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Commission permanente de l'Education
Projet de loi no 28
Loi concernant la restructuration des
commissions scolaires sur l'île de
Montréal
Séance du mardi 26 octobre 1971
(Seize heures cinquante-quatre minutes)
M. PILOTE (président de la commission permanente de l'Education):
A l'ordre, messieurs !
La parole est à l'Association des cadres de la commission des
écoles catholiques de Montréal dont le porte-parole est M.
Laurent Portugais. M. Portugais.
Association des cadres de la commission des
écoles catholiques de Montréal
M. PORTUGAIS: M. le Président, vous me permettrez de vous
présenter les personnes qui m'accompagnent, ce sont des membres du
comité de coordination qui ont présidé à
l'étude du projet de loi: Mme Monique Brière, M. André
Strouvens, M. Arthur Dubé, M. Aimé Nault et M. Bernard
Landry.
M. le Président, MM. les ministres, MM. les membres de la
commission, l'Association des cadres de la commission des écoles
catholiques de Montréal se fait un devoir de venir aujourd'hui vous
présenter l'opinion de ses membres sur le projet de loi. Je dis bien
l'opinion de ses membres, puisque le document que nous avons
déposé est le résultat de nombreuses consultations
produites, consultations qui ont pris la forme de comités d'étude
dont les conclusions se retrouvent dans les grandes lignes de nos
recommandations, consultations qui ont également pris la forme d'une
assemblée générale spéciale de nos membres qui ont
approuvé l'action de base qui est contenue dans le mémoire.
Je disais que c'était un devoir, puisque nous croyons que, comme
cadres et professionnels de la plus importante commission scolaire du pays,
nous devons mettre à votre disposition un peu de notre compétence
et de notre expérience, expérience acquise
particulièrement dans le secteur montréalais de
l'éducation, apporter cette expérience, dis-je, à
l'élaboration et à la réalisation d'un système
scolaire qui sera beaucoup plus complexe dans toute l'île que ne l'est la
pourtant très importante CECM.
C'est un devoir également parce que la réforme
proposée dans le projet de loi est une réforme des structures
politiques mais surtout des structures administratives et que la
majorité des administrateurs scolaires qui seront touchés par le
projet de loi sont membres de notre association. Pour ces raisons et pour
d'autres aussi, c'est un devoir qu'il nous fait plaisir d'accomplir
aujourd'hui.
Le mémoire que nous vous présentons con- tient cinq
parties mais M. Aimé Nault va faire un résumé. Nous
aimerions que le document soit considéré comme lu et versé
au journal des Débats. Dans le premier chapitre, nous endossons le
principe de la commission scolaire unifiée. Nous le faisons parce que
nous souscrivons aux objectifs qui sont inhérents au projet de loi,
à savoir la démocratisation du système, la
répartition plus efficace des ressources...
M. CARDINAL: Je m'excuse, M. le Président, monsieur vient de
faire une proposition pour le journal des Débats. Il y aurait
peut-être lieu que la commission l'accepte. Si je comprends bien, vous
proposez de résumer votre texte pourvu qu'il soit reproduit
intégralement au journal des Débats.
M. PORTUGAIS: C'est ça.
M. CARDINAL: Ceci doit être accepté par la commission, M.
le Président. Nous sommes d'accord. Je m'excuse.
M. PORTUGAIS: Je vous en remercie.
M. LE PRESIDENT: La motion est acceptée. (Voir annexe)
M. PORTUGAIS: Je disais donc que, dans le premier chapitre, nous
endossons le principe d'un système scolaire unifié pour
l'île. Nous le faisons parce que nous souscrivons aux objectifs qui sont
donnés dans les notes explicatives. Nous le faisons aussi pour une autre
raison, c'est ce que contient ce premier chapitre.
Jusqu'à présent, le système scolaire
québécois a remis aux collectives linguistiques et
confessionnelles la responsabilité de transmettre aux jeunes à la
fois les connaissances, les valeurs et la vision de la société
dans laquelle ils évoluent. Cette organisation scolaire n'a certes pas
contribué à un développement optimal d'une
communauté culturelle et sociale. Plutôt, le système
scolaire a servi d'organisation et de développement social pour d'autres
groupes que la société québécoise comme telle dans
son ensemble.
Nous considérons qu'une réforme en profondeur du
système scolaire montréalais accompagnées
simultanément d'autres mesures comme, par exemple, la politique de
langue et la politique de l'immigration contribueront à mettre fin
à l'existence de ces deux solitudes qui ne pourront continuer de
s'ignorer longtemps sans entraîner des coûts sociaux majeurs pour
l'une comme pour l'autre.
Il n'est plus permis de laisser la société
québécoise évoluer et se transformer au gré des
dynamismes particuliers. La démocratisation scolaire ne peut être
recherchée en tenant compte uniquement des libertés individuelles
qu'elle favoriserait mais en tenant un aussi bon compte des dimensions
collectives, fondamentales à côté desquelles aucun individu
à Québec
comme à Montréal ne peut passer dans le
développement de sa personnalité. La question fondamentale
demeure, à notre avis, l'orientation de la société
québécoise. La réforme scolaire à Montréal
devrait tendre vers l'instauration d'une société
québécoise où les principaux partenaires se
définiront d'abord les uns par rapport aux autres plutôt
qu'à l'exclusion les uns des autres. La poursuite de cet objectif
primordial nécessite, il va sans dire, un certain pragmatisme dans la
recherche des moyens.
A cette fin, il nous apparaît que deux conditions essentielles
doivent être absolument respectées pour atteindre la mise en
commun de toutes les ressources du système scolaire de l'île: Un
processus graduel, mais dynamique conduisant à une intégration
progressive, et la mise en place d'un organisme central relativement fort,
exerçant un rôle de leadership auprès des dynamisme s
locaux actuellement existants.
En conclusion de ce premier chapitre, l'Association des cadres de la
CECM, tout en endossant pleinement la mise en application le plus tôt
possible du principe d'un système scolaire unifié, recommande par
ailleurs aux législateurs d'user de réalisme et de souplesse et
de permettre que, dans un délai plus adéquat, un processus
graduel conduise à une intégration plus organique et beaucoup
moins artificielle.
Notre chapitre 2 se divise en deux parties. Dans la première
partie de ce deuxième chapitre...
M. SAINT-PIERRE: Les trois dernières lignes, qu'est-ce que
ça veut dire concrètement, lorsque vous demandez au
législateur d'utiliser de réalisme et de souplesse et de
permettre que, dans un délai plus adéquat, un processus graduel
conduise à une intégration plus organique et moins
artificielle?
M. PORTUGAIS: Cela veut dire, par exemple, que ça ne suffirait
pas de donner un délai plus long aux membres provisoires du conseil pour
réaliser l'unification et que, en plus de donner du temps, il faudrait
changer, à notre avis, le rôle qu'on veut donner au conseil
provisoire de l'île.
M. SAINT-PIERRE: Est-ce que vous l'explicitez plus loin, dans votre
mémoire?
M. PORTUGAIS: Donc, dans cette deuxième partie du chapitre 2,
nous tenons à décrire les motifs qui nous amènent à
croire à la nécessité d'une intégration
graduelle.
En d'autre termes, pourquoi voulons-nous une intégration
graduelle? Premièrement, parce que les écoles doivent continuer
à fonctionner normalement. Une intégration qui serait trop
brusque aurait pour effet de provoquer des bouleversements qui,
inévitablement, vont rebondir au niveau de l'école.
Deuxièmement, parce que la réforme pédagogique est
à peine amorcée et que, déjà, elle nécessite
d'immenses efforts d'adaptation et de renouvellement. Il faut, à notre
avis, éviter de reléguer la réforme pédagogique au
troisième plan.
Troisièmement, parce que nous devons respecter les
diversités réelles et les mentalités actuelles. A notre
avis, ce respect se fera seulement par un cheminement qui favorisera des
relations constantes entre les deux groupes et qui en plus incitera les
organismes locaux à travailler ensemble.
Quatrièmement, parce que nous devons aussi éviter la
formation de ghettos. En intégrant d'un seul coup des
éléments aussi différents, on risque de déclencher
des mécanismes de défense qui pourraient provoquer des effets
contraires à ceux que l'on recherche.
Il faut éviter que des groupes minoritaires se sentent
brimés dans leurs droits et cherchent à se regrouper et à
constituer des blocs fermés sur eux-mêmes. A notre avis, il faut
donner le temps au gouvernement d'établir une politique de la langue et
de l'immigration.
Le projet de loi no 28 suscite de nombreuses discussions, parce qu'il ne
s'appuie pas sur une politique linguistique gouvernementale appropriée.
Une politique qui serait adéquate, une politique des langues devrait
reconnaître la place prioritaire qu'il faut faire au français dans
le Québec, alors qu'une politique de l'immigration devrait freiner
l'anglicisation des néo-Québécois.
Sixièmement, parce qu'il faut intégrer graduellement le
personnel impliqué. Ce changement de structures entraînerait
inévitablement, dans bon nombre de cas, des réaménagements
de fonctions et de nouvelles définitions de responsabilités.
On devrait, dans ce mécanisme, s'assurer une participation
volontaire et une participation dynamique de toutes les personnes
impliquées, parce qu'il faut aussi informer les parents et le public.
Les parents sont directement impliqués dans des mécanismes
nouveaux de participation et de consultation. Par ailleurs, l'élection
des commissaires d'écoles constitue, pour la grande partie de
l'île de Montréal, un processus démocratique nouveau. On
peut donc penser que ces mécanismes nécessiteront
préalablement une campagne d'information et de sensibilisation
auprès de tout le public concerné.
On vous a dit que le chapitre 2 se divisait en deux parties. Dans la
deuxième partie de ce chapitre 2, nous tenons à expliquer comment
le conseil central peut être l'instrument premier du processus
d'intégration. Nous croyons qu'en vue d'implanter graduellement un
système scolaire unifié qui soit cohérent et efficace, le
premier moteur de cette entreprise se situe au niveau du conseil scolaire.
Aussi, nous paraît-il plus approprié de donner,
dès le départ, un caractère plus représentatif et
des pouvoirs opérationnels à cet organisme clé qui aura
pour tâche primordiale d'amener et de soutenir le mouvement vers
l'intégra-
tion. Au lieu de préparer l'unification surtout par des plans et
projets nécessairement à caractère plutôt
théorique, nous croyons nécessaire que les éléments
constituants s'engagent dans des expériences communes graduellement plus
nombreuses et plus complexes et entreprennent, par étapes, des
programmes communs tant à l'échelle de l'île qu'à
l'échelle des territoires des futures commissions scolaires
unifiées.
Dans cette optique, le conseil scolaire devrait être
constitué, dès la sanction de la loi, de représentants
désignés par les différentes commissions scolaires
existantes. Ce conseil, une fois formé, pourrait se mettre à la
tâche et entreprendre l'établissement et l'exploitation de
certains services communs pour toutes les commissions scolaires de l'île.
Simultanément à cette action à l'échelle de
l'île, le conseil devrait inviter les commissions scolaires
situées sur un même territoire à constituer des
comités de travail, du genre des comités provisoires
proposés dans le bill 27. Ces comités pourraient, d'une part,
entreprendre un inventaire de leurs ressources et soumettre au Conseil leur
plan d'intégration et, d'autre part, amorcer des programmes d'action
commune dans leur territoire, programme qui cadrerait évidemment avec le
plan général établi par le conseil. Nous croyons que, pour
réaliser harmonieusement l'objectif de la commission scolaire
unifiée, le conseil scolaire devrait être chargé de
préparer et de soumettre au lieutenant-gouverneur en conseil, au plus
tard un an après sa création, un plan d'intégration
prévoyant l'entrée en fonction des nouvelles commissions
scolaires pour au plus tard le 1er juillet 1975. Nous croyons également
que dans ce processus d'intégration graduelle il ne faut pas exclure la
possibilité pour le conseil d'être amené à
reconsidérer la carte scolaire, tel que prévu actuellement dans
le projet de loi.
Au chapitre 3, nous traitons des droits et intérêts de nos
membres en regard des profonds changements qu'amènerait la
restructuration scolaire. Des changements aussi nombreux et aussi radicaux au
cours d'une période de transition relativement brève ne seront
pas sans faire naître chez tout le personnel impliqué de
sérieuses tensions requérant de chacun un fort degré de
tolérance à l'anxiété.
Pour éviter que ne se développent des mécanismes de
défense et une résistance au changement qui risqueraient de
compromettre le succès de cette vaste réorganisation des
structures, voici quelques-unes des conditions qui, à notre avis,
devraient être respectées. Certaines de ces conditions devraient
être garanties par des dispositions du projet de loi lui-même,
alors que les autres devraient faire partie de tout programme
d'intégration du personnel qui vise à respecter les droits des
personnes impliquées.
Ces conditions sont les suivantes: le projet de loi devrait garantir
encore plus clairement la sécurité d'emploi de tous les cadres;
deuxièmement, chacun devrait être assuré d'occuper soit des
fonctions identiques ou similaires à celles occupées
antérieurement, soit de se voir offrir de nouvelles fonctions qui
tiennent compte de ses goûts et aptitudes, de sa capacité de
réadaptation ou encore de son potentiel de développement.
Des cours de formation et de recyclage et des occasions d'apprentissage
devraient faciliter l'adaptation de tous ceux affectés par des
changements de fonctions. Des mécanismes de revision devraient permettre
à tout cadre ou autre fonctionnaire de faire valoir son point de vue.
Des mécanismes de consultation avec des représentants des cadres
de chacun des groupes d'employés concernés devraient permettre de
développer une procédure appropriée pour le transfert et
la réaffectation des différentes catégories de
personnel.
L'élaboration du plan d'intégration devrait se faire avec
la participation active et dynamique des cadres impliqués. Enfin, les
nouvelles tâches, responsabilités ou fonctions devraient
être décrites aussi clairement que possible.
Chapitre 4. En cette section de notre mémoire, nous visons
à développer quelques thèmes qui ont trait à
d'autres préoccupations générales contenues dans le projet
de loi. Le premier thème touché est la démocratisation. La
démocratie ne se donne pas exclusivement à l'élection de
ceux à qui on confie des responsabilités. Il faut en plus que ces
personnes élues soient munies de véritables pouvoirs qu'elles
doivent exercer sans les ingérences ou' des contrôles excessifs. A
cet égard, nous croyons que le système scolaire
montréalais ne pourrait être qualifié de
démocratique que si l'on procède à une véritable
délégation de pouvoirs permettant à chaque organisme
d'exercer pleinement ses responsabilités.
En regard de la démocratisation, nous voudrions souligner un
point particulier au sujet de la représentativité des membres
provisoires du conseil. Nous croyons que ces treize membres devraient
être désignés par et parmi les commissaires des commissions
scolaires existantes et non par le gouvernement. Un tableau à la page 35
résume notre position sur ce sujet.
Deuxième thème: toucher dans ses préoccupations
générales les contrôles gouvernementaux. Nous formulons de
sérieuses réserves quant aux nombreux contrôles
gouvernementaux prévus dans le texte de loi. Nous les formulons parce
que certaines autres interventions touchent directement les opérations
courantes du conseil et des commissions scolaires.
Un manque de latitude dans l'exercice des pouvoirs risque de paralyser
le fonctionnement du système et d'inhiber les énergies mises en
place.
Le troisième thème: la confessionnalité. Nous
souscrivons entièrement à l'établissement de structures
administratives non confessionnelles. Nous reconnaissons également le
bien-fondé
d'offrir au milieu scolaire certaines garanties confessionnelles qui
assureront le respect des diverses options religieuses. Cependant, nous sommes
portés à croire que la population serait prête à
accepter des écoles non étiquetées sur le plan
confessionnel, mais qui toutefois respecteraient les options religieuses de
chaque individu. A cet égard, nous recommandons aux législateurs
de prévoir dans la loi, dans la mesure où ils se seraient
assurés que la population le désire, une possibilité de
regrouper les enfants selon la langue, dans des écoles
multiconfessionnelles.
Un dernier thème touché: le rôle du conseil en
matière pédagogique.
Nous croyons qu'un conseil scolaire qui constitue un palier
intermédiaire entre le ministère et les commissions scolaires
devrait exercer dans certains domaines pédagogiques un rôle de
planification, de coordination et de service pour les commissions scolaires.
Nous songeons entre autres à la recherche pédagogique
appliquée, dont les expertises pourraient être faites en
collaboration avec les commissions scolaires, à l'éducation de
l'enfance inadaptée dont les besoins divers nécessitent une
variété de services hautement qualifiés, enfin, à
l'éducation permanente, afin de permettre une meilleure planification et
utilisation des ressources pour une certaine clientèle adulte.
Dans le chapitre 5, nous regroupons nos recommandations et les
amendements proposés. Ce chapitre pourrait être
considéré comme un résumé technique des quarante
premières pages de notre mémoire. Je vous remercie.
M. LE PRESIDENT: La parole est au député de Bagot.
M. CARDINAL: M. Portugais, d'abord, je me permettrais de vous
féliciter de la sérénité avec laquelle vous avez
présenté ce mémoire, ça nous repose en commission
et vous l'avez résumé, ce qui est aussi intéressant. Comme
je le mentionnais aussi tantôt, à la page 41 et aux pages
suivantes, nous pouvons voir dans la réalité l'esprit
général de vos recommandations. Il y a cependant une question que
je voudrais poser. Est-ce que nous devons comprendre que parce que vous semblez
croire, si je me trompe, vous me corrigerez que le projet de loi
28, s'il était adopté dans son état actuel,
établirait un état de fait et un état de droit en
matière linguistique, il vaudrait mieux attendre que la Commission
Gendron ait produit son rapport avant de réaliser la restructuration
scolaire sur l'île de Montréal.
M. PORTUGAIS: Non, ce n'est pas là notre avis.
M. CARDINAL: Cela ne va pas aussi loin que ça.
M. PORTUGAIS: Nous disons qu'il faudrait prendre le temps d'installer
à Montréal un système unifié et ce temps qu'on
prendrait permettrait au gouvernement en même temps d'établir une
politique de la langue. On considère que ça pourrait être
fait en même temps.
M. CARDINAL: Merci, M. Portugais.
M. CHARRON: A votre avis, M. Portugais, l'actuel bill 28 rend bilingue
la structure, si elle n'est pas accompagnée d'une politique de la langue
propre, comme vous le suggérez dans votre mémoire. Si le bill 28
est appliqué tel quel, la structure serait bilingue.
M. PORTUGAIS: C'est une question à laquelle on ne peut pas
répondre, à notre avis.
M. CHARRON: Est-ce que votre association a abordé la question
dans le fait que l'unification veut dire que vous aurez vous, actuellement
à l'emploi du secteur francophone de la CECM, désormais à
répondre à des citoyens de langue anglaise à qui on
reconnaît le droit de s'adresser en langue anglaise, donc
forcément, si votre métier ne vous obligeait pas à
être bilingues, peut-être devrez-vous l'être maintenant?
M. PORTUGAIS: Je n'ai pas compris le projet de loi dans ce
sens-là. Nous avons évité de traiter de façon
très directe le projet de la langue parce que nous ne voulions pas que
le débat sur le projet de loi 28 se fasse sur la langue. Nous sommes
prêts ici à annoncer que, s'il y avait une loi, une politique de
la langue, notre association devrait à ce moment là intervenir et
donner sa position sur cette politique. Or, nous ne voulions pas que le
débat sur le projet de loi 28 devienne un débat linguistique.
M. SAINT-PIERRE: Pour continuer sur les territoires scolaires, je l'ai
dit encore ce midi, il n'y a rien de parfait sur le nombre de commissions
scolaires ni sur le territoire, est-ce qu'il vous semble à vous, compte
tenu de facteurs à la fois pédagogiques et administratifs, que la
grandeur moyenne de nos commissions scolaires, sans être un chiffre
magique, c'est quand même d'un ordre de grandeur tel qu'elle permet une
véritable vie sur le plan administratif et pédagogique?
En d'autres termes, est-ce qu'il vous semble qu'on doit absolument
tendre à réduire le nombre des commissions scolaires et, au lieu
d'en avoir onze, d'en avoir sept, ou si, au contraire, d'après vous, il
faudrait augmenter ou si le problème se situe plus de tenter de
corriger, de donner plus de latitude au conseil scolaire, de corriger les
frontières des onze mais de rester avec le nombre onze, le nombre dix
dans le projet de loi pour éviter après ça
puisqu'on le conçoit au niveau de la représentativité des
différents groupes que ça puisse être un
débat interminable?
M. PORTUGAIS: Ce que nous disons, c'est qu'on ne devrait pas être
relié à la carte actuelle. Nous sommes d'autant plus à
l'aise de le dire parce que c'est du personnel de nos membres qui ont
élaboré cette carte. Nous ne devrions pas être liés
parce que, quand même, elle est faite depuis 1967, cette carte, et que si
des regroupements, sans être des regroupements volontaires,
s'avéraient fructueux, le conseil scolaire devrait présider
à cette réorganisation-là, pour autant que ça
respecte la logique de l'ensemble. C'est dans ce sens-là que nous disons
que nous ne devrions pas être liés à la carte. Mais je
pense que, s'il y avait une tendance à faire, ça devrait
être dans la diminution des commissions scolaires, dans le nombre, afin
de permettre aux minorités l'assurance d'un enseignement de
qualité égale et c'est ce qui nous fait craindre autant d'un
côté que de l'autre.
M. SAINT-PIERRE: Vous dites que, dans les comités
d'écoles, il y aurait peut-être lieu d'accroître la
proportion d'enseignants et de donner le vote à ces derniers. Est-ce
qu'il ne vous semble pas que la voix des parents risque d'être
mitigée, et je m'explique pas pour établir un
conflit mais est-ce que les enseignants comme tels, soit par les syndicats ou
soit par des comités de régie ou d'autres formes ou les
principaux eux-mêmes, n'ont pas des voix pour exprimer leur point de vue?
Est-ce qu'il n'y a pas lieu de laisser aux parents, bien qu'il y ait les
mécanismes nécessaires d'information, toute la latitude pour eux
d'exprimer leur point de vue, compte tenu qu'eux n'ont pas d'autre voix que le
comité d'école pour exprimer ce qu'ils pensent?
M. PORTUGAIS: D'une part, sur le nombre des représentants des
instituteurs, d'abord à Montréal, nous avons des
écoles avec quinze professeurs et d'autres avec 200 on
considère que le nombre devrait peut-être permettre plus de
représentativité dans le comité d'école. Du
côté du vote, je pense que ça pourrait permettre aux
professeurs de se sentir vraiment participants au comité. Si on lui
enlève le droit de vote, peut-être qu'on enlève là
tout son intérêt à la participation.
