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(Dix heures vingt-deux minutes)
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission parlementaire de l'éducation est réunie aux
fins d'étudier article par article le projet de loi 32, Loi sur
l'accréditation et le financement des associations
d'étudiants.
Les membres de cette commission sont: MM. Charbonneau
(Verchères), Champagne (Mille-Îles), Cusano (Viau), de
Bellefeuille (Deux-Montagnes), Mme Dougherty (Jacques-Cartier), MM. Hains
(Saint-Henri), Laurin (Bourget), Leduc (Fabre), LeMay (Gaspé), Baril
(Rouyn-Noranda-Témiscamingue), Ryan (Argenteuil).
Les intervenants à cette commission sont: MM. Bisaillon
(Sainte-Marie), Dauphin (Marquette), Doyon (Louis-Hébert), Gauthier
(Roberval), Mme Harel (Maisonneuve), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), MM.
Paré (Shefford), Rochefort (Gouin), Sirros (Laurier).
Il faudrait nommer un rapporteur.
M. Leduc (Fabre): M. Baril.
Le Président (M. Jolivet): M. Baril, député
de Rouyn-Noranda-Témiscamingue, sera le rapporteur.
J'appelle donc l'article 1 et je demande à M. le ministre s'il a
des remarques préliminaires.
M- Laurin: M. le Président, je pense avoir dit tout ce que
j'avais à dire lors du débat de deuxième lecture. Je ne
voudrais pas me répéter. Je suis prêt à discuter de
l'article 1 tel qu'il se lit, c'est-à-dire: "La présente loi
s'applique à tout étudiant inscrit dans un établissement
d'enseignement visé à l'article 2." Cet article établit
l'universalité d'application des dispositions de la loi à tous
les étudiants inscrits dans un établisssement. Cela veut dire que
cet article, dans sa généralité, élimine toute
discrimination relative au sexe, à la religion, à la race,
à la nationalité, à l'âge ou au champ d'étude
des étudiants.
Le Président (M. Jolivet): Le député
d'Argenteuil semble avoir des remarques à faire.
M. Laurin: Avant que M. le député d'Argenteuil
prenne la parole, j'aurais un amendement à apporter. Conformément
à un avis de normalisation de l'Office de la langue française qui
a normalisé aussi bien le mot "élève" que le mot
"étudiant", le mot "élève" signifiant un étudiant
à temps plein ou à temps partiel et le mot "étudiant"
étant réservé aux élèves qui étudient
dans les établissements universitaires, je prépare
présentement un amendement pour remplacer le mot "élève",
partout où il apparaît dans le projet de loi, par les mots
"élève ou étudiant".
Le Président (M. Jolivet): Est-ce la même chose pour
"étudiant" aussi?
M. Laurin: Oui, partout. Ce serait une sorte d'amendement
omnibus. Nous regardons cela présentement et peut-être qu'à
la fin de la discussion sur l'article 1 je serai en mesure de communiquer le
texte exact; mais ce que je viens de dire représente la substance de
l'amendement.
M. Ryan: Je n'ai pas bien saisi. Vous remplaceriez le mot
"étudiant" par le mot "élève".
M. Laurin: Le mot "étudiant" par "élève ou
étudiant", conformément aux avis de normalisation donnés
par l'Office de la langue française et qui, selon les termes de la loi
101, doivent lier l'administration.
Le Président (M. Jolivet): Cela veut dire que même
dans le titre on le changerait.
M. Laurin: Oui.
Le Président (M. Jolivet): On va attendre et vous allez le
proposer formellement à la fin.
M. Laurin: Oui, c'est cela.
Le Président (M. Jolivet): D'accord! Article 1?
Remarques préliminaires M. Claude Ryan
M. Ryan: Tout d'abord, je voudrais signaler que je
m'étonne que le ministre n'ait pas déposé de projet
d'amendements. Il n'y a pas de projet d'amendements qui a été
conçu par le gouvernement. D'ordinaire, on
nous les communique un peu avant que le travail en commission commence,
mais là, nous n'avons absolument rien.
M. Laurin: Oui, il y en a quelques-uns que nous avons
préparés. Je m'excuse de ne pas vous les avoir fait apporter.
C'est probablement parce que c'est lundi, c'est le début de la semaine
parlementaire, mais, effectivement, nous avons une liste d'amendements que nous
entendons apporter.
Le Président (M. Jolivet): Est-ce qu'on en a une pour
chacun des membres?
Une voix: Moi, je l'ai.
M. Laurin: On pourrait la faire photocopier et la faire
distribuer immédiatement aux membres de la commission, avec mes excuses
aux députés d'Argenteuil et de Marquette.
Le Président (M. Jolivet): Donc, les documents vont
venir.
M. Ryan: Comme le ministre en convient lui-même, il aurait
été extrêmement utile que nous eussions ces textes avant de
commencer la discussion parce que nous ne savons pas du tout ce qu'ils
entraînent comme changements possibles dans l'économie du projet
de loi et comme répercussions pratiques, non plus. Là, on va
être obligés d'improviser à mesure qu'on avance. C'est un
peu plus risqué.
M. Laurin: C'est parce que nous y avons travaillé en fin
de semaine. Les communications sont toujours plus difficiles en fin de
semaine.
M. Ryan: Je voudrais souligner une autre difficulté
pratique qui se pose ce matin en particulier. En même temps que
siège ici la commission de l'éducation, la commission de la
présidence du conseil siège dans une autre salle pour
l'étude du projet de loi 19 portant sur la création d'un
ministère de la Science et de la Technologie. Je devrai tantôt me
transporter de l'autre côté parce que, dans ce projet de loi, il y
a un très grand nombre de dispositions qui ont des implications directes
et importantes pour l'éducation. Cela devient extrêmement
difficile de faire un travail sérieux sur les deux fronts en même
temps.
Le Président (M. Jolivet): Tout ce que je pourrais vous
dire, M. le député, c'est que, comme président de la
commission, je n'ai aucun pouvoir en ces matières. C'est une discussion
qui aurait dû avoir lieu lors de la motion qui a été
présentée à l'Assemblée nationale vendredi dernier.
On pourrait en discuter longuement ici, mais ce n'est pas l'objet de notre
propos; c'est le projet de loi 32.
M. Ryan: D'accord, M. le Président, mais je voulais vous
en faire part quand même, parce que là-bas, cela a passé
vite l'autre jour: on nous a annoncé cela à la toute fin de la
séance, suivant l'habitude. On n'a pas toujours le temps de se rendre
compte de tout ce qui va être entraîné comme
conséquences.
En troisième lieu - je pense que cela va satisfaire davantage
votre souci de la pertinence - le contexte général dans lequel
nous sommes invités à aborder l'étude en commission du
projet de loi n'a pas changé. Le dernier développement que nous
avons eu à ce sujet remonte à la commission parlementaire qui a
eu lieu il y a à peu près une dizaine de jours maintenant. Au
cours de cette commission parlementaire, si mes souvenirs sont exacts, nous
avons entendu sept organismes, dont trois représentant des
étudiants et quatre représentant des institutions
affectées par le projet de loi. Sur les sept organismes qui
s'étaient fait entendre, cinq, à ma connaissance, ont
exprimé des réserves très sérieuses et se sont
étonnés de la rapidité avec laquelle le gouvernement
entend procéder en cette matière. Ils avaient demandé
fermement que l'étude du projet de loi soit reportée à
l'automne de manière que l'on puisse mieux en mesurer toutes les
implications pratiques.
Je ne crois pas que des organismes qui se présentaient devant la
commission il y a une dizaine de jours aient modifié leur avis depuis ce
temps-là. Je crois comprendre, au contraire, que du côté de
l'association étudiante, apparemment majoritaire, qui s'oppose au projet
de loi, on a maintenu l'attitude qui avait été définie
devant cette commission. De la part d'autres organismes, en particulier de la
Fédération des collèges d'enseignement
général et professionnel, je pense que le gouvernement a dû
recevoir, comme l'Opposition, des représentations indiquant que
l'attitude de fond n'a point changé. On réitère qu'il
serait infiniment préférable qu'une période additionnelle
soit accordée pour l'étude en profondeur des conséquences
de tout ce qui est envisagé, mais on demande, en tout cas, à
défaut d'une telle concession de la part du gouvernement, que soient
examinés très sérieusement un certain nombre d'articles du
projet de loi de manière que les conséquences négatives ou
mauvaises soient réduites au minimum.
C'est en pensant à tout ce contexte général que
nous abordons en commission parlementaire l'étude du projet de loi. Il y
a un bon nombre d'amendements que nous aurons à présenter en
cours de route. Nous sommes très intéressés à
prendre connaissance de ceux que le gouvernement
veut présenter, encore une fois. Sur le fond, tantôt, mon
collègue de Marquette complétera le point de vue des
étudiants. Moi, je parle davantage du point de vue des institutions
d'enseignement, comme responsable du secteur de l'éducation pour
l'Opposition.
Ce qui nous intéresse, c'est que la vie associative
étudiante fonctionne librement, de manière dynamique, avec les
garanties législatives qui peuvent être nécessaires pour
assurer à la fois sa liberté de fonctionnement et sa
stabilité, mais qu'elle fonctionne aussi avec le minimum de contraintes
législatives. Il y a une sorte de principe qui paraît sous-jacent
dans le projet de loi, qui n'est pas exprimé de manière formelle,
mais dont on trouve la manifestation à bien des endroits. C'est un essai
de transposition au domaine de l'action étudiante des principes
généraux qui régissent des associations de travailleurs
dans notre milieu. Évidemment, il y a des éléments qui
sont communs aux deux, qui justifient cet essai de transposition dont nous ne
faisons pas la critique, au contraire. Mais il y a, en même temps, des
différences de conditions qui sont extrêmement importantes. On a
souligné, par exemple, le caractère transitoire du statut de
l'étudiant, surtout au niveau du cégep. On passe deux ans, pour
la très grande majorité, dans le cégep et, après
une certaine période pour s'adapter lorsqu'on entre, déjà
on commence à regarder à l'extérieur lorsqu'approche la
fin de la deuxième année. Cela ne laisse pas
énormément de temps pour la coagulation des énergies en
vue d'une action efficace et représentative. Il faut bien s'entendre sur
ce qu'est la notion d'étudiant à ce niveau-là. Je pense
que, dès le premier article, on aura l'occasion de toucher cela
abondamment. Il n'est pas facile de regrouper, non plus, les étudiants.
Il faut en tenir compte dans un projet de loi comme celui-ci, mais il faut
éviter également de créer des privilèges
exorbitants qui ne répondraient pas à la
réalité.
Ce qui nous a frappés dans les points de vue qui ont
été exprimés par les organismes étudiants en
particulier, c'est qu'il y a deux conceptions qui sont en présence. Il y
a une conception que j'appellerais institutionnelle, c'est-à-dire que,
du côté de l'ANEQ, si j'ai bien compris, on dit qu'il y a une
association qui représente les étudiants d'une institution. Elle
est là; elle est un donné objectif. Il s'agit de la faire
fonctionner dans les meilleures conditions possible et, si elle ne fonctionne
pas à la satisfaction de tout le monde, plutôt que de la
contester, de la remplacer par une autre ou de s'embarquer dans tout ce jeu de
renouvellement d'association, il s'agit de la renouveler de l'intérieur
en changeant la direction, en favorisant une participation plus grande aux
activités. Je n'exprime pas d'opinion sur les deux conceptions, mais en
voilà une qui a été exprimée clairement devant
nous.
L'autre conception est plus conforme au modèle classique que nous
connaissons dans le secteur des relations du travail. C'est celle qui dit
qu'une association peut être accréditée si elle a fait la
preuve qu'elle représente la majorité des étudiants d'une
institution donnée ou d'un secteur donné à
l'intérieur d'une institution. Une fois qu'elle a été
accréditée, elle jouit d'un mandat exclusif de
représentation pendant une période donnée. Au terme d'une
certaine période, qui est de douze mois dans le projet de loi, selon ce
que j'ai compris, on peut instituer une contestation autant de son existence
que de son caractère représentatif.
Je pense qu'il faudrait discuter, pour commencer, de ces deux
conceptions. Le gouvernement a fait son choix. Il a choisi le modèle qui
est défini dans notre législation du travail plutôt que
l'autre modèle. Il faudrait qu'on ait une justification bien claire de
cela. Il y a des avantages et des inconvénients dans l'un et l'autre
modèles. Le gouvernement en a choisi un, ce qui entraîne une
série considérable de conséquences.
Le ministre nous a dit à maintes reprises, en cours de route - on
aura l'occasion de l'aborder plus tard - que de toute manière la loi est
un cadre qu'on propose aux organismes étudiants et qu'on ne leur impose
pas. Il a dit: Là où cela fonctionne bien sur le modèle de
l'entente plus ou moins informelle entre l'institution et l'association ou les
associations concernées, on ne sera pas obligé de se
prévaloir de la loi 32. C'est vrai, d'un côté. De l'autre
côté, cela peut être remis en question parce qu'avec le
projet de loi 32 ce qu'on institue, c'est la possibilité permanente
d'une remise en question du statut de l'association. L'association peut
être reconnue une année. Je crois que c'est douze mois
après que des éléments qui ne partageraient pas ses
orientations peuvent instituer une contestation dans le milieu. Cela peut
revenir continuellement.
On va me dire: Est-ce qu'ils ont peur de la confrontation? Est-ce qu'il
faut avoir peur de cette remise en question? Cela fait partie de la vie
démocratique elle-même. Les gouvernements sont astreints à
cela, les syndicats à l'expiration d'une convention collective sont
astreints à cela également. Oui, mais avec les nuances suivantes.
Dans le cas d'un gouvernement, il y a quand même un mandat d'une
durée de quatre ou cinq ans qui lui donne le temps de faire une action
stable et continue. Dans le cas des syndicats, en général, ils
signent des conventions d'une durée de deux ou trois ans. D'après
les dispositions du Code du travail,
une fois qu'un syndicat a signé une convention collective, son
statut d'agent représentatif pour les fins de négociation des
conditions de travail ne peut être remis en cause qu'un certain temps
avant l'expiration de la convention collective, ce qui lui donne une
période suffisante pour pouvoir faire la preuve de son
efficacité.
Dans ce cas-ci - peut-être que mes souvenirs du projet de loi ne
sont pas aussi précis qu'ils devraient l'être - si mes souvenirs
sont exacts, je crois que toutes ces procédures de remise en cause
autant de l'existence de l'association que de son caractère
représentatif peuvent être instituées douze mois
après qu'elle a été reconnue.
Ce sont des interrogations que nous avons à ce stade-ci. Nous
allons voir à ce que chaque article soit l'objet d'un examen très
attentif en vue d'assurer que la loi qui en découlera soit une loi
réaliste, efficace, juste. C'est dans cet esprit que nous allons aborder
l'étude du projet de loi en commission. Je souligne, encore une fois,
que nous le faisons dans des conditions extrêmement défavorables.
