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(Dix heures seize minutes)
La Présidente (Mme Hovington): Je demande aux membres de
la commission de bien vouloir prendre place. La commission de
l'éducation va entreprendre ses travaux. Je rappelle le mandat de la
commission qui est de procéder à une consultation
générale et de tenir des auditions publiques sur le projet de loi
25, Loi sur l'aide financière aux étudiants. M. le
secrétaire, est-ce que nous avons des remplacements?
Le Secrétaire: Oui, Mme la Présidente. M. Maltais
(Saguenay) remplace M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon); M. Poulln (Chauveau)
remplace M. Parent (Sauvé).
La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. le
secrétaire. Aujourd'hui, nous recevrons donc différents groupes.
À 10 heures, c'est l'Association générale des
étudiants et étudiantes du cégep de Lévis-Lauzon;
à 11 heures, l'Association générale des étudiants
et étudiantes du cégep de Tracy; à 12 heures, le
Regroupement des aveugles et amblyopes du Québec; à 15 heures,
l'Association québécoise des parents d'enfants handicapés
visuels; à 16 heures, la Fédération des cégeps;
à 17 heures, la Confédération des syndicats nationaux;
à 18 heures, l'Association des syndicats de professionnelles et
professionnels de collège du Québec.
Association générale des
étudiants et étudiantes du cégep de
Lévis-Lauzon
Alors, j'inviterais le premier groupe, l'Association
générale des étudiants et étudiantes du
cégep de Lévis-Lauzon à bien vouloir prendre place. Si
vous voulez bien vous présenter, pour fins de transcription des
débats.
M. Côté (Stéphane): Bonjour, Mme la
Présidente, M. le ministre, membres de la commission. Je suis
Stéphane Côté, le secrétaire général
de l'Association. À ma droite, premièrement, c'est
Hélène Saint-Pierre, attachée politique et, ensuite,
Érick Daigneault, secrétaire à l'information.
La Présidente (Mme Hovington): Bonjour et bienvenue
à la commission de l'éducation.
M. Côté (Stéphane): Merci.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, vous avez 20 minutes
pour nous présenter votre mémoire.
M. Côté (Stéphane): D'accord.
La Présidente (Mme Hovington): Allez-y.
M. Côté (Stéphane): Je vais y aller avec la
présentation. C'est avec une certaine joie que l'Association
générale des étudiants et étudiantes du
cégep Lévis-Lauzon, l'AGEECLL, présente son document
à cette commission parlementaire sur les orientations gouvernementales
concernant le régime de l'aide financière aux
étudiants.
Notre intervention n'est pas le fruit du hasard. Vous vous rappellerez
qu'à l'automne 1988 l'ANEEQ déclenchait, à la grandeur de
la province, une grève générale devant la lenteur du
ministre Ryan à déposer sa réforme sur les prêts et
bourses. En ce qui nous concerne, le cégep de Lévis-Lauzon se
limita à trois jours de grève. Par contre, l'exécutif de
l'association étudiante recommandait à ses membres, lors de
l'assemblée générale, la tenue d'une journée
d'étude sur l'aide financière aux étudiants, à la
session d'hiver 1989. Nous sommes fiers de mentionner que nous sommes la seule
institution collégiale à avoir agi de la sorte. Cette
journée, malgré une faible participation des étudiants, a
quand même eu des résultats positifs sur les propositions qui ont
vu le jour. Aussi, elle a permis une meilleure compréhension du
régime. Nous tenons donc à remercier la DGAFE pour son excellente
collaboration par le biais de ses fonctionnaires. Sans eux, cette
journée n'aurait pas eu le succès escompté.
Mme Saint-Pierre (Hélène): Les propositions qui
vous sont soumises dans ce document sont le fruit des réflexions de
ladite journée. Il faudrait également mentionner qu'au cours de
la session d'hiver 1989 quelques associations étudiantes se sont
rencontrées dans le but de former un autre regroupement national
étudiant. Malgré un certain échec, ces rencontres ont
permis des discussions pertinentes concernant le régime de l'aide
financière aux étudiants ainsi que des prises de position
opportunes en ce qui concerne les réalités régionales.
D'ailleurs, à cet effet, il y a deux fins de semaine, le
cégep de Lévis-Lauzon participait à une rencontre des
cégeps de l'Est, à Rimouski, et la majorité des
propositions qui sont amenées par notre association dans ce
mémoire ont été entérinées par les
cégeps de l'Est. Également, lors de l'assemblée
générale mentionnée précédemment, les
membres présents ont accepté par une forte majorité que
l'exécutif de l'association étudiante présente ce
mémoire à cette commission parlementaire, laquelle, à
l'époque, on se rappelle, était une promesse du ministre de
l'Enseignement supérieur et de la Science, M. Claude Ryan. C'est
brièvement la raison de notre intervention ici, aujourd'hui.
M. Daigneauft (Érick): Cette commission parlementaire sur
le régime de l'aide financière aux étudiants se veut pour
fa masse étudiante, si tel est le désir de celle-ci, l'occasion
de relever un défi important. En effet, il est essentiel que le discours
véhiculé par les associations étudiantes, dont celle du
cégep de Lévis-L»uzon, en soit un de gens responsables,
c'est-à-dire un discours qui va vers les défis des prochaines
années dans le milieu de l'éducation.
Qu'on le veuille ou non, les étudiants sont
considérés comme les enfants gâtés du
système. Mais la réalité est tout autre pour bon nombre de
ceux-ci Nous en sommes venus à un tournant de notre
société où il faudra davantage être performants et
c'est à nous qu'il revient de préparer l'avenir, par le parler ou
les agissements.
Mme Saint-Pierre: En tant qu'étudiants, nous avons un
rôle social à jouer. Et c'est de concert avec les autorités
- et ça, c'est très important - qu'il faudra créer un
climat propice à la poursuite des études chez ceux qui nous
suivent de près. Nous avons donc le défi aujourd'hui de proposer,
suite à la lecture des orientations gouvernementales, des mesures qui ne
feront qu'accroître l'accès aux études postsecondaires,
tout en garantissant - et c'est vital pour la future génération -
l'équité économique qu'elle a le droit de recevoir en tant
qu'étudiante et consommatrice.
À la lecture des orientations du ministre Ryan, nous avons cm y
voir un encouragement à la poursuite des études chez les
étudiants chefs de famille. Certes, c'est déjà une
approche sensible de celui-ci aux futures réalités, mais il
serait possible de faire encore mieux. Avec la décision de votre
gouvernement de hausser les frais de scolarité de 130 % en deux ans au
niveau universitaire, cela remet en cause le principe de l'accessibilité
aux études postsupérieures pour la classe à moyen revenu.
Hausser les frais de scolarité pour garantir des revenus
légèrement plus élevés aux universités et
non pour financer complètement l'achat de matériel
adéquat, nous, on trouve que c'est un petit peu fuir la
réalité. D'ailleurs, cela fera l'objet, plus loin dans notre
document, d'une critique.
M. Côté (Stéphane): Ce que nous reprochons
dans l'ensemble à ce que le ministère de l'Enseignement
supérieur et de la Science propose, c'est l'oubli total des situations
économiques et sociales des différentes régions du
Québec - les disparités - ainsi que des mesures
législatives afin de garantir aux étudiants
bénéficiaires du régime de recevoir les contributions
parentales telles que calculées par la DGAFE; c'est un gros point. Dans
un premier temps, nous analyserons les propositions qui nous semblent peu
adéquates. Deuxièmement, nous vous soumettrons certaines
propositions qui nous semblent essentielles pour l'amélioration du
système de l'aide financière aux étudiants. Et, pour
finir, nous vous ferons part de nos interrogations et inquiétudes quant
à l'avenir de l'éducation au Québec.
M. Daigneault: Nous espérons que les membres de cette
commission tiendront compte des propositions et des suggestions contenues dans
ce document. La plupart des étudiants ne sont plus les illuminés
d'autrefois, n'est-ce pas? Nous sommes aptes à porter un jugement
réaliste sur la société d'aujourd'hui et celle de demain,
car nous y sommes directement impliqués, et surtout parce qu'il nous
reviendra un jour de refaire ou de détruire ce qui nous semblera mauvais
ou juste
Mme Saint-Pierre: Maintenant, en ce qui concerne les critiques
des recommandations, nous suggérons des modifications à certaines
des propositions émises dans le document des orientations
gouvernementales, et les propositions dont nous ne parions pas sont
jugées satisfaisantes par l'Association étudiante.
À la recommandation 8 du ministre, il est proposé de ne
pas prendre en compte les ressources provenant d'allocations à la
naissance ni celles du programme d'allocations mensuelles aux enfants
d'âge préscolaire Nous, tout ce qu'on propose, c'est de rajouter,
en plus, les crédits d'Impôt pour enfants et les allocations
familiales, c'est-à-dire qu'ils ne soient pas comptés dans les
déductions pour les dépenses admises.
M. Daigneault: A la recommandation 11 du ministre, il est
proposé de demander une contribution minimale au candidat qui effectue
un retour aux études après avoir été deux ans sur
le marché du travail, comme ça est demandé à tous
les étudiants. Nous modifions la proposition comme ceci: II est
proposé de demander une contribution minimale au candidat
indépendant qui demeure chez ses parents et qui effectue un retour aux
études après avoir été deux ans sur le
marché du travail, comme cela est demandé à tous les
autres candidats.
M. Côté (Stéphane): Pour ce qui est de la
recommandation 14 du ministre, il est recommandé d'allouer à
l'étudiant qui demeure chez ses parents, à l'égard de ses
frais de transport, un tarif simple de 10,50 $ par semaine pour celui qui se
voit actuellement reconnaître cette dépense, et un tarif double de
21 $ par semaine pour les autres. Ce que nous proposons, c'est le retrait
simplement de cette recommandation.
Mme Saint-Pierre: À la recommandation 15, il est
proposé de rembourser aux bénéficiaires de
bourses les frais reliés à l'achat d'orthèses
visuelles jusqu'à concurrence de 175 $ par étudiant et par enfant
d'étudiant. L'aide offerte ne sera accessible à chacun
qu'à tous les deux ans. Nous, ce que nous proposons, c'est de rajouter
en plus les frais dentaires pour les boursiers jusqu'à concurrence de
100 $ par année d'études, parce que c'est un minimum que la DGAFE
pourrait consentir pour de nombreux étudiants, en plus des
orthèses visuelles.
M. Daigneault: À la recommandation 16, il est
recommandé de retirer la prime de 22 $ par semaine au budget du candidat
qui a été sur le marché du travail, lorsque ce dernier
pendant ses études réside chez ses parents. Nous proposons
simplement, également d'ailleurs, le retrait de cette
recommandation.
M. Côté (Stéphane): En ce qui concerne la
recommandation 17 du ministre, il est recommandé d'instituer un
comité d'appel formé de quatre représentants des services
aux étudiants en établissement, de quatre personnes en provenance
du grand public, ainsi que de quatre étudiants, tous nommés par
le ministre responsable. Nous suggérons d'instituer un comité
d'appel par région, formé d'un représentant des services
aux étudiants en établissement, d'un représentant du grand
public, d'un étudiant, chacun nommé par le ministre responsable,
bien sûr, en plus d'un comité national formé de deux
représentants des services aux étudiants, d'une personne du grand
public ainsi que de deux étudiants.
Mme Saint-Pierre: À la recommandation 18, il ' est
proposé d'offrir une bourse à l'intention des étudiants
universitaires à temps partiel inscrits à deux ou trois cours par
session. L'aide sera modulée en fonction des revenus de
l'étudiant et de ceux de ses parents ou de son conjoint. L'allocation
couvrira les frais de scolarité, de matériel scolaire, de
transport et les frais de garde. L'aide sera limitée à cinq
sessions. Nous, ce qu'on dit, c'est: Pourquoi ne serait-ce pas offert
également au niveau collégial? Nous rajoutons "pour les
étudiants de niveau collégial professionnel et que cette aide
soit limitée à trois sessions au niveau collégial."
M. Côté (Stéphane): À la
recommandation 19 il est proposé d'accorder une remise de 25 % de la
dette contractée à l'intérieur du régime des
prêts et bourses, durant les deuxième et troisième cycles
d'études universitaires, à l'étudiant qui aura
complété son programme dans les délais prescrits. Nous
suggérons de rajouter que ce soit la même chose, une remise, par
contre, de 15 % de la dette contractée, au niveau collégial
professionnel à l'étudiant qui aura complété son
programme dans les délais prescrits.
Mme Saint-Pierre: Alors, voilà en quoi consistent nos
modifications aux différentes recommandations du ministre dans les
orientations gouvernementales sur l'aide financière aux
étudiants. Nous croyons sincèrement que ces ajustements aux
propositions émises sont plus qu'essentiels pour une meilleure
équité économique non discriminatoire des
différentes clientèles. Dans son document, le ministre a
oublié plusieurs aspects que nous jugeons importants pour l'avenir de
l'éducation dans les prochaines années. C'est pourquoi, dans le
deuxième volet de ce mémoire, nous faisons part au ministre et
aux membres de cette commission de certains ajustements qu'il serait important
d'apporter à l'aube des années deux mille.
M. Daigneault: Les propositions qui vont suivre dans cette
deuxième partie sont évidemment axées sur de nouvelles
réalités socio-économiques du Québec pour la
prochaine décennie. La dernière réforme majeure du
régime des prêts et bourses a eu lieu en 1974. Certes, au fil des
années, le ministère de l'Éducation a apporté des
modifications ponctuelles au régime pour faire face à de
nouvelles réalités sociales et économiques. Cette
réforme, on le sait, était attendue depuis plus de quatre ans par
la population étudiante du Québec. Nous avons cru que le ministre
de l'Éducation aurait une vision vers l'avenir en élaborant sa
réforme, mais ce n'est pas tout à fait le cas. Certes, plusieurs
propositions aideront une certaine clientèle à poursuivre des
études collégiales et d'autres, des études
universitaires.
M. Côté (Stéphane): On le sait, le
Québec a connu une certaine amélioration de sa situation
économique et ce, au milieu des années quatre-vingt. Cependant,
certaines régions de la belle province ont fait face à un
dépeuplement massif. On pense ici à la Côte-Nord du
Québec, entre autres, qui a dû faire face à un
ralentissement économique important. Des villes en pleine effervescence
au milieu des années soixante-dix sont devenues des ghettos où la
population restante est liée de façon émotive à ce
coin de pays. L'économie du Québec repose donc essentiellement
sur les centres urbains au détriment des régions riches en
main-d'oeuvre spécialisée et en usines abandonnées. Les
jeunes surtout n'échappent pas à cette ruée urbaine. Ils
poursuivent leurs études dans les grands centres et ne reviennent que
trop rarement à leur lieu d'origine une fois les études
complétées. Pourtant, les régions ont besoin de cette
jeunesse pour pouvoir continuer à offrir des services de base essentiels
à la population restante. C'est sur ces réalités que nous
désirons élaborer et les propositions que nous soumettons dans
les prochaines pages ne relèvent pas de la fiction. Bien entendu,
certaines d'entre elfes ne pourront être incluses pour l'année
d'attribution 1990-
1991. Mais si le désir premier du ministre de l'Éducation
est de penser à l'avenir, ce que nous espérons, il trouvera
sûrement quelques propositions intéressantes à faire
analyser par les fonctionnaires de la DGAFE. De plus, cette instance
gouvernementale doit agir dans les prochaines années afin d'inciter les
étudiants finissants des universités et même ceux du
collégial professionnel à participer à la relance
économique des régions éloignées du
Québec.
Mme Saint-Pierre: Alors, en ce sens, la première
proposition que nous désirons amener est la suivante: Nous proposons
d'accorder une remise de 50 % de la dette contractée à
l'Intérieur du régime de prêts et bourses à
l'étudiant finissant qui s'engage à travailler dans son domaine
d'études en région éloignée pour une période
minimale de trois ans et maximale de cinq ans. (10 h 30)
M. Oaigneautt: Dans un second temps, nous proposons d'abolir la
prime d'éloignement de 400 $, sauf aux étudiants qui choisissent
un programme d'études non dispensé dans l'université ou le
collège le plus proche de leur lieu de résidence.
Mme Saint-Pierre: Nous proposons, dans un troisième temps,
que la DGAFE entreprenne une vaste étude socio-économique des
différentes régions du Québec avec la collaboration des
responsables de l'aide financière des institutions collégiales et
universitaires et que, suite à cette étude, la DGAFE
procède à des bonifications des dépenses admises, s'il y a
lieu, en tenant compte des réalités économiques des
différentes régions.
M. OaigneauK: Nous proposons également que le
ministère de l'Éducation, en collaboration avec les institutions
d'enseignement, établisse le coût réel par programme
d'études et que celui-ci soit réévalué à
tous les deux ans.
M. Côté (Stéphane): Nous proposons aussi
d'augmenter de 6 % le total des dépenses admises pour l'année
d'attribution 1990-1991 et, par la suite, d'augmenter ces dernières
annuellement, selon l'indice du coût de la vie.
M. Daigneault: Nous proposons que le régime des
prêts et bourses accorde au bénéficiaire ayant plus d'un
enfant à sa charge une prime supplémentaire pour le logement.
M. Côté (Stéphane): Nous proposons que la
DGAFE entreprenne une étude dans le but d'établir un mode de
versement de la contribution parentale, et ce, sans nuire à
l'unité familiale bien sûr, et surtout de connaître les
moyens réels de payer des parents.
Mme Saint-Pierre: Nous sommes de ceux qui croient que le
régime d'aide financière doit permettre à une certaine
clientèle de poursuivre des études supérieures et, en ce
sens, nous pensons qu'il est important que le financement des
universités ne devienne pas uniquement l'affaire des étudiants.
L'État a un rôle à jouer, ainsi que les entreprises qui
bénéficient du service des étudiants comme travailleurs
à la fin de leurs études. Le financement des universités
est une affaire de société, comme le choix de
l'universalité des programmes sociaux. L'État a plusieurs
possibilités afin de diminuer un déficit ou d'y remédier.
La solution la plus facile est de taxer la classe moyenne au détriment
de ses revenus. Nous ne possédons pas de solution miracle, mais nous
croyons que d'autres avenues peuvent être exploitées pour le
financement des universités.
M. OaigneauK: Pour ce qui est des perspectives futures, dans le
dernier volet de notre mémoire, il s'agit d'un hymne à la
reconnaissance du statut étudiant. C'est également un plaidoyer
en faveur de l'accessibilité à l'éducation au
Québec. C'est une constatation alarmante sur la vie sociale au
Québec pour la prochaine décennie.
Il n'est pas nécessaire de faire un historique des conditions
sociales au Québec depuis la Révolution tranquille pour
comprendre que celui-ci entre dans une phase difficile en ce qui a trait
à de nombreux acquis sociaux. Depuis quelques années, on assiste,
impuissants, à une détérioration globale du système
de l'éducation, des services de santé, de la baisse de la
natalité. Nous sommes en droit, en tant que futurs travailleurs et
administrateurs, de considérer l'avenir avec scepticisme. Nous pouvons
nous questionner sincèrement sur les intentions des administrateurs
gouvernementaux, avec quelques frissons. La société bâtie
à grands coups de gratuité, de droits fondamentaux, s'effondrera
plus rapidement que sa création entreprise il y a 30 ans.
M. Côté (Stéphane): Les heureux
bénéficiaires des réformes sociales des années
soixante et soixante-dix, par leur consommation désabusée, ont
hypothéqué l'avenir. La gratuité scolaire au Québec
a fait en sorte que les institutions d'enseignement se remplissent à
leur pleine capacité, et cela a permis à ce même
Québec de mieux concurrencer les autres provinces canadiennes, notamment
l'Ontario, au niveau du nombre de finissants universitaires. Toute une
génération, pour ne pas dire deux, a profité avec largesse
des mesures de gratuité. Le prêt étudiant a augmenté
plus vite que le coût de la vie, et les emplois ont diminué en
même temps que le chômage a augmenté. Tout a
augmenté, alors que les chances pour l'étudiant de se trouver un
emploi dans son domaine d'études ont chuté de façon
dramatique. Ils sont nombreux, ceux qui ont des diplômes et des
baccalauréats et
qui travaillent dans des domaines pour lesquels Bs n'auraient pas eu
besoin de s'endetter.
Mme Saint-Pierre: Dans la Déclaration des droits de
l'homme, n'est-il pas dit que le droit à l'éducation est une
chose fondamentale? Certes, il n'est pas question de gratuité, mais en
augmentant de 130 % les frais de scolarité à l'université
en deux ans, vous imposez aux 16-25 ans et à ceux qui désirent se
spécialiser un choix qui n'est pas nécessairement le leur. Ils
sont sûrement nombreux ceux qui remettront en cause le choix de leurs
études, le choix de leur carrière. Déjà, le
réseau de l'éducation québécois est
déficient. Trop de programmes d'études dispensés au
collégial et à l'université ne répondent plus aux
besoins des petites et moyennes entreprises. Cela diminue déjà
les chances pour l'étudiant de se trouver un emploi à la fin de
ses études.
Dans un avenir rapproché, l'État, les entreprises et les
étudiants devront trouver les moyens de travailler ensemble afin que le
Québec puisse relever le défi de l'aventure économique
mondiale. Les entreprises québécoises doivent investir, et nous
insistons sur ce fait, dans les cerveaux étudiants, afin de devenir les
centres nerveux d'une meilleure formation académique. Les
étudiants et l'État seront les premiers gagnants de cette
façon de procéder, puisque le Québec deviendra un peu
plus, sinon très compétitif sur le plan des échanges
économiques mondiaux.
M. DaigneauH: Donc, notre pensée sur la hausse des frais
de scolarité est que l'État, les entreprises et les
étudiants doivent participer pécuniairement, selon les moyens de
payer de chacun, à la formation et à l'amélioration du
réseau universitaire québécois. En ce sens, nous demandons
au gouvernement de revoir de manière objective ses décisions et
recommandations quant à l'accessibilité aux études
supérieures dans le seul et unique but de ne pas hypothéquer
aveuglément et de manière irresponsable l'avenir d'une jeunesse
qui ne demande qu'à contribuer et à participer à la vie
économique active du Québec par son dynamisme.
Nous comprenons que la hausse des frais de scolarité est devenue
nécessaire, mais l'État et les entreprises doivent faire leur
part autant que les étudiants afin de rendre les études
supérieures accessibles et rentables pour l'ensemble de la
communauté québécoise.
Mme Saint-Pierre: Alors, considérant que la hausse des
frais de scolarité de 130 % en deux ans, au niveau universitaire, risque
de nuire à l'accessibilité aux études
supérieures...
M. Côté (Stéphane): Considérant que
l'État doit investir dans la recherche et le développement de son
réseau universitaire...
Mme Saint-Pierre: Considérant les perspectives
économiques plutôt sombres des prochaines années...
M. Côté (Stéphane): Considérant que le
Québec doit se tailler une place dans le domaine du marché
économique mondial...
Mme Saint-Pierre: Considérant que les entreprises sont
celles qui ont le plus à gagner dans un investissement à long
terme dans les universités...
M. Côté (Stéphane): Considérant qu'il
est encore temps pour l'État québécois de créer une
interdépendance État-entreprises-étudiants pour mieux
former la jeunesse au monde du travail...
Mme Saint-Pierre: Considérant la capacité de payer
des entreprises québécoises dans le financement des
universités et considérant le devoir de l'État d'investir
dans sa jeunesse...
M. Côté (Stéphane): Nous proposons que le
gouvernement du Québec reconsidère sa position d'augmenter les
frais de scolarité de 130 % en deux ans. Nous proposons que
l'État et les entreprises collaborent ensemble dans le but de
créer des programmes axés sur la formation fondamentale
indispensable aux divers besoins en main-d'oeuvre des petites et moyennes
entreprises... Finalement, nous proposons que les étudiants participent
à la hausse des frais de scolarité dans un pourcentage non
nuisible à l'accessibilité pour eux aux études
supérieures. À ces conditions, l'AGEECLL est en faveur de la
hausse des frais de scolarité.
M. Daigneault: En terminant, nous voulons mentionner à
cette commission parlementaire et surtout au ministre de l'Enseignement
supérieur et de la Science, en l'occurrence M. Claude Ryan, notre bonne
volonté et nos efforts pour contribuer à l'accessibilité
de l'éducation au Québec et à l'amélioration du
régime de l'aide financière aux étudiants. Nous
espérons que nos recommandations, nos suggestions et nos questions
relativement à l'avenir de la génération étudiante
présente et future du Québec trouveront une oreille
attentive.
Nous souhaitons également que le ministre de l'Éducation
prenne en considération que la hausse des frais de scolarité
prévue est exhaustive et risque de mettre en péril l'accès
à l'université à de nombreux étudiants et que sa
répartition en quatre ans serait moins difficile à assumer pour
l'ensemble des étudiants du Québec. Nous pouvons, en tant
qu'étudiants, mieux comprendre les besoins de cette masse sociale bien
au-delà de la paperasserie administrative du gouvernement qui,
semble-t-il, est détaché, sans môme en prendre conscience,
des réalités so-
ciales. En vous remerciant pour votre attention, nous-mêmes,
représentants de l'AGEECLL inc.
La Présidente (Mme Hovington): Merci de votre
présentation. Alors, M. le ministre, vous avez la parole.
M. Ryan: Oui, Mme la Présidente. Si j'étais un
journaliste chargé de suivre !as travaux de la commission parlementaire
autour du projet de loi 25, je n'éprouverais aucune hésitation
à écrire que le mémoire dont on vient de nous communiquer
la teneur est l'un des plus étoffés, des plus sérieux qui
ont été soumis à l'attention de la commission depuis le
début. Je voudrais vous en remercier très cordialement et surtout
vous exprimer mon appréciation pour le sens des responsabilités
dont votre mémoire témoigne du début à la fin.
À la fin, vous émettez des réserves importantes au
sujet du taux arrêté par le gouvernement pour la hausse des frais
de scolarité. Je reconnais parfaitement votre droit à la
légitime dissidence sur un point comme celui-ci, mais vous l'exprimez
d'une manière tellement digne et responsable que je ne puis faire mieux
que de vous adresser tout de suite une question à ce sujet-là.
Même si, comme je l'ai dit hier, la décision est
arrêtée - elle a été prise au mois de
décembre par le gouvernement et s'appliquera à partir du mois de
septembre - j'aimerais quand même que vous me disiez... Vous trouvez que
la hausse est forte. Vous auriez aimé qu'elle soit dosée
autrement. Est-ce que vous pourriez nous indiquer quelle aurait
été pour vous une hausse raisonnable à un double point de
vue, du point de vue des besoins de notre système d'enseignement qui a
besoin de ces revenus additionnels et, deuxièmement, du point de vue de
la possibilité de payer de l'étudiant?
Mme Saint-Pierre: Premièrement, ce que l'on déplore
un petit peu dans votre décision de hausser les frais de
scolarité de 130 % en deux ans, c'est que la masse étudiante n'a
pas été consultée comme telle. Nous, dans le fond, ce que
l'on propose dans notre mémoire, ce que l'on voudrait que ça
devienne, finalement, c'est une collaboration étudiant-entreprise
État, selon la capacité de payer de chacun. De 130 % en deux ans,
on l'a dit, ça peut monter jusqu'à 1280 $ d'ici à 1992.
C'est sûr que les étudiants travaillent un petit peu plus pendant
les périodes d'été, les revenus sont un petit peu plus
élevés, beaucoup d'étudiants travaillent à temps
partiel, mais peut-être que si la hausse avait été de 80 %
à 100 % en deux ou trois ans, ça aurait donné une chance
aux étudiants d'essayer de trouver des moyens de financement pour les
universités. Ça aurait peut-être permis une collaboration
qui aurait pu amener les entreprises à dire: Boni Oui. nous avons un
rôle social à jouer. Nous sommes prêts à investir
dans les entreprises et ça se chiffre à tant de millions ou de
milliers de dollars par année.
Alors, c'est ça. C'est qu'on aurait aimé être
consultés en tant qu'étudiants. Je pense qu'on en a, des
idées, pour l'avenir, je pense que ça aurait pu être
intéressant que le gouvernement...
M. Ryan: En tout cas...
Mme Saint-Pierre: ...nous pose des questions.
M. Ryan: ...si j'en juge d'après la teneur de votre
mémoire, nous aurons intérêt à vous consulter de
nouveau, à l'avenir.
Mme Saint-Pierre: On est toujours disponibles.
M. Ryan: Je le dis en toute simplicité. J'ai
remarqué que votre mémoire est divisé en deux parties.
Vous avez des remarques ponctuelles, dans la première partie, qui
traitent directement des énoncés formulés dans le document
publié par le gouvernement en avril dernier. Mon collègue, le
député de Vimont, vous adressera quelques questions à ce
sujet, tantôt.
Je voudrais commenter brièvement, peut-être, la
deuxième partie de votre mémoire où vous formulez des
propositions inédites par rapport au contenu de l'énoncé
d'orientation et du projet de loi. Vous demandez, tout d'abord, qu'on envisage
des mesures spéciales pour favoriser les étudiants en
région éloignée. Vous demandez, entre autres, qu'on
envisage la possibilité d'une remise de dette pour l'étudiant qui
s'engage à rester dans sa région pendant une certaine
période. L'Université du Québec à Rimouski a
déjà présenté des Idées semblables à
la commission Nous avons dit que nous étions pour les examiner
attentivement. Alors, je vais vous dire la même chose ce matin.
Ce n'est pas facile, nous le faisons pour les médecins. Aux
médecins que nous voulons envoyer en région nous donnons une
prime, je pense, de 20 %. Alors, il y a quelque chose à regarder de ce
côté-ci. J'ai parié tantôt au directeur de l'aide
financière aux étudiants qui nous accompagne à cette
commission. Il dit qu'on va essayer de regarder ça de plus près.
Je n'ai pas d'autres commentaires à vous dire. Ce n'est pas facile
à contrôler, c'est l'établissement d'un mécanisme de
contrôle qu'il faut trouver. Parce que, si on veut que la mesure soit
efficace, il faut qu'on puisse l'assortir des vérifications
nécessaires. En tout cas, cela étant dit, je pense que c'est
intéressant.
Vous pariez de la prime de 400 $. Peut-être que vous pourriez nous
expliquer un petit peu ce que vous envisagez là-dessus. Vous voulez
qu'on supprime la prime actuelle et qu'on la réserve pour
l'étudiant qui va dans le collège de sa région, à
moins qu'il ne doive s'éloigner parce
qu'H y aurait un programme qui ne serait pas disponible chez lui?
Mme Saint-Pierre: Oui, justement. C'est que, selon vos
statistiques, cette prime représente environ 3 000 000 $ qui sont
versés sous forme de bourses et 500 000 $ qui sont versés sous
forme de prêts. C'est que bien souvent, justement, toujours dans le souci
de garder les étudiants un peu dans leur région, ce que nous, on
ne trouvait pas normal, un petit peu, c'est que les étudiants qui
venaient du Saguenay-Lac-Saint-Jean puissent venir, comme ça,
étudier à Lévis-Lauzon, etc., que ce soient des gens de
Rimouski qui puissent venir étudier ici. Nous, ce qu'on veut tout
simplement, c'est que les étudiants s'éloignent de leur
région seulement si le programme n'est pas dispensé dans la
maison d'enseignement la plus proche, pour dire que c'est important que les
étudiants restent dans leur région.
M. Ryan: Très bien. Je continue brièvement. Vous
demandez que le niveau des dépenses admissibles soit ajusté en
tenant compte de l'évolution du coût de la vie. Vous demandez,
à un moment donné, qu'on ajoute 6 % annuellement. Est-ce que
ça serait en plus de l'indexation, ça, 6 %, ou bien si c'est
votre évaluation de l'indexation? (10 h 45)
Mme Saint-Pierre: Bon. Lorsqu'on regarde les dépenses
admises, de 139,45 $, si on compare au salaire minimum qui est de 5 $ l'heure,
ça fait 3,82 $ l'heure et, 6 %, c'est quand même un mimimum; je
pense que ça représente environ 6 $ ou 7 $ de plus par semaine.
Ce serait important, je crois, quand on pense à différentes
clientèles, entre autres, les familles monoparentales qui ont le
même montant de dépenses admises que l'étudiant qui est
indépendant auprès du régime des prêts et bourses.
Alors, 6 %, ça représente environ 6 $ ou 7 $, et qu'il soit
indexé chaque année, selon le coût de la vie; si le
coût de la vie est à 5 %, qu'il soit indexé de 5 %.
M. Ryan: Très bien.
Mme Saint-Pierre: C'est une mesure qui représente environ,
d'après nos légers calculs, 18 000 000 $, approximativement.
M. Ryan: Très bien. Si on mettait le 6 % brut, c'est 22
000 000 $, d'après nos calculs à nous autres. Ça ne veut
pas dire qu'entre 22 000 000 $ et zéro il n'y a pas de l'espace à
explorer, parce que l'idée en soi est très défendable et
on va l'étudier.
Vous demandez que des études soient fartes sur les coûts
comparés, suivant qu'on étudie dans une région ou dans une
autre. Ça, il y a déjà des études qui se font
continuellement à ce sujet par l'Office de planification et de
développement du Québec. Quand on arrive à
considérer la possibilité de régionaliser les prestations,
c'est très difficile. Jusqu'à maintenant, le gouvernement n'est
pas entré dans cette voie-là, on l'a discutée à
plusieurs reprises, à propos du salaire minimum, à propos de
l'allocation de logement qui est versée aux assistés sociaux,
à propos des allocations sociales également. Il y a des obstacles
qui sont insurmontables jusqu'à ce jour. Parce que les formules de
remplacement sont toutes assorties d'imperfections. Je vous assure qu'on porte
une grande attention aux différences qui peuvent exister dans le niveau
de développement économico social d'une région à
l'autre, mais quand arrive le moment de traduire les constatations que nous
faisons dans les politiques de redistribution du revenu, c'est
extrêmement difficile. On n'a pas trouvé de solution encore.
J'enregistre ici et je ne peux pas vous laisser entrevoir des choses à
court terme parce que c'est très difficile.
Je termine. Un autre point: vous demandez qu'on fasse des études
sur les coûts réels des programmes. Ça, déjà,
des travaux sont commencés avec... On a un comité des
personnes-ressources qui travaille en collaboration avec la Direction de l'aide
financière aux étudiants. Je vous assure qu'on va pousser sur ces
travaux-là, vous soulevez un point qui est très pertinent.
Je termine là-dessus, Mme la Présidente, parce que je
voudrais donner à mon collègue de Vimont l'occasion de s'exprimer
aussi. J'ajouterai peut-être un point, c'est que j'ai eu vent qu'avant de
vous engager dans toutes ces choses-la vous avez pris soin de vous renseigner
aux sources compétentes. Vous avez pris soin, dès l'année
dernière, d'aller chercher des renseignements avant de partir en
campagne. Je pense que ça vous a permis d'acquérir une masse
d'information et une compréhension du régime qui vous donne une
bonne distance par rapport au gouvernement, distance critique nécessaire
et très appréciée, en même temps qui nous invite
à prendre au sérieux vos représentations. Alors, je vous
remercie.
La Présidente (Mme Hovington): M. le député
de Vimont.
M. Fradet: Merci, Mme la Présidente. Je tiens aussi
à vous féliciter pour la qualité de votre mémoire.
Je pense qu'il y a plusieurs recommandations dans votre mémoire dont il
va falloir tenir compte dans le régime d'aide financière.
M. Ryan a parié de votre première recommandation. Je
pense, moi aussi, que c'est une recommandation qui est louable. On la vit
déjà dans le système de la santé. J'aurais juste
une question à ce sujet-là. Dans le système de la
santé, nous, on a fait ça, je pense, parce qu'il y avait une
pénurie de main-d'oeuvre en région. Je voudrais juste vous
demander: Est-ce que vous
savez si, présentement, il y a des pénuries de
main-d'oeuvre dans certains domaines, avec lesquels on pourrait travailler pour
ce régime là, ou s'il y a une pénurie d'emplois et que les
jeunes n'auraient pas plus d'emplois s'ils demeuraient en région?
Mme Saint-Pierre: Ce n'est pas facile de répondre à
ça. Moi, de la façon que je le conçois, c'est qu'il y a
des CLSC un peu partout, ça peut être des écoles, ça
peut être des médecins, ça peut être des
professionnels; par contre, ça peut être de la main-d'oeuvre
spécialisée également. Quand on pense à des villes
comme La Tuque, quand on pense à des villes comme Schefferville, il ne
faut quasiment plus en parler, mais il y a quand même... Que ce soit
Gaspé.. On voit souvent des annonces: Demande de personnel, des
infirmières. Beaucoup de personnes n'osent pas s'en aller en
région, justement, parce que c'est trop loin, c'est loin de tout, c'est
loin de la famille, etc. Peut-être qu'avec un programme comme
celui-là, ça favoriserait l'implantation de certaines personnes
dans les régions et recommencer un niveau économique.
M. Fradet: Je ne nie pas ça du tout, ce que je voulais
juste savoir, c'est si vraiment il y avait... C'est parce que cette
mesure-là, c'était pour vraiment combler le manque de
main-d'oeuvre en région, et puis s'il n'y a pas vrai ment... Je ne sais
pas, je ne suis pas en région mais, s'il n'y a pas vraiment un manque de
main-d'oeuvre, on aurait une mesure qui inciterait les jeunes à demeurer
chez eux, mais il n'y aurait pas d'emploi à remplir. C'était
juste ça, le but de ma question.
Ensuite, vous avez une autre recommandation, vous parlez des côuts
réels. Je pense que c'est la deuxième fois que j'entends
ça. Le collège de Drummondville, hier, je crois, le cégep
de Drummondville nous a présenté un mémoire, nous a
parlé de ça aussi. Je pense qu'il arrive qu'il y ait des
différences de coûts, mais il y a une chose que je peux vous dire
là-dessus, c'est que ce dont le ministère tient compte dans ses
démarches, dans ses demandes d'aide financière, c'est ce que
l'institution scolaire lui fournit comme coût réel. Je pense que,
oui, il y a peut-être des problèmes, là; on parlait
d'exemples avec la photographie, puis ces choses-là Je pense qu'il va
falloir regarder ça attentivement. Il y en avait une autre où je
voulais...
Vous parlez de la contribution parentale, à votre recommandation
8: "...la contribution parentale sans nuire à l'unité familiale
et surtout de connaître les moyens réels de payer des parents." Je
pense que, dans la réforme qu'on fait présentement, on va tenir
compte de ça. Il faut dire tout de suite en partant qu'une contribution
parentale, ça peut être de deux sortes: on a une contribution
monétaire, puis on a une contribution, soit le loyer ou la nourriture.
Je pense que ce que vous voulez dire dans ça, c'est la contribution
monétaire. Oui, on en a tenu compte, je pense qu'on a diminué la
contribution monétaire des parents ou on va diminuer la contribution
monétaire des parents II y a eu aussi plusieurs propositions, dans
d'autres mémoires qui nous ont été
présentés, comme: envoyer une lettre aux parents pour leur
mentionner le montant qui a été retenu, la contribution qu'ils
doivent verser à leurs enfants, qui a été retenue dans le
calcul de l'aide financière; je pense que ça, c'est une autre
mesure qui est très importante. Sur ce, je pense que vous avez des
éléments qui sont très louables et sur lesquels on va se
pencher pour la réforme, et puis on va regarder ça ensemble.
Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. M. le député
d'Abitibi-Ouest, vous avez la parole.
M. Gendron: Alors, bonjour, les jeunes du cégep de
Lévis-Lauzon. Je veux vous féliciter, vous aussi, d'avoir pris
cette initiative. Je pense que c'est toujours rafraîchissant et
intéressant de voir des jeunes qui s'intéressent à des
questions d'avenir, questions fondamentales pour une société,
comme les questions éducatives. C'est toujours un peu également
votre responsabilité de ne pas rater le moment où on peut avoir
l'occasion de vous entendre, d'entendre vos réflexions et de voir
là qu'il s'agit, pour vous, d'un sujet d'intérêt important,
puisque c'est un peu votre avenir qu'on discute, et un peu pas mal votre
avenir. Donc, votre mémoire, je pense qu'il est bien fait, il tient
compte à peu près de la plupart des revendications qui ont
été faites par d'autres. C'est sûr qu'à partir du
moment où vous indiquez que la plupart des étudiants
d'aujourd'hui ne sont plus les illuminés d'autrefois, ça ne nous
fait pas bien bien une belle jambe, pour employer une expression à la
mode, admettons que ça ne nous fait pas une belle jambe, mais ce n'est
pas grave, on dit: Ça doit être l'autre génération,
la génération du ministre de l'Éducation et non pas la
mienne. Donc, je ne vous en sais pas gré, je ne vous en fais pas
gré, je suis de bien bonne humeur, et on passe outre à
ça.
Si on avait à évaluer les principaux
éléments de votre mémoire, en gros, il y a trois
propositions là-dedans, trois sections majeures. Une première,
c'est l'analyse des propositions que vous considérez comme
inadéquates et injustes par rapport au régime d'aide comme tel Je
pense que vous avez raison de revenir et d'indiquer: Écoutez, on ne peut
pas véritablement parler d'un véritable régime d'aide
financière aux étudiants s'il n'y a pas plus d'adaptation
à la réalité quatre vingt-dix. J'ai l'impression qu'il
faudrait prendre au moins jusqu'en juin pour rappeler ça au ministre,
pour avoir un peu la conviction que ça peut l'atteindre. Comme on ne
finit que la semaine prochaine, malheureusement,
on va être obligés de dire que ça n'a pas l'air
à l'atteindre, d'aucune façon. Toutes les remarques par rapport
à la pertinence quatre-vingt-dix, concernant l'autonomie, concernant la
contribution parentale, concernant le niveau des dépenses admises pour
le calcul du prêt ou de la bourse, concernant le comité d'appel,
l'incongruité de ne pas considérer que c'est urgent de donner
également aux temps partiel un régime de prêts et bourses,
ça a toujours été balayé du revers de la main par
le ministre, jusqu'à date. Mais quand vous touchez ces
questions-là, même s'il vous dit que vous avez un excellent
mémoire, j'ai hâte de voir comment il va en tenir compte dans le
concret. Là, on pourra s'en reparler. Mol, je suis inquiet et j'ai la
même inquiétude que vous.
Pour ce qui est de tout le volet sur l'an 2000, je pense qu'encore
là, ce que votre mémoire illustre, sans les prendre une par une,
c'est que le ministre de l'Éducation, d'après vous, aurait une
vision vers l'avenir, mais qui vous inquiète drôlement parce
qu'elle ne tient pas compte de certaines réalités des
années deux mille, où un certain effritement des régions
du Québec... Je ne sais pas à quelle page au juste, mais ce n'est
pas important. À un moment donné, vous mentionnez:
écoutez, il y a des régions qui sont en
dépérissement et vous citez la Côte-Nord. Vous n'avez pas
tort, sauf que pour être au parfum - c'est une expression - pour
être bien informé, il faudrait dire toutes les régions,
parce que, sincèrement, au-delà des banlieusards autour de la
grande région de Montréal, toutes les régions du
Québec sont malheureusement en décroissance. Il s'agit juste de
lire le document des affaires sociales "Deux Québec dans un".
Je vois ma collègue de Lévis, elle a raison, parce que je
la considère aussi comme étant dans la grande région
métropolitaine de Québec où c'est sûr qu'il y a eu
un développement accéléré sur la rive sud. Prenez
les premiers kilomètres le long du fleuve, mais ne dépassez pas
trop les quinze ou vingt premiers kilomètres en bordure du fleuve. Quand
vous rentrez à l'intérieur des terres, dans la région de
la Beauce ou un peu plus avant près de la frontière du Vermont,
des États-Unis, c'est le même problème que dans
l'Outaouais, qu'en Abitibi, qu'au Saguenay-Lac-Saint-Jean, c'est le même
problème dans toutes les réglons: il y a un
dépérissement grave des régions du Québec par
l'absence de politiques, l'absence de soutien et le modèle de
développement économique de ce gouvernement-là; il y a un
modèle du laisser-faire. On regarde passer les trains, puis ils ne
passent plus. Ça fait qu'il y a un problème. Quand tu es en
période de conjoncture favorable, ce n'est pas si mal d'avoir une
attitude de passéiste, d'attentiste, de laisser-faire comme ça,
mais quand l'économie chute du nez comme c'est le cas, eh bien, on le
paie cher dans les régions du Québec et c'est ce qui est en train
d'arriver. Ce n'est pas moi qui ai inventé un taux de chômage de
22 % au Saguenay-Lac-
Saint-Jean. En Abitibi, on a vécu 6 %, 7 % dans la période
de croissance forte avec les accréditives dans le domaine minier.
Êtes-voua ail courant qu'on est remontés à 20 %, ça
n'a pas été long. La Gaspésie, j'aimerais ça en
parler, mais on est mieux de ne pas en parler. C'est autour de 40 %, si les
chiffres sont exacts.
