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(Neuf heures trente-sept minutes)
Le Président (M. Blouin): À l'ordre! La commission
permanente de l'éducation reprend donc ses travaux. Je vous rappelle
brièvement que la commission a reçu de l'Assemblée
nationale le mandat d'entendre toute personne ou tout groupe qui désire
intervenir sur le projet de loi 40, Loi sur l'enseignement primaire et
secondaire public. Ce matin, nous entendrons successivement le Comité de
parents de la commission scolaire régionale de Chambly et, par la suite,
le Regroupement scolaire de l'île de Montréal.
Les membres de cette commission parlementaire sont: M. Brouillet
(Chauveau), M. Champagne (Mille-Îles), M. Maltais (Saguenay), M. de
Bellefeuille (Deux-Montagnes), Mme Dougherty (Jacques-Cartier), M. Hains
(Saint-Henri), M. Laurin (Bourget), M. Leduc (Fabre), M. Paré
(Shefford), M. Payne (Vachon), M. Ryan (Argenteuil).
Les intervenants sont: M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Charbonneau
(Verchères), M. Dauphin (Marquette), M. Doyon (Louis-Hébert), M.
Gauthier (Roberval), Mme Harel (Maisonneuve), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), M.
Rochefort (Gouin), M. Sirros (Laurier).
Alors, sans plus tarder, je vais donc demander aux représentants
du Comité de parents de la commission scolaire régionale de
Chambly de bien vouloir d'abord nous livrer, en une vingtaine de minutes, le
contenu de leur mémoire et, ensuite, nous procéderons aux
échanges entre nos invités et les membres de la commission.
Comité de parents de la régionale de
Chambly
M. Sénécal (Yvon): M. le Président, M. le
ministre, Mmes et MM. les membres de la commission élue permanente de
l'éducation, le comité de parents de la régionale de
Chambly désire remercier les membres de cette commission de lui
permettre de faire connaître sa position sur le projet de loi 40 sur
l'enseignement primaire et secondaire public.
M. Jean-Guy Lagacé, représentant du comité
d'école de l'école Hélène-de-Champlain au
comité de parents, agira comme personne-ressource à cette
table.
Située sur la rive sud de Montréal, la commission scolaire
régionale de Chambly dispense l'enseignement aux élèves
des municipalités suivantes: Longueuil, Boucher-ville, Saint-Lambert,
Greenfield Park, Saint-Hubert, Saint-Bruno, Sainte-Julie, Lemoyne, Varennes,
Saint-Amable, Verchères, Calixa-Lavallée, Chambly, Carignan et
Saint-Basile-le-Grand.
Son territoire comprend le territoire des comtés de
Marie-Victorin, Bertrand, Vachon, Laporte, ainsi qu'une partie du territoire
des comtés de Chambly et de Verchères.
Les commissions scolaires Greenfield Park, Jacques-Cartier, Mont-Fort,
Saint-Exupéry, Varennes et Taillon dispensent l'enseignement primaire
sur le territoire de la régionale.
Sa clientèle s'élevait à 21 336
élèves en 1982-1983, incluant les élèves de
l'école polyvalente anglo-catholique Macdonald-Car-tier. Le
comité d'école de cette dernière a d'ailleurs
déposé son mémoire à cette commission en octobre
dernier.
Nous insistons par ailleurs pour que l'école polyvalente
Macdonald-Cartier, la seule école anglo-catholique de la rive sud, soit
représentée au comité d'implantation, même si cette
dernière est en deçà de la représentation de 10%
que prévoit la loi.
Nous ne ferons pas ici l'historique de la commission scolaire
régionale de Chambly, les représentants de cette dernière
l'ayant déjà fait lors de leur intervention hier devant les
membres de cette commission.
Le comité de parents de la régionale n'entend traiter
aujourd'hui que de certains problèmes spécifiques au territoire
et à la clientèle de la régionale.
Il appuie et endosse, par ailleurs, les positions de la
Fédération des comités de parents de la province de
Québec concernant la participation des parents et la responsabilisation
de l'école.
Les centres spécialisés pour handicapés. Comme nous
le soulignons dans l'introduction de notre mémoire, la régionale
a mis sur pied plusieurs centres spécialisés pour dispenser
l'enseignement à diverses clientèles d'élèves
handicapés: mésadaptés socio-affectifs de niveau primaire,
handicapés mentaux moyens de niveaux primaire et secondaire,
handicapés auditifs, handicapés visuels et handicapés
physiques et mentaux.
Il est évident que l'importance du territoire de la
régionale de Chambly a eu un effet direct sur la mise sur pied et sur la
plus grande facilité d'accès de la clientèle aux centres
spécialisés. D'autre part, la
régionalisation du transport scolaire a permis de transporter la
clientèle de l'adaptation scolaire des niveaux primaire et secondaire
à un prix abordable.
Or, le comité de parents de la régionale s'inquiète
grandement des risques de mésententes et des difficultés
d'ententes multilatérales entre plusieurs commissions scolaires
concernant le maintien ou la mise sur pied de centres
spécialisés. L'expérience passée sur le territoire
de la régionale en matière de services informatiques ou
concernant le centre sportif communautaire de Longueuil et, tout
récemment, la clientèle des mésadaptés
socio-affectifs a démontré les difficultés de telles
ententes. L'autonomie de chaque commission scolaire en ces matières peut
constituer une menace à la survie de certains centres
spécialisés comme celui pour les mésadaptés
socio-affectifs.
En conséquence, le comité de parents de la
régionale demande que, dans l'hypothèse de l'adoption du projet
de loi 40 et du morcellement du territoire de la régionale, les centres
spécialisés de cette dernière conservent leur vocation
régionale et qu'ils soient administrés conjointement par les
commissions scolaires de la région et non seulement par l'une d'entre
elles.
Par cette proposition, le comité de parents rejoint une partie
des conclusions du mémoire déposé par l'Association de
parents de l'enfance en difficulté de la rive Sud devant cette
commission.
Les options professionnelles. Dans le secteur de l'enseignement
professionnel, la régionale a pu développer une dynamique interne
à cause de son grand nombre d'enseignants. À cause de l'ampleur
de ses ressources, elle a pu se permettre de concevoir, de planifier et de
mettre sur pied des centres d'excellence, par exemple, en bureautique, en
hôtellerie et en couture et habillement, ainsi que développer
différents projets en mécanique, par exemple, pour
préparer nos élèves à planifier l'installation de
systèmes flexibles (machines dirigées par ordinateur), à
ordonnancer les machines et entretenir ces systèmes.
Présentement, les élèves de la régionale ont
le choix entre 42 options professionnelles dont l'enseignement est
dispensé dans ses écoles. Il est évident que la grosseur
d'une commission scolaire a un effet direct sur la mise sur pied et sur la
grande facilité d'accès à des options
professionnelles.
La régionalisation du transport scolaire, par exemple, a permis
une plus grande flexibilité dans l'utilisation des autobus, facilitant
un choix d'options professionnelles plus grand aux élèves en leur
assurant un mode de transport interécoles. Or, advenant l'adoption telle
que proposée du projet de loi 40 et du morcellement du territoire
régional de Chambly, près de 500 élèves de cette
dernière ayant choisi des options professionnelles et
bénéficiant présentement d'un transport scolaire
interécoles deviendraient des élèves
extraterritoriaux.
De plus, les clientèles en enseignement professionnel des futures
commissions scolaires, sur le territoire de la régionale, étant
plus petites que celles de cette dernière, l'existence ou la mise sur
pied d'options professionnelles et de centres d'excellence pourrait être
réduite ou empêchée. Or, le comité de parents veut
s'assurer, advenant l'adoption du projet de loi 40, que les
élèves du territoire de la régionale conserveront à
tout le moins le même choix d'options professionnelles que
présentement.
En conséquence, le comité de parents demande que des
garanties soient données quant au maintien, à moins de
désuétude, des options professionnelles et des centres
d'excellence actuels et que les futures commissions scolaires du territoire de
la régionale soient obligatoirement tenues d'admettre à une
option professionnelle, non offerte par sa future commission scolaire, tout
élève de ce territoire.
Si vous permettez, M. le Président, je laisse poursuivre l'autre
partie par M. Lagacé.
M. Lagacé (Jean-Guy): M. le Président, nous allons
maintenant parler des territoires des futures commissions scolaires sur le
territoire de la régionale de Chambly.
Afin de maintenir et d'assurer un certain niveau de qualité et de
quantité de services - ce que nous avons vu, hier soir, par le
dépôt du mémoire de la régionale de Chambly - le
comité de parents de la régionale demande que les territoires des
commissions scolaires prévues par le projet de loi 40 pour le territoire
de la régionale de Chambly soient regroupés en trois commissions
scolaires d'environ 20 000 élèves chacune.
Voici les territoires que nous proposons: Une commission scolaire
comprenant Lemoyne, Greenfield Park, Saint-Hubert et Brossard avec en plus les
territoires de Carignan et de Chambly; une commission scolaire comprenant
Calixa-Lavallée,
Verchères, Saint-Amable, Sainte-Julie,
Boucherville, Saint-Bruno-de-Montarville,
Saint-Basile-le-Grand mais excluant Carignan et Chambly; une autre sur
le territoire de la ville de Longueuil.
Notre proposition fait suite à celle du ministère de
l'Éducation qui favorise la création de cinq commissions
scolaires. Or, nous énonçons les commentaires suivants sur les
territoires proposés par le projet de loi 40. Quatre des cinq
territoires proposés ne contiennent que deux écoles secondaires.
Trois des futures commissions scolaires ont une population au secondaire
d'environ 3000 élèves. Quatre des futures commissions ont
des populations respectives d'environ 12 000, 11 400, 8500 et 8300
élèves. De plus, nous constatons que la rive sud de
Montréal a connu depuis quelques années une forte augmentation de
la densité de sa population, une plus grande urbanisation et le
développement de ses moyens de transport. À l'instar des futures
commissions scolaires de l'île Jésus et de l'île de
Montréal, celle du territoire de la commission scolaire régionale
de Chambly devrait compter des populations d'environ 20 000
élèves.
La sous-représentation des écoles secondaires au conseil
d'administration des futures commissions scolaires. Le comité de parents
de la commission scolaire régionale de Chambly ne peut pas appuyer
présentement le mode de composition des conseils d'administration
proposé dans le projet de loi 40, car il implique la
sous-représentation des écoles secondaires au conseil
d'administration des futures commissions scolaires.
Nous appuyant sur des chiffres publiés dans un document de
travail de juillet 1983 de la Direction générale des
réseaux du ministère de l'Éducation concernant les
territoires des commissions scolaires prévus dans le projet de loi 40,
nous sommes d'avis que compte tenu de la représentation par
l'école, le nombre des représentants des écoles
secondaires au conseil d'administration des nouvelles commissions scolaires
intégrées serait inférieur à l'importance relative
de la clientèle de niveau secondaire de ces commissions scolaires. Un
tel mode de représentation n'est pas équitable pour les
écoles primaires ou secondaires ayant des différences importantes
de population. Rappelons que l'article 138 du projet de loi 40 stipule que la
commission scolaire est administrée par un conseil d'administration
composé du commissaire de chaque école dont le statut
linguistique est le même que le sien.
En conclusion, le comité de parents de la commission scolaire
régionale de Chambly appuie et endosse les positions de la
Fédération des comités de parents de la province de
Québec concernant la participation des parents et la responsabilisation
de l'école. Par contre, le comité de parents demande, dans
l'hypothèse de l'adoption du projet de loi 40 et du morcellement du
territoire de la commission scolaire régionale de Chambly, que les
centres spécialisés de cette dernière conservent leur
vocation régionale et qu'ils soient administrés conjointement par
les commissions scolaires de la région et non seulement par l'une
d'entre elles. Il demande également que des garanties soient
données quant au maintien, à moins de désuétude,
des options professionnelles et des centres d'excellence actuels et que les
futures commissions scolaires du territoire de la régionale de Chambly
soient obligatoirement tenues d'admettre à une option professionnelle,
non offerte par sa future commission scolaire, tout élève de ce
territoire.
Il demande notamment, pour maintenir et assurer un niveau de
qualité et de quantité de services, que les territoires des
commissions scolaires prévus dans le projet de loi 40, pour le
territoire de la régionale de Chambly, soient regroupés - ceci
n'est qu'une hypothèse - en trois commissions scolaires d'environ 20 000
élèves. On ne peut appuyer le mode de composition des conseils
d'administration proposés par le projet de loi 40, car il amène
la sous-représentation des écoles secondaires au conseil
d'administration des futures commissions scolaires. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. Lagacé, merci,
M. Sénécal.
Je signale aux membres de la commission ainsi qu'à nos groupes
invités ce matin que nous disposons d'une période globale d'une
heure et quinze minutes pour chacun des deux groupes que nous entendons ce
matin. M. le député de Fabre.
M. Leduc (Fabre): Merci, M. le Président. Je voudrais vous
transmettre les excuses du ministre de l'Éducation, M. Laurin, qui
devrait se joindre à nous dans quelques minutes. Il s'entretient
actuellement avec le ministre de l'Éducation de la Tunisie.
En son nom, je voudrais vous remercier pour la présentation de
votre mémoire. C'est un mémoire qui est sobre, précis,
bien articulé dans lequel vous nous faites part d'un certain nombre de
craintes, par rapport à la carte scolaire en particulier. Vous vous
inquiétez de la difficulté que pourraient connaître les
nouvelles commissions scolaires proposées à organiser certains
services spécialisés.
Vous nous faites un certain nombre de recommandations dont le ministre
de l'Éducation pourra sûrement s'inspirer. Je note, en
particulier, que vous proposez que les centres spécialisés
développés par la commission scolaire régionale de Chambly
conservent leur vocation régionale et qu'ils soient administrés
conjointement par les commissions scolaires de la région.
Je note également votre recommandation que le territoire de la
commission scolaire régionale de Chambly soit réparti en trois
commissions scolaires d'environ 20 000 élèves chacune.
Finalement, il y a une recommandation quant à la composition du conseil
d'administration, afin d'éviter une sous-représentation du
secteur secondaire.
Par rapport au territoire scolaire, je peux vous donner l'assurance que
votre recommandation sera prise en considération
dans ce sens que la discussion est toujours en cours, qu'il n'y a rien
de définitif et que nous accueillons bien vos recommandations et vos
opinions à ce sujet.
J'aurais une question à vous poser en rapport avec un autre
aspect de votre mémoire. Vous dites que vous appuyez et endossez les
positions de la Fédération des comités de parents du
Québec concernant la participation des parents et la
responsabilité de l'école. Afin que l'on s'entende, est-ce qu'une
telle prise de position signifie que vous êtes pleinement d'accord avec
cette idée que l'école devienne un lieu décisionnel, un
troisième niveau de responsabilité? Dans le même ordre
d'idées, faut-il comprendre que vous êtes d'accord avec la
position de votre fédération, à savoir que les parents
soient majoritaires au sein du conseil d'école?
M. Sénécal: Sur votre première question,
nous avons fait une réunion - vous savez que la régionale de
Chambly représente des élèves du secondaire de six
commissions scolaires locales - nous avons fait une réunion
spéciale, nous avons convoqué les gens pour essayer de sortir un
consensus pour faire notre mémoire. Nous ne le mentionnons pas dans
notre mémoire, nous disons simplement que nous sommes d'accord avec la
fédération. Au sujet de la participation des parents dans les
écoles, il a semblé y avoir une forte demande que ce soit
proposé par le comité de parents. Nous appuyons donc ce pourquoi
nos commissions locales nous ont mandatés en disant: Vous êtes
d'accord avec la fédération. Nous aurions pu le mentionner dans
notre mémoire, mais nous n'avons pas voulu entrer en interaction avec
les commissions scolaires locales qui, elles aussi, ont des propositions, pour
demander certaines choses plus précises concernant l'école. La
régionale voulait être représentative. En effet, à
la régionale de Chambly, on appuie aussi le fait que les parents soient
majoritaires au conseil d'école, évidemment. Est-ce que cela
répond à votre...
M. Lagacé: M. le député de Fabre, M. le
Président, j'aimerais apporter un complément de réponse
pour essayer d'éclairer votre entendement sur le fait qu'on essaie de
trouver des consensus sur quelque chose.
Dans notre mémoire, on dit qu'on appuie la
Fédération des comités de parents dans son ensemble. Je
m'explique en disant qu'on appuie le principe que les parents devraient
être majoritaires dans l'enseignement au niveau des écoles. Par
contre, ceci ne veut pas dire que l'ensemble du document nous paraît
acceptable à première vue, mais ce n'est pas une bible autant que
le projet de loi, autant que notre propre mémoire.
M. Leduc (Fabre): D'accord. Et cela va jusqu'à
reconnaître qu'il y ait à l'école un niveau
décisionnel assumé par un conseil d'école
représenté par des parents, des enseignants. En fait, vous
êtes d'accord avec la formule qui est proposée dans le projet de
loi 40.
M. Lagacé: Oui. M. le Président, dans la
formulation, nous sommes d'accord avec le principe. Par contre, comme parent,
j'aimerais aussi être mandaté par la loi, à savoir ce que
je vais faire dans un conseil d'administration d'une école. Vous savez
comme moi que dans la vie il y a plusieurs paliers de décision. Si on
nous donne un palier de décision au niveau de l'école, j'aimerais
qu'il soit clarifié dans la loi 40, ce qui, actuellement, me semble pas
mal flou.
M. Leduc (Fabre): Vous voulez dire que les fonctions qui sont
énumérées dans la loi vous paraissent imprécises ou
pas suffisamment claires?
M. Lagacé: Pas suffisamment claires. M. Leduc (Fabre):
Oui. M. Lagacé: D'accord.
M. Leduc (Fabre): Pouvez-vous donner un exemple?
M. Lagacé: Quelques exemples. On parle de
pédagogie, on parle de conseil d'orientation, on parle de conseil
d'école, on parle de sous-comité avec le comité de parents
et le conseil d'administration. Il me semble qu'il y a à ce niveau un
imbroglio qui ne puisse nous permettre d'être élus avec un mandat
précis au niveau de l'école. Il me semble qu'il y a des paliers
qui s'interposent, qu'il y a de doubles mandats à des endroits qui
pourraient peut-être - je m'excuse de mon inexpérience -
être clarifiés pour permettre à chacun des paliers d'avoir
des niveaux d'autorité autant gestionnels que directionnels, capables
d'amener tout le monde à un consensus à un moment
donné.
M. Leduc (Fabre): Je vous remercie.
Le Président (M. Blouin): Vous avez terminé, M. le
député de Fabre? Merci. M. le député
d'Argenteuil.
M. Ryan: Messieurs les représentants du comité de
parents de la commission scolaire de Chambly, nous vous saluons avec plaisir.
Ce vendredi matin, nous sommes heureux de vous retrouver - vous étiez
là hier soir pour la présentation du mémoire de la
commission
scolaire régionale de Chambly - pour compléter ce qui a
été dit hier soir, à certains points de vue, et
peut-être le contredire à d'autres. C'est ce qu'on va essayer de
clarifier.
Je voudrais vous demander une chose tout d'abord. Vous avez entendu les
représentants de la commission scolaire régionale de Chambly nous
faire part de certaines objections qu'ils ont à l'encontre du projet de
loi 40. En particulier, le directeur général de la commission -
son nom est M. Galipeau, je pense, n'est-ce pas? - nous a dit qu'il
était absolument essentiel, à son point de vue, qu'existe un lien
d'autorité entre l'école et la commission scolaire. Il nous a
parlé, tant au point de vue administratif que pédagogique, de la
nécessité de ce lien et il en a donné de nombreux exemples
avec ses collaborateurs et les commissaires qui étaient là.
Êtes-vous d'accord avec eux sur ce point?
M. Lagacé: Sur ce point, M. le Président, il faut
peut-être faire une petite nuance ici. C'est que, avec les gens qui se
sont présentés ici hier soir ou hier matin pour la
présentation de leur mémoire, au niveau d'une direction
générale, on peut se permettre des opinions semblables. En tant
que parents, au niveau professionnel, je ne pense pas qu'on puisse être
en accord ou complètement en désaccord avec des avancés
semblables, face à des professionnels ou à des
administrateurs.