M. SAINT-PIERRE: Est-ce qu'on ne risque pas qu'un des partenaires dans
le domaine de l'éducation ait finalement deux mécanismes,
c'est-à-dire qu'il a un syndicat qui peut formuler des griefs, demander
des changements, qu'il peut participer au sein d'un comité de
régie interne et qu'au même moment, le soir, il peut se rendre
avec des parents et influencer une autre voix? On prend des risques,
finalement, les parents ne se sentent pas manipulés mais se sentent
devant des gens qui ont tellement plus d'informations qu'eux, un peu pris et
peut-être pas capables d'exprimer leur point de vue, puisque le
rôle de l'enseignant dans le comité d'école était
plutôt d'amener de l'information et d'avoir quelqu'un qui peut
répondre aux questions sans pour autant...
M. PORTUGAIS: Mais ces comités de parents demeurent quand
même des comités consultatifs.
M. SAINT-PIERRE: Je reprends donc ma question. Est-ce que le concept des
parents-maîtres vous semble préférable à un
comité d'école formé exclusivement de parents?
M. PORTUGAIS: Le concept des parents-maîtres nous semble
préférable afin d'avoir vraiment un interéchange entre les
deux parties.
M. CARDINAL: M. le Président, à propos de cette question,
la question du ministre de l'Education est intéressante mais je ne veux
certainement pas lui imputer des idées qu'il n'a pas exprimées
d'une façon explicite. Si je ne me trompe pas, à midi même,
en parlant devant des gens, il a évoqué le fait qu'il
espérait que la bonne foi de toutes les parties
intéressées permettrait la réalisation concrète du
projet de loi 28. Est-ce que sa question ne laisse pas entendre qu'il y a quand
même des craintes, non pas du côté de la bonne foi, mais du
côté du rôle d'une des parties importantes du système
d'éducation que forment les enseignants?
M. SAINT-PIERRE: Je pense qu'on va sûrement tenter d'amoindrir des
craintes qui auraient pu exister. Je sais que la communication, compte tenu de
certains facteurs historiques des dernières années, est assez
difficile mais c'est une des tâches où j'aimerais tenter
d'englober de nouvelles avenues. Des associations de parents, à
l'expérience particulièrement des ateliers pédagogiques,
ont eu l'impression, dans quelques cas, non pas d'être manipulées,
mais de ne pas avoir une association qui leur appartenait puisque d'autres
partenaires, à savoir les enseignants, avaient beaucoup plus de
renseignements, étaient beaucoup plus familiers avec les
problèmes. Tout à coup, la réunion prenait la forme
où un jargon nouveau était utilisé, les parents se
sentaient alors perdus. Je conçois, par contre, que lorsque les parents
sont très éclairés, il y a peut-être un avantage
à y avoir une espèce d'équilibre, l'option
parents-maîtres qui, particulièrement du côté
anglophone, a joué beaucoup et qui permet peut-être...
M. CHARRON: Si vous le permettez, M. le ministre, la solution
réside peut-être dans ce que le rapport Parent avait abordé
lui-même, c'est-à-dire de laisser ouvert le comité
d'école à qui que ce soit on peut toujours le limiter
en laissant l'électorat aux parents, c'est-à-dire que ce
sont les parents eux-mêmes qui pourraient décider
d'intégrer tel ou tel enseignant à leur comité pour
justement apporter la lumière sans leur donner une place, de fait, comme
le
demande l'association mais parce que les parents eux-mêmes ont
peut-être besoin d'impliquer le directeur des services
pédagogiques de l'école à leur comité pour qu'ils
puissent travailler ensemble, mais leur laisser le choix tel que le disait le
rapport Parent.
M. CARDINAL: La question est intéressante et importante. Il va
certainement se produire des comités où les enseignants sont en
même temps parents et ils pourraient être membres du comité.
Il ne faudrait pas que l'on parte d'un texte juridique je reviens aussi
sur quelque chose que le ministre a souligné aujourd'hui en parlant des
articles de la loi et que l'on croit qu'il y ait des exclusions, parce
qu'on parle de parents. Des parents, cela peut être des cadres scolaires
aussi, cela peut être des enseignants, cela peut être le
principal...
M. CHARRON: Cela peut être des étudiants aussi.
M. CARDINAL: ... mais il est à craindre je suis d'accord
avec le député de Saint-Jacques que parce qu'on parle de
parents, on croit que de prime abord, il faille exclure tout parent qui aurait
déjà un rôle dans le système d'éducation
tandis que si, au contraire, le texte de loi est corrigé et indique
clairement l'objectif de participation, alors cette crainte
disparaîtrait.
M. CHARRON: M. le Président.
M. LE PRESIDENT: La parole est au député de
Chicoutimi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que c'était sur le même
sujet?
M. CHARRON: Non.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Portugais, tout à l'heure, vous avez
indiqué que votre organisme n'avait pas l'intention de mélanger
des questions et de faire porter l'accent de l'examen de ce projet sur la
question de la langue. Il arrive toutefois que des organismes ont comparu
devant nous et ont formulé des propositions précises sur cette
question de la langue, notamment l'instauration de l'unilinguisme dans toute
l'administration de cette grande structure scolaire unifiée.
Unilinguisme également, et j'entends par là unilinguisme
français, dans les écoles. Je ne veux évidemment pas vous
entrafner sur un terrain que vous n'avez pas choisi et que vous avez
temporairement écarté, mais il me paraîtrait utile d'avoir
votre avis sur cette proposition, par exemple, de l'unilinguisme dans
l'administration et, d'autre part, l'unilinguisme dans les écoles, comme
cela nous a été demandé par au moins trois organismes qui
ont comparu devant nous.
M. PORTUGAIS: A notre avis, le système scolaire ne devrait pas
être une panacée quant au problème linguistique. Il y a
d'autres mesures qui devraient accompagner une réorganisation, une
restructuration scolaire. Cette restructuration scolaire sur l'île de
Montréal devrait être accompagnée d'une politique de la
langue. Dans une partie de notre mémoire, nous sommes portés
à croire qu'on est prêt à regrouper les
élèves dans des écoles selon la langue plutôt que
selon la confessionnalité. Cela indique bien notre point de vue
là-dessus.
Au niveau de l'administration, nous avons préféré
ne pas toucher à cet aspect, quitte à y revenir dans un
débat par une proposition d'une législation sur une politique de
la langue.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Mais si, M. Portugais, le gouvernement allait,
par hypothèse, donner suite à certaines recommandations qui ont
été faites, que ce soit dans un sens ou dans l'autre, vous
regretteriez peut-être de ne pas avoir fait connaître votre opinion
à ce stade-ci de l'étude du projet de loi.
M. PORTUGAIS: Le point de départ c'est, d'après nous, que
la politique de la langue devrait mettre en évidence le français
prioritaire.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le français prioritaire, non pas
l'unilinguisme.
M. PORTUGAIS: Non.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, su sujet de la confession
religieuse, est-ce que vous pourriez expliciter un peu plus votre attitude
là-dessus? On a dit du projet de loi qu'il faisait disparaître
l'école confessionnelle, d'autres prétendent le contraire, enfin
nous avons entendu divers témoignages ici. Quelle est l'opinion de votre
groupement à ce sujet? Vous avez parlé tout à l'heure
d'écoles multiconfessionnelles, mais en pratique, de façon
précise, qu'est-ce que cela veut dire?
M. PORTUGAIS: Dans la présentation que je vous ai faite au
début, j'ai indiqué que l'étude du projet de loi
s'était faite par comités d'étude. L'option de base du
projet de loi s'est faite en assemblée générale. Il y
avait un comité d'étude sur la confessionnalité. Le
résultat de ce comité d'étude a été la
tendance qui est indiquée dans notre mémoire.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): D'accord. Merci, M. Portugais.
M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Jacques.
M. CHARRON: M. Portugais...
M. PORTUGAIS: En passant peut-être, dans ce comité
d'étude sur la confessionnalité plus
de la moitié des membres étaient des personnes de notre
service de pastorale.
Donc, ce n'était pas pour nous un comité prévu
à l'avance qui s'orientait dans cette option-là.
M. CHARRON: M. Portugais, vous me permettrez de revenir, non pas parce
que pour moi, je ne sais et je ne veux parler que de ça, sur le
problème de la langue. Parce que, tout en étant d'accord avec
vous d'une première mesure qui devrait accompagner la loi 28, c'est le
retrait de la loi 63, etc. Ce n'est pas dans les structures scolaires que l'on
règle le problème de la langue.
C'est en tant qu'administrateur scolaire que vous êtes, que je
reviens sur le problème. Vous allez avoir à vivre dans une
structure unifiée. Je dois vous dire que je ne suis pas satisfait de la
réponse que vous m'avez donnée tantôt.
Comment voyez-vous fonctionner cette structure-là sur le plan de
la langue de travail, sur le plan du respect fondamental, à la fois des
cadres anglophones qui sont déjà dans les structures scolaires
anglophones et les vôtres? En fait, toute la réussite de ce que
l'on craint est un fouillis administratif.
Les commissions scolaires unifiées vont reposer sur la
façon dont vous les administrateurs scolaires, allez être capables
de supporter le fardeau du défi que l'on vous demande.
Comme le disait le député de Chicoutimi, tout à
l'heure, il y a des gens qui sont venus témoigner ici à la
commission pour dire: Je cherche un autre mot que "bordel" mais, je n'ai que
celui-là dans la tête. Ça va être le capharnaüm.
Et, cela ne sera pas tenable comme maison.
M. SAINT-PIERRE: Le député de Saint-Jacques me permettra.
Il y a des gens qui nous ont dit: C'est un problème qui n'en est pas un.
La commission scolaire unifiée, lorsqu'on parle de la coexistence de
deux groupes linguistiques, à l'intérieur d'une commission
scolaire, ce n'est pas nouveau. Cela existe sur l'île de Montréal
du côté catholique, de l'est à l'ouest de l'île. Dans
des cas ce sont des francophones qui sont en majorité, dans d'autres cas
ce sont les anglophones qui sont en majorité, et à ce que je
sache, il n'y a pas de problème.
M. CHARRON: C'est d'accord.
M. SAINT-PIERRE: Et plus que ça il n'y a aucune garantie dans la
loi. Alors, avec notre législation actuelle, les gens l'ont
réglé peut-être d'une façon différente, mais
ils ont réglé le problème.
M. CHARRON: C'est ça, vous venez de nous donner l'exemple de la
CECM où M. Portugais est peut-être le mieux placé que nous
tous.
M. SAINT-PIERRE: La CECM est différente...
M. CHARRON: Pour nous donner l'exemple qu'a donné
monseigneur...
M. SAINT-PIERRE: Il s'est établi quand même des structures
très différentes à la CECM et dans d'autres commissions
scolaires elles n'existaient pas. Il ne faudrait pas penser que le projet de
loi no 28 tend de recopier la CECM. Je l'ai déclaré à
plusieurs reprises, autant qu'il y a des protections sur des postes clefs, pour
m'assurer qu'il y a une présence au moins de la minorité
linguistique. Il n'est pas question d'avoir des structures divisées au
niveau des programmes ou du personnel. C'est une structure unifiée comme
on a, par exemple, à la Commission scolaire de Saint-Laurent qui, elle,
est une structure unifiée et qui, elle, je pense, a une majorité
anglophone.
Lorsqu'on va à Baldwin-Cartier, je pense...
M. CHARRON: Eux étaient bilingues. M. SAINT-PIERRE: La
régionale...
M. CHARRON: Ils nous ont dit que l'administration l'était. Ils
ont dit que pour eux ce n'était pas un problème d'unifier les
commissions scolaires, parce que de toute façon ils desservaient une
clientèle 50 50. C'est déjà fait.
Moi, je veux savoir si, d'après Baldwin-Cartier, ici on va
répéter à onze endroits leur expérience
personnelle, comment les administrateurs scolaires francophones de
Montréal envisagent l'expérience.
M. PORTUGAIS: A notre avis, on ne sait pas comment ça va se
passer, si la loi est sanctionnée telle qu'elle est. Nous disons qu'elle
ne devait pas être sanctionnée telle qu'elle est. On devrait
prendre plus de temps, pour en même temps établir une politique de
la langue qui nous permettrait de savoir comment ça va se passer.
La politique de la langue devrait être
décrétée dans le système scolaire.
M. SAINT-PIERRE: S'il n'y avait pas de...
M. PORTUGAIS: Je ne peux pas répondre à votre question,
parce que nous ne sommes pas d'accord sur le projet tel que
présenté. On dit que c'est trop rapide. Il manque trop
d'arguments et trop d'éléments pour constituer le
casse-tête.
M. CHARRON: Je vais faire avec vous la même chose et je vais vous
poser la même question que je pose toujours aux témoins qui
viennent nous dire: Il y a ceci et cela. Moi, je vous dis que, si on refuse de
donner plus de temps, jusqu'au 1er juillet 1975, au conseil provisoire pour
préparer et si le gouvernement ne fait pas la politique
linguistique...
M. PORTUGAIS: Moi, je vous réponds...
M. CHARRON: Cela fait cinq ans qu'on la demande...
M. PORTUGAIS: Je vous réponds très simplement: Cela va
être le fouillis.
M. CHARRON: Cela va être le fouillis...
M. PORTUGAIS: A notre avis, ce sera le fouillis.
M. CHARRON: Votre mémoire touche plusieurs sujets mais il ne
parle pas de l'article des adjoints ou alors je ne l'ai pas vu, peut-être
que je me trompe...
M. PORTUGAIS: ...Non, nous n'en avons pas fait une étude
spécifique.
M. CHARRON: Moi, je vous la demande. Des témoins sont venus dire
à la commission, ici, je dois vous dire que c'est ma croyance
aussi que le fait qu'on consacre une fonction publique parallèle
pour la minorité, ça va être l'expérience de la
CECM, que vous connaissez, c'est-à-dire, qui fonctionne
indépendamment de votre secteur francophone, selon votre
expérience, en tant qu'administrateur scolaire, est-ce que c'est
ça qui va se passer, oui ou non?
M. PORTUGAIS: Je ne répondrai pas en donnant l'avis de
l'association, si vous voulez une réponse personnelle, je pense que le
danger pourrait être de former des réseaux parallèles.
M. CHARRON: Voulez-vous me dire, je ne veux pas entrer dans le secret
des dieux...
M. PORTUGAIS: C'est une réponse personnelle.
M. CHARRON: ...pourquoi le mémoire de votre association, pas vous
personnellement, est muet sur cette dimension administrative du projet de
loi?
M. PORTUGAIS: Nous sommes peut-être mal placés pour le
dire. Nous nous étions proposés de prendre beaucoup plus de
temps. Notre mémoire date du 29 septembre. Nous avons été
convoqués le 29 et le 30 septembre, puis le 20 et le 21 octobre et nous
revenons aujourd'hui.
M. CHARRON: Vous "poireautez."
M. PORTUGAIS: Nous l'avons préparé à la vapeur,
mais il y a bien des sujets que nous aurions aimé discuter davantage au
sein des comités d'étude. C'est un des sujets que nous aurions
aimé discuter. Nous n'en avons pas repris parce que vous savez que
lorsqu'on donne...
M. CARDINAL: Est-ce que je peux vous interrompre, M. Portugais, est-ce
que vous n'êtes pas justement l'association qui a envoyé un
télégramme au ministre pour que les séances de la
commission ne débutent qu'à la mi-octobre.
M. PORTUGAIS: C'est ça! C'est notre association. C'est le manque
de temps qui nous a permis de toucher à des points, peut-être, que
l'on considère moins importants mais quand même essentiels.
M. CHARRON: M. Portugais, une dernière question, si le
Président le permet. Le témoin dont j'ignore le nom, je ne me le
rappelle plus, qui est venu témoigner au nom de la commission
régionale Baldwin-Cartier, commission scolaire bilingue, M. St-Pierre,
nous a dit que c'était une condition de promotion à peu
près, pas seulement à peu près mais effectivement à
l'intérieur de la commission scolaire, le fait d'être bilingue, ne
croyez-vous pas que l'expérience se répétera
désormais à onze échelons sur l'île de
Montréal...
M. PORTUGAIS: Si...
M. CHARRON: ...y compris le conseil scolaire aussi, douzième
échelon?
M. PORTUGAIS: ... on sanctionne le projet de loi tel qu'il est
actuellement, le danger que vous soulevez existe.
M. CHARRON: Merci.
M. PICARD: Monsieur, est-ce que votre mémoire, de même que
les propos que vous avez tenus tantôt établissent, hors de tout
doute, que vous admettez avec nous que le bill 28 est un bill qui touche les
structures administratives surtout et presque exclusivement?
M. PORTUGAIS: Nous l'avons signalé dès la
présentation.
M. PICARD: Alors, comment se fait-il que vous dites, comme vous l'avez
fait tantôt, qu'il sera préférable d'attendre le rapport
Gendron qui touchera plutôt, à mon avis, le côté
pédagogique?
M. PORTUGAIS: Nous n'avons pas dit qu'il fallait attendre le rapport
Gendron, on a dit que cela touche la réforme d'abord administrative.
Nous sommes de cet avis-là.
M. PICARD: Exclusivement administrative, il n'y a rien, rien sur le plan
pédagogique dans ce bill-là.
M. PORTUGAIS: Si on touche à l'administration, pourquoi
l'administration est-elle là sinon comme soutien puis comme conseil
des
écoles qui existent? Si on bouscule et si on bouleverse une
administration scolaire, nécessairement et inévitablement, cela
va rebondir au niveau de l'école. C'est dans ce sens-là.
Autrement, on n'a pas de raison d'être comme cadre et professionnel d'une
commission scolaire, si on n'est pas là comme personne de ressources et
comme personne de soutien.
M. CHARRON: Le député d'Olier notera que la question que
je posais quant à la langue portait sur l'administration de la structure
scolaire.
Je suis bien d'accord avec lui pour dire que le projet de loi touche les
structures administratives. Ce sont eux les fonctionnaires de la structure, et
je me demande si on ne leur impose pas désormais une condition, soit le
bilinguisme, pour la promotion qui n'existe pas actuellement. Parce que je ne
crois pas qu'à l'intérieur du secteur francophone de la CECM, ce
soit une condition d'avancement pour atteindre les cadres que ces messieurs et
dames occupent que de parler anglais. Dans les structures scolaires
unifiées, puisqu'on reconnaîtra à chacun le droit de
s'adresser en anglais à tous les niveaux de la structure, à
partir de l'école jusqu'au conseil scolaire, il est évident que
les cadres supérieurs que ces messieurs représentent devront
désormais être bilingues. Cela apporte, vous me direz, un
impératif de plus pour les anglophones qui, probablement, dans la
structure anglaise actuelle, ne parlent pas le français. Ils devront
l'apprendre. Mais ça oblige aussi, contrairement à une politique
si longtemps annoncée de la part du gouvernement, que la langue de
travail dans ce secteur, qui était le français, deviendra
désormais l'anglais et le français.
M. PICARD : Vos craintes sont basées surtout sur le plan
théorique. En théorie, ce sera cela. Mais dans la pratique...
M. CHARRON: C'est une expérience pratique qu'il vient de me
donner.
M. PICARD: ... de tous les jours, je ne vois pas comment...
M. CHARRON: Il y a une expérience pratique qui se fait à
Montréal dans ce domaine, c'est l'expérience de Baldwin-Cartier
et le témoin, président de la commission scolaire là-bas,
est venu nous dire lui-même que c'était ça chez lui. Il a
dit: Chez-nous, ce n'est pas un problème, le projet de loi no 28 y est
déjà. Alors, nous demandons: Comment est-ce que ça va chez
vous, maintenant que c'est unifié? Il dit: Tout le monde est bilingue
dans la structure scolaire. Est-ce que c'est une structure d'avancement? Il
nous dit oui et du même souffle, il nous dit que c'est même cela
qui va être répété à onze niveaux dans la
commission scolaire. On va toujours bien le savoir.
Avec le projet de loi, au point de vue de la langue de travail, on fait
ceci: dans les domaines où l'anglais était la langue de travail,
dans une structure où le français était la langue de
travail, en les unifiant, on oblige à parler les deux langues dans la
structure scolaire.
M. PICARD: Il n'est pas question dans le projet de loi no 28...
M. SAINT-PIERRE: Il ne faut pas exagérer. Si on prend le cas de
la CECM je m'excuse il y a une composante. Parce que dans votre
cas, vous tentez d'amplifier le rôle des protestants. On le sait, il y a
moins d'étudiants protestants sur l'île de Montréal qu'il y
a d'anglophones catholiques. Or, le secteur anglophone catholique à
l'intérieur de la CECM, que fait-il dans le moment? Il n'y a absolument
rien dans la loi. Il y a des anglophones qui vont à des commissions, il
y a une situation de fait que le projet de loi no 28 ni n'aggrave ni ne
résout. Et je répète ce que j'ai déjà dit:
Il me semble illogique de tenter de nous faire prendre des décisions
avant que nous ayons au moins terminé un travail de recherche, compte
tenu que ce travail de recherche a été amorcé, que nous
espérons avoir les résultats le plus rapidement possible et que,
pour la première fois dans cent ans, dans ce secteur, nous avons voulu
investir $3 millions pour savoir où nous devions aller.
M. PORTUGAIS: M. le Président, est-ce que vous permettez à
M. Dubé de s'exprimer?
M. LE PRESIDENT: Allez.
M. DUBE: On a soulevé la question suivante: Dans la pratique,
qu'est-ce qui arrive? Au niveau de la CECM, on peut dire que, dans la pratique,
nous sommes obligés d'être bilingues mais que, dans la
véritable pratique, nous n'avons pas besoin d'être bilingues parce
qu'il n'y a pas de contact. Ce sont deux réseaux parallèles. Mais
nous prévoyons, pour une grande part des cadres, que les adjoints
recréeront la situation de la CECM contrairement à ce que
Baldwin-Cartier a dit ici. Pour nous, c'est un fait, nous ne communiquons pas
ou presque pas et j'insiste davantage sur le "pas" entre les deux
réseaux parallèles de la CECM. Et ça, depuis des
années et des années.
M. LE PRESIDENT: La parole est au député de
Dorchester.
M. GUAY: Dans votre recommandation numéro 11, je pense que vous
l'avez formulée dans ce sens, le bilinguisme peut être à
l'intérieur des cadres, tel que vous le prévoyez, quand vous
dites: "Nous recommandons que des programmes d'information, de formation et de
recyclage soient organisés pour permettre à tous les cadres,
fonctionnaires et autres employés affec-
tés à de nouvelles tâches, de mieux s'adapter aux
conditions nouvelles de leurs fonctions".
C'est sans doute là que vous prévoyez quand même un
changement, un changement qui semble assez important, qui existe
peut-être déjà mais qui devra, à l'intérieur
des cadres mentionnés, faire l'objet d'un bilinguisme...
M. PORTUGAIS: Non, cette proposition n'est pas reliée à un
bilinguisme possible des commissions scolaires. Cette proposition est
reliée au fait que des cadres vont avoir dans leur restructuration
à changer de fonctions, à changer de définition de
tâches. Puis, on dit que, si on doit bousculer les personnes, on devrait
leur offrir des cours de ce qu'on appelle "Service Training", des cours de
conditionnement dans le nouvel emploi. Cela nous apparaît comme une
condition et c'est important pour nous, parce que nous représentons nos
membres qui sont les cadres. Il n'est pas exclu que la langue pourrait
être une des dimensions. Nous ne songions pas nécessairement
à cette optique.
