partenaires de
développement. On connaît l'importance du développement
régional, du développement de la main-d'oeuvre. La
Commission-Jeunesse prend dans une vision globale le rôle des
cégeps. On sait que les cégeps, au fil des années, ont
tissé des liens importants avec leur communauté, que ce soit au
niveau des infrastructures, au niveau de la communauté. Alors, nous, ce
qu'on dit, c'est qu'en ce moment, au Québec, on vit une espèce de
mutation. On voit aussi, au niveau du développement régional, les
sommes qui sont transférées et administrées à
partir des régions. Au niveau de la main-d'oeuvre aussi il y a les
sociétés régionales de développement de la
main-d'oeuvre qui sont vues à partir des régions. Alors, on
décentralise un peu à ce niveau-là. Alors, nous, on
considère que les cégeps devraient prendre une place plus grande
au sein, justement, de ces deux organismes-là, c'est-à-dire la
Société québécoise de développement de la
main-d'oeuvre ainsi que les sociétés régionales de
développement, dans une stratégie d'impliquer plus en profondeur
les cégeps au niveau du développement de la région pour
mieux comprendre, justement, les besoins de cette région-là,
surtout que les cégeps sont ceux qui forment les techniciens, sont ceux
qui forment
une main-d'oeuvre professionnelle et générale. Souvent,
dans les régions, il y a des particularités et, pour que le
courant passe entre les deux, c'est important que les cégeps soient bien
informés. Il y a déjà des structures en place qui
permettent aux cégeps de prendre une position à l'interne de ces
comités-là. Alors, ce que nous proposons, premièrement,
c'est que les cégeps profitent de cette
opportunité-là.
Deuxièmement, au niveau de la restructuration du
développement industriel du Québec - on parle de la
réforme du ministre Tremblay - on a pointé, au Québec, au
niveau national, les grandes lignes du développement industriel. On a
nos forces, on connaît nos faiblesses, on connaît nos secteurs qui
sont prometteurs. C'est une réforme qui va faciliter, pour les
Québécois et pour les entreprises, le développement. Et
les cégeps doivent s'enligner aussi avec cette réforme-là
et ce nouveau réaménagement de nos forces au niveau industriel.
On parle d'une société qui va être une
société de valeur ajoutée. Au niveau industriel, on va
miser sur la valeur ajoutée. Alors, au niveau des cégeps, c'est
important que, dans un plan, de façon globale, on considère
ça, autu . au niveau régional et puis au niveau national, avec la
nouvelle stratégie. Alors, ça, c'est deux propositions au niveau
partenaires du développement.
Et puis il y a une troisième proposition qui touche ce point, qui
est venue durant notre congrès jeunes, où les jeunes du plancher,
suite au document qu'on leur avait proposé, sont venus bonifier encore
la chose en disant: Nous autres, on veut plus que ça, on veut aussi que
soit mise en oeuvre une campagne de sensibilisation afin de raffermir le
secteur technique des cégeps. Alors, eux autres ont dit: Ce qu'on a
proposé, c'est beau au niveau que les cégeps prennent la place
qu'ils ont à prendre, mais aussi - on va en parler plus tard - au niveau
du rapport Parent, on prévoyait, bon, à l'époque, 60 % en
secteur technique, 40 % en secteur général. C'est un peu le
contraire qui est arrivé. Alors, pour justement aider à
rétablir un peu l'équilibre - puis on sait ce qui est
arrivé au niveau de certaines entreprises qui manquaient de ressources,
justement, au niveau du Québec - ce qu'on demande, c'est une campagne de
sensibilisation afin, justement, comme je l'ai dit tout à l'heure, de
favoriser ce secteur.
Mme Galluccio: Ensuite de ça, ce qui est important, c'est
d'avoir une formation fondamentale solide et complète. Alors, selon
nous, la formation fondamentale, c'est de permettre aux futurs travailleurs de
pouvoir affronter un monde du travail, un marché du travail complexe.
Parce qu'on sait que les jeunes seront probablement appelés à
changer à quelques reprises d'emploi, parfois même
fréquemment. Alors, au niveau de l'enseignement du français, ce
que nous proposons, c'est d'avoir des cours adaptés au secteur
d'études parce que, présentement, c'est une faiblesse. Donc,
ça ferait en sorte que les étudiants seraient mieux
préparés au type de rédaction qu'ils auraient à
faire dans leur branche, dans leur domaine, puis ça les
préparerait aussi pour le niveau universitaire.
Quant aux cours de philosophie, bien, on sait que les critiques sont
nombreuses. Les principales, c'est surtout l'incohérence de chacun des
cours et puis le manque d'uniformisation de l'enseignement. Donc, sans une
définition claire des objectifs, bien, on va poursuivre dans cette
veine-là, sauf que les jeunes du Parti libéral du Québec
nous on fait entendre qu'ils voulaient maintenir les cours de philosophie tout
en ayant des objectifs clairs.
Nous reconnaissons aussi l'importance des cours d'éducation
physique. Nous voulons garder ces cours-là, parce qu'on sait qu'on
assure la santé physique des étudiants puis que ça permet
aussi une influence sur leur rendement académique. Et on sait que,
statistiquement, au Québec, les jeunes sont moins en forme que dans les
autres provinces. Donc, on a un avantage, et il faudrait le garder à ce
niveau-là.
Quant à la problématique des cours complémentaires,
il y a une trop grande variété de cours disponibles, et puis
ça ne permet pas aux étudiants de se doter d'une formation
complémentaire importante. On sait très bien que les jeunes
choisissent leurs cours complémentaires pour rentrer dans leur horaire
ou selon la facilité du cours. Donc, ce que, nous, on propose, c'est
tout simplement de revoir ce type de cours et de remplacer la formule des cours
complémentaires par une formule de cours à option à
l'intérieur des disciplines identifiées, ce qui ferait en sorte
que les étudiants auraient un certain bagage de connaissances
intéressant à la fin de ce cours-là. Donc, c'est ce qui
est pour la formation fondamentale au niveau de nos propositions. (11 h 50)
M. Drapeau: Dans le rapport Parent, on parlait de la
réussite académique des étudiants. Sur la réussite
académique des étudiants, actuellement, on a identifié
deux problèmes majeurs: il y a l'abandon et puis le prolongement indu
des études. Au point de vue de l'abandon, actuellement, il y a un tiers
des étudiants qui abandonnent avant d'avoir terminé leur
programme collégial, et les conséquences, c'est des coûts
importants au point de vue social et au point de vue économique. Et, en
tant que société, on ne peut pas se permettre de continuer de
cette façon.
Au point de vue du prolongement indu des études, eh bien, en
1990-1991, il y a un tiers des étudiants qui ne suivaient pas le
cheminement proposé, c'est-à-dire deux ans au point de vue du
secteur préuniversitaire et trois ans au point de vue du secteur
technique. Et cela, bien, ça a fait que les étudiants, qui ne
participent pas à
plein temps au marché du travail, sont retardés. Et
ensuite, ça affecte la santé financière des
collèges, car une année scolaire, ça coûte environ
7000 $ par étudiant, par année. Alors, plus les étudiants
continuent à prolonger leurs études, plus ça affecte la
situation financière des collèges.
On a identifié quelques causes par rapport au prolongement indu
des études et à l'abandon: il y a l'attrait du marché du
travail, la préparation déficiente au secondaire, une mauvaise
orientation au collégial et un manque d'encadrement. Au point de vue de
la préparation déficiente au secondaire, on a noté que les
cours d'éducation au choix de carrière ne répondent pas
nécessairement aux attentes qu'on s'était fixées. Une
solution à ça nous a été proposée par nos
jeunes, c'est l'implication des intervenants des collèges dans ces cours
de choix de carrière, car on croit que les intervenants des
collèges sont mieux adaptés au milieu collégial et peuvent
mieux valoriser, entre autres, le secteur technique, qui est à notre
avis très peu valorisé en ce moment dans les cours de choix de
carrière.
Au point de vue de l'orientation au collégial, il y avait
seulement 130 API en 1988, et ça veut dire un par 1000 étudiants.
Il y a une nette amélioration à apporter de ce
côté-là. Au point de vue de l'encadrement, il y a un manque
certain aussi. Les étudiants se sentent seuls quand ils arrivent au
collégial, ils se sentent laissés à eux-mêmes. Les
collèges privés sont un exemple de succès au point de vue
de l'encadrement. On voit que, au point de vue de l'encadrement, les
collèges privés ont fait leurs devoirs là-dessus et on
croit que le secteur public devrait faire comme les collèges
privés, assurer un meilleur encadrement au point de vue des
étudiants au collégial. Entre autres, au point de vue de
l'encadrement, on parle de groupes stables, de tutorat, de cours de
récupération et aussi de parrainage étudiant. Alors, c'est
toutes des mesures, au point de vue de l'encadrement, qui sont
intéressantes, qui ont été utlisées localement dans
divers cégeps mais qui n'ont pas été établies dans
l'ensemble du réseau collégial, et on croit que ça serait
une très bonne alternative.
M. Gagné: parlons maintenant d'une formation plus
rigoureuse. premièrement, je vais aborder l'aspect au niveau de la
technique au cégep, et puis mademoiselle va parier du secteur
général. au niveau technique, une formation plus rigoureuse.
comme je l'ai dit tout à l'heure, quand on a formé les
cégeps, avec le rapport parent, on prévoyait que 60 % des
étudiants iraient à la clientèle au niveau des techniques
et que 40 % iraient au niveau général. ce n'est pas ce qui s'est
produit, c'est l'inverse qui est arrivé. alors, nous, on pense qu'il
faut donner des incitatifs aux étudiants pour que, première- ment
- on en a parlé tout à l'heure - ils choisissent bien leur
orientation, mais qu'ils n'aient pas de préjugé
défavorable envers le secteur technique. Il y a certains
préjugés en ce moment. Alors, une des recommandations qu'on fait,
et c'est quelque chose de nouveau, qui est relativement... bien, qui est
nouveau, qu'on vient d'inventer, mettons...
Une voix: Ha, ha, ha!
M. Gagné: ...on parie d'établir des filières
professionnelles décloisonnées. Alors, ça, c'est un terme
qu'on a inventé pour quelque chose qui existe déjà
ailleurs. C'est-à-dire qu'on dit que, pour les étudiants qui
entrent dans une technique, ce serait quelque chose qui faciliterait le passage
entre les niveaux, entre les niveaux secondaire-cégep et
cégep-université. Alors, il n'y aurait pas de
préjugé défavorable en disant: J'ai peur d'aller au niveau
d'une technique, que ça me bloque les portes de l'université en
sortant. Alors, ce qu'on dit, nous autres, c'est de modifier les cours pour que
les gens qui terminent leur technique puissent passer au niveau universitaire
sans problème et sans être défavorisés face à
ceux qui vont du côté du général.
Une autre chose dont on parle aussi, pour améliorer au niveau de
la formation technique, c'est des stages en milieu de travail. Il y a beaucoup
de gens qui ont parlé de ces stages-là. On en parle beaucoup,
mais il n'y a pas beaucoup de stages qui se donnent encore aujourd'hui. Alors,
ce serait peut-être au gouvernement d'intervenir d'une façon qu'il
jugera nécessaire pour, justement, jouer le rôle un peu de
catalyseur à ce niveau-là pour faire comprendre aux entreprises
que c'est un investissement pour eux et que c'est important, justement, autant
pour les cégeps que pour les entreprises, que les jeunes qui sortent et
qui font leur technique soient bien formés et que, quand ils le font
à l'intérieur de l'entreprise, eh bien, là, ils soient
formés vraiment à la fine pointe de la technologie. Et on dit
souvent que les équipements sont coûteux pour les cégeps,
que les équipements deviennent désuets. Alors, quand les jeunes
vont faire leur stage, ça permet de travailler avec des instruments et
c'est bon autant pour l'entreprise que pour le jeune.
Qu'on assure aussi une mise à jour continue des programmes
techniques impliquant les collèges et les entreprises dans leurs milieux
respectifs. Alors, la mise à jour, justement, de ces
programmes-là... Impliquons les entreprises dans la mise à jour
au niveau théorique ou pour conseiller au niveau technique aussi. Alors,
c'est une autre recommandation qu'on fait. On dit: Impliquons les entreprises.
Et c'est des recommandations qui ne sont pas nécessairement
coûteuses pour un gouvernement mais qui vont amener de bons
résultats, à notre avis, au niveau technique.
Mme Galluccio: Ce qu'on propose aussi, c'est un resserrement des
exigences au niveau du secteur préuniversitaire, parce qu'on sait qu'il
y a un bon nombre d'universités qui mettent en doute la qualité
de la formation qui est acquise au cégep. Très souvent, les
universités doivent revoir, en début d'année ou
passé une certaine période de la session, de la matière
qui aurait dû avoir été vue au niveau collégial.
Donc, il y a une perte de temps là. Et ce qu'on doit garantir, c'est que
les étudiants, dans un premier temps, les étudiants d'une
même concentration, aient reçu un profil d'études
comparable. Donc, on sait que le préuniversitaire a comme vocation
première de préparer les étudiants à poursuivre
leurs études universitaires. Et le principal problème à ce
niveau-là, c'est l'éventail des cours qui a été
grandement gonflé. Donc, il faut s'assurer que le secteur
préuniversitaire puisse dispenser réellement un enseignement
préparatoire à l'université. Donc, à ce
niveau-là, il faudrait faire une épuration de la banque de cours
offerts, qui doit être faite en retirant les cours qui sont trop
spécialisés.
De plus, il faudrait assurer un contrôle plus serré sur le
contenu dto cours, qui varient très souvent d'un professeur à
l'autre et d'un établissement à l'autre. Donc, pour assurer un
certain contrôle sur l'atteinte des connaissances, la Commission-Jeunesse
propose d'instaurer un examen couvrant les éléments fondamentaux
que devraient avoir vu et acquis tous les étudiants au sein d'une
même concentration à la sortie des études
collégiales. Le but, c'est de viser la préparation, une meilleure
préparation des étudiants pour leur entrée à
l'université.
Pour mesurer la qualité, maintenant, nous, ce qu'on propose,
c'est qu'une évaluation soit réalisée et
intégrée pour évaluer les programmes et les
établissements. Donc, en évaluant les programmes, ça
permettrait aux étudiants d'acquérir une meilleure formation.
Évaluer les établissements, eh bien, c'est essentiel parce que,
dans le fond, c'est eux autres qui administrent les programmes. Donc, à
ce niveau-là aussi, c'est important pour assurer une rigueur et une
objectivité de l'évaluation. Donc, ce qu'on propose, c'est de
confier aussi à un organisme externe le rôle d'administrer ces
examens-là. Donc, on sait que l'évaluation de l'enseignement
collégial, ça bénéficiera avant tout aux
étudiants, particulièrement ceux du secteur
préuniversitaire. Pour ce qui est du secteur technique, bien, le
marché du travail constitue en lui-même un mécanisme
d'évaluation supplémentaire. Donc, c'est ce que nous proposons,
une évaluation périodique des enseignants, du personnel et des
établissements.
La Présidente (Mme Hovington): Votre temps serait
écoulé. Est-ce que vous en avez encore pour...
M. Drapeau: De façon très brève, je veux
juste parler du chapitre VI, du financement des réseaux. Je vais essayer
de faire ça le plus bref possible.
La Présidente (Mme Hovington): D'accord. J'ai le
consentement des deux côtés. Allez-y!
M. Drapeau: O.K. Merci. Au point de vue du financement des
réseaux, on a marqué «priorité à
l'étudiant» dans notre mémoire, et c'est une chose qui est
très importante pour nous. C'est dans ce sens-là que, nous, on
est complètement en faveur de la gratuité scolaire. Au point de
vue de la gratuité scolaire, ce qui est important, c'est qu'un des bons
points qui est retenu des cégeps, c'est qu'on a vraiment
démocratisé le système de l'enseignement supérieur
et qu'on a ouvert l'enseignement supérieur à pratiquement toute
la population, à tous les jeunes du Québec. Pour nous, c'est
extrêmement important, la gratuité scolaire. C'est un principe
fondamental au point de vue du secteur collégial. (12 heures)
Deuxièmement, pour le financement du réseau, pour avoir
une gestion plus saine, ce qui est important, c'est peut-être de revoir
la rigidité des conventions collectives qui existent pour les
employés du secteur collégial. En rendant les conventions
collectives plus souples, ça permettrait aux administrations
collégiales d'avoir une administration plus saine et, en même
temps, de ne pas dépenser de l'argent pour rien. Alors, en gros, c'est
ça notre point 6. S'il y en a qui ont des questions...
La Présidente (Mme Hovington): On pourra élaborer
un petit peu plus dans la période des échanges. Ça va?
Alors, je vais reconnaître maintenant la ministre de l'Éducation,
de l'Enseignement supérieur et de la Science. Vous avez la parole.
Mme Robillard: Merci, Mme la Présidente. Je voudrais
saluer de façon toute particulière les membres de la
Commission-Jeunesse du Parti libéral du Québec et leur dire
combien je suis heureuse qu'ils aient présenté un mémoire
à cette commission parlementaire. Je veux aussi saluer votre
démarche. Je vois que vous avez fait une large consultation dans les
différentes régions du Québec auprès des jeunes,
membres du Parti. Je pense que c'est important qu'on ait le son de cloche des
différentes régions du Québec. Et je vois que vos
propositions ont été acceptées par plus de 800 jeunes au
niveau de la Commission-Jeunesse, alors je pense qu'on se doit de les
écouter, de les analyser et de regarder ce qui est faisable au niveau de
la réforme de l'enseignement collégial.
Ce que je comprends de votre point de vue, de votre point de
départ, vous dites: Arrêtons les débats de structure, on ne
peut pas se permettre des débats de structure; l'an 2000
étant à nos portes, allons plus directement sur le contenu
de la formation et faisons les virages nécessaires. Je pense que je ne
peux que saluer cette approche que vous avez au niveau de la réforme de
l'enseignement collégial.
Alors, je voudrais commencer mon échange sur la formation
technique. Je sais, dans votre mémoire, vous avez abordé - et je
tiens à vous féliciter pour l'avoir fait - je dirais, toutes les
dimensions des problèmes qui nous ont été
présentés à date: autant le problème de
l'orientation des jeunes que la formation fondamentale, que la formation
préuniversitaire, la formation technique, le financement. Mais allons
sur la formation technique, parce que c'est un des défis qui est
déjà présent à nos portes, et vous le soulignez, si
ce n'est qu'en termes d'objectifs quantitatifs on n'a pas atteint ce que le
rapport Parent nous avait fixé. Donc, il n'y a pas encore suffisamment
de jeunes qui choisissent l'enseignement technique au niveau collégial,
et vous nous suggérez différentes hypothèses pour
améliorer, justement, l'attirance des jeunes vers le secteur
professionnel.
Donc, là, vous nous parlez nécessairement d'une meilleure
orientation. Je suis aux pages 21, 22 de votre mémoire, l'élagage
des préalables, dites-vous. Mais, là, vous apportez une
idée importante, à mon point de vue. J'aimerais ça vous
entendre davantage. Vous dites: II faudrait «une meilleure transition
entre les différents niveaux d'enseignement» pour ne pas que le
jeune pense que, parce qu'il choisit la formation technique, il peut être
bloqué quelque part dans son cheminement de carrière ou dans son
cheminement de formation. Et là vous avez dit que c'était une
idée nouvelle que vous veniez d'inventer; alors, je suis fortement
intéressée à vous entendre sur ça. Vous me parlez
du décloisonnement des filières, que vous voulez une
filière professionnelle décloisonnée. Ça veut dire,
ça, aux différents ordres d'enseignement, secondaire,
collégial, universitaire. Voulez-vous m'expliquer, c'est quoi?
M. Gagné: Premièrement, on n'a pas inventé
le principe, on a inventé le terme. On a trouvé un terme
québécois pour un principe qui s'applique dans d'autres formes
d'enseignement, ailleurs dans le monde. On dit que oui, il faut faciliter
l'étape entre chacune de ces étapes-là. Il faut faciliter,
justement, le passage entre ces étapes-là. Les avantages de
ça, c'est que ça va permettre de multiplier les
possibilités de cheminement de l'étudiant, et aussi un
degré de formation plus élevé. Alors que l'étudiant
va avoir dans son domaine technique, à partir... Ça pourrait
même aller jusqu'au secondaire, mais, là, on déborde des
cadres de la commission aujourd'hui. Mais, si l'étudiant qui
étudie dans son domaine technique voit, dans les matières souvent
qui peuvent être un peu connexes, tout le temps des choses qui ont
rapport à son domaine de travail, alors il va élargir son champ
d'action. Et autant faire une espèce de mélange avec le
système général aussi pour que l'étudiant... Comme
je l'ai dit, le but, c'est que l'étudiant, en fin de compte, arrive,
choisisse l'option technique en se disant: Je n'ai pas d'empêchement de
le faire; je vais arriver en bout de ligne après mes deux, mes trois ans
et je vais pouvoir continuer à l'université si je veux, puis
ça ne sera pas un problème pour moi. Alors, c'est dans cet
esprit-là qu'on amène cette proposition-là, une
proposition... le genre de chose qui se fait à l'extérieur. Et,
comme je l'ai dit tout à l'heure, c'est le terme qu'on a trouvé
pour définir, justement, ce principe-là.
Mme Robillard: Mais comment ça pourrait se faire,
ça? Voulez-vous dire, à titre d'hypothèse, que quelqu'un
qui a un diplôme d'études professionnelles de niveau secondaire,
un D.E.P., dans le jargon, quelqu'un qui a ce diplôme, ce
diplôme-là pourrait être considéré
peut-être même comme une première étape du
diplôme d'études collégiales?
M. Gagné: C'est exactement ça qu'on dit. C'est pour
que l'étudiant qui arrive comme ça puisse passer à
l'étape suivante et n'en soit pas empêché parce qu'il sera
obligé de revenir faire des cours qu'il aurait dû faire il y a
deux ans, retourner dans une classe avec des étudiants qui sont cinq ans
plus jeunes que lui, souvent, et arriver et dire: Écoutez, je m'enligne
dans cette branche-là, j'arrive là, je vais faire au secondaire
mon secteur professionnel. Si je décide d'aller au cégep,
écoutez, dans le bagage de cours que j'ai reçu, j'ai tout ce
qu'il me faut pour entrer au cégep. Je ne suis pas obligé d'aller
reprendre un chemin parallèle pour pouvoir accéder au
cégep. Et au cégep, la même chose. Ici, on parle plus
spécifiquement au niveau des cégeps. Pour aller à
l'université, c'est la même chose, l'étudiant ne sera pas
obligé de revenir faire des cours. C'est que, dans son cheminement
à lui, en technique, il va avoir tous les outils nécessaires pour
pouvoir arriver et aller à l'université, au même titre
qu'un autre étudiant.
Mme Robillard: Vous savez sûrement que, dans certains
domaines de formation, on pourrait penser à de telles filières,
parce qu'il y a comme une continuité. Mais il y a d'autres domaines qui
sont complètement séparés, où il n'y a pas de liens
nécessairement. Il y a des formations qui se donnent strictement au
niveau secondaire, d'autres strictement au niveau collégial. Il n'y a
pas de liens. Alors, vous voulez quand même voir des passerelles qui
s'installent.
M. Gagné: II faut que le cours se donne dans les trois
secteurs d'enseignement.
Mme Robillard: Les trois niveaux.
M. Gagné: Pour qu'on puisse passer à un niveau
supérieur, il faut qu'il existe un niveau supérieur,
évidemment.
Mme Robillard: Est-ce que vous savez qu'à l'heure actuelle
il y a 17 % des jeunes de la formation technique du collégial qui
accèdent à l'université dans différentes
disciplines? Ça veut dire qu'il y a une certaine passerelle, au moment
où on se parle.
M. Gagné: On pense, on considère qu'il y aurait
lieu d'améliorer, justement, ce passage-là.
Mme Robillard: Parfait. Maintenant, au niveau de la formation
préuniversitaire, ce que vous nous dites dans votre texte... En tout
cas, vous êtes très sévères; vous dites que c'est
dans ce domaine-là où vous avez reçu les critiques les
plus nombreuses et les plus sévères, dites-vous, dans le secteur
préuniversitaire. Et vous nous encouragez à resserrer les
exigences, à augmenter les exigences. Je pense que c'est le message
qu'on entend de plus en plus des jeunes - moins des adultes mais plus des
jeunes - en disant: Voulez jus hausser les exigences? Parce que vous
considérez que ce secteur-là est un des maillons faibles du
réseau collégial. Est-ce que je comprends bien votre message?
C'est là que vous avez eu les critiques les plus
sévères?
Mme Galluccio: Oui, parce que plusieurs jeunes nous ont dit:
Bien, rendus à l'université, souvent, on est perdus, on ne sait
pas comment s'orienter, on ne sait pas comment s'organiser. On est
supposés avoir vu telle chose, on ne l'a pas vue, le prof est
obligé de recommencer, de passer trois semaines sur de la matière
du collégial. Donc, ce qu'il faut faire, c'est qu'il faut faire en
sorte, en resserrant les exigences, que tout le monde dans un même
secteur puisse avoir vu au moins la matière de base pour qu'à
l'université on puisse cheminer sur autre chose.
Mme Robillard: Et vous nous recommandez aussi que, dans une
même concentration, il y ait un profil d'études comparable - d'un
cégep à l'autre, j'imagine. Et vous arrivez avec une proposition
très précise, c'est d'avoir un examen à la sortie des
études collégiales pour le secteur préuniversitaire. Moi,
c'est ce que je lis à la page 26 de votre mémoire, que vous
voulez un examen à la sortie des études collégiales. Vous
dites que, si on n'a pas ça présentement, c'est parce qu'il y a
eu une opposition du corps professoral. J'aimerais ça vous entendre sur
ça. Et vous suggérez que ce soit un examen synthèse.
Alors, pourriez-vous élaborer davantage? Qui ferait cet examen? Est-ce
que ce serait un examen uniforme à l'échelle du réseau?
Comment ça pourrait se passer? (12 h 10)
M. Gagné: Nous, on l'a vu dernièrement, dans les
dernières années, ce qui est arrivé au niveau des
cégeps. C'est qu'il y a des groupes externes qui sont venus pour
quantifier le niveau d'excellence des cégeps. Alors, ça,
ça a créé un malaise chez plusieurs cégeps, surtout
dû au fait que ces gens-là, souvent, basaient leur étude
sur quelque chose d'absolument pas scientifique et qu'ils ne tenaient pas
compte, souvent, de problèmes ou de différentes choses au niveau
des cégeps. Alors, nous, ce qu'on se dit, c'est que, pour éviter
que des choses de même se reproduisent, c'est à nous à
juger de la valeur des cégeps... Ce sera au gouvernement,
c'est-à-dire à vous, de juger de la valeur des cégeps et
non à des firmes extérieures comme celles qui peuvent faire
ça, en bout de ligne, pour n'importe quelle raison, pour vendre des
journaux.
Et aussi, il y a le fait que les étudiants arrivent en bout de
ligne, sortent de l'université, et certains étudiants ont de la
difficulté comparativement à d'autres. Ils n'ont pas vu les
mêmes choses. Alors, on se dit qu'un examen synthèse - on parle
d'un examen synthèse qui reverrait l'ensemble, d'un examen, je le
rappelle... Dans la proposition, on dit: Un examen qui ne serait pas fait au
détriment de l'étudiant. Ce ne serait pas un examen où on
pourrait arriver et empêcher un étudiant de progresser dans son
cheminement parce qu'il n'a pas vu... Parce que, si l'étudiant ne l'a
pas vu, c'est la faute, peut-être, de l'institution. Alors, c'est
évident que l'étudiant, à un moment donné, il a ses
notes de passage, il peut passer. Mais l'examen synthèse est là
pour prendre une photographie et pouvoir faire une espèce de comparaison
pour uniformiser le secteur collégial au Québec et que les
étudiants, quand ils arrivent à l'université... Souvent,
dans une région, tu as deux ou trois cégeps. Là, ça
arrive à l'université, et là ils arrivent de deux ou trois
cégeps différents. Alors, là, ils arriveraient et ils
auraient eu quelque chose de sensiblement équivalent, et ce serait
uniforme, et on aurait moins de difficultés à ce
niveau-là.
Mme Robillard: Je ne peux pas passer la parole à mes
collègues de l'Opposition sans vous avoir parlé du financement du
réseau. Vous me faites des propositions au regard du financement du
réseau. Outre le fait que vous dites: Bon, il faudrait remettre en
question certaines pratiques de gestion, il faudrait regarder la
rigidité des conventions collectives, vous statuez très
clairement sur le maintien de la gratuité au collégial. Bon. Vous
n'êtes pas le premier groupe à nous le recommander, vous devez le
savoir. Mais je voudrais aussi aller un peu plus loin avec vous, Mme Galluccio.
Vous dites que vous avez fait une tournée dans toutes les régions
du Québec, vous avez eu une assemblée, un congrès jeunes
où il y avait 800 jeunes. Est-ce qu'il a été question,
dans vos délibérations, d'essayer de
mettre une limite à la gratuité pour les jeunes qui
prolongent indûment leurs études? Et là je ne parle pas de
ceux ou celles qui ont des problèmes d'orientation mais de ceux qui
prolongent indûment leurs études. Est-ce que, dans vos
délibérations et dans vos discussions, vous avez envisagé
cette hypothèse-là? Et est-ce que vous l'avez acceptée ou
rejetée? Et pourquoi?
M. Drapeau: Cette hypothèse a été
envisagée. Je pense qu'il y a eu un amendement qui a été
apporté pour la proposition 8 et il a été rejeté.
Il y a plusieurs facteurs qui sont en faveur de la gratuité scolaire et
qui vont à rencontre d'une brèche, c'est-à-dire que,
premièrement, si on y va avec une brèche au point de vue des
étudiants qui prolongent indûment leurs études, il va
falloir essayer de savoir comment on va «critériser» les
étudiants qui prolongent leurs études, qui sont ces
étudiants-là et comment on va évaluer, essayer de cibler
ces étudiants-là. Et, au point de vue du prolongement indu des
études, on croit qu'il y a d'autres moyens. On en a parlé dans
notre mémoire. Il y a d'autres moyens qui, selon nous, vont probablement
être plus efficaces, aussi probablement plus profitables à la
société québécoise et aussi au collégial
parce que, premièrement, on doit être préventif et non
correctif. Si on n'a pas été préventif en premier, je
crois que ce serait important d'essayer les moyens de prévention avant
d'essayer les moyens de correction.
Puis, au point de vue aussi de la gratuité scolaire, ce qui est
intéressant, c'est que, parmi les pays industrialisés, on est
dans les seuls, ou je pense qu'on est le seul État qui assure 13
années de scolarité gratuite. Si on enlève la
gratuité scolaire au collégial, bien, on va tomber normalement
à 11 années de scolarité gratuite, et là on serait
en bas des autres pays industrialisés. Je crois que ce ne serait pas une
bonne chose pour nous. Je pense qu'on est en avance, et il faut continuer dans
ce sens-là.
La Présidente (Mme Hovington): merci alors, je
reconnaîtrai maintenant le député d'abitibi-ouest,
porte-parole... vous aviez peut-être un petit ajout à faire...
Mme Galluccio: Oui, s'il vous plaît. Pour compléter
sur ce que Nicolas-Pierre a dit, au niveau de la consultation, bien sûr,
on en a discuté ouvertement avec nos jeunes en assemblée-conseil
jeunes, au printemps dernier. Ça a été un des sujets. On
en a rediscuté également au congrès jeunes, sauf que les
jeunes nous ont dit: Bien, des fois, on est obligés de travailler pour
survivre et on veut continuer nos études, mais on n'a pas le choix de
travailler. Puis le consensus a été très clair quand est
venu le temps de prendre la décision, bien, ils ont dit non. La
discussion a été ferme, et ils nous ont dit: Vos frais de
scolarité, on n'en veut pas, même au prolongement indu des
études.
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup pour ce
complément de réponse. Alors, M. le député
d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Oui, je voudrais, Mme la Présidente, saluer
cordialement les jeunes de la Commission-Jeunesse du Parti libéral et je
suis convaincu que vous ne m'en voudrez pas de signaler que, comme membre de
cette commission, on peut regretter un peu l'absence de votre
exprésident, M. Dumont, parce qu'on s'était habitué
à son bagout, à sa vivacité, à sa présence
d'esprit. Mais j'ai constaté par votre présentation et par la
façon dont vous avez répondu aux questions que la ministre vous a
posées que la relève est là. Alors, on salue la
relève. On est heureux, sincèrement, on est heureux qu'il y ait
de la bonne relève.
Sur le mémoire comme tel, vous avez présenté un
mémoire, effectivement, qui est assez articulé, assez
étoffé, qui touche passablement les questions fondamentales sur
lesquelles nous avons eu à échanger depuis plusieurs semaines. Je
pense que vous avez un mémoire pertinent, qui touche les bonnes
questions et, compte tenu de l'implication de la Commission-Jeunesse du Parti
libéral dans les grands dossiers, les grands débats, je pense que
c'était requis que vous soyez là. Je suis content d'avoir
l'occasion d'échanger avec vous. La ministre a un avantage sur moi:
c'est évident qu'en commençant toujours la première elle
peut toujours me prendre mes trois ou quatre premières bonnes
questions.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Gendron: Je ne les ai plus, alors on en a d'autres, quand
même; il n'y a pas de problème à échanger avec vous
parce que vous avez touché tellement de sujets.
Je suis quand même heureux de voir que votre mémoire, comme
d'autres, se place quand même à un niveau général de
rehaussement des standards. Au sens général, on sent que, vous
aussi, ça vous préoccupe, comme jeunes, de dire: On ne veut pas
nécessairement venir négocier la facilité. Et, moi,
ça me plaît toujours que des jeunes au Québec soient
conscients qu'on ne peut pas tout obtenir avec rien. Et, dans ce
sens-là, vous avez des éléments importants dans votre
mémoire. On le sent, on sent cette constante-là. Je ne veux pas
tout reprendre, mais vous souhaitez une formation plus rigoureuse: II importe
aujourd'hui de mettre plus l'accent sur la qualité de la formation, et
ainsi de suite. Donc, c'est des éléments intéressants.
La première question sur laquelle je voudrais échanger,
c'est au niveau des cours complémentaires. Au niveau des cours
complémentaires, vous êtes probablement de ceux qui portez
peut-être le jugement le plus sévère à l'effet
que... Compte tenu de l'étendue et de la variété
des cours disponibles, vous dites que ceux-là, les cours
complémentaires, ne permettent pas de doter les étudiants d'une
formation adéquate. Et là vous expliquez comment les
étudiants font le choix des cours complémentaires et, un peu plus
loin, ' vous dites: «En conséquence, il faut remplacer la formule
trop laxiste des cours complémentaires par celle de cours à
option limitée.» (12 h 20)
Je vous avoue que, ça, c'est plus l'inverse qu'on a entendu et,
moi, j'aimerais mieux me fier au bon jugement des jeunes et y aller par une
espèce de culture éducationnelle pour dire: Écoutez, soyez
sérieux! Vous venez de me dire que vous vouliez du rehaussement. Je suis
d'accord avec vous. Vous voulez avoir des cours qui correspondent mieux
à la réalité des besoins de la société de
1992 et de l'an 2000. J'en suis, mais il me semble qu'il y a une logique.
À partir du tronc commun de base... Il y a beaucoup plus d'intervenants
qui nous ont dit, vous y compris: On ne touche pas à la philosophie, on
ne touche pas à l'éducation physique. Moi, j'en suis, mais vous
avez explique, la philosophie, vous êtes d'accord pour que... Là,
o ne veux pas reprendre ce que vous dites dans votre mémoire, mais, en
bout de ligne, vous gardez les quatre cours de philo mais pas ceux qu'on
enseigne. Il y a trop de disparités. J'avais bien compris ça.
Donc, si on veut avoir une formation de base fondamentale plus
qualifiante, il va falloir déplacer des unités de cours quelque
part et, à ma connaissance, c'est plus par le biais d'une meilleure
offre de cours complémentaires adaptés, selon moi. Pourquoi,
vous, préconisez-vous de la limiter? Et qu'est-ce que vous voulez
exactement dire par: Dans le futur, limiter l'offre de cours
complémentaires, alors que, moi, je voudrais agrandir la plage, mais de
cours adaptés? Pourquoi êtes-vous plutôt dans l'option
contraire?
M. Drapeau: Au sujet des cours complémentaires, notre
vision, c'est que les cours complémentaires sont importants en soi parce
qu'ils permettent à l'étudiant de se détacher des cours de
concentration. Un étudiant peut avoir trois, quatre, peut-être
même cinq cours de concentration par session, et je crois que c'est
important pour l'étudiant de pouvoir se détacher de ces cours de
concentration et de suivre peut-être un cours où il y a un
intérêt, un cours général, par exemple les cours de
langues, qui sont des cours de formation générale quand
même assez importants, des cours d'anglais, des cours d'espagnol, des
cours d'allemand. On sait qu'on veut que les étudiants, au
Québec, puissent s'ouvrir au monde et, ça, ça fait partie
des cours complémentaires qu'on trouve nécessaires. Les cours
d'informatique, ce n'est pas toujours évident que les cours
d'informatique font partie des cours de concentration dans les programmes et,
en ce sens-là, nous, on considère que des cours complémen-
taires comme ces cours-là sont nécessaires. Oui, il y a des cours
complémentaires qui sont beaucoup moins nécessaires, et ils font
partie de la banque des choix de cours qui existent en ce moment. Je pourrais
vous donner des exemples, là.
Une voix: Lesquels?
M. Gendron: Ça dépend si vous voulez...
M. Drapeau: Ce qui arrive, bon, il y a des cours de
théologie et des cours qui n'apportent pas vraiment de formation
adéquate aux étudiants. Ça fait partie aussi des
conventions collectives, c'est-à-dire que les cégeps, des fois,
créent des programmes pour certains professeurs qui aimeraient enseigner
un tel genre de cours. Et c'est dans ce sens-là que ces cours-là,
pour nous, sont jugés moins importants, et c'est dans ce sens-là
qu'on voudrait faire un genre de ménage dans ces cours
complémentaires pour donner des cours complémentaires essentiels,
qui donnent une formation fondamentale vraiment adéquate. Vous dites
qu'il faut faire de la place pour des heures de cours, mais, nous, dans nos
réformes, au point de vue des cours fondamentaux, on ne parle pas
d'ajout d'heures de cours. On parle plus de prendre les heures de cours qui
sont là, de les rendre plus structurantes et qu'on donne une meilleure
formation avec les éléments en place.
M. Gendron: Donc, si je vous comprends bien, vous voulez qu'on
fasse un certain ménage dans les cours optionnels, parce que le moment
est venu de faire le ménage là-dedans. Il y a trop de choses.
Juste un peu de façon humoristique, vous faites bien de donner quelques
exemples. Si vous voulez être cité, ça va prendre quelques
exemples. La ministre a été longuement citée avec sa
pêche à la mouche...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Gendron: ...alors... Si je comprends bien, vous dites tout
simplement: On fait le ménage et, après ça, on essaie
d'enrichir la plage de cours complémentaires qui correspondraient
davantage à la réalité des besoins d'aujourd'hui. C'est
plus de même qu'il faut lire votre recommandation?
M. Drapeau: C'est ça.
M. Gendron: Merci. Deuxième sujet. Vous avez touché
toute la question des causes concernant le prolongement indu des études,
l'abandon plus les mesures d'encadrement. Là-dessus, moi, je trouve
encore intéressant que des jeunes viennent traduire une
réalité que, j'espère, pour certains, vous avez
vécue. D'ailleurs, votre échantillonnage de consultation
était assez intéressant. Vous proposez, et j'espère que
la
ministre va être attentive: un resserrement de l'encadrement des
étudiants au niveau collégial - toujours, j'en doute - une
amélioration des programmes d'orientation au secondaire suite à
l'implication; une augmentation des ressources consacrées aux services
d'orientation. Mais vous n'avez pas touché ce que beaucoup ont
touché, et j'aimerais avoir votre avis là-dessus. Il y a vraiment
passablement de consensus que le niveau de préparation, lorsque vous
arrivez au collégial par le diplôme d'enseignement secondaire
qu'on appelle le D.E.S., est vraiment insuffisant. Le contenu est insuffisant.
Il y a trop peu d'exigences par rapport au seuil d'entrée
collégial, et c'est une des conditions qui font qu'il y a un certain
nombre d'abandons, d'échecs et qu'on place les jeunes dans des
conditions de non-réussite. Pourquoi n'avez-vous pas parlé de
ça? Est-ce que vous avez réfléchi là-dessus? Et
partagez-vous le point de vue que je viens d'exprimer, si c'était le
cas?
M. Drapeau: Bien, premièrement, c'est une commission
parlementaire sur les cégeps, alors on ne voyait pas vraiment le but de
commencer à faire le procès du niveau secondaire. Par contre,
ça reste une réalité, oui, sauf que, dans notre
mémoire, nous, on se concentre strictement sur le secteur
collégial. Oui, on a fait l'aspect du renforcement du secteur secondaire
au point de vue des choix de carrière sauf que, dans notre
mémoire, on parle d'une implication des gens du secteur
collégial. Alors, c'est dans ce sens-là que, nous, on
considère que le collégial est impliqué là-dedans,
et c'était important de venir parler de ça dans le
mémoire. Mais, au point de vue de savoir si le secondaire donne une
formation adéquate, il faudrait peut-être avoir une commission
parlementaire sur le secondaire, éventuellement...
M. Gendron: C'est une bonne idée, ça.
M. Drapeau: ...puis on viendrait présenter un
mémoire, mais...
M. Gendron: C'est une bonne suggestion. Nous, on voulait.
M. Drapeau: ...je pense que... C'est ça. C'est une
commission parlementaire sur les cégeps, puis je pense que notre
mémoire couvre bien les cégeps en tant que tels. Au point de vue
du secondaire, on aime mieux ne pas trop en parler pour l'instant.
M. Gendron: Non, non, je comprends, mais c'était la
question... C'est facile, mais ce n'était pas une question de faire une
évaluation du secondaire. Quand vous entrez au collégial... Vous
y êtes allés, probablement, puis il y a beaucoup des jeunes que
vous avez consultés qui y sont. Ma question n'était pas trop
compliquée: Croyez- vous que vous avez ce qu'il faut pour entrer au
collégial? Point.
M. Drapeau: On dit aussi que le secondaire doit faire ses
devoirs, dans le mémoire, mais on ne juge pas nécessaire de
parler de ça dans une proposition. Oui, on en parle, puis ça
reste à évaluer. Disons que, comme je vous l'ai dit, on
préparera un dossier là-dessus éventuellement mais, pour
l'instant, on aime mieux se concentrer sur le collégial. Parce que le
collégial, lui non plus... C'est important que le collégial donne
une bonne formation en vue de l'université et en vue aussi du
marché du travail au point de vue du secteur technique. Et puis, en ce
qui a trait au secondaire, bien, là, comme je vous l'ai dit, c'est une
commission parlementaire sur les cégeps.
M. Gendron: J'avais également une question sur la
filière professionnelle décloisonnée. Vous avez
donné des explications qui sont satisfaisantes, donc je ne reviens pas
là-dessus. Je ne peux pas, cependant, ne pas questionner sur une
suggestion qui, à ma connaissance, a été la seule qui nous
ait été faite à ce moment-ci, qui est toute la question de
la sécurité d'emploi du corps professoral. Je pense que ça
ne serait pas responsable de ne pas approfondir avec vous parce que, comme vous
dites, vous êtes les seuls à avoir fait cette suggestion, et je ne
trouve pas particulièrement que vous avez des arguments. Et c'est pour
ça que je veux vous faire jaser là-dessus. Vous dites tout
simplement: «L'abolition de la sécurité d'emploi absolue
permettrait d'instaurer une certaine souplesse dans l'administration des
collèges.» Et vous ajoutez que vous êtes d'accord pour une
abolition de la sécurité d'emploi absolue, ce qui
«permettrait de répondre à une inéquité
flagrante. En effet, la permanence d'emploi a conféré des acquis
à une catégorie d'enseignants qu'il s'avère difficile,
sinon impossible, de donner aux nouveaux enseignants.» Je voudrais
savoir, est-ce que vous faites une distinction entre une sécurité
d'emploi absolue versus un autre type de sécurité d'emploi que je
ne connaîtrais pas? J'aimerais vous entendre là-dessus.
Deuxièmement, il faut être précis quand on parle de
faire lever la sécurité d'emploi. Est-ce à dire que, parce
que des gens auraient une sécurité d'emploi, ça devient
difficile de faire les adaptations requises eu égard aux programmes?
Puisque vous le justifiez un peu plus loin en disant: D'autant plus que la
cohorte de professeurs vieillit et que, dans ce sens-là, ça
requiert une adaptation constante. Moi, j'ai toujours pensé que, vous
avez raison, ça requiert une adaptation constante, mais ce n'est pas
parce qu'on vieillit - et là je ne veux pas citer d'exemples, nulle part
- qu'il n'y a pas certaines personnes qui ne sont pas en mesure de s'adapter.
Alors, j'aimerais que vous soyez vraiment un petit peu plus volubiles
là-dessus. Pour quels
motifs pensez-vous qu'il faut faire ce choix-là? Et, comme vous
êtes les seuls à le faire, ce choix-là, jusqu'à
date, il faut en discuter un peu.
M. Gagné: On peut peut-être en ajouter
là-dessus. Écoutez, on parie du financement des
universités. On a vu, au début du mémoire, qu'on ne peut
pas toucher aux immobilisations. Il y a certaines choses où les
coûts sont fixes, on ne peut pas les toucher. Alors, il faut aller voir
dans les coûts variables. Maintenant, on regarde, on parle de la
rigidité des conventions collectives. Alors, quand on amène
l'argument de la sécurité d'emploi, bien, ça, c'est un des
éléments de la rigidité. Il y a d'autres choses, puis je
pense qu'on a été assez précis en les nommant. Puis, vous
l'avez dit vous-même, on est le seul groupe a avoir nommé les
choses. Alors, ce qu'on se dit, c'est qu'au niveau de la rigidité de ces
conventions-là, bien, il y a le transfert d'enseignants entre certains
niveaux, il y a aussi la formation pour des enseignants, certaines choses
où, en assouplissant ces conventions-là, qu'il faut regarder...
Là, on parle d'une réforme des cégeps. On est tous ici, on
fait une belle grosse commission parlementaire, mais " faut avoir une vision
globale de l'ensemble, il faut que chacun des intervenants soit prêt
à faire un bout de chemin pour qu'on puisse rehausser le niveau de nos
cégeps. Et je pense qu'on a une institution importante au Québec,
originale, on est en avance sur le reste du monde, presque, mais ce qu'il faut,
c'est profiter des acquis qu'elle nous a rapportés pour la bonifier.
Alors, il faut regarder ça dans un esprit de vision. (12 h 30)
Et, en revenant sur la sécurité d'emploi, je vous dis
qu'il ne faut justement pas se fermer de portes. Et, en bout de ligne, on n'est
pas dogmatiques, on vous dit: Écoutez, oui, on peut jouer dans les
conventions collectives, chacun va faire sa part, les étudiants vont
travailler plus fort, on le demande. Maintenant, les enseignants, là, ce
qu'on dit, c'est que c'est une... On nomme cette rigidité des
conventions collectives. C'est qu'on n'a pas peur de nommer les choses. Et,
éventuellement, si on en arrive à ce qu'on soit obligé
d'aller là, on ira là. Mais, maintenant, on parle d'une vision
globale, on dit qu'il faut toucher à cette rigidité-là et,
ça, c'est un des éléments.
M. Gendron: Oui, regardez, M. Gagné. Bien amicalement, de
me donner une explication... Vous voulez une plus grande souplesse des
conventions collectives, vous êtes dans la ligne de tous les autres. Ce
n'est pas de ça que je vous parle. Dans votre mémoire, page 33,
vous parlez de l'abolition de la sécurité d'emploi. Là, ce
n'est pas de la souplesse des conventions collectives, c'est un principe qu'on
connaît dans les relations de travail depuis plusieurs années au
Québec, et là vous recommandez l'abolition de la
sécurité d'emploi. Alors, moi, je veux vous entendre parler
là-dessus, parce que ce n'est pas une souplesse, là...
M. Gagné: Je vous ai...
M. Gendron: ...c'est d'abolir la sécurité d'emploi.
Pourquoi préconisez-vous ça et pourquoi prétendez-vous
qu'en abolissant la sécurité d'emploi on aurait de meilleures
garanties que, là, les profs s'adapteraient mieux, on n'aurait pas de
problème d'adaptabilité par rapport au réalisme, ainsi de
suite? C'est ça que je veux préciser avec vous.
M. Gagné: D'une façon globale, il y a une
différence entre abolir un poste et demander une restructuration de ce
poste-là. Alors, ce qu'on dit, c'est que c'est un des
éléments. Quand on parle de la rigidité des conventions
collectives, ça fait partie de cette rigidité-là le fait
de savoir que, quand un enseignant a sa sécurité d'emploi, on
peut difficilement le retirer du réseau s'il ne fait plus l'affaire.
Alors, ce qu'on dit, c'est qu'on soumet des éléments. Et pourquoi
se cacher et se borner à ne pas dire ces choses-là quand on parle
de choses importantes comme ça et qu'à un moment donné on
viendra qu'on n'aura pas le choix? Et le niveau fiscal au Québec, on ne
peut plus l'augmenter, on ne peut plus taxer, on ne peut plus demander plus aux
gens. Alors, moi, ce que je vous dis, c'est qu'il ne faut pas se fermer de
portes; il faut en parler, et on est ici pour parler de cégeps, parler
de toutes les options qui sont là. Et je pense qu'il y a une
volonté de la part de tout le monde, autant des enseignants - on l'a vu
avec les centrales syndicales - que de tout le monde. Alors, on en parle, nous;
on amène cette option-là et on croit que, quelque part, s'il faut
se rendre jusque-là, bien, écoutez, il y a certains endroits
où on devra aller et couper, s'assurer pour ça.
M. Gendron: Bon, c'est votre point de vue, vous placez beaucoup
votre argumentaire sur l'aspect coûts. Je n'ai pas d'objection, on va en
parler un peu, des coûts. Vous dites: Bon, bien, la capacité
financière de l'État n'est pas indéfinie. Je comprends
ça. Vous dites: II faudrait regarder dans les coûts variables.
Question: Est-ce que vous ne croyez pas que, justement, dans les coûts
variables, si on tentait de rationaliser un peu plus l'offre de cours au niveau
technique, en particulier dans la couronne de Montréal et le bassin
montréalais, où il y a peut-être trop de cégeps qui
offrent les mêmes options que d'autres, avec des coûts faramineux -
et ce n'est pas contre les cégeps, c'est parce que ça coûte
cher au niveau des équipements - il y aurait là une
possibilité très concrète de faire un effort de
rationalisation et de dégager un peu d'argent afin de l'affecter
davantage aux mesures d'en-
cadrement que, vous-mêmes, vous souhaitez, avec raison, qui
éviteraient probablement des décro-cheurs et des personnes qui
rallongent le temps d'apprentissage compte tenu qu'ils sont mal
encadrés, mal définis? Est-ce que vous seriez davantage d'accord
avec de telles mesures, si jamais on réussissait à dégager
de l'argent?
M. Gagné: Tantôt, j'ai parlé qu'au niveau
technique il faut rationaliser les cours, s'adapter au nouvel équilibre
qui existe. C'est évident que c'est une des mesures qui pourraient
être retenues. Quand on va refaire l'ensemble des cours et des choses...
Et là je reconnais là votre esprit de gens de région.
Moi-même venant d'une région éloignée, je pense,
comme vous, que c'est un aspect important et, s'il y a de l'argent qui est
gaspillé parce qu'il y a trop d'écoles qui donnent le même
type de cours, évidemment... Quand on parlait au début,
là, au niveau de choses du niveau industriel, on disait qu'il faut
adapter, que les cégeps s'impliquent au niveau du développement
industriel pour, justement, savoir où mettre les énergies pour ne
pas dédoubler ces énergies-là, alors ça fait
partie, justement, de cet élément-là. Et puis la
sécurité d'emploi, comme je l'ai dit, comme vous en avez
parlé, c'est un élément, et il ne faut pas, justement, ne
pas en parler. Je pense que c'est important de faire face à
ça.
M. Gendron: Merci.
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup. Je
reconnaîtrai maintenant M. le député de Vimont.
M. Fradet: Merci, Mme la Présidente. Ça me fait
plaisir de vous revoir en commission parlementaire aujourd'hui.
Vous avez parlé tout à l'heure - et je suis
entièrement d'accord avec vous - du décloisonnement et des
passerelles, mais je voudrais juste l'approfondir encore un petit peu - la
ministre l'a fait. Je vais vous donner un exemple, dans le domaine de la
construction. Moi, ce que je trouve important, c'est qu'on puisse effectivement
poursuivre notre cheminement sans être pénalisé si on a
pris le secteur professionnel. Par exemple, si on est au secondaire, qu'on
prend un cours de construction et qu'on veut avoir accès au niveau
collégial, au cégep, il faut aussi, par contre, avoir une
formation fondamentale, la même que ceux et celles qui n'ont pas fait le
cours de construction en formation professionnelle au secondaire.