À ce niveau, il faut voir que certains parents peuvent se
permettre une opinion, s'ils ont sensiblement la même formation ou la
même éducation.
Quand nos gens mandatés, ou nos directeurs ou nos
administrateurs, nous amènent des expertises semblables, cela nous aide,
nous, comme parents à prendre des décisions. Cela ne veut pas
dire qu'on est toujours en accord ou toujours en désaccord avec la ligne
de pensée des administrateurs de la commission scolaire ou du
réseau du ministère de l'Éducation.
M. Ryan: C'est M. Sénécal ou M.
Sénéchal?
M. Lagacé: Sénécal.
M. Ryan: Sénécal, très bien. Est-ce que vous
voulez ajouter quelque chose là-dessus, M. Sénécal?
M. Sénécal: Oui. M. Ryan, si vous permettez. Dans
un sens j'ai compris M. Galipeau quand il a dit hier qu'il fallait un chef
d'orchestre. J'ai compris cela. C'est pour cela que tantôt M.
Lagacé a mentionné que dans la loi, il faut que ce soit bien
précisé qui va être responsable de quoi, clairement. Dans
ce sens, on appuie un peu ce que M. Galipeau a dit: Que ce soit bien
déterminé qui est responsable de quoi. C'est flou.
M. Ryan: Lui, il a indiqué que c'était
essentiel.
M. Sénécal: On sent qu'il y a deux décisions
à prendre. Disons une décision, mais deux tangentes. Deux "boss"
peuvent prendre la décision.
M. Ryan: Supposons qu'il arrive une question, par exemple
l'implantation du nouveau programme de français en secondaire III.
Là il arrive que dans une école ils aient une manière de
voir cela et que la commission scolaire ait un plan d'ensemble. Avant de se
lancer là-dedans, il faut des sessions de formation des enseignants. Il
va falloir qu'on fasse l'examen du matériel pédagogique
attentivement et vous pourrez vous lancer avec tel et tel calendrier. Si
l'école dit: Nous autres, l'application du régime
pédagogique, d'après la loi, c'est notre affaire, on regrette, on
n'a pas besoin de vous sur ce point, trouvez-vous qu'on peut marcher avec un
système d'enseignement comme cela? (10 heures)
M. Sénécal: Quand il arrive un nouveau service en
français - je vais vous donner un exemple - à la régionale
de Chambly, le comité de parents est consulté. Cela va? Chaque
école aussi est consultée. Chaque école dit son mot, dit
les choses qu'elle aimerait y voir. Pour cela, la régionale de Chambly
est très ouverte et écoute l'école de son mieux. Mais dire
si cela va déranger que ce soit le comité d'école qui
prenne une décision, je ne verrais pas pourquoi parce que c'est son
école et un projet éducatif, cela comprend un programme de
français dans l'école. Si un tel programme s'adapte,
d'après leur "prof" au conseil d'école, ils vont vraiment adapter
un programme dans leur milieu. Je pense que la décision devrait se
prendre là. Ce que je veux dire, c'est que cela peut s'adapter. C'est
là qu'on veut que ce soit clair. Qui prend la décision, par
exemple? Vous savez, si le conseil d'école décide qu'il veut ce
programme de français, s'il arrive à la régionale et qu'il
est démoli, ou à la commission scolaire, là-dessus...
M. Ryan: II faut mettre les choses bien clairement. Supposons que
la commission scolaire institue un programme de préparation des
professeurs pour le nouveau programme de français. Elle dit: Là,
on va avoir quatre sessions de formation, telle date et telle date. Il ne
faudrait pas que le conseil d'école vienne dire: Nous autres, on
regrette, on a fixé un calendrier et cela ne marche pas. On ne peut pas
les envoyer là. S'ils sont convoqués par la commission scolaire,
en vue de sessions qui vont viser
directement la qualité de l'éducation, il me semble que
cela devrait être - appelons les choses par leur nom - un ordre et non
pas simplement une petite invitation à venir à une réunion
de salon. Qu'est-ce que vous en pensez?
M. Sénécal: M. Ryan, quand la régionale de
Chambly propose un nouveau cours de français, il y a des choix.
C'est-à-dire que dans chaque choix tout est expliqué. Cela va? Le
conseil d'école va avoir à choisir dans ces choix et dans ces
choix il va y avoir tout l'organigramme du cours, c'est-à-dire le plan
du cours. Donc, je ne pense pas qu'ils s'obstinent pour trois ou quatre
sessions. Il va y avoir un plan où tout sera expliqué. Ils
diront: Celui-là on l'aime, et il sera accepté. M. Lagacé
a quelque chose à ajouter à ce sujet.
M. Lagacé: M. le Président, pour faire suite
à la réponse de M. Sénécal, si j'ai bien compris
votre question, nous sommes actuellement sur des modalités ou des
détails qui peuvent se régler à l'aide de
règlements internes.
Un conseil d'administration d'une école, en concertation avec une
commission scolaire ou n'importe quel autre type d'organisme, peut et doit
établir des échéanciers pour - si on parle d'un calendrier
scolaire, même pas de l'année de l'école de 180 jours, mais
de rencontres prévues au niveau de l'implantation de nouveaux programmes
être en mesure de libérer soit son personnel au niveau de
l'école, ou les personnes-ressources au niveau d'une commission
scolaire. J'espère avoir répondu en partie à votre
question.
M. Ryan: En partie, oui. Mais pas d'une manière
complètement claire, je regrette.
M. Lagacé: On va essayer de clarifier, M. le
Président.
M. Ryan: Je voudrais vous poser une autre question. Non, mais je
ne veux pas prendre trop de temps non plus, parce que mes collègues
veulent aussi vous poser des questions. Je vais vous en poser une autre: Vous
allez admettre en principe que le directeur d'école ne peut pas relever
de deux "boss".
M. Lagacé: Je suis parfaitement d'accord, M. le
Président.
M. Ryan: De qui va-t-il relever, d'après vous?
M. Lagacé: J'émets une opinion personnelle. Selon
les modalités de la loi et les organigrammes des commissions scolaires,
cela relève d'une personne, que je ne suis pas habilité à
nommer.
M. Ryan: Dans la loi actuelle, c'est bien clair, on peut la
nommer, c'est le directeur général de la commission scolaire.
M. Lagacé: Si vous voulez me faire dire que je suis
d'accord avec la direction de la régionale de Chambly, je dirai:
oui.
M. Ryan: Très bien. C'est un point sur lequel vous
êtes en désaccord avec la
Fédération des comités de parents, par exemple.
M. Lagacé: M. le Président, j'ai dit tantôt
qu'on pouvait accepter un principe d'un mémoire, mais non en accepter
tous les articles. Il y a un certain consensus à faire aussi.
M. Ryan: Très bien. En tout cas, on est
intéressé à savoir sur lesquels vous seriez plutôt
d'accord avec le réalisme.
M. Lagacé: Dans tout ce qui me semble réaliste et
logique, je peux dire que j'embarque.
M. Ryan: Très bien. Dans ce cas-ci, pour le directeur de
l'école, je pense que votre position est assez nette. M.
Sénécal la partage. Vous semblez reconnaître que le
directeur de l'école doit finalement relever du directeur
général de la commission scolaire.
M. Lagacé: D'accord!
M. Ryan: Merci. Y a-t-il quelque chose à ajouter?
M. Sénécal: Oui. Vous avez dit qu'on appuie la
fédération au niveau de la participation et de la
responsabilisation des écoles dans le mémoire. C'est ce qu'on a
dit tantôt.
M. Ryan: Pardon?
M. Sénécal: On a dit qu'on appuyait le
mémoire de la fédération au niveau de la participation des
parents dans l'école et la responsabilisation de l'école.
M. Ryan: Oui. Nous aussi, sur ces deux objectifs
généraux. C'est quand on entre dans la tuyauterie qu'il y a
toutes sortes de problèmes...
M. Sénécal: C'est dans la tuyauterie, c'est
cela.
M. Ryan: Très bien, je vous comprends parfaitement. Je
n'ai qu'une autre question. Vous insistez, avec raison, sur l'importance
de ces services régionaux qu'a mis sur pied la commission
scolaire régionale de Chambly. Vous ne voulez pas qu'ils soient perdus.
Vous montrez très bien, dans votre mémoire, que certains de ces
services doivent, pour continuer d'être accessibles dans des conditions
égales à toute la population, être faits sur une certaine
échelle. Vous mentionnez l'argument du transport, un très bon
système de transport organisé par la commission scolaire de
Chambly. Vous dites: On envisagerait comme hypothèse - vous n'êtes
pas dogmatique là-dessus et je l'apprécie
énormément - trois commissions scolaires de 20 000...
M. Lagacé: Même que nous préférerions
peut-être seulement une commisssion.
M. Ryan: Vous ne rejetez pas l'hypothèse d'une commission
scolaire qui pourrait continuer d'offrir des services comme cela. Vous
êtes ouvert, vous trouvez que cinq dans les dimensions proposées
dans la carte scolaire distribuée par le ministère à la
fin de l'été, cela serait trop petit, si je comprends bien, cela
serait trop inégal.
M. Sénécal: M. Ryan, ce n'est pas inégal,
c'est...
M. Ryan: Encore ici, je voudrais simplement ajouter une chose. Ce
n'est pas du tout un piège que je vous tends, vous le comprenez
bien.
M. Sénécal: Non, non.
M. Ryan: Je ne veux pas vous inviter à dire: Nous autres,
c'est 25 000 élèves et tout. Je voudrais avoir votre impression
sur cela pour préciser un peu ce qui est dans le mémoire. C'est
un point très intéressant. J'ajoute à ceci une autre
considération. Là on a une commission scolaire qui est
constituée pour offrir ces services. Vous avez dit vous-même:
Quand il faut faire des ententes continuellement, cela complique les affaires.
Pour continuer d'avoir ces services régionaux, il faudrait un organisme
permanent, non pas simplement des ententes ad hoc, si je comprends bien votre
pensée.
M. Sénécal: M. le Président, oui,
première question. Il y a des études qui ont été
faites de commissions scolaires, des services qui sont donnés, par
exemple, dans une commission scolaire de 6000, 12 000 et 20 000
élèves. Quand on regarde cela, il ne faut pas être sorcier,
on s'aperçoit que, dans une commission scolaire de 20 000, les services,
l'encadrement et tout ce que vous voudrez, les coordinateurs, les conseillers
sont plus nombreux, etc., pour donner le service à
l'élève. Nous avons pris les cinq territoires et nous avons
constaté que les chiffres étaient d'environ - de mémoire -
de 11 000, 12 000 ou 14 000. C'était très en bas de 20 000. Nous
avons aussi vu des tableaux de comparaison des commissions scolaires, des
services de 11 000 et de 12 000, et il y a un net recul dans les services si ce
sont des commissions scolaires de 12 000 et 13 000 élèves, au
niveau des services et aussi au niveau de l'enseignement professionnel. Si vous
avez une commission scolaire de 20 000, c'est sûr que c'est une entente
nationale, les options professionnelles. Mais une entente nationale va vouloir
dire: une commission scolaire de 20 000 élèves, on lui donne 42
options à la régionale, cela va là parce qu'il y a 20 000
élèves: les élèves ont un choix entre 42 options.
Au niveau national on va dire: cette commission a 8000 élèves, on
lui donne sept ou huit options. C'est pénaliser nos enfants quant
à la possibilité dans leur vie de choisir telle carrière.
Vous parlez aussi des ententes, etc. Une commission scolaire de 22 000, il n'y
aura pas d'entente à faire. Chaque commission scolaire va pouvoir
gérer ses services au niveau professionnel. Pour les enfants en
difficulté, on dit: Sur le territoire, qu'il y ait trois commissions
scolaires, mais seulement une qui gère - je veux dire qui administre -
les services pour les handicapés, et que ce ne soit pas elle qui soit en
charge de cela, mais que chaque commission scolaire puisse participer à
l'administration des services. Les enfants handicapés ont droit à
une qualité de services éducatifs. On rejoint un peu le
mémoire de l'association des handicapés. Je ne sais pas si cela
répond à votre question. Peut-être que M. Lagacé
aurait des...
M. Ryan: Je vous remercie. Je pourrais et j'aimerais continuer.
Je veux donner un peu de temps à mes collègues. Je vous
félicite de votre intérêt pour les affaires scolaires. Vous
faites cela bien consciencieusement et je l'apprécie vivement.
Le Président (M. Blouin): Merci beaucoup, M. le
député d'Argenteuil. M. le député de Vachon.
M. Payne: Merci, M. le Président. Bonjour, M.
Sénécal, M. Lagacé. Il me fait plaisir de vous rencontrer
de nouveau. Nous avons travaillé aux dossiers ensemble. Je ne peux
qu'être sympathique à plusieurs de vos suggestions
éminemment constructives et basées sur l'expérience de la
plus grande commission scolaire régionale au Québec; en termes de
population, la quatrième au Québec. D'ailleurs, plusieurs de vos
suggestions me touchent de près. Lorsqu'on discute de
l'incongruité dans le projet de loi pour ce qui concerne la
représentativité des écoles secondaires au sein du conseil
d'administration, je suis concerné, car trois
de ces écoles secondaires se trouvent dans le comté de
Vachon et la ville de Saint-Hubert, à savoir André-Laurendeau,
Macdonald-Cartier et Gérard-Filion qui représentent, d'ailleurs,
50% de la population étudiante de toute la région partagée
entre Longueuil et Saint-Hubert. Bien sûr aussi, cela pose des
problèmes pour - cela a été soulevé lors d'une
rencontre que M. Laurin a eue avec le milieu anglophone, à
Montréal, il y a deux semaines - le comité de mise en oeuvre, le
problème posé par les 10%-35%.
Je pense qu'il y a aussi un argument qui milite en faveur d'une
reconsidération de la représentativité au sein du conseil
de mise en oeuvre. Donc, il s'agit, à mon avis, d'éléments
très constructifs et très pragmatiques que le législateur
ne peut pas facilement prévoir. C'est la raison pour laquelle nous avons
la commission parlementaire. En mon nom personnel et comme député
impliqué dans le dossier, je vous appuie pour que le législateur
regarde de très près vos recommandations. Cela apporte un certain
appui à votre revendication concernant les territoires. Votre
proposition de trois territoires, plutôt que cinq, mérite aussi
une attention.
Vous n'êtes pas sans observer la provision, justement, en ce qui
concerne les écoles à vocation régionale, à
l'article 33 et également à l'article 201, quant aux ententes
possibles qui, à ma lecture, n'excluent pas du tout les conseils de
concertation régionale.
J'ai quelques questions à poser. J'aimerais juste être
clair là-dessus, M. Sénécal. Je sais que vous étiez
commissaire avant. Vous avez une certaine expérience.
M. Sénécal: Oui.
M. Payne: Même si vous avez un chapeau aujourd'hui, vous
avez déjà eu un autre chapeau. Il faut que ce soit dit
clairement. Lorsque les champions du statu quo récitent la litanie des
inconvénients d'un certain pouvoir décisionnel au conseil
d'école, ils soulèvent l'argument que les parents n'ont pas le
temps, la compétence, l'intérêt et l'expérience pour
travailler aux conseils d'école. Quelle est votre expérience et
vos commentaires là-dessus?
M. Sénéchal: Vous voulez avoir mon opinion
personnelle. Quant aux responsabilités qu'on donne à
l'école, je pense que le parent est prêt à cela. Il y en a
évidemment, à qui cela fait peur d'avoir des
responsabilités. Ils ne se sentent pas sûrs d'eux. C'est normal.
J'ai vécu, si vous me le permettez, une expérience comme
commissaire - vous l'avez mentionné - et c'est la même chose
lorsqu'il entre en fonction. Il y a des cours de rattrapage. La commission
scolaire le soutient, lui donne des sessions pour lui expliquer comment cela
fonctionne. Au niveau des parents, c'est la même chose. La
fédération de la section donne des cours présentement aux
parents pour les perfectionner au niveau d'un comité d'école,
leur expliquer comment cela fonctionne, comment gérer cela, comment
préparer des projets, etc.
Quand le projet de loi 40 va entrer en vigueur, dans le mémoire
de la fédération, la section propose d'aider aussi les parents
à suivre des cours pour s'initier à leur nouveau rôle. Il y
en a déjà beaucoup. Avec ce que la fédération veut
donner, je pense que le parent est responsable, est assez adulte pour faire des
choix. D'ailleurs, on dit qu'il va y avoir des choix à faire dans les
règlements. Il est capable de faire cela; je ne conteste pas cela. Ceux
qui disent que les parents ne sont pas capables, qu'ils ne sont pas aptes
à le faire, c'est peut-être une chicane d'adultes. (10 h 15)
M. Payne: Est-ce que vous êtes en accord ou en
désaccord avec l'idée que, si vous donnez des pouvoirs
décisionnels plutôt que consultatifs aux parents au niveau du
conseil d'école, cela aura un effet direct sur la participation et sur
l'intérêt, sur le dynamisme même de ce conseil
d'école?
M. Sénécal: La réponse à cette
question est évidemment oui. Cela revalorisera un peu les parents dans
l'école qui, depuis quelques années, depuis la loi 27, ne font
que des propositions et ne sont que consultés. Maintenant, ils seront
décisionnels; c'est vraiment revalorisant pour les parents. Ils vont
pouvoir prendre des décisions pour la couleur de leur école, pour
qu'elle soit vraiment adaptée à leur école, et non pour
une commission scolaire. Je réponds oui à votre question. M.
Lagacé a quelque chose à ajouter.
M. Payne: Je m'excuse.
M. Lagacé: Excusez, M. le Président. J'aimerais
ajouter, dans la ligne de pensée du député de Vachon, que
ce que j'ai dit tantôt... Ce que j'aimerais dire à titre de parent
et ce que je pense que les parents aimeraient, ce que tout le monde aime en
fait, c'est la clarté et la transparence. Si on nous donne des pouvoirs
au sein d'un conseil d'école, bravo, mais qu'on nous donne et qu'on nous
définisse ces pouvoirs pour qu'il y ait de moins en moins d'imbroglios
au niveau des échelons supérieurs.
M. Payne: Parfait! C'est exactement le résumé que
j'allais faire, à savoir qu'avec des pouvoirs décisionnels, avec
un mandat clarifié, le projet de loi vous convient dans ses
orientations.
M. Lagacé: En principe et sur le fond,
oui, M. le député de Vachon.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. le
député de Vachon. M. le député de
Louis-Hébert.
M. Doyon: Merci, M. le Président. Je veux souhaiter la
bienvenue à nos invités. Il me fait plaisir d'entendre leur point
de vue; c'est toujours très intéressant. Le discours
ministériel se gargarise beaucoup de participation, de
responsabilisation. C'est devenu une espèce de mythe qu'on
développe et qui me paraît ne pas reposer sur des assises
suffisamment solides pour amener une adhésion spontanée à
cela.
Le Président (M. Blouin): Nous allons vérifier ce
qui se passe, mais de toute façon vous pouvez poursuivre, M. le
député de Louis-Hébert.
M. Doyon: L'adéquation qui devrait exister entre le projet
de loi, la participation et la responsabilisation des parents me paraît
très déficiente. Je ne vois pas cette adéquation, elle
n'est pas visible dans le sens qu'on développe le fait que les parents
ont besoin de ce pouvoir décisionnel, qu'ils ont le droit de
décider en dernier ressort de certaines matières pour que cette
responsabilisation, pour que cette participation ait lieu.
Les propositions ministérielles me font l'effet qu'on veut faire
du conseil d'école une espèce de modèle de
démocratie athénienne selon lequel tout le monde peut s'occuper
de la chose publique, tout le monde a la capacité, tout le monde a le
temps, tout le monde a la compétence pour participer à cette
forme de démocratie athénienne que nous avons pu étudier
en histoire, mais c'est oublier la réalité.