M. BROCHU: Si je comprends bien, à ce moment-là, c'est
peut-être une des raisons principales qui vous font insister dans votre
mémoire sur le fait de la mise en application graduelle de la
restructuration de l'île de Montréal.
M. PORTGAIS: Absolument, c'est à cause de tout le problème
que vous soulevez autour de cette table que nous disons, comme cadres de la
CECM et comme cadres d'une importante commission scolaire, que nous ne sommes
pas prêts actuellement à légiférer et à
entrer, à nous orienter rapidement vers un système scolaire
unifié. A cause de tout ça, c'est ce que l'on vous signale. C'est
un élément important de notre mémoire.
M. BROCHU: J'ai une autre question, si vous permettez. A ce
moment-là, les implications pédagogiques, dans votre conception,
sont plus indirectes que directes. C'est-à-dire que les implications
pédagogiques se retrouveraient au niveau du phénomène
"d'habituation", si on peut parler ainsi, du personnel d'abord, et les
conséquences, au niveau pédagogique, pourraient venir des
difficultés qui pourraient exister à ce niveau, si la mise en
application se fait tout d'un bloc, et non pas directement au point de vue
pédagogique comme tel...
M. PORTUGAIS: Nous sommes dans un système scolaire, donc nous
sommes dans un système pédagogique. A tous les niveaux: au niveau
du ministère, au niveau du conseil de l'île, au niveau des
commissions scolaires, nous avons un rôle à jouer. Nous aimerions
que ce rôle, chacun le joue de la meilleure façon. Au
ministère, si on se veut un véritable ministère moderne,
qui exerce un rôle de leadership, on doit se limiter à des
programmes-cadres. Au niveau du conseil scolaire, on devrait là
planifier des choses, alors qu'au niveau des commissions scolaires, on devrait
orienter et organiser l'enseignement. Si chacun joue bien son rôle,
chacun peut être très fort aux trois paliers. Il n'y a pas de
paradoxe dans cette position. C'est pourquoi on recommande un conseil
relativement fort, que nous voyons comme une véritable autorité
scolaire métropolitaine. A notre avis, il n'y a pas de paradoxe entre
une véritable autorité scolaire métropolitaine au niveau
du conseil et des commissions scolaires qui joueraient pleinement leur
rôle et qui seraient fortes. Chacun joue le rôle qui lui revient.
Et le ministère devrait lui aussi jouer son rôle.
M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Laurent.
M. PEARSON: M. Portugais, quand vous avez parlé tantôt de
français prioritaire, est-ce que, dans votre esprit, cela voudrait dire
que vous iriez jusqu'à dire, par exemple, que le gouvernement devrait
établir que les communications à l'intérieur du conseil
soient faites en français, comme cela existe à l'intérieur
de certains ministères ou de certains services du gouvernement: Est-ce
que, dans votre esprit, c'est cela?
M. PORTUGAIS: Dans mon esprit, ça irait jusque là.
M. PEARSON: Cela irait jusque là.
M. LE PRESIDENT: Le député de Dorchester a demandé
la parole.
M. GUAY: J'aurais une autre question. M. Portugais, vous semblez avoir
une peur affreuse des contrôles gouvernementaux à
l'intérieur du système scolaire.
Vous avez souligné un danger de produire une bousculade. Est-ce
qu'un trop grand contrôle des gouvernements pourrait produire cette
bousculade que vous craignez justement?
M. PORTUGAIS: Les dangers ne sont pas au niveau de la bousculade mais au
niveau de l'action, s'il y a trop de contrôle, les gens qui sont dans des
positions d'agir, ne pourront plus agir.
M. GUAY: Cela signifie que votre rôle sera grandement amoindri si
l'état venait contrôler ce que vous mentionnez.
M. PORTUGAIS: Ce sont toutes les décisions importantes du conseil
qui doivent être soumises à l'approbation, c'est excessif.
M. GUAY: Cela vous empêcherait d'agir à ce moment-là
et de prendre les décisions.
M. PORTUGAIS: Vous avez raison.
M. SAINT-PIERRE: Pour soulager les craintes du député de
Dorchester, ce ne semble pas qu'une législation socialisante contre
l'école chrétienne.
M. PORTUGAIS: Absolument pas.
M. GUAY: Je remercie le ministre de la précision.
M. SAINT-PIERRE: Vu vos déclarations fracassantes de la fin de
semaine, je suis heureux de la participation au débat.
M. CHARRON: M. Portugais, selon les recommandations que vous faites
quant à la formation du conseil provisoire et à ses pouvoirs,
mais lorsque la structure sera permanente, lorsque l'on atteindra le conseil
scolaire, en 1975 selon votre mémoire, est-ce que vous accepteriez que
le conseil scolaire soit l'unique employeur?
M. PORTUGAIS: Nous n'en avons pas fait d'étude complète,
il y a des avantages et il y a des désavantages. Encore là, c'est
un avis personnel, je pense que peut-être il serait
préférable que les commissions scolaires soient les
employeurs.
M. CHARRON: Les employeurs.
M. PORTUGAIS: C'est un avis personnel.
M. LE PRESIDENT: Je remercie, M. Portugais, ceux et celles qui
l'accompagnent, de leur rapport. Soyez assurés que nous en prenons bonne
note.
M. PORTUGAIS: Merci.
M. LE PRESIDENT: On passe à présent à la Quebec
Association of School Administrators dont les porte-parole sont M. Stafford et
Miss Marksfield.
Quebec Association of School
Administrators
MLLE MARKSFIELD: M. le Président, M. le ministre, MM. les
députés, j'ai le plaisir de vous présenter mes
collègues, Miss Ann McClish, Vice-Principal, Riverdale High School; Mr.
James Patrick, Principal, Verdun High School and president of MASA; Mr. James
Haywood, Information Officer, Lakeshore School Board, Mr. William Stafford,
Executive Director, QASA. I am Sylvia Marksfield, Principal of Cartierville
School, école d'immersion.
L'association des administrateurs scolaires de Montréal et
l'Association des administrateurs scolaires de Lakeshore comptent ensemble un
total de membres desservant une population scolaire d'environ 70,000
élèves dans l'île de Montréal. Nos deux associations
sont conjointement les auteurs du présent mémoire. Nous
reconnaissons d'emblée la nécessité d'une
réorganisation des systèmes scolaires de l'île de
Montréal. Nous estimons qu'il est essentiel qu'un système moderne
d'éducation puisse fournir à chacun la possibilité
d'acquérir une éducation de même calibre et, pour ce faire,
nous sommes en faveur de l'uniformisation de l'évaluation
foncière et du taux de l'impôt. Par contre, nous ne pouvons
être d'accord sur la structure des organismes de l'éducation tels
qu'envisagés par le bill 28.
Si nous sommes en quelque sorte forcés à cette prise de
position, c'est que nous ne pouvons faillir à notre principe directeur
que tout système d'éducation doit en premier lieu être
capable de percevoir et de réagir aux besoins de la population qu'il est
censé servir; qu'il ne peut être imposé par une
autorité supérieure ou cogité dans des bureaux du
gouvernement, aussi éclairé et intelligent que puisse être
cette autorité supérieure ou le gouvernement.
Le meilleur système doit être mis sur pied pour convenir
à nos enfants et à nos écoles de sorte que la
planification de l'éducation doit partir de ce niveau.
En tant qu'administrateurs scolaires, nous nous rendons bien compte que
pendant trop longtemps nous avons essayé de forcer les gens à se
plier à des normes, qui, administrativement, faisaient notre affaire. Ce
dont il nous faut tous convenir maintenant, c'est de renverser la vapeur et
d'apprendre à créer des structures qui répondent aux
besoins de la population.
La conjoncture actuelle présente une occasion propice au
gouvernement du Québec et aux citoyens de Montréal de se
débarrasser des abus contraignants et des injustices flagrantes d'un
système désuet tout en oeuvrant pour l'élaboration d'un
nouveau.
Le présent exposé repose sur la profonde conviction que
cette occasion est trop précieuse pour qu'elle coure le risque
d'être gâchée ou tout au moins adultérée par
une législation précipitée.
Un nouveau système doit tout d'abord être implanté
selon les vrais besoins et les aspirations de la population. Ensuite, il doit
pouvoir, dans une atmosphère bienveillante, disposer d'un temps
suffisant pour s'étendre d'une manière logique, avec assez de
souplesse et d'ampleur pour permettre la population de Montréal dans son
ensemble de s'y épanouir. C'est seulement dans un tel système
qu'il sera possible de développer "l'homme nouveau du Québec",
celui qui, par sa formation éducative, pourra à la fois
être profondément au courant et fier à juste titre des
cultures française et anglaise dont il fait partie, tout en étant
conscient de son rôle dans la communauté humaine.
La composition provisoire du conseil de l'île de Montréal
tel que décrit dans le bill 28 section Il, article 9, est une structure
imposée et ne peut ainsi refléter les vrais besoins des
communautés de l'île de Montréal.
Nous désirons voir ce conseil désigné par le
suffrage populaire de toute la population adulte de Montréal, car, pour
nous, ce conseil fait face à la plus lourde des obligations et des
responsabilités, celle de créer une nouvelle structure de
l'éducation dans l'île de Montréal et celle de
déterminer les tâches respectives du conseil permanent de
l'île, des commissions et des comités scolaires.
Nous suggérons que des comités scolaires soient
formés dans chaque école et que tous les contribuables en
âge de voter puissent s'y porter candidats.
A partir de ces comités scolaires locaux, on pourrait
élire les groupes de comités régionaux et, à leur
tour, ces derniers pourraient élire le conseil provisoire de l'île
de Montréal.
Nous proposons que le conseil provisoire de l'île soit mis sur
pied de la manière suivante: a) que l'école secondaire et les
écoles élémentaires qui l'alimentent soient reconnues
comme unité éducative pour les élèves, les
professeurs et les parents, environ 3,000 étudiants; b)que, pour cette
unité éducative, des comités scolaires soient élus
et que tout contribuable en âge de voter puisse y être candidat ;
c) qu'il y ait treize régions, chacune composée de dix
unités éducatives 30,000 étudiants chaque
unité élirait alors un représentant à un conseil
régional, dix membres; d) que ces treize unités
régionales élisent deux représentants pour former le
conseil provisoire de l'île; e) que le président et le
vice-président soient élus par les membres du conseil provisoire
de l'île; f) que trois des membres de ce conseil soient nommés par
le lieutenant-gouverneur en conseil; g) que le comité exécutif
soit élu par le conseil parmi ses propres membres.
Le conseil provisoire ainsi créé aurait pour tâche
de formuler des recommandations au ministre sur tout ce qui a trait à la
réorganisation des structures de l'éducation dans l'île de
Montréal afin de pouvoir promulguer vers le 1er juillet 1974 toutes les
lois s'y rattachant. Ceci permettrait au conseil provisoire d'avoir
suffisamment de temps pour consulter les organismes de l'éducation
déjà existants ainsi que tous les groupes, les individus et le
gouvernement du Québec.
Le conseil pourrait alors faire connaître périodiquement
les progrès de ses activités aux citoyens et aux gouvernants.
Nous croyons fermement qu'un tel conseil émanant du peuple et
responsable devant lui peut fournir les meilleurs moyens possible à tous
les groupes religieux et ethniques de travailler en commun à la
création et au développement d'un système
d'éducation convenant à tous.
En tant qu'administrateurs scolaires, nous nous attendons à
être consultés par un tel conseil en tout ce qui touche aux
fonctions et aux aspects pratiques de la vie des écoles. Ainsi nous
pourrons nous joindre à tous les autres segments de notre
communauté dans la tâche de construire un Québec
nouveau.
Il y a un addendum. Nous désirons déclarer, M. le
Président, qu'à une réunion de notre association tenue
pour discuter ce mémoire, nos membres nous ont donné le mandat
d'énoncer fermement que nous sommes en faveur de commissions scolaires
basées sur la langue.
Merci.
M. SAINT-PIERRE: Merci, Mlle Marksfield. Est-ce que, dans votre
processus sur le conseil provisoire, vous n'auriez pas une crainte? Parce que,
si je comprends bien votre suggestion, on s'en remet pour les pouvoirs du
conseil provisoire du type de recommandations formulées sur un processus
qui n'est pas tellement dans nos moeurs au niveau des comités
d'école alors qu'on n'est pas certain de la participation des parents
à tous ces niveaux et que si ce sont ces treize personnes-là qui,
somme toute, pourraient décider pratiquement de tout ce qui
deviendra...
MLLE MARKSFIELD: Je m'excuse, M. le Ministre, mais personne vraiment n'a
une formation. Vous, MM. les députés et M. le ministre, est-ce
que vous avez eu une formation pour faire de la politique? Alors, ces gens qui
vont vouloir se poser comme candidats, ils vont faire leur devoir comme vous le
faites. Votre carrière n'était pas dans l'enseignement avant.
M. SAINT-PIERRE: Mais vous pensez qu'en laissant finalement à
treize personnes tous les pouvoirs...
MLLE MAKRSFIELD: C'est un chiffre arbitraire, M. le ministre, on dit
treize comme vous avez dit onze, alors on peut toujours arriver à une
réponse.
M. SAINT-PIERRE: Merci.
M. CARDINAL: M. le Président, je voudrais poser une question.
Votre association s'appelle The Quebec Association of School
Administrators.
MLLE MARKSFIELD: C'est ça.
M. CARDINAL: Vous représentez les administrateurs, enfin je le
devine, du secteur anglophone. Mais est-ce dans tout le Québec ou
particulièrement à Montréal?
MLLE MARKSFIELD: Non, c'est simplement à Montréal et au
Lakeshore, monsieur.
M. CARDINAL: D'accord, merci.
M. LE PRESIDENT: La parole est au député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. TETLEY: Après vous, vous êtes le représentant
d'un parti politique à la commission.
M. CHARRON: Merci, M. le ministre. Moi, c'est la dernière page
qui nous a été passée qui m'intéresse beaucoup.
MLLE MARKSFIELD: Je le savais.
M. CHARRON: Votre groupe demande des commissions scolaires basées
sur la langue. Moi, j'avais une série de questions à vous poser,
comme administrateurs scolaires, sur l'unification des commissions scolaires.
Comme je l'ai demandé aux messieurs de la CECM qui viennent de partir,
comment entrevoyez-vous ça? Maintenant, si ce n'est pas dans votre
mandat, est-ce que je dois croire que c'est comme administrateurs scolaires que
vous demandez des commissions scolaires basées sur la langue? Est-ce que
c'est parce que vous croyez qu'administrativement c'est impossible d'unifier
les commissions scolaires que vous en êtes rendus à cette
position?
MLLE MARKSFIELD: Oui, monsieur.
M. CHARRON: Maintenant, si le ministre, qui est parfois cruel,
décidait de ne pas donner suite à votre recommandation et tenait
ferme à son idée de faire l'unification des commissions
scolaires, est-ce que vous considérez comme garantie suffisante
l'article qui parle des adjoints représentant la minorité au
niveau de chacune des commissions scolaires? Est-ce que c'est suffisant pour
vous?
MLLE MARKSFIELD: M. Stafford, voudriez-vous répondre à
cette question?
M. STAFFORD: Quand je suis venu ici, il y a deux ans, au mois de
janvier, M. l'ancien ministre, un mémoire fut présenté par
la Montreal Association of School Administrators. Ce mémoire
d'aujourd'hui est présenté par deux de nos sections. La Quebec
Association of School Administrators comprend les administrateurs et
présidents de toute la province. Mais nos deux sections, la Montreal
Association of Administrators et la Lakeshore Association, présentent ce
mémoire. Quand j'étais ici représentant la Montreal
Association of Administrators il y a deux ans, une des observations que j'ai
faites était celle-ci: la seule nomination d'administrateurs de langue
française et anglaise, catholiques romains, protestants et autres
catholiques romains et protestants, n'assure pas en soi une protection
adéquate au groupe des minorités placées sous la
juridiction des commissions scolaires.
M. CHARRON: C'est votre réponse aussi à ce que stipule le
projet de loi no 28 là-dessus, parce que vous savez sans doute qu'il y a
des groupes francophones qui sont venus dire que c'était là une
précaution excessive. Or, vous, vous la jugez comme non suffisante pour
assurer les droits de la minorité. Mais là, est-ce que vous
parlez en tant qu'anglophone ou en tant qu'administrateur scolaire?
M. STAFFORD: Je dois revenir à une chose. Notre mémoire
d'aujourd'hui suggère qu'il y ait un comité, un conseil
provisoire de l'île qui irait au peuple de Montréal et arriverait
avec une décision à savoir quelle sorte d'entente nous voulons
avoir, quelle sorte de plan pour l'île de Montréal.
Si ce comité venait nous voir et nous demander quel type
d'organisation nous préférerions, pour le moment, nous dirions
des commissions basées sur la langue pour des raisons semblables
à celles que nous venons d'entendre de M. Portugais il y a quelques
minutes.
Nous ne sommes pas contre l'idée du ministre que nous devons
avoir un conseil de l'île unifié. Nous sommes entièrement
d'accord. Cela a du bon sens. Il est temps que nous ayons cela. Mais, nous
sommes convaincus que la culture, la langue sont transmises au niveau de
l'école par les administrateurs et les professeurs et que, le
deuxième niveau, la commission scolaire doit être aussi
basé sur la langue. Au niveau du conseil de l'île,
là c'est le moment où on doit avoir l'unification comme nous
l'avons maintenant au ministère. Cela marche. Le problème est que
ça marche...
UNE VOIX: Plus ou moins.
M. CHARRON: M. Stafford, si on adoptait le plan que vient de nous
suggérer...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! Il est six heures et nous
continuerons la période des questions après le souper.
La commission ajourne ses travaux à huit heures quinze.
Reprise de la séance à 20 h 21
M. SAINT-GERMAIN (président de la commission permanente de
l'Education): A l'ordre, messieurs!
Si vous voulez bien, nous allons commencer la séance. Je crois
que M. le ministre d'Etat a quelque chose à nous dire.
M. GOLDBLOOM: M. le Président, je regrette d'informer les membres
de la commission et surtout les témoins qui sont ici que le ministre de
l'Education doit s'absenter ce soir de façon imprévue. Il
s'excuse auprès de tout le monde. Il m'a prié de le remplacer et
il a prié la commission de continuer ses travaux.
M. CHARRON: Si vous me permettez. Si on continue avec les
témoins, je vais essayer de terminer mes questions.
M. LE PRESIDENT: Vous avez la parole.
M. CHARRON: En tenant compte de la suggestion faite par vos
prédécesseurs, c'est-à-dire les administrateurs scolaires
de la CECM, qui parlaient de prolonger le mandat du conseil provisoire de
façon à faciliter l'intégration ou l'unification du
secteur anglais et du secteur français, est-ce que l'opposition que vous
faites, à la dernière page de votre mémoire, à
l'unification des commissions scolaires pourrait s'éteindre ou
disparraître? Je m'explique ; vous avez compris? C'est bien.
M. PATRICK: M. le Président, mon français n'est pas
bon.
M. CHARRON: Le mien non plus.
M. PATRICK: Je peux parler un peu français mais je ne peux pas
penser en français. Peut-être que c'est ça le
mélange des cultures qui sera difficile ici.
M. CHARRON: C'est unifié...
M. PATRICK: Je peux parler un peu anglais pour vous?
M. CHARRON: Certainement.
M. PATRICK: Merci. Mr. President, about our brief of this evening, the
question you are asking, M. Charron, is: Let us suppose that the brief of the
CECM were adopted, the thoughts in that brief, how can we reconcile them with
our last page?
The thinking of our membership is that, at this time, it would be better
to have language boards, at that level. We see three levels on the Island of
Montreal: the Council, the School Board, the School. We think that
pedagogically speaking there, at that level, you need to have the language,
better communication.
Alright at the council level to thave your unification. We are not
thinking English or French, Catholic or Protestant, we are thinking
pedagogically only, then, it would be a better communication direction.
Now, as to your question, our brief says: Take it to the people of
Montreal. The job of the provisional council will be to make a recommendation
to Government as to which kind of boards they recommend. If the provisional
council says. Unified boards, we accept. Does that answer it?
M. CHARRON: Merci.
M. LE PRESIDENT: La parole est au député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. TETLEY: Mlle Marksfield, combien d'administrateurs protestants y
a-t-il sur l'île de Montréal? Combien êtes-vous?
MLLE MARKSFIELD: A peu près deux cents, au niveau des principaux,
principaux adjoints, je parle seulement de cette catégorie. Je ne parle
pas des gens qui sont surintendants ou surintendants adjoints.
M. TETLEY : Vous ne parlez pas des cadres qui se trouvent sur la rue
Fielding, dans l'édifice A?
MLLE MARKSFIELD: Non, ils ne font pas partie de ces deux sections.
M. TETLEY: Très bien. Vous me permettez, Mlle Marksfield, de
poser une question à M. Patrick. Mr. Patrick, after the session, this
evening, at six o'clock, you had some personal views which were not in the
brief. I do not say I necessarily agree with them or disagree with them, but I
think you should present them or I would like you to, if you would do so
briefly.
M. PATRICK: I would. I do not know if you would call a weakness of
English speaking people, but they tend to perhaps belabour the fact that they
would like to make sure, first of all. This is why they have pilot projects.
Might I give an example? Around 1960, our school board examined subject
promotion as an idea which we might bring in to our schools.
Before bringing it in, or even trying it, they visited school boards
throughout North America where these were practiced. Then, they tried it in a
few schools for about three or four years. These were pilot projects. It was
only after that that they brought it in. Now maybe we take too long to do
things, this is a thing we understand, and I have reservations, personal
reservations about the establishing of unified boards. The reservations are
only these that I would wonder what kind of study in depth has been made of
unified boards throughout the rest of Canada, even North
America, because the feed-back we get, either in the press, or on the
radio or on the television, is that they are in trouble, but I cannot go any
further than that, because I personnally have not made a study in depth in
that. I have reservations that way. I have a further reservation and that is
about education in a metropolitan area.
Now, we do know that in United States, they have had more experience
with metropolitan problems and they have much bigger metropolitan problems then
we do. There has been a philosophy of the melting pot theory in United States;
this seems to be again in trouble; it seems to be going by the boards in favor
of another idea all together which seems to be based more on language areas and
on small local boards, local areas. These are reservations I have. Now, have we
done any study in metropolitan programs? Have we made a study in the unified
boards throughout North America? These are the questions that I would ask. They
are reservations I have.
M. TETLEY: I cannot of course reply for the Minister but I think your
observations are useful. I know however there is one board, the Baldwin-Cartier
Board, which is an excellent unified board in the west end of the Island, that
had considerable success. Je vous remercie, M. Patrick, de vos idées
personnelles.