C'est la même chose au collégial, et on a vu, par contre,
une passerelle qui s'est établie avec l'École de technologie
supérieure, à l'Université du Québec à
Montréal, qui offre des baccaulauréats en génie qui
poursuivent les études du technique au cégep. Moi, ce que je vous
dis, c'est: Oui, je suis d'accord avec vous.
Prenons par exemple en considération qu'il faut aussi avoir la
formation fondamentale; alors, il va falloir rajouter des cours. Et vous parlez
aussi de formation fondamentale au cégep, que vous respectez les cours
de philosophie, d'éducation physique et de littérature. Alors,
où on rajoute ces cours-là pour faire la passerelle? Ou comment
on fait le lien?
M. Gagné: II faut faire la différence entre le
secteur technique et le général. Quand on parlait des cours de
philosophie, on disait qu'il fallait les restructurer et non les abolir. Alors,
on ne demande pas d'en rajouter, on ne demande pas d'en annuler.
M. Fradet: D'accord.
M. Gagné: Et, au niveau technique, peut-être qu'il y
aura lieu de rajouter des cours, de modifier aussi des cours. On parlait de
cours qui pourraient être adaptés, du genre... comme on disait au
niveau des cours de français du tronc commun qui pourraient être
adaptés au secteur pour élargir l'esprit et qui permettraient
d'en arriver à un niveau assez élevé pour que la
transition puisse se faire normalement au secteur qui suit, c'est-à-dire
au niveau universitaire quand on parle des techniques au cégep.
M. Fradet: Par exemple, lorsqu'on fait un cours technique, on n'a
pas nécessairement les cours de chimie, de physique ou de biologie que
ça prend pour faire la transition à l'université. Alors,
vous proposez que des cours complémentaires en formation
générale soient peut-être... que l'étudiant puisse
prendre des cours de chimie, physique ou mathématiques pour lui
permettre d'avoir une passerelle à l'université. C'est ce que
vous proposez?
M. Gagné: C'est ça.
M. Fradet: Un deuxième petit point. Vous avez parié
d'évaluation. Hier, il y a des gens qui sont venus nous voir et qui nous
ont dit que déjà, actuellement, les programmes sont
évalués, les professeurs sont évalués par les
étudiants et que, déjà, les programmes sont
évalués par le département; et ils considéraient ne
pas avoir besoin de davantage d'évaluation. Vous, vous proposez
l'évaluation externe pour les programmes. Vous proposez aussi
l'évaluation des professeurs. Est-ce que vous croyez que
l'étudiant a un rôle à jouer dans cette évaluation
des cégeps, des programmes et des professeurs?
M. Gagné: II nous apparaît clair que
l'étudiant ne peut pas être exclu de ce processus. Alors, quand on
parle d'évaluer les professeurs, il faut évaluer le rendement, et
ça passe nécessairement, dans notre tête, par une
évaluation avec les étudiants. Alors, on spécifiait... Et
l'idée
qui a été amenée, l'idée nouvelle,
c'était qu'on parlait de firme extérieure, quelque chose
d'extérieur, et tantôt j'en ai parlé... On parle
d'évaluer les cégeps à différents niveaux. On ne
parle pas juste au niveau de la performance de l'enseignant. On parle de faire
évaluer le cégep de façon globale, par une firme
extérieure, pour, justement, éviter des choses dont j'ai
parlé tout à l'heure. Mais, effectivement, pour nous, c'est
clair, on ne peut pas faire autrement qu'inciter l'étudiant
là-dedans. Historiquement, dans tous les discours qu'on a tenus a la
Commission-Jeunesse, on l'a toujours favorisé - et ça, ça
a été des débats depuis de longues années - la
Commission-Jeunesse s'est toujours battue pour que les étudiants fassent
partie de cette évaluation. Puis, tu te souviens, quand...
La Présidente (Mme Hovington): Alors, j'ai besoin du
consentement des deux côtés pour donner la parole au
député d'Orford, qui n'est pas membre de la commission, pour une
minute et demie qu'il reste à faire. Allez-y.
M. Benoit: Oui. Merci d'être ici. J'ai eu l'occasion dans
les dernières semaines de visiter bon nombre de cégeps et j'ai,
d'une façon particulière, regardé l'encadrement. Vous en
parlez à la page 19, de l'encadrement. J'ai vu de très bonnes
choses et j'en ai vu de pas mal moins bonnes. Vous dites, finalement,
d'établir un plan d'action à ce chapitre. C'est ce que vous
recommandez à la ministre de faire. Qu'est-ce que vous lui
suggérez à l'intérieur de ce plan d'action sur
l'encadrement? (12 h 40)
M. Drapeau: Dans le mémoire, on parle de toutes sortes de
suggestions. J'en ai parlé au point de vue des groupes stables, au point
de vue du tutorat. Ça, c'est un exemple. C'est des mesures qui ont
été appliquées au point de vue local dans certains
cégeps. Puis, comme on le dit dans notre mémoire, elles
méritent d'être vues plus en profondeur et peut-être
même d'être appliquées au point de vue provincial, dans tout
le réseau. Je pense, au point de vue des groupes stables, que c'est
très positif parce que ça permet à l'étudiant,
surtout dans les premières années, d'être moins... Quand
ils arrivent du secondaire, souvent, ils ont des groupes stables et ils sont
encadrés, ils sont suivis. Et, quand ils arrivent au cégep, bien,
là, c'est tout éparpillé et l'étudiant se sent
seul. Alors, avec des groupes stables, ça lui permettrait
peut-être de se faire des amis beaucoup plus vite et aussi d'avoir un
partenariat avec les étudiants, etc.
Au point de vue du tutorat, bien, ça pourrait permettre à
des professeurs, à des enseignants aussi de s'impliquer plus au point de
vue de la réussite académique des étudiants et aussi de
pouvoir faire un suivi pédagogique. S'il y a vraiment des
étudiants qui se sentent en problème, ils peuvent avoir une
personne-res- source. Quand on sait que les API sont souvent très
occupés... On a dit qu'en 1988 il y en avait un pour 1000
étudiants. Alors, ce n'est pas toujours évident que
l'étudiant va pouvoir... et que les API sont toujours disponibles.
Alors, ça fait une personne-ressource de plus, disponible pour
l'étudiant, et c'est quand même positif aussi de décerner
des tâches semblables aux enseignants. Ça les implique mieux dans
le milieu.
Aussi, on a parlé juste d'une autre chose, des cours de
récupération. Ça aussi, c'est d'autres mesures qui sont
intéressantes, avec le parrainage étudiant. Ça, au point
de vue de l'encadrement, comme on en parle, ça a été et
c'est actuellement... On impute la réussite des collèges
privés beaucoup à l'encadrement qu'ils font de leurs
étudiants.
M. Benoit: Très bien. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, c'est tout ce que
nous avions comme temps. Mme la ministre, en conclusion.
Mme Robillard: Oui, je veux remercier les membres de la
Commission-Jeunesse du Parti libéral et je les invite à suivre de
très près ce qui va suivre après la commission
parlementaire. Je pense que vos idées seront les bienvenues au niveau du
gouvernement. Merci bien d'être venus aujourd'hui.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, au nom des membres
de la commission, merci à la Commission-Jeunesse du Parti
libéral. Le mémoire était très intéressant
pour les membres. La commission suspend ses travaux jusqu'à 14 heures
cet après-midi.
(Suspension de la séance à 12 h 42)
(Reprise à 14 h 6)
Le Président (M. Hamel): Bonjour. Il me fait plaisir de
souhaiter la bienvenue au Comité national des jeunes du Parti
québécois, représenté par Mme Isabelle Daoust, M.
Henri Lanaie jr et M. Marc Blanche!
Alors, vous savez que nous avons une période de 60 minutes. Vous
avez 20 minutes pour exposer votre mémoire et, ensuite, le temps est
partagé à peu près également entre le parti
ministériel et le parti de l'Opposition. Alors, sans plus tarder, nous
vous écoutons.
Comité national des jeunes du Parti
québécois
Mme Daoust (Isabelle): m. le président, mme la ministre,
mmes et mm. les députés, bonjour. il nous fait plaisir
d'être ici aujourd'hui pour présenter notre mémoire sur
l'avenir de la
formation collégiale au Québec. La première partie
sera sur l'enseignement préuniversitaire. Mais, tout d'abord,
permettez-moi de vous présenter les gens qui seront ici avec moi: M.
Blanchet, qui s'occupera plus précisément de la formation
professionnelle et, à ma droite, M. Lahaie qui, lui, s'est penché
sur les questions de frais de scolarité, aide financière et
financement des institutions.
Alors, sans plus tarder, l'enseignement préuniversitaire. On a
noté quelques problèmes généraux concernant
l'enseignement préuniversitaire. Les voici: la formation fondamentale de
l'étudiant est déficiente au cégep. Pour renforcer cette
formation, on propose d'imposer de nouveaux cours obligatoires pour tous les
étudiants inscrits dans les programmes préuniversitaires et,
probablement aussi, professionnels.
Nouvel objectif, également, des cours complémentaires:
développer la formation de base des étudiants. Ensuite, on voit
que les liens sont inexistants entre les différents paliers de
l'éducation, cégep-secondaire et cégep-université.
Il faut recréer ces liens et nous proposons donc de travailler à
la restructuration des programmes afin que la première année
préuniversitaire complète la formation du secondaire et que la
deuxième prépare l'entrée à l'université. Et
créer une structure de rencontre entre professeurs du cégep et de
l'université sous la forme de la coordination provinciale qui est
déjà existante. Enfin, redéfinir le rôle du
Comité de liaison enseignement supérieur enseignement
collégial aussi connu sous le nom de CLESEC.
Ensuite, mauvais encadrement des étudiants, autre
problème. Alors, nous proposons de réduire
considérablement le ratio étudiants-API, c'est-à-dire aide
pédagogique individuelle; également, de réduire le ratio
étudiants-professeur et d'abolir les cours de trois heures au
cégep pour en faire des cours d'une heure trente, à raison de
deux fois par semaine. Ça, c'est une tendance qu'on observe
déjà à l'université, surtout dans les
universités anglophones où les cours de trois heures existent peu
ou pas, et cette tendance, également, on la retrouve tranquillement dans
les universités francophones. Nous croyons donc qu'au niveau du
cégep les cours de trois heures devraient être abolis. Enfin, pour
permettre aussi un meilleur encadrement des étudiants, allonger la
session d'enseignement de 10 jours, c'est-à-dire que l'année
collégiale passerait de 150 à 170 jours. On sait que plusieurs
des cours sont des cours d'introduction, de panorama. Alors, ça
permettrait de mieux voir la matière, pour les étudiants.
Manque de mécanismes d'évaluation. Alors, création
d'examens nationaux portant sur les cours obligatoires et création
d'examens nationaux de synthèse. Ces examens, conjugués aux
résultats scolaires, détermineront le succès des
étudiants.
Et, enfin, mauvaise structure des départe- ments:
redéfinir le rôle des départements. Donc, nous proposons la
facilitation de la communication entre les profs et les directeurs des services
pédagogiques. Et, également, nous croyons que le
ministère, en collaboration avec les différentes instances, soit
le Conseil des collèges, les administrations de cégep, les profs,
les étudiants, etc., doit clarifier les objectifs et les tâches
des départements et voir à redistribuer les
responsabilités, si nécessaire.
Alors, je crois que j'ai quand même fait un peu le tour de la
question. Je laisse la paroie à M. Blanchet. (14 h 10)
M. Blanchet (Marc): Au niveau de la formation professionnelle,
maintenant, nous devons déterminer quelle est la mission de
l'enseignement professionnel. Selon nous, il s'agit de permettre aux
étudiants d'acquérir les compétences techniques
nécessaires à leur travail, mais aussi de leur donner le
goût de l'acquisition générale des connaissances, autant
pour suivre révolution technologique que pour mieux comprendre
l'évolution de notre société.
Il est nécessaire d'avoir une formation fondamentale car elle
représente un minimum pour se débrouiller dans la vie. La
formation fondamentale permettra à l'individu de poursuivre des
études universitaires après quelques années de travail,
que ce soit pour un perfectionnement, un repositionnement de carrière ou
pour une simple connaissance personnelle.
La formation technique doit permettre l'apprentissage de méthodes
de travail actuelles et la flexibilité nécessaire pour la mise en
place des nouvelles technologies et des méthodes de travail qui
pourraient survenir. Elle doit être suffisamment précise pour
être applicable immédiatement, mais aussi suffisamment ouverte
pour permettre une mobilité de l'individu. Nous devons donc revaloriser,
dans la société, le diplôme professionnel.
Il y a actuellement certaines contraintes que nous connaissons dans
l'ensemble de l'éducation. On va en mentionner quelques-unes.
L'éducation doit être considérée comme un
investissement de la société dans son avenir. Ce n'est pas une
dépense; c'est un investissement pour notre futur. Les moyens de
communication, surtout télévisuels et informatiques, ont
créé de nouveaux types d'écoles et de moyens
d'apprentissage, entre autres, les cours à domicile.
La mondialisation de nos entreprises demande également une
souplesse d'adaptation. Cependant, il faut faire attention pour ne pas en faire
une panacée parce que ce n'est pas applicable pour toutes les
entreprises, cette mondialisation. Les changements technologiques modifient le
marché du travail et ses structures organisationnelles. La
clientèle étudiante se diversifie par l'ajout du
perfectionnement, du repositionnement et des jeunes qui retournent aux
études après quelques années. Le
néo-libéra-
lisme désire un désengagement de l'État et les
cégeps doivent rendre des comptes à l'État, aux
étudiants et à la société en général
sur la qualité de leur enseignement. De plus, nous constatons que les
entreprises souffrent d'un excès d'exigences envers les
diplômés. Elles ne semblent plus vouloir assumer leur propre
devoir de formation interne axée sur leur propre philosophie
d'entreprise et sur leurs procédés de fabrication.
Également, il y a des chevauchements dans certaines disciplines
entre le secondaire et le collégial: par exemple, le secrétariat.
Nous devons donc nous pencher plus en profondeur pour déterminer s'il y
a réellement un chevauchement ou s'il y a complémentarité
et, à ce moment-là, apporter les correctifs
nécessaires.
Les développements technologiques exigent une mise à jour
constante des programmes de formation. Ainsi, il devient vital d'effectuer des
analyses fiables des besoins sectoriels afin de guider les étudiants et
les établissements. Cela nécessite aussi une plus grande
collaboration avec le secteur privé. Cette collaboration peut se faire
à différents niveaux, tels que le contenu des programmes, la .'
jrniture d'équipements de pointe et des stages valables autant pour les
étudiants que pour les enseignants. En plus de cet incitatif d'obtenir
une main-d'oeuvre mieux qualifiée, nous allons suggérer, plus
tard, d'autres incitatifs de nature financière pour les entreprises.
Donc, il est essentiel de créer cette coordination
cégeps-État-entreprises. Certains projets sont déjà
à l'oeuvre et ils semblent assez concluants. On en a vu dans les
pâtes et papiers, dans l'électronique. Cependant, les
cégeps doivent demeurer les maîtres d'oeuvre de l'enseignement
collégial et donc s'assurer qu'ils ne deviennent pas des serviteurs du
secteur privé. Il doit y avoir un échange dans les deux sens.
Il faut établir également des mécanismes
d'évaluation des programmes, mais ceux-ci ne doivent pas créer
une lourde bureaucratie. Nous devons demeurer concurrentiels. Donc, cela exige
une rapidité d'adaptation. Ces évaluations sont
nécessaires pour maintenir un positionnement axé sur l'avenir.
Plusieurs remarques négatives sont actuellement véhiculées
contre nos finissants, telles que le manque d'intégration des
connaissances et le peu d'uniformité nationale. Nous suggérons
donc l'élaboration d'examens de synthèse nationaux. Pour les
disciplines offertes par un ou quelques collèges, ils pourront
être élaborés par eux. Pour les autres, des groupes
représentatifs de la discipline les rédigeront.
Nous devons également investir massivement dans le
perfectionnement des enseignants. Ils sont la source de transmission des
connaissances. Ils en ont la volonté. Nous devons leur en donner les
moyens. Il pourra s'agir de recherches pédagogiques, c'est-à-dire
de recherches sur les méthodes d'enseignement, de recherches
fondamentales en laboratoire, que ce soit collégial, universitaire ou
privé, de stages en milieu de travail pour se remettre à jour
dans les nouvelles pratiques et des études universitaires
additionnelles. Après que nous aurons réformé
l'enseignement, nous devrons nous assurer qu'ils ont les moyens financiers de
le faire. M. Lahaie vous présentera nos recommandations
financières.
M. Lahaie (Henri): Merci, M. Blanchet. Bonjour, messieurs,
mesdames. Dans cette dernière section qui sera plus économique,
cinq sujets seront traités: la question des frais de scolarité,
l'aide financière aux étudiants, le financement des
cégeps, la gestion administrative et la question de l'impôt
postétudes supérieures.
Tout d'abord, les frais de scolarité. Le Comité national
des jeunes du Parti québécois propose que le gouvernement
maintienne fa gratuité des frais de scolarité pour les
étudiants du cégep. Nous savons que les cégépiens
vivent actuellement une précarité économique; 60 % des
jeunes qui ont de l'aide financière ne reçoivent pas la
contribution parentale; 70 % des étudiants au cégep
présentement doivent travailler pour subvenir à leurs besoins et
nous savons à peu près que le revenu annuel des étudiants
au cégep est d'environ 4000 $. Donc, imposer des frais de
scolarité serait une atteinte à l'accessibilité.
Parlons tout d'abord de la gratuité, au Québec, en ce qui
a trait au cégep. Selon nous, parler de gratuité
présentement, c'est un leurre. Nous savons qu'il y a des frais
administratifs, il y a des frais de livres qui sont assez élevés
et, aussi, il y a la fameuse question de l'endettement; Les étudiants
qui demandent de l'aide financière à chaque année ont une
dette. Donc, c'est une facture à long terme et on peut considérer
que c'est des frais pour ces étudiants-là.
Donc, ça nous amène à parler de la question de
l'aide financière. C'est intéressant d'en parler car ça
concerne la vie économique des étudiants. On a
décelé deux gros problèmes dont on va vous parler. C'est
le problème de l'endettement. Nous savons que des étudiants font
des demandes de prêt à partir du cégep et auront des
prêts jusqu'à... Disons qu'ils ont des prêts à chaque
année jusqu'à la fin de leur maîtrise. Ils vont s'en sortir
avec un endettement d'environ 15 000 $. Pour ce qui est du doctorat, ça
se chiffre autour de 20 000 $. Nous, ce qu'on remarque, c'est que le ratio
prêt et bourse a évolué d'une façon telle que c'est
le prêt qui a de plus en plus augmenté depuis les années
1985-1986. En 1985-1986, le ratio prêt et bourse était de 50 %-50
%. Présentement, en 1990-1991, c'est 58,3 % en prêt et la
différence est en bourse. Donc, nous, ce qu'on propose au gouvernement,
c'est de faire un retour, de retourner vers la tendance des années
1985-1986 qui était du 50 %-50 %.
Selon nous, on se demande aussi: Est-ce que le régime actuel
permet aux étudiants d'être à
temps plein et de se consacrer pleinement à leurs études?
On se demande si un régime qui n'offre que 640 $ par mois pour payer
loyer, nourriture, transport, habillement, c'est suffisant. La question du
travail, parce que les étudiants doivent beaucoup travailler pour
subvenir à leurs besoins, est-ce qu'il n'y aurait pas un lien assez
direct avec ça? Donc, selon nous, le gouvernement doit bonifier le
régime pour permettre aux étudiants d'être à temps
complet et, selon nous, nos deux mesures, qui sont de bonifier le régime
et de réduire la question de l'endettement, seront des incitatifs pour
réduire la durée des études des étudiants, et cette
réduction des études amènera des économies au
gouvernement, sachant les coûts que ça entraîne, la
durée prolongée des études.
Pour ce qui est du financement des cégeps, le gouvernement, qui
est le principal bailleur de fonds, ne cesse de se désengager du
financement des cégeps. Ceux-ci, tels les étudiants, vivent une
précarité économique. Pendant les années de vaches
grasses du gouvernement libéral, de 1986 à 1989, dont il s'est
largement vanté, les subventions de fonctionnement par rapport au PIB
pour les cégeps sont passées de 0,62 % à 0,55 %. Selon
nous, le gouvernement doit investir dans l'éducation pour l'avenir de
notre pays.
Pour ce qui est du financement des cégeps, l'apport du
privé devrait être une voie plus recherchée. À ce
titre, des tables de concertation État-cégeps-entreprises
devraient être plus présentes. De plus, il devrait y avoir plus de
programmes adaptés aux entreprises. Le gouvernement devrait consentir
des crédits d'impôt aux entreprises qui s'impliqueront
financièrement à la restructuration de programmes et à
l'amélioration technologique.
Puisque, dans nos propositions, on parle d'amener plus d'argent dans les
cégeps, la question de la gestion administrative, on doit la souligner.
Selon nous, présentement, la gestion administrative des cégeps
est efficace et serrée, mais, avec l'apport de nouveaux fonds, on vous a
présenté quelques mesures à l'intérieur de notre
mémoire pour améliorer la gestion administrative et je vous
invite à consulter ces mesures-là.
Enfin, le dernier point, la question de l'impôt postétudes
supérieures. Si on se rappelle, en 1990, le projet de loi 25 sur la
réforme de l'aide financière, à l'époque, il y a eu
beaucoup de groupes d'intervenants qui avaient amené cette
question-là de l'impôt postétudes universitaires, à
l'époque. Nous, on appelle ça «postétudes
supérieures» pour inclure les cégeps. Selon nous, c'est une
nouvelle façon d'aller chercher de l'argent et c'est une façon
qui va permettre d'impliquer les étudiants au moment où ceux-ci
sont le plus dans la possibilité de le faire, quand ils vont avoir un
revenu. Donc, l'impôt postétudes supérieures est, selon
nous, une bonne façon d'aller chercher des sources de financement pour
nos institutions, pour permettre la gratuité scolaire au cégep et
à l'université et, enfin, permettre de bonifier le régime
d'aide financière et de tendre vers un régime de bourses
seulement. (14 h 20)
Donc, nous invitons le gouvernement actuel à
réfléchir sur les modalités de la mise en place d'un
impôt postétudes supérieures au Québec. Il faudrait
convenir d'un pourcentage de revenus retenu, des délais d'application et
d'un seuil minimum de revenu pour lequel les étudiants rendus
travailleurs commenceraient à payer.
Donc, c'étaient les cinq points sur la question économique
que je voulais traiter. Merci d'avoir été attentifs à
notre mémoire.
Le Préaident (M. Hamel): Alors, je vous remercie d'avoir
été aussi succincts, ça nous permet quelques minutes
supplémentaires pour échanger davantage avec vous trois. Alors,
comme il est de tradition, j'inviterais Mme la ministre à
procéder aux échanges.
Mme Robillard: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord
remercier les jeunes du Comité national des jeunes du Parti
québécois d'être venus nous présenter un
mémoire sur l'ordre d'enseignement collégial
québécois. Plusieurs de vos membres, sûrement, sont au
cégep ou viennent de quitter le cégep. Alors, je pense que vous
êtes très bien placés pour nous faire une analyse de ce que
vous avez vécu ou de ce que vous vivez présentement, et pour nous
dire qu'est-ce qu'on doit changer, qu'est-ce qu'on doit réformer. Dans
ce sens-là, votre mémoire couvre les différents aspects,
je pense bien, autant au niveau de la formation technique que
préuniversitaire et de la question du financement du réseau.
Ça nous permet sûrement un échange des plus fructueux.
Mais, au point de départ, Mme Daoust, je serais intéressée
à connaître comment vous avez procédé pour la
production de votre mémoire. Est-ce qu'il y a eu une consultation
auprès des jeunes membres du parti? Comment avez-vous fait
ça?
Mme Daoust: Bien, tout d'abord, au sein même de
l'exécutif du CNJ, duquel nous ne faisons pas partie, il y a eu
consultation, il y a eu des idées qui ont été
lancées: Ensuite, nous avons été approchés pour
écrire ce document qui, par la suite, est retourné dans cet
exécutif qui est composé des présidents de chacune des
régions du Québec, et ces présidents sont
retournés, eux, dans leurs exécutifs de région, et
là, ensuite, on a voté sur ce document avec quelques changements.
C'est comme ça que ça s'est passé.
Mme Robillard: Donc, ce n'est pas strictement le point de vue des
jeunes, mais de façon beaucoup plus globale, quand vous dites au niveau
des exécutifs, donc...
Mme Daoust: C'est les exécutifs jeunes. Mme Robillard:
Ah, les exécutifs jeunes.
Mme Daoust: Oui, oui, je parle toujours... Ce qu'on appelle le
«senior», entre guillemets, a été consulté,
mais après approbation...
M. Gendron: Hum! Hum!
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Daoust: ...du comité des jeunes.
M. Gendron: Moi, je n'ai jamais vu ça, ce que vous dites,
là.
Une voix: Ça nous rassure! M. Gendron: Ha, ha,
ha!
Mme Robillard: mme daoust, ou quelqu'un d'autre, là, ceux
ou celles qui ont travaillé cette partie-là du mémoire,
j'aimerais peut-être aborder avec vous la formation
générale ou la formation fondamentale tj'j que vous la
décrivez dans votre mémoire. donc, cette formation
générale de base s'applique autant au secteur
préuniversitaire qu'au secteur technique. vous nous faites des
recommandations très précises, et là, je me
réfère surtout aux pages 6 et 7 de votre mémoire. si je
vous ai bien saisis, là, vous nous suggérez de diminuer les cours
de philosophie de quatre à deux et d'ajouter d'autres types de cours.
alors, allons-y. en premier lieu, pourquoi nous suggérez-vous de
diminuer les cours de philo?
Mme Daoust: Bon. Les cours de philo, en tant que tels, nous
sommes bien conscients que ce n'est pas des mauvais cours. Ce n'est pas parce
qu'il y a une peur en quelque part ou un dégoût de la philo qu'on
les coupe, ce n'est pas ça. C'est qu'il me semble que, dans le monde
d'aujourd'hui, on demande à l'étudiant d'avoir beaucoup de
connaissances. On lui demande d'avoir des connaissances scientifiques, de
connaître plusieurs langues, d'avoir des connaissances aussi d'ordre
technologique, si je pense à l'ordinateur, entre autres, et puis on note
aussi des lacunes qui sont traînées pendant tout le système
d'éducation, du primaire au secondaire. Et là, l'étudiant
qui arrive au cégep, il n'a pas sa formation générale, ou
de base, ou fondamentale. Quand on parle de l'histoire, des maths, du
français, de l'anglais, il y a plusieurs déficiences dans ces
domaines-là. Alors, on a regardé et on s'est dit: Les cours de
philo, parce qu'on tenait peut-être plus aux autres. C'est un choix tout
à fait... Mais on tient beaucoup aux cours d'éducation physique.
Ça, on croit que c'est la dernière instance, au moment de
l'étude, où on va encore faire de l'activité physique.
Ça, pour nous, c'est important. Ça développe des talents,
des aptitudes, etc. Alors, nous avons décidé de couper les cours
de philosophie parce qu'on ne veut pas, non plus, alourdir l'étudiant,
le combler de travail et qu'il ne puisse plus bien se concentrer. Alors, on
coupe les cours de philo, on ajoute deux cours d'histoire, parce qu'on se dit
qu'il y a une grosse lacune en histoire, au Québec, que la formation
historique des Québécois n'est pas très forte. On ajoute
également un cours de maths adaptées qui fait, d'après
nous, partie de la formation fondamentale, un cours d'anglais et de
français dans les institutions anglaises, puisque la langue seconde, au
Québec, bien, elle est très importante, en vue, surtout,
d'études universitaires et autres. Voilà!
Mme Robillard: alors, si je comprends bien, si je vous ai suivie
dans votre recommandation, on diminue de deux cours de philo, mais on en ajoute
quatre.
Mme Daoust: Oui.
Mme Robillard: Donc, on augmente le nombre d'unités.
Mme Daoust: Oui.
Mme Robillard: C'est bien ça, votre recommandation?
Mme Daoust: Oui.
Mme Robillard: Dans une telle proposition, que faites-vous des
cours complémentaires?
Mme Daoust: On les garde, les cours complémentaires.
Mme Robillard: Tels quels?
Mme Daoust: Dans le fond, je pense que la partie concernant les
cours complémentaires, c'est une suggestion, je ne dirais pas un voeu
pieux, parce que ce ne serait pas assez fort, pour dire qu'il faudrait aller
dans ce sens-là. Mais on ne peut pas, non plus, limiter les choix des
étudiants parce que quelque chose qui, pour nous, va sembler tout
à fait inutile et anodin, pour quelqu'un d'autre va être utile et
va contribuer à son développement. Alors, c'est pour ça.
Dans les cours complémentaires, on se dit: Bien, peut-être qu'il y
a des cours qui n'auraient pas vraiment... Mais, dans le fond, on laisse
ça un peu comme ça.
Mme Robillard: Parce que vous avez dû regarder comme moi la
liste des différents cours complémentaires.
Mme Daoust: Oui, dans les différents cégeps. Des
fois, il y a des questions, mais c'est
vrai que... Je pense, entre autres, à la pêche à la
mouche. On en avait parlé un peu.
Mme Robillard: Non. Ça, ce n'était pas dans les
cours complémentaires.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Daoust: Mais c'est vrai que ça développe des
talents que peut-être, personnellement, je n'aurais pas choisis, mais
qu'un autre peut trouver intéressants.
Mme Robillard: Donc, on augmente les cours obligatoires. On
maintient les cours complémentaires en tant que tels. Maintenant, au
niveau des cours de concentration - parce que vous avez quand même un
jugement sévère sur la formation préuniversitaire - des
cours de concentration au niveau préuniversitaire, ici, vous dites: II y
a des problèmes dans ce secteur-là. Est-ce que vous avez des
recommandations précises sur les cours de concentration?
Mme Daoust: Bien, je pense que ça va un peu dans le sens
de ce qui a déjà été dit avant, soit d'avoir, dans
les concentrations, dans les programmes précis, des cours qui se
ressemblent dans tous les cégeps pour qu'une fois arrivés
à l'université les étudiants ne se retrouvent pas avec une
formation complètement différente et que le professeur qui se
trouve devant eux doive répéter ou rabaisser le niveau
d'éducation qu'il devrait normalement donner parce que certains n'ont
pas reçu la même formation. Alors, on se dit: II faudrait quand
même que, dans les définitions de programmes, il y ait une
homogénéité à travers la province.
Mme Robillard: Est-ce que vous pourriez m'expliciter votre
recommandation pour améliorer les liens entre le secondaire, le
cégep et l'université? Et je me réfère de
façon particulière à la page 11. Là, j'ai de la
difficulté à vous saisir quand vous voulez qu'on considère
la première année, au niveau du cégep, comme une
propédeu-tique. Habituellement, une propédeutique, c'est une
période qui nous aide avant d'entrer dans un programme, mais, vous, vous
voulez que toute la première année - si j'ai bien saisi, mais
j'attends vos explications - soit comme une propédeutique et la
deuxième année, une année préparatoire à
l'universitaire. Quand je lis ça, c'est comme si l'enseignement propre
au collégial n'avait plus son identité. C'est comme si vous
pensiez ajouter une année au secondaire et une année de plus
à l'universitaire.
Mme Daoust: O.K. Je comprends ce que vous voulez dire. (14 h
30)
Mme Robillard: Est-ce que je vous ai mal perçue?
Mme Daoust: Je comprends ce que vous voulez dire, là. Je
peux peut-être clarifier un peu. Non, ce n'est pas tout à fait ce
que je voulais dire. Quand je dis propédeutique, c'est une année
préparatoire à l'université, mais qui complète la
formation du secondaire. Je pourrais peut-être m'exprimer ainsi. La
première année serait plutôt constituée de cours
obligatoires, d'un genre de tronc commun à tous les programmes
préuniversitaires où on retrouverait les cours d'histoire, les
cours de philo, etc. Et ainsi, la deuxième année, il y aurait
beaucoup plus de cours au choix ou de cours directement reliés à
la concentration, si l'on veut, mais qui, la première année,
aideraient l'étudiant à faire un choix plus
déterminé sur sa carrière. Mais il ne serait pas
obligé... Le but de ça, c'est surtout d'essayer de faire les
changements. On sait qu'il y a plusieurs étudiants, au cégep, qui
vont changer, en cours de route, de programme. Mais c'est de faire ce
changement-là, de l'établir le plus facilement possible. C'est
pour ça qu'on se dit: Première année un peu
propédeutique, avec plus de cours obligatoires un peu pareils à
tous les programmes et puis, la deuxième année, vraiment la
concentration, vraiment la préparation à l'université.
Mme Robillard: Si on revenait aux cours d'éducation
physique, vous dites: Ceux-là, n'y touchez pas, on veut garder les
quatre cours d'éducation physique. Et, à la page 8, vous dites
très clairement: «Nous tenons [...] à conserver les quatre
cours d'éducation physique au choix».
Mme Daoust: Mais c'est parce qu'il y a un choix. Il y a toute une
gamme de cours d'éducation physique qui s'offrent et puis on en prend
quatre parmi cet éventail de cours.
Mme Robillard: Pourquoi tenez-vous à ce que les cours
d'éducation physique au niveau collégial soient
crédités sur votre bulletin alors que, quand vous rentrez
à l'université, on ne tient même pas compte de ces
crédits-là?
Mme Daoust: C'est parce que, pour nous, ça fait partie de
la formation fondamentale aussi, c'est un des éléments. La
formation fondamentale de l'étudiant, ce n'est pas juste qu'il puisse
additionner ou qu'il puisse faire de la physique ou de la chimie, ou
orthographier correctement; l'aspect physique entre aussi là-dedans. Et
puis, ça, je pense que c'est une conséquence du primaire et du
secondaire, dans lesquels on retrouve des cours d'éducation
physique.
Mme Robillard: Mais pourquoi pensez-vous que les
universités ne considèrent pas ces crédits-là quand
vous êtes admis à l'université?
Mme Daoust: D'après moi, c'est probablement qu'elles
s'appuient plus sur des cours
magistraux où il y a vraiment écriture et tout et qu'elles
délaissent un peu les cours d'éducation physique. mais j'imagine
que, dans la concentration éducation physique, par contre, elles vont
noter ces cours-là.
Mme Robillard: Ça va.
Le Président (M. Hamel): Merci, Mme la ministre. Merci,
Mme Daoust. Maintenant, je reconnaîtrai Mme la députée de
Terrebonne.
Mme Caron: Merci, M. le Président. Alors, bienvenue. Votre
mémoire fait vraiment le tour des différents problèmes,
des problèmes importants qui ont été soulevés tout
au long de cette commission parlementaire. Vous faites des propositions
concrètes et, ce qui m'apparaît très intéressant, la
plupart des mémoires qui ont été présentés
par les jeunes nous proposent d'améliorer la qualité, nous
proposent l'excellence, nous proposent de ne pas limiter, de ne pas niveler par
le bas, de présenter des défis beaucoup plus intéressants
aux jeunes et que ça serait peut-être la meilleure façon de
les intéresser et de les motiver.
Vous nous avez, évidemment, parlé beaucoup de la formation
fondamentale. Je vais peut-être poser une seule question au niveau de la
formation fondamentale, donc, à Mme Daoust. Dans les mesures
d'encadrement que vous proposez, vous avez tenu compte de l'importance des
liens entre les étudiants et les enseignants. Et, cette
préoccupation-là, on la retrouve dans les propositions
concrètes comme le ratio au niveau des aides pédagogiques, le
ratio au niveau des étudiants-professeur, du côté des cours
de trois heures, et là j'aimerais que vous soyez un petit peu plus
explicite sur cette formule-là, concrètement, si ça pose
problème de changer ce système-là qui est bien
implanté. Et vous proposez également de prolonger la session et
non de la raccourcir. Donc, ces quatre mesures d'encadrement sont très,
très liées à la relation étudiant-enseignant.
Est-ce que vous pouvez expliquer un petit peu?
Mme Daoust: Oui. J'expliquerai peut-être le ratio,
rapidement. On sait que le ratio étudiants-API est d'un API pour 1000
étudiants, ce qui est tout à fait ridicule. Quand on sait que
l'API doit diriger l'étudiant, etc., c'est même farfelu. Le ratio
étudiants-professeur, maintenant, est à 160 étudiants par
professeur. Comment veut-on qu'un professeur accorde le temps suffisant
à un étudiant quand on sait qu'il en a 160 à voir, qu'il a
probablement des cours différents à donner? Comment peut-il faire
un suivi efficace, examens, travaux, etc? L'abolition des cours de trois heures
pour en faire des cours de une heure trente, ça permet à
l'étudiant de voir plus souvent son professeur. Donc, ça permet
au professeur de faire un meilleur suivi de la démarche de
l'étudiant et, d'un autre côté, les trois heures vont
être pleines. Ce que je veux dire par là, c'est que, dans un cours
de trois heures, souvent, la dernière demi-heure va sauter parce que le
professeur est fatigué, ou le professeur va donner des textes à
lire ou faire des trucs comme ça; l'étudiant lui-même est
fatigué après trois heures de cours.
Enfin, l'allongement des sessions, 150 jours, ce n'est même pas
une demi-année; alors, 170 jours, ça me paraît quand
même un peu plus refléter la réalité. Quand on sait
que les gens travaillent, je ne sais pas, 30 heures par semaine et qu'ils ont
deux semaines ou un mois de vacances et les étudiants, eux, n'ont que
170 jours de cours. Et, autre aspect, pour aider l'encadrement des
étudiants; comme je l'ai dit dans la présentation, les cours
couvrent une matière très étendue au cégep. J'ai
parlé de panorama, etc. Alors, l'allongement de la session ferait en
sorte qu'on pourrait mieux voir la matière.
Mme Caron: Merci. Je m'en voudrais de ne pas aborder le chapitre
sur le financement, puisque vous avez présenté plusieurs
propositions. Vous avez touché à la gratuité scolaire,
vous avez touché à l'endettement, aux prêts et bourses,
à la participation des entreprises et à l'impôt
postétudes supérieures.
D'ailleurs, au niveau des crédits alloués, que vous
considérez comme un investissement, vous rejoignez le mémoire de
la Commission-Jeunesse du Parti libéral, où on pouvait
découvrir, en page 32, ce matin, que: «Si, au cours de la
dernière décennie, les subventions accordées en dollars
constants sont demeurées stables, on constate cependant une diminution
des sommes accordées a l'enseignement collégial par rapport aux
dépenses budgétaires du gouvernement québécois.
Ainsi, la proportion des dépenses budgétaires totales du
gouvernement du Québec consacrée à l'enseignement
collégial est passée de 2,95 % à 2,46 %, pour la
même période». Donc, vous rejoignez les membres de la
Commission-Jeunesse du Parti libéral aussi sur le manque à gagner
du côté des cégeps.
L'endettement est une nouvelle réalité. Vous soulignez
aussi un point qui m'apparaît important parce que, lorsqu'on rencontre
les jeunes, régulièrement, on se fait dire - et votre pourcentage
de 60 % m'apparaît réaliste - que 60 % des jeunes étudiants
ne reçoivent pas la contribution parentale. Et, dans les calculs, dans
l'évaluation qu'on fait, on considère toujours que le jeune
reçoit cette contribution. Qu'est-ce que vous proposez pour contrer
ça? Est-ce que c'est simplement la mesure de ramener le pourcentage des
prêts et bourses à 50-50, comme dans les années
quatre-vingt-cinq?
M. Lahaie: Plus précisément, vous avez parlé
de la question parentale et de la question
de l'endettement, 50-50. Pour ce qui est, c'est sûr, de
l'endettement, je pense que le régime d'aide financière, on
pourrait le qualifier présentement - et c'est dramatique - de
régime de l'endettement. Quand on sait que l'accessibilité, c'est
un principe sur lequel on s'est fondé, depuis la Révolution
tranquille, les années soixante, pour bâtir notre éducation
au Québec et en sachant tous les apports que ça a pour la
société québécoise, on se demande, actuellement,
comment ce régime fait pour favoriser les étudiants à
étudier à temps plein et non pas seulement à plein temps,
parce qu'on sait qu'à l'aide financière on peut avoir des
prêts et bourses, disons à l'université, à quatre
cours seulement, quand on sait que, pour finir en trois ans, il faut faire cinq
cours. Mais, on sait qu'on peut avoir de l'aide financière en quatre
cours. Donc, qu'est-ce que ce régime fait pour que les étudiants
puissent être à temps plein, cinq cours? (14 h 40)
Ce qu'on voit, on l'a noté dans notre mémoire, depuis
1985-1986, c'est que l'endettement, le ratio prêt et bourse n'a pas
cessé de croître. Il avait même augmenté
jusqu'à 61 % et quelque chose l'année passée. Mais, avec
la question de la hausse des frais de scolarité à
l'université qu'il y a eu, ceci a fait en sorte que, pour les bourses,
il y a eu une certaine compensation, ce qui fait que ça a diminué
vers 58 %. C'est quand même 58 % qui va en prêt et le restant en
bourse. Donc, je pense que ce n'est pas un régime qui incite les
étudiants à faire de longues études et, aussi, à se
consacrer pleinement à leurs études. C'est un régime qui
fait peur aux étudiants.
Mme Caron: Est-ce que vous pouvez élaborer un petit peu
sur l'impôt postétudes supérieures? On sait qu'au moment de
l'étude de la réforme des prêts et bourses plusieurs
groupes avaient parlé de cet impôt post-études
supérieures et, depuis, on en entend très peu parler. Au cours de
cette commission, je crois que vous êtes les seuls à avoir
reparlé de cette proposition-là.
M. Lahaie: On en parie un peu pour rafraîchir la
mémoire du gouvernement parce qu'il y avait eu quand même beaucoup
de groupes qui, il y a deux ans, avaient proposé cette
idée-là. Je pense que cette idée-là doit être
plus étudiée. On vient quand même proposer au gouvernement
de vérifier des modalités. Mais je pense que c'est une
façon qui est... Ce qu'on dit souvent aux étudiants, c'est: Vous
devez avoir... La fameuse contribution des étudiants. Et, nous, ce qu'on
dit: On est prêts à contribuer. L'éducation, ça nous
tient à coeur. L'avenir de la société
québécoise nous tient à coeur. On veut y participer. Mais,
nous, on se dit: On va être plus capables de contribuer à nos
études quand on sera sur le marché du travail. Et je pense que,
par le régime postétudes supérieures, on s'est permis de
changer les mots, comme on vous l'a dit, parce que, avant, c'était
études universitaires. Maintenant, on veut inclure le cégep et
l'université.
Je pense que, de cette façon-là, ça permettra
à l'étudiant de contribuer davantage, financièrement, pour
l'éducation au Québec. Donc, ces sommes d'argent là
pourront aller au financement des institutions, pourront aussi permettre une
bonification du régime de l'aide financière. Et, croyez-moi, je
pense que ce régime-là a besoin d'être bonifié.
Quand on sait que 70 % des étudiants travaillent présentement, ce
sont des étudiants qui ne peuvent pas se concentrer pleinement sur leurs
études. Et ça se reflète sur la qualité - on sait
que la diplomation, c'est une chose qui est importante - mais aussi sur la
durée. Et on s'est dit aussi, au niveau de la durée des
études, qu'un étudiant qui prend plus de temps à faire ses
études, c'est des coûts supplémentaires pour le
gouvernement. Donc, on a eu une réflexion de se dire qu'on vit dans un
contexte économique et qu'il faut tenir compte des dépenses
gouvernementales, il faut tenir compte des rentrées d'argent et tout
ça. Donc, nous, on se dit: Faisons en sorte que l'étudiant puisse
étudier à temps plein. Aidons-le à finir ses études
dans les délais prescrits. Et c'est la société
québécoise, c'est le gouvernement qui va en
bénéficier par une meilleure diplomation et une réduction
de la durée, des délais d'études.
Mme Caron: Du côté de la formation professionnelle,
vous avez un chapitre complet. On parle beaucoup du rôle des entreprises,
des problèmes de chevauchement entre les cours au niveau professionnel
qui sont donnés du côté du secondaire et du
côté du collégial, de l'importance de coordonner l'action
État-cégeps-entreprises, de l'importance de l'évaluation,
du perfectionnement des enseignants et, aussi, des examens de synthèse.
Pourquoi souhaitez-vous des examens de synthèse et est-ce que ces
examens-là seraient vraiment uniformes partout? Est-ce que ça
compterait pour la note finale des étudiants? Est-ce que ça
serait une exigence ou est-ce qu'il y aurait reprise?
M. Blanchet: Disons que, sur les modalités d'examens
nationaux, il n'y a rien qui est gelé dans le béton. On trouve
ça très intéressant comme mécanisme. On
connaît actuellement certaines professions, comme les médecins,
les avocats, les comptables, qui ont des examens de corporation à passer
pour atteindre leur statut professionnel. On s'aperçoit, par la suite,
en pratique, que ça permet une certaine uniformité. Ça ne
demande pas une excellence. Au Québec - et c'est peut-être une des
raisons, entre autres, du décrochage - on demande aux jeunes de toujours
être les premiers. Si tu n'as pas la médaille d'or, tu n'es pas
bon. Donc,
l'examen national n'est pas fait dans un but d'épuration des
étudiants. Il est fait dans un but de s'assurer que, dans l'ensemble du
Québec, un étudiant qui aura suivi un cours, disons, en
techniques administratives aura le minimum de connaissances pour pouvoir se
débrouiller demain matin dans l'entreprise, que l'employeur aura, de
toute façon, sa formation propre à lui à faire, mais qu'il
n'aura pas besoin de remontrer à l'étudiant les bases mêmes
de son domaine. Donc, on n'en a pas mentionné comme tel, parce que,
encore là, on a discuté également des modalités. On
se demandait jusqu'où exactement... Est-ce qu'on doit le rendre
obligatoire? Dans la formation fondamentale, on a dit qu'il était
accessoire, l'examen national. Donc, les technicalités, on les reverra
par après. Mais je crois que le principe d'un examen national,
d'uniformisation de la formation est très important.
Mme Caron: Du côté de la formation
générale comme de la formation professionnelle, vous avez
parlé du perfectionnement des enseignants. On a fait part à
quelques reprises, dans plusieurs mémoires, du problème des
enseignants qui n'avaient pas de iv, nation pédagogique, qui
étaient d'excellents spécialistes qui connaissaient bien leur
matière, mais qui n'avaient pas nécessairement de connaissances
du côté pédagogique. Est-ce que, du côté du
perfectionnement des enseignants, ça vous apparaît important que
nous nous axions sur cette pédagogie? Et est-ce que vous pouvez proposer
certaines mesures qui iraient dans ce sens-là?
M. Blanchet: Oui, effectivement, parce que là on le voit
exactement dans à peu près tous les domaines avec les enseignants
actuels; il y a toujours des enseignants qui sont très forts en
pédagogie et moins forts en techniques, et le vice versa est
également vrai. On le vit aussi à l'université avec des
professeurs qui auraient envie de ne faire que de la recherche, mais qui sont
pris à faire des charges d'enseignement. Le cégep,
principalement, c'est un endroit d'enseignement et beaucoup moins de recherche.
Tranquillement, on ramène de la recherche un petit peu. Mais c'est
évident qu'il est très bon d'avoir des gens dans des domaines
où ils ont eu les compétences techniques, où ils ont
appris. À part les formations vraiment fondamentales de base, comme le
français, l'histoire, si on tombe dans des domaines de techniques, je
vais prendre, mettons, l'exemple de l'administration de tout à l'heure,
un cours de comptabilité, c'est toujours bon d'être donné
par quelqu'un qui a fait de la pratique ou même peut-être par
quelqu'un qui est encore à temps partiel en pratique parce qu'il peut
permettre de montrer les nouveaux outils, qu'est-ce qui se fait actuellement
dans le domaine, qu'est-ce qu'il y a comme nouvelle technologie qui s'en vient,
qu'est-ce qu'il y a comme avenir également dans ce secteur
d'activité là.
Évidemment, l'enseignant qui aura eu une formation
professionnelle toute sa vie, qui n'aura pas eu de formation, soit de
certificat ou de baccalauréat en enseignement, pourrait avoir certaines
faiblesses d'enseignement. À ce moment-là, il y a toujours les
directeurs départementaux qui, eux, auront à examiner si,
vraiment, le professeur a tous les prérequis; et, s'il lui manque des
prérequis pédagogiques - on le mentionne exactement dans nos
quatre critères - il pourra aller sort faire une formation additionnelle
universitaire ou aller suivre un peu d'études de recherche ou de
recherche pédagogique sur l'enseignement comme tel. Il est effectivement
acceptable. On s'est aperçu que les enseignants veulent vraiment se
perfectionner. Il n'y a pas, je crois, de laxisme de ce
côté-là. La seule chose, c'est que, pour qu'ils se
perfectionnent, on leur dit: Bon, il faut que tu prennes une année
complètement sabbatique. Il y a sûrement d'autres moyens que cet
élément-là qui a des coûts Importants pour
l'enseignant.
Mme Caron: Plusieurs mémoires ont présenté
le problème, et on en a fait mention ce matin un petit peu, du manque de
préparation. La préparation n'est pas égale,
c'est-à-dire que de nombreux jeunes du secondaire arrivent au
collégial avec 130 unités; d'autres avec 176; d'autres avec 180.
Est-ce que vous croyez qu'on doit régler le problème au niveau du
secondaire, c'est-à-dire exiger un certain nombre d'unités, ou si
on doit plutôt régler le problème au niveau du
collégial en essayant de parfaire au cours de la première
année?
M. Blanchet: Nous, ce qu'on trouve à ce niveau-là,
c'est qu'on aurait mieux aimé une commission parlementaire sur la
réforme de tout l'enseignement, à partir du primaire à
aller jusqu'au doctorat. Malheureusement, le gouvernement a voulu se limiter
seulement au cégep. Donc, c'est pour ça qu'on mentionne qu'il y a
des interrelations cégep-collège-université et même
le secondaire, et il y a aussi des relations avec le primaire. C'est
évident que, si on donne une mauvaise formation ou une formation
déviée - je ne veux pas dire nécessairement que la
formation est mauvaise, mais peut-être que la manière de
l'enseigner, il y aurait moyen de la revoir - dès le primaire, bien,
ça déborde dans le secondaire, le secondaire déborde dans
le cégep, le cégep déborde dans l'université et
l'université déborde dans la vie de tous les jours. Il faut
vraiment tout repartir l'éducation à partir du primaire.
Mme Caron: Qu'est-ce que vous auriez souhaité? Une
commission parlementaire élargie, des états
généraux?
M. Blanchet: Ce qu'on aurait plus aimé, ça
aurait été, en principe, de commencer peut-être par
des états généraux où, là, tout le monde
aurait pu parler entre eux, où l'ensemble de la population
également pourrait s'impliquer, et, prenant tout le système au
complet, d'essayer de refaire, je ne veux pas dire une commission Parent, parce
que la commission Parent a existé, mais vraiment repartir à
zéro, se vider l'esprit et dire: Comment est-ce qu'on enseigne? Et,
après ça, un coup qu'on a fait cette grande base d'enseignement
là, on essaie de l'appliquer dans la vie de tous les jours avec les
institutions qui existent actuellement. Les états
généraux, je crois, c'est peut-être une des bonnes
façons de le faire. (14 h 50)
Mme Caron: Vous avez parlé beaucoup du rôle des
entreprises au niveau de la formation professionnelle. Je pense que c'est
important. Est-ce que vous croyez que les entreprises font suffisamment
d'efforts? Et est-ce que les entreprises participent suffisamment? Est-ce qu'il
y aurait obligation de stages dans tout le secteur professionnel?
M. Blanchet: Nous nous dirigeons vers une obligation de stages,
mais ce n'est toujours qu'une tendance. Des fois, on a des difficultés.
Le Québec est quand même un petit pays. Donc, on n'a
peut-être pas toute la capacité d'entrer tous les
étudiants, mais il faut tendre vers ça. Il faut aussi,
peut-être, tendre vers des programmes comme on en voit à
l'Université de Sherbrooke où on a une session de formation
technique et une session de stages, et imbriquer tout ça pour que
l'étudiant puisse avoir un esprit peut-être plus pratique et plus
proche de la réalité lorsqu'il va arriver sur le marché du
travail. Il faut tendre vers ça. On sait que peut-être les
entreprises n'ont pas, comme je le disais, tous les postes disponibles. Il faut
les encourager. C'est pour ça qu'on parlait d'incitatifs comme des
crédits d'impôt. Et, dans les endroits où on voit des vrais
stages, pas un stage de deux semaines, mais un vrai stage où
l'étudiant aura eu un programme de formation pratique à suivre,
que les entreprises, dans la plupart des cas, réembauchent cet
étudiant-là lorsqu'il a terminé ses études. Donc,
ça sert autant pour les entreprises, pour avoir une main-d'oeuvre la
plus à jour possible, et ça sert également à
l'étudiant de se parfaire, pour savoir: mon professeur m'a dit
ça, mais qu'est-ce qui se passe en réalité? Dans le
concret, qu'est-ce que je suis capable de faire?
