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(Neuf heures trente-trois minutes)
La Présidente (Mme Hovington): Je demanderais le silence,
en arrière.
La commission de l'éducation va débuter ses travaux. Je
constate que nous avons quorum. Je déclare donc la séance de la
commission de l'éducation ouverte, et je rappelle le mandat de la
commission qui est de procéder à des auditions publiques sur
l'enseignement collégial québécois. Est-ce que nous avons
des remplacements, M. le secrétaire?
Le Secrétaire: Oui, Mme la Présidente. M. Parent
(Sauvé) est remplacé par M. Khelfa (Richelieu).
La Présidente (Mme Hovington): Merci. Aujourd'hui, le 26
novembre, nous entendons ce matin le collège Ahuntsic, l'équipe
de direction et le syndicat du personnel enseignant qui sont déjà
installés. Bonjour! Je vais lire l'horaire de la journée: 10 h
30, nous aurons la Conférence des recteurs et des principaux des
universités du Québec; 11 h 30, la Corporation professionnelle
des conseillers et conseillères d'orientation du Québec; 12 h 30,
suspension; reprise à 15 h 00 avec le cégep du
Vieux-Montréal; 16 h 00, la Fédération des
infirmières et infirmiers du Québec; 17 h 00, la Chambre de
commerce de la Rive-Sud; 18 h 00, suspension; 20 h 00, le cégep de
Rimouski; 21 h 00, le cégep de Chicoutimi, pour ajourner à 22 h
00.
Je souhaite la bienvenue au collège d'Ahuntsic, ce matin,
à la commission de l'éducation. Je ne sais pas qui en sera le
porte-parole. C'est M. Inchauspé, directeur général?
Alors, bienvenue. Si vous voulez bien nous présenter votre
équipe, M. Inchauspé.
Collège Ahuntsic - Équipe de direction
et syndicat du personnel enseignant
M. Inchauspé (Paul): Alors, madame, à ma gauche,
comme il convient, des représentants du syndicat des professeurs: Mme
Margot Sicard, professeur d'histoire, qui est présidente du syndicat;
Pierre Lavertue, professeur de chimie, qui est secrétaire du syndicat;
et Annette Gélinas, professeur de physique, qui est
vice-présidente du syndicat. À ma droite, comme il se doit, des
membres de la direction: Roch Tremblay, qui est directeur des services
pédagogiques; Bernard Morin, qui est son adjoint et responsable, au
collège, de toute la formation préuniversitaire; Yves Mongeau,
secrétaire général.
La Présidente (Mme Hovington): Bonjour!
Alors, nous vous écoutons religieusement. Vous avez vingt minutes
pour nous présenter votre mémoire.
M. Inchauspé: Merci, Mme la Présidente.
Mme la ministre, M. le porte-parole de l'Opposition, MM. les
députés, après près de 80 heures d'audience sur les
cégeps, cela, je pense, est de nature à limiter l'ardeur du plus
vaillant et de la plus vaillante, d'autant plus que comme vous arrivez à
la fin du processus, votre tête est probablement déjà
faite. Alors, que vous dire? Nous voudrons vous dire trois choses: la
première, c'est que, pour nous, toute réforme doit tenir compte
de la dualité que constitue le cégep, celle de la filière
de formation technique et celle de la filière de formation
préuniversitaire. Pourquoi? Parce que chacune de ces figures a une
finalité différente. L'une conduit immédiatement au
marché du travail, l'autre conduit à des études qui,
ultérieurement, conduiront au marché du travail. De plus, chacune
de ces filières, concrètement organisée, est
organisée de façon différente, et ceci conditionne les
études et la manière dont peuvent se faire les études.
En effet, la filière technique favorise l'appartenance et
l'organisation. Nous y trouvons des laboratoires et des ateliers communs, qui
sont fréquentés par les étudiantes et les
étudiants. Nous y trouvons des groupes homogènes. Même s'il
n'y a pas une structure de coordination du programme, la majorité des
professeurs qu'ils ont viennent de la discipline mère de leur programme
technique: chimie analytique, électrophysiologie médicale,
médecine nucléaire, photolithographie et autres.
Par contre, dans la filière de formation préuniversitaire,
les conditions, d'une façon générale, ne favorisent pas
l'appartenance. Nous y trouvons des salles banalisées, des groupes pas
toujours homogènes. Il n'y a pas de structure de responsabilité
de programmes. Les professeurs qui leur enseignent viennent d'une dizaine de
départements et, théoriquement, en deux ans, ils pourraient en
rencontrer 28.
De plus, il nous semble que les problèmes posés par ces
deux filières - et je pense que, quand on parle de réforme, il
faut regarder ceci - nous paraissent être aussi différents.
J'utilise souvent une image qui est la suivante: la filière technique,
c'est comme un fleuve aux berges trop serrées, et qu'on empêche
d'irriguer des terres nouvelles. La filière préuniversitaire,
c'est un fleuve à l'eau stagnante qu'il faudrait dynamiser en resserrant
les berges.
En effet, quand on regarde les problèmes de la filière
technique, et ce qu'il faudrait faire pour la réformer, on trouverait
des mesures corn-
me, par exemple: des stages en entreprise pour les professeurs; que nous
puissions engager des vacataires, qui sont des experts de l'industrie, pour
enseigner; que, dans beaucoup de programmes techniques, les champs de la
recherche appliquée et du transfert technologique soient ouverts; qu'on
assure la présence des milieux professionnels autant pour
l'élaboration du programme que pour son évaluation; qu'on
favorise des modes d'organisation plus souples, permettant entre autres
l'entrée et la sortie des adultes; qu'on assure une coordination
verticale entre l'enseignement professionnel du secondaire et celui du
collégial - quand nous parlons de coordination verticale, c'est beaucoup
plus qu'une simple harmonisation; et que, dans cette filière
technologique, un enseignement exigeant plus de 14 ans d'études puisse
se dérouler sans passer par l'université.
Ce sont les types de proposition de réforme que nous faisons
concernant la filière technique, mais à l'évidence
même, cette liste montre que ça ne concerne absolument pas la
filière préuniversitaire. Toutes ces réformes ne
concernent que la filière technique. Par contre, la filière
préuniversitaire a des problèmes spécifiques qui doivent
avoir des solutions spécifiques. En effet, on y trouve les
problèmes suivants: l'agrégation, dans cette filière,
d'étudiants moins bien préparés et incertains sur ce
qu'ils veulent faire dans des programmes de sciences humaines ou de lettres.
Tout le monde a parlé du manque de cohérence de ces programmes,
du manque de précision de ce qu'il convient d'enseigner, du manque de
détermination des standards de sortie, du manque d'encadrement pour
faciliter les apprentissages, et du manque de signal extérieur clair et
en temps réel sur les résultats atteints par les étudiants
d'un groupe en comparaison avec d'autres étudiants ayant les mêmes
cours au collège ou avec des étudiants ayant les mêmes
cours dans des collèges analogues. Voilà donc, là encore,
un ensemble de problèmes qui se trouvent être des problèmes
absolument différents de ceux de la filière technique. (9 h
40)
Simplement pour vous donner une idée concrète de
problèmes de la filière préuniversitaire: le manque de
précision de ce qu'il convient d'enseigner et le manque de
détermination des standards. Je voudrais simplement lire, si vous le
permettez, Mme la Présidente, les indications, les lignes directrices
qui sont données dans le programme de sciences de la nature et qui
doivent guider la détermination du programme. Vous verrez comment ces
lignes sont fortes, mais leur application peut donner n'importe quoi ou, du
moins, bien des choses différentes. Voici ces lignes. Des
collèges, les enseignantes et les enseignants devront assurer la
préparation des cours en favorisant le développement de
l'approche de l'esprit et de la méthode scientifique, la
réflexion sur la relation sciences-technologie-société,
l'éthique dans le domaine des sciences, l'épistémologie et
l'histoire des sciences. La deuxième directive dit que les
collèges devront s'assurer que l'élève maîtrise
suffisamment les langages de base. Et la troisième directive: au terme
du programme, les collèges s'assureront de l'intégration des
connaissances et des aptitudes chez les élèves.
Voilà la description du programme. Suit une liste de cours dont
tous sont élaborés, qui ont été
élaborés en 1978, 1977, 1982, 1975. Il est évident qu'un
tel encadrement, ça va concerner à peu près 2000, 2500
professeurs du collégial. C'est un encadrement qui n'est pas très
précis.
En conséquence, nous, il nous paraît que la réforme,
si elle doit avoir lieu, doit tenir compte de ces deux réalités.
En fait, nous sommes en présence de deux sociétés
distinctes. Il faut accepter leur logique propre, il faut accepter leur
environnement de développement propre, et essayer d'avoir des
réformes qui ne tiennent pas compte de cela, c'est faire des côtes
mal taillées qui seront inadaptées pour les deux. Alors, c'est la
première idée que nous voulions vous dire, qui est une
idée centrale de notre mémoire.
La deuxième idée, c'est la suivante. Il n'y a pas de
réforme efficace sans que les diagnostics n'aient été
auparavant établis. Réformer, c'est rendre possible ce qui est
nécessaire. Or, pour établir ce qui est nécessaire, on ne
peut se fier à des sondages ou à des cueillettes d'opinion ou, du
moins, ça ne peut suffire. Il nous semble qu'il faut faire une analyse
de ce qui ne va pas. Ce que nous avons essayé dans notre mémoire,
c'est de faire précéder toutes les propositions que nous faisons
d'analyses. Elles valent ce qu'elles valent, mais nous avons fait un gros
effort sur ceci. Or, il nous semble, du moins, à partir du moment
où... d'après l'écho qui en est sorti dans la presse,
qu'un certain nombre d'avancés qui ont été faits devant
vous ne sont pas basés sur des analyses.
Je voudrais simplement vous en donner deux exemples: l'un qui concerne
la formation générale, et l'autre qui concerne le
mécanisme d'organismes extérieurs d'évaluation des
collèges. En ce qui concerne la formation générale, tout
le monde dit: II faut plus de formation générale au
collégial. Qui, d'ailleurs, ne parle pas de nos jours de la
nécessité de la formation générale? Aux
époques d'incertitude, une tête bien faite est toujours
préférable à une tête bien pleine. Mais un
observateur extérieur qui nous écoute - et j'en ai autour de moi
qui ne connaissent rien de la réalité des cégeps - part
avec l'idée suivante, qu'en augmentant le temps de la formation
générale, on réglera le problème de la formation
générale au cégep. Or, il n'en est rien.
En effet, la formation générale occupe de la place au
cégep. Dans tel baccalauréat universitaire, sur 90
crédits, il y en a 80 qui... Le baccalauréat de chimie qui, sur
90 crédits, en a 80 en chimie, je peux dire qu'il n'y a pas
suffisamment de formation générale. Mais tous les
programmes préuniversitaires du collégial ne sont en fait que des
formations générales, puisqu'en deux ans l'étudiant est
obligé de voir 10 disciplines différentes et que, dans
l'enseignement professionnel, les étudiants des cours autres que la
spécialisation représentent, suivant les programmes, de 30 %
à 50 %. Donc, on ne peut pas dire que le problème est
quantitatif. Alors, où est le problème de la formation
générale?
Quand on écoute ce qu'on nous dit sur les défauts de la
formation générale au collégial, qu'est-ce qu'on nous dit?
On nous dit que, pour la formation préuniversitaire... La
Fédération québécoise des professeurs
d'université vous l'a dit, la Conférence des recteurs qui va nous
succéder vous le dira probablement. On déplore quoi? On
déplore l'insuffisance, chez les étudiants sortant du
collégial, de la capacité d'établir des liens entre des
choses apprises. On déplore qu'on ait négligé le
développement du sens historique et du sens critique. On déplore
qu'on n'ait pas donné assez d'importance au raisonnement abstrait et
à l'argumentation.
Quand on écoute ceux qui reçoivent les gens du technique,
qu'est-ce qu'on déplore? Ils nous disent tous: On déplore leur
manque de maîtrise de la communication écrite. Ils nous disent: On
déplore qu'un certain nombre de procédés importants pour
le technologue n'aient pas été suffisamment
développés. Ainsi, par exemple, la méthode inductive qui
permet de passer du fait à la notion, qui permet de passer du
symptôme à la cause, ou bien la pensée systémique
qui est très importante pour les technologues, qui porte de l'attention
au jeu des relations entre les parties. On nous dit aussi: Vos étudiants
sortant du technique ne manifestent pas assez le sens de l'innovation et de la
curiosité intellectuelle. Or, pensez-vous qu'en remembrant les cours de
formation dite générale habituelle, qui sont les cours
obligatoires et les cours complémentaires, et qu'en changeant le cours
de philosophie par un autre cours, on réglera ces problèmes? Non.
Ces problèmes demeureront.
L'autre exemple, c'est celui de l'évaluation. Je n'aurai
peut-être pas le temps de le dire complètement, mais, là,
c'est pareil. Tous les intervenants, et certains sont prestigieux, disent: Ce
qu'il faudrait, pour le cégep, c'est un organisme externe
d'évaluation. Qui, d'ailleurs, de nos jours, est contre
l'évaluation et contre la reddition de comptes? Mais si ce
système est si extraordinaire, pourquoi, par un excès de vertu,
ne propose-t-on pas quelque chose d'analogue pour les universités et
pour les commissions scolaires? Est-ce que les gens des cégeps seraient
plus paresseux? Non. Il y a, par contre, probablement, un problème au
cégep concernant l'évaluation, mais quel est-il? Est-ce que
l'organisme externe paraît être capable de le régler?
Je n'ai pas le temps de développer cette idée.
Peut-être que si on me pose les questions, on le fera, mais je constate
le fait suivant: c'est qu'on détache toujours le problème de
l'évaluation de l'ensemble du système.
Dans un système d'éducation, il faut regarder la
corrélation existant entre celui qui décide du programme, celui
qui donne le diplôme et l'évaluation. Le mode d'évaluation
dépend de qui décide du programme, de qui donne le diplôme.
Le problème n'est pas posé ainsi, d'autant plus qu'un organisme
d'accréditation de cet ordre, je pourrais en faire la
démonstration, du moins pour l'enseignement technique... On pourrait
obtenir les mêmes effets plus rapidement et certainement beaucoup plus
efficacement.
Je sais qu'analyser les choses est difficile. Nous-mêmes, autour
de la table, ici, nous n'avons pas toujours été d'accord. Nous ne
sommes pas d'accord sur les solutions, et notre mémoire en convient.
Mais ce que nous avons essayé de faire - et ça nous a pris
des heures et des heures de discussion, beaucoup d'heures, peut-être pas
loin des 80 heures que vous avez passées - c'est d'essayer de nous
entendre sur l'analyse des causes, pensant la chose suivante: si nous nous
entendons sur l'analyse des causes, la logique des questions bien posées
entraînera, un jour ou l'autre, le rapprochement sur les solutions. C'est
sur ça qu'a porté notre effort essentiel, et nous ne regrettons
pas de l'avoir fait, mais nous pensons que si on ne fait pas ça, des
réformes peuvent exister, mais elles risquent d'être
cosmétiques et de ne pas produire l'effet escompté.
La dernière idée que je voudrais vous transmettre concerne
des problèmes de financement. Vous allez vous dire: Encore un
collège qui va venir se plaindre du financement. Non, je ne viens pas me
plaindre du financement. Vous êtes préoccupés des
coûts du système. Nous aussi, nous sommes préoccupés
d'une gestion serrée.
Dans mon collège, il y a 28 programmes professionnels, plus de
100 ateliers et laboratoires. C'est complexe à gérer, ces
choses-là. Et vous pourriez croire - et tout le monde croit -que les
programmes techniques de cet ordre, ça coûte les yeux de la
tête. Savez-vous que l'argent que nous recevons per capita
étudiant au collège Ahuntsic pour un étudiant qui a une
moyenne de 25 heures - parce que, dans l'enseignement technique, on en a plus,
d'heures -par semaine est de 6550 $. C'est un des plus bas du réseau. (9
h 50)
Un collège de Montréal qui a peu de techniques a, par
étudiant, 900 $ de plus. Sur un budget de 45 000 000 $, avec la
même norme, nous aurions 5 000 000 $ de plus. Un collège de
région, par étudiant, c'est 13 580 $, c'est-à-dire le
double. Avec la même norme, nous aurions 90 000 000 $. Alors, nous
n'avons pas cet argent.
Nous avons l'habitude des économies d'échelle puis des
économies tout court. Et ceci nous donne, je pense, le droit de vous
dire deux choses concernant le financement.
Tout d'abord, concernant la gratuité. Est-ce que c'est parce que
nous sommes dans un collège qui est un collège technique? Nous
autres, nous sommes en entier convaincus que le meilleur moyen qu'on a
trouvé, jusqu'à présent, pour assurer une redistribution
sociale de la richesse - le meilleur, je veux dire, en termes de
coûts-bénéfices de l'argent que c'a coûté par
rapport aux bénéfices qu'on attend - c'est encore de permettre
l'accès à des études à des enfants de familles plus
modestes.
Neuf sur dix de nos étudiants du technique sont les premiers de
leur famille à atteindre ce niveau d'études. Nous ne sommes pas
non plus pour autant pour les frais modérateurs. Pourquoi? Parce que,
ici encore, l'analyse n'est pas faite. En effet, on poursuit ses études
pendant plus longtemps pour trois raisons. Parce qu'on prend moins de cours,
mais le financement des collèges, comme celui des universités,
est basé presque entièrement sur le nombre de cours effectivement
suivis, donc ça ne coûte pas tellement plus.
Deuxième chose, on prend plus d'études parce qu'on fait un
changement d'orientation. Le changement d'orientation est important. Nous
avons, à l'heure actuelle, dans nos programmes techniques, près
de 50 % des étudiants qui nous reviennent de l'université ou des
programmes préuniversitaires, et je trouve qu'ils font un bon choix en
faisant ça. Pourquoi les pénaliserait-on?
Troisième chose, on prend plus de temps parce qu'on lambine,
c'est-à-dire qu'on cumule les échecs, les abandons. Mais
là, il s'agit d'un problème qui est un problème
pédagogique. À problème pédagogique, sanction
pédagogique et non pas sanction monétaire. Autrement, nous
aurions la chose suivante: quelqu'un qui a de l'argent, lui, il peut se
permettre de lambiner et pas les autres. Il y a longtemps dans notre
collège, Mme la ministre, que nous avons limité l'abandon
à un cours et que, à chaque session, nous excluons des
étudiants parce qu'ils n'ont pas des résultats scolaires
satisfaisants. Nous appliquons l'article 33. Alors donc, les frais
modérateurs ne nous paraissent pas non plus une solution.
L'autre élément du financement dont nous voudrions vous
parler, c'est celui de l'éducation des adultes. Mme la
Présidente, il y a déjà presque deux ans, j'ai
adressé à la ministre de l'Enseignement supérieur - nous
avons adressé, plutôt, le collège - un petit, court
mémoire concernant ce type de question, où nous indiquions que la
situation des étudiants à l'enseignement du soir, à temps
partiel - et dans notre collège, 90 % d'entre eux sont dans le
professionnel - est une situation inéquitable. Nous les
considérons, effectivement, ou du moins ils sont
considérés comme des clientèles de second ordre par
rapport à leurs collègues du jour, et par rapport aux adultes des
commissions scolaires et à ceux des universités.
Nous vous redisons que ceci doit être réglé. C'est
de l'argent, effectivement. L'évaluation qui aurait été
faite serait de 20 000 000 $. C'est beaucoup, mais qu'est-ce que c'est par
rapport à une accélération de la formation professionnelle
de gens qui désirent en avoir. Puis, qu'est-ce que c'est dans un budget
général de l'enseignement collégial qui est de 1 200 000
000 $, et un budget général de l'enseignement supérieur
qui est de 3 000 000 000 $? Ne pourrait-on pas trouver des
réaménagements là-dessus? La décision, simplement,
que vous avez prise de reporter la date des abandons vous a fait sauver au
moins 15 000 000 $, probablement - je n'ai pas calculé, mais le calcul
général qu'on a pu faire.
Nous sommes... Sur cette question, c'est avec une certaine
vivacité que nous le faisons. Pourquoi? Parce que nous pensons que ce
sont des phénomènes d'équité, de distribution, de
justice sociale qui interviennent, surtout dans un collège qui a
tellement de techniques, mais aussi parce que nous savons que ces mesures sont
de première importance dans le combat incessant qu'il faut mener au
Québec pour hausser le niveau général de la
population.
La Présidente (Mme Hovington): Ça va, merci. Ah,
vous êtes juste dans votre temps, M. Inchauspé. Il vous restait
une minute. Mme la ministre.
Mme Robillard: Merci, Mme la Présidente. D'abord, je veux
remercier l'équipe du collège Ahuntsic d'être venue
partager avec nous sa réflexion, et je veux souligner que la
participation du personnel enseignant à la préparation du
mémoire nous est chère aussi, parce qu'on peut vraiment voir,
donc, ce qu'est un travail d'équipe à l'intérieur d'un
cégep. Je vois que vous avez utilisé une approche très
pragmatique au niveau des recommandations de votre mémoire.
Mais, d'abord, M. Inchauspé, je voudrais vous dire que je ne fais
pas exactement la même lecture que vous des recommandations qui nous ont
été faites, ici à la commission parlementaire. Disiez-vous
que plusieurs des recommandations n'étaient pas nécessairement
basées sur une analyse rigoureuse? À mon point de vue, depuis le
début de ces travaux, à quelques exceptions près, oui, je
serais d'accord avec vous, mais la majorité des intervenants qui sont
venus ici avaient fait l'effort que vous avez fait, de procéder à
une analyse rigoureuse avant de nous faire des recommandations. J'ose
espérer que vous ne vous êtes pas fié strictement à
la lecture des journaux. Mais, M. Inchauspé, il faudrait peut-être
lire les 210 mémoires qui nous ont été
présentés pour voir la qualité de ces mémoires-la,
basés sur des analyses rigoureuses.
Quand vous me dites que, bon, peut-être qu'on a eu des recettes
miracles qui nous ont été présentées au niveau de
la formation générale ou du mécanisme d'évaluation,
moi, j'ai une première question à vous poser. Il y a deux
organismes ici, crédibles, je pense, dans le milieu des collèges,
qui sont venus, après une analyse rigoureuse, nous faire des
recommandations; je pense de façon particulière au Conseil des
collèges et à la Fédération des cégeps.
Est-ce à dire que le collège Ahuntsic est en désaccord, de
façon générale - ou que, peut-être, M.
Inchauspé lui-même est en désaccord - avec les
recommandations qui nous sont faites en regard de ces deux
éléments de la formation générale et de
l'évaluation, sans entrer dans le détail, parce que j'aimerais
garder mon temps d'échange avec vous sur la formation technique, si vous
n'y voyez pas d'inconvénient?
M. Inchauspé: Merci, madame. Je vous répondrai
brièvement ceci: Ce n'est pas que nous sommes en désaccord, nous
avons une position qui est une position... Ils ont une position qui n'est pas
tout à fait la nôtre.
Concernant l'enseignement à la formation générale,
avec l'expérience de 25 ans au collégial, je vous dis que la
notion de formation fondamentale, elle a été écrite, il y
a 17 ans, dans le rapport Nadeau. Je crois à ça, et je vais
essayer d'y travailler. Pourtant, on nous dit, 25 ans après, que c'est
les mêmes effets. Or, moi, je prétends que ce n'est pas en
changeant quelques cours qu'on règle le problème. Le
problème doit être réglé autrement. On aura
peut-être l'occasion d'en parler.
Concernant une espèce d'organisme externe, ce qu'il faut d'abord
régler, c'est le point suivant: qui est responsable du programme, qui
est responsable des diplômes? Une fois qu'on a réglé
ça, on commence à parier des choses. Ce n'est pas l'organisme en
tant que tel qui est un problème, c'est qui...
Mme Robillard: Vous avez tout à fait raison. D'ailleurs,
cette nécessité d'un organisme externe nous a toujours
été présentée en deuxième lieu comme le
pendant à une responsabilité académique accrue au niveau
des collèges avant de penser à un organisme externe. Je pense que
ça a toujours été présenté dans cette
optique. Mais, M. Inchauspé, revenons à la formation
professionnelle de niveau collégial et à des recommandations
spécifiques que vous nous faites dans votre mémoire.
D'abord, j'aimerais ça vous entendre, M. Inchauspé, parce
que je pense que c'est une première, cette recommandation-là,
ici, au niveau de la commission: la recommandation à la page 11 de votre
mémoire en regard d'une filière continue inter-ordres au niveau
de la formation professionnelle. Si je vous suis bien dans votre
recommandation, alors que la formation profes- sionnelle se donne au
secondaire, au collégial et à l'universitaire, vous, vous nous
recommandez une filière, mais strictement secondaire/collégial en
excluant, je pense - si je vous saisis bien -l'université. Alors, je
vous le dis, c'est assez nouveau comme recommandation. Pour, je dirais, mettre
en place cette filière continue, vous nous recommandez un
mécanisme de coordination: les ministères de l'Éducation,
de l'Enseignement supérieur et de la Main-d'oeuvre pour regarder toute
cette filière continue, la carte des enseignements professionnels, la
carte des programmes, etc., mais en disant très clairement que ça
suppose la disparition du recours à l'ordre universitaire pour certaines
formations, si je vous ai bien saisi. Pourriez-vous être plus explicite?
(10 heures)
M. Inchauspé: Oui, madame. Tout d'abord, il y a un
problème très concret qui existe: des duplications qui existent
entre le secondaire et le collégial. Ce problème n'est pas
né de la mauvaise volonté des personnes. Ce problème est
né des changements qui ont eu lieu dans la société
relativement au niveau de compétence des métiers. Cette question
doit être réglée. Nous, ce que nous proposons pour qu'elle
soit réglée, c'est de la façon suivante: qu'on puisse
établir actuellement, avec les changements qui ont eu lieu dans les
différents types de métiers et les différents types de
professions, des niveaux de compétence. Ensuite, on déterminera
qui les donne.
C'est un exercice qui doit être fait. On est organisé
suivant la grande distinction qui a été faite par l'OCDE, il y a
30 ans, qui était celle d'ouvrier, de technicien et d'ingénieur.
Or, j'ai eu l'occasion, il y a cinq ans, d'aller travailler à l'OCDE sur
ces questions, et tout le monde remet en question cette distinction. Donc, il y
a une érosion. Donc, il faut tenir compte de cet
élément.
Nous, nous pensons que cette articulation verticale doit être
faite. De plus, en ce qui concerne l'ordre supérieur, on constate que
tous les pays occidentaux - pour régler deux problèmes....
Premièrement, pour régler le problème de
l'enseignement supérieur de masse, nous ne voulons pas que
l'université ouvre à côté des voies technologiques
consistantes pouvant amener jusqu'à 14 ans, 15 ans de scolarité.
Tous les pays - l'Angleterre, la France, l'Allemagne, la Suède - tous
les pays... il doit bien y avoir un mouvement de quelque chose à
l'intérieur de ceci.
Deuxième chose, il y a, effectivement, à
l'intérieur aussi de ces types de métier, des variations qui ont
lieu. Je peux en parier d'une façon très concrète. Nous
offrons des communications graphiques. Au collège d'Ahuntsic, nous
sommes le seul collège à donner cet
élément-là. Nous sommes en contact avec des écoles
internationales de cet ordre - Rochester, qui est la plus
grande école mondiale à l'intérieur de ce domaine.
Qu'est-ce que nous constatons?
Nous constatons le fait suivant: ils ont des formations à 12 ans
de scolarité dans ces domaines, à 14 ans. Ils en ont à 16
ans, et ils ne sont pas encore des ingénieurs. Donc, nous pensons que
pour un certain nombre de programmes techniques, même du
collégial, en ajoutant un, deux ans, il pourrait y avoir des
problèmes de cet ordre. Le problème de l'électrotechnique
est un problème vieux de 20 ans. Il y a déjà... en 1972,
1974, le problème se posait: Est-ce qu'en électrotechnique, le
programme de trois ans est suffisant? Est-ce qu'il ne faudrait pas un programme
de quatre ans, ou diviser le programme de quatre ans en deux de deux ans et
deux ans?
Donc, ce que nous voudrions, c'est une approche pragmatique de ces types
de problèmes, se dire: il y a une filière à
l'intérieur de ceci. Il faut... ces niveaux de compétence, et
elles varient. En conséquence, c'est une articulation de cet ordre qui
peut être faite et non pas ce que chacun fait.
L'enseignement technique du niveau collégial, c'est le lit de
Procuste. Il y a trois ans. Tout ce qui dépasse trois ans, on lui coupe
les jambes; et tout ce qui n'a pas trois ans, on l'étiré. Pour le
programme de bureautique qui fait double emploi avec l'enseignement au niveau
secondaire, il y a eu des tentatives de régler ce problème il y a
15 ans. Vous savez ce qu'elles sont devenues... Mais le programme de
bureautique dont on pourrait se poser... il est devenu un programme de trois
ans parce qu'il était collégial.
Alors, donnons une approche qui est un peu plus pragmatique, qui regarde
les fonctions effectives.
Mme Robillard: Parfait. Parlons donc, maintenant, des
responsabilités institutionnelles à l'égard des programmes
techniques. J'ai cru voir dans le mémoire que, là, il peut y
avoir des distinctions entre l'équipe de direction et l'équipe
des profs pour nous faire des recommandations. C'est pour ça que
j'aimerais comprendre la position très claire... et si je veux
résumer, ce que je comprends, c'est que l'équipe de direction
voudrait aller jusqu'à une responsabilité, je dirais, d'un
diplôme d'établissement, alors que l'équipe des professeurs
voudrait qu'on conserve un diplôme d'État. Je résume en
parlant de cette partie-là du mémoire.
M. Inchauspé: Oui, oui.
Mme Robillard: Est-ce que, Mme Sicard, vous pourriez expliciter
votre position sur ce sujet?
Mme Sicard (Margot): Bon. Je voudrais tout simplement mentionner
que nous avons discuté pendant plusieurs heures. Cependant, nous aurions
voulu profiter d'un plus long laps de temps pour pouvoir arriver,
peut-être, à un plus large consensus encore sur les solutions.
En ce qui concerne l'enseignement technique, nous partageons avec la
direction, l'équipe de direction du collège, le fait qu'il puisse
y avoir un organisme national d'accréditation des programmes, là
où, effectivement, nous, comme syndicat, nous
préférerions, pour l'instant en tout cas, que ce soit toujours un
diplôme d'État qui soft décerné par le
ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science.
Cependant, on n'est pas fermé non plus au fait qu'on puisse avoir une
certaine lattitude localement, parce que c'est évident que, concernant,
par exemple, les choix de cours institutionnels, on n'a pas vraiment
donné de solution ici, nous, en ce qui nous concerne. On ne serait pas
fermé à une discussion sur cette possibilité, d'autant
plus, comme disait M. Inchauspé, qu'il y a plusieurs programmes qui ne
sont donnés, enfin, qui ne sont décernés, offerts
qu'à Ahuntsic.
Mme Robillard: Alors, mais pourquoi, Mme Sicard, tenez-vous
à un diplôme d'État? Quel est votre argumentaire?
Mme Sicard: Disons que, jusqu'à maintenant, comme
mouvement syndical et même comme groupe de profs au collège, je
pense qu'on a toujours tenu à ce que le réseau collégial
demeure un réseau collégial et qu'effectivement, je veux dire,
les diplômes soient décernés par le ministère.
Mme Robillard: M. Inchauspé, est-ce que vous voulez...
M. Inchauspé: Je vous indiquerai très simplement la
raison pour laquelle, nous, nous demandons ça. Tout d'abord: une raison
pragmatique. Sur les 28 programmes que nous avons, nous les élaborons
nous-mêmes pour 14 d'entre eux parce que, pour 9 d'entre eux, on est les
seuls et, pour d'autres, on s'entend avec 2, 3 collèges. C'est la
mécanique, vous la connaissez. On s'est bâti un service de
programmes consistant, sérieux, qui est capable de faire ce travail, de
développer des programmes par compétence. On a même l'outil
pour pouvoir le faire, et on se dit: pourquoi... L'appétit, on l'a.
Pourquoi ne pas le continuer? Alors, ça, c'est la raison très
pratique.
L'autre raison, c'est une raison qui est un peu plus de système.
Nous pensons que l'environnement général des programmes
techniques des collèges est analogue à l'environnement
général des programmes universitaires, c'est-à-dire qu'ils
sont en rapport avec le marché du travail. En conséquence,
ça nous paraît que si nous avions plus de latitude - la
responsabilité de l'élaboration - le ministère, lui,
déterminerait les niveaux
des standards, déterminerait aussi les quantités de
véhicules, mais à l'intérieur de ceci, nous aurions la
pleine responsabilité. Nous pensons que les changements de programmes se
feraient beaucoup plus rapidement.
Le programme, par exemple, de technique de l'imprimerie que nous
reprenons, c'est la troisième fois en 10 ans qu'il est refait à
cause des changements technologiques à l'intérieur de cet
élément-là. L'objectif que nous nous donnons - nous sommes
aidés par le ministère, financièrement, pour le faire -
mais l'objectif que nous nous donnons, c'est de le réaliser, ce
changement de programme profond, fondamental, pour six programmes qui seront
changés en deux... un an et demi, et nous l'atteindrons.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. Merci, Mme la
ministre. Alors, je reconnaîtrai maintenant le porte-parole de
l'Opposition officielle, M. le député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Oui, Mme la Présidente. Je voudrais saluer de
façon particulière les gens et l'ensemble de l'équipe qui
accompagnent M. Inchauspé du collège Ahuntsic.
J'estime que vous avez un excellent mémoire dans le sens
qu'à décrire avec autant de clarté les problèmes
spécifiques vécus par les deux filières principales de
l'enseignement collégial, vous êtes sûrement en mesure de
préconiser des solutions appropriées, à certains
égards. J'ai trouvé particulièrement intéressant
que, d'une façon très précise, pour chacune des deux
filières, vous ayez précisément dégagé ce
que vous croyez être des nécessaires rappels concernant les
contraintes et les difficultés vécues par ces
filières-là et, également, un traitement approprié,
en termes de recommandations que vous faites. (10 h 10)
Je voudrais juste... À titre d'exemple, quand vous rappelez que,
pour ce qui est de la filière technique, il y a une rigidité de
la structure des programmes, il y a une mésadaptation des
mécanismes de révision des programmes - et je pense que,
ça, il n'y a pas beaucoup de gens qui ne l'ont pas rappelée - il
y a une duplication secondaire/collégial. Pour un, moi, ça m'a
étonné un peu plus, dans le sens que j'en connaissais, mais je
pensais que c'était marginal. Il ne semble pas que ce soit marginal. Il
semble que c'est assez important. Lorsqu'on fait une description aussi
précise, aussi adéquate des difficultés depuis plusieurs
années, l'étonnement qui me frappe, cependant, c'est de dire:
Comment se fait-il que cette réalité si bien décrite, avec
autant de précision, n'a pas pu être corrigée au fil des
ans? Je veux bien qu'on fasse une commission parlementaire qui regarde
l'ensemble de l'avenir des études collégiales même si, en
toute fin de conclusion, je suis de votre avis lorsque vous dites, vous aussi,
qu'il aurait été préférable d'avoir un regard plus
global sur l'ensemble des ordres de l'éducation parce qu'on voit ce que
certains problèmes vécus au secondaire créent au
collégial, et certains problèmes au collégial dans le
monde universitaire.
Mais, ma première question, sans la rendre plus
spécifique... Qu'est-ce qui fait, selon vous, que nous sommes
obligés, encore aujourd'hui, de reprendre à peu près les
mêmes éléments? Là, vite vite, quand vous dites:
Bon, écoutez, rigidité des structures du programme: ce n'est pas
aujourd'hui qu'on apprend ça. Mésadaptation des mécanismes
de révision: ce n'est pas aujourd'hui qu'on apprend ça.
Duplication secondaire/collégial: ce n'est pas aujourd'hui qu'on apprend
ça. Alors, comment se fait-il qu'on n'ait pas réussi à
trouver des formules d'ordre général? À quoi
attribuez-vous la raison principale de cette incapacité d'apporter les
réformes requises, en termes de grand premier point de vue
général?
M. Inchauspé: La raison, pour moi, elle est simple. C'est
ce qui se passe toujours dans l'existence. Les choses qu'il faut faire, qu'il
faut vraiment faire, on prend toujours du temps à comprendre qu'elles
doivent être faites. Deuxième chose: on n'analyse pas toujours les
causes du problème. Là-dessus, par exemple, en ce qui concerne le
problème de la rigidité des programmes... À partir du
moment où on établit que les programmes techniques, il va y en
avoir 140, on a déterminé nécessairement qu'il va y avoir
une adaptation fine de chacun de ces programmes versus le marché du
travail. Si nous n'avions que 30 programmes généraux dans les
techniques, on aurait une autre conception de l'organisation des programmes. Il
n'y aurait pas une adaptation fine. L'avantage - et on le voit dans tous les
pays du monde - d'en avoir beaucoup et d'avoir l'adaptation fine, ça
permet une insertion rapide dans le marché du travail. Le Québec,
de ce point de vue, dans l'enseignement technique, a les taux d'insertion les
plus extraordinaires du monde. À l'OCDE, ils n'en revenaient pas. La
raison vient de ce qu'on a beaucoup de programmes et, par conséquent, il
y a une adaptation fine. Par contre, la structure générale de
l'établissement ne tient pas compte de cette finesse. On a voulu
transplanter des structures pour des programmes préuniversitaires qui
changent tous les trente ans.
La loi de Galilée demeure la même. En tout cas, c'est
sûr qu'il y a des changements, mais ce n'est pas de même nature.
Or, il y a simplement deux, trois éléments qui sont importants
là-dedans. À partir du moment où tous les professeurs qui
enseignent dans le technique sont tous des permanents, la difficulté
existe de cette adaptation. Une des raisons pour lesquelles nous le demandons,
c'est qu'il devrait y avoir un certain pourcentage de professeurs qui soient...
Rien que ça, ça faciliterait l'adaptation.
Deuxième chose: à partir du moment où,
dans l'élaboration des programmes, les entreprises
n'interviennent pas, et qu'elle n'est faite qu'avec les professeurs,
nécessairement, l'adaptation se fait de façon
différée. Je ne dis pas qu'il faut imiter ce qui se passe au
Mexique, mais puisque nous rentrons dans le marché commun avec ce
pays... Le Mexique a un réseau d'enseignement technique qu'il a
copié sur les cégeps. Ils sont venus ici regarder comment on le
fait, et ils l'ont adapté à leur façon. C'est un
réseau qui comprend 260 établissements, 150 et quelque
programmes. Est-ce que vous savez que tous les professeurs qui enseignent
à l'enseignement technique sont tous des gens de l'industrie? Tous.
Là, je pense que c'est exagéré, là.
Quand on examine ce problème de l'enseignement technique qui
demande de l'adaptation dans tous les pays, on constate que ce sont un certain
nombre de mesures de cet ordre... C'est la raison pour laquelle nous proposons
aussi que tous les professeurs, tous les cinq ans, dans ces domaines, aillent
en stage. Il y a un programme de stage existant déjà, mais il est
nettement insuffisant par rapport aux demandes que notre collège
fait.
Alors, je pense qu'il faut rester avec la logique des problèmes.
II y en a certains qui disent: Réduisons ces programmes à 20, 30.
Je pense que c'est faux. On aurait des problèmes d'insertion sur le
marché du travail. Mais tirons-en les conséquences! Alors, quels
sont les facteurs d'inertie? Ce sont, ces facteurs d'inertie, des
systèmes d'élaboration des programmes plus rapides. Est-ce que
vous savez que, sur 140 programmes, 80 % ou 75 % sont offerts dans quatre
collèges et moins? Il peut y avoir plus de rapidité à
l'intérieur de ces collèges. D'ailleurs, le ministère
lui-même en a convenu puisqu'il a délégué les
collèges pour le faire, et la rapidité a lieu. Là
où on a toujours des problèmes, c'est avec les gros, les gros...
électrotechnique, enfin, bref, les éléments de cet
ordre.
Alors, je pense que c'est encore par une analyse précise des
facteurs d'inertie et en jouant sur ces facteurs d'inertie et en les corrigeant
qu'on améliorera.
M. Gendron: Je voudrais aborder une autre question. Je suis
convaincu que le cégep Ahunstic, vous-même, toute votre
équipe, avez la même conviction que le cégep doit viser
à maximiser le plus possible la réussite scolaire du plus grand
nombre de gars et filles qui décident d'y aller. Vous avez dit dans
votre mémoire que, selon vous, il y aurait lieu d'assouplir les
structures d'accueil et de diversifier les parcours scolaires. C'est des moyens
éventuels de maximiser la réussite. Il y en a plusieurs qui sont
venus soutenir - selon moi, avec raison - que le moment était venu de
rehausser les exigences pour l'obtention du diplôme d'enseignement
secondaire, communément appelé le DE.S.
Est-ce que vous êtes de cet avis? J'aimerais ça vous
entendre là-dessus, rapidement. Si vous étiez de cet avis, est-ce
qu'on fait ça de la façon suivante, dans le sens qu'on exigera un
plus grand nombre d'unités pour être admis, dorénavant, au
collégial? Est-ce que vous avez des opinions là-dessus?
M. Inchauspé: Oui, mais, là encore, il faudrait que
je fasse... Je vais vous donner quelques éléments de l'analyse,
parce que c'est un problème qui va être un problème
national. D'un côté, on constate les effets du système de
diplomation que l'on a versus les études ultérieures et, par
ailleurs, en augmentant les exigences d'un tel diplôme, on va diminuer la
diplomation au niveau secondaire. On ne peut pas accepter qu'un enseignement
secondaire, qui est un enseignement de base, n'ait que 50 % de diplomation.
Alors, en conséquence, où est le problème, et qu'est-ce
qu'il faut pour le régler?
On ne peut pas dire, comme j'ai entendu dire dans les journaux -
excusez-moi, madame, je n'étais pas à la commission parlementaire
tout le temps - certains qui ont dit: II ne faut pas faire de
propédeutique pour forcer le secondaire à changer. Je trouve
ça anormal qu'on mette des problèmes de cet ordre, de
société, de système, dans des commissions de rapports de
force. C'est anormal. Ça n'a pas de sens de dire des choses pareilles.
Même si le secondaire change, pour faire ces transformations, il faudra
sept ans. Est-ce qu'on va sacrifier des cohortes alors qu'ici même le
Conseil supérieur de l'éducation est venu vous dire que les
objectifs de scolarisation de l'enseignement supérieur doivent
être si forts?
Alors, en conséquence, pour moi, pour répondre, une fois
que j'ai décrit discrètement la question, ce n'est pas la
quantité des choses qui importe, c'est les cours qui constituent le
diplôme. Savez-vous qu'au Québec on peut avoir un diplôme
d'études secondaires sans avoir jamais réussi un cours de maths
de niveau secondaire, en ayant simplement réussi un cours de maths de
sixième année? C'est la construction. Ce n'est pas
l'unité, mais c'est les cours qui le constituent. Or, il y a des types
de cours, vous le savez, qui devaient constituer le diplôme. Mais,
là, ça supposait le problème suivant: si ceci constitue le
diplôme, comment s'assurer qu'il y ait une grande majorité qui les
réussissent, auquel cas c'est le curriculum du secondaire qui est
requestionné? Est-ce qu'il y a des disciplines qui doivent
disparaître pour laisser plus de place à d'autres? Ce qu'il y a de
certain, c'est que ce n'est pas la solution. Elle ne sera pas magique, il
faudra une volonté, une détermination. On a un problème
que je dis national. Il ressort, à cette occasion, que ce n'est pas par
des rapports de force qu'on réglera cette question.
M. Gendron: Vous parlez d'une session exploratoire pour les
étudiants, dans certains cas,
indécis, parce que, ça, c'est précisément ce
que vous proposez. Dans d'autres cas, ça pourrait être parce que
vous trouvez qu'ils n'ont pas le degré requis, donc une session de mise
à niveau. Mais, indépendamment de la terminologie, selon vous,
c'est quoi, les activités et cours qu'une telle session devrait
comprendre? Est-ce que ce serait un programme qui serait sur mesure ou qui
contiendrait un certain contenu de formation uniforme? Serait-il
crédité?
M. Inchauspé: Oui. Je pense que la fonction de ce type de
programme doit être une fonction de sas, c'est-à-dire une fonction
de mise à niveau et d'orientation. En conséquence, c'est à
partir de ces fonctions qu'il doit être redessiné. Or, il est
évident que ces étudiants faibles, on constate qu'ils ont des
faiblesses dans les disciplines de base qui assurent le succès aux
études ultérieures qui sont le français, les
mathématiques, les sciences de façon générale, les
méthodes de travail. Donc, c'est le noyau dur qui doit constituer ce
type de programme. Le reste, ça doit être des formes
d'exploration. Je pense qu'il y a un certain nombre de ces étudiants qui
pourraient aller dans le technique et réussir parfaitement dans le
technique, ultérieurement.
M. Gendron: Merci. Il y a plusieurs intervenants qui sont venus
nous dire qu'ils réclamaient de l'autonomie additionnelle à peu
près partout, pour tout. En principe, je veux dire, il y a des gens qui
l'ont étoffé, qui prétendaient que le moment était
venu de leur consacrer plus de marge de manoeuvre. Au niveau de la
révision des programmes et du contenu des programmes - moi, c'est
surtout là-dessus que je voudrais avoir votre point de vue - vous
suggérez dans votre mémoire, à la page 25, que le contenu
des programmes soit défini d'une façon plus rigoureuse. Moi, je
n'ai pas d'objection. Là, vous dites que les comités provinciaux
de coordination disciplinaire devraient être remplacés par des
vrais comités provinciaux. (10 h 20)
Alors, c'est quoi, le problème que vous reprochez? Puis, moi,
c'est objectif ma question, pour le vrai. Dans votre mémoire, vous ne
définissez pas les problèmes vécus par les comités
de coordination disciplinaire qui n'ont pas l'air de fonctionner trop trop.
Pourquoi vous souhaitez une plus grande rigueur concernant la
détermination des contenus de programme, parce que ça m'apparatt
important, s'il y a problème là, effectivement? Mais quand je me
sens parallèle, avec plus d'autonomie, ce qui existe, la prochaine fois,
on va en faire des vrais. Je ne suis pas capable de dégager comment on
va arriver à ça.
M. Inchauspé: C'est la curiosité de notre
mémoire. Nous proposons deux régimes. Un, concernant
l'enseignement technique, c'est l'autonomie, parce que les encadrements
existent et la pression des marchés existe. On n'invente pas les cours
d'électrotechnique. Par contre, pour les programmes
préuniversitaires, nous proposons l'inverse, parce que, là, un
cours de philo, on peut en faire bien des choses, même un cours de
politique, puis un cours d'économie, etc. Tout à l'heure,
simplement dans la lecture que je vous ai faite, vous avez vu ce que ça
peut-être, la description d'un programme. On me dira: II est assez
général, parce qu'il va y avoir des groupes qui vont
l'expérimenter. Mais les autres programmes, tels qu'ils étaient
définis, étaient définis de la même nature.
Or, une des difficultés que l'on a au niveau collégial...
et je pense que le problème doit être, pour regarder encore ici
globalement, la fonction du préuniversitaire, du collégial, est
appelée à changer. Pourquoi? Sur tout ce que nous dit
l'université en ce qui concerne ce type de formation
générale qui est nécessaire, elle est basée sur
quoi? Des idées simples, les liens entre des connaissances. Encore
faudrait-il s'assurer que les connaissances qu'ils ont sont à peu
près équivalentes, que c'est les mêmes qu'ils ont eues.
Beaucoup de nos étudiants ont une culture d'autodidacte, sauf
qu'elle est passée à l'école. Ils ont eu des professeurs
extraordinaires qui leur ont fait découvrir des choses et, d'autres,
dans lesquelles ils n'ont rien vu. C'est ça qui caractérise un
autodidacte. Donc, il doit y avoir une plus grande précision,
harmonisation à l'intérieur de ces
éléments-là. Deuxième chose: vous savez, le domaine
de l'éducation, ça, c'est comme le domaine du jardinage. Je me
méfie des grands technocrates. La grande expérience et la sagesse
du temps font les institutions.
En Occident, il y a eu deux grandes institutions: ce qu'on appelle le
collège, puis ce qu'on appelle l'université. La forme
d'organisation du collégial par le préuniversitaire, c'est comme
à l'université. C'est inadapté au type de formation qui
est maintenant requis de cette formation générale. Ce qu'on
appelle le collège met l'accent à l'effet que le professeur doit
respecter le programme, qu'il doit non seulement respecter le programme, mais
développer par des exercices particuliers ces types d'aptitudes.
Ça ne se fait pas comme ça. C'est systématiquement quand
plusieurs professeurs le font que ça se réalise, et c'est la
raison pour laquelle nous proposons, dans l'enseignement
préuniversitaire, ce resserrement qui permettra de le dynamiser.
M. Gendron: Puisque vous avez la chance d'être
accompagné par votre gauche, c'est-à-dire l'équipe
professorale...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Gendron: ...j'aimerais ça avoir leur point de vue
là-dessus. Est-ce que vous croyez, vous
aussi, qu'il y a lieu d'avoir plus de rigueur dans le contenu des
programmes? C'est quoi, votre point de vue là-dessus?
Mme Sicard: Disons que le point de vue là-dessus... En ce
qui nous concerne, localement, on peut toujours faire certaines analyses
critiques. C'est évident que si on regarde, par exemple, un programme
comme celui des sciences de la nature et des sciences de la santé, on
remarquera que des directeurs de Poly, de sciences à McGill, tout
ça, ont déjà contacté les profs de notre
collège pour dire que les étudiants avaient vraiment une
excellente formation.
Là, où, effectivement... et là, nous avons eu de
longues discussions, parfois houleuses - ha, ha, ha! - je dirais même
émotives! C'est certain que, par exemple, on fait plus de critiques pour
des programmes comme les sciences humaines, les arts ou les lettres. On fera
remarquer, cependant, que le programme des sciences humaines vient tout juste
d'être révisé, d'une part, qu'on y a ajouté
certaines unités. Nous pensons, comme profs - même, je pense,
l'équipe de direction aussi - et nous en avions fait la demande, qu'il y
ait autant d'unités pour les étudiants des sciences humaines
qu'il y en a pour les étudiants des sciences de la nature.
Quand on a des programmes préuniversitaires, il nous semble
qu'ils devraient être au moins... ils devraient permettre à
l'étudiant de suivre un nombre d'heures de cours égal, en tout
cas, tout au moins équivalent.
Pour ce qui est d'un resserrement, je vous dirai, par exemple, que sur
toute la question de l'approche programme - et je sais qu'on en parle, ici,
dans le mémoire, en disant que les conventions ne permettent pas
ça pour l'instant, en espérant évidemment que les
conventions, si elles le permettaient, fournissent les ressources
nécessaires. Il reste que, par exemple, au collège, nous avons,
depuis 1989, une entente sur la distribution des allocations et, comme partie
syndicale, nous avons accepté - ça n'a pas été un
recul pour nous là, ça a été de bonne augure - nous
avons accepté de financer certains projets de coordination de
programmes. Cela, nous le faisons depuis 1989 localement. Évidemment,
c'est une infime fraction là, mais les professeurs, en tout cas, dans le
programme des sciences humaines, dans le programme des arts ou des lettres,
depuis deux ou trois ans, on travaille vraiment dans un cadre là...
enfin, appelons ça approche programme, coordination programme, où
il y a une espèce de... Enfin, on tente de dégager des objectifs
communs, puis, bon, des méthodes communes et tout ça, sans que
nécessairement on veuille viser l'uniformité terne.
