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(Dix heures vingt et une minutes)
La Présidente (Mme Harel): À l'ordre, s'il vous
plaît! J'inviterais les membres de la commission parlementaire de
l'éducation à prendre place s'il vous plaît. Alors,
permettez-moi de saluer d'abord les membres de la commission parlementaire. Je
déclare la séance ouverte. Je rappelle le mandat de la
commission, qui est de procéder à une consultation
générale et de tenir des audiences publiques sur le projet de loi
25, Loi sur l'aide financière aux étudiants. Je vais inviter le
secrétaire de la commission à nous annoncer des remplacements
s'il y a lieu.
Le Secrétaire: Non, Mme la Présidente, merci.
La Présidente (Mme Harel): Je vais donner lecture de
l'ordre du jour de ce matin, tel qu'il a d'ailleurs été
distribué. D'abord, II y aura une déclaration d'ouverture. Le
temps imparti est de 45 minutes pour le ministre, 45 minutes pour le
porte-parole de l'Opposition officielle, le député
d'Abitibi-Ouest, et de 15 minutes pour le député de
Jacques-Cartier. Par la suite, nous entendrons la Conférence des
recteurs et des principaux des universités du Québec avant
l'ajournement. Comme nous débutons nos travaux avec un certain retard,
il faut donc comprendre que le temps imparti est redistribué tel que
convenu.
Je regrette de ne pas pouvoir présider les travaux de la
commission. Je suis porte-parole en matière de main-d'oeuvre, et la
commission des affaires sociales a débuté hier une consultation
sur les normes minimales de travail. Je dois immédiatement rejoindre la
commission des affaires sociales. Je n'ai malheureusement pas le don
d'ubiquité et je le regrette beaucoup. Madame la vice-présidente
et députée de Matane m'a assurée qu'elle acceptait de
présider nos travaux. Je vais l'inviter immédiatement à
poursuivre nos travaux et je la remercie pour son amabilité.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, c'est à mon
tour de vous souhaiter la bienvenue à tous à cette commission
parlementaire très importante qui commence ce matin. Ceci étant
dit, je vais inviter dès maintenant le ministre de l'Éducation,
M. Ryan, à prendre la parole pour le temps qui lui est alloué,
c'est-à-dire 45 minutes. M. le ministre, vous avez la parole.
Remarques préliminaires
M. Claude Ryan M. Ryan: Mme la Présidente, je suis heu-
reux de saluer au nom du gouvernement l'ouverture des auditions publiques de la
commission parlementaire de l'éducation autour du projet de loi 25,
traitant de la réforme du régime québécois des
prêts et bourses à l'intention des étudiants de niveau
postsecondaire.
Parce qu'elles visent à la fois l'amélioration de la
condition étudiante et celle de la qualité de l'enseignement
postsecondaire et de la recherche universitaire, les mesures prises ou
envisagées par le gouvernement dans le secteur de l'enseignement
postsecondaire et de l'aide aux étudiants ont une importance capitale
pour notre avenir.
Nos choix doivent viser à ce que l'enseignement postsecondaire
soit le plus largement accessible et d'une qualité élevée.
Toute position qui prétendrait ne retenir que l'un des deux volets
serait irréaliste, voire irresponsable. C'est dans cet esprit que le
gouvernement écoutera avec attention et respect les
représentations qu'on voudra lui soumettre au sujet du projet de loi sur
l'aide financière aux étudiants.
Je vous dirai, d'entrée de jeu, que le gouvernement n'a aucune
prétention à un quelconque monopole de la vérité en
cette matière. Une société doit se doter de services
conformes à ses moyens, et la meilleure façon pour elle de
mesurer ce dont elle est capable, étant donné le niveau de ses
ressources, c'est de comparer l'ensemble de sa situation à celle
d'autres sociétés qui lui ressemblent.
En bout de ligne, toute société doit rechercher, en
matière de politique sociale et culturelle, un équilibre
compatible avec les normes les plus élevées qui soient et, aussi,
avec ce qu'elle est concrètement en mesure de s'offrir. De
manière générale, le niveau d'avancement des services sera
le reflet du niveau de richesse d'une société tout autant que
l'expression de sa hiérarchie des valeurs. Une société
moins riche peut bien, si elle le veut, se doter de services plus
avancés dans tel ou tel domaine, mais elle devra être prête
à payer, pour ce faire, l'une ou l'autre des rançons suivantes:
ou elle devra se résoudre à traîner de l'arrière
dans d'autres domaines de l'activité collective, ou encore elle devra
s'enfoncer dans l'endettement jusqu'à ce qu'un jour,
généralement plus proche qu'éloigné, les
créanciers viennent la rappeler à l'ordre.
Afin qu'il n'y ait aucune méprise à ce sujet, il importe
de rappeler le contexte concret dans lequel nous abordons la réforme des
prêts et bourses. Ce contexte se compose d'éléments bien
connus mais trop facilement oubliés. Il y a tout d'abord l'état
général des finances publiques, qui
nous incite continuellement à la plus grande discipline. Au cours
des quatre dernières années, le gouvernement, il est vrai, a
réduit considérablement le déficit annuel de
fonctionnement de l'État québécois, mais l'héritage
très lourdement hypothéqué que nous avait laissé le
gouvernement précédent continue d'exercer une pression
extrêmement forte sur les budgets annuels. Cette année encore, les
intérêts que nous devrons payer sur la dette du secteur public
viennent chercher plus de 5 000 000 000 $, sur des dépenses totales de
près de 33 000 000 000 $. Tant que nous n'aurons pas réussi
à ramener ce fardeau de la dette à un niveau plus raisonnable,
des contraintes étouffantes continueront de peser sur l'allocation des
ressources publiques. Depuis quelques mois, nous sommes en outre entrés
dans une période de contractions économiques que certains
qualifient désormais de récession. Autant cette conjoncture peut
justifier une intensification des investissements publics, autant elle est peu
propice à une augmentation des dépenses de fonctionnement de
l'Etat. A ces facteurs est venu s'ajouter le discours sur le budget qu'a
prononcé M. Michael Wilson, hier soir, qui annonce une ponction de
l'ordre de 221 000 000 $ pour l'année 1990-1991 sur les subventions de
financement des programmes établis que le Québec touchera au
titre de la santé et des services sociaux, d'une part, et de
l'enseignement postsecondaire, d'autre part.
La réforme des prêts et bourses doit également
être examinée en regard de l'effort global du gouvernement dans le
secteur de l'enseignement postsecondaire et de l'éducation en
général. Les compressions instituées au cours de la
dernière décennie ont donné naissance à de
multiples légendes à ce sujet. Quelques chiffres devraient
contribuer à dissiper certaines impressions fausses qui perdurent. On
soutient, par exemple, que l'on assisterait, ces années-ci, à un
inquiétant désengagement de l'État québécois
en matière d'éducation et que l'éducation aurait
cessé d'être une priorité majeure pour le gouvernement. Les
statistiques que les services du ministère de l'Enseignement
supérieur et de la Science viennent de colliger à ce sujet
tiennent pourtant un tout autre langage. Selon ces données, la part
relative de chaque grand secteur éducatif, soit le secteur
primaire-secondaire, le secteur collégial et le secteur universitaire, a
connu une augmentation et non pas une diminution au cours des quatre
dernières années par rapport à l'ensemble des
dépenses publiques. De 1979 à 1985, les subventions du
gouvernement aux commissions scolaires, aux collèges et aux
universités, établies sur une base per capita avaient
chuté - je dis bien de 1979 à 1985 - de 6,1 %. 6,3 % et 9,7 %
respectivement, et cela en dollars constants. De 1986 à 1989, elles ont,
au contraire, augmenté de 2,7 %, 0,2 % et 12,7 % respectivement,
toujours en dollars constants. Les 12,7 % s'appliquent, évidemment,
à l'enseignement universitaire. Ces chiffres illustrent clairement
l'effort que s'est imposé le gouvernement afin de redresser la situation
financière des universités. (10 h 30)
Tandis que, de 1986 à 1989, les dépenses
générales du gouvernement augmentaient sur une base per capita de
11,6 % en dollars courants et de seulement 0,8 % en dollars constants, les
subventions d'équilibre budgétaire accordées aux
universités ont connu une augmentation de 24,9 % en dollars courants et
de 12,7 % en dollars constants. Ces chiffres confirment ce qu'indique
également l'évolution des subventions gouvernementales à
l'enseignement postsecondaire et à la recherche au Québec et dans
les autres provinces.
Entre 1980-1981 et 1985-1986, l'effort du Québec à cet
égard avait fléchi par rapport à la moyenne canadienne.
Entre 1985-1986 et 1988-1989, la tendance a été inversée
en faveur du Québec. Les subventions gouvernementales ont connu pendant
ces quatre dernières années, au Québec, une hausse de 24,6
%, tandis que dans les autres provinces l'augmentation n'était que de
21,5 %. Les statistiques révèlent de même que les
dépenses de fonctionnement des universités absorbaient au
Québec, en 1988-1989, 1,25 % du produit intérieur brut contre
seulement 0,90 % en Ontario. Comme le gouvernement fournit aux
universités québécoises plus de 70 % de leurs revenus de
fonctionnement, il est logique et juste de conclure que l'effort du
Québec pour ces universités est d'ores et déjà
très élevé en ce qui touche la partie gouvernementale. La
même tendance se confirme pour l'ensemble du secteur de
l'éducation. De 1985-1986 à 1989-1990, la part de
l'éducation dans les dépenses gouvernementales a augmenté
de manière appréciable, passant de 18,7 % du total à 19,5
%.
Le gouvernement qui a été l'auteur de cette performance
n'a pas à rougir lorsqu'il parle d'éducation. Il a su garder
l'éducation au premier rang de ses priorités, tout en faisant
face avec non moins d'énergie à ses responsabilités dans
de nombreux autres secteurs. Quand le gouvernement parle de responsabiliser
davantage les intervenants de l'éducation et, notamment, les
étudiants, il ne craint pas d'être interpellé au sujet de
sa propre performance. Celle-ci parle par elle-même, pour qui accepte de
laisser parler les chiffres sans les déformer.
Dans ce tableau d'ensemble, le régime de l'aide financière
aux étudiants a connu une évolution qui reflète assez bien
les conditions économiques des quatre dernières années. Le
volume total de l'aide financière accordée aux étudiants
est demeuré à peu près stable, passant de 406 000 000 $ en
1985-1986 à 401 500 000 $ en 1989-1990. On constate que le nombre de
demandes d'aide financière a sensiblement diminué. Il fut de 133
375 $ en 1985-1986 et de
138 075 $ en 1986-1987. Il n'est plus, en 1989-1990, que de 121 385 $.
Il n'est pas étonnant, dans ce contexte, que le nombre de
bénéficiaires du régime soit passé de 122 788, en
1985-1986, à 108 030 en 1989-1990. En outre, la part de l'aide
accordée sous forme de prêt a augmenté par rapport à
l'aide accordée sous forme de bourse.
Estimant que, par comparaison avec les autres provinces, la part
réservée à la bourse était trop
élevée au Québec, le gouvernement a voulu tendre vers un
équilibre où l'accent serait davantage mis sur la
responsabilisation de l'étudiant. Les mesures adoptées à
cette fin ont produit des résultats attendus puisque, de 1985-1986
à 1989-1990, le nombre d'étudiants bénéficiaires
d'un prêt seulement est passé de 45 985 à 50 780, tandis
que le nombre d'étudiants bénéficiaires d'un prêt et
d'une bourse passait de 76 803 à 57 250. Pendant la même
période, le volume d'aide émis sous forme de nouveaux prêts
est passé de 205 000 000 $ à 247 000 000 $, et le volume d'aide
émis sous forme de bourse est passé de 201 000 000 $ à 155
000 000 $.
Ces modifications dans le volume de la clientèle et dans la part
respective du prêt et de la bourse reflètent la période de
relative santé économique que nous avons connue depuis quatre
ans. Elles traduisent le fait qu'un nombre sans cesse plus élevé
d'étudiants occupent pendant l'année des emplois
rémunérés qui leur permettent de se procurer des
liquidités plus élevées et de se passer ainsi plus
facilement du recours au Régime des prêts et bourses. Elles
reflètent enfin certains changements apportés à l'aide
accordée aux étudiants, surtout par la voie du transfert vers le
prêt d'une partie non négligeable des sommes naguère
versées sous forme de bourse. Je rappelle, pour mémoire, que
cette dernière opération a été autant le fait du
gouvernement précédent que du gouvernement actuel. Elle visait
à corriger une tendance suivant laquelle la part réservée
à la bourse était beaucoup plus forte au Québec que dans
les autres provinces.
Au niveau universitaire, on observe en contrepartie une hausse continue
des inscriptions depuis quatre ans, c'est-à-dire pendant la même
période. Le nombre des étudiants équivalence temps complet
inscrits dans nos universités est passé de 149 470, en 1985-1986,
à 156 158 en 1988-1989. Pendant la même période, le nombre
des étudiants réguliers à temps plein a connu une
progression nettement plus significative, passant de 92 769 à 114 889,
soit une hausse de près de 24 %.
Le taux de fréquentation universitaire au Québec a de
même connu une progression constante, passant de 10, 4 % de la population
âgée de 18 à 29 ans, en 1985-1986, à 11, 6 % en
1988-1989, comparativement à des taux respectifs de 11, 5 % et 12, 3 %
en Ontario pour les mêmes années. Loin de diminuer par suite des
change- ments apportés au régime des prêts et bourses, la
fréquentation universitaire a donc continué de progresser, si
bien qu'à toutes fins utiles, au niveau des inscriptions, la
fréquentation universitaire atteint désormais au Québec un
niveau comparable à celui de l'Ontario.
On constate également, si l'on observe l'évolution des
données relatives à la diploma-tion, une progression
significative des résultats obtenus au Québec entre 1985 et 1988.
Sous l'angle de l'accessibilité à l'enseignement universitaire,
le Québec a donc franchi depuis quatre ans un nouveau pas très
significatif, mais ces progrès risqueraient d'être annulés
ou compromis si un virage n'était pas pris dès maintenant, afin
de fournir à nos universités les ressources dont elles ont besoin
pour s'acquitter avec succès de leur mission.
Nous attachons, à juste titre, une grande importance à la
formation universitaire et aux effets bienfaisants qui en découlent
autant pour les futurs diplômés que pour la société
tout entière. Mais il y a un prix à payer pour que cette
formation soit disponible en conformité avec des niveaux
élevés d'accessibilité et de qualité. À
l'heure actuelle, nos universités, malgré les progrès
accomplis depuis quatre ans, demeurent dangereusement sous-financées par
rapport à la moyenne canadienne. Même après des
crédits additionnels de 55 000 000 $ injectés dans la base de
financement des universités lors du dernier discours sur le budget, un
écart substantiel séparait encore nos universités de la
moyenne canadienne quant au volume des ressources dont elles disposent. Cet
écart peut sembler mineur si l'on songe que les dépenses de
fonctionnement de nos universités atteindront cette année un
total voisin de plus de 1 700 000 000 $ de dollars. Mais il peut aussi
signifier une différence très importante dans la qualité
de l'enseignement et de la recherche et, par voie d'implication, dans la
qualité de notre avenir.
Devant cet écart, on serait tentés de renvoyer la balle au
gouvernement et de l'inviter à augmenter encore ses subventions aux
universités. Mais cet effort a déjà été
accompli par le gouvernement si bien qu'aujourd'hui, le Québec se situe
parmi les toutes premières provinces canadiennes, sous l'angle des
sommes consacrées aux subventions de fonctionnement universitaire et
à l'aide financière aux étudiants. Au Québec, les
subventions ministérielles représentaient, en 1988-1989, 70 % des
dépenses de fonctionnement des universités, tandis que les
mêmes subventions ministérielles n'apportaient en Ontario que 58,
9 % des dépenses de fonctionnement des universités pour la
même année.
Si des besoins des autres secteurs d'activité collective - je
mentionne en particulier le secteur de la santé et le secteur des routes
- étaient moins pressants et moins aigus, le
gouvernement pourrait peut-être accroître encore sa
contribution directe aux universités, mais dans l'état actuel de
ses finances, il estime que les sommes injectées cette année dans
la base de financement des universités représentent l'effort
maximal dont est capable, à court terme, le trésor public.
Dans le contexte serré où nous serons appelés
à oeuvrer pendant encore de nombreuses années, il était
devenu impérieux de réexaminer la contribution fournie par les
étudiants eux-mêmes au financement de leurs études. Dans
l'ensemble du Canada, la part versée par les étudiants sous forme
de droits de scolarité équivaut à environ 15 % des
dépenses de fonctionnement des universités. Au Québec,
cette part est de 6,7 %. Pour ne citer qu'un exemple, j'examinais
récemment le dernier rapport annuel de l'Université de
Montréal, pour l'exercice terminé le 31 mai 1989, qui a paru dans
une édition récente du journal Forum. Sur des revenus
totaux de 335 000 000 $, les droits de scolarité ont rapporté
à cet établissement la somme de 13 500 000 $, soit environ 4 % du
total des revenus. Si la part des étudiants avait été de
15,8 %, l'université en aurait retiré non pas 13 000 000 $, mais
53 000 000 $.
Voici un autre exemple tout aussi révélateur. En
1988-1989, les revenus en provenance des droits de scolarité et autres
frais connexes ont rapporté aux universités ontarlennes 420 000
000 $, soit 20,2 % de leurs dépenses d'enseignement. Au Québec,
les droits de scolarité et autres frais connexes ont rapporté,
pendant la même année, des revenus de 117 000 000 $, presque
quatre fois moins, soit 8,4 % des dépenses d'enseignement.
Après 20 années inspirées par une approche de
rattrapage qui pouvait se justifier dans un autre contexte, nous étions
arrivés à un carrefour. Il fallait choisir, soit de condamner nos
universités à la stagnation en les obligeant à se
contenter de ressources encore insuffisantes, soit d'augmenter les subventions
gouvernementales d'équilibre aux universités en alourdissant
ainsi le fardeau déjà très élevé que
supporte l'ensemble de la société québécoise pour
l'enseignement universitaire, soit d'accroître le déficit
gouvernemental et de reporter ainsi sur les générations futures
le fardeau d'une contribution gouvernementale accrue aux universités,
soit de requérir, des principaux bénéficiaires de
l'enseignement universitaire, une contribution davantage accordée aux
coûts de cette formation et aux avantages qu'en retireront au premier
chef les étudiants universitaires d'aujourd'hui.
Le gouvernement a choisi la quatrième voie. C'est la voie du
réalisme, de l'équilibre et de la justice. L'étudiant
universitaire québécois paie actuellement trois fois moins cher
que celui de toute autre province pour fréquenter l'université.
Il lui en coûte 540 $ par année en droits de scolarité,
tandis que le coût réel de la formation universitaire est
d'environ 8900 $ par étudiant, par année. Même après
les deux augmentations de 350 $ chacune qui interviendront au cours des deux
prochaines années dans le montant des frais de scolarité, la part
de l'étudiant québécois au financement de ses
études universitaires restera la plus faible de toutes les provinces
canadiennes.
Conscient des implications éventuelles d'une augmentation des
droits de scolarité, le gouvernement, comme il s'y était
engagé, n'aurait pas envisagé d'agir à ce niveau s'il
n'avait été aussi en mesure d'apporter des ajustements
substantiels au régime des prêts et bourses. Comme les auditions
de la commission parlementaire de l'éducation auront principalement pour
objet de favoriser un débat sur les orientations retenues à ce
chapitre par le gouvernement, je voudrais résumer les
éléments centraux de la réforme, dont le projet de loi 25
veut être l'expression législative.
Au plan des orientations, les principes majeurs qui sous-tendent le
régime actuel sont maintenus. D'une part, le gouvernement
réaffirme sa politique voulant que nul ne se voit interdire
l'accès aux études supérieures en raison de la seule
insuffisance de ses ressources financières. D'autre part, le
gouvernement considère que l'étudiant lui-même et aussi ses
parents et, s'il y a lieu, son conjoint doivent demeurer les premiers
responsables du financement de ses études. En raison de cette exigence,
l'aide financière émanant de l'État ne saurait être
que supplétive par rapport à la contribution des premiers
intéressés. Elle continuera aussi à revêtir d'abord
la forme d'un prêt, avant d'être disponible sous forme de
bourse.
A ces principes déjà établis, le gouvernement
greffe des objectifs complémentaires auxquels il attache une grande
importance, à savoir que le régime doit apporter des
réponses satisfaisantes aux besoins réels des étudiants,
que l'aide offerte par le régime doit pouvoir soutenir avantageusement
la comparaison avec ce qui se fait ailleurs et qu'une attention
particulière devra, à l'avenir, être portée à
la persévérance, à la continuité et à une
certaine diligence de l'étudiant dans la poursuite des études
postsecon-dalres. (10 h 45)
Au plan concret, il était impossible, pour des raisons
financières maintes fois évoquées, d'instaurer
l'accès universel aux prêts et à la bourse pour les
étudiants non résidents, et encore moins pour tous les
étudiants. Le coût dune telle mesure, défendable et
justifiable en soi, a été estimé à plusieurs
centaines de millions. Et, à une époque où l'Implication
du gouvernement fédéral dans le financement de l'enseignement
postsecondalre accuse une diminution constante et très
préoccupante, le gouvernement du Québec n'est pas capable de
trouver ces sommes pour cette fin particulière. Pareil
ajout de dépenses est donc inaccessible pour l'avenir
prévisible. Il est important de rappeler que, pour les fins du calcul de
l'aide financière, le montant intégral des droits de
scolarité exigés de l'étudiant, y compris le montant des
hausses Instituées pour les deux prochaines années scolaires,
sera considéré comme dépense admissible et, de la sorte,
tout étudiant pourra recevoir une aide financière accrue, dans la
mesure où ses moyens financiers ne lui permettraient pas de faire face
à la hausse des frais de scolarité. Ceci implique, entre autres,
que tout étudiant présentement admissible à la bourse
obtiendra un supplément de bourse équivalent à la hausse
des frais de scolarité.
De nombreux ajustements s'imposent toutefois à notre
régime de prêts et bourses, lequel n'a pas subi de modifications
importantes depuis 15 ans. Je résumerai brièvement les
principales améliorations que le gouvernement entend apporter au
régime à l'aide du projet de loi 25. Tout d'abord, des
améliorations importantes seront instituées au niveau de la
contribution parentale, laquelle demeure un élément essentiel du
régime. Ainsi, les exemptions pour enfant à charge seront
modifiées, de manière surtout à faire disparaître la
discrimination qui s'exerce présentement à l'endroit des
étudiants non résidents. L'exemption accordée pour ces
derniers sera désormais du même ordre que l'exemption
accordée pour les étudiants résidents, c'est-à-dire
de 2440 $ au lieu de 840 $ actuellement.
En second lieu, la table des contributions des parents sera
indexée, de manière à éviter que ne se reproduise
l'accroissement caché de contributions imposées depuis 15 ans en
raison du gel de la table de contribution. Le taux 'maximum de la contribution
parentale sera en outre réduit à 50 %, au lieu du niveau actuel
de 60 %. Grâce à ces modifications, la contribution exigée
des parents sera diminuée. Avec un revenu net disponible de 3500 $, par
exemple, la contribution parentale est présentement de 1275 $. Sous le
régime proposé, elle ne sera plus que de 925 $, cette somme
devant être désormais répartie suivant le nombre d'enfants
aux études postsecondaires plutôt que selon le nombre total
d'enfants.
En troisième lieu, l'exemption accordée pour les actifs
immobilisés des parents lors du calcul de la bourse, laquelle est
actuellement de 50 000 $, sera portée à 90 000 $. Grâce
à ces modifications, la contribution parentale sera notablement
allégée. Ainsi, les parents ayant un revenu net de 25 000 $ et
deux enfants aux études postsecondaires verront leur contribution passer
de 2006 $ à 1312 $, dans le cas d'étudiants résidents, et
de 2966 $ à 1312 $ dans le cas d'étudiants non
résidents.
Dans le cas des étudiants mariés, la contribution
exigée du conjoint connaîtra des assouplissements
intéressants. Ainsi, le conjoint qui n'est pas aux études est
actuellement admis- sible à une aide en provenance du régime des
prêts et bourses, mais cette aide n'est accessible qu'à un nombre
limité de boursiers. Le montant de l'aide est en outre inférieur
aux besoins dans la majorité des cas. Afin de corriger cette lacune, le
conjoint qui n'est pas aux études sera désormais admissible
à l'aide sociale, ce qui n'est pas le cas présentement. Là
où le conjoint dispose d'un revenu suffisant, il continuera à
contribuer au financement des études postsecondaires de l'autre
conjoint, mais l'exemption de base accordée dans ces cas sera de 9890 $,
par comparaison avec l'exemption actuelle de 6950 $. Les revenus de
l'année précédente serviront de base de calcul. On
disposera également d'une table de contribution indexée. Sous
l'effet de ces modifications, le conjoint disposant d'un revenu net de 10 000 $
n'aura aucune contribution à verser, tandis qu'on exige actuellement de
lui une contribution de 1525 $.
La contribution attendue du candidat à l'aide financière,
c'est-à-dire de l'étudiant, continuera à être
établie en tenant compte à la fois de ses revenus et de ses
besoins, mais elle connaîtra plusieurs modifications. Ainsi, aucune
contribution minimale ne sera exigée du candidat ayant à sa
charge un enfant d'âge préscolaire ou scolaire. Il ne sera pas
tenu compte, dans le calcul du revenu des candidats, des sommes reçues
au titre des allocations de naissance ou des allocations mensuelles aux enfants
d'âge préscolaire. Pour la première année
d'étude, il ne sera pas tenu compte des revenus d'assistance sociale
encaissés pendant les mois qui auront précédé le
retour aux études.
L'étudiant qui revient aux études après avoir
séjourné deux ans sur le marché du travail se verra, en
contrepartie, demander une contribution minimale au même titre que tout
autre étudiant.
Ces changements favoriseront surtout les étudiants ayant charge
d'enfants. Pour l'étudiant responsable d'une famille monoparentale,
ayant un enfant d'âge scolaire, par exemple, la contribution actuelle est
de 1846 $; après la réforme, elle ne sera plus que de 850 $.
Au chapitre des dépenses admissibles de l'étudiant,
celui-ci n'aura plus accès à la prime de 22 $ par semaine, qui
était accordée aux candidats résidents revenant d'un
séjour de deux ans sur le marché du travail. Cette mesure
n'apparaît plus justifiée, tous les étudiants
résidents étant réputés avoir les mêmes
besoins. En retour, en plus de l'ajustement automatique qui se produira dans le
calcul des dépenses admissibles relativement aux frais de
scolarité, les améliorations suivantes seront apportées:
des frais de garde de 10 $ par jour ou 50 $ par semaine, sans limite maximum
quant au nombre d'enfants, seront^ accordés; les frais par enfant
à charge seront portés de 1365 $ à 2230 $ pour les enfants
d'âge préscolaire, et de 1815 $ à 1895 $ pour les enfants
des niveaux primaire et secon-
daire; les frais de transport seront calculés sur
une base nouvelle au sujet de laquelle, je le reconnais, de nombreux
intervenants nous ont déjà fait part d'objections
sérieuses, lesquelles seront l'objet d'un examen attentif; les achats
d'orthèses seront remboursables à raison de 175 $ par
étudiant et par enfant d'étudiant, l'allocation à cette
fin étant disponible à tous les deux ans.
Ayant observé que, dans de trop nombreux cas, le
séjour à l'université ou au collège se prolonge
parfois au-delà de toute justification raisonnable, le gouvernement
estime qu'il faut ajuster des dispositions du régime de prêts et
bourses de manière à susciter à la fois la discipline,
l'excellence et une certaine diligence dans la poursuite des études
postsecondaires. À cette fin, des limites seront établies pour le
nombre de sessions d'études définissant l'admissibilité
à la bourse. Des mesures incitatives permettront aussi de réduire
la dette dans le cas des étudiants de deuxième et de
troisième cycles qui auront réussi à terminer leurs
études dans des délais normaux.
Et si ce n'eut été des coûts trop
élevés qui en eussent découlé, le gouvernement,
cela va de soi, aurait été très intéressé
à appliquer la même mesure aux études universitaires de
premier cycle, voire aux études de niveau collégial. Sur la base
de l'expérience qui sera faite aux deuxième et troisième
cycles, nous continuerons d'examiner la possibilité d'une action de
même nature au niveau du premier cycle universitaire et des études
collégiales.
Le gouvernement a inséré dans le projet de
loi 25 une section consacrée aux étudiants à temps
partiel, lesquels sont particulièrement nombreux au niveau
universitaire. Quoique l'équilibre à cet égard ait
été sensiblement modifié au cours des quatre
dernières années, il est apparu au gouvernement qu'il y avait
lieu de faciliter à ces étudiants à temps partiel,
lorsqu'ils ont des besoins financiers évidents, l'accès à
une aide directement axée sur le coût des études. Outre que
les mesures proposées suscitent de sérieuses difficultés
dans la formulation actuelle, le gouvernement n'envisage pas de pouvoir les
appliquer dès la date d'entrée en vigueur de la loi. Cette
décision a été motivée à la fois par les
contraintes budgétaires du gouvernement et par le besoin que nous
éprouvons d'approfondir davantage la situation et les attentes des
étudiants à temps partiel, de manière à pouvoir
mettre au point des mesures qui répondront vraiment à leurs
besoins, sans créer d'inéquité par rapport à
d'autres classes d'étudiants.
Enfin, ceux qui ont à gérer un régime
public d'aide financière savent qu'il est impossible, dans les
dispositions afférentes à un tel régime, de
préciser tous les cas susceptibles d'être portés à
l'attention de l'appareil gouvernemental. Même quand une loi ou un
règlement ont été minutieusement rédigés, il
arrive Immanquablement - et les députés qui sont autour de cette
table en savent quelque chose, parce qu'ils ont pratiquement tous eu des cas
à me soumettre - que les personnes chargées de l'application de
la loi se heurtent à des cas concrets qui sortent de la norme, mais n'en
exigent pas moins une intervention efficace du gouvernement. Souvent, ces cas
sont plus aigus, plus dignes d'aide que bien d'autres cas qui répondent
aux définitions du règlement et de la loi. Faute de dispositions
appropriées, il est hélas Impossible, dans la plupart des cas,
d'apporter à ces personnes l'aide qui serait justifiée. Je l'ai
fait dans près d'une centaine de cas au cours des quatre
dernières années, à l'aide du fonds discrétionnaire
qui m'est imparti, mais d'autres éléments qui auraient
également eu droit de souhaiter avoir accès à ce fonds en
ont été privés.
Pour parer à ces situations inhumaines, le
gouvernement veut que le ministre, dans des cas exceptionnels comportant un
danger d'abandon des études, puisse disposer d'un pouvoir d'initiative
raisonnable et, pour l'exercice de ce pouvoir, le ministre sera cependant
conseillé par un comité d'examen sur lequel siégeront des
personnes issues des principaux milieux concernés.
En dernier lieu, le projet de toi 25 vient combler une
carence que l'on observait dans la loi actuelle sur les prêts et bourses,
à savoir l'absence de dispositions habilitant le ministre à
requérir des renseignements nécessaires pour la bonne application
de la loi et les vérifications qui peuvent s'avérer
indispensables dans la gestion de celle-ci. Les dispositions que l'on trouve
à cet égard dans le projet 25 sont identiques à celles que
contient, sur le même sujet, la Loi sur la sécurité du
revenu. Ce pouvoir d'enquête attribué au ministre devra sans doute
être exercé avec prudence et discernement. Il ne sera pas
nécessaire d'y recourir souvent, étant donné que la nature
du régime d'aide financière aux étudiants diffère
très substantiellement de celle du régime d'aide sociale. Mais ce
pouvoir est néanmoins nécessaire pour le bon exercice des
fonctions que le législateur entend confier au ministre.
L'ampleur exacte des mesures envisagées par le
gouvernement ne sera connue que lorsque le règlement devant
présider à l'application de la loi aura été
dévoilé. Vu les liens étroits qui relient
l'énoncé d'orientation, le projet de loi et le futur
règlement, II eût été utHe et fort logique que les
parlementaires puissent disposer dès maintenant non seulement du projet
de loi, mais aussi du texte du futur règlement. A cela, je dois
répondre que la divulgation du règlement aura normalement lieu
après que le gouvernement aura fait connaître, par la voie des
crédits annuels et du budget, les ressources qu'il entend consacrer l'an
prochain à l'enseignement postse-condalre.
Je n'exclus pas la possibilité que le projet
de règlement puisse être porté à l'attention
des membres de la commission parlementaire, au stade de l'étude du
projet de loi en comité. Si les orientations définies dans
l'énoncé sont retenues, comme je le souhaite et l'envisage, le
nombre total d'étudiants bénéficiaires du régime de
prêts et bourses devrait connaître une augmentation de plus de 20
%. Les catégories d'étudiants les plus favorisées par la
réforme seront les étudiants non résidents, les
étudiants avec conjoint et les étudiants sans conjoint ayant des
enfants à charge.
A l'occasion du débat qui aura lieu autour du projet de loi 25,
on serait tentés de multiplier les comparaisons avec des régimes
d'aide financière existant dans d'autres pays. On serait tentés,
en particulier, d'emprunter à d'autres régimes des
éléments auxquels on donnera souvent une portée
exagérée, en les isolant de leur contexte. Fort heureusement,
l'exercice que nous inaugurons aujourd'hui aura lieu alors même que nous
venons tout juste d'avoir accès à des études importantes,
faites au cours des derniers mois, sur ces questions à l'OCDE.
Un collaborateur de mon cabinet, M. Gaétan Lévesque, qui
se spécialise depuis longtemps dans l'étude des aspects
financiers de notre système universitaire, a rédigé,
à l'aide de ces études parues récemment, une excellente
synthèse dont le texte est disponible dès maintenant,
c'est-à-dire aujourd'hui ou demain. Il ressort clairement de cette
synthèse que chaque système d'aide financière forme un
tout dont les parties peuvent difficilement être détachées
Mes unes des autres. Il ressort aussi que chaque système traduit
l'évolution politique, sociale, économique et culturelle du pays
auquel il est identifié, et que ces caractéristiques doivent
être vues à travers le prisme de maints autres facteurs propres
à chaque pays. (11 heures)
Pour ne citer qu'un exemple, il serait tentant de soutenir que la France
et la Grande-Bretagne sont en avance sur le Québec vu que, dans ces deux
pays, on n'exige à peu près aucune contribution des
étudiants au chapitre des droits de scolarité. Il faudrait
toutefois ajouter, pour compléter le tableau, que dans un pays comme la
France, l'aide financière à l'étudiant est beaucoup plus
difficilement accessible, beaucoup plus chichement distribuée qu'au
Québec, il faudrait également ajouter qu'en Grande-Bretagne et en
France, le taux de fréquentation universitaire est sensiblement moins
élevé qu'au Québec malgré qu'on y ait la
gratuité, si mes souvenirs sont bons, depuis le lendemain du dernier
conflit mondial, c'est-à-dire depuis plus d'une quarantaine
d'années. On se plaît de même à citer l'exemple de la
Suède, où l'aide financière est accessible sous forme de
prêt à tout étudiant âgé de plus de 18 ans,
sans examen de ses ressources financières, mais on oublie d'ajouter
qu'au sortir des études univer- sitaires, l'étudiant
suédois entre dans la carrière porteur d'une dette dont le niveau
moyen était supérieur à 18 000 $ il y a déjà
trois ans.
À propos d'accessibilité en particulier, on est
tentés d'établir un lien de causalité entre le taux de
fréquentation universitaire et les politiques relatives au droit de
scolarité et à l'aide financière aux étudiants. Il
est néanmoins de plus en plus établi, dans tous les pays
où des études ont été faites à ce sujet, que
la composition sociale du corps étudiant n'a guère
été modifiée par l'existence de politiques
libérales en matière de droit de scolarité et d'aide
financière aux étudiants.
Une conclusion ressort de plus en plus des travaux faits à ce
sujet: tandis que l'aide financière est essentielle pour que les
étudiants en provenance de milieux socio-économiquement pauvres
puissent avoir accès à l'université, la poursuite des
études jusqu'à l'université demeure influencée par
de nombreux autres facteurs dont l'impact respectif demeure encore largement
inconnu. Dans ce contexte encore obscur, plusieurs observateurs inclinent
à penser que la gratuité universitaire, si elle devait
principalement bénéficier aux milieux capables de s'offrir ce
service public, serait une subvention régressive contraire, de par sa
nature même, aux principes d'équité qui doivent
régler la gouverne des finances publiques.
Quoi qu'il en soit, on peut dégager des études faites ces
derniers temps certaines observations qui intéressent plus
particulièrement le Québec. Je retiendrai, à cet
égard, les constatations suivantes. Tout d'abord, sous l'angle du
montant de l'aide financière accordée aux étudiants, le
Québec occupe le premier rang pour le montant maximal de l'aide qui peut
être accordée. En ce qui touche le niveau moyen de l'aide
accordée, le Québec se situe à un niveau
intermédiaire après les pays de tête comme la Suède,
la Norvège et les États-Unis. Signalons cependant qu'en
Suède et en Norvège, l'aide versée sous forme de
prêts représente respectivement 92 % et 77 % du volume total de
l'aide. Deuxièmement, si l'on considère la proportion des
étudiants qui bénéficient de l'aide financière par
rapport a la clientèle étudiante totale, des pays comme la
Suède et la Norvège viennent en premier lieu, mais d'autres
sociétés comme les États-Unis et le Québec suivent
d'assez près, et l'Ontario vient assez loin en arrière.
Troisièmement, si l'on considère l'aide financière dans
son rapport à l'ensemble de la société, on constate que
l'effort per capita - ça veut dire l'effort par habitant - du
Québec à 51 $ par année vient tout de suite après
celui des États-Unis, 71 $, et de la Norvège, 68 $, et loin en
avant de l'effort de l'Ontario, qui est à 40 $. On constate aussi que le
Québec consacre à l'aide financière une part de son
produit intérieur brut, c'est-à-dire 0,4 %, qui est comparable
à celle des États-Unis, à 0,43 %, et supérieure
à celle de la
Suède et du Royaume-Uni, où c'est 0,3 %, et à celle
de l'Ontario, où c'est 0,2 %.
Voilà des faits extrâmement éloquents, qu'on ne
saurait ignorer dans un débat comme celui-ci. Dans la très grande
majorité des pays, je remarque aussi que la contribution des parents,
que certains voudraient éliminer, est jugée nécessaire
pour le financement des études universitaires. Là où elle
n'est pas jugée nécessaire, l'aide financière est
accordée surtout sous forme de prêt, c'est-à-dire
d'obligation que l'étudiant doit contracter pour l'avenir.
Sous l'angle de l'endettement de l'étudiant, les deux pays qui
offrent le régime d'aide financière le plus avantageux sont
également, et ça se passe de démonstration, ceux dont les
étudiants sont le plus lourdement endettés. En 1985-1986, la
dette moyenne de l'étudiant norvégien était de 10 853 $,
celle de l'étudiant suédois était de 18 310 $, tandis que
celle de l'étudiant québécois était de 3300 $ pour
l'étudiant de premier cycle universitaire et de 4186 $ pour
l'étudiant de second cycle universitaire.
À la lumière de ces données, on peut conclure,
comme le fait mon collaborateur, M. Lévesque, que la situation qu'ont
à vivre les étudiants québécois, malgré
certaines aspérités dont nous sommes conscients, s'avère
l'une des plus favorables de l'ensemble des pays de l'OCDE. On peut
également conclure qu'en regard de la réforme projetée de
l'aide financière aux étudiants et de la hausse des droits de
scolarité instituée pour les deux prochaines années, les
conditions offertes aux étudiants de niveau postsecondaire au
Québec feront que ces derniers jouiront d'un support financier
relativement plus avantageux que leurs collègues de la très
grande majorité des autres pays qui font partie de l'OCDE.
La Présidente (Mme Hovtngton): Merci, M. le ministre.
Maintenant, je donne la parole au porte-parole de l'Opposition officielle, le
député d'Abitibi-Ouest, pour une période de 45 minutes
également. M. le député d'Abitibi-Ouest, vous avez la
parole.
M. François Gendron
M. Gendron: Oui, Mme la Présidente. Je suis très
heureux que moi-même ainsi que mes collègues ayons l'occasion, au
nom de l'Opposition officielle, de faire valoir notre point de vue sur des
questions aussi majeures qu'une plus grande accessibilité, un meilleur
régime d'aide financière au niveau des étudiants et,
également, sur tous les problèmes connexes qui sont liés
à Ça, dont un meilleur financement du réseau
universitaire.
Une chose est certaine, d'entrée de jeu, je veux signaler que si
la réforme proposée de l'aide financière aux
étudiants et la question du dégel des frais de scolarité
étaient aussi intéres- sants et aussi rosés que ce qu'on
vient d'entendre avec l'énoncé des chiffres du ministre de
l'Éducation, il y a une chose qui est évidente: la
démonstration aurait eu lieu à tout le moins en présence
des premiers concernés, à savoir les étudiants et les
étudiantes du Québec. Ça fait un peu drôle de voir
que, pour la première journée, pour une question qui les concerne
autant, nous n'aurons pas l'occasion d'avoir de groupes étudiants devant
nous puisque, dans sa grande sagesse, le gouvernement a décidé
qu'on ferait appel d'abord à des intervenants complètement
favorables, bien sûr, à son point de vue et à sa salade,
parce qu'il s'agit effectivement d'une salade bien orchestrée.