Alors, si ça, c'est une croissance des régions du
Québec, il y a un problème d'analyse et de lecture. Mais sur
l'analyse il ne faut pas se surprendre. J'entendais le ministre tantôt -
je n'en reviens pas - et il faisait des signes du bonnet en disant: Ouais,
très bon mémoire, parce qu'il va dans le sens de ce qu'il
revendique. Quand vous indiquez que votre accord est conditionnel à deux
autres alternatives et que vous savez très bien que les deux autres
alternatives n'y sont pas, à savoir une participation accrue de
l'État et une participation des entreprises, je ne peux pas dire que
vous venez nous dire en commission que vous êtes d'accord avec le
dégel. Ce n'est pas ça que je dis. Je dis que vous avez
été responsables, en disant: On est prêts à faire un
effort et à regarder ça, mais pas à se clencher tout
seuls. On n'accepte pas qu'on soit les seuls à porter une hausse qui ne
réglera absolument rien au sous-financement des universités. Le
ministre, ce n'est pas ça qu'il a lu, puis je vous remets
allègrement en disant: Écoutez, voilà des jeunes
responsables. Ils nous disent: Nous autres, on est d'accord.
Les deux conditions, il les a oubliées, puis ne vous cassez pas
la tête, il nous l'a dit, parce que vous venez aujourd'hui, vous allez
passer une heure ici, mais moi, ça fait un petit, bout de temps qu'on a
commencé, ça fait une couple de semaines qu'on travaille
là-dessus et on va finir la semaine prochaine et le discours aura
été constamment le même. Il n'y a pas d'autre solution, pas
question pour les entreprises, elles sont assez taxées. L'État ne
peut pas en mettre plus. On n'a pas l'argent requis, puis on est en crise, puis
il y a les routes, la santé, puis on fait tout un brasse-camarades de
l'histoire, puis on dit: On ne peut pas aller plus loin. C'est ça qui a
été dit par le ministre de l'Éducation.
Donc, ne pensez pas que les deux volets de votre recommandation
où c'était très clair: un, deux, trois et vous finissez
à la fin avec "à ces conditions", "à ces conditions"...
Tout ce que vous voulez, c'est en faveur de la hausse des frais de
scolarité, mais les deux autres points sont aux calendes grecques, en ce
qui concerne le ministre. (11 heures)
J'ai trois questions. La première... J'aimerais ça que
vous reveniez un peu à la page 29. Moi, je vous dis, quand j'ai lu
ça, que j'ai filé mal, pour ne pas employer une autre expression.
Vous dites: "Ce dernier volet de notre mémoire est un hymne à la
reconnaissance du statut étudiant." Moi, j'ai vu plus là un cri
d'alarme, un cri d'inquiétude parce que vous dites: "Depuis
quelques années, on assiste, impuissants, à une
détérioration globale, du système de l'éducation...
" Vous ajoutez: "Nous sommes en droit, en tant que futurs travailleurs et
administrateurs, do considérer l'avenir avec sceptiscisme. " Là,
j'ai de la misère: "Nous sommes en droit de considérer l'avenir
avec scepticisme. " Et ça finit par des frissons. Vous dites: "Nous
pouvons nous questionner sincèrement sur les intentions des
administrateurs gouvernementaux avec quelques frissons. " Moi, je partage
ça, sauf que j'ai de la misère à voir là l'hymne
à la reconnaissance que ça va bien, qu'il n'y a pas de
problème. Je trouve que c'est une description, quand même, qui est
inquiétante comme perspective future et, si c'était là
votre analyse, j'aimerais que vous la détailliez davantage. Quels sont
les éléments que vous évaluez et que vous mettez en
analyse pour conclure à une détérioration globale du
système d'éducation?
Mme Saint-Pierre: Bien, de un, c'est surtout, comme je le
mentionnais tout à l'heure, quand on regarde qu'il y a beaucoup de
programmes qui sont dispensés au collégial ou à
l'université, ou, des stages en milieu de travail. Quand
l'étudiant vient pour s'en aller sur le marché du travail, bien
souvent, l'employeur va lui demander: As-tu de l'expérience dans ton
domaine? Ou encore il n'est pas formé comme tel par l'école pour
faire face à un tel type de travail. Vous savez, d'après moi, ce
qu'on enseigne dans les écoles, ce n'est pas mauvais, mais c'est surtout
très global et le système d'éducation, dans ce
sens-là, je veux dire... Qu'on regarde dans les universités
où les bibliothèques sont remplies, bien souvent, de volumes en
anglais ou même les bibliothèques au niveau collégial
où il y a un volume pour 40 étudiants dans la réserve.
Ça, ce n'est qu'un exemple qui démontre qu'il manque quelque
chose dans les écoles pour former adéquatement une
clientèle qui. elle, ne demande qu'à être formée
comme du monde, d'être formée en fonction du marché du
travail, tout simplement.
M. Gendron: Donc, rapidement, c'est un questionnement sur la
dégradation des outils de support, c'est bien ça...
Mme Saint-Pierre: Entre autres.
M. Gendron:... des instruments pédagogiques et,
également, un jugement sur la pertinence de certains programmes. Est-ce
ça?
Mme Saint-Pierre: Oui, oui, en gros.
M. Gendron: Deuxième question. Est-ce que vous avez
évalué... D'après vous, le sous-financement du
réseau universitaire, même si vous êtes au collégial,
iI est de quel ordre?
Mme Saint-Pierre: 160 000 000 $ environ.
M. Gendron: êtes-vous au courant du montant que va
rapporter la hausse du dégel des frais de scolarité, combien
ça va donner dans le sous-financement des universités?
Mme Saint-Pierre: 80 000 000 $ environ.
M. Gendron: Alors, tout de suite, il faut réduire de
moitié: c'est 40 000 000 $. Ce n'est pas grave, mais c'est juste pour
vous dire que c'est la moitié pour la première année, bien
sûr. À ce moment-là, puisque vous-mêmes
l'évaluez correctement à 160 000 000 $, sachant qu'il n'y aura
que 40 000 000 $ par l'apport du dégel des frais de scolarité,
est-ce que vous croyez que c'est une goutte importante, que c'est un montant
significatif qui permettra de corriger les lacunes que vous déploriez
tantôt au niveau des outils de support et des instruments
pédagogiques plus adéquats pour donner une meilleure
formation?
M. Côté (Stéphane): Oui, pour l'instant,
ça ressemble plus peut-être à un coup d'épée
dans l'eau, si on est seuls à pousser, comme on dit. On est prêts
à tirer la charette, mais il faudrait peut-être tirer à
trois: soit le gouvernement, les entreprises, les étudiants. Pour
l'instant, on fournit 7 % et on va passer à 15 % avec la hausse des
frais de scolarité. Il en manque encore. Il y a un gros fossé
à combler. Je sais que c'est difficile de parler des entreprises
à M. Ryan, de les taxer, mais, quand même, il faudrait
peut-être finir par y penser un jour. C'est pour ça qu'on dit que
ça va fournir 40 000 000 $ la première année. Ça ne
sera même pas pour améliorer les techniques, les outils de support
pédagogiques, qu'on appelle, ça va être juste pour financer
le déficit, tout simplement. Donc, l'apport est inutile pour
l'instant.
M. Gendron: Ma collègue, députée de
Lévis, voulait poser une question. Alors, je lui laisserais le temps
pour notre période. Merci.
La Présidente
(Mme Hovington): Vous avez la parole,
Mme la députée.
Mme Carrier-Perreault: Merci, Mme la Présidente Je suis la
députée des Chutes-de-la-Chaudière.
La Présidente (Mme Hovington): C'est M. Garon encore, M.
le député d'Abitibi-Ouest.
Mme Carrier-Perreault: Mais il reste que c'est la rive sud.
M. Gendron: Vous avez tout à fait raison, Mme
Carrier-Perreault, Chutes-de la Chaudière.
La Présidente (Mme Hovington): C'est le nouveau
comté des Chutes-de-la-Chaudière.
Mme Carrier-Perreault: Et voilà. De toute façon,
ça fait partie de la rive sud. Ça me fait plaisir de saluer les
gens de chez nous. Oisons que c'est vrai que c'est un excellent mémoire;
je reprends les propos de M. le ministre. Mais je pense qu'on ne pouvait pas
s'attendre à autre chose des jeunes de la rive sud.
Moi, il y a une chose qui m'a beaucoup intéressée dans le
mémoire en question, c'est votre préoccupation régionale.
On sait que chez les gens qui ont à s'éloigner de leur
région pour aller étudier, par exemple, surtout les jeunes qui
quittent la région pour aller étudier à
l'extérieur, rares sont ceux qui reviennent chez eux. Dans certains
domaines, c'est dramatique. On voit au niveau des affaires sociales par rapport
aux médecins que, même avec les incitatifs qui ont
été mis, les primes d'éloignement, si on veut... Je pense
que c'est une excellente idée d'en ajouter un peu parce qu'on voit qu'il
y a des pénuries, il y a des manques encore dans plusieurs coins.
J'aurais une question, par ailleurs, sur la page 20 du mémoire.
Quand vous partez d'abolir la prime d'éloignement de 400 $ aux
étudiants qui choisissent un programme d'études non
dispensé dans les collèges ou l'université la plus proche,
j'aimerais savoir si vous avez une idée du nombre, par exemple. Quel est
le pourcentage d'étudiants qui s'en vont étudier à
l'extérieur de leur milieu quand le programme est dispensé chez
eux? Avez-vous une idée à peu près? Est-ce que c'est
important?
Mme Saint-Pierre: Aucune idée. Ce que je pourrais
répondre à ça, c'est qu'il y en a environ 2000 à
3000 - un instant que je vérifie - qui bénéficient, par le
biais de l'aide financière, de cette prime de 400 $. Sûrement que
le nombre est plus élevé, sauf qu'il faut tenir compte aussi que
beaucoup n'ont pas besoin de l'aide financière. Mais je vais vous
répondre dans quelques instants. Alors, c'est 1211 cas très
exactement.
Mme Carrier-Perreault: Qui ont bénéficié des
400 $ de prime d'éloignement.
Mme Saint-Pierre: Oui.
Mme Carrier-Perreault: D'accord. Peut-être qu'au
ministère on connaît ces chiffres-là, à savoir
lesquels sont à l'extérieur parce que le programme ne se donne
pas chez eux ou, en tout cas, quelles sont les raisons profondes qui font que
les jeunes préfèrent s'éloigner et s'en aller dans
d'autres milieux pour étudier. Vous n'avez pas d'étude
là-dessus non plus?
Mme Saint-Pierre: Non.
Mme Carrier-Perreault: Ça n'existe pas, j'imagine.
Mme Saint-Pierre: Je ne sais pas.
M. Côté (Stéphane): C'est sûr que le
déclin des régions éloignées n'incite pas à
rester là. On a peur. Les perspectives futures pour l'étudiant
sont très sombres. Alors, ils aiment autant se rapprocher du centre
urbain, je crois.
Mme Carrier-Perreault: D'accord. Merci.
La Présidente (Mme Hovington): Ça va?
Mme la députée de Terrebonne, vous avez une question?
Mme Caron: Merci, Mme la Présidente. Moi aussi, je tiens
à vous féliciter pour la qualité de votre mémoire.
Vous avez vraiment su le présenter dans une approche globale. Je pense
que ça, c'est important. On ne peut couper les faits de l'ensemble de la
réalité québécoise et vous l'avez bien fait.
Vous avez dit tantôt que M. le ministre avait certaines
réticences par rapport à la taxation des entreprises et vous avez
raison, mais je pense que vous apportez un élément
intéressant. Pour les entreprises, participer pour participer, ce n'est
pas intéressant. Mais lorsque vous proposez que l'État et les
entreprises collaborent ensemble dans le but de créer des programmes
axés sur la formation fondamentale et Indispensable aux divers besoins
en main-d'oeuvre des petites et moyennes entreprises, je pense que c'est
vraiment une solution à la taxation parce que, lorsqu'on participe au
programme, lorsqu'on obtient en retour un bienfait de cette taxation-là,
je pense que ça serait peut-être plus acceptable. C'est dans ce
sens-ià que vous le proposez?
M. Côté (Stéphane): Si on regarde le genre,
justement, du système corporatif à Sherbrooke, qui est
très intéressant pour les entreprises où il y a des stages
qui s'effectuent plusieurs fois durant l'année, à ce
moment-là, c'est plus intéressant pour eux autres de payer quand
ils savent que les étudiants seront formés à leur milieu
de travail et pourront entrer en fonction immédiatement.
Mme Caron: Une question que j'ai...
Mme Saint-Pierre: Oui...
Mme Caron: Oui, vous voulez compléter?
Mme Saint-Pierre: Je voulais tout simplement compléter en
mentionnant que c'est déjà ce qui se fait en Allemagne de
l'Ouest. Ça se fait déjà là-bas et le taux de
chômage est de 2 %.
Mme Caron: Parfait. Une petite question
que j'ai posée assez régulièrement; Dans votre
mémoire, quand vous invoquez la notion de conjoint, est-ce que vous
incluez le conjoint de fait?
Mme Saint-Pierre: De fait? Oui.
Mme Caron: Merci. Est-ce qu'il reste un petit peu...
La Présidente (Mme Hovington): Une très courte.
Mme Caron: Une toute petite?
La Présidente (Mme Hovington): Oui.
Mme Caron: J'aimerais que vous élaboriez davantage sur la
contribution parentale, ce que vous souhaitez vraiment à ce
niveau-là.
Mme Saint-Pierre: C'est qu'actuellement beaucoup
d'étudiants... Comme M. le député l'a mentionné
tout à l'heure, c'est de deux ordres. Elle peut être de l'ordre du
logement, de l'ordre de la nourriture ou du vêtement. Ça, c'est
une forme de contribution des parents. L'autre forme, elle est
monétaire. Bien souvent, il y a des étudiants qui n'ont pas
nécessairement droit à l'aide financière parce que les
parents devraient fournir x montant, 4500 $, 5000 $, 3000 $ et, bon, on envoie
des lettres pour informer les parents du montant de leur contribution. C'est
bien, sauf que beaucoup de parents ne donnent pas d'argent à leurs
enfants. Les étudiants se débrouillent par eux-mêmes,
travaillent à temps partiel.
Tout ce qu'on veut, finalement, s'il pouvait y avoir un moyen, soit sous
forme d'impôt, etc., c'est que le montant de la contribution des parents
soit directement versé à l'étudiant, bien entendu, pour ne
pas que ça fasse de conflits familiaux. Il y a beaucoup
d'étudiants, déjà, qui commencent à penser
sérieusement à se rendre en cour contre leurs parents pour qu'ils
leur donnent la contribution qui est calculée selon la formule de
demande d'aide. Ce n'est pas tellement logique d'en arriver jusque-là.
Il me semble qu'il pourrait y avoir un moyen puis ça, je pense que c'est
au gouvernement de le faire, d'étudier la possibilité que la
contribution parentale soit versée directement à
l'étudiant, sans créer de conflits.
Mme Caron: Merci.
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup. En
conclusion, M. le député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Merci beaucoup. Rapidement, je vous demande tout
simplement d'être vigilants dans le suivi de vos recommandations. Je suis
pas mal convaincu qu'à la lecture du résultat net, suite à
l'adoption du projet de loi concernant l'aide financière, vous allez
peut-être avaler différemment les propos élogieux que le
ministre faisait de votre mémoire et peut-être dire à la
fin, qu'il y a un problème d'adéquation entre le degré de
suivi qu'il aura pris en compte de vos recommandations dans le résultat
final et la présentation d'aujourd'hui, qui était très
sympathique, très correcte, bien orientée. Je vous remercie
beaucoup, vous aviez un bon mémoire.
La Présidente (Mme Hovington): M. le ministre.
M. Ryan: Juste en terminant, là, je voudrais rappeler
quelques données pour que ça fasse partie de l'échange que
nous avons eu. A propos de la hausse des droits de scolarité, pourquoi
la hausse? Parce qu'un ajustement était devenu, de toute
évidence, indispensable. Le coût moyen d'un étudiant
inscrit à l'université est de 8900 $ par année. La
contribution moyenne qu'on exige de lui, actuellement, est de 540 $, ce qui est
trois fois moins élevé que dans les autres provinces du Canada, y
compris dans des provinces plus pauvres que le Québec, comme le
Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse et Terre-Neuve. Je pense que,
chaque fois qu'un citoyen entend ces explications, le taux de
compréhension de la mesure gouvernementale augmente. On constate une
évolution considérable de l'état de l'opinion
là-dessus depuis un mois. Les gens sont capables de comprendre ce
langage-là très bien.
Deuxièmement, j'entends l'Opposition qui répète
sans cesse, à la manière d'un gramophone, sans réflexion
et sans études, surtout sans preuves, que le gouvernement a
laissé pourrir le problème du financement des universités.
Nous reconnaissions, sur la base des données de 1986-1987, un
écart de 162 000 000 $ avec l'Ontario. Là, nous avons
injecté, depuis ce temps, 55 000 000 $ dans la base de financement des
universités, récurrents. La contribution additionnelle requise
des étudiants, sur deux ans, va rapporter 82 000 000 $ de plus.
Ça va être 82 000 000 $ par année, à compter de la
deuxième année. Si je compte bien, 55 000 000 $ plus 82 000 000
$, ça fait 137 000 000 $. Il reste une marge, mais l'écart, on
l'a rétréci considérablement. Puis, de laisser entendre
qu'on n'a rien fart, puis qu'on n'arrange rien... Voyons donc! Je pense qu'il
faut, à un moment donné, se mettre les pieds à terre puis
vérifier ce qu'on dit, puis, le dire avec des preuves à
l'appui.
Nous avons fait des progrès et j'ajoute que le ministre des
Finances, dans son dernier discours sur le budget, a dit: Nous reconnaissons
qu'il va rester encore un écart à combler et le gouvernement est
prêt à le faire dès que ses ressources le lui permettront.
Alors, voilà la position du gouvernement sur cette question. Ça
ne change pas le respect que j'ai pour la posi-
tion que vous avez énoncée parce que vous l'avez
énoncée avec tellement de sens des responsabilités que je
ne puis que vous réitérer ma vive appréciation pour votre
présence parmi nous, ce matin.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. Mme Saint-Pierre, M.
Daigneault, M. Côté, au nom des membres de cette commission, il me
reste à vous féliciter du bon travail effectué dans votre
mémoire et à vous dire merci pour votre présentation.
Des voix: Merci.
La Présidente (Mme Hovington): Au revoir. J'inviterais
l'Association générale des étudiants et étudiantes
du cégep de Tracy à bien vouloir prendre place. Nous suspendons
pour une minute, le temps de vous laisser vous organiser.
(Suspension de la séance à 11 h 15)
(Reprise à 11 h 17)
La Présidente (Mme Hovington): S'il vous plaît, je
demanderais aux membres de la commission de bien vouloir reprendre leur place.
S'il vous plaît, la commission de l'éducation doit reprendre ses
travaux.
Alors, la commission de l'éducation reprend donc ses travaux avec
l'Association générale des étudiants et étudiantes
du cégep de Tracy. Si vous voulez bien vous présenter. Il y a M.
Snyder et M. Valois, je crois?
Association générale des
étudiants et étudiantes du collège de Sorel-Tracy
Une voix: Oui.
La Présidente (Mme Hovington): Lequel est lequel?
M. Snyder (Marc): Je suis Marc Snyder.
M. Valois (Jonathan): Nous nous présentons. Je suis
Jonathan Valois, président de l'Association générale des
étudiants et étudiantes du collège de Sorel-Tracy.
La Présidente (Mme Hovington): C'est donc vous, M. Valois,
qui allez présenter le mémoire?
M. Valois: Non, c'est M. Snyder, par contre.
La Présidente (Mme Hovington): C'est M. Snyder? Alors,
vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire aux membres de
la commission. Allez-y.
M. Valois: Merci. Ces audiences publiques sur le projet de loi
25... Il faut que j'attende la lumière rouge...
La Présidente (Mme Hovington): Ça va, il va vous
l'ouvrir.
M. Valois: Oui?
La Présidente (Mme Hovington): Oui, oui.
M. Valois: Ces audiences publiques sur le projet de loi 25 nous
donnent la chance de nous exprimer et nous l'apprécions. Le
mémoire que nous présentons comporte des petites lacunes, nous le
reconnaissons. Nous en sommes à notre première expérience
dans ce domaine et nous sommes conscients d'avoir fait des erreurs de forme
dans la présentation du document.
Le mémoire de l'Association générale des
étudiants et étudiantes du college de Sorel-Tracy que nous
présentons comporte deux volets. Vu l'incidence directe qu'a le
régime d'aide financière sur l'accessibilité à
l'éducation postsecondaire, ainsi que l'influence du dégel des
droits de scolarité sur cette même variable, il nous paraît
important de traiter de ces deux sujets du même coup.
M. Snyder: Suivant le dépôt du projet de loi par le
ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science, nous
considérons que dans son ensemble le projet de loi est valable, mais il
nous reste quelques réserves. Nous sommes satisfaits que le ministre ait
jugé bon de réduire le taux de contribution parentale de l'ordre
de 30 %, mais nous croyons toujours fermement qu'une catégorie
importante des étudiants postsecondaires ne reçoivent toujours
pas cette aide. Nous croyons que cela découle d'une
"mésinformation" de la part des parents. Un envoi de la Direction
générale de l'aide financière aux étudiants aux
parents les informerait que, dans le calcul de l'aide financière, il a
été pris en considération le fait qu'ils fournissent un
montant x. La réduction de 50 % de la contribution du conjoint va dans
le même sens. C'est notre nette impression que dans la structure
familiale des années quatre-vingt-dix, la séparation des biens et
des revenus est beaucoup plus marquée que par les années
précédentes.
Nous appuyons aussi les nouvelles exemptions ou augmentations des
exemptions contenues dans la réforme: augmentation du montant des
exemptions pour les parents ayant des enfants aux études, exemption pour
les allocations aux jeunes enfants et les allocations à la naissance,
exemption de la contribution minimale pour l'étudiant ayant à sa
charge un enfant d'âge scolaire ou préscolaire. Mais nous sommes
tombés de haut lorsque le ministre a subtilement enlevé de son
projet de loi la mesure d'aide pour les étudiants universitaires
à temps partiel. Nous considérions que cette mesure était
une des plus
importantes contenues dans le projet de réforme du printemps
dernier.
Nous pensons que le fait que les coûts de soins de santé ne
soient pas catégorisés comme étant une dépense
admissible est une situation désincitative pour les gens qui sont
inscrits à un programme d'aide sociale. Nous considérons par
ailleurs que le remboursement des dépenses pour l'achat de
prothèses visuelles peur les étudiants bénéficiant
de bourses est un très petit pas dans la bonne direction.
Il manque une autre des mesures recherchées par le mouvement
étudiant, soit le remboursement des frais de transport pour les gens des
régions éloignées. Ce sont justement ces mêmes
régions qui ont le plus besoin de main-d'oeuvre qualifiée.
Considérant que les étudiants arrivent à survivre
avec un revenu moyen de 5500 $ - ce qui est évidemment beaucoup plus bas
que le seuil de la pauvreté - et que le régime d'aide
financière a ou devrait avoir pour but de permettre aux étudiants
de poursuivre leurs études dans des conditions favorables et
décentes, nous proposons que les frais de subsistance soient
fixés au seuil de pauvreté, tel qu'établi par Statistique
Canada.
Nous considérons, comme le ministre de l'Enseignement
supérieur et de la Science, que la non-indexation des paliers de la
table de contribution parentale est la principale cause de la
surévaluation de la contribution parentale. Nous proposons que la table
de contribution parentale soit indexée chaque année selon la
variation du taux d'inflation.
Nous croyons que l'endettement étudiant est une barrière
à la poursuite des études et qu'il devrait y avoir un seuil
maximal de fixé et que, dépassé ce seuil, laide
financière soft octroyée sous forme de bourses seulement.
Dans un tout autre ordre d'idées, nous croyons que
l'amélioration du régime d'aide financière n'est pas une
raison suffisante pour qu'il y ait un dégel des frais de
scolarité au niveau universitaire. Représentant des
étudiants d'un collège où les deux tiers des
étudiants graduent avec un diplôme d'études
collégiales du secteur général, nous nous sentons
particulièrement touchés par un dégel aussi soudain. Peu
de mesures peuvent être plus régressives qu'un dégel des
droits de scolarité à ce moment-ci.
Le gel des droits de scolarité, à la fin des années
soixante, a eu pour effet de hausser le taux de participation universitaire
québécois. Statistique Canada nous dit que ce taux est
passé de 8 % à 14 % chez les 18-24 ans, de 1970-1971 à
1986-1987, au Québec, soit une hausse de 80 %. En Ontario, cependant, le
taux de participation est passé de 13,3 % à 16,8 %, soit une
hausse de 26 %. Nous croyons que cela est un exemple parfait de relation de
cause à effet. De plus, bien qu'il y ait eu des améliorations
très importantes dans les dernières années, il reste tou-
jours du chemin à faire, les taux de diplomation au Québec aux
1er, 2e et 3e cycles étant toujours plus bas que ceux de l'Ontario.
Un facteur qui n'a pas été étudié, à
notre connaissance, est l'effet d'un dégel sur la migration
étudiante. Il est envisageable que, vu la diminution de la
différence entre les droits de scolarité des universités
québécoises et ceux des provinces avoisinantes, les
étudiants des régions limitrophes de la province décident
d'aller étudier dans d'autres provinces.
Une autre préoccupation de notre population découle du
fait que 20 % des revenus additionnels générés par la
hausse des frais de scolarité soient injectés dans le
régime de l'aide financière aux étudiants. Cela revient
à dire que !es étudiants financeront, dans deux ans, 21 600 000 $
d'un régime qui a essentiellement pour but de les financer. Tous les
groupes s'accordent pour dire que le réseau universitaire
québécois est sous-financé. Là où on
diffère, c'est dans la manière de régler le
problème. Il est certain que les étudiants ne devraient pas
être les seuls auxquels on demande une participation financière
accrue. Nous sommes conscients des efforts fournis par le gouvernement qui, le
printemps passé, a accordé 21 000 000 $ de plus d'argent neuf
à l'enveloppe financière des universités. Il n'en demeure
pas moins que les universités québécoises souffrent
toujours d'un sous-financement de 160 000 000 $ par rapport aux
universités ontariennes, ce qui est inadmissible. De plus, le
gouvernement a tout de même financé l'injection de cet argent
à partir des coupures de plus de 30 % en dollars constants qu'il a
effectuées, au cours des dix dernières années, dans les
universités.
Une action globale dans ce dossier se doit d'impliquer l'entreprise
privée. Sa participation au financement universitaire comparée
à celle des entreprises américaines est dérisoire. La
participation des entreprises au financement du réseau universitaire
pourrait se faire de différentes façons. La possibilité
d'implanter un impôt spécial a été mentionnée
par différents groupes. Un autre moyen serait d'augmenter les ressources
comme les abris fiscaux pour les entreprises qui désireraient
s'impliquer dans le financement des universités. On pourrait aussi
améliorer les moyens incitatifs pour que les entreprises s'impliquent
dans des projets de recherche.
Nous croyons vraiment que les universités ont encore un bout de
chemin à faire. Nous sommes conscients que de grands efforts de
rationalisation ont été faits par les universités dans les
dix dernières années. Nous connaissons aussi la
nébulosité avec laquelle sont faits les budgets universitaires et
nous déplorons le fait que l'État n'ait pas plus à dire
dans l'administration de cet argent. Nous ne voudrions surtout pas qu'une
hausse des droits de scolarité serve à des dépenses
administratives ou à repayer la
dette accumulée des universités.
Nous craignons que le fait que les universités puissent hausser
leurs droits de scolarité unilatéralement de 10 %
n'entraîne la catégorisation suivante. Les universités de
qualité seraient accessibles aux plus fortunés et celles de
moindre qualité ne seraient accessibles qu'aux classes plus pauvres. De
plus, une hausse des droits de scolarité aura pour effet de créer
une pression indue sur tes secteurs mous, les secteurs où les
perspectives d'emploi ou de salaire élevé sont moins bonnes.
De plus, plusieurs points restent obscurs. Le ministre a
déclaré qu'à partir de l'année 1992-1993 les droits
de scolarité seraient indexés selon une formule que le
gouvernement mettra au point en consultation avec les universités. Ne
connaissant toutefois pas encore cette formule, nous ne pouvons la juger, mais
il y a fort à craindre qu'elle ne soit défavorable aux
étudiants. Cette impression est renforcée par fes commentaires du
ministre quant au pourcentage qui, selon lui, devrait être payé
par les étudiants. Il a mentionné que les étudiants
devraient payer de 25 % à 33 % de la facture, soit de 2000 $ à
2700 $. Donc, nous craignons que cette hausse ne soit qu'une première
étape et qu'il ne continue de les hausser jusqu'à ce qu'il arrive
à ce niveau.
Nous croyons qu'une fois ces étapes complétées et
ces détails éclaircis, une hausse de la participation
financière des étudiants pourrait être envisageable. Un
dégel aussi brusque reste une option, mais il faut prendre le temps d'en
envisager d'autres. Une possibilité est un impôt postuniversitaire
transformant le régime d'aide financière en un régime de
bourses financé par un impôt obligatoire. Une autre
possibilité est un gel au mérite, tel qu'expliqué par le
tableau ci-dessous. Tout étudiant à temps complet
n'échouant pas à plus d'un cours aurait ses droits de
scolarité gelés au niveau actuel. S'il échoue à
plus d'un cours, il devra alors payer en conséquence. Si, à la
session suivante, il revient à la normale et n'échoue pas, ses
droits de scolarité retourneraient au niveau actuel.
Le tableau de la page 8 est expliqué par la note en bas qui dit
qu'à partir des données de 150 000 étudiants et
qu'approximativement 20 % d'entre eux échouent à plus d'un cours,
à partir de ce moment-là on voit que 150 000 étudiants
paient 300 $ à la première session; ça rapporte des
revenus additionnels. À la session suivante, admettons que 20 %
échouent à plus d'un cours, ceux qui n'échouent pas
à plus d'un cours, il en reste 120 000, ça fait des revenus
additionnels encore. Ceux qui échouent ont une hausse des droits de
scolarité substantielle, je l'admets, et ça rapporte des revenus
additionnels, la première année, de 30 100 000 $. La
deuxième année - c'est toujours approximatif - 20 % qui
échouent, ceux qui n'échouent pas, ça rapporte des revenus
additionnels de 51 200 000 $. La différence avec le moyen actuel, c'est
que ça marche par session et que ça marche au mérite.
Ce ne sont que deux idées à l'état brut, mais il
restera beaucoup à faire avant de les implanter. Nous demandons donc au
ministre qu'il accorde au dossier des droits de scolarité un moratoire
d'un an. Nous demandons aussi qu'il crée un comité conjoint
regroupant à la même table le gouvernement, l'entreprise
privée, les étudiants et les recteurs. Le mandat de ce
comité serait d'étudier les alternatives au dégel des
frais de scolarité.
Nous demandons aussi au ministre qu'il nomme une commission
spéciale, comportant des étudiants, chargée de la
vérification de la gestion des deniers publics dans l'administration des
universités. Merci. (11 h 30)
La Présidente (Mme Hovington): Merci. M. le ministre de
l'Éducation, vous avez la parole.
M. Ryan: Je vous remercie beaucoup, Mme la Présidente. Je
l'apprécie. Il me fait plaisir de saluer les étudiants du
collège de Sorel-Tracy, de même que leur valeureux
député qui nous fait l'honneur de sa présence, ce matin,
pour échanger un petit peu avec eux tantôt.
Avant que vous passiez la parole à mon collègue de Sorel,
Mme la Présidente, je voudrais faire quelques brefs commentaires sur des
propos que nous avons entendus de la part des représentants des
étudiants du collège de Sorel-Tracy. Je ne
répéterai pas ce que j'ai dit tantôt à la fin de la
rencontre avec les étudiants du cégep de Lévis-Lauzon,
parce que je serais porté à répéter la même
chose, mais je pense que ça a été dit clairement, à
plusieurs reprises, ces derniers mois. Je pense que j'ai donné les
éléments essentiels du dossier du financement universitaire. Le
dossier est établi clairement. Il s'agit maintenant de passer aux
solutions. Ce n'est plus le temps des moratoires et des tergiversations des
commissions d'enquête et tout; on a établi certains
éléments décisionnels qui doivent recevoir leur
réalisation dans les faits. Alors, de ce point de vue là, je suis
sympathique à la requête qui est faite et il n'est pas question,
dans l'esprit du gouvernement, d'un quelconque moratoire.
Vous demandez qu'une commission formée d'étudiants soit
créée afin de vérifier les états financiers des
universités. Est-ce que j'ai bien compris?
M. Snyder: Ce serait: regroupant les étudiants, pour que
ce ne soient pas seulement les étudiants naturellement.
M. Ryan: Ça là, vous pouvez le faire par
vous-mêmes. Vous n'avez pas besoin du gouvernement pour ça.
Ça fait partie de vos prérogatives.
Je me souviens quand j'étais dans les
mouvements de jeunesse, je ne vous dirai pas il y a combien
d'années, et on avait fondé la Fédération des
mouvements de jeunesse du Québec. On avait créé une
commission sur les finances publiques. Je me rappelle que la commission
s'était donné comme mandat: Qu'est-ce que ce
gouvernement-là fait pour la jeunesse? On avait dépecé les
comptes publics de fond en comble. On avait mobilisé un
économiste des Hautes Études, M. Roland Parenteau, qui est
à l'École nationale d'administration publique maintenant. On
était venus voir le ministre du temps qui était Paul
Sauvé. C'était dans le temps de Ouplessis. On lui avait dit:
Votre patente pour la jeunesse, ça ne marche pas bien. On n'a pas dit au
gouvernement: Formez-nous une commission. On est allés enguirlander le
gouvernement. Mais je ne voudrais pas que vous comptiez sur le gouvernement
pour former cette commission, c'est à vous autres de faire ça, si
vous en avez la conviction.
Le gouvernement a ses moyens de vérifier les finances des
universités et il les vérifie régulièrement. Il
reçoit des données très détaillées sur la
manière dont sont utilisés les fonds publics. Et comme je l'ai
dit ici à plusieurs reprises, les universités publient, chaque
année, des rapports financiers qui sont aussi élaborés que
ceux d'Hydro-Québec, ceux de la ville de Montréal, ceux de
Radio-Canada, ceux de n'importe quelle entreprise publique. Les cégeps,
c'est la même chose: ils publient des rapports très
élaborés, chaque année; les commissions scolaires aussi.
Vous pouvez poser des questions II y a des assemblées où on peut
poser des questions, mais je ne sais pas là, qu'est-ce que vous voudriez
que le gouvernement fasse de plus là-dedans? Nous trouvons qu'il y a
actuellement ce qu'il faut, de ce point de vue là. Si ce n'est pas
suffisant, apportez-nous des éléments concrets. Ça va nous
faire extrêmement plaisir de les examiner.
Je vais réserver ça. Je veux laisser du temps pour mon
collègue, le député de Sorel, parce que j'ai des
données à propos de la participation des entreprises. Vous en
faites un thème important, dans votre présentation, au
financement des universités. On aura l'occasion d'en discuter plus tard
dans la journée, probablement. C'est une question que nous avons
examinée évidemment et que nous continuons d'examiner et à
laquelle le gouvernement n'est pas indifférent, quoi que vous entendiez.
Le gouvernement est très intéressé à cette
dimension-là. Il s'agit d'établir les modalités, les
formes sous lesquelles la participation de l'entreprise peut être
instituée ou souhaitée ou promue, avec des résultats
concrets. Mais je prends note de ce que vous dites.
J'ajoute seulement, pour les fins de notre débat immédiat,
que la participation des entreprises au budget de fonctionnement des
universités dans tout le Canada est un élément
extrê- mement réduit dans le financement des universités.
J'ai des chiffres ici: pour l'ensemble du Canada, c'est 0,3 %,
c'est-à-dire les trois diziè-mes de un pour cent du budget total
des universités. En Ontario, c'est 0,4 %; au Québec, c'est 0,2 %,
par conséquent, un pourcentage insignifiant. Ces données
confirment ce que j'ai mentionné à maintes reprises devant la
commission: Souhaiter des contributions directes des entreprises au
fonctionnement des universités, ça ne semble pas être la
voie la plus appropriée. Il y en a d'autres, cependant, il y en a
beaucoup d'autres que nous allons promouvoir au cours des prochaines
années. J'aurai l'occasion d'en dire davantage d'ici à la fin des
travaux de la commission et à l'occasion des autres étapes qui
suivront.
Alors, je vous remercie. Il est toujours intéressant
d'échanger avec les représentants des communautés
étudiantes concrètes et non pas des collectifs abstraits. On les
accepte aussi, mais quand on peut avoir les deux, c'est encore plus
enrichissant pour tout le monde. Je vous remercie beaucoup de vous être
donné la peine de préparer un mémoire et de venir le
défendre, ce matin.
La Présidente (Mme Hovington): M. le député
de Sorel.
M. Khelfa: De Richelieu.
La Présidente (Mme Hovington): De Richelieu, pardon, mais
natif de Sorel. Ce sont vos commettants, ce matin, que l'on reçoit
aujourd'hui.
M. Khelfa: Effectivement, Mme la Présidente. J'aimerais
vous remercier de m'avoir donné l'opportunité d'intervenir et
surtout remercier le ministre de m'avoir laissé du temps sur son temps
pour intervenir et poser des questions au groupe étudiant du
comté de Richelieu, du cégep Sorel-Tracy. Donc, j'aimerais les
saluer, saluer leur détermination, leur travail dans le processus
démocratique de nos institutions. Leur participation à la
commission parlementaire aujourd'hui, ça démontre leur
volonté de participer à cette consultation d'une façon
constructive.
J'ai lu, à quelques reprises, votre document. Dans un premier
temps, j'aimerais vous féliciter pour le contenu, pour les
recommandations, vous avez plusieurs natures de recommandations. Comme
député du comté, je suis très fier de vous recevoir
à l'Assemblée nationale, à cette commission.
Ceci étant dit, vous allez me permettre, dans un premier temps,
d'échanger avec vous sur quelques recommandations que vous avez
amenées. Dans un premier temps, quand vous parlez du temps partiel, des
étudiants à temps partiel qui étaient non inclus dans la
formule,
partez-vous d'étudiants à temps partiel adultes ou bien du
temps partiel dans sa globalité? Pour-riez-vous nous expliquer?
M. Snyder: C'est qu'il y a un chapitre de la Loi sur l'aide
financière aux étudiants qui parie spécifiquement des
temps partiel à l'université, sauf que la date de mise en
application de cette mesure n'est pas fixée. C'est à une date
ultérieure ou quelque chose du genre, ce qui fait que ce serait une
bonne idée de l'appliquer immédiatement.
M. Khelfa: Considérez-vous les étudiants à
temps partiel adultes ou bien le temps partiel dans sa globalité, dans
son ensemble?
M. Snyder: Tous ceux qui en ont besoin.
M. Khelfa: D'accord. Un autre volet dont j'aimerais...
Personnellement, je me réjouis et je constate même que le ministre
a eu une ouverture sans l'inclure d'une façon directe, c'est de pouvoir
questionner l'administration et savoir comment les dépenses sont faites.
Ça, c'est une preuve, de votre part, de vouloir s'impliquer dans le
quotidien des universités, sachant que chez nous, dans le comté
de Richelieu, ceux qui veulent aller à l'université doivent
sortir du comté, aller ailleurs, pour pouvoir obtenir une diplomation
universitaire. Votre participation, depuis quelques mois, à la vie
collective du comté, c'est tout à votre honneur et je vous en
félicite, je vous remercie. Voulez-vous m'expli-quer un peu le
rôle de votre comité, votre vision du comité conjoint de
consultation que vous avez mentionné à la page 6 - si je ne me
trompe pas - de votre mémoire?
M. Snyder: À quelle page?
M. Khelfa: À la page 6, c'est votre recommandation
à la fin: Un comité conjoint. À la page 8, excusez.
M. Snyder: Oui, on est d'accord qu'il y a un sous-financement et
c'est évident. Tout le monde s'accorde pour dire ça. C'est qu'il
y a d'autres alternatives: augmenter la participation d'une forme globale, soit
des entreprises, des étudiants et du gouvernement. Une fois que ces
mesures-là auront été mises en application, si les
étudiants ont encore besoin, ils auront à payer. S'ils ont
à payer, quelle forme prendrait exactement l'augmentation de leur
implication financière?
Le point majeur avec lequel on n'est pas d'accord avec la mesure du
gouvernement dans le dégel, c'est que ça touche à
l'accessibilité. Il y a d'autres mesures qui peuvent ne pas toucher
à l'accessibilité, que tous ceux qui sont capables d'aller
à l'université auraient le droit d'y aller, sans tenir compte de
leur capacité financière de payer, sauf que ça aiderait
quand même au financement universitaire.
M. Khelfa: Mme la Présidente, si vous me permettez une
dernière question concernant la formule que je trouve
intéressante, le gel au mérite. Voulez-vous nous expliquer un peu
plus votre pensée?
M. Valois: Avec le gel au mérite, on montre et on
démontre même que nous autres, l'Association étudiante du
cégep de Sorel-Tracy, on est capables de trouver d'autres alternatives
qu'un dégel aussi brusque et violent, finalement. Le gel au
mérite est vraiment une idée qu'on a ébauchée ici
avec des chiffres vraiment abstraits. Pour donner un peu l'idée, c'est
que la personne qui va à l'école, tout le monde paie par session.
La première session, ça coûte 300 $ pour tout le monde.
Donc, les frais de scolarité remontent à 600 $ par année,
si tu n'as pas échoué du tout. Ce qui veut dire que c'est
déjà 60 $ de plus d'augmentation des frais de scolarité,
ce qui, à notre avis, ne devrait pas déranger grand monde. Puis,
ça coûte 300 $ pour cette session-là. À cette
session-là, si l'étudiant la passe sans échouer deux ou
plus de deux de ses cours, à l'autre session d'hiver, qu'on a
écrit ici, ça lui coûterait encore un autre 300 $. Par
contre, s'il échouait, les frais de scolarité augmenteraient. On
a écrit 1000 $; ça pourrait être 700 $ ou un autre chiffre.
Les chiffres qu'on a écrits ici, ce sont vraiment des chiffres
hypothétiques pour expliquer notre tableau. Premièrement, c'est
pour que tous les étudiants puissent accéder à
l'université et, deuxièmement, on est surtout partis des
répliques lancées par différentes personnes qui disaient:
Vu que ça ne coûtait pas cher, les gens prenaient les
universités comme des "parkings". Les étudiants allaient à
l'école, vu que ça ne coûtait pas cher et peu importe s'ils
échouaient, ça restait là. Vu que ça ne coûte
pas cher, on peut rester encore, parce qu'en Ontario finalement... Il faudrait
aller à notre université pendant trois ans avant que ça
coûte le même prix qu'en Ontario pendant un an. Alors, même
si j'en échoue une, je vais continuer. Eh bien, pour nous, ce n'est pas
comme ça, c'est pour suivre cette idée-là et on sait quand
même que le Parti libéral aime vraiment ça, les choses au
mérite. On sait que son régime de prêts et bourses marche
dans ce sens-là. On a dit: Pourquoi pas le dégel aussi? C'est une
idée comme une autre. C'est une idée alternative comme il en a
été lancé. Vous avez sûrement entendu un paquet
d'alternatives.
M. Khelfa: Est-ce que c'est implicite, dans votre pensée,
qu'il pourrait y avoir des exemptions dans cette formule pour des maladies ou
bien des conditions sociales?
M. Valois: Si elles vont avec tout le reste.
Ce n'est pas un gel au mérite seul, c'est un gel au mérite
global qui suit les trois autres, comme ils ont toujours été
répétés: (a société, les industries et, nous
autres, c'est le financement des universités qu'on veut vraiment
regarder de façon administrative, où passe leur argent, parce
que... En tout cas, c'est peut-être une idée qu'on a dans notre
tête qui est vraiment venue du saint ciel, mais on trouve que, quelque
part, il y a sûrement de l'argent qui se passe dont les étudiants
ne bénéficient pas et qui se perd dans l'administration des
universités, ça aussi.
M. Khelfa: D'accord. Mme la Présidente, je pense que je ne
pourrai pas revenir. J'aimerais vous remercier pour votre réflexion dans
l'amélioration de la mosaïque économique et sociale de notre
comté. Je vous félicite et je vous remercie.
La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. le
député de Richelieu. M. le député d'Abitibi-Ouest.
(11 h 45)
M. Gendron: Oui. Chers amis, les jeunes de Sorel et Tracy, je
voudrais d'abord dire deux choses avant de débuter: Ce que j'ai
aimé le plus dans votre mémoire, dans le fond, c'est à la
page 5, quand vous dites... Et je trouvais ça intéressant pour
des jeunes étudiants, qui n'ont peut-être pas l'occasion
d'être là-dedans tous les jours, de voir que, même à
ça, la vérité a ses droits et que vous avez indiqué
ce qu'est la vérité: "Le printemps passé, le milieu
universitaire s'est vu accorder 21 000 000 $. Je ne sais pas si vous
étiez ici tantôt, quand le ministre, encore là,
allègrement, disait que je faisais marcher mon gramophone en
répétant les mêmes faussetés - c'est l'expression
qu'il a employée - alors que dans le bulletin de la CREPUQ, c'est on ne
peut plus clair, c'est 21 000 000 $ que nous avons reçus, signé
par Patrick Kenniff, président, dans l'Info-CREPUQ, volume III,
numéro 1. Il va continuer à satiété à
répéter un chiffre que personne n'a vu. J'ai toujours
pensé que si je fais un cadeau à quelqu'un et que celui à
qui je fais le cadeau dit: Tu m'as donné 10 $, et que moi, je dis: Non,
non, je t'ai donné 5 $... J'aime mieux me fier à celui qui a
reçu le cadeau, parce que c'est censé lui faire plaisir. Il n'a
pas de raison de tromper, il n'a pas de raison de conter des menteries, il n'a
pas de raison de ne pas être content, on lui a fait un cadeau. Alors,
j'étais content de voir ça que des gens qui ne sont pas
là-dedans tous les jours... Ça arrive que l'information
honnête passe, des fois. Vous avez dit: Écoutez, les
universités nous ont dit qu'elles avaient reçu 21 000 000 $. On
aime mieux parler de ce chiffre-là que du discours du ministre. Donc,
j'ai été obligé de repartir mon gramophone, mais en
indiquant qu'il n'était pas basé sur des fausses
réalités.