La participation des entreprises actuellement, est-ce qu'elle est
suffisante? Je dirais que non. Mais il ne faut pas oublier qu'au Québec
on n'a pas encore cette culture-là. L'éducation
québécoise est quand même récente. On parle des
années soixante. Même les universités ne font que commencer
à avoir des partenariats avec l'entreprise privée. Donc,
tranquillement, il faut inciter les gens, encore par des mécanismes.
Ça peut être des subventions, ça peut être des
crédits d'impôt, ça peut être de leur dire: Bien, si
tu veux participer à l'enseignement autant qu'au financement, on va
aussi te permettre de participer à l'élaboration des programmes.
Peut-être que, toi, tu aimerais ça, mais on voit actuellement dans
l'entreprise... C'est toujours déplorable quand je lis - à chaque
année, l'article ressort - qu'une grande entreprise comme Northern
Telecom dit: Je suis obligée d'aller embaucher mes gens, mes techniciens
à l'étranger parce que je n'en ai pas au Québec. Je trouve
ça déplorable et je crois qu'on peut régler ça, ces
problèmes-là. Surtout quand, actuellement, on est en situation de
chômage drastique chez les jeunes, si, en plus, il y a des emplois qu'on
perd parce qu'on n'a pas la formation en question, il faut qu'on revoie notre
histoire. Il faut qu'on revoie ça pour régler au moins ces
problèmes-là.
Le Président (M. Hamel): Alors, merci, M. Blanchet.
Mme Caron: Merci beaucoup.
Le Président (M. Hamel): Je reconnais maintenant M. le
député de Rimouski.
M. Tremblay (Rimouski): Oui, M. le Président. Je serai
très bref. Tout d'abord, je me réjouis que le Comité
national des jeunes du Parti québécois ait daigné venir se
présenter, ici, en commission parlementaire, la même chose pour la
Commission-Jeunesse du Parti libéral. Je pense que c'est important
d'entendre des jeunes à cet égard.
Une seule question et elle s'adresse à M. Blanchet. C'est la
fameuse recommandation 9 de votre «rapport». Vous dites: «Le
Comité national des Jeunes du Parti québécois propose au
gouvernement et aux cégeps de promouvoir la valorisation de la formation
professionnelle collégiale». Ça, là, j'aime autant
vous le dire, presque tous les «rapports» ou plusieurs personnes
nous font cette recommandation: promouvoir la formation professionnelle. Et
là, vous nous embarquez, le gouvernement. C'est le gouvernement qui doit
le faire et les cégeps. Vous ne seriez pas plutôt d'avis que
ça reviendrait strictement aux cégeps, compte tenu qu'ils veulent
avoir leur autonomie, d'une part. Et, deuxièmement, ça
dépend du dynamisme des gens qui sont en place pour donner cette
formation professionnelle. Ne trouvez-vous pas que, le gouvernement, on
l'associe toujours à toutes les sauces? Finalement, on nous dit: Bien,
le gouvernement, désengagez-vous, laissez l'autonomie aux cégeps.
Ne pensez-vous pas qu'on devrait strictement... Moi, je serais d'accord avec
votre recommandation à condition qu'on soustraie le mot
«gouvernement».
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Blanchet: Dans toute société, on le voit, on le
vit peut-être aussi actuellement, le gouvernement sert de balise à
toute la société. Un gouvernement fort va baliser les
institutions, un gouvernement fort, un gouvernement qui a des idées. Et,
quand on parle que le gouvernement doit s'y impliquer, on ne demande pas
d'avoir des budgets effarants. Ça peut n'être qu'une contribution
aussi simple que... Pour promouvoir, ça va prendre quoi? Ça va
prendre de la publicité, ça va prendre des visites au secondaire,
ça va prendre des rencontres dans les entreprises pour leur montrer: Eh,
monsieur, il n'y a pas seulement que des bacs, les programmes techniques
existent aussi et les gens qui sortent de là sont bons. Donc, ça
implique des coûts. Bien, l'implication du gouvernement pourrait,
à la rigueur, ne s'en tenir qu'à une contribution
financière de ça. Mais je crois que le gouvernement, son esprit
primordial, c'est de donner des balises. Le gouvernement doit guider les gens.
Quand on parle d'implication, on ne dit pas que le gouvernement doit tout
faire, fit c'est pour ça que les cégeps sont mentionnés.
Bien sûr, la majorité de la tâche reviendra aux
cégeps, parce que les cégeps sont régionalisés, les
cégeps ont des formations dans certains domaines qui leur sont propres
à eux, parce que, dans leur région, ils ont vu un certain besoin.
Ce n'est certainement pas au gouvernement à commencer à faire la
promotion du diplôme en pâtes et papiers de Trois-Rivières.
Sauf que le gouvernement doit être là, être vigilant envers
ça et dire: Pour nous, c'est important, les cégeps, on investit
des sommes considérables à chaque année, c'est un
créneau important pour l'éducation du Québec, et on veut
que vous publicisiez, on veut que vous rendiez le cégep dynamique dans
son milieu...
M. Tremblay (Rimouski): Très bien. Merci.
M. Blanchet: ...parce que ça, déjà, ce
serait beau.
Le Président (M. Hamel): Merci, M. Blanchet. Mme la
ministre.
Mme Robillard: Merci. Je voudrais remercier de façon
particulière les jeunes du Parti québécois qui sont venus.
Malheureusement, M. Lahaie, on n'a pas eu la chance d'avoir une longue
discussion sur la partie que vous qualifiez de partie économique de
votre mémoire. Sûrement qu'on aurait pu avoir de nombreux
échanges, que ce soit au niveau du régime d'aide
financière, qui est toujours le plus satisfaisant au niveau de toutes
les provinces canadiennes, car le niveau d'endettement chez les jeunes est
encore plus faible au Québec qu'ailleurs; que ce soit au niveau des
compressions budgétaires à l'ordre collégial, M. Lahaie,
où vous m'avez cité les années 1986 à 1990, mais
vous avez oublié les années antérieures où il y a
eu aussi beaucoup de compressions budgétaires. Mais, vous savez, le
député de l'Opposition et moi avons beaucoup d'instances
parlementaires où faire ce genre de discussion là. Alors, ce
n'était pas le moment de le faire avec vous aujourd'hui. Je peux
très bien le faire avec mon collègue. Mais, sur les autres
aspects du dossier, je pense que vous avez apporté des idées
précises et, surtout, par le fait que vous viviez vous-même ces
réalités-là ou que vous venez de les vivre, je pense que
c'était très précieux pour les membres de la commission.
Merci beaucoup d'être venus témoigner.
Le Président (M. Hamel): Merci, Mme Daoust, M. Lahaie et
M. Blanchet, de votre participation à la commission parlementaire.
J'inviterais maintenant les représentants de la Jeune Chambre de
commerce du Québec métropolitain à prendre place, s'il
vous plaît.
Je suspends nos travaux pour deux minutes en attendant.
(Suspension de la séance à 14 h 58)
(Reprise à 15 h 2)
Le Président (M. Hamel): La commission de
l'éducation reprend ses travaux. Si vous me permettez, si nos
invités nous le permettent, je vais demander à M. le
secrétaire de la commission de procéder à une mise au
point de nos travaux.
Organisation des travaux
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. On a fait
état d'un consensus entre la ministre et le porte-parole de l'Opposition
officielle sur la suite des auditions publiques. Il y aurait donc séance
demain, le 3 décembre, au cours de laquelle la commission entendrait les
groupes suivants: le cégep François-Xavier-Garneau, le
cégep de Lévis-Lauzon, le cégep Beauce-Appa-laches, le
cégep de Sainte-Foy, le cégep de La Pocatière ainsi que le
mémoire 57M présenté par un département du
cégep.
Ensuite, il y aurait également consensus pour siéger les
16, 17 et 18 décembre où la commission entendra l'Ordre des
chimistes du Québec, le Comité de philosophie des
universités de langue française, le Comité
pédagogique provincial du programme de soins infirmiers, l'Association
pour la recherche au collégial, la commission scolaire
Chutes-de-la-Chaudière et la MRC des Chutes-de-la-Chaudière,
l'Association pour l'avancement des sciences et des techniques de la
documentation et la Corporation des bibliothécaires du Québec,
MM. Balthazar et Jules Bélanger, l'Université Laval,
l'Université de Sherbrooke, le Comité de concertation
cégep-
université en esthétique et histoire de l'art et le
sous-comité pédagogique d'esthétique et histoire de l'art,
ainsi que le cégep André-Laurendeau, les cégeps de
Bois-de-Boulogne, de Saint-Laurent, de Rosemont, de Sept-îles, de
Saint-Jérôme et de Drummondville. Et, le 18 décembre, la
commission conclurait avec les remarques finales et la clôture de ses
travaux.
Il faudrait une approbation de cette entente par la commission aux fins
de l'article 167 du règlement.
Le Président (M. Hamel): Alors, est-ce que les membres de
la commission sont d'accord?
Mme Robillard: Oui, adopté. Des voix:
Adopté.
Le Président (M. Hamel): D'accord. Adopté.
Très bien. Alors, nous allons poursuivre. Comme vous avez pu le
constater, nous étions dans une procédure particulière
à nos commissions parlementaires. Alors, il nous fait plaisir de vous
accueillir, M. Jean Lamy, président, M. Michel Guillet, Mme Nathalie
Noël et M. Jean-Marc Delage, tous membres de la Jeune Chambre de commerce
du Québec métro. Alors, nous vous écoutons.
Jeune Chambre de commerce du Québec
métropolitain
M. Lamy (Jean): M. le Président, Mme la ministre, M. le
critique de l'Opposition officielle, membres de la commission. Je suis Jean
Lamy, président de la Jeune Chambre de commerce du Québec
métro.
Notre organisme regroupe 600 jeunes gens d'affaires de moins de 35 ans
de la grande région de Québec qui sont intéressés
au développement de celle-ci. Pourquoi la Jeune Chambre de commerce du
Québec métro a-t-elle choisi de se préoccuper de la
formation à l'international au niveau collégial? Nous constatons
tous que notre monde est plus que jamais en évolution et qu'il s'ensuit
une mondialisation des marchés importante. À titre d'exemple, on
n'a qu'à penser au libre-échange à trois, au
développement du marché européen. Dans ce contexte,
puisque l'objectif de la commission, tel que le mentionnait Mme la ministre,
est d'honorer avec discernement et détermination les rendez-vous de
l'avenir du Québec, la Jeune Chambre de commerce du Québec
métropolitain a choisi de faire le constat des secteurs forts du
Québec au niveau de ses exportations par rapport au reste du Canada dans
le contexte des grappes industrielles et, également, de faire le constat
de la situation actuelle des programmes de formation à l'international
au niveau collégial. Nous aurons, par la suite, des recommandations qui
pourront intégrer ces deux éléments.
Je suis accompagné cet après-midi des membres de la Jeune
Chambre de commerce qui ont réalisé cette étude, suit M.
Michel Guillet, à ma droite, qui traitera de l'environnement
économique provincial, Mme Nathalie Noël, à ma gauche, ainsi
que M. Jean-Marc Delage, qui traiteront du diagnostic, des forces et faiblesses
de la formation à l'international. Je cède la parole à M.
Michel Guillet.
M. Guillet (Michel): Alors, avant de parler plus
spécifiquement des programmes de formation à l'international qui
existent déjà ou de ceux qu'il faudrait développer, il
nous a paru important de replacer la problématique dans l'environ nement
économique provincial. Alors, c'est peut-être un bien grand mot.
Je dirais qu'on a voulu plus particulièrement mettre en évidence
la compétitivité du Québec vis-à-vis du reste du
Canada en ce qui concerne le niveau de ses exportations.
Alors, pour réaliser cette démarche, nous avons voulu
distinguer les secteurs forts au Québec, toujours vis-à-vis des
exportations, et ceux qui ont plus de difficultés. La démarche se
déroule comme suit. Le premier aspect à considérer, c'est
qu'on ne peut pas simplement utiliser, pour mettre en évidence
l'importance des exportations, les données brutes concernant les
différents secteurs d'activité économique dans ce domaine.
Donc, ça nous a amenés à décomposer le niveau des
exportations par secteurs d'activité selon trois composantes. Les deux
premières, sur lesquelles je ne m'étendrai pas beaucoup, sont ce
qu'on appelle la part nationale et le mix industriel. Alors, la part nationale
représente la part de l'évolution des exportations du secteur
d'activité considéré qui suit l'évolution nationale
de l'ensemble des exportations. Le mix industriel représente la
variation du niveau des exportations du secteur que l'on peut attribuer
à la variation nationale du secteur. Et le troisième, qui nous
préoccupe plus particulièrement, est ce qu'on appelle l'effet
concurrentiel et qui représente d'une certaine manière l'avantage
comparatif du Québec par rapport au reste du Canada dans le secteur
industriel considéré.
Le deuxième aspect de la méthodologie concerne le choix
des secteurs d'activité que nous avons considérés. Alors,
pour réaliser notre démonstration, nous avons utilisé la
notion de grappes industrielles. La raison en est simplement qu'il s'agit du
regroupement qui est utilisé par le gouvernement du Québec dans
le cadre de sa stratégie de développement économique.
Donc, ça nous a semblé particulièrement pertinent
d'utiliser cette notion
Si on en vient maintenant aux résultats que nous avons obtenus,
alors, on pourra à ce sujet consulter le tableau à la page 5 de
notre mémoire. Alors, dans ce tableau, nous avons
considéré deux périodes, à savoir les années
1989-1990 et les années 1990-1991 dans lesquelles nous avons
voulu mettre en évidence l'effet concurrentiel. Alors, ce qu'il
faut bien voir dans ce tableau, c'est qu'on peut avoir des secteurs
d'activité pour lesquels l'effet concurrentiel tel que calculé de
la manière que j'ai décrite succinctement auparavant, donc on
peut avoir des secteurs dans lesquels l'effet concurrentiel pourra être
négatif alors que le niveau brut des exportations est positif. C'est le
cas en particulier dans le cas de l'aérospatiale, qui pourrait, selon la
terminologie qu'on a utilisée jusqu'à maintenant, être
considérée comme un secteur en relative difficulté d'un
point de vue concurrentiel par rapport au reste du Canada. Si on prend, par
contre, le cas des industries culturelles, on voit que l'effet concurrentiel
dans les deux cas est positif, donc il s'agit d'un secteur qui est relativement
en bonne santé en ce qui concerne ses exportations. De la même
façon, on pourrait analyser l'ensemble des secteurs.
Alors, il faut bien retenir que les résultats que nous
présentons ici sont fragmentaires et sont plus indicatifs que
significatifs. Mais ce que nous voulions souligner par cette démarche,
c'est la façon dont le ministère de l'Industrie et du Commerce
travaille actuellement pour identifier de manière plus précise
les secteurs industriels forts et ceux qui ont plus de difficultés, au
niveau des exportations toujours, parce que nous pensons que le
développement des cours de formation à l'international au niveau
collégial devrait se faire de manière prioritaire dans les
secteurs que l'on va identifier comme forts. (15 h 10)
Alors, je laisserais maintenant la parole à Nathalie Noël
pour qu'elle nous parle, justement, plus en détail de ces programmes de
formation.
Mme Noël (Nathalie): Après cet examen de
l'environnement économique, on a voulu voir ce qui se faisait
aujourd'hui dans le réseau collégial québécois en
formation à l'international pour pouvoir poser un diagnostic de la
situation et voir quelles sont, à notre avis, les forces et les
faiblesses de cette formation. On a commencé en consultant un
questionnaire qui a été envoyé aux collèges par le
ministère de l'Enseignement supérieur et qui est intitulé
«Les actions de coopération avec l'extérieur et de
sensibilisation à l'international des cégeps». De
ça, il ressort qu'il y a une certaine conscientisation du réseau
collégial ou des cégeps, ou de certains cégeps, aux
nouvelles réalités internationales. Je n'irai pas dans les
détails, mais on peut dire qu'il y a deux types d'activités que
les cégeps ont entreprises en international. Il y a des activités
scolaires ou parascolaires de sensibilisation et il y a, d'autre part, des
stages à l'étranger ou des exportations de ressources
éducatives. Ensuite, en consultant les répertoires des
différents programmes qui sont offerts au cégep, on a pu, par la
suite, faire un tableau récapitulatif des forces et des faiblesses qu'on
a identifiées en ce qui concerne la formation à l'international.
Vous retrouverez ce tableau à la page 9 de notre mémoire.
Moi, je discuterai de la formation générale et mon
collègue, Jean-Marc Delage, discutera de la formation technique.
En ce qui concerne la formation générale, on peut dire
qu'il y a plusieurs forces qu'on a identifiées, puisqu'il y a eu une
certaine adaptation dans plusieurs cégeps, surtout au niveau des
programmes de sciences humaines. Donc, on a identifié trois principales
forces qui sont: une prise de conscience du phénomène de la
globalisation des marchés et des différences culturelles qui sont
sous-jacentes à cette globalisation-là et qui restent; la
possibilité de stages à l'étranger, même
limités, surtout pour les professeurs, mais, parfois, pour les
étudiants; et aussi, dans certains cas, il y a des exemples qui sont
mentionnés dans notre mémoire, une réorientation du
contenu des programmes de sciences humaines.
Cependant, on a identifié une faiblesse qui est un peu
générale, c'est-à-dire que ces possibilités de
formation à l'international, du côté de la formation
générale, sont limitées à un nombre assez restreint
de cégeps. Les stages, aussi, c'est très limité et la
formation à l'international aussi est faite dans relativement peu de
cégeps.
Maintenant, on va discuter de la formation technique.
M. Delage (Jean-Marc): Suite à l'analyse de Nathalie, moi,
je vais, pour ma part, aborder tout ce qui est programmes de formation
technique au niveau de l'international. À ce niveau, je vous
réfère à l'annexe B qui donne une nomenclature des cours
au niveau des deux programmes qui existent de techniques à
l'international. Donc, il en existe deux.
Un premier, c'est techniques de commerce international. C'est offert
dans trois cégeps au Québec. Les conditions d'admission sont les
suivantes. On parle d'un an d'expérience en commerce international ou
encore de deux ans d'expérience en administration de façon
générale. De plus, il doit y avoir 20 unités de cours
complétées dans un programme collégial. Ce programme de
techniques est un programme d'établissement, c'est-à-dire qu'il
est élaboré par certains collèges en particulier. Donc, ce
n'est pas un programme qui est offert dans l'ensemble du réseau des
cégeps du Québec. Ça, c'est le premier programme.
Le deuxième, c'est un programme de marketing
spécialisé à l'exportation. Il est offert dans simplement
un cégep au Québec, c'est le cégep de Sainte-Foy. Les
conditions d'admission sont les suivantes, c'est-à-dire un certificat
d'études collégiales en techniques administratives, et l'autre
condition, c'est d'avoir une excellente connaissance de l'anglais et du
français, tant parlé qu'écrit. C'est aussi un programme
d'établissement, c'est-à-dire qu'il est élaboré
par
certains cégeps seulement.
Maintenant, je vais y aller de l'analyse en fonction des forces et des
faiblesses de ces deux programmes. La première force, c'est que ces deux
programmes sont deux très bons programmes quant au contenu, à
notre avis. Une deuxième force est le fait que l'entrée dans ces
programmes est limitée puisqu'il existe des prérequis. C'est une
force dans la mesure où ceux qui vont s'inscrire à ces programmes
sont réellement intéressés à ces programmes. Une
troisième force, c'est la possibilité de stages qu'ont les
professeurs de plusieurs techniques au cégep, d'aller faire des stages
ou des échanges dans des pays étrangers. C'est sûrement une
très bonne force.
Quant aux faiblesses, la première faiblesse qu'on a
constatée, c'est qu'il y a un accès à la formation
à l'international qui est presque inexistant dans la plupart des
programmes de techniques au cégep, en particulier dans les secteurs
forts qu'on a précédemment identifiés. Ça fait en
sorte que les étudiants d'un programme donné, exemple, techniques
de foresterie, ne peuvent pas, généralement parlant, avoir
accès à des programmes sur l'import ou l'export. C'est un
exemple. Maintenant, les programmes existants ne sont pas offerts à
l'ensemble du réseau régulier, c'est les deux programmes que j'ai
mentionnés tout à l'heure. C'est, je pense, dans quatre ou cinq
cégeps que ça s'offre, au total.
Pour terminer, c'est que les conditions d'admission à ces
programmes sont, à notre avis, très, très discutables,
surtout dans le cas où on exige de l'expérience. C'est une lacune
dans la mesure où quelqu'un qui termine son secondaire V, profil
régulier, même s'il a une note qui est très, très
bonne, ne pourra pas accéder à ces programmes-là s'il n'a
pas d'expérience. Alors, à notre avis, c'est une lacune
importante.
Pour terminer, on doit dire que, quand on a fait l'analyse de la
présence du cégep à la formation à l'international,
on a essayé de ne pas étudier le cégep comme un acteur
isolé, mais comme un acteur faisant partie d'un ensemble. Cet
ensemble-là, c'est, bien sûr, le cégep. C'est aussi les
universités et les agences gouvernementales.
En ce qui concerne les universités, la plupart des
universités offrent des mineures, des majeures, ou encore des
spécialisations en commerce international au niveau du
baccalauréat, et elles offrent aussi, la plupart, une
spécialisation au niveau de la maîtrise en commerce international.
Au niveau, maintenant, des gouvernements, on parle de façon plus
précise de deux agences gouvernementales qui sont plus
concernées, c'est-à-dire le ministère des Affaires
internationales et le ministère de l'Industrie et du Commerce. En ce qui
concerne le ministère des Affaires internationales, ils ont, eux, un
ensemble de sept cours liés à la formation à
l'international et quelques séminaires également.
Au niveau du ministère de l'Industrie et du Commerce, il existe
un séminaire qui a trait au commerce international.
Ce qu'il faut retenir de tout ça, au niveau des techniques, c'est
qu'il se fait très peu d'activités de formation à
l'international, particulièrement dans les régions. Il s'en fait
un peu à Montréal, mais, pour ce qui est du reste, il se fait
très, très peu de choses. Et c'est sûrement là une
occasion pour les cégeps de combler le vide laissé par certaines
universités ou encore le gouvernement, entre autres.
Alors, sur ce, je vais laisser la parole au président, qui va
faire état de la conclusion et des recommandations.
M. Lamy: Alors, après avoir entendu ces constats, nos
recommandations qui peuvent guider le positionnement stratégique des
collèges, toujours dans le contexte de la formation à
l'international, sont les suivantes. D'abord, la Jeune Chambre de commerce du
Québec métropolitain recommande la création d'une table
ronde sur l'éducation laquelle regrouperait, entre autres, des
intervenants des secteurs public, parapublic et privé. Les participants
à cette table seraient en mesure d'exprimer les besoins respectifs des
marchés à l'intérieur desquels ils évoluent. Il
s'agit donc de créer un mécanisme qui permet d'ajuster la
formation collégiale selon les besoins des marchés, et cela, sur
une base régulière. Ensuite, nous recommandons que les programmes
de formation collégiale qui sont liés aux secteurs concurrentiels
québécois incluent des cours de formation à
l'international. Par exemple, si on prend les gens qui sont formés en
foresterie, nous jugeons que ceux-ci doivent avoir un minimum de connaissances
de l'import-export.
Concernant la formation générale au niveau
collégial, la Jeune Chambre de commerce du Québec métro
recommande une augmentation du nombre de cégeps qui offrent des cours
axés sur l'international dans les programmes de sciences humaines. Il
s'agit donc d'intégrer dans les programmes de sciences humaines de la
formation à l'international. Au niveau de la formation technique, nous
recommandons d'étendre à un plus grand nombre de cégeps
les programmes techniques et d'en faire des programmes de réseau.
Finalement, consciente que Montréal représente le
pôle majeur des activités internationales au Québec, la
Jeune Chambre de commerce du Québec métro considère
néanmoins que l'ensemble du Québec doit tenir compte des
nouvelles réalités internationales s'il désire renforcer
sa position concurrentielle sur les différents marchés. Il s'agit
donc d'arrimer la formation collégiale dispensée en région
avec les secteurs forts de chacune de celles-ci. (15 h 20)
Alors, je vous remercie d'avoir permis aux
jeunes gens d'affaires de la région de Québec de
s'exprimer cet après-midi. Merci.
Le Président (M. Hamel): Je vous remercie beaucoup d'avoir
été aussi concis. Et, comme le veut la tradition, j'inviterai Mme
la ministre à procéder à l'échange.
Mme Robillard: Merci, M. le Président. J'aimerais saluer
d'abord la Jeune Chambre de commerce du Québec métro, et vous
dire que nous apprécions que vous ayez porté un
intérêt aux travaux de cette commission. Plusieurs d'entre vous,
j'imagine que ça ne fait pas très longtemps que vous avez
terminé l'ordre collégial, alors vous êtes bien
placés pour nous en parler. Et je vois qu'au niveau de votre
mémoire vous avez insisté, de façon particulière,
M. Lamy, sur toute la dimension de l'international. Vous avez pris ce que je
peux appeler ce biais, ce biais de l'international dans toute votre analyse, et
vous n'avez pas touché aux autres dimensions. Pourquoi?
M. Lamy: II est bien certain qu'il aurait été
intéressant de toucher à plusieurs aspects dans le cadre de cette
commission. Par contre, nous souhaitions être distinctrfs. Pourquoi la
formation à l'international? Bien, le but de la formation
collégiale ou formation quelle qu'elle soit, c'est de former de la
main-d'oeuvre québécoise qui soit compétitive et, à
notre avis, la formation à l'international sera un prérequis
essentiel pour avoir une main-d'oeuvre québécoise
compétitive, qui sera capable d'être compétitive dans le
contexte de la mondialisation des marchés.
Mme Robillard: Mais, M. Lamy, vous allez être d'accord avec
moi qu'on peut regarder la formation à l'international sous
différents aspects, je dirais. D'abord, on peut parler d'une ouverture
à l'international qui peut couvrir tous les enseignements, la dimension
à l'ensemble des enseignements de façon générale.
On peut en parler quand c'est des cours plus spécifiques ou des
activités à l'intérieur des programmes, et je pense que
vous en avez soulevé quelques exemples. Le programme de sciences
humaines où il y a une douzaine de cégeps qui ont mis des
activités très particulières sur l'international;
ça peut être des programmes en tant que tels, comme les deux
attestations d'études collégiales que nous connaissons qui sont
des programmes spécifiques, mais surtout des programmes qui s'ajoutent
à une formation de base, hein, comme c'est une attestation; comme il
peut y avoir différents outils aussi que l'étudiant doit
acquérir justement pour faire du commerce international. Pour moi,
l'international, c'est ça au niveau de l'ordre collégial. Ce
n'est pas strictement le fait d'avoir des cours très précis. Si
ce n'est que je ne vous ai pas entendu sur la maîtrise des langues qui...
Pour faire du commerce interna- tional, s'il y a quelque chose d'essentiel,
c'est bien ça; au moins, la bonne maîtrise de la langue maternelle
plus une maîtrise de la langue seconde. Mais je ne vous ai pas entendu
dans cette voie-là. Pourquoi?
Mme Noël: Si je peux prendre la parole. En ce qui concerne
les langues, c'est qu'on doit faire la différence ici entre le
technicien et le professionnel. Le technicien, si on parle des deux programmes
techniques ou d'attestations qui se rajoutent à une formation technique,
c'est sûr que les langues sont importantes, mais c'est moins important
que pour quelqu'un qui est un professionnel qui va chercher des marchés,
qui va conclure les contrats. Là, on parle de quelqu'un qui s'occupe
vraiment de la gestion quotidienne du commerce international. On peut faire
ça sans jamais sortir de son bureau, comme vous savez, en travaillant
simplement sur son ordinateur. C'est à ce niveau-là qu'on avait
identifié plus... Disons qu'il y avait plus de besoins étant
donné qu'il y avait un nombre très limité de cégeps
qui l'offraient. C'est pour ça qu'on a décidé de ne pas
insister sur la question des langues, même si c'est vrai que c'est une
question importante, j'en suis consciente.
M. Oelage: Juste pour compléter. Au niveau des langues, je
pense qu'on a peut-être pris pour acquis que les langues, c'était
un petit peu du ressort des écoles secondaires de s'assurer qu'il y ait
une connaissance suffisante à ce niveau-là. Il y a d'autres
intervenants qui peuvent s'occuper des langues. Parce que, effectivement, c'est
essentiel, c'est même primordial de maîtriser au moins deux
langues, si ce n'est trois, à l'international. Je pense qu'on s'est dit
que ce n'était pas réellement du ressort des cégeps de
poursuivre...
Mme Robillard: Si vous pensez qu'on peut avoir une maîtrise
de trois langues à partir strictement des ordres d'enseignement primaire
et secondaire, je vous dirais, les membres de la Jeune Chambre de commerce, que
vous êtes dans le domaine de l'utopie. Nous avons déjà des
problèmes pour qu'il y ait une maîtrise au niveau de deux langues,
alors, quand on parle d'une troisième langue...
Une voix: Même d'une.
Mme Robillard: Même d'une langue. Alors, quand on parle
d'une troisième langue et que, de plus en plus, les marchés
même asiatiques se développent, vous le savez très bien, ne
pensez pas que l'apprentissage de ces langues-là va se faire au niveau
des ordres primaire et secondaire. C'est pour ça d'ailleurs que nous
avons eu beaucoup de représentations ici. On a parlé de langue
seconde, mais, aussi, on a parié d'autres langues, de possibilité
d'apprentissage d'autres
langues, même au niveau de l'ordre collégial, et, je
pourrais vous dire, même à l'ordre universitaire où, vous
le savez très bien, il y a aussi l'apprentissage de la langue qui se
fait là. Est-ce à dire, M. Lamy, donc, que sur la formation
générale, je dirais, qui se donne au niveau du collégial,
au niveau de la Jeune Chambre, vous n'avez pas fait de réflexion
particulière et vous n'avez pas d'autres recommandations à nous
faire? C'est exact?
M. Lamy: Nous avons «focussé» uniquement sur
la formation à l'international.
Mme Robillard: Strictement sur ça? M. Lamy:
Exact.
Mme Robillard: Bon, parfait. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Hovington): M. le député
d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Oui, rapidement. Je veux vous saluer cordialement et
je suis heureux que vous ayez profité de l'occasion pour venir nous
donner l'éclairage que vous souhaitiez faire, et, vous venez de
l'indiquer, vous souhaitiez nous en donner un sur la dimension que vous avez
développée davantage qui est la formation à
l'international. Moi, je n'ai pas de difficulté à vivre avec
ça puisque, effectivement, on n'a pas reçu beaucoup d'avis de ce
genre. Donc, si vous vouliez vous particulariser, vous distinguer, vous l'avez
fait, et ce n'est pas péjoratif, au contraire.
Deux questions. Lorsque vous indiquez que vous souhaiteriez que les
programmes de formation collégiale qui sont liés aux secteurs
concurrentiels doivent inclure des cours de formation à l'international
ou faciliter l'accès des étudiants à des cours offerts
dans d'autres programmes, ça signifie concrètement, à
moins que je comprenne mal, une recommandation d'inclure à la formation
générale des cours de formation à l'international? Alors,
j'aimerais que vous soyez un peu plus explicite. Comment on fait ça,
inclure à la formation générale des cours de formation
à l'international? Quelle forme ça pourrait prendre? Est-ce qu'on
met ça en termes de cours complémentaires ou si vous souhaiteriez
éventuellement regarder même la plage de cours obligatoires?
Mme Noël: Vous avez parlé de la formation liée
aux secteurs forts qu'on a identifiés, c'est différent de la
formation générale.
M. Gendron: Oui.
Mme Noël: Là, on parle de ceux qui sont dans un
secteur qu'on a identifié comme un secteur industriel fort au
Québec, c'est-à-dire fort au niveau des exportations. Là,
on n'a pas pris de décision. On a dit: Ce qui sera le plus facile
à faire; que ce soit d'intégrer dans leurs programmes, que ce
soit pâtes et papiers ou industrie pharmaceutique, des cours de formation
à l'international ou de leur donner accès à des cours dans
d'autres programmes où il y a de l'international. Ça, ce sera
dépendant des disponibilités ou de ce qui sera le plus facile
à réaliser.
En ce qui concerne la formation générale, nous, on a
insisté sur les sciences humaines. Là, c'est d'intégrer
dans les programmes de sciences humaines une formation à
l'international. C'est deux choses différentes.
M. Gendron: Mais, par rapport à ce que vous connaissez,
comment vous en voyez de cours forts, que vous avez identifiés, qui
auraient véritablement un avantage à profiter d'une formation
à l'international?
Mme Noël: C'est les secteurs qui seront identifiés
par les études du ministère de l'Industrie et du Commerce. Ici,
on vous a donné un exemple à titre indicatif. Mais ces secteurs
forts là seront identifiés au cours des prochaines années
grâce à la stratégie des grappes industrielles. Puis les
cégeps eux-mêmes pourront prendre l'initiative. S'ils voient qu'il
y a un besoin dans leur industrie, ou ils ont une industrie qui fait beaucoup
d'import-export et que leurs étudiants doivent avoir un minimum de
connaissances, comme ce que Jean Lamy a dit, là, les cégeps
pourront prendre une initiative. C'est un moyen d'action qu'on propose.
M. Gendron: Ça va. D'une façon plus
générale, vous avez suggéré une table ronde sur
l'éducation. Et, là, j'ai été très attentif.
Je vous cite: «L'acquisition de connaissances théoriques est une
bonne chose en soi, mais le lien entre celles-ci et les besoins
exprimés...» Parce que vous venez de le dire, au préalable,
qu'à cette table ronde les échanges entre des gens plus
liés aux besoins de l'industrie et le monde de l'éducation,
ça permettrait d'apporter plus rapidement les modifications aux
programmes souhaités. Je veux savoir, encore là, sans jugement...
Moi, je prétends que ce n'est pas nécessairement une table ronde
qui va faire fonctionner mieux les comités qui sont mis en place pour...
Bon, sans sortir les noms, vous êtes sans doute au courant qu'il y a un
comité au niveau du ministère de l'Enseignement supérieur
qui a une responsabilité de réviser les programmes. Ce
comité-là, tous les autres intervenants sont venus nous dire
qu'ils souhaitaient qu'il y ait plus d'interrelation entre les gens du
ministère et les gens de l'industrie. Mais est-ce que vous ne croyez pas
que c'est plus de réaffirmer la nécessité que cet
arrimage-là soit plus fort que de rouvrir un autre dispo-
sitif, puis, de toute façon, toutes les recommandations qu'elle
ferait, cette table ronde là, on va être obligé de
retourner aux mêmes instances qui existent? (15 h 30)
Alors, c'est pour ça que je n'ai pas de réticence comme
telle, mais je ne suis pas capable de voir l'élément neuf, ou le
bien-fondé, ou en quoi nous aurions plus d'avantages. Puis, là,
bien, tout de suite je tombe dans la mécanique: la composition de cette
table-là, les buts précis. Si vous la suggérez, vous avez
probablement plus réfléchi que moi. Alors, j'aimerais ça
vous entendre là-dessus, sur sa composition, les buts précis et
ce que ça donnerait concrètement.
M. La my: Votre compréhension était bonne, mais
notre seul objectif en suivant ce point était de s'assurer qu'il y ait
un mécanisme permanent qui permette d'ajuster la formation
collégiale, toujours dans le contexte de la formation à
l'international, selon les besoins des marchés sur une base
régulière, et ce mécanisme-là devra comprendre des
gens des secteurs publics, de l'éducation et des gens de l'industrie.
C'était uniquement dans le bui. de proposer qu'il y ait une
création d'un mécanisme. La forme et tout ça, je pense que
ça peut être discuté de bien des façons. Mais on
souhaite qu'il y ait un mécanisme qui permette de s'assurer que notre
formation est toujours à jour.
M. Gendron: O.K. Mais, puisque vous savez, et vous le dites
très bien, dans l'annexe on voit les cégeps qui dispensent de la
formation à l'international, puisque ça existe, bon, vous dites:
On voudrait qu'il y en ait plus. Je n'ai pas d'objection. Vous souhaitez qu'il
y en ait plus de cégeps qui offrent des cours de formation à
l'international. Mais, puisqu'il y a des cégeps qui le font et que les
cégeps connaissent le mécanisme prévu au ministère
de l'Enseignement supérieur concernant la révision de programmes,
moi, je dis - et c'est juste que je veux vérifier par rapport à
ce que vous venez d'exprimer - que c'est dans ce sens-là que vous
souhaitiez faire la recommandation tantôt. Autrement dit, vous n'avez pas
de trouble à passer par le mécanisme existant.
M. Lamy: On n'a pas de problème à passer par le
mécanisme existant. Néanmoins, on souhaite quand même
intégrer des gens de l'industrie à ce mécanisme-là
pour qu'ils puissent donner le son de cloche exact de la situation du
marché.
M. Gendron: II y a une autre recommandation, bien, sans la faire
formellement, j'aimerais savoir si, au niveau de l'intégration ou de
cette nécessaire relation entre ce qu'on appelle la formation et les
stages en milieu de travail... Vous êtes sans doute ouverts à
ça. Est-ce que vous êtes disposés à accueillir des
stagiaires dans les entreprises avec qui vous avez déjà eu des
relations? Parce que je sais ce que c'est qu'une jeune chambre de commerce. Et
vous avez des liens avec des petites et moyennes entreprises. Est-ce que vous
croyez qu'il y a assez d'ouverture au niveau des PME pour faciliter toute la
dimension des stages en milieu de travail?
M. Lamy: Si l'on se fie à l'expérience de la Jeune
Chambre de commerce à cet effet, oui, certainement, il y a assez
d'ouverture dans les entreprises pour permettre ce genre d'échanges.
Tout à fait. Et un des objectifs de la Jeune Chambre était,
justement, d'essayer de provoquer ces échanges-là depuis quelques
années.
M. Gendron: Je n'ai pas d'autres questions. Je vous remercie
beaucoup.
M. Lamy: Merci.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. Mme la ministre.
Mme Robillard: Merci. Je voudrais remercier les membres de la
Jeune Chambre de commerce d'être venus à la commission. Je pense
que l'analyse que vous avez faite est sûrement un rappel important que,
dans l'ensemble des enseignements, l'ensemble des enseignements du
collégial, autant en formation préuniversitaire qu'en formation
technique, on doit avoir cette dimension de l'international. C'est clair. C'est
déjà le monde d'aujourd'hui. Ce n'est même plus le monde de
demain, c'est le monde d'aujourd'hui. Je pense qu'il faut que les jeunes aient
cette ouverture au niveau de chacune des professions qu'ils veulent exercer
dans la vie. Merci bien de votre témoignage.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. Alors, j'inviterais
maintenant le cégep de l'Abiti-bi-Témiscamingue et
l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue à
bien vouloir prendre place, s'il vous plaît. Nous allons suspendre
peut-être une minute pour leur laisser le temps de s'installer.
(Suspension de la séance à 15 h 34)
(Reprise à 15 h 36)
Cégep de l'Abitibi-Témiscamingue et
Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue
La Présidente (Mme Hovington): La commission de
l'éducation reprend ses travaux avec tous les gens de
l'Abitibi-Témiscamingue, du comté de notre ami de l'Opposition
officielle, de toute la grande région de l'Abitibi-Témiscamingue.
Alors, bienvenue à la commission de l'éducation,
messieurs. Qui sera le porte-parole?
M. Barrette (Lorrain): C'est moi, madame.
La Présidente (Mme Hovington): Et vous êtes qui,
vous?
M. Barrette: Je suis le directeur général du
cégep de l'Abitibi-Témiscamingue, Lorrain Barrette.
La Présidente (Mme Hovington): Le directeur
général, alors c'est M. Barrette?
M. Barrette: Oui.
La Présidente (Mme Hovington): Bonjour, M. Barrette.
Bienvenue à la commission de l'éducation. Voulez-vous nous
présenter vos collègues?
M. Barrette: Oui. Je voudrais d'abord vous dire que nous sommes
très heureux et vous remercier de nous avoir permis de nous faire
entendre à cette commission. Évidemment, ces remerciements, je
les adresse au nom de mes collègues que je vous présente.
D'abord, le recteur de l'Université du Québec en
Abitibi-Témiscamingue, M. Jules Arsenault.
M. Arsenault (Jules): Bonjour.
M. Barrette: M. le secrétaire de l'Université du
Québec, M. Jean Turgeon. M. Turgeon a été aussi, durant
quatre ans, le président du conseil d'administration du cégep de
l'Abitibi-Témiscamingue. Et mon collègue de gauche, c'est le
secrétaire général du cégep.
La Présidente (Mme Hovington): M. Lafond, c'est
ça?
M. Barrette: M. Lafond, c'est exact.
La Présidente (Mme Hovington): Bonjour.
M. Lafond (Yvon): Bonjour.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, allez-y, M.
Barrette.
M. Barrette: Merci, madame. Alors, avant de passer la parole au
recteur de l'université, je voudrais juste prendre quelques secondes
pour vous décrire le territoire sur lequel nos deux institutions
oeuvrent. L'Abitibi-Témiscamingue, vous le savez probablement, c'est un
grand territoire. C'est une superficie de 65 000 kilomètres
carrés, c'est-à-dire deux fois la Belgique. Cependant, eux, ils
ont 10 000 000 d'habitants et nous, nous en avons 145 000. C'est sûr
qu'une telle description peut donner l'impression d'un éparpillement
absolu. Pourtant, 75 % de la population de l'Abitibi-Témiscamingue
réside dans cinq villes et leur périphérie, villes qui
sont aussi les chefs-lieux de cinq municipalités régionales de
comté. Ces villes, je vous les énumère:
Rouyn-Noranda, Val-d'Or, Amos, La Sarre et Ville-Marie. À partir de
Rouyn-Noranda, par exemple, pour atteindre Ville-Marie, il faut parcourir 145
kilomètres. Dans le cas de Val-d'Or et d'Amos, c'est 113
kilomètres et, dans le cas de La Sarre, 97 kilomètres. Les deux
institutions desservent aussi la partie sud de la région
Nord-du-Québec, soit les villes de Matagami et de
Lebel-sur-Quévillon. L'Université du Québec, quant
à elle, dispense des enseignements encore plus au nord.
Autre caractéristique, nous sommes éloignés des
grands centres. Ainsi, nous sommes à 900 kilomètres de
Québec ou, si vous aimez mieux, par avion, nous sommes à 538, 60
$ de la vieille capitale. Voilà les contingences territoriales avec
lesquelles nos deux institutions doivent composer.
Dans les minutes qui vont suivre, le recteur vous présentera son
institution et ses préoccupations en regard de l'enseignement
collégial et, par la suite, je ferai de même en ce qui regarde le
cégep de l'Abitibi-Témiscamingue. M. Arsenault.
M. Arsenault: Bonjour. Vous avez dû remarquer que notre
mémoire ne comporte pas de recommandations. Notre mémoire est
plutôt un témoignage de comment se vit l'enseignement
supérieur en Abitibi-Témiscamingue et la prise en charge par le
milieu, l'Abitibi-Témiscamingue et les deux institutions d'enseignement
supérieur, du développement de l'enseignement supérieur.
On pense, même au-delà de la commission parlementaire,
au-delà des recommandations, qu'il existe encore des capacités de
faire dans le milieu, et notre mémoire propose des défis que se
sont donnés les deux établissements d'enseignement
supérieur en Abitibi-Témiscamingue. Avant de parler de ces
défis, je vais vous décrire un peu ce qu'est l'UQAT et vous faire
un état des collaborations qui existent déjà en
enseignement supérieur en Abitibi-Témiscamingue. (15 h 40)
L'Université du Québec, comme le mémoire de l'UQ
l'a présentée, le mémoire du réseau de
l'Université du Québec, présente que les cégeps et
le réseau de l'UQ, ça a été créé
à peu près des mêmes sources, dans la fin des années
1960, et qui répondaient à un besoin d'accessibilité.
L'UQAT offre des services universitaires depuis cette période, avec
plusieurs affiliations. Aujourd'hui, l'UQAT, c'est 30 programmes au niveau du
premier cycle, 3 programmes de deuxième cycle. C'est 2700
étudiants, un tiers à temps complet. Comme M. Barrette le disait,
c'est des services répartis dans 11 communautés, plus 2
communautés complètement au nord, Ivujivik et Povungni-tuk, et
là, pour prendre l'exemple de M. Barrette, c'est à 1600 $ de
billet d'avion de Rouyn-Noranda. C'est tout près de 7000
diplômés,
l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue,
où 85 % travaillent sur le territoire, de nos diplômés.
J'apporte cette notion-là pour bien faire saisir à la commission
l'importance de l'enseignement supérieur dans les régions. Sur
100 jeunes qui quittent la région pour faire leurs études
supérieures, il y en a seulement 15 % qui reviennent travailler sur le
territoire. Sur 100 à l'UQAT, qui font leurs études chez nous, 85
% travaillent sur le territoire. Donc, c'est important de soutenir ces
établissements. C'est aussi plus de 1 000 000 $ de recherche par
année pour une jeune institution qui a des vocations d'enseignement et
de recherche complètes depuis 1983.
L'enseignement supérieur en Abitibi-Témiscamingue s'est
d'abord caractérisé par une collaboration très
étroite, et je pense qu'on est peut-être la seule région
à présenter un mémoire conjoint
université-collégial, et ce n'est pas un hasard, c'est dû
à une tradition de collaborations depuis la création des deux
établissements. Ces collaborations sont d'abord du côté
peut-être plus facile de départ, les côtés physique,
matériel. On partage des locaux, des services communs,
bibliothèques, laboratoires, dans les centres régionaux - parce
:;u'on appelle ça des centres à La Sarre, dans d'autres
communautés que Rouyn-Noranda - on partage des services, des locaux
qu'on appelle des centres d'enseignement supérieur. On n'appelle pas
ça des centres d'enseignement collégial, d'enseignement
universitaire, on appelle ça un centre d'enseignement supérieur
dans les communautés. Donc, je disais, on partage des
bibliothèques, ce qui permet, à moindre coût, d'offrir des
services supérieurs; des laboratoires pour le développement des
programmes de sciences. On partage aussi, on commence à partager des
ressources humaines; des professeurs du collégial viennent enseigner,
des prêts de services entre les établissements. Et on commence
à partager des projets de recherche. Je donnerais des exemples:
l'unité de recherche en services et technologie minérale qui est
une création, qui est un partenariat entre le collège,
l'université, les entreprises, les autres centres de recherche, le
CADMET qui est en région, des partenariats importants pour
réaliser des services de formation, des services au milieu, des services
de recherche qui répondent aux besoins de notre communauté; des
partenariats dans d'autres projets, comme l'étude de la scolarisation,
l'histoire de la région. Mais il faut aller au-delà de cette
collaboration-là. Il ne faut pas partager uniquement la maison; je
dirais, il faudrait arriver à partager le lit. Il faut aller plus loin
dahs cette collaboration-là.
Et les messages qui nous orientent pour les défis de l'an 2000,
il y a deux messages importants, qualité et pertinence, dans la
réalisation des missions des deux niveaux d'enseignement
supérieur. Je dirais que ces objectifs-là, de qualité et
de pertinence, nous amènent à relever des défis qu'on a
mentionnés dans notre mémoi- re. Un premier défi
important, c'est la scolarisation en Abitibi-Témiscamingue. Nous avons
réalisé une étude en collaboration avec tous les niveaux
d'enseignement, avec le ministère, avec le CRDAT, le Conseil
régional de développement. On connaissait des difficultés,
mais on a fait une étude en trois étapes qui fait état de
la scolarisation. On peut voir que l'Abitibi-Témiscamingue est une des
régions les plus sous-scolarisées du Québec, si on
élimine le Nord. On a déterminé les causes dans un
deuxième volet et nous terminons le troisième volet avec un plan
d'action, un plan d'action qui s'arrime aussi au projet du ministre
Pagé, comme on appelle, chez nous, la mise en oeuvre du plan
Pagé, mais qui est plus large que l'enseignement uniquement
primaire-secondaire, qui regroupe tous les niveaux d'éducation,
où on trouve des partenaires. Les causes, je pourrais revenir
là-dessus plus tard, mais les causes générales, c'est la
valorisation de l'éducation, la valorisation du potentiel des jeunes, la
valorisation des enseignants. C'est tout cela qui est en cause dans notre
société. Dans notre région, c'est encore plus
dramatique.
Je vais raconter une petite anecdote. Chez nous, on a une de nos
étudiantes en comptabilité qui est arrivée première
au Québec, deuxième au Canada, dans les examens des sciences
comptables, et aucun journaliste n'a voulu traiter de cette nouvelle.
L'Université a été obligée de payer 9000 $ pour
faire connaître cela à la population. Et n'importe quel petit
«peewee» qui fait le tour du chapeau fait la première page
des hebdos. C'est ça, le problème profond. On peut trouver
plusieurs petites causes, mais c'est la valorisation. Il faut que notre
société, et la région de l'Abitibi-Témiscamingue
encore d'une façon plus importante, valorise cela, et les trois niveaux:
l'enfant, l'étudiant, le maître, et l'éducation en
général. On a un plan d'action qui touche tous ces volets.
Je dirais que le deuxième défi qu'auront à relever
l'enseignement supérieur, le collège, l'université, c'est
le défi de faire un virage un peu plus fort du côté
scientifique, du côté technologique, et surtout pour
développer les régions du Québec. On pourrait dire le
même discours pour d'autres régions, qu'on appelle
périphériques. Je dirais que le Québec a connu, dans les
années soixante, soixante-dix, une vogue au niveau de
l'éducation. On a formé des maîtres, on en avait besoin. On
a eu une autre période du développement des sciences
administratives; on sait aujourd'hui que ça prend beaucoup de place dans
les universités. Mais le prochain défi important, c'est du
côté des sciences, des sciences appliquées, et, si on veut
développer l'autre volet des économies des régions, qui
sont souvent une économie basée sur les ressources primaires,
s'en aller dans la transformation, l'industrie secondaire, il faut aller plus
loin et valoriser l'enseignement, les secteurs scientifique et
technologique.
Et je dirais que le dernier défi - je m'arrêterai là
- c'est la qualité et l'accessibilité, et c'est peut-être
le plus grand des défis. Ça ne donne rien de scolariser si ce
n'est pas de qualité et ça ne donne rien de développer le
petit secteur technique ou scientifique si on ne le fait pas de façon de
qualité. Et, dans la région, c'est plus difficile à cause
de la dispersion des clientèles. Il faut être créateur,
innovateur, trouver d'autres solutions. La qualité exige une
concentration des ressources, développer des masses critiques, et les
demandes sont fortes pour la déconcentration. Il faut trouver un juste
équilibre et trouver d'autres moyens de rendre les services
universitaires accessibles.
Et on a trouvé des moyens originaux en
Abitibi-Témiscamingue qui nous permettent d'avoir
l'accessibilité, pas nécessairement par des moyens toujours de
bâtisse, d'édifice, de brique et de béton qu'on appelle,
par des réseaux de communications importants. On fait de l'enseignement
par tableaux électroniques. À l'hiver, on va former, à
l'usine Tembec, on va donner une maîtrise en chimie, avec
l'Université de Trois-Rivières, par des professeurs de
Trois-Rivières, dans le secteur des pâtes et papiers. Le
collégial va faire de même avec le collège de
Trois-Rivières, et tout ça, par des moyens mis en commun, puis
aller chercher les ressources où elles se trouvent sur le territoire du
Québec. On n'a pas besoin toujours de déplacer, de créer
de nouveaux programmes. Donc, il faut être capable de trouver des
solutions pas toujours permanentes parce que les besoins sont petits, sont
passagers. (15 h 50)
Et je dirais que, pour la qualité, l'accessibilité, nous
avons un projet d'harmonisation des deux niveaux d'enseignement, ce qu'on
appelle chez nous un «deux plus trois», l'enseignement
collégial et universitaire. Et l'objectif, c'est... dès le
secondaire, l'étudiant ou l'étudiante ne s'inscrit pas au
collégial, il s'inscrit en soi dans un niveau d'enseignement
supérieur. Le collégial général, selon nous,
ça n'a pas de débouchés. Il faut que l'étudiant
soit conscient qu'il s'engage dans une démarche de cinq ans. Et le
défi, ce défi-là est important parce qu'il amène
à créer des groupes, des équipes professorales qui
gèrent l'ensemble, avec un curriculum intégré, de la
sortie du secondaire jusqu'au diplôme universitaire.
J'ajouterais que, dans cette mission-là de
collégial-universitaire, et je reviendrais à ce qu'on soulignait
tantôt, l'importance de la formation générale, ce que mon
confrère, Corbo, soulève souvent, c'est... La formation
générale, selon moi, c'est la maîtrise de trois choses. La
maîtrise des moyens de communication, je voyais la question... Les moyens
de communication, c'est d'abord la langue maternelle; au moins une langue
seconde; les mathématiques qui sont un moyen de communication abstrait;
je dirais l'informatique aujourd'hui qui est un autre moyen de communication;
et, a l'instar des Japonais, j'ajouterais un moyen de communication au niveau
des arts. Cette première maîtrise-là. Deuxième
maîtrise, une maîtrise d'une méthode de travail. Quand nos
jeunes auront cette maîtrise de cet outil qui nous sert partout dans la
vie, être capable de discerner l'accessoire de l'essentiel, être
capable de résoudre des problèmes... Et je dirais une
dernière maîtrise, une maîtrise d'une culture, et cela,
c'est encore plus important dans un contexte, aujourd'hui, d'ouverture, de
mondialisation des marchés.