Les étudiants sont dispersés. Moi-même, j'ai des enfants
qui sont au cégep et à l'université, j'en ai plusieurs, et
c'est une question qui leur passe complètement par-dessus la tête
à ce temps-ci de l'année. Ils sont déjà en
vacances. Ils sont déjà partis. Leur soucis, c'est beaucoup plus,
pour ceux qui ont déjà du travail, d'exercer leurs fonctions
estivales d'une manière consciencieuse et, pour ceux qui n'en ont pas,
de s'en trouver. Franchement, à part le petit groupe des professionnels
de l'associationnisme étudiant et des directions des institutions qui
sont encore en poste à ce moment-ci de l'année, je pense qu'il
n'y a à peu près personne qui est vraiment touché par ce
projet de loi et c'est extrêmement regrettable. Je pense que c'est une
raison suffisante pour que, du côté de l'Opposition, nous
apportions le maximum de vigilance à l'examen de chacun des articles du
projet de loi. Merci.
Le Président (M. Jolivet): Je crois comprendre qu'on
serait prêt faire la correction première, c'est-à-dire Loi
sur l'accréditation et le financement des associations
d'étudiants et d'élèves.
M. Laurin: Je vais vous apporter le texte.
Le Président (M. Jolivet): Bon. On va donc procéder
à l'étude de l'article 1 lui-même. M. le
député de Verchères.
M. Charbonneau: Je voudrais faire quelques remarques.
Le Président (M. Jolivet): Certainement.
M. Jean-Pierre Charbonneau
M. Charbonneau: Je ne reproche pas au député
d'Argenteuil de ne pas avoir participé au débat de
deuxième lecture. Je sais pourquoi il était absent, mais je
voudrais, pour son bénéfice et celui des membres de la
commission, reprendre certains passages, que j'ai lus lors de mon intervention
en deuxième lecture du rapport du Comité d'étude sur
l'organisation du système universitaire, partie III, où on
identifie les problèmes de l'organisation étudiante. On fait une
longue analyse de la situation qui existe et des correctifs qui pourraient
peut-être être envisagés. Je ne relirai pas l'ensemble du
texte qui a plusieurs pages, mais seulement certains passage.
M. Ryan: Pour mon information, est-ce que c'est le rapport
Angers?
M. Charbonneau: Je crois que oui. C'est le rapport du
Comité d'étude sur l'organisation du système
universitaire, qui est un comité d'étude de la commission
Angers.
M. Ryan: Que le gouvernement en général n'a pas
tout retenu.
M. Laurin: Que nous allons retenir au fil des années.
M. Charbonneau: Donc, pour l'information du député
d'Argenteuil, entre autres, je voudrais lire certains passages. On dit, entre
autres: "Les étudiants, en tant que groupe social, n'ont pas les
ressources politiques nécessaires pour jouer le rôle dynamique
correspondant à leur importance sociale. Ces ressources sont les
suivantes: le nombre, l'organisation, l'argent, la respectabilité et le
cadre juridique approprié légitimant à un regroupement ou
une action politique." Quand on parle d'action politique, c'est bien
évident que ce n'est pas une action partisane; c'est une action
politique dans le sens général du terme. "L'absence de ces
ressources, jointe à l'état de dépendance du statut
d'étudiant au sein de l'université et dans la
société, explique, selon le comité, la pratique politique
limitée des étudiants actuels."
On continue: "Prises dans un engrenage de difficultés aussi
importantes les unes que les autres, les associations étudiantes font
surtout face à un problème majeur, probablement celui qui est la
cause de tous les autres: l'absence d'un cadre formel de reconnaissance des
associations générales. Un tel cadre juridique réduirait
leur dépendance trop forte et anéantirait le pouvoir
discrétionnaire que les administrations universitaires exercent sur
elles présentement. Il leur conférerait les attributions et
les prérogatives reconnues par la société aux corps
sociaux avec lesquels elle est en interaction. D'ailleurs, il faut bien
reconnaître que, dans la société québécoise,
l'étudiant ne peut compter sur aucun cadre juridique précis.
À mi-chemin entre l'enfant dont on se préoccupe de plus en plus
et l'adulte qui travaille, a travaillé ou veut travailler,
l'étudiant québécois, à cause même de son
statut d'étudiant, n'a pas le droit d'être un chômeur.
Comment, dans un tel contexte social et juridique, les corps étudiants
peuvent-ils rivaliser de pouvoir avec ceux auxquels ils sont confrontés?
Comment l'organisation étudiante peut-elle s'intégrer au milieu
universitaire et contribuer au développement de la collectivité?
Le manque d'intérêt et de participation des étudiants au
niveau des associations générales ne surprend plus guère
lorsqu'on prend conscience de l'ampleur des difficultés auxquelles sont
confrontées ces mêmes associations générales. Tout
en ne sous-estimant pas l'importance réelle de ces deux problèmes
que sont la représentativité et le problème des
cotisations, le point le plus urgent à régler au niveau des
associations étudiantes générales semble être celui
du statut juridique à leur accorder à elles-mêmes et
à l'étudiant qu'elles doivent représenter."
C'est en tenant compte de ces remarques, M. le Président, que le
gouvernement a privilégié, après avoir analysé les
deux types de conceptions qu'a soulignés le député
d'Argenteuil, le modèle d'un cadre juridique plus strict, plus formel.
"Il est proprement inacceptable que toutes les législations
reliées au monde du travail, même les plus récentes,
ignorent totalement le phénomène étudiant en dépit
du fait que les associations étudiantes aient adopté, au tout
début de leur existence, une orientation de type syndical."
Comme je l'indiquais au discours de deuxième lecture, les
associations étudiantes, depuis le début - la Commission Angers
le reconnaît - se sont comportées et ont agi comme des syndicats
qui représentent les intérêts généraux de
leurs membres. Elles ont adopté une pratique syndicale et souvent
même un discours syndical. (10 h 45)
Je pense qu'il était inévitable qu'à un moment
donné, face aux problèmes de la reconnaissance, des cotisations
et de l'importance qui leur était accordée dans le milieu
universitaire ou collégial, on en vienne finalement à
définir des rapports et une reconnaissance formelle qui s'inspirent de
ce modèle des relations de travail, sans nécessairement le copier
bêtement. Et ceux qui sont les plus enclins à utiliser le discours
syndical et la pratique syndicale sont ceux aujourd'hui qui rejettent cette
même conception-là pour régler le problème de la
reconnaissance et celui du financement. Mais il est évident que, par
ailleurs, dans la mesure où les associations étudiantes, auront
un cadre de reconnaissance plus formel, un cadre juridique qui clarifiera les
droits et les privilèges de ces associations, qui clarifiera aussi les
droits des étudiants membres de ces associations, on aura des
règles du jeu qui seront plus claires pour tout le monde et qui, en fin
de compte, permettront une plus grande stabilité dans le milieu
étudiant.
En ce qui concerne le problème de la remise en question
permanente, le député d'Argenteuil soulignait que douze mois, ce
n'est pas beaucoup. C'est, néanmoins, plus que ce que laissaient
entendre les différentes critiques qui ont été
formulées à la suite de la publication du projet de loi où
on laissait voir que c'étaient des remises en question continuelles qui
pouvaient s'effectuer, alors que ce n'est pas le cas.
Par ailleurs, c'est non seulement douze mois qui sont exigés,
mais il y a aussi des pourcentages qui sont exigés. Pour avoir parcouru
un peu le milieu étudiant et pour y avoir milité aussi, il faut
savoir que ce n'est pas si simple que cela d'aller chercher 25% d'appuis dans
un campus ou dans une institution pour renverser une association et en
implanter une autre. Le maraudage dont on fait état à l'annexe -
je le disais la semaine dernière - n'est pas une trouvaille que le
projet de loi va mettre en place. C'est une pratique qui existe
déjà et qui ne sera pas accentuée par le projet de loi.
Mais, est-ce qu'on voudrait que ce soit le gouvernement qui choisisse à
la place des étudiants quel type de contestation ils veulent avoir de
leur association représentative? Certains préféreront
militer et essayer de changer les choses de l'intérieur et d'autres vont
considérer qu'il vaut mieux, pour toutes sortes de raisons, tenter de
créer une nouvelle association, la faire reconnaître et l'imposer
par l'appui majoritaire qu'elle recueillerait. Est-ce au gouvernement de
bloquer une des avenues ou si c'est aux étudiants de choisir quelle
avenue ils voudront emprunter pour l'expression de leurs opinions et de leurs
divergences dans le milieu étudiant? Quand on pense qu'à ces
douze mois s'additionnent des exigences en termes de pourcentage, on se rend
compte que, finalement, il n'y aura pas de contestation chaque année. Et
ce n'est pas tout le monde qui va se payer le luxe dans le milieu
étudiant de batailles annuelles pour le monopole de la
représentation. Je pense qu'il y a bien des gens qui vont
réaliser que les combats idéologiques pourront se faire à
d'autres paliers que dans des batailles sur le fait de vouloir
détrôner une association ou un groupe qui est en place.
C'étaient les remarques préliminaires, je voulais faire
face aux propos pertinents du
député d'Argenteuil. Je n'ai pas la prétention
d'avoir éteint toutes ses inquiétudes, mais j'espère au
moins qu'il va considérer que le gouvernement, dans ce
dossier-là, en utilisant la formule d'un cadre juridique, d'abord, ne
l'a pas imposée sans que ce débat-là soit présent
et ait longuement mûri dans le milieu étudiant et dans d'autres
milieux. La preuve, c'est qu'une commission d'étude sur les
universités s'y est penchée avec beaucoup d'attention et a
elle-même conclu que, de tous les problèmes, celui qui
était peut-être le plus important en termes d'avenir et
d'importance qu'on doit accorder à la voix étudiante dans notre
société et dans le milieu scolaire, c'est de consolider la
présence étudiante en termes juridiques pour faire en sorte que
le pouvoir étudiant soit reconnu dans la société au
même titre que le pouvoir syndical, le pouvoir des administrations, le
pouvoir des instances politiques traditionnelles ou du milieu des affaires.
C'est cette voie-là qu'on a choisie en sachant, par ailleurs, aussi que
les raisons pour lesquelles plusieurs militants étudiants refusent cette
voie-là, c'est pour des raisons idéologiques qui n'ont rien
à voir avec le bien-fondé d'une option ou d'une autre, ou d'une
conception ou d'une autre. Je pense qu'il faut aussi être conscient que
quel que soit le type de solution qu'on aurait à apporter, le simple
fait que ce soit le gouvernement ou l'Assemblée nationale, donc
l'instance politique de notre société pour des gens, c'est une
raison suffisante pour rejeter du revers de la main quelque solution que ce
soit qui serait proposée à cet égard.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Marquette.
M. Claude Dauphin
M. Dauphin: Merci, M. le Président. À mon tour,
j'aimerais faire quelques commentaires généraux. Au même
titre que mon collègue d'Argenteuil, je dis qu'il est regrettable que
nous ayons eu à étudier le projet de loi 32 dans un tel climat.
J'aimerais faire référence, tout d'abord, aux sept groupes qui
sont venus présenter des mémoires lors de la commission
parlementaire, il y a une dizaine de jours. De ceux-là, la
majorité était pour le report du projet de loi à l'automne
pour laisser la chance aux représentants des institutions de bien
analyser le projet de loi et l'Association nationale des étudiants du
Québec qui représente - cela n'a pas été
contesté - la majorité des étudiants des niveaux
collégial et universitaire, dans un premier temps, en demandait le
retrait - je reviendrai sur le fond tantôt des raisons du retrait dudit
projet de loi - et, dans un deuxième temps, demandait de permettre
à tous les étudiants, à l'automne, de pouvoir se prononcer
sur le projet de loi en question.
On a eu effectivement les représentations de l'Association
nationale des étudiants du Québec qui avait non seulement des
réserves, mais demandait le retrait du projet de loi. Pour ceux-ci - je
suis d'accord en grande partie avec eux - pour régler un problème
qui se dit urgent de financement au niveau de la cotisation étudiante,
il n'y a pas lieu de chambarder tout le fonctionnement des associations
étudiantes en instaurant un cadre juridique "encarcaneux" autour du
fonctionnement des associations étudiantes.
Je crois que les étudiants sont responsables, sont capables de
voir à effectuer leur représentativité au niveau de leurs
associations. On n'a pas, sous prétexte de vouloir régler un
problème de financement, à chambarder tout le système
à ce niveau-là. D'ailleurs, on l'a vu encore en fin de semaine
lors du sommet québécois de la jeunesse de la région de
Montréal où il y avait 200 participants. Par un vote nettement
majoritaire, on a demandé la démission du député de
Verchères comme représentant des jeunes...
M. Charbonneau: Je vous en parlerai plus tard.
M. Dauphin: ...en grande partie à cause de sa position sur
le projet de loi 32. Les étudiants présents à ce sommet se
demandent pourquoi le député a pris une telle direction, une
telle tangente au niveau du fonctionnement des associations
étudiantes.
J'en reviens à l'élément le plus important et le
plus démocratique en soi. Pourquoi est-ce que le gouvernement du
Québec veut adopter ce projet de loi alors que tous les étudiants
sont à la recherche d'un emploi? Dieu sait si les emplois sont
très rares dans le milieu étudiant pour la saison estivale.
Pourquoi ne pas régler le problème le plus urgent, comme je l'ai
mentionné lors du débat en deuxième lecture, qui consiste
à régler l'aspect financier, alors que certaines institutions ont
effectivement des problèmes au niveau de la perception de la
cotisation?
J'ai fait part au ministre, jeudi dernier, que nous étions
prêts, nous de l'Opposition, à donner notre entière
collaboration à un amendement à la loi sur les collèges
pour régler l'aspect financier qui cause certains problèmes,
comme je le disais tantôt, dans certaines institutions, pour laisser la
chance aux étudiants, à l'automne, de se prononcer sur le projet
de loi 32.
L'ANEQ, que le député de Verchères et le
député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue ont critiquée
lors du débat en deuxième lecture - j'entends encore le
député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue dire que
l'ANEQ n'était qu'une "gang" d'anarchistes et qu'on n'avait pas
nécessairement à l'écouter - a, d'ailleurs, fait
paraître un communiqué aujourd'hui, dans lequel elle demande
justement, pour le 14 septembre prochain, de permettre à tous les
étudiants du Québec de se prononcer sur le projet de loi 32.
Faisant référence à une déclaration de l'adjoint
parlementaire du ministre de l'Éducation, lors de la commission
spéciale sur le conflit avec les enseignants, qui avait dit que l'ANEQ
n'était pas nécessairement représentative, l'ANEQ
répond à l'adjoint parlementaire en lui disant: Si on n'est pas
représentatif, comme vous le mentionniez à l'époque, on
demande que le 14 septembre on prévoie cette journée pour
consulter l'ensemble des étudiants justement pour faire la
démonstration qu'on est effectivement représentatif.
On comprend le discours des ministériels. Effectivement - cela ne
date pas du projet de loi 32 - lorsque des groupes ou des partis politiques
sont contre leur philosophie ou leur façon de voir les choses, ils
n'essayent pas de les comprendre et de les écouter; au contraire, ils
les attaquent et leur disent qu'ils ne sont pas représentatifs.