Je ne pourrais faire mieux que de citer certains extraits d'un article
de Mme Lysiane Gagnon, dans le journal La Presse d'hier, qui s'exprime sur la
disponibilité, la compétence et le désir des parents quant
à la proposition gouvernementale sur leur participation au niveau
décisionnel dans les écoles.
Voici ce que dit, dans le journal La Presse d'hier, Mme Lysiane Gagnon:
"II n'est pas rare que, pour une école de 700 à 1200
élèves, moins d'une cinquantaine de parents s'amènent
à l'assemblée où doivent être élus les
membres du comité d'école. Tous les sondages des dernières
années montrent que, si les parents apprécient,
théoriquement au moins, la possibilité qu'ils ont
déjà de dire leur mot à titre consultatif sur certains
aspects du système scolaire, la majorité ne souhaite pas du tout
hériter de cet encombrant cadeau que leur fait le ministre Laurin avec
son projet de loi 40." Ce n'est pas moi qui parle, c'est Lysiane Gagnon. "En
l'occurrence, il s'agit d'un fardeau plutôt que d'un cadeau, et d'une
imposition plutôt que d'un don. "M. Laurin et les jansénistes de
la participation voudraient bien, à tout prix, culpabiliser les parents
"absents", mais ce faisant ils ne font que montrer à quel point ils
vivent dans des modèles abstraits et dépassés,
éloignés de la vie quotidienne de la plupart des familles.
"Prétendre que les parents ont le temps de diriger les écoles,
c'est avoir perdu contact avec la réalité. C'est croire que
toutes les familles sont composées du papa-qui-fait-de-l'argent, de
la-maman-qui-reste-à-la-maison, les deux vivant exclusivement au rythme
de l'enfant et de ses activités scolaires. "Qui donc devra s'astreindre
aux réunions, aux assemblées, à ce travail harassant et
bénévole, il va sans dire, qu'implique la nouvelle conscription
du bon docteur Laurin? La mère évidemment! (Les comités
d'école sont d'ailleurs largement composés de "mères au
foyer"). Et la famille monoparentale? Et les foyers séparés? Et
ceux où la mère a un emploi (la moitié des femmes
mariées sont sur le marché du travail)? Et les enfants, le soir,
à la maison? Qu'est-ce qu'on en fait? Est-ce le ministre qui va venir
faire du "baby-sitting" quand les parents sont en réunion de
comité d'école? Où faudra-t-il les traîner, entre
huit heures et minuit, à la garderie dont le ministre promet que chaque
école sera dotée (comme s'il fallait un projet de loi pour cela)?
"Dans quel monde vivent donc ces législateurs, pour s'imaginer que les
gens ordinaires sont atteints au même degré qu'eux-mêmes de
la maladie de la réunionite et qu'ils sont prêts à engager
dans ces nouvelles activités le peu de temps de loisirs qu'il leur
reste, une fois assumés le travail professionnel, le travail domestique,
les tâches innombrables reliées à l'éducation des
enfants au foyer, le marché, les emplettes, les activités
syndicales, les politiques que s'imposent déjà les citoyens les
plus engagés?"
Mme Gagnon continue, M. le Président: "Prétendre que les
parents ont la capacité de diriger les écoles et de superviser
les orientations pédagogiques, c'est verser dans la démagogie,
cette démagogie qui tente de faire croire que n'importe qui peut faire
n'importe quoi et qui enlève aux enseignants le peu de fierté
professionnelle qui leur reste après que leur travail eût
été codifié à la seconde près par des
conventions collectives négociées à mille pieds au-dessus
de leur tête. "Un bon parent, c'est quelqu'un qui aime son enfant et lui
procure, à la maison, les soins et l'attention qu'il faut. Un parent n'a
pas à se transformer en instructeur de hockey, en chef scout, en
professeur de musique, en directeur d'école, ni en
pédagogue professionnel. "Enseigner, c'est un métier.
Diriger une école aussi. Ce sont en outre des métiers qui
évoluent: qui donc, même parmi les parents instruits, peut se
retrouver dans de nouvelles méthodes pédagogiques qui sont
d'ailleurs si complexes qu'on incite les enseignants à se recycler
périodiquement? La plupart des parents ne sont même pas capables
d'aider leur enfant à faire ses devoirs! "Pourquoi amener les parents,
dotés d'un pouvoir de tutelle, à s'interposer entre les enfants
et les enseignants, et mettre ces derniers sous la tutelle d'amateurs qui
s'imagineront qualifiés pour discuter de manuels et de principes
pédagogiques alors qu'en réalité, ce qu'ils voudront le
plus souvent c'est un retour à l'école de leur propre enfance et
aux méthodes qui les ont eux-mêmes formés? (En
matière pédagogique, en effet, les parents sont
généralement des juges très conservateurs parce que leurs
seuls points de repère sont leurs propres souvenirs de la petite
école). "Prétendre que les parents devraient diriger les
écoles, c'est revenir des décennies en arrière. Comme si
l'école n'était que l'extension de la famille, comme si
l'école devait refléter exactement les mêmes valeurs que la
famille, comme si les enfants appartenaient corps et âme aux parents. "M.
Laurin dit que les parents sont les "usagers" de l'école. C'est faux.
Les usagers d'une école, ce sont les élèves, et il n'est
pas mauvais du tout que l'enfant échappe durant quelques heures par jour
à la tutelle parentale." - C'est un point de vue, M. le
Président, entre parenthèses, qui vaut la peine d'être
considéré, même s'il n'amène pas l'adhésion
complète - "II découvre alors d'autres valeurs, d'autres styles
de vie, il apprend le pluralisme et la société, il apprend peu
à peu la liberté. Quel besoin..." Oui, M. le
Président.
Le Président (M. Blouin): M. le député de
Louis-Hébert, tout cela est fort intéressant. Cependant, je vous
rappelle que le mandat de la commission est d'entendre tout groupe et toute
personne qui désire se faire effectivement entendre au sujet du projet
de loi 40. Nous avons devant nous un organisme qui a bien voulu se rendre
à cette invitation et il m'apparaîtrait raisonnable que nous
puissions maintenant reprendre le dialogue avec notre organisme
invité.
M. Doyon: Oui, M. le Président. Là-dessus, j'ai
pensé ce matin faire entendre Lysiane Gagnon, qui a des choses à
dire là-dessus et qui est intéressante.
Le Président (M. Blouin): M. le...
M. Doyon: Les points de vue qui ont été
donnés par MM. Sénécal et Galipeau sont des points de vue
qui nous ont déjà été présentés
à plusieurs reprises et sous différentes formes.
Le Président (M. Blouin): Alors...
M. Doyon: Je termine immédiatement, M. le
Président, et je laisserai les invités donner leur
réaction à ce point de vue de Mme Lysiane Gagnon qui a
établi d'une façon fort convaincante, en tout cas, qui
mérite qu'on en discute, que le projet de loi - et c'est l'essence de
son propos - du ministre Laurin est coupé de la réalité et
qu'il ne correspond pas à la façon dont les choses se passent en
réalité.
Le Président (M. Blouin): M. le député de
Louis-Hébert, je voulais vous rappeler la présence de nos
invités.
M. Doyon: Oui, M. le Président, merci. Je continue: "Quel
besoin un enfant a-t-il de retrouver ses parents à l'école? Et au
secondaire, combien d'adolescents ont vraiment envie de voir leurs parents
s'occuper des horaires et des activités de l'école? "En
règle générale et exception faite de cette infime
minorité de parents qui sont eux-mêmes des pédagogues
qualifiés, les parents sont plus mal placés que quiconque pour
voir à la gestion des écoles, parce qu'ils sont
viscéralement subjectifs et en conflit d'intérêts
perpétuel." C'est l'opinion de Mme Gagnon.
Elle continue en disant: "C'est à travers les succès et
les échecs de leur propre enfant qu'ils analysent les choses. Là
où leur enfant est heureux, là où il progresse, le
père ou la mère se conforte dans la certitude béate que
les autres parents se plaignent pour rien. Si le rejeton va mal, tout le
tableau change: les professeurs sont pourris, l'école est mauvaise, la
discipline nulle, etc. Ce sont des réactions parfaitement normales mais
pas le type de réaction qu'on attend d'un administrateur scolaire."
En conclusion, Mme Lysiane Gagnon dit: "Les mêmes sondages qui
montrent que les parents se contentent fort bien d'un pouvoir consultatif
montrent aussi que ce qu'ils veulent, c'est une amélioration -
véritable -de la qualité de l'enseignement." On ne le soulignera
jamais assez, M. le Président. C'est cela qu'on doit rechercher. "Mais
le projet de loi Laurin n'a rien à voir avec cela. C'est dans les salles
de classe et non pas dans les conseils d'école que s'effectue l'acte
pédagogique, et sa qualité dépend essentiellement de celle
de l'enseignant et de sa motivation. Ce n'est pas la tutelle hautement
subjective des parents - qui de toute façon n'auront pas le pouvoir de
changer le personnel enseignant car c'est la
commission scolaire qui reste l'employeur -qui va régler les
vrais problèmes de l'école. Cela pourrait même, dans
certains cas, les empirer."
Je regrette d'avoir été un peu long, sauf que ce point de
vue a largement cours, est partagé par de nombreuses personnes et
j'aimerais avoir votre réaction à ce point de vue, concernant la
participation scolaire et le quiproquo qui existe entre les pouvoirs
consultatifs et les pouvoirs décisionnels.
M. Lagacé: M. le Président...
Le Président (M. Blouin): M. Lagacé.
M. Lagacé: ...en préambule à ma
réflexion ou à ma réaction, je tiens à dire que
l'article de Mme Lysiane Gagnon, qui est paru dans la Presse d'hier, je l'ai
moi-même lu. Je respecte aussi Mme Gagnon en tant que personne, mais je
ne partage pas son opinion. Je ne pense pas que les 40 000 parents qui sont
membres de la Fédération des comités de parents de la
province de Québec actuellement, les bénévoles
impliqués au niveau scolaire, au niveau des loisirs des villes, au
niveau de tous les organismes puissent appuyer ou même se dire d'accord
avec une position semblable. Je relève, dans le discours ou dans
l'énoncé du député de Louis-Hébert, une
chose qui ne m'a pas choqué, remarquez bien, car cela fait vingt ans
que, comme parents, on n'a pas de place dans l'école. Mais, comme
parents, nous sommes les premiers éducateurs de nos enfants, je pense,
et nous devons, dans notre vécu quotidien, être en mesure de
retransmettre des valeurs. Ces valeurs, ce n'est pas nous qui les avons eues,
elles nous ont été transmises aussi par nos parents. Si on est
d'accord avec le préambule, je continuerais en disant que certaines
valeurs de la société québécoise actuelle sont fort
valables; par contre, d'autres peuvent évoluer, comme la
société québécoise évolue.
Ceci n'est pas un discours politique, remarquez-le bien. Quant à
l'amateurisme dont parle Mme Lysiane Gagnon dans son texte d'hier, je m'excuse,
on peut sembler être des amateurs, mais, si vous n'aviez pas d'amateurs,
cela irait drôlement mal dans la société actuelle.
D'accord, tous les parents ne sont pas sensibilisés ou politisés
à la chose scolaire, on n'a qu'à regarder les résultats au
moment des élections scolaires dans nos propres commissions scolaires,
cela varie entre 20% et 25%. Par contre, je vous implore, M. le ministre, de
donner aux parents qui le veulent les pouvoirs qu'ils demandent et ceci,
toujours dans les limites d'un mandat précis. (10 h 30)
Le Président (M. Blouin): M. Sénécal, en
complément de commentaire.
M. Sénécal: M. Lagacé a passablement dit ce
que j'avais à dire, mais je rajouterais une chose. Après les
commentaires de M. le député de Louis-Hébert, j'ai
décidé de ne pas acheter la Presse aujourd'hui. Je vais
économiser 0,25 $.
Une voix: C'est la Presse d'hier.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. Sénécal.
M. le député de Shefford.
M. Paré: Merci, M. le Président. Avant de vous
poser des questions, je vais revenir un peu là-dessus, parce qu'il
faudrait arrêter de charrier à un moment donné. Quand on
dit qu'on va déranger les parents, qu'on va tous les amener à
l'école et qu'on va leur demander maintenant d'être professeurs,
d'être en permanence en réunion, il faudrait arrêter de
charrier. Ce ne sont pas tous les parents de l'école qui font partie
d'un comité d'école, ce sont ceux qui sont
intéressés. Ce qu'on veut faire, c'est de donner des pouvoirs
à ceux qui sont intéressés. Les parents n'auront pas
à intervenir plus que cela. Ceux qui ne le veulent pas n'auront pas
à s'impliquer plus, mais on donne des moyens à ceux qui le
veulent. Il faudrait arrêter de charrier et de faire peur à tous
les professeurs. C'est vrai que c'est à la maison que les parents
doivent compléter l'éducation, l'instruction des enfants et les
aider à faire les travaux, et on ne leur en demande pas plus, mais il
faut donner les moyens de s'impliquer à ceux qui sont
intéressés. Il ne s'agit pas de tous les parents. On ne s'en
vient pas chambarder la vie dans tous les foyers. Là-dessus,
premièrement, il faudrait arrêter de charrier.
Quand on parle d'un retour en arrière, je ne me rappelle pas que
les parents aient eu des contrôles directement dans les écoles. On
ne retourne pas en arrière quand on leur donne quelque chose qu'ils
n'ont jamais eu. Je pense qu'il faudrait faire attention à cela
aussi.
Un troisième point qu'on a amené un peu globalement dans
la lecture du mémoire qu'on vient d'entendre, c'est que le
système arrache maintenant les enfants aux parents, que c'est
l'étatisation de l'éducation, que les parents n'ont plus leur mot
à dire. Justement, ce n'est pas cela qu'on veut, on veut que
l'éducation réponde à l'attente des parents qui ne sont
pas satisfaits de l'éducation donnée à leurs enfants. Les
sondages le prouvent, tout le monde demande des changements. Les gens disent
que les enfants ne savent plus lire, ne savent plus écrire. Les parents
disent: J'aimerais que mon enfant soit capable d'écrire et de faire
moins de fautes. J'aimerais cela pouvoir le dire à quelqu'un. À
l'heure actuelle, ils ne savent pas à qui le dire, parce que la
commission scolaire est loin. Souvent elle est
proche et on réussit à la rejoindre, sauf que, lorsqu'on
s'adresse au comité de parents, lorsqu'on s'adresse à
l'école, on nous dit: Non, ce n'est pas moi qui en ai le pouvoir.
Lorsqu'on s'adresse à la commission scolaire, elle nous dit: Non, ce
n'est pas moi qui en ai le pouvoir. Il y a un comité de parents. Le
comité de parents dit: Je n'ai pas de pouvoirs. Justement, on veut que
le parent puisse s'adresser à quelqu'un de proche, à quelqu'un
qui a des pouvoirs et à quelqu'un qui peut faire quelque chose et
répondre à la volonté du milieu. Il y a un bout à
charrier. Je vous remercie d'avoir lu cela, cela nous permettra peut-être
de ramener les choses à leur juste niveau. Ce qu'on veut faire, ce n'est
pas surcharger les parents, mais que ceux à qui on va donner des
pouvoirs soient à l'écoute de ces parents et qu'ils aient les
pouvoirs de répondre à ces besoins-là. Vous avez eu votre
temps, vous allez me laisser le mien, j'espère.
Je voudrais maintenant revenir à nos invités. Je m'excuse
de cet aparté, mais j'avais envie de le faire et je l'ai fait. On n'a
pas eu votre idée, M. le député de Louis-Hébert. Je
vous demanderais de me laisser la parole.
Le Président (M. Blouin): S'il vous plaît! M. le
député de Shefford, vous avez raison, c'est vous qui avez la
parole. Veuillez, s'il vous plaît, maintenant poursuivre.
M. Maltais: Qu'il s'adresse aux invités, non pas aux
autres. On l'écoute.
M. Paré: La question que je voudrais vous poser concerne
une préoccupation des parents et des commissaires. Vous déclarez
dans votre mémoire que votre organisme ne peut appuyer le mode de
composition du conseil d'administration proposé au niveau de la
commission scolaire, parce qu'il se trouve à y avoir une
sous-représentation des écoles secondaires. Je dois dire que cela
mérite vraiment attention et dicussion. Je voudrais savoir si vous avez
des correctifs à apporter, si vous avez des suggestions à nous
faire, parce que c'est une préoccupation à laquelle on doit
s'arrêter. Vous donnez des exemples, vous dites qu'il y aurait deux ou
trois écoles secondaires par commission scolaire formée en vertu
du projet de loi 40. Avez-vous des suggestions à nous faire
là-dessus afin que les écoles secondaires aient une
représentativité un peu plus grande?
M. Lagacé: Présentement, M. le Président, le
Comité de parents de la commission scolaire régionale de Chambly
s'est penché sur quelques points, dont celui de la
sous-représentativité. Mais, malheureusement, étant
donné la très grande complexité de la
représentation - on n'a qu'à se rappeler les débats sur le
partage de la carte électorale, entre autres, au niveau tant provincial
que municipal... Je m'excuse, mais présentement je n'ai pas les
expertises et, personnellement - ce n'est pas un blâme ou une
façon de dire que je ne suis pas bon -je n'ai pas l'expérience et
la compétence pour vous amener des solutions valables. Quant à
exporter des solutions, j'aimerais qu'elles soient utiles. Sinon j'aime mieux
ne pas en faire, et laisser aux organismes la chance de faire des expertises et
de nous consulter. C'est ce que fait effectivement la commission scolaire
régionale de Chambly depuis de nombreuses années. Même
c'est inscrit dans son cahier, la politique de gestion. Que les comités
de parents sont consultés. Je vous ramène au niveau de la
consultation. Nous ne sommes pas des experts. Nous sommes des parents. Nous
avons un vécu, nous avons ties expériences différentes,
nous avons des travaux différents. On est occupé de façon
différente dans la vie. Par conséquent, la
complémentarité ou la pluralité des choses fait qu'on est
capable de réunir quelques personnes ou plusieurs personnes et de leur
demander leur opinion éclairée par des suggestions positives
venant d'autres personnes beaucoup plus compétentes et dont c'est le
travail professionel de le faire.
C'est dans ce sens que la recommandation a été faite, mais
elle n'a pas été explicitée ou même amenée
avec certaines hypothèses de travail pour permettre à d'autres
personnes de pouvoir continuer. Merci.
M. Sénécal: Nous avons mentionné qu'il y
avait une lacune, c'est clair, on le montre par des chiffres; le secondaire va
être très mal représenté. Quand on dit qu'il va y
avoir un commissaire par école, il va y avoir seulement, dans une
commission scolaire, deux commissaires pour le secondaire et treize pour le
primaire. C'est une lacune. Nous avons voulu le mentionner. Comment modifier
cela? Tous les organismes qui ont fait des mémoires ont dû
certainement formuler des suggestions. On ne le sait pas, on ne les pas tous
vus. De plus, dans le mécanisme d'implantation, le gouvernement va
probablement avoir aussi des suggestions. On voulait mentionner la lacune.
C'est très important. C'est clair que deux commissaires au secondaire
contre treize, c'est une lacune. C'est ce qu'on voulait démontrer.
M. Lagacé: Si vous permettez, j'aimerais ajouter un petit
commentaire. J'ai peut-être une hypothèse de travail ou une
"suggestion". Que pourraient apporter - je lance l'idée - les
commissions scolaires intégrées? C'est peut-être un des
mécanismes. Par contre, les expertises, je ne les ai pas. Vous voulez un
exemple. En voilà
un. Tous les parents d'un territoire donné sont responsables du
total de l'enseignement et de la qualité de l'enseignement au niveau
d'une région donnée. On n'a plus de querelles de clocher et de
querelles de pouvoir à savoir qui représente qui et à quel
moment, c'est-à-dire les commissaires du primaire, les commissaires du
secondaire et les commissaires de la régionale. Je ne pense pas qu'on
soit ici pour amener un débat politique. On est ici pour
présenter un mémoire. On le fait. On est ici pour amener des
idées. On essaie de le faire.