M. Gendron: Merci, je trouve intéressant. Dernière
question, toujours pour des raisons de temps, est-ce que... Si vous aviez -
encore là, toujours à l'équipe professorale, si c'est
possible... Vous êtes nos invités, vous déciderez qui
répond. Pour ce qui est des cours de philosophie, sans faire, encore
là, de la philosophie là-dessus, est-ce que vous ne croyez pas
que ce qu'il y a lieu de réviser, si vous aviez un jugement à
porter, c'est peut-être davantage la façon dont on les donne que,
strictement, de convenir que le moment n'est plus requis d'avoir des cours de
philo en formation de base? En termes clairs, est-ce que ce n'est pas là
aussi un peu un problème de manque de rigueur qui a fait qu'on
questionne la pertinence de dispenser des cours de philosophie? Est-ce que vous
pensez ça, vous?
Mme Sicard: Non, je ne crois pas que nous pensions ça
comme équipe. Comme équipe syndicale, nous pensons que les cours
de philosophie sont essentiels. Qu'ils puissent s'ajuster, ce n'est pas
s'ajuster à chacun des programmes, attention! Ça ne serait pas du
tout notre avis. Mais, qu'il y ait certains changements... Je pense
qu'actuellement même les profs de philo se penchent sur la
possibilité d'introduire peut-être un cours de philo des sciences,
qui pourrait s'adresser, dans un collège comme le nôtre, à
la limite, à toute la clientèle, parce qu'il y a une importante
clientèle au technique que ça pourrait intéresser.
Moi, je vais vous dire... Personnellement, j'ai deux filles qui ont
suivi des cours, enfin qui ont fait leur D.E.C. dans un autre collège
que le mien, pour ne pas le nommer, le collège Saint-Laurent, où
nous avons considéré, mon mari et moi, que les cours de philo -
puis elles aussi, d'ailleurs - étaient bien faits. Enfin, ils leur
avaient appris des choses qui ne sont pas nécessairement utiles ou
utilitaires à court terme là, mais qui, je pense, permettent une
certaine ouverture d'esprit aux étudiants.
M. Gendron: Je vous remercie beaucoup.
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup. Alors, il
reste un peu de temps pour Mme la ministre.
Mme Robillard: Oui, une dernière question aux membres de
l'équipe sur la structure des programmes de l'enseignement technique.
Vous nous suggérez dans votre mémoire l'articulation en modules
capitalisables, dites-vous, des divers formats de programmes: l'attestation, le
certificat et le diplôme d'études collégiales,
premièrement.
Deuxièmement, vous nous dites: l'introduction
d'éléments de formation générale dans tous les
programmes, donc, dans tous les modules, je suppose.
Alors, j'aimerais ça savoir si, selon vous, selon votre
expérience, selon vos contacts avec le monde des entreprises, une telle
structure va répondre aux besoins de recyclage et de perfectionnement de
la main-d'oeuvre?
M. Inchauspé: Oui, je vous répondrai à ceci
que cette articulation-là peut être horizontale et verticale. Je
m'explique. Elle peut être horizontale. Déjà, dans
l'éducation des adultes, nous avons développé
nous-mêmes ces modules, donc des ensembles pourraient donner presque un
certificat d'études collégiales, parce que, pour le moment, ils
n'ont pas de formation générale, que nous voudrions ajouter.
Ainsi, par exemple, nous offrons le programme de mécanique du
bâtiment. Alors, nous avons développé un module de
plomberie-chauffage, un autre de réfrigération, un autre de
ventilation-climatisation.
Mme Robillard: Avec la formation générale? M.
Inchauspé: Non. Mme Robillard: Ah!
M. Inchauspé: Parce que, pour le moment, il n'y a pas de
formation générale. Mais la division des éléments,
suivant les champs d'application - par exemple, le module des gens
d'électronique analogique, puis d'électronique numérique,
puis de micro-ordinateurs. Donc, déjà, ça existe. Alors,
ça, c'est horizontalement. Il y a des champs différents en
imprimerie, je pourrais vous les indiquer aussi. (10 h 30)
Mais il y a aussi quelque chose qui peut être vertical. Si nous
prenons l'idée suivante de reprendre les séries de métiers
qui existent, de professions, et d'établir ces niveaux, on va pouvoir
peut-être déterminer - ça, c'est comme un poulet; ça
ne se coupe pas comme un saucisson, un poulet, ça doit se couper suivant
les fractures, suivant l'articulation. Il ne s'agit pas de couper en disant un
an ou deux ans. Il faut, je pense, faire l'exercice de déterminer s'il y
a des niveaux de compétence reconnus. Si nous découpons ainsi,
nous pourrons constater... Constatation que nous faisons déjà en
faisant le programme de matières plastiques, parce qu'il se donne au
secondaire, et que nous l'avons réexaminé suivant la même
méthode de compétence qui avait servi à
l'élaboration au niveau du secondaire, et nous avons obtenu
l'autorisation, sans le changer, de le réexaminer sous cette forme. On
constate que l'évolution a fait qu'il y a des éléments de
première année qui sont de même nature. Pourquoi, à
ce moment-là, cet élément ne constituerait-il pas,
même s'il est donné au secondaire, un premier niveau qui pourrait
se continuer ultérieurement? Mais ceci exigerait aussi qu'au niveau
secondaire la formation professionnelle ait aussi de la formation
générale, ce qu'elle n'a pas.
Mme Robillard: Mais, M. Inchauspé, je comprends le
système que vous m'expliquez, mais ma question est; Est-ce qu'un tel
système répondrait aux besoins de recyclage et de
perfectionnement du milieu du travail et de la main-d'oeuvre? Est-ce que, dans
le fond, si on mettait un tel système en marche, on devrait maintenir
une autre structure parallèle de formation sur mesure non
créditée, dans le fond, qui ne contiendrait pas de formation
générale?
M. Inchauspé: Tous ces modules qui ont été
élaborés l'ont été pour des besoins de recyclage et
de perfectionnement.
Mme Robillard: Donc, on les maintiendrait? M.
Inchauspé: Absolument.
Mme Robillard: On les maintiendrait tels quels, sans formation
générale?
M. Inchauspé: Non, nous voudrions ajouter de la formation
générale. Ils n'en ont pas à l'heure actuelle dans les
règles établies.
Mme Robillard: Alors, quelle serait la réaction du monde
du travail?
M. Inchauspé: Bien, la réaction du monde du
travail... On a eu des contrats avec HydroQuébec ou autres; ils
demandent tous la maîtrise de l'écrit, du rapport, des
éléments de cet ordre. Je pense que c'est vendable.
Mme Robillard: Oui.
M. Inchauspé: II y a des éléments de
formation générale qui se trouvent être vendables. Et,
là-dessus, on a, par exemple, de la formation sur mesure. On a voulu,
nous autres, réaliser le rapprochement avec l'enseignement technique.
Nous ne l'offrons que dans les programmes que nous offrons en enseignement
technique pour permettre, justement, cette interaction.
Mme Robillard: D'accord, parfait. Alors...
La Présidente (Mme Hovington): En conclusion.
Mme Robillard: ...il me reste à vous remercier, vous et
toute votre équipe, pour avoir éclairé les membres de
cette commission. merci bien.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, au nom des membres
de la commission, c'est à mon tour de vous remercier de la
présentation de votre mémoire. Je vous souhaite une bonne
journée. Merci.
Et j'inviterais immédiatement, s'il vous plaît, la
Conférence des recteurs et des principaux des universités du
Québec à bien vouloir prendre place.
Alors, la commission va reprendre ses travaux. Je demanderais un peu de
silence en
arrière, s'il vous plaît! S'il vous plaît, en
arrière, du silence! Où est la discipline du monde enseignant,
là? S'il vous plaît!
Alors, bienvenue à la Conférence des recteurs et des
principaux des universités du Québec à la commission de
l'éducation; elle est représentée, je crois bien, par M.
Michel Ger-vais, recteur de l'Université Laval et président de la
Conférence des recteurs. C'est ça, vous êtes le
porte-parole?
Conférence des recteurs et des
principaux des universités
du Québec (CREPUQ)
M. Gervais (Michel): Oui.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, bonjour et
bienvenue, M. Gervais. Voulez-vous nous présenter votre équipe,
s'il vous plaît?
M. Gervais: Oui, j'ai ici, à ma gauche, M. Jean-Guy
Ouellet, qui est vice-recteur à l'enseignement à
l'Université de Sherbrooke.
La Présidente (Mme Hovington): Bonjour.
M. Gervais: Et, à ma droite, M. Jacques L'Écuyer,
qui est vice-président à l'enseignement et à la recherche
de l'Université du Québec et qui est ex-président du
Conseil des universités du Québec, et M. Jacques Bordeleau,
directeur général de la Conférence des recteurs et des
principaux des universités du Québec.
La Présidente (Mme Hovington): Bonjour et bienvenue.
Alors, vous avez 20 minutes, M. Gervais, pour nous faire part de votre
mémoire.
M. Gervais: Merci. Alors, Mme la Présidente, Mme la
ministre, Mmes et MM. les membres de la commission parlementaire, il nous fait
vraiment plaisir de participer aujourd'hui aux audiences publiques que tient la
commission de l'éducation pour faire le point sur l'enseignement
collégial québécois, selon les termes du mandat que lui a
confié le gouvernement.
Vingt-cinq ans après l'adoption de la Loi sur les collèges
d'enseignement général et professionnel et la création des
premiers collèges publics, la nécessité d'un nouveau bilan
s'impose d'emblée à l'esprit. C'est en effet un objectif
ambitieux qu'à l'époque les auteurs du rapport Parent avaient
assigné aux établissements d'enseignement collégial, comme
en témoigne l'extrait suivant: «assurer au plus grand nombre
possible d'étudiants qui en ont les aptitudes la possibilité de
poursuivre des études plus longues et de meilleure qualité; [...]
hausser le niveau des études préuniversitaires et de
l'enseignement professionnel; uniformiser le passage des études
supérieures et mieux préparer les étudiants à
entreprendre ces dernières».
Il y a là de quoi méditer pour quiconque s'interroge sur
le rôle des collèges dans notre système éducatif. Et
par rapport à l'évolution de la société au cours de
la dernière décennie, ce rôle est devenu plus actuel et
vital que jamais, compte tenu des besoins de formation auxquels les
collèges sont appelés désormais à répondre.
C'est dire que l'examen auquel nous convie la commission intervient à
point nommé.
Voilà qui souligne l'importance que les établissements
universitaires du Québec attachent aux travaux que votre commission a
entrepris. C'est en leur nom que la Conférence des recteurs a l'honneur
de lui soumettre aujourd'hui ses réflexions et commentaires, mais la
question de l'enseignement collégial ouvre un vaste champ
d'étude. C'est pourquoi la Conférence se bornera à
soulever, parmi tant d'autres, les trois questions auxquelles l'ensemble des
établissements universitaires accorde, dans la conjoncture actuelle, une
importance singulière: ce sont les conditions d'une formation de
qualité, l'évaluation des programmes et des apprentissages et les
relations interordres.
Précisons qu'en élaborant le présent
mémoire, nous ne pouvions ignorer l'existence de l'important avis du
Conseil des collèges sur «L'Enseignement collégial: des
priorités pour un renouveau de la formation», dont la publication
a coïncidé avec l'annonce de la consultation à laquelle
votre commission est chargée de procéder. Nous nous sommes
également inspirés du mémoire que la Conférence des
recteurs a présenté au Conseil des collèges en octobre
1990 sur «Les Priorités de l'enseignement collégial»
à l'occasion des consultations qu'a menées ce dernier dans le
cadre de la préparation de son avis.
Nous prenons pour acquis que les collèges sont là pour
rester. Au stade actuel, plutôt que de remettre en cause leur existence,
il nous semble préférable d'examiner comment les collèges
pourraient répondre plus adéquatement à leur mission,
améliorer leur performance et relever les défis que pose
l'évolution de la société.
Car il est évident qu'un virage sérieux doit être
pris sans tarder pour s'assurer que le diplôme d'études
collégiales, le D.E.C., soit reconnu comme l'attestation fiable d'une
formation de qualité et propre à ce niveau d'enseignement. Cela
signifie que les collèges doivent promouvoir en toute priorité
des objectifs de formation intellectuelle, communément
désignés sous la notion de formation fondamentale. Ces objectifs
sont inséparables de l'ordre de l'enseignement collégial; ils en
déterminent la finalité éducative comme première et
véritable. C'est en ces termes qu'il y a deux ans, dans son
mémoire au Conseil des collèges, la Conférence a
abordé la question, et notre position là-dessus n'a pas
varié.
Qu'il nous soit permis d'en rappeler succinctement ici les principaux
éléments. Il s'agit d'abord pour l'élève
d'apprendre à penser, c'est-à-dire de développer la
capacité d'analyse et de synthèse. Spécifiquement, on
accordera une place prépondérante à l'analyse logique pour
apprendre à définir les concepts, à distinguer les divers
sens d'un mot, à identifier et utiliser les principales formes
d'argumentation. Il faut savoir qu'un exemple n'est pas une
démonstration, qu'une opinion n'est pas un théorème.
L'initiation aux mécanismes élémentaires de la
pensée formelle s'impose pour mieux comprendre un problème,
développer un raisonnement, tirer des conclusions et porter un jugement
en faisant appel à des processus d'association, de combinaison, de
reconstitution et de généralisation.
La formation fondamentale doit aussi permettre de maîtriser les
outils de la pensée, d'abord et surtout la langue, étant entendu
que cette compétence ne se limite pas à la seule connaissance du
code linguistique. En réalité, maîtriser sa langue
présuppose la capacité d'organiser ses idées dans un
ensemble structuré et cohérent où l'utilisation correcte
des principales ressources syntaxiques et lexicales permet une communication
claire et efficace. Acquérir les bases d'une formation intellectuelle,
c'est aussi développer les méthodes du travail intellectuel qui
permettent de saisir les enjeux d'un problème, de choisir parmi les
solutions ou interprétations possibles et de formuler des questions
pertinentes. C'est, en d'autres mots, apprendre à utiliser les
connaissances acquises pour découvrir, comprendre, imaginer, agir et
créer. (10 h 40)
Enfin, dans un monde que caractérise l'interdépendance des
nations et des systèmes politiques et économiques, il importe de
favoriser ce que l'on pourrait appeler l'ouverture culturelle par la
connaissance de l'histoire et la «familiarisation» avec d'autres
cultures. Et puis, les questions morales et sociales inédites qui
surgissent de réclosion des technologies nouvelles, parmi tant d'autres,
soulèvent des problèmes d'ordre éthique qui mettent en
cause des valeurs fondamentales sur lesquelles les diplômés des
collèges devraient avoir eu l'occasion de s'interroger et d'apprendre
à exercer leur jugement.
Ce sont là les capacités de base qu'à nos yeux
l'enseignement collégial devrait s'attacher à développer.
Évidemment, on pourrait s'en faire une conception différente, en
élargir ou en réduire la portée, en ordonner autrement les
composantes. Nous constatons que, dans son avis, le Conseil des collèges
y reconnaît sensiblement les mêmes orientations. Quoi qu'il en
soit, cette question en amène deux autres sur lesquelles nous voudrions
attirer l'attention particulière de votre commission.
D'abord, il serait primordial de s'assurer que ces objectifs de
formation fondamentale s'appliquent à l'ensemble des
élèves de l'enseignement régulier, qu'ils soient
engagés dans un cheminement préuniversitaire ou professionnel,
quitte à en varier le dosage au besoin. S'agissant des exigences d'une
formation proprement collégiale, la chose paraît aller de soi,
mais il n'est sans doute pas inutile de le préciser.
Ensuite et surtout, la formation fondamentale s'acquiert par l'action
structurée et convergente de l'ensemble des enseignements. Loin
d'être le domaine réservé des cours de philosophie ou de
français, c'est une activité transversale dont les objectifs
doivent imprégner toutes les disciplines et tous les cours. Il faut,
pour reprendre l'expression du Conseil des collèges, que la formation
fondamentale soit le principe intégrateur des composantes des
programmes. Chacun des cours au programme de l'élève doit
contribuer à la formation fondamentale, et ce, d'une manière
organique, cohérente et planifiée. Cette cohérence dans
l'action constitue une condition de réalisation de la formation
fondamentale.
Les implications de ce principe sont immenses, car on s'aperçoit
qu'à défaut de véritables programmes il est difficile de
réaliser l'objectif de la formation fondamentale et de favoriser avec
toute la rigueur souhaitée le développement des capacités
intellectuelles. Mais cette même exigence s'impose nécessairement
dans le domaine de la formation générale, au sens de culture
générale, qui désigne l'extension des connaissances et
habiletés que l'élève est censé acquérir au
cours de ses études.
Comment les collèges pourront-ils jamais garantir l'acquisition
d'une formation générale solide autrement qu'en s'appuyant sur
d'authentiques programmes d'études? En ce qui concerne les
activités de concentration ou de spécialisation, il est clair que
les collèges ne sauraient contourner plus longtemps l'obligation d'en
structurer les objectifs dans le cadre de programmes. Et puis, il faut
coordonner et planifier l'action de ces grandes composantes de la formation
collégiale, en assurer la cohérence dynamique, y insuffler
direction et vitalité, convier à leur réalisation la
participation active et concertée des enseignants et des directions
pédagogiques. Le programme constitue ce noyau central autour duquel
viennent se greffer toutes les activités propices à une formation
de qualité. Et quand nous parlons de programmes ici, nous ne parlons pas
uniquement de la concentration de l'ensemble du programme collégial.
Il délimite, par ailleurs, un lieu naturel d'insertion des
mécanismes de gestion pédagogique, des procédures
d'évaluation et des diverses mesures d'accueil, d'encadrement et
d'orientation dont la mise en oeuvre est primordiale pour la
persévérance et la réussite aux études, en
particulier pour les élèves à risque. Il procure enfin un
climat favorable à l'épanouissement d'un sentiment
d'appartenance, qui est un puissant
facteur de motivation et d'émulation.
C'est pourquoi la Conférence, dans le mémoire
déjà cité au Conseil des collèges, a plaidé
en faveur de l'approche programme qui vise l'intégration des
apprentissages en insistant sur la nécessité de réviser la
structure, le contenu et la séquence du tronc commun des cours
obligatoires - philosophie, français ou anglais et éducation
physique - de façon à ce qu'ils forment un ensemble
cohérent d'activités.
À notre avis, et c'est à cette idée bien simple
qu'au fond nous voulions en venir, l'absence de programmes est l'une des
principales déficiences de l'organisation de l'enseignement
collégial. C'est à cette lacune qu'il faut attribuer pour une
bonne part les doutes et l'insatisfaction qu'un nombre croissant de
responsables et d'observateurs de l'enseignement collégial continuent
d'entretenir et d'exprimer sur la qualité de l'enseignement
collégial.
À ce sujet, l'on peut difficilement passer sous silence le
diagnostic à la fois nuancé et sévère qu'a
posé le Conseil des collèges dans son avis sur les
priorités de l'enseignement collégial. Pour «assurer une
formation de plus grande qualité, écrivait-il, il faut
établir une cohérence beaucoup plus grande à
l'intérieur des programmes d'études; il faut faire en sorte que
le programme devienne l'axe intégrateur des études
collégiales. [...] Pour ce faire, il devient nécessaire de bien
s'entendre sur le fait que le programme conduisant au D.E.C. est autre chose et
plus que la spécialisation ou la concentration et que, par
conséquent, il est aberrant de concevoir et de décrire les
objectifs et les contenus d'un programme dans des termes qui ne font
référence qu'à ce seul bloc de cours. Lorsque le Conseil
propose que chaque programme de D.E.C. comporte désormais non pas trois
"blocs" mais deux grandes composantes, l'une de formation
générale et une de formation spécialisée, il est
clair que ces deux composantes doivent concourir aux objectifs du programme
dans son ensemble». Fin de la citation.
Nous n'avons pas l'intention d'entraîner votre commission dans un
débat sur les composantes des programmes d'études
collégiales, estimant que d'autres forums se prêtent mieux
à l'examen détaillé de contenus pédagogiques
spécifiques. Il suffira de souligner que nous sommes d'accord sur
l'orientation générale qui vient d'être esquissée.
C'est sur la question cruciale de l'évaluation des programmes et des
apprentissages que nous voudrions maintenant attirer l'attention de votre
commission.
La quête de la qualité et de l'excellence constitue une
caractéristique incontournable des sociétés modernes
à l'aube de la prochaine décennie. La concurrence la plus vive
touche désormais toutes les sphères de l'activité humaine,
et la capacité des pays d'assurer leur développement dans cet
environnement volatile et exigeant est plus que jamais intimement liée
à la qualité et au dynamisme de leurs ressources humaines. Pour
garantir cette qualité et ce dynamisme, il est indispensable d'assurer
l'évaluation rigoureuse et continue des objectifs, des méthodes
et des ressources qui concourent à la formation d'une main-d'oeuvre
qualifiée.
Nous affirmerons d'entrée de jeu que le jugement que nous portons
sur les modes d'évaluation des apprentissages et des programmes au
collégial, à partir de ce que nous avons pu observer directement
ou par l'intermédiaire des étudiants qu'accueillent les
universités, concorde avec le bilan qu'en dresse le Conseil des
collèges dans son avis sur les priorités de l'enseignement
collégial. Cet état de choses justifie pleinement, hélas,
les doutes que l'on pouvait avoir sur la crédibilité du
diplôme d'études collégiales - et je vous
réfère, ici, sans le citer, à l'avis du Conseil des
collèges sur cette question.
S'il appartient aux collèges eux-mêmes de faire leur propre
bilan critique, les établissements universitaires ne sauraient se
soustraire à l'obligation de signaler les carences qu'ils
perçoivent chez les diplômés du collégial qu'ils
accueillent. Il est frappant de constater la très grande
hétérogénéité de formation chez les
candidats qui détiennent pourtant le même diplôme. Le
collège de provenance et, partant, la composition
socio-économique des clientèles qui y poursuivent leurs
études expliquent en partie cette diversité, mais des
différences analogues apparaissent également parmi les sortants
d'un même collège, selon les disciplines surtout. Malgré
tout, il faut reconnaître qu'un nombre important de diplômés
du collégial ont une préparation très adéquate. En
même temps, et nous en avons déjà abondamment fait
état, il est indéniable que dans l'ensemble bon nombre
d'élèves connaissent des insuffisances manifestes, notamment au
plan de la maîtrise des langages de base, des méthodes du travail
intellectuel et des éléments de culture
générale.
Il est vrai, et j'insiste là-dessus, que les collèges ne
sont certainement pas les seuls responsables de cet état de choses qui
est aussi de l'ordre du phénomène de société, mais
il n'est pas moins certain que des transformations radicales s'imposent dans
certains domaines pour améliorer la situation. Il serait
spécialement important que des mécanismes rigoureux
d'évaluation des programmes et des apprentissages soient
instaurés. Les conditions qu'a esquissées le Conseil des
collèges à cet égard nous paraissent aller dans la bonne
direction. L'adoption d'une approche programme, du fait de l'intégration
des objectifs et des contenus qu'elle favorise, constitue la pierre d'assise de
toute opération d'évaluation des apprentissages et des
programmes. Par ailleurs, nous ne saurions trop insister sur la
nécessaire participation d'experts externes.
Enfin, un élément fondamental du succès d'une telle
opération réside dans l'adhésion de tous ceux qui oeuvrent
dans les collèges, et tout
particulièrement, bien sûr, des enseignants. Il va de soi
que, le cas échéant, les collèges et les autorités
de l'ordre collégial pourraient compter sur la collaboration des
universités qui, tant par l'expérience qu'elles ont acquise en ce
domaine que par l'intérêt, qu'elles prêtent à ces
questions, notamment à titre d'établissements d'accueil des
diplômés du collégial, seraient disposées à
contribuer à cette entreprise dans la mesure de leurs moyens.
Cela dit, nous ajouterons qu'à la limite cette
problématique de l'évaluation pourrait être
envisagée sous l'angle d'une révision en profondeur du
système actuel. Nous voulons parler de l'hypothèse
évoquée par le Conseil des collèges que chaque
établissement collégial soit responsable de ses propres
diplômes. Cette orientation n'est certes pas dénuée
d'intérêt, et nous considérons qu'elle mérite
d'être explorée. Évidemment, une transformation aussi
radicale risquerait de provoquer un effet-choc sur la dynamique interne du
réseau d'enseignement collégial, il va sans dire qu'on ne
pourrait s'y engager sans en évaluer sérieusement les
répercussions et les conditions de réalisation. Cependant, toute
responsabilité comporte ses obligations, et l'on voit mal que les
collèges soient autorisés à décerner leurs
diplômes sans avoir au préalable introduit et
éprouvé les changements fondamentaux que nous préconisons,
surtout en matière de programmes d'études et de procédures
d'évaluation. (10 h 50)
La majorité des clientèles universitaires proviennent des
collèges qui, on le sait, sont, depuis 25 ans, le passage obligé
des diplômés du secondaire qui se destinent à
l'université. La plupart de ces étudiants ont suivi, bien
sûr, le cheminement préuniversitaire de deux ans, mais un nombre
croissant de diplômés du secteur technique, en fait quelque 18 %
des nouvelles cohortes universitaires annuelles, choisissent de poursuivre des
études universitaires plutôt que de s'orienter vers le
marché du travail.
Dans ces conditions, il est indispensable de veiller à
l'harmonisation des relations interordres qui seront établies de
préférence sur la base de mécanismes de coordination
spécifiquement dévolus à cette fin. C'est dans le cadre du
Comité de liaison de l'enseignement supérieur et de
l'enseignement collégial, le CLESEC, réactivé en 1990
à la demande des universités, que les ordres collégial et
universitaire poursuivent des activités de concertation, examinent des
questions d'intérêt commun, partagent des préoccupations,
recherchent des solutions. De façon générale, il est
important de rompre l'isolement et d'apprendre a mieux se connaître.
Des progrès importants ont d'ailleurs été
réalisés au cours des deux dernières années,
notamment sur la fameuse question des cours préalables. Par exemple,
dans la perspective de l'implantation du nouveau programme d'études
collégiales en sciences humaines, les établissements
universitaires ont aboli tous les cours préalables des structures
d'accueil aux programmes universitaires de sciences humaines, à
l'exception des programmes de psychologie et d'économie-administration.
Dans un autre ordre d'idées, des collèges et des
établissements universitaires vont participer à un projet
conjoint d'expérimentation en vue d'élaborer un projet de
programme d'études collégiales en sciences de la nature.
Quoique partiels, ces résultats demeurent encourageants et vont
dans la bonne direction. Cela ne dispense pas, malgré tout, de soulever
la question de fond. Idéalement, il y aurait lieu que chaque ordre
d'enseignement jouisse d'une réelle autonomie et détermine des
finalités éducatives qui lui appartiennent en propre, en dehors
de tout asservissement aux exigences de formation imposée par l'ordre
supérieur; en contrepartie, l'on prendrait pour acquis que les
diplômés d'un niveau d'enseignement donné auraient acquis
les compétences, connaissances et habiletés nécessaires
à la poursuite de leurs études au niveau suivant.
Dans les faits, on sait bien pourtant que nous sommes loin du compte,
que le passage entre l'école et le collège, puis entre le
collège et l'université n'a rien d'un passage à niveau, si
l'on peut dire. Les écluses se sont embourbées, et c'est ainsi
qu'est apparue progressivement la panoplie des structures d'accueil, des
propédeuti-ques, des programmes de mise à niveau, des cours
d'appoint et de rattrapage, des tutorats et autres mesures d'aide. Peu à
peu, l'on s'est résigné à l'idée d'admettre des
étudiants qui ne possèdent pas la formation requise ou
adéquate, d'accorder même le diplôme à ceux qui
souffrent de lacunes manifestes dans des domaines de compétence
jugés fondamentaux.
La question de la maîtrise de la langue en est un exemple patent.
Lorsqu'elles ont imposé un examen de français à
l'entrée à l'université, les universités ont
exercé des responsabilités normalement assignées aux
ordres d'enseignement antérieurs. Certes, les nouvelles mesures
ministérielles marquent un jalon décisif dans l'évolution
progressive d'une problématique fort complexe; elles produiront
inévitablement leur effet d'entraînement jusque dans le niveau
secondaire et le niveau primaire. Cependant, il faut bien voir que le
problème de fond reste entier puisque nos établissements
continuent d'accueillir dans une proportion de plus de 40 % des
diplômés du collégial qui ne possèdent pas ce qu'il
est convenu d'appeler les «compétences langagières de
base». En clair, cela signifie, hélas, que leur capacité de
s'exprimer correctement et de communiquer efficacement par écrit est
impropre, non pas seulement au niveau universitaire ni même au niveau
collégial mais au niveau secondaire.
Devant l'ampleur du problème, se borner à
lancer des cris d'alarme ou à dresser un doigt accusateur
friserait l'inconscience. Notre intention est tout autre puisque nous sommes
solidaires des réussites et des échecs du système
éducatif auquel nous participons. En définitive, on se heurte
encore, et presque fatalement, aux mêmes impératifs de
qualité qui transcendent les missions propres à chacun des ordres
d'enseignement et les conditions particulières où elles se
déploient.
Disons, pour terminer, que les relations entre les collèges et
les universités ne seront véritablement fécondes qu'une
fois établies les conditions d'une formation de qualité, que nous
avons déjà longuement commentées, et
dépassées les fonctions trop étroitement
départementales auxquelles sont présentement assujettis les
projets de collaboration que certains de nos établissements
souhaiteraient lancer ou développer.
Mme la Présidente, je vous remercie.
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup, M. Gervais.
Alors, Mme la ministre, vous avez 20 minutes d'échange.
Mme Robillard: Merci, Mme la Présidente. Je veux d'abord
saluer les membres de la Conférence des recteurs et des principaux des
universités. Je pense que la Conférence, la CREPUQ, se devait
d'être présente à cette commission parlementaire de
l'éducation. Je veux souligner l'importance de votre mémoire,
étant donné que c'est un mémoire collectif de l'ensemble
des universités québécoises.
Votre mémoire est court, précis, avec des recommandations
pour essayer d'améliorer l'ensemble du système
d'éducation. Je vois qu'il est constructif et nuancé, et
ça me fait énormément plaisir de voir l'approche qui est
utilisée par l'ensemble des universités
québécoises, avec son regard très particulier qu'il peut
avoir sur l'enseignement collégial, étant donné qu'une
forte partie de votre clientèle origine, donc, du monde
collégial, même s'il y a toute une autre partie qui vient
directement du monde du travail.
M. Gervais, j'aimerais aborder avec vous quelques questions. Je
commencerai par votre premier sujet: les conditions d'une formation de
qualité. À l'intérieur de cette partie de votre
mémoire, vous nous dites que vous jugez primordial de s'assurer que les
objectifs de formation fondamentale - et vous les avez bien décrits, ces
objectifs - s'appliquent à l'ensemble des élèves du
collégial, mais vous dites, si on regarde la filière
préuniversitaire et la filière professionnelle, «quitte
à en varier le dosage». Alors, j'aimerais ça vous entendre
sur ça, si vous êtes allé plus loin dans cette
réflexion.
Et, à la page suivante, vous nous dites aussi que vous avez
plaidé, au Conseil des collèges, sur l'approche programme et vous
avez insisté pour qu'il y ait une intégration des apprentissages.
Et là, vous nous indiquez la nécessité de réviser
la structure, le contenu et la séquence du tronc commun des cours
obligatoires. J'aimerais aussi vous entendre sur cette partie-là. Donc,
la question du dosage au niveau de la formation fondamentale dans les deux
filières et la question du tronc commun.
M. Gervais: je vais laisser à m. jean-guy ouellet, qui est
le président du comité des affaires académiques de la
conférence des recteurs, le soin de répondre, au moins à
la première question.
M. Ouellet (Jean-Guy): Disons l'ex-prési-dent, parce que
c'est M. L'Écuyer, depuis septembre, qui est maintenant le
président.
Je crois qu'une des préoccupations que nous avons, c'est
lorsqu'on parle d'accessibilité et qu'on parle aussi de la
mobilité que les étudiants ont face à une formation
collégiale, compte tenu des débouchés. Quand on a
regardé, tout à l'heure, on a mentionné qu'il y avait
beaucoup de prérequis, de préalables dans beaucoup de programmes.
On a essayé, dans le cadre de la refonte de la concentration en sciences
humaines, de les enlever, mais, ça, ça exigeait de notre part
qu'on modifie la formation de base ou la formation fondamentale qui devait
être inhérente à tout diplômé sortant de cette
concentration.
On a vécu dans le passé des exigences spécifiques
compte tenu de la trop grande variété, en termes de formation,
qui nous venait de cette concentration. Mais ce qu'on réalise aussi,
c'est qu'il y a maintenant entre 15 % et 20 % de nos entrants à
l'université qui viennent avec une formation professionnelle ou
technique. Dans ce sens-là, nous croyons qu'il devrait y avoir à
tout le moins un minimum de formation fondamentale et générale
qui soit commun à tous les étudiants qui sortent des
collèges, et ceci pour leur donner aussi la possibilité de
continuer dans une filière universitaire sans avoir encore un ensemble
de préalables.
Mme Robillard: Mais c'est le cas présentement, M.
Ouellet.
M. Ouellet: Oui, c'est le cas présentement. Mme
Robillard: C'est le cas.
M. Ouellet: On a 15 % à 20 % des étudiants de
formation technique qui entrent dans nos programmes à
l'université.
Mme Robillard: Non, mais, ce que je veux dire, c'est que c'est le
cas présentement, dans les structures de programmes, qu'il y ait un
tronc commun de formation générale qui s'applique autant en
filière préuniversitaire qu'en filière technique. Mais,
vous, vous dites dans
votre mémoire qu'il faudrait revoir un dosage, dites-vous.
(11 heures)
M. Ouellet: On est prêts, disons, à regarder un
dosage qui pourrait être différent. Ce que l'on recommande, c'est
une refonte de cette formation-là. Je pense qu'on en a parlé
assez longuement à l'effet qu'il faut revoir, dans une approche
programme, la contribution relative, disons, des disciplines qui, actuellement,
sont incorporées dans la formation générale et
fondamentale.
Donc, je pense qu'on a fait cette recommandation ou ce
constat-là. Et, ce qu'on dit, c'est que dans une refonte aussi on
devrait tenir compte de la formation autant technique que de la formation
préuniversitaire.
M. Gervais: Bref, je pense qu'on ne dit pas qu'il faut
réviser, mais on dit surtout qu'il faut maintenir, cela même dans
la formation professionnelle, quitte à en revoir le dosage. Ça ne
veut pas dire qu'on prône nécessairement le dosage, mais on
pourrait se demander, par exemple, si dans une certaine filière
professionnelle il est absolument requis qu'il y ait, par exemple, quatre cours
de philosophie. C'est une question qui peut se poser, mais on n'a pas voulu
répondre à cette question-là.
Pour la deuxième partie de votre question, Mme la
Présidente, M. L'Écuyer, je crois, voudrait...
M. L'Écuyer (Jacques): Si je peux me permettre, la
clé est vraiment... La réponse à votre question repose sur
l'approche programme. Et, dans le contexte d'une approche programme, on peut
concevoir que, suivant la filière, suivant le programme, certains des
cours qui sont actuellement du tronc commun, par exemple les cours de
philosophie, puissent être adaptés à l'approche ou au type
de programme. À titre d'exemple, on pourrait penser, dans un programme -
et là je vais prendre un exemple dans le domaine du
préuniversitaire - de sciences de la nature, qu'on mette plus l'accent,
dans les cours de philosophie, sur une perspective, par exemple, de philosophie
des sciences, si je peux me permettre, une approche où on mettrait un
peu plus l'accent sur l'histoire des sciences, par exemple, ou des choses de ce
type-là dans la perspective de former un programme qui soit
cohérent et qui vise des objectifs de formation et de mise en
situation.
Alors, fondamentalement, la réponse à votre question, elle
est basée sur l'approche programme et sur les adaptations qui sont
nécessaires pour qu'on ait un programme qui soit vraiment
cohérent.
Mme Robillard: Parfait. M. Gervais, dans votre deuxième
partie qui porte sur l'évaluation des programmes et des apprentissages,
je vou- drais aborder avec vous directement votre conclusion parce que,
là, vous parlez de l'hypothèse que chaque collège soit
responsable, de ses propres diplômes, et vous dites: Ça
mériterait d'être exploré. Mais vous soulignez qu'avant que
les collèges ne soient autorisés à décerner leurs
diplômes, il faudrait absolument avoir au préalable introduit,
éprouvé des changements fondamentaux au regard de
l'évaluation des programmes, des processus d'évaluation. Et je
pense bien que les universités savent elles-mêmes comment
l'évaluation des programmes n'est pas une mince tâche, n'est-ce
pas, M. Gervais, et qu'on n'y arrive pas du jour au lendemain non plus, de
même que la fiabilité d'un grade qu'on accorde, c'est toujours une
lutte incessante au fil des années. Mais j'aimerais ça que vous
me précisiez votre position sur ça au niveau de
l'évaluation des programmes propres au collégial.
M. Gervais: Mme la ministre, pour avoir apposé ma
signature par moyen mécanique sur à peu près 40 000 grades
depuis quelques années, je ne peux pas, personnellement, en tout cas,
rejeter du revers de la main l'hypothèse qu'une institution comme le
collège puisse être responsable de la qualité de ses
programmes. Toutefois, dans le cas des universités, nous sommes en
présence d'institutions qui jouissent d'une telle autonomie depuis des
siècles, si on se réfère à nos ancêtres
européens, alors qu'ici, dans le cas du collège, nous sommes en
présence d'une institution jeune qui a fonctionné dans un autre
contexte où la dynamique est très différente. Et, entre
autres, si l'on n'est pas assurés des conditions de réalisation
efficace - et je reviens là-dessus, je m'excuse, ça a l'air d'un
dada - de l'approche programme, par exemple, je ne crois pas que ce serait
responsable, de faire cette transformation immédiatement.
Il nous apparaît, entre autres choses, que l'enseignement
collégial se présente, en bien des cas, beaucoup plus comme une
juxtaposition d'interventions individuelles, disons, qui sont laissées
au gré des départements, voire des individus, qui collaborent
beaucoup plus qu'un programme intégré autour d'objectifs communs,
avec des moyens dont on a discuté entre les professeurs des
différents départements, etc. Et il me semble qu'il faudrait au
moins s'assurer qu'à l'intérieur des collèges il y ait des
mécanismes pour faire contrepoids au poids des départements. Je
pense à des choses analogues, par exemple, à ce qu'on retrouve
dans les universités, avec des commissions des études ou des
mécanismes de ce genre-là.
Et il faudrait s'assurer aussi qu'il y ait évaluation des
programmes. J'ai entendu mentionner l'idée d'une commission externe
d'évaluation des programmes, mais je pense qu'une commission externe
d'évaluation des programmes devrait d'abord se fonder sur une
évaluation interne et sur des habitudes d'évaluation interne dans
les
collèges. Et, si ces conditions étaient mises en place, on
devrait pouvoir, éventuellement, envisager la possibilité que les
directeurs de collèges puissent apposer la signature sur les
diplômes et être pleinement responsables de leur qualité.
Mais...
Mme Robillard: Est-ce que je comprends, M. Gervais, que vous
jugeriez prématurée la mise en place d'un organisme externe
d'évaluation, étant donné que vous dites que les processus
internes d'évaluation des programmes au niveau des collèges n'ont
pas encore atteint, bon, disons, utilisons le mot, une certaine
maturité.
M. Gervais: Non, je ne dirais pas ça, mais, ce que je veux
dire, c'est que, de toute façon, à court et à moyen
termes, les collèges eux-mêmes devront se préoccuper de
l'évaluation de leurs programmes et non pas uniquement compter sur un
organisme extérieur. Je ne sais pas, M. L'Écuyer, si...
M. L'Écuyer: Je pourrais ajouter un exemple qui est
très intéressant dans ce domaine-là, c'est l'exemple de
l'Angleterre au moment où ils ont créé les polytechniques.
Au début des années soixante, ils ont créé ce
réseau complet; il y en a plusieurs dizaines à travers
l'Angleterre. Et on a chargé un organisme externe qui s'appelle le
Council for National Academic Awards de décerner les diplômes pour
l'ensemble des polytechniques.
Cependant, à mesure que les années passaient et que les
polytechniques développaient des mécanismes de validation de
leurs programmes, d'évaluation de leurs programmes, de garantie de la
qualité de leurs programmes, les polytechniques, graduellement, et pas
toutes en même temps, ont acquis le privilège de décerner
leurs diplômes. Et, cette année, le gouvernement anglais a aboli
complètement les polytechniques qui, maintenant, sont devenues des
universités.
Mais c'est un processus qui s'est fait graduellement, en fonction de la
maturité de chacun des établissements dans la capacité
d'évaluer ses propres programmes.
Mme Robillard: Tout est clair et net.
La Présidente (Mme Hovington): Merci, Mme la ministre.
Vous avez un ajout de réponse, oui?
M. Gervais: M. Ouellet aimerait dire un mot.
M. Ouellet: Ce qu'on reproche aussi, je pense, c'est de ne pas
avoir une approche programme au niveau collégial. Donc, outre qu'il y a
un programme d'État qui est offert de façon très
variée dans tout près de 50 établissements au
Québec, il va falloir, je pense, qu'on soit capable de mieux
définir, je dirais, des objectifs de formation et d'acquisition de
divers savoirs et d'établir des liens de cohérence entre ces
objectifs de programmes, les objectifs de cours et leurs contenus et
l'élaboration de séquences d'apprentissage.
Donc, ça, je pense qu'il y a, dans un premier temps, à
sortir un petit peu du cloisonnement disciplinaire qu'on retrouve actuellement
dans les collèges. On en a parlé tout à l'heure, les
représentants du collège Ahuntsic ont parlé de
coordination disciplinaire, mais la difficulté réelle, je pense,
est une coordination interdisciplinaire dans une approche programme. Et,
à ce moment-là, je pense que ça va débuter,
ça, par une autoévaluation, par une concertation et une
coordination qui est à peu près inexistante actuellement, qui va
devoir se faire avant qu'on passe, je pense, à des mécanismes
d'évaluation externe.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. Alors, je vais
reconnaître maintenant le porte-parole de l'Opposition officielle, M. le
député d'Abitibi-Ouest. (11 h 10)
M. Gendron: Oui, Mme la Présidente. Je veux saluer d'une
façon spéciale les gens de la Conférence des recteurs,
communément appelée la CREPUQ. Je pense que c'était requis
que vous donniez votre point de vue parce que vous êtes quand même
très largement dans le débat, compte tenu des étudiants
que vous recevez, qui proviennent de la filière technique ou de la
filière de la formation de base.
C'est important d'avoir le point de vue de la Conférence des
recteurs. Votre mémoire, je pense qu'il se résume à trois
points principaux qui précisent les conditions d'une formation de
qualité, qui estiment qu'il faut avoir un meilleur système
d'évaluation des programmes et des apprentissages de même qu'une
plus grande harmonisation interordres. Il touche sûrement des points sur
lesquels il y a lieu d'apporter des correctifs ou de prendre des
décisions qui s'imposent. Profitons de votre présence et
approfondissons certains éléments.
Dans votre mémoire, à la page 4 - et là, même
si ça pourrait avoir l'air que je veux faire de la sémantique, ce
n'est pas le cas; en tout cas, ce n'est pas ce que je veux essayer de faire -
vous dites: II importe «de réviser la structure, le contenu et la
séquence du tronc commun des cours obligatoires - là, vous les
nommez -philosophie, français ou anglais et éducation physique -
de façon à ce qu'ils forment un ensemble cohérent
d'activités». Est-ce à dire, pour parodier un peu la
ministre, qu'il faut en retrancher ou ajouter des éléments? En
termes très clairs, c'est que lorsqu'on parle d'un tronc commun de cours
obligatoires et qu'on souhaite qu'ils forment un ensemble cohérent
d'activités, ça ne nécessite pas nécessairement
d'ajouter ou de retrancher les éléments de ce contenu du
tronc commun. Mais vous dites qu'il faut réviser la structure, le
contenu et la séquence. Moi, je voudrais, en termes très
clairs... Parce que je trouve que, comme objectif, on ne peut pas être
contre ça. Il n'y a personne qui ne peut pas avoir comme objectif qu'il
faille, dans le futur, avoir un tronc commun qui réponde à un
ensemble plus cohérent d'activités, surtout quand, à la
page 4, dans le haut de la page, vous dites: «Chacun des cours au
programme de l'élève doit contribuer à la formation
fondamentale, et ce d'une manière organique, cohérente et
planifiée. Cette cohérence dans l'action constitue une condition
de réalisation de la formation fondamentale».
Question précise: Pourquoi un contenu de cours de formation de
base qui comprendrait philo, français, éducation physique ou
anglais ne peut-il pas atteindre l'objectif de cohérence des
activités?
M. Gervais: II le peut, mais il ne le fait pas
nécessairement.
M. Gendron: Ah bien! Je comprends mais...
M. Gervais: Écoutez, je vais vous référer
à mon expérience personnelle. J'ai, il y a quelques nombreuses
années, je dois dire, enseigne dans un collège comme professeur
de philosophie pendant quelques semaines pour remplacer un professeur malade.
J'étais professeur à temps plein, à ce moment-là,
au collège, puisque, à l'Université Laval, on était
en grève. L'expérience que j'ai eue, c'est d'avoir à
donner un cours en ayant une indication extrêmement liminaire sur le
contenu possible - il y avait une infinité de possibles dans ce
cours-là - en n'étant convoqué qu'une fois par mois
à une réunion de département et en ne participant jamais
à aucune activité reliée à l'intégration ou
à la cohérence et à des activités liées,
disons, à ma participation à une oeuvre commune qui aurait
été l'atteinte des objectifs du programme collégial. Tout
cela apparaissait comme de la simple juxtaposition, encore une fois,
d'initiatives individuelles. Et c'est à cela, finalement, qu'on se
réfère ici.
Je ne sais pas si M. L'Écuyer veut ajouter quelque chose,
mais...
M. L'Écuyer: Essentiellement, c'est cette
approche-là que nous préconisons. Il ne s'agit pas d'enlever des
cours, a priori, en tout cas. Si on le juge à-propos, on peut le faire,
mais, essentiellement, c'est d'adapter les cours aux objectifs des programmes
suivant cette approche programme que nous préconisons. Adapter un cours
de philosophie, ça veut dire que le cours de philosophie n'est pas
nécessairement exactement le même pour chacun des programmes qui
vont se poser. Ils peuvent correspondre un peu aux besoins des étudiants
ou aux préoccupations des étudiants suivant les différents
secteurs où ils vont aller.
Alors, il y a une certaine préoccupation, une certaine adaptation
à faire en fonction des catégories, des milieux dont proviennent
les étudiants, et même des collèges. Les collèges
peuvent très bien développer des approches particulières
en fonction de thématiques qu'ils se donneraient, par exemple en
fonction de certaines préoccupations qui pourraient être celles
des régions où ils sont situés.
Une voix: M. Ouellet.
M. Ouellet: Peut-être juste suite à cette question,
ce n'est peut-être pas nécessairement le choix des disciplines,
c'est beaucoup plus dans, je pense, l'adéquation entre-On a
dérivé un peu, je pense, suite à l'autonomie qu'on a
laissée et à l'absence, bien souvent, de coordination dans
l'enseignement de ces disciplines-là. Moi, j'ai été
témoin d'un même cours x - pour ne pas le mentionner - dans un
collège où on a des objectifs qui sont assez différents.
On a des manuels, disons, qui sont aussi différents et des
éléments d'évaluation qui sont aussi différents.
Donc, c'est le même cours, mais qui est donné à des groupes
différents par des professeurs différents. Donc, est-ce que ce
cours-là contribue, donné de façon aussi
différente, aux objectifs généraux de formation? Je pense
que c'est là-dessus qu'il va falloir regarder attentivement le lien
entre la discipline, la façon dont elle est enseignée et les
objectifs spécifiques qu'on lui donne à l'intérieur d'une
formation générale et comment, ça, ça
s'insère dans les objectifs généraux d'un programme.
Donc, ce n'est peut-être pas nécessairement la discipline;
ça pourrait être les mêmes, mais je pense qu'on a
dérivé passablement dans le comment on utilise ces
disciplines-là pour atteindre les objectifs, spécifiques et
généraux.
M. Gendron: Oui, mais, moi, je trouve important - et je
réinsiste - que des universitaires ou des représentants du monde
universitaire - puis là vous me corrigerez - viennent dire que nous
pourrions conserver le même tronc commun de cours obligatoires de base et
convenir qu'on aurait développé cette nécessité
qu'il faut montrer à des jeunes l'importance d'apprendre pour apprendre
et toute la théorie qui veut que c'est plus important d'avoir des
têtes bien faites que des têtes bien pleines. C'est sur ça
que je voulais insister, parce qu'il y a tellement de gens qui nous ont dit...
Ça ne veut pas dire qu'il n'y aura pas de changements à apporter,
mais, dans le fond, vous nous dites très clairement: Nous pourrions
conserver le même tronc commun, obligatoire et atteindre l'objectif de
plus grande cohérence, de plus grande relation, avec une approche
programme, et c'est plus à ce niveau-là qu'il faut s'assurer
d'atteindre
l'objectif que pour faire plaisir à des gens, que ce soit le
monde des affaires...
Il n'y a pas de jugement contre mais, des fois, il y a une tendance
facile de dire: Écoutez, ça fait 25 ans, il faut changer le tronc
commun parce que, là, qu'est-ce que vous voulez, on n'est pas
arrivés aux objectifs qu'on voulait atteindre. Ce n'est pas ça
que vous privilégiez. Vous dites: L'objectif d'apprendre aux jeunes
à apprendre, ça peut s'obtenir de bien des façons à
condition qu'il y ait toujours cohérence, qu'il y ait une espèce
d'ensemble d'activités vers un objectif, et c'est plus là qu'il
faut mettre l'insistance. C'est de même que je dois vous comprendre
là-dessus?
M. Gervais: Vous nous avez très bien compris. Maintenant,
l'objectif d'apprendre à apprendre, l'objectif d'apprendre à
penser, etc., on l'a dit dans le mémoire, n'est pas relié
uniquement à ces cours du tronc commun, mais il est transversal et doit
être poursuivi également dans les cours de la concentration. Je
disais que l'objectif, par exemple, d'apprendre à penser, à
être logique, etc., c'est un objectif qui doit être poursuivi de
façon transversale, non seulement par ces cours du tronc commun mais
également par les cours de la concentration.
Parlant de philosophie, par exemple, on voit qu'il y a une très
grande variation dans les contenus de cours. Je pense que c'est normal par
rapport à la philosophie, mais on peut quand même s'étonner
que l'instrument de la philosophie, qui est la logique, ne soit pas vu
nécessairement dans le cadre du programme de quatre cours de
philosophie. Et ça correspondrait certainement a un besoin, parce que je
regarde chez nous, à l'Université Laval, la Faculté de
philosophie offre un cours au choix, qu'on appelle, c'est-à-dire qui
peut être choisi par l'ensemble des étudiants du campus, qui
s'appelle «Principes de la logique». Il y a des centaines
d'étudiants qui s'inscrivent tout à fait librement à ce
cours-là comme cours au choix, comme quoi il correspond à un
besoin qui, normalement, aurait peut-être dû être
comblé antérieurement. (11 h 20)
M. Gendron: Merci, M. Gervais. Le fait que vous ayez
indiqué que... Il semble que j'aie bien compris ce que vous
suggérez sur la formation de base; ça m'aide pour la prochaine,
parce que la prochaine question... Je trouve que vous avez fait deux bonnes
pages sur la nécessité de l'évaluation des programmes et
des apprentissages. Sincèrement, c'est vraiment deux bonnes pages
où on sent qu'il faut en faire. Mais quand j'ai fini de lire ça,
je ne suis pas sûr que je comprends exactement ce qu'il faudrait retenir
comme mécanismes d'évaluation.
