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Commission permanente de l'Education
Projet de loi no 28
Loi concernant la restructuration des
Commissions scolaires sur l'île de
Montréal
Séance du jeudi 21 octobre 1971
(Dix heures treize minutes)
M. PILOTE (président de la commission permanente de l'Education):
A l'ordre, messieurs! La parole est à M. Bernard Grégoire,
représentant du comité consultatif de la CECM.
Comité consultatif de la CECM
M. GREGOIRE: Bonjour, M. le Président. Je vous remercie, M. le
Président, de même que les membres de votre commission, d'avoir
accepté de nous entendre ce matin. Je vous présente
immédiatement les gens qui m'accompagnent. A ma gauche, Mme Terry
Killins, qui est mère de famille et a quatre enfants dans les
écoles de la CECM; M. Georges Lahaise, qui est aussi membre du
comité consultatif de la CECM et a deux enfants dans les écoles
de la CECM. Moi, j'en ai quatre, ce qui veut dire qu'à nous trois nous
en avons dix. Je remonte la moyenne de mon ami Lahaise. Nous avons...
M. CARDINAL: Pardon, M. Grégoire. Hier, j'ai soulevé la
question de la représentativité. Est-ce la réponse que
vous venez nous donner ce matin?
M. GREGOIRE: Non, j'ai d'ailleurs l'intention de répondre aux
questions du député de Bagot. Il a, hier, entrouvert une porte,
et j'ai l'impression qu'ayant été ministre de l'Education, le
député de Bagot est sûrement au courant de ce dont il
s'agit quand on parle des comités consultatifs.
Cependant, en ouvrant cette porte je discerne un certain
machiavélisme et peut-être la possibilité de vous parler
des comités de parents, de vous parler des parents. C'est revenu
plusieurs fois, au cours de la journée d'hier. Alors que j'assistais
à vos débats, j'ai remarqué que c'était une
préoccupation. C'est sûrement très important parce que la
clientèle que vous touchez avec le projet de loi 28, en fait, en ce qui
concerne la CECM, c'est 220,000 enfants; donc, on peut dire près d'un
demi-millions de parents.
Je continue mes présentations. M. Pellegrino fait partie du
personnel de la CECM et nous aide, du côté anglophone, pour nos
réunions du comité consultatif, du côté francophone,
M. Jean-Paul Charbonneau est secrétaire du comité.
Je n'ai pas l'intention de vous lire notre mémoire. Je vous ferai
un bref exposé en trois parties. D'abord, je vous parlerai des
comités d'écoles, tels qu'ils sont. Je tenterai de
répondre à la question du député de Bagot, je vous
parlerai de l'attitude des parents vis-à-vis de la CECM et ensuite et je
vous parlerai de l'attitude des parents vis-à-vis du projet de loi no
28.
Tout d'abord, je dpis remercier la CECM d'avoir accepté que nous
présentions ce mémoire séparément. Il eut
été peut-être plus normal, plus logique, étant un
comité de la CECM, que nous présentions notre mémoire aux
commissaires et qu'ensuite, eux, vous fassent part des vues des parents.
Mais, devant l'importance du sujet, nous avons demandé aux
commissaires d'être entendus séparément, parce qu'on leur a
dit: S'il fallait que les parents soient en désaccord avec les
commissaires de la CECM, nous pensons que les législateurs devraient le
savoir, et la même chose s'ils sont en accord. C'est comme ça que
nous sommes parvenus à cette formule. Donc, je remercie la CECM.
Sans plus tarder, quant aux comités consultatifs à la
CECM, Mme Roux, hier, vous en a tracé un tableau assez précis.
Présentement, 300 comités fonctionnent sur une possibilité
de 350 écoles. Ces comités sont élus, évidemment,
au cours de réunions de parents dans chacune des écoles. On
convoque les parents et parfois, par exemple dans une école de 800
parents, il peut arriver que 700 parents viennent, mais c'est très rare.
Il va arriver plus souvent qu'il y en ait 100 ou 150. A ce moment-là,
ça se fait un peu à la bonne franquette. On doit
reconnaître évidemment que le système n'est pas
parfait.