Ce sont là les défis que se sont donnés les
institutions d'enseignement supérieur en Abitibi-Témiscamingue,
et j'ai l'espoir, la conviction qu'au-delà des chefs
d'établissement, à un niveau beaucoup plus bas, il va se
développer, se nouer des complicités, des solidarités
porteuses d'avenir pour réaliser ces défis que je viens vous
présenter.
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup.
M. Barrette: Est-ce qu'il me reste quelques minutes?
La Présidente (Mme Hovington): Vos 20 minutes sont
écoulées, à moins que j'aie le consentement des deux
côtés.
M. Barrette: Je ne viens pas souvent, hein!
La Présidente (Mme Hovington): On raccourcira les...
Oui.
Une voix: Je vous donne deux minutes .
La Présidente (Mme Hovington): Allez-y, M Barrette.
M. Barrette: Cinq minutes. C'est parce que j'aimerais ça
pouvoir vous présenter quand même l'institution que je
représente et vous dire qu'elle a été créée
en 1967 et qu'elle avait été conçue à
l'époque pour accueillir tous les étudiants de
l'Abitibi-Témiscamingue ainsi que des principales villes du
Nord-du-Québec, c'est-à-dire Lebel-sur-Quévillon ainsi que
Matagami. En cours de route, le cégep a modifié ses modes de
présence sur le territoire. C'est ainsi qu'en 1983 un pavillon a
été ouvert à Amos et, en 1988, un second a
été ouvert à Val-d'Or. Nous sommes aussi présents
à La Sarre et à Ville-Marie via le service de l'éducation
des adultes.
À l'automne 1992, la population étudiante se
répartit comme suit: Rouyn-Noranda, 2000; Val-d'Or, 600
étudiants; Amos, 200, pour un total de 2800 étudiants. Au niveau
de l'enseignement professionnel, c'est 11 programmes que nous dispensons. Il
faut bien le reconnaître, cette déconcentration a permis une
légère augmenta-
tion du taux de passage aux études collégiales, mais
surtout, et surtout, elle a facilité le retour aux études de
plusieurs qui n'étaient pas mobiles, et cette déconcentration a
aussi contribué à la vie culturelle et sociale de ces villes.
Ceci étant dit, il faut bien admettre aussi que la gestion de ces
pavillons présente certaines difficultés au plan de la gestion du
personnel, au plan du partage des responsabilités entre le siège
social et les pavillons ainsi qu'au pian du financement. Sur ce dernier point,
je voudrais simplement vous soumettre que les conditions dans lesquelles
fonctionnent les centres d'enseignement sont tellement différentes d'un
endroit à l'autre que vouloir trouver un modèle de financement
unique est extrêmement difficile.
Parlons maintenant des principaux défis qu'il faudra relever. Je
ne reviendrai pas sur ce que vient de vous dire le recteur de
l'Université, ce fut tellement bien dit. Je me limiterai d'abord
à indiquer que le défi de la scolarisation en
Abitibi-Témiscamingue sera relevé en modifiant nos valeurs comme
société; que la sous-scolarisation en
Abitibi-Témiscamingue n'est pas d'abord liée aux infrastructures,
mais à des valeurs à changer; que la priorité Joit
être centrée davantage sur la qualité plutôt que sur
l'accessibilité; que cette qualité, nous l'obtiendrons par une
formation générale plus large et rigoureuse, par des programmes
professionnels plus souples et bien connectés avec le monde du travail,
par une meilleure harmonisation interordres; que cette qualité devra
être certifiable et crédible.
Je termine en formulant un dernier commentaire. Au cours des
dernières semaines, plusieurs organismes sont venus devant vous et
presque à l'unisson vous suggérer des changements importants, que
ce soit au niveau d'une formation générale plus large, que ce
soit au niveau d'un resserrement des conditions d'admission, que ce soit au
niveau d'une formation professionnelle plus souple, que ce soit au niveau de
l'évaluation des programmes et des institutions. Il faut, je pense,
profiter de ce momentum pour apporter des changements et éviter de faire
un référendum sur chacun de ces changements. Cependant, il faudra
employer, pour les mettre en place, une pédagogie qui nous assure la
collaboration de tous les personnels des cégeps. Et ça, je pense
que c'est extrêmement important. Parce qu'on peut être tenté
de dire: C'est tellement un grand boulevard que ces modifications qui sont
suggérées, qu'on ne prenne pas le temps, je dirais, de
développer ce que j'appellerais cette pédagogie du
changement.
La Présidente (Mme Hovington): Si vous voulez bien
conclure. Peut-être qu'on pourrait élaborer dans la période
des échanges...
M. Barrette: Oui.
La Présidente (Mme Hovington): ...ça faciliterait
le débat.
M. Barrette: Alors, je disais donc qu'il fallait nous assurer la
participation des personnels, et en particulier du personnel enseignant. C'est
là, à mon sens, que repose le succès de ce qui est
à venir. Merci.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. J'ai beaucoup de
représentants de votre grande région qui voudraient vous
questionner sur votre mémoire. Mme la ministre.
Mme Robillard: Merci, Mme la Présidente. Je veux saluer
les gens de la région de l'Abitibi-Témiscamingue et de
façon particulière les deux chefs d'établissement des
institutions d'enseignement supérieur. Je suis contente que vous soyez
là. Lors de ma dernière visite chez vous, je vous avais
expressément invités à venir nous rencontrer en commission
parlementaire pour nous faire part de votre expérience, je dirais, toute
particulière, que vous avez dans votre façon d'approcher
l'enseignement collégial et l'enseignement universitaire. Depuis le
début des travaux de cette commission, nous avons vu beaucoup
d'intervenants. M. Barrette, d'ailleurs, ce que vous venez de dire, je peux
vous dire que je l'accueille très favorablement et que je vais me fier
à la collaboration des directeurs généraux aussi pour
associer leur personnel enseignant dans cette réforme des
collèges.
Beaucoup des intervenants, autant des cégeps et des
universités, sont venus nous parler justement du continuum «deux
plus trois», pour la formation préuniversitaire. On pourrait
parler aussi de la formation technique, étant donné que,
maintenant, 17 % de nos jeunes de la filière de la formation technique
vont aussi vers l'université. Mais essayons, pour les fins de la
discussion, de se centrer sur la filière de la formation
préuniversitaire, le continuum «deux plus trois», le fait
que le jeune doit être conscient qu'il s'engage dans un projet
d'études de cinq ans. Nous avons vu, au niveau de cette commission
parlementaire, beaucoup d'ouverture chez les divers intervenants et, de
façon particulière, chez le monde universitaire, et même le
monde universitaire des régions urbaines, M. Arsenault, à
s'ouvrir vers une plus grande collaboration dans le continuum «deux plus
trois». Mais chez vous, autant à Rouyn qu'à Val-d'Or, vous
avez un projet présentement en tête, celui de favoriser ce
rapprochement du «deux plus trois». Je ne vous parle pas
strictement du rapprochement physique. La nouvelle université sera
construite tout près du cégep, on le sait tous. À
Val-d'Or, la même chose. Mais où en êtes-vous rendus dans ce
projet concret d'avoir une formation plus intégrée pour les
jeunes, d'avoir un continuum? Où en êtes-vous au niveau de vos
ententes? (16 heures)
M. Arsenault: Au niveau des ententes, Mme
la ministre, les deux établissements sont en train de regarder
dans un secteur, je dirais le secteur des sciences humaines au collège
qui vise principalement la formation des maîtres et le secteur des
sciences sociales au niveau universitaire, les équipes sont en train de
regarder les programmes, aussi bien collégiaux qu'universitaires, pour
faire une proposition, qui devrait être prête en janvier,
février prochain, d'intégration des deux ordres d'enseignement.
Et, je dirais, le tronc commun qui peut se développer irait
peut-être au-delà de seulement le premier «deux» au
niveau collégial, qui pourrait, dans ce volet-là, dans ce secteur
disciplinaire, aller peut-être un peu plus loin que deux ans. Donc, les
équipes sont à faire leurs travaux de sorte qu'on vise être
capable de lancer, peut-être pour septembre prochain, les
premières expériences dans le «deux plus trois».
Mme Robillard: Donc, à l'heure actuelle, les
équipes professorales sont en train de travailler sur l'harmonisation
des contenus?
M. Arsenault: C'est ça. Les travaux sont
débutés chez nous et au niveau collégial.
Mme Robillard: Au niveau des responsabilités
académiques aussi?
M. Arsenault: Académiques, surtout académiques
parce que, comme vous le dites, la partie physique, la partie
matérielle, c'est une partie très facile. C'est d'arrimer,
d'amener une collaboration, de développer vraiment une équipe
professorale intégrée des deux ordres pour des cheminements.
Parce que, au-delà des curriculum, il faut beaucoup de coordination au
niveau du corps professoral. Ce n'est pas seulement un exercice qu'on fait pour
développer le curriculum, il faut que ça soit dans la
réalisation, ce projet-là, une équipe d'un corns
professoral, que les professeurs, à l'universitaire autant qu'au
collégial, soient conscients, reçoivent les étudiants qui
sortent du secondaire et pas seulement les professeurs du collégial.
C'est vraiment d'intégrer ces deux niveaux-là.
Mme Robillard: Donc, on pourrait voir poindre un projet-pilote,
si je peux le qualifier ainsi...
M. Arsenault: Septembre.
Mme Robillard: ...concret pour septembre prochain.
M. Arsenault: C'est ça. C'est l'objectif que se sont
donné le cégep et l'université.
Mme Robillard: Est-ce que ce projet se travaille à partir
du nouveau bac que vous avez, qui est très particulier, du bac en
sciences sociales?
M. Arsenault: Ça se travaille au niveau du bac en sciences
sociales et du bac en formation des maîtres au préscolaire et au
primaire.
Mme Robillard: Quelle est la réaction préliminaire
de vos équipes professorales?
M. Arsenault: Chez nous, c'est très positif. Je laisserais
peut-être M. Barrette répondre au niveau collégial, mais,
chez nous, l'équipe professorale est déjà en train de
travailler sur ça. Ils ne se sentent pas menacés, ils voient ce
projet-là extrêmement intéressant. La commission des
études, chez nous, regroupe - vous savez la composition des commissions
des études - six professeurs, six étudiants, et ça a
été accueilli avec beaucoup d'intérêt; d'autres
secteurs aimeraient bien qu'on développe d'autres projets-pilotes.
Mme Robillard: M. Barrette, est-ce que vous avez appliqué
la pédagogie du changement?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Barrette: J'essaie. La semaine dernière, nous
rencontrions les départements impliqués, ou qui seront
impliqués dans cette démarche, et je dois vous dire que nous
avons reçu un accueil sympathique - je ne peux pas aller plus que
ça, à ce moment-ci - c'est-à-dire que les gens sont
prêts à regarder ce que ça veut dire. Évidemment, il
y a un questionnement. Par exemple, on se dit que, au collégial, on ne
doit pas arriver à une formation trop spécialisée. Donc,
comment garder une formation générale large tout en
préparant, peut-être plus immédiatement, les
étudiants à un débouché vers le «trois»
qui suit le «deux»?
Au moment où on se parle, la réunion n'est peut-être
pas terminée, mais le directeur des services pédagogiques est
à Val-d'Or pour rencontrer aussi les professeurs qui seraient
impliqués. Mais il faut quand même dire que, actuellement, ce
projet est à être élaboré pour Val-d'Or. On verra
comment on peut l'exporter à l'intérieur du territoire.
La Présidente (Mme Hovington): M. le député
d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Assez rapidement. C'est sûr que c'est toujours
intéressant pour des gens d'une région, c'est agréable
même de recevoir à la «maison du peuple» les
représentants du haut savoir, surtout quand le mémoire est
présenté dans un quatuor où on a
délégué les deux concertos seniors pour faire la
présentation, pour démontrer combien vous vivez mutuellement une
collaboration soutenue.
Sérieusement, je pense que c'est un fait que
l'Abitibi-Témiscamingue peut bénéficier d'une
très étroite collaboration des deux responsables des
établissements d'enseignement supérieur. La réalité
de la région, je la connais, après plusieurs années.
Alors, comme Rémy, mon collègue de Rouyn-Noranda, veut vous poser
quelques questions, moi, j'aurais juste une question et un commentaire.
M. Arsenault, recteur de l'université, vous avez insisté,
avec raison, énormément sur la différence qu'il y a dans
la rétention des diplômés lorsqu'ils sont formés
chez nous versus lorsqu'ils doivent aller quérir leur formation
universitaire à l'extérieur. Je voudrais avoir l'attention de
tout le monde. C'est fantastique que, sur un indice 100 comme expression ou sur
une cohorte de 100 personnes, si on en forme chez nous, à
l'université, 100, nous en retenons 85 et, si nous en formons 100
à l'extérieur de l'Abitibi, nous en retenons 15. Alors, c'est des
proportions qui devraient nous éclairer combien il est important de tout
faire pour que le plus de temps d'études de nos jeunes Abitibiens et
Témiscamiens puisse se passer chez nous. Et là ma question
précise est à M. Barrette.
Je suis toujours ..eureux, M. Barrette, de voir que, dans un
mémoire que le collège présente, il indique qu'en 1982 le
collège a changé un petit peu sa vision, a décidé
de s'ouvrir d'une façon un peu plus large, a copié un peu ce que
l'université faisait depuis plusieurs années, c'est-à-dire
donner suite à des demandes de déconcentration. M. Arsenault a
insisté là-dessus, qu'il y avait une forte demande pour de la
déconcentration des études collégiales.
En termes concrets, M. Barrette, j'aimerais ça, moi, puisque
l'expérience dure depuis 10 ans... Je parle, bien sûr, de
l'expérience amos-soise. Vous le savez très bien que ce n'est pas
tellement convenant que nous n'ayons pas réussi à enrichir depuis
10 ans cette expérience-là. Vous le savez, la demande est
répétée, elle est largement étoffée. Il est
évident que, si on veut être vraiment soucieux d'une meilleure
offre de cours au collégial pour nos jeunes, il faut offrir les sciences
pures à Amos, et il n'y a pas de raison d'offrir un programme de
sciences. Il n'y a pas de raison objective.
Et, puisqu'on a la chance de vous avoir et d'avoir la ministre, la
question que je vous poserais, c'est la suivante: Si vous aviez des garanties
sur les quelques coûts additionnels que représenterait l'offre
d'un cours de sciences pour enrichir l'expérience amossoise de
déconcentration - et, à courte vue, les quelques coûts
additionnels, c'est pour une courte période, parce qu'on y sauverait
tellement de coûts, compte tenu qu'on garantirait l'avenir de
l'expérience et qu'on permettrait à un plus grand nombre de
jeunes étudiants amossois et du bassin au niveau collégial de
pouvoir prendre la formation collégiale et, plus tard, universitaire
à partir d'une expérience de déconcentration enrichie...
Alors, ma question à M. Barrette: Est-ce que, effectivement, si la
ministre consentait à donner les crédits requis au
collège, vous seriez plus ouvert à définitivement prendre
une décision qui s'impose, à ma connaissance, dans cette demande
de déconcentration constamment répétée, mais
même réponse depuis plusieurs années?
M. Barrette: Vous vous imaginez bien que j'avais prévu
cette question.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Gendron: Bien, j'espère. J'espère que vous
l'avez prévue parce que vous êtes à l'affût des
dossiers de l'actualité.
M. Barrette: Oui. Des voix: Ha, ha, ha!
M. Barrette: Écoutez, je vais vous répondre de la
façon suivante. Depuis 1982, j'ai appris, dans ce dossier-là,
à ne pas être trop, trop dogmatique, de sorte que... Il n'en
demeure pas moins que, lorsque nous avons adopté notre plan de
développement l'année dernière - ce n'est rien de
gelé dans le béton - il me semble que nous avions des raisons qui
justifiaient la prise de position que nous avons. Vous n'êtes pas oblige
d'être d'accord, mais nous avions des raisons de le faire. Comme vous le
disiez tantôt, peut-être que ce ne sont pas des raisons
trans-cendantales, de sorte qu'il pourrait y avoir d'autres raisons qui nous
amènent à changer d'idée. Mais, nous, on pensait que ce
n'était pas une mauvaise idée que de dire qu'en
Abitibi-Témiscamingue, compte tenu de la population, il fallait qu'il y
ait une certaine concentration quelque part et, donc, on pensait qu'on pouvait
concentrer le développement de l'enseignement collégial davantage
dans l'est, à Val d'Or, et dans l'Ouest, à Rouyn-Noranda. On peut
ne pas être d'accord avec ça, mais, nous, on pense que
c'était ça. (16 h 10)
Deuxième affaire. On s'est dit: En sciences, voilà un
programme qui attire quand même beaucoup moins d'étudiants que les
siences humaines, par exemple. Effectivement, à Amos, le bassin que nous
avions évalué, que nous avions estimé était quand
même très limité. Autre chose. Un principe qui nous a
guidés, ça a été de dire: On ne déconcentre
pas un programme qui ne générerait pas un ou deux professeurs
dans une discipline. Ça aussi, il me semble que c'est valable. Ce n'est
pas transcendantal, comme je le disais tantôt, mais il me semble que,
donner un enseignement et ne pas être capable de baser à cet
endroit où on donne l'enseignement un professeur à temps complet,
ça nous apparaît difficile. Ce n'est pas impossible, d'autres le
font.
Finalement, la question d'Amos m'apparait aussi être très
différente de ce que l'on voit dans d'autres sous-centres, ne serait-ce
que pour la proximité. À Amos, on est à quelque 74 km de
Val d'Or où se dispense de l'enseignement. Je dis qu'on pourrait
même regarder la possibilité de faire voyager ces gens-là
deux jours-semaine pour aller suivre des cours en sciences, quitte à ce
que les autres cours continuent à être dispensés à
Amos. Aussi, il faut bien dire que le milieu regarde un petit peu plus loin et
il se dit: Oui, si on enrichit l'expérience d'Amos qui, d'ailleurs, a
été enrichie... Vous dites qu'on ne l'a jamais enrichie, mais on
l'a enrichie. On l'a enrichie cette année, on donne la troisième
année de techniques administratives, ce qui n'était pas fait
avant. Autre chose. Je pense qu'on l'a aussi enrichie parce que vous savez
très bien qu'au cours des dernières années nous avons
quand même réussi à donner des cours à plein temps,
par exemple, en recyclage de techniques infirmières. Ça s'est
fait à Amos et pas ailleurs. Alors, je pense qu'on a quand même
utilisé le pavillon le mieux que l'on peut.
Si on nous dit: Bien, il faut que vous alliez donner les sciences
à Amos, puis voilà l'argent requis... Sauf que vous me permettrez
de penser que cet argent pourrait être utilisé autrement.
Voilà ma réponse.
M. Gendron: Mon collègue.
La Présidente (Mme Hovington): J'ai besoin du consentement
de tous les parlementaires pour vous reconnaître, M. le
député de Rouyn-Noran-da-Témiscamingue.
Une voix: On a une hésitation.
Mme Robillard: Bien, là, Mme la Présidente, j'ai
une hésitation.
La Présidente (Mme Hovington): Oui? Parce que vous
n'êtes pas membre de la commission. Alors, j'ai besoin de
l'autorisation.
M. Trudel: Ha, ha, ha! Et, aux affaires sociales, je ne sais pas
ce qu'on va faire quand on va arriver. Ha, ha, ha!
Mme Robillard: non, mais, à la condition que le
député de rouyn-noranda-témiscamingue ne fasse une autre
annonce gouvernementale en avance de la ministre...
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Robillard: ...je vais lui donner la parole.
M. Trudel: Moi, ça me coûte moins cher! Des voix:
Ha, ha, ha! la présidente (Mme Hovington): alors, allez-y, m.
le député. ha, ha *?\
M. Trudel: Merci, Mme la Présidente. Je veux souhaiter la
bienvenue au directeur général et au recteur, et à MM. les
secrétaires généraux de ces deux établissements
d'enseignement supérieur importants pour la région de
l'Abitibi-Témiscamingue. On ne perdra pas trop de temps sur les
politesses parce qu'on se connaît bien. On sait tout le travail que vous
accomplissez, mais il faut quand même souligner que c'est important, le
geste symbolique que vous posez de vous présenter ici, le collège
et l'université, au moment où on examine ce qui se produit dans
les collèges. Ça veut dire que vous nous signifiez
concrètement qu'il y a des pistes dans lesquelles on peut s'engager.
À tout le moins, on doit examiner ces pistes, cette piste de travail en
vue de faire plus avec ce que nous avons et avec un ordre de moyens qui, il ne
semble pas, va énormément se développer au cours des
prochaines années.
Moi, j'aimerais toucher l'aspect de la recherche; vous le soulignez dans
votre mémoire. J'aimerais que vous puissiez nous donner quelques
dimensions particulières de cette collaboration qui existe, entre
collège et université, des ressources professorales, entre les
deux niveaux d'enseignement, en particulier au niveau du secteur des mines, de
l'unité de recherche et de services en technologie minérale.
C'est parce que je voudrais qu'on donne ici une illustration des
possibilités très contrètes qui peuvent exister pour le
développement du secteur de la recherche à travers ces deux
ordres d'enseignement supérieur, comment ça se passe et quelques
éléments de résultats de la part du collège et de
l'université au cours des dernières années quant à
la combinaison des ressources au niveau de la recherche entre les deux
établissements et de la complémentarité qui s'est
installée.
M. Arsenault: Je pense qu'il existe des collaborations. Je dirais
que ce qui nous inspire un peu, c'est un peu le support, la synergie qu'on a
développée à Rimouski. Je regarde dans le secteur
océanographique où on retrouve aussi bien le collège, qui
a des orientations, que l'université, l'INRS - on retrouve l'organisme
fédéral. C'est la même chose qu'on veut développer
en Abitibi-Témiscamingue dans le secteur mines. C'est une unité
de recherche dont le conseil d'administration est composé tiers, tiers,
tiers: tiers représentants du collège, les professeurs, tiers de
l'université et tiers des entreprises. J'ajouterais à cela - qui
y participe beaucoup - le centre spécialisé en mines du
cégep de l'Amiante. Il y a une ressource qui y est affectée et
qui est très importante pour cette unité de recherche là.
Il se réalise des projets, des services; on me faisait le point
là-dessus hier, aussi bien de la recherche que des services
qu'on donne aux entreprises, et je dirais qu'on est en train de
développer un créneau spécifique qu'on retrouve dans le
plan de développement de l'université, qui est l'environnement
minier.
Vous savez présentement qu'en Abitibi-Témiscamingue c'est
plus dispendieux de fermer une mine que de l'ouvrir à cause des
protections qu'on doit assurer de l'environnement. Donc, il y a des projets de
recherche importants où, je pense, présentement, il y a un
professeur du cégep qui est directeur de l'unité de recherche
depuis - c'est un prêt de service - trois ans, deux ans, trois ans. Donc,
c'est une collaboration très étroite dans les projets de
recherche, et le corps professoral du cégep est très bien
scolarisé. Il y a des docteurs qui ont accès à des
organismes subventionnaires. Il se réalise des projets de recherche de
façon importante en Abitibi-Témiscamingue. Et la venue du CANMET
à Val-d'Or est complémentaire et bonifie encore cet axe de
recherche. Donc, c'est un projet majeur de collaboration. On pourrait le donner
dans d'autres secteurs, en foresterie aussi, qui est un volet important au
niveau économique de l'Abitibi-Témiscamingue. Je ne sais pas si
vous voulez avoir plus d'exemples, pius concrets.
M. Trudel: Mais, du côté du collège, est-ce
que la collaboration et la... Vous venez de nous dire, par exemple, que le
directeur de cette unité de recherche est en provenance du
collège.
M. Arsenault: Oui.
M. Trudel: Est-ce que ça correspond aussi aux attentes et
aux objectifs que vous vous étiez fixés?
M. Barrette: II faut aussi dire qu'en plus de cela l'ensemble des
équipements de notre département de technologie minérale
est entièrement à la disposition des chercheurs, autant de
l'université que du collège. Alors, la collaboration va
jusque-là.
M. Trudel: Écoutez, très rapidement, parce que je
pense que la commission prend un peu de retard dans ses travaux, mais il y a
deux questions, quand même, inévitables sur le plan
régional, qu'il faut adresser surtout à M. Barrette. C'est toute
la question du développement d'un cégep autonome à
Val-d'Or. Il faut que vous nous disiez ici, devant cette commission... Surtout
que vous dites dans votre mémoire: II va falloir régler les
problèmes de fric. Je pensais à ça, je veux que vous
précisiez ce que ça veut dire et c'est quoi votre
réflexion là-dessus, d'un cégep autonome à 100 km
plus loin, dans le but de nous éclairer? Et, si le temps nous le permet,
je formule la question tout de suite: Dans votre mémoire, vous
souhaitez, en termes de programmes, que les formats des formations technique et
technologique soient mieux adaptés, c'est-à-dire que la formation
à l'éducation aux adultes soit également permise du
côté de la formation de base, du côté de
l'enseignement régulier. Ça, c'est extrêmement important,
parce que le recteur, il nous a décrit tantôt l'état de la
sous-scolarisation. Donc, il y a un très grand nombre d'adultes qui sont
sous-scolarisés dans la région de l'Abitibi-Témiscamingue,
alors votre demande d'adapter les formats de formation aux niveaux technique et
technologique m'apparalt absolument essentielle. Alors, sur la première
question et, s'il reste du temps, sur la deuxième, sur le format. (16 h
20)
M. Barrette: Oui. Alors, sur la première question, je
rappellerai qu'en 1987 M. Ryan, lors du Sommet socio-économique, avait
demandé au collège d'abord d'ouvrir un campus à Val-d'Or
et, lui, dans son expression, à ce moment-là, je me souviens
très bien, et d'autres aussi, ici, s'en souviennent... L'expression
qu'on utilisait à ce moment-là, c'était «les
sous-centres d'enseignement». On disait, bon... Et M. Ryan disait: Oui,
mais à Val-d'Or il faut que ce soit plus qu'un sous-centre, sans
préciser exactement ce que ça devait être. Et il est
évident que la population de Val-d'Or avait des attentes bien
particulières par rapport à ce développement. Nous, je
pense que nous avons essayé de répondre le mieux possible
à ces demandes et je pense que la satisfaction de la population, elle
est là. Et ça fonctionne. Moi, je pense que ça fonctionne.
Il faudrait, évidemment - vous l'avez souligné et on le rappelle
dans notre mémoire - tenir compte, justement, de l'historique des
contingences qui ont entouré la création et les attentes aussi de
la population par rapport à tel sous-centre ou à tel pavillon,
comme celui de Val-d'Or. Je pense qu'il y a des particularités dont on
doit tenir compte.
Je sais très bien qu'actuellement - et c'est peut-être
là la preuve que les cégeps sont très
«ensouchés» dans leur communauté - elles veulent
aussi, ces communautés, contrôler leur plein développement.
Comme j'ai déjà dit à une question, si Val-d'Or se
considère une société distincte et qu'elle veut
contrôler son plein développement, moi, je ne peux rien faire
là-dessus. Tout ce que je peux dire, c'est que, nous, nous sommes
prêts a continuer de donner les services, mais, si une décision
doit être prise par rapport à l'autonomie de Val-d'Or, vous
comprendrez qu'on aurait intérêt à ce que ça se
décide le plus rapidement possible. Il n'est pas facile de travailler en
se faisant parler tous les soirs de la façon dont on s'apprête
à divorcer. Je trouve que les collaborations sont très difficiles
à ce moment-là, en tout cas un peu plus compliquées.
Alors, je ne sais pas si ça répond à votre première
question.
Quant à la deuxième, par rapport aux programmes,
ça, je pense que c'est bien important pour nous. Mon opinion sur
l'enseignement
professionnel, c'est qu'il y a beaucoup trop de programmes
professionnels. Et aussi, il y a peut-être trop de collèges qui
offrent trop de programmes. Peut-être qu'une des solutions pour
répondre, par exemple, à des besoins ponctuels qu'on pourrait
retrouver dans une région comme la nôtre, on pourrait
créer, via un autre collège, offrir un programme mais pour une
période bien déterminée.
Je pense que l'Université du Québec a fait
l'expérience. Il y a un besoin de main-d'oeuvre, par exemple, en
techniques de laboratoire médical. Moi, je pense que ce n'est pas
approprié que l'on dise aux collèges: On va offrir maintenant le
programme de laboratoire médical. Dans quatre, cinq ans, le
marché va être noyé. Mais est-ce que ce ne serait pas
possible, ce ne serait pas pensable d'offrir un engagement de former deux,
trois cohortes là-dedans et, après ça, on ferme ça
et on s'en va ailleurs? Il me semble qu'il y aurait là une
économie intéressante. On le fait actuellement à
l'éducation des adultes versus les clientèles temporaires, ce que
l'on appelle les clientèles temporaires, et c'est dans ce sens-là
qu'on dit que ça pourrait être transféré à
l'enseignement régulier, ce mode de fonctionnement.
Puisque vous me mettez sur la piste de la formation professionnelle, je
trouverais intéressant aussi qu'au lieu de créer... Chaque fois
qu'on trouve un nouveau secteur d'activité, on s'empresse, on dirait, de
créer un programme professionnel qui réponde à cela. Mais,
souvent, c'est peut-être par rapport à un programme
déjà existant qu'on pourrait, par exemple... Prenons un exemple,
l'environnement. Il n'y a pas actuellement de programme précis en
environnement. Est-ce que c'est vraiment nécessaire ou est-ce qu'on ne
pourrait pas atteindre l'objectif, qui est de former des gens qui pourraient
travailler, par exemple, sur des études d'impact toutes les fois qu'on
fait des travaux, est-ce qu'il ne serait pas possible de donner un
diplôme de perfectionnement à des finissants, par exemple, ou
à des étudiants qui ont complété leur technologie
minérale, qui ont complété leur technique de génie
civil, qui ont complété leurs techniques forestières?
Alors, je pense qu'il y aurait une économie à faire
là, une rationalisation à faire, et ça soulagerait sans
doute, ça contribuerait de quelque façon à résoudre
l'imbroglio financier dans lequel on étouffe, je pense.
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup. J'imagine
que j'ai le consentement pour reconnaître M. le député
d'Abitibi-Est?
M. Savoie: Certainement, Mme la Présidente.
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Hovington): Alors, rapidement, parce
que nous n'avons plus beaucoup de temps.
M. Savoie: Oui, très rapidement, Mme la Présidente.
Vous constaterez qu'après plusieurs semaines de travail je pense que
c'est la première fois qu'une équipe se présente devant
nous, où il y a l'université et le cégep en même
temps. On me dit qu'il semble que ce soit le seul cas qui se présentera.
Oui, c'est unique. Alors, cette unicité de notre région et, bien
sûr, cette volonté d'être original et de répondre
adéquatement aux attentes de la population ont des répercussions
chez nous. Et j'aimerais ça entendre le directeur du cégep sur le
taux de scolarité en Abitibi-Témiscamingue, son évolution
au cours des quelques dernières années et comment il voit son
évolution et l'implication du cégep pour les quelques
années à venir.
M. Barrette: Je pense qu'on en a parié tantôt, le
niveau de scolarisation de la population est de l'ordre de 10 %
inférieur à ce que l'on peut retrouver même par rapport, je
pense, à la moyenne provinciale. Le taux de passage aux études
collégiales, il est aussi de cet ordre-là. L'écart est
aussi de cet ordre-là. Mais, comme je le disais, on ne passe pas une loi
pour décider que la scolarisation va remonter. Il faut absolument que
l'on change les mentalités et, là-dessus, évidemment, moi,
je pense que le collège a essayé de faire la promotion le plus
possible de l'enseignement collégial. Et je ne vois pas comment on
pourrait faire plus, sinon que de toujours insister et aussi obtenir
l'adhésion des autres milieux que le milieu de l'enseignement.
Dans ce dossier, je trouve qu'on se prêche entre convertis. Il
faudrait peut-être que la bonne parole sorte de nos petits cercles
à nous. J'aimerais ça entendre les hommes d'affaires qui
viendraient dire aux jeunes: Voici, si vous ne passez pas à travers le
cégep, si vous ne complétez pas un secondaire V fort, vous n'irez
nulle part. Eux sont crédibles, nous on l'est peut-être moins
compte tenu que, semble-t-il, on est payés pour le dire.
M. Savoie: Dernière question, justement. Si je comprends
bien, c'est que, depuis trois ans, quatre ans, le but, finalement, de la
collaboration qui existe, l'idéal que vous recherchez, finalement, c'est
d'avoir des répercussions sur le niveau de scolarisation, le taux de
scolarité en région. Vous avez posé plusieurs gestes au
cours des deux, trois dernières années, vous en posez d'autres
encore dans cette collaboration qui doit exister. Si vous aviez des
recommandations spécifiques à faire pour les deux, trois
prochaines années, justement pour ouvrir davantage les portes, pour nous
mettre sur un pied d'égalité avec la province au niveau du taux
de scolarité, quelles seraient-elles?
M. Arsenault: Moi, je pense, je l'ai dit tantôt dans notre
présentation, que c'est surtout de revaloriser l'éducation avec
les facettes que j'ai soulignées et, comme disait M. Barrette,
d'impliquer d'autres partenaires. On a commencé. Je regardais ceux qui
ont participé dernièrement à la collation des grades
où M. Frank Dottori, qui est président-directeur
général de Tembec... Il faut montrer d'autres modèles aux
jeunes que les joueurs, les sports et en mettre sur la tribune et intervenir
auprès des médias pour les bien informer sur les dossiers, leur
rôle. Si vous regardez dans le plan de développement du CRDAT, le
Conseil régional de développement de
l'Abitibi-Témiscamingue, l'importance que prend l'éducation, je
pense que c'est un travail de tous les jours et je dirais aussi qu'il y a
d'autres gestes plus ponctuels. J'en ai déjà parlé au
ministère. Je pense à des programmes en efficience cognitive.
Chez nous, on intervient sur le processus de développement de
réalisation du plein potentiel des jeunes à tous les niveaux.
Mais je pense que c'est un travail commun de revalorisation du secteur de
l'éducation, de la capacité des jeunes, du rôle des
maîtres dans la société. Et je dis 1er-
«maîtres»; j'aime mieux «maître»
qu'«enseignant». L'éducation, c'est rencontrer des adultes
de qualité. C'est juste ça, donner l'occasion à des
jeunes, des gens de rencontrer des adultes de qualité. Il faut
développer ça.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. Mme la ministre, en
conclusion.
Mme Robillard: Messieurs du milieu de l'enseignement
supérieur de l'Abitibi-Témiscamingue, merci beaucoup d'être
venus témoigner en commission, et sachez que l'expérience-pilote
qui va se dérouler chez vous va être suivie de très
près et que j'ai bien retenu la date, septembre 1993, qu'on aura un
projet concret sur la table. Merci bien d'être venus.
M. Arsenault: On vous remercie.
M. Barrette: On vous remercie de votre accueil.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. Et, si on veut
expliquer le phénomène à mon collègue, le
député d'Abitibi-Est, c'est peut-être parce que vous avez
un Gaspésien, en la personne de M. Arsenault, avec des Abitibiens. Il y
a une osmose entre les deux régions.
M. Savoie: Un pur hasard. (16 h 30)
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup. Ha, ha, ha!
Alors, j'inviterais le collège O'Sullivan de Montréal à
bien vouloir prendre place, s'il vous plaît. J'inviterais le
collège O'Sullivan à bien vouloir prendre place.
Alors, si vous voulez bien laisser la place, s'il vous plaît, aux
représentants du collège O'Sullivan. Je demanderais un peu de
silence en arrière, s'il vous plaît.
La commission va poursuivre ses travaux. C'est le collège
O'Sullivan de Montréal, représenté par M. Rodolphe
Rousseau, président et directeur général - bonsoir, M.
Rousseau - et Mme Joanne Rousseau, directrice des services pédagogiques
- bonsoir, madame - et j'ai Mme Nicole Tamaro, professeure, programme
Techniques de bureau et de secrétariat spécialisé. Alors,
il me manque une dame dans ma liste.
Collège O'Sullivan de Montréal
inc.
M. Rousseau (J. Rodolphe): Mme Wendy Thatcher, qui est
coordonnatrice du département de l'enseignement de l'anglais.
La Présidente (Mme Hovington): Thatcher?
M. Rousseau: Thatcher, comme l'ancienne première ministre
de l'Angleterre.
La Présidente (Mme Hovington): La dame de fer?
M. Rousseau: Exactement.
La Présidente (Mme Hovington): J'imagine que c'est vous,
M. Rousseau, qui allez être le porte-parole?
M. Rousseau: Oui, je vais commencer. Vous permettez, Mme la
Présidente, Mme la ministre et les membres de la commission? À
titre de collège privé, nous vous remercions de l'occasion de
nous présenter devant vous et, d'une part, de faire valoir la
santé de l'enseignement privé au Québec et le dynamisme du
collège O'Sullivan de Montréal. Votre commission offre l'occasion
aux collèges et aux organismes impliqués dans le réseau
collégial de vous transmettre des recommandations dans l'optique de
modifier le système collégial de façon à mieux
préparer les étudiants à assumer leurs
responsabilités, soit sur le marché du travail ou bien au niveau
universitaire. L'opportunité de vous exprimer en personne les
argumentaires qui appuient nos recommandations témoigne du grand
intérêt que vous avez, évidemment, pour l'enseignement
collégial en général et l'enseignement privé en
particulier.
Comme porte-parole de petit collège, comparé aux grands
cégeps, nous voulons vous expliquer un peu les motifs des
recommandations présentées dans notre mémoire. Pour vous
décrire les particularités du collège O'Sullivan de
Montréal, permettez-moi de vous donner les caractéristiques
suivantes.
D'abord, le collège a été fondé en 1916,
donc ce n'est pas d'hier. À l'origine, sa vocation
était une vocation de «business college» dans la
tradition des collèges qui se constituaient à cette époque
et dont l'orientation était de former les gens le plus tôt
possible pour le marché du travail. nous avons évolué
depuis et, aujourd'hui, nous avons une population étudiante de 430
étudiants le jour et 150, à peu près, le soir. à
l'origine, nous n'avions qu'un programme: «business»
secrétariat. aujourd'hui, nous avons quatre programmes de techniques et,
tout récemment, un programme de sciences humaines qui prépare les
étudiants à des études plus avancées au niveau
universitaire. 70 % de la population étudiante provient des milieux
anglophone et allophone, donc, 30 % sont des canadiens d'expression
française, et 78 % sont des femmes, ce qui nous distingue un peu d'une
autre institution où, probablement, la population étudiante,
elle, est mieux équilibrée. mais, à cause de la nature des
programmes que nous avions et que nous avons, il y a une
prépondérance d'accueil d'une population plus féminine,
donc un peu une orientation particulière du collège à
l'endroit de cette clientèle importante.
Essentiellement, les recommandations contenues dans le mémoire
rejoignent les objectifs suivants: une meilleure connaissance, de la part des
finissants, du français et de l'anglais comme langue maternelle et comme
langue seconde; la reconnaissance au BCU, au bulletin cumulatif uniforme, des
connaissances acquises en secrétariat spécialisé à
l'intérieur du programme de Techniques de bureau 412, parce que le
collège offre quatre spécialisations en secrétariat - nous
offrons une spécialisation en secrétariat médical,
secrétariat juridique, secrétariat de direction et en
secrétariat d'hôtellerie, de voyages et de tourisme; une formation
en sciences humaines plutôt élargie dans le sens des
«humanities» qui serait plus près des réalités
contemporaines, avec une plus grande ouverture sur le monde et
compréhension des différentes cultures et traditions; une
formation professionnelle à la fine pointe des technologies grâce
à une plus grande expérience réelle de travail par des
stages intégrés à l'intérieur de tous les
programmes et des stages en milieu de travail; une meilleure utilisation des
ressources humaines et matérielles et la possibilité d'offrir une
formation continue aux adultes durant un trimestre d'été qui
serait subventionné; enfin, nous recommandons et nous souhaitons
fortement et très vivement que le collège et les collèges
aient plus d'autonomie dans la mise à jour des programmes et des cours.
Prendre quatre ans pour renouveler un programme n'est plus réaliste, et
attendre que tout le monde soit prêt pour y amener des correctifs n'est
pas dans les meilleurs intérêts de la population où les
programmes se sont installés depuis quelque temps. Et, par exemple, je
vous parlerai tout à l'heure de la formation en commerce
international.
En lisant les reportages dans les journaux et les copies des
mémoires que nous avons reçues, nous constatons q'je les
recommandations que fait le collège O'Sullivan de Montréal ne se
distinguent pas beaucoup des recommandations faites par toutes les instances.
Nous venons confirmer, nous, un peu la préoccupation que nous avons
particulièrement, au collège O'Sullivan, mais nous rejoignons
toutes les attentes professionnelles dans le monde de la formation et de
l'éducation au Québec. Cette autonomie que nous cherchons pour
notre collège et pour d'autres collèges faciliterait la mise
à jour continue des programmes. D'ailleurs, une formation technique
pertinente ne peut pas attendre un échéancier de révision
à tous les 5 ou 10 ans. Pour être efficace, elle requiert un
processus de révision des programmes. D'ailleurs, ça a
été confirmé par la Chambre de commerce du Québec,
le Conseil du patronat ainsi que le mémoire de l'Association des
cégeps.
La connaissance des langues, elle est primordiale. Nous ne pouvons plus
oeuvrer avec une langue et nous souhaitons que nous puissions faire des
aménagements à l'intérieur des programmes de
français et d'anglais de façon à rendre encore beaucoup
plus forte la connaissance du français et de l'anglais pour nos
étudiants. Pour les uns, c'est une langue maternelle, pour les autres,
c'est une langue seconde. Et, dans bien des cas, c'est une tierce langue parce
qu'eux ont déjà appris à la maison l'italien, le grec ou
d'autres langues et, maintenant, ils se rendent dans les collèges
où ils doivent apprendre à travailler dans une des deux langues
officielles du Canada.
Donc, notre recommandation se situe dans ce sens-là: que le
collège puisse modifier, peut-être même à
l'intérieur du programme des cours de littérature, et
peut-être substituer un cours de littérature par un autre cours
dont le besoin et le résultat seraient de renforcer la connaissance des
règles, la connaissance de la composition, la recherche de façon
à être plus efficaces dans les travaux qu'ils auront à
remettre au cours de leurs études et une fois rendus sur le
marché du travail. Il y aurait peut-être aussi une alternative
à laquelle Mme la ministre pourrait peut-être agréer, c'est
que, si nous devions réduire le nombre de cours d'éducation
physique par obligation, nous pourrions peut-être substituer à un
ou deux cours d'éducation physique des cours dans le domaine de la
connaissance des langues maternelle ou secondaire. Je pense que c'est une
décision qu'un collège pourrait facilement prendre si cette
autonomie lui était réservée. (16 h 40)
Depuis longtemps, le collège O'Sullivan enseigne le programme de
secrétariat. À l'origine, le cours de secrétariat
était enseigné au niveau collégial. Avec des
modifications, il fut appelé éventuellement le cours de
Techniques de bureau. Avec l'avènement des techniques de bureau, les
inscriptions ont diminué. On dirait que personne ne comprenait
quelle était la sortie de Techniques de bureau. Et nous avons, nous, au
collège O'Sullivan, pu persévérer à travers des
programmes de formation en y ajoutant l'enrichissement du secrétariat
spécialisé. Les gens qui sortent du programme de Techniques de
bureau vont travailler sur le marché du travail à un très
haut pourcentage, probablement à 100 %, comme secrétaires. Et,
devant la concurrence inévitable de la surenchère des gens qui
sont là, qui cherchent des emplois, les secrétaires qui sortent
avec des connaissances particulières et spécialisées ont
une plus grande chance de postuler des emplois dans des firmes et des endroits
où la connaissance acquise jadis par l'expérience de travail est
maintenant disponible par la formation professionnelle.
Depuis 10 ans, le collège est fier de la qualité de notre
formation en secrétariat spécialisé quoique,
malheureusement, nous ne puissions pas l'afficher. Au bulletin cumulatif des
étudiants, l'étudiant ne reçoit pas une reconnaissance
pour la formation spécialisée. L'encadrement ou la liste des
cours, en tous les cas, que nous devons enseigner ne permet pas que nous
puissions substituer un cours de secrétariat ou de pratique de bureau
ordinaire à une pratique de secrétariat juridique, par exemple,
et Mme Tamara, pourra vous donner d'autres exemples.
Nous avons une recommandation à l'endroit des cours de
philosophie. Il y a 20 ans, le collège O'Sullivan offrait des cours de
relations et de connaissance humaines. Avec l'avènement du programme
plus fixe et rigide, nous avons dû, nous, enseigner de la philosophie. Le
programme de philosophie, dans le sens pur, ne rejoint pas les attentes ni
l'intérêt des étudiants, et non plus les vrais besoins, et
nous aimerions proposer que le programme de philosophie en français...
que nous puissions substituer des cours plutôt dans le cadre des
«humanities», comme nous le faisons déjà en anglais,
ce qui est permis par le programme d'études anglophone.
L'éducation physique, je l'ai mentionné un peu plus
tôt, nous aimerions en réduire le nombre d'heures et y substituer
un programme d'introduction de notions de conditionnement physique afin que les
étudiants et les étudiantes puissent, à la fin d'un cours
collégial, s'être habitués à se conditionner et
à se maintenir en bonne condition physique. Je pense que, là, il
y a moyen d'innover sans détruire ou réduire l'efficacité
du programme collégial et tout en donnant aux étudiants des
besoins bien particuliers.
Enfin, nous avons une recommandation vis-à-vis des études
intensives et du retour au travail accéléré. Dans les
programmes d'études que nous enseignons, nous avons un certain nombre
d'étudiants pour qui le retour au marché du travail est
très important. Ils, elles ne peuvent pas prendre un an et demi ou deux
ans quand ils peuvent le faire dans 12 mois. Nous pouvons offrir nos programmes
pendant 12 mois continus, sauf que la période, le trimestre
d'été n'est pas subventionné; et ça cause aux
étudiants un surcroît de dépenses qui n'enlèverait
absolument rien au ministère comme dépense, parce que les
subventionner à l'automne, l'hiver ou le printemps ou l'automne et
l'hiver, c'est la même chose que les subventionner pour la période
d'été.
Enfin, nous voulons insister sur l'importance de pouvoir modifier les
programmes d'études de façon à y insérer des stages
obligatoires sur le marché du travail. Cette année, nous avons pu
obtenir l'approbation de la DIGEC et de l'enseignement privé pour offrir
un programme coopératif en technique administrative. A date,
l'expérience, quoique toute nouvelle et toute jeune, s'avère
très intéressante, et les efforts que nous faisons pour ouvrir le
marché à nos éventuels diplômés nous donnent
raison de croire que la même approche pourrait être fort utile aux
étudiants et étudiantes dans les autres disciplines et dans les
autres programmes professionnels que nous enseignons. Donc, nous recommandons
fortement que des modifications soient faites de façon à ce que
nous puissions, à l'intérieur des programmes existants,
intégrer des stages obligatoires ou même peut-être des
stages sur le plan facultatif de façon à avantager certains
étudiants qui veulent obtenir plus d'expérience en vue d'offrir
leurs services éventuellement sur le marché du travail.
Je ne parlerai pas de finances parce que je sais que l'Association des
collèges privés a présenté un mémoire,
lequel mémoire nous appuyons. J'aimerais seulement mentionner, Mme la
Présidente, Mme la ministre et membres de la commission, que, quoique le
collège O'Sullivan de Montréal ait fait de grands pas depuis
quelques années par des compressions et par des utilisations sages des
sommes que nous avons, nous avons encore des services à
améliorer. En particulier, nous aimerions améliorer le service
d'encadrement à l'arrivée des étudiants du niveau
secondaire. Nous avons fait un effort cette année - Mme Joanne Rousseau
pourra vous expliquer un peu ce que nous avons fait - mais il y a encore
beaucoup de travail à faire de ce côté-là. On dirait
que les étudiants qui nous arrivent ces dernières années
sont moins prêts à assumer et à travailler dans le cadre du
niveau collégial.
Un autre service que nous devons augmenter et renforcer, c'est le
service de placement et des stages. Évidemment, ce sont des services un
peu nouveaux, des services qui vont ajouter une charge additionnelle aux frais
d'administration du collège et probablement une justification, à
l'endroit de Mme la ministre et des gens qui vont regarder
éventuellement les correctifs à apporter aux subventions, que
nous puissions avoir des modifications marginales, mais
en tous les cas des modifications raisonnables afin de pouvoir offrir
aux étudiants, à l'intérieur d'un programme professionnel,
un meilleur encadrement dans le programme de recherche de stages,
d'évaluation en période de stage et de placement. Parce que la
raison d'être de tous nos programmes professionnels, c'est qu'à la
fin les étudiants se trouvent d'une façon utile à enrichir
notre économie montréalaise et québécoise par les
connaissances qu'ils ont acquises au collège. Je vous remercie de votre
attention.
La Présidente (Mme Hovington): Merci, M Rousseau. Alors,
je vais reconnaître maintenant la ministre de l'Éducation, de
l'Enseignement supérieur et de la Science.
Mme Robillard: Merci, Mme la Présidente. Ça me fait
plaisir de saluer M. le directeur général du collège
O'Sullivan de même que son équipe et de vous dire combien nous
apprécions le fait que vous ayez déposé un mémoire
à cette commission parlementaire. Vous êtes le seul collège
privé à l'avoir fait. L'Association des collèges
privés est venue, vous l'avez indiqué, le Mouvement pour
l'enseignement privé est venu, mais vous êtes le seul
collège privé, donc, à titre individuel qui a
déposé un mémoire, et j'en suis fort heureuse. J'aurais
souhaité que d'autres collèges privés le fassent pour
échanger avec nous au niveau de l'enseignement collégial. Et
vous-même, au point de départ, dans votre lettre d'introduction,
M. Rousseau, dans votre mémoire, vous signifiez que, de façon
générale, vous êtes satisfait du régime
pédagogique collégial à l'heure actuelle, ce qui ne vous
empêche pas de l'analyser et de suggérer des recommandations
spécifiques. Alors, j'aimerais ça aborder avec vous
différentes questions. Vous avez eu une approche très pragmatique
en nous suggérant des recommandations, et je pense qu'on va profiter de
votre présence pour aller un peu plus loin. (16 h 50)
Je vois que vous suggérez des modifications quand même
assez substantielles aux cours obligatoires actuels, au tronc commun actuel.
C'est des modifications quand même assez importantes que vous
suggérez et, à cet égard-là, vous vous
différenciez d'autres mémoires. Premièrement, si je vous
ai bien saisi, vous nous recommandez de remplacer certains cours de
littérature par des cours de langues. Alors que ce sont des cours de
langues et de littérature, vous, vous voulez que ce soient strictement
des cours de langues? Est-ce que je vous ai bien compris dans votre
recommandation?
Mme Rousseau (Joanne): Non, ce n'est pas strictement des cours de
langues. C'est que, depuis quelques années, on remarque qu'à
l'arrivée au collégial les jeunes présentent des lacunes
dans l'acquisition des connaissances quant à la lecture, à
l'écriture, à l'expression orale, aux mathématiques et aux
connaissances générales. Afin de remédier à cette
situation-là, le collège O'Sullivan, comme bien d'autres
collèges, a mis sur pied des cours de rattrapage ou de mise à
niveau qui sont offerts à tous les étudiants qui ont des lacunes
en français écrit, en anglais écrit et en
mathématiques. Mais ces mesures-là sont insuffisantes. Les
étudiants ont toujours des déficiences au niveau de leur
connaissance du français et dans leurs habiletés dans leurs
communications écrites. Et même, il y a un rapport de recherche
qui sortait sur la formation technique au collégial où les
employeurs se prononcent et, eux aussi, de l'ensemble des habiletés que
les étudiants ont quand ils arrivent avec un D.E.C., ils sont
satisfaits, dans l'ensemble, de leurs habiletés, sauf dans leur
connaissance du français et, encore, en communication écrite. Et
ça, ce n'est pas seulement en français. On est un collège
bilingue et on le voit chez les anglophones aussi. Alors, quand je dis
«communication écrite», c'est aussi valable pour les
étudiants francophones que ça l'est pour les étudiants
anglophones. Il y a des mesures à prendre en ce moment à ce
niveau-là, que ce soit par...
Mme Robillard: Je vous réfère à votre
recommandation de la page 7, où vous dites que le collège
recommande «que le ministère autorise le remplacement de certains
cours de littérature par des cours de langues».
Mme Rousseau: Oui.
Mme Robillard: Donc, c'est dans ce sens-là, votre
recommandation.
Mme Rousseau: Oui. Par rapport aux besoins de la clientèle
qui a des déficiences au niveau de la langue écrite.
