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(Neuf heures trente et une minutes)
La Présidente (Mme Hovington): Je constate que nous avons
le quorum. Alors, je déclare la séance ouverte. Je rappelle le
mandat de la commission de l'éducation qui est de procéder
à des audiences publiques sur l'enseignement collégial
québécois.
M. le secrétaire, est-ce que nous avons des remplacements?
Le Secrétaire: Oui, Mme la Présidente. M. Fradet
(Vimont) par M. Maltais (Saguenay); M. Gautrin (Verdun) par M. Gauvin
(Montmagny-L'Islet); M. Parent (Sauvé) par M. Doyon
(Louis-Hébert).
La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. le
secrétaire. Alors, pour aujourd'hui, nous avons un horaire assez
chargé, intéressant. À 9 h 30, ce matin, nous avons la
Chambre de commerce du Québec et la Chambre de commerce du
Montréal métropolitain. À 10 h 30, nous avons la
Fédération étudiante collégiale du Québec.
À 11 h 30, Regroupement des collèges du Montréal
métropolitain. À 12 h 30 nous suspendons. Nous revenons à
14 heures pour l'Association des collèges privés du
Québec. À 15 heures, Association professionnelle des aides
pédagogiques individuels et Association québécoise
d'information scolaire et professionnelle. À 16 heures, nous avons le
Collège Montmorency. À 17 heures, nous avons le cégep de
Saint-Félicien, conseil d'administration. À 18 heures,
suspension. Nous reprenons à 20 heures avec l'Association des cadres des
collèges du Québec. À 21 heures, le cégep de
Matane. Nous finissons en beauté avec le cégep de Matane, vous
voyez. Vous direz que je prêche pour ma paroisse. À 22 heures nous
ajournons.
Alors, ce matin nous recevons la Chambre de commerce du Québec et
Chambre de commerce du Montréal métropolitain. Je vous souhaite
la bienvenue, messieurs. Vous êtes représentés, je crois,
par M. Yvon Marcoux, président de la Chambre de commerce du
Québec.
M. Marcoux (Yvon): Oui, madame.
La Présidente (Mme Hovington): C'est vous qui êtes
le porte-parole?
M. Marcoux: Oui.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, bienvenue à
la commission. Si vous voulez bien nous présenter les membres qui vous
accompagnent.
Chambre de commerce du Québec et
Chambre de commerce
du Montréal métropolitain
M. Marcoux: Alors, Mme la Présidente, Mme la ministre,
Mmes et MM. les membres de la commission, ça me fait plaisir de vous
présenter ceux qui m'accompagnent. À ma droite, M. Claude
Descôteaux, qui est le vice-président exécutif de la
Chambre de commerce du Québec; M. Graham Weeks, qui est le
président du Comité éducation de la Chambre de commerce du
Montréal métropolitain; à ma gauche, M. Jacques Girard,
qui est le président du Comité éducation et formation de
la Chambre de commerce du Québec; M. Denis Beauregard, qui est
conseiller en recherche auprès de la Chambre de commerce du
Montréal métropolitain; et M. Alfred Morin, qui est membre de la
Chambre de commerce d'Amqui.
La Présidente (Mme Hovington): Bonjour. Un voisin. Alors,
nous avons une heure pour vous entendre; 20 minutes de présentation de
votre mémoire et 20 minutes de chaque côté de la Chambre.
Alors, allez-y, nous vous écoutons.
M. Marcoux: Je vous remercie. Je voudrais également
ajouter que nous avons M. François Gilbert, de la Chambre de commerce de
Chicou-timi, qui, malheureusement, à cause du nombre de places
limité ne peut être en avant. Il est en arrière, ici, avec
nous.
Mme la Présidente, d'abord je voudrais vous souligner qu'en plus
du mémoire de la Chambre de commerce du Québec et de la Chambre
de commerce du Montréal métropolitain, mémoire conjoint
que nous vous présentons aujourd'hui, certaines autres chambres de
commerce locales ont également soumis des mémoires à la
commission parlementaire. Deux des représentants sont ici aujourd'hui.
Ils pourront d'ailleurs intervenir lors de la période de questions. Mais
si vous lisez les mémoires qui ont été soumis par ces deux
chambres, également par la Chambre de commerce de la rive-sud de
Montréal, vous pourrez constater que les lignes directrices de ces
mémoires convergent avec les principes de base contenus dans le
mémoire que nous allons vous présenter. Donc, je pense que
ça témoigne d'une certaine unanimité dans le milieu des
affaires.
D'entrée de jeu, mentionnons que les milieux d'affaires
s'entendent sur le maintien du système des cégeps. Il serait
malsain de vouloir tout remettre en cause et de vouloir tout restructurer. Il
est toutefois urgent, après 25 ans, d'apporter des améliorations,
de repenser
certains éléments du contenu et du fonctionnement de
l'enseignement collégial. La valorisation et l'amélioration de
notre système d'éducation est un défi de
société. Dans le contexte d'ouverture des marchés, la
capacité concurrentielle des pays industrialisés repose sur la
présence d'une main-d'oeuvfe éduquée et formée. La
période de croissance de notre richesse économique basée
sur les ressources naturelles est terminée.
Nous évoluons maintenant dans un contexte où les
connaissances sont plus importantes que les matières premières
pour les entreprises industrielles d'avenir. Selon des études
récentes, autant au Canada qu'aux États-Unis, d'ici à l'an
2000, les deux tiers des emplois qui seront créés
nécessiteront une formation de niveau collégial ou
universitaire.
Pour assurer l'avenir de nos jeunes et confirmer la force de notre
société, nos écoles, nos collèges et nos
universités doivent donc réaliser les meilleures performances
parmi les pays industrialisés. Comment les choses se
présentent-elles? Il est vrai que l'accessibilité aux
études secondaires et collégiales a fait un progrès
remarquable depuis 20 ans. Toutefois, ce n'est pas tout de fréquenter
l'école. Encore, faut-il y apprendre quelque chose et réussir en
fonction de critères reconnus sur la scène mondiale.
Démocratisation, oui, mais, également, qualité du travail
qui s'y fait, taux de diploma-tion satisfaisant et réponse au besoin de
main-d'oeuvre. Autrement, on n'a pas à démocratiser
grand-chose.
Quatre constatations, et j'essaie de résumer ce que nous avons
dans le mémoire, soulèvent de profondes interrogations.
Premièrement, pendant que les besoins de travailleurs
spécialisés augmentent particulièrement dans les secteurs
de pointe, le nombre de diplômés dans ce secteur diminue.
Deuxièmement, le nombre d'étudiants inscrits au secteur
professionnel au niveau collégial a diminué de 1985 à
1990, tant en nombre absolu qu'en proportion de la population étudiante
totale. Il y a peut-être eu une légère reprise l'an
dernier. Troisièmement, beaucoup d'étudiants terminant le
collégial éprouvent des difficultés anormales à
s'exprimer correctement dans leur propre langue. Quatrièmement, le taux
d'abandon scolaire à tous les niveaux, à partir du secondaire,
excède considérablement celui que nous pouvons retrouver dans les
pays concurrents.
Donc, des questions troublantes se posent. Premièrement, pourquoi
notre formation professionnelle n'est-elle pas mieux intégrée
à la réalité d'aujourd'hui? Pourquoi la formation
professionnelle exerce-t-elle si peu d'attrait chez nos jeunes? Est-ce que nous
croyons être en mesure vraiment de préparer adéquatement
nos jeunes et de répondre aux besoins de personnels qualifiés au
cours des prochaines années avec le système actuel sans y
apporter des correctifs importants?
Les faiblesses de notre système ne proviennent pas de
l'insuffisance des ressources financières que nous y consacrons. Nous
savons que le Canada et le Québec comptent parmi les pays qui
investissent le plus en éducation. Il est donc jutifié de nous
demander si nos investissements sont aux bons endroits, si le système
est générateur de coûts sans rapport nécessairement
avec la qualité de l'enseignement qui est dispensé ou, encore, si
la présence de deux ou trois ministères dans un même
domaine n'est pas susceptible d'entraîner des coûts inutiles.
De toute façon, force est de constater que les faiblesses
observées dans le système ne découlent donc pas du manque
d'investissements consentis par les contribuables. Il nous faut plutôt
comme société établir des exigences de qualité plus
élevées et assurer une performance supérieure. N'ayons
crainte de parler d'émulation, de responsabilité, de valorisation
de l'effort, de poursuite d'excellence, d'acquisition de discipline
intellectuelle.
Dans cette perspective, nous énonçons un certain nombre de
recommandations que je vous résume en quatre points.
Premièrement, l'évaluation de l'enseignement et des institutions.
Pour atteindre un niveau plus élevé de performance et valoriser
l'effort intellectuel, il nous apparaît essentiel d'établir une
évaluation structurée, tant de la qualité de
l'enseignement que des connaissances acquises par les étudiants. Dans le
même ordre d'idées, les collèges eux-mêmes doivent se
plier à une forme d'évaluation qui permette de démarquer
les meilleurs et de susciter une saine émulation. Un organisme externe
devrait être responsable de cette évaluation. Par exemple,
l'actuel Conseil des collèges pourrait, à notre avis, assumer
cette responsabilité qui ne nécessite pas la création d'un
autre nouvel organisme. (9 h 40)
Deuxièmement, formation des étudiants et connaissances
à acquérir. Tous sont d'accord, le taux d'abandon et
d'échec, tant au collégial qu'à l'école secondaire,
constitue un drame national. Nous croyons que les collèges devraient
développer des formules plus poussées d'encadrement et assurer un
meilleur suivi au plan de la formation personnelle des étudiants, car il
faut nous rappeler que bien des étudiants arrivent au cégep
à un âge relativement jeune. De plus, les services professionnels
d'orientation devraient être véritablement disponibles aux niveaux
secondaire et collégial.
En ce qui a trait aux connaissances acquises, il est temps de revoir le
tronc commun de cours obligatoires qui n'a pas été
retouché depuis 25 ans. Par exemple, est-il encore nécessaire de
maintenir, au niveau collégial, des cours obligatoires
d'éducation physique alors que les cégé-piens peuvent
obtenir leur diplôme sans maîtriser les habiletés
langagières et sans suivre de cours de mathématiques? Plus que
jamais nos étudiants doivent se donner les outils nécessaires
pour
apprendre à apprendre et se rendre capables de cheminer dans leur
carrière tout au cours de leur vie en augmentant constamment leur bagage
de connaissances.
Troisième point, relations collèges et milieu des
affaires. Il existe des exemples de collaboration extrêmement fructueuse
entre certains collèges, ou même des centres
spécialisés dans les collèges, avec des entreprises et des
industries, notamment dans le secteur professionnel. Il faut, à notre
avis, faire connaître ces expériences davantage et en favoriser la
multiplication. Que les collèges aient la marge de manoeuvre requise
afin de travailler efficacement en partenariat avec les entreprises et leur
milieu respectif. Que les succès obtenus par certains collèges
dans leurs relations avec des entreprises soient davantage publicises.
Par ailleurs, nous recommandons que de véritables stages
intégrés à la formation dispensée soient
organisés dans les entreprises pour les étudiants du
côté technique. Il serait également souhaitable d'accentuer
les stages de professeurs en milieu de travail ainsi que la participation de
spécialistes de l'entreprise à la formation dans les
collèges. Il faudrait, évidemment, que les modifications
nécessaires ou les adaptations requises soient prévues dans les
conventions collectives.
Quatrième point qui fait l'objet de nos recommandations,
décentralisation, conseil d'administration et financement. Les
cégeps évoluent de plus en plus dans un contexte de marché
et la démarche actuelle doit s'inscrire, selon nous, dans une approche
globale centrée vers les clientèles à desservir. C'est de
cette façon que les cégeps peuvent agir efficacement dans leur
milieu. Dans les régions notamment, les cégeps sont un agent de
développement économique important. Ils doivent s'adapter
à ces milieux et les servir. Dans cette perspective, on doit favoriser
une décentralisation accrue des pouvoirs, tant au plan des programmes
qu'à celui de la gestion, et, notamment, des ressources humaines.
Dans la mesure où les collèges seront plus responsables de
leurs réalisations et bénéficieront de plus d'autonomie,
le conseil d'administration jouera un rôle encore plus important. Nous
recommandons que la composition des conseils soit modifiée afin qu'une
majorité des administrateurs proviennent de l'extérieur de
l'institution et que, de plus, des représentants d'entreprises en
fassent partie en plus grand nombre. Nous croyons qu'on accentuerait ainsi
l'ouverture vers l'extérieur et que nous renforcerions les liens avec le
milieu et, notamment, avec le monde de l'industrie.
Quant au financement, nous avons vu que les Québécois
fournissent déjà un effort financier important pour supporter
leur système d'éducation. Dans le contexte actuel des finances
publiques et du fardeau fiscal existant, on ne peut leur en demander davantage.
Il faut donc faire mieux avec ce que l'on a et inciter à une meilleure
utilisation des ressources actuelles. Ainsi, on peut songer à relier le
système de financement, en partie du moins, à la performance des
institutions, notamment, par exemple, taux de diplomation ou taux de
réussite. De plus, nous croyons que les étudiants qui
dépassent la durée normale de leurs études devraient
défrayer, en tout ou en partie, le coût réel des
études qui restent à compléter. Il est important de faire
comprendre à un étudiant qu'il doit se consacrer
sérieusement à ses études, car, dans le cas contraire, la
société en supporte des coûts importants. On peut aussi,
évidemment, se demander si les étudiants devraient participer
plus activement au financement de leurs études.
Enfin, un mot seulement sur la Société
québécoise de développement de la main-d'oeuvre et
particulièrement dans le domaine de la formation sur mesure, domaine
dans lequel les cégeps sont très engagés et où le
taux de satisfaction est particulièrement élevé quant
à la qualité de la formation dispensée. D'ailleurs, une
brochure récente fait état de réalisations fort
intéressantes dans ce domaine. Il faut donc éviter, à
notre avis, que le fonctionnement de la nouvelle société ne
vienne alourdir un système qui actuellement donne satisfaction.
En terminant, je veux rappeler que la Chambre de commerce du
Québec et ses chambres affiliées, la Chambre de commerce du
Montréal métropolitain en particulier, s'engagent à
faciliter le nécessaire rapprochement entre le monde des affaires et les
collèges en jouant un rôle actif auprès de leurs membres
respectifs. L'éducation, pour nous, c'est une priorité, et je
puis vous dire personnellement qu'à titre de parent c'est
également pour moi une préoccupation majeure.
Mme la Présidente, voilà la présentation que
j'avais à faire et qui résume, je pense, les principales
recommandations qui sont contenues dans notre mémoire. Il nous fera
plaisir maintenant de répondre, soit moi-même ou mes
collègues qui sont ici, aux questions des membres de la commission.
La Présidente (Mme Hovington): merci, m. marcoux. mme la
présidente. euh... mme la présidente, mme la ministre! ha, ha,
ha! vous avez la parole pour la période d'échange.
Mme Robillard: Merci, Mme la Présidente. Je veux d'abord
remercier les membres des chambres de vous être penchés sur ce
dossier de l'enseignement collégial québécois et je suis
très heureuse de constater l'intérêt que vous portez
à l'enseignement collégial. Je vois que vous avez abordé
beaucoup de questions, un éventail de questions dans votre
mémoire. Mais je prends note de façon très
particulière du fait que vous signifiez clairement que, selon vous,
selon les
chambres, l'éducation est la grande priorité au
Québec. Je pense que vous le statuez au point de départ et j'en
prends bonne note.
Maintenant, M. Marcoux, j'aimerais ça aborder avec vous les
attentes que vous avez en matière de formation technique. Partons de la
recommandation que vous avez à 9.1, à la page 24 de votre
mémoire, où vous dites très clairement que vous voulez que
des mesures soient prises pour assurer une plus grande autonomie et un
véritable statut au secteur professionnel à l'intérieur
des collèges. À quelle autonomie vous faites
référence? À quel statut vous faites
référence? Essayez de m'expliciter un peu cette
recommandation.
M. Marcoux: À cet égard-là, d'abord je
voudrais bien souligner que nous ne sommes pas les spécialistes en
matière d'éducation. Je pense que ça, nous l'indiquons
dans le liminaire du mémoire. Ce que nous constatons, cependant, et nous
l'avons souligné, c'est qu'il semble que le secteur professionnel a
exercé beaucoup moins d'attraits chez les jeunes, et c'est
corroboré par les statistiques que nous avons.
Il y a peut-être différentes raisons, mais ça
indique certainement qu'il faut le valoriser davantage. Peut-être que la
collaboration ou une meilleure collaboration entreprises et collèges est
une façon de le faire, c'est-à-dire d'indiquer que c'est
important, qu'il y a des débouchés dans un certain nombre de
disciplines, d'ailleurs, où il y a des pénuries d'emplois. Mais
ce que nous croyons, également, c'est qu'au sein même des
collèges il serait peut-être souhaitable que le statut du secteur
professionnel soit valorisé. Il ne l'a peut-être pas toujours
été, selon ce que nous percevons. (9 h 50)
Exactement, comment le faire? Nous n'avons pas, à cet
égard-là, de recette particulière à fournir. C'est
probablement un ensemble de moyens, mais c'est certainement, selon nous, un
aspect qui est important. Et je pense que le fait que les jeunes aient
été moins attirés par le secteur professionnel
témoigne certainement que, pour eux, c'était moins valorisant. Et
peut-être que M. Graham Weeks, qui connaît bien également ce
secteur-là, pourrait ajouter certains commentaires.
M. Weeks (Graham): C'est correct? Ça fonctionne? Je
pourrais peut-être parler en termes de l'expérience de la Chambre
de commerce du Montréal métropolitain parce que nous avons un
projet de programme pour tisser des liens entre le milieu industriel et le
milieu scolaire, y compris un programme pour inciter les jeunes du secondaire,
côté académique, à aller s'inscrire dans des
programmes techniques. Évidemment, si on veut que les jeunes
s'inscrivent dans les programmes technico-collégiaux, il y a quelque
chose qu'il faut faire au niveau secondaire et je pense qu'on ne devrait pas
dépendre seulement de l'orientation. Dans notre mémoire on parle
du besoin d'une amélioration vis-à-vis les orienteurs, au niveau
secondaire, de donner plus de ressources.
Je pense qu'actuellement le ratio, c'est un orienteur par 1500
élèves, quelque chose de ce genre-là. Alors, il faut plus
de ressources. Mais, de notre part, on est prêt et on fait
déjà des liens avec le milieu scolaire pour assurer que les
jeunes soient exposés dès le secondaire, et même dès
le primaire, aux réalités du marché du travail. Je pense
qu'il va falloir faire de plus en plus de ces choses-là pour assurer que
les jeunes soient vraiment conscients des possibilités dans les
techniques. Et ce sera la contribution de la chambre de commerce à la
valorisation de ce secteur-là au sein des collèges.
M. Girard (Jacques): Mme la ministre, je dois dire que si on
avait eu plus de temps on aurait peut-être eu le goût d'entrer
davantage dans les détails et tenté d'indiquer de façon
plus précise comment cette plus grande autonomie et ce statut accru
pourraient fonctionner. Par ailleurs, ça ne nous a pas été
possible de le faire, et on s'est même demandé si c'était
à nous de le faire.
Ce que l'on veut indiquer, par ailleurs, c'est qu'il faut prendre tous
les moyens pour valoriser le secteur professionnel. Et, si, parmi tous ces
moyens, il faut en venir à des moyens structurels à
l'intérieur du fonctionnement des collèges, il ne faudrait pas
hésiter à le faire. Autrement dit, il faut absolument que le
secteur professionnel puisse réagir rapidement, puisse tisser les liens
nécessaires avec le monde de l'entreprise et de l'industrie sans
nécessairement avoir à subir toutes les contraintes qui peuvent
exister à l'égard d'un fonctionnement normal. Au fond, on veut
qu'il soit un interlocuteur immédiat et rapide pour le monde de
l'entreprise.
Mme Robillard: Parfait. Venons-en à une question où
vous pouvez faire quelque chose. Vous nous recommandez de façon
très précise, à la recommandation 7.2, des stages pour les
professeurs et des stages pour les étudiants. Qu'est-ce que les membres
des chambres sont prêts à faire pour accueillir nos
stagiaires?
M. Marcoux: Alors, Mme la ministre, d'abord, je pense que,
déjà, ça commence à se faire, et il y a un
intérêt de plus en plus marqué du côté des
entreprises pour pouvoir participer à des programmes comme
ceux-là. Il y a aussi - parce que ça ne peut pas se mettre en
place du jour au lendemain non plus - des contraintes également dans
l'entreprise, et vous le savez. D'ailleurs, à la fois à la
chambre du Québec et à la chambre de Montréal nous avons
des groupes de travail sur ce sujet-là, qui ont été mis
sur pied, d'ailleurs, cette année - c'est M. Girard
qui en est le président - pour voir avec nos membres comment on
peut le favoriser. Alors, ça, je pense que c'est déjà un
point extrêmement positif et c'est la première fois que ça
se fait.
Évidemment, il y a aussi des ajustements. Par exemple, il n'y a
pas seulement la durée, il y a également... On parlait de
conventions collectives tout à l'heure. Il est bien sûr qu'on ne
peut pas accueillir des stagiaires dans une entreprise au même titre
qu'on peut accueillir un travailleur qui est régi par une convention
collective avec le même type de salaire. Alors, ça, ça va
être certainement un aspect qu'il va falloir considérer et sur
lequel il va falloir s'entendre avec d'autres partenaires. Pour des chefs
d'entreprise - et je les comprends - c'est un aspect important. Il ne s'agit
pas non plus d'avoir des stagiaires qui vont prendre la place des travailleurs,
ce n'est pas ça; ce n'est vraiment pas dans cet esprit-là que le
programme est conçu.
Donc, oui, il y a une ouverture. Oui, avec nos membres, actuellement,
nous sommes, à la fois à la chambre de commerce de
Montréal et dans d'autres, en voie de voir comment on peut poser des
gestes dans cette direction-là. Il faut le faire en collaboration avec
des institutions et aussi voir du côté des conditions de travail,
des conventions collectives, des accommodements qui permettraient de le faire
sans que ça soit coûteux sur le plan... que ce soit exactement les
mêmes conditions de travail.
Mme Robillard: Mais ce que je comprends et que je note,
là, c'est l'ouverture de la Chambre ou des chambres à travailler
ce sujet-là...
M. Marcoux: Oui, ça là...
Mme Robillard: ...et à regarder quelle part vous pouvez
faire au niveau des stagiaires, des étudiants là, directement
chez vos membres. Je note bien ça aussi.
M. Marcoux: Ça, vous pouvez le noter. On ne vous dit pas
qu'il va y avoir des miracles demain matin, ce n'est pas ça qu'on vous
dit.
Mme Robillard: Non.
M. Marcoux: Ce qu'on vous dit: C'est une préoccupation
importante pour nous et c'est également... Je pense, qu'il y a une
ouverture de plus en plus grande du côté des entreprises à
collaborer pour pouvoir instaurer un système qui permette justement cet
échange et ces stages.
Mme Robillard: Parfait, M. Marcoux. Venons-en peut-être
à la participation financière des étudiants à leurs
études. Vous soulevez la question au point de départ, à la
page 13, en disant: Est-ce qu'il y aurait lieu de demander une contribution
financière modulée à certains étudiants? Mais de
façon précise, à la recomman- dation 10.2, je pense que
vous répondez à votre propre question. J'aimerais ça que
vous m'expliquiez votre recommandation 10.2.
M. Marcoux: Je peux peut-être demander à M.
Beauregard, qui a travaillé avec nous, de répondre.
M. Beauregard (Denis): Alors, le principe est le suivant: C'est
qu'on se rend compte, quand on examine la façon dont les
étudiants poursuivent leurs études en termes de durée, en
termes d'intensité également, semble-t-il, il y a des
problèmes de ce côté-là. Des cours qui devraient
normalement se faire sur une période de trois ans sont de plus en plus
fréquemment, je dirais, étirés sur une période de
quatre et de cinq ans.
Il y a toutes sortes de raisons qui expliquent ce
phénomène. Il faut évidemment travailler sur les causes
à l'origine du problème. Sauf qu'il reste tout de même que
c'est un phénomène qui est excessivement coûteux. Le
collège doit encadrer, pendant une période allant presque
jusqu'au double de la période normale prévue, des
étudiants et ça coûte cher. Alors, nous, ce qu'on propose,
ce n'est pas une formule mathématique, bien que ce soit ici inscrit en
termes de pourcentage, c'est plutôt une orientation.
Alors, donc, l'étudiant qui dépasse, de façon je
dirais significative la durée normale prévue pour ses cours
devrait être appelé à contribuer à défrayer
les coûts que cette situation-là entraîne. On parle d'un
dépassement de 25 % qui entraînerait un financement
équivalent à 50 % des coûts réels ou d'un
dépassement de 50 % qui entraînerait un financement à 100
%. C'est un ordre de grandeur mais je pense que ce qu'on a l'intention de
véhiculer avec cette recommandation, c'est d'amener les gens à
considérer cette avenue comme une alternative valable au niveau du
financement des collèges.
M. Girard (Jacques): Je pense que le sens fondamental de la
recommandation, c'est le suivant: Déjà, on consacre beaucoup
d'argent à l'éducation - le président y a fait allusion
tantôt - comment faire en sorte que cet argent soit utilisé de la
façon la plus efficace possible? Et on constate que, somme toute, de
bonne foi ou de mauvaise foi, il y a certaines personnes qui abusent du
système et il nous paraît nécessaire de prendre les moyens
pour que ces abus soient corrigés. Il y aurait sûrement des sommes
d'argent significatives qui seraient dégagées si l'ensemble des
étudiants, qu'ils soient inscrits au secteur professionnel ou qu'ils
soient inscrits au secteur préuniversitaire, prenaient un temps moins
long pour compléter leurs études. Et cet argent, pensons-nous,
pourrait être adressé de façon intéressante à
d'autres fins à l'intérieur du réseau collégial.
(10 heures)
On se rend compte que ça peut être un montant
considérable, évidemment, et, à cet
égard-là, on serait prêts à y regarder de plus
près. C'est pourquoi j'insiste sur l'objectif qui nous animait,
c'était de faire en sorte d'éviter qu'il y ait des abus. Et il
nous paraît abusif, pour ce qui est du cours préuniversitaire,
qui, normalement, devrait prendre deux ans, de prendre, dans certains cas,
trois ans ou trois ans et demi pour le compléter et, dans le cas du
professionnel, qui, normalement, devrait prendre trois ans, de prendre quatre
ans, quatre ans et demi ou cinq ans. Ça, ça nous paraît
nettement abusif et il nous paraît nécessaire de démontrer
aux étudiants que leurs études, c'est un investissement et qu'ils
doivent y consacrer la majeure partie de leur temps, et toute ou la plus grande
part de leurs énergies. On sait que ça peut attaquer
jusqu'à un certain point le travail à temps partiel qui est aussi
un phénomène sur lequel il faut se pencher, parce qu'à
certains moments on constate que le travail à temps partiel devient plus
que du travail à temps partiel et que le travail devient plus important
que les études, et ça, je pense, c'est mauvais pour les
étudiants eux-mêmes d'abord et pour la société
ensuite.
La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. Girard. M. le
député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Merci beaucoup, Mme la
Présidente. Je voudrais remercier la Chambre de commerce du
Québec et celle du Montréal métropolitain d'avoir
accepté de venir présenter leur mémoire. C'est
intéressant de vous rencontrer parce que vous avez un mémoire
qui, assez rapidement en tout cas, se positionne très bien et explique
les vraies réalités selon vous. Et, moi, j'ai aimé, entre
autres, à un moment donné, votre choix rapide de dire: Nous, on
veut conserver la formule, mais il y a un mot clé: il faut s'adapter.
Vous avez dit ça, à un moment donné, à la page 4 ou
5: II faut s'adapter. Puis, bien sûr, vous l'avez défini. Mais
s'adapter, ce n'est pas compliqué, c'est simple, c'est clair, c'est net,
c'est précis et ça correspond, je pense, à ce que nous
devons faire en 1992.
Chose certaine, votre mémoire pose les bonnes questions. Il pose
de très bonnes questions. Il va falloir travailler un peu plus sur les
réponses ensemble. Mais c'est évident que vous posez de
très bonnes questions. Entre autres, juste à titre d'exemple,
quand vous dites à la page 10: Chez nous, il y a une question
fondamentale qui se pose: «Quel ministère est vraiment responsable
de la formation professionnelle au Québec?» Vous faites bien de
rappeler ça parce que, moi, je l'ai dit à plusieurs reprises, il
y a du pilage de pieds, puis ça n'a pas de bon sens, et la formation
professionnelle, ça devrait être l'Éducation, ça ne
devrait pas être le MMSR. Moi, je vous le dis, parce que vous posez la
question, c'est le ministère de la Main-d'oeuvre et de la
Sécurité du revenu qui s'occupe de la formation professionnelle
et ça n'a pas de sens, selon moi. On ne réglera pas ça ici
aujourd'hui, mais vous faites bien de poser la question. Vous avez une
série de bonnes questions comme ça et on y reviendra
tantôt. Mais, moi, je veux échanger rapidement sur
différents points de vue qui sont clairement exprimés dans votre
mémoire.
La formation professionnelle. On a affaire à des gens qui
regroupent le monde des affaires. Vous dites: Pourquoi la formation
professionnelle exerce-t-elle si peu d'attrait chez nos jeunes? Un peu plus
loin, vous dites: Pourquoi nos étudiants terminent-ils le cégep
avec une formation générale déficiente et
éprouvent-ils autant de difficultés à s'exprimer? Par
contre, tout de suite après - et je trouve ça correct parce que
ça correspond aux faits - a la page 12 dans votre mémoire, vous
dites que «92 % des représentants d'entreprises interrogés
ont déclaré que la formation donnée par les cégeps,
dans le cadre de ces activités, est adaptée à leurs
besoins particuliers et à ceux de leurs employés».
Mais, première question: Effectivement, pourquoi on ne
regarderait pas ce que vous pourriez faire, vous autres, comme instance quand
même importante au Québec, importante dans la
société québécoise, pour vendre un peu mieux la
nécessité pour nos jeunes de choisir davantage ce qui serait
légitime d'être choisi pour un plus grand nombre de jeunes,
c'est-à-dire une formation professionnelle pointue, adéquate qui
correspond aux besoins de l'industrie? Vous avez une crédibilité
dans vos milieux. Il n'y a pas beaucoup de régions ou de
municipalités importantes qui n'ont pas leur chambre de commerce. C'est
une institution locale bien perçue, règle générale.
Il me semble que vous avez un travail à faire de promotion de la
formation professionnelle, que vous seriez crédibles là-dessus,
puis je ne suis pas sûr que je vous entends comme je souhaiterais vous
entendre là-dessus. Alors, pourquoi vous n'avez pas regardé
ça? Pourquoi vous ne le faites pas? Si vous avez envie de le faire,
comment vous avez l'intention de le faire? Je suis convaincu que vous aideriez
énormément à ce qu'il y ait plus de jeunes qui fassent le
bon choix d'une formation professionnelle si vous disiez: Ça
répond, puis il y aura de l'emploi, puis allez-y là-dedans, puis
on va vous aider, puis on va vous supporter.
M. Marcoux: M. Gendron, je suis d'accord avec vous pour dire
qu'il y a plus à faire à cet égard-là. Il y a
déjà certaines actions qui ont été posées,
et M. Weeks en parlait tantôt au niveau de la Chambre de commerce du
Montréal métropolitain. Donc, ce n'est pas à
l'échelle de la province là, mais c'est déjà
commencé à certains endroits.
Ce que je puis vous dire, c'est que, cette année, c'est une des
priorités, aussi, de la Chambre de commerce du Québec,
l'éducation et la formation. Et je pense que c'est la première
fois que nous y mettons autant l'accent. Évidemment, ça
correspond parfois aussi à des besoins qui sont ressentis. La situation
évolue et, autant chez les gens d'affaires, je pense, et aussi à
titre de parent, l'éducation dans le monde d'aujourd'hui, compte tenu de
l'évolution de l'économie, est devenue un élément
extrêmement important pour assurer notre richesse collective comme
société, mais également pour pouvoir développer la
main-d'oeuvre qualifiée dont les entreprises auront besoin d'ici
à l'an 2000.
Donc, ce que je vous dis, c'est que déjà il y a certaines
choses qui se font. Ce n'est pas suffisant. Nous mettons, cette année,
l'emphase et l'accent à cet égard-là, non pas seulement
sur la promotion de la formation technique, mais également sur d'autres
avenues que nous allons examiner avec un groupe de travail pour mieux, de
façon générale au niveau secondaire, d'ailleurs, faire
percevoir aux étudiants l'importance de continuer leurs études et
d'essayer d'avoir, même au niveau secondaire, un impact sur le fameux
décrochage scolaire.
Donc, je vous dis: Oui, il y a des choses à faire. Oui, nous
allons tenter de faire plus à cet égard-là, et puis nous
espérons que nous aurons des résultats un peu plus concrets.
Évidemment, il n'y aura pas de changements mathématiques et de
changements dramatiques demain matin. Je pense qu'il faut modifier les
attitudes, changer des comportements, faire évoluer les
mentalités, et ça, nous allons certainement nous atteler à
la tâche pour le faire.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Je comprends, monsieur...
M. Girard (Jacques): Très brièvement, M. Gendron.
Je pense que l'essentiel à atteindre, c'est de multiplier les liens et
les échanges entre le monde des affaires et le monde de
l'éducation. Ça, ça me paraît clair. Il n'en existe
pas suffisamment. Deux moyens concrets qui pourraient venir à l'esprit:
un, que les entreprises fassent des efforts pour aller dans les cégeps
et pour indiquer aux jeunes ce qu'elles font, quelles sortes d'entreprises
elles ont, les emplois qui sont offerts, les exigences qui sont requises, et,
deux, une présence plus significative de représentants du monde
des affaires dans les conseils d'administration des cégeps. Ça,
ce serait des moyens concrets pour faire passer les messages.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Ça va. Merci.
M. Marcoux: Si vous permettez, monsieur, oui, je pense que vous
avez peut-être un mot, un commentaire à ajouter, M. Weeks.
M. Weeks: Oui, juste pour ajouter. Moi, je viens de milieux
éducatif et communautaire, et ça fait huit ans que je suis
à la Chambre de commerce du Montréal métropolitain. Je
peux témoigner de l'évolution de l'intérêt croissant
d'année en année de cette Chambre-là pour, si vous voulez,
l'éducation, dans le sens large, des milieux sur l'importance des
techniques. Et ça, il faut commencer ça au primaire. Ce n'est pas
juste les jeunes qu'il faut sensibiliser, mais également leurs parents,
parce qu'on a beau exposer les jeunes à toutes sortes de milieux de
travail, s'ils embarquent là-dedans, mais que leurs parents insistent
pour qu'ils soient, mettons, dans les professions libérales, avocat ou
ingénieur, c'est difficile pour les jeunes de continuer dans ce
cheminement-là.
Alors, tout ça pour vous dire qu'on a commencé et, comme
M. Marcoux l'a dit, il y a plein de choses à faire.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Merci beaucoup.
Ça, je n'en doute pas, mais, regardez, «M.
Morin», puis bien amicalement, parce que ça fait quand
même plusieurs fois qu'on a l'occasion de vous entendre-Une voix:
M. Marcoux.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Oui, M. Marcoux. Qu'est-ce que j'ai
dit? Ah, excusez, oui, je sais que c'est M. Marcoux. C'est Yvon Marcoux.
Excusez-moi!
M. Marcoux: Ha, ha, ha!
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Ce que j'allais dire, c'est que
ça fait plusieurs fois qu'on a l'occasion d'entendre des
représentants des chambres de commerce ou du monde patronal. Et
ça ne fait aucun doute sincèrement qu'il y a de l'ouverture et
tout ça. Mais je trouve qu'il n'y a pas assez d'engagement. Je le dis
comme je le pense. Quand M. Dufour va venir, je l'avertis d'avance. Je l'aime
bien. D'ailleurs, c'est sûr qu'on va le voir. Dès qu'il y a une
commission, on le voit. Alors, on va le voir, ce n'est pas péjoratif,
puis on va lui dire: Comment ça se fait que vous êtes capable de
donner des lignes de conduite plus serrées dans d'autres dossiers? On a
vu certaines chambres de commerce qui sur des dossiers majeurs ont
hésité, puis, à un moment donné, elles ont dit: On
ne se prononce pas. Mais certaines ont dit: Oui, ce serait mieux de dire oui.
J'ai entendu ça, tu sais, de certaines chambres de commerce.
Peut-être, là-dessus, qu'elles ont eu moins d'influence que dans
le domaine où vous êtes, mais restons sur le fond des choses.
Je vous entendais donner la réponse à Mme la ministre pour
ce qui est des stages. Là, j'essaie de vous citer bien, bien
correctement. Vous avez dit: Oui, il y a de l'ouverture. On va
regarder ça comment on peut poser des gestes. Il faut
également évaluer, sur le plan des conventions collectives, les
implications. Moi, ça doit faire quatre ou cinq commissions où
j'entends exactement les mêmes commentaires. Et, je le
répète, il n'y a rien de péjoratif là-dedans. Il
faut aller plus loin. M. Dufour, ça doit faire quatre ans qu'il dit, au
niveau des stages: Vous ne faites pas ça comme il faut, au
Québec, parce qu'il n'y a pas assez de liens en formation
professionnelle entre l'école, les collèges, le monde patronal et
l'industrie. Je ne veux pas qu'il me redise qu'il va regarder ça et
qu'il y a de l'ouverture. (10 h 10)
Vous ne pensez pas que, si vous alliez un peu plus loin, même pour
ce que vous venez de mentionner, vous seriez des promoteurs? La formation
professionnelle, il faut que ça ait plus d'attrait chez nos jeunes. Et
ça en aurait, j'en suis certain, si vous donniez une directive à
vos chambres: Vous allez contacter vos collèges dans vos milieux, vous
allez contacter les commissions scolaires pour leur dire que vous êtes
là pour que le stage des jeunes qui sont au niveau de l'enseignement
professionnel soit moins fastidieux, moins plate, parce qu'il y a plusieurs
jeunes qui s'ennuient de ne pas sortir. C'est de même qu'ils se parlent.
On aimerait ça aller à l'atelier, dans le champ et ainsi de
suite. Mais ils ne veulent pas arriver et se faire dire: Bien, écoutez,
pour nous autres, ça ne se fait pas de même. Il y a des
problèmes et il faut regarder ça avec nos conventions
collectives. On commence à avoir de l'ouverture.
Je voudrais juste terminer là-dessus. Est-ce que vous ne croyez
pas que le moment est venu de poser des gestes vraiment concrets, par lesquels
vous allez inciter plus de chambres à faire des propositions aux
collèges et à faire des propositions aux centres de formation et
d'éducation des adultes au niveau professionnel?
M. Marcoux: M. Beauregard, je pense, voulait apporter certains
commentaires. Je reviendrai.
M. Beauregard: Oui. Là-dessus, M. Gendron, je pense qu'il
faut d'abord considérer l'action que les chambres de commerce peuvent
avoir dans sa véritable perspective. Les chambres de commerce
s'adressent à des membres qui ont vraiment toute l'autonomie et toute la
latitude de faire ce qu'ils veulent. Alors, il n'y a pas vraiment... Ce n'est
pas - j'allais dire un mouvement, ce n'est peut-être pas le bon mot -
mais ce n'est vraiment pas le genre d'organisation qui peut donner des mots
d'ordre. Au-delà de ça, cependant, je suis bien d'accord avec
vous, il ne faut pas dire: Puisqu'on ne peut pas, croisons-nous les bras et
attendons. Il se fait vraiment des choses, et je pense que ce n'est pas tout
à fait exact de croire que, depuis quelques années, on ne fait
que répéter: On va regarder ça.
Je peux vous parler beaucoup plus de la Chambre de commerce du
Montréal métropolitain, que je connais mieux que les autres, mais
il se fait énormément de choses qui ne paraissent pas
nécessairement sur la place publique, pour une raison qui est
très simple: les gens d'affaires en sont venus à la conclusion,
après des années de table centrale au niveau de toute la
province, que le véritable travail, celui qui donne quelque chose, il
doit se faire avec une école ou avec un collège et non pas avec
une organisation monstre qui fait en sorte qu'on perde notre temps en
réunions qui ne débouchent jamais sur rien.
Et si vous regardez au niveau collégial - puisqu'on est ici pour
parler de ça - il y a énormément de collèges,
d'entreprises et même d'industries qui font des tas de choses ensemble.
Il y en a une quinzaine au moins, Graham pourra préciser, qui ont
développé ensemble, en très étroite collaboration,
des centres d'excellence. Dans ces cas-là, on termine le processus
éducatif par des stages, et ça marche. Ça marche pour une
raison qui est bien simple, c'est qu'on considère le
phénomène dans son ensemble. Souvent, les industries vont
participer, par exemple, à la définition même des
programmes à certains niveaux, vont avoir un bon mot à dire sur
l'enseignement qui se donne dans les cégeps, vont être en relation
très étroite avec les professeurs, vont amener les gens dans
leurs entreprises. Ça se fait déjà, mais ça ne se
publicise pas suffisamment. C'est une autre de nos constatations. Il va falloir
absolument trouver le moyen de faire en sorte que les cas de succès - et
il y en a quand même passablement - soient plus connus et que ces
cas-ià aient un effet d'entraînement sérieux dans d'autres
domaines. Donc, il se fait des choses.
M. Marcoux: Mme la Présidente, si vous permettez, je
demanderais peut-être à M. Gilbert, de la Chambre de commerce de
Chicoutimi, justement, d'ajouter là-dessus parce que les cégeps
de la région, là-bas, ont des expériences, je pense, fort
intéressantes avec des entreprises.
M. Gilbert (François): effectivement, au
saguenay-lac-saint-jean, je pense, c'est un milieu un petit peu particulier,
même vis-à-vis de certaines préoccupations que vous
avez...
Des voix: Ha. ha, ha!
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Complètement d'accord. Mais
l'Abitibi s'en approche, là. Les résultats se ressemblaient.
M. Gilbert: Je pense que, globalement, sur votre
préoccupation, moi, je suis un petit peu d'accord qu'on pourrait
peut-être, comme chambres de commerce, aller un petit peu plus de
l'avant. Je regarde un exemple bien simple La
semaine dernière, une école élémentaire nous
approchait en disant: Écoutez, est-ce qu'il n'y aurait pas
possibilité d'avoir une association entre nos étudiants - pour
aider au décrochage scolaire - et les gens de l'entreprise? Ils nous ont
approchés, nous y sommes allés et, effectivement, on s'est
entendus sur un programme. Je crois que, souvent, la relation cégep
milieu des affaires existe, mais peut-être qu'il y a des attentes pour
dire qui va faire quoi et qui va prendre des initiatives. Et, comme chambre de
commerce - je suis d'accord avec vous - peut-être qu'on pourrait aller un
peu plus loin. Je regarde certaines entreprises et je prends l'exemple du
cégep de Jonquière, dans la région du
Saguenay-Lac-Saint-Jean, qui a des relations très étroites avec
des firmes. Je pense, par exemple, à un centre spécialisé
de production automatisée qui est relié à une firme qui
s'appelle Allen-Bradley, une firme américaine, la plus importante dans
son secteur, et on fait de la formation pour cette firme-là partout dans
le monde francophone. C'est un exemple bien précis.
Je suis convaincu, d'ailleurs probablement comme vous, qu'il existe des
expériences intéressantes, mais ce qu'il faudrait faire, c'est
aller plus loin, à savoir est-ce que c'est les cégeps qui doivent
débuter en premier ou est-ce les chambres de commerce? Est-ce que c'est
les gens d'affaires? On peut lancer cette balle-là longtemps. Je serais
d'accord à dire qu'on a un rôle certainement plus important
à jouer.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Merci beaucoup. C'est parce que je
veux procéder assez rapidement. Il y aurait deux autres points que je
voudrais aborder. Je ne peux pas, moi non plus, ne pas toucher à la
question du financement. Vous l'avez abordée à la page 13: il y
aurait lieu de demander une contribution financière modulée.
À la page 25, vous arrivez avec l'explication de ce que vous appelez la
contribution financière modulée. J'aimerais échanger un
petit peu avec vous. D'abord, ça m'étonne un peu. Peut-être
que vous n'avez pas eu l'occasion de le voir. Êtes-vous au courant que
ceux qui prennent plus de temps pour l'obtention de leur diplôme ont dit
deux choses, entre autres, là-dessus sur le plan statistique?
L'expression est la suivante: Ceux qui diplôment, règle
générale, ils ne traînent pas. Ceux qui ne diplôment
pas, selon les statistiques, ils traînent. Avec ce point de vue que vous
deviez connaître et l'autre qui est plus important, selon moi...
Là, j'explique le plus important. Toutes les statistiques qu'on a
là-dessus nous disent qu'essentiellement ceux qui prennent plus de
temps, ce n'est pas parce qu'ils lambinent, ce n'est pas parce qu'ils se
traînent les pieds, si vous permettez l'expression; les chiffres disent
que c'est parce qu'ils ne savent pas exactement quel bord prendre. Ce n'est pas
compliqué, ça. On parle d'orientation, en termes plus
précis. Alors, dans la majorité des cas, ce que les jeunes nous
ont dit, c'est qu'ils ont pris une mauvaise orientation ou qu'ils ont
été obligés de changer de programme pour toutes sortes de
raisons qu'ils ont expliquées.
Alors, ma question est: Si vous saviez ça et que vous connaissez
ces éléments-là, pourquoi pénaliser les jeunes qui
disent que la raison pourquoi ça leur prend un peu plus de temps, c'est
un problème d'orientation? Pensez-vous que ça n'aura pas une
conséquence dramatique pour en faire décrocher davantage, surtout
si vous mettez ça en parallèle avec l'autre donnée, que
vous n'êtes pas supposés ne pas savoir, que 70 % des jeunes sont
obligés de travailler et que, dans les 70 % des jeunes qui travaillent
malheureusement aux études collégiales, il y en a 50 % qui
disent: C'est pour subvenir à mes besoins?
Alors, quand on met ça ensemble, supposons que vous connaissez
ces éléments-là, est-ce que vous maintenez toujours la
recommandation d'aller impliquer un coût financier de 50 % à ceux
qui déborderaient le temps requis pour obtenir leur diplôme, avec
ces réalités-là?
M. Marcoux: M. Gendron, j'aurais deux commentaires sur votre
question qui est tout à fait pertinente. En ce qui a trait à ce
que vous mentionnez comme étant un peu le manque d'orientation des
étudiants, vous verrez que dans notre mémoire nous en parlons. Ce
que nous mentionnons, c'est que, d'une part, dans les cégeps
eux-mêmes, nous croyons qu'il devrait y avoir un meilleur encadrement et
un meilleur suivi sur le plan personnel. Vous le savez, plusieurs arrivent
relativement jeunes au niveau du cégep, ils se sentent un peu
désemparés. Ça, je pense que c'est un volet important.
Deuxièmement, c'est qu'également nous fournissions à la
fois au niveau secondaire et au niveau du cégep - et nous croyons que
ça pourrait aider - des meilleurs services professionnels d'orientation.
Vous allez me dire: Ça ne réglera pas tout. Nous pensons que ce
que vous soulignez, oui, c'est un problème, et on le voit chez les
jeunes. Nous croyons que ces deux éléments-là seraient
susceptibles d'améliorer la situation vis-à-vis des jeunes. Donc,
ça répond à une première préoccupation.
La deuxième, c'est vrai qu'il y a peut-être un certain
nombre de jeunes qui sont obligés de travailler, mais je pense qu'il y
en a un certain nombre qui travaillent et qui, en même temps, disent:
Oui, c'est permis, on peut le faire en plus de temps; on peut prendre trois ans
ou trois ans et demi au lieu de le faire en deux. Donc, on va se permettre de
travailler au lieu de se concentrer sur nos études. Nous croyons qu'il y
en a un bon nombre et, à cet égard-là, donc, il serait
approprié, parce que ce sont quand même des coûts assez
importants, comme le mentionnait M. Girard tout à l'heure, d'avoir une
certaine forme de sanction. Parce que finalement avec ce qu'eux prennent, les
coûts qu'ils absorbent dans
le système, il y en a moins pour les autres. Et c'est dans ce
sens-là que nous croyons quand même que notre recommandation
demeure appropriée, avec les nuances qu'il faut faire. (10 h 20)
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Je voudrais juste ajouter, toujours
pour des raisons de temps, que j'avais remarqué effectivement en page
16, et je tiens à vous en féliciter, que votre première
recommandation - en tout cas, moi pour un, c'est une de celles auxquelles je
tiens le plus et j'espère que la ministre va être très
attentive - elle s'intitule: Développer des formules plus
poussées d'encadrement. Parce que je persiste à croire qu'au
niveau collégial, en première année, il n'y a pas assez de
mesures d'encadrement, et ça, ça crée
énormément d'impacts sur la démotivation, le
découragement, ainsi de suite. Sauf que des hommes d'affaires comme vous
autres, vous devriez savoir que, quand il y a eu des coupures, malheureusement,
la plupart des coupures ont été affectées sur les mesures
d'encadrement. Et ça, c'est confirmé par les gens du milieu.
Donc, quand j'ai à opposer votre recommandation, là, j'y
reviens, à une partie plus grande d'efforts financiers demandée
aux jeunes, je ne suis pas capable de vivre avec ça parce que je dis:
Regardez, vous êtes conscients qu'il n'y a pas assez d'encadrement; la
preuve, c'est votre recommandation no 1. Alors, moi, je dis: Je vous
félicite, là, vous êtes sur la bonne voie, selon moi.
Vous ne croyez pas que ça serait plus légitime de faire un
bout de chemin dans le système en essayant effectivement de mettre plus
de formules d'encadrement, d'essayer de ne pas se sentir coupables, comme
société et comme ministère, qu'il y ait trop de failles
dans nos affaires sur le plan de faciliter l'orientation des jeunes pour savoir
où est-ce qu'ils s'en vont. Et, si on faisait ces deux choses-là
et que les résultats ne changeaient pas, là, on serait
obligé de dire: Écoutez, là, on ne peut pas accepter le
lambinage, si vous me permettez l'expression, ou le traînage de pieds
parce qu'on a corrigé les deux points majeurs. Les deux points que vous
avez dit qui étaient la raison: pas assez d'encadrement et on ne sait
pas trop comment s'orienter. Corrigeons ça et puis on regardera une
formule.
Quand je raisonne comme je viens de le faire, est-ce que vous êtes
réfractaires à ça?
M. Marcoux: Moi, je pense qu'il y a toujours... Écoutez,
nous sommes d'accord sur l'importance de l'orientation. Nous en avons
parlé. Deuxièmement, ça ne veut pas nécessairement
dire que ça demande toujours des ressources additionnelles. Parfois on
peut changer les priorités ou faire les choses autrement à
l'intérieur du système et ça permet de dégager des
sommes pour des priorités que l'on cible. Troisiè- mement,
à notre avis, il en reste toujours un certain nombre, je pense, qui,
tout en étant bien orienté, compte tenu des exigences quand
même minimales requises de semestre en semestre, se dit: Bien, on va
faire ça sur trois ans, trois ans et demi et puis on va travailler en
même temps. Je pense qu'il y en a un certain nombre et que ça
devrait donner lieu, en tout cas, à une certaine forme de sanction,
pour, à l'intérieur du cadre général, que ces
sommes-là servent à ceux qui vraiment y vont à temps plein
et de façon soutenue.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Je termine. Vous n'aimeriez pas mieux
la formule de dire: Bien écoutez, si vous faites votre D.E.C. dans les
temps requis, on vous crédite 25 % de votre prêt que vous n'aurez
pas à rembourser? Vous n'aimeriez pas mieux des formules comme
ça?
M. Marcoux: Écoutez, là, nous ne sommes pas
allés dans ces détails-là, M. Gendron.
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Hovington): Vous avez
dépassé votre temps, mais ce n'est pas grave, ce n'est pas
grave.
M. Marcoux: Ce n'est pas parce que ce n'est pas important, mais
on n'a pas eu le temps.
La Présidente (Mme Hovington): Avant de passer la parole
à mon collègue de Sherbrooke, j'aimerais juste, M. Gilbert, de la
Chambre de commerce de Chicoutimi, dire peut-être que le
Saguenay-Lac-Saint-Jean est spécial. C'est sûr, ça, je ne
veux pas vous enlever ça, mais vous savez, à Matane, le
cégep de Matane a mis en place, depuis quelques années
déjà, un service aux entreprises. Quand Donohue Matane est venue,
il y a eu une collaboration, au niveau de la formation, extraordinaire. Et
même le cégep est sorti du cégep pour aller jusqu'aux
Jardins de Métis pour offrir un cours en horticulture. Alors, vous
voyez, c'est spécial aussi à Matane.
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Hovington): Mais j'aurais une question
toute simple, M. Marcoux. Dans votre recommandation 2.2, vous parlez
d'évaluation et tout, et vous dites: «Qu'un organisme soit
responsable de l'évaluation des collèges et qu'un système
d'accréditation soit instauré». Moi, j'aimerais que vous
nous parliez un petit peu plus de ce que vous entendez par l'évaluation
des collèges et un système d'accréditation au niveau des
collèges.
M. Marcoux: Actuellement, vous voyez que, pour les
collèges, l'évaluation que nous avons est faite par une revue,
une excellente revue qui est
L'actualité, mais nous croyions qu'il était
important qu'il y ait des critères objectifs et qu'un organisme externe,
évidemment pas le ministère lui-même, puisse évaluer
la performance des différents cégeps et même donc de
certains programmes, à la fois pour les étudiants, à la
fois également pour, je pense, le public. Et, de toute façon, si
on ne le fait pas, ça se fait indirectement. Vous savez, dans certains
cas, les universités, par exemple, semble-t-il, nous dit-on,
déjà font, au niveau de leur admission, des distinctions
subtiles, mais qui, finalement, sont une forme d'évaluation.
Je pense qu'il est important, si nous voulons augmenter la performance,
augmenter l'excellence, d'avoir, au niveau des institutions - et ça
existe ailleurs, vous savez - des mécanismes d'évaluation qui
sont faits par un organisme externe. Ça permet d'abord de voir ceux qui
sont les meilleurs, qui performent le mieux. Ça permet peut-être
aussi à ceux qui se sentent un peu moins bons de dire: Écoutez,
on va prendre des mesures et nous allons améliorer notre qualité.
Ça va servir, croyons-nous, à la fois les étudiants,
surtout premièrement, puis également la société de
façon générale, et les choses vont être beaucoup
plus claires.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. M. le
député de Sherbrooke.
M. Hamel: Merci, Mme la Présidente. On a parlé de
formation professionnelle, de stage, de financement. J'aimerais ça qu'on
touche un tout petit peu à la formation générale. Dans
votre mémoire, vous soulignez, avec pertinence d'ailleurs, qu'une
formation générale qui rend capable d'apprendre et de s'adapter
est plus importante que les connaissances . spécialisées, et vous
formulez trois recommandations: 4.1, 4.2 et 4.3. Vous dites à 4.2, entre
autres: Que les cours de philosophie soient intégrés à
l'intérieur d'un bloc obligatoire «d'humanités». M.
Girard, pourriez-vous expliquer davantage ce que vous entendez par ce bloc
«d'humanités»?
M. Marcoux: Je vais le demander à M. Girard qui a
déjà travaillé là-dessus.
M. Girard (Jacques): Ça me rappelle, effectivement, des
souvenirs.
M. Hamel: C'est ce que je pensais. Des voix: Ha, ha,
ha!
M. Girard (Jacques): Au fond, on se demande sérieusement
si les cours de philosophie tels qu'ils sont dispensés à l'heure
actuelle continuent d'avoir la même importance et s'il ne serait pas
préférable d'avoir un cours ou des cours qui remplaceraient ces
cours de philosophie, qui comprendraient des notions de philosophie, des
notions d'histoire, des notions de géographie: au fond, des cours de
formation générale permettant de saisir de façon certaine
le monde dans lequel on vit. Le mot «humanités» ici est
entendu au sens où on l'entend en anglais, «humanities», et
il nous paraît qu'en allant dans ce sens-là on ferait
vraisemblablement un pas dans la bonne direction, qu'on répondrait
à un besoin, et je pense qu'on répondrait aussi à des
attentes chez les étudiants.
M. Hamel: Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Hovington): Mme la ministre, en
conclusion.
Mme Robillard: Oui. En conclusion, je veux remercier les membres
des chambres de s'être préoccupés d'éducation. M.
Marcoux, je retiens le message que, oui, vous croyez toujours à la
formule des cégeps au Québec, que, oui, vous voulez des
changements. Mais, oui, les membres des chambres vont aussi donner un coup de
main concernant tous les changements qu'on a à faire au niveau des
cégeps et, de façon particulière, votre implication dans
l'accueil de nos stagiaires car, à certains égards, parfois on a
de la difficulté là à aller plus loin dans ce
domaine-là. Mais je retiens l'engagement de la Chambre à se
préoccuper et à passer à l'action de façon
concrète, j'ose espérer dans l'année qui vient, M.
Marcoux.
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup.
M. Marcoux: Je peux vous assurer, Mme la ministre, que c'est une
priorité pour nous et que nous allons mettre en oeuvre tout le support
que nous pouvons apporter, et également ce que j'appellerais la
conviction pour pouvoir orienter et pouvoir apporter des améliorations
à cet égard-là.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, au nom des membres
de la commission de l'éducation, je vous remercie d'être venus
nous présenter votre excellent mémoire. Bonne journée.
Et je demanderais à la Fédération étudiante
collégiale du Québec de bien vouloir venir prendre place pendant
que nous suspendons une minute pour saluer les chambres de commerce.
(Suspension de la séance à 10 h 29)
(Reprise à 10 h 36)
La Présidente (Mme Hovington): Je demanderais le silence
en arrière, s'il vous plaît. La commission de l'éducation
va reprendre ses travaux avec la Fédération étudiante
collégiale du Québec, représentée par M.
Frédéric Lapointe.
Fédération étudiante
collégiale du Québec (FECQ)
M. Lapointe (Frédéric): C'est ça, oui.
La Présidente (Mme Hovington): Bonjour.
M. Lapointe: Bonjour.
La Présidente (Mme Hovington): Voulez-vous nous
présenter vos adjoints peut-être, vos collaborateurs?
M. Lapointe: Alors, vous avez, à ma droite, M. Ugo Lippe,
qui est notre coordonnateur à la pédagogie de la
Fédération, et vous avez, à ma gauche, Lawrence Auger, qui
est attaché politique et membre du comité de rédaction du
mémoire.
La Présidente (Mme Hovington): C'est M. Lawrence.
Bonjour.
M. Auger (Lawrence): Bonjour.
La Présidente (Mme Hovington): Vous avez 20 minutes pour
nous présenter votre mémoire.
M. Lapointe: Je vous remercie. Je commencerai d'abord par vous
faire part de notre réaction à la tenue de cette commission
parlementaire. On a été, de prime abord, très favorables
à sa tenue, contrairement à certains intervenants
étudiants, pour la simple et bonne raison que c'était, pour nous,
l'occasion d'exprimer le point de vue des étudiants sur un ensemble de
questions qu'on jugeait importantes, à ce moment-là. Par la
suite, se penchant sur la question, on a résolu qu'il était
peut-être nécessaire d'effectuer une révision
intégrale du système d'éducation, ce qui est l'objet de
notre proposition 4, notamment, dans ce mémoire que nous vous
déposons aujourd'hui, qui est la version évidemment la plus
soignée.
Donc, vous connaissez tous un peu l'évolution du mouvement
étudiant. Je vous donne un peu d'information comme ça, je profite
de l'occasion. Durant les années soixante, il évoluait au rythme
de la Révolution tranquille; durant les années soixante-dix, le
mouvement étudiant avait des vues un peu plus révolutionnaires,
un peu plus déphasées. Or, ce que vous pouvez constater à
l'heure actuelle, c'est que les associations étudiantes, du moins la
FECQ, que je représente, et la FEUQ, au niveau universitaire, sont
très branchées sur le présent et offrent notamment des
services économiques, ce dont les étudiants ont ardemment
besoin.
Maintenant, je pense que c'est une nécessité, on va parler
un peu de méthodologie. Vous remarquerez qu'il n'y a pas de table des
matières dans ce mémoire. Néanmoins, nous avons
évidemment consulté l'ensemble de la littérature
pertinente sur le sujet et nous avons consulté les étudiants, de
Rouyn-Noranda à Baie-Comeau. Même si nous étions en
période estivale à ce moment-là, nous avons réussi
à rencontrer des étudiants, à faire des réunions de
groupe et à recueillir un certain nombre d'opinions des étudiants
du collégial, mais aussi des étudiants du secondaire, question de
voir ce que sont leurs attentes par rapport au collégial, et,
évidemment, des étudiants des universités pour faire un
peu un post mortem sur leur formation. Ce sont les gens qui, selon moi, sont
les mieux placés pour pouvoir juger de l'enseignement
collégial.
Donc, les sujets que nous traiterons, ils ne sont évidemment pas
aussi nombreux que ceux traités par le Conseil des collèges. Je
vous les présente comme ça, sommairement: il y aura
l'étudiant au collégial, l'étudiant d'aujourd'hui - c'est
un sujet assez intéressant; évidemment, la question
épineuse du financement; en troisième lieu, toute la
problématique autour de l'évaluation - ça fait beaucoup de
vagues; et la question du partage des responsabilités.
Donc, M. Ugo Lippe, qui est coordonnateur à la pédagogie,
je l'ai dit tantôt, présentera notre vision en ce qui a trait
à l'étudiant d'aujourd'hui au collégial.
M. Lippe (Ugo): O.K. Pour commencer, il faut dire que, dans un
système d'éducation, d'après moi et d'après nous,
le centre, c'est l'étudiant; la raison d'être d'un système
d'éducation, c'est de former l'étudiant pour demain. On peut voir
que les cégeps, ce n'est pas simplement un endroit pour apprendre ce
qu'on nous enseigne, comme des cours de philosophie, des cours de
français ou, encore, des choses plus concentrées, mais c'est
aussi un endroit pour apprendre à vivre en société, parce
que les cégeps deviennent presque une société, et on croit
que toute l'implication sociale qu'on amène les étudiants
à faire est primordiale. (10 h 40)
Bien entendu, on peut parier de ceux qui sont un petit peu
traîneux au cégep, mais on pense que le problème, c'est que
certains étudiants qui sont quand même traîneux ne
traînent pas nécessairement trop longtemps ou n'ont pas des
échecs si considérables que ça, étant donné
que... Bon, il y a l'article 33, et on est pour. C'est sûr que, des fois,
il y a des applications de l'article 33 qui pourraient être plus
serrées, mais, en général, je crois que ça
contribue à garder l'étudiant sur la bonne voie. Il y en a
toujours qui réussissent à se faufiler, comme dans tout
système.
Il y a des étudiants qui prennent plus de temps. Souvent, on peut
dire, on accuse le travail à l'extérieur. Pour l'étudiant,
travailler, c'est s'inscrire dans la société. Souvent, rendu
à cet âge-là, bon, bien, on a le goût d'avoir un
petit peu plus d'autonomie, puis aussi les parents payent de moins en moins.
Donc, veux veux pas,
il faut travailler. Et on arrive avec la proposition 5: «La FECQ
considère que le travail rémunéré est formateur et
parfois nécessaire.»
Nous sommes sûrs que l'étudiant... Il doit travailler, bon.
Il y en a certains dont les parents vont tout payer, ils vont payer même
leurs sorties. Mais il y en a d'autres qui doivent aller jusqu'à payer
leurs livres, et leurs parents refusent de payer tout. Ils disent: Si tu veux
étudier, travaille. Bon! Pour ça, l'étudiant n'a pas non
plus le droit au bien-être social ou à des choses comme ça
s'il n'a pas quitté les études. Puis ça amène des
fois certains étudiants à se remettre en question et à
dire: Je vais peut-être quitter pour un an ou deux pour mieux revenir
après et être eligible et être considéré comme
étant autonome.
Ce qui nous amène à la résolution 8: «La FECQ
réclame donc que le statut d'étudiant soit reconnu et que
l'âge ne soit pas un critère dans les implications tarifaires de
ce statut.» On peut voir, avec le transport en commun, que les
étudiants qui ont plus de 18 ans n'ont plus le tarif étudiant. Il
y a plusieurs autres domaines où on voit la même manifestation.
C'est-à-dire qu'on est considérés comme étant
étudiants... Lorsque c'est pour nous donner de l'argent, pour nous
donner des choses comme ça, donc, on ne nous en donne pas, et lorsque
c'est pour nous donner des rabais, là, nous ne sommes plus
étudiants.
Bon, nous croyons qu'il est inconcevable qu'un système de
prêts et bourses ne s'indexe pas, ou très peu. Les
étudiants doivent suivre les prix. Donc, quelqu'un qui ne vit qu'avec le
système de prêts et bourses et qui voit, d'année en
année, en dollars constants, réduire sa bourse, ce n'est pas
très, très bénéfique. Alors, on en arrive à
la recommandation 9: «La FECQ demande que soient indexées à
chaque année, au niveau minimum de l'indice des prix à la
consommation (IPC), les dépenses admises - transport, matériel,
subsistance, garderie, etc. - en vertu du régime d'aide
financière aux étudiants; également, que le MESS assure le
maintien ou l'augmentation de la proportion d'aide versée sous forme de
bourses aux étudiants.»