L'autre commentaire que je veux faire avant d'y aller, moi aussi, de ma
présentation sur les deux aspects touchés par la commission
parlementaire, au-delà de tous les chiffres évoqués par le
ministre, au-delà de toutes les justifications, et il y en a eu de
nombreuses... Quand, après cinq ans, on continue encore à
prétendre que c'est à cause du lourd héritage qu'ils ont
reçu qu'ils ne sont pas en mesure d'assumer leurs propres
décisions, II faut le faire!
Au-delà de toutes les comparaisons, dans certains cas, exactes,
dans d'autres cas, plus ou moins odieuses... Je donne un exemple: Encore
aujourd'hui, venir dire à une commission parlementaire que dans le
dernier budget de M. Lévesque il y a eu une augmentation d'argent neuf
au niveau universitaire de 55 000 000 $, c'est du mensonge. Il n'y a pas une
université, Mme la Présidente, qui a constaté cette hausse
de scolarité.
La Présidente (Mme Hovfngton): Je vous en prie.
M. Parent: Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Hovington): Pour une question de
règlement?
M. Parent: ...je pense...
La Présidente (Mme Hovington): M. le député
de Sauvé.
M. Parent: Je voudrais que...
M. Gendron: Je retire tout de suite. C'est une
demi-vérité. C'est une demi-vérité.
M. Paré: Alors, je reconnais la gentHhom-merie de mon
collègue d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Oui, oui. Au-delà de...
La Présidente (Mme Hovington): Alors, veuillez continuer,
s'il vous plaît.
M. Gendron: Oui, Mme la Présidente. Au-
delà de toutes les analyses, de temps en temps très fines,
d'autres fois un peu moins fines, au-delà, bien sûr, des
données que le ministre a utilisées dans son exposé, ce
qui est son droit le plus strict, pour confirmer la thèse qu'ils ont
choisie, c'est-à-dire de dégeler les frais de scolarité et
montrer qu'il n'y a pas d'impact, et de montrer que le régime d'aide
financière est le plus généreux - et là je voudrais
avoir l'attention de tous les membres de cette commission - il demeure deux
faits fondamentaux. Il demeure deux constats majeurs. Je voudrais les
répéter et les faire. Le premier constat, c'est: Est-ce que les
universités du Québec sont sous-flnancées, oui ou non, au
moment où nous discutons des questions que nous allons aborder? La
réponse est on ne peut plus claire: Oui, nos universités sont
sous-financées.
Je ne peux pas refaire toutes les démonstrations qui ont
été faites, mais à titre d'exemple, je voudrais juste
citer un article de l'Actualité où on interviewait M.
Serge Godin: "Les universités sont au bord de la faillite". Je ne vous
lirai pas l'article. Je l'ai lu. J'espère que vous l'avez lu. La
Conférence des recteurs - on aura l'occasion de les entendre
tantôt - a répété à satiété -
et je cite juste une phrase - ce qui ressort, cependant, de l'analyse que nous
avons faite précédemment, quelles que soient les méthodes
utilisées, toutes les méthodes révèlent un
sous-financement chronique majeur important des universités
québécoises, vraisemblablement supérieur à 200 000
000 $. Je ne m'obstinerai pas, ce matin, sur le chiffre. Je sais que M. le
ministre n'est pas d'accord, mais mon point, ce n'est pas le chiffre.
Est-ce que, oui ou non, les universités du Québec sont
sous-financées? La réponse, c'est oui. Votre adjointe, votre
défunte adjointe parlementaire à l'Éducation et à
l'Enseignement supérieur, la députée de Jacques-Cartier,
Mme Joan Dougherty, dans une sublime belle lettre au premier ministre,
indiquait combien c'était grave, combien c'était critique,
combien ça n'avait pas de bon sens. Et l'ineffable premier ministre du
Québec disait combien ces gens-là sont raisonnables. "C'est avec
plaisir que j'ai appris, par le biais des journaux, que je considère que
les demandes que vous faites sont raisonnables". Le milieu universitaire
faisait des demandes raisonnables (La Presse, 28 mars 1989). Ça a
été repris à satiété.
Je pourrais multiplier les exemples. Je rappelle le premier constat.
Est-ce que, oui ou non, le milieu universitaire est sous-financé? La
réponse, c'est oui, en ce qui concerne l'Opposition. Deuxième
constat. Est-ce que les étudiants et les étudiantes du
Québec, dans les quatre dernières années, ont vu leur
endettement augmenter d'une façon importante, majeure? La
réponse, c'est oui. L'endettement des étudiants et des
étudiantes du Québec, uniquement au chapitre des prêts et
bourses, c'est au-delà de 100 000 000 $ d'endettement additionnel. Et,
lié à ce constat d'endettement additionnel des étudiants,
on fait également le constat que le niveau de diplomation par rapport
à l'Ontario, d'autres provinces, d'autres pays, est très
Inférieur.
La question qu'il faut se poser, avant d'aborder moi aussi mon
exposé d'une façon plus précise: Est-ce que le
dégel des frais de scolarité aura des effets majeurs sur ce que
nous notons comme étant des carences du système universitaire? Je
vous donne des exemples précis. Est-ce qu'on n'a pas un problème,
à savoir qu'il y a trop d'étudiants qui sont à temps
partiel? La réponse, c'est oui, par le milieu universitaire. Est-ce
qu'on n'a pas un très grand nombre de diplômes inférieurs
par rapport au reste du Canada ou l'Ontario? La réponse, c'est oui.
Est-ce qu'on n'a pas tendance à ce que davantage d'étudiants - et
là, je ne discute pas des motivations qui les animent pour faire ces
choix-là - est-ce qu'on n'a pas un certain nombre d'étudiants qui
préfèrent plutôt s'inscrire à l'obtention d'un
certificat universitaire plutôt qu'à un diplôme de premier
cycle, de deuxième cycle ou de maîtrise? La réponse,
malheureusement, est encore oui.
Et là, je me dis: Puisque j'ai des réponses oui à
toutes ces questions, est-ce que le nouveau régime d'aide
financière qu'on nous présente aujourd'hui aura comme
conséquence de corriger ces lacunes du réseau universitaire? En
conscience, si la réponse est non, et c'est ce que nous essaierons de
questionner à travers les intervenants qui viendront nous donner des
indications, on n'a pas d'autre alternative que de dire deux choses:
Premièrement, ce n'est pas un bon régime de prêts et
bourses, d'assistance financière, parce qu'il ne corrigera pas les
problèmes; deuxièmement, ce n'est sûrement pas en
dégelant uniquement les frais de scolarité, avec un apport
insignifiant d'argent neuf dans le réseau... Parce qu'il faut être
conscient que le dégel au net, quand on l'aura fait, quand on aura
taxé uniquement les étudiants, au net, ça donnera la
magnifique somme de 40 000 000 $ pour la prochaine année. (11 h 15)
Or, tout le monde reconnaît, même si le ministre avait des
hochements de tête négatifs, la plupart des intervenants ont
convenu que le niveau de sous-financement chronique des universités
était à tout le moins de 160 000 000 $, même s'ils
contestent le chiffre de 200 000 000 $; 160 000 000 $ moins 40 000 000 $, pour
ceux qui savent encore compter un peu, ça donne 120 000 000 $ de manque
à gagner. Dans ce sens-là, on n'aura rien réglé
d'une meilleure qualité, d'une meilleure prestation des services
universitaires, d'un meilleur appareillage, de meilleurs instruments de support
à l'enseignement et à la recherche. On aura endetté
davantage les étudiants, puis on se
gargarisera d'avoir fait des efforts extraordinaires, flamboyants,
fantastiques.
Nous non plus, on ne vient pas ici avec le monopole de la
vérité. Nous aussi, on va être attentifs, nous aussi, on va
écouter; mais nous, ce n'est pas gelé dans le ciment, notre
décision. Nous, on n'a pas fait comme le gouvernement. On a eu
l'occasion, avant les fêtes même, à une émission de
radio où on parlait du dégel... puis le ministre a
répondu: Oui, d'accord, on parle du dégel, mais sachez que c'est
gelé bien dur. C'était gelé bien dur, la décision
d'augmenter les frais de scolarité. Et comme c'est très
lié à ce que nous allons discuter, il me semble que, dans ce
sens-là, il va falloir être vraiment convaincant, et je souhaite
que l'ensemble des intervenants nous permettent de l'être, pour
vérifier encore une fois si ce n'était que des paroles quand le
ministre, tantôt, a mentionné que le gouvernement serait attentif
et qu'il n'avait pas le monopole de la vérité. J'ai hâte de
voir s'il n'est pas, comme d'habitude, assis dans la chaire de la
vérité.
Sur les frais de scolarité, je voudrais y aller d'une
déclaration plus soutenue et commencer justement par cette question,
même si je sais que la commission parlementaire devra davantage porter
sur la modification à l'aide financière proposée. À
peu près à la même époque où fut
créé le régime d'aide aux étudiants, on
décidait de geler les frais de scolarité à
l'université, autre élément majeur d'une politique visant
à élargir et à démocratiser l'accès aux
études supérieures. Plutôt que d'abolir
Immédiatement les frais de scolarité, il fut plutôt
résolu de les maintenir à un même niveau, ce qui devait
impliquer, compte tenu de l'inflation, une diminution progressive.
Aujourd'hui, tous reconnaissent que le gel des frais de
scolarité, leur maintien à un niveau de plus en plus bas en
termes réels aura favorisé une accessibilité accrue aux
études universitaires. Le ministre de l'Éducation lui-même,
et j'aimerais ça que vous soyiez attentifs, disait, lors de cette belle
annonce qu'il faisait en décembre, et je le cite - et là, je
répète que c'est le ministre de l'Éducation actuel qui
parlait - "La politique de gel observée par tous les gouvernements qui
se sont succédé à Québec aura contribué
largement à une hausse très importante du taux de
fréquentation universitaire au Québec". Le ministre dit que parce
que ça a été gelé, ça a permis, d'une
façon importante, une fréquentation accrue. Pourtant, le
même ministre décidait, au même moment, de mettre fin
à cette politique de gel, faisant passer les frais de scolarité
de 540 $, ce qu'ils sont en moyenne, à 890 $ l'an prochain et à
1240 $ en 1991-1992, soit une légère, une modeste augmentation de
130 % sur deux ans.
Dans un même souffle, il nous apprenait qu'à compter de
1992-1993, les droits de scolarité seraient indexés annuellement
selon des modalités encore inconnues. Ne s'arrêtant pas là,
il donnait la liberté aux universités d'exiger, dès cette
année, des frais de scolarité supplémentaires pouvant
atteindre 10 % du niveau établi, et c'est d'ailleurs largement
commencé, il y a plusieurs universités qui ont indiqué que
c'est dans ce sens-là qu'elles fonctionneraient.
Dans ce même discours, le ministre nous disait, et je cite: "Le
gouvernement prévoit que l'impact de la hausse des droits de
scolarité sur l'accessibilité sera nul ou marginal". Quelques
semaines plus tard, il changeait d'avis: "La hausse annoncée pourrait
entraîner une baisse du taux de fréquentation des
universités d'environ 5 %, à moins que le ministre ne
considère comme marginale une baisse de 12 000 étudiants, ce qui
ne me surprendrait guère puisque, selon ses propres propos, il disait
ceci: 5 %, dans l'ensemble, ça peut être plusieurs milliers
d'étudiants, mais si c'est pour un an, deux ou trois et qu'un bon nombre
de ceux-ci reviennent aux études après être allés
travailler une couple d'années, il n'y a rien là, je pense qu'il
n'y a pas de tragédie là-dedans. C'est le ministre qui parlait.
Je laisse le soin aux membres de la commission de juger de tels propos.
À l'instar de M. Ryan, des travaux menés par M. Stager,
réputé économiste qui a étudié le lien entre
le niveau des frais de scolarité et de l'accessibilité aux
études universitaires, chiffrent même à 30 000
étudiants, soit 13 %, la baisse potentielle que pourrait provoquer la
hausse annoncée. Un autre économiste, Clément Lemelin, qui
a aussi étudié la question, prévolt également
qu'une baisse est inévitable. Là, je n'ai pas le temps de montrer
tout ça, mais je pourrais le citer, dans certaines universités
régionales: Les profs de l'UQAC croient que la hausse des frais de
scolarité va nuire à la région. Eux aussi ont des
chiffres. Le ministre n'en a pas parlé dans son exposé, c'est
évident. Je pourrais citer de nombreux chiffres avec tout autant de
prétention que le ministre peut en avoir, que, oui, ça pourrait
effectivement avoir un impact majeur.
Donc, nous, de notre côté, on fait la conclusion suivante.
Ça ne fait aucun doute que cette hausse aura un effet sur la
fréquentation, le type de fréquentation universitaire ou le type
d'engagement pris par les étudiants versus une diplomation.
Deux raisons principales, liées l'une à l'autre, motivent
cette opinion. D'une part, on ne peut risquer de compromettre un acquis
précieux en raison du retard qu'accuse encore le Québec en
matière de scolarisation et de diplomation par rapport aux
sociétés voisines. D'autre part, nous croyons qu'il nous faille
situer ces discussions sur l'accessibilité dans un débat beaucoup
plus large, soft celui des défis d'excellence que nous impose la
concurrence mondiale. Il faut «avoir à quel moment le ministre
pose ça. Si je reviens à M. Godin... M. Godin disait, je cite
juste deux phrases: "La situation est-elle si dramatique?" Ça,
c'était la question. La réponse est la suivante:
"Au rythme où nous laissons aller les choses, nous deviendrons
rapidement un pays techniquement sous-développé". Très
endetté aussi, on en a eu des preuves encore hier. Et les données
sont de plus en plus accablantes. Le Canada se situe au seizième rang
parmi les principaux pays industrialisés pour le nombre de
diplômés universitaires, de scientifiques, d'ingénieurs et
d'entreprises de pointe. Nous sommes avant-derniers en ce qui concerne la
recherche universitaire et le nombre de brevets d'invention. Et je pourrais
continuer. Si j'illustre ça, ce n'est pas pour montrer qu'on n'a pas
fait de progrès. Je comprends qu'on a fait des progrès.
J'espère qu'on est en 1990 et non en 1960. Mais le rattrapage est
tellement important encore. On vient de prendre un virage majeur, comme
société, avec le libre-échange. Nous allons probablement
devoir en prendre d'autres avec Europe 92. Et, au moment où on constate
toutes ces lacunes, on décide de poser un geste qui aura comme
conséquence de renforcer et d'accentuer toutes ces lacunes.
Voici quelques données sur le retard du Québec en
matière de scolarisation. Tandis que la proportion de la population
âgée de 15 ans et plus, détenant un grade universitaire, se
situe à 12,4 % en Ontario, elle n'est qu'à 10 % au Québec.
Le taux de diplomation au baccalauréat - pas au deuxième cycle et
au troisième cycle universitaire, mais au baccalauréat - demeure
inférieur de 25 % chez nous, par rapport à la province voisine.
Avez-vous compris? 25 %. En 1987, nos universités décernaient 29
000 nouveaux diplômes de bac, maîtrise et doctorat, comparativement
à 52 000, en Ontario. Ramené au prorata de la population, c'est
un déficit d'environ 8000 diplômes par an.
La réalité est davantage préoccupante lorsqu'on ne
considère que les francophones - parce qu'on a ce
problème-là additionnel - puisque la scolarisation encore plus
forte des Anglo-Québécois a pour effet de rehausser
artificiellement - entre guillemets - notre performance. Selon les
données les plus récentes divulguées par le CSE, la
probabilité d'accéder à l'université
s'élève à 44 % chez les élèves anglophones,
comparativement à 22 % pour les francophones. Seulement 3 % des
élèves francophones accèdent à la maîtrise,
par rapport à 6 % chez les anglophones. Le Québec décerne,
à l'instar des autres provinces, mais dans une proportion plus
élevée, un plus grand nombre de certificats. Je l'ai
illustré tantôt, je l'ai indiqué tantôt. Je n'ai rien
contre les certificats universitaires, je n'ai rien contre ça. Bravo
pour toutes les personnes qui ont le courage et la détermination d'aller
se chercher un certificat universitaire, mais je ne suis pas sûr qu'on va
prendre tous les virages que la société doit prendre uniquement
avec des certificats. Je suis très inquiet.
Enfin, malgré une légère augmentation, le nombre de
diplômes de deuxième et troisième cycles demeure
Insuffisant. À titre d'exemple, pour les études de
deuxième cycle, en 1987, 4500 diplômes, en 1988, 4600; une hausse
flamboyante, ça représente 10 % des diplômes
universitaires, de l'ensemble des diplômes universitaires. Pour les
études de troisième cycle, en 1987, 600 diplômes; en 1988,
une hausse majeure par le bas, 593; ça représente 1,3 % des
diplômes universitaires. Si on veut saisir toute la portée de ces
données, il faut situer cette réalité dans le contexte de
la recherche de l'excellence, de la compétition économique
internationale, libre-échange, Europe 92, à laquelle nous sommes
confrontés.
Alors, selon Gilles Goulet, président de l'Université du
Québec, le retard systématique de nos diplômés
universitaires amène le recul progressif et inéluctable de nos
entreprises dans la compétition du marché international où
elles se situent désormais. Pour preuve, Serge Godin, président
de la Chambre de commerce de Montréal - je l'ai dit tantôt - nous
livre quelques données accablantes sur le retard que nous accusons sur
le plan, et j'ai eu l'occasion de citer ces chiffres.
À partir de ces constats, il ne fait aucun doute qu'il faut faire
des efforts, même si le ministre vient de nous dire que l'effort du
gouvernement, lui, c'est réglé, ils l'ont fait, en donnant des
chiffres erronés, en prétendant qu'il y a eu 56 000 000 $
d'argent neuf, alors que toutes les universités que j'ai vues m'ont dit
que c'était 25 000 000 $. Il dit: Ça, c'est notre effort, c'est
réglé, on l'a fait. Alors, je dis qu'il faut accroître et
stimuler l'accès aux études postsecondaires. Et, pour ce faire,
l'objectif d'accessibilité doit donc demeurer une priorité
guidant nos actions, mais cet objectif n'aura de sens que dans la mesure
où le financement adéquat de nos universités redevient une
priorité.
Notre performance sur le plan international est liée à la
capacité de concurrence de nos universités avec celles d'autres
pays plus avancés. À cet égard, plusieurs intervenants se
sont prononcés, et tous conviennent que les universités manquent
de ressources. À l'appui du dégel, le gouvernement invoque
essentiellement la nécessité d'assurer des ressources accrues aux
universités. Ayant échoué dans ses démarches visant
à convaincre ses collègues ministres, le président du
Conseil du trésor et le premier ministre, de délier leur bourse
au profit de cette cause, le ministre a décidé de faire assumer
par les étudiants et les étudiants seuls la responsabilité
de remédier au financement des universités. Il a choisi une
solution de facilité qui ne règle absolument rien des vrais
problèmes et qui a comme conséquence d'aggraver l'endettement
étudiant.
Selon les chiffres du ministre, la hausse des droits de scolarité
devrait pouvoir procurer des revenus additionnels de 52 000 000 $ en 1990-1991
et de 104 000 000 $ en 1991-1992,
dont le cinquième sera réservé pour le financement
des prêts et bourses. Non seulement il ne donne pas aux
universités ce dont elles ont besoin, mais il se permet, par l'argent
additionnel du dégel des frais de scolarité, d'en prendre une
partie et il va financer la bonification du régime d'aide
financière dont nous allons parler dans quelques minutes. Au net, je
l'ai dit tantôt, ça fait 41 000 000 $ en 1990-1991 - rappelez-vous
que les besoins sont de 160 000 000 $, donc rien de réglé - et
l'année subséquente, 830 000 000 $.
Avez-vous une idée de ce que ça représente, ces 83
000 000 $ sur le budget total de l'État, qui est de 32 500 000 000 $?
Pour des gens qui prétendent que le moment est venu de prendre le
virage, le virage au sens tout simplement large du terme, on est en 1990, on
reconnaît que le sous-financement a eu comme conséquence que nos
universités ont du retard dans des équipements adéquats,
dans des instruments de support. On n'a aucune garantie que ces 40 000 000 $
vont, effectivement, servir à de meilleurs outils pédagogiques
à la clientèle étudiante. On continue à
prétendre que ces gens-là se préoccupent
d'éducation, qui pensent que l'éducation est une priorité,
alors qu'une société - là, je parle de la
société québécoise - comment voulez-vous qu'elle
soit stimulée, qu'elle soit concurrente, qu'elle soit
équipée pour faire face au défi de l'avenir si on n'a pas
la conviction que c'est fondamental que nos institutions de haut savoir
puissent avoir les crédits requis pour s'acquitter de leur mission
fondamentale de recherche, d'enseignement et de support à la
collectivité?
Le ministre fait valoir qu'une fois majorés, les frais de
scolarité demeureront encore parmi les moins élevés du
Canada. Il a raison! Mais pourquoi veut-il toujours suivre l'exemple du Canada
et des États-Unis? Pour servir sa cause, bien sûr. D'autres
exemples peuvent aussi bien être suivis. Il y en a d'autres exemples
qu'on pourrait suivre: la RFA, la Suède, la France, où
l'université est gratuite. En Espagne, en Belgique, en Suisse, les frais
de scolarité sont comparables aux autres. Et ce qu'il y a de plus
dramatique, c'est l'absence de volonté de ce gouvernement-là
d'évaluer des alternatives, parce que des alternatives à la
hausse des frais de scolarité, il y en a. Je voudrais juste en
évoquer quelques-unes. (11 h 30)
Nous, on estime, tout comme d'autres organismes et associations - qu'on
aura l'occasion d'entendre - que les entreprises qui bénéficient
directement des ressources qualifiées issues des universités
auraient tout avantage à augmenter leur apport financier si elles
veulent demeurer compétitives. Et moi ça ne me gêne pas. Ce
n'est pas gênant de dire ça. C'en est une solution. On verra dans
les discussions que, si on compare l'apport du financement provenant des
entreprises au Québec versus l'Ontario, les bonnes comparaisons que le
ministre vous servait, les entreprises contribuent beaucoup moins au
Québec au financement et à la recherche universitaire qu'ailleurs
au Canada et en Ontario. Et ce qu'il y a de pire c'est que, quand elles
contribuent - et là je ne blâme pas nécessairement les
entreprises, je blâme beaucoup plus l'irresponsabilité chronique
du ministre - comme par hasard, ça atterrit presque toujours à la
même place. Le financement privé, comme par hasard, atterrit
massivement à McGill ou à Concordia, mais il atterrit rarement
dans une université régionale. Il atterrit rarement dans le
réseau UQ de l'université. Il y en a un peu. Bien sûr qu'il
y a des fondations, bien sûr que Laval fait des efforts, et je les
félicite. Mais pensez-vous que si le gouvernement avait un peu plus de
respect pour l'équilibre du financement provenant du secteur
privé, il ne poserait pas certains gestes liés à la
fiscalité pour s'assurer qu'il y a une meilleure distribution et un
meilleur équilibre? Notre réponse, nous, c'est clair, c'est oui.
Ces dernières contribuent à peine pour 2 % au financement des
universités.
Lors de la dernière campagne électorale, on a
proposé l'instauration d'une taxe spéciale sur la masse
salariale, destinée à stimuler les efforts de recherche et de
développement dont une partie servirait à défrayer les
coûts indirects de la recherche présentement imputés aux
universités.
Les universités ont-elles aussi à faire leur part dans le
financement? Bien sûr. Les sommes additionnelles
générées par une amélioration de leur gestion,
à certains égards, pourraient servir à améliorer la
qualité de l'enseignement, des équipements et de
l'encadrement.
Enfin, nous, il n'y a pas de cachette, on est favorable à ce que
les étudiants soient mis davantage à contribution, mais -
écoutez bien ça, là - pas avant leur entrée sur le
marché du travail. Pas avant leur entrée sur le marché du
travail, après, parce qu'on pense que ça peut exister, ça,
un gouvernement qui se creuserait les méninges pour instaurer,
après leurs études, une forme d'Impôt postuniversitaire
proportionnel au niveau gagné par la suite. D'ailleurs, les professeurs
de l'Université de Chicoutimi, c'est une recommandation qu'ils font. Et
il y en a d'autres qui ont fait cette recommandation-là, mais le
gouvernement a la solution facile. On ne regarde pas d'autres solutions qui
auraient moins d'impacts négatifs sur le financement universitaire et
également sur l'endettement étudiant.
Les frais remplacés par cet impôt sur le revenu des
personnes ayant fréquenté l'université permettraient
d'aller chercher des ressources additionnelles pouvant être remises aux
universités et de relier le coût des études universitaires
aux bénéfices réels qu'en tirent ceux qui y ont
accès.
Enfin, toujours dans les solutions, une
dernière remarque concernant l'argument utilisé par le
ministre afin d'atténuer les nombreuses appréhensions relatives
au dégel des frais de scolarité. Ce dernier fait valoir qu'il n'y
a pas de danger de limiter l'inaccessibilité, puisque la hausse sera
compensée par le biais du régime d'aide financière aux
étudiants. Là, ce n'est môme pas une
demi-vérité, c'est une "tiers-vérité". C'est une
"tiers-vérité" parce qu'on sait qu'il y a à peine - si on
prend l'ensemble des étudiants du réseau qui
bénéficient d'une aide financière sous forme de prêt
ou de bourse -c'est à peu près le tiers de l'ensemble des
étudiants. Ce n'est pas un argument qui, en tout cas, va nous
convaincre. Est-il essentiel de rappeler que moins de la moitié des
étudiants universitaires à temps plein reçoivent une telle
aide? Moins de la moitié! De plus, celle-ci se traduira, pour le plus
grand nombre, par un endettement encore accru et, tandis que le niveau des
frais de scolarité, lui - ce n'est pas peut-être bien ou
peut-être pas, excusez l'expression... Le niveau des frais de
scolarité, c'est réel, c'est garanti, tu dois le payer, alors que
l'obtention d'une aide financière demeure dans l'ordre d'une
éventualité lorsque se formulent les choix relatifs à la
poursuite des études. Peut-être bien que tu en auras,
peut-être bien que tu en auras pas; ça dépend de la grille,
ça dépend d'une série de paramètres et là,
bien sûr, on a ajouté l'habitude traditionnelle du ministre: II
faut que je regarde ça. Parce qu'il aime bien que tout passe par son
bureau. Alors là, on va ajouter une nouvelle façon,
dépendamment que le ministre est de bonne humeur ou qu'il a vu une tache
de rouge à quelque part sur la demande, là, il va dire: Ça
me fait plaisir, cher étudiant, j'ai regardé ça et on va y
souscrire. Pour ce qui est...
M. Ryan: Question de règlement, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Marois): M. le ministre, question de
règlement.
M. Ryan: Mme la Présidente, si le député
pouvait apporter quelques exemples de ce qu'il a insinué, j'en serais
éclairé. S'il n'est pas capable d'en apporter, je sais qu'il aura
la décence de retirer cette allusion-là à la
parti-sanerie.
M. Gendron: Je retire mon allusion à la partisanerie.
Une voix: C'est correct, monsieur.
M. Gendron: C'est juste parce que j'ai un travail à faire
et là, je n'ai pas le temps de m'amuser avec des questions de
procédure.
M. Ryan: Ha, ha, ha!
Une voix: II y a des fois où il se retire.
M. Gendron: Alors, en conclusion, là-dessus, sur les frais
de scolarité, je citerai un extrait de la lettre absolument fantastique
de l'ex-députée de Jacques-Cartier, Mme Dougherty, au premier
ministre; elle disait ceci: "Notre habilité à concurrencer est et
restera directement liée à notre matière grise - comme
elle parlait bien -à notre capacité de créer des
idées et de s'en servir, de résoudre des problèmes et de
gérer des ressources physiques, humaines et financières pour le
bien de la société et de l'économie. À la
lumière de cette réalité, continuer de priver nos
universités des argents qu'ils ont besoin équivaudrait à
se tirer dans le pied."
À ces propos qui, à mon avis, situent très bien le
contexte dans lequel devraient s'insérer les discussions de cette
commission, j'ajouterai: Puisque la force et le dynamisme de notre nation
reposent principalement sur la compétence de nos ressources humaines,
force est de reconnaître qu'en décidant de hausser les frais de
scolarité, il est évident que le gouvernement libéral fait
un mauvais choix. Au contraire, tous nos efforts doivent viser à
encourager nos étudiants et étudiantes à entreprendre et
à poursuivre des études supérieures. À cette fin,
le régime des prêts et bourses peut constituer un outil efficace,
s'il tient compte des différentes positions et arguments qui seront
émis par les différents intervenants dans le cadre de cette
consultation. Il restera au ministre, bien sûr, à tenir compte des
suggestions qui nous seront faites au sujet de la réforme de l'aide
financière.
J'ai dit que je reviendrais plus particulièrement non pas sur le
rappel historique de la réforme des prêts et bourses - parce que
tout le monde connaît son contexte, on sait que la philosophie du
régime des prêts et bourses s'inscrivait dans une perspective de
complémentarité à des ressources personnelles
insuffisantes - mais en maintenant le principe que l'étudiant et ses
parents avaient la responsabilité première du financement de ses
études. On pense que le régime, à date, a
contribué, en tout cas, à rendre plus accessible au fil des ans
et à démocratiser le système, et on le voit par le nombre
de demandes qui est passé de 55 000 en 1966 à plus de 125 000 en
1988-1989. Et nous, on est bien à l'aise pour parler de la
réforme de l'aide financière aux étudiants, parce qu'il
faudrait au moins faire quelques phrases sur le bilan du Parti
québécois de 1976 à 1985; on n'a pas honte. Moi, en tout
cas, je n'ai pas honte "pantoute" de notre bilan, parce que les données
confirment que le Parti québécois a apporté de nombreuses
modifications aux règles d'attribution de l'aide financière;
entre autres portant le volume d'aide alloué de 83 000 000 $ en
1976-1977 à 407 000 000 $ en 1985-1986, soit une légère
augmentation de 500 %.
Le volume de bourses est passé de
38 200 000 $ à 201 000 000 $ sous notre
régime. On parlera de celui des libéraux. Le nombre de
bénéficiaires, quant à lui, est passé de presque 60
000 en 1976-1977 à 122 000 en 1985-1986, donc le double. Les
crédits, en 1976-1977, étaient de 48 800 000 $; en 1985-1986, de
265 900 000 $, donc à peu près six fois plus. La performance
libérale, l'extraordinaire performance, on va en parler. En 1985, ces
gens-là prennent des engagements ou livrent certaines promesses
libérales et, particulièrement sur ce que nous discutons, ils
avaient dit ceci: "On va apporter quatre améliorations fondamentales: on
va hausser la déduction à l'égard de la contribution des
parents servant à établir le seuH d'admissibilité; on va
instaurer un prêt sans intérêt pour les étudiants
à temps partiel; on va donner accès au régime de
prêts et bourses aux étudiants du secteur professionnel du niveau
secondaire qui doivent s'éloigner de leur foyer pour poursuivre leurs
études; et, enfin, on va hausser les montants d'aide financière
pour tenir compte des coûts supplémentaires encourus par les
étudiants en provenance des régions éloignées." Or,
parmi ces quatre promesses, ces quatre engagements, une seule promesse ou un
seul engagement a été tenu par l'ajout dans le calcul des
dépenses admises du candidat dépendant, non résident et
dont les parents demeurent dans les régions éloignées, un
montant de 400 $. Merci, bravo, c'est vrai. Mais les trois autres, on n'en a
pas vu la couleur pendant quatre ans. Les deux premiers éléments
se retrouvent dans le projet de réforme. Ah, là ça revient
dans le projet de réforme du ministre cinq ans plus tard. Mais on sait
déjà que le deuxième engagement - intéressant - a
déjà commencé à être modifié et
entrera en vigueur à une date indéterminée. Et là,
pour ne pas qu'il y ait de confusion, je parle bien sûr de l'instauration
d'un prêt sans intérêt pour les étudiants à
temps partiel. C'est intéressant, mais ça, on refoule ça.
Un peu comme l'aide sociale, toutes les mesures dures pour les
concernés, qui faisaient la guerre aux pauvres plutôt que faire la
guerre à la pauvreté, ont trouvé leur application le 1er
août. Toutes les bonnes mesures, un an plus tard, parce qu'il y en a
quelques-unes, quand même, dans leur réforme d'aide sociale.
Alors que ces améliorations devraient
représenter 25 000 000 $ de plus dans le régime des prêts
et bourses, le gouvernement libéral - je l'ai dit tantôt - a
choisi d'endetter les étudiants d'environ 100 000 000 $ de plus sur
quatre ans, soit l'équivalent de 25 000 000 $ par année et ce,
par le transfert d'une partie de la bourse en prêts. Il faut être
au courant que depuis 1985-1986, le niveau du prêt maximal conditionnel
et préalable à la bourse a augmenté de 44 % au
collégial et de 39 % au premier cycle universitaire, et de 35 % aux
deuxième et troisième cycles. Mais tandis que la bourse moyenne
n'aura augmenté - écoutez bien ça - que de 1 %, la bourse
moyenne a augmenté de 1 %, le prêt moyen, lui, est passé de
1673 $ à 2198 $, soit un bond de 31 % sous le règne
libéral. Il faut se rappeler de ça làl Pendant quatre ans,
la bourse augmente de 1 % et le prêt, lui, un léger bond de 31 %.
Le volume de bourses a chuté de 201 400 000 $ en 1985-1986 à 153
000 000 $. Une progression par le bas! Tandis que le nombre de boursiers est
passé de 76 800 a 57 000. Donc, rapidement 20 000 boursiers de moins et,
au niveau de l'argent, 50 000 000 $ de moins en bourse pendant quatre ans avec
nos amis les libéraux! L'aide allouée sous forme de bourse ne
représente plus que 45 % du volume total, 38 % pour ceux qui auraient le
texte que j'ai distribué. Il y a une erreur. L'aide allouée sous
forme de bourse ne représente plus que 38 % du volume total de l'aide
financière par rapport à 50 % il y a quatre ans. Le budget de
l'aide financière aux étudiants s'établit à 272 000
000 $ pour 1989-1990, en excluant les bourses de la francophonie
octroyées par le gouvernement fédéral, par rapport
à 273 200 000 $ en 1985-1986, soit une baisse de 17 % en dollars
constants.
Sur la réforme proposée, parce qu'il faut en
parler pendant quelques minutes, et ça sera ma conclusion, je voudrais
indiquer quelques commentaires généraux. En dépit du
nombre de correctifs envisagés, il ne faut pas penser qu'il s'agit d'une
réforme d'envergure majeure. D'abord, on ne se reconnaîtrait pas,
on ne pourrait pas reconnaître le Parti libéral. Faire quelque
chose d'envergure, il faudrait se poser des questions, ça fait quatre
ans qu'ils sont sur les freins, à peu près sur tout ce qui bouge
ou ne bouge pas et là, après trois ans où les
étudiants ont fait toutes sortes de représentations et dit. Quand
est-ce que ça s'en vient? Là, on annonce qu'enfin on va
procéder aux modifications législatives requises pour donner
suite aux éléments de reforme. Mais ne vous trompez pas
là. Ce n'est pas la mer à boire. Il n'y a pas à manger
là-dedans pendant des années et se nourrir grassement! Parce que,
au net, encore là, l'ensemble des bénéfices de l'aide
financière aux étudiants pour la première année,
ça va être un gros 20 000 000 $. Ils sont très
préoccupés, eux autres, par la question des étudiants! 20
000 000 $ de bonification du régime d'aide financière aux
étudiants. Le coût de la réforme sera à peu
près équivalent, sur une base annuelle, aux compressions
pratiquées. Ah! Petit hasard, heureux hasard. Ces gens-là ont
endetté les étudiants de 100 000 000 $ sur quatre ans, 25 000 000
$ par année, et là on dit: Ouais, on va vous remettre çal
On va vous remettre à peu près 25 000 000 $ par année,
exactement le même chiffre que l'endettement progressif occasionné
aux étudiants sur une base annuelle. La réforme confirme, une
fois de plus, le choix libéral en faveur d'un endettement croissant des
étudiants. Lorsqu'elle sera en vigueur, la propor-
tion de l'aide allouée sous forme de bourse ne
représentera plus que 40 % du volume total, comparé à 50 %
en 1985-1986. Le volume de bourses émises s'élèvera alors
à 190 000 000 $. Imaginezl Réforme en vigueur, nouvelle
réforme fantastique. Ça va donner 190 000 000 $ de bourses alors
qu'en 1985-1986, les étudiants en avaient pour 201 000 000 $. Toute une
augmentation! (11 h 45)
La réforme tranquille ne remet pas en question les principes
fondamentaux du régime, à savoir que l'étudiant demeure le
premier responsable du financement de ses études. Nous, on achète
ce principe. L'aide de l'État conserve son caractère
supplétif et continue à revêtir la forme de prêt
avant d'être disponible sous forme de bourse.
À ces principes de base, le gouvernement en ajoute trois.
Imaginez! Trois beaux principes supplémentaires parce qu'il faut changer
quelque chose, c'est une réforme. Un des objectifs
supplémentaires: il faut que, dorénavant, l'aide
financière apporte des réponses satisfaisantes aux besoins
réels et établis des étudiants. Ce n'est pas beau,
ça? Nous, on achète ça, c'est trop beau pour en discuter.
On est complètement d'accord avec ça. C'est la vertu, la tarte
aux pommes, ça répond, bien sûr, à un objectif de
tout régime politique que l'aide financière apporte des
réponses satisfaisantes aux besoins réels et établis,
donc, ça veut dire prouvés, des étudiants. On n'a rien
à dire là-dessus.
Faire en sorte que l'aide offerte aux étudiants
québécois se compare avantageusement à celle qu'offrent
les régimes en vigueur dans d'autres provinces canadiennes. Là,
on a un peu plus à dire parce que, comme par hasard, avec ce
gouvernement, quand on dit que ça se compare avantageusement à
celle qu'offrent les autres régimes ailleurs, dans l'esprit de ce
gouvernement, ça veut toujours dire la même chose, un nivellement
par le bas. Toujours la même chose, sur tout, un nivellement par le bas.
Donc, on a de quoi à dire parce que c'est un prétexte au
nivellement par le bas, accentuant ainsi la tendance déjà
amorcée depuis quatre ans par le gouvernement libéral.
Nous, pourquoi on a des choses à dire là-dessus? C'est que
si on avait rattrapé les retards, si on n'avait pas de problème
avec les temps partiels, si on n'avait pas de problème avec les
chargés de cours, si on avait un certain nombre d'étudiants plus
élevé qui étaient au deuxième et au
troisième cycles, on dirait peut-être qu'on a un niveau de
diplomation assez intéressant pour se permettre des fredaines de ce
genre-là, mais, ce n'est pas notre cas.
Sur le dernier principe, promouvoir la continuité et la
persévérance dans les études - noble objectif - tout en
incitant les bénéficiaires à compléter leurs
études dans des délais normaux, louable! Sincèrement, on
est d'accord là-dessus, M. le ministre, parce qu'on pense qu'on ne peut
pas, comme société, étirer les études sans
justification. À un moment donné, il faut que des études
de niveau premier cycle, deuxième cycle ou troisième cycle se
terminent.
Donc, oui, il y avait lieu de faire une mise à jour, et on pense
que le projet de loi 25 comporte des éléments nouveaux
intéressants, comme la remise de la dette, la bourse pour temps
partiels, comité d'examen des demandes dérogatoires. Sur le
comité d'examen des demandes dérogatoires, on a des commentaires
particuliers parce qu'on estime que, encore là, le ministre de
l'Éducation tombe dans sa vieille habitude de tout examiner et de dire:
Écoutez, si je n'ai pas l'occasion de regarder ça, c'est
dangereux. Et, au niveau des commentaires particuliers que je voudrais faire en
conclusion... Combien est-ce qu'il me reste de temps, Mme la
Présidente?
La Présidente (Mme Hovington): li vous reste quatre
minutes, M. le député.
M. Gendron: On va les prendre et on va conclure avec les
commentaires particuliers et les commentaires spécifiques. J'en ferai
moins parce que j'aurai l'occasion de revenir à chaque fois que nous
aurons l'occasion de bénéficier de l'éclairage des
groupes. Mais, sur les commentaires particuliers, je veux dire qu'au chapitre
de la contribution parentale, les recommandations visant la diminution de cette
dernière par le biais de l'indexation de la table de contribution, de
même que l'augmentation des exemptions liées aux enfants à
charge et aux actifs nets des parents sont un reflet exact d'ajustement
réclamé depuis longtemps. Il s'agit là d'une bonne mesure,
à laquelle nous souscrivons.
La réduction de la contribution du conjoint représente,
quant à elle, un avantage certain. Encore là, on aura quelques
remarques, mais nous pensons qu'il s'agit là d'une bonification.
L'extension de l'abolition de la contribution minimale à tous les
étudiants ayant des enfants à charge représente un acquis
de plus. Plusieurs recommandations, bien que louables, sont le résultat
d'ajustements mineurs aux règles déjà établies, que
nous aurons l'occasion de commenter davantage lors de l'étude du projet
de loi article par article.
On a quelques réserves, des réserves majeures: Bourses
pour les étudiants universitaires à temps partiel. On ne comprend
pas pourquoi le ministre décide de reculer avant même que la bonne
mesure soit en application.
La remise de la dette concernant la recommandation 19. Nous sommes
sûrement favorables à l'instauration d'un mécanisme de
remise de dette pour les étudiants des deuxième et
troisième cycles, puisque c'est une mesure qui s'inspirait de notre
programme politique. Nous croyons, cependant, qu'elle devrait également
s'appliquer aux étudiants du premier cycle universitaire. On va
s'interroger sur les modalités d'application,
mais ce n'est pas le moment à ce moment-ci.