Le Président (M. Blouin): Cela va. Merci, M. le
député de Shefford. Mme la députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je vais être très brève. Il
me reste quatre minutes. Tout à l'heure, je vous ai entendu dire: Cela
fait 20 ans qu'on ne peut pas participer à la vie de nos écoles.
Je me demande si, dans les faits, même d'après les lois que nous
avons présentement, qu'il s'agisse de la loi 27 et à plus forte
raison de la loi 71, il y avait des responsabilités données aux
parents. Est-ce qu'on n'a jamais essayé de mesurer jusqu'à quel
point les parents ont exercé ce qui était déjà dans
les lois? On a vu que des parents l'ont exercé, parce que - vous
étiez ici hier soir - une école est venue présenter son
projet particulier. On en a eu plusieurs exemples. Il y a des commissions
scolaires, enfin, généralement, on les appelle écoles
alternatives, ou on leur donne un autre nom exerçaient à peu
près l'équivalent de ce qui est prévu dans le projet de
loi. Est-ce que ce n'est pas parce qu'une partie des parents, selon les
écoles, s'implique moins? C'est peut-être à cause de la
mentalité de certains directeurs d'école, de certaines
commissions scolaires plutôt qu'aux lacunes des lois existantes. Est-ce
que vous croyez que, même si on légifère davantage pour
dire: Désormais, vous ferez ceci en plus de cela, cela va changer les
mentalités?
Ce que vous désirez, dans le fond, est-ce que cela se fait par
des lois ou si, au contraire... Il faut quand même donner certaines
balises, je suis d'accord pour la participation des parents parce que... Mais,
même avant cela, il y a des parents qui ont créé leur
propre participation. Je pense que, du côté protestant, on a eu ce
qu'ils appelaient les "home and school associations," cela a
précédé tout ce qui existait même du
côté francophone et cela remonte à de nombreuses
années, à tout près de 50 ans. N'est-ce pas vraiment, en
fait, le résultat de la participation des parents? N'est-elle pas aussi
étroitement liée à la volonté des directions
d'école de faire de la place aux parents, de leur accorder l'importance
qu'ils ont à l'intérieur de l'école, qu'à des lois
qui, finalement, sont toujours appliquées d'une façon boiteuse
parce que vous ne pouvez pas forcer la participation et la
coopération?
M. Lagacé: M. le Président, la conjoncture que Mme
la députée de L'Acadie nous présente est vraie. Les
variables et les facteurs qui font que les parents se disent qu'ils n'ont pas
de place dans le système d'éducation depuis 20 ans, sont fort
discutables. À savoir maintenant si réellement tous ces facteurs
sont de la faute d'une personne, le directeur d'école, je ne suis pas
prêt à endosser cette hypothèse.
Mme Lavoie-Roux: Non, je dis: directeurs d'école et
commissions scolaires, enfin, tout ce qui constitue le système scolaire
au niveau local.
M. Lagacé: Dans votre préambule, j'avais saisi le
nom du directeur d'école.
Mme Lavoie-Roux: Oui, je l'ai aussi nommé.
M. Lagacé: Je m'excuse si ma mémoire...
Mme Lavoie-Roux: Oui, je l'ai nommé. M. Lagacé:
D'accord!
Mme Lavoie-Roux: Je ne le retire pas non plus.
M. Lagacé: Non, non, d'accord! Je suis parfaitement
d'accord avec vous. Dans le système scolaire, comme dans toute
société, on se dit qu'on n'a pas de place, mais on a la place
qu'on prend.
Mme Lavoie-Roux: C'est cela.
M. Lagacé: Par contre, le projet de loi 40, qui peut
être voté cet été ou plus tard, je ne le sais pas...
Je vais faire une boutade: On a eu la loi 27, on a eu la loi 71; j'ai
posé la question à des personnes et on m'a dit: Pourquoi ne pas
bonifier la loi 71? Au moment de la loi 27, c'était le même
principe. La personne politique en place, celle que j'ai élue aussi dans
mon comté -et ce n'est pas la personne de mon comté qui m'a
donné la réponse, mais c'est un politicien - m'a dit: Eh bien,
pour bonifier une loi, on en fait une autre. À ce moment-là, je
me dis: Si vous en faites une autre, donnez-nous un mandat précis et on
va essayer de le faire. À savoir que les parents ne sont pas
intéressés à l'école, c'est un débat de
fond. Il y a des parents, les enfants... Mme la députée de
L'Acadie, vous l'avez vécu à la commission scolaire de
Montréal.
Mme Lavoie-Roux: Je pense, monsieur,
qu'il ne faudrait pas déformer ce que j'ai dit. Je n'ai pas dit
que les parents n'étaient pas intéressés, j'ai dit que les
parents...
M. Lagacé: Plus ou moins de parents étaient
intéressés.
Mme Lavoie-Roux: C'est un fait. C'est la
réalité.
M. Lagacé: C'est un fait, d'accordl
Mme Lavoie-Roux: Selon leur disponibilité, selon leur
intérêt, etc. Ce que j'ai dit, c'est: Est-ce que strictement, en
légiférant, on change les mentalités? N'est-ce pas
davantage la motivation des gens à ouvrir l'école aux parents et
à leur permettre d'y prendre leur place plutôt qu'une loi avec des
choses bien précises comme a, b, c et d, qui, on l'a déjà
vu dans certains projets de loi qui exitent actuellement, a donné dans
certains cas des résultats pas très bons, mais dans d'autres cas
des résultats inespérés, comme certains sont venus le
démontrer ici?
M. Lagacé: M. le Président et Mme la
député de L'Acadie, je pense que, sur le fond, dans aucune
sphère de la société, une loi ne va motiver les parents.
Ce n'est pas seulement le projet de loi 40, on peut remonter à d'autres
lois. On peut aller à la restructuration des municipalités, on
peut aller aux MRC, on peut aller n'importe où. Ce n'est pas la loi
votée par une Législature qu'on a élue qui fait que les
parents ou les intervenants participent plus ou moins.
Mme Lavoie-Roux: C'est cela. C'est ce que je pensais. Merci.
Le Président (M. Blouin): Merci, Mme la
députée de L'Acadie.
Sur ce, je remercie les représentants du Comité de parents
de la commission scolaire régionale de Chambly d'avoir bien voulu
participer à nos travaux. Je le fais au nom de tous les membres de la
commission parlementaire.
J'invite maintenant le groupe suivant, c'est-à-dire les
représentants du Regroupement scolaire de l'île de
Montréal, à bien vouloir s'approcher de la table des
invités, afin de nous livrer leur mémoire. Pendant que nos
invités suivants s'approchent, nous allons suspendre nos travaux pour
une ou deux minutes, tout au plus.
M. Lagacé: Merci, M. le Président, de nous avoir
entendus.
M. Sénécal: Merci, au revoir. Le
Président (M. Blouin): Au revoir. (Suspension de la séance
à 10 h 45)
(Reprise de la séance à 10 h 47)
Le Président (M. Blouin): La commission élue
permanente de l'éducation reprend ses travaux. Maintenant que les
représentants et les représentantes du Regroupement scolaire de
l'île de Montréal ont eu le temps de s'installer à la
table, je vais les inviter, comme à l'accoutumée, à nous
présenter en une vingtaine de minutes le contenu de leur mémoire,
puisque nous disposons d'une période globale d'une heure et quinze
minutes pour procéder à la fois à la présentation
et aux échanges entre les membres de la commission et les
invités.
M. le député d'Argenteuil.
Les organismes invités
M. Ryan: M. le Président, avant que nous entendions les
représentants du Regroupement scolaire de l'île de
Montréal, je voudrais vous faire part de quelques communications que
j'ai reçues d'organismes qui avaient manifesté le désir
d'être entendus à cette commission parlementaire. Nous avons
convenu plus tôt de reporter à ce moment-ci cette communication,
vu que le ministre a été retenu pour un entretien avec le
ministre de l'Éducation de Tunisie, ai-je cru comprendre. Je vous donne
les communications suivantes. Ceci est une lettre adressée au ministre
de l'Éducation.
Le Président (M. Blouin): M. le député
d'Argenteuil, je crois que, jeudi dernier, nous avons fait une mise au point,
à la suite d'une intervention de M. le député de Vachon.
J'espère que nous nous sommes bien compris. L'entente était que -
j'ai cru qu'il y avait un consentement de l'ensemble des membres de la
commission - nous pouvions lire des communications provenant d'organismes qui
n'ont pas encore été entendus par la commission parlementaire et
que nous devions limiter nos communications aux organismes qui n'ont pas encore
été entendus par la commission parlementaire. Ce rappel
étant fait, je vous redonne la parole, M. le député
d'Argenteuil.
M. Ryan: M. le Président, j'allais vous dire que le
député de Vaudreuil-Soulanges, M. Daniel Johnson, accordait son
appui à la demande de la commission scolaire régionale de
Vaudreuil-Soulanges qui veut être entendue ici. Il me semble qu'on peut
communiquer cette opinion sans violer en aucune manière votre
dignité ou vos privilèges.
Je voudrais vous communiquer également une lettre que j'ai
reçue de la commission scolaire de l'Île-Perrot, qui vous a
été adressée mais dont on m'a communiqué copie, qui
se lit comme suit: M. le Président, mercredi dernier, nous recevions
votre lettre explicative concernant notre non-participation à la
commission parlementaire sur le projet de loi 40. Permettez-nous de vous
préciser tout de suite que votre lettre n'atténue en rien notre
déception. Nous nous souvenons que, dès l'annonce de la tenue
d'une commission parlementaire portant sur le projet de loi, les fonctionnaires
les mieux informés au ministère disaient que le gouvernement
privilégierait et prêterait une oreille plus attentive aux
groupes, associations et organismes plutôt qu'aux individus. D'une
certaine manière, l'approche était défendable, car il
n'est pas sûr qu'un individu représente l'opinion de la
majorité. Par contre, nous vous soulignons que déjà cette
prise de position manifestait le peu de cas et de place qu'on
réserverait à certains groupes ou certaines personnes. Enfin,
lorsque nous avons connu la sélection des intervenants, nous avons
compris que les dés étaient pipés dès l'annonce de
la commission parlementaire et ce, malgré que le mandat de la commission
soit "d'entendre toute personne ou tout groupe qui désirerait intervenir
sur le projet de loi 40". Comme la coutume veut que ce soit exclusivement le
gouvernement qui fixe l'ordre des intervenants devant une commission, nous ne
pouvons nous empêcher de faire un rapprochement avec la façon dont
le gouvernement exerce la démocratie. Nous sommes estomaqués de
la façon dont le gouvernement nous a traités dans ce cas."
Le Président (M. Blouin): M. le député de
Fabre.
M. Leduc (Fabre): M. le Président, je crois que l'entente
était que... Nous étions d'accord pour que le
député d'Argenteuil présente rapidement, succinctement, la
demande de certains organismes. Je pense que l'entente n'était pas que
nous entendions des discours qui reflètent certaines opinions au sujet
du gouvernement. Je pense que nous entrons ici, M. le Président, dans le
champ d'un débat. À ce moment-là, nous allons être
obligés de vous demander d'exercer notre droit de parole. Il me semble
que nous allons de toute façon à l'encontre du règlement.
Nous aimerions nous en tenir à l'entente pour que le
député d'Argenteuil présente tout simplement et
succinctement la revendication de l'organisme concerné.
Le Président (M. Blouin): Mme la députée de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, question de
règlement. Quand M. le député d'Argenteuil a pris la
parole, vous avez pris soin de mentionner l'espèce de consensus auquel
nous en étions arrivés. Il ne s'agissait pas de
répéter des organismes au sujet desquels on avait
déjà fait des représentations ici. Dans tous les autres
cas, je ne pense pas que le député d'Argenteuil vienne de changer
les règles du jeu que nous avons appliquées jusqu'à
maintenant. Quand il y a eu une nouvelle communication touchant un nouvel
organisme, on lui a toujours permis d'en faire la lecture. Je comprends que
c'est un peu désagréable pour le gouvernement. D'un autre
côté, M. le Président, je pense que c'est la seule
façon qu'ont ces gens, à qui on a demandé de
préparer des mémoires, d'au moins faire entendre, par personne
interposée, leur point de vue. Maintenant, nous allons même leur
refuser de faire les représentations...
M. Leduc (Fabre): M. le Président...
Mme Lavoie-Roux: ...qu'ils nous ont adressées?
M. Leduc (Fabre): ...je m'excuse.
Le Président (M. Blouin): Un instant! M. le
député de Fabre.
M. Leduc (Fabre): Question de règlement encore une fois.
Je crois que Mme la députée de L'Acadie préjuge des
décisions que le gouvernement prendra. Je pense encore une fois que nous
entrons dans le champ d'un débat. Nous sommes d'accord pour que le
député d'Argenteuil présente -c'est l'entente que nous
avons eue rapidement - la demande de certains organismes, mais, encore une
fois, nous refusons d'entrer dans le champ des opinions qui nous
amèneraient inévitablement à un débat. Je crois que
nous allons à l'encontre du mandat qui a été confié
à cette commission.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président. M. Ryan: M. le
Président.
Le Président (M. Blouin): Si vous permettez, tout cela est
très délicat. Je crois comprendre que nous avions convenu que
nous pouvions entendre des opinions d'organismes qui désirent insister
pour que la commission les entende le plus rapidement possible. Enfin, tout
cela, comme je l'ai dit tout à l'heure, est très délicat.
Dans la mesure, évidemment, où dans leur communication les
organismes reprennent le débat que nous avions convenu d'abandonner au
cours de ces travaux, cela complique les choses, et j'en conviens, M. le
député de Fabre. Maintenant, si vous voulez qu'il y ait un
débat sur cette question, je suis prêt à entendre toutes
les opinions que vous voudrez émettre et que prévoit d'ailleurs
le règlement. Au terme de ce débat, vous comprendrez que je
devrai me rabattre sur la lettre des règlements et, en
conséquence,
émettre une décision qui concernera la portée de
notre règlement à l'égard de ce que nous sommes en train
de discuter. Mme la députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, vous avez tout à
fait raison de dire qu'il s'agit d'un sujet délicat. D'autant plus
délicat que ce que le député de Fabre propose de faire,
c'est que nous en fassions un résumé. Est-ce que nous allons
recommencer, d'une certaine façon - je n'ose même pas utiliser le
mot parce que je suis sûre que le député de Fabre va sauter
- à faire une certaine censure des lettres qui nous sont
envoyées? Si nous en faisons une interprétation, vous nous
reprocherez d'avoir laissé des éléments de
côté ou d'avoir fait valoir ceux que nous
préférions. Je pense qu'il est plus juste dans
l'intérêt de tout le monde que ces lettres ou ces
télégrammes soient lus au complet dans la mesure où ils
constituent une première représentation d'un organisme qui n'a
pas été convoqué.
M. Ryan: M. le Président...
Le Président (M. Blouin): M. le député
d'Argenteuil.
M. Ryan: Je dois signaler qu'il n'y a pas eu d'entente avec le
gouvernement voulant qu'on aurait pris l'engagement de résumer les
lettres que j'aurais reçues. Jusqu'à maintenant, j'ai toujours
communiqué le texte intégral des communications qui m'avaient
été adressées. J'entends bien continuer de le faire. Je
crois qu'il est parfaitement réglementaire qu'à un certain moment
nous discutions de la marche de nos travaux. Vous savez que nous vous avons
très peu encombré avec des considérations de cette nature
depuis le début des travaux de la commission. C'est une des commissions
parlementaires où il y a le moins de questions de cette nature qui ont
été soulevées et où on a consacré le moins
de temps à ces discussions.
Mais, ce matin, il faut qu'on fasse le point. Je vais continuer mes
communications, avec votre permission, et j'aurai ensuite une question à
poser au gouvernement. Est-ce que je peux continuer, M. le
Président?
Le Président (M. Blouin): M. le député de
Fabre.
M. Leduc (Fabre): M. le Président, nous nous y opposons.
Nous n'avons aucune objection à ce que le député
d'Argenteuil nous fasse part de la demande d'un organisme qui sollicite
d'être entendu. Je pense que c'est ce qu'il a fait jusqu'à
maintenant. Il nous a fait part de demandes de certains organismes qui ne sont
pas présentement sur la liste d'invitation et désireux de se
faire entendre. Nous nous opposons cependant à ce qu'il nous fasse part
d'opinions politiques, de jugements, d'opinions sur la façon dont les
organismes auraient été invités. Je pense qu'à ce
moment-là nous entrons dans le champ du débat politique et que ce
n'est pas notre mandat, à ce moment-ci, au moment où nous nous
parlons, d'entendre des opinions qui soulèvent un débat
proprement politique. Nous sommes ici pour entendre des organismes.
Présentement, il y a le Regroupement scolaire de l'île de
Montréal que nous devons entendre et je constate que nous le faisons
attendre.
Je vous demanderais donc, M. le Président, de signifier au
député d'Argenteuil de nous dire simplement en substance quelle
est la demande de l'organisme dont il a reçu une lettre, mais
d'éviter de nous faire part des jugements politiques, des opinions sur
la façon dont le gouvernement a pu faire un choix d'intervenants pour
cette commission.
Le Président (M. Blouin): M. le député de
Fabre, vous comprendrez qu'au moment où nous nous parlons, et avec les
arguments additionnels que vous apportez et ceux qu'ont apportés les
députés de l'Opposition, ma marge de manoeuvre se
rétrécit considérablement. Je ne peux certainement pas
porter un jugement sur le contenu des communications qui nous sont
adressées. C'est mal comprendre mon rôle que de considérer
que je peux porter un tel jugement. Je peux davantage porter un jugement, en
m'appuyant sur les règlements, sur le fait que nous pouvons ou que nous
ne pouvons pas y aller de telles communications. Quant au contenu des
communications, à partir du moment où il y a une entente entre
les membres, un consensus pour que des communications soient émises,
provenant d'organismes qui désirent en transmettre le contenu, je ne
peux pas m'interposer et intervenir sur le contenu même de ces
communications provenant des organismes.
Je vous demande de faire porter le débat davantage sur la
possibilité d'avoir ou de ne pas avoir ce genre de communications, mais
non pas sur le contenu même des communications.
M. Leduc (Fabre): M. le Président, à ce
moment-là, nous allons devoir vous demander d'appliquer
intégralement le règlement et de procéder
immédiatement pour que la commission puisse entendre l'organisme
invité, le Regroupement scolaire de l'île de Montréal. Le
mandat de la commission est d'entendre toute personne, tout groupe qui
désire intervenir, et le Regroupement scolaire de l'île de
Montréal est un de ces organismes. Je n'ai jamais entendu dire que
l'Opposition avait objection à entendre le Regroupement scolaire de
l'île de Montréal...
Mme Lavoie-Roux: Franchement, quelle démagogiel
M. Leduc (Fabre): Nous allons devoir vous demander d'appliquer le
règlement.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président...
Le Président (M. Blouin): Merci. Oui, Mme la
députée...
M. Ryan: M. le Président... (11 heures)
Le Président (M. Blouin): M. le député
d'Argenteuil.
M. Ryan: ...je voudrais savoir de quel règlement
précis il s'agit, d'abord. C'est bien beau d'invoquer le
règlement en général, mais pourriez-vous donner l'article
précis du règlement pour qu'on sache de quoi on parle?
Le Président (M. Blouin): Nous parlons...
M. Ryan: Je signale ceci. J'étais en train de lire une
communication qui m'a été adressée, qui est directement
reliée aux travaux de cette commission lorsque j'ai été
interrompu par le député de Fabre qui aurait voulu m'inviter
à faire de la censure dans la lettre que j'étais en train de
lire. Il n'y a pas d'autre chose en question que celle de décider si je
vais continuer à donner ces communications en vertu d'un droit que je
réclame et non pas d'une faveur que je demande au gouvernement ou
à qui que ce soit, ou si je n'ai pas le droit.