Finalement, cela se résume à trois points. Tous les
intervenants qui sont venus en commission parlementaire, il y a une dizaine de
jours, représentant les parties dites institutionnelles ont
demandé au ministre de l'Éducation de reporter le tout à
l'automne pour qu'ils puissent prendre part au débat.
Deuxièmement, l'Association nationale des étudiants qui
représente la majorité - cela n'a été
contesté par personne - demande le retrait ou, à tout le moins,
comme on vient de le constater aujourd'hui par un communiqué de presse
de celle-ci, qu'on permette aux étudiants à l'automne de se
prononcer sur le projet de loi 32. Mais réglons l'aspect financier -
c'est mon troisième point - immédiatement, pour finalement avoir
vraiment le pouls de l'ensemble des étudiants du Québec au lieu,
comme on le dit de plus en plus du gouvernement actuel, de croire qu'on a le
summum de la vérité et que tous ceux qui sont contre le
gouvernement sont soit des incompris ou des gens qui ne veulent pas comprendre
le bon sens.
Je tenais tout simplement à faire ces quelques remarques avant
que nous passions à l'adoption des articles du projet de loi 32 qui,
soit dit en passant, je le répète encore une fois, n'a pas
l'assentiment des étudiants du Québec. Ce projet de loi, encore
en fin de semaine, a été l'objet de vives discussions lors du
sommet québécois de la jeunesse, sommet qui, soit dit en passant,
a été appuyé par les deux formations politiques de
l'Assemblée nationale du Québec. Ces gens ont vanté le
sommet québécois de la jeunesse en disant: Cela va être bon
pour nos jeunes, ils vont pouvoir s'exprimer librement, ils vont pouvoir faire
des recommandations, des revendications. Là, on a un sommet
régional qui a eu lieu dans la région de Montréal
où on demande la démission du député responsable
des jeunes. On demande de retirer le projet de loi 32 ou de le reporter
à l'automne parce que cela ne rencontre pas l'assentiment des jeunes et,
encore une fois, le gouvernement du Québec dit: Maintenant, le sommet ne
sera pas bon parce que les recommandations du sommet vont aller à
l'encontre du gouvernement du Québec.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Camille Laurin
M. Laurin: M. le Président, la tradition veut que, lors de
la discussion de l'article 1 d'un projet de loi, on permette certains
commentaires généraux sur la portée, les effets du projet
de loi. Il reste, cependant, que cette tradition ne permet, quand même,
pas la reprise au complet du débat de deuxième lecture. Je dis
cela parce que la plupart des problèmes qui ont été
évoqués ce matin par le député d'Argenteuil et le
député de Marquette touchent au principe même du projet de
loi, par exemple, conception des associations étudiantes modèles
dont elles s'inspirent, principes généraux qui sous-tendent la
rédaction du projet de loi, division du problème du financement
et de l'accréditation des associations étudiantes. Tout cela a
été amplement évoqué lors de la commission
parlementaire et a fait l'objet même de nos discussions en
deuxième lecture. Comme l'a dit le député d'Argenteuil, le
gouvernement a fait son lit, a fait son choix entre les divers principes et
modèles possibles. Je pense que nous avons eu cette occasion de donner
toutes les raisons pour lesquelles nous avions opté pour telle branche
de l'alternative plutôt que pour telle autre. On pourrait, bien
sûr, répéter toute cette argumentation à l'occasion
de la discussion de l'article 1. Je n'en vois pas véritablement la
nécessité, sauf pour répéter, encore une fois, que
ce projet de loi s'attache à définir un cadre juridique pour
celles des associations qui croiront opportun d'y recourir, alors que, pour
toutes les associations qui sont satisfaites de la situation actuelle,
satisfaites des protocoles d'entente qu'elles ont pu signer avec les
établissements universitaires, il ne sera pas nécessaire de
recourir à ce projet de loi. (11 heures)
Quant aux autres arguments qui ont été
évoqués, je pense que, dans sa brève réponse, le
député de Verchères a répété les
arguments qui nous avaient permis d'opter pour telle direction plutôt que
pour telle
autre. Ce débat, même s'il trouve sa conclusion dans la loi
32, ne date pas d'aujourd'hui. C'est un débat dont on peut retrouver
l'origine, les traces, dans tous les débats qui se sont tenus au sein
des associations étudiantes depuis un bon nombre d'années. La
preuve que les associations, de même que les établissements
étaient parfaitement au courant du débat, c'est la qualité
des mémoires qu'on nous a présentés et qui ont
été préparés dans un laps de temps assez court.
Cela veut dire, au fond, qu'il y a eu maturation du débat au cours des
dernières années et qu'il importait maintenant que nous y
apportions une solution.
Dans ces conditions, M. le Président, je pense que le
gouvernement aura à assumer la responsabilité de l'acte qu'il
pose aujourd'hui en faisant adopter ce projet de loi. En ce qui me concerne, je
ne crains pas du tout le jugement qui sera porté par le milieu et par la
population à l'endroit de ce projet de loi.
En terminant, j'ajouterais simplement qu'il est peut-être faux de
dire que tous les organismes se sont prononcés contre ce projet de loi.
Il y en a au moins deux qui se sont prononcés fortement en faveur;
d'autres qui se sont prononcés pour les objectifs poursuivis, pour les
principes aussi qui sous-tendaient le projet de loi et qui n'avaient, au fond,
des réserves que sur certaines des modalités d'exécution,
modalités sur lesquelles il sera possible de revenir lors de la
discussion et, peut-être même, d'apporter des amendements.
En ce sens, M. le Président, je pense que nous sommes prêts
à passer à l'étude de chacun des articles.
Le Président (M. Jolivet): En tenant pour acquis au
départ qu'il y avait un premier amendement qui est général
et s'étend à l'ensemble du projet de loi. Vous avez le manuscrit
entre les mains.
M. Laurin: Je veux maintenant le présenter
formellement.
Le Président (M. Jolivet): Oui.
M. Laurin: L'amendement se lirait comme suit: "Le présent
projet de loi est modifié par le remplacement, partout où il se
retrouve, du mot "étudiant" par les mots "élève ou
étudiant", avec les adaptations nécessaires le cas
échéant."
Le Président (M. Jolivet): Est-ce que cet amendement est
adopté?
M. Dauphin: Adopté.
Le Président (M. Jolivet): Adopté. L'article 1
est-il adopté?
Étude article par article Champ
d'application
M. Dauphin: Concernant l'article 1, M. le Président - j'en
faisais justement mention au ministre de l'Éducation tantôt - nous
avons préparé une série d'amendements qui sera
dactylographiée soit pour la reprise de cet après-midi ou de ce
soir, selon les engagements du ministre.
À l'article 1, nous avons un amendement relatif au statut
d'étudiant: "Que la présente loi s'applique à tout
étudiant à temps plein inscrit dans un établissement
d'enseignement visé à l'article 2." À la suite de la
présentation de plusieurs mémoires et de commentaires que nous
avons eus de plusieurs intervenants, à savoir que dans plusieurs
institutions - si on prend l'exemple des HEC ou d'autres institutions -il y a
souvent une majorité d'étudiants qui sont à temps partiel,
nous avons cru bon d'engager le débat sur ce sujet, à savoir si
le ministre ne verrait pas la possibilité de modifier l'article 1
prévoyant que la loi s'appliquerait à tout étudiant
à temps plein dans chaque établissement d'enseignement.
M. Laurin: Nous avons longuement considéré cette
possibilité, M. le Président, à la suite des
mémoires que nous avons entendus; nous avons refait nos devoirs, nous
avons étudié toutes les possibilités d'amendement dans le
sens que nous indique le député de Marquette. Finalement, nous
avons conclu qu'il valait mieux garder le texte de l'article tel qu'il est
actuellement rédigé pour la raison bien simple que, tout en
reconnaissant la multiplicité des statuts possibles d'un étudiant
au sein d'un établissement, la loi permet deux types de reconnaissance.
Un type de reconnaissance bona fide intervenu entre un établissement et
une association étudiante sans qu'on ait besoin de recourir à ce
projet de loi, ce qui laisse la possibilité d'organiser des associations
pour toute catégorie ou tout type d'étudiants, la
possibilité de faire reconnaître cette association par les
établisssements, la possibilité par les établissements de
financer ces associations étudiantes selon un protocole d'entente
à intervenir entre l'établissement et l'association.
Il y a une autre possibilité, c'est que les divers types
d'étudiants - qu'il s'agisse d'étudiants à temps plein,
à temps partiel ou d'étudiants à temps gradué -
peuvent également recourir au projet de loi, demander et obtenir
l'accréditation. Par la suite, s'ils veulent se regrouper avec d'autres
associations pour former les regroupements que prévoit la loi, ils
peuvent absolument le faire et ainsi acquérir peut-être une force
de pression plus grande dans les revendications
ou représentations qu'ils peuvent faire auprès de leurs
établissements respectifs dans le but de promouvoir la cause de cette
association étudiante spécifique.
Étant donné ce libre choix, d'abord de recours à la
loi 32 ou au protocole d'entente, étant donné aussi ce choix pour
une association éventuellement accréditée de demander son
adhésion à un regroupement, il nous semble qu'il vaut mieux
garder l'article 1 tel qu'il est actuellement. Cet article, encore une fois,
établit l'universalité d'application des dispositions de la loi
à tous les étudiants inscrits dans un établissement,
éliminant ainsi toute une discrimination relative au sexe, à la
religion, à la race, à la nationalité, à
l'âge ou au champ d'étude des étudiants.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Verchères.
M. Charbonneau: Je veux seulement ajouter, M. le
Président, qu'un des problèmes, c'est qu'il y a beaucoup de
définitions différentes les unes des autres de l'étudiant
à temps plein parce que, s'il fallait mettre cela, comme le
suggère le député de Marquette, il faudrait aussi,
à un moment donné, établir une définition de ce
qu'est un étudiant à temps plein. On se retrouverait avec une
série de problèmes parce qu'une telle définition pourrait
entrer en contradiction avec certaines des définitions qui existent.
Je pense qu'il y a aussi le fait qu'on ne veut pas, non plus, être
discriminatoire par rapport aux étudiants à temps plein contre
les étudiants à temps partiel et qu'il est peut-être
préférable de laisser le terme comme cela et de laisser dans les
milieux étudiants, dans les institutions, aux étudiants
eux-mêmes le soin de préciser certaines règles du jeu
éventuellement.
Le Président (M. Jolivet): Donc, cet amendement... Oui, M.
le député de Marquette.
M. Dauphin: J'aurais une question de règlement à
vous soumettre, M. le Président. Étant donné que nous
venons de prendre connaissance des différents amendements que veut
proposer le gouvernement, est-ce qu'on pourrait prendre, si le ministre y
consent, dix minutes pour pouvoir en prendre connaissance et nous ajuster, nous
aussi, avec les différents amendements que nous avons? Normalement, on
les a à l'avance, tandis que là...
Le Président (M. Jolivet): Oui. La seule chose, c'est
qu'il y a eu deux documents qui ont été déposés. Il
y en a un qui ajoute à celui déjà déposé au
paragraphe 6 de l'article 2. Donc, c'est celui-là qui devient le
document officiel de travail. Dans le premier document sur lequel sont
griffonnées des choses, il manquait un article lorsque la photocopie a
été faite. Donc, le document officiel est le deuxième qui
vous a été proposé.
Maintenant, je ne vois pas de problème, à moins que le
ministre n'ait d'autre chose, à présenter chacun des amendements.
Normalement, on le fait au moment où arrive chacun des articles. Vouloir
prendre d'autres procédures que celle-là serait créer des
précédents qui seraient nuisibles à l'ensemble de
l'étude article par article parce qu'il n'y a aucun règlement qui
oblige le ministre à les donner deux minutes avant au lieu de les donner
dix minutes ou une heure avant.
Je comprends votre besoin de les connaître, mais ils seront
expliqués au fur et à mesure.
M. Dauphin: C'est parce que, si vous me le permettez, M. le
Président, de l'aveu même du ministre en deuxième lecture,
il m'a un peu identifié comme un député
pondéré. Alors, je demande cela pour la bonne marche de nos
travaux de la journée. Je remarque, entre autres, au premier amendement
du gouvernement, que nous avons le même, nous aussi. Nous aimerions tout
simplement prendre dix minutes pour nous ajuster, cela étant fait non
pas pour retarder les travaux d'aujourd'hui, mais tout simplement dans un but
de concordance et de bonne entente.
M. Laurin: Est-ce qu'on peut adopter, M. le Président,
l'article 1 et accorder, étant donné que nos amendements
commencent à l'article 2, un certain temps au député de
Marquette pour qu'il passe à travers la liste de nos amendements, ce qui
ne devrait pas être long?
M. Dauphin: Je n'ai pas compris le début, je m'excuse.
Le Président (M. Jolivet): En fait, on adopterait ou
rejeterait d'abord votre amendement à l'article 1; ensuite, on
adopterait l'article 1 lui-même et on prendrait une pause de dix minutes,
si j'ai bien compris.
M. Dauphin: C'est-à-dire d'adopter l'article 1 tout
d'abord.
M. Charbonneau: M. le Président, je veux vérifier,
parce qu'il y a des erreurs lorsqu'on a fait la photocopie pour les textes
d'amendements. J'avais utilisé un texte qui n'était pas
définitif.
Le Président (M. Jolivet): J'ai vérifié
pendant que vous discutiez. Je les ai vérifiés
un à un. La seule différence qu'il y a entre les deux
textes, c'est que le paragraphe 6 de l'article 2 est modifié par la
suppression dans la troisième ligne des mots "département" et "ou
module" et tout le reste est conforme.
M. Dauphin: C'est le deuxième document.
Le Président (M. Jolivet): C'est cela. Donc, est-ce qu'on
adopte l'article 1 en rejetant l'amendement. Selon ce que j'ai pu comprendre de
la part du député de Marquette, l'article 1 serait
adopté.
M. Dauphin: Sur division.
Le Président (M. Jolivet): Sur division. On prendrait une
pause de dix minutes.
M. Dauphin: D'accord.
Le Président (M. Jolivet): Le temps que vous preniez
connaissance des textes.
(Suspension de la séance à 11 h 12)
(Reprise de la séance à 11 h 27)
Le Président (M. Jolivet) À l'ordre, s'il vous
plaît!
Nous reprendrons donc nos travaux. Nous en étions rendus a
l'article 2.
J'appelle donc l'article 2, mais j'aurais auparavant deux amendements
à vous lire, dont vous avez une copie entre les mains. Au paragraphe 2
de l'article 2, il y a une modification par l'addition, après le mot
"constituantes", de ce qui suit: "instituts de recherche et écoles
supérieures;". Et, au paragraphe 6 du même article 2, par la
suppression à la troisième ligne des mots "département et
"ou module". Il y a une petite erreur quelque part, ce n'est pas cela qui est
indiqué. 'Département"? Suppression... C'est l'addition?... Mais
c'était dans la deuxième version... C'est encore plus
drôle, parce que le premier était bien.