Les comités sont formés au niveau de chacune des
écoles. Comme la CECM se divise en sept territoires administratifs, les
comités d'école de chacun de ces territoires élisent
ensuite un comité consultatif régional qui discute des questions
régionales avec l'administration de la CECM au niveau régional.
Ensuite, les sept régions délèguent sept
représentants en haut de la pyramide au niveau des commissaires, pour
siéger au comité consultatif d'éducation. C'est de
là qu'on vient.
Pour ma part, j'ai été élu dans une école;
ensuite, j'ai été élu président du comité
consultatif de cette école, l'école Evangéline; ensuite,
j'ai été élu au comité consultatif régional
Après, j'ai été élu président du
comité consultatif régional de la région no 5 et ensuite,
j'ai été mandaté au comité consultatif de la CECM;
ensuite, élu président. C'est comme ça que je suis ici ce
matin.
Une autre question a été posée hier. On a
demandé: Est-ce que ces comités sont financés par la CECM?
M. Dugas a dit oui. Je voudrais peut-être nuancer cela un peu. C'est oui
et c'est non, en ce sens que la CECM, pour ces comités, fournit $0.20
par élève si le comité est formé avant
Noël.
Elle fournit $0.10 par élève, s'il est formé
après Noël et le montant versé ne doit pas dépasser
un maximum de $350. Dans mon école, par exemple, on reçoit
environ $238.85 et je dois vous dire qu'au bout de deux mois
l'argent est dépensé. La plupart du temps il est
dépensé pour l'achat de timbres, pour les frais de poste,
c'est-à-dire envoyer les communications aux parents. C'est là le
financement des comités consultatifs.
Evidemment, quand on multiplie ça par 300 comités
consultatifs, il faut admettre que ça fait, en chiffres absolus, un
effort assez important de la part de la CECM.
De plus, la CECM...
M. PICARD: A la suite de l'augmentation des tarifs postaux a-t-on
augmenté votre cotisation?
M. GREGOIRE: Non, on n'a pas augmenté notre cotisation pour
l'instant.
M. PICARD: Comment pouvez-vous arriver à envoyer des avis
à $0.07?
M. GREGOIRE: Nous n'arrivons pas et peut-être qu'un jour nous
pourrons nous adresser au ministère des Postes à ce
sujet-là.
De plus, la CECM nous donne de l'aide, en ce sens qu'elle nous fournit
les services des deux personnes que je vous ai présentées
tantôt qui s'occupent du fonctionnement du comité. Elle nous
fournit les locaux où nous devons nous réunir et elle nous permet
aussi de faire appel à des ressources humaines si, par exemple, nous
avons besoin de techniciens pour nous expliquer un problème
donné, parce que nous ne sommes pas des experts en éducation,
loin de là, nous pouvons, par le truchement de la CECM, demander
à un fonctionnaire de venir nous expliquer de quoi il en retourne.
Alors, la participation des parents au niveau des comités
consultatifs est assez bonne. Evidemment, certains comités fonctionnent
mieux que d'autres, mais ça dépend des gens qui en font partie.
Dans l'ensemble, je peux dire que nous sommes de plus en plus satisfaits de la
chose et c'est important d'en parler parce que, dans le projet de loi 28, il
est question de comités d'écoles.
Quant à l'attitude des parents vis-à-vis de la CECM, je
veux vous en parler assez brièvement, ça ne fait pas partie du
projet de loi 28 comme tel, mais c'est pour "contextualiser" la question.
Quand vous demandez aux parents ce qu'ils pensent du projet de loi 28,
c'est assez étrange, mais l'on s'aperçoit qu'ils sont un peu
surpris et ils se disent, à priori, satisfaits de la CECM. Ils disent
ça va bien, nous sommes contents, c'est efficace, c'est honnête,
ça marche. Ils sont satisfaits mais évidemment ça ne veut
pas dire qu'il n'y a pas certains griefs, il y en a.
Par exemple, les parents sont mécontents de l'enseignement de la
langue seconde. C'est une chose qui revient souvent surtout du
côté francophone. Du côté anglophone aussi, mais ils
sont mécontents de l'enseignement religieux, et cela revient
peut-être plus du côté francophone.