Deuxième commentaire, et il faut que vous soyez conscients de
ça, j'espère... Je pense que oui, parce que des jeunes,
habituellement, c'est éveillé. Vous avez fini votre
mémoire en disant ceci: On demande donc au ministre qu'il accorde dans
le dossier des droits de scolarité un moratoire d'un an. On demande au
ministre qu'il crée un comité conjoint - et je n'évalue
même pas le mérite pur de vos recommandations - et,
troisièmement, on demande au ministre qu'il nomme une commission
spéciale.
Le ministre vous a dit que vous aviez un bon mémoire, mais il
vous a envoyé littéralement paître sur toutes vos
recommandations. Il faut que vous soyez conscients de ça. Il est bien
bon pour féliciter, mais il vous a envoyé littéralement
paître en disant: Retournez au plus vite à Sorel-Tracy refaire vos
devoirs. Moi, je n'ai pas le temps de faire des commissions d'enquête.
C'est exactement ce qu'il a dit. Ce n'est pas le temps de faire un moratoire,
c'est le temps de décider. J'ai la voie, la vérité et,
moi, je règle ça. Ce sont les étudiants qui sont clenches.
Donc, on revient toujours à la même case. Je suis obligé de
retaire marcher mon gramophone, comme il l'a dit tantôt.
Votre mémoire, rapidement, je le trouve intéressant parce
qu'il a touché les mêmes questions que tout le monde a
posées. Contrairement à ce que le ministre a affirmé en
disant: Quand je leur explique, les étudiants comprennent plus, on se
rend compte, depuis un mois, qu'il y a un changement de mentalité. Il le
voit uniquement à son ministère ou dans ses lectures tardives, la
nuit, parce que le changement de mentalité... Tous les mémoires
ont dit la même chose et vous, vous dites ceci: Ça aura des effets
sur la fréquentation. Vous craignez que la hausse ne soit qu'une
première étape à vous clencher davantage. Nous, on vous
dit que vous avez raison.
Deuxièmement, vous ne voulez pas être seuls. C'est
ça que votre mémoire dit. Vous demandez également une
participation financière accrue du gouvernement et des entreprises.
Sachez que, dans la tête du ministre et dans sa réforme, ces deux
volets n'y sont pas. Il faut que vous soyez conscients de ça. Seuls les
étudiants sont clenches. Vous ajoutez: II faut prendre le temps
d'envisager d'autres options. Le ministre a dit: Non, moi, je l'ai choisie. Il
a même dit à des étudiants qui souhaitaient avoir
été consultés là-dessus: Écoutez, ça
aurait été aberrant d'aller vous consulter là-dessus,
c'est évident que vous auriez dit non. Donc, on a pris notre
décision et on a pris nos responsabilités. Là-dessus, il a
raison, ils ont pris leurs responsabilités, mais leurs
responsabilités, nous, de ce côté-ci et la plupart des
mémoires, les voyons beaucoup plus larges que la solution facile
d'augmenter l'endettement étudiant sans regarder des alternatives. Donc,
quand vous dites qu'il y a d'autres options et qu'on regarde donc ça,
faites-en votre deuil. Le ministre a dit qu'il
y en avait d'autres alternatives, mais qu'il n'en est pas question, il
procède.
Vous demandez un moratoire d'un an pour qu'un comité regroupant
les entreprises, le gouvernement, les étudiants et les recteurs
étudie des alternatives au dégel. Vous l'avez eue, votre
réponse. C'est le temps d'agir, ce n'est pas le temps de rêver,
a-t-il dit.
En conclusion, moi, je prétends que vous avez un mémoire
réaliste, pratique, concret par rapport à tout ce que les gens
sont venus nous dire ici. Merci de votre contribution. Je ne peux pas le
questionner vraiment, sauf sur un aspect, parce que je ne peux pas faire comme
le député de Sorel qui, bien gentiment, vous dit: Oui, vous avez
une bonne suggestion concernant votre impôt...
Mme Caron: Votre gel au mérite.
M. Gendron: ...votre gel au mérite, mais je ne la
comprends pas, voulez-vous m'expliquer ça? Alors, moi, avant de dire que
c'est une bonne suggestion, j'aurais fait le commentaire après avoir
reçu l'explication. Moi, là-dessus, je pense que c'est la
première fois qu'on voit ça. Moi, j'hésite
énormément à endosser votre recommandation du gel au
mérite pour deux raisons principales. Je connais peu d'étudiants
qui ont des échecs par choix et je ne connais pas beaucoup
d'étudiants qui sont heureux, contents ou qui ont procédé
pour échouer, soit au niveau collégial ou universitaire. En
conséquence, il y a déjà en soi un inconvénient
majeur d'avoir échoué et leur rajouter de l'endettement, compte
tenu de l'inversion que ce gouvernement-là a fait de l'aide
financière... Êtes-vous au courant qu'au moment où on se
parle il n'y a plus que 38 % des sommes versées sous forme de bourses,
38 %, au moment où on se parle? Le gros de l'aide ¦
financière est versé sous forme de prêts, donc on ajoute
à l'endettement. Et, dans votre formule de gel au mérite, c'est
sûr que ça aurait comme conséquence d'endetter davantage
ceux qui ont échoué.
J'aimerais ça - parce que moi, mon jugement, c'est plutôt
de dire: Ce n'est pas une voie de solution - que vous ne me donniez pas
tellement d'explications sur comment ça marcherait, mais donnez-moi
quelques explications additionnelles. Pourquoi prétendez-vous qu'il y a
là une voie à regarder pour, éventuellement, mettre plus
d'argent dans le système universitaire, mais en l'imputant à ceux
qui, déjà, auraient à souffrir de l'inconvénient
à bien des égards, mais surtout financier d'un échec?
Parce que, quand tu veux avoir une diplomation et que tu as un échec, tu
es obligé de te reprendre. Donc, tu dis: Comme récompense, toi,
on va te donner une hausse de frais de scolarité à la suite de
ton échec. Est-ce que vous ne le placez pas - c'est là-dessus que
j'aimerais avoir vos commentaires - déjà dans une perspective
d'échouer à nouveau, plus facilement que d'autres?
M. Valois: Le mémoire qu'on a fait avec cette perspective
de gel au mérite, ce n'est pas un dégel aux non-méritants,
c'est un gel au mérite. Tout le monde subit le dégel, sauf ceux
qui passent, c'est le contraire. C'est: Je te remercie, je laisse cela
gelé vu que tu passes. C'est dans cette perspective qu'on l'avait
envoyé. Ça, c'est premièrement.
Deuxièmement, 50 % des étudiants, environ, laissent
l'université avant de terminer leur 1er cycle, ça veut dire le
bac. Tu échoues, ça coûte plus cher, tu y repenses deux
fois avant de dire: Suis-je vraiment fait pour l'université? Et ce n'est
pas si tu échoues juste à un cours, si tu échoues à
deux et plus. Alors là, l'étudiant, dès le début,
se questionne: Suis-je vraiment fait pour l'université vu que j'ai
échoué à deux cours et plus? Ça va me coûter
plus cher. Est-ce que je continue en assumant ça ou est-ce que je me
relance dans ce gouffre-là? Et là, plus rapidement la
décision va être prise, moins l'université va avoir
à débourser pour cet étudiant-là et, comme on a
pris les universités pour des "parkings", là, cela n'en sera plus
parce que l'étudiant, dès la fin de sa première session,
va avoir à prendre une décision. Mais ce n'est pas, je le
répète, un dégel aux non-méritants, c'est un gel au
mérite; il ne faudrait pas l'oublier. Tous les étudiants font
face au dégel, excepté ceux qui échouent à un seul
cours ou qui réussissent tous leurs cours. C'est comme un cadeau qu'on
leur donne.
M. Gendron: Bien amicalement, entre dégel... Je reprends
vos phrases, entré un dégel aux non-méritants et un gel au
mérite, est-ce que, dans les faits, la conséquence n'est pas la
même, sur le plan du résultat? Là, je pose la question:
Est-ce que, dans les faits, seuls ceux qui ont échoué à
plus d'un cours paieront les frais de scolarité, dans votre proposition?
Est-ce que c'est bien ça?
M. Valois: Le résultat, en fait, est le même, ils
vont payer, c'est vrai. Par contre...
M. Gendron: II y a uniquement ceux qui vont échouer qui
vont payer...
M. Valois: Pardon?
M. Gendron: ...dans votre formule.
M. Valois: Non. Parce qu'il ne faudrait pas oublier que les
autres qui n'échouent pas paient quand même un gros 60 $ de plus
par année, parce qu'il y a déjà un dégel qui est
fait de ce côté-là. Ils paient 300 $ par session, ça
monte à 600 $ par année; 540 $ plus 60 $, ça fait 600 $.
Eux autres aussi paient, ils donnent une contribution.
M. Gendron: C'est un moindre gel. M. Valois: C'est un
moindre gel.
M. Gendron: Pardon, un moindre dégel. S'il
réussit...
M. Valois: Bien, ça dépend...
M. Gendron: Non, non, mais ça va.
M. Valois:... pour qui.
M. Gendron: Ca va, on s'entend. Alors, je vous remercie beaucoup,
je n'ai pas d'autre question. Merci beaucoup de votre contribution.
La Présidante (Mme Hovington): Merci. Alors, en guise de
conclusion, M. le ministre.
M. Ryan: Je vous remercie également, je pense que
ç'a été un échange très constructs et vous
pouvez compter sur votre député, le député de
Sorel, pour continuer à véhiculer auprès de nous...
À supposer que nous ne soyons pas disposés à comprendre,
comme le laisse malicieusement entendre l'Opposition, vous pouvez compter que
le député de Sorel va se charger de véhiculer
auprès de nous vos points de vue. Moi, je vous ai dit ce qu'il en
était, bien franchement, sur le thème général que
vous avez abordé, ce matin. Je pense que c'est important qu'on se quitte
sans illusions, en étant bien conscients des points de vue des uns et
des autres. J'apprécie votre position, et je crois que le Québec
doit franchir un pas maintenant. Je complète juste. On peut discuter
longtemps sur 55 000 000 $ ou 21 000 000 $, mais si ce n'est pas 55 000 000 $,
c'est 21 000 000 $ plus 34 000 000 $.
Des voix: Ha, ha, ha!
M, Valois: C'est ça. L'année d'avant,
c'était 34 000 000 $.
M. Ryan: Ça voudrait dire qu'il y aurait eu 34 000 000 $
l'année précédente. On ne s'en était pas
vanté. Il y a eu 34 000 000 $ l'année précédente et
21 000 000 $ cette année. Ça fait 55 000 000 $ de toute
manière. Comme je l'ai dit, en ajoutant le produit de la hausse des
droits de scolarité, on va rétrécir très
sensiblement l'écart qui subsiste avec l'Ontario et le gouvernement aura
encore une part à faire, lui. Vous pouvez compter que, tous ensemble,
les députés ministériels et le ministre de
l'Éducation et de l'Enseignement supérieur et de la Science, nous
allons continuer de multiplier les pressions auprès du gouvernement pour
que cet écart en vienne à être annulé dans les
meilleurs délais. Merci de l'appui que vos représentations nous
apportent à cette fin.
La Présidente (Mme Hovington): MM. Snyder et Valois, merci
d'avoir présente votre mémoire aux membres de la commission de
l'éducation.
M. Valois: Merci à vous aussi de nous avoir
écoutés parce que c'est quand même nous.. Ce que nous avons
fait et ce que nous ferons toujours dans le fond... Pour une fois, on ne se bat
pas pour avoir plus, on se bat pour aller à l'école Moi, je me
bats pour ça. Je dis non au dégel. Pourquoi? Pour
l'accessibilité à l'éducation. Je me bats pour aller
à l'école.
La Présidente (Mme Hovington): C'est tout à votre
honneur et à l'honneur du Québec. Merci.
J'inviterais le Regroupement des aveugles et amblyopes du Québec
à bien vouloir venir prendre place. Nous allons suspendre une minute.
Merci.
(Suspension de la séance à 11 h 57)
(Reprise à 12 h 1)
Regroupement des aveugles et amblyopes du
Québec
La Présidente (Mme Hovington): Je demanderais aux membres
de bien vouloir prendre place. Nous allons recommencer nos travaux, s'il vous
plaît.
Alors, bienvenue au Regroupement des aveugles et amblyopes du
Québec. Si vous voulez bien vous présenter à tour de
rôle pour fins de transcription des débats, s'il vous
plaît.
M. Bouvart (Alain): Bonjour. Je suis Alain Bouvart. Je suis
président du Regroupement des aveugles et amblyopes du Québec.
Ici, à côté de moi, à ma gauche, Yves Fleury,
directeur général, Michel Picard, secrétaire et Pierre
Ouellet, deuxième vice-président de notre organisme.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, M. Bouvart, c'est
vous qui êtes le porte-parole ou si c'est monsieur...
M. Bouvart: Nous sommes tous porte-parole. Nous allons... Je vais
vous présenter notre organisme, dans un premier temps, et après,
M. Picard et M. Ouellet vont lire le mémoire.
La Présidente (Mme Hovington): D'accord. Alors, vous avez
20 minutes pour nous présenter votre mémoire. Alors, allez-y, M.
Bouvart.
M. Bouvart: Merci beaucoup. Bonjour, M. le ministre, bonjour,
mesdames et messieurs. Le
Regroupement des aveugles et amblyopes est un organisme qui fait la
promotion et la défense des
droits des personnes aveugles et amblyopes du Québec. On existe
depuis quinze ans et nous sommes particulièrement
intéressés en ce qui concerne l'éducation de nos membres.
Ce mémoire, comme vous avez pu vous en rendre compte, s'adresse... Nous
avons 65 personnes qui sont au cégep ou dans des universités
à l'heure actuelle.
Notre conseil d'administration, le 10 juin 1989, s'est
particulièrement penché sur le volet économique des
étudiants. Tradionnellement, le RAAQ s'est toujours consacré
d'une façon très intense et on a toujours été
très très présents concernant l'intégration des
personnes handicapées de la vue au niveau collégial et au niveau
des universités. On était surtout présents par le
passé en ce qui concerne l'adaptation des cours et la transcription de
tout ce qui est imprimé parce que, pour nous, c'est quelque chose, comme
vous pouvez le constater, de très important. C'est notre dossier un peu
traditionnel.
Ce que j'aimerais aussi dire, c'est que nous avons eu, encore hier soir,
une mauvaise nouvelle. Nous avons appris, à la télévision
anglaise de Radio-Canada, dans une émission qui était
consacrée aux personnes aveugles et aux personnes ayant une
déficience visuelle, que nous avions un taux de chômage
supérieur à celui de la Gaspésie et de l'Abitibi. Il est
question d'un taux de chômage de 90 % dans notre communauté. C'est
ça. Maintenant, je passe la parole à Michel.
M. Picard (Michel): Michel Picard, étudiant à
l'université.
Contribution de l'étudiant atteint d'une déficience
fonctionnelle majeure. Considérant que la personne ayant une limitation
visuelle en situation d'études vit des contraintes très
sévères à l'emploi; considérant que les services
externes de main-d'oeuvre dits spécialisés dans le placement des
personnes ayant une limitation visuelle ne priorisent pas la clientèle
étudiante dans l'exercice de leurs fonctions et de leurs mandats
émanant du ministère de la Main-d'oeuvre et de la
Sécurité du revenu, le RAAQ recommande que le ministère de
l'Éducation exclue le calcul de la contribution de l'étudiant
atteint d'une déficience fonctionnelle majeure dans la
détermination du montant d'aide financière lui étant
accordé.
Contribution du conjoint ou des parents de l'étudiant atteint
d'une déficience fonctionnelle majeure. Considérant que le
conjoint ou les parents assument déjà des responsabilités
importantes dans le soutien à l'autonomie des personnes ayant une
limitation visuelle en situation d'études, considérant que laide
constante d'une tierce personne s'avère primordiale pour la
réussite des études d'une personne atteinte d'une
déficience fonctionnelle majeure, telle que confrontée à
l'accomplissement des tâches multiples dépassant les limites
raisonnables imposées par la nature même de la déficience,
le RAAQ recommande que le ministère de l'Éduca- tion exclue le
calcul de la contribution du conjoint ou des parents dans la
détermination du montant d'aide financière accordé aux
personnes atteintes d'une déficience fonctionnelle majeure.
Exonération de l'obligation de rembourser les prêts
étudiants. Considérant qu'une personne devenant atteinte d'une
déficience fonctionnelle majeure en cours d'études vivra,
à partir de ce moment, des contraintes très sévères
à l'emploi et qu'il deviendra, de ce fait, extrêmement difficile
d'être confronté au remboursement de prêts étudiants
déjà accordés, considérant que le fait de devenir
atteint d'une déficience fonctionnelle majeure occasionne une source de
stress bouleversant l'équilibre d'une personne en cours d'études,
le RAAQ recommande que le ministère de l'Éducation exonère
les personnes devenant atteintes d'une déficience fonctionnelle majeure
en cours d'études de l'obligation de rembourser tout prêt
contracté en matière d'aide financière pour fins
d'études.
M. Ouellet (Pierre): Bonjour tout le monde, M. le ministre,
mesdames et messieurs. Je ne sais pas si vous m'entendez bien.
La Présidente (Mme Hovington): Très bien,
allez-y.
M. Ouellet: D'accord, je vous remercie. Comme je vous le disais,
mon nom est Pierre Ouellet; je suis deuxième vice-président au
Regroupement des aveugles et amblyopes du Québec. Je m'implique dans ma
communauté depuis plusieurs années. Je suis une personne qui est
aux études, qui poursuit des études de niveau postsecondaire.
Maintenant, je vais vous tirer les grandes lignes de la suite de notre
rapport.
Reconnaissance financière appropriée du soutien
académique. Considérant que les personnes ayant une limitation
visuelle en situation d'études nécessitent les services de
lecteurs pour l'accomplissement de leurs travaux, considérant que les
salaires horaires des personnes accomplissant cette tâche doivent
être déclarés comme source de revenus à
l'État québécois, le RAAQ recommande que le
ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science augmente
substantiellement les montants accordés en matière de besoins
spéciaux pour le soutien académique des personnes atteintes d'une
déficience fonctionnelle majeure, particulièrement en ce qui a
trait au salaire horaire des lecteurs pour les personnes ayant une limitation
visuelle, afin de faciliter le recrutement de personnes compétentes dans
ce domaine.
À titre personnel, j'aimerais ajouter et peut-être vous
faire partager une expérience que j'ai vécue. J'ai terminé
un bac en droit à l'Université de Montréal, en 1985. En
1986, j'ai fait une trentaine de crédits en relations industrielles. En
1987, j'ai essayé de faire mon Barreau, afin d'être membre du
Barreau du
Québec et de pouvoir pratiquer la profession d'avocat. Je me suis
heurté à un tas de barrières. Ce qui arrive, c'est qu'au
Barreau il y avait, cette année-là, 18 volumes à
l'étude au niveau de la formation professionnelle. La seule façon
d'y avoir accès, parce que ces livres, habituellement, ne sont
disponibles qu'à peu près un mois avant le début des
cours, donc la seule façon d'y avoir accès était de
fonctionner avec des lecteurs bénévoles ou
rémunérés. Eh bien, je vous dis que ça a
été une belle partie! J'ai passé environ le quart de mon
temps, si ce n'est pas le tiers, à essayer de recruter des
bénévoles semi-rémunérés. Au tarif horaire
que le ministère me proposait, il était quasi impossible de
trouver des gens qui étaient intéressés à
travailler à 4 $ ou 4,50 $ l'heure, considérant que ces
revenus-là sont déclarés. Donc, c'était
définitivement irréalisable. Moi, j'ai même, à un
moment donné, suggéré à la personne qui
recommandait les 4,50 $ qu'elle dresse pour moi une banque de
bénévoles et j'en aurais été vraiment heureux.
Donc, au niveau d'une formation professionnelle à l'école du
Barreau - comment je dirais bien ça? - les ressources qui étaient
mises à ma disposition n'étaient aucunement adéquates. Il
n'y avait aucune possibilité.
Je me suis réessayé en 1990 et je me suis heurté
encore à la même situation. Je poursuis des études, mais
dans un champ d'activité différent. Je poursuis des études
en relations industrielles. Ce n'est peut-être pas tout à fait ce
que je voulais faire mais, présentement, il ne semble pas y avoir
d'autres alternatives ou possibilités afin que je puisse, comme tout
autre étudiant qui n'a pas de limitation fonctionnelle, faire mon
Barreau et, en fin de compte, me réaliser dans ce que j'ai le goût
de faire dans notre société. Je pense que ça résume
assez bien la quatrième recommandation de notre rapport.
Maintenant, nous allons passer à la cinquième.
Éligibilité des personnes atteintes d'une déficience
fonctionnelle majeure en situation d'études présecondaires,
secondaires et à l'éducation aux adultes à l'aide
financière. Considérant que les personnes ayant une limitation
visuelle nécessitent l'obtention de diplômes leur permettant
d'accéder à des études postsecondaires, considérant
que ces personnes atteintes d'une déficience fonctionnelle majeure dans
ces situations particulières d'études doivent absolument
réussir ces programmes tout en assumant leur subsistance des plus
précaires, la RAAQ recommande que le ministère de l'Enseignement
supérieur et de la Science soutienne financièrement
l'accomplissement des études des personnes atteintes d'une
déficience fonctionnelle majeure étudiant en alpha,
présecondaire et secondaire, par l'allocation d'une aide
financière substantielle en reconnaissance des efforts investis par ces
personnes désirant mieux maîtriser leur situation de vie par une
scolarisation accrue. Je pense que M. Bouvart aurait certains commentaires
à faire vis-à-vis de cette cinquième proposition.
La Présidente (Mme Hovington): M Bouvart, allez-y.
M. Bouvart: En effet, nous avons quelques étudiants dans
une école, à Montréal, qui s'appelle l'école
Champagnat, qui sont en alpha, qui sont en présecondaire et qui sont en
secondaire et ces étudiants, apparemment, recevaient une forme de bourse
pour leurs besoins spéciaux, les années avant. Cette
année, ces personnes-là ont reçu une mauvaise nouvelle:
elles ne sont plus éligibles à ce genre de bourse. C'était
simplement ce commentaire-là que j'avais à faire.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. (12 h 15)
M. Ouellet: Je vais continuer maintenant avec la sixième
proposition de notre Regroupement. Imposition des frais inhérents aux
besoins spéciaux des personnes atteintes d'une déficience
fonctionnelle majeure. Considérant que l'imposition des frais
inhérents aux besoins spéciaux représente une forme de
taxation tout à fait immorale de l'adaptation scolaire à
l'intention spécifique des personnes atteintes d'une déficience
fonctionnelle majeure désirant s'intégrer à part
entière dans la société, la RAAQ recommande que le
ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science se
concerte avec les autorités responsables au ministère du Revenu
et au Conseil du trésor afin de faire cesser la pratique d'imposer les
allocations accordées pour les besoins spéciaux.
Conclusion
M. Picard: Pour le point 6, ce qu'on veut dire, c'est de ne pas
considérer les besoins spéciaux comme étant des revenus
faisant partie d'une bourse parce que, par exemple, une bourse de lecteur de
soutien académique. . Si une personne peut demander un versabraille ou
une imprimante braille, si on met tout le montant sur un T-4 à la fin de
l'année, la personne risque de payer de l'impôt sur, en fin de
compte, un revenu qui n'est pas à elle parce que, pour les besoins
spéciaux, tout ce qu'on fait, c'est qu'on signe le chèque et on
le donne à une autre personne. Donc, ce n'est pas un revenu à
nous autres qui fait partie de notre bourse. C'est tout pour le point 6.
M. Ouellet: Donc, en résumé, la personne se fait
imposer sur des sommes qu'elles n'a pas touchées, en fin de compte.
Conclusion Notre organisme croit sincèrement que les personnes
ayant une limitation visuelle doivent être stimulées et
encouragées à poursuivre des études. Cela
représente une des seules portes de sortie, sinon la seule, leur
permettant d'accéder à une plus grande maîtrise de leur
situation de vie. L'application de mesures
incitatives à caractère économique doit
également s'opérer dans des délais raisonnables ne privant
pas la personne en cause de revenus essentiels au bon déroulement de ses
études.
Je vous remercie beaucoup. C'est terminé, en substance, en ce qui
a trait à la présentation de notre rapport. Je pense que je
pourrais laisser la parole à mes autres collègues.
La Présidente (Mme Hovington): D'accord. Est-ce que c'est
tout pour la présentation?
M. Picard: C'est tout, oui.
M. Fleury (Yves): Moi, j'aimerais ajouter quelque chose qui
n'apparaît pas nécessairement dans le mémoire. C'est en ce
qui a trait à la documentation qui est envoyée aux
étudiants relativement à leurs prêts et bourses. Nous
autres, on reçoit beaucoup de plaintes à l'effet que ce n'est pas
adapté selon le mode de communication qui leur est accessible. Par
exemple, ce sont toutes des choses qui sont envoyées imprimées
et, souvent, les gens sont très fonctionnels en braille mais le
ministère ne prend pas les dispositions nécessaires pour faire la
transcription en braille ou sur cassettes de cette documentation-là.
C'est impossible pour ces gens-là d'être autonomes et même
d'aller de l'avant vers une plus grande maîtrise de leur situation
économique par rapport aux prêts et bourses. Il faut toujours
aller voir quelqu'un et se faire lire ce qui est dit. Je voulais simplement
ajouter ça.
La Présidente (Mme Hovington): Merci de ce renseignement
supplémentaire. M. le ministre, vous avez la parole.
M. Ryan: Oui, Mme la Présidente. C'est avec une sympathie
toute spéciale que nous recevons votre groupe aujourd'hui. Surtout, nous
essayons d'écouter et de comprendre les représentations que vous
voulez nous soumettre. J'ai beaucoup d'admiration pour les personnes souffrant
de handicaps majeurs qui décident d'entreprendre, malgré ces
handicaps, des études aussi poussées que certains d'entre vous
l'ont fait. Je pense que de nombreuses mesures déjà prises par le
gouvernement indiquent que le gouvernement est conscient de la
responsabilité de la collectivité à cet égard. La
collectivité vous doit un soutien et, même si ce soutien ne
s'exprime pas toujours sous des formes complètement satisfaisantes pour
vous, je pense qu'il doit continuer de s'améliorer. Une série
d'auditions publiques comme celle que tient la commission parlementaire de
l'éducation fournit une tribune tout indiquée pour la
présentation des problèmes qui vous sont propres. Je peux vous
assurer que nous avons pris connaissance avec beaucoup d'attention des
principales observations que vous vouliez nous soumettre.
Je vais me permettre de commenter briève- ment les principales
recommandations contenues dans votre mémoire, après quoi ma
collègue, la députée d'Anjou, vous adressera quelques
questions. Excusez-moi, je fais une erreur terrible, la députée
de Bourget.
Je vais vous faire une remarque générale, pour commencer,
qui va éclairer les remarques particulières. En concevant le
régime d'aide financière sous la forme renouvelée que nous
entendons lui donner, nous sommes partis du principe que tous les
étudiants sont considérés sur un pied
d'égalité, que nous ne faisons pas de distinctions, sauf celles
qui sont suggérées par les différentes opérations
administratives qu'il faut faire en cours de route, comme entre
résidents et non-résidents, des choses comme celles-là.
Mais nous avons cru que, si le régime d'aide financière aux
étudiants doit exister comme un régime à caractère
universel, c'est-à-dire accessible à tous moyennant certaines
conditions, il ne faut pas introduire des catégories
particulières à l'intérieur du régime.
Pour prendre un exemple concret, si une personne souffre d'une
infirmité majeure et qu'elle dispose, pour toutes sortes de raisons qui
sont inhérentes à son histoire ou à son statut personnel,
de ressources suffisantes pour subvenir à ses besoins de base, y compris
ses besoins en éducation, nous ne pensons pas que ce soit la
responsabilité automatique de la collectivité de lui verser des
allocations spéciales en sus de ce qui peut lui suffire.
Nous avons pensé, pendant une certaine période, que nous
pouvions multiplier les programmes a caractère général et
nous en venons de plus en plus à des programmes qui sont axés sur
les besoins des citoyens. Dans la mesure où des besoins spéciaux
existent pour des catégories particulières de citoyens, y
compris, au premier chef évidemment, les personnes placées dans
une situation comme celle que vous nous avez décrite, ces citoyens ont
droit à l'attention spéciale du gouvernement, mais nous
considérons que ça doit se faire par un programme particulier, un
programme qui vienne s'ajouter à celui qui est le programme de base pour
tout le monde.
Ça, c'est la règle que nous avons choisi de retenir pour
guider notre travail dans ce dossier. Par conséquent, il y a un certain
nombre des recommandations que vous nous adressez qui relèveraient
plutôt de ce programme spécial dont dispose le ministère
pour répondre aux besoins spéciaux de la catégorie
d'étudiants comme celle que vous représentez. On pourra discuter
tantôt de l'ampleur de ce budget spécial, des difficultés
qu'il peut soulever, mais il est là. Déjà, cette
année, il nous permet de fournir une assistance spéciale à
plus de 600 personnes handicapées, seulement dans le secteur où
vous oeuvrez. Je pense que dans votre texte vous parliez de 65 personnes. Nous
autres, nous en avons dénombré 148, dont 97 sont des
étudiants à temps plein, 22
sont des étudiants à temps partiel, 21 sont des personnes
inscrites à l'éducation des adultes et 8 personnes Inscrites au
primaire et secondaire.
À ce sujet, vous avez mentionné, tantôt, que
certaines personnes se sont vu refuser, cette année, l'accès
à une aide spéciale, étant en alphabétisation. Je
n'étais pas au courant de ça. Mes collaborateurs du
ministère m'informent que c'est vrai que quelques personnes se sont vu
refuser l'accès à l'aide financière suivant le programme
d'alphabétisation. La raison administrative qui a inspiré cette
décision, c'était que les cours d'alphabétisation ne sont
pas des cours conduisant à l'obtention d'un diplôme, et ça,
c'est le critère d'admissibilité qu'on a suivi jusqu'à
maintenant. Il y a eu quelques exceptions dans le passé, mais qui
n'étaient pas autorisées par le règlement. Je vais vous
dire ce matin que je suis content que vous m'ayez informé de ce
point-là et que nous allons le régler rapidement, parce que c'est
une chose absolument inadmissible. Je pense que nos collaborateurs ont agi dans
un bon esprit, en voulant être fidèles à la lettre des
normes qui nous régissent, mais je pense que le besoin de ces
personnes-là passe avant. Si on n'est pas capables de trouver une
solution à ce besoin-là, je ne mérite pas de rester
ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur. J'ai
toujours dit qu'il fallait que le ministre ait une certaine marge de souplesse
et vous m'en donnez une nouvelle preuve, puis ça ne prendra pas de temps
qu'on va trouver une solution à ce problème-là, je peux
vous en assurer.
M. Bouvart: Merci, M. le ministre. En plus, cette année,
c'est l'Année de l'alphabétisation. Ce serait comme dommage de
marquer ça d'une pierre noire.
M. Ryan: Je n'ai pas besoin de passer par l'UNESCO pour me rendre
compte qu'on a une responsabilité. Je vous le dis, j'aime bien l'UNESCO.
Mais, soyez assurés, en tout cas, qu'on va trouver une solution à
ce problème-là.
M. Bouvart: Merci beaucoup.
M. Ryan: Ensuite, je prends vos recommandations. Vous recommandez
qu'on exempte l'étudiant atteint d'une déficience fonctionnelle
majeure de la contribution exigée de l'étudiant. Mais pour la
raison que je vous ai donnée tantôt, je ne peux pas souscrire
à cette recommandation-là. Ce n'est pas de la mauvaise foi de la
part du gouvernement, mais ça fait partie aussi de la philosophie
générale d'intégration qui doit de plus en plus inspirer
l'action du gouvernement. J'appliquerais la même observation en ce qui
touche la contribution du conjoint et des parents, tout en reconnaissant avec
vous que ceux-ci encourent des obligations beaucoup plus lourdes que des
parents ou des conjoints ordi- naires. Il y aurait peut-être quelque
chose à examiner Je ne souscrirais pas à l'abolition de la
contribution, mais qu'il y ait lieu de faire un examen particulier du niveau de
la contribution attendue et des modalités. Je suis prêt à
le faire et je vais l'examiner, mais étant donné les orientations
générales que j'ai définies tantôt, je pense que je
ne pourrais pas aller beaucoup plus loin. J'appliquerais la même
observation à la demande visant l'exonération de l'obligation de
remboursement des prêts étudiants.
Vous avez une recommandation disant: II faudrait abolir la taxation qui
est imposée sur les allocations reçues au titre des besoins
spéciaux. Vous avez parfaitement raison. Nous avons fait des
négociations avec le ministère du Revenu au cours des derniers
mois. Il me fait plaisir de vous informer ce matin que ces négociations
ont donné des résultats heureux et que cette imposi tion va
cesser. Ça, je suis bien content que vous l'ayez rappelé à
notre attention, parce que c'est un problème que nous avions dans le
paysage depuis déjà quelques mois. J'avais héte que nous
puissions annoncer qu'il était réglé.
En ce qui regarde les personnes qui sont aux niveaux primaire et
secondaire, il y a quelque chose de spécial à rechercher. Ici, le
régime d'aide financière dont nous discutons s'applique aux
étudiants de niveau postsecondaire. Le programme de besoins
spéciaux dont j'ai parlé s'adresse aussi à des personnes
étudiant aux niveaux primaire et secondaire, parce qu'on ne voulait pas
avoir deux programmes, il n'y avait pas assez de personnes pour qu'on multiplie
la bureaucratie. Ça aurait coûté plus cher de
fonctionnaires que d'aide; ça n'aurait été pratique pour
personne. Mais on est en train d'examiner aussi du côté primaire
et secondaire les possibilités d'amélioration sous l'angle de
l'aide financière versée à des personnes comme vous.
Je pense que j'ai fait le tour des principales recommandations de votre
mémoire. Maintenant, je vais laisser à ma collègue, la
députée de Bourget, le soin de poursuivre l'échange,
à moins que... Peut être que vous pourrez commenter tout ça
lors de vos réponses.
La Présidente (Mme Hovington): Mme la
députée de Bourget, vous avez la parole.
Mme Boucher Bacon: Oui. Je remercie le Regroupement des aveugles
et amblyopes du Québec de venir à la consultation
générale sur le projet de loi 25, Loi sur l'aide
financière aux étudiants.
Alors, comme le ministre, M. Ryan, le mentionnait tout à l'heure,
je crois que ça prend beaucoup de courage, lorsqu'on a un handicap
visuel, pour pouvoir poursuivre des études et avoir la volonté
d'aller aussi loin que M. Ouellet qui, d'ailleurs, m'a très surprise. Je
vous en félicite, M. Ouellet.
Alors moi, dans les faits, ce que j'aimerais
savoir, c'est: Lorsqu'une personne ordinaire, sans handicap, a des
besoins pour aller aux études, il y a des mécanismes, soit un
prêt ou une bourse qui peut lui être accordé. Dans le cas
d'un handicapé visuel, je crois que l'office de la protection des
handicapés va vous donner, pour des besoins spécifiques, de
l'aide. Alors, quand vous recommandez au ministre de l'Éducation, soit
par des calculs ou soit par des exonérations d'obligation de rembourser
des prêts des étudiants... Quels sont vos besoins
spécifiques qui font que vous demandez ce genre de mutation? (12 h
30)
M. Fleury: Je voulais dire, au sujet de l'exonération, on
est... Au sujet de cas, sans entrer dans l'identité de personnes, de cas
particuliers, on est au courant que des personnes qui devenaient aveugles,
complètement aveugles, ont été exonérées de
rembourser la dette qu'elles avaient contractée au temps où elles
étaient voyantes. Parce que du fait que... Quand tu deviens aveugle dans
la vie, ça devient extrêmement difficile de rencontrer les
obligations de rembourser des prêts de plusieurs milliers de dollars. Je
comprends que ce n'est peut-être pas au ministère de
l'Enseignement supérieur et de la Science à rendre compte de tout
ce qui est discrimination systémique dans la société
québécoise. Par contre, je pense que ça prend des mesures
de discrimination positive qui sont de nature économique pour permettre
aux gens de ne pas devenir égorgés en même temps que de
devenir aveugles, surtout sur la question de l'exonération.
La contribution de l'étudiant, maintenant. Je pense que, comme
les considérants l'expliquent, le fait de ne pas pouvoir avoir
accès au marché du travail, mais d'une manière vraiment
exagérée au niveau des désavantages en matière
d'embauché... Il faut le reconnaître, ce n'est peut-être
pas, là encore, la prérogative majeure du ministère de
l'Enseignement supérieur et de la Science de voir à ce que les
employeurs veuillent embaucher des personnes aveugles ou non, mais,
au-delà des principes, la réalité demeure qu'il n'y a pas
d'employeurs qui veulent embaucher des personnes aveugles. Ce qui fait que, si
on a une contribution à mettre, puis de toute manière,
l'été passe et on n'a pas d'argent, cet argent-là, on ne
l'a pas. Ça fait que, quelque part, ça nous est soustrait de
l'aide qui pourrait nous être accordée.
La contribution du conjoint et des parents, maintenant. Je pense que le
conjoint, que ce soit le "chum", la blonde ou les parents, déjà,
ils agissent comme personnes qui supportent de différentes
manières et de plusieurs manières les personnes
handicapées visuelles dans leur cheminement. Puis ce n'est pas un
cheminement qui est si simple que ça pour les parents et pour le
conjoint. Je pense que d'y aller, en plus, en obligeant ces personnes-là
à souscrire d'une manière financière en plus du temps et
des énergies qu'elles investissent, ça pourrait certainement
être autrement. Vu qu'on ne parle pas d'un si grand nombre de personnes
que ça, je pense qu'au-delà du principe on devrait
reconnaître la réalité du concours de ces
personnes-là dans l'existence de gens qui sont fortement
défavorisés et très désavantagés au niveau
sensoriel et systémiquement discriminés par la seule nature du
fait qu'ils ne voient pas clair. Ça fait que le fait de demander une
contribution du conjoint ou des parents, à ce moment-là, je pense
qu'ils contribuent déjà en masse.
Ça aiderait davantage la personne handicapée visuelle sur
le plan économique à avoir le goût de poursuivre des
études malgré les difficultés énormes sur le simple
plan académique, de l'admission et de l'inscription et de tout ce que
vous pouvez imaginer en vous fermant les yeux et de retourner à
l'école. Je pense que ça prend des incitatifs de nature
économique et, que ce soit le gouvernement ou le ministère de
l'Enseignement supérieur et de la Science qui contribue, je pense que
tout le monde là-dedans peut faire son bout de chemin, de chaque
ministère, d'un ministère à l'autre, pour faire en sorte
que ces personnes puissent devenir des contribuables au lieu de rester des
bénéficiaires de l'aide sociale. En tout cas, c'est ça que
j'avais à répondre là-dessus, j'espère que
ça a répondu.
Mme Boucher Bacon: Oui, ça me convient. Remarquez qu'il ne
fallait pas que vous voyiez là-dedans une question piège,
c'était simplement pour vous permettre de vous exprimer, de sensibiliser
encore plus notre gouvernement, parce que, moi, je trouve louables vos
recommandations. Je crois que M. Ryan aussi a vu une ouverture d'esprit. Ce
qu'il peut donner, il le donne; ce qu'il ne peut pas, bien, c'est à nous
de faire le cheminement pour que vous puissiez avoir ce à quoi vous
prétendez.
Maintenant, je voulais féliciter aussi M. Ouellet de son
cheminement de 1985, 1986, 1987 et j'aurais peut-être une dernière
question, à savoir: M. Ouellet, si ça n'avait pas
été du coût quasi impossible de 4 $ ou 4,50 $ l'heure, vous
auriez trouvé une personne vraiment intéressante, vraiment
intelligible qui aurait pu vous transmettre les valeurs pour vous permettre de
passer votre Barreau. Est-ce que vous croyez qu'aujourd'hui vous seriez en
mesure d'avoir une position d'avocat et de pratiquer?
M. Ouellet: Définitivement. J'espère, en tout cas,
et je l'espère sincèrement que l'État
québécois n'a pas investi en moi, à partir des
années 1981 aller jusqu'à 1985, pour que je sois un futur
prestataire d'aide sociale. Si tel est le cas, bien là, je suis
désolé, je vais faire autre chose. Non! Je crois que si j'ai
réussi le bac en droit, il n'y a aucune raison et alors aucune raison au
monde pour que je ne puisse pas faire mon Barreau et pratiquer, à titre
d'avocat, ou, en fin de compte,
occuper une position de même nature. Je n'y vois vraiment aucune
contrainte physique ou encore de quelque nature que ce soit.
Maintenant, vous me félicitiez tantôt, je vous en remercie,
mais ça ne s'arrête pas là. Ça fait depuis septembre
1985 que je suis admissible à l'école du Barreau et on se
retrouve, en février 1990, en mars 1990, le 1er. Il n'y a pas eu grand
cheminement qui s'pst fait depuis mai 1985, à ce niveau-là. Donc,
à un moment donné, moi, j'ai beau y mettre de la bonne
volonté, mais il n'y a à peu près pas de moyens existants
pour y arriver.
La Présidente (Mme Hovington): Merci.
Mme Boucher Bacon: Je comprends bien. Je vous remercie beaucoup.
Je vais essayer de voir à ce que vous puissiez arriver au Barreau et
à bien pratiquer votre futur métier. Merci.
La Présidente (Mme Hovington): M. le ministre, vous voulez
ajouter quelque chose.
M. Ryan: Si vous me permettiez d'ajouter peut-être deux
précisions. Sous le régime actuel, vous avez accès
à la bourse, mais vous n'êtes pas admissible au prêt,
d'après ce que nos collaborateurs me disaient. Sous le nouveau
régime, il y aura l'admissibilité au prêt également,
qui va changer des choses, évidemment.
En ce qui touche la contribution minimale, lorsqu'une personne est
empêchée de travailler en raison d'un handicap, à ce
moment-là, il n'y aura pas de contribution minimale d'exigée,
dans ces cas-là. Je ne sais pas si ça répond
complètement à la situation que vous avez évoquée,
mais ce sont des aspects du nouveau régime que je voulais souligner.
M. Fleury: J'aurais une question à poser. De fait, la
plupart des mesures qui concernent les personnes handicapées dans le
projet de loi sont de nature discrétionnaire. Maintenant, il y avait
quelque chose qui concernait le fait qu'un étudiant à temps
partiel soit considéré comme un étudiant à temps
plein et puisse bénéficier de l'aide financière du
gouvernement comme s'il était à temps plein, s'il est inscrit
à deux ou trois cours. Est-ce que c'est exact?
M. Ryan: Oui. Dans le projet de loi, il y a une section qui
prévoit l'institution d'un programme spécial pour les
étudiants à temps partiel. Maintenant, nous avions prévu,
dans l'énoncé d'orientations, certaines modalités de ce
programme qui donnent lieu à des critiques nombreuses, à des
difficultés structurelles aussi. Il faut revoir ça de plus
près, il faut préciser davantage la nature possible de ce
régime, mais ça ne sera pas un régime qui consisterait
à traiter l'étudiant à temps partiel comme un
étudiant à temps complet, mais qui lui donnerait accès
à une forme d'aide centrée sur les coûts occasionnés
par les activités directement reliées aux études.
Ça va prendre un certain temps avant qu'on puisse l'instaurer parce
qu'on n'est pas prêt à le définir tout de suite, dans
toutes ses modalités Ça va prendre peut-être, je ne le sais
pas, une certaine période.
On me signale que, dans le cas des étudiants handicapés -
je m'excuse, j'oubliais cet élément-là - pour eux, celui
qui est étudiant à temps partiel pourrait être
considéré comme étudiant à temps plein. Ça,
c'est une disposition...
La Présidente (Mme Hovington): Ça répond
à votre question?
M. Ryan: ...qui est dans l'énoncé d'orientations et
que j'oubliais.
M. Fleury: Je vous remercie beaucoup et je tiens à
féliciter le gouvernement de nous rendre non éligibles au
prêt. Je pense que la nature même de la déficience fait que
ce prêt-là, il serait, de toute façon, difficile à
rembourser et presque impossible à rembourser.