Je vous ai dit, il y a quelques instants, de prendre le deuxième
document pour revenir au premier document. C'est, justement, parce que le
deuxième document n'est pas bon. Autrement dit, il n'y a qu'un seul
amendement à l'article 2 et c'est au paragraphe 2. Par l'addition,
après le mot "constituantes" de ce qui suit: "instituts de recherche et
écoles supérieures;".
Donc, M. le ministre, à l'article 2.
M. Laurin: Nous avons fait cet amendement, M. le
Président, parce que l'Université du Québec ne compte pas
que des constituantes, mais elle compte aussi des instituts de recherche dont,
par exemple, l'Institut Armand-Frappier, et des écoles
supérieures comme l'Ecole de technologie supérieure. C'est pour
être plus explicite. On aurait pu laisser "constituantes" étant
entendu que le mot "constituantes" recouvre la réalité "instituts
de recherche et écoles supérieures", mais nous avons voulu
être plus explicites et nous l'avons ajouté dans l'amendement.
Le Président (M. Jolivet): Est-ce que cet amendement est
adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Jolivet): L'article 2, tel
qu'amendé, est-il adopté? (11 h 30)
M. Ryan: Je m'excuse. J'ai été absent quelques
minutes. Êtes-vous en train de procéder à l'adoption de
l'article 2 alinéa par alinéa? Est-ce cela que je dois
comprendre?
Le Président (M. Jolivet): Non, c'était, d'abord,
l'amendement qui était apporté à l'article 2. Si vous avez
d'autres amendements, je vais les regarder, mais, si vous n'en avez pas,
j'adopterais l'article 2 tel qu'amendé.
M. Ryan: Très bien. Vous avez fini avec les amendements du
ministre, si je comprends bien.
Le Président (M. Jolivet): Du ministre, exactement.
M. Ryan: Nous en avons, évidemment. Le Président
(M. Jolivet): Allez.
M. Ryan: Tout d'abord, nous voudrions que l'alinéa 1 soit
enlevé du texte.
Le Président (M. Jolivet): Nous allons procéder
à celui-là, d'abord.
M. Ryan: Oui et je vais vous expliquer pourquoi. À la
suite de représentations qui ont été faites au
gouvernement, ainsi qu'à nous-mêmes au cours des tout derniers
jours, ces propositions nous ont été soumises en date du 17 juin,
c'est-à-dire vers la fin de la semaine dernière. Voici ce que
demande la Fédération des collèges du Québec: "La
réalité des collèges est telle que tous les intervenants
de ce niveau, autant administrateurs qu'étudiants, du moins par la voix
de l'association qui représente actuellement la majorité d'entre
eux, ont contesté l'utilité et l'applicabilité du projet
de loi. Citons pour mémoire le nombre et lescaractéristiques propres aux étudiants de niveau
collégial, le transit étudiant et l'apprentissage du processus
démocratique, le
fait que près de la moitié des personnes inscrites dans
les collèges, soit les étudiants adultes, voient
concrétiser une formule qui ne leur rend pas justice et on comprendra
qu'en ce qui nous concerne nous suggérions dans un premier temps de
retirer le paragraphe 1 de l'article 2 qui identifie les cégeps comme
des établissements d'enseignement visés par le projet de loi. "De
plus, et en nous appuyant sur une analyse de la réalité
vécue qui révèle que la grande majorité des
associations étudiantes de niveau collégial sont
incorporées, que ces associations ont conclu des protocoles d'entente
avec les administrations locales et qu'aucun cégep n'a refusé de
percevoir la cotisation étudiante par un moyen ou l'autre, nous
affirmons que le seul problème susceptible d'être résolu
par les voies législatives demeure l'ambiguïté relative aux
procédures de perception directe des cotisations par les collèges
et que ce problème se réglerait par un amendement à
l'article 24 de la Loi sur les collèges, article qui l'interdit
actuellement".
Cela, c'est une question que nous devons soulever et que nous avions,
d'ailleurs, soulevée lors de la compuration des organismes qui avaient
été invités à se présenter devant la
commission parlementaire il y a une dizaine de jours. S'il y a un moyen plus
simple et plus expéditif que le présent projet de loi pour
régler le cas des associations d'étudiants au niveau des
collèges, il me semble qu'il faut opter, surtout dans le contexte tardif
et pressé où nous sommes, pour la formule la plus simple de
préférence à la formule la plus compliquée.
Or, j'avais posé une question, il y a dix jours, à la
Fédération des collèges du Québec, demandant
à ses représentants s'ils étaient prêts à
souscrire à un amendement à la Loi sur les collèges qui
obligerait les collèges à percevoir la cotisation au nom de
l'association étudiante représentative plutôt que d'avoir
seulement le pouvoir de le faire, comme le dit actuellement la loi. À ce
moment-là, on ne m'a pas donné de réponse, si mes
souvenirs sont exacts et, depuis ce temps, on nous a laissé savoir que
l'Association des collèges du Québec serait prête à
souscrire à un amendement à la Loi sur les collèges qui
irait dans ce sens-là. Il me semble que les choses seraient
éminemment simplifiées. Il restera le cas des institutions
d'enseignement universitaire. Des institutions d'enseignement privées,
je ne pense pas qu'il y ait eu beaucoup de représentations qui aient
été faites au gouvernement de ce point de vue. Je pense que le
gouvernement veut un peu aller au-devant des coups. Pour le moment,
l'amendement propose que soit enlevé de l'article 2 l'alinéa 1,
pour les raisons que je viens de mentionner.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Laurin: M. le Président, nous ne pouvons pas accepter
cet amendement -d'ailleurs, je l'avais laissé voir et entendre lors de
la commission parlementaire et je l'ai répété lors de mon
discours de deuxième lecture - parce qu'il vise à séparer
le problème du financement des associations étudiantes de leur
accréditation. Les arguments qui nous ont été
présentés n'emportent pas notre adhésion. Je ne veux pas
répéter tout ce que la commission Angers disait et que le
député de Verchères a répété ici ce
matin, à savoir que le cadre juridique des associations
étudiantes est le problème principal, le problème majeur
qui a été noté par la commission comme empêchant une
vie associative dynamique et efficace et la mise en place d'associations qui
peuvent vraiment promouvoir les intérêts des étudiants sur
tous les plans.
Par ailleurs, on nous fait valoir que la plupart de ces associations
étudiantes sont incorporées. Si elles le sont, si elles ne
veulent pas se prévaloir de la loi, il leur est tout à fait
loisible de le faire. Quand j'ai posé la question aussi bien à
l'ANEQ qu'à la Fédération des collèges, la
réponse est restée évasive, mais la réponse
indiquait bien, quand même, conformément au projet de loi, qu'une
association pouvait ou non se prévaloir du projet de loi 32. S'il arrive
que les 34 qui sont déjà incorporées et qui ont
déjà signé des protocoles d'entente avec les
établissements sont satisfaites de leur situation, elles n'auront pas
à recourir au projet de loi. Ce projet de loi est fait à
l'intention de celles des associations étudiantes, peut-être
minoritaires, très peu nombreuses, qui auraient à faire face
à des difficultés quant à la reconnaissance ou à la
signature de protocoles d'entente, difficultés qu'elles trouvent
inacceptables. C'est un nombre probablement minime encore une fois
d'associations qui pourront se prévaloir du projet de loi.
Quant à l'argument du transit, il est peut-être moins
important qu'il ne paraît à première vue, parce que,
même si les étudiants de cégeps ne passent que deux ou
trois ans au sein de leur cégep, il y a quand même une tradition
qui a fini par s'installer et il y a un flambeau que l'on se passe de leader
étudiant à un autre, un flambeau qui fait que les associations
étudiantes, même si les étudiants qui en font partie
passent, demeurent et témoignent d'une continuité certaine dans
le maintien des objectifs de l'association et dans le contenu et la forme
même parfois des revendications ou des représentations qui sont
faites aux établissements d'enseignement.
Je pense donc que cette application de la loi aux collèges est
utile pour certains en
tout cas, que la loi sera applicable en vertu d'un amendement que nous
proposerons à l'article 53 ou à l'article 54, comme disposition
transitoire et finale, et que celles des associations étudiantes qui
prendront la décision de s'en prévaloir ont le droit qu'on
reconnaisse leur droit à s'en prévaloir en raison de la situation
particulière ou même exceptionnelle qui est la leur.
Même si la Fédération des collèges accepte
maintenant de remplacer le mot "peut" par le mot "doit", cela ne règle
qu'une partie du problème. Cela ne règle en rien le
problème de la reconnaissance des associations et, encore une fois, je
pense qu'il faut laisser aux associations étudiantes qui croiraient
opportun de le faire la chance de recourir au projet de loi.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Verchères.
M. Charbonneau: II y a aussi la question du respect des droits
individuels des étudiants. Dans la mesure où dans un
collège les étudiants se verraient contraints de payer une
cotisation parce qu'il y a une entente bona fide et parce qu'ils
considéreraient pour une raison ou pour l'autre que cette entente
devrait être remise en question, actuellement ils n'ont aucun recours.
Avec la présence d'un cadre juridique, ils auront un recours qui leur
permettra de vérifier la pertinence de la représentativité
et de voir, finalement, si ce n'est pas seulement quelques-uns, mais une
majorité. Je pense que c'est important. Pour ceux qui se posent des
questions, et vous étiez de ceux-là, sur l'à-propos
d'instaurer une cotisation obligatoire, dans la mesure où on s'en va
vers cette approche d'une généralisation d'une cotisation
obligatoire, je n'ai pas d'objection si tout le monde s'entend pour des
ententes bona fide, mais si à un moment donné il y a un
problème et qu'il y a des questions de droits individuels qui se posent,
il y a maintenant un cadre juridique qui existe et qui pourra permettre
à des étudiants collégiaux de faire valoir leurs droits et
à une association de consolider ses positions et sa
représentativité à l'égard du droit qu'elle
utiliserait qui est important.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Marquette.
M. Dauphin: M. le Président, sur le même amendement,
la Fédération des cégeps - et le ministre y a fait
référence lors de son discours en deuxième lecture - nous
avait dit qu'elle admettait l'urgence du financement, que certaines
institutions avaient de la difficulté à cause de l'avis juridique
émanant du ministère l'année dernière. Voyant que
la Fédération des cégeps actuellement, au contraire, sans
hésitation, est prête à donner son consentement pour que la
Loi sur les collèges soit amendée, cela règle l'aspect
urgent. Je ne veux pas m'embarquer sur le fond, mais, dans les circonstances,
il semblerait que le problème de l'urgence serait réglé en
grande partie et que cette proposition d'amendement devrait être
recevable.
Le Président (M. Jolivet): Je ne peux pas dire qu'il n'est
pas recevable, mais il n'est pas reçu par l'ensemble des membres de la
commission. Je crois comprendre qu'il est rejeté. C'est cela?
Une voix: Oui.
Le Président (M. Jolivet): Est-ce qu'il y a d'autres
amendements à l'article 2, M. le député d'Argenteuil?
M. Ryan: À l'alinéa 2, "l'Université du
Québec, ainsi que ses universités constituantes," l'amendement
qui a été adopté tantôt ajoute: "Ses instituts de
recherche et écoles supérieures". C'est cela? Est-ce que le
ministre pourrait me donner l'énumération de ces institutions
pour qu'on sache exactement à quoi s'en tenir?
M. Laurin: Je pense que nous avons voulu par l'amendement
expliciter dans toute la mesure du possible, c'est-à-dire recouvrir la
réalité complète de l'Université du Québec
qui compte, comme on le sait, des universités constituantes, l'INRS,
l'Institut national de la recherche scientifique, l'Institut Armand-Frappier,
l'École nationale d'administration publique, l'ENAP, l'ETS. Je pense que
cela fait le tour des diverses composantes de l'Université du
Québec.
M. Ryan: Est-ce qu'il y en a d'autres? Vous avez nommé
l'INRS, l'Institut Armand-Frappier, l'École nationale d'administration
publique, l'École de technologie supérieure.
M. Laurin: Non, M. le Président, ma mémoire
était bonne, ma mémoire était fidèle.
M. Ryan: Très bien. L'alinéa 3: "les
établissements d'enseignement de niveau universitaire dont au moins la
moitié des dépenses de fonctionnement sont payées sur les
crédits apparaissant aux prévisions budgétaires
déposées à l'Assemblée nationale." Est-ce qu'il y a
sept universités en tout, à part l'Université du
Québec?
M. Laurin: II y a l'Université de Montréal,
l'Université McGill, Concordia, l'Université de Sherbrooke,
l'Université Laval, Bishop. Je pense que c'est tout. (11 h 45)
M. Ryan: Les établissements privés étaient
venus devant la commission parlementaire. Je ne sais pas si le ministre a eu le
temps de réfléchir sur les représentations qu'ils avaient
faites devant la commission. Je ne sais pas si le ministre se souvient de la
comparution que nous avons eue de la part de l'Association des collèges
du Québec en particulier.
M. Laurinc Mais, ici, M. le Président, le paragraphe 5 ne
touche qu'un aspect de la question: ce sont les établissements qui sont
couverts par la loi.
M. Ryan: Très bien.
M. Laurin: Nous aurons l'occasion de revenir sur les autres.
M. Ryan: Ils n'avaient pas demandé formellement...
M. Laurin: Non.
M. Ryan: ...à votre connaissance, d'être
exemptés de la loi?
M. Laurin: Non.
M. Ryan: Cela va. "Les établissements d'enseignement de
niveau collégial ou universitaire régis par la Loi sur
l'enseignement spécialisé". Est-ce qu'on pourrait avoir la liste
de ces établissements, M. le Président?
M. Laurin: Une seconde. Il s'agit, M. le Président, de
l'École des hautes études commerciales de Montréal, des
Instituts de technologie de Montréal, Québec,
Trois-Rivières, Hull, Sherbrooke, Chicoutimi, Shawinigan, Rimouski, de
l'Institut des arts appliqués de la province de Québec à
Montréal, de l'Institut de papeterie de la province de Québec
à Trois-Rivières, de l'Institut des textiles de la province de
Québec à Saint-Hyacinthe, de l'Institut des arts graphiques de la
province de Québec à Montréal et de l'Institut de marine
de la province de Québec à Rimouski. Il s'agit enfin des
Écoles des métiers de l'automobile de Montréal et de
Québec, de l'École des métiers commerciaux à
Montréal, de l'École des métiers féminins à
Montréal, de l'École des métiers du patronage
Saint-Charles à Trois-Rivières.
M. Ryan: Concernant les instituts de technologie, est-ce que le
ministre pourrait me donner la liste de nouveau? J'en ai manqué un ou
deux.
M. Laurin: Les instituts de technologie de Montréal,
Québec, Trois-Rivières, Hull, Sherbrooke, Chicoutimi...