Il faut reconnaître aussi que les étudiants
réussissent mieux. C'est pourquoi on arrive avec la proposition 10:
«La FECQ recommande que le MESS établisse un programme de remise
de dette au niveau collégial sur la dette accumulée afin
d'inciter les étudiants des secteurs professionnels à terminer
leurs études dans les délais prescrits.» Un étudiant
qui aurait emprunté pour faire son cours en électrotechnique et
qui aurait réussi dans les délais prescrits pourrait se voir
remettre un certain pourcentage de son prêt. Ça l'encouragerait
à réussir dans les délais prescrits.
Aussi, il y a trop d'étudiants qui, comme on le disait tout
à l'heure, quittent les études collégiales - et
même, des fois, ça peut tarder jusqu'à l'universitaire -
pour pouvoir avoir droit à l'aide financière. Donc, on revient
à ce que l'on disait tout à l'heure, mais cette fois-ci pour la
proposition 11: «La FECQ exige que le MESS accorde le statut de
non-résident à tout étudiant qui quitte le domicile de ses
parents.»
Pour ce qui est de la proposition 12, on pourrait dire que certains
étudiants se retrouvent pris à la gorge à cause des
retards. On a déjà vu des étudiants qui recevaient leur
bourse d'automne après leur bourse de printemps. Donc, c'est des choses,
des fois, que les étudiants, des fois, ils tiennent là-dessus
pour pouvoir vivre pendant ce temps-là.
Puis, ensuite, pour la proposition 13, pour apporter des solutions au
régime de prêts et bourses, on pense que ce serait important de
mettre sur pied une commission d'enquête indépendante et
impartiale.
Pour ce qui est de ses responsabilités, pour éviter que
l'étudiant lâche son cours simplement parce qu'il est tanné
ou parce qu'il n'aime pas le professeur ou quoi que ce soit, nous
apprécions beaucoup la décision qui a été prise de
supprimer les abandons de cours. Ça a permis à des
étudiants de se réveiller et de se rendre compte que
c'était plus important que ça d'essayer de le réussir,
même si on n'a peut-être pas les notes pour passer au
début.
Il y a aussi un manque de motivation de la part des étudiants, et
on s'en inquiète beaucoup; il y a une proposition qui en traite. De
plus, on pense que l'étudiant doit s'impliquer de plus en plus. C'est
sûr que, non au détriment de ses études, mais ça le
forme comme citoyen pour plus tard. Alors, on propose, avec la 17, que la FECQ
s'engage à favoriser la conscience collective des étudiants et,
à cet égard, par son discours, ses actions et ses moyens.
La Présidente (Mme Hovington): Si vous voulez
accélérer, parce qu'il vous reste neuf minutes, si vous
voulez...
M. Lippe: Oui, exactement.
M. Lapointe: Oui, rapidement, on passe au deuxième
chapitre, pour ainsi dire, qui est en fait la partie III, qui est sur le
financement des collèges. Je ne vous ferai pas un récital de
toutes les diminutions de subventions et de toutes les coupures qui sont
arrivées au cours des dernières années. Vous siégez
sur cette commission, vous êtes au courant. Nous demandons
essentiellement, un peu à l'instar de la Fédération des
cégeps récemment, une compensation financière aux
institutions de l'ordre de 50 000 000 $, une plus grande fixation des taux
appliqués à la formule FABES, notamment en ce qui a trait aux
étudiants, aux... Comment ils appellent ça? Enfin, vous savez que
les institutions sont financées à coût d'étudiants,
sauf que, présentement, le gouvernement attend le nombre
d'étudiants et, après, fixe le taux, évidemment,
dans le but d'avoir une enveloppe fermée. Aussi, nous
suggérons de maintenir autour de 3 % du PIB la part du financement de
l'enseignement collégial, de façon à ce que l'enseignement
ne soit pas la proie des fluctuations budgétaires du gouvernement, voire
des grands cycles économiques. L'enseignement fait l'objet d'un choix de
société, et celui-ci doit se renouveler afin de faire justice aux
diverses générations qui se succèdent.
Évidemment, vous allez me dire: Le gouvernement n'a pas de fonds.
Évidemment, on ne propose pas d'aller les chercher dans la dette
publique puisque, finalement, c'est nous autres qui allons avoir à la
payer en bout de ligne. Non. Ce qu'on suggère, c'est: a) de hausser les
impôts en conséquence, et/ou de couper dans d'autres postes
budgétaires et, si ces postes budgétaires sont trop restreints,
eh bien! en c), on propose de rapatrier toutes les juridictions et tous les
impôts au Québec afin de procéder à une meilleure
priorisation en faveur de l'éducation.
Ce qui m'amène aussi aux alternatives de financement qui ne
toucheraient pas directement le gouvernement, du moins dans sa forme actuelle.
Il y a deux alternatives: il y a l'alternative entreprises et il y a
l'alternative étudiants. Ça va étonner certains, mais on
ne se prononce pas en faveur de l'imposition d'une taxe sur la masse salariale
pour financer l'enseignement collégial, notamment parce que les
entreprises sont théoriquement très taxées. Je dis
théoriquement, ce serait à vérifier, nous ne l'avons pas
fait. Et ensuite, parce que nous croyons que l'imposition d'une taxe sur la
masse salariale ou une quelconque taxe amènerait l'entreprise à
être beaucoup trop présente, par exemple, pour dorer la pilule de
la taxe, à être beaucoup trop présente dans la
définition notamment des programmes, des évaluations et ainsi de
suite.
Donc, nous ne souhaitons pas que le collégial soit calqué
sur l'entreprise avec des discours de valeur ajoutée et des choses comme
ça. Donc, nous ne nous prononçons pas en faveur d'une taxe sur la
masse salariale pour augmenter le financement du réseau. Par contre,
nous sommes pour toutes les formes directes et non coercitives de participation
financière des entreprises dans les cégeps. Bon, notamment, les
augmentations de stages en entreprise. Au dernier colloque de l'Institut
québécois des colloques étudiants, on avait
présenté une position qui allait dans le sens que les techniques
devaient faire beaucoup plus de formation et que l'acquisition de la
connaissance en ce qui a trait à la tâche à exécuter
devrait être laissée à l'entreprise puisque, de toute
façon, elle adapte ses employés. Il n'y a pas une formation qui
est adaptée parfaitement à une entreprise.
Évidemment, on exige le maintien de la gratuité scolaire
pour tout type d'étudiant qui en bénéficie
présentement et, en plus, on revendique le principe suivant,
c'est-à-dire que pour tous frais spéciaux perçus aux
étudiants, que préalablement il y ait entente administrative avec
l'association étudiante accréditée en vertu du principe
qui est dans la loi qui dit que l'enseignement collégial est gratuit. Il
y a évidemment un article qui permet les frais spéciaux, et vous
avez remarqué que, dernièrement, il y a explosion de frais
spéciaux, ce qui fait que, en pratique, c'est des frais de
scolarité déguisés. Donc, s'il y a à avoir des
frais pour maintenir certains services, bien, c'est aux étudiants
à dire lesquels ils veulent et ça, ça ne peut se faire que
par une participation administrative. (10 h 50)
Donc, évidemment, on parle d'accessibilité. C'est
l'accessibilité financière qui est en cause Aujourd'hui, vous
nous voyez, on est tous en complet-cravate, mais vous savez très bien
que dans le réseau il y a encore des gens qui ont le choix entre
l'épicerie de la semaine et les volumes dont ils ont besoin pour tel et
tel cours. Ces gens-là, vous ne les verrez pas nécessairement
passer devant vous, mais ils existent. Et, évidemment, le rapport Parent
parlait d'un effet psychologique, donc, nécessité de
démocratiser l'enseigement, donc, de rendre ça gratuit. C'est un
aspect qui est moins important présentement.
Il y a un autre aspect qui est très important, c'est que nous
croyons que l'imposition de frais de scolarité n'entraînerait pas
de ressources supplémentaires dans le réseau. Et je vous
ramène un peu à ce qui est arrivé au niveau des
universités lorsque les frais de scolarité ont été
imposés. On a remarqué qu'il y a eu un désengagement du
gouvernement par la suite, un désengagement qui était de l'ordre
de 30 000 000 $, si je me rappelle bien. Évidemment, il y a eu
réinjection d'un fonds de 15 000 000 $, mais n'empêche que
l'imposition de frais de scolarité ne fait que permettre le retrait du
gouvernement, à notre sens, ce qui est inacceptable.
De toute manière, l'enseignement collégial n'est pas
gratuit pour nous. Lorsqu'on choisit d'investir une année de notre vie
dans l'enseignement collégial, c'est une année de notre vie qu'on
ne passe pas, par exemple, à travailler entièrement. Des
années, on n'en a pas énormément, et, notamment, aussi,
lorsque les étudiants vont au collégial, ils utilisent des
services qui ont été financés, entre autres, par des
immobilisations qui ont été financées par la dette
publique qu'ils auront à payer plus tard.
Alors, moi, ce que je vous dis, c'est: si vous voulez qu'on ait les
moyens de payer cette fameuse dette publique qui sera énorme, et c'a
bien l'air que la population active risque d'aller en diminuant, compte tenu de
la dénatalité, donnez-nous au moins les moyens de pouvoir faire
face à ces problèmes. Donc, rapidement, c'est nos positions en ce
qui a trait au financement.
Maintenant, il y a une autre partie extrê-
mement importante, je la passe rapidement, c'est l'évaluation au
collégial. Dans nos consultations, on a remarqué qu'une
préoccupation très grande des étudiants, c'était la
valeur de leur diplôme. Ils passent deux ans, trois ans dans le
collège. Ils ne veulent pas que leur passage au collège soit
inutile. Donc, l'obtention du diplôme devrait consacrer la formation
qu'ils y ont reçue. Ce n'est pas toujours évident. Notamment,
certains programmes techniques ne sont pas reconnus par les entreprises et, au
niveau préuniversitaire, c'est encore plus lamentable. Dans certaines
universités, ils font repasser aux étudiants leurs cours du
collégial qui étaient considérés comme des
préalables. Notamment, en économie, ils exigent des
mathématiques, ils font repasser exactement les mêmes cours de
mathématiques. Quelque part, il n'y a pas reconnaissance des acquis du
collégial. Donc, pousser l'évaluation des apprentissages de
façon à garantir la valeur du diplôme.
Évidemment, c'est sur un plan plus local, mais je vous en fais
part, on dénonce vivement la pratique actuelle en matière de
révision de notes faisant en sorte que l'enseignant est juge et
jugé, parce qu'il siège sur le comité de révision
de notes, et nous considérons cela foncièrement inacceptable.
Bon, ça se justifie peut-être en vertu du principe de l'autonomie
professionnelle, de la liberté professorale. Nous ne croyons pas que ce
soit un principe suffisant pour passer au-delà de principes
légaux auxquels tout le monde accède, d'ailleurs.
La proposition 27, je passe rapidement là-dessus. La FECQ
réitère sa volonté de systématiser
l'évaluation des enseignements et non pas seulement des enseignants par
les étudiants. C'est une proposition connue. Je ne la
développerai pas. De toute façon, on a un avis sur la question
qui va être produit bientôt.
En ce qui a trait à l'évaluation des institutions, je
crois qu'on en parlait tantôt, la Fédération des
cégeps va en parler. On est aussi favorables à
l'évaluation des institutions par un organisme externe. Pour peu que cet
organisme soit composé notamment par des gens du monde de
l'éducation, pas nécessairement des gens du collégial pour
ne pas se juger soi-même, mais au moins par des gens du monde de
l'éducation, question qu'ils comprennent un peu la relation entre un
prof et un étudiant. Et, évidemment, je parlais du milieu
universitaire; c'est les gens les mieux placés, je pense, pour juger du
produit collégial.
Donc, voilà pour l'évaluation. Il y a un autre point
majeur dont on tient à vous parler, même si le temps file, c'est
la question du partage des responsabilités au collégial. À
cette fin, j'inviterai Lawrence Auger à présenter le point.
M. Auger: Vu le peu de temps qui nous est accordé, je vais
aller très rapidement. Donc, en ce qui concerne le partage des
responsabilités au collégial, en regard de la formation
préuniversitaire et fondamentale, la FECQ se prononce pour
l'approche-réseau, donc, pour une responsabilité de
l'État. Pour nous, l'approche-réseau favorise donc la
prédominance de l'État dans l'exercice du pouvoir en enseignement
collégial. Il détermine les contenus des programmes, embauche le
personnel et émet les diplômes.
En ce qui concerne l'enseignement technique, la FECQ propose l'autonomie
complète des institutions allant jusqu'à l'émission des
diplômes techniques institutionnels. L'approche-institution favorise
l'autonomie du collège en lui permettant de définir ses
programmes d'enseignement, d'embaucher ses enseignants et d'émettre ses
propres diplômes.
Nous croyons que la technique doit être revalorisée pour
attirer les 10 % de clientèle qui lui manquent pour cadrer avec ce que
le rapport Parent suggérait. L'autonomie complète des
institutions n'entraînerait pas trop de problèmes
d'évaluation du produit ou du diplôme. Les techniques,
étant des programmes terminaux, ne sont pas offerts dans tous les
collèges. Merci.
M. Lapointe: Donc, en conclusion, il y a évidemment des
aspects qui n'ont pas été traités par ce mémoire.
Nous avons résolu dans notre dernière proposition de produire un
mémoire, enfin un avis sur la Loi sur l'accréditation et le
financement des associations d'élèves ou d'étudiants, ce
qui est un peu notre code du travail, sur l'évaluation au
collégial, donc, peaufiner un peu plus notre position, puisque c'est une
question importante. La question du partage des responsabilités
collégiales poussées plus de l'avant. Aussi, fait
intéressant, dans notre mémoire est incluse la place des
collèges privés en enseignement collégial. Donc, on
considère, oui, que l'enseignement privé a une place au
Québec. Il perpétue notamment des cultures d'organisation aussi
particulières qu'intéressantes. Donc, on va produire un avis
là-dessus aussi et, évidemment, sur toute la problématique
de l'éducation permanente qui n'a été traitée qu'en
surface dans ce mémoire puisque nous n'étions pas en mesure,
nécessairement, d'étudier les phénomènes. Nous ne
représentons pas beaucoup d'adultes, nous représentons surtout
des étudiants du secteur régulier.
Il y a un aspect que...
La Présidente (Mme Hovington): Votre temps est
écoulé.
M. Lapointe: Donc, je vous remercie. Juste en finissant, les
points qui n'ont pas été traités, c'est notamment parce
que nous n'étions pas nécessairement d'accord; il n'y avait pas
consensus. Ce que vous voyez là-dedans, c'est un consensus, et il y a
des questions aussi qui
nécessitaient plus d'étude puisqu'on ne tient pas à
vous présenter des positions qui ne seraient pas nécessairement
conformes à nos étudiants et pas nécessairement
bonnes.
La Présidente (Mme Hovington): D'accord. Merci beaucoup.
Mme la ministre, vous avez la parole.
Mme Robillard: Merci, Mme la Présidente. M. Lapointe, quel
plaisir de vous voir à nouveau et quel plaisir de voir que la
Fédération étudiante collégiale s'est
penchée sur la question posée par cette commission parlementaire.
Je veux vous féliciter d'abord et avant tout pour votre implication dans
ce dossier et d'avoir pris le temps, malgré les vacances estivales comme
vous dites, de vraiment avoir consulté les étudiants qui
relèvent de votre Fédération. Je vois le sérieux de
la démarche qui a été entreprise par votre
Fédération. Je suis aussi heureuse de constater que vous avez
différentes recommandations à nous faire, des recommandations au
ministère, des recommandations aux collèges, mais vous ne vous en
êtes pas tenu non plus strictement à ces
recommandations-là. J'ai l'impression que vous avez aussi un message
pour les jeunes. Je ne sais pas si je l'ai bien décodé, et
j'aimerais ça vous en parier parce que, hier, nous avons eu le Conseil
permanent de la jeunesse qui nous parlait beaucoup du manque de motivation et
d'intérêt des jeunes, mais quant aux causes et aux remèdes,
on a eu de la difficulté à cerner ce qu'on pourrait faire
davantage.
J'ai été à la fois surprise et heureuse de
constater, dans votre mémoire, une de vos premières
recommandations, et j'aimerais vous entendre sur ça. Vous nous
décrivez trois types d'étudiants: l'étudiant 20-20-20 (20
heures d'étude, 20 heures de cours et plus de 20 heures de travail);
l'étudiant mou, l'étudiant qui est plutôt amorphe, peu
impliqué dans ses études, qui aime plutôt la
tranquillité qu'autre chose; et celui que vous qualifiez
d'intermédiaire, qui est très capable de faire face à ces
différents défis-là. La Fédération dit, je
pense: On aime mieux le troisième type, mais on constate que le premier
et le deuxième sont de plus en plus présents parmi les jeunes. Et
vous nous arrivez avec une recommandation très précise, la
recommandation 15 à la page 16 de votre mémoire, où vous
nous dites que vous vous inquiétez du peu d'effort consenti par les
jeunes dans leurs propres études. Parlez-nous donc un peu de ça,
M. Lapointe.
M. Lapointe: D'abord, ce qu'on constate aussi dans le
réseau, c'est que ces constats-là, qui sont un peu
négatifs, sont en train de se corriger lentement; du moins, c'est la
tendance qu'on remarque. Par exemple, il y a simplement quelques années,
vous n'auriez pas reçu de mémoire de la part d'étudiants
puisqu'ils étaient totalement démobilisés. Donc, ce qu'on
peut remarquer, c'est que même au niveau de l'implication politique, il y
a un très grand renouveau. Pour ce qui est de la proposition 15, nous
avons choisi d'être aussi autocritiques. Les étudiants, trop
souvent, ont reporté leurs problèmes sur les autres alors que les
solutions, ils les ont en eux.
Évidemment, les portraits qu'on a faits des étudiants sont
un peu sommaires, mais notre société de consommation,
effectivement, pousse les étudiants à être un peu des
super-étudiants, comme on parlait durant les années quatre-vingt
des super-femmes qui devaient s'occuper et du ménage et du travail et de
leur mari. L'étudiant mou est aussi un type d'étudiant auquel on
a à faire face beaucoup, comme association générale
d'étudiants, parce que si les étudiants sont, moins
qu'auparavant, mais s'ils sont très désabusés par rapport
à la politique, ils sont aussi, et c'est assez étonnant,
désabusés par rapport à leur propre... Donc, nous, on a
à faire face à cette très grande inertie. Cependant, je
suis très optimiste que nous réussirons à faire notre part
du travail, c'est-à-dire à réussir à conscientiser
ces étudiants-là au fil des années puisque, comme vous le
savez, il y a renouvellement des populations. (11 heures)
Je vous ramène aussi à la proposition 17 qu'on n'a pas lue
tantôt. La FECQ s'engage à favoriser la conscience collective,
oui, mais aussi on demande aux divers intervenants du monde de
l'éducation de commencer ou de continuer à user de leurs
discours, actions et moyens pour favoriser la conscience collective des
étudiants à cet égard et aussi leur responsabilité.
On parle beaucoup d'encadrement, mais on oublie trop souvent que l'encadrement,
c'est un peu une béquille au manque de responsabilité. Si nos
étudiants, soit par notre culture, soit par nos pratiques, par nos
actions, étaient suffisamment responsables, l'encadrement, en principe,
on n'en aurait pas besoin. L'encadrement est là surtout pour des gens
qui en ont besoin et, souvent, s'ils en ont besoin, c'est parce que leur niveau
de responsabilité n'est pas suffisamment élevé, et,
plutôt que de proposer des mesures d'encadrement, on se propose de
responsabiliser les étudiants. À cet égard-là, on a
l'intention de publiciser beaucoup le coût par année d'un
étudiant au collégial. Je pense que, si les étudiants
étaient conscients de ce qu'ils coûtent à la
société, ils s'y sentiraient beaucoup plus redevables, donc ils
étudieraient plus et chercheraient à faire connaître leur
savoir beaucoup plus, ce qui peut se faire très bien et ce qui aurait un
impact très positif.
Mme Robillard: Est-ce que vous avez d'autres moyens comme
ça? Vous venez de dire: La publication du coût. Vous dites: La
Fédération
va s'impliquer pour favoriser l'engagement des jeunes dans leurs
études. Est-ce que vous voyez d'autres moyens concrets?
M. Lapointe: Je pense que le discours politique, c'est quelque
chose qu'on néglige présentement et qui a beaucoup d'impact. On
dit que les jeunes sont désintéressés de la politique, par
exemple, mais, malheureusement, les discours ne sont pas nécessairement
aussi enflammés qu'ils l'étaient dans le temps. Donc, la
politique est peut-être moins intéressante à certains
égards. Mais on souhaite utiliser, oui, notre discours politique, et le
fait que ce soit nouveau, je crois, risque d'avoir un impact. Mais il y aura
aussi des actions qui sont, comment je pourrais dire, des non-actions qui
encourageraient les gens à poursuivre leurs études, puisque nous
ne poserons pas d'actions, et c'est ce que nous disons, nous ne poserons pas
d'actions de nature à ne pas favoriser l'engagement des étudiants
dans leurs études. Donc, loin de nous l'idée de suggérer
aux étudiants de boycotter leur enseignant en cas de problème ou
des choses comme ça. Au contraire, nous favorisons le libre cours des
activités pédagogiques et nous croyons en des moyens de pression,
notamment, qui sont beaucoup moins subversifs que ce que vous avez pu voir dans
le passé. Donc, favoriser l'engagement des étudiants dans leurs
études.
Mme Robillard: M. Lapointe, j'aimerais venir sur une de vos
recommandations, la 10, à la page 14, qui porte sur la remise de dette
au niveau collégial pour inciter les étudiants du secteur
technique à davantage terminer leurs études dans les temps
requis. Et je fais aussi référence à
l'énoncé qui a été fait par votre collègue
de droite sur toute la question des prêts et bourses. Ça me
soulève des points d'interrogation. Vous n'êtes pas sans savoir
que les derniers chiffres présentement au niveau des prêts et
bourses nous démontrent qu'environ 40 % des étudiants du
collégial ont accès aux prêts et bourses, donc 60 % n'y ont
pas accès étant donné fort possiblement les revenus des
parents, du conjoint ou des étudiants. Donc, 40 % ont accès aux
prêts et bourses, 60 % n'y ont pas accès. Là, vous me
faites une recommandation sur la remise de dette, de prêt. Alors, j'ai
deux questions. Quels seront les moyens incitatifs pour les jeunes qui n'ont
pas accès aux prêts et bourses et, deuxièmement, pourquoi
avez-vous limité votre recommandation strictement au secteur technique?
Qu'en est-il du secteur préuniversitaire?
M. Lapointe: Probablement parce qu'on a des recommandations qui
touchent l'ensemble de la formation générale qui chevauche un peu
le collégial et l'universitaire. Comme vous le savez, ça ne sert
pas à grand-chose de diplômer un étudiant, par exemple en
sciences, en sciences pures ou en sciences de la santé, s'il ne va pas
à l'université. Ce n'est pas un programme terminal. Une remise de
dette doit se faire, selon nous, en fonction d'un programme terminal. Donc, si
on a à vous présenter quelque chose en fonction du
général, du préuniversitaire et de l'universitaire, ce
serait quelque chose de global. Je pense que ça doit être
traité globalement. L'étudiant qui passe, par exemple, deux ans
au collégial et quatre ans pour faire un baccalauréat devrait
être traité, selon nous, sur le même pied
d'égalité qu'un étudiant qui fait trois ans de
collégial et trois ans de baccalauréat. Dans ce sens-là,
c'est difficile... En tout cas, pour nous, on l'a jugé comme ça.
C'est peut-être une erreur, mais on a jugé que, si une proposition
devait aller dans le sens général, ça devrait inscrire les
deux paliers de l'enseignement supérieur. C'est pour ça
d'ailleurs qu'on a suggéré - parce qu'on a fait face à ce
genre de problème là - une révision de l'ensemble du
système d'éducation. Si ça avait été le cas,
on aurait probablement été de l'avant avec une proposition dans
ce sens-là.
Pour ce qui est des autres étudiants, ceux qui n'ont pas
accès, donc vous parlez des 60 %, on mise surtout sur la
responsabilisation des étudiants, donc l'autocritique dont on vous fait
part déjà comme organisation puis qu'on souhaite promouvoir chez
les étudiants. Évidemment, nous sommes contre toute forme de
ticket modérateur car, selon nous - puis ça fait longtemps qu'on
le dit - c'est une incitation au décrochage. Dans le fond, on leur
indique: Vous êtes indésirables, vous avez manqué votre
coup, vous vous êtes réorientés, vous n'êtes pas
corrects dans votre démarche, donc on vous impose des frais et,
finalement, on veut que vous quittiez l'institution le plus vite possible sans
égard à la formation que vous vouliez y acquérir. Je veux
dire, moi, j'ai un de mes officiers qui a fait deux ans de sciences pures et
qui fait une technique chimique. Est-ce à dire que ses trois ans de
technique, parce qu'il a commencé en sciences pures, il devrait les
payer? Je ne pense pas, parce que, entre autres, des techniciens, on en a
besoin. Donc, ce genre de mesure là, qui est plus coercitive
qu'incitative, non, on ne marche pas là-dedans. Puis, évidemment,
on se prononce contre avec beaucoup de véhémence.
Mme Robillard: Bon. Abordons le dossier de l'évaluation au
collégial. Je pense que vous nous donnez des messages très clairs
au niveau de l'évaluation des apprentissages, l'évaluation des
enseignements et l'évaluation des institutions. La sorte
d'évaluation qui se pratique le plus présentement dans le
réseau, nous le savons tous, c'est l'évaluation des
apprentissages. Vous nous arrivez avec une recommandation en disant: Pour que
la valeur du diplôme soit encore plus garantie, on voudrait une
évaluation des apprentissages plus poussée. Pourriez-vous
m'expliquer ça? Qu'est-ce que vous voulez dire exactement?
M. Lapointe: Évidemment, je ne m'avancerai pas trop parce
qu'on va produire un avis spécifique là-dessus, puis c'est des
questions qui sont et délicates et très, très, très
difficiles à traiter. Ce n'est pas pour rien que le réseau ne
s'est pas doté d'un mécanisme d'évaluation des
apprentissages à sa fondation, parce que ce n'était pas
nécessairement évident. Donc, nous, on souhaite étudier la
question beaucoup plus avant de vous émettre un avis spécifique.
Mais je vous mentionnerai notamment que l'évaluation des apprentissages,
c'est une responsabilité qui est très départementale, dans
le sens que c'est le département qui, collectivement, se définit
des politiques, bon, en suivant les lignes de conduite du plan de
développement, de l'administration, de sa politique institutionnelle, et
ainsi de suite. Sauf que ce qu'on remarque dans la pratique, c'est qu'il y a
des enseignants qui ne le font pas, puisqu'il y a des départements qui
ne font pas appliquer la politique d'évaluation des apprentissages.
Donc, vis-à-vis de ce problème-là puis vis-à-vis du
fait que le diplôme n'est pas nécessairement très reconnu
au niveau universitaire, du moins dans certaines universités, nous
autres, on se dit: II faudrait pousser plus. Est-ce que pousser plus ça
veut dire un réaménagement des responsabilités? On verra.
Est-ce que pousser plus, c'est avoir non pas des politiques institutionnelles,
mais des politiques gouvernementales? On verra. Est-ce que pousser plus
ça signifie qu'il y a des examens panquébécois au niveau,
notamment, des sciences préuniversitaires? On verra. On ne s'est pas
prononcés spécifiquement sur ces aspects-là, mais,
évidemment, on va les envisager très sérieusement.
Mme Robillard: Parlons donc du partage des
responsabilités. Vous m'avez surprise en divisant l'approche
réseau, l'approche institution, d'un côté le secteur
préuniversitaire, de l'autre côté le secteur technique.
L'approche réseau, pour vous, c'est le secteur préuniversitaire,
où tout doit encore, je pense, demeurer sous la responsabilité de
l'État - je pense que c'est le message de fond - et l'approche
institution pour le secteur technique, donc l'autonomie complète de ce
côté-là jusqu'à l'émission des
diplômes, si j'ai bien saisi. Qu'est-ce qui fait une si grande
distinction dans vos approches à cause des deux secteurs qui sont
là?
M. Lapointe: D'accord. Je suis bien content de pouvoir
préciser un peu la question. Tantôt, on n'avait pas beaucoup de
temps, on a procédé rapidement. D'abord, le
préuniversitaire, sa fonction, c'est d'amener des gens à
l'université. Ça semble être une lapalissade, mais c'est
pour ça, et de façon égale, donc pour fins
d'accessibilité. Si, par exemple, on laissait aux institutions le soin
d'avoir plus de marge de manoeuvre puis d'être beaucoup plus
différentes, je me demande bien comment l'Université de
Montréal pourrait juger de la validité du diplôme de
sciences humaines à Baie-Comeau versus celui de Boîs-de-Boulogne,
si l'État n'était pas là pour cautionner les enseignements
par l'émission du diplôme. (11 h 10)
Aussi, au niveau des contenus, nous souhaitons qu'il y ait beaucoup plus
de contrôle gouvernemental. Présentement, O.K., les institutions
ont de quoi se donner une couleur locale. On appelle ça comme ça,
ça me fait bien rire. Mais c'est souvent ce qui fait en sorte qu'au
niveau de l'université les universités voient un étudiant
et se demandent ce qu'il a appris. Alors, ils font des cours de rattrapage pour
mettre tout le monde au même niveau. C'est que l'étudiant qui a
suivi tous ces cours-là et qui les a bien passés se dit:
Qu'est-ce que je fais ici? Je perds mon temps. Donc, pour les fins de
reconnaissance des diplômes, nous croyons que ça doit rester une
responsabilité d'État et que cette
responsabilité-là doit être élargie puisqu'on
constate présentement que, même si c'est une responsabilité
d'État, il y a encore des problèmes.
Et, évidemment, le programme technique est un programme terminal,
un peu à la façon d'un baccalauréat. Il y a plusieurs
programmes techniques qui ne s'offrent que dans certaines institutions. Je
dirai que, notamment, on représente les étudiants de
l'École nationale d'aérotechnique qui ont des programmes qui ne
s'offrent que là. Déjà, en pratique, c'est des
diplômes d'État, mais il y a juste une institution. C'est
institutionnel, sauf qu'ils n'ont pas nécessairement toute la marge de
manoeuvre qu'ils souhaiteraient pour pouvoir notamment adapter leurs
programmes, les faire fonctionner avec le milieu entrepreneurial, et ainsi de
suite, ce qu'on favorise au niveau technique.
Donc, l'émission de diplômes par les collèges, dans
les collèges, et une plus grande diversité au niveau des
programmes. Évidemment, l'organisme externe d'évaluation jugera
toujours de la pertinence de certains programmes offerts, mais pour s'adapter
à la technologie, puis aussi pour motiver les institutions à
mettre l'emphase sur ce qui va les distinguer... C'est-à-dire qu'en
enseignement technique, au lieu de mettre l'emphase sur les sciences pures,
peut-être qu'on va se ramasser avec des évaluations qui vont
être moins en fonction des sciences pures, ce qui dévalorise
certains collèges, et plus en fonction de l'enseignement technique. Et
peut-être que les étudiants, parce que l'enseignement technique
aura plus de visibilité, iront un peu plus dans cette voie.
Je crois qu'on n'a pas vu les mêmes problèmes qu'avec le
préuniversitaire, dans le sens qu'il n'y aura pas 48 diplômes de
sciences infirmières, par exemple, même si elles se donnent un peu
partout. De toute façon, c'est régi par l'Ordre des
infirmières. Donc, il y a quand même des domaines qui vont rester
très, très centralisés.
mais pas nécessairement par l'État, plus par les
corporations professionnelles.
Si on prend la question, par exemple, de l'informatique, qui s'offre
à peu près partout, on sait pourquoi elle s'offre partout: c'est
parce que toutes les institutions veulent avoir des laboratoires
d'informatique. On se pose la question, à savoir si c'est
justifié qu'à Jonquière et à Chicoutimi il y ait
deux programmes d'informatique. Il y aurait peut-être place pour de la
rationalisation à certains endroits, évidemment, sans mettre en
cause l'accessibilité aux études techniques, ce qui ferait en
sorte que seuls les gens des grands centres auraient accès à de
bons programmes. Donc, ça va un peu dans ce sens-là: revitaliser
l'enseignement technique par l'initiative des institutions.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. M. le
député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron (AbHibi-Ouest): Oui, je voudrais saluer de
façon cordiale M. Auger et M. Lippe, et d'une façon
particulière M. Lapointe, qui est un jeune concitoyen
émérite de l'Abitibi-Témis-camingue. Alors, salut, M.
Lapointe, plus cordialement que les autres.
D'entrée de jeu, je serais porté à dire: Un
mémoire qui cite le critique de l'Opposition officielle doit être
pris au sérieux, mais ça ne ferait pas sérieux. Alors, ce
n'est pas pour ça que je dis que votre mémoire est
sérieux. Sincèrement, je pense qu'un mémoire qui aborde le
financement collégial, qui aborde l'évaluation au sens large -
parce que vous l'avez précisé d'une façon assez large - le
partage des responsabilités, qui parle du coeur du débat - parce
que je pense que vous avez bien fait d'insister, le coeur du débat,
ça doit être l'étudiant; le coeur du débat, quand
bien même on regarderait ce qu'on veut dans les études
collégiales, si on ne parle pas un peu plus des étudiants et quoi
faire pour telle affaire, telle affaire, et si on ne prend pas le temps de le
faire pendant trois semaines, quatre semaines... donc, le coeur du
débat, c'est important - et qui termine - je parle de votre
mémoire - avec 34 recommandations, je pense qu'on doit le prendre au
sérieux, et je vous félicite sincèrement de l'avoir fait.
Il y a là 34 recommandations sur lesquelles il serait important, nous,
de nous faire une opinion, et vous l'avez fait, comme Mme la ministre le
mentionnait tantôt, d'une façon assez large. Vous l'avez fait
également pour vous autres parce que, quand on regarde ça, il y a
de quoi aussi à analyser chez vous, dans votre propre cour, et je trouve
ça sage, rafraîchissant et intéressant. Merci.
J'ai quelques questions, bien sûr, à vous poser. J'aurais
pu dire aussi, pour faire un peu d'humour, qu'à la page 21 vous n'auriez
pas eu de problème avec le C du rapatriement des impôts si vous
l'aviez mis en premier. Si vous aviez mis ça comme A, ça aurait
éliminé les deux autres. Vous n'auriez plus eu besoin d'un B et
d'un C, mais, ça, ce n'est pas grave.
Première question que je voudrais vous poser, c'est que vous
parlez de l'évaluation générale et, à un moment
donné, vous portez un jugement assez sévère sur ce qui va
être possiblement un élément qu'il va falloir discuter
sérieusement, qui est le fameux département ou l'assemblée
départementale. Je crois que l'assemblée départementale
est plus une structure de l'université, tandis qu'au collège on
parle du département. Mais, indépendamment de ça, vous
dites ceci: «C'est une structure inefficace». Vous concluez, vous
parlez de «l'inefficacité flagrante de la structure
départementale». Alors, moi, j'aimerais ça que vous soyez
plus précis. Pourquoi portez-vous ce jugement-là? Pensez-vous que
c'est une structure qui doit demeurer et pensez-vous qu'on est capable de
l'améliorer?
M. Lapointe: Effectivement, je crois qu'on peut
l'améliorer. Remarquez que ce qu'on dit, c'est qu'on constate
l'inefficacité flagrante dans maintes responsabilités et à
maintes occasions. Alors, des occasions, on en a dans notre vécu. Je
vous citerai quelques exemples que j'ai connus personnellement au cégep
de l'Abitibi-Témis-camingue, au moment où j'y étais. Un
très gros département de français avait la composition
suivante: 33 % d'enseignants qui étaient très bons et qui
favorisaient l'évaluation et un contrôle très serré
de ce qu'ils enseignaient; 33 % de très bons enseignants, mais qui ne
voulaient pas qu'il y ait de contrôle trop coer-citif et qui
prônaient la liberté professionnelle à tout rompre; et 33 %
d'enseignants qui ne faisaient absolument rien, du moins de l'avis des
étudiants. Or, ce qui arrive, lorsqu'on veut discuter avec ces
départements-là et appliquer des politiques plus
sévères et des enseignements substantiels, c'est qu'on se fait
répondre, par exemple, que «dans la vie, il faut être
capable de vivre avec l'incompétence». Donc, moi, je me dis, par
rapport à ça - c'est quand même un gros département,
un département important, celui du français, et ça s'est
répété ailleurs - qu'il y a un problème.
Il y a un autre problème aussi, et, à ce moment-là,
ce n'est pas tant la faute du département ou des gens qui travaillent
à l'intérieur comme de son pouvoir. Vous savez que les
départements exigent les plans de cours des enseignants et qu'ils
doivent vérifier un peu ce qui se donne dans les classes, ce qui,
évidemment, ne se fait pas dans tous les cas. Je vous cite l'exemple du
département de psychologie, encore du cégep de
l'Abitibi-Témiscamingue - je vous les cite de mémoire, il y en a
peut-être d'autres qui pourront en amener. Il y avait un enseignant qui
ne suivait pas, mais alors là pas du tout le cahier de l'enseignement
collégial. Il donnait un cours qui était très libertin,
qui, en
soi, n'était peut-être pas mauvais, mais qui n'était
pas ce qu'il s'était engagé à enseigner. Or, le
département, malheureusement, n'avait aucun recours, même s'il
l'avait souhaité, pour ramener à l'ordre cet enseignant. Donc, il
y a quelque part un problème. Soit que le département n'a pas
assez de dents, soit qu'il ne s'en sert pas lorsqu'il en a.
Nous croyons aussi - on n'en parle pas là-dedans, mais on va en
parler dans le partage des responsabilités et dans l'évaluation -
que les départements sont strictement, oui, des structures où il
y a des enseignants, mais aussi il s'y prend des décisions
extrêmement importantes au sens de la pédagogie et, pour citer un
certain président français: «La guerre est trop importante
pour laisser ça au strict militaire». Eh bien, je crois que la
pédagogie est aussi trop importante pour laisser ça strictement
aux enseignants. Donc, c'est aussi dans ce sens-là qu'on prône, au
niveau de la place de l'étudiant dans l'institution, que la commission
pédagogique soit décisionnelle et qu'il y ait plus
d'étudiants et probablement qu'un oeil externe au sein des
départements, ça ne ferait pas nécessairement tort pour
que les responsabilités qui leur sont confiées par la convention
collective soient beaucoup plus appliquées.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Mais vous connaissez bien ce
milieu-là. Est-ce que vous croyez qu'effectivement les jeunes auraient
assez de conviction et de capacité de convaincre l'équipe
professorale d'apporter ces modifications-là?
M. Lippe: Moi, actuellement, je siège sur la commission
pédagogique au collège Édouard-Montpetit. Ce n'est pas
décisionnel, sauf que ça arrive souvent... Même si les gens
qui y siègent ont beaucoup plus d'expérience que nous - nous, on
y passe au maximum un an, des fois un petit peu plus - on réussit quand
même à faire valoir notre point de vue, et je crois qu'en
général ils sont assez conscients qu'ils sont là pour
l'étudiant; sans étudiants, ils n'ont pas de travail ni l'un ni
l'autre. Alors, je pense que c'est possible pour un groupe d'étudiants
de pouvoir s'impliquer et influencer.
M. Lapointe: Pour revenir sur le département, rapidement,
effectivement, on s'est penchés sur la question, à la commission
pédagogique, et ils sont arrivés à la conclusion que, si,
oui, on était prêts à se battre et à se
défendre en commission pédagogique, même
décisionnelle - et c'est pour ça que ce n'est pas dans le
mémoire - les étudiants n'avaient pas nécessairement
acquis un certain niveau d'implication et de responsabilité pour
s'impliquer au niveau des départements. Mais on constate, par exemple,
que, dans le secteur technique, il y a beaucoup d'interaction entre les
étudiants et les ensei- gnants. Certains diront que c'est parce qu'il
n'y a pas beaucoup d'étudiants par rapport aux enseignants. D'autres
diront que c'est parce que l'approche programme est beaucoup plus
poussée et que la vision est plus globale, ce n'est pas disciplinaire.
Toutes ces hypothèses-là, toutes ces propositions qu'on pourra
faire apparaîtront plus tard, malheureusement, dans le débat.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Sur la question de
l'évaluation par rapport a la valeur des diplômes, est-ce que vous
croyez que le moment serait venu d'envisager des examens nationaux? Est-ce que
vous êtes pour ou contre les examens nationaux? (11 h 20)
M. Auger: La commission pédagogique de notre
Fédération s'est penchée sur le sujet. Puis, la raison
pourquoi on n'a pas recommandé la tenue d'examens nationaux, c'est parce
qu'il y avait beaucoup trop de division. Certains y étaient favorables,
d'autres non. Donc, avec un avis ultérieur, on devrait éclairer
la question.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Je sais qu'il y a des divisions
là-dessus. Mais l'essentiel, en deux phrases, des arguments, c'est quoi?
Pourquoi il y a tant de division que ça? C'est parce que vous avez peur
d'un rangement défavorable par la suite, c'est quoi?
M. Auger: Certains disent que, par la tenue d'examens nationaux,
la liberté professorale, le contenu un petit peu plus individuel des
cours chez certains professeurs pourrait être mis de côté.
Donc, c'est l'argument.
M. Lapointe: Aussi, on constate les problèmes au
secondaire, par exemple...
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Oui.
M. Lapointe: ...que les institutions écrément leurs
étudiants avant qu'ils se présentent à l'examen pour mieux
figurer dans le classement de L'actualité.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Oui. Vous avez une recommandation qui
est forte, qui est importante, qui est même un peu grosse concernant...
Pas grosse en termes que je ne l'accepte pas, mais, je veux dire, il doit y
avoir des problèmes majeurs pour exiger une commission d'enquête.
C'est la recommandation 13. Moi, je suis resté surpris. Vous dites:
Recommande la mise sur pied d'une commission d'enquête
indépendante et impartiale. Donc, c'est lourd comme moyen, c'est majeur
comme moyen, c'est pesant comme instance. Habituellement, c'est parce qu'il y a
des gros problèmes. Est-ce à dire qu'il y a tant de
problèmes que ça concrètement, au niveau de l'aide
financière, puisque vous souhaitez qu'elle porte là-dessus? Moi,
je sais que la
réforme de l'aide financière n'a pas donné tous les
résultats escomptés. Mais, globalement - je porte un jugement,
puis corrigez-le, on est ici pour ça là - moi, je pensais
qu'effectivement, quand même, il n'y avait pas tant de lacunes que
ça. Il y en a. Tous les jours, je fais du bureau de comté et j'ai
des demandes de révision de ci puis de ça au niveau de l'aide
financière aux étudiants. Mais, dans l'ensemble, il
m'apparaissait que c'étaient des modifications qui avaient donné
les résultats escomptés globalement. Ça ne semble pas le
cas. Pourquoi?
M. Lapointe: En fait, évidemment, si l'on compare avec les
autres systèmes qui existent sur la planète, on a probablement un
système qui est parmi - je n'ai pas peur de le dire - les meilleurs.
Ceci dit, il est toujours moins bon pour ceux qui le vivent. Cette proposition
est l'objet de la préoccupation très grande des étudiants
par rapport aux problèmes qu'on vous a cités
préalablement. Parce que ce sont strictement les étudiants qui
vivent ces problèmes-là. Évidemment, les fonctionnaires
qui émettent les chèques, la classe politique n'a pas
nécessairement un regard très, très éclairé
sur ces questions-là. C'est dans ce sens-là que les
étudiants nous ont proposé de vous suggérer ça, de
façon à ce que vous ayez un portrait vraiment fidèle de ce
qui se passe.
Déjà, il y a des initiatives étudiantes qui vont
dans ce sens-là. Nous avons, au niveau de notre
confédération avec la FEUQ, une commission qui travaille
strictement là-dessus. Je crois aussi que l'ANEEQ, qui est
évidemment notre regroupement concurrent, en ont une depuis, je pense,
depuis 17 ans, qui se promène supposé-ment. Donc, vous voyez, les
étudiants... Il y a un besoin. Ils ont besoin d'exprimer leurs
problèmes. Ils pensent que, par un moyen comme celui-là, ils
pourront le faire.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Merci beaucoup. M. Lapointe, il va
sûrement être question au cours de nos échanges... Et
là, même si Mme Gruda, ce matin, a fait un editorial dans La
Presse disant qu'elle espère que cette commission va parler d'autres
choses que des cours de philo et de physique, je ne suis pas inquiet. On va
parler d'autres choses que ça. C'est clair qu'il y a des questions
importantes, mais il faut toujours atterrir dans le concret pareil. À un
moment donné, il faut atterrir pratiquement. Or, c'est sûr, je
pense, qu'il faut revoir le contenu de la formation dite de base ou
fondamentale, parce que tout le monde nous dit que ce n'est pas
réaliste, ce n'est pas adapté, puis il me semble que ça
fait partie du débat que nous devons faire. Vous, avez-vous un avis sur
les cours de philo et les cours d'éducation physique?
Concrètement, qu'est-ce que vous en pensez? On garde les cours de
philosophie au niveau collégial en 1992 ou on n'en garde pas, ou moins?
On garde les cours d'éducation physique ou on n'en garde pas, ou moins?
C'est quoi votre point de vue?
M. Lapointe: Ce qu'on constate au niveau de la philosophie...
Bon. Vous constatez évidemment qu'on n'en a pas parlé dans notre
mémoire. Au niveau des cours de philosophie, les étudiants nous
disent généralement qu'il y en a toujours deux sur quatre qui
leur sont utiles. Sauf que ce n'est jamais les deux mêmes! Donc, c'est
difficile de se dire qu'en en enlevant deux on va régler le
problème. Évidemment, sur cette question, on était
très divisés. Il y a à peu près autant d'opinions
qu'il y a d'étudiants sur le contenu des cours. C'est un sujet
extrêmement lourd et sur lequel il faut réfléchir
très longuement. Je pense que, si le Conseil des collèges a mis
deux ans de consultation et de réflexion pour se prononcer avec
pertinence sur le sujet, je crois qu'il aurait été assez
irresponsable de notre part de se réunir dans un bar puis de
réinventer l'enseignement collégial au niveau de son contenu.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Non, non, vous n'allez pas là,
voyons donc! Vous n'allez pas là, voyons donc!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lapointe: Donc, nous allons évidemment travailler sur
la question, mais nous souhaitons travailler de façon beaucoup plus
réfléchie. Vous êtes conscients aussi de la
difficulté pour des étudiants qui reçoivent l'enseignement
de comparer cet enseignement avec autre chose, donc d'avoir un peu plus de
perspective, et surtout de le tester. Il faudrait peut-être aller voir
beaucoup plus du côté des universitaires qui pourraient juger un
peu de la qualité de leur formation puisqu'ils ont à la
confronter avec d'autres apprentissages, la nécessité d'autres
apprentissages ou avec des gens, par exemple, des techniques sur le
marché du travail.
Ce qu'on constate, par exemple, c'est qu'au niveau des étudiants
techniques leur formation est souvent inadéquate, leur formation pour ce
qui est de la tâche. C'est pour ça qu'on proposait tantôt
que la tâche soit beaucoup plus apprise en entreprise, entre autres.
Mais, sur la question des contenus de cours, on est divisés et on a
besoin de réfléchir beaucoup plus sur la question.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): En tout cas. si jamais vous aviez des
lumières et que votre réflexion vous conduisait, à un
moment donné, à conclure, parce que je sais que ce n'est pas
facile, sincèrement là, mais il me semble que là-dessus,
compte tenu de... La plage de cours ne peut pas être universelle, la
plage de cours obligatoire et fondamentale qu'on appelle la
formation de base. Donc, il va falloir, à un moment donné,
convenir d'un contenu. Ou bien on modifie et on adapte, ce que plusieurs
souhaitent... Et, moi, je suis de cette école-là. Oui, il faut
revoir. En 1992, je pense qu'il est important de réviser les contenus de
formation qu'on a retenus au démarrage des collèges. On ne peut
pas tout placer dans la formation de base. Et, en conséquence, il faut
faire des choix et je pense qu'il va falloir requestionner certains choix, et
ceux qui vont l'être le plus... Je ne dis pas qu'il n'y a pas d'autres
choix à faire, mais, comme ça fait partie de la discussion, et
vous avez été bien honnêtes en disant: Oui, on en parle et
c'est divisé, si jamais vos divisions se terminaient par une conclusion,
j'aimerais ça que vous nous en saisissiez.
Autre question que je voudrais poser, toujours parce que le temps file.
Que le financement des collèges soit inadéquat, oui, dans la
logique de tous les autres, dans le sens de toutes les autres instances parce
qu'il y a eu des coupures, et ainsi de suite. Mais, j'étais content que
vous souligniez avec pertinence, je pense, 8, 9, 10 cégeps qui donnent
le cours d'informatique lorsqu'on pourrait peut-être, à cinq rues
plus loin, entre un autre cégep, prendre le cours d'informatique. Quand
on sait les coûts que ça peut représenter, je ne trouve pas
que c'est bien logique. Et, avec 140 programmes - et certains m'ont dit que,
dans certains collèges, il y en a 150 - est-ce que vous ne croyez pas
que le moment est venu d'être plus sélectifs en termes de
programmes? Et est-ce qu'il est toujours requis que l'État
québécois offre tant de programmes, surtout de même nature,
quand on sait le lien direct entre l'offre de cours et la facture? Et, avec le
dégagement d'argent que ça pourrait créer s'il y avait une
meilleure rationalisation, est-ce que vous ne trouvez pas qu'on pourrait
trouver là vos 50 000 000 $? Que j'aimerais ça qu'en une phrase
vous me disiez où vous l'avez pris! Pourquoi 50 000 000 $? Pourquoi pas
100 000 000 $? Pourquoi pas 80 000 000 $? Qu'est-ce qui vous fait arrêter
sur le chiffre 50 000 000 $?
M. Lapointe: Bon, rapidement, je pense que c'était l'objet
d'une recommandation de la Fédération des cégeps, une
recommandation récente. C'était de l'ordre, je crois, de 48 000
000 $. Donc, on a arrondi pour que ça frappe un peu plus l'imaginaire,
quoi.
Pour ce qui est de votre question, au niveau des techniques,
évidemment, dans la mesure où ça ne constitue pas une
barrière à l'accessibilité géographique... Vous
savez, par exemple, que le campus d'Amos, qui est dans votre comté,
offre très peu de techniques, ce qui fart que les étudiants de
votre comté s'en vont pratiquement tous en pré-universitaire, ce
qui est un problème puisque, après, ils sont destinés
à aller à l'extérieur, ils ne peuvent pas entrer sur le
marché du travail directement. Donc, oui, si on parle de
Jonquière, Chicoutimi...
M. Gendron (Abrtibi-Ouest): C'est un beau cas de comté. Je
vous remercie de m'aider.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lapointe: Donc, évidemment, si on parle de deux villes
adjacentes ou de la grande région de Montréal, oui, il y a de la
place pour de l'amélioration, mais il ne faut surtout pas toucher
à l'accessibilité géographique.
J'aimerais revenir sur ce que vous disiez tantôt: Si vous avez des
consensus, bon, faites-nous-en part. Je peux vous relever quelques discussions
qui étaient intéressantes. Pour l'éducation physique,
notamment, il y avait quand même beaucoup de gens qui étaient en
faveur de diminuer l'importance de l'éducation physique. Mais, à
la lumière de l'impact que ça aurait sur, notamment, les
installations sportives, qui sont aussi très coûteuses, on s'est
dit: À la limite, ça va nous faire perdre un peu de notre
richesse institutionnelle en termes d'équipements. Parce que, si on
enlève de l'importance à ça, évidemment, on accorde
moins de budget, les installations sont plus vétustés, et ainsi
de suite.
Donc, si on ne s'est pas prononcés en faveur de ça, c'est
surtout pour cet aspect-là. Vous n'êtes pas sans savoir, par
exemple, qu'à l'École nationale d'aérotechnique ils
convertissent les gymnases en salles de classe, entre autres parce qu'ils n'ont
pas de place, mais aussi parce que l'éducation physique perd un peu de
terrain. Donc, on a des craintes par rapport à ça.
L'autre aspect, c'était les cours complémentaires. On
avait beaucoup d'associations qui argumentaient que ces cours-là, d'une
façon générale, ne contribuent pas nécessairement
tout à fait à la préparation, du moins
pré-universitaire de l'étudiant. Évidemment, elle permet
d'explorer son champ d'intérêts et certains trouvent ça
pratique puisque, par exemple, on fait la promotion du cours Implication
sociale. Vous allez dire qu'on prêche pour notre classe, mais parfois il
faut le faire. (11 h 30)
II y a aussi un autre aspect. Si je pense au Conseil des
collèges, les langues. On parle de l'enseignement, dans le Conseil des
collèges, des langues modernes. On tient mordicus à ça.
L'imposition de l'anglais obligatoire au collégial, on ne trouve pas
ça acceptable. C'est le travail du secondaire et, à la limite,
d'une portion du primaire. Ce qu'on devrait apprendre au collégial,
c'est d'autres langues modernes, de façon à ce qu'on ne soit pas
strictement bilingues, mais bien polyglottes. Il y a des pays qui mettent
l'emphase là-dessus et ça leur permet d'être beaucoup plus
ouverts sur le monde. Je pense qu'il est temps qu'on le fasse, puis qu'on ne
mette pas seulement l'emphase sur l'anglais.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): M. Lapointe, je veux tout simplement
vous dire merci. Puis une chose est certaine, à vous entendre, ce n'est
pas tous les cégeps qui ne développent pas certaines
habiletés langagières. Merci beaucoup.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lapointe: C'est moi qui vous remercie.
La Présidente (Mme Hovington): En conclusion, Mme la
ministre.
Mme Robillard: M. Lapointe, merci de votre collaboration aux
travaux de cette commission. Je vous encouragerais à aller plus loin
dans certains sujets; vous les avez mentionnés vous-même. Il est
très clair qu'il faut des changements au niveau de l'ordre
collégial, changements que nous aurons à décider suite
à cette commission parlementaire. Donc, si vous avez des avis
supplémentaires à fournir à la ministre, je vous
encouragerais à accélérer vos travaux sur certains
sujets.
Maintenant, je me permettrai de dire aussi que, au niveau de
l'éventail des programmes qui sont offerts et de la préoccupation
que vous avez sur peut-être la duplication de certains programmes avec
des collèges qui sont rapprochés l'un de l'autre, je voudrais
vous dire quand même qu'il y a au moins 75 % de nos programmes techniques
qui se donnent dans quatre collèges et moins dans toute la province.
Alors, la problématique n'est quand même pas si globale que
ça et, contrairement à mon collègue de l'Opposition, moi,
je ne connais aucun collège au Québec qui donne 150 programmes de
formation technique. Au maximum, à ma connaissance, c'est autour de 20,
au gros maximum. Alors, dans ce sens-là, je pense qu'il faut regarder
ça en perspective.
Encore une fois...
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Dans l'ensemble du réseau.
C'est dans l'ensemble du réseau qu'il y a 140 programmes. Voyons
donc!
Mme Robillard: Encore une fois... Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Hovington): Ah! ce n'est pas pareil
là.
Une voix: Ce n'est pas ça que tu as dit.
Mme Robillard: Ce n'est pas ça que vous avez dit.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Je suis allé faire un petit
tour en Ontario. C'est parce que c'est en Ontario, 150.
Mme Robillard: II s'est trompé avec l'On- tario, avec la
province voisine. Alors, encore une fois, M. Lapointe, merci de votre apport
aux travaux de cette commission.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, il me reste à
vous remercier d'être venus présenter votre mémoire
à la commission de l'éducation. Je ne suspendrai pas les travaux
et je demanderais au Regroupement des collèges du Montréal
métropolitain de bien vouloir venir prendre place assez rapidement, s'il
vous plaît.
Je demanderais aux membres de la commission de bien vouloir prendre
place, s'il vous plaît. La commission va reprendre ses travaux. Est-ce
que le Regroupement des collèges du Montréal métropolitain
pourrait s'avancer? Je demanderais le silence en arrière. La commission
poursuit ses travaux avec le Regroupement des collèges du
Montréal métropolitain. Je crois qu'il y a M. Pascal Nadon, qui
est vice-président. Bonjour, M. Nadon.
Regroupement des collèges du Montréal
métropolitain (RCMM)
M. Nadon (Pascal): Bonjour, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Hovington): Voulez-vous
présenter les gens qui vous accompagnent, s'il vous plaît?
M. Nadon: Avec plaisir. À ma droite, M. André
Campagna, qui est directeur des services pédagogiques au collège
Bois-de-Boulogne.
La Présidente (Mme Hovington): Bonjour.
M. Nadon: Mme Josée Beaudoin, qui est conseillère
au RCMM.
La Présidente (Mme Hovington): Bonjour.
M. Nadon: À mon extrême gauche, M. Gerry Brown, qui
est directeur général du collège John Abbott.
La Présidente (Mme Hovington): Bonjour.
M. Nadon: À ma gauche immédiate, M. Pierre Lupien,
qui est directeur général du Regroupement des collèges du
Montréal métropolitain.
La Présidente (Mme Hovington): Bienvenue à la
commission de l'éducation. Vous avez 20 minutes pour nous
présenter votre mémoire.
M. Nadon: Le Regroupement des collèges du Montréal
métropolitain désire vous remercier de nous recevoir. Nous
aimerions commencer par une courte présentation de ce qu'est le
Regroupement des collèges du Montréal métropolitain. C'est
un
organisme qui regroupe 11 collèges de IHe de Montréal et
de l'île Jésus. Nous nous définissons comme un organisme de
gestion concertée du dossier de l'éducation des adultes de niveau
collégial et également comme un organisme qui entend mieux
positionner les cégeps de Montréal et les rendre plus visibles
auprès des organismes socio-économiques et de regroupements
d'entreprises.
Par le biais du Regroupement des collèges du Montréal
métropolitain, les collèges font en sorte que leurs actions de
formation, de concertation et de développement pénètrent
davantage ce territoire. Par année, nous comptabilisons environ 75 000
inscriptions-cours. En termes de formation et de services connexes, nous
travaillons avec plus d'un millier d'entreprises différentes, ce qui
nous amène à un chiffre annuel de formation, autant auprès
des adultes qu'auprès des entreprises, de 30 000 000 $ annuellement.
À l'intérieur de notre mémoire, nous avons un
certain nombre de recommandations qui ont trait à l'accès des
adultes aux études collégiales. Au niveau des collèges,
nous sommes en difficulté au niveau de l'éducation aux adultes et
les adultes aussi sont en difficulté. Nous, c'est beaucoup plus sur le
plan du financement; les adultes, c'est sur le plan de l'accès aux
programmes, de pouvoir finir ces programmes-là et, bien sûr, de la
nécessité de ne pas reprendre en formation ce qu'ils ont acquis
en emploi.
Sur le plan du financement, les collèges du Montréal
métropolitain ont subi des coupures énormes,
particulièrement au niveau de la formation à temps partiel, des
budgets du ministère de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité
du revenu. À titre d'exemple, 50 % de nos activités, en trois
ans, ont disparu. La situation est stagnante au niveau du ministère de
l'Enseignement supérieur et de la Science concernant l'accès des
adultes à ce type de formation, soit la formation à temps partiel
des adultes. Je veux simplement vous faire remarquer que plus de 75 % des
étudiants qui sont dans ce type de formation sont déjà en
emploi et déjà sur le marché du travail.
Il est évident que notre clientèle doit, elle aussi,
s'ajuster aux mutations technologiques, aux impératifs de
productivité accrue, aux rationalisations de personnel. Alors que 40 %
des emplois créés au Québec depuis 15 ans le sont à
temps partiel, que le manque de scolarisation est un obstacle
déterminant à la participation au marché du travail, alors
que les entreprises réclament davantage de personnel qualifié, il
est pour le moins incongru que les collèges ne puissent donner
accès à l'ensemble des adultes qui veulent se former, surtout
quand 75 % à 80 % des adultes en formation actuellement au niveau
collégial le font par la filière professionnelle.
Malheureusement, ces adultes-là n'ont pas droit au chapitre, n'ont pas
de voix commune et ne peuvent pas nécessairement se faire entendre
auprès des différentes instances. C'est dans ce sens-là
qu'on fait une recommandation au niveau du financement de l'éducation
aux adultes. (11 h 40)
Un deuxième élément qu'on veut souligner, c'est
aussi les difficultés que les adultes rencontrent, des
difficultés au niveau de l'accès au D.E.C., en termes de finir,
de compléter leur D.E.C. Évidemment, la durée, du fait
qu'ils étudient à temps partiel, décourage plus d'un
adulte à compléter toute sa formation. C'est pour ça qu'on
propose également que la structure des programmes de D.E.C, soit
révisée, de façon à pouvoir produire des programmes
plus adaptés aux adultes et assortis d'une certification plus
progressive.
Nos clientèles adultes sont diversifiées et sont de plus
en plus nombreuses. Tout inerte l'adulte à se former. Il y en a certains
qui sont en emploi qui se recyclent, qui se perfectionnent, principalement,
bien sûr, dans les nouvelles technologies. Beaucoup dans les hautes
technologies. Il y a d'autres individus qui veulent faire des retours sur le
marché du travail qui sont aussi de notre clientèle. Il y a, bien
sûr, ceux qui subissent des licenciements collectifs. Actuellement, dans
la région de Montréal, on est à instaurer des programmes
d'actualisation de compétence professionnelle pour les immigrants. C'est
aussi une réalité du Montréal métropolitain. Et,
bien sûr, il y a l'adaptation à la nouvelle réalité
sociale qu'est une métropole au niveau des gens qui travaillent dans ce
que nous appelons des techniques humaines.
Alors, à titre d'exemple, je pense à ia toxicomanie, je
pense au travail qui se fait auprès de tous les prestataires d'aide
sociale, des familles monoparentales, des décrocheurs, des
délinquants, et ainsi de suite. C'est évident que ces
gens-là ont un certain bagage de travail et un bagage de connaissances.
C'est ce qui amène une autre de nos recommandations au niveau de la
reconnaissance de ces acquis pour les transférer en reconnaissance
d'acquis de formation. C'est bien sûr qu'un adulte, s'il s'inscrit dans
un processus de D.E.C, qu'il le prend d'un point a et qui devrait le mener au
point z, ça peut être décourageant. Mais si l'adulte
s'aperçoit que déjà il n'est pas au point a, il est rendu
à l'intérieur du cursus et qu'il a un peu moins de chemin
à faire pour se rendre au point z, nous croyons qu'il y a là
certains éléments de motivation pour les adultes, pour finir leur
D.E.C, et pour poursuivre et persévérer.
Comme je le disais tantôt, de plus en plus d'adultes
fréquentent nos programmes. Il y a différents programmes, tant
venant des ministères à saveur économique que du
ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science. Ces
étudiants-là viennent suivre des cours et le jour et le soir,
dépendant des catégories. Ça nous crée, au niveau
des collèges, des nouveaux problèmes au niveau de
l'accessibilité de ces
étudiants-là dans les locaux du collège. Ça
nous amène, au niveau de l'éducation aux adultes, à devoir
louer des espaces à l'extérieur. C'est ce qui nous amène
aussi à faire des recommandations concernant la location de ces
espaces-là. Déjà, l'an dernier, les collèges, au
niveau de l'éducation aux adultes, consacraient 500 000 $ à la
location de locaux à l'extérieur de leurs collèges. Cette
année, ce sera de l'ordre de 700 000 $.
Lorsqu'on fait une comparaison entre ce qui se passe dans le milieu
métropolitain et ce qui se passe en région, les collèges
qui sont en région éloignée bénéficient
d'une certaine subvention pour créer des sous-centres. La notion
d'éloigne-ment est l'item qui leur permet de faire ça.
Évidemment, on ne peut pas invoquer la notion d'éloignement.
Donc, nous devons, nous, peut-être plus invoquer la notion de
densité de population. On sait particulièrement que les
collèges de l'enseignement régulier ont refusé des
étudiants; on en a entendu parler récemment. Il y a de moins en
moins de places disponibles, en termes d'espaces dans les collèges. Il
n'y en a plus pour les adultes et on pense qu'il devrait y avoir des choses qui
se fassent de ce côté-là.
Le deuxième aspect de notre mémoire est au niveau du
partenariat cégeps-industries. Vous avez commencé à en
entendre parler. Il est clair que nous sommes très fiers du concept de
la formation sur mesure. C'est un concept qui a été
travaillé à l'intérieur des services de l'éducation
aux adultes, qui a été mis de l'avant et qui constitue un de nos
fleurons. Le dynamisme des collèges à travailler avec l'industrie
nous a amenés à établir des partenariats avec ces
industries-là, tellement que le taux de satisfaction est rendu à
86 %, à 92 %, particulièrement au niveau des contenus de
formation et au niveau de la qualité des formateurs.