M. Ouellet: Si on prend pour acquis... Si on considère,
pour l'instant, avec les statistiques qu'on a, que plus de 90 % de notre
population n'a actuellement pas d'emploi, je me demande comment les gens
feraient pour rembourser le prêt.
M. Picard: À moins de rendre les mesures plus coercrtives
en ce qui regarde l'embauche des personnes handicapées.
La Présidente (Mme Hovington): M le ministre, si vous
voulez compléter votre réponse.
M. Ryan: Oui. Je voudrais simplement dissiper une
ambiguïté Là, vous tombez sous le régime
général des prêts et bourses avec les modifications que
nous apportons, donc vous seriez admissibles au prêt d'abord, comme tout
le monde, et ensuite à la bourse. Je ne veux pas qu'il y ait de
malentendu. Il y aurait les mesures spéciales, en plus, pour les besoins
spéciaux. Mais je crois comprendre que votre position, c'est exactement
le contraire.
M. Ouellet: C'est exactement le contraire. J'imagine
difficilement comment une personne sans emploi pourrait vous rembourser un
prêt après ses études, à moins qu'on ne lui
garantisse du travail après. Mais je pense que ça ne
relève peut-être pas nécessairement des obligations du
ministère de trouver des emplois à des personnes quand elles
finissent leurs études. Donc, je ne vois vraiment pas, à moins de
consolider des faillites, vraiment pas comment.
La Présidente (Mme Hovington): M. le ministre.
M. Ryan: En tout cas...
M. Fleury: Juste pour clarifier. Vous dites que... Moi, j'ai fait
des études er, arts plastiques, à l'Université du
Québec, l'an dernier. J'ai eu une bourse de 5300 $. Je n'ai pas de
prêt à rembourser. Est-ce que vous dites qu'à
présent j'aurais un prêt à rembourser?
M. Ryan: Oui, c'est ça qu'est l'économie du nouveau
régime.
M. Fleury: C'est ça l'économie?
M. Ryan: Oui. Je dis l'économie en ce sens que c'est la
structure du nouveau régime. C'est à ça que ça
conduit parce que, si une personne a un handicap, mais qu'en même temps
elle a les ressources matérielles disponibles soit de par sa famille ou
en raison d'autres éléments qui échappent à notre
connaissance ou à notre contrôle, c'est normal qu'elle assume une
obligation de prêt comme une autre. Ce n'est pas parce qu'elle est
handicapée qu'elle est nécessairement pauvre.
M. Fleury: Mais elle ne doit pas être riche du fait que ses
parents ou son conjoint sont autonomes financièrement. Si la personne
n'a pas son autonomie financière... Je n'ai pas lu ça dans le
projet de loi. C'est une très mauvaise surprise.
M. Ryan: Oui.
M. Fleury: Je trouve que c'est totalement
déconnecté de la réalité.
M. Ryan: Très bien. Mais je suis content qu'on le
précise quand même. Je vais regarder la question de nouveau, de
notre côté. On se rencontre pour voir clair dans les implications
du projet de loi, on va l'examiner attentivement, c'est pour ça que je
voulais que ce soit net et qu'il n'y ait pas de malentendu.
La Présidente (Mme Hovington): M. Ouellet.
M. Ouellet: Je suis bien content qu'on en parle, ce matin, parce
que c'est la première nouvelle que j'en ai. Je suis très heureux
qu'on en parle pour justement essayer de faire la lumière
là-dessus un peu. Comme je le disais tantôt, je me demande comment
les gens... En tout cas, moi, personnellement, je me demande comment je le
rembourserais, mon prêt. Qu'est-ce que je serais obligé de faire?
Je ne le sais pas. Je n'en ai aucune idée.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. Est ce que
vous...
M. Ryan: Oui, je vais ajouter juste un élément.
À supposer qu'une personne ait contracté une dette par la voie de
l'emprunt sous l'empire du régime d'aide financière, qu'elle
termine ses études, pendant qu'elle fait ses études, elle ne
rembourse pas son prêt; c'est le gouvernement qui paie de
l'intérêt là-dessus et le remboursement va après.
À supposer qu'elle ait maintenant terminé ses études et
qu'elle n'ait pas d'emploi, encore là, c'est le gouvernement qui paie de
l'intérêt sur la dette. Et, si elle n'a pas d'emploi, cette
personne-là, c'est le gouvernement qui assume la dette auprès de
l'institution financière. Mais si elle a des revenus et si elle a les
ressources pour s'acquitter de ses obligations, je ne pense pas qu'on agirait
dans le respect de la dignité des personnes en disant: Non, on fait une
exemption ou une exonération générale.
M. Ouellet: Sur le régime général, j'aurais
peut-être une petite question juste d'intérêt.
La Présidente (Mme Hovington): Rapidement parce que le
temps est maintenant...
M. Ouellet: Oui, oui. Dans le régime
général, les personnes...
La Présidente (Mme Hovington): ...vous prenez du temps sur
l'Opposition.
M. Ouellet: ...qui ont terminé leurs études et qui
sont prestataires d'aide sociale, est-ce qu'elles doivent rembourser leur
prêt?
M. Ryan: Pardon?
M. Ouellet: Les personnes qui sont sous le régime
général actuellement, en 1990, qui sont maintenant prestataires
d'aide sociale, qui ont gradué, admettons, en mai 1989 et qui sont
présentement à la recherche d'un emploi et prestataires d'aide
sociale, est-ce que ces personnes remboursent actuellement leur prêt?
M. Ryan: Non. M. Ouellet: Non?
M. Ryan: Non. C'est le gouvernement qui rembourse a leur place,
quand ils sont sur l'aide sociale.
M. Ouellet: C'est ce que je voulais savoir.
M. Ryan: Oui, c'est ça.
La Présidente (Mme Hovington): M. le député
d'Abitibi-Ouest, vous avez la parole. (12 h 45)
M. Gendron: Oui, je voudrais vous remercier
chaleureusement d'être venus. C'est toujours un peu difficile
parce que ça fait la preuve, quand on est obligé d'apporter des
commentaires particuliers dus à la déficience que vous avez, que,
contrairement aux volontés répétées des
gouvernements, vous êtes loin encore de la notion de chance égale.
Je me rappelle la publication d'une réflexion sur les personnes
souffrant d'un handicap, que ce soit un handicap à caractère
général ou un handicap visuel, il y avait une belle
réflexion qui disait: On veut donner aux handicapés, quelle que
soit la nature de leur handicap, des chances égales. J'ai l'impression
que ça deviendra vrai quand on vous considérera comme tout le
monde et qu'on aura les mêmes commentaires qu'à tout le monde.
Là, on dit: On vous accueille avec sympathie. Je ne fais pas de
reproches, je fais juste constater que ça fait une situation qui est
troublante en soi.
À tout événement, si on avait joué les
règles comme d'habitude, rapidement, j'aurais dit: Si c'est le
gouvernement - et c'est le cas - qui est très interpellé dans ce
mémoire-là, moi, je n'aurais pas d'objection, après les
quelques commentaires que je veux faire, à vous laisser la parole pour
vous donner l'occasion de clarifier avec le ministre certaines situations qui
m'ap-paraissent confuses Que le ministre vous indique tout de go qu'il aime
bien vos recommandations, mais qu'il ne peut pas en tenir en compte - parce que
c'est à peu près ce qu'il a dit - dans le régime
universel, c'est un choix qu'il peut faire mais, au moins, il me semble que
vous êtes en droit de questionner le choix qu'il devrait faire, compte
tenu de l'insignifiance, entre guillemets - ce n'est pas un jugement que je
porte, ça veut dire peu significatif, insignifiant - du nombre de
concernés. Alors, comme il n'y a à peu près qu'une
centaine, quelque 100 personnes concernées, le ministre devrait
être très ouvert et très attentif aux suggestions que vous
lui faites parce qu'elles sont opportunes, requises, elles correspondent
à une situation de fait bien décrite.
Quand M. Ouellet nous dit: Écoutez, moi, j'ai fait mon
baccalauréat en droit et on m'empêche d'être avocat.. Et
c'est ça, la réalité, parce qu'il n'y a pas de mesures
particulières qui auraient pu lui permettre d'avoir l'assistance
financière dont il avait besoin à ce moment-là. Je suis
convaincu que le ministre conviendra avec moi qu'il s'agit d'un mauvais choix
de société. C'est un mauvais choix de société.
C'est une mauvaise utilisation des fonds publics. C'est évident qu'on
utilise mal les fonds publics. Si, vous aussi, vous représentez un
coût de x milliers de dollars et, à la toute fin, l'État ne
se préoccupe pas que cet investissement que l'État a mis en vous,
et que vous, vous avez eu l'intelligence, la sagesse, la détermination
et le courago, avec toutes les difficultés que vous avez, de vous rendre
là et on dit: Bien, écoutez pour des raisons de livres - parce
que c'est un peu ce qu'on nous a dit - certains cons jouent le livre,
indépendamment du concret. Alors, moi, je ne vais pas plus loin, sauf
dire deux remarques: J'ai bien pris connaissance de vos recommandations. Elles
sont pertinentes Et on n'a pas le droit, il me semble, de ne pas les prendre en
compte quand on sait que ça ne serait pas terriblement coûteux
pour l'État québécois mais combien respectueux de votre
situation réelle. Écoutez, les embûches pour des
étudiants qui n'ont, selon leur prétention, pas de
déficience sont déjà tellement nombreuses qu'imaginez,
pour ceux qui ont des déficiences observables, qu'elles soient visuelles
ou autres, il faut absolument réduire, atténuer ces
embûches additionnelles. Et vos cinq... Il y en a six mais, je veux dire,
il y en a cinq, plus particulièrement, qui retiennent
complètement mon attention parce que je considère qu'il s'agit
là de demandes complètement légitimes et opportunes et que
si, pour des raisons d'économie - qui est un beau grand terme -
générale d'une pratique on ne peut les considérer à
l'intérieur du régime général... Ça, c'est
le gouvernement qui décide mais, à tout le moins, qu'il le
considère à l'intérieur de dispositions spécifiques
et particulières vous concernant pour que vous ayez au moins ces
applications-là
Donc, moi, je conclus et, pour le temps qui m'est imparti, puisqu'il me
reste du temps, si vous voulez le prendre... Jocelyne aurait peut-être
une question, ma collègue députée de Terrebonne. Je fais
juste vous indiquer que, moi, en ce qui me concerne, vous devriez être
comme vous l'avez été: incisifs auprès du gouvernement et
exigeants. Parce que je ne trouve pas que vous l'êtes fondamentalement,
compte tenu des difficultés que présente pour vous un handicap
visuel et, en particulier, au chapitre de la contribution du conjoint.
Moi-même ayant une couple de personnes très proches de ma famille,
je sais combien d'efforts ont été faits par des membres de la
famille immédiate pour soutenir, aider des personnes qui souffrent d'un
handicap visuel. Et, déjà là, il y a une contribution
beaucoup plus forte que celle que mécaniquement on voudrait continuer
d'exiger de vous parce qu'il y a une formule qui l'exige. Et, en ce
sens-là, j'espère que votre courage et votre détermination
réussiront à convaincre le gouvernement actuel, le ministre de
l'Éducation qu'il y a lieu d'instaurer des mécanismes pour que
vos demandes soient agréées.
La Présidente (Mme Hovington): Mme la
députée de Terrebonne.
Mme Caron: Merci, Mme la Présidente Très
brièvement, votre contribution est essentielle à cette commission
parce qu'elle nous fait vraiment prendre conscience des besoins particuliers
vécus par les personnes que vous représentez et qu'on est souvent
porté à oublier Je voudrais juste renforcer deux points. Compte
tenu du nombre de
personnes touchées, je crois sincèrement que les montants
que la société vous accorderait pour répondre à vos
recommandations seraient rapidement récupérés à
long terme, à cause de la formation que vous pourriez aller
chercher.
Le deuxième point que je voudrais souligner davantage, c'est
lorsqu'on parle de la contribution des parents. Vous dites qu'ils assument
déjà des responsabilités importantes; moi, j'irais plus
loin. Ils ne font pas qu'assumer des responsabilités importantes, ils
épargnent même des coûts à la société.
Je vais jusque-là. Ce n'est pas seulement assumer, mais épargner.
On vous laisse le temps pour vos autres recommandations.
M. Gendron: Oui, à vous la parole.
La Présidente (Mme Hovington): C'est à vous. M.
Fleury.
M. Fleury: J'aimerais aussi parler de l'égalité. Je
ne considère pas qu'une personne handicapée visuelle est
égale à une personne clairvoyante ou voyante parce qu'elles ont
toutes deux un niveau d'endettement égal. Je pense que ça prend
aussi la capacité de regarder des manières de rembourser
égales. On parle plus de mesures d'équité que de mesures
d'égalité, parce que, quelque part, une personne qui voit et une
personne qui ne voit pas, ça ne se compare pas.
M. Gendron: Rapidement, parce que c'est moi qui ai
évoqué cette situation. Je ne sais ce qui est arrivé, mais
il me semble que vous l'avez pris à l'envers. C'est justement...
M. Fleury: Je parle plus de ce que M. Ryan disait
tantôt...
M. Gendron: O. K.
M. Fleury:... à savoir qu'on soit, nous autres, mis sur le
même pied que tout le monde au sujet de rembourser des prêts.
M. Gendron: Là, vous avez bien compris. M. Fleury:
O. K.
M. Gendron: Donc, vous faites bien de questionner cet aspect,
ça n'a pas d'allure.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, M. Fleury, vous avez
la parole. Vous avez encore une question à poser au ministre
peut-être ou un éclaicissement à demander?
M. Ouellet: C'est vraiment un éclaircissement.
L'étudiant qui poursuit des études postsecondaires, qui est
clairvoyant ou qui est voyant, peut travailler chez Steinberg la fin de
semaine. J'aimerais aller empaqueter des sacs, mais Steinberg ne m'engagera pas
et Provigo non plus.
Donc, le revenu d'appoint que l'étudiant va chercher avec un
travail complémentaire, moi, je ne peux pas aller le chercher. Je me
ramasse avec un revenu qui est moindre que mon voisin. Donc, si on parie
d'égalité, je ne comprends plus.
La Présidente (Mme Hovington): M. Fleury.
M. Fleury: Est-ce que c'est une intention affirmée du
gouvernement de faire en sorte que des personnes handicapées visuelles
soient sur le même régime de prêts que tout le monde?
La Présidente (Mme Hovington): M. le ministre.
M. Ryan: J'ai répondu tantôt.
M. Fleury: Quand, M. le ministre, va-t-on voir les mesures
discrétionnaires écrites sur papier pour que je puisse informer
les personnes handicapées visuelles de l'existence de telles mesures?
Parce que, dans le projet de loi, il n'a jamais été question de
ça et nous allons nous y opposer vertement.
La Présidente (Mme Hovington): Est-ce qu'il y a autre
chose?
M. Fleury: Je veux savoir où sont les mesures
discrétionnaires pour que je puisse informer les gens. Je veux savoir ce
qui en est du statut des personnes handicapées visuelles en situation
d'études. J'aimerais avoir des écrits de ça. Je veux les
publiciser. J'ai un bulletin d'information bimestriel. Je veux faire
connaître ces mesures aux gens. Je pense que c'est important,
l'éducation, et je pense que c'est important d'avoir des mesures
d'équité...
M. Ryan: C'est peut-être l'occasion...
M. Fleury:... concrètes et réalistes en termes
d'accroître le niveau de scolarité de ces personnes.
La Présidente (Mme Hovington): M. le ministre. Vous avez
la parole.
M. Ryan: Déjà, pour la présente
année, les sommes consacrées à ces besoins spéciaux
des personnes handicapées et plus particulièrement des personnes
handicapées visuelles s'élèvent à plusieurs
centaines de milliers de dollars. Lorsque nous déposerons ies
crédits du gouvernement, dans quelques semaines, je serai en mesure
d'indiquer avec précision les sommes prévues aux fins de ce
programme pour l'année 1990-1991. Ça me fera plaisir de vous
envoyer une note d'information là-dessus, pour que vous puissez Informer
vos membres.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. Est-
ce qu'il y a quelque chose d'autre?
M. Fleury: Juste un commentaire. Je pense qu'on parlait tout
à l'heure d'environ 140 personnes handicapées visuelles qui
étaient aux études au Québec.
M. Gendron: 138, oui.
La Présidente (Mme Hovington): Le ministre va ressortir le
chiffre exact.
M. Fleury: Je pense que, de fait, ce nombre est appelé
à décroître dramatiquement si les gens sont contraints
à rembourser des prêts et à voir des agents de
réclamation qui viennent sonner à toutes les deux minutes.
Puis je reviens sur le fait de l'exonération pour dire que le
ministère a, de fait, procédé à ces
exonérations. Ça fait que, mol, je veux voir ces
mesures-là écrites. Je veux que les aveugles soient
traités de manière égale, au moins entre eux autres, comme
ç'a déjà été fait. Je pense que ça
mérite d'être dit, je pense que ça mérite
d'être écrit et je pense que ça mérite d'être
réaffirmé, ça. C'est juste une mesure
d'équité sociale.
La Présidente (Mme Hovington): M. le ministre.
M. Ryan: J'ai pris bonne note de votre requête
légitime et, dès que les crédits auront été
déposés, nous serons en mesure de fournir les explications sur
les modalités suivant lesquelles cette aide-là sera disponible
pour la prochaine année.
M. Gendron: M. le ministre, si vous permettez, très
amicalement et sincèrement, il me semble que la demande ne porte pas
uniquement sur les chiffres. La demande qu'il vous fait - je pense que c'est la
quatrième fois qu'il la répète - c'est: Y a-t-il moyen
que, comme ministre, vous preniez l'engagement de faire connaître par
écrit les règles particulières...
M. Ryan: C'est ça que je viens de répondre. C'est
à ça que je viens de répondre.
M. Gendron: Non, vous venez de répondre que, lors des
crédits, vous allez faire connaître les chiffres, les sommes
d'argent que vous mettrez là-dessus.
M. Ryan: Ah non! Puis les modalités suivant lesquelles on
pourra avoir accès à ce programme.
M. Gendron: Non, mais puisque, M. le ministre,
présentement, il y a déjà des handicapés visuels
qui bénéficient d'une forme d'aide...
M. Ryan: Ils le savent très bien.
M. Gendron: Mais s'ils le savaient très bien, ils ne nous
demanderaient pas les règles sur lesquelles seront basées
l'analyse particulière de leur situation.
M. Ryan: Non, je pense que les personnes concernées sont
très bien informées.
M. Gendron: Ce n'est pas ce qu'on entendait, mais ce n'est pas
grave.
M. Ryan: Oui, puis on les tiendra informées avec encore
plus de...
M. Fleury:... d'information. M. Ryan: Pardon!
M. Gendron: Ça fait trois semaines que j'entends des
faussetés, ça fait que ça ne me surprend pas.
La Présidente (Mme Hovington): Excusez-moi, c'est le
ministre qui avait la parole.
M. Gendron: C'est parce que je la lui ai donnée.
M. Ryan: Regardez, ces cas-là, j'en ai, en tout, 148. Ils
ne sont pas arrivés par accident au ministère. Ils sont
arrivés par les voies de l'information qui leur était accessible,
de toute évidence. Puis s'il y avait des cas qui n'avaient pas eu
accès à cette aide, je vous serais bien reconnaissant de me les
signaler.
La Présidente (Mme Hovington): M. Fleury.
M. Fleury: J'aimerais revenir sur le... On parle beaucoup
d'égalité depuis tout à l'heure. Puis, moi, j'ai
noté, au début - puis personne n'a relevé ça - le
fait que les gens, on ne communique pas avec eux autres dans le mode de
communication qui leur est accessible. Je pense que la première des
choses, puis le minimum, c'est d'au moins envoyer la documentation relative aux
prêts et bourses, de même qu'aux besoins particuliers, de
même que toutes les mesures discrétionnaires, écrites ou
non écrites, dans un mode de communication accessible aux gens.
Si les gens lisent le braille, que le ministère de l'Enseignement
supérieur et de la Science procède à un envoi en braille
de cette documentation. Ça, c'est une mesure d'égalité.
Nous autres, on envoie un bulletin d'information sur cassettes, en braille et
en gros caractères. Je pense que c'est strictement au niveau dela décence de pouvoir communiquer dans un mode de communication
faisant en sorte que les gens ne soient pas obligés d'aller solliciter
l'assistance d'une tierce personne exprès pour se faire lire ce qui leur
est adressé à eux spécifiquement,
pour la poursuite de leurs études à eux, pas de la
personne qui est appelée, à laquelle on dit: Veux-tu me lire
telle affaire, là, je ne suis pas capable de la lire. Ça
s'adresse à moi, ça. C'est mon argent, ça. Ce sont mes
études que je poursuis. C'est une question d'avancer dans la vie
aussi.
La Présidente (Mme Hovington): M. le ministre.
M. Ryan: Vous savez que le gouvernement, pour l'adaptation des
instruments pédagogiques aux besoins des handicapés visuels,
dépense déjà des sommes considérables. Les
coûts sont très élevés et bien au-delà de ce
que nous pouvons discuter ce matin. Puis je vous dis que, si nous faisons face
à des besoins qui concernent, disons, 200 personnes dans le secteur
postsecondaire, il y a des moyens d'assurer que l'information va être
transmise. Ce ne sont pas nécessairement des publications de choses qui
vont être imprimées jusque dans des détails non plus. Il y
a d'autres moyens souvent plus directs et plus efficaces.
Je vous dis que l'information à laquelle vous avez droit sera
mise à votre disposition. Et je ne suis pas pour prendre d'engagement
quant aux modalités de transmission de cette information-là ce
matin. Vous le comprendrez facilement. Mais vous avez votre association. En
plus de ça, s'il y a des choses qui ne sont pas claires, vous nous le
signalerez puis nous allons essayer de corriger ces choses
immédiatement.
J'ajoute, pour l'information des membres de la commission et des
délégués qui viennent nous voir, que nous venons justement
de publier, au ministère de l'Enseignement supérieur et de la
Science, ces jours derniers, une brochure intitulée "Les personnes
handicapées inscrites dans les universités
québécoises, situation et perspectives". On a un tour d'horizon
très détaillé de la situation qui existe à ce point
de vue là. Vous allez en prendre connaissance, puis s'il y a des
remarques à faire quant à des améliorations possibles,
nous serons toujours très intéressés à en prendre
connaissance.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. Alors, en guise de
conclusion, M. le député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Merci beaucoup encore une fois. Mais je pense que
vous êtes en droit d'insister. C'est moi qui ai évoqué,
effectivement, qu'on n'est pas dans un contexte de chances égales si on
ne permet pas, à tout le moins, de tenir compte spécifiquement,
par une évaluation plus fine, de votre situation. Manifestement, les
handicapés souffrant de déficience visuelle, quand on parle de
poursuite d'études, ne sont pas dans les mêmes conditions que la
clientèle régulière et, dans ce sens-là, vous avez
des droits que, normalement, vous vous devez de revendiquer. C'est ce que vous
êtes venus faire et j'espère que le gouvernement aura une
écoule favorable parce que les besoins sont réels, facilement
compréhensibles, puis j'espère qu'il y aura des suites
concrètes qui seront données.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. M. le ministre.
M. Ryan: Merci, encore une fois, puis on va examiner vos
représentations avec une attention toute particulière. Veuillez
compter sur la compréhension du gouvernement pour faciliter la
réalisation de l'objectif très noble dont vous êtes venus
nous entretenir ce matin, qui est celui de l'accès aux études,
à tous les niveaux, pour les personnes pouvant être
affectées d'un handicap visuel.
La Présidente (Mme Hovington): Merci au Regroupement des
aveugles et amblyopes du Québec, au nom des membres de la commission de
l'éducation, de votre mémoire. La commission de
l'éducation suspend ses travaux, donc, jusqu'à 15 heures, cet
après-midi.
(Suspension de la séance à 13 h 2)
(Reprise à 15 h 10)
Le Président (M. Gobé): Si vous voulez reprendre
place, la commission de l'éducation va reprendre ses travaux concernant
la consultation générale sur le projet de loi 25, Loi sur l'aide
financière aux étudiants. À l'ordre, s'il vous
plaît, M. le député. J'appellerais maintenant l'Association
québécoise des parents d'enfants handicapés visuels, s'il
vous plaît.
J'aimerais informer les membres de la commission et les témoins
qui vont venir déposer, que M. le ministre de l'Éducation sera en
retard de quelques minutes. Il a actuellement une rencontre importante. Il m'a
fait savoir qu'il allait nous rejoindre dans les meilleurs délais. Je
vous demanderais donc de bien vouloir vous présenter et de
procéder à l'explication de votre mémoire.
Association québécoise des parents
d'enfants handicapés visuels
Mme Laurin (Élyse): D'accord, merci monsieur. Je saluerais
M. le ministre, mais je le ferai tantôt.
Mesdames, messieurs, je me présente: Élyse Laurin,
directrice générale de l'Association québécoise des
parents d'enfants handicapés visuels. J'aimerais présenter des
parents de l'Association, mais d'abord, Marc Frechette, un jeune
handicapé visuel de 19 ans qui fréquente
présentement le collégial, il est en deuxième
année. Ensuite, j'aimerais présenter son père, Normand
Frechette, qui est aussi vice-président de l'Association. Ces deux
personnes viennent de la région de Trois-Rivières. J'aimerais
finalement présenter Huguette Turcotte, mère de Valérie,
14 ans, qui est atteinte de cécité totale et qui est
intégrée à l'école secondaire ici, dans la
région de Québec.
Le Président (M. Gobé): Mme Laurin. MM. Frechette
et Mme Turcotte, je vous souhaite la bienvenue à cette commission et je
vous passe maintenant la parole pour présenter votre mémoire.
Mme Laurin: D'accord. Je vais faire une brève
présentation de l'organisme, ensuite chacun de nous prendra la
parole.
L'AQPEHV est un organisme provincial de parents d'enfants
handicapés visuels qui existe depuis 1980. Nous sommes donc, cette
année, dans notre dixième anniversaire de fondation.
L'Association concentre ses efforts sur la promotion et l'entraide. Elle vise
particulièrement la mise sur pied et le maintien de services publics de
qualité pour l'ensemble des jeunes déficients visuels de 0
à 21 ans, et ce, partout au Québec.
L'AQPEHV répond aux besoins d'information des parents. Elle
publie cinq fois par année un bulletin de liaison qui s'appelle "Le
Clairvoyant" et qui contient nouvelles, opinions et communiqués. Elle
favorise aussi les rencontres de parents. En 1986, elle a publié le
guide "Mémoires Vives" à l'intention des parents et de toute
personne concernée par l'avenir des enfants déficients
visuels.
L'AQPEHV intervient auprès des établissements et des
ministères pour faire mieux connaître les besoins des jeunes
qu'elle représente. Les problématiques qui retiennent plus son
attention sont celles qui se rapportent à la scolarisation des enfants
déficients visuels et aux services d'adaptation et de
réadaptation, dont la stimulation précoce.
En 1987-1988, l'AQPEHV a été très impliquée
pour avoir une meilleure disponibilité du matériel scolaire
adapté nécessaire pour tous les élèves
fonctionnellement aveugles et certains élèves fonctionnellement
voyants, c'est-à-dire, d'avoir accès à du matériel
scolaire adapté, braille ou autre, et/ou à du matériel
agrandi. L'AQPEHV a d'ailleurs pris une position là-dessus.
En 1988-1989, elle a aussi été très
impliquée dans l'organisation des services de soutien
suprarégionaux à l'école régulière. Et tout
récemment, en 1989, l'AQPEHV a été très
impliquée dans le projet de loi 107, la Loi sur l'instruction
publique.
Selon les données de 1988 fournies par les centres d'adaptation
et de réadaptation, il y aurait, au Québec, près de 1000
enfants de 0 à 18 ans dont la vision correspond à la
définition légale du handicapé visuel. Dans ce groupe de
1000 enfants, la majorité sont des enfants appelés
fonctionnellement voyants. Ces enfants utilisent leur vision. Ils peuvent lire
et écrire l'imprimé conventionnel, mais, selon leur vision, ils
devront utiliser des aides optiques pour la vision de loin ou la vision de
près - on peut utiliser un télescope, une loupe, etc. - et, dans
certaines situations d'apprentissage, des caractères d'imprimerie
agrandis.
Le nombre d'enfants fonctionnellement aveugles est beaucoup plus
restreint. On a évalué, en 1988, le nombre d'enfants
fonctionnellement aveugles qui suivent les programmes académiques
réguliers dans nos écoles québécoises,
spécialisées ou régulières, à moins de 50
enfants. Ces enfants n'ont aucune vision ou n'utilisent pas le peu qu'il leur
reste. Ils ne peuvent donc pas lire l'imprimé courant et devront
utiliser des médias substituts comme le braille, les graphiques en
relief et des aides technologiques. Aussi, ils devront faire appel à des
preneurs de notes ou à des lecteurs.
La plupart de ces enfants ont droit à des aides visuelles, dans
le cadre d'un programme qu'on appelle AMEO, Aide mécanique,
électronique ou optique, qui est distribué par la Régie de
l'assurance-maladie du Québec. Cependant, ils n'ont pas d'autres recours
pour recevoir une deuxième aide visuelle nécessaire à la
poursuite de leurs études.
Je laisserais maintenant la parole à Huguette Turcotte.
Le Président (M. Gobé): Madame.
Mme Turcotte (Huguette): Oui, c'est moi, monsieur.
Le Président (M. Gobé): Mme Turcotte, vous avez
maintenant la parole.
Mme Turcotte: M. le Président, mesdames, messieurs, ayant
vécu très difficilement la situation où ma fille, qui est
intégrée en sixième année du primaire, n'avait pas
accès à un deuxième versabraille, je peux vous assurer que
l'aide financière qui nous avait été allouée par le
ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science
était capitale pour l'intégration scolaire d'une jeune enfant
aveugle, et ceci, tant au primaire qu'au secondaire.
Sachez d'abord qu'un appareil comme le versabraille permet à
l'élève aveugle de vaquer à ses devoirs et
responsabilités d'étudiant d'une façon normale et non
marginale. Je précise ici la grande quantité de travaux scolaires
que l'enfant aveugle a à faire par les soirs, ce qui l'oblige à
trimballer son versabraille. L'importance de cet appareil n'est plus à
démontrer et ses preuves sont amplement laites.
Au primaire et au secondaire, le ministère de l'Enseignement
supérieur et de la Science doit continuer d'aider les jeunes
élèves aveugles à se procurer un deuxième
versabraille pour des raisons pratiques, humaines et économiques.
D'abord, du côté pratique, il est impossible pour un jeune enfant
du primaire ou encore du secondaire de transporter quotidiennement de la maison
à l'école, et vice versa, un sac rempli de livres scolaires en
braille et un versabraille, car le poids total se situe aux environs de 35
à 40 livres pour le versabraille, compte tenu aussi de la
fragilité de l'appareil, car c'est un ordinateur, et de telles
manipulations provoqueraient des bris fréquents.
Dans notre cas, nous avons fait réparer le versabraille trois
fois en l'espace de cinq mois à cause des problèmes dus au froid
ou des problèmes de manipulations fréquentes. En plus du risque
de bris par manipulations fréquentes, le jeune élève
aveugle risque de tomber à cause de la surcharge de poids, surtout en
hiver, à cause de la présence de la neige et de la glace. De
plus, une telle surcharge peut, selon les spécialistes, provoquer des
problèmes de posture, particulièrement en période de
croissance.
Par ailleurs, nous considérons que c'est une lourde
responsabilité pour un élève du primaire ou du secondaire
d'assurer le transport et la protection d'un ordinateur dans ses
déplacements en dehors de l'école. Dans le cas de ma fille, elle
devait marcher sur une distance de 2,2 kilomètres pour se rendre
à l'école.
Selon des informations obtenues auprès des parents de l'AQPEHV,
on estime que la plupart des enfants ne peuvent trimballer boîle à
lunch, canne, manuels scolaires et versabraille en même temps et que,
bien souvent, le poids ne peut qu'être malsain pour les enfants,
généralement de petite taille à cet âge, sans parler
des bris éventuels causés par le froid et les chocs. Or, la
réparation d'un appareil causerait un retard d'apprentissage à
l'élève qui en serait privé.
Finalement, nous croyons qu'il faut continuer d'attribuer une aide
financière directement à l'élève pour éviter
que le ministère de l'Éducation n'ait à financer un tel
achat chaque fois que l'élève change de commission scolaire ou
lorsqu'il arrive au cégep ou à l'université. Dans le cas
de ma fille, elle a changé de commission scolaire en arrivant au
secondaire et son versabraille l'a suivie, compte tenu qu'il lui avait
été attribué personnellement. Lorsqu'elle arrivera au
cégep, ce sera la même chose. Nous croyons que c'est ainsi plus
économique pour le gouvernement québécois et que cela
éviterait que des versabrailles restent sur les tablettes dans
différentes institutions d'enseignement.
Pour conclure, je vous rappelle que l'aide financière du
ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science a
été très importante dans le cas de ma fille, dont la
situation est similaire à beaucoup d'autres qui rêvent à
une intégration scolaire un peu partout au Québec.
Un changement d'orientation du ministère de l'Enseignement
supérieur et de la Science pour l'aide financière aux
élèves souffrant de cécité ne serait pas rentable
pour le gouvernement et hypothéquerait grandement les cas actuels et
futurs d'intégration scolaire. Je vous remercie.
Le Président (M. Gobé): Est-ce que vous avez
terminé votre présentation?
Mme Laurin: Non, il y aurait M. Frechette.
Le Président (M. Gobé): M. Frechette, vous avez
maintenant la parole.
M. Frechette (Normand): Merci. M. le Président, mesdames
et messieurs, par cette courte présentation, je voudrais souligner
l'importance du projet de loi 25 pour les enfants handicapés visuels. Il
n'est pas question ici d'intervenir sur la totalité des articles de la
loi. Je m'attarderai plutôt aux principes qui favorisent
l'intégration scolaire et sociale des étudiants handicapés
visuels.
Il faudrait que soient inscrits dans la loi les principes directeurs qui
garantissent aux personnes handicapées visuelles l'accès à
des bourses pour financer l'achat de matériel spécialisé
et de services spécialisés. L'étudiant handicapé
visuel doit souvent fonctionner en braille. Il doit, comme tous les enfants,
avoir à sa disposition manuels scolaires, dessins, graphiques et autres
outils. L'étudiant doit aussi communiquer avec son titulaire et ses
compagnons de classe. On doit donc mettre à la disposition de ce dernier
une panoplie de moyens de communication qui sont, pour la plupart, très
dispendieux. Je pense ici aux versabrailles, télévisionneuses,
logiciels d'agrandissement de caractères, services de lecteurs et
preneurs de notes, traductions braille, etc.
Pour un étudiant fonctionnellement aveugle, il est
extrêmement difficile, sinon impossible, de poursuivre ou même
d'entreprendre des études s'il n'a pas accès au matériel
nécessaire. La majorité de ces appareils de communication et de
ces services spécialisés n'est pas disponible dans les
écoles. D'autres - quelques-uns - sont alloués par les centres
suprarégionaux dans le cadre du programme AMEO. Il n'en demeure pas
moins qu'un nombre important d'outils d'apprentissage ne sont accessibles qu'en
utilisant le service des bourses pour personnes handicapées.
Jusqu'à maintenant, le ministère de l'Enseignement
supérieur et de la Science attribuait des bourses pour l'achat
d'équipement spécialisé non seulement au niveau
collégial et universitaire, mais également aux niveaux primaire
et secondaire. Or, dans le projet de loi, nous n'avons pas retrouvé la
volonté du ministère de
rendre disponible ce service aux étudiants des deux premiers
niveaux scolaires.
En résumé, il est important que la loi garantisse
l'accès aux équipements et services spéciaux requis par
les étudiants handicapés visuels, ceci a tous les niveaux
d'enseignement et nonobstant les revenus des parents. Il en va de l'avenir de
nos enfants. Je remercie les membres de la commission.
Le Président (M. Gobé): Est ce que vous avez
terminé?
Mme Laurin: Non, il reste Marc Fréchette; et moi, je
reprendrai la parole.
Le Président (M. Gobé): Alors, M. Marc
Fréchette, vous avez maintenant la parole.
M. Fréchette (Marc): Je voudrais sensibiliser les membres
de la commission parlementaire au vécu d'un étudiant
handicapé visuel dans le système scolaire actuel. J'espère
ainsi vous démontrer l'importance de rendre accessible un tel
système de bourses permettant de financer des équipements et des
services spécialisés. J'ai 19 ans et j'étudie actuellement
en deuxième année du niveau collégial. J'espère
entreprendre des études universitaires dès janvier 1991, soit en
informatique ou en mathématiques. J'ai toujours été
intégré dans une classe régulière et j'ai
réussi à suivre le rythme des autres étudiants parce que
je dispose d'aide matérielle et humaine indispensable à mon
cheminement scolaire.
Comme vous l'avez sans doute remarqué, je suis handicapé
visuel. J'ai ce que les médecins appellent une rétinite
pigmentaire qui, comme vous le savez sans doute, est une maladie
évolutive. Dès la sixième année du primaire, j'ai
dû avoir recours à certains appareils tels télescope,
agrandissement de caractères et dictionnaires adaptés.
Étant alors fonctionnellement voyant, peu de matériel
spécialisé m'était nécessaire, quoique
indispensable. Au niveau secondaire, ma vue se détériora de
nouveau.
Mme Laurin: Marc apprend le braille depuis peu de temps,
alors...
M. Fréchette (Marc): Je n'arrivais plus à voir au
tableau, ni à lire un imprimé ni à écrire
convenablement. Une nouvelle évaluation de ma vision s'imposait et,
dorénavant, je devais utiliser de nouveaux appareils qui
s'avéraient beaucoup plus nombreux et complexes Avec ces derniers, je ne
distinguais toujours rien au tableau, mais je pouvais consulter mes livres ou
lire les notes de cours d'un camarade. La télévisionneuse,
appareil qui est utilisé pour grossir les caractères, est un
objet très lourd, de sorte qu'il fallait la laisser soit à
l'école, soit chez moi. Heureusement, une deuxième
télévisionneuse m'était octroyée. Je crois que je
fus l'un des premiers à bénéficier de cette nouvelle
politique de la Régie de l'assurance maladie.
L'achat d'un ordinateur défrayé par mes parents, parce que
cet équipement n'était pas subventionné par le
système de bourses pour étudiants handicapés, fut
l'acquisition la plus importante pour la poursuite de mes études. En
fait, je ne saurais comment fonctionner sans l'informatique. Enfin, je pouvais
écrire sans que cela exige des efforts prolongés. La Régie
de l'assurance-maladie me prêta un ordinateur portatif, et les
périphériques nécessaires furent achetées par mes
parents. J'avais un ordinateur à l'école et un autre à la
maison. C'était indispensable et stimulant.
Me voilà maintenant au collégial. Suite à une
nouvelle baisse de ma vision, je dois aujourd'hui fonctionner en braille. Donc,
de nouveaux appareils et de nouveaux services spécialisés. La
très grande majorité de ces appareils est reliée à
des ordinateurs et est très dispendieuse. Je bénéficie de
plus d'un service de lecteur et preneur de notes. Ces services et
équipements spécialisés ne me sont fournis que par le
système de bourses pour étudiants handicapés. Sans eux, je
ne vois pas comment je pourrais envisager de poursuivre des études d'une
façon efficace. Dans mon cas, c'est ici qu'on constate le
caractère indispensable d'un système de bourses pour
étudiants handicapés. (15 h 30)
II ne faut pas croire que tout est facile. Une partie de
l'été et quelques jours de classe doivent être
consacrés à l'apprentissage d'appareils. Je dois composer avec
des retards de production de livres sur cassettes et avec des changements de
volumes en début d'année scolaire. De plus, on peut multiplier
par deux le temps requis pour effectuer des travaux scolaires. Je dois ajouter
que, sans l'appui de mes parents, je ne me demanderais pas aujourd'hui dans
quel programme universitaire je vais m'inscrire. Appui financier? Bien
sûr, mais quotidien, surtout. J'ai maintenant conscience des efforts et
du temps requis pour compenser mon handicap. Combien d'énergies ont-ils
consacrées à convaincre le milieu scolaire que je pouvais
entreprendre et réussir des études, à participer à
des réunions avec des professeurs et directions d'écoles,
à rechercher des services et à combattre préjugés
et laisser-faire! Enfin, une question se pose: si j'avais été
fonctionnellement aveugle dès le primaire et avais eu besoin des
appareils et services dont je dispose aujourd'hui, aurais-je pu les
obtenir?
Je remercie les membres de la commission d'avoir bien voulu recevoir
cette courte présentation.
Le Président (M. Gobé): On vous remercie, M.
Fréchette. Est-ce que quelqu'un de votre groupe veut maintenant
intervenir?
Mme Laurin: Oui. Moi, je vais enchaîner avec la
conclusion.
Au ttom des parents que vous venez d'entendre Ici aujourd'hui, au nom de
Marc, étudiant handicapé visuel, et des parents d'enfants
d'âge scolaire qui vivent avec une limite visuelle sévère,
et au nom du conseil d'administration de l'Association québécoise
des parents d'enfants handicapés visuels, je tiens à conclure
cette présentation en insistant sur l'importance que le matériel
et les services spécialisés soient accessibles aux
étudiants atteints d'une déficience fonctionnelle majeure, tant
aux niveaux primaire, secondaire, collégial et universitaire.
Par ailleurs, c'est depuis plusieurs années - à notre
connaissance, depuis 1981 - que les parents de l'AQPEHV se prévalent
d'une politique générale du gouvernement du Québec qui
veut rendre tous les niveaux d'études accessibles aux étudiants
handicapés désireux de les atteindre, mais dont les ressources
financières s'avèrent insuffisantes.
De plus, au primaire et au secondaire, les élèves qui,
à cause de la gravité de leur handicap sensoriel, sont incapables
de suivre adéquatement les cours offerts par leur commission scolaire,
pouvaient à ce jour surmonter cet obstacle en étant pourvus de
matériel et de services spécialisés selon leurs besoins
particuliers. Ainsi, ils pouvaient recevoir une bourse pour couvrir l'achat de
matériel et de services spécialisés nonobstant la
contribution des parents ou de ceux qui en tiennent lieu. Jadis
subventionnés par l'Office des personnes handicapées du
Québec, puisque les établissements ne dispensaient pas cedit
matériel ou ces services, ils ont été jusqu'à
aujourd'hui couverts par le programme de bourses pour élèves
gravement handicapés. Je vais vous montrer. Sûrement que vous les
connaissez. Ce sont les manuels qui sont la règle d'attribution pour
élèves gravement handicapés, à l'intérieur
de laquelle on retrouve des clauses particulières pour les
élèves du primaire et du secondaire.
Les élèves pouvaient donc se procurer des appareils et des
services spécialisés comme dictionnaire braille, machine à
écrire en braille, magnétophone, versabraille, service de
lecteurs ou de preneurs de notes. En 1989, les nouvelles demandes de bourses
des parents de l'AQPEHV étaient refusées. Les autres qui avaient
déjà adressé une demande au ministère de
l'Enseignement supérieur et de la Science subissaient un traitement
fiscal qui les obligeait à les inclure dans leurs revenus
personnels.
À ce compte-là, l'AQPEHV a rencontré le ministre
Séguin en mars 1989. Tout récemment, nous avons reçu une
confirmation de Bernard Angers, du ministère du Revenu, confirmant que
le revenu ne serait pas imposé. C'est ce que vous aviez dit ce matin au
regroupement qui n'était pas encore informé. Alors, ça,
là-dessus, on vous remercie sincèrement, M. le ministre, ainsi
que
M. Séguin.
Ce contexte a donc provoqué une situation
d'insécurité et d'attente chez les parents de L'AQPEHV et
entraîné des difficultés aux étudiants
handicapés visuels, difficultés qu'ils auraient pu surmonter
autrement s'ils avaient eu leur matériel ou leurs services
spécialisés, parce que, dans ce groupe-là, il y a encore
des parents qui n'ont pas accès à ces services-là.
Aussi, nous avons constaté qu'il y avait actuellement un
questionnement dans le milieu scolaire relativement à la
responsabilité de ce matériel et de ces services
spécialisés. À ce sujet, nous croyons que le
ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science est la
meilleure instance qui permette l'accessibilité au matériel et
aux services spécialisés en attribuant une bourse via un
programme particulier ou autre aux étudiants handicapés, car nous
ne sommes pas convaincus, entre autres choses, de la pertinence de la place des
commissions scolaires dans l'attribution de ce matériel ou de ces
services spécialisés.
Compte tenu du faible taux de prévalence des élèves
fonctionnellement aveugles - ce matin, M. le ministre parlait de seulement huit
élèves intégrés aux niveaux primaire et secondaire,
alors je ne crois pas que ce soit un taux élevé
d'élèves - alors, la probabilité que plusieurs commissions
scolaires intègrent un élève handicapé total dans
une de ses écoles est basse. Je ne crois pas que les commissions
scolaires s'équiperaient de matériel spécialisé au
cas où elles recevraient un étudiant handicapé visuel. Il
serait plus économique d'attribuer ce matériel à
l'élève.