M. Ryan: Rimouski.
M. Laurin: ...Shawinigan et Rimouski.
M. Ryan: Très bien. En ce qui touche l'alinéa 6, la
Fédération des collèges a fait des représentations
aussi sur ce point-là. Elle demande qu'un amendement soit apporté
à l'alinéa 6. Je pense qu'il faudrait qu'on prenne connaissance
de ce qu'elle a demandé pour qu'on puisse se prononcer en connaissance
de cause. À défaut, disaient-ils, de choisir la voie qu'ils
avaient recommandée et qui a été rejetée
tantôt par le ministre et son équipe, pour reconnaître ce
qu'il en est dans les collèges, il faudrait à tout le moins
s'assurer que le projet de loi soit amendé de manière à
favoriser réellement le pluralisme de la représentation
étudiante dans les collèges et le droit de tout étudiant
de faire partie d'une association de son choix.
Ainsi, l'article 2, paragraphe 6, devrait-il se lire: Leurs composantes,
savoir chaque campus, secteur ou programme. De cette manière, se
concrétiserait la possibilité pour les étudiants de
choisir de s'associer dans des collectifs plus restreints, plus proches de
leurs préoccupations que ne peuvent l'être ces
méga-associations qui, dans l'actuel projet de loi, regrouperaient 2000
à 10 000 individus par collège, incluant des étudiants
adultes.
Je pense bien que, ne serait-ce que pour favoriser l'examen aussi
attentif que possible des représentations qui ont été
faites par l'organisme qui regroupe tous les collèges d'enseignement
professionnel et général publics du Québec, nous allons
formuler un amendement à l'alinéa 6 en vertu duquel
l'alinéa devrait se lire comme suit: Leurs composantes, savoir chaque
campus, secteur ou programme. Et ensuite, le reste demeurerait tel quel, parce
que du côté des universités, on ne nous a fait aucune
représentation particulière. Cette suggestion nous vient d'un
organisme qui est très familier avec la réalité des
cégeps. Je pense que cela mérite d'être
étudié dans un esprit positif et franc.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Laurin: Nous l'avons étudié dans un esprit
positif, M. le Président. Nous ne croyons pas opportun de descendre
jusqu'à ce niveau d'organisation. Nous pensons que, pour une
accréditation et pour tout ce qu'elle implique au sens de la loi,
c'est-à-dire la perception d'une cotisation qui serait faite par
l'établissement, la reconnaissance de cette accréditation par
l'établissement, la reconnaissance par l'établissement du droit
de nommer des représentants des étudiants au sein des organismes
conjoints, étant donné
l'importance de ces obligations, il y a lieu de ne pas descendre trop
bas au niveau des secteurs et des programmes, d'autant plus -c'est là
une autre raison - qu'il n'y a rien qui empêche des étudiants
appartenant à un secteur ou à un programme de former une
association bona fide et de la faire reconnaître par les autorités
des établissem ents.
D'ailleurs, la Fédération des collèges, lorsqu'elle
est venue en commission parlementaire, nous a dit qu'il existait actuellement
un bon nombre de ces associations d'étudiants au niveau des secteurs et
des programmes, associations qui visent des objectifs très particuliers,
limités, justement, aux secteurs et aux programmes ou même qui
visaient certains types d'activités, comme les activités
sportives ou culturelles. Tout en reconnaissant l'utilité, pour ne pas
dire la nécessité, de pareilles associations, il nous semble
qu'il n'y a pas lieu, cependant, d'aller plus loin et de leur reconnaître
la possibilité de recourir à la loi pour fins
d'accréditation.
Je pense qu'en limitant l'accréditation au campus, aux
facultés, écoles, départements, instituts, famille ou
module dans le cas de l'Université du Québec, nous atteignons les
objectifs qui nous étaient tracés par la Commission
d'étude sur les universités ou par le Conseil supérieur de
l'éducation. Il n'est pas nécessaire de légiférer
au point de permettre ou de favoriser une accréditation sur le plan plus
limité des secteurs ou des programmes.
Le Président (M. Jolivet): Est-ce que l'amendement est
adopté?
M. Ryan: Attendez un peu, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): Oui.
M. Ryan: Si j'étais sûr qu'il serait adopté,
je n'aurais aucune intervention additionnelle à faire. Comme j'ai
l'impression qu'il va être rejeté, je pense qu'il y a des
clarifications qui doivent être obtenues préalablement.
D'abord, je voudrais poser une question au ministre. Il y a le cas des
étudiants à temps plein. Il y a le cas des élèves
à temps partiel. Il y a des cas où ils sont regroupés dans
des associations différentes d'ores et déjà au niveau
même des cégeps. Avec le texte que vous voulez nous faire adopter,
ils seraient obligés d'être regroupés dans une seule et
même association, contrairement à l'esprit pluraliste dont on se
réclame depuis l'ouverture du débat. Si je me trompe dans mon
interprétation, je serais très heureux de le savoir.
Deuxièmement, je vais vous donner un autre exemple de situations
qui peuvent surgir, à propos desquelles vous devriez, me semble-t-il,
avoir au moins autant de souplesse au niveau des collèges que vous
semblez vouloir en manifester au niveau des universités. Le ministre est
aussi familier que moi avec le problème qui se pose au cégep de
l'Outaouais en relation avec le campus Héritage. On n'a pas de
définition ici dans la loi de ce que cela veut dire. Je parle du campus
Héritage; est-ce un campus au sens de la loi comme cela est
défini ici ou non? À supposer que cela ne le soit pas, cela
voudrait dire que les étudiants du campus Héritage, qui sont des
étudiants de la section anglophone du cégep de l'Outaouais,
seraient obligés d'être regroupés uniquement dans
l'association générale. Il y a une jolie limite. Je trouve qu'on
irait bien au-delà de ce qu'on nous présente, d'autre part, comme
devant être l'esprit général du projet de loi. Ce sont deux
exemples qui viennent illustrer la pertinence de l'amendement qui est
proposé. J'aimerais bien connaître l'avis du ministre et de ses
collègues sur ce point-là.
M. Laurin: Actuellement, s'il y a une association étudiante au
cégep de l'Outaouais. Évidemment, c'est en vertu d'un protocole
d'entente. C'est l'objet de tractations qui ont eu lieu entre les
étudiants, de la façon dont ils se sontregroupés,
et l'établissement. Je crois me souvenir qu'il y a une seule association
qui regroupe tous les étudiants. Cependant, dans la foulée des
décisions que nous avons prises il y a déjà un an et demi,
il est entendu que les chances sont données à ce qu'on appelle le
campus Héritage, qui n'est pas encore un campus au sens
législatif du terme, d'évoluer selon certaines conditions. Le but
est de permettre l'autonomisation graduelle du campus Héritage dans
toutes ses dimensions, que ce soit sur le plan de la représentation, sur
le plan des relations du travail, surle plan de l'organisation
pédagogique et aussi sur le plan de l'organisation étudiante.
Quand cette évolution sera complétée, rien
n'empêcherait les étudiants du campus Héritage anglophone
de former leur propre association. Là, ils auraient deux choix: ou faire
reconnaître par les autorités du collège leur association
en vertu d'un protocole d'entente, comme cela existe actuellement, ou recourir
à la loi. À ce moment, ilspourraient recourir à la
loi, s'ils en décident ainsi. Voilà à peu près
l'état de la situation actuellement en ce qui concerne le cégep
de l'Outaouais.
En ce qui concerne le problème des étudiants à
temps plein ou à temps partiel, il est vrai effectivement que, si ces
étudiants décident de recourir à la loi, encore une fois,
l'accréditation devrait recouvrir aussi bien les étudiants
à temps plein que les étudiants à temps partiel, au
sens de la loi 32 et pour les fins qu'elle poursuit, encore une fois, si
tel est leur choix. Mais comme nous l'avons vu lors de la commission
parlementaire, même si les étudiants à temps partiel
désirent recourir à la loi 32 pour fins d'accréditation
avec les avantages, les droits et obligations que cela comporte, rien ne les
empêcherait, cependant, de former aussi, pour d'autres fins, un autre
groupe ou une autre association qui poursuivrait des fins autres que celles que
vise l'accréditation. Je pense que, là aussi, il y a une certaine
latitude qui demeure la prérogative des étudiants à temps
partiel.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Verchères.
M. Charbonneau: Sur la question des campus, peut-être qu'il
y aurait lieu d'avoir des précisions parce que je pense que ce ne serait
pas acceptable qu'on ne reconnaisse pas la réalité
géographique des campus. Dans certaines régions du Québec,
il y a des associations étudiantes qui existent selon le lieu physique
et non pas selon l'institution elle-même. Je pense qu'il y aurait
peut-être lieu de regarder la possibilité que dans un lieu
physique... Je me rappelle que, dans la région de Saint-Hyacinthe, pour
les étudiants de mon comté qui allaient au cégep,
longtemps le campus de Saint-Hyacinthe, c'était juste un campus d'un
cégep plus gros. À Sorel aussi dans le même cégep.
Je pense que les gens de Saint-Hyacinthe ont une identité propre et je
ne vois pas pourquoi on imposerait une espèce d'association
multigéographique.
Par ailleurs, au niveau des programmes et des secteurs, il ne faut pas,
non plus, tomber dans l'autre extrême. Il y a tellement de programmes
dans un cégep que, si on amenait une reconnaissance avec droit de
perception et de cotisation étudiante et tout cela, on se retrouverait
à aller pas mal loin dans l'autre sens. Ce que je dis, c'est qu'il y a
beaucoup de programmes dans un cégep. S'il fallait qu'on multiplie le
nombre d'associations reconnues avec droit de perception des cotisations
obligatoires et tout cela, on va se retrouver avec une situation assez
compliquée dans les institutions et on va finalement diminuer l'impact
des associations étudiantes aussi. (12 heures)
Je pense qu'il y a une différence entre un programme dans un
cégep et une faculté ou une école dans une
université. Ce qu'on a essayé de faire, j'ai l'impression, c'est
trouver un certain équilibre en tenant compte aussi d'une
réalité particulière. Je ne pense pas qu'on puisse
associer complètement la réalité collégiale avec la
réalité universitaire.
Le Président (M. Jolivet): M. le député
d'Argenteuil.
M, Ryan: Dans l'amendement, on a le mot "secteur". J'ai ma
conception du mot "secteur", mais est-ce que le ministre pourrait me dire s'il
existe une définition officielle de "secteur" dans le langage des
cégeps?
M. Laurin: Je ne pourrais pas vous répondre à ce
moment-ci.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Fabre.
M. Leduc (Fabre): Je sais que dans plusieurs cégeps on
utilise le terme "secteur" pour regrouper des programmes qui se rejoignent.
Tous les cours professionnels touchant tel domaine, par exemple la
mécanique, peuvent être regroupés et s'appeler un secteur
et on retrouve des chefs de secteur. C'est le regroupement de plusieurs
programmes. Je ne sais pas si la définition est officielle, mais je sais
qu'elle existe dans plusieurs cégeps.
M. Laurin: Non, elle n'est ni officielle, ni officialisée,
c'est un terme qui est utilisé pour fins organisationnelles.
M. Ryan: Est-ce dans le même sens dont vient de parler le
député de Mille-Îles?
M. Laurin: Oui.
M. Ryan: M. le Président, il faudrait revenir sur les deux
points que nous discutons, parce que j'estime que la réponse du ministre
n'est pas satisfaisante. D'abord, en ce qui touche l'exemple du cégep de
l'Outaouais, je crois que ce qu'a dit le ministre est du genre "exhortatoire".
Il reconnaît lui-même que la situation de fait actuellement peut
donner lieu à bien des problèmes éventuellement, quand on
sera rendu à tel stade, c'est-à-dire au stade où le
collège Heritage aura été reconnu comme un campus en bonne
et due forme. À ce moment, les étudiants pourront se
prévaloir corollairement du droit d'association que leur
reconnaîtrait le projet de loi, s'il devenait loi. Cela ne tient pas
compte, cela fait même abstraction des difficultés actuelles qu'on
rencontre dans un collège comme celui-là. J'ai déjà
porté le problème à l'attention du ministre, j'ai
déjà signalé à son attention que la situation qui
existe là est très insatisfaisante.
J'avais d'autres précisions ces jours derniers. Là, on
doit procéder au choix d'un recteur. On a formé un comité
pour procéder au tamisage des candidatures, peut-être au
recrutement de candidatures également, je ne sais trop. Mais on
m'écrit pour me dire que,
sur le comité, il n'y a aucun représentant du campus
Heritage. C'est toujours comme cela; on tient bien à les garder pour les
fins de calculs de têtes à des fins de subventions, mais,
lorsqu'il s'agit de les associer véritablement, c'est une tout autre
histoire. Si le projet de loi est adopté comme ceci, je prévois
qu'on décide nous, du haut de notre grandeur, à Québec.
Mais vous, mesdames et messieurs du campus Heritage, vous faites partie de
l'association générale, quelle que soit son orientation, quelle
que soit la manière dont elle fonctionne. Cela a été
décidé du haut de notre autorité à Québec.
Je trouve que c'est un très bon exemple du genre de situation auquel
peut conduire une loi adoptée dans le climat précipité
où nous nous trouvons.
Deuxièmement, je reviens au problème des étudiants
adultes. Tantôt, le ministre a rejeté l'amendement que nous
proposions au tout début pour que la loi ne s'applique qu'aux
étudiants au sens fort du terme; cela va. Mais au moins si on inclut les
élèves à temps partiel - en particulier les
élèves adultes - faudrait-il prévoir la possibilité
qu'ils veuillent se regrouper distinctement, leur reconnaître ce droit,
parce qu'il me semble que ce qu'on veut reconnaître, c'est un statut de
liberté pour les étudiants qui veulent se regrouper. Alors, je
pense bien que le ministre va comprendre comme moi que les étudiants
adultes peuvent avoir de très bonnes raisons, à la fois
financières, professionnelles et autres, de vouloir se regrouper dans
des associations distinctes. Je ne vois pas pourquoi on ne leur donnerait pas
cette possibilité.
Il me semble que cela vient en plein à l'article 6, un amendement
comme celui qui est proposé. Justement comme il n'existe pas de
définition juridique de l'expression "secteur", il me semble que cela
pourrait embrasser une possibilité comme celle-là. Mais
là, livrer tout d'un coup, pour une période indéfinie,
toute personne qui vient faire son inscription pour suivre des cours aux
diktats d'une association qui serait éventuellement connue ou
accréditée, il me semble que c'est aller vite en affaires. Il me
semble que c'est procédé sans tenir compte de toutes les
sinuosités du réel. Il me semble que c'est mettre la charrue
devant les boeufs, en somme. Si on pouvait trouver un amendement ici qui
laisserait un peu plus de latitude, je pense qu'on rendrait un grand service
à tout le monde, y compris à bien des associations
étudiantes qui ne sauraient pas quoi faire de tous ces étudiants
adultes ou à temps partiel si elles étaient tenues par la loi
à les incorporer dans leurs rangs au même titre que les
étudiants à temps plein.
M. Charbornneau: Est-ce que vous avez le texte de votre
amendement?