C'est bien sûr qu'une telle initiative a des
bénéfices. Elle a des bénéfices pour les individus
au niveau d'augmenter leur confiance en emploi face aux aléas du
marché du travail, d'augmenter leur désir au niveau d'un retour
aux études un peu plus soutenu. Ça a aussi des
bénéfices au niveau de l'entreprise parce que ça assure la
compétitivité au sein de son marché et, bien sûr,
ça assure son développement à plus long terme.
Pour les collèges, ce que ça a comme
bénéfices, c'est que ça sert aussi de ressource-ment pour
les enseignants, ça peut effectivement devenir des milieux de stages,
puisque les contacts commencent à s'établir et, bien sûr,
ça permet à nos enseignants de se familiariser avec la fine
pointe de la technologie et avec les nouveaux équipements.
Ce type de formation sur mesure s'inscrit difficilement à
l'intérieur des programmes, et plus on a d'adultes qui se forment par la
formation sur mesure plus ces adultes-là veulent voir reconnaître
cette formation-là. Donc, ça nous amène à faire
aussi une recommandation au niveau de l'aménagement des programmes, mais
de l'actualisation des programmes en fonction de ce qu'on fait au niveau de la
formation en entreprise. Bien sûr, l'apanage de la formation sur mesure
nous a amenés à développer d'autres items. Un des
éléments qui devient aussi un élément où on
travaille énormément, c'est à l'intérieur des plans
de développement des ressources humaines avec les entreprises.
Contrairement aux prétentions de certains autres ministères, nous
en faisons et nous sommes, je pense, compétents. Nous faisons de bonnes
actions là-dessus, d'autant plus que la formation qui suit est en ligne
directe avec les objectifs que les entreprises visent.
Si on regarde au niveau un peu plus prospectif - et c'est aussi un des
éléments de recommandation qu'on fait - nous croyons que le
secteur technique va continuer à évoluer avec la vitesse qu'il a.
Entre autres, au niveau de l'information électronique, on dit que de 10
% à 15 % du potentiel actuel, du potentiel du marché est
développé actuellement. Il reste donc 85 % à 90 % du
potentiel du marché. Ça va transformer les environnements
organisationnels des entreprises, ça va nécessiter des nouvelles
qualifications de la part des travailleurs.
Donc, pour nous, au niveau des collèges, ça veut dire plus
de recherche appliquée, ça veut dire une adaptation et un
transfert de cette technologie-là au niveau de la diffusion
auprès des travailleurs. Et, bien sûr, compte tenu qu'on fait
affaire beaucoup avec des petites et moyennes entreprises, ça veut dire
que les collèges devraient avoir une mission d'éveil
technologique pour pouvoir être les diffuseurs de cette nouvelle
technologie là auprès des entreprises, et pour pouvoir aussi agir
comme conseillers auprès de ces entreprises-là.
Le dernier élément sur lequel nous voudrions vous
entretenir, c'est la participation au développement
socio-économique dans la région de Montréal. Bien
sûr, les collèges en région ont, surtout lorsque le
collège est l'établissement de formation supérieure dans
la région, une reconnaissance quasi officielle et quasi statutaire,
dirais-je. À Montréal, c'est assez différent. Bien
sûr, les collèges sont connus comme des lieux accessibles par
leurs locaux, par leurs installations d'éducation physique.
Déjà, il y a des collèges qui ont des ententes avec des
maisons de la culture, et tout ça. Mais il y a plus que ça. On
pense que les collèges peuvent jouer un rôle beaucoup plus
considérable et sous de nouvelles formes. Nos partenaires sont de plus
en plus nombreux. On travaille avec d'autres ministères. Les
intervenants en milieux de formation sont aussi de plus en plus nombreux, tant
au niveau du secteur privé qu'au niveau du secteur public. Sauf que nous
croyons que nous sommes capables de travailler à l'intérieur de
cette compétition-là et de cette jungle-là, si vous me
permettez. (11 h 50)
Un seul problème ou une seule chose que nous vous demandons
à l'intérieur de nos recommandations, c'est de nous aider. Nous
croyons que le ministère de l'Enseignement supérieur pourrait
effectivement aider tant la structure de regroupement régional que les
collèges à intervenir davantage au niveau du développement
de la région de Montréal. C'est bien sûr que les
universités sont des ressources qui, traditionnellement, ont toujours
été reconnues et sont toujours sollicitées. Nous croyons
avoir des compétences et de l'expertise dans beaucoup de secteurs, de
façon particulière dans les secteurs technologiques. Nous croyons
que nous pourrions être un apport enrichissant d'un nouveau partenariat.
Nous avons fait nos classes avec la formation sur mesure. Nous avons fait nos
classes avec le partenariat cégeps-entreprises. Je pense que nous avons
aussi fait preuve de succès, de détermination. Nous voulons faire
la même chose au niveau du Montréal métropolitain, donner
un dynamisme un peu plus particulier.
Nous sommes 11 collèges. Nous nous présentons comme 11
collèges, une force. C'est déjà là un effort
considérable lorsqu'on regarde les limites territoriales de
Montréal et le nombre de collèges qu'il y a là. C'est donc
déjà un témoignage de la volonté des
collèges de Montréal de faire des choses, concerter d'abord entre
nous, mais aussi avec le milieu dans lequel on travaille et,
particulièrement, le milieu socio-économique. Nous voulons
être de nouveaux acteurs et nous considérons que nous sommes
prêts à jouer ce rôle. Je vous remercie.
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup. Mme la
ministre.
Mme Robillard: Merci, Mme la Présidente. M. Nadon,
bienvenue aux travaux de cette commission. Je suis contente que le Regroupement
des collèges du Montréal métropolitain se soit
présenté parce que je pense que vous êtes une structure de
concertation fort efficace pour le Grand Montréal, pour Montréal
et ITIe, Laval aussi, en matière d'offre de formation aux adultes. Vous
avez vraiment une structure qui permet cette concertation au niveau de l'offre.
Et vous soulevez, dans votre mémoire, différents problèmes
que je reconnais volontiers, dont le premier, c'est celui de
l'accessibilité, vous l'avez mentionné, au niveau des adultes
à l'ordre collégial, et les problèmes de financement qui
entourent cette problématique. J'en suis fort consciente et
j'espère que les travaux de cette commission vont nous amener à
trouver des pistes de solution.
Alors, j'aimerais ça aborder directement cette question-là
avec vous, le problème de l'accessibilité lié au
problème de financement, parce que je pense que c'est ce que vous faites
dans votre mémoire. Je sais que vous vous occupez de façon
particulière des adultes - c'est ça, votre regroupement - mais
vous réalisez très bien que la loi sur les collèges,
à l'heure actuelle, elle ne fait aucune distinction entre les jeunes et
les adultes au niveau du financement. On fait plutôt une distinction
entre temps complet et temps partiel, que ce soient des jeunes ou des adultes,
n'est-ce pas? La loi est ainsi faite. Est-ce que vous avez des modifications
particulières à nous suggérer, des recommandations sur cet
item-là de la loi sur les cégeps?
La Présidente (Mme Hovington): M. Nadon.
M. Nadon: Nous n'avons pas vraiment de suggestions
particulières. La seule chose, je pense, qu'il est important de
regarder, c'est que la majorité des étudiants à temps
complet étudient le jour. Il y a certains adultes qui vont,
effectivement, étudier également le jour. Le problème
qu'on a, c'est pour les adultes qui étudient à temps partiel le
soir, qui travaillent, qui ont une famille et qui veulent continuer à
étudier à l'intérieur de ça.
On a, comme je l'expliquais tout à l'heure, une diversité
de clientèles qui ont certains objectifs qui sont aussi
différents les uns des autres que l'atteinte d'une attestation
d'études collégiales ou la completion de leur D.E.C. Ce qui fait
qu'il y a effectivement un certain nombre de programmes qui sont axés
sur les prestataires de l'aide sociale, les prestataires de
l'assuran-ce-chômage, et ainsi de suite, mais il y a de moins en moins de
programmes qui sont reliés aux travailleurs en emploi qui
désirent se perfectionner. C'est surtout là-dessus qu'on
considère que l'accès est déficient.
Mme Robillard: Mais, M. Nadon, je reviens avez ma question: Que
pensez-vous de la loi actuelle sur les collèges, qui fait toute la
différence en matière de financement entre le temps complet et le
temps partiel, indépendamment que ce soit un jeune qui fréquente
le cégep à temps partiel? Vous savez, la distinction est de plus
en plus limitée, l'écart se réduit de plus en plus entre
jeunes et adultes au cégep. D'ailleurs, quand on s'en tient au langage
strict, la majorité de nos étudiants sont des adultes, au
cégep; même la dénomination de faire cette
différence devient de moins en moins vraie. On voit que l'âge
même a augmenté; même chez les temps complet de jour, ce
sont des adultes, de plus en plus, qui sont là. Alors, je reviens avec
cette question-là: Que pensez-vous de cette distinction qui est faite
à l'heure actuelle dans notre loi sur le financement entre temps partiel
et temps complet?
M. Nadon: Ce que je pourrais rajouter, où je vous
ramènerais à notre première recommandation, c'est: Si on
fait une distinction entre les étudiants à temps complet et ceux
à temps
partiel, à ce moment-là, il faudrait peut-être
s'organiser pour que les étudiants à temps partiel soient
comptabilisés en termes d'équivalents à temps complet et
qu'on bénéficie à ce moment-là du financement des
étudiants à temps complet.
Mme Robillard: Bon. Allons donc dans les formats de cours ou les
formats de programmes que vous avez développés. Vous nous avez
parlé beaucoup de la formation sur mesure, le fleuron, dites-vous, que
vous avez pu développer au fil des années, en
collaboration...
M. Nadon: Un de nos fleurons. Mme Robillard: Un de vos
fleurons... M. Nadon: C'est ça.
Mme Robillard: ...en collaboration avec l'entreprise. Avant de
parler de formation sur mesure, M. Nadon, vous dites très clairement, au
point de départ: Depuis longtemps, les collèges, nous avons
développé des contenus et des structures de programmes
diversifiées: I'A.E.C, l'attestation d'études collégiales,
le certificat d'études collégiales et le diplôme de
perfectionnement de l'enseignement collégial, le D.P.E.C. Voulez-vous me
dire, M. Nadon, si ces certifications-là, à l'heure actuelle,
sont reconnues sur le marché du travail? Est-ce que quelqu'un qui
détient un A.E.C. a une reconnaissance sur le marché du travail?
Est-ce que quelqu'un qui détient un C.E.C. est reconnu sur le
marché du travail avec ce diplôme-là dans sa poche? La
même chose avec le D.P.E.C? Quelle est votre expérience dans ce
domaine-là?
M. Nadon: II est évident que le détenteur d'une
attestation d'études collégiales, lorsque la loi oblige, par
exemple, les organismes de services de garde, les garderies, à avoir
à l'intérieur de leur personnel une personne sur trois qui est
détentrice ou détenteur d'une attestation, la reconnaissance de
l'attestation a, effectivement, beaucoup d'importance.
Quant à la reconnaissance du certificat et du diplôme, ce
que je pourrais vous dire, c'est que de plus en plus les entreprises commencent
effectivement à réaliser quelles sont les différences qui
existent entre un certificat et un diplôme pour réaliser,
finalement, que si leur intérêt - là, je parle des adultes
- est d'avoir des compétences, le certificat donne à l'adulte
l'ensemble des compétences professionnelles. La différence qu'il
y a avec le D.E.C, c'est effectivement les cours de français, de philo
et des cours complémentaires. Je peux vous dire que, de plus en plus,
l'industrie et les entreprises commencent à être conscientes de
cette chose-là.
Je vous dirais que la reconnaissance est minime actuellement, sauf qu'il
y a un certain nombre d'organismes professionnels qui deman- daient un d.e.c.
jusqu'à récemment et, sur représentation des
collèges, ils reconnaissent le certificat au même titre que le
d.e.c. pour fins d'emploi.
Mme Robillard: Alors, vous me dites qu'à l'heure actuelle
il y a un début de reconnaissance.
M. Nadon: Exact. (12 heures)
Mme Robillard: Parce que, pour avoir parlé à
plusieurs reprises avec des représentants du monde des affaires, on me
disait qu'à l'heure actuelle il y a très peu de reconnaissance en
tant que telle de ce certificat sur le marché du travail. Alors,
ça me pose des points d'interrogation. Surtout quand vous me
suggérez des formules plus modulées. Parce que vous avez une
recommandation aussi à la page 7 qui dit ça: Est-ce qu'on ne
pourrait pas avoir un système modulaire de programmes? Je ne sais pas
à quoi vous faites référence exactement. Peut-être
que j'aimerais vous entendre sur ça aussi. Peut-être qu'on peut
regarder ça, les systèmes modulaires, mais il faut que ça
donne quelque chose à l'individu qui est sur le marché du
travail. Quand j'entends dire que le C.E.C. à l'heure actuelle est plus
ou moins reconnu... En tout cas, si ce n'est pas ça, expliquez-moi.
Alors, je suis inquiète.
M. Nadon: Effectivement, le certificat est plus ou moins reconnu
parce que les gens ne connaissent pas la nature du contenu de ces certificats.
À partir du moment où on commence à leur expliquer ce que
c'est, dans les faits, il y a effectivement reconnaissance et, dans certains
cas, il y a reconnaissance formelle.
Quant au système modulaire, nous avons, au niveau de
l'éducation aux adultes, développé ce qu'on appelle une
approche client. On essaie effectivement de donner à l'adulte, de
motiver l'adulte à aller le plus loin possible à
l'intérieur de sa formation, puis idéalement de se rendre au
diplôme d'études collégiales. Comme je le disais
tantôt, c'est très long.
Le principe modulaire, c'est de dire, sans nécessairement changer
du tout au tout: Est-ce que l'attestation d'études collégiales ne
devrait pas être un premier jalon? Est-ce que le certificat ne devrait
pas être un deuxième et le D.E.C. un troisième, mais dans
le sens suivant? Actuellement, ce qu'on a, on a des attestations
d'études collégiales qui ont un contenu défini et pour
lequel un certain nombre de cours doivent être repris si
l'étudiant veut prendre la filière du D.E.C. Donc,
l'étudiant peut avoir fait 10, 12 cours, avoir une attestation
d'études collégiales, avoir, si on veut, pris le goût
d'étudier et avoir comme objectif de terminer un D.E.C. Lorsqu'on fait
l'étude de son dossier on est obligés, malheureusement, de lui
dire que sur les 12 cours qu'il a faits il y en a un certain nombre qui ne
pourront pas être comptabilisés à l'intérieur
de son D.E.C.
Mme Robillard: Est-ce qu'à l'intérieur de chacune
de ces étapes que vous décrivez, que ce soit par le cumul
d'A.E.C, est-ce qu'il y aurait de la formation générale, de la
formation de base dont on souligne depuis le début des travaux la
nécessité d'une révision? Est-ce qu'à
l'intérieur de chacune de ces étapes il y aurait la formation
générale de base?
M. Nadon: Moi, je pense que sur l'assise des étapes, il
devrait effectivement y avoir de la formation de base. C'est bien sûr que
je vous ramènerais à une autre de nos recommandations, c'est la
reconnaissance des acquis. Pour nous, le type de modulation, il faut bien
comprendre que nos adultes, comme vous le disiez tantôt, c'est aussi des
gens qui sont en enseignement ordinaire. Et on pense que ce type de modulation
pourrait être effectivement des facteurs d'encouragement pour les gens et
des facteurs de reconnaissance au niveau du marché du travail. Donc,
dans ce sens-là, effectivement, il faudrait qu'il y ait un certain
nombre de cours généraux.
Mme Robillard: Donc, ce ne serait pas le C.E.C. actuel.
M. Nadon: Ce ne serait pas nécessairement le C.E.C.
actuel.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. M. le
député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Oui, je veux vous saluer, M. Nadon,
ainsi que toute votre équipe. Je pense que c'est important que nous
ayons un organisme qui vienne nous parler plus spécifiquement de la
problématique de l'éducation des adultes ou de l'éducation
permanente. C'est important, dans le genre de société où
nous vivons, que ce soit lié à des considérations de
pauvreté qui grandit - moins d'emplois, donc, moins de richesse - on va
envisager davantage dans le futur le temps partagé. On va devoir
obligatoirement, il n'y en a pas assez. Toute la problématique du
monoparentalisme dans les deux sens, en tout cas, tous les
phénomènes sociaux puis l'évolution de la
société nous obligent à dire: Si on n'offre pas une
meilleure place pour celles et ceux qui voudront parfaire leur formation et
l'adapter à la réalité du libre-échange et
conditions d'emploi futures, je pense qu'on se placerait dans une mauvaise
position. Donc, c'est important qu'un groupe ou une instance qui a une action
plus concertée avec ces gens-là vienne nous donner sa
réflexion.
Ce que j'ai constaté dans votre mémoire, il y a quelques
cris d'alarme et je pense qu'on ne peut pas les passer sous silence, parce que
je trouve qu'ils sont fondés, ils sont réalistes. Il y a des
choses qui ne sont pas toujours plaisantes à entendre, mais, quand elles
correspondent à la réalité, c'est important de les dire.
Lorsque vous dites, entre autres, au gouvernement, parce que je veux bien
croire qu'ici c'est une commission parlementaire de l'éducation, mais le
gouvernement y est représenté, et d'une façon très
importante, compte tenu que la titulaire de l'Enseignement supérieur est
également titulaire, présentement, de l'ensemble du portefeuille
de l'Éducation, pas aussi pourvu que je le souhaiterais... Mais le
premier cri d'alarme, c'est quand vous dites: La Fédération des
cégeps, le Conseil des collèges, le Conseil supérieur de
l'éducation ont réclamé le rétablissement de la
situation dans le même sens auprès des autorités
gouvernementales sans succès, et là vous faites
référence à toute l'organisation d'une seule source de
financement, ça fait plusieurs fois que vous revenez là-dessus.
Vous dites: «Le RCMM a dénoncé plus d'une fois cette
situation auprès des autorités responsables. Il maintient
toujours sa position aujourd'hui, soit l'établissement d'une source
unique de financement pour l'offre de cours crédités à
temps partiel...» Moi, je suis un allié de votre cause. Je pense
qu'il faut regarder ça plus sérieusement. Et, quand je vais
finir, là, j'aimerais ça, vous entendre. Pourquoi vous pensez
qu'il n'y a pas d'oreille pour cette demande-là, qu'il n'y a pas
d'écoute? J'aimerais ça, vous entendre là-dessus.
Deuxième cri d'alarme qu'il est important de relater, à la
page 5, vous dites: «Une révision du mode de financement de la
formation à temps partiel au collégial s'impose de toute urgence
pour corriger une situation qui a été maintes fois
dénoncée», parce qu'un trop grand nombre d'adultes sont
refusés aux comptoirs d'inscription, malgré leur
intérêt à poursuivre une formation.
Je voulais lier les deux cris d'alarme et j'aimerais ça, vous
entendre - je vous l'ai dit tantôt, donc je ne le répète
pas - et, là-dessus, d'une façon un petit peu précise en
termes quantitatifs. En termes quantitatifs, est-ce que vraiment aujourd'hui
vous êtes en mesure de corroborer qu'il y a de plus en plus d'adultes de
toutes sortes, dans toutes sortes de conditions, mais volontaires pour parfaire
leur formation, qui se voient carrément refuser l'accès?
J'aimerais ça, en termes quantitatifs, que vous me donniez des chiffres,
peut-être pas, là, au poil, comme on dit chez nous, mais assez
précis pour être capable d'évaluer ce que ça
signifie précisément.
M. Nadon: Quant au problème d'oreille, là, je vous
dirais que nous avons fait, tous les organismes que vous avez
mentionnés, des représentations lorsque, en 1984, il y a eu une
restructuration de la formation professionnelle et où il y a certains
mandats qui ont été donnés au ministère de la
Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu. Nous croyons
qu'effective-
ment le fait qu'il y ait deux ministères qui interviennent au
niveau de la formation professionnelle à temps partiel, c'est une des
difficultés et ça empêche l'harmonisation du financement.
C'est clair que je ne pourrais pas vous expliquer, là, pourquoi il n'y a
pas eu d'oreille. Je pense que c'est une des explications. Il y en a
sûrement d'autres, mais je ne les connais pas.
Quant aux refus, il est effectivement difficile de quantifier, surtout
au poil près. Cependant, ce qu'on peut vous dire, c'est qu'il est
difficile parce qu'on ne comptabilise pas et qu'on ne tient pas de formule ou
de liste, si vous voulez, là, des étudiants qui voudraient
s'inscrire. Lorsque je suis arrivé à Montréal, j'avais
commencé à faire une liste, mais je me suis aperçu que
c'était beaucoup plus une source de frustration de la part des gens,
parce qu'ils s'imaginaient qu'on était pour faire quelque chose, puis il
n'y avait rien à faire, puis on était obligés de les
rappeler pour leur dire: Bien, effectivement, il n'y en a pas, de place, puis
on n'est pas capables.
La seule chose que je peux vous dire, c'est que - puis je vais prendre
l'exemple au niveau du cégep du Vieux-Montréal où je
travaille - à l'intérieur d'un court programme au niveau des
techniques de prévention des incendies, nous avons refusé autant
d'étudiants que nous en avons admis, et ça veut dire, ça,
à peu près 200 étudiants.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Pardon?
M. Nadon: Environ 200 étudiants.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): O.K. Excusez.
M. Nadon: Alors, c'est un exemple. C'est clair que c'est un
exemple peut-être extrême. Il y a une variation à
l'intérieur de tout ça. Je ne saurais pas vous quantifier, mais
on refuse de plus en plus de gens lors des inscriptions. C'est bien sûr
que nous, on fait une offre à la mesure de nos moyens. Et, une fois que
les étudiants sont inscrits et que les groupes sont complets, on ferme,
puis il n'y a plus de place. Donc, quand on dit à un adulte qu'il n'y a
plus de place, il est frustré, dans un premier temps, puis il n'a pas
vraiment le goût de nous laisser ses coordonnées pour qu'on fasse
des statistiques là-dessus.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): D'après vous - monsieur veut
compléter, mais je veux juste ajouter - si j'énonçais le
chiffre une couple de 1000, est-ce que je serais dans le domaine de la
science-fiction ou si ce serait réaliste?
M. Nadon: Je pense qu'il y en a plus que ça à
Montréal. (12h 10)
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Oui, monsieur, vous voulez
compléter avant mon autre question?
M. Lupien (Pierre): C'était juste pour ajouter
peut-être un autre chiffre. C'est qu'alors qu'on est en pleine transition
de l'économie, je dirais que 75 % à 80 % des adultes qui suivent
des cours à temps partiel, c'est des gens qui suivent des cours dans le
domaine d'une technique. Et ça m'apparaît un chiffre
important.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Oui, mais c'est pour ça que je
tenais à poser cette question. Si j'ai la même indication, la
plupart des adultes qui veulent parfaire leur formation, c'est, soit suite
à la mise à pied, soit à la suite du recyclage requis et
nécessaire par rapport à un autre type d'emploi, compte tenu de
l'évolution des marchés. Puis ça, c'est de plus en plus
une réalité. On dit que, dans le futur, n'importe quel individu -
puis il faut le dire à nos jeunes, et il faut le dire haut et fort, sauf
les professions libérales et là, je ne parle pas du parti, bien
sûr - va devoir passer par quatre, cinq, six professions
différentes dans l'avenir. Mais là, on dit ça comme si
c'est toujours dans l'avenir, alors qu'on est dans ça tous les jours,
pour les gens qui sont en situation de perte d'emploi ou qui font face à
une réduction des heures travaillées ou qui envisagent de se
recycler dans quelque chose qui offre de meilleures perspectives de
stabilité, puis de meilleurs revenus pour améliorer la
qualité de vie.
Donc, de dire qu'il y a des milliers d'adultes qui, en 1992, se font
refuser une formation qu'ils veulent améliorer, ce n'est pas gai, ce
n'est pas rose. Je n'aime pas ça, mais il faut le dire, puis il ne faut
pas nécessairement dire: Parce qu'on apprend ça aujourd'hui, on
va garder ça. Ça urge, et ce n'est pas nécessairement
lié à l'ensemble du mandat de la commission. C'est pour ça
que je voulais insister là-dessus. Vous faites bien d'insister,
sincèrement, puis c'est important d'avoir ce volet, compte tenu de
l'éducation permanente, mais il ne faut pas le voir uniquement dans une
réforme de la législation. Il y a des gestes à être
posés et dès que la session va commencer, nous - je vous donne un
préavis, Mme la ministre - c'est évident qu'on va être
assez agressifs là-dessus, et avec raison. Ça n'a pas de bon sens
ce qu'on est en train de faire. Il y a trop de gens qui sont limités,
parce que n'oubliez pas que la formation à temps partiel, même au
secondaire, ce n'est pas gai. On dit aux jeunes: Oui, oui, si tu acceptes de
revenir à l'école, on va t'offrir toutes sortes d'alternatives.
Je vous dis que ce n'est pas de même que ça se passe dans les
faits, actuellement. Donc, il va falloir être vraiment plus
décideurs pour permettre que l'accès soit réel.
Vous voulez ajouter? Parce que j'ai une autre question et ma
collègue en a une.
M. Campagna (André): En tout cas, il m'apparaît que
c'est là le problème central que nous avons en éducation
des adultes. Je pense que le ministère est très bien
sensibilisé depuis au moins cinq ans, et tous les conseils ont
parlé là-dessus aussi. En tout cas, le Conseil des
collèges puis le Conseil supérieur de l'éducation ont
parlé là-dessus. La Fédération des cégeps
parle là-dessus depuis longtemps. Je pense que le ministère est
particulièrement sensibilisé là-dessus. C'est probablement
un plus grand ministère qui est peut-être moins sensibilisé
à ça... Il y a cette dimension-là. Actuellement, on vit
donc avec des quotas. C'est des quotas qu'on a. Vous avez tant
d'heures-élèves, puis faites ce que vous pouvez avez ça.
Alors, je pense qu'il faut lever les quotas, puis peut-être faire les
ajustements au financement. Certains ont lancé le chiffre de 20 000 000
$ que ça coûterait de plus pour l'ensemble du Québec.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Ça va surtout le
décoter.
M. Campagna: Mais c'est difficile à mesurer, cette
chose-là. Et ça, c'est un blocage qui existe actuellement par
rapport à l'accessibilité des adultes, individus à temps
partiel. Ce qui est dans la loi, c'est le temps partiel. L'autre blocage qu'on
a, c'est la reconnaissance des acquis de formation. Le ministère sait
que, là-dedans, il ne met actuellement que 240 000 $ ou 250 000 $ par
année, ce qui fait à peu près 5000 $ ou 6000 $ par
collège. Ça n'a pas de bon sens. C'est quelque chose qui est
prévu dans le régime pédagogique depuis 1984. Par
ailleurs, on n'a pu, jusqu'ici en tout cas, mettre assez de ressources
là-dedans.
L'autre blocage, on l'a mentionné aussi dans notre
mémoire, c'est toute la question des espaces et, à
Montréal, c'est probablement pire qu'en région, comme en Abitibi.
Nous manquons d'espace. Il y a de plus en plus de jeunes qui viennent au
collège ces années-ci, vous le savez, et lorsque le
ministère calcule les espaces pour les collèges il ne calcule pas
du tout - on ne compte pas, ça n'existe pas - les adultes à temps
partiel. Ça, ça ne compte pas. Alors, je pense que dans ce qui se
passe actuellement au niveau du libre-échange, etc., il y a de plus en
plus de personnes, d'employés d'entreprises, de gens qui travaillent,
qui veulent se recycler et se perfectionner. Alors, je pense qu'il faut faire
un changement là aussi.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Merci beaucoup. C'est des
commentaires intéressants. L'autre question que j'ai à poser,
c'est sur votre recommandation à la page 17. Ce n'est pas que je ne la
comprenne pas, là; je pense que je la comprends mais, moi, je suis un
peu surpris que vous insistiez comme ça, pour aller jusqu'à
modifier le cadre législatif des collèges en y consacrant une
mission de services à la communauté socio-économique:
«Que soient ainsi reconnues et promues des activités
diversifiées comme la recherche appliquée, la diffusion et les
transferts technologiques.» Je fais deux commentaires, et j'aimerais
ça que vous soyez plus explicite. Je le répète, ce n'est
pas parce que ce n'est pas clair, c'est très clair.
J'essaie de voir les motivations qui vous animent pour prétendre
que, dans le bassin montréalais, ce serait devenu majeur et important
que les collèges mettent plus d'énergie pour ce que j'appelle la
mission de services à la communauté ou à la
collectivité, surtout dans sa dimension socio-économique. Et
là je sais ce que ça veut dire, socio-économique.
Ça, c'est la bibite, on met tout là-dedans. Tout est
là-dedans. C'est la gare centrale, ça: pauvreté et rien
dans le ventre, pas de jobs, il y a trop de papier brun dans les vitrines, il
n'y a plus de monde qui travaille et il faut recycler. Tout y est, là.
Ça, il y a un méchant groupe de volontaires de toutes natures,
subventionnés à gauche, au centre, au milieu pour s'occuper de
ça. Moi, je dis: II me semble que j'ai du trouble avec ça parce
que, dans les milieux, en tout cas, la fonction enseignement, recherche et
services aux collectivités, elle est dans la Loi sur l'Université
du Québec, entre autres, le réseau UQ, et je trouve que,
globalement, moi, je suis heureux que ce soit là. Et je pense que le
réseau de l'Université du Québec, il fait toutes sortes de
bonnes choses mais, là-dessus, je pense qu'il fait un peu plus que les
autres, soit de s'impliquer dans les milieux et de donner ce que j'appelle le
sceau de crédibilité à certains organismes qui
requièrent que l'université se mette dans le coup, dans leurs
affaires pour donner de la crédibilité à leur action.
Mais, pour ne pas me perdre, là, et être trop long, je ne veux pas
multiplier ces vocations-là, moi. Ce n'est pas péjoratif aux
collèges, là. Je veux dire, je n'ai rien contre les
collèges. Je ne veux rien enlever aux collèges, mais j'ai bien de
la misère à dire: Écoutez, je serais très sensible
à leur confier des missions de recherche, surtout de la recherche
appliquée, des missions de diffusion et de transferts technologiques, et
également toute la dimension d'agrandir leurs responsabilités au
niveau de ce que j'appelle des services à la communauté
socio-économique. Là, vous avez assez de problèmes.
D'ailleurs, dans votre mémoire, il y avait tellement de cris d'alarme
sur des choses plus préoccupantes: pas d'espace, pas de locaux, on dit
non à peu près à 5000, 6000 adultes qui veulent parfaire
leur formation. Il me semble que vous avez là un mandat qui est assez
imposant. J'ai de la difficulté à vous en confier d'autres sur
des affaires nobles, chic. Qu'est-ce que vous en pensez?
M. Nadon: Ce qu'on constate en travaillant avec les entreprises,
entre autres, c'est que les
grandes entreprises se payent effectivement des activités de
recherche et des choses du genre, soit auprès des universités ou
créent leur propre centre. Ce qu'on constate aussi, c'est que les
petites et moyennes entreprises ne le font pas. C'est l'élément
moteur économique au niveau du Québec. Ça l'est aussi pour
Montréal. Ils ne le font pas et on remarque qu'on est les seuls à
travailler avec eux. On pense que dans ce cadre-là et pour eux, c'en est
un des axes qu'il faut privilégier pour eux. C'est clair que la veille
technologique, comme on l'appelle dans notre document, ce n'est pas toutes les
PME qui peuvent se payer ça, qui peuvent souscrire à
différentes choses, mais on pense qu'à partir du moment où
on a déjà établi un partenariat, si on peut aussi faire
ça, on sera un élément qui permettra aux PME de se
maintenir, mais aussi de progresser et de continuer au niveau du
développement économique.
M. Campagna: Je pense qu'il faut faire une distinction importante
aussi. À l'université, généralement, on va parler
davantage de recherche fondamentale, etc. Au niveau des collèges, c'est
plus de la recherche appliquée, de la recherche appliquée au
niveau technologique, etc. C'est dans ces domaines-là, dans la
recherche-développement que les entreprises font, qu'il faut donc
accompagner, ou faire avec des entreprises ce type de recherche très
concrète, à partir des connaissances technologiques que nous
enseignons dans les collèges. Alors, il y a déjà au
Québec 15 centres spécialisés qui font déjà
des activités comme ça et ça doit s'accroître
évidemment.
M. Nadon: J'aimerais peut-être ajouter une chose, c'est que
le niveau de l'enseignement collégial est un niveau technique, et c'est
aussi ce secteur-là. Les universités travaillent, bien sûr,
sur une certaine forme de recherche, mais, actuellement, l'autre constat qu'on
fait, c'est que pour l'univers technique il y a beaucoup moins de choses qui se
font, et c'est majeur comme importance.
La Présidente (Mme Hovington): II y a le
député de Jacques-Cartier qui m'a demandé la parole. M. le
député. (12 h 20)
M. Cameron: Merci, Mme la Présidente. D'abord, je voudrais
remercier le Regroupement et je voudrais aussi poser une question en anglais.
La réponse pourrait être en anglais ou en français.
In hearing several of these brieves, it seems to me that almost all of
the problems now stated for the cégeps really come back to about four
main difficulties. The first is demographic, that is to say the changes in the
population structure, not only the general population but for teachers
themselves, for instance, as well as the student bodies, across the province.
For example, for Montréal - the situation is somewhat different in most
cases for the rest of the province - the demographic situation in time, if you
like, vertically rather than horizontally, that is that the students that you
will be receiving in Montréal in the next 25 years may be a quite
different combination by age and background than in the past 25 years.
Then, the third problem is the problem of individual choice. You cannot
really tell what either full-time or part-time students are going to choose to
do and whether or not it will entirely fulfill general objectives of the
Québec society or even what you are trying to do in your particular
cegep.
The fourth one is that no one knows how to pay for this immensely
complicated tangle. It would seem to me in the circumstances that there would
be a powerful case for the financing to go directly to the students rather than
the institutions, not in terms of money, but in terms of the type of device
that has been suggested several times, both here and in other educational
investigations in the United States and Canada, voucher system, or
«banque d'études», or something of that kind, allowing
enough flexibility. Because if we go by the recommendations either of your
group, or recommendations, for example, of the Conseil supérieur, or the
recommendations of the student bodies, or the recommendations of the Chambre de
commerce, it seems to me that no matter what combination is chosen, you wind up
with a sort of bed of Procrustes. If there is a law, a change in the law,
intended to bring about a good reform for let us say the province-wide cegep
system, it may still be something that will have very bad effects for, say
Vieux-Montréal or Dawson College. And, on the other hand, if you do not
do something major, you run into a serious financial crisis, and a credibility
crisis. So, is there not more to be said for directing the action, so to speak,
or the choice to the student rather than to the complexity of the system?
M. Brown (Gerald): Permit me, Mr. Cameron, to respond to that. It
is not... I think that the evaluation of the problem that you have defined from
the point of view of the difficulty that we run, from the point of view of the
colleges to be able to deal with the demography, the different types of
students, the individual choice and the ability to pay, I think you read well
our mémoire, these are difficulties that we are faced with.
As for the solutions, I think that the solutions are close. I do not
think we have to change the entire system to respond to it. I mean, as it
presently is, we have introduced a number of financing formulas, in particular,
for instance, the FABES formula, which recognizes the presence of students in
the classroom. So, depending on the choices those students would
take, we would be funded accordingly for those changes. What remains to
be done now for the FABES formula is to introduce that in totally to the point
of making it available to our adult students, or to our partial students. That
is the next step that needs to be done. As is now, we have done it for our day
students and we have adjusted it accordingly in our different funding formulas.
All that needs to be done now is to move one step further to a full
implementation of FABES. I am not notoriously known to be the greatest
supporter of the FABES system, but I realize that in this process that is
probably the next step that we have to do.
The voucher system, the jury is out I think, Mr. Cameron, in certain
areas. It is true that in some areas it works, but in some other areas it does
not work well. And we would have equally a number of unsettled problems,
because then it would be difficult to start determining... Once the student has
made a choice, of course, we are still faced with the same problems that you
are talking about: Where do we put him, where do we insert him, what class do
we send him to?
There is a beginning also I think from the point of view of the Sprint
program that has been introduced recently. The Sprint program is beginning to
recognize the fact that there is people out there who would like to return back
to studies and is, through a tax-credit-process, funding them and giving them
the type of tax credits which is, I guess, a form of a voucher system.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, merci beaucoup.
Ça va aller? J'ai Mme la députée de Terrebonne qui a
demandé la parole.
Mme Caron: Merci, Mme la Présidente. Je vous remercie de
nous présenter une des incohérences les plus flagrantes du
système. Depuis plusieurs années, on nous parle de
priorités à l'éducation, de l'importance de la formation
de la main-d'oeuvre. On dénonce à tour de bras les
décrocheurs et, en même temps, on empêche
l'accessibilité à ceux et celles qui décident de parfaire
leurs connaissances, qui volontairement décident d'apprendre, qui ont eu
le goût d'apprendre en même temps. C'est extrêmement
incohérent, et votre mémoire a ce grand mérite de dire: II
faut absolument faire quelque chose là-dessus.
Au niveau de cette accessibilité, vous avez plusieurs
recommandations. Vous parlez également de l'importance des partenaires
en région. Votre organisme touche 11 cégeps de l'Île de
Montréal et de Laval. Et il y a une réalité, dans cette
grande région métropolitaine, la réalité de la
couronne de Montréal, la réalité de cette couronne qui est
en croissance démographique, depuis de nombreuses années,
tellement qu'à chaque élection on a ajouté un
comté. À la prochaine élection, on ajoutera deux
comtés: un au sud de Lanaudière et un autre au sud des
Laurentides. Et dans ces comtés-là se retrouvent des familles,
des jeunes qui ont droit aux cours du réseau collégial et des
familles, aussi, qui ont besoin de parfaire leurs connaissances au niveau de la
main-d'oeuvre, au niveau technique, au niveau préuniversitaire. On n'en
fait pas mention. On n'en parle pas, de cette réalité-là.
Elle est pourtant là. Vous avez parlé du manque de places, du
manque d'espace. Devant ce phénomène qui est là, qu'est-ce
que vous préconisez pour répondre à ces besoins-là
de tout un secteur de population qui est en pleine évolution?
La Présidente (Mme Hovington): M. Nadon.
M. Nadon: lorsqu'on parle de la couronne, c'est qu'on
considère aussi qu'on a d'autres collègues qui travaillent dans
ce secteur-là. je pense aux cégeps de la rive sud du
montréal métro. je pense aussi aux cégeps sur la rive
nord. ce qui est aussi un autre problème à
l'accessibilité, peut-être, c'est qu'on remarque qu'effectivement
il y a un certain nombre de ces gens-là qui travaillent à
montréal et qui étudient aussi à montréal. on
considère, dans un collège comme le nôtre et dans la
majorité des collèges à montréal, que 20 % de la
clientèle adulte à temps partiel n'est pas de la région
immédiate de l'île de montréal et de itie jésus mais
vient de l'extérieur. alors, c'est sûr que, peut-être, c'est
plus facile en termes d'aménagement d'horaire pour les individus de
travailler, de venir étudier et de s'en aller chez eux par la suite,
évitant peut-être la congestion des ponts et des routes. c'est
effectivement un autre phénomène qui vient jouer à
l'intérieur de l'accessibilité et qui, malheureusement, n'est pas
toujours tenu en ligne de compte à l'intérieur des
financements.
M. Lupien: C'est tout le concept régional, probablement,
qui risque d'être revu dans une dynamique d'une région
métropolitaine élargie.
M. Brown: J'aurais le goût de répondre aussi que
l'élément important et plus fondamental, c'est le rôle que
Montréal et sa région vont jouer dans le futur, l'avenir du
Québec. Il nous semble, en tout cas, à Montréal
qu'à un moment donné, pour une période de temps en tout
cas, Montréal n'a pas joué son propre rôle. On n'est pas
vus comme le moteur économique de la province. Je pense que les
décisions cheminent dans une bonne voie présentement. Les
résultats qui sortent de la commission permanente sur Montréal et
sa région indiquent clairement que l'île de Montréal et sa
région ont un rôle fort important à jouer pour
Montréal.
On a aussi à se poser la question non seulement sur les services
éducatifs qu'on a à donner sur l'île de Montréal et
sa région, mais aussi sur le rôle de l'île de
Montréal et sa
région. Est-ce que ce n'est pas important pour la vie
économique de notre province?
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup. J'aurais le
député de Sherbrooke qui aurait une question. (12 h 30)
M. Hamel: Oui, une brève question, si vous permettez, Mme
la Présidente. À la page 15 de votre mémoire, vous
mentionnez que «pour permettre aux établissements de formation de
jouer pleinement ce rôle avec l'appui du monde du travail, il faut
nécessairement qu'ils soient directement engagés dans la gestion
et le développement des programmes de formation», et vous
recommandez «que le MESS favorise une plus grande
décentralisation». Et là, vous y allez assez largement.
Est-ce que ça veut dire que vous laissez un peu le diplôme
d'État, que vous souhaiteriez un diplôme-maison? Et, à ce
moment-là, qui reconnaîtrait la valeur de ce
diplôme-maison?
M. Nadon: Ce n'est pas nécessairement dans cet
axe-là qu'on l'a fait. On avait plus en exemple le travail qui s'est
fait entre un collège et tout le secteur de la pétrochimie, entre
autres. Il y a eu un partenariat, des activités très timides, au
début. Mais, par la suite, l'industrie de la pétrochimie a
réalisé qu'il y avait effectivement là un organisme qui
était prêt à collaborer et à mettre sur pied autant
de nouveaux programmes qui satisfont les besoins de cette industrie-là.
C'est dans ce sens-là que le secteur de la pétrochimie a pu
être développé et pour lequel les collèges ont pu
déposer un programme. C'est plus dans cet axe-là.
La Présidente (Mme Hovington): Merci.
M. Campagne: Je peux peut-être ajouter un complément
là-dessus. En tout cas, au niveau des microprogrammes, des petits
programmes, huit, neuf cours qui conduisent à des A.E.C., il me semble
qu'après 25 ans les collèges pourraient être en mesure de
prendre les décisions et de donner des programmes et des diplômes
là-dessus. Je vous donne juste un exemple qu'on vit actuellement dans
mon collège, le collège Bois-de-Boulogne. On fait de la formation
en gestion de la qualité depuis un certain nombre d'années,
notamment, on en fait chez Bell Northern; je pense que c'est un bon exemple. On
essaie actuellement, on a une demande devant le ministère de faire
approuver un A.E.C. dans ce domaine-là. Ce n'est pas encore
approuvé, là, mais il me semble que des petits programmes comme
ça, tout au moins, je pense qu'après 25 ans, avec
l'expérience que nous avons, on pourrait nous-mêmes
déterminer ces programmes-là, les fixer.
Je ferais peut-être un aparté, si vous le permettez.
La Présidente (Mme Hovington): Rapidement, parce qu'on va
manquer de temps.
M. Campagna: Ça va prendre 10 secondes. Je ne sais pas si
Mme la ministre vous a fait circuler le document qui existe sur la formation
sur mesure qui est publié par le ministère. Je pense que
ça peut-être une très bonne illustration pour les gens de
la commission, s'il ne l'ont pas déjà lu, sur les relations
étroites que les collèges ont avec des entreprises sur des
projets concrets de développement.
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup. Alors, en
conclusion, Mme la ministre.
Mme Robillard: II ne me reste qu'à remercier les gens du
Regroupement d'être venus partager avec nous leur expérience et de
nous avoir apporté un éclairage très particulier sur tout
le secteur... appelons-le le secteur de l'éducation permanente. Merci,
M. Nadon.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, au nom de la
commission de l'éducation, il me fait plaisir de remercier le
Regroupement des collèges du Montréal métropolitain pour
avoir présenté aux membres son très bon et très
intéressant mémoire.
La commission de l'éducation suspend donc ses travaux
jusqu'à cet après-midi, 14 heures, où nous recevrons
l'Association des collèges privés du Québec. Alors, je
vous souhaite un bon déjeuner, et à cet après-midi.
(Suspension de la séance à 12 h 33)
(Reprise à 14 h 3)
La Présidente (Mme Hovington): En attendant le
porte-parole officiel de l'Opposition, j'inviterais l'Association des
collèges privés du Québec à venir prendre place, si
vous voulez bien. On sauvera un peu de temps comme ça.
Ah voilà!
Alors, nous allons débuter nos travaux. Il y a présent M.
le président, M. Benoit Lauzière?
Association des collèges privés du
Québec
M. Lauzière (Benoit) : Oui.
La Présidente (Mme Hovington): C'est vous? Bonjour,
bienvenue a la commission de l'éducation. Si vous voulez bien nous
présenter vos collègues qui vous accompagnent.
M. Lauzière: Oui. À ma droite, le
vice-président de l'Association des collèges privés du
Québec, Guy Forgues...
La Présidente (Mme Hovington): Bonjour.
M. Lauzière: ...directeur du campus Notre-Dame-de-Foy, et
M. André Beaucage, également vice-président et directeur
du collège Marie-Victorin.
La Présidente (Mme Hovington): Bonjour et bienvenue.
M. Lauzière: Merci.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, vous avez 20 minutes
pour faire la présentation de votre mémoire.
M. Lauzière: Merci. Comme vous le savez, nous
représentons 25 des 26 collèges privés du Québec,
déclarés d'intérêt public, qui offrent de
l'enseignement de niveau collégial. Comme vous le savez
également, notre mémoire a l'avantage, je pense, pour le lecteur,
d'être court, et ça a eu la contrainte, pour nous, de nous obliger
à aller à l'essentiel, dans le fond, et à éviter
tout dérapage ou toute suggestion, ce qui irait à rencontre de la
philosophie de nos membres, comme vous le savez, éviter toute suggestion
de nouveau mur-à-mur pour remplacer justement ce qu'on déplore
être le mur-à-mur actuel.
Le mémoire étant relativement court, je me contenterai -
je pense que ce sera plus utile pour vous qui avez déjà pris
connaissance, sans doute, de ce mémoire - de le présenter, pas en
m'efforçant de résumer au sens strict du terme, mais de le
présenter sous forme d'une série d'affirmations relativement
courtes qui constituent autant d'articulations de ce qu'est notre position sur
l'essentiel de ce qui nous semble devoir être dit sur l'avenir de
l'enseignement collégial.
Les états de service et la réputation des collèges
privés du Québec, malgré les conditions difficiles que
vous savez qui leur sont faites, les habilitent à parler avec
compétence et crédibilité, et en toute modestie, bien
sûr, des conditions nécessaires à la réussite des
collèges dans l'accomplissement de leur mission, à savoir la
formation complète et adaptée des étudiants qui les
fréquentent.
Ce que nous proposons dans notre mémoire s'applique à tous
les collèges, privés comme publics. Nous ne sommes pas ici pour
défendre des intérêts particuliers, si légitimes
soient-ils, mais les intérêts supérieurs de toutes les
institutions d'enseignement collégial qui souffrent d'un même mal
radical.
L'Association des collèges privés du Québec ne
préconise pas de faire table rase de ce qui existe. Nous parlons d'un
avenir prévisible et partons du fait que les collèges existent,
qu'ils ont rendu de bons services, qu'il y a là des ressources humaines
et des équipements collectifs dont il faut faire un usage productif.
Même s'il est vrai que l'éducation coûte cher et qu'il faut
tenir compte de la capacité de payer des con- tribuables, nous posons
que l'État doit maintenir un haut niveau de contribution
financière.
Ces préalables étant dits, venons-en maintenant aux
conditions - puisque c'est là notre propos - qu'il faut créer
aujourd'hui pour relancer les collèges. Le mal radical dont nous
parlions à l'instant, dont sont atteints les collèges depuis 25
ans, c'est la centralisation tous azimuts qui a tenu lieu de principe
d'organisation et de développement et qui a donné lieu à
l'immobilisme et à la paralysie, terrain propice, c'est bien connu
maintenant - c'est-à-dire, c'est bien connu, mais là aussi la
connaissance est souvent inutile; mais enfin, c'est bien connu - aux alibis et
à l'hypocrisie. Le seul remède possible et urgent, parce que seul
principe connu de dynamisme productif, c'est le retour à des
institutions libres et responsables. Et le couple est aussi important que
chacun de ses termes.
Donc, la plus grande mesure de liberté dans l'ordre des moyens et
la plus grande mesure de responsabilité dans l'ordre des
résultats. Des collèges libres et en concurrence, entre lesquels
la compétition ne se ferait pas en abaissant mais en élevant les
exigences. Une fois définis certains objectifs généraux de
la formation de ce niveau, le collège, premier responsable de
répondre à la demande de formation dans son milieu, doit
retrouver toute l'autorité nécessaire à cette fin, ce qui
inclut choisir son personnel et organiser le travail, fixer les conditions
d'entrée, choisir les matières et les méthodes
d'enseignement, juger du progrès des élèves, signer les
diplômes. (14 h 10)
La conséquence nécessaire de cette liberté
responsable, c'est une évaluation externe - et non pas le jeu de miroirs
ou le nombrilisme ou le narcissisme régnant - et une évaluation
des résultats. L'évaluation des collèges, c'est
l'évaluation de la qualité de leurs diplômés, et
cette évaluation n'est objective que si elle est confirmée par
ceux qui reçoivent les diplômés: les universités et
les employeurs.
La diversité qui en résultera n'est pas la tache
originelle que les grands champions et principaux bénéficiaires
de la centralisation s'efforcent d'effacer depuis un quart de siècle.
C'est plutôt le fruit de la liberté, principe vital non
substituable de tout développement efficace et efficient.
Le principe de responsabilité s'applique également - et
entraîne - au mode de financement et au comportement du citoyen
étudiant. Le soutien financier de l'État doit s'adresser aux
individus plutôt qu'aux institutions, et nous pensons que c'est le
meilleur antidote à la démangeaison d'intervention de
l'État en apparence justifiée par le financement direct des
institutions.
Le soutien financier des étudiants par l'État au niveau de
l'enseignement supérieur doit être élevé - c'est ce
que nous disions au début, nous
le répétons - mais limité et conditionnel. Il doit
être égalitaire mais laisser place à une part payée
par d'autres sources des frais exigés de l'étudiant et être
un régime d'aide financière généreux qui,
justement, empêche qu'un étudiant ne puisse pas accéder
à ce niveau pour les seules raisons économiques.
Il doit également, ce soutien financier, s'étendre sur un
certain nombre d'années. C'est dans ce sens que nous disons
«limité». L'objectif poursuivi est évidemment que les
études supérieures soient accessibles à tous et à
toutes sans discrimination économique et sans discrimination d'âge
non plus. On pourrait revenir sur les moyens, le cas échéant. Le
principe étant posé, les moyens, il n'y en a pas qu'un, mais je
pense qu'il est important d'affirmer très nettement ces principes de
base d'organisation.
Bref, je conclurai là-dessus. Si nous reprenions, enfin si nous
voulions exposer de la façon la plus compacte possible, la plus
résumée possible, la plus courte possible mais en même
temps qui essaie de dire à peu près tout ce que nous voulons
dire, je m'exprimerais de la façon suivante: Fini l'esprit de
système! Fini le mur-à-mur paralysant! Finis les alibis qui ne
peuvent aboutir qu'à des non-lieux! Finie la culture de l'entre-deux!
Vive la liberté créatrice de solutions nouvelles! Vive la
responsabilité stimulante! Vive le citoyen et l'étudiant mieux
servis, ce faisant! Vive, autrement dit, la seule dynamique de
développement de l'enseignement collégial! Je vous remercie.
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup. Mme la
ministre de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la
Science, vous avez la parole.
Mme Robillard: Merci, Mme la Présidente. Messieurs de
l'Association des collèges privés du Québec, je tiens
à vous remercier de votre participation aux travaux de la commission
parlementaire sur l'éducation. Il est très clair, et nous l'avons
dit souvent, que les collèges privés ont joué un
rôle historique, ont eu un apport historique au niveau de
l'éducation au Québec, et je ne parle pas seulement des
collèges actuels mais aussi de ceux à partir desquels s'est
bâti le réseau collégial que nous connaissons
maintenant.
Si j'en viens à votre mémoire, M. Lauzière, il y a
une seule ligne de fond qui m'apparaît, c'est que vous demandez la
liberté et la responsabilité complètes des institutions.
C'est le message central et presque unique de votre mémoire. C'est comme
ça que je le lis. Si je me trompe, vous me le dites. Dans le fond, vous
voulez cette liberté et cette responsabilité complètes;
donc, vous demandez un changement radical de ce qui se passe actuellement, un
renversement de perspective, comme vous le dites très clairement, un
nouvel équilibre au niveau de l'autonomie institutionnelle. Et,
même si vous ne vous opposez pas à des objectifs plus
généraux de formation qui seraient déterminés par
des autorités externes, vous dites très clairement à la
page 5: On pense que le collège - et quand vous dites «le
collège», je lis «le collège privé et le
collège public», n'est-ce pas? - devrait pouvoir avoir
l'autorité nécessaire pour choisir son personnel, organiser son
travail, fixer les conditions d'entrée, choisir les matières et
les méthodes d'enseignement, juger des progrès des
élèves et signer ses diplômes. Point. Alors, c'est ce que
vous réclamez, la responsabilité et la liberté
complètes au niveau des institutions.
Par ailleurs, j'aimerais ça vous entendre sur des questions un
peu plus vastes dont cette commission a le mandat. Vous connaissez les 10 ou 11
sujets qui sont sur la table de cette commission. Est-ce que je pourrais
savoir, par exemple, ce que pense l'Association des collèges
privés sur la formation générale de base que
reçoivent nos collégiens?
M. Lauzière: Oui. Alors, justement sur l'angle d'abordage
qui est l'objet de notre mémoire, sur cette question-là en
particulier, nous pensons, et l'histoire le montre un peu beaucoup - dans le
cas des institutions privées cela est vrai, mais c'est vrai aussi pour
les collèges publics - que, si on revenait aux conditions - je pense aux
conditions de base à la création des collèges, des
cégeps - si on se réfère, par exemple, au document
d'éducation no 4 qui essayait de dessiner quel serait le régime
de responsabilité et d'autonomie des collèges, eh bien, on se
rend compte qu'il y avait là évidemment de larges espoirs, dans
le fond une visée très juste qui n'a pas été
respectée par la suite, comme on dit. Je ne sais pas si... Ce n'est plus
vrai, en physique, que la nature a horreur du vide, mais disons que le vide
là-dedans a été vite comblé par une série
d'interventions galopantes qui ont fait que c'est vraiment le mur-à-mur
à tous les égards là-dessus.
Si on revient à la question de la formation fondamentale, s'il y
a quelque chose dans le concret et dans l'histoire réelle où
c'est évident que ça devrait être, dans le fond,
premièrement de responsabilité locale, c'est bien ce
domaine-là. Parce que qu'est-ce qui est arrivé? Et tout le monde,
tous ceux qui ont vécu dans le système, et j'y ai vécu
depuis le début, plus on définit en hauteur et de loin ce que
doit être la formation générale fondamentale... Et vous
savez, là-dessus, il y a eu beaucoup d'essais, beaucoup de productions,
beaucoup de réflexions philosophiques, métaphysiques,
sociologiques sur ces beaux mots de «général»,
«intégral», «réussi»,
«fondamental», bon, mais, si on regarde dans le concret, plus on a
défini de façon centralisée toutes ces choses, plus on
s'est contenté d'un formalisme où on ne sait pas ce qui s'y
passe, à l'intérieur.
Alors, actuellement, on est dans un for-
malisme de type très nominaliste où on dit: La formation
fondamentale générale, par exemple, ou la partie, en tout cas,
générale, disons, pour reprendre des termes plus clairs et plus
anciens, la partie non spécialisée, disons, bon, c'est quatre
cours de philo, quatre cours de français, deux d'éducation
physique, des cours optionnels. Et là on a défini à qui
mieux mieux, à travers les années, une série de
règles et de compositions de tout ça. Et le problème se
pose 25 ans après, ou je ne sais pas combien de milliards plus tard
là-dessus, c'est de dire: Coudon qu'est-ce qui s'enseigne exactement?
Quelle est l'évaluation qui a été faite des
résultats? Quel est le contenu, en dehors de cette appellation nominale,
où on dit: Québec approuve, dans le fond, s'il y a philo 101,
201, 301, 401, avec les cours de français et l'éducation
physique? (14 h 20)
À la limite, quelqu'un disait, en faisant une blague quand on
conversait là-dessus: S'il y avait, pour la formation
générale, une définition aussi large qu'il y a de
l'éducation physique, ma foi, ça correspondrait à peu
près à un portrait idéal de définition, puisqu'on
sait très bien qu'on dit qu'il faut qu'il y ait de l'éducation
physique et que le choix des cours est infiniment vaste. Les institutions une
par une n'ont-elles pas démontré dans le temps, sans nous battre,
là - l'histoire ne commence pas il y a 25 ans, quand même, bon -
qu'elles avaient tout ce qu'il faut? En tout cas, elles ont au moins autant ce
qu'il faut que n'importe quelle armée de fonctionnaires, ou
l'État, ou je ne sais pas trop qui, ou les pouvoirs centraux
parallèles. Une institution avec son personnel, son personnel
d'encadrement, a au moins tout ce qu'il faut et, en tout cas, plus ce qu'il
faut que toute autre solution pour définir, pour les étudiants
qui la fréquentent, quels doivent être les objets et le curriculum
d'information fondamentale. Et la concurrence entre les institutions, et les
impératifs de l'extérieur, et la vie continuant de poursuivre son
cours, il y a tout ce qu'il faut. En tout cas, il y a au moins plus là,
dans les institutions, qu'il y a dans tous les complexes, dans le fond, du
monde pour définir ce que doit être la formation
générale et fondamentale. Il y a matière à
discours, mais du point de vue de l'organisation, et les institutions qui l'ont
fait l'ont prouvé depuis longtemps. Encore faudrait-il savoir ce qui s'y
passe.
Mme Robillard: Mais, M. Lauzière, est-ce que ce n'est pas
beaucoup les collèges privés qui ont influencé, il y a 25
ans, le contenu des cours obligatoires et qui ont même
réclamé qu'ils soient obligatoires il y a 25 ans?
M. Lauzière: Vous faites appel à des
éléments de l'histoire. Je sais très bien qu'il y a eu un
long débat. Par exemple, juste pour la question de la philosophie
obligatoire, quand on regarde ce qui s'est passé à
Saint-Hyacinthe en 1966, si je ne m'abuse, il y a eu quelques discussions dans
le fond et quelques débats sur «est-ce que certaines disciplines
sont exclusivement porteuses de»? Ce que nous disons, nous, c'est que, du
point de vue même de l'Association que nous sommes - et on pense que ceux
qui sont plus hauts et plus loin que nous ont encore moins de choses à
dire là-dessus - nous ne prétendons pas, comme Association, avoir
la compétence, dans le fond, pour dire ce qui doit se passer ou à
Brébeuf, ou à Notre-Dame-de-Foy, ou sur tel type de
formation.
On pense cependant, et on est sûr de quelque chose - et c'est la
certitude qu'on essaie d'inscrire de la façon la plus forte possible
dans la présentation de notre mémoire - c'est que, s'il y en a
qui savent ce que doit être la formation générale et la
formation fondamentale, c'est ceux qui la conjuguent au quotidien, et qui ont
une histoire, et qui ont des perspectives particulières, et qui sont
sensibles à des besoins particuliers de leur région, ou de
l'histoire, ou de leur avenir. C'est ceux-là qui... Et je pense qu'on ne
peut pas aller beaucoup plus loin.
Mme Robillard: M. Lauzière, vous êtes parmi
ceux-là? Vous êtes parmi ceux-là, vous êtes
directeur...
M. Lauzière: Oui.
Mme Robillard: ...d'une institution qui a des nombreuses
années d'histoire...
M. Lauzière: Oui.
Mme Robillard: ...derrière elle.
M. Lauzière: Oui.
Mme Robillard: M. Forgues, la même chose. M. Beaucage, les
membres de l'Association des collèges privés, vous êtes ces
personnes-là qui vivez quotidiennement avec les étudiants, qui
voyez les nécessités de la formation. Alors, vous êtes
sûrement bien placés pour en parler, du contenu de cette
formation. C'est dans ce sens-là que je vous pose les questions.
M. Lauzière: Oui.
Mme Robillard: Vous me dites que l'Association ne peut pas se
prononcer pour Brébeuf, Notre-Dame-de-Foy, mais vous êtes trois
D.G. de collèges privés, vous les connaissez, ces
besoins-là de nos jeunes. Parlez-nous-en. Vous avez sûrement lu le
rapport du Conseil des collèges. Le Conseil des collèges, dans
son avis, ne s'adressait pas strictement aux cégeps publics; c'est aussi
pour l'enseignement collégial qui est donné par les
collèges privés. Vous avez sûre ment des idées sur
ces sujets-là. J'aimerais ça
vous entendre.
M. Lauzière: Oui. Si vous me permettez, je vais demander
à mon collègue Guy Forgues de s'allonger un peu là-dessus,
quitte à y revenir.
M. Forgues (Guy): Oui. Je pense qu'on est bien conscients tout le
monde que notre mémoire n'est pas très pointu. Au niveau des
objectifs par compétence, ce qu'on considère comme étant
important, c'est que les élèves du secteur général
puissent sortir de nos collèges avec une capacité d'apprendre
plus et, pour les étudiants du secteur professionnel, d'être
capables de s'adapter aux changements. Effectivement, on considère que
la réalité n'est pas nécessairement la même au
campus Notre-Dame-de-Foy, au collège Brébeuf ou dans n'importe
quel autre collège, qu'il soit privé ou public. Et ce sont des
choix d'institutions. Par rapport à la clientèle qu'on
reçoit, il peut être éminemment plus important pour nous,
parce qu'on a des ressources particulières par exemple en histoire, de
faire cheminer nos élèves par le biais d'un cours d'histoire
plutôt que par le biais d'un cours de philosophie, par le biais d'un
cours de géographie ou d'économique. Ce qu'on souhaite, c'est
d'avoir un mandat large et un mandat de résultat, et non pas une
obligation de moyens, de la part de l'État, dire: Ce qu'on souhaite,
c'est qu'à la fin des études collégiales vos
étudiants soient en mesure de. D'ailleurs, ça s'inscrit bien dans
l'ensemble des théories de management qui sont appliquées non
seulement au gouvernement du Québec, mais partout, de dire aux gens: On
vous fait confiance. L'obligation de résultat que vous avez, c'est
celle-ci, les moyens sont de votre ressort et on considère que vous avez
toutes les compétences et les motivations pour en arriver à ces
résultats-là.
Alors, si ça s'applique dans la gestion des ressources humaines,
on se demande pourquoi ça ne pourrait pas s'appliquer aux institutions
qui sont en charge de faire l'éducation des jeunes.
Mme Robillard: En tout cas, je vois bien que vous ne voulez pas
répondre à ma question, c'est assez clair, merci, mais j'en ai
une autre pour vous. Vous parlez de l'évaluation, vous parlez d'une
éventuelle accréditation des tests communs ou de certains examens
d'État. Vous dites ça à la page 7, «mais nul besoin
d'en décider a priori», que vous dites. Ça va
émerger, je ne sais pas d'où là, ça va
émerger. Expliquez-moi donc ça.
M. Lauzière: Si vous me permettez, Mme la ministre, je
voudrais revenir un peu sur la conclusion que vous venez de faire en disant, en
affirmant qu'on ne veut pas répondre à la question. Je dirais -
c'est le point de vue de notre mémoire - que nous voulons, dans le fond
- et nous le disons aux autres et nous nous le disons - résister
à la démangeaison bien connue depuis au moins 25 ans de
définir, urbi et orbi, par exemple, ce que doit être la formation,
les contenus, les numéros de cours, et ainsi de suite. Ce n'est pas
qu'il ne doit pas y en avoir, mais, par exemple, l'histoire d'un collège
comme celui que je dirige, je ne dirais pas impose, mais propose et
suggère, dans sa tradition, une certaine façon de faire, dans le
fond, pour la formation générale. Dans une autre institution,
c'est différent.
Je pense - et c'est notre propos - que l'État, effectivement - et
c'est ce que nous disons - peut donner des objectifs généraux.
Par exemple, pour être bien concrets, on peut très bien dire -
ça avait cette allure-là dans les premiers éléments
qui ont mené à la création de ce niveau-là: II faut
qu'à ce niveau une formation générale et fondamentale se
poursuive et qu'on doive y consacrer au moins, disons, la moitié du
temps. On peut dire 45 %, mais peu importe, c'est une suggestion, laissant
à ceux qui la font et qui savent ce dont ils parlent l'ordre des moyens.
Et les gens n'arriveront pas de la planète Mars justement, ils sont dans
un milieu qui a une histoire, qui a des impératifs, qui a des exigences.
Il y a des clients, il y a des gens qui s'intéressent a ce qui se fait
là. Bon. Là-dessus, on ne risque pas de se tromper.