L'abolition des incitatifs pour les personnes effectuant un retour aux
études après avoir été sur le marché du
travail. On aura également des choses à dire là-dessus.
Recommandation 14: Coupure dans l'allocation de transport. Nous, on pense
qu'encore là, c'est une recommandation qui a un effet désastreux
pour les étudiants des régions éloignées parce que,
en Abitibi et au Saguenay-Lac-Saint-Jean, sans blesser personne, c'est
très rare qu'on peut s'amuser dans les bouches de métro. Il n'y
en a pas beaucoup. Dans ce sens-là, quand il n'y a pas de transport en
commun, si on coupe la réduction pour l'allocation de transport, comme
par hasard, c'est vraiment dans la même tendance de ce
gouvernement-là de toujours être antirégional. Mais nous,
on ne peut pas souscrire à ça, des mesures qui font que
constamment on ne tient pas compte des régions avec ce gouvernement. Pas
plus de Montréal, en passant, parce que quand on regarde l'état
de la ville de Montréal, particulièrement dans l'est, ce n'est
pas brillant.
Pour ce qui est du comité d'examen des demandes de
dérogation, là on aura encore des commentaires particuliers, mais
je l'ai dit tantôt, c'est la fâcheuse manie du ministre de se doter
d'un pouvoir discrétionnaire. Il ne vivrait pas s'il n'avait pas
ça. Il est obligé d'en prendre un au niveau de l'âge
d'admission. Il en a pris un au niveau de l'accès à
l'école anglophone, au niveau de l'éducation des adultes quant
à la limitation des 2000 heures. Là, il en veut un au niveau des
prêts et bourses. Il faut qu'il regarde ça. On verra d'ailleurs
combien cette suggestion a l'air d'être très partagée par
le Protecteur du citoyen. Quand on aura l'occasion de prendre connaissance du
rapport du Protecteur du citoyen, on aura l'occasion de revenir et d'indiquer
au ministre de l'Éducation que les vues du Protecteur du citoyen ne sont
sûrement pas dans le sens de celles du ministre de
l'Éducation.
Conclusion, Mme la Présidente et chers membres de cette
commission. Je voudrais conclure en vous rappelant ceci: Très
clairement, au début, j'ai laissé voir qu'il y a deux constats
majeurs dont on ne peut pas se sortir: les universités sont
sous-financées et les étudiants sont endettés. On est dans
une société où, effectivement, on a des retards au niveau
de la diplomation, où on a trop de temps partiel. On a plus
d'étudiants qui feront le choix de certificats et ce n'est pas,
d'après nous, la façon de corriger les nombreuses lacunes du
système universitaire. Aujourd'hui, on nous propose un nouveau
régime d'aide financière, financé en grande partie par les
étudiants, et pour ce qui est du dégel des frais de
scolarité, on a eu l'indécence de prendre la décision
avant même de regarder d'autres solutions qui auraient été
moins pénalisantes, qui auraient été plus respectueuses de
ce que nous sommes comme société. C'est évident que
j'espère et je souhaite qu'à la lumière des
éclairages qui nous seront fournis par les différents
intervenants, que le ministre de l'Éducation ait cette
sensibilité qu'il nous a indiquée au début, qu'il serait
attentif, à l'écoute, pour nous démontrer que,
effectivement, son gouvernement ne fait pas cette commission parlementaire
uniquement pour justifier sa position, mais pour recevoir les éclairages
qui lui permettraient de modifier sa position.
La Présidente (Mme Hovtngton): Merci, M. le
député d'Abitibi-Ouest. Il avait été convenu, entre
les partis, qu'un temps de quinze minutes serait alloué au
député indépendant de Jacques-Cartier. Est-ce que vous
voulez vous prévaloir de vos quinze minutes, M. le député?
Alors, allez-y, vous avez un droit de parole de quinze minutes. M. le
député de Jacques-Cartier.
M. Cameron: Mme la Présidente, je pense que je devrais
commencer en expliquant que je reste encore un peu étonné de me
voir ici. J'ai enseigné l'histoire depuis presque 20 années dans
les collèges et les universités du Québec, avec grand
plaisir. Mais avec moins de plaisir, j'ai déjà suivi plusieurs
commissions et conseils qui concernent l'éducation collégiale. En
faisant cela, j'ai découvert que la politique et l'administration de
l'éducation étalent beaucoup plus compliquées que
l'histoire de la civilisation. J'ai préféré, en
général, me cacher dans la salle de classe. Je soupçonne
être redevenu étudiant depuis quelques mois. J'espère que
je passerai mon examen.
À long terme, je voudrais voir au Québec un système
d'éducation avec une plus grande liberté de choix à tous
les niveaux. Il faut dire, en employant ce terme, que je l'applique en
général, pas seulement à la question troublante des choix
linguistiques.
Comme beaucoup d'enseignants et de professeurs, dans toute
l'Amérique du Nord, je suis devenu très sceptique sur les effets
réels de l'étatlsme dans l'éducation. On peut citer, par
exemple, le nouveau livre par deux professeurs québécois,
Jean-Luc Miqué et Richard Marceau, Le monopole public de
l'éducation. Comme ces auteurs, je crois que le public sera mieux
servi par un système dans lequel le consommateur et le contribuable se
voient offrir des choix réels à propos d'un service qui leur est
indispensable. J'insiste sur ceci, même en considérant le but
d'assimiler les immigrants allophones dans les milieux francophones et
québécois. Quoi qu'il en soit, je sais bien que, à ce
moment, l'heure de cette idée n'arrivera pas. Dans cet endroit, je
crains que ce ne soit un peu comme plaidoyant pour l'athéisme dans la
cathédrale elle-même.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Cameron: Dans l'Immédiat, j'essaie de faire un
rôle constructif en examinant les questions comme l'aide
financière aux étudiants.
En général, je reconnais la nécessité de
l'augmentation des frais de scolarité universitaire, gelés depuis
vingt ans. J'ai lu les dépositions des syndicats des étudiants et
des autres groupes qui essaient de maintenir, même réduire, les
frais, mais j'ai lu également les autres statistiques. Les
universités du Québec perdent en chemin entre la moitié et
les deux tiers des étudiants inscrits; 40 % des jeunes ne terminent pas
leur collégial.
De plus, les étudiants doivent "se concerner" pas seulement avec
les frais, mais avec le transport, la nourriture, les livres et, au-delà
de tout ça, avec le manque à gagner. En effet, les frais de
scolarité comptent pour moins de 10 % du coût des études.
De plus, les obstacles sociaux, les aptitudes et la motivation culturelle sont
plus importants en déterminant la fréquentation et le
succès universitaires.
Je devrais ajouter que les pratiques au collégial sont
importantes aussi. Par exemple, après deux mois, chaque semestre, les
étudiants peuvent signer un formulaire d'abandon de cours. Ils
évitent ainsi la mention d'un échec sur leur bulletin et aussi
toute forme de pénalité financière au moment où ils
voudront reprendre. La pratique voulait permettre à l'étudiant de
travailler à son rythme mais, en effet, elle introduit la
démission devant la difficulté, et les étudiants
abandonnent quand même.
I would like to conclude by a brief comment in English. For historic
reasons, there are some differences in the level of participation of anglophone
and francophone students at the university level, and in degree of success. But
most of the really important problems of post-secondary education are much the
same for both groups, and are problems which are found throughout the Canadian
and American university systems. They are only partially demographic and
financial problems, although these tend to preoccupy us. What politicians,
journalists, educational administrators and other public figures involved in
education need to realize is that many of them arise precisely from our weak
submission to pressure groups and vague aspirations, and our past unwillingness
to confront the failures that have resulted from educational policies like the
one I have just described. If we really want to improve education for everyone
in Québec, we must admit that the most valuable education is the most
difficult and demanding one. And if it is to be provided, we must choose the
policies that will support hard work and hard thought.
Je vous remercie, Mme la Présidente.
Auditions
Conférence des recteurs et des principaux des
universités du Québec
La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. le
député de Jacques-Cartier. Après les différents
temps de parole accordés au gouvernement, à l'Opposition et au
parti indépendant, j'aimerais inviter maintenant la Conférence
des recteurs et des principaux des universités du Québec à
prendre place. Il y a M. Patrick Kenniff, président et recteur de
l'Université Concordia. Si vous voulez vous avancer, s'il vous
plaît, et prendre place au centre. Mme Claire McNicoll, directrice
générale; M. René Simard, président des affaires
académiques et vice-recteur à l'Université de
Montréal; M. Yves Therrien, de l'Université de Montréal,
et M. Roger Côté, de l'Université Concordia. Bonjour et
bienvenue à la commission de l'éducation.
Laissez-moi vous rappeler le temps alloué pour la période
de présentation et la période d'échanges, donc, 20 minutes
pour la présentation de votre mémoire et 40 minutes pour les
échanges entre les différents membres de la commission
parlementaire et vous-mêmes. Alors, vous pouvez y aller. Vous avez un
porte-parole, je crois. (12 heures)
M. Kenniff (Patrick): Merci, Mme la Présidente. Vous
m'avez épargné de faire la présentation de la
délégation. Tout de suite, à ma gauche, M. Simard;
à sa gauche, M. Therrien; Mme McNicoll, à côté,
à ma droite; et M. Côté.
Je pensais qu'il serait plus utile, Mme la Présidente, au lieu de
vous faire une lecture du mémoire que vous avez déjà entre
les mains, de le considérer comme versé au dossier pour fins de
discussion et de vous faire peut-être quelques commentaires en marge de
ce mémoire, et également peut-être quelques commentaires
que nous inspirent les remarques que nous avons entendues ce matin.
Je pense que vous ne serez pas surpris d'apprendre que les
universités se présentent devant cette commission, ce matin, dans
le contexte où, depuis plusieurs années, nous avons clairement
parlé à la population du Québec du problème de
sous-financement des universités. Nous avons entendu, ce matin, dire que
nous en avions parlé à satiété. Mais je pense que
nous n'en avons pas parlé suffisamment, puisque les écarts qui
séparent les universités du Québec des autres
universités canadiennes ne sont pas encore comblés. Le ministre
de l'Enseignement supérieur et de la Science - on ne parlera pas
nécessairement du chiffre précis - avait reconnu cet écart
autour du montant de 189 000 000 $. Le premier ministre du Québec, il y
a exactement un an, faisait état de la demande raisonnable de combler un
écart de 150 000 000 $. Peu importe le chiffre que nous choisissons et
l'année de référence, je pense qu'il faut
reconnaître que le niveau relatif de sous-financement de l'ensemble des
universités québécoises se situe à un niveau quand
même très élevé.
Un premier pas. Comme vous le savez, tout long voyage, comme le dit le
proverbe chinois, commence par un pas. Et le premier pas dans la
voie du comblement de cet écart a été
réalisé l'an dernier avec un ajout, comme l'a dit le ministre
avec exactitude dans ses commentaires, ce matin, de 55 000 000 $ dans la base
des universités. Mais il reconnaît lui-même, comme nous en
avons fait le calcul, que ces 55 000 000 $ ne représentent finalement
que 21 000 000 $ d'argent neuf et qu'il y a quand même un écart
à combler entre ces 21 000 000 $ et le seuil minimal de 150 000 000 $
dont nous avons parlé.
La décision du gouvernement, prise en décembre dernier,
d'autoriser le dégel des frais de scolarité après 20 ans
de gel, constitue un autre pas dans la voie d'une solution au problème
des universités, ne constitue pas la totalité du voyage, comme le
prétendent certains, mais constitue quand même un pas important,
un pas qui devrait rapporter aux universités le montant de 41 000 000 $
nets au cours de la première année, c'est-à-dire en
1990-1991 et 83 000 000 $ cumulatifs, à la fin de la deuxième
année, en 1991-1992. Je pense qu'on doit reconnaître, à ce
moment-là, qu'il demeurera, même après les deux
années d'augmentation des frais de scolarité, un écart
à combler, que l'on peut chiffrer au niveau minimal à 50 000 000
$. Nous avons l'espoir, et nous maintenons la demande que la Conférence
des recteurs fait depuis plusieurs années, que l'écart soit
comblé au complet. Comme il n'y a que deux sources de financement pour
le fonctionnement des universités, à l'heure actuelle, à
savoir les subventions gouvernementales et les frais de scolarité, il me
semble raisonnable d'espérer que le gouvernement fasse le pas final vers
le comblement complet de l'écart.
Donc, je voulais quand même rappeler aux membres de la commission
cette problématique d'entrée en matière. Je rappelle
également que la décision de la Conférence des recteurs et
des principaux des universités du Québec d'appuyer la
décision du gouvernement de dégeler les frais de scolarité
était assortie de deux conditions. La première, c'était
qu'il y ait une amélioration du régime des prêts et bourses
qui soit suffisante pour compenser cette augmentation des frais de
scolarité et ainsi faire en sorte que les étudiants et les
étudiantes qui n'étaient pas en mesure de payer l'augmentation
des frais de scolarité ne subissent pas un tort. La deuxième
condition, c'était que le produit net de cette augmentation
bénéficie aux universités, c'est-à-dire que
l'augmentation ne soit pas compensée par une diminution correspondante,
totale ou partielle, des subventions gouvernementales. Je pense qu'il est
très important de rappeler ces deux conditions, au lendemain d'un budget
fédéral qui annonçait une coupure de 2 500 000 000 $ au
chapitre des programmes établis, c'est-à-dire les programmes de
santé et d'enseignement postsecondaire, qui comprend à la fois le
collégial et le niveau universitaire.
Quant à nous, nous espérons que le ministre des Finances
du Québec, que le ministre de l'Enseignement supérieur et de la
Science et leurs collègues du gouvernement ne décideront pas de
refiler aux universités cette compression, de la même
manière que le gouvernement fédéral a refilé ses
compressions, entre guillemets, au gouvernement des provinces. Alors,
là-dessus, c'est le rappel de la position de la Conférence des
recteurs en ce qui a trait à l'augmentation des frais de
scolarité.
Il y en a beaucoup qui a été dit ici, ce matin, il y en a
beaucoup qui s'est dit à l'extérieur de cette chambre sur la
question de l'impact des mesures annoncées sur l'accessibilité
à l'université. Je pense que c'est une vérité
acceptée par tous, que de dire que nous souscrivons à
l'accessibilité à l'université. Nous avons
travaillé, depuis vingt ans, à faire en sorte que
l'université soit davantage accessible aux jeunes et aux moins jeunes,
de plus en plus. Nous ne dérogeons pas à cet énoncé
de principe que nous acceptons toujours.
Évidemment, l'accessibilité, c'est pour ceux et celles qui
ont la capacité et le désir de faire des études
supérieures et ce n'est pas, évidemment, tout le monde. On
constate, à l'heure actuelle, des chiffres qui ont été
cités ici, ce matin, qu'il y a effectivement un retard qui existe
toujours par rapport à la moyenne canadienne, quant au taux de
fréquentation de l'université de la part de la population du
Québec en général et de la population francophone en
particulier. Donc, nous avons encore des pas à franchir.
Je pense que la question qu'on doit se poser, c'est: Où sont
véritablement les problèmes aujourd'hui, en 1990,
vis-à-vis de l'accessibilité à l'université?
Là-dessus, on peut constater qu'à l'heure actuelle, de 100 jeunes
de 6 ans qui commencent au primaire, il n'y en a que 19 qui,
éventuellement, accèdent à l'université, 17 qui
viennent du programme général au collège et 2 des
programmes professionnels. Donc, cela signifie que 81 jeunes abandonnent avant
d'arriver au niveau universitaire, qui est le premier niveau où ils
doivent rencontrer, évidemment, des frais de scolarité. Nous
avons à nous interroger largement sur les facteurs - nous croyons
largement au niveau de la motivation - qui font en sorte que des jeunes
abandonnent après leurs études secondaires ou au cours de leurs
études collégiales.
Les vraies barrières à l'accessibilité, nous
prétendons, ne sont pas financières, bien qu'il y ait une partie
de la problématique qui est du côté financier, mais que ces
barrières sont davantage au niveau de la motivation et se constatent
dans tous les pays, que les frais de scolarité soient
élevés, comme dans le cas des États-Unis ou dans certaines
autres provinces canadiennes, ou que ce soit dans des pays où les frais
de scolarité sont très bas, voire même inexistants.
D'ailleurs, des chiffres ont été cités Ici, ce matin,
notamment par le ministre, à
l'effet que dans des pays où il n'y a pas de frais de
scolarité, le taux de fréquentation de l'université est
inférieur à des pays où les frais sont très
élevés, tels les États-Unis. Donc, il y a
énormément de travail à faire de ce
côté-là. Mais un constat qu'on peut faire, c'est que ce
n'est pas essentiellement au niveau des finances ou des frais afférents
aux études universitaires que se trouvent les véritables
barrières à l'accès à l'enseignement
supérieur.
La problématique de l'accessibilité, donc, c'en est une
que nous estimons très importante et, pour peu que l'aspect financier
compte dans cette équation, le régime des prêts et bourses
constitue véritablement une assise essentielle de la politique
d'accessibilité. C'est un régime qui permet de pallier les
éléments financiers qui empêchent l'accès à
l'université. Ce régime n'a pas eu de révision majeure
depuis 1974, et c'est dans cette optique-là, à la suite
d'énormément de discussions, que le gouvernement a publié
un document d'orientation, en avril dernier, document qui a donné lieu
au dépôt du projet de loi 25, en décembre de l'an
dernier.
Lorsqu'on lit le document d'orientation, en avril 1989, c'est important
de constater que tous les chiffres qui y sont cités, notamment quant
à l'aide additionnelle qui sera fournie aux étudiants, qui est
chiffrée autour de 50 000 000 $, que cette aide additionnelle, c'est en
dehors de la décision qui est venue par la suite de permettre
l'augmentation des frais de scolarité. Donc, les modifications qui sont
proposées au régime des prêts et bourses en dehors de
l'augmentation des frais de scolarité devraient procurer aux
bénéficiaires un montant additionnel de 50 000 000 $.
De plus, le ministre a annoncé en décembre dernier que 20
% du produit brut de l'augmentation des frais de scolarité, soit dans la
première année un montant d'environ 11 000 000 $, seraient
réservés pour combler l'écart résultant de
l'augmentation des frais de scolarité. Donc, il faut envisager un autre
11 000 000 $ au-delà des 50 000 000 $ déjà prévus.
Et c'est à la lumière de ces chiffres qu'il faut lire le document
d'orientations gouvernementales d'avril 1989.
Donc, si J'en viens maintenant au régime lui-même, je pense
qu'on doit exprimer d'abord notre accord avec le constat qu'a fait le Conseil
des universités dans son avis 87.12, lorsqu'il dit que le régime
actuel est avantageux ou tout à fait comparable aux autres
régimes d'aide financière canadiens et américains. Je
pense qu'on part déjà d'un régime qui procurait aux
étudiants et aux étudiantes du niveau postsecondaire au
Québec des avantages tout à fait comparables aux autres
régimes en vigueur sur notre continent.
Cependant, compte tenu du rattrapage que nous avons à faire,
compte tenu également du glissement de certains des critères
depuis la dernière réforme majeure, il était urgent d'ap-
porter des correctifs et ces correctifs-là, effectivement, pour une
bonne partie, ont été apportés par les propositions que
nous avons devant nous dans le projet de loi 25.
Évidemment, nous devons dire qu'il est extrêmement
difficile pour nous de porter un jugement précis sur le projet de loi
étant donné, comme l'a constaté lui-même le ministre
dans ses remarques, que nous avons à étudier un projet de loi
dépourvu de la réglementation qui l'accompagnera
éventuellement. Et c'est dans cette réglementation qu'on trouvera
certaines des normes précises qui nous permettront de voir un peu
comment, effectivement, cette réforme va s'opérationnallser au
plan de l'application auprès de chaque étudiant ou chaque
bénéficiaire. Nous comprenons les raisons pourquoi la
réglementation n'est pas disponible, mais le ministre semble laisser une
porte ouverte. Et si c'est possible, effectivement, qu'un projet de
réglementation soit disponible au moment de l'étude en commission
article par article, ça facilitera beaucoup, et pour les membres de la
commission et pour nous qui nous intéressons beaucoup à cette
réforme, notre intelligence de l'envergure de la réforme. Donc,
là-dessus, je pense que nous exprimons formellement le souhait que cette
réglementation soit éventuellement disponible.
Nous avons également évoqué dans notre
mémoire notre accord avec l'ouverture que fait le projet de loi à
une aide nouvelle à apporter aux étudiants à temps
partiel. C'est un phénomène effectivement qui est très
répandu au Québec. Nous ne voulons pas - et c'est la sourdine que
nous mettons à cet appui, à cet aspect du projet de loi - que
cette aide additionnelle constitue un encouragement à ce que davantage
d'étudiants fassent des études à temps partiel et se
dirigent notamment vers les programmes courts. Cependant, je pense que le
principe d'aider les étudiants à temps partiel est un principe
auquel nous pouvons souscrire. Évidemment, le ministre n'a pas
l'intention de mettre en vigueur immédiatement cette partie du projet de
loi. Encore une fois, il faudra attendre pour voir à quel moment
ça entrera en vigueur. Souhaitons que ce soit quand même dans des
délais pas trop longs.
Nous réaffirmons également, au plan des principes, notre
conviction que les études à temps complet,
réalisées dans les délais normaux, constituent la
meilleure voie d'accès à un premier diplôme universitaire
et à un marché du travail plus intéressant ou, le cas
échéant, au cycle supérieur universitaire.
Nous sommes d'accord évidemment aussi avec la proposition de
créer un comité des demandes dérogatoires parce que nous
estimons qu'il y a là une mesure de flexibilité qui est
nécessaire dans un projet de loi aussi complexe et dans un régime
aussi complexe pour pallier les cas imprévus qui peuvent survenir. (12 h
15)
Je n'ai pas l'intention, Mme la Présidente, de passer en revue en
détail les différentes recommandations que nous avons faites,
mais tout simplement de souligner aux membres de la commission que lorsque l'on
réfère à des recommandations numérotées, ce
sont les recommandations avec les numéros qui les accompagnaient dans le
document d'orientation gouvernementale déposé en avril 1989. Nous
avons fait ces commentaires sur ces recommandations-là parce que nous
avons tenu pour acquis que, même si certains de ces aspects-là ne
se trouvaient pas dans le projet de loi, c'était l'Intention du ministre
de les faire figurer dans la réglementation et donc, que c'était
tout à fait opportun pour nous de faire des commentaires sur des aspects
un peu plus techniques de l'application éventuelle du nouveau
régime.
Je voudrais dire un mot, en guise de conclusion à mes remarques
introductives, sur la question de la compensation qui sera prévue au
régime pour l'augmentation des frais de scolarité. Ce montant,
comme je l'ai signalé tout à l'heure, serait de l'ordre de 11 000
000 $. Nous exprimons le souhait, dans la conclusion de notre mémoire,
que cette ponction de 11 000 000 $ dans le montant qui, normalement, aurait
dû revenir aux universités, soit clairement identifiée et
chiffrée dans les documents qui, éventuellement, expliqueront le
régime des prêts et bourses. Comme c'est vraiment une ponction
dans les ressources des universités pour payer l'augmentation des frais
de scolarité aux étudiants qui en ont besoin, on ne voudrait pas
que ce soit fondu dans le montant global de 50 000 000 $ qui est prévu
pour l'amélioration du régime en général afin que
et les étudiants et les administrations universitaires puissent suivre
l'évolution de ce montant-là directement des coffres du
gouvernement vers les poches des étudiants.
Je pense que l'ensemble de cette réforme donc, si j'ai une
conclusion à tirer au nom de la Conférence des recteurs, est
bienvenue pour nous. Cette réforme est attendue depuis longtemps et,
dans la mesure où ça va bénéficier à un
nombre accru d'étudiants et favoriser leur accès à
l'université, évidemment, nous ne pouvons que nous réjouir
du fait qu'elle soit enfin devant l'Assemblée nationale.
Je voudrais peut-être, si vous me le permettez, je crois que j'ai
encore quelques minutes... Il y a un certain nombre de remarques qui ont
été évoquées par M. le député
d'Abitibi-Ouest dans ses commentaires et qui, je pense, méritent
d'être soulevées en début de discussion. C'est clair que -
je suis tout à fait d'accord avec lui, comme je pense le ministre le
serait -que les universités sont sous-financées à l'heure
actuelle. Je suis tout à fait d'accord avec lui que c'est sûr que,
avec l'évolution de la situation dans notre société,
l'endettement des étudiants peut augmenter. Il a cité le chiffre
de 100 000 000 $. Il faudrait peut-être ramener ça à sa
proportion congrue et souligner que si le chiffre de 100 000 000 $ est exact,
ça représente à peu près 2000 $ par étudiant
bénéficiaire du régime. Selon les études que nous
avons faites nous-mêmes, qui concordent à peu près
exactement avec les études faites par le ministère, à
l'heure actuelle, le niveau d'endettement des étudiants, à la fin
de leurs études de premier cycle, se chiffrerait entre 6200 $ et 6800 $
par étudiant, qui se trouve encore très en deçà du
niveau d'endettement moyen qui se trouve dans les autres provinces
canadiennes.
On a également parlé du fait que c'est une augmentation
des frais de scolarité de 130 %. Effectivement, en termes de
pourcentage, ça paraît énorme, mais il faut se rappeler
également que les frais de scolarité à l'heure actuelle ne
sont que le tiers de la moyenne canadienne et, une fois que les deux
augmentations successives seront en vigueur, elles seront encore les plus
basses au Canada et, en termes réels, exactement la moitié de ce
qu'elles étaient lorsque le gel a été imposé en
1968. Je pense qu'il faut ramener tout ça à sa proportion
congrue.
J'ai cru savoir qu'à un moment donné le
député d'Abitibi-Ouest a invoqué la question de l'aide des
entreprises aux universités et a souligné le fait que cette aide,
essentiellement, va à deux universités au Québec,
c'est-à-dire l'Université McGill et l'Université
Concordia. Je pense que, pour paraphraser ce qui a été dit par
quelqu'un à quelqu'un d'autre dans le contexte politique canadien,
à l'heure actuelle, je pense que le député aurait avantage
à visiter les universités, à voir ce qui s'y passe, et
à voir qu'effectivement II y a des campagnes de souscription
extrêmement réussies qui ont été faites dans toutes
les universités: l'Université Laval, 40 000 000 $,
l'Université du Québec à Montréal, 12 000 000 $,
etc. Et puis, s'il pense que nous avons un accès
privilégié à toutes les entreprises du Québec, je
peux faire une parenthèse, il est Invité à venir rendre
visite à mon établissement universitaire, je pourrais lui en
montrer.
Je pense, Mme la Présidente, que j'en aurais bien long à
dire aussi là-dessus et sur d'autres questions qui ont été
soulevées. Mais je pense que, globalement, ça complète les
remarques introductives et sûrement que moi et mes collègues qui
sont ici, ce matin, nous serons très heureux de répondre aux
questions ou aux commentaires que pourraient soulever les membres de la
commission. Je vous remercie, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Hovlngton): Merci, M. Kenntff. Alors,
nous sommes rendus à la période des échanges entre les
invités et les membres de la commission parlementaire. Alors, |e vais
reconnaître, ici, M. le ministre. Est-ce que vous avez quelques
interventions à faire?
M. Ryan: Oui, Mme la Présidente. Ne
serait-ce que pour souligner le plaisir que j'éprouve à
retrouver les dirigeants de la Conférence des recteurs et des principaux
des universités du Québec, je vais sûrement me
prévaloir du droit de parole que vous m'accordez. Je veux profiter de
l'occasion pour signaler la collaboration étroite qui existe entre la
Conférence des recteurs et le ministère de l'Enseignement
supérieur et de la Science. Les questions concernant l'enseignement
supérieur sont l'objet d'échanges constants, autant au niveau des
orientations qu'au niveau des questions plus techniques. Je crois que, dans
l'ensemble, ces échanges sont imprégnés d'un esprit de
respect mutuel et de collaboration qui est du meilleur aloi. Ça
n'empêche pas que des problèmes existent et que nous ne puissions
pas tous les régler dans l'immédiat. Je pense que, de part et
d'autre, il y a une recherche d'excellence et de vérité qui est
de bon aloi.
A propos du niveau de financement, c'est la première question qui
a été soulevée dans l'exposé du président de
la Conférence des recteurs. Il rejoignait ainsi des propos tenus plus
tôt par le porte-parole de l'Opposition officielle. Je pense que ce n'est
pas mauvais de clarifier les chiffres là, une fois pour toutes.
J'entendais le député d'Abitibi-Ouest tantôt. Je le voyais
déchirer ses vêtements, presque, devant ce qu'il appelle le niveau
insuffisant de l'implication gouvernementale dans le financement des
universités. Il a pourtant fait partie pendant de nombreuses
années, d'un gouvernement, dont l'une des spécialités,
l'une des marques de commerce, ça a été de réduire
dramatiquement - là, le mot "dramatiquement" avait sa raison
d'être - les subventions de fonctionnement versées aux
universités. Pendant la période de 1979 à 1985, selon mes
données, les subventions versées aux étudiants, par
étudiant équivalence temps complet, en dollars constants, ont
baissé de 23,8 %. Sous le gouvernement actuel, pendant ses quatre
premières années, elles ont augmenté en dollars constants
de 9,2 %. Je pense que nous en convenons tous, de ça.
C'est là que les 55 000 000 $ trouvent leur explication. Et comme
l'a dit très justement M. Kenniff tantôt, les deux chiffres sont
vrais. Celui de 55 000 000 $ et celui de 21 000 000 $. Nous n'avons jamais
nié ça. Ce qui est arrivé, c'est que, quand nous avons
annoncé les 55 000 000 $, nous avons dit: Là, ce qui avait
été accordé sous forme de crédits transitoires non
garantis au point de vue récurrence - mot qui nous est, hélas!
très familier - là nous le rendons récurrent. En plus, le
gouvernement a ajouté cette somme de 21 000 000 $ additionnels, qui
donne en tout 55 000 000 $. Je pense qu'on s'entend sur les chiffres. Il n'y a
plus de discussion maintenant, mais c'est très important que les bases
de financement des universités aient été enrichies de
manière récurrente d'une somme de 55 000 000 $ à
l'occasion du dernier budget de 1989-1990, alors que, sous le gouvernement
précédent, ça avait été une descente aux
enfers dont nous portons encore les conséquences, d'ailleurs.
Cela étant dit, je pense que c'est clair. Je rappelle ce que je
disais dans mon exposé liminaire tantôt. Le gouvernement a fait
son possible. Il ne considère pas qu'il a fait tout ce qui doit
être fait, mais il n'a pas les moyens, dans l'immédiat, je parie
de l'année budgétaire en cours, de faire davantage. Il l'a dit
aussi franchement qu'on puisse le faire. Le gouvernement déplore
énormément ce qui est arrivé à Ottawa hier.
Là-dessus, j'aimerais peut-être que le président de la
Conférence des recteurs nous donne peut-être un peu plus la
réaction de la Conférence sur les effets de la mesure
annoncée par M. Michael Wilson dans son budget d'hier soir, dans lequel
il a dit que les paiements de transferts aux provinces, au titre des programmes
établis, seraient gelés pour les deux prochaines années.
Je ne sais pas si vous avez eu le temps de faire des calculs au sujet de ce que
ça représente possiblement pour tout l'équilibre du
système de financement universitaire au Québec. J'ai
malheureusement dû m'absenter de la réunion du cabinet ce matin
où mes collègues ont sans doute échangé
là-dessus. J'aimerais connaître votre réaction sur cette
façon qu'a le gouvernement fédéral d'approcher des
problèmes relatifs à son déficit et à
l'équilibre des finances publiques au Canada.
M. Kenniff: M. le ministre, Mme la Présidente, si vous me
le permettez-La Présidente (Mme Hovington): Allez-y.
M. Kenniff: ...j'ai donné ma réaction à la
porte de cette chambre ce matin. Je vais la redonner ici. Je pense que c'est
extrêmement regrettable qu'on trouve que l'essentiel des compressions
annoncées par le ministre des Finances du Canada hier consiste en une
réduction des paiements de transferts aux provinces. C'est une sorte
d'exportation des problèmes du gouvernement central vers les
gouvernements des provinces. Je pense que c'est normal pour nous de
déplorer toute exportation d'un problème particulier vers
quelqu'un d'autre. Donc, que les provinces soient obligées d'assumer
cette situation, ça me semble déplorable.
M. le ministre, je n'ai malheureusement pas encore eu la chance de faire
une analyse détaillée des documents budgétaires mais on
semble dire qu'il s'agit d'une réduction des paiements de transferts
prévus pour l'an prochain de l'ordre de 2 500 000 000 $ pour l'ensemble
du Canada, dont la part du Québec serait de l'ordre de 220 000 000 $ au
chapitre du financement des programmes établis qui, en vertu de la loi
fédérale, sont les programmes de santé et d'enseignement
postsecondaire qui comprend au
Québec, évidemment, le niveau collégial et le
niveau universitaire.
Ces 220 000 000 $ représentent quand môme une compression
importante. Vous me demandez quel est l'impact sur le réseau
universitaire du Québec; je dois vous dire que pour l'instant, il n'y en
a pas. L'impact viendra au moment où le ministre des Finances annoncera
son budget au cours de ce printemps. C'est pour cette raison, M. le ministre,
que j'ai espéré. Je suis convaincu que vous allez plaider cette
cause avec vigueur, comme vous avez plaidé plusieurs causes en faveur
des universités dans le passé auprès de votre
collègue, afin qu'on trouve une formule qui nous permette
d'éviter que les universités voient leur subvention
gouvernementale réduite.
C'est tout simplement une inquiétude face à ce budget
fédéral que nous avons. Je pense que ça doit être
une inquiétude partagée par vous et vos collègues à
l'heure actuelle.
M. Ryan: Je pense que vous comprenez facilement que si on fait un
calcul préliminaire encore une fois, on estime que les retombées
pour le Québec en 1990-1991 seront de l'ordre d'à peu près
220 000 000 $. Vous savez que le partage entre santé et enseignement
postsecondaire est à peu près 70 %-30 %; 30 % de 220 000 000 $,
ça veut dire 66 000 000 $. AJors, on annule d'un seul coup tous les
effets de la hausse des frais de scolarité; même on va
au-delà de ça. Si on pense en revenus concrets dont dispose la
société québécoise pour le financement des
universités, je mentionne juste ce fait-là, je pense que nous
devrons prendre nos responsabilités comme gouvernement.
Évidemment, nous allons les prendre. Et je peux vous assurer que moi, je
vais essayer de défendre de toute mon énergie les
intérêts les plus élevés de l'enseignement
postsecondaire, en particulier de nos universités mais je déplore
cette décision qui a été annoncée hier. C'est une
source de déséquilibre dans les finances publiques qui survient
à un très très mauvais moment.
J'en viens, brièvement, à vos commentaires au sujet du
projet de loi 25. Dans l'ensemble, j'apprécie - je pense bien que je
n'exagère pas en interprétant votre mémoire comme un
mémoire qui est favorable, de manière générale, aux
modifications que définit le projet de loi. Je suis d'accord avec vous
que si nous disposions dès maintenant du règlement, ce serait
préférable, mais étant donné les raisons que j'ai
indiquées dans mon exposé de tantôt, ce n'est pas possible.
Nous le ferons le plus tôt possible, cependant, soyez-en assurés.
(12 h 30)
Je voulais vous dire que les propositions particulières contenues
dans votre mémoire, au sujet des éléments concrets du
projet de réforme, sont des propositions qui seront
étudiées avec beaucoup d'attention. Il y en a certaines qui ont
déjà leurs réponses dans le projet. Vous dites: II
faudrait indexer les paliers de la table de contribution de manière,
peut-être, à éviter que les bénéfices trop
grands surviennent pour des foyers qui seraient plus riches, par rapport
à d'autres qui seraient moins fortunés. C'est en haut de la page
5 de votre mémoire. Vous donnez un exemple qui est préoccupant.
Je me suis justement posé la même question en relisant toute cette
documentation au cours de la dernière semaine. Je me suis dit: II y aura
peut-être des indications qui nous seront fournies de ce
côté-là, qui nous inviteront peut-être à
examiner d'encore plus près l'équilibre qui est produit. Je ne
sais pas si vous pourriez donner quelques explications là-dessus, sur ce
problème que vous avez identifié.
La Présidente (Mme Hovington): M. Kenniff
M. Kenniff: On peut demander à M. Côté s'il a
des commentaires à apporter sur ce point particulier.
La Présidente (Mme Hovington): M. Côté, de
l'Université Concordia, vous avez la parole.
M. Côté (Roger): C'est ça. C'est simplement
l'observation des contributions qui ont été recalculées
suite à la nouvelle façon de calculer les contributions
parentales. On s'aperçoit que l'écart n'est pas le même
à travers une différente échelle, une différente
ventilation des revenus disponibles. Cet écart était de 16, 6 %
pour un seuil de revenu, et de 32 % pour un seuil plus élevé.
C'est simplement ce qu'on voulait souligner.
M. Ryan: O. K. Je prends bonne note de cette observation. Je
pense que c'est un point sur lequel nous allons examiner notre projet de
très près pour voir si des ajustements pourraient être
envisagés. Un autre point. Vous dites: L'exemption, c'est-à-dire
le premier seuil de 0 à 1000 $. vous auriez intérêt
à porter ça de 0 à 2500 $. J'ajoute juste une chose ici.
C'est qu'avec les exemptions plus généreuses que nous accordons
pour les enfants, nous apportons un élément de réponse
important à cette proposition-là. Si nous allions ajouter un
changement dans la définition de ce seuil, je pense que les implications
financières seraient considérables et risqueraient de briser
l'équilibre général de ta réforme. Je voudrais que
vous examiniez ça, peut-être tenir compte de l'exemption plus
élevée accordée pour les enfants. Si vous avez des
remarques additionnelles à nous adresser, on les étudiera avec
beaucoup d'intérêt.
Mon collègue, le député de Verdun, aimerait
beaucoup prendre la parole parce que, comme tout le monde le sait, le
député de Verdun a été professeur à
l'Université de Montréal; iI l'est encore d'ailleurs, II l'est
depuis de nombreuses années. Il a fait partie du conseil
d'administra-
tion, môme de l'exécutif de l'université. Comme
toute personne qui se respecte, avant d'être dans l'administration, il a
môme été dirigeant syndical.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Ryan: Je pense bien que... Ha, ha, hal Mme la
Présidente, je suis prêt à...
La Présidente (Mme Hovington): À céder un
petit peu de votre temps...
M. Ryan: Oui, volontiers.
La Présidente (Mme Hovington): ...au profit du
député de Verdun. M. le député de Verdun, on vous
écoute.
M. Gautrin: Merci, Mme la Présidente. Rapidement, j'aurais
deux questions à vous poser. La première, dans l'ensemble des
budgets réguliers des universités, quel montant d'argent vous
accordez, sous forme de bourses, à l'aide directe aux étudiants?
C'est-à-dire, à moins que je ne me trompe, qu'il existe, à
l'intérieur des budgets de chaque université, une forme d'aide
directe aux étudiants sous forme de bourses au premier et au
deuxième cycle, éventuellement, et comme on étudie
actuellement un projet de loi sur l'aide financière aux
étudiants, quel est le montant que vous accordez dans chacune des
universités à l'aide directe aux étudiants?
M. Kenniff: Mme la Présidente, si vous le permettez, comme
M. le député est professeur à l'Université de
Montréal, je demanderais à M. Simard de répondre à
la question.
La Présidente (Mme Hovington): M. Simard, vous avez la
parole.
M. Gautrin: Le pire, c'est que je connais la réponse.
M. Simard (René): Merci, Mme la Présidente. Je
pense que la situation que soulève M. Gautrin, ou le
député de Verdun maintenant, varie considérablement d'une
université à l'autre. Il est certain que les universités
qui ont des fonds de dotation importants consacrent une partie de leur fonds de
dotation à l'octroi de bourses au deuxième et au troisième
cycle, et aussi à l'octroi de bourses de premier cycle, pour attirer les
meilleurs étudiants en leur sein. C'est tout à fait normal et de
bon aloi. D'autres universités sont moins fortunées de ce
côté-là et ont commencé, c'est le cas de
l'Université de Montréal, à utiliser d'abord leur fonds de
dotation pour donner des bourses au premier cycle et aux deuxième et
troisième cycles. Les fonds de dotation étant
épuisés, parce qu'elles reconnaissaient l'importance de l'octroi
de ces bourses, elles ont fait passer les coûts au budget
régulier. Ce sont des sommes tout à fait minimes comparativement
au budget des universités. Je pense que c'est le cas dans les autres
universités, à l'Université Laval et à
l'Université du Québec, j'ai l'Impression.
La Présidente (Mme Hovington): M. Kenniff?
M. Kenniff: Peut-être juste une précision. Il y a
aussi une aide qui est apportée sous forme d'engagement
d'étudiants de deuxième et troisième cycles comme
auxiliaires de recherche et d'enseignement au chapitre des budgets, parfois
dans certains établissements, prévus pour les chargés de
cours, parce que ce sont des étudiants de deuxième et
troisième cycles qui agissent comme chargés de cours; c'est une
forme additionnelle d'aide qui est apportée par cette voie. Quelle est
la proportion? Je ne pourrais donner de chiffres précis au
député de Verdun, mais ce n'est pas une proportion significative
des budgets de fonctionnement des universités à l'heure
actuelle.
La Présidente (Mme Hovington): Ça va, M. le
député de Verdun?