Le Président (M. Jolivet): C'est chaque campus, secteur ou
programme.
M. Ryan: On peut le retravailler. Il est là à titre
indicatif. Il me semble qu'il y a quelque chose là-dedans que le
ministre devrait regarder avec nous.
M. Laurin: M. le Président, il y a deux autres facteurs
qu'il importe également de considérer et que nous avons
considérés. En regardant les chartes des universités,
ainsi que les pratiques institutionnelles des institutions d'enseignement
postsecondaire, nous nous sommes rendu compte qu'il y a autant de
définitions d'"adulte"...
M. Ryan: Je m'excuse. J'ai eu une distraction. Est-ce que le
ministre pourrait avoir l'obligeance de reprendre ce point?
M. Laurin: Oui, bien sûr. En regardant les chartes des
universités et les pratiques institutionnelles des institutions
d'enseignement postsecondaire, nous nous sommes rendu compte qu'il y a autant
de définitions d'"adulte" que d'institutions. Il y a loin d'avoir une
homogénéité, une uniformité dans la
définition du mot "adulte". C'est là une première
difficulté importante.
Deuxièmement, je pense qu'à la commission parlementaire on
nous a fait valoir - je pense que c'est le RAEU qui nous faisait valoir cela -
qu'un certain nombre d'institutions tendent à accorder moins d'attention
aux besoins des étudiants à temps partiel qu'aux besoins des
étudiants à temps complet. C'est, d'ailleurs, une remarque aussi
qu'avait faite la commission Jean. La commission Jean demandait dans ses
recommandations que l'on institue au bénéfice des
étudiants à temps partiel, qui souvent sont des étudiants
adultes, des services spéciaux d'accueil et de référence,
de même qu'on mette à leur disposition certains services dont
bénéficiaient les étudiants réguliers et auxquels
ils n'avaient pas accès, que ce soient des services qu'on appelle
complémentaires ou collectifs ou qu'il s'agisse de services dotés
d'un certain équipement, par exemple, bibliothèques, gymnases et
ainsi de suite.
Je pense que, dans les remarques qu'on nous a faites à la
commission parlementaire, on nous a laissé entendre qu'il serait
peut-être temps que les étudiants à temps partiel
bénéficient de ces mêmes services et qu'il serait
peut-être important, justement, que les associations étudiantes,
du fait qu'elles auraient maintenant des étudiants à temps
partiel parmi leurs membres, se fassent les porte-parole, les véhicules
de ces besoins tout à fait légitimes, marqués au coin de
la justice, des étudiants à temps partiel. En acceptant encore
une fois de séparer les étudiants à temps partiel des
étudiants à
temps complet, on courrait le risque de maintenir cet état de
ghettorisation dont les étudiants à temps partiel souffrent
actuellement. Je pense donc qu'il importe de laisser le droit aux
étudiants à temps partiel, par le biais d'associations
accréditées dont ils feraient partie, d'obtenir les mêmes
services dont bénéficient actuellement les étudiants
à temps complet.
M. Ryan: M. le Président, je pense que cette affaire vaut
d'être approfondie parce qu'il me semble que les propos du ministre font
abstraction de la réalité concrète comme on la
connaît et on la vit. Les étudiants à temps partiel sont,
en règle très générale, des personnes qui
travaillent en même temps qu'elles étudient et qui ont aussi, pour
la plupart, des responsabilités familiales et parfois même des
responsabilités professionnelles, sociales ou civiques. Par
conséquent, ce sont des personnes qui n'ont pas la même
disponibilité pour s'adonner à des activités associatives
avec les étudiants à temps plein. Il y a des moments où
auront lieu les réunions qui ne conviendront pas du tout aux
étudiants adultes. D'ailleurs, l'expérience des dix
dernières années montre très bien que, dans toutes les
expériences d'agitation étudiante qui ont pu avoir lieu, les
étudiants adultes étaient en général absents. Ils
étaient profondément - je pense qu'on va le dire bien
carrément - embarrassés par cela.
Je me souviens qu'à l'UQAM, au moment le plus difficile d'une
crise très grave qui a sévi il y a quelques années, les
étudiants de la section administration du département des
sciences administratives qui est un des plus importants à l'UQAM, comme
le ministre le sait, avaient décidé de poursuivre leurs affaires
de leur côté et de s'engager dans une expérience
académique en pleine période de grève qu'ils ont
poussée jusqu'au bout. Les étudiants en sciences administratives
représentaient les quatre cinquièmes des étudiants
à temps partiel, c'est-à-dire des étudiants adultes qui
avaient d'autres activités dans la vie et qui ne voulaient pas se lancer
dans la création de mouvements dont on peut reconnaître la
validité par ailleurs, mais qui, pour eux, n'offraient pas un
intérêt aussi immédiat et aussi total que pour
d'autres.
Pour le gouvernement, aller, par une législation adoptée
en dernière heure, les précipiter dans cette obligation
d'être encadrés par les associations qui regroupent les
étudiants à temps plein, il me semble que c'est une grave
imprudence. C'est même une injustice à leur endroit parce qu'ils
n'auraient aucune garantie en matière de cotisation, par exemple.
J'entends le ministre nous dire: Qu'ils se regroupent pour des fins
spéciales, s'ils le veulent. Ils ne peuvent pas passer leur temps
à cela, justement à cause de leur situation particulière.
Il y a les questions de cotisation. Est-ce qu'il y a une garantie selon le
projet de loi que, s'ils suivent des cours pour l'équivalent du quart
d'un étudiant à temps plein, la cotisation ne sera que le quart?
Ils n'ont aucune garantie. La cotisation sera votée à une
assemblée générale à laquelle ils seront
très probablement absents. Il y a des associations qui reconnaissent le
principe de la cotisation selon le nombre de crédits. C'est très
bien, c'est déjà une nuance importante. On n'a absolument rien
dans le projet de loi qui garantit cela. Cela veut dire que, dans certaines
institutions, des étudiants qui seraient en majorité seraient
condamnés par une loi trop rigide et trop complaisante à subir
des contraintes qui auraient été arrêtées en leur
absence par une minorité. Je pense que c'est un des aspects les plus
inquiétants du projet de loi. Je veux attirer l'attention du ministre
parce qu'il en parle avec placidité et, pour la personne qui en subira
les conséquences, cela n'a rien de placide. Je ne sais si... Je n'ai pas
l'impression qu'on a même cherché à résoudre le
problème sérieusement et de manière réaliste.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Fabre.
M. Leduc (Fabre): Je comprends bien le problème que pose
le député d'Argenteuil. Il me semble que, lorsque le
député d'Argenteuil dit que la loi ne tient pas compte de la
réalité, en tout cas en ce qui concerne l'éducation des
adultes, cela ne tient pas compte de la réalité non plus. Il me
semble que vous ne tenez pas compte de la réalité du monde de
l'éducation des adultes. C'est difficile de circonscrire exactement, par
rapport aux étudiants inscrits à temps régulier, ce
monde-là. Vous avez des étudiants inscrits pour une session aux
cours de l'automne ou de l'hiver. Vous avez des sessions intensives au
printemps et à l'été. C'est un monde qui va et vient
énormément. Il y en a qui sont inscrits pour un cours, d'autres
pour deux cours. Comment exactement circonscrire sur une période d'une
année tout ce regroupement? C'est un va-et-vient constant, le monde de
l'éducation des adultes. Il y a donc là une difficulté
réelle en termes de vouloir signifier qui ferait partie de cette
association si le désir y était. Il y a un grand risque que cette
association soit entre les mains d'un petit groupe qui ne soit pas
précisément représentatif à cause de la
difficulté d'établir la représentativité, à
cause de la nature même de ces étudiants qui vont et viennent. (12
h 15)
II me semble que c'est plus simple de régler le problème
par la régie interne. Il
peut se créer une section à l'intérieur de cette
grande association étudiante qui comprend les étudiants à
temps régulier et les étudiants adultes. Il peut se créer
une section des étudiants adultes et, le cas échéant,
c'est de la régie interne; mais vouloir prévoir tous ces cas dans
la loi, il me semble que c'est vraiment impossible et ce n'est pas
précisément tenir compte de la réalité du monde de
l'éducation des adultes.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Laurin: J'ajouterais, M. le Président, que, s'il
était vrai, comme le prétend le député
d'Argenteuil, que les étudiants à temps partiel, en raison de
leur manque de disponibilité, recourront beaucoup moins aux services que
pourrait leur obtenir l'association accréditée, ce serait
injuste. En effet, si on en croit, encore une fois, la commission Jean, s'il y
a eu tant de représentations faites à la commission Jean de la
part d'étudiants à temps partiel qui se plaignaient de la
façon dont ils étaient traités en général
dans les institutions, nous n'aurions pas à déplorer les
conséquences auxquelles nous tentons actuellement de remédier non
seulement dans cette loi, mais dans la politique que nous sommes en train de
préparer. Il y a des degrés de disponibilité variables au
sein des étudiants à temps partiel. Il y a aussi des
étudiants dont les moyens financiers sont très variables.
J'aimerais bien, pour ma part, que les étudiants à temps partiel
aient accès aux mêmes services que les étudiants
réguliers. Ils en ont souvent besoin et cela réglerait beaucoup
de problèmes pour eux s'ils pouvaient y avoir accès. De la
même façon -je pense que c'est là un droit que nous devons
leur reconnaître - si on leur reconnaît ce droit, il faudrait leur
donner les moyens d'obtenir ce à quoi ce droit leur donne accès.
Donc, je pense que l'injustice serait de les exclure plutôt que de les
inclure.
M. Ryan: M. le Président... Le Président (M.
Jolivet): Oui.
M. Ryan: ...le ministre a invoqué le rapport Jean. J'ai
envoyé chercher le rapport Jean, parce que je crois me souvenir que le
rapport Jean recommande qu'on reconnaisse des associations distinctes pour les
étudiants adultes.
M. Laurin: Encore une fois, le député de Fabre
vient de vous dire la façon dont cela pourrait se passer.
M. Ryan: Non, il m'a dit la façon dont cela pourrait ne
pas se passer. C'est parce que vous avez cité le rapport Jean à
deux reprises. On va, au moins, demander de vérifier si c'est bien ce
qui est recommandé. Si c'est le contraire, on va cesser de tourner
autour du pot.
M. Laurin: Je parlais de la commission Jean d'une façon
générale en disant que les adultes...
M. Ryan: Oui, mais enveloppante.
M. Laurin: ...dans les institutions n'avaient pas droit aux
mêmes services que les étudiants à temps complet, services
auxquels ils ont pourtant droit...
M. Ryan: Justement!
M. Laurin: ...et dont ils pourraient bénéficier
d'une façon générale. Je n'en parlais pas d'une
façon spécifique dans toutes les explicitations que ce principe
pourrait recevoir, mais j'en parlais d'une façon générale.
Je pense que le député d'Argenteuil ne pourra pas nier que
c'était une des lignes de force ou une des lignes directrices du rapport
de la commission Jean.
M. Ryan: Oui, mais ce que je veux signaler à l'attention
du ministre, c'est que tout le monde est évidemment d'accord, y compris
la commission Jean, le ministre et moi-même, pour reconnaître que
les étudiants adultes n'ont pas toujours l'égalité de
traitement ou de condition à laquelle ils sont en droit d'aspirer dans
les établissements d'enseignement, autant au niveau secondaire qu'au
niveau collégial et au niveau universitaire. De là à
conclure -et c'est là que le ministre fait une pétition de
principe qui est inadmissible chez un esprit rigoureusement logique comme le
sien que les obliger à faire partie d'une association
accréditée unique pour obtenir cela, c'est la meilleure formule,
de là à conclure que les obliger à faire partie d'une
association qui, selon toutes les indications de l'expérience, sera
très probablement dominée par les étudiants à temps
plein, c'est le meilleur moyen, je pense que là, il y a un pas qui n'est
justifié ni, à ma souvenance, par les recommandations du rapport
Jean - qu'on va vérifier - ni par une considération
réaliste des choses.
Il peut arriver dans certains cas que ce soit mieux comme cela. Je
n'aurais pas d'objection si les étudiants à temps partiel jugent
majoritairement qu'il est préférable pour la défense de
leurs intérêts qu'ils fassent partie d'associations communes.
S'ils jugeaient librement, eux, que c'est mieux qu'ils aient une association
distincte qui a le droit d'être accréditée, il me semble
que ce serait l'obligation d'un législateur qui dit, justement, qu'il ne
veut pas imposer de
cadre et qu'il ne veut pas "encarcaner" les gens de dire: Très
bien, on va reconnaître cette possibilité en l'ajoutant ici.
Si vous voulez m'excuser, M. le Président, cela va me prendre
deux minutes. Il faudrait que je relise la section du rapport Jean. C'est un
document volumineux qui, comme vous le savez, traite des associations
étudiantes. À première vue, je ne peux pas
interpréter facilement ce qui est dit ici. Cela va prendre au moins une
minute, mais je pense que c'est très important pour cette discussion que
l'on sache si la commission Jean va dans un sens ou dans l'autre. Si elle ne va
dans aucun sens, je n'ai pas intérêt à poursuivre
l'argumentation sur le rapport Jean, évidemment.
Mais, sur le fond, je dis au ministre, justement, que nous reconnaissons
tous qu'il y a des problèmes spéciaux: ils n'ont pas accès
dans des conditions égalitaires à tous les avantages qui sont
offerts aux étudiants à temps plein. De plus, le moyen le plus
indiqué pour cela, le ministre nous dit que ce serait de les obliger par
la loi à faire partie de l'association accréditée. Nous
disons: Si vous leur donniez au moins le choix, en conformité avec le
principe qui est énoncé à l'article 4. Je ne sais pas ce
qui va en rester une fois que l'on aura adopté les choses que le
ministre veut nous faire adopter. J'espère qu'il aura, au moins, la
rigueur logique de le retirer. S'il ne veut pas que ce soit l'association de
leur choix, qu'il retire au moins cet article plus tard. On saura, au moins,
à quelle enseigne le gouvernement loge.
Dans le cas du campus Héritage, je n'ai pas eu de réponse,
non plus. Je ne comprends pas que dans des situations de cette nature le
principe de la liberté d'association ne permette pas aux
étudiants du collège Héritage de se regrouper en une
association qui les représenterait pour les fins de défense et de
promotion de leurs intérêts.
M. Laurin: D'abord, M. le Président, l'association n'est
pas obligée, encore une fois, de recourir à la loi 32. Si elle
trouve des moyens qui la satisfont de se faire reconnaître et de se
financer, elle n'est pas obligée de recourir à la loi. De plus,
dire que les étudiants à temps partiel seront dominés par
les étudiants à temps plein, je pense qu'on pourrait dire cela
d'un bon nombre de gens qui peuvent avoir des opinions différentes,
selon l'école idéologique qui les inspire ou selon d'autres
intérêts qui peuvent être les leurs. On a vu, justement,
lorsqu'une association est venue ici prendre le parti des étudiants
à temps partiel, que la domination n'est pas incompatible avec la
considération des problèmes réels d'un certain groupe
d'étudiants et de sa détermination à s'en faire le
véhicule et le porte-parole intéressé et ardent pour que
justice leur soit rendue.