Mme Robillard: La même chose quand on arrive au niveau des
cours de philosophie. C'est quand même une approche assez nouvelle que
vous nous présentez en disant: II faudrait peut-être remplacer
certains cours de philosophie par des cours de relations humaines, de
psychologie et de sociologie.
Hier, en cette commission, nous avons reçu le groupe des
professeurs qui donnent le bloc qu'on qualifie de «humanities» dans
les collèges anglophones. Au collège O'Suliivan de
Montréal, est-ce que vous avez déjà songé à
donner ce bloc «humanities» au lieu d'avoir des cours de
philosophie?
Mme Rousseau: Oui. Nous le faisons présentement du
côté anglophone. Comme collège bilingue, nous avons les
deux clientèles qui se côtoient et, en anglais, c'est l'approche
«humanities» que l'on a adoptée.
Mme Robillard: Est-ce que vous me suggérez l'approche
«humanities» pour le côté francophone?
Mme Rousseau: exactement, oui. c'est une approche plus
interdisciplinaire au niveau des sciences humaines, et je pense que ce serait
plus proche des réalités et des besoins des étudiants.
Mme Robillard: Vous avez aussi des recommandations
spécifiques sur les cours d'éducation physique, n'est-ce pas?
Mme Rousseau: Oui.
Mme Robillard: Vous nous recommandez de maintenir un certain
nombre de cours d'éducation physique.
Mme Rousseau: Oui. On recommande de maintenir les objectifs
ministériels qui étaient du savoir, du savoir-faire et du
savoir-être. Ça, ce sont tous des objectifs qui sont valables. Par
contre, ce qu'on recommande, c'est peut-être la réduction: au lieu
de 120 heures, 60 heures, mais toujours en gardant le~ mêmes objectifs
que le ministère s'était fixés.
Mme Robillard: Est-ce que, présentement, au collège
O'Sullivan, il y a des cours d'éducation physique aux jeunes qui suivent
le diplôme d'études collégiales?
Mme Rousseau: Oui. Nous offrons des cours d'éducation
physique aux jeunes. Malheureusement, nous n'avons pas les facilités,
comme vous avez pu le constater lors de votre visite, à
l'intérieur de l'édifice. Par contre, nous avons fait des
ententes avec différents centres sportifs, le YMCA et le YWCA, qui sont
des organismes situés près du collège O'Sullivan. Nous en
avons une avec le centre Nautilus et nous avons déjà
organisé dans le passé des activités de plein air au
centre EDPHY, dans les Laurentides. Et on veut continuer à avoir ces
ententes-là, parce que je ne crois pas que nous aurons des
facilités d'éducation physique bientôt.
Mme Robillard: Au niveau de votre recommandation qui touche les
programmes courts et les programmes intensifs, je parle de façon plus
spécifique des programmes d'A.E.C, d'attestation d'études
collégiales, et de C.E.C., de certificats d'études
collégiales, vous en parlez en faisant référence aux
décrocheurs du secondaire, du collégial, au monde des adultes.
Mais, quand même, votre recommandation est globale. Quand vous me dites,
à la page 9, que vous souhaitez, donc, que ces programmes-là
soient accessibles à tout étudiant, est-ce à dire que vous
souhaitez, peu importe leur âge, sans aucune condition, que ces
programmes-là soient accessibles à la clientèle de
façon générale, premièrement? Et,
deuxièmement, est-ce que, à l'intérieur de ces
formations-là... Nous savons présentement qu'il n'y a pas de
formation générale à l'intérieur des A.E.C. et des
C.E.C. Est-ce que vous maintenez la formation actuelle qui est donnée ou
si vous ajoutez des composantes?
M. Rousseau: Vous avez plusieurs questions dans la même.
D'abord, c'est vrai que nous recommandons - des C.E.C. et des A.E.C. - que
l'aménagement des cours professionnels, de façon à
préparer quelqu'un pour une fonction ou pour des fonctions bien
particulières, soit disponible à des jeunes qui sortent du
secondaire. À l'heure actuelle, pour être admis dans un C.E.C, si
je ne me trompe pas, il s'agit d'être sorti du...
Mme Rousseau: II faut avoir interrompu ses études...
M. Rousseau: Pendant un an. Mme Rousseau: ...pendant un
an.
M. Rousseau: C'est une condition... En tout cas, elle est assez
moche comme condition. Elle n'est pas, à mon sens à moi,
très utile ni valable. Ce n'est pas le fait d'être absent du
collège ou de l'école secondaire pendant un an qui justifie
qu'une personne a le droit de prendre un cours ou de prendre un programme, de
s'intégrer dans un programme particulier dont les buts sont bien
spécifiques. C'est soit ça ou bien ne rien faire, dans bien des
cas. J'aimerais mieux penser que nous puissions accepter, nous, des
étudiants qui sortent du secondaire, qui n'ont peut-être pas dans
leur plan de travail ou plan d'étude la possibilité
d'étudier pendant trois ans, et, au lieu de les perdre parce qu'ils vont
décrocher au cours des trois ans, que nous puissions leur donner
probablement un C.E.C, un certificat, tout en les encourageant, en les ayant
chez nous, à assumer peut-être la responsabilisation d'augmenter
et de parfaire leur formation fondamentale et autre plus tard ou bien en
même temps. Il s'agit de les recevoir, de les encadrer et de les motiver
à vouloir continuer, de leur donner ce goût de la
curiosité, le goût de vouloir apprendre, et c'est plus facile de
le faire en travaillant avec eux et elles dans un programme court que de ne pas
travailler du tout avec eux ou elles ou bien de les perdre chemin faisant parce
que la seule voie d'entrée, c'était un D.E.C
C'est une hypothèse que nous vous proposons. Il y aurait
probablement des conditions, advenant que nous puissions accepter certains
étudiants. Je pense bien qu'il y aurait des cours... pas
préparatoires, mais des cours...
Mme Rousseau: De mise à niveau.
M. Rousseau: ...de mise à niveau qui de-
vraient être exigés si la personne doit entrer dans un
programme plus court. mais c'est dans cette optique-là que nous
aimerions voir ouverts ces programmes à tout étudiant qui peut en
bénéficier.
Mme Robillard: Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, je
reconnaîtrai maintenant le député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Oui. Également, Mme la Présidente, je
veux saluer et remercier M. Rousseau et les représentants du
collège O'Sulli-van, du collège privé O'Sullivan de
Montréal, d'être venus. Tout ce que la ministre a dit, c'est
exact. C'est intéressant d'avoir le point de vue d'un collège
privé. Votre mémoire est succinct, mais précis, concret,
et je vous cite, vous avez indiqué: «Nous sommes
intéressés à venir confirmer la justesse des attentes
professionnelles des autres mémoires.» À un moment
donné, dans votre présentation, vous avez dit ça, et je
trouve que vous avez raison de venir confirmer un certain nombre
d'attentes.
Trois remarques. Même si la ministre, d'entrée de jeu,
disait que vous êtes un des collèges qui pensez que, globalement,
ce qui se fait dans un collège est passablement valable... Bien, je
pense que c'est vous citer comme il le faut. C'est ce que vous dites. Ce n'est
pas parce que vous avez des recommandations précises, mais vous dites
aussi qu'il y a une rigidité des programmes qui doit se terminer. Vous
dites également qu'il y a lieu d'avoir des mécanismes pas mal
plus appropriés pour faire rapidement les révisions qui
s'imposent. Et là vous touchez également ce qui a
été dit, des orientations qui ont été reprises
à peu près par tous les intervenants. Donc, qu'un collège
privé vienne confirmer la justesse de l'ensemble des mémoires
qu'on a reçus sur ces mêmes points là, nous, ça nous
confirme davantage dans certains consensus que nous allons devoir retenir comme
membres de la commission si on veut, effectivement, que cette commission porte
les fruits escomptés.
Deux questions précises. Moi, je voudrais revenir
également sur... Vous souhaitez quand même des modifications
importantes à ce qu'on appelle communément la formation
fondamentale ou le tronc commun et vous avez... Si vous nous aviez dit
franchement... Bien, ce n'est pas que vous n'avez pas été francs,
vous avez été très francs, mais c'est moi qui me suis mal
exprimé, là. Si vous aviez dit: Nous, on souhaiterait offrir
à l'ensemble de nos jeunes qui fréquentent le collège,
plutôt que philo, un cours comme «Humanities» du
côté anglophone, moi, je n'aurais pas eu de trouble. On les a
reçus hier. Ils nous ont expliqué toutes les merveilles qu'ils
réussissaient à faire avec un tel cours. Je n'ai pas de raison
objective pour disconvenir d'autre chose, pour le vrai, parce qu'on a eu un
échange assez intense, très approfondi avec des gens des
cégeps anglophones qui préfèrent le cours
«humanities» à philosophie. Mais, quand vous dites, dans
votre mémoire... Je ne suis pas un grand spécialiste du tout,
mais il faut avouer que les cours de philo n'offrent rien de tel aux
étudiants et ne rejoignent pas les préoccupations des jeunes
étudiants. Là, je suis obligé de vous dire que vous vous
distinguez drôlement parce qu'on a toujours entendu l'inverse - par les
étudiants, j'entends. Je ne dis pas que le Conseil des collèges
n'a pas des avis sur les cours de philo, mais les jeunes nous ont toujours dit
l'inverse. (17 heures)
Deuxième problème que j'ai, c'est que, pour
développer une structure de pensée et une logique, qu'elle soit
cartésienne ou autre, une pensée logique et une structure de
pensée plus articulée, ferme, précise, des cours de
relations humaines, j'ai du trouble avec ça. Je n'ai pas de trouble avec
des cours de relations humaines, mais j'en ai pour développer l'objectif
d'une plus grande logique, d'une plus grande structure de pensée.
Même chose avec des cours de psycho. Je n'ai rien contre la psychologie,
mais je ne suis pas capable de faire le lien très concret entre un cours
de psychologie et le développement d'une meilleure structure de
pensée et les objectifs d'un cours de philo. Donc, je dis: Ce que devait
faire le cours de philo, pas nécessairement comme on l'a
enseigné, pas nécessairement avec les disparités... Je
pense qu'il y a lieu de réunifier, de raffermir les objectifs des cours
de philo. Vous, est-ce que vous vouliez dire: On aimerait les remplacer, quelle
que soit l'origine linguistique des jeunes que nous formons, par des cours de
type «humanities» du secteur anglophone? Est-ce que c'est ça
que vous voulez?
M. Rousseau: Oui, c'est précisément ça, M.
Gendron.
M. Gendron: Avec ça, je n'ai pas de trouble. Mais je pense
que s'il fallait envisager de remplacer ça par des cours de relations
humaines, de psychologie et de sociologie, sans philosophie... Offrir des cours
de ce type dans les cours complémentaires, moi, je n'ai pas d'objection
parce que, pour certains, c'est un excellent moyen de raffermir et de parfaire
la formation de base. Donc, on s'accorde, il n'y a plus de distinction
là-dessus.
À la page 9 de votre mémoire, je suis heureux que vous
souligniez également... La ministre l'a touché un peu, mais,
encore là, je n'ai pas compris très clairement. Moi, je pense que
ce que vous souhaitez, c'est ce qu'on appelle communément une
intégration des adultes. Et, pour qu'une intégration
réelle des adultes à des cours de niveau collégial ait
lieu, il y a des
conditions, des exigences. J'aurais aimé ça que vous me
parliez des conditions et des exigences que vous voyez parce que je... À
moins que je ne me trompe, vous me corrigerez, je sens qu'à la page 9
c'est surtout de ça que vous vouliez parler. Il n'y a pas assez de
facilités, il n'y a pas assez de règles qui permettent et
facilitent la capacité, pour des adultes, pour éviter qu'ils
soient des décrocheurs, pour éviter qu'on leur donne toutes
sortes de conditions: Bien, tu vas avoir droit à tel petit papier -
qu'on parle du C.E.C. ou de l'A.E.C. - si tu arrêtes, tu continues, tu
repars. Vous dites: Pourquoi ne pas arrêter tout ça et avoir des
mécanismes d'intégration? Est-ce que c'est ça qu'on aurait
dû comprendre?
M. Rousseau: oui, en partie. peut-être qu'il va vouloir me
corriger là-dessus, mais l'objectif, vraiment, que nous visons par cette
recommandation, c'est que des gens qui n'ont pas le statut
d'admissibilité au c.e.c. doivent, s'ils veulent poursuivre des
études de niveau collégial, s'inscrire au d.e.c. mais l'optique
du d.e.c. est bien différente de celle du c.e.c. dans l'esprit des
gens... certaines persoi.. 63, peut-être plus jeunes et qui sont des
exceptions, qui aimeraient aller sur le marché du travail dans une
période de temps beaucoup plus courte que le programme de trois ans,
nous ne pouvons pas les accepter. nous aimerions pouvoir les intégrer
dans un programme de certificat, avec un encouragement de continuer vers un
diplôme, une fois rendus sur le marché du travail. par contre, il
va falloir, pour pouvoir le faire, avoir des conditions d'admissibilité,
évidemment, en langue, en pensée, en méthode de travail.
en tout cas, ces gens-là devraient pouvoir assumer la charge
d'étudiant comme assument la charge les étudiants qui viennent et
qui ont déjà fait des études peut-être
collégiales. mais la prépondérance... il y a une
augmentation significative de gens qui veulent maintenant prendre des
programmes plus courts, de façon à travailler plus rapidement.
ça ne devrait pas, à notre sens à nous, exclure des gens
qui n'auront peut-être pas terminé le niveau secondaire. si la
condition presque unique, à l'heure actuelle, c'est qu'ils soient sur le
marché, en chômage ou qu'ils aient laissé l'école
depuis un an, bien, à notre sens à nous, ce n'est pas une mesure
assez légitime pour les empêcher de s'inscrire presque
immédiatement à l'intérieur d'un programme court.
M. Gendron: Pour ce qui est du cours d'éducation physique
- assez rapidement parce que vous avez été assez précis,
sur le cours d'éducation physique, c'est peut-être moi qui ne
comprends pas - moi, j'ai compris que, vous, vous souhaitiez une modification
au cours du programme ou si...
M. Rousseau: Une réduction.
M. Gendron: Oui, mais regardez, le...
M. Rousseau: Une réduction et peut-être une plus
grande latitude au collège d'organiser un programme d'initiation au
conditionnement physique, de façon à ce que ça devienne
une façon de vivre de l'étudiant durant la période de deux
ou trois ans, et qu'il puisse continuer, une fois rendu sur le marché du
travail, à faire de la danse aérobique ou bien à jouer au
tennis ou bien à faire du ski de fond. Il y a plusieurs de nos
étudiants qui n'ont pas eu la facilité d'apprendre des
habiletés sportives - à cause peut-être du haut pourcentage
de femmes que nous avons - qui viennent de milieux allophones, de milieux
ethniques dans lesquels ils n'ont pas eu, eux, peut-être, les mêmes
opportunités de jouer au hockey, d'apprendre à faire autre chose.
On aimerait leur donner le goût de ce conditionnement et de se tenir en
forme par des activités. Donc, remplacer les quatre cours obligatoires
par un programme plus souple, plus individualisé...
M. Gendron: Mais obligatoire ou pas?
M. Rousseau: Obligatoire pour seulement deux cours.
M. Gendron: Merci. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup. Alors, Mme
la ministre, en conclusion.
Mme Robillard: Je vous remercie, M. Rousseau, de même que
les membres de votre équipe, d'être venus témoigner. Je
prends bonne note aussi de vos recommandations en matière de financement
des écoles privées au Québec. Merci d'être venu, M.
Rousseau.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, les membres de la
commission de l'éducation vous remercient à leur tour
d'être venus nous présenter votre mémoire. J'inviterais
maintenant le collège de Maisonneuve à bien vouloir prendre place
immédiatement, s'il vous plaît. Nous allons suspendre une
minute.
(Suspension de la séance à 17 h 7)
(Reprise à 17 h 10)
La Présidente (Mme Harel): La commission de
l'éducation reprend ses travaux. Nous avons le plaisir de recevoir parmi
nous le collège de Maisonneuve, bien évidemment. D'ailleurs, je
disais à Mme la ministre ce qui explique ma présence cet
après-midi, j'ai eu le plaisir d'obtenir le consentement des membres de
la commission des institutions pour ajourner nos travaux sur la Loi sur
l'application de la réforme du Code civil pour pouvoir vous recevoir
à cette
commission parlementaire de l'éducation. Je vous demanderais, M.
Leduc, de nous présenter les personnes qui vous accompagnent.
Collège de Maisonneuve
M. Leduc (Pierre): Merci bien, Mme la Présidente. Je vous
remercie de l'honneur que vous nous faites. Oui, avec plaisir, je vous
présente: à ma droite, Me Jacques Durocher, secrétaire
général de l'Université du Québec à
Montréal et président du conseil d'administration du
collège de Maisonneuve; à sa droite, M. Oliva Bouchard,
professeur de philosophie et président du Syndicat des enseignants, la
FNEEQ-CSN au collège de Maisonneuve; à ma gauche, M. Guy
Lefebvre, directeur des services de formation; à côté de
lui, M. Roger Gauthier, président du Syndicat des employés de
soutien, la FTQ, et technicien de laboratoire au Département de physique
du collège de Maisonneuve. Il aurait dû y avoir M. Dubé, le
président du Syndicat des professionnels, qui est malheureusement malade
aujourd'hui, mais ça nous donne le loisir d'avoir une femme dans notre
délégation, ce qui n'est pas un défaut, Mme
Hélène Brassard, professeur de sciences politiques au
collège et également la responsable du groupe des enseignements
à la commission pédagogique du collège.
Mme la Présidente, Mme la ministre de l'Éducation, de
l'Enseignement supérieur et de la Science, Mmes et MM. les
députés, nous sommes très heureux d'être ici
aujourd'hui pour vous présenter un mémoire qui est
véritablement une oeuvre collective. Par cette réalisation
commune, nous avons le sentiment renouvelé d'être peut-être
un peu plus aujourd'hui un vrai collège, dans la mesure où nous
constituons un groupe intégré d'hommes et de femmes partageant
les mêmes orientations de base en formation et partageant les mêmes
préoccupations pour la mise en oeuvre de ces orientations. Pour
réaliser notre mémoire, un comité formé de
représentants de tous les personnels a d'abord proposé des
avenues et ouvert des perspectives. Tout cela a été repris au
cours d'échanges qui ont réuni des personnes de tous les services
et de tous les départements. Une version intégrée du
document a ensuite été mise au point et adoptée par les
assemblées générales des différents regroupements
de personnel, puis par les instances elles-mêmes du collège. Nous
voici donc aujourd'hui avec un texte à notre image et à notre
ressemblance. Notons toutefois que la période de l'année
où nous avons mis au point l'essentiel de ce document ne favorisait
guère la participation des étudiants et des étudiantes.
Ils ne sont donc pas partie formellement à nos prises de position,
même si d'aucuns se sont joints à nos discussions. Notre point de
vue développé dans le mémoire tient davantage du
témoignage que de l'analyse de système. Il s'agit d'une
réflexion, parfois à ras le sol, de personnes qui ont vécu
leur cégep, qui ont ensemble convenu de moyens et de formules pour
traduire dans les faits leur mission de formation, qui ont cru dans ce qu'ils
ont mis en oeuvre et qui entendent le dire à l'occasion de cette
commission parlementaire et dire aussi leur souhait de pouvoir continuer sur
cette lancée, tout en misant sur les corrections de parcours qui leur
permettront de mieux atteindre leurs objectifs.
Par ailleurs, ce mémoire a ses limites. Nous avons volontairement
choisi de mettre en évidence les orientations de base partagées
par tous et par toutes, celles qui soutiennent et encadrent l'essentiel de
notre action. Il y a de forts consensus à Maisonneuve sur ces points
fondamentaux. Cela dit, il y a des points que nous n'abordons pas dans notre
mémoire, à propos desquels la convergence, sinon
l'unanimité n'est pas encore chose faite. Nous avons trouvé plus
prometteur de miser, aux fins de ces audiences, sur ce qui nous définit
en nous ralliant plus que sur des objets plus pointus à propos desquels
les intérêts pourraient être divergents. Nous sommes un
collège vivant, où les opinions et les convictions sont en
cheminement constant. Pour les fins de cet échange-ci, nous n'avons
évidemment pas l'intention d'aller au-delà des bornes à
l'intérieur desquelles s'est défini notre consensus.
Au cours des audiences de cette commission, plusieurs intervenants ont
évoqué la perspective de projets d'établissement pour
chacun des cégeps. De fait, ce que nous avons choisi de dire
auprès de cette commission, c'est très précisément
quelques éléments de base, quelques têtes de chapitres du
projet d'établissement de Maisonneuve. Il s'agit, bien sûr, d'un
projet en développement, qui ne sera vraisemblablement jamais
achevé puisqu'il s'enrichit, comme tout être vivant, des consensus
auxquels nous parvenons au fil des ans. C'est un projet dont la force
d'entraînement s'accroît avec les années et qui finit par
donner au collège sa vraie dynamique puisqu'il fait cheminer toute la
communauté collégiale sur des questions de fond, comme celles que
nous abordons dans ce mémoire: Quels sont les principaux vecteurs de la
formation pour les gens de Maisonneuve? Comment ont-ils été mis
en oeuvre? Quelles difficultés majeures avons-nous rencontrées?
Quels éléments de perspective ou de prospective nous
permettraient maintenant d'aller de l'avant dans notre projet? Voilà ce
que, par ce mémoire, nous tentons bien sommairement de partager avec les
membres de cette commission, convaincus que notre témoignage et notre
expérience peuvent faire oeuvre utile pour le développement de
l'ordre collégial.
Très brièvement, donc, voici l'essentiel de notre
document. Premièrement, l'approche programme et la formation
fondamentale. À Maisonneuve, nous avons pris parti depuis un certain
temps déjà pour l'approche programme, afin de contrer notamment
la fragmentation des apprentissages entretenue par le système. Le
cadre des études collégiales a donné lieu, dans les
faits, à une formation à l'allure éclatée,
l'étudiant étant soumis à plusieurs démarches
parallèles, souvent étanches. L'étudiant choisissait un
programme lors de son inscription au collège, sauf qu'aucun lieu au
collège n'était chargé de prendre en compte les objectifs
de ce programme, et cela s'est surtout vérifié du
côté du préuniversitaire. De fait, les programmes
étaient la somme de plusieurs cours plutôt qu'une organisation
intégrée de plusieurs démarches complémentaires, a
fortiori si l'on comptait les cours de formation générale dans le
programme. Bref, il y avait là de sérieuses lacunes du
système. Nous entendons maintenant relier entre elles les
démarches proposées aux étudiants, mieux relier
également les objectifs et les méthodes des disciplines aux
objectifs d'un programme; en somme, fournir un projet de formation plus
conforme aux besoins et aux attentes des personnes.
Cette approche nous a conduits à adopter, après un long
travail d'élaboration, une politique d'établissement, de
concertation par programme qui est devenue le pôle de
référence de notre action. En même temps, nous avons
précisé nos objectifs de formation fondamentale qui doivent
innerver ou irriguer chacun des programmes, chacune des démarches
proposées aux étudiants. Nous les avons adoptés par
consensus et nous en sommes à définir la façon dont chacun
de ces objectifs sera pris en compte au sein des programmes et des
démarches propres à chacune des disciplines. Enfin, nous
commençons à mettre en place les comités de programmes
où de multiples intervenants réunis prennent en charge la mise au
point, le développement et l'évaluation des programmes. Nous
sommes très persuadés du caractère prometteur de notre
parti pris pour l'approche programme. Il recèle un bon sens
pédagogique et un respect des personnes, vertus de base s'il en est dans
une entreprise comme la nôtre. De plus, la concertation par programme
peut prendre appui sur les apprentissages disciplinaires eux-mêmes et sur
les regroupements disciplinaires que sont les départements
d'enseignement, de sorte que l'on peut mieux conjuguer les objectifs de
formation générale et spécialisée, les objectifs
d'ensemble et ceux qui sont propres à une démarche
particulière. Pour donner une assise solide à ce
développement essentiel, selon nous, nous devrons pouvoir compter
cependant sur des ressources supplémentaires qui seront mises à
la disposition des collèges car ce dossier demande plus que de la bonne
volonté, plus que de l'esprit de concertation et plus que de la
conviction. (17 h 20)
Deuxièmement, la réussite scolaire. Les approches
pédagogiques mieux intégrées que nous venons
d'évoquer, la recentration de notre action sur l'étudiant, autant
de raisons de croire que les taux de réussite scolaire devraient
être meilleurs dorénavant. Cela dit, il y a différents
facteurs, de nombreux autres facteurs, qui nous obligent à
insérer nommément la réussite scolaire parmi nos
priorités d'action. L'hétérogénéité
grandissante des groupes d'élèves, l'évolution des
comportements sociaux de ces élèves, la préparation
diversifiée et parfois inadéquate des élèves aux
exigences de l'ordre collégial, tous ces facteurs ne nous donnent
guère le choix. Nous devons nous définir essentiellement comme
des établissements de maîtres, de pédagogues de
première grandeur, si nous voulons assumer avec succès notre
mission d'enseignement supérieur de masse. Il faut qu'une
pédagogie de la réussite nous amène à mieux
soutenir toutes les initiatives qui vont augmenter la motivation des
étudiants, mieux encadrer et mieux diriger les énergies qu'ils
doivent consacrer à leur démarche d'apprentissage. À
Maisonneuve, l'orientation est prise, les initiatives déjà
nombreuses, ainsi qu'on peut s'en rendre compte à la lecture du
mémoire.
Dans ce chapitre central de notre projet d'établissement, qui
s'appelle «La réussite scolaire», il faut traiter, de
façon privilégiée, de recherche et de perfectionnement.
Sur ce point, Maisonneuve fait figure de proue. Côté
perfectionnement, nous avons été de la première
équipe de PERFORMA et, depuis, nous sommes un des collèges
où les programmes de perfectionnement du personnel enseignant recrutent
le plus grand nombre de personnes à chaque année.
Côté recherche, notre performance n'est pas moins
éloquente, qu'il s'agisse de projets de recherche pédagogique, de
production de matériel didactique et, notamment, de logiciels
d'enseignement, ces dernières années. Nous avons choisi, depuis
longtemps, cette approche qui entend apprivoiser le changement en
pédagogie par le biais de la recherche et du perfectionnement. Cela a
joué un rôle de premier plan dans la dynamique pédagogique
du collège et dans la qualité de ses interventions. En somme, en
deçà des problèmes de système qui influent sur la
réussite scolaire au cégep, nous misons sur la multiplication, au
local, des mesures d'appoint, sur la concertation du milieu pour prendre en
charge la réussite des élèves, sur l'adaptation de nos
programmes, sur notre investissement dans le perfectionnement, les
activités de recherche et de renouvellement de la pédagogie.
Encore ici, pour que toutes nos initiatives pourtant déjà
éloquentes deviennent encore plus productrices de succès
scolaire, il faut que nous puissions disposer de ressources locales qui nous
permettront de les multiplier, de mieux les articuler à nos besoins. En
effet, en dépit d'une situation d'ensemble plutôt
intéressante, taux d'attirance, qualité des candidatures,
équilibre relatif des clientèles, programmes plutôt en
santé, taux de placement, performance de nos diplômés
à l'université, en dépit de tout cela, nos taux d'abandon
sont encore trop forts. Nos taux de persistance aux études et de
diplomation sont en deçà de ce à quoi on devrait
s'attendre.
Des objectifs précis ont été ciblés dans
notre plan de développement des programmes, mais les moyens pour les
atteindre sont encore trop limités.
Ce problème des taux de réussite est
particulièrement préoccupant du côté du secteur
technique. Les candidatures à ces programmes ne sont pas assez
nombreuses car le technique n'est pas considéré comme une option
aussi séduisante et prometteuse que la perspective d'études
universitaires. De plus, le fait que ces études soient
généralement considérées comme terminales, ce qui
est le plus souvent le cas, d'ailleurs, semble avoir comme conséquence
que les candidats intéressés ne présentent pas toujours
les meilleurs dossiers scolaires. Ici aussi, l'approche programme, la
concertation et l'évaluation locale devraient atténuer certains
effets pervers de cette situation, mais également le rapprochement avec
l'industrie, la multiplication des stages pour les étudiants comme pour
le personnel, des programmes d'enseignement coopératifs, une plus grande
polyvalence des programmes de formation, la possibilité d'adapter nos
programmes aux besoins régionaux ou locaux, un meilleur arrimage avec le
secondaire, tout cela constitue autant de moyens qui devraient nous permettre
de lever cette contrainte qui continue de peser lourdement sur le technique en
dépit de ses multiples états de service.
Troisièmement, l'éducation des adultes. Maisonneuve est
devenu, à Montréal, un centre important d'éducation des
adultes, de formation sur mesure, de services aux entreprises, de
reconnaissance des acquis de formation, de développement de programmes
adaptés. En collaboration avec l'entreprise, nous avons aussi
conçu et mis sur pied l'Institut de chimie et de pétrochimie qui
s'est avéré une réalisation marquante. Tout cela constitue
une démonstration éloquente de notre capacité
d'innovation, bien sûr, mais surtout de notre volonté
d'intégrer dans notre projet d'établissement tous les patterns de
formation, toutes les clientèles, tous les rôles sociaux d'un
collège qui est un pôle de développement régional,
même en milieu urbain. Sauf que nous sommes contrariés, dans cette
orientation, par le cadre administratif du collégial qui nous oblige
à restreindre le nombre de personnes adultes qui veulent s'inscrire
à des cours crédités au collège, à leur
imposer de trop lourdes charges, à ne leur fournir que la portion
congrue en termes de services péripéda-gogiques. De plus, nous
avons fait l'expérience répétée des lourdeurs
administratives qui sont liées à la présence
simultanée de plusieurs instances gouvernementales pour le financement
des activités.
Quatrième et dernier point, une question de
crédibilité. La commission parlementaire actuelle aura eu cet
effet bénéfique, entre autres choses, de mieux faire ressortir
des aspects positifs, mais trop souvent méconnus ou occultés, du
réseau.
C'est tant mieux, les cégeps ayant été si souvent,
trop souvent remis en cause au cours de leur brève histoire. Mais une
des causes de ce traitement particulier est peut-être le manque de
transparence des collèges relativement à l'essentiel de leur
mission, soit l'enseignement objectif, démarche d'apprentissage,
évaluation. Ce manque de transparence est particulièrement
néfaste lorsqu'il est souligné par nos principaux partenaires,
les universités et les entreprises. Nous devons donc être plus
sensibles à cette situation.
À Maisonneuve, nous avons commencé à faire des pas
significatifs en ce domaine. Avec les universités, avec
l'Université de Montréal, ii faudrait dire, nous avons mis au
point un projet commun en sciences de la nature, où les objectifs et les
contenus sont plus clairement définis et partagés, où,
notamment, sera précisé le niveau minimal des compétences
visées. Les modes d'évaluation seront plus standardisés.
Des examens synthèses seront mis au point. Leurs résultats nous
serviront d'indicateurs. En somme, nous posons là des gestes porteurs
d'avenir.
De même, du côté du technique, mais dans le cadre
d'un programme pour adultes, cette fois, nous avons développé, en
très étroite collaboration avec l'industrie, un programme
original d'attestation d'études collégiales en techniques de
chimie et de pétrochimie. Nous l'avons validé auprès du
milieu du travail. Nous l'offrons en concertation avec l'industrie. Nous
gérons son développement en collaboration avec elle et
l'attestation est en voie d'être transformée en diplôme
d'études collégiales. Par tout ce parcours, la
crédibilité du programme et du collège s'en trouve
nettement confirmée. Voilà deux exemples récents
illustrant très bien notre volonté d'ouverture auprès
d'instances externes. La suite des choses, dans le quotidien de notre
développement, n'est pas encore toute dessinée, sauf que
l'orientation est là, elle est partagée, même si tous les
chemins ne sont pas tracés d'avance. (17 h 30)
Tels sont donc les quelques points qu'il nous a semblé
très opportun de porter à l'attention des membres de cette
commission. Notre conclusion, évidemment, elle coule de source. Pour
nous, gens de Maisonneuve, le cégep, tel que nous l'avons vécu,
est une réalisation d'envergure qu'il ne s'agit pas de remettre en
cause, mais dont on doit confirmer certaines des caractéristiques si
l'on veut qu'il produise les fruits attendus. Le cégep doit s'investir
dans la pédagogie, dans l'aide à l'apprentissage, dans le soutien
à la réussite, dans une approche renouvelée de la
formation et, pour cela, il doit pouvoir compter sur des ressources
améliorées. Le cégep doit mieux se coordonner avec ses
partenaires de sorte que ses taux de réussite, de diplomation et de
passage à l'université ou au marché du travaul soient
nettement plus élevés. L'éducation des adultes constitue
désormais un
volet essentiel de l'action des cégeps, à la condition que
l'accessibilité des adultes au collège soit soutenue et
consolidée. Enfin, si le monde du cégep devenait un peu moins
opaque aux regards externes de nos partenaires et de nos collaborateurs, le
cégep, comme institution, gagnerait cette crédibilité qui
lui fait trop souvent défaut et, souvent, très injustement. Il
serait surtout moins isolé dans sa quête d'une qualité
améliorée.
Nous aurons plaisir, maintenant, mes collègues et moi, à
répondre aux questions qu'aurait suscitées ce mémoire et
nous vous remercions, en terminant, de nous avoir permis de vous expliciter
notre point de vue.
La Présidente (Mme Harel): Merci, M. Leduc. La parole est
maintenant à Mme la ministre.
Mme Robillard: Merci, Mme la Présidente. Je veux saluer
tous les représentants du collège de Maisonneuve et vous dire
combien ça fait plaisir de voir une équipe. Parce que c'est un
peu ce que vous nous démontrez aujourd'hui par la présentation de
votre mémoire, une équipe qui a fait une réflexion
concertée à l'intérieur du collège, du conseil
d'administration jusque dans les différents départements et
auprès des différents syndicats. Je pense que c'est très
précieux, pour les membres de la commission, de voir que c'est possible,
cette vie d'équipe au sein des collèges. Dans ce sens-là,
j'aimerais peut-être tout de suite échanger avec vous, si vous le
permettez, sur le premier point de votre mémoire. Vous dites de
façon très claire qu'à Maison-neuve toutes vos actions
sont basées autour de l'approche programme et de la formation
fondamentale. Vous avez décrit, M. le directeur général,
comment ça pouvait se vivre à Maison-neuve, mais j'ai
l'impression, à tout le moins depuis qu'on entend des audiences ici, que
vous êtes presque un exemple unique dans le réseau
collégial. D'après ce que vous nous expliquez, l'approche
programme est réalisée chez vous et, en plus, ça ne cause
pas, mais absolument pas, de problème avec la structure
départementale et l'approche plus disciplinaire. Vous avez réussi
à trouver le moyen d'appliquer, donc, l'approche programme à
l'ensemble du collège. Dans ce sens-là, moi, j'aimerais vous
entendre davantage. Nous avons ici entendu d'autres témoignages
où il y avait des inquiétudes, de la peur du changement. Par
ailleurs, tout le monde dit que l'approche programme doit absolument être
implantée dans nos collèges. Alors, peut-être que
j'aimerais entendre, de façon spécifique, le témoignage de
M. Bouchard, président du Syndicat des professeurs; en plus, j'ai
entendu que vous étiez prof de philo, si j'ai bien entendu au point de
départ. La philosophie étant une discipline dans les cours
obligatoires, parfois, on voit une approche programme se dessiner dans des
collèges, mais sans impliquer les gens des départements de
philosophie. alors, m. bouchard, expliquez-moi comment ça se vit
à maisonneuve, et comment il se fait que ça se vive si
facilement, d'après ce qu'on me dit.
M. Bouchard (Oliva): Mme la ministre, je vous remercie de votre
question. Je n'irais pas jusqu'à dire que ça se vit facilement.
L'approche programme est un concept relativement nouveau, justement, dans la
définition des objectifs et des pratiques qui y sont rattachés
à l'intérieur des collèges. Chez nous, comme dans les
autres collèges, nous avons vu arriver ce nouveau concept. Je pense que,
rapidement, les différents groupes d'un collège et nous, comme
professeurs, nous sommes attelés à la tâche pour voir
comment nous pourrions vivre une approche programme à l'intérieur
de notre institution. Ça a donné lieu, je ne vous le cache pas,
à des débats difficiles entre nous, mais en même temps des
débats qui étaient prometteurs et des débats qui se sont
faits de façon constructive. Ça nous a conduits - bon, je passe
sur les multiples consultations pour le groupe qui nous concerne auprès
de tous les départements, enquêtes très poussées,
j'ai des rapports substantiels devant moi - finalement à accepter le
principe de l'approche programme, de la concertation par programme. Cela dit,
en poursuivant nos réflexions, nous en sommes venus, à la
commission pédagogique, à adopter un projet de politique de
concertation par programme. C'est ce qui a été conduit jusqu'au
conseil d'administration qui a fait sienne cette politique, et nous avons
maintenant une politique d'établissement. Je pense que c'est la
première chose qu'il faut dire, et ça n'a pas été
facile. C'est vraiment une démarche qui a été relativement
difficile à effectuer, mais je pense qu'on y est parvenus. Cette
démarche-là nous conduit à l'établissement d'un
certain nombre de paramètres. Je pense que c'est ça qu'il est
important de définir dans un premier temps. Ces
paramètres-là garantissaient, par exemple - et nous
l'écrivons dans notre mémoire - la primauté des
disciplines, des départements, parce que c'est toujours la
première menace que les gens voient venir en approche programme.
Ça m'amène tout de suite à une autre dimension.
Pour répondre à votre question, c'est, bien sûr, la peur
que les professeurs et que les départements ont d'être subsumes,
en quelque sorte, par les programmes, particulièrement quand on parle de
programmes techniques; et on a fait référence tantôt
à un programme défini par l'éducation des adultes, mais
d'une A.E.C. en pétrochimie, et il y a justement un cheminement pour
demander l'obtention d'un D.E.C. en procédés chimiques. Alors,
ça nous a renvoyés de plein fouet à toute cette question
en pleine commission pédagogique, alors que nous venions à peine
d'adopter cette politique de concertation par
programme. Autrement dit, on se voyait beaucoup plus rapidement que
prévu, je pense, confrontés à un exercice vraiment sur le
terrain, là, d'approche programme. Cet exemple-là me permet de
vous dire que ça a pu se faire au niveau de la commission
pédagogique aussi, et pas facilement, encore une fois, parce que,
là, vraiment, les disciplines obligatoires, puisque vous questionniez
particulièrement philosophie tantôt, et j'en suis, se sont vues
confrontées à une question existentielle, pour employer un terme
qui nous est cher: comment une discipline comme la philosophie peut-elle
s'insérer dans un programme aussi technique que celui-là, de
surcroît, je n'ai pas à vous l'apprendre, défini en
approche par compétence? Mais ça a pu se faire, et cela a
même amené à discuter - je pense que jamais un
département de philosophie, enfin, le nôtre, n'a eu à se
réunir aussi souvent pour discuter de ces questions, et tout à
fait en profondeur, parce que nous devions voir comment une discipline
obligatoire pouvait s'arrimer dans un... s'adapter à un programme comme
celui-là. J'aime mieux le terme «adapter». Et nous parlons,
justement, d'une adaptation d'une partie des objectifs du cours et du
département à l'intérieur du programme, et ça nous
a amenés sur le terrain des groupes homogènes, sur le terrain des
groupes stables, sur toutes des questions nouvelles pour nous, parce que nous
ne les pratiquons pas encore dans l'institution. Mais tout cela pour vous dire
que, oui, c'est un débat qui se fait, qui est prometteur, et je pense
qu'il y a surtout... c'est peut-être le plus rassurant dans tout
ça, c'est qu'il y a au moins un espace que nous reconnaissons et
où nous savons que nous sommes reconnus à l'intérieur de
la commission pédagogique et du collège pour pouvoir mener ces
débats-là de façon constructive. Voilà. (17 h
40)
Mme Robillard: Merci bien, M. Bouchard. C'est encourageant de
vous entendre, même si la concertation est difficile. Et je pense que
c'est le cas à plusieurs instances. Mais quand on réussit
à relever le défi de la concertation, très souvent, on
voit les impacts positifs que ça peut avoir. Vous me semblez, en tout
cas, sur... Si vous ne l'avez pas encore atteint, vous me semblez tout
près du but et je trouve ça très encourageant pour
d'autres cégeps qui sont au début de cette démarche et qui
s'interrogent et qui cheminent et qui... Bon, il y a toujours une certaine peur
du changement, mais vous démontrez que c'est possible et ce, pour que
nos jeunes aient une formation plus cohérente et une formation de
qualité. Alors, moi, j'apprécie beaucoup le témoignage que
vous nous faites aujourd'hui.
J'aborderai peut-être un autre sujet, M. le directeur
général ou d'autres. Dans votre chapitre sur la réussite
scolaire, vous vous interrogez de façon particulière sur le haut
taux d'abandon au niveau de la formation technique, au niveau de la diplomation
aussi qui est relativement faible. Vous avez différentes mesures. Il y
en a une sur laquelle je voudrais revenir et regarder avec vous, pour aller
plus loin, à la page 17 de votre mémoire, à la
recommandation 3.3.3. Vous dites: II faudrait établir des passerelles,
il faudrait avoir une filière de formation professionnelle et ce,
à partir de l'ordre secondaire jusqu'à l'ordre universitaire. Il
ne faudrait pas qu'il y ait des culs-de-sac - c'est ce que je comprends,
là - pour les jeunes. Qu'il y ait toujours des
débouchés.
M. Leduc, selon votre longue expérience dans le réseau
collégial, comment se fait-il que nous n'ayons pas encore ça, en
1992?
M. Leduc: Des passerelles entre le secondaire et le
collégial, par exemple?
Mme Robillard: Et le collégial et l'universitaire. Qu'on
n'ait pas une filière.
M. Leduc: Collégial et université, il y en
quelques-unes. Elles sont trop rares, mais il y en a quelques-unes. Il y a
quand même, je pense, 17 % du monde du professionnel qui vont à
l'université. Mais ça ne veut pas dire que, s'ils y vont, la
passerelle est là. Mais ils y vont sur le chemin qu'ils peuvent trouver.
Entre le secondaire et le collégial, oui, c'est là que le
bât blesse davantage. Entre autres... Là, je ne veux pas faire
intervenir d'autres mémoires auxquels j'ai déjà
collaboré. Mais la transformation qu'il pourrait y avoir, au
collégial, relativement au diplôme d'études
collégiales qui serait peut-être modulé, c'est
peut-être une façon d'intégrer les fameux secondaires VI et
VII, au secondaire, dans certains champs de savoir, de sorte que
l'étudiant qui aurait son secondaire VI en électronique, disons -
si ça existe - pourrait déjà être reconnu quand il
arriverait au collège, au moins un premier module. Enfin, il faut
s'organiser pour que la formation du secondaire, d'abord, soit
harmonisée avec celle du collégial. Il ne faudrait pas, par
exemple, que les changements dans les programmes au secondaire se fassent
indépendamment du collégial, en concertation, à la limite.
Il ne faudrait pas non plus, par exemple dans une région comme
Montréal, que le secondaire fasse - je ne dirais pas -exprès,
mais choisisse de faire des développements en secondaires VI et VII,
dans des secteurs qui sont exactement les mêmes ou très proches
parents de secteurs qui sont en difficulté au niveau collégial
lui-même. En tout cas, s'il veut le faire, il faudrait le faire en
concertation. Il faudrait qu'on puisse donc, ensuite de cela, faire des
passerelles entre ce qui s'est fait en secondaire VI et le collégial, au
niveau technique, et entre le collégial et l'université. Mais,
alors, il faudrait que l'université également reconnaisse ce qui
s'est fait au collégial.
Mais là, ce sont des choses de système dont
je parie, qui débordent le cadre strict du mémoire
très pointu et très lié à notre expérience
à nous, que nous avons présenté. Cela dit, même
nous, des fois, on s'envoie du côté du système et c'est
là que vous nous avez attendus, en ce 3.3.3. Et voilà!
Mme Robillard: Merci bien. Ça va, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Harel): Alors, merci, Mme la ministre.
La parole est à Mme la députée de Terrebonne.
Mme Caron: Merci, Mme la Présidente. Alors, au nom de ma
formation politique, bienvenue parmi nous à M. Leduc et à toute
son équipe. Vous comprendrez que je n'utiliserai pas tout le temps de
parole de l'Opposition pour permettre évidemment à notre
présidente, la députée de Hochelaga-Maisonneuve, de
profiter de votre passage pour pouvoir questionner, elle aussi.
Vous nous présentez, dans votre mémoire, votre vécu
particulier. Vous nous le faites bien saisir, tout en analysant : ensemble des
problèmes qui sont vécus par l'ensemble des cégeps.
Malgré le manque d'autonomie, que vous notez à plusieurs endroits
dans le mémoire... vous réclamez davantage d'autonomie. Dans le
chapitre sur la réussite scolaire, chapitre extrêmement inspirant,
vous avez défini, en pages 13 et 14, une kyrielle de moyens
centrés autour de l'élève pour arriver à cette
réussite scolaire. Je pense que ces exemples bien précis que vous
nous donnez peuvent être des pistes de solution qui peuvent être
utilisées, je pense, d'une manière nationale.
Ma question portera sur un autre chapitre qui semble occuper et
préoccuper beaucoup le collège de Maisonneuve,
c'est-à-dire l'éducation des adultes. Vous nous faites part d'un
problème particulier, en page 2, vous nous mentionnez que les candidats
proviennent de partout, à votre cégep, et sont si nombreux au
total que: «nous devons régulièrement en refuser la
moitié.» J'aimerais vous entendre un petit peu sur cet
élément. Et, en page 19, vous nous parlez de cette formation qui
est souvent considérée comme le parent pauvre et vous nous faites
part de différentes préoccupations que vous avez sur ce sujet.
Dans le dernier paragraphe de la page 19, vous nous dites: «II a souvent
fallu procéder dans un enchevêtrement inextricable de politiques
et de juridictions; nous aurions d'ailleurs beaucoup à dire sur ce
dernier point.» Et vous faites part un petit peu de la lenteur de la
machine gouvernementale. Mais, puisque vous auriez beaucoup à nous dire
sur ce dernier point des problèmes d'enchevêtrement, j'aimerais
ça vous entendre un peu sur le sujet.
La Présidente (Mme Harel): Alors, M. Leduc.
M. Leduc: Oui. Pour la première partie de la question, le
fameux 50 % dont on parle à la page 2, il ne s'agit pas des adultes,
à ce moment-là. C'est l'enseignement ordinaire pour les jeunes.
Nous recevons, disons, 4500 demandes et, compte tenu des espaces dont nous
disposons, on en prend 2200. C'est le sens du 50 %. Comme on est dans une
région comme Montréal, où il n'y a pas une
clientèle captive pour un collège, eh bien, les deuxièmes
tours vont ailleurs. Voilà!
La deuxième partie de votre question...
La Présidente (Mme Harel): Est-ce qu'on peut dire qu'en
termes élégants cette chose est dite? On y reviendra, si vous le
permettez.
M. Leduc: Oui, avec plaisir, madame.
L'éducation des adultes. L'enchevêtrement. Mais, là,
madame, oui, on aurait beaucoup à dire, mais je ne veux pas non plus
entrer dans beaucoup d'aspects techniques. D'ailleurs, ils sont tellement
connus. Toute la difficulté de fonctionner avec plusieurs
ministères, qu'il s'appelle Emploi et Immigration Canada, qu'il
s'appelle ministère de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité
du revenu et le ministère de l'Enseignement supérieur, avec tous
les processus, les procédés administratifs pour les façons
de faire payer, de nous faire payer, les lenteurs administratives, notamment de
la part du ministère de la Main-d'oeuvre - mais, là, je ne veux
pas faire... Ce n'est pas un mur des lamentations ici - cela dit, c'est
très lourd à porter pour les collèges, le fait... Si vous
avez un très gros service d'éducation des adultes, comme nous en
avons un chez nous, le fait de devoir avancer des sommes d'argent
considérables et de ne se faire rembourser que 6, 8, 12 et plus encore
de mois après, évidemment, il n'y a personne qui va vous parler
des taux d'intérêt là-dedans, il y a quelque chose d'un
petit peu lamentable. Toutes les complications pour finir par y aboutir, c'est
un roman! (17 h 50)
Alors, oui, c'est le problème, bien sûr, de l'harmonisation
de processus administratifs. Depuis longtemps, on aurait souhaité, les
collèges, et nous en particulier, que ces sources de financement, au
moins pour l'enseignement crédité, soient centralisées,
unifiées, remises à une seule source. On a toujours dit que
ça devrait être, compte tenu que c'est l'enseignement
crédité, le ministère de l'Enseignement supérieur
et de la Science. Bon, enfin, c'est un dossier qui n'est pas fermé. En
attendant, oui, il y a beaucoup de problèmes administratifs.
Mme Caron: Je vous remercie, M. Leduc. Alors, je vais passer
immédiatement la parole à ma collègue de
Hochelaga-Maisonneuve.
La Présidente (Mme Harel): Je vais la prendre avec
plaisir. M. Leduc, vous pariiez de lenteur administrative et vous nous parliez,
dans
votre mémoire également, de cette réalisation, en
fait, remarquable, qui est l'Institut de chimie et de pétrochimie. Je me
rappelle avoir reçu de nombreuses représentations de dirigeants
patronaux et syndicaux au moment de l'implantation de l'Institut, qui me
faisaient part des lenteurs administratives du ministère de
l'Enseignement supérieur et de la Science. Je crois comprendre qu'il a
fallu trouver une façon détournée, c'est-à-dire le
comité aviseur de la relance de l'est, qui n'existe plus, et le fonds
qu'il administrait n'existe plus non plus. Alors, heureusement qu'on y est
arrivé juste au bon moment. Mais je crois comprendre que c'est
grâce à ce coup de pouce que le procédé de
validation a pu s'enclencher et que l'approche par compétence a pu se
mettre en place. Est-ce que vous auriez des recommandations à faire - je
profite de votre passage pour le bénéfice de tous les membres de
cette commission - des recommandations à faire sur la manière de
faire pour s'ajuster plus vite aux besoins des travailleurs et des
entreprises?
M. Leduc: Évidemment, ça déborde le cadre de
notre mémoire, ce que vous nous demandez là.
La Présidente (Mme Harel): Oui.
M. Leduc: Mais il faut bien dire que, quand nous avons... Pour la
pétrochimie, c'est à la demande des industries qui sont venues
nous voir que nous avons mis en place ce programme-là. À ce
moment-là, cependant, compte tenu de la situation, de notre
expérience, de notre connaissance du milieu et du réseau, nous
avons fait délibérément le choix - d'ailleurs,
c'était ça qui était voulu - rapidement de faire un
programme pour adultes. Quand on fait ce choix-là, bien sûr, il y
a beaucoup d'intervenants, surtout quand on veut aller très vite comme
nous voulions le faire; alors, oui, ça a été
compliqué, mais ça fait partie du...
La Présidente (Mme Harel): Vous diriez que ce n'est pas
possible de simplifier?
M. Leduc: Ah oui. J'y viens justement. Dans une perspective
où les collèges seraient un peu plus responsables de leurs
programmes, bien sûr que cela serait plus simplifié. Mais, quand
je dis cela, je déborde sur d'autres mémoires que je connais
bien.
La Présidente (Mme Harel): Ou d'autres fonctions que vous
occupez.
M. Leduc: Aussi.
La Présidente (Mme Harel): J'écoutais la
réponse que vous donniez à ma collègue de Terrebonne et je
pensais pouvoir, en plus, profiter de votre présence parmi nous pour
vous demander si le collège a une idée, une opinion, une
évaluation, une appréciation du scénario d'un nouveau
cégep à Rivière-des-Prairies?
M. Leduc: Ha, ha, ha! Bon... une appréciation d'un nouveau
cégep. Écoutez, il existe déjà un collège
privé. Alors, il y aura un cégep vraisemblement, c'est ce qu'on
dit. Alors, tant mieux pour les gens de l'est et tant mieux pour le
développement de l'enseignement collégial et
l'accessibilité. Je vous ai parlé tantôt d'un certain taux
d'attirance du collège de Maison-neuve et d'un certain taux de refus au
collège, eh bien, bravo pour le collège Marie-Victorin... Enfin,
je ne sais pas comment il s'appellera.
La Présidente (Mme Harel): Faut-il présumer la
conversion? Écoutez, j'ai eu l'occasion de l'exprimer, notamment aux
professeurs d'éducation physique qui sont venus me rencontrer, mais,
cette fois, je profiterai de la présence de M. Bouchard, qui est
président du syndicat, pour lui demander s'il considère que
l'activité physique fait partie de la formation fondamentale. J'aimerais
l'entendre là-dessus. Moi, il y a 32 ans maintenant, lorsque mon
père a choisi pour moi le collège classique où je devais
poursuivre mes études, il a choisi, entre plusieurs, Marie-Anne parce
qu'il y avait des gymnases neufs. Il m'a dit comme ça: Tu vas pouvoir
obtenir ce que les gars ont toujours eu. Je l'en remercie parce que je crois
personnellement que, oui, l'activité physique fait partie de la
formation fondamentale. C'est un message que l'on doit transmettre, surtout
avec une population jeune, d'origine immigrante, où non seulement les
femmes mais souvent les garçons n'ont eu aucun apprentissage de
l'activité physique. Alors, ceci étant dit, j'écoute
attentivement, M. Bouchard, la position que, sans doute, le Syndicat a pu
prendre sur cette question.