Il y a aussi les griefs qui sont très localisés, par
exemple, dans le cas où la construction d'une école ne serait pas
terminée à temps. Bien, dans ce secteur-là, il peut y
avoir des parents qui sont un peu en colère. Des petites choses comme
ça. Mais dans l'ensemble, les parents sont assez satisfaits. C'est pour
ça que lorsqu'on leur parle du projet de loi no 28, ils commencent
à se poser des questions, parce qu'ils ne savent pas ce que c'est.
Alors, nous, dans les délais très courts qu'on avait, on a
réussi quand même à faire parvenir un exemplaire du projet
de loi à tous les membres de tous les comités consultatifs
accompagné d'un document que nos collègues du comité de la
CECM ont préparé, un document synthèse qui
résumait, autant que faire se peut, le projet de loi no 28 et qui le
comparait avec la situation actuelle, si vous voulez, dans le domaine scolaire
de Montréal.
Ce document a donc été envoyé à tous les
comités et on leur a demandé d'étudier le projet de loi no
28, de se réunir au niveau régional, d'en reparler et ensuite de
nous faire rapport. Cela a été fait. Cela a été
fait dans certaines régions avec beaucoup de succès. Dans la
mienne, par exemple, parce que c'est celle-là que je connais le mieux,
le lundi 20 septembre, tous les présidents des comités
consultatifs se sont réunis et ont préparé un rapport
qu'ils nous ont soumis. C'est la somme de tout cela qui nous a permis de
préparer le mémoire que vous avez devant vous.
Alors, dans les grandes lignes, quelle est l'attitude des parents?
Qu'est-ce qui ressort de cela vis-à-vis du projet de loi no 28? Ils sont
d'accord sur les lignes de force du projet de loi no 28. Ils sont d'accord sur
la restructuration, sur le conseil scolaire, sur les commissions scolaires
unifiées. Dans notre comité, il y a eu, toutefois, une
dissidence, comme vous le remarquerez, c'est qu'au sein du comité
consultatif de la CECM, il y a un membre qui nous est
délégué par l'Association des parents catholiques. Cette
personne, évidemment, c'était normal pour elle de s'opposer
à ce mémoire parce que nous, nous étions d'accord sur le
principe des commissions scolaires unifiées. Il y a eu une seule
dissidence qui est celle-là.
M. CARDINAL: Je suis à me demander si c'est la dissidence
à laquelle j'ai fait allusion, hier, parce que j'ai mentionné que
le ministre de l'Education, deux autres députés et moi-même
avons reçu une lettre d'un secrétaire-trésorier d'un
comité de parents de la commission scolaire de Montréal. Je n'ai
pas voulu identifier alors...
M. GREGOIRE: Voici, au sujet de cette lettre, je sais à quoi vous
faites allusion.
C'est que, la semaine dernière, au cours de l'émission de
télévision Format 30, j'ai expliqué que les parents, en
majorité j'ai bien dit, à ce moment-là, "en grande
majorité" étaient
d'accord sur le principe des commissions scolaires unifiées.
Evidemment, il y en a parmi mes 400,000 électeurs qui ne sont pas
d'accord. Parmi ceux-ià, il y en a un qui s'est demandé de quel
droit j'allais affirmer que les parents étaient en majorité en
faveur des commissions scolaires unifiées. C'est ce monsieur-là
qui a envoyé la lettre dont vous parlez. Je n'ai reçu qu'une
seule lettre. C'est la seule intervention.