Le Président (M. Blouin): Vous avez compris et vous
comprenez aussi que nos droits sont balisés par le règlement qui
régit nos travaux.
M. Ryan: Quel règlement?
Le Président (M. Blouin): II s'agit
précisément de l'article 118 et, si vous avez des remarques
à faire - puisque je comprends que, de part et d'autre, vous me demandez
maintenant de trancher ce débat - je vous demande donc, si vous avez des
arguments additionnels à apporter, de les émettre dès
à présent.
M. Ryan: M. le Président, vous invoquez l'article 118.
Le Président (M. Blouin): Non, je n'invoque pas le
règlement, M. le député d'Argenteuil. Je vous signale
simplement - je n'ai pas à invoquer le règlement - ce que
contient l'article 118 et il me semble que, comme au tout début de nos
travaux il y a maintenant trois semaines, nous sommes encore à
débattre, effectivement, l'interprétation de l'article 118.
M. Ryan: Évidemment, et tant que le gouvernement voudra
limiter la liste des organismes qui viennent ici, il va y avoir des
débats.
Le Président (M. Blouin): Mais là...
M. Ryan: On va faire les débats à la commission. On
en parle depuis trois semaines. Jamais le ministre n'a dit un traître mot
encore. On va lui demander d'en dire un et, pour l'instant, je demanderais de
pouvoir continuer la lecture de mes communications.
Le Président (M. Blouin): Mais, M. le député
d'Argenteuil, j'ai compris que le consensus sur lequel nous pouvions nous
appuyer précédemment n'existe plus et, à partir du moment
où il n'existe plus, vous comprenez que mon rôle consiste à
indiquer aux membres de la commission quelle est la procédure que nous
devrons suivre dorénavant, conformément à
l'interprétation stricte que je devrai faire du règlement qui
régit nos travaux. Voilà pourquoi je vous demande, si vous avez
des arguments à apporter en faveur de cette procédure, de me les
communiquer dès maintenant pour que je puisse prendre la décision
la plus judicieuse possible.
M. Ryan: M. le Président, j'invoque une coutume qui est
bien établie. Je pense que, pour que les travaux d'une commission se
déroulent normalement, il est normal que, lorsque le besoin s'en fait
sentir, on prenne un peu de temps pour mettre de l'ordre dans ses affaires,
s'informer les uns les autres des choses qui sont arrivées et qui nous
intéressent immédiatement. C'est ce que je vous demande dans ce
cas-ci. Il me semble que c'est une demande absolument
élémentaire, d'élémentaire rationalité.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président...
Le Président (M. Blouin): Mme la députée de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: ...j'ai entendu tout à l'heure le
député de Fabre utiliser comme argument le fait qu'en faisant la
lecture de ces communiqués, nous présumions de la volonté
du gouvernement d'entendre les organismes. C'est très simple. On peut
trouver une solution immédiate. Le ministre n'a qu'à nous
indiquer que tous les organismes qui ont présenté des
mémoires seront entendus. Nous aurons cette assurance et nous ne
sentirons plus le besoin de faire des représentations au nom des
organismes qui, présentement, se sentent brimés, parce qu'ils
n'ont pas été retenus dans la liste prioritaire que le ministre a
établie. C'est aussi simple que cela et il n'y aura plus de
discussion.
Le Président (M. Blouin): Oui, M. le député
de Louis-Hébert.
M. Doyon: M. le Président, un élément dont
vous devriez tenir compte dans votre décision est le suivant.
Jusqu'à maintenant, un certain nombre d'organismes ont
été, comme on le sait, il y a de nombreuses semaines,
invités par le ministre à présenter leur mémoire et
ont pu se préparer adéquatement. On connaît cela. Des
organismes ont été laissés de côté et si, par
votre décision, vous faites droit à la demande du
député de Fabre, vous doublerez l'injustice qui est faite, M. le
Président, et je m'explique.
Le Président (M. Blouin): M. le...
M. Doyon: Non, M. le Président...
Le Président (M. Blouin): Oui...
M. Doyon: ...vous ne savez pas ce que je vais dire.
Le Président (M. Blouin): Attention!
M. Doyon: Je regrette, mais je vais continuer.
Le Président (M. Blouin): Oui.
M. Doyon: Vous m'avez demandé de faire part de mes
arguments. C'est ce que je suis en train de faire. Si votre décision
était dans le sens de faire droit à la demande du
député de Fabre, cela aura pour effet non seulement que des
organismes n'auront pas pu se faire entendre, ce qui semble devoir être
le cas de plusieurs d'entre eux compte tenu de l'attitude du ministre, mais,
pour un nombre considérable d'entre eux, ils n'auront même pas pu
faire valoir devant cette commission, contrairement à d'autres, leur
désir, leur volonté expresse, leur demande expresse auprès
du ministre, par la voie du député d'Argenteuil, de se faire
entendre. Vous devez éviter qu'il y ait une deuxième
catégorisation de personnes qui ont présenté des
mémoires; une première catégorisation est
déjà faite, je l'ai signalée précédemment et
je n'ai pas l'intention de revenir là-dessus. En aucune façon une
deuxième catégorisation ne doit être faite. Il y a des
organismes qui auront eu l'occasion de faire valoir leur désir, par
l'intermédiaire du député d'Argenteuil, par une demande
faite expressément au gouvernement. Ils sont prêts et ils veulent
venir comparaître devant cette commission; vous devez éviter
qu'une autre catégorie se voie refuser ce privilège. C'est
important. Il est important que tout le monde soit traité sur le
même pied. Je fais appel avant tout, non seulement au règlement
comme tel, mais à votre esprit de justice et d'équité afin
que tout le monde soit traité sur un pied d'égalité. Cela
prime tous les articles du règlement au monde.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. le
député de Louis-Hébert. M. le député
d'Argenteuil.
M. Ryan: M. le Président, je voudrais soumettre une autre
considération à votre attention. J'étais en train de
donner communication de cette lettre, qui ne diffère en rien,
substantiellement, de bien d'autres communications que j'ai portées
à la connaissance de la commission depuis trois semaines. Je vous
signale que, alors qu'au dire même du député de Fabre il y
avait une entente entre nous sur ces communications, j'ai été
interrompu en plein coeur de la lecture. Il nous a dit qu'il mettait fin
à l'entente en plein coeur d'une lecture; c'est assez fantastique. Il
arrive des moments où la parole dépasse un peu la pensée.
Je ne veux pas prêter de motifs, mais j'espère bien qu'on va
corriger cette très mauvaise impression qui risque de se créer et
qu'on va compléter le travail commencé dans un climat de respect
mutuel plus véritable.
Le Président (M. Blouin): M. le député de
Fabre.
M. Leduc (Fabre): Encore une fois, je veux signaler que le
député de Louis-Hébert veut tenter de nous faire dire ce
que nous n'avons jamais dit. Nous n'avons pas du tout objection à ce que
le député d'Argenteuil nous signale certaines choses au sujet de
divers organismes, qu'il fasse même lecture de communications de certains
organismes qui demandent d'être entendus. Nous n'avons absolument aucune
objection à cela, c'est ce que nous avons fait, c'est la
tolérance que nous avons observée jusqu'à maintenant et
c'est dans ce sens que nous voudrions continuer. Mais nous nous opposons
à ce qu'il y ait lecture de passages qui prêteraient à des
discussions politiques. Quand on porte des jugements - et c'est ce que j'ai
entendu dans le passage que nous lisait le député d'Argenteuil -
quand on nous fait part d'opinions sur la façon dont le gouvernement se
comporte par rapport à la liste des invités, je pense que nous
entrons alors dans le champ du débat.
Si le député d'Argenteuil veut, tout simplement, nous
faire part que cet organisme désire être entendu, nous voulons
bien accepter sa communication. Je ne voudrais pas, non plus, imputer de motifs
à l'Opposition, mais c'est un peu dangereux, ce qui peut se produire.
Qu'est-ce qui empêcherait un organisme d'écrire au
député d'Argenteuil une lettre dans laquelle on
ferait part de jugements politiques sur la façon dont le
gouvernement se comporte par rapport à la liste des invités? Ce
n'est peut-être pas voulu de la part de l'Opposition, mais on entre ici
dans une situation extrêmement délicate.
Justement, pour éviter que, de part et d'autre, nous ne fassions
des procès d'intention, je pense qu'il vaudrait mieux accepter ce qui
s'est fait jusqu'à maintenant, c'est-à-dire qu'il y ait
simplement lecture d'une communication nous faisant part de la demande
d'être entendu par tel ou tel organisme qui aurait écrit au
député d'Argenteuil.
Le Président (M. Blouin): Afin d'apporter une information
plus complète à ce débat, je vais vous donner lecture
d'une lettre qui a été adressée ce matin à M.
Valmond Bouliane, secrétaire des commissions à l'Assemblée
nationale, par M. Jean-François Duchaine, le directeur du cabinet du
leader du gouvernement. La lettre se lit comme suit: "M. le leader du
gouvernement me prie de vous informer que la commission parlementaire de
l'éducation, qui a pour mandat d'entendre des personnes et des groupes
intéressés à faire des représentations concernant
le projet de loi 40, Loi sur l'enseignement primaire et secondaire public,
poursuivra ses travaux les 7, 8 et 9 février 1984. Vous trouverez donc
ci-joint l'ordre de convocation qui touche ces trois journées. Je vous
prie de bien vouloir en aviser les personnes intéressées. Je vous
remercie de votre collaboration et vous prie d'accepter, monsieur, l'expression
de mes sentiments les meilleurs." C'est M. Jean-François Duchaine,
directeur de cabinet du leader du gouvernement, qui a signé cette
lettre. Y a-t-il d'autres remarques à ce sujet? M. le
député de Saguenay.
M. Maltais: M. le Président, en écoutant le
député de Fabre, je pense qu'on ne peut absolument pas souscrire
à son intervention. Il présume que les messages que le
député d'Argenteuil lira provenant de différents
organismes pourraient être dangereux pour la discussion. Je pense qu'on
ne peut pas accepter cela. Y a-t-il deux catégories de
Québécois au Québec? Les gens ne sont-ils pas tous
égaux vis-à-vis du gouvernement? Le but de la commission, c'est
d'entendre tout le monde. Le ministre a décidé de choisir les
organismes qu'il entendra. Ce n'est plus alors une commission parlementaire,
cela brime le but donné à la commission par l'Assemblée
nationale. Tout le monde, c'est tout le monde, ce n'est pas un tel, une telle
parmi tout le monde. Est-ce un exemple de la démocratie que le ministre
veut insérer dans le projet de loi 40? Je pense que l'Opposition n'y
souscrit pas. Merci, M. le Président.
M. Ryan: M. le Président...
Le Président (M. Blouin): Oui, M. le député
d'Argenteuil. M. le député de Shefford désirerait
intervenir avant.
M. Ryan: Oui, je pense que le député...
M. Paré: Oui, M. le Président, sur le même
sujet. Cela me semble simple et clair. Près de 250 mémoires ont
été envoyés. Il y a donc 250 individus, groupes ou
associations qui veulent se faire entendre. La commission a comme mandat
d'entendre les groupes qui veulent se présenter ici. Le gouvernement a
émis une liste. Si on décide de ne pas les entendre tous et si le
gouvernement juge que les membres sont suffisamment informés, il pourra
y avoir un débat. Entre-temps, on vient d'annoncer aussi qu'il y aura
une prolongation des travaux de la commission. D'autres groupes se feront donc
entendre. Mais tous les membres de la commission doivent présumer que
les groupes peuvent tous être entendus tant et aussi longtemps qu'on ne
dira pas que les membres sont suffisamment informés et qu'on
n'amènera pas un débat là-dessus.
Tant et aussi longtemps qu'un groupe ne nous envoie pas une lettre ou un
télégramme pour nous informer de sa volonté de ne pas
comparaître, nous savons très bien qu'il veut être entendu.
Qu'on reçoive des télégrammes qui disent: Je veux
être entendu, cela ne fait pas avancer le débat, car nous savons
que ces gens veulent être entendus puisqu'ils nous ont envoyé un
mémoire et qu'ils l'ont dit. Qu'on répète: Je veux
être entendu et je ne suis pas sur la liste, cela ne donne rien. On le
sait déjà. C'est effectivement reconnu, c'est un fait, puisqu'on
a reçu un mémoire et que les gens ont demandé d'être
entendus. Qu'on répète: Je veux être entendu, cela ne donne
rien, on le sait déjà, puisque l'on ne dit pas que notre
volonté d'être entendu ne tient plus. Si un groupe décidait
de ne pas se présenter, cela vaudrait la peine d'intervenir et de lire
ce communiqué, parce que cela viendrait changer le cours des choses.
Mais le fait de dire: Je ne me suis pas retiré, cela ne change rien;
surtout lorsque ces messages sont adressés au ministre, comme celui que
le député d'Argenteuil est en train de lire. Le ministre sait
déjà que l'organisme réitère sa volonté
d'être entendu.
M. le Président, je ne vois pas pourquoi on ferait la lecture des
communiqués, puisque cela ne change rien. C'est effectivement reconnu
que ces gens l'ont demandé et qu'ils insistent pour être
entendus.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. le
député Shefford. M. le député d'Argenteuil.
M. Maltais: M. le Président, c'est vous qui conduisez les
débats.
Le Président (M. Blouin): Justement. Alors, M. le
député d'Argenteuil.
M. Ryan: Je vous rappelle qu'il y a deux choses sur la table. Il
y a la lettre que j'étais en train de lire au sujet de laquelle
j'aimerais bien que vous nous rendiez une décision. Il y a, de plus, la
lettre dont vous nous avez fait prendre connaissance au sujet de laquelle
j'aurai des observations à faire après que vous aurez
disposé du premier point.
Le Président (M. Blouin): En fait, il s'agit d'un autre
règlement qui est très clair, M. le député
d'Argenteuil, et c'est l'article... Enfin, c'est un autre sujet. Nous pourrons
en discuter après si vous voulez, mais...
M. Ryan: C'est cela.
Le Président (M. Blouin): ...je ne pense pas qu'il y ait
un long débat là-dessus. M. le député de Vachon.
(11 h 15)
M. Payne: J'aimerais, M. le Président, que vous respectiez
l'indépendance des membres de la commission en ce qui concerne leur
mandat. Je vous ai demandé, la semaine passée, en vertu de quel
règlement vous pouvez laisser continuer une lecture, pas sporadique,
mais régulière de la part du chef de l'équipe de
l'Opposition. Moi, je n'ai jamais donné mon consentement à qui
que ce soit pour que les travaux prennent fin à telle ou telle date. Au
contraire, je me considère suffisamment indépendant d'esprit,
comme membre de la commission, pour décider en temps et lieu quand on va
finir nos travaux. Dans mon esprit - je dis cela en toute
honnêteté - je ne suis pas du tout intéressé,
à ce moment-ci, à discuter quand on va terminer. Si les membres
de l'Opposition peuvent présumer de l'intérêt du
gouvernement, j'aimerais signaler qu'il y a un règlement qui ne touche
pas du tout le gouvernement, mais touche plutôt le mandat de la
commission dont je suis membre comme mes collègues ici. En temps et
lieu, on va décider, mais qu'on continue: nous avons des invités
devant nous et il y en a d'autres.
Que je sache, tout le monde a reçu un avis public - vrai ou faux?
- dans la Gazette officielle. Tout membre, par avis public, cela, c'est le
règlement. Je ne vois pas ce que le gouvernement a à faire dans
cette discussion.
M. Ryan: M. le Président...
Le Président (M. Blouin): M. le député
d'Argenteuil.
M. Ryan: ...j'écoute le député de Vachon et
je suis obligé de considérer qu'il parle d'une manière un
peu naïve, parce qu'en même temps qu'il y a cette partie publique,
officielle, sur laquelle il insiste à juste titre, le gouvernement est
à nos trousses continuellement pour obtenir des consentements de notre
part, même sur des listes d'organismes à inviter. Nous lui avons
fait, en retour, des propositions qui n'ont pas été
acceptées. C'est de toute évidence une politique qui vise
à mettre fin à nos travaux assez vite et à essayer de
faire cela en douce sans que personne s'en aperçoive. Il faut bien qu'on
le dise quelque part. C'est un travail d'intérêt public que nous
faisons. On va vider la question ce matin. C'est cela que je veux.
Le Président (M. Blouin): Allez-y, M. le
député, videz la question.
M. Ryan: Merci. Est-ce que je peux faire une communication?
J'avais deux communications à faire. Vous ne me dites pas que vous allez
interrompre cela. Est-ce que je peux plaider une dernière fois
auprès de vous avant?
Le Président (M. Blouin): Je vous dis, M. le
député d'Argenteuil, que, actuellement, nous sommes en train de
débattre d'une question de règlement. Avant que vous puissiez
poursuivre ce que vous étiez en train de faire avant que nous abordions
cette question, il faudra que nous disposions de cette question de
règlement. Si vous avez d'autres commentaires à émettre
sur cette question de règlement, je suis prêt à lesentendre.
M. Ryan: Je voudrais vous demander une précision. Vous
m'avez dit de continuer dans la veine où j'étais engagé.
Je suis prêt à le faire, si c'est bien l'invitation que vous
m'avez faite, et mettre toutes les cartes sur la table. Vous me feriez une
très grande faveur en m'autorisant à le faire.
Le Président (M. Blouin): J'ai compris que vous aviez
l'intention de vider le débat que nous avions engagé. C'est,
évidemment, sur le débat que nous avons entamé, non sur un
autre débat.
M. Ryan: Parfait.
Le Président (M. Blouin): Et le débat que nous
avons entamé, je vous le rappelle, est un débat qui touche une
question de règlement.
M. Ryan: Maintenant, je vais vous poser une question bien simple.
Est-ce que vous décidez qu'on n'aura pas le droit d'émettre la
moindre opinion sur la liste qui nous a été
communiquée ce matin pour la semaine prochaine, qu'on a seulement
à recevoir cela passivement comme des moutons dociles?
Le Président (M. Blouin): Je dis, M. le
député d'Argenteuil, que j'aurai tout à l'heure à
trancher puisqu'il n'y a pas de consensus, de toute évidence. J'aurai
donc à trancher et, en me basant sur la lettre du règlement,
effectivement, à émettre une décision qui, ensuite, devra
régir le déroulement de nos travaux. Si le débat est
terminé, je vais vous demander quelques minutes pour rassembler toutes
ces idées et y mettre la dernière main. Je pourrai, ensuite,
émettre une décision à laquelle, évidemment, nous
devrons, pour la bonne marche de nos travaux, nous soumettre.
M. Ryan: Comme vous avez demandé un répit pour
examiner cela, je voudrais vous rappeler bien clairement les points qui sont en
litige, selon mon interprétation. Il y a, d'abord, la possibilité
pour moi de poursuivre la lecture des messages que j'ai reçus. Je
voudrais avoir une réponse ferme, positive ou négative;
deuxièmement, la possibilité d'informer nos collègues,
ainsi que nos concitoyens du point où en sont les tractations entre le
gouvernement et l'Opposition au sujet des organismes invités devant
cette commission, parce qu'il y a plus que la simple communication qu'on nous
fait ce matin. On va mettre le dossier bien clairement sur la table pour que
chacun puisse s'expliquer en toute franchise.
Le Président (M. Blouin): Alors, il s'agit des deux points
sur lesquels vous désirez avoir des directives, si j'ai bien
compris.
Cela va. Alors, si la commission y consent, nous pourrions suspendre
cette décision pour que je puisse délibérer pendant
quelques instants et entendre tout de suite notre groupe invité, le
Regroupement scolaire de l'île de Montréal, pour lequel nous
disposons d'une période d'une heure et quinze minutes. Nos
invités pourraient d'abord, comme c'est la coutume maintenant,
s'identifier et, ensuite, procéder à la lecture de leur
mémoire en une vingtaine de minutes.