M. Bouchard: Merci, Mme la Présidente. Vous nous faites
résolument déborder du cadre de notre mémoire. Je serai
donc relativement bref par rapport à cette question, quoique j'essaierai
d'y répondre avec précision. Nous n'avons justement pas voulu
inscrire cette dimension dans notre mémoire parce que, pour être
allés justement devant notre assemblée générale,
devant le groupe, discuter de cette question, nous avons bien senti aussi qu'il
y avait là des débats importants à mener entre nous.
Cependant, dans un premier temps, compte tenu de l'ensemble de l'information
que nous avions, des documents qui avaient été mis sur la table,
n'est-ce pas, pour préparer et alimenter, pour rester dans la même
image de cette commission, nous avons estimé que les quatre cours de
philosophie, les quatre cours d'éducation physique et les quatre cours
de français demeuraient pertinents pour la formation
générale, comme formation générale, et en
formation
fondamentale, donc comme cours obligatoire. Cela dit, nous n'avons pas
voulu lier cette question au mémoire lui-même puisque nous
étions en pourparlers pour un mémoire d'établissement.
Mais, jusqu'à maintenant, les informations que nous avons, dont nous
disposons nous font maintenir, précisément par rapport à
votre question, le cours d'éducation physique, les quatre cours
d'éducation physique comme étant un élément
très important, santé et éducation physique, de la
formation fondamentale. Cependant, je vous dis aussi que ce
débat-là se poursuit entre nous et qu'il n'y a pas non plus de
fermeture, d'intransigeance à discuter de cette question. Ce n'est donc
pas une réponse coulée dans le béton que je vous fais
à ce stade-ci. Mais, pour l'instant, nous considérons, oui, en
réponse précisément à votre question, que
santé et éducation physique font partie de façon
importante de la formation fondamentale.
La Présidente (Mme Harel): Je vous remercie de la
franchise de la réponse. Il se pratique très souvent en
commission parlementaire non pas la langue de bois, mais la langue de coton.
C'est une langue qui c . en usage très souvent dans ce Parlement et qui
consiste à ne dire que ce qui, finalement, ne fait pas l'objet des vrais
débats. Ceci étant dit, je voudrais vous dire à quel
point, moi, je suis personnellement fière, au nom des citoyens et
citoyennes de Hochelaga-Maisonneuve, d'avoir le cégep Maisonneuve et
d'avoir cette équipe de direction, et ça vous inclut tous, vous
qui êtes ici. Je veux, M. Durocher, que vous en fassiez part au conseil
d'administration. Pour un quartier qui est en difficulté comme le mien,
c'est certainement un très grand sujet de fierté d'avoir
l'excellence, la qualité et l'ouverture également, l'ouverture
sur le milieu que manifestent le cégep, la direction et le directeur du
cégep, et je veux les en remercier. Alors, Mme la ministre.
Mme Robillard: Merci, Mme la Présidente. Mme la
Présidente, je veux vous rassurer qu'ici, au niveau des travaux de cette
commission, nous n'avons pas utilisé la langue de coton. Je pense que
vos collègues sont témoins que les vraies choses se sont dites
ici et que nous sommes allés au fond des choses. Malheureusement, vous
n'avez pu être avec nous...
La Présidente (Mme Harel): Eh oui!
Mme Robillard: ...en raison de vos nombreuses occupations. Ce fut
depuis le début et c'est toujours un débat de fond sur les vraies
choses et les vrais enjeux de l'avenir pour la formation des jeunes et des
adultes au Québec. Je veux remercier sincèrement le
collège de Maisonneuve, Me Durocher et toute votre équipe
d'être venus témoigner en commission parlementaire. Encore une
fois, je trouve que vous êtes un exemple du travail d'équipe qui
est possible à l'intérieur des cégeps et je pense que
c'était essentiel que vous veniez nous en faire part. Merci bien.
La Présidente (Mme Harel): Alors, la commission suspend
ses travaux jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 18 heures)
(Reprise à 20 h 6)
Fédération des associations de parents
des cégeps du Québec
La Présidente (Mme Hovington): La commission de
l'éducation va reprendre ses travaux en recevant la
Fédération des associations de parents des cégeps du
Québec inc. Bonsoir messieurs, mesdames. Elle est
représentée par Mme Marina Lessard, présidente. C'est vous
qui allez être la porte-parole?
Mme Lessard (Marina): Oui, madame.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, Mme Lessard,
bienvenue à la commission de l'éducation. Si vous voulez bien
nous présenter votre équipe et les parents qui vous
accompagnent.
Mme Lessard: C'est une belle brochette de la province de
Québec, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Hovington): J'ai cru me rendre compte
quand vous me les avez présentés officieusement, tout à
l'heure.
Mme Lessard: ...vous regarderez que c'est équilibré
entre hommes et femmes aussi.
La Présidente (Mme Hovington): Vous avez raison,
absolument.
Mme Lessard: Nous avons à la droite, du Lac-Saint-Jean,
d'Alma, Mme Lizette Fournier, qui est la trésorière, qui tient
les cordons de la bourse d'une façon très ferme.
Mme Fournier Lapointe (Lizette): Bonsoir.
Mme Lessard: Nous avons Mme Thérèse Mathieu, qui
est du cégep de Drummondville, qui est la deuxième
vice-présidente.
Une voix: Bonsoir.
Mme Lessard: M. Wilfrid Lanoix, qui est du cégep de
Joliette-De Lanaudière.
Une voix: Bonsoir.
Mme Lessard: Moi, je suis du cégep de
Chicoutimi. M. Déziel, Roland, qui se trouve à être
le secrétaire de notre fédération et qui est du
cégep de Shawinigan, et M. Guy Viel, qui est du Bas-du-Fleuve, de
Rimouski, et qui est aussi... il est membre de la commission de publication et
de recherche de la Fédération. Et aussi, en arrière, il y
a des parents qui ont bien voulu se déplacer pour venir entendre ce que
Mme la ministre pourra échanger avec nous.
La Présidente (Mme Hovington): Oui, et je voudrais
peut-être souligner la présence d'un parent qu'on a bien connu, un
ancien collègue, M. Laurier Gardner, qui est là, je crois.
Une voix: Oui.
La Présidente (Mme Hovington): Bonsoir, Laurier. Ça
me fait plaisir de vous revoir. Alors, Mme Lessard, vous avez 20 minutes pour
nous présenter votre mémoire.
Mme Lessard: Mme la Présidente de la commission, Mme
Hovington, honorable ministre Mme Robillard et M. Gendron, aussi un parent,
député d'Abitibi-Ouest, sur les 46 établissements publics
du réseau collégial, nous comptons 26 associations, dont 24
forment notre fédération. Elles représentent donc les
parents d'à peu près 70 000 élèves.
En vertu de ses objectifs, notre fédération sensibilise
avec continuité depuis 1973 - d'ailleurs, on en profite pour inviter Mme
la ministre à participer à nos fêtes du 20e - tous les
parents attentifs au cégep afin de les amener à poursuivre leur
rôle d'accompagnateur tout en apprenant des comportements nouveaux avec
leur adolescent et leur adolescente aux études. Par analogie, on
pourrait considérer l'action de la Fédération comme une
oeuvre musicale où il faut constamment la recréer dans le temps
présent, grâce au jeu de musiciens, en l'occurrence, chez nous,
les délégués bénévoles qui passent et
administrent notre fédération.
Votre geste d'invitation, Mme la ministre, manifeste une fine
compréhension politique du fait incontournable que constitue la vision
générale de parents et leur présence active au sein du
système d'éducation collégial. Les parents affiliés
à notre fédération apprécient donc hautement le
fait de participer au présent débat gouvernemental dont les
intervenants sont en position de service face à notre jeunesse. Par le
fait même, les parents de nos associations reconnaissent chez Mme la
ministre et les membres de son ministère une authentique volonté
politique d'offrir à la population du Québec la plus grande
qualité de ses services pédagogiques de son réseau. Cette
authenticité d'intention et d'action est d'autant plus évidente
et réconfortante, lorsqu'on voit la plupart de nos fonctionnaires
dirigeants, eux-mêmes des parents, s'approcher des cégeps pour
mieux les connaître et s'intéresser au développement des
jeunes et à la réussite de leurs études
collégiales. C'est pourquoi, ce soir, le nous collectif prendra tout son
sens, puisqu'il englobera tous les parents qui sont ici présents. (20 h
10)
Dans l'évaluation gouvernementale de nos actuels services
éducatifs, les parents et leurs enfants se considèrent comme un
tout difficilement divisible qui est fait de deux parties intégrantes
légitimement et légalement reconnues: les jeunes, qui ont droit
à l'éducation supérieure, qu'ils soient aux études
ou non, et les parents, partenaires du système collégial, qui ont
droit et devoir à l'évaluation du système éducatif.
Ce droit naturel d'évaluation d'un système est tel que des
parents non satisfaits de leur système d'éducation demeurent
toujours libres dans leur choix et peuvent décider d'aller en dehors du
système public, selon leurs convictions politiques.
Mme la ministre, les parents vous donnent un message clair à
travers leurs consultations au niveau de la province. En regard de l'existence
réelle et toujours active de leur rôle d'accompagnateurs qui
suivent leurs jeunes depuis la naissance, les parents partenaires se voient
davantage dans une relation d'adulte et de jeune adulte en préparation
de carrière. Dans la limite de leurs pouvoirs, nos parents expriment
intensément leur volonté de continuer leurs
responsabilités et de vaincre toutes les formes d'obstacles
administratifs qui empêchent leur engagement légitime.
Quotidiennement, nous vivons auprès de nos jeunes des expériences
d'intervention affectives et sociales, dans le même sens qu'en donnait le
médecin et chercheur Jean-Yves Frappier, à l'occasion de l'une de
nos séances de formation pour les parents des cégeps de notre
fédération.
Le rôle du parent de l'adolescent, disait-il, est comme celui de
la ligne blanche bien tracée de la route. Cette présence prend
toute son utilité de guide, de repère ou d'accompagnement,
surtout lors d'affluences ou de périodes sombres. Dans la même
ligne de pensée, nous considérons que nous pouvons ajouter, sans
le trahir, que nous voulons aussi participer à un accompagnement
politique. C'est ce que nous faisons ce soir.
Mme la ministre, en tant que porte-parole des parents des cégeps,
qui est un groupe unique, nous sommes ensemble à cette table
parlementaire non avec un esprit d'étude de cas ou de revendication,
mais en vertu de notre raison d'être qui s'alimente d'un savoir
empirique, afin d'apprécier les forces et les faiblesses de notre
institution postsecondaire, ce que vous trouverez à travers 44
recommandations. Mais on ne vous les dira pas ce soir. Vous les connaissez.
Nos recommandations prioritaires proposent le maintien de l'actuelle
structure de nos collèges publics, nommés communément
cégeps - et des parents me disaient, Mme la ministre, que le
«p» de cégep, pour eux autres, ça voulait dire
public - et le maintien d'une mentalité de gestion favorable
à la présence de parents partenaires, afin que ceux-ci
participent au processus de réflexion en vue d'apporter des solutions
communes à certains aspects de notre système d'éducation
qui, malgré ses 25 ans et d'évidents et nombreux signes, a
conservé des lacunes parce que nos cégeps ont certaines
difficultés à s'autocorriger.
Mme la ministre, la mentalité moderne des parents des
cégeps, c'est d'être en relation de partenariat. Depuis
l'époque du rapport Parent, la mentalité, les attitudes, la
trajectoire militante des parents ont évolué dans la ligne d'une
collaboration toujours alliée d'un généreux et souple
bénévolat. Une recherche historique sérieusement
étoffée pourrait avantageusement témoigner d'un
palmarès étonnant de services rendus par les parents de nos
collèges dont l'une de nos revues à la mode pourrait
s'enquérir. Cette mentalité moderne et démocratique qui
participe à la croissance de nos générations distinctes du
Québec continue son raffinement en s'alimentant d'un leitmotiv
récemment créé par notre fédération, celui
du parent partenaire.
Pourquoi cette é^irète de partenaire au mot
«parent»? La Fédération a fait sienne le qualitatif
de partenaire parce que nous apportons une distinction majeure lorsque nous
parlons de la motivation parentale au collège. Certes, notre
priorité de visibilité nous amène à sensibiliser
des parents à continuer leur rôle d'accompagnement auprès
des jeunes, mais dans cet ensemble politique que constituent les parents se
retrouve en effet une mosaïque de mentalités et de
compétences parentales.
Outre les parents qui n'ont jamais réussi à comprendre
leurs responsabilités, il y a ceux qui, depuis longtemps, ont
décroché de leur mission et d'autres parents uniquement
engagés, un peu égoïstement, là, dans le cheminement
de leurs propres enfants. Il y a aussi ceux qui se disent motivés
à soutenir leurs enfants, mais qui, par ailleurs, neutralisent leur
conscience - c'est pour ça qu'il y a beaucoup d'échecs et
d'abandons, peut-être - parce qu'ils sont ou se laissent chloroformer par
une désinformation ou de séquelles de fausses mentalités
qui disent, par exemple, qu'un parent n'a plus sa place auprès
d'adolescents aux études collégiales.
Cette erreur de jugement souvent empoisonne les relations ou encore
déresponsabilise et crée cette illusion de fin de
responsabilités. Cette dernière est vite perdue, lors de la
demande du bilan fiscal des parents, pour répondre au formulaire des
prêts et bourses. Être associés, Mme Robillard, c'est une
grande richesse chez les parents. La notion de partenaire s'enrichit en
croissance infinie d'expériences et d'échanges de clés de
réussite lorsque des parents veulent bien vivre dans cette relation de
réciprocité avec d'autres parents déjà
associés qui participent à la gestion et au fonctionnement de
notre système du réseau collégial public. Notre
intervention de partenariat commence là où le terrain est propice
à soutenir la motivation et les actions des jeunes élèves,
la gestion de leur association de parents et de celle de l'institution.
Qui s'y connaît sait que notre société ne peut se
permettre de perdre une telle puissance que nous appelons des partenaires
authentiques de nos collèges, parce que bénévoles et
surtout très compétents, pour un grand nombre, et sans conflit
d'intérêts. Et, tout de suite, je devance une question pour vous
dire que, pour nous, sans conflit d'intérêts, ça veut donc
dire qu'il n'y a pas une tendance mercantile en retour de l'éducation
que nous donnons à notre jeune. Ce qui compte, c'est la réussite
de l'élève.
Mais, pour assurer un certain partenariat efficace, nous rencontrons des
difficultés. Parallèlement à cette richesse de
compétences parentales et disponibles au partenariat et à la
motivation de nouveaux parents, dont plusieurs ont été
formés par des comités d'école, curieusement et
paradoxalement, c'est la très courte période mise au temps
d'intervention des parents partenaires qui les rendent vulnérables.
Cette vulnérabilité peut se corriger par des politiques et
régimes appropriés. Vous pourriez vous demander où les
parents pourraient être utiles. À l'instar de la loi des
associations étudiantes, qui regroupe, au premier niveau, nos jeunes
utilisateurs du service éducatif, la Fédération souhaite
un support juridique pour que chaque cégep ait son association de
parents partenaires. Il y en a 18 qui n'ont pas d'association de parents, et
c'est quand même important.
Toute association de parents légitimes, reconnue par une loi et
bien intégrée au sein de l'équipe collégiale,
pourrait offrir de précieux services comme, par exemple, un
système de tutorat afin de rendre plus facile la reconnaissance, de la
part de parents, dans le processus de consultation sur les grands enjeux au
collège, afin d'aider le cégep au quotidien dans leur image, et
là j'ai mis toute une série, dans la liste d'épicerie,
où on serait utile, mais je passe, pour ne pas vous ennuyer. (20 h
20)
Mme la ministre, nous avons des problèmes, les parents, à
rejoindre les autres parents parce que nous rencontrons la loi de la
confidentialité. Afin d'informer facilement les parents, nous, les
parents affiliés, demandons avec insistance à Mme la ministre
d'étudier la possibilité de modification de la loi de la
confidentialité afin que toute association de parents puisse
légalement acheminer par courrier aux parents des cégeps
certaines informations qui concernent l'organisation du cégep.
Actuellement, l'interprétation de la loi est très
arbitraire. Elle nous laisse au gré des vents et marées de
certaines personnalités détentrices du pouvoir de cette
interprétation. Nous saisissons mal la rigidité de certains
établissements
face à la demande de fournir l'adresse du répondant de
l'élève pour l'inviter à nos réunions. Il faut
toujours passer par la direction générale. Pourtant, n'est-il pas
curieux de constater - et je le redis, je l'ai dit tout à l'heure - une
dérogation de la loi par les services de l'aide financière
lorsque les parents visés doivent fournir leur rapport de banque? Cette
demande gouvernementale, même si le parent accepte, n'est-elle pas une
sorte de geste dérogatoire de la confidentialité? Je suis un peu
influencée par le comité de demandes dérogatoires. Alors,
je l'utilise très souvent.
Mme la ministre, quand on regarde un peu l'organisation des parents de
près, on se rend compte que ce réseau de parents offre un
éventail pluraliste de strates sociales. Les parents constituent pour
les collèges un très grand bassin de dévouement et de
compétence. Ils forment un éventail pluraliste de strates avec
une population très active, et ils ne sont pas là en fonction de
leur travail, mais ils sont là comme à titre de gardiens de la
qualité de la vie des collèges. En revanche, ils sont en position
discutable parmi des groupes organisés fortement corporatistes et
largement pourvus de moyens financiers. Malgré cela, les grandes lignes
du message des parents des cégeps, recueilli aux quatre coins du
Québec, dégagent avec rationalité et autorité une
situation qui met en présence l'ardeur de la volonté et l'absence
d'un mécanisme, par ailleurs, qui bloque subtilement la réussite
de cette implication légitime.
La Fédération demande d'apporter un correctif à la
durée et à leur précarité d'intervention et
recommande, entre autres, que les parents soient reconnus comme membres
officiels, au conseil d'administration, par une représentativité
de 6 parents et que ie mandat de chacun soit d'une durée de trois ans,
comme celui des socio-économiques, qu'il y ait un parent à la
commission pédagogique. Moi, à Chicoutimi, j'ai essayé de
dire: Ce serait important que les parents, un parent puisse assister au
processus de discussion à la commission pédagogique. Mais on m'a
envoyé une lettre très gentille: Vous pouvez... On va vous
envoyer les ordres du jour. S'il y a un thème qui vous intéresse,
vous pouvez toujours venir y participer. Alors, j'ai rencontré,
après, le président: Étais-tu contente? Oui, poliment
contente. O.K.?
Et aussi, qu'il y ait un parent au comité de la vie
étudiante. Je me suis rendue compte... À Chicoutimi, il y a un
parent au comité de la vie étudiante, mais à mon grand
étonnement il n'y a pas beaucoup de parents qui siègent dans les
comités de vie étudiante, un ou deux parents au comité de
finances. On a des banquiers parmi les parents. On a des hommes politique. On a
un peu toute sorte de monde. Pourquoi est-ce qu'ils ne seraient pas aussi au
comité de finances? Ça ne nuirait pas, je pense, non plus. Et
à l'exécutif d'un cégep. On a appris que même
là il y a des parents qui ne siègent pas du tout au niveau de
l'exécutif d'un cégep.
Ce qui compte, Mme la ministre, il y a beaucoup de choses pour les
parents. Je vais en passer, mais il y en a une que je ne peux vraiment pas
passer de côté, pour nous autres, les parents, c'est que les
enfants réussissent. Pas qu'ils réussissent dans un sens de
compétition. Pas qu'ils réussissent dans une ligne de
l'olym-pisme, mais c'est que notre jeune puisse réussir, qu'il puisse
normalement performer. C'est ça qui est important pour nous parce que
vous savez, on entend souvent des conférences où est-ce que nos
enfants décrochent parce que, des fois, on exige un peu beaucoup d'eux.
Mais les systèmes sont faits où nos enfants peuvent
réussir si on conserve certaines balises.
On voudrait que les méthodes d'apprentissage encouragent la
performance non héroïque dans le choix de carrière, la
confiance de ia jeunesse, l'éducation du coeur. On voudrait qu'on
stimule la pédagogie collégiale. On voudrait aussi qu'on ne tue
pas la moyenne. C'est qu'en ce moment tous les jeunes qui sont un peu
conscients essaient d'avoir des 85 %, 90 %. Où est-ce qu'elle est la
moyenne? On ne voudrait pas, nous autres, que la moyenne disparaisse.
L'évaluation, Mme la ministre, on en a beaucoup discuté.
Alors, ici, on va passer ça un peu. Mais il y a une chose qui est
importante pour nous dans l'évaluation. Quand on discute avec nos jeunes
à la maison, on trouve ça un peu aberrant de voir la
pondération à l'intérieur des examens. Je vous donne un
exemple. Je suppose que mon jeune arrive d'une polyvalente et qu'il arrive dans
le système du cégep. Le professeur dit: Bon, comment voulez-vous
que je vous évalue? 25 points par mois? 25 % par mois? Les jeunes
disent: Bon, ça a du bon sens, 25, 25, 25. Mais quelqu'un qui
connaît le système d'apprentissage, qui connaît les
processus de développement de la pensée, sait très bien
qu'on ne fait pas des relations au commencement, surtout quand on arrive et
qu'on est encore des jeunes de 17 ans.
Alors, une façon de vérifier l'évaluation, c'est
que, à un moment donné, il y a 10 %; après ça, on
peut mettre 15 %, puis on peut mettre 30 %. Il peut mettre un peu plus
d'examens qu'il faut et, à un moment donné, s'il y a un examen
qui est un peu moins bon... Il faut rendre un peu l'évaluation
humanisante parce que les jeunes, ils veulent étudier, mais quand ils
sont pris dans un système d'évaluation semblable, moi, je me dis
souvent qu'ils sont dans un piège. Moi, je voudrais bien que mes enfants
ne soient pas dans un piège d'évaluation parce que ce n'est pas
seulement comptabilisé, l'évaluation, c'est très
important. Même, on voudrait que tout l'aspect de services à la
collectivité des jeunes soit comptabilisé un peu dans cette forme
d'évaluation.
Mme la ministre, je sais qu'il y en a
plusieurs qui vous ont dit que les diplômes d'études
secondaires avaient deux poids, deux mesures. J'ai dû, au conseil
d'administration de mon cégep, défendre la fameuse cote
d'accessibilité dans les cégeps. J'ai dit que je ferais du tapage
au niveau de la population si, à un moment donné, ils ne
changeaient pas cette fameuse cote. Vous savez que la cote 60, dans les
cégeps, pour entrer - vous êtes au courant un petit peu - c'est un
amalgame de . toutes sortes de choses. Ils brassent ça un petit peu, et
il faut que ça donne 60 %. Alors, nous autres, on voudrait bien que la
cote d'admission soit reconsidérée. On voudrait bien qu'on
apporte un correctif à ces deux poids, deux mesures, mais plusieurs
autres personnes vous l'ont dit aussi.
Les parents demandent également à Mme la ministre
d'organiser des tables permanentes de concertation en vue d'harmoniser les
concepts de contenu de programme à tous les niveaux d'enseignement:
secondaire, collégial, université et ceux du monde du travail.
Ils insistent sur un fait très important: que le monopole corporatiste
d'exclusivité de la carte de compétence soit aboli. C'est
très sociaL unt. Il est urgent que tout diplômé ayant
reçu sa formation, incluant des stages d'apprenti, puisse obtenir sa
carte d'apprenti pour une courte durée. Puis, avec un bon système
de supervision dans le milieu, il pourrait avoir une carte de
compétence.
C'est pourquoi on aimerait voir organiser une table avec le parent
intégrateur d'emploi. Les parents, ils sont dans divers milieux. Les
parents doivent faire une place aux enfants. C'est eux autres qui doivent
être les premiers intégrateurs d'emplois. Le ministère a le
pouvoir de protéger... J'entendais, l'autre jour, les gens qui disaient:
C'est important de protéger le publics des corporatistes qui venaient.
Je pense que le ministre a ce pouvoir aussi de protéger le public et de
convaincre en ce sens les syndicats et les patrons.
En vue de faire progresser les meilleures conditions de vie de nos
étudiants, les parents proposent le maintien de prix modiques à
la cafétéria et une subvention au plat principal de la
cafétéria. Il y a beaucoup d'enfants qui mangent peu parce qu'il
y a beaucoup d'enfants qui n'ont pas d'argent. Alors, quand ils ont un
système de cafétéria où ça coûte cher,
les parents nous confient qu'ils ne mangent pas grand-chose. Si on était
capable de subventionner le plat principal, seulement ça,
peut-être que ça aiderait. Mais il paraît que ça peut
venir à coûter cher un petit peu, mais on aurait des solutions par
rapport à ça.
La Présidente (Mme Hovington): Excusez-moi. Il va falloir
que vous accélériez un petit peu parce que votre temps est
écoulé.
Mme Lessard: Oui, il me reste une page.
La Présidente (Mme Hovington): D'accord.
Mme Lessard: Alors, aussi que le service de psychologie et de
santé soit un peu plus présent. Que, pour les
non-résidents, il y ait une création d'habitations à prix
modiques, en collaboration avec les municipalités. C'est-à-dire
que les municipalités donneraient un crédit - je n'ose dire de
taxe, là - à tous les propriétaires qui pourraient fournir
un bail à un étudiant. Et, à ce moment-là...
Vous savez, Mme la ministre, quand on regarde en Europe, le statut
d'étudiant, il a beaucoup sa place. Au Québec, dans la
population, le statut d'étudiant n'a pas beaucoup sa place. Moi, je
regarde, j'ai fait une enquête autour de l'Université du
Québec à Chicoutimi. Il n'y a pas beaucoup de loyers de libres.
Donc, moi, je dis peut-être qu'on pourrait temporiser les ambitions un
peu plus mercantiles des propriétaires autour de nos cités
universitaires. (20 h 30)
En guise de conclusion, notre fédération veut
réaffirmer son rôle de partenaire des parents qui veulent
travailler pour sauvegarder des valeurs qui, des fois, se font plutôt
oralement que par écrit. Évidemment, les après-commissions
vont tenir la pensée parentale en éveil, comme le traduit si bien
l'oeil bleu du graphisme de la page couverture de notre mémoire.
Voyez-le avec son oeil rond, ouvert, ses ailes certes légères,
mais grandes et toujours prêtes à se déployer, comme des
éléments de «feedback», pour venir à la
rescousse du système d'éducation. Cette vision de vigilance
active des parents a été traduite par une jeune artiste, Julie
Déziel, étudiante en arts à Trois-Rivières.
Pour nous, les cégeps demeurent avant tout un ensemble de
services, de réponses et de solutions à la continuité de
notre mission sociale de parents, ceux qui mesurent toute l'importance de
l'instruction supérieure et du raffinement de l'éducation
supérieure. Ce présent forum est donc pour tous l'occasion de
resserrer notre relation de partenariat entre nous, parents motivés, ce
gouvernement et la société des collèges, afin que notre
action commune produise des fruits au profit de notre jeunesse, qui dispose
d'un grand potentiel d'avenir garant de notre relève à porter le
flambeau de notre lendemain. Merci, Mme la ministre.
La Présidente (Mme Hovington): Merci, Mme Lessard. Alors,
je reconnaîtrai la ministre de l'Éducation, de l'Enseignement
supérieur et de la Science.
Mme Robillard: Merci, Mme la Présidente. Je voudrais
saluer les membres de la Fédération des associations de parents
des cégeps du Québec, saluer de façon particulière
Mme la présidente. Nous le savons tous et toutes, je pense, comment vous
êtes impliquée au niveau de
la Fédération des associations, et on voit bien le sens de
votre engagement. Vous avez pris la peine, les parents, aussi d'écrire
un mémoire au niveau de la commission parlementaire, et je pense qu'on
se doit d'entendre votre point de vue. Que les jeunes aient 15, 18 ou 20 ans,
ils ont toujours des parents qui, nous le souhaitons, sont là pour les
accompagner aussi dans leur démarche de formation. Je pense que c'est ce
pour quoi vous êtes là.
Alors, sans plus attendre, Mme Lessard, j'aimerais ça qu'on
échange sur certaines de vos recommandations, pour apporter des
clarifications et aussi voir si on vous saisit bien dans ce que vous nous
recommandez au niveau de votre fédération. Le premier sujet que
je voudrais aborder avec vous, Mme Lessard, a trait à votre
recommandation, à la page 15, la recommandation 4, où vous nous
suggérez - et c'est dans le chapitre de la fréquentation et du
cheminement des étudiants - la création d'un poste d'om-budsman
au sein des cégeps et, un peu plus loin, à la page 20, quand vous
nous parlez de la fonction enseignante, vous dites - et là je veux
savoir s'il y a un lien entre les deux - vous recommandez, à ce
moment-là, la mise en opération d'un comité neutre de
révision des notes.
Alors, j'aimerais bien saisir, d'abord, la première des
recommandations, un poste d'om-budsman, avec quel rôle, et l'autre, sur
le comité neutre de révision des notes. Pourriez-vous être
plus explicite?
Mme Lessard: Oui. Alors, nous allons parler d'expériences
empiriques. Ce que j'espérerais, un jour, ce serait d'avoir des fonds
pour vous apporter quantitativement nos observations. Quand les
étudiants ont des problèmes - j'ai vu, l'autre jour, les
étudiants, ici, qui sont venus, ils vous ont dit... alors, j'ai dit: On
va être dans le même sens - ils acheminent leurs revendications ou
leurs plaintes, mais ça reste souvent lettre morte. Et aussi, dans le
système, il y a des gens qui ne sont pas des étudiants, qui sont
aussi des professeurs, et ils se plaignent, et ça reste mort.
Alors, on s'est dit, nous autres: II manque l'ombudsman, parce que
l'ombudsman, il va être là pour ça. Il pourrait être
pour quatre cégeps, par exemple. Dans la région du Saguenay, on
pourrait avoir quelqu'un qui ferait ce rôle-là. Alors, j'ai
commencé, au conseil d'administration, à m'intéresser
à poser la question. Il paraît qu'il existe un comité des
litiges.
Alors, au conseil d'administration chez nous, on s'est posé la
question et, à un moment donné, il y a quelqu'un... oui, il dit:
Oui, oui, au fait, il existe un comité des litiges. Alors, tout le monde
était étonné que, dans notre cégep, il y avait un
comité des litiges. Alors, on a dit: On va s'en servir. Mais, quand on
achemine des choses là, on a le temps de passer, parce que nous, on est
de courte durée, et les étudiants aussi. Alors, les
étudiants se découragent. Si on a mis le comité de
révision de notes, c'est que ça se fait entre les pairs, la
révision de notes. J'ai d'autres modèles à d'autres
niveaux d'enseignement où ce ne sont pas les pairs qui prennent le
dossier d'une révision de notes, et ça donne plus justice
à l'étudiant. Alors, probablement que l'ombudsman pourrait
pousser ce dossier pour enfin neutraliser les personnes qui sont sur le
comité de révision des notes.
Mme Robillard: Alors, l'ombudsman serait principalement pour des
plaintes qui concernent la révision de notes. Mais, en plus, il y aurait
un comité neutre que vous appelez de révision.
Mme Lessard: Non. C'est-à-dire que l'ombudsman, lui, il
ramasserait toutes les plaintes qui n'aboutissent pas et qui sont
fondées.
Mme Robillard: Parfait. Alors, Mme Lessard, si on en venait
à la représentation des parents au niveau du conseil
d'administration, vous ne serez sûrement pas surprise que je vous pose
des questions sur ce sujet-là. Présentement, selon notre loi
actuelle, comme vous le savez très bien, il y a quatre
représentants des parents. Dans votre mémoire, vous me faites la
recommandation d'augmenter à six, de passer de quatre à six. Mme
la Présidente, vous le savez, vous avez été avec nous,
ici, de nombreuses heures, à entendre d'autres intervenants qui sont
venus en commission parlementaire. Nous avons eu, par exemple, des jeunes, des
jeunes adultes qui fréquentent le cégep et qui sont venus nous
dire: II faudrait peut-être que les parents nous laissent leur place et
de diminuer de quatre à deux, et nous, les jeunes adultes
étudiants, nous sommes très bien placés pour être
des représentants au niveau du conseil d'administration. Nous avons eu
aussi les gens d'affaires qui sont venus nous dire: II faudrait augmenter le
nombre de représentants socio-économiques. Vous les avez entendus
autant que moi. Et vous, vous m'arrivez en disant: Non pas quatre parents, mais
six parents.
Alors, j'aimerais bien entendre votre argumentaire pour augmenter ce
nombre et que, par le fait même, vous m'expliquiez aussi votre
réaction par rapport aux autres propositions que nous avons
reçues et, de façon particulière, celle des jeunes
étudiants.
Mme Lessard: Oui, vous savez, ma fille aimerait bien avoir ma
voiture. C'est qu'à un moment donné les jeunes pensent toujours
que les parents sont de trop. Tout à l'heure, j'ai dit justement: Les
parents ne sont pas de trop quand il s'agit de signer la formule fiscale. O.K.?
Et on a observé - et ce n'est pas mon opinion personnelle, c'est
l'opinion des parents, parce qu'on a eu plusieurs forums là-dessus -
nous avons
observé que les parents, sur un conseil d'administration,
d'abord, étaient toujours assidus. C'est rare qu'il manque un parent,
parce qu'il est très intéressé à ce qui se passe
dans son cégep. Le parent est un réseau en lui-même. Il est
un réseau socio-économique aussi et sans conflit
d'intérêts. Il ne vient pas la pour une fonction.
On sait, de par l'histoire de certains pays, où les parents sont
beaucoup plus présents dans leur cégep, qu'ils sont
peut-être beaucoup plus près des personnes qui sont les enfants
qui doivent réussir leur collège. Alors, nous autres, on s'est
dit, parce qu'on avait même entendu dire qu'il y avait des gens qui
voulaient carrément enlever les parents: Ils peuvent toujours le faire,
mais, s'il y a six socio-économiques, pourquoi n'y aurait-il pas six
parents?
Mme Robillard: Alors, ce fut votre argumentaire, là, pour
nous arriver à la proposition de six parents...
Mme Lessard: C'est que nous... L'argumentaire, c'est que les
parents sont très bien capables d'être socio-économiques,
mais ils ont quelque chose qui est u> peu plus noble, un petit peu, a mon
avis.
Mme Robillard: Alors, que pensez-vous de l'employé de
collège, à n'importe quel poste dans un collège, comme
professeur, comme professionnel ou comme personnel de soutien, qui accepte un
poste au conseil d'administration comme représentant de parent, mais
qui, en même temps, est employé du collège? On nous a
soulevé ce problème au niveau de notre commission. (20 h 40)
Mme Lessard: À mon avis, ils sont en conflit
d'intérêts.
La Présidente (Mme Hovington): M. le porte-parole de
l'Opposition officielle, le député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Oui, Mme la Présidente. Bonjour, Mme Lessard,
ainsi qu'à toute votre équipe. On salue d'une façon
très cordiale et d'une façon spéciale la
Fédération des associations de parents des cégeps du
Québec. Ce n'est pas tous les jours qu'on a la chance d'avoir une
présidente qui est docteure en philosophie. On en profite pour vous
saluer. À ce chapitre, comme docteure, on sent que votre mémoire
comporte plusieurs mesures de protection, plusieurs mesures d'enveloppement, de
support, de stimulation, de délicatesse, de sentiment de mère et
de père, quoi! On sent ça comme lignes de force dans votre
mémoire, et nous saluons cette orientation. Toutes celles et ceux qui
penseraient que les parents au Québec ont démissionné face
à l'éducation devront aller se rhabiller, suite à la
présentation de votre mémoire et au nombre important de
recommandations. Vous n'avez sûrement pas décidé de
démissionner face au défi de l'éducation.
Ceci étant dit, on va profiter de votre présence pour
échanger un peu sur quelques points. Vous avez fait beaucoup de
recommandations. Vous touchez plusieurs points. J'aimerais en approfondir
quelques-uns avec vous.
À un moment donné, vous recommandez - une première
question que je voudrais poser - que des moyens de communication soient mis au
service des parents dans leur implication à la réussite des
études. Lorsqu'un comité de parents vient faire une
recommandation comme ça... D'ailleurs, vous l'avez fait à
plusieurs reprises à la ministre. Vous vous adressiez davantage à
la ministre en espérant qu'elle retienne un certain nombre de vos
recommandations. Sur celle-là, je voudrais que vous soyez plus explicite
parce qu'en ce qui me concerne, je peux me tromper, mais je ne crois pas que ce
soit une recommandation qui puisse s'adresser au système parce que des
moyens de communication sont mis au service des parents dans leur implication
à la réussite des études. C'est quelque chose qui vous
intéresse tellement que mieux vaut, d'après moi, le
développer avec la particularité de chacun des milieux, avec la
particularité, dans certains cas, d'un bassin urbain plus riche, plus
pauvre, dans un autre cas, un cégep éloigné qui n'a pas
tout à fait les mêmes options.
En termes clairs, pourquoi vous ne croyez pas, compte tenu de votre
très grand intérêt, à la réussite? On sent
également que votre mémoire est marqué un peu dans toute
cette orientation, que le premier objectif qui vous anime le plus, c'est de
tout mettre en oeuvre pour que les jeunes gars et filles du Québec
puissent réussir le mieux leurs études collégiales. Dans
ce sens-là, il me semble que c'est une préoccupation constante de
parents, et ça m'apparaîl plus crédible d'envisager que des
parents se mobilisent, se regroupent au sein même de l'institution
collégiale pour exiger du cégep d'Alma, si c'est le cas, du
cégep de Jonquière, si c'est le cas, du cégep du
Vieux-Montréal, si c'est le cas, des mécanismes pour vous assurer
que vous restez dans le coup. Pourquoi vous préconisez cette
recommandation?
Mme Lessard: M. Gendron, vous êtes un père d'enfants
au cégep.
M. Gendron: Oui.
Mme Lessard: Vous avez toujours suivi votre enfant, vos
enfants.
M. Gendron: Pas autant que je voudrais, mais un peu.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Lessard: Et c'est pour vous très précieux.
C'est pour vous très précieux. Quand des parents suivent des
enfants depuis qu'ils sont tout petits et qu'ils les voient s'en aller dans un
système, et que vous êtes en plus un éducateur de
profession, vous savez très bien que, si la pédagogie
collégiale est bien organisée... On a lu un rapport
extraordinaire sur la pédagogie de la réussite, et j'en suis, et
je pourrais vous donner beaucoup de témoignages où est-ce que,
quand une pédagogie est très bien organisée et que
ça suit une évolution d'enfants non au micro-ondes, non sur une
chaîne de montage, et que le système donne une méthode de
travail...
Moi, ce que je veux pour mon jeune, c'est qu'au moins, au cégep,
il soit heureux, il soit content. Ce n'est pas nécessaire qu'il soit le
«bollé». Tant mieux pour le «bollé», j'en
suis heureuse mais, des fois, même le «bollé», il a de
la misère à suivre sur autre chose parce que la clé de son
affectif, il ne l'a peut-être pas tout le temps. L'enfant qu'on encourage
tout petit à réussir, moi, je veux que le système donne
une pédagogie pour que mon jeune... On n'en a tellement pas beaucoup au
Québec.
Savez-vous combien il y a d'adultes au Québec? Et savez-vous
combien il y a d'enfants au Québec? M. Ryan disait, un jour, mais je ne
sais pas s'il s'en rappelle: S'il y avait un enfant et un adulte et qu'un
adulte s'occupait d'un enfant, on n'aurait pas de problèmes. Mais il y a
15 adultes, il y a un enfant qui souffre, et le parent n'est pas là.
Mais les parents qui sont autour de cette table, il y en a qui
réussissent très bien, il y en a qui réussissent moins
bien, mais ce qu'on veut, c'est que le système qui est le nôtre et
le gouvernement qui est le nôtre mettent en place une pédagogie
qui fasse que nos enfants réussissent au moins à s'instruire.
Bon, il y a le monde du travail qui est autre chose, mais au moins
qu'ils ne soient pas des rescapés des échecs et des abandons. Je
sais qu'on a tous... la formation des maîtres a beaucoup
travaillé, il y a beaucoup de méthodes qui circulent, on a
d'excellents pédagogues qui peuvent aider nos enfants à
réussir. C'est le message des parents. On veut que nos enfants
réussissent parce qu'on n'en a pas beaucoup et qu'ils sont
précieux pour nous.
M. Gendron: En page 19, également, ce n'est pas que j'ai
des réticences par rapport à la recommandation, c'est au niveau
où vous la placez. Vous indiquez qu'il y aurait lieu d'avoir un service
de santé dans les cégeps beaucoup plus préoccupé...
moi, je vais appeler ça, dans le jargon, que je souhaite... Vous savez
que c'est des jeunes adultes à ces âges-là, et il y a un
certain nombre de jeunes adultes qui, de toute façon, vont vouloir faire
un certain nombre d'expériences qui, selon nos critères
d'appréciation, n'auraient peut-être pas dû se faire ou ne
devraient pas se faire au niveau collégial. Il me semble que la
recommandation que vous faites de se préoccuper davantage de toute la
dimension de ce que vous soulignez, uni= bonne conduite et un bon comportement
ou une bonne culture, de l'importance de conditions de santé - et
là je ne détaillerai pas - que c'est une préoccupation qui
devrait être davantage au niveau secondaire, au milieu de l'adolescence
ou à la fin de l'adolescence.
Pourquoi, vous, pensez-vous qu'il y aurait lieu de renforcer
considérablement toute cette préoccupation au domaine de la
santé au niveau collégial, où c'est des jeunes adultes
qui, les trois quarts du temps, veulent, de toute façon, faire un
certain nombre d'expériences qu'ils feront, de toute façon,
indépendamment des bonnes considérations qu'on leur donnera?
Mme Lessard: Je vais juste dire très court et je vais
demander à mon collègue, M. Déziel, d'en parler un petit
peu. C'est qu'à un moment donné on avait entendu dire qu'il y
avait un remue-ménage au niveau de la santé, et je sais que nos
jeunes ne feront pas deux kilomètres pour aller voir, par exemple, le
CLSC, et on voulait bien maintenir les services de santé. On voudrait
même un médecin qui s'organise pour voir le traitement, par
après la santé... Mais je vais demander à mon
collègue Déziel, parce qu'on a fait un mouvement
là-dessus. M. Déziel.
M. Déziel (Roland): Oui, messieurs. Ce que nous
désirons, même avec nos jeunes adultes, nous sommes dans une
société de consommation et de consommation immédiate.
Alors, le jeune qui est en interrogation, qui est en questionnement, veut avoir
une réponse tout de suite. Alors, si dans le cégep on s'avise de,
je ne sais pas, retourner au CLSC les infirmières qui sont en place, nos
jeunes, probablement qu'ils seront découragés d'aller chercher
l'information, parce que ce qui nous préoccupe, c'est que
l'infirmière du cégep et les autres personnes qui sont
affectées aux services de santé puissent faire aussi une
éducation préventive. Pour nous, c'est très important afin
que nos jeunes sachent à quoi ils s'exposent quand ils veulent faire
certaines expériences, comme vous le souligniez tout à
l'heure.
Et puis, peut-être aussi, je dis non seulement peut-être,
mais aussi d'ajouter un correctif s'ils ont fait une mauvaise
expérience. Alors, c'est la préoccupation globale des parents
qu'on leur garde ce service bien actif à l'intérieur du
cégep, qu'il y ait également des mouvements qui s'installent
là pour assister l'infirmière, médecin, groupe. Par chez
nous, à Shawinigan, on a le groupe qu'on appelle le Sparadraps, qui peut
assister d'une façon très efficace l'infirmière, et
puis...
M. Gendron: Regardez, si vous permettez, ce que je comprends,
là, c'est genre... bon, bien,
le cégep étant un milieu de vie, qu'une équipe
santé pas très forte, légère, s'occupe de
prévention, de dépistage, puis soit davantage à
l'intérieur du milieu de vie plutôt qu'au CLSC. C'est ça
qu'il faut comprendre?
M. Déziel: Oui.
(20 h 50)
M. Gendron: Merci. Page 21, recommandation 23, parce que je
trouvais ça encore là intéressant, mais je ne suis pas
capable de saisir exactement la portée de votre recommandation, que le
ministère de l'Enseignement supérieur précise la
philosophie d'encadrement des étudiants des cégeps et
protège leur intérêt en leur assurant tous les services,
ainsi de suite. À ma connaissance, ce n'est pas, encore là, une
recommandation qui a sa portée et son sens si on l'expédie au
ministère de l'Enseignement supérieur, parce que les
collèges sont différents les uns des autres. L'âme d'un
collège, le projet éducatif d'un collège n'est pas le
même.
En conséquence, je souhaiterais que votre préoccupation
soit davantage axée au niveau d'un conseil d'administration de chacun
des collèges, en voulant dire: Bien, on exige que les collèges
aient un minimum de ce que j'appellerais de paramètres d'encadrement.
C'est de même que je comprends ça. Est-ce que c'est bien ça
que vous vouliez dire? Mais l'encadrement par rapport à quoi?-
Mme Lessard: Bon, c'est que c'est l'insertion sociale et
professionnelle. Ça va un petit peu dans te sens quand les gens
demandaient des stages coopératifs aussi, puis pour les aider aussi
à aller dans le milieu du travail et de revenir. C'est à peu
près dans ce sens-là. C'est pour les aider, regarde... 23, c'est
insertion sociale et professionnelle. C'est ça que vous dites,
numéro 23?
M. Gendron: Oui.
Mme Lessard: oui. c'est de mettre des mécanismes qui
permettraient cette insertion. et ça va aussi... le parent
intégrateur d'emploi, à peu près, là.
M. Gendron: O.K. Une dernière question. Vous avez
touché également la formation de base. Vous savez que c'a
été discuté par beaucoup de gens, beaucoup d'intervenants.
Il n'y a pas beaucoup de parents et il n'y a pas beaucoup d'intervenants qui ne
souhaitent pas que des jeunes adultes du niveau collégial puissent
bénéficier de la meilleure formation de base. Vous dites,
à la recommandation 29... Et je les prends ensemble, je ne veux pas
nécessairement en faire une lecture, là. Mais 29, 30, 31, selon
moi, ça va ensemble. Alors, vous dites: Dès la première
année, le cégep assure d'abord une culture générale
de qualité. À ma connaissance, c'est ça pour la formation
de base tout court. Tous les cégeps qui offrent un tronc commun de
formation de base et de formation fondamentale se doivent de viser à la
meilleure culture générale.
Vous ajoutez que la spécialisation collégiale ne
s'acquiert qu'à partir de la deuxième année. Moi, je ne
sais pas pourquoi vous portez ce jugement-là parce que, selon moi, il ne
devrait pas y avoir de spécialisation, pas plus en deuxième
année, du moins pour ce qu'on appelle un diplôme d'études
collégiales, mais qui conduit à des cycles universitaires, donc
qui est préparatoire à l'université. Si vous êtes au
niveau professionnel, par définition, il est spécialisé
tout le temps parce qu'il est dans une technique. C'est trois ans de formation
technique. Alors, j'ai de la difficulté. Pourquoi vous
préconisez, à 30 et 31, entre autres, que la
spécialisation collégiale ne s'acquière qu'à partir
de la deuxième année? Faites-vous référence
à quelque chose de spécifique que vous avez oublié de
préciser? J'ai de la difficulté à saisir.
Mme Lessard: L'esprit de ceci... Tout à l'heure, à
l'évaluation, j'en ai touché un petit peu. Mais on s'est rendu
compte que, quand les élèves arrivent de plusieurs polyvalentes
différentes, ce que je trouve formidable dans notre système... Et
puis moi, je l'aime, ce système-là. On dirait qu'en philosophie
c'est le moyen terme, O.K.? Ce que je trouve intéressant, c'est que,
quand ils reviennent de toutes sortes de collèges différents
où, à un moment donné, ils ont reçu toutes sortes
d'enseignements pédagogiques, quand ils arrivent au cégep, c'est
bon qu'à un moment donné, là, la première
année, ils raplom-bent leurs connaissances de base. Puis ils
évoluent tellement vite, les jeunes, c'est tellement beau de les voir,
du mois de septembre à octobre, novembre, quand ils s'intéressent
à l'histoire, quand ils s'intéressent à la philosophie,
quand ils s'intéressent à toutes ces choses-là, qu'il faut
absolument le conserver
J'entendais l'Université Laval qui offrait quelque chose d'autre,
technique, là, à un moment donné, que tous les
étudiants en première année pourraient être... J'ai
dit ça dans mon milieu, et ils ont dit: Bien, sais-tu que c'est pas
bête, ça. Mais, à un moment donné, ça
s'épuiserait au niveau technique parce qu'ils ont besoin aussi d'anoblir
leur pensée.
Alors, ce qu'on voudrait, nous autres, c'est que nos étudiants
soient cultivés dès la première année et qu'ils
fassent du ménage et qu'ils arrivent à un certain niveau,
à un certain carrefour où est-ce que là, après
ça, ils peuvent repartir vers une spécialisation. Il ne faut pas
trop les spécialiser vite, nos enfants. C'est trop vite. À un
moment donné, c'est prématuré, au secondaire, de faire de
l'orientation d'une façon définitive, puis c'est
prématuré de trop les spécialiser au cégep. Des
fois, dans les univer-
sites, on dit: C'est encore un peu vite, tu sais.
M. Gendron: Mais, rapidement, là, ce petit ménage
que vous souhaitez - c'est juste pour aller plus vite, là - pour deux,
trois mois, est-ce que ça ne pourrait pas être plutôt des
cours de mise à niveau avant d'envisager de choisir des options
définitives?
Mme Lessard: Moi, je n'aime pas ça quand vous nous mettez
au niveau.
M. Gendron: Ah bon!
Mme Lessard: On ne met pas au niveau les cours de base
fondamentaux, on ne met pas au niveau l'analyse du langage, on ne met pas au
niveau la littérature. J'aime pas ça me faire mettre au niveau
parce que la connaissance, elle n'a pas de niveau.
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup. M. le
député de Sherbrooke.
M. Hamel: Merci, Mme la Présidente. L'inconvénient,
Mme Lessard, quand on prend plus de temps pour exposer son mémoire, on
en a peu pour échanger. Alors, on a plusieurs questions et on va
être limité, malheureusement.
Dans votre paragraphe concernant l'orientation au secondaire, à
la page 16, vous avez une recommandation, mais vous utilisez des mots assez
forts, là, vous parlez de harceler les enfants, les exposer à une
difficulté psychologique, on angoisse les enfants. Et vous recommandez,
finalement, que... Vous parlez aussi, dans votre recommandation... vous
demandez une enquête. Et vous parlez de coupable désinformation de
certains conseillers en orientation qui prônent la facilité au
détriment de ce qui est indispensable.
J'aurais une couple de questions là-dessus, moi. Quand vous
parlez de coupable désinformation, c'est appuyé sur quoi? Et
quand vous dites qu'on prône la facilité, de quel genre de
facilité parlez-vous, là? C'est fort ce que vous dites
là-dedans.
Mme Lessard: Oui. Moi, j'aimerais ça qu'il y ait une
enquête de faite auprès des étudiants pour...
M. Hamel: ...appuyé?
Mme Lessard: Oui. On se base sur des choses empiriques.
M. Hamel: Comme quoi?
Mme Lessard: Sur ce que les parents quand, à un moment
donné, en forum, nous racontent qu'un enfant a eu tel type
d'orientation. Bien, tu ne peux pas faire tes sciences, tu n'es pas forte en
mathématiques.
M. Hamel: Ça nécessite une enquête?
Mme Lessard: J'aimerais ça, à un moment
donné, que cet enfant-là, qu'on dit... Moi, j'ai eu un
étudiant... Je vais vous donner un cas très précis que
j'ai dans ma tête. À un moment donné, j'ai un garçon
d'un ouvrier qui vient à la maison. Aïe, il dit: Je m'en vais au
cégep. C'est formidable! Mais il dit: Ils m'ont mis en sciences sans
maths. Il dit: Ce n'est pas là que je voulais aller. Il dit: Ils m'ont
organisé. J'ai dit: Comment ça? Qu'est-ce qui arrive? Il
était quatre heures moins quart. Il s'en allait au cégep de
Jonquière, puis moi j'habite Chicoutimi. Il dit: Moi, c'est en sciences
économiques que je voulais aller, mais quand j'étais au
secondaire ils m'ont dit que je ne serais jamais bon en sciences
économiques parce que mes maths n'étaient pas bonnes, puis vous
voyez, là, je suis puni, là. C'est mon orienteur qui m'a dit
ça. Des cas comme ça, je pourrais vous en ramener tout plein.