M. CARDINAL: There was an experience in the Montreal Island, I should
say in Greater Montreal, it is the Baldwin-Cartier School Board and that is an
experience, that is a fact, that is not a theory, it is not in the United
States or elsewhere. That is in the Montreal Island and I was very happy to
hear what they said about this unified school board where they are about, not
exactly half and half, but 60 p.c. and 40 p.c.
But that is something and I thing that this brief from the
Baldwin-Cartier School Board was something very positive presented to this
committee.
M. TETLEY: J'ai aussi la même opinion du mémoire de la
commission scolaire Baldwin-Cartier de l'ouest de Montréal.
M. LE PRESIDENT: La parole est au député de
Saint-Laurent.
M. PEARSON: M. Patrick, c'est la première fois que j'entends un
témoignage comme celui que vous venez de nous donner et j'aurais
été intéressé, en somme... C'est vous qui nous
dites que vous avez entendu les "come back from the press, from the radio, was
there anything written at all about those experiences, any opinion expressed by
the press, or something because it is the first time I hear something like
that? I would be interested myself.
M. PATRICK: I have heard, for instance, about the people in Sturgeon
Falls, Ontario, and I saw the actual television myself where the French people
themselves in Sturgeon Falls were asking, in one case, for language boards. I
heard them use that expression but I do not know. If they are asking for them,
M. Charron, it probably means that they are not happy with what they have got.
This is the point, be the English or French. I do not want to try and say to
you the French people or someone else are asking this because we have purposely
try to keep away from anything dealing with this. We are trying to be as
pedagogical as we can and I know that M. Cardinal appreciates this because this
is his original field.
M. CHARRON: Vous me permettrez de vous faire remarquer, M. Patrick, que
j'admets que le fait que les gens de Sturgeon Falls, par exemple, aient
demandé des commissions scolaires françaises est une preuve
qu'ils ne sont pas satisfaits de ce qu'ils ont, mais il y a toute la
différence au monde aussi entre ce qu'ils ont actuellement, ce qui
s'appelle les écoles séparées ou les autres écoles,
et ce que va offrir à la minorité anglaise le projet de loi no
28.
Je comprends qu'ils demandent plus dans le cas où ils sont parce
que, toutes proportions gardées, ils sont beaucoup moins bien
traités que ne le Sera encore la minorité anglophone dans le
projet de loi no 28. Cela ne veut pas dire que je suis contre le traitement de
la minorité anglophone dans le projet de loi no 28, je suppose qu'ils
devraient avoir le même là-bas.
M. STAFFORD: Si je peux revenir à ce que M. Cardinal a dit
à propos de Baldwin-Cartier, si je me rappelle bien, les gens à
Baldwin-Cartier ont dit qu'ils ont deux réseaux parallèles.Des
cadres de Montréal ont dit, ce matin, qu'à la CECM c'est encore
la même chose avec deux réseaux parallèles. Ce qui nous
inquiète franchement c'est le fait que, dans certaines de ces
commissions, il y ait un très petit groupe, une minorité
très minuscule et je me demande ce qu'on peut faire avec toute la bonne
volonté du monde. Qu'est-ce qu'on peut faire pour ce groupe-là?
Parce que je reviens à ce que j'ai dit auparavant, notre mémoire
dit qu'on va accepter ce que la commission temporaire ou provisoire de
l'île suggérera au gouvernement, nous ferons notre possible pour
faire fonctionner ce qu'il recommandera mais nous croyons si vous voulez
notre opinion personnelle que si on veut avoir un système qui va
fonctionner, il faut avoir une bonne communication entre la commission et ceux
qui sont dans l'école. Il faut travailler de plus près avec nos
collègues de la section française. Il faut qu'on collabore de
plus près. Mais pour des raisons de communication, nous croyons qu'on
pourrait avoir un système qui serait plus efficace pour les deux groupes
linguistiques si
nous avons la commission régionale linguistique et l'école
aussi.
M. CARDINAL: M. le Président, maybe I do not possess a perfect
command of the English language, but as you speak French, I may answer you in
French.
C'est justement là qu'est le véritable problème. On
a donné l'exemple de Baldwin-Cartier, on pourrait prendre l'exemple de
Missisquoi, on pourrait prendre l'exemple de Saint-Laurent; le
député de Saint-Laurent, M. Pearson, pourrait en parler.
Actuellement, à la CECM on a dit qu'il y avait deux réseaux
parallèles, d'accord, au Protestant School Board of Greater Montreal il
n'y a pas deux réseaux parallèles même s'il y a quelques
écoles françaises.
Mais il serait important, dans une ville comme Montréal, que l'on
puisse justement s'unifier. Tantôt, on m'a dit que j'ai été
dans l'enseignement pendant dix-sept ans, ce qui est vrai; j'ai
été aussi dans le milieu des affaires pendant sept ans. Et, dans
le milieu des affaires, justement, il n'y a pas cette distinction. Rue
Saint-Jacques ou rue Notre-Dame, autrefois, rue Dorchester, aujourd'hui, vous
avez, dans des sociétés financières, industrielles,
commerciales, des conseils d'administration composés de francophones et
d'anglophones et qui, par conséquent, sont unifiés. Je pourrais
prendre toutes les sociétés l'une après l'autre, que ce
soit The Royal Bank of Canada, The Montreal Trust, The Montreal Bank so on and
so forth, et ça fonctionne.
Je comprends qu'il y a le point de vue pédagogique, mais pourquoi
n'est-on pas capable d'accepter? Quelle est la raison fondamentale? Est-ce que
parce que des gens de deux cultures différentes, élus au suffrage
universel ou presque donc, c'est la majorité qui agirait
avec, surtout, les garanties qu'il y a dans le projet de loi là,
c'est drôle, je défends le ministre et je ne suis pas
entièrement d'accord avec lui, on le sait pourquoi, avec les
garanties qu'on a ajoutées, ne serait-on pas satisfait? Il va quand
même y avoir les directeurs pédagogiques de l'autre langue. Si
l'élection n'élit qu'une majorité d'une langue, le
ministre pourra en nommer deux de l'autre. Je vous dis que je ne suis pas
entièrement d'accord sur ça, mais quand même, je prends le
projet comme il est. Je me demande quelle est la raison fondamentale pour
laquelle il faut absolument que nous continuions à être
divisés?
MLLE MARKSFIELD: Est-ce que vous voulez une réponse franche,
monsieur?
M. CARDINAL: Ah oui!
MLLE MARKSFIELD: Eh bien! je vais tâcher de vous la donner. C'est
très simple. Nos collègues, nos membres, nos écoles, tous
les enseignants de la communauté s'effraient cha- que fois qu'il y a une
déclaration. Et l'on sait, par un membre de la CEQ ou de l'Alliance, je
ne veux même pas le répéter, vous savez très bien ce
qu'ils disent, alors, il faut au moins donner des sauvegardes bien
éclairées à l'égard de l'enseignement en anglais.
Voilà! Est-ce que je simplifie trop?
M. CARDINAL: C'est une bonne réponse. Mais, est-ce que vous
pensez vraiment qu'au Québec, après 125 ans d'histoire dans le
domaine de l'éducation à Montréal, qui a toujours
été à majorité francophone je ne compare pas
au Manitoba, je ne compare pas à l'Ontario, je ne compare pas à
la Colombie-Britannique, etc., on pourrait faire une longue histoire
est-ce que vous croyez vraiment qu'il y a danger pour la culture anglaise
à Montréal?
MLLE MARKSFIELD: Je ne parle pas de la culture, je parle simplement de
l'instruction en anglais.
M. CARDINAL: Je réponds aussi franchement que vous, je ne vois
pas la différence.
MLLE MARKSFIELD: On peut chercher de midi à quatorze heures
à distinguer culture et enseignement.
M. CARDINAL: Il y a l'instruction en anglais, il y a l'instruction de
l'anglais, si vous voulez.
MLLE MARKSFIELD: Vous avez demandé la raison pour laquelle on
insiste, et la voilà, monsieur.
M. CARDINAL: Oui, mais je pense que c'est une crainte. C'est une crainte
que je reconnais.
MLLE MARKSFIELD: Oui.
M. CARDINAL: Je le reconnais, écoutez. J'ai été 32
mois ministre de l'Education, et je l'ai très bien sentie, cette
crainte.
Cela fait deux ans que l'on discute cette question. On l'a
souligné cet après-midi, lorsque la commission parlementaire
s'est réunie les 20 et 21, on a célébré le
deuxième anniversaire de cette commission parlementaire sur le projet de
loi.
Monsieur nous a même rappelé le mémoire qu'il avait
présenté à ce moment-là.
MLLE MARKSFIELD: Moi aussi.
M. CARDINAL: Il y a d'autres personnes dans cette salle, justement vous
étiez là; d'ailleurs, entre parenthèses, je vous
félicite de l'excellent français que vous parlez. C'est à
souligner.
MLLE MARKSFIELD: Merci.
M. CARDINAL: Non, c'est à souligner. C'est à souligner
parce que c'est un argument. Si... Il n'y a pas de questions?
MLLE MARKSFIELD: Continuez. Je suis honorée.
M. CARDINAL: Si vous réussissez à parler un excellent
français, si je réussis à me débrouiller en
anglais, à cause des expériences passées, est-ce que vous
ne pensez pas que ça pourrait être quelque chose de positif, de
constructif, d'avantageux que l'on fasse cette expérience pour les deux
groupes culturels du Greater Montreal, quelque chose de différent du
reste du Québec?
MLLE MARKSFIELD: On ne peut pas nier l'idée, la conception de
l'unité ou l'unification des écoles. C'est l'idéal,
n'est-ce pas?
M. CARDINAL: Ah bon!
MLLE MARKSFIELD: Et on a dit dans notre mémoire, au niveau du
conseil, ça va. Peut-être en cinq ans, en dix ans, ça peut
marcher. Mais, je crois que c'est trop précipité.
M. CARDINAL: Est-ce que je peux poser une dernière question?
MLLE MARKSFIELD: Oui.
M. CARDINAL: Votre mémoire, encore là je vais être
très franc, contrairement à certains mémoires
présentés par des groupes, ou francophones ou anglophones, que
l'on a appelés, à cette table, à certains moments,
extrémistes est très serein, très calme, donne une
position très précise.
Mais, vous ajoutez à la fin une douzième page, si ce n'est
pas une onzième, un addendum. Vous êtes très
catégorique. Vous n'êtes pas obligée de répondre,
mais est-ce que votre association n'est pas prise dans la situation
présente, où, je ne sais pas moi, un exécutif est ouvert
à une discussion, à des développements, mais où ses
membres viennent dire: Votre mandat, c'est de dire devant la commission: On
veut des commissions scolaires non unifiées.
MLLE MARKSFIELD: M. Stafford répondra à cette
question.
M. CARDINAL: D'accord.
M. STAFFORD: Je voudrais répondre à cela. Notre mandat est
bien clair. Si le gouvernement permet la nomination d'un conseil de l'île
provisoire qui fera des recherches parmi tous les gens de la ville de
Montréal et si ce conseil provisoire de l'île vous recommande que
ce soient des commissions unies, notre mémoire indique que nos membres
sont prêts à respecter cela et à faire leur possible pour
assurer qu'un tel système fonctionne.
Deuxièmement, on dit: Si cette commission vient nous demander
quelle est notre opinion pour le moment, il faudra dire: Nous croyons que nous
pouvons faire de meilleurs progrès avec des commissions linguistiques.
Cela, c'est notre opinion actuellement.
Je pourrais ajouter, moi-même, que si on continue de faire des
progrès dans nos écoles dans l'enseignement du français,
le jour arrivera, et peut-être assez tôt, où on pourra
fonctionner dans des commissions unies avec plus de possibilités de
succès que nous n'en avons maintenant. On travaille de plus près
avec nos collègues de la section française. J'ai dit auparavant
qu'il faut le faire le plus tôt possible et autant que possible, mais je
suis convaincu que, si on ne pousse pas ça trop vite je ne veux
pas dire d'attendre toujours si on se connaît mieux, et si on ne
saute pas dans quelque chose où il faut résoudre toutes sortes de
problèmes vous-même, M. le ministre, vous avez dit que vous
l'espériez on aura quelque chose qui durera assez longtemps et
qu'on ne devra pas changer trop vite.
Alors, c'est pour cela que j'ai dit si vous me le permettez,
j'aimerais bien le répéter qu'il ne faut pas oublier que
c'est l'avenir de nos enfants qui nous tient à coeur et que nous voulons
à tout prix assurer. Alors, n'agissons pas trop vite. Pour eux, les
changements brusques sont difficiles à accepter et je reviens à
ce que monsieur a dit avant le souper: Ce qui arrive au niveau de la commission
touchera les élèves dans les écoles. C'est pour cela que
nous préférons qu'on fasse le premier pas maintenant, mais, je le
répète, selon notre mémoire, nous sommes prêts
à accepter la décision du gouvernement après avoir
reçu un mandat ou des suggestions d'un tel conseil qui serait
nommé d'une façon entièrement démocratique.
M. CARDINAL: I thank you very much. There are many more shades and
nuances in your answer than in your brief.
M. STAFFORD: Je peux peut-être simplement souligner ce que
monsieur a dit avant aussi, c'est que j'ai téléphoné
à M. Pouliot lui-même, lui demandant s'il ne serait pas possible
d'avoir un peu plus de temps pour préparer cela. Il a répondu le
24 septembre pour nous dire que nous étions convoqués pour le 30.
Nous avons fait notre possible et nous sommes ici pour essayer de
répondre de notre mieux à vos questions.
M. CARDINAL : Nous vous remercions. D'ailleurs, écoutez, ce n'est
pas moi qui vais répondre à ce que vous venez de dire; c'est de
l'autre côté de la table.
M. LE PRESIDENT: La parole est au député de
Saint-Laurent.
M. PEARSON: Le député de Bagot a fait allusion
tantôt au cas de Saint-Laurent. A
Saint-Laurent, l'unification est faite au niveau confessionnel,
c'est-à-dire qu'il y a une commission scolaire catholique qui groupe les
francophones et les anglophones.
Et ça existe depuis des années; à ce niveau, il n'y
a aucune difficulté. Au niveau des commissaires d'écoles, il y a
quatre commissaires francophones et un anglophone et il n'y a pas de
difficulté, même dans les communications.
Maintenant, il y a une réponse qui a été
donnée par Mlle Marksfield tantôt qui m'a surpris un peu. Elle a
mentionné, en réponse au député de Bagot: Qu'est-ce
que vous voulez, à cause des mémoires de la CEQ ou d'autres
mémoires, on est obligé de réagir un peu de cette
façon! Est-ce que votre mémoire, en somme, est un peu une
réaction vis-à-vis de certaines demandes d'autres mémoires
qui auraient pu être présentés auparavant, par exemple?
MLLE MARKSFIELD: Non, pas du tout. Ce sont simplement les
déclarations qu'on lit dans la presse par la presse, j'entends la
presse anglaise et la presse française qui disent : Les chefs de
ces deux groupes, voilà! Et cela effraie l'élément
anglophone dans la ville de Montréal.
M. PEARSON: D'accord. Mais assez pour pouvoir influencer la teneur des
mémoires que vous pouvez présenter?
MLLE MARKSFIELD: Je le crois. M. PEARSON: Oui?
MLLE MARKSFIELD: Bien sûr, cela nous influence. Est-ce que je peux
ajouter...
M. PEARSON: Do you mean that in the brief you present you ask for a
little more just to receive a little less?
MLLE MARKSFIELD: Non, jamais. Il n'y a pas de... Ce que j'ai
pensé que vous avez voulu dire, monsieur, c'était le fait qu'on a
dû ajouter une phrase à la fin de notre mémoire, purement
à cause de ces déclarations et pour sauvegarder l'instruction en
anglais.
M. PEARSON: D'accord.
MLLE MARKSFIELD: Est-ce que je peux simplement dire quelque chose
à l'égard de l'enseignement du français dans les
écoles anglaises?
M. PEARSON: Certainement.
MLLE MARKSFIELD: Vous savez, on fait des progrès extraordinaires.
Les petits anglophones qui apprennent à parler français au niveau
primaire, au niveau de la 7 e année et partout dans les écoles,
bien sûr, mais ceux qui sont immergés dans les programmes
français...
Je voudrais bien que vous veniez un jour passer une semaine chez nous
dans mon école, s'il vous plaît, 6520 ouest, boulevard Gouin. Nous
serons toujours prêts à vous accueillir.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): On a l'adresse.
M. LACROIX: Je tiens à dire au député de Chicoutimi
que ça fait longtemps que j'ai l'adresse, puisque je parlais avec
madame...
MLLE MARKSFIELD: Vous serez étonnés et, je crois, ravis,
de voir les progrès que font ces petits anglophones en faisant des
leçons, quatre heures et demie par jour, en français,
entièrement en français. Ils font les mathématiques,
l'histoire, la géographie, l'initiation à la musique,
l'initiation à la peinture; ils font la gymnastique, les sports en
français et ils parlent français dans la cafétéria.
Et c'est très anormal de voir deux petits anglophones se parler en
français, vous allez m'accorder cela. Mais ils le font, et volontiers.
Ils ont fait ce choix et ils l'acceptent avec enthousiasme. C'est notre nouveau
Québec qui se crée. Alors, il faut vraiment venir le voir et je
vous invite tous, soit à mon école ou aux autres écoles
d'immersion.
M. LACROIX: A quelle heure, les cours?
MLLE MARKSFIELD: De 9 heures à 3 heures, monsieur.
M. LE PRESIDENT: La parole est au député de
Saint-Jacques.
M. CHARRON: Mlle Marksfield, votre réponse très franche au
député de Bagot tout à l'heure m'oblige à vous
donner un commentaire très franc aussi sur ce que vous venez de dire.
Vous avez dit que chaque fois que des groupes comme la CEQ et l'Alliance des
professeurs de Montréal, par exemple, s'expriment sur la situation
linguistique de Montréal, vous auriez pu mentionner d'autres groupes et
j'imagine que c'est avec délicatesse que vous avez ignoré de
nommer mon parti,...
MLLE MARKSFIELD: Pas du tout, je l'ai oublié, voilà.
M. CHARRON: la communauté anglophone de Montréal frissonne
et se voit immédiatement attaquée dans ses droits. Je vous
rappellerai quand même que ces deux groupes que vous avez nommés,
pour ne pas prendre ceux que vous avez sous-entendus, sont eux-mêmes
venus témoigner, ils vous ont précédée à la
table que vous occupez actuellement, et aucun des deux groupes
peut-être un, celui de l'Alliance des professeurs, avait un style
particulier qui, je crois bien, ne l'a pas beaucoup servi, mais enfin, peu
importe, c'est son choix n'a demandé la disparition des
écoles anglophones. Pas plus
d'ailleurs que le Parti québécois n'a demandé la
disparition des écoles anglophones.
MLLE MARKSFIELD: ...mais c'est malheureux alors que la presse...
M. CHARRON: C'est ce que j'allais vous dire, madame, je ne vous cache
pas qu'il existe dans le groupe francophone des extrémistes qui
demandent, et vraisemblablement nous aurons l'occasion de les entendre aussi,
la disparition de ce que nous considérons comme l'un de vos droits des
écoles.
Mais vous admettrez que vous avez une presse du côté
anglophone bien particulière et qui sait mettre en évidence ces
secteurs de la population, qui ne reflètent peut-être rien
à l'intérieur de la population francophone, qui sont
utilisés en première page ou avec beaucoup d'éclat,
surtout quand les personnages qui véhiculent cette idéologie sont
aussi éclatants, cette crainte chez les anglophones. Je n'ai jamais
été un gros lecteur des journaux anglophones, malheureusement,
mais je le suis devenu depuis le dépôt de la loi 28, parce que je
suis concerné.
J'ai été étonné de voir comment, par
exemple, des témoignages que j'avais entendus ici, ainsi que tous mes
collègues autour de la table, se trouvaient agencés. Je ne parle
pas du travail des journalistes eux-mêmes qui prenaient le contenu, mais
comment il était présenté, l'importance qu'on lui
accordait dans le journal pour toujours faire ressortir le côté le
plus francophile, le plus désireux de retrouver la dignité
francophone que nous n'avons pas encore tout à fait atteinte, etc.;
comment on manoeuvrait les nouvelles, ou alors les attaques parfois normales
que j'ai pu faire moi-même ainsi que d'autres sur ce qui a
été, pour un certain moment, des privilèges des
anglophones, comment on les a placées, le fait que nous disions
simplement notre opinion là-dessus, comment on les a traitées
comme étant une attaque viscérale et visqueuse et que nous
voulions vous arracher tous vos droits, etc. Je trouve que, si la
minorité anglophone de Montréal frissonne à chaque fois
qu'un francophone dit que la situation de Montréal est anormale, il y a
une part de responsabilité dans ceux qui dirigent cette minorité
anglophone à Montréal et qui sont intéressés
justement, et bien souvent, à apeurer la minorité anglaise de
l'endroit.
Je ne nie pas, encore une fois, l'existence des extrémistes, mais
on lui accorde une importance beaucoup plus forte par rapport à la
majorité. Vous avez ici quatre partis politiques. Aucun, depuis le
début des travaux de la commission, n'a voulu demander la disparition
des écoles anglaises à Montréal. Chacun a eu l'occasion de
répéter à son tour que c'était un droit et chacun
est venu assurer les anglophones qui sont venus ici que ces droits-là
étaient préservés dans la loi 28. Ce que nous et ce que le
gouvernement aussi croient, puisque c'est lui le proposeur du projet de loi no
28, c'est qu'une commission scolaire propre à la minorité
anglophone, ça c'est un privilège. Lui, il parle de les unifier,
nous aussi voulons les unifier d'une façon plus complète que ne
le fait le projet de loi no 28. Mais dans l'ensemble, il y a une entente autour
de la table qui représente les quatre partis politiques de la province
de Québec là-dessus et je vous assure que si votre remarque
était franche je l'admets bien quant à vos craintes
le commentaire que je vous fais, il l'est aussi beaucoup. J'ai eu l'occasion de
recevoir plusieurs mémoires des anglophones, il y en a eu quelques-uns,
comme celui du Protestant School Board de Montréal la semaine
dernière, qui était vraiment, à mon avis,
malhonnête. Mais pour l'ensemble, je comprends la crainte que vous ayez.
Vous venez d'un groupe bien particulier.
Si vous nous dites que vous êtes une minorité, pour nous,
ici, vous êtes la pointe d'une majorité continentale. On ne peut
pas vous considérer que comme minorité. Vous êtes, c'est
vrai, minoritaires, chez nous, mais on ne peut pas ignorer que vous êtes
en même temps la pointe d'une majorité continentale forte, solide,
puissamment organisée, contrairement à notre situation à
nous, et c'est ça qui domine toute nos positions.
MLLE MARKSFIELD: Vos remarques me soulagent énormément,
monsieur, et je vous en remercie. Simplement quelques petits commentaires.