M. Gautrin: Deuxième question, Mme la Présidente.
Il y a peu de temps, les universités ont demandé aux
étudiants une contribution supplémentaire, non pas sous forme de
frais de scolarité mais de ce qu'on a appelé "frais
afférents", demandant aux étudiants de participer un peu plus aux
choses qu'ils recevaient de l'université, ce qui a entraîné
quand même dans le budget des étudiants une augmentation, si je
puis dire, de ce qu'ils avaient à payer, pratiquement, à
l'université. Est-ce que, d'après vos connaissances, cela a eu un
effet sur la fréquentation universitaire?
M. Kenniff: Je pense, Mme la Présidente, pour
répondre au député de Verdun, que ça n'a pas eu
d'impact Identifiable sur le niveau de fréquentation universitaire. Les
frais afférents qui ont été autorisés l'ont
été avec un contrôle très serré de la part du
ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science. D'abord,
le maximum a été fixé à 100 $ par année. Ces
frais-là, on devait en faire état à chaque année,
au point de vue des dépenses de l'université qui devaient
être consacrées précisément à produire les
divers documents et matériaux dont bénéficiaient les
étudiants à ce chapitre-là. Dans la plupart des
établissements - je peux prendre le mien à témoin - nous
avons également été tenus, et c'est tout à fait
normal, d'abolir tous les frais que nous imposions, ou qu'un professeur pouvait
imposer dans le cadre d'un cours, pour le matériel de polycopie qu'il
distribuait à ses étudiants. Donc, c'était, ni plus ni
moins, la centralisation et la légalisation de frais que
l'université encourait pour produire ces docu-
merits.
La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. Kenniff.
M. Gautrin: Simplement pour bien comprendre. Si je comprends
bien, l'augmentation de 100 $ de ce que devait contribuer un étudiant
à l'université n'a pas eu d'effet sur la fréquentation des
étudiants. Merci.
La Présidente (Mme Hovington): M. Slmard.
M. Simard: On peut même ajouter que, globalement, dans tout
le réseau universitaire québécois, en 1989, l'année
se solde par une augmentation des clientèles étudiantes.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. Alors, je vais
reconnaître, maintenant, le député d'Abitibi-Ouest,
porte-parole de l'Opposition.
M. Gendron: Oui. Je veux saluer très amicalement M.
Kenniff, ainsi que ses collaborateurs, et lui dire que j'ai pris bonne note de
son agréable et aimable invitation d'aller faire un tour en ville de
temps en temps. Je fais juste lui signaler, cependant, que, quand je regarde le
bulletin de la CREPUQ qu'il a signé, il comprendra peut-être que
je puisse avoir quelques réticences à aller le saluer dans sa
vénérable institution, compte tenu que je suis critique de
l'Opposition officielle. Il commençait le bulletin comme ceci: "II y
avait, dans la victoire que le Parti libéral du Québec a
remportée, le 25 septembre dernier, quelque chose de très
rassurant pour ceux qui ont à diriger des établissements
universitaires. La réaction de M. Bourassa ainsi que celle de M. Ryan
dans son poste de ministre - ainsi de suite - constituent à nos yeux une
garantie implicite de continuité dans les efforts que le gouvernement du
Québec fait depuis 1987-1988, ainsi de suite. " Je pourrais continuer
l'ode au gouvernement libéral et à M. Ryan. C'est votre droit le
plus strict.
Une voix: Lis-le au complet!
Des voix: Au complet! Au complet!
M. Gendron: Vous comprendrez...
La Présidente (Mme Hovington): Vous avez 20 minutes,
là.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Gendron:... que pour un critique de l'Opposition, ça
peut être gênant éventuellement...
La Présidente (Mme Hovington): Vous avez 20 minutes.
M. Gendron:... d'aller vous saluer dans votre institution.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Gendron: Au-delà de cette plaisanterie, je vous
remercie sincèrement, je remercie sincèrement la
Conférence des recteurs d'avoir apporté des éclairages aux
deux questions fondamentales. Je reconnais également que, dans les
commentaires que j'ai faits, vous avez quand môme reconnu que, pour ce
qui est du sous-financement chronique des universités, je pense qu'on
dit la même chose. Je trouve que votre invitation n'était pas si
dure que ça à mon endroit, puisque le ministre de
l'Éducation vous en a fait une "bien pire" en vous disant que vous ne
savez pas compter, au sujet des 21 000 000 $, qui est vraiment de l'argent
neuf, dans 'le dernier budget du gouvernement, alors que M. le ministre de
l'Éducation passe son temps à expliquer qu'une méthode de
comptabilité, d'écriture entre des crédits dits
récurrents par rapport à des crédits non
récurrents, ça donnerait de l'argent neuf. J'ai toujours
pensé que ça ne donne pas de l'argent neuf, une méthode
comptable.
J'ai deux questions avant que ma collègue ne poursuive. La
première question est très simple, M. le recteur, M. Kenniff.
Vous avez dit: Nous, on est d'accord avec le dégel et on est d'accord
essentiellement avec les modifications au régime de prêts et
bourses, mais il y a deux conditions - là, je vous cite: "II faudrait
que l'on s'assure qu'aucun étudiant ne soit empêché de
fréquenter l'université en raison de cette hausse. " Ma question
est très simple: En prenant connaissance de la réforme, est-ce
que vous avez obtenu cette assurance?
La Présidente (Mme Hovington): M. Kenniff.
M. Kenniff: Si vous me permettez de dire d'abord que j'ai compris
tout de suite, quand le député d'Abitibi-Ouest a commencé
son intervention, que c'était une plaisanterie, parce que ma remarque
dans le document de la CREPUQ, c'était tout à fait une remarque
non partisane; elle ne tenait compte que des politiques qui étaient
annoncées et énoncées par le gouvernement et par le
ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science, mais j'ai
beaucoup apprécié la plaisanterie.
La réponse à votre question, c'est: Oui.
M. Gendron: Oui. Deuxième question: Est-ce que vous
croyez, parce que toujours dans ce que vous avez évoqué
tantôt - mon erreur, tantôt, ç'a été
probablement d'associer Concordla et McGill. Mais les informations qu'on a,
nous, c'est que l'Université McGill bénéficie de fonds de
dotation, selon ce qu'on entend dire, qui tourneraient autour de 300 000 000 $.
Donc, ça fait un petit 35 000 000 $ ou 40 000 000 $
d'argent neuf par année. Ma question est très simple:
Est-ce que vous croyez qu'une université qui bénéficie de
35 000 000 $ ou 40 000 000 $ par année - je parle de l'Université
McGIII -est avantagée par rapport aux autres universités?
M. Kenniff: Je pense que toute la communauté universitaire
de Concord ia serait reconnaissante envers vous du fait que vous n'associez pas
l'Université Concordia à l'Université McGIII et je
présume que vice versa. Alors, nous sommes deux établissements
très autonomes et indépendants.
La question des fonds de dotation des universités a toujours
été une question qui a préoccupé, qui
préoccupe toujours les universités et qui préoccupe le
gouvernement. D'ailleurs, le ministre de l'Enseignement supérieur et de
la Science nous en a fait part et compte bien travailler avec nous sur cette
question. Mais ça ne nous préoccupe pas de la façon dont
vous le suggérez dans vos remarques et dans les remarques que vous avez
faites plus tôt, c'est-à-dire que je pense qu'à l'heure
actuelle, toutes les universités constatent qu'il est très
important que nous puissions être en mesure d'augmenter les fonds mis
à notre disposition provenant de sources autres que le gouvernement et
les frais de scolarité.
C'est pour cela, d'ailleurs, que les universités... et je pense
que la seule université au Québec, il y a une dizaine
d'années, qui avait vraiment réussi à recueillir des fonds
importants pour son fonctionnement, pour la dotation de chaires, pour les
bourses aux étudiants, etc., c'était l'Université McGill.
Depuis ce temps-là, je pense que les autres universités, dont la
mienne, dont l'Université de Montréal, l'Université Laval,
l'Université du Québec, l'Université de Sherbrooke, etc.,
ont compris l'Importance et ont procédé à créer des
fondations, à commencer à monter des fonds de dotation. Et s'il y
a une chose qui est claire, à l'heure actuelle, pour l'ensemble des
établissements universitaires du Québec, c'est que nous ne voyons
pas du tout la problématique comme étant une problématique
de prendre des mesures punitives contre les universités qui ont des
fonds de dotation à l'heure actuelle, mais davantage de faire en sorte
que les fonds de dotation de tous les établissements universitaires
augmentent. Donc, l'Université McGill, dans sa longue histoire,
constitue à cet égard, pour l'ensemble des établissements
universitaires du Québec, non pas une crête à couper mais
un modèle à émuler.
M. Gendron: Rapidement, Mme la Présidente, avant de passer
la parole à ma collègue, moi, je ne pensais pas que j'assisterais
à un procès d'intention. Il n'y a pas d'intention dans la
question que j'ai posée. Je vous dis tout simplement: Compte tenu que
McGill est très très largement favorisée par rapport aux
autres universités - et vous le savez parce que je sais l'excellente
connaissance que vous avez du réseau universitaire - croyez-vous qu'il
n'y aurait pas lieu que le gouvernement assume plus de leadership et de
responsabilité dans la redistribution de cet argent qui provient, tout
compte fait, des Québécois? Je comprends mal qu'on pourrait
cautionner que certaines entreprises que je ne nommerai pas, par respect pour
les entreprises, puissent donner 1 000 000 $ et 500 000 $, dans certains cas,
à McGill alors qu'elles vont distribuer 5000 $ ou 6000 $ à
d'autres universités. Sachant que l'État n'assume plus ses
responsabilités, on l'a entendu depuis plusieurs mois et années
dans ce domaine-là, ne croyez-vous pas que ce serait normal, compte tenu
qu'il y a vraiment du favoritisme d'une façon très
exagérée, que des mesures soient prises pour que la
redistribution de cet argent qui provient des Québécois soit plus
équitable? (12 h 45)
La Présidente (Mme Hovington): M. Kenniff.
M. Kenniff: Je pense qu'il faut dire d'abord que si je n'ai pas
répondu de la façon dont le souhaitait le député
d'Abitibi-Ouest à sa question, je le regrette. Je vais essayer
peut-être d'être un peu plus précis sur ce qu'il veut
savoir. C'est évident, à l'heure actuelle, que
l'Université McGill, comme d'autres universités qui ont des fonds
de dotation - c'est très inégal à l'heure actuelle au
Québec - mais que les fonds de dotation procurent aux universités
qui les ont certains avantages. Mais ces avantages-là n'existent pas
nécessairement au niveau du fonctionnement de l'université, parce
que ce sont des fonds qui peuvent aller pour de la recherche, pour doter des
chaires en médecine, par exemple, et qui n'émargent pas au budget
de fonctionnement des universités.
Alors, la réponse à votre question, en ce qui touche les
budgets de fonctionnement et le mode de calcul qui a été
pratiqué par tous les gouvernements à l'égard des budgets
de fonctionnement des universités, c'est qu'on ne tient pas compte de
ces fonds de dotation. Ça n'entre pas dans le fonctionnement. On peut
avoir eu, comme c'est le cas de l'Université McGill, des contributions
pour la construction de pavillons, mais manquer de fonds, effectivement, pour
assurer leur fonctionnement. Et comme la formule de financement des
universités a toujours été une formule de financement des
dépenses nettes, il n'y a vraiment aucun intérêt d'associer
ces contributions au fonctionnement de l'université; ça ne sert
qu'à réduire la contribution gouvernementale.
Par ailleurs, comme je vous ai dit, ma réponse - je pense que
c'est très important - c'est que les fonds de dotation apportent une
contribution importante aux universités et c'est, je pense, l'aspiration
légitime de toutes les
universités du Québec de faire en sorte que ces fonds de
dotation soient augmentés. Mais que le gouvernement exerce un rôle
de redistribution - je ne sais pas par quel moyen vous l'envisagez - je pense
que c'est totalement irréaliste. Comment voulez-vous que je demande aux
diplômés - parce que ce ne sont pas juste les entreprises, ce sont
les diplômés, de plus en plus, ce seront les diplômés
des établissements à qui on va demander de contribuer au
financement de l'institution - comment peut-on demander, par exemple, aux
diplômés de l'Université de Montréal de contribuer
à un fonds général qui sera redistribué à
l'Université de Sherbrooke? Je pense que là, ce sont des
idées, c'est là un peu le "scheme" qu'on envisage, qui serait
tout à fait irréaliste.
M. Gendron: ...les entreprises.
M. Kenniff: Alors, je pense qu'il faut laisser à chaque
établissement...
Une voix: Partez des entreprises.
M. Kenniff: ...l'autonomie de faire la demande de fonds
auprès de ses diplômés, de faire la demande de fonds
auprès des entreprises et c'est tout.
M. Gendron: ...des entreprises, Mme la Présidente, et non
pas des diplômés, parce que la part des diplômés est
intéressante. Vous le dites vous-mêmes, ça, c'est ce qui va
venir. Moi, je parlais de ce qui se passe, dans les faits et, dans les faits,
actuellement, le gros du fric à McGill, ce n'est pas les
diplômés, c'est les entreprises, vous le savez très bien.
Ma collègue a quelques questions additionnelles.
La Présidente (Mme Hovington): Je vais reconnaître
maintenant la députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Je vous remercie, Mme la Présidente, juste
une toute petite remarque à l'intention du ministre parce que, chaque
fois, j'ai remarqué qu'il a la môme réserve. Lorsqu'il
parle de la relative santé économique, c'est pour expliquer qu'il
y a moins d'étudiants qui ont recours aux prêts et bourses. Mais
jamais II n'utilise le même argument pour expliquer qu'il ait pu
augmenter un peu l'enveloppe des universités de façon fort
modeste. D'ailleurs, on retrouve ce propos-là à la page 7 de son
mémoire, si vous voulez le lire, premier paragraphe, il dit que ces
modifications au volume de la clientèle, c'est dû à la
relative santé économique. Je dis: Bravo! Mais ça doit
s'appliquer ailleurs aussi, si on est en santé économique.
Je refais cette commission parlementaire et je retrouve exactement la
même atmosphère que j'avais connue à l'occasion de la
première commission parlementaire qui, en fait, cachait une
volonté: celle d'augmenter les frais de scolarité. Et on retrouve
à peu près le même débat et qui, là, veut
cacher la réalité qu'on veut augmenter les frais de
scolarité en laissant voir que ça n'aura pas d'effets, que ce
n'est pas grave, cette décision.
Je pense que je dois vous dire que j'ai regretté et je regrette
que l'organisme que vous représentez n'ait pas cru utile de poser un
regard plus critique et de nous apporter ici une vision ou des alternatives un
peu novatrices. À tort, sans doute, je considère que les
universités ont un rôle de critique social et qu'elles doivent
poser un regard critique lorsqu'on est en train de modifier des choix de
société, entre autres. Pas nécessairement les recteurs,
mais l'ensemble de la communauté universitaire. Alors, au cours des
dernières semaines, nous avons eu droit à deux
présentations qui m'ont étonnée et un peu
déçue; là, il y a la vôtre, je ne vous le cache pas,
et il y a celle également de l'Association des hôpitaux du
Québec. Et le parallèle que je fais, c'est que, quand on a de la
difficulté de financement, ces organismes nous disent: Mais tapez, un,
sur les étudiants, c'est-à-dire, mettez à contribution les
étudiants, et l'autre: Faites payer les personnes qui sont
hospitalisées. Ça me semble toujours un peu court comme
raisonnement, alors qu'il me semble qu'il existe une gamme d'autres moyens de
s'assurer qu'on puisse à la fois maintenir une bonne
accessibilité et surtout, ce que rappelle mon collègue,
député d'Abitibi-Ouest, c'est qu'il y a deux problèmes
criants au Québec. Ça, ça fait l'unanimité chez
nous comme ailleurs et le Conseil du patronat: sous-financement et
sous-diplomation. Les deux sont reliés. Alors, je me demandais...
Et vous faites ce que j'appelle une profession de foi à l'endroit
du ministre de l'Enseignement supérieur. Vous avez tout à fait ce
droit, sauf que ça m'étonne toujours quand vous faites cette
profession de foi-là, puis en même temps vous dites. Il devait
donner 50 000 000 $, mais il a seulement donné 21 000 000 $. Là,
j'ai comme des problèmes de lecture.
Mais j'ai un certain nombre de questions. Je vais essayer de les faire
brèves, de manière à ce qu'on puisse rapidement mieux
saisir l'essentiel de votre mémoire. Vous parlez d'équité
dans votre mémoire en disant, en page 3: "De la même façon,
les universités ne peuvent que souscrire au principe
d'équité qui reconnaît la responsabilité (...) de sa
famille" dans le paiement de ses études. Eh bien, d'abord ils
participent déjà parce que tous les frais de subsistance sont
à la charge de la famille et de l'étudiant, ce qu'on oublie
toujours de dire. Et est-ce qu'il n'y aurait pas eu une certaine
équité, dans la proposition qui est faite par le Parti
québécois et par l'Opposition officielle, à l'effet
d'imposer une taxe de 1 % sur la masse salariale des entreprises, entreprises
qui, à notre avis, ne sont peut-être pas les premiers
bénéficiaires - disons que
ce sont les étudiants - mais au moins les deuxièmes
bénéficiaires les plus importants de la scolarisation, si j'en
crois leurs propos mêmes, lorsqu'on nous déclare: On doit
scolariser au Québec et on doit diplômer davantage parce que,
selon M. Godin, ça deviendra un pays techniquement
sous-développé? Ça veut donc dire que la scolarisation
bénéficie, au premier chapitre, aux entreprises. Pourquoi,
n'avez-vous pas envisagé cette hypothèse?
La Présidente (Mme Hovington): M. Kenniff.
M. Kenniff: II y a énormément
d'éléments dans l'introduction et la question de la
députée de Chicoutimi. Pourquoi n'avons-nous pas envisagé
- je vais répondre à la question précise et laisser de
côté les remarques antérieures, une taxe de 1 % sur la
masse salariale des entreprises qui sont les seules bénéficiaires
ou les grands bénéficiaires de la scolarisation de la population?
Sûrement, à l'heure actuelle, on doit accepter quand même
que les entreprises sont Imposées, comme tout le monde, pour payer des
taxes au gouvernement, qui sont redistribuées par la suite en partie aux
universités sous forme de subventions. Donc, il y a déjà -
les entreprises le diront - une part importante de ce qu'elles paient en
impôt qui va pour financer les universités et le système
d'enseignement en général.
D'autre part, on propose cependant un impôt sur la masse
salariale. Je peux avoir des inquiétudes sur les taxes qu'on impose sur
la masse salariale si on prend l'exemple de la Commission de la santé et
de la sécurité du travail comme un modèle du genre. Donc,
sur ce type d'imposition, je peux avoir des interrogations. Mais, je suis
étonné d'entendre la députée de Chicoutimi dire que
ce sont les entreprises qui bénéficient et donc, finalement,
l'enseignement universitaire ne procure à la société qu'un
bénéfice économique.
Je pense que l'enseignement universitaire procure des avantages d'abord
aux individus qui en bénéficient, et ça, c'est clair,
à la fois par le niveau de salaire que ces gens peuvent escompter, d'une
part, et par un niveau de chômage réduit par rapport à la
population qu'ils peuvent également espérer. Les statistiques
sont la pour le démontrer. L'individu profite au premier plan de
l'éducation universitaire. C'est pour cette raison, d'ailleurs, qu'on a
toujours soutenu que l'étudiant doit participer au financement de son
cours universitaire.
Deuxièmement, je pense que l'éducation universitaire
bénéficie à la population en général,
à l'ensemble de la société. Sûrement au plan
économique, il est vrai, mais également au plan social, au plan
culturel, le progrès de toute société passe par un niveau
de scolarisation élevé qui procure a l'ensemble de cette
société, je pense, un niveau de vie généralement
plus élevé. Ce serait vraiment étriqué que de voir
ça uniquement en termes économiques.
La réponse que je donnerais, c'est qu'il me semble qu'une surtaxe
aux entreprises ferait fausse route dans ce débat - c'est comme
ça que nous l'avons considéré - qu'au premier plan, les
bénéficiaires principaux, qui sont les étudiants actuels,
doivent payer davantage et d'une manière qui se compare à ce que
les étudiants contribuent, notamment dans les autres provinces
canadiennes. Je ne voudrais pas faire de comparaisons malveillantes avec les
universités américaines.
La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. Kenniff.
Mme Blackburn: Mme la Présidente, je n'ai pas
élaboré parce que, effectivement, on dit qu'il y a trois grands
bénéficiaires: la société qui paie largement
actuellement, qui en bénéficie mais qui paie, il y a
l'étudiant et il y a l'entreprise. Je suis d'accord avec vous. On se
compare beaucoup avec l'Ontario. Les entreprises ontariennes contribuent
beaucoup plus que les entreprises québécoises au financement des
universités. Les chiffres là-dessus sont assez
éloquents.
Est-ce que vous croyez que le régime actuel aura les effets
qu'appréhende le ministre de réduire, pour les premières
années de 5 %, on va même jusqu'à 9 % et on dit, dans nos
universités régionales, de 12 % la fréquentation
universitaire? Est-ce que vous avez... Dans les universités
régionales, ce sont les femmes, les temps partiels, les travailleurs, et
du moment où vous avez une augmentation, cela a des effets, plus de
conséquences, là. Croyez-vous partager l'avis du ministre
là-dessus et, compte tenu de l'écart qu'on a, quel effet
ça pourrait avoir?
Une deuxième question, parce que, là, on me dit que j'ai
terminé. Vous semblez faire une corrélation entre la durée
des études et les frais de scolarité, le régime d'aide
financière, en disant que ça va avoir comme effet de
réduire la durée des études. Il y a aussi les 25 % de la
remise de dette aux deuxième et troisième cycles. Mais
pouvez-vous me dire s'il y a une corrélation entre les
bénéficiaires du régime d'aide financière aux
études et la durée de leurs études, ou, s'il y a
corrélation, est-ce que ce n'est pas parce qu'ils doivent travailler en
même temps qu'ils étudient? Comment ce régime-là
va-t-il avoir comme effet de réduire la durée des études,
parce qu'on parle d'une remise de dette de 25 % pour les deuxième et
troisième cycles, alors qu'on estime, dans le milieu universitaire, que
les raisons qui font qu'on prolonge les études aux deuxième et
troisième cycles, c'est la pauvreté des bourses? Les bourses aux
deuxième et troisième cycles sont tellement pauvres que les
étudiants travaillent en même temps et que les études sont
trop longues, mais pas nécessairement parce qu'ils sont
bénéficiaires de l'aide
financière. Je n'arrive pas à faire cette
corrélation.
La Présidente (Mme Hovtngton): M. Kenniff.
M. Kenniff: Je ne suis pas sûr d'avoir compris la
deuxième question. Je vais commencer par la première. Mme la
Présidente, peut-être que je vais étonner Mme la
députée de Chlcouti-mi en disant que sur la question de la
réduction de la clientèle, je ne partage peut-être pas tout
à fait l'avis du ministre. Je suis un peu plus optimiste que lui
là-dessus. Nous avons tous vu les sondages qui ont été
réalisés ces derniers temps, où on demande aux
étudiants: Advenant une augmentation des frais de scolarité,
qu'allez-vous faire? C'est intéressant de noter que dans l'ensemble de
ces sondages-là, il n'est jamais question des modalités de
réforme du régime des prêts et bourses. Donc, nous avons
soutenu et nous soutenons toujours le point de vue que, pourvu qu'il y ait
pleine et entière compensation de l'augmentation des frais de
scolarité, les effets potentiellement néfastes de l'augmentation
des frais de scolarité seront compensés auprès des
étudiants et des étudiantes qui en ont véritablement
besoin. En d'autres termes... D'ailleurs, je pense même que le
député d'Abitl-bi-Ouest a cité celui qui est devenu un peu
le gourou des étudiants sur cette question-là, M. Clément
Lemelin. Dans les deux articles que M. Clément Lemelin a publiés
dans Le Devoir à la fin du mois de janvier, et notamment
l'article du 31 janvier dernier, il indique très clairement que, s'il y
a impact néfaste sur les étudiants dû à une
augmentation des frais de scolarité, cet impact est annulé par un
régime de prêts et bourses qui compense de façon
appropriée.
Donc, écoutez, le ministre a cité des chiffres de 5 %,
d'autres ont parlé de 9 % dans les sondages. Je pense qu'il faut tenir
compte du fait que, dans les sondages, on n'a jamais exposé aux
étudiants, avant de leur poser la question, quelles compensations
étaient disponibles à travers le régime des prêts et
bourses. En ce qui concerne la deuxième question que je crois
comprendre: Est-ce qu'il y a une corrélation entre ceux qui
bénéficient de l'aide par le régime des prêts et
bourses et la durée des études, ce que le...
Mme Blackburn: En référence à la page 3 de
votre mémoire où vous rappelez les orientations, c'est le
deuxième paragraphe où vous partagez... "Compte tenu des retards
que le Québec continue d'accuser en matière de scolarisation
universitaire, particulièrement au niveau des deuxième et
troisième cycles - et là, je saute - ...favoriser la
continuité et la persévérance aux divers cycles
d'études tout en Incitant les étudiants à compléter
leur études dans les délais normaux." Alors, on semble conclure
qu'on modifie le régime d'aide financière aux étudiants et
que ça aura cet effet. Comment est-ce qu'on peut nous faire la
démonstration? (13 heures)
M. Kenniff: Je pense que, d'une part, dans la mesure où il
y a une aide financière accrue qui est disponible aux étudiants,
on peut s'attendre à ce que ce soit un peu plus facile pour eux de
compléter leurs études dans un délai normal, étant
donné que, normalement, les ressources qui, peut-être, auparavant,
devaient être procurées au moyen d'un travail à temps
partiel, avec une réduction de la charge de cours... Il sera possible
pour ces étudlants-là de compléter leurs études
d'une façon plus accélérée. Je pense que cet
objectif, qui est une citation du document d'orientation gouvernementale, fait
référence également à la recommandation
précise de faire une remise de dette aux étudiants et aux
étudiantes qui auront complété les études de
maîtrise dans le délai normalement attribué à ce
niveau de formation. Je pense que ça, c'est une mesure incitative que
nous appuyons.
D'ailleurs, nous avons également dit dans notre mémoire -
et là-dessus, c'est à l'instar du Conseil des universités
- que nous souhaitons que le gouvernement étudie la possibilité
de faire une remise, peut-être à un pourcentage moindre, pour les
étudiants qui, au premier cycle, complètent leurs études
dans le délai normal. D'ailleurs, là-dessus, on peut citer, je
pense, l'AI-lemage fédérale où il y a une remise qui est
faite à la fin des études de premier cycle, suivant ce
principe-là. Je pense que ce serait une façon additionnelle
d'inciter les étudiants à compléter leurs études
dans des délais raisonnables et, à travers ça,
évidemment, cela entraînera des économies pour les
étudiants et pour le régime des prêts et bourses, il faut
le dire en passant.
La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. Kenniff. Je vais
reconnaître le député de Jacques-Cartier qui a
manifesté l'intention de poser une question.
M. Cameron: Merci, Mme la Présidente. Je voudrais, s'il
est possible, des petites clarifications sur les finances administratives.
President Kenniff, could you tell us the percentage of the total
university budget that goes to administration itself of the universities In
general and, for that matter, for McGill or Concordia in particular?
La Présidente (Mme Hovington): M. Kenniff.
M. Kenniff: Je ne voudrais pas hasarder, Mme la
Présidente, des chiffres pour répondre à cette
question-là, comme ça varie énormément, d'un
établissement à l'autre, sur la façon de comptabiliser les
dépenses d'administration. Je donne l'exemple de l'Université
Concordia où le
budget du recteur a un fonds discrétionnaire qui me permet de
donner un appui financier à des projets de colloques qui sont
organisés par les professeurs dans les départements, au cours de
l'année, et qui n'étaient pas prévus au budget du
début de l'année. On peut qualifier ça de dépenses
administratives. J'ai plutôt l'impression que c'est une dépense
académique, mais c'est comptabilisé comme dépense
administrative.
À l'Université McGiII, les salaires des administrateurs
émargent au budget des facultés dont ces gens-là sont
issus. À ce moment-là, ça fait partie du budget
académique de l'établissement. Est-ce que c'est de l'enseignement
ou si c'est de l'administration? Donc, à l'heure actuelle, c'est
très difficile. Mais je peux dire: La part très importante des
budgets des universités, à l'heure actuelle, ce sont les salaires
qui sont payés aux professeurs pour fins d'enseignement et les
dépenses non salariales qui sont effectuées dans les
départements, dans les unités d'enseignement et de recherche. Je
pense que, si l'administration représente 10 % des budgets des
universités, ça m'étonnerait; je n'ai pas de chiffres,
malheureusement, pour le député de Jacques-Cartier, je le
regrette; mais, quel que soit un pourcentage cru qu'on pourrait donner, il
faudra toujours le moduler avec le genre de tempérament que j'ai
apporté dans le début de ma remarque.
M. Cameron: Merci.
La Présidente (Mme Hovington): En conclusion... C'est tout
le temps que nous avons, M. le député de Jacques-Cartier. Le
temps, donc, pour la période d'échange étant
terminé, je pense que nous prendrons quand même quelques secondes
pour quelques mots de conclusion. M. le député d'Abitibi-Ouest,
est-ce que vous voulez conclure?
M. Gendron: Bien, très simplement. Je pense que c'est
sûr que d'avoir la présence de la Conférence des recteurs
sur un dossier majeur comme ça, c'est important. Cependant, en
conclusion, on a été un peu étonnés, nous, de notre
côté, qu'il n'y ait pas plus de recherche d'autres pistes que
celles qui sont suggérées par le gouvernement, il me semble que
c'est le rôle d'une université, puis c'est le rôle des
universités d'autant plus que vous êtes la Conférence des
recteurs. Je donne un exemple: II vous appartiendrait, selon moi, de fouiller
une question comme l'impôt postuniversitaire. Vous avez des chercheurs,
vous pourriez les mettre là-dessus; vous avez du fric dans vos fonds de
dotation; en tout cas, c'est le cas de McGill, et ce serait possible. Dans ce
sens-là, il me semble que l'éclairage qu'une université
aurait pu donner sur des moyens autres que strictement ceux qui sont
préconisés par le gouvernement aurait été
intéressant.
Je conclus en disant également... Quand vous avez dit: Pour vous,
il y a deux sources. Et je vous cite au texte, vous avez dit: "II y a deux
sources de financement: il y a les subventions du gouvernement et il y a les
frais de scolarité. " Bien, moi, je regrette, il y a une
troisième source partout ailleurs dans le monde, et la troisième
source est très significative ailleurs dans le monde: c'est l'entreprise
privée. Alors, je ne peux pas, moi, la négliger; elle est
là, elle est Importante. Et là, je vois que vous avez une
très bonne expérience politique, M. Kenniff, et je vous en
félicite. Vous avez répondu souvent avec des
considérations de nature politique et c'est votre droit, mais nous,
quand on a dit tantôt que le niveau universitaire, pour ceux qui en
bénéficient, dans l'ordre, c'est la société
québécoise, ce sont les étudiants. Mais pourquoi que
très rapidement un certain nombre d'étudiants, dans des
créneaux de développement importants... Et je suis bien
placé pour en parler, mon jeune neveu, ça ne lui a pas pris de
temps à se trouver une job, parce qu'il a fini aux HEC, dans un domaine
où la Noranda avait besoin d'expertise et il n'était pas sorti
qu'il était placé. Est-ce que c'est le cas de bien des
étudiants dans d'autres facultés que vous connaissez? Vous savez
bien que la réponse, c'est non. Donc, ça veut dire quoi?
Ça veut dire que ça intéresse l'entreprise, ça
intéresse drôlement l'entreprise d'avoir des diplômés
qualifiés de second cycle et de troisième cycle universitaire, ou
môme de premier cycle universitaire dans des créneaux de
développement. Et on aurait aimé ça avoir un
éclairage là-dessus. Mais c'est sûr que votre
mémoire, il est intéressant dans le sens qu'il va dans les pistes
traditionnelles du gouvernement. Oui, il n'y a pas de fric, on va y aller en
taxant les étudiants et ie problème est en partie régie
parce que c'est ce que vous avez dit, il y a un bout de chemin de fait.
Une voix: II n'y a rien qui est garanti.
M. Gendron: Nous pensons qu'il en reste beaucoup à faire,
et le beaucoup à faire était également dans d'autres
pistes de travail.
La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. le
député d'Abitibi-Ouest. M. le ministre, en guise de
conclusion.
M. Ryan: Oui, brièvement, Mme la Présidente. Je
pense qu'à mesure que le débat avancera, on va constater que
l'opposition du Parti québécois est tout à fait
irresponsable dans ce débat-ci. C'est la première fois que j'ai
l'occasion de le dire, mais je l'affirme avec autant d'énergie que j'en
suis capable. On s'attendait à une contribution utile du Parti
québécois à la solution du problème du financement
des universités, surtout après l'héritage qu'il nous a
laissé; on s'aperçoit qu'il continue à s'enliser dans
des
voies sans issue. On ne demande pas que l'étudiant porte le poids
entier du financement de l'université. On dit: Même si le
Québec est une société distincte, ce n'est pas une raison
pour qu'on encourage seulement l'Irresponsabilité au Québec. Ce
n'est pas une raison pour qu'on ne demande pas à l'étudiant de
porter une part raisonnable du fardeau financier que représente, pour la
société, l'enseignement et la recherche universitaires. La voie
que préconise le Parti québécois, s'il veut être
honnête avec lui-même, c'est la voie de la gratuité pure et
simple. Parce que si vous refusez de toucher au niveau actuel des frais de
scolarité, vous acceptez Implicitement qu'ils soient amenés
à zéro, tôt ou tard, et c'est vers ça qu'on s'en
allait rapidement. Ayez le courage de vos convictions. Dites au moins. Nous
sommes pour la gratuité totale et nous envisageons d'autres choses. Vous
n'êtes pas capables de le dire et vous êtes placés dans une
voie sans issue...
M. Gendron: Non, on n'est pas capables. Comme
société, on n'est pas capables, la gratuité totale.
M. Ryan:... avec la position que vous avez choisie. Là,
vous cherchez refuge du côté des entreprises. C'est un tout autre
débat. On va le faire à l'Assemblée nationale, le
débat de la participation des entreprises au financement de la
société québécoise, on va le faire à fond.
Quand vous laissez entendre aux étudiants que des entreprises, ailleurs,
contribuent au fonctionnement des universités, ce n'est pas vrai. Ce
n'est pas vrai. Elles contribuent d'autres manières.
M. Gendron: Bien, voyons donc! 12 %, en Ontario.
M. Ryan: Elles contribuent sous la forme de participation aux
campagnes de financement pour des immobilisations, elles contribuent sous la
forme de création de fonds de fiducie pour favoriser la recherche
d'excellence dans différents secteurs. C'est parfait, nous en sommes.
Nous le favorisons déjà. J'aurai l'occasion de donner des
exemples de choses que nous avons faites au cours des prochains jours, mais de
laisser entendre qu'on pourrait trouver une source de revenus de fonctionnement
de ce côté-là, je pense que ce n'est pas sérieux.
Et, je remercie de toute manière la Conférence des recteurs de
l'excellente présentation qu'elle a faite, ce matin. SI nous
étions dans une société où les ressources sont plus
abondantes, iI y a toutes sortes d'avenues qu'on pourrait envisager. Si nous
étions dans une société moins endettée que celle
que vous nous avez laissée, vous autres de l'Opposition, on pourrait
envisager d'autres choses aussi. Mais la solution que vous nous proposez, c'est
d'endetter encore davantage le monde. C'est votre spécialité,
mais nous autres, nous préférons la voie de la
responsabilité.
La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. le ministre.
Alors, il me reste à remercier, moi de même, la Conférence
des recteurs et des principaux des universités du Québec pour les
commentaires sur les principes, les orientations et sur les mesures
proposées dans le projet de loi 25. Merci beaucoup. La commission
suspend donc ses travaux jusqu'à cet après-midi, 15 heures.
(Suspension de la séance à 13 h 10)
(Reprise à 15 h 13)
Université du Québec à
Rimouski
La Présidente (Mme Hovington): La commission reprend ses
travaux. En attendant que le ministre et que le député
d'Abitibi-Ouest prennent place, si vous le voulez bien, je vais rappeler tout
simplement le mandat de la commission: procéder à une
consultation générale et tenir des audiences publiques sur le
projet de loi 25, Loi sur l'aide financière aux étudiants.
J'Inviterais le deuxième groupe de la journée à
prendre place, si vous le voulez bien, l'Université du Québec
à Rimouski, représenté par M. Marc-André Dionne,
recteur; M. Guy Gi-roux, professeur Invité; Mme Marie-France Ma-heu,
directrice des relations publiques et de l'Information, et M. Jean-Nil
Thérlault, vice-recteur à l'administration et aux ressources
humaines.
Vous avez 20 minutes pour la présentation du mémoire et iI
y aura 40 minutes après pour les échanges entre les membres de la
commission et vous-mêmes. Permettez-moi de vous souhaiter la bienvenue.
Ce sont des gens de ma région, du Bas-Saint-Laurent. Bienvenue à
cette commission parlementaire très importante sur la réforme du
régime des prêts et bourses et d'aide financière aux
étudiants en général. Vous avez la parole.
M. Dionne (Marc-André): Merci, Mme la Présidente.
M. le ministre, MM. les membres de la commission, MM. et Mmes les
députés, l'Université du Québec à Rimouski a
pris la décision de soumettre un mémoire à la commission,
compte tenu de l'Importance de la question que vous avez à
étudier. Je vais vous épargner la lecture Intégrale du
mémoire. Nous avons préparé un résumé pour
vous exprimer l'essentiel de ce que nous pensons de cette problématique
et nous vous remercions de votre écoute et de votre Invitation.
L'annonce successive du dégel des frais de scolarité et du
projet de loi 25 proposant une réforme du régime d'aide
financière aux étudiants nous amène à réagir
à ces événements compte tenu des caractéristiques
des régions périphéri-
ques et des clientèles que nous desservons. Pour l'essentiel, M.
le ministre, l'Université du Québec à Rimouski
reconnaît la pertinence de mieux répartir les sources de
financement de l'enseignement supérieur et considère que les
modifications proposées au régime d'aide financière aux
étudiants sont opportunes. Le mémoire que nous déposons
aujourd'hui se veut donc un document constructif proposant des
aménagements réalistes au projet de loi 25. Ces
aménagements nous semblent cependant essentiels non seulement au
maintien, mais à la poursuite du développement de
l'accessibilité aux études universitaires dans les régions
périphériques du Québec, compte tenu de la
fragilité des systèmes socio-économiques des
régions.
En effet, le contexte particulier des régions
périphériques au Québec qui se traduit par un plus faible
taux de fréquentation universitaire, qui se traduit par un taux de
chômage élevé, par des revenus familiaux qui sont moindres,
justifie selon nous des mesures pour contrer les effets négatifs de la
hausse des frais de scolarité si l'on veut assurer une véritable
accessibilité aux études universitaires à l'ensemble des
citoyens du Québec. Car nous pensons que les enjeux de
l'accessibilité aux études supérieures rejoignent les
enjeux du développement môme des régions dites
périphériques.
Poser la question de l'accessibilité aux études
supérieures en soumettant les régions périphériques
aux mêmes paramètres que ceux qui affectent les clientèles
étudiantes des grands centres urbains, c'est là ne pas
apprécier et reconnaître les disparités régionales.
En effet, en procédant ainsi, on Ignore certaines
caractéristiques essentielles des régions
périphériques qui expliquent, pour une large part, le retard
actuel de la fréquentation universitaire dans ces régions.
Vous le savez, en régions périphériques, on
étudie moins longtemps, on entre plus tôt sur le marché du
travail, on a plus de difficultés à trouver un emploi. Il en
résulte donc, pour la plupart de ces régions, un taux
d'inactivité et un taux de chômage plus élevés et
une dépendance plus forte par rapport à l'aide sociale.
Ces réglons sont aussi celles où l'on compte le plus sur
les ressources universitaires du milieu pour insuffler des dynamismes
générateurs d'emplois et d'entrepreneurship, sources d'espoir
dans une perspective d'autodéveloppement et de responsabilisation de la
population. À cet égard, je vous mentionne que le Conseil
supérieur de l'éducation nous rappelait récemment le
rôle important que les universités au Québec ont à
jouer pour supporter le développement économique de leur
région et, notamment, les régions sises en régions
périphériques.
L'avenir de l'UQAR est à la fois prometteur par son dynamisme et
les aspirations de son milieu, mais en même temps, précaire en
raison de la faiblesse de l'infrastructure économique de la
région. Globalement, les réglons ressources et
périphériques desservies par l'UQAR, de
Bas-Saint-Laurent-Gaspésie et Côte-Nord sont de vastes superficies
mi-rurales, mi-urbaines, aux populations dispersées sur un grand
territoire.
Cependant, cet Immense territoire connaît des
caractéristiques spécifiques. Premièrement, nous avons
vécu, depuis ces dernières décennies, une évolution
démographique négative et surtout caractérisée par
l'exode des jeunes de 18-30 ans, les cerveaux qui migrent vers les centres
urbains. Deuxièmement, caractérisée par une pénurie
d'emplois. Les taux d'activité du Bas-Saint-Laurent, Côte-Nord et
Gaspésie sont plus bas que la moyenne provinciale et le revenu moyen est
inférieur à la moyenne provinciale.
Dans ce contexte, nous croyons que c'est le Québec tout entier
qui a beaucoup à gagner d'une mise à contribution des ressources
humaines enracinées dans des territoires spécifiques. La question
de l'accessibilité aux études avancées s'inscrit donc dans
une problématique intimement reliée au développement
régional. À l'UQAR, nous sommes convaincus que les
finalités de l'éducation et du développement
régional se rejoignent. En effet, la qualification des ressources
humaines constitue la clé du développement
socio-économique des régions et le développement des
régions favorise la consolidation d'un Québec fort dans une
conjoncture de mondialisation des échanges commerciaux.