M. CARDINAL: C'est exact. Je ne le souligne pas pour vous embarrasser.
Dans le fond, les questions que je pose je reviens à une phrase
que vous avez dite plus tôt ce n'est pas par machiavélisme,
mais c'est parce qu'enfin il est exact que j'ai déjà
occupé le poste que l'honorable Saint-Pierre occupe aujourd'hui. Le
projet de loi no 28 est quelque chose de compliqué. Même si les
députés l'ont étudié, tous les organismes qui
viennent devant nous, il faut pouvoir les replacer dans un contexte. Vous
l'avez dit, vous-même. Comme il n'y a eu qu'une lettre d'envoyée
et qu'elle n'a été envoyée qu'à quatre
députés seulement, j'ai voulu soulever le fait pour que,
justement, on se rende compte qu'en majorité les parents vous ont
vraiment donné un mandat pour être leur porte-parole dans le cadre
de ces comités consultatifs. Je pourrais même ajouter ceci: Il
m'est arrivé à moi-même d'expliquer le projet de loi no 28
pendant deux heures à la radio. Le résultat a été
que j'ai constaté moi-même que, sauf une exception, les parents
demandaient d'abord à être renseignés et,
deuxièmement, étaient, en principe, d'accord sur ce que vous avez
appelé les lignes de force du projet.
M. GREGOIRE: C'est exact.
M. CARDINAL: Et c'est exact qu'il n'y a eu qu'une lettre de
protestation.
M. GREGOIRE: M. le Président, je remercie le député
de Bagot pour son intervention. Il est exact qu'à ma connaissance il y a
pas eu de contestation sur ce que j'avais dit à ce moment-là,
sauf la lettre dont on parlait. Je vous ai expliqué le mécanisme
qui, à mon sens, est très démocratique pour
l'élection des comités. Il y a peut-être une chose que je
dois ajouter, c'est qu'hier on parlait du financement des comités
consultatifs. Je vous ai expliqué comment on était
financé. Je dois vous dire que nous sommes tous, évidemment,
bénévoles. Lorsque nous sommes ici, ce matin, nous ne sommes pas
à notre travail. Nous ne sommes pas des spécialistes de
l'éducation. Nous sommes des parents et nous avons appris, depuis
quelques années, avec ce système de comités consultatifs,
à connaître la participation. Nous pensons que c'est une formule
valable et qu'il va falloir l'enrichir de plus en plus. A travers le projet de
loi no 28, je pense que cela va se faire. Maintenant, je suis prêt
à répondre à vos questions sur notre mémoire. Je
n'avais pas l'intention de vous le lire, je ne crois pas que ce soit
nécessaire.
M. CARDINAL: J'aurais une question à poser. Est-ce que le
comité consultatif désire que ce mémoire soit
déposé au journal des Débats, vu qu'il est relativement
court, ou que, simplement, les députés en prennent
connaissance?
M. LE PRESIDENT: Nous pouvons permettre aux membres que leur
mémoire soit publié dans le journal des Débats.
M. GREGOIRE: Si vous voulez.
M. CARDINAL: C'est parce qu'en fait cela donne un élément
de référence, éventuellement. Nous sommes
présentement en première lecture. La deuxième lecture
n'est pas commencée. Nous aurons tout le temps je l'ai dit au
ministre au tout début de réétudier le projet de
loi 28 après avoir entendu de nombreux groupes, mais je trouverais qu'en
général il serait utile que nous ayons les textes ou, au moins,
des synthèses des textes au journal des Débats pour pouvoir s'y
référer au moment de la deuxième lecture et,
particulièrement, du comité plénier.
M. GREGOIRE: C'est là une technicité à laquelle je
ne peux pas m'opposer. (Voir annexe A).
M. LE PRESIDENT: La parole est au député de
Saint-Jacques.
M. CHARRON: Si vous me permettez, je passe rapidement à certaines
des recommandations que vous faites.
M. GREGOIRE: Oui, d'accord.
M. CHARRON: J'aimerais avoir des explications sur quelques-unes d'entre
elles.
Vous vous dites d'accord sur l'article qui permettrait au ministre de
nommer deux commissaires là où la minorité ne serait pas
représentée. Etes-vous d'accord aussi sur le dédoublement
de structures, l'article qu'on appelle celui des adjoints? Vous êtes
d'accord sur le fait que le directeur général ait un adjoint
francophone. Mais la CECM, hier, nous avait aussi dit qu'elle était
d'accord sur cela mais qu'elle ne demandait pas le dédoublement au
niveau du directeur du service aux étudiants, du directeur du service
pédagogique et du directeur du service du personnel, comme le dit le
projet de loi. Est-ce que les parents ont exprimé une opinion
là-dessus?