J'ai remarqué que la copie qui nous a été remise,
si on procède à la lecture de ce mémoire de façon
rigoureuse, demandera beaucoup plus que 20 minutes et que vous risquez de
prendre presque la totalité du temps qui vous est dévolu. Alors,
je fais appel à votre esprit de synthèse pour que vous puissiez
procéder à cette présentation en une vingtaine de minutes,
si vous désirez qu'il y ait des échanges significatifs entre les
membres de la commission et vous-mêmes. D'accord?
Auditions (suite)
Regroupement scolaire de l'île de
Montréal
M. Constantin (Jacques): M. le Président, M. le ministre,
Mme et MM. les députés, permettez-moi, avant d'entrer dans le
résumé du mémoire que nous avons présenté,
de vous présenter le Regroupement scolaire de l'île de
Montréal. D'abord, les personnes qui sont ici aujourd'hui vos
invités, à ma droite, Mme Cécile Poissant, à ma
gauche, M. Robert Thivierge. Je voudrais vous rassurer, malgré les
apparences physiques, l'harmonie est totale entre nous. Enfin, moi-même,
après avoir agi comme porte-plume prolifique au long des 100 pages du
mémoire, je vais être aujourd'hui le porte-parole du groupe,
même si je ne suis pas le porte-voix puissant.
Le Regroupement scolaire de l'île de Montréal, c'est
essentiellement un instrument de sensibilisation du public aux problèmes
de l'école et une force de pression auprès des instances
publiques pour l'évolution des institutions. Sa composition montre un
très grand éventail de professions, de localisations
géographiques, l'appartenance à diverses commissions scolaires
et, malgré son nom qui inclut l'expression "l'île de
Montréal", nous débordons largement ce territoire où,
justement, nous voyons que s'amorcent généralement les
évolutions que connaît ensuite la province, mais qui aussi
reflète ces évolutions.
Si je voulais résumer en quelques mots la pensée
articulée au long des quatre années de son existence par le RSIM,
je l'exprimerais dans cette équation: école démocratique,
plus communautaire, plus pluraliste, égale vraiment l'école
publique et commune. Tout cela parce qu'à nos yeux la juste et belle
notion d'école publique et commune, qu'on lisait en filigrane dans le
rapport de la commission Parent, n'a jamais vraiment été mise en
oeuvre au Québec: une école démocratique par son
accessibilité gratuite à tous, d'abord, par son fonctionnement
interne surtout auquel doivent participer les parents et les autres agents de
l'éducation, y compris les élèves eux-mêmes; une
école communautaire, qui doit devenir pour la collectivité un
pôle de développement social ou culturel, la collectivité
étant représentée totalement par un village ou, dans les
milieux urbains, par cette notion de quartier à laquelle nous accordons
une importance énorme, comme le font aujourd'hui les urbanistes et les
socioloques qui essaient de planifier une réhumanisation du milieu
urbain; Une école enfin pluraliste qui, loin d'évacuer la
dimension religieuse, redéfinirait l'insertion de celle-ci dans
l'école parce que nous sommes dans une société
désormais pluraliste.
Autour de cette école, nous voyons des structures dont
l'existence n'a de raison d'être que l'école elle-même. Cela
implique que soit réglé au minimum l'appareil bureaucratique qui
s'y superpose. Cela implique un effort de décentralisation du
ministère vers les organismes régionaux, vers des commissions
scolaires, et des commissions scolaires vers l'école.
Il est bien évident qu'en partant d'une réflexion ainsi
articulée nous ne pouvions pas ne pas intervenir dans le débat
sur cet ambitieux projet de loi puisque celui-ci étend d'abord au
territoire national la restructuration scolaire attendue depuis 20 ans pour
l'île de Montréal et que, sur ce redécoupage de la carte
scolaire, il greffe un nouveau partage des devoirs et des pouvoirs.
Le mémoire que le Regroupement scolaire de l'île de
Montréal présente à la commission parlementaire ne
prétend certes pas scruter en détail tous les rouages de cette
immense machine, ni accorder à chaque partie une égale
importance. Mais, comme nous avons développé au plan du
problème religieux des propositions dans lesquelles nous voyons une
troisième voie entre les impasses que représentent la
confessionnalité, d'une part, et la laïcité, d'autre part,
vous ne vous étonnerez pas que nous ayons consacré dans notre
deuxième chapitre une très large réflexion sur les aspects
que le projet de loi consacre à la question religieuse.
Sur cette question religieuse, si nous voulions ramasser notre position,
nous voulons faire droit à l'article 41 de la Charte des droits et
libertés, droit à l'enseignement religieux conformément
aux valeurs de l'intéressé, mais aussi à la liberté
de conscience. Nous voulons respecter les individus, mais aussi la
primauté du bien commun. Nous voulons être fidèles aux
héritages de l'histoire, mais aussi reconnaître les
évolutions en cours. Entre tant d'exigences apparemment contradictoires,
il y a une dynamique à inventer; entre les principes qui ne sont ni de
droite ni de gauche, mais de toujours et de partout, une troisième voie
à réinventer.
Dans le projet de loi, nous voyons beaucoup de zones de lumière,
qu'il s'agisse de l'école, de la commission scolaire ou de la question
religieuse. Voici enfin l'école posée comme pierre angulaire du
système scolaire. Au commencement, il y a l'école avec sa
pédagogie centrée sur l'élève, l'école mise
au service de la communauté humaine dans laquelle elle s'insère.
Au commencement, il y a l'école avec les parents, les enseignants, tous
appelés à participer à son fonctionnement. La
création dans chaque école d'un conseil multipartite nanti de
pouvoirs réels, l'entrée en scène de parents
jusque-là tenus à distance, et même la majorité
accordée à ceux-ci, l'instauration de comités consultatifs
pour les parents, pour la pédagogie, pour les élèves;
l'assimilation de la direction à un rôle de gérance, la
présence d'élèves dans l'exercice du pouvoir, autant de
pas vers une authentique décentralisation, autant de pas vers une
responsabilisation de l'école. (11 h 30)
Voici encore définie, pour la commission scolaire, un rôle
de coordination et de planification, un rôle ni moins noble ni moins
important que ceux qu'elle a assumés jusqu'ici. Voici la commission
scolaire munie de mécanismes pour la consultation des écoles.
Voici un plan quinquennal qui réduira, en particulier, l'arbitraire des
fermetures d'écoles. Voici taillées des dimensions humaines pour
les commissions scolaires et voici enfin réunis officiellement les
enseignements primaire et secondaire au sein d'une même commission
scolaire.
Sur la question religieuse, plusieurs pas dans la bonne direction.
D'abord, le rejet de l'hypothèse stérile, coûteuse et
négative de la renaissance des quartiers, l'hypothèse, dis-je,
d'un troisième réseau; l'instauration d'un régime d'option
entre enseignement religieux et enseignement moral au lieu de l'odieux
régime d'exemption; une relative ouverture à des enseignements
religieux autres que catholiques ou protestants; la
déconfessionna-lisation officielle des commissions scolaires; la
réduction des pouvoirs des comités confessionnels du Conseil
supérieur de l'éducation; l'astucieuse façon aussi par
laquelle le législateur contourne quelques-uns des obstacles
surannés de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique en
respectant les commissions scolaires constitutionnelle-ment confessionnelles,
mais en les ramenant à leurs dimensions originelles.
Les zones de lumière, mais aussi des zones d'ombre. Si nous
accordons peut-être plus de place à ces dernières, cela ne
veut pas dire qu'à nos yeux, dans le mémoire, le positif ne
dépasse pas le négatif.
Sur la question religieuse d'abord. Le problème religieux auquel
nous consacrons notre deuxième chapitre demeure, malgré des
améliorations, une lourde hypothèque. Il y a, d'abord, certaines
timidités face aux contraintes ou aux soi-disant contraintes
constitutionnelles. Le juge Deschênes nous avait déjà
indiqué que, dans la voie où s'est déjà
engagé le projet de loi 40 de ramener les commissions scolaires
constitutionnelle-ment confessionnelles à leurs dimensions d'origine, on
aurait pu aller plus loin et dire que ces commissions scolaires, à
l'origine, ne géraient qu'un enseignement primaire.
On pourrait aussi se poser des questions sur l'opportunité de
soustraire les commissions scolaires restées confessionnelles ou
dissidentes à tous les avantages que nous propose, pour l'école
publique, le projet de loi 40.
Mme Poissant (Cécile): Nous recommandons qu'un examen
attentif soit fait des articles 28 à 127 afin de vérifier, pour
chacun d'eux, l'opportunité ou la nécessité d'en dispenser
les écoles qui relèveront des commissions scolaires
confessionnelles ou dissidente.
M. Constantin: L'article 338 du projet de loi nous montre une
autre disposition surannée, même si elle est constitutionnelle.
Par exemple, l'avis de dissidence peut émaner de citoyens, si peu
nombreux qu'ils soient, qui n'auraient même pas d'enfant dans les
écoles de la commission scolaire dont ils demandent sécession.
Non, vraiment, toute cette acrobatie à laquelle le législateur
doit se livrer, toutes les concessions qu'il doit faire restent toujours
pénibles.
À l'article 103, une porte est ouverte, mais combien peu, car
l'article en question prévoit que les confessions autres que
constitutionnellement protégées n'auront pas droit à un
enseignement scolaire religieux gratuit.
Mme Poissant: Nous recommandons que le troisième
paragraphe de l'article 103 soumette les enseignements religieux autres que
catholique et protestant aux mêmes normes que ces derniers en ce qui
concerne l'entente avec le groupe religieux concerné, le recrutement de
la personne qui le dispense, sa nomination et sa
rémunération.
M. Constantin: Le projet fait une large place à un concept
intéressant, passionnant, le projet éducatif scolaire, dont on
trouve plusieurs données aux articles 30, 31, 32, 309 et 611 en
particulier. On y attache notamment la possibilité d'un projet
éducatif à teneur religieuse propre à une confession
donnée, ainsi que la reconnaissance officielle d'une école comme
école catholique ou protestante. Or, il nous semble y avoir une
contradiction nette entre la notion d'école publique et commune, d'une
part, et la reconnaissance d'un statut confessionnel. Il nous semble y avoir
incompatibilité totale entre un régime d'option entre
l'enseignement religieux et moral, d'une part, et, d'autre part, un projet
éducatif confessionnel. Comment, en effet, pourra-ton dispenser du
contenu du projet éducatif confessionnel ces mêmes
élèves qui auront obtenu de prendre l'option morale, donc sans
enseignement religieux?
Mme Poissant: Nous recommandons que l'article 30, en
établissant que l'école est publique et commune, charge celle-ci
d'intégrer à son projet éducatif les valeurs de la
communauté à laquelle elle dispense ses services mais, au nom de
son statut d'école pluraliste au service d'une société
pluraliste, lui interdise d'intégrer à ce projet les croyances ou
les valeurs religieuses d'une confession particulière; son pluralisme
même fait partie de son projet éducatif.
Nous recommandons que les articles 31 et 32, ainsi que l'article 611
soient radiés et qu'ils soient remplacés par des articles qui
définiront l'école pluraliste dans son statut juridique, ses
devoirs, son fonctionnement.
M. Constantin: Nous craignons, en lisant certains passages du
projet de loi, que, dans l'école, on confonde souvent enseignement
religieux et pastorale ou qu'on confonde pastorale et animation
socioculturelle. Cette inquiétude porte, en particulier, sur les
articles 110 et 111. On est gêné tantôt par l'absence de
symétrie dans le traitement des deux confessions
désignées, tantôt par l'exclusion de toute confession
autre, gêné aussi étant donné qu'aucune
référence n'est faite à la nécessité de
fournir, collectivement et individuellement, aux élèves un
soutien psychologique, une animation socioculturelle, un "counseling", un
véritable réseau de relations humaines.
Nous avons le sentiment que le volet animation laisse pour compte tous
les non-chrétiens, tous les immigrants si généreusement
accueillis pourtant dans notre société, mais qui n'ont pas de
racines chrétiennes, tous les chrétiens même qui ont pris
leurs distances par rapport à la foi dans laquelle ils ont
été baptisés.
Mme Poissant: Nous recommandons donc que soit assurées en
priorité, dans toute école publique, l'existence et
l'efficacité de services offerts à tous les élèves
en matière de "counseling" personnel, de relations humaines,
d'activités socioculturelles sans connotation religieuse.
Nous recommandons que soit élargie, dans les articles 110 et 111,
la notion de pastorale, pour qu'y soit reconnu le principe de
l'égalité des confessions représentées dans la
clientèle d'une école, sous réserve du désir qu'ont
ou n'ont pas leurs représentants de porter sur le plan scolaire
l'expression de leur foi et l'éducation de celle-ci.
Nous recommandons que la participation des élèves aux
services et aux activités pastorales, de quelque confession majoritaire
ou minoritaire qu'il s'agisse, reste en tout temps une participation libre.
Nous recommandons qu'entre les services pastoraux religieux et les
services socioculturels la distinction soit nette aux yeux de la
clientèle, en particulier par la désignation de personnes
distinctes et que, en même temps, soit franche et ouverte la
collaboration entre les uns et les autres.
Nous recommandons que la direction de l'école collabore avec les
animateurs socioculturels et les animateurs de pastorale pour que les
élèves puissent bénéficier des services des uns et
des autres, à l'intérieur
comme à l'extérieur des locaux de l'institution, ceux-ci
étant gratuitement disponibles aux uns comme aux autres.
Nous recommandons que le personnel affecté au service de
"counseling" personnel et d'animation socioculturelle soit
rémunéré à même les budgets de
l'école.
Nous recommandons que les personnels affectés aux services de
pastorale, de quelque confession ou groupe religieux qu'ils relèvent,
reçoivent leur rémunération de leurs Églises
respectives et que le temps, partiel ou complet, qu'ils y consacrent
respectivement soit à peu près proportionnel aux
clientèles identifiées.
M. Constantin: Nous avons applaudi tout à l'heure...
Le Président (M. Paré): Je m'excuse, M. Constantin,
de vous interrompre, mais j'aimerais vous rappeler que nous sommes à la
page 8 d'un mémoire en contenant 18 et que cela fait déjà
20 minutes. Serait-il possible d'accélérer un peu pour qu'on ait
le temps d'avoir des échanges entre les membres de la commission et
vous-mêmes?
M. Constantin: D'accord, M. le Président. La
déconfessionnalisation des commissions scolaires à laquelle nous
applaudissons nous paraît incompatible avec l'article 220.
Mme Poissant: Nous recommandons que l'article 220, au lieu de
demander la création d'un service de soutien à l'enseignement et
à la pastorale catholiques, fasse obligation à la commission
scolaire d'engager un responsable du soutien aux services, personnels et
collectifs, de "counseling", de relations humaines et d'activités
socioculturelles à offrir à l'ensemble de la clientèle de
toutes les écoles relevant de la commission. Ce responsable aurait aussi
le mandat d'assurer dans les écoles de la commission l'équilibre
entre les divers agents de pastorale qui y oeuvrent, ainsi que l'harmonisation
entre les actions de ceux-ci et celles des services non religieux dont il aura
la responsabilité.
M. Constantin: Contredisant aussi la
déconfessionnalisation des commissions scolaires, nous trouvons que le
projet de loi maintient faussement au sommet de la pyramide des structures qui,
elles, demeureraient confessionnelles.
Mme Poissant: Nous recommandons que soient abolis les
comités catholique et protestant du Conseil supérieur de
l'éducation et que l'on confie à une commission authentiquement
pluraliste - à créer au sein du conseil supérieur ou au
sein du ministère - la tâche de conseiller le ministre dans toutes
les questions relatives à l'enseignement religieux, à
l'enseignement moral, à la pastorale en milieu scolaire et aux services
communs d'animation socioculturelle à l'intention de l'ensemble de la
clientèle.
Nous recommandons que la nomination des membres du Conseil
supérieur de l'éducation ne soit plus fondée sur les
allégeances religieuses des candidats.
Nous recommandons que soient abolis les postes de sous-ministre de foi
catholique et de sous-ministre de foi protestante auprès du ministre de
l'Éducation. Nous recommandons que les questions soumises à ces
sous-ministres soient désormais déférées au Conseil
supérieur de l'éducation chargé de conseiller le
ministre.
Nous recommandons que soient abolis au sein du ministère de
l'Éducation les services de l'enseignement catholique et de
l'enseignement protestant.
Nous recommandons que soit formé à leur place un service
des enseignements religieux et moral responsable de l'harmonisation pour toute
la province des enseignements religieux confessionnels et de l'enseignement
moral sans connotation religieuse.
M. Constantin: Bref, sur la question religieuse, nous avons le
sentiment que là où nous attendions un aménagement du
pluralisme, le projet de loi nous offre un réaménagement
de la confessionnalité. (11 h 45)
Notre mémoire consacre son troisième chapitre à la
répartition des pouvoirs entre les différentes instances,
à l'exercice du pouvoir dans l'école, au fonctionnement de la
commission scolaire, à la mise en oeuvre de la décentralisation.
Comme nous sommes largement d'accord avec les principes qui, à ce
chapitre, sous-tendent le projet de loi, on ne s'étonnera pas de ce que
les réserves que nous exprimons sur ces dispositions se situent à
un niveau plus opérationnel que celles que nous avons formulées
jusqu'ici. Ainsi, parlant du projet éducatif, nous nous
inquiétons de sa correspondance ou de sa compatibilité avec des
consensus nationaux et avec des paramètres ou des objectifs
assignés par le ministère.
Mme Poissant: Nous recommandons que l'article 91 charge
l'école de se donner, par concertation, des orientations et un plan
d'action accordés à son milieu immédiat, en même
temps que respectueux des objectifs nationaux comme des consensus qui se
dégagent au sein de la société québécoise.
Les orientations et le plan d'action ainsi définis constitueront les
éléments du projet éducatif de l'école; chaque
nouveau conseil d'école les étudiera avec soin, les avalisant ou
les amendant, et veillera à ce qu'ils président à la vie
de l'école.
M. Constantin: Je passe à la page 12, M. le
Président, pour me pencher sur les pouvoirs qui sont donnés au
conseil d'école en regard de la gestion des ressources humaines. Nous
trouvons que le législateur est logique dans son entreprise de
responsabilisation du conseil d'école. Dans le sillage des articles 78,
104 et 229, nous recommandons en page 13...
Mme Poissant: ...que les prochaines conventions collectives
autorisent l'école, de concert avec la commission scolaire, à
choisir son personnel en fonction des aptitudes et des goûts de chacun
à collaborer à la réalisation du projet éducatif
que s'est donné l'école.
M. Constantin: Une autre création qui nous paraît
bénéfique, celle des comités consultatifs au sein de
l'école: comité consultatif des parents, comité
pédagogique pour les enseignants, comité consultatif des
élèves.
Mme Poissant: Nous recommandons que l'article 87 établisse
que le directeur d'école ne fait pas partie d'office des comités
consultatifs, mais que ceux-ci peuvent l'inviter comme personne-ressource, sans
droit de vote, pour l'étude de certaines questions de leur ressort.
Nous recommandons donc que les articles 66, 69 et 72 n'en fassent qu'un
seul applicable simultanément aux trois comités consultatifs et
fait de l'ensemble des sujets qui figurent dans les trois articles à
fusionner.
M. Constantin: Parlons maintenant des commissions scolaires.
Commençons par la ligne de partage qui a été choisie pour
découper leur territoire, c'est-à-dire l'axe bilinguistique que
le projet de loi substitue à l'axe biconfessionnel.
La logique de notre démarche, que nous exposons dans le premier
chapitre de notre mémoire, de même que la logique de la
démarche du législateur dans son livre blanc et l'analyse des
réponses apportées aux sondages là-dessus nous font
préférer la création de commissions scolaires
unifiées pour chaque territoire, chaque commission scolaire ayant
juridiction sur l'ensemble des écoles aujourd'hui anglophones ou
francophones, catholiques ou protestantes, de son territoire.
Nous sentons bien cependant, par l'évolution des
témoignages devant cette commission, qu'un consensus s'établit
autour de l'axe bilinguistique. Nous recommandons alors que le
législateur, tout en retenant ce qui semble être un consensus,
prenne trois dispositions.