Si j'avais à vous demander de résumer ce que,
concrètement, on garde comme procédures d'évaluation pour
les cégeps pour qu'ils soient plus responsables de la sanction des
études...
Vous dites: II faut faire attention; on voit mal que les collèges
soient autorisés à décerner leurs diplômes sans
avoir au préalable introduit et éprouvé des changements
fondamentaux. Mais est-ce qu'on y va, vers un mécanisme externe, ou pas?
Puis, là, je répète, à la page 6, vous avez
passablement bien décrit tout ce qu'il faudrait corriger, toutes les
lacunes de cette incohérence dans le domaine de l'évaluation des
apprentissages. Mais ça ne nous donne pas, en tout cas, selon moi, votre
opinion bien franche sur ce qu'on devrait retenir pour être certains que,
comme société, dans le futur, on aura un meilleur contrôle
de la sanction des diplômes au collégial.
M. L'Écuyer: La réponse à ça, c'est
que dans notre mémoire nous disons, dans une phrase, que le recours
à des experts externes est une nécessité d'un processus
crédible d'évaluation. Évidemment, nous n'avons pas pris
une position très précise là-dessus parce qu'il y a une
grande incertitude quant au degré de responsabilisation qu'on est
prêt à donner aux collèges. Si vous avez des programmes
d'État qui sont complètement fixés par l'État, en
supposant qu'on aille dans cette direction-là, bien, c'est un type
d'évaluation qui va vraisemblablement avoir une partie centrale plus
importante. Mais si on va vers une responsabilisation accrue des
collèges, comme nous le souhaitons, alors, à ce moment-là,
nous estimons que les collèges doivent eux-mêmes, comme on l'a dit
tout à l'heure, procéder à leur propre évaluation
pour que cette évaluation soit crédible, pour que non seulement
elle soit crédible mais qu'elle soit rigoureuse.
Tous les systèmes, ou à peu près tous les
systèmes, d'enseignement supérieur que nous connaissons ont
recours, sous une forme ou sous une autre, à des processus externes
d'évaluation. Ça peut être, comme vous avez aux
États-Unis, des processus d'accréditation, comme nous avons aussi
dans les programmes professionnels à l'université en
médecine, en génie, en sciences, en service social; on pourrait
en mentionner toute une série, des processus externes
d'accréditation. Ça peut être des commissions nationales
d'évaluation, comme vous avez en France, qui font une évaluation
institutionnelle de l'ensemble des établissements et qui
vérifient de cette façon-là leur capacité de
garantir la qualité de leurs programmes. Ça peut être des
évaluations comme nous en avons implanté dans le milieu
universitaire comme politique en ayant recours à des experts externes et
en rendant publics nos résultats d'évaluation.
Alors, vous avez toute une série de processus. Lequel d'entre eux
se révélera le plus adapté, ça, c'est autre chose.
Je pense que c'est une question à laquelle l'ensemble des
collèges, le monde collégial lui-même doit répondre.
Ça peut même être, je l'ai déjà
mentionné ici et ailleurs, avoir recours, par exemple, à des
exami-
nateurs externes pour les examens. Enfin, il y a toute une série
de processus. Nous n'avons pas voulu prendre position là-dessus comme
Conférence des recteurs, parce que nous pensons que ça
dépend beaucoup de la structure des programmes dans le monde
collégial, du degré de responsabilisation des
établissements.
M. Gendron: Merci. Il a été dit par un de vous, et
je pense que ça correspond également aux chiffres que nous
avions: Le milieu universitaire accueille à peu près... Vous avez
dit 10 % à 20 %, mais c'était plus; l'information qu'on avait,
c'était à peu près 20 %.
M. Gervais: 18 %, ce qu'on a dit dans le mémoire. M.
Ouellet a mentionné entre 15 % et 20 %, mais c'est autour de
ça.
M. Gendron: O.K. Alors, le milieu universitaire accueille 18 % de
jeunes qui proviennent de la filière professionnelle. J'aimerais
ça, puisqu'on a la chance de vous avoir, que vous portiez un jugement
sur les conditions d'entrée de ces gars et filles qui proviennent de la
filière professionnelle. Comment l'université trouve-t-elle leur
formation versus les exigences du milieu universitaire? Est-ce qu'il y a des
problèmes au niveau de l'inscription, au sens: est-ce qu'il ont le
degré de préparation requis, selon vous, pour entrer dans les
options de formation plus pointue à l'université? Est-ce qu'il y
a des problèmes d'intégration? Est-ce que vous reconnaissez
qu'ils ont reçu une formation adéquate? Avez-vous des
commentaires à faire? Puisqu'il y a 20 % de la clientèle qui
provient de la filière professionnelle qui va chez vous, j'aimerais
ça, avoir votre expertise au niveau de cette
clientèle-là.
M. Gervais: Mme la Présidente, pour répondre
à M. Gendron, je vais le faire de façon très empirique.
Disons que selon l'expérience que j'ai eue à l'époque
comme vice-recteur à l'enseignement et à la recherche, et qui me
venait du témoignage de collègues de différents programmes
qui accueillaient de tels étudiants, tous étaient très
positifs par rapport à cette venue des étudiants du secteur
professionnel. D'abord, la plupart du temps, ce sont les meilleurs
étudiants des programmes professionnels qui veulent aller plus loin et
qui, donc, demandent d'être admis à l'université. Et,
deuxièmement, ce sont des gens habituellement très motivés
et qui font d'excellents étudiants dans le programme professionnel
correspondant à l'université. Globalement, c'est
l'expérience que j'ai, et leur taux de succès est aussi
excellent. M. Ouellet voulait parler.
M. Gendron: Bien regardez, juste une seconde, M. Gervais.
M. Gervais: Oui, oui.
M. Gendron: Y aurait-il moyen, parce que, moi, c'est ça
que... Pas nécessairement que c'est ça que je voulais entendre,
mais ça correspond à ce qu'on m'avait donné comme
information. Mais ce serait tellement important de le véhiculer un peu
plus, parce qu'il y a beaucoup d'intervenants qui sont venus nous dire, dans
toute la mission de revalorisation de l'enseignement technique et professionnel
au Québec, compte tenu qu'en bout de ligne, ça donne à peu
près ce que vous venez d'illustrer comme résultat, là...
C'est souvent les plus performants, et ceux qui réussissent le mieux qui
perdurent, diplôment, ainsi de suite; c'est tous des beaux objectifs
qu'on poursuit...
Il me semble qu'on n'a pas fait, comme société, ce qu'on
doit faire pour associer un peu plus le monde universitaire dans la
nécessaire meilleure vente, qu'il y ait plus de gars et de filles qui
choisissent ce qui m'apparaît devoir être davantage un choix qui
conduit à des résultats plus probants, qui est la filière
technique. Et là, je la démarrerais dès l'enseignement
secondaire.
Bon, je sais bien que, quand on est rendu à dire ça
à des universitaires, de faire du travail de «missionnariat»
pour l'enseignement secondaire professionnel, ce n'est peut-être bien pas
votre mission, mais il faut sortir de ça, je pense, et si vous pouvez
contribuer à quelque chose qui doit être fait au niveau de la
société... C'est dans ce sens-là que je voudrais, moi,
essayer de trouver une façon de faire. Et je ne sais pas trop comment,
mais j'aimerais donc ça qu'il y ait plus de liens avec les instances
requises afin qu'on relavorise la formation technique et professionnelle, mais
à tous les ordres, pour qu'il y en ait plus qui la choisissent, parce
que c'est ça.
M. Gervais: M. Gendron, d'abord...
La Présidente (Mme Hovington): Vous avez une minute pour
répondre.
M. Gervais: Je prend bonne note de vos commentaires. Je vous
dirais que depuis quelque temps on fait des efforts énormes pour se
rapprocher du niveau de l'enseignement secondaire et non seulement de l'ordre
collégial. Et, d'autre part, je dirais que ça a été
un processus d'apprivoisement progressif. Les universitaires, constatant que
ces étudiants étaient d'excellents étudiants, ont
été beaucoup plus disposés à leur reconnaître
des équivalences, à faciliter leur progression dans le programme.
Et, aujourd'hui, par exemple, vous allez demander à quelqu'un à
la Faculté d'agriculture: Est-ce que quelqu'un qui veut entrer chez nous
est mieux d'aller au D.E.C. général ou au D.E.C. professionnel,
il va dire: Ce serait peut-être mieux d'aller faire trois ans au D.E.C.
professionnel; on va lui reconnaître une année
d'équivalence, et il fera trois ans à l'université. C'est
vu maintenant comme une formule alternative dans certains secteurs
professionnels.
La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. Gervais. Alors,
je vais reconnaître M. le député de Sherbrooke.
M. Hamel: Merci, Mme la Présidente. J'aurais deux
questions. La première, les universités ont demandé en
1990 de réactiver le Comité de liaison de l'enseignement
supérieur et de l'enseignement collégial. Est-ce que,
après deux ans, ce mécanisme est toujours aussi pertinent? Est-ce
qu'il a démontré son efficacité? Est-ce que vous pourriez
élaborer un petit peu là-dessus? Est-ce que c'est le
mécanisme qui répond vraiment à ce qu'on souhaite de
l'harmonisation interordres? (11 h 30)
M. Ouellet: Disons que le comité du CLESEC, selon moi,
pour y avoir été impliqué au cours des sept
dernières années, il y a eu une certaine léthargie, il y a
eu une période d'inactivité, mais je pense que depuis deux ans on
a réorienté les priorités et réanimé,
réactivé ce comité-là. Et je pense qu'il y a des
travaux qui m'apparaissent très importants qui ont eu lieu et qui
devront encore avoir lieu suite à cette commission parlementaire dans
un, disons, un forum privilégié qui permette une interrelation
beaucoup plus étroite entre l'ordre universitaire et l'ordre
collégial.
M. Hamel: Merci. Un autre volet touché très
brièvement dans votre mémoire, mais qui est assez important. Un
certain nombre d'organismes et de collèges nous ont demandé ici
d'élargir la mission des cégeps concernant la recherche, et vous,
vous nous signalez d'une façon très claire que cette mission des
collèges concernant la recherche devrait rester ce qu'elle est, que vous
reconnaissez la pertinence des centres spécialisés, mais que,
tout compte fait, la recherche est plutôt l'apanage universitaire. Est-ce
que vous pourriez nous dire un peu plus ou préciser vos choses
là-dessus?
M. Gervais: Je vais répondre, M. le député,
très simplement que la recherche n'est même pas, je dirais, un
objectif comme tel du premier cycle universitaire, a fortiori ne devrait-elle
pas être un objectif du niveau collégial. Ça ne veut pas
dire qu'il ne peut pas se faire de la recherche au niveau collégial.
Ça ne veut pas dire qu'il y a, au niveau collégial, un ensemble
de personnes qui peuvent, qui ont certainement la compétence et la
capacité de faire de la recherche, mais je ne crois pas que ce soit la
mission comme telle de l'ordre collégial.
Et ceci dit, je crois que nous devons tout faire pour faire en sorte
qu'un plus grand nombre de professeurs de cégep puissent être
associés, par exemple, à des équipes universitaires, parce
que, bien sûr, vis-à-vis des organismes subventionnaires
fédéraux, par exemple, nous sommes défavorisés au
Québec parce que nous avons moins de professeurs d'université du
fait qu'il nous manque la première année. Une façon de
pallier à cela serait d'associer un certain nombre de professeurs de
cégep à des équipes universitaires, ceux qui ont les
capacités de le faire. D'année en année, les
compétences à ce niveau-là s'améliorent, et tous,
nous connaissons des gens qui sont capables de participer efficacement à
des activités de recherche. Mais faire de la recherche comme telle une
mission du niveau collégial, ça, c'est une autre chose.
M. Hamel: Merci, M. Gervais.
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup. En
conclusion, Mme la ministre. Malheureusement, nous n'avons plus de temps.
Mme Robillard: MM. les membres de la Conférence des
recteurs, nous avons fortement apprécié la qualité de
votre mémoire et nous vous remercions d'être venus
témoigner en commission parlementaire.
La Présidente (Mme Hovington): À mon tour de vous
remercier au nom des parlementaires qui siègent sur cette commission.
Merci, M. Gervais. Merci à toute votre équipe.
J'inviterais maintenant la Corporation professionnelle des conseillers
et conseillères d'orientation du Québec à bien vouloir
venir prendre place immédiatement, s'il vous plaît. Nous allons
suspendre une minute.
(Suspension de la séance à 11 h 33)
(Reprise à 11 h 38)
La Présidente (Mme Hovington): La commission de
l'éducation poursuit ses travaux avec la Corporation professionnelle des
conseillers et conseillères d'orientation du Québec,
représentée par Mme Louise Landry, présidente. Bonjour;
Mme Landry.
Mme Landry (Louise): Bonjour.
La Présidente (Mme Hovington): Voulez-vous nous
présenter votre équipe, s'il vous plaît.
Mme Landry: Oui, je vous présente, à ma droite, M.
Michel Héroux, administrateur élu au bureau de direction de la
Corporation et conseiller d'orientation au cégep de
Trois-Rivières...
La Présidente (Mme Hovington): Bonjour.
Mme Landry: ...et, à ma gauche, M. Bruno Tremblay,
conseiller d'orientation au cégep de Sainte-Foy.
La Présidente (Mme Hovington): Bonjour. Allez-y, vous avez
20 minutes de présentation.
Corporation professionnelle des
conseillers et conseillères d'orientation du
Québec (CPCCOQ)
Mme Landry: D'abord, Mme la Présidente de la commission,
Mme la ministre, MM., Mmes les membres de la commission, je vous remercie de
nous accorder cette audience et de nous fournir l'occasion d'expliciter un
petit peu notre point de vue.
Peut-être pour situer brièvement la Corporation, nous
aurons 30 ans en 1993, comme corporation professionnelle. C'est une corporation
à titre réservé, régie par le Code des professions.
Notre mandat est d'assurer la qualité des services offerts par nos
membres et de garantir au public tous les droits de recours prévus par
les lois professionnelles.
Nous regroupons au-delà de 1500 membres, dont 60 % travaillent
dans le domaine de l'éducation. Les autres se répartissent pour
la plupart dans les secteurs de la main-d'oeuvre, des ressources humaines et
des affaires sociales. Par ailleurs, il y en a aussi 32 % qui offrent des
services privés à temps plein ou à temps partiel. Notre
travail porte pricipalement sur la relation de l'individu avec son
environnement, que ce soit scolaire, professionnel ou social. Axée sur
la psychologie et les méthodes d'orientation, notre formation comprend
des connaissances théoriques et pratiques sur la dynamique de
l'individu, sur celles du travail, et sur la relation entre l'individu et le
travail. (11 h 40)
Tous les membres de la corporation doivent détenir un
diplôme universitaire de deuxième cycle, avec une
spécialisation en orientation scolaire et professionnelle. Ils agissent
principalement comme conseillers auprès des individus et des organismes
pour toutes les questions qui se rapportent à la planification et
à la gestion de la carrière. Il faut bien se rendre compte que
l'orientation est à la base du développement des ressources
humaines d'une société et que c'est la dynamique de l'orientation
qui mobilise les gens à passer à l'action pour apporter leur
contribution à la société. Alors, fournir les ressources
appropriées pour permettre à chaque individu de donner une
direction et un sens à sa formation constitue certes un investissement
rentable tant pour l'avenir de la société que pour l'avenir des
individus qui la composent.
Malgré le rôle clé que joue l'orientation dans une
société, les chiffres sur le nombre de conseillers d'orientation
dans les cégeps nous laissent perplexes. En effet, nous avons
calculé qu'il y a 74 conseillers d'orientation équivalents temps
plein dans les cégeps publics pour 148 000 étudiants,
c'est-à-dire un conseiller d'orientation pour une moyenne de 2000
étudiants. Comme vous le savez sûrement, le sondage du Conseil
permanent de la jeunesse réalisé l'été dernier
auprès de 1500 cégépiens révèle que 30 %
d'entre eux quittent le collège par manque d'intérêt, donc
sans but vocationnel aussi, sans but professionnel.
En ne considérant que ce groupe qu'on évalue à
quelque 44 000 jeunes, les 74 conseillers d'orientation ne peuvent offrir des
services d'orientation valables et effectuer un véritable suivi. C'est
désastreux quand on considère qu'une bonne orientation est la
voie royale pour s'intégrer à la société. Il est
important de souligner qu'une aide d'orientation adéquate devrait
permettre de rencontrer les étudiants plus d'une ou deux fois. Nous
avons adapté nos modes d'intervention et nos approches pour
répondre aux besoins d'un plus grand nombre d'étudiants, en
activant le plus possible leur développement vocationnel, cependant nous
ne pouvons aller plus loin sans compromettre leur avenir. On ne peut
accélérer indûment le processus d'orientation sans tenir
compte du rythme personnel des individus qui nous consultent.
Pour ce qui est de l'éducation des adultes, il n'y a que 8
conseillers d'orientation pour s'occuper des 70 000 adultes qui ont entrepris
une formation créditée, c'est-à-dire un conseiller
d'orientation pour 8750 personnes. Les chiffres parlent d'eux-mêmes.
Voilà pourquoi notre première recommandation est de doter
chaque cégep d'un véritable service d'orientation. L'orientation,
qui est à la base du développement des ressources humaines d'une
société, devait, selon le rapport Parent, constituer le pivot de
la formation collégiale. Or, à l'heure actuelle, certains
étudiants ne reçoivent aucune aide au moment où ils en
auraient besoin sous prétexte qu'ils ne figurent pas dans les
catégories prioritaires. Dans certains collèges, au cours de la
session d'hiver, seuls les élèves de quatrième session du
secteur préuniversitaire peuvent bénéficier des services
d'orientation, les autres devant patienter au trimestre suivant pour voir s'ils
seront, cette fois, dans une catégorie prioritaire.
Quant aux adultes, constamment incités à se recycler, ils
n'ont généralement accès à aucun service
d'orientation avant de s'inscrire à un programme de formation.
Résultat? De nombreux abandons et changements de programmes. De toute
évidence, ils ont besoin d'être encadrés. Pourtant, dans la
plupart des collèges, il n'y a pas de service d'orientation pour
eux.
Le manque de conseillers d'orientation a des conséquences sur le
cheminement scolaire des étudiants réguliers et adultes.
L'allongement de la durée des études, suite aux nombreux
changements de programmes, coûte très cher à la
société et à l'individu en termes de temps et d'argent.
C'est évident qu'en investissant dans la mise en place de
véritables services d'orientation
les coûts de cet investissement seraient entièrement
compensés par la diminution de la durée des études et par
l'accès d'un plus grand nombre de personnes à un diplôme de
formation qualifiante. Les changements de programmes et le décrochage
scolaire coûtent très cher à l'État. Aussi, bien se
rendre compte que, dans les cégeps, on a amélioré beaucoup
l'accessibilité de la population aux études. Cependant, on serait
rendus à une étape d'améliorer l'accessibilité
à un diplôme, aussi, de formation qualifiante. Il ne suffit pas de
les laisser entrer, il faut s'assurer qu'ils peuvent en sortir avec un
diplôme aussi.
Le sociologue Guy Rocher, dans une entrevue publiée par
L'infomane en novembre 1991, indique que le phénomène du
décrochage scolaire est lié au fait que les jeunes ne sont pas
suffisamment aidés et déplore que l'on n'ait pas
développé le système d'orientation préconisé
dans le rapport Parent. À l'instar de Guy Rocher, le Conseil du patronat
du Québec, le Conseil supérieur de l'éducation, le Conseil
des collèges, la Commission des affaires étudiantes de la
Fédération des cégeps, le Conseil permanent de la jeunesse
et la Chambre de commerce du Québec, pour ne nommer que ceux-là,
ont tous souligné le manque de services d'orientation.
Ah oui, il y a beaucoup de gens qui parlent du manque d'orientation. Il
y en a aussi beaucoup qui parlent du manque d'information. Cependant, il y a
souvent confusion entre les deux et c'est la raison pour laquelle la
Corporation a fait une recommandation qui est de distinguer entre le besoin
d'information et le besoin d'orientation. On entend souvent dire que, si les
gens étaient mieux informés, il n'y aurait pas de problème
d'orientation. Or, il ne suffit pas d'informer les individus sur les besoins du
marché du travail pour leur permettre de prendre une décision
éclairée. Les jeunes reçoivent déjà beaucoup
d'information - on vit dans une société d'information d'ailleurs
- mais l'information ne rentre pas toujours. Les recherches démontrent
qu'une personne peut traiter, en moyenne, sept informations à la fois.
Au-delà de ça, on ne fait que provoquer une confusion et on se
retrouve plus mêlé qu'avant.
Le nombre de professions, selon la classification canadienne descriptive
des professions, est de 6400 et le nombre de programmes d'études est
d'environ 2500. Le choix d'une profession, ça implique de traiter des
informations sur soi d'abord et aussi sur les professions. Alors, on ne peut
pas uniquement lancer une masse d'informations, c'est seulement les inonder.
Trop d'information, c'est comme pas assez. Ça en prend, mais il faut
doser et au bon moment aussi.
Le vrai problème réside donc bien dans le manque de
conseils en orientation. L'orientation, ça a pour but d'aider les
individus à analyser leur expérience personnelle afin de leur
permettre de mieux se connaître, d'identifier les compétences
qu'ils veulent et peuvent développer, de construire leur
identité, de donner un sens, une direction à leur vie, et sans ce
processus individuel qui permet de transposer l'identité personnelle en
identité professionnelle les informations fournies n'ont que peu
d'intérêt. Ça ne reste pas. On se rend compte qu'ils en ont
reçu, de l'information, mais ils ne s'en souviennent pas parce qu'au
moment où ils l'ont reçue ce n'était pas
nécessairement celle dont ils avaient besoin.
L'orientation est un processus fondamentalement personnel et exige une
démarche personnalisée qui respecte le tempo individuel. On ne
peut donner n'importe quelle information à n'importe quel moment, sinon
ça ne passe pas et ça ne fait que provoquer de la confusion.
Informer sans conseiller, c'est influencer en pure perte des gens qui ne sont
pas réellement motivés; c'est donc voué à
l'échec. Cela dit, il faut comprendre que la décision d'explorer
ses possibilités ne peut être que volontaire. Imposer des cours
d'orientation obligatoires se révélerait totalement inefficace.
On ne peut décider pour quelqu'un que c'est ce trimestre-ci qu'il va
choisir sa carrière. Je me permets de rappeler aussi que les conseillers
d'orientation sont des spécialistes de la dynamique individu-travail et
qu'à ce titre la Corporation recommande de répondre aux besoins
du marché du travail sans y asservir les individus.
Les prévisions des besoins du marché du travail se font
généralement à partir des emplois traditionnels et ne
peuvent tenir compte de tous les nouveaux débouchés qui
apparaissent. De plus, leur valeur est limitée dans le temps compte tenu
de l'évolution rapide de la situation, d'où le danger
d'établir des programmes de formation postsecondaires uniquement en
fonction de ces prévisions. Il ne faut surtout pas sacrifier le
développement des qualités et compétences dont
dépend la réussite professionnelle à l'acquisition des
seules connaissances nécessaires pour travailler dans les secteurs
où on prévoit une demande de main-d'oeuvre à court terme.
La formation collégiale doit être pensée en fonction des
besoins futurs des étudiants.
S'il est important de les aider à s'orienter vers des secteurs
d'avenir, il est indispensable de leur transmettre des notions fondamentales
leur donnant une certaine polyvalence. On entend beaucoup parler des
compétences de base en lecture, en écriture, en calcul qui sont
nécessaires aux nouveaux emplois. Cependant, on entend beaucoup moins
parler des nouvelles compétences personnelles que les individus doivent
posséder pour composer avec les changements du marché du travail
et pour se mouvoir dans la nouvelle structure des emplois, pour en influencer
aussi la direction et la nature des changements.
Les travailleurs et les travailleuses de l'avenir devront faire preuve
de souplesse, d'où-
verture d'esprit, de polyvalence, d'esprit d'analyse et de
synthèse, de créativité, d'initiative, d'une bonne
capacité d'adaptation, la capacité de faire face à
l'insécurité et à l'inconnu, devront se perfectionner
aussi continuellement, être capables de se réorienter
régulièrement, d'utiliser leur formation de différentes
façons, d'accomplir des tâches de plus en plus complexes et
diversifiées et de trouver des solutions nouvelles aux problèmes.
Ils devront être en mesure aussi de traiter toutes sortes d'information
pour prendre des décisions personnelles et des décisions
professionnelles, être capables de communiquer, d'entretenir des
relations interpersonnelles. Ils devront aussi être bien outillés
pour faire face aux situations nouvelles et relever les défis actuels et
à venir. Or, on leur en demande de plus en plus. Il faudrait aussi
considérer que les individus auront à changer d'emplois au moins
sept à huit fois au cours de leur vie professionnelle et qu'en ce sens
ils doivent posséder une formation favorisant la mobilité
professionnelle. Il faut permettre aux individus de maîtriser
l'environnement et non chercher à les y asservir. (11 h 50)
Comme je le disais précédemment, s'orienter, c'est
transposer son identité personnelle en identité professionnelle.
C'est pourquoi notre quatrième recommandation est la suivante: de
modifier les programmes de façon à favoriser la construction de
l'identité chez l'individu et faciliter la circulation des
étudiants dans le réseau de l'éducation. Nous croyons
qu'il faudrait privilégier l'approche programme et constituer des
groupes stables pour permettre, justement, de construire l'identité et
de développer un sentiment d'appartenance. Le fait que les cours soient
souvent très morcelés dans un programme - ils apprennent des
disciplines, c'est une accumulation de cours, souvent, qui leur donne un
diplôme - ne permet pas de développer une perspective, d'avoir une
vue d'ensemble de leurs problèmes et de se situer. Pour s'orienter,
c'est essentiel d'être capable de se situer dans le temps, dans l'espace
et d'avoir une perspective, parce que c'est se projeter dans le futur aussi,
s'orienter.
Alors, dans les programmes, lorsqu'on a seulement des cours qui sont
trop morcelés, sans lien entre eux, les étudiants n'arrivent pas
à faire ça, n'ont pas une vision de ce qu'ils peuvent faire sur
le plan professionnel avec tout ça. Quand on dit ça, ce n'est pas
non plus de ramener ça à une fonction utilitariste. C'est
vraiment de faire des liens entre tout ça, d'intégrer le
programme dans une vision globale, d'enseigner les disciplines dans une
perspective historique afin d'aider les étudiants à comprendre
l'évolution du monde, à acquérir le sens du temps et
à se projeter dans l'avenir, formuler les objectifs des programmes en
fonction de compétences à acquérir plutôt qu'en
fonction de savoir strictement scolaire. Quand on dit à un
étudiant: Bon, tu as tes mathémathiques 103, ses
compétences sont toutes axées sur telle discipline. Ça ne
l'aide pas nécessairement pour s'orienter, alors que s'il sait que, dans
ce cours-là ou dans ce programme-là, il a acquis telle
compétence qui est plus fonctionnelle, qui a plus de liens avec ce qu'il
est, comme individu, ça va aussi l'aider à s'orienter et à
voir mieux ce qu'il peut faire avec tout ça.
Nous préconisons aussi d'offrir des stages dès le
début de la formation technique ou, tout au moins, d'intégrer des
objectifs d'apprentissage pratiques, favorisant le contact avec le
marché du travail, d'établir des voies d'accès facilitant
le passage entre les trois ordres d'enseignement. Par exemple, on a noté
que les finissants du secteur professionnel du secondaire n'ont pas
accès à au moins 105 des 150 programmes du cégep faute
d'harmonisation entre les deux ordres d'enseignement. Il faudrait aussi voir la
même chose entre le cégep et l'université.
On se plaint beaucoup qu'il n'y a pas suffisamment de jeunes en
formation technique, sauf que la formation technique et la formation
professionnelle du secondaire sont souvent perçues comme un cul-de-sac
parce qu'il n'y a pas de voie d'accès entre les ordres d'enseignement.
Quand c'est perçu comme une voie terminale et qu'il faut revenir en
arrière pour aller à l'ordre d'enseignement suivant, si on
décide de poursuivre, la conséquence, c'est qu'à 15 ans
ils ne veulent pas faire des choix qui leur apparaissent aussi
définitifs, alors que si c'est plus souple comme système et qu'il
y a des passerelles, des voies d'accès entre les niveaux d'enseignement,
il y aura possibilité, pour des jeunes, de faire plus facilement la
formation professionnelle du secondaire, celle du cégep, la formation
technique, en se disant: Je peux poursuivre par après si je veux le
faire. Alors, ce n'est pas un cul-de-sac.
Il faudrait aussi mettre en place un système de reconnaissance
des acquis dans tout le réseau collégial pour faciliter
l'accès à la formation continue et éviter les
dédoublements. Il y a énormément de dédoublements,
certains cours de base qui se donnent à différents niveaux qui
sont très similaires, et il n'y a aucune reconnaissance de ça.
Les gens doivent reprendre des études.
Je voudrais conclure ma présentation en vous
énumérant les principales actions à entreprendre dans le
cadre d'un véritable service d'orientation. Il y aurait lieu d'organiser
des rencontres avec les... D'abord, c'est sûr que, pour nous autres,
c'est d'offrir le service à tout le monde, de donner accès aux
services d'orientation à tous ceux qui en ont besoin et
particulièrement aussi au cours de la première année. Mais
il y a aussi d'autres types d'activités qui seraient à organiser,
par exemple avec les groupes de première session et de troisième
session du secteur préuniversitaire et de cin-
quième session du secteur technique qui sont à des moments
charnières, pour faire le point sur leurs objectifs professionnels et
les moyens de les atteindre.
Au tout début, souvent, il y a des étudiants pour qui leur
formation n'a pas de sens. Ils sont entrés au cégep parce qu'ils
suivaient le courant. Ils ne savaient pas trop ce qu'ils faisaient. Ils
prennent un programme sans avoir nécessairement précisé.
Oui, ils ont besoin d'aide pour donner un sens à leur formation. On
constate qu'il y a un certain nombre d'étudiants qu'on rencontre qui,
finalement, ne changent pas de programme. Ils ont simplement, tout à
coup, donné un sens à ce qu'ils font au cégep. Il y en a
aussi qui vont changer, mais ils ne sont pas plus avancés en changeant
parce que ça n'a pas plus de sens, leur formation.
Il y aurait lieu aussi d'informer et de conseiller les professeurs pour
qu'ils puissent inciter les élèves à
réfléchir sur leur identité professionnelle au secteur
technique ou discuter avec eux des carrières reliées à la
discipline qu'ils enseignent dans le secteur préuniversitaire. Il n'y a
à peu près jamais de lien de fait entre ce qu'ils apprennent,
à quoi sert tel cours ou dans quelle profession on peut l'utiliser. Ils
ne voient pas du tout ces choses-là.
Il y aurait lieu aussi d'organiser des activités de parrainage
entre les travailleurs, des anciens élèves, et les
élèves, ainsi que des rencontres avec les employeurs, d'organiser
des rencontres aussi avec les parents, pour les éclairer sur le
processus d'orientation et les façons d'aider leurs enfants. Les parents
sont très inquiets. Souvent ils vont provoquer de la confusion chez les
jeunes et souvent, aussi, ils vont les aider. Ils veulent beaucoup les aider,
et ils ont une influence sur l'orientation des jeunes, tout comme les
enseignants, d'ailleurs. Et on a un rôle d'expert-conseil à jouer
auprès de ces gens-là pour faciliter. On n'a pas à tout
faire soi-même au niveau de l'aide à l'orientation, mais on peut
aussi apporter de l'aide à ceux qui peuvent en apporter aux jeunes
à ce niveau-là.
Il y aurait lieu aussi de mettre sur pied des programmes particuliers de
retour aux études pour les adultes et des centres de bilan de
carrière pour les adultes. De donner un accès aux services
d'orientation avant de s'inscrire pour les adultes au cégep, c'est de
s'assurer qu'ils s'inscrivent dans un programme qui a du sens, qui leur
convient et qu'ils sont susceptibles de terminer aussi. Alors, on a
constaté que lorsqu'on les rencontre après l'inscription
seulement ça prend plus de rencontres pour replacer les choses. Ils ont
fait un détour, ils ont déjà une perte de temps, et c'est
une perte de temps pour tout le monde, beaucoup d'anxiété aussi
pour tout le monde.
J'aimerais aussi juste noter que... Je ne sais pas si vous le savez,
mais la France a passé une loi, un décret qui donne un
accès à tout le monde à des services d'orientation par le
biais de centres de bilan de compétences. Après plus de 20 ans
d'histoire en formation professionnelle où ils ont une taxe aux
entreprises, ils ont constaté que, oui, il y avait beaucoup plus de gens
qui prenaient des programmes de formation, qui avaient de nouvelles
qualifications, mais que ça manquait de sens. Les gens les prenaient
aussi comme on magasine au centre d'achats. À ce moment-là, c'est
très... Ils ont trouvé que ce n'était pas du tout
rentable, et ils ont mis sur pied un système de centres de bilan de
compétences pour permettre aux gens de faire une démarche
d'orientation avant de s'engager dans ces programmes-là pour les
utiliser de façon rentable.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, il vous resterait
une minute pour conclure.
Mme Landry: O.K. J'arrive justement à ma conclusion. En
conclusion, nous tenons à vous rappeler que de fournir les ressources
appropriées pour permettre à chaque individu de donner une
direction et un sens à sa formation constitue un investissement rentable
tant pour l'avenir de la société que pour l'avenir des individus
qui la composent. Merci de votre attention.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. Mme la ministre.
Mme Robillard: Merci...
La Présidente (Mme Hovington): Nous allons peut-être
diviser le reste du temps si on veut finir à 12 h 30. Vous avez chacun
15 minutes.
Mme Robillard: Parfait, merci, Mme la Présidente. Je suis
heureuse de rencontrer les conseillers et conseillères d'orientation,
parce que, vous le savez, plusieurs questions, ici, à la commission, ont
été soulevées en regard de l'orientation des jeunes. J'ai
eu l'impression, quand j'ai lu votre mémoire, qu'étant
donné votre expertise dans le domaine vous aviez une approche, je
dirais, beaucoup plus globale de ce que c'est que l'orientation d'une personne
dans la vie, que ça va au-delà - si j'ai bien saisi votre message
- de l'information qu'on lui donne, mais qu'il y a aussi toute une
démarche d'intégration de cette information, du cheminement de
l'individu, du moment où il est prêt aussi à faire ses
choix. Vos recommandations, à mon point de vue, dépassent
beaucoup le fait d'ajouter simplement des ressources spécialisées
en orientation dans les réseaux d'enseignement, parce que vous vous
attaquez à toute l'organisation scolaire et pédagogique pour
favoriser ce cheminement ou cette maturation de l'individu, de sorte qu'il
parvienne, lui-même, à faire son orientation. C'est comme
ça que j'ai compris le sens de votre
mémoire, et je pense que j'apprécie le fait que vous nous
obligiez à regarder ce problème-là dans un ensemble. Et
vous vous positionnez, d'ailleurs, très rapidement sur votre
désaccord par rapport à certaines recommandations que nous avons
déjà reçues par d'autres intervenants. Dans ce
sens-là, je pense que c'est important qu'on les regarde avec vous. (12
heures)
Vous nous dites très clairement que vous êtes, je pense,
contre les propédeutiques, en tant que telles. Si je vous ai bien
comprise, Mme Landry - vous allez m'expliquer ça - vous êtes
contre des activités d'exploration précises. Vous dites:
L'exemple qu'on a vécu au secondaire avec le cours choix de
carrière devrait nous démontrer que ce n'est pas en ajoutant un
cours de choix de carrière, au niveau collégial, qu'on va
régler le problème. C'est beaucoup plus vaste que ça, nous
dites-vous. Et là vous nous suggérez de façon
particulière, à la page 26, toute une série de
mesures.
J'aimerais ça tester avec vous l'idée suivante, qui nous a
été suggérée par plusieurs groupes, à
l'effet d'avoir une session, donc que la première session au
cégep soit conçue comme une session d'accueil,
d'intégration, mais qui aide aussi à l'orientation. Alors,
certains nous l'ont suggérée pour des groupes cibles, d'autres en
parlaient de façon plus générale. Comment vous, les
conseillers en orientation, vous réagissez à une telle
recommandation, que donc l'organisation pédagogique de la
première session soit revue pour essayer d'aider davantage les jeunes
à cheminer dans leur réflexion d'orientation?
Mme Landry: Ça, en soi, que l'organisation
pédagogique soit revue pour faciliter l'orientation lors du premier
trimestre, pour nous, c'est une excellente recommandation. Sauf que ça
ne veut pas dire, à nos yeux, des cours d'orientation, parce que c'est
clair, en tout cas...
Mme Robillard: Non. Ça serait quoi, selon vous?
Mme Landry: Bon. Ça prend plus de souplesse, c'est
sûr, dans l'organisation des programmes parce que c'est clair que, lors
de leur arrivée au cégep, il y en a beaucoup qui commencent en
précisant leurs choix et il y a beaucoup de changements de programmes
à ce niveau-là. Alors, si ça ne retarde pas tout le monde
de pouvoir le faire, en faisant des cours qui vont de toute façon
être crédités, ça serait fort utile. Mais il ne
faudrait pas non plus miser automatiquement sur le fait qu'il y aurait, bon,
soit un cours ou une activité d'exploration. Si c'est une
activité d'exploration qu'ils ont à faire et qu'ils sont
livrés à eux-mêmes dans ça, au hasard,
peut-être que ça va donner quelque chose, mais ça risque
d'être au hasard. Ça peut être aussi le temps et la
maturation qui s'est faite pendant ce trimestre-là qui se serait faite
de toute façon, même s'ils avaient été ailleurs,
mais ce n'est pas en soi l'exploration toute seule. L'exploration, elle doit
être intégrée aussi avec la personne. Si vous voulez aller
acheter quelque chose au centre d'achats et que vous n'avez aucune idée
de ce que vous cherchez, vous allez peut-être le trouver, mais vous allez
avoir beaucoup plus de chances de le trouver si vous avez déjà
une idée de ce que vous cherchez.
Alors, c'est tout le temps un mouvement constant d'aller-retour entre
l'information sur soi et l'information sur le monde environnant, à tous
points de vue. Alors, il faut vraiment que ce soit intégré dans
une démarche d'orientation si on veut que ça donne des
résultats efficaces. Il faut voir aussi l'état personnel de
l'individu pour voir s'il est capable de choisir à quel degré est
rendue son identité. Est-ce que cette personne-là a une
identité qui est très floue? Ils vivent beaucoup de nouvelles
choses au cégep. Alors, quand ils arrivent à 15, 16 ans, c'est
sûr qu'ils ne sont pas en mesure de faire des choix
définitifs.
Il faut aussi concevoir que l'orientation, c'est un processus avec des
choix progressifs. Et c'est ça qui s'établit. D'ailleurs, on le
sait, la carrière d'une personne, on peut la dire après. Souvent,
avant, on ne peut pas la dire. On peut se faire une... Mais il y a des gens qui
vont avoir un sens de la direction de façon très
spontanée, sans même dire qu'ils y sont, sans être capables
de dire leurs qualités, leurs intérêts, leurs
défauts, tout ça, leur potentiel. Mais il y en a pour qui il faut
les aider beaucoup plus là-dessus. C'est comme il faut replacer
certaines choses aussi sur le plan personnel. Il faut les aider à
traiter toutes ces informations-là pour vraiment placer les choses.
Mme Robillard: Alors, vous le dites vous-même, il y a une
certaine partie des étudiants qui arrivent qui ont déjà
réalisé leur sens de la direction eux-mêmes,
peut-être pas en ayant fait une analyse approfondie, mais vous le sentez,
là, que la direction est déjà fixée de façon
assez générale et ils savent plus où ils vont, d'autres
pas. Est-ce que, selon vous, c'est facilement identifiable au point de
départ? Parce que, si nous avions une session très
particulière d'accueil pour, justement, le type d'étudiants qui,
eux, ont encore à cheminer dans leur processus d'orientation, il
faudrait donc les identifier à leur entrée au collégial.
Est-ce que, selon votre expérience, ce serait possible?
Mme Landry: En tant que spécialiste en orientation,
évidemment, on peut identifier des gens comme ça. On a un certain
nombre de méthodes. Sauf qu'il y a aussi un danger. Il ne faudrait pas
ostraciser les gens qui éprouvent des difficultés d'orientation.
Ça n'est pas une maladie, ça fait partie du développement
normal. Alors, il faut faire attention aussi comment on
procède dans tout ça. Je pense que mon collègue
voulait ajouter quelque chose. Je vais lui passer la parole.
M. Héroux (Michel): Oui, si vous permettez, j'aimerais
dire, moi, que je vois d'un très bon oeil l'idée qu'on ait une
préoccupation de s'occuper des étudiants qui arrivent au
collégial et qui sont en difficulté d'orientation. Cependant je
ne vois pas que ce soit dans l'organisation d'une activité
spécifique, presque obligatoire, en tout cas perçue comme
ça, qu'on réussirait, à mon avis. Je pense que ce qui est
important, c'est que ce soit bien perçu chez les étudiants qui
arrivent au collège qu'il y aura un encadrement particulier qui leur
sera dorénavant offert pour les aider s'ils sont en situation difficile
d'orientation.
Comment verrais-je ça, pratiquement parlant? Peut-être
qu'on serait d'accord avec l'idée qu'en arrivant au collège
l'étudiant puisse manifester clairement, le dire clairement dans
l'organisation du registraire, qu'il a des difficultés en orientation.
Et il faudrait, je pense, que le collège mette en place un ensemble de
personnels, particulièrement des spécialistes en orientation, qui
s'occupent de façon spécifique des gens qui arrivent en
première. Dans les circonstances, c'est impossible. Vous avez
remarqué, dans notre rapport, que nous n'avons pas les personnels pour
s'occuper de façon particulière de ces gens, alors que ceux qui
sont en deuxième année au préuniversitaire nous
harcèlent, ont besoin de nous, parce que c'est leur dernière
année et ils veulent faire leur choix et c'est compliqué pour
eux. Alors, on ne peut pas faire les deux activités en même temps.
Mais s'il y avait un effort particulier dans chacun des collèges pour
s'occuper de la clientèle qui arrive... Et là, on leur offrirait
différentes possibilités d'aide, ils pourraient aller consulter
des gens qui seraient à leur disposition, d'une part, mais ils
pourraient aussi participer à des activités volontaires
d'orientation que nous avons la possiblité de monter et que nous faisons
déjà d'ailleurs mais qui, en ce moment, sont
réservées à un nombre d'étudiants très
limité. On pourrait d'ailleurs, si cela vous intéressait, vous
expliquer un peu en quoi ça consiste, de telles sessions.
Mme Robillard: Oui, je les connais. Ça va.
La Présidente (Mme Hovington): Merci, Mme la ministre. M.
le député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Oui, rapidement, puisque c'est ma collègue qui
va faire l'essentiel de l'échange. Je voudrais quand même vous
dire qu'on est heureux de vous accueillir, parce que depuis le début de
cette commission il y a passablement d'intervenants qui ont indiqué les
carences, les faiblesses, et ils ne portaient pas de jugement sur vous comme
association professionnelle, mais ils portaient un jugement sur la
réalité qu'il y a beaucoup de jeunes qui déplorent et
réprouvent le fait qu'ils n'ont pas assez facilement accès
à des services d'orientation professionnels et toute la relation qui
leur permettrait, s'il y avait plus d'accès facile, les aiderait, nous
disent-ils, à identifier de façon plus adéquate leur
chemine-nent de carrière, là où ils désirent aller
et tout ça.
Moi, j'ai une question d'ordre général. Vous oeuvrez
à peu près à 35 % au niveau secondaire. Le gros de vos
effectifs oeuvre au niveau secondaire en termes d'exercice professionnel de la
profession, et vous avez indiqué, dans votre mémoire, à
plusieurs endroits, qu'il y aurait lieu de faire une place beaucoup plus
grande, compte tenu du nombre de services que vous pouvez offrir à ces
jeunes-là. Et moi, je n'ai pas d'objection. Je voudrais juste savoir
comment c'est établi, très concrètement, le nombre et la
place jouée par les conseillers en orientation au niveau secondaire, et
comment il se fait que la relation n'est pas plus étroite entre celles
et ceux qui donnent, justement, le cours choix de carrière, où
vous dites: Ce n'est pas suffisant. Je n'ai pas de trouble avec ça,
parce que si je vous définis à la page 9, là, vous dites:
«La démarche d'orientation vise à aider la personne
à organiser son expérience individuelle pour l'intégrer et
en arriver à identifier les compétences qu'elle peut et veut
développer.» Parfait. (12 h 10)
Pour de vrai, c'est une bonne définition. Mais pour aider les
profs qui donnent le cours choix de carrière, quel type de relation les
conseillers en orientation ont-ils établi ou entendent-ils
établir? Et ça, il me semble que ce n'est pas lié à
une problématique d'une enveloppe protégée ou une
problématique budgétaire. Pourquoi que ça ne se fait pas
un peu plus et c'est quoi, les problèmes précis qu'il y a qui
font que tout le monde qui nous en a parlé constate que le cours choix
de carrière ne vaut pas cinq cents - là, je le dis comme je le
pense - est mal distribué, est mal enseigné, est platte pour les
jeunes, les agresse plus qu'autre chose, et que les jeunes nous disent: On n'a
pas le support qu'on souhaiterait pour être en mesure de savoir un peu
plus quel bord prendre, en bon français?
Mme Landry: Les modalités avec lesquelles le cours
d'éducation ou choix de carrière... Nous, on déplore quand
même que ce soit souvent une tâche qui soit attribuée en
complément de tâches à des enseignants d'autres
disciplines. Et on ne veut surtout pas mettre la faute sur les gens qui les
donnent, ces cours-là; ils les donnent avec ce qu'ils ont comme
formation, comme perfectionnement, comme préparation pour le donner,
mais dans des conditions difficiles. C'est des choses qui se donnent dans des
conditions très difficiles et avec des groupes-classes qui ne permettent
pas non plus de faire une démarche personnalisée
avec les étudiants et de voir chacun, le type d'information dont
cette personne-là aurait besoin, où elle est rendue dans son
cheminement et de tout réajuster. li y a des collaborations qui
s'établissent avec les conseillers d'orientation dans plusieurs milieux,
mais il faut bien se rappeler que ce sont des cours à l'horaire avec du
personnel enseignant et du personnel professionnel qui a de la consultation
à faire aussi auprès des étudiants. Alors, ce n'est pas
toujours facile. Il y a des milieux où il y a une excellente
collaboration. Lorsque les enseignants en choix de carrière sont plus
stables dans un milieu au lieu que ça change de personnes à
chaque année, c'est beaucoup plus facile d'établir des liens
constants avec les conseillers d'orientation qui vont dans certains milieux,
qui vont dans la classe, qui discutent avec les enseignants là-dessus.
Il y a des endroits où ça va très bien et il y a des
endroits où c'est très difficile pour des conditions aussi
bêtes et méchantes, pratico-pratiques de comment ça se
fait, du mouvement, aussi, de personnel qu'il y a dans tout ça.
M. Gendron: Rapidement, pour terminer là-dessus, moi,
est-ce que vous croyez... Vous connaissez sans doute la notion de
spécialiste à l'élémentaire, même si c'est
une notion qui est plus particulière à l'ordre d'enseignement
élémentaire. Si on envisageait d'en faire des spécialistes
au secondaire, c'est-à-dire les profs qui enseignent le choix de
carrière, pensez-vous qu'en partie on réglerait le
problème? Rapidement, dire: Dorénavant, le cours choix de
carrière sera dispensé par des spécialistes qui seront en
constante relation avec les conseillers en orientation, est-ce que vous croyez
que là on serait sur la bonne voie pour améliorer l'affaire?
Mme Landry: Ça dépend si c'est encore ta formule de
cours formels. Ça prend plus de souplesse que ça dans des
activités d'orientation. C'est sûr que, si on a des gens qui sont
spécialisés dans ça, ça améliore
considérablement les chances en partant, mais nous, on s'objecte quand
même à la notion d'obligatoire pour tout le monde. Ça
amène beaucoup de résistance, tout ça.
La Présidente (Mme Hovington): Mme la
députée de Terrebonne.
Mme Caron: Merci, Mme la Présidente. Comme on vous l'a
mentionné, nous vous attendions évidemment avec impatience,
puisque très majoritairement les mémoires ont souligné les
lacunes, les problèmes au niveau de l'orientation.
Par rapport aux adultes, votre proposition des centres de bilan de
compétences m'apparaft intéressante puisqu'au niveau des adultes
je pense qu'il faut peut-être utiliser des moyens un petit peu
différents. Mais, moi, je pars du principe qu'il vaut toujours mieux
prévenir que guérir. Parce que, rendu au cours collégial,
le problème, il est là, il est identifié, on le sait, et
toutes les statistiques nous le disent.
Dans cette volonté de prévenir, dès le secondaire,
vous nous avez bien identifié le problème du cours choix de
carrière, qu'il n'est pas donné par des spécialistes. Le
problème aussi que lorsqu'on donne trop d'information, finalement, les
étudiants et les étudiantes ne retiennent que l'information dont
ils ont besoin au moment précis où on la donne et, ça, je
pense qu'on peut le constater aussi au niveau des adultes. Lorsqu'on fait de
l'information sur certains programmes, certains projets, si la personne ne se
sent pas directement concernée, elle ne retiendra pas l'information et
retournera la chercher au moment où elle en aura besoin.
Donc, vous nous dites que l'important, dans le fond, c'est de construire
l'identité personnelle, de découvrir l'identité
personnelle pour arriver au choix professionnel. Donc, tout est basé sur
se connaître, connaître ses capacités, connaître ses
goûts, connaître ce que l'on est pour arriver à savoir ce
que l'on veut faire. Mais ça ne pourrait pas se traduire par un cours,
justement, obligatoire, donné par des spécialistes, un cours non
pas de choix de carrière mais de connaissance de soi, un cours qui
permettrait aux jeunes de découvrir cette identité dont ils ont
besoin, de toute façon, tout au long de leur vie?
Mme Landry: Parce que ce n'est pas aussi simple que ça,
l'identité. Dire ses intérêts, ses habiletés, c'est
une manifestation extérieure de ce qu'on sait sur soi, mais
l'identité, c'est beaucoup plus vaste que ça. C'est vraiment
toute la personne et c'est d'amener une personne à un point tel
où elle est capable, même sans nommer les choses, de dire:
Ça, ça me convient, et de réagir dans toutes sortes de
situations en conformité avec ce qu'elle est, et avec l'environnement
aussi, parce qu'il y a l'interraction, là. Il ne faut pas oublier qu'on
ne s'oriente pas dans les airs non plus. On s'oriente pour vivre dans telle
société avec ses contraintes. Alors, il y a toute la...
Mme Caron: Je vous donne un exemple. Au niveau des adultes,
souvent, pour les personnes qui sont en cheminement, plus
particulièrement dans les centres de femmes, on va donner un cours de
connaissance de soi. Et souvent, à partir de ce cours-là, les
femmes vont faire un choix de carrière, à partir de ce
cours-là, elles vont prendre des décisions importantes. Ça
ne pourrait pas se traduire au niveau de nos jeunes?