Or, cette problématique soulève la question des
disparités entre réglons, d'où l'enjeu de
l'équité interrégionale. Nous croyons que l'application de
normes identiques à des problématiques différentes aurait
des effets discriminatoires car ces normes, même si on les applique
également à tous les milieux et à toutes les personnes qui
en subissent les effets, n'entraînent pas les mêmes
conséquences en périphérie. C'est le concept que vous
connaissez d'avoir des politiques qui sont modulées, compte tenu des
caractéristiques des réglons parce que l'habit sur mesure ne sied
pas toujours à l'ensemble.
Au surplus, comme garants de l'intérêt public, nous croyons
que l'État doit être accueillant et accepter d'être
interpelé par ses enjeux en n'abdiquant pas la responsabilité qui
lui incombe de venir en aide aux régions excentriques par des mesures
ponctuelles de redressement des disparités régionales. Dans le
contexte de l'accessibilité aux études avancées dans les
régions périphériques, le support attendu de l'État
est d'accommoder les étudiants et étudiantes qui désirent
entreprendre ou poursuivre des études avancées à
l'intérieur de ces régions. Par ailleurs, en assumant cette
responsabilité, l'État concourra à freiner les migrations
interrégionales qui désavantagent lourdement les régions
périphériques au profit des grands centres urbains. Cela
suggère l'enjeu de l'enracinement des populations dans leur milieu
d'origine et celui de la qualité de vie au sein des familles. De la
sorte, les familles seront moins susceptibles d'être dissoutes par
l'exil des étudiants qui chercheront à trouver à
l'extérieur les meilleures conditions possible pour assurer leur
avenir.
Vous savez, on est habitués de tenir pour acquis, on avait
commencé à tenir pour acquis qu'il était un peu normal que
les familles se divisent parce que l'un et l'autre doivent aller poursuivre des
études dans différentes régions du Québec. Je pense
que, de plus en plus, les gens reviennent à des valeurs du clan
familial, à des valeurs familiales et ça nous apparaît une
dimension à mettre en lumière.
Quelques mots sur la nature des clientèles ou les
caractéristiques de nos clientèles étudiantes. Nous
croyons que, de par leurs caractéristiques, les clientèles
étudiantes des universités situées en région
périphérique sont peut-être plus vulnérables aux
divers changements relatifs aux politiques d'aide financière du
gouvernement. Quelques données. Dans l'est du Québec, iI y a 1, 8
% des |eunes de moins de 30 ans qui fréquentent leur université
régionale, alors que, dans l'ensemble du Québec, 5, 3 % des moins
de 30 ans fréquentent une université située dans leur
région d'appartenance; écart, évidemment, expliqué
par deux variables, fondamentalement. D'une part, ceux qui vont étudier
dans les centres urbains et, d'autre part, le fait que le taux global de
fréquentation universitaire est moindre pour des raisons de structures
socio-économiques que vous connaissez.
L'autre dimension ou l'autre donnée qu'il nous apparaît
important de fournir et qui explique également l'Intérêt
que nous avons porté à ce dossier, c'est qu'à l'UQAR,
à l'automne 1988 ou 1989, 92 % des étudiants inscrits à
temps complet dans des programmes de baccalauréat à
l'Université du Québec à Rimouski étaient des
utilisateurs du régime gouvernemental de prêts et bourses. Donc,
92 % de nos étudiants à temps complet inscrits à des
baccalauréats utilisaient le programme gouvernemental de prêts et
bourses, alors que la moyenne provinciale est de l'ordre de 45 % ou de 48 %. La
perspective d'un endettement plus élevé dans un milieu
caractérisé par la précarité de l'emploi est
susceptible de réduire le nombre de candidats prêts à
prendre ce beau risque de poursuivre des études graduées.
Autre élément, l'examen de nos populations
étudiantes nous Indique les éléments suivants:
Premièrement, nous avons 50 % des 6000 personnes qui fréquentent
l'UQAR qui suivent des cours hors campus, presque exclusivement à temps
partiel; donc, clientèle à temps partiel très importante,
et à l'extérieur du campus rimous-kois, sur l'ensemble du
territoire desservi. Nous savons que 70 % des étudiants à temps
partiel sont des femmes et, sur les quelque 3000 étudiants et
étudiantes inscrits sur le campus, la moitié ou un peu plus de la
moitié de ceux-ci suivent leurs cours à temps partiel. Donc,
Importance des études à temps partiel, dans cette
région-là, qui permettent à des personnes qui, dans des
cas travaillent et peuvent poursuivre leur travail en poursuivant un
cheminement universitaire et qui, dans d'autres cas - je pense également
à la clientèle féminine - sont des personnes qui se
préparent à ce que certains appellent "le second envol", à
revenir sur le marché du travail; ça nous apparaît un
service éminemment important et peut-être plus sensible aux
variations de coûts. Ainsi, les étudiants à temps partiel,
très nombreux à l'UQAR, sont particulièrement
vulnérables à l'impact de la hausse des frais de
scolarité, compte tenu de la fragilité de l'équilibre des
revenus familiaux des personnes demeurant en régions
périphériques et aussi de la difficulté des employeurs de
ces régions d'augmenter substantiellement les budgets de
perfectionnement. Ici, je ne parle pas, évidemment, de ceux qui ont,
j'allais dire le privilège, de travailler pour les organismes publics.
Mais vous connaissez le tissu socio-économique de cette région
qui se caractérise par une grande quantité d'entreprises ou de
PME pour lesquelles les ressources financières consenties au
perfectionnement ou à la formation sont, somme toute,
limitées.
Nous voulions donc, dans un premier temps, vous donnez un certain nombre
d'éléments pour apprécier la situation
socio-économique de cette région, d'une part, et, d'autre part,
vous fournir cette Information sur les caractéristiques de la
clientèle que nous desservons.
Passons maintenant à certains commentaires et, surtout,
recommandations concrètes en termes de mesures que nous faisons. Le
nouveau régime d'aide financière aux étudiants,
commentaires et recommandations.
De façon générale, nous considérons que les
réformes proposées au régime d'aide financière aux
étudiants constituent une nette amélioration par rapport au
régime actuel et nous reconnaissons qu'il s'agit là d'un pas
important dans la bonne direction. Nous croyons cependant opportun de proposer
quelques améliorations à ce régime afin de garantir le
maintien et le développement d'une large accessibilité aux
études supérieures, notamment pour les candidats et candidates
venant des régions périphériques. Nous vous
présentons aujourd'hui les principales recommandations du document. (15
h 30)
Les trois premières recommandations, pardon, les quatre
premières, visent l'attraction des clientèles. Ensuite, on va
parler de mesures touchant la rétention et des mesures touchant
l'intégration au marché du travail.
Attraction, parce que nécessité de favoriser un plus grand
taux de fréquentation universitaire en région parce que nous
savons, à partir de données que nous avons et tirées du
document "Deux Québec dans un", que près des trois quarts des
étudiants qui étudient en région poursuivent par la suite
leur carrière dans la région et
deviennent des agents de développement économique, social
et culturel. Et là-dessus, évidemment, on nous sert souvent, et
c'est aussi exact, l'argument de dire que les étudiants quittent parce
qu'il n'y a pas d'emploi, évidemment. Ce que nous pensons: II faut qu'on
ait le support gouvernemental pour contribuer à Infléchir cette
tendance-là parce qu'on pense que si nous observons qu'il y a un
consensus social quant à l'importance dans le développement
économique des ressources humaines qui sont le premier facteur de
développement, nous pensons que nous devons déployer des gestes
proactifs pour qu'on puisse à la fois développer
l'Intérêt pour les études universitaires et faire en sorte
que les étudiants étudient davantage dans leur région
parce qu'ils y restent davantage par la suite et deviennent des facteurs de
développement.
À ce niveau-là, iI n'est pas évident que la loi du
libre marché d'Adam Smith est la meilleure formule. Donc, par rapport
aux mesures touchant l'attraction, en premier lieu, nous voulons vous dire que
nous endossons pleinement les principes de base de la réforme de l'aide
financière proposée par le gouvernement. Nous croyons, en outre,
que le principe de base suivant devrait être ajouté. Le
régime devrait viser à favoriser une plus grande
accessibilité aux études universitaires dans les régions
périphériques. Avoir une discrimination positive. Le
reconnaissant de ce principe nous semble essentiel si l'on veut
réellement freiner l'exode continu des cerveaux vers les grands centres
urbains et rentabiliser les efforts déjà consentis en
région pour la formation des ressources humaines qualifiées.
Deuxièmement, dans le régime actuel d'aide
financière aux étudiants, en ce qui a trait aux frais
admissibles, le gouvernement du Québec accorde une allocation annuelle
de 400 $ pour les étudiants provenant des régions
périphériques, manifestement pour tenir compte des frais de
voyages, des frais inhérents au déplacement. Par cette mesure, le
gouvernement reconnaît certains coûts supplémentaires pour
les étudiants provenant des régions périphériques
et leur facilitent l'accès à l'ensemble des établissements
universitaires du Québec. Cependant, malgré ces avantages
évidents, cette mesure comporte aussi l'inconvénient de ne pas
contribuer à freiner l'exode des jeunes vers les grands centres et
réduit, en conséquence, l'enracinement de ceux-ci, de leur milieu
naturel.
Une parenthèse. Vous savez, vous tous et vous toutes, que les
régions ont contribué au développement du Québec,
non pas exclusivement par les ressources naturelles qu'on a exportées
vers les grands centres pour les transformer parce que, malheureusement, on n'a
pas eu beaucoup de transformations dans beaucoup de régions, comme vous
le savez.
Les milieux régionaux ont beaucoup contribué à la
formation, par la migration des res- sources qualifiées dans les grands
centres pour le bien-être du développement du Québec. Ce
qu'on vous demande aujourd'hui, c'est qu'on puisse avoir un relatif juste
retour des choses, qu'on puisse avoir une mesure et ce que nous proposons,
c'est qu'en sus de ce qui est prévu actuellement, II y ait une
allocation additionnelle de 400 $ par étudiant qui poursuit ses
études dans un établissement situé dans une région
périphérique. Et c'est carrément une mesure
discriminatoire, une discrimination positive parce qu'il nous faut contrer le
mouvement de l'exode naturel. C'est pour ça qu'il faut une mesure qui
est positive. Et ce n'est pas sur un calcul de coût...
La Présidente (Mme Hovington): M. Dionne, il va falloir
conclure. Vous avez 20 minutes maintenant de passées.
M. Dionne: Très bien. Un autre élément,
comme troisième mesure, la hausse des frais de scolarité risque
d'affecter sérieusement l'accessibilité aux études
universitaires pour les étudiants à temps partiel.
Là-dessus, on a parlé tout à l'heure de ce groupe, de la
composition de la clientèle étudiante. Je n'y reviens pas. Ce
qu'on veut vous dire c'est: Nous sommes contents de voir qu'il y a des
ouvertures là-dessus dans la réforme actuelle et ce que nous
proposons, c'est que les étudiants à temps partiel qui
poursuivent leurs études dans des centres hors campus, dans des
régions, aient accès aux programmes d'aide financière dans
la mesure où ils suivent deux cours-année - un
cours-année, je pense que les gens peuvent s'en accommoder - dans la
mesure où ils suivent deux cours-année et ce, applicable
dès l'automne 1990. Il ne faut pas différer ces
mesures-là. C'est Important de permettre aux gens en exercice, à
la population de développer son niveau de connaissances, parce que je
suis beaucoup...
La Présidente (Mme Hovington): M. Dionne, en
conclusion.
M. Dionne: Pardon?
La Présidente (Mme Hovington): En conclusion, M. Dionne,
s'il vous plaît.
M. Dionne: Sommairement, j'ai quelques mesures additionnelles
dont je voudrais vous parier. Nous avions des mesures au niveau de la
rétention des clientèles, donc, d'accorder une remise de 25 % de
la dette contractée aux étudiants ayant complété,
dans les délais prescrits, leurs études universitaires dans une
région périphérique, quel que soit leur cycle
d'études, pour accélérer le cheminement dans les
programmes. Et, enfin, Mme la Présidente, je vais directement à
la recommandation au niveau des mesures d'intégration. C'est
carrément d'exempter les nouveaux diplômés universitaires
issus des
universités en région et qui travaillent dans leur
région au terme de leurs études, de les exempter, dis-je, des
Intérêts de leur dette d'études pour une période
maximale de trois ans, favorisant l'intégration au milieu du travail des
finissants et des finissantes des universités en régions
périphériques. Mme la Présidente, c'était
l'essentiel de nos recommandations. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Hovfngton): Merci beaucoup, M. Dionne.
Je pense que vous avez oublié une dernière recommandation, si Je
peux me permettre, "de créer un mécanisme propre aux
régions périphériques favorisant l'intégration des
diplômés universitaires aux marchés de l'emploi
régionaux. "
M. Dionne: Oui.
La Présidente (Mme Hovington): C'est parce que je la
trouve importante aussi, étant une régionaliste
moi-môme.
M. Dionne: Effectivement, il a fallu que je choisisse parmi les
plus importantes. Alors, je devais... J'ai sauté celle-là, Mme la
Présidente. Elle est effectivement très importante.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. Alors, M. le
ministre, ou est-ce qu'on va directement au député de Rimouski,
qui vous représente à l'Assemblée nationale et qui va se
faire un plaisir de commenter quelque peu votre mémoire et d'y apporter
peut-être... de vous poser peut-être quelques questions? M. le
député de Rimouski.
M. Tremblay (Rimouski): Mme la Présidente, M. le recteur,
Madame et Messieurs, |e vous remercie du mémoire que vous avez
présenté à la commission parlementaire. Je me suis
donné la peine de le lire attentivement; d'ailleurs, vous avez eu
l'amabilité de m'en faire parvenir une copie au préalable et
probablement beaucoup plus avant que les autres. J'en al pris connaissance. Je
trouve ça un peu rafraîchissant parce que je vais vous dire que
j'ai entendu l'Opposition ce matin critiquer le projet de loi 25 que nous avons
devant nous et surtout les orientations gouvernementales quant au régime
de prêts et bourses et le dégel des frais de scolarité et,
en même temps, l'Opposition s'est gargarisée que, durant la
période de 1976 à 1985, elle avait, elle, bonifié le
régime de prêts et bourses, sauf qu'elle a oublié de dire
que, pendant qu'elle faisait ça, elle coupait les subventions aux
universités et c'est pourquoi on se ramasse aujourd'hui avec un
déficit aussi Important. D'une part, on se montrait
généreux et, d'autre part, on coupait les subventions de
fonctionnement aux universités.
Aujourd'hui, nous arrivons avec un régime nécessairement
qui vient améliorer quelque peu les prêts et bourses mais, nous,
pendant ce temps-là, comme gouvernement, nous avons augmenté les
subventions de fonctionnement aux universités pendant que vous autres,
vous les couplez.
Une voix:...
M. Tremblay (Rimouski): On va vous le prouver. Durant la
période de 1976 à 1985, vous avez coupé les subventions de
23 % aux universités pendant que nous, de 1985 à 1989, nous les
avons augmentées de 15 %.
Cela dit, M. le recteur, vous me permettrez de vous féliciter
pour les recommandations que vous faites à la fin de votre
mémoire. J'aimerais vous questionner quant à l'implication
financière de la première proposition que vous faites à
savoir une allocation de 400 $ par étudiant pour poursuivre des
études dans une université en région. Vous savez, et
d'ailleurs vous l'avez dit, qu'on a déjà une bourse
supplémentaire de 400 $ pour les élèves ou les
étudiants qui viennent des périphéries, mais est-ce que
vous ne trouvez pas ou est-ce que vous pourriez me dire quel impact
pécuniaire pourrait avoir une telle initiative de la part du
gouvernement?
La Présidente (Mme Hovington): M. Dionne.
M. Dionne: En ce qui concerne l'Université du
Québec à Rimouski, c'est une première mesure.
Évidemment, elle vise exclusivement les étudiants à temps
complet sur le campus. Donc, pour l'UQAR, compte tenu du pourcentage
d'étudiants qui fréquentent l'université et qui ont
accès aux prêts et bourses, cela représente un coût
d'à peu près 350 000 $ à 400 000 $ annuellement.
M. Tremblay (Rimouski): Est-ce que vous n'avez pas fait une
extension de cette possibilité vis-à-vis de l'ensemble des
élèves...
M. Dionne: Compte tenu des clientèles qu'on retrouve
à Chlcoutimi et en Abitibi-Témiscamin-gue, et compte tenu du
pourcentage des étudiants ayant accès aux prêts et bourses,
j'avancerais que le coût global serait de l'ordre de 1 000 000 $ ou 1 100
000 $ pour ces trois universités sises en région.
M. Tremblay (Rimouski): Je suis convaincu que cette proposition
que vous faites mérite d'être considérée parce
qu'elle aurait certainement un effet d'attraction pour les universités
en région, et Dieu sait si nous avons besoin de ce coup de pouce
supplémentaire pour pouvoir garder chez nous nos cerveaux
D'autre part, au niveau de la rétention de la clientèle,
vous proposez le non-remboursement des intérêts sur la dette pour
une période de trois ans. Est-ce que cette initiative ou cette
proposition a été évaluée aussi?
M. Dionne: Oui. En ce qui a trait à cette recommandation
de l'exemption de la dette d'études pour les gradués
d'université en région qui travaillent dans leur région,
exemption pour une période de trois ans, le coût annuel, dans
notre cas, serait approximativement de 200 000 $. Quand on fait l'extension par
rapport aux clientèles de Chicoutimi et de
l'Abltibi-Témis-camingue, je pense qu'on peut envisager un chiffre de
l'ordre de 500 000 $ ou 600 000 $, par hypothèse.
M. Tremblay (Rimouski): Oui.
M. Dionne: Peut-être un peu plus, 700 000 $.
M. Tremblay (Rimouski): En terminant, M. le recteur, vous nous
faites d'autres recommandations, c'est évident, dans votre
mémoire. Cependant, et probablement que c'est votre perception de votre
vécu régional, vous tenez compte de la disparité
régionale et aussi de l'immensité du territoire que nous avons
à desservir et cela a un effet négatif sur le fonctionnement de
votre université en région. Est-ce que les mesures que vous
proposez dans votre rapport auront pour conséquence d'avoir un effet
boniflcateur, si je peux m'exprimer ainsi, de votre fonctionnement?
M. Dionne: En fait, je pense qu'il faut voir deux
problématiques distinctes en ce qui a trait aux conditions
particulières qui nous amènent des coûts de fonctionnement
additionnels, conditions qui sont expliquées par la taille des
établissements, par la dispersion des clientèles et leur
éloignement. À cet égard, vous savez que dans les
ressources financières que le gouvernement et le ministre mettaient
à la disposition des universités, il a été reconnu
des variables qui nous permettent d'avoir un fonctionnement plus harmonieux
à cet égard et, M. le député, M. le ministre, vous
avez collaboré à ce que ces problématiques soient
regardées correctement, de sorte qu'il y a eu un effort que je qualifie
de substantiel du gouvernement pour nous aider au niveau du fonctionnement.
Aujourd'hui, le sens de notre débat n'est pas un plaidoyer en
faveur de l'institution. C'en est un en faveur de la clientèle
étudiante. Ce que je veux que nous retenions collectivement c'est, qu'on
le veuille ou non, le fait qu'il y a une valeur que nous associons à un
prix. Je pense, comme d'autres, que l'effet global au niveau du Québec
par rapport aux frais de scolarité en termes de pourcentage ne sera pas
si considérable. Je pense, comme d'autres, - le ministre a avancé
des chiffres, des pourcentages à ce niveau - que ce ne sera
peut-être pas si considérable, sauf que, dans des conjonctures
socio-économiques où, compte tenu du niveau de scolarisation des
gens, du taux de chômage qu'on retrouve, de la structure des occupations
dans des réglons périphériques, je crains que dans
l'association entre la valeur du service universitaire par rapport au prix il
puisse y avoir des éléments qui auraient un effet plus
considérable, d'où, je pense... Et, par ailleurs, quand on
regarde la démonstration sur les frais de scolarité, on comprend.
Par ailleurs, je pense que ces mesures, qui amènent carrément une
discrimination positive en faveur des étudiants des régions,
seraient susceptibles de favoriser la poursuite et de stimuler, parce que je ne
pense pas qu'il faille seulement maintenir la fréquentation
universitaire ou l'accessibilité, il faut la stimuler et, dans les
réglons, il faut continuer de la stimuler positivement, non seulement
pour les jeunes qui nous arrivent des cégeps, également pour les
gens à temps partiel. Et retenir nos cerveaux parce que écoutez,
on peut se battre pour conserver nos ressources naturelles, mais si on n'a pas
nos cerveaux, on a un problème majeur, pas juste comme région
périphérique, aussi comme société
québécoise. (15 h 45)
M. Tremblay (Rimouski): Très bien, M. le recteur. Je vais
certainement me faire un défenseur des propositions que vous faites dans
votre mémoire auprès du ministre, auprès du gouvernement,
et j'espère qu'on aura des améliorations au régime tel que
proposé. M. le ministre.
La Présidente (Mme Hovington): M. le ministre. Il vous
reste une dizaine de minutes.
M. Ryan: Oui, Mme la Présidente, il me fait plaisir de
saluer la direction de l'Université du Québec à Rimouski.
Je pense que le mémoire de l'Université du Québec à
Rimouski situe avec beaucoup de vitalité la dimension régionale
dans le développement de notre système universitaire, et aussi le
rôle des établissements universitaires régionaux dans le
développement de leurs régions respectives. Ainsi que vous l'avez
rappelé tantôt, le gouvernement a tenu compte des
universités en région dans l'ajustement des bases de financement
des universités qui a été institué à compter
de cette année. Nous avons prévu des montants spéciaux
pour les universités en région. Nous n'en avons pas fait un
étalage sensation-naliste; ce n'est pas notre genre. Mais nous l'avons
fait et c'est à l'Université du Québec qu'il incombe de
répartir ces sommes suivant des critères qu'elle définira
elle-même. Mais il y a des sommes précises qui ont
été réservées pour le partage entre les
établissements situés dans les régions
périphériques au titre des coûts additionnels
qu'entraîne leur implantation dans ces régions. Et c'est un
début. Je pense bien que c'est loin d'être la fin. C'est un
début. C'est un principe que nous voulions établir clairement. Il
l'était déjà dans des mesures antérieures, mais
il
n'avait pas reçu de développement depuis
déjà un bon nombre d'années. Cela a été
fait. J'en suis bien content.
Je voudrais profiter d'une remarque que vous avez faite, M. Dionne, pour
préciser la portée exacte d'une déclaration qui m'a
été attribuée à maintes reprises et qui devient de
plus en plus mal rapportée à mesure qu'on la
répète. On m'a interrogé souvent, moi, sur l'impact
éventuel d'une hausse des frais de scolarité sur le taux de
fréquentation. Je suis un petit peu... comme tout le monde, je ne le
sais pas avec précision, parce que nous n'avons pas fait
l'expérience depuis 24 ans, au Québec. Il faudrait être
bien bien sage et bien voyant pour être capable d'apporter une
réponse précise. Par souci d'honnêteté, J'ai dit: II
y aura probablement un léger effet, qui peut aller de zéro
à 5 %. J'aurais bien pu dire de zéro à 3 %, ça
aurait été aussi bon. Mais, voulant être honnête,
j'ai dit: Ça peut aller de zéro à 5 % et je m'appuyais
pour dire ça, pas tant sur les études de Stager et tout
ça. Ces gens ne le savent pas plus que vous et moi. M. Lemelin, en
particulier, il a dit lui-même, qu'il ne le savait pas plus que personne.
Je m'appuyais surtout sur des données statistiques concernant
l'évolution des clientèles dans d'autres provinces canadiennes,
par suite des ajustements qu'elles ont faits. J'ai constaté que, dans
certaines provinces. II n'y a eu aucun impact et, dans d'autres provinces, il y
a eu une diminution pendant deux ou trois ans. Est-ce que c'était
attribuable à la hausse des frais de scolarité? Ça, je ne
le sais pas avec précision. Mais les statistiques indiquent qu'il y a eu
un certain mouvement; je voulais être honnête et rendre compte de
ça. Mais quelqu'un qui dit: Le ministre a dit: Ça va être 5
% et ça lui est indifférent, me trahit totalement. Je me soumets
volontiers, parce que c'est la rançon des hommes politiques qui sont
dans le débat public, il faut qu'ils soient capables de vivre avec
ça. Mais quand l'occasion leur en est donnée, ils redressent les
perspectives.
M. le député de Rimouski a dit tantôt qu'une des
mesures que vous avez proposées, une allocation de 400 $ pour les
étudiants inscrits dans les universités en régions
périphériques, il a indiqué que c'est une chose que nous
allions étudier avec attention. Nous allons le faire sûrement
parce qu'il y a quelque chose là-dedans. Et dans la mesure où on
pourrait établir qu'il y a des coûts spéciaux explicites et
identifiables qui doivent être associés à la
fréquentation de l'université en régions
périphériques, en relation avec le régime d'aide
financière aux étudiants, évidemment, je pense que c'est
notre obligation de les étudier. En principe, nous essayons
d'établir des normes pour tout le Québec, en matière de
coûts admissibles, par exemple, sauf cas très spéciaux.
Parce que quand on commence à diviser par région, ça
devient un gros problème. Je ne veux pas trop m'embarquer
là-dedans parce qu'on aurait des tables multipliées par dix
à tout point de vue. Ce n'est pas tout, une table divisée par
dix. Le logement serait de tel pointage, à telle place, de tel autre
pointage, à telle autre; on n'en finirait pas. L'indice de
chômage, l'indice de rémunération, le coût de
l'alimentation, le coût de l'habillement, on n'en finirait pas. Je pense
qu'on doit avoir une table qui est commune. Mais s'il y a des points
précis sur lesquels les problèmes exprès sont
démontrables, je pense bien qu'on a l'esprit assez ouvert pour les
regarder avec Intérêt et attention.
Je note que les problèmes des étudiants à temps
partiel vous préoccupent également. J'ai Indiqué, ce
matin, que nous avions certaines difficultés en relation avec le projet
que nous avons conçu. C'était surtout sous forme de bourse. Il y
a quelque chose qui ne colle pas tout à fait à la logique
générale de notre système de ce
côté-là. Nous allons l'étudier encore pendant
quelques mois et nous examinerons la recommandation que vous avez faite
à cet égard.
La proposition de congé d'intérêts pendant une
période de trois ans à l'issue des études pour celui ou
celle qui reste en région, ça, je pense que c'est un cas
intéressant. Quand on sait le fort degré d'attraction des centres
métropolitains sur les diplômés universitaires qui sont
dans des régions périphériques, je pense qu'il y a une
proposition qui mérite d'être examinée avec attention et
nous allons sûrement le faire.
Je souligne un point. J'ai remarqué que la Conférence des
recteurs l'avait fait ce matin et vous le faites aussi. Vous ne pensez pas que
l'impact sur la fréquentation sera considérable, s'il y en a un.
Vous ne savez même pas s'il y en aura un, d'après ce que j'ai
compris. Je suis content de vous entendre dire ça, non pas parce que
ça confirme la thèse du gouvernement, non, mais parce que je me
dis: S'il y a quelqu'un qui a Intérêt à garder ses
étudiants, c'est bien le recteur d'une université et s'il voyait
qu'il y a un danger, il me semble qu'il nous le dirait spontanément. Je
sais le zèle que déploie l'université pour aller recruter
de la clientèle. Les universités en ont besoin pour justifier
leur budget et justifier leur raison d'être dans une région. C'est
comme n'Importe quelle entreprise, il faut que la population réponde.
Alors, moi, je ne vois pas que les recteurs viendraient dire, seulement pour
faire plaisir au gouvernement: Ne vous Inquiétez pas, ça va, il
n'y aura pas de problème. Il me semble que s'il y en avait un, vous nous
le diriez. Je ne sais pas si vous pourriez apporter des précisions sur
ce point-là en particulier qui m'Intéresse tout
spécialement. Parce que, quand nous avons discuté du montant de
la hausse, je vous dirai franchement que nous avons beaucoup pensé aux
universités en régions. Et si nous avions pu la situer à
un niveau plus modeste, nous l'aurions fait volontiers.
M. Dionne: M. le ministre, en ce qui a trait au premier
élément, les 400 $ additionnels, je ne voudrais pas qu'on
résume notre argumentation à la question des coûts parce
que, là-dessus, évidemment, on peut avoir des points de vue...
Souvent, l'imagination des personnes qui font l'exercice, ça demeure une
problématique assez complexe. C'est carrément, une mesure
discriminatoire, objective qui facilite ou favorise le fait qu'on étudie
en région parce qu'on observe qu'il y a un exode. Si on pense, comme
société, qu'on a intérêt à conserver les
cerveaux dans les régions, avoir un mécanisme proactif à
cet égard-là... Évidemment, je comprends votre question
par rapport aux coûts, ça prend des quanta raisonnables. Pour
cette question-là, je voulais rétablir cette
dimension-là.
Par rapport à l'autre question, écoutez, la position qu'on
a émise, M. le ministre, sur les frais de scolarité, on a dit: On
comprend que le gouvernement envisage cette mesure quand on regarde le paysage
nord-américain. Là-dessus, il faut regarder le paysage
nord-américain, le paysage canadien. Cela dit, nous avons
manifesté des inquiétudes par rapport à
l'accessibilité et vous-même, vous dites qu'il faut être
grand clerc pour pouvoir évaluer précisément l'impact.
Donc, on a manifesté de l'inquiétude. Les mesures que nous
proposons au niveau du régime de prêts et bourses nous semblent
être des mesures qui sont susceptibles de réduire
substantiellement l'impact psychologique que ça pourrait avoir à
des coûts qui, somme toute, ne sont pas extravagants. Évidemment,
on les trouve encore plus élevés ce matin, peut-être bien,
après le budget fédéral d'hier soir, mais ils ne sont
quand même pas, en soi, trop extravagants, un peu une dimension qui
permet d'éviter une impression ou l'impression que ça devient
Inaccessible ou hors de portée, de sorte que beaucoup moins inquiets...
dans la mesure, évidemment, où les mesures que nous proposons
avec modestie ou certaines d'entre elles ont des chances d'être
agréées par le gouvernement, évidemment.
La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. Dionne. Alors, M.
le député d'Abitibi-Ouest...
M. Gendron: Oui, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Hovington): ...que je reconnais.
M. Gendron: Je voudrais remercier les gens de l'Université
du Québec à Rimouski pour la présentation de leur
mémoire. Moi, ce que j'ai trouvé rafraîchissant, c'est bien
plus vos préoccupations régionalistes, réelles,
sincères que les propos de votre député avec son
laïus complètement déphasé, parce que c'est sa propre
collègue qui se lamentait il y a deux ans - c'est sa propre
collègue, peut-être qu'il ne se le rappelle pas - Nos
universités ont atteint l'état de crise,
Québec doit Intervenir d'urgence. Elle aussi avait accès
aux mêmes données, elle était censée avoir
accès aux mêmes données que le député de
Rimouski qui a fait accroire que ce ne sont pas des farces, tous les efforts
que ces gens-là ont fait pour augmenter le financement universitaire. Si
c'était vrai, peut-être qu'elle aurait été moins
"lamentatrlce". De toute façon, ça ne faisait pas tellement
sérieux.
Au-delà de ça, le ministre de l'Éducation a dit, et
vous avez repris ses propos: II faudrait être très grand clerc
pour déterminer avec précision et exactitude l'effet du
dégel sur l'accessibilité. Je pense qu'à ce
niveau-là, sincèrement, on n'a pas à faire de longues
discussions. Mais l'essentiel de mon argumentation, ce matin, ce n'était
pas nécessairement Stager, ce n'était pas nécessairement
Lemelin, c'était bien plus vous-même, c'était bien plus
vous-même. Je voudrais que tout le monde se le rappelle, comment on peut
dire - on ne peut pas parler des deux côtés de la bouche à
moins d'avoir une infirmité - en même temps, dans une
déclaration - là, je cite le maître à penser, M. le
ministre de l'Éducation: La politique de gel observée par tous
les gouvernements qui se sont succédé à Québec a
contribué à une hausse très significative et importante
sur le taux de fréquentation universitaire au Québec point. Moi,
j'arrête là, je dis: Je ne peux pas dire ça et, a
contrario, dégeler et il ne se passera rien. Ça, ce n'est pas
compliqué, ce n'est pas Stager, ce n'est pas Lemelin et je ne sais pas
c'est qui. Alors, mon point, c'est juste ça.
Devant ça, il y a deux questions que j'aimerais vous poser. La
première, c'est que c'est frappant de se faire dire, avec raison, que 92
% des étudiants à temps plein chez vous bénéficient
du régime d'aide financière. Vous dites ça dans votre
mémoire: 92 % des étudiants inscrits. Et, deuxièmement -
ça, ça m'apparaît être des préoccupations
réalistes - vous dites: On est vraiment très
préoccupés par le problème de nos étudiants
à temps partiel, parce qu'on a beaucoup d'étudiants à
temps partiel. La question que je vous pose, toujours reliée aux
questions qui nous préoccupent: Est-ce que vous, comme recteur de
l'Université du Québec à Rimouski, sachant que vous n'avez
que 1,8 % de fréquentation, sachant que 92 % des étudiants ont
besoin du régime d'aide financière ou ont le régime et que
vous avez beaucoup d'étudiants à temps partiel, avez un jugement,
vous, à porter aujourd'hui sur le pourcentage d'étudiants que
vous prétendez qui ne feront pas nécessairement le choix de
poursuivre des études universitaires suite au dégel des frais de
scolarité? (16 heures)
La Présidente (Mme Hovington): M. Dionne.
M. Oionne: Question difficile. M. Gendron: Oui.
M. Dionne: J'ai le sentiment, j'ai le net sentiment que notre
responsabilité, je le prends comme citoyen et comme recteur de
l'université... Je vais vous dire clairement que l'opposition
sèche au dégel ne m'apparaît pas une position raisonnable
quand nous vivons dans une société, la société
actuelle nord-américaine. Je pense, par ailleurs, qu'il faut
s'ingénier à regarder des éléments de
particularités, celles que nous mentionnons, pour trouver des
stratégies plus fines pour vaincre, pour tenir compte des situations
dans les régions, le fait qu'il faut progresser au niveau de la
fréquentation universitaire, le fait qu'on a un niveau de chômage
élevé, qu'on a une population qui est dispersée et qu'on a
des étudiants à temps partiel. Je pense qu'il y a des mesures et
je continue de penser que le système des prêts et bourses est un
véhicule significatif qui peut amener un support important pour
maintenir et développer l'accessibilité.
On peut discuter, évidemment, sur l'importance des hausses.
Là-dessus, on peut faire toutes sortes de spéculations. Mais,
sincèrement, je ne peux pas souscrire à l'argument strict, non au
dégel sans autre forme d'analyse; ça ne m'apparaît pas
responsable et, comme recteur, je n'aurais pas le goût de
prétendre ça. Je préfère qu'on regarde la
conjoncture nord-américaine et canadienne, qu'on regarde l'effort
consenti par les gouvernements au niveau de la recherche collective, l'effort
qui doit être consenti par les usagers et les caractéristiques de
ces usagers-là dans les régions qui feraient que leur fardeau
qu'ils peuvent porter ou l'assistance qu'on doit leur fournir doit être,
elle, articulée de façon plus judicieuse. C'est un peu le sens
des propositions que nous faisons. Et je compte bien, quand je vous
réponds de cette façon-là, que certaines des mesures ou
l'ensemble, suivant des quanta qui peuvent être ajustés - surtout
au lendemain du budget fédéral - on puisse regarder cette
situation-là et avoir un certain nombre de mécanismes dans des
systèmes de prêts et bourses qui sont discriminatoires, de
façon positive, pour les régions. Et, à ce
moment-là, je pense que nous pouvons avancer correctement.
M. Gendron: Ma deuxième question porterait sur votre
assertion, le fait que le régime d'aide financière aux
étudiants doit viser à favoriser une plus grande
accessibilité aux études universitaires dans les régions
périphériques. J'ai de la difficulté à concilier
votre appréciation du nouveau régime proposé,
sincère, l'excellence des mesures adaptées aux
particularités régionales que vous proposez, puisqu'il y en a des
bonnes. Je prétends que les 400 $ additionnels pour prendre des
universitaires en régions périphériques,
sincèrement, c'est une excellente suggestion, parce qu'il faut
développer des méthodes pour, effectivement, permettre à
nos jeunes d'être davantage attirés à faire des
études universitaires chez nous. Il faut les garder également. La
remise de la dette et tout ça... Mais là j'arrive à ma
question. Vous dites: Le régime doit viser à favoriser une plus
grande accessibilité aux études universitaires dans les
régions périphériques. Est-ce que, à la lecture du
projet de loi 25 que nous avons sur la table, vous avez trouvé,
effectivement, que dans ces mesures proposées il y avait là une
plus grande accessiblité aux études universitaires?
M. Dionne: Je pense, effectivement, que dans l'économie
générale des réformes envisagées où il y a
beaucoup d'éléments, il y a quand même un certain nombre
d'éléments qui concourent à bonifier le régime.
Écoutez, ma compréhension du dossier, c'est que le coût du
régime de prêts et bourses après la réforme
proposée par rapport au coût du régime avant la
réforme, il y a quand même un delta d'approxi-mativement 50 000
000 $ ou 60 000 000 $. Ça, c'est ma compréhension.
Ce que nous disons, c'est que la proposition actuelle qui est là
et, dans notre cas, qui nous semble être une proposition qui est une
amélioration par rapport à la situation actuelle, est
bonifiée des éléments de particularités pour tenir
compte des caractéristiques des clientèles étudiantes et
du tissu économique des régions, de la nécessité
d'accélérer l'accessibilité, pas uniquement de la
maintenir. Je pense que tout le monde partage l'idée à savoir que
notre principale richesse, les ressources humaines, il faut continuer d'y
concourir. Avec ces éléments-là, je pense que nous aurions
une situation intéressante. Donc, je pense qu'en bonifiant le
système de prêts et bourses, en l'accompagnant des recommandations
que nous faisons par rapport aux régions, ce sont des mesures qui sont
susceptibles qu'on puisse poursuivre le développement de nos
collectivités.
La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. Dionne. Il reste
combien de minutes? Alors, une dernière question, M. le
député d'Abltibi-Ouest.
M. Gendron: Une très courte question. Est-ce que vous avez
une opinion sur un éventuel Impôt postuniversitaire?
M. Dionne: Sur?
M. Gendron: Un impôt postuniversltalre. À la fin des
études, que les étudiants soient amenés à
contribuer davantage au coût de leurs études dans la
société, avez-vous une opinion là-dessus? Avez-vous
envisagé cette hypothèse-là, plutôt que les
clencher, comme c'est le cas, avant même qu'ils aient fini leurs
études?
M. Dionne: On ne l'a pas étudié dans cette
perspective-là. Évidemment qu'à ce moment-là,
je
pense, c'est une mesure de portée plus générale. On
a essayé de s'employer à identifier des mesures qui nous
apparaissaient spécifiques pour répondre a des besoins
caractérisés de la conjoncture qu'on vit dans les régions.
La mesure dont vous parlez, qui va être de portée plus
générale, on a pensé que d'autres qui regardent le paysage
d'ensemble peuvent s'y intéresser. On n'a pas réfléchi
là-dessus.
La Présidente (Mme Hovlngton): Mme la
députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, Mme la Présidente. Je dois dire
qu'à l'instar de mon collègue, j'ai apprécié vos
recommandations touchant les modifications qui pourraient être
apportées en vue d'avoir une plus grande rétention de nos
étudiants en région. Je les trouve particulièrement
intéressantes.
Je dois dire - c'est un commentaire -j'écoutais le
député de Rimouski tout à l'heure, et à mon grand
étonnement, je me rappelle, et d'ailleurs je pense que ça avait
été repris dans les journaux chez vous, qu'en 1987-1988, il avait
déclaré, à l'occasion de l'étude des
crédits, sur le financement des universités que
l'Université de Rimouski était bien financée, qu'elle
n'avait pas de problème de financement. Alors, à mon grand
étonnement, parce que je lui avais dit: Ecoutez, on a vraiment... En
tout cas, ça ne me paraissait pas être conforme à la
réalité, alors que, là, il nous dit qu'on vous avait
laissé complètement dans la dèche. Mais je trouvais que
c'était important. D'ailleurs, si vous voulez, on vous enverra à
nouveau ses propos sur cette question-là, je pense que ce n'était
pas très sérieux, pas plus sérieux que les remarques de
tout à l'heure.
Mon collègue d'Abitibi-Ouest disait: On avait avancé...