Mme Poissant: Nous recommandons que le ministère de
l'Éducation se livre à une enquête exhaustive sur les
coûts - sociaux, humains et financiers - de l'actuelle division
biconfessionnelle et de la division bilinguistique proposée par le
projet 40 afin de vérifier les avantages - sociaux, humains et
financiers - que pourrait engendrer la réunion dans chaque territoire
des clientèles francophone et anglophone, catholique et protestante,
sous une seule et même commission scolaire.
Nous recommandons que le législateur, advenant le cas où
il s'en tiendrait à son projet de loi 40 fondé sur une division
bilinguistique, assortisse celle-ci de dispositions qui laisseraient la porte
ouverte à des regroupements volontaires entre commissions scolaires de
langues différentes desservant des territoires qui se recoupent en tout
ou en partie.
Nous recommandons que le législateur, advenant le cas où
il s'en tiendrait à son projet de loi fondé sur une division
bilinguistique, confie à des organimes régionaux non
gouvernementaux, qui ne soient ni confessionnels, ni linguistiques,
l'établissement de la taxe scolaire, la surveillance de sa perception et
la répartition de son fruit et que soient mis en place les
mécanismes qui assureront les standardisations nécessaires pour
assurer entre les régions un juste équilibre.
M. Constantin: Je passe par-dessus le reste de la page 15 pour
dire que nos recommandations n'ont pour effet que de renforcer encore les
dispositions déjà en place dans le projet de loi 40 afin
d'éviter les intempestives pénibles et abruptes fermetures
d'écoles. Je passe par-dessus la page 16 qui avait tout simplement pour
but de renforcer l'adéquation entre les élus, d'une part, et le
quartier qu'ils représentent, d'autre part. Je passe également
par-dessus les dispositions sur le nombre de commissaires pour prévoir
des cas, en somme, marginaux.
Notre inquiétude porte maintenant surtout sur la question de la
décentralisation du ministère vers les commissions scolaires et
vers des organismes régionaux. Nous avons le sentiment que, loin de
décentraliser ses activités pour les donner à des
organismes inférieurs, en termes de palier, le ministère
cède même à la tentation d'y ajouter par l'article 307 en
particulier.
Mme Poissant: Nous recommandons que l'article 307 exclue, pour
l'organisme suggéré, tout rôle d'éditeur ou de
producteur de matériel pédagogique.
M. Constantin: Enfin, nos craintes face à la nouvelle
situation principalement centralisatrice s'apaiseraient si le projet de loi
consacrait quelques articles à la
confirmation d'organismes régionaux propres à
rétablir l'équilibre et créait en province des organismes
analogues.
Mme Poissant: Nous recommandons que, dans le projet de loi, soit
rétabli l'équilibre des pouvoirs entre le ministère de
l'Éducation et les commissions scolaires, afin que ces dernières
reçoivent des pouvoirs ajustés à leurs
responsabilités de coordination et de planification comme de gestion des
ressources humaines, matérielles et financières.
Nous recommandons que l'action des directions générales du
ministère de l'Éducation soit limitée à un
rôle d'information et d'animation à l'égard des commissions
scolaires et, par là, à l'égard des écoles. Je
pense qu'ici, il y a une petite erreur, plutôt que des "directions
générales", il s'agit des "directions régionales". Nous
aurions dû dire: "Nous recommandons que l'action des directions
régionales du ministère..."
Nous recommandons que le Conseil scolaire de l'île de
Montréal soit confirmé dans ses fonctions et que soient
créés, dans les autres régions, des organismes
analogues.
M. Constantin: On se lance donc sur cette question des organismes
régionaux, mais il y a un silence aussi sur la présence sur la
scène scolaire de nombreuses institutions privées largement
subventionnées par l'État. De celles-ci, le projet ne souffle
mot, s1 estimant peut-être dédouané par son
titre de Loi sur l'enseignement primaire et secondaire public. Or, les
ponctions que ces institutions exercent sur les finances de l'État comme
sur la clientèle du réseau public imposent, au contraire, de les
prendre en compte dans tout plan de restructuration et de les mettre de quelque
façon plus nettement au service de la collectivité.
Ce projet de loi est donc un projet ambitieux, mais un projet
cohérent si l'on y apporte les ajustements que nous suggérons.
C'est un projet réalisable aussi, pour peu qu'on donne à chaque
instance les instruments de sa mission. Défi de taille, l'implantation
d'une telle réforme exigera la collaboration de tous. Il faut
éviter, bien sûr, l'improvisation qui a laissé
inachevée la réforme entamée par le rapport Parent. Il
faut souhaiter l'harmonie dans les changements de structures comme dans les
déplacements de personnels, mais il faudra surtout garder le cap sur les
grands objectifs par une volonté politique réaffirmée tout
au long du processus. Nous ne nous scandaliserons pas des tâtonnements et
des lenteurs qui jalonneront la conversion des mentalités et la mutation
des institutions. L'école de grand-papa règne encore sur les
esprits. L'école de demain, il faut la bâtir aujourd'hui. Merci,
M. le Président.
Le Président (M. Blouin): Merci beaucoup pour votre
présentation. Comme votre présentation a pris 35 minutes, c'est
donc dire qu'il nous reste 40 minutes d'échanges pour les deux
côtés, donc 20 minutes de chaque côté. La parole est
maintenant à vous, M. le ministre.
M. Laurin: Je veux, d'abord, remercier le Regroupement scolaire
de l'île de Montréal, en même temps que le féliciter
pour un mémoire fouillé non seulement abondant, mais
éclairé, qui s'inspire d'une pensée
généreuse, prospective et qui vise à améliorer le
projet de loi dont on dit qu'il est solide et cohérent, mais auquel,
quand même, il importe d'apporter des amendements. Il est bien
évident que, dans les quelques minutes mises à notre disposition,
nous ne pourrons pas en épuiser toute la richesse. Je veux donc assurer
le Regroupement scolaire de l'île de Montréal que nous nous
réservons le temps pour en tirer toutes les conclusions qui
s'imposent.
Vous touchez plusieurs sujets: la question religieuse, la question
linguistique et l'école en tant que pierre angulaire du système.
Je voudrais commenter brièvement les deux premiers et vous poser des
questions sur le troisième.
Nous avons beaucoup parlé d'aménagement de la
confessionnalité au cours de cette semaine et je pense que vous avez pu
entendre ces échanges. Autant il est difficile de se rallier aux
positions qui veulent déconfessionnaliser complètement le
système, autant il nous apparaît impossible de souscrire aux vues
qui voudraient le confessionnaliser encore plus qu'il ne l'est à l'heure
actuelle. Le but que nous visons, c'est de respecter les faits,
l'évolution du Québec, les traditions, les droits de la
majorité, avec les droits individuels, la liberté de conscience;
c'est à cet équilibre que nous visons. Je pense que nous y sommes
passablement parvenus, malgré, encore une fois, que notre tentative
reste perfectible et que notre réflexion se continuera à ce
sujet.
Quant aux commissions scolaires linguistiques que vous n'approuvez pas,
nous avons considéré d'autres solutions avant d'arriver à
celle que préconise le projet de loi. D'ailleurs, il y a une
évolution entre le livre blanc et le projet de loi 40 à cet
égard. Il nous semble, en effet, essentiel d'assurer à la
minorité anglophone au Québec le contrôle et la gestion de
ses institutions scolaires, de l'école jusqu'à la commission
scolaire, l'école paraissant absolument nécessaire comme
pôle de développement culturel pour cette société,
pour cette minorité, et apparaissant aussi admi-nistrativement plus
praticable que toutes les autres solutions auxquelles on aurait pu d'abord
penser. D'ailleurs, cette mise en place de commissions scolaires linguistiques
a
reçu de la part des groupes qui ont été entendus un
appui quasi unanime. Vous vous dites totalement d'accord avec cette
visée du projet de loi qui veut faire de l'école la pierre
angulaire du système éducatif et qui veut faire de
l'école, enfin, une école responsable et communautaire. (12
heures)
Je ne veux pas reprendre ici tous vos arguments, mais étant
donné toutes les opinions que nous avons entendues, je voudrais vous
poser deux questions à cet égard. Quand on dit, dans le projet de
loi, que l'école devra appliquer le régime pédagogique,
devra être responsable de l'implantation des programmes, de leur
adaptation et de leur enrichissement, de l'élaboration des services
complémentaires à l'école et de l'évaluation des
élèves qui lui sont confiés, trouvez-vous, après
toutes les études que vous avez faites et avec l'expérience que
vous en avez, que c'est là un objectif irréalisable ou si vous
trouvez, au contraire, que non seulement il est justifié et logique,
mais également parfaitement réalisable avec les moyens que
prévoit le projet de loi? Comme conséquence de cette
première question, croyez-vous que le conseil d'école et,
particulièrement, les parents qui y siégeront pour la
première fois à titre décisionnel sont en mesure d'assumer
ces responsabilités? Croyez-vous que la place faite aux parents est
juste et correspond à leurs possibilités et à leur
compétence?
Le Président (M. Blouin): M. Constantin.
M. Constantin: M. le Président, à la
première question de M. le ministre, je réponds: Oui, nous
trouvons logique cette responsabilisation de l'école; oui, nous trouvons
logique que des pouvoirs qui étaient jusque-là
réservés à la commission scolaire lui soient
donnés. Est-elle réalisable, cette prise en charge par
l'école des responsabilités que vous lui confiez? Notre
réponse est oui. J'ajouterais que tout cela ne se fait pas sans la
commission scolaire. Dans notre mémoire, nous plaidons aussi pour qu'une
décentralisation se fasse du ministère vers la commission
scolaire. Par conséquent, la commission scolaire devra rester un tampon
pour l'application et la surveillance de l'application par l'école du
régime pédagogique, des programmes scolaires et de
l'évaluation même. Même si l'école en est la
première responsable, il y a un relais entre l'école et le
ministère et ce relais doit rester la commission scolaire.
La deuxième question de M. le ministre concerne ce pouvoir qui
est donné à l'école dans une école dirigée,
en somme, par un conseil où les parents, en vertu du projet de loi 40,
deviendront majoritaires. Est-ce que les parents, demandez-vous, le
désirent? Sont-ils en mesure de le réaliser? Mes commentaires
là-dessus sont de divers ordres. D'abord, globalement, notre
réponse est oui. Deuxièmement, nous supposons que la commission
scolaire apportera à l'école dans sa nouvelle structure les aides
nécessaires et, en particulier, pendant une période de rodage,
une aide fournie par des conseillers itinérants pour renseigner chaque
participant, le directeur d'école, les membres du conseil
d'école, qu'ils soient parents, enseignants ou autres. Donc, nous
parlons d'une aide pour roder l'implantation de ce système nouveau.
Une question implicite dans celle de M. le ministre, c'est: Pourquoi
donner la majorité que le projet de loi 40 accorde au sein du conseil
d'école aux parents parce que, implicitement, dans certains milieux, on
semblerait nier que les parents aient l'intérêt suffisant pour
s'impliquer ainsi à fond? Je dirai ici ce qui a déjà
été dit, que ce ne sont pas tous les parents qui sont
appelés à faire partie d'un conseil d'école. Il suffit de
sensibiliser la population parents d'une école pour qu'elle
délègue des membres au sein du conseil d'école.
Autre remarque: la majorité numérique qui est
donnée aux parents, on ne doit pas partir en peur à cause de
cela. C'est une majorité qui n'est que numérique. Il faut tenir
compte en particulier de la position d'infériorité que,
malgré leur nombre, les parents conservent et conserveront toujours,
même quand ils participent à un conseil décisionnel. Les
parents, contrairement aux enseignants, ne passent pas leur journée
à l'école. Ce n'est, pour eux, qu'une portion marginale de leur
temps, si grand que soit l'intérêt qu'ils y portent. On sait par
avance que ceux qui se feront élire au sein du conseil d'école
seront par définition des parents intéressés et
motivés. Ces mêmes parents ne sont pas, contrairement aux
enseignants, formés totalement à l'enseignement. Ils ne sont pas
formés à la participation quotidienne au sein des écoles.
Ces parents, contrairement aux enseignants, n'ont pas l'encadrement
corporatiste ou syndical; donc, ils ne formeront pas un bloc monolithique au
sein du conseil d'école. Ces parents mêmes, au sein du conseil
d'école secondaire, auront comme interlocuteurs parmi d'autres les
représentants des élèves eux-mêmes. Tout cela pour
dire que cette majorité que donne le projet de loi aux parents n'est
qu'une domination apparente et une majorité numérique.
M. le Président, Mme Poissant voudrait ajouter à ma
démarche.
Mme Poissant: Oui. M. le ministre, cela nous paraît
d'autant plus réaliste que les parents dans l'école ne seront pas
isolés. Pour fonctionner, ils auront les conseils et le support des
professionnels de l'école. Il est bien évident, en ce qui
concerne la pédagogie, que les parents savent bien, de la
même façon que les commissaires d'écoles en
général, qu'ils ne sont pas des professionnels de l'enseignement.
Lorsqu'au conseil des commissaires il se prend des décisions, cela se
fait à partir des recommandations des spécialistes. De la
même façon, à l'école, les parents seront
amenés à prendre des décisions, mais en tenant compte de
l'éclairage des spécialistes. L'expérience des
comités d'école le démontre bien; bien qu'étant
consultatifs, les parents, de façon générale - ils sont
très sages en ce sens -retiennent les recommandations et les
éclairages qui leur sont apportés par les spécialistes de
l'enseignement et les professionnels.
On a souvent évoqué ici la question du rythme de chacun.
Je crois que dans la loi on prévoit que certains milieux ne se sentant
pas prêts à assumer certaines responsabilités pourraient
les déléguer, selon le cas, soit au directeur d'école,
soit à la commission scolaire. C'est important qu'il y ait dans la loi
un article qui permette aux gens qui ne sont pas prêts ou qui ne sont pas
désireux d'assumer certaines responsabilités, de les
déléguer.
M. Constantin: Et de les récupérer quand ils sont
mûrs.
Le Président (M. Blouin): Merci beaucoup. Merci, M. le
ministre. Mme la députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Il me fait
plaisir de saluer le Regroupement scolaire de l'île de Montréal,
car j'ai eu le plaisir de travailler avec certains de ses membres pendant
plusieurs années.
Je dois d'abord dire que vous avez consacré
énormément de temps à cette question. Il y a peu d'aspects
que vous n'avez pas touchés. Je pense que, dans ce sens-là, vous
avez fait un grand travail. Je voudrais aussi souligner, en passant, que
même si je ne suis pas d'accord avec toutes les propositions contenues
dans votre mémoire, il y a au moins une chose que je dois
reconnaître en public, c'est que votre intérêt pour
l'éducation n'est pas de date récente - je ne parle pas pour
chacun des membres, mais pour le regroupement - et que vous avez toujours eu
comme souci d'être à la défense de l'école publique.
C'est, d'ailleurs, peut-être ce qui explique vos remarques sur
l'école privée à la fin. Je pense que c'est bon qu'il y
ait dans notre société des gens qui aient à coeur le souci
de l'école publique. Je pense que, dans ce sens-là, votre groupe
l'a toujours démontré.
Il y a tellement d'aspects que vous touchez, je vais simplement en
aborder quelques-uns. Le premier touche la confessionnalité.
Peut-être que le ministre y a touché tout à l'heure, car
j'ai dû m'absenter pendant quelques minutes. D'ailleurs, on
n'était peut-être pas sur la même longueur d'onde
là-dessus. En lisant votre mémoire, je trouve que vous faites une
réduction très grande de l'école confessionnelle.
Finalement, au nom du pluralisme qui, je pense, est un principe auquel on peut
souscrire d'une façon globale et auquel je souscris, moi aussi, et qu'il
faut reconnaître dans notre société, vous me semblez
réduire l'importance qu'encore un grand nombre de parents attachent
à la confessionnalité. Évidemment, on pourrait
définir l'école confessionnelle selon différents
modèles; je ne veux pas entrer là-dedans, mais c'est ce que la
population en général veut quand elle dit: Je veux conserver un
statut d'école confessionnelle.
D'après votre mémoire, j'ai l'impression que, sans dire
que vous voulez l'école neutre, si le gouvernement retenait toutes les
suggestions que vous faites, dans les faits, on aurait une école neutre,
mais, pour les gens qui désirent un enseignement religieux de telle ou
telle confession ce serait, d'une part, aux Églises de l'assumer, du
côté de la pastorale. Du côté de l'enseignement
religieux, pour toutes les catégories, ce serait l'école ou le
système d'éducation qui paierait les enseignants. Finalement, je
n'ai pas l'impression que, dans cette recommandation, dans la façon dont
vous envisagez ceci, vous teniez vraiment compte de l'évolution ou des
désirs de l'ensemble du Québec. J'aimerais avoir votre
réaction.
Le Président (M. Blouin): M. Constantin.
M. Constantin: M. le Président, d'abord, pour le projet
d'école que nous véhiculons et dont une définition un
petit peu plus articulée figure dans notre mémoire complet, en
particulier aux pages 21 à 24, je récuse totalement
l'étiquette de l'école neutre comme nous récusons toute
tendance vers cela. Comment pourrions-nous taxer de neutralité ou de
neutralisme une école qui permet à tout parent ou à tout
élève de recevoir un enseignement religieux de telle ou telle
confession? Comment dire que cette école est neutre? Cet enseignement
religieux, il le reçoit, selon nous, conformément à
l'article 41 de la Charte québécoise des droits et
libertés de la personne, dans les cadres du programme de l'école,
à l'intérieur des horaires de l'école et aux frais de
l'école. Comment pouvons-nous taxer de neutralité ou même
d'une tendance au neutralisme une école qui ouvre la porte à tous
les agents de pastorale qui peuvent être nécessaires pour
desservir, pour honorer la demande qui se fait jour au sein de la
clientèle d'une école. (12 h 15)
À moins qu'on ne veuille nous reprocher
l'obligation que nous faisons à l'école de fournir en
priorité et à tous, par-delà les allégeances
idéologiques ou religieuses, au profit des confessionnalistes comme des
autres, un minimum commun de "counseling" personnel en psychologie, d'animation
socioculturelle et de relations humaines, nous sommes très loin de
l'école neutre. Nous respectons, je crois, exactement ce que les
sondages montrent comme étant ce qu'on réclame vraiment quand on
pense école confessionnelle.
Il y a deux façons dans l'opinion publique d'envisager la
confessionnalité scolaire. Il me semble y en avoir une première,
la plus tapageuse, celle qui veut bloquer dans le béton de statuts et de
règlements absolument omniprésents une confessionnalité
à toute épreuve, régissant toutes les démarches et
toute la journée d'une école. Il y a une autre notion aussi de la
présence religieuse dans l'école, puisque, s'il est vrai que
l'école publique, la seule dont l'État ait l'obligation, a un
devoir, c'est bien celui de desservir d'abord l'ensemble de la population en
faisant droit au respect de l'article 41 de la charte des droits, en faisant
droit non seulement à l'enseignement religieux, mais, je le
répète, nous allons plus loin, aussi à la pastorale pour
autant que soient déjà assurés les services
psychologiques, sociaux et culturels communs.
Mme Poissant: À votre question, madame, j'ajouterais que
vous avez tout à fait raison quand vous dites que nous
privilégions l'école pluraliste. Il nous semble que
l'école de quartier ou l'école de village qui va accueillir la
grande majorité de la clientèle du milieu devrait pouvoir
accueillir les enfants sans qu'il y ait aucune sorte de discrimination à
l'égard des religions. On se dit qu'en offrant des services
d'enseignement religieux et en accueillant la pastorale dans l'école on
respecte la dimension religieuse. Mais on refuse que le projet éducatif
soit teinté de religion, parce que, n'y aurait-il dans l'école
qu'un enfant dont les parents souhaitent un enseignement ou un projet autre que
catholique ou d'une autre religion, on ne respecte pas la liberté de
conscience de cet enfant. C'est dans ce sens-là qu'il nous semble
important que l'école de quartier soit pluraliste, parce qu'on sait que
la majorité des gens, surtout à l'élémentaire,
favorisent l'école de quartier. Il peut y avoir de façon
exceptionnelle des groupes qui se donnent des écoles
particulières; on le voit pour les écoles alternatives. On
pourrait le voir pour certaines confessions, mais, à notre sens, cela ne
devrait pas être l'école de quartier.