Compte tenu qu'il y a des commissions scolaires non
intégrées, c'est-à-dire qui n'offrent pas à la fois
le primaire et le secondaire, il deviendrait onéreux au gouvernement
d'ainsi attribuer pour chaque ordre d'enseignement le matériel et les
services spécialisés à un même individu, sans
oublier qu'il en serait ainsi aux études postsecondaires. De plus, nous
croyons qu'il pourrait s'ajouter des délais lourds de
conséquences, s'il y avait lieu de faire réparer le
matériel spécialisé à un centre
suprarégional. Nous demandons donc que le matériel et les
services spécialisés soient attribués à
l'élève pour l'ensemble de ses études.
Jusqu'à maintenant, vous vous dites probablement que nos propos
ont plein de bon sens. Mais n'en pensez pas moins qu'il s'agit là d'une
politique qui peut toucher des règlements, des mesures
particulières, des ententes entre ministères - le
ministère de l'Éducation et le ministère de l'Enseignement
supérieur et de la Science, par exemple - et qu'il ne s'agit pas
d'éléments à inclure dans le projet de loi.
Mais, justement, avec le projet de loi 25, Loi sur l'aide
financière aux étudiants, l'AQPEHV craint le pire, le vide
juridique, entre guillemets. Les parents de l'AQPEHV ne voient pas dans le
projet de loi l'esprit ou les principes directeurs qui assurent
l'accessibilité au matériel et aux services
spécialisés pour les élèves handicapés
visuels.
Qu'est-ce qui nous garantit que les enfants déficients visuels
auront droit à un autre service d'attribution de ce matériel ou
de ces services spécialisés, si le ministère de
l'Enseignement supérieur se retire ou s'il n'y a pas d'aide
financière pour couvrir ces achats, qu'il n'y a pas de bourse
particulière si ce n'est pas le régime général?
Alors, est-ce qu'il y aura des bourses particulières? Qu'est-ce
qui nous garantit...
Le Président (M. Gobé): Mme Laurin. Mme Laurin:
Oui
Le Président (M. Gobé): Étant donné
le temps, je vous demanderais de bien vouloir conclure, s'il vous
plaît.
Mme Laurin: II me reste deux paragraphes, monsieur.
Le Président (M. Gobé): Allez-y, madame, je vous en
prie.
Mme Laurin: Qu'est-ce qui nous garantit que les parents n'auront
pas à faire encore et encore des démarches? Pourquoi nous
retire-ton, dans le fond, cet acquis, puisque nous utilisons cette bourse
depuis quasiment dix ans? Enfin, pour l'AQPEHV, la loi devrait inclure des
garanties fermes autres que le régime général pour tous
les niveaux, en ce qui concerne le droit à l'aide financière pour
les élèves gravement handicapés.
Nous espérons que vous prendrez nos recommandations en
considération et nous vous remercions de votre attention.
Le Président (M. Gobé): Merci, Mme Laurin. Vous
avez pu dépasser votre temps sur consentement des deux partis de cette
commission. C'était pour le meilleur intérêt de la
commission. Je passerai maintenant, pour quelques questions, la parole à
Mme la députée de Bourget. Mme la députée de
Bourget, vous avez la parole.
Mme Boucher Bacon: Merci, M. le Président. M. le ministre,
mesdames et messieurs de l'Association québécoise des parents
d'enfants handicapés visuels. Ma question... Tout d'abord, je tiens
à vous remercier de votre mémoire et, aussi, je voudrais faire un
aparté pour Marc. Je pense que, dans le mémoire et les
discussions qu'il y a eu, Marc est un exemple de courage qui a suscité
tout l'émoi nécessaire à un coeur de mère
vis-à-vis de son handicap visuel et surtout vis-à-vis de la
société et des jeunes québécois qui sont aux
études et des décrocheurs. Je pense que c'est un exemple de
courage et Marc a toute l'étoffe d'un champion. Je t'en félicite.
Merci de ta présentation.
Je passe à une première question, soit Mme Laurin soit Mme
Turcotte, vous êtes bien libre de répondre Dans votre
mémoire, surtout en page 5, il y a évidemment une distinction
entre deux types de handicapé visuel II y a ceux que vous nommez, les
enfants fonctionnellement voyants et fonctionnellement aveugles. Pourriez-vous,
pour les besoins de la commission, en raison de l'importance de vos propos ici,
préciser davantage la nature de cette distinction entre handicap visuel,
ce qu'on appelle "voyant" et "aveugle".
Mme Laurin: D'accord. Les enfants fonctionnellement voyants sont
des enfants qu'on appelle demi voyants, qui vont utiliser leur vision mais qui
ont besoin d'appareillage comme des télescopes ou des loupes pour
agrandir les caractères d'imprimerie conventionnels Ils ont besoin
évidemment quelquefois d'appareillage comme des
télévisionneuses ou des logiciels Vista, qu'on appelle. C'est
très spécialisé, le jargon de la définition
visuelle. Ils ont besoin d'agrandissement soit sur l'ordinateur ou soit sur le
papier et ils ont besoin de matériel scolaire adapte, agrandi.
Ça, c'est fonctionnellement voyants. Fonctionnellement aveugles, ce sont
les personnes généralement qui utilisent le braille comme mode de
communication et qui vont avoir besoin de tablettes braille, de dactylos
braille, de versabrailles - c'est l'appareil qui est le plus utilisé,
qui est un ordinateur, mais qui permet de transcrire en braille des
données et de brancher ça sur une imprimante qui peut le sortir
en noir, en caractère imprimé, ou en braille - grosso modo, c'est
la différence.
Mme Boucher Bacon: J'avais une sous-question qui n'était
pas tout à fait préparée, c'est relativement à ce
que Marc disait Si j'ai bien compris, c'est que Marc était
handicapé visuel voyant À cause de sa rétinite, il est
devenu handicapé aveugle. C'est ça?
Mme Laurin: C'est ça
Mme Boucher Bacon: Et puis il mentionnait, à la toute fin
de son discours: Le problème se pose, si j'avais été
aveugle au tout début, est-ce que j'aurais
bénéficié des mêmes avantages? Est-ce que vous
pourriez, encore là, expliquer?
M. Frechette (Normand): Je l'ai vécu pour être son
père. Je dois dire que j'ai vu sa maladie évoluer, etc, j'ai vu
son intégration scolaire et je peux vous dire qu'au niveau primaire,
vous l'avez compris, c'était relativement facile, peu d'appareils, bon.
Au niveau secondaire, fonctionnellement voyant; là, fonctionnellement
aveugle. Si vous pouviez voir maintenant la panoplie
d'instruments qu'il doit utiliser, surtout il a parlé
énormément de l'ordinateur. Très rarement il écrtt
à la main, c'est toujours sur ordinateur. Deuxième ordinateur:
versabraille, par exemple. Est-ce qu'il l'aurait eu au primaire? Je ne le sais
pas. La question se pose. Je ne connais personne qui l'a actuellement. Donc, je
ne sais pas s'il l'aurait eu, c'est la question qu'on pourrait se poser. C'est
pour ça que j'ai insisté aussi en voulant dire la
nécessité que les handicapés aient accès à
un programme spécialisé, pour pouvoir financer ce type d'appareil
qui est très dispendieux.
Mme Laurin: Peut-être juste pour compléter. C'est
que les commissions scolaires n'attribuent pas les appareils
spécialisés. Il faut faire des demandes de bourse pour y avoir
droit. Dans ce cas-ci, Mme Turcotte a une fille qui l'a eue au primaire
secondaire.
Mme Turcotte: Oui. Moi, ma fille est de cécité
complète. Elle a été intégrée en
sixième année, il y a trois ans. Ce qui a permis cette
intégration, c'est qu'on a eu d'abord un premier versabraille, autrement
ce n'était pas possible de donner les travaux en noir au professeur ou
même elle-même de faire ses travaux. On a dû se battre un bon
bout de temps. Ça a pris un an et demi avant qu'on puisse avoir une
bourse et qu'elle puisse avoir son deuxième appareil. Comme on l'a
souligné tantôt, un seul appareil, le trimballer soir et matin,
ça amenait des bris, des retards d'apprentissage, ces problèmes
de toutes sortes. Maintenant, nous avons le deuxième versabraille, ce
qui fait qu'elle en laisse un au secondaire - parce que maintenant, elle est au
secondaire - et l'autre à la maison pour ses travaux qui sont
très abondants, en passant. (15 h 45)
Mme Boucher Bacon: Je vous remercie. J'ai une autre question.
Dans votre mémoire, la question de dépistage - pour moi, c'est
bien important - des handicapés visuels a été
évoquée, mais tout à fait légèrement. Sur
cette question, nous aimerions croire qu'on a progressé dans notre
société québécoise depuis dix ou quinze ans, mais
pourriez-vous donner une idée de cette mesure dans cette progression?
Comme je crois qu'il y a eu progression et grâce, sans doute, au travail
de votre association, j'aimerais que vous élaboriez sur le
dépistage, s'il vous plaît.
Mme Laurin: Le dépistage, je vous dirais que ça
relève plus, à ce moment là, des professionnels du milieu
scolaire ou des spécialistes, des orthopédagogues ou autres qui
vont réussir à dépister les étudiants demi-voyants,
mais nous, on n'intervient pas au niveau du dépistage. Ce n'est pas
notre mandat.
Mme Boucher Bacon: Votre association...
Mme Laurin: Non, c'est ça. Pour en revenir, tantôt,
au versabraille, c'est un appareil qui coûte environ 10 000 $. Alors,
c'est bien entendu que le parent ne peut pas acheter ce
matériel-là. Souvent, quand on parle de matériel
spécialisé pour personnes handicapées visuelles, c'est du
matériel dispendieux, qui coûte relativement cher, ce qui fait que
le parent ne peut pas l'acheter. De toute façon, ce sont des appareils
qui doivent être subventionnés par l'État parce que ce sont
des appareils qui facilitent l'intégration scolaire. Aussi bien qu'un
élève qui a un dictionnaire ordinaire, le handicapé visuel
doit avoir droit à un dictionnaire en braille. Dans le fond, ça
revient à l'État de subventionner ce matériel. On ne peut
pas se procurer ça, nous, ce matériel-là, c'est pour
ça qu'on fait appel au gouvernement, à l'État.
Mme Boucher Bacon: Je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Gobé): Je vous remercie, Mme
Laurin, merci, Mme la députée de Bourget. Oui, Mme Turcotte,
allez-y, je vous en prie.
Mme Turcotte: Je voulais juste souligner que c'est un appareil
qui est essentiel à l'intégration, à la scolarité.
C'est dans cette idée, finalement...
Le Président (M. Gobé): C'est quel appareil
ça, Mme Turcotte?
Mme Turcotte: L'appareil, le versabraille qui est
l'ordinateur.
Le Président (M. Gobé): Le versabraille qui est
l'ordinateur.
Mme Turcotte: Qui est l'appareil de 10 000 $ ou 12 000 $, on ne
sait pas précisément le prix, mais on souligne l'importance de
ces appareils pour l'intégration et la scolarité, tout
simplement.
Le Président (M. Gobé): Est-ce qu'il est
subventionné par le ministère des Affaires sociales?
Mme Turcotte: Par la bourse.
Le Président (M. Gobé): Par la bourse.
Mme Turcotte: C'est la bourse du ministère de
l'Enseignement supérieur et de la Science qui nous a permis d'en avoir
un deuxième.
Le Président (M. Gobé): Je vous remercie,
Mme Turcotte. Je passerai maintenant la parole à
M. le ministre de l'Éducation. M. le ministre, vous avez la
parole.
M. Ryan: Bien, ça me fait plaisir de vous rencontrer. On
va poursuivre la discussion qu'on a commencée ce matin. Il y a des
points qui sont communs par rapport à ce qu'on a discuté ce
matin. Je pense que ce n'est pas nécessaire de les
répéter.
Je voudrais mentionner peut-être une pre mière chose. Dans
la loi actuelle sur les prêts et bourses, il n'y a rien sur les
handicapés.
Mme Laurin: Dans la réglementation M. Ryan: Dans la
loi actuelle.
Mme Laurin: Actuelle? Non, il y a juste le temps partie*.
M. Ryan: La loi existante ne parle même pas de ça.
Dans le texte du projet de loi 25, nous introduisons le concept étudiant
handicapé. Ça, c'est un développement qui vaut
d'être souligné, ça n'y était pas avant. On va
pouvoir définir, par voie de réglementation, ce qu'est un
étudiant handicapé. La porte est ouverte et ça va
être plus légal.
Maintenant, on parlait du programme pour les besoins spéciaux,
pour l'achat de matériel spécialisé et tout. Il existe une
brochure où c'est tout décrit. C'est parce que quelqu'un, ce
matin, disait que l'information n'était peut-être pas disponible.
M. le député d'Abitibi-Ouest était un petit peu
scandalisé de ça. Je voudrais signaler qu'il existe quand
même une brochure où c'est bien établi ce qu'est le
programme de bourses pour les étudiants gravement handicapés.
Là-dedans, il y a toute une section qui traite des besoins particuliers.
Alors, tout ça, dans l'ensemble, ça reste et j'ai bien
précisé, ce matin, que l'étudiant handicapé
à temps partiel...
M. Gendron: II n'avait qu'à le dire.
M. Ryan: ...continuera d'être considéré comme
un étudiant à temps plein, comme c'est le cas actuellement
déjà, d'après nos pratiques.
Mme Laurin: Je peux peut-être juste préciser, en
fait, notre intervention. Nous savons que ça existe et nous l'avons
utilisée, d'ailleurs, cette brochure. Il en existe même une depuis
1981. On sait que c'est au niveau de la réglementation, ça, on en
est conscients
M. Ryan: Regardez, ce n'était pas pour vous autres,
c'était pour mon collègue, le député
d'Abitibi-Ouest.
Mme Laurin: D'accord.
M. Ryan: Je sais que vous êtes au courant, vous autres, je
ne suis pas inquiet.
Mme Laurin: C'est ça. Et même si ça
n'apparaissait pas dans le projet de loi, des articles concernant les personnes
handicapées ou autres, nous, ce qui nous fait craindre le pire... En
fait, on aimerait que ça apparaisse parce que la réalité,
présentement, est à l'effet qu'il y a des parents qui n'ont pas
accès à cette bourse, malgré le fait qu'elle soit
indiquée dans les réglementations Alors, c'est pour ça que
nous, dans le fond, ce qu'on veut, c'est au niveau plutôt philosophique,
ce qui nous assurerait ou nous donnerait des garanties sur la
réglementation. Je ne sais pas si vous me suivez.
M. Ryan: Voulez-vous répéter? Si vous permettez,
j'ai eu un petit moment de distraction et j'ai perdu le fil
Mme Laurin: D'accord Ce que je dis, c'est que, oui,
effectivement, on est au courant des règlements concernant les bourses.
Cependant, dans la réalité, il y a des parents qui,
présentement, n'ont pas accès à ces bourses-là, on
les refuse carrément parce que présentement on dit que
peut-être ce seraient les commissions scolaires qui attribueraient ces
bourses-là. On s'est adressés à la fois au
ministère de l'Éducation et au ministère de l'Enseignement
supérieur et de la Science et c'est pour cela que nous voulons que, dans
la loi, il y ait des principes qui garantissent l'accessibilité à
cette bourse-là, qu'elle soit particulière ou autre, mais qu'il y
ait des principes qui nous assurent de sa faisabilité.
M. Ryan: Maintenant, comme je l'ai mentionné tantôt,
le projet de loi porte exclusivement sur les étudiants du
postsecondaire.
Mme Laurin: II peut y avoir des exceptions.
M. Ryan: Regardez, le gouvernement peut toujours décider
de confier à la Direction générale de l'aide
financière du ministère de l'Enseignement supérieur et de
la Science la gestion d'autres programmes, y compris celui pour les besoins
particuliers des élèves handicapés de niveau primaire et
secondaire. Il peut faire ça, puis c'est ce qui arrive dans ce cas-ci.
Il y a une couple de programmes...
Mme Laurin: C'est ce qu'on souhaite.
M. Ryan: ...qui sont gérés par la DGAF et qui ne
relèvent pas nécessairement de la Loi sur l'aide
financière aux étudiants. Alors ça, comme je vous l'ai dit
ce matin, le programme concernant les besoins particuliers, lui, va continuer.
C'est un programme qui a été institué en vertu du pouvoir
général qu'a le ministre de faire des subventions.
Mme Laurin: Et même si on parie du primaire et du
secondaire?
M. Ryan: Le primaire et le secondaire, ce que nous faisons
actuellement va continuer. Maintenant, ça demande un examen plus
approfondi que nous allons faire distinctement.
Mme Laurin: Parce que...
M. Ryan: Là, on est en négociation avec l'OPHQ,
comme vous le savez, pour des transferts de responsabilités et de
ressources. Ce n'est pas encore terminé, ça, je pense qu'il va
falloir attendre encore une année parce qu'on n'a pas réussi
à établir le point d'entente parfait de ce
côté-là. On étudie également les
problèmes d'aide financière qui peuvent se poser aux niveaux
primaire et secondaire. Mais là, le projet de loi, on essaie de
régler ce qui regarde les étudiants de niveau postsecondaire.
Mme Laurin: Oui. C'est parce que, ce qu'on se posait comme
question, c'est s'il ne pourrait pas apparaître des clauses
dérogatoires ou exceptionnelles, dans le projet de loi, ce qui est
possible habituellement dans les projets de loi, qui nous garantiraient plus
de...
M. Ryan: L'Opposition n'aime pas toujours ça, mais nous
autres, ça nous arrive d'en mettre, c'est vrai.
Mme Laurin: Dans ce cas-ci, ça nous faciliterait la
tâche pour nous.
M. Ryan: Très bien. Alors, comptez que les... Et vous avez
parlé... je suis content que vous ayez reçu une lettre de M.
Angers, le sous-ministre du Revenu...
Mme Laurin: Oui.
M. Ryan: ...ça confirme ce que je disais ce matin.
Mme Laurin: C'est ça.
M. Ryan: Je suis bien content que...
Mme Laurin: Pour l'année 1988-1989. Cependant, on ne nous
avise pas des démarches en cours pour le futur, par exemple.
M. Ryan: Ne vous inquiétez pas pour l'avenir. Le
gouvernement, quand il prend une décision une année, d'habitude
ça dure un siècle.
Mme Laurin: Comme la loi 107, ha, ha, ha!
M. Ryan: Oui. Regardez, je vous remercie beaucoup, je pense que
ça a été extrêmement instructif pour nous. Ça
nous rappelle nos responsabilités aussi de rencontrer une
délégation comme la vôtre. Soyez sûrs que ça
va nous aider à mieux comprendre nos responsabilités dans la
perspective du projet de loi 25. Je vous remercie.
Le Président (M. Gobé): Je vous remercie, M. le
ministre. M. le député d'Abitibi-Ouest, vous avez maintenant la
parole.
M. Gendron: Oui. Très rapidement quand même, avec...
J'ai rarement vu, en si peu de temps dire, autant d'énormités
concernant l'Opposition. Alors, l'Opposition est capable de faire son travail.
Je vais en relever deux parce que ça n'a pas de bon sens. Prenons juste
un exemple: Quand un gouvernement prend une décision, c'est bon pour des
siècles. Je pense que le ministre a fait ses devoirs à peu
près 25 fois dans l'espace d'une année. Prenez juste la loi 107:
il y avait quasiment plus d'amendements, six mois après la loi 107, dans
la loi 9, qu'il y en avait dans 107. Alors, il faut le faire pour dire des...
C'est gros, là. Ce ne sont même plus des pianos qu'on entre dans
cette salle-ci, ce sont de gros camions. Bon! Là, je ne sais pas, parce
que je pensais que le ministre avait compris que c'est un mémoire
présenté par l'Association québécoise des parents
d'enfants handicapés visuels et non pas de malentendants. Donc,
ça ne justifie pas de dire des quarts et des tiers de
vérité, parce que j'espère que vous entendez pareil,
même si vous avez des problèmes visuels, pour certains. Et un des
quarts de vérité qui a été dit: l'Opposition ne
s'est pas offusquée ce matin, ce n'est pas ça la demande, puis je
sais que ça existe depuis 1980 et 1982 qu'il y a une brochure concernant
les étudiants éprouvant des handicaps majeurs. Ce n'est pas
ça, la question. Mais quand il dit ce qu'il veut dire, il dit que la
demande qui a été faite ce matin, ce qu'il y a de neuf comme
orientation, y a-t-il moyen que nous ayons ça en braille? C'était
ça, la question. Il n'en parle pas de ça.
Ce matin, je ne me suis pas offusqué, moi, qu'il y ait une
brochure là-dessus. Je sais que ça existe depuis 1982 puis vous
le citez dans votre document, juste pour rétablir les faits.
Votre mémoire ou votre réflexion... Puis je remercie MM.
Frechette, père et fils de même que Mme Laurin que je connais
depuis un petit bout de temps, de même que Mme Turcotte. Je pense que
l'occasion était adéquate de venir présenter votre point
de vue pour dire que, pour ce qui est des élèves ou les parents
d'élèves handicapés visuellement, que ce soit d'une
façon fonctionnelle ou non fonctionnelle, peu importe le degré,
vous faites bien de venir saisir les membres de cette commission et surtout le
ministre qu'il y a urgence et nécessité d'offrir de meilleures
garanties à l'effet que des droits concernant ces personnes-là se
sont préservés au niveau du système de prêts et
bourses.
Ce que j'ai compris, c'est que dans le passé, au primaire et au
secondaire, les élèves qui, à cause de la gravité
de leur handicap
sensoriel, étaient incapables de suivre adéquatement les
cours offerts par les commissions scolaires pouvaient recevoir une bourse puis
ce n'est plus le cas, au moment où on se parie.
Mme Laurin: Cette année, là.
M. Gendron: Oui, je le sais, et c'est bien expliqué dans
votre mémoire. Et lorsque vous dites: La loi 25 n'offre pas de garantie
formelle que, autant les règlements vont tenir compte de certains
principes qui seraient évoqués en termes de garantie dans le
projet de loi, vous avez sûrement bien lu le projet de loi. Le Protecteur
du citoyen est venu dire la même chose. Ce n'est pas parce que c'est la
première fois, comme le ministre vient de le dire, dans le projet de
loi, qu'on va parler de l'expression "déficience fonctionnelle" qu'on a
réglé toutes les affaires.
Si la déficience fonctionnelle n'est pas définie dans la
loi et non dans les règlements, vous n'avez aucune garantie
législative que vos droits sont sauvegardés. C'est ça que
le Protecteur du citoyen est venu dire, en disant qu'il était
très inquiet sur ces dispositions-là, à l'effet que le
ministre met un mot dans la loi et il dit: Je viens de vous donner
énormément d'avantages. Sauf que, dans les faits, ça ne
vous donne absolument aucune garantie. C'est lui qui va faire les
règlements et on n'aura pas la capacité d'apprécier les
règlements et vous n'avez pas de poignées législatives si,
effectivement, il n'y a pas d'élément concret offrant ces
garanties-là à travers ou à l'intérieur du projet
de loi. C'est ce que je comprends.
J'ai bien compris votre problème. Je pense que le mémoire
est simple. Vous jugez nécessaire de retrouver dans la loi des garanties
fermes quant aux droits à l'aide financière pour les
élèves grandement handicapés sur le plan visuel. Ça
n'y est pas. Donc, ne prenez pas pour acquis des vessies pour des lanternes. Ce
n'est pas le cas.
Deuxièmement, vous voulez vous assurer de retrouver dans le
projet de loi 25 l'esprit qui permettrait que, quand on élaborera les
règlements, nous tenions compte de cette garantie qui devrait être
donnée dans le projet de loi 25 qui n'y est pas. C'est ça que
j'ai compris de votre mémoire. Quant à la volonté du
législateur de dire: Compte tenu qu'il est difficile, dans un
régime universellement appliqué, de prévoir des
modalités pour des groupes particuliers... Ce n'est pas une question
qu'on veuille vous marginaliser mais, là, on ne peut pas vivre dans un
autre monde; ça existe. Ça, c'est plus difficile
d'apprécier s'il a tort ou s'il a raison, dans le sens: Est-ce qu'on
intègre à l'intérieur du régime universel des
dispositions spécifiques pour tenir compte de cette
réalité?
Moi, je pense qu'ils peuvent avoir raison de vouloir le faire comme ils
le font, à condition que le droit soit clairement établi, comme
je l'ai dit tantôt; à condition que, dans la loi. le droit soit
clairement établi; que pour des handicapés visuels ou d'autres
types de déficience majeure significative qui causent un handicap aux
apprentissages réguliers primaire, secondaire, collégial et
universitaire, oui, il faut que l'État québécois trouve un
moyen de consacrer ce droit-là quelque part, compte tenu des
coûts, compte tenu de ce que ça représente comme efforts.
Je suis convaincu que M. Frechette pourrait nous en parier longuement. C'est
déjà excessivement stimulant de voir un jeune, avec des troubles
visuels qui se sont aggravés au fil des ans, qui dit: Moi. je suis en
collège II puis j'envisage de faire l'université.
Sincèrement, c'est extraordinaire! Mais ça n'a pas dû
être facile, et ça a dû être assez onéreux
à tous les plans, sur les plans moral, psychologique et financier. Et je
ne pense pas qu'il appartienne à des parents seuls de supporter autant
d'épreuves. Je pense que l'État québécois doit
s'assurer - en 1990, jamais je ne croirai, on doit être assez
évolués pour être tous convaincus que cela appartient
à l'État - d'avoir des mécanismes pour offrir un meilleur
support aux personnes qui ont à vivre ces difficultés-là
et, en particulier bien sûr, aux élèves concernés,
parce que les parents ont été sûrement
généreux, mais Marc aussi a dû avoir pas mal de courage et
de détermination pour faire face à ce qu'il a fait.
Alors, moi, puisque les questions s'adressent davantage au ministre,
dans les quelques minutes qui me restent, vous seriez peut-être mieux de
vérifier jusqu'à quel point le ministre va prendre l'engagement
ferme de trouver une place quelque part pour s'assurer de deux choses: qu'on
reconnaisse le principe que ces difficultés-là soient
assumées quelque part par l'État et que, si ce n'est pas dans le
projet de loi 25, il faut que ça soit ailleurs. C'est à lui
à répondre à ça, c'est lui qui est le
législateur.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. le
député.
M. Frechette (Normand): Excusez. J'aurais une chose à
rajouter, c'est qu'il faudrait faire comprendre que ces appareils-là...
Bon, pour faire une comparaison, l'étudiant qui arrive au primaire, au
secondaire, au collégial ou à l'université a besoin de
volumes, a besoin de notes de cours, a besoin de professeurs, etc.
L'étudiant handicapé visuel a aussi besoin de ça, mais les
appareils dont il se sert sont aussi indispensables que ces volumes-là
pour les autres étudiants; sans ces appareils-là, c'est comme si
un étudiant non handicapé n'avait pas de volumes, ça
revient à peu près à ça.
Le Président (M. Gobé): M. le ministre.
M. Ryan: Là, je pense que l'étudiant
handicapé est couvert par le projet de loi. On
dit même, exceptionnellement, que celui qui est étudiant
à temps partiel sera considéré, pour les fins de la loi
25, comme un étudiant à temps plein.
M. Gendron: Non mais, une seconde, madame, une seconde. Je vais
vous laisser répondre, mais c'est parce que le ministre avait l'air de
s'adresser à moi.
M. Ryan: Non, non, je m'adressais .
Mme Laurin: Mais ça ne concerne pas notre
clientèle.
Le Président (M. Gobé): A M. Frechette ou à
M. le député?
M. Ryan: Je m'adressais à la délégation,
à la délégation.
M. Gendron: Excellent, excellent.
Le Président (M. Gobé): Vous pourrez
répondre, vous avez encore du temps, M. le député.
Mme Laurin: Bien, je vous dirais, M. le ministre qu'en fait
ça ne s'adresse pas nécessairement à notre
clientèle parce qu'on a des enfants qui sont au primaire et au
secondaire. Dans notre recommandation, ce qu'on demande, c'est que ça
touche le primaire et le secondaire, et la question n'est pas tant le temps
partiel ou le temps plein. Mais on ne veut pas que ces
élèves-là... Ils ne demandent pas nécessairement le
régime général des prêts et bourses, ils veulent
plutôt la bourse spéciale, la bourse aux élèves
gravement handicapés. C'est à ce niveau-là qu'on veut
plutôt intervenir et pas aux prêts et bourses, là, pas sur
l'ensemble du régime. Alors, c'est pour ça que cet
article-là ne nous concerne pas.
M. Ryan: Très bien.
Le Président (M. Gobé): Est-ce que vous avez
terminé, M. le ministre?
Mme Laurin: Ce qu'on aimerait peut-être savoir c'est -
j'imagine que vous allez étudier la question: Quels sont les
délais ou de quelle façon allez-vous procéder? Il va y
avoir des amendements, j'imagine, au projet de loi et tout ça.
M. Ryan: Là, j'ai dit: Pour les élèves du
primaire et du secondaire, on ne le réglera pas dans ce projet de
loi-ci. On va continuer les pratiques qui existent et si,
éventuellement, il y a lieu de légiférer, on le fera, mais
je ne l'envisage pas pour le moment.
Mme Laurin: Les politiques, c'est-à-dire celles du
règlement? M. Ryan: Pardon?
Mme Laurin: Les politiques pour le primaire et secondaire seront
celles de votre réglementation au niveau du ministère de
l'Enseignement supérieur et de la Science, c'est ça?
M. Ryan: Ce sont des pratiques administratives, il n'y a pas de
réglementation comme telle là-dessus.
Mme Laurin: Mais, quand on parle des règles d'attribution
des bourses...
M. Ryan: Oui, oui, c'est correct.
Mme Laurin: ...ce seront celles-là qui vont
s'appliquer.
M. Ryan: Oui, oui.
Mme Laurin: C'est ça. En tout cas, nous, on voudrait des
engagements, on aimerait avoir des articles qui concernent les personnes
handicapées dans le projet de loi 25. C'est une demande ferme.
M. Ryan: Mais là, pour ceux du primaire et du secondaire,
je ne peux pas vous donner cette garantie-là. Le ministère de
l'Éducation a déjà des programmes assez
élaborés d'aide aux élèves handicapés au
niveau primaire et secondaire. Vous savez qu'on a même des écoles
spéciales. On a un grand nombre de services, de ce
côté-là, qui sont coûteux également et on ne
s'en plaint pas, c'est normal, c'est une responsabilité qu'a la
collectivité d'assumer la tâche de fournir des services
adéquats aux élèves visuellement handicapés.
Mme Laurin: Oui.
M. Ryan: Alors, toute cette aide-là continue. Le
problème de l'aide financière... Il faut voir quelle est la
responsabilité de l'Office des personnes handicapées du
Québec aussi et, comme je vous l'ai dit, nous sommes en discussion avec
eux. D'ici un an...
Mme Laurin: Transfert.
M. Ryan: ...ces choses-là devraient avoir
été clarifiées de manière complète et,
après ça, il sera plus facile d'avoir un tableau vraiment
intégré. Mais, en attendant, je crois qu'il y a quand même
des ressources élaborées qui sont mises en oeuvre pour le service
de ces enfants-là aux niveaux primaire et secondaire et il n'est pas
question de les réduire ou de les supprimer, loin delà.
Mme Laurin: Parce que, présentement, nous savons qu'il y a
des parents qui n'ont pas accès à la bourse-là, qui n'ont
pas la bourse.
M. Ryan: Oui.
Mme Laurin: Ils ont fait une demande et ils n'ont pas la
bourse.
M. Ryan: Ça, vous m'en saisirez. Vous m'écrirez
à ce sujet-là pour m'en informer et je vous fournirai toutes les
explications et, j'espère, surtout les solutions qui pourraient
être indiquées.
Mme Laurin: Parce que, présentement, on m'a
informée, la semaine dernière, que la commission scolaire de
Charlesbourg a attribué des versabrailles, mais à des parents qui
n'en avaient pas fait la demande, pour la demande de bourse, parce qu'elle
avait évalué les besoins différemment. Alors, il y a comme
une confusion dans les rôles présentement.
M. Ryan: En tout cas, signalez-nous ces cas-là et nous
allons y voir assez immédiatement.
Mme Laurin: Je sais qu'au niveau du ministère de
l'Éducation du Québec, aussi, ils ne veulent pas travailler avec
le programme de bourses parce qu'ils n'ont pas juridiction sur la bourse, c'est
plutôt le MESS. Alors, il y a plein d'éléments qui portent
un peu à confusion et on compte sur vous pour démêler tout
ça.
M. Ryan: Saisissez-moi des problèmes avec plus de
précision là. La meilleure façon, c'est de me poser des
cas concrets pour commencer. Chaque fois qu'on me soumet le cas d'un enfant qui
n'a pas les services auxquels il a droit, nous y voyons immédiatement.
J'ai eu plusieurs cas d'enfants visuellement handicapés qui ont
été soumis à mon attention et, une semaine ou dix jours
après avoir communiqué le problème, nos services
m'assuraient que le problème était réglé. On verra
là. S'il y a des choses qui traînent, laissez-le-nous savoir.
Ça n'a pas de raison de traîner.
Mme Laurin: Merci.
Le Président (M. Gobé): Je vous remercie, Mme
Laurin, M. le ministre. M. le député d'Abi-tibi-Ouest, avez-vous
le mot de la fin?
M. Gendron: Merci beaucoup. Merci beaucoup de votre
témoignage et de votre présence.
Le Président (M. Gobé): M. le ministre.
M. Ryan: Merci aussi.
Le Président (M. Gobé): Alors, la...
Mme Laurin: Bon, d'accord.
Le Président (M. Gobé): Madame?
Mme Laurin: Non, ça va.
Le Président (M. Gobé): Alors, au nom de la
commission, je tiens à vous remercier d'être venus
témoigner devant nous. La commission va suspendre ses travaux quelques
minutes, le temps de permettre à la Fédération des
cégeps de venir prendre votre place. La commission suspend ses travaux
pour deux minutes.
(Suspension de la séance à 16 h 7)
(Reprise à 16 h 11)
Le Président (M. Gobé): La commission de
l'éducation va reprendre ses travaux et poursuivre la consultation
générale sur le projet de loi 25, Loi sur l'aide
financière aux étudiants. Je demanderais maintenant à la
Fédération des cégeps de s'asseoir en avant et de se
présenter. Allez-y M. Beaulieu, vous pouvez... M. Beaulieu, s'il vous
plaît. M. le ministre.
Bonjour, M. Beaulieu, si vous voulez présenter vos
collègues qui sont assis près de vous?
Fédération des cégeps
M. Beaulieu (Yvon): Merci, M. le Président. D'abord,
à ma gauche, M. Gaétan Boucher, directeur général
de la Fédération des collèges; à ma droite, M Guy
Forgues, directeur des services aux étudiants du cégep de
Lévis Lauzon; Mme Francine Provost, conseillère d'aide aux
étudiants du cégep de Saint-Laurent, et, finalement, Mme
Hélène Giguère, présidente de la Commission des
affaires étudiantes; elle travaille aussi au cégep Ahuntsic.
Le Président (M. Gobé): M Beaulieu et vos
collègues, je vous souhaite la bienvenue à cette commission et je
vous inviterais maintenant à procéder à la
présentation de votre mémoire. Vous avez 20 minutes pour ce
faire.
M. Beaulieu: Merci, M. le Président. 20 minutes
globalement?
Le Président (M. Gobé): Oui.
M. Beaulieu: Merci, M. le Président. M. le ministre de
l'Enseignement supérieur et de la Science, MM, Mmes les
députés membres de cette commission, mesdames et messieurs, la
Fédération des cégeps se réjouit d'avoir l'occasion
aujourd'hui de vous présenter son point de vue sur le nouveau
régime québécois d'aide financière aux
étudiants. Il s'agit, en effet, d'un
débat qui nous intéresse au plus haut point, puisqu'il
porte sur un aspect fondamental du développement de notre
société, l'accessibilité aux études
supérieures.
Pour apporter la contribution la plus enrichissante possible, la
Fédération des cégeps a procédé, ces
derniers mois, à une vaste consultation dans les 45 collèges du
réseau collégial. Elle s'est adressée surtout aux
responsables des services d'aide financière aux étudiants qui
connaissent à fond, par leur travail quotidien, la situation
concrète des étudiants. Le mémoire que nous vous
présentons est le résultat de cette consultation et des
recommandations formulées par les collèges.
Une réforme du régime des prêts et bourses
était nécessaire, compte tenu de l'évolution des
conditions de vie des étudiants depuis la création du
régime en 1966, et la Fédération appuie la démarche
du gouvernement. Elle approuve les grands principes sur lesquels il s'appuie et
particulièrement celui qui fait de l'accessibilité aux
études postsecondaires un object essentiel du nouveau régime.
Nous voudrions, cependant, insister sur un point fondamental à nos yeux:
le régime québécois d'aide financière aux
étudiants se compare avantageusement aux autres régimes canadiens
ou américains. Nous nous réjouissons de le constater et nous
pensons que tout doit être fait pour préserver cet avantage.
Nous partageons également l'objectif de favoriser la
continuité et la persévérance dans les études qui
est formulé dans l'énoncé gouvernemental. Mais il doit
s'appliquer à l'ensemble des étudiants et pas seulement aux
bénéficiaires des prêts et bourses qui seraient
lésés par rapport aux autres. Nous souhaitons donc que le
gouvernement retire ce principe de sa réforme du régime d'aide
financière aux étudiants et qu'il le fasse figurer plutôt
dans le cadre du mode d'allocation des ressources financières aux
cégeps.
La Fédération des cégeps aimerait également
soumettre à l'attention de la commission trois principes qui ne figurent
pas dans l'énoncé du ministre, mais qui s'harmoniseraient
parfaitement avec les siens et qui nous paraissent extrêmement
importants. Tout d'abord, nous pensons qu'il faut accorder la priorité
à la satisfaction des besoins réels des étudiants les plus
démunis plutôt qu'à la simplification des règles
administratives, quand il y a conflit entre les deux. Nous parlons ici du
transport, des droits de scolarité, du coût des enfants à
charge, etc. Les collèges ont constaté que les étudiants
les plus démunis sont les premiers à être
pénalisés par les mesures de normalisation, et ceci, parce qu'ils
appartiennent à des groupes restreints et qu'ils ont souvent des besoins
particuliers dont ces mesures ne peuvent pas tenir compte.
En second lieu, nous souhaitons que le régime d'aide
financière aux étudiants mette l'accent sur
l'épanouissement de la famille. Nous rejoignons ici une
préoccupation de la société québécoise dans
son ensemble, qui désire que toutes les mesures soient prises pour
encourager la natalité. Le régime d'aide financière aux
étudiants doit être parmi les premiers programmes gouvernementaux
à s'inspirer de cette approche.
Enfin, la Fédération pense qu'il faudrait assurer aux
étudiants et aux étudiantes des revenus comparables à ceux
des assistés sociaux. Actuellement, la différence entre les deux
niveaux de ressources joue souvent un rôle négatif. Bien des
étudiants renoncent à leurs études parce que l'aide
sociale leur offre davantage que le régime des prêts et bourses.
Si les deux étaient équivalents, il est certain qu'un bon nombre
d'entre eux n'hésiteraient pas à entreprendre des études
postsecondaires ni à les terminer.
Je vais maintenant passer la parole à M. Guy Forgues, le
directeur des services aux étudiants du cégep de
Lévis-Lauzon. Il va vous présenter le résumé de
notre mémoire, puisque nous n'avons que 20 minutes pour ce faire,
préparé avant le dépôt du projet de loi 25 à
l'Assemblée nationale. Il va de soi que les commentaires et les
recommandations contenus dans ce mémoire concernent davantage le
document ministériel sur l'aide financière aux étudiants
dans les années quatre-vingt-dix, que le projet de loi 25. Mais, comme
l'un a inspiré l'autre, nos remarques continuent néanmoins de
prévaloir. M. le Président, M. le ministre, mesdames et messieurs
de la commission, je vous remercie de votre attention et je passe la parole
à M. Forgues.
Le Président (M. Gobé): Vous avez maintenant la
parole.
M. Forgues (Guy): M. le Président, M. le ministre, je vais
me permettre de présenter chacune des recommandations du mémoire
de la Fédération, en n'élaborant pas sur chacune parce que
je comprends que notre temps est limité.
La première recommandation consiste à indexer annuellement
les paliers de la table de contribution parentale. On sait que les orientations
gouvernementales prévoyaient une telle indexation et on sait que
ça faisait plusieurs années que ça n'avait pas
été fait. On considère que c'est une manoeuvre qui devrait
être faite annuellement.
La deuxième recommandation: tenir compte de chaque enfant de
l'unité familiale, qu'il soit ou non aux études postsecondaires,
c'est dans le cadre d'un de nos principes qu'on met de l'avant, à savoir
que, pour favoriser une politique familiale au Québec, on
considère que chacun des enfants devrait être pris en
considération dans le calcul et dans la division des contributions.
La troisième: attribuer un coefficient de
pondération de 100 % à chaque enfant, c'est en vertu du
même principe.
La quatrième recommandation: Que les allocations familiales et
les crédits d'impôt pour enfants ne soient plus pris en compte
dans le calcul des allocations de prêts et bourses. On considère
également que ce sont des mesures qui viennent assister, et appuyer,
soutenir des gens qui ont décidé de fonder des familles, mais on
considère comme n'étant pas très positif comme mesure que
ça leur soit retiré automatiquement au niveau de leurs
prêts et bourses.
La cinquième recommandation: retirer la onzième
recommandation ministérielle et maintenir la pratique actuelle,
c'est-à-dire alléger la contribution du candidat qui effectue un
retour aux études après avoir été deux ans sur le
marché du travail. On considère qu'il s'agissait là d'une
mesure transitoire intéressante pour des gens qui veulent se
réinsérer dans le monde des études. Étant
donné que c'est une mesure qui n'est pas récurrente, donc qu'un
étudiant ou une étudiante n'a droit à cette
mesure-là qu'une seule fois, c'est peut-être positif en termes
d'incitation au retour aux études.
La sixième recommandation: Que les dépenses admises pour
les frais de garde soient portées, par enfant, à 13 $ par jour,
soit 65 $ par semaine, et que ces montants soient indexés chaque
année. C'est que les propositions gouvernementales actuelles font que
les frais de garde qui sont compensés aux étudiants sont
nettement en deçà du marché.
La septième recommandation: Que le montant des dépenses
admises reconnu à l'enfant soit porté à 2440 $, dans le
cas du premier enfant, et à 1895 $, pour les suivants. C'est une
question de concordance avec une recommandation gouvernementale, qui est la
recommandation no 1.
La huitième recommandation: Que la quatorzième
recommandation du document ministériel ne soit pas retenue et qu'on
maintienne plutôt la règle actuelle à l'égard des
frais de transport. Cette recommandation est celle qui a l'effet le plus
négatif sur l'accessibilité aux études car sa mise en
application entraînerait une baisse significative des dépenses
admises. Nous vous référons, à ce sujet-là, au
mémoire, entre autres, de l'Association générale
étudiante du cégep de Drummondville qui porte essentiellement ou
en très grande partie sur cette recommandation, qui, pour nous, est
très pénalisante au niveau de nos clientèles.
La neuvième recommandtion: Que la seizième recommandation
du texte ministériel sur le retrait de la prime au budget du cadidat qui
a été sur le marché du travail et qui réside chez
ses parents pendant ses études ne soit pas retenue. On considère
que là également, c'est une incitation pour les gens à
demeurer ailleurs que dans leur famille et la pratique actuelle, d'après
nous, supporte mieux ces clientèles-là.
La dixième recommandation. Qu'un comité d'appel soit
formé d'un représentant des services aux étudiants en
établissement, d'une personne venant du grand public et d'un
étudiant, tous nommés par le ministre responsable. Il s'agit du
comité d'appel ou du comité dérogatoire, dépendant
du texte auquel on se réfère. On est en accord avec cette
recommandation-là. On s'interroge un peu sur la façon dont
ça va se vivre. On ne sait pas si les décisions vont être
centralisées. Ce comité-là semble avoir un pouvoir de
recommandations sur tout. Je ne sais pas s'il y a des études de faites
à savoir, une première année, combien de cas peuvent lui
être soumis. Mais ce qu'on veut, c'est que, si ce comité-là
existe, il soit, autant que possible, efficace.
La onzième recommandation: Que la proposition d'offrir une bourse
à l'intention des étudiants universitaires à temps
partiel, inscrits à deux ou trois cours par session, soit élargie
pour comprendre également les étudiants adultes de l'enseignement
collégial inscrits à temps partiel à deux ou trois cours
par session, et ceci, afin que les gens soient traités également,
surtout que les programmes actuels, au niveau du ministère, au niveau de
l'aide sociale traitent également ces clientèles-là en
termes de statut.
La douzième: Que la vingt-deuxième recommandation du
document ministériel sur les périodes d'accessibilité aux
prêts et bourses ne soit pas retenue. On considère qu'actuellement
on a des mesures facilitantes, en termes de gestion, concernant le nombre de
sessions pendant lesquelles les étudiants sont admissibles à
l'aide financière aux étudiants et trouve qu'il n'y a pas lieu de
les changer.