Alors, je me suis dit, à un moment donné, là - je
suis bien placée des fois pour parler chez nous à certains
orienteurs - j'ai dit qu'à un moment donné il ne faut jamais dire
à un enfant qu'il n'est pas bon en mathématiques. C'est vrai au
niveau des effets, mais il faudrait voir aussi comment ça se fait qu'il
a fait son apprentissage. Bien, un cas comme ça, ce jeune-là...
On est parti en voiture, puis là on est allé à
Jonquière. Il restait un quart d'heure. C'était drôle,
parce que ce n'est pas mon enfant et, à un moment donné, il a
fait un pacte avec le API qui est là et, maintenant, il est en sciences
économiques et il a repris ses mathématiques. Tu sais? Alors,
j'aimerais ça que de la désinformation comme ça... Tu n'es
pas bon en français. Tu n'es pas bon en mathématiques. Et
ça, ça désoriente les jeunes. C'est dans ce
sens-là. Vous n'êtes pas convaincu, hein?
M. Hamel: C'est-à-dire que ce n'est pas tout à fait
de la désinformation. C'est d'autres termes que ceux-là. Ce n'est
pas nécessairement non plus un geste comme celui-là qui veut dire
qu'on prône la facilité. Mais, de toute façon, on est
obligé de s'arrêter, là, madame...
La Présidente (Mme Hovington): Si je veux laisser une
minute au député de Rimouski, en vitesse.
M. Tremblay (Rimouski): Oui, moi, je... Mme la Présidente,
d'abord, je félicite l'association des parents. Je pense que c'est
important d'avoir le point de vue des parents sur les conseils
d'administration. Ce qui m'a intrigué un peu, Mme Lessard, c'est que
vous me dites qu'il y a 16 cégeps, si je comprends bien, qui n'ont pas
de comité.
Mme Lessard: Dix-huit. Ça n'a pas de bon sens.
M. Tremblay (Rimouski): Dix-huit. Quelle est la cause? C'est quoi
la cause?
Mme Lessard: C'est parce qu'à l'intérieur des
cégeps on n'a aucun mécanisme qui nous tient. Alors, ils n'aiment
pas très, très ça. Il y a des cégeps qui sont
très partenaires. C'est merveilleux de travailler avec eux autres. Mais
il y en a d'autres qui ne font pas d'efforts pour que les parents s'associent.
Ils pensent toujours qu'on a un peu l'esprit corporatiste, puis on ne l'a pas.
Alors, je pense qu'à un moment donné il faudrait avoir une
association de parents comme il y a une association d'étudiants.
M. Tremblay (Rimouski): ...là. Vous, vous êtes une
association. Vous êtes la Fédération?
Mme Lessard: Oui, mais, demain matin, on peut mourir nous
aussi.
M. Tremblay (Rimouski): Bien non, c'est impossible. Vous ne
pouvez pas mourir. Voyons donc!
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Lessard: Bien oui, on peut mourir. Heureusement que,
maintenant, on a eu la chance d'avoir un petit peu d'aide, mais ça ne
tient sur rien. C'est très, très, très
précaire.
M. Tremblay (Rimouski): C'est précaire. O.K.
Mme Lessard: Parce qu'il n'y a rien qui nous tient. Il n'y a pas
de mécanisme qui nous tient à l'intérieur. Peut-être
que votre citoyen de Rimouski pourrait vous le dire. M. Viel.
M. Viel (Guy): Si on me donne la parole...
La Présidente (Mme Hovington): En une minute.
M. Viel: ...je pourrais répondre à mon honorable
député. Nous, ce qu'on prône avant tout... Bien sûr
qu'il y a des faiblesses. Et, dans certains aspects de notre rapport, on y va
un peu gaiement, puis l'autre député, qui est à votre
gauche, a trouvé facilement une des coquilles de notre rapport. Mais on
est ici avant tout pour défendre le rôle des parents et la
primauté de la part qu'on peut apporter. (21 heures)
À titre d'exemple, à Rimouski, au cégep de
Rimouski, pour les parents qui siègent sur les comités de
harcèlement, comité de vie étudiante, comité de
planification, le collège demande à l'association de
désigner. Mais, quand vient le temps d'élire les parents au
conseil d'administra- tion, il ne nous demande pas notre avis. Alors, ce qui se
produit, c'est qu'il y a des parents qui sont sur les conseils d'administration
de collèges et qui ne sont pas sur les associations. Qui est-ce qui les
représente, ces parents-là?
Alors, nous, ce qu'on voudrait surtout... Si on veut pouvoir exercer, on
a besoin de moyens. Les moyens peuvent être d'ordre financier, mais ils
sont aussi d'autres ordres. Par exemple, je trouverais ça normal que ce
soit mon cégep, ou une loi, ou peu importe, un cas cité dans
le... nous permette de pouvoir agir. Et c'est une faiblesse que je trouve.
Pourquoi que, pour les comités de harcèlement, on demande de
désigner une personne et que, pour gérer le cégep, on ne
le demande pas? Je dois vous rappeler... Moi, j'étais, avec ma fille et
mon garçon à l'élémentaire, sur le comité de
parents. Je les ai accompagné au secondaire. Je les ai accompagné
au collégial. C'est dans la voie normale. Moi, j'ai deux, trois bacs et
une maîtrise. J'ai été très actif dans mon milieu et
j'ai été très engagé.
M. Tremblay (Rimouski): Je sais ça.
M. Viel: Donc, en plus de mes connaissances académiques,
de mon suivi comme parent, j'apporte aussi une connaissance de mon milieu dans
la gestion d'une coopérative. Vous le savez, M. le député,
combien j'ai été actif.
M. Tremblay (Rimouski): Oui. Je vous connais. Je sais.
M. Viel: Or, je suis un parent, mais je ne suis pas un exemple
unique. Si, là, on se retournait et on demandait aux gens quels sont
ceux qui ont été sur les comités de parents à
l'élémentaire, à peu près tous les parents
lèveraient la main, et quels sont ceux qui étaient sur d'autres
comités. Alors, c'est un rôle d'accompagnant qu'on a fait depuis
le début. Et nous, ce qu'on voudrait, au cégep, c'est de pouvoir
continuer à agir. Et on le fait d'une façon
désintéressée. On représente, pour ceux qui y
participent, parce que ce n'est pas tout le monde qui a la facilité ou
les moyens... On est là pour être des collaborateurs et avec les
cégeps et avec le ministère. On vous remercie de nous avoir
entendus, de nous avoir écoutés. Et soyez sûr qu'on sera
toujours attentifs et près de vous.
M. Tremblay (Rimouski): Très bien.
La Présidente (Mme Hovington): C'est tout le temps qu'on
avait. On a même débordé largement sur notre temps. Mme la
ministre, en conclusion.
Mme Robillard: Merci, M. Viel, de ce témoignage si vivant.
Je suis certaine que le député de Rimouski, là, comprend
encore mieux le rôle des parents au sein...
La Présidente (Mme Hovington): Je ne suis pas sûr.
Je ne suis pas sûr.
Mme Robillard: ...de conseils d'administration de cégeps.
Mme Lessard, mesdames et messieurs, merci beaucoup à la
Fédération des associations de parents d'avoir pris la peine de
faire cette analyse pour venir nous soumettre des recommandations
précises. Je pense qu'on se devait d'écouter le point de vue des
parents. Merci bien.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. Alors, j'inviterais
maintenant le groupe de jeunes appartenant aux communautés noires de
Montréal de bien vouloir prendre place, s'il vous plaît. Nous
allons suspendre une minute.
(Suspension de la séance à 21 h 3)
(Reprise à 21 h 6)
La Présidente (Mme Hovington): Veuillez prendre place.
Alors, le groupe de jeunes appartenant aux communautés noires de
Montréal est représenté par M. Eddie Alcide. Vous
êtes le porte-parole.
Groupe de jeunes appartenant aux communautés
noires de Montréal
M. Alcide (Eddie): Oui, en fait...
La Présidente (Mme Hovington): Bonsoir, et bienvenue
à la commission de l'éducation, M. Alcide. Voulez-vous nous
présenter vos trois collègues, s'il vous plaît?
M. Alcide: Bon, alors, je vais vous présenter... À
ma gauche, c'est Mme Debbie Robertson; dans le milieu, c'est Mme Margaret
Jean-Charles et, au bout, à ma gauche complètement, la
troisième, c'est Mme Mireille Foula Bruno. Alors, ce soir, vous avez
deux porte-parole. Vous avez, dans le milieu, Mme Margaret Jean-Charles, qui va
vous faire une présentation. Ensuite, ce sera Mireille Foula Bruno, qui
va enchaîner la présentation. Et puis, bien sûr, à la
suite, s'il y a des questions, alors ça sera moi qui vais
répondre.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, vous avez 20 minutes
pour nous présenter votre mémoire.
M. Alcide: Oui. Et je dois aussi dire que ce groupe-là, il
est patronné par l'Association des praticiens sociaux haïtiens et
l'Association des jeunes diplômés de la communauté
haïtienne.
La Présidente (Mme Hovington): Bonsoir. M. Alcide:
Alors, Margaret.
Mme Jean-Charles (Margaret): Oui, bonsoir. Donc, c'est le
mémoire qui a été patronné par l'Association des
praticiens sociaux haïtiens du Québec. Dans le cadre de la
consultation générale qu'organise le secrétariat de la
commission de l'éducation relativement à l'enseignement
collégial, nous, jeunes appartenant aux communautés noires de
Montréal, voudrions porter à votre attention notre point de vue
sur ce sujet. Nos propos porteront sur les aspects suivants:
premièrement, l'accessibilité des jeunes Noirs à
l'enseignement collégial; deuxièmement, l'adaptation de
l'enseignement collégial à la réalité pluriethnique
du Québec; troisièmement, l'insertion des jeunes Noirs dans le
marché de l'emploi au moyen de dispositifs de développement de la
main-d'oeuvre.
Premièrement, l'accessibilité des jeunes Noirs à
l'enseignement collégial. Nous pensons que toutes les options dans le
choix de carrière doivent être ouvertes aux jeunes Noirs. Il est
nécessaire que soient mis en place des mécanismes d'orientation
qui assurent concrètement l'accès à toutes les options. En
instaurant de tels mécanismes, les jeunes Noires ne seront plus
confinées dans le nursing, notamment. Ces mécanismes pourraient
se traduire, par exemple, par des supports pédagogiques fournis aux
néophytes dans le cadre d'une propédeutique, ce qui favoriserait
une qualification pour un choix de carrière diversifié.
Deuxièmement, l'adaptation de l'enseignement collégial
à la réalité pluriethnique du Québec. Le contenu et
la structure générale des programmes d'études ne sont pas
adaptés à la réalité pluriethnique du Québec
d'aujourd'hui. L'histoire et la littérature noires ne sont pas
enseignées dans nos collèges. La clientèle, en
général, se trouve alors privée d'une source
d'enrichissement intellectuel. Les jeunes Noirs, en particulier, restent
coupés de figures significatives auxquelles ils pourraient se
référer au cours de leur quête identitaire.
En plus, les programmes d'études gagneraient à favoriser
des échanges entre jeunes appartenant aux minorités ethniques et
ceux appartenant à l'ethnie majoritaire. Par ailleurs, le personnel
enseignant devrait être sensibilisé aux relations interethniques,
et ce personnel devrait compter dans ses rangs des membres des
communautés culturelles, notamment des Noirs, afin de mieux
refléter la réalité sociale multiethnique du
Québec. (21 h 10)
En ce qui a trait aux dispositifs et pratiques en évaluation des
apprentissages, il est nécessaire d'instaurer des mécanismes qui
soient aptes à contrecarrer les effets d'éventuelles pratiques
discriminatoires. La nomination d'un ombudsman est une piste à
explorer.
L'insertion dans le marché de l'emploi. Le chômage chez les
jeunes des communautés noires à Montréal se situe
au-delà de 40 %. Parmi ces
jeunes se trouve un nombre important de jeunes diplômés de
niveau collégial.
Le secrétariat de l'éducation, de concert avec le secteur
de l'emploi, doit donc favoriser la mise en oeuvre de dispositifs permettant
l'accès des jeunes Noirs au marché de l'emploi. Les programmes
d'accès à l'égalité constituent une voie de
solution au problème de chômage des jeunes Noirs. Une autre voie
de solution serait que le secrétariat de la commission de
l'éducation supporte, par des moyens discrétionnaires, les
organismes qui s'engagent à fournir aux jeunes Noirs la
possibilité d'effectuer des stages pratiques.
Enfin, il est souhaitable que les jeunes soient
représentés dans une structure administrative permanente, telle
que le Conseil consultatif de la jeunesse du Québec.
En espérant que les suggestions contenues dans ce mémoire
vous inspireront, nous vous prions d'agréer nos salutations
distinguées. Merci.
M. Alcide: Mme Foula Bruno va enchaîner avec l'information
complémentaire.
Mme Foula Bruno (Mireille M.): La révision de la loi sur
les cégeps vient à point nommé et l'on estime que celle-ci
vise non seulement à faire une évaluation, mais surtout à
identifier les nouveaux défis et les moyens d'y arriver. Dans cet ordre
d'idées, ce rapport se divisera en trois parties: le constat, les
défis et les enjeux, et les recommandations.
Le constat. Le système collégial, qui a aujourd'hui 25
ans, se caractérise par un déséquilibre inquiétant.
Celui-ci se manifeste à différents niveaux et surtout se
matérialise dans des formes quotidiennes qui touchent toutes les
catégories d'étudiants et plus particulièrement les
Afro-québécois et les allophones.
De récentes données montrent que ces groupes
éprouvent beaucoup plus de difficultés à réussir
leur cycle collégial, alors que, dans le même temps, ils ne
cessent de représenter un pourcentage important de la population
collégiale, surtout dans la zone de la région
métropolitaine de Montréal. Les difficultés liées
à l'absence d'encadrement adéquat, à la barrière de
la langue, dans certains cas, et au manque d'opportunités réelles
en font aujourd'hui des étudiants virtuellement
défavorisés et surtout qui commencent leur processus
d'éducation avec déjà un handicap par rapport à
l'ensemble des jeunes de leur classe. L'évolution d'une telle situation,
dont on en voit aujourd'hui les prémisses et les
matérialisations, ne peut conduire, à terme, qu'à des
conséquences dramatiques au niveau individuel et au niveau
collectif.
Ainsi, il est indéniable que, au vu de cette situation, comme
certains autres groupes d'étudiants dans le système
collégial, les Afro-québécois et les allophones ont besoin
d'un support réel et soutenu pour accomplir avec succès leur
cycle collégial. Mais, pour cela, il est évident qu'un tel
ajustement ne peut se faire en marge du système. Il ne peut se faire
qu'en apportant des modifications structurelles au système qui
permettraient donc de tenir compte de cette problématique. C'est
pourquoi il est important de faire valoir ces facteurs critiques dans la
nouvelle dynamique de révision de la loi.
Par contre, le système aujourd'hui présente des carences
à tous les niveaux: des ressources matérielles, des ressources
financières, des ressources humaines. Particulièrement au niveau
humain et financier, les données révèlent une
évolution inquiétante. Ainsi, au cours des dernières
années, de 1983 à 1989, le nombre d'étudiants est
passé de 130 000 à 168 000, soit une progression de 30 %, alors
que, sur la même période, le nombre d'enseignants diminuait de 15
%, soit une perte de 1400 postes. De plus, au niveau financier, les pertes de
budget encourues suivaient la même évolution. Une telle dynamique
non seulement crée de nouveaux besoins et de nouvelles attentes, mais,
pire encore, cause un déséquilibre irréversible dans le
système. Le nombre croissant des étudiants ne correspond pas
à l'ensemble des ressources humaines et financières
disponibles.
Par ailleurs, il faut offrir une excellente qualité
d'enseignement et de formation aux étudiants. Ainsi, par rapport aux
objectifs visés lors du rapport Parent, les conditions inhérentes
font qu'il n'est plus possible d'atteindre les résultats
escomptés avec, d'une part, les structures actuelles et, d'autre part,
les formes d'organisation présentes. Ce déséquilibre fait
que le système non seulement accuse un retard par rapport à ses
propres objectifs, mais, plus encore, il ne trouve plus en son sein les
ressources nécessaires pour pouvoir se régénérer.
Dans ces conditions, il est évident que les ajustements
nécessaires relatifs à une meilleure formation des
Afro-québécois ne pourront se réaliser si
déjà le système maintient ou s'enfonce un peu plus dans
son déséquilibre actuel.
Spécifiquement au niveau des jeunes Afro-québécois,
au-delà des facteurs de langue et de suivi académique, on peut en
identifier d'autres, notamment l'absence d'identification par rapport au
personnel enseignant, l'absence de références historiques ou
présentes dans leur processus d'apprentissage comme source d'exemple et
d'identification, l'absence de cours privilégiant des connaissances
globales, signe d'ouverture et d'intégration culturelle
nécessaires à leur développement, leur situation sociale
individuelle très souvent précaire qui crée sur eux des
pressions d'affirmation, de réussite et d'appartenance
révélant ainsi le choc culturel important qu'ils vivent.
Au-delà de ces facteurs, la problématique inhérente
à la présence des jeunes Afro-québécois dans le
système collégial touche inévitablement un point majeur de
notre système d'éduca-
tion actuel: la formation des jeunes et le sens des valeurs qu'on leur
transmet. Et cette question devient donc d'autant plus cruciale que ce groupe
spécifique d'étudiants présente des
caractéristiques spécifiques. C'est pourquoi nous estimons que la
situation actuelle est critique, car il faut relever ces défis, mais,
par contre, correspond aussi à un espoir pour de meilleurs jours, car
l'accessibilité de l'éducation est pour le moment assurée
à tous les groupes.
Au niveau des enjeux. Le déséquilibre actuel du
système et la situation précaire que vivent les jeunes
Afro-québécois sont très inquiétants.
L'évolution d'une telle situation dégradante ne les
prépare pas adéquatement à la vie en
société, au marché du travail et à
développer un humanisme qui leur permettrait de devenir des hommes et
des femmes de demain. À ce titre, les enjeux ne sont plus seulement ceux
des Afro-québécois. Ils en sont les premiers concernés
dans ce cas. Ils sont plutôt sociaux, culturels et même
économiques. Sommes-nous capables d'avoir un système
collégial qui tiendra compte des mutations, de la diversité et
des attentes de ceux qui y participent, soit un système collégial
moderne?
La modernité réside dans cette capacité du
système à former des têtes bien faites plutôt que
pleines. Par conséquent, les enjeux se situent à trois niveaux:
au niveau de la formation, de l'intégration et du développement
d'une nouvelle vision du monde qui sous-tendrait aussi bien la formation que
l'intégration. Au niveau de la formation, la question fondamentale qui
se pose est de savoir: Comment peut-on former les jeunes pour qu'ils soient
capables, sur les plans professionnel et personnel, de répondre à
notre dynamique québécoise de diversité culturelle et aux
exigences du monde, alors que, dans le même temps, le contexte
évolue constamment? Cette préoccupation fait que la formation
devrait inévitablement se baser sur un ensemble de connaissances
fondamentales qui font aujourd'hui défaut. Car l'on sait aujourd'hui que
près des deux tiers des emplois de demain ne sont pas encore
créés. Donc, la formation devrait être assez ouverte et
dense afin que les jeunes Afro-québécois puissent y trouver les
repères pour que, continuellement, ils puissent faire leur chemin
adéquatement, aussi bien dans le système collégial que
dans la société. (21 h 20)
Or, leur cheminement actuel à ces deux niveaux, et notamment de
la société, est très précaire. Le taux de
chômage des Afro-Québécois est trois fois plus important
que la moyenne provinciale de la même classe d'âge. Un des
paramètres de cette situation est issu de la formation et de leur
vécu au niveau collégial. C'est pourquoi le système
collégial ne peut donc être vu en vase clos, car de cette
situation émerge l'enjeu de l'intégration. Si les
Afro-québécois éprouvent des problèmes au niveau de
leur intégration académique malgré l'accessibilité,
il leur serait donc aussi difficile de parfaire leur intégration au
niveau de l'emploi. Or, socialement, économiquement et même
humainement, aucune société ne peut survivre en permettant la
marginalisation d'un groupe important de sa jeunesse, donc de sa force de
travail de demain. Il est donc important que la manière dont le
système collégial nouveau appréhendera
l'intégration des Afro-québécois au niveau de leur
formation, de leur préparation au monde leur facilite l'entrée
sur le marché du travail. La base de cette formation devra être
partagée par l'ensemble de leurs confrères
québécois, qui seront, ma foi, les responsables de demain.
Ce qui nous mène à l'enjeu fondamental de la vision du
monde et des valeurs à transmettre à l'ensemble des jeunes
Québécois, certainement, dans cette société:
l'équité, l'égalité de tous et l'appartenance sur
la base historique et humaine à une seule et même
société, et partageant à parts égales les bienfaits
et les malheurs, les emplois et les crises, les avantages et les échecs.
Ce n'est qu'en relevant ces enjeux dans la nouvelle orientation du
système collégial que l'on trouvera des formes d'apprentissage,
d'intégration et de formation vouées aux jeunes et à leur
futur dans notre société.
Voici les recommandations. La situation présente et les enjeux
qui y sont associés exigent de nous une refonte importante du
système collégial. À cet effet, nos recommandations
touchent deux dimensions spécifiques du système: au niveau micro,
l'orientation des contenus; au niveau macro, les adaptations institutionnelles
et structurelles.
Au niveau micro. Nous estimons que la base de la formation devra
permettre l'insertion des cours portant sur l'histoire du Québec dans sa
version originale: à titre d'exemple, le rôle joué par les
premiers Afro-québécois tels que Mathieu de Costa, brillant
interprète de Champlain, ou encore le passé esclavagiste peu
glorieux du Haut et du Bas-Canada. De telles références
historiques sont nécessaires pour assurer la valorisation et une
meilleure intégration, non seulement des Afro-québécois,
mais aussi de l'ensemble de la jeunesse.
L'insertion de cours portant sur la culture générale,
d'ordre technologique, biologique, humaine et culturelle. Ces
différentes perspectives permettront non seulement aux jeunes de mieux
comprendre leur environnement, mais aussi d'avoir des bases pour
interpréter et saisir le monde qui les entoure.
L'intégration dans les programmes, pour les élèves
qui le demandent, de possibilités de stages de travail, ce qui leur
permettra de parfaire leur éducation et perspective académique.
Ainsi, progressivement, ils pourront se former et bâtir une
expérience dans des situations réelles d'emploi.
L'introduction de mécanismes de contrôle
administrés par des tiers, qui donnerait à la formation
plus de rigueur et de crédibilité. L'accessibilité ne doit
pas être une raison pour diminuer ni la qualité ni les exigences
de réussite.
L'introduction pour des groupes d'étudiants spécifiques de
programmes de parrainage étudiants universitaires-élèves
de collèges. Ce type de programmes permettrait aux élèves
de bénéficier d'un support par discipline durant leurs
études. Ainsi, ils pourraient améliorer leur capacité
d'apprentissage et leur réussite.
Au niveau macro. Il est important que le corps de professeurs soit
très représentatif de la diversité de notre
société et de celle des élèves, ce qui va
certainement accélérer le processus d'identification et
d'intégration. À cet égard, des postes de chargés
de cours pourraient être mis à la disposition de jeunes
Afro-québécois.
La situation précaire des jeunes de certains groupes
spécifiques tels que les Afro-québécois, nécessite
tout au moins un moratoire sur la volonté de l'institution à
vouloir imposer des frais de scolarité aux élèves des
collèges. Une telle mesure limiterait certainement leur
accessibilité à l'enseignemei. collégial, donc à la
formation et, par conséquent, aux emplois.
La mise en place d'une structure enseignante et collégiale, de
comités dont le rôle sera de travailler au développement
d'initiatives et de projets propres à leur contexte, pour permettre
l'épanouissement et le développement des composantes ethniques de
leur milieu au niveau des études et de la vie sociale.
Il est indéniable que l'ensemble des trois dimensions
soulevées, qui sont le constat, les enjeux et les recommandations, pose
clairement le problème et les avenues de la formation dans le
système collégial, mais aussi, repose avec acuité le
problème de l'intégration et de l'harmonie socio-culturelle de
notre société. Y parvenir est notre défi commun à
tous, et le réussir est notre salut. En tant que société
ouverte, moderne et multiculturelle, à l'image du monde du XXIe
siècle, c'est donc cette école que nous devons créer.
La Présidente (Mme Hovington): C'est tout? Alors, merci de
votre exposé. Je vais re... C'était terminé?
M. Alcide: Oui, c'est terminé, c'est la fin des
exposés.
La Présidente (Mme Hovington): D'accord, merci. Parce que
votre temps était juste dépassé à peu près
d'une minute. Mais ce n'est pas grave. Alors, je reconnaîtrai Mme la
ministre de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la
Science.
Mme Robillard: Merci, Mme la Présidente. Ça me fait
plaisir d'accueillir un groupe de jeunes qui appartient aux communautés
noires de Montréal et de vous saluer de façon
particulière, étant donné que vous avez plusieurs de vos
membres, je pense, qui fréquentent les institutions collégiales
au Québec. J'aimerais savoir, au point de départ, dans votre
premier mémoire, Mme Jean-Charles, que vous avez déposé
aux membres de la commission, qu'on avait reçu en avance, vous aviez
indiqué que c'était un groupe de jeunes qui appartiennent aux
communautés noires de Montréal. Est-ce que vous pourriez nous
parler de votre groupe en particulier? Ça représente combien de
jeunes, de quelles communautés noires?
Mme Jean-Charles: Donc, nous sommes un groupe de jeunes.
Actuellement, moi, je fais partie d'une association des diplômés
haïtiens du Québec - j'ai dit «du Québec», c'est
qu'il y a plusieurs diplômés - et, en même temps, nous
sommes quasiment, pour l'instant, 80. On fait des structures internes, et nous
voulons vraiment structurer notre affaire, parce que nous avons constaté
qu'il y a plusieurs diplômés qui ne travaillent pas. En même
temps, ces diplômés-là, c'est des diplômés...
Nous voulons aller chercher des diplômés qui travaillent pour
développer un genre de centre d'aide entre nous pour ceux qui ne
travaillent pas et ceux qui travaillent mais qui ne sont pas dans leur domaine.
Et là, justement, je vous ai parié des diplômés,
mais je ne peux pas avancer des faits concrets pour vous dire: C'est 40 % ou 60
%. Parce que nous avons constaté, pas par les médias, c'est de
bouche à bouche que nous avons découvert 80
diplômés. Nous voulons continuer à faire cette
recherche-là pour ressortir ce genre de problématique là,
qui est dans notre communauté.
Mme Robillard: Dans votre mémoire, Mme Jean-Charles, vous
nous indiquez, à la page 2, que toutes les options dans le choix de
carrière doivent être ouvertes aux jeunes Noirs, dites-vous, et
qu'on devrait avoir des mécanismes d'orientation. Vous n'êtes pas
sans savoir que, depuis le début des travaux de cette commission
parlementaire sur l'enseignement collégial, beaucoup d'intervenants en
plusieurs occasions nous ont souligné les problèmes d'orientation
des jeunes quand ils arrivent à l'ordre collégial. Est-ce que
vous considérez que la situation est différente pour les jeunes
Noirs?
Mme Jean-Charles: Oui, c'est différent pour les jeunes
Noirs. Comme vous avez constaté, je pourrais dire aussi que les jeunes
Noires sont plutôt confinées dans le nursing, ou on les envoie
faire des cours comme en bureautique. On leur dit: Allez-y, en administration.
Je pourrais vous donner ça en exemple. Moi, quand j'ai fini mon
secondaire, quand je suis allée voir l'orien-teur, le conseiller
d'orientation, je lui ai dit: Moi, j'aime beaucoup la recherche, j'aime
parler,
j'aime communiquer, j'aime la recherche, je suis très curieuse.
Là, il m'a dit: Mais je vous vois en administration. J'ai dit: Mais
j'aime la recherche. Pourriez-vous voir en quoi... Est-ce que c'est en
archives, ou quoi? En recherche? N'importe quoi. Là, il m'a dit que je
devrais aller en administration, et, moi, je ne me voyais pas en
administration. Là, ce que j'ai fait après, j'ai fait de la
recherche moi-même. Comme je vous ai dit, je suis curieuse. Là, je
suis rentrée en techniques de recherche. Mais, si je l'avais
écouté... J'aurais pu rentrer en administration, mais,
après être entrée en administration, c'est là le
problème. (21 h 30)
Mme Robillard: Ce problème-là nous a aussi
été soulevé par d'autres jeunes...
Mme Jean-Charles: O.K.
Mme Robillard: ..dans les conseils qu'ils peuvent recevoir de
différents orienteurs, disant: Peut-être que j'ai
été mal orienté, etc. Est-ce que vous considérez
qu'il y a des problèmes plus spécifiques qui sont à votre
communauté? Comment se fait-il que vous me dites que la plupart des
jeunes femmes s'en vont en nursing? Pourquoi pas dans d'autres techniques?
Mme Foula Bruno: Peut-être qu'à ce
niveau-là... Ce que j'aurais à dire, c'est qu'étant
donné qu'il y a beaucoup de chômage dans notre communauté
nos jeunes n'ont pas tellement d'espoir d'avoir de l'emploi. Donc, dès
le départ, ils sont limités au niveau des choix, du moins dans
leur tête. Alors, ils sont peut-être moins hargneux à
essayer de découvrir exactement ce qu'ils vont faire. Ce qui fait que,
quand ils vont voir l'orienteur, ils vont prendre ce qu'on va leur donner. Ils
ne vont pas chercher à atteindre l'objectif qu'ils aimeraient
réellement rejoindre. Tandis que, si nous pensions que nous pouvions
accéder à tous les emplois, nous serions peut-être plus
sélectifs. Alors, quand on regarde autour de nous, qu'est-ce qu'on voit?
On voit que la plupart des personnes de notre communauté sont en nursing
ou dans d'autres domaines, alors on va aussi s'orienter là-bas parce
qu'on a l'impression que c'est seulement là-bas qu'on va trouver de
l'emploi.
Mme Robillard: Alors, est-ce que c'est dans ce sens-là,
aussi, que vous suggérez la mise en place d'une propédeutique,
dites-vous?
Mme Jean-Charles: Bon. Il y a ça aussi, un genre
d'année préparatoire pour ceux qui ont des difficultés,
et, en même temps, comme je vous ai dit, quand ils arrivent au
cégep, parfois, ces étudiants-là sont perdus. Comme ceux
qui sont en administration, ils n'aiment pas l'administration, mais ils sont en
administration, ou ils peuvent passer 8 à 10 ans à s'orienter
dans plusieurs disciplines alors qu'ils ne savent pas où ils vont. Et,
en même temps, c'est là le problème que nous pouvons
discuter encore plus, que ces jeunes-là ont besoin de gens qui pourront
les aider, les informer sur tout ce qui se passe, toutes les exigences des
disciplines et les aider.
Mme Robillard: Vous savez sans doute que certains de nos
cégeps, dans la région de Montréal, ont fait des actions
très précises au niveau des communautés culturelles pour
faciliter leur intégration. Je pense de façon particulière
au cégep de Saint-Laurent, ou à Bois-de-Boulogne, ou à
Vieux-Montréal. Est-ce que vous êtes au courant de ces
actions-là qui ont été menées par les cégeps
et, si oui, qu'est-ce que vous en pensez?
Mme Jean-Charles: Je suis au courant de ces actions-là et
en même temps d'autres cégeps, en même temps, qui font
ça. Mais il y a un problème. C'est quand je dis
«l'orientation». Quand on veut les orienter, c'est là le
problème. Ces jeunes-là, ça se peut qu'ils aient fini leur
diplôme, mais c'est là, quand ils vont aller sur le marché
de l'emploi, c'est là qu'ils auront un problème. Comme ceux qui
sont en bureautique. On ne peut pas prendre pour secrétaire une jeune
Québécoise de la communauté noire parce que la
réalité... Comme un avocat, il ne veut pas parce qu'il va perdre
sa clientèle. Donc, comme il y a plusieurs collèges, il y a
beaucoup de jeunes Noires québécoises qui sont comme en
bureautique, en finances, en administration. Alors, quand elles ont
terminé leur diplôme, elles ont de la difficulté de trouver
un emploi.
Mme Foula Bruno: Peut-être aussi, à ce niveau, on
pourrait rajouter que cette année propédeutique là
pourrait être intéressante pour nous et pourrait nous servir,
nous, les jeunes de la communauté noire. Mais j'étais très
contente d'entendre ce que l'association des parents disait tout à
l'heure, et c'est le même problème, l'orientation est faite trop
tôt. Nous sommes dans les mêmes écoles, donc nous allons
profiter aussi des mêmes structures.
Mme Robillard: Oui. Alors, c'est pour ça que je vous
disais: II semble y avoir un problème de base au niveau de
l'orientation, mais vous nous soulignez des facettes plus particulières
qui regardent les personnes de votre communauté. Merci bien.
Mme Foula Bruno: C'est ça. C'est parce que, quand nous
venons vous voir, nous venons vous voir avec les problèmes que nous
vivons et, parfois, nous ne sommes pas vraiment au courant des problèmes
que les autres vivent.
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup. Alors, je
reconnaîtrai maintenant M. le
député d'Abitibi-Ouest de l'Opposition officielle.
M. Gendron: Bonjour. Je pense qu'il est toujours requis, pour les
membres d'une commission parlementaire, toujours utile en tout cas, de nous
sensibiliser davantage aux réalités des communautés
ethniques, des communautés culturelles, aux problèmes plus
spécifiques auxquels vous êtes confrontés, autant dans la
présentation qui a été faite par Mme Jean-Charles - c'est
bien ça - ...
Mme Jean-Charles: Oui.
M. Gendron: ...ainsi que l'autre madame - je m'excuse, le nom, je
ne m'en rappelle plus. On sentait qu'il y avait, selon vous, un traitement un
peu particulier qui vous occasionne des difficultés.
Je ne peux pas laisser le point qu'on vient de discuter, même s'il
a été approfondi un peu. Je suis content que Mme la ministre
l'ait souligné. Est-ce à dire que, dans votre cas, vous
prétendez que le marché du travail envisagé avant de
conclure vos études est beaucoup plus restreint, est beaucoup plus
limité et qu'en conséquence, lorsque vous essayez de
bénéficier du service professionnel des conseillers en
orientation, vous avez deux handicaps: celui de penser qu'il y aura plus de
possibilités de travail dans vos communautés et, en
conséquence, si elles vous font des suggestions un peu traditionnelles,
qui ont été reprises par vos confrères et consoeurs plus
vieux, vous y répondez ou vous dites que c'est ça que vous allez
choisir et que toutes les autres alternatives ne sont pas creusées pour
des raisons, pas de racisme, parce que ce serait un trop grand terme, mais de
crainte que le marché universel de l'emploi ne soit pas pour vous?
Est-ce que vous êtes dans ces dispositions-là quand vous allez
rencontrer un orienteur?
Mme Jean-Charles: Oui. Je peux le dire parce que le marché
universel n'est pas pour nous. Ça, c'est un point que j'ai trouvé
très, très important pour moi. Moi, comme j'ai fini en techniques
de recherche, enquête et sondage... Je suis la première Noire
québécoise qui a eu un D.E.C. en techniques de recherche,
enquête et sondage. Je peux vous dire que j'ai eu de la difficulté
à trouver, alors que tous mes confrères ont été
placés. Quand j'ai enfin trouvé un emploi, c'était pour un
mois à trois jours par semaine. Là, je devais m'affirmer pour le
trouver: Ne me regarde pas en Noire, pour ma couleur, mais regarde-moi pour ma
connaissance que je pourrais apporter dans votre entreprise.
Malgré ça, j'ai l'emploi pour un mois. Je ne sais pas si
je vais plaire ou non, mais la personne qui m'a engagée m'a dit: Je vous
ai donné une chance. Elle me l'a dit elle-même. Mais toutes ces
personnes, tous les chercheurs, parce que c'est au DSC Sainte-Justine, toutes
les autres personnes ou le coordonnateur, elle m'a elle-même dit
après que ces personnes-là n'étaient pas vraiment d'accord
pour ce qu'elle avait fait. Mais je pourrais vous dire que ce n'est pas la
première chose, j'ai cherché beaucoup d'emplois. C'est pour
ça que là je commence à reculer sur moi-même. Il y a
un problème pour nous. Il y a des disciplines dans lesquelles nous ne
pouvons pas entrer parce que, si on est là-dedans, on ne trouvera pas
d'emploi, on ne nous donnera pas d'emploi. Pourquoi? Nous sommes des
Québécois de la communauté noire, nous devons avoir le
droit de...
M. Gendron: Je trouve, c'est-à-dire que... Je ne veux pas
être paternaliste, mais je trouve correct que vous rappeliez cette dure
réalité, même si elle n'est pas toujours
intéressante à être entendue. Moi, quand je voyais... Parce
qu'à un moment donné, dans votre deuxième page, vous
suggériez une adaptation de l'enseignement collégial à la
réalité pluriethnique du Québec. Bon, là, moi, je
vous aurais dit honnêtement: Je suis d'accord avec vous. Mais le
souhaiter, la réalité pluriethnique du Québec, là,
ce n'est pas la réalité que je connais du Québec, et je
pense connaître le Québec. Si vous aviez dit: Bien, au moins,
à tout le moins, sur ffle de Montréal, dans la grande couronne
métropolitaine...
La réalité pluriethnique à Montréal, elle
est réelle, on y est confronté à tous les jours. Ça
fait, selon moi, une quinzaine d'années qu'elle est vivante,
présente. J'ai eu l'occasion, moi, comme ministre de l'Éducation,
de visiter, aux niveaux primaire et secondaire, certaines écoles
très multiethniques. En conséquence, ces jeunes-là - parce
que ça fait un bout de temps que je n'ai plus ces
responsabilités-là - sont en quelque part. Ils sont
sûrement au niveau collégial. (21 h 40)
Donc, je suis un peu même renversé de voir... Je suis
convaincu que votre témoignage est vraiment dans le sens de ce que vous
vivez. Vous n'avez pas de raison de vouloir le grossir ou l'exagérer.
C'est très utile de rappeler ces réalités-là, parce
que ça n'a pas de bon sens qu'avec le contexte dans lequel vous vivez,
peut-être pas comme Québécois puis
Québécoises de souche, mais au moins d'adoption... Je veux dire,
la communauté noire, ça fait des années... Probablement
que vous êtes de souche compte tenu de votre âge, mais ça
fait tellement longtemps qu'ils sont présents dans le bassin
montréalais que ça n'a pas de bon sens que vous n'ayez pas cette
même possibilité d'ouverture au niveau des emplois.
Alors, moi, je ne peux pas faire autrement que de dire que vous avez
bien fait de le rappeler et j'espère que des mesures seront prises pour
essayer d'améliorer ça. Je reconnais que ce n'est pas facile,
puis il n'y a pas de jugement à apporter. Quelque gouvernement que
ce soit, quelque ministère de l'Enseignement supérieur que
ce soit, c'est bien plus une éducation, une «culturation»,
si vous me permettez l'expression, qui va nous amener, à un moment
donné... Parce que, moi, je croyais que... Des médecins noirs, il
y en a à Montréal, des avocats noirs, j'en connais
personnellement, des spécialistes de toute nature, à
Montréal, j'en connais. Donc, j'essaie de voir, par rapport à des
emplois de techniques ou de techniciens, ce qui ferait... Et là ce n'est
pas parce que je veux vous confiner, vous êtes noir, vous ne pouvez pas
travailler autrement que chez un noir, mais je dis: Au moins, tous ces
professionnels qui ont besoin de techniciens, de techniciennes et de
professionnels, à tout le moins eux ne devraient pas avoir de jugement
sur les couleurs de peau.
Mme Jean-Charles: J'allais mentionner quelque chose sur ce que
vous avez mentionné à propos de la réalité
pluriethnique du Québec. Pourquoi? Nous sommes au Québec. On ne
pouvait pas mentionner à Montréal pour séparer
Montréal et Québec en même temps.
M. Gendron: Vous avez raison. Juste une phrase: Vous avez raison.
C'est votre mémoire qui est bien fait. Ce que je voulais dire, c'est
que, dans la réalité du Québec, il y a les régions
du Québec, et la présence de communautés ethniques
significatives dans les régions du Québec est tellement marginale
que, là, ça n'aurait pas été étonnant
d'être obligé de faire une recommandation dans ce sens-là.
C'est ce qui m'étonne, et là je vous laisse aller.
Mme Jean-Charles: O.K. Donc, seulement on ne pourrait pas dire
Montréal...
M. Gendron: Non, vous avez raison.
Mme Jean-Charles: ...et, en même temps, je pourrais vous
mentionner comme à Québec... Même si on veut travailler
à Québec, pensez-vous qu'on aura la possibilité? Parce
qu'il n'y a pas beaucoup de jeunes Québécois de la
communauté noire qui vivent à Québec. Ça, c'est un
problème aussi. Nous sommes déjà exclus un peu, parfois,
malgré l'intégration. On fait tout ce qui est possible pour
s'intégrer, mais il y a toujours une barrière. Moi, je ne peux
pas dire que la barrière est à mon niveau, parce que j'ai
donné même 200 % de moi-même pour essayer d'arranger les
choses, essayer de le faire, mais il y a toujours eu une barrière.
À chaque fois qu'il y a cette barrière-là, on se recule un
peu. Moi, personnellement, c'est ça que j'ai fait. Je me recule un peu
pour dire: Mais, il y a un problème. Qu'est-ce que je fais pour
solutionner ce problème-là?
Je pense que, vous tous qui êtes ici, vous pouvez constater qu'il
y a un problème d'après ce mémoire-là qui a
été présenté. C'est comme moi, je me recule, avec
les choses que j'ai vécues moi-même quand j'ai passé une
entrevue où on m'a dit: Vous êtes engagée, Mme
Jean-Charles, et, après, peur me dire que, pour m'engager, il faut faire
une réunion de département. Ça, ça me projette
quoi? Donc, c'est mal de prendre ça en pleine face. Et, en même
temps, on peut dire qu'on pourrait faire des interventions pour poursuivre ces
personnes-là; on n'a pas de fait précis, on n'a rien. Donc, la
seule chose qu'on doit faire, c'est de l'accepter.
J'ai fini de faire mes études, de faire les efforts que je peux
dans mes études. Moi, je peux vous dire que j'ai réussi. J'ai
fait un travail avec un de mes confrères à l'école; il a
eu 93 % et moi j'ai eu 79 %. On l'a fait à deux. Là, j'ai dit au
professeur: Qu'est-ce qui se passe? Pourquoi j'ai 79 %? Là, c'est un
fait. C'est la seule chose, parce que... Je sais qu'il y a ce
problème-là, mais je n'avais pas de fait. Le fait, c'est qu'on
l'avait fait à deux et que lui avait 93 %. Elle m'a dit: Mais, c'est
bien, c'est une bonne note, là. Que tu l'acceptes ou non, je ne la
change pas. Et, à chaque fois qu'on reçoit ce coup-là,
pour nous, jeunes Québécois de la communauté noire,
qu'est-ce que ça projette? On veut travailler pour des modèles.
C'est dur d'accepter ça.
M. Gendron: Vous avez également, madame...
Mme Foula Bruno: Je voudrais reprendre un point dont vous avez
parlé. Vous avez dit tout à l'heure que c'était
plutôt à Montréal qu'il y avait beaucoup plus de personnes
de la communauté noire. Il me semble qu'on ne peut pas isoler un endroit
du Québec, parce que la télévision, nous la regardons
tous, et la télévision, les chaînes de
télévision qu'on regarde, les émissions qu'on voit
à la télévision vont avoir ces personnes-là. Chaque
fois que je regarde les actualités, je vois des personnes de la
communauté noire. Et, d'un autre point de vue, il faut préparer
le Québec de demain, parce que toutes les personnes de la
communauté noire n'ont pas à rester confinées à
Montréal. Chicou-timi, c'est très beau. Je suis venue à
Québec, j'ai trouvé ça superbe. Si je réussis
à...
M. Gendron: Venez en Abitibi. Vous n'êtes pas encore venue
en Abitibi.
Mme Foula Bruno: C'est ça.
M. Gendron: Vous allez rester si vous venez.
Mme Foula Bruno: Peut-être qu'au retour je vais essayer de
convaincre mon conjoint pour qu'on vienne ici. On ne sait jamais. Et, si
j'arrive ici et que j'ai des enfants, j'aimerais bien qu'en arrivant ici ils
trouvent un climat qui leur soit favorable. Et puis, de toute façon, je
pense que, de façon globale, il faut préparer les
jeunes à une éducation de type international, à
l'ouverture aux autres, parce que non seulement il y a ces communautés
qu'on peut regrouper... Bon, il y a la communauté noire, c'est la
couleur, là, mais on peut regrouper aussi par d'autres points comme les
communautés allopho-nes ou les communautés espagnoles et autres.
Il y a aussi différentes autres cultures dans la société
québécoise, chez les Québécois de souche. Donc,
l'ouverture, elle doit être faite à tous les niveaux et en ce qui
concerne aussi les communautés allophones.
M. Gendron: Vous avez complètement raison. Je vous ai
expliqué ce que je voulais signifier, mais je souhaiterais,
effectivement, que cette ouverture à la réalité des
communautés ethniques ne soit pas limitée ou confinée
à un bassin. C'est juste que je disais tantôt que, dans une
réalité où c'est beaucoup plus évident depuis
plusieurs années, j'étais un peu étonné que vous
soyez encore à l'état qu'on a entendu tantôt au niveau
descriptif. C'est plus ça que je voulais rappeler.
Dernière question, puis c'est tellement vrai à vous,
madame, qui venez de terminer et à ce que vous venez de dire, lorsque je
vous écoutais attentivement dans la présentation que vous avez
faite - on n'a pas le document, mais vous avez fait une excellente
présentation - on sentait que vous vibriez aux mêmes
réalités et aux mêmes valeurs que les autres lorsque vous
parliez d'une refonte importante des études collégiales et que
vous parliez du contenu, meilleure culture générale, stages en
milieu de travail - je vous résume un peu. Il s'agissait là des
mêmes réalités qu'on a entendues à peu près
de tous les intervenants. Donc, ça confirme que ce n'est pas parce qu'on
est d'une minorité ethnique, quelle qu'elle soit, ou d'une
communauté culturelle, quelle qu'elle soit, qu'on n'a pas des
préoccupations qui nous concernent, qui concernent les décideurs,
les membres de cette commission, en tout cas, pour ce qui est de l'avenir des
études collégiales. Moi, je tiens à vous remercier
très sincèrement de votre présentation et du
témoignage que vous êtes venu faire qui est éclairant mais
qui nous obligerait, je pense, à faire des efforts sans
précédent pour que la situation que vous avez décrite dure
le moins longtemps possible, parce que c'est inadmissible.
Mme Jean-Charles: Je peux mentionner quelque chose en attendant,
s'il vous plaît?
La Présidente (Mme Hovington): Oui, allez- y-
Mme Jean-Charles: Vous avez parlé du contenu, en
mentionnant qu'il faut avoir une sensibilisation des enseignants. C'est
très important. Et, en même temps, on veut améliorer
l'image de la communauté québécoise, des jeunes
Québécois de la communauté noire, l'image qu'on se fait au
cégep. En même temps, on avait parlé de stages. Je pourrais
vous mentionner... C'est très important pour nous quand on parle de
stages. Quand nous avons eu un diplôme et quand on cherche un emploi, on
nous dit parfois qu'on n'a pas assez d'expérience. C'est ça qu'on
nous donne, par exemple. Mais, si on n'a pas assez d'expérience, ce
qu'on demande, c'est d'aider ces jeunes-là à avoir au moins deux
ans de stages pour pouvoir acquérir un peu d'expérience.
Là, ça ne veut pas dire que c'est un mois, mais au moins deux ans
de stages pour les aider. En parlant de stages, ce n'est pas un genre de stages
comme on fait, c'est un genre de stages qui pourrait remplacer dans leur c.v.
comme un genre d'expérience. Alors, c'est très important de
mentionner ça, pour moi, parce que ce n'est pas n'importe quel stage,
c'est un genre d'expérience que nous allons chercher. On n'attend
qu'après eux pour bonifier ou améliorer
l'équitabilité d'emploi, s'il vous plaît. (21 h 50)
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup, Mme
Jean-Chartes. Alors, je reconnaîtrai maintenant le député
de Sauvé.
M. Parent: Mme Jean-Charles, mesdames, messieurs, bienvenue. Je
voudrais vous exprimer toute ma joie et ma satisfaction de voir aujourd'hui,
à l'Assemblée nationale du Québec, à cette
commission parlementaire, de jeunes Afro-québécois qui viennent
ici à titre de citoyens à part entière, de
Québécois à part entière, qui viennent exprimer
leur opinion face à cette enquête parlementaire que nous faisons
concernant les cégeps. ce que vous avez dit tout à l'heure, mme
jean-charles, et votre collègue, concernant la perception que l'on se
fait souvent des communautés visibles, je dois vous dire que je la vis
tous les jours dans mon comté de montréal-nord, dans le nord-est
de montréal. je vous comprends et vous avez pleinement raison. lorsque
vous me disiez tout à l'heure que, en collaboration avec un de vos
collègues, vous aviez fait un travail de recherche et que le
collègue a eu 90 % et vous, 73 %, je vis ça à tous les
jours et je le déplore. ça me fait de la peine tous les
jours.
Je suis content que vous veniez ici, à cette commission
parlementaire, pour sensibiliser la ministre et les membres de cette commission
aux problèmes que vivent les communautés visibles,
spécialement à Montréal. Malheureusement, ce n'est
peut-être pas le cas partout. Il faut quand même être
conscient que la majorité des membres des communautés visibles
vivent à Montréal. Les députés qui sont ici
présents ne sont pas tous des députés de la région
de Montréal. Ils représentent l'ensemble du Québec, et je
suis très heureux, je pense que c'est très intéressant et
enrichissant pour eux aussi de prendre conscience de cette
réalité des minorités culturelles, et surtout ce qu'on
appelle les minorités visibles,
des problèmes que vous vivez.
Moi, je ne veux pas vous retarder plus longtemps. Il y a deux questions
que je voudrais vous poser concernant votre mémoire. Dans votre
mémoire, à un certain endroit, vous dites: Le groupe pense que
les programmes d'études gagneraient à favoriser des
échanges entre les jeunes des minorités ethniques et ceux de
l'ethnie majoritaire. Moi, j'aimerais que vous m'expliquiez d'une façon
plus élaborée, peut-être, de quelle façon plus
précise ces programmes pourraient-ils favoriser de tels échanges
et quels sont les obstacles actuels au dialogue. Je dois vous dire
immédiatement que je les connais, mais j'aimerais que mes
collègues les entendent. Mme Jean-Charles, ou une des personnes qui vous
accompagnent.
Mme Jean-Charles: O.K. On voulait avoir un genre de forum de
discussion qu'on devrait faire entre la communauté majoritaire et la
communauté noire pour discuter, pour faire des échanges entre
eux, et ça pourrait aider la communauté, au moins, et la
société, je pense, du Québec. On pourrait aussi faire des
activités pour les étudiants. Et, quand j'ai dit le forum,
ça pourrait se faire aussi au cégep et dans les collèges,
parce qu'il y a un problème. Moi, je peux vous le dire, comme je suis
là pour l'enseignement collégial. Quand on est au collège,
on est toujours porté... Parfois, dans un cours, ça m'arrive que
je suis toujours exclue, et ce n'est pas parce que je veux être exclue.
Je le suis sans m'en rendre compte. Et, si le professeur nous demande de faire
un travail en groupe, tout le monde est porté à aller en groupe
et, nous, on nous laisse. C'est pour ça que je parlais
d'intégration.
On est déjà intégrés, on est là, au
Québec. Mais je dis: La barrière, c'est fort de l'accepter et
de... Bon, c'est pour ça que j'ai parlé d'un genre de discussion,
d'un échange entre ces étudiants-là. Et, en même
temps, c'est l'histoire et la littérature. S'ils nous connaissent plus,
s'ils connaissent d'où on vient ou bien nos parents, d'où ils
viennent... Si nous sommes nés ici, donc nous sommes des
Québécois ou des Québécoises. C'est nos parents
ou... Ça pourrait améliorer la qualité de vie aussi. Donc,
je pense que tous ces échanges-là devront être faits.
M. Parent: Oui, madame, allez.
Mme Foula Bruno: Peut-être aussi rajouter qu'il devrait
peut-être y avoir une sensibilisation au niveau de tous les
étudiants pour qu'on se mette d'accord sur ce que c'est qu'être
Québécois. Parce que je peux bien être Noire, même
plus Noire que ça, parce que ça peut arriver, et être
Québécoise autant qu'une autre. Donc, je pense qu'à ce
niveau-là il faudrait qu'il y ait des discusions qui se fassent. Qu'on
mette les gens ensemble et qu'on puisse discuter franchement des
problèmes qu'on a, parce que parfois il s'agit de problèmes
d'ignorance. Il y a des questions qu'on aimerait poser a i airtre, mais on a
peur d'être rejeté, alors on ne se prononce pas. Il me semble
qu'en faisant certaines activités en commun ça va rapprocher les
gens, ça va les inciter au dialogue, presque malgré eux, si je
peux dire ça, mais sans qu'ils s'en rendent compte. Et ça va
permettre d'établir des liens qui iront au-delà des appartenances
à différentes communautés ou à différentes
cultures.