D'autre part, je répète ce que disait le
député de Fabre: Les associations à l'intérieur de
leurs propres procédures ou schémas organisationnels pourront,
par des règlements de régie interne, faire droit à
plusieurs revendications particularistes qu'ils régleront au mieux de
leurs connaissances.
M. Ryan: Je pose une question au ministre. Supposez que dans une
association il soit décidé que la cotisation va être la
même pour tout le monde, au nom du principe une voix, un vote, une
cotisation, quelle protection le projet de loi donne-t-il de ce point de vue
aux étudiants à temps partiel?
M. Laurin: Ce serait faire montre de paternalisme que de demander
au législateur de régler tous ces problèmes. Il faut,
comme on le fait pour d'autres associations dans d'autres domaines, laisser aux
organismes de la base le soin de discuter leurs problèmes et de trouver
les solutions qui paraissent les plus sensées, les plus justes et les
plus acceptables.
M. Ryan: Est-ce que le ministre a sollicité l'avis de
l'Institut canadien d'éducation des adultes ou d'autres organismes
familiers avec les problèmes...
M. Laurin: Non, M. le Président.
M. Ryan: ...des étudiants adultes dans la
préparation de ce projet de loi?
M. Laurin: C'est-à-dire que, depuis que nous suivons le
dossier, évidemment, nous avons pris connaissance de tout ce qui avait
pu être écrit ou publié à cet égard, et la
moisson était abondante. En ce sens-là, oui, mais d'une
façon immédiate et formelle, non.
Le Président (M. Jolivet): Compte tenu du temps que nous
avons pris pour étudier cet amendement et que, normalement, j'ai
été assez large dans le temps, je serais prêt à
poser la question suivante, parce que je pense qu'on est diamétralement
opposé quant à l'issue de cette discussion: Est-ce que
l'amendement proposé par le député d'Argenteuil est
adopté? Refusé, rejeté. Est-ce qu'il y a d'autres
amendements?
Oui, M. le député.
M. Charbonneau: Je veux juste m'assurer d'une chose avec le
ministre. Pour chaque campus, est-ce qu'on s'entend sur la remarque que j'ai
faite tantôt? Je ne voudrais pas qu'on se retrouve dans une situation
où le texte de la loi serait utilisé de telle sorte qu'on ne
tienne pas compte des réalités régionales, ce qui ferait
qu'à un
moment donné une institution où il y a plusieurs campus
géographiques, par exemple, je ne sais pas, le collège de la
Gaspésie, obligerait, finalement, tout le monde à faire partie
d'une même association.
M. Laurin: Le mot "campus" ici a la signification qu'il a dans
les règlements du ministère de l'Éducation. Il y a des
collèges qui comportent des campus qui sont reconnus comme campus.
M. Ryan: Cette définition-là, est-ce qu'on pourrait
l'avoir? On met cela dans la loi. Comme il n'y a aucune définition au
début du texte de loi, on ne peut pas marcher, non plus, par des actes
de foi, parce que nous avions le cas au collège de l'Outaouais. Je vous
avertis que vos réponses ne sont pas satisfaisantes.
M. Laurin: II n'est pas reconnu comme campus actuellement,
M. Ryan: Je le sais bien. Justement, c'est encore plus
insatisfaisant à cause de cela.
M. Laurin: Mais il y a les collèges où il y a des
campus, comme le collège Champlain qui comporte trois campus reconnus
administrativement, institution-nellement.
M. Ryan: Ce que le député de Verchères a
soulevé, cela fait fait partie de mes préoccupations aussi.
M. Laurin: C'est la même chose pour les autres.
M. Ryan: II peut arriver qu'un cégep ait trois ou quatre
installations géographiques, mais que chacune ne soit pas définie
à l'état de campus et qu'à ce moment-là, les
étudiants soient tous embrigadés par votre projet de loi dans une
association unique.
M. Laurin: Le mot "campus" ici réfère à ce
qui est reconnu administrativement comme campus, pour fins budgétaires,
par exemple.
M. Ryan: Est-ce qu'on peut avoir la définition ou les
critères qui sont utilisés, justement, pour cela?
M. Laurin: Je pourrai vous la donner.
M. Ryan: Quand?
M. Laurin: Cet après-midi.
M. Charbonneau: Je voudrais aller un peu plus loin. N'y a-t-il
pas moyen, indépendamment du problème de la reconnaissance... Je
regarde le problème de l'Outaouais, pour mettre les choses sur la table.
Je ne pense pas qu'il s'agisse de forcer une reconnaissance si le
ministère de l'Éducation, pour toutes sortes de raisons, n'est
pas arrivé à cette conclusion. Je pense qu'il y a une distinction
à faire entre les reconnaissances institutionnelles pour toutes sortes
de raisons et la réalité étudiante. Je ne voudrais pas
qu'on oblige des étudiants à faire partie d'associations qui
n'ont pas de prise sur la réalité. Je me dis que, si le texte de
la définition du terme "campus" doit être précisé
dans ce projet de loi, qu'on le fasse, mais qu'on n'embrigade pas ou qu'on
"n'encarcane" pas des étudiants en les obligeant à s'associer
à des gens qui sont dans une autre région ou dans un autre lieu
géographique, alors qu'ils n'ont pas d'affinités
particulières avec eux.
M. Ryan: Oui, j'apprécie énormément ce que
dit le député de Verchères et c'est cela qu'on essaie de
prévenir.
M. Charbonneau: Je pense qu'on peut le faire et qu'on devrait le
faire dans ce projet de loi, indépendamment du problème du
cégep de l'Outaouais dont vous parlez et du fait qu'à la
direction institutionnelle du cégep, pour toutes sortes de raisons, le
problème ne soit pas encore réglé et qu'on soit à
une étape d'autonomisation qui amènerait éventuellement le
ministère à le reconnaître officiellement comme campus.
Entre-temps, ce que je ne voudrais pas, c'est que les étudiants de ce
secteur ou dans un autre lieu soient obligés de faire partie d'une
association générale, alors que leurs affinités vont
d'abord dans le sens de leur lieu d'appartenance.
M. Ryan: M. le Président, c'est exactement ce qu'on va
faire si on refuse l'amendement qui est proposé ou un amendement de ce
type-là. Je ne prétends pas que la formulation proposée
était la meilleure. Il y en a peut-être une autre. Mais c'est
exactement vers quoi on va. Je remarque une chose du côté des
établissements de niveau universitaire: une très grande
souplesse. On dit: Ils pourront se regrouper dans "chaque faculté,
école, département ou institut, ainsi que chaque famille ou
module" au sens des statuts de l'Université du Québec. Il y a des
départements qui vont peut-être comprendre une centaine ou 200
étudiants. Cela peut varier de 100 à des milliers. Il y a
beaucoup de souplesse de ce côté. Ce n'est pas mauvais, mais, du
côté des cégeps, il n'y en a aucune, sauf pour les campus.
(12 h 30)
Regardez un exemple concret. Je ne veux pas utiliser la tribune ici pour
régler
d'autres problèmes, mais je reviens au campus Héritage,
parce que c'est comme cela qu'on l'appelle de toute manière, même
si la définition retarde ou les décisions administratives. Le
campus Héritage regroupe, si mes souvenirs sont bons, entre 800 et 1000
élèves. Ils vont être obligés d'aller dans le bassin
commun, tout le monde ensemble. Il va arriver, parce qu'un étudiant est
à l'université et qu'il a une année ou deux de plus
d'études, qu'il va être dans un département qui regroupe
200 étudiants et qu'il va avoir son association à lui. Il est
correct, la loi a pensé à lui, mais, dans le cas des
cégeps, la loi était une espèce de moule uniforme qu'on
imposait sans considération des nuances de la réalité.
Le Président (M. Jolivet): Y a-t-il d'autres amendements
à l'article 2? S'il n'y en a pas, je vous demanderais s'il est
adopté avec l'amendement proposé. Est-il adopté?
M. Dauphin: J'aurais une question, M. le Président, si
vous me le permettez.
Le Président (M. Jolivet): Oui. M. le député
de Marquette.
M. Dauphin: Deux autres points différents. Au même
paragraphe, le paragraphe 6 - évidemment, on est au paragraphe 6 - il y
a une association étudiante favorable au projet de loi 32 qui a fait
certaines propositions d'amendements notamment - et je me souviens que
c'était à l'Université Laval - au niveau des
deuxième et troisième cycles. Les étudiants de
deuxième et troisième cycles - le ministre va en convenir - ont
souvent des intérêts différents de ceux des
étudiants du premier cycle. Je demanderais au ministre s'il a pris
connaissance des amendements de l'association étudiante, le RAEU, entre
autres, qui a fait ces propositions lors de la commission parlementaire. N'y
aurait-il pas possibilité de faire l'amendement ou l'ajout suivant,
après "au niveau universitaire, chaque faculté, école,
département ou institut", et de prévoir des associations
différentes au niveau des deuxième et troisième
cycles?
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Laurin: II y a là un problème, M. le
Président. Après vérification, un bon nombre
d'étudiants qui appartiennent au deuxième ou troisième
cycle sont des employés en même temps que des étudiants.
Ils reçoivent une rémunération de la part des
autorités universitaires et ils ont un statut ambigu. Donc, ils
appartiennent à deux catégories en même temps.
Deuxièmement, il n'y a absolument rien qui les empêche - ce qui
est le cas actuellement, d'ailleurs - de former leur propre association. On a
même entendu des représentants de l'association de Concordia qui
refusaient d'être touchés par le projet de loi.
Troisièmement, on peut dire qu'ils pourraient former leur propre
association s'ils le veulent et s'ils le décident ainsi. S'ils
désirent profiter des recours qu'offre la loi 32, ils pourraient, en
vertu des articles touchant au regroupement, par une résolution de leur
association, demander d'être regroupés au sein d'une association
accréditée qui pourrait représenter leurs
intérêts selon les termes prévus par la loi. Donc, pour
toutes ces raisons, nous n'avons pas cru opportun d'inclure d'une façon
spéciale les étudiants des deuxième et troisième
cycles.
Le Président (M. Jolivet): M. le député
d'Argenteuil.
M. Ryan: Les étudiants du secondaire, deuxième
cycle, ont été exclus de ce projet de loi. D'autre part, le
ministre, dans les déclarations de politique qu'il a faites au cours des
derniers mois, affirmait qu'il voulait promouvoir l'exercice du droit
d'association des étudiants du niveau secondaire. Les étudiants
de niveau secondaire, deuxième cycle, sont des étudiants
âgés, en général, de 16 à 18 ans. Le ministre
pourrait-il nous dire pourquoi ils sont exclus du projet de loi?
M. Laurin: Nous avons voulu - je l'ai répété
à plusieurs reprises - faire un premier pas et là où cela
pressait le plus, c'était au niveau des établissements
d'enseignement postsecondaire. Quant au niveau secondaire, le projet de loi que
je déposerai cet après-midi comporte déjà plusieurs
dispositions qui assureront une participation effective des
élèves à la vie de leurs institutions secondaires, par
exemple par la formation d'un comité qui pourra être
consulté sur des objets qu'il détermine. Par ailleurs, nous
savons qu'il y a un mouvement actuellement en formation, un mouvement national
de regroupement de tous les élèves du secondaire. Ce mouvement
est en marche et je pense qu'il faudra laisser encore quelque temps à
ces efforts qui se font actuellement au sein des institutions secondaires pour
que cela débouche sur une organisation structurée du genre de
celles qu'on connaît dans les établissements d'enseignement
postsecondaire. Nous avons donc voulu limiter la portée de ce projet de
loi aux institutions d'enseignement postsecondaire.
Le Président (M. Jolivet): L'article 2 tel
qu'amendé est-il adopté? Adopté. L'article 3? M. le
ministre.
M. Laurin: Oui, M. le Président. Cet
article énonce les fonctions principales des associations ou
regroupements d'associations d'étudiants que la loi pourra
accréditer et il indique certains champs d'exercice
privilégiés. Les fonctions sont la représentation des
étudiants et la promotion de leurs intérêts et les champs
d'exercice mentionnés sont particulièrement l'enseignement ou la
pédagogie, les services aux étudiants et l'administration de
l'établissement. Cet article, en somme, centre les rôles des
associations et regroupements d'associations d'étudiants sur les
principales fonctions des étudiants et des établissements qu'ils
fréquentent. Sans exclure ni restreindre l'existence de quelque mode de
regroupement d'associations d'étudiants, cet article identifie le type
d'association ou de regroupement d'associations qui sera
accrédité.
Le Président (M. Jolivet): M. le député
d'Argenteuil.
M. Ryan: Oui. L'article qui me paraît restrictif, M. le
Président, dans l'ensemble, c'est celui qui concerne la première
fonction: "représenter respectivement les étudiants ou les
associations d'étudiants - nous allons proposer un amendement à
cet article en disant, suivant leur condition respective - et de promouvoir
leurs intérêts, notamment en matière d'enseignement, de
pédagogie, de services aux étudiants et d'administration de
l'établissement d'enseignement". Il n'y a pas d'objection à cela,
mais il y a une dimension qui est complètement absente du texte et que
je formulerais à peu près comme suit: "De poursuivre toute autre
fin qu'ils jugent librement devoir se donner".
Le projet de loi, comme il est conçu, limite le champ d'action ou
d'intervention des associations étudiantes aux problèmes
d'études, aux problèmes d'éducation, aux problèmes
d'enseignement, aux problèmes de conditions qui peuvent se poser dans
les établissements d'enseignement. Il me semble que toute la tradition
qui s'est développée en matière d'associations
étudiantes depuis une vingtaine d'années va beaucoup plus loin
que cela, ouvre des horizons beaucoup plus larges. Je pense qu'il faut laisser
la possibilité que les associations étudiantes poursuivent
également - je pense que le député de Verchères en
a parlé tantôt -même des objectifs politiques, au sens
qu'ils voudront se déterminer. Je pense que ce n'est pas à nous,
législateurs, de décider qu'une association va se confiner
strictement au champ ou au cadre d'intervention qui est prévu par la
loi. La loi a pour but de reconnaître le principe de la liberté
d'association. Et le principe de la liberté d'association comprend un
corollaire essentiel: le droit de définir les objectifs pour lesquels on
se regroupe même, si le législateur doit en reconnaître
quelques-uns de manière plus spécifique.
Alors, il y a deux amendements que je vous annonce et que je serai
heureux de vous communiquer tantôt. Je vois que vous les saisissez
facilement. Je m'excuse de ne pas les avoir par écrit tout de suite,
mais je vais vous les faire parvenir sans délai.