La treizième recommandation: Que les montants accordés
pour les frais scolaires soient haussés de manière qu'ils
s'ajustent aux coûts réels et que soient reconnues les
dépenses faites, dans certains progammes, pour l'achat
d'équipement de travail. On voudrait attirer votre attention à
savoir que le principe de la gratuité scolaire au niveau
collégial subit un léger glissement, c'est-à-dire que, de
plus en plus, le client - l'étudiant ou l'étudiante - a à
fournir de sa poche des équipements qui, avant ça, lui
étaient fournis par les collèges. Alors, étant
donné qu'on laisse retomber sur ses épaules le financement de
certains outils, on pense qu'il doit être compensé au niveau de
l'aide financière aux étudiants.
La quatorzième recommandation: Que le montant correspondant aux
coûts réels du transport, y compris le transport en commun, soit
octroyé aux étudiants ayant un statut d'étudiant autonome,
à titre de chef de famille monoparentale, de couple marié ou de
couple vivant maritalement et ayant un enfant, et qu'on reconnaisse, selon le
cas, la double résidence aux étudiants considérés
comme autonomes, à titre de chef de famille monoparentale, de couple
marié ou de couple vivant maritalement et ayant un enfant. Il s'agit de
clientèles qui sont dans des
situations particulières et qui, à notre avis,
mériteraient d'être supportées financièrement, mieux
qu'elles le sont actuellement.
La quinzième recommandation: Qu'un montant de 11 $ par semaine
soit octroyé aux étudiants non résidents qui ont à
employer le transport en commun pour se transporter jusqu'à
l'établissement d'enseignement.
La seizième recommandation: Que la location annuelle soit
portée à 3650 $ pour les familles monoparentales de trois enfants
ou plus.
La dix-septième recommandation: Que l'étudiant
handicapé bénéficie des mêmes avantages que la
personne handicapée qui n'est pas aux études et qu'on harmonise
à cette fin le régime québécois d'aide
financière aux étudiants avec les différents programmes
gouvernementaux concernés.
La dix-huitième recommandation: Que la contribution minimale de
l'étudiant ne soit pas retenue aux fins de calcul du prêt, et
ceci, tel qu'il est prévu à l'article 14 du projet de loi actuel.
Ça nous met dans des situations où des gens, des familles, qui
ont 9000 $ de revenus, ont des prêts inférieurs à des
familles où les parents gagnent 30 000 $ et plus.
Que l'allocation aux étudiants venant de régions
éloignées soit réservée à ceux qui doivent
sortir de leur région, soit parce que le programme choisi n'y est pas
donné, soit parce qu'ils n'y sont pas admis. Cette
recommandation-là de notre mémoire est retirée,
étant donnée que l'assemblée générale de la
Fédération s'est prononcée à rencontre de cette
recommandation cette semaine.
La vingtième recommandation: Que soit rétabli le
supplément hebdomadaire de 22 $ pour tous les étudiants dont les
parents sont des personnes à faible revenu. Lorsque cette
mesure-là a été enlevée, on croyait que ces
clientèles-là, ces familles-là étaient
compensées par le programme APPORT, mais on se rend compte à
l'usage que ce n'est pas du tout le cas.
Alors, il s'agit là de l'essentiel de nos recommandations. Je
comprends que c'est très rapide et que c'est un peu beaucoup technique,
mais il faut penser que c'est un mémoire qui a été fait,
qui a été écrit suite à des consultations qui ont
été faites dans les collèges par les personnes qui
reçoivent quotidiennement des étudiants et des étudiantes
qui vivent avec le régime d'aide financière aux
étudiants.
Le Président (M. Gobé): Je vous remercie. Est-ce
que vous en avez terminé avec votre présentation?
M. Forgues: Oui, monsieur.
Le Président (M. Gobé): Alors, je passerai
maintenant la parole à M. le ministre pour une période
déterminée d'avance. M. le ministre, vous avez la parole.
M. Ryan: M. le Président, je remercie la
Fédération des cégeps des suggestions nombreuses qu'elle
nous apporte en vue de contribuer à l'amélioration du projet de
loi 25. Les représentations de la Fédération ont
été conçues à la lumière de
l'expérience des établissements qui en font partie et, en
particulier, du personnel spécialisé qui se consacre à
l'aide et aux services à l'intention des étudiants dans les
collèges. On voit que le mémoire a été
rédigé en fonction d'une connaissance concrète des
situations auxquelles font face des étudiants et les administrateurs
d'établissement et ça lui apporte d'autant plus
d'intérêt.
Évidemment, on a plusieurs suggestions qui visent des
améliorations importantes dans le régime que nous proposons. J'ai
fait un calcul rapide de ce que coûteraient les principales
recommandations faites par la Fédération. Je ne sais pas si vous
avez établi un calcul de votre côté, M. le
président.
M. Beaulieu: Je dois vous dire que, là-dessus, pour nous,
c'est assez difficile de faire une évaluation précise en termes
de cents et de dollars. On n'a pas vraiment tout l'ensemble des statistiques
qui nous permettraient de réaliser ça. L'intention qui
était derrière nos recommandations était de sensibiliser
votre ministère et vous-même, M. le ministre, à l'ensemble
des problèmes qui restent à régler dans l'aide
financière aux étudiants en ayant à l'esprit l'aide aux
plus démunis. C'est dans ce sens-là. Nous sommes bien conscients
que la capacité de payer de l'État est quand même
relativement limitée, qu'il y a eu un effort important de fait dans le
projet de loi qui est actuellement déposé, mais nous pensons que
le gouvernement, dans la mesure de ses capacités financières, et
s'il peut faire plus... Nous lui avons indiqué à quelles places
il fallait, effectivement, peut-être appuyer davantage l'aide
financière aux étudiants.
M. Ryan: En tout cas, je prends note de cela, mais je voudrais
vous indiquer qu'un calcul rapide que j'ai fait dresser de mon
côté indique que l'ensemble des recommandations que vient de
résumer votre porte-parole donneraient un total d'à peu
près 118 000 000 $. Ça va vite. Et les sommes que nous projetions
de libérer pour l'amélioration du régime, lorsque nous
avons publié l'énoncé d'orientation, étaient en
tout de 52 000 000 $, c'est-à-dire un montant d'à peu près
34 000 000 $ au prêt, un montant de 18 000 000 $ à la bourse, que
nous financions en partie par certaines ablations que nous faisions dans les
éléments du programme qui nous apparaissaient moins
justifiés aujourd'hui qu'au moment où ils furent
institués.
Je fais mention de cette dimension générale parce que je
pense que ça aide à situer notre échange dans un contexte
peut-être plus immédiatement concret. Je donne juste un exemple:
la
contribution du conjoint. Là, je prends l'exemple le plus lourd
dans tout le paquet; il y en a d'autres qui... Ce sont des choses qui peuvent
être échangées. La contribution du conjoint, si nous
allions l'abolir, ça, ça implique des coûts additionnels de
40 000 000 $, un manque à gagner de 40 000 000 $. Les frais de garde,
nous les avons ramenés à 50 $ par semaine par enfant. C'est
réduit par rapport à ce que c'est actuellement par enfant; c'est
un fait. Il a fallu nous aligner sur les normes qui ont cours à l'aide
sociale parce que faire garder un biifant pour un couple qui est sur l'aide
sociale ou un couple dont l'un des conjoints est aux études, on ne voit
pas qu'il y ait une différence métaphysique et on ne voulait pas
avoir l'air de favoriser indûment le couple dont le conjoint est aux
études, excepté qu'on n'a plus de plafond. Il y avait un plafond
sous le régime actuel. Je ne sais pas de combien il était... Le
plafond actuel est à 84 $ et il n'y aura plus de plafond sous le
régime que nous proposons. Par conséquent, H y a un certain biais
en faveur des familles plus nombreuses, c'est évident, et ça
rejoint un des principes que vous voulez voir ajouter à ceux que nous
mettons de l'avant, le principe de l'encouragement aux responsabilités
familiales.
Je mentionne ces points-là, non pas pour dire que je m'oppose
à l'un ou l'autre, mais pour dire que nous avons dû faire ce que
j'appellerais un mixte, un paquet dont tous les éléments se
tiennent et qui peut se tenir lui-même à l'intérieur du
cadre qui nous est fixé. C'est pour ça que je vous dis que,
peut-être, vous pourriez faire un effort de votre côté pour
resserrer un petit peu vos propositions et peut-être les sérier
par ordre d'importance. Ce sera peut-être l'objet de ma première
question. Si on vous disait: Là, on est rendus au stade où il ne
peut pas être question d'élargir le cadre financier, mais à
l'intérieur de ce cadre-là, est-ce qu'il y a des échanges
que vous entreverriez? Par exemple, parmi les propositions que vous faites,
est-ce qu'il y en a que vous substitueriez à des améliorations
que nous proposons dans l'énoncé d'orientation, ou s'il y aurait
des modifications de cette nature? Mais je pense que ça, c'est le cadre
à l'intérieur duquel nous discutons, et le reste nous le retenons
pour des jours meilleurs. (16 h 30)
M. Forgues: M. le ministre j'entends bien ce que vous dites par
rapport à l'ensemble du coût de nos recommandations. Remarquez que
l'exemple que vous avez cité... En tout cas, je ne me souviens pas qu'on
ait demandé d'enlever la contribution du conjoint, là, mais c'est
probablement une erreur de ma part. Mais c'est sûr que ces
recommandations-là n'ont pas toutes le même poids. Sauf qu'il faut
dire que si on relit l'ensemble de nos recommandations avec une vision
historique de l'évolution du service d'aide financière aux
étudiants, ou la façon dont les clientèles ont
été traitées, pour certains éléments, il
nous semble qu'il s'agit d'une perte pour les clientèles actuelles.
Lorsque, dans un régime on prévoit des mesures pour favoriser la
réintégration au niveau de l'école et qu'on a
verbalisé ça par un allégement de contribution et qu'on
veut faire perdre le bénéfice de cet avantage-là à
ces étudiants-là, pour nous, il ne s'agit pas de coûts
supplémentaires, mais il s'agit de coupures par rapport aux services que
les étudiants ont actuellement, ou ont déjà eus. Et dans
ce sens-là, je ne pense pas que ça doive nécessairement se
chiffrer au même titre que des améliorations à
l'état pur qu'on pourrait vous suggérer. Par exemple, lorsqu'on
vous suggère que tous les étudiants non-résidents touchent
des frais de transport, aux coûts du transport en commun, je pense que
c'est une lecommandation qui, d'après nous, n'a pas la même valeur
que, par exemple, de mieux soutenir les étudiants qui sont soutien de
famille monoparentale, etc. Sauf qu'on se rend bien compte, dans l'exercice de
notre profession, tous les jours, qu'actuellement, il y a des
étudiantes, en particulier, qui vivent des situations difficiles et
pénibles, et que les règles ne nous permettent pas de leur donner
le minimum décent non seulement pour les inciter à rester dans le
réseau, mais à vivre dans le réseau de
l'éducation.
Alors, pour ce qui est de votre suggestion, peut-être de les
mettre par ordre de priorités, je pense que c'est une exercice auquel on
pourrait se livrer.
M. Ryan: Je m'excuse. S'il y a eu méprise à propos
de l'abolition de la contribution du conjoint, je m'en excuse, si vous me dites
que ce n'est pas dans le mémoire. Nous croyions nous souvenir que
ça y était, mais si vous me dites que ça n'y est pas, je
prends votre parole pour l'instant et je retire ce que j'ai pu indiquer
là-dessus.
Je reviens avec ma question, M. Forgues Dans les points que vous
soulevez, est-ce que vous pourriez indiquer, par exemple, peut-être les
trois plus aigus, à la lumière, justement, de ce qui
m'intéresse spécialement, c'est-à-dire votre
expérience quotidienne avec les étudiants qui s'adressent aux
programmes d'aide financière.
M. Forgues: Je vous dirai qu'à notre avis, celle qui est
la plus pénalisante pour nos clientèles, c'est votre
recommandation 14. Notre recommandation 8 s'oppose à votre
recommandation 14, à savoir les frais de transport pour les
étudiants qui ne peuvent bénéficier des transports en
commun. Je pense qu'à ce titre-là, le mémoire qui vous a
été présenté par l'Association des étudiants
du cégep de Drummondville... Pour certaines parties du Québec, il
nous semble que c'est très pénalisant. On comprend bien, pour
avoir discuté déjà avec des gens qui
travaillent à la Direction générale de l'aide
financière, qu'il y a une question de principe importante
là-dedans, à savoir que le gouvernement ne veut par financer des
autos aux étudiants là où il n'y a pas de transports en
commun. Sauf qu'il faut comprendre aussi que quelqu'un qui demeure à 50
ou 60 milles et qui fait le choix de continuer à rester dans sa famille,
ne doit pas être pénalisé financièrement par rapport
à celui qui coûte effectivement plus cher à l'État
et qui décide de ne pas résider avec ses parents. On croyait que
les règles actuelles faisaient que ce choix-là était
financé jusqu'à concurrence d'une non-résidence, ce qui
nous paraissait tout à fait juste, parce que...
M. Ryan: Sous le régime actuel, M. Forgues,
jusqu'où ça peut aller, la contribution versée à
l'étudiant au seul titre des frais de transport? Ça peut aller
jusqu'à 3000 $, 4000 $, ou 5000 $ par année?
M. Forgues: Ça peut aller jusqu'à la
différence entre un budget de résident et celui d'un
non-résident. Je pense que c'est 91 $ par semaine. Ça peut faire
un écart de 2200 $. Sauf qu'il faut penser que cet
étudiant-là, il subit un coût; il faut qu'il se transporte.
S'il décide de ne pas se transporter, s'il n'y a pas de transports en
commun et qu'il décide, à ce moment-là de se prendre un
appartement en ville, à ce moment-là, le régime actuel
prévoit que son budget de dépenses va passer de 48,45 $ à
139,45 $; donc, les 91 $, le gouvernement les paiera de toute façon,
sauf que l'étudiant...
M. Ryan: C'est de l'argent.
M. Forgues: ...pour avoir ce financement-là, va rester
ailleurs que chez ses parents.
M. Ryan: C'est de l'argent, ça, ce qui fait qu'on est
obligés d'y penser bien comme il faut. Mais, en tout cas, je suis
content, vous m'indiquez que c'est le problème le plus aigu dans la
liste de ceux que vous soumettez à notre attention. J'en prends note.
Vous n'êtes pas le premier à le souligner. Je pense que c'est un
des points qui nous ont été soulignés le plus
fréquemment depuis le début des auditions publiques de la
commission. On est obligés de le regarder de près, mais je ne
sais pas si vous auriez une solution qui pourrait coûter un petit peu
moins cher que ce qu'on encourt actuellement. Ça m'apparaît
très élevé.
M. Forgues: Je pense que peut-être...
M. Ryan: Je ne sais pas si vous avez pensé à
quelque chose d'intermédiaire. Moi, je suis toujours fort sur les
solutions intermédiaires.
M. Forgues: Oui. C'est absolument politique aussi. Je pense
qu'effectivement on pourrait peut-être tenter de trouver un moyen de
financer le transport des étudiants. Sauf qu'il mô semble
qu'à partir du moment où on va laisser le choix à des
étudiants, soit de prendre un appartement et, à ce
moment-là, d'être financés par l'État à 100
%, ou selon un budget de non-résident, ou de faire accroire à
l'Etat que les gens demeurent ailleurs que chez leurs parents... Parce que,
d'après nous, c'est une ouverture à la fraude de façon
extraordinaire. Un étudiant ou une étudiante n'a qu'à se
trouver une adresse, à Drummondville, par exemple, et, même s'il
continue à voyager de chez ses parents à une ville à 20
kilomètres, on va le considérer comme un non-résident et
on va le financer complètement. Alors, c'est à ce
niveau-là où on pense qu'il y a peut-être lieu de trouver
une façon pour favoriser l'honnêteté des gens et que
ça ne coûte pas plus cher, en bout de course, à
l'État. Mais c'est une mesure, je pense, sur laquelle je voulais attirer
votre attention.
D'autres mesures qui touchent, à notre avis, des gens qui sont
peut-être moins bien nantis, il s'agit de notre recommandation 14.
Celle-là, M. le ministre, je vais me permettre de l'illustrer par un cas
que je vis au collège actuellement. Présentement, parmi mes
étudiantes, j'ai une dame, qui est mariée, qui demeure à
Saint-Philé-mon de Bellechasse - par rapport au cégep
Lévis-Lauzon - et qui a cinq enfants. Actuellement, on lui octroie un
budget de non-résident, parce que c'est sûr qu'elle ne demeure pas
chez ses parents, elle demeure avec son mari et ses cinq enfants. Tous les
jours, elle voyage de Saint-Philémon à Lévis-Lauzon et les
règles actuelles ne nous permettent pas de lui attribuer de frais de
transport. À mon avis, ce serait difficile d'exiger d'elle, pour que,
effectivement, elle se retrouve dans la même situation que n'importe quel
étudiant ou étudiante, qu'elle déménage à
Lévis-Lauzon pour trois années d'études. Alors, moi, je
considère qu'on devrait lui octroyer des frais de transport. Mieux que
ça, étant donné que c'est une étudiante qui
étudie dans un programme où il y a des stages, une journée
par semaine, cette étudiante-là se rend à Montmagny, qui
est moins loin de chez elle que Lévis-Lauzon et, à ce
moment-là, on lui octroie des frais de transport entre
Lévis-Lauzon et Montmagny, ce qui veut donc dire qu'actuellement, le
régime, dans son cas à elle, ne la favorise sûrement pas
à se réintégrer au niveau des études et à
s'investir au niveau des études, parce que ça lui coûte
plus cher que ce que compense le régime actuel des prêts et
bourses. Alors, c'est l'objet de notre recommandation 14.
Une autre recommandation, aussi, c'est la dernière
recommandation, qui consiste, comme dans le passé, à remettre aux
étudiants...
M. Ryan: Dites-moi donc, cette personne-là, comment
est-elle remboursée actuellement, quand
elle va à Montmagny? Est-ce que c'est 0,21 $ ou 0,22 $ le
kilomètre?
M. Forgues: C'est 0,21 $ le kilomètre. Elle a droit
à des frais spéciaux de transport, étant donné que
son lieu de stage est situé à un certain nombre de
kilomètres de l'établissement d'enseignement qu'elle
fréquente, et ce sont des coûts qu'elle encourt actuellement,
parce que, effectivement, il faut qu'elle y voyage.
Deux autres recommandations sur lesquelles j'aimerais peut-être
attirer votre attention. Il s'agit de la recommandation 20 concernant les 22 $
pour les étudiants dont les parents sont des personnes à faible
revenu. Cette mesure-là a été enlevée du
régime d'aide financière aux étudiants cette année.
On vit ça actuellement, en 1989-1990, et l'argumentation qui nous a
été donnée, c'est que la relève a été
prise par le programme APPORT au niveau de l'aide sociale. Or, les
études qu'on a faites nous démontrent qu'effectivement, ce ne
sont pas tous les étudiants et étudiantes qui auraient
été bénéficiaires de cette mesure-là dans le
passé et qui ne sont pas compensés par le programme APPORT.
M. Ryan: Oui. Le transfert a été fait, dans ce
cas-là, à l'aide sociale.
M. Forgues: Pardon?
M. Ryan: Cette partie-là du programme est
transférée au régime de l'aide sociale.
M. Forgues: Oui, c'est-à-dire que...
M. Ryan: Puis là, l'allocation, évidemment, va
être versée aux parents. On dit: Ils ne peuvent pas fournir de
contribution parce qu'ils sont dans le besoin. Mais on dit: L'aide sociale va
fournir une contribution directe aux parents, puis cette contribution-là
est financée par le régime de l'aide sociale. Ça,
ça va embrasser peut-être 3000 ou 4000 cas.
M. Forgues: Mais, à notre avis, l'aide sociale ne vient
pas compenser toutes ces familles-là, parce qu'il faut absolument que
les faibles revenus dont il est question soient des revenus de travail. Or,
à partir du moment où ces revenus proviennent de la Régie
des rentes du Québec, par exemple, il n'y a pas de compensation. Parce
que APPORT, c'est Aide aux parents pour leur revenu de travail. Alors, à
partir du moment où ce ne sont pas des revenus de travail, mais de la
Régie des rentes du Québec, que ces gens-là touchent, ils
ne sont pas compensés.
M. Ryan: L'aide sociale, ce n'est pas ça. M. Forgues:
Pardon?
M. Ryan: L'aide sociale...
M. Forgues: Le programme APPORT, oui, c'est ça. C'est
l'objet de ce programme-là.
Lorsque les gens touchent l'équivalent d'environ 300 $ par mois
de revenus autres que des revenus de travail, que ce soit de l'aide sociale de
la CSST, ou de la Régie des rentes du
Québec, Ils ne sont plus admissibles à ces
programmes-là.
M. Ryan: Attendez un petit peu. Ce n'est pas relié au
programme APPORT. Le transfert qu'on a fait, c'est directement à l'aide
sociale. L'allocation est versée aux parents et, par conséquent,
il n'y a pas de perte de revenu.
M. Forgues: Pour l'étudiant, oui.
M. Ryan: L'étudiant, if est postulé qu'il a une
contribution de ses parents, mais l'argent qui faisait défaut à
ses parents va être donné par l'aide sociale, le même
montant.
M. Forgues: À condition que l'étudiant ou
l'étudiante satisfasse aux critères de résidence et de
non-résidence, à la fois aux prêts et bourses et à
l'aide sociale.
Le Président (M. Gobé): M. le ministre, c'est
là tout le temps que vous aviez, et je me dois maintenant de passer la
parole...
M. Ryan: Je voudrais souligner quand même le
caractère très constructs de l'ensemble du mémoire.
J'apprécie l'appui que donne la Fédération aux
orientations générales de la politique du gouvernement. Je sais
bien qu'on pourrait désirer mieux; on esquisse à plusieurs
endroits des possibilités d'amélioration intéressantes. Je
pense que la Fédération est l'un des organismes les mieux
placés pour comprendre les contraintes auxquelles doit obéir le
gouvernement, parce que ces contraintes commandent également les
rapports d'ordre financier que nous avons avec les collèges
d'enseignement général et professionnel à travers le
Québec. J'apprécie hautement l'esprit constructif dans lequel ces
choses-là sont apportées et les points sur lesquels nous avons
échangé. Si vous avez des compléments d'information
à nous communiquer, qui pourraient nous aider à mieux comprendre,
nous les recevrons avec beaucoup d'intérêt. Je voudrais exprimer
mon appréciation aux personnes qui font partie de votre
délégation, cet après-midi, et qui siègent à
notre comité de personnes-ressources pour l'étude de ces
questions-là. Je pense que si nous avons pu nous rencontrer comme
ça, c'est parce qu'il y a beaucoup de travail de convergence et de
consultation qui se fait.
Le Président (M. Gobé): M. le ministre,
vous aurez deux minutes à la fin pour conclure.
M. Ryan: Merci. Ha, ha, ha!
Le Président (M. Gobé): Je vais maintenant passer
la parole à notre collègue, le député
d'Abitibi-Ouest, qui doit certainement avoir quelques questions à poser,
lui aussi. M. le député d'Abitibi-Ouest, vous avez maintenant la
parole pour une période de 20 minutes ou moins, à votre
choix.
M. Gendron: Oui. Je voudrais remercier la
Fédération des cégeps d'avoir profité de cette
occasion pour venir nous donner l'éclairage qu'elle voulait nous donner
en tout cas, sur deux aspects principaux de la question que nous
débattons, même si moi je trouve qu'il y en a d'autres. On ne peut
pas toucher uniquement la question du dégel des frais de
scolarité et la loi 25 sans aborder également toute
l'évolution de l'accessibilité des études, la diplomation
et, également, les garanties que notre système
d'éducation, aux niveaux collégial et universitaire, progresse
plutôt que de régresser.
Je vais traiter rapidement de la première partie de votre
mémoire. En tout cas, indépendamment que ce soit dans l'ordre ou
non, ça n'a pas d'importance. J'estime que vous avez bien fait de
rappeler qu'au niveau des principes, il me semble que nous avons, comme
société, un régime d'aide financière qui
répond à certains principes qu'il n'y a pas lieu, en ce qui me
concerne, de remettre en question. C'est ce que vous avez fait au début
de votre mémoire en disant que vous approuviez sans réserve les
quatre premiers et je n'ai pas à répéter ça.
Au niveau du cinquième, je vous félicite d'avoir
rappelé que là, vous avez de sérieuses réserves.
Moi, je ne les trouve pas assez sérieuses à mon goût, mais
ça, c'est une question d'opinion. Il me semble qu'on dit la même
chose. C'est juste une question - est-ce que c'est peu, beaucoup,
passionnément, à la folie? - c'est une question de variation. Je
pense qu'avec ce gouvernement-là, qui a toujours comme objectif de
toujours égaliser les choses par le bas en défaveur des
concernés, vous faites bien d'indiquer que le régime doit viser
à être comparable à ce qui est offert dans les autres
sociétés. Malheureusement, dans le présent cas, c'est
évident que ça veut dire une réduction des
bénéfices, ça veut dire une coupure de certains
éléments. D'ailleurs, le ministre l'a admis lui-même, c'est
une nouvelle réforme qu'il veut financer en partie par les gains qu'il
fait sur des éléments qu'il coupe du régime actuel et en
bonne partie également par le dégel des frais de
scolarité. Donc, ça fait un peu curieux quand on parle de
bonifier un régime, mais que pour l'essentiel de la bonification, on
passe la facture à quelqu'un d'autre; il faut être conscient de
ça. Sur ce principe-là, je vous félicite d'avoir
rappelé au ministre - même si, lui, il lit bien ce qu'il veut lire
- que là. il y a un problème. (16 h 45)
Un autre point également. Je pense que vous avez fait une
remarque pertinente en disant que d'avoir l'objectif de favoriser la
continuité, la persévérance aux divers cycles
d'études tout en incitant, bien sûr, les étudiants à
compléter leurs études dans des délais normaux, c'est la
tarte aux pommes, c'est la vertu. Mais il est bon de le rappeler parce que je
pense que, comme société, personne ne souhaite que les
études s'éternisent, à moins qu'il n'y ait des motifs
valables pour que, de temps en temps, ça prenne plus de temps à
les faire. Ça, il peut y avoir des circonstances qui l'expliquent, avec
le type d'étudiants qui composent notre société en 1990
par rapport aux années 1970-1972. C'est un élément sur
lequel je trouve que vous n'avez pas assez insisté. Pour des gens qui
sont sur le terrain comme vous autres, qui vivez avec des clientèles,
j'aurais aimé qu'il y ait plus de descriptif des clientèles
collégiales. Je ne change pas d'avis qu'il y a de plus en plus de jeunes
qui sont démunis, qui sont seuls et qui ne peuvent pas compter sur
énormément de support de leurs parents pour 25 000 raisons que je
ne veux pas analyser, mais qui sont là. Il me semble qu'un organisme
comme le vôtre aurait dû être capable de mettre un peu plus
d'acuité là-dessus en disant: Compte tenu de l'éclatement
des familles, compte tenu des familles reconstituées, compte tenu des
familles qui, au plan de la notion économique de ménage, ont un
statut de monoparental - et c'est plus de 40 % en 1990 - ça ne donne pas
un profil étudiant comme je souhaiterais en avoir un et ça n'en
donne pas un au Québec qui ressemblerait à celui de
l'île-du-Prince-Édouard, de la Nouvelle-Ecosse ou du
Nouveau-Brunswick. Ce sont des réalités qu'il faut prendre en
compte.
Le ministre, lui, nous compare avec le reste du Canada en disant que les
frais de scolarité vont demeurer les plus bas même avec la hausse;
il a raison. Mais il ne faut pas regarder juste ça. Il y a des raisons
pour lesquelles il y a lieu de les maintenir les plus bas et d'arriver à
l'autre dossier auquel je vais arriver dans quelques minutes, celui du
dégel.
Sur vos recommandations, sincèrement, vous avez, je pense,
touché à peu près aux mêmes recommandations qui sont
constamment revenues. Le ministre a dit que c'est celle-là qui est
revenue le plus souvent. À ma connaissance, elle est revenue dans tous
les mémoires, sauf dans celui de la CREPUQ, qui a fait plus l'analyse de
la problématique du financement universitaire et du dégel que de
l'aide financière, et c'est parfaitement normal. Il n'y a pas de
blâme dans ce que je dis. Mais, parmi tous ceux qui ont fait une analyse
plus détaillée du régime d'aide financière, il n'y
a à peu près personne qui n'a pas convenu d'être plus
sensible à toute la
notion d'autonomie, de contribution parentale et des frais de transport;
ce sont toutes des notions qui sont constamment revenues pour tenir compte
aussi des actifs, la notion d'actifs à l'intérieur du calcul. Il
y en a plusieurs qui sont venus en disant qu'il y a lieu de faire des
révisions là-dessus. Vous, de la Fédération des
cégeps, vous dites: On approuve à peu près la
moitié des recommandations précises concernant le régime
d'aide financière. Je n'ai pas de difficulté à vivre avec
ça.
Quant aux éléments qui sont supprimés, le ministre
dit: Nous, on avait compté financer une partie de notre réforme
là-dessus et, donc, c'est pour ça qu'il faut les supprimer. En
tout cas, je suis heureux que vous ayez rappelé que... Je ne pense pas
qu'il y ait lieu de supprimer la recommandation 14, qui réduit
considérablement les frais de transport alloués. Vous avez bien
fait de rappeler la nécessité de la maintenir. Les 22 $
également, vous souhaitez que l'on supprime la recommandation qui veut
retirer la prime de 22 $; donc c'est revenir à ce qui existait. Je
pense, encore là, que c'est une bonne recommandation qui a
été rappelée par la plupart. Je n'ai pas de
problème à vivre avec ça.
Quant à l'ajout, vous dites: La Fédération des
cégeps, sur les points qui ont été ignorés dans le
document... Vous proposez des recommandations supplémentaires au
ministre. Écoutez, tout ce que je peux dire, c'est que ce sont de bonnes
suggestions et j'espère que le ministre va en tenir compte.
Sur vos recommandations concernant le régime d'aide, je ne peux
pas vous poser de questions pour poser des questions. Je pense que c'est clair;
votre mémoire est bien clair. J'espère que le ministre va en
tenir compte et que, dans l'évaluation générale qu'il
fera, il insistera bien sûr davantage à l'endroit où il me
semble que, avec plus d'acuité, il y a lieu de corriger de vrais
problèmes, puisqu'on fait une réforme de l'aide financière
et que c'est le moment de le faire.
Quelques commentaires sur votre opinion qui n'est pas tellement
traitée dans le mémoire, mais puisque vous en avez parlé
publiquement et que vous venez d'émettre un communiqué de presse
avec un embargo jusqu'au 27 février - mais c'est passé - sur le
dégel des frais de scolarité, j'aurais un ou deux commentaires.
Mes deux questions, puisqu'on a la chance de vous avoir, porteraient
là-dessus. Dans l'article de presse, avant de regarder
spécifiquement votre communiqué, on vous faisait dire, bien
sûr, que vous étiez pour le dégel des frais de
scolarité. Je vais juste lire la fin de votre article: "La
Fédération est d'autre part favorable au dégel, mais
à certaines conditions." Évidemment, ça, on n'a plus
reparlé de ça dans les titres et tout ça; ça, on
est habitués, ce n'est pas grave. Mais moi, ce que je veux approfondir,
c'est... Vous avez posé des conditions et vous en avez posé une
majeure, à savoir qu'il faut absolument que cette hausse d'argent soit
directement affectée à l'amélioration de la qualité
de l'enseignement. Comme je sais que l'éducation vous intérese et
que vous avez suivi les débats de cette commission parlementaire,
peut-être pas en étant assidus ici, mais par ce que les groupes en
ont dit, ce que la presse en a dit, est-ce que vous avez acquis cette
conviction, suite au déroulement de cette commission parlementaire? Ou
est-ce que vous avez obtenu, vous, comme fédération, la garantie
du ministre que, effectivement, cette hausse sera directement affectée
à l'amélioration de la qualité de l'enseignement?
M. Beaulieu: Si on a reçu la certification du ministre
là-dessus?
M. Gendron: Oui.
M. Beaulieu: Bon. D'après le débat qui s'ensuit,
effectivement la hausse va être attribuée à la formation
universitaire. Le danger qu'il y a, c'est qu'il y art possiblement un
désengagement de l'État, dans la mesure où compte tenu...
Si l'on se sert des hausses ou des produits de la hausse pour faire en sorte
que, par ailleurs, l'État se désengage au niveau des subventions,
bien là, la problématique du financement des universités
va rester la même, c'est-à-dire qu'on est d'accord avec
l'augmentation des frais de scolarité dans la mesure où le
produit de cette augmentation-là puisse effectivement servir au
financement des universités et régler le problème du
sous-financement. Cependant, effectivement, il n'y a pas d'engagement connu
à l'effet que le gouvernement, par ailleurs, ne réduira pas les
subventions qui sont accordées aux universités actuellement.
M. Gendron: Vous, vous l'évaluez à combien, le
sous-financement universitaire?
M. Beaulieu: Le sous-financement universitaire?
M. Gendron: Oui.
M. Beaulieu: C'est très difficile à évaluer.
Ce que je peux vous dire, c'est qu'il semble accepté communément
qu'actuellement la problématique de la qualité de l'enseignement
universitaire passe par une addition très substantielle de subventions
et de financement. Que cette augmentation-là exige ou autorise de
solliciter de la part des étudiants et des étudiantes du
Québec une contribution supplémentaire, soit, mais ça ne
doit pas avoir pour effet que le gouvernement se désengage, par
ailleurs, quant à ces subventions. Je pense que la responsabilité
gouvernementale à cet égard-là dort être une
responsabilité qui non seulement doit être maintenue, mais doit
être aussi accentuée au niveau de ces
subventions. Donc...
M. Gendron: Si je lançais tes chiffres suivants... Je
prétends que le sous-financement, avant l'injection de l'argent du
dégel, était à peu près de 160 000 000 $...
M. Ryan: Avant les 55 000 000 $?
M. Gendron: Je répète: 160 000 000 $...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Gendron: ...et que si le ministre a bien compté, que la
réforme va rapporter 40 000 000 $ en argent neuf, on n'a pas la garantie
qu'il va aller directement dans le financement universitaire. Mais même
si cela était, 160 000 000 $ moins 40 000 000 $, il reste 120 000 000 $.
A ce moment-là, la question que je pose: Si vous lisiez la même
chose que je viens de lire sur la situation exacte des chiffres que le
sous-financement demeure à 120 000 000 $, auriez-vous la même
opinion sur le dégel des frais de scolarité?
M. Beaulieu: La même opinion?
M. Gendron: À savoir d'être favorable au
dégel, même si ça ne réglera rien du financement des
universités.
M. Beaulieu: Quant à moi, je pense que ça
règle une partie, ça ne règle pas tout le problème.
Le problème du financement ou du sous-financement des universités
demeure encore un problème important, aigu et auquel l'État ou le
gouvernement doit s'attarder et travailler.
M. Gendron: Sur l'accessibilité, avez-vous une opinion
à l'effet que le dégel des frais de scolarité puisse avoir
un inconvénient significatif sur l'accessibilité, puisque le
maintien du gel, selon le ministre, pendant 25 ans, a contribué
énormément à la démocratisation et à
l'accessibilité. Est-ce que que vous êtes les tenants de la
thèse que le dégel des frais de scolarité n'aurait pas
d'effet sur l'accessibilité?
M. Beaulieu: Nous pensons que le dégel n'aura pas un effet
très significatif sur l'accessibilité.
M. Boucher (Gaétan): Si vous permettez, M. Gendron, votre
question amène de ma part aussi un commentaire. Tout notre
système d'éducation, au moment où on se parle, est pris
avec un problème de sous-financement. Les universités peuvent,
d'une certaine façon, s'estimer chanceuses de pouvoir compter,
peut-être, sur 40 000 000 $ à travers les frais de
scolarité. Les commissions scolaires se plaignent d'un sous-financement.
Le Journal de Montréal, ce matin, faisait état d'un
possible transfert, à travers l'assiette fiscale. Mais les
collèges également sont victimes d'un sous-financement, sauf que
nous, nous n'avons ni pouvoir de taxation, ni frais de scolarité.
Évidemment, au moment où on se parle, on peut, à notre
point de vue, être inquiets face à ce portrait-là et
inquiets, aussi - et je partage l'avis du ministre - par rapport au dernier
budget Wilson, en ce qui concerne les transferts fiscaux, bien qu'ils aillent
dans le fonds consolidé, mais, néanmoins, on peut être
inquiets. Il y a une partie, que le ministre évalue à 65 000 000
$, soit 30 %, qui, en principe, est réservée à
l'enseignement postsecondaire. On peut être inquiets, à l'aube de
l'annonce du discours du ministre des Finances, puisque, dans notre cas, en
tout cas, c'est sûr, on n'a ni pouvoir de taxation, ni frais de
scolarité. On compte donc sur l'État, les subventions de
l'État, pour assumer la mission qui est la nôtre.
M. Gendron: Une dernière question, en ce qui me concerne,
vous avez affirmé avec énormément de conviction, comme
quatrième principe, que vous donniez, selon ce que je lis dans votre
communiqué, votre accord au dégel, et je vous cite, vous dites:
C'est probablement là la plus importante des conditions pour la
Fédération des cégeps, soit que le dégel
s'accompagne d'une amélioration de l'aide financière, de sorte
que nul ne se voit refuser l'accès aux études universitaires
à la suite de l'augmentation des frais de scolarité. Est-ce qu'en
lisant attentivement le projet de loi sur l'aide financière, vous avez
acquis cette conviction que nul ne se verra refuser l'accès aux
études universitaires et qu'en conséquence la condition la plus
importante est satisfaite et que c'est pourquoi vous êtes à l'aise
de donner votre appui au dégel?
IUI. Beaulieu: Là-dessus, je dois vous dire que je ne
pense pas que le projet d'aide financière permette actuellement à
l'ensemble des étudiants et des étudiantes du Québec, et
surtout à ceux et à celles qui sont les plus démunis,
d'avoir une garantie d'accessibilité, et c'est pourquoi nous avons
déposé un mémoire, et c'est pourquoi nous avons fart un
certain nombre de recommandations.
M. Gendron: D'après vous, actuellement, au niveau des
études collégiales, c'est combien le pourcentage des
étudiants de niveau collégial qui reçoivent une aide
financière sous forme de prêts et de bourses?
M. Forgues: Au niveau des prêts, je pense qu'à ma
connaissance c'est un étudiant sur quatre; au niveau de la bourse, je
pense que c'est un étudiant sur trois, ou le contraire.
M. Gendron: Oui, le contraire.
M. Forgues: C'est-à-dire qu'un étudiant sur trois a
un prêt et un étudiant sur quatre à la bourse.
M. Gendron: Alors, si vous voulez juste répéter
ça s'il vous plaît.
M. Forgues: Je vais prendre la feuille pour essayer de vous
donner la bonne information. C'est un étudiant sur trois qui a un
prêt pour une valeur d'environ, pour les collèges publics, 80 000
000 $ et un étudiant sur six des collèges publics a une bourse,
pour l'équivalent de 60 000 000 $.
M. Gendron: Vous dites qu'il y a seulement 20 %, dans les
collèges publics, des étudiants de niveau collégial qui
ont une bourse, c'est bien ça?
M. Forgues: Un sur six.
M. Gendron: C'est ça. Merci.
Le Président (M. Gobé): Est-ce que vous avez
terminé, M. le député?
M. Gendron: Moi, j'ai terminé, mais ma collègue a
peut-être des questions à poser dans les deux minutes qui me
restent.
Lé Président (M. Gobé): Oui, s'il vous
plaît. Mme la députée.
Mme Caron: Merci, M. le Président. Une seule question.
Vous ne croyez pas que le dégel des frais de scolarité va amener
une non accessibilité. Vous réaffirmez, dans le
communiqué, l'importance de la gratuité au collégial. Si
ce principe était remis en cause, est-ce que ça toucherait
à l'accessibilité?
M. Beaulieu: Bon. Lorsqu'on dit qu'au niveau universitaire il n'y
aura pas d'impact significatif, je pense que ça, c'est une chose et on y
croit. En ce qui concerne le niveau collégial, il faut bien se rendre
compte que, dans la conjoncture actuelle et cette des prochaines années,
le niveau collégial, de par la mondialisation des marchés, de par
les champs de spécialisation qui vont définir finalement les
connaissances de base ou les connaissances fondamentales pour que les jeunes
puissent accéder éventuellement au marché du travail, on
pense qu'effectivement le niveau collégial va devenir de plus en plus le
niveau presque absolument essentiel pour un jeune s'il veut atteindre une
fonction de travail convenable, au niveau collégial. Donc, ça
devient un niveau quasiment obligatoire éventuellement et, partant, il
me semble que là il y a une responsabilité de l'État qui
est encore supplémentaire, qui va devenir de plus en plus importante et
qui va de plus en plus s'accroître, à ce niveau-là.
Est-ce que l'augmentation ou l'ouverture à la
problématique des frais de scolarité va avoir un impact sur les
étudiants jeunes? Très certainement aussi. C'est vrai, il va y en
avoir un impact. Est-ce qu'il va être significatif? Ça, je ne
saurais vous le dire.
Mme Caron: Donc, l'impact est marqué au niveau
collégial, mais ne l'est pas au niveau universitaire.
M. Beaulieu: Au niveau universitaire, il y aura un impact, mais
il ne sera pas nécessairement significatif. Au niveau collégial,
il y en aura certainement un aussi, mais de là à dire qu'il sera
très significatif, je ne pourrais pas l'affirmer.
Mme Caron: Merci.
Le Président (M. Gobé): Je vous remercie, Mme la
députée de Terrebonne. M. le député de
d'Abitibi-Ouest, un mot pour conclure?
M. Gendron: Merci.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. le
député de d'Abitibi-Ouest. M. le ministre, vous avez un mot
aussi?
M. Ryan: Oui, juste un mot, M. le Président. Je voudrais
rappeler clairement, parce que j'entendais le président de la
Fédération des cégeps parler des étudiants les plus
démunis, qui seraient peut-être les personnes les plus
affectées par la hausse des frais de scolarité... Je pense qu'il
est important de rappeler, comme je l'ai dit à plusieurs reprises depuis
le début des travaux de la commission, que tout étudiant
présentement bénéficiaire d'une bourse verra sa bourse
augmenter d'au moins le montant de l'augmentation des frais de
scolarité. Par conséquent, il n'y aura pas d'impact
monétaire pour cet étudiant là découlant de la
hausse des droits de scolarité. Je pense que c'est important de le
signaler avec clarté, parce que ça fait deux semaines qu'on le
dit puis, du côté de l'Opposition en particulier, il y en a qui
n'ont pas compris ou qui affectent de n'avoir pas compris. Je pense que c'est
important que ce soit rappelé clairement.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. le ministre. Au
nom de la commission, je tiens à vous remercier d'être venus. La
commission va suspendre ses travaux quelques minutes afin de permettre à
la Confédération des syndicats nationaux de prendre votre place
en avant. La séance est suspendue pour une minute.
(Suspension de ia séance à 17 h 2)
(Reprisée 17 h 7)
Le Président (M. Gobé): À l'ordre, s'il vous
plaît! La commission de l'éducation va reprendre ses travaux
concernant la consultation générale sur le projet de loi 25, Loi
sur l'aide financière aux étudiants. Je demanderais à la
Confédération des syndicats nationaux de bien vouloir prendre
place à la table, en avant. À l'ordre, s'il vous plaît! M.
le ministre.
Est-ce que je pourrais demander aux intervenants de se présenter
ou, du moins, à la personne qui va faire la présentation de
présenter ses vis-à-vis.
Confédération des syndicats
nationaux
Mme Lamontagne (Céline): Oui. Alors, Céline
Lamontagne de la Confédération des syndicats nationaux.
Le Président (M. Gobé): Bonjour, Mme
Lamontagne.
Mme Lamontagne: Bonjour. Je vais vous présenter ceux qui
m'accompagnent. Denis Choi-nière, président de la
Fédération nationale des enseignants «t des enseignantes du
Québec; Jean Charest, conseiller syndical à la CSN,
économiste de profession, et Mario Guertin, président du
comité des jeunes de la CSN. Je voudrais aussi excuser l'absence de Mme
Ginette Guérin, présidente de la Fédération des
employés et employées des services publics qui regroupe les
employés du soutien collégial et soutien
élémentaire et secondaire.
Le Président (M. Gobé): Merci beaucoup. Il me fait
plaisir de vous accueillir et de voir qu'il y a même des
économistes parmi nous aujourd'hui. Je vous donne maintenant la parole.
Vous avez une période de 20 minutes pour procéder à la
présentation de votre mémoire et, par la suite, le ministre et M.
le critique en chef de l'Opposition auront chacun une période de temps
pour vous questionner et faire valoir leur point. Alors, vous avez maintenant
la parole.
Mme Lamontagne: Merci, M. le Président. Alors, il nous
apparaît peut-être important quand même, avant d'aborder nos
commentaires sur les orientations gouvernementales et les propositions
gouvernementales sur le régime d'aide financière aux
étudiants, de rappeler ce qui nous apparaît, à nous,
certains enjeux de cette réforme et de rappeler aussi dans quel contexte
cette réforme se fait.