M. CHARRON: Allez-y.
MLLE MARKSFIELD: Tout d'abord, vous dites que nous sommes dans un vaste
continent anglophone. C'est vrai, mais nous habitons ici, c'est notre foyer. Il
me semble que je l'ai dit il y a deux ans, nous ne voulons pas être des
Québécois errants. Montréal, le Québec, c'est notre
"home" et nous voulons demeurer ici. Nous avons fait des carrières ici;
nous voulons continuer à aider à faire épanouir cette
province et je crois que nous avons déjà apporté des
contributions assez grandes et assez importantes. Autre chose. Si vous savez
que la presse indique quelque chose qui n'est pas comme il faut, il me semble
si j'ose le dire, et je m'excuse de le dire que comme
député vous avez le droit d'écrire des lettres et des
articles pour éclaircir les choses pour la communauté.
M. CHARRON: C'est ce que le ministre de l'Education lui-même a
fait et regardez le traitement qu'il reçoit à l'intérieur
de ces journaux-là.
M. LACROIX: Si j'osais dire la moitié de ce que le
député de Saint-Jacques a dit vous verriez la belle
publicité qu'on me ferait.
MLLE MARKSFIELD: Chapeau.
M. LAURIN: On vous en fait de la bonne.
M. STAFFORD: Si je peux ajouter une seule remarque, Mlle Marksfield a
dit que peut-être une raison pour le retard, ce sont quelques craintes.
Je souligne une chose, c'est que je vois ici des gens comme moi qui sont assez
mûrs, pas aussi jeunes qu'auparavant et j'ai suggéré, quand
nous sommes venus ici la dernière fois, que nous représentions
peut-être cent cinquante ans dans l'enseignement. Je ne suis pas loin de
la vérité peut-être, mais j'ajoute que notre raison, la
vraie raison pour laquelle on a dit ceci, c'est que si ce conseil provisoire
venait nous demander, comme pédagogues, comme des gens qui veulent faire
fonctionner quelque chose, un programme qui aiderait les élèves
les gens à qui nous nous intéressons le plus des
deux sections, autant que possible, pour le moment, je crois que comme
pédagogues c'est ce qu'il faudrait qu'on dise. Je répète
que c'est comme pédagogues que nous sommes venus ici.
M. LE PRESIDENT (Pilote): La parole est au député de
Saint-Laurent.
M. PEARSON: Mademoiselle, comme mot final personnel, disons qu'on a le
droit d'envoyer des fleurs. Vous êtes sûrement, dans toutes les
séances que nous avons eues jusqu'à présent, une des
meilleures ambassadrices de l'élément anglophone.
MLLE MARKSFIELD: Merci.
M. PEARSON: Et si tous les anglophones qui viennent nous
présenter des mémoires avaient autant d'ouverture d'esprit, je
pense que cela nous éviterait beaucoup d'affrontements.
M. LE PRESIDENT: Je remercie les membres de la Québec Association
of School Administrators et Mlle Marksfield. J'ai noté que le
député de Chicoutimi avait pris votre adresse.
UNE VOIX: J'espère que vous aimez les maigres.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je dois dire, mademoiselle, que si ce n'est
pas confortable pour vous, ce le sera pour moi.
MLLE MARKSFIELD: Qui vivra verra!
De la part de mes collègues, puis-je vous remercier pour
l'accueil très chaleureux que vous nous avez témoigné.
Merci.
M. LE PRESIDENT: Merci bien. Nous allons passer maintenant au
mémoire de la Montreal Teachers Association représentée
par M. D.R. Peacock, président.
Montreal Teachers Association
M. PEACOCK: Je m'appelle Donald Peacock P-e-a-c-o-c-k, ça veut
dire paon. Je suis prési- dent, depuis cinq ans, du Montreal Teachers
Association, syndicat qui regroupe les 2,800 enseignants à l'emploi du
Bureau protestant du Grand Montréal. J'espère que vous avez
reçu, en même temps que notre mémoire, le mémoire
qu'on a présenté sur le bill 62 puisqu'il contient toujours des
points valables.
Comme tout bon enseignant, je me rends compte que la classe est un peu
fatiguée, surtout la première journée d'école. Je
ne veux donc pas vous ennuyer trop longtemps; je n'ai aucunement l'intention de
lire tout mon mémoire, surtout que vous l'avez sous les yeux.
M. VEILLEUX: M. le Président, peut-être, avant de
commencer, pourriez-vous nous montrer le lien ou la différence qui peut
exister entre le Montreal Teachers Association et le PAPT.
M. PEACOCK: Nous sommes une section de la PAPT, par hasard. Je vais vous
expliquer ça plus tard. La PAPT est une corporation. Je vais essayer de
faire un résumé de notre mémoire ce qui m'est assez
difficile parce que je ne suis pas francophone. De temps en temps, vous allez
voir que je vais le lire. J'espère bien que je ne vais pas ajouter trop
de choses pour fâcher le député de Chicoutimi et nuancer ce
que j'ai déjà écrit.
Nous sommes en faveur de la rationalisation des structures, de la
démocratisation et de la participation des parents. Nous sommes
également en faveur de l'égalisation des "opportunités"
pour tous les enfants de l'île. Le rôle coordonnateur du conseil de
l'île pourrait justement assurer cette égalisation. Nous sommes
toujours contre les commissions unifiées.
Nous sommes contre pour les mêmes raisons qui ont poussé la
commission Pagé à proposer les commissions divisées selon
la langue. Il y a deux raisons principales. D'abord, on craignait que demander
à une communauté de se préoccuper des
intérêts de l'autre à l'heure actuelle, c'était un
peu trop demander, la bonne volonté étant à la baisse au
Québec ces jours-ci. C'était la première raison.
Ensuite, une raison technique. Si vous voulez à tout prix unifier
les commissions pour aider quelques commissaires anglophones à devenir
bilingues, nous allons nous trouver en face de gros problèmes quand il
s'agira de fournir trois sortes d'instruction en deux langues aux enfants dans
au moins quatre des onze commissions proposées.
Alors, si vous voulez à tout prix faire cela, il y a trois
solutions au problème. D'abord, centraliser l'opération au
complet en faisant du conseil de l'île une supercommission.
L'expérience vécue par New York et par Londres a
démontré que cette solution était finalement non
démocratique et inefficace.
Deuxième solution: réduire le nombre des commissions
scolaires. A cause de la répartition inégale d'enfants
anglophones et francophones, ceci causerait des difficultés. Par
exemple, le
West Island Board (numéro 10)est déjà
géographiquement vaste et devrait prendre une proportion énorme
afin d'inclure une population francophone d'au moins 20,000 personnes.
Troisième solution, c'est celle qu'on propose: réduire le
nombre de types d'écoles. La grande majorité de nos professeurs
est en faveur d'écoles neutres, mais, comme ceci causerait de nouvelles
divisions, nous vous recommandons la fin des écoles à
dénominations différentes et la création d'écoles
multiconfessionnelles où toutes les religions seraient
respectées, où les cours d'éducation religieuse seraient
offerts sur une base optionnelle et où, enfin, des enfants de toutes
croyances et d'aucune croyance pourraient se rencontrer, travailler et jouer
ensemble.
Pour nous, ça, c'est l'unification réelle au niveau
où existe le monde. En passant, je dois dire que cette association n'a
jamais favorisé l'argument constitutionnel envers le projet de loi no
28, en partie parce que l'Acte de l'Amérique du Nord britannique n'a pas
garanti les droits linguistiques du français en d'autres parties du
Canada et en partie parce que nous ne voyons pas comme inaliénable le
droit de séparer nos enfants.
Nous osons suggérer à nos amis catholiques et protestants
à qui répugne l'idée des écoles
multiconfessionnelles que c'est essentiellement faire preuve d'un manque
à son devoir de chrétien de refuser de se mêler à
ceux qui ont d'autres croyances, que le foyer et l'Eglise sont les endroits
appropriés pour la dissémination des valeurs religieuses et qu'un
vrai chrétien est quelqu'un qui peut vivre dans un monde
dénudé de christianisme et garder sa foi.
On le fait parce que l'Acte de l'Amérique du Nord britannique
nous donne un cadre inapproprié à nos besoins modernes.
Néanmoins, il ne faut pas faire comme on dit en anglais "throw the baby
out with the bath water." On a besoin d'une constitution et nous sommes
déçus que le gouvernement du Québec n'ait pas
proposé des amendements à cet Acte de l'Amérique du Nord
britannique qui correspondraient mieux aux réalités d'aujourd'hui
et qui, tout en protégeant les droits de la majorité,
assureraient une fois pour toutes les droits des parents à choisir la
langue d'instruction de leurs élèves.
Comme la langue n'est pas seulement un outil de l'enseignement mais bien
une méthode de transmission d'une culture, nous acceptons à
regret la séparation de nos écoles sur une base linguistique,
mais nous espérons que le ministre verra à ce que l'instruction
dans la langue seconde soit grandement améliorée afin de
contrebalancer cette séparation physique.
Nous avons déjà soumis à son ministère des
propositions destinées à favoriser cette fin, dont le sommaire
apparaît à l'annexe A que je vais lire.
Nous suggérons une dépense admissible spéciale,
à être incluse dans le rapport maître-élèves,
afin de permettre une classe maximum pour l'enseignement de la langue seconde
de quinze élèves pour les trois premières années,
de vingt pour les trois années suivantes et de vingt-cinq par la
suite.
Deuxièmement, la présente entente
fédérale-provinciale pour promouvoir le bilinguisme doit
être amendée afin d'inclure les subsides fédéraux
suffisants pour couvrir les coûts additionnels entraînés par
la recommandation numéro 1.
Nous avons trouvé à notre grande surprise que les $25
millions sont en partie pour payer les frais de l'instruction en anglais
à la minorité anglophone. Cela ne marche pas au Québec, on
trouve que le Québec n'est pas une province comme les autres et on
trouve illogique ce système de paiement. Nous désirons porter
aussi votre attention sur le fait que la présente formule, qui
reconnaît le facteur de coût pour l'enseignement de l'anglais aux
enfants anglophones, est convenable pour toutes les autres provinces mais
hautement inappropriée pour le Québec.
Troisièmement, la création d'instituts linguistiques dans
des centres convenables à travers le Québec possiblement
sous l'égide de l'Université du Québec
financés par les gouvernements fédéral et provincial et
où des cours de linguistique, de méthodes pédagogiques
modernes, de phonétique, là, seraient accessibles aux professeurs
de la langue seconde et dans la langue seconde, c'est-à-dire des
professeurs donnant des cours d'histoire en français aux
étudiants anglophones.
Quatrièmement, pourvoir, en priorité, des bourses de
perfectionnement professionnel aux enseignants de la langue seconde qui
désirent se prévaloir des cours décrits ci-haut.
Cinquièmement, un encouragement actif par le gouvernement
provincial à un échange d'enseignants et d'élèves
entre les deux groupes linguistiques, incluant des clauses selon lesquelles les
enseignants gardent tous les droits d'emploi avec leur commission scolaire
originale alors qu'ils enseignent dans une autre commission scolaire.
Sixièmement, la préparation de cours au niveau secondaire
destinés à rendre les étudiants conscients des
caractéristiques sociales et culturelles de l'autre communauté
linguistique. Ces cours devraient être préparés par le
ministère de l'Education en collaboration étroite avec les
enseignants et des experts-conseils des commissions scolaires; ils devraient
être des cours-cadres afin de permettre des variations locales et
encourager l'initiative des enseignants, ils devraient faire appel à des
artistes connus, chanteurs, acteurs, écrivains, etc. et des
personnalités, aussi bien qu'à des films, disques, concerts
vivants, etc., et ils devraient être des cours d'intérêt
plutôt que des cours formels permettant l'obtention de
crédits.
Autrement dit, on veut, au lieu de passer de petits règlements
pour des raisons politiques, que le gouvernement mette un peu d'argent dans
l'affaire une fois pour toutes. Nous ne
considérons pas tout ceci comme étant une digression du
débat sur la réorganisation des écoles puisque aucun
changement de structures n'a de valeur réelle à moins de
créer un esprit nouveau d'entente mutuelle et de respect entre les
citoyens de demain.
Nous ne pouvons pas trop insister sur le fait qu'une condition
préalable pour que toute réorganisation scolaire puisse
réussir, c'est la formulation d'une politique linguistique par le
gouvernement.
Nous avons déjà constaté que la plupart des gens
qui discutent théoriquement du bill 28 ne parle pas du bill 28, ils
parlent du bill 63. Peut-être ne le savent-ils pas mais ils parlent du
bill 63. Leurs craintes viennent justement du fait que le bill 63 est toujours
mis en cause.
Si M. Saint-Pierre veut attendre le rapport de la commission Gendron
tout le monde attend le rapport de la commission Gendron soit,
mais qu'il retire son bill, entre-temps. Nous ne sommes pas contre la
composition d'un conseil de l'île temporaire et permanent.
Sûrement nous avons terminé l'ère des
représentants nommés par le gouvernement et catapultés
dans les divers corps de l'éducation. Ou nous faisons confiance au
peuple ou non. Nous ne pouvons simplement pas avoir une démocratie
partielle dans les années soixante-dix.
Nous recommandons que l'article 600 et que la disposition transitoire 9
soient amendés comme suit: Article 600: "Le conseil sera composé
de onze membres le nombre de membres selon le nombre de commissions
désignés à la première assemblée
suivant l'élection des commissaires d'écoles, parmi et par les
commissaires de chaque commission scolaire" et que la disposition transitoire
soit amendée afin qu'elle se lise: "Jusqu'au moment de la
désignation faite en vertu de l'article 600, mais au plus tard le 1er
août 1972, le conseil sera composé de treize membres, élus
parmi et par les commissaires des commissions scolaires, selon la formule
suivante:..."
Nous désirons maintenant toucher à un sujet qui concerne
tout particulièrement notre association. En 1966, nous avons
organisé ce syndicat et, malgré la contestation de notre bureau,
de notre commission, nous avons obtenu accréditation, pour
négocier. En 1967, nos premières négociations furent
"gelées" par le projet de loi 25, et une corporation professionnelle,
The Provincial Association of Protestant Teachers, fut nommée en tant
que notre représentant pour fins de négociations.
Nos professeurs s'adaptèrent à cette situation en
réorganisant la PAPT de façon à séparer les
administrateurs des enseignants en ce qui avait trait au syndicat. Le projet de
loi no 46, encore une fois, nous force à utiliser la PAPT en tant que
représentant et les termes de ce projet de loi ne spécifient pas
si de vraies négociations dans le sens du code du travail
seront permises à notre niveau. Un gouvernement qui accorde des droits
de négociation aux syndicats, d'une part, et les empêchent
d'exercer ces dits droits, d'autre part, est un gouvernement dont l'attachement
à la démocratie pose un doute sérieux.
L'article 17 des dispositions transitoires et finales du projet de loi
no 28 ajoute encore à la confusion en laissant entièrement la
question de notre employeur légal au plan d'intégration du
conseil transitoire.
Nous trouvons continuellement que, pour certaines fins, notre employeur
est le ministre de la Fonction publique et, pour d'autres, le ministre de
l'Education alors que, légalement, c'est le "Protestant School Board of
Greater Montreal". Dans le plan stratégique d'ensemble de la Fonction
publique, nous devons insister sur l'exercice de nos droits de base à
pouvoir négocier avec notre employeur ou, du moins, de pouvoir choisir
notre propre mandataire.
Nous avons déjà fait mention que, sous les chartes
démodées des trois corporations (CEQ, PACT et PAPT) être
membre n'est pas une question de choix individuel. En effet, selon le
présent projet de loi, les enseignants dans les écoles non
protestantes et non catholiques qu'elles soient multiconfessionnelles ou
autres se retrouvent automatiquement membres de la CEQ.
Cette situation absurde signifie en effet que le fait que je sois membre
d'une corporation est déterminé par le comité protestant
du conseil supérieur puisque ce corps peut décider de
reconnaître ou non une école comme étant protestante. Cela
signifie aussi qu'à cause du projet de loi 46, je dois demeurer dans
cette corporation si je désire pouvoir exercer une influence sur les
négociations concernant mon salaire et mes conditions de travail.
Nous recommandons donc que les ministres du Travail, de l'Education et
de la Fonction publique travaillent ensemble une fois pour toutes dans le but
de mettre fin au statut privilégié spécial des
corporations professionnelles, et de faire un amendement au projet de loi no 46
afin de permettre à tous les syndicats de choisir librement leur
mandataire pour toute négociation provinciale.
Nous recommandons de plus que le présent projet de loi no 28 soit
amendé afin de stipuler clairement que, quoique l'employeur légal
des enseignants demeure la commission scolaire, les négociations (ou
"arrangements" pour citer le projet de loi no 46) doivent se faire au niveau du
conseil de l'île. Nous n'avons pas inclus dans ce mémoire le
problème syndical parce que nous croyions à ce moment que
c'était réglé par une décision de la East End
Teachers Association. Mais on se trouve encore dans la confusion à cause
d'un autre jugement à Sainte-Foy. Je vous explique l'affaire.
Normalement, on ne divise pas une unité de négociation,
mais un commissaire-enquêteur peut le faire, s'il trouve des raisons
valables. Un commissaire-enquêteur, Me Geoffroy, a trouvé
qu'à la régionale Le Royer, il y avait lieu, pour
des raisons qui étaient un peu poussées, je crois, de
diviser selon la langue, de permettre, autrement dit, aux anglo-catholiques de
la régionale Le Royer de former leur propre syndicat. C'est ce qu'ils
ont fait.
Mais, à Sainte-Foy, un autre qui était autrefois
employé de l'Alliance des professeurs de Montréal, M. Normand
Cinq-Mars, a trouvé que la langue n'était pas une raison
suffisante pour diviser une unité de négociation. Il l'a
refusé.
Alors, puisque le ministre ne veut pas nous dire qui sera notre
employeur, nous nous trouvons face à plusieurs possibilités. Si
c'est le conseil de l'île qui est notre employeur et si c'est Sainte-Foy
qui l'emporte, nous nous trouverons dans un syndicat de 21,000 enseignants.
Je vous ai dit la dernière fois, dans notre mémoire sur le
projet de loi 62, que, si nos arguments d'ordre démocratique ne vous
touchent pas, peut-être que vous allez calculer que 21,000 enseignants
dans un syndicat, c'est un gros bébé au Québec. Vous ne
voulez pas créer un tel géant.
Par contre, si l'employeur est la commission scolaire, nous pouvons nous
trouver dans neuf syndicats majoritairement francophones et deux syndicats
majoritairement anglophones. C'est absurde, cette histoire.
L'Alliance des professeurs et nous-mêmes avons déjà
proposé à M. Cournoyer une autre solution basée sur un
principe qui va pour le projet de loi no 28 aussi: s'unifier autant que
possible et se séparer où ça s'avère
nécessaire, c'est-à-dire des certifications conjointes, mais
l'organisation séparée. C'est cela que l'on propose.
Vous trouvez peut-être que je parle en dehors du projet de loi no
28, mais le projet de loi no 28 influence beaucoup d'autres choses. C'est une
question de démocratie.
Alors, notre problème syndical, pour nous, c'est celui qui nous
préoccupe le plus. Mais, si vous voulez vos commissions unifiées,
nous relèverons ce défi de travailler au sein de structures
nouvelles, en contact plus étroit avec nos collègues catholiques
francophones et anglophones et nous vaincrons... pourvu que le gouvernement
alloue à chaque commission scolaire vous avez compris
autant d'initiative pédagogique que le demande une égalité
de service; pourvu que le conseil de l'île serve en capacité de
corps coordonnateur plutôt qu'en celle d'un maître tout-puissant de
la bureaucratie et pourvu que nos droits à un enseignement de haute
qualité dans la langue de notre choix soient clairement respectés
par nos collègues francophones, alors que certains parmi eux semblent
croire que notre droit de respirer est un privilège
intolérable.
Ce projet de loi, amendé convenablement, peut devenir la base
d'une nouvelle société plus éclairée au sein de
laquelle les deux races fondatrices peuvent perdre leurs craintes mutuelles,
leur belligérance, et où nos enfants peuvent être enrichis
par une influence réciproque de deux cultures vitales et dynamiques,
libres de la mentalité de ghetto qui caractérise encore
aujourd'hui un grand nombre de nos débats publics au Québec.
Ce projet de loi peut aussi marquer la fin d'un système
d'éducation cohérent à Montréal et amener la
scission finale dans les relations communautaires.
Qu'il le fasse ou non dépend ultimement non pas d'un document
juridique, mais de la motivation des divers éléments
impliqués dans l'enseignement à Montréal.
Cette association, dont je suis fier d'être le président,
voue son attachement aux idéaux de base du projet de loi no 28. Nous
sommes prêts à sacrifier notre existence collective afin de voir
la réalisation de ces idéaux.
Nous avons fait le premier pas. Il appartient maintenant à
d'autres de la majorité ou de la minorité culturelle du
Québec de sacrifier leurs préjudices afin que nos enfants
puissent grandir et apprendre ensemble.
Je vous remercie.
M. CARDINAL: Peut-être pour une fois, ce soir nous sommes
d'accord. La dernière fois que vous êtes venu, pour le projet de
loi 62, cela avait été assez difficile.
Le premier jour des séances de cette commission parlementaire,
à la première minute, en réponse au ministre, je lui ai
souligné le problème des relations syndicales sur lesquelles vous
avez fortement insisté.
Sur ce point-là, je suis entièrement d'accord avec vous,
le projet de loi no 28 n'est pas clair et on ne sait pas qui est l'employeur
des enseignants au Québec. C'était clair dans le projet de loi no
62, vous n'étiez pas d'accord, mais au moins c'était clair. Bon.
Non, c'était clair. Mais, enfin, on ne recommencera pas les discussions
d'il y a deux ans.
Il y a quelque chose quand même qui me frappe: la question de
certification syndicale. L'Alliance des professeurs au sein de la CEQ, comme
votre groupement au sein de la PAPT, vous êtes dans la même
position, si je ne me trompe pas après avoir entendu les deux. Mais il y
a autre chose, il y a ce problème de savoir qui est l'employeur...
M. PEACOCK: Excusez-moi, vous dites que l'Alliance dans la CEQ est dans
la même position que nous dans la PAPT, ce n'est pas vrai.
M. CARDINAL: D'accord.
M. PEACOCK: La CEQ est une corporation, mais en même temps c'est
une centrale, et quand l'Alliance perçoit sa cotisation syndicale, dont
une part va à la CEQ, la CEQ ne se sert plus de sa charte des
corporations, sauf aux fins d'obtenir des membres dans les écoles qui ne
sont pas catholiques ou protestantes. Elle n'a pas encore abandonné la
charte. Mais la PAPT,
c'est une vieille affaire, ça date de 1860, avant la
confédération et cela n'a jamais été
créé pour les fins syndicales. La PAPT n'est pas un syndicat, ce
n'est pas une centrale. Chaque unité, chaque syndicat est
séparé parce que nous sommes membres individuellement de la PAPT,
et la PAPT obtient ses $60 séparément par sa charte. Autrement
dit, la PAPT c'est un peu une anomalie. Je sais pourquoi M. Johnson a
nommé la PAPT dans le bill 25, c'est parce qu'il n'y avait pas autre
chose, mais je m'élève contre l'idée des corporations dans
ce siècle. L'idée des corporations est vraiment
antidémocratique.