D'ailleurs, tout ce qu'on dit, tout ce qu'on invoque et tout ce qu'on
dit sur la formation générale et fondamentale, on le tire souvent
d'un certain nombre d'éléments qui se sont construits dans des
démarches institutionnelles privées, pas au sens
nécessairement du statut juridique de l'institution, mais des
démarches singulières qui respectaient leur tradition ou leur
milieu et, quand on essaie de transformer ça en formalisme, dans le
fond, ou en recette mur-à-mur, eh bien, ça donne ce que ça
a donné. On pense avoir dit quelque chose et on ne fait que dire quelque
chose, on n'est même pas capable d'évaluer les résultats.
On peut avoir des tiroirs, des classeurs pleins de politiques institutionnelles
d'évaluation et ne pas savoir ce qui se passe en classe; nous, c'est
l'inverse qu'on propose comme démarche.
Mme Robillard: Oui, mais, M. Lauzière, si vous permettez,
si, par exemple, il fallait choisir la voie des examens d'État, il faut
bien en décider quelque part, il faut bien s'en parler. Est-ce que vous
en réclamez ou vous n'en réclamez pas?
M. Lauzière: Bon, nous, ce que nous réclamons, et
je ne veux pas éviter la question... Nous ne sommes pas contre a priori
un certain nombre d'examens d'État, mais il est important pour nous de
les situer. Ce qu'il faut d'abord dire, c'est qu'il faut renverser la vapeur et
favoriser une évaluation externe des résultats. Qui?
Premièrement, les institutions, ou les industries, ou les commerces,
ceux qui reçoivent
nos diplômés. Parce qu'il y en une règle de base,
dans le fond, et on ne peut pas la contourner - et, quand on veut la
contourner, on sait que les jeunes sont assez habiles pour la contourner: Si
les universités et les employeurs font, de fait, une évaluation
permanente, constante de la valeur de nos diplômés, on peut se
faire accroire, nous, entre nous, que le diplôme ou le papier, dans le
fond, fait valeur, a valeur et donne un droit d'entrée à
l'université ou chez les employeurs, tout le monde sait que ce n'est pas
vrai, mais on se dit ça en dessous de la table, parce que chacune des
facultés, chacune des universités prend les moyens pour savoir,
connaître la valeur des diplômés qu'elle reçoit.
Nous, on veut jouer ce jeu-là, dans le fond, limpidement.
Cela dit, je reviens à votre question. Ce qui est important,
c'est que l'évaluation soit celle des résultats et faite par des
organismes externes. Je pense là aussi qu'il faut éviter de
sombrer dans la tentation facile de tout de suite installer un système
là aussi mur-à-mur d'examens d'État. Nous ne sommes pas
contre un certain nombre de mesures qui peuvent envoyer un reflet et donner des
indicateurs, et c'est très intéressant. Nous sommes
également pour le fait que, premièrement - il y a des employeurs
qui le font déjà, d'ailleurs, de façon assez
systématique, comme vous le savez - les universités qui le font,
de fait, le fassent de façon la plus visible possible et la plus
crédible possible également. Ça renvoie de l'information
dans le système et ça aide tous les gens à se
réajuster. Nous ne sommes pas contre un certain nombre si... Pour
répondre à votre question spécifiquement, on n'est pas
contre a priori, mais je dirais que là aussi, puisqu'il s'agit d'examens
d'État, il faudrait savoir ce qui est mesuré et ce qu'il faut
mesurer, mais il faudrait éviter de succomber à la tentation de
passer d'un système à un autre dans ce domaine-là comme
dans tant d'autres. (14 h 30)
Le Président (M. Hamel): Merci. M. le député
d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Oui, M. le Président. Je veux
remercier M. Lauzière et son équipe: M. Forgues, M. Beaucage. Je
pense que c'est important que l'Association des collèges privés
du Québec vienne donner son point de vue.
Encore là, sans jeu de mots et sans aucune agressivité, au
contraire de ce que vous avez dit, M. Forgues, je trouve votre mémoire
très pointu. Vous avez dit tantôt: On admet que notre
mémoire n'est pas très pointu. Moi, je le trouve très
pointu. Il est pointu dans une direction, point. Puis vous avez le droit.
Alors, il est très pointu dans le sens que vous, vous prétendez:
Bien, laissez-nous la paix - en gros, là; on ne va pas se gargariser,
là - des institutions libres et responsables et là ça va
bien aller. En gros, c'est ça la ligne directrice de votre
mémoire.
Moi, je ne dis pas que ce n'est pas défendable, sauf que j'ai du
trouble avec ça par rapport au mandat qui nous est confié. Je
dis: Ça ne se peut pas que des gens qui ont tant d'expérience -
j'ai la chance de connaître M. Lauzière depuis un bon bout de
temps, M. Forgues également... Vous êtes des gens
d'expérience en éducation. Il n'en demeure pas moins que,
indépendamment des avis, nous allons devoir, puisque les grandes
instances au Québec, que ce soit le Conseil des collèges ou le
Conseil supérieur... Ça, ça ne veut pas dire que, parce
que ces gens-ià nous disent des choses, il faut toujours les copier,
là, mais essentiellement, eux, ils n'ont pas dit: On va rechoisir dans
la société québécoise une instance autre que celle
des collèges publics et privés du Québec, parce que
ça incluait, à ce que je sache, également ies
collèges privés. Ils ont dit: On refait le choix des
collèges, mais adaptés, modernisés, qui correspondent plus
au défi des années quatre-vingt-dix et suivantes. Et là je
ne veux pas refaire ça, vous savez tous ce que ça veut dire:
compétitivité, libre-échange, meilleure formation de base,
meilleure formation technique pour ceux qui décideront de la choisir,
évaluation. Il faut avoir un peu plus de contrôle sur les
apprentissages, qu'est-ce que vous voulez. Si on dit à des gens:
Dorénavant, on va refaire nos devoirs pour s'assurer que ce que nous
apprenons correspond plus aux besoins, et si on n'évalue pas plus ce
qu'on pense qu'on leur apprend, on n'est pas plus avancés. Et, dans ce
sens-là, moi, je suis un peu... Juste entre guillemets, je comprends
votre mémoire. On ne peut pas avoir 32 lignes de force dans un
mémoire. La ligne que vous avez eue, c'est de dire: Écoutez, tant
qu'il y aura juste une politique de mur-à-mur, qu'on va être en
difficulté. Puisqu'on fait une révision de l'avenir de
l'enseignement collégial, je pense que vous faites bien de nous alerter
que ce n'est pas dans du mur-à-mur, que ce n'est pas dans des politiques
homogènes, universelles que les progrès doivent se faire. Mais,
après qu'on a dit ça, il faut conclure et il va falloir accoucher
quelque part. C'est un peu ce que je veux questionner. Vous allez avoir un
exemple concret de ce que je veux faire.
Exemple: vous faites le choix de traiter de sujets liés à
l'avenir des collèges, mais je ne sens pas, dans votre mémoire,
si vous faites le choix tout court de l'existence même des cégeps,
parce que vous ne faites pas le choix de traiter la question de savoir si le
niveau collégial, ce niveau-là, comme on le connaît,
indépendamment de ses forces et de ses faiblesses, ça devrait
exister, selon vous. Moi, j'aurais aimé ça. Compte tenu de votre
expérience, dites-nous clairement: Non, on ne le remet pas en question,
ou: On le remet en question pour telle raison. Première question.
J'arrête là si je veux avoir une réponse.
M. Lauzière: Oui. Nous ne remettons pas en question
l'existence du niveau cégep. Deuzio, nous... Ça, je pense que,
dans le mémoire...
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Ça, c'est clair. M.
Lauzière: ...si c'était mal exprimé...
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Ah! je n'ai pas dit ça.
M. Lauzière: Non, non, mais il faudrait l'exprimer
clairement, et votre question nous invite à le faire. Nous ne remettons
pas en question l'existence du niveau cégep. Nous croyons plutôt
qu'il y aurait quelque danger, dans le fond, à la limite, à jouer
aux apprentis sorciers et là aussi à réinventer la roue.
Ils existent, ils ont rendu de bons services, il s'agit d'établir les
meilleures conditions pour les relancer.
Cela dit, M. Gendron, si vous le permettez, nous avons
l'expérience, justement, et je pense que nous ne sommes pas les seuls.
Nous n'avons aucune intention d'avoir la propriété privée
de l'expérience dans ce domaine. Il est pointu, et vous avez raison, je
pense, de le dire. Il n'est pas pointu sur les moyens, mais il est pointu sur
la ligne de fond qui est indiquée là parce que nous avons
justement l'expérience, au moins depuis 25 ans - mais d'autres diront
plus encore - que la tentation est toujours grande, dans le fond, de dire:
C'est vrai, il ne faut pas le mur-à-mur, ça a des effets pervers,
il faut décentraliser; mais passons à autre chose et
redéfinissons des contenus mur-à-mur et des programmes
mur-à-mur, et l'évaluation interne, et tout. Nous nous sommes
efforcés, à la limite peut-être de par la modestie de nos
moyens, mais également de par la philosophie, dans le fond, qui est la
nôtre dans les institutions que nous représentons, de le souligner
en très gros traits et de ne parler que de cela parce que nous savons
que, sans cette condition, le reste, dans le fond... On se donne bonne
conscience dans un discours décentralisateur et, deux minutes
après, on cherche partout les nouvelles formules mur-à-mur. C'est
de l'ordre de la pathologie sociale et économique au Québec. Bon
Dieu! Il faut en parler. C'est pour ça qu'on dit: Si c'est vrai, cela,
le reste doit être en partie vrai. Une des conséquences, ça
ne doit certainement pas être de rechercher si c'est quatre cours ou deux
cours de philosophie, ou quatre de français, ou les 22 règles
suivantes de composition des cours optionnels, ayant dit dans la phrase
précédente: Bien, le mur-à-mur, c'est mauvais.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Je veux bien être d'accord,
sauf que, regardez, je pense qu'il faut faire attention à l'autre
excès. On va essayer de jaser sur la page 6. Bon, on pourrait jaser sur
d'autres pages, mais prenez le bas de la page 6. Un exemple. Moi, je lisais
ça, puis je trouvais ça beau, mais je ne suis pas plus
avancé. C'était marqué: «Deuxièmement, plus
la responsabilité de la formation générale sera
assumée par le collège...» Je répète,
là, «plus la responsabilité de la formation
générale sera assumée par le collège,
conformément à sa tradition et compte tenu de ses ressources
humaines, plus on évitera de s'en remettre à des noms de
disciplines et à des numéros de cours pour s'acquitter de cet
objectif fondamental de la mission de ce niveau».
Je n'ai pas de trouble avec la phrase, mais j'ai un méchant
trouble avec la demande du milieu. Les jeunes nous ont tous dit: II faut avoir
une formation générale qui corresponde davantage aux besoins
d'aujourd'hui. Ils demandent ça, là, les gens, puis, moi,
là, je ne suis pas de l'État, je ne suis pas du gouvernement,
mais je suis associé à cette démarche, là, par la
responsabilité qui est mienne comme parlementaire, puis je voudrais
l'exercer. Alors, on va être obligés, à la fin de la
commission, de conclure à quelques affaires.
Alors, je relis votre phrase. Moi, personnellement, je ne peux pas
être d'accord avec ça, compte tenu du mandat que j'ai et de la
responsabilité, parce que vous me dites: «Plus la
responsabilité de la formation générale sera
assumée par le collège, conformément à sa tradition
et compte tenu de ses ressources humaines, plus on évitera de s'en
remettre à des noms de disciplines et à des numéros de
cours pour s'acquitter...» Mais, dans quatre ans, si j'écoutais
ça, ça veut dire que je ne touche pas à ça, puisque
je le laisse au collège, je laisse à chaque collège la
possibilité de revamper, si vous me permettez l'expression, la formation
générale. C'est ça que vous me demandez.
M. Lauzière:oui.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Puis vous êtes convaincus qu'il
n'y aura pas, dans trois, quatre ans, les mêmes intervenants, avec
raison, qui vont dire: M. Gendron, Mme la ministre, nous ne trouvons pas que
l'État québécois s'est assuré que la formation
générale corresponde aux besoins de celles et ceux qui
prétendaient qu'il y avait lieu de la corriger. Puis là je vais
avoir un problème de conscience. Je vais dire: Je me suis fait dire
ça dans une commission II y a trois ou quatre ans, puis je le
partageais. Puis je suis retourné, puis j'ai dit: Non, non,
écoutez, là, au nom de la créativité de la
liberté, parce que seule la liberté est créatrice...
À un moment donné, vous avez dit ça tantôt.
Ça, ça donne toutes les sagesses requises pour apporter toutes
les modifications.
J'ai peur de ça. Je vous le dis comme je le pense, mais je ne
pense pas que je fasse du mur-à-mur quand je dis: De toute façon,
il va falloir atterrir en quelque part. Il va falloir finir
en quelque part par des matières et des disciplines pour dire:
Voilà ce que nous croyons être un contenu de formation dite
générale. Pourquoi vous êtes contre ça?
M. Lauzière: Justement, vous pensez que cette
dernière phrase, dans le cadre d'un échange que vous initiez...
Vous pensez vraiment que ceux qui sont les mieux placés pour le faire
seraient, par exemple, une équipe de fonctionnaires, ou de politiciens,
ou d'externes? Je pense que, justement, fa preuve a été faite. Il
y a 25 ans, il y a eu telle chose, une volonté de définition, et
ça s'est juste amplifié par la suite des choses, d'une
définition, je dirais, formelle, pour ne pas dire formaliste, là,
de la formation générale, et on s'en plaint. Au bout de 25 ans,
vous dites: Très bien, vous...
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Excusez. Excusez, M. Lauzière,
puis vous ne m'en voudrez pas, là. Je ne veux pas vous couper, mais pas
du tout! Je veux avoir votre aide. Je ne veux pas, justement, que ce soit
défini au 15e étage. Je le connais un peu, le 15e. Je l'ai
vécu, le 15e du G. Puis ce n'est pas péjoratif. C'est tous des
excellents collaborateurs pour le vrai, là. Je veux dire, il n'y a aucun
problème pour nous autres. Je n'ai aucun trouble avec les hauts
fonctionnaires.
Une voix: Le 16e.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Même chose au 16e. Tout ce que
je veux dire...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Oui, mais, à cette heure, vous
avez les deux étages, vous, là! Votre premier ministre est
à deux vitesses, vous, vous êtes sur les deux étages.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Non, mais, trêve de
plaisanterie, là, j'ai beaucoup de respect pour ces gens-là,
mais, justement, je ne veux pas que ça soit fait en vase clos. Donc,
concrètement, puisque je dois atterrir puis avoir un contenu,
aidez-nous. Vous connaissez ça! Vous êtes des gens
spécialisés là-dedans et vous savez que, nous, on ne
pourra pas juste être vertueux puis dire: Oui, oui, les collèges
vont définir ça. Il va falloir le faire. Aidez-nous à le
faire comme il faut pour que les éléments que nous allons retenir
donnent plus de garanties qu'enfin ça représente une formation
dite générale qui répond à 1992, en sachant ce que
ça signifie. C'est ça que j'aimerais. (14 h 40)
M. Lauzière: Je vais laisser parler Guy. Je parlerai
après.
M. Forgues: La question qui se pose, c'est: Pourquoi vous
sentez-vous obligé de le faire? Pourquoi l'État se sent-il
obligé de le faire alors qu'on dit que les compétences pour
définir les contenus des apprentissages, c'est dans les
collèges?
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Je «peux-tu»
répondre?
M. Forgues: Bien...
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Non, non, mais je trouve que c'est
bon.
M. Forgues: Si Mme la Présidente le permet.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Je demande la permission à la
présidente. Je trouve que c'est très sérieux. C'est bon,
d'après moi, un échange dynamique comme ça. Moi, ce n'est
pas parce que je veux que ce soit l'État. Moi, dans le fond, je
répondrais comme ceci: Pourquoi je pense que nous devons le faire? Un,
c'est parce que ça nous est demandé et, deuxièmement,
c'est parce que j'ai acquis la conviction que, si on ne le fait pas, on va
arriver quatre ou cinq ans plus tard au résultat que j'observe
aujourd'hui, c'est-à-dire que la formation générale, pas
par mauvaise foi, ne répond pas aux exigences que le milieu souhaite en
termes de contenu. Écoutez, le mot le dit, à moins que les mots
ne veuillent plus rien dire, une formation générale de base - il
faut finir nos phrases - ça signifie: Que tu ailles en
préuniversitaire ou que tu ailles en formation technique,
dorénavant, si tu me dis que tu as obtenu un D.E.C., moi, je veux savoir
ce que tu as obtenu. Je ne veux pas savoir que tu as obtenu... D.E.C. veut dire
diplôme d'études collégiales. Je m'en fous, de ça.
Ce n'est pas ça que je veux savoir. C'est quoi, ton contenu de D.E.C?
Bien, le contenu de D.E.C, il faut que je le connaisse, moi, pour être
capable d'évaluer ce que ça vaut, la formation dite
générale de base. Si je ne la définis pas, comment je vais
faire pour savoir ça?
M. Lauzière: Écoutez un peu, là. Je pense
que la question que vous posez me semble, évidemment, fondamentale, sans
jeu de mots, mais partons de l'organisation actuelle. Les institutions
d'enseignement de niveau collégial privées ou publiques que
l'État reconnaît pour fins d'intérêt public, que
l'État accrédite et que l'État finance, est-ce que
ça ne devrait pas indiquer un peu le lieu où devrait se
définir cette chose-là, puisque l'État ayant pris les
moyens, au moment de la reconnaissance de la valeur d'une institution
d'enseignement, lui demande de donner tel enseignement ou accepte qu'elle le
donne à partir d'une demande, d'une démarche privée, le
cas échéant, finance une
bonne partie, comme c'est le cas actuellement, finance beaucoup dans le
public et finance une bonne partie dans le privé et, dans notre propos,
finance de façon égale tous les étudiants qui veulent
fréquenter ce genre d'institution? Bien, il me semble que je viens de
savoir, quand j'ai dit ça, que ce sont les personnes les mieux
placées - quitte à ce qu'elles soient évaluées au
terme - pour me dire et comprendre les besoins auxquels il faut répondre
et avoir une capacité de le faire de façon évolutive.
Parce que vous savez comme moi qu'un des problèmes... Dans le fond, une
erreur de parcours et une différence, si elle a des effets non
désirables, ça peut se corriger plus rapidement. Une erreur de
système, vous en parlez 25 ans après, et même là,
tout le monde est prêt à dire que ce n'est pas une erreur. Faisons
une expérience de 75 ans encore et on verra après; les enfants de
nos enfants y pourvoiront.
Alors, ce qu'on dit, nous, c'est que la capacité de
définir... Ça s'est fait comme ça et ça se fait. Il
ne faut pas oublier - et on n'est pas ici, nous, pour dire que nous sommes dans
le mal absolu et qu'il faut aller dans le bien total - que, puisqu'on se pose
des questions sur une relance plus vigoureuse de ces institutions-là, on
pense, effectivement, qu'il y a des correctifs majeurs qui doivent être
apportés à la source même. Par exemple, sur la question de
la formation générale ou de la formation fondamentale, on pense
que ce sont les formateurs des institutions reconnues,
accréditées et financées par l'État qui devraient
probablement être les plus à même de dire à
l'État, d'abord, et surtout aux citoyens, à leurs clients et aux
étudiants ce qu'ils font, pourquoi ils le font et comment on peut
évoluer.
À la limite, pour faire une comparaison avec ce que Churchill
disait: La démocratie, c'est le moins mauvais des systèmes, bien,
à coup sûr, le moins mauvais et sans doute, pour nous en tout cas,
le meilleur des systèmes ou la meilleure des conditions, c'est de partir
de là où ça se fait, avec toutes les exigences de
contrôle, l'imputabilité publique sur le plan financier, les
contrôles externes. Mais je vous dis que plus on le définit d'en
haut, plus on le définit pour les autres, plus on le définit de
façon purement abstraite, sans jamais savoir ce qui s'y passe.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Je comprends ce que vous dites. On va
réfléchir. Je donne un autre exemple pour éclairer
davantage. Vous avez préconisé les vertus de la diversité,
à la page 8: «En laissant aux institutions d'enseignement une
liberté véritable, nous obtiendrons des institutions ayant
chacune, de plus en plus, ses caractères propres.» C'est bien,
c'est correct, je comprends la phrase. «Il y aura des collèges
plus ouverts», plus spécialisés. «Il y aura des
collèges plus sélectifs a l'entrée». Oh! la peur me
prend. «Il y aura des collèges polyvalents». Il y aura
«des collèges spécialisés». «Il y aura
des collèges seulement collégiaux». Il y aura «des
collèges qui auront intégré le collégial»,
d'autres le secondaire, d'autres pas, ou les dernières années du
secondaire seulement. «Il y aura des collèges ou plus humanistes,
ou plus scientifiques, ou plus techniques». Et là je dis: Eh bien,
en Abitibi, je vais avoir l'air fin, j'en ai juste un. En gros, là.
Puis là je le sais, je le fais par exprès, je le fais
volontairement pour permettre de tirer quelque chose. Est-ce que vous ne voyez
pas là quand même... Je ne peux pas en avoir 25 autres
collèges, et dans les régions où effectivement je veux
absolument que le jeune en Abitibi-Témis-camingue... Puis ce n'est pas
parce qu'il vient de l'Abitibi-Témiscamingue qu'il n'a pas droit
à une formation générale de base convenable. Quand il ira
aux HEC ou quand il ira à une autre faculté à
l'université, je veux qu'à son entrée il ait les
mêmes conditions d'accès, puis je veux être capable de
porter un jugement sur ce qu'il a reçu. Est-ce que vous ne croyez pas
que ça nécessite, quand on poursuit des objectifs communs,
d'avoir un minimum de choses à définir? Comment je vais faire
pour vérifier l'authenticité des objectifs communs si je n'ai pas
défini un minimum d'exigences de base?
M. Forgues: Moi je demeure convaincu que M. Barrette et son
équipe au collège de l'Abitibi-Témiscamingue vont
être capables, à partir des besoins de leur milieu et des
feed-back qui leur seront donnés par les universités et par le
marché du travail, d'ajuster leur formation au fur et à mesure de
l'évolution du temps. Je suis convaincu qu'il y a plein de
compétences dans ce collège-là qui vont être
capables de répondre aussi bien aux besoins de la région qu'aux
besoins de formation de l'enseignement supérieur universitaire ou du
marché du travail. Je suis convaincu de ça. Vous ne l'êtes
pas?
M. Lauzière: Si je peux ajouter quelque chose...
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Je connais très bien M.
Barrette. J'ai beaucoup de respect pour M. Barrette. Je connais depuis 10 ans
M. Barrette. Je n'ai pas la même conviction, mais je ne l'applique pas
à M. Barrette.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Forgues: L'équipe du collège de
l'Abitibi-Témiscamingue. Non, mais pour donner un exemple concret.
M. Lauzière: Cela dit, il faut bien dire que nous ne
faisons pas table rase de tout ce qui existe de mécanismes de
concertation qui ne sont pas juste des choses dirigées, conçues
et accompagnées à tous les pas par l'État. Par
exemple,
pour la question... Et là on a parlé longtemps de la
formation générale ou fondamentale. Peut-être qu'il y avait
une certaine ambiguïté dans les termes, mais pour la filière
des cours de spécialisation, pour prendre un vieux jargon, la
filière préuniversitaire et les cours de spécialisation
dans la filière technique, ils se définissent concrètement
de façon efficace dans le fond. Parfois, on peut reprocher que ça
ne va pas assez vite et tout ça, mais il y a un rapport constant, et,
s'il n'y a pas, compte tenu qu'on parle de l'évaluation externe, un
rapport constant, continu et vraiment utile et de concertation, eh bien, les
étudiants ne viennent plus chez vous. C'est ça,
l'évaluation des résultats. Si je veux former
éventuellement des secrétaires dont le métier ne
correspond plus du tout aux exigences du marché, je peux bien tenter,
mais, si je suis financé et évalué à partir des
résultats, il va y avoir comme une contrainte réelle dont je
devrai bien tenir compte. C'est dans ce sens-là.
Le marché. On ne parle pas du marché, on n'est pas rendu
au capitalisme sauvage, là. Il y a autant de mécanismes de
concertation et de coordination qu'il y a d'individus à certains
endroits. Mais, cela dit, nous, on pense que ces mécanismes-là
doivent demeurer. L'État n'est pas évacué et tous les
mécanismes de concertation ne sont pas évacués.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Oui, mais rapidement, M.
Lauzière. Il faut faire attention à deux choses - puis il me
reste une autre question; là, c'est un commentaire que je fais.
Écoutez, j'aurais beau avoir le meilleur M. Barrette que vous voulez,
puis je le répète parce que c'est amical, je le connais
très bien, je n'ai pas de trouble avec, mais écoutez, vous dites:
Les gens ne choisiront plus le cégep s'il n'est pas adapté et
s'il ne s'adapte pas. En Abitibi-Témiscamingue, je répète
qu'il y a au moins - puis je le dis comme ça et je serais capable de le
prouver - 40 % des parents par rapport à leurs jeunes qui n'ont pas 25
choix de cégeps, ils en ont juste un pour les moyens financiers, et
ainsi de suite, c'est celui qui est là. Alors, si celui qui est
là n'a pas une formation de base que je peux évaluer, même
si, vous, vous souhaitez qu'en le laissant libre tout va bien aller, parce que
c'est un peu ça la ligne, par la liberté créatrice
ça va bien aller, je n'ai pas la conviction que j'aurai le choix
d'envoyer mes enfants à un cégep où j'aurai la garantie
qu'ils auront une meilleure formation de base.
Mais je veux lâcher la formation de base, j'ai une autre question.
À cause du temps, vous prendrez les deux. Dans votre réponse,
vous vous arrangerez pour commenter les deux. Vous êtes capable, M.
Lauzière, ce n'est pas péjoratif.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lauzière: Merci, M. Gendron.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Vous voulez que l'État se
désengage. Vous demandez au fatigant de se retirer. Alors, moi, je
demandais la même chose, mais, pour moi, le fatigant, c'était le
fédéral. Mais ça, c'est réglé. Alors, vous
demandez au fatigant de se désengager, en parlant du Québec,
graduellement, puis vous dites: II devrait commencer par abandonner les
interventions les plus lourdes. Dans deux ou trois phrases concrètes,
j'aimerais ça que vous me précisiez les séquences de ce
désengagement. Comment voyez-vous ça? Comment voyez-vous
ça en termes de séquences que l'État se désengage
d'abord des interventions les plus inappropriées, les plus lourdes, pour
voir ce qui me resterait comme bébé à la fin?
M. Lauzière: Oui. Je pourrais partir par la fin en disant:
Ne vous inquiétez pas, il en restera, je pense, beaucoup, beaucoup,
mais, enfin, je réponds à vos deux questions. Vous m'avez permis
de reprendre l'autre question. (14 h 50)
Quand vous dites: On ne saura pas si c'est dans un cégep, dans
une région ou dans un collège où il n'y a qu'une
institution, je dis: Non, non! Vous saurez beaucoup plus si on instaure une
pratique d'évaluation des résultats connue et vous saurez
beaucoup plus que ce que les gens pensent savoir actuellement, en
évaluant des processus et des comment, et si peu que pas des
résultats. Ça commence, il y a eu quelques foulées dans la
bonne direction, quand on parle des indicateurs et des choses comme
celles-là.
Mais, cela dit, moi, je dis: Ce n'est pas parce qu'il y a de la
liberté et des moyens qu'il n'y a pas connaissance; au contraire. C'est
un couple dont je disais au début qu'il a les deux termes. Le couple est
aussi important que ses deux termes, c'est-à-dire que les gens sauront
effectivement beaucoup plus ce qui s'y passe, et le fait de savoir que les gens
sauront ce qui s'y passe parce qu'il y a une évaluation des
résultats, il y aura comme une obligation et une contrainte très
forte, c'est le cas de le dire, pour prendre les meilleurs moyens, parce qu'on
saura désormais qu'on ne sera pas juste jugés sur la façon
dont on a fonctionné, mais sur les résultats réels qu'on a
produits. Ça, c'est la première chose.
Deuxième chose, évidemment... Comme vous m'avez
indiqué que le temps était un peu court, ça m'aide un peu,
je ne peux pas vous donner une leçon complète sur les
étapes du désengagement de l'État, mais, par exemple, dans
la définition, on parle souvent de la formation générale
ou fondamentale, qu'il y ait de moins en moins de gens, dans le fond, qui,
à mon sens, le fassent - et ce n'est pas une question de personnes, on
se comprend, c'est une question de système et de structure - mais qui
peuvent être amenés, dans le fond, à utiliser du temps tout
à fait improductif à définir, par exemple, les
compositions et le nombre de matières, les méthodes, la
composition des cours optionnels, et tout. Je pense que, quand on dit
«l'État», là, on comprend que ça couvre
largement tous les fonctionnaires qui travaillent à son maintien et
à son développement. Mais je pense qu'il y aurait beaucoup de
meilleures énergies à resituer ou recibler dans la ligne de
l'évaluation des résultats, beaucoup moins d'énergies
investies à accompagner, dans le fond, main dans la main et à
tous les pas ce que chacun doit faire dans les cégeps ou dans les
collèges. À ce moment-là, il me semble que le
désengagement commencerait par dire: Quand ce n'est pas utile, quand ce
n'est pas productif, quand ça n'introduit pas une dynamique de
développement, bien, je n'y suis pas et je laisse aux seuls qui peuvent
le faire le soin de le faire. À ce moment-là, je pense que tout
le monde travaillerait mieux à son niveau et je suis sûr qu'en
bout de ligne les résultats, en tout cas, seraient plus
intéressants et que les étudiants seraient mieux servis, et dans
un net meilleur rapport qualité-prix, «qualité»
étant bien définie par ceux qui savent en parler,
contrôlée par ceux qui doivent mesurer les résultats.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. Merci beaucoup. Une
courte question pour M. le député de Jacques-Cartier?
M. Cameron: Merci, Mme la Présidente.
Merci pour votre mémoire. Je voudrais demander quelque chose en
anglais, réponse en français si vous voulez. I would like to ask
whether the private colleges, which I know have a good record of formation -
the record now on how well they have done compared to public colleges has been
often studied in books like «Le monopole de l'État dans
l'éducation» and others - I wonder if they encourage any of their
students to become teachers in the public system at either the primary, the
secondary or the cégep level itself, and whether some of the problems of
the public cégeps might be addressed by just getting some more products
of the private colleges after they have done their university studies to enter
into the large public institutions.
M. Lauzière: Oui. Écoutez un peu, là-dessus,
peut-être que M. Beaucage a des... Ça va? Tu...
M. Beaucage (André): Non, non.
M. Lauzière: Non. C'est parce que, là-dessus, sur
la question, on évite... on essaie, dans le fond, on a essayé
dans notre mémoire, en tout cas, de ne pas aborder cette
question-là sous l'angle des mérites, si je puis dire, du
système privé par rapport au système public. Nous, ce dont
nous sommes convaincus, c'est que, en termes d'effets dont vous venez de parler
pour une partie, on pense que, si chacune des institutions - et j'insiste
là-dessus parce qu'au début, à la création des
cégeps, et je l'ai dit souvent en faisant des blagues... S'il y avait la
mesure de liberté de moyens qui était prévue dans les
cégeps au début de leur création, ça ferait
pâlir d'envie un certain nombre d'institutions privées eu
égard à ce qu'on souhaite comme liberté de manoeuvre.
C'est qu'on a perdu le fil très rapidement et qu'on a occupé le
vide dangereusement, et pas seulement le gouvernement. C'est pour ça
que, quand on parle de décentralisation... Bon.
Mais, cela dit, je serais un peu mal à l'aise, dans le fond,
compte tenu du propos de notre mémoire, de... Il y a d'autres
commissions parlementaires, dans le fond, où on exige des choses et on
essaie de faire reconnaître le mérite propre de l'enseignement
privé, mais le problème, on le sait, n'est pas uniquement
dû à des statuts juridiques. Il y a un principe d'organisation
qui... Prenez le régime pédagogique de l'enseignement
collégial, il vaut... Les collèges privés y sont soumis.
Alors, il y a des conditions. Et c'est ce que, dans le fond, sans
phari-saïsme, on essaie de dire. Le succès, la
crédibilité, le mérite propre - qui n'est pas exclusif au
privé, faisons attention - nous avons une histoire dans les institutions
que nous représentons qui nous permet de dire avec
crédibilité quelles sont les meilleures conditions pour faire
partir la machine et faire en sorte que toutes les institutions retrouvent,
dans le fond, le sens de la responsabilité eu égard aux
résultats, le goût du développement et le risque du
développement.
Si on n'instruit pas ça dès le début, si je puis
dire, si on n'introduit pas ça, le reste, ça va être du
«patchage», du colmatage et de la révision à tous les
quarts de siècle.
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup, M.
Lauzière. Alors, Mme la ministre. En conclusion.
Mme Robillard: Merci, Mme la Présidente. M.
Lauzière vous voyez un petit peu la réaction que nous avons eue
aujourd'hui par rapport à votre mémoire. Je tiens à vous
dire que votre mémoire a peut-être été un peu
excessif en termes de liberté, de responsabilité complète.
Excessif dans le sens que, si on veut s'en aller dans cette voie-là...
Moi, l'image que j'ai, j'ai l'impression que vous demandez l'autonomie
académique - pour faire une analogie - universitaire. Vous demandez un
petit peu que les collèges s'en aillent dans cette voie-là. J'ai
cru percevoir le message de fond.
Par ailleurs, il me semble que vous n'avez pas bien cerné le
rôle de l'État dans ses objectifs et ses orientations. Ensuite,
l'autonomie des collèges que vous souhaitez, et surtout à la
fin... Et pourtant, vous avez beaucoup insisté dans votre échange
avec nous sur l'évaluation des résultats. Ça fait partie
de la nouvelle approche
que vous nous suggérez. Cependant, cette mécanique
d'évaluation des résultats, vous dites: Nul besoin d'en
décider a priori. C'est peut-être pour ça qu'on avait de la
difficulté, parce que le filon de base qui est le filon d'autonomie des
établissements... Je tiens à vous dire qu'il y a beaucoup de
mémoires qui soulèvent - ce n'est pas une problématique -
cette façon de faire pour améliorer la qualité de la
formation. Donc, il y a sûrement là un certain équilibre
à faire.
Mais, ceci étant dit, je veux vous remercier personnellement
d'être venus nous rencontrer et de nous avoir fait partager cet esprit ou
ce nouvel esprit qui vous inspire pour l'ordre d'enseignement collégial.
Merci.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, au nom des membres
de la commission de l'éducation, merci beaucoup d'être venus nous
présenter votre mémoire.
J'inviterais maintenant l'Association professionnelle des aides
pédagogiques individuels et l'Association québécoise
d'information scolaire et professionnelle à venir prendre place, s'il
vous plaît. Nous allons suspendre pour une minute.
(Suspension de la séance à 14 h 58)
(Reprise à 15 h 1)
La Présidente (Mme Hovington): La commission de
l'éducation va reprendre ses travaux. Je demanderais un peu de silence
en arrière s'il vous plaît. Il y a M. Jean-Luc Lavoie,
président de l'Association professionnelle des aides pédago
giques individuels, bonjour, M. le président. Et il y a M. Gaston
Leclerc, président de l'Association québécoise
d'information scolaire et professionnelle. Bonjour. Lequel de vous deux sera le
porte-parole, chacun votre tour?
Association professionnelle des aides
pédagogiques individuels (APAPI) et
Association québécoise d'information
scolaire et professionnelle (AQISEP)
M. Leclerc (Gaston): Chacun notre tour.
La Présidente (Mme Hovington): Si vous voulez bien
présenter les collègues qui vous accompagnent.
M. Leclerc (Gaston): Oui. De mon côté, pour
l'Association québécoise d'information scolaire professionnelle,
la vice-présidente et secrétaire de notre Association, Francine
Duval, qui est conseillère en information scolaire et professionnelle
dans un cégep du Québec, qui est à Baie-Comeau.
La Présidente (Mme Hovington): Bonjour.
M. Lavoie (Jean-Luc): De mon côté, à
l'Association professionnelle des aides pédagogiques, il y a M. Conrad
Roy, qui est vice-président de l'Association et qui oeuvre au
cégep Lévis-Lauzon, et M. Claude St-Amant, secrétaire de
l'Association et qui travaille au collège de Matane. Quant à moi,
je travaille au cégep de Saint-Jérôme.
La Présidente (Mme Hovington): Certaines personnes que
j'ai connues. Bienvenue à la commission. Alors, vous avez 20 minutes
pour faire part de votre mémoire aux membres de la commission.
M. Leclerc (Gaston): Est-ce qu'on pourrait vous poser une
question, Mme la Présidente?
La Présidente (Mme Hovington): Oui, allez-y.
M. Leclerc (gaston): étant donné qu'on est deux
groupes, pourrait-on savoir si les 20 minutes incluent la présentation
des deux groupes?
La Présidente (Mme Hovington): Oui. M. Leclerc
(Gaston): Merci.
La Présidente (Mme Hovington): Vous avez 10 minutes
chacun, si vous voulez être équitables.
M. Leclerc (Gaston): D'accord. Je vais être le premier. Mme
la Présidente, Mme la ministre, messieurs, mesdames de cette commission
parlementaire d'importance pour l'avenir des collèges au Québec,
il nous fait extrêmement plaisir, comme association professionnelle
d'information scolaire et professionnelle, d'être ici présents
pour vous aider et vous éclairer dans ces travaux d'importance.
Les propos, à la suite de la présentation de notre
mémoire, je voudrais attirer votre attention sur six points: tout
d'abord, dans un premier temps, nous souhaiterions bien présenter notre
Association pour que l'éclairage soit le meilleur possible; vous donner,
dans un deuxième temps, notre point de vue sur cette formation qui, pour
nous, est d'importance; dans un troisième point, vous présenter
une proposition quant à l'introduction d'un cours, qu'on intitulerait
préparatoire à la carrière; dans un quatrième
temps, on voudrait vous parler de l'accessibilité aux études
collégiales; en cinquième, la révision des programmes et
des préalables et, pour terminer, avec les services d'information et
leur importance.
Si vous me permettez, je vais débuter tout de suite en vous
précisant le rôle et la situation de notre Association. Je
voudrais vous dire, dans un premier lieu, que notre Association est
interniveaux; ça veut dire que ça touche tous les gens qui
oeuvrent en information scolaire et professionnelle au Québec, tant aux
niveaux secondaire, collégial et universitaire que dans les centres
d'emploi et les centres de main-d'oeuvre. Et, pour la gouverne de plus en plus
claire, au secondaire, ce sont les profs d'éducation et de choix de
carrière dans le cadre du cours d'éducation au choix de
carrière; au niveau collégial, ce sont les conseillères et
les conseillers en information scolaire et professionnelle; au niveau des
universités, ce sont des agents d'information, les gens qui ont à
donner l'information au regard des formations qui sont offertes par les
universités et, dans les centres de main-d'oeuvre et les centres
d'emploi, ce sont les gens qui travaillent à tous les jours
auprès des jeunes et des adultes dans le domaine du choix de
carrière, dans la recherche, dans les carrières non
traditionnelles et dans l'aide à la recherche de carrière.
Étant situé au niveau de notre association
professionnelle, je voudrais - et je ne m'attarderai pas sur le deuxième
point tout simplement pour continuer dans la même foulée des
intervenants précédents et depuis le début des audiences
de la commission parlementaire - qu'on s'associe, nous aussi, que cette
formation-là est d'importance et que, en ce qui a trait à la
formation du niveau collégial professionnel, on est d'emblée pour
suggérer de retoucher certains aspects et, du côté de la
formation générale, on est beaucoup plus à dire qu'il
faudrait revoir, de façon quand même assez
détaillée, l'ensemble de cette formation-là. Comme la
ministre le déclarait hier, nous aussi on dit que c'est une formation
d'importance et que, s'il y a 25 ans, on a instauré cette formation, nos
jeunes et nos adultes du Québec ont vraiment besoin de... on appelait
ça un intermédiaire entre le secondaire et le
collégial.
Je devrais dire qu'il y a quelques semaines, on réalisait un
colloque, en collaboration avec le ministère et la ministre, sur la
formation technique au collégial. Je peux vous dire que ça a
été un succès fort intéressant. M. Lussier,
sous-ministre, ici, était à l'ouverture. Dans ses propos comme
dans les propos du président de la Fédération qui a
clôturé le discours de fin de notre colloque, ça a
été vraiment d'emblée que la formation technique au
collégial doit être le plus connue et doit être le plus
articulée.
Dans un troisième temps, je parle de l'introduction dans le cadre
de la formation collégiale générale. On parle beaucoup de
revaloriser, d'ajuster la formation à ces niveaux-là. Alors, je
pense que, dans toute la foulée de l'information scolaire et
professionnelle, les gens au niveau des collèges qui essaient, par tous
les moyens, de donner l'information la plus claire sur les différents
programmes, il y a quelque chose qu'on devrait aider, appuyer dans toutes les
initiatives qui existent présentement au niveau des collèges par
l'introduction de certains cours. On pense à un cours très
structuré qui viendrait aider le jeune ou l'adulte en formation dans le
but de l'aider à bien préparer sa carrière. Il n'est pas
suffisant, je pense, à notre avis, que le jeune ou l'adulte doive
recevoir une formation et que, par la suite, on le laisse aller à
l'intérieur. Alors, il faut vraiment l'aider et, à ce
compte-là, essayer de rétablir l'objectif fondamental qui
était la formation collégiale, de donner aux jeunes et aux
adultes une formation à 60 % au niveau collégial professionnel et
à 40 % au niveau de la formation générale. Je pense qu'il
y a un équilbire à donner. On parle aussi d'abandon. On parle
d'augmenter et de faciliter la formation et les diplômes; je pense qu'un
cours comme ça viendrait vraiment appuyer. On aura l'occasion si, des
fois, il y avait des questions de plus pour élaborer davantage.
Dans un quatrième temps, au niveau de l'accessibilité aux
études collégiales, on demande, et je dirais, aux deux
ministères - tout à fait par hasard, je pense que maintenant la
ministre est bien placée - alors, de regarder tant au niveau du
ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science que du
ministère de l'Éducation, qu'on étudie et qu'on analyse
rapidement l'accessibilité aux études collégiales et les
conditions générales d'admission. Là, on parle beaucoup du
diplôme d'études secondaires avec un minimum de 130 unités
pour obtenir cette formation-là. On se rend compte que, depuis les
dernières années, tous les jeunes qui s'engagent avec ce minimum
qui est vraiment... On ne conteste pas si le minimum est bon ou pas bon, ce
qu'on dit c'est que le jeune qui s'engage avec ce minimum est face à des
échecs très rapidement. Alors, on pense qu'il faudrait regarder
et évaluer ça de façon très claire.
Dans un cinquième temps, on parle de la révision des
programmes et des préalables. Je voudrais surtout attirer l'attention de
cette commission au niveau du nouveau programme de sciences humaines. Je pense
que la volonté qui était préconisée à l'aube
de cette révision était vraiment très sincère et
très recherchée et souhaitée par le milieu. Je pense que
le programme qui a été mis en place était vraiment
très sérieux aussi parce qu'au lieu de choisir le programme,
parce que les jeunes choisissent souvent les sciences humaines par
défaut, alors, en rétablissant cette formation, je pense qu'on
changeait l'objectif et on redonnait au jeune la possibilité de prendre
ce programme avec vraiment l'opportunité qui était là. Ce
dont on se rend compte, c'est que dans la kyrielle des options qu'il y a
là-dedans, on ne s'y comprend plus. Ce qu'on souhaiterait, c'est de nous
aider et même, quand un élève commence dans un
cégep, il est loin d'être sûr qu'on puisse poursuivre dans
un autre cégep en se garantissant et en n'augmentant pas les
éléments de base. (15 h 10)
Sur l'autre aspect, quand on parle de
révision, on parle aussi des préalables. Je pense qu'il y
a eu un effort que je qualifierais de louable et d'honnête, à
l'intérieur de toute la révision des préalables. Ce qu'on
souhaiterait, c'est que ça continue, et que ça continue dans le
sens de s'articuler pour qu'enfin le jeune ou l'adulte puisse vraiment choisir
ce programme-là ou ces programmes en fonction vraiment des
préalables qui sont nécessaires et non des préalables de
sélection, comme souvent, dans des programmes, ça existe.
Je terminerais - parce que je vois que le temps coure - en disant que,
tout à l'heure, je parlais de l'introduction d'un cours
préparatoire à la carrière. Ça ne vient pas enlever
les services existants au niveau de l'information scolaire et professionnelle.
Je pense que ces services-là doivent se poursuivre, doivent se
continuer, s'intensifier, et ce cours-là viendrait aider et supporter
ces services, à l'intérieur. Merci de votre attention.
La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. Leclerc. Alors,
je passerai la parole à M. Lavoie.
M. Lavoie: Bonjour! Merci, Mme la Présidente. Mme la
ministre, mesdames, messieurs de la commission, vous me permettrez,
brièvement, d'abord, de nous présenter. Tout le monde
connaît ce que ça fait, un professeur, un directeur, dans un
collège. Alors, les aides pédagogiques individuels, d'une
façon générale, je vous explique ça parce que c'est
à partir de l'expertise dont je vais vous parler qu'on a
préparé le mémoire.
Nous travaillons auprès des étudiants, dans un premier
temps. Déjà, on rencontre des étudiants en secondaire V
pour leur parler des cégeps. On fait la tournée des polyvalentes,
donc, pour leur parler des programmes, des exigences du cours de niveau
collégial. On procède à l'étude des dossiers, donc
les admissions. On les assiste dans les choix de cours, dans la
réalisation de leur programme. Une fois qu'ils sont là, on est
là pour les assister, avec les hauts et les bas que ça peut
comporter, bien sûr, surtout les bas, et donc assister l'étudiant
dans la réalisation de son programme et surtout le supporter dans son
apprentissage.
C'est donc dire qu'il y a des aides pédagogiques dans tous les
collèges. Leur nombre varie de un à six ou sept, selon la taille
ou selon le nombre d'étudiants dans les collèges. C'est donc dire
que, depuis 25 ans, à peu près tout le monde qui est passé
par les collèges a eu affaire à ce qu'on appelle
communément - le nom qu'on porte - aide pédagogique
individuel.
C'est donc volontairement qu'on a décidé de
présenter un mémoire sur un certain nombre de questions qui
étaient posées, mais particulièrement sur celles qui
relèvent un petit peu de notre travail quotidien, de notre vécu,
où on côtoie quotidiennement les étudiants qui nous font
part de leurs difficultés, de leurs inquiétudes, de leur angoisse
sur comment ils vont réaliser leur programme. Donc, en un mot, on veut
vous dire quelque chose sur le niveau collégial, la structure d'un
diplôme, l'harmonisation, également, qui devrait être faite
entre le secondaire et le collégial et, finalement, un mot sur le
cheminement des étudiants.
Le niveau collégial. Posons la question directement. On est
carrément, comme on l'indique dans le mémoire, pour ce maintien.
Il y a des lacunes, il y a des faiblesses, mais ce n'est pas le temps de tout
jeter par terre. En conséquence, on est aussi pour le maintien des deux
secteurs.
La gratuité scolaire. La question a été
abordée hier, elle est posée et elle est dans le décor, je
pense, depuis les mois de mars, avril, et on peut dire que, quant à
nous, tout en étant conscients des coûts astronomiques de
l'éducation, nous sommes favorables au maintien de la gratuité
scolaire. Pour travailler dans des collèges de toutes les régions
du Québec, pour avoir travaillé, pour ma part, au pavillon
Mont-Laurier du cégep de Saint-Jérôme qui avait
été créé il y a bientôt une dizaine
d'années, je pense qu'on ne doit pas revenir sur ces acquis.
Par contre, parler de gratuité scolaire, c'est faire
référence aussi à la durée des études. C'est
évident: plus c'est long, plus ça coûte cher. Et s'il y en
a qui savent que, parfois, il y en a qui étirent un peu, qui prennent
plus que le temps prévu pour les études, c'est bien nous,
puisqu'on les revoit régulièrement de session en session,
d'année en année, pour faire les choix de cours. C'est une
question importante, mais, quant à nous, s'il y a des tentations de
vouloir limiter le nombre des sessions, nous avons beaucoup de réticence
à ça.
Je vous donnerai tout simplement un exemple pour illustrer mon propos.
Il y a de plus en plus de gens qui reviennent aux études après
avoir laissé un certain temps. Prenons l'exemple de la mère de
famille de 35 ans qui revient aux études et qui se présente
à nous autres en disant: Écoutez, j'ai encore ma petite
dernière à la maternelle, je voudrais commencer à faire
quelques cours cette année, d'autres l'année prochaine, pour
commencer à plein temps dans mon programme pour être
infirmière et faire ça, donc, sur une période de cinq ans.
Voilà ce qui nous semble un projet articulé, valable et qui a
toutes les chances de réussite. Si on arrive avec un nombre de sessions,
il y a toute cette catégorie de clientèle qui pourrait être
pénalisée. Ce n'est pas un exemple parmi tant d'autres; je pense
que vous savez qu'il y a, dans les cégeps, une diversité de
clientèles. Des jeunes de 17 ans, il y en a toujours, bien sûr,
mais quand on regarde les statistiques, il y en a de plus en plus aussi qui ont
au-delà de 17 ans. Et c'est dans ce sens-là que, quant à
nous, avant de prendre une décision sur le fait de limiter, d'avoir un
nombre
limite de sessions, il faudrait être très
réticent.
La structure du diplôme. Le maintien des quatre cours de
français, je pense qu'on n'a pas à revenir sur cette
décision. Quand on regarde les résultats obtenus par nos
finissants lors du test de français pour l'admission aux
universités, on n'a pas besoin de se demander longtemps si on doit
diminuer les cours de français. Il faut donc les maintenir. La
philosophie, quant à nous, nous serions favorables au fait de ramener
ça à deux cours, de façon à utiliser les
unités libérées pour aborder d'autres grands dossiers de
l'humanité. L'éducation physique, la position de nos
collègues, on est pour la disparition des quatre cours. Non pas qu'on ne
juge pas la bonne forme physique importante, mais ce qu'on pense, c'est que si
on retourne un petit peu aux objectifs de l'éducation physique,
c'était de permettre aux étudiants de développer de saines
habitudes. Quand on regarde la diversité de nos clientèles,
l'âge qu'elles ont et ainsi de suite, je pense qu'il y a lieu, à
ce moment-là, de requestionner un petit peu la pertinence des quatre
cours.
On est quand même conscients qu'il y a dans les collèges du
personnel. Et s'il y avait un compromis à faire, peut-être que,
graduellement, on pourrait ramener ça à deux cours
d'éducation physique. Pour ce qui est des cours complémentaires,
à notre avis, il faut absolument les maintenir.
Un mot sur l'harmonisation entre le secondaire et le collégial.
La ligne de force... parce que j'entendais Mme la ministre tout à
l'heure chercher à voir quelle était la ligne directrice des gens
qui présentaient un mémoire. Quant à nous, c'est la
réussite, et la réussite à tout prix. Sauf qu'il y a un
problème de système. Quand on accueille les étudiants en
première année, première session, au mois de septembre,
qu'ils sont tout enthousiastes de venir au cégep, il y a parmi ces
étudiants deux catégories de clientèle. Pourtant, tout le
monde est détenteur d'un D.E.S., d'un diplôme d'études
secondaires, sauf qu'il y en a un bon nombre qui n'ont que le minimum. On va
parler de 130 unités, on va parler de 52 accumulés en secondaire
IV et V, et d'autres qui en ont 76, d'autres qui ont 180 unités. C'est
donc une différence d'à peu près une année de
scolarité. Alors, vous avez dans la même classe, pour un
professeur, des étudiants qui ont un D.E.S. à 130 unités,
d'autres, à 176. C'est carrément une année de
différence en termes de formation, de préparation,
d'intérêt aux études, de préparation à des
études supérieures.
Et ce qu'on a constaté avec le temps, c'est que l'étudiant
qui a à peu près 130 unités, il n'y a pas 90 % de moyenne.
Ça tourne autour de 62. C'est le style qui a dit à son
père: Papa, énerve-toi pas, je passe! Mais il a passé.
Mais il a passé à 62 %, puis juste le nombre d'unités
qu'il faut. Ces étudiants éprouvent, à notre avis - et
c'est le constat que fait également le SRAM, entre autres, qui a fait
des études poussées là-dessus - énormément
de difficultés.
Un chiffre, si vous permettez, du SRAM: la cohorte de 1991. Je ne parie
pas de quelques étudiants, parce que tout le monde parmi nous
connaît le cousin, le garçon de sa cousine qui n'était pas
au secondaire, mais qui a bien réussi au cégep et qui est devenu
avocat ou quelque chose comme ça. Alors, les étudiants qui
avaient moins de 56 unités pour la cohorte de 1991 sur 20 000
étudiants, 58 % ont réussi; ceux qui avaient 72 unités et
plus en secondaire V, 92 %, sur 20 000 étudiants.
Je pense que ces chiffres parlent et méritent qu'on regarde un
petit peu le problème de systèmes posés par les
détenteurs de D.E.S. avec juste le minimum. Je termine par le sens de
l'effort et le soutien aux étudiants dans leur cheminement. Les aides
pédagogiques ont été très heureux de la
dernière décision du ministre le printemps passé de faire
disparaître les abandons. Enfin, on peut tenir un discours auprès
des étudiants qui est un discours d'incitation à l'effort,
à la persévérance.
Pour vous situer brièvement, jusqu'à l'an passé,
les étudiants avaient, dans certains collèges, jusqu'à la
fin de la dixième semaine pour abandonner un cours. Alors, je pense que
tout le monde comprendra que quand on peut abandonner un cours, on sait qu'on
peut abandonner sans avoir une mention échec, la motivation n'est pas la
même. Alors, bravo pour cette mesure, sauf que la plus grande faiblesse
de l'histoire des cégeps, c'est le manque d'encadrement. On a
pensé que parce qu'ils avaient 17 ans et qu'ils avaient quitté le
secondaire, l'autonomie était assumée. Ce n'est pas vrai. Il faut
donc, dans le cheminement, dans ce qu'on va essayer d'améliorer dans les
collèges, mettre une insistance particulière sur trois
éléments que nous soulignons plus précisément dans
le mémoire: l'approche programme, l'approche par compétence et un
encadrement personnalisé. Un encadrement personnalisé, ça
veut dire qu'on ne doit pas se contenter de dire à un étudiant:
Bravo! Tu es admis, bonne chance, on se reverra dans deux ou trois ans,
à la grâce de Dieu! Il faut que les collèges puissent lui
assurer, une fois admis, toute l'aide nécessaire pour réaliser
son projet professionnel. Or, en résumé, donc, nous avons foi en
l'avenir des collèges dans la mesure où quelques modifications
pourraient être apportées. Je vous remercie. (15 h 20)
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup, M. Lavoie.
Alors, nous sommes rendus aux 20 minutes de chaque côté de la
Chambre. Mme la ministre de l'Éducation, de l'Enseignement
supérieur et de la Science, c'est à votre tour de poser les
questions.
Mme Robillard: Merci, Mme la Présidente. Je tiens tout
d'abord à remercier les deux
associations qui viennent nous voir aujourd'hui, que ce soit celle des
aides pédagogiques individuels ou l'Association québécoise
d'information scolaire et professionnelle. Je pense qu'on connaît tous le
travail très précieux que vous menez auprès des
étudiants et des étudiantes dans les collèges du
Québec. Dans ce sens-là, je trouve que vos mémoires ont un
angle d'approche qui est très particulier par rapport à d'autres.
C'est vraiment centré sur les besoins de nos étudiants et de nos
étudiantes.
M. Lavoie, j'aurais quelques questions pour vous. Je pensais vous faire
clarifier un peu la question des cours obligatoires, mais dans votre
présentation, ce fut très clair. Donc, vous avez
déjà répondu à mes questions de ce
côté-là. Par ailleurs, j'aimerais vous entendre sur toute
la question de l'emploi à temps partiel chez nos jeunes. Vous l'avez
abordée avec une approche particulière, il me semble, dans votre
mémoire. Je me réfère à la page 21 ou à la
page 22, M. Lavoie, où vous nous dites, vous, de votre point de vue, que
l'emploi à temps partiel, ça peut devenir un facteur
d'échec, un facteur parmi d'autres, mais que ça peut le devenir.
Selon vous, vous pensez même que dans un très grand nombre de cas,
l'emploi prend le pas sur les études. Donc, ça devient la cause
d'échec, mais aussi du prolongement de la durée des
études, de la perte de motivation et de l'abandon complet. En même
temps, vous lancez un message à vos collègues enseignants et
enseignantes: Surtout ne diminuez pas les exigences parce que le message aux
jeunes serait mauvais. C'est un peu ça, là, que je vois.
J'aimerais vous entendre élaborer sur ce sujet-là de la
réalité que vous constatez, auprès des jeunes, de l'emploi
à temps partiel.
La Présidente (Mme Hovîngton): M. Lavoie.
M. Lavoie: D'accord. En 1990, nous avons tenu une session de
perfectionnement avec l'espoir naïf de régler le problème en
deux jours. Je dis l'espoir naïf parce qu'après deux jours, le
constat qu'on a fait, c'est que le phénomène du travail à
temps partiel n'était pas seulement québécois, canadien,
il était nord-américain et qu'il n'y avait rien à faire.
C'était un problème de société.
De retour dans nos collèges, on s'est dit: Que fait-on maintenant
avec ce phénomène-là? Je pense que ça a
donné lieu à des actions à peu près suivantes.
D'une part, on a commencé à véhiculer le message aux
étudiants que, selon toutes les recherches, au-delà de 15 heures
semaines travaillées, ça pouvait avoir un impact négatif
sur leurs études. On a commencé aussi à encourager et
à soutenir nos collègues enseignants qui venaient nous voir en
disant: Qu'est-ce que je fais? Ils veulent que je finisse le cours une demi
heure plus tôt parce qu'ils s'en vont travailler et ils veulent faire
sauter un ou deux travaux dans le plan d'étude. Alors, l'attitude a
été de leur dire: Écoutez, il y a des exigences, il faut
les maintenir, et c'est dans ce sens-là qu'on le reprend ici, sauf que
ce n'est pas facile pour les gens, dans les collèges, quand ils ont un
peu à vivre ce phénomène-là du travail à
temps partiel. Je pense que M. Roy qui a travaillé là-dessus dans
son collège pourrait compléter, madame.
La Présidente (Mme Hovington): Oui.
M. Roy (Conrad): Bonjour, Mme la ministre et les membres de la
commission. C'est que j'ai eu l'occasion, justement, de faire une recherche sur
la situation du travail à temps partiel pour les étudiants au
niveau collégial. Je pense qu'il faut faire disparaître un mythe
qui circule dans le sens que l'étudiant qui travaille à temps
partiel au cégep va échouer. L'ensemble des recherches qui ont
été faites à ce niveau-là, dont une qui a
été présentée pas plus tard qu'hier au Hilton, lors
de la rencontre des cégeps de source secondaire, il y a deux choses qui
ressortent. C'est que les étudiants qui, globalement, travaillent 20
heures et plus à peu près, il y a des risques d'échecs
sérieux pour la moyenne de la clientèle. Et, dans cette
approche-là, on constate que l'étudiant qui a un potentiel de
réussir au cégep, mais qui fait un équilibre entre ses
moments d'études et son travail personnel ou autre activité
sociale ou culturelle, réussit très bien.
Je dis en fin de compte que pour l'étudiant c'est une question de
gérer vraiment ses moments d'études avec son travail à
temps partiel. L'autre phénomène qui s'ajoute à ça,
il est sûr que chez un bon nombre d'étudiants qui travaillent
à temps partiel, il y en a un certain nombre qui vont perdurer un peu au
cégep. Exemple, au lieu de faire deux ans dans un D.E.C.
général ou trois ans dans un D.E.C. professionnel, ils vont
peut-être prendre une session ou deux sessions de plus parce que la
charge d'études des fois est un peu trop élevée dans
certaines techniques professionnelles et ils devront équilibrer dans le
sens souvent de prendre moins de cours par session s'ils travaillent à
temps partiel pour pouvoir quand même avoir un rendement scolaire
satisfaisant.
Mais il faut faire disparaître le fameux mythe de dire que
l'étudiant qui travaille à temps partiel échoue. Dans
certains cas, c'est valorisant parce qu'on a vu les étudiants qui, pour
eux, travailler à temps partiel, ça leur permet en fin de compte
de vivre une expérience de milieu de l'emploi et aussi, des fois, de
faire disparaître un peu de stress et d'anxiété.
Mme Robillard: M. Lavoie, j'aimerais vous ramener sur le sujet de
la gratuité scolaire. Vous avez affirmé, lors de votre
présentation, que vous étiez donc très favorable au
maintien de la gratuité et vous avez ajouté que vous étiez
même
très réticent à une limite à la
gratuité pour ceux et celles qui ont des sessions supplémentaires
au niveau du collégial. Alors, à ce moment-là, comment je
peux lire à la page 5, comment je peux comprendre à la page 5 de
votre mémoire le fait, quand vous me dites que «l'État ne
peut pas tout payer indéfiniment quand des étudiants reprennent
deux, trois et même quatre fois le même cours? Nous en convenons,
des solutions sont possibles pour marquer les limites de la gratuite scolaire
dans les cas d'exagération, mais - et là vous me lancez la balle
- il revient au gouvernement de les proposer.» Pourriez-vous
m'expliquer?
M. Lavoie: Je comprends que vous auriez aimé, Mme la
ministre, qu'on vous dise là-dedans: Écoutez, un nombre de
sessions limite, ce serait 6, 8 ou 12. Je pense que c'était impossible
pour nous de le faire. Nous y avons réfléchi de nouveau, depuis
que c'est écrit là, et je vous dirais qu'il faudrait
peut-être s'inspirer de ce qui se fait au chapitre des prêts et
bourses. Ils ont une politique qui limite. Tu ne peux pas avoir des prêts
et bourses pendant 20 sessions. On n'a pas eu le temps de se pencher, Mme la
ministre, sur ce sujet-là, mais je pense que ça mérite que
ce soit regardé de très près.
Il y a une quinzaine d'années, on parlait des sénateurs
dans les cégeps. Je me sens à l'aise d'en parler, parce qu'il n'y
en a plus au Québec. Les sénateurs qui prenaient 8, 10 ans, qui
restaient dans un collège parce qu'ils jouaient au
«volleyball» et s'occupaient de la radio étudiante et qui
étaient là pendant, 8, 10, 12 ans. On les appelait les
sénateurs, on en riait, et ils étaient d'ailleurs des gens
très sympathiques, en passant. Il y en a de moins en moins des
sénateurs, et je pense qu'il ne faudrait pas avoir une loi pour
éliminer les sénateurs alors qu'il y a des gens pour qui une
telle loi, avec un nombre limite serait vraiment un préjudice. C'est ce
que je trouve de plus intelligent à vous répondre pour le moment.
Je ne sais pas si on peut compléter.
La Présidente (Mme Hovington): M. Roy. (15 h 30)
M. Roy: Je pense, Mme la ministre, qu'il y aurait un ajout
important, c'est que dans la clientèle que nous avons au cégep,
vous avez les étudiants de jour, les jeunes qui arrivent des
différentes polyvalentes, et vous avez la clientèle qui
croît de plus en plus, celle des adultes. Je pense que ce serait malvenu
d'être rigide par rapport aux adultes, dans le sens suivant: Exemple,
chez nous, il y a à peu près 10 ou 15 ans, nous avions 5 à
10 adultes à plein temps durant le jour. Présentement, nous en
avons 350 à 400. Ces gens-là sont très désireux de
réaliser un projet de formation, mais à cause du contexte
familial, du contexte personnel - et vous savez que de situations
monoparentales, il y en a de plus en plus - impossible pour eux autres de faire
le projet en trois ans ou deux ans. Alors, dire à ces gens-là au
bout de trois ans, c'est fini, je pense que ce serait rendre un mauvais service
à la société. Il faut considérer cette
avenue-là.
Et on a aussi des étudiants, il faut l'avouer, qui sont admis au
cégep avec certaines difficultés de fonctionnement et
d'encadrement. Ce n'est pas tous les étudiants qui peuvent faire un
D.E.C. général en deux ans, ce qui serait souhaitable, ou un
D.E.C. professionnel en trois ans, ce qui serait souhaitable. Ces
gens-là, on établit quoi comme encadrement? Dans certains cas, on
a vu des étudiants très bien réussir en faisant une ou
deux sessions de plus. Ce n'est pas la majorité, mais c'est quand
même un bon nombre. Alors, il faut considérer aussi ces
différentes avenues-là.