Mme Landry: C'est parce que vous pariez aussi d'adultes. Il ne
faut pas oublier qu'ils ont déjà une identité
formée. Ça ne veut pas dire qu'il n'y a aucun problème,
mais quand vous avez déjà une identité bien formée,
il y a des choses
qui peuvent se traduire presque en une démarche un peu
systématique et qui vont permettre de clarifier des
éléments pour poser des gestes aussi au niveau du choix
professionnel. Quand vous êtes avec des jeunes qui sont en train de
construire leur identité, ce n'est pas aussi simple que ça.
Mme Caron: C'est que souvent, au niveau des centres de femmes, ce
n'est justement pas les personnes qui ont bien déterminé leur
identité qui ont vraiment acquis tout ce qu'elles souhaitaient. C'est
souvent des personnes qui ont de sérieuses difficultés, qui sont
comparables à des jeunes en pleine évolution. Alors, ça
m'appa-raissait un élément peut-être important.
Dans votre mémoire, pour revenir plus précisément,
vous nous faites mention, à la page 26, qu'il est important d'investir
des ressources supplémentaires au secondaire. Alors, comme vous rejetez
la notion obligatoire, même pour découvrir l'identité...
donc, vous souhaitez mettre en place diverses actions pour aider les jeunes
à mieux préciser leur orientation scolaire et professionnelle,
diverses actions. Quelle sorte d'actions? Lesquelles vous proposez?
Mme Landry: Vous en avez une liste dans le mémoire comme
tel.
Mme Caron: Mais dans votre mémoire, page 26, vous nous
dites: «Investir des ressources supplémentaires, au secondaire,
pour mettre en place diverses actions pour aider les jeunes.» Pouvez-vous
préciser un peu ce que vous souhaitez comme actions?
Mme Landry: II y a aussi toutes les activités, bon, le
type d'atelier qu'on peut mettre sur pied en fonction des besoins. On se
retrouve, à un moment donné, avec un certain nombre de jeunes
qu'on voit, qui ont des besoins un peu similaires, et on va les regrouper pour
faire des activités de...
Mme Caron: Ateliers libres, là. Mme Landry:
...groupe aussi. Mme Caron: Ateliers libres?
Mme Landry: Oui. Il y a des choses à faire avec les
enseignants aussi sur les comités pédagogiques. Il y a beaucoup
d'actions à entreprendre dans une école pour rendre une
école plus «orientante», dans le bon sens du terme.
Mme Caron: Mais nommez-m'en. C'est ça que j'attends.
Mme Landry: Voulez-vous utiliser des exemples concrets, mes
collègues, dans vos milieux?
M. Héroux: Oui. Évidemment, vous me posez la
question au niveau secondaire et, moi, je travaille au niveau collégial.
Je peux tenter de le donner au niveau collégial.
Mme Caron: C'est parce que votre recommandation est au niveau
secondaire, en page 26. C'est pour ça que je la posais comme
ça.
M. Héroux: Je crois que, d'abord et avant tout, il s'agit
de se rapprocher le plus possible des étudiants à partir de leur
façon de fonctionner, de leur psychologie, de leurs attentes. Si c'est
au niveau d'une activité cours obligatoire, on sait comment sont les
étudiants de niveau secondaire. On sait que, dès que ce n'est pas
perçu comme étant très obligatoire, très important
en termes de notation, ils le voient facilement comme étant
négligeable. Je verrais plus, à mon avis, que ce soient des
conseillers d'orientation qui aient la possibilité d'intervenir à
des périodes régulières auprès des groupes
d'étudiants, mais en dehors de ce qui est perçu comme
étant une activité cours.
J'ai l'impression que notre mentalité est tout à faire,
dans ce domaine-là; comment concevoir que, dans un milieu scolaire, les
jeunes soient invités à s'impliquer dans la connaissance de soi
tout en faisant en sorte que ça les intéresse. Je pense qu'il y a
tout à faire. C'est difficile pour nous de vous donner une recette
magique - je ne pense pas qu'il y en ait une - mais c'est là qu'est le
défi. C'est de trouver des moyens qui font que les étudiants
considèrent, réalisent que c'est important, effectivement. Je
crois qu'il faut aller se chercher aussi des partenaires là-dedans.
Ça, c'est un autre défi qui nous appartient dans les
écoles secondaires et dans les cégeps. Je crois que c'est
superimportant d'aller auprès des professeurs, d'aller auprès des
départements, d'aller auprès des directions pour vendre, pour
bien faire comprendre l'importance de ce que vous appelez la connaissance de
soi pour qu'ils puissent en parler en classe. (12 h 20)
Nous avons fait récemment, dans mon collège, une
activité qui s'appelle «Comment ça va?» auprès
des étudiants qui arrivaient du secondaire. Et ce qui est ressorti de
façon évidente - on a fait ça auprès de tous les
groupes de collège I, toutes les concentrations - c'est -c'est
surprenant peut-être, là, mais: On ne voit pas en quoi ça a
rapport de faire telle matière, telle matière. Moi, je me dis,
pour essayer de répondre à votre question, ça serait bien
qu'on devienne un peu plus des partenaires des enseignants pour, ensemble,
tenter de clarifier auprès des jeunes en quoi c'est utile de faire
toutes les activités de type scolaire et pédagogique. Je pense
que d'autres moyens, c'est aussi, je crois, travailler sur les
différents comités qui existent dans les écoles pour
essayer, comme disait ma
présidente, de rendre l'école plus
«orientante». J'ai l'impression que nous avons une part importante
à inventer, à ce niveau-là.
La Présidente (Mme Hovington): En conclusion, Mme la
députée. Il vous reste une minute.
Mme Caron: J'aurais aimé vous entendre, j'avoue, sur toute
la section des informations sur les métiers en pénurie, parce que
là aussi on découvre qu'il n'y a pas de recette magique. En page
8 et suivantes, finalement, vous nous dites que, même si l'on
connaît, on a une certaine connaissance des métiers en
pénurie, finalement, ça ne peut pas se traduire dans la
réalité nécessairement par ces choix pour les jeunes.
Est-ce que vous pensez qu'il y a des moyens de relier davantage les besoins de
main-d'oeuvre et les intérêts des jeunes?
Mme Landry: II ne faut jamais oublier qu'un emploi, un choix de
carrière, c'est un projet qu'on se fait. Il faut que ça vienne de
l'intérieur de soi aussi. Il faut qu'on y croie. Il faut qu'on soit
intéressé à embarquer dans ça, sinon ça ne
fonctionne pas. Nous, on peut trouver des moyens pour repérer les gens
pour qui le type d'emploi convenable, c'est, par exemple, un métier en
pénurie, mais on ne peut pas forcer les gens à aller de ce
côté-là non plus. Ça ne fonctionnera pas de toute
façon. On ne peut occuper n'importe quel emploi dans sa vie. Il n'y a
pas, malheureusement, comme vous le disiez, de recette magique
là-dessus.
Par contre, de faire connaître certains métiers, ça
n'est pas uniquement de dire qu'ils sont en pénurie ou qu'ils sont
payants. Il faut présenter l'information. Et la façon de
valoriser aussi la formation technique, ce n'est pas nécessairement par
une guerre publicitaire, parce qu'on ne choisit pas une carrière comme
on achète un objet. Il faut vraiment pouvoir s'y reconnaître
dedans. Alors, il faut présenter les métiers avec leurs
caractéristiques propres aussi avec la structure qu'il y a dedans, avec
les compétences que ça prend.
Bon. Je vous donne l'exemple de l'émission
«Viséo» à laquelle on collabore, d'ailleurs, en
donnant des informations aux gens suite à l'émission. Elle est
très stimulante pour les gens. Elle provoque beaucoup de mouvement au
niveau de l'orientation des gens parce qu'elle présente du vrai monde
qui fait la job, et ils ont choisi des gens qui aiment leur métier, qui
parlent des différents aspects. On les voit dans leur milieu de travail,
en action. Et ça, c'est mobilisant. Or, c'est toujours de trouver des
moyens pour mobiliser les gens, mais ce n'est pas de la publicité comme
la guerre de Coke ou Pepsi qui va amener les gens à aller dans des
directions comme ça. Ce n'est pas à partir de ça qu'on
s'oriente.
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup. C'est tout
le temps que vous aviez. M. le député de Rimouski.
M. Tremblay (Rimouski): Oui, Mme la Présidente, comme mes
collègues, je veux remercier la Corporation professionnelle des
conseillers et conseillères d'orientation du Québec pour leur
mémoire. Je pense que c'est très important que vous nous fassiez
connaître votre opinion quant au réaménagement des
enseignements au collégial.
Étant donné qu'on est dans une science un peu abstraite et
probablement pas tellement précise, on n'est pas en sciences
appliquées, et que vous travaillez sur un matériel très
fragile, qui est les jeunes, au niveau de l'orientation, une première
question. Est-ce que, des fois, vous ne vous sentez pas un peu mal à
l'aise dans votre fonction au niveau de l'orientation des jeunes? Il y en a
peut-être qui vont vous dire: O.K. Vous nous avez bien orientés,
mais il y en a d'autres, peut-être, qui peuvent vous reprocher d'avoir
fait un mauvais choix. Comment vous réagissez à cette
interrogation? Je voudrais plutôt poser la question à M. Tremblay,
qui est dans un cégep de Sainte-Foy. Moi, j'ai vu, souventefois, des
étudiants nous dire: Bien, c'est l'orienteur qui m'a
suggéré ça. Finalement, je suis allé dans cette
option-là et, vraiment, j'ai poché toute mon affaire. C'est quoi,
votre attitude?
M. Tremblay (Bruno): II est certain, au début... Il faut
préciser que, souvent, les jeunes peuvent appeler
«orienteur» plusieurs personnes. Ça peut être un aide
pédagogique, ça peut être quelqu'un qui lui a donné
de l'information. Moi, je suis conseiller d'orientation et je tiens beaucoup
à le préciser aux jeunes. L'approche, elle a changé
beaucoup au niveau de ça aussi. Au niveau du Conseil permanent de la
jeunesse, dans le sondage qu'ils ont fait, ils ont montré, sur les 1500
jeunes qui ont répondu, un taux de satisfaction assez important. Je peux
vous dire une chose. Moi, au cégep de Sainte-Foy, je ne peux rencontrer
qu'un pourcentage assez minime de jeunes qui veulent me rencontrer. Au niveau
de l'accessibilité, les jeunes en demandent beaucoup, et plus je fais
quelque chose qui poigne, comme diraient les jeunes, plus ma liste d'attente
augmente et moins je peux y répondre dans un tempo adéquat.
Quand on parle d'un cours, le cours, il est bon dans un moment. Lorsque
le jeune va faire le test de la réalité dans les cours qui
suivent, s'il a besoin de rencontrer quelqu'un, peut-il me voir s'il y a une
liste d'attente de deux mois? Il a besoin d'un tempo, d'un moment
précis. Lorsqu'on parle qu'il y a des cours qui sont donnés - on
a parlé des centres de femmes - il y a toujours, dans ces
cours-là, un conseiller d'orientation disponible pour les rencontrer
individuellement, pas dans un cours qui est seule-
ment intellectuel.
Mors, moi, si je vous parie des besoins des jeunes, ce qu'ils me disent,
c'est: On aurait aimé te rencontrer. Comment te rendre accessible? On
développe des façons pour qu'ils puissent nous rejoindre. Eux
développent même des stratégies pour sauter des
priorités qu'on a. Les jeunes démontrent un côté
très... de la satisfaction. C'est ça, moi, que je peux vous dire
qui se passe au cégep de Sainte-Foy.
Je peux vous dire aussi qu'on reçoit des jeunes. On a fait un
programme d'intégration dans le programme régulier. À
partir du programme régulier, des gens interviennent de façon
à fournir un encadrement spécial auprès de ces
jeunes-là. Les jeunes le choisissent d'une manière volontaire.
Sur 200, environ 90 acceptent de faire ce programme-là. Et on se rend
compte que ces jeunes-là changent moins de programme. On se rend compte
que ces jeunes-là, après deux ans, ont une diplomation plus
élevée. Cette année, on a accepté des jeunes - il a
fallu ouvrir les portes parce qu'il y avait des jeunes en attente - et on les a
obligés à prendre ce cours prévu. Et on est en train de se
rendre compte que ces jeunes-là obligés n'arrivent pas avec les
mêmes résulats que ceux qui ont été volontaires.
Alors, il y a tout un tempo, il y a tout un «timing». Et
c'est très, très, très important, au niveau des jeunes, de
pouvoir répondre aux besoins qu'ils ont à certains moments.
M. Tremblay (Rimouski): Très bien. Je vous remercie. Je ne
pourrai pas, malheureusement, poser d'autres questions, le temps m'est...
Alors, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. En conclusion, Mme
la ministre.
Mme Robillard: Merci beaucoup, Mme Landry, vous et vos
collègues, d'être venus partager, je dirais, cette
problématique d'orientation que nous avons chez les jeunes, et ce,
à tous les ordres d'enseignement. Je pense que ce n'est pas strictement
au collégial, mais ça nous permet d'approfondir notre
réflexion dans le domaine. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Hovington): Merci d'être venus
à la commission de l'éducation. Je vous souhaite une bonne
journée.
La commission suspend ses travaux jusqu'après les affaires
courantes, donc vers 15 heures cet après-midi.
(Suspension de la séance à 12 h 29)
(Reprise à 15 h 32)
La Présidente (Mme Hovington): La commission reprend ses
travaux avec un peu de retard.
Nous tenons à nous en excuser devant les gens qui sont ici pour
présenter leur mémoire. Vous savez, on n'a pas le contrôle
tout à fait de la période de questions. Alors, on peut prendre
des retards comme ça. Excusez-noiis, pour une dernière fois.
Alors, nous recevons le cégep du Vieux-Montréal
représenté par M. Michel Salbaing, président du conseil
d'administration. Bonjour. Vous êtes le porte-parole?
Cégep du Vieux-Montréal
M. Salbaing (Michel P.): Ce sera le directeur
général qui sera le porte-parole.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, voulez-vous nous
présenter toute votre équipe?
M. LalDer (Alain): Oui, bien sûr, madame. Je vous
présente d'abord, à ma droite, Mme Luce Goerlach, qui est
directrice des services pédagogiques au collège.
La Présidente (Mme Hovington): Bonjour. Mme Goerlach
(Luce): Bonjour.
M. Laitier: À sa droite, Mme Danyelle Pagé, qui est
enseignante et présidente de la commission pédagogique.
Mme Pagé (Danyelle): Bonjour.
La Présidente (Mme Hovington): Bonjour.
M. Lallier: On vous a présenté M. Salbaing. M.
Salbaing est président du conseil d'administration et il est aussi
vice-président finances chez Marconi Canada.
La Présidente (Mme Hovington): Bonjour.
M. Lallier: À sa gauche, M. Sébastien McQuade, qui
est étudiant et représentant de l'association
générale des étudiants.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, M. Lallier, nous
vous écoutons.
M. Lallier: Merci, madame. Mme la Présidente de la
commission de l'éducation, Mme la ministre de l'Éducation, de
l'Enseignement supérieur et de la Science, Mmes et MM. les
députés membres de cette commission, au nom du cégep du
Vieux-Montréal, pour commencer, je tiens à vous remercier pour
votre invitation à partager avec vous nos réflexions et nos
propositions sur l'avenir des cégeps. Nous venons de vous
présenter les porte-parole du cégep. Je tiens à souligner
aussi que, dans la délégation, on retrouve aussi des membres du
groupe de travail qui ont oeuvré à la préparation du
mémoire et qui
représentent les différents syndicats et associations du
cégep. Avec nous aussi, on retrouve la présidente et le
vice-président de l'Association des parents partenaires du CVM, le
directeur général de l'Institut des métiers d'art du
cégep, d'autres membres du personnel et un certain nombre
d'étudiants.
Puisque l'on est dans les présentations, je voudrais prendre
quelques minutes pour tracer à grands traits le portrait du cégep
du Vieux-Montréal. Avec les deux tiers de ses étudiants dans le
secteur technique, le cégep du Vieux-Montréal est l'un de ceux
qui se rapprochent le plus du modèle prôné par la
commission Parent. 5600 étudiants sont inscrits à l'enseignement
ordinaire et quelque 8000 à l'enseignement aux adultes. En formation
préuniversitaire, la plus grande proportion des étudiants se
retrouvent en sciences humaines. En formation technique, le plus fort
contingent se retrouve en techniques physiques. Quasi ex aequo au second rang,
toujours en techniques, les arts et communications graphiques. Et aussi les
techniques humaines regroupent le plus grand nombre de futurs techniciens
formés par le cégep du Vieux-Montréal.
Situé au coeur du centre-ville de Montréal, au confluent
des transformations et des influences les plus actuelles, ce cégep
cultive une sensibilité particulièrement aiguë aux besoins
et aux nécessités du Québec d'aujourd'hui. C'est
probablement la principale raison qui, dès que la ministre de
l'Enseignement supérieur et de la science, Mme Robillard, a
annoncé la tenue d'une commission parlementaire sur l'avenir des
cégeps, a motivé la direction générale du
cégep à travailler en concertation avec la communauté
locale pour dégager des lignes de force qui devaient et qui devraient
contribuer au développement durable des cégeps.
La Présidente (Mme Hovington): Si vous me permettez, vous
devriez lire peut-être un petit peu plus rapidement parce que vous avez
à peine 15 minutes maintenant pour présenter votre
mémoire. Alors, on veut vous écouter jusqu'à la fin. S'il
vous plaît!
M. Lallier: Je vous remercie, madame. En première phase de
concertation, des représentants de l'ensemble des syndicats et des
associations ont travaillé à une table commune pour ouvrir des
pistes de réflexion susceptibles d'alimenter les discussions sur ce
sujet crucial pour notre établissement comme d'ailleurs pour tous les
cégeps. La commission pédagogique et la communauté ont
été, par la suite, invitées à donner leur avis
quant à ces voies d'avenir ouvertes par le groupe de travail. C'est
ainsi que des accents plus particuliers sont ressortis comme essentiels et que
des nuances significatives ont été apportées aux
propositions premières. Au total, à l'intérieur de
délais très serrés, l'opération a permis de
dégager des objets de consensus ou de tendances claires au sein de notre
cégep, faisant du mémoire que nous vous présentons un
véritable mémoire communautaire.
Le cégep du Vieux-Montréal se prononce résolument
en faveur du maintien du modèle des cégeps et identifie les
changements nécessaires à son renforcement. Nous affirmons que
c'est en demeurant fidèle à l'idéal qui a
présidé à l'instauration des cégeps après le
rapport Parent que les cégeps peuvent donner leur pleine mesure et
participer significativement au développement du Québec.
Après 25 ans seulement d'existence, les cégeps n'ont pas encore
donné le meilleur d'eux-mêmes. Il est prématuré de
balayer du revers de la main les compétences et les contributions qui
s'y sont développées. Mais, pour qu'ils puissent participer
significativement à l'avenir de notre société, des
améliorations précises doivent être apportées aux
cégeps et des principes clairement énoncés doivent
aiguillonner les changements proposés.
D'abord, les principes. Deux principes, somme toute, doivent guider la
nécessaire actualisation de l'enseignement collégial. L'adoption,
d'abord, d'une perspective écologique de l'éducation et la
concentration. Une perspective écologique suppose de tenir compte de
l'environnement du cégep lors de la conception de son nouveau design.
Les interrelations qui unissent le cégep, compte tenu de sa position
charnière, aux autres ordres d'enseignement, au monde du travail,
à la société québécoise et au contexte
mondial dans son ensemble doivent être intégrées aux
ajustements que l'on s'apprête à apporter. Pour agir localement
sur chacun des établissements et leurs composantes, il faut penser
globalement. Et penser globalement avec le maximum d'économie
d'énergies, d'efforts et de ressources conduit aussi à favoriser
la concentration. Ce dont on parle ici, c'est de la concentration des
ressources humaines et financières pour le meilleur développement
des programmes, de l'enseignement collégial et des citoyens
appelés à vivre et à se réaliser dans un monde
où les choix sont de plus en plus nombreux et la réflexion de
plus en plus exigeante. En ce sens, il faudra envisager avec
détermination une révision salutaire de la carte des programmes,
particulièrement dans la région de Montréal, tant dans les
cégeps publics que dans les collèges privés. Il faudra
aussi analyser de près les nombreux avantages que présenterait,
sur le plan du resserrement des pratiques pédagogiques et de la
cohésion interne, l'adoption par chacun des cégeps d'un projet
d'établissement propre, cernant les convictions communes des divers
agents éducateurs qui y oeuvrent. Donc, deux principes:
nécessaire perspective écologique et concentration des ressources
humaines, matérielles et financières. (15 h 40)
Fondées sur ces deux principes, des règles
d'aménagement doivent être observées pour assurer la
relance des cégeps. En voici quelques-unes. Tout d'abord, il faudra
confirmer le cégep comme lieu d'études supérieures. Nous
partageons en ce sens l'avis du Conseil supérieur de l'éducation:
C'est en participant à la mission d'enseignement supérieur que la
mission des collèges a le plus de chances d'affirmer sa consistance et
son originalité. D'où nos recommandations que l'État doit
fixer des standards de réussite scolaire au collégial, doit
préciser le niveau d'exigence des études collégiales et
soutenir les cégeps dans l'application des standards. Dans cet esprit,
il faut inclure au régime pédagogique et soutenir
financièrement des mesures de dépistage et d'évaluation
diagnostique des étudiants admis avec une 5e secondaire qui ont besoin
de compléter la maîtrise des habiletés nécessaires
à l'inscription dans les premiers cours de certaines disciplines.
Confirmer le cégep comme lieu d'études supérieures, c'est
aussi améliorer et élargir les possibilités d'accès
aux études universitaires en prévoyant les ponts qui facilitent
le passage entre les programmes de formation technique du collégial et
les études universitaires.
Par ailleurs, les programmes d'enseignement collégiaux ne doivent
pas uniquement s'assujettir aux préalables universitaires. Le
cégep ne doit pas non plus se mouler à des besoins trop pointus
du milieu socio-économique. Préserver l'identité propre du
cégep et de sa mission doit s'accompagner d'efforts redoublés
pour créer de réels arrimages avec les autres ordres
d'enseignement et le monde du travail. Le cégep a tout à gagner
à se définir et à s'inscrire dans la mouvance des
études supérieures pour le meilleur développement du
Québec.
Plus que jamais, peut-être, la formation générale
des étudiants, à la fois du secteur technique et du secteur
préuniversitaire, doit être solide. En ce sens, nous recommandons
que le fonds culturel, qui devrait être commun à tous les
Québécois ayant complété des études
collégiales, soit clairement établi. Il y a là un choix de
société qu'il appartient à l'État d'orchestrer.
À notre point de vue, la formation générale devrait viser
les objectifs de formation fondamentale tels que définis par le Conseil
des collèges. Quant à savoir quels cours, quelles disciplines
canaliseraient les objectifs, nous croyons qu'il faut définir au
préalable de quoi devrait être constitué le fonds culturel
commun à tous les Québécois. La question: Qu'est-ce qui
est essentiel et obligatoire aujourd'hui pour répondre aux besoins des
individus et de la société? Et l'évidence n'est pas encore
établie que l'on doive retenir l'hypothèse de la diminution de la
place de la philosophie ou de l'éducation physique en formation
générale.
Parmi les autres réaménagements à réaliser,
il faut raffermir, c'est-à-dire développer et renforcer les deux
filières de formation collégiale.
Dans les programmes de formation préuniversitaire, des programmes
plus organiques naîtront de la généralisation de l'approche
programme. Le nouveau programme de sciences humaines, dont l'implantation est
en cours chez nous, ouvre des pistes prometteuses en ce sens. Les programmes de
formation technique, quant à eux, gagneront, avec la
systématisation, des liens avec les entreprises et des organismes
sociocommunautai-res. On pense, bien sûr, ici, aux stages et aux formules
d'alternance études-travail dont on vous a beaucoup parlé. La
formation technique devrait aussi être revue pour adopter une optique de
formation continue, les techniciens étant de plus en plus nombreux
à poursuivre leurs études à l'université.
Mais, de façon plus globale, nous recommandons de soutenir les
efforts des partenaires dans la valorisation de la formation technique au
cégep en faisant ressortir son appartenance aux études
supérieures, de même qu'en améliorant l'information quant
à ses programmes, ses installations, aux ressources disponibles et quant
à la contribution des techniciens au développement du
Québec.
Avec cette même visée en tête, celle du
raffermissement des deux filières de formation, nous recommandons la
création d'autres centres spécialisés, sur l'île de
Montréal en particulier, contribuant à renforcer la formation
offerte au cégep et à tisser aussi des liens avec le milieu.
Nommément, le cégep du Vieux-Montréal, compte tenu de ses
forces dans ce domaine, estime qu'il pourrait rendre d'excellents services en
design.
Il faut tenir compte de la population scolaire qui est maintenant
hétérogène. C'est l'étudiant qui doit être au
centre de toute actualisation de l'enseignement collégial. Il faut
désormais se représenter la classe comme une mosaïque de
motivations dissemblables et de modes d'apprentissage très
variés. En effet, la population des cégeps n'a plus
l'homogénéité qui était la sienne à
l'époque du rapport Parent. Le nombre de femmes est croissant, celui des
adultes aussi, les origines ethniques et socio-économiques et les
formations antérieures sont devenues très diversifiées,
sans compter que les modes de vie des étudiants ne sont plus les
mêmes. Selon nous, c'est vraiment la relation
maître-étudiant qui doit être le pivot des nouvelles
dispositions prises au cégep. Sous cette rubrique, nous recommandons de
reconnaître à part entière la place, les droits et les
besoins de l'étudiant adulte dans les cégeps et aussi de mettre
en place des mesures qui favorisent un enrichissement et une continuité
accrue de la relation maître-élève, par exemple en offrant
des cours sur une année ou en nommant des responsables de groupes.
Au coeur des progrès des cégeps se trouve
l'évaluation: évaluation des apprentissages, évaluation
des programmes, de l'atteinte des objectifs des projets d'établissement
et des pratiques
d'administration nationales. C'est toute la question de droit à
l'information de citoyens de mieux en mieux formés et informés et
de devoir de transparence des établissements publics à leur
endroit qui est en cause. Il faut évaluer pour améliorer, mieux
gérer et rendre des comptes. Cela dit, les mécanismes
d'évaluation à venir devront être établis avec
toutes les précautions nécessaires parce que l'éducation
est une réalité complexe qu'il est difficile de décomposer
en objets d'évaluation sans perdre la perspective d'ensemble qui, seule,
permet de poser un jugement pertinent. Classer un cégep sur la base de
deux de sa trentaine de programmes, comme cela se pratique actuellement, ce
n'est pas de l'évaluation crédible. L'évaluation, bien
sûr, va de pair avec l'accroissement de l'autonomie des cégeps.
C'est pourquoi nous recommandons d'aménager un nouveau partage des
responsabilités entre l'État et les cégeps, partage qui
laisserait aux cégeps une marge de manoeuvre plus grande dans leur
gestion et dans la gestion des programmes en particulier. (15 h 50)
Sans les ressources humaines et financières adéquates,
l'actualisation de l'ordre collégial ne produira pas les effets
escomptés. Les personnes qui oeuvrent au sein des cégeps
devraient disposer des possibilités de perfectionnement et être
valorisées dans leur travail pour créer les conditions propices
à la responsabilisation de chacun. Éduquer est fondamental pour
le devenir de notre société et des efforts financiers
additionnels doivent aussi être consentis. L'État doit ici envoyer
le signal clair que l'accessibilité à l'enseignement
supérieur reste une valeur privilégiée. Il faudra, bien
sûr, faire preuve de beaucoup de créativité pour
diversifier les sources de financement. Les payeurs de taxes, nous en sommes
conscients, ne peuvent plus, a eux seuls, assumer les dépenses en
éducation. Et pourtant, la gratuité scolaire doit être
maintenue compte tenu que les besoins de scolarisation sont toujours
très vivants, ainsi que l'a récemment très bien
montré le Conseil supérieur de l'éducation.
Parmi les solutions de financement envisagées, il faudra, d'une
part, se tourner vers les entreprises en instaurant des mesures fiscales pour
les encourager à contribuer financièrement à
l'entraînement en formation technique et aussi au perfectionnement, par
des dons ou prêts d'équipement, des bourses, des stages des
professeurs. Nous proposons aussi d'instaurer des mesures qui, sans coercition,
inciteront les étudiants à compléter leurs études
dans les temps raisonnables, soit en utilisant le régime d'aide
financière, soit, plus globalement, en informant l'étudiant des
coûts réels de ses études pour favoriser une prise de
conscience de la contribution monétaire de la société
à sa formation, cela, ajoutons-le, tout en resserrant l'application du
régime pédagogique en vigueur dans le réseau
collégial.
Voilà donc, très rapidement tracés, les principes
et les règles de réaménagement qui, selon nous, devraient
guider la relance des cégeps.
Depuis 25 ans, le cégep du Vieux-Montréal, comme tous les
autres cégeps, a fait montre d'une extraordinaire capacité
d'adaptation. Cela fait 25 ans que les cégeps changent avec les
mutations sociales du Québec et ils seront en mesure de s'engager
à continuer à le faire si on leur donne l'environnement favorable
à leur pleine contribution au développement du Québec dans
toutes ses dimensions, qu'elles soient économique, sociale et
culturelle. Vingt-cinq ans après la création des cégeps,
le cégep du Vieux-Montréal croit qu'il faut reprendre la
perspective systémique, la vision d'ensemble qui a inspiré les
auteurs du rapport Parent. Il faut embrasser dans toute son envergure
l'enseignement collégial et le système dans lequel il
s'insère. La rareté des ressources ne nous permet pas d'investir
dans du développement à la pièce ni à courte vue.
Parce que les ressources sont rares, il faut faire du développement
durable. Merci de votre attention.
La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. Lallier. Mme la
ministre.
Mme Robillard: Merci, Mme la Présidente. Bienvenue
à toute l'équipe du collège du Vieux-Montréal. Je
suis tellement heureuse que vous ayez décidé de venir en
commission parlementaire nous soumettre un mémoire. Je veux saluer tous
les gens qui vous accompagnent aussi, M. le président du conseil
d'administration. Vous êtes venus en grand nombre aujourd'hui et nous
l'apprécions, d'autant plus que, vous savez, nous avons reçu en
commission parlementaire, depuis le début des travaux, plusieurs
cégeps de différentes régions du Québec, et les
membres de la commission parlementaire ont noté, avec satisfaction,
comment chacun des cégeps a sa personnalité propre en
région. Je pense qu'avec votre exemple nous allons voir aussi que les
cégeps de la région métropolitaine ont aussi des
personnalités très particulières les unes des autres et,
au Vieux-Montréal, je pense que c'est assez évident par le
contenu de votre mémoire que vous avez votre personnalité qui
vous est propre et donc des défis très particuliers qui vous
attendent.
Vous êtes aussi un cégep qui offrez deux tiers, je pense,
de formation technique sur l'ensemble de vos programmes. C'est
déjà une spécificité qui vous est
particulière et, d'entrée de jeu, j'aimerais ça... M.
Salbaing, président du conseil d'administration, vous venez du monde des
entreprises, vous êtes le président du conseil d'administration.
Pourriez-vous nous dire comment ça se passe au cégep du
Vieux-Montréal, les liens entre les entreprises et les différents
intervenants du cégep dans ses nombreux programmes?
M. Salbaing: Les relations entre le cégep et l'entreprise
se passent à différents niveaux. Elles se passent d'abord au
niveau de l'implication des partenaires socio-économiques au niveau du
conseil, qui sont choisis en essayant de représenter le milieu des arts
et le milieu des affaires d'une manière à peu près
égale. Elles se passent aussi au niveau de l'échange et de
l'implication des entreprises au niveau de la formation continue. Aussi, elles
se développent lors de relations avec la ville de Montréal. Nous
avons récemment signé, nous sommes en train de signer un
mémoire d'entente avec la ville de Montréal pour participer avec
elle dans différentes activités de formation et, en même
temps, échanger des installations que nous avons. Nous avons aussi, au
niveau de notre rayonnement extérieur, des activités qui
reprennent notre diversité culturelle que nous avons à
l'intérieur du collège. Les entreprises, au niveau du
collège, essaient de participer et participent d'une manière
très active au développement de cours spécifiques de
formation à l'entreprise. Il y a donc tout un éventail
d'activités qui se passent entre les entreprises et le cégep du
Vieux-Montréal.
Mme Robillard: Nous avons la chance d'avoir avec vous, je vois
bien, une délégation très diversifiée. Alors,
j'aimerais peut-être demander au représentant des
étudiants, M. McQuade... Dans votre mémoire que vous nous
présentez aujourd'hui, il y a 25 recommandations. Du point de vue des
étudiants, laquelle est la plus importante?
M. McQuade (Sébastien): Premièrement, je crois
qu'elles sont toutes importantes pour la simple et bonne raison qu'elles
s'adressent directement aux étudiants. Autrement dit, ce
mémoire-là, c'est pour les étudiants. Évidemment,
celle qui est la plus importante, on croit, c'est au niveau du maintien de la
gratuité scolaire.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. McQuade: Je crois qu'il serait faux de prétendre
qu'actuellement les études sont gratuites pour les étudiants du
niveau collégial, que ce soit au niveau de leurs coûts de
matériel didactique ou autres. Quelquefois, ça peut monter
à des montants, dans certaines concentrations, je pense en ans
plastiques, assez élevés. Maintenant, je ne veux pas juste
m'attarder là-dessus parce que je pense qu'il y a aussi toute une
dimension d'aller chercher et de valoriser les études auprès des
étudiants. Je pense que, si on leur fait le cadeau de payer pour leurs
études collégiales, il faut nécessairement qu'il y ait un
engagement qui vienne de la part des étudiants de prendre le temps, dans
des délais raisonnables, de compléter leurs études
postsecondaires. Je pense que ça doit venir des deux côtés,
l'effort. Il doit venir autant de l'État que des étudiants.
Mme Robillard: ...parole responsable, M. McQuade.
M. McQuade: Merci beaucoup.
Mme Robillard: J'apprécie. J'aimerais revenir à des
points spécifiques de votre mémoire, M. le directeur
général ou Mme la DSP, comme vous le voulez. Vous nous parlez de
l'approche programme dans votre mémoire, vous nous indiquez que le
développement des programmes devrait viser une plus grande articulation
entre les différentes disciplines, et vous nous soulignez que la
révision du programme de sciences humaines a peut-être
été une occasion ou une démarche type pour permettre,
justement, de poser des jalons entre les disciplines, dites-vous. C'est dans ce
sens-là que je l'ai compris et j'aimerais ça que vous me donniez
plus d'information sur la démarche que vous avez suivie pour
l'implantation du nouveau programme de sciences humaines. Est-ce que, dans
cette démarche-là, aussi, les professeurs qui dispensent les
cours obligatoires du tronc commun ont été impliqués aussi
dans cette démarche programme au niveau des sciences humaines? Et est-ce
que vous avez intégré les coordinations départementales
à l'intérieur de ça? En somme, comment ça s'est
passé chez vous?
Mme Goerlach: Bon. Alors, ça s'est passé, d'abord,
en impliquant effectivement le personnel enseignant de toutes les disciplines
du programme de sciences humaines. À ce moment-là, je veux dire
que nous avons mis en place un comité que nous avons appelé un
comité de concertation interdisciplinaire qui, avec la coordination de
l'enseignement, à partir des balises ministérielles, a
élaboré l'ensemble du programme. Et je dois vous dire que ce
comité de concertation interdisciplinaire était toujours
appuyé par ce qu'on appelait un comité programme qui rejoignait
l'ensemble des professeurs de sciences humaines. À votre question,
à savoir si les professeurs de français et de philo
étaient présents, donc des cours obligatoires, non, ils
n'étaient pas présents au moment où a été
élaboré le programme de sciences humaines. Il est important de
mentionner que nous en sommes arrivés, dans notre programme de sciences
humaines, à une grille unique au cégep du Vieux-Montréal
et que nous sommes en train, actuellement, d'élaborer ce qu'on appelle
les habiletés transdisciplinaires du programme de sciences humaines. (16
heures)
Je voudrais souligner ceci: ce dont nous nous sommes aperçus en
travaillant sur l'élaboration du programme de sciences humaines, c'est
qu'il était, bien sûr, important d'avoir un lieu de concertation,
et nous l'avons fait par le comité de concertation interdisciplinaire.
Ce que nous avons pu constater aussi, c'est que, pour y
arriver, à appliquer l'approche programme, ce qu'il nous faut,
bien sûr, c'est faire en sorte que le personnel qui est impliqué
soit présent dans l'élaboration, donc dans la démarche
elle-même. Ce que nous avons aussi constaté, c'est qu'il nous
faut, bien sûr, un lieu de coordination et de gestion.
C'est-à-dire qu'il faut à quelque part quelqu'un qui soit en
mesure de trancher quand il y a à décider quels sont les
objectifs spécifiques à retenir, et je dois vous dire qu'en ce
sens-là la coordination de l'enseignement et la direction des services
pédagogiques se sont acquittées de cette tâche au
cégep du Vieux-Montréal.
Mme Robillard: Mme Pagé, comment s'est vécue cette
démarche au niveau des professeurs?
Mme Pagé: Ça a été une
démarche qui... Il faut que je vous dise d'abord que je suis enseignante
en administration, donc une discipline qui était concernée dans
le programme de sciences humaines. C'est une démarche qui a plu
énormément aux enseignants, qui ne mettait pas de
côté la présence des départements. Les coordinations
départementales, elles étaient impliquées dans cette
approche programme. Les départements, l'existence même des
départements dans les cégeps ne doit pas être mise en cause
par l'implantation des approches programmes, parce que c'est là que les
professeurs peuvent, à l'intérieur de leur discipline, faire tous
les échanges qu'ils ont besoin de faire pour améliorer
l'enseignement, pour améliorer les stratégies d'enseignement, les
objectifs qui sont liés à la discipline même. Alors, moi,
je pense que, au cégep du Vieux-Montréal, on a vécu
l'approche programme en sciences humaines. On l'a aussi vécue,
d'ailleurs, dans un programme plus technique, en techniques de métiers
d'art, où ce programme a été élaboré
à partir des objectifs, en intégrant aussi les disciplines qu'on
appelle disciplines de service, par exemple la discipline administration qui
avait plusieurs cours à dispenser à ce programme. Au moment de
l'élaboration du programme, nous avons été, comment je
pourrais dire, nous y avons été à part entière
durant tout le temps de l'élaboration, et je pense que c'est très
important de respecter les enseignants dans leur département, la
coordination départementale, l'un va avec l'autre.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. Alors, je vais
reconnaître maintenant Mme la députée de Terrebonne.
Mme Caron: Merci, Mme la Présidente. Alors, à mon
tour, permettez-moi de vous souhaiter la bienvenue, à toute
l'équipe, l'équipe incluant tous ceux et celles qui vous
accompagnent, puisque vous êtes très nombreux aujourd'hui, et cela
signifie qu'effectivement votre démarche s'est faite en concertation et
jusqu'au bout.
J'ai lu attentivement votre mémoire et j'ai retenu certains
points que j'aimerais questionner en particulier. Dans le mémoire,
à la page 10, vous recommandez «d'inclure au régime
pédagogique et de soutenir financièrement des mesures de
dépistage et d'évaluation diagnostique des étudiants admis
avec une 5e secondaire qui ont besoin de compléter la maîtrise des
habiletés». À de nombreuses reprises, on nous a fait part
de ce problème concernant une préparation différente des
étudiants, c'est-à-dire certains qui entraient avec 130
unités ou d'autres avec 180, et que ça posait, évidemment,
un sérieux problème pour ceux qui les recevaient au
collégial. Ces mesures de dépistage, cette évaluation
diagnostique, est-ce que vous la souhaitez uniforme partout? Est-ce qu'elle
serait de la responsabilité du ministère, laissée à
la discrétion des différentes écoles secondaires ou en
lien avec les cégeps?
M. Lallier: Je vais inviter la directrice des services
pédagogiques à répondre à cette question.
Mme Goerlach: Au cégep du Vieux-Montréal, nous
avons mis en place des mesures de dépistage. Actuellement, ce que nous
faisons, c'est que, par exemple, pour les étudiants qui entrent avec,
bien sûr, leur français secondaire V, les étudiants qui ont
donc réussi ce cours de français secondaire V, et tous ceux qui
se retrouvent avec une cote qui se classe entre 60 et 65, nous les invitons...
plus que les inviter, nous les inscrivons dans un cours de mise à niveau
qui n'est pas crédité, pour faire en sorte que ces
étudiants puissent acquérir, finalement, la maîtrise de
leur langue maternelle, parce que, pour nous, c'est vraiment un objectif, je
pense, de formation fondamentale qui est excessivement important. Donc, nous
avons ces mesures.
Nous avons aussi, à l'intérieur des programmes comme tels
- et nous avons insisté tantôt sur le fait qu'il est important
d'intensifier davantage et de mettre l'accent sur la relation
maître-élève - nous faisons en sorte que les
étudiants qui éprouvent des difficultés soient aussi
supportés dans leur réussite scolaire, qu'ils soient
supportés de manière à recevoir certaines formules d'aide.
Par exemple, je peux vous citer l'aide par les pairs, que ce soit en
mathématiques, que ce soit en chimie, que ce soit en biologie.
Le diplôme d'études secondaires, à notre avis,
devrait être plus exigeant qu'il ne l'est actuellement. Il est
impérieux qu'au niveau secondaire l'on soit en mesure de résoudre
les difficultés qui existent là et de les régler à
ce niveau-là. Il est important, à ce moment-là, de
considérer et de faire en sorte que l'enseignement collégial soit
considéré comme un niveau d'ordre supérieur et que l'on
fasse en sorte que
les difficultés qui devront être résolues par le
niveau collégial, ce soient des difficultés qui concernent, bien
sûr, l'ordre supérieur d'enseignement et non pas les
difficultés que l'on retrouve dans la formation de base qui doit
être acquise par les étudiants de l'ordre secondaire.
Mme Caron: Je vous remercie beaucoup. Toujours dans votre
mémoire, aux pages 17, 18 et 19, vous nous parlez des difficultés
d'adaptation pour une population hétérogène et vous faites
mention, en page 18, à la fin, dernier paragraphe: «Le devis
pédagogique du cégep du Vieux-Montréal autorisé par
le ministère, pour n'évoquer qu'un seul aspect de la question, ne
reconnaît pas tous les adultes inscrits à temps plein pour fins de
calcul des espaces subventionnés.» Est-ce que vous pourriez nous
expliquer un petit peu le problème que vous vivez?
M. Laitier: C'est un problème réel, avec la
présence de plus en plus importante des adultes au collège, et
ils sont très nombreux au collège, et la demande centre-ville de
Montréal est importante compte tenu des problèmes de
main-d'oeuvre et des problèmes aussi de recyclage de main-d'oeuvre. Ce
que nous voulons souligner là, on a un problème d'espace chez
nous qui tient en grande partie au fait que, quand on définit le devis
pédagogique du nombre d'étudiants, on ne prend pas en compte
toute la clientèle. Alors, la clientèle adulte qui vient, entre
autres, dans les programmes du fédéral, dans des programmes de
recyclage de main-d'oeuvre, n'est pas vraiment comptabilisée en termes
d'espace. Conséquence, nous nous retrouvons avec 200, 300
étudiants dans ces cours où il faut trouver des classes pour
donner les cours et avoir des laboratoires. Or, ce n'est pas prévu dans
le devis technique, et des espaces... Alors, vous devinez qu'on loue, bien
sûr, à l'extérieur, mais, souvent, ça vient
créer un engorgement dans le collège. Et, au fil des ans, je
dirais que c'est la qualité même de la vie de tout le monde qui
s'en trouve détériorée: ceux, les premiers 5600 qu'on a
pris, qui n'ont pas tout l'espace dont ils pourraient avoir besoin, et ces
adultes qui, toujours à la dernière minute, parce que, souvent,
on ne peut pas non plus le prévoir à longue
échéance, se retrouvent souvent sans des locaux adéquats.
Alors, il y a là un problème, et je pense qu'on devrait changer
les devis et les règles à ce point de vue là pour prendre
en compte une réalité qui est réelle. Ce sont des
étudiants réels qui ont besoin aussi d'espace dans les
cégeps.
Mme Caron: je vous remercie beaucoup parce que très peu de
groupes nous ont fait part de ce problème bien concret que vous nous
définissez. je m'en voudrais de ne pas profiter de la présence de
représentants de l'association des étudiants pour leur demander
peut-être une question sur une partie du texte qui a été
présenté aujourd'hui. On nous fait part de l'importance, et j'ai
aimé cette expression, d'un fonds culturel commun à tous les
Québécois. Je pense que, là-dessus, vous avez raison,
c'est essentiel, c'est obligatoire de se poser la question, de se demander
aujourd'hui, pour répondre aux besoins des individus de la
société, quel serait le fonds culturel commun nécessaire
à tous les Québécois. Et peut-être avec votre vision
de jeunes actuellement aux études, pour vous, qu'est-ce que ça
devrait contenir un fonds culturel commun? (16 h 10)
M. McQuade: Bien, premièrement, dans le mémoire, on
fait mention de l'importance de la langue et aussi de l'importance de la
maîtrise d'une langue seconde. Je pense que, dans la
réalité actuelle nord-américaine, il faut
nécessairement maîtriser deux à trois langues, c'est
nécessaire. Maintenant, pour ce qui est du reste, je vois venir un peu
votre question au niveau des cours de philosophie puis d'éducation
physique.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Caron: Ça pourrait être autre chose, un fonds
culturel commun.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Caron: Ça pourrait être de l'histoire.
M. McQuade: Oui, oui, effectivement, ça doit
nécessairement contenir l'histoire aussi. Je pense que,
premièrement, au niveau des cours de philosophie, à
l'intérieur de ces cours-là, les étudiants
développent des capacités d'analyse, des capacités de
synthèse et des apprentissages personnels aussi au niveau de leur propre
morale, de leurs propres objectifs, finalement, dans la vie. Et, au niveau de
l'éducation physique, on ne peut pas avoir des travailleurs pas en
forme. Si je prends l'exemple de Marconi Canada, si on mettait des gens pas en
forme sur les lignes de montage, j'ai bien l'impression qu'on se retrouverait
avec beaucoup d'accidents de travail et beaucoup de déficits à la
CSST encore. Je pense qu'à ce niveau-là on doit aussi inclure
d'autres... évidemment, donner une perspective historique, mais aussi
multiculturelle.
Mme Caron: C'est bien de nous parler de la philosophie, parce que
notre recherchiste me souffle à l'oreille que votre directeur est un
exprofesseur de philo et qu'elle a reçu des cours de philosophie.
M. McQuade: C'est dommage qu'il ne le soit plus, aussi. Il devait
être très bon.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Caron: J'aimerais aborder, évidemment, la question du
financement. Vous la présentez dans le texte de présentation
d'aujourd'hui et vous la présentez également dans le
mémoire. Dans le mémoire, c'était peut-être un petit
peu plus précis quant à la formule de créer, dans le
régime d'aide financière, un incitatif financier pour les
étudiants qui terminent leurs études collégiales dans le
temps prescrit, c'est-à-dire d'encourager par la positive plutôt
que par la négative, plutôt que de pénaliser ceux qui
auraient un retard, d'encourager ceux qui termineraient plus tôt.
J'aimerais vous entendre un peu là-dessus.
M. Lallier: Oui. À cet égard, il y a trois mesures
qu'on met de l'avant. Une première mesure incitative qui pourrait
toucher plus particulièrement, prendre comme levier le système de
prêts et bourses. Il y a une formule qui a été
trouvée, peut-être, au niveau de la remise du prêt. Il y
aurait là un incitatif intéressant. La formule est
déjà appliquée pour les gens au niveau de la
maîtrise. Une deuxième mesure, on pense, qui a été
déjà retenue et appliquée au niveau des hôpitaux,
des services de santé. Vous vous souvenez avoir reçu un
relevé qui vous disait: Pour telle opération, ça a
coûté 6000 $. On croit que ça ne coûte pas
très cher d'indiquer qu'il y a des coûts rattachés à
la formation et que, quand vous recevez votre bulletin, vous pourriez voir
combien ça a coûté à l'État pour avoir
reçu cette formation. Et, de façon plus globale, l'on croit que
le régime de prêts et bourses prévoit une contribution des
parents. Ça, c'est très net, c'est une règle
établie. Ce que l'on constate à l'analyse du vécu des
prêts et bourses dans notre collège et dans d'autres
collèges, c'est que souvent, même si on prend ça pour
acquis, on ne retrouve pas toujours une implication des parents. Puisque c'est
une règle établie et qui est un a priori, nous disons: Informons
bien la population que les étudiants et l'État considèrent
que les parents ont un rôle important à jouer pour appuyer les
étudiants. Je pense que ce n'est pas évident, et ça
déborde l'aspect financier. Je crois qu'il y a une campagne de
sensibilisation à l'appui en termes de réussite, cette fois, en
termes de réussite pour les élèves, et le message doit
être clair auprès des parents, même si ce sont
déjà de jeunes adultes, que l'appui des parents, financier et
autre, est essentiel pour la réussite. Je pense que M. McQuade voulait
peut-être juste ajouter un petit...
Mme Caron: Oui.
M. McQuade: Oui, j'aimerais juste ajouter quelque chose à
ce niveau-là. Il faut aussi tenir compte, dans la réalité
économique des étudiants, de la dimension travail versus
études qui est de plus en plus répandue chez les
étudiants, et ce qui cause à certaines personnes, vu qu'elles
doivent financer leurs études, de prolonger le temps de leurs
études postsecondaires. Il y a aussi le fait des gens qui ont une
implication au niveau socioculturel ou sportif à l'intérieur des
collèges, qui, je crois, ne devraient pas être
pénalisés pour ça, mais plutôt encouragés
à s'impliquer dans la vie à l'intérieur du
cégep.
Mme Caron: Je vous remercie beaucoup. Peut-être une
dernière question. Dans votre texte de présentation aujourd'hui,
en page 9, vous parlez de mettre en place des mesures qui favorisent un
enrichissement et une continuité accrue de la relation
maître-élève, par exemple en offrant des cours sur une
année ou en nommant des responsables de groupes. Est-ce que c'est le
principe du tutorat ou si vous faisiez allusion à une autre mesure?
M. Lallier: Mme Pagé.
Mme Pagé: Alors, nous considérons, au cégep
du Vieux-Montréal, que le pivot du cheminement scolaire, c'est vraiment
la relation maître-élève et, à cette fin,
l'alourdissement de la tâche d'enseignant fait que, pendant une
année, un enseignant en français ou en philosophie rencontre 300
élèves différents. Nous croyons que c'est fort peu
pédagogique, cette situation, et que peut-être une façon
d'y pallier pourrait concevoir des cours sur une année complète
où l'enseignant serait invité à rencontrer 150
étudiants, mais sur une période d'une année, plutôt
que deux fois: 150 différents à l'automne et 150 étudiants
différents à l'hiver.
D'autres mesures ont aussi été mises en place au
cégep du Vieux-Montréal. Par exemple, notre centre d'aide
à l'apprentissage en français, on a de l'aide par les pairs en
mathématiques. On a un règlement sur les abandons de cours qui a
réduit les abandons de cours de 3000 qu'ils étaient
l'année dernière à 1000 cette année, en imposant un
seul abandon de cours aux étudiants et en invitant l'étudiant
à se prendre en charge et à s'engager à fond dans ses
études dès le moment de son choix de cours. Donc, une fois son
choix de cours fait, une fois son horaire accepté, il ne peut abandonner
qu'un seul cours au moment de la date des abandons. Ça va.
Mme Caron: Je vous remercie beaucoup. C'est très
intéressant.