M. Parent: Merci, madame. J'aurais une autre question. Tout
à l'heure vous avez abordé le problème, pas le
problème, la situation des stages. Dans votre mémoire vous nous
disiez: Outre les programmes d'accès à l'égalité,
le groupe suggère la mise en place d'incitatifs pour encourager les
organismes à fournir aux jeunes Noirs la possibilité d'effectuer
des stages pratiques. Lorsqu'on parle de stages, quels pourraient être,
d'après vous, les moyens discrétionnaires utilisés en
faveur des jeunes Noirs pour des stages pratiques? Est-ce que vous pourriez
nous aider à trouver, en fin de compte, les pistes?
Mme Jean-Charles: O.K. Je pourrais vous donner plusieurs exemples
parce que, là, je fais partie de l'association des diplômés
haïtiens. Je sais qu'il y a plusieurs problèmes, comme à
l'ETS. Je pourrais vous donner ça en exemple. Il y a des
diplômés - je le dis parce que je vais un peu à
l'université - qui ont des difficultés à trouver un stage,
comme ceux qui sont en bureautique au collège en même temps.
Là, il y a un problème. Il y en a plusieurs qui sont en finances,
plusieurs qui sont en administration et plusieurs qui sont en bureautique. Et
ils ne peuvent pas les placer. Et ces jeunes-là, ils ont une
connaissance autant que l'autre qui est à côté. Et
là on ne peut pas les placer parce que l'avocat ne veut pas une jeune
Québécoise de la communauté noire, parce que, pour la
façade de sa société ou de son entreprise, c'est
très important. Et ça, on pourrait le développer.
Ça se peut que ce soit parce qu'il ne connaisse pas sa culture ou qu'il
ne connaisse pas vraiment un échange en même temps avec la
communauté, qu'il a peur.
En même temps, comme dans les banques, il y en a plusieurs qui
sont en secrétariat, qui sont en bureautique, et ces jeunes-là
vont à la banque et toute la communauté et toutes les
minorités visibles ou la communauté noire vont à la
banque. Il devrait y avoir au moins une secrétaire qui soit en
administration ou qui soit en finances à la banque. Ou vous pourriez les
aider à faire ce cheminement-là pour les envoyer faire un stage
au moins de deux ans pour acquérir ce stage-là pour les aider.
Mais ça, ça ne se fait pas. Je ne sais pas si je vous ai
acheminé un peu, là, mais c'est ce genre de type de programmes
là qu'on devrait faire.
M. Parent: Alors, merci, Mme Jean-Charles. J'ai juste une
réflexion avant de terminer. Je dois vous dire que j'ai beaucoup
aimé votre réaction face au stéréotype qui fait en
sorte que les orienteurs blancs, d'une façon plus précise, plus
particulière chez les jeunes Haïtiennes, dirigent les gens vers le
nursing. Ça, c'a été une espèce de
stéréotype. Les Haïtiennes qui avaient une certaine
instruction qui allaient faire un D.E.C. ou qui allaient à
l'université, on les envoyait en nursing. Eh bien, je pense que vous
n'avez pas le droit d'accepter béatement ces diagnostics ou ces
orientations qui vous sont données par des orienteurs. Il y a des
barrières à franchir. Il y a un cheminement à faire. Il y
a une affirmation à faire.
Ce n'est pas facile d'être une minorité culturelle. Ici, je
ne parle pas seulement des cégeps. Je parie partout, dans votre
quotidien de tous les jours. Vous êtes des Québécois
à part entière et vous avez à vous affirmer. Vous avez une
lutte à mener et vous avez aussi à nous indiquer le chemin pour
mieux vous connaître, pour mieux vous découvrir et pour mieux vous
aimer. Alors, continuez, je pense, à vous affirmer. Et, par le geste ^j
vous avez posé en venant rencontrer ici les députés de
l'Assemblée nationale, je pense que c'est de bon augure puis que la
communauté afro-québécoise est sur la bonne voie de se
faire reconnaître, tant à l'intérieur du système
éducatif du Québec qu'à l'extérieur. Merci,
madame.
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup. En
conclusion, Mme la ministre.
Mme Robillard: Merci. J'ajoute mes remerciements à ceux du
député qui vient de vous parler. Et, si vous aviez, mesdames et
messieurs, l'objectif de venir sensibiliser les parlementaires aux
réalités que vous vivez, je pense que vous avez atteint votre
objectif. Merci bien d'être venu en commission.
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup. Au revoir.
Alors, j'inviterais maintenant les Instituts de technologie agro-alimentaire de
Saint-Hyacinthe et de La Pocatière à bien vouloir prendre place,
s'il vous plaît.
Nous allons suspendre une minute.
(Suspension de la séance à 22 heures)
(Reprise à 22 h 4)
La Présidente (Mme Hovington): Je demanderais un petit peu
de discipline en arrière, s'il vous plaît. S'il vous plaît,
Mme la députée! Merci.
Nous allons poursuivre nos travaux avec les Instituts de technologie
agro-alimentaire de Saint-Hyacinthe et de La Pocatière,
représentés par M. Bélanger, directeur
général de l'Institut de La Pocatière - M.
Bélanger, c'est vous, bonsoir - et par M. Gilles Vézina, de
l'Institut de Saint-Hyacinthe, bonsoir. Et il me manque un nom.
Instituts de technologie agro-alimentaire de
Saint-Hyacinthe et de La Pocatière
M. Bélanger (Jean-Marc): M. Fournier, directeur des
services éducatifs à l'ITA de La Pocatière.
La Présidente (Mme Hovington): M. Fournier, de La
Pocatière.
Alors, bienvenue à la commission de l'éducation et merci
d'être venus à notre invitation si tardive, parce qu'il est quand
même 22 heures. Alors, nous vous écoutons. Vous avez 20 minutes
pour nous présenter votre mémoire.
M. Bélanger (Jean-Marc): Merci beaucoup, Mme la
Présidente. Mme la ministre Robillard, MM. et Mmes les membres de cette
commission parlementaire, je dois vous dire que ça nous fait
extrêmement plaisir d'avoir été invités à
venir présenter nos points de vue sur le sujet qui vous
préoccupe. Comme nous sommes habitués, en agriculture et en
agro-alimentaire, à travailler très tard le soir, nous sommes
très à l'aise dans ce mécanisme, qui est aussi le
vôtre, dans le sens que vous êtes à la disposition des
citoyens par le rôle que vous jouez.
Je voudrais mentionner un petit peu d'histoire en ce qui concerne les
Instituts de technologie agro-alimentaire. Ces Instituts existent depuis 1962,
donc avant la mise en place du système collégial qui est venu un
petit peu plus tard, alors que le ministère de l'Agriculture, qui
croyait beaucoup en la formation des ressources humaines, avait
décidé, suite à un comité d'étude sur
l'enseignement agricole et agronomique, de mettre en place des instituts
d'enseignement qui pouvaient et qui devaient former des technolo-gistes d'un
niveau postsecondaire, mais préuniversitaire pour oeuvrer dans le
secteur agroalimentaire et faire en sorte de supporter le développement
du secteur agro-alimentaire. Et, évidemment, le ministère de
l'Agriculture a été très longtemps et il demeure beaucoup
associé à la formation. Il y a déjà eu, un bout de
temps, une trentaine d'écoles moyennes d'agriculture au niveau
secondaire et, évidemment, depuis 1962, il y a deux institutions de
niveau postsecondaire ou de niveau collégial.
Donc, à partir de ces 30 ans d'histoire, les Instituts offrent
présentement 12 programmes de formation régulière, dont 11
sont exclusifs. Les programmes de formation régulière couvrent
tous les aspects de la production agricole jusqu'à sa transformation en
produits alimentaires tels qu'ils sont commercialisés. Pour
l'année en cours, 916 élèves étudient chez nous.
Quand je mentionne
chez nous, c'est soit à La Pocatière ou à
Saint-Hyacinthe. Et, respectivement, dans ce nombre de 916
élèves, il y en a environ 330 qui étudient à La
Pocatière et quelque 580 à Saint-Hyacinthe.
Il y a un des programmes qui est offert dans les Instituts, qui est
également offert par six cégeps, six collèges du
réseau collégial, soit le programme de gestion et exploitation
d'entreprise agricole, programme qui forme et vise à former les
éventuels propriétaires d'entreprises agricoles. Dans ce
programme-là, la clientèle des deux Instituts représente
60 % des élèves qui sont inscrits à ce programme. Tout
comme ça se passe dans le réseau de niveau collégial,
évidemment, les inscriptions sont à la hausse depuis une couple
d'années et sont en hausse d'environ 5 % à 6 % pour
l'année en cours et l'année 1991.
En plus des programmes réguliers que nous offrons, les deux
Instituts sont également impliqués dans la formation des adultes.
En 1991-1992, au-delà de 11 358 heures-groupes de formation des adultes
ont été données et quelque 137 étudiants
étaient inscrits afin d'obtenir une attestation d'études
collégiales. Pour l'année en cours, les chiffres sont à
peu près les mêmes. Alors, on se dit: Si le passé est
garant de l'avenir, les étudiants qui s'inscrivent à nos deux
Instituts obtiendront à 70 % leur diplôme d'études
collégiales dans le délai des trois années. Et, dans les
six mois après leur graduation, 90 % trouveront un emploi dans le
secteur bioalimentaire. Alors, nous sommes fiers de ces performances de nos
étudiants et de notre personnel qui supporte cette formation-là.
(22 h 10)
Nous sommes convaincus que la formation des personnes est un outil de
développement économique et social. Dans ce cadre, le
ministère, par ses Instituts, a mis en place des infrastructures et
développé des services pour supporter la réussite de ses
clientèles. Nos élèves peuvent, entre autres, compter sur
un suivi pédagogique composé de mesures simples, requérant
peu de ressources, par exemple: l'identification dès l'admission des
élèves à risque, les admissions conditionnelles, les
obligations de suivre des cours d'appoint et de mise à niveau avant
l'inscription, une approche particulière et la possibilité de
programmes spéciaux d'intervention auprès des
élèves à risque, un service d'aide à
l'apprentissage, un suivi régulier auprès des
élèves tout au long de la session, une politique institutionnelle
d'évaluation des apprentissages et un suivi spécial des
élèves ayant subi un échec-session. La qualité de
cet encadrement se vérifie par une réduction du pourcentage
d'échecs et un taux de transit plus court que la moyenne du
collégial.
Présentement, évidemment, toute la question de remise en
cause de la façon d'aborder ou d'offrir de la formation, ça
découle d'un plan de planification stratégique qui avait
débuté en 1990 et qui visait, à ce moment-là,
à définir des objectifs pour les 8, 10 prochaines années
en termes de formation en agro-alimentaire. C'était dans ce
cadre-là que ie ministère avait entrepris cet exercice de
planification stratégique. Le but visé à ce
moment-là était d'accroître l'impact des actions et de
prévoir d'une manière plus articulée l'affectation des
ressources du ministère et des Instituts en fonction des mandats et
cibles stratégiques pour s'assurer que le secteur bioalimentaire
québécois dispose de ressources humaines compétentes.
Le résultat de cette démarche a permis d'identifier cinq
orientations dont deux se rattachent spécifiquement à la
réflexion qui est présentement en cours. Une d'elles était
de privilégier, pour la formation professionnelle initiale en
bioalimentaire, une formation fondamentale et polyvalente, et l'autre de
développer, en formation spécialisée, la formation sur
mesure pour répondre aux becoins spécifiques du personnel des
entreprises.
Nous avons donc fait cet exercice. Nous avons été voir
qu'est-ce que les employeurs, qu'est-ce que l'industrie en pensaient, et nous
avons eu un message qui était très clair de la part de
l'industrie, et un tel message rejoint l'opinion émise par le Conseil
des collèges dans son rapport «L'enseignement collégial:
des priorités pour un renouveau de la formation». Ce qu'on nous
dit, c'est: Mettez à notre disposition des personnes possédant
des connaissances de base solides, des personnes polyvalentes ayant la
capacité de s'adapter aux changements rapides. Ainsi donc, les personnes
qui désirent oeuvrer dans le secteur bioalimentaire devront
posséder des connaissances et des habiletés transférables
qui les rendront mobiles, polyvalentes, innovatrices et capables de s'adapter
aux changements. Dans ce cadre-là, la formation fondamentale de la
personne se référera non seulement aux connaissances techniques,
mais également aux habiletés, aux attitudes et aux valeurs
essentielles à un développement continu de la personne et
à son adaptation aux fonctions d'un travail en évolution.
La formation - ce qu'on nous disait également - devra favoriser
le décloisonnement des connaissances, l'acquisition de connaissances de
base transférables et le développement d'habiletés
personnelles telles que le travail d'équipe et la communication. Les
personnes recevant une formation en bioalimentaire devront connaître
l'ensemble de la filière bioalimentaire et l'interdépendance de
ses composantes que sont la production, la transformation, la distribution et
la consommation.
Sur le plan des objectifs, il nous semble approprié d'aborder
cette adaptation en définissant davantage les thématiques de la
formation générale et fondamentale de façon à
faciliter les moyens qui seront mis en oeuvre pour concrétiser cette
approche dans des programmes spécifiques de formation professionnelle.
La mise
en place de l'orientation citée précédemment se
traduit dans les instituts par une vaste opération d'évaluation
et de révision de programmes. Déjà, le programme de
gestion et exploitation d'entreprise agricole, programme qui est
dispensé également par six cégeps et les deux Instituts, a
été révisé selon cette approche, en collaboration
avec la Direction générale de l'enseignement collégial, et
nous pouvons croire que les futurs producteurs agricoles pourront s'adapter aux
changements qu'exigera le marché par les qualités de polyvalence
et d'adaptabilité qu'ils auront développées par leur
formation. Quant aux programmes reliés à la transformation des
aliments, ils sont présentement en révision et nous
amorçons, durant la présente session, le même processus
pour les six autres programmes reliés aux services à la
production.
Cette expérience d'intégration de la formation
fondamentale dans la spécialisation telle que vécue lors de la
révision du programme gestion et exploitation d'entreprise agricole nous
confronte à une réalité qui marginalisera encore davantage
la formation générale dans les programmes en révision.
C'«st une réalité qui nous inquiète et qui invite
à taire preuve d'ouverture et de créativité pour trouver
des mécanismes qui facilitent l'intégration du bloc de formation
générale dans des programmes de formation professionnelle.
En termes de formation sur mesure, les Instituts vont privilégier
des offres de formation technique qui pourraient introduire une proportion non
négligeable de formation fondamentale et qui devraient permettre une
reconnaissance sur le marché du travail. Par ailleurs, comme les deux
Instituts détiennent un mandat de formation professionnelle unique dans
le secteur agroalimentaire, les offres de formation visent plus
particulièrement la clientèle oeuvrant dans ce secteur, laissant
aux cégeps la préoccupation de répondre à d'autres
besoins de formation.
Alors, je vais laisser le directeur général de l'Institut
de Saint-Hyacinthe continuer la présentation.
M. Vézina (Gilles): Alors, étant donné que
je m'aperçois qu'il nous reste à peine cinq minutes, je vais y
aller un peu rondement.
Concernant la révision des programmes, nous affirmons dans notre
document notre croyance dans les pouvoirs de l'approche par compétences
pour permettre des ajustements rapides selon les indicateurs recueillis au
niveau de l'évaluation. Nous pensons cependant que cette approche doit
être renforcée par la base si nous désirons qu'au moment de
l'implantation ces programmes soient vraiment vécus de la façon
dont ils ont été conçus. Comment? Notamment par une
implication nécessaire du personnel professionnel et enseignant, par une
formation spécifique de ce personnel à l'approche par
compétences et aussi par un partage clair des
responsabilités.
D'autre part, nous proposons qu'une équipe d'aide au
développement soit constituée pour venir supporter les
comités qui sont impliqués dans une démarche de
révision des programmes. Et nous pensons que la Direction
générale de l'enseignement collégial peut contribuer
à la création d'une telle équipe. Il est important que
l'on se sente appuyé lorsqu'on s'adresse au ministère de
l'Enseignement supérieur à ce niveau-là.
Par ailleurs, nous voulons souligner l'importance de la formation du
personnel enseignant qui aura à mettre en place des programmes selon
l'approche par compétences. Ces gens-là doivent vraiment
maîtriser l'approche «curriculaire» pour appliquer tout
l'aspect multidimensionnel d'une compétence et, conséquemment, la
place importante à donner au perfectionnement des enseignants.
D'autre part, nous soulignons la nécessaire adaptation aux
besoins du milieu et au particularisme de la clientèle, adaptation qui
passe nécessairement par une plus grande marge de manoeuvre à
donner aux établissements lorsqu'il s'agit d'ajuster les programmes et
de les mettre en place, notamment concernant les conditions d'accès
à ces programmes-là. (22 h 20)
II convient, nous le soulignons, d'ajuster continuellement au
particularisme de la clientèle ces programmes-là. On
s'aperçoit que, même dans un secteur qui peut être
considéré comme plus traditionnel, nos clientèles ont
évolué et nous proviennent tantôt du niveau universitaire,
tantôt du niveau collégial sans que leurs études soient
nécessairement complétées, tantôt du marché
du travail. Cette adaptation, elle passe par une politique de reconnaissance
des acquis scolaires et «expérientiels», elle passe
également par une souplesse dans la façon de dispenser les
programmes et dans la continuité de ces programmes-là pour les
élèves qui voudraient poursuivre au niveau universitaire.
Nous affirmons l'importance d'un continuum de formation entre le
secondaire, le collégial et la formation continue, et soulignons
l'expérience heureuse et récente qui découle d'une entente
entre le MEQ, le MAPAQ et le MESS à ce niveau concernant le nouveau
programme gestion de l'entreprise agricole qui permet vraiment de faire un lien
visible pour les clientèles entre la formation au niveau secondaire et
la formation au niveau collégial. Nous décrivons dans notre
document comment ça se traduit à partir d'un découpage du
diplôme d'études collégiales en attestations
d'études collégiales. Nous soulignons aussi
l'intérêt que ce découpage présente pour les
clientèles qui sont des clientèles adultes et qui ne sont pas
nécessairement disponibles ou qui peuvent, à un moment
donné, décrocher de leurs études
régulières.
Donc, pour conclure, à titre d'établisse-
merits d'enseignement et forts de notre expérience de plus de 30
ans en formation professionnelle dans un domaine spécifique, nous nous
permettrons de rappeler, d'une part, l'importance d'assurer une certaine
intégration du bloc de formation générale dans les
programmes de formation professionnelle - et, là-dessus, soulignons
qu'on est un peu inquiets parce que, dans la révision du nouveau
programme gestion de l'entreprise agricole, on n'a pas tenu compte de cette
réalité; en tout cas, on ne voit pas comment cela a
été prévu, si cela a été fait - l'importance
aussi de répondre aux besoins exprimés par le milieu du travail
en mettant l'accent sur la formation fondamentale et polyvalente dans
l'actualisation et la mise en oeuvre des programmes; l'importance
également d'assurer, par des mécanismes souples et des formules
adaptées, un arrimage constant de l'enseignement avec les besoins du
milieu et le particularisme des clientèles - et je pense qu'au niveau de
la formation en production agricole particulièrement on a
été innovateurs avec des formules qui permettent d'aller
rejoindre la clientèle là où elle est et au moment
où elle est disponible - l'importance également de faciliter un
continuum de formation entre les différents ordres d'enseignement et,
enfin, d'assurer des services de formation sur mesure à la main-d'oeuvre
en entreprise, et la main-d'oeuvre en entreprise, particulièrement celle
de la transformation au niveau bioalimentaire, est une main-d'oeuvre qui a un
grand besoin de formation.
Je souligne ici, en passant, qu'on a présentement sur notre table
de travail un projet intéressant et, je dirais, innovateur qui
permettra, si jamais ce projet va de l'avant, d'associer un collège avec
des établissements du ministère de l'Agriculture et le
ministère de l'Enseignement supérieur pour aller plus loin dans
l'offre de services qu'on peut faire au secteur de la transformation des
aliments.
Enfin, nous croyons qu'un lien fonctionnel doit exister entre la
formation professionnelle dans un secteur spécialisé et les
instances gouvernementales concernées par le développement
économique de ce secteur, la formation étant, au même titre
que la recherche et le développement, un levier important de
développement. Notre expérience des 30 dernières
années au sein du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries
et de l'Alimentation nous renforce dans cette conviction. Merci.
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup de votre
présentation. Alors, je reconnaîtrai la ministre de
l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Science.
Mme Robillard: Merci, Mme la Présidente. Ça me fait
plaisir d'accueillir les gens des Instituts de technologie agro-alimentaire de
Saint-Hyacinthe et de La Pocatière, et je suis contente que vous ayez
décidé de participer aux travaux de notre commission. J'ai
noté, depuis maintenant deux ans que je suis au ministère de
l'Enseignement supérieur et de la Science, combien vous collaborez de
très près avec le ministère au niveau de
l'élaboration et de la révision des programmes. Et vous venez, M.
Vézina, d'en mentionner un exemple; dernièrement, nous avons
convenu d'une nouvelle révision et, je pense, à la satisfaction
de tous.
M. Vézina ou M. Bélanger, vous commencez votre
mémoire en nous soulignant, je dirais, les réussites des
Instituts en matière de diplomation et de durée des
études. Vous savez sûrement, depuis les débuts de ces
travaux en commission parlementaire, comment nous avons parlé de la
problématique du taux de diplomation au niveau des études
collégiales et aussi au niveau de la durée des études. Et,
vous, vous statuez que 70 % des étudiants vont obtenir leur
diplôme d'études collégiales, ceux qui s'inscrivent aux
Instituts, dans vos programmes, dans un délai de trois ans. Et j'ai le
goût de vous demander quelle est votre recette. Quelle est votre recette?
Vous me parlez de beaucoup de méthodes que vous utilisez,
l'identification des élèves à risque, des admissions
conditionnelles, des obligations de cours d'appoint, bon, plusieurs
méthodes qui sont aussi utilisées dans d'autres cégeps,
mais vous arrivez quand même avec des résultats beaucoup plus
élevés que dans d'autres secteurs. Est-ce que vous avez fait une
analyse plus raffinée? J'aurais des hypothèses dans ma
tête, là, mais je veux vous entendre.
M. Bélanger (Jean-Marc): Mme la ministre, je pense
qu'étant une institution spécialisée au point de
départ nous sommes convaincus, à l'analyse que nous avons faite
de ces résultats-là et en comparaison avec les données qui
venaient de votre ministère, que les gens qui décident soit
à la fin de leurs études secondaires ou par d'autres cheminements
de venir à l'un ou l'autre des Instituts, ils ont fait un choix,
déjà.
Mme Robillard: II n'y a pas de problème d'orientation, une
fois qu'ils sont rendus chez vous.
M. Bélanger (Jean-Marc): II y a moins de problèmes
d'orientation. Ils savent déjà, ils ont déjà fait
un choix qui est peut-être plus orienté, là, de la part des
communautés, de la part de la famille, mais ils savent qu'ils s'en
viennent dans une institution où ils ne changeront pas de programme,
c'est-à-dire où ils ne changeront pas d'orientation ou de champ
d'activité. Ils pourront changer, à la limite, de programme, mais
ils seront toujours dans le même champ d'activité. Et ça,
on croit que c'est la raison principale pour laquelle nous avons des
résultats tels qu'on les mentionne dans notre mémoire. Donc, les
gens qui s'en viennent ou à La Pocatière ou à
Saint-Hyancinthe, ils ont déjà fait un choix qui, pour la
très grande majorité, n'est pas remis en question. Et,
évidemment, il y a moins d'hésitations, il y a moins de remises
en question de la part de ces élèves-là.
Mme Robillard: Vous avez aussi un résultat fort performant
au niveau du marché du travail. Vous dites que 90 % de vos
diplômés se trouvent un emploi. Est-ce à dire que, dans
votre domaine où vous agissez, dans le domaine de la formation, les
possibilités du marché du travail pour intégrer les
nouveaux diplômés sont encore très grandes en termes de
perspectives?
M. Bélanger (Jean-Marc): Bien, vous savez, Mme Robillard,
le milieu bioalimentaire ou le milieu agro-alimentaire est un milieu où
tout le monde se connaît, ou à peu près, et c'est
peut-être plus facile d'avoir la réaction ou d'avoir l'expression
des besoins des employeurs de façon qu'on puisse ajuster nos programmes,
nos offres de formation en relation avec les besoins des employeurs. Mais il
faut dire qu'étant des institutions, encore une fois,
spécialisées, de petites institutions par .apport au
réseau des collèges, nos liens avec lo milieu, nos liens avec
l'industrie sont peut-être plus prononcés. Je ne porte pas de
jugement sur d'autres secteurs, mais nous sommes en lien direct avec les
employeurs. Et, évidemment, le monde ou le milieu agroalimentaire, au
cours des 20 ou 25 dernières années, a été en
développement et en ebullition et, dans ce cadre-là, l'apport des
technologistes qui avaient été formés en 1962, 1965, 1968,
1970 et 1975 a été tellement valable et tellement pertinent que
les employeurs ont eu le réflexe et continué d'avoir le
réflexe de venir chercher des diplômés dans nos Instituts.
Et les 10 % qui n'ont pas d'emploi, c'est parce que ou bien donc les gens
décident de continuer à l'université ou ils
décident de se réorienter, dans certains cas, dans d'autres
domaines. (22 h 30)
Mme Robillard: Vous insistez beaucoup dans votre mémoire
pour qu'on privilégie une formation fondamentale et polyvalente,
dites-vous. Vous demandez qu'on définisse davantage les
thématiques au niveau de la formation générale et
fondamentale. Est-ce à dire que la révision du programme,
dernièrement, qui nous amène au cumul de trois A.E.C. pour avoir
un diplôme d'études collégiales devrait être
révisée pour y inclure de la formation fondamentale?
M. Bélanger (Jean-Marc): Sous toutes réserves - et
je laisserai compléter mon collègue de Saint-Hyacinthe - nous
avons fait cette évaluation parce que nous avions
développé, dans notre orientation qui privilégiait la
formation fondamentale et polyvalente... En cours de processus et une fois le
processus du programme terminé, nous avons fait une évaluation
à savoir si ces objectifs-là étaient rencontrés et,
sûrement par un heureux hasard, effectivement, dans la
compréhension que nous avions de la formation fondamentale et de la
formation polyvalente, ces objectifs-là étaient présents
dans les résultats du nouveau programme. Donc, pour répondre
à votre question, il n'y aura pas nécessité de
réviser le programme qui vient d'être révisé. Donc,
vous pourrez le sanctionner avec toute tranquillité et
quiétude.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Robillard: Est-ce que vous vouliez ajouter quelque chose?
M. Vézina: Je partage ce point de vue là, mais il y
aura obligation de notre part, toutefois, de s'assurer que nous exploitons au
maximum les possibilités qui sont dans le programme pour faire que cette
formation-là soit vraiment traduite dans la réalité de
l'enseignement. C'est ça qui fait la différence. Alors, je pense
qu'il n'y a pas lieu nécessairement de revoir le travail fait, mais
plutôt de compléter, s'il y a des lacunes, par un meilleur
encadrement au niveau de l'implantation.
Mme Robillard: Vous nous faites part aussi dans votre
mémoire qu'une plus grande marge de manoeuvre serait nécessaire
au niveau des Instituts pour modifier ou ajuster les programmes. Est-ce que
vous pourriez être plus précis? Quelle est exactement la marge de
manoeuvre que vous demandez présentement au niveau de l'ajustement des
programmes?
M. Vézina: Moi, j'ai été, avant d'être
directeur général, directeur des services éducatifs
à Saint-Hyacinthe, il y a plus de quatre ans de ça, et j'ai connu
ce que ça voulait dire que de changer une orientation dans un programme,
que de développer une attestation d'études collégiales
dans des programmes qui, pourtant, étaient définis comme des
programmes d'établissement. Et je peux vous dire qu'on travaillait fort
et longtemps et que, au moment où on arrivait au bout, on avait
déjà perdu une partie de notre crédibilité devant
la clientèle qui nous poussait dessus pour répondre aux
besoins.
Donc, il y avait, je dirais, un contrôle trop serré de la
part de la Direction de l'enseignement collégial, contrôle qui me
semblait parfois conditionné, d'une part, par le cadre, mais, d'autre
part, par l'attitude des gens qui avaient à l'exercer. Et il y avait
même un roulement dans ces personnes-là; il fallait recommencer
avec des nouvelles personnes. Ce n'était pas toujours facile. Donc, au
niveau même de la procédure et de la délégation du
pouvoir, particulièrement concernant la question des ajustements au
niveau d'orientations à l'intérieur d'un D.E.C., concernant le
pouvoir donné aux collèges
de mettre en place des attestations d'études collégiales,
en tout cas, à ce moment-là, moi, je n'ai pas vu les
possibilités. S'il y en avait, je n'ai pas su les exploiter. Donc, de ce
côté-là aussi.
Plus récemment, on a eu une expérience concernant les
préalables dans un de nos programmes où - je ne sais pas
où était le trouble; probablement qu'on en avait un beau - on n'a
pas réussi à faire modifier les préalables. Pourtant, tout
le monde était d'accord, tout le monde, et nos préalables
étaient plus élevés que d'autres programmes du domaine des
sciences. Comment ça se fait qu'on n'a pas réussi à faire
ça? Pourtant, ce n'était pas une question de délai. Alors,
il y a eu là quelque chose. Ou c'était la procédure qui
était trop sévère ou quelqu'un ne l'a pas appliquée
dans l'esprit où elle devait être appliquée. Donc, à
ce niveau-là, il y a quelque chose à faire. En tout cas, nous, on
a vécu une difficulté.
Par ailleurs, au niveau de la démarche même, même
s'il y avait une délégation aux collèges, il pourrait y
avoir un contrôle sur l'application de la démarche. Et là,
les difficultés qu'on a rencontrées, nous, c'était de
faire affaire avec des personnes qui étaient à leurs
premières armes - et, des fois, on les aidait à définir ce
qu'elles devaient nous définir - et aussi de faire affaire avec des
personnes qui changeaient. Donc, on recevait du support, mais ce n'est pas nous
autres qui les supportions. Alors, là aussi, il y avait quelque chose
qui nous a créé des difficultés et qui, lorsqu'on
retournait devant le personnel enseignant et même notre clientèle,
faisait qu'on paraissait mal.
Mme Robillard: Vous dites: II pourrait très facilement y
avoir une plus grande responsabilité académique donnée aux
différents cégeps et aux Instituts. Je pense que, la demande,
nous l'avons reçue aussi de la plupart des cégeps d'augmenter la
responsabilité académique au niveau des différents
cégeps, et c'est dans ce sens-là que je comprends votre
demande.
M. Vézina: À tout le moins, oui. Mme Robillard:
À tout le moins.
La Présidente (mme
hovington): merci m le
député d'arthabaska, j'aurais besoin du consentement, par contre,
des membres de la commission, parce que vous n'êtes pas membre de la
commission.
M. Tremblay (Rimouski): Sérieusement, on a un doute,
là. Je ne suis pas sûr.
M. Baril: Ne prenez pas trop de temps pour
réfléchir.
La Présidente (Mme Hovington): Ha, ha, ha!
Vous avez la parole.
M. Tremblay (Rimouski): II a une figure sympathique, on va lui
dire oui.
M. Baril: Je vous remercie bien de votre gentillesse. Je vous
remercie et je vous félicite de la qualité de votre
mémoire. Et aussi, connaissant la qualité de l'enseignement que
vos deux Instituts dispensent également, je pense que c'est tout
à votre honneur. Et les chiffres démontrent très bien
aussi - comme Mme la ministre l'a souligné - dans votre mémoire,
que 70 % de vos étudiants obtiennent un diplôme d'études
collégiales et que 90 % se trouvent un emploi. Je suis certain que vous
rendez sans doute des gens jaloux dans d'autres secteurs au niveau du placement
et je pense que les résultats démontrent, comme vous l'avez
souligné tout à l'heure, d'ailleurs, que, les personnes qui vont
chez vous, leur orientation est déjà choisie. Elles ont un amour,
sans doute, ou une affection marquée du travail qu'elles auront à
accomplir dans la profession qu'elles auront à remplir suite à
leur formation.
Vous parlez, à la page 6, de la mise en place de l'orientation
qui «se traduit dans les Instituts par une vaste opération
d'évaluation et de révision des programmes». On me dit que
plusieurs organismes sont venus ici, devant la commission, pour souligner que
ce processus de révision était long, ardu et qu'il n'arrivait pas
tout le temps au résultat escompté. Est-ce que, vous autres, vous
arrivez à la même solution au niveau de la révision des
programmes?
M. Bélanger (Jean-Marc): Bien, évidemment, nous
sommes confrontés avec le même processus que tous les autres
établissements de niveau collégial dans la révision de
programmes. Donc, c'est un processus qui est long, qui prend au-delà
d'une année. Bon, si on parle d'une année, dépendant du
moment où on commence et du moment où on termine, il se peut
qu'on dérape d'une autre année parce que, à un moment
donné, il faut faire de l'information scolaire, il faut être en
mesure de dire: Oui, tel programme va être à faire à partir
de l'an prochain.
Effectivement, c'est un processus qui est long et, comme M.
Vézina le mentionnait tout à l'heure, c'est un processus qui tend
à être trop long de sorte qu'au moment où on est en mesure
de répondre aux besoins qu'on avait identifiés deux ans
auparavant, pour les gens qu'on va commencer à former, qui seront sur le
marché du travail dans trois ans, il va s'être
écoulé une période de cinq ou six ans. Donc, ce n'est pas
évident qu'on répondra complètement aux besoins. (22 h
40)
Donc, lorsqu'on fait une révision en profondeur avec les
méthodes qui sont utilisées et préconisées
présentement, c'est un processus qui est long. Est-ce qu'il y a des
processus qui sont
plus adéquats? Là, je n'ai pas de réponse à
vous donner, mais le processus qu'on a présentement, lorsqu'on fait une
révision majeure, c'est un processus qui est très long. Ce qu'on
a de la misère à s'expliquer, c'est que, dans des programmes qui
sont des programmes monoparentaux jusqu'à un certain point, où
c'est très spécifique, la démarche qui est
utilisée, c'est la même que s'il y avait 8, 10, 12 collèges
qui donnaient le même type de programme. Donc, c'est un peu cette...
Et les spécialistes du secteur, bien, on est en contact avec ces
spécialistes du secteur là. Donc, on se dit: Peut-être
qu'on devrait adapter les méthodes de base qui sont reconnues par la
Direction générale de l'enseignement collégial, on devrait
les adapter à devenir plus souples pour des programmes qui sont
spécifiques comme celui dans le secteur agro-alimentaire. Il y a
d'autres secteurs qui sont spécifiques. Et, comme ce sont des programmes
de niveau collégial, de niveau professionnel, bien, je pense qu'il faut
avoir plus de marge de manoeuvre, plus de souplesse pour réagir
rapidement aux besoins qui sont formules.
M. Baril: Mais, puisque différentes personnes,
différents organismes identifient la situation, identifient le
problème, comment ça se fait qu'on ne trouve pas ensemble une
solution pour essayer d'accélérer ce processus de révision
des programmes pour que ça réponde, comme vous dites, pour pas
que ça prenne trois ans, parce que les personnes qui ont
été formées dans les deux premières années,
quand elles sortiront, elles ne seront plus... Comment ça se fait qu'on
ne trouve pas une solution pour essayer d'accélérer ça?
Où ça bloque?
M. Bélanger (Jean-Marc): Je n'ai pas de réponse
spécifique à vous donner. J'imagine que l'objet principal ou un
des objets de cette présente commission parlementaire est de voir c'est
quoi, quelles sont les contraintes, quelles sont les embûches qui font
que de telles révisions prennent tellement de temps.
J'imagine qu'on pourrait avoir des mécanismes pour aller plus
rapidement. Ce n'est pas mon intention de mettre la faute sur quelqu'un ou sur
tel organisme, mais je pense que ce sont des mécanismes qu'il faut
adapter, qu'il faut modifier. Puis je pense que les suggestions qui ont
été données ici, j'imagine, au niveau de la
présente commission parlementaire, vont aider à adapter des modes
ou des méthodes qui ont été mis en place il y a quelques
années, qui étaient sûrement pertinents à ce
moment-là. Sauf que, dans les secteurs de formation professionnelle, les
techniques ou les technologies évoluent tellement rapidement qu'il faut
avoir quelque chose de différent.
M. Baril: M. Vézina, avez-vous quelque chose à
ajouter?
M. Vézina: Moi, je n'ai pas une réponse, mais je
peux peut-être donner une piste. La démarche comme telle, elle est
longue, mais elle n'est pas nécessairement compliquée. Et, si, je
pense, on pouvait la faire du début à la fin sans interruption,
sans intermède trop prolongé, on irait assez rondement pour
réviser les programmes. Mais, vous savez que le monde de l'enseignement,
c'est un monde où on met beaucoup de temps à consulter et
à convaincre. Et, à chaque fois qu'on consulte et qu'on convainc,
il faut attendre une réponse pour reconsulter et reconvaincre.
Je pense que ça peut être une des pistes. Parce que, la
démarche, elle n'est pas si compliquée que ça, mais il
faut partir de là et consulter tel endroit et prendre le temps de
regrouper. Il y a beaucoup de gens à regrouper, des gens qui ne sont pas
nécessairement toujours disponibles. Il faut aller voir le
département, la commission pédagogique, attendre
l'autorité de ci et de ça, de sorte que, en bout de ligne, c'est
long. Ce n'est peut-être pas tout inhérent à la
démarche, ce qui fait que c'est long. C'est une piste, mais je ne suis
pas positif là-dessus.
M. Baril: Oui, monsieur.
M. Fournier (Ghislain): Oui. Je voudrais rajouter un petit mot
là-dessus. En fait, on ne remet pas en question toute la
procédure de la révision des programmes. La révision en
profondeur des programmes, c'est un peu normal que ce soit un processus qui est
un petit peu plus long. Mais, ce qu'on espère, c'est qu'une fois qu'on
en arrivera à des programmes révisés et approuvés
la procédure pour faire en sorte de maintenir à jour nos
programmes, ça, ce soit plus léger et plus facile, parce que,
s'il fallait reprendre la même démarche pour des révisions
que j'appellerais mineures, là, ça deviendrait très
onéreux et on serait continuellement décalés par rapport
aux besoins du marché.
M. Baril: À la page 8, vous parlez de mécanismes
formels école-industrie et vous dites qu'ils ont été
récemment mis sur pied dans différents secteurs. Comment
fonctionnent ces mécanismes-là?
M. Vézina: Nous, on a deux sortes de comités
école-industrie. On en a qui sont plutôt ad hoc et on en a qui
sont plutôt permanents. Il n'y a rien d'innovateur, je dirais, ou de
très créatif là-dedans. On avait déjà des
bons contacts avec l'industrie. Alors, ça consiste simplement à
rassembler un échantillon significatif des gens concernés par le
secteur de la formation périodiquement et à les amener à
formuler leurs points de vue sur les éléments qui nous
préoccupent à ce moment-là. Ça n'a pas de
fonctionnement plus compliqué que ça.
M. Baril: Aussi à la page 14 - et ça, ce n'est pas
la première fois que je l'entends non plus - vous dites que les mesures
favorisant la formation professionnelle sont difficilement applicables au
secteur bioalimentaire. Comment suggérez-vous que ces mesures
s'appliquent aussi à ceux et à celles qui veulent aller dans le
secteur alimentaire et bénéficier de ces mesures-là?
Où ça accroche? Où est le problème?
«C'est-u» parce que, dans les autres ministères, soit celui
de la Main-d'oeuvre ou celui de l'Enseignement supérieur, il n'y a pas
assez de ressources pour connaître le milieu ou les besoins du secteur
agro-alimentaire? Pourquoi on a de la misère à avoir des
programmes qui répondent à ce secteur-là?
M. Vézina: Ce qui est mentionné dans ce paragraphe
vise particulièrement !a problématique qu'on vit au niveau des
gens qui veulent acquérir de la formation au niveau de la production
agricole et ça concerne la clientèle adulte. C'est le
caractère particulier du profil de cette clientèle-là qui
est: propriétaire d'entreprise complètement ou partiellement, en
situation de travail, puis partiellement propriétaire d'entreprise,
travailleur autonome, puis employé en même temps. Quand on regarde
la production agricole avec ses 40 000 producteurs, on s'aperçoit que
ça n'a pas de commune mesure. On pourrait peut-être les comparer
à certains secteurs, mais, si on regarde les autres secteurs importants,
ça ne se compare avec les autres secteurs économiques. Alors,
dans ce cas-là, les programmes de soutien à la formation de la
main-d'oeuvre, qui sont généralement profilés sur
l'ensemble du secteur économique, font que, lorsqu'on arrive à
l'application des normes, ces gens-là se trouvent exclus.
Par ailleurs, je prends un autre exemple: au niveau de la transformation
des aliments, on avait des programmes pour la formation de la main-d'oeuvre,
mais il fallait être en chômage. Mais le problème au niveau
de la transformation des aliments, c'est qu'on avait beaucoup de main-d'oeuvre
pas qualifiée, mais elle n'était pas en chômage, cette
main-d'oeuvre. Alors, ils se trouvaient exclus et on aurait voulu aller
chercher des gens en chômage pour les qualifier, mais il n'y avait pas de
postes pour ces gens-là; c'est ceux qui étaient
déjà en situation de travail qu'il fallait qualifier. C'est une
question de normes.
M. Baril: C'est ça. Mais, pour adapter les normes aux
besoins, comme je vous dis, c'est un peu les problèmes qu'on me soumet.
À un moment donné, ça te prend, je ne souviens pas
là, 15 ou 17 personnes pour dispenser un cours et, quand tu as
réussi a regrouper ton monde, bien, là, soit qu'il n'y ait plus
de budget ou bien que tu ne puisses plus le dispenser. Mais, puisqu'on est
capable d'adapter des normes à d'au- tres secteurs, comment ça se
fait qu'on n'est pas capable d'adaptp^ des normes au secteur agricole? Il me
semble que ça ne doit pas être si compliqué que ça.
On manque un peu de souplesse comme dans d'autres choses. En tout cas, je sais
que vous êtes conscient du problème, mais je pense peut-être
que le ministère devrait étudier ça davantage parce que,
tout le monde le reconnaît, le besoin est là, puis on n'est pas
capable de répondre à ça. (22 h 50)
Une dernière question, qui est en dehors de votre mémoire,
là. À plusieurs reprises aussi, je vais vous dire, il y a
quelques années, mais ce n'est quand même pas si lointain, on me
disait, on m'informait qu'il y avait une difficulté ou un manque, je
vais appeler ça de collaboration, entre le ministère de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et le ministère
de l'Enseignement supérieur pour faire reconnaître des programmes.
Il y en a un qui voulait les faire reconnaître et l'autre disait: Bien
non, là, ce n'est pas nous autres. Est-ce que ça existe encore,
ces malaises-là?
M. Bélanger (Jean-Marc): Non. Je pense qu'il y a eu
beaucoup d'efforts qui ont été faits au cours des trois ou quatre
dernières années de part et d'autre. Je pense qu'à ce
niveau-là des relations entre les deux ministères, non seulement
de la direction, mais des principales personnes qui sont impliquées dans
ces révisions de programmes, il y a une collaboration qui est
fructueuse, qui est positive, présentement. C'est un peu ce que M.
Vézina mentionnait tout à l'heure. On essaie, évidemment,
d'éliminer les contretemps en associant, dès le départ,
dans une démarche, des personnes des deux ministères de
façon à ce que tout le monde... De la part des deux
ministères, on sait très bien quel est le type de démarche
qu'on doit faire et, à chaque étape qui est faite, il y a non pas
une vérification, mais une espèce de validation qui est faite de
façon que, lorsqu'un dossier est rendu à une certaine
étape avancée, on n'ait pas à reprendre parce qu'on a
oublié un élément ou différents
éléments. Donc, dans ce cadre-là, dans la démarche
que nous faisons de la révision de l'ensemble des programmes des deux
instituts, présentement, on doit dire que la collaboration est
là. Elle est positive et les mandats de chacun des deux partenaires sont
bien identifiés. On doit dire qu'on n'a pas ce problème-là
présentement.
Mme Robillard: Est-ce pour nous autres, ça, Mme la
Présidente?
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup. Alors, j'ai
aussi besoin du consentement pour reconnaître la députée de
Kamouraska-Témiscouata.
Des voix: Ah!
M. Baril: Moi, je ne peux pas parler.
Mme Dionne: Merci. C'est réglé, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Hovington): Allez-y!
Mme Oionne: Merci, Mme la Présidente. J'aurais seulement
une question à poser aux gens des deux ITA. Ça me fait plaisir
qu'ils aient pensé à venir présenter un mémoire en
commission parlementaire sur l'évolution des cégeps, parce qu'ils
sont partie prenante, je pense, de la formation professionnelle depuis
plusieurs années puisque, entre autres, l'ITA de La Pocatière a
été la première faculté d'agronomie du Canada,
sinon de l'Amérique du Nord. Alors, je pense que c'est tout à
leur honneur. S'ils sont encore existants aujourd'hui, les deux instituts,
c'est qu'ils ont pu répondre aux besoins de la clientèle agricole
qui a modifié, je pense, sa façon de travailler au fil des
années et qui a eu besoin de formation.
Tout à l'heure, j'écoutais le mémoire qui est
présenté et j'aimerais peut-être ajouter une chose aussi.
Je suis . -jreuse de constater le taux de réussite et le taux de
placement des étudiants. Il y a aussi, je pense, une obligation qui a
été créée par le gouvernement libéral, il y
a quelques années, et qui a peut-être aussi influencé - et
c'est tout à l'honneur des jeunes - c'est que, à l'Office du
crédit agricole maintenant, quand on veut investir dans une entreprise
agricole, on peut avoir des taux d'intérêt plus réduits si
on a un taux de diplo-mation plus élevé. D'ailleurs, je pense
qu'au niveau des deux ITA, que ce soit Saint-Hyacinthe ou La Pocatière,
ça a motivé beaucoup de jeunes à s'inscrire dans ces deux
établissements et dans les cégeps de formation agricole pour
obtenir cette formation, cette diplomation qui était vraiment
nécessaire dans le domaine et qui est devenue, je pense, une obligation,
mais beaucoup plus une motivation maintenant que ça l'était dans
le passé.
D'autre part, dans les deux ITA, ce qu'on remarque de façon
particulière, c'est le fait que la formation agro-alimentaire ou
agricole est appuyée par un soutien technique très important que
les cégeps, peut-être au fil des années, ont
développé, mais que les deux ITA ont connu et que le
ministère de l'Agriculture supporte depuis plusieurs années.
Alors, ça donne, je pense, un outil additionnel aux étudiants qui
ont une formation dans l'agro-alimentaire qui est importante.
En même temps, si on va, l'hiver, dans ces deux maisons
d'enseignement, on va retrouver des agriculteurs, via leur syndicat des
producteurs, qui se réunissent en assemblée
générale. Donc, le contact entre les agriculteurs, les
producteurs et les étudiants est toujours très étroit.
Alors, Mme la ministre, c'est pour ça qu'il y a beaucoup d'avantages, je
pense, dans la façon dont les deux institutions ont travaillé
depuis plusieurs années puisque ça a rapporté et ça
rapporte toujours des bénéfices, surtout pour les
étudiants.
J'aurais seulement une question et je vais revenir à la page 15
dans vos conclusions pour peut-être vous demander d'expliciter davantage.
Quand, dans le deuxième paragraphe, vous rappelez l'importance de
«faciliter un continuum de formation entre les différents ordres
d'enseignement», j'aimerais peut-être vous entendre
là-dessus, parce que, si vous l'avez mis là, c'est que ça
revêt une importance particulière.
M. Bélanger (Jean-Marc): À ce niveau-là, Mme
Dionne, ce que nous voulions souligner, c'est qu'il se donne beaucoup de
formation en agriculture au niveau secondaire, au niveau collégial et au
niveau universitaire. Et il existait... Je veux dire que c'est dans le lien
entre le niveau secondaire et le niveau collégial qu'il existait un
certain dérapage. Et les efforts qui ont été faits au
cours de la dernière année entre les directions du
ministère de l'Agriculture, le ministère de l'Éducation et
le ministère de l'Enseignement supérieur ont abouti à une
entente qui fait que les personnes qui recevront un diplôme, un D.E.P. au
niveau secondaire pourront être reconnues dans un premier temps au niveau
collégial, de façon à éviter de reprendre certains
cours ou de reprendre une démarche. Et c'est dans ce sens-là
qu'on dit: Au niveau du secondaire et au niveau collégial, c'est
important et, également, on se dit: Les gens que nous formons, qui
obtiennent un D.E.C. après avoir passé chez nous, ils devront
avoir une route ou une façon d'accéder au niveau universitaire
sans avoir de pénalité. C'est dans ce sens-là qu'on dit:
II doit y avoir un continuum, il doit y avoir une intégration de la
formation. Et ça se fait également au niveau des attestations
d'études collégiales. On dit: Pour quelqu'un qui commence une
attestation d'études collégiales, il doit y avoir une progression
de façon à ce que la personne qui veut investir suffisamment de
temps puisse décrocher et atteindre des objectifs qu'elle veut
atteindre.
C'est dans ce sens-là qu'on dit qu'il doit y avoir ce continuum
entre les différents ordres d'enseignement.
Mme Dionne: Est-ce que vous dites, par le fait même, que,
dans le moment, pour toute la négociation entre le réseau
secondaire et collégial, le pas est fait depuis l'année
dernière et que vous souhaitez qu'entre le collégial et
l'unversitaire ce soit plus étroit?
M. Bélanger (Jean-Marc): Effectivement, et ça,
entre le collégial et le niveau universitaire, selon les
universités, les contraintes sont moins grandes. Par exemple, si on va
à l'Université
McGill, la reconnaissance ou le crédit que l'on accorde pour
certains cours ou certaines formations que les gens ont eus au niveau
collégial est peut-être plus permissif - j'emploie ce
terme-là - qu'on peut l'avoir à l'Université Laval, par
exemple.
Mais je pense que c'est important que les gens n'aient pas à
reprendre, parce que, quand on a fait trois années de niveau
collégial, il y a sûrement un certain bagage de connaissances
qu'on n'a pas besoin de reprendre lorsqu'on arrive au niveau universitaire.
Mais il n'y a pas de discussions spécifiques, à ma connaissance,
présentement, entre le niveau collégial et le niveau
universitaire comme il y avait entre le niveau secondaire et le niveau
collégial où la problématique était plus importante
qu'à l'autre niveau.
Mme Dionne: O.K. Il faut que je m'arrête, Mme la
Présidente?
La Présidente (Mme Hovington): Une demi-minute.
Mme Dionne: Une demi-minute? Juste peut-être pour vanter,
Mme la ministre...
La Présidente (Mme Hovington): Si c'est pour ça,
vous avez deux minutes! Ha, ha, ha! (23 heures)
Mme Dionne: Deux minutes pour vanter... Seulement pour
peut-être expliquer comment, justement, les deux ITA peuvent s'adapter de
façon particulière. Il y a deux domaines dans lesquels, je pense,
l'ITA de La Pocatière, en particulier, a fait un gros travail. C'est de
s'adapter au monde de l'industrie des courses de chevaux. On avait besoin de
formation professionnelle spécifique. Et il y a une technique
équine qui est accordée avec, justement, appui technique,
à l'ITA de La Pocatière. Alors, ça donne un coup de main
au niveau professionnel, au niveau de l'industrie des courses de chevaux, et
ça va avoir ses retombées d'ici quelques années. Et
l'autre, c'est, bien sûr, pour répondre aux besoins des
consommateurs et consommatrices en agriculture biologique. On a un centre
d'expertise qui est très intéressant et qui veut justement
répondre...
Alors, vous voyez, Mme la ministre et Mme la Présidente, qu'au
niveau de l'agro-alimentaire on relève les défis des grappes
industrielles.
La Présidente (Mme Hovington): Et un, dans votre
comté.
Mme Dionne: Effectivement.
La Présidente (Mme Hovington): C'est tout à votre
honneur. Alors, en conclusion, Mme la ministre.
Mme Robillard: Merci, mesdames et messieurs des Instituts,
d'être venus témoigner en commission parlementaire. Je pense que
c'était tout à fait pertinent que vous veniez nous faire part de
votre expérience. Je ne peux que souhaiter que la collaboration qui
s'est installée depuis de nombreuses années avec le
ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science se
continue, et surtout, aussi, souhaiter que les filières de formation
professionnelle de l'ordre secondaire jusqu'à l'universitaire se
développent de plus en plus. Je pense que c'est un objectif à
poursuivre. Merci bien d'être venus.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, au nom des membres
de la commission de l'éducation, je vous remercie d'avoir bien voulu
nous présenter votre mémoire très intéressant. Bon
retour.
La commission de l'éducation ajourne ses travaux sine die, non,
pas sine die, jusqu'à demain, après la période des
affaires courantes, vers 11 heures.
(Fin de la séance à 23 h 2)