M. Laurin: M. le Président, je ne pense pas que l'article,
tel qu'il est formulé, exclue l'une ou l'autre des possibilités
qu'a ouvertes le député d'Argenteuil. Lorsque nous disons dans
l'article: "promouvoir leurs intérêts", cela est tout à
fait général et couvre tout le champ possible des
intérêts des étudiants. Nous avons voulu simplement, en
ajoutant "notamment", privilégier la dimension essentielle ou la
dimension la plus importante des activités d'une association
étudiante. Cela n'a aucun caractère restrictif ou limitatif quant
aux autres intérêts qui ne sont pas mentionnés dans cet
article, mais qui sont quand même inclus par la formulation
générale que nous avons adoptée. Donc, je ne vois pas
pourquoi il serait nécessaire d'ajouter la phrase que le
député d'Argenteuil nous recommande.
M. Charbonneau: Sans compter qu'on dit: "a pour fonctions
principales", et non pas exclusives.
Le Président (M. Jolivet): Donc, deux amendements
étaient proposés par le député d'Argenteuil.
M. Ryan: Oui, en fait, cela va en faire trois. Il y en a un qui
est tout à fait mineur. Je vais vous les communiquer tout de suite, M.
le Président.
Premièrement: 'Pour l'application de la présente loi, une
association ou un regroupement d'associations étudiantes est un
organisme qui a pour fonctions principales de regrouper les étudiants
suivant leur condition respective - "suivant leur condition respective" -
j'ajouterais ces mots - ou les associations d'étudiants, de promouvoir
leurs intérêts - on laisserait tomber le mot "et" -notamment...
Tout cela resterait. Après "d'enseignement", il y aurait une virgule, et
ceci serait ajouté: "et de poursuivre toute autre fin que ses membres
veulent démocratiquement lui donner".
Le Président (M. Jolivet): J'ai cru comprendre qu'une
discussion avait eu lieu sur cette question, mais qu'on ne semble pas
être d'accord.
M. Laurin: Non, parce que, encore une fois, la façon dont
l'article est formulé atteint l'objectif que veut atteindre le
député d'Argenteuil avec son amendement. La formulation est
inclusive de tout ce que
l'on pourrait vouloir ajouter.
M. Charbonneau: M. le Président, ce n'est pas très
clair, ce que le député d'Argenteuil propose en son début
d'amendement. Vous parlez de regrouper, à un moment donné.
M. Ryan: Oui, il faudrait peut-être que je vous explique
l'amendement, M. le Président, ce que je n'ai point fait.
Le Président (M. Jolivet): J'avais cru que vous aviez
présenté votre amendement et que vous aviez donné votre
argumentation préliminaire. Non, en aucune façon?
M. Ryan: Non, je l'ai à peine esquissée.
Le Président (M. Jolivet): Allez-y, mais j'ai cru
comprendre que, pour le moment, cela ne faisait pas l'unanimité. En tout
cas, allez-y.
M. Ryan: C'est entendu et je le prévoyais. Il y a trois
parties dans l'amendement. Quant à la première partie, le
député de Verchères me demande les explications que
j'essaierai de lui fournir avec beaucoup de bienveillance. "Regrouper les
étudiants suivant leur condition respective." Singulier. C'est pour
tenir compte des différences de condition qui existent chez les
étudiants. Libre à eux de définir ce qu'il en est. La loi
ne s'immisce pas dans le processus de définition technique de ce que
peut être la condition de telle catégorie d'étudiants ou de
telle autre. Cela laisse cette possibilité ouverte pour les raisons que
j'ai expliquées tantôt, en particulier en pensant aux
problèmes très différents qui se posent aux
étudiants à temps partiel et surtout aux étudiants
à temps partiel qui sont des adultes engagés, par ailleurs, dans
des activités professionnelles, familiales, etc. Voilà pour la
première partie de l'amendement.
Je peux, peut-être, expliquer les autres parties en même
temps, M. le Président, pour éviter tout malentendu. Ensuite, il
y a une troisième partie qui est ajoutée. Dans les fonctions de
l'association, on dit: "représenter des étudiants". C'est la
première. Deuxièmement: "promouvoir leurs intérêts",
notamment dans des champs qui se rattachent plus immédiatement aux
problèmes reliés à la vie de l'établissement,
à la dispensation des cours d'enseignement, etc. Il y a un amendement
qui vient s'ajouter et qui dirait: "et de poursuivre toute autre fin que ses
membres veulent démocratiquement lui donner." Cela élargit
l'affaire. Cela peut devenir une association qui ne fait pas uniquement un
travail de défense ou de revendication des intérêts de ses
membres, mais qui peut également promouvoir les intérêts ou
le bien supérieur de la société en général,
qui peut diffuser des idées, qui peut décider de venir en aide
à un groupe de citoyens qui n'ont rien à voir
immédiatement avec les étudiants, qui peut promouvoir telle sorte
de valeurs dans la société. (12 h 45)
Vu qu'on se met à faire des définitions - ce n'est pas
nous qui les avons demandées, c'est le ministre qui nous en fait cadeau
- il me semble qu'on devrait, au moins, ajouter ce volet qui va empêcher
de penser que le gouvernement voudrait restreindre la perspective ou le champ
d'intervention, d'intérêt des associations étudiantes et
qui va surtout empêcher un ministre d'être éventuellement
tenté d'invoquer cette formulation restrictive pour dire: Quand vous
parlez du reste, vous êtes en dehors de votre domaine, ouvrant la porte
à des injonctions et à des contestations de toutes sortes qui
mettront bien plus de désordre et d'instabilité qu'elles
n'apporteront de solution au problème.
Je comprends la réticence du ministre sur le deuxième
point. À la rigueur des rigueurs, si le président me disait que
ce problème a déjà été réglé
antérieurement, je serais prêt à discuter, s'il y avait un
élément de vraisemblance. L'autre élément de
l'amendement, il me semble qu'il ajoute une dimension qui est indispensable au
jugement de tout citoyen le moindrement bien disposé.
Le Président (M- Jolivet): L'amendement se lirait comme
suit, pour les besoins de la cause, si j'ai bien compris: "Pour l'application
de la présente loi, une association ou un regroupement d'associations
d'étudiants est un organisme qui a pour fonctions principales - le
premier dit ceci -de regrouper les étudiants selon leur condition
respective ou les associations d'étudiants, de promouvoir leurs
intérêts, notamment en matière d'enseignement, de
pédagogie, de services aux étudiants et d'administration des
établissements d'enseignement et - c'est le troisième - de
poursuivre toute autre fin" que les étudiants je pense - se seront
donnée démocratiquement.
M. Ryan: "Que ses membres veulent démocratiquement lui
donner."
Le Président (M. Jolivet): D'accord. "Que ses membres
veulent démocratiquement lui donner."
M. Laurin: Je trouve que l'amendement du député
d'Argenteuil laisserait tomber une dimension fondamentale des objectifs
reconnus d'une association étudiante. Il y a une grande
différence entre regrouper des étudiants et les
"représenter". Je préfère de
beaucoup le terme représenter. Il s'inscrit dans le sens des
désirs, de la volonté des associations étudiantes depuis
toujours. C'est un sens beaucoup plus fort que le simple terme "regrouper" des
étudiants. Par ailleurs, je pense que le mot "intérêts"
dans l'article recouvre absolument tout ce qu'une association étudiante
peut juger valable de dire et de faire aussi bien au sein de l'institution
d'enseignement où elle a ses activités que sur un plan plus
général. Les étudiants ont des intérêts, on
l'a rappelé assez souvent, non seulement en tant qu'étudiants, en
tant qu'élèves, mais aussi en tant que citoyens, en tant que
futurs partenaires sociaux. Ils se sont toujours exprimés dans le
passé sur les grands enjeux collectifs et je ne vois absolument rien
dans cet article qui les empêcherait, loin de là, de faire
entendre leur voix sur leurs intérêts en tant que citoyens, leurs
vues sur les grands enjeux collectifs. Je pense que l'article tel qu'il est
rédigé est très vaste et comprend la multitude de
rôles ou de représentations que les associations
d'étudiants peuvent être amenées à faire aussi bien
au sein de leurs institutions que dans les grands débats nationaux qui
peuvent s'instaurer sur quelque matière ou problème que ce
soit.
Le Président (M. Jolivet): M. le député
d'Argenteuil a-t-il quelque chose à ajouter?
M. Ryan: D'abord, sur le premier point "représenter les
étudiants", il n'y a aucun problème là-dessus si le mot
"regrouper" crée des scrupules au ministre. Le mot "représenter"
est parfaitement acceptable. Cette partie de l'amendement, je vais vous dire
franchement, s'est glissée par distraction de mon côté. Je
n'avais pas du tout l'intention de substituer le mot "regrouper" au mot
"représenter". Les mots qui comptent dans l'amendement sont "suivant
leur condition respective". C'est cela qui compte: "leur condition respective",
au singulier. Cela est bien plus important. Quant au reste, il n'y a pas de
problème.
Maintenant, quand le ministre assimile à la promotion de "leurs
intérêts", les champs possibles d'intervention des associations
étudiantes - c'est une dimension plus large qu'essaie de définir
la dernière partie de l'amendement en disant: "de poursuivre toute autre
fin que ses membres veulent lui donner démocratiquement" - il me semble
qu'il limite beaucoup parce que ce n'est pas seulement des questions
d'intérêts. On sait très bien en matière d'action
syndicale ce que représente une perspective d'action qui est
inspirée uniquement par des intérêts. Cela conduit au
corporatisme. Cela conduit presque inévitablement, si ce n'est
tempéré par des objectifs plus larges, à l'affirmation de
plus en plus poussée des intérêts particuliers au
détriment de l'intérêt général. La
dernière partie de l'amendement a précisément pour objet
de faire en sorte que, de par la loi elle-même, les associations se
voient rappeler qu'il leur est entièrement loisible de poursuivre des
fins plus larges et que le législateur n'a jamais envisagé de les
restreindre aux objets qui auraient été définis dans la
loi.
M. Laurin: Mais, actuellement...
M. Ryan: Je m'excuse, je vais seulement terminer.
M. Laurin: Oui.
M. Ryan: L'article dit deux choses: d'un côté, de
représenter les étudiants ou les associations qui les regroupent
et de promouvoir leurs intérêts. C'est tout ce qu'il dit:
représenter des étudiants et promouvoir leurs
intérêts. C'est la thèse qui a toujours voulu
réduire le syndicalisme à la défense des
intérêts de ses membres: Occupez-vous de cela et nous, on
s'occupera du reste. Il me semble que toute notre société a
été en réaction contre une thèse aussi
étroite. Le mot "et" est encore assez fort, il joint ces deux-là
et il n'y a pas énormément de possibilités pour autre
chose là-dedans. Si c'était dit clairement, je pense qu'on le
saurait.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Laurin: Le mot, tel qu'il apparaît à l'article,
recouvre, le principal et n'exclut pas quoi que ce soit d'autre, d'une part.
D'autre part, il est compatible avec la définition très large
qu'on peut donner du mot "intérêts", en particulier avec les
pratiques actuelles des associations d'étudiants qui ne se privent pas
d'intervenir - nous le savons depuis plusieurs années - sur les
problèmes politiques de l'heure. Nous entendons souvent des associations
d'étudiants s'exprimer. Nous les avons entendues, par exemple, lors des
dernières négociations. Nous avons même entendu, ici, en
commission parlementaire, trois associations étudiantes qui sont venues
s'exprimer sur le problème, politique, s'il en est, des
négociations dans les secteurs public et parapublic. Cela montre bien
que cet article, tel que formulé, n'est pas du tout incompatible avec la
fonction qu'exercent actuellement les associations d'étudiants.
Je ne vois pas pourquoi il serait nécessaire d'ajouter quelque
chose qui pourrait être considéré comme
superfétatoire, en ce sens qu'il est compris, il est de commune
renommée que les associations étudiantes conçoivent leurs
intérêts d'une façon très large et en concluent
qu'il leur
appartient de s'exprimer sur les grands problèmes de l'heure.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Verchères.
M. Charbonneau: Au risque de m'attirer le courroux du ministre,
je vais vous dire, comme représentant du dossier jeunesse au niveau
gouvernemental, que j'aimerais bien que les choses soient plus précises,
parce qu'éventuellement, dans le milieu étudiant, ce sera facile
de faire un peu de démagogie autour d'un texte qui pourrait
apparaître restreint et on se fera dire que, finalement, on a voulu
limiter la portée. On pourra toujours, par la suite, tenter de donner
des explications sur nos bonnes intentions, mais j'ai trop vu de débats
démagogiques dans ce milieu, souvent sur des textes
rédigés de bonne foi, qui étaient des textes globaux,
généraux, mais qu'on utilisait de façon très
spécifique en utilisant les mots, les verbes, etc., pour ouvrir des
débats à n'en plus finir.
Je ne suis pas d'accord avec la première partie de l'amendement
du député d'Argenteuil, mais peut-être que, dans le
deuxième cas, cela ne nous enlève rien et permettrait
peut-être d'avoir un texte qui montrerait que l'intention du
législateur n'est pas de s'immiscer dans l'autonomie des associations
étudiantes, mais plutôt de laisser les associations
étudiantes décider de leurs propres orientations.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre a-t-il des
choses à ajouter?
M. Laurin: Non.
Le Président (M. Jolivet): Les deux amendements
proposés par le député d'Argenteuil sont-ils
acceptés? Ils sont refusés?
M. Ryan: M. le Président... Le Président (M.
Jolivet): Oui.
M. Ryan: ...il vient d'y avoir une intervention, de la part du
député de Verchères, que je trouve éminemment
constructive. C'est avec la première partie de l'amendement qu'il n'est
pas d'accord. Je comprends très bien cela. Je pense qu'il
reconnaît le bien-fondé de la deuxième partie. Il est
peut-être plus proche des milieux étudiants que le ministre qui a
eu trop de contacts seulement avec des petits groupes limités et il
n'est pas au courant de toute la fermentation d'idées qu'il semble y
avoir dans ce milieu. Il me semble que, pour la deuxième partie, le
ministre devrait y penser comme il faut. Je serais prêt à
séparer ces deux parties de l'amendement pour qu'elles ne soient pas
jugées ou rejetées en bloc comme si elles ne formaient qu'un seul
élément. Il pourrait très bien les proposer sous
forme...
Le Président (M. Jolivet): On va y aller une par une.
M. Ryan: ...de deux amendements distincts.
Le Président (M. Jolivet): II n'y a pas de
problème.
M. Ryan: En ce qui concerne le premier amendement, "suivant leur
condition respective", je serais prêt à voter dès
maintenant. On nous a annoncé, dans l'autre sens, de quel
côté on allait voter.
Le Président (M. Jolivet): Le premier amendement serait
rejeté, si j'ai bien compris. Le second...
M. Laurin: Nous allons le garder en suspens.
Le Président (M. Jolivet): Nous allons donc garder
l'article 3 en suspens puisqu'il y a un amendement qui pourra faire l'objet de
revérification et qui pourrait revenir. En conséquence, compte
tenu de l'heure, il reste trois minutes, nous allons ajourner en sachant qu'il
y aura un ordre donné par le leader en Chambre. Donc, ajournement des
travaux.
(Fin de la séance à 12 h 56)