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup. C'est tout
le temps que vous aviez, Mme la députée.
Mme Caron: Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Hovington): Je reconnais maintenant le
député de Jacques-Cartier, une question concise.
M. Cameron: O.K. Merci, Mme la Présidente, et merci pour
votre mémoire. Je voudrais revenir pour le moment à la question
de la population scolaire hétérogène et je voudrais savoir
si vous avez des étudiants d'origine anglophone et le nombre
d'étudiants d'origine anglophone.
M. Lallier: Anglophones comme tels, je n'ai pas de statistiques
comme telles. Allophones, bien sûr, c'est de l'ordre de 15 %.
M. Cameron: Oui.
M. Lallier: Mais anglophones comme tels, je ne pourrais pas vous
dire. Je ne sais pas si la DSP...
Mme Goerlach: Non, je ne suis pas en mesure. Mais allophones,
c'est 15 %.
M. Cameron: Pour les allophones, par exemple, ici on dit: 14 %
n'étaient pas Canadiens de souche. Est-ce qu'en général
les immigrants de langue française, par exemple d'Algérie ou du
Viêt-nam, parlent beaucoup de langues?
M. Lallier: Ce que l'on constate effectivement, et je crois qu'il
y a là un point important, c'est que les étudiants qui ne sont
pas de souche québécoise, bien sûr, maîtrisent leur
langue maternelle. Je crois qu'ils maîtrisent assez bien l'anglais et
qu'ils maîtrisent de plus en plus, à cause de la loi 101 et de
l'application de la loi 101, le français. Je tiens à souligner
que les francophones, dans un tel contexte, auront un certain nombre de
difficultés à se comparer, et il y a là un avantage des
allophones sur les francophones de Montréal, du fait qu'ils ont la
maîtrise de plus d'une langue. De ce point de vue là, c'est un
élément important qu'il faudra prendre en compte pour
l'avenir.
M. Cameron: Merci.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. Maintenant, le
député de Sherbrooke, pour une dernière question. (16 h
20)
M. Hamel: Merci, Mme la Présidente. Une brève
question, parce que, malheureusement, le temps ne nous le permet pas. Vous avez
chez vous quelque chose d'assez spécifique, vous avez une formation en
métiers d'art, et vous dites dans votre mémoire qu'après
quelque 10 ans d'expérimentation il y aurait lieu de consolider ce
modèle novateur de la formation collégiale. Pourriez-vous
expliquer davantage ce que vous entendez par «consolider ce modèle
novateur»?
M. Lallier: Oui, je vais inviter Mme Goerlach à
répondre.
Mme Goerlach: Concernant le modèle de métiers
d'art, au collège, nous sommes responsables, bien sûr, du
programme de métiers d'art. Pour dispenser ce programme, nous avons fait
une entente avec une corporation qui est autonome, qui est l'institut des
métiers d'art, et l'Institut des métiers d'art travaille avec ce
qu'on appelle des écoles-ateliers qui, elles, les
écoles-ateliers, dispensent en général les cours de la
spécialisation comme telle en métiers d'art. Ce que nous
considérons actuellement par rapport au programme de métiers
d'art et à la façon dont il est dispensé, c'est que
ça nous donne une certaine souplesse par rapport à l'organisation
des enseignements comme tels et qu'il y a lieu de tirer parti de la souplesse
que nous avons en termes d'engagement de professeurs, d'organisation des
horaires, et qu'il y aurait lieu, ne serait-ce qu'en termes d'organisation des
enseignements, de tirer parti de l'expérience qui est là. Aussi,
ce que nous vous disions tantôt, c'est que nous avons eu l'occasion, avec
le programme de métiers d'art et les écoles-ateliers qui
étaient présentes, de faire en sorte que le programme soit
élaboré par les écoles-ateliers, donc les
représentants des écoles-ateliers, et, en même temps, des
représentants du cégep du Vieux-Montréal, faisant en sorte
que l'on retrouvait, pour élaborer ce programme-là, à la
fois les professeurs de la discipline comme telle et les professeurs qui
donnent ce qu'on appelle des cours de service dans nos cégeps.
M. Hamel: Merci. Ça va.
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup. Alors, Mme
la ministre, en conclusion.
Mme Robillard: Un grand merci à toute l'équipe du
collège du Vieux-Montréal d'avoir pris le temps parce que nous
savons que, pour venir présenter un mémoire en commission
parlementaire, il faut du temps, de l'analyse, de la réflexion et de la
concertation. Alors, merci d'avoir pris ce temps pour venir éclairer les
membres de la commission. Merci.
Une voix: Merci, madame.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. Au revoir, au nom de
tous les membres de la commission de l'éducation, et merci d'être
venus.
Alors, j'inviterais la Fédération des infirmières
et infirmiers du Québec à bien vouloir prendre place
immédiatement, s'il vous plaît.
Alors, j'inviterais la Fédération à prendre place,
Mme Lavallée. Je demanderais un petit peu de silence en arrière,
s'il vous plaît! Alors, Mme Lavallée, qui est la présidente
de la Fédération des infirmières et infirmiers du
Québec, bonjour et bienvenue à la commission de
l'éducation.
Fédération des infirmières et
infirmiers du Québec (FIIQ)
Mme Lavallée (Diane): Bonjour.
La Présidente (Mme Hovington): Si vous voulez nous
présenter vos deux accompagnatrices, s'il vous plaît.
Mme Lavallée: Oui. À ma droite, Marie-Andrée
Comtois, qui est conseillère syndicale à la
Fédération, et, à ma gauche, Thérèse
Théroux, qui est conseillère et coordonnatrice aux secteurs
négociation et tâches et organisation du travail.
La Présidente (Mme Hovington): Merci et bienvenue. Alors,
vous avez 20 minutes pour nous présenter votre mémoire, Mme
Lavallée.
Mme Lavallée: C'est bien. Je veux saluer Mme la ministre,
mesdames et messieurs, et vous remercier d'avoir permis à notre
organisation de se faire entendre dans un débat aussi important. Donc,
je n'entrerai pas dans un préambule plus long et, rapidement, je vais
vous livrer les commentaires de la Fédération dans le cadre de
cette commission.
Si la FIIQ s'intéresse particulièrement à l'avenir
des cégeps, c'est aussi puisque, majoritairement, la majeure partie des
membres que nous représentons ont une formation de type
collégial. On s'intéresse aussi aux propos de cette commission
parce que cette évaluation comporte des enjeux, à notre avis,
très importants, à savoir le droit fondamental à
l'éducation et son exercice et l'éducation comme
déterminant important de la santé. C'est donc à la
lumière de ces enjeux que nous interviendrons aujourd'hui.
Premièrement, nous tenons à souligner les liens essentiels entre
l'éducation et la santé; deuxièmement, la
nécessité d'évaluer l'expérience des cégeps
dans sa globalité, mais toujours en fonction de l'étudiant et de
l'étudiante; troisièmement, ce sera de la formation initiale des
infirmières au cégep qu'on a l'intention de vous entretenir;
quatrièmement, l'importance du cégep dans la scolarisation des
femmes au Québec; cinquièmement, nous aborderons les orientations
que la FIIQ privilégie et, en dernier lieu, bien sûr, nous vous
présenterons nos recommandations.
Nous souhaitons donc mettre en évidence, comme je vous le disais,
en premier lieu, les liens essentiels entre l'éducation et la
santé. Une étude du ministère de la Santé et des
Services sociaux nous apprenait, en 1989, qu'on pouvait dire qu'il existe un
lien important entre la morbidité périnatale et la
scolarité de la mère. Un autre exemple à relever, aussi
important, et qui démontre aussi cette thèse, c'est qu'il existe
aussi un rapport établi entre le bas niveau de scolarité et la
consommation des drogues dures, alors qu'on peut établir une
corrélation aussi entre les personnes hautement scolarisées et de
saines habitudes de vie. Nous en parlons d'ailleurs en page 6 de notre
mémoire.
Parce que de tels liens existent entre éducation et santé,
nous jugeons important d'attirer l'attention des membres de cette commission
sur l'importance aussi de ne pas placer en concurrence ces deux droits, ces
deux principes, en fait, l'accès à l'éducation et
l'accès à la santé. Il ne faudrait surtout pas envisager
d'enlever à l'un pour donner à l'autre, car, à notre avis,
les méfaits constatés chez l'un ont des répercussions chez
l'autre. Notre mémoire s'emploie aussi à le démontrer, au
point 1 particulièrement du mémoire. Aussi, nous nous inscrivons
en faux contre certaines associations de jeunes qui, semble-t-il, durant cette
commission, ont voulu exprimer leur souhait de voir ajouter des crédits
à l'éducation en recommandant d'en puiser à même le
secteur de la santé. D'autre part, la FIIQ privilégie, dans cette
approche d'évaluation des cégeps, une évaluation globale
et, comme on vous disait, centrée sur l'étudiante.
Nous souhaitons que les solutions envisagées, qu'envisagerait de
proposer votre commission iront dans le sens d'une approche volontairement
globale et qui tienne compte de ce qui se passe en amont et en aval de la
formation collégiale. Cela n'infirme en rien la nécessité
de satisfaire aux besoins de formation spécialisée en
adéquation au marché du travail, mais cela éviterait,
quant à nous, le danger d'instaurer une approche trop
compartimentée qui risque d'oublier l'essentiel, en effet, les besoins
de l'étudiante et de l'étudiant. Nous formulons ce souhait en
paraphrasant le slogan qui a été prévu à
l'élaboration de la réforme de la santé: II faudrait,
à notre avis, centrer le système d'éducation
collégial sur l'étudiant, et nous ajoutons
«l'étudiante».
Parlons maintenant de la formation initiale des infirmières au
cégep. Toutes les intervenantes et tous les intervenants du milieu de la
formation en soins infirmiers ont convenu, et ce, à plusieurs reprises,
à l'été 1976 et en 1990, de la pertinence de la formation
initiale en nursing du niveau collégial. Qu'il s'agisse de la commission
Rogers ou du Comité d'étude sur la main-d'oeuvre en soins
infirmiers, communément appelé le CEMOSI, et, enfin, de l'avis de
la FIIQ et de ses membres auprès desquels nous avons fait une
enquête, et bien, toutes et tous s'entendent pour dire que la formation
collégiale est adéquate pour répondre à la
majorité des besoins de la population en matière de santé.
À l'heure actuelle, et selon l'Association des enseignantes et
enseignants en soins infirmiers, 42 collèges offrent cette formation en
nursing.
Nous réaffirmons ici que nous évaluons positivement la
formation de niveau collégial. Les problèmes vécus dans
les établissements de santé, si problèmes il y a, parce
qu'on y fait allusion,
viennent souvent d'une mauvaise utilisation des ressources, du manque
d'encadrement qui est offert aux infirmières stagiaires et de la
valorisation incomplète des tâches de l'infirmière. Et
bien, quant à nous, de la Fédération, le programme de
nursing de 1990 dans les cégeps nous satisfait dans son ensemble. La
formation de niveau cégep en soins infirmiers satisfait à nos
critères essentiels d'accessibilité économique et de
proximité des lieux et de vie et de travail des futures
infirmières. (16 h 30)
En matière de formation en emploi et perfectionnement, la FIIQ
aimerait vous présenter des mesures prévues dans la convention
collective des infirmières, mesures qui ont été obtenues
et préservées au fil des ans par la ténacité des
organisations syndicales. En effet, nous avons su convaincre les employeurs de
la nécessité de prévoir, dans nos conventions collectives,
des dispositions qui concernent la formation en cours d'emploi et le
perfectionnement.
Nous trouvons important de porter à votre connaissance les
mécanismes qui ont été développés dans notre
secteur car, aussi perfectibles soient-ils, ils peuvent tout au moins venir
enrichir les débats de la présente commission entourant les liens
à créer entre les responsabilités du réseau de
l'éducation et celles des employeurs, quand il s'agit d'élargir
ou de compléter la formation scolaire.
Le domaine de la santé et des soins infirmiers représente
des milieux qui évoluent et se transforment très rapidement,
notamment par l'introduction des nouvelles technologies ou de nouvelles
approches. Aussi est-il important que les infirmières puissent se
ressourcer, qu'elles maintiennent leurs connaissances et leurs habiletés
et, au besoin, qu'elles acquièrent aussi des connaissances
spécialisées, en vue non seulement de maintenir, mais aussi
d'améliorer la qualité de leurs services à la
population.
Eh bien, pour les infirmières, il existe plusieurs moyens pour y
arriver. Qu'on pense à l'autoformation, à la formation en cours
d'emploi et au perfectionnement. La formation en cours d'emploi, elle comprend
deux volets: les activités d'orientation, qui sont destinées aux
nouvelles embauchées, et les activités de mise à jour, qui
sont rendues nécessaires par les exigences inhérentes à
l'exercice des fonctions ou, à l'occasion, à l'introduction de
nouveaux appareils ou de nouvelles technologies. Eh bien, ces activités
sont à la charge de l'employeur, et leur durée est
limitée. Pour défrayer les coûts de la formation en cours
d'emploi, un budget est négocié à chaque convention
collective.
Le perfectionnement, quant à lui, il permet d'acquérir une
compétence accrue au moyen d'une formation qui est plus approfondie,
dans les domaines de discipline qui sont reliés à la dispensation
des services ou à l'organisation administrative. Selon les types, il
peut être de courte durée ou avoir une durée maximale de
deux sessions académiques à temps plein. Là encore, un
budget est négocié à chaque convention et, à la
dernière négociation, la FIIQ en a accru l'accessibilité.
Mais, même si plus d'infirmières sont admissibles
présentement, il faut bien comprendre que toutes ne peuvent en
bénéficier, car les budgets - vous le constatez dans chacun de
vos ministères - sont limités.
D'autre part, la FIIQ, vous le savez, est une des plus importantes
organisations de femmes syndiquées, et elle regroupe donc 45 000
membres. C'est dire que, pour nous, le rôle prépondérant
qu'ont joué et que jouent encore les cégeps en matière
d'accès des femmes à un niveau plus élevé de
scolarisation nous importe grandement. Cette scolarisation a contribué,
tout comme notre travail pour la reconnaissance syndicale des
infirmières, à la valorisation du travail infirmier et, en
général, à la reconnaissance de la valeur du travail au
féminin.
Nous abordons maintenant les orientations que la FIIQ privilégie.
Pour nous, il importe que ces orientations soient faites en respect du principe
de l'accessibilité sous tous ses aspects: l'accessibilité
économique, donc, la gratuité; l'accessibilité
géographique, des cégeps partout au Québec;
l'accessibilité culturelle, donc, soucieuse du respect des gens et de
leurs besoins, selon les différents milieux de vie et de travail. Les
acquis de l'éducation au niveau cégep doivent être
maintenus, mais doivent être bonifiés en se référant
à une approche globale de développement. Cette approche,
répétons-le, doit être centrée sur
l'étudiante et sur l'étudiant et, selon nous, il faudrait donner
la possibilité aux adultes aussi de compléter leur formation,
tout comme de donner la possibilité aux décro-cheurs de notre
système de réintégrer le système.
En terminant, je veux donc voir avec vous nos recommandations. Comme
nous le précisons au début de notre allocution, les propositions
qui vont suivre sont loin d'être exhaustives. Elles représentent,
par ailleurs, des pistes de solution ou des balises pour la mise en place de
correctifs qu'il nous semble important de rappeler ici.
Tout d'abord, il nous apparaît essentiel de répéter
que l'application des principes, comme je vous disais tantôt,
d'accessibilité et de gratuité dans le domaine de la
santé, comme dans le domaine de l'éducation, constitue un acquis
démocratique sur lequel une société comme la nôtre
ne peut reculer. La FIIQ propose donc que toute modification, réforme ou
changement apporté dans le réseau de l'éducation le soit
dans le respect intégral des principes de gratuité et
d'accessibilité de l'éducation, pour tous les citoyens et toutes
les citoyennes du Québec. Pour que cette accessibilité ne
devienne pas une lettre morte, nous proposons que des mesures soient mises ou
remises en place assurant que, partout au Québec, dans chaque
région, un
éventail large de programmes soit offert. Des efforts
supplémentaires devront également être dirigés vers
les décrocheurs et les décrocheuses, vers ceux et celles pour qui
l'école ne voulait ou ne veut plus rien dire.
On propose aussi que des programmes et surtout des approches
spécifiques soient offerts aux jeunes qui n'ont pas la formation
adéquate pour pouvoir travailler et se développer dans la
société québécoise. Pour éviter qu'un tel
phénomène ne persiste, nous proposons qu'au cégep
même, pour ceux et celles qui y sont actuellement ou qui demain y
entreront, des structures d'accueil et de support soient accessibles et que les
ressources nécessaires y soient consacrées. Dans un souci
d'arrêter et de faire des réformes à la pièce et,
compte tenu des liens qui devraient être resserrés entre les
différents niveaux, que ce soit le niveau primaire, secondaire,
collégial et universitaire, nous proposons que la présente
commission donne naissance à une instance beaucoup plus large,
regroupant des représentants et des intervenants de toutes les
entités qui font vivre au quotidien notre système
d'éducation.
En tant que fédération d'infirmières
préoccupée par la formation de ses membres et surtout convaincue,
également, que leurs besoins à ce niveau ne sont pas si
différents de ceux et de celles qui pratiquent une autre profession, il
nous semble important, sinon essentiel, de modifier l'approche actuelle
concernant la formation professionnelle. Une fois la formation initiale acquise
au cégep ou à l'université, il nous apparaît que,
loin d'être terminé, le processus de formation devrait, au
contraire, pouvoir se poursuivre. La formation en continuum nous tient à
coeur et, déjà, dans notre milieu, nous avons des outils pour y
pallier quelque peu, mais nous pensons qu'un meilleur arrimage entre la
formation collégiale et la formation universitaire devrait aussi ouvrir
encore plus de possibilités de progression dans la formation et ce, en
tenant compte et même en partant de l'expérience acquise dans la
pratique.
Pour ce faire, la FIIQ, au terme de sa consultation sur la formation
initiale, en est arrivée à la conclusion qu'il est
nécessaire que l'infirmière formée au collégial
puisse augmenter ses connaissances, si elle se destine à un rôle
élargi, ou qu'elle puisse compléter sa formation, si elle
s'oriente vers l'enseignement collégial, l'enseignement universitaire ou
la recherche. La FIIQ propose donc que les programmes universitaires soient
aménagés et que le rôle de la formation universitaire en
sciences infirmières soit réévalué pour mieux
répondre aux besoins. Considérant également que
l'accessibilité universitaire doit se faire en tenant compte des acquis
de formation antérieure et que la reconnaissance d'équivalences
est susceptible de favoriser l'attraction d'infirmières et de faciliter
l'accès à la formation complémentaire, nous proposons donc
une reconnaissance en équivalences universitaires pour les acquis
«expérientiels» des infirmières.
Finalement, nous espérons que les changements qui seront
apportés au système d'enseignement collégial prendront
place dans le respect des intervenants et des intervenantes qui, il faut bien
le dire ici, ont accompli et continuent d'accomplir un travail énorme
avec des moyens souvent très restreints. Ils font face à des
besoins sans cesse croissants et à une clientèle de plus en plus,
et avec raison d'ailleurs, exigeante. Dans cette optique, la FIIQ propose que
les différents intervenants et les intervenantes salariés du
réseau soient impliqués, via leur organisation syndicale, dans
les changements qui seront apportés au réseau de
l'éducation.
En guise de conclusion, la Fédération des
infirmières et infirmiers du Québec aimerait attirer votre
attention sur le fait que l'évolution de la société est
telle que les changements technologiques sont parfois si importants et que les
moyens d'information sont si efficaces que nous sommes, tous et toutes, des
étudiants et des étudiantes en puissance. Dans cette perspective,
il convient d'insister sur le caractère fondamental du droit à
l'éducation et de l'importance, dans une société qui se
veut démocratique comme la nôtre, de faire en sorte que les
ressources pour une éducation permanente soient non seulement
accessibles à tous et à toutes, mais attirantes pour l'ensemble
de la population québécoise. Merci.
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup, Mme
Lavatlée.
Mme la ministre, vous avez la parole.
Mme Robillard: Merci, Mme la Présidente. Je suis heureuse
d'accueillir la Fédération des infirmières et infirmiers
du Québec, d'autant plus que, parmi vos rangs, vous comptez plusieurs
finissants et finissantes du collégial, n'est-ce pas? Donc, je trouve
que vous êtes très bien placée pour venir nous faire des
recommandations, et vous l'avez souligné dès le point de
départ, Mme Lavallée, que vous reconnaissez la qualité de
la formation qui est dispensée à l'ordre collégial pour
les infirmières et pour les infirmiers. (16 h 40)
J'aborderai d'abord avec vous une première question plus
générale. Étant donné la profession que vous
exercez, vous êtes très bien placée pour faire le lien
entre l'éducation et la santé, et vous l'avez fait dès le
point de départ, dans votre mémoire. Vous nous invitez à
la prudence quant à l'accessibilité aux deux réseaux,
étant donné les liens qui existent entre les deux. Mais vous avez
souligné très rapidement un commentaire sur tes objectifs
santé poursuivis au collégial, et j'aimerais ça vous
entendre.
Vous savez présentement que, pour la
majorité de nos étudiants et de nos étudiantes au
niveau de l'ordre collégial, à l'exception de ceux qui demandent
une dispense de cours, la majorité des étudiants et des
étudiantes doivent suivre obligatoirement des cours d'éducation
physique avec des objectifs santé. Je ne sais pas si vous êtes en
mesure, d'abord, d'émettre un jugement sur ces objectifs-là.
Est-ce que vous les trouvez clairs, précis, correspondant à la
réalité, étant donné que vous connaissez aussi tous
les défis de la santé, je dirais? Et est-ce que vous jugez que
les moyens qui sont utilisés sont les bons moyens pour atteindre ces
objectifs-là? Est-ce que c'est une question à laquelle vous avez
réfléchi?
Mme Lavallée: Non, on n'a pas réfléchi
à l'ensemble de toutes ces questions. Par contre, pour ce qui est de la
formation et permettre, et favoriser, même, l'éducation physique,
je pense c'est clair, quand on associe... quand toutes les études,
aussi, font la corrélation entre l'importance de l'exercice physique et
le maintien d'une bonne santé, même son développement, on
ne peut pas s'y opposer. Au contraire, je pense qu'on doit favoriser, dans nos
maisons d'enseignement, tout ce qui favorise un meilleur équilibre pour
la santé d'un individu. L'exercice physique, à notre avis, bien
sûr, est un élément très prépondérant
qu'on devrait favoriser dans l'ensemble du réseau de l'enseignement.
Mme Robillard: Mais avez-vous eu l'occasion d'examiner les
objectifs qui sont poursuivis, dans ce secteur-là, au niveau du
réseau collégial dans son ensemble?
Mme Lavallée: Non, on n'a pas fait d'étude
spécifique à ce niveau-là.
Mme Robillard: Non? Parfait. Alors, j'aborderai peut-être
avec vous, Mme Lavallée, la question de la nécessité de
perfectionnement des infirmières et des infirmiers. Je pense que vous
dites très clairement que vous êtes dans une profession où
les changements technologiques sont très rapides et qu'il faut donc que
vous soyez à date au niveau des connaissances en tant que telles. D'un
côté, vous reconnaissez aussi très clairement que
l'accès à la profession doit passer par l'ordre
collégial.
Alors, j'essaie de voir. Au niveau de votre nécessité de
perfectionnement, est-ce que vous considérez que ce
perfectionnement-là doit être donné à l'ordre
collégial en tant que tel? Est-ce que le réseau collégial
devrait s'organiser pour offrir des sessions de perfectionnement aux
infirmières ou aux infirmiers, ou est-ce que ça devrait
être plutôt à l'ordre universitaire? Comment voyez-vous
ça présentement, et que font les infirmières pour se
perfectionner?
Mme Lavallée: Bon, présentement, ce qui est
prévu, c'est qu'il y a des perfectionnements de courte durée ou
de longue durée, et c'est pour vraiment approfondir les connaissances
déjà existantes. Je peux vous donner l'exemple. Dans des milieux
plus spécialisés comme les soins intensifs, des
infirmières, par l'avènement, bien sûr, de nouvelles
technologies, mais de nouvelles approches en santé, ressentent aussi un
besoin d'aller approfondir les connaissances qui leur permettent
déjà d'exercer quand même leur profession, et ça
peut être de niveau collégial ou universitaire,
dépendamment des besoins. Il y a aussi de la formation spécifique
qui est donnée pour ce qui est de permettre aux infirmières
d'avoir des critères, des qualifications plus importantes au niveau
administratif. Eh bien, c'est souvent de niveau universitaire pour ce qui est
de cette formation-là de perfectionnement.
Mme Robillard: mais est-ce que vous êtes satisfaite des
cours offerts présentement aux divers ordres d'enseignement, des cours
de perfectionnement?
Mme Lavallée: À date, les commentaires qu'on
reçoit et ce qu'on peut constater, c'est que les gens sont très
satisfaits et, dans le milieu du travail, le fait d'être allé
chercher ce type de perfectionnement permet de voir vraiment une
différence, là, dans l'approche au travail et dans les
résultats qu'on souhaitait obtenir. À date, ça semble bien
satisfaisant. Il va sans dire qu'il y a quand même toujours des
améliorations à apporter dans tous les programmes mais, de
façon générale, ça satisfait très bien aux
besoins qui ont été exprimés.
Mme Robillard: Alors, outre le fait, Mme Lavallée, que
vous indiquez que vous êtes satisfaits de la qualité de la
formation qui est offerte aux infirmiers et aux infirmières, vous n'avez
pas abordé de façon spécifique la formation
générale qui est donnée dans le cadre de la formation des
techniques infirmières à l'ordre collégial. J'aimerais
ça savoir ce que vous en pensez. Étant donné justement que
vous êtes une profession dans laquelle il y a beaucoup de changements
technologiques, qui a eu aussi beaucoup de développements au plan
scientifique, la question de l'éthique dans le monde médical est
devenue de plus en plus une priorité, je dirais, à regarder,
étant donné tous ces développements. Qu'est-ce que vous
diriez si, au niveau de la formation générale en tant que telle,
il y avait des cours d'éthique qui seraient donnés?
Mme Lavallée: Nous, on considère que,
présentement, la formation collégiale, du type collégial
telle qu'elle est formulée permet vraiment aux infirmières
d'aller sur le marché du travail, d'être très efficaces et
d'avoir la formation adéquate pour répondre aux besoins. Ce qu'on
pense, par contre, c'est qu'avec tout
l'avènement des nouvelles technologies qui arrivent d'une
façon très rapide, c'est davantage au niveau de l'actualisation
des connaissances dans le milieu de travail qu'on devrait axer... pour
favoriser une meilleure formation qui s'adapte aux besoins changeants du
marché du travail. La notion d'éthique, telle que vous la voyez,
j'aimerais que vous l'expliquiez davantage parce que, pour nous, si c'est pour
permettre d'être mieux adaptés au marché du travail avec
l'avènement des nouvelles technologies toujours grandissantes, nous, on
pense que c'est davantage dans le milieu du travail que ça devrait se
faire par des programmes et des subventions qui permettent l'actualisation des
connaissances, selon les milieux et les spécialités.
Mme Robillard: Et non pas d'avoir, de façon
particulière, des cours donnés dans ce domaine-là.
Mme Lavallée: Au niveau collégial,
présentement, pour ce qui est de la formation infirmière, il y a
une formation générale de base et, quand même, des cours de
spécialité dans les domaines tels que la pédiatrie,
l'obstétrique et dans différents champs d'intervention. Nous, on
considère que la formation générale de base qui est
donnée permet aux gens d'aller oeuvrer dans différents secteurs
quand même très diversifiés, et là on compte sur les
employeurs, quand arrivent les infirmières du niveau collégial ou
que ce soit même du niveau universitaire, pour être en mesure de
favoriser une bonne orientation dans rétablissement concerné et
de donner la formation spécifique de façon plus pointue dans
certains départements, parce qu'il est clair que la formation, je peux
vous dire, qu'elle soit du niveau universitaire ou collégial, ne permet
pas, sans formation plus pointue, soit de perfectionnement ou d'actualisation
de connaissances, de faire en sorte que l'infirmière puisse tout faire
et tout savoir. Mais la formation générale de base nous permet
d'avoir les qualificatifs nous permettant d'aller oeuvrer dans les
différents secteurs d'activité qu'on retrouve dans le
réseau de la santé.
Il y a une information complémentaire que Thérèse
Théroux veut ajouter.
Mme Théroux (Thérèse): Bon, bien, ça
va un petit peu dans le sens de ce que disaient les cégeps. Je pense
qu'aujourd'hui, avec l'évolution des technologies, puis tout ce qui s'en
vient, je veux dire, le fait que partout, dans tous les domaines où il y
a de la technologie qui évolue, les gens ont à s'ajuster et que,
dans ce sens-là, le niveau de formation, en tout cas, de base dont ils
pariaient sur les acquis culturels que tout étudiant devrait avoir, je
pense que ça réfère à une bonne formation
permettant à tout le monde... ensuite de ça, quand il y a une
formation qui est assez adéquate et permettant d'exercer des jugements,
de pouvoir compléter en milieu de travail une formation plus pointue
dans des domaines où la technologie évolue.
Ça fait que, dans ce sens-là, je pense que ce qu'on a
à date, je veux dire comme cours de base... il y a, bien sûr, des
fois, à être ajusté, compte tenu de nouvelles technologies
qui arrivent ou, au point de vue éthique, compte tenu de nouvelles
recherches qui sont faites et tout ça, mais, cependant, une fois que
ça a été bien acquis au niveau de la formation de base, il
faut mettre en place, puis même si on a déjà des choses
dans la convention collective, des mécanismes un peu partout qui vont
permettre en milieu de travail, je veux dire, de parfaire et qu'il y ait une
meilleure adéquation entre les besoins, finalement, et peu importent les
catégories de travailleurs, de travailleuses et les services qu'ils
dispensent...
Je pense que, nous autres, on a peut-être, à ce
niveau-là, eu un petit peu plus. Compte tenu que comme c'est un service
essentiel et que les employeurs devaient y répondre, ils ont
peut-être privilégié un petit peu les infirmières
là-dessus. Mais je pense qu'on se rend compte aujourd'hui que, dans
l'économie dans laquelle nous vivons un peu partout, quand on manque de
travailleurs spécialisés, cet apport-là, puis cette
collaboration entre les collèges d'enseignement, l'université et
les entreprises devraient être faits parce que c'est aussi profitable
pour l'ensemble de la société, je veux dire. Ça fait que
c'est dans ce sens-là que, nous autres, on dit qu'on est un petit peu
privilégiées, mais ça doit continuer parce qu'il y a
encore des choses qui sont à faire à ce niveau-là. (16 h
50)
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup. M. le
député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Oui. Je vous salue d'une façon
particulière, Mme Lavallée, ainsi que Mme Comtois et Mme
Théroux. Que la Fédération des infirmières et
infirmiers du Québec profite de l'occasion pour venir nous donner son
point de vue, c'est intéressant. Vous avez fait quelques rappels qui ne
me déplaisent pas, en particulier, de rappeler qu'il y a un lien
très étroit, effectivement, entre l'éducation et la
santé, peu importe là où on l'applique. Vous l'avez
démontré dans votre mémoire. Je pense que c'est
intéressant de rappeler ce lien-là.
Je n'ai pas de trouble non plus avec le lien que vous avez fait en
disant que la Fédération des infirmières et infirmiers du
Québec voulait exprimer aux membres de cette commission la
nécessité de regarder le système de l'éducation
dans son ensemble et pas seulement dans son volet intermédiaire de
niveau cégep, ou encore dans le volet de l'adéquation au
marché du travail. C'est une réalité qu'il est bon de
rappeler constamment.
On l'avait fait, nous, au début de la
commission, en disant que c'est évident qu'on ne peut pas
regarder un ordre d'enseignement uniquement dans sa valeur intrinsèque,
si on veut lui apporter les bons correctifs, parce qu'il y a
énormément de liens, de passerelles et de situations qui exigent
que certains correctifs soient appliqués à l'ordre du secondaire
pour un ordre collégial en meilleure santé et, effectivement,
aussi, des liens très étroits avec l'ordre universitaire.
J'étais heureux également de constater, à la toute
fin, que vous nous rappelez que, compte tenu de la technologie et des moyens de
communication, et, si on peut se l'appliquer, à un certain
rafraîchissement au niveau de l'âge, nous sommes toujours
d'éternels jeunes étudiants en puissance. Alors, c'est
intéressant pour ceux qui se sentent vieillir trop vite.
Deux choses que je voudrais apprécier avec vous. À la page
10, dans votre mémoire, à moins que je me trompe, vous avez
porté un bon jugement d'appréciation concernant le nouveau
programme qui a été implanté en 1988. La question n'est
pas tellement compliquée. Je voudrais savoir si c'est parce que vous
trouvez que le nouveau programme offert par rapport à ce qu'on appelle
la pratique de la vocation ou de la fonction infirmière, de la pratique
quotidienne... est-ce que vous croyez que le nouveau cours a plus de liens
directs avec l'exercice de la profession, et c'est dans ce sens-là que
vous trouvez une satisfaction parce qu'il serait plus adapté à la
réalité de la profession?
Mme Lavallée: Bon... plus adapté, c'est qu'il y a
quand même des heures de stage plus importantes en quantité que ce
qu'on retrouvait avant. Je pense que c'était une lacune. Les stages
étaient quand même très bien adaptés au
marché du travail, mais il y a vraiment la quantité d'heures qui
est aussi très importante pour préparer les gens à
être aptes à rentrer sur le marché du travail. Et la
réforme, telle qu'elle a été faite pour ce qui est de la
formation infirmière, à notre avis, a été largement
améliorée et favorise davantage l'intégration sur le
marché du travail.
Ceci étant dit, ça n'exclut pas le besoin imminent d'une
bonne formation et d'une bonne initiation à l'embauche. Quand on arrive
sur le marché du travail, peu importe le secteur d'activité, que
ce soit un centre hospitalier, un centre d'accueil ou un centre hospitalier
universitaire, l'infirmière qui sort, malgré cette
formation-là qui est de beaucoup améliorée, a besoin d'une
bonne intégration sur le marché du travail.
M. Gendron: Merci. Dans votre mémoire, vous parlez que
vous souhaiteriez que les structures d'accueil et de support soient accessibles
à celles et ceux qui, éventuellement, envisagent de faire leur
cours au niveau du cégep. À part la recommandation, ce n'est pas
facile pour nous, en tout cas pour moi - je ne parlerai pas pour les autres -
ce n'est pas facile d'essayer d'imaginer ce que vous voulez dire
précisément quand, à la page 17, vous dites: Pour ceux et
celles qui y sont actuellement ou qui demain y entreront, en formation, ou tout
simplement qui feront le choix d'aller suivre un cours de techniques
infirmières, que des structures d'accueil et de support soient
accessibles et que les ressources nécessaires y soient
consacrées.
Est-ce que vous avez des exemples en tête? Est-ce que vous faites
allusion à quelque chose de plus particulier que nous ne voyons pas et
qu'il serait intéressant que nous entendions?
Mme Lavallée: C'est au niveau de l'aide pédagogique
que reçoivent les étudiants et les étudiantes à
leur entrée au niveau collégial. On sait que les aides
pédagogiques ont peut-être entre 150 et 200 étudiants, pour
ce qui est de certains cégeps, à soutenir et à guider dans
leur entrée au niveau collégial. Nous, ce qu'on favorise, c'est
qu'il y ait plus de gens pour s'occuper de plus d'étudiants, en fait,
pour augmenter le ratio d'aide pédagogique pour le nombre
d'étudiants.
M. Gendron: Merci. Je tenais à ce que vous le rappeliez
parce que c'a été signalé par plusieurs. Ce qu'on appelle
communément les API. Ils ne sont pas assez nombreux, et c'est des
mesures de soutien. Il y a plusieurs jeunes qui prétendent que, si ces
mesures de soutien et d'encadrement ou les mesures assistées
étaient plus nombreuses, ça éviterait à un certain
nombre de celles et ceux qui en font le choix de décrocher.
Mme Lavallée: Voilà, c'est pour prévenir le
décrochage.
M. Gendron: Voilà. Immédiatement après,
à la même page, toujours pour mieux comprendre, vous dites: La
FIIQ propose que la présente commission donne naissance à une
instance beaucoup plus large, regroupant des représentants et des
représentantes d'intervenants de toutes les entités qui font
vivre au quotidien notre système d'éducation. Est-ce que c'est
dans la même logique, que je rappelais au début, que vous auriez
voulu qu'on fasse une évaluation plus large de l'ensemble des ordres
d'enseignement et de tout le système d'éducation au
Québec? Est-ce que c'est dans ce sens-là, cette
recommandation-là?
Mme Lavallée: II est clair qu'on trouve que, oui, on
devrait être en mesure de regarder l'ensemble du système
d'éducation, autant primaire, secondaire, collégial
qu'universitaire. À notre avis, l'éducation, c'est un tout. Ce
qu'on trouverait important aussi, c'est peut-être de
référer les différentes études de cette commis-
sion à un comité de travail qui pourrait être
composé du Conseil supérieur de l'éducation, du Conseil
des collèges, des représentants des enseignants, des
étudiants, des recommandations mêmes du ministère, pour que
ces gens-là soient en mesure de faire une analyse, une synthèse
et, éventuellement, de proposer des recommandations au gouvernement,
recommandations qui seraient rendues publiques, donnant l'occasion à
différents groupes de se faire entendre sur ces diverses, ces
dernières recommandations qui seraient issues d'un comité de
travail plus large.
M. Gendron: Oui, c'est parce que c'est important... Oui, je me
doutais bien que c'était dans la logique de quelques autres qui ont
suggéré ça. Mais je veux vous rappeler que la ministre a
indiqué clairement que ça ne serait pas la voie qu'elle entendait
suivre. C'est son droit, c'est son choix. Mais nous, on a le choix de rappeler
qu'effectivement il pourrait être légitime, logique que, suite aux
travaux de cette commission, il y ait un groupe un peu plus
spécialisé qui ait plus d'outils en main pour évaluer
certains consensus, les apprécier à travers certains filtres,
avant de sauter dessus. C'est ce que je crois comprendre, que vous souhaiteriez
qu'il y ait un petit peu plus de regard...
Mme Lavallée: Ça serait pour approfondir
l'étude...
M. Gendron: C'est ça.
Mme Lavallée: ...et être en mesure de faire des
recommandations avec...
M. Gendron: Un peu plus larges avant de sauter tout de suite sur
la rétention de conclusions et que l'instance qui ferait ça, le
gouvernement, prendrait ça à son compte et resoumettrait
peut-être à une vaste consultation, mais au moins une
appréciation des organismes ou des groupes intéressés dans
la rétention de ce qui serait...
Mme Lavallée: Effectivement, c'est une étape
supplémentaire qu'on favoriserait avant l'adoption de recommandations
finales.
M. Gendron: J'aurais une autre chose que je voudrais
apprécier avec vous. Présentement, est-ce que vous croyez que,
dans les formations qui sont offertes au collégial, au niveau des soins
infirmiers, il y a du chevauchement entre l'ordre collégial et l'ordre
universitaire? Dans la perspective où, moi, je suis un cours de soins
infirmiers et que je voudrais modifier mon orientation ou la poursuivre
à l'université, quelle est l'attitude, actuellement, du milieu
universitaire en termes de reconnaissance des acquis, des équivalences,
crédits pour certains cours?
Est-ce que vous croyez que, présentement, au niveau où je
l'illustre, il n'y a pas trop de problèmes ou il y a des
problèmes importants dont vous voudriez nous saisir?
Mme Lavallée: À l'heure actuelle, il n'y a pas de
reconnaissance d'acquis d'expérience pour avoir accès au niveau
universitaire. Il est clair que les infirmières de cours
collégial peuvent aller suivre une formation universitaire et obtenir un
bac par l'équivalent de trois certificats, mais il n'y a pas de
reconnaissance d'acquis. Donc, pour une infirmière qui a fait trois ans
de cours collégial, pour obtenir un cours, un premier niveau
universitaire, donc, ça lui prend trois ans supplémentaires.
Donc, elle se retrouve avec six ans de formation, après le secondaire V,
pour obtenir un premier niveau universitaire.
Nous, ce qu'on pense, c'est que la seule voie d'accès devrait
être le cours collégial, et le cours universitaire est un cours
qui serait complémentaire pour approfondir certaines connaissances ou
permettre à des infirmières qui veulent s'orienter, soit dans le
secteur de la recherche et de l'éducation collégiale ou
universitaire, d'avoir accès à ces cours-là. Ce qu'on
recommande, c'est, bien sûr, que l'infirmière qui a fait son cours
au collégial, qui a de l'expérience, puisse y avoir accès
et qu'on reconnaisse ces acquis-là pour ne pas qu'elle ait à
faire trois ans d'université pour obtenir le premier niveau
universitaire.
M. Gendron: Concernant, éventuellement,
l'évaluation du programme techniques infirmières, est-ce que vous
avez des suggestions si... Et, là, je ne dis pas qu'il faut le
réévaluer, je ne sais pas. Je pose juste la question, si on
devait faire le choix de l'évaluer, puis dire: Bien, il faut
procéder à une évaluation de ce cours-là, est-ce
que vous croyez que ça devrait être les associations
professionnelles, un organisme externe d'accréditation, la Corporation
professionnelle des infirmières et infirmiers du Québec? Comment
vous voyez ça? Avez-vous une opinion là-dessus pour l'instance
qui serait la plus appropriée ou habilitée pour porter un
jugement concernant l'évaluation du programme? (17 heures)
Mme Lavallée: Je pense que l'évaluation du
programme, s'il y a lieu de la faire, il faut rassembler les intervenants
concernés, à mon avis: les enseignants, des représentants
des étudiants, bien sûr, des organisations syndicales et les
corporations. Je pense qu'il faut mettre à contribution l'expertise et
l'évaluation de chacun des intervenants concernés et
préoccupés par la question de l'éducation dans une
profession très spécifique.
M. Gendron: Ça, vous voyez plus de les impliquer que
quelque chose d'externe?
Mme Lavallée: Bien oui, à l'heure actuelle oui,
vraiment.
M. Gendron: Merci.
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup. M. le
député de Sherbrooke.
M. Hamel: Merci, Mme la Présidente. J'aurais
peut-être une couple de questions. Dans votre chapitre sur
l'accessibilité à la gratuité, vous signalez un peu,
à la page 15, que la société doit donc absolument trouver
les moyens de sortir de ce cercle vicieux qui fait que les
inégalités économiques entraînent des
inégalités au niveau de la santé et de l'éducation.
Avez-vous des moyens à nous suggérer?
Des voix:...
Mme Lavallée: On vous suggère des commissions sur
la fiscalité, entre autres. Je pense qu'il y a des débats de
société qu'on a à faire. Il n'y a pas de solution miracle,
mais on a, je pense, tous ensemble à s'asseoir, et je pense qu'il serait
urgent qu'il y ait quelque chose qui soit mis de l'avant par les dirigeants en
place, pour qu'on s'assoie tout le monde ensemble pour tenter de trouver des
solutions. Dans un contexte économique aussi difficile, je pense qu'on
ne peut pas fermer les yeux sur l'augmentation du phénomène de
pauvreté, qui est grandissant et qui entraîne des
inégalités sociales, et entraîne aussi des
inégalités quant au niveau de la santé de la
population.
Dans la seule région de Montréal, dépen-damment du
quartier où on se situe, il y a un indice de mortalité qui peut
varier entre 5 à 10 ans, si tu es né à Westmount ou
à Saint-Henri. Je pense que la question économique est au coeur
de la préoccupation concernant la santé de la population et je
pense que c'est tout à fait prioritaire qu'on s'en occupe, au même
titre que l'éducation.
M. Hamel: Très bien. Vous dites aussi, à la page
17, que la FIIQ propose donc que des programmes, mais surtout des approches
spécifiques soient offerts aux jeunes qui n'ont pas la formation
adéquate pour pouvoir travailler et se développer dans la
société québécoise. Quelles approches?
Mme Lavallée: En tout cas, ce qu'on pense, c'est qu'il
faut se préoccuper particulièrement des jeunes qu'on nomme aussi
des décrocheurs ou des gens qui n'ont pu, pour toutes sortes de raisons
d'ordre économique, suivre des formations. On sait que certaines
formations ne sont pas accessibles dans certaines régions, que les
jeunes doivent aller à l'extérieur. Il y a des contraintes
économiques aussi à cela. Certains doivent travailler pour avoir
accès à l'éducation.
Bien qu'on sache qu'on a un système qui est passablement
universel, il reste que, quand on doit aller à l'extérieur de son
coin pour étudier, ça entraîne des coûts importants.
Donc, je pense qu'il faudrait être en mesure de se préoccuper de
toute la problématique qui entoure la possibilité donnée
aux jeunes de poursuivre des cours de niveau collégial.
M. Hamel: C'est une spécificité assez
générale. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup. Mme la
ministre.
Mme Robillard: Merci, Mme Lavallée et vos collaboratrices.
Nous vous remercions d'être venues témoigner en commission
parlementaire sur l'enseignement collégial. Je pense que
l'expérience que vous avez de cette formation-là vous-mêmes
va sûrement nous apporter des éclairages pour la suite de la
commission parlementaire. Merci.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, merci, au nom des
membres de la commission, d'être venues nous présenter votre
mémoire, Mme Lavallée, Mme Comtois et Mme Théroux. Bon
retour.
Alors, j'inviterais maintenant la Chambre de commerce de la Rive-Sud
à bien vouloir prendre place immédiatement, s'il vous
plaît.
Alors, la commission de l'éducation poursuit ses travaux avec la
Chambre de commerce de la Rive-Sud, avec le président, M. Jacques
Goyette. C'est vous? Bonjour, bienvenue à la commission.
M. Goyette (Jacques): Bonjour.
La Présidente (Mme Hovington): M. René Desjeans,
premier vice-président, bonsoir, et Mme Louise Collignon, directrice
générale.
Mme Collignon (Louise): Bonsoir.
La Présidente (Mme Hovington): Bonsoir. Alors, c'est M.
Goyette qui sera le porte-parole.
M. Goyette: C'est ça.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, vous avez 20
minutes, M. Goyette, pour nous présenter votre mémoire.
Chambre de commerce de la Rive-Sud
M. Goyette: Alors, merci, Mme la Présidente, Mme la
ministre, Mmes et MM. les députés.
La Chambre de commerce de la Rive-Sud, en raison de l'importance qu'elle
accorde à la formation, ne pouvait manquer l'occasion de se
prononcer à cette consultation sur l'enseignement
collégial. Tout d'abord, j'aimerais, Mme la Présidente, vous
situer quelque peu notre organisme.
La Chambre de commerce de la Rive-Sud de Montréal est la
quatrième en importance au Québec avec plus de 1600 membres
venant de tous les secteurs de l'activité économique. La Chambre
a une mission de représentation, de sensibilisation et
d'éducation de ses membres, mais son action est d'abord orientée
vers le développement économique. Le territoire couvert par notre
association d'affaires comprend 11 villes. Je me permets de vous les
énumérer, soit les villes de Boucherville, Brossard, Candiac,
Greenfield Park, La Prairie, Lemoyne, Lon-gueuil, Sainte-Julie, Saint-Hubert,
Saint-Philippe et Saint-Lambert. Ce territoire a connu tout de même un
développement accéléré, au cours des 30
dernières années, pour devenir un des pôles de
développement les plus dynamiques de la région de
Montréal, et nous en sommes fiers.
Ces 11 municipalités comptent maintenant environ 500 000
habitants, suite à une explosion démographique sans
précédent. C'est une population scolarisée, aisée
et productive qui vit sur la Rive-Sud. Notre territoire compte un grand nombre
de PME et profite de la présence de très grandes entreprises dans
plusieurs secteurs clés permettant à des réseaux de
sous-traitance de se développer.
Le secteur manufacturier est particulièrement bien
diversifié. Le secteur tertiaire connaît un développement
phénoménal depuis plusieurs années. Dans le domaine de
l'enseignement supérieur et de la recherche, on peut compter, notamment,
sur la présence de deux cégeps, c'est-à-dire le
collège Édouard-Montpetit et le collège régional
Champlain, d'un centre de services de l'Université de Sherbrooke, qui
est situé à Longueuil, du Conseil national de recherches du
Canada, qui est à Boucherville, et de l'Agence spatiale canadienne,
à Saint-Hubert.
Permettez-moi, maintenant, Mme la Présidente, de situer les
paramètres qui sont à la base de notre réflexion. C'est en
tant qu'association d'affaires qui regroupe des dirigeants d'entreprises qui
ont des besoins particuliers en matière de main-d'oeuvre, les nouveaux
diplômés, et de perfectionnement de leurs salariés que nous
voulons nous faire entendre à la présente commission
parlementaire. De plus, plusieurs de nos membres sont également
concernés par les cégeps en tant que parents d'enfants qui
fréquentent ces établissements.
Nos membres s'intéressent à la formation et au
perfectionnement de la main-d'oeuvre au point où, pour la
deuxième année consécutive, nous en faisons notre
préoccupation centrale pour 1992-1993. À cet effet, je me permets
de vous souligner que nous avons produit deux séries
télévisées éducatives. Nous avons fait plusieurs
séminaires, par exemple sur la réforme du Code civil et le plan
d'affaires. Il y a eu, également, une mention spéciale qui a
été faite pour la formation de la main-d'oeuvre, au sein de notre
concours Prix Dominique-Rollin, ainsi que la participation à des cours
d'initiation à la gestion d'une PME et, également, au concours
«Devenez entrepreneur». Une chronique, également, dans la
dernière livraison de notre bulletin Affaire à suivre,
soulevait tous les propos que nous tenons ce soir.
Toutefois, nos membres ne sont pas des spécialistes de
l'organisation scolaire ni des questions pédagogiques, mais ils ont un
intérêt pour le fonctionnement du système scolaire, son
efficacité et ses retombées sur le milieu des affaires.
Cependant, comme association régionale d'affaires, nous n'avons ni les
moyens, ni les ressources pour préparer un mémoire qui fasse le
point sur l'existence des cégeps depuis 25 ans, ces
établissements d'éducation qui forment nos jeunes et qui offrent
de nombreux services directement à la population et aux entreprises.
Malgré cela, notre point de vue nous apparaît des plus pertinents
au débat sur l'avenir des cégeps. (17 h 10)
J'aimerais vous souligner que nous avons pris connaissance des
mémoires présentés par la Chambre de commerce du
Québec et par la Chambre de commerce du Montréal
métropolitain et que nous sommes d'accord avec l'ensemble de leurs
recommandations. De plus, nous avons consulté près d'une
cinquantaine de membres qui embauchent des jeunes diplômés afin de
vous faire part de leurs opinions.
L'idée générale que nous défendons.
D'emblée, nous souscrivons à l'idée de faire un bilan des
25 ans des cégeps afin d'en revoir la mission, le fonctionnement et les
résultats obtenus. Toutefois, n'aurait-il pas été plus
pertinent de faire cet exercice pour l'ensemble de notre système
scolaire, afin de mettre en perspective les difficultés
éprouvées par l'ensemble du système scolaire? J'aimerais
vous souligner que cette réflexion nous vient des données
alarmantes qui concernent le taux de décrochage scolaire au
secondaire.
Par ailleurs, nous avons présenté un mémoire
à la commission parlementaire sur le projet de Société
québécoise de développement de la main-d'oeuvre et, lors
de nos discussions, un des points source de problèmes portait sur
l'absence de communication entre les trois univers d'enseignement,
c'est-à-dire primaire, secondaire, universitaire, ce qui a pour
résultat que l'enseignement de certaines techniques au secondaire, par
exemple, contient un contenu très similaire à celui d'une
technique au collège.