M. CARDINAL: Bon, d'accord, j'accepte ce que vous venez de dire comme
étant "a matter of fact". Ce que je voulais dire, c'est que votre
position, non pas votre situation juridique, mais votre position devant la
commission est analogue toute comparaison a toujours des défauts
analogue à celle de l'Alliance.
Mais il y a deux aspects au problème: cet aspect, si vous voulez,
de la corporation qui est en même temps syndicat qui va
peut-être devenir simplement syndicat sans être association, la
PAPT qui date de dix-huit cent j'ignore quoi, etc et le fait que,
même si Montréal est très, très important au sein du
Québec, les gouvernements, les uns après les autres, ont voulu
qu'il y ait à travers tout le territoire du Québec une
égalité pour les enseignants. Et c'est pourquoi, quand, dans
votre mémoire, vous accusez un gouvernement, sans le nommer, on devine
lequel, de n'être pas démocratique, et que vous accusez celui qui
est là aujourd'hui de ne pas l'être pour les mêmes raisons,
là je ne vous suis plus parce qu'il y a deux plans, il me semble qu'il y
a deux choses différentes.
Je suis d'accord avec vous que ça n'a pas de bon sens que les
négociations avec les enseignants fassent que le ministre de
l'Education, quel qu'il soit, soit sans cesse mis, vous me permettrez
d'employer cette expression, "on the spot", pendant que le ministre de la
Fonction publique prend ses décisions et que le ministre du Travail est
dans son ministère. Sur ce point, je l'ai dit même pendant que
j'étais ministre, et ce n'était pas une attaque contre mon
collègue, le ministre de la Fonction publique. Cela, il va falloir qu'au
niveau du gouvernement ce soit réglé, vous ne pouvez pas faire
affaires avec trois ministères. On en a vu un exemple cet
après-midi, le ministre de l'Education a fait une déclaration
ministérielle sur le problème des universités, mais c'est
M. Cournoyer qui devient celui qui s'en occupe. Qu'est-ce qui va arriver tout
à l'heure, je ne le sais pas, je souhaite bonne chance au gouvernement
et aux relations entre les ministres, surtout à l'UQAM et à
l'Université de Montréal. Mais là, ça n'a pas de
sens.
Je fais quand même cette distinction, si vous me comprenez bien,
entre l'égalité des traitements le mot "traitements" est
employé au sens large non pas de salaire mais de façon de traiter
avec quelqu'un l'égalité des services envers les
étudiants, et ces questions techniques de reconnaissance d'unité
que j'appellerai unité syndicale.
Et c'est pourquoi, tout en exceptant cela je vous dis que je suis
d'accord avec vous il y a quand même cette distinction, je pense,
qu'il faudrait apporter. C'est sûr que le projet de loi no 28, et je l'ai
soumis au ministre déjà, il y a plusieurs semaines, devrait
clarifier la question de l'engagement des enseignants sur l'île de
Montréal. Dans mon esprit, ce n'est pas clair qui est responsable de
cette question.
Quand, dans le projet de loi no 28, ou dans le projet de loi de la
communauté urbaine, on fait référence aux articles 36 ou
37 de la Loi du ministère du Travail, je ne suis pas d'accord. Toute
législation par références, que ce soit
référence à une autre loi du Québec ou à une
loi fédérale, est une mauvaise législation. Lorsque l'on
modifie la législation principale, on se trouve à modifier
l'autre législation. Deuxièmement, le projet de loi no 28 ne
crée pas des fusions de syndicats, ne crée pas des fusions de
commissions scolaires; il défait tout le système radicalement et
le refait. Par conséquent, je ne comprends pas comment l'on va pouvoir
résoudre ce problème des relations syndicales alors que le projet
de loi no 28 pourrait être adopté pendant que vous êtes en
négociations.
Cela me parait encore une situation pire. Et quand je dis ceci, ce n'est
pas une attaque, M. le ministre, contre le gouvernement. C'est simplement une
invitation au gouvernement à réfléchir à cette
situation qui pourrait placer l'Etat je ne dis même pas le
gouvernement l'Assemblée nationale, tout le Québec, tout
le système de l'éducation dans une situation impossible parce
qu'on n'aurait pas clarifié cette question des relations syndicales
à l'occasion de l'application concrète dans les faits, sur une
certaine période, du projet de loi no 28.
Et l'intervention que je fais n'est absolument pas partisane; c'est
simplement une invitation au gouvernement, après l'expérience que
j'ai moi-même vécue, de songer très sérieusement
à inclure dans le projet de loi no 28 des articles qui viendront
clarifier cette situation et cela de concert avec le ministère de la
Fonction publique et le ministère du Travail.
M. PEACOCK: Est-ce que je peux ajouter quelque chose? Vous avez
parlé beaucoup mieux que moi, beaucoup plus longuement que moi sur ce
que j'ai dit, je crois. Ce n'est pas seulement cela, M. Cardinal. C'est aussi
la question du code du travail qui influence encore la politique linguistique.
Le commissaire-enquêteur à la régionale Le Royer n'a pas
divisé l'unité sur la base de la langue; il n'a pas osé;
il n'a pas le droit. Il a prétendu que la formation des maîtres
était différente, que l'objet visé était
différent, ainsi de suite.
Mais je vous demande: Est-ce que le gouver-
nement va changer le code du travail afin de nous reconnaître le
droit de nous organiser dans notre langue? C'est encore une chose. Il faut le
faire. Même si c'est la commission qui est notre employeur, on se trouve
encore dans la même maudite bataille avec un commissaire qui fait une
chose. On ne saura plus où on se trouve. Il faut une fois pour toutes
décider si c'est un droit ou un privilège. Nous sommes
prêts à marcher avec une accréditation conjointe, c'est ce
que nous avons proposé, avec l'Alliance, malgré le East End
Teachers Association qui leur a donné le droit d'avoir un certificat
séparé.
On le veut parce que c'est logique, selon le principe que j'ai
énoncé. Unifier où c'est possible; diviser où c'est
nécessaire. Mais on ne peut pas, à l'heure actuelle, avoir cela.
La CECM est un exemple différent parce qu'elle a un certificat conjoint
donné par Duplessis pour des raisons que je ne veux pas expliquer
maintenant parce que c'est tout à fait spécial. Cela n'existe
plus, ça ne peut pas exister. Mais on veut savoir. Est-ce que le
gouvernement va nous accorder le droit de nous ! organiser nos propres
syndicats de langue anglaise, oui ou non? Ensuite, c'est la question des
chartes des corporations, de l'éducation non confessionnelle ou non
catholique ou non protestante. Le projet de loi no 28 n'est pas clair
là-dessus; il ne parle pas des écoles, il parle seulement de
possibilités; il n'y a pas de comité pour cela, il n'y a rien; il
y a un comité protestant, un comité catholique au conseil
supérieur mais il n'y a pas d'autres choses. Alors on n'est pas
sûr de ce qu'il veut dire par ces autres choses. Est-ce qu'on aura des
écoles ou non? Mais s'il y a des écoles qui ne sont ni
catholiques ni protestantes et on les veut on veut des
écoles multiconfessionnelles.
Si vous nous mettez dans ces écoles, nous allons nous trouver
dans une corporation dite la corporation des enseignants du Québec, pas
dans un syndicat mais dans la corporation. Parce que la corporation a une
charte qui dit que tout enseignant dans les écoles publiques du
Québec se trouve dans la CEQ à part ceux qui se trouvent dans la
partie des écoles anglo-catholiques et ceux qui se trouvent dans la
partie des écoles protestantes. C'est absurde!
Alors, il y a manque de cohérence dans la politique du
gouvernement, un manque de clarté.
M. CARDINAL: Vous ne croyez pas, justement, M. Peacock, qu'à
l'occasion du projet de loi no 28, ce n'est pas le code du travail qui devrait
être amendé, mais que c'est le projet de loi no 28 qui devrait
être clair sur la question. Cela ne concerne que l'Ile de
Montréal.
M. PEACOCK: Le projet de loi ne peut faire que définir
l'employeur et l'on fait cela.
M. CARDINAL: Qu'on aille plus loin. Qu'on dise dans le projet de loi no
28 non seulement qui sera l'employeur, mais comment se régleront,
à l'occasion de l'abolition des commissions existantes et la
création de nouvelles commissions, d'un conseil métropolitain,
les conflits, enfin ce que j'appelle des conflits syndicaux, c'est un terme
générique, qu'on le dise, qu'on ne réfère pas au
code du travail.
M. PEACOCK: Vous ne pouvez pas faire un amendement au bill 28 pour
régler cette affaire si c'est en contradiction avec le code du travail,
parce que ça fait partie de la loi de la province.
M. CARDINAL: Ah oui! Vous le pouvez.
M. GOLDBLOOM: Je m'excuse, si le député de Bagot me
permet. Mais ce n'est pas à M. Peacock de nous dire ce que le
gouvernement peut faire et ne peut pas faire. Le gouvernement, si
l'Assemblée nationale est consentante, peut justement faire avec le
projet de loi no 28 ce qu'il croit nécessaire de faire. Et je me permets
de dire aussi que je crois que même si mon collègue, le ministre
de l'Education, était ici ce soir, et en outre, mes collègues de
la Fonction publique et du Travail et de la Main-d'Oeuvre; il ne serait pas
possible de fournir ce soir, séance tenante, une réponse à
ce que M. Peacock nous demande, parce que justement c'est le conseil des
ministres qui devra se prononcer et qui devra fournir la réponse.
Tout ce que M. Peacock et le député de Bagot ont dit a
été enregistré et tout cela sera étudié par
le ministre. Je m'en porte garant.
M. CARDINAL: M. le Président, si vous me permettez, je suis
entièrement d'accord sur tout ce qu'a dit, au début, M. le
ministre. Il a parfaitement raison, M. Peacock, du point de vue de
l'Assemblée nationale, vous pouvez toujours par une loi, que ce soit le
projet de loi no 28, amender d'autres lois, même si c'est dans d'autres
domaines.
Je ne prends qu'un exemple, qui peut soulever des débats, le
projet de loi no 63, qui parlait autant de la Loi du ministère de
l'Immigration que de la Loi du ministère de l'Education.
L'Assemblée nationale dans ce domaine, je ne dis pas le
gouvernement, je dis l'Assemblée nationale est toute puissante et peut,
par n'importe quelle loi, à sa majorité, amender toute autre
loi.
M. PEACOCK: J'ai mal compris. Je sais très bien que
l'Assemblée nationale est toute-puissante, mais elle peut être
aussi illogique qu'elle veut.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Voilà une observation pour le moins
insolente. Tenez donc pour acquis, M. Peacock, que l'Assemblée nationale
est toute-puissante, sans commentai-
res. Les suggestions que vous nous faites, nous en tiendrons compte dans
la mesure où il nous sera possible de le faire et admettez une fois pour
toutes qu'il y a des législateurs et que vous n'êtes pas ici pour
nous donner des leçons.
M. LE PRESIDENT: La parole est au député de
Saint-Jean.
M. VEILLEUX: Le ministre a répondu tout à l'heure.
M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Jacques.
M. CHARRON: M. le Président, il y a dans la première
partie du mémoire du Montreal Teachers Association, une longue partie
qui porte sur la confessionnalité des écoles et même si je
trouve valables, fort valables les idées que vous soulevez à
propos de la multiconfessionnalité des écoles qui serait, sinon
un objectif à court terme, très certainement à moyen terme
pour les Québécois, vous avez eu cette phrase, vous avez dit
à un moment donné: "La majorité des membres de notre
association sont neutres". Ceci m'a posé une question, que je vous
transmets à l'instant. Les commissions scolaires, par la loi 28, seront
obligées d'offrir des écoles confessionnelles,
c'est-à-dire catholiques ou protestantes et autres. Maintenant, elles
seront aussi responsables de l'affectation des professeurs à
l'intérieur de ces écoles.
Qu'est-ce qui va se produire chez les professeurs comme ceux que vous
représentez, quand, par exemple, un professeur préférera
être envoyé dans une école neutre mais que la commission
scolaire lui demandera d'aller enseigner dans une école catholique ou
dans une école protestante? Est-ce que vous seriez prêt à
reconnaître le droit de l'enseignant à refuser d'aller dispenser
sa science et son savoir dans une école dont il n'approuverait pas, ou
la non-confessionnalité ou la confessionnalité, parce que
ça peut être à l'inverse aussi? Les professeurs catholiques
pourraient également refuser d'être affectés à une
école neutre, demandant plutôt d'aller dans une école
confessionnelle.
C'est la première fois que le problème me vient à
l'esprit parce que, contrairement peut-être à ceux de l'Alliance
ou de la CEQ, vous mentionnez qu'il existait chez vous une majorité
neutre. Or, je ne crois pas que... enfin, dans certaines commissions scolaires,
la majorité des écoles ne sera pas neutre. Il va se trouver des
coins de l'île de Montréal où 60 à 65 pour cent des
écoles seront catholiques, 15 à 20 pour cent protestantes et il
en restera 15 à 20 pour cent neutres. Vous aurez des professeurs neutres
qui enseigneront dans des écoles catholiques et des professeurs
catholiques qui enseigneront dans des écoles neutres. Si je
soulève ce problème c'est parce que les tenants de l'école
confessionnelle que la commission a entendus depuis le début nous ont
toujours défini l'école confessionnelle comme une école
où existe une ambiance particulière. Et en définissant
ambiance, on faisait évidemment allusion au corps professoral de
l'endroit. On nous dit: Oui, actuellement, il y a des écoles
confessionnelles, mais tout le monde sait que les professeurs y compris
il y en a un qui est venu nous dire ça même les professeurs
de cathéchèse ne croient pas en Dieu. C'est un reproche que les
parents, tenants de l'école confessionnelle, faisaient. Qu'est-ce qui va
arriver dans le système actuel, où la majorité des
professeurs neutres seront affectés à différentes
confessionnalités?
M. PEACOCK: Il y a deux problèmes, là; je crois qu'on doit
faire une distinction, on doit être franc, on doit faire une distinction
entre l'école catholique et l'école dite protestante, parce que
ça fait bien longtemps que l'école protestante n'est qu'une
école non catholique. Comme ça, on pourrait facilement les
transformer en écoles multiconfessionnelles. Je rappelle que, je ne
crois pas moi-même. Mais parce que notre mémoire suggère
des écoles multiconfessionnelles pour tout le monde, et si les
catholiques veulent une école purement catholique, ce serait illogique,
j'ose le dire encore, de mettre les professeurs qui ne sont pas catholiques
dans cette école, parce que ce n'est pas seulement le fait qu'il y a une
croix sur le mur, mais que le professeur est catholique et quand je dis
catholique, je veux dire bon catholique, catholique croyant et pratiquant. Ce
serait logique dans un système confessionnel. J'espère qu'on fera
faire cette distinction, pour qu'on ne puisse pas, qu'une commission ne puisse
pas envoyer des professeurs qui ne sont pas catholiques dans des écoles
catholiques. Mais la question en est encore de pratique, parce qu'il y a quand
même trop de professeurs pour pas assez d'emplois. Si les professeurs
catholiques sont assurés des postes dans des écoles catholiques,
ils peuvent aussi venir dans nos écoles. Nous aurons alors des
problèmes et des mécontentements, parce qu'il se peut fort bien
que le surplus d'enseignants catholiques vont se trouver dans nos
écoles, car il n'y a rien qui les en empêche. C'est encore un
problème qui n'a pas été vraiment étudié
assez longtemps, je crois.
M. CHARRON: Je ne veux quand même pas exagérer le
problème. Je ne veux pas dire qu'il va y avoir conflit, que ça va
être le cas majoritaire ou disons presque unanime de conflit entre la
confessionnalité de l'école et la confessionnalité propre
de l'enseignant. Mais j'ai l'impression que ce conflit-là va exister.
Si, à certains endroits, les commissions scolaires, d'ailleurs en
réponse aux demandes du comité confessionnel que la loi
crée et en réponse aux demandes des comités
d'écoles, se mettent à dire, en réponse par exemple,
à des parents qui disent: Moi, j'ai choisi d'envoyer mon enfant à
l'école catholique, il se trouve que la majorité
de ces enseignants, après l'expérience de quelques mois,
sont de parfaits athées. Dites-le-moi, est-ce que j'ai une école
confessionnelle, oui ou non? Et pour ce faire, on procédera peut
être, c'est ma crainte, à un transfert de professeurs, mettant
tous les neutres dans les écoles neutres et tous les catholiques...
Mais, à ce moment là, est-ce qu'on n'affecte pas la
qualité de l'enseignement? Il me semble que la raison fondamentale pour
mettre un professeur dans une école plutôt que dans une autre,
c'est sa qualité professionnelle et le fait qu'il doit desservir un plus
grand nombre d'étudiants.
Mais parce que ce professeur aurait une confessionnalité
particulière, on le placerait dans une petite école de 30
élèves par exemple, qui seraient de sa confession, pendant que
l'énorme polyvalente neutre ne recevrait que des professeurs neutres,
peut-être moins qualifiés, et que 180 élèves
recevraient un cours moins valable qu'une trentaine à côté,
à cause de la confessionnalité des enseignants.
Je ne dis pas que ce sera un problème général, mais
pour la première fois, on est ici à la commission pour
ça, pour fouiller le bill je m'aperçois que cette
disposition-là va peut-être créer des conflits. Je ne les
souhaite pas mais ils sont latents au projet de loi.
M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Laurent.
M. PEARSON: M. Peacock, lorsque vous mentionnez que, dans une
école catholique, il ne devrait y avoir que de fervents
chrétiens, est-ce que, dans votre esprit, vous voulez dire que ça
irait jusqu'au fait qu'un professeur de mathématiques, de physique, de
chimie ou de sciences devrait être un fervent catholique?
M. PEACOCK: Vous devez poser la question à d'autres personnes, je
ne suis pas catholique, je ne suis même pas chrétien. Nous
proposons des écoles multiconfessionnelles pour les raisons qu'on vous
donne, mais je suppose que je comprends l'idée d'une école
catholique, je dis catholique, pas protestante.
L'idée d'une école catholique, ça ne veut pas
seulement dire qu'on lui donne le nom d'un saint, on dit que c'est catholique
et qu'il y a des crucifix sur les murs. On croit qu'on crée une ambiance
catholique dans cette école, et le député de
Chicoutimi a bien expliqué cette affaire la dernière fois
et que le professeur de mathématiques catholique inspire ses
élèves par ses relations personnelles. Il ne peut pas enseigner
les mathématiques catholiques dans ce sens pur qu'il donne l'instruction
mais sa personnalité influence l'enfant.
Alors, un catholique qui veut une école catholique veut que ses
enfants soient exposés aux bons catholiques, dont la formation,
l'idée de la vie quoi, le caractère est catholique. C'est quelque
chose que je ne comprends pas. Mais, M. Pearson, vous posez la question au
mauvais endroit parce que je n'y crois pas. Je comprends, mais je ne propose
pas ça.
M. PEARSON: Non, c'était tout simplement pour saisir à peu
près la définition que vous pouviez donner. Autrement dit,
ça veut dire que dans ses rapports extraprofessionnels, par exemple, un
professeur de mathématiques, dans ses relations en dehors de son cours
de mathématiques, dans votre esprit, ça devrait être
quelqu'un qui serait un bon catholique pour enseigner dans une école
catholique. Cela irait jusque là.
M. PEACOCK: Je vais plus loin, je dirais que, si ce n'est pas ça,
ce n'est pas la peine d'avoir des écoles catholiques.
M. LE PRESIDENT: Je remercie M. Peacock, représentant de la
Montreal Teachers Association, de ses représentations et j'en prends
bonne note. M. le ministre.
M. CARDINAL: Ajournement au 16 novembre à 10 heures.
M. CHARRON: Le 16 novembre.
M. LE PRESIDENT: La séance ajourne ses
délibérations au 16 novembre à 10 heures.
M. GOLDBLOOM: Les séances sont prévues pour les 16, 17 et
18.
M. LE PRESIDENT: Les 16, 17 et 18. (Fin de la séance: 10 h
20)
ANNEXE
MEMOIRE PRESENTE PAR L'ASSOCIATION DES CADRES DE LA
CECM
A LA COMMISSION PARLEMENTAIRE DE L'EDUCATION
DE L'ASSEMBLEE NATIONALE DU QUEBEC
PREAMBULE
L'Association des cadres de la C.E.C.M. se fait un devoir de venir
présenter à la commission parlementaire de l'Education son
mémoire sur le projet de loi no 28.
Consciente des profondes répercussions que l'adoption de ce
projet de loi aura, à court et à long termes, tant sur le
système lui-même dans son ensemble que sur tous les cadres et
professionnels de la C.E.C.M., l'association a voulu présenter un
mémoire qui soit vraiment l'expression de la pensée de ses
membres à l'égard de la restructuration scolaire sur l'île
de Montréal. A cette fin, de nombreuses consultations ont
été faites, divers sous-comités d'études ont
été formés et plusieurs recherches ont été
entreprises permettant de recueillir l'opinion éclairée et
mûrie de l'ensemble des cadres et professionnels de la CE.C.M. En outre,
les options de base du présent mémoire ont été
approuvées au cours d'une longue assemblée générale
de nos membres. La présentation d'un tel mémoire devrait retenir
l'attention de la commission parlementaire non seulement parce que les
recommandations qu'il contient ont été étudiées et
formulées par des pédagogues et des administrateurs oeuvrant
quotidiennement dans le secteur montréalais de l'éducation et qui
ont voulu ainsi apporter un peu de leur compétence et de leur
expérience à la solution tant attendue du problème de la
restructuration scolaire de l'île de Montréal.
La préparation de ce mémoire a cependant été
marquée par une contrainte lourde à supporter: celle du temps.
Nous aurions aimé pouvoir consacrer plus de temps à
l'étude de cette question. Certes, les cadres de la C.E.C.M.
désirent qu'une décision soit enfin prise en regard de la
restructuration scolaire de l'île de Montréal dont on parle dans
le milieu montréalais depuis plusieurs années. Mais, c'est
peut-être au moment de la prise d'une décision si importante et si
lourde de conséquence pour l'avenir de l'éducation à
Montréal qu'il faut éviter une précipitation hâtive
dont tout le monde regretterait les effets. Notre association avait
demandé un délai pour comparaître devant la Commission
parlementaire de l'éducation sur ce projet de loi. Nous désirions
par ce geste faire part de notre vive inquiétude de ne pouvoir faire
participer démocratiquement dans une période si courte nos six
cents membres à l'étude approfondie d'un projet de loi si
important pour eux au point de vue professionnel. Même si la question
à l'étude n'est pas nouvelle, il reste que l'heure de la
décision est grave et retarder de quelque temps l'adoption du projet de
loi no 28 nous paraissait normal en regard des années au cours
desquelles ce sujet a été à l'étude.