M. GREGOIRE: Les parents n'ont pas tellement exprimé d'opinions
à ce sujet. Nous ne sommes pas allés assez loin, je pense. Nous
sommes plutôt d'accord sur le projet de loi tel qu'il est.
M. CHARRON: Plus loin, sur ce qui vous concerne, disons, plus
pratiquement, vous, les parents, qui aurez à vivre dans cette nouvelle
structure, vous demandez qu'un tiers des commissaires de chacune des
commissions scolaires soit élu par un collège électoral
qui serait formé des comités d'écoles. C'est une entaille
au principe du suffrage universel qu'apporte le projet de loi. Pourquoi?
J'imagine que vous avez des motivations.
M. GREGOIRE: Oui. Il est vrai qu'en démocratie pure c'est une
entaille, comme vous dites. Nous le reconnaissons. Nous avons
évidemment, comme vous pouvez le penser, repêché cela dans
l'article 640 du projet de loi 62, où il était question d'un
collège électoral.
Et on pense que les parents ont un rôle primordial à jouer
dans le contexte scolaire à Montréal, beaucoup plus, par exemple,
que le propriétaire d'un immeuble, qui paye des taxes évidemment,
mais qui n'aurait pas d'enfants à l'école qui ne serait pas
intégré, si vous voulez, à la communauté scolaire.
Lui aussi il va voter au suffrage universel.
Le parent, lui, qui aurait des enfants à l'école, selon ce
que nous proposons et cela a été unanime dans tous les
comités consultatifs de proposer cet amendement-là a
beaucoup plus d'intérêt à la chose scolaire. Cela lui donne
deux votes à lui, parce qu'il va voter au suffrage universel, d'une
part, et il va voter via son collège électoral pour trois
commissaires.
Mais nous pensons que nous avons besoin de la participation des parents.
Et si nous ne donnons pas au comité d'écoles un rôle un peu
de décision, un rôle de participation vraiment active les parents
vont se désintéresser, alors qu'au contraire il faut les
intéresser de plus en plus.
Il faut les intéresser de plus en plus, les parents, parce que
depuis 1960 il y a eu des bouleversements assez considérables dans le
domaine de l'éducation. La génération de parents qui est
là présentement est formée de gens qui sont allés
à l'école dans l'ancien système et, depuis I960, nous
tentons de leur apprendre ce qu'est le nouveau système; nous avons de la
difficulté à les faire participer parce qu'ils ne s'y retrouvent
pas. C'est là l'importance des comités d'écoles. Plus ils
vont participer, plus ça va être démocratique, à
l'envers de l'entaille, si vous voulez; je pense que ça va aller mieux
à long terme.
M. CHARRON: Je trouve curieux que votre recommandation là-dessus
je comprends votre motivation ait comme but ultime d'augmenter la
participation. Si les parents sentaient que ce pouvoir-là leur est
reconnu, ils seraient peut-être plus intéressés. Mais je
trouve curieux que vous ne demandiez pas que ce soit au niveau de
l'école, là où ils travaillent, que les pouvoirs soient
accrus plutôt que dans le choix des commissaires. Vous jugez acceptables
les fonctions attribuées aux comités d'écoles. D'autres
groupes sont venus nous dire ici qu'ils les trouvaient floues pour
reprendre l'expression que j'ai utilisée avec Mme Roux hier.
Pour augmenter le pouvoir des parents, vous portez le pouvoir dans la
nomination des commissaires plutôt que dans la vie interne de
l'école.
M. GREGOIRE : Nous ajoutons autre chose à la vie interne de
l'école. Si vous remarquez, plus loin dans le mémoire, nous
ajoutons que les parents du comité devraient être consultés
avant la nomination du principal de l'école.
Cela, c'est une responsabilité accrue pour le comité
d'école.
M. LE PRESIDENT: Messieurs, la parole est au ministre de
l'Education.