Un autre commentaire, qui est relié à l'information
diffusée lors de cette commission, porte sur le nombre d'unités
réglementaires en vue de l'obtention d'un diplôme d'études
secondaires, la possibilité de passer au cégep sans avoir
réussi les mathématiques de secondaire IV
et V. À première vue et de l'opinion d'un néophyte,
il semble que les jeunes ne sont pas suffisamment qualifiés pour leur
entrée au collégial et, malheureusement, le collégial en
paie les frais avec, par exemple, les cours de mise à niveau.
Malgré cela, nous comprenons de toute évidence qu'une telle
commission aurait été un travail de Goliath, et nous tenons
à souligner le mérite que Mme la ministre a de s'attaquer
à ce dossier fort complexe.
De plus, les conclusions de cette commission doivent se traduire par des
actions concrètes et des mesures favorisant l'amélioration de
l'enseignement collégial. Sur ce, nous nous en remettons à vous,
Mme la ministre. L'idée générale que nous voulons
défendre est de favoriser une meilleure concertation entre les
cégeps et les entreprises privées et publiques, pour assurer la
formation et le perfectionnement d'une main-d'oeuvre adaptée et pour
favoriser un développement optimal des régions. Par ailleurs,
nous ne voyons pas le bien-fondé d'un démantèlement du
réseau des cégeps. Nous n'en sommes plus aux changements de
structures pour améliorer le réseau scolaire.
Trois points de convergence relient un bon nombre de nos membres. Je
vous réfère toujours au sondage, dont je parlais tout à
l'heure, d'une cinquantaine de personnes que nous avons sondées à
l'intérieur de la Chambre de commerce de la Rive-Sud. Alors, il y a
trois points de convergence qui relient ce nombre de membres, soit: une
formation générale solide, la rationalisation des
activités des collèges, pour maintenir les budgets à leur
niveau actuel, et la valorisation des études. Sans en faire des
recommandations formelles, nous soumettons ces idées comme toile de fond
aux orientations du réseau collégial.
La formation générale. À l'occasion, comme
dirigeants d'entreprises, nous nous interrogeons sur la pertinence de la
formation générale. Vous avez sans doute pensé comme moi
au français, à la philosophie, à l'éducation
physique dans l'éducation des jeunes. Mais, en dernière analyse,
la maîtrise du français, la capacité de développer
une argumentation, de réfléchir sur la condition humaine et
d'avoir des habitudes de vie qui maintiennent les individus en santé
nous paraissent nécessaires pour l'éducation de notre future
main-d'oeuvre.
Toutefois, selon ce que peuvent nous dire nos enfants qui
fréquentent un cégep et selon ce que nous pouvons constater
auprès de nos employés nouvellement arrivés des
cégeps, ces enseignements n'atteignent pas toujours leur objectif. La
maîtrise du français, particulièrement du français
écrit, est déficiente. Même si, oralement, les nouveaux
diplômés des collèges communiquent sans difficulté
leurs idées et leurs points de vue, leurs propos manquent souvent de
perspective d'ensemble et de rigueur. Alors, nous tenons ici à insister
sur le maintien des cours de français, de philosophie,
d'éducation physique, avec le nombre d'unités qu'on leur accorde
actuellement. Nos gens d'affaires nous ont par ailleurs largement
souligné, en septembre dernier, lors de ce même sondage, les
problèmes qu'ils rencontrent. L'expression d'une idée et la
définition d'une problématique viennent en tête de
liste.
Afin de préciser le pourquoi de notre insistance, permettez-moi
de vous citer un extrait du document intitulé «Profil des
compétences relatives à l'employabilité» et
rédigé par le Conference Board du Canada. À la rubrique
compétence académique, on souligne que deux des critères
importants demeurent communiquer et penser, penser et agir de façon
logique afin d'évaluer les situations, résoudre les
problèmes et prendre des décisions. Au niveau des cours
d'éducation physique, nous croyons qu'une partie théorique
pourrait être envisagée. Si l'on connaît le fonctionnement
du corps humain, on pourrait être plus sensibilisé, par exemple,
à une surdose de stress, voire même à un burn-out
prochain.
Que dire de plus en tant qu'association de gens d'affaires? Nous
prônons constamment l'excellence des résultats. Il devrait en
être de même dans les collèges, et nous devons miser sur des
jeunes en santé, éduqués à la mécanique de
leur corps, initiés aux fondements de la logique et aptes à
s'exprimer correctement.
Une rationalisation nécessaire. Depuis quelques années,
notre organisme, comme plusieurs regroupements d'affaires, défend
l'idée que les déficits budgétaires des gouvernements
doivent être réduits. Dans cette perspective, il nous paraît
clair que toute nouvelle dépense gouvernementale doit être
justifiée et qu'une rationalisation des activités publiques doit
se continuer. Le financement des cégeps doit être analysé
et conçu dans cette perspective.
La valorisation des études. Actuellement, la valorisation des
études est un défi majeur pour l'ensemble de notre
société. Les informations diffusées largement par les
médias, ces derniers temps, laissent voir clairement que, pour une
proportion significative d'étudiants, les nombreuses heures de travail
rémunéré remplacent les heures d'études
nécessaires à la réussite scolaire. Mais,
phénomène probablement plus grave encore, pour les
étudiants qui n'occupent pas d'emploi ou qui travaillent moins d'heures,
les heures consacrées à l'étude sont à peine plus
nombreuses. Il faut maintenant renverser la vapeur, promouvoir l'effort
intellectuel, et le travail scolaire devient inévitable. L'ensemble du
mouvement chambres de commerce réclame, depuis quelque temps, qu'il y
ait une rationalisation des dépenses gouvernementales et qu'un tournant
vers la compétitivité soit effectué dans la gestion des
fonds publics. Ceci signifie qu'en principe nous ne favorisons pas les
injections d'argent neuf qui viennent augmenter le déficit
gouvernemental, afin d'offrir plus de services.
Bien que nous soyons tous pour la vertu, il
nous paraît tout de même impératif d'inciter les
jeunes à poursuivre leurs études et, par conséquent,
d'entamer le plus rapidement possible une campagne nationale de valorisation
des études collégiales. Pour financer cette campagne, des sommes
d'argent pourraient être récupérées, grâce
à une rationalisation de l'action du gouvernement en matière de
perfectionnement de la main-d'oeuvre, où trois ministères, le
ministère de l'Éducation du Québec, le MESS et le MMSRFP,
sont engagés. La rationalisation ferait en sorte que les intervenants
dans ce dossier seraient moins nombreux.
D'abord, sur la rationalisation nécessaire, j'aimerais dire, Mme
la Présidente, que nous sommes conscients des impacts de nos
recommandations sur l'enveloppe totale d'argent dédié aux
cégeps. Comme je le soulignais dans mon introduction, nous ne sommes pas
des spécialistes de l'éducation. D'ailleurs, vous pouvez venir de
le constater en me voyant me chercher dans les mots. Alors, comme je le disais,
nous ne sommes pas des experts dans l'éducation. Cependant, si les
entreprises réussissent, par les temps qui courent, à effectuer
des compressions budgétaires, tout en continuant d'offrir le même
service, il y a sûrement une piste à explorer pour les
cégeps. On me donnait l'exemple, récemment, que, dans 33
collèges, on enseigne les programmes d'électrotechnique. Alors,
pourquoi 33? Pourquoi pas 20, pourquoi pas 15? Ce n'est là qu'un
exemple, évidemment.
Mais, pour nous, lorsqu'on parle de rationalisation nécessaire,
nous nous référons au document déposé au Conseil
des ministres, en juin 1990, par la Chambre de commerce du Québec,
intitulé: «Formation et éducation pour une vision
globale». Dans ce document, on soutient que le fardeau excessif de
l'administration des ministères responsables de l'enseignement et la
lourdeur de la bureaucratie actuelle produisent une rigidité et une
inefficacité des procédures. En effet, nos membres qui ont, par
exemple, demandé des crédits d'impôt pour la formation sur
mesure ont vivement dénoncé l'incohérence du
système, la trop grande quantité de paperasse à
compléter et les nombreux intervenants au dossier. (17 h 20)
C'est donc dire que le gouvernement doit à tout prix
réduire ses propres dépenses en améliorant la
productivité des services, incluant la formation. Nous pensons qu'en
dégageant ces sommes nous pourrons motiver les jeunes. Mais, plus
spécifiquement, en ce qui a trait au dossier cégep, les quelques
questions suivantes trouveront peut-être réponse après
cette commission. Peut-être que les services auxiliaires pourraient
être plus rentables. Sans imposer des frais de scolarité,
peut-être que les étudiants qui prennent trop de temps à
terminer leurs études devraient être chargés en
conséquence. Je vous réfère à la recommandation de
la Chambre de commerce du Québec à cet effet.
Dans une optique de partenariat collège-entreprise,
peut-être que les gens d'affaires pourraient participer dans le
financement et/ou le don ou le prêt d'équipement pour la formation
technique. Sur ce, notre appui est manifeste. Peut-être qu'une
utilisation plus grande des locaux serait souhaitable. Pourquoi ne pas penser
à trois sessions ou encore à offrir des cours les fins de semaine
comme à l'université? Nous espérons que ces idées
deviennent pour vous des solutions.
Nos cinq priorités. Des programmes mieux adaptés. Le
rythme des changements technologiques s'est accéléré au
cours des 20 dernières années. Tant bien que mal, les
collèges ont tenté de suivre ce rythme pour adapter leurs
programmes de formation aux nouvelles réalités technologiques et
économiques. Dans le contexte actuel où les cerveaux sont plus
importants que les matières premières, les cégeps doivent
multiplier les efforts nécessaires pour faire face à cette
nouvelle conjoncture. Comme le soulignait récemment le nouveau
président de la Chambre de commerce du Québec, M. Yvon Marcoux,
un rapport du Conseil de la science et de la technologie indique que, d'ici
l'an 2000, 65 % des nouveaux emplois nécessiteront une formation
collégiale ou universitaire. Dans certains cas, l'adaptation des
cégeps s'est avérée une réussite. Dans d'autres,
les résultats sont moins probants. La formation de la main-d'oeuvre est
un des facteurs déterminants dans la compétitivité des
entreprises. Il en va donc de notre existence même et, par
conséquent, des emplois disponibles pour les diplômés des
collèges.
Recommandation 1. La Chambre recommande que des mesures soient prises
pour favoriser une adaptation plus rapide des contenus des programmes aux
réalités du marché du travail. À ce sujet,
règle générale, nos membres sont assez satisfaits - je
vous renvoie toujours au même sondage - de la formation technique des
jeunes et, surtout, de leurs connaissances théoriques. Là
où les commentaires justifient la recommandation, c'est dans les
domaines de l'informatique et de l'électronique. Évidemment, d'un
point de vue strictement régional, les gens d'affaires qui
opèrent des entreprises dans ces domaines nous ont signifié que
les jeunes ne sont pas assez spécialisés. Nous sommes sensibles
à cette situation parce qu'en Montérégie une foule de PME
se sont informatisées depuis deux ans. Au dire des gens d'affaires, il y
a, par exemple, un urgent besoin en réseaux ordinés, une
discipline qui est reliée à l'électronique et à la
microinformatique. À cet effet, nous avons d'ailleurs communiqué
ces informations aux responsables des programmes de notre cégep
local.
Les stages en entreprise. Actuellement, certains programmes du secteur
technique des collèges incluent un stage en milieu de travail ou un
stage pratique dans un contexte simulé de
travail. Ces stages nous apparaissent des plus utiles puisqu'ils donnent
l'occasion aux élèves de se familiariser avec leur futur univers
de travail, de prendre conscience de leurs forces, de leurs faiblesses, de
mettre en pratique les connaissances et les habiletés acquises durant
leur formation.
Malheureusement, tous les programmes techniques du collégial ne
comportent pas de tels stages. Les raisons qui expliquent cette situation sont
multiples. Parmi les principales, il faut mentionner les difficultés
inhérentes à l'organisation de ces stages, c'est-à-dire
que l'identification des entreprises, la logistique des stages, etc., et les
réticences des entreprises à s'engager dans une telle entreprise
entraînent des coûts de production supplémentaires.
Ça exige également une supervision et ça peut même,
dans une certaine mesure, compromettre les impératifs de la production.
Malgré cela, à notre avis, ces stages doivent être
obligatoires dans chacun des programmes techniques.
Les stages pratiques dans des milieux de travail simulés sont
également une solution appropriée. Que l'on pense aux
différentes cliniques du collège Édouard-Montpetit,
où on a denturologie, lunetterie, etc., ou encore aux installations de
l'École nationale d'aérotechnique qui permettent aux futurs
techniciens de monter, d'entretenir et de réparer des moteurs ou des
appareils utilisés sur le marché du travail. Ces stages se
doivent d'être des moments pour les élèves de
réellement mettre en pratique les connaissances et habiletés
acquises. Ils doivent être également préparés et
supervisés par les collèges afin d'être bien
intégrés au programme concerné et de répondre
à ses finalités. Ces stages doivent être accessibles
à tous les étudiants.
Recommandation 2. La Chambre recommande que des stages pratiques
supervisés par les collèges soient intégrés
à chacun des programmes techniques du collégial. L'autre
recommandation est à l'effet que la Chambre recommande que le
gouvernement mette en place des mécanismes pour inciter les entreprises
à s'engager dans la réalisation de stages en milieu de
travail.
Permettez-moi d'apporter les commentaires suivants sur ces deux
recommandations. On remarque un changement de mentalité, nous, sur la
Rive-Sud, auprès des gens d'affaires. Ceux-ci jugent primordial d'offrir
des stages aux jeunes et ils sont de plus en plus ouverts à les
accueillir au sein de leur entreprise. Sur ce point, nous croyons que la
formation, c'est l'affaire de tous et qu'en ce sens les entreprises ont une
responsabilité. Notre mémoire a été
rédigé dans l'optique d'un rapprochement entre les
collèges et les entreprises, et les stages sont un excellent moyen, une
excellente façon d'engendrer ce rapprochement qui peut prendre
différentes formes. Ça peut être, par exemple, des visites
d'entreprises, des conférences d'hommes ou de femmes d'affaires, le
jumelage d'une journée en entreprise, etc. Par ailleurs, plusieurs de
nos membres seraient stimulés à l'idée d'une formule
simple et efficace d'aide financière en vue d'accueillir des stages
inspirés des crédits d'impôt, par exemple, alloués
à la formation sur mesure. Ce dernier commentaire est seulement à
titre indicatif. Mme la Présidente, il ne constitue pas une
recommandation ni une solution.
Une évaluation des résultats. De manière
générale, nos membres s'interrogent sur l'évaluation dans
les collèges et, plus particulièrement, sur la valeur des
diplômes décernés par les cégeps. Il y a, bien
sûr, leurs expériences passées, lors de l'embauche de
diplômés des collèges, qui leur permettent de porter un
certain jugement sur la valeur de la formation donnée par les
collèges. Il y a aussi la réputation des collèges que les
dirigeants d'entreprises connaissent par ouï-dire et par la
notoriété publique de ceux-ci.
La Présidente (Mme Hovington): Si vous voulez conclure,
parce que votre temps serait écoulé maintenant.
M. Goyette: Bon. Alors, je vous remercie. Je conclurais tout
simplement en énumérant peut-être les trois
recommandations, si vous le permettez, qui suivent.
La Présidente (Mme Hovington): Allez-y.
M. Goyette: Alors, la quatrième recommandation est
à l'effet que le ministère mette en place des mécanismes
appropriés pour s'assurer que les diplômes décernés
soient de bonne qualité et de valeur équivalente dans l'ensemble
du réseau collégial.
Recommandation 5. La Chambre recommande que les procédures de
participation des entreprises aux programmes gouvernementaux de financement des
activités de perfectionnement de la main-d'oeuvre soient
simplifiées, de manière à réduire les formulaires
à compléter, à réduire le nombre d'intervenants
gouvernementaux, raccourcir les délais de réalisation de ces
activités.
Je comprends que je manque de temps. Je voulais insister beaucoup sur la
recommandation 6. On aura peut-être l'occasion d'en discuter. Alors, on
recommande également que le ministère reconnaisse les actions des
collèges en matière de services à la communauté et
de développement régional par l'inclusion de cette mission dans
la loi des collèges et ce, en raison de notre expérience, par
exemple, avec le collège Édouard-Montpetit, qui est un acteur
privilégié du développement dans notre région et
qui s'est mérité le Prix Dominique-Rollin en reconnaissance de
son engagement communautaire sur la Rive-Sud. Je vous remercie.
La Présidente (Mme Hovington): Merci
beaucoup. Alors, Mme la ministre, vous avez la parole.
Mme Robillard: Merci, Mme la Présidente. Ça me fait
plaisir de saluer les membres de la Chambre de commerce de la Rive-Sud, comme
ministre de l'Enseignement supérieur, mais aussi comme
députée de Chambly et membre, donc, de la grande
Montérégie. Je vois que vous vous intéressez de
près aux questions éducatives. D'ailleurs, vous l'aviez fait
avant aujourd'hui en vous impliquant avec le collège
Édouard-Mont-petit dans la production de vidéos sur la formation
de la main-d'oeuvre et d'autres activités en tant que telles qui
touchent le domaine de l'éducation.
Je prends donc note que, de façon très claire, vous
êtes pour le maintien des cégeps au niveau des ordres
d'enseignement québécois, mais, en même temps, vous nous
suggérez certains changements. J'aimerais ça préciser
certaines de vos recommandations, M. Goyette, ou certaines de vos orientations
que vous voulez nous suggérer. (17 h 30)
À la page 5 de votre mémoire, vous dites que vous voulez
favoriser une meilleure concertation entre les cégeps et les entreprises
privées et publiques, pour assurer la formation et le perfectionnement
d'une main-d'oeuvre. C'est l'idée que vous voulez défendre.
Alors, comment allons-nous faire ça?
M. Goyette: Si on parie de concertation, nous, ce qu'on voulait
surtout soulever au niveau de la concertation, nos membres, de par leurs
expériences avec ces différents ministères, ont
soulevé que, peut-être, il y avait un problème de
duplication au niveau des dossiers, au niveau des documents, au niveau des
personnes à rencontrer. Donc, un des points qu'on voulait soulever,
c'était vraiment de favoriser une concertation entre ces
différents paliers-là.
Mme Robillard: À la page 6, vous nous pariez d'une
rationalisation qui est nécessaire. Si je comprends bien votre
idée de base, c'est que la rationalisation est nécessaire dans
toutes les activités publiques en tant que telles, parce que vous ne
voulez pas que le déficit augmente, que les dépenses
gouvernementales continuent à augmenter. Mais vous dites que le
financement des cégeps, donc, doit être analysé dans cette
optique-là. Est-ce que vous avez analysé cette question-là
d'un peu plus près et que vous jugez nécessaire une
rationalisation plus grande dans les cégeps?
M. Goyette: En fait, ce qu'on vise ici, c'est, depuis le
début des prises de position du mouvement chambres de commerce, comme je
le soulignais un peu plus tôt, on défend l'idée, disons, de
la rationalisation des dépenses et pour arriver à faire baisser
les déficits gouvernementaux. Il va de soi qu'au niveau de notre
position sur l'enseignement collégial ce n'est pas, comme je l'ai
mentionné plus tôt, de réinjecter de nouvelles sommes
à l'intérieur de ce ministère en particulier ou d'autres
ministères. On pense plutôt, peut-être, à une
redistribution ou à revérifier les sommes qui sont
dépensées dans certains endroits. Par exemple, je donnais
l'exemple des 33 cours - ce n'est peut-être pas un exemple très
percutant - qui sont donnés en électrotechnique. Alors,
peut-être qu'il y a moyen de rationaliser en ce sens-là.
Mme Robillard: La Chambre de commerce de la Rive-Sud nous
recommande aussi des stages pratiques obligatoires dans chacun des programmes
de la formation technique. Vous nous dites aussi que c'est dérangeant
pour les entreprises, des stagiaires. Vous le dites très clairement,
à la page 9 de votre mémoire, que ça entraîne des
coûts de production supplémentaires, que ça exige une
supervision et, bon, dans une certaine mesure, ça peut compromettre les
impératifs de production. Mais, malgré cela, vous dites: II faut
vraiment qu'il y ait des stages obligatoires en entreprise. Mais vous
suggérez que ces stages, maintenant, soient sous la supervision directe
des collèges. Moi, j'ai le goût de vous demander: Si nos
stagiaires dérangent déjà dans les entreprises, qu'en
est-il si on ajoute, en plus, des enseignants avec eux qui vont les accompagner
pour les superviser dans les entreprises?
M. Goyette: À cet effet-là, ce qu'on voulait vous
dire également, c'est que les mentalités ont commencé
beaucoup à changer sur la Rive-Sud. Il est vrai que, par le
passé, peut-être, certaines entreprises ont fait valoir le point
que, bon, évidemment, c'est une personne additionnelle, c'est de la
formation à faire. Je pourrais vous donner l'exemple d'un cas, que vous
connaissez sûrement, sur la Rive-Sud, qui est une entreprise qui
s'appelle Produits d'acier Bertie. Ces gens-là ont engagé des
soudeurs qui commençaient pour de la formation, et ils ont fait des
stages chez eux. Alors, ça a été fait, je crois, en
soirée, et il y a eu moyen d'organiser ça. Donc, on sent une
mentalité qui commence à changer en ce sens-là. Je vous
donne un exemple. On en a également d'autres sur la Rive-Sud.
Pourquoi superviser avec les jeunes du collégial? Je pense qu'on
ne peut pas avoir tout simplement une personne qui va en stage en entreprise,
sans qu'il y ait un lien et un suivi qui soit fait via les collèges. Il
y a des exemples de ça, également, sur la Rive-Sud. Pour un, le
collège Edouard-Montpetit fait des stages en entreprise, et on m'a
informé qu'il y avait une personne qui se présentait, sur
rendez-vous ou à l'occasion, ou, pour ne pas vraiment nuire, si on peut
s'exprimer ainsi, à l'entreprise, pour voir si tout fonctionne bien et
discuter des possibilités
au niveau de ces stages-là.
Je pense que c'est des mentalités. Évidemment, les deux
parties ont un pas à faire. Je pense que les entrepreneurs, s'ils
veulent avoir de la main-d'oeuvre qualifiée, doivent aussi mettre un peu
de leur temps, et, de cette façon-là, on pourra avoir de la
main-d'oeuvre qui sera plus qualifiée.
Mme Robillard: M. Goyette, vous souhaiteriez aussi que le
gouvernement mette en place des mécanismes pour inciter les entreprises
justement à accueillir nos stagiaires. N'est-ce pas? Vous nous
recommandez ça à la page 9 de votre mémoire. Lesquels
mécanismes?
M. Goyette: Vous avez sûrement noté mon manque
d'expérience flagrant en éducation ou en formation.
Mme Robillard: non, non, c'est les mécanismes pour inciter
les entreprises à accueillir les stagiaires. ça vous devez les
connaître, les entreprises.
M. Goyette: Oui, tout à fait.
Mme Robillard: Qu'est-ce qui les inciterait à accueillir
nos stagiaires?
M. Goyette: Je pense qu'un exemple concret auquel vous devez
sûrement penser en même temps que moi sont les crédits
d'impôt qui pourraient être accordés aux entreprises qui
engageraient ces stagiaires-là.
Mme Robillard: Est-ce qu'il y en aurait d'autres moyens
incitatifs?
M. Goyette: Je vous avouerai honnêtement que pour l'instant
je n'en vois pas d'autre.
Mme Robillard: Non? Merci, M. Goyette.
La Présidente (Mme Hovington): M. le député
d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Je veux saluer les gens de la Rive-Sud. C'est
toujours important, je pense, d'avoir des intervenants économiques qui
viennent nous donner leur point de vue concernant les réalités
qu'ils vivent, et surtout quand il y a quelques bons petits messages
nécessaires d'être rappelés, en particulier, envers ce
gouvernement-là. Il y en avait une couple. Il y avait une couple de bons
petits messages qui m'ont plu particulièrement, comme de dire qu'il vous
apparaît clair que toute nouvelle dépense gouvernementale devrait
être justifiée avant d'être dépensée. Ce n'est
pas inutile de rappeler ça, parce qu'il ne faut pas oublier que ce
gouvernement-là a vécu sur cinq, six ans de
prospérité sans précédent, et ça n'a jamais
paru, parce qu'on a des coupures par-dessus coupures. Et là on est en
difficulté assez sérieuse avec un déficit de 4 000 000 000
$ et quelque chose. Alors de rappeler quand on dépense...
Une voix:...
M. Gendron: Je pense que c'est très pertinent, c'est dans
le mémoire de la Chambre de commerce de la Rive-Sud. De dire qu'il y a
un peu trop de pilage de pieds à la page 7, c'est bon aussi de rappeler
ça au niveau du perfectionnement de la main-d'oeuvre, de rappeler que
ça fait plusieurs fois. Maintenant, c'est important. C'est un peu
effrayant le nombre d'intervenants qui sont venus leur dire qu'Us ne l'ont pas
pantoute au niveau de la formation professionnelle avec ce tiraillage du
ministère de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu,
avec la société d'investissement de je ne sais pas quoi, de M.
Bourbeau, dont tout le monde ne voulait pas mais qui est en place.
Une voix:...
M. Gendron: Non, non, je le sais. Je le sais très bien et
je me rappelle ce que les intervenants sont venus dire de cette bibite à
cinq pattes qui n'est pas partie à fonctionner et où,
déjà, il y a énormément d'inconvénients et
de craintes. Vous ne pensez pas qu'on va sauver et on va rationaliser des
coûts. Moi, je voulais juste vous dire qu'il y a de bons messages.
J'aimerais ça, de temps en temps, qu'ils soient plus pris en compte.
Vous dites, exemple, aux pages 10 et 11: «En clair, cela signifie moins
de paperasse, moins d'intervenants et des délais de réalisation
plus courts.» Si vous sentez le besoin de rappeler ça, ce n'est
pas parce que ça marche de même. Vous venez de dire
vous-même que vous souhaiteriez que... À la page 9, vous dites:
«Mettre en place des mécanismes pour inciter les entreprises
à s'engager dans la réalisation des stages...» Et vous
dites - je savais que c'était ça que vous diriez - les
crédits d'impôt. Il y en a présentement, essayez de les
obtenir. Vous laissez tomber. Vous l'avez dit vous-même, vous ne les
prenez pas parce que c'est trop compliqué. C'est trop de paperasse.
Le sondage que vous avez fait à la page 11: «Selon une
étude sur le programme FME, deux entreprises sur cinq jugent trop long
le temps écoulé entre leur demande initiale et le début de
la formation; une entreprise sur trois considère - une sur trois, c'est
le tiers - la procédure à suivre bien trop complexe; et deux sur
cinq indiquent que le nombre d'intervenants gouvernementaux est trop
élevé.» Alors, ça, je vous remercie beaucoup pour ce
genre de messages qui devrait être rappelé constamment à ce
gouvernement. Mais j'espère que de temps en temps il va décider
de les suivre. C'est important de venir rappeler ça parce que vous avez
lié ça à la
réflexion qui se fait présentement sur l'avenir des
études collégiales. Vous dites d'entrée de jeu que vous
êtes un groupe qui ne veut pas remettre en question le
démantèlement du réseau. Donc, vous choisissez le
réseau à nouveau, puis je pense que c'est ça qu'il faut
faire, mais il faut y apporter des correctifs et il faut effectuer des virages
importants pour éviter dans le futur qu'il y ait autant d'initiatives
qui n'atteignent pas leur objectif. C'est de même que j'ai compris votre
mémoire.
Sur les points qui nous concernent plus, j'ai deux questions. Ici, quand
des intervenants viennent et nous produisent un mémoire, il y a deux
choses qu'on peut faire: un commentaire sur leur mémoire - je viens de
le faire - et poser des questions, compte tenu qu'on a la chance d'avoir des
invités qui ont une expérience à certains égards.
(17 h 40)
Page 6 de votre mémoire. Vous avez dit que vous vous interrogiez
sur la pertinence de la formation générale: français,
philo, éducation physique. Mais, en dernière analyse, là
vous avez dit: La maîtrise du français, la capacité et
ainsi de suite, ça nous a permis de convenir qu'il y avait lieu de les
conserver. La question a l'air simple: Pourquoi vous avez hésité,
autrement dit, et que rapidement vous avez dit: Dans le fond, ce type de
formation de base correspond à ce que nous croyons être une bonne
formation de base?
M. Goyette: En fait, quand on dit qu'on a hésité,
peut-être que le sens du texte a l'air de dire qu'on a
hésité; c'est que, comme tout le monde, on s'est posé la
question: Est-ce qu'on doit conserver ces choses-là ou est-ce qu'on doit
tout simplement les modifier, ou les écarter, ou les mettre non
obligatoires? Quand on dit qu'on s'est posé la question, on a tout
simplement réfléchi à cette chose-là et non pas, si
on veut, hésité avant de dire qu'on acceptait le maintien du
statu quo.
M. Gendron: Merci. J'avais également une question sur les
stages; vous avez répondu à la ministre. D'après vous,
c'est une formule qu'il faut privilégier, mais il va falloir inciter
davantage les entreprises à embarquer. Pour ça, ça prend
des mécanismes et vous souhaitez que le gouvernement en mette en
place.
M. Goyette: Tout à fait.
M. Gendron: Comment va-t-il faire ça avec vos objectifs de
rationalisation, puis de ne pas mettre d'argent additionnel?
M. Goyette: Sur ce point-là, ce que je disais tout
à l'heure et ce qu'on maintient, c'est d'essayer de réutiliser
les sommes, revoir l'enveloppe globale qui est distribuée au niveau col-
légial, essayer de rationaliser le plus possible, d'être le plus
efficace possible avec la même enveloppe budgétaire. On pense
qu'avec l'enveloppe budgétaire qui est là présentement il
y a une possibilité de continuer à offrir le même service
et même avoir des stages en entreprise.
M. Gendron: Compte tenu que la plupart des chambres de commerce
sont bien implantées dans l'ensemble du Québec... Vous êtes
d'accord là-dessus? Il y a plusieurs chambres de commerce dans la
plupart des villes majeures du Québec; vous en êtes. Vous avez
parlé de la nécessité de la revalorisation des
études: l'effort, le travail, puis «il faut que le travail
scolaire - je vous cite - soit revalorisé et il faut promouvoir l'effort
intellectuel et le travail intellectuel qui l'accompagne.» Est-ce que
vous seriez d'accord pour envisager une campagne de revalorisation, puis de
promotion, mais que ce soit la chambre de commerce qui déciderait de
l'initier, compte tenu que vous êtes assez bien
décentralisés, vous rayonnez à peu près dans toutes
les villes importantes du Québec? Ça risquerait probablement
d'être plus fonctionnel, il y aurait moins de pilages de pieds, moins de
fonctionnaires là-dedans, si on ne met pas le gouvernement
là-dedans. Est-ce que vous seriez d'accord de regarder ça pour la
faire vous autres mêmes?
M. Goyette: On serait tout à fait d'accord, d'autant plus
que ça s'est déjà fait au niveau secondaire, une telle
campagne, puis on est prêts à offrir notre collaboration dans ce
sens-là rapidement.
M. Gendron: Vous avez également une recommandation qui me
plaît sincèrement, page 6, de dire: Dorénavant, parce que
je sais où vous êtes sur le plan physique, la Rive-Sud... Page 12,
pardon, la recommandation 6. La Rive-Sud de Montréal, c'est quand
même un bassin de population qui est de plus en plus dynamique, explosif
sur le plan de l'entrepreneurship et puis tout ça. Je parle des gens qui
y vivent.
Une voix: Et de leurs représentants.
M. Gendron: Et de leurs représentants, bien sûr. Par
définition, leurs représentants proviennent de ces
gens-là. Sérieusement, vous dites que les collèges jouent
une mission liée au développement régional. Ça ne
fait aucun doute dans mon esprit, sincèrement. Je vis dans une
région et je sais comment les institutions collégiales et
universitaires ont énormément d'implication dans leur milieu: ils
participent et on va le voir de plus en plus, j'espère.
Votre recommandation dit quand même que vous souhaitez que le
ministère ou la ministre reconnaisse les collèges dans leur
activité de développement régional et qu'il inclue cette
mission dans la Loi sur les collèges. Alors, je
n'ai pas de trouble avec ça, sincèrement, mais la question
que je vous pose est: Comment, concrètement, on pourrait faire ça
dans la Loi sur les collèges sans y ajouter une ressource
financière? Quand on dit au collège «tu as une mission
d'enseignement, puis, pour le reste, tu t'arranges», il va jouer avec les
possibilités financières qu'il a pour son implication. Mais si on
dit: Dorénavant, si tu as une mission enseignement, plus une mission
support aux collectivités et implication dans le milieu... Ce qu'il
fait. Mais à partir du moment où on l'inclut formellement dans la
Loi sur les collèges, ce à quoi je n'ai pas d'objection, je
prétends qu'il va falloir voir les coûts afférents, parce
qu'il y a des coûts à s'impliquer et à supporter des
initiatives. Alors, comment vous voyez votre recommandation sans toucher
à l'aspect coût?
M. Goyette: Moi, ce que je peux vous dire là-dessus, c'est
que je pense que ça se fait déjà. Actuellement, ça
se fait déjà. Notre expérience sur la Rive-Sud - je ne
sais pas si elle est particulière, je ne connais pas le réseau au
complet - je peux vous dire que ça se fait énormément.
Est-ce que ça a demandé des sommes additionnelles ou des
crédits additionnels? Je pense qu'il y a eu quand même aussi un
effort en temps-personne dans ça, et je les en remercie, d'ailleurs.
Au niveau des revenus, je ne m'y connais pas beaucoup, mais je pense
qu'il y a quand même des revenus qui sont auxiliaires aux cégeps;
il n'y a pas nécessairement uniquement les revenus qui proviennent des
sources gouvernementales. Alors, il y a des revenus autres qui peuvent
être soit le stationnement, soit la cafétéria, etc. C'est
peut-être une avenue possible. Notre recommandation, on la voyait, nous,
dans le sens également où ça se fait déjà,
et on voulait vraiment que cette mission-là soit reconnue.
M. Gendron: Merci. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup. M. le
député de Sherbrooke.
M. Hamel: Peut-être, oui. J'avais quelques questions mais,
déjà, la ministre en a pris une, le critique de l'Opposition
aussi. Il y aurait peut-être deux questions: une qui touche le
collégial et une autre qui touche votre région,
particulièrement. À la recommandation 1, vous dites, M. Goyette:
«La Chambre recommande que des mesures soient prises pour favoriser une
adaptation plus rapide des contenus des programmes aux réalités
du marché du travail.» Quelles sortes de mesures voyez-vous pour
atteindre cet objectif, plus précisément?
M. Goyette: Je dois vous dire que je m'attendais un peu à
cette question-là.
M. Hamel: Tant mieux.
M. Goyette: Et je veux vous dire également que c'est un
peu pour ça qu'on a mis un peu tout au long de notre texte qu'on
n'était pas des experts en formation. Définir les mesures, pour
nous, je pense que c'est un petit peu difficile. Ce qu'on veut vraiment...
Nous, les gens d'affaires, au niveau des programmes techniques, avons
déjà des problèmes actuellement: il manque de
main-d'oeuvre spécialisée dans certains domaines. Je pourrais
peut-être juste vous citer, si le temps me le permet, un exemple: On a
une entreprise sur la Rive-Sud qui s'appelle Systèmes M3 I, qui est une
nouvelle entreprise. Elle a eu un besoin de main-d'oeuvre très,
très spécialisée, un secteur très pointu. Alors,
via nous et le cégep, ils ont pu mettre sur pied très rapidement
un système de formation. En l'espace de deux ou trois semaines, ils ont
mis ça sur pied; ils ont formé une trentaine d'employés.
Ça s'est fait au niveau de la formation sur mesure. Est-ce qu'on ne
pourrait pas inclure ça d'une façon plus générale?
La formation sur mesure, ce que j'en sais, ce que j'en comprends, ça va
assez bien. Les gens ont des besoins, ils communiquent soit avec nous ou avec
le collège et mettent sur pied assez rapidement un système de
formation sur mesure pour ce cas-là précis. Pourquoi on ne
pourrait pas étendre cette possibilité-là? Maintenant,
comme je vous le dis, disons que je ne suis pas très, très
connaissant en cette matière-là.
M. Hamel: Ça va, M. Goyette. Une question d'un tout autre
ordre, qui ne touche pas le collégial. L'Université de Sherbrooke
est présente sur la Rive-Sud, vous l'avez souligné dans votre
mémoire en page 3. J'imagine que vous verriez d'un bon oeil que
l'Université de Sherbrooke continue à s'étendre sur la
Rive-Sud.
M. Goyette: Ha, ha, ha!
M. Hamel: Et est-ce que vous êtes satisfait à date
de ce qui se passe?
M. Goyette: Je vais répondre à la deuxième
partie en vous disant que, oui, on est très satisfaits de la
présence de l'Université de Sherbrooke sur la Rive-Sud. On a des
commentaires très positifs à cet effet-là.
M. Hamel: et est-ce que vous verriez d'un bon oeil qu'on continue
à s'étendre davantage dans d'autres disciplines pour
répondre aux besoins de la rive-sud?
M. Goyette: Je vous répondrai oui, en ajoutant qu'on a un
territoire très sollicité, par contre.
M. Hamel: Merci, M. Goyette.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. Alors, Mme la
ministre.
Mme Robillard: M. Goyette, vous avez été
très prudent, je vous félicite, je vous félicite. Merci de
votre participation aux travaux de la commission.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, merci, au nom des
membres de la commission de l'éducation, d'être venu nous
présenter votre mémoire. Je vous souhaite un bon retour chez
vous.
La commission de l'éducation n'ajourne pas, mais suspend
plutôt ses travaux jusqu'à 20 heures ce soir.
(Suspension de la séance à 17 h 50)
(Reprise à 20 h 1)
La Présidente (Mme Hovington): Alors, la commission sur
l'éducation va reprendre ses travaux.
(Consultation)
La Présidente (Mme Hovington): La commission poursuit ses
travaux avec le cégep de Rimouski, que nous avons l'honneur de recevoir
à la commission de l'éducation. Bienvenue. Alors, par contre, sur
ma feuille, j'ai quatre noms seulement, et vous avez une
délégation assez imposante, une délégation
régionale assez imposante. Ha, ha, ha!
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Hovington): Alors, il y a M. Gaston
Desrosiers, président du conseil d'administration. Est-ce que vous
êtes le porte-parole?
Cégep de Rimouski M. Desrosiers (Gaston): Oui, madame.
La Présidente (Mme Hovington): Ou c'est M. Daigneault?
C'est vous?
M. Desrosiers: Oui, madame, c'est moi.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, si vous voulez bien
nous présenter votre équipe.
M. Desrosiers: À l'intérieur du texte, madame, je
vais faire la présentation de l'ensemble de l'équipe qui est
à la table et des gens qui nous accompagnent.
La Présidente (Mme Hovington): D'accord, et si jamais il y
a quelqu'un qui intervient avec vous, alors il n'aura qu'à s'identifier
avant pour les fins de la transcription des débats.
M. Desrosiers: Parfait.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, vous avez donc 20
minutes pour nous faire part de votre mémoire.
M. Desrosiers: Parfait. Merci. Donc, Mme la Présidente,
Mme la ministre, Mme, MM. les représentants de l'Opposition, Mmes et MM.
les députés, c'est avec empressement que nous avons
accepté l'invitation qui nous a été faite de nous
présenter à la commission parlementaire de l'éducation sur
les collèges. Nous vous remercions bien sincèrement de nous avoir
fourni cette occasion de préciser notre point de vue, bien que
parcellaire, sur des aspects particuliers et généraux du
collège de Rimouski et du réseau collégial. Étant
moi-même un ancien étudiant du collège de Rimouski au
début des années soixante-dix, et m'étant à ce
moment engagé dans l'association étudiante, et étant
membre du conseil d'administration du collège depuis six ans et
président du conseil depuis maintenant deux ans, j'ai été
à même de suivre de près l'évolution de ce
collège et de constater les constantes et les différences entre
ce qu'était le cégep à ses débuts et ce qu'il est
devenu avec les années.
À titre de président du conseil au cours des deux
dernières années, j'ai été impliqué dans les
différentes situations difficiles qu'a connues ce collège
jusqu'à il y a quelques mois. Le mémoire que nous vous avons fait
parvenir, «Le collège de Rimouski, un cégep régional
et un institut national», a été élaboré avec
la collaboration des différentes composantes de notre
établissement. Il est le fruit de notre réflexion commune, il a
fait l'objet d'un consensus dans notre milieu et réaffirme des
orientations déjà annoncées dans notre mémoire au
Conseil des collèges il y a deux ans.
Aujourd'hui, je me présente en commission parlementaire
accompagné de représentants des quatre syndicats du
collège et des membres de la direction. La délégation qui
m'accompagne est effectivement composée du directeur
général du collège, M. Alcide Daigneault, de la directrice
des services pédagogiques, Mme Nicole Vigeant, du directeur de
l'Institut maritime du Québec, M. Jean-Marie Vignola, du directeur
adjoint de l'Institut maritime du Québec, M. Raymond Gi-guère,
d'un professionnel à la pédagogie, M. François Desjardins,
du président du Syndicat des enseignantes et des enseignants du
cégep de Rimouski, M. Jean-Claude Drapeau et du président du
Syndicat du personnel de soutien du cégep, M. Rodrigue Martin.
M'accompagne aussi du personnel du cégep et de l'Institut maritime du
Québec, dont M. Lionel Fortin, président du Syndicat des
professeurs de l'enseignement ma-
ritime du Québec, et M. Maurice Cordon, vice-président du
même syndicat. Toutes ces personnes ont collaboré de très
près à la préparation du mémoire du collège
de Rimouski.
Je présenterai donc les points saillants de notre mémoire
et, par la suite, il nous fera plaisir d'échanger avec les membres de la
commission parlementaire et de répondre à vos interrogations.
Nous souhaitons que cette présentation et cet échange soient des
plus fructueux et permettent de préciser les aspects plus particuliers
de notre point de vue. Les personnes qui m'accompagnent sont disponibles pour
cet échange.
A titre d'introduction, maintenant. Le collège de Rimouski est
constitué de deux entités distinctes: un cégep
régional et un institut national, avec une préoccupation commune,
soit d'assurer une formation de qualité adaptée aux besoins du
milieu. Pour le collège de Rimouski, la commission parlementaire
survient à une étape importante de son histoire, au moment
où nous procédons à l'évaluation du plan de
développement du cégep et du plan de développement de
l'Institut maritime du Québec. Les orientations et les recommandations
contenues dans notre mémoire se situent donc dans le prolongement de la
réorientation de ces plans de développement et prennent assise
sur la vocation régionale et technique reconnue au cégep de
Rimouski et sur la vocation nationale et technique de l'Institut.
Nous verrons, dans un premier temps, que cette vocation de cégep
régional et technique lui confère une position très
particulière dans le réseau. Puis nous parlerons de l'Institut
maritime du Québec, deuxième composante du collège de
Rimouski. À l'origine issu de préoccupations et de besoins
régionaux, l'institut a constamment élargi son champ d'action et
occupe présentement une place importante au plan national. Chez les deux
constituantes, nous retrouvons une préoccupation similaire qui fait
appel à un souci constant d'amélioration et d'évolution
afin de répondre aux attentes de leur clientèle respective.
Ainsi, il est question d'expertise, de formation de qualité, de
perfectionnement de la main-d'oeuvre, de concertation avec les partenaires, de
structure souple, d'autonomie. En ce sens, les recommandations de notre
mémoire font état de mesures ayant comme objectif de parfaire
notre mission d'éducation.
Le premier point que j'aborderai, donc, est le collège de
Rimouski, un cégep régional. Pour bien comprendre le sens de
notre mémoire, il faut bien situer le collège de Rimouski dans
son contexte historique. Lors de la création des collèges
d'enseignement général et professionnel, le cégep de
Rimouski reprenait l'héritage reçu des différents
établissements de Rimouski qui répondaient jusque-là aux
besoins en éducation d'une clientèle répartie dans les
régions du Bas-Saint-Laurent, de la Gaspésie, des
Îles-de-la-Madeleine et de la Côte-Nord. Le séminaire de
Rimouski, le Couvent des Ursulines, l'Institut de technologie,
l'École de commerce, l'École normale, l'École des
infirmières et l'Institut familial avaient établi la
réputation de la ville de Rimouski comme un pôle régional
en éducation. Environ 1000 jeunes provenaient d'un vaste territoire pour
recevoir une formation répondant à leurs besoins et à
leurs aspirations.
En 1967, le collège de Rimouski poursuivait la même mission
en devenant un cégep régional. Avec les années, il a
développé un ensemble de programmes qui lui assurent une
expertise et un leadership qui se reflètent sur toute la région.
Dès ses débuts comme cégep, le collège de Rimouski
s'est retrouvé dans une situation très particulière, en
ayant intégré un institut de technologie déjà de
très grande qualité et très diversifié en termes de
nombre de programmes techniques.
Avec les années, cette tradition d'enseignement technique s'est
maintenue, s'est renforcée et s'est modernisée. Aujourd'hui, en
1992, le collège de Rimouski se trouve en tête de file du
réseau collégial quant au nombre de programmes techniques, soit
22, en plus des 5 programmes techniques de l'Institut maritime du
Québec. Parmi ces 22 programmes, il y en a 9 que nous sommes le seul
collège à dispenser à l'est de Québec. Il y en a 5
autres que nous sommes le seul collège à dispenser dans les
régions administratives du Bas-Saint-Laurent et de la Côte-Nord.
Parmi ces 22 programmes, 2 seulement sont sous le seuil de viabilité
fixé par la DIGEC, dont le programme de chimie analytique, qui est dans
la même situation que dans les 5 autres cégeps du réseau
qui dispensent aussi ce programme.
Vous comprendrez que, pour accueillir une clientèle significative
dans un aussi grand nombre de programmes techniques, il nous faut recruter
notre clientèle dans un aussi vaste territoire que celui du
Bas-Saint-Laurent, de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine,
ainsi que de la Côte-Nord. Il est évident que
l'éparpillement des programmes n'est pas souhaitable si l'on veut
maintenir le seuil de viabilité souhaité et soutenir une
expertise et un parc technologique adéquat. Vous comprendrez aussi
qu'une telle concentration de programmes techniques à Rimouski fait de
notre collège un pôle régional important, et ce, hors de
tout doute.
Affirmer que le collège de Rimouski est, par ce fait, un
cégep régional d'envergure régionale n'est que
reconnaître la réalité historique et la
réalité actuelle. Aussi, il nous semble important de s'assurer
que cette réalité soit maintenue dans l'avenir. Il y va de la
viabilité de l'enseignement technique dans ce vaste territoire du
Québec. C'est pourquoi nous demandons à la commission
parlementaire de confirmer cette vocation technique régionale au
cégep de Rimouski et d'adopter, lorsque nécessaire, un
financement spécifique, ce que ne prévoit pas le nouveau mode
d'allocation des ressources.
Mentionnons que la confirmation de cette vocation technique
régionale du cégep de Rimouski ne passe pas, à notre point
de vue, par un changement structurel. Le cégep de Rimouski, fort
heureusement, ne détient pas le monopole de la formation technique dans
l'Est du Québec et sur la Côte-Nord. Il existe, en plus d'une
école nationale en pêche, six autres cégeps qui dispensent
aussi de la formation technique dans des programmes que nous ne dispensons pas
à Rimouski, notamment quatre à Rivière-du-Loup et quatre
à Matane. Il nous apparaît tout aussi important que l'on assure la
viabilité des différents programmes techniques offerts dans les
cégeps de l'Est afin de maintenir dans ce vaste territoire un large
éventail de programmes techniques, ce qui permettra ainsi aux jeunes de
poursuivre une grande partie de leurs études postobligatoires dans leur
région. Il y va de l'accessibilité au réseau
collégial et du maintien du dynamisme régional. (20 h 10)
En plus de la quantité de programmes à offrir, le
cégep de Rimouski est aussi préoccupé par le défi
de la qualité de la formation à dispenser et par la valorisation
de la formation technique dans notre société. Nous faisons
référence ici à la concertation avec nos partenaires
universitaires afin d'établir un arrimage soutenu entre certains
programmes collégiaux et universitaires. Nous souhaitons aussi un
meilleur arrimage entre la formation d'ouvrier spécialisé
dispensée à l'ordre secondaire et la formation de technologue
dispensée à l'ordre collégial, afin d'assurer une plus
grande continuité entre les deux ordres d'enseignement dans une optique
d'éducation permanente.
L'approche programme, tant pour les programmes techniques que
préuniversitaires, est un autre moyen à développer pour
assurer à la fois un enseignement encore de plus grande qualité
et une valorisation de la formation technique. Nous pensons aussi à
l'enseignement coopératif, qui repose sur une approche
pédagogique axée sur une meilleure intégration de la
théorie à la réalité du travail. Mentionnons
à ce propos, de l'enseignement coopératif, que le gouvernement
devra aussi s'impliquer au niveau du financement des organismes parapublics et
publics ainsi qu'au niveau des conventions collectives afin de leur permettre
de jouer leur rôle d'employeurs, partenaires de l'éducation pour
plusieurs programmes de formation. Dans une région comme la nôtre,
ces organismes sont des employeurs importants qui pourraient accueillir de nos
élèves stagiaires. Nous n'insistons pas plus sur ces
différents aspects de la vocation technique régionale de notre
cégep. Notre mémoire est plus explicite sur ce sujet.
Les autres éléments de cette première partie de
notre mémoire portent sur la mission du cégep de Rimouski et du
réseau collégial, soit le collège comme lieu de formation,
le collège comme lieu de recherche et le collège comme lieu de
services à la collectivité. Et nous terminons cette
première partie par quelques considérations sur l'adaptation des
programmes. Nous y abordons l'évaluation et l'approche programme. Comme
ces thèmes ont été abondamment traités dans
d'autres mémoires et d'autres présentations en commission
parlementaire, nous n'insisterons que sur quelques points majeurs.
Le collège de Rimouski considère comme essentiel son
rôle de voie d'entrée aux études universitaires, le
réseau collégial étant déconcentré sur
l'ensemble du Québec. La cohabitation des élèves inscrits
à la formation technique et à la formation
préuniversitaire doit demeurer. Elle permet un coude à coude de
tous ceux et celles qui sont appelés à travailler à
l'évolution de la région. De plus, elle permet à
l'élève qui désire se réorienter de passer sans
trop de heurts de la formation préuniversitaire à la formation
technique. Le collège offre à l'élève un milieu de
vie transitoire qui tient compte de la personne dans toutes ses dimensions, un
milieu accessible pour l'élève puisque situé dans sa
propre région.
Le collège de Rimouski considère qu'il doit collaborer au
renouveau de la formation, dont la formation préuniversitaire, à
l'intérieur d'un processus d'évaluation qui nous est propre. Il
faut préalablement se doter de mécanismes d'évaluation et
analyser la portée des actions présentes en regard des objectifs
et des buts déterminés. Toutefois, le collège seul ne peut
faire tout te processus; il doit compter sur la collaboration de tous les
agents de l'enseignement collégial et des responsables de tous les
ordres d'enseignement.
Dans le champ de la recherche pédagogique, les collèges
sont à peu près les seuls lieux où se fait de la recherche
sur et pour le niveau collégial. La recherche pédagogique dans
les collèges vise à adapter l'enseignement au nouveau profil de
la clientèle, jeune et adulte, à la suite de changements sociaux,
de changements de valeurs et de comportements, à adapter l'enseignement
aux nouveaux besoins de formation et de perfectionnement des adultes, à
développer de nouvelles approches pédagogiques adaptées
aux changements qui surviennent dans les programmes de formation et
adaptées aux innovations dans les moyens et techniques d'enseignement.