D'abord, une remarque. L'Opposition n'a jamais dit qu'il ne fallait pas
augmenter et le financement des universités, on a simplement dit qu'il
fallait aller par une autre source que l'augmentation des frais de
scolarité. Ce que nous avançons: Oui, les étudiants
doivent participer, une fois les études terminées, par le biais
d'un impôt-études qui est beaucoup plus équitable, parce
que, une fois les études terminées, vous payez selon votre
revenu. Donc, si vous êtes en région et que vous faites 10 000 $,
12 000 $ et 15 000 $ les trois premières années, vous payez 1 %
ou 1,5 % sur le revenu gagné sauf que si vous êtes en
région et un médecin, que vous vous tapez 90 000 $ ou 100 000 $
la première année, vous payez là-dessus aussi-Alors,
ça, c'est une proposition qui avait été d'abord
développée par un chercheur de Concor-dia qui a été
reprise par le Parti québécois qui en a fait une proposition
formelle. Ça nous permettrait non seulement d'accorder un meilleur
régime d'aide financière aux étudiants, mais ça
nous permettrait aussi, et nous sommes cons- cients de ça, d'assurer une
indexation automatique du financement des universités. On pourrait le
faire par obligation contractuelle avec l'étudiant qui s'inscrit dans
une université, il y a moyen de s'arranger avec ça, sauf que
personne n'a pensé qu'il était important d'examiner ça, on
s'est contenté de faire comme on fait beaucoup ailleurs. On se dit:
Ça coûte cher dans les hôpitaux, les malades; le BS nous
coûte cher; on ne crée pas d'emploi. On dit: Tapons sur le BS, sur
les assistés sociaux. L'approche qu'on avait est exactement la
même alors qu'on avait d'autres voies de solution. C'était
ça la question de mon collègue. Et on ajoutait: II faudrait
mettre à contribution les entreprises en créant un fonds, 1 %,
pour faire de la formation professionnelle et de la recherche, fonds qui
pourrait être géré par un comité tripartite
composé des universités, des entreprises et du gouvernement, mais
rattaché directement, parce que c'est toute une conception, au cabinet
c'est-à-dire le premier ministre. Alors, nous avions deux propositions
très précises. Dans les universités ailleurs, au
gouvernement d'ailleurs, personne n'a songé à les étudier
de façon sérieuse et nous estimons que ce serait une façon
équitable d'assurer un bon financement du réseau de
l'université et en faisant payer tout le monde. Actuellement,
l'étudiant paie, la société paie, les entreprises beaucoup
moins. On se compare tout le temps à l'Ontario. En Ontario, les
entreprises paient, participent au financement des universités;
ça, on oublie toujours de faire ce parallèle. Alors, ça
c'était la proposition.
D'abord, une petite question: Est-ce que vous tenez pour acquis que le
fruit de l'augmentation des droits de scolarité, la partie qui va
être versée aux universités, le gouvernement va maintenir
son financement, va l'augmenter ou va le diminuer?
M. Dionne: Les perspectives que nous avons à cet
égard, c'est que le gouvernement a reconnu à un moment
donné que le réseau universitaire québécois
souffrait de sous-financement. Il y a eu une première injection au
dernier budget, significative, et la perspective que les correctifs
éventuels viennent, entre autres, d'une partie des revenus venant des
frais de scolarité, je pense que ça a été
affirmé effectivement et là-dessus, je pense, comme citoyen, on
l'a vu, sauf que... C'est ce que j'anticipe effectivement.
Mme Blackburn: Je me rappelle la douloureuse expérience de
tout le réseau des garderies l'an passé, exactement, à peu
près à la même période, où on avait
lancé un gros programme très généreux. Puis, le
fédéral a coupé, puis le Québec a dit: On n'en
donne pas plus parce qu'on n'a pas les moyens. Ça ressemble
drôlement à ce qui risque de se passer cette année.
Là, je vais poser une dernière question parce qu'on me dit qu'il
reste trois minutes. Il y a quelque chose
qui m'intrigue. J'ai mal formulé ma question sans doute ce matin.
Mais, à la page 33 de votre mémoire, vous dites "qu'un programme
adapté de remise de dette peut constituer un incitatif réel
favorisant la diminution de la durée des études" et, en page 37,
vous dites, toujours dans la même perspective, afin d'inciter les
étudiants à compléter leurs études dans des
délais plus normaux... appuie la proposition limitant le nombre de
périodes d'admissibilité à la bourse ne dépassant
pas de deux sessions la durée prévue pour le cycle normal.
L'impression qui se dégage à la lecture de ça, aux pages
33 et 37 de votre mémoire... Alors, il y a deux mesures, une qui est les
25 % de remboursement et l'autre qui dit: Après deux sessions de plus
que le cycle normal, fini, "no way" plus de bourse. Alors, c'est ça. Ces
deux mesures-là, vous prétendez que ça va avoir comme
effet de réduire la durée des études. Je vais essayer de
formuler ma question correctement: Est-ce que le fait de rester indûment
ou de prolonger indûment ses études n'est le fait que des
étudiants qui sont bénéficiaires de l'aide
financière aux étudiants? Ils sont 42 %. Est-ce qu'il y a
seulement eux autres qui restent trop longtemps collés le
derrière à l'université? Excusez-moi l'expression. On a
l'impression que c'est juste eux autres parce que la mesure ne peut viser que
ceux qui sont bénéficiaires de l'aide financière. Je
trouve que c'est très péjoratif ce qu'on fait là. On a
l'impression qu'il n'y a que les étudiants bénéficiaires.
Ils s'assoient, ils sont bien payés, ils sont
bénéficiaires du régime de prêts et bourses et c'est
eux autres qui restent trop longtemps à l'université. Est-ce que
c'est vrai ou si ce n'est pas vrai? Chez vous, c'est difficile à
mesurer, je le comprends; 92 % en ont. Mais je me demandais, parce que
ça doit s'appuyer sur quelque chose, chaque fois que je relis ça,
je suis incapable de penser que ce doit être les seuls. Et vous
êtes-vous demandé, sans doute que vous vous l'êtes
demandé, si le fait que ces étudiants bénéficiaires
du régime d'aide financière restaient si longtemps à
l'université ce n'était peut-être pas exclusivement parce
que c'étaient des tire-au-flanc, mais parce qu'ils travaillaient en
même temps qu'ils étudiaient parce qu'ils manquent de moyens?
Alors, moi, ces deux affaires-là, chaque fois, je vous dis, ça
sent la discrimination à l'endroit des plus démunis.
La Présidente (Mme Hovington): M. Dionne.
M. Dionne: Écoutez! J'ai un peu de difficultés
à comparer deux populations compte tenu du fait qu'on a 92 %.
Mme Blackburn: Ce n'est pas vous. C'est dans le régime,
ça.
M. Dionne: Par le biais de la mesure que nous identifions,
c'était carrément un mécanisme pour Inciter les
étudiants et les étudiantes à avoir une cadence qu'on
pourrait qualifier de normale. Là-dessus, écoutez, si on veut
accroître la fréquentation universitaire avec les espaces et les
ressources dont on dispose, je pense qu'on a intérêt à
concourir à ce que le rythme d'acheminement soit le plus correct
possible. C'est ça, ma réaction.
La Présidente (Mme Hovington): Alors...
Mme Blackburn: La question était plus simple, est-ce que
ce n'est pas le fait que des bénéficiaires prolongent les
études? C'était simplement ça.
La Présidente (Mme Hovington): Bon. Merci. Votre temps est
écoulé. Quelques secondes en guise de conclusion, M. le
député d'Abitibi-Ouest?
M. Gendron: Ahl Merci beaucoup, parce que, sincèrement,
dans les recommandations qui ont trait au régime, vous avez quand
même des mesures intéressantes, spécifiques et là,
je me fie à la force de conviction de votre député; je
vais l'appuyer pour convaincre le ministre du bien-fondé des mesures de
votre mémoire. En espérant qu'à ce nlveau-là, il
soit plus convainquant que...
Une voix: Que le ministre.
M. Gendron: ...sur d'autres dossiers dont j'ai eu
connaissance.
La Présidente (Mme Hovington): M. le ministre de
l'Éducation, en guise de conclusion.
M. Ryan: Je voudrais simplement ajouter, pour l'information de
l'Opposition, parce que tout le monde ailleurs que dans l'Opposition, en est
déjà informé, que si nous avons retenu le facteur
régional dans les critères de répartition des
crédits additionnels injectés dans la base de financement des
universités cette année, et les universités en
régions en sont très satisfaites, on le doit en grande partie
à la vigilance du député de Rimouski.
Des voix: Ohl Une voix: Bien sûr!
La Présidente (Mme Hovington): Ha, ha, ha! Bravo!
M. Ryan: Le député de La Tuque, on est en train
d'essayer d'Implanter l'enseignement collégial chez lui, là.
L'enseignement universitaire va venir après. Ha, ha, ha! Non, je pense
qu'il y a eu un travail de tout le monde, mais je vous assure que le
député de Rimouski est toujours
très vigilant en ce qui touche le facteur régional et, en
particulier, les intérêts légitimes de l'Université
du Québec à Rimouski, même quand iI s'agit de navires. Ceux
qui sont au courant des questions...
La Présidente (Mme Hovington): Des dossiers.
M. Ryan:... d'océanographie comprendront. Ha, ha, ha! Je
vous remercie infiniment. Je pense que c'est très important que la
dimension régionale vienne s'ajouter à nos perspectives. Vous
demandiez qu'on en fasse peut-être un septième principe. Je ne
suis pas sûr que nous puissions aller jusque-là, mais, en tout
cas, qu'il faille en tenir compte et l'ajouter comme objectif
complémentaire au grand principe de fond, ça m'apparaît
nécessaire, et comptez que nous allons étudier dans cet esprit
les propositions que vous avez soumises de manière très
intéressante. Merci beaucoup et bon succès à
l'Université du Québec à Rimouski.
La Présidente (Mme Hovington): Permettez-moi, en tant que
vice-président de la commission de l'éducation, de vous
féliciter à mon tour pour la qualité du mémoire que
vous avez présenté, et surtout pour les mesures
régionalis-tes qui y sont commentées. Je suis une fille de
région moi-même, issue de la Côte-Nord et maintenant
représentant une population de la Côte-Sud.
Je veux rassurer le député d'Abitibi-Ouest sur le fait que
je serai aussi aux côtés de mon collègue de Rimouski,
d'abord en tant que voisine de comté et en tant que représentante
d'une région éloignée à l'Assemblée
nationale, pour que surtout vos mesures visant l'intégration au
marché du travail, et ce sont vraiment les mesures qui m'apparaissent
à moi très intéressantes pour justement garder nos
cerveaux en région... Par exemple, l'exemption des nouveaux
diplômés universitaires de la dette jusqu'à trois ans
m'apparaît extrêmement importante. Vous savez, quand on parle de
fuite de cerveaux, souvent j'ai des gens de mon comté de
Sainte-Anne-des-Monts, Cap-Chat, Tourelle ou Matane qui vont étudier
chez vous à Rimouski et qui ne reviennent pas à Matane. Alors,
pour les gens de Matane, Rimouski est peut-être un grand centre. Il
faudrait voir à ce que la fuite des cerveaux cesse vis-à-vis du
comté vers Rimouski aussi.
Cela dit, les mesures que vous présentez sont très
intéressantes. Merci beaucoup d'avoir bien voulu accepter de
présenter votre mémoire aux membres de cette commission. Bon
retour chez vous, à Rimouski.
M. Dionne: Merci de votre attention. Merci.
La Présidente (Mme Hovington): Nous allons inviter, si
vous le voulez bien, l'Université du
Québec en Abitibi-Témiscamingue, à bien vouloir
prendre place. Nous allons même peut-être suspendre quelques
minutes pour laisser le temps aux représentants de l'Université
du Québec en Abitibi-Témiscamingue de prendre place.
(Suspension de la séance à 16 h 20)
(Reprise à 16 h 23)
Université du Québec en
Abitibi-Témiscamingue
La Présidente (Mme Hovington): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission va reprendre ses travaux.
L'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue est
représenté par M. Jean Turgeon, secrétaire
général, et par M. Normand Murphy, directeur du service aux
étudiants et régistraire. Alors, allez-y. Vous avez 20 minutes
pour la présentation et 40 minutes seront réservées pour
les échanges.
M. Turgeon (Jean): Merci. Mme la Présidente, M. le
ministre, Mmes et MM. les députés, membres de cette commission
parlementaire, dans le cadre justement de cette commission parlementaire
relative au projet de loi 25, nous sommes heureux de vous présenter la
position de l'Université du Québec en
Abitibi-Témiscamingue telle que définie par son conseil
d'administration.
Si vous me le permettez, en quelques mots, je vous présenterais
notre établissement. L'Université du Québec en
Abitibi-Témiscamingue offre des services d'enseignement et de recherche
dans cette vaste région et dans le Nord du Québec depuis 1970.
Elle dispense une trentaine de programmes d'études de premier cycle et
trois programmes de maîtrise à 2500 étudiants
répartis dans dix villes de son territoire.
À l'instar des autres universités
québécoises, notre établissement a connu sa part des
problèmes financiers des universités. Le conseil d'administration
de l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue a donc
suivi avec beaucoup d'intérêt les nombreuses démarches du
ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science qui, au cours des
dernières années, a travaillé à la mise en oeuvre
de moyens susceptibles de régler la crise financière que
connaissent les établissements universitaires. A ce sujet, les fonds qui
ont été octroyés au réseau de l'Université
du Québec et qui ont été partagés au cours du mois
de décembre dernier ont permis d'entreprendre le
réaménagement des finances de notre établissement de
façon à pouvoir reprendre le niveau de la qualité des
services qui s'étaient quand même grandement
détériorés au cours des dernières
années.
En janvier dernier, le conseil d'administration de l'UQAT s'est
prononcé en faveur de
l'augmentation des frais de scolarité et vous connaissez
naturellement la composition des conseils d'administration d'universités
dans le réseau de l'Université du Québec qui regroupent
des étudiants, des membres socio-économiques, des professeurs et
chargés de cours, et la résolution du conseil d'administration a
été adoptée unanimement. En adoptant cette
résolution, le conseil a précisé que les sommes
générées par le dégel des frais de scolarité
devraient être retournées aux universités sous forme de
péréquation et ceci s'entend naturellement à
l'intérieur du réseau de l'Université du Québec
suivant la formule de partage des subventions que ce réseau s'est
donné récemment.
Le conseil a également souhaité que les sommes recueillies
par le biais du dégel des frais de scolarité devraient être
utilisées pour améliorer les services offerts aux
étudiants. Et enfin, le conseil d'administration a insisté pour
que cette hausse soit accompagnée d'une amélioration du
système d'aide financière aux étudiants afin qu'elle ne
porte pas atteinte aux grands principes d'accessibilité qui ont toujours
prévalu et, en particulier, dans le réseau de l'Université
du Québec.
Alors, à la suite de cette position prise par le conseil, nous
nous présentons aujourd'hui devant cette commission parlementaire afin
d'apporter quelques commentaires au document d'orientations gouvernementales
relatif à l'aide financière aux étudiants dans les
années quatre-vingt-dix. Quelques mots d'abord sur le dégel et
ses impacts. Se questionnant sur le fait que seulement le tiers de sa
clientèle étudiante à temps complet
bénéficiait d'une bourse et que, donc, seule cette portion
d'étudiants était assurée de ne pas être
pénalisée financièrement par le dégel des frais de
scolarité, le conseil d'administration, au moment de ses discussions,
était perplexe sur les impacts que pourrait avoir l'augmentation des
frais de scolarité sur les autres clientèles de
l'établissement, c'est-à-dire sur les clientèles qui ne
bénéficient pas des bourses.
Toutefois, l'étude produite par le ministère de
l'Enseignement supérieur et de la Science permet de constater que le
nombre de bénéficiaires du régime d'aide financière
devrait augmenter et que les diverses mesures en vue d'harmoniser le
régime auront pour effet de minimiser pour certains l'impact de la
hausse des frais de scolarité. Outre les nouvelles pistes
envisagées au niveau de la remise de la dette et des clientèles
à temps partiel, les recommandations présentées demeurent,
à notre avis, des modifications ponctuelles très
intéressantes qui ne sont pas de nature à remettre en question
les fondements mêmes du régime. Il s'agit pour nous toujours du
même régime auquel on a ajouté des bonifications au fil des
ans.
L'Université du Québec en Abitibi-Témis-camingue,
à l'instar de la Conférence des rec- teurs et des principaux des
universités du Québec que vous avez entendue ce matin, et de
l'ensemble des établissements universitaires, se réjouit tout de
même de voir apparaître un certain nombre d'améliorations
qui font l'objet de requêtes soutenues depuis plusieurs années de
la part des responsables institutionnels de l'aide financière aux
étudiants. L'indexation de la table de contribution des parents en est
un exemple. Nous y reviendrons.
Alors, l'intervention de l'UQAT se veut donc un appui à la
position de la CREPUQ, que nous avons entendue ce matin, et une occasion
d'apporter quelques brefs commentaires additionnels. L'objectif
général du régime d'aide financière étant
d'assurer l'accessibilité aux études postsecondaires, II faudrait
qu'aucune mesure ne vienne entraver cet objectif. Bien que nous ne puissions
prédire l'avenir, nous sommes portés à croire que le
dégel des frais aura peu d'effets négatifs sur les
clientèles étudiantes de la région de
l'Abitibi-Témiscamingue et du Nord du Québec. Toutefois, il
aurait été souhaitable que ces frais de scolarité soient
indexés à chaque année.
L'UQAT, de plus, souscrit d'emblée au principe d'une
participation tripartite, l'étudiant ou l'étudiante, la famille
et l'État. L'université reconnaît que même si
l'étudiant doit, dans un certain sens, hypothéquer son avenir, il
sera tout de même celui qui en bénéficiera le plus dans le
futur.
Je poursuivrais maintenant avec quelques commentaires spécifiques
sur les orientations gouvernementales. Sur la contribution parentale,
l'Indexation de la table de contribution des parents fait l'objet d'une demande
répétée depuis les quatorze dernières années
de la part des établissements d'enseignement. Les recommandations
à l'effet de l'indexer sont donc accueillies avec soulagement, d'autant
plus qu'elles permettront à un bon nombre de bénéficiaires
de voir leur aide augmenter. Il serait également souhaitable que cette
table puisse être révisée périodiquement.
À l'instar de la CREPUQ, nous sommes d'avis que le premier palier
devrait être haussé à 2500 $ afin de soutenir certaines
familles à revenu plus modeste. A titre d'exemple, il nous
apparaît difficilement acceptable, actuellement, qu'une famille avec un
revenu net de l'ordre de 21 700 $, avec également un enfant aux
études postsecondaires, soit obligée de contribuer pour un
montant de plus de 4000 $. Plusieurs autres exemples de cet ordre pourraient
vous être fournis et nous en avons quelques-uns qui sont assez
pathétiques.
En regard également de cette recommandation, non seulement est-il
souhaitable de tenir compte du revenu net tel qu'établi par le fisc,
mais encore faudrait-Il mettre sur pied des mécanismes pour aller
recueillir cette information directement au ministère du Revenu. Une
telle
procédure éliminerait une série de gestes
administratifs et de contrôle de la part du ministère de
l'Enseignement supérieur et de la Science et simplifierait de beaucoup
les démarches des étudiants et des parents. La presque
totalité des bénéficiaires et de leurs parents
suggèrent d'ailleurs à chaque année de quérir cette
information directement au ministère du Revenu.
Sur la contribution du candidat. En regard à une contribution
minimale fixe selon l'ordre d'enseignement, il faudrait à tout le moins
que cette contribution corresponde à la réalité
collégiale et universitaire.
Les programmes coopératifs. Les sessions d'études à
temps complet au cours de l'été et les différents
calendriers universitaires constituent autant de cas où l'application
d'une contribution minimale fixe risque de créer des préjudices
à des étudiants. D'ailleurs, en favorisant des études
à temps complet durant l'été, la période de
contribution du gouvernement s'en verrait diminuée, tout comme le niveau
d'endettement de l'étudiant. Ainsi, tous les partenaires y
retrouveraient des avantages.
Sur la remise de la dette. L'Université du Québec en
Abitibi-Témiscamingue se réjouit de cet élément
tout à fait nouveau dans la philosophie du régime d'aide
financière. Nous serions même d'avis d'en envisager l'implantation
au niveau du premier cycle, voire même au niveau du collégial
professionnel, des programmes de formation de trois ans. La seule
économie réalisée en ne versant pas à
l'étudiant l'aide financière pour une année
supplémentaire pourrait permettre au ministère de libérer
des sommes d'argent en contrepartie de la remise accordée. Le
pourcentage de la remise pourrait évidemment varier selon les cycles ou
les niveaux.
Sur le comité d'appel. La possibilité qui est offerte au
ministère, dans le projet de loi, d'accorder une aide financière
à une personne inadmissible pour un motif autre que ceux prévus
justifie bien, à notre avis, la création d'un comité
d'appel formé de divers intervenants. À notre avis, ce
comité devrait être souple, efficace et devrait voir à
rendre ses décisions rapidement. À cet effet, nous vous
recommanderions de réduire le nombre de ses membres. Dans la
réalité, le fart de rassembler douze personnes
étrangères au ministère constitue une dépense
d'énergie et de fonds beaucoup trop importante, si l'on considère
que le comité voudra respecter une certaine
représentativité des divers niveaux d'enseignement et des divers
milieux. Une composition de six membres extérieurs au ministère
nous semblerait plus appropriée.
Au sujet des étudiants à temps partiel. Le principe
d'accorder un support financier aux étudiants à temps partiel qui
s'inscrivent à raison de deux ou de trois cours par session constitue un
deuxième élément nouveau qui apparaît fort louable
et intéressant en soi. Cependant, nous demeurons perplexes en ce qui a
trait au nombre de candidats qui répondent aux conditions
d'admissibilité et à la somme d'énergie qui sera
nécessaire pour en assurer le suivi. Il est difficile à ce
stade-ci d'évaluer les opérations qui s'y rattachent. Il nous est
cependant permis de croire que les services d'aide financière des
établissements et le service d'accueil du ministère auront fort
à faire pour bien informer cette nouvelle clientèle
majoritairement exclue de cet aspect du programme d'aide financière. Les
règles de fonctionnement n'étant pas encore établies, nous
nous contentons pour l'instant de ce bref commentaire.
Quant aux mesures visant soit à mieux harmoniser l'ensemble du
régime d'aide financière, soit à assurer plus
d'équité entre certaines catégories de clientèles
ou soit à ajuster certaines natures de dépenses admissibles,
elles nous paraissent toutes souhaitables, même si nous sommes conscients
que, dans certains cas, elles ne s'adressent qu'à des groupes
très limités d'étudiants.
En conclusion, dans l'ensemble et avec les quelques réserves que
nous venons de faire, la réforme proposée s'inscrit bien dans le
sens des objectifs d'accessibilité aux études postsecondaires et
de responsabilisation des partenaires que le ministère veut bien
poursuivre. Les divers tableaux annexés aux orientations nous permettent
de prévoir les effets positifs de cette réforme et de prendre
connaissance des efforts que le ministère de l'Enseignement
supérieur et de la Science déploie dans le but de maintenir plus
d'équité et de justice parmi les bénéficiaires du
régime. Cependant, comme il s'agit tout de même de bonifier un
régime implanté depuis déjà un certain nombre
d'années, il serait intéressant de pousser plus loin la
réflexion et de procéder à l'étude de certains
autres régimes implantés ailleurs et qui ont
développé des philosophies ou des approches différentes.
À titre d'exemple, on pourrait parler d'un régime où la
participation financière de l'étudiant serait fonction de ses
revenus futurs. Toutes les sociétés modernes sont
confrontées au problème de scolarisation et leurs
expériences pourraient sûrement nous inspirer de nouvelles
avenues.
Je vous remercie de nous avoir entendus.
La Présidente (Mme Hovington): Merci. M le ministre.
M. Ryan: Je vous remercie, Mme la Présidente. Je voudrais
remercier l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue
d'être venue, par la voix de son secrétaire général
et du directeur du service aux étudiants, MM. Turgeon et Murphy,
présenter son point de vue sur le projet de loi traitant de la
réforme de l'aide financière aux étudiants.
Je suis d'abord agréablement impressionné
par le réalisme de la présentation qui nous a
été faite. Je pense bien que cette présentation
émane de personnes qui sont en contact avec la réalité
quotidienne. On voit que vous avez étudié les dispositions du
projet de loi et de l'énoncé d'orientations avec la
précision qui peut seule venir d'une connaissance concrète des
mécanismes et de la philosophie de l'aide aux étudiants comme
nous la pratiquons au Québec. J'apprécie vivement, par
conséquent, à la fois la précision, la concision et le
caractère éminemment utile des recommandations que vous nous avez
faites.
J'ai appris, en prenant connaissance de votre mémoire, que le
conseil d'administration de l'Université du Québec en
Abitibi-Témiscamingue s'est prononcé, à sa réunion
de Janvier 1990, en faveur de l'augmentation des frais de scolarité
moyennant certaines conditions qui sont, à toutes fins utiles, celles
auxquelles le gouvernement a tenu à s'astreindre lui-même. Vous
avez dit, tantôt, que cette résolution a été
adoptée à ('unanimité; j'en suis d'autant plus heureux
que, dans le conseil d'administration de l'Université du Québec
en Abitibi-Témiscamingue, on compte non seulement des
représentants de milieux économicosociaux, mais également
des représentants nombreux de l'intérieur de l'université,
en particulier des professeurs et des étudiants. Ça, c'est,
à mon point de vue, très encourageant, qu'une communauté
universitaire comme la vôtre en vienne à une telle conclusion, pas
pour des considérations idéologiques, j'en suis sûr, mais
pour des raisons pratiques dont le bien-fondé n'échappe à
l'intelligence de personne qui veut regarder ces choses de façon
impartiale.
Vous avez, dans votre mémoire, deux sortes de propositions, des
propositions précises touchant des éléments ponctuels de
la réforme et quelques considérations générales qui
m'intéressent tout autant. En ce qui touche les éléments
précis, je voudrais peut-être en commenter une couple, si vous me
le permettez.
Vous vous inquiétez du premier palier de la table de contribution
parentale, je pense que c'est 0 $ à 1000 $, actuellement, et nous le
conservons. Vous demandez si on ne pourrait pas le porter de 0 $ à 2500
$. Je comprends très bien l'esprit de la proposition, je voudrais
seulement rappeler que nous Introduisons des exemptions accrues pour les
enfants et qu'à toutes fins utiles, le niveau du revenu disponible va
être augmenté en conséquence. Quand on parle de 0 $
à 1000 $, ce n'est pas la même chose que sous le barème
actuel des exemptions.
Comme vous le savez, pour les enfants d'âge préscolaire,
l'exemption actuelle est de 1365 $, et elle sera portée à 1895 $;
pour l'étudiant de niveau postsecondaire non résident,
l'exemption actuelle est de 840 $ et nous la portons à 2440 $. En tenant
compte de tout ça, il nous semble préférable de garder le
premier échelon de 0 $ à 1000 $ comme il est actuellement. Il y
a, également, dans l'esprit du gouver- nement, un motif je dirais
d'équilibre avec les dispositions du régime de l'aide sociale. Le
gouvernement ne compare pas le régime de prêts et bourses au
régime de l'aide sociale, mais il faut quand môme qu'on
prévoie certains niveaux de comparabilité qui évitent que,
dans un secteur de la population, on dise: Toi, parce que tu fais ceci, tu
retires beaucoup plus. Parce que tu fais ça, tu retires beaucoup moins.
On a tenu compte de tout ça. Et, dans une perspective d'harmonisation
générale, il nous semble que l'ensemble des dispositions que nous
avons, dont plusieurs diffèrent par rapport à l'aide sociale,
forment un équilibre plus acceptable, à la fois au point de vue
financier pour le gouvernement, évidemment pour le régime, et au
point de vue équilibre des intérêts et des points de vue
dans la société.
Je vous dirai que moi aussi, si le gouvernement en avait les moyens, je
favoriserais hautement l'instauration de la diminution de dette pour
l'étudiant qui termine ses études de baccalauréat dans des
délais que j'appellerais raisonnablement diligents. Je pense même
que ce serait plus facile de l'appliquer à ce niveau-là qu'au
niveau de la maîtrise et du doctorat. Parce qu'au niveau de la
maîtrise, on ne peut pas définir arithmétiquement le temps
que ça va prendre, encore moins au niveau du doctorat. Il y a toutes
sortes de choses qui arrivent. Et des fois, une personne va faire sa
maîtrise dans le délai requis, ça va être une
maîtrise qui ne laissera pas de traces dans l'histoire, nulle part. Elle
aura son papier chez elle dans sa chambre. Ça va rester là toute
sa vie. Il y en a une autre qui va prendre plus de temps et ça va
être une maîtrise qui va produire des fruits parce qu'elle aura
approfondi sa matière. Et quand même elle aurait pris trois
sessions de plus, ça ne dérange personne en Israël. Alors on
commence par là parce que c'est un peu plus modeste. On veut essayer de
faire l'expérience. Mais l'objectif, c'est d'en venir aux études
de baccalauréat et éventuellement, même aux études
de niveau collégial. Par conséquent, nous sommes sur la
même longueur d'onde là-dessus. Je tenais à vous le
signaler.
En ce qui touche le comité d'appel, il y a peut-être une
incompréhension qui se dégage de notre texte à nous. Le
comité comprendra, suivant le projet actuel, 12 membres. Mais vous aurez
remarqué qu'il y aura un quorum de trois. C'est-à-dire que des
bancs différents siégeront en même temps. Il pourra
même arriver qu'un banc siège à Québec, par exemple,
et un autre à Montréal. Ce seront des bancs de trois personnes,
qui seront constitués de manière à pouvoir fonctionner
efficacement et rapidement, parce que ce sont des choses qui ne doivent pas
traîner. Les décisions doivent venir dans des délais brefs.
Pour le prêt, par exemple, on annonce les décisions au mois de
septembre. Il ne faut pas que ça traîne au-delà de
ça. Et pour la bourse, les décisions sont
généralement
connues pour le début de l'année de calendrier. Il faut
que ça marche aussi.
Comme vous le savez, je pense que vous autres qui êtes dans le
pratique vous allez corroborez mes dires. On a amélioré beaucoup
la gestion du régime depuis quatre ans. Les tralhe-ries qu'on a connues
pendant des années, il n'y en a pratiquement plus maintenant. Et
ça, je pense que je dois le dire - j'ai mes collaborateurs de l'aide
financière qui sont ici - je dois leur dire que j'en ai eu des
échos nombreux dans le réseau. Et on veut que ça continue
et je ne voudrais pas que la procédure d'appel devienne un
prétexte à des retards. Par conséquent, votre remarque,
comptez que nous allons en tenir compte.
En ce qui touche les étudiants à temps partiel, même
réaction que vous. L'affaire n'est pas tout à fait mûre
comme nous l'avons conçue. Nous allons la travailler encore de
manière à répondre à des questions comme celles que
vous posez dans votre mémoire. Et justement là-dessus, j'aurais
peut-être une première question à vous adresser. Comment
verriez-vous ça, vous autres, l'aide financière aux
étudiants à temps partiel? Par rapport à ce que nous
avons, quelles possibilités voyez-vous de ce
côté-là?
La Présidente (Mme Hovington): M. Tur-geon.
M. Turgeon: C'est assez difficile à prévoir pour
l'instant. L'aide financière pour les étudiants à temps
partiel: entendons par "étudiants à temps partiel" les adultes
qui suivent des cours et non pas des étudiants plus jeunes qui ne
suivent que deux ou trois cours alors qu'ils pourraient, effectivement, en
suivre cinq. D'abord, nous vérifiions fa semaine dernière le
nombre d'étudiants à temps partiel qui bénéficient
déjà directement d'une aide de leur employeur et, à
l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue, il y a
entre 30 % et 35 % des étudiants dont la scolarité est
remboursée par l'employeur. Ce sont donc là des gens qui ne sont
pas admissibles ou qui ne pourraient pas être admissibles à de
l'aide financière supplémentaire.
Pour les aspects plus techniques, M. le ministre, je pourrais
peut-être demander à M. Murphy qui est directement dans l'action
aux services aux étudiants, de vous éclairer.
M. Ryan: Si M. Murphy a des observations à nous faire en
même temps sur le fonctionnement administratif du régime, c'est le
temps de les faire, on l'écoutera avec intérêt. (16 h
45)
M. Murphy (Normand): Je vais vous transmettre les commentaires
d'un responsable de l'aide financière, donc qui est directement sur le
plancher des vaches. Au niveau des étudiants à temps partiel, je
vous dis que mon interprétation, c'est que je ne vois pas, dans le
moment, beaucoup de clients qui seront touchés par ça. Comme M.
Turgeon l'a mentionné, \\ y a d'abord une certaine clientèle que
l'aide de l'employeur va éliminer du régime. Il y a l'autre
condition, à savoir qu'il faut suivre deux à trois cours. On sait
qu'en moyenne les étudiants à temps partiel, chez nous, suivent
1.2 cours-session. Donc, tous les étudiants qui suivent seulement un
cours seront éliminés. Enfin, si on regarde la table de
contributions, si vous arrivez avec des revenus de l'ordre de 15 000 $, vous
êtes, à toutes fins pratiques, exclu parce que la nature des
dépenses va faire que ça ne dépassera pas trop les 150 $.
Donc, mon interprétation comme gestionnaire dans un établissement
d'enseignement c'est que je vois là un très gros achalandage au
niveau de la clientèle qui va venir s'informer sur la possibilité
d'avoir de l'aide financière et du nombre, en bout de piste, qui va
effectivement jouir de ce régime-là. C'est, à mon avis, le
commentaire. Évidemment, il y a des clientèles, je pense aux
femmes qui sont au travail, à celles qui ont des enfants et tout
ça, il y en a une petite partie, mais, à mon avis en tout cas, la
première observation que je peux en faire, c'est qu'on va avoir à
transiger avec beaucoup de gens, mais qu'il y en a très peu qui vont
pouvoir bénéficier du régime.
M. Ryan: Oui, c'est intéressant. L'échelle des
dépenses admissibles que nous avons, est-ce que ça vous
crée des problèmes particuliers sous l'angle régional,
vous autres, ou si, dans l'ensemble, vous trouvez à l'appliquer
convenablement?
M. Murphy: À mon avis, je ne vois pas ça comme
étant très différent de l'ensemble des étudiants
à temps partiel au Québec. Je peux me tromper sauf...
M. Ryan: Je pariais pour l'étudiant régulier
à temps plein.
M. Murphy: Je vous avoue que je ne pourrais pas vous dire, mais
je ne vois pas de différence majeure, comparativement avec les autres
étudiants du Québec.
M. Ryan: Très bien. Il y a peut-être une remarque
que je me permettrais de formuler à ce stade-ci. Vous aimeriez... Vous
dites à la fin de votre mémoire: "...il serait intéressant
de pousser plus loin la réflexion et de procéder à
l'étude de certains autres régimes implantés ailleurs",
étudier peut-être même la possibilité de faire
participer l'étudiant, en fonction de ses revenus futurs, au financement
de ses études. D'abord, nous avons fait une étude - et je ne
prétends pas que ce soit une étude exhaustive, mais une
étude quand même assez approfondie - de régimes qui
existent dans une douzaine de pays différents, à la
lumière, en particulier, d'études
fouillées qui ont été faites sous les auspices de
l'OCDE ces dernières années et dont les rapports ont
été publiés au cours des derniers mois. J'ai donné
les grandes lignes de ces étgdes dans la conclusion de mon message
liminaire ce matin et, cet après-midi, nous avons remis aux membres de
la commission, je pense bien, le texte de M. Gaétan Lévesque:
L'Aide financière aux étudiants et les droits, de
scolarité: une perspective internationale. On vous en fournira
volontiers une copie avant votre départ tantôt pour que vous
rapportiez ce souvenir du travail de la commission. Je vais vous dire. Nous
allons continuer d'étudier ceci. Et je vais profiter de l'occasion pour
dire pourquoi nous ne pouvons pas envisager maintenant l'imposition future
comme solution. L'imposition future, comme solution, ça veut dire que,
dans l'immédiat, dans l'avenir prévisible, il faut que le
gouvernement mette plus d'argent, mais il faut que cet argent-là vienne
de quelque part. Il va falloir que ça vienne du gouvernement. Ça
demande, par conséquent, qu'on ait plus de revenus qu'on en a.
J'ai dit clairement ce matin que le gouvernement a fait son maximum pour
l'instant; faire plus d'endettement, c'est une solution que nous ne favorisons
pas de ce côté-ci de la Chambre, parce que nous trouvons que,
déjà, le niveau d'endettement du Québec est trop
élevé. Quand les finances seront davantage rétablies... et
je l'ai d|t, depuis que je traite de ces questions-là à la
Chambre, c'est une question de plusieurs années. Celui qui vient vous
dire: J'ai réglé le problème des finances publiques en un
an ou deux, je ne pense pas qu'il puisse parler sérieusement; ce n'est
pas comme ça que ça se fait. Ce sont des choses à beaucoup
plus long terme. C'est une perspective intéressante, mais là,
ça m'étonne parce que des gens... Il y a un pays au monde qui a
ça, vous le savez, c'est l'Australie. Il a commencé ça
l'année passée. Il y en a qui seraient prêts à
s'accrocher après la dernière queue de veau, vous savez: on part
dans le wagon, Australie, aujourd'hui; demain, ça va être la
Hongrie et, après ça, ça va être la Norvège.
Ce n'est pas comme ça qu'on gouverne. Pardon!
M. Jolivet: C'est ça que le premier ministre a dit l'autre
jour, en parlant de la Hongrie...
M. Ryan: Ha, ha, ha!
M. Jolivet:... et de la Tchécoslovaquie.
M. Ryan: Non, non, ce n'était pas pour les mêmes
questions, évidemment.
M. Jolivet: Ah bon. Lui, il a raison.
M. Ryan: Ha, ha, ha! Non, non. Ce n'est pas comme ça qu'on
peut établir une politique d'aide aux étudiants. Celle que nous
proposons, nous l'avons discutée longuement. Je pense que vous pouvez en
témoigner. Tout le monde a été consulté, tout le
monde a été associé à la recherche des
améliorations que nous proposons et, ce que nous faisons, nous
reflétons un consensus qui s'est établi surtout du
côté des praticiens. Comme nous n'avions pas les ressources pour
faire de grandes embardées vers l'avenir, nous avons dit: Nous allons
améliorer les choses dans l'horizon prévisible. Mais les
perspectives qu'entrouve une expérience comme celle de l'Australie sont
très intéressantes et nous allons suivre de près le
cheminement de cette expérience. Mais ce n'est pas le moment de tirer
des conclusions comme celles-là. Je pense que c'est exactement dans le
sens de votre mémoire. Et je vous exprime, encore une fois, toute mon
appréciation pour cette contribution extrêmement utile à
notre démarche.
La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. le ministre.
Alors, je vais inviter M. le député d'Abitibi-Ouest à
prendre la parole.
M. Gendron: Oui, je voudrais saluer des personnes tout à
fait spéciales, M. Turgeon et M. Murphy, que j'ai la chance de
connaître intimement, et de les remercier d'avoir accepté de venir
participer aux travaux de cette commission, parce que, encore là
ça nous permet, en tout cas, de bénéficier de
l'éclairage d'une université en région. On sait que la
problématique n'est pas tout à fait la même.
Quelques commentaires, je pense que dans votre mémoire, lorsque
vous envisagez que l'argent perçu par la hausse des frais de
scolarité soft retourné aux universités sous forme de
péréquation, je trouve que vous faites là une suggestion
intéressante et très sage parce que j'ai très peur que
s'il n'y a pas de dispositions de rééquilibrage des sommes
perçues à la suite de la hausse du dégel des frais de
scolarité, ça risque de créer des inconvénients
encore davantage pour les universités périphériques.
Que les frais de scolarité soient Indexés chaque
année, je pense que c'est une bonne suggestion. Vous avez un niveau de
perplexité au même titre que nous à savoir que vous
êtes perplexes quant aux impacts de l'augmentation sur les
clientèles qui ne reçoivent pas de bourses et, il semble que,
selon vos chiffres, c'est le cas des deux tiers des étudiants à
l'Université du Québec en Abitibl-Témicamingue. Nous, on a
exactement les mêmes craintes que ça peut avoir des
inconvénients majeurs.
De suggérer au ministre de regarder d'autres régimes. Mol,
je pense que c'est une très bonne suggestion. Et pour ces gens-là
qui, en campagne électorale, avaient le discours voulant que
l'éducation, chaque fois qu'il y avait une dépense dans
l'éducation, ça ne s'appelait
pas de même. C'était un investissement. C'est un peu
étonnant aujourd'hui de les entendre dire que là on ne peut pas
procéder parce que ça serait de rajouter sur la dette alors que
j'ai toujours pensé que, une société qui avait investi
dans ses cerveaux, même s'il y a un coût social à ça
et un coût économique, il s'agit bel et bien d'un investissement
majeur et important. Parce que, de toute façon, on le paie pareil comme
société le fait que nous soyons en retard, le fait qu'on n'est
pas capable de prendre les virages, le fait qu'on a trop d'étudiants
à temps partiel, le fait qu'il y a plusieurs étudiants qui vont
faire le choix de certificats plutôt que du baccalauréat. C'est
ça qui va nous arriver avec ce qu'on discute. Et je pense que vous avez
fait d'excellentes remarques. D'ailleurs, juste une toute petite remarque, M.
le ministre de l'Éducation. C'est un peu étonnant, je ne suis pas
sûr que le ministre, tout en reconnaissant qu'il est un grand
travailleur, se donne la peine de lire certains documents importants. Dans ses
commentaires tantôt, il était heureux de dire combien, dans les
quatre dernières années, il avait contribué à
améliorer le régime de l'aide financière en laissant
tomber des tracasseries, des finasseries inutiles. Pourtant s'il avait lu le
rapport du Protecteur du citoyen qui lui dit ceci: Comme par hasard, dans les
quatre dernières années, les plaintes se sont accrues. Les quatre
dernières années, non pas sous le PQ là, les quatre
dernières années. Jusqu'en 1985, vous aviez 200 plaintes en
moyenne, jusqu'en 1985.