M. SAINT-PIERRE: Sur un point j'aimerais obtenir votre point de vue.
Compte tenu que nous recherchons de la part des parents des candidats possibles
pour occuper les postes de commissaires, est-ce que votre groupe serait
favorable, contrairement au projet de loi, à ce que le renouvellement
des commissaires sur une période de quatre ans se fasse en bloc,
c'est-à-dire qu'un peu à long terme on applique le principe du
parti scolaire qui se présenterait avec un programme défini et
qu'il y aurait une rupture dans le mandat des commissaires, leur terme se
terminant à la même date? Si vous étiez favorables ou non,
pourriez-vous m'expliquer pour quelle raison?
M. GREGOIRE: Oui, M. le Président, c'est une bonne question. M.
le ministre, on est favorable à cela. On est favorable à une
élection tous les quatre ans, tout le monde en même temps. Mais
quand je dis tout le monde, je veux dire aussi les conseillers municipaux. On
pense que la simultanéité va accroître de part et d'autre
l'intérêt pour la chose publique. La cité, en somme, avec
le phénomène d'urbanisation, c'est l'école, c'est la
ville, ça va un peu tout ensemble. Si une question est débattue
sur le plan municipal, par exemple, cela va intéresser les gens à
aller voter. Si, par ailleurs, c'est assez tranquille du côté
municipal et qu'il y a une question intéressante du côté
scolaire, ils vont être intéressés à y aller en
même temps. Ils auront leurs deux papiers puis ils voteront. Cela va un
peu tout ensemble.
Dans cette optique, on est contre la rotation, donc pour une
élection simultanée tous les quatre ans.
M. SAINT-PIERRE: Est-ce que cela ne rend pas plus difficile la
participation de parents qui pourraient être très bien
préparés à remplir un rôle de commissaires? Est-ce
que cela ne favorisera pas un petit peu la formation de partis politiques
scolaires, ce qui rendrait très difficile la participation par la suite
de groupes
de parents ou d'un parent individuellement qui, à moins de faire
partie d'une alliance ou d'être accepté par un groupe qui trouve
impossible...
M. GREGOIRE: C'est une hypothèse qu'il faudrait vérifier
à l'expérience. Evidemment, dans une grande ville comme
Montréal on ne l'a pas vécue encore. Peut-être que si,
comme vous le dites hypothétiquement, il se formait des partis,
même des coteries, je me demande si ce serait vraiment mauvais. En plus
de cela, en faisant cette simultanéité d'élections, il y
aurait pour le contribuable montréalais une économie
substantielle, puisque c'est le même cens électoral, ce sont les
mêmes voteurs, le suffrage universel à 18 ans. Et si on additionne
cela de quatre ans en quatre ans, d'après les informations que j'ai eues
auprès des fonctionnaires de la communauté urbaine, on sauverait
entre $2 millions et $3 millions à chaque élection.
C'est là une affaire que vous allez trouver dans notre
mémoire. Je ne l'ai pas vu ailleurs, mais c'est un fait. Oui, en posant
des questions j'ai appris aussi que c'est ce qui se fait à Toronto,
semble-t-il et on m'a dit que cela fonctionne bien.
M. CHARRON: D'autre part, avec la notion de partis scolaires, je sais
très bien que des gens peuvent avoir peur rien qu'à cette
mention, parce que ça peut vouloir dire de la propagande, des posters,
la Brinks, tout ce que vous voulez, sur le plan scolaire, des choses absolument
inacceptables quand on travaille dans le monde de l'éducation. Le parti
scolaire peut vouloir dire aussi l'occasion de regrouper des hommes professant
la même idée, ce qui fait que ça augmente le choix de la
personne.
S'il n'y a pas de parti scolaire, c'est au hasard du résultat
dans les quinze quartiers que va se déceler une majorité. Ces
gens ne se connaissaient peut-être même pas avant. Ils vont se
retrouver tous les quinze en face et ils vont avoir à administrer une
commission scolaire sans même s'être entendus sur un certain nombre
de principes d'administration scolaire, au départ, qui fait que quand il
y a une majorité, on sait où on s'en va.
L'existence de l'action simultanée va donner naissance à,
je n'appellerais pas cela des partis mais, des plate-formes avec le mot
anglais sur lesquelles un certain nombre de candidats pourraient
s'entendre, ce qui valorise la participation des citoyens. Là,
désormais, ils savent à quoi ils s'engagent quand ils votent pour
un homme en place.