Mme Robillard: Je vous remercie, messieurs. M. Leclerc, vous me
suggérez, dans votre mémoire, de penser à un cours
spécifique sur la préparation à la carrière, au
niveau collégial. Si ma perception est bonne là, je pense qu'au
niveau de votre association vous êtes très présent au
niveau secondaire. Hier, on nous a dit, ici dans cette commission, qu'il
commençait à y avoir un problème de plus en plus important
au niveau du cours «Éducation au choix de carrière»,
au secondaire. Et, là, vous me demandez d'en ajouter un au niveau
collégial. J'aimerais ça vous entendre sur le fait. Y a-t-il
problème ou pas avec le cours qu'on a déjà au niveau
secondaire? Et, si je pose la question, c'est non seulement parce que je suis
aussi ministre de l'Éducation mais que ça a drôlement un
impact sur l'orientation des jeunes qui s'en viennent au collégial.
M. Leclerc (Gaston): Je pense, Mme la ministre, que vous avez
raison. Je vais essayer de bien situer votre question et aussi essayer d'y
répondre le plus possible. Puis je vais essayer de développer ce
à quoi vous faites référence, ce qui s'est dit hier. Puis
en plus, je suis tout aise à vous répondre parce que le
ministère de l'Éducation du Québec vient de sortir une
étude sur l'évaluation du programme d'Éducation au choix
de carrière auquel vous faites référence et qui
démontre, hors de tout doute, que ce programme-là est vraiment
important, intéressant. Où il y a problématique, c'est au
niveau des enseignants qui se retrouvent souvent, parce que peut-être que
vous ne la connaissez pas encore, la problématique, mais vous allez la
connaître très rapidement, au niveau des enseignants, avec la
sécurité d'emploi et puis la question des tâches.
C'est qu'on se retrouve avec un événement où, forts
des conventions collectives qui régissent les gens, il y a des gens qui
sont pris pour - je dis pris, là, pas de façon négati-
ve - mais ils se retrouvent à enseigner, en plus d'une autre
matière, le programme d'Éducation au choix de carrière,
avec aucune préparation, aucune formation, sauf de le savoir le matin ou
la veille qu'ils vont enseigner Éducation au choix de carrière.
Vous comprendrez que ça ne fait pas une dynamique très
intéressante.
Et le programme d'Éducation au choix de carrière, qui a
été instauré en 1982, se voulait un peu dans une dynamique
intéressante, à savoir qu'on allait aider le jeune, le soutenir
dans sa démarche pour qu'il devienne le plus autonome possible dans sa
démarche de choix de carrière. Et dans tous les milieux, puis
c'est prouvé à l'intérieur de l'étude que dans tous
les milieux où on a respecté cet engagement-là, où
les gens qui sont formés présentent le programme tel qu'il doit
être, ça donne des résultats intéressants. Et cette
étude-là est tellement forte parce qu'elle ne touche pas juste
quelques individus; elle a été faite de façon provinciale
dans toutes les commissions scolaires, les écoles, auprès des
conseillers pédagogiques, des directeurs d'école, des
enseignants, des élèves et des parents de ces
élèves-là. Et, hors de tout doute, les milieux où
le programme est bien enseigné, ça donne des résultats
très intéressants.
Mme Robillard: Alors, prenons l'hypothèse que le programme
est parfait au secondaire. Prenons cette hypothèse-là.
M. Leclerc (Gaston): O.K.
Mme Robillard: Donc, il donne des résultats, vous venez de
le dire; pourquoi ajouter un cours au collégial Choix de
carrière?
M. Leclerc (Gaston): C'est-à-dire que ce n'est pas ajouter
un cours d'Éducation au choix de carrière au collégial. Ce
dont on a parlé c'est un cours préparatoire à la
carrière. Peut-être que les terminologies peuvent se ressembler,
mais ce qu'on veut vraiment développer au niveau collégial, c'est
le support, l'aide, des initiatives qui sont instaurées dans beaucoup de
milieux au niveau collégial, et qui ont un besoin, à un moment
donné, d'être appuyées par des contenus structurés,
encadrés, pour qu'à un moment donné, on puisse donner des
résultats intéressants. Et si vous me permettez, Mme la ministre,
la vice-présidente qui est avec moi a fait des expériences dans
son collège, et elle pourrait vous témoigner des résultats
intéressants de ces initiatives-là.
La Présidente (Mme Hovington): Mme Duval.
Mme Duval (Francine): Oui. Alors, ce que j'aimerais pouvoir vous
souligner, en premier lieu, c'est de vous rappeler que dans les
collèges, qu'ils soient petits ou qu'ils soient gros, au niveau des
services d'information scolaire et professionnelle, on ne retrouve en
général qu'un conseiller ou qu'une conseillère en
information scolaire et professionnelle. La tâche principale est bien
sûr souvent d'aider l'élève en consultation individuelle.
Mais ce qu'on constate, c'est que lorsqu'on rejoint les jeunes en groupes,
parce qu'il y a du groupe qui se fait quand même dans de nombreux
collèges, on va rejoindre davantage les élèves et on est
capable davantage de leur offrir un cadre qui va leur permettre d'entreprendre
une démarche d'information scolaire qui va les mener à un choix
de carrière qui va être beaucoup plus motivant, plus dynamique
pour eux.
Alors, ça leur permet... Une expérience qu'on a faite,
entre autres, de concert Baie-Comeau et Saint-Félicien, l'hiver
passé, c'est qu'on a offert des ateliers avec trois volets distincts et
ce dont on s'est rendu compte quand on a fait l'évaluation, ça se
faisait sur une base volontaire, sur l'heure du midi et les
élèves - lorsqu'ils ont eu fini leur premier atelier, un sur la
connaissance de soi, le second sur l'exploration des professions, et le
troisième sur la prise de décisions et le plan d'action - ont
demandé que cette initiative-là puisse prendre un petit peu plus
de temps d'abord que ce qui avait été consacré. Et
certains ont même recommandé que tous les élèves
puissent avoir le loisir d'en bénéficier, et même plusieurs
ont mentionné que ça pourrait être intéressant sous
forme de cours.
Nous autres on se rend compte, alors, que plus on rencontre des gens en
groupes, plus on est capable de les éveiller et de les soutenir à
travers tout le cheminement qu'ils ont à faire au niveau du
collégial.
La Présidente (Mme Hovington): Merci, Mme Duval. M. le
député d'Abitibi-Ouest, vous avez la parole.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Oui. Je veux vous remercier. C'est un
beau et bon tandem que vous faites, les deux associations. L'Association
professionnelle des aides pédagogiques individuels, de même que
l'Association québécoise d'information scolaire et
professionnelle. Je ferai quelques commentaires d'abord sur le mémoire
présenté par l'Association professionnelle des aides
pédagogiques individuels. Je pense que c'est M. Lavoie ainsi que votre
monsieur qui en a parlé.
Sans, encore là, de flatterie inutile, il m'apparaît que
vous avez un mémoire où les positions sont bien campées,
clairement définies, et j'aime les choses claires. Quand un
mémoire divise sa présentation en cinq sections bien
précises... Au niveau collégial, on sait à quelle enseigne
vous logez. Il faut maintenir le niveau, deux secteurs. Il faut continuer
à cohabiter là au préuniversitaire avec la formation
technique. La gratuité scolaire doit être maintenue, c'est
clair.
Durée des études collégiales n'est pas
exagérée. Vous avez des réticences à
l'illimité, vous avez expliqué pourquoi.
Autrement dit, à peu près tout votre mémoire, je
trouve qu'il est très bien fait. Il est clair, il est précis. Je
n'ai pas de difficulté à comprendre les choses. Deux points sur
lesquels - parce que le temps est divisé, et je veux questionner aussi -
j'aimerais échanger un peu plus. À ma connaissance, vous
êtes le deuxième ou le troisième intervenant qui revenez
avec la question du nombre d'unités en disant qu'il y a tellement de
disparités entre le 130 unités, pour ceux qui veulent prendre
ça assez facile au secondaire, et ceux qui font le plus d'efforts
peuvent aller jusqu'à 176. Vous semblez être bien assis sur la
conviction que ceux qui entrent au collégial avec un pourcentage
d'unités aussi faible que 130, c'est de les placer immanquablement dans
une position de non-réussite.
C'est ce que vous exprimez d'une façon très claire. J'ai
peur que vous ayez raison. Vous avez dit que votre préoccupation - j'ai
vu ça un peu plus loin, et je trouve encore là que c'est de bon
aloi - qu'il ne faut pas convenir d'autre chose: qu'au coeur de ce
débat-là, le sujet principal, c'est toujours l'étudiant,
c'est les jeunes. Vous avez dit ça. Et vous, vous avez dit que le fil
conducteur de votre mémoire, c'était la réussite scolaire.
Vous avez bien dit ça? Là-dessus, je ne veux pas
nécessairement avoir des explications sur ce que vous avez dit, c'est
clair. Je voudrais profiter de votre expérience et du fait que vous
assistez ces jeunes-là et que vous êtes avec eux souvent et, en
particulier, ceux qui n'ont pas le nombre d'unités requis, selon vous,
et là, j'aimerais ça que vous me parliez un peu plus de comment
ils se comportent rapidement. Est-ce qu'ils se comportent rapidement, qu'ils
constatent qu'ils vont être pris pour travailler au collégial et,
en conséquence, comme ils ne sont pas habitués à
ça, il n'y a pas beaucoup d'alternative pour eux; c'est ou bien ils
changent d'option ou ils laissent tomber et ils disent que le Conseil permanent
de la jeunesse nous a dit, l'un des critères no 1, pour l'abandon,
c'est: Ce n'est pas fait pour moi, je ne pensais pas que c'était
sérieux, le collégial? Est-ce que c'est de même que vous
lisez ça, les conséquences? (15 h 40)
M. Lavoie: C'est à peu près comme ça qu'on
lit ça et c'est à peu près comme ça qu'on vit
ça. S'il n'y avait pas les chiffres qui venaient confirmer hors de tout
doute que ces étudiants-là, au départ, sont en situation
d'échec ou d'abandon, ça pourrait être tout simplement
notre «feeling» et dire: On est fatigués un peu à la
fin de la journée, on a l'impression que tout est croche, ce n'est pas
vrai.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Ça nous arrive aussi.
M. Lavoie: Ça nous arrive aussi, oui. Alors, ce qu'on
constate cependant, et on le constate en début d'année,
très rapidement, c'est que ces étudiants-là...
Écoutez, je vais prendre un exemple concret, je pense que vous allez
bien le comprendre. Quand tu es en sciences humaines, tu as un cours de philo,
français, histoire, psychologie, sociologie et que l'étudiant te
dit: J'haïs ça, lire; je n'aime pas ça faire des travaux de
recherche. Moi, je dis que c'est aussi... Un gars qui veut jouer au hockey et
qui n'aime pas patiner, ce n'est pas sa place. Quand vous avez une situation
comme ça dans votre bureau, vous dites au jeune homme, à la jeune
fille: Je pense qu'il va falloir regarder ailleurs, et ce que tu as fait, toi,
tu as suivi le groupe l'année passée. Le 15 février, tes
amis ont fait une demande au cégep; tu étais bien trop
gêné pour dire: Moi, je n'y vais pas, je n'aime pas ça et
je ne sais pas trop en quoi m'en aller. Alors, il y a de ces
étudiants-là qu'on retrouve. Et, dans certains cas, je vous
dirais qu'on les voit au mois de septembre pour les accueillir et on les revoit
très souvent au mois de janvier, parce que là, ça n'a pas
bien été.
Je ne veux pas jouer au psychologue, mais quelqu'un qui est venu vivre
un échec au cégep, je pense qu'il s'en retourne dans la vie pas
mieux préparé. Alors, c'est un peu là-dessus. Mais la
question qui est importante, je pense pour les parlementaires...
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Oui.
M. Lavoie: ...c'est la suivante: Est-ce qu'il doit y avoir, comme
règle officielle, que les collèges doivent accepter tous les
détenteurs d'un D.E.S.? Je pense que c'est ça, M. Gendron, la
question que vous devez vous poser ici et que vous devez trancher aussi.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Oui...
M. Lavoie: Est-ce que le D.E.S., le diplôme d'études
secondaires, fait en sorte que l'étudiant se présente dans tous
les collèges et dit: Vous n'avez pas le droit de me refuser, j'ai mon
D.E.S., surtout quand c'est quelqu'un qui a décroché, qui a
raccroché et qui a travaillé fort, qui a vécu des
problèmes personnels, à 17, 18 ans, qui est allé chercher
son D.E.S. et il vous arrive, à 22 ans: Je l'ai, mon D.E.S.; il n'est
pas fort, mais je l'ai; vous n'avez pas le droit de me refuser. Je pense qu'au
terme de la commission, on devrait être plus éclairés
là-dessus, mais en s'inspirant toujours des chiffres, de la
réalité.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Oui. J'aime ça, ce que vous
venez de dire, parce que je me la posais, la question, mais je me pose l'autre
aussi, parce que je ne suis pas sûr que c'est par le biais
général de dire: Dorénavant, un D.E.S., ça ne donne
pas obligatoirement le O.K. pour
l'admission au collégial; je ne suis pas sûr que c'est par
ce biais-là. Est-ce que ça ne serait pas mieux par le biais de
dire, dès le niveau secondaire: Tu es le bienvenu au collégial,
on souhaite que tu sois au collégial, mais au collégial,
ça prend 145? C'est un exemple.
M. Lavoie: Oui.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Est-ce que vous n'aimeriez pas plus
cette formule-là, compte tenu de votre expérience?
M. Lavoie: C'est une bonne question.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Bien, j'essaie de poser les
meilleures.
M. Lavoie: Oui. Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lavoie: Mais on n'est pas habilités à
répondre si 145, ça serait ça, la solution, M. Gendron;
tant qu'à moi, c'est ma réponse. Je ne sais pas... Claude a
travaillé sur ce dossier-là ici, je pense que...
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Ah non, mais là,
«stickez» pas, excusez l'expression, sur les 145, c'est un
exemple.
M. Lavoie: Ah! O.K. D'accord.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): C'est plus convenir: Est-ce que
ça n'appartiendrait pas au système de regarder ça et se
faire éclairer par les gens du collège privé?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Gendron (Abitibi-Ouest): ...d'arriver avec une norme, parce
qu'à un moment donné, il faut... Ça prend quelque
chose.
M. St-Amant (Claude): Actuellement, comme M. Lavoie vient de vous
dire...
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Oui, mais il ne faut pas venir
fou.
M. St-Amant: D'abord, je vous remercie beaucoup, M. Lavoie, de
justifier mon déplacement, je vais avoir de quoi à dire.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): L'accessibilité qui conduit
à un échec qui coûte 500 000 000 $ par année...
La Présidente (Mme Hovington): ...la parole, les deux
collègues ici.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): ...de Rimouski.
La Présidente (Mme Hovington): M.
St-Amant, je vous reconnais.
M. St-Amant: C'est sûr qu'actuellement on n'est pas en
mesure de vous donner une balise très significative en disant, c'est 145
ou 147 que ça prendrait Chose certaine, c'est qu'on a constaté
qu'il y a 39 % des étudiants qui s'inscrivent avec le minimum des
crédits qui ratent la moitié de leurs cours à leur
première session. Donc, ça, c'est un chiffre qui est... Je veux
dire, on ne l'a pas inventé. On est jusqu'à un certain point pris
avec ça, parce que, nous autres, on veut les encadrer. C'est les
étudiants qu'on a le plus souvent dans nos bureaux. On veut bien les
aider, mais on se frappe à une difficulté assez majeure. La
solution qu'on a proposée dans notre mémoire, vous avez dû
la remarquer. Si on n'arrive pas à s'entendre sur une balise de x nombre
de crédits, c'est d'aller vers une première session de cours
propédeutiques, où on donnerait à l'étudiant
strictement des matières de mise à niveau, qu'on appelle, les
fameux cours de mise à niveau qui deviennent de plus en plus populaires
parce que nécessaires, je pense, dans les niveaux des collèges,
où l'étudiant, au moins, aurait cette première session
pour s'ajuster. Je ne dirais pas pour rattraper tout ce qu'il a pu manquer
durant sa formation, mais, au moins, pour s'ajuster au niveau collégial
et entreprendre ses études à la deuxième session avec de
meilleures chances de réussite. Mais, actuellement, on en est seulement
à cette solution. On n'a pas réussi actuellement à
s'entendre au niveau de l'Association sur un chiffre à proposer qui
aurait été accepté par la majorité de nos
membres.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Une sous-question, mais je vais
revenir, Mme la ministre.
La Présidente (Mme Hovington): Mme la ministre.
Mme Robillard: En continuité avec la question
précédente, est-ce que c'est vraiment une question de nombre
d'unités? Parce que vous tablez sur ça, 130 unités. Est-ce
que ce n'est pas plutôt une question des règles de sanction? Vous
savez que présentement on est en régime transitoire au niveau du
secondaire et qu'on n'applique pas les règles de sanction. Est-ce qu'il
n'est pas plutôt là, le problème, que de parler de 130, 135
et 140?
M. Lavoie: Oui et non. Je pense que ce qu'on dit, c'est que la
préparation antérieure, c'est encore le meilleur pronostic de
succès. Que ce soit 135, c'est pour ça que je ne pouvais pas
répondre. Vous avez tout à fait raison, 130, c'est
peut-être un faux problème. Sauf que, ce qu'on dit derrière
ça, c'est qu'il y en a qui arrivent avec une année de moins de
préparation que les autres, pas juste en termes de crédits, vous
avez
tout à fait raison, mais c'est en termes de préparation,
c'est en termes d'entraînement, de préparation à faire des
études supérieures.
Vous savez, quand ils nous disent: Je n'apportais pas mon sac à
la maison secondaire. Puis, nous autres, on leur dit: Pour une heure de cours
au cégep, une heure de travail personnel. Ils rient un peu de nous
autres; 25 heures de cours, 25 heures de travail. La marche est haute.
Ça ne marche pas ça. Ce n'est pas sérieux.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Je suis heureux que la question...
Pour continuer là-dessus, mais, moi, en tout cas, pour un, je n'ai pas
une vaste expérience mais j'ai enseigné. J'ai encore du monde qui
enseigne au secondaire très proche de moi, et je pense plus, Mme la
ministre, un avis personnel, qu'effectivement ce n'est pas une question de
sanction. Il n'y a pas assez d'efforts là-dedans, il n'y a pas assez de
contenu là-dedans. Et tu les habitues un peu à ce que des gens
nous ont dit: Ah! Ça va faire. Mais ça va faire pour le
secondaire. Sauf qu'ils arrivent au collégial et ça ne fait plus
parce qu'ils n'ont aucune habitude d'efforts un peu intellectuels. Je pense que
le drame est bien plus... Moi, je pense qu'il va falloir fouiller ça
parce que c'est trop dramatique d'être capable de conclure. Dans la vie,
là, quand quelque chose devient très clair, c'est
là-dessus qu'il faut travailler. Je viens d'entendre - et je n'ai pas le
droit de ne pas croire ce que vous venez de dire - que 50 % de ceux qui entrent
avec seulement le minimum d'unités en première année
abandonnent ou échouent. C'est ça que vous venez de dire. Si
c'est ça, il y a d'autres gens qui nous ont dit: 500 000 000 $ par
année pour le décrochage. On n'a pas les moyens de se permettre
ça. Donc, ça coûte cher pour une société. On
ne peut pas laisser filer ça sans vouloir corriger la courbe. Merci pour
ce bout-là.
Rapidement, pour des raisons de temps, vous avez dit que, dans la
formation de base, ou formation générale, vous souhaitiez
réviser les cours de philosophie, l'éducation physique, vous
n'êtes pas arrêtés complètement, le français
vous dites...
M. Lavoie: Excusez, l'éducation physique, c'est abandon
des quatre cours, dans notre cas.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Ah, vous avez dit ça? Abandon
des quatre. Je m'excuse, il y a des choses qui m'échappent. Parfait.
M. Lavoie: Ça va, pas de problème.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Sur le français, cependant, et
je suis complètement d'accord avec vous, vous dites: Non, non, non.
Ça, pas question de toucher à ça, mais, vous ajoutez,
à condition que les étudiants y trouvent du plaisir. Alors,
là, j'ai failli faire des folies, compte tenu de l'actualité,
mais je n'en ferais pas, je suis trop sérieux.
(15 h 50)
Non, sérieusement, qu'est-ce que vous pensez qu'il y aurait lieu
quand même de poser comme geste pour s'assurer que le nécessaire
message d'une meilleure qualité des apprentissages au niveau de la
langue parlée et écrite puisse se faire? Moi, je suis de votre
avis, on ne peut pas toucher à ça, on ne peut pas toucher
à moins de quatre cours. Mais effectivement, il y a beaucoup de jeunes
de niveau collégial qui. à tort selon moi, ne comprenant pas
toute l'importance dans le futur, pour quelque emploi que ce soit, pour quelque
emploi que ce soit, c'est ça qu'il faudrait leur dire cinq fois par jour
minimum, qu'est-ce qu'il faudrait faire pour les intéresser davantage?
Est-ce que, là, on va arriver à vos acolytes du mémoire
d'aujourd'hui tantôt en disant: Écoutez, là, vous devriez
faire du travail là-dessus? Ou si vous autres, au niveau du
collégial, puisque vous êtes des aides pédagogiques
individuels, est-ce que vous ne devriez pas insister davantage auprès
des jeunes pour leur dire: Écoutez, que ça te tanne ou pas, c'est
capital? Il n'y a pas moyen, presque, de fonctionner nulle part si tu n'as pas
un minimum de bonne capacité d'expression française, autant dans
le langage parlé que dans le langage écrit. Qu'est-ce qu'on fait,
soit pour rendre ça intéressant ou pour s'assurer qu'ils sont
bien imprégnés de ça, donc que ça ne les fatiguera
plus?
M. Lavoie: Je pense que c'est bien enclenché. Il ne faut
pas ne voir que le négatif. Depuis plusieurs années, il y a des
collèges qui ont pris comme décision de ne pas accepter -
ça va vous paraître étonnant aujourd'hui, mais il y a cinq
ans ça se faisait sur une haute échelle - même s'ils
avaient été admis en mars, avril, des étudiants qui, en
bout de ligne, ne réussissaient pas leur français de secondaire
V. Parce qu'il faut savoir que c'est si tu en refusais 75 au mois d'août,
ça avait un impact sur les charges. Alors, déjà c'est fait
et, ce que j'entends, c'est quand les collèges ont pris cette
décision-là, le professeur de français de secondaire V qui
rentrait en classe dans une polyvalente n'avait pas un grand discours à
faire pour susciter la motivation. Si vous n'avez pas réussi votre
français de V au mois de juin prochain, le cégep, ce que vous
voyez au centre-ville, vous n'irez pas l'an prochain.
Ça, j'entends, moi, des amis, des collègues qui enseignent
et qui me disent: Ça, c'est bravo! Et je pense que c'est le discours
qu'on tient maintenant quand on fait la tournée des écoles, quand
les étudiants nous demandent: Bien, moi, je veux aller au cégep.
Et ils nous montrent leur bulletin, et tu vois: Français, 48, 52. On est
clairs. Je pense que c'est l'information, et ça va se faire sur une
haute échelle. Je pense que ça se fait présentement. Nos
collègues sont convain-
eus de ça et à peu près tout le monde travaille
dans ce sens-là.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Sur le contenu des cours de
français, un mot.
M. Lavoie: Sur le contenu...
M. Roy: Moi, ce que j'ajouterais, M. Gendron, c'est que le
questionnement que vous avez, dites-vous que, dans les collèges, les
professeurs de français se questionnent très sérieusement.
Et c'est une démarche intéressante pour améliorer le
contenu, et ça se fait actuellement, je dirais, dans la perspective
suivante. Au lieu de dire de prendre des étudiants pas pour leur donner
le cours de français, ils se disent: Où en seront rendus les
étudiants dans l'étape actuelle lorsqu'ils finissent le
secondaire? Les examens ministériels... Euh! Excusez. L'examen des
cégeps pour évaluer le français, on constate qu'il y a des
lacunes sérieuses. Les professeurs de français se disent: Nos
étudiants sont rendus à quelle étape?
Et il y a plusieurs cours de français actuellement qui sont
adaptés à des situations précises de groupes
d'étudiants qui sont faibles. Et, pour eux autres, leur souci comme
étudiant d'avoir du plaisir, comme vous dites, de réussir le
cours de français, c'est de dire: Amenez-nous à progresser
à travers les différents apprentissages pour qu'au bout de la
course on soit meilleurs et qu'on ait du plaisir à faire nos travaux en
histoire, en géographie, en sciences, avec un français
articulé. Et je pense que le message est transmis de plus en plus dans
ce sens-là, et il y a une conscientisation qui se fait dans le
milieu.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Merci beaucoup. Je suis obligé
de passer à vos acolytes, là.
Une voix:...
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Oui. Pour des raisons de temps,
ça me fait plaisir. J'avais une couple de questions. Ne dérangez
pas, M. le sénateur.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, vous passez à
M. Leclerc?
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Oui. À l'Association
québécoise d'information scolaire professionnelle, c'est
important aussi de vous questionner un peu, puis c'est important que vous soyez
là parce qu'il y a d'autres intervenants qui, effectivement, ont
prétendu - et je suis un de ceux-là, avec la petite
expérience que j'ai... Je suis loin d'être satisfait de ce qui se
fait actuellement au Québec en termes de cours de choix de
carrière. Bon, il y a des causes, il y a des raisons. Vous avez
mentionné tantôt que, là où c'est enseigné
par des spécialistes, il n'y a pas grand problème. Mais ce n'est
pas le cas. Ce n'est pas le cas, pour des raisons d'ancienneté. Ce n'est
pas le cas, pour d'autres raisons, surplus de personnel, parce que ça
existe encore. Je connais bien plus de professeurs qui disent: Je suis poigne
à mon horaire pour enseigner une fois de temps en temps le cours
Éducation au choix de carrière qui ne me dit rien, qui ne
m'intéresse pas. Et ça, ça n'a pas de bon sens. Ça
n'a pas de bon sens.
Alors, comme vous êtes une association professionnelle et que vous
savez, et là je cite, exemple, le Conseil permanent de la jeunesse qui
nous dit: Les jeunes qu'ils avaient interrogés étaient, dans une
grande majorité, insatisfaits des services d'orientation qu'ils avaient
reçus au secondaire. Ils avaient été fort mal
préparés et très mêlés, ce que je partage. On
ne leur a pas tellement indiqué le bon chemin à suivre.
Alors, avec des éléments aussi probants que ça,
vous êtes de ce milieu, et je vous entendais suggérer un nouveau
cours. Mme la ministre vous a questionné là-dessus. Je vous dis
que, moi, avant d'autoriser ça, si jamais j'étais ministre, il
coulerait beaucoup d'eau sous les ponts. Je n'autoriserais pas un nouveau cours
au collégial certain. J'essayerais de corriger le problème au
niveau secondaire. Alors, je tenais à vous dire franchement... Je
voulais savoir si vous êtes de mon avis.
M. Leclerc (Gaston): Je voudrais vous dire, M. Gendron... Il y a
peut-être une chose que je voudrais préciser par rapport à
votre citation du Conseil permanent. On ne représente pas les services
d'orientation. Ils se défendront là-dessus, puis peut-être
qu'ils ont des réponses à donner. On représente vraiment
les gens en information scolaire professionnelle... et la façon... puis
j'ai essayé de le préciser au point de départ, c'est qu'au
secondaire, c'est vraiment le programme d'Éducation au choix de
carrière, et c'est là-dessus que votre question porte, je vais y
répondre dans ce sens-là. C'est dans tous les endroits, puis je
pense que, maintenant, le ministère s'est engagé, il a fait une
évaluation du programme d'Éducation au choix de carrière
à la suite des différents propos que vous citez. Et l'engagement
du ministère à la suite de l'étude du programme, c'est: il
faut revoir - pas le programme; le programme, je pense qu'il est bien
articulé - la formation des gens, la façon dont le programme est
présenté aux jeunes. Et on est tous d'accord que, dans un
endroit, ce soit donné par un prof - puis par respect, je ne veux pas
engager un débat là-dessus - d'enseignement moral et religieux
catholique ou un prof de physique, puis qu'il décide demain matin qu'il
va être oblige, à cause de sa tâche, d'enseigner
Éducation au choix de carrière, je ne suis pas sûr qu'il va
être préparé, puis qu'il va avoir une volonté. Puis
comme vous le citez très bien, qu'il
va avoir ce cours une fois à tous les neuf jours.
Alors, la volonté du ministère, en tout cas, à la
suite de l'étude, c'est vraiment de revoir la formation, de revoir
toutes les opportunités au niveau de l'engagement du personnel, puis
d'encourager les endroits où ça se situe puis ça
fonctionne bien, que ça va continuer.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Ce n'est pas vous. C'est moi puis
l'horloge.
M. Leclerc (Gaston): Oui!
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Qu'est-ce que vous diriez d'envisager
- est-ce qu'on pourrait avoir votre avis là-dessus? Vous connaissez un
peu ça - que, dorénavant, cette formation soit dispensée
par des spécialistes? Et pas parce que je veux exagérer. C'est
parce que je connais la notion de spécialiste dans les conventions
collectives. Et si on disait: D'abord, ce sera probablement un facteur de
renouveau, parce que ça n'en prendrait pas des millions puis des
milliers, compte tenu qu'un ou deux professeurs de formation de carrière
pourraient dispenser dans une polyvalente l'ensemble du cours formation de
carrière, parce que ce n'est pas un bloc de cinq cours par semaine tous
les jours à tous les unités-groupes. Qu'est-ce que ça vous
dirait à prime abord? Que dorénavant, on dise: C'est
sérieux, il y a un problème, il y a un malaise, il faut que,
dorénavant, on ait la garantie que le cours Éducation au choix de
carrière soit bien fait, bien enseigné par des gens
compétents et de qualité. On règle ça. Le
ministère décide que, dorénavant, c'est des
spécialistes qui enseignent ça. Qu'est-ce que vous en pensez?
M. Leclerc (Gaston): Je serais assez heureux, parce que c'est le
discours qu'on tient, puis qu'on a écrit, puis on a vous a même
écrit, M. Gendron, quand vous étiez ministre de
l'Éducation. Alors...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Leclerc (Gaston): ...c'est vraiment...
La Présidente (Mme Hovington): Ha, ha, ha! ... la
mémoire, hein?
M. Leclerc (Gaston): Je suis content que vous arriviez à
cette conclusion.
La Présidente (Mme Hovington): La mémoire! Ha, ha,
ha!
M. Gendron (Abitibi-Ouest): J'ai toujours dit que je
n'étais pas resté assez longtemps là pour changer les
affaires!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Je voulais vous le dire!
M. Leclerc (Gaston): Permettez-vous à Mme Duval... Elle
voudait rajouter quelque chose.
La Présidente (Mme Hovington): Je pense que le temps est
écoulé.
M. Leclerc (Gaston): Mais, madame, permet-triez-vous à Mme
Duval de rajouter juste un petit quelque chose?
Des voix: Oui, oui.
Mme Duval: Juste une petite information pour compléter,
c'est que je pense qu'à ce moment-là, dispensé de cette
façon, probablement que nos élèves qui arrivent au
collégial auraient une disposition différente à
l'égard de leur choix de carrière, de leur choix de programme
puis de leur cheminement travers cet ordre d'enseignement.
M. Leclerc (Gaston): Puis il faudrait penser aussi que - je n'ai
plus rien - le choix de carrière, ça se continue, ça ne
s'arrête pas. Et quand on parle, c'est vrai que peut-être il y a
des problèmes. Mais je me dis: II y en a, des problèmes, au
niveau de la formation collégiale. On la regarde, on l'analyse, on ne
veut pas tout corriger, mais je pense que, dans une foulée
intéressante puis quand on revoit la formation collégiale, ce
serait peut-être important d'avoir une attention spéciale sur un
cours qui aiderait le jeune à mieux se préparer à la
carrière. Merci.
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup. Mme la
ministre, en conclusion.
Mme Robillard: II me reste à vous remercier, mesdames et
messieurs des deux associations, M. Leclerc. L'actuelle ministre vous a bien
écoutés aujourd'hui. Je ne sais pas si vous allez m'écrire
aussi.
Des voix: Ha, ha, ha!
(16 heures)
Mme Robillard: Alors, je vais regarder ça avec attention.
Et M. Lavoie, un grand merci pour le mémoire que vous avez
déposé, qui, encore une fois, je le redis, est très
près, je pense, du besoin des étudiants. Vous avez
commencé par une affirmation très claire en disant
qu'après 25 ans d'une structure inchangée il est temps que des
modifications soient en place. Alors, sûrement que nous allons le faire
ensemble. Merci.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, au nom de la
commission de l'éducation et de ses membres, permettez-moi, à mon
tour, de vous
remercier de votre excellent mémoire et de vous souhaiter une
bonne fin de journée. Nous allons passer maintenant au collège
Montmorency que j'inviterais à venir se joindre à nous. Je
suspendrai une minute, pas plus.
(Suspension de la séance à 16 h 1 )
(Reprisée 16 h 5)
La Présidente (Mme Hovington): Je demanderais aux
représentants du collège Montmorency de bien vouloir prendre
place.
Je demanderais au monde de l'enseignement d'avoir un peu de discipline
en arrière. Le silence! J'ai déjà enseigné, vous
savez. Je peux faire ma... on appelait ça une maltresse d'école,
dans le temps.
Alors, le collège Montmorency. Il y a M. Normand Filiatrault,
président du conseil d'administration. Bonjour, monsieur.
Collège Montmorency
M. Filiatrault (Normand): Bonjour, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Hovington): M. le président,
voulez-vous nous présenter vos collègues, qui sont avec vous?
M. Filiatrault: Oui. Alors, Mme la Présidente, Mme la
ministre, Mmes et MM. les membres de la commission, mesdames et messieurs,
permettez-moi de présenter mes collègues. À ma gauche,
j'ai M. Michel Brisson, directeur général du collège, et
également à ma gauche, Mme Nicole Boutin, directrice des services
pédagogiques. Et, à ma droite, M. Michel Saint-Onge, adjoint
à la direction des services pédagogiques.
La Présidente (Mme Hovington): Bonjour et bienvenue
à la commission de l'éducation. Alors, vous avez 20 minutes pour
faire votre présentation.
M. Filiatrault: Je vous remercie. Mon intention, Mme la
Présidente, est de faire une courte présentation du
collège Montmorency et un rappel des principaux points que nous n'avons
pas jugé utile d'élaborer devant vous mais que vous retrouverez
dans notre mémoire. Je céderai ensuite la parole à notre
directeur général dont l'exposé portera principalement sur
l'accessibilité aux études collégiales et sur la
qualité croissante des services, deux objectifs que nous voulons
poursuivre et consolider chez nous afin d'assurer la réussite de nos
élèves.
Fondé en 1969, le collège Montmorency compte cette
année une population étudiante de 4615 personnes inscrites
à l'enseignement régu- lier. Dans cette population, on retrouve
environ 80 % d'étudiants provenant de Laval et de sa région. Il
constitue un exemple typique de ce que sont devenus ces collèges
souhaités il y a plus de 25 ans par le rapport Parent. En effet, notre
collège n'est pas né d'une autre institution déjà
existante, et c'est pourquoi il a eu comme première tâche de se
doter d'un cadre pédagogique et physique adapté aux besoins des
élèves et de l'enseignement. Il a eu à définir sa
mission par rapport à son milieu en offrant, par exemple, de nombreux
services à la collectivité; je crois que c'est un
élément important dans le cas du collège Montmorency. Le
projet pédagogique qu'il s'est donné était original et
mettait l'accent sur le développement d'outils pédagogiques. Au
cours des ans, l'établissement a réussi à créer au
sein de son personnel la cohésion nécessaire à son
développement. Le collège Montmorency est fier de sa
réalité et de ses réalisations 23 ans après sa
création.
À titre de représentant du milieu socio-économique
de Lavai, je suis en mesure d'exprimer la satisfaction du milieu que je
représente. Le collège est né peu de temps après la
création de la ville de Lavai, et il a su grandir avec son milieu,
tantôt en assumant un leadership, tantôt en agissant en
complémentarité avec les forces vives du milieu. Cette place
enviable qu'occupe aujourd'hui le collège Montmorency au sein de la
communauté lavaloise est à la mesure de l'importance que le
milieu lui accorde. De nombreuses collaborations définies dans le cadre
de protocoles d'entente avec des entreprises et organismes, tels que la Banque
Nationale, l'UQAM, la Chambre de commerce de Laval, la salle
André-Mathieu, la ville de Laval, démontrent clairement
l'importance des relations développées entre le collège et
son milieu. À cet égard, j'attire votre attention sur les lettres
d'appui au mémoire du collège qui proviennent de la Corporation
de développement économique de Laval, de la chambre de commerce
de Laval, de la ville de Laval et de la Régie de la santé et des
services sociaux, qui sont tous d'importants partenaires de notre
établissement.
Avant de passer la parole, permettez-moi d'exprimer le souhait que votre
commission parlementaire joue principalement trois rôles: Qu'elle suscite
dans notre société une telle prise de conscience de l'importance
de l'éducation pour son développement qu'il apparaisse essentiel
de lui consacrer tout l'appui nécessaire; qu'elle détermine,
à partir des avis reçus, quelles transformations seront retenues
afin d'assurer que les générations de demain soient en mesure
d'affronter les nombreux défis que nous réserve un monde
hautement compétitif et aussi de renforcer le développement
économique du Québec; et, finalement, que les changements retenus
permettent aux élèves de s'épanouir dans un milieu
scolaire dont ils sont fiers et qui leur redonne le goût du savoir, de la
réussite et de
la découverte.
En comparaissant devant vous aujourd'hui, le collège Montmorency
souhaite contribuer au débat en l'enrichissant et en témoignant
de son expérience en proposant comme valables pour d'autres
collèges ses propres voies de développement, et, enfin, en
recommandant des orientations générales qui devraient permettre
aux collèges de faire face aux défis auxquels ils sont
actuellement confrontés.
Mme la Présidente, le mémoire du collège
Montmorency porte un regard sur la réalité collégiale
à partir de cinq objectifs qu'avait fixés à cet ordre
d'enseignement le rapport Parent. Dans le cadre de cette brève
présentation, nous avons choisi d'insister davantage sur les objectifs
d'accessibilité et de qualité croissante. Même si nous n'en
faisons pas mention dans cette présentation, je me dois de souligner que
le collège Montmorency croit à la nécessité de la
gratuité scolaire, à l'affirmation de la priorité de
l'éducation, à la reconnaissance de la contribution originale et
du savoir-faire des collèges dans l'atteinte des objectifs de
scolarisation au Québec. (16 h 10)
Par ailleurs, à titre de président du conseil
d'administration et représentant du milieu socio-économique, je
tiens à affirmer l'importance d'intégrer les mandats de recyclage
de la main-d'oeuvre et de la formation en entreprise dans la mission des
collèges. La mise en oeuvre de cette orientation suppose l'adoption de
mesures qui fassent des collèges des partenaires essentiels du monde du
travail dans la formation de la main-d'oeuvre. Il nous serait possible
d'élaborer plus longuement sur ce sujet à la période des
questions, si ça vous plaît.
Et, en tout dernier lieu, je ne saurais passer sous silence le
rôle des conseils d'administration, et mes commentaires sont basés
sur six longues années au sein du conseil d'administration Montmorency.
Ces conseils doivent non seulement exercer les droits et les pouvoirs d'un
collège, tel que le stipule la loi, ils doivent aussi aider
l'institution à progresser. Les conseils doivent être proactifs et
non pas un mal nécessaire qu'on supporte. Pour ce faire, je vous
présente certaines recommandations dont: augmenter le nombre de membres
externes au conseil, afin de favoriser les liens avec le milieu, et
peut-être cibler des membres avec des organisations économiques du
milieu; nommer des personnes disponibles, qualifiées, et très
énergiques au conseil; donner au conseil des outils de gestion tels que
des instruments peut-être de mesure de qualité, des politiques de
gestion ainsi qu'un support administratif et financier qui lui permettent de
bien remplir son rôle; établir clairement le rôle et les
responsabilités que doivent assumer les conseils d'administration, les
comités exécutifs et chaque membre de ces instances; et puis
assurer une continuité au sein du conseil lors du renouvellement de ses
membres. il arrive quelquefois que sur 20 membres il y en a 10 qui changent
tous dans la même période. alors, peut-être essayer
d'améliorer un petit peu la continuité à ce
niveau-là. alors, sans plus tarder, j'inviterai m. michel brisson,
directeur général du collège, à poursuivre la
présentation. merci.
M. Brisson (Michel): Mme la Présidente, Mme la ministre,
mesdames et messieurs, au collège Montmorency notre préoccupation
première est la réussite des élèves. Nous croyons
fermement que l'atteinte de cet objectif doit se faire à la fois par la
poursuite de l'accessibilité et de la hausse de la qualité des
études et des services. Le collège Montmorency se refuse à
passer par l'exclusion qui priverait le Québec de l'apport d'une partie
de sa population et qui créerait une dépendance lourde pour la
société. Nous entendons démontrer qu'il est possible de
favoriser la réussite en intervenant sur divers facteurs qui affectent
le cheminement des élèves. Nous sommes convaincus qu'on ne
saurait prétendre que seuls des efforts mis sur l'évaluation
arriveraient à faire échec aux difficultés
rencontrées. Les facteurs retenus pour notre présentation sont
les suivants: la fonction d'orientation, l'implication dans le projet de
formation, la gestion de l'hétérogénéité des
clientèles et un enseignement adapté aux besoins.
La fonction d'orientation. Il faut reconnaître que le cégep
reçoit une clientèle qui n'a pas nécessairement
cristallisé son orientation et que l'apprentissage dans un programme
donné est en soi un facteur d'orientation. En cela, la cohabitation des
secteurs préuniversitaire et professionnel constitue un atout et
favorise des changements de programme. Le soutien de l'orientation nous semble
fondamental pour assurer la réussite des étudiants. Et, à
cet égard, il faut reconnaître sans équivoque la fonction
d'orientation des collèges et leur donner des moyens de l'assumer. Pour
nous qui sommes confrontés à ces réalités
incontournables, nous avons identifié certains moyens au soutien du
processus de l'orientation.
Premièrement, un environnement favorable à la
consolidation du choix professionnel de l'élève, est la seule
assise permettant la persévérance et la réussite des
études supérieures. Pour assurer cet environnement, il faut
reconnaître la nécessité des services de soutien à
l'élève dans son orientation et son cheminement d'apprentissage.
Il faut aussi fournir au collège l'assurance que le financement
permettra le maintien et le développement de services d'aide
individuelle et de groupe. Deuxièmement, un soutien à la
recherche personnelle. C'est par des services personnalisés d'aide
à l'apprentissage que nous parvenons à appuyer
l'élève dans sa recherche. Cela se manifeste par une aide
individuelle ou dans le cadre d'ateliers d'orientation.
Troisième moyen, un régime pédagogique souple. Le
cheminement dans un programme d'études contribue à
préciser l'orientation des élèves. Les données sur
le taux de changements de programme montrent que de nombreux
élèves ont des difficultés à choisir un programme
d'études. À l'automne 1992, 488 élèves, soit
près de 10 % de la population de notre collège, ont
procédé à un changement de programme. Qu'on le veuille ou
non, la souplesse d'un régime pédagogique s'avère non
seulement une nécessité mais la seule avenue possible pour
certains élèves. Autrement, ceux-ci seraient exclus du
système et créeraient encore plus de difficultés lors de
leur réinsertion au réseau collégial deux ou trois ans
plus tard.
Enfin, quatrième moyen, l'information sur les nouvelles
carrières. Le collège a pris l'initiative d'informer les jeunes
sur les carrières professionnelles. Il faut non seulement renforcer
cette démarche par l'adjonction de renseignements sur les nouvelles
carrières, mais nous pensons qu'il faut également rejoindre
l'entourage qui peut influencer les jeunes. Au collège Montmorency, nous
travaillons déjà à cette tâche, de concert avec des
intervenants des milieux scolaire et socio-économique.
Mme la Présidente, le rapport Parent avait fixé comme l'un
des objectifs des collèges celui de favoriser une meilleure orientation
des étudiants selon leurs goûts et leurs aptitudes et, comme vous
pouvez le constater, cet objectif est encore très d'actualité
aujourd'hui et nous croyons pouvoir y répondre avec des moyens
adéquats.
Deuxième élément, l'implication dans le projet de
formation. Un autre facteur pour assurer la réussite de
l'élève, c'est son implication dans son projet de formation.
Cette implication se réalise par un engagement dans les
réalités sociales, dans les études et dans le monde du
travail. En ce qui concerne l'implication dans les réalités
sociales, le collège Montmorency s'est donné comme mission
prioritaire d'assurer dans son milieu l'accessibilité à une
éducation postsecondaire de qualité. Il y parvient non seulement
en dispensant l'enseignement général et professionnel, mais en
assurant le développement intégral des personnes par l'ensemble
de ses activités éducatives, tant au plan intellectuel, social,
culturel, physique que moral. Nous croyons essentiel d'affirmer l'importance
d'un milieu riche et stimulant qui encourage les élèves à
prendre en charge leur développement et leur réussite.
L'implication dans les réalités sociales se traduit chez
nous par la présentation de pièces de théâtre
s'ajoutant aux cours, par des conférences scientifiques et
philosophiques dont les thèmes coïncident avec des matières
d'enseignement, par des échanges internationaux ou des programmes de
coopération qui impliquent directement les élèves. Toute
la philosophie à la base de ce processus d'implication en est une de
responsabilisation. Nous constatons que si les étudiants s'impliquent
dans de telles activités, leurs études prennent davantage de
sens. La mission d'un collège, à la lumière de notre
expérience, n'est pas seulement d'offrir des cours et de les dispenser.
Pour réussir, l'élève doit trouver un milieu de vie riche
et stimulant où il peut s'engager, faire son apprentissage et exercer sa
responsabilité.
Les études. De même nous croyons que les stratégies
qui vont permettre d'impliquer davantage les élèves dans leurs
études sont nécessaires. L'étude apparaît comme une
activité parmi d'autres pour les jeunes dont plus de 75 % occupent un
emploi. Il nous faut socialement et dans nos établissements revaloriser
le temps consacré à l'étude. À cette fin, nous
avons réaménagé la bibliothèque afin d'offrir un
lieu propice à l'étude et au travail en équipe. Nous avons
augmenté l'aide offerte aux étudiants dans leurs travaux. La
fréquentation de la bibliothèque a augmenté en nombre
d'élèves et en qualité d'heures consacrées. Les
pratiques pédagogiques des enseignants incitent davantage à
l'étude et offrent un meilleur encadrement.
Le monde du travail. Le contact avec le monde du travail constitue un
autre facteur qui donne un sens à l'apprentissage. Nous favorisons la
mise en place de mesures concrètes qui assurent dans les programmes
professionnels un lien avec les milieux de travail, que ce soit par
rétablissement de stages dans tous les programmes professionnels,
l'encouragement à des formules d'alternance études-travail, et la
mise en place de mesures incitatrices pour faire en sorte que les entreprises
collaborent à l'application de telles stratégies. (16 h 20)
Troisième élément, la gestion de
l'hétérogénéité. De par son statut de
collège régional, au coeur d'une population à forte
croissance depuis sa création, le collège Montmorency a toujours
eu comme politique d'admettre dans ses rangs tous les élèves
ayant réussi leurs études secondaires. Nous retrouvons
également parmi notre clientèle de plus en plus d'adultes et de
représentants des diverses communautés ethniques. De plus, la
diversité des cheminements impose aux établissements et au
personnel enseignant la nécessité d'élaborer de nouvelles
stratégies de gestion de cette
hétérogénéité.
Pour ce faire, il faut intégrer au calcul de son financement et
soutien les mesures à cet effet. Cette gestion
d'hétérogénéité doit se traduire par une
différenciation des cheminements ainsi que par une réduction des
inégalités dans la préparation. Selon nous, la
différenciation des cheminements ne peut être assurée que
dans la mesure où le régime pédagogique donne au
collège la capacité de s'ajuster aux exigences de sa
clientèle. Cette capacité d'adaptation ne doit pas être
réduite. La différenciation des
cheminements peut se réaliser par des mises à niveau, par
un encadrement spécifique, par des regroupements particuliers
d'élèves, et par de l'enseignement adapté.
L'encadrement constitue une autre mesure de gestion de
l'hétérogénéité. Par exemple, à leur
première session au collège, les élèves sont
regroupés selon leurs intérêts, de manière à
ce que la matière enseignée soit adaptée en fonction des
groupes. Dans certains cas, le contenu du volume à l'appui de la
matière, donc du matériel didactique, sera différent d'un
groupe à l'autre, comme c'est le cas en biologie dans notre
établissement.
La réduction des inégalités dans la
préparation. Une autre mesure destinée à assurer une
meilleure gestion de l'hétérogénéité
consiste à réduire les inégalités dans la
préparation des élèves accédant aux études
collégiales. Si les collèges ont su, dans l'ensemble, garantir la
possibilité de poursuivre des études après le secondaire,
certains groupes ont de la difficulté à se prévaloir de
cette possibilité et doivent être aidés. En revanche, ceci
ne peut se faire à même l'enveloppe budgétaire du
collège. Il faut donc des ressources particulières pour soutenir
cette démarche. Notre mémoire identifie certaines
clientèles et la nature des besoins spécifiques qui les
caractérisent.
Par ailleurs, cette expérience nous convainc que l'on doit
prendre des mesures pour harmoniser le passage du secondaire aux
différents programmes du collégial. Cela découle de
l'interdépendance entre les ordres et de la nécessaire
harmonisation entre les ordres d'enseignement. Cet objectif passe par
l'uniformisation du Diplôme d'études secondaires, par
l'uniformisation du nombre d'unités dans les programmes de formation
préuniversitaire et par un encouragement des liens interordres lors de
l'élaboration des programmes.
Un enseignement adapté aux besoins. Mme la Présidente, la
réussite des élèves passe par un enseignement
adapté aux besoins, à leurs besoins. Au collège
Montmorency, la tradition qui est la nôtre s'est construite sur
l'élève et son apprentissage. Nous sommes un collège qui
s'est préoccupé des méthodes d'enseignement les plus
efficaces, et son corps professoral a été recruté en
fonction de la capacité de ses membres à penser pédagogie
avant tout. C'est à la lumière de cette expérience que
nous préconisons un ensemble de mesures qui permettront d'offrir un
enseignement encore plus adapté aux besoins. Tous reconnaissent que la
capacité d'adaptation des collèges a considérablement
servi le maintien du niveau des études. Pour conserver cet atout, il est
nécessaire d'associer les collèges aux processus de
révision, d'élaboration et d'évaluation des programmes et,
également, que le corps professoral continue à intervenir dans
l'adaptation des programmes, d'une part, en fonction des domaines scientifiques
et technologiques et, d'autre part, en fonction des besoins des
clientèles.
L'encouragement à la recherche pédagogique. Nous pensons,
en effet, qu'une recherche menée à l'intérieur même
du réseau peut souvent fournir des pistes de développement de
façon plus efficace que ne peut le faire une évaluation.
Accroître les connaissances des cheminements d'apprentissage est
indispensable pour concevoir de façon professionnelle les programmes
d'études et les services à fournir. Le ministère pourrait
nous aider en assurant le développement non seulement des connaissances
directement applicables dans ces secteurs, mais surtout d'outils de travail
pour les professeurs et les autres professionnels de l'éducation.
Le perfectionnement. Le ministère devrait aussi mettre à
la disposition des établissements un budget que ceux-ci géreront,
et ce, afin de soutenir le développement ou la mise à jour de
l'expertise qu'ils jugent nécessaire à l'institution. Soutenir
l'effort constant de mise à jour reste, pour les collèges, la
voie la plus sûre pour adapter l'enseignement aux besoins.
La production de matériel pédagogique. Le collège
Montmorency jouit d'une tradition de réflexion pédagogique qui
s'exprime, entre autres, par une production de matériel
pédagogique dont il est fier. Il nous faut poursuivre et
accélérer cette piste de développement en ayant les moyens
nécessaires.
En conclusion, Mme la Présidente, le collège Montmorency
croit qu'il est possible d'accroître l'accessibilité aux
études supérieures et de rehausser la qualité des services
et de l'enseignement afin d'accroître la réussite des
élèves. Il vous revient, au terme des travaux de votre
commission, de convaincre la société québécoise
d'accepter la nécessité d'investir de nouvelles ressources
financières dans l'amélioration de son réseau
collégial. Du soutien financier doit notamment être accordé
aux établissements afin qu'ils puissent assumer pleinement leur fonction
d'orientation auprès des élèves et assurer le maintien et
le développement des mesures de soutien à la réussite des
élèves, qu'ils soient jeunes ou adultes. Je vous remercie.
La Présidente (Mme Hovington): merci, m. brisson, m.
filiatrault. mme la ministre de l'éducation et de l'enseignement
supérieur et de la science, vous avez la parole.
Mme Robillard: Merci, Mme la Présidente. Mesdames et
Messieurs du collège Montmorency, bienvenue aux travaux de cette
commission. Vous êtes le premier collège qu'on reçoit lors
de nos audiences. Alors, ça nous fait plaisir de vous accueillir. Et je
vois, M. le directeur général, que vous vous êtes
très bien adapté et rapidement à votre nouveau
collège, dans votre nouvelle région. Ça me fait plaisir de
vous accueillir ici et de vous signifier aussi ma satisfaction du
mémoire que vous avez déposé.
J'ai noté avec intérêt que vous nous aviez soumis
aussi, en annexe à votre mémoire, un appui qui était
donné par la Corporation de développement économique de
Laval et la Chambre de commerce de Laval aussi, par rapport aux orientations
que vous nous déposez.
M. le président du conseil d'administration, M. Filiatrault, je
suis heureuse de vous voir ici, d'autant plus que vous avez soulevé des
recommandations au niveau du conseii que vous dirigez, ou des conseils
d'administration. À moins que ma mémoire fasse défaut,
là, je n'avais point vu dans le mémoire que vous nous avez
soumis, et peut-être même pas dans le texte que vous nous avez
distribué... Alors, vous piquez vraiment ma curiosité. M. le
président du conseil, M. Filiatrault, je voudrais vous entendre
davantage sur le rôle du conseil et sur sa composition. Pourriez-vous
élaborer?
M. Filiatrault: Mme la ministre, c'est simplement que je
souhaitais faire part de mon expérience personnelle à titre de
président du conseil. Je pense que certaines recommandations peuvent
aider le rôle d'un conseil, et puis c'est strictement dans ce
but-là que je le représente. On n'a pas eu de longs débats
chez nous là-dessus, simplement des opinions personnelles.
Il y a une foule de points. Je peux peut-être prendre le dernier,
assurer une continuité au sein du conseil. Je peux peut-être vous
citer des exemples. On a eu des parents qui ont été élus
tout récemment, le printemps dernier, au conseil, de nouveaux membres du
conseil. Puis, parmi les parents élus, il y a des personnes, vraiment,
qui avaient déjà siégé sur des conseils, des
personnes très valables, et puis on était très heureux de
les avoir parmi nous. Une de ces personnes-là a dû donner sa
démission puisque sa fille ne s'est pas présentée; elle a
changé d'idée puis n'a pas choisi de poursuivre ses
études. Alors, malheureusement, cette personne a dû
démissionner. C'est malheureux. Peut-être qu'au niveau de
l'élection de parents au conseil, il serait préférable de
faire élire les parents à l'automne, lorsque les gens sont
certains que leurs enfants sont aux études. Alors, c'est des situations
qui ne sont, à mon avis, pas très compliquées, là,
à améliorer et puis qui peuvent donner de très bons
résultats, puis éviter des problèmes comme
ceux-là.
Mme Robillard: M. Filiatrault, est-ce que vous ne m'avez pas
suggéré aussi, au niveau de la composition, d'augmenter le
nombre, vous avez dit, de membres extérieurs?
M. Filiatrault: Oui.
Mme Robillard: Pourquoi?
M. Filiatrault: On parle, dans notre mémoi- re, de liens
avec le milieu, et puis les liens se font de différentes façons,
se font au niveau de la direction du collège. Et puis les iiens sont
très bien, sont très bons avec le milieu, à Montmorency.
Mais je crois que c'est possible d'améliorer ces liens-là,
d'avoir des gens qui ont une expérience de gestion forte, qui
proviendraient du milieu économique et qui pourraient siéger au
conseil d'administration d'une façon un peu plus formelle que Ses liens
ad hoc qu'on peut avoir dans différentes disciplines ou dans
différents projets avec les gens. Je crois que ça pourrait
enrichir un conseil d'administration d'avoir plus de personnes de
l'extérieur et d'avoir des personnes qui occupent des positions
stratégiques dans le milieu.
(16 h 30)
Mme Robillard: M. Brisson, j'aimerais vous entendre davantage sur
toute la question, dans votre mémoire, qui porte un peu sur, je vais
l'appeler, la session d'accueil et d'intégration. Pour contrer les
échecs et les abandons, vous nous parlez d'organiser peut-être des
cours de propédeutique, je pense - vous les appelez comme ça -
et, de façon plus générale, vous l'avez dit, la gestion de
l'hétérogénéité. Vous avez abordé
l'orientation des élèves aussi en nous indiquant que les
programmes d'études hors programme pouvaient aider certains
élèves à s'orienter et à mieux juger de leur
intérêt et vous souhaitez aussi utiliser un programme court pour
aider l'étudiant à s'orienter. Est-ce que vous pourriez me dire
comment on pourrait organiser une tei!e session de propédeutique? Ce
serait quoi, son contenu comme tel? À qui on offrirait ça? Est-ce
que ça s'ajoute au curriculum, là, du collégial? Comment
vous voyez ça?
M. Brisson: Dans les faits, ce qu'on vous propose, c'est une
orientation qui nous permettrait d'avoir des moyens, lorsque nous accueillons
l'élève, pour le soutenir lors de son arrivée au
coilégiai. Donc, vous avez énoncé une série de
moyens ou d'approches qui pourraient être privilégiés.
Au collège Montmorency, évidemment, on a
développé des approches, comme par exemple les cours de mise
à niveau. On a développé également un programme
particulier pour les étudiants qui sont hors programme, ce qu'on appelle
hors D.E.C. À la lumière de cette expérience-là,
c'est une orientation qu'on voudrait privilégier.
Les moyens comme tels, bon, est-ce que ce serait une
propédeutique, est-ce que ce seraient des cours de mise à niveau,
est-ce que ce serait un programme adapté à un groupe
d'élèves en particulier? L'orientation que nous voudrions
privilégier, c'est une orientation en fonction de la clientèle
qui nous arrive. Donc, ne pas se limiter à une formule, mais à
des formules adaptées en fonction des besoins des élèves.
À cet égard-là, je pourrais peut-être passer la
parole à Mme Boutin qui pourrait davantage préciser.
Mme Boutin (Nicole): Hier, j'ai eu, lors d'une commission
pédagogique où siégeaient nos élèves, le
témoignage d'une élève que j'aurais aimé que les
membres de la commission parlementaire entendent. Cette élève
nous a dit: Je suis sortie du secondaire, je me suis inscrite dans un programme
de sciences humaines. Après une session, je me suis aperçue que
je n'irais pas à l'université en sciences humaines. J'ai
poursuivi ma session et j'ai décidé de m'inscrire en techniques
de réadaptation. Je n'aurais pas pu prendre ce choix-là si je
n'avais pas fréquenté le collège à l'automne.
Ça m'a permis de rencontrer des gens du secteur professionnel, de voir
à quoi ressemblait une formation au secteur technique, et j'ai
décidé de m'orienter dans ce secteur-là. Elle m'a dit:
Heureusement qu'au collège Montmorency vous aviez la possibilité
de m'inscrire dans un hors programme qui me permettait d'attendre mon admission
à la session d'automne pour le programme de techniques de
réadaptation. Elle a dit: Je suis consciente que cette session-là
que j'ai passée au collège, dans un volet hors programme en
attente d'entrer dans mon programme professionnel, m'a permis de m'avancer dans
mes études et m'a surtout évité de me retrouver à
l'extérieur du système d'enseignement et m'a permis de
réussir les études que je suis en train d'entreprendre.
Alors, vous avez dans ce témoignage-là, Mme la
Présidente, l'illustration de la philosophie qu'on a d'un cheminement
hors programme. Alors, ce qu'on demande, c'est que le régime
pédagogique fasse en sorte qu'on puisse offrir des cheminements
particuliers aux élèves pour répondre à des besoins
particuliers, que ce soit parce qu'un étudiant n'a pas fait son choix au
secondaire, que ce soit parce qu'il change de programme ou que ce soit parce
qu'il lui manque des préalables du secondaire et qu'on doit renforcer sa
préparation pour l'accès à son programme
d'études.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. M. le
député d'Abitibi-Ouest? Je vous prends en flagrant... Bien,
est-ce qu'on respecte l'alternance? Ou on peut aller tout de suite au
député de Rimouski, si le député... On respecte
l'alternance, je pense bien. Alors, M. le député d'Abitibi-Ouest,
je vous avais reconnu.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Sérieusement, bonjour, les
gens de Laval. Effectivement, Mme la ministre, avec raison, disait que c'est le
premier collège que nous recevons. On reconnaît Laval par ses
couleurs contagieuses. C'est bien. À regarder ça, on a presque le
goût de retourner au cégep Montmorency, pas n'importe
où.
Vous avez un bon mémoire. Je pense que vous avez exposé,
surtout dans le texte de présentation, parce qu'il faut faire la
distinction entre le texte de présentation puis votre mémoire...
On sent que dans le texte de présentation vous vouliez insister sur ce
que vous vivez surtout, sur ce que vous faites et, effectivement, sur ce qui
vous apparaît comme étant des conditions de réussite.
Moi, j'étais heureux de constater sincèrement que vous
affirmiez, dans votre présentation - et je reviendrai sur le
mémoire tantôt - qu'à Laval tout est axé en fonction
de la réussite. Je vous cite au texte. À un moment donné,
je pense que c'est à la page 10: «Notre préoccupation
première est la réussite des élèves.» Je
pense que c'est bien. C'est bien, parce qu'un des drames de la
société québécoise au niveau de la poursuite des
études et d'une plus grande possibilité que plus de jeunes
fassent le choix des études collégiales... C'est important
d'avoir ça comme objectif.
J'aimerais ça avoir un peu plus d'information, puisque le
cégep de Laval, à moins que je me trompe, a presque une vingtaine
d'années. J'aimerais ça que vous me donniez des chiffres, sans
que ce soit à la virgule près, encore là, justement sous
l'angle de la réussite, compte tenu que vous faites des choses
particulières qui me plaisent. Quand on regarde ça, ça a
l'air d'être intéressant, ce que vous faitee. Vous impliquez le
jeune. Le cégep a l'air d'avoir une âme. Le cégep de
Montmorency a l'air d'avoir une âme, un projet éducatif. Et, moi,
je prétends que c'est des éléments de rétention et
d'encouragement à ne pas être dépaysé, entre
guillemets, si vous me permettez l'expression, au cégep.
C'est quoi, vos données par rapport au décrochage, disons
dans les quatre ou cinq dernières années, au niveau de votre
cégep - par rapport aux admissions, bien sûr? Vous les sauvez
à 85 %, 88 %, 72 %, 60 %?
M. Filiatrault: Je vais demander à Mme Boutin de nous
faire part de ses commentaires.
Mme Boutin: J'ai peut-être été
incomplète dans notre mémoire pour la gestion de
l'hétérogénéité. Et, à cet
égard, le cégep Montmorency est particulier puisqu'il
reçoit des clientèles hétérogènes et qu'on
doit différencier nos résultats en ce qui a trait à la
réussite en fonction des différentes clientèles qu'on
reçoit. Alors, pour illustrer, par exemple, sur le décrochage: en
1985, de concert avec les professeurs et sous la recommandation des aides
pédagogiques individuels et de la commission pédagogique, le
collège a appliqué des mesures d'encadrement spéciales
pour les élèves qui abandonnaient les études, et on a
réussi à faire passer notre taux d'abandon de 10 % à 6 %
par l'application de ces mesures-là. Par ailleurs, quand on regarde le
taux d'étudiants qui changent de programme et qui, habituellement, se
dirigent d'un profil hors
programme ou d'un programme préuniversitaire à un
programme professionnel, je pense qu'on a réussi à faire en sorte
que 10 % de ces élèves qui changent de programme restent aux
études et qu'on a amélioré le décrochage.
Par ailleurs, si on regarde les résultats plus globaux - et on se
base sur les indicateurs que madame la ministre avait fournis aux institutions
d'enseignement collégial - on s'aperçoit que, pour nos
étudiants en sciences, nous accueillons des étudiants qui, de
façon générale, sont légèrement
inférieurs au réseau. Et quand nous les sortons de Montmorency,
nous avons des étudiants qui ont des performances
légèrement supérieures à celles du réseau
collégial.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Est-ce que vous êtes trop jeune
- évidemment, je parle du cégep - pour être capable de
dégager, dès ce moment-ci, quelques données eu
égard à la diplomation?