Rappelons qu'en 1965 le Québec avait décidé de se
retirer du programme canadien d'aide financière et on sait qu'à
l'époque il y avait plusieurs raisons qui militaient en faveur de ce
retrait. C'était un retrait, comme on le sait, avec compensation. On
reconnaissait, par ce retrait-là, qu'il y avait des besoins
spécifiques au Québec en matière d'éducation et
que, si on voulait instituer un régime particulier d'aide aux
étudiants, c'est qu'on souhaitait, entre autres - ce n'était pas
la seule raison - faciliter le rattrapage en termes de scolarisation de niveau
postsecondaire. Alors, si on dit que notre régime est peut-être
meilleur qu'ailleurs au Canada, c'est parce qu'il y avait des objectifs et une
situation particulière au Québec. Même si le Québec,
aujourd'hui, à notre avis et de l'avis de tous, a fait des grands pas en
termes d'accessibilité aux études postsecondaires, il nous
apparaît que l'objectif d'accessibilité doit demeurer encore un
objectif majeur de tout l'ensemble de nos politiques en éducation. Cet
objectif-là, pour nous, n'est pas en contradiction avec des objectifs de
qualité, de performance, d'augmentation du nombre de diplômes de
2e et de 3e cycles. Ce ne sont pas deux objectifs qui se contredisent, mais
plutôt deux objectifs, à notre avis, qui devraient se
compléter parce que le Québec, encore aujourd'hui, a du
rattrapage à faire. Entre autres, rappelons-en quelques-uns, il y a le
retard des francophones par rapport aux anglophones au niveau du temps, de la
durée des études. Quant aux femmes, même si elles ont fait
beaucoup de pas au niveau de l'accès aux études universitaires,
il demeure que dans les niveaux non traditionnels, entre autres en sciences
pures, il y a des retards importants et on demeure toujours en retard sur
l'Ontario particulièrement au niveau du nombre de diplômés
de 2e et de 3e cycles. Donc, un régime d'aide financière doit
avoir comme objectif, toujours comme il a été dès le
départ, de permettre une plus grande accessibilité des
étudiants aux études postsecondaires.
Un deuxième aspect qui nous apparaît important aussi, c'est
qu'on ne peut dissocier cette réforme que la commission parlementaire
étudie actuellement du contexte du dégel des frais de
scolarité. Parce que le régime d'aide financière visait
des objectifs d'accessibilité et, historiquement, également la
volonté politique de maintenir les frais de scolarité au
Québec à un niveau plus bas que dans les autres provinces, visait
des objectifs d'accessibilité et de rattrapage. En ce sens, les deux
politiques se rejoignent. De plus, on en a parlé tout à l'heure
dans l'autre présentation, c'est clair, et c'est la volonté du
gouvernement, que la réforme qui est proposée au niveau de l'aide
financière vise à compenser les effets négatifs du
dégel des frais de scolarité pour les plus démunis ou ceux
qui sont le plus économiquement faibles.
Nous, nous sommes inquiets, et très inquiets, des orientations
qui sont sous-tendues par la jonction de ces deux projets qui sont
parallèles et qui, en même temps, se joignent très bien.
Nous ne croyons pas que des mesures de soutien financier aux étudiants
et étudiantes
ne doivent pas entrer en contradiction avec d'autres moyens pour
faciliter d'autres mesures qu'on pourrait qualifier de mesures plus
universelles pour faciliter l'accessibilité de tous aux études.
Il y a un choix politique qui est inquiétant actuellement au
Québec, c'est qu'on remet de plus en plus des mesures dites universelles
pour dire, oui, si on coupe dans des mesures universelles, on va, par ailleurs,
créer des programmes pour que les pius démunis n'en soient pas
touchés. C'est tout le débat qu'on a fait, les dernières
semaines, sur le ticket modérateur sur la santé. Ça
rejoint ce débat-là On sait que tout, que ce soit le dégel
des frais de scolarité ou d'autres formes de ticket modérateur,
l'effet, en bout de piste, de toutes ces coupures dans les mesures
universelles, ça pénalise toujours les plus faibles et les plus
démunis économiquement. Nous pensons que des corrections ne
doivent pas être apportées à ce niveau, mais doivent
être apportées par un régime fiscal.
L'autre question qu'on se pose quand on lie les deux politiques
actuelles, dégel et aide financière, c'est: Est-ce que les
bonifications actuelles qui sont proposées à l'aide
financière vont permettre une pleine compensation des coûts
supplémentaires? M. le ministre a parlé tout à l'heure de
ceux qui étaient récipiendaires de bourses, mais qu'en sera-t-il
pour ceux qui sont récipiendaires de prêts, qu'en sera-t-il pour
ceux qui sont dans des limites difficiles? Comment seront-ils compensés
par la réforme actuelle du régime? C'est d'autant plus
inquiétant qu'on dit que peut-être ça pourrait aller - on
n'en est pas sûr - jusqu'à une diminution de 12 000
étudiants au niveau universitaire, du fait du dégel des frais de
scolarité. C'est pour ces raisons et c'est en lien avec la politique
d'aide financière qu'on s'oppose aussi au dégel des frais de
scolarité.
Si on revenait maintenant aux orientations gouvernementales sur l'aide
financière. D'abord, on peut dire qu'on est en accord avec plusieurs
modifications, mais on est inquiets, par ailleurs, de la tendance de
l'augmentation de l'appart relatif des prêts par rapport à
l'appart des bourses dans l'ensemble du régime d'aide financière.
Ça s'est développé depuis les dernières
années et, à notre avis, c'est un effet pervers du régime,
dans la mesure où ça aura pour conséquence d'augmenter
l'endettement des étudiantes at des étudiants.
On va nous dire que l'endettement des étudiants est moins
élevé au Québec qu'en Ontario, mais je pense qu'il
faudrait avoir des études beaucoup plus approfondies de comparaison de
niveau de vie et on sait qu'il y a peut-être moins de facilité
pour un étudiant ou une étudiante québécoise
à se trouver un emploi au Québec qu'en Ontario, quand on
connaît le niveau de chômage.
Alors, je reviendrais maintenant, si vous le permettez, M. le
Président, aux recommandations qui sont contenues dans notre
mémoire que vous ayez entre les mains. Je vais aller assez rapidement
pour rappeler et dire quelles sont les modifications qu'on souhaite voir aux
recommandations, aux orientations gouvernementales. Si on prend la
recommandation 1 du cahier gouvernemental où on parle de l'exemption,
où on parie de la contribution parentale et on parle de l'exemption pour
enfants, nous, on est d'accord avec cette première
recommandation-là, mais on souhaite qu'il y ait une formule d'indexation
d'année en année pour tenir compte de l'augmentation du
coût de la vie.
Deuxième recommandation: Nous, on s'inquiète d'une chose.
On trouve qu'il faudrait réviser les tables pour s'assurer qu'il n'y
aura pas une diminution de la contribution parentale pour les parents les plus
fortunés. Sur la recommandation 3: Quand on propose que le revenu net
soit celui établi par le fisc, on recommande qu'on inclue le revenu des
gains de capital, les amortissements déduits à l'égard des
édifices à logements, etc. Donc, que ce soit plus le revenu net
que celui qui est prévu dans les formules d'impôt.
Au niveau de la recommandation 4: On est d'accord pour porter à
90 000 $ les actifs nets. Au niveau de la recommandation 5: On est d'accord
avec le fait que les besoins du conjoint soient couverts par l'aide sociale. Au
niveau de la recommandation 6: On est aussi d'accord avec la réduction
de la contribution du conjoint. On s'est rendu compte, cet après-midi,
qu'on était peut-être moins radical que la
Fédération des cégeps. On n'a pas demandé
l'abolition de la contribution du conjoint, mais on peut dire qu'on a fait un
peu ce débat et, sur le principe de l'indépendance
économique de chacun des conjoints, on pense que ça se
défend très bien. Au niveau économique, on n'a pas fait
les calculs de ce que ça pourrait signifier.
Nous recommandons, à la recommandation 7 sur la contribution de
l'étudiant qui propose une contribution minimale fixe, qu'on revienne au
statu quo, c'est-à-dire qu'on tienne compte des contributions
individuelles. Nous sommes en accord - je ne nommerai pas l'ensemble des
recommandations - sur tout ce qui améliore, tous les ajustements qui
sont faits dans les recommandations, dans les orientations pour
améliorer ceux qui sont des étudiants et les étudiantes
qui ont une charge parentale. Je pense que ça nous apparaît
intéressant et souhaitable actuellement.
Au niveau de la recommandation 11: Nous sommes aussi en accord avec
cette recommandation-là pour des raisons d'équité La
recommandation 12, elle, qui porte sur les frais de garde, nous, on croit qu'on
a baissé par cette recommandation le plafond qui était à
64 $. On devrait maintenir le plafond qui existe actuellement. C'est vrai que
peut-être des étudiants ou étudiantes ont droit à
d'autres subventions, mais
ce n'est pas égal partout. Il y en a qui doivent avoir recours
à la garde en milieu familial non subventionnée. Donc, 64 $ par
semaine, ça nous apparaît vraiment un minimum pour la garde des
enfants.
Nous appuyons la recommandation 13. La recommandation 14 sur le
transport: Nous ne sommes pas d'accord pour qu'il y ait une diminution aussi
substantielle, qu'il y ait diminution tout court du transport pour ceux qui
n'ont pas accès au transport en commun. On pense que ça pourrait
entraîner une mesure des gens qui deviendraient non résidents
parce que les frais de transport ne sont pas payés comme ils devraient
l'être. On n'en tient pas compte comme ils devraient être.
Au niveau de la recommandation 16 qui a pour effet de retirer la prime
de 22 $ par semaine au budget du candidat qui était sur le marché
du travail, on croit que cette recommandation devrait être biffée
pour maintenir la prime de 22 $, parce qu'on ne croit pas que ce soit une
prime, d'abord, parce que ce sont des frais réels qui sont entretenus
par les étudiants et, d'autre part, je pense que ça pourrait
aussi encourager la non-résidence, si tous les frais ne sont pas
calculés.
Sur le comité d'appel, on est d'accord avec un comité,
mais on est inquiets, à savoir si ledit comité va pouvoir traiter
avec diligence les demandes qui sont faites, parce qu'il peut y avoir un
"embourbement". Deuxièmement, oh souhaite, quand on parle des
représentations des étudiants, qu'il y ait consultation des
associations représentatives comme ça se fait dans d'autres
comités consultatifs ou d'autres comités gouvernementaux.
Une des recommandations majeures de cette réforme, c'est
d'élargir aux étudiants à temps partiel le régime
d'aide financière. Évidemment, nous sommes en accord avec
ça. Cependant, on souhaiterait qu'il soit élargi aux niveaux...
à ceux des étudiants du collégial, parce qu'il y a aussi
des étudiants à temps partiel au collégial et l'aide ne
devrait pas être limitée à cinq sessions seulement, parce
que, à cinq sessions, ce sont surtout les certificats, les
étudiants qui sont au niveau des certificats. Et on pense qu'on devrait
encourager, même à temps partiel, les étudiants à
obtenir des baccalauréats.
Très rapidement. Une recommandation sur la question de la remise
de la dette de 25 % pour les étudiants et les étudiantes de 2e
cycle qui auraient complété leurs études dans les
délais prescrits. Nous, on croit que cette recommandation devrait
être retirée. Nous n'avons pas d'analyse assez substantielle qui
nous dit que cette mesure-là va permettre d'encourager les études
de 2e et de 3e cycles. Deuxièmement, on ne sait pas non plus quelles
sont les causes, pourquoi les étudiants ne rentrent pas dans les
délais prescrits ou allongent leurs études, surtout au niveau du
doctorat, et on pense que ce sont d'autres programmes qui devraient encourager
et inciter les études de niveau supérieur, par exemple, des
programmes de bourse. Le fonds FCAR devrait être beaucoup plus
accessible, plus substantiel. Il y a des bourses de particuliers. Donc, on ne
croit pas que ce soit une mesure qui a sa place dans un régime d'aide
financière, même si on est d'accord qu'il faille trouver des
incitatifs pour les études de 2e et de 3e cycles.
D'autre part, si on passe à la recommandation 21, c'est que sur
la question des sports, un régime particulier pour ceux qui
participeraient à des compétitions d'envergure internationale, on
s'est posé la question: Pourquoi pas ceux qui font du
théâtre ou des arts? On pense que ces programmes-là
devraient relever des fédérations sportives. Donc, on pense que
ça n'a pas sa place dans un régime d'aide financière.
Au niveau de la recommandation 22: On est en désaccord aussi avec
cette recommandation-là et on veut retourner au statu quo. C'est la
limite des nombres de sessions pour être eligible au régime de
prêts et bourses. Sur ce qui favorise les familles, on est en accord
aussi.
Une dernière remarque...
Le Président (M. Gobé): Mme Lamontagne...
Mme Lamontagne: ...sur les propositions, qui est à la page
21 de notre mémoire. C'est tout le système de
vérification. Nous, on est inquiets de ce système-là parce
qu'on trouve que ça s'apparente au régime qui a été
mis sur pied pour l'aide sociale. On sait que notre régime doit
être crédible. Par ailleurs, est-ce que des moyens ont
déjà été entrepris dans d'autres régimes,
entre autres, celui de l'aide sociale qui n'était pas loin de l'abus de
pouvoir? Deuxièmement, on pense aussi que les abus sont tellement minces
que les moyens qu'on y met administrativement et les coûts qui sont
encourus par ces mesures de vérification, valent-ils la peine de mettre
tout cet arsenal? Parce que, dans tous les régimes, il y a
peut-être des abus, mais c'est marginal.
Le Président (M. Gobé): Mme Lamontagne, votre temps
est presque terminé, si vous voulez conclure.
Mme Lamontagne: Alors, j'avais presque fini.
Le Président (M. Gobé): S'il vous plaît.
Mme Lamontagne: Je voudrais, en termes de conclusion, rappeler
que le régime d'aide financière, c'est un aspect de tout le
débat qu'il y a en éducation. Nous, on considère que
l'éducation profite aux individus, profite à la
collectivité et, en ce sens-là, on croit toujours important qu'il
y ait une part du financement public en éducation. On est inquiets
à la fois des choix fiscaux, des
choix gouvernementaux qui ont été faits au niveau
fédéral. La damier budget Wilson est très
inquiétant parce qu'il y a une réduction des paiements de
transfert qui va avoir des conséquences assez désastreuses pour
les Québécoises et les Québécois. On espère
que le gouvernement du Québec, qui a déjà fait des choix
fiscaux avec lesquels on n'était pas en accord, ne va pas continuer dans
ce sillage du gouvernement fédéral et qu'on va continuer à
augmenter et qu'on va même augmenter les ressources en éducation.
Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Gobé): Merci, madame. Je passerais
maintenant la parole à M. le ministre de l'Éducation pour une
période de vingt minutes.
M. Ryan: M. le Président, je remercie la CSN de
l'excellente contribution qu'elle apporte à notre débat. J'ai lu
avec beaucoup d'intérêt le mémoire qua la
délégation, présidée par Mme Lamontagne, nous a
résumé dans son intervention. J'en viendrai tout de suite
à un certain nombre de commentaires qui réapparaissent pertinents
en l'occurrence.
Je ferai d'abord quelques commentaires de caractère
général sur les orientations qui sous-tendent tes interventions
ponctuelles à propos du projet de loi; ensuite, peut-être quelques
remarques à propos des points qui portent plus directement sur le projet
de loi.
De manière générale, je pense que les passages les
plus importants du mémoire sont aux pages 6 et 7 À la page 6, on
parle de l'effet de l'entrée en scène d'une nouvelle conception
du rôle de l'État dans la société. Ensuite, on parie
de l'impact que ce développement a pu avoir sur l'importance que les
sociétés, en particulier la nôtre, accordent à
l'éducation.
Je ne serais pas enclin à partager la perspective dans laquelle
est faite cette analyse, en page 6 en particulier. Je crois que ce qui s'est
produit dans les sociétés développées, ces
dernières années, ça a été un
phénomène d'engraissement, un phénomène de
corpulence qui a gravement affecte leurs capacités concurrentielles.
Elles ont dû constater que pour rester dans la course, elles devaient
ramener leur train de vie et leur style de dépenses à des niveaux
mieux accordés à leurs moyens véritables.
Les États, en particulier le Québec, s'étaient
dotés de programmes sociaux très élaborés, d'un
train de dépenses fort élevé, d'une bureaucratie
considérablement développée, tout ça s'étant
traduit par un fardeau de denes très lourd dont le poids se
répercute dans les dépenses quotidiennes de l'État.
L'illustration la plus pratique que je puisse en donner, c'est que, pour la
présente année, les charges de dettes de l'État
québécois sont d'à peu près 5 300 000 000 $ sur un
budget de 32 000 000 000 $. Je pense pouvoir dire devant vous, et sans aucune
arrière-pensée d'antisyndicalisme, que les syndicats n'ont pas
été étrangers à ce développement. Ils ont
contribué à développer, dans notre société,
des conventions, des contraintes, des modes d'organisation du travail qui ont
contribué à ces phénomènes d'engorgement dans bien
des endroits, qui ont conduit à la situation paradoxale que nous
connaissons: pendant que notre société produit des milliers
d'emplois nouveaux, de caractère précaire, il y a d'autres
emplois, à un autre niveau, qui sont surprotégés, surtout
dans les secteurs public et parapublic et tout ça se traduit par des
coûts pour la collectivité. (17 h 30)
Nous allons renouveler encore les conventions collectives.
J'espère bien qu'on conclura ça très bientôt, M.
Choinière Encore là, dans les conventions, nous accordons aux
travailleurs du secteur collégial, que représente M.
Choinière, une protection qui va bien au-delà de ce que le
secteur privé est capable d'accorder, et nous finançons cette
protection avec les taxes des citoyens, il faut bien le dire. Je ne mets pas en
cause autre chose que ce qui a été discuté aux tables de
négociation. On donne des planchers d'emploi, par exemple, ça
fait l'objet de débats continus entre nous, mais dans le secteur
privé, les milliers d'entreprises qui sont à la marge même
de la survie ne peuvent même pas discuter de plancher d'emploi; c'est
tout juste si elles savent si elles vont être encore en circulation le
lendemain. C'est dans ce contexte-là qu'on a été
obligés de reprendre en main l'appareil de l'État et de se dire:
II faut faire fonctionner l'État à un niveau qui convienne
davantage à nos ressources.
Comme vous le signalez justement dans votre mémoire, la part des
dépenses publiques dans le fonctionnement de la société
québécoise a diminué, depuis quatre ans, d'au-delà
de 25 % qu'elle était à la fin du régime du Parti
québécois, à quelque chose qui est entre 21 % et 22 %,
actuellement. C'est évident que ça se traduit par des contraintes
nombreuses dont les membres du gouvernement sont les premiers témoins,
les témoins les plus directement affectés, dans la conduite de
l'action dont ils avaient rêvé. Mais c'est une contrainte que nous
devons nous imposer. Quand nous regardons les statistiques, nous sommes encore
à un niveau qui dépasse celui de sociétés
correspondantes. L'Ontario, lui, il a un fardeau de dette de 4 000 000 000 $
pour un budget annuel d'au-delà de 40 000 000 000 $; nous autres, c'est
5 300 000 000 $ pour un budget de 32 000 000 000 $ ou 33 000 000 000 $; il faut
que quelqu'un le paie.
C'est la situation à laquelle nous faisions face qui explique
ceci. Je pense que, dans l'éducation, nous avons bien tenu le coup,
finalement. J'ai donné des statistiques, au début des travaux de
la commission, indiquant que, tout compte fait, l'éducation a
légèrement amélioré sa place dans l'ensemble des
dépenses de l'État.
Mais, étant donné ce que j'ai dit plus tôt, c'est
évident que le taux d'augmentation des dépenses pour
l'éducation a diminué par rapport au produit intérieur
brut. Je pense que tout ça se tient, évidemment. Mais c'est un
contexte qui s'est Imposé de force à nous.
Je me rappellerai toujours quand le gouvernement précédent
a été obligé de serrer la vis et même de renier sa
signature sur des contrats collectifs, de venir chercher dans la poche de nos
travailleurs des millions et des millions de dollars. Il l'a fait parce qu'il
avait reçu des appels vraisemblablement de certaines sources qui lui
disaient: Vous êtes rendu au sommet de l'endettement. Il faut que vous
établissiez un meilleur équilibre dans vos affaires.
C'est le problème qui s'est posé à nous. Nous
autres, nous avons choisi la voie de la santé en nous disant que, quel
que soit le sort du Québec au point de vue constitutionnel ou autre, il
n'aura toujours de véritable force que celle de son portefeuille, celle
de sa situation financière solide. S'il y a des vertus de travail,
d'initiative, de créativité en arrière de ça, tant
mieux. Mais, si on a tout le reste et qu'on n'a pas la force économique
pour appuyer le reste sur un fondement solide, c'est bien difficile de
fonctionner. C'est ça, le fond. Le reste, il peut y avoir un rapport
Gobeil, un rapport Bertrand, un rapport Ryan et un rapport ci et ça,
mais la société québécoise se défend bien
contre tous ces rapports-là et recherche un équilibre quelque
part qui est discutable. Quand l'équilibre ne fait plus l'affaire, le
gouvernement est renversé et on en met un autre à sa place.
J'en viens au financement universitaire, maintenant. Ça s'inscrit
dans tout ceci. Le sous-financement universitaire est une manifestation de ce
mouvement qui avait commencé sous le gouvernement
précédent, évidemment. Nous l'avons corrigé,
là. Nous l'avons corrigé. Je vais vous donner des chiffres. Je
vois que vous hochez la tête et j'en suis content, parce que vous
m'obligez à m'expliquer davantage. Depuis quatre ans, nous avons
augmenté les subventions aux universités d'au moins 15 % en
dollars constants, alors que les dépenses du gouvernement en dollars
constants augmentaient seulement de 0,8 %. Là, il y a quand même
eu un effort de redressement qui se traduit par l'injection de 55 000 000
$...
Une voix: Oui.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Ryan: ...dans la base de financement des universités
et...
M. Gendron: Perroquet, gramophone.
M. Ryan: J'ai un léger différend avec (e
député d'Abitibi-Ouest qui est d'une nature tout à fait
mineure. Je parle de 55 000 000 $ et il parle de 21 000 000 $. Il sait
très bien qu'il faut ajouter 34 000 000 $, ce qui donne 55 000 000
$.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Ryan: La seule chose qui nous sépare, c'est: Les 34 000
000 $, est-ce qu'on les compte pour l'année précédente ou
pour cette année?
M. Gendron: Je ne peux pas. Le bulletin de la CREPUQ: 21 000 000
$.
M. Ryan: 55 000 000 $, par conséquent. M. Gendron:
Une menterie.
M. Ryan: ...ajoutés par le gouvernement. Nous avions
établi le sous-financement relatif par rapport à l'Ontario sur la
base de 1986-1987, à 162 000 000 $. Il y a 55 000 000 $ qui avaient
été ajoutés. Par rapport à 1986-1987, le
député d'Abitibi-Ouest ne peut pas me chicaner parce qu'on
l'applique à 1987-1988, le 34 000 000 $, ou à 1989-1990,
ça ne change rien. Il est ajouté dans la base.
M. Gendron: Pour ça, je ne peux pas vous chicaner.
M. Ryan: 55 000 000 $ dans la base.
M. Gendron: Oui, oui.
M. Ryan: Merci.
M. Gendron: Je n'ai jamais mis ça en cause.
M. Ryan: Très bien.
M. Gendron: Je parle de l'argent neuf, l'an passé.
M. Ryan: Là, avec les frais de scolarité nous
allons ajouter, mettons 41 000 000 $ par année pendant deux ans,
ça fait 82 000 000 $ plus 55 000 000 $, 137 000 000 $. Entre 162 000 000
$ et 137 000 000 $, vous admettrez que nous aurons franchi un pas très
important. On ne peut plus parler, 125 000 000 $ à 200 000 000 $, parce
que ce ne sera plus ça la réalité. En outre, le ministre
des Finances a déclaré dans son dernier discours du budget, que
dès qu'il en aura les moyens, le gouvernement reconnaît qu'il doit
faire encore plus pour les universités. Je pense qu'il voulait signifier
la différence dont nous parlons ici.
J'ajoute, en toute franchise, que l'Ontario n'est pas notre
modèle. Le modèle que nous choisissons en matière
universitaire, c'est la moyenne canadienne, laquelle est supérieure
à ce qui se fait en Ontario. En Ontario aussi on avait accusé une
régression pendant un certain nombre
d'années.
Les droits de scolarité viennent s'inscrire dans ceci. Il nous
est apparu, à la lumière des données que nous
possédions sur l'ensemble du pays canadien, que l'effort demandé
aux étudiants, pour le financement des universités, était
complètement déphasé par rapport à la
réalité canadienne. Alors que le coût d'un étudiant
à l'université est devenu autour de 8900 $ par année, la
contritublon qu'il est appelé à verser était restée
à 540 $ depuis 24 ans, en moyenne. On s'est dit, un certain ajustement
de ce côté... Tout a monté, les prix ont monté
partout, c'est dû à un certain ajustement. Si on mettait ça
seulement au coût de l'inflation, ça serait 2400 $. Là on
va l'amener à 1240 $ sur deux ans. C'est dur. Et moi-même j'aurais
préféré infiniment ne pas être le parrain d'une
telle mesure. Mais c'est nécessaire, en raison de tout le contexte
où nous opérons. C'est pour ça que vous avez raison de
situer les droits de scolarité dans le contexte plus large. À
condition que le contexte plus large soit présenté dans ses
véritables dimensions. Je crois l'avoir fait en toute simplicité.
Mais, quoi qu'il en soit, j'admets la divergence. C'est du débat
politique. On présente la thèse du gouvernement réduite
à ses termes les plus simples, et je le fais en toute bonne foi.
Autrement, je ne ferais pas partie de ce gouvernement, si je ne croyais pas que
c'est la voie qui peut le mieux nous conduire à une certaine
santé. Je ne veux pas, par là, insinuer qu'il n'y aura pas eu
d'erreur dans la conduite du gouvernement, qu'on n'aurait pas fait des choix
budgétaires discutables. Tout ça est possible.
J'en viens maintenant au deuxième thème. Je vais faire
ça très rapidement, M. le Président...
Le Président (M. Gobé): Je compte les minutes.
M. Ryan: Aux remarques sur l'assistance financière aux
étudiants. Dans l'ensemble, je les trouve éminemment
constructives, évidemment. Je les apprécie au plus haut point. Je
vois que vous avez fait une étude très poussée des
propostions contenues dans l'énoncé d'orientation. Vous nous
exprimez votre accord sur la majorité de ces propositions. Vous
émettez un certain nombre de réserves sur d'autres. Nous allons
en tenir compte consciencieusement.
Je vous donne un exemple. Vous vous étonnez des pouvoirs
d'enquête accordés au ministre. Évidemment, cette
partie-là est un petit peu modelée - je le dis sans aucune
cachette - sur lés passages qu'on trouve dans la Loi sur l'aide sociale.
On nous a dit: Si on doit le faire pour l'aide sociale, il faut
également qu'on puisse le faire pour l'aide financière aux
étudiants. On a fait valoir à cette commission - le Protecteur du
citoyen en particu- lier - que les situations n'étaient pas les
mêmes, les possibilités de fraude sont très
différentes. C'est une question que nous reconsidérerons. Pour
introduire un mécanisme fort dans une loi, il faut qu'on ait un besoin
vérifié et démontré. Dans ce cas-ci, sur la base de
l'expérience, il y a matière à doute. Nous laisserons
cette question continuer de travailler nos esprits.
Étudiants à temps partiel, vous suggérez que
ça vaille également pour les étudiants du
collégial. Je pense que c'est un point sur lequel on peut être
facilement d'accord. J'en ai parlé avec la Fédération des
cégeps tantôt. On va essayer, au cours des prochains mois, de
trouver des modalités qui conviendraient le mieux à cette classe
d'étudiants, pas facile à définir, parce que
extrêmement hétérogène. Si vous avez des
recommandations à nous faire là-dessus... La méthode que
nous préconisions pour répondre aux besoins des étudiants
dans notre énoncé d'orientation n'était pas la plus
réaliste. Si vous aviez quelques observations à me faire
là-dessus, je l'apprécierais vivement.
Je souligne juste un petit point, pour le comité d'appel, iI ne
faudrait pas vous inquiéter trop parce qu'il n'y aura pas seulement...
Il va y avoir un comité, mais avec plusieurs bancs. Les bancs vont
siéger à trois, et il y aura de la mobilité, ils pourront
se déplacer d'un endroit à l'autre. Il pourrait y en avoir trois
ou quatre qui siégeront en même temps. On va faire en sorte que,
comme vous le dites, il ne s'accumule pas de listes de cas qui n'auraient pas
été traités. Je me fais un point d'honneur de voir
à ce qu'il n'y ait pas d'accumulation d'arriéré dans les
affaires du ministère. On va essayer d'être fidèle à
la tradition des dernières années. Je vous remercie. S'il y a des
remarques particulières sur les étudiants à temps partiel,
j'apprécierais les recevoir, évidemment sur d'autres, les
commentaires que j'ai pu formuler, que j'ai faits en toute bonne foi.
Le Président (M. Gobé): Je vous remercie, M. le
ministre. Je dois maintenant passer la parole à M.. Je m'excuse, mais ce
serait sur le temps de M. le député d'Abitibi-Ouest.
M. Ryan:... empiéter sur mon temps.
Mme Lamontagne: Ça va. On va prendre les questions de M.
le député et on...
Le Président (M. Gobé): On se doit malheureusement
ou heureusement de suivre les horaires. Il y a des gens qui attendent de passer
après vous. M. le député d'Abitibi-Ouest, vous avez
maintenant la parole.
M. Gendron: Une chose est certaine. C'est sûr que, compte
tenu de l'analyse sociopolitique que le ministre vient de faire, il aurait
été légitime de laisser quelques minutes de
réaction
avant que je prenne la parole et moi, je suis prêt,
sincèrement, parce que je trouve que ça n'a pas de bon sens que
vous n'ayez pas une couple de minutes de réaction à son discours.
Normalement, on reçoit des invités. Alors, je croyais qu'il y
aurait un peu d'échanges avec vous et avec les règles qu'on
s'étaient imparties, il a pris ses 20 minutes, alors il n'y a pas bien
bien d'échanges. Moi, je vous donnerais au moins deux minutes de mes
minutes, moi, ça ne fait rien d'en avoir 18, pour avoir deux ou trois
minutes de réaction à son discours épistolaire sur une
analyse sociologique et socio-économique de la société
québécoise, selon les vues du Parti libéral, j'aimerais
avoir les vôtres.
Le Président (M. Gobé): M. le député
d'Abititi-Ouest, je vais maintenant passer la parole à Mme Lamontagne
pour faire quelques remarques.
M. Ryan: M. le Président, si l'Opposition veut consentir
à un certain nombre de minutes additionnelles pour qu'on
n'empiète pas sur le temps de l'Opposition, nous n'avons pas d'objection
de ce côté-ci.
M. Gendron: Non, mais c'est surtout pour leur permettre de
réagir et je vais...
M. Ryan: Je ne voudrais pas que vous pensiez que vous nous faites
une faveur parce que...
M. Gendron: Moi, non, je ne fais pas de faveur, je ne fais pas de
faveur.
M. Ryan: Très bien.
M. Gendron: Je fais ce que je viens de faire.
Le Président (M. Gobé): Mme Lamontagne, vous avez
la parole.
Mme Lamontagne: D'abord un premier commentaire sur les premiers
commentaires de M. le ministre sur le rôle de l'État. Je pense que
ça demanderait plus de deux minutes pour faire un débat, parce
que c'est d'abord un débat politique et des conceptions politiques du
rôle, finalement, du gouvernement. On peut comprendre la situation des
pays industrialisés dans les années quatre-vingt, les situations
difficiles qui ont été vécues, mais est-ce que, à
notre avis, il y a des choix politiques qui ont été faits de
vouloir, par exemple, être concurrentiels au niveau économique?
Tout le monde doit être d'accord avec cet objectif-là, mais
comment on y arrive, selon quels moyens, selon quels choix fiscaux on le fait,
ça, il y a place à débat politique. Évidemment il y
a aussi, quand on parle, un peu étonné par ailleurs, des
conventions collectives à ce niveau-ci, c'est aussi un débat en
soi de parler de la place des conventions collectives du secteur public. On en
a beaucoup parlé ces derniers temps. Mais une chose, juste une remarque,
qui est très pointue, mais qui m'ap-paraït importante quand on
parle de la sécurité d'emploi dans le secteur public, il nous
apparaît deux choses majeures, c'est que, premièrement, la
sécurité d'emploi est un moyen important pour assurer une
qualité des services ou une continuité des services, que ce soit
dans l'éducation ou dans la santé; deuxièmement, à
notre avis, et quand on compare avec d'autres expériences qu'on a dans
le secteur privé où il y a fragilité, il n'y a pas de
sécurité d'emploi, à notre avis, il est plus facile, de
faire des changements dans un milieu où les travailleurs et les
travailleuses se sentent en sécurité, sentent qu'ils ont un
avenir où ça ne sera pas la mise à pied ou la fermeture
qui arrive. Donc, je pense que c'est un gage à deux niveaux de la
qualité des services que cette protection de l'emploi qui existe dans le
secteur public. Sur des questions d'ordre financier, je demanderais à
Jean de continuer.
M. Charest (Jean): Je vais être bref, je n'entrerai pas
dans les détails, je voudrais juste faire référence, si
vous permettez...
M. Gendron: Je vous permets, vous, après ça, je
vais y aller. (17 h 45)
M. Charest: Oui, ça va. Parce que M. le ministre a fait
référence d'entrée de jeu à la capacité de
payer de l'État et à la capacité de payer des citoyens et,
à juste titre, à notre avis... Évidemment, nous ne sommes
pas en faveur d'assister à une explosion de la situation
financière du gouvernement. Cependant, je pense que quand on fait
référence à la capacité de payer de l'État
et, donc, à la capacité de payer des individus, des citoyens et
des citoyennes au Québec, il faut bien voir que les besoins en
éducation, puisque c'est de ça dont on parle, après-midi,
sont réels peu importe qui les assume financièrement. Les
coûts qui sont reliés à ces besoins-là en
éducation sont aussi des coûts qui sont réels, qui sont
existants. On peut jouer un peu sur les coûts, mais globalement, quand on
constate certains besoins de formation, certains besoins d'éducation
dans la société, il y a des coûts qui sont inhérents
à ça et qui ne disparaissent pas du fait que l'État
effectue des coupures ou du fait que l'État se désengage pour
prendre l'expression de plus en plus consacrée.
Ce qui fait que le fardeau financier pour la société
demeure, pour répondre aux besoins qu'on constate en éducation.
À ce niveau, quand on fait justement référence à la
capacité de payer des citoyens et des citoyennes, je pense qu'il est
important de voir que quand l'État se désengage, les coûts
ne disparaissent pas pour autant. Ils se répartissent
différemment chez les individus dans
la société. On assiste, malheureusement, à notre
avis, depuis quelques années, à un transfert de plus en plus
important de ce qu'on pourrait appeler des charges directes, en termes
financiers, directement vers les usagers et les usagè-res et ça
à tous les niveaux de l'éducation.
À notre avis, on assiste donc là à une nouvelle
répartition des coûts qui, de toute façon, vont demeurer
dans le domaine de l'éducation, tant et aussi longtemps qu'on
considère qu'il y a des besoins dans ce domaine-là. La question,
à notre avis, se résume beaucoup plus à savoir - et je
termine là-dessus - est-ce que ces coûts-là, on va choisir
de les faire assumer par la gestion du régime fiscal, et donc, en tenant
compte, à notre avis, davantage de la capacité de payer des
individus? Ou, est-ce qu'on va les transférer de plus en plus vers les
individus, vers les usagers et les usagères, ce qui est néfaste,
à notre avis?
Le Président (M. Gobé): Je vous remercie. Je
passerai maintenant la parole à M. le député
d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Oui, très rapidement. Je vais prendre mon
temps quand même, mais je veux vous dire que je pense que vous avez un
excellent mémoire. Vous avez un mémoire très très
bien fouillé, qui a le mérite de faire plus que juste une analyse
ou une observation un peu neutre de deux éléments de la
problématique: dégel des frais de scolarité et
bonification, amélioration ou réduction de certains
bénéfices du régime d'aide financière. Qu'un
organisme comme le vôtre prenne la peine de fouiller des orientations de
société, des problématiques beaucoup plus larges que
strictement un geste ponctuel comme celui de dire: Nous on poursuit - et c'est
vous qui parlez - encore la démocratisation de l'enseignement
postsecondaire et vous expliquez pourquoi. C'était requis,
nécessaire de le faire, le problème que nous avons, c'est que
tout argument autre que ceux dans lesquels est bien campé le ministre ne
semble pas avoir d'emprise sur lui.
Lorsque le ministre faisait cette espèce d'analyse de sa
philosophie et de la nécessité que le gouvernement réduise
les engorgements, et ça ne donne rien de faire ça parce
qu'objectivement, il n'y a personne qui a mis ça en cause qu'à
partir du moment où on passe à travers une crise de fou comme on
a passé, qu'il fallait faire des choix plus rationnels. Est-ce que nous
aussi on poursuivait l'objectif de réduire le rythme de croissance des
dépenses? Ils diront ce qu'ils voudront, mais tous ceux qui ont
regardé un gars comme Darcy McKeough, ce n'était pas PQ bien bien
ça, pour ceux qui ne le savent pas là, tous ceux qui ne
connaissent pas Darcy McKeough, c'est l'ancien ministre des Finances ontarien,
type crédible, qui, pendant une quinzaine d'années, a eu une
responsabilité majeure en Ontario et disait: Le gouvernement du Parti
québécois, tout compte fait, s'est très bien
acquitté de sa responsabilité de gestionnaire des finances
publiques de l'État québécois.
Et un type comme Alain Dubuc, je ne veux pas citer Alain Oubuc, mais
c'est parce que dans ce domaine-là, on ne s'en sort pas. Moi aussi je
suis capable de mettre des preuves et des éléments. Alain Dubuc
disait, à un moment donné: Ce qu'il y a de crédible quand
on analyse le comportement d'une administration par rapport à l'autre,
c'est les besoins financiers nets parce qu'il disait: Toutes les autres
affaires, c'est de la merde, excusez l'expression. Donc, est-ce que les besoins
financiers nets, sous le Parti québécois, ont été
réduits en période de dégonflement de l'appareil de
l'État versus les libéraux? Il a dit: Un demi-mHliard les trois
dernières années du Parti québécois, un
demi-milliard les trois premières années du Parti libéral.
Donc, moi, ce n'est pas sur ces pistes-là que je veux engager le
débat parce que sur deux éléments, réduction du
rythme de croissance des dépenses, nous avions également cet
objectif. On n'avait pas le choix.
Deuxièmement, le niveau d'endettement de l'État, est-ce
qu'il a été, à un moment donné, trop
élevé? Réponse: Oui. Parce que ça ne
m'intéresserait pas, moi, aujourd'hui de - je veux dire -
défendre un régime comme ces gens-là d'en face
défendent, indéfendable strictement sur le plan du comportement
des finances publiques et là, je parte du régime
fédéral. C'est criminel d'avoir un niveau d'endettement comme le
Canada en a un. Êtes-vous au courant que nous, nous en aurions un
à peu près de 8 500 000 000 $ à 9 000 000 000 $ de
déficit en 1990, s'il n'y avait pas eu des comportements responsables
qui ont été faits au cours des années quatre-vingt
à aller jusqu'à aujourd'hui? Ça, c'est établi.
C'est réglé. Moi, je suis capable de vivre avec ça et ce
n'est pas ça le débat.
Je reviens, par contre, à des objectifs que vous avez, qui sont
plus lents. Est-ce que, oui ou non, on doit poursuivre l'objectif, en 1990, de
la démocratisation et de l'accessibilité de l'enseignement
secondaire et postuniversitaire, c'est-à-dire collégial et
universitaire? C'est évident que la réponse est oui,
d'après moi. Il n'a pas dit un mot de ça. Vos raisons pourquoi on
doit continuer - page 3 - il n'en a pas parlé, le ministre. Ça,
ça mériterait une analyse sérieuse si on avait affaire
à un ministre qui veut analyser les vraies causes. Qu'est-ce que vous
avez dit là? Pourquoi est-ce nécessaire? C'est parce qu'au niveau
des francophones versus les anglophones, c'est grave notre taux de
diploma-tion. C'est grave. Le taux de fréquentation universitaire, c'est
grave. Vous avez dit: Les femmes. Vous avez raison. Il y a eu un rattrapage
mais il y a encore bien trop de recul pour se permettre des folies, pour se
permettre de poser des gestes qui auraient des conséquen-
ces graves. Vous avez dit une autre affaire: Temps partiel et adultes.
Pensez-vous que vous n'avez pas raison? Jasez avec du monde universitaire. Ils
vont dire: On est à peu près la seule société...
Bien oui, on est distincts, mais on ne peut pas se comparer et puis quand
ça fait en défaveur de nous autres prendre les
éléments. Au niveau du temps partiel, est-ce qu'on a un niveau
d'étudiants à temps partiel trop élevé au
Québec? La réponse, c'est oui. Est-ce qu'un temps partiel a
exactement la même qualité qu'une formation continue? C'est non.
Est-ce qu'on ne devrait pas poser des gestes, comme gouvernement, pour
s'assurer qu'il y ait plus d'étudiants qui fassent le choix
d'études à temps plein? La réponse, c'est oui. Est-ce que
ce gouvernement-là fait ces choix-là? La réponse, c'est
non. C'est ça le genre de débat qu'on doit avoir. Vous l'avez
bien exprimé à la page 3.
Page 4, vous dites: Nous, l'accessibilité du plus grand nombre
à l'éducation postsecondaire reste toujours, pour nous, un
objectif fondamental du système d'éducation. Vous avez le droit
de faire ça parce que c'est correct.
Page 5, le ministre de l'Éducation, pas un mot sur la page 5.
Qu'est-ce que vous avez illustré à la page 5? Et là, on
n'est pas dans les grands discours de l'État, là, à la
page 5. Là, on est dans une réalité de ce gouvernement qui
a endetté les étudiants de plus en plus, en inversant les
proportions prêts et bourses. Là, il y a des chiffres qui parlent.
Écoutez! Pendant cinq ans, le volume des prêts est passé de
160 100 000 $ à 245 000 000 $, une augmentation de 43 %. C'est quoi
ça qui a augmenté? Le prêt. Le prêt, c'est quoi?
C'est de la dette étudiante. C'est de l'endettement étudiant.
Puis, j'arrête là parce que si on lit comme il le faut la page 5,
on se révolte un peu de voir que, dans la décision qu'ils
prennent, ils ne tiennent jamais compte du comportement qu'ils ont eu sur les
aspects qui sont liés à la décision qu'ils ont prise. La
décision qu'il a prise de dégeler les frais de scolarité
et d'arriver avec un nouveau régime d'aide financière, ça
n'a rien à voir avec le discours qu'on a entendu sur vos pages 6
à 8. Même si moi je tenais à ce qu'il soit dans votre
mémoire, le discours sur les pages 6 à 8 qu'il a fait, mais
ça traduisait, vous autres... Là où il y a un écart
fondamental entre votre perception et la nôtre, c'est qu'à un
moment donné vous l'affirmez haut et fort. Vous, là, vous ne
favorisez pas le retrait de l'État comme instrument de promotion
collectif et de réduction des inégalités. Ça c'est
du fondamental. En ce qui nous concerne, ce n'est pas un discours, c'est une
pratique. Nous, on l'a prouvé dans la pratique. Nous aussi, on
n'était pas des tenants d'un État le plus petit possible, le
moins interventionniste possible, le plus rapetissé possible, qui n'a
presque plus de rôle à jouer. Ce n'était pas ça
notre conception et ça, c'était une question clé. Est-ce
qu'on doit encore, en 1990, convenir que ça prend un bras puissant de
l'État pour corriger des inégalités là où
elles se produisent les inégalités? La réponse, en ce qui
nous concerne, c'est oui, chers amis.
Je vais vite sur tout le bon travail, sincèrement, que vous avez
fait au niveau du régime comme tel. Comment je prendrais une demi-heure
pour commenter les bonnes recommandations que vous avez faites, dans le fond,
là je vous cite juste un peu, vos recommandations sur le régime,
vous avez scruté les 24 recommandations et, à toutes choses
près, ce sont les mêmes commentaires émis par d'autres
groupes sauf pour la recommandation numéro 11 où il y a une
originalité, et moi je vais m'en servir. Je vais m'en servir lors de
l'étude article par article du projet de loi qui va venir
subséquem-ment. Vous m'avez donné un excellent instrument de
travail pour, à chaque fois qu'on arrivera dans, ce qu'on appelle, le
quotidien du projet de loi. Là, il y aura lieu de se servir des
suggestions que vous nous faites pour faire des ajustements, que ce soit sur
les amendes qui sont trop sévères, que ce soit sur le
système de vérification et d'enquête qui m'apparaît
abusif... Il faudrait retirer ça de là parce que ça n'a
pas d'allure. Le Protecteur du citoyen est venu nous le dire. Ça me fait
juste des appuis de plus pour dire: Écoutez, il me semble que tout le
monde a dit la même chose, donc, on enlève ça de
là.