L'impossibilité de retarder les séances de la commission
parlementaire nous a contraints de présenter un document que nous
aurions voulu plus complet et illustrant mieux par plus de données
factuelles le bien fondé de nos recommandations. Quoi qu'il en soit,
c'est en vue de contribuer professionnellement à l'élaboration
d'un système scolaire efficace et répondant aux besoins de
l'éducation montréalaise que l'Association des Cadres de la
C.E.CM. soumet à l'attention des membres de la commission parlementaire
de l'Education l'opinion de ses membres en regard de la restructuration
scolaire de l'île de Montréal. Nous restons, par ailleurs,
à votre entière disposition pour fournir divers renseignements ou
données supplémentaires jugés nécessaires pour
appuyer nos recommandations contenues dans ce mémoire.
Dans le présent mémoire, nous exposons dans les deux
premiers chapitres notre thèse principale suivant laquelle
l'établissement d'un système scolaire unifié pour
l'île de Montréal doit s'effectuer par le processus d'une
intégration graduelle, laquelle pourrait être mise en action dans
le plus bref délai avec la création d'un conseil central
relativement fort qui constituerait l'instrument clé pour la mise en
place d'un réseau de commissions scolaires unifiées pour au plus
tard le 1er juillet 1975.
Dans un troisième chapitre, nous traitons des droits et
intérêts de nos membres en regard des profonds changements
qu'amènera la restructuration scolaire. Un quatrième chapitre
apporte d'autres considérations sur des aspects particuliers du projet
de loi no 28 qui devraient aussi retenir l'attention du législateur.
Enfin, vous trouverez dans le dernier chapitre l'ensemble des recommandations
et amendements proposés par notre association.
POUR UN SYSTEME SCOLAIRE UNIFIE
L'Association des cadres de la C.E.C.M. endosse pleinement le principe
d'un système scolaire unifié pour l'île de Montréal.
C'est en fonction d'une conception de la démocratie tenant compte, non
pas uniquement des seuls droits de l'individu mais également des
principales dimensions collectives ou des groupes d'appartenance qui
conditionnent l'évolution de l'individu et le caractérisent dans
toute sa personnalité, que nous en sommes venus à
reconnaître cette fonction majeure que le bill 28 fait assumer au
système scolaire montréalais.
En effet, jusqu'à présent, le système scolaire
québécois a remis aux collectivités linguistiques
(francophones et anglophones) et confessionnelles (catholiques et protestants)
la responsabilité de transmettre aux jeunes à la fois les
connaissances, les valeurs et la vision de la société dans
laquelle ils évoluent. Cette organisation scolaire n'a certes pas
contribué à un développement optimal d'une
communauté culturelle et sociale. Objectivement, on se retrouve
aujourd'hui, à Montréal plus particulièrement, avec deux
cultures, deux visions du monde, deux solitudes qui cohabitent sans
réellement se rejoindre. Parce que la société
québécoise n'a pu assumer directement dans sa
totalité et sa diversité la responsabilité de
l'école, celle-ci a été utilisée par d'autres
groupes (les collectivités canadienne-française et
canadienne-anglaise) à leurs fins spécifiques. Le système
scolaire a servi d'instrument d'organisation et de développement social
pour d'autres groupes que la société québécoise
comme telle, dans son ensemble.
Certes, nous ne pouvons attribuer à l'école la
responsabilité exclusive de cette situation, dont les diverses
conséquences (distribution inégale des ressources scolaires,
assimilation massive des immigrants, minorisation
accélérée de la majorité francophone, rupture entre
l'école de la majorité et le milieu de travail, etc.) ont
été décrites et analysées en long et en large.
Mais, par ailleurs, nous considérons qu'une réforme en profondeur
du système scolaire montréalais accompagnée
simultanément d'autres mesures, comme par exemple une politique des
langues et de l'immigration, contribuera à mettre fin à
l'existence de ces deux "solitudes" qui ne pourront continuer de s'ignorer
longtemps sans entraîner des coûts sociaux majeurs pour l'une comme
pour l'autre. Il n'est plus permis de laisser la société
québécoise évoluer et se transformer spontanément
au gré des dynamismes particuliers. La collectivité
québécoise se doit, dans quelque contexte constitutionnel que ce
soit, de renforcer ses caractéristiques fondamentales à l'aide du
seul instrument collectif légitime qu'est l'Etat. La
démocratisation scolaire, à notre avis, ne peut être
recherchée en tenant compte uniquement des libertés individuelles
qu'elle favoriserait, mais en tenant un aussi bon compte des dimensions
collectives fondamentales à côté desquelles aucun individu,
à Montréal comme dans tout le Québec, ne peut passer dans
le développement de sa personnalité.
Cette question fondamentale à savoir l'orientation de la
société québécoise la démocratie ne
peut pas la trancher comme telle, par dessus la volonté des citoyens. La
démocratie ne privilégie pas un type de la société
à l'exclusion des autres, pas plus pour le Québec que pour
d'autres sociétés. Elle ne vise qu'à permettre aux
citoyens, à travers leurs élus et à l'aide de leur propre
participation, de choisir leurs vraies options fondamentales.
Selon nous, la question fondamentale se pose ainsi: Voulons-nous une
réforme scolaire à Montréal qui consolidera la situation
actuelle ou voulons-nous une réforme scolaire à Montréal
qui tendra vers l'instauration d'une société
québécoise, où les principaux partenaires se
définiront d'abord les uns par rapport aux autres plutôt
qu'à l'exclusion les uns des autres, ou encore, par rapport à
d'autres réalités extérieures à celles du
Québec? En regard de cette question, nous affirmons qu'un système
scolaire unifié pour l'Ile de Montréal, tel que proposé
dans le bill 28, permettra aux francophones, anglophones et individus de toutes
autres ethnies, qu'ils soient catholiques, protestants ou autres de s'engager
dans un processus de construction d'une société
québécoise originale.
La poursuite de cet objectif primordial nécessite, il va sans
dire, un certain pragmatisme dans la recherche des moyens. L'unification
constitue un défi à relever pour la société
scolaire montréalaise; ce défi, elle ne pourra le relever qu'en
tenant compte des réalités et des dynamismes actuellement
existants.
Si nous reconnaissons que le principe d'un système scolaire
unifié doit être mis en application le plus tôt possible
pour l'île de Montréal, nous ne pouvons accepter par ailleurs
qu'une contrainte législative nuise à la poursuite d'un tel
objectif. Or, il nous apparaît que le projet de loi no 28, tel que
rédigé, risque à cause d'une interprétation trop
rigide de fausser le véritable esprit qui doit animer le processus
graduel vers l'unification. Comme cadres de la plus importante commission
scolaire du Canada, nous vivons quotidiennement les problèmes toujours
de plus en
plus complexes de l'administration et de la bureaucratie scolaires. Nous
avons connu et nous connaissons encore les difficultés pour adapter un
système administratif qui réponde vraiment aux exigences de
l'éducation d'aujourd'hui. Certes, une réforme des structures
scolaires pour l'Ile de Montréal s'avère nécessaire et
urgente, mais nous restons convaincus qu'une telle réforme sera
véritablement effective dans la mesure où la loi qui l'inspire
présente suffisamment de souplesse pour permettre aux individus et aux
organismes en cause d'évoluer sans coercition comme sans délai
excessif vers l'objectif poursuivi.
A cette fin, il nous apparaît que deux conditions essentielles
doivent être absolument respectées pour atteindre la mise en
commun de toutes les ressources du système scolaire de l'île un
processus graduel mais dynamique conduisant à une intégration
progressive et la mise en place d'un organisme central relativement fort
exerçant un rôle de leadership auprès des dynamismes locaux
actuellement présents dans le milieu scolaire. Cet organisme que nous
identifions au conseil scolaire de l'île devrait être muni de
pouvoirs lui permettant, tout en favorisant l'épanouissement des
diverses cultures, d'orienter vers un objectif commun les forces actuellement
agissantes en vue de constituer progressivement un milieu scolaire
montréalais qui soit essentiellement le reflet d'une culture
typiquement' québécoise. C'est dans un conseil scolaire
unifié que se situe selon nous le point de départ d'un
regroupement de toutes les ressources et de toutes les énergies du
milieu scolaire de l'Ile de Montréal. C'est à partir d'un tel
organisme, que les commissions scolaires actuellement existantes trouveront
l'élan et l'appui indispensables pour entreprendre dans un climat de
compréhension et de collaboration l'unification de leurs ressources
culturelles et pédagogiques tout en favorisant l'épanouissement
du génie propre de chacune des deux cultures.
En conclusion, l'Association des Cadres de la C.E.C.M., tout en
endossant pleinement la mise en application le plus tôt possible du
principe d'un système scolaire unifié, recommande par ailleurs au
législateur d'user de réalisme et de souplesse et de permettre
que dans un délai plus adéquat un processus graduel conduise
à une intégration plus organique et moins artificielle.
POUR UNE INTEGRATION GRADUELLE (
SOUS LA RESPONSABILITE D'UN CONSEIL RELATIVEMENT
FORT)
Tout en reconnaissant le principe d'un système scolaire
unifié tel qu'exposé dans le chapitre précédent,
l'Association des cadres de la C.E.C.M. est convaincue que cet objectif ne
pourra être atteint que par une intégration graduelle.
Nous tenons dans ce chapitre, d'une part, à décrire les
motifs qui nous amènent à croire à la
nécessité d'une intégration progressive et, d'autre part,
à expliciter comment, selon nous, un conseil central relativement fort
peut être l'instrument premier dans la mise en marche du processus
d'intégration.
I RAISONS QUI JUSTIFIENT UNE INTEGRATION GRADUELLE
La mise en place d'un processus d'intégration graduelle nous
parait justifiée pour les raisons suivantes: a) Le bon fonctionnement
des écoles
Pour bien fonctionner, les écoles doivent s'appuyer sur de
solides structures pédagogiques et administratives qui répondent
à leurs besoins. Elles doivent trouver continuellement au sein du
système dont elles font partie le ressourcement nécessaire
à leur bon fonctionnement et à leur progrès. Une
intégration trop brusque et trop hâtive aurait pour effet de
provoquer des bouleversements qui, inévitablement, rebondiraient au
niveau de l'école. b) Les exigences de la réforme
pédagogique
La réforme pédagogique est à peine amorcée
et elle seule nécessite déjà d'immenses efforts
d'adaptation et de renouvellement. Le règlement no 7, que le
ministère de l'Education vient d'édicter, crée les
conditions et les cadres nécessaires pour mettre en marche une
réforme pédagogique en profondeur. Une telle réforme
requiert un changement dans les mentalités, les programmes, les
méthodes, les horaires, etc... Ces changements doivent avoir pour effet
de transformer complètement l'enseignement et l'école.
Il faut éviter de reléguer au troisième plan ou de
noyer dans des préoccupations administratives ou structurales les
efforts qui doivent être entrepris sans retard pour adapter la
pédagogie aux exigences de l'éducation nouvelle. La
réforme des structures ne peut primer sur la réforme
pédagogique. Bien au contraire, ces deux réformes doivent se
faire simultanément. Pour les personnes en place dans chaque classe,
dans chaque école et dans chaque échelon administratif, il s'agit
donc d'effectuer, non pas une simple évolution, mais une
véritable mutation si l'on veut que les deux réformes, celle de
la pédagogie comme celle des structures, aient une chance de
réussir. c) Le respect des diversités réelles et des
mentalités actuelles
Le défi de l'unification ne pourra être relevé que
dans la mesure où l'on respectera les cheminements nécessaires
qui permettront de mieux tenir compte des diversités réelles et
des mentalités actuelles. Pour nous, un nouvel esprit doit s'instaurer
où le travail se fera en commun dans le plus grand respect des uns et
des autres. Des relations et une collaboration entre francophones et
anglophones, entre catholiques, protestants et autres devront être
constantes. Il faut éviter le danger de coercition et de conflits que
des délais trop courts ou une précipitation hâtive
risqueraient d'entrafner.
Le conseil scolaire de l'île devrait avoir cette constante
préoccupation, tout en présidant à la mise en place du
nouveau système, d'inciter les organismes locaux à travailler
ensemble, dans le respect des diversités linguistiques et culturelles,
à l'élaboration graduelle d'un système scolaire
unifié. d) Le danger de ghettos
La solution globale proposée dans le projet de loi 28
(intégration d'un seul coup d'éléments si
différents) risque de déclencher des mécanismes de
défense considérables qui pourraient produire des effets
contraires à ceux recherchés. Il faut éviter, entre
autres, un risque très sérieux de balkanisation où des
groupes minoritaires se sentant brimés dans leurs droits chercheraient
à se regrouper et à constituer des blocs fermés sur
eux-mêmes. Devant ce danger, nous croyons qu'une intégration
graduelle soutenue par une autorité centrale respectant les droits de
chacun sera la garantie d'une véritable unification de toutes les forces
en présence. e) La nécessité d'une politique des langues
et d'une politique de l'immigration
Le bill 28 suscite et suscitera de nombreuses incompréhensions,
prises de position ou discussions parce qu'il ne s'appuie pas sur une politique
linguistique gouvernementale appropriée.
Le processus de l'intégration graduelle vers un système
scolaire unifié devrait permettre au gouvernement provinciel d'user du
temps voulu pour élaborer, et même établir par
législation au besoin, une politique des langues et une politique de
l'immigration en vue de favoriser l'intégration harmonieuse des
minorités au groupe majoritaire français et freiner
l'anglicisation des Néo-Québécois.
Une politique adéquate des langues devrait reconnaître la
place prioritaire qu'il faut faire au français dans le Québec et
préciser, entre autres, les droits linguistiques au point de vue
scolaire.
Des mesures n'affectant qu'une réforme des structures scolaires
sont bien insuffisantes pour favoriser la priorité concrète du
français. Il faudrait aussi généraliser un usage meilleur
et plus large du français dans le monde du travail, la vie
économique, la conduite des affaires publiques, la publicité, les
loisirs, etc. L'élaboration de ces politiques devrait se faire
simultanément avec la mise en place d'un système scolaire
unifié. f) Besoin d'intégrer graduellement le personnel
impliqué
La restructuration scolaire de l'île de Montréal touche
directement dans leurs attributions et leurs fonctions un nombre impressionnant
de fonctionnaires et d'employés qui oeuvrent actuellement dans les
diverses commissions scolaires. Ce changement des structures entraînera
inévitablement dans bon nombre de cas un réaménagement des
fonctions et de nouvelles définitions de responsabilités.
Nous
croyons qu'une tâche importante du conseil sera de fournir
à tout le personnel impliqué les moyens requis et le temps
nécessaire pour leur permettre de s'adapter dans des conditions normales
aux changements qui seront amorcés. Les actions à entreprendre
pour l'unification, tant au niveau du conseil qu'au niveau des commissions
scolaires, devront être proposées au personnel impliqué
avec beaucoup de souplesse et de flexibilité afin de s'assurer une
participation volontaire et dynamique de tous dans l'élaboration et la
mise en place du nouveau système. Cela suppose que seront prévus
à l'intention de tout le personnel des programmes d'information, de
formation et de recyclage pour permettre à chacun de s'intégrer
harmonieusement dans le nouveau système et de remplir efficacement des
fonctions nouvelles qu'il pourrait être amené à exercer. g)
Le besoin d'informer les parents et le public
L'établissement d'un système scolaire unifié qui se
veut démocratique et respectueux des particularités culturelles
et religieuses de la communauté montréalaise ne pourra
réussir qu'avec la participation active de tous les citoyens. Les
parents, particulièrement, seront directement impliqués dans les
mécanismes de participation et de consultation et auront un rôle
important à jouer pour l'amélioration du système scolaire.
Déjà, sur le territoire métropolitain, des efforts sont
entrepris pour rapprocher les parents de la vie de l'école et en faire
d'authentiques partenaires. Nous savons que les progrès sont lents et
que la grande majorité des parents montréalais sont encore
absents dans le domaine de l'éducation scolaire. Par ailleurs,
l'élection des commissaires d'écoles constituent pour la grande
partie de l'île de Montréal un processus démocratique
nouveau. Quand nous savons déjà que dans le reste de la province
existe un faible pourcentage d'électeurs aux élections des
commissaires d'écoles, on peut penser que la première
élection des commissaires d'écoles au suffrage universel sur
l'île de Montréal nécessitera préalablement une
campagne d'information et de sensibilisation auprès de tout le public
concerné. L'implantation des comités d'écoles et des
comités de parents devrait être une première étape
dans un processus d'intégration graduelle pour permettre aux parents et
au public de participer progressivement à l'établissement du
système scolaire unifié.
Toutes ces raisons ainsi décrites justifient à elle seules
que l'établissement d'un système scolaire unifié doive se
faire de façon progressive, sans contrainte excessive ou coercition mais
en tenant compte des réalités existantes et avec l'appui d'un
organisme central qui pourra jouer tout au cours de cette opération un
rôle de leadership, de soutien et, au besoin, d'arbitre.
Il LE CONSEIL SCOLAIRE: UNE VERITABLE AUTORITE SCOLAIRE
METROPOLITAINE_______________________
Nous croyons qu'en vue d'implanter graduellement un système
scolaire unifié qui soit cohérent et efficace, le premier moteur
de cette entreprise se situe au niveau du conseil scolaire. Aussi nous
paraît-il plus approprié de donner dès le départ un
caractère plus représentatif et des pouvoirs opérationnels
à cet organisme clé qui aura pour tâche primordiale
d'animer et de soutenir le mouvement vers l'intégration. Au lieu de
préparer l'unification surtout par des plans et projets
nécessairement à caractère plutôt théorique,
nous croyons nécessaire que les éléments constituants
s'engagent dans des expéreinces communes, graduellement plus nombreuses
et plus complexes, et entreprennent par étapes des programmes communs
tant à l'échelle de l'île qu'à l'échelle des
territoires des futures commissions scolaires unifiées.
Dans cette optique, le conseil scolaire devrait être
constitué, dès la sanction de la loi, de représentants
désignés par les différentes commissions scolaires
existantes, à l'instar de la formation du conseil exécutif de la
Communauté urbaine de Montréal.
Le conseil, une fois formé, pourrait se mettre à la
tâche et entreprendre l'établissement et l'exploitation de
certains services communs pour toutes les commissions scolaires de
l'île.
Nous croyons qu'à ce niveau une des premières tâches
du conseil serait de s'attaquer au problème de la taxation et à
celui du financement des commissions scolaires, et d'amorcer des solutions
quant au rattrapage à effectuer dans les milieux
défavorisés de l'île.
Egalement, le conseil pourrait mettre sur pied, selon les
possibilités et les besoins prioritaires, des services communs pour
toutes les commissions scolaires de l'île, comme par exemple: le
contentieux, le transport, la planification, la construction, l'informatique,
la recherche pédagogique appliquée, etc.
Simultanément à l'action à l'échelle de
l'île, le conseil devrait inviter les commissions scolaires
situées sur un même territoire à constituer des
comités de travail (genre conseil provisoire tel que prévu dans
le bill 27 pour le regroupement des commissions scolaires) qui pourraient,
d'une part, entreprendre un inventaire de leurs ressources et soumettre au
conseil leur plan d'intégration et, d'autre part, amorcer des programmes
d'actions communes dans leur territoire, programmes qui cadreraient avec le
plan général établi par le conseil.
Le conseil scolaire, vu ainsi comme l'instrument principal d'une
intégration graduelle de toutes les forces en présence, sera une
meilleure garantie que l'établissement d'un système scolaire
unifié pourra se faire dans un climat de sérénité
et de confiance avec la participation de tous les intéressés.
Dans cette optique, nous recommandons que le chapitre du bill 28
concernant les dispositions transitoires soit amendé dans son esprit et
dans sa forme de telle façon que soit mis en place, dès la
promulgation de la loi, un conseil permanent qui, tout en jouissant d'un
délai plus raisonnable, soit muni de pouvoirs lui permettant, en plus
d'élaborer des projets et des plans pour l'unification, de
déclencher certaines opérations qui mettront en branle le
processus d'une unification graduelle des diverses commissions scolaires.
Nous croyons que pour réaliser harmonieusement l'objectif de la
commission scolaire unifiée, le conseil scolaire devrait être
chargé de préparer et de soumettre au lieutenant-gouverneur en
conseil, au plus tard un an après sa création, un plan
d'intégration graduelle comportant la mise en place et l'exploitation
par étapes de services communs tant à l'échelle de
l'île qu'à l'échelle de chacun des territoires des
nouvelles commissions scolaires et prévoyant l'entrée en
opération des nouvelles commissions scolaires pour au plus tard le 1er
juillet 1975.
Par ailleurs, tout en reportant la date limite pour la formation des
commissions scolaires au 1er juillet 1975, nous n'excluons pas la
possibilité que les commissions scolaires unifiées puissent
commencer à fonctionner à des dates différentes, ce qui
permettrait ainsi une évolution progressive vers l'unification en
respectant les particularités des divers groupes impliqués. Nous
croyons également que dans ce processus d'intégration graduelle
il ne faut pas exclure la possibilité pour le conseil d'être
amené à reconsidérer la carte scolaire telle que
prévue actuellement dans le projet de loi no 28.
Ces diverses considérations nous amènent à insister
pour que le législateur laisse au conseil beaucoup de souplesse dans son
fonctionnement et lui permette de s'ajuster constamment aux
réalités auxquelles il aura à faire face. Il faudrait
aussi prévoir dans la loi, comme cela existe d'ailleurs pour la
communauté urbaine de Montréal, que tout délai
accordé par la présente loi au conseil scolaire de l'île
pour adopter une mesure ou poser un geste autre que la mise en place pour le
1er juillet 1975 des nouvelles commissions scolaires, puisse être
prorogé pour une période d'au plus un an par le
lieutenant-gouverneur en conseil à la demande du conseil scolaire.
En conclusion, l'intégration graduelle, processus indispensable
pour en arriver à établir avec succès un système
scolaire unifié pour l'île de Montréal, nécessite
une modification du bill 28 de telle façon que les dispositions de la
loi assurent la mise en place de l'organisme clé et le munissent de
moyens souples et d'instruments solides pour exercer, dans un délai
suffisant, la tâche difficile qui lui revient.
LES DROITS ET INTERETS DE NOS MEMBRES
La restructuration du système scolaire de l'île de
Montréal touchera directement ou indirectement un grand nombre de
personnes. En particulier, le changement des structures entraînera
inévitablement, pour la plupart des cadres et professionnels qui
oeuvrent dans les diverses commissions scolaires, un
réaménagement des fonctions et une nouvelle définition de
responsabilités, quand ce ne sera pas un changement de lieu de travail
ou une insertion dans une nouvelle équipe de gestion. Des changements
aussi nombreux et aussi radicaux au cours d'une période de transition
relativement brève ne seront pas sans faire naître chez tout le
personnel impliqué de sérieuses tensions requérant de
chacun un fort degré de tolérance à
l'anxiété.