Mme Boutin: Actuellement, notre taux de diplomation dans les
programmes de sciences est légèrement supérieur à
la moyenne du réseau. Celui de sciences humaines est à
l'égalité de celui du réseau. Dans les autres programmes,
dans les programmes techniques, par exemple, on a eu dernièrement des
données sur le taux de placement de nos finissants et, à
Montmorency, nous avons des taux de placement supérieurs à la
moyenne des collèges du SRAM.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Comment se vivent chez vous les
relations entre la direction, le conseil d'administration et la commission.
pédagogique puis les départements"7 Parce que c'est
possible qu'en bout de ligne ça crée des problèmes,
dépendamment des décisions qu'on prend. Alors, j'aimerais
ça, savoir comment ça se vit chez vous, les relations avec les
départements du collège et la commission pédagogique.
Mme Boutin: Je vous dirais que, dépendant de la nature des
décisions que vous prenez, les réactions peuvent être
différentes.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Ça, je suis d'accord avec
vous.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Boutin: Ha, ha, ha! Je pense qu'à Montmorency, depuis
1985, ia commission pédagogique... Le syndicat des professeurs de
Montmorency a déposé à cette commission un mémoire
en indiquant que le syndicat avait décidé dêtre partie
prenante des mesures pédagogiques que le collège entendait
prendre. Et nous avons, à cet égard, surtout sur les aspects
d'encadrement, une collaboration assez exceptionnelle de la part de nos profs.
Les profs sont également engagés profesionnellement dans le
développement d'un matériel pédagogique adapté aux
enseignements. (16 h 40)
Pour vous donner un exemple, les professeurs produisent chaque
année près de 300 ou 400 manuels-guides à l'intention des
élèves. Et, à chaque année, les professeurs
publient des volumes. Un, d'ailleurs, a eu l'honneur de recevoir le prix de
madame la ministre, il y a deux ans, M. Régneault. Et je pense que, par
rapport au changement pédagogique, dans !a mesure où on sera
capables d'impliquer les professeurs et de les faire participer aux changements
en les y préparant et en les appuyant par du perfectionnement, je pense
qu'on peut être assurés de leur collaboration.
M. Gendron (abitibi-ouest): pour ce qui est de l'implication dans
les réalités sociales, moi, je pense que vous touchiez un point
important au niveau de vos clientèles étudiantes. mais j'aimerais
ça, avoir un avis. chez vous, est-ce que cette même implication se
traduit également par le corps professoral qui s'implique
énormément dans les activités autres que des
activités d'enseignement?
Mme Boulin: Je pense qu'à cet égard on peut aussi
parier du dynamisme du corps professoral de Montmorency. Je vous citerai,
à titre d'exemple, et excusez-moi de profiter de cette tribune pour en
parler... Dans nos programmes professionnels d'enseignement technique, dans les
secteurs des techniques physiques, les programmes actuels ne prévoient
pas de stages à I intérieur de ces programmes-là. Alors,
dans ces programmes-là, les profs ont utilisé la marge de
manoeuvre laissée par ia régime pédagogique pour instaurer
des stages en milieu de travail at développer, en collaboration avec des
milieux de travail, des activités de stages, des activités de
projets d'études dans ie milieu. Pour vous donner un exemple, en
techniques administratives, les étudiants doivent faire des projets
d'études et doivent aller auprès des entreprises de Laval leur
présenter, par exemple, un projet en marketing ou autre, et c'est une
exigence pour réussir leur cours. Je pense qu'à ce
chapitre-là nos professeurs sont actifs.
Dans un autre secteur, nos professeurs ont développé aussi
des outils qui sont transférables dans ie secteur de l'entreprise. Je
pense, par exemple, à l'utilisation d'un logiciel d'automatisation en
entreprise, !e GRAFCET, qui actuellement est un outil qui est largement
répandu, pas suffisamment implanté dans les entreprises, mais
largement répandu comme outil de travail.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Puisque votre objectif de
réussite scolaire semble être une préoccupation majeure,
est-ce que vous faites un lien, vous, suivant votre expérience - le
«vous» étant collectif au collège, là -- entre
l'implication tout autant des élèves, dans les
réalités sociales
du milieu, du collège, et d'autres activités, que des
professeurs? Est-ce que vous faites un lien eu égard à la
réussite scolaire? En termes clairs, est-ce qu'il y a plus de
réussite scolaire si vous avez affaire à des jeunes qui
s'impliquent dans la dynamique de l'ensemble des activités offertes par
le collège plutôt que l'inverse, à savoir, si les jeunes
prennent trop de place dans des activités comme ça, ça a
des effets négatifs par rapport à des objectifs de
réussite scolaire?
M. Brisson: Je pourrais vous dire que le collège
Montmorency est en soi un milieu de vie et que ça s'est
développé à travers l'histoire du collège en ce
sens que, entre autres, à titre d'exemple, il y a beaucoup
d'activités par concentration ou par programme d'enseignement. Donc,
à cet égard, il y a un regroupement des élèves
autour d'un même programme, d'une même concentration. Par le fait
même, les professeurs sont touchés par ça, sont
impliqués. Il y a beaucoup d'activités parascolaires qui sont
organisées par le service des affaires étudiantes mais qui sont
aussi faites en collaboration avec les départements d'enseignement.
Donc, il n'y a pas, si vous voulez, de division, d'opposition à cet
égard-là. On veut que le collège soit un milieu de vie, et
l'histoire du collège a amené ça de cette
manière-là.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Pour des considérations un peu
plus larges, toujours pour des raisons de temps... Il me reste du temps?
Une voix: Une minute...
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Ce n'est pas vous qui contrôlez
ça.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Gendron (Abitibi-Ouest): II me reste du temps en masse. On
s'en... Il n'y a pas de problème.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Gendron (Abitibi-Ouest): II restait deux choses que j'aimerais
vérifier d'une façon un peu plus large que chez vous.
L'évaluation est une question importante concernant les collèges.
Le jugement général qu'on porte, c'est qu'il ne s'en est à
peu près pas fait, qu'il n'y a pas des méthodes unifiées
et qu'il faut dorénavant s'assurer que nous soyons plus
équipés pour faire de l'évaluation de qualité qui
nous permette de porter des jugements adéquats.
Deux questions chez vous: Qu'est-ce que vous faites à ce
chapitre-là? Au cégep de Laval, comment vous faites ça,
l'évaluation? Mais pas uniquement des profs, là. Des
apprentissages du collège. Et quel degré de sensibilité
vous auriez si on envisageait que dorénavant les étudiants et les
étudiantes seront plus impliqués dans l'évaluation de
l'enseignement? Vous, M. le président du collège, est-ce que vous
seriez réfractaire à ça? Comment vous voyez l'implication
des élèves dans l'évaluation des profs?
M. Filiatrault: Ce que j'ai mentionné tout à
l'heure, c'est que je pense que le conseil souhaiterait avoir des outils
d'évaluation. Je pense que l'évaluation peut se faire à
l'interne. En ce qui concerne les méthodes utilisées pour faire
l'évaluation, je demanderais à M. Saint-Onge, peut-être, de
nous en parler.
M. Saint-Onge (Michel): Je pense que ce qu'on souhaite, c'est que
l'évaluation soit vraiment intégrée au processus de
gestion. Et, chez nous, on essaie d'intégrer de façon naturelle
l'évaluation dans un processus global de gestion et des programmes et
des apprentissages des élèves. Et ce qui se dégage, je
pense, de notre expérience, c'est que les habitudes de travail font que
nous sommes en train de créer les instruments d'évaluation. Et
c'est en autant que ces instruments-là apparaissent comme utiles aux
cheminements qu'on arrive à les faire utiliser. Lorsqu'ils viennent de
l'extérieur, évidemment, c'est beaucoup plus difficile que
ça apparaisse comme un outil de travail. Alors, c'est pourquoi dans nos
pratiques on essaie de développer des instruments au fur et à
mesure que des activités se développent afin que ça
apparaisse comme un outil de travail.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Rapidement, là, dans vos
pratiques de gestion, envisager que dorénavant les étudiants et
les étudiantes du collège joueront un rôle plus important
dans l'évaluation des apprentissages et des enseignants, qu'est-ce que
ça vous dit? Avez-vous une opinion là-dessus?
M. Saint-Onge: Actuellement, je pense que nous sommes
confrontés à la tendance de la demande des étudiants
d'intervenir dans l'évaluation. Je pense que notre réflexion
n'est pas assez avancée pour voir comment on pourrait les
intégrer dans ce processus.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): O.K. Une dernière question sur
un point majeur. Vous n'avez pas parlé des frais de scolarité. Je
présume que vous, vous êtes d'accord qu'il n'y en ait pas, mais
vous...
Une voix: Oh oui, il en a parlé.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): La gratuité, ils en ont
parlé? O.K., parfait. Peut-être dans le mémoire, mais dans
la présentation... O.K. Mais une chose est sûre, c'est que vous
concluez, M. le directeur général, votre présentation en
disant: «II vous revient - en parlant un petit peu
à nous, beaucoup plus au gouvernement - au terme des travaux de
votre commission, de convaincre la société
québécoise d'accepter la nécessité d'investir de
nouvelles ressources financières». Et là, très
clairement, vous dites: «Du soutien financier doit notamment être
accordé aux établissements afin qu'ils puissent assumer
pleinement...».
Moi, je n'ai pas d'objection. C'est évident, il y a eu des
coupures, c'est évident que si on veut «reprioriser» d'une
façon concrète l'éducation, il va falloir y accorder
l'importance en crédits financiers. Mais, dans la perspective où
les ressources de l'État sont difficilement trouvables et qu'on va
apprendre probablement des mauvaises nouvelles suite à la
récession qui perdure - vous êtes sûrement au courant que
ça ne lève pas vite, il n'y a pas grand monde au travail,
malheureusement - est-ce que vous ne croyez pas qu'il y aurait moyen encore...
Pas de demander des efforts collectifs de rationalisation budgétaire,
là...
Je pense qu'à certains endroits au niveau des équipements
supports, entre autres, les instruments de supports à l'action
pédagogique on est rendu au maximum; dans la non-indexation de certaines
enveloppes on est rendu très loin. Mais je ne suis pas sûr qu'il
n'y a pas de mesures de rationalisation à faire en disant
carrément qu'il y a des cégeps qui doivent ne plus offrir des
programmes qui ne mènent nulle part. Ils ne doivent pas dans un grand
... Je sais bien où est située Laval, je sais très bien
où est située Laval, mais dans le bassin montréalais,
là, l'Ile de Montréal, est-ce qu'il faut absolument qu'il y ait
encore 9 ou 10 cégeps qui offrent un cours d'informatique de gestion,
alors que ça coûte cher, ou d'informatique tout court - pas de
gestion, mais d'informatique tout court - avec les équipements? En
termes clairs, est-ce que le moment n'est pas venu de dire que ça prend
plus de ressources mieux utilisées pour ce faire? Les collèges
vont nous indiquer ce qu'on laisse tomber, ce qui est moins requis, parce qu'on
a dit qu'il fallait s'adapter, en 1993, à une nouvelle
réalité. S'il faut s'adapter à une nouvelle
réalité, il y a des choses qu'il faut laisser tomber,
d'après moi. Est-ce qu'il y a moyen de dégager du fric
là-dedans, d'après vous?
M. Filiatrault: Peut-être que j'aurais un commentaire
là-dessus, M. le député. Le Montmorency a fait, depuis
plusieurs années, des exercices fortement honorables au niveau de
réduire les budgets, réduire les dépenses, réviser,
se questionner sur l'endroit où on dépensait. Le Montmorency a
été un des collèges les plus affectés par les
modifications de distribution de ressources financières
récemment. Le Montmorency s'est plié à cela, s'est dit:
C'est vrai, on est dans une période où chacun doit faire son
effort. Il a fait, à mon avis, un grand bout de chemin. Et puis, est-ce
qu'il reste des choses à faire? M.
Brisson pourrait nous en parler. (16 h 50)
M. Brisson: En fait, je peux peut-être vous donner un peu
le sens de ce que nous voulons donner à cette demande-là. Nous
prônons l'accessibilité, la réussite des études. Je
crois qu'à la lumière de ce qui a été
présenté cette semaine, on veut accroître
l'accessibilité et même accroître le taux de diplomation.
À Laval, au collège Montmorency entre autres, nous avons une
clientèle hétérogène et c'est a peu près
dans tous les collèges que ça se produit. Et je crois que pour en
arriver à atteindre des objectifs tels qu'ils ont été
fixés, du moins tels qu'ils sont présentés jusqu'à
maintenant, on doit être en mesure d'avoir un soutien
supplémentaire, en termes de mise en place et de mise en oeuvre de
mesures particulières. Je pense qu'il serait fort louable que la
dimension financement apparaisse dans le cadre d'un support à la mise en
place et à la mise en oeuvre de mesures particulières.
On a eu des exemples au cours des dernières années. Je
pense à la question du français, également à la
question de l'encadrement des élèves à la première
session, qui ont donné des résultats fort intéressants.
Pour le collège Montmorency, ce serait une façon de
démontrer le support que le gouvernement pourrait avoir dans la mise en
place d'une mesure particulière.
La Présidente (Mme Hovington): Merci.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Pour avoir la paix avec M. Tremblay,
je suis obligé de terminer.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. Alors, je reconnais
le député de Rimouski.
M. Tremblay (Rimouski): mme la présidente, je dois vous
faire un certain reproche, parce que la gérance du temps semble
favoriser le député d'abitibi.
La Présidente (Mme Hovington): M. le député
de Rimouski, je vous ferai remarquer qu'il a encore quatre minutes. Alors, si
vous voulez garder votre temps, prenez-le, parce que je le lui redonne. Ha, ha,
ha!
M. Tremblay (Rimouski): Le mémoire que vous nous
présentez, à mon sens, est très intéressant et
ça nous donne, en tout cas, beaucoup d'espoir pour l'enseignement
collégial au Québec, à savoir, en tout cas, que l'approche
pédagogique que vous mettez de l'avant est très
intéressante. En même temps, par rapport à ce qu'on a
entendu ce matin des collèges privés qui semblaient
étouffer, eux, par une centralisation, vous autres, vous semblez avoir
de l'oxygène dans votre collège. Vous ne semblez pas être
étouffés par le système présentement. Vous
êtes, je présume, un des meilleurs collèges du
Québec,
ne serait-ce que par votre mémoire. Après le
collège de Rimouski, je présume que vous êtes le meilleur
collège de la province.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Ça, c'est une affaire de
temps.
M. Tremblay (Rimouski): Oui. Mais là je suis bien content
d'avoir un président de conseil d'administration. Souventefois on se
fait dire: Le conseil d'administration d'un cégep, ça ne
gère pas grand-chose. 80 %, c'est des salaires, puis ça, c'est
toutes des conventions collectives.
Je voudrais bien savoir. Vous, M. le président du conseil
d'administration, votre rôle, est-ce que vous le considérez comme
trop restrictif ou - comment je vous dirais ça? - avec beaucoup
d'enfarges, ou bien si vous avez assez de latitude pour gérer d'une
façon efficace votre cégep? C'est quoi, votre perception? Est-ce
que vous en avez assez, de la latitude, ou bien si vous n'en avez pas
assez?
M. Filiatrault: Mme la Présidente, est-ce que je pourrais
prendre une demi-heure pour répondre à cela?
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Hovington): Allez-y! Ad lib!
M. Filiatrault: C'est une grande question. Je pourrais vous en
parler longtemps. Évidemment, les conseils d'administration, je pense
qu'ils jouent un rôle différent dépendant du collège
ou dépendant des gens qui y sont présents. Chez nous, on a
tenté de jouer le rôle qui était décrit dans la loi
et puis tenté de jouer aussi le rôle que Mme la ministre nous a
écrit, lorsqu'elle nous a transmis les indicateurs de performance. Cette
lettre-là m'a impressionné beaucoup et c'était une
précision très importante, à mon avis, sur le rôle
que doivent jouer les conseils. C'est de cette façon-là que nous
avons tenté de le jouer, de le jouer pleinement et de prendre toutes nos
responsabilités.
En ce qui concerne notre marge de manoeuvre, elle n'est pas grande. Si
je regarde la loi, la loi dit: Bon, les conseils doivent adopter des
politiques. C'est leur rôle, c'est très bien. Alors, dans la loi,
on parle de politique de gestion du personnel. Parfait. On a dit: Cette
année, c'est une grande préoccupation chez nous, on s'attaque
à ça. Comment est-ce qu'on pourrait adopter une politique de
gestion du personnel? On a passé plusieurs soirées de travail
là-dessus pour en arriver à la conclusion que, finalement, c'est
tellement réglementé, le personnel, qu'il ne reste plus
grand-chose à faire suite à ça. Alors, la marge de
manoeuvre n'est pas grande. Nous sommes effectivement très
réglementés. Chaque fois qu'on veut faire un pas en avant, on est
un peu pris avec les règlements. En tout cas, c'est notre point de vue.
Et puis je pense qu'il y aurait peut-être avantage a avoir un petit peu
plus de latitude.
J'ai avec moi, ici, des gens très compétents, des gens
très dynamiques aussi et puis qui, peut-être, s'ils avaient un
petit peu plus de marge de manoeuvre et de moyens aussi, donneraient des
résultats incroyables au niveau de la réussite scolaire. Alors,
si on avait une suggestion globale à donner, ce serait: Oui, donnez-nous
un petit peu plus de latitude dans l'exercice de notre fonction.
M. Tremblay (Rimouski): Une autre question, Mme la
Présidente, que je voudrais poser, c'est surtout au plan de la gestion
du cégep, je veux dire, au directeur général ou à
Mme la directrice des services pédagogiques.
Vous nous dites, dans votre rapport, que vous mettez la priorité
au sujet d'un environnement favorable à la consolidation du choix
professionnel de l'élève. Ça, c'est fondamental, à
mon sens. Vous vous en occupez, de l'élève, vous vous en occupez
à tous les paliers. Cependant, vous arrivez à la fin et vous
semblez demander des ressources supplémentaires pour les
élèves qui vraiment sont des cas particuliers,
c'est-à-dire des élèves qui sont plutôt faibles, et,
si on réglait ce problème budgétaire là, ce serait
le bonheur total chez vous. Ou pas?
Mme Boutin: Je sais que ça ferait le bonheur de la
société québécoise, parce que probablement qu'on
aurait acheminé vers la diplomation un plus grand nombre
d'élèves, particulièrement ceux qui en ont besoin. Alors,
quand on parle du soutien au choix de cheminement professionnel, ça part
d'une conviction profonde qu'un étudiant va avoir d'autant plus de
chances de réussir dans son programme d'études que ce programme
d'études là aura un sens. Et la façon de soutenir son
cheminement professionnel, c'est de le soutenir à plusieurs
égards, et de soutenir le cheminement professionnel,
particulièrement de groupes cibles.
On a donné l'accès à une majorité de jeunes.
Maintenant, on doit se centrer sur des populations particulières: nos
populations, par exemple, de filles qui n'ont pas accès aux
métiers non traditionnels; une population de garçons qui nous
arrive, de plus en plus faible; et l'intégration des communautés
ethniques qui doit se faire de façon harmonieuse. Il nous semble que
cette intégration-là de groupes cibles, et cet
accompagnement-là, on ne pourra pas le faire avec les moyens qu'on a
actuellement, qui sont strictement des moyens de masse. Il nous faut, pour
intégrer des groupes cibles qui n'ont pas accès et pour acheminer
un plus grand nombre de personnes vers la réussite, des
stratégies ciblées, des ressources qui sont ciblées aussi,
parce que si on continue à faire un
enseignement de masse on va continuer à exclure une très
forte proportion des jeunes du diplôme.
M. Tremblay (Rimouski): Très bien.
La Présidente (Mme Hovington): M. le député
de Sherbrooke, vous avez une question?
M. Hamel: Oui, Mme la Présidente. Dans votre
synthèse du mémoire que vous nous avez soumis, vous parlez
très brièvement de l'encouragement à la recherche. Moi,
j'aimerais ça si vous pouviez élaborer davantage et nous dire,
selon vous, comment pourrait ou devrait se concrétiser cet encouragement
à la recherche?
M. Filiatrault: M. Saint-Onge.
M. Saint-Onge: Oui. Actuellement, il y a des efforts qui sont
faits pour soutenir la recherche, mais c'est pratiquement seulement sur un plan
individuel, c'est-à-dire que c'est selon l'intérêt d'un
professeur pour un thème de recherche. Vous remarquerez que, dans notre
mémoire, nous avons placé la recherche à deux endroits.
Nous l'avons placée comme outil pour arriver à hausser le niveau
et comme outil aussi pour diminuer les échecs et les abandons. Alors, on
voudrait resituer la recherche dans un cadre de création d'outils, de
façons de faire pour arriver à résoudre des
problèmes concrets.
Alors, la recherche telle qu'elle est vécue actuellement, elle
est vécue sur la base d'intérêt. On voudrait resituer la
recherche sur la base d'une instrumentation. La plupart du temps, quand on veut
résoudre un problème dans les autres domaines, on se donne des
buts et la recherche nous permet de voir si on peut se fixer des objectifs. Si,
en santé, par exemple, on se donne le but de guérir le cancer, on
fait de la recherche, on trouve un médicament ou une technique
quelconque, et ensuite on se donne comme objectif, selon la performance de
l'outil qu'on a trouvé, de guérir 80 % des cas.
En éducation, souvent, on se donne tout de suite un objectif et
ensuite on lance la recherche des moyens, et on est souvent déçu
de ne pas pouvoir atteindre l'objectif. Nous, on croit que, dans un premier
temps, quand il y a un problème, il faut se donner comme but de le
résoudre, et là mettre tout de suite en branle la recherche pour
trouver les moyens. Parce que, dans le fond, ce qui est efficace, c'est le
moyen, ce n'est pas tellement l'énoncé de l'objectif. Et nos
objectifs doivent être toujours à la mesure des moyens qu'on a
trouvés. Il y a des moyens plus ou moins efficaces.
Donc, on voudrait resituer la recherche en tant qu'outil pour
élaborer des interventions, et ensuite se fixer des objectifs pour voir
ce qu'on peut faire avec ça.
M. Tremblay (Rimouski): Merci.
La Présidente (Mme Hovington): En conclusion, Mme la
ministre.
Mme Robillard: Oui, merci, Mme la Présidente. Je voudrais
encore une fois remercier le collège Montmorency de s'être
déplacé pour venir nous rencontrer au niveau de la commission. Je
sais que le milieu de Laval tient beaucoup à son cégep, fait
beaucoup de représentations à cet égard-là, ce qui
signifie pour moi que vous êtes très bien intégré
dans le milieu et que vous répondez aussi aux demandes en provenance de
ce milieu-là.
Alors, merci d'avoir éclairé les membres de la commission
de votre expérience et, M. le président, vous l'avez noté,
il y a un intérêt particulier à entendre aussi les
présidents de conseils d'administration des cégeps. Merci
bien.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, au nom de la
commission de l'éducation, en tant que présidente, permettez-moi
de vous remercier pour la présentation de votre mémoire qui saura
sûrement donner un éclairage aux parlementaires dans leurs
recommandations. Merci.
M. Filiatrault: Mme la Présidente, nous vous remercions.
Mme la ministre, nous vous remercions de l'attention que vous avez
accordée à toutes nos recommandations.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, bonne fin de
soirée.
J'inviterais le cégep de Saint-Félicien à venir
prendre place. Je suspends pour une minute.
(Suspension de la séance à 17 heures)
(Reprise à 17 h 2)
La Présidente (Mme Hovington): La commission va reprendre
ses travaux. Je demanderais un petit peu de silence en arrière, s'il
vous plaît. La commission de l'éducation va reprendre ses travaux
avec le cégep de Saint-Félicien, représenté par M.
Jean Girard, président du conseil d'administration. Bonsoir, M. Girard,
bienvenue à la commission de l'éducation. Voulez-vous
présenter aux membres les collaborateurs qui vous accompagnent?
Conseil d'administration du cégep de
Saint-Félicien
M. Girard (Jean): Certainement. Je vais débuter
immédiatement. Donc, Mme la Présidente, Mme la ministre, Mmes,
MM. les membres de la commission, comme président du conseil
d'administration, je suis honoré de vous présenter la position de
notre cégep. Des représentants de notre milieu m'accompagnent
pour l'occasion,
entre autres, M. Jean-Marc Gendron, qui est maire de Mistassini; M.
Ronald Blackburn, qui est maire de Chibougamau; M. Gérald
Bélanger, qui est membre du conseil des ambassadeurs du cégep; M.
Jocelyn Audet, qui est le directeur général du cégep; et
M. Robert Dumais, qui est directeur des services éducatifs.
J'interviendrai dans un premier temps; par la suite, les gens de notre
milieu vous présenteront pourquoi notre cégep est un outil
essentiel du développement de notre région; enfin, nous
répondrons à vos questions.
Mentionnons dès le départ que le cégep de
Saint-Félicien, avec ses 1200 élèves, est un très
bon exemple d'un cégep de petite taille en région
éloignée. Il répond d'abord aux besoins de la population
de l'ouest et du nord du Lac-Saint-Jean, puis de la vaste région du
Saguenay-Lac-Saint-Jean, et de la région de Chibougamau-Chapais jusqu'au
lac Mistassini par son Centre d'études collégiales à
Chibougamau.
Notre cégep et notre Centre d'études collégiales
doivent répondre, comme tous les cégeps du Québec, aux
besoins de notre société et de nos communautés; ainsi,
à titre d'exemple, le problème des décrocheurs, la
maîtrise de la langue maternelle et le recyclage de la main-d'oeuvre.
Les régions-ressources comme la nôtre vivent ces
problèmes de façon plus catastrophique. Elles ont moins de marge
de manoeuvre, un poids politique et économique moins
élevé. Notre région vit déjà des
problèmes d'isolement, de disparité, de déclin de nos
villes mono-industrielles, d'exode de leurs jeunes et, également,
d'épuisement de nos ressources naturelles.
Il faut comprendre la réalité que vivent nos
communautés, comme beaucoup de régions-ressources, pour trouver
une solution à nos problèmes de développement. Lorsque
l'on veut apporter des remèdes à un problème, il faut bien
diagnostiquer la maladie. Or, nous avons souvent l'impression que les docteurs
sont assez loin de nos malades et de leurs préoccupations.
En région, un cégep est un outil de développement
régional aux plans économique, social, culturel et
éducatif. Face aux problèmes actuels, on demande au cégep
d'être le médecin du coin, de pratiquer une médecine de
brousse, mais aussi d'offrir une médecine générale de
qualité en réponse aux multiples maux socio-économiques de
nos communautés.
De la même façon qu'aujourd'hui les communautés
éloignées se bagarrent pour obtenir des médecins, de la
même façon, en 1970, les chefs de file du Lac-Saint-Jean sont
intervenus pour obtenir un cégep. Il ne leur a pas été
offert en fonction de normes de répartition. Ils sont allés le
chercher et ils l'ont implanté par la force de leurs convictions. Je
vous ferai remarquer que le cégep de Saint-Félicien n'est pas
né d'une institution précédente. Même, certains ont
dit qu'il n'y aurait pas de cégep dans un champ de patates.
Pourquoi? Pour offrir un avenir à leurs jeunes, pour augmenter le
taux de passage du secondaire au collégial, pour permettre
l'accès aux études aux moins bien nantis, pour garder les jeunes
dans la région et développer leurs racines, pour former la
relève. Ces leaders avaient compris que la base de la structure sociale
et économique s'assure par les aînés pour la
génération suivante. Vider une région de ses jeunes, ne
pas leur permettre de s'instruire et de s'enraciner, c'est le début
d'une déstructuration sociale et économique. Un cégep
constitue un levier important de développement du potentiel humain de sa
communauté, d'accès aux connaissances, à la formation
technique, aux études qui mènent à
l'université.
Depuis la fin des années quatre-vingt, les problèmes
bousculent les régions-ressources: l'Accord de libre-échange, les
effets des normes environnementales, la nécessité de capitaux
énormes pour moderniser les usines de transformation, la
déqualification de la main-d'oeuvre, l'exode des jeunes familles en
quête de stabilité économique, la perte de fierté
causée par le chômage et l'apparition de l'humiliante
dépendance sociale. Ainsi apparaît la spirale de
l'appauvrissement, de la déstructuration économique et sociale et
de la dépendance.
Mais les raisons invoquées en 1970 pour avoir un cégep
à Saint-Félicien sont-elles toujours d'actualité? Oui, et
même plus. Le cégep n'est plus uniquement un pourvoyeur de
services de formation collégiale, il devient un acteur important dans la
solution des enjeux sociaux, économiques, culturels, éducatifs
des communautés. En 1987, lors de la révision de notre plan de
développement, les 23 communautés rencontrées ont fait
savoir à la direction du cégep ce que l'on attendait de lui:
premièrement, garder les jeunes dans leur communauté le plus
longtemps possible; deuxièmement, offrir des programmes de formation
calqués sur les besoins du milieu; troisièmement, former les
adultes en sortant du gros catalogue de cours; quatrièmement,
s'impliquer dans la formation et le recyclage de la main-d'oeuvre;
cinquièmement, supporter le développement économique
à l'aide de ses ressources humaines.
Depuis cette démarche structurée de contacts dans le
milieu, les appels à l'aide des communautés sont plus pressants,
plus incisifs, à la mesure des problèmes. En fait, un
cégep de région est souvent le lieu où sont
rassemblés, de façon plus évidente, les cerveaux de la
communauté. Le bénévolat de nos ressources humaines est
actuellement un ingrédient important de la symbiose
cégep-milieu.
Ainsi, nous considérons que la vocation de notre institution se
définit à partir des concepts d'appartenance, de
dépendance à notre milieu, d'imputabilité à nos
communautés, de particularités et de disparités
régionales. La réalité de
notre vie en région nous oblige à innover dans un cadre de
gestion d'un service public financé par l'État et selon un
mécanisme de répartition et de gestion par norme - entre
guillemets, par norme.
Cette approche gestionnaire, bien que vénérable dans la
gestion des biens publics, ne s'applique pas très bien dans des
conditions de médecine de brousse où la nécessité
est la mère de l'invention. L'urgence du besoin exige d'innover, de ne
compter que sur nos propres forces, une réalité à laquelle
sont confrontés continuellement les cégeps des
régions-ressources. (17 h 10)
Le cégep de Saint-Félicien a innové, mais, en
raison de la rigidité des normes ministérielles ou des
conventions collectives, combien d'obstacles avons-nous et rencontrons-nous?
À titre d'exemple, 10 ans pour faire reconnaître le programme des
techniques du milieu naturel, élaboré selon l'approche par
compétences désirées du marché du travail, un
modèle que le ministère est en voie d'implanter. Dix ans pour
implanter un programme. Combien d'efforts pour répondre aux besoins de
la population de Chibougamau-Chapais par un Centre d'études
collégiales?
Depuis 1976 que l'on se cogne aux normes des conventions collectives
pour regrouper en départements nos enseignants selon l'approche
programme, une approche pédagogique que tout le monde veut implanter
maintenant dans les cégeps. Combien d'efforts pour se faire
reconnaître de façon expérimentale un centre
spécialisé en environnement? On oublie trop les vrais besoins:
les besoins de nos jeunes, de nos adultes, de nos communautés, de nos
entreprises. On démobilise notre monde par la rigidité de la
gestion par norme. Pour nous, la vitalité d'un cégep se manifeste
à sa vision éducative, à son dynamisme et à sa
capacité d'innover.
L'innovation pratiquée dans nos programmes de formation se classe
dans la catégorie des réalisations en éducation et en
enseignement professionnel. Les problèmes que vivent présentement
les régions-ressources nous obligent à en faire davantage. Le
milieu exige de son cégep qu'il soit un acteur de premier plan dans la
dynamique de restructuration économique et sociale qu'amorcent les
leaders des régions. Notre milieu nous prie de nous impliquer parce que
toutes les régions-ressources sont victimes de leur éloignement,
de l'étalement géographique, des disparités
régionales, des ressources naturelles qui se raréfient.
De Mme la ministre et de son ministère, le cégep de
Saint-Félicien, comme témoin et acteur de sa communauté,
demande d'avoir une vision éducative et sociale de la
réalité des régions-ressources; une gestion des moyens,
des ressources financières et humaines centrée sur la
réponse aux besoins des communautés; une réponse où
la répartition des ressources respecte l'équité, la
justice distributive, la compensation aux phénomènes de
disparités plutôt que de se satisfaire d'une gestion par norme qui
nivelle les besoins à une moyenne provinciale.
En conclusion, Mme la Présidente, Mme la ministre, mesdames et
messieurs de la commission, avec toutes les convictions de notre
expérience de vie en région, de détermination à
offrir un enseignement de qualité et de volonté à innover
dans nos pratiques de formation et de gestion, nous recommandons bien
humblement mais avec sincérité: premièrement, d'appliquer
avec réserve et retenue les approches de gestion par norme des
programmes de formation - il faudrait «prioriser» la réponse
aux besoins des jeunes, des adultes, des entreprises; une vision
éducative doit être la toile de fond de la réponse aux
besoins - deuxièmement, de réserver aux petits cégeps de
région, de façon délibérée et exclusive, des
programmes professionnels dans des créneaux viables et
spécifiques afin de compenser les phénomènes de
disparités régionales; et, finalement, troisièmement, dans
l'élaboration et l'application des diverses politiques du
ministère, de réserver aux cégeps de région les
facilités pour qu'ils ne soient pas continuellement acculés
à des conditions de survie.
Maintenant, j'aimerais demander aux personnes qui m'accompagnent, en
commençant par M. Jean-Marc Gendron, maire de Mistassini, de vous donner
la raison pour laquelle elles nous appuient dans notre démarche face
à vous.
La Présidente (Mme Hovington): M. le maire, allez-y.
M. Gendron (Jean-Marc): Mme la Présidente, Mme la
ministre, membres de la commission et mon homonyme, M. Gendron - probablement
qu'on a le même Pierre comme ancêtre - vous me permettrez
aujourd'hui de tasser le maire pour laisser la place au prof et au père
de famille qui a justement une collégienne qui fréquente le
cégep de Saint-Félicien.
Vous savez, j'ai le plaisir de faire ce qu'on appelle chez nous du
tutorat, c'est-à-dire un suivi auprès de jeunes - c'est
très, très, très personnalisé - auprès d'une
clientèle qui fréquente la cinquième secondaire. Et puis,
ça me fait plaisir, Mme la ministre et membres de la commission, de vous
parler de la vraie vie pour un vrai bleuet du Lac-Saint-Jean, au nord du
Lac-Saint-Jean. Ça représente quoi, pour un jeune de
cinquième secondaire, ça, son orientation,
l'accessibilité? Premièrement, il a le choix. S'il veut
fréquenter des cégeps, pas tellement loin, là, Aima,
Chicoutimi, Jonquière, ou aller à Québec ou
Montréal, il vient de se farcir 5000 $ à 8000 $ de
dépenses. Donc, s'il n'est pas eligible aux prêts et bourses parce
que son père gagne juste assez cher pour le disqualifier, pas assez cher
pour le subventionner, là il doit se trouver obligatoirement un emploi
d'été. Vous savez que, dans le coin, ça frappe dur. Dans
le
secteur forestier, les emplois d'été, il n'y en a plus.
Donc, là, c'est un casse-tête.
Heureusement, Mme la ministre, qu'un groupe de fonceurs, il y a de cela
20 ans, ont décidé de mettre en place un cégep dans un
champ de patates. Vous savez, dans le beau comté de Roberval, de voir
cinq villes qui ajustent leurs clochers pour localiser un cégep, il faut
le faire. Le centre qui a été choisi, c'est
Saint-Félicien. 150 personnes, au début, qui avaient M. Laroche
comme directeur général. Aujourd'hui, on est rendu à 1200
étudiants qui fréquentent ce cégep-là, dont 900 de
la région.
Mme la ministre, ce qui me fait mal au coeur, comme enseignant, c'est de
voir une jeune pleine de potentiel qui choisit son orientation pas en fonction
de son potentiel, mais en fonction de son portefeuille. Ça, Mme la
ministre, ça fait mal. Puis, dans notre coin, chez nous, il y en a
à qui ça fait mal, puis il y en a qui sont obligés de
faire ça. Heureusement qu'ils ont une institution de qualité qui
a réussi à développer l'approche client. C'est quoi,
l'approche client? C'est quoi concrètement? Ils ont réussi,
grâce à des directeurs généraux un peu hors la loi,
à mettre en place un système de transport qui relie les cinq
collectivités et qui a été, au fil des années,
avalisé par le ministère de l'Éducation: 50 % par les
jeunes, 50 % par le cégep via des subventions gouvernementales.
Ça, déjà, ça vient de rabaisser la note à
1000 $, 1500 $.
C'est un cégep, Mme la ministre, qui est extrêmement
présent dans son milieu. Nous, on ne parle pas de relations avec le
milieu, on parle de réalisations concrètes: le Centre
écologique de Saint-Félicien, CIDEL, une nouveauté qui a
été carrément mise en place hier, différents
projets récréotouristiques, parce que chez nous, Mme la ministre,
quand on regarde ça bien concrètement, dans notre milieu, on est
obligés de rationaliser. Puis, quand on a une belle grosse boîte
pleine de ressources, on n'a pas le temps de courir à Québec,
Montréal, Chicoutimi pour aller les chercher. On cogne, puis on
s'adresse à Jocelyn Audet pour lui demander: Écoute, viendrais-tu
nous donner un coup de pouce dans ce secteur-là? Et puis Jocelyn, qui
est un bonhomme qui est ouvert, un bonhomme qui est dynamique,
généralement nous vient en aide, et CIDEL, ça nous a
permis d'accoucher de quelque chose d'intéressant.
Alors, probablement que je viens de dépasser largement mes deux
minutes, mais j'aimerais vous dire, en terminant, Mme la ministre: Vous savez,
à 16 ans, là, un jeune, ça fait du bien quand il
réussit à chaque soir à retourner chez lui. Puis, quand on
réussit, parce qu'il a déjà le cégep près de
chez lui, à lui permettre de fréquenter sa famille une couple
d'années de plus, ça lui permet de se stabiliser, de maturer. Et
puis, Mme la ministre, une autre affaire intéressante, c'est que, plus
il reste longtemps en région, plus les fantasmes montréalais et
québécois s'évaporent et plus il a le goût de rester
chez lui pour relever le défi.
Alors, merci pour le cégep que vous nous avez accordé. Et,
s'il vous plaît, n'appliquez pas chez nous des normes
montréalaises, ça ne marche pas. C'est un grand territoire de
fous, Mme la ministre. Mais tenez compte, avec l'originalité que vous
avez, de la situation géographique particulière avec laquelle on
est confrontés puis des vrais problèmes qu'on a le goût de
relever. Merci.
M. Girard (Jean): Maintenant, la parole est à M. Ronald
Blackburn, qui est maire de Chibou-gamau.
M. Blackburn (Ronald): Mme la Présidente, membres de la
commission parlementaire, M. Gendron, Mme la ministre, j'ai accepté avec
grand plaisir de répondre à l'invitation que le cégep de
Saint-Félicien m'a faite de venir vous répéter un peu ce
que j'avais déjà discuté avec Mme la ministre à
Chibougamau, au Centre d'études collégiales, au mois de mai
dernier. Alors, je vais donc assez rapidement vous situer un petit peu. Donc,
le Centre d'études collégiales de Saint-Félicien à
Chibougamau est à 250 kilomètres de la maison mère,
Saint-Félicien, et c'est aussi le seul établissement
d'études postsecondaires qu'on retrouve dans la région nord du
Québec. Alors, est bien évidente que, pour nous, la grande
importance que peut avoir un établissement de ce type-là, alors
que nous sommes des petites communautés vraiment isolées dans la
forêt québécoise. (17 h 20)
Vous savez, par ailleurs, que notre secteur Chapais-Chibougamau est aux
contreforts du développement nordique. Je pense qu'on peut affirmer que
même dans notre région on vit ça tous les jours, en plus
d'avoir une économie un peu particulière, vraiment
mono-industrielle, parce qu'on n'a même pas d'agriculture en plus. C'est
l'électricité qui remplace l'agriculture chez nous. Alors, en
plus d'avoir cette économie très particulière, nous
développons actuellement des pistes intercommunautaires avec les
autochtones, parce que je crois que notre secteur Chapais-Chibougamau est
probablement la région où, avec deux municipalités et
trois bandes amérindiennes, le mixage est à peu près
parfait entre autochtones et non-autochtones.
Alors, permettez-moi de vous rappeler, donc, que pour ces
raisons-là de développement nordique et de nouveaux partenariats
intercommunautaires, il est important que le Centre d'études
collégiales de Chibougamau reçoive l'appui, reçoive
l'oxygène dont il a besoin pour devenir un outil de développement
important pour nous autres. Et je dirais même - et je vais aller un petit
peu plus loin - que ça devient même un outil d'occupation du
territoire pendant
ce temps-ci, parce que vous savez que, quand les problèmes
économiques se multiplient dans le Nord, les gens ont tendance à
se retirer, et ça peut devenir un instrument d'occupation du
territoire.
Alors, je demande donc à cette commission parlementaire de bien
regarder, de ne pas avoir uniquement des centres d'études, on pourrait
dire, qu'on va laisser vivre, mais j'aimerais qu'on réfléchisse
bien à ces instruments dont on a absolument besoin dans le Nord,
à leur donner les ressources, à leur donner les normes et les
marges de manoeuvre nécessaires pour qu'ils puissent fonctionner et
devenir justement cet oxygène-là dont on a besoin. Merci beaucoup
de nous avoir entendus.
La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. le maire. Votre
temps est écoulé à moins que, de consentement unanime,
vous preniez chacun sur vos 20 minutes pour...
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Le consentement est unanime.
Ça nous fait plaisir de recevoir des gens des régions; alors, ce
n'est pas un régionaliste qui va vous couper la parole, certain.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, de consentement
unanime. Mme la ministre.
Mme Robillard: S'il vous plaît, M. le président,
vous allez sûrement nous faire entendre votre ambassadeur.
M. Girard (Jean): Certainement. C'est là qu'on en est, Mme
la ministre. Donc, pour terminer, M. Gérald Bélanger, qui est
membre de notre conseil des ambassadeurs, va vous adresser la parole.
La Présidente (Mme Hovington): M. Bélanger,
allez-y.
M. Bélanger (Gérald): Mme la Présidente, Mme
la ministre, membres de la commission parlementaire, je collerai à un
petit texte pour être sûr de vous laisser votre temps aussi.
Régions-ressources, régions éloignées, recul du
rôle de la grande industrie, avance de la technologie même dans la
PME, déqualification de la main-d'oeuvre, disparition des emplois du
secteur primaire égalent chômage, dépendance,
déchéance. Pourtant, dans nos régions on a encore aux
tripes les valeurs du coeur à l'ouvrage et de la force du travail et on
veut se reprendre en main. Le petit cégep en région
éloignée est, chez nous en tout cas, une ressource unique, quasi
inespérée. En plus de ses attributs essentiels qui concernent la
formation, le perfectionnement et le recyclage, c'est le lieu où l'on
retrouve une exceptionnelle concentration de spécialistes et d'experts
dans une multitude de domaines qui, heureusement, collent à notre
réalité, que ce soit dans le domaine des ressources naturelles,
de la forêt, de l'environnement, de l'initiative industrielle et
touristique, de l'informatisation, de l'organisation sociale et des loisirs
sportifs et culturels.
Notre propos ne veut pas éloigner le présent débat
de sa préoccupation première qui est la qualité de la
formation. Vous en avez déjà entendu parler et vous en entendrez
encore longuement parler au cours de ce mois. Mais il veut mettre en
perspective la valeur ajoutée du cégep par son rôle en
région éloignée. C'est souvent le lieu d'une
première consultation, de la vérification d'une hypothèse
novatrice, d'une collaboration et d'une participation à des analyses ou
des tests dans le milieu du développement local. C'est le coup de pouce
encore gratuit et bénévole qui peut donner lieu à la
création d'une entreprise, à la consolidation d'une autre ou tout
au moins à mettre un projet sur les rails solides d'un cheminement vers
sa réalisation, surtout qu'il s'agira habituellement chez nous
d'entreprises peu complexes.
Le cégep, chez nous, ça pourrait bien être, au fond,
notre plus proche et le moins coûteux instrument de développement
local et régional. Pour que le cégep joue ce rôle, il lui
faut sa marge de manoeuvre - pas de la richesse, on aurait peur de le perdre
dans la brume. Mais accordez-lui des assises honnêtement reconnues, dans
un juste temps, et accordez-lui ses propres programmes exclusifs, et avec cela
on saura bien innover encore en région.
La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. l'ambassadeur.
Est-ce que vous aviez d'autres porte-parole à faire entendre? Non,
ça va?
M. Girard (Jean): C'est tout, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, merci. Mme la
ministre, vous avez la parole.
Mme Robillard: Merci, Mme la Présidente. Bienvenue non
seulement au cégep de Saint-Félicien mais au milieu de
Saint-Félicien. M. le président du conseil d'administration, je
suis très heureuse de voir que vous êtes venu non seulement avec
des ambassadeurs mais avec les maires des municipalités environnantes
pour nous décrire et nous faire part de l'importance du rôle du
cégep dans votre région. Vous me l'avez très bien traduit
et dans votre mémoire, et par vos présentations aujourd'hui. Et,
dans ce sens-là, sachez que c'est très apprécié de
sentir de très près ce qui se passe dans une région comme
la vôtre. Bien que j'aie eu l'occasion de visiter autant le
collège de Saint-Félicien que le centre de services à
Chibougamau, je trouve que votre apport à la commission est vraiment
spécifique et, dans ce sens-là, je suis heureuse que vous
soyez avec nous.
M. le président du conseil d'administration, ma première
question est pour vous. Vous êtes président d'un conseil
d'administration; est-ce que vous avez des remarques à faire aux membres
de cette commission sur le rôle que vous exercez comme président
du conseil d'administration? Est-ce que vous avez des recommandations, des
suggestions à nous faire sur le rôle d'un conseil d'administration
de cégep et sur sa composition? (17 h 30)
M. Girard (Jean): Merci, Mme la ministre. Je vais commencer par
sa composition. C'est le dernier élément de votre question. Moi,
personnellement, je suis d'accord avec la position qui a été
exprimée par plusieurs, et même par la Fédération
des cégeps qui la présentera prochainement, à l'effet que
la majorité des membres du conseil d'administration devrait être
formée de personnes de l'extérieur du cégep. Je pense, par
expérience personnelle - ça fait six ans que je suis
administrateur - que le conseil d'administration d'un cégep, c'est
peut-être le seul endroit où vraiment il y a un souffle de
l'extérieur qui rentre à l'intérieur de l'institution,
parce que vous savez comment le domaine de l'éducation en
général, et des collèges en particulier, peut être
hermétique à l'occasion, tant par son langage que par ses
habitudes, ses traditions, tout ça.
Et, malheureusement, actuellement, il y a sur notre conseil
d'administration six membres socio-économiques, dont deux sont du
domaine de l'éducation; il faut dire qu'il y a quatre parents aussi qui
nous aident dans notre travail, mais ça ne fait pas, quand même,
beaucoup de monde pour capter tous les éléments qu'il faut
connaître pour apporter une participation intéressante aux travaux
du conseil d'administration. Ça fait que, donc, moi, je serais
parfaitement d'accord que la majorité d'un conseil d'administration soit
formée de personnes qui viennent de l'externe.
Deuxièmement, quant au rôle, je vais parler du rôle
d'un administrateur. Je pense que le rôle d'un administrateur au conseil
d'administration... Lorsqu'il y aura une majorité de gens de l'externe,
juste par le fait du nombre, nous aurons une participation plus importante aux
travaux du conseil d'administration et au développement du cégep,
parce que vous savez qu'au conseil d'administration on ne règle pas les
problèmes de cuisine. C'est le développement, c'est le futur,
c'est les nouveaux programmes, c'est comment on s'implique dans notre
communauté. C'est là que ça se brasse. Ça fait que,
donc, pour ce qui est de la participation, je vois difficilement comment on
peut l'améliorer, parce que c'est vraiment du domaine personnel des gens
qui sont là.
Quant à la présidence, je vous dirai, Mme la ministre, que
la présidence, je pense qu'on prend la place qu'on veut prendre, par
expérience personnelle; et prendre la place qu'on veut prendre,
ça ne veut pas dire prendre la place des autres. Dans un cégep,
le directeur général fait son travail, puis le directeur des
services éducatifs fait son travail aussi, puis tout le monde dans le
cégep fait son travail. Cependant, et ça, vous ne pourrez pas le
traduire dans des règlements ou dans des dispositions de la loi,
à mon avis, un président qui veut s'impliquer peut le faire.
Ça fait que, donc, en résumé, moi, ce que je voudrais
d'important, c'est qu'il y ait une très grande représentation, au
conseil d'administration, des gens de l'externe de l'institution.
Mme Robillard: Merci, M. Girard.
M. Bélanger, pourriez-vous nous expliquer, aux membres de la
commission, quel est le rôle des ambassadeurs au collège? Combien
êtes-vous? Que faites-vous? Expliquez donc aux membres de la commission
ce qui se passe.
M. Bélanger (Gérald): Mme la ministre, juste avant
de commencer, j'avais pris la peine de compter combien nous étions. Ha,
ha, ha! J'en ai compté 16 actuellement. Les ambassadeurs, nous sommes
dans notre troisième année. Nous provenons de tous les milieux du
territoire que dessert le collège de Saint-Félicien et de toutes
les souches de l'activité sociale et économique du territoire en
question. Nous commençons notre implication au collège par
apprendre comment fonctionne le collège. Nous sommes en
possibilité de nous mettre en relation avec les divers groupes
d'administrateurs, puis les professionnels, puis les enseignants. Nous faisons
une certaine connaissance des programmes qui sont développés au
collège, qui sont enseignés, et du fonctionnement en
général du collège.
Ensuite, notre rôle se joue dans notre milieu. Dans notre milieu,
nous sommes, le mot le dit, ambassadeurs. Je trouve ça bien, bien riche
comme mot, bien gros pour la réalité que je suis, mais j'ai des
origines du monde de l'enseignement, pour moi. J'ai fait ma carrière
dans l'enseignement. De me retrouver, donc, dans un milieu
éloigné comme ambassadeur pour le cégep de mon territoire,
c'est d'essayer d'encourager les gens de mon milieu à comprendre ce que
peut faire le cégep pour eux, tant pour les jeunes - une promotion du
côté des jeunes - que du côté des milieux d'affaires
ou des organismes sociaux.
Il m'est arrivé aussi d'inviter le collège à venir
dans mon milieu rencontrer les gens d'affaires, rencontrer les leaders sociaux
du milieu pour leur expliquer ce qu'est le collège, ce qu'il comporte
comme potentiel au-delà d'être une institution de formation pour
les jeunes. Et j'insiste en particulier beaucoup sur le fait que le
collège peut apporter une aide importante dans notre milieu, pour les
entreprises, pour la formation de la main-d'oeuvre. Chez nous, en milieu
éloigné, les emplois étaient beaucoup des emplois du
secteur primaire. Petit à petit, on
entre dans un autre secteur, le secteur secondaire, et il y a davantage
besoin de recyclage, de formation, d'adéquation des travailleurs. Il y a
de belles initiatives d'industries, de petites entreprises qui se créent
chez nous, qui font leur renom à travers le Québec, qui sont en
relation avec des pays étrangers parfois, et elles veulent produire
quelque chose de qualité. Mais ça prend du recyclage, ça
prend un savoir-faire interne pour les gestionnaires. Le rôle que nous
essayons de jouer, c'est d'approcher les gens de notre milieu, du
collège et des ressources qu'il représente. Et puis nous
essayons, d'un autre côté, de fouetter les gens du collège
à s'offrir, à s'ouvrir, à s'approcher du milieu et
à faire connaître ce qu'ils peuvent offrir aussi à ce
milieu.
Mme Robillard: Merci. Maintenant, MM. les maires, je n'ai pas de
question spécifique. Je pense que votre témoignage était
très clair sur l'importance du cégep dans votre milieu et, M.
Blackburn, j'ai bien reconnu le même discours que vous m'aviez tenu
à Chibougamau, et je retiens bien le message aussi concernant le centre
que vous avez là-bas. M. Audet, j'aimerais ça vous entendre sur
une question particulière touchant peut-être les programmes, la
viabilité des programmes que vous soulevez dans votre mémoire, et
aussi peut-être regarder la concertation qui est possible avec d'autres
cégeps de votre région.
Vous me soulevez, dans votre mémoire, et avec raison, le fait de
dire: Écoutez, appliquez avec prudence des normes de viabilité de
programme dans nos cégeps de régions éloignées. Et
vous avez tout à fait raison de le souligner. Je tiens à vous
dire que, quand on vous envoie cette lumière rouge, c'est plus une
lumière pour susciter la réflexion et voir quoi faire avec ce
programme-là. Et ce n'est absolument pas un signal de fermeture. C'est
un signal plus de réflexion et pour voir comment on peut peut-être
relancer ce programme-là. Alors, soyez sûrs que les normes ne sont
pas appliquées de façon aveugle et abstraite mais qu'elles
tiennent compte de la réalité des milieux.
Mais, ceci étant dit, est-ce que, M. Audet, vous pourriez me
parler un peu de la concertation qui peut ou qui pourrait exister avec les
cégeps de la grande région du Saguenay-Lac-Saint-Jean? Il y a
quatre cégeps dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean et, tout
à l'heure, je ne sais pas si vous avez eu l'occasion d'entendre mon
collègue, le critique de l'Opposition, qui parlait de la
nécessité de la rationalisation de certains programmes. Et i!
apportait, à titre d'exemple, l'informatique. Je pense que voici un
exemple tangible, concret. Nous avons le programme d'informatique dans les
quatre cégeps de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean. Je donne
cet exemple-là vu qu'il a été suscité par mon
collègue en disant: Est-ce qu'il n'y a pas moyen de rationaliser
davantage?
J'aimerais ça vous entendre dans votre expérience de
concertation, de difficile concertation. C'est toujours difficile, la
concertation, mais, quand on la réussit, ça nous apporte
beaucoup. Alors, j'aimerais ça vous entendre. (17 h 40)
M. Audet (Jocelyn): Mme la Présidente, Mme la ministre, M.
Gendron, membres de la commission parlementaire, d'abord, j'aimerais
peut-être revenir sur ce dont vous parliez. Vous parliez des normes au
départ. Vous faites référence surtout au programme sur le
seuil de rentabilité. Je pense qu'on demande plus, parce que, dans des
régions éloignées, il y a des normes tant au niveau du
régulier qu'au niveau des adultes qui nous empêchent
régulièrement de pouvoir répondre aux attentes du
milieu.
Quand on dit au niveau des adultes, pour donner une formation de
qualité à l'entreprise forestière du coin, pour pouvoir
être financé, ça prend 18 élèves. Donc,
régulièrement, on est confronté à ces
choses-là, puis on n'est pas capables de regrouper - il y a la compagnie
Domtar qui a un besoin particulier - 18 élèves pour donner de la
formation. C'est un exemple parmi d'autres. Régulièrement, on a
des demandes des entreprises, des petites PME qui voudraient avoir de la
formation dans certains domaines et on a beaucoup de difficultés
à recevoir du financement. On le fait beaucoup quand même, parce
qu'il y a un genre de vases communicants dans certains programmes aux adultes
où c'est plus rentable. Donc, on répond quand même aux
besoins de la communauté, mais, régulièrement, on ne peut
pas répondre toujours à ces attentes-là parce qu'on va
venir à avoir un déficit énorme et on ne sera pas capable
de fonctionner, mais on essaie quand même de composer. C'est pour
ça qu'on demande que ies normes soient adaptées plus aux besoins
des collèges des régions.
Concernant la concertation, avant 1970, avant que le collège
naisse à Saint-Félicien, même dans le milieu, il y a eu
beaucoup de tiraillement pour situer le collège de
Saint-Félicien. Donc, déjà, vous voyez que, même
dans le comté de Roberval, Mistassini, Dolbeau, Norman-din, Roberval et
Saint-Félicien auraient aimé avoir chacun un collège.
C'est pour vous dire un peu comment c'est difficile de travailler en
concertation dans nos milieux. On a quatre collèges dans la
région. On est une petite région de 250 000 de population, et il
y a déjà quatre collèges. Je pense qu'on est
choyés, la population est choyée de pouvoir avoir quatre
collèges et une université dans la région. Ce n'est pas
facile, mais on peut vous dire qu'il y a des approches déjà. Les
directeurs généraux ont décidé de se rencontrer une
fois par mois pour pouvoir analyser différents problèmes qu'on
vit, pour essayer de trouver des solutions. Donc, on est plus loin qu'on
était il y a deux, trois ans.
Vous faites référence aussi à quatre
collèges qui donnent de l'informatique. On vous dit dans notre
mémoire: Vous devriez peut-être penser à réserver
des programmes professionnels pour des petits collèges de
régions, qui vivent dans un milieu particulier. Chez nous, par exemple,
je suis prêt, demain matin, à regarder avec Chicoutimi la
possibilité de changer mon informatique pour techniques
forestières. Ce sont des choses qui peuvent se réaliser. Je pense
qu'il va falloir, entre collèges, se parler, il va falloir
décider des choses.
Chez nous, à Saint-Félicien, on a choisi nos
créneaux depuis longtemps: C'est la forêt, c'est l'environnement,
c'est le récréotouristique. On n'en veut pas plus que ça.
On ne veut pas être un cégep de 3500; on est 1200
déjà. Heureusement, on a eu la possibilité d'avoir des
subventions pour s'agrandir, parce qu'on vit dans des locaux pour accueillir
750 élèves. On va débuter prochainement une construction,
donc ça va répondre directement à nos besoins, mais il va
falloir... On ne demande pas plus, on ne veut pas avoir... On a quatre
programmes professionnels, puis, pour nous autres, ça répond aux
besoins de notre comté. Et, si on regarde à Chibougamau-Chapais,
on voudrait la possibilité d'avoir des normes un peu plus larges pour
offrir aux entreprises minières ce qu'elles nous demandent.
Régulièrement, on est confrontés à ces
choses-là parce qu'on n'est pas capables de répondre aux
attentes.
Donc, on est ouverts au dialogue; je pense que la région veut
faire un effort. Et le collège de Saint-Félicien veut être
identifié dans ses créneaux, veut être reconnu, veut avoir
des programmes officiels qui nous appartiennent, mais, à ce
moment-là, on sera prêts à s'asseoir et à regarder
la possibilité de rationaliser au niveau de certains programmes. Je
pense que ça doit se faire et que ça devrait se faire.
La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. Audet. M.
le...
M. Girard (Jean): Pardon. Est-ce que je pourrais ajouter...
La Présidente (Mme Hovington): Oui.
M. Girard (Jean): Est-ce que je peux ajouter juste-La
Présidente (Mme Hovington): Oui.
M. Girard (Jean): ...une petite intervention? C'est que
l'échange de programmes de ce genre-là, c'est sûr que
ça peut se faire, mais il faut quand même penser à la
viabilité de nos organisations aussi. C'est pour ça qu'on parle
de réserver des programmes exclusifs. Présentement, dans le
Québec, il se donne de la foresterie dans sept, huit cégeps
à tout le moins. Je suis sûr qu'il y a des cégeps où
il n'y a même pas un arbre dans la cour, tu sais. Et nous autres, des
arbres, il y en a pas mal dans la cour. Ça fait qu'on se demande
pourquoi la foresterie se donne partout. Si elle se donnait seulement à
deux ou trois endroits, j'ai l'impression que ça serait peut-être
moins coûteux pour l'État de conserver ces programmes-là.
Cependant, à cause du préjugé favorable, il faudrait que
ce programme-là, qui s'adapte très bien à notre
institution, se donne chez nous.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Vous allez...
La Présidente (Mme Hovington): C'est parce qu'il reste...
Ça dépend, il reste 15 minutes à monsieur...
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Allez.
La Présidente (Mme Hovington): Allez-y, M. le maire.
M. Gendron (Jean-Marc): J'aurais une petite affaire à
ajouter. C'est que ça fait assez longtemps que les étudiants de
notre coin font la preuve qu'ils sont capables de puiser 7000 $, 8000 $ dans
leurs poches pour aller chercher à l'extérieur une formation
professionnelle qui ne se donne pas dans la région, qu'on peut
facilement provoquer le phénomène inverse, amener des personnes
de l'extérieur dans notre région. Puis, ça, ça a un
effet de rétention. Il y a une journaliste, d'ailleurs, qui est rendue
chez nous, en provenance de Montréal, parce qu'elle est venue à
l'ATM à Jonquière.
La Présidente (Mme Hovington): Pour en arriver là,
on pourrait risquer de nuire à l'accessibilité à certains
programmes dans d'autres régions, à d'autres étudiants, si
on allait dans le sens...
M. Gendron (Jean-Marc): Mme la Présidente, chez nous, on
se bat, les étudiants se battent pour avoir accès aux
études collégiales. Heureusement qu'ils ont le cégep de
Saint-Félicien! Heureusement!
La Présidente (Mme Hovington): Alors, ça, je n'en
doute pas. C'était juste... M. le député
d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Je veux vous remercier, MM. les
maires, M. le président et M. l'ambassadeur, M. Blackburn d'une
façon particulière parce que je le connais depuis longtemps. Mon
homonyme, bien sûr, que je salue. J'ai senti beaucoup de
détermination, donc je suis sûr qu'on est parents à quelque
part.
Je pense qu'on peut dire de vous, les gens de Roberval et du milieu, de
Saint-Félicien, de Mistassini et également de Chibougamau, M.
Blackburn, que c'est le premier cégep qu'on entend - et je le
fais par exprès, on vient d'en entendre un, mais c'était Laval.
C'est tellement différent, un cégep d'une région par la
réalité de votre mémoire, par la forme de la
présentation. Je le sais, vous parlez à un gars de région.
Vous savez où je vis. Je vis en Abitibi-Témis-camingue. Je me
rappelle quand j'ai commencé à pousser fort pour une
déconcentration des études collégiales, ayant acquis la
conviction que, si on ne pouvait pas, nous, avoir votre chance d'en avoir
quatre, on pouvait en avoir au moins un, puis déconcentrer en
Abitibi-Témiscamingue.
Je persiste à croire qu'il n'y a pas de logique. Si
l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue est
capable d'offrir de l'enseignement universitaire dans 15 sous-centres, je n'ai
jamais compris pourquoi le collège ne pouvait pas le faire dans deux ou
trois, au moins. Ça n'a pas été facile de faire comprendre
ça - et, encore là, je n'ai rien contre M. Barrette, le
même M. Barrette qui, tantôt, réglait tous les
problèmes. Il avait bien de la misère, parce que c est sûr
que ça crée quelques petits problèmes d'ajustement, mais
on a fait la preuve qu'avec le sous-centre d'Amos... Et, entre-temps, Va!-d'Or
a revendiqué la même chose; je ne pense pas que ce soit une
mauvaise expérience. J'aime bien mieux avoir 300 étudiants
à Amos, de niveau collégial, et 500 ou 600 à Val-d'Or -
ça en fait 800 - en termes de redéploiement
d'accessibilité à des études collégiales, que de
voir ce qui se passait à Amos. Un jeune qui envisageait de faire des
études collégiales dans le bassin amosois, à 95 %, la
seule alternative, c'était: Je n'y vais pas ou je vais en dehors. Mais,
pour lui, en dehors, c'était Rouyn, parce que, quant à aller en
dehors, il va y aller pour vrai. Les conséquences pour la région
ne sont pas les mêmes, s'il va en dehors pour vrai. Là, on
risque... Il y a des chances de le perdre pour toutes sortes de raisons, et on
n'en a pas à perdre, on n'en a pas à perdre.
Donc, je veux juste vous dire que j'ai iu votre mémoire
attentivement et combien je comprends ça. On sent que vous dites des
choses auxquelles je suis sensible, qui correspondent à une
réalité de milieu. Je le reconnais pour oeuvrer depuis 16 ans en
politique, ce n'est pas facile de faire comprendre ça aux
«doudes» de la ville. Vous connaissez ce que c'est, des
«doudes» de la ville? C'est une expression consacrée que
vous relirez ce soir dans vos romans, quelque part. Vous allez trouver ce que
ça veut dire.
Les régions-ressources, vous le dites, ont des problèmes
spécifiques particuliers et il y a un dépérissement, puis
il y a un poids politique moindre. On vit toutes sortes de problèmes
d'isolement, de disparité, de déclin. Ce n'est pas parce qu'on
est une institution qui doit répondre aux mêmes règles en
vertu de la loi, d'abord de dispenser des contenus de formation de niveau
collégial... Parce que, quelque part, il va falloir donner des cours
pareil. Mais le cégep d'une région est sollicité pour
beaucoup plus que strictement sa responsabilité d'enseignement. Et c'est
méritoire, oeuvrer au niveau d'un conseii d'administration d'un
collège ou d'une université en région, compte tenu de la
sollicitation qu'à peu près n'importe quel intervenant qui bouge
quelque part va exiger du collège et de l'université. J'emploie
toujours la même expression. C'est une espèce de sceau; si je fais
quelque chose, je veux que le collège mette son sceau dessus pour
montrer que c'est sérieux. Ça, c'est important. Quand vous dites
dans votre mémoire que c'est un outil de développement
régional, moi, je comprends ça. Un cégep, c'est un outil
de développement régional, je comprends très bien
ça. (17 h 50)
Par contre, si on ne l'adapte pas à la réalité du
milieu, ça fait quand même des cégeps qui peuvent
éprouver de sérieuses difficultés. Si les règles,
le financement, les normes sont toujours une politique de mur-à-mur,
ça crée de sérieux problèmes. Donc, moi, je
comprends bien votre réalité. Je suis heureux, et je l'avais dit
à la ministre, d'entrée de jeu, quand on a commencé la
commission parlementaire. Là, vous êtes les premiers de
région. Mais, moi, je vais souhaiter que tous ceux qui ont produit un
mémoire, de quelque endroit qu'ils viennent, dès que ça
s'appellera un cégep, puisque, ici, on regarde l'avenir du cégep,
soient entendus. Et je vais tout faire pour que ça se passe comme
ça en commission, parce qu'on a besoin de cet éclairage-là
et on doit s'imprégner de réalités, et, immanquablement,
dans certains cas, on doit mettre autant d'importance aux nuances qui nous
seront faites par ces gens-là que les grands créneaux. Et
là on y arrive.