C'est pourquoi le champ de la recherche pédagogique constitue une
priorité pour le collège de Rimouski, particulièrement
pour l'élaboration du type pertinent d'enseignement visant
l'amélioration de la qualité de l'enseignement et la
réussite scolaire des élèves, notamment ceux qui
éprouvent des difficultés d'apprentissage. Concrètement,
cette préoccupation se traduit par des ressources humaines,
matérielles et financières disponibles pour assister les
enseignantes et enseignants, les professionnelles et professionnels lors de
leurs activités de recherche.
Le programme. Dans un autre ordre d'idées,
rappelons que la mission première des collèges demeure la
formation technique et préuniversitaire. Le programme est au coeur de la
formation; il est en quelque sorte l'unité de base de l'enseignement
collégial. Le fait, pour le cégep de Rimouski, d'offrir un vaste
éventail de programmes le situant en tête de file du réseau
constitue un défi d'adaptation continuel aux besoins de la région
et de la société en évolution constante. Pour le relever,
le collège de Rimouski doit posséder une plus grande marge de
manoeuvre, une plus grande autonomie, ce qui lui permettrait d'instaurer un
processus continu d'adaptation des programmes et, conséquemment,
l'évaluation de programmes dans une perspective d'approche programme qui
intègre les différentes composantes des programmes: cours
obligatoires, cours complémentaires et cours de concentration ou de
spécialisation.
L'approche programme, qui vise l'intégration des apprentissages,
fait appel à la cohérence de l'enseignement et comporte des
implications certaines pour les collèges. Elle constitue donc un moyen
privilégié qui conduira à l'élaboration d'outils
d'évaluation valables en vue d'une meilleure adaptation des programmes.
L'approche programme est également un moyen pour parvenir à la
formation fondamentale. Elle favorise l'intégration des apprentissages
et elle exige des actions collectives et concertées de tous les agents
éducatifs d'un collège et de son milieu. Elle vise davantage que
l'adaptation pointue à des besoins éphémères du
marché. Elle exige de tenir compte de toutes les dimensions de la
personne et prépare l'élève à s'adapter au monde du
travail en constante évolution.
Dans le contexte présent de questionnement des cégeps et
de l'enseignement collégial, la formation générale fait
l'objet de controverses. Compte tenu de la lourdeur et de la surcharge de
plusieurs programmes, le collège de Rimouski est opposé à
l'augmentation de temps accordé à la formation
générale. Il considère également que trop
diversifier les cours obligatoires aurait comme conséquence la
dispersion et le morcellement de la formation, sans lien apparent. Avant de
penser à modifier le contenu de ce bloc de cours, ne serait-il pas
préférable d'évaluer les résultats obtenus
présentement en termes d'habiletés et de compétences au
regard des buts et des objectifs visés par la formation
générale? Nous serions alors en mesure de porter un jugement sur
le genre d'élèves que nous formons présentement et de nous
questionner sur le genre d'élèves que nous désirons former
dans l'avenir. Cette évaluation nous amènerait peut-être
à découvrir que les disciplines présentes facilitent, dans
une large part, l'acquisition d'habiletés et de compétences
nécessaires pour le futur et rejoignent déjà plusieurs
aspects essentiels du développement multidimensionnel de la
personne.
Le collège de Rimouski, un institut national. La deuxième
partie de notre mémoire porte sur l'Institut maritime du Québec,
un institut national. Fondé à Rimouski en 1944 suite à une
volonté concertée des milieux industriels, l'Institut maritime du
Québec est une composante du collège de Rimouski depuis 1974.
L'IMQ est reconnu comme une école nationale et possède une
mission précise et exclusive au Québec, soit la formation de la
main-d'oeuvre travaillant dans le secteur maritime. Traditionnellement, cette
formation se faisait et se fait dans le secteur de la navigation maritime, de
la mécanique marine, de l'architecture navale et de la
radiocommunication. Au cours des dernières années, avec l'appui
du collège de Rimouski surtout, l'Institut a élargi sa mission
à tous les secteurs d'activité reliés à la mer,
soit la plongée avec scaphandre, l'hydrographie, la logistique du
transport intermodal et la plaisance.
Il est à-propos également de souligner que l'IMQ a mis en
place, en 1988, un centre de plongée professionnelle unique au
Québec qu'il modernisera bientôt à Rimouski et qui devrait
lui ouvrir la voie vers une reconnaissance comme centre
spécialisé en technologie maritime. Y ont été
développés deux programmes professionnels reliés à
la plongée avec scaphandre. De plus, depuis cette année, l'IMQ
dispense un nouveau programme en logistique du transport intermodal, support
essentiel au progrès des grappes industrielles. Et l'IMQ élabore
aussi un programme complet à l'intention des plaisanciers
québécois.
Cette diversification des activités a permis d'occuper tout le
champ de la formation dans le secteur maritime pour l'ensemble du
Québec. L'Institut maritime assume l'ensemble de cette mission, tant
pour l'enseignement ordinaire qu'à l'éducation des adultes,
à partir de son campus de Rimouski ainsi que de ses trois centres
d'éducation des adultes à Montréal, Québec et
Saint-Romuald. Ce dernier centre est spécialisé en mesures
d'urgence en mer. Les exigences de cette mission unique ont
nécessité le maintien et le développement de structures
administratives et pédagogiques adaptées à cette
réalité.
Le statut particulier de l'Institut est reconnu à
l'intérieur du collège par une harmonisation des règles
administratives avec tous les services du collège de Rimouski et par une
autonomie de gestion qui lui laisse toute la latitude nécessaire
à un fonctionnement efficace. De même, la DIGEC a commencé
à implanter une application particulière du nouveau mode
d'allocation des ressources et la direction générale assure un
lien constant avec l'IMQ. Cependant, cette reconnaissance d'une telle
école nationale ne dépasse pas ce niveau. Nous le
déplorons et nous souhaitons que l'IMQ soit considéré
à sa juste valeur. (20 h 20)
Cette institution entretient de fortes relations avec l'industrie. Cette
collaboration se traduit par un système d'enseignement coopératif
et un programme de stages en entreprise très
important pour parfaire la formation théorique et pratique
acquise en établissement. Il est fréquent de voir l'industrie
maritime contribuer au perfectionnement des enseignantes et enseignants en les
accueillant dans les entreprises et à la modernisation de
l'équipement par des dons ou des prêts de matériel. Cette
collaboration lui permet d'offrir une formation de pointe et de disposer
d'expertises très poussées qui, en plus de satisfaire les besoins
de l'industrie québécoise et canadienne, sont recherchées
à l'échelle internationale.
Pour le conseiller, un comité consultatif a été
formé. Ce comité est composé de représentants de
l'industrie, de représentants de différents ministères,
tant fédéraux que provinciaux, ainsi que de représentants
du milieu de l'éducation. De plus, le contenu des programmes
d'enseignement qu'il offre doit satisfaire aux exigences non seulement du
ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science, mais
aussi de certains ministères fédéraux comme ceux des
Transports et des Communications. Servant un secteur industriel très
spécialisé, devant répondre aux exigences des divers
ministères concernés et voulant toujours offrir une formation
à la fine pointe de la technologie moderne, l'IMQ doit composer avec la
lenteur excessive dans l'actualisation de ses différents programmes
d'enseignement. Pour suivre l'évolution du milieu industriel en
continuelle progression et pour s'ajuster aux courants nouveaux, il y a lieu de
revoir périodiquement les programmes de formation. À cette fin,
nous croyons que les comités de programme, très
représentatifs de l'industrie et de l'enseignement collégial,
devraient annuellement requestionner les curriculum et recommander s'il y a
lieu les modifications nécessaires. Nous croyons qu'une telle structure
permettrait une économie d'argent et d'énergie en évitant
le grand processus de révision de programmes que l'on connaît
actuellement.
L'Institut maritime a vécu ces dernières années et
revit encore le défi posé par l'em-piètement du secondaire
dans des champs de spécialisation qui lui sont historiquement
réservés. Comme d'autres, l'IMQ s'interroge actuellement sur le
bien-fondé de développer au secondaire de nouvelles
infrastructures pour des programmes professionnels dans des domaines
déjà occupés par lui. Peut-il assister impuissant à
des dédoublements de services et à de nouveaux investissements
importants dans les équipements très sophistiqués dont il
dispose déjà en partie sous le seul prétexte qu'il s'agit
de programmes de formation conçus pour des ordres d'enseignement
différents? Chez nous, c'est le domaine de la plongée avec
scaphandre qui est le plus touché, et aussi, avec moins d'importance, le
nautisme. Pour pousser plus loin son expertise et ainsi répondre aux
besoins pressants et urgents d'une industrie à la fine pointe, l'IMQ
devrait être considéré comme un centre d'excellence
où peuvent se côtoyer les divers ordres d'enseignement, favorisant
ainsi une formation vraiment intégrée dans un processus
continu.
Dans un autre ordre d'idées, au plan de la formation des adultes,
l'identification des besoins de formation et le financement des programmes de
perfectionnement nous obligent à multiplier nos interventions
auprès des différentes commissions de formation professionnelle.
À cause du territoire à desservir et des ressources d'encadrement
limitées chez nous, il y aurait avantage, selon nous, à
réserver des enveloppes particulières pour les secteurs
concernés et à confier à un bureau précis, à
titre de guichet unique, la responsabilité des échanges avec
notre institution dans la formation de la main-d'oeuvre adulte.
Comme les autres écoles spécialisées du
réseau collégial dites nationales, l'IMQ a su jusqu'à
présent relever les défis posés par sa situation
particulière et sa mission unique au Québec. Avec des ressources
dynamiques et de qualité, il a appris à oeuvrer efficacement, en
concertation avec le collège de Rimouski et le milieu industriel qu'il
dessert depuis un demi-siècle. Aujourd'hui, alors que l'on s'interroge
sur la formation collégiale, c'est avec assurance que nous redisons
notre engagement à continuer notre action à la grandeur du
Québec, à l'intérieur du réseau collégial et
dans tous les secteurs d'activité du monde maritime. Nous croyons
même qu'une fois relevés les défis
préidentifiés cet institut pourrait servir de modèle
à d'autres au plan de ses échanges avec l'industrie, de son
enseignement coopératif et de l'engagement de l'ensemble de son
personnel.
Pour sa part, le collège de Rimouski est très fier des
réalisations de l'Institut maritime du Québec et entend continuer
à le soutenir dans son développement. C'est pourquoi il fait
siennes les considérations qui précèdent et qui sont
reprises dans le mémoire déposé conjointement par les
Écoles nationales du Québec.
À titre de conclusion, maintenant. Donc, en guise de conclusion,
rappelons que le collège de Rimouski est constitué de deux
entités distinctes - un cégep régional et un institut
national -mais avec une préoccupation commune, soit d'assurer une
formation de qualité adaptée aux besoins du milieu. La
façon de réaliser l'ensemble de notre mission est orientée
par notre spécificité propre: le cégep de Rimouski comme
pôle régional en éducation, particulièrement en
formation technique, et l'Institut maritime du Québec comme
établissement à vocation maritime, dont les actions
débordent sur les champs national et international. Chez les deux
constituantes, nous retrouvons une préoccupation similaire qui fait
appel à un souci constant d'amélioration et d'évolution
afin de répondre aux attentes de nos clientèles. Ainsi, il est
question d'expertise, de formation de qualité, de perfectionnement de la
main-d'oeuvre, de concer-
tation avec les partenaires, de structure souple, d'autonomie.
En ce sens, les recommandations de notre mémoire font état
de mesures ayant comme objectif de parfaire notre mission d'éducation.
Nous espérons que la commission parlementaire les prendra en
considération, et nous sommes disponibles pour échanger avec les
membres de la commission sur la portée et l'impact concret de nos
recommandations.
La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. Desrosiers. Mme
la ministre, vous avez la parole.
Mme Robillard: Merci, Mme la Présidente. Je voudrais
d'abord souhaiter la bienvenue à toute l'équipe du collège
de Rimouski et de l'Institut maritime. Je pense que c'est très important
que nous ayons le témoignage de plusieurs cégeps au niveau de
cette commission, et vous êtes un parmi d'autres qui avez soumis un
mémoire. Je vois que vous êtes ouverts à certains
changements et à certaines adaptations. Ça nous fait plaisir de
vous accueillir, toute l'équipe.
M. Desrosiers, vous avez plusieurs recommandations, mais d'abord et
avant tout je me dois de clarifier avec précision la recommandation 1.
Vous n'êtes pas sans savoir que cette recommandation qui veut qu'on donne
une vocation régionale au collège de Rimouski a suscité
des émois dans le milieu. Et je voudrais donc que vous soyez très
précis. Même dans votre conclusion, vous avez encore parlé
du collège régional. Et, vous le savez, dans l'histoire des
cégeps au Québec depuis 25 ans, nous avons vécu cette
réalité de collège régional, et l'histoire a fait
que nous nous sommes en allés graduellement vers des cégeps
autonomes, partout, dans toutes les régions du Québec. Il nous en
reste un présentement, qui est le collège régional
Champlain, avec trois campus. Et là aussi il y a un désir
très grand d'autonomie. Alors, vous comprenez bien que, quand on voit
une recommandation que vous ayez le statut de collège régional de
Rimouski, c'est comme le mouvement inverse de ce qui s'est passé dans
l'histoire des cégeps. Et, naturellement, tous les cégeps de
l'Est du Québec, que ce soit Matane, Rivière-du-Loup,
Gaspésie, même la Côte-Nord, s'interrogent sur cette
recommandation que vous nous faites. Alors, je veux que vous soyez très
précis. Pourquoi voulez-vous vous appeler collège régional
de Rimouski?
M. Daigneault (Alcide): Si vous permettez, Mme la ministre,
Alcide Daigneault. Ce n'est pas de vouloir s'appeler collège
régional, ce qu'on met sur la table à la commission
parlementaire, c'est simplement que, dans la pratique, dans les faits, soit
reconnu le rôle régional du collège de par sa vocation
technique. Et, comme on le mentionne, on ne demande pas de changement de
structure. On ne demande pas de changement structurel.
Il y a quatre collèges au Québec qui ont 20 programmes
professionnels et plus. Il y en a deux à Montréal, il y en a un
à Trois-Rivières, il y en a un à Rimouski. Et, ça,
je pense que ça place le collège dans une situation
particulière. Et, si l'on veut maintenir l'ensemble de ces
programmes-là dans le territoire du Bas-Saint-Laurent, de la
Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine, il faut que l'on fasse le
recrutement de la clientèle dans l'ensemble de ce territoire-là.
Et actuellement, quand on le fait, on le fait avec le mode d'allocation des
ressources qui ne prévoit pas de zone de rayonnement pour des
collèges ou des situations comme celle-là. Et c'est ça
qu'on met sur la table.
Pour nous, il n'est pas question d'inféoder quelque
collège que ce soit, au contraire, parce que nous recommandons aussi que
l'ensemble de la carte des options professionnelles qui sont dispensées
dans les collèges de la région soit aussi maintenu. Et, pour
nous, on a cette nette préoccupation là. Et on reconnaît
tout à fait, comme on l'a fait dans notre mémoire, dans la
présentation qui a été faite ce soir, que les autres
collèges aussi ont un rôle à jouer et qu'ils ont
développé un certain nombre de cartes d'options de programmes
professionnels qui sont différents des nôtres pour un certain
nombre et que ces programmes-là aussi doivent continuer à vivre
dans la région du Bas-Saint-Laurent, de la Gaspésie et de la
Côte-Nord. Mais l'on sait que, pour développer des programmes, par
exemple, en radiologie ou laboratoire médical, le recrutement de la
clientèle doit se faire dans l'ensemble de ces territoires. Et,
même, on a des ententes de services avec le Nouveau-Brunswick. Alors, je
pense que c'est juste reconnaître ce fait-là; l'on ne veut pas
changer le nom du collège de Rimouski pour l'appeler collège
régional de Rimouski, mais on veut simplement, dans le sens historique
des choses, rappeler que Rimouski est une ville d'éducation et que
Rimouski est une ville qui a accueilli tous ces programmes-là dès
le point de départ, et que le collège est né d'un institut
de technologie qui était là, qui était présent.
D'ailleurs, les quatre collèges qui ont 20 programmes et plus sont
quatre collèges qui sont aussi nés d'instituts de technologie en
1967. (20 h 30)
Alors, c'est cette réalité qu'on met sur la table. On ne
demande pas de changer de nom de collège, on fait simplement dire: La
réalité de Rimouski, c'est celle-là, et ça a des
impacts au niveau du recrutement de la clientèle, au niveau du
perfectionnement, du parc technologique à développer dans un
territoire comme celui-là, dans une région comme celle-là,
pour un bassin de population qui est plus large que celui d'un collège
en région, parce qu'on joue aussi ce rôle de collège en
région dans le territoire plus immédiat. Mais, comme
collège qui a cette
envergure régionale, avec ses 22 programmes de formation, c'est
ça qu'on met sur la table. Ce n'est pas autre chose et ce n'est pas une
question de vouloir changer de nom, de vouloir être reconnu plus qu'un
autre, c'est simplement que la réalité du collège de
Rimouski soit reconnue et que, possiblement, dans la spécificité,
dans le mode de financement au niveau du MESS, il puisse y avoir quelque chose
au niveau de la zone de rayonnement qui soit particulier dans un collège
comme celui-là.
Mme Robillard: Mais, qu'est-ce que ça signifie si, pour
vous... Vous me dites presque que c'est strictement une reconnaissance, mais
vous ne me parlez pas des impacts. De la façon dont je le vois, je vous
saisis mal, je pense, M. Daigneault, parce que j'ai l'impression que je
pourrais reconnaître la vocation régionale à plusieurs
cégeps dans la province, qui ont cette vocation dans chacune des
régions, leur spécificité, et non seulement par le nombre
de programmes techniques offerts, mais par beaucoup d'autres
spécificités. Alors, c'est pour ça que j'ai de la
difficulté, sûrement, à saisir ce que vous voulez, et
surtout à mesurer les impacts d'une telle reconnaissance. Je pense que
c'est ça que je veux que vous me disiez aussi clairement. Qu'est-ce que
ça veut dire quand vous me demandez ça?
M. Daigneault: Ça veut dire que, par exemple, pour le
recrutement de la clientèle, on doit se rendre dans l'ensemble du
territoire pour 9 programmes qui sont dispensés seulement à
Rimouski, à l'est de Québec. Ça a un impact au niveau du
recrutement de la clientèle. Au niveau d'avoir 22 programmes
professionnels à Rimouski, ça demande un corps professoral
très diversifié qui doit se maintenir, au niveau du
perfectionnement, à la fine pointe du perfectionnement. Et on est
payés de la même façon que si on était à
Montréal ou que si nos 300 professeurs étaient dans 5 programmes
seulement. Parce que tout ce qui génère du financement, c'est le
nombre de professeurs, dans quelque programme qu'ils soient.
Déjà, là, ça a un impact aussi au niveau du
perfectionnement des enseignants. Au niveau du parc technologique à
maintenir, ça a aussi des impacts d'avoir 22 programmes professionnels
qui sont répartis dans tous les secteurs d'activité, à
part le secteur des arts.
Mme Robillard: Mais j'ai l'impression que vous êtes en
train de me parler de certaines spécificités qui vous sont
propres, à votre collège, et qui ont sûrement des impacts
budgétaires. Et ce que vous me demandez, c'est une souplesse dans le
financement pour reconnaître ce que vous êtes et ce que vous
offrez. Et, bon, avec un tel discours, j'ai moins de problème qu'avec un
discours de vocation régionale, parce que, encore une fois, la vocation
régionale, il y a plusieurs cégeps qui l'ont. Vous savez que nos
cégeps n'ont pas de territoire en tant que tel, ne sont pas
définis par territoire dans la loi; ce n'est absolument pas la
même chose qu'à d'autres ordres d'enseignement. Vous savez aussi
que des cégeps, parfois, qu'on qualifie de monoparentaux, donc qui ont
un seul programme et sont les seuls à offrir ce programme dans toute la
province de Québec...
M. Daigneault: C'est ça.
Mme Robillard: ...eux aussi ont des impacts au niveau du
recrutement, et tout.
M. Daigneault: C'est ça.
Mme Robillard: Je pense que c'est de ça que vous voulez me
parler. Alors que, quand vous utilisez ce vocable, vous savez très bien,
MM. Daigneault et Desrosiers, vous avez dû le sentir... Je ne pense pas
que vous ayez réuni tous les cégeps de l'Est du Québec
pour leur demander s'ils étaient d'accord avec cette vocation
régionale, et ça a fait soulever beaucoup de vapeur. Je saisis
mieux ce que vous me demandez: c'est une souplesse budgétaire par
rapport à ce que vous offrez, en continuité avec l'histoire de
toutes les maisons d'éducation de Rimouski.
M. Desrosiers: Exact. M. Daigneault: Exact et...
Mme Robillard: Exact. Parfait. Alors, passons à autre
chose, parce que... C'était important que je vous saisisse bien dans vos
demandes. Alors, passons à certaines parties de votre mémoire et,
de façon particulière, je veux aborder avec vous ce que vous me
recommandez dans les programmes de A.E.C., C.E.C., attestation d'études
collégiales et certificat d'études collégiales. Vous me
recommandez que ces deux diplômes là, A.E.C., C.E.C., soient
enrichis, dites-vous, qu'ils soient «enrichis de façon à
aller au-delà des besoins stricts exigés par le marché du
travail. Il faudrait viser une formation reliée à toutes les
dimensions de la personne.» Moi, je me fie non pas au texte de votre
présentation que vous avez faite, M. Desrosiers, mais à votre
mémoire, que nous avions.
M. Desrosiers: Oui, absolument.
M. Daigneault: Excusez, dans quelle...
Mme Robillard: Pages 14 et 15 de votre mémoire.
M. Daigneault: O.K. Ça va.
Mme Robillard: Alors, vous voulez que les diplômes d'A.E.C.
et de C.E.C. soient enrichis.
Alors, je voudrais bien vous saisir dans votre recommandation. Vous
voulez ajouter de la formation générale à l'A.E.C. et au
C.E.C.
M. Desrosiers: C'est ça.
Mme Robillard: Est-ce que c'est bien ça? Parce que,
là, si on ajoute de la formation générale au C.E.C,
ça nous amène au D.E.C., au diplôme d'études
collégiales. Là, je veux exactement vous saisir.
M- Daigneault: C'est exact. Ça pourrait être une
façon de valoriser la formation professionnelle, la formation technique
en la modulant en termes d'A.E.C. et de C.E.C, mais, à
l'intérieur de cette modulation, il devrait y avoir aussi de la
formation générale et non pas seulement de la formation
professionnelle telle qu'on la connaît actuellement, ou des A.E.C. ou des
C.E.C. tels qu'on les connaît actuellement, qui sont concentrés
sur la formation professionnelle sans intégration de la formation
générale.
Mme Robillard: C'est une modulation et, dans chaque modulation,
une partie de formation générale.
M. Daigneault: C'est ça. Mme Robillard: C'est bien
ça? M. Daigneault: C'est ça.
Mme Robillard: Maintenant, M. Desrosiers, vous avez aussi... Dans
votre mémoire, vous ne parliez pas de la formation
générale, mais, dans votre présentation, vous en avez
parlé ce soir.
M. Desrosiers: Oui.
Mme Robillard: Vous n'aviez aucune recommandation, je pense,
précise, et ce que vous dites dans votre présentation de ce soir,
vous ne voulez pas qu'on augmente le nombre d'heures de formation
générale. Est-ce que le collège est en accord avec
certaines recommandations qui nous ont été faites, soit par le
Conseil des collèges, soit par la Fédération des
cégeps, à l'effet de regrouper ensemble les cours
complémentaires et les cours obligatoires, d'en faire un seul bloc de
formation générale, et l'on pourrait discuter du contenu,
là. Mais est-ce que vous êtes d'accord avec cette formulation?
M. Desrosiers: Madame, afin de répondre à cette
question-là, Mme Vigeant, notre directrice des services
pédagogiques, a un point de vue à vous émettre
là-dessus.
Mme Vigeant (Nicole): Ce qu'on recommande, finalement, au niveau
de la formation générale, c'est qu'on est opposés à
ce que la formation générale soit augmentée en termes
d'unités, et on met en garde face à une dispersion trop grande
qu'on pourrait retrouver à l'intérieur de la formation
générale. Par exemple, si on décidait d'ajouter beaucoup
de champs d'études dans la formation générale, il nous
semble qu'on pourrait arriver à une dispersion qui pourrait être
dangereuse.
Mme Robillard: On ne se parlera pas de la dispersion actuelle
dans les cours complémentaires.
M. Drapeau (Jean-Claude): Non, tout à fait. Mme
Robillard: II y en a une très grande. M. Drapeau: Exact. Oui,
oui. Mme Robillard: Oui, effectivement.
Mme Vigeant: Ce que l'on recommande, c'est finalement de passer
par l'approche programme et de regarder à l'intérieur de chacun
des programmes quel type de diplômé nous voulons former et que, a
partir du profil de diplômé que nous allons déterminer pour
chacun des programmes, on se pose la question: Quelle est la formation
générale ou quelles sont les habiletés fondamentales,
plutôt, qui sont requises pour former l'étudiant du profil qui est
défini? Ce profil, on pense qu'il doit être défini en
collaboration avec le marché du travail et le monde des
universités. Et c'est dans ce sens-là que notre proposition, au
niveau de la formation générale, recommande une évaluation
de ce qui se fait présentement et un arrimage entre le profil de
diplômé qu'on doit former, défini par le marché du
travail et le monde universitaire; à partir de ce profil-là, on
pourrait définir le type de formation générale qui serait
le plus approprié.
Mme Robillard: Merci.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. M. le
député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: merci, mme la présidente. j'hésite
entre deux choses, donner mon temps au député de rimouski pour
qu'il bataille avec la ministre ou...
Une voix:...
M. Gendron: Non, je sais. Un peu avec...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Gendron: J'allais le dire, mais ce ne sera pas long,
là. Ou, un peu avec le sens de l'humour que vous me connaissez, dire:
Écoutez, je ne suis pas sûr qu'on a avantage à se
mêler de
dossiers d'envergure régionale, mais, à partir du moment
où j'ai presque eu peur que ça touche tout le Québec,
là, j'ai dit: Ça me regarde. (20 h 40)
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Gendron: Mais, trêve de plaisanterie et très
sérieusement, vous avez donné l'explication à la
première question, mais je ne pense pas, en ce qui me concerne, que
ça clôt quand même le fond de la question. Moi, sur
l'appellation et le contexte historique, j'aime bien me fier à vous
tous, et je vous salue, en passant, et je suis très heureux que vous
soyez aussi nombreux. J'ai toujours admiré les régionaux qui
défendent fermement leur cause, et c'est de même qu'on
réussit à garder des régions fortes, dynamiques,
prospères. Alors, bravo d'être là, sincèrement!
Moi-même, je suis un gars de région puis j'aime bien que les gens
de ma région ou des régions du Québec, de temps en temps,
laissent voir leur fermeté à tenir à certaines choses.
Mais ce que je voudrais savoir, au-delà de l'appellation qui ne
semble peut-être pas réglée complètement mais, en
tout cas, répond aux questions de la ministre, est-ce que vous ne croyez
pas que, si la prétention est uniquement sur une base historique et,
justement, qu'entre-temps, avec l'arrivée d'un cégep à
Matane, à Baie-Comeau, à Rivière-du-Loup, à
Gaspé, à Sept-lles, de maintenir... Et tant mieux si ça
n'a pas d'incidence! Ma crainte, c'est que ça ait des incidences sur
l'affaiblissement progressif des autres collèges, dans le temps, qui ne
pourront pas développer une masse critique assez significative pour
être capables de rayonner dans le temps, de perdurer et, eux aussi,
d'avoir un minimum d'offres de cours assez alléchantes, autant en
formation technique qu'en formation de base, pour qu'ils puissent
connaître un peu de développement, eux aussi, dans des
spécialités qui pourraient éventuellement être
intéressantes pour eux. Est-ce que vous avez analysé ça
sous cet angle-là? Et est-ce que vous pouvez aujourd'hui me donner
garantie que l'ensemble de la direction et le socio-économique - en
fait, tout le milieu, les syndicats, tout ça... En termes de
prospective, vous n'avez pas d'inquiétude d'affaiblir le vécu
futur des autres cégeps de cette belle et grande région?
M. Daigneauit: Si vous me permettez, en fait, les
collèges, ailleurs dans la région, lorsqu'ils sont devenus
cégeps, se sont développés à partir de
collèges classiques là où il n'y avait pas d'institut de
technologie, sauf à Gaspé. Et ils se sont
développés, donc, dans des créneaux où il n'y avait
pas de formation technique déjà dans le territoire, si on pense
à Matane ou si on pense à Rivière-du-Loup. Et, nous, on
s'est développés dans les secteurs où on était
déjà en place, qui étaient nés de l'Institut de
technologie et des autres programmes. Alors, par ce fait-là, on n'a pas
affaibli les autres, on n'a pas empêché les autres collèges
de se développer. Au contraire, ils ont continué à se
développer. Et le réseau collégial a assuré une
base de programmes techniques en soins infirmiers, en informatique, en
techniques administratives, en gestion de bureau dans l'ensemble du
réseau collégial, dont les collèges de l'Est.
Et, nous, on dit que ces programmes là aussi et les programmes
particuliers des autres collèges doivent aussi être maintenus dans
le territoire, au-delà des seuils de viabilité dont il est
question quand la DGEC établit ses seuils. Parce que cette carte
d'options là doit être maintenue. Dans l'ensemble du territoire,
il y a une quarantaine de programmes différents qui sont
dispensés. Et, ça, on pense que ça doit être
maintenu. Et, à Rimouski, il y en a 22 sur ces 40 là. Alors, on
pense que, ça, ça doit être maintenu et on travaille en
concertation avec les autres collèges aussi pour que cet ensemble de
programmes là soit maintenu. On fait des actions communes sur la
promotion des études supérieures dans l'Est, par exemple, et tout
ça en vue de maintenir une offre de programmes dans l'ensemble du
territoire.
M. Gendron: Et vous n'avez pas peur que ça ait des
incidences sur une accessibilité peut-être réduite si, dans
le futur, on maintenait toujours les 22 offres de cours techniques uniquement
à Rimouski?
M. Daigneauit: Bien, c'est-à-dire que, d'après ce
dont on se rend compte, il n'y a pas de clientèle dans le territoire
pour avoir, par exemple, deux collèges qui dispenseraient laboratoire
médical ou radiologie. Il n'y a pas de placement non plus de ces
finissants-là pour deux collèges. Alors, je ne pense pas qu'on
puisse prétendre qu'on va pouvoir offrir de ces mêmes programmes
là dans d'autres collèges du territoire parce qu'il n'y a pas de
placement.
M. Gendron: Non, mais vous me comprenez sans doute, là,
indirectement. Moi, supposons que je reste à Gaspé...
M. Daigneauit: Oui.
M. Gendron: ...en termes d'hypothèse, et que je veuille
aller chercher une formation préuniversitaire en sciences humaines, un
D.E.C., je n'ai pas la conviction, là, que... Ah excusez! Mon exemple
n'est pas bon. Non, non. Je vais le prendre dans une discipline. Je vais le
prendre dans une formation professionnelle et non pas...
M. Daigneauit: O.K.
M. Gendron: C'est quoi, là, l'obligation que, mes trois
années de formation technique ou professionnelle, j'aille
obligatoirement les prendre
à Rimouski? N'oubliez pas que je suis toujours un résident
de Gaspé, là.
M. DaigneauH: Oui, oui.
M. Gendron: Est-ce que ce ne serait pas possible de me permettre
de faire un an à Gaspé, peut-être deux, et de venir finir
ça à Rimouski?
M. Daigneault: Ça existe. M. Gendron: Ça
existe?
M. Daigneault: Ça existe dans certains programmes;
ça existe en electro, par exemple, où on n'a pas les mêmes
voies de sortie. Ça existe dans certains programmes.
M. Gendron: Et il y a une bonne collaboration avec les autres
cégeps...
M. Daigneault: Ah...
M. Gendron: ...pour regarder des filières communes...
M. Daigneault: ...tout à fait!
M. Gendron: ...des arrangements?
M. Daigneault: Tout à fait, tout à fait, tout
à fait. Il n'y a aucun problème avec ça.
M. Gendron: Alors, ne lâchez pas. M. Daigneault:
D'ailleurs...
M. Gendron: Continuez. J'ai une autre question, sur la recherche.
Vous avez mentionné que, dans le champ de la recherche
pédagogique, les collèges sont à peu près les seuls
lieux où se fait de la recherche sur et pour le niveau collégial.
Je prends vos phrases. Vous avez défini trois objectifs, et vous
ajoutez: «C'est pourquoi le champ de recherche pédagogique
constitue une priorité pour le collège de Rimouski».
J'aimerais ça avoir un peu plus d'indications, parce que je trouve
ça original, tant mieux, mais, en termes d'effectif et de budget, c'est
quoi? Qu'est-ce que ça signifie? C'est significatif ou peu? J'aimerais
ça vous entendre sur l'effectif que vous pensez qu'il faut, une
approximation, et le budget relié à cette recherche
pédagogique.
M. Daigneault: M. Desjardins.
M. Desjardins (François): François Desjardins. Je
suis le conseiller pédagogique à la recherche. Donc,
conséquemment, il y a une personne, un professionnel d'alloué
à la recherche. La recherche comprend ici à la fois la recherche
de nouvelles stratégies d'enseignement et également la production
de matériel didactique, des programmes qui complètent le
programme offert par la DGEC qui, malheureusement, risque de disparaître,
à ce qu'on m'a dit. En plus du rôle-conseil du conseiller
pédagogique, il y a également un budget d'alloué pour
dégrever les professeurs d'une partie de tâche pour leur permettre
soit d'expérimenter des stratégies pédagogiques, d'essayer
de nouvelles choses, de faire des expériences ou de comparer pour
évaluer les choses ou, dans d'autres cas, pour produire du
matériel didactique, particulièrement dans les secteurs
techniques où il n'y a rien en français. Ce budget-là,
cette année, est de 38 500 $. S'ajoute à ça un support
à d'autres professeurs qui ne sont pas dégrevés mais qui
expérimentent des choses ou produisent du matériel.
Vous connaissez, du moins le milieu collégial connaît un
peu le type de production que nous faisons. Nous produisons, on pourrait dire,
en moyenne de un à deux manuels par année grâce à
l'aide de la DGEC, particulièrement dans les secteurs techniques ou dans
les secteurs où il y a une plus grosse clientèle, en particulier
dans les secteurs généraux, en collaboration avec des maisons
d'édition. Bref, c'est un peu ça, on pourrait dire, le portrait
de la recherche pédagogique à Rimouski.
S'ajoute à ça une autre expertise qu'on a
développée depuis six ans, c'est l'aide aux étudiants en
difficulté. Nous avons monté un système de
dépistage. Nous offrons différents programmes, soit des
programmes préventifs pour les élèves qui sont dits
à risque - bon, ces programmes-là sont connus dans le
réseau - ou des programmes qu'on pourrait dire curatifs, qui visent
à récupérer, entre guillemets, les étudiants qui
seraient autrement expulsés du collège; on essaie de les
intégrer avec des programmes ad hoc.
M. Gendron: Je trouve ça très bien,
sincèrement, je trouve ça très bien, surtout pour les
élèves qui éprouvent des difficultés
d'apprentissage, d'autres pour les formules d'encadrement, peu importe, mais
qu'est-ce qui fait que c'est difficilement faisable d'en faire un peu plus et
de dégager plus de professeurs? Est-ce juste des raisons
budgétaires?
M. Desjardins: Oui, parce que la volonté, le dynamisme est
là.
M. Gendron: O.K. Donc, c'est exclusivement des raisons
budgétaires. Dernière question, parce que mon collègue de
Rimouski me fait accroire qu'il a des bonnes questions à vous poser.
Alors, je vais le vérifier, je vais le vérifier si c'est vrai.
Alors, j'aurais questionné la formation de base, mais la ministre a
posé cette question-là, donc je n'y vais pas. La dernière.
Vous dites, à un moment donné, à la recommandation 20:
«d'établir un guichet unique et une enveloppe
protégée en formation des adultes - et vous avez ajouté,
parce que c'est dans le texte - pour le secteur maritime.» est-ce
à dire que votre réflexion exigerait qu'il y ait une enveloppe
protégée en formation des adultes uniquement pour le secteur
maritime?
M. Daigneault: M. Vignola. (20 h 50)
M. Vignola (Jean-Marie): Permettez. Comme le dit le
mémoire présenté également par les Écoles
nationales, l'institution que je dirige a une mission qui lui est personnelle,
unique au Québec. Notre mémoire dit également que nous
administrons, dans la formation des adultes, trois centres permanents de
formation: Rimouski, Saint-Romuald... même quatre avec Rimouski:
Rimouski, Saint-Romuald, Québec et Montréal. Ça nous
oblige, cette multiplication, à faire affaire avec différents
bureaux de formation professionnelle, des CFP à Rimouski,
Montréal, Québec, etc. Vu qu'également nos ressources
d'encadrement sont plutôt limitées, nous avons de la
difficulté à remplir tous les mandats provinciaux que nous
avons.
Ce que nous souhaitons, c'est que nous puissions en venir à faire
affaire avec un seul bureau régional ou une seule région,
à titre de guichet unique, et dans l'identification des besoins de
formation pour le secteur maritime et pour le financement des programmes de
formation. Quant à l'enveloppe protégée, on est
peut-être un petit peu choyés depuis un certain temps dans la
formation maritime. Nous avons toujours eu une certaine partie d'enveloppe
protégée pour le secteur maritime. Nous espérons voir
confirmer et étendre ce concept, non seulement à nous, mais aux
autres également, aux autres écoles nationales.
M. Gendron: Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Hovington): Merci.
M. Tremblay (Rimouski):...
La Présidente (Mme Hovington): Je ne vous ai pas reconnu
encore.
M. Tremblay (Rimouski): J'ai bien hâte que vous me
reconnaissiez, Mme la Présidente. J'attends.
La Présidente (Mme Hovington): Je vous reconnais donc, M.
le député de Rimouski.
M. Tremblay (Rimouski): Alors, Mme la Présidente, moi, je
viens faire une mise au point. J'ai rencontré les professeurs de
philosophie du cégep de Rimouski. On m'a remis toute une série de
documents publiés par les professeurs de philosophie.
La Présidente (Mme Hovington): C'est bien, ça.
M. Tremblay (Rimouski): II me fait plaisir de les mentionner, Mme
la ministre. «Les conceptions de l'être humain, théorie et
problématique» publié par MM. Benoît Leclerc et
Salvatore Pucella. Ça, c'est les tomes I et II; les tomes IV et V de la
même publication: «Éthique et politique des valeurs
personnelles à l'engagement social» publié par MM.
André Morazain et Salvatore Pucella. Une autre, «Le
développement de la pensée formelle par les méthodes LOGOS
et BBGR» par MM. Joseph-Marie Briand, Jean Dé-silets, Daniel Roy
et Mme Annie Trépanier. «Étude de l'importance des
connaissances, de l'enseignement et de l'influence des actes professionnels
d'enseignement sur l'apprentissage au collégial» par M. Daniel Roy
et, enfin, le prix de la ministre: «L'apprentissage du
raisonnement» par MM. Jean Désilets et Daniel Roy. Voilà
pour ma mise au point, et c'est important; puis c'est publié par des
professeurs de chez nous.
La Présidente (Mme Hovington): Faites-moi un
résumé, M. le député.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Tremblay (Rimouski): Oui. Je vous récrirai.
La Présidente (Mme Hovington): Ce n'était pas
publié quand il est passé au collège.
M. Tremblay (Rimouski): Ceci dit, étant donné que
nous avons deux secteurs de l'enseignement collégial qui sont
drôlement interpellés dans cette commission, et comme nous avons
le privilège d'avoir un professeur d'éducation physique ici en la
personne de M. Drapeau, j'aimerais bien l'entendre quelques minutes.
Nécessairement, je vais l'entendre, mais, au départ, je voudrais
souligner que l'Institut maritime du Québec à Rimouski, dans deux
ans, fêtera son cinquantième anniversaire d'existence. Mme la
ministre, c'est très important. Et nous avons développé
une expertise dans ce domaine. Je n'ai pas le temps de questionner l'Institut
maritime, mais soyez assurée que je suis très fier de l'avoir
dans ma région, et surtout dans mon comté.
Maintenant, ma question s'adresse à M. Drapeau. M. Drapeau,
dites-nous donc pourquoi il faut maintenir les cours d'éducation
physique. Dites-nous donc ça.
M. Drapeau: Vous me permettrez d'abord, M. Tremblay, de
mentionner que je suis particulièrement intéressé par les
enjeux régionaux. Et à la question de M. Gendron, tout à
l'heure, sur le danger d'aller chercher une clientèle dans un territoire
où il y a déjà un autre cégep dans
notre région, c'est une réalité, bien sûr,
mais il y a une autre réalité qu'il faudrait mettre dans le
décor, c'est celle qui fait que les jeunes de notre région de
l'Est du Québec, Bas-Saint-Laurent, Gaspésie, les îles, ont
tendance à venir beaucoup par en haut. Et cet élément de
problématique là est supérieur, je pense, au niveau des
impacts, à ce que ça peut provoquer comme impact par rapport
à nos cégeps de régions. Et, dans ce sens-là, je
pense que je trouvais important de vous ajouter cet
élément-là.
En ce qui concerne l'éducation physique, bien sûr, vous
avez entendu les gens de la Confédération des éducateurs
et éducatrices physiques. Vous connaissez les vertus de ça. Mais
je pense qu'on a parlé d'une controverse dans notre mémoire, et
c'est un peu dans ce sens-là que je le comprends, comme éducateur
physique. Comme les cours de formation générale, on est
très interpellé, finalement. Bien sûr, il y a le
français, compte tenu d'un contexte donné qu'on connaît
très bien, qui a été interpellé à sa
façon, mais pas pour le remettre en question. Sauf que, pour la philo et
l'éducation physique, on est interpellé dans le sens que, nous,
on a comme un statut particulier. On n'est pas dans des programmes directement.
Les gens des programmes professionnels, des programmes de sciences humaines,
ils nous perçoivent un petit peu comme des gens qui prennent leur place,
parce qu'ils manquent de temps, eux aussi, pour faire l'amélioration de
la formation dans leur domaine. Alors, pris dans ce sens-là, ce qui nous
cause un peu problème à ce moment-ci, c'est de ne pas pouvoir
être intégrés à l'intérieur de ces
différents programmes.
C'est pour ça qu'on croit fermement que, le jour où
l'approche programme va être davantage en place, qu'on va donner la
possibilité à des cours comme philo et éducation physique
d'être dans ces programmes, qu'on va les évaluer, qu'on va
connaître la portée, sachant aussi la finalité qu'on veut y
donner, on va avoir la preuve de ce qui se vit. Par exemple, au cégep de
Rimouski, aussitôt qu'on est dans des programmes particuliers, comme pour
les décrocheurs, comme pour les clientèles de handicapés
physiques, c'est magique, ces cours-là, d'une certaine façon.
Mais, quand on n'est pas là, bien sûr, on est
questionné.
M. Tremblay (Rimouski): O.K. Je vous remercie. Mme la
Présidente, vous me donnez encore deux minutes, s'il vous
plaît?
La Présidente (Mme Hovington): Je vous en prie.
M. Tremblay (Rimouski): J'adresserais une question au directeur
de l'Institut maritime du Québec. Au niveau des équipements
didactiques que vous tenez tant à avoir, surtout dans les
équipements sophistiqués, est-ce que, bientôt, vous ne
serez pas doté d'un équipement tout à fait particulier
pour dispenser vos cours d'enseignement maritime?
M. Vignola: L'Institut maritime du Québec a une mission
unique mais, étant les seuls au Québec à dispenser cette
formation, nous avons à composer avec l'ensemble canadien. Et,
prochainement, le ministère fédéral des Transports va
donner à chaque région, les cinq grandes régions du
Québec... Il va doter les cinq grandes régions du Canada
d'équipement de haute technologie pour l'enseignement de la navigation
électronique simulée et l'enseignement en salle de machines, pour
les mécaniciens.
L'Institut maritime sera doté de deux de ces
équipements-là: un simulateur de salle de machines, qui va
être installé à Rimouski, et un autre, de simulation de
navigation électronique simulée, qui serait ici, installé
à Québec. Je ne sais pas si, à la question que vous me
posez, je réponds bien.
M. Tremblay (Rimouski): M. le directeur, vous avez bien compris.
C'est surtout ça que je voulais vous faire préciser, et vous
l'avez fait très bien. Je vous remercie.
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Hovington): ça va, m. le
député de rimouski? vous êtes satisfait? si vous me
permettez, si vous donnez le privilège de poser une question à la
présidente...
Une voix: Jusqu'à 21 heures.
La Présidente (Mme Hovington): Jusqu'à 21 heures?
Alors, j'ai encore deux minutes.
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Hovington): J'en prends un petit peu
sur le temps de l'Opposition. Ma question, à moi, s'adresse soit
à M. Daigneault ou à M. Desrosiers. C'est que, dans votre
communiqué de presse que vous avez remis à la commission
aujourd'hui, le dernier paragraphe dit: «C'est donc fort de l'appui de
toute la communauté collégiale que le collège de Rimouski
se présente à la commission pour échanger avec les membres
sur la portée et l'impact concret de ses recommandations.» Vous
parlez de l'appui de toute la communauté collégiale.
À la commission, ici, nous avons reçu le cégep de
Gaspé et le cégep de Matane et, à la question qui leur
était posée sur, justement, votre recommandation 1, d'être
reconnu à vocation régionale, le cégep de Gaspé,
par la bouche de M. Bourque, a répondu exactement ceci, et je cite,
parce que j'ai les galées ici, devant moi. Alors, M. Bourque a
répondu: «Ça nous a été garroché comme
ça. Ce n'est absolu-
ment pas en concertation et encore moins en
collégialité.» Ça, c'est le cégep de
Gaspé. Et le cégep de Matane, quant à lui, par la bouche
de M. Clermont, le D.Q., nous a dit - enfin, c'est un peu une réaction
de stupéfaction, dans un premier temps, parce qu'il a dit: «Sur ce
plan, il nous apparaissait que la position qui a été
annoncée par le cégep de Rimouski de s'identifier et d'avoir la
reconnaissance d'être le cégep régional pour le
Bas-Saint-Laurent, ça nous apparaissait un peu aller à
contre-courant de ce qui a toujours été vécu.»
Alors, quand vous dites que vous avez l'appui de toute la
communauté collégiale, moi, je voudrais bien vous entendre
là-dessus. Et qu'est-ce que c'est pour vous qu'une concertation,
à ce moment-là?
M. Desrosiers: Madame, si vous me permettez de donner un
élément de réponse, M. Dai-gneault pourra compléter
là-dessus. Dans le communiqué de presse, lorsqu'on fait
référence à la communauté collégiale, on
fait référence à notre communauté
collégiale, au niveau du collège de Rimouski, dans le sens de la
concertation...
La Présidente (Mme Hovington): Vous autres, la
communauté collégiale, c'est Rimouski. Ah, bon!
Des voix: Ha, ha, ha! (21 heures)
M. Desrosiers: Madame, si vous me permettez de continuer, ce
n'est pas tout à fait exact. Je pense qu'on en a pas mal parlé,
de la question du cégep régional et d'un cégep qui dessert
une clientèle régionale, et, moi, je l'ai dit dans mon allocution
de tout à l'heure, il n'est pas question, dans notre esprit, tout au
moins, de faire en sorte de desservir les autres collèges de la
région parce que, comme M. Daigneault l'a mentionné, on agit en
concertation avec ces collèges de la région dans plusieurs
domaines. C'était strictement une reconnaissance historique d'une
situation de fait et pour préserver des choses qui existent
déjà et renforcer des choses qui existent déjà pour
permettre de mieux desservir, en accord avec les autres collèges de la
région, la clientèle régionale et permettre justement
à cette clientèle régionale de rester chez nous, de ne pas
sortir à l'extérieur de la région. Et c'est dans ce
sens-là qu'il faut le prendre. J'espère que ces
remarques-là peuvent éclairer la commission pour ne pas que vous
croyiez qu'on est ici aux dépens des autres. Loin de là, on est
là pour affirmer une réalité: qu'on dessert effectivement
une clientèle régionale, que ça, ça demande une
certaine reconnaissance de cette spécificité, et je pense que
ça a été reconnu là-dessus.
Lorsqu'on parlait de communauté collégiale, on parlait,
dans notre mémoire et on parlait dans notre communiqué de presse
de la concertation, ce que nous avons jugé intéressant parce que
chez nous, vous savez, on a passé par des périodes difficiles et,
maintenant, on est forts de cet appui de l'ensemble de notre communauté,
chez nous. Et on voulait le souligner parce que, pour nous, ça,
c'était fondamental et important d'avoir tout ce monde-là ici ce
soir, présent avec le collège, différentes parties de
notre collège qui viennent endosser le mémoire. Donc,
c'était dans ce sens-là. Je ne sais pas si M. Daigneault avait
des choses à ajouter.
M. Daigneault: Oui. Simplement que quand on parle, c'est de notre
communauté à nous, parce que c'était notre mémoire
à nous.
La Présidente (Mme Hovington): Je le comprends dans cet
esprit-là, mais il faudrait peut-être en parler avec les autres
cégeps, parce que ça les inquiétait, ce
côté-là.
M. Daigneault: On en a parié beaucoup avec les autres
collèges et on va continuer d'en parier encore.
La Présidente (Mme Hovington): Parfait. Alors, je vous
remercie. Excusez-moi. Mme la ministre, en conclusion.
Mme Robillard: Voyez-vous, M. Desrosiers, vous avez réussi
à attirer une attention tout à fait particulière sur votre
mémoire, était-ce dans votre stratégie? Nous ne le savons
pas. Mais, ceci étant dit, M. Desrosiers, merci de vous être
déplacé avec toute votre équipe et de nous avoir
témoigné de votre réalité, qui est très
spécifique, je pense, à Rimouski. J'ai eu l'occasion
moi-même de visiter le collège et l'institut maritime, et je pense
que vous avez de précieuses institutions d'enseignement, dans votre coin
de pays, et conservez-les dans toute la qualité. Merci bien.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, à mon tour,
au nom des membres de la commission, permettez-moi de vous remercier de votre
mémoire et d'être venus nous le présenter ici à
Québec. Bon retour et soyez prudents. Au revoir!
J'inviterais le cégep de Chicoutimi, s'il vous plaît,
à venir prendre place. Nous allons suspendre une minute.
(Suspension de la séance à 21 h 3)
(Reprise à 21 h 5)
Cégep de Chicoutimi
La Présidente (Mme Hovington): J'inviterais le
cégep de Chicoutimi à bien vouloir prendre place, s'il vous
plaît. Si vous voulez prendre place, les chaises vous attendent.
Alors, le cégep de Chicoutimi sera représenté par
M. Bérard Riverin, président du conseil d'administration. Alors,
où est M. Riverin?
M. Riverin (Bérard): Excusez-moi, madame.
La Présidente (Mme Hovington): Bonsoir, M. Riverin. Et M.
Roger Demeule, directeur général.