Pour éviter que ne se développent des mécanismes de
défense considérables et une résistance au changement qui
risqueraient de compromettre le succès de cette vaste
réorganisation des structures, nous croyons qu'une des tâches
importantes du conseil (comme des autorités de chacune des commissions
scolaires existantes ou en voie de formation) sera de fournir à tout le
personnel impliqué les moyens requis et le temps nécessaire pour
lui permettre de s'adapter aux nouvelles fonctions et aux nouvelles
conditions.
Pour permettre une harmonieuse intégration de tous les
fonctionnaires et employés dans les nouvelles structures (et en
particulier des cadres et professionnels que notre association
représente), voici quelques-unes des conditions qui devront être
respectées. Certaines de ces conditions devraient être garanties
par des dispositions du projet de loi lui-même, alors que les autres
devraient faire partie de tout programme d'intégration du personnel qui
vise à respecter les droits des personnes impliquées. Le
projet de loi devrait garantir encore plus clairement la sécurité
d'emploi de tous les cadres, professionnels, enseignants et autres
employés des commissions scolaires existantes. Une telle garantie
paraît d'autant plus nécessaire dans le cas des cadres scolaires
que ceux-ci n'ont pas la protection minimum accordée aux salariés
par le code du travail ou par la présence d'un syndicat pour faire
valoir leurs droits. Chacun devrait être assuré d'occuper
soit des fonctions identiques ou similaires à celles occupées
antérieurement à la restructuration, soit de se voir offrir de
nouvelles fonctions qui tiennent compte de ses goûts et aptitudes et de
sa capacité de réadaptation ou de son potentiel de
développement. Des cours de formation et de recyclage (in-service
training) et des occasions d'apprentissage devraient faciliter l'adaptation
à leurs nouvelles tâches de tous ceux affectés par des
changements de fonctions. Là où la chose sera possible, le
transfert à de nouvelles fonctions devrait se faire graduellement ou par
étapes. Des mécanismes de revision devraient permettre
à tout cadre ou autre fonctionnaire qui se sent lésé par
la réaffectation qu'on lui impose de faire valoir son point de vue et
assurer ainsi une meilleure équité dans le plan
d'intégration du personnel. Des mécanismes de consultation
avec des représentants des cadres et de chacun des groupes
d'employés concernés devraient permettre de développer une
procédure appropriée pour le transfert et la réaffectation
des différentes catégories de personnel et, notamment,
déterminer certains critères pour la rétention ou le
transfert de cadres ou autres fonctionnaires, d'une fonction à une
autre, ou d'une commission scolaire à une autre.
L'élaboration du plan d'intégration ou la répartition des
nouvelles fonctions devrait se faire avec la participation active et dynamique
des cadres ou fonctionnaires impliqués, à un point tel que par
cette participation les personnes se sentent vraiment engagées dans le
processus de changement et développent ainsi une attitude positive face
aux nombreuses transformations que la restructuration impose. Les
nouvelles tâches, responsabilités ou fonctions de chacun devraient
être décrites aussi clairement que possible pour réduire
les risques de confusion et les descriptions de tâches devraient
être revisées fréquemment pour s'assurer qu'elles
reflètent bien la situation du moment et qu'elles répondent bien
aux besoins changeants d'un système en évolution. Egalement un
processus adéquat d'évaluation des tâches devrait
déceler rapidement la nécessité de reviser (en moins ou en
plus) le contenu des tâches ou de réévaluer les traitements
y attachés.
C'est consciente des nombreuses implications des réformes
structurales proposées dans le projet de loi 28 pour le statut et le
développement professionnel de ses membres, que l'Association des cadres
de la C.E.C.M. se déclare prête à collaborer pleinement
avec les autorités concernant l'élaboration et la mise en place
des nouvelles structures de gestion scolaire.
AUTRES PREOCCUPATIONS GENERALES
La présente section de notre mémoire vise à
développer quelques thèmes ayant trait à d'autres
préoccupations générales touchant le projet de loi no 28:
la démocratisation, les contrôles gouvernementaux, la
confessionnalité et le rôle du conseil en matière
pédagogique.
A La démocratisation
Il va s'en dire que l'Association des cadres de la CECM, tout en
souscrivant au principe d'un système scolaire unifié, tient
à préserver le caractère démocratique que devront
revêtir les nouvelles structures administratives scolaires. Nous
reconnaissons que le projet de loi no 28, dans son esprit, manifeste un souci
certain de démocratisation du système scolaire
montréalais. Ainsi, il est heureux de pouvoir constater que tous les
citoyens de l'île de Montréal pourront enfin élire leurs
commissaires d'écoles. Il est heureux également que la loi
reconnaisse que les parents puissent devenir des partenaires dans un
système public d'éducation et que des mécanismes de
consultation aient été prévus pour leur permettre de mieux
jouer le rôle qui leur revient en éducation scolaire. Toutefois,
la démocratie ne se borne pas exclusivement à l'élection
de ceux à qui on confie des responsabilités. Il faut en plus que
ces personnes élues soient munies de véritables pouvoirs qu'elles
doivent exercer sans des ingérances ou des contrôles excessifs ou
inutiles. A cet égard, nous croyons que le gouvernement fausse le
processus démocratique par ses approbations et ses contrôles
fréquents dans toutes les prises de décisions importantes de
même que par la nomination de personnes de son choix à des postes
clés, tel que les dispositions présentes du projet de loi no 28
l'y autorisent.
Tout en reconnaissant que l'Etat constitue l'autorité
première en matière d'éducation publique nous croyons que
le système scolaire montréalais ne pourra être
qualifié de démocratique que si l'on procède à une
véritable délégation de pouvoirs permettant à
chaque organisme d'exercer pleinement ses responsabilités. C'est dans
cet esprit que nous formulons plus loin (chapitre V) divers amendements
à la loi concernant les comités d'écoles, les commissions
scolaires et le conseil. Ces amendements proposés amélioreront le
processus démocratique du système scolaire montréalais et
permettront l'établissement d'une véritable
décentralisation devenue indispensable pour permettre aux organismes
locaux de répondre aux besoins et exigences de leur clientèle
respective.
En regard de la démocratisation, nous voudrions souligner un
point particulier au sujet de la représentativité des membres
provisoires du conseil. L'article 9 des dispositions transitoires
prévoit la nomination de treize membres au conseil. Nous croyons que ces
treize membres devraient être désignés par et parmi les
commissaires des commissions scolaires existantes et non par le gouvernement.
Nous suggérons en plus pour des motifs explicités plus loin que
la représentation des membres du conseil soit déterminée
de la façon suivante : a) six (6) personnes choisies par et parmi les
membres de la Commission des écoles catholiques de Montréal; b)
deux (2) personnes choisies par et parmi les membres du Bureau
métropolitain des écoles protestantes de Montréal; c)
quatre (4) personnes choisies par et parmi les membres des autres commissions
scolaires catholiques existantes; d) une (1) personne choisie par et parmi les
membres des commissions scolaires protestantes existantes autres que celles qui
sont soumises à l'autorité du Bureau métropolitain des
écoles de Montréal.
Ce mode de répartition pour la désignation des membres du
conseil permettrait une représentation proportionnelle plus
équitable par rapport aux populations scolaires francophones et
anglophones, catholiques et protestantes. De plus, il amènerait une
représentation plus juste des commissions scolaires catholiques autres
que la Commission des écoles catholiques de Montréal, lesquelles
présentent des particularismes variés dus à leur
clientèle plus hétérogène (catholique
française ou anglaise), leur milieu socio-économique, leurs
structures administratives différentes, leur situation
géographique etc.
Le tableau comparatif suivant (page 35) démontre de façon
plus explicite le bien fondé de notre recommandation.
B Les contrôles gouvernementaux
Dans un même ordre d'idées, nous formulons de
sérieuses réserves quant aux nombreux contrôles
gouvernementaux prévus dans le texte de loi. Certaines de ses
interventions (déplacement du siège social du conseil,
décret pour un recensement) sont occasionnelles et ne constituent pas
une entrave. D'autres (établissement des honoraires des membres du
conseil, approbation des budgets) sont vraiment imperatives et leur
utilité n'est pas discutée. Par ailleurs, certaines autres
interventions touchent directement les opérations courantes du
conseil et des commissions scolaires. Il s'agit particulièrement de
nombreuses décisions administratives relatives aux emprunts, aux
transactions immobilières, aux constructions, aux dépenses
d'entretien, d'amélioration et de rénovation et aux diverses
ententes et conventions relatives à l'implantation et à la mise
en oeuvre de projets communautaires. L'administration d'un système
scolaire unifié à l'échelle de l'île de
Montréal se doit, pour être efficace, d'user de pouvoirs assez
étendus pour être en mesure de répondre adéquatement
aux besoins des divers organismes socio-économiques du milieu
montréalais.
De plus, la complexité du système administratif, la
lourdeur et la lenteur du fonctionnarisme et de la bureaucratie
inhérentes aux grands organismes rendent encore plus nécessaire
un réel partage des décisions.
Un manque de latitude dans l'exercice des pouvoirs risque de paralyser
le fonctionnement du système et d'inhiber les énergies mises en
place. Nous recommandons dans la section suivante de notre mémoire
divers amendements qui éliminent ou restreignent certains
contrôles gouvernementaux que nous avons jugés excessifs.
C La confessionnalité
En regard de la confessionnalité, nous souscrivons
entièrement à l'établissement de structures
administratives non confessionnelles telles que prévues dans le projet
de loi no 28. Nous reconnaissons également le bien fondé d'offrir
au milieu scolaire certaines garanties confessionnelles qui assureront le
respect des diverses options religieuses. Nous souhaiterions cependant que pour
garantir l'option religieuse des non catholiques et des non protestants, le
législateur introduise les mêmes mécanismes qui ont
été prévus pour les catholiques et les protestants.
Par ailleurs, selon un principe suivant lequel une école publique
doit aujourd'hui, dans un contexte oecuménique, accepter tous les
enfants quelle que soit leur option religieuse, nous sommes portés
à croire que la population serait prête à accepter des
écoles non étiquetées sur le plan confessionnel mais qui,
toutefois, respecteraient les options religieuses de chaque individu. A cet
égard, nous recommandons au législateur de prévoir dans la
loi, dans la mesure où il se serait assuré que la population le
désire, une possibilité de regrouper les enfants selon la langue
dans des écoles multi-confessionnelles.
D Rôle du conseil en matière pédagogique
En matière pédagogique, le Ministère de
l'éducation a comme rôle principal à l'échelle de la
province d'élaborer les grandes politiques, d'établir la
planification à long terme, de concevoir les programmes et de coordonner
les initiatives existantes.
Au niveau local, la commission scolaire a principalement un rôle
d'exécution et d'organisation. C'est à elle que revient la
responsabilité d'appliquer les politiques pédagogiques en les
adaptant aux besoins et possibilités du milieu.
Avec l'établissement sur l'île de Montréal d'un
système scolaire unifié, nous croyons qu'un conseil scolaire, qui
constitue un palier intermédiaire entre le ministère et les
commissions scolaires, devrait exercer dans certains domaines
pédagogiques un rôle de planification, de coordination et de
service pour les commissions scolaires.
Cette fonction particulière que nous attribuons au conseil
devrait en être une d'expertise plutôt que d'autorité de
type hiérarchique.
A cette fin, nous recommandons, pour des facteurs d'efficacité et
de rentabilité, que le conseil scolaire puisse mettre sur pied certains
services pédagogiques.
Nous songeons, entre autres, à la recherche pédagogique
appliquée dont les expertises pourraient être faites en
collaboration avec les commissions scolaires, à l'éducation de
l'enfance inadaptée dont les besoins divers nécessitent une
variété de services hautement spécialisés, et
également à l'éducation permanente afin de permettre une
meilleure planification et utilisation des ressources pour certaines
clientèles adultes.
Cette mise en commun des initiatives et ressources pédagogiques
au niveau de l'île aurait pour effet de mieux servir l'enseignement et
d'accélérer les progrès dans la réforme
d'éducation.
NOS RECOMMANDATIONS ET LES AMENDEMENTS
PROPOSES
Nous regroupons dans cette section nos recommandations et les
amendements proposés en suivant les thèmes
développés dans les chapitres précédents.
I- PRINCIPALES POSITIONS ET RECOMMANDATIONS 1 Nous
endossons pleinement le principe d'un système scolaire unifié
pour l'île de Montréal. 2 Nous croyons cependant que seul
un processus dynamique d'intégration graduelle respectant davantage la
capacité d'évolution du milieu permettra d'établir avec
succès un système scolaire unifié sur l'île de
Montréal. 3 Nous recommandons que l'on donne dès le
départ au Conseil scolaire un caractère plus représentatif
et des pouvoirs opérationnels pour lui permettre d'animer et soutenir
l'implantation graduelle des nouvelles commissions scolaires unifiées. 4
Nous recommandons que pour réaliser harmonieusement l'objectif de
la commission scolaire unifiée, le conseil scolaire soit chargé
de préparer et de soumettre au lieutenant-gouverneur en conseil, au plus
tard un an après sa création, un plan d'intégration
graduelle comportant la mise en place et l'exploitation par étapes de
services communs tant de l'échelle de l'île qu'à
l'échelle de chacun des territoires des nouvelles commissions scolaires,
et prévoyant l'entrée en opération des nouvelles
commissions scolaires pour au plus tard le 1er juillet 1975. 5 Nous
recommandons que les commissions scolaires existantes situées sur chacun
des territoires prévus dans le plan d'intégration constituent des
comités de travail genre "conseil provisoire" tel que défini dans
la loi 27 pour le regroupement des commissions scolaires à
l'extérieur de l'île de Montréal. 6 Nous croyons que
le conseil scolaire, dans l'élaboration de son plan
d'intégration, ne devrait pas être lié par la carte
scolaire telle que prévue actuellement dans le projet de loi 28. 7
Nous recommandons que sans plus de délai le gouvernement
élabore et établisse, par législation au besoin, une
politique des langues reconnaissant la place prioritaire qu'il faut faire au
français dans le Québec et précisant, entre autres, les
droits linguistiques au plan scolaire. 8 Nous recommandons que maints
contrôles gouvernementaux sur les opérations courantes tant du
conseil que des commissions scolaires soient éliminés ou du moins
grandement restreints. 9 Nous croyons qu'un des rôles principaux
du conseil scolaire sera la mise en commun des ressources et leur
redistribution équitable non simplement sur une base "per capita" mais
aussi en fonction des besoins réels des divers milieux. 10 Nous
recommandons que le projet de loi no 28 garantisse plus clairement la
sécurité d'emploi de tous les cadres, professionnels, enseignants
et autres employés des commissions scolaires existantes. 11 Nous
recommandons que des programmes d'information, de formation et de recyclage
("in-service training") soient organisés pour permettre à tous
les cadres, fonctionnaires et autres employés affectés à
de nouvelles tâches de mieux s'adapter aux conditions nouvelles de leurs
fonctions.
Il AMENDEMENTS PROPOSES A En regard de la
démocratisation a) Le comité d'école
En vue d'enrichir les échanges entre les parents et
l'école, nous recommandons au sujet de la composition du comité
d'école, que l'article 69 du bill 27 soit modifié afin de
permettre une meilleure représentation des enseignants dans les
écoles où le nombre de professeurs est élevé.
En vue de stimuler la participation des professeurs, nous recommandons
que l'article 66 du bill 27 soit modifié pour accorder le droit de vote
aux professeurs.
b) le comité de parents
En vue d'éviter un trop grand nombre de membres au comité
de parents et en vue d'assurer une représentation équitable des
comités d'écoles, nous recommandons que le projet de loi no 28
prévoie: que les comités de parents soient composés
de quinze membres, chaque membre étant désigné par les
présidents des comités d'écoles d'un quartier.
En vue de rendre le rôle du comité de parents encore plus
significatif, nous recommandons d'ajouter la fonction suivante à celles
déjà énumérées à l'article 68 de la
Loi de l'instruction publique: avant l'adoption du budget de la
commission, être consulté par celle-ci sur les grandes
orientations et les priorités du budget. c) les commissions
scolaires
En vue d'éviter la possibilité de manipulation dans le
découpage des quartiers par les élus et d'éviter de
politiser les commissions scolaires sur des enjeux non éducatifs, nous
recommandons de modifier l'article 584 de la façon suivante: que
toute modification au découpage des quartiers établi par la
commission scolaire soit soumis à l'approbation du Conseil scolaire.
En vue d'éviter que la rotation par tiers ne favorise que
l'apparition de débats locaux, en vue d'éviter que la population
soit en constante période électorale et en vue d'assurer une plus
grande stabilité dans l'équipe des commissaires, nous
recommandons de modifier l'article 585 de la façon suivante : que
les commissaires soient élus simultanément pour un terme de trois
ans.
Conséquemment à l'amendement proposé ci-haut, nous
recommandons d'amender l'article 583 de la façon suivante: que
les commissaires nommés pour représenter les minorités
aient un mandat de trois ans.
En vue de garantir un vote universel et de réduire certaines
inégalités dues à la propriété
foncière, nous recommandons: que tous les électeurs,
locataires ou propriétaires, n'aient qu'un seul droit de vote par
municipalité scolaire. d) le conseil scolaire
Au sujet de la formation du conseil scolaire et en vue de permettre une
représentation démocratique, nous recommandons de modifier
l'article 9 des dispositions transitoires de la façon suivante :
que le conseil scolaire soit composé de treize membres
désignés par et parmi les commissaires des commissions scolaires
existantes et cela de la façon suivante: six (6) personnes
choisies par et parmi les membres de la Commission des écoles
catholiques de Montréal deux (2) personnes choisies par et parmi
les membres du Bureau métropolitain des écoles protestantes de
Montréal. quatre (4) personnes choisies par et parmi les membres
des autres commissions scolaires catholiques existantes une (1) personne
choisie par et parmi les membres des commissions scolaires protestantes
existantes autres que celles qui sont soumises à l'autorité du
Bureau métropolitain des écoles protestantes de
Montréal.
En vue d'établir une concordance entre le mandat des membres du
conseil élus par leur commission scolaire et celui de ceux nommés
par le Gouvernement, advenant que le gouvernement persiste dans son intention
d'en désigner, nous recommandons de modifier l'article 603 de la
façon suivante: que les membres du conseil devant être
nommés par le lieutenant-gouverneur en conseil aient un mandat de trois
ans.
Afin d'assurer que les membres du Conseil représentant la
C.E.C.M. auront une connaissance suffisante de son fonctionnement, nous
recommandons: qu'au plus deux (2) des quatre (4) nouveaux commissaires
de la C.E.C.M., prévus à l'article 10 des dispositions
transitoires, puissent être nommés au conseil.
Considérant que diverses mesures assurent déjà au
ministère un contrôle suffisant sur la structure proposée
comme celles relatives aux nombreuses décisions importantes devant
être soumises à l'approbation du conseil des ministres ou celles
concernant les nombreuses normes ministérielles actuellement existantes,
nous recommandons d'amender l'article 618 de la façon suivante:
que le président et le vice-président soient choisis parmi et par
les membres du conseil. B- AMENDEMENTS EN REGARD DES CONTROLES
GOUVERNEMENTAUX ARTICLE 588 En regard du paragraphe (c), que
l'approbation du ministre ne soit requise que si la durée du bail
excède 5 ans ou si le loyer annuel excède $250,000.00. En
regard de la transformation des immeubles (réaménagement et/ou
rénovation), que l'approbation du Ministre ne soit requise que si le
coût excède $250,000.00. En regard de l'aliénation
de biens-meubles et immeubles, que l'approbation du ministre ne soit requise
que dans les cas ou la valeur excède $50,000.00. En regard de la
démolition d'immeubles, que l'approbation du ministre ne soit requise
que si le coût excède $100,000.00.
ARTICLES 592 et 616 En regard des conventions et ententes
relevant des commissions scolaires en vertu de l'article 226, que
l'intervention du ministre ne soit requise, en supplément de celle du
conseil, que si le coût excède $250,000.00. En regard des
conventions et ententes entre des commissions scolaires en vertu de l'article
496, que l'approbation du ministre, en supplément de celle du conseil,
ne soit requise que dans les cas concernant les institutions d'enseignement
privées si le coût excède $250,000.00. En regard des
ententes et conventions entre les Commissions scolaires et le conseil
concernant le fonctionnement normal des commissions scolaires, que
l'intervention du ministre ne soit requise que pour l'arbitrage de conflits
découlant de l'application desdites ententes ou conventions. ARTICLES
606 et 624 En regard des règlements du conseil applicables
aux commissions scolaires, que le conseil ait pleine autorité pour
adopter tous les règlements; mais en cas de conflits de juridiction
entre le Conseil et les commissions scolaires, que le ministre intervienne pour
régler le litige. En regard du règlement créant
différents services et établissant leur mandat, que
l'intervention du lieutenant-gouverneur en conseil ne soit requise que dans
l'arbitrage des conflits de juridiction.
ARTICLE 607
Que l'autorisation du ministre ne soit
pas requise concernant le paragraphe (g) relatif au pouvoir d'édicter
des règlements pour sa régie interne. En regard des
coûts relatifs aux transformations d'immeubles et aux baux de location,
que l'approbation du ministre ne soit requise que dans les cas où la
valeur excède $250,000.00. En regard de la durée d'un bail
de location, que l'approbation du ministre ne soit requise que si cette
durée excède 5 ans.
ARTICLE 617
Que les règlements du conseil
concernant les pouvoirs et devoirs du comité exécutif ne
relèvent que du conseil.
ARTICLE 590
En regard des devoirs des commissaires
et des syndics relativement aux propriétés scolaires et aux
emprunts, si le conseil n'est pas propriétaire des biens-meubles et
immeubles, que l'autorité suffisante lui soit reconnue d'affecter
l'utilisation des édifices scolaires selon les besoins des diverses
clientèles lorsqu'il est nécessaire de procéder à
un échange de services entre commissions scolaires.
EN REGARD DE LA CONFESSIONNALITE
En vue d'assurer des garanties confessionnelles aux non catholiques et
aux non protestants, nous recommandons d'amender les articles 593 et le dernier
paragraphe de l'article 589 de la façon suivante :
(art. 593) il est constitué pour chacune des commissions
scolaires, un comité catholique, un comité protestant et un
comité pour les autres options religieuses.
(art. 589) à la demande des comités visés
à l'article 593, les commissaires d'écoles doivent nommer trois
personnes responsables des questions religieuses: une pour les catholiques, une
pour les protestants et une autre pour les autres options.
D - EN REGARD DE LA PROTECTION DES INTERETS DE NOS MEMBRES
que le paragraphe (b) de l'article 11 soit modifié en ajoutant
les mots: "avec les organismes représentatifs d'employés".
que l'article 18 soit amendé en ajoutant une référence aux
articles 1lb et 17. L'article se lirait comme suit: "Sous réserve des
articles 7, 11b, 14, 15 et 17, tous les règlements....."