M. Ryan:... clients?
M. Gendron: Et comme par hasard... bien voyons! jusqu'en 1985.
Voir, si on avait 125 000 clients. Et comme par hasard, pour l'année en
cours, il y aura 500 plaintes du Protecteur du citoyen au régime d'aide
financière. Ça, ce sont des faits, ce n'est pas un discours. Ce
sont des faits. Et si les plaintes ont presque quadruplé, il dit:
L'année en cours nous laisse entrevoir une augmentation de 47 % des
plaintes des citoyennes et citoyens du Québec concernant le
régime d'aide financière. Il ne doit pas être si parfait
que ça. Il doit y avoir quelques petits problèmes s'il y a 47 %
des plaintes qui arrivent au Protecteur du citoyen. Et en passant, le ministre
devrait savoir que la moyenne des plaintes des autres ministères
adressées au Protecteur du citoyen est de 29 %. Savez-vous ce que c'est
au ministère de l'Enseignement supérieur? On devrait vous le
dire: c'est de 33 %. Ah, petit problème! Je veux dire que l'ensemble des
autres ministères, ils se font achaler, si vous me passez l'expression,
à 29 %, et au ministère de l'Enseignement supérieur,
à 33 %...
Une voix:...
M. Gendron: Non.
M. Ryan: Plus vite. Des voix: Ha, ha, ha! Une voix:
Oui, oui, c'est ça.
Une voix: Ils n'ont pas écrit à la bonne place.
M. Gendron: Ah! Je ne suis pas sûr. Avec tout ce que vous
regardez et tout ce que vous voulez voir, des fois, ça prend bien des
mois.
M. Ryan: Mais il n'y pas grand-chose qui traîne. Les cas
particuliers ne traînent pas longtemps.
M. Gendron: Avec tout ce que vous signez... Bon. Au-delà
de ça, je pense que vous avez des commentaires intéressants dans
votre mémoire et, comme mes collègues veulent participer à
l'échange de vues avec vous, j'aurais une question à poser
à M. Turgeon ou à M. Murphy. Lorsque vous posez la question
à savoir si la hausse des frais de scolarité puisqu'elle
générera des sommes, vous vous posez la question: est-ce que ces
sommes-là sont suffisantes pour réellement améliorer les
services? J'aimerais que vous nous disiez quels services spécifiques
vous pensez améliorer. D'après vous, est-ce que, effectivement,
le dégel des frais de scolarité vous donne la conviction que les
principales universités du Québec auront la capacité de
sécuriser les étudiants advenant que ça se passe comme
prévu, que l'ensemble de l'argent neuf soit retourné en services
aux étudiants.
M. Turgeon: Sur la décision relative à
l'utilisation de l'argent qui sera remis aux universités, à notre
université, le conseil d'administration s'est prononcé pour que
les augmentations de revenus provenant des frais de scolarité soient
retournées directement au chapitre des ressources consacrées
à l'enseignement. Le problème de l'accessibilité aux
études supérieures et, en particulier, aux études
universitaires en Abitibi-Témiscamingue et dans le Nord du
Québec, ce n'est pas nécessairement un problème
d'argent.
L'accessibilité, c'est d'avoir des cours, et dans une
région comme l'Abitibi-Témiscamingue, nous avons, depuis les
quatre ou cinq dernières années, une moyenne d'étudiants
par groupe qui est fixée à 30, c'est-à-dire qu'à 29
étudiants on ne donne pas de cours dans une ville, et dans un village
comme Lebel-sur-Quévillon d'à peu près 3000 de population,
mais qui compte une grosse usine qui aura des besoins de perfectionnement, on
ne pouvait pas donner autant de services. Il a donc fallu mettre en place des
mécanismes et essayer d'être inventifs. On l'a fait de toutes les
façons. On a cotisé les étudiants pour qu'ils paient
volontairement les
voyages de leur professeur; ça s'est fait. Des groupes
d'étudiants ont dit: Oui, oui, on va payer le voyage du professeur parce
qu'on veut l'avoir. Il y a des entreprises qui, par protocole, paient le manque
à gagner. On dit que les sommes qui vont nous parvenir devront
être remises aux étudiants sous forme de services,
c'est-à-dire pour offrir de l'enseignement et aussi pour nous permettre
de fournir de l'enseignement dans nos centres avec des moyens nouveaux, des
moyens d'enseignement à distance, par exemple. Je ne sais pas si
ça répond à votre question.
M. Gendron: Oui, je vous remercie. Toujours pour des raisons de
temps, je vais laisser la parole au collègue de
Rouyn-Noranda-Témis-camingue.
La Présidente (Mme Hovington): M. le député
de Rouyn-Noranda-Témlscamingue, vous n'êtes pas membre de la
commission de l'éducation, alors j'ai besoin du consentement des membres
de cette commission pour que vous puissiez prendre la parole.
M. Trudel: ...collègues.
La Présidente (Mme Hovington): Est-ce que j'ai le
consentement?
M. Ryan: On ne peut pas faire ça. M. Gendron: Bien,
juste une petite...
La Présidente (Mme Hovington): Sur division? Ha, ha,
ha!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Gendron: Mme la Présidente, juste une question. Ce
serait important, d'autant plus que, dans les journaux ce matin, on rapporte
que le député de Rouyn-Noranda-Témlscamingue est encore M.
Gilles Baril. Alors, ce serait au moins important de le laisser parler pour
prouver que le député de Rouyn-Noranda-Témlscamingue,
c'est M. Rémy Trudel.
La Présidente (Mme Hovington): Alors ça me fait
plaisir de vous reconnaître, M. le député
d'Abitibi-Témiscamingue, comme digne représentant, à
l'Assemblée nationale, de cette belle population.
M. Trudel: Et, voyez-vous, ça va d'un côté
à l'autre, puisque vous avez dit M. le député de
l'Abitibi-Témiscamingue Je ne prétends pas toute la région
encore maintenant. C'est Rouyn-Noran-da-Témiscamingue, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Hovington):...
M. Trudel: Mon collègue est ici. Merci de me
reconnaître et d'avoir accepté que j'Intervienne à cette
commission, d'abord pour dire aux gens de la région de
l'Abitibi-Témiscamingue que c'est une université, M. le ministre,
que je connais un peu, voyez-vous, puisque ces gens-là, je leur avais
demandé, Mme la Présidente, de se présenter comme
représentants de l'Université du Québec en
Abitibi-Témiscamingue. Ils sont un peu modestes en se disant
secrétaire de l'institution et directeur des services aux
étudiants, puisque M. Turgeon occupe deux ou trois fonctions, car
ça continue toujours, compte tenu de l'état de pauvreté
des universités. On est obligé d'accepter une combinaison de
postes. Quant à M. Murphy, il doit sûrement continuer à
être directeur des services aux étudiants, responsable des
services Informatiques et, comme je le disais à l'époque, comme
recteur, maître-chambre, pompeur d'orgue et autres responsabilités
honorables. (17 heures)
Là-dessus, donc, vous nous présentez un mémoire qui
est extrêmement Intéressant. Je reconnais bien, effectivement, M.
le ministre, la connaissance terrain de ces gens puisqu'ils se sont, depuis le
début de cette Université du Québec en
Abitibi-Témiscamingue, dévoués à la cause des
étudiants et à la population régionale. Ils connaissent
bien les aléas du régime ou de ce qui a pu causer
difficultés dans un régime d'aide aux étudiants en
particulier et, y compris, vous l'avez certainement saisi dans la
dernière réponse du secrétaire général,
l'essence même de l'université, l'offre de cours. Le premier
service aux étudiants, c'est d'abord l'offre de cours.
Je voudrais cependant aussi faire quelques remarques, d'abord refroidir
un peu l'ardeur du ministre et sa réjouissance sur le fait que le
conseil d'administration ait voté unanimement l'appui au dégel
des frais de scolarité. Je comprends très bien les gens de
l'Université du Québec, je ne mettrai pas au pied du mur mes
collègues, je ne peux pas prendre cette expression, mais il faudrait
aussi qu'ils nous disent le résultat du vote de l'Assemblée
générale de l'ensemble des étudiants de
l'université qui avalent été invités sur le
résultat et sur le gel et le dégel des frais de scolarité
plutôt, qui est tout à fait à l'inverse.
Dans ce sens, pour être très honnête, M. le ministre,
quand les gens de l'Université du Québec en
Abitibi-Témiscamingue... J'ai lu également ce matin le
mémoire de la CREPUQ. Je vous avoue que, comme recteur
d'université à l'époque, j'aurais eu à me
présenter ici pour me prononcer sur cette question et je me demande si
l'état de pauvreté de l'Université m'aurait permis de
venir dire au ministre: Nous ne sommes pas d'accord avec votre régime,
nous ne sommes pas d'accord avec un dégel des frais de
scolarité. La situation est telle - et mon collègue
d'Abitibl-Ouest a cité tantôt des exemples de votre propre parti
et on a à tous les jours des exemples, dans les universités - et
le gouverne-
ment ayant Indiqué par ailleurs qu'il n'avait pas l'intention de
faire appel aux impôts de l'ensemble de la population et des
contribuables individuels ou au niveau des entreprises, que ces gens n'ont
qu'une chose à se dire: Si on veut avoir de l'aide de l'État, et
ils vous l'ont dit il y a quelques secondes, pour donner des cours, non pas
pour augmenter l'administration de l'Université, non pas pour augmenter
le nombre de pieds carrés au niveau des normes reconnues par le
ministère, mais pour offrir des activités dans une région
périphérique, c'est la pauvreté qui fait tenir ce discours
et si on a un discours louangeur du président de la CREPUQ... Et je me
rappelle très bien, M. le ministre, les discussions, à titre de
recteur, autour de la table de l'Assemblée des gouverneurs - et ce n'est
pas trahir le secret des discussions qui ont lieu à huis clos au niveau
de la Commission de planification de l'Université du Québec -
où j'ai entendu souvent dire... Mais, comme le gouvernement ne semble
pas avoir le courage de prendre une décision sociale, de faire un choix
de société en disant: Nous allons considérer tout cela
comme un investissement qui demande des efforts financiers, nous le
reconnaissons bien, on sait calculer, nous aussi, mais qui va porter le
fardeau? Il semble donc qu'on veuille le faire porter aux usagers. On est mieux
de ne pas s'opposer à tout ça. Soyons du bord de la proposition
parce qu'on sait, et vous l'avez dit vous-même, M. le ministre, le
problème du sous-financement et le problème de
l'équité au niveau du fonctionnement des universités n'est
pas tout réglé. Vous avez abordé le problème, vous
en avez fait un bout et vous savez qu'il en reste un très grand bout
à faire et on sait que vous avez de la difficulté probablement
à aller chercher les sous nécessaires. Où? Ces gens savent
lire, ces gens savent observer. Ils disent: Où est-ce qu'on va aller
chercher le régime? Où est-ce qu'on va aller chercher l'argent?
Si la seule façon est d'aller taxer les usagers, bien, disons à
l'État: Compte tenu de notre situation de pauvreté, allez-y donc,
taxez les usagers, ça va être la seule façon qu'ils vont
nous permettre de progresser.
C'est un peu ça, la situation qui se produit. Les
universités vont venir ici, vont venir dire qu'elles sont d'accord avec
le régime et c'est essentiellement l'état de leur pauvreté
et de leur incapacité de développement qui leur feront dire au
gouvernement: C'est ça, allez-y, taxez les usagers. Dans ce sens, on
entend la même chanson ou à peu près à la commission
des affaires sociales où on dit: Dans le domaine de la santé et
des services sociaux, on a aussi des problèmes de financement. Allez
donc au niveau de certaines associations, allez donc taxer les usagers, allez
donc chercher dans la poche des utilisateurs et abandonnons graduellement,
parce que le problème, c'est moins le taux de l'augmentation que de
débarrer le système. Vous savez ce que ça veut dire.
Dès le moment où on dit. On débarre le système, on
vient de changer de cap social et, en ce sens-là, tout gouvernement, peu
importe lequel, pourrait être tenté évidemment d'aller
puiser dans ce nouveau champ de taxation, en quelque sorte, en passant par les
étudiants.
Une petite question du côté de mes collègues M.
Turgeon, M. Murphy. Est-ce que vous avez un aperçu... Je vous ai
demandé des chiffres tellement souvent, comme recteur, et vous m'avez
toujours répondu: Donnez-moi au moins l'après-midi pour vous les
trouver. Je vais être aussi indulgent aujourd'hui. Est-ce que vous avez
le pourcentage, à peu près, des étudiants qui sont en
emploi, qui ont des emplois tout en fréquentant l'université au
niveau des temps complets? Est-ce que vous avez des statistiques
là-dessus, sur les étudiants qui occupent des emplois en
même temps qu'ils poursuivent des études à temps
complet?
M. Turgeon: C'est approximativement 55 % à 60 % des
étudiants à temps complet qui effectuent du travail à
l'extérieur ou, souvent, à l'intérieur de
l'université. C'est sensiblement la même chose qu'ailleurs,
à ce niveau.
M. Trudel: Alors, à cet égard, 55 % à 60 %,
il faut le reconnaître, c'est imposant comme masse d'étudiants. Et
lorsque notre métier, lorsque notre principal travail doit être
celui de s'adonner à l'apprentissage, à la connaissance, il ne
faut pas se surprendre que les études durent plus longtemps ou que, par
ailleurs, le taux de diplomation... On le sait, on a un problème de
diplomation, au Québec, entrée, sortie, j'irais jusqu'à
dire que le principal ennemi, actuellement, de la diplomation dans les
universités québécoises, en particulier, aux
deuxième et troisième cycles, c'est le travail. Et là, on
travaille parce qu'on y est obligé, au niveau de la subsistance et, par
ailleurs, ça nous amène, on le sait... on augmente au niveau des
responsabilités et on finit par ne pas terminer nos programmes. On a des
difficultés sérieuses, au Québec, sur le taux de
diplomation parce qu'il y a de plus en plus d'étudiants qui sont
obligés... On vient de nous le dire, M. le ministre, il y a 50 %
à 60 % d'étudiants à temps complet dans cette
université qui travaillent, qui sont au marché du travail en
même temps, évidemment, au niveau de leur... pour arriver à
leur subsistance, ça va de soi. C'est ça le problème,
entre autres, au niveau du deuxième et du troisième cycles.
Les étudiants n'étirent pas les études de
deuxième ou troisième cycle, et même au premier cycle
uniquement parce que... il y a une petite proportion, il y a toujours une
frange quelque part, parce qu'ils sont des abonnés, nos éternels
étudiants. C'est parce que ces étudiants sont obligés de
travailler et, lorsqu'on embarque dans ce cycle-là, souvent on va
augmenter également
nos responsabilités et, un jour, on va aller sur le marché
du travail à temps complet et on va abandonner les études parce
qu'on a été obligé de s'y faire pour se rendre au bout,
mais on a changé nos responsabilités en cours de route.
Une autre toute petite remarque avant de... Je pense que ma
collègue, la députée de Chicou-timi, avait
également une question. Vous dites, à la page 3 du
mémoire: "L'UQAT souscrit d'emblée au principe d'une
participation tripartite: étudiant, famille et État". N'avez-vous
pas l'impression qu'étudiant et famille, là, c'est la même
chose en quelque sorte? C'est-à-dire que la contribution, c'est
l'État et la famille, dont un des membres, évidemment, est
étudiant et que dans ce sens-là, vous faisiez des remarques sur
le niveau, sur le premier palier qui devrait être haussé à
2500 $ parce qu'il y avait un certain nombre de familles plus
défavorisées qui auraient moins d'accès. Vous n'avez pas
l'impression que, donc, étudiant, famille et État, finalement,
c'est famille, le noyau principal et le gouvernement et que le dégel des
frais de scolarité va certainement nous amener à ajouter un
fardeau supplémentaire sur la partie famille.
M. Murphy: II y a une contribution qui est exigée du
candidat et, qu'il ait la chance d'avoir un emploi l'été ou qu'il
n'ait pas cette chance, il y a une contribution qui est toujours
calculée devant provenir de l'étudiant lui-môme. Il y a une
deuxième contribution qui doit parvenir des parents et c'est là
que le bât blesse, à mon avis. Et c'est là que
peut-être, au niveau du régime, je trouve personnellement, pour
vivre avec des étudiants qui sont confrontés avec ces
problèmes-là, qu'il y a, effectivement... il va y avoir une
augmentation du nombre de bénéficiaires. Et on a mentionné
un chiffre à l'intérieur de la contribution des parents.
Ça, ça a été mentionné au conseil
d'administration. Vendredi, je me suis penché sur le problème et
j'ai sorti des cas. J'ai les numéros de dossiers, si jamais vous les
voulez. Je ne peux pas croire qu'aujourd'hui, en 1990, par exemple, des parents
qui ont un revenu net de 16 013 $ et qui ont deux enfants non-résidents
au postsecondaire doivent contribuer pour 681 $ pour les études des
enfants. Et ça, c'est un cas très précis. J'en ai deux
pages. Quand on parle d'augmenter les montants d'argent au niveau des actifs
des parents, je suis bien d'accord qu'il faille protéger la
résidence familiale. Il y a un cas, et peut-être faudrait-il le
soumettre au ministre tout de suite dans son comité d'appel, d'un parent
qui a des revenus de 5 142 $. Et parce qu'il a probablement une
résidence de 85 000 $, il y a 85 000 $ d'actifs, la contribution de
cette personne-là est de 718 $. C'est là que ça va faire
du bien d'avoir des mesures qui vont faire en sorte que la médiane ou
les fumlllos dont les revenus sont présentement sur la ligne va
s'augmenter vers la droite. Je suis convaincu que les quelques cas que j'ai
ici, ce sont des cas qui, demain matin, seront exclus. Donc, il n'y aura pas de
contribution de parents. À ce niveau-là, je pense que c'est un
gain.
Maintenant, pour répondre à votre question, il y aura
toujours, à mon avis, un investissement des étudiants dans leurs
études. Il faudrait minimiser peut-être celui des parents, compte
tenu de ce que je vous ai mentionné. Et l'État, normalement,
vient combler le manque à gagner.
M. Trudel: Très bien, merci. Je ne voudrais pas prendre
tout le temps. Comme d'habitude, vous avez toujours les bonnes réponses
avec les bons dossiers, au bon moment. C'est plaisant de vous entendre. Je vous
remercie, quant à moi, de votre contribution. Je suis certain que le
ministre a entendu ces exemples-là et qu'il pourra très
certainement en tenir compte.
La Présidente (Mme Hovington): M. le ministre.
M. Ryan: Mme la Présidente, comme il reste encore du temps
au gouvernement, je voudrais utiliser une partie de ce temps pour apporter une
précision. Le directeur de l'aide financière, M. Pierre Boisvert,
qui m'accompagne, m'assure qu'avec la réforme qui est définie
dans le projet de loi 25 et l'énoncé d'orientation, les deux cas
qu'a présentés le représentant de l'Université du
Québec en Abitlbi-Témiscamingue ne seraient plus astreints
à une contribution parentale.
Des voix: C'est ce qu'il a dit lui-même.
M. Ryan: C'est ce qu'il a dit aussi. Alors, les avis convergent
parfaitement. Ça prouve les bons côtés de la
réforme. Je m'en réjouis et je vous remercie de votre
contribution utile, une fois de plus.
La Présidente (Mme Hovington): Ha, ha, ha! Merci, M. le
ministre. Mme la députée de Chicoutimi, il vous reste quelques
minutes.
Mme Blackburn: On pourrait peut-être demander à M.
Boisvert de faire le calcul suivant: Une dame seule a un enfant à
l'université; elle a une résidence qui lui a été
donnée par sa famille, qui vaut 90 000 $; elle gagne 8000 $ et sa fille
n'a pas droit à l'aide financière.
M. Ryan: Aujourd'hui.
Mme Blackburn: Non, non, selon le régime.
M. Ryan: Demain...
Mme Blackburn: Parce que c'est compté sur 90 000 $. Alors,
je vous apporterai le cas. On me l'a apporté, hier, au bureau. Il
faudrait voir...
M. Ryan: ...il y aura bien des choses qui vont changer.
Mme Boucher Bacon: Comment faire vivre une maison de 90 000
$...
Une voix: Avec 8000 $ de revenu.
Mme Boucher Bacon: ...avec 8000 $ de revenu. Il y a quelque chose
quelque part qui ne marche pas.
La Présidente (Mme Hovington): Alors, la parole
était à Mme la députée de Chlcoutimi.
Mme Boucher Bacon: Elle l'a quand même dans ses
goussets.
Une voix: C'est au moins 3000 $ de taxes, 2000 $.
La Présidente (Mme Hovington): II vous reste trois
minutes, Mme la députée.
Une voix: Elle existe.
Mme Boucher Bacon: Elle existe avec...
Une voix: ...et 1000 $ de chauffage.
La Présidente (Mme Hovington): S'il vous plaît!
Mme Blackburn: J'ai posé la question au recteur de
l'Université du Québec à Rimouski, mais comme 92 % de sa
clientèle sont sur l'aide financière... Chez vous, il y en a
seulement le tiers qui bénéficient des bourses; 50 %, des
prêts. Est-ce que vous avez remarqué qu'il y a une
différence quant à la durée des études selon qu'on
soit ou non bénéficiaire de l'aide financière? Est-ce que
vous pensez, vous, comme responsable de ce régime-là, compte tenu
de la lourdeur, tel que le signale le Protecteur du citoyen, de la
difficulté de traitement, qu'on devrait régionaliser le
système?
Une voix: Pardon. Qu'on devrait...
Mme Blackburn: Régionaliser l'administration. On pourrait
unir université et collège.
M. Turgeon: Sur la première partie de votre question, je
dois vous dire que l'Université du Québec en
Abitibi-Témiscamingue a la chance d'être l'établissement
où les étudiants qui y entrent sortent le plus rapidement. On est
également l'établissement qui a le meilleur taux de diplomation
de ses intrants. À ce moment-là, on les garde. Sur la richesse
relative..
Mme Blackburn: Oui, mais est-ce qu'il y a un écart, une
différence entre ceux qui sont sur le régime et ceux qui ne le
sont pas, qui n'y ont pas droft?
M. Turgeon: Je vais demander à M. Murphy.
M. Murphy: Malheureusement, je ne pourrais pas vous le dire. (17
h 15)
Mme Blackburn: Ça va. La seconde question, la
régionalisation.
M. Murphy: La régionalisation, ça comporte,
à mon avis, des problèmes parce qu'il y a de
l'interprétation qui ne serait peut-être pas pareille d'une
région à l'autre, d'un coin du Québec à l'autre. On
a présentement des responsables, j'en suis un responsable d'aide
financière dans un établissement, j'ai une façon d'aborder
les problèmes qu'un autre collègue, je ne sais pas, à
Sherbrooke, à Montréal ou à Trois-Rivières, n'a
pas. C'est plus difficile, à mon avis, de garder une politique
cohérente si elle est régionalisée. Ça, c'est une
opinion qui est très personnelle parce que... À titre d'exemple,
encore là, je suis dans la cuisine; les responsables d'aide
financière, j'ai vu, il y a quelques années, ont à
retourner au ministère les chèques des étudiants qui ont
quitté les études. On a remarqué à certains
endroits que la proportion n'est pas la même d'un établissement
à l'autre, ce qui veut dire que j'ai l'impression qu'il y a des
responsables d'aide financière qui faisaient moins de
vérifications, donc qui pouvaient donner de l'aide aux étudiants
qui étaient peut-être passés du régime de temps
complet à temps partiel ou, en tout cas, il y avait une disparité
entre ceux qui étaient plus sévères dans certains
établissements et ceux qui étaient moins sévères.
À ce titre-là, la régionalisation, il y a des avantages,
mais il y a aussi ces inconvénients-là, de garder quelque chose
de cohérent pour être sûr que les gens, à travers le
Québec, aient le même service.
La Présidente (Mme Hovington): Ça va.
M. Murphy: Maintenant, si je peux ajouter, il y a un autre
phénomène régional qui se passe en région, c'est
que, dans le fond, les services d'aide financière, et du collège
chez nous et de l'Université, parce qu'il y a seulement deux
établissements postsecondaires, nous agissons ou nous répondons
à l'ensemble de la région. Les parents qui ont des enfants, et
chez nous et ailleurs, quand ils ont des demandes de renseignements, ils
s'adressent chez nous. Nous devenons, les deux institutions, un service qui est
très régional dans ce sens-là. Maintenant, ce n'est pas
nous qui appliquons... On donne beaucoup d'informations. Il reste que
l'administration, la cohérence doit cesser d'être assurée
d'en haut, à mon avis.
La Présidente (Mme Hovington): Merci, M.
Murphy. Alors, M. le ministre, est-ce que vous voulez...
M. Ryan: II y aurait peut-être une question additionnelle
que je souhaiterais vous adresser, la procédure de révision ou
d'examen, appelons-la comme on veut, ça n'a pas d'importance pour tout
de suite, verriez-vous un certain intérêt, vous autres, à
ce qu'il y ait une dimension régionale là-dedans? Ça va
être des bancs de trois personnes qui vont siéger
là-dessus, ça ne sera pas un comité de douze qui va passer
son temps à se chicaner, ça va être des comités
à caractère fonctionnel. Verriez-vous ça d'un bon oeil que
cette fonction-là s'exerce avec une attention spéciale au volet
régional? Par exemple, il y aurait un banc, disons, qui irait en
Abitibi-Témiscamingue - disons qu'on a quinze cas qui nous causent des
problèmes - et qu'il y aurait un représentant de la région
au comité de trois?
M. Turgeon: Nous le verrions d'un très bon oeil, M. le
ministre, d'autant plus que lorsqu'on parle de cas qui seraient portés
en appel, ce sont souvent des cas que l'on doit porter à l'attention
d'un comité d'appel en raison, par exemple, de disparités
régionales. Il y a des régions, par exemple, en
Abitibi-Témiscamingue, si on prend la ville de Rouyn-Noranda, où
les loyers sont très chers, où les maisons sont très
chères, alors ça peut provoquer des exemples comme ceux qu'on
vous a donnés tout à l'heure. Alors, pour tenir compte des
particularités régionales, il serait particulièrement
intéressant que ce comité-là puisse être
composé, entre autres, d'un représentant des régions.
M. Ryan: Oui. ça. je pense que c'est très
intéressant. Je tiendrais à préciser que dans
l'idée que nous nous faisons de cette procédure, les responsables
d'aide institutionnelle comme vous - votre nom, c'est M. Murphy? - vous allez
être associé à ce travail; vous allez aider à
préparer le dossier. Vous allez être invité à avoir
des représentants au comité d'examen. Ça va faciliter bien
gros l'attention au caractère humain, au caractère
régional et local aussi des problèmes qui sont posés. Et
mol, j'ai constaté - c'est un des points sur lesquels l'Opposition me
critique souvent, mais c'est seulement par devoir d'état qu'elle fait
ça; au fond, elle est d'accord avec moi - que tant qu'on ne va pas
jusqu'à l'aspect humain, on ne comprend pas. Quand on a cet
aspect-là bien exprimé, bien cueilli, à ce
moment-là, on se rend compte qu'il faut faire quelque chose. Alors, je
vous dis qu'on pense à la dimension régionale. On va l'incarner
dans le mode de révision qui sera Institué à la faveur de
la loi lorsqu'elle sera adoptée.
M. Murphy: Ça permettrait d'avoir beaucoup de souplesse,
en tout cas.
M. Ryan: Pardon?
M. Murphy: Ça permettrait, en tout cas, d'avoir beaucoup
plus de souplesse...
M. Ryan: J'espère que vous passerez le message à
votre député...
Une voix: Bien oui!
M. Murphy:... et de rapidité dans les...
M. Ryan:... pour qu'il le passe à ses collègues de
l'Opposition. Nous autres, nous sommes gagnés à l'Idée de
souplesse au maximum. Ha, ha, ha!
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Blackburn: "Souplesse", dans son langage, c'est
discrétionnaire.
M. Ryan: J'ajouterais juste une autre remarque. Si vous voulez
compléter votre réponse, remarquez bien que je ne voudrais pas
vous interrompre mais j'ai une petite remarque à faire ensuite en
relation avec ce que j'ai entendu tantôt. Oui?
La Présidente (Mme Hovington): M. Murphy, est-ce que vous
voulez continuer?
M. Murphy: Non, je veux simplement... Si on parte de souplesse et
on parle de simplifier le processus pour l'étudiant, parce que c'est
toujours lui qui est confronté avec les formulaires, les pièces
et tout ça. La suggestion qu'on fait daller chercher les revenus des
parents directement au ministère du Revenu, ça fait longtemps que
ça devrait être implanté, à mon avis. Il est
aberrant qu'un parent doive donner deux ou trois copies de son rapport
d'impôt parce qu'il a deux ou trois enfants. De la part du
ministère, c'est une série de demandes de renseignements qui n'en
finissent plus. Et l'étudiant nous dit: Ecoutez, mon père est
d'accord. Allez le chercher. Et tous les problèmes de respect de la
confidentialité sur les renseignements, à ce moment-là,
seraient aussi éliminés. Et là-dessus, je vous le dis: En
bas, les gens sont d'accord pour le faire. Il s'agit qu'il y ait un
désir du gouvernement d'aller puiser ces informations-là.
M. Ryan: Je peux vous donner l'assurance que dès la
prochaine année d'attribution, quand on va répondre à
l'étudiant, il y aura une formule qu'il sera appelé à
signer et ses parents pour qu'on ait accès à ces
données-là de manière à ce qu'il ne soit pas
obligé d'envoyer toute cette paperasse-là au gouvernement. Les
formules sont déjà pratiquement prêtes. On attend seulement
que tout ça soit confirmé. Le député
d'Abitibi'Ouest sait très bien qu'il y a bien des choses qui sont
faites avant que la sanction soit donnée. Mais on en fait le moins
possible pour éviter le gaspillage. Mais, déjà, on a des
brouillons dans nos carnets. Les brouillons, c'est tout prêt. Et comme le
député me le dit souvent: Tant que ce n'est pas définitif,
c'est sujet à amélioration. Ça fait qu'il n'y a pas
d'impression qui a été autorisée encore.
M. Gendron: Ça fait trois, quatre ans que je suis avec le
ministre et...
La Présidente (Mme Hovington): Nous allons conclure, si
vous le permettez.
M. Gendron: ...il n'y a jamais quelque chose de fini. Au moment
même où on vient l'étudier, il faut recommencer.
M. Ryan: Juste un point, Mme la Présidente, que je
voudrais compléter. J'écoutais le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue, tantôt, dire que si les milieux
universitaires se prononcent pour l'accroissement des frais de
scolarité, c'est en raison de l'état de pauvreté
extrême dans lequel ils se trouveraient. Mais là, j'ai des
nouvelles pour lui. Je ne suis pas d'accord. Ha, ha, hal Je vais vous dire
là. J'ai pris connaissance, ces jours derniers, des conditions de
salaire qui se négocient présentement à
l'Université Laval, avec des professeurs en grève et je ne suis
pas porté à téléphoner à la
Saint-Vincent-de-Paul en voyant ces données-là. Je ne suis pas
porté à téléphoner à la
Saint-Vincent-de-Paul, je serais plus porté à
téléphoner à l'impôt sur le revenu.
Des voix: Ha, ha, ha!
Une voix: Au niveau des travailleurs à
l'université.
M. Ryan: Et je trouve que, actuellement, ils présentent
des revendications qui sont de nature à faire du tort au mouvement qui
s'amorce ici de redressement du sens des responsabilités dans les
milieux universitaires. Les étudiants que j'ai rencontrés
moi-même sur le campus de l'Université Laval, pas plus tard que la
semaine dernière, m'ont dit: Si c'est pour servir uniquement à
augmenter les privilèges d'un groupe particulier dans la
communauté universitaire, l'augmentation des frais de scolarité,
ça nous inspire des réserves. Par conséquent, ce n'est pas
uniquement le thème de la pauvreté.
Il y a un autre thème qui est très important dans
l'attitude des milieux universitaires, selon la manière dont je les
connais, moi. C'est qu'ils veulent un meilleur équilibre dans le partage
des sources de revenu. Ils ne veulent pas que leurs subventions continuent de
venir de plus en plus uniquement du gouvernement parce qu'ils se rendent compte
que ça crée une espèce de réflexe de
dépendance, à la longue, qui peut devenir dangereux pour la
liberté universitaire. Ils voient qu'ailleurs on a un équilibre
qui est plus satisfaisant. Je l'ai mentionné, ce matin. En Ontario, les
dépenses de fonctionnement des universités dépendent, dans
une proportion de 58,9 %, de subventions universitaires. Ici, c'est 71 %. Et,
dans certains cas, c'est plus que ça, ça dépend des
institutions, évidemment, vous le savez comme moi. Alors là, il
n'y a pas uniquement le réflexe de pauvreté.
J'ajoute un petit point dans le cas de l'Université du
Québec en Abitibi-Témiscamingue; je n'allais pas le faire parce
que ça ne vous affecte pas directement, vous autres. C'est qu'à
un moment donné, il y a eu des dépenses qui ont été
faites là-bas. Il y a eu des décisions budgétaires qui
étaient sujettes à question et qui ne correspondaient pas
toujours aux orientations qui avaient été données par les
autorités de l'Université du Québec et qui avaient
été définies par le ministère, en
général. Il y a des redressements qui s'imposaient de ce
côté-là. Je pense qu'ils sont en vole d'être
effectués. Je ne fais pas de procès a posteriori.
Il y a toutes sortes de facteurs qui entrent en ligne de compte et je ne
voudrais pas qu'on parte avec l'impression misérabiliste que
menaçaient de laisser dans nos esprits les propos du
député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue...
La Présidente (Mme Hovington): Merci. M. Ryan:
Merci.
La Présidente (Mme Hovington): Si vous voulez conclure, M.
le ministre.
M. Ryan: Je remercie la délégation des
précieux conseils qu'elle nous a donnés et des indications que
nous examinerons avec beaucoup de soin.
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup. Est-ce
qu'il y a une conclusion, M. le député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Oui, une conclusion très rapide.
La Présidente (Mme Hovington): Très courte.
M. Gendron: Très courte et très rapide. Je veux
remercier sincèrement nos collaborateurs d'Abitibi-Témiscamingue,
M. Turgeon et M. Mur-phy. Mais une chose est certaine, je ne peux pas ne pas
revenir en deux phrases sur les commentaires du ministre de l'Éducation.
Quand il veut prendre quelque chose pour faire son affaire, il ne prend que ce
qui fait son affaire. Ce que mon collègue a voulu illustrer, et vous
le
savez bien, puisque ça a été
répété et répété par à peu
près tous vos conseillers, tous vos proches, le patronat et mettez-en, y
compris l'ancienne...
Une voix: ...adjointe...
M. Gendron: ...adjointe parlementaire qui disait que la situation
est dramatique. Ce n'est pas parce que, à l'université, les
étudiants...
La Présidente (Mme Hovington): Son remplaçant est
de votre côté.
M. Gendron: Oui, je le sais. D'ailleurs, les étudiants
vous l'ont dit: Le ministre de l'Éducation n'a pas pu garantir aux
étudiants que les montants provenant de l'augmentation des frais de
scolarité serviront bel et bien à l'amélioration de la
qualité de l'enseignement. On le sait que vous les avez
rencontrés. On le sait qu'il y a des situations, des franges abusives
dans n'Importe quelle situation, mais est-ce que, globalement, le réseau
universitaire est sous-financé? Il me semble que ça ne fait aucun
doute. Et c'est en ce sens-là...
La Présidente (Mme Hovington): En conclusion, s'il vous
plaît.
M. Gendron: Oui, en conclusion. C'est en ce sens-là que
mon collègue a parlé et c'est surtout en ce sens-là que
toutes les universités parlent. Je cite une phrase: "L'intervention de
l'UQAT se veut donc un appui à la position de la CREPUQ." C'est on ne
peut plus clair et je ne peux pas vous blâmer, je connais bien...
Une voix: Ils n'ont pas le choix.
M. Gendron: Et vous n'avez pas le choix, et on le sait.
Une voix: C'est ça, on n'a pas le choix.
M. Gendron: D'autant plus que c'est le même gouvernement
qui disait tantôt: Vous n'aurez pas une cenne de plus parce que, dans la
lecture de notre système, nous pensons que l'éducation n'est pas
une priorité. C'est on ne peut plus clair. Alors, les recteurs sont
assez grands garçons pour savoir lire.
La Présidente (Mme Hovington): En conclusion, s'il vous
plaît.
M. Gendron: Et, en conclusion, tout le monde universitaire nous a
dit aujourd'hui: On n'a pas le choix, on est obligés de dire qu'on est
tellement en situation de pauvreté qu'on achète le dégel
des frais de scolarité.
Une voix: C'est ça.
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup. Merci
beaucoup d'être venus présenter votre mémoire à la
commission de l'éducation. Bon retour en Abitibi.
J'Inviterais dès maintenant les représentants du Conseil
des écoles professionnelles privées. M. Thomas, directeur au
comité d'étude sur la modification de la Loi sur l'aide
financière aux étudiants et M. Michel Lavallée, membre. Si
vous voulez prendre place.
Nous allons suspendre une minute pour laisser le temps aux nouveaux
intervenants de prendre place et de sortir le mémoire.
(Suspension de la séance à 17 h 28)
(Reprise à 17 h 30)
Conseil des écoles professionnelles
privées
La Présidente (Mme Hovington): Si les membres de la
commission veulent prendre place, s'il vous plaît. Nous avons pris 30
minutes de retard, alors nous allons essayer de rattraper ce temps. S'il vous
plaît! Alors, vous pouvez commencer. M. Thomas, je crois, vous êtes
le porte-parole des écoles profesionnelles privées.
M. Thomas (Anwar): Oui. M. le ministre, mesdames et messieurs.
Mon collègue et moi représentons le Conseil des écoles
professionnelles privées. Ce sont des collèges, au niveau
collégial professionnel, qui ne sont pas subventionnés. Je
voudrais d'abord commencer par un préambule.
Le Canada, et particulièrement le Québec, fait, d'une
part, partie de marchés internationaux qui, aujourd'hui, essaient, par
le GATT, de faire baisser les barrières douanières et, d'autre
part, adhère à des blocs économiques favorisant les
échanges entre leurs membres. Ainsi, le Canada s'est engagé avec
les États-Unis dans le pacte de libre-échange pendant que
l'Europe, le ECC complétera, en 1992, l'abolition de toutes les
barrières douanières et monétaires entre ses membres pour
créer ce que l'ECC appelle La Forteresse Europe. Par ailleurs, les pays
de la ceinture du Pacifique sont aussi en voie de s'organiser
économiquement.
Il s'agit donc pour les industries canadiennes et surtout, bien entendu,
pour les Industries québécoises, d'améliorer au maximum
leur compétitivité pour pouvoir tenir tête à cette
concurrence mondiale acharnée. Ainsi, II faudrait, non seulement prendre
une avance technologique, mais aussi former une main-d'oeuvre qualifiée
capable d'exploiter un équipement modernisé basé sur les
automatismes et la robotique pour améliorer la productivité.
Comme tout le monde le sait, au Québec, ici. nous sommes très en
retard. Nos industries, n'est-ce pas, au point de vue du modernisme, sont
très en retard et ont
besoin de faire un grand effort pour faire face à toute la
compétition du libre-échange et autres. Cette automatisation
demandera, entre autres, des programmeurs, des électroniciens, et des
opérateurs bien formés aux techniques les plus avancées et
continuellement mises à jour Cette formation servira aussi à
fournir des techniciens pour compléter les équipes de recherche.
Il est vrai que le Québec possède de riches ressources
naturelles, mais on se doit d'en tirer le maximum de profits en les traitant
localement à des coûts très compétitifs, ce qui
n'est pas souvent le cas.
Au Québec, malgré tous leurs efforts et les budgets mis
à leur disposition, il s'avère que les collèges et les
cégeps publics sont incapables d'assurer, dans le secteur professionnel,
le nombre de places nécessaires pour répondre à la
demande. La raison est que cette demande fluctue constamment d'un secteur
à un autre, selon les besoins des employeurs. La présence de
collèges privés non subventionnés est donc indispensable
et sert de tampon pour absorber ces fluctuations et assurer aussi une formation
intensive aux adultes en un temps relativement court. En fait, en 1987-1988,
sur les 47 000 élèves adultes que comptait le Québec dans
le réseau collégial, 10 % étaient inscrits dans les
collèges privés non subventionnés. Pour remplir leur
rôle, ces derniers ont besoin d'une certaine assistance de la part du
ministère. Il s'agit d'une assistance plutôt morale pour
résoudre les problèmes que rencontrent les élèves,
sans pour autant que cette assistance coûte au ministère
d'importants montants.
Le CEPP, le conseil des collèges privés, qui
représente la majorité de ces collèges se fait donc un
devoir de présenter au ministère de l'Enseignement
supérieur et de la Science le présent mémoire qui
décrit d'abord la problématique à laquelle les
élèves font face et présente ensuite des recommandations
sur les solutions à y apporter.