J'ai juste voulu traduire un peu comment je vous sens dans ce
mémoire-là. Ce n'est pas parce qu'on est à
Saint-Félicien, Roberval, Aima ou ailleurs - je prends des exemples -
qu'on n'est pas capables de vibrer aux mêmes réalités
nationales. Oui, je suis pas mal sûr que vous autres aussi, vous voulez
que les cégeps soient mieux évalués. Je suis pas mal
sûr que vous vibrez à la gratuité scolaire pour maximiser
la réussite et maximiser le nombre de jeunes qui y auront
accès.
Je voudrais juste corriger une affaire avant de passer à une
question ou deux. Mme la ministre, j'ai trouvé un petit peu curieux,
puis ça va bien à date, donc on va continuer à être
gentils, mais j'ai trouvé un peu curieux que vous disiez que j'ai
mentionné que je souhaitais une plus grande rationalisation et, comme
par hasard, que vous l'appliquiez à des gens de région. Je le
répète, j'ai trouvé ça curieux. C'est vrai que j'ai
dit ça, mais j'aurais aimé bien mieux que vous posiez la question
à des gens du cégep de la ville, parce que ce n'est pas là
qu'il y a de grandes économies à faire en termes de
rationalisation, ils sont chanceux, eux, d'avoir quatre
cégeps: Alma, Chicoutimi, Jonquière et
Saint-Félicien, avec une filiale à Chibougamau-Chapais. Mais ce
n'est pas là. Écoutez, je connais les distances dans ce
coin-là. J'en fais régulièrement des distances de fou.
Alors, il n'y a pas grandes économies, sauf peut-être entre
Jonquière et Chicoutimi, parce que, encore là, je connais les
distances. Alors, là, ce n'est pas vrai qu'entre Jonquière et
Chicoutimi, c'est terrible, il faut absolument qu'on ait tout en double puis
que ça n'a pas de bon sens. Là, il y aurait des économies
à faire. Ils seraient ici et je leur dirais; j'aime bien ces
gens-là. Je voulais juste corriger ça pour ne pas qu'il y ait de
confusion.
Ce que je préconise, moi, c'est entre Rosemont et Maisonneuve,
qui ne sont pas loin à Montréal, puis qu'il y en a 10 ou 11
cégeps, ce n'est pas vrai que ça prend 11 cégeps avec un
kit spécialisé en informatique. Il y a des économies
à faire là, puis il y a trop de mêmes programmes offerts
dans un certain nombre de cégeps. Moi, je veux rationaliser
là-dessus. Je trouvais heureuse la suggestion que vous avez faite; moi,
je la partage. C'est évident qu'il y aurait peut-être une
légitimité plus forte que techniques forestières soient
dispensées là où on voit une épinette ou... je
n'emploierai pas l'autre expression que vous connaissez, de temps en temps,
plutôt qu'à Chicoutimi ou à Jonquière. C'est pas mal
plus logique. Ça, je connais ça.
Ce dont je voudrais vous parler, c'est de trois, quatre questions. Je
vous entendais, M. le président du conseil d'administration,
tantôt, dire que vous souhaiteriez que dorénavant il y ait plus de
jeunes de l'extérieur qui viennent sur le conseil d'administration. Moi,
je n'ai pas d'objection, mais il va falloir qu'on me prouve très
sérieusement comment les gens, quand ils sont là... Je sais bien
que, dans les régions, ce n'est jamais pareil comme ailleurs, mais,
après qu'on a dit ça, de temps en temps, il faut quand même
regarder d'autres choses. Moi, j'ai vu du fonctionnement de commissions
scolaires - je ne blâme personne - j'en ai vu plusieurs comme permanent
syndical pendant un bon bout de temps, comme prof intéressé
à ces questions-là, et je n'ai pas toujours eu la conviction que
les commissaires de l'extérieur étaient toujours bien
imprégnés de ce qui se passait là, pour toutes sortes de
raisons. Écoutez, je sais comment ça va vite et je sais comment
le monde se passe. Faire appel à plus de ressources de
l'extérieur, est-ce que ça n'égalerait pas - mais je veux
que vous me répondiez - à un certain moment, un danger de
concentrer ça entre le D.G., trois, quatre cadres, un socio plus fort
que les autres - il est tellement pris qu'il a beaucoup de temps pour s'occuper
d'autres choses, parce que c'est de même que ça se passe dans la
vraie vie... Puis moi, j'ai peur de ça. Vous, cette
réaction-là, est-ce que vous l'avez? Vous ne l'avez pas? Je suis
sûr que vous me comprenez très bien. Je suis convaincu que vous me
com- prenez très bien.
M. Girard (Jean): la fin de votre question m'a aidé
à comprendre, parce que, là, j'ai compris que vous vouliez parler
du conseil d'administration.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Oui.
M. Girard (Jean): C'est ça. Moi, personnellement, je n'ai
pas de crainte à ça parce que, en général, pour
l'expérience que j'ai, les gens qui sont nommés au conseil
d'administration, c'est des gens responsables puis qui viennent de
différents milieux aussi. Puis, souvent, ce n'est pas des gens qui sont
calqués les uns sur les autres. Chacun apporte sa collaboration. Mais
c'est sûr qu'il y a toujours des règles humaines de prendre sa
place puis de participer aux travaux. Ça, c'est peut-être une
question que vous soulevez qui est peut-être un peu vraie dans ce que
vous dites.
Cependant, ce problème-là, vous le rencontrez partout. Ce
n'est pas plus intéressant d'avoir des professeurs qui sont
négatifs puis que c'est non, non, non tout le temps. J'aime autant avoir
des socio-économiques qui vont nous donner un peu la
réverbération de ce qui se passe dans leur milieu que d'avoir des
gens qui... O.K., ils sont impliqués, ils connaissent ça, et tout
ça, mais ils ne nous aident pas; même, ils nous nuisent. Je pense
que le danger que vous soulevez, il est peut-être vrai, mais on le vit
encore d'une autre façon aujourd'hui, même s'il n'y a pas une
majorité de socio-économiques.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Rapidement. Vous avez dit: Le conseil
d'administration, c'est les grands dossiers, c'est les grandes orientations, ce
n'est pas la poutine. Vous avez raison, je sais comment ça se passe un
peu. Vous avez raison. Alors, pour des grandes orientations, des grands
dossiers, est-ce que vous ne reconnaissez pas que ça prend quand
même un minimum d'implication dans le milieu, que ça prend un
minimum de connaissances, que ça prend un minimum
d'intérêt? Et moi, ce qu'on m'a laissé dire et ce que j'ai
constaté pour le bout que je connais - je vous ai parle des commissions
scolaires - j'ai vu, des fois, une certaine passivité et un certain
manque d'intérêt, pour ne pas dire d'autres choses; parlons-nous
franchement, pour ne pas dire d'autres choses. Moi, j'avais l'impression, des
fois, que les gens étaient carrément et littéralement
dépassés. Je répète que j'ai peur qu'en prenant
beaucoup de gens de l'extérieur, qu'en excluant les gens qui ont tous
les jours le nez dans les bonnes affaires, j'ai l'impression que c'est une
forme pour laisser voir au D.G.: Tu as toute la marge de manoeuvre parce que tu
peux faire à peu près ce que tu veux avec, puis le
président pareil. Puis, là, j'ai peur des accointances. Vous,
ça ne vous fait pas
peur?
M. Girard (Jean): Non.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Non?
M. Girard (Jean): Je ne suis pas peureux de nature, ça
fait que c'est peut-être ça, là...
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Oui, je vois ça. Vous avez le
gabarit pour.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Girard (Jean): Moi, à mon avis... En tout cas, il faut
dire aussi que je réponds avec les expériences que je connais. Je
peux vous dire que des moutons au conseil d'administration chez nous, on n'en a
pas vu beaucoup. Puis, quand il y en a eu, ils se sont éliminés
d'eux-mêmes. Parce que quelqu'un qui n'est pas intéressé,
il ne reste pas longtemps. C'est un point de vue. Ensuite, il ne faut pas
oublier que, quand je parle d'une majorité, je ne dis pas à
l'unanimité. Il va rester suffisamment de gens de l'interne quand
même pour nous donner le pouls de l'institution. Puis il va rester quand
même des professeurs, puis il va rester des gens du personnel de soutien,
et tout ça. Mais il va en rester moins. Mais on va avoir quand
même... il va y avoir quand même des critiques qui vont pouvoir
être exprimées par ces gens-là vis-à-vis du travail
du directeur général ou des personnes qui l'accompagnent.
Je vois difficilement la différence qu'il peut y avoir entre
ayant une minorité de socio-économiques, disons, je ne sais pas,
moi, sur 20, en avoir 8, et en avoir 12 ou en avoir 11. Les 3 de
différence, je ne sais pas si ça va changer toute
l'atmosphère des délibérations d'un conseil
d'administration. Je ne suis pas certain de ça.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Merci beaucoup. À
Saint-Félicien, le problème majeur que votre cégep vit,
c'est quoi?
M. Girard (Jean): Le problème majeur? M. Gendron
(Abitibi-Ouest): Oui
M. Girard (Jean): Je pense que, en tout cas pour ce qui est de
mon expérience personnelle, c'est justement souvent la lourdeur
administrative.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): La ministre est partie.
M. Girard (Jean): Pardon?
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Soyez bien à l'aise, la
ministre est partie. Ce n'est pas vrai, mais faites comme si elle
n'était pas là si vous êtes gêné.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Gendron (Abitibi-Ouest): C'est quoi le problème majeur
que vous avez?
M. Girard (Jean): Un des problèmes, c'est certainement une
certaine lourdeur administrative qui fait qu'on ne peut pas s'impliquer aussi
rapidement qu'on voudrait dans nos dossiers. Je vais juste vous donner quelques
exemples.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Des exemples concrets.
M. Girard (Jean): Je vais vous donner un exemple. On fonde un
centre spécialisé. On est un cégep de région. C'est
sûr qu'il y avait comme une période où il n'y en avait pas
de formation de centre spécialisé. On a été
chanceux d'en avoir un. Mais on nous l'a donné avec une
épée de Damoclès, en voulant dire: C'est
expérimental. Je ne suis pas sûr, si on avait donné un
centre spécialisé dans une grande ville, si on l'aurait
donné aussi expérimental. Pour nous, c'est un peu un obstacle,
parce que, quand vous démarrez une organisation comme un centre
spécialisé, ça vous prend toutes vos énergies et
une chance de survivre. Si, au bout de deux ans, tout est remis en question -
dans le fond, quand on dit «expérimental», c'est un peu
ça - bien, pour nous, d'après moi, c'est un handicap, parce qu'il
faut toujours, toujours agir en fonction de l'analyse qui va se faire dans deux
ans. Moi, je pense que ça, ça a été un
problème. Ça vous donne un exemple des difficultés qu'on
rencontre.
Je vais vous donner un deuxième exemple juste pour être
certain que c'est vrai. Ça nous a pris 10 ans pour se faire
reconnaître notre programme spécialisé en techniques du
milieu naturel, 10 ans à ne pas être sûr si ça va
continuer, si ça ne continuera pas. Même encore aujourd'hui, on ne
peut pas vraiment publiciser notre programme comme on voudrait. Je ne sais pas,
Robert, si tu veux ajouter quelque chose sur ça, mais c'est deux
exemples flagrants, et je ne suis pas sûr, moi, si j'avais
été à Limoilou, qu'on aurait eu tous ces
problèmes-là.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, en conclusion.
Mme Robillard: Oui, Mme la Présidente. Merci beaucoup, M.
le président, d'être venu avec vos collègues du milieu.
Entre parenthèses, si on vous a donné le centre
spécialisé expérimental, c'était justement
peut-être pour apporter de la souplesse dans les normes
budgétaires et vous permettre de l'avoir, alors qu'au même moment
j'en ai refusé deux en milieu urbain. (18 heures)
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Robillard: Alors, vous avez là une
démonstration de notre intérêt à ce que les
régions continuent de se développer et aient des institutions
d'enseignement supérieur de qualité autant que celles qui sont
dans des milieux plus urbains. Merci beaucoup de vous être
déplacés de Saint-Félicien jusqu'à notre
commission.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, au nom des membres
de la commission de l'éducation, je vous remercie de l'excellent
mémoire que vous nous avez présenté. Je vous souhaite un
bon retour à Saint-Félicien, beaucoup de prudence sur les routes.
Quant à nous, nous suspendons nos travaux jusqu'à 20 heures ce
soir où nous entendrons l'Association des cadres des collèges du
Québec. Bonsoir.
(Suspension de la séance à 18 h 2)
(Reprise à 20 h 2)
La Présidente (Mme Hovington): La commission de
l'éducation va débuter ses travaux et j'inviterais l'Association
des cadres des collèges du Québec à bien vouloir prendre
place.
Alors, il y a M. Guy Boutin, qui est le président. Vous
êtes le porte-parole.
M. Boutin (Guy): Oui, madame.
La Présidente (Mme Hovington): Bonsoir et bienvenue! Si
vous voulez bien nous présenter les gens qui vous accompagnent.
Association des cadres des collèges du
Québec (ACCQ)
M. Boutin: Bonsoir, Mme la Présidente, bonsoir, Mme la
ministre, MM. les députés. À ma droite, c'est André
Archambault, secrétaire général du collège
Saint-Jean-sur-Richelieu.
La Présidente (Mme Hovington): Bonsoir.
M. Boutin: À ma gauche, Jean Perron, directeur
exécutif de l'Association des cadres des collèges du
Québec.
M. Perron (Jean): Bonsoir.
M. Boutin: Bill Atkins, directeur des services aux
étudiants au cégep de La Pocatière.
M. Atkins (Bill): Bonsoir.
La Présidente (Mme Hovington): Bonsoir. Alors, je vous
souligne qu'il y a des dames députées aussi, M.
Boutin.
M. Boutin: Ah, mais, là, elles n'étaient pas
assises.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Boutin: Bonsoir, mesdames.
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Hovington): Voilà. Très
important. Alors, vous avez 20 minutes pour présenter votre
mémoire et il y aura 40 minutes d'échanges équitablement
entre les deux côtés de la Chambre. Alors, allez-y, M. Boutin, on
vous écoute.
M. Boutin: Disons que l'Association des cadres des
collèges regroupe 920 gestionnaires, répartis dans 48
cégeps publics et privés. Si on regarde les objectifs de
départ des cégeps, nous, on croit qu'au niveau de
l'accessibilité il y a eu une bonne amélioration. En 1967, on
pouvait estimer à environ 17 % les étudiants du groupe
d'âge qui faisaient des études collégiales et, en 1990, on
était rendu à 62 %, pour atteindre peut-être, de nos jours,
64 %, 65 %; 147 000 étudiants cette année, dans le réseau,
ça fait beaucoup de monde.
Les universités ont aussi connu une bonne explosion de leur
clientèle. En 25 ans, ça a été de 38 000 à
242 000. Mais, il y a un fait intéressant qui joue, c'est qu'il y a 14 %
des étudiants en enseignement professionnel qui font des études
universitaires.
Il y a eu aussi des changements de clientèles. En 1992, il y a 19
000 personnes, dans le réseau, qui ont plus de 30 ans. Il y a 70 % des
étudiants qui travaillent, puis, il y a 10 500 allophones. On ne
connaissait pas cette situation-là en 1967.
Au niveau du développement technologique, je pense qu'on constate
que la révision de nos programmes professionnels prend passablement de
temps. Il y a peut-être des conflits d'intérêts par rapport
aux différents types d'intervenants là-dedans. Il est difficile
de demander à des profs de sacrifier des tâches d'enseignant
lorsqu'ils siègent sur un comité qui décide de la
composition d'un programme professionnel. Cependant, il faut reconnaître
que les centres spécialisés dans les cégeps sont une
réussite. Il semble que, pour 1 $ investi, il y a 6 $ qui roulent. Des
fois même, c'est 20 $ qui roulent. Et il faut reconnaître que,
même si les cégeps n'ont pas tous des centres
spécialisés, ils sont actifs pour les services aux entreprises et
aux différents organismes.
Le cégep est un modèle original qui n'a pas
d'équivalent ailleurs. On a mis fin, en 1967, à une série
de filières parallèles et hermétiques. Quelqu'un qui
finissait son école normale et qui voulait aller à
l'université était obligé de faire une année de
cours classique. C'était un peu
absurde.
Il faut aussi garder une souplesse au niveau de ia réorientation
des étudiants. Il y a un certain nombre d'étudiants qui rentrent
dans nos collèges qui n'ont pas de choix vocationnel précis et
qui doivent se réorienter. Le système actuellement permet une
certaine réorientation. Cependant, on croit que les deux secteurs, celui
du général et celui du professionnel, ont été mal
servis par un régime pédagogique uniforme. On croit quand
même nécessaire de maintenir la cohabitation parce qu'il est
intéressant pour les étudiants de pouvoir changer d'orientation
sans trop perdre de temps. Mais il est important d'avoir plus de souplesse dans
le régime pédagogique.
Au niveau de l'éducation permanente, nous vivons, comme d'autres,
un système de chevauchement de juridictions et on espère un plus
grand leadership de la part du ministère de l'Enseignement
supérieur et de la Science. Il faudrait aussi qu'il y ait un cadre
légal pour cette situation et que le droit à l'éducation,
pour l'ensemble de la population, sans distinction d'âge, soit
reconnu.
Au niveau de l'appartenance au milieu, les cégeps
régionaux ont un grand impact dans leur région, et il y a un
coût à cela. Cependant, nous, on croit que la collectivité
québécoise doit l'assumer parce qu'il y aurait un coût
encore plus grand que de ne pas avoir de cégeps en région. Que ce
soit en système de prêts-bourses, que ce soit en coût pour
les parents, il y aurait un coût societal plus grand.
Il y a eu des modifications du contexte aussi depuis 25 ans. On est
passé d'une économie de production à une économie
à valeur ajoutée. On a aussi le phénomène d'une
société à deux vitesses, une société duale,
et la démographie nous fait constater que la pyramide d'âge
change. C'est l'âge du «papy boom».
Il y a aussi le phénomène des comportements sociaux qui a
changé. En 1967, la religion avait une bonne importance, la famille, les
rapports hommes-femmes, la perception de l'autorité, le sens de
l'effort, du devoir, la consommation, la solidarité, les lieux
d'appartenance. Nos jeunes vivent des valeurs passablement différentes
de celles de leurs parents. Il y a des besoins de formation à
actualiser. Au niveau de la langue maternelle, nous considérons
essentielle la maîtrise de la langue d'enseignement comme instrument de
communication écrite et parlée. Nous considérons aussi
importante la maîtrise d'une langue seconde et nous voyons, iivoc le
phénomène de libre-échange qui s'ôcoule Nord Sud en
Amérique, l'Importance aussi, d'une troisième langue.
Au niveau de l'informatique, nous croyons important que les
étudiants fassent un apprentis-sjkjo utile do l'outil informatique Ici,
on dit bien do no pas faire un cours d'Informatique, mais d'être en
contact avec l'informatique. Et je me souviens, moi, qu'au secondaire j'ai fait
un cours de dactylo puis ça m'a été pas mal utile. Je
trouve déplorable qu'aujourd'hui on n'enseigne même plus l'usage
d'un clavier dans plusieurs polyvalentes, parce que ça servirait
à l'étudiant toute sa vie.
Le rapprochement des milieux de travail. Nous préconisons
l'alternance travail-études, c'est-à-dire des stages. C'est un
système qui a fait ses preuves, en particulier en Allemagne, et nous
croyons qu'il y a une culture à développer au Québec
à cet égard. Nous préconisons un système national
d'alternance travail-études et nous croyons que les entreprises
devraient être incitées à ceci par le biais de mesures
fiscales. Nous devons nous inspirer de ce qui se passe ailleurs
là-dedans. Si, au niveau de la formation professionnelle, on a des
difficultés de recrutement, il faudrait voir les pays où la
formation professionnelle fonctionne puis regarder ce qu'on peut faire comme
eux. En Allemagne, entre autres, ils vont avoir plus de places en entreprise.
On calcule qu'il va y avoir 930 000 places en entreprise pour
l'équivalent de 660 000 jeunes d'âge à aller en entreprise
pour faire des stages d'alternance travail-études. Donc, il y a une
culture qui s'est développée à l'intérieur de ce
pays-là et, ici, cette culture-là n'est pas existante. Il
faudrait se préoccuper de la développer. (20 h 10)
La préparation aux études collégiales. On a des
difficultés, nous, parce que nos étudiants qui nous arrivent avec
un diplôme d'études collégiales, théoriquement, sont
admissibles à venir au cégep. Cependant, un diplôme
d'études secondaires qui a 180 unités et un diplôme
d'études secondaires qui a 130 unités, ça n'a pas tout
à fait la même valeur, c'est même 40 % de moins. L'autre
phénomène qui se passe, c'est la normalisation des notes. Cela
donne une impression de compétence qui ne correspond pas tout à
fait à la réalité. En 1990, entre autres, nous avons eu
comme information qu'à l'examen de français du ministère,
en secondaire V, la moyenne des scores bruts était de 30 % au niveau de
l'orthographe et de la grammaire. La normalisation l'a portée à
64 %. Bien, l'étudiant qui arrive au collégial puis qui a eu la
note, mettons, 70, il s'imagine bon en français. Mais la note n'est pas
normalisée quand il passe le cours de français, et il a des
difficultés. Le phénomène de normalisation a pris une
ampleur qui fait que les gens se sentent compétents alors qu'ils ne le
sont pas tout à fait. C'est pour ça que, nous, on prône
qu'au niveau des collèges on ait le droit de faire des examens
d'admission et quo, pour les étu diants qui ont terminé un cours
secondaire, qui ont un diplôme, il y ait une propédeutique dans le
but de faciliter la réussite de ces gens-là.
Pour une gestion plus efficace, maintenant. Des décisions plus
près de l'action, car gérer, c'est décider de
l'application des ressources à des besoins. Nous prônons une plus
grande part
d'autonomie au niveau des structures de participation. Je vous donne
comme exemple la commission pédagogique qui est prévue par la loi
des collèges. Mais comment il se fait que c'est les conventions
collectives qui déterminent la composition de la commission
pédagogique, alors que c'est un objet qui relève d'une loi? Il me
semble que ces choses-là devraient être de négociation
locale. Mais on a une belle astuce dans la convention collective, c'est: s'il
n'y a pas d'entente, c'est ce qui est prévu dans la convention qui
s'applique. Qui cherche l'entente? Ça va être la définition
de la convention, par extension.
Au niveau de la gestion des programmes, de la gestion des ressources
humaines et de la gestion financière, il nous semble qu'on devrait avoir
une plus grande marge de manoeuvre.
Je vous donne un autre exemple. La coordination départementale,
c'est-à-dire la coordination des disciplines, c'est l'équivalent
de 480 tâches dans le réseau et c'est 27 000 000 $. Nous croyons
que ces 27 000 000 $ sont mal utilisés. Il faut mettre le
«focus» sur la coordination des programmes et non pas des
disciplines. Nous voyons un processus dans lequel les chefs de programme
seraient nommés par les collèges, retirés de
l'unité d'accréditation avec une garantie qu'ils pourraient
retourner à leur unité d'accréditation. De plus, on trouve
important que les conventions collectives permettent une plus grande
mobilité par égard au personnel cadre, qu'il puisse retourner
à ses fonctions d'origine. Il faudrait aussi prévoir des
ressources de perfectionnement et de ressourcement pour ces gens-là qui
ont à occuper des fonctions administratives.
Le phénomène qu'on vit actuellement dans le réseau
collégial a été importé du secondaire, parce qu'on
ne vit pas la même démarche que le réseau universitaire. Il
serait intéressant d'avoir un régime semblable à celui des
universités.
La carte des enseignements techniques. On sait qu'actuellement il y a un
bon nombre de programmes dans le réseau collégial. Nous croyons
qu'il y a une nécessité de faire une révision de cette
carte des enseignements techniques et de prévoir un jumelage, car il
devient très coûteux pour la société d'avoir une
troisième année qui se donne dans un collège avec 12
étudiants et qu'à 100 milles, à côté, il y
ait 13 étudiants qui suivent le même programme. Il y a des
coûts de système élevés et il faudrait qu'il y ait
comme des ententes de négociées entre institutions pour
établir qu'un tel fait la première, la deuxième ou la
troisième, et jumelage avec un système de prêts et bourses
s'il faut que les étudiants se déplacent. Mais il y aurait des
coûts à aller chercher là-dedans et à
économiser.
Au niveau du financement de l'enseignement collégial, nous
estimons nécessaire que l'entreprise participe au financement de
l'enseignement technique. Cependant, nous croyons importante une limite au
droit à la gratuité pour chaque citoyen jeune ou adulte. Ce que
nous voulons dire ici, c'est qu'un étudiant qui fait un cours, qui
réussit, il n'y a pas de problèmes. Mais un étudiant qui a
un cheminement trop long, par exemple, qui demeure cinq ans ou six ans dans le
réseau, il y aurait peut-être lieu de vérifier pourquoi
ça arrive. Si c'est un changement d'orientation, on est prêt
à lui donner une chance, mais les perpétuels étudiants,
à un moment donné, il faudrait que la gratuité cesse.
Mais, on instaure aussi la gratuité pour les adultes, pour les gens qui
perdent leur emploi dû à des changements technologiques, du
recyclage de main-d'oeuvre. Il nous semble qu'il faut aider les gens à
pouvoir étudier, mais pas à abuser.
Au niveau de la gestion, exercer une responsabilité signifie
être capable de répondre de quelque chose. La
nécessité de la reddition de comptes en regard du mandat qui est
confié est une chose importante pour les collèges.
L'évaluation ou le contrôle. On a une tendance, dans le
réseau collégial, à faire un contrôle a priori et
nous estimons que cela tue l'initiative et la responsabilité parce que
cela suggère l'idée que tout ce qui n'est pas autorisé est
défendu. Ce sont davantage les résultats obtenus qu'il faudrait
évaluer que la conformité à des procédures
bureaucratiques. Nous recommandons une évaluation a posteriori des
performances plutôt que le contrôle a priori de leur
fonctionnement.
Le droit du public à l'information. Le système de
reddition de comptes à développer doit permettre une information
qui soit accessible au grand public sans pour autant verser dans le simplisme.
À défaut de satisfaire ce besoin, les médias s'en
occuperont. On a juste à voir L'actualité, ils vendent des
bons numéros à certains moments de l'année.
Des mécanismes d'agrément des collèges ou d'examens
nationaux. Les orientations préconisées ici en matière
d'évaluation, c'est-à-dire la reddition de comptes,
l'évaluation a posteriori et l'information juste du public, devront se
concrétiser par de nouvelles formes de rapports entre les
établissements et les instances centrales. Nous recommandons un
organisme externe et indépendant et nous recommandons aussi de recourir
à des examens nationaux. On a vécu pour la première fois
du réseau un examen en français. Certains ont critiqué,
des gens ont fait des grands cris, mais je pense que plusieurs attendaient avec
impatience les résultats. Et ça n'a pas été la
catastrophe. Il y a peut-être eu des collèges qui ont vu qu'ils
n'avaient pas trop performé, puis je suis certain que, depuis que les
résultats sont sortis, ils se creusent la tête pour savoir comment
ils vont s'améliorer pour le prochain examen.
Bien, c'est des choses qu'on appelle de l'évaluation a posteriori
puis nous, on est favorables à ça. Je pense qu'on est rendus au
moment de choix difficiles mais nécessaires.
L'État devra limiter son rôle à la définition
des grands encadrements généraux du système,
responsabiliser les établissements et se doter de nouveaux
mécanismes pour juger des résultats obtenus.
Merci de votre attention, Mme la Présidente. Mes collègues
et moi sommes disponibles pour vos questions.
La Présidente (Mme Hovington): Merci bien. Vous n'avez pas
pris tout à fait vos 20 minutes, alors on aura plus de temps à
consacrer aux échanges. Mme la ministre de l'Éducation, de
l'Enseignement supérieur et de la Science, vous avez la parole.
Mme Robiliard: Oui, merci, Mme la Présidente. Je suis
heureuse d'accueillir l'Association des cadres des collèges du
Québec. Je pense que vous êtes une association très
représentative au niveau du réseau pour tout ce qui touche !a
gestion de ce réseau, vu que c'est votre mandat principal, la gestion du
réseau et l'administration collégiale. Donc, vous êtes un
apport aussi important dans ce réseau collégial.
M. Boutin, vous le dites en partant, dès votre introduction, il
se dégage une constante: les collèges ont besoin de changement.
C'est clair, net et précis, en partant. Et, tout au long de votre
mémoire, vous nous faites des suggestions justement pour ces
changements.
Le premier point que j'aimerais aborder avec vous, parce que j'ai
l'impression qu'il concerne un très grand changement, du moins au niveau
de la gestion pédagogique, changement que vous suggérez dans
votre mémoire, c'est celui de la coordination départementale
telle qu'on la connaît maintenant. Vous nous suggérez, si j'ai
bien saisi, mais j'aimerais ça vous entendre davantage, de changer - ou
d'ajouter, je ne sais pas, là - la coordination départementale
par une coordination des programmes en tant que tels.
D'abord, avant de parler de la nouvelle structure, parlez-moi de celle
qui existe présentement et pourquoi vous considérez que ce n'est
pas une structure efficace dans le réseau. (20 h 20)
M. Boutin: Je vais vous donner deux exemples. Prenons techniques
de génie civil, qui est un programme professionnel. L'ensemble des cours
donnés par les techniques de génie civil représente 53 %
du programme. Il y a 47 % qui proviennent d'autres disciplines dans lesquelles
le chef du programme de génie civil n'a aucun contrôle en termes
de séquence, en termes d'aménagement de contenu de cours. Et si
on regarde un autre programme, soit celui des sciences de la nature, soit celui
des sciences humaines, là il n'y a aucune discipline qui s'occupe de ce
programme-là. Mais ça regroupe un bon nombre d'étudiants.
Plus que 25 % du réseau vit dans des programmes et même on
pourrait monter un peu plus, mais soyons... Moi, je dirais qu'il y a tout
près de 30 % des étudiants du réseau qui sont soit dans le
programme des sciences humaines, soit dans le programme des sciences de la
nature, et i! n'y a pas de coordination. La coordination de disciplines fait
que les mathématiques vivent sur elles-mêmes, la chimie vit sur
elle-même, la philo vit sur elle-même, et il y a un manque
là. Quand on arrive au niveau des méthodes de travail qui sont
transdisciplinaires, il faudrait qu'il y ait un consensus au niveau de ces
profs-là.
Mme Robillard: Est-ce à dire que, dans votre
recommandation, on remplace complètement cette structure-là,
c'est-à-dire que la coordination départementale disparaît
pour être remplacée par une coordination de programmes?
M. Boutin: Je mettrais l'emphase sur le programme de formation
parce que c'est là que la vie pédagogique se passe.
Mme Robillard: Mais est-ce que la structure départementale
demeure?
M. Boutin: Elle demeurerait, mais à un coût beaucoup
moindre. Moi, je prendrais l'argent, les 27 000 000 $ qui sont là, et je
l'utiliserais différemment. On pourrait peut-être en garder 25 %
pour les disciplines et 75 % pour les programmes de formation, parce que
ça va se recouper. Toutes les disciplines professionnelles rentrent dans
le coût, mais elles se sentent une responsabilité à
l'égard de leur programme de formation. Le programme au
général n'est ni plus ni moins que l'orphelin depuis 25 ans.
Mme Robillard: Alors, vous nous dites: Dans ia structure
actuelle, bon, il y a 480 tâches d'enseignant, ça coûte 27
000 000 $. La nouvelle structure que vous suggérez, M. Boutin, elle
coûterait combien?
M. Boutin: 27 000 000 $.
Mme Robillard: 27 000 000 $. On remplace ou, en tout cas, on
ajuste: 25 %, 75 %.
M. Boutin: Oui.
Mme Robillard: Alors, expliquez-moi un peu, dans votre
idée, comment fonctionnerait cette nouvelle structure. Comment, par
exemple, le collège va coordonner les directions de programmes. Que
deviendrait le rôle de la commission pédagogique? Est-ce que ce
serait plus une commission des études? Qu'est-ce que vous avez en
tête en matière de fonctionnement?
M. Boutin: Au niveau de la commission pédagogique, son
rôle demeure le même, elle s'occupe toujours des questions
pédagogiques. Au
niveau des relations d'un programme à un autre, la dynamique est
différente, c'est que la discipline, à ce moment-là, ne
vit plus uniquement pour elle-même, elle vit parce qu'elle rend service
à un programme et il faut qu'elle s'ajuste à ce programme.
Mme Robillard: Comment pensez-vous que cette suggestion pourrait
être reçue dans le réseau?
M. Boutin: Actuellement, dans le réseau, on est pas mal
convaincu qu'il faut faire quelque chose à l'égard de l'approche
programme, parce qu'il y a des difficultés au niveau de la
réussite quand les profs ne se concertent pas et ce serait
peut-être une façon... Je pense qu'on pourrait essayer d'aller
labourer le terrain dans ce sens-là, sans trop de risques. C'est
sûr qu'il va y en avoir vu que c'est un changement, que ça peut
inquiéter, mais, à mon sens, il y a pas mal à gagner en
allant dans ce sens-là.
Mme Robillard: Est-ce qu'il n'y a pas certaines
expériences, présentement? Je pense que c'est le président
du Conseil des collèges qui nous faisait part de ça, à la
commission. Est-ce qu'il n'y a pas certaines expériences
présentement, dans le réseau, où on vit cette coordination
de programmes, mais tout en maintenant la structure départementale?
Est-ce que votre association, vous êtes au fait de cette
expérience, et qu'en pensez-vous?
M. Boutin: il y en a, des expériences, qui se font
actuellement, mais elles se font sur une base volontaire et elles vivent sur le
bras. La journée où les intervenants n'en veulent plus,
l'expérience cesse. C'est que l'énergie est
déployée à l'égard des disciplines, c'est ça
qui est faux, alors que la discipline existe parce qu'on a des programmes de
formation et qu'elle dispense des cours à l'intérieur de ces
programmes de formation.
Mme Robillard: Est-ce que la coordination de programmes serait
assumée par des cadres?
M. Boutin: Nous, le système qu'on propose, c'est que les
gens qui seront choisis par le collège y soient nommés pour une
période de temps et qu'ils aient la possibilité de
réintégrer leur fonction à la fin d'un mandat.
Mme Robillard: Et, au moment où ils occupent la fonction,
ils sont...
M. Boutin: Retirés de l'unité
d'accréditation.
Mme Robillard: bon. allons donc à votre proposition,
à la page 38 de votre mémoire, m. boutin, où vous nous
suggérez deux moyens pour créer une nouvelle dynamique dans
l'enseigne- ment collégial. Le premier, vous me parlez d'examens
nationaux ou d'examens de synthèse - et on va y revenir - et le
deuxième moyen, c'est de créer un organisme
indépendant.
Alors, prenons le premier moyen, des examens nationaux dans un nombre
limité de disciplines, c'est ce que vous dites ici. À votre point
de vue, à ce moment-là, ces examens nationaux seraient pour
quelle matière en particulier, et est-ce qu'ils deviendraient des
conditions de réussite au D.E.C., au diplôme d'études
collégiales?
M. Boutin: Moi, je ne pense pas qu'on pourrait retomber dans le
vice de l'examen qui joue de la carrière d'un individu. Si ça va
mal un certain jeudi matin et que vous manquez votre examen, vous manquez votre
diplôme. Ça me paraît un peu fort. Mais ça pourrait
compter pour une partie de la note finale. L'examen national crée un
stress créateur auprès de l'étudiant. En tout cas,
plusieurs d'entre nous en ont connu et on savait que c'était
sérieux ce matin-là, on n'allait pas trop veiller la veille. Il
me semble qu'on pourrait redonner ce stress-là et ça ferait du
bien. En même temps, ça permettrait de pouvoir comparer les
performances d'un groupe par rapport à un autre. J'espère qu'il
n'y aura pas de normalisation, par exemple.
Mme Robillard: Donc, ça ne fait pas partie de la condition
de réussite d'un D.E.C.?
M. Boutin: Mais ça rentre à l'intérieur de
la note de l'étudiant. Mettons, par exemple, qu'on a une note finale sur
100; ça peut compter pour 30 % ou 40 %. Normalement, on met une
importance relative importante, mais...
Mme Robillard: Et l'examen de synthèse, M. Boutin?
M. Boutin: l'examen de synthèse vise plutôt
à voir cet étudiant assimiler des capacités d'analyse et
de synthèse par rapport aux disciplines qui constituent son curriculum.
c'est peut-être difficile à élaborer, mais ça permet
aussi à l'étudiant de développer une capacité de
réflexion et une capacité d'analyse qui peuvent être
transmises par écrit.
Mme Robillard: Que vous verriez dans tous les programmes?
M. Boutin: Dans les programmes généraux en
particulier, puis dans les programmes que la ministre ou le ministère
fait en révision. Il me semble qu'une fois qu'on a fini un cycle de
révision il devrait y avoir un examen national.
Mme Robillard: Maintenant, votre deuxième moyen,
créer un organisme indépendant d'accréditation. Est-ce
bien ça?
M. Boutin: Oui.
Mme Robillard: Un système d'accréditation?
M. Boutin: Un système d'accréditation qui se ferait
par visite des établissements, rencontre des intervenants, rencontre des
étudiants et étude des résultats; voir quel genre
d'équipement il y a. Chez nous, par exemple, au collège de
Sherbrooke, techniques de laboratoire médical subit un conseil
d'agrément de la part de l'association canadienne. Il va venir un groupe
d'experts de l'extérieur et ils vont passer trois jours ou quatre jours;
les profs, les étudiants vont être rencontrés, et ils vont
nous donner, après ça, des commentaires.
Mme Robillard: Alors, un organisme qui a, comme mandat,
strictement l'accréditation des programmes?
M. Boutin: Oui.
Mme Robillard: C'est ça? Avec quels pouvoirs, M. Boutin?
Si on prend l'exemple qu'un organisme va visiter un collège,
évalue comment un programme est donné et décide qu'il ne
donne pas son accréditation, que se passerait-il pour le
collège?
M. Boutin: Moi, je crois que le ministère serait en
difficulté et qu'il devrait peut-être retirer l'autorisation de
dispenser le programme. Parce que, si on a un organisme externe qui dit que le
programme est mal dispensé, que les étudiants sont mal
formés, il y a de l'argent mal dépensé et c'est une
responsabilité ministérielle d'arrêter ce gâchis. (20
h 30)
Mme Robillard: Donc, le ministère retirerait le programme.
C'est ça?
M. Boutin: Parce que, actuellement, les autorisations sont
données par le ministère.
Mme Robillard: C'est ça. Mais avec ce nouvel
organisme-là aussi?
M. Boutin: Oui.
Mme Robillard: On garde la même structure, sauf qu'ils ont
un mandat d'accréditation.
M. Boutin: Oui
Mme Robillard: Oui. Parfait. Maintenant, au niveau de l'admission
aux études collégiales, au niveau de la préparation, vous
avez intitulé cette partie-là: «La préparation aux
études collégiales», à la page 22 de votre
mémoire, M. Boutin. C'est la première fois que je vois ce genre
de proposition, alors j'aimerais ça que vous élaboriez sur le
sujet. Chaque collège ou regrou- pement de collèges devrait
être autorisé à instaurer un examen d'admission.
M. Boutin: Oui, parce que c'est une conséquence logique de
ce que je soulignais tout à l'heure par rapport à la
normalisation des notes et du contenu variable des D.E.S. Quand vous avez un
étudiant qui a 180 unités de réussies à
l'intérieur de son diplôme d'études secondaires, c'est
rarement un individu ou une personne en difficulté de réussite.
Mais, quand vous avez quelqu'un qui frôle les 130 unités puis qui
passe plutôt près des 60, souvent, ces cas-là sont en
difficulté de réussite. Parce que ça représente
quand même une bonne différence, 50 unités, c'est
l'équivalent de presque une année d'études non
réussie.
Mme Robillard: Oui, M. Boutin. Plusieurs intervenants nous ont
noté ça depuis hier, cette problématique-là, mais
leurs suggestions allaient plutôt dans le sens de peut-être
modifier quelque chose au niveau des règles du D.E.S. Vous, vous dites:
On ne change rien là, mais on va faire un examen d'admission à
l'entrée.
M. Boutin: Remarquez que, nous, on n'a pas fait beaucoup de
suggestions pour demander aux autres niveaux de modifier leur contenu de cours
parce qu'on s'est dit que c'était une commission portant sur
l'enseignement collégial; les autres niveaux ne sont pas tout à
fait visés là-dedans. C'est sûr qu'on pourrait aimer que
tous les étudiants nous arrivent avec un profil type comportant 175
unités, mais est-ce que c'est réaliste?
Mme Robillard: Selon vous?
M. Boutin: difficilement réaliste, parce que je calcule
que chaque individu va cheminer à son rythme. il y aurait
peut-être des seuils qu'il faudrait définir d'une manière
plus précise.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. Alors, je vais
passer la parole au député d'Abiti-bi-Ouest.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): M. Boutin, je vous salue, ainsi que
tous vos collègues de travail. Je pense que, pour nous en tout cas,
membres de la commission, c'est important de recevoir l'éclairage de
l'Association des cadres des collèges du Québec. D'ailleurs, je
suis heureux que, dès le début de votre mémoire, vous ayez
indiqué effectivement combien vous regroupez de personnes. C'est quand
même important qu'une association à peu près de 1000
gestionnaires puisse nous donner un éclairage pratique, concret. Vous
avez pris la peine de bien camper votre point de vue au début, en termes
d'accessibilité, de développement de la formation technique.
Autrement dit, vous avez
fait un rappel historique sur les mandats et les missions du
collège. Je n'ai pas de difficultés à vivre avec vos
conclusions à cet égard-là. Cependant, comme la ministre
l'a indiqué, vous convenez... Je pense qu'un mémoire qui arrive,
à la conclusion, à une trentaine de recommandations - parce que
c'est à peu près ça, 29, 30, 31, mais ça n'a pas
d'importance - c'est évident que vous convenez qu'il y a lieu d'apporter
des modifications importantes. Et moi, je suis dans cet esprit-là depuis
le début, donc je pense que vous êtes dans le ton. Vous êtes
dans le ton. Ça correspond à ce qu'on a regardé un peu
partout et je suis heureux que vous soyez là pour qu'on puisse
apprécier, échanger sur un certain nombre de suggestions que vous
faites par votre expérience pratique.
On va y aller tout de suite pour maximiser le temps d'échange.
D'entrée de jeu, si j'avais à vous demander - parce que je vais
revenir sur quelques-unes de vos recommandations - si vous aviez à nous
indiquer c'est quoi le changement majeur qui devrait être
opéré au niveau des études collégiales, le point
sur lequel, comme gestionnaires, vous avez éprouvé le plus... pas
de difficultés, mais de... où vous avez constaté que,
selon vos convictions, c'était le point sur lequel il y aurait lieu
d'apporter immédiatement des correctifs, c'est quoi le premier point sur
lequel il faudrait apporter des changements majeurs dans une perspective
d'avoir une formule d'études collégiales plus adaptée, qui
corresponde au monde moderne, puis à nos besoins, puis ainsi de
suite?
M. Boutin: Premier point: maîtrise de la langue.
Deuxième point: formation professionnelle; formation professionnelle,
parce que c'est triste de voir aussi peu de diplômés sortir avec
un D.E.C. professionnel des cégeps. Moi, je crois qu'il y a lieu de
vérifier pourquoi ça n'arrive pas. Ce n'est pas normal d'avoir
des programmes professionnels avec une moyenne provinciale de 25 %. Ça
coûte affreusement cher à l'État, ça coûte
cher de nos impôts, et il faudrait, en tout cas, qu'on trouve une
solution. Moi, je me dis qu'il faut regarder ce qui se fait dans les pays
où la formation professionnelle fonctionne, et regarder comment on peut
le mettre en vigueur chez nous. Il y a une question de motivation auprès
de ces étudiants-là, il y a une question d'orientation et il y a
aussi une question de coûts: trois ans d'études, c'est de
l'argent. Vous savez qu'actuellement un étudiant qui ne se lève
pas et qui manque son trois heures de cours le matin, il coûte 51 $ de
vos impôts; et il y a des coûts annuels d'étudiants qui sont
plus élevés que ça. Là, je prends une moyenne.
À un moment donné, les étudiants qui disent qu'il n'y a
pas de frais de scolarité, ça ne veut pas dire que ça ne
coûte rien: ça coûte quelque chose à l'État,
ça coûte quelque chose aux citoyens d'avoir un étudiant qui
étudie et ça coûte quelque chose à ses parents.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): C'est clair, c'est précis. Par
contre, vous dites: II faudrait, à un moment donné, qu'on aille
voir qu'est-ce qui fait que ça marche ailleurs et évaluer
pourquoi ça ne marche pas ici. Et, rapidement, vous avez jeté une
couple de pistes de solution. Heureux de ça, moi, je vous pose la
question: Est-ce que vous ne croyez pas que le problème n'est pas
d'abord et avant tout au secondaire, dans des cours de choix de carrière
qui, selon les jugements qu'on nous a faits depuis le début, ne sont pas
très pertinents et pas donnés très adéquatement?
Est-ce que vous ne croyez pas que, d'abord, on vend mal la formation
professionnelle? On ne la vend pas, on l'a discréditée et on
pense, parce qu'elle est rendue de niveau collégial,
éventuellement, que, là, il y a plus de jeunes qui vont faire le
choix de formation technique, parce que, effectivement, le monde des affaires,
en tout cas, quand il a eu à porter des jugements sur le type de
formation qui est dispensée au collégial, en termes de formation
technique, règle générale, les jugements qualitatifs sur
le type de formation ne sont pas mauvais, au contraire ils sont même
assez bons, ce qui n'est pas nécessairement le cas au secondaire. Mais,
si on discrédite la formation professionnelle au niveau secondaire, on
se limite, en termes de bassin potentiel. Est-ce que vous croyez que c'est la
cause principale?
M. Boutin: Au niveau de la formation professionnelle, la
difficulté pour les étudiants, c'est le choc culturel. Prenons
une diplômée en technique infirmière qui fait trois ans
d'études, qui a des stages qui ne sont pas
rémunérés, par exemple, mais qui se déroulent de
jour, de 8 h 00 à 16 h 00. Elle est diplômée; son premier
emploi, elle travaille de soir, mettons de 15 h 30 à 23 h 30, et elle a
la responsabilité d'un département. C'est un petit choc culturel,
ça. Il me semble que, s'il y avait un système alternance
travail-études rémunéré, peut-être pas
à un niveau élevé, mais qu'elle fasse réellement la
réalité de son travail professionnel jour-soir-nuit, parce qu'ils
ont quelques années à passer en rotation, on aurait
peut-être moins de diplômés qui décrochent une fois
qu'on les a diplômés en technique infirmière.
Et le problème de l'orientation: prenons une technique humaine.
On a modifié les programmes de techniques humaines en mettant dans
chacune des premières années un stage de sensibilisation. Bien,
ça nous évite d'avoir à former des individus deux ans,
deux ans et demi de temps, qui arrivent en troisième année et
là ils se rendent compte que, si on travaille en éducation
spécialisée, par exemple, on a beaucoup de difficultés
avec des enfants de type mongol. Bien, si vous l'avez eu le contact en
première année et que vous changez d'orientation, c'est normal,
ça ne
coûte pas trop cher au système. Mais, si vous le
découvrez uniquement en troisième année, ça vient
de coûter deux ans au système. C'est pour ça qu'il faut que
l'enseignement professionnel soit valorisé par un système de
stages et que l'étudiant soit en contact avec un milieu réel de
travail, pas un milieu artificiel.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): O.K. Page 25 de votre mémoire,
au bas de la page - je croyais que la ministre commencerait peut-être par
ça, comme questionnement; si elle ne l'a pas fait, c'est probablement
parce qu'elle veut conserver sa responsabilité de ministre de
l'Enseignement supérieur - il y a là, on va le voir en regardant
le texte, pas mal d'éléments sur lesquels vous souhaiteriez que
ça se passe autrement, que l'État adopte comme ligne de conduite
dans ses relations avec le réseau d'accorder à chaque
établissement l'autonomie qu'il juge nécessaire concernant les
structures de participation à mettre en place. Concernant la gestion des
programmes, la gestion des ressourches humaines, la gestion financière,
c'est la première fois, à date, que je vois une suggestion aussi
forte en termes d'autonomie de gestion. Je n'ai pas de trouble avec, c'est que
je ne suis pas capable d'apprécier très concrètement
qu'est-ce que ça signifie par rapport à l'état actuel, si
ce n'est que de reconnaître que ça doit être plus fatiguant
que je ne le pensais de les supporter. Et là, évidemment, je ne
parle pas nécessairement de la ministre, je parle du ministère.
Il doit être fatiguant pas pour rire pour dire: Bon, bien, écoute,
dorénavant, on veut que tu te tasses à tel endroit, tel endroit,
tel endroit. (20 h 40)
Alors, vous êtes des gestionnaires et, même si je le fais
sur le ton de l'humour, très sérieusement, je pense qu'une telle
autonomie de gestion pourrait, d'après moi, à partir du moment
où on demande quand même qu'il y ait de l'évaluation qui se
fasse par l'État québécois au niveau de ce qui se passe,
au niveau des examens nationaux... Il y a tout le contrôle de l'argent
que vous-même constatiez qu'il est assez dispendieux. Comment mettez-vous
ça en parallèle?
M. Boutin: Je vais demander à mon collègue Bill de
répondre à cette question.
M. Atkins: Est-ce que vous m'entendez comme il le faut là?
Oui?
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Moi, oui. Pas de problème!
M. Atkins: Bon, c'est bien. L'idée, en fin de compte,
c'est qu'on...
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Est-ce compte tenu de ce que vous
allez dire que vous demandez ça?
M. Atkins: Non, non.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Ah bon!
M. Atkins: Ce qui est important...
M. Gendron (Abitibi-Ouest): II n'y a pas de danger de tomber en
bas de ma chaise.
M. Atkins: Ce qui est important pour nous, c'est qu'on
responsabilise effectivement de plus en plus les ressources humaines qui
constituent la ressource la plus importante du réseau au
collégial, compte tenu des sommes d'argent importantes qui sont
investies au niveau de ces ressources humaines. Puis on considère que,
plus on va les impliquer directement, plus ces gens-là vont se sentir
impliqués dans une espèce de projet éducatif, mais
d'institution, et éventuellement réseau.
L'idée, c'est qu'on voudrait qu'au niveau du ministère de
l'Enseignement supérieur on donne des grandes orientations, mais, une
fois qu'on a donné les grandes orientations, qu'on laisse la marge de
manoeuvre à chacune des institutions pour pouvoir appliquer ces grandes
orientations là en fonction, je dirais, des spécificités
de chacun des cégeps et de chacune des régions, compte tenu que,
comme on le sait, le Québec est assez vaste et que chacune des
régions administratives a ses propres caractéristiques. On sait
aussi que chacun des cégeps a développé des façons
d'intervenir dans son milieu, soit avec le milieu du travail, soit avec les
municipalités, soit avec les différents groupes en termes de
développement économique. Puis ce qu'on voudrait, c'est que les
collèges puissent justement, par des contrôles a posteriori -
ça va? - rendre des comptes à l'État. Par contre, au
moment où on a obtenu les grandes orientations et pour les mettre en
place, ce qu'on voudrait, c'est avoir de la marge de manoeuvre pour pouvoir le
faire afin de développer la responsabilisation des ressources humaines,
leur créativité et utiliser une certaine souplesse pour s'ajuster
aux besoins du marché.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Bien, je veux dire, au niveau... Je
serais étudiant en deuxième année de maîtrise et je
ne vous dis pas que je ne serais pas attentif à ce que vous venez de
dire puis que je n'en discuterais pas, mais, concrètement, sur le plan
pratique, j'ai des problèmes parce que, moi, regardez,
concrètement, là, je dis: Qu'est-ce que je mets au centre de la
réforme du collège? Pour certains, ils ont dit: C'est la
réussite éducative. Il faut maximiser la réussite
éducative, c'est ça le drame: il y a trop d'échecs, puis
il y a trop d'abandons scolaires. Alors, là, je fais une relation. Je
dis: Je ne vois pas ça très intimement lié. Mais, on va se
comprendre. C'est pour ça que je veux en jaser. Je ne vois pas ça
intimement lié: une
structure de participation à mettre en place, la gestion des
ressources humaines, sélection, embauche, affectation, puis la gestion
financière. Parce que, moi, un contrôle a posteriori, je pense
qu'on devrait viser vers ça pour le vrai. Comme État, il y a trop
de contrôle a priori puis c'est une gestion non moderne, selon moi. Les
gestions modernes ou l'avenir des gestions modernes, c'est dans le contrat a
posteriori. Mais, là, ce n'est pas juste le cégep, ça
là, c'est partout.
Mais, pour ne pas se perdre, supposons que, vous, c'est la
réussite éducative qui est une des premières motivations
qui vous animent. Je ne suis pas capable de voir qu'il y a lieu d'apporter
autant de changements pour corriger ça. Même chose au niveau, par
exemple, de ceux qui nous ont dit: N'oubliez pas que la première
réalité du collège, c'est l'élève. Il faut
de plus en plus s'assurer qu'à peu près toutes les
décisions de dépenses soient en fonction de
l'élève. Est-ce que ça va le placer dans de meilleures
conditions de réussite, que ça soit l'apprentissage de la langue,
comme vous l'avez manifesté avec raison tantôt... Et vous, comment
vous voyez ça, le lien entre une gestion beaucoup plus autonome...
Est-ce à dire que vous trouvez que vous perdez du temps pour ces
choses-là parce que vous n'avez pas le contrôle... assez de
contrôle autonome et, en conséquence, que vous en auriez plus pour
vous occuper de pédagogie ou de vie interne au cégep?
M. Atkins: Je vais vous donner juste un exemple. Si on prend
l'exemple de la sélection, actuellement, lorsqu'on veut faire la
sélection d'un enseignant, un comité de sélection est
formé majoritairement d'enseignants. O.K.? Puis, en termes de gestion,
c'est quoi la possibilité pour nous autres de donner des orientations?
On prend l'exemple de mettre en place une approche programmes. Si on continue,
au niveau des comités de sélection, à engager des
enseignants mais face à une approche disciplinaire, on va un petit peu
à rencontre de ce qu'on prône en termes de développement
d'approche programmes. Donc, ce qu'on aimerait, c'est avoir des moyens concrets
de ce type-là qui nous permettraient effectivement de pouvoir avoir des
actions qui ont de l'effet sur le système.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Mais est-ce que vous ne croyez pas
qu'une des causes, c'est l'évolution des conventions collectives qui
nous ont amenés...
M. Atkins: Les conventions collectives sont un
élément parmi tant d'autres. L'évolution aussi du
système de financement du réseau peut en être un autre. Les
nouvelles technologies peuvent en être un autre. Si on regarde
actuellement la performance des cégeps au niveau des centres
spécialisés de technologie physique, puis Dieu sait que les
centres spécialisés de technologie, en général, si
on les associe aux départements d'enseignement... Qu'est-ce qui fait que
les départements d'enseignement, actuellement, profitent justement des
centres qui peuvent exister dans les différents collèges? C'est
que ces centres-là ont développé une expertise, entre
autres, en ayant une étroite collaboration avec l'industrie et,
grâce à cette étroite collaboration, on a pu
développer des méthodes et des approches pédagogiques
qu'on a implantées au niveau de la formation des départements, et
ça a permis une meilleure formation de l'élève et une
meilleure réussite de l'élève.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): O.K. Toujours plus loin,
peut-être que... Je souhaiterais que ce soit M. Boutin pour la suivante,
mais c'est vous qui menez. Ce n'est pas moi qui décide, vous êtes
nos invités, et on en profite. Un peu plus loin, vous indiquez que vous
souhaiteriez que les règles déterminant les effectifs des cadres
soient abolies afin que les collèges puissent eux-mêmes juger de
leurs besoins en cette matière. La question que je vous pose... À
ma connaissance, ça a été comme ça au début,
mais je peux me tromper, et, à un moment donné, on a
décidé d'instaurer des règles - l'État
québécois - pour déterminer le nombre de cadres, parce
au'il nous apparaissait qu'à certains endroits il y avait des abus.
Est-ce que je suis dans les patates quand je raisonne comme ça?
M. Boutin: Moi, je peux vous dire qu'actuellement le taux
d'encadrement des cégeps est peut-être plus bas que bien d'autres
taux dans le réseau. Avec l'accroissement de la clientèle, il n'y
a pas eu un grand nombre de postes-cadres qui s'est créé. Il y a
10 000 étudiants de plus et on prévoit encore une bonne
fournée d'étudiants qui vont arriver l'an prochain. Il y a des
règles d'effectifs. Il peut se négocier à la pièce
avec l'ADIGECS les autorisations de dépasser ces règles
d'effectifs. Mais il me semble que ça ne donne pas beaucoup de marge de
manoeuvre pour respecter une réalité locale.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Soyez sans crainte, M. Boutin. Moi,
sincèrement, là-dessus, je ne porte pas de jugement, mais je me
suis fait dire... Puis j'aime mieux parler à des gens qui sont
là-dedans, vous êtes le président de l'Association des
cadres. Alors, entre autres, je le dis, quelqu'un m'affirme dur comme fer que
la comparaison du taux d'encadrement du secteur public versus le secteur
privé dans certains collèges, c'est du trois pour un, puisque,
dans certains autres endroits, c'est du quatre pour un, le niveau
d'encadrement. Moi, je n'ai pas eu le temps de faire l'ensemble du tour des
collèges, surtout au niveau des cadres. Au niveau des étudiants,
j'en connais plus, je connais plus la problématique. Alors, vous, vous
êtes le président
de l'Association des cadres, est-ce que c'est ce que vous constatez?
Vous me répondez que non.
M. Boutin: Mon collègue Jean Perron va répondre
là-dessus.
M. Perron (Jean): Écoutez, il peut arriver que, dans
certains collèges, effectivement, de par la région des fois le
secteur professionnel est plus développé, un plus grand nombre de
cadres autorisé par le ministère soient présents dans les
collèges par rapport aux règles maximales de postes. Mais, en
général, c'est plus le contraire qu'on peut observer parce que
les tâches se sont multipliées dans les collèges. Ces
règles-là datent quand même de 1977, même elles
étaient là avant les premiers règlements. Elles
étaient là sous forme de documents de référence,
mais elles ont été maintenues avec le temps. Dans les
collèges, comme le disait Guy Boutin tout à l'heure, les
clientèles ont constamment augmenté, mais les effectifs
d'encadrement n'ont pas pour autant été ajustés, enfin les
règles existantes. Alors, c'est pour ça qu'on dit maintenant,
dans le cadre d'une plus grande marge de manoeuvre de gestion, de permettre aux
collèges de se doter des effectifs d'encadrement nécessaires au
bon fonctionnement de l'institution. (20 h 50)
M. Gendron (Abitibi-Ouest): O.K. Rapide ment, je continue.
J'avais des questions sur le département, vous en avez parlé; sur
les examens d'organismes indépendants chargés de
l'agrément périodique, vous en avez parlé. Deux autres
aspects que, je pense, vous n'avez pas touché. Il y a un certain nombre
de jeunes qui sont venus nous indiquer qu'ils souhaiteraient jouer un plus
grand rôle quant à l'évaluation des apprentissages et des
enseignements. C'est quoi votre point de vue là-dessus, même si,
à ma connaissance, vous n'y avez pas touché dans le
mémoire? Et c'est votre droit. Vous avez dit que vous regardiez
ça plus sur les aspects de gestion. Avez-vous une opinion
là-dessus, d'impliquer davantage les clientèles étudiantes
dans un processus d'évaluation plus serré des apprentissages?
Avez-vous un point de vue à ce sujet-là?
M. Boutin: Mon collègue André va vous
répondre là-dessus.
M. Archambault (André): C'est toujours la question
très difficile de savoir jusqu'à quel niveau on peut impliquer
des étudiants de niveau collégial dans leur propre
évaluation. Vous savez qu'il y a eu une époque où l'on ne
jurait que par l'auto-évaluation; ça n'a pas toujours
été des succès mirobolants. Je sais qu'il existe dans le
réseau actuellement des pratiques nombreuses où les
étudiants contribuent en partie à l'évaluation de
l'enseignement qu'ils reçoivent.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Pour ne pas qu'il y ait de confusion,
vous mettez plus l'accent sur l'évaluation des enseignements qu'ils
reçoivent, donc des enseignants.
M. Archambault: Oui.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Plutôt que sur l'ensemble des
apprentissages. Je pense que la plupart des étudiants qui sont venus ici
nous ont dit qu'ils souhaiteraient jouer un rôle plus actif et être
impliqués dans l'évaluation des enseignants, et des enseignements
bien sûr, mais surtout des enseignants. Alors, juste pour ne pas
vous...
M. Archambault: oui, mais remarquez qu'il \ a quelque chose d'un
peu subtil lorsqu'on dit: ils ne font que l'évaluation des
enseignements. les enseignants vont vous le dire. ils savent très bien
que, quand vous faites l'évaluation de l'enseignement, vous faites aussi
l'évaluation de l'enseignant. et ça explique que parfois les
enseignants sont un peu craintifs lorsqu'on parle d'évaluation de
l'enseignement. mais je pense que les cadres de collèges n'auraient pas
d'objection à ce que l'on confie une part de responsabilité aux
étudiants dans l'évaluation des enseignements et des enseignants.
ça fait partie de la reddition de comptes qui est un devoir des
collèges.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Dans une des recommandations que vous
faites et dans un commentaire vous dites: Bon, on maintient le réseau
collégial, mais avec des assouplissements au régime
pédagogique qui tiendraient davantage compte des cheminements scolaires
et des divers processus d'apprentissage. J'aimerais ça que vous
m'expliquiez à quoi plus précisément vous faisiez
référence quand vous parliez des divers processus
d'apprentissage.
M. Boutin: Prenons un programme professionnel, par exemple. Il
serait peut-être possible d'envisager un programme professionnel qui
pourrait être complet d'année en année. Par exemple,
technicien classe I, technicien classe II, technicien classe III, avec des
stages en milieu de travail, ou une période où la personne cesse.
Peut-être qu'il y en a qui vont dire: On va perdre le fil de la formation
professionnelle. À un moment donné, quand on ne réussit
pas à faire faire tout le cheminement à un étudiant, il y
a peut-être que le programme est trop lourd. Aujourd'hui, on a une
tendance à avoir des programmes professionnels où il y a 28, 30
ou 32 heures d'enseignement et qui demandent comme travail personnel 24 ou 25
heures. Il n'y a pas beaucoup de jeunes qui se tapent 56 ou 60 heures de
travail et qui ont le temps d'aller voir leur blonde, d'avoir une job chez McDo
et de faire des études à plein temps. Ce qui fait que ça
se traduit que ça a un coût pour la société: il
y a des échecs ou il y a des abandons, il y a un cheminement
scolaire plus long. C'est pour ça qu'il faut prévoir une
souplesse dans le régime pédagogique, puis voir comment on peut
l'organiser et le gérer.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): O.K.
La Présidente (Mme Hovington): Votre temps est
expiré, monsieur. À moins...
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Oh! Une minute. Pas de
problème. Une autre question rapide. C'est que vous avez des contacts
avec le monde de l'entreprise, comme cadres, et vous parlez de stages et d'un
fonctionnement en deux temps. Qu'est-ce qui fait, d'après vous, qu'il
n'y a pas plus d'offres concrètes de collaboration? Je ne parle pas
qu'ils ne sont pas d'accord, mais que ça se traduise
véritablement pas une ouverture réelle du monde des affaires
à ce qu'il y ait plus de stages d'organisés. Est-ce qu'il y a des
cas dont vous pourriez nous instruire qui font que ça lambine
là-dessus?