Avant de laisser ma collègue poser quelques questions, je ferais
deux ou trois autres considérations, aux pages 25, 26 et 28, parce que,
encore là, je trouve qu'il y a pas mal d'éléments
d'analyse. Avant d'aller à ces pages, je vais juste rappeler qu'à
un moment donné, vous avez affirmé: Notre population, au
Québec, il faut qu'elle tienne compte des milieux
défavorisés, des temps partiel, des francophones, des femmes, des
interruptions des études, de l'endettement et du choix de programmes
courts plutôt que de programmes longs.
Ça, c'était une bonne vision, parce que ce sont tous les
problèmes que nous avons au niveau d'études universitaires
adéquates. Page 25. Là, c'est pour contredire le ministre de
l'Éducation, quand il dit: Tout compte fait, dans le domaine de
l'éducation, on est chanceux. On s'en tire très bien puis les
dépenses dans le domaine de l'éducation n'ont pas
substantiellement été réduites. Bien, ce n'est pas ce que
les chiffres disent. Vous l'avez prouvé aux pages 25 et 26. C'est on ne
peut plus clair. Tous les niveaux d'enseignement ont été atteints
et ont été atteints d'une façon assez dramatique, parce
que c'était 7 % du PIB du Québec alors qu'actuellement, on est
rendus à 5,3 % puis même pas. On est rendus plus bas, à ma
connaissance. Ça, c'est 1987-1988.
En 1987-1988, le Conseil des collèges estimait que les
collèges publics recevraient 480 $ de moins par étudiant qu'en
1977-1978. Puis, pourtant, même avec ces choix-là, vous
avez indiqué une bonne trace pour les membres
ministériels. Le budget d'enseignement privé, lui, n'a pas eu de
problème: 15 000 000 $ d'augmentation par rapport à
l'année précédente. Ça indique des choix.
Finalement, vous avez touché une question, mais ce serait
peut-être ma question accompagnée d'une autre. Je trouve qu'il est
légitime d'être très critique dans ce dossier-là,
quand on voit qu'il n'y a aucune demande de la part de ce
gouvernement-là d'un effort additionnel du secteur privé. Et vous
savez que le secteur privé, il n'a pas été "clenche" sous
ce gouvernement-là. Vous avez des chiffres qui le prouvent. Il n'a pas
trop été "clenche". Que ce soit le fait qu'on ait enlevé
l'exemption pour gains de capital, 34 000 000 $ de moins dans le Trésor
public. Merci, le gouvernement Provigo, merci beaucoup! Même chose au
niveau du taux d'imposition pour les riches. D'un coup sec, on l'a
baissé de 33 % à 28 %; ce n'était pas assez. Le taux
d'imposition, on l'a baissé; il est passé de 28 % à 24 %.
Là, on aime bien ça, nous autres, les gens qui sont riches, sauf
qu'on trouve que dans la société, il y en a I %. Un gouvernement
n'est pas censé avoir un comportement ou de la réglementation
pour 1 % de la société. Il est censé l'avoir pour la
grande majorité de la société. Ce n'est pas parce qu'on
hait les hommes riches. On adore ça C'est bon pour l'économie
québécoise, sincèrement, mais pas au détriment de
l'ensemble ou de la majorité d'une population.
Donc, les entreprises, elles n'ont pas été trop
"clenchées". Et je pense que c'est l'abbé Dion qui disait, en
mars 1989: Je déplore le manque de générosité du
secteur privé. Ma question précise est la suivante: Est-ce que
vous croyez qu'avant de prendre une décision sur le dégel des
frais de scolarité qui va jeter à terre tout un pan du mur du
Québec moderne par rapport à l'accessibilité, est-ce que,
vous, vous seriez favorables à une taxe sur la masse salariale qui
serait applicable à deux chapitres précis: premièrement,
au recyclage de la main-d'oeuvre, parce que c'est un problème majeur de
la société québécoise et également une
partie de cette taxe sur la masse salariale qui serait applicable au
financement universitaire? Parce que même si je ne veux pas m'obstiner
avec le ministre sur les chiffres, il n'en demeure pas moins que dans le
bulletin de la CREPUQ, même avec son addition, la CREPUQ dit: En
même temps que tu es sur la bonne voie pour dégeler, nous, c'est
conditionnel à 50 000 000 $ de plus cette année. Ça, c'est
dans le bulletin de la CREPUQ signé Patrick Kenniff,
président.
Alors, ça signifie que le sous-financement universitaire, on ne
l'a pas réglé. Alors, c'est quoi, vos commentaires sur cette
question?
Mme Lamontagne: Premièrement, par rapport au lien entre
les maisons d'enseignement et les universités, en particulier,
l'entreprise, c'est évident. Là, on est en train de faire des
études que l'entreprise, pour les retombées qu'elle a de
l'éducation, du système de l'éducation,
particulièrement des systèmes universitaire et supérieur,
finance très peu le système de l'éducation.
Par ailleurs, on est aussi conscients qu'il ne faut pas qu'il y ait une
dépendance des maisons d'enseignement par rapport à l'entreprise.
Il faut qu'il y ait des liens, H faut qu'il y ait un financement qui vienne des
entreprises, mais il faut que les maisons, les universités demeurent
autonomes dans leurs objectifs. Elles ont des objectifs beaucoup plus sociaux
et beaucoup plus larges.
Quant au fonds pour financer le recyclage de la main-d'oeuvre et
à la fois les universités, on n'a pas de position précise
sur cette question là Par ailleurs, au niveau de la formation
professionnelle, on a toujours demandé, soit par le biais des
conventions collectives, que les employeurs mettent une partie de la masse
salariale dans la formation professionnelle de leur main-d'oeuvre. Ce qu'on
étudie aussi au niveau de la formation professionnelle, on le sait,
ça a été proposé par le rapport au niveau
fédéral, c'est qu'à cause, entre autres, des petites et
moyennes entreprises qui, même si elles mettaient tant de pourcentage, 1
% de leur masse salariale pour former leur propre main-d'oeuvre, ça ne
serait pas suffisant pour leur propre main-d'oeuvre.
On est en train de réfléchir sur la question d'un fonds
qui serait un fonds peut-être semblable à celui qu'il y a pour
l'indemnisation des accidentés du travail, qui pourrait être
géré, je ne sais pas, de façon collective, qui pourrait
servir à la formation professionnelle. Le débat est à
faire, par ailleurs, à savoir si ce même fonds doit servir pour
financer directement les universités. Mais c'est sûr que s'il y a
plus d'argent pour la formation de la main-d'oeuvre, même en emploi,
ça a des retombées sur l'ensemble du système, même
du système postsecondaire parce que le recyclage en emploi n'est pas
juste de niveau secondaire, il est surtout de niveau postsecondaire et aussi de
niveau universitaire. Parce qu'on sait que les études de main-d'oeuvre
qu'on fait, les projections sur les besoins de main-d'oeuvre, c'est que c'est
une main-d'oeuvre de plus en plus qualifiée, de plus en plus de niveau
universitaire dont on aura besoin au Québec.
Donc, c'est clair que si les entreprises investissaient dans leur propre
formation, il y aurait des retombées sur l'université. Et sur la
question précise du fonds, c'est oui pour la formation professionnelle
et on est en réflexion sur la question, à savoir si ça
doit financer les universités directement.
Le Président (M. Gobé): Je vous remercie, Mme
Lamontagne. M le député, un mot pour
conclure.
M. Gendron: Bien, si c'est bien vrai qu'il ne nous reste plus de
temps.
Le Président (M. Gobé): Non, malheureusement, nous
devons...
M. Gendron: On va respecter les règles, on va conclure. La
conclusion, je vais la faire, mais dans le sens que je la partage avec nos
invités. Il est clair que la décision du gouvernement de
dégeler les frais de scolarité s'inscrit dans la
continuité des politiques budgétaires et fiscales du
gouvernement, c'est-à-dire un désengagement progressif non
seulement de ses responsabilités, parce que là-dessus, on s'est
bien entendus. Nous, on pense qu'à partir du moment où le
coût est élevé, il faut que l'État soit convaincu
que notre régime ou notre système universitaire offre un
enseignement de qualité, si on veut prendre le virage et relever les
défis.
Je n'ai pas, moi, la conviction que l'injection des 40 000 000 $ va
régler quoi que ce soit et ça me répugne de voir qu'elle
sera portée exclusivement par les étudiants, non pas parce que je
ne suis pas conscient qu'ils ont les frais de scolarité les plus bas
dans le monde ou en Amérique du Nord, mais parce qu'on est une
société qui a du rattrapage à faire et qui a des
problèmes cruciaux qui n'ont pas été évalués
et pris en compte depuis cinq ou six ans. Si on avait pris en compte...
Moi, j'en ai une jeune fille qui est à l'université et je
sais ce que ça coûte. Je n'ai pas de prêt, je n'ai pas de
bourse. Je n'en demande pas parce que je suis d'accord avec cette philosophie
sociale que les plus hauts salariés s'arrangent et c'est notre
responsabilité. Elle, elle l'est moins, par exemple, compte tenu du
niveau d'autonomie et de l'âge qu'elle a, mais ça, c'est un autre
débat. Mais je veux juste signaler que je sais très bien ce que
ça coûte, je sais très bien ce que ça coûte
à l'étudiant. Et quand on laisse voir qu'il ne paie que 574 $ de
frais de scolarité, c'est une fausse réalité par rapport
à notre vécu. Ça, on ne le dit jamais. Ça ne
correspond en rien au coût réel. Écoutez, il y a quelqu'un
qui est venu prouver que même au collégial, il n'y en a pas de
frais de scolarité et, en moyenne, ça coûte 500 $. Et
là, je parle juste des frais de catéchisme, de volumes, de ci et
de ça. Je ne parle pas de pension et ils ont le droit de vivre eux
autres aussi.
On est dans une société où on a un paquet de
familles éclatées. On dit: On est d'accord avec une politique
familiale, on est d'accord pour inciter à une espèce de soutien
plus intéressant que ça et ce sont ces données-là
qui ne paraissent pas dans la réalité un peu froide de dire:
Écoutez, c'est plus bas, on hausse et on regardera les
conséquences après. Moi, je ne peux pas marcher là-dedans.
J'ai senti que vous aviez la même conviction, que le moment n'est pas
venu de requestionner un régime qui, actuellement, a fait ses preuves
quant à deux questions de fond: la démocratisation et
l'accessibilité. Et quand nos retards seront comblés, on
regardera ça.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. le
député d'Abitibi-Ouest. M. le ministre, avez-vous quelques
remarques brèves à faire?
M. Ryan: Non. Je pense que je m'abstiendrai de remarques
additionnelles. J'ai dit l'essentiel tantôt. C'était bien clair et
ce ne sont pas des positions qu'on peut ébranler par des échanges
de cinq minutes, évidemment. Encore une fois, je voudrais signaler qu'en
ce qui touche le régime d'aide financière aux étudiants,
j'ai apprécié l'analyse responsable qu'a présentée
la CSN et je crois que tôt ou tard, par la force des choses, elle en
viendra à faire le même genre d'analyse pour l'ensemble de nos
problèmes économiques et sociaux et que ça nous
rapprochera beaucoup. Merci beaucoup.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. le ministre.
Mesdames et messieurs, au nom de fa commission, je vous remercie.
Nous allons maintenant suspendre pour permettre à l'Association
des syndicats de professionnelles et professionnels de collège du
Québec de se présenter en avant.
La séance est suspendue une minute.
(Suspension de la séance à 18 h 6)
(Reprise à 18 h 7)
Le Président (M. Gobé): La commission reprend ses
travaux. C'est la consultation générale sur le projet de loi 25,
Loi sur l'aide financière aux étudiants. J'appellerais maintenant
en avant l'Association des syndicats de professionnelles et professionnels de
collège du Québec. À l'ordre, s'il vous plaît! Si
vous voulez partir de... Je demanderais aux gens de la CSN, si vous voulez
aller discuter un peu dans le salon à côté, parce qu'il y a
des gens qui doivent prendre place en avant. À l'ordre, s'il vous
plaît! Ce n'est pas un "meeting" ici, là. Allez faire le piquet de
grève ailleurs. M. Bussière et M. Michel Chagnon, si vous voulez
prendre place. Merci, M. le ministre. Si vous voulez vous présenter,
afin que nous puissions vous connaître visuellement.
M. Bussière (Alain): Alors, Alain Bussière,
président de l'Association des syndicats de professionnelles et
professionnels de collège du Québec.
Le Président (M. Gobé): Bonjour, M.
Bussière.
M. Bussière: Et M. Michel Chagnon, qui est un des
signataires du document que vous avez; il est aussi une ressource dans le
milieu, c'est-à-dire qu'il est professionnel à l'aide
financière au cégep de Joliette, de Lanaudière.
Le Président (M. Gobé): Merci beaucoup. Vous avez
maintenant vingt minutes pour exposer votre mémoire; par la suite, le
ministre et le critique de l'Opposition auront chacun un laps de tempe pour
répondre à vos questions et parler de votre mémoire. Vous
avez maintenant la parole, vous pouvez procéder.
Association des syndicats de professionnelles et
professionnels de collège du Québec
M. Suseière: Évidemment, ce mémoire, vu la
nouveauté du concept que nous vous proposons, se veut principalement un
document de réflexion. Nous sommes tout à fait conscients que
nous ne disposons pas de toutes les ressources requises pour en évaluer
toutes les implications. Compte tenu des remarques que j'ai entendues tout
à l'heure de savants participants à cette rencontre, je
précise justement que ça se veut vraiment un document de
réflexion. Donc, on sait pertinemment qu'au cours des vingt
dernières années, le Québec a pratiqué une
politique de plus grande démocratisation et de permettre
l'accessibilité maximum aux gens du Québec de se scolariser. Pour
cela, il a créé, évidemment, le régime de
prêts et bourses qui a évolué au rythme des besoins et des
choix du Québec. Aujourd'hui, dans le cadre de cette commission, nous
proposons l'ajout d'un nouveau concept de gestion de ce régime, soit la
bourse différée. Qu'est-ce que c'est que la bourse
différée? Une très courte définition: la
première des choses, c'est l'abolition de la notion de prêts et
bourses, c'est-à-dire de cette distinction, jusqu'à la fin du 1er
cycle universitaire. Autre particularité: reconnaissance du principe de
l'indépendance de l'étudiant dès son admission aux
études postsecondaires. En fait, ça constitue l'ensemble de
l'aide reçue par l'étudiant au cours de ses études.
L'application de ce concept dans la gestion du régime d'aide
financière aurait pour effet le paiement des intérêts des
bourses différées tant et aussi longtemps que l'étudiant
est aux études. À la fin de ses études,
l'ex-étudiant ferait un prêt consolidé pour la
totalité des sommes reçues. Il aurait donc droit à un
terme de remboursement de dix ans au maximum. Le remboursement annuel de sa
dette se ferait proportionnellement à sa capacité de payer,
compte tenu de son salaire, de ses responsabilités familiales, ou s'il
possède une jeune entreprise, etc. La contribution future du candidat
remplacerait la contribution parentale actuelle. Pour le calcul des
remboursements annuels, nous proposons une table de contribution, celle qu'on
utilise actuellement pour la contribution parentale. À titre d'exemple,
pour peut-être mieux comprendre ce projet, imaginons qu'un
étudiant ait fini un premier cycle universitaire. Il aura eu besoin de
deux ans de bourses différées pour faire ses études
collégiales, donc, disons, chaque année, environ 5000 $, ce qui
fait 10 000 $. Trois ans d'études universitaires à raison de 7000
$ par année, ce qui totaliserait 21 000 $. Donc, il aurait reçu,
d'aide, un montant total de 31 000 $. Après ses études, il
devrait normalement rembourser 3100 $ par année, plus les
intérêts, ce qui ferait environ 3500 $ à rembourser
annuellement, étalés sur une période de dix ans.
L'application de la contribution proposée, c'est donc celle des
parents à l'annexe I. Supposons maintenant, pour prendre un cas bien
concret, que, pendant ses études, II s'est marié et a un enfant.
Donc, pendant sa première année de travail, sa femme ne
travaillant pas à l'extérieur de la maison, lorsqu'il fait son
rapport d'impôt, il lui reste un revenu net de 20 000 $. Compte tenu de
sa situation, nous calculons un seuil de pauvreté d'environ 15 000 $.
Nous avons donc un revenu disponible de 5000 $, ce qui fera une contribution
totale de 1325 $. Il remboursera donc le minimum de ces deux montants, soit
1375 $, pour sa première année de travail. Il aura donc
reçu, selon l'ancienne terminologie, une bourse de 2125 $. Ce montant de
remboursement se fera ainsi de suite pendant ses premières années
sur le marché du travail, toujours, évidemment, ajusté
à son revenu et à ses obligations. Si l'ex-étudiant se
retrouve avec un revenu net en bas du seuil de pauvreté calculé,
il n'aura rien à rembourser pour ces années. Dans notre exemple,
cela correspond donc à une bourse de 3500 $. Par contre, si
l'ex-étudiant possède un revenu net supérieur, supposons
un revenu de 35 000 $, il devra rembourser la totalité, soit 3000 $.
Quant à l'impact financier d'un tel régime, il faudrait
une étude, évidemment, actuarielle, mais il est réaliste
de croire que le coût des bourses versées en différé
serait moindre que celui des bourses versées dans le régime
proposé, et ce, en atteignant mieux les objectifs
d'acces-silibité aux études postsecondaires. Par contre, les
sommes ainsi économisées, s'il y en avait, devraient être
réinjectées dans des programmes particuliers de bourses au
secondaire, ou au collégial, aux personnes ayant de plus grands besoins,
dans des secteurs où l'abandon des études est plus
élevé.
En fait, ce concept de gestion aurait l'avantage d'atteindre les
objectifs suivants: Réaliser l'accessibilité à des
études postsecondaires à tous les citoyens
québécois qui le veulent; responsabiliser davantage
l'étudiant, dans sa gestion financière, et aussi dans ce qu'on
pourrait appeler la gestion de son programme d'études; l'intégrer
davantage dans ce qu'on
pourrait appeler le monde des adultes; respecter la capacité de
payer des ex-étudiants rendus sur le marché du travail; tenir
compte des possibilités financières de la société
québécoise; et aussi, respecter la capacité de payer des
parents. Il faut, évidemment, bien tenir compte que la classe moyenne,
présentement, éprouve certaines difficultés, dans un
contexte de rupture des ménages et certaines obligations additionnelles,
ou encore dans certaines périodes de crise, ou parfois les obligations
des parents augmentent considérablement, sans qu'ils en soient nullement
responsables. Aussi, ça permet de se doter d'un outil pour encourager
davantage certaines catégories d'étudiants à poursuivre
des études ou à aller travailler dans certains secteurs ou dans
des régions particulières.
Alors, on a fait rapidement le tour de la proposition que nous avions
à faire. Évidemment, je suis tout à fait convaincu que
ça va susciter beaucoup de questions. Nous sommes là pour y
répondre.
Le Président (M. Gobé): Je vous remercie,
M. Bussière. Je passerai maintenant la parole à
M. le ministre de l'Éducation. M. le ministre, vous avez la
parole.
M. Ryan: Je ne suis pas enclin à vous poser beaucoup de
questions aujourd'hui, parce que l'idée est très
intéressante en soi. Elle est très neuve aussi par rapport au
contexte québécois, à tout le moins. Comme vous le dites
vous-même, dans un passage de votre mémoire, il est assez
difficile de calculer l'impact financier d'un tel régime
renouvelé. C'est ce que je vais demander à nos services de faire
au cours des prochaines semaines.
Nous autres, nous avons dû, je vous le dis pour que ce soit bien
clair, élaborer une réforme du régime d'aide
financière, qui n'est pas une véritable réforme. Le
député d'Abitibi-Ouest l'a souligné à quelques
reprises et je ne lui cherche pas noise là-dessus. C'est une
série de modifications qui nous sont apparues à la fois
opportunes et faisables, dans un contexte de contraintes budgétaires
très serrées à l'intérieur duquel nous devions
concevoir cette opération. Pour l'avenir, aucun horizon n'est
fermé. Nous devrons enregistrer cette proposition que vous faites, une
proposition massive, considérable et généreuse et, je
pense, inspirée d'un souci de rationalité de bon aloi. Nous
allons l'examiner soigneusement, mais nous ne pourrons pas arriver à des
résultats à temps pour la présente opération. Nous
serons obligés de l'entrer dans la machine des projets à plus
long terme que nous examinerons avec toute l'attention nécessaire. Je
vous le dis en toute vérité. Il n'y aura pas d'illusions ou de
malentendu entre nous. Les choses seront claires
Cela dit, je serais très heureux d'entendre mon collègue
de Verdun poursuivre cet échange et vous faire part de
l'intérêt que suscitent chez lui vos propositions.
Le Président (M. Gobé): M. le député
de Verdun, vous avez la parole pour quelques minutes.
M. Gautrin: Je vous remercie, M. le Président. Je dois
dire que votre approche est originale et intéressante. Si vous me le
permettez, je voudrais prendre les quelques minutes qui viennent pour vous
poser des questions pour essayer d'approfondir ce que vous avez comme
propositions.
Qu'est-ce qui distingue ce que vous proposez d'un impôt
universitaire après le premier cycle ou d'une forme d'imposition
après le premier cycle? J'ai un peu l'impression... Évidemment,
vous avez voulu, pour ne pas alerter les gens, rester proche du concept de
bourse, mais, pratiquement, vous voulez graduer les remboursements année
après année. Autrement dit, quelqu'un qui a été aux
études a dix ans pour rembourser et son remboursement est proportionnel
à ses revenus. Ça ressemble bigrement, entre guillemets, à
une forme d'impôt universitaire après le diplôme de premier
cycle. Est-ce que je me trompe ou quoi?
M. Bussière: En fait, dans notre esprit, ça ne
rejoint pas nécessairement ce concept-là parce que, de toute
façon, dans le système actuel, la dimension prêt est
remboursable par l'étudiant.
M. Gautrin: Oui.
M. Bussière: Nous, on l'a fait dans un souci de plus
grande justice. En fait, c'est que l'étudiant ne cotise pas
nécessairement en proportion de ce qu'il a reçu, finalement, de
la société, dans le sens que si vous avez un revenu nettement
supérieur, compte tenu de ce que vous avez reçu au cours de vos
études, on trouve justifié que cette personne-là
rembourse, en fait, la totalité. C'est dans un concept d'investissement,
ça. On investit dans ses études. Alors que si vous vous retrouvez
dans des secteurs où, temporairement, l'embauche est plus difficile,
où la demande est moins forte et le salaire moins élevé,
bien, l'ex-étudiant rembourse au prorata. On trouve, nous, à ce
niveau-là, qu'il y a plus de justice. Donc, ce n'est pas lié au
niveau de l'impôt et, comme vous avez pu le voir dans notre document, on
n'est pas tellement ferrés en ce qui concerne les questions
d'imposition, ou tous ces aspects-là.
M. Gautrin: Comment vous... Pratiquement, si je comprends bien,
tous les étudiants qui termineraient un premier cycle universitaire
auraient donc, à ce moment-là, un énorme endettement avec
des facilités de remboursement, mais ils auraient un énorme
endettement. Or, il y
a beaucoup de gens qui sont venus témoigner devant cette
commission en se plaignant énormément de l'endettement des
étudiants à la fin de leurs études Est-ce que ça
vous pose des problèmes ou non?
M. Chagnon (Michel): Je pense que dans ce concept de bourse en
différé, ce qu'il est important de comprendre, c'est deux choses
Actuellement, ce qui pose problème dans l'endet tement étudiant,
c'est que l'étudiant se retrouve avec une dette et, dans bien des cas,
II n'a pas les ressources financières suffisantes pour rembourser sa
dette. Imaginons un étudiant qui termine avec 10 000 $ de prêt. Il
fait un prêt consolidé, il se retrouve avec une petite job qui
fait qu'à un moment donné, il doit rembourser pareil. Tandis que
dans le concept de bourse en différé, nous avons la situation
suivante où l'étudiant rembourse selon ses revenus Donc,
l'étudiant qui n'a pas de revenu quand il a terminé ses
études n'a rien à rembourser Donc, le problème de
l'endettement, c'est un problème quand je n'ai pas de ressources comme
telles.
Si on applique maintenant la table d'imposition parentale à
l'ex-étudiant, nous nous retrouvons dans une situation où celui
qui a des revenus moyens avec une charge familiale forte n'a rien à
rembourser. Il se retrouve avec un endettement ou une remise de sa dette moins
forte que dans la situation actuelle. Parce que, dans la situation actuelle, on
ne tient pas compte du tout de sa capacité de payer. Tout ce qu'on dit:
Tu as une dette et tu payes tant par mois. Dans ce concept-là, on
retient l'idée de dire: C'est selon sa capacité de payer.
Ça, ça m'appa-rart très important de voir cet
aspect-là.
Par rapport à un autre aspect aussi, j'aimerais ajouter que dans
le régime actuel, ce qui fait défaut, à mon point de vue,
c'est qu'on se retrouve avec une masse d'étudiants, souvent sans
ressources, parce qu'on dit tout le temps: Ce sont les parents qui sont
responsables de lui financièrement, parce que les parents ont des
ressources financières. Or, on sait qu'on vit dans des familles
éclatées; il y a beaucoup de familles éclatées;
c'est une réalité, que je dirais, québécoise. Je
regarde dans mon milieu, chez nous, à Joliette, beaucoup du travail du
conseiller en affaires étudiantes est lié au fait qu'il y a
beaucoup de parents qui refusent de payer leur contribution. Les
étudiants qui se retrouvent dans cette catégorie-là, ils
se retrouvent sans ressources financières. Et ça, je pense qu'il
faut le regarder d'une façon attentive parce que ces gens-là, les
seuls moyens qu'ils ont pour s'en sortir, c'est d'appliquer les critères
d'indépen dance qu'on connaît dans le régime actuel, ou
d'aller travailler davantage que les autres étudiants; ils sont donc,
davantage pénalisés. Or, chez nous, les gens de cette
catégorie-là travaillent entre 22 et 31 heures de plus que les
autres étudiants qui se retrouvent dans des catégories moins
favorisées, donc des revenus parentaux entre 15 000 $ et 20 000 $, ou
ceux qui ont des revenus très élevés de la famille.
M. Gautrin: J'ai peu de temps encore. Il me reste deux
minutes?
Le Président (M. Gobé): Oui, une couple de minutes,
M. le député.
M. Gautrin: Une dernière question, puisqu'on a
coupé dans le temps, mais j'aurais voulu quand même continuer
à échanger certains propos avec vous. À la fin du premier
cycle, pour quelqu'un qui entre dans un deuxième ou un troisième
cycle, vous dites que c'est le régime actuel qui s'applique pour eux.
Est-ce qu'il est considéré comme ayant des revenus? Est-ce qu'il
commence à rembourser? Qu'est-ce qu'il fait? Ou est-ce qu'on attend sa
période de remboursement à la fin de ses études? Quand
est-ce qu'on peut, dans votre approche, considérer la fin des
études?
M. Chagnon (Michel): Dans la proposition que nous faisons
aujourd'hui, on dit: Jusqu'au premier cycle, c'est ce régime de bourse
en différé qui est appliqué. À partir du
deuxième cycle, c'est le régime actuel. Et tant et aussi
longtemps que l'étudiant est aux études, il n'a rien à
rembourser. Il commence à rembourser à la fin de toutes ses
études. Donc, il va avoir un endettement, si je peux m'exprimer ainsi,
un endettement théorique plus grand jusqu'au premier cycle, ça,
c'est vrai, mais en même temps, comme je l'expliquais tantôt, cet
endettement-là est relatif aux revenus qu'il aura. S'il a des revenus
plus bas, ce n'est plus un endettement, ça devient une bourse. Donc, il
n'y a plus d'endettement. Et avec des revenus plus bas, on a un endettement
inférieur à la situation actuelle. Au deuxième cycle,
c'est le régime de prêts et bourses actuel qui est appliqué
pour les deuxième et troisième cycles.
M. Gautrin: Ça veut dire que les dix ans à
rembourser ne commenceraient à courir qu'après la fin du
doctorat
M. Chagnon (Michel): C'est ça, à la fin de toutes
ses études.
M. Gautrin: O.K. J'aurais encore beaucoup à
échanger avec vous, mais enfin j'imagine que le temps est fini On va
passer la parole au député d'Abitibi-Ouest.
Le Président (M. Gobé): Merci beaucoup, M. le
député de Verdun. M. le député d'Abltibi-Ouest. (18
h 30)
M. Gendron: Rapidement pour éviter.. Parce qu'il y a
peut-être des bénédictins et des
jésuites qui vont regarder nos réflexions. Alors pour
éviter qu'il y en ait qui restent accrochés à la
dernière question de mon collègue et néanmoins ami de
Verdun, de laisser voir qu'il y en a qui commenceraient à rembourser
uniquement après le doctorat, je trouve que c'est tendancieux un peu
parce que ça ne mouille pas les rues, les étudiants du
Québec qui finissent des études doctorales. Donc, j'aimerais
mieux qu'il en reste à la pratique plus courante, comme le gros de nos
étudiants ont du temps partiel, du premier cycle universitaire, le
remboursement pour l'État se ferait quand même bien plus
rapidement que de laisser voir qu'on ne le verra presque jamais.
De votre mémoire, je veux dire trois ou quatre choses. Ma
collègue aura une question ou deux. Je vais être bien franc. Je
veux évaluer la formule, la regarder un peu plus. Je la comprends, mais
ce n'est pas, à sa face même, la première fois qu'on peut
considérer toute l'implication d'une telle formule, en tout cas, selon
moi. Il y en a peut-être d'autres qui sont plus vite que moi, c'est leur
privilège, et tant mieux. Ce qui m'intéressait cependant dans
votre formule, c'est de regarder vos prétentions au niveau des principes
de cette formule. Moi, une formule qui vise l'accessibilité des
études secondaires à toutes et à tous les citoyens qui le
veulent, moi, j'aime ça. Si c'est ça, ça
m'intéresse de regarder ça. Une formule qui a comme principe de
respecter la capacité de payer des ex-étudiants rendus sur le
marché du travail, je suis capable de vivre avec ça. Nous, nous
étions les tenants d'un impôt postuniversitaire, formule de
l'Australie, qui donne le choix: On paie avant ou après, parce qu'il y a
une logique, compte tenu de l'ampleur des besoins du régime
universitaire pour augmenter la qualité de l'enseignement reçu et
pour régler une fois pour toutes le sous-financement chronique et
repartir avec de nouvelles bases, à condition qu'on fasse les
corrections au régime, qui sont requises. Donc, je n'ai pas de trouble
à vivre avec ça.
Tenir compte également des possibilités financières
de la société, c'est un argument qui, dans le présent
contexte, n'est sûrement pas à balayer du revers de la main. Donc,
moi, pour l'instant, j'ai mis un peu plus de réflexion sur vos
critères, sur ce que vous appelez les principes ou les objectifs que
viserait votre formule et, moi également, j'aimerais ça prendre
un peu plus de temps pour la regarder. Je ne suis pas en mesure de faire des
simulations comme le ministère peut le faire, mais je tiens à
vous féliciter sincèrement parce qu'on ne peut pas, du revers de
la main, dénoncer un geste et une décision que le gouvernement
s'apprête à prendre, et dire: Écoutez, moi, ce n'est pas
mon problème de regarder autre chose. Alors c'est évident que
n'importe quel intervenant qui met sur la table une proposition quelconque,
moi, ça me plaît, parce que la leur, c'est clair que je ne la
trouve pas bonne. On en a parlé peut-être pendant 35 ou 40 heures
depuis qu'on a commencé nos auditions, et je vais continuer à en
parler. C'est un choix trop facile, "bebête", qui ne règle rien.
C'est un choix "bebête", qui ne règle rien, qui crée des
dangers pour l'avenir de notre société. Dans ce sens-là,
quand quelqu'un met quelque chose sur la table et dit: Est-ce que ça
pourrait pallier certains inconvénients de leur formule, moi
j'achète ça. J'achète votre formule au niveau des
objectifs, pour le moment, parce que je n'ai pas le temps de l'apprécier
dans sa mécanique et, pour l'instant, je ne peux pas dire autre
chose.
Quant aux commentaires que vous avez faits sur les diverses
recommandations, parce que j'ai eu l'occasion de prendre connaissance de votre
mémoire, et vous dites que, pour ce qui est du deuxième cycle et
du troisième cycle, c'est le régime proposé par le
gouvernement. Dans le régime proposé par le gouvernement, je l'ai
dit: 11 y a des éléments de bonification intéressants. Je
ne change pas d'avis. Ça ne contrevient pas à des principes que
nous connaissons et ce n'est pas le moment de contrevenir. Donc, les principaux
principes de la réforme sont encore là. La seule conclusion que
je fais, à ce moment-ci, sur la réforme de l'aide
financière aux étudiants, c'est que je trouve qu'elle ne
coûte rien au gouvernement. Et c'est malhonnête de présenter
ça comme étant un équivalent au dégel des frais de
scolarité parce qu'il y a un nouveau régime d'aide
financière qui ne leur coûte à peu près rien parce
qu'il est financé par l'inversion prêt-bourse. Il est
financé par 10 000 000 $ ou 12 000 000 $ qui disparaissent du paysage
et, à ce moment-là, il n'y a pas vraiment d'argent neuf dans la
nouvelle réforme, alors que c'était censé être
l'élément pour permettre aux étudiants de voir la
compensation au dégel.
Moi, je m'arrête là, en vous remerciant sincèrement
de votre contribution. Ma collègue, la députée de
Terrebonne, avait une couple de questions à vous poser.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. le
député d'Abitibi-Ouest. Mme la députée de
Terrebonne, vous avez maintenant la parole.
Mme Caron: Merci, M. le Président. Dans votre conclusion,
suite à l'alternative que vous proposez, qui m'apparaît à
première vue une formule concrète d'impôt
postuniversitaire, mais qui tient compte plus globalement de la capacité
de payer, vous dites: "II faut aussi être capable de reconnaître
que certaines catégories d'étudiants et d'étudiantes sont
à l'heure actuelle pénalisées ou dans
l'impossibilité d'entreprendre des études postsecondaires".
Est-ce que vous croyez qu'avec le dégel des frais de scolarité le
nombre de personnes incapables d'accéder à l'université
sera croissant?
M. Bussière: En fait, je ferai tout simple-
ment ici une précision. Vous comprenez facile ment que le rapport
que nous avons fait porte sur le régime des prêts et bourses. Nous
ne nous sommes pas prononcés sur le dégel des frais de
scolarité.
Mme Caron: C'est bien pour ça que je vous pose la
question.
M. Bussière: On pourrait dire, évidemment, que tout
ce qui peut appauvrir l'étudiant, pour nous, on ne serait pas d'accord
ave:, ce principe là, pour une raison très simple, c'est qu'en
tant qu'aide pédagogique oeuvrant dans un collège, la principale
cause d'abandon des études ou d'échec des études qui
apparaît dans les études que nous avons fartes, c'est le travail
à l'extérieur et le manque de motivation aux études
très souvent lié à ça. On pourrait,
évidemment, et souvent, on conclut trop facilement au caprice des
étu diants... Pour vivre continuellement avec des étudiants, je
peux vous dire que ce n'est pas une question de caprice. C'est une question
fort simple où, présentement, la classe que l'on dit moyenne -
moi j'aurais plutôt tendance à l'appeler un peu pauvre - n'a pas
nécessairement, n'a plus la capacité de subvenir aux besoins de
grands adolescents. L'autre aspect, et je pense qu'on l'oublie peut-être
un peu trop, on ne parle que de questions d'argent. Je pense qu'on oublie les
grands principes à la base de ce rapport, au point de départ,
rendre plus accessibles les études. Ça pour nous, c'est un
élément très important. Lorsqu'on dit de ne pas faire
porter toute la responsabilité sur les parents, je crois que c'est
important parce que les parents n'ont plus nécessairement toute la
capacité qu'on leur prête. Aussi, comme je le disais tout à
l'heure, la situation familiale change. Donc, les obligations changent, ce qui
fait que c'est l'étudiant qui se retrouve avec des problèmes et
c'est loin de l'aider au niveau de son rendement académique.
Une autre dimension qu'on oublie malheureusement tout le temps...
N'oubliez jamais que de se sentir, parfois jusqu'à l'âge de 25
ans, toujours dépendant de son père, de toujours aller le
supplier pour la moindre chose et pour faire un cadeau à sa blonde
à Noël, on trouve ça plus ou moins justifié.
Lorsqu'on vit dans ces milieux, nous estimons qu'il est très important
que l'adolescent se sente responsable de sa vie et ce n'est pas, dans notre
esprit, en lui refusant certains accès ou en le prétendant, au
point de départ, toujours sous la tutelle de ses parents, qu'on va
arriver vraiment à le rendre responsable. On ne lui apprendra même
pas le minimum vital, c'est-à-dire d'être capable de gérer
sainement un simple budget.
M. Chagnon (Michel): Aussi, si je peux me permettre de
compléter, la question du dégel pose la question des ressources
financières de l'étudiant. Et le problème du dégel,
c'est qu'on dit que ça va coûter plus cher, mais on ne lui donne
aucun moyen supplémentaire.
Une voix: C'est ça
M. Chagnon (Michel): Et c'est ça, le problème du
régime des prêts et bourses; c'est ça, le problème
de l'aide financière. Or, le régime qui est proposé par
l'Association, ça résout en très bonne partie . ces
problèmes-là, je dirais, pour la raison suivante. Quand,
tantôt, on mettait des chiffres, ça veut dire qu'on va
évaluer les besoins de l'étudiant incluant, cette fois-là,
ses frais de scolarité, c'est clair que ça va augmenter ce que
j'appellerais sa dette, qui sera évaluée selon sa capacité
de payer par la suite Si je dis: Ça coûte 1000 $ de plus pour sa
scolarité, mais qu'en même temps je lui permets d'avoir l'argent
pour la payer, le problème du dégel ne se pose pas du tout dans
le même contexte. C'est pour ça que, pour moi, le problème
actuel du dégel, à mon point de vue, est un problème
où on évite la capacité de payer de l'étudiant en
disant: Seuls ceux qui seront admissibles au régime des prêts et
bourses vont pouvoir être davantage aidés, en ajustant nos tables
en fonction du régime, en fonction de la nouvelle situation des frais de
scolarité. Moi, je pense que ça fait plusieurs réformes
qu'on vit, et je me demande s'il n'est pas temps, actuellement, d'avoir une
réforme plus radicale, qui tienne compte, justement, de l'ensemble des
principes qu'on évoquait tantôt, c'est-à dire que
l'étudiant doit avoir les moyens financiers et aussi être
responsable de ce que coûte sa formation. Et quand cet
étudiant-là est rendu sur le marché du travail, il doit
être aussi davantage responsable pour rembourser les coffres de
l'État en fonction de ses revenus. Et celui qui aurait reçu
beaucoup, je dirais, de la société, va devoir rembourser
davantage. Et celui qui reçoit moins rembourse moins, compte tenu de sa
situation.
Mme Caron: Les principes qui sous tendent votre proposition
mettent exactement le doigt sur les problèmes actuellement vécus
par nos étudiants. Je pense qu'on le sent, là, que vous
connaissez vraiment la réalité. Pour mettre en place un programme
comme celui que vous proposez, au départ il est évident qu'il
faut quand même de l'argent pour le commencer Vous préconisez une
participation des entreprises. Où le gouvernement ira-t-il chercher
l'argent pour commencer ce programme?
M. Chagnon (Michel): On n'a pas du tout imaginé de
façon de le faire, comme telle, mais on peut regarder ça d'une
façon différente. Imaginons qu'on décide d'appliquer ce
principe de bourses en différé, et quon oublie que... Autrement
dit, du niveau collégial jusqu'à la fin du premier cycle, qu'il
n'y ait plus de bourses telles
qu'on les connaît dans le régime actuel. Ce qui coûte
cher dans le régime actuel, dans les 400 000 000 $ qu'il coûte par
année, ce sont les bourses, parce que ce n'est jamais remboursé.
À ce moment-là, il faudrait évaluer, là, je n'ai
pas les chiffres, à savoir combien, dans le régime actuel,
coûtent les bourses du cégep jusqu'à la fin du premier
cycle universitaire. Une deuxième chose qu'il faut regarder aussi, dans
ce qu'on propose comme tel, c'est surtout des intérêts, dans les
premières années, que ça coûte. Ça ne
coûte pas de l'argent comme tel, ça devient des prêts qui
sont faits. Sauf que ça va devenir des bourses au moment où
l'étudiant va aller sur le marché du travail. Moi je pense que,
dans les premières années, ça demanderait un
investissement plus important dans le régime d'aide financière,
mais qui va être remboursé par la suite, dans les années
subséquentes. Mais je n'ai pas de chiffres plus précis que
ça à vous donner.
Mme Garon: Vous dites bien qu'au début, ça va
coûter plus d'argent. Mais on va le chercher où?
M. Chagnon (Michel): Bon ça ...
Mme Garon: Avez-vous des réticences à
l'égard d'une collaboration avec les entreprises?
M. Chagnon (Michel): Mais quand vous dites: Ça va
coûter plus cher...
Mme Garon: Vous-même l'avez souligné...
M. Chagnon (Michel): Oui, dans le sens qu'on va devoir investir
de l'argent plus en termes de prêts. Mais les prêts ne sont pas
avancés par le gouvernement, ce sont les caisses qui avancent l'argent -
les caisses ou les banques - mais ce sont les intérêts qui sont
avancés par le gouvernement. Donc, ça, les intérêts
payés pour l'ensemble des prêts contractés par des
étudiants ne coûteront pas nécessairement plus cher que les
bourses que l'on donne actuellement. Je n'ai pas de chiffres là dessus,
mais imaginons que le volume des prêts soit multiplié par deux,
par rapport à la réalité, ou par trois, faisons un taux de
coût à ça, c'est ça le coût que le
Québec va devoir payer, par rapport à ce nouveau
régime-là.
Mme Garon: D'accord. Une dernière ques tion. En annexe,
vous faites des commentaires, recommandation par recommandation. Si vous aviez
une seule recommandation à retenir, quelle serait la plus importante
pour vous7
M. Bussière: En fait, c'est évident que co que nous
venons de vous exposer constitue pour nous la principale recommandation.
Mme Caron: Mais dans les recommandations que vous faites sur le
document du ministre?
M. Chagnon (Michel): Moi, je dis que la plus importante, à
mon point de vue, en tout cas, pour les cégeps des régions
éloignées, une des choses importantes, c'est quand on abolit les
frais de transport.
Mme Caron: D'accord, merci.
M. Chagnon (Michel): Ça m'apparaft quelque chose
d'extrêmement important, parce que pour beaucoup d'étudiants, le
fait d'être éloignés du cégep, le coût
principal, ce n'est pas les frais de scolarité, c'est souvent le
transport.
Mme Caron: Merci.
Le Président (M. Gobé): Merci, Mme la
députée de Terrebonne. M. le député
d'Abitibi-Ouest, un mot en conclusion?
M. Gendron: Non, la conclusion, je l'ai dit tantôt, je la
répète: Merci sincèrement, parce que votre formule, en
tout cas, il faut qu'elle soit regardée de plus près, en ce qui
me concerne, parce qu'elle est au moins alternative à ce qui est sur la
table à date, et ça, c'est intéressant.
Le Président (M. Gobé): Merci beaucoup. M. le
ministre, votre conclusion, s'il vous plaît, brièvement.
M. Ryan: Alors, dans l'immédiat, nous porterons une
attention spéciale à vos observations qui ont davantage trait aux
implications immédiates du projet de loi 25. Et à long terme, on
va examiner votre proposition avec plusieurs autres qui ont été
mises sur la table ces derniers temps, et ça pourra fort possiblement
faire l'objet d'une réorientation de la politique gouvernementale, dans
quelques années. Mais là, on embarque dans un régime,
ça va durer au moins, au moins, j'imagine deux, trois ou quatre ans.
J'aime autant vous le dire franchement. On va examiner votre projet très
attentivement avec une attention particulière aux implications
financières, non seulement pour l'État, mais aussi pour
l'individu, parce que moi je suis bien effrayé par la perspective d'une
dette de 35 000 $, en moyenne, disons, qui échoirait à chaque
diplômé d'université; de se voir aux prises avec une charge
de dette de 3000 $ ou 4000 $ pendant dix ou quinze ans, c'est de l'argent. Mais
ce sont des chiffres hypothétiques que J'émets après une
première lecture de votre document. On va le regarder attentivement,
puis si la preuve peut être faite que ça peut être
institué dans des conditions raisonnables, je pense bien que votre
idée fera son chemin dans l'opinion, et aussi, éventuellement,
auprès du gouvernement. Je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Gobé): Merci, M. le ministre.
Merci aux collègues membres de la commission. Merci, M. Bussière
et M. Chagnon. Maintenant, la commission va ajourner ses travaux au mardi 6
mars 1990, à 10 heures, en cette salle. La séance est
levée.
(Fin de la séance à 18 h 43)