M. Demeule (Roger): Bonjour.
La Présidente (Mme Hovington): Bonsoir. Alors, qui de vous
deux sera le porte-parole? M. Riverin. Alors, bienvenue à la commission
de l'éducation. Si vous voulez bien nous présenter votre
équipe pour, ensuite, nous présenter votre mémoire dans 20
minutes.
M. Riverin (Bérard): Merci beaucoup, Mme la
Présidente, Mme la ministre. Je croyais que Mme la députée
de Chicoutimi serait là, mais... Ah, elle est là, bon! Mme la
députée de Chicoutimi, Mmes et MM. les députés,
qu'il me soit également permis de souligner la présence ici, ce
soir, d'un représentant du conseil d'administration du collège,
de même que d'autres ressources humaines de l'établissement.
D'entrée de jeu, je dois me présenter. Je suis adjoint au
directeur général de l'hôpital du même nom que le
collège, l'hôpital de Chicoutimi, et j'ai le plaisir et l'honneur,
Mme la Présidente, de présider le conseil d'administration de
notre collège.
Permettez-moi, Mmes et MM. les commissaires, de vous présenter la
délégation de notre établissement collégial aux
présentes audiences: Mme Denise Tremblay, à mon extrême
gauche, est comptable associée chez Samson, Bélair, Deloitte
& Touche; elle est également présidente de la chambre de
commerce de Chicoutimi; cet organisme de quelque 700 membres du milieu des
affaires a présenté à cette commission un mémoire
sur l'enseignement collégial, dont vous avez certainement eu l'occasion
de prendre connaissance, et dont les conclusions appuient intégralement
notre démarche; M. Roger Demeule, tout près de moi, est directeur
général du collège; il aura également, tout
à l'heure, l'occasion de vous adresser la parole pour vous
présenter l'essentiel de notre mémoire. M. Jean Halley, à
ma droite, est préfet de la MRC du Fjord-du-Saguenay; cette
municipalité régionale de comté intervient dans la
démarche que nous faisons ce soir, en ce sens qu'elle a adopté
une résolution d'appui à l'endroit des principaux
éléments de réflexion que nous avons portés
à votre attention; M. Pierre Matteau, à mon extrême droite,
est directeur des services pédagogiques de notre collège et il
fait partie du groupe de travail qui a élaboré le mémoire
que nous vous présentons; M. Bruno Riverin, à mon extrême
gauche, est président de la Bourse de Montréal et il est membre
de la fondation Roméo-Vachon qu'il représente ici, ce soir.
Cette fondation, dont l'objectif est de favoriser le
développement du Centre québécois de formation
aéronautique, a également déposé un mémoire
à votre commission. Rappelons également que l'Association des
gens de l'air du Québec a aussi déposé un mémoire
qui, sous de nombreux aspects, touche le Centre québécois de
formation aéronautique, bien entendu. Malheureusement, l'AGAQ n'a pas
été en mesure de déléguer un représentant
avec notre délégation de ce soir.
Le cégep de Chicoutimi souhaite, en se présentant
aujourd'hui devant cette commission, Mme la Présidente, apporter sa
contribution, si modeste soit-elle, à l'importante réflexion sur
l'avenir de l'enseignement collégial qui se déroule
présentement. Nous désirons vous présenter certaines
particularités de notre établissement. Nos préoccupations
propres à un cégep en région guident l'entité de
notre démarche et soutiennent nos recommandations. Nous espérons
vivement qu'elles seront prises en compte dans d'éventuelles
révisions de nos structures et de nos cadres d'opération
actuels.
Le cégep de Chicoutimi est un cégep en région.
C'est sans doute l'une de ses principales caractéristiques, quoiqu'il se
distingue également à bien d'autres égards.
Héritier d'une longue tradition d'excellence, réuni sous un
même toit en 1967 par la fusion de plusieurs institutions, il offre
aujourd'hui ses services à quelque 3500 étudiants
réguliers. À l'éducation permanente, il compte près
de 2000 inscriptions aux cours à la présente session dans ses
activités de formation à temps partiel ou à temps plein.
Notre collège joue aussi dans notre région un rôle moteur
essentiel au développement éducationnel, culturel, social et
économique du Saguenay-Lac-Saint-Jean-Chibougamau-Chapais. Les effectifs
du cégep se répartissent intégralement entre le
général et le professionnel, qui représentent,
respectivement, quelque 45 % et 55 % des étudiants. Le secteur
professionnel se caractérise, quant à lui, par trois axes de
développement important: le secteur des techniques biologiques où
l'on retrouve sept programmes, le secteur des techniques physiques avec ses
quatre programmes et ses huit voies de sortie et celui de l'administration
où l'on compte trois programmes et cinq voies de sortie. Plusieurs de
ces programmes s'adressent à la population régionale, en plus du
bassin local, et un certain nombre dessert tout l'Est du Québec. Le
cégep de Chicoutimi est également responsable pour l'ensemble de
la province, entre autres, de l'enseignement du pilotage d'aéronefs au
niveau collégial, du pilotage de ligne, de brousse et
d'hélicoptères. (21 h 10)
L'on pourrait ajouter beaucoup sur les caractéristiques du
collège, en particulier, élaborer sur la vie pédagogique
ou étudiante qui palpite en ses murs de par le dévouement de plus
de 600 employés. Je m'arrête là cependant, conscient de la
limite du temps qui nous est imparti, pour
laisser le soin à M. Demeule, le directeur général,
de vous faire part des réflexions de notre établissement en
rapport avec l'avenir de l'enseignement collégial et de
l'éducation en général. M. le Président par
intérim, merci beaucoup de votre attention.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Très bien,
monsieur. Malheureusement, je suis pris un peu de court, vous êtes
monsieur?
M. Riverin (Bérard): Riverin.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): M.
Riverin. Alors, est-ce qu'il y a une autre partie? Oui.
M. Riverin (Bérard): M. Demeule va vous entretenir...
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): M.
Demeule, allez-y gaiement!
M. Riverin (Bérard): ...du reste et de l'essentiel du
mémoire, M. le Président.
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Très bien. M.
Demeule.
M. Demeule: Sans l'intervention de M. Riverin, j'aurais
probablement dit «Mme la Présidente». M. le
Président, Mme la ministre...
Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Ça aurait
été impardonnable.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Demeule: ...Mmes et MM. les députés, je vais
commencer par une lapalissade: Les cégeps ne sont pas tous les
mêmes. Le nôtre est né de la fusion de cinq
établissements d'enseignement profondément enracinés dans
leur milieu, certains depuis près d'un siècle. C'est dire que les
25 années du réseau collégial sont bien loin de
résumer toute l'histoire de l'enseignement général et
professionnel au Saguenay. On comprendra donc que, malgré les
bourrasques qui frappent périodiquement l'enseignement collégial,
le Saguenay ne s'émeut pas. Il est un proverbe chinois qui dit
«Quand la racine est profonde, pourquoi craindre le vent?» Aussi
partageons-nous d'emblée le point de vue qui semble se dégager de
la présente commission et que vous avez, Mme la ministre,
personnellement exprimé dans les premiers moments des audiences,
à savoir qu'il faut réformer les collèges dans la
continuité et sans rupture.
À ce sujet, nous voulons vous dire que plus que jamais
peut-être le personnel des collèges est prêt et
déterminé à se mettre passionnément au service de
sa population étudiante. Au cours des 25 dernières années,
le réseau collégial s'est bâti une tradition. Il a atteint
une maturité certaine sur laquelle il est indiqué de s'appuyer.
Comme vous le savez, la moyenne d'âge du personnel des cégeps se
situe dans la mi-quarantaine, à l'âge du mltan de la vie, et la
psychologie du développement nous a appris qu'au mitan de sa vie
précisément l'individu éprouve le besoin fondamental de se
mettre au service de la génération montante. Bien plus,
l'individu qui ne réussirait pas à satisfaire ce besoin ne
vivrait pas de façon satisfaisante et enrichissante cette période
de la vie. On le voit donc, les buts individuels rencontrent ceux de nos
organisations. Cette caractéristique, on la retrouve également
chez le personnel du ministère qui nous régit et parmi les
membres de cette digne commission, sans vouloir blesser ou flatter personne,
évidemment. Cette communauté d'objectifs, cette collaboration
étroite des différents niveaux hiérarchiques dans le sens
d'un meilleur service aux élèves reposera, d'abord et avant tout,
sur une reconnaissance de nos rôles respectifs. Ainsi, c'est dans les
établissements que l'enseignement se passe. C'est dans les classes que
se vit la relation professeur-étudiant. Avouons-le sans ambages, c'est
dans les établissements que l'on retrouve les principaux acteurs de
l'éducation. Leur responsabilité est énorme. Les
cégeps et leurs agents sont imputables en relation avec les moyens dont
ils disposent, autant des succès que des difficultés qu'on peut y
connaître. Les groupes de personnels des établissements et les
individus qui les composent seront ou ne seront pas les responsables de cette
nouvelle révolution tranquille tant espérée dans le monde
de l'éducation.
Ceci étant dit, il est réconfortant de savoir que la
source principale d'énergie des collèges réside d'abord et
avant tout dans la motivation que chacun éprouve à se
développer et à apprendre, bref, à s'épanouir. Ceci
est aussi vrai pour les professeurs et l'ensemble du personnel que pour les
étudiants. Dans ce contexte, le rôle du gouvernement et de ses
services, et le rôle de la présente commission consistent sans
aucun doute à insuffler un esprit, à assurer les conditions
nécessaires aux établissements dans la réalisation de leur
mission. N'attend-on pas du gouvernement qu'il mette sans compromis le cap sur
l'essentiel, qu'il montre la direction, inspire et crée les occasions,
de même qu'un climat où chacun se sentira apprécié
et engagé à déployer tout son potentiel? On constate
déjà, d'ailleurs, que la seule existence de cette commission a
suscité des réflexions et des remises en question qui, autrement
sans doute, n'auraient pas eu lieu aussi rapidement et avec la même
intensité.
Dans les minutes qui suivent, nous n'entendons pas résumer
l'ensemble des arguments et des recommandations que le cégep a inscrits
dans son mémoire. Nous sommes conscients que cette commission en arrive
dans le dernier droit de ses audiences et qu'elle a entendu beaucoup
de choses jusqu'à présent. Pourtant, nous aurions mauvaise
grâce de répéter que tout est dit et que l'on vient trop
tard, car tel n'est pas le cas. Notre mémoire développe certains
aspects particuliers, nous n'en retiendrons que quelques-uns.
Dans notre réflexion, nous avons mis un accent insistant sur les
particularités que vit un cégep en région, et plus
précisément un cégep au Saguenay-Lac-Saint-Jean. Notre
région est éloignée des grands centres. Une part de son
économie, celle du domaine tertiaire, repose sur une structure de
services bien enracinée. L'autre part, celle du domaine primaire et
secondaire, est tributaire de quelques grandes industries auxquelles se
greffent des PME fortement dépendantes.
Sur le plan démographique, les dix dernières années
ont sonné le glas de la croissance et de la prospérité.
L'avenir, si rien n'est fait pour corriger la situation, n'est pas plus
prometteur. Il s'agit là d'un contexte que la région n'a pas
connu depuis sa fondation. Ce sont les bases mêmes de la structure
régionale qui sont ébranlées et nous n'avons pas le choix
d'opérer une adaptation rapide.
C'est dans ce contexte de mutation profonde que s'inscrit l'intervention
du cégep. De façon permanente et
généralisée, il est sollicité comme levier de
développement de son milieu. Il représente une concentration
importante d'énergie et de spécialisation dans des domaines
divers. Il constitue un intervenant socio-économique de poids, il ne
peut se soustraire à des éléments de mission qui, dans
l'état actuel des choses, ne lui sont pas formellement reconnus.
Encore une fois, c'est dans ce contexte que nous sommes à
définir notre projet éducatif institutionnel. La formation
fondamentale constitue le principe de base de sa philosophie éducative,
car elle soutient et supporte la perspective d'une formation continue et de
l'intégration de nouveaux savoirs. Si elle vise en premier lieu le
développement intégral de la personne, elle ne saurait oublier
l'adéquation avec les besoins du marché du travail et
l'intégration d'une attitude proactive face à l'environnement
économique, au travail en équipe et à
l'entrepreneurship.
L'ensemble de cette réflexion sur les besoins de notre milieu
nous conduit à développer la notion d'arrimage et à
proposer une formule que nous croyons originale. L'arrimage, jusqu'à
présent, a principalement eu comme cible les différents niveaux
de formation. Sur le plan local et régional, il a été
laissé à la bonne volonté et à l'enthousiasme
momentané des parties en cause. Nous soumettons que l'arrimage devrait
être encadré juridiquement par une structure légère
et décentralisée. En outre, le contexte régional
décrit précédemment fait ressortir plus qu'un choix, une
nécessité d'effectuer une concertation plus large qui fasse
intervenir les entreprises et les institutions en plus des niveaux de
formation. Et, nous tenons à l'affirmer aujourd'hui, notre
établissement, Mme la ministre, est prêt et disposé
à mener une expérimentation de cette formule nouvelle. Le milieu
où nous évoluons constitue un microcosme où toutes les
instances se trouvent représentées: secondaire, collégial,
université, entreprises et institutions grandes, moyennes et
petites.
Un mot à propos de certains aspects du secteur professionnel. Ce
secteur est contingenté à peu près partout, sinon par des
directives ministérielles, du moins par le niveau de ressources que les
cégeps et les milieux de stages peuvent mettre à la disposition
de la formation. De nombreux élèves, ceux qui ont un dossier
scolaire plus faible notamment, sont ainsi amenés à poursuivre
des études générales qui les conduisent à
l'université faute de pouvoir s'intégrer à un moment ou
l'autre au programme professionnel de leur choix. Cette situation ne favorise
ni l'enseignement général ni l'enseignement universitaire. Elle
fait aussi en sorte que les augmentations d'effectifs que le réseau
connaît présentement font varier en faveur du
général le rapport des inscriptions entre les deux secteurs, et
pourtant on déplore en même temps que la proportion 60-40 %
établie comme une espèce d'idéal par le rapport Parent ne
se réalise pas. Il est vrai que de vouloir à toute force fournir
plus d'opportunités de formation professionnelle coûterait plus
cher, mais ne faut-il pas se demander ce que coûte un étudiant mal
orienté ou un autre qui est incapable d'être admis dans le
programme de son choix et qui fera un détour par un autre programme?
Ici, nous parlons autant des coûts directs qu'indirects.
Notre cégep, comme on dit dans le jargon de l'éducation,
n'est pas un cégep de premier tour. Sa mission comporte comme volet
essentiel celui de l'accessibilité pour l'ensemble de son milieu. Or,
dans cette perspective, la poursuite de la qualité ne manque pas de
poser certains paradoxes. L'élève, dont la préparation au
secondaire est insuffisante, s'il est refusé au cégep, n'a pas
forcément accès à une solution alternative, et nous
déployons un maximum d'efforts pour le servir.
L'homogénéité des groupes en termes de préparation
en souffre forcément et les professeurs sont régulièrement
aux prises avec l'impossibilité de s'adresser efficacement à
l'ensemble d'un groupe-classe. Les établissements, peu importe leur
situation de cégep de premier, de second ou de troisième tour,
ont le même niveau de ressources. Nous vous le demandons, n'y a-t-il pas
là un problème d'équité? La seule comparaison, les
seuls palmarès ne sont pas de nature à apporter des solutions
valables. Nous nous demandons s'il n'y aurait pas lieu de considérer la
cohérence du système d'éducation dans son ensemble et sa
capacité à rencontrer les besoins de la société
québécoise. S'il est sain d'interroger le réseau
collégial - et nous sommes d'accord pour interroger d'abord ce niveau -
il nous semble que c'est l'ensemble du système sco-
laire qu'il faut réformer. Tout ce qui se fait au secondaire a un
impact au collégial, et tout ce qui se fait au collégial a un
impact à l'université. (21 h 20)
II faut responsabiliser les établissements, avons-nous dit. La
contrepartie à la responsabilité c'est, entre autres,
l'évaluation, et sa seule perspective a toutes les chances
d'opérer à elle seule des réformes en profondeur. Nous
avons mentionné l'effet que la tenue de cette commission de
l'éducation a déjà eu sur les milieux collégiaux.
Nous osons même affirmer que les débats actuels sur certaines
disciplines - pour les nommer, la philosophie et l'éducation physique -
d'une valeur, par ailleurs, sans équivoque en ce qui nous concerne,
n'auraient probablement pas lieu d'être, si l'évaluation
s'était imposée plus tôt dans le réseau
collégial, permettant ainsi de corriger, au fur et à mesure, des
situations qu'on déplore aujourd'hui.
Je vais terminer là-dessus. Je vous remercie de votre attention.
Avec votre permission, Mme la Présidente, je demanderais à M.
Bruno Riverin, qui est un membre de la fondation Roméo-Vachon, fondation
qui a pour objet d'aider le Centre québécois de formation
aéronautique, de compléter la présentation de notre
délégation.
La Présidente (Mme Hovington): Allez-y, M. Riverin.
M. Riverin (Bruno): Merci, Mme la Présidente. Mme la
ministre, Mmes et MM. les députés, je suis très
honoré de me présenter devant vous ce soir et de
représenter ici la fondation Roméo-Vachon. Dès l'annonce,
par le gouvernement du Québec, de la tenue d'une commission de
l'éducation sur l'enseignement collégial, la fondation
Roméo-Vachon, dont l'existence même est liée à la
cause de l'enseignement collégial de l'aéronautique, n'a pu se
défendre d'un vif intérêt pour la question et c'est avec
empressement qu'elle vous soumet quelques-unes des considérations qui
font l'objet de ses préoccupations. L'expertise très
diversifiée de ses membres l'autorise, croyons-nous, à intervenir
auprès de vous afin d'alimenter les réflexions sur cet aspect
particulier de l'enseignement collégial pour le programme de pilotage
d'aéronefs offert par le cégep de Chicoutimi.
La fondation Roméo-Vachon est un organisme à but non
lucratif. Elle a été créée par une initiative
bénévole de gens d'affaires, précisément dans le
but de venir en aide au Centre québécois de formation
aéronautique du cégep de Chicoutimi et de favoriser le
développement de cette école, qui s'avère un
véritable succès et la seule du genre au Québec.
Jusqu'à présent, en plus d'effectuer elle-même des
levées de fonds publics pour le bénéfice d'un enseignement
collégial du pilotage, la fondation a obtenu le support et les
interventions requis des deux paliers de gouvernement ainsi que des diverses
entreprises privées dans le développement du Centre, soit par des
investissements directs ou bien par des dons d'équipements qui
contribuent directement à la formation de futurs pilotes. Par ses avis
et ses nombreux efforts, la fondation intervient aussi à titre conseil
dans la gestion du programme concerné. L'orientation donnée au
développement de la formation aéronautique suscite donc ainsi
particulièrement son intérêt.
La fondation Roméo-Vachon recrute ses membres dans le monde des
affaires. On y retrouve, en majorité, des représentants
d'entreprises dans le domaine de l'aéronautique; on y trouve
également des personnes en provenance des autres secteurs de
l'activité économique ainsi que des hauts fonctionnaires du
gouvernement. Précisons que l'intervention engagée de toute
personne bénévole se fonde sur le niveau de la qualité
déjà atteinte par le Centre de formation aéronautique et
sur le déploiement que ses réalisations actuelles et
passées permettent d'espérer.
Sans vouloir rappeler l'histoire du Centre ni faire une enumeration
exhaustive de ses nombreuses réalisations depuis 25 ans, qu'on me
permette de rappeler que l'intervention du collège dans la formation
spécialisée en aéronautique a eu deux effets majeurs:
d'une part, elle a permis aux pilotes nouveaux et anciens de se
prévaloir d'une formation de base technique solide, plus solide, qui
leur permet ainsi d'intégrer plus facilement les changements
technologiques constants dans ce domaine d'activité; d'autre part, les
Québécois peuvent désormais aspirer à une
carrière plus intéressante en aéronautique, et le
Québec lui-même peut se comparer aux pays les plus
réputés dans ce domaine à travers le monde.
Ces avantages doivent être maintenus mais, en plus, ils doivent
être étendus davantage et, dans toute la mesure possible, encore
plus appuyés. C'est dans ce sens que s'oriente l'essentiel des
recommandations de la fondation Roméo-Vachon. En premier lieu, la
fondation croit qu'il y a lieu, pour le Québec, de faire en sorte que
l'enseignement collégial se répande davantage dans la profession
de pilote, ce qui comprend à la fois les activités de
l'enseignement régulier et celles de l'éducation permanente, car
si les besoins de formation des nouveaux pilotes sont importants, ceux du
domaine de recyclage, du perfectionnement et de l'actualisation ne le sont pas
moins.
Dans le même ordre d'idées, nous souhaitons que cette
formation soit rendue plus accessible à la population anglophone du
Québec. Le Centre, à cet égard, a entrepris le
développement d'un programme tout à fait approprié au
contexte de notre société. La formation en pilotage coûte
cher; la plupart des entreprises qui oeuvrent dans ce domaine pourraient en
parler longuement. De plus, les changements technologiques, présents
là plus que partout ailleurs, imposent une mise à
jour constante des équipements ainsi que des qualifications
correspondantes.
Si des entreprises plus considérables arrivent, tant bien que
mal, à adapter leurs activités dans ce monde en
perpétuelle mutation, les petites et moyennes entreprises voient souvent
leur stabilité compromise par la nécessité où elles
se trouvent d'harmoniser leurs opérations avec les besoins du
marché et de la technologie. À l'égard des coûts de
formation, compte tenu que l'effort de l'État relativement au
réseau public d'enseignement n'est pas illimité, la fondation
recommande que le gouvernement favorise une concentration des ressources
disponibles pour l'enseignement du pilotage dans des structures
déjà établies et efficaces, en évitant de
multiplier les centres de formation à caractère public dans ce
secteur de pointe. Une telle attitude, croyons-nous, est de nature à
conférer au Centre québécois de formation
aéronautique la masse critique indispensable pour intervenir non
seulement au niveau national, mais également au niveau international
où se situent les enjeux véritables de ce moyen de
développement de connaissances dans ce secteur particulièrement
décloisonné. Cela, pourtant, ne saurait empêcher le Centre
québécois de formation aéronautique de se rendre
accessible auprès des plus fortes concentrations de la population par le
développement de sous-centres ou de centres satellites.
À l'égard des besoins de mise à jour de la
technologie dans les entreprises, la fondation supporte qu'il serait avantageux
de reconnaître au Centre de formation aéronautique le statut de
seul centre spécialisé au Québec dans son domaine, en
même temps qu'une mission de recherche et de développement, ainsi
que de support technologique en tant que partenaire de l'entreprise dans
l'industrie aéronautique. De plus, dans le sens même d'une
formation plus adéquate des étudiants en pilotage, en vue d'un
marché de l'emploi qui ne comporte plus guère d'appareils
à pistons, la fondation recommande qu'on introduise dans la formation
collégiale en pilotage de ligne une familiarisation minimale avec des
appareils à turbine.
Voilà donc un très bref résumé du contenu du
mémoire de la fondation Roméo-Vachon en termes d'argumentation et
de recommandations. Nous tenons à remercier la commission de
l'éducation de nous avoir permis l'expression de notre point de vue sur
ce sujet qui nous tient profondément à coeur. Nous sommes
persuadés que ces propos vont directement dans le sens du
développement de cette industrie de l'aéronautique si importante
pour le Québec. Merci, Mme la Présidente. (21 h 30)
La Présidente (Mme Hovington): Merci.
M. Riverin (Bruno): Merci, Mme la ministre. Merci, Mmes et MM.
les députés.
La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. Riverin, de votre
exposé. J'ai été permissive, en fait, je ne vous ai pas
interrompu, vous avez dépassé votre temps de cinq minutes. Alors,
il resterait 30 minutes qu'on pourrait diviser en 15-15 de chaque
côté. Ça va? Alors, Mme la ministre, vous avez la
parole.
Mme Robillard: Mme la Présidente, je veux d'abord saluer
l'ensemble de l'équipe du collège de Chicoutimi et les gens du
milieu aussi qui vous accompagnent. Je pense que vous démontrez bien que
vous êtes implantés dans votre milieu régional,
étant donné que les gens sont là avec vous et vous
supportent dans vos activités. Je vois aussi, par votre mémoire,
que vous voulez répondre aux besoins très particuliers de votre
collectivité, à Chicoutimi; ça se sent aussi dans vos
différents énoncés. Je commencerais donc mon
échange avec vous avec M. Halley.
M. Halley, je vois, dans ce qui a été envoyé
à la commission, que vous avez fait passer une résolution
à la MRC du Fjord-du-Saguenay où siègent de nombreux
maires et où tout le monde semble, à l'unanimité,
être d'accord avec le mémoire qui a été
déposé. J'aimerais vraiment vous entendre, comme
témoignage du monde municipal, sur l'importance que vous accordez aux
cégeps à Chicoutimi.
M. Halley (Jean): Mme la ministre, tout à l'heure,
j'entendais parler de régional. Moi, je peux dire, ce soir, que je
représente bien un milieu régional au niveau de la MRC du Fjord.
Alors, même s'il y a deux cégeps sur notre territoire, le
mémoire présenté par le cégep de Chicoutimi
présentait un avantage certain. Pourquoi, en fait, une MRC ou un
représentant de MRC avec un cégep au niveau de cette table? C'est
que vous savez que, dans un premier temps, les MRC, on a parlé d'un
schéma d'aménagement. On en est rendu aujourd'hui dans une
deuxième phase, au niveau d'un schéma de
développement.
Quand on parle de développement, on parle d'industrie, on parle
de technologie. Ayant oeuvré longtemps aussi au niveau du monde du
travail, au niveau du monde de la formation professionnelle également,
j'ai toujours eu une préoccupation immense pour le facteur particulier
d'arrimage des études - je m'exprime en gros -que ce soit aux niveaux
secondaire, collégial ou universitaire, d'arrimage avec l'industrie. Cet
arrimage-là, je comprends bien, peut être une pratique plus grande
à l'intérieur de l'industrie ou intégré au niveau
de l'ensemble des cours de formation professionnelle.
Je me souviens, déjà, au niveau de la formation
professionnelle, on présentait des mémoires sur des
enquêtes qui étaient faites par les gouvernements
précédents et le présent gouvernement. On insistait
davantage sur le besoin d'une technologie ou des besoins de cours
avancés dans le domaine de formation professionnelle pour les
années quatre-vingt-dix. Alors, voyez-vous, j'ai une tête blanche,
ça fait déjà quelques années que j'oeuvre dans ce
secteur-là. On disait: II manquera de techniciens, tout à
l'heure. Alors, évidemment, lorsque j'ai lu le rapport du cégep
de Chicoutimi, ça m'a grandement intéressé et c'est de
cette façon qu'on a convaincu notre table de les appuyer. De plus,
lorsqu'on a touché à ce secteur de la formation professionnelle,
ça nous a permis également, autour de notre table, de
dégager un mouvement vers l'industrie pour donner de meilleurs services.
On souligne dans le mémoire en quelque part que les grandes industries
de chez nous ont beaucoup de pertes d'emplois, mais qu'on exige davantage aussi
au niveau des techniciens qui auront maintenant à oeuvrer, dans
l'industrie, dans une technologie plus avancée.
Alors, c'est pour ce secteur-là particulier que je suis
présent ce soir, c'est pour que vous regardiez... Je sais qu'il y a des
hommes, des femmes politiques et des techniciens de chez vous qui sont capables
de regarder le «comment faire» de cette intégration de
l'étudiant dans une formation professionnelle à l'industrie et
c'est ce secteur-là, encore une fois, qui m'intéresse
davantage.
Mme Robillard: Merci, M. Halley. Mme Tremblay, quel est le
message de la chambre de commerce sur le cégep de Chicoutimi?
Mme Tremblay (Denise): Le message de la chambre de commerce vient
surtout mettre de l'emphase sur le point de souplesse d'adaptation, la
capacité d'adaptation des cégeps. En région, dans notre
région, on dit que nos PME dépendent de la grande entreprise. Les
grandes entreprises se rationalisent, il y a des pertes d'emplois, et surtout
ces temps-ci, en période de récession, si ce n'est pas des pertes
d'emplois ce sont des personnes qui doivent se recycler. Alors, on se ramasse
avec un problème où on a besoin d'un perfectionnement de la
main-d'oeuvre. On a également besoin de faire du recyclage des
sans-emploi, d'une part. D'autre part, étant donné qu'il y a
moins d'entreprises, on aimerait qu'il y ait un développement de
l'entrepreneurship, et c'est, grosso modo, les besoins qui ont
été identifiés pour notre région.
Maintenant, le grand principe qui se dégage de notre rapport - il
y a les besoins, d'une part, et les services, d'autre part - vise à
l'apparie-ment des services aux besoins. Comment devrait se faire cet
appartement? Tout d'abord, on aimerait que les cégeps aient la
capacité de s'adapter, s'il y a un programme ou quelque chose qui est
isolé en conseil d'administration. On a des gens de la chambre de
commerce qui siègent au conseil, qui nous disent: Bon, il y a toujours
un article de loi, les programmes sont structurés et font qu'on n'a pas
la capacité de s'adapter. D'autre part, ce qu'on aimerait aussi, c'est
qu'il y ait une concertation plus poussée entre les gens du milieu - les
besoins - et les gens du cégep - les services. Cette concertation ne
devrait pas se faire seulement en un temps précis, mais devrait
être non pas perpétuelle mais régulière, de
façon à... Ça devrait aussi se faire au niveau du conseil
d'administration, et également au niveau du corps professoral. Au niveau
du corps professoral en disant que, bien sûr, pour voir un peu c'est quoi
le besoin immédiat de formation, adapter les cours. Parce que des fois
l'adaptation, les règles ou les lois ne sont pas si strictes que
ça, mais les professeurs eux-mêmes doivent faire leur part en
adaptation. Ils ont, bien sûr, le perfectionnement, qu'on les encourage
à continuer, mais une bonne manière de se perfectionner, c'est
d'aller tâter le pouls dans l'entreprise, et les stages des professeurs
dans l'entreprise, c'est une chose qu'on recommande aussi. Voici, c'est un peu
ce qu'on recommande.
Dans un deuxième temps, je déborde un petit peu du cadre,
c'est en ce qui concerne notre mémoire. Étant donné qu'on
représente la communauté d'affaires de Chicoutimi, bien
sûr, on a traité d'autres questions que je pourrais appeler de
nature financière, étant donné qu'on représente le
comité des gens d'affaires. Ce qu'on a dit, ce qui est ressorti dans le
sondage qu'on a présenté à nos membres, c'est que
l'augmentation de l'aide financière aux étudiants, on n'est pas
vraiment pour ça. En ce qui concerne le maintien de la gratuité
scolaire, c'a été très controversé; ça fait
qu'on ne s'est pas prononcé sur ça. Et, en ce qui concerne la
durée des études collégiales, il y a une perception chez
les gens d'affaires qui fait que les étudiants qui s'éternisent
ternissent l'image de l'établissement. C'est quelque chose qui est
ressorti dans le sondage. Il faut que je le dise. Ce n'est pas tout à
fait, ça ne va pas tout à fait avec ce qui a été
avancé ici ce soir, mais c'est un peu ce qui ressort de notre
sondage.
Mais le principe général, c'est qu'il y a des besoins, il
y a des services, ça doit être apparié, et ce, par la
concertation, non pas en un temps mais sur une base régulière.
C'est ça.
Mme Robillard: Merci, Mme Tremblay, de vos explications.
C'était très clair. M. Demeule, vous nous avez recommandé
dans votre mémoire, à la page 26, recommandation 9, qu'on
«rende disponibles les ressources nécessaires au fonctionnement
des structures d'arrimage». Je dois vous avouer que, quand j'ai lu votre
mémoire, je me demandais ce à quoi vous faisiez
référence. Mais là, ce soir, dans votre exposé,
vous soulevez encore plus de points d'interrogation chez moi parce que vous
avez parlé d'une structure qui serait encadrée juridiquement,
bien qu'elle soit une structure légère et
décentralisée. Et,
vous vous êtes offerts pour faire un projet-pilote. alors, il faut
que je saisisse bien ce à quoi vous faites référence.
pourriez-vous m'ap-porter des explications?
M. Demeule: Bien sûr. Ça peut paraître
étonnant pour une région reconnue comme étant pour le
moins autonomiste...
Mme Robillard: Ha, ha, ha! Juridique.
M. Demeule: ...d'aller demander qu'on encadre juridiquement, ou
qu'on réglemente la concertation. En peu de mots, il semble qu'il y ait
un consensus à l'effet que, actuellement, compte tenu de la
compétitivité à laquelle on fait face, tout le monde
puisse se concerter. C'est d'autant plus vrai dans une région comme la
nôtre. Mais le modèle, parce que je pense que c'est ça qui
vous intéresse peut-être particulièrement...
Mme Robillard: Oui.
(21 h 40)
M. Demeule: ...je vous avoue qu'on n'est pas en mesure pour
l'instant de vous proposer une structure qui nous apparaîtrait
complète. Ça ne s'est fait nulle part ailleurs, je pense, au
Québec et au Canada. Il y a des exemples du genre en Allemagne, mais je
pense qu'il ne faut pas les emprunter. Mais d'abord, on dit: II faut que la
structure soit décentralisée. On pense qu'il faut que l'ensemble
des niveaux de formation s'y retrouve,. Et ce qui nous apparaît original,
c'est d'ajouter les entreprises et les institutions qui sont
intéressées à la formation de la main-d'oeuvre. On pense
à la commission de formation professionnelle, par exemple. Tout ce
monde-là devrait être en mesure de voir à ce qu'on
réponde le mieux possible aux besoins des différentes
régions. Nous, on vous propose, avant d'implanter un modèle qui
n'est pas défini pour l'instant, d'en faire une expérimentation
dans une région où on retrouve tous les éléments.
Et pour commencer, on se dit: Pourquoi ne pas partir et identifier quelques
programmes? À partir de ces programmes-là, supposons qu'on y va
en électrotechnique ou je ne sais pas - bien sûr, on parle surtout
de programmes techniques - essayer de voir jusqu'où on peut aller et
dans quelle mesure l'ensemble de la région sera capable d'avancer dans
cette direction.
Mme Robillard: Mais, vous êtes d'accord avec moi, M.
Demeule, que même pour expérimenter un tel projet il faudrait
qu'il y ait des balises plus spécifiques. Surtout quand vous me parlez
d'encadrement juridique, il faudrait avoir des objectifs précis, des
stratégies, des moyens. Comment vous voyez ça? Ce que je
comprends, c'est que c'est à l'état de projet dans votre
tête, mais que vous n'avez pas articulé de façon
détaillée ce que ça pourrait être.
M. Demeule: C'est juste, mais la conviction est qu'on ne peut
plus, compte tenu de l'état de crise, entre guillemets, se permettre de
laisser aller les choses. On ne peut plus, compte tenu des coûts
associés à la formation en particulier, se chamailler comme on le
fait parfois encore. À partir du moment où on se chamaille entre
nous, les choses vont tellement vite que d'autres ont pris les devants et on ne
les rattrape plus jamais.
Mme Robillard: Et l'objectif principal, est-ce que c'est
l'arrimage entre les trois ordres d'enseignement?
M. Demeule: II y a plus que ça: les trois ordres
d'enseignement, auxquels s'ajouteront les entreprises et les institutions
intéressées à la formation de la main-d'oeuvre. Vous
voyez, c'est une régie régionale de la main-d'oeuvre avec des
objectifs différents.
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Hovington): Merci, Mme la ministre. M.
le député d'Abitibi-Ouest, en premier.
M. Gendron: Oui, bien, assez rapidement, compte tenu du temps et
que ma collègue va faire un bout. Je voulais vous saluer. C'est toujours
intéressant de recevoir un cégep de région et de sentir
qu'il y a une très grande solidarité entre tous les partenaires.
On sent que la présence des institutions dans le milieu est une
réalité. On vous remercie d'être là. Rapidement,
pour bonifier au maximum votre présence, moi, je n'ai pas bien, bien de
trouble avec votre mémoire; je pense que c'est un mémoire
concret, pratique. L'élément que j'aurais voulu apprécier
davantage dans le peu de temps qui m'est imparti, c'est la percée ou la
présence des adultes. Moi, de plus en plus, je pense que, compte tenu
des beaux discours réalistes qu'on doit tenir au niveau de la
compétitivité, des changements technologiques, mettez tout ce que
vous connaissez autant que qui que ce soit, oblige à ce qu'il y ait plus
d'efforts de faits au niveau de la formation continue, au niveau de
l'éducation des adultes.
À cette commission-ci on a touché énormément
le secteur jeunes, en formation générale et en formation
technique, mais on n'a pas vraiment élaboré. Quand on a la chance
d'avoir des gens... Ma question n'est pas compliquée: Chez vous, comment
ça se vit? J'ai cru comprendre que pour ce qui est des adultes qui
s'inscrivent au régulier, ils rencontrent des difficultés
majeures. Je vous cite à la page 5 d'un des trois documents de
présentation, et vous ajoutez, «pour lesquels nous ne disposons
pas de solutions satisfaisantes». Donc, vous avez noté qu'il y a
des problèmes et vous n'êtes pas en mesure de les
gérer,
c'est ce que votre mémoire dit. Je ne vous blâme pas, je
veux savoir pourquoi, quelles sont vos difficultés?
Et pour celles et ceux qui vont moins aux cours régulier mais qui
tentent d'aller en formation à temps partiel ou le soir, est-ce que vous
avez senti effectivement, dans les dernières années, que le
cégep de Chicoutimi pouvait répondre à cette
clientèle-là adéquatement, qu'il avait les outils pour le
faire, qu'il avait les budgets pour le faire et que ça intéresse
la direction du collège de faire une pénétration plus
forte en termes d'objectifs de gens qui pourront avoir une formation au niveau
des adultes?
M. Demeule: Si vous le voulez, le directeur des services
pédagogiques va répondre à la question.
M. Matt eau (Pierre): Bon. Je vais traiter ça en deux
temps, si vous me le permettez. D'abord, au secteur régulier, au secteur
ordinaire de l'enseignement, nous sommes appelés à recevoir de
plus en plus d'adultes qui veulent se recycler ou réorienter leur
carrière et qui se retrouvent, bien sûr, en situation de
côtoiement avec des étudiants qui, eux, sont habitués au
régime scolaire, habitués à la vie d'école, et qui
doivent s'y adapter en faisant du mieux qu'ils peuvent et en mariant, si vous
me permettez, leur vie. Souvent, ce sont des monoparentaux, ce sont des jeunes
femmes qui sont mères qui nous arrivent et qui doivent s'adapter
à ça. Nous avons mis sur pied un service qui les aide. On a
même mis à leur disposition toute une série d'instruments
qui visent a leur faciliter l'intégration à l'enseignement
régulier. On les retrouve dans différents secteurs, bien
sûr, et je pense qu'on est appelé de plus en plus à voir ce
nombre grandir. Lorsque nous faisons des projections de clientèles
à partir des informations qui nous viennent de l'enseignement
secondaire, on peut le voir, mais il nous est difficile actuellement d'estimer
le nombre et le type de personnes que nous allons rencontrer. Il y a là
un défi très important et pour lequel les ressources ne sont pas
formées. On doit donc faire des pieds et des mains pour s'adapter
à cette nouvelle situation-là et il y a là un défi,
un défi qui nous attend dans les prochaines années et auquel nous
devrons répondre.
Quant à l'enseignement aux adultes, évidemment, tout ce
secteur est appelé à entrer en étroite collaboration avec
les milieux de travail. On répond donc à des besoins très
ponctuels de formation et, en ce sens-là, on souhaiterait nous aussi
dépasser la simple réponse à des besoins ponctuels de mise
à niveau. Il nous semble qu'il y a plus que cela à faire. On
s'est donné, bien sûr, un plan au niveau du service de
l'éducation permanente, un plan triennal, dans le but de mieux
répondre aux besoins de notre milieu, en fonction de ce que nous pouvons
offrir à notre milieu: au secteur de la santé, au secteur des
techniques physiques et au secteur plus général, notamment aussi,
de l'informatique.
Bref, nous tentons autant que possible de répondre le mieux
possible aux besoins de notre région mais, encore là, lorsqu'on
s'adresse aux étudiants de l'éducation permanente du soir,
évidemment, les services que l'on peut mettre à leur disposition
ne sont pas aussi nombreux qu'on le souhaiterait et, en ce sens-là,
encore une fois, on ne peut pas demander à des gens qui oeuvrent toute
la journée - je pense, par exemple, aux aides pédagogiques
individuels, aux conseillers d'orientation - de venir en plus le soir. Et
là on a aussi un grand défi à relever. Donc, pour
l'éducation des adultes, on a beaucoup de travail à faire.
M. Gendron: Merci. Jeanne.
La Présidente (Mme Hovington): Ça me prend le
consentement de tous les députés parce que vous n'êtes pas
membre de la commission.
Mme Blackburn: Je vous remercie.
La Présidente (Mme Hovington): J'ai le consentement.
Alors, je vous reconnais, Mme la députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, merci. J'apprécie. Je vais le faire
brièvement parce qu'il nous reste peu de temps, et comme on est plus
là pour vous écouter que pour parler, je vais poser des questions
sur deux sujets: le Centre québécois de formation, le CQFA, et le
contingentement.
Je voudrais juste dire que je suis heureuse de voir que vous avez fait
le rappel quant à l'historique des collèges. Trop souvent ici, et
dans le Québec de façon générale, lorsqu'on parle
des cégeps, on prétend qu'ils sont nés il y a 25 ans,
alors qu'ils sont nés d'institutions centenaires. Une tradition,
ça porte, même si les établissements ont changé de
nom, une espèce de culture. Et heureusement pour nous - je parle du
Québec de façon générale - parce que ça a
donné des fruits Intéressants. Ça permet souvent à
beaucoup de nos institutions collégiales de conserver une qualité
de formation qui relève un peu de son histoire et de sa culture.
En ce qui concerne le centre spécialisé, comment se
fait-il que vous n'ayez pas reçu le statut de centre
spécialisé et qu'est-ce que ça vous donnerait de plus? Et
vous demandez, à la recommandation 10 dans votre mémoire, page
31, les autorisations nécessaires et les ressources pour affronter plus
adéquatement vos besoins. Ça serait quoi, les besoins du
marché? Si vous voulez m'en parler brièvement pour qu'on puisse
mieux saisir la réalité de ce centre? (21 h 50)
M. Demeule: En commençant peut-être par la toute
dernière question.
Mme Blackburn: Oui.
M. Demeule: Le collège a identifié des besoins dans
l'ensemble de la province, en particulier en ce qui concerne le recyclage, le
perfectionnement de gens déjà en emploi, et pour mieux
répondre à ces besoins-là, il serait nécessaire de
se retrouver en particulier dans des centres comme Montréal et
Québec. Donc, ce qui est demandé, c'est d'avoir les ressources
nécessaires pour nous aider précisément à avoir ce
qu'on pourrait appeler des pied-à-terre dans ces deux villes-là
en particulier. Donc, de permettre de nous déployer davantage.
En ce qui concerne le centre spécialisé, je pense que ce
que ça permet d'obtenir, pour l'instant, c'est un montant de 200 000 $
qui est offert au centre spécialisé. Jusqu'à maintenant,
il y a un certain nombre de critères que probablement le CQFA ne
rencontre pas encore parfaitement. Je pense, en particulier, à celui qui
touche la recherche et le développement. Bien que le CQFA ait
déjà une certaine expertise dans ce domaine-là, en
particulier dans le domaine du matériel didactique - vous savez que le
CQFA, les professeurs de ce centre ont publié plusieurs ouvrages
déjà - jusqu'à maintenant, probablement que le
ministère en est arrivé à la conclusion qu'il ne
répondait peut-être pas parfaitement à cette exigence.
Cependant, il y a deux conditions essentielles, c'est: l'excellence et le
caractère unique du programme. À partir de ces deux
critères-là, je pense qu'on peut dire que notre centre
répond à ces conditions essentielles.
Mme Blackburn: Les autorisations auxquelles vous faisiez
référence dans votre recommandation 10, c'étaient...
M. Demeule: De se déployer sur le territoire.
Mme Blackburn: d'accord. ça va. vous parlez des
activités à caractère international au centre, ça
représente quel pourcentage de vos activités?
M. Demeule: Pour l'instant, c'est variable. Mme Blackburn:
Et dans quels pays?
M. Demeule: C'a été beaucoup les pays africains. Il
y a quand même des relations assez suivies avec la France, mais, vous
savez, quand on parle du domaine international, ce qui importe, c'est la
concentration des ressources. Et dans ce sens-là, il est très
important que le Québec puisse se donner une école qui soit en
mesure de faire de la compétition, parce que c'est de ça qu'il
s'agit quand on parle de l'international, avec des écoles qui sont de
loin... Bien que le CQFA soit bien pourvu, si on le compare à des
écoles semblables au Canada, quand on le compare, par exemple, à
l'École nationale d'aviation civile, en France, c'est tout autre chose.
Donc, il importe que le CQFA soit en mesure de faire une saine
compétition à ces autres écoles dans d'autres pays du
monde.
Mme Blackburn: Qu'est-ce qui pose problème, au-delà
de la langue, pour admettre un peu plus d'anglophones? Parce que vous parlez
d'ouvrir le cégep aux anglophones, ce avec quoi je suis d'accord,
mais...
M. Demeule: Le seul problème...
Mme Blackburn: Parce que généralement les jeunes
anglophones sont de plus en plus bilingues. En tout cas, c'est ce que les
statistiques nous disent. Alors, qu'est-ce qui fait que vous ne puissiez pas
les admettre ou encore qu'ils ne se trouvent pas bien?
M. Demeule: Actuellement, c'est possible pour un anglophone
d'être admis chez nous, mais il doit satisfaire les conditions et l'une
des conditions, c'est au niveau de la langue. Ce n'est peut-être pas
facile, comprenez-vous, bien que ce soit faisable. Ce qu'on dit, c'est que pour
leur faire une place on ne voudrait pas non plus enlever de la place aux
Québécois francophones actuellement, et on pense que, toute
proportion gardée, si on reçoit 44 étudiants en
première année, la population anglophone représentant 20 %
de la population québécoise, on pourra leur faire une place
équivalente.
Mme Blackburn: D'accord. Sur le contingentement, vous rappelez
l'objectif qu'on s'était donné au Québec,
c'est-à-dire 40-60 - 40 % de général, 60 % de
professionnels - et qu'au cégep c'est 45-55. Qu'est-ce qui explique...
Est-ce que c'est juste par le choix des élèves ou le
contingentement? Et, est-ce que vos programmes, de façon
générale... Évidemment, je ne ferai pas tout le
Québec, mais les vôtres? Je sais qu'au CQFA, c'est
contingenté, mais pour les autres programmes, est-ce qu'ils sont
contingentés depuis longtemps, à quand remonte le
décontingentement et dans quels programmes? Et qu'est-ce qui serait
souhaitable, si on veut vraiment atteindre cet objectif-là?
M. Demeule: J'imagine que les raisons sont multiples. On a
beaucoup parlé de la valorisation de l'enseignement technique. Mais,
pour vous parler plus précisément de ce qu'on a vécu,
nous, c'est pour vous dire que dans le domaine de l'enseignement technique il y
a, si ma mémoire est fidèle, un seul champ dont on a revu le
contingentement depuis 1975. Ça veut dire qu'il y a beaucoup
d'étudiants qui, normalement, pourraient être
intéressés; ils sont obligés de faire le détour,
soit dans un autre programme au niveau collégial ou même à
l'université. Dans le cas du
CQFA, ça s'explique probablement dans les programmes exclusifs,
mais on va recevoir beaucoup d'étudiants universitaires aussi.
Donc, probablement qu'une des raisons... Dans notre mémoire, on a
mis l'accent là-dessus, on s'étonne que la proportion... On ne
réalise pas ce qui était prévu par le rapport Parent et,
en même temps, alors qu'il y a une augmentation importante de
clientèles dans le réseau, ces gens-là ont le choix, dans
une certaine mesure, mais certains n'ont pas véritablement le choix, ils
vont se retrouver dans la filière du général, souvent dans
les sciences humaines, et c'est des gens qu'on va retrouver à
l'université, à un endroit où ils n'avaient jamais
vraiment espéré se retrouver.
Mme Blackburn: D'accord. Est-ce que vous avez fait une
évaluation de ce phénomène dans le cégep pour
savoir, par exemple, combien vous avez de demandes d'admission dans un
programme x et combien devez-vous en refuser qui, finalement, se retrouvent
dans d'autres filières, mécontents et reviennent quand ils
peuvent? Est-ce que vous avez fait l'évaluation?
M. Matteau: Actuellement, nous avons mis sur pied des programmes
dits «exploratoires», en sciences humaines, en sciences et
techniques physiques et en sciences et techniques biologiques. On y retrouve
deux types d'élèves: des élèves qui n'ont pas les
préalables, en un premier temps, et d'autres qui sont
précisément en attente, en espérant qu'un bon jour ils
auront eux aussi une place dans le contingentement. C'est un détour et
ils n'ont pas la garantie de s'y retrouver à cause des contingentements.
En conséquence, actuellement, cette année, nous en avons environ
200. Ça représente quand même un bon nombre
d'élèves.
Mme Blackburn: C'est énorme, c'est beaucoup. Une toute
dernière question sur laquelle j'aurais aimé qu'on puisse
élaborer davantage, c'est l'idée que vous avancez, un peu comme
on en parle dans les écoles primaires et secondaires, d'un projet
éducatif. Vous insistez davantage sur l'entrepreneurship - j'essaie de
me rappeler - et la coopération. Je ne me rappelle plus bien des termes
que vous avez utilisés. Est-ce que cette idée d'un projet
éducatif a été développée en collaboration
avec les enseignants, avec les communautés collégiales ou si
vraiment ce sont des idées nouvelles que vous nous suggérez
à la réflexion?
M. Demeule: Non, on est relativement avancés quant
à l'élaboration de notre projet éducatif. Par
définition, ça doit impliquer l'ensemble de notre
communauté. D'ailleurs, la commission pédagogique a
accepté le leadership de ce projet-là et on retrouve un
comité qui siège déjà depuis quelques
années, où vous avez des représentants de toute la
communauté collégiale. On s'attend à ce que cette
année soit une année déterminante. On devrait être
en mesure... Pour nous, c'est comme un projet d'entreprise. Il s'agit de bien
préciser la mission et d'être capable de voir quelle est la vision
particulière ou les valeurs que le collège de Chicoutimi devrait
ou pourrait véhiculer. Il n'y a rien d'arrêté pour
l'instant de façon définitive, mais certains aimeraient bien
qu'on retrouve parmi ces valeurs-là - et on y a fait
référence dans notre mémoire - des valeurs comme le
travail en équipe, l'entrepreneurship, dans une région comme la
nôtre qui en dépend beaucoup, et la coopération.
Mme Blackburn: Je vous remercie.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. C'est tout le temps
que nous avions. Alors, en conclusion, Mme la ministre.
Mme Robillard: Merci, M. le président du conseil
d'administration, d'avoir pris tout ce temps. Je pense que vous avez dû
travailler très fort à la préparation de ce mémoire
et à la mobilisation aussi du milieu qui vous appuie dans vos
orientations. Merci d'être venu témoigner à la commission
parlementaire.
La Présidente (Mme Hovington): Aters, permettez-moi
à mon tour de vous remercier, au nom des membres de la commission de
l'éducation, d'être venus présenter votre mémoire.
Je vous souhaite un bon retour chez vous. Soyez prudents dans le Parc.
Alors, la commission ajourne ses travaux au mardi 1er décembre,
10 heures le matin. J'ai bien dit 10 heures, mardi, le 1er décembre.
(Fin de la séance à 21 h 59)