M. Boutin: D'après moi, c'est un phénomène
culturel. L'Université de Sherbrooke, il y a plus de 20 ans, a
commencé un système d'enseignement coopératif qui
aujourd'hui est étendu dans la majorité de ses programmes, et qui
fonctionne très bien, et qui fait que les étudiants sont heureux
là-dedans. J'ai même un garçon qui finit son bac en
génie civil et qui a fait ses stages et il n'a pas une cent de dette. Il
n'y a pas beaucoup de jeunes aujourd'hui qui finissent un bac universitaire pas
une cent de dette. Bien, à un moment donné, s'il faut dire: On
prend cette tangente-là, on prend cette orientation-là et on met
de l'énergie dans ce sens-là.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): ...mettre les cadres
là-dessus.
M. Boutin: On est convaincus de ça, nous.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. M. le
député de Sherbrooke.
M. Hamel: Merci, Mme la Présidente. M. Boutin, dans votre
mémoire, au chapitre concernant des besoins de formation à
actualiser, et ça concerne la langue maternelle, vous vous dites
déçus que le Conseil des collèges n'ait pas prévu
d'aménagement particulier pour les élèves dont la langue
maternelle est autre et qui connaissent des difficultés dans la langue
d'enseignement. Et vous recommandez, justement, que des aménagements
particuliers soient prévus pour les élèves dont la langue
maternelle est autre que la langue d'enseignement. Pouvez-vous nous citer
quelques-uns de ces aménagements particuliers que vous souhaiteriez?
C'est quoi, ça?
M. Boutin: Bon. On peut prendre le cas des collèges qui
ont une bonne proportion de leur clientèle qui est allophone. Est-ce
qu'il est normal de demander à un allophone de maîtriser la langue
française au même niveau qu'un Québécois d'origine
qui a de la difficulté, après 11 ans d'études primaires et
secondaires, à la maîtriser, alors que notre ami allophone, qui
vient d'arriver, qui est passé par un COFI, qui a peut-être 6 mois
ou 9 mois de formation, là, il entre dans le système
collégial? Nous, on dit: Acceptons qu'ils ont des valeurs culturelles
différentes et donnons-leur une chance. C'est peut-être une
question d'ouverture de la société québécoise
à ces gens-là. Actuellement, il y a des étudiants
allophones qui réussissent, mais il y en a aussi qui se cassent le
cou.
Moi, je trouve ça pénible, des fois, d'avoir à
expliquer à des étudiants... J'en ai, dans mon collège; il
n'y en a pas beaucoup, il y en a peut-être moins qu'au cégep de
Saint-Laurent, mais je trouve ça pénible d'avoir à
expliquer à un étudiant qu'il ne peut pas réussir en
français et qu'il n'aura pas son D.E.C.
M. Hamel: Très bien. Dans la carte des enseignements
techniques, vous souhaitez, vous recommandez que le ministère
révise la carte des enseignements techniques. Quels seraient, pour vous
autres, les grands principes qui devraient nous guider pour effectuer cette
révision?
M. Boutin: Moi, je pense qu'il faut partir de la clientèle
potentielle et ne pas organiser un enseignement technique à un endroit
où il n'y a pas un équivalent de 60 étudiants en
première année. Pourquoi? Parce que ça entraîne une
multiplicité de préparation pour les profs et ça
entraîne aussi que, s'il y a une multiplicité de
préparation, les cours seront peut-être moins bien
préparés et, quand vous êtes rendus en troisième
année, vous avez encore un coût plus élevé.
Il faudrait prévoir un système de jumelage et qu'il y ait
entente interinstitutionnelle afin que telle institution, qui a une population
plus vaste, accepte ipso facto de garder des places en troisième
année pour un collège qui est plus petit.
Mme Robillard: m. boutin, il y a quelques cégeps de
régions qui vous trouveraient sévère dans vos chiffres. je
me demande... on va recevoir le cégep de matane dans quelques minutes,
je pense que je vais leur poser la question.
M. Boutin: Ha, ha, ha! Matane a des gros problèmes de
clientèle.
La Présidente (Mme Hovington): Pas cette année. En
conclusion, Mme la ministre.
Mme Robillard: Mme la Présidente, seulement un mot pour
remercier l'Association des cadres d'avoir pris le temps de
réfléchir. Je pense que vous avez très bien assumé
votre responsabilité, comme cadres du réseau, de venir nous faire
part de votre réalité. Et, M. Boutin, vous avez une façon
très colorée de nous la traduire. Merci bien.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, au nom de la
commission de l'éducation, permettez-moi de vous remercier de votre
excellent mémoire et d'être venus nous le présenter ce
soir. Je vous souhaite un bon retour chez vous. Soyez prudents, passez une
bonne nuit.
Et j'inviterais les représentants du cégep de Matane
à venir s'installer. Nous allons suspendre les travaux quelques minutes
pour vous laisser le temps.
(Suspension de la séance à 20 h 59)
(Reprise à 21 h 1)
La Présidente (Mme Hovington): La commission de
l'éducation reprend ses travaux. Je demanderais un petit peu de silence
en arrière, s'il vous plaît, pour que la commission puisse
reprendre ses travaux.
Nous avons le plaisir de recevoir le cégep de Matane. Pas besoin
de vous dire, chers membres de la commission, qu'on finit très bien
notre soirée. Avec le groupe de Matane, on est choyés.
Pardon?
Une voix:...
La Présidente (mme
hovington): pas le cégep.
alors, nous avons m. jean-pierre cler- mont, qui est le directeur
général, qui sera le porte-parole, j'imagine. bonsoir.
Cégep de Matane M. Clermont (Jean-Pierre): Bonsoir.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, je vais vous laisser
le soin de présenter cette belle table.
M. Clermont: Je vais demander à M. Marc L'Arrivée,
qui est vice-président du conseil d'administration, de bien vouloir le
faire, s'il vous plaît.
M. L'Arrivée (Marc): Merci, M. le directeur
général. Ça me fait plaisir, Mme la Présidente, Mme
la ministre, Mmes et MM. membres de cette commission parlementaire. Je voudrais
d'abord vous remercier de nous avoir invités à présenter
notre mémoire devant cette commission parlementaire. Avant la lecture du
mémoire, il me fait plaisir de vous présenter les membres de la
délégation du cégep de Matane. Il y a d'abord, à
l'extrême gauche de notre table, M. Maurice Gauthier, qui est maire de la
ville de Matane, directeur de l'éducation des adultes, à la
commission scolaire de Matane, et qui est en plus un homme très
dévoué à la cause du développement
régional.
La Présidente (Mme Hovington): Bonsoir.
M. L'Arrivée: À côté de M. Gauthier,
nous retrouvons M. Gilbert Scantland, qui est commissaire industriel et
directeur général du Conseil économique des berges dans la
MRC de Denis-Riverin.
M. Scantland (Gilbert): Bonsoir.
La Présidente (Mme Hovington): Bonsoir.
M. L'Arrivée: À l'extrême droite maintenant
de la table, M. Michel Boucher, qui est enseignant en mathématiques au
cégep et président du syndicat des enseignants de notre
collège.
M. Boucher (Michel): Bonsoir.
M. L'Arrivée: Également à ma droite, M.
Perry Fournier, directeur des services pédagogiques au cégep de
Matane. Et finalement, à ma gauche, M. le directeur
général du cégep, M. Jean-Pierre Clermont, qui va vous
faire la lecture du mémoire du cégep de Matane.
La Présidente (Mme Hovington): M. Clermont, vous avez 20
minutes pour nous exposer votre mémoire.
M. Clermont: Je vous remercie, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Hovington): Si vous prenez quelques
petites minutes de plus...
M. Clermont: Vous allez être tolérante... on s'en
doutait. Mme la Présidente, Mme la ministre, MM. et Mmes commissaires.
Les éléments de réflexion que nous vous apportons sont le
fruit d'un travail collectif qui a impliqué tous les acteurs
éducatifs de notre institution. Alors, les divers groupes qui
étaient impliqués, c'étaient les divers groupes
d'employés, la direction et aussi le conseil d'administration. Nous
voulons contribuer aux réflexions actuelles sur l'enseignement
collégial, et il nous apparaît important que le cégep de
Matane alimente cette discussion en tant qu'institution au caractère
distinct, tant par la place que nous occupons en région que par le
nombre d'étudiants que nous accueillons.
Notre intervention s'inscrit donc dans le contexte d'un cégep de
région dont la mission est étroitement liée au
développement d'un milieu
qui représente un certain nombre de caractéristiques
spécifiques. Nos étudiants proviennent principalement de la
municipalité régionale de comté de Matane et des MRC
voisines. Notre population est dispersée sur un territoire immense qui
compte les sous-régions les plus dépourvues du Québec sur
le plan du développement, soit les MRC de Matapédia et de
Denis-Riverin. Ce territoire doit pouvoir compter sur un collège public
qui assure l'accessibilité aux études postsecondaires. La
présence d'un cégep comme le nôtre, le cégep de
Matane, au sein de ce territoire, est un atout majeur pour le
développement socio-économique et culturel de ces
collectivités.
Nous souhaitons décrire devant vous la réalité
actuelle et l'avenir de notre institution en relation avec son insertion dans
le développement régional, la double mission à la fois
éducative et élargie qui la caractérise. Comment favoriser
l'accessibilité et la poursuite d'études supérieures?
Comment rendre viable et autonome notre région et développer une
main-d'oeuvre qualifiée? Comment renforcer notre rôle comme agent
de développement régional et comment participer à
l'évolution de la société québécoise dans
son ensemble? Voilà autant d'éléments qui sont au coeur de
notre problématique de développement régional et que nous
désirons partager avec vous pendant les quelques prochaines minutes.
Alors, le cégep de Matane accueille chaque année moins de
1000 étudiants à l'enseignement régulier dans neuf
programmes du secteur technique et quatre programmes préuniversitaires.
Depuis plus de 20 ans, nous misons sur la qualité de la formation,
l'égalité des chances, l'augmentation de la scolarisation. Ces
objectifs initiaux et d'autres préoccupations importantes
exprimées dès la création des cégeps sont partie
prenante de notre mission, maintenant plus large et en pleine évolution.
Notre contribution à l'augmentation de la scolarisation dans notre
région est significative. À l'instar des autres institutions du
réseau collégial, le cégep de Matane a donc très
largement rempli la mission initiale qui lui a été
confiée, que le milieu lui a confiée. En conséquence, nous
estimons nécessaire et essentielle la poursuite de l'accomplissement de
notre mission de formation, tant sur le plan de la formation technique que
préuniversitaire.
Ce qui nous amène à parler de notre mission
éducative actuelle et, en premier lieu, de la modernisation de la
formation professionnelle. Tout en respectant les conditions d'obtention d'un
diplôme et à financement et ressources équivalentes, nous
souhaitons pouvoir exercer plus de souplesse dans l'organisation et, donc, dans
la réponse aux besoins de la clientèle étudiante, mais
également dans la réponse aux besoins du milieu, de la
main-d'oeuvre et des entreprises dans notre région. Notre
expérience nous amène à proposer que l'on examine
sérieu- sement la possibilité d'organiser certains programmes en
bloc ou en partie menant au D.E.C. lorsque des circonstances
particulières le commandent. Un exemple de ces situations
particulières, le cas de clientèle en nombre insuffisant pour
assurer l'offre d'un programme. Alors, on répond presque
déjà à la question que vous aviez l'intention de nous
poser tantôt. Voilà une modulation qui permettrait aux
cégeps en régions d'offrir plus de souplesse dans l'organisation
de la formation qu'ils dispensent.
Le cégep de Matane a toujours eu une vocation davantage
professionnelle. Cela répondait aux besoins spécifiques de notre
région. Nous avons relevé le défi de la modernisation de
la formation professionnelle par la mise sur pied de programmes adaptés
aux besoins du marché du travail. Nous devons nous ajuster rapidement et
efficacement aux contextes professionnels et régionaux. Jusqu'ici, nous
croyons y être arrivés avec succès. Une formation plus
souple et mieux adaptée à certains contextes professionnels est
maintenant nécessaire pour la réalisation de ces objectifs. Nous
possédons de nombreux exemples qui mettent en évidence la place
que nous avons prise dans la définition de programmes de formation
moderne et, en particulier, sans aller dans le détail, je peux vous
mentionner les cas plus spécifiquement de photographie, de tourisme, de
techniques d'aménagement du territoire, où nous sommes intervenus
de façon très importante dans la définition de ces
nouveaux programmes-là au plan national, la plupart du temps des
enseignants du collège étant des coordonnateurs provinciaux de
ces programmes professionnels là au moment où on a
effectué les révisions.
Le cas du programme Gestion et exploitation d'entreprise agricole
mérite qu'on s'y arrête. Le cégep de Matane y a fait la
démonstration convaincante qu'il est possible et souhaitable de
renouveler' la formation professionnelle en répondant à la fois
aux besoins des apprenants et aux exigences d'un secteur de l'activité
économique régionale. Nous avons renouvelé et
transformé ce programme avec un calendrier scolaire s'étendant
d'octobre à avril avec des stages de formation ainsi que du travail
agricole effectué pendant la haute saison. Le diplôme
d'études collégiales a été divisé en trois
attestations d'études collégiales distinctes et non
séquentielles, et nous avons la possibilité d'intégrer des
élèves du secteur régulier et de l'éducation des
adultes à l'intérieur d'un même programme.
Cette intégration de plusieurs niveaux d'enseignement,
liée au rapprochement du secteur régulier et de la formation des
adultes, nous a permis de former des groupes d'étudiants suffisamment
nombreux pour que nous puissions leur accorder toutes les ressources
nécessaires. Mais voilà, une actualisation de programmes de cette
ampleur hors des sentiers battus a exigé de longs échanges avec
le ministère. Ce n'est pas des
choses qui se font rapidement, surtout au moment où on innove,
où on sort des sentiers battus. (21 h 10)
Comment résoudre cette problématique bien régionale
des petits groupes d'élèves? Un partage plus clair de la gestion
des programmes entre le ministère et les collèges pourrait nous
offrir la souplesse requise pour la réalisation optimale de nos
activités de formation, en fonction des besoins exprimés dans
notre milieu. Notre souhait est donc de pouvoir exercer plus de souplesse dans
l'organisation et la réponse aux besoins de la clientèle
étudiante du milieu, de la main-d'oeuvre, et des entreprises de notre
région, dans le plus grand respect des conditions d'obtention d'un
diplôme et à financement et ressources équivalentes. C'est
pourquoi nous proposons que l'on examine avec attention la possibilité
d'organiser certains programmes en blocs ou en parties menant au D.E.C. Cette
modulation nous permettrait d'offrir plus de souplesse dans l'organisation de
la formation que nous dispensons et, de façon ultime, d'assurer en
régions la disponibilité de certains programmes de formation
postsecondaire.
Le cégep de Matane a toujours maintenu une importante vocation
professionnelle. Nous désirons voir s'élargir des liens efficaces
avec les secteurs du marché du travail et des entreprises correspondant
à nos programmes, en ayant pour objectifs de relancer cette formation
technique et de nous rapprocher du marché du travail. Il nous faut
mettre de l'avant des mesures incitatives susceptibles de favoriser la
poursuite des études dans les programmes professionnels et de renverser
la tendance observée depuis quelques années.
La formation professionnelle doit être actualisée, mais
elle doit également être valorisée avec force. Nous
assistons actuellement à un glissement: de sept étudiants sur 10
il y a quelques années, ce sont maintenant six étudiants sur 10
qui fréquentent le secteur technique au cégep de Matane. Cette
situation réclame un redressement - et de façon pressante - en
régions, où nous devons contrer l'exode des jeunes et favoriser
le maintien des compétences essentielles au développement du
milieu. Aussi, nous souhaitons voir mettre de l'avant des moyens susceptibles
de favoriser la poursuite des études dans les programmes techniques et
de renverser ce glissement du secteur professionnel vers le secteur
général.
La relance de la formation technique passe notamment par
l'établissement de liens efficaces avec les secteurs du marché du
travail et les entreprises qui correspondent aux programmes professionnels
offerts au cégep de Matane. Dans cette même perspective, nous
souhaitons voir appuyer de façon tangible l'organisation de stages en
tant que cégep à majorité technique.
Dans la plupart de nos programmes techniques, nous organisons des
stages, qu'ils soient d'ailleurs prévus ou non au programme. Nous
débutons cette année un programme d'alternance
travail-études en techniques administratives qui a reçu un
accueil très favorable des étudiants et des employeurs. Cette
structure de stages en alternance nous permet de mieux nous concerter avec les
entreprises et de mieux comprendre leurs besoins, de contribuer à leur
développement, de maintenir l'expertise en région et, en bout de
ligne, de participer davantage au développement socio-économique
régional, comme un véritable partenaire. Avec neuf programmes
professionnels sur les 13 programmes offerts au cégep de Matane, nous
avons besoin d'appuis tangibles dans l'organisation de tels stages, et en
particulier selon la formule d'alternance travail-études. En somme,
c'est par une solide formation générale et professionnelle qui
répond aux besoins du milieu, tout en développant une formation
de coopération soutenue, que notre collège a contribué et
entend accentuer sa participation concrète au développement de sa
région.
En 1992-1993, le cégep de Matane accueille 850 étudiants
au secteur régulier et accueillera plus de 2 500 personnes inscrites
à l'éducation des adultes. Situation unique et remarquable, avec
trois fois plus d'étudiants chez les adultes qu'au secteur
régulier. Nous estimons que ces adultes doivent pouvoir compter sur des
services et sur un encadrement facilitant leur insertion ou un retour aux
études quels que soient les programmes dans lesquels ils s'inscrivent,
et cela, dans une perspective de formation continue. De multiples facteurs
créent cette nécessité de la formation continue:
l'évolution technologique rapide, les besoins de perfectionnement de la
main-d'oeuvre, les nombreux changements de profession que vivent bon nombre de
travailleurs. Le réseau collégial ne pourra rencontrer cette
exigence qu'en s'assurant d'une formation de base suffisamment large. Il nous
semble important que l'offre de services de formation aux adultes soit mieux
intégrée à notre fonctionnement régulier, tant au
plan administratif que financier. Les étudiants adultes contribuent au
fonctionnement de ce système à même leurs impôts: ils
ne devraient pas être soumis aux aléas des règles
administratives garantissant la disponibilité d'un programme en fonction
des fonds disponibles ou d'un commanditaire intéressé à y
participer. Nous n'avons pas le droit de leur donner l'impression qu'ils sont
des étudiants de seconde zone. Ces nouveaux étudiants adultes qui
ont quitté la filière scolaire depuis un certain temps, ils ont
des besoins très diversifiés, qui nécessitent un
diagnostic de base. Il est important qu'ils aient droit à des services
équivalents à ceux offerts aux étudiants du secteur
régulier. Les adultes doivent pouvoir compter sur des services
facilitant leur insertion ou un retour aux études sans
égard aux programmes dans lesquels ils s'inscrivent, et cela dans
une perspective de formation continue et d'une plus grande accessibilité
aux études. C'est cette même perspective de formation continue qui
renforce l'idée que la formation spécialisée des
programmes doit s'appuyer sur une solide formation générale et
fondamentale permettant le recyclage et le perfectionnement.
De plus, nous désirons faciliter encore plus aux adultes la
reconnaissance des acquis de formation en constituant pour chacun un dossier
à cet effet, en vue d'y intégrer et de reconnaître au fur
et à mesure tout apprentissage réalisé en formation sur
mesure. Cette approche devrait amener des adultes à s'inscrire dans une
démarche de programme, donc aussi vers de la formation
créditée.
Le cégep doit offrir une formation assez large et solide afin de
constituer une base sur laquelle on continuera de construire. C'est le principe
de la formation continue dont nous venons de parler. Malgré les
ressources humaines et financières limitées, non seulement
avons-nous maintenu des standards élevés dans nos
activités de formation, mais également nous avons choisi
d'investir dans l'innovation. C'est donc une véritable tradition de
recherche institutionnelle que nous devons consolider pour les prochaines
années afin de hausser ces standards de qualité.
Au cégep de Matane, des efforts marqués d'appropriation du
concept de formation fondamentale ont été réalisés
par l'ensemble de nos acteurs éducatifs. Les habiletés
fondamentales visées par notre définition de cette formation
fondamentale ne sont pas le seul fait des disciplines actuellement
obligatoires, mais de l'ensemble des cours qui y sont offerts au
collège. Nous devons donc continuer de donner un sens institutionnel
à la formation fondamentale qui soit propre au niveau collégial
en s'inspirant de nos priorités éducatives et en les
intégrant à nos programmes et aux services que nous offrons.
Dans cet esprit qui nous guide à poser la formation fondamentale
comme un pivot de la formation collégiale, il nous apparaît
primordial de faire du programme de formation un pôle intégrateur,
un véritable projet d'étude. Dans ce contexte régional que
nous vivons, il serait souhaitable que les collèges jouissent de plus de
responsabilités dans l'organisation, la réalisation de même
que dans l'adaptation régionale des programmes, sans pour autant
diminuer l'universalité de la reconnaissance des diplômes. Bien
entendu, la définition des objectifs terminaux est de
responsabilité ministérielle. C'est à l'intérieur
de nos ressources actuelles que nous voulons assumer plus d'autonomie dans
l'établissement des moyens qui nous permettront d'atteindre ces
objectifs et de mieux répondre aux besoins de nos étudiants et au
contexte de notre milieu.
Tous les programmes de formation du cégep de Matane seront
bientôt renouvelés dans cette optique d'intégration de
l'ensemble des disciplines. C'est par l'approche programme que nous pouvons
nous assurer que nos finissants ont acquis une formation large et toutes les
compétences requises. Cette démarche nous apparaît
avantageuse à la fois pour l'institution, les enseignants, les
étudiants, le milieu de travail et, éventuellement, pour les
universités. Tout cela soulève à nouveau la question de la
souplesse et de l'autonomie dont ont besoin les collèges dans la gestion
de leurs programmes. Le ministère autorise chaque établissement
à offrir certains programmes à l'enseignement régulier et
à l'éducation des adultes. Cependant, nous sommes imputables des
résultats quant à la façon de dispenser ces programmes en
fonction des ressources disponibles et des moyens mis en oeuvre pour y
parvenir. Ce qui nous amène à souhaiter que nous puissions
bénéficier de plus de responsabilité dans l'organisation,
la réalisation et l'adaptation des programmes, au moins sur un plan
régional.
Au chapitre du perfectionnement, il nous apparaît que les
ressources financières décentralisées dans les
institutions sont insuffisantes. Il nous apparaît ainsi au moment
où nous connaissons des changements technologiques rapides, de
fréquentes révisions de nos programmes dont nous faisions
état à l'instant, et cela dans une région où nous
n'avons pas accès à toutes les ressources requises pour remplir
cet objectif. Le cégep de Matane a récemment adopté une
politique de perfectionnement institutionnel visant à appuyer le
développement de l'organisation et de l'ensemble du personnel qui y
oeuvre. Nous souhaitions aller au-delà de ce que permettent les
différents comités de perfectionnement aux conventions
collectives et donner un sens institutionnel aux interventions de
perfectionnement.
Comme maison d'enseignement, nous nous devons de nous préoccuper
autant du développement psychopédagogique que de
l'évolution rapide des sciences et des techniques, afin d'assurer la
qualité de formation qu'on attend de nous. Cette responsabilité
nous incombe, mais les ressources - je dois vous dire - nous font quelque peu
défaut. (21 h 20)
Le cégep de Matane accueille des clientèles de jeunes et
d'adultes dont le niveau de préparation aux études
postsecondaires est assez inégal. Nous poursuivons cependant les
mêmes objectifs de niveau de qualité de formation, avec le souci
constant de voir augmenter la réussite scolaire. Nous souhaitons pouvoir
continuer et même élargir nos interventions d'encadrement
liées aux difficultés d'apprentissage ou d'adaptation. Ce que
nous constatons cependant, c'est qu'à l'intérieur des ressources
qui nous sont allouées il nous sera nécessaire d'accorder
davantage de moyens à la poursuite et à l'accentuation de
telles pratiques d'encadrement.
Quel est le portrait des nouveaux arrivants au collégial, chez
nous? On observe chez eux des profils de formation très variés
puisque, à l'exception de certains cours préalables à leur
admission dans certains programmes au cégep, on exige des finissants du
secondaire un diplôme d'études secondaires comportant un minimum
de 130 unités réussies sur une possibilité de 180. Cet
écart de près de 50 unités équivaut pratiquement
à une année scolaire en moins, et cela nous semble
particulièrement important.
Les nouveaux étudiants du collégial sont confrontés
à des changements liés au régime d'études de
même qu'à des difficultés d'adaptation environnementale. La
moitié de ces étudiants se retrouvent hors du milieu familial
souvent pour la première fois, et 40 % de ceux-ci doivent s'adapter
à la vie en résidence. Des étudiants adultes, absents
depuis un bon moment des institutions d'enseignement, retrouvent les bancs
d'école à plein temps et doivent se réadapter à ce
mode de vie. Par ailleurs, un nombre grandissant d'étudiants
découpent leur horaire entre les études et le travail.
Dans ce contexte, accueillir des étudiants en plus grand nombre
et avec des profils presque individualisés nous amène à
élargir et à accentuer les mesures d'encadrement, principalement
au niveau des nouveaux arrivants. A ressources égales, nous avons la
conviction qu'il est préférable d'investir dans la
prévention et adopter des stratégies liées à la
réussite plutôt que dans des mesures de correction en
réaction à des échecs et des abandons scolaires. Les
projets que nous avons menés font la démonstration que les
mesures préventives en encadrement sont particulièrement
efficaces à la première année du D.E.C. et
précisément pendant la première session des études
collégiales.
Au chapitre du rendement scolaire, les renforcements des mesures
d'encadrement que nous avons mises en vigueur ont fait en sorte que, sur trois
ans, la proportion d'élèves avec au moins un cours
échoué ou abandonné a été diminuée
d'un cinquième. Ces mêmes stratégies d'encadrement nous ont
permis, sur cinq ans, de faire régresser d'un tiers la proportion des
étudiants ayant 50 % d'échecs et plus, ceux qui sont visés
par l'article 33 du régime pédagogique. Nous estimons cependant
que 45 % de nos étudiants ont un cheminement irrégulier. Les
efforts d'aide à l'apprentissage auprès d'une clientèle
plus nombreuse et de moins en moins homogène réclament du temps
et des ressources.
Alors, nous croyons devoir continuer d'élargir nos interventions
d'encadrement liées aux difficultés d'apprentissage ou
d'adaptation. Le bulletin de mi-session, cours d'appoint, dépistage des
difficultés, parrainage par les enseignants ou les pairs, ateliers sont
autant de moyens que nous privilégions. Nous voulons agir principalement
sur ces mesures d'encadrement puisque ce sont celles sur lesquelles nous avons
le plus de prise.
La Présidente (Mme Hovington): II faudrait que vous
résumiez peut-être le reste parce qu'on a à peine deux
minutes pour finir.
M. Clermont: II nous reste deux minutes, madame?
La Présidente (Mme Hovington): Oui.
M. Clermont: Oui? D'accord.
Alors, je vais tenter, pour la dernière partie, de vous
résumer ça le plus rapidement. Ce qui nous importe
également aussi, c'est toute la question de la validation de la
qualité à l'intérieur de nos institutions. On a mis en
oeuvre, au cégep de Matane, une série de moyens qui visent
à vérifier la qualité et les actions institutionnelles,
car on ne peut sérieusement parler de qualité sans
évaluation. Et, à l'instar, évidemment, de l'ensemble des
autres collèges du réseau, le cégep de Matane s'est
doté d'une politique institutionnelle d'évaluation des
apprentissages. On a également adopté une politique
d'évaluation des cadres et, depuis un an, nous avons mis en place un
processus de probation des nouveaux enseignants qui nous donne le moyen de
réaliser une meilleure intégration de ces nouveaux enseignants,
de leur offrir tout l'appui nécessaire dans l'amélioration des
pratiques pédagogiques et de contribuer à assurer nos
élèves et le public de la qualité de formation offerte au
cégep de Matane et, en bout de ligne, de la validité des
diplômes qu'on y décerne. Et c'est pas terminé puisque le
collège entend également adopter une politique
d'évaluation des programmes, et ces mesures démontrent notre
capacité à être en mesure de relever des défis au
plan de l'évaluation institutionnelle.
Bon, je passe par-dessus un certain nombre de constats que nous sommes
amenés également à faire au collège pour arriver
à ce que nous considérons comme étant une mission qui
s'élargit depuis quelques années, qui s'élargit
très rapidement, qui est celle de notre contribution au
développement régional. Mais peut-être, puisque je crois
qu'on est arrivés à la limite du temps qui nous était
accordé, nous pourrions y revenir, autant sur le plan du
développement régional que des services à la
communauté, à travers les questions qui pourront nous être
posées tantôt. Alors, je vous remercie de votre attention.
La Présidente (Mme Hovington): Ce sera très sage,
et je suis sûre qu'on aura le temps d'y revenir, M. Clermont. Alors, Mme
la ministre de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la
Science, vous avez la parole.
Mme Robillard: Oui, M. Clermont, M.
L'Arrivée et tous vos collaborateurs, je me joins à la
collègue députée de Matane et présidente de notre
commission pour vous souhaiter la bienvenue et pour vous dire combien nous
apprécions avoir le témoignage d'un cégep qui vit dans une
région telle que la vôtre.
Et, si vous me le permettez, M. le vice-président du conseil
d'administration, comme M. Clermont nous disait qu'il n'avait pu nous lire
toute la partie du texte qui touchait au développement régional,
je voudrais, premièrement, le rassurer et lui dire que nous avons lu ce
texte avant qu'il vienne nous voir, donc, nous en avons pris connaissance.
Peut-être que j'adresserais ma première question au maire de
Matane.
M. Gauthier, j'aimerais ça vous entendre quelques minutes sur
votre idée, votre perception du cégep de Matane et quelle
importance le milieu de Matane lui accorde.
M. Gauthier (Maurice): Alors, je vais parler au nom du
cégep de Matane, c'est-à-dire pour le cégep de Matane,
mais, je suis convaincu que toutes les régions parleraient de la
même façon pour leur propre cégep.
Le cégep de Matane, d'abord, dans la région de Matane,
c'est un moteur du côté développement économique.
D'ailleurs, ce qui est important à savoir, on ne peut dissocier le
développement économique de la formation technique et
professionnelle; ça va de pair. Alors, le jour où on verrait
disparaître l'enseignement professionnel ou l'enseignement technique dans
des régions comme les nôtres, ce serait probablement la
disparition d'une région ou, tout au moins, on la verrait
décliner très rapidement. Alors, j'espère que le
gouvernement ne prendra pas comme mesure, pour faire disparaître la
Gaspésie, cette formule-là; elle serait idéale, je dois
vous dire.
Il est une chose aussi qu'il est important de savoir, c'est que, pour
nos régions, quand je parle de cette sorte-là, c'est que ce qui
attache les gens d'une région, c'est le vécu, leur implication
réelle dans la région. Alors, quand un jeune de chez nous part
pour aller suivre des cours à quelque endroit que ce soit dans la
province, il perd rapidement cet esprit d'appartenance qu'il a dans sa
région. Je suis un exemple passablement grand parce que j'ai
étudié à peu près dans toute la province et,
n'eût été ma femme, probablement que je serais
demeuré à Sherbrooke, M. le député, parce que j'ai
terminé mes études dans le coin de Sherbrooke et j'avais
été demandé pour être assistant-directeur à
la polyvalente de Saint-François. Heureusement, le fait, donc, de
connaître quelqu'un de chez moi m'a permis de retourner. Et je dois dire
actuellement que, pour le développement régional, s'il y a
quelqu'un qui y croit, c'est bien moi, parce que je l'ai vécu, et je
sais que c'est extrêmement important. Donc, il faut garder nos jeunes
chez nous, il faut leur donner la chance de travailler chez eux, de
façon à ce qu'ils s'impliquent. Et un Québec sans
régions, ce n'est pas un Québec, Mme la ministre.
Mme Robillard: Merci, M. le maire. M. Scantland, vous êtes
directeur général du Conseil économique, donnez-moi donc
quelques exemples comment le cégep de Matane vous aide au niveau du
développement économique de la région.
M. Scantland: Nous avons plusieurs cadres de collaboration avec
le cégep, différents cours qu'on partage au niveau du
cégep et du Conseil économique des berges, comme des cours
créateurs d'entreprises, par exemple, qui sont des cours
dispensés par les professionnels enseignants du cégep, qui aident
les entreprises, les petites entreprises à démarrer leurs
projets. Par exemple, cette année, ça a permis la création
de quatre petites entreprises chez nous et, par la suite, nous avons pu
continuer à offrir le service de support-conseil à ces
entreprises-là. C'est un des aspects importants. (21 h 30)
Mais je voudrais profiter de mon intervention, peut-être, pour
signaler d'autres aspects majeurs, en ce qui nous concerne. Nous sommes dans
une région - M. Gauthier l'a signalé tout à l'heure - nous
sommes face à un exode de nos cerveaux, dans notre région, et
c'est peut-être le pire exode qu'il y a. On a l'exode des ressources,
c'est évident, mais l'exode des cerveaux est majeur. Il faut absolument
garder nos jeunes en région, pour qu'ils étudient, mais pas
seulement nos jeunes, nos adultes également, qui se retrouvent sans
emploi maintenant et qui doivent parfaire leur éducation, à
l'intérieur d'un cadre pédagogique que je souhaiterais, pour ma
part, le plus arrimé possible aux entreprises de notre territoire. Le
plus arrimé, ça veut dire également avec de la souplesse
dans les programmes, de la souplesse et de la complicité avec les
entreprises et les agents de développement économique, dans un
réel partenariat pour le développement. Je pense qu'on a
très peu de ressources sur notre territoire. On ne
bénéficie malheureusement pas d'une université,
particulièrement pour la région gaspésienne, et à
ce titre-là nous avons malheureusement peu de ressources
compétentes pour aider les entreprises. Et la mission du cégep,
avec son partenaire d'entreprise, sa mission conjointe avec les commissions de
développement économique, je pense, réagit très
bien à son mandat.
Mme Robillard: M. Boucher, vous êtes professeur de
mathématiques, mais vous êtes aussi président du syndicat
des enseignants et des enseignantes. Et je vois que dans le mémoire que
vous nous présentez, de façon très particulière,
à la page 9 du mémoire, vous nous dites comment vous êtes
impliqué dans l'approche programme, dans le développement de
cette approche programme, et je dirais dans plusieurs
de vos programmes. C'est ce que vous nous signalez ici, comment
plusieurs professeurs participent à la révision qui est
entreprise dans plusieurs des programmes, et vous nous dites que plusieurs
départements sont engagés dans cette voie-là. Comment
ça se vit, ça, dans le cégep pour les enseignants et pour
les enseignantes, la structure départementale en tant que telle versus
le fait que vous soyez impliqués dans une approche programme et que vous
la viviez dans plusieurs programmes que vous avez à Matane?
Pourriez-vous nous en parler un peu?
M. Boucher: Je dois vous dire, Mme la ministre, que notre
situation particulière, le fait d'être un petit collège,
ça favorise déjà l'implantation de l'approche programme.
Pour nous, si je vous donne mon exemple, je suis un professeur de
mathématiques, mais il n'y a pas de département de
mathématiques chez nous. Il y a un département de sciences et
techniques physiques, qui regroupe toutes les disciplines associées
à ça. Donc, depuis 21 ans que je suis au collège, depuis
21 ans qu'on échange entre nous, entre les disciplines scientifiques,
mathématiques, physique, biologie, chimie et électrotechnique
également, qui fait partie de notre département; alors, ces
échanges-là étaient déjà là de
manière régulière. Ce que l'approche programme apporte de
supplément, c'est qu'en plus d'échanger sur une base quotidienne
sur nos pratiques, maintenant on cherche à se définir des
orientations communes et des objectifs de formation communs. Et ça bien
ça se vit dans plusieurs départements.
Mme Robillard:. Est-ce que c'est la même chose, M. Boucher,
par exemple en sciences humaines?
M. Boucher: Bien sûr, en sciences humaines et en
tourisme.
Mme Robillard: C'est aussi multidisciplinaire que pour vous en
mathématiques?
M. Boucher: En sciences humaines, le département de
sciences humaines regroupe la sociologie, la psychologie, la philosophie,
l'histoire, la géographie dans un seul département
géré par un seul coordonnateur.
Mme Robillard: Vous avez déjà la coordination de
programme dans le fond.
M. Boucher: La coordination était déjà
là, maintenant, l'approche programme amène, canalise ça
vers un effort commun de définition d'objectif de formation. Ça
va plus loin, et c'était déjà... Notre contexte
particulier nous facilite, et on glisse là-dedans assez aisément,
je vais vous dire. C'est pour ça qu'on ne sent pas vraiment la
nécessité de nouvelles structures pour vivre ça.
Mme Robillard: Est-ce que, donc, du contexte que vous me
décrivez, qui favorise l'approche interdisciplinaire, là, est-ce
à dire que, par exemple, les profs de philo ou les profs de
français sont aussi impliqués au niveau d'une approche programme
en techniques infirmières? Est-ce que ça va si loin que
ça?
M. Boucher: Pour être franc avec vous, maintenant, c'est un
des défis qu'on a à relever, bien entendu, pour les
différentes disciplines de service comme philosophie, français ou
mathématiques face aux différents programmes. Il y a un
défi particulier de ce côté-là que nous avons
à relever, bien entendu. Les échanges sont moins
fréquents.
Mme Robillard: Merci, je vais laisser la place.
La Présidente (Mme Hovington): Je vais reconnaître
maintenant le député d'Abitibi-Ouest en respectant
l'alternance.
M. Qendron (Abitibi-Ouest): Oui, Mme la Présidente, je
veux saluer les gens du cégep de Matane ainsi que les compagnons
d'engagement qui les accompagnent, parce que qu'on sent que dans les
régions, par définition, je pense que lorsqu'une institution
comme un cégep pourrait se présenter, les accompagnateurs
pourraient être nombreux et variés, parce qu'il n'y a pas beaucoup
de gens dans les régions qui ne sont pas intimement et directement
liés à l'institution. Et je suis heureux que ce soit comme
ça à Matane, comme d'autres régions que je connais bien,
que ce soit le cégep d'Abitibi-Témiscamingue, dans l'Outaouais,
dans le Saguenay-Lac-Saint-Jean. On avait les gens du Saguenay-Lac-Saint-Jean,
mais en particulier de Saint-Félicien qui nous racontaient comment
ça se vit. Et je suis très heureux que vous ayez ajouté
dans votre mémoire, au-delà de la réflexion que vous avez
faite quand même sur ce qui doit nous animer davantage, il y a quand
même deux dernières sections que je tenais moi, à ce
qu'elles soient là. Et ce que vous avez appelé correctement - je
sais que M. Gauthier est un type très impliqué dans ies
activités liées au développement régional - et vous
avez intitulé ça la section «Mission élargie».
Parce que c'est tellement vrai dans les régions que la mission
d'enseignement est une mission importante pour un cégep. Mais on doit
absolument parler de la mission élargie, tout autant pour les services
à la communauté que vous êtes constamment appelés
à rendre. Et c'est très rare que les collèges des
régions se soustraient à ces nombreuses demandes
répétitives d'implication dans toutes sortes de dossiers, de la
même nature, comme vous êtes convaincus qu'il y a des projets qui,
si vous y êtes associés, ont davantage de chances de donner des
résultats concrets et d'être comptabilisés dans le
grand
livre de ce qu'on appelle des activités qui ont permis de
développer davantage d'initiative à caractère de
développement régional.
Alors, bravo pour cette contribution. J'ai dit, d'entrée de jeu,
au début de la commission, que j'avais souhaité que nous
entendions tous les cégeps qui ont eu l'intelligence ou la sagesse de
dire: Ce dossier-là nous regarde, que nous soyons des régions
éloignées ou des grands centres, on va s'exprimer. On va aller
jaser avec les membres de cette commission pour convenir ensemble de ce qu'il y
a lieu d'améliorer. Alors, merci de votre contribution.
Moi, j'ai quelques questions que je voudrais approfondir avec vous.
À la page 9, dans votre mémoire, vous indiquez au bas de page que
chez vous, l'approche programme, c'est une approche que vous souhaitez
privilégier. Et Mme la ministre vient de questionner un des
éminents professeurs qui semble dire qu'il n'y aura aucun
problème de privilégier cette approche-là plutôt que
la traditionnelle approche du département. Cependant, moi c'est une
clarification que je voudrais obtenir, parce que je n'en doute pas. Je sais
comment ça se passe dans les milieux, c'est pas mal plus facile, dans
les milieux régionaux, pour toutes sortes d'autres raisons... M. le
professeur qui est là, je suis convaincu que ce n'est pas la
première fois qu'il voit M. Gauthier. Ce n'est pas nécessairement
la même chose dans les grands centres. Et vous vous connaissez tous assez
bien, les uns et les autres; vous avez développé des habitudes de
collaboration. Donc, ce qui vous anime souvent, c'est bien plus l'objectif
plutôt que vos chapelles personnelles.
Je lis quand même la dernière phrase: «À
l'intérieur de nos ressources actuelles, nous voulons assumer plus
d'autonomie dans l'établissement des moyens qui nous permettront
d'atteindre ces objectifs et de mieux répondre aux besoins de nos
étudiants et au contexte de notre milieu.» Je n'ai pas de trouble
avec ça, mais, au préalable, vous aviez mentionné que,
dans un contexte régional, vous souhaiteriez que les collèges
jouissent de plus de responsabilités dans l'organisation, la
réalisation, de même que dans l'adaptation régionale des
programmes, sans pour autant diminuer l'universalité de la
reconnaissance des diplômes. Donc, en termes clairs, au-delà des
mots, je ne suis pas capable de voir ce que vous demandez exactement. Parce que
quand vous dites: On va avoir une plus grande responsabilité dans
l'organisation, la réalisation, de même que dans l'adaptation
régionale... Mais à partir du moment... où si les contenus
sont définis au niveau national, si vous reconnaissez que ça
prend quand même des objectifs d'évaluation nationale pour les
apprécier, je dis: C'est quoi qui fait problème? Pourquoi vous
souhaitez ça? C'est évident que dans ce que vous voulez, vous
aurez toujours cette marge de manoeuvre. Vous aurez toujours cette marge de
manoeuvre dans la réalisation, l'organisation et l'adaptation.
C'est la couleur régionale, c'est la couleur locale. Qu'est-ce
qui vous manque? Qu'est-ce qui vous empêche de faire ça? (21 h
40)
M. Clermont: M. Gendron, un élément de
réponse à cet égard-là pourrait être le
suivant. Il va de soi, je pense, que la définition des objectifs
terminaux est de responsabilité ministérielle et je pense que, au
plan de l'ensemble des programmes, les grandes orientations se doivent
d'être définies par le ministère, les grandes tendances.
Cependant, au niveau des programmes, je pense qu'on va très loin dans
l'organisation et l'articulation des programmes au plan ministériel.
Ça prend du temps, ça prend des années. Et les
modifications qui interviennent, quant à nous... Quoique ces
dernières années, je pense qu'elles se sont
accélérées, mais le rythme ne convient parfois pas aux
ajustements assez rapides que la situation nous imposerait sur le terrain, et
particulièrement en région, pour faire face à certaines
situations. Et, à cet égard, je pense que les collèges ont
acquis, au fil des ans - ça fait 25 ans que les collèges sont en
place - une maturité suffisante pour être en mesure, tout en
répondant de façon tout à fait adéquate aux
objectifs ministériels qui auront été définis, de
définir, à l'intérieur d'un certain nombre de
paramètres également définis au plan d'un régime
pédagogique, de définir l'organisation précise des
programmes et des diverses modalités qui s'y greffent. Et sur ce
plan-là, je dois vous dire qu'en région, et
particulièrement dans un petit collège, où le normatif,
qui... bon, n'est probablement jamais fait pour les très, très
gros collèges ni pour les très petits, le normatif est toujours
un petit peu embêtant, nous encarcanne plus qu'autre chose. Alors, on a,
je pense, eu l'obligation de l'imagination, de l'invention pour réussir
à s'organiser. Alors, sur ce plan-là, je pense que nous, on est
prêts à prendre, jusqu'à un certain point, des
responsabilités plus grandes sur ce plan-là.
M. Gendron (Abrtibi-Ouest): Moi, je n'en disconviens pas.
J'essaie juste de voir... Parce que c'est justement, s'il y a quelqu'un qui est
convaincu, c'est moi. Vous êtes capables d'en prendre pas mal plus. Mais
je regarde, prendre plus de quoi? Si, juste dans l'expression
«l'organisation, la réalisation puis l'adaption
régionale», moi, je croyais que vous faisiez ça de toute
façon. Parce que, à ce que je sache, c'est très rare qu'un
contenu de programme est dicté par le ministère quand il arrivera
en Abitibi, en Gaspésie, Bas-Saint-Laurent ou chez vous, qu'il aura
cette originalité - je vais le dire comme je le pense -
organisationnelle, réalisationnelle, pour qu'il s'opère tel
qu'ils l'ont défini. Vous allez être obligés de lui donner
l'adaptation requise. Alors, c'est quoi qui faisait problème?
M. Clermont: Bon. Je vous donne un
exemple, puis je pense que l'exemple est déjà contenu un
peu dans le mémoire. Je vous réfère à un programme
Gestion et exploitation d'entreprise agricole. Bon. On avait des
problèmes et puis on peut se référer à de faibles
clientèles. On avait des problèmes de clientèle, dans ce
programme-là. On était largement en-deçà des seuils
qui ont été indiqués comme étant, je pense, un
déclencheur pour au moins un examen sérieux de la situation quand
les clientèles globales d'un programme tombent en dessous du seuil de
60. Ça fait plusieurs années qu'on est dans cette
situation-là. On a été de l'avant, on a mis sur pied, on a
fait des propositions quant à réorganiser ce programme-là
sous forme d'attestations qui pouvaient beaucoup mieux s'ajuster à un
contexte régional, à un contexte plus sous-régional,
également, et répondre, dans le fond, aux besoins des
clientèles, répondre aux besoins de la relève agricole,
répondre aux besoins de ces étudiants qui sont en situation,
déjà, à la fois de travail et en situation d'étude,
parce qu'ils sont déjà des ouvriers agricoles en relève
dans l'entreprise familiale, la plupart du temps. Mais c'était quelque
chose d'un petit peu novateur, à l'époque, et je pense que ce
n'était pas facile d'en arriver à mettre de l'avant ce
modèle-là. Je dois vous dire que sur ce point-là en
particulier, on a été entendus et que, par la suite, le
modèle a été retenu et appliqué dans l'ensemble des
autres collèges du réseau. Là-dessus, la DGEC nous a
suivis. Mais ce n'est pas facile d'innover.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Mais je voulais vous faire jaser
là-dessus. C'est pas mal plus précis, en tout cas, selon moi.
Deuxième point que je voulais aborder. Je trouve que vous êtes
sage, comme cégep d'une région, de parler de problèmes du
perfectionement en disant que les enveloppes de perfectionnement ne sont pas
assez significatives - je parle de PERFORMA, là - pour que vous puissiez
bénéficier des nécessaires ajustements requis en
région. Donc, vous dites, vous autres: Quand on a vu ça, on s'est
organisés. Ça, c'est votre texte. Puis vous dites ceci: On
souhaite que notre formule permette aux différents comités de
perfectionnement prévus aux conventions collectives d'être
dépassés parce que ce n'est pas significatif, ce n'est pas
suffisant. C'est ce que vous dites à la page 10. Comment vous allez
faire ça, où vous allez obtenir l'argent? C'est quoi qu'il y a do
plus original chez vous que je ne saisirais pas au-delà, encore
là, de nous dire que l'argent national prévu aux conventions
collectives ne permet pas d'offrir le perfectionnement qui correspond à
vos besoins puis vous autres, vous allez dépasser ça? Comment
vous allez faire ça et avec quel argent?
M. Clermont: Bon. Deux éléments de réponse.
Dans un premier temps, quant à la suffisance, je dirais, des fonds
nécessaires au perfectionnement de nos personnels, je voudrais juste
vous indiquer que, par rapport à l'ensemble de la masse salariale et des
bénéfices marginaux qui vont pour l'ensemble de nos personnels,
c'est passablement moins de 1 % de cette masse-là qui va au
perfectionnement de notre personnel. Dans la mesure où on a, d'une part,
à faire en sorte que nos enseignants, particulièrement, mais
aussi les professionnels et les techniciens, puissent devancer, jusqu'à
un certain point, les besoins et être à l'avant-garde des
technologies, je pense qu'il faut aller un peu plus loin que ce très
faible pourcentage. Et c'est d'autant plus nécessaire en région
dans la mesure où il y a des coûts, évidemment,
additionnels qui sont impliqués au moment où on réalise
certaines activités.
Bon, quant à la deuxième partie de votre question, le
conseil d'administration du collège a adopté une politique de
perfectionnement institutionnelle qui va au-delà de celles qui sont
indiquées et précisées au niveau des conventions
collectives ou qui sont possibles dans le cas des cadres du collège, de
façon à ce que certains besoins qui sont identifiés dans
l'institution puissent être comblés de façon globale et non
pas sectorialisés par types d'emploi, donc ne soient pas
spécifiques à des enseignants.
Donc, si on a... Au niveau d'un programme, par exemple... On parlait
tantôt de l'approche programme. Si on a des professionnels, des
techniciens qui sont impliqués dans un programme, on ne perfectionnera
pas seulement nos enseignants, mais l'ensemble du personne! qui est
impliqué dans une démarche, autour d'un programme. Et c'est cette
voie-là qu'on pense être plus riche pour une institution comme la
nôtre.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Vous avez parlé avec raison de
la validation de la qualité et vous avez appelé l'expression...
Chez vous, vous dites: Nous, on veut que les diverses actions institutionnelles
posées - donc, c'est assez large - soient validées par des
méthodes d'évaluation. Et je pense que, encore là, c'est
sage qu'un cégep de région ou d'ailleurs convienne qu'il y a lieu
d'avoir des méthodes évaluatives plus significatives.
Ça, c'est l'interne. Vous souhaitez qu'à l'interne le
cégep ait des méthodes d'évaluation. Qu'est-ce que
ça vous dit ou avez-vous une opinion sur des méthodes
d'évaluation externes? Et, si jamais on pense à un organisme
national, croyez-vous que le Conseil des collèges devrait s'occuper de
développer des mécanismes nationaux d'évaluation?
Pensez-vous qu'il aurait un rôle à jouer là-dedans, selon
vous?
M. Clermont: Sur ce plan-là, puis à
l'intérieur du mémoire, vous ne retrouverez pas d'indications sur
l'évaluation externe. Au point de départ, nous avions choisi de
faire un mémoire de façon commune avec l'ensemble des
employés du collège. Nous oeuvrons tous les jours avec
l'ensemble des employés; alors, c'est de cette façon-là
que nous voulions constituer notre mémoire. Je pense qu'on n'a pas eu le
temps d'aborder cette question-là de façon suffisamment
significative pour pouvoir vous donner des indications à
l'intérieur du mémoire. Mais je crois que toute forme
d'évaluation, quand elle est bien faite, réussit toujours
à faire progresser les organisations. Et, sur ce plan-là, je
pense que les mentalités dans l'institution ont passablement
progressé et qu'il y a des ouvertures qui se manifestent de façon
de plus en plus claire de la part de l'ensemble des intervenants
éducatifs. Maintenant, les moyens à choisir? Ça, il faudra
voir, examiner de quelle façon cela pourra être fait.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Je n'ai pas de trouble avec votre
réponse. Je la trouve même sage. Mais ça signifie que
puisque vous avez fait une bonne réflexion... Et on sent que c'est un
travail d'équipe, on sent que votre mémoire, c'est vraiment toute
l'équipe au sens autant des impliqués dans le
développement régional, des missions externes que la mission
proprement d'enseignement ou, comme vous dites, éducative, incluant la
direction et les profs.
Puisque vous avez une bonne réflexion sur l'évaluation
interne, est-ce que vous conviendriez... Puis là, je ne veux pas vous
faire dire des choses qui ne vous tentent pas, là. Est-ce que vous
pensez que, dans certains cégeps, ce serait suffisant? Puis que les
parents, puis les élèves seraient conscients et contents et que
c'est suffisant comme évaluation si l'ensemble des intervenants internes
à une institution collégiale en conviennent et se donnent des
mécanismes, puis qu'ils pourraient faire preuve devant les parents que,
vraiment, l'évaluation, chez vous, vous en faites? Et ça comprend
- puis là, je reprends votre expression - l'ensemble des actions
institutionnelles. Donc, il n'y a pas grand-chose qui a été
oublié là-dedans.
M. Clermont: Sur ce plan-là, il faudrait demander aux
membres du conseil d'administration qui sont des personnes autres que celles de
l'interne pour voir si cela les satisfait. À ma connaissance, cela les a
toujours satisfaits parce que ça a toujours été fait avec
la plus grande transparence possible auprès des membres du conseil, et
il me semble que c'est suffisant à leurs yeux. Cependant, je dois vous
avouer que des regards externes, c'est aussi toujours intéressant. (21 h
5Q)
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Frais de scolarité? Qu'est-ce
que vous en pensez?
M. Clermont: Dans le mémoire, nous indiquons que nous ne
souhaitons pas, évidemment, que des frais de scolarité soient
imposés aux étudiants du collégial. Pour nous, ce serait
une embûche, une contrainte additionnelle à l'accessibilité
dans notre région, et ça, c'est particulièrement
évident quand on connaît les ressources dont peuvent disposer nos
étudiants. Les frais de scolarité, je pense, éloigneraient
un certain nombre d'étudiants de l'accès au collège.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Même avis pour ceux qui
prennent un peu plus de temps que les autres à terminer dans les
délais prescrits?
M. Clermont: Bon, je pense que ce qu'il faut éviter, c'est
les situations d'extrême, mais il faut cependant, de mon point de vue,
respecter les cheminements des personnes. Ce qui est important, c'est d'en
arriver à avoir un niveau ou un taux, je pense, de réussite ou un
taux de diplomation qui soit le plus élevé possible. Et, dans ce
sens-là, un étudiant qui connaît un cheminement difficile,
qui connaît un cheminement beaucoup plus tortueux, l'important c'est
qu'au bout du compte, il puisse obtenir, dans le fond, un diplôme qui
l'habilite à exercer tantôt des fonctions de travail ou encore
l'habilite à poursuivre des études universitaires. Aux âges
où nous accueillons nos étudiants, il n'y a pas uniquement des
problèmes scolaires. Il y a des problèmes de toutes natures qui
interviennent et qui peuvent faire en sorte qu'un cheminement soit plus
long.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Je vous remercie. Il me reste un
élément. J'ai été, encore là, un peu surpris
qu'un cégep de région - puis il n'y a pas de connotation ni dans
un sens ou l'autre, je dis que vous êtes dans une ligne qui, depuis deux
jours, nous revient constamment sur le nombre d'unités... Vous dites que
ça fait problème. Vous trouvez qu'il faut faire quelque chose et
vous ouvrez dans une recommandation où vous souhaitez élargir vos
interventions pour mieux préparer, adapter ceux qui ne le sont pas, les
clientèles qui ne seraient pas bien adaptées à poursuivre
ou à entamer des études collégiales, et vous dites la
raison, ce n'est pas compliqué, il y a trop d'écart dans le
nombre d'unités de formation. Est-ce que c'est quelque chose que vous
avez apprécié collectivement ou si vous trouviez que
c'était une idée dont vous aviez entendu parler par d'autres,
vous avez décidé de la reprendre à votre compte?
M. Clermont: On en était conscients depuis fort longtemps,
de cette réalité-là. Ce n'est pas la seule cause, mais
c'en est une qui mérite qu'on s'y attarde parce qu'il faut auprès
de, en tout cas, plus particulièrement des étudiants qui nous
arrivent avec un dossier scolaire au secondaire même s'ils ont leur
D.E.S., dossier scolaire qui représente 130, 140 unités, et
surtout quand ces unités-là ont été réussies
avec une moyenne
générale plutôt faible, c'est sûr que c'est
là qu'il faut investir davantage au plan de l'encadrement de ces
étudiants-là.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Je suis parfaitement d'accord, mais
on corrige comment? On corrige... Parce qu'il y a deux façons. Juste une
seconde. On dit: Dorénavant, si tu sors du secondaire, si tu n'as pas
145 - et ne vous arrêtez pas sur les 145 unités, mais c'est un
exemple...
La Présidente (Mme Hovington): Votre temps est
écoulé, Monsieur...
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Oui? Vous ne m'aviez pas dit
ça. Si mon temps est écoulé, je... Mon temps est
écoulé.
M. Clermont: Le temps est écoulé pour la
réponse également, oui?
La Présidente (Mme Movington): Ha, ha, ha!
Parce que je veux quand même me garder un petit peu de temps.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Oui, oui. Je comprends ça
d'ailleurs.
La Présidente (Mme Hovington): ...M. le
député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron (Abitibi-Ouest): Vous avez raison.
La Présidente (Mme Hovington): Tout simplement pour...
M. Gendron (Abitibi-Ouest): En autant que vous reprenez la bonne
question.
La Présidente (Mme Hovington): Je voudrais vous
féliciter d'abord pour la qualité de votre mémoire. Un
mémoire qui est à votre image, parce que je trouve et j'ai
toujours trouvé que le cégep de Matane est un cégep
très performant: un cégep performant au niveau de la
qualité de formation qu'il donne aux élèves; un
cégep performant au niveau de la modernisation de la formation
professionnelle. Qu'on pense seulement au programme Gestion et exploitation
d'entreprise agricole, où vous avez fait preuve d'une souplesse, d'une
créativité, en tout cas, peu ordinaire. Au niveau de mission
élargie, où le cégep de Matane est un outil de
développement régional essentiel chez nous et où vous
n'avez pas eu peur d'aller dans les sous-centres, d'aller dans la MRC de Denis
L Riverin, qui est la MRC la plus démunie du Québec. J'ai
hâte qu'on change de titre. C'est un titre peu enviable, mais on s'en
vient bien. Avec le contrat de relance, on s'en vient bien. Vous êtes
allés aussi dans la vallée de la Matapédia où vous
n'avez pas eu peur donc de vous impliquer dans le développement
régional sous toutes ses formes.
Ma question n'est pas dans votre mémoire. Dans le fond, c'est que
je veux vous demander quelle est la réaction du cégep de Matane
vis-à-vis le cégep de Rimouski qui va nous présenter un
mémoire sous peu, mais ce n'est pas un secret pour personne - je ne
dévoile pas de secret parce qu'ils ont fait une grande conférence
de presse pour dévoiler le mémoire en disant qu'ils voulaient
devenir un cégep régional, à vocation régionale,
à Rimouski. Est-ce que ça vous fait peur? De quelle façon
vous le voyez? Et je le dis devant mon collègue, de Rimouski qui est
là parce que, selon mon collègue: «Hors de Rimouski, point
de salut», peut-être.
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Hovington): On est habitués un
petit peu à ça, dans les sous-centres. Alors, quelle est la
réaction du cégep de Matane face à cette prise de position
du cégep de Rimouski?
M. Clermont: Je reprendrai la même maxime, quant au
mémoire du cégep de Rimouski: «Hors de Rimouski, point de
salut». Bon, enfin, c'est un peu une réaction de
stupéfaction, dans un premier temps, parce que je dois vous dire que,
depuis une bonne dizaine d'années, au moins, il y a eu des efforts de
concertation entre les institutions d'enseignement collégial de l'Est du
Québec, de La Pocatière à Gaspé, qui ont
donné des résultats tout à fait intéressants, qui
ont donné cours à un très grand nombre d'actions
positives, de concertations entre les institutions et, depuis quelques
années, nous avons même inclus, dans cette concertation
régionale, l'ensemble des institutions d'enseignement supérieur,
en y incluant également l'Université du Québec à
Rimouski.
Alors, sur ce plan-là, il nous apparaissait que la position qui a
été annoncée par le cégep de Rimouski de
requérir ou de s'identifier et d'avoir toute la reconnaissance
d'être le cégep régional pour le
Bas-Saint-Laurent-Gaspésie et même les îles et même de
la Côte-Nord, ça nous apparaissait un peu aller à
contrecourant de ce qui a toujours été vécu et qui a
donné des fruits tout à fait positifs, au niveau de la
région.
On a, à cet effet, l'ensemble des directions des collèges
de l'Est, rencontré la direction du cégep de Rimouski pour mieux
connaître, dans le fond, ou pour avoir au moins une clarification sur les
intentions qu'on pouvait lire dans le mémoire. Mais je dois vous avouer
cependant que ce qui nous a été indiqué corrobore tout
à fait ce qu'on retrouvait dans le mémoire. Donc, c'est une
position qui vise, dans une certaine mesure, une certaine forme de
hiérarchisation des institutions. Sur ce plan-là, nous sommes,
vous le comprendrez, tout à fait en désaccord avec cette
perspective, avec cette lecture de la réalité. Leur
réalité, on la respecte, ils en font une interprétation.
Cependant, je dois vous dire qu'on en fait une qui est tout à fait
différente.
À titre d'exemple, une des raisons qui est évoquée,
c'est la très grande proportion de programmes techniques, de programmes
professionnels qu'on retrouve dans l'institution à Rimouski. C'est
effectivement vrai, il y en a un très grand nombre. Et aussi, la
proportion qu'on retrouve, de façon exclusive, dans la région.
Quand on examine toutes les autres institutions d'enseignement collégial
de l'Est du Québec, c'est exactement, à quelques pour-cent
près, la même proportion de programmes qui sont en
exclusivité, soit sur le plan régional, soit sur le plan
national, dans chacune des institutions. Tous les collèges de l'Est ont
également un poids professionnel à peu près égal,
aux alentours de 60 % à 65 %. On indique aussi qu'on tient à
avoir un statut un petit peu particulier, une reconnaissance
particulière, comme cégep régional, du fait que beaucoup
des clientèles qui vont au cégep de Rimouski ne demeurent pas
chez leurs parents, doivent aller à Rimouski pour suivre ces programmes.
Quand on examine les proportions de clientèles d'étudiants dans
les autres institutions, qui sont en résidence ou qui demeurent hors du
foyer de leurs parents pour, justement, continuer de poursuivre des
études collégiales, les proportions sont exactement les
mêmes, sinon plus élevées.
Tous les éléments d'information, en tout cas, qui nous ont
été transmis à ce jour, ne nous permettent pas, au plan
régional, de reconnaître... D'ailleurs, la région, je pense
que ce n'est pas un mouvement qui a été demandé par la
région, on n'a jamais entendu parler de quoi que ce soit comme
mouvement, qui demanderait à Rimouski d'avoir un statut régional,
comme cégep. Alors, sur ce plan-là, je dois vous dire que notre
lecture de la réalité est tout à fait différente de
la leur, et je peux vous traduire aujourd'hui celle de l'ensemble des autres
collèges aussi, parce qu'on a eu exactement la même lecture de
situation.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, ça s'est fait
sans concertation, ça s'est fait sans collégialité.
M. Clermont: C'est un peu ce qui nous a étonnés,
d'autant plus qu'on avait bâti, je pense, des liens de concertation qui
étaient, je pense, tissés relativement serrés. Mais, on ne
désespère pas, Mme la Présidente, de pouvoir renouer,
retisser ces liens puis continuer, dans le fond, de travailler en concertation,
parce que je pense qu'à partir du moment où tous les
cégeps de la région seront forts, et non seulement un, mais, tous
les cégeps de la région seront forts, toute la région sera
plus forte aussi et, à ce moment-là, c'est l'ensemble de nos
concitoyens qui vont en bénéficier. (22 heures)
La Présidente (Mme Hovington): Absolument. Alors, je vous
remercie. J'aimais vous entendre là-dessus parce que j'ai entendu
ça moi aussi en conférence de presse, et c'était la
première nouvelle que j'en avais. Je me demandais d'où ça
venait, d'où venait la demande et le besoin d'avoir un cégep
à vocation régionale à Rimouski. Alors, Mme la ministre,
si vous voulez... Ha, ha, ha!
Mme Robillard: Merci, Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Hovington): ...si vous voulez
conclure.
Mme Robillard: ...je tiens à dire aussi aux gens du
cégep de Matane que ce n'est pas non plus suite à une demande du
ministère. Alors, bon, nous en...
Des voix: Ha, ha, ha!
Une voix: Elle les a reçus avant.
Mme Robillard: Donc, nous entendrons les gens quand ils viendront
nous voir, je pense bien, mais...
Une voix: Voilà, voilà.
Mme Robillard: ...permettez-moi de vous remercier, M. le
vice-président, M. le directeur, les gens du milieu, aussi, qui
êtes venus nous faire part de votre témoignage, et aussi M. le
directeur des services pédagogiques et M. le président du
syndicat. J'apprécie énormément le travail collectif qui a
été fait pour la préparation de votre mémoire. Je
pense que ça nous démontre quel genre d'atmosphère
règne à l'intérieur du cégep de Matane. Merci
beaucoup.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, il me reste à
vous remercier, au nom de mes collègues de la commission de
l'éducation, d'être venus de si loin nous rencontrer à
Québec. Et je suis sûre que votre mémoire va donner un
éclairage nouveau à certains de mes collègues. Ha, ha,
ha!
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Hovington): ...qui seront
éclairés. Alors, je vous remercie beaucoup, et la commission
ajourne au 10 novembre, 9 h 30. Bonsoir.
(Fin de la séance à 22 h 2)