La problématique: Les assistés sociaux. Il y aurait un
accord fédéral-provincial selon lequel un citoyen qui jouit d'une
aide provenant de l'un de ces niveaux de gouvernement n'aurait pas le droit
d'en recevoir une seconde de quelque niveau que ce soit. Par exemple, un
assisté social n'a pas droit à un prêt étudiant ou
vice versa, n'est-ce pas, un étudiant qui prend un prêt du
gouvernement se voit couper l'aide sociale. Ainsi, il se fait que, si un
chômeur de moins de 30 ans d'âge ne trouve pas d'emploi
après 52 semaines, il perd son chômage et a recours au
bien-être social qui lui verse environ 168 $ par mois. Maintenant, je
pense que ce montant a été augmenté. Mais s'il a de la
fierté et de l'ambition et désire se recycler dans un autre
métier, il ne peut se permettre de se payer des études intensives
qui lui permettront de se qualifier pour un emploi en pénurie. En effet,
il n'a pas droit aux prêts et bourses. Toutefois, s'il est chef de
famille monoparentale, il peut s'Inscrire sur la liste d'attente d'un
cégep public pour suivre le cours. Mais l'attente est habituellement de
deux à trois ans, sans compter la durée de ses études,
alors qu'un étudiant dans un collège privé non
subventionné pourrait facilement joindre le marché du travail au
bout de dix mois seulement. On peut facilement calculer le coût que
l'État supporte dans ces cas qui sont actuellement assez nombreux. Mais
le plus grave encore, ce sont les blessures morales et psychologiques qu'un
chômage prolongé pourrait infliger à un jeune adulte,
blessures qui coûtent encore plus à l'État en soins et en
réhabilitation. Le Québec manque actuellement de main-d'oeuvre
spécialisée dans certains secteurs et il a souvent recours aux
immigrants pour les combler, pendant qu'il supporte encore un nombre
respectable de jeunes chômeurs manquant de qualifications.
Selon les prévisions du ministère de la Main-d'oeuvre et
de la Sécurité du revenu, les perspectives professionnelles au
Québec pour la période de 1985 à 1993 sont
particulièrement prometteuses dans tous les domaines reliés
à l'informatique, l'électronique et la bureautique. Des besoins
nets, en pourcentage de l'emploi en 1985, sont prévus, variant de 22 %
à 65 % selon les professions. La majorité des collèges
privés non subventionnés offrent de la formation dans ces
domaines.
Réfugiés politiques et immigrants. Certaines
catégories de réfugiés politiques et d'immigrants n'ont
droit ni au chômage ni aux prêts. Ils sont donc sur l'aide sociale,
souvent handicapés par leur faible connaissance des langues officielles.
Les résidents au Québec sont invités par le gouvernement
à se perfectionner en français et en anglais dans les COFI.
Certains trouvent ensuite de l'emploi à des salaires réduits;
d'autres souhaiteraient apprendre un métier après avoir
été employés sporadiquement à de menus travaux. Ils
aspirent à un emploi plus ou moins stable et possèdent la
motivation et les aptitudes nécessaires pour apprendre, mais ils n'ont
pas accès aux prêts pour poursuivre leurs études et
survivre en même temps.
Les bourses scolaires. En juin 1987, notre conseil a
présenté à M. le ministre, Claude Ryan, un mémoire
demandant l'admission des étudiants des collèges privés
non subventionnés aux bourses, du fait qu'aucune loi ou règlement
ne faisait état d'une discrimination quelconque entre les
étudiants du secteur privé et ceux du secteur public. Ce
problème n'a pas encore trouvé de solution, du fait que, selon
certaines estimations, ces bourses ajouteraient un supplément de 13 500
000 $ au budget du ministère.
Maintenant, nous passons aux collèges privés et à
leur vocation. Ils ne sont peut-être pas connus de plusieurs honorables
membres. Actuellement et de fait, les collèges privés non
subventionnés, de par leurs dimensions assez
réduites ainsi que leurs moyens, possèdent la vocation
suivante: offrir un apprentissage plus individualisé du fait de leur
échelle réduite par rapport aux collèges publics ou
privés subventionnés; répondre avec plus de
flexibilité aux besoins en pénurie du marché du travail.
En effet, de par leur structure, ces collèges peuvent créer des
classes pour de nouveaux programmes saris avoir besoin de budgets ou
d'approbation de plusieurs niveaux supérieurs, sauf pour les permis
d'enseignement. Dans certains cas, la liste d'attente dans les collèges
publics dépasse deux ans par manque de places. Ces collèges
visent aussi à former, d'une façon Intensive, tes techniciens
adultes en un temps relativement court. Nous avons des étudiants qui ont
peut-être 45 ans. Par la flexibilité de leurs horaires et de leur
mode d'enseignement, ces collèges peuvent mieux accommoder certaines
catégories d'étudiants adultes et pallier leurs
difficultés d'apprentissage. D'après certaines statistiques, un
élève inscrit dans un collège public coûte au
ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science environ
6000 $ par an, sans compter les intérêts et les frais de l'aide
financière, soit 18 000 $ jusqu'à l'obtention de son
diplôme ou DEC. Il faudrait ajouter à ce chiffre les
investissements d'immobilisations dépensés sur les
collèges. Ce coût se compare désavantageusement aux cas des
élèves des collèges privés non subventionnés
qui ne coûtent rien au ministère de l'Enseignement
supérieur et de la Science, à l'exception des
intérêts sur les prêts consentis par l'aide
financière, si on ne considère pas les intérêts de
l'aide financière. De plus, aucun investissement n'est requis.
Il est donc évident que les collèges privés non
subventionnés remplissent un rôle complémentaire
très peu dispendieux pour le ministère et, pourtant, assez
important. Ce rôle ne peut être assuré par les
collèges publics Ils ont ainsi droit à un encouragement et
à certaines considérations de la part du gouvernement du
Québec.
Maintenant, nous passons aux solutions préconisées. Compte
tenu de la section 3 qui précède et de la problématique de
la section 2, il existe une solution pratique qui pourrait satisfaire toutes
les parties concernées. Cette solution consiste à offrir à
l'étudiant, fréquentant les collèges privés et
n'ayant pas droit à l'allocation de chômage, une aide
financière comportant deux volets: le premier volet, pour
défrayer ses frais scolaires, un prêt lui serait accordé,
calculé selon le tarif ou les frais de scolarité du
collège; pour les frais de subsistance nécessaires à
l'étudiant, le régime normal des prêts et bourses du
ministère de l'Enseignement supérieur leur serait
appliqué.
Ainsi, cette solution présenterait les avantages suivants: ne
coûter au Trésor que les intérêts bancaires durant la
période des études et celle qui précède le
début des remboursements. Il est à noter que la grande
majorité des diplômés des écoles privées ne
fréquentent ces dernières que pour acquérir un
métier ou une profession qui leur permettra de trouver un emploi
permanent dans les plus courts délais possible. Moins de 1 % de ces
diplômés s'intéressent à poursuivre leurs
études au niveau universitaire. Leur endettement se limite ainsi au
cycle collégial et ne risque pas de coûter au ministère de
l'Enseignement supérieur des prêts additionnels. Cette solution
permettrait aussi d'aider les chefs de famille monoparentale à se
dégager de l'emprise de la pauvreté et de ses conséquences
funestes pour les enfants; d'aider certains immigrants à devenir des
membres actifs de notre société au lieu d'être
réduits à en être des membres parasites; de fournir
à l'Industrie une main-d'oeuvre professionnelle qualifiée,
augmentant ainsi la productivité et, par conséquent, la
compétitivité et, grâce à la flexibilité des
collèges privés non subventionnés, de combler rapidement
et au fur et à mesure les nouveaux besoins créés par les
récents développements technologiques comme, par exemple, au
début des années soixante-dix, alors qu'il n'y avait pas assez de
programmeurs et d'opérateurs pour répondre aux besoins des
compagnies canadiennes désirant mettre en exploitation leur nouveau
système d'ordinateurs. Les collèges privés non
subventionnés ont été plus prompts a dispenser la
formation demandée.
Maintenant, nous passons à la comparaison avec d'autres provinces
du Canada, parce que nous avons eu des étudiants provenant de la
Saskatchewan et d'ailleurs. Si l'on prend, par exemple, la province de la
Saskatchewan. Nous ne mentionnons ci-après que ce qui nous
intéresse des détails de son programme d'aide financière
en vue de le comparer à celui accordé par le Québec.
L'étudiant de la province de la Saskatchewan a droit à l'un ou
plusieurs des modules de l'aide financière dispensée par cette
province, à savoir: prêt étudiant du Canada - c'est le
gouvernement fédéral - pour l'étudiant qui étudie
en dehors de la Saskatchewan; prêt de la Saskatchewan dont les conditions
sont similaires à celles du Québec, sauf en ce qui concerne les
frais de subsistance, nous y reviendrons plus loin; bourses spéciales
d'encouragement; programme de prêt supplémentaire de la
Saskatchewan, applicable aux études d'une durée inférieure
à douze semaines consécutives et remise
d'intérêts.
La partie de ce programme qui présente un intérêt
pertinent à notre rapport se résume dans le fait que le prix
accordé à l'étudiant est censé couvrir ses frais de
scolarité et aussi de subsistance dans les limites d'un plafond
donné. L'étudiant n'a donc pas droit normalement à l'aide
sociale. Il existe toutefois une exception, dans le cas où les frais
scolaires seraient élevés, ou bien les frais de subsistance
Insuffisants. Dans ces cas où le total requis dépasserait le
plafond du prêt admis, l'aide sociale doit compléter les
dépenses par une prestation ou allocation complémentaire.
Nous citons, par exemple, le cas d'un étudiant inscrit dans un
collège privé, ou bien le cas d'une famille monoparentale
composée de plus d'un enfant. Les deux ont droit à l'aide sociale
si le plafond du prêt est dépassé par les besoins admis. En
Ontario, il existe un processus d'appel qui permet à un
bénéficiaire d'aide sociale d'obtenir des montants additionnels
sous forme de prêts et de bourses à ceux normalement prévus
par l'OSAP. Cette procédure s'applique aussi bien aux
élèves fréquentant les collèges privés que
les collèges publics.
Donc, en conclusion, le Conseil des écoles professionnelles
privées prie M. le ministre de l'Enseignement supérieur et de la
Science de bien vouloir considérer avec bienveillance les
recommandations présentées dans ce mémoire et de prendre,
avec la clairvoyance et l'ouverture d'esprit que la population lui
reconnaît, les décisions qui serviraient au mieux les
intérêts présents et futurs du Québec. (17 h 45)
La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. Thomas. M. le
ministre, vous avez des commentaires.
M. Ryan: Oui, Mme la Présidente, volontiers. Il me fait
plaisir de vous rencontrer, M. Thomas et M. Lavallée. J'ai pris
connaissance de votre mémoire avec beaucoup d'intérêt. J'en
ai écouté la lecture avec non moins de docilité,
souhaitant toujours percevoir à l'aide de mémoires comme le
vôtre des aspects de la réalité qui auraient pu nous
échapper. Je voudrais vous dire une chose pour commencer. Vous
êtes dans un domaine intermédiaire, en quelque sorte, la plupart
des écoles que vous représentez ne sont pas subventionnées
par le gouvernement. Elles détiennent un permis, cependant. Toutes
détiennent un permis, qui les habilite à donner un enseignement
de niveau collégial.
Je crois que vos écoles jouent un rôle très utile,
indépendamment de toute idéologie. Elles jouent un rôle
très utile, un rôle de liaison à l'intérieur de
notre système économicosocial. Il y a des jeunes qui ne peuvent
pas continuer au cégep pour une raison ou pour une autre, qui ne sont
pas dans une condition pour fonctionner dans un collège privé
subventionné. Il existe votre réseau d'écoles qui est loin
d'être un élément inutile dans notre société;
il joue un rôle extrêmement utile. Il faut connaître des
jeunes qui sont passés par l'une ou l'autre de ces maisons-là
pour savoir l'utilité réelle, au-delà de toute
idéologie. Le gouvernement est attentif à ces aspects de la
réalité. C'est pour ça qu'il pratique une politique
souvent de soutien direct, et, dans d'autres cas, au moins d'écoute et
de dialogue.
Là vous nous avez soumis des problèmes aujourd'hui que
vous aviez déjà portés à mon attention, il y a
quelque temps, concernant le régime fait à vos étudiants
sous l'angle du programme des prêts et bourses et vous arrivez avec des
propositions cet après-midi qui indiquent une sorte d'aboutissement,
finalement, qui va provoquer de ma part une réaction dont je vous ferai
part en toute simplicité.
Déjà, vos étudiants, si j'ai bien compris, sont
admissibles aux prêts, il y a peut-être au-delà de la
moitié de vos étudiants qui bénéficient d'un
prêt, à toutes fins utiles. D'après les statistiques dont
je dispose, il y en aurait à peu près 2600, cette année.
Et le total des inscriptions dans les établissements affiliés
à votre conseil, c'est entre 4500 et 5000, je suppose?
M. Thomas: Oui.
M. Ryan: Est-ce que j'erre beaucoup?
M. Thomas: II y a certainement plus que 70 % qui
bénéficient des prêts.
M. Ryan: Si j'ai bien compris, même si nous ne pouvons pas
rendre vos étudiants admissibles pour tout ce qui regarde les frais de
scolarité, souvent, le montant du prêt n'est pas tellement
éloigné du coût de la scolarité, en pratique.
M. Thomas: C'est exact.
M. Ryan: Ça ne me fait rien. Ce sont des choses qui me
font plaisir plutôt que me surprendre ou me désarçonner;
j'en suis très heureux.
Vous dites, dans votre mémoire: Peut-être qu'on pourrait
franchir un pas de plus. En fait, ce qui empêche de rendre les
étudiants directement admissibles pour les fins du régime des
prêts et bourses, c'est le fait que vous n'êtes pas
subventionnés par le gouvernement. Vous n'êtes pas des
écoles reconnues d'intérêt public ou pour fins de
subvention. L'étudiant, ça ne lui enlève pas son
mérite. Il est chez vous, on le reconnaît. Il y a peut-être
une chose, un pas de plus qui pourrait être envisagé, c'est que
l'étudiant soit admissible aux prêts pour la partie de la
scolarité, comme vous le proposez dans votre mémoire, et
admissible à la bourse pour ses autres dépenses. Il faut qu'il
mange comme n'importe quel autre étudiant. Il faut qu'il se loge comme
n'importe quel autre étudiant. Il n'est pas un paria parce qu'il est
inscrit chez vous plutôt qu'au collège qui est de l'autre
côté de la rue. Je pense que c'est ça qu'est votre position
de fond.
J'ai fait examiner les implications financières de la proposition
que vous soumettez. Il faudra que nous la regardions de plus proche encore.
Mais je veux vous dire qu'en ce qui me touche, je ne peux pas apporter une
réponse négative à votre proposition. Nous allons con-
tinuer de l'examiner avec vous. Nous allons regarder toutes les
implications. Il y a la situation financière du gouvernement dont je
dois tenir compte. Mais on doit penser surtout aux étudiants
concernés. Ces étudiants ont droit à la
considération du gouvernement comme tout autre groupe
d'étudiants. Je pense que ce que vous avez proposé, en
conséquence, est digne d'attention et sera l'objet de notre attention.
Et j'ose espérer qu'au cours des prochains mois on pourra
peut-être arriver à définir des orientations qui soient
à peu près durables.
M. Thomas: M. le ministre, ici, nous mettons... Ce que le
gouvernement offre à nos étudiants est très louable et
c'est grâce à ça que plusieurs d'entre eux, qui
appartiennent surtout aux classes moyennes et pauvres, arrivent à
être formés et à devenir de très bons techniciens.
D'ailleurs, ils sont très recherchés par l'industrie et autres.
Mais là, nous mettons surtout de l'emphase sur les gens qui
bénéficient de l'aide sociale et qui n'ont pas accès aux
services que nous leur rendons. Nous avons des cas tragiques qui nous viennent
chaque semaine. Je vous citerai, par exemple, le cas d'une jeune femme de 30
ans qui avait été mariée à l'âge de 18 ans,
ayant deux enfants, abandonnée par son mari à l'âge de 30
ans, provenant d'une famille aisée, etc., qui se retrouvait dans la
misère, qui se retrouvait sur l'aide sociale, avec des
dépressions nerveuses, etc. Cette femme est venue s'adresser à
nous pour pouvoir avoir un métier; elle s'est mariée à
l'âge de 18 ans, elle n'avait pas pu compléter son
éducation, elle avait son diplôme d'études secondaires. Eh
bien, on lui a coupé... Elle a demandé, n'est-ce pas, l'aide
financière, on lui avait accordé une aide financière, mais
on lui a coupé l'aide sociale. Nous avons dû nous débattre,
l'aider et, nous-mêmes, lui garantir des prêts et autres pour
qu'elle puisse survivre, jusqu'au temps où on lui a redonné
l'aide sociale. Cette jeune femme, au bout de dix mois, est devenue une
technicienne en électronique. Nous lui avons trouvé facilement un
travail. Elle a commencé à 22 000 $ dans une
société de composantes électroniques. Au bout d'un an et
demi, elle touche 30 000 $. Elle est devenue la chef acheteuse de cet
établissement. C'est ainsi qu'aujourd'hui... Elle nous a dit
elle-même, n'est-ce pas, qu'elle est fière devant sa famille,
devant ses enfants et qu'enfin elle s'est débarrassée du spectre
de la misère et de la mendicité, elle qui était si
fière et qui acceptait l'aide sociale avec beaucoup de peine.
Nous avons des cas comme ça, tragiques, qui nous arrivent
souvent. C'est surtout sur ces cas que nous présentons ce mémoire
parce que, comme je l'ai dit plus tôt, nos étudiants, en
général, sont très heureux de cette aide
financière, ils sont très reconnaissants au gouvernement.
Plusieurs se sont recyclés, qui sont en chômage; il y a 60 % de
chômeurs chez nous, n'est-ce pas. Tous ces chômeurs retournent
immédiatement sur le marché du travail et trouvent facilement de
l'emploi et ils sont très heureux. Mais c'est surtout pour les
assistés sociaux et cette catégorie d'immigrants, de
réfugiés plutôt qui n'ont pas le droit d'étudier et
autres, qui n'ont pas droit à l'aide financière que nous
adressons ce mémoire-là.
La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. Thomas. M. le
ministre.
M. Ryan: Alors, Mme la Présidente, j'ai
écouté avec attention les précisions qu'apportait M.
Thomas, je pense qu'elles vont dans le même sens que l'orientation
générale du mémoire de son organisme. Je déplore,
moi aussi, la situation à laquelle doivent faire face certaines
personnes qui sont inscrites à l'aide sociale, qui ne peuvent pas
s'inscrire en même temps à des études
régulières sans risquer d'être disqualifiées de
l'aide sociale, en même temps qu'elles n'ont pas accès à
l'aide financière étudiante dans les conditions qui s'appliquent
à l'ensemble des étudiants. C'est sûr qu'il y a un manque
d'harmonie ici qui est source d'injustice pour bien des personnes. Nous en
sommes conscients. Je pense que vous l'avez fait voir avec clarté. Vous
avez surtout montré que ça ne prend pas nécessairement des
exposés interminables pour arriver à un problème
véritable.
Je vais vous dire une chose, nous allons continuer d'examiner ce
problème avec vous et nous allons essayer d'y apporter une solution. Je
pense que vous l'avez très bien défini. On a d'autres
problèmes qui se posent au niveau secondaire aussi. Il y a des personnes
qui sont sur l'aide sociale, qui veulent aller s'inscrire à des
études de niveau secondaire, en matière professionnelle, qui vont
frapper des problèmes aussi parce que le régime d'aide
financière ne s'applique pas aux étudiants de niveau secondaire.
On a un programme d'aide au niveau secondaire pour les étudiants qui
doivent se déplacer de chez eux, suivre leurs cours ailleurs. Mais pour
ceux qui doivent suivre les cours là où ils sont, il n'y a aucune
aide. Ça m'a été signalé à plusieurs
reprises, ça aussi. On ne peut pas le résoudre tout de suite,
mais c'est un autre problème que nous continuons d'examiner. Et on aura
peut-être des solutions avant longtemps à ce problème
aussi.
En tout cas, vous avez mis le doigt. Ce n'est pas le plus gros des
problèmes qui affectent l'ensemble de la population étudiante au
Québec, mais c'est un problème réel, très bien
identifié, vécu concrètement auquel vos institutions
apportent des solutions quotidiennes très utiles. La
société, par l'intermédiaire de son gouvernement, va
chercher avec vous à compléter le dispositif de manière
que ces étudlants-là aient une chance raisonnable.
M. Thomas: Nous vous remercions, M. le ministre.
La Présidente (Mme Hovington): On va respecter le principe
de l'alternance. Je vais donner la parole à M. le député
d'Abitibl-Ouest et je reviendrai au député
ministériel.
M. Gendron: Très rapidement, parce que c'est ma
collègue de Masson... Terrebonne, excusez-moi, qui va poursuivre. Je
voulais tout simplement dire à M. Thomas: Merci d'avoir profité
de l'occasion pour venir nous donner votre point de vue. Moi, pour me faire une
meilleure opinion, j'ai peut-être deux questions à poser. Combien
d'institutions représentez-vous?
M. Thomas: Environ 17. La plupart enseignent l'informatique,
l'électronique, la robotique industrielle et les automatismes, et
certaines autres institutions enseignent, par exemple, la musique
électronisée. Enfin, se sont des technologies de pointe qu'on
enseigne spécialement.
M. Gendron: Et elles sont concentrées dans la grande
région métropolitaine?
M. Thomas: Oui, mais il y en a plusieurs ici dans la ville de
Québec et il y en a une à Chicoutimi, je pense...
Une voix: II y en a une Sherbrooke.
M. Thomas: ...à Sherbrooke et ailleurs. Mais la
majorité est concentrée à Montréal...
M. Gendron: Merci.
M. Thomas: ...où le marché de l'emploi est le plus
exigeant à ce point de vue.
M. Gendron: Et combien d'étudiants et d'étudiantes
avez-vous dans l'ensemble de vos 17 institutions?
M. Thomas: Les 10 %... C'est environ 4000 étudiants, les
10 % des élèves adultes du collégial.
M. Gendron: Le coût moyen des frais de scolarité
dans ces institutions privées non subventionnées est de
combien?
M. Thomas: Ça dépend de la durée, mais il va
jusqu'à 8000 $ par programme de dix à douze mois.
M. Gendron: Merci. Ça va être mon dernier
commentaire. En conscience, je me sens obligé de le faire, mais pas
nécessairement, encore là, pour des raisons d'orthodoxie ou
d'idéologie, mais autrement dit, sur ie travail que vous faites,
ça ne fait aucun doute que les institutions qui sont mises en place pour
pallier des carences d'un système public, c'est évident que le
travail qu'elles font, ces institutions-là, ne peut pas être
discrédité. Et jamais, moi en tout cas, en ce qui me concerne, je
ne mettrais en cause l'extraordinaire travail que vous faites. Le
problème dans une société, ce n'est pas juste de constater
si tous les gens qui sont en parallèle à un autre régime
font un bon travail ou pas. Moi, à partir du moment où j'entends
ce que j'entends depuis quatre ou cinq ans de ce gouvernement - ces gens ont un
discours, et l'aiguille du gramophone est accrochée, sur la
rareté des finances, la rareté des ressources financières
- et que, vous l'avez dit vous-même correctement, 70 % de vos
étudiants, déjà, bénéficient d'un
régime de prêts, que je sache, c'est rarement la proportion qui
est observée dans les institutions que je connais du réseau
public, financé, que ce soit collégial ou universitaire. Dans ce
sens-là, tout en étant conscient que le travail que vous faites
est immensément légitime - et je le dis sincèrement -
j'aurais de la difficulté à ajouter des éléments
à l'intérieur de vos institutions sachant qu'il y a
déjà 70 % des étudiants concernés qui peuvent
bénéficier d'une aide au moins au niveau du prêt. Je vous
remercie quand même d'avoir signalé au ministre tout
l'intérêt que vous portez à ces questions-là. Il lui
appartiendra d'évaluer si, effectivement, il y a lieu d'aller plus
avant, surtout que votre conclusion semble très confiante compte tenu de
la clairvoyance et de l'ouverture d'esprit que vous lui voyez. J'espère
qu'il saura donner suite à vos demandes, mais je prétends que,
dans une société où on a un bon régime public, de
moins en moins d'institutions parallèles sont requises et de moins en
moins nous aurions à être très attentifs à des
récriminations correctes, exactes que vous avez, si le système
d'éducation public pouvait bénéficier de l'aide qui lui
est requise, de l'encadrement et du support technique qui lui sont requis. (18
heures)
Les commissions scolaires:.. Il y a un colloque et vous le savez. Le
gouvernement, semblerait-il, a dit non et ça ne me surprend pas, mais il
a été interpelé drôlement au colloque sur l'urgence
d'apporter plus de financement à l'éducation au Québec. On
le lisait pas plus tard qu'aujourd'hui dans Le Soleil. C'est bien beau
parler d'université et de collégial, mais c'est rendu que ce
n'est même plus une priorité, l'éducation, pour ce
gouvernement, au primaire et au secondaire. Alors ça ne peut
sûrement pas l'être aux niveaux collégial et universitaire.
Ça fait quoi, huit ou neuf ans, que les commissions scolaires du
Québec doivent souffrir coupure après coupure, année
après année? Moi, avant de regarder la bonification
légitime d'institutions privées, j'aimerais mieux pour l'instant
qu'on fasse davantage d'efforts pour s'assurer que le régime public
puisse avoir l'aide qu'il devrait avoir. Ce sont mes convictions propres.
Cela dit, jamais je ne mettrais en cause le très bon travail...
car je connais quelques-unes de vos écoles spécialisées
qui, effectivement, font de l'excellent travail et qui permettent à des
jeunes citoyens et citoyennes du Québec d'être mieux armés
pour faire face aux exigences du modernisme en termes d'emploi et de tous les
virages qu'on doit prendre. Ma collègue veut... Ah! Si vous avez des
commentaires...
La Présidente (Mme Hovington): M. Thomas.
M. Thomas: Je vous remercie pour vos remarques, mais je voudrais
souligner les points suivants. Chez nous, actuellement, les programmes que nous
enseignons répondent à un besoin urgent du marché du
travail. Ce besoin peut disparaître dans un an, deux ans ou trois ans.
Or, aujourd'hui, si le système public se met à établir des
classes, à nommer des professeurs et autres pour ce genre de cours,
comme, par exemple, la programmation qui est en train d'être
saturée aujourd'hui, si le ministère se met à
établir ces cours, à créer des cours spéciaux dans
les collèges et autres, ça ne va pas être rentable à
la longue, tandis que nous, nous sommes flexibles. Nous pouvons nous adapter
aux besoins et nous avons l'expertise nécessaire pour nous adapter aux
besoins au jour le jour. Tandis que le ministère, à cause des
budgets et des compressions budgétaires et autres, n'a pas la même
flexibilité que nous possédons. Ensuite, nous avons une
clientèle dont l'âge varie entre 22 ans et 47 ou 48 ans.
Ce public, dont l'âge varie entre 22 ans et 47 ans, ceux de 47 ans
qui. aujourd'hui, ne trouvent plus de travail à cause de leur âge,
qui veulent se recycler et qui viennent chez nous, nous leur donnons un soin
spécial que le système public ne peut pas leur donner parce qu'il
traite un grand nombre d'étudiants en même temps pendant que nous,
nous avons des classes de 10, 12 ou 15 étudiants. Nous avons mâme
eu un gars, par exemple, de 52 ans qui était mécanicien diesel
sur les bateaux des Grands Lacs. Il était en chômage depuis un an
et il ne trouvait pas de travail et tout ça. Il est venu chez nous. Au
début, ça a été très difficile pour lui de
démarrer parce qu'il avait perdu le pouvoir de concentration, le pouvoir
de s'organiser pour les études et autres. Nous l'avons aidé. Nous
avons des classes spéciales et supplémentaires pour ces
gens-là. Aujourd'hui, ce monsieur, après dix mois, a repris un
travail et il occupe une double fonction de mécanicien et
d'électronicien sur les bateaux. Donc, ce sont des services
spéciaux qui ne sont pas rentables au système public. Le
système public se doit d'assurer l'éducation, la culture
générale et les enseignements universitaires et autres. Nous
avons un créneau particulier dont nous nous occupons et c'est un
créneau très très spécialisé. Donc, c'est
simplement pour vous éclairer un peu sur notre position exacte.
La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. Thomas. M. le
ministre, vous vouliez faire une petite mise au point avant que passe la parole
au député de Verdun. M. le député de Verdun, vous
avez la parole.
M. Ryan: Passez-la-lui.
M. Gautrin: Implicitement, j'avais deux questions à poser
qui étaient semblables à celles du député
d'Abitibi-Ouest. Je voulais savoir quelles étaient les institutions que
vous représentiez et quelles étalent les caractéristiques
propres de votre système par rapport au système public. Autrement
dit, pourquoi quelqu'un allait-il chez vous plutôt que dans le
système public ou est-ce que vous êtes en dédoublement par
rapport au système public? J'ai l'impression qu'en partie vous avez
déjà répondu, suite aux questions du député
d'Abitibi-Ouest, à mes interrogations. Donc, je n'ai pas...
M. Thomas: Je pourrais ajouter juste un point. Le système
public vise aussi à donner la culture générale en
même temps que l'éducation. Donc, un étudiant qui s'inscrit
au cégep, par exemple, il est forme en électronique, en trois
ans, mais il reçoit en même temps des cours d'humanité, de
français et autres, tandis que nous, en dix mois, avec une formation
intensive, nous formons des adultes de tous les âges et destinés
au marché de l'emploi directement, sans prétendre leur donner une
culture générale. Alors, voilà aussi l'avantage que
retirent ces gens-là qui sont souvent des chômeurs et autres. En
dix mois, ils sont déjà sur le marché du travail et il n'y
a pas de liste d'attente ou autre, n'est-ce pas, pour entrer dans un
cégep.
La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. Thomas. Mme la
députée de Terrebonne.
Mme Caron: Merci, Mme la Présidente. Je pense que ce que
j'ai apprécié le plus dans votre exposé, c'est que vous
avez vraiment mis le doigt sur la faiblesse actuelle de notre formation
professionnelle qui, compte tenu de l'importance du contexte actuel de
libre-échange et des besoins nouveaux de notre société, ne
répond pas actuellement, dans le système public, à la
demande. Vous avez également donné des exemples précis,
très réalistes, quant à moi, dans le contexte de
ralentissement économique qu'on vit, en donnant des cas très
précis et je pense que toutes les personnes autour de la table le
comprendront bien, nous rencontrons ces gens dans nos bureaux de comté,
régulièrement, qui se retrouvent sur le chômage, qui n'ont
pas d'études, qui désirent poursuivre et qui n'ont pas les moyens
de le faire.
J'aurai quelques questions. La moyenne
d'âge de votre clientèle, en particulier... M. Thomas:
La moyenne d'âge...
Mme Caron: Est-ce qu'il y a des groupes précis?
M. Thomas: Comme je vous ai expliqué, les extrêmes,
c'est de 22 ans ou 21 ans à 47 ans, 48 ans. Je placerai la moyenne
à 28 ou 30 ans, des gens qui ont déjà été
sur le marché du travail et qui veulent se recycler, étant sur le
chômage ou ayant été mis à pied à plusieurs
reprises.
Mme Caron: Lorsque vous nous parlez de coûts d'environ 8000
$ pour dix à douze mois environ...
M. Thomas: Oui. C'est-à-dire que ça varie. Chez
moi, par exemple, dans mon institut, c'est 7000 $ pour des cours de dix mois et
8500 $ pour des cours de quinze mois en robotique et automatisme industriel. Ce
sont des coûts qui se mesurent un peu à ce que l'étudiant
au cégep coûte à l'État.
Mme Caron: Compte tenu du prêt que 70 % de ces
étudiants reçoivent...
M. Thomas: Oui.
Mme Caron: ...il leur reste un montant d'environ 6000 $.
M. Thomas: Non. C'est-à-dire que oui, dans certains de nos
collèges, ils sont obligés de leur faire payer peut-être
100 $ par mois, ou quelque chose comme ça, pour couvrir la
différence. Actuellement, nos étudiants reçoivent
jusqu'à 7000 $ de prêt.
Mme Caron: Jusqu'à 7000 $ de prêt. Une voix:
Pour dix mois?
M. Thomas: Oui, remboursable en dix ans. Ça leur revient
à 70 $ ou 80 $ par mois et ces étudiants vont directement sur le
marché du travail. Donc, ils sont immédiatement pris. Nous les
plaçons en quatre semaines environ. Nous avons des employeurs qui nous
appellent continuellement et on les place assez facilement et ils remboursent
intégralement leur dette.
Mme Caron: Vous me parlez donc d'un prêt qui peut aller
jusqu'à 7000 $, donc ce ne sont pas les mêmes conditions de
prêt qu'on a dans le régime public.
M. Thomas: Ce sont les mêmes conditions, exactement; ils
suivent les mêmes règlements qui s'appliquent à nos
étudiants, aux étudiants du secteur public, exactement les
mêmes règlements.
Mme Caron: Qui prête?
La Présidente (Mme Hovington): D'où provient le
prêt dont vous parlez, M. Thomas, à vos étudiants? Qui
prête?
M. Thomas: II vient de l'aide financière aux
étudiants, mais ils n'ont pas droit aux bourses.
M. Jolivet: Mais ils ne peuvent pas avoir 7000 $.
La Présidente (Mme Hovington): S'il provient de l'aide
financière provenant du gouvernement, les étudiants ne peuvent
pas avoir 7000 $, le prêt maximal...
M. Lavallée (Michel): Dans nos maisons d'enseignement, nos
étudiants sont admissibles à un prêt de 2335 $ par session
d'études...
La Présidente (Mme Hovington): C'est ça.
M. Lavallée: ...les sessions d'études étant
les sessions habituelles de 13 semaines, l'automne, l'été,
l'hiver. Finalement, c'est la durée du cours qui va déterminer
l'aide maximale à laquelle l'étudiant aura droit. Ça,
c'est pour les maisons d'enseignement pour fins de prêt seulement.
M. Gendron: C'est l'addition de courtes sessions. La somme, sur
une base annuelle...
M. Lavallée: C'est ça, exact.
M. Gendron: ...représente ce que vous venez
dédire.
M. Lavallée: Alors, les 7000 $, effectivement, il n'y a
aucun prêt de 7000 $ qui est consenti, c'est le total de.
M. Gendron: Je suis prêt à donner un cours n'importe
quel temps.
La Présidente (Mme Hovington): Mme la
députée de Terrebonne, vous vouliez continuer.
Mme Caron: Une dernière question. Ma question serait
peut-être davantage au ministre, je pense. Est-ce qu'il compte,
effectivement, faire un lien, est-ce qu'il envisage un lien entre le
régime de prêt étudiant et l'aide sociale?
La Présidente (Mme Hovington): M. le ministre.
M. Ryan: Une question de portée plus large ou si, dans ce
cas-ci...
Mme Caron: Oui, de portée plus large.
M. Ryan: On a travaillé... Toute la modification que nous
envisageons au régime des prêts et bourses a été
étudiée en étroite consultation avec le ministère
de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu qui a la
responsabilité du régime d'aide sociale. On a cherché
l'harmonisation dans toute la mesure raisonnablement possible. Ce
travail-là a été fait minutieusement. On ne peut pas
chercher l'identité matérielle sur toute la ligne parce qu'il y a
des conditions différentes. Ce n'est pas la même chose
d'être étudiant au niveau postsecondaire et d'être une
personne qui est absente du marché du travail parce qu'elle ne peut pas
trouver de travail ou qu'elle n'est pas capable d'accepter un emploi. Tout le
travail d'harmonisation qui pouvait être fait a été
accompli, à mon point de vue, sauf qu'il reste encore des cas, celui
qu'on examine aujourd'hui, des personnes qui sont sur l'aide sociale et qui
voudraient acquérir un complément de formation, qui se trouvent
dans une sorte de vide entre les deux. Si elles passent du côté
des études, elles perdent leur aide sociale. Elles ne sont pas
admissibles à une bourse, en aucune manière. Ça, c'est un
point que nous allons examiner, je l'ai dit tantôt.
Mme Caron: Merci. M. Ryan: Ça va? Merci.
La Présidente (Mme Hovington): Merci, M. le ministre.
Est-ce qu'il y a d'autres questions?
M. Jolivet: Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Hovington): M. le député
de Laviolette.
M. Jolivet: Oui, peut-être une réflexion. Ce qui est
devant nous dénote un peu le problème qui existe dans l'arrimage
de l'ensemble de tous les programmes, soit fédéraux ou
provinciaux et publics ou privés, en ce qui concerne le recyclage de la
main-d'oeuvre, de la capacité que les gouvernements ont de pouvoir, dans
le contexte du libre-échange actuel, dans le contexte du changement
technologique rapide, de faire de la mise à jour des travailleurs qui
perdent leur emploi.
Dans ce contexte-là, c'est une réflexion, je pense, qu'il
va falloir qu'on continue peut-être à regarder, celle de
l'arrimage de tout l'ensemble du recyclage de la main-d'oeuvre et de la
capacité qu'ont les gouvernements de mettre ensemble, par le
ministère de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu,
d'une part, par le ministère du Travail, d'autre part, ou le
ministère de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur,
tous les programmes dans un seul et même but, c'est-à-dire de
permettre à la clientèle qui va dans ces collèges
privés de pouvoir obtenir une formation lui permettant de retrouver un
emploi dans certains cas ou d'en trouver dans d'autres cas. Je pense que c'est
Important qu'on le regarde comme tel et peut-être que la question qui
était posée, d'un impôt, par M. de Grandpré, parce
qu'il ne faudrait pas non plus négliger cette réflexion qui a
été faite au niveau national canadien dans le contexte du
libre-échange. M. de Grandpré disait la même chose que
nous, il va falloir que les industries aussi, qui ont une responsabilité
à ce niveau-là et qui reçoivent des gens qui ont
été formés par le système d'éducation ou le
système de recyclage de la main-d'oeuvre, aient à payer une
partie de ces actions-là. Peut-être qu'on n'aurait pas
l'obligation d'arriver à des coûts astronomiques à des
personnes qui sont sur le bien-être social. On en a à des niveaux
autres que ceux concernant la technologie. J'ai des cas, chez moi, où il
a fallu que j'intervienne, au niveau de l'aide sociale et au niveau des
prêts et bourses pour des personnes qui voulaient suivre simplement des
techniques infirmières, et on sait que, bientôt, il va y avoir un
manque de personnel à ce niveau.
La Présidente (Mme Hovington): Merci beaucoup de votre
intervention. En conclusion, M. le ministre.
M. Ryan: Je pense que le député de Laviolette a mis
le doigt sur un aspect très important de la responsabilité qui
Incombe au gouvernement en matière de formation de la main-d'oeuvre en
cette période de changements nombreux, rapides et profonds dans laquelle
nous vivons. Je ne pense pas, justement à cause de la
multiplicité des changements, du caractère souvent imprévu
et spectaculaire qu'ils revêtent, qu'il soit possible d'avoir un
dispositif unique. C'est pour ça que les gouvernements donnent
naturellement la priorité à l'appareil public de formation, mais
celui-ci, comme vous l'avez signalé justement, tantôt, M. Thomas,
n'a pas toujours la flexibilité voulue pour se retourner
immédiatement. Il y a des besoins qui surgissent dans l'économie
et qui vont durer l'espace d'une période plutôt brève, qui
requièrent néanmoins des équipements
élaborés pour qu'on puisse y apporter des réponses.
L'entreprise privée est généralement beaucoup plus rapide
pour s'adapter à ces situations-là que ne le sera jamais
l'appareil public. C'est pour ça qu'il faut une
complémentarité.
Il y a aussi des responsabilités ministérielles
différentes. Le ministre de la Main-d'oeuvre et de la
Sécurité du revenu a sa part de responsabilités, le
ministre de l'Éducation et ministre de l'Enseignement supérieur
et de la Science a la sienne, le gouvernement fédéral intervient
passablement dans ces questions-là par son ministère Emploi et
Immigration et ses commissions d'emploi et d'immigration aussi. Il y a une
sorte de concertation qui s'Impose, qui n'est pas facile à
trouver à cause du caractère très mouvant de la
réalité elle-même et qui exige que nous ayons des attitudes
très ouvertes et que nous soyons vigilants parce que les dangers de
dédoublement de coûts considérablement accrus sont
énormes, les dangers de gaspillage de richesse humaine aussi. Je pense
que c'est approprié qu'on souligne cet élément, et je veux
vous assurer que j'y suis très attentif. Je dois engager prochainement
des conversations approfondies avec mon collègue de la Main-d'oeuvre, de
la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle sur ces
questions.
M. Jolivet: Je voudrais juste rajouter qu'il y a des
problèmes qui existent toujours justement dans la capacité qu'ont
les ministères et les gouvernements de s'entendre concernant le
même personnage parce que, d'une part, à
l'assurance-chômage, à l'aide sociale, au CFP ou à
l'Éducation, on a des problèmes... Ça concerne une
personne qui est confrontée à différents programmes,
lesquels ne s'ajustent pas à elle parce qu'elle n'est pas à
l'assurance-chômage ou au bien-être social. C'est dans ce
sens-là que je fais mon intervention en disant qu'il va falloir qu'il y
ait une meilleure concertation partout, et ça n'empêchera pas les
collèges privés tels qu'on les connaît actuellement, mais
ça va peut-être en diminuer l'importance et permettre, à ce
moment-là, une meilleure utilisation des ressources financières
et humaines pour une meilleure planification de recyclage et une
possibilité pour la main-d'oeuvre de voir augmenter son
ernploya-bilité.
La Présidente (Mme Hovington): Ça va?
Alors, il me reste à remercier le Conseil des écoles
professionnelles privées du Québec et à le
féliciter de la qualité du mémoire qu'il nous a
présenté. Il nous reste à faire confiance, comme vous le
dites si bien à la fin de votre mémoire, à l'ouverture
d'esprit et à la très grande générosité du
ministre de l'Éducation.
M. Jolivet: On verra.
La Présidente (Mme Hovington): J'ajourne donc les travaux
de la commission de l'éducation jusqu'à 10 heures, demain
matin.
(Fin de la séance à 18 h 19)