M. Constantin: Cette importance que nous accordons à
l'école de quartier, nous y avons été sensibilisés
ces dernières années par une participation étroite aux
questions qui se sont soulevées en maints endroits de fermeture
d'écoles. C'est alors en particulier que nous avons vu que ce mouvement
de fermeture d'écoles, loin d'être arrêté, sera
toujours relancé dans la mesure où nous n'assurerons pas, surtout
dans les milieux urbains, à l'école de quartier l'accès
à la totalité de sa clientèle. Par l'instauration ou le
maintien d'une école confessionnelle, mais tellement confessionnelle
qu'elle rejette les non-catholiques ou les non-protestants vers la
création d'un troisième réseau, nous arrivons à
l'éclatement de l'ensemble du système, nous arrivons à
susciter la présence impossible dans les quartiers de plusieurs
écoles, l'une catholique, l'autre protestante, l'autre neutre, et
là, nous relançons de plus belle le mouvement désastreux,
au plan du tissu social, des fermetures d'école.
Mme Lavoie-Roux: J'aimerais peut-être que vous
répondiez un peu plus brièvement, parce que j'avais quelques
questions à vous poser. Il reste que le problème que vous avez
posé, c'est en fonction de l'article qui dit que l'école publique
est commune. À ce moment-là, vous voyez des contradictions dans
les termes avec ce qui est dans d'autres articles du projet de loi et c'est la
solution que vous avez trouvée, de vous rallier derrière ce
concept d'école pluraliste pour essayer d'établir une relation
plus cohérente entre la définition de l'école publique et
les autres éléments qui sont contenus dans le projet de loi.
Mais, sans parler d'une école confessionnelle, comme vous le dites,
fermée, bloquée, etc., je pense, quand même, qu'une
l'école confessionnelle où les valeurs religieuses
dépassent l'enseignement religieux et des activités de pastorale
où on sera toujours sur la corde raide des activités, par
exemple, autour des sacrements, des fêtes chrétiennes ou autres,
serait rendue très difficile si on s'en tenait à votre
définition de l'école confessionnelle.
L'autre question que je voudrais vous poser a trait à la page 10
où il me semble qu'il y a une espèce de contradiction entre votre
désir que l'école reflète le milieu et, d'un autre
côté, le besoin que vous y voyez d'intégrer les objectifs
nationaux, etc. Finalement, les gens devraient presque prendre comme livre de
chevet le plan d'action pour qu'il n'y ait pas d'écart trop grand dans
les objectifs nationaux. Je pense que tout le monde reconnaît que le
ministère a des objectifs d'éducation à fixer et personne
n'est venu contester cela ici, mais j'ai l'impression que, si on allait dans la
direction que vous dites, avec votre recommandation de la page 10, il y a un
peu une contradiction avec votre désir, aussi que chaque école
colle au milieu.
Une deuxième question immédiatement,
pour laisser la place à mon collègue. Comme vous venez de
Montréal, une des préoccupations que j'ai - et je pense que cela
ne vous surprendra pas - c'est une objection qui a été
apportée ici, je pense, d'une façon objective qui n'a rien
à faire avec la confessionnalité; c'est le problème de
l'écart qui peut se développer entre les écoles du point
de vue des services qu'on rendra aux enfants, compte tenu des
caractéristiques socio-économiques très
diversifiées de Montréal. On peut être un apôtre de
l'école qui dessine son propre projet éducatif et à qui on
donne la gestion de l'école, etc., cela reste une réalité.
Je pense que vous l'avez vécue à Montréal ou
peut-être que vous la vivez. Croyez-vous que c'est une difficulté
ou que tout cela va corriger les écarts que les commissions scolaires ou
le ministère ont essayé ou essaient de corriger dans le sens
d'une plus grande démocratie de l'éducation, dans le vrai sens de
la démocratisation de l'enseignement? Croyez-vous que ces efforts ne
seront pas minés, au moins pour une certaine partie, justement, par le
fait que les milieux n'ont pas les mêmes ressources? Il ne s'agit pas
uniquement de ressources financières. Il faut bien se le dire. Il s'agit
aussi de ressources matérielles. C'est ma deuxième question.
Ma troisième question est la suivante: Quelle part faites-vous
aux enseignants à l'intérieur du conseil d'école? Parce
que je n'en ai pas vu, à moins que je n'aie mal lu. Merci.
M. Constantin: En réponse à votre première
question qui était, je crois, la relation entre un projet
éducatif local et les objectifs ou les consensus nationaux, je pense que
toute société vit avec cela. Le projet local, qu'on parle
d'école, d'hôpital ou de je ne sais quoi, reste un compromis sans
cesse refait entre les impératifs et les sentiments de la population
locale, d'une part, et les exigences de paramètres nationaux dont
certains sont exprimés par un ministère de l'Éducation et,
dans d'autres, sont flottants dans l'ambiance d'une société
à telle époque. À ce sujet, je vous renvoie à la
page 48 de notre mémoire proprement dit qui explicite un peu cette
correspondance.
Deuxième question. Ai-je bien compris? Est-ce qu'il n'y aurait
pas une inégalité dans les services que diverses écoles
offrent à leurs commettants selon que l'école est
implantée en milieu bien nanti ou en milieu
défavorisé?
Mme Lavoie-Roux: On parle aussi de la disponibilité des
parents dans un milieu plutôt que dans l'autre; ce n'est pas
nécessairement une question de milieu nanti ou pas, il y a bien des
variables qui peuvent intervenir.
M. Constantin: Oui. Enfin, c'est tout le problème des
écarts entre favorisés et défavorisés dont,
malheureusement, le projet de loi ne parle pas tellement. Nous voyons que les
écarts pourront se combler en partie d'abord par l'intervention de la
commission scolaire en ce qui concerne les écarts entre ses
écoles à elle. Si, au sein d'une commission scolaire, il est
évident que telle école, de par l'amplitude de ses locaux ou je
ne sais quoi, récupère des revenus qui sont absolument
inaccessibles à telle autre école, la commission scolaire devra,
d'une façon à déterminer, pourvoir à une certaine
péréquation locale.
Notre mémoire insiste plutôt sur la création, quand
ils n'existent pas, et le maintien, quand ils existent, d'organismes
régionaux - comme, actuellement, à Montréal, le Conseil
scolaire de l'île de Montréal - comme facteur de
péréquation pour établir à court terme, à
moyen terme et à long terme, en collaboration avec les commissions
scolaires participantes, des plans de rééquilibrage de ces
disparités entre favorisés et défavorisés.
J'ajouterai un principe de base dont le projet ne parle pas, mais que
nous projetons volontiers sur toutes les tribunes: On ne saura, dans aucune
société - et surtout la nôtre - jamais combler ces
écarts si on n'accepte pas d'y mettre le paquet. La justice distributive
n'est pas une justice mathématique. Pour équilibrer les
écarts dont nous parlons, il faudra que les écoles et les
commissions scolaires implantées en milieu défavorisé
reçoivent des appuis financiers beaucoup plus élevés que
d'autres, même si cela paraît discriminatoire.
Je le répète: La justice distributive exige plus. Par
exemple, une école en milieu défavorisé devrait voir son
ratio maître-élèves changé du tout au tout si on
veut rattraper les retards et maintenir ce milieu à flot.
Mme Poissant: Peut-être pour compléter, vous ne
parliez pas que des milieux bien nantis ou moins bien nantis, vous parliez d'un
certain dynamisme qui pourrait se développer au niveau de
l'école. Dans ce sens, je pense que déjà, depuis le
début des auditions, on a pu voir que des écoles se sont
donné, grâce au dynamisme du milieu, des projets plus
intéressants. Je pense que cela continuera, il y aura des milieux plus
dynamiques et d'autres qui auront peut-être besoin d'être
animés un peu plus.
Mme Lavoie-Roux: Ma troisième question était sur la
place que vous faites aux enseignants.
Mme Poissant: D'accord. Est-ce que je peux répondre?
Le Président (M. Blouin): Très rapidement, cette
fois-ci.
Mme Poissant: On a déjà dit souhaiter la
participation des enseignants. On pense que dans le projet les enseignants sont
invités à partager. Maintenant, en ce qui a trait au nombre,
comme il a été dit plus tôt, le pouvoir d'influence et le
pouvoir de recommandation qu'ont les enseignants contrebalancent...
Mme Lavoie-Roux: Excusez-moi de vous interrompre, mais vous
maintenez uniquement une question d'invitation et non pas un statut vraiment
officiel sur le conseil d'école.
Mme Poissant: Je pense que l'invitation est faite pour que le
conseil d'école ne soit pas bloqué si les enseignants refusaient
de participer. Mais enfin, s'il y a une formulation plus engageante, nous
sommes d'accord; nous ne voulons pas que le conseil soit paralysé.
Le Président (M. Blouin): Merci, Mme Poissant.
M. le député de Chauveau, en vous rappelant qu'il ne reste
que six minutes avant que nous suspendions nos travaux. (12 h 30)
M. Brouillet: J'ai gagné deux minutes sur la
dernière fois, c'est bien. On passe de quatre à six. Merci, M. le
Président.
Je tiens à vous signaler que j'ai apprécié votre
mémoire. Cela reflète une étude très approfondie.
Vous avez été très soucieux de vous prononcer sur tous les
aspects importants. Vous avez fait allusion à des zones de
lumière. Je n'y reviendrai pas, je pense que le ministre et les membres
de l'Opposition en ont parlé tantôt. Vous avez parlé aussi
de quelques zones d'ombre. Les zones d'ombre concernent surtout
l'aménagement de la confessionnalité par rapport à
l'école publique et commune.
Je reviendrais autour de la notion de projet éducatif en ce qui
concerne ces zones d'ombre. Vous avez dit qu'une conception d'une école
publique commune qui permet l'élaboration d'un projet éducatif
contenant des valeurs religieuses, confessionnelles, était le cheval de
Troie de la conception gouvernementale. Vous proposez une conception
pluraliste. Lorsque je regarde un peu la façon dont vous traitez le
projet éducatif dans une école pluraliste, j'aurais tendance
à vous dire que c'est probablement la pierre d'achoppement de votre
conception pluraliste de l'école. Le point précis, c'est lorsque
vous dites qu'on devrait interdire à l'école qui prépare
son projet éducatif à partir des valeurs du milieu d'y inclure
des valeurs religieuses. Je pense que c'est extrêmement
irréalisable ou que c'est difficile de l'imposer, parce que demander
à un milieu qui prépare un projet éducatif d'exclure les
valeurs religieuses qui en sont partie intégrante, c'est quasiment
impensable, ce n'est plus vraiment un projet éducatif qui correspond aux
aspirations du milieu. Vous dites, à un moment donné, qu'il
faudrait préparer un projet éducatif pluraliste. À mon
sens, un projet éducatif ne peut pas en lui-même être
pluraliste si on élimine les références à des
valeurs religieuses d'une confession. La seule façon de garder la
pluralité dans une école serait de permettre la
préparation de plusieurs projets éducatifs. Je pense que c'est
extrêmement difficile pour une même institution de préparer
plusieurs projets éducatifs. Avec cette idée de projet
éducatif, il y a vraiment des difficultés d'accepter votre
conception de l'école pluraliste jusque dans ses derniers
retranchements, tel que vous l'avez fait.
Le Président (M. Blouin): Un commentaire, M.
Constantin.
M. Constantin: La question de M. le député
impliquerait qu'un projet pluraliste élimine des préoccupations
religieuses. Notre conception est tout autre. Le projet pluraliste, je le
disais tout à l'heure, n'en est pas un de neutralité. Nous disons
que le pluralisme d'une école est déjà en soi un projet
pédagogique. Il a une valeur éducative dans la mesure où
il apprend la coexistence, non pas dans le silence de chacun, mais dans
l'expression de chacun, puisque non seulement il permet, mais il établit
que la clientèle, qui réclame un enseignement religieux de telle
et telle confession ou, au contraire, un enseignement moral sans connotation
religieuse, a droit à cet enseignement. La valeur pédagogique de
ces coexistences me paraît grande. Apprendre à connaître ses
différences, à les accepter et ensuite à en tirer un
enrichissement, c'est là que nous parlons de la pédagogie du
pluralisme.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. Constantin. Merci, M.
le...
M. Brouillet: Je voudrais simplement faire une
dernière...
Le Président (M. Blouin): Non. M. le...
M. Brouillet: Excusez-moi, M. le Président.
Le Président (M. Blouin): Un bref commentaire, M. le
député de Chauveau, mais il ne pourra pas y avoir de
réplique.
M. Brouillet: Non, ce sera très bref. Ne croyez-vous pas
qu'il serait peut-être préférable de laisser au milieu le
soin d'introduire les valeurs qu'il désire dans le projet de loi? Si
effectivement, il y a une
diversité, une pluralité, on arrivera, par un consensus,
à mettre dans ce projet des valeurs qui rallient tout le monde.
Interdire d'introduire des valeurs religieuses, je trouve que c'est un peu
inconcevable.
Le Président (M. Blouin): Très rapidement, M.
Constantin.
M. Constantin: Nous préférerions, à la
formulation que nous avons employée dans notre mémoire,
l'abstention de toute mention au sujet de l'introduction des valeurs
religieuses, parce que, si cette présence des valeurs religieuses est
coulée dans la loi, nous en arriverons, tôt ou tard, à des
situations qui brimeront la liberté de conscience. S'il y a une totale
unanimité au sein d'un milieu, mais vraiment une totale unanimité
pour un projet éducatif chrétien, d'accord. Nous ne voulons pas
que le droit, cela reste une façon d'écarter ensuite toute
dissidence. Si l'introduction des valeurs religieuses est exprimée dans
la loi, toute dérogation à cela deviendrait aussi pénible
qu'était pénible le régime d'exemption vis-à-vis de
l'enseignement religieux dans la loi actuelle. Merci, M. le
Président.
Les organismes invités (suite)
Le Président (M. Blouin): Merci beaucoup, M. Constantin,
Mme Poissant et M. Thivierge. Au nom de tous les membres de la commission, je
vous remercie d'avoir participé à nos travaux.
Maintenant, afin de donner suite au débat que nous avons tenu
tout à l'heure, avant de rendre une décision, je rappelle aux
membres de la commission la teneur d'une partie du chapitre VI touchant les
questions de règlement, qui est l'article 43 qui dit d'abord,
premièrement: "Le président se prononce sur les questions de
règlement au moment où il le juge à propos;
deuxièmement: Lorsque le président rend sa décision, il
indique ce qui la justifie et il n'est pas permis de la critiquer ni de revenir
sur la question décidée."
Je crois opportun de clarifier, ce midi, la portée de l'article
118a de notre règlement qui établit les règles des
commissions mandatées pour mener une consultation comme celle en cours
sur le projet de loi 40. Les questions de règlement qu'on porte à
mon attention sur ce sujet m'invitent à apporter les précisions
suivantes, pour la bonne marche de nos travaux. Une fois ces précisions
apportées, je n'accepterai pas que l'on revienne sur ce point. Je
considérerai avoir disposé de ce rappel au règlement.
L'article 118a stipule que, dans l'éventualité où
un projet de loi est envoyé à une commission parlementaire
après la première lecture, un avis doit être publié
par le secrétaire des commissions à la
Gazette officielle, en l'occurrence; cet avis a dûment
été publié le 17 août 1983.
Cet avis publié, les personnes et les organismes ont un
délai de 30 jours pour déposer au secrétariat des
commissions 100 exemplaires de leurs mémoires accompagnés d'un
bref résumé. Toutefois, les travaux de notre commission ayant
été reportés à deux reprises, les personnes et les
groupes intéressés à faire connaître leur point de
vue ont pu se prévaloir d'un délai supplémentaire pour
faire parvenir leurs mémoires, soit jusqu'au 1er décembre 1983.
Après ce délai, le secrétaire des commissions doit faire
parvenir à tous les membres de la commission un exemplaire de tous les
mémoires et résumés.
Le troisième paragraphe de l'article 118a indique que le
secrétaire des commissions convoque les personnes qui ont
déposé des mémoires au moins sept jours avant la
réunion où elles se feront entendre. L'usage a
conféré à cet égard une discrétion au leader
du gouvernement, soit de déterminer l'ordre dans lequel les personnes et
les groupes sont entendus. Je rappelle aux membes de cette commission que les
usages et la tradition s'imposent tout autant qu'une règle
écrite. Toute personne ou groupe ayant acheminé un mémoire
au Secrétariat des commissions possède virtuellement le droit
d'être entendu et cela dans des conditions égales pour tous. Je me
dois d'insister sur ce point qui est conforme à l'esprit et à la
lettre de notre règlement.
À l'ouverture d'une séance, le président donne
lecture de l'ordre du jour et appelle à tour de rôle les personnes
ou les organismes convoqués. Ceux-ci peuvent perdre leur droit de se
faire entendre s'ils ne se présentent pas devant la commission ou s'ils
ne sont pas prêts à procéder. La commission n'a pas le
choix d'entendre ou non les personnes ou organismes qui ont
déposé des mémoires à moins que la commission, se
croyant suffisamment renseignée, ne décide de cesser les
auditions et de faire rapport à l'Assemblée.
Cependant, il s'agit là d'une éventualité et on n'a
pas à discuter ici de situations hypothétiques. Toute discussion
basée sur une telle éventualité ne peut être
tolérée dans le cadre de nos travaux. La commission n'a pas le
choix. Nous avons un mandat précis, celui d'entendre toute personne ou
tout groupe qui voudrait intervenir sur le projet de loi 40, Loi sur
l'enseignement primaire et secondaire public. Les droits de parole que le
président confère doivent porter sur ce mandat à moins
qu'il ne s'agisse d'une question de règlement ou d'un débat sur
toute motion jugée recevable. Je dois donc veiller au respect de ces
règles et à ce que tous s'y conforment. J'entends bien
m'acquitter de cette responsabilité et je demande à cette fin le
concours de tous et de tous les
membres de la commission parlementaire.
Sur ce, nous allons maintenant procéder à la motion
d'ajournement de nos travaux et nous nous réunirons à nouveau le
mardi 31 janvier 1984 à 10 heures.
M. Ryan: M. le Président...
Le Président (M. Blouin): Oui, M. le député
d'Argenteuil.
M. Ryan: J'aurais quelques directives à vous demander. Je
n'ai pas compris, en entendant la lecture de votre décision, que vous
aviez pris une décision ferme au sujet de l'acte de censure qui s'est
produit tantôt. Votre décision veut-elle dire que le gouvernement
était justifié de mettre fin unilatéralement et
arbitrairement à une convention - vous venez de dire vous-même
l'importance des conventions - établie entre nous depuis le début
des travaux de cette commission?
Le Président (M. Blouin): M. le député
d'Argenteuil, je vous invite à relire la décision. Je pourrais
vous en faire tenir une copie et vous pourrez en tirer des conclusions
très claires.
M. Ryan: Deuxièmement, votre décision veut-elle
dire qu'on n'aurait même pas le droit de demander au gouvernement de nous
faire part de ses intentions au sujet de la poursuite des travaux de la
commission à un stade ou à un autre?
Le Président (M. Blouin): Ces négociations doivent
en effet se tenir en dehors de la table des délibérations.
M. Ryan: Vous décidez qu'on n'a pas le droit de demander
cela au gouvernement?
Le Président (M. Blouin): M. le député
d'Argenteuil, il me semble que ma décision est très claire. Je
vous invite à la relire. Si, mardi, elle vous suggère encore des
précisions, il me fera plaisir de vous les apporter, M. le
député d'Argenteuil.
Alors, nous ajournons donc nos travaux à mardi prochain, 10
heures.
(Fin de la séance à 12 h 42)