M. GREGOIRE: Il y a une autre chose aussi. S'il y a rotation au niveau
des commissaires d'une commission scolaire donnée et si, par hasard,
vous n'êtes pas satisfaits de votre administration scolaire, cela devient
très difficile de déloger ceux qui sont en place. Tandis que si
vous avez une élection globale, à un moment donné, au bout
de quatre ans, par exemple on a dit quatre ans parce que cela coincide
avec le municipal vous pouvez faire un changement, si vous n'êtes
pas satisfaits.
La période de quatre ans donne évidemment l'occasion aux
hommes en place de vraiment... Vous le savez, vous autres, cela prend un
élan pour vraiment se mettre au travail et comprendre les
problèmes du milieu. Trois ans, c'est peut-être un peu court.
M. SAINT-PIERRE: M. Grégoire, il y a un autre point. Les
garanties confessionnelles prévues au projet de loi 28
apparaissent-elles satisfaisantes aux parents que vous avez
consultés?
M. GREGOIRE: Oui, elles paraissent satisfaisantes. D'après ce que
j'ai entendu de beaucoup de parents je ne veux pas dire la
totalité, encore une fois, des parents, je ne veux pas être mal
interprété présentement, dans le système
actuel, l'enseignement religieux est quasi inexistant. Cela s'appelle la
Commission des écoles catholiques de Montréal mais ce n'est pas
en consacrant le statu quo, par exemple, que cela améliorerait les
affaires. Tandis qu'avec le projet de loi 28, si j'ai bien compris, les parents
vont pouvoir, au niveau de l'école, s'en occuper et dire: On veut de
l'enseignement religieux de telle façon, et le surveiller de
près. S'ils en veulent, ils l'auront, je pense, d'une façon
beaucoup plus active que cela se fait maintenant.
M. CARDINAL: Dans le même ordre d'idées, M. le
Président, en d'autres mots, votre position est que ce n'est pas la
structure qui assure la qualité de l'enseignement religieux, c'est
l'intérêt des parents au niveau du comité
d'école.
M. GREGOIRE: C'est exactement cela, M. le Président. C'est vrai,
ce que dit le député de Bagot. C'est l'intérêt des
parents au niveau de l'école qui va, je pense, donner un nouvel essor
à l'enseignement religieux si les parents le désirent, et je
pense qu'ils le désirent.
M. SAINT-PIERRE: M. Grégoire, une dernière question
à titre général. Je sais que nous avons à
Montréal, sur le plan scolaire, une situation de fait qui a un
historique, dans certains cas, de plus de 25 ans.
Cela fait sept ou huit ans que nous tentons de nous attaquer à ce
problème, non pas que les nouvelles structures scolaires pourraient
être une panacée à tous nos problèmes, mais les
dispositions que nous avons prévues pourraient peut-être vous
permettre d'atteindre plus facilement certains objectifs que tous semblent
partager: les francophones, les protestants et les anglophones.
Ma question ne veut pas un jugement de votre part, mais, de la
consultation des parents, d'une part et c'est ma première
question
est-ce que vous avez l'impression que le gouvernement s'attaque, en
tentant de transformer le statu quo, à un problème qui n'existe
pas ou est-ce que, d'après les parents, il y a une
nécessité réelle de changer le statu quo? Ma
deuxième question: Avez-vous l'impression que, même si le
gouvernement et le législateur font face à des demandes
contradictoires et qu'on a, dès le départ, l'assurance qu'on ne
pourra pas satisfaire quand même tout le monde, on peut régler
certains problèmes par le projet de loi 28?
M. GREGOIRE: Certainement, pour répondre à votre
première question, M. le ministre. Nous pensons que le projet de loi va
aider à régler des problèmes. Il va peut-être en
susciter certains autres. C'est inévitable. Mais, dans l'ensemble, je
pense qu'on peut être favorable parce que c'est un pas important en
avant. Je pense que ça vient couronner tout le changement qui s'est fait
depuis 1960 dans le domaine de l'éducation. Il fallait arriver à
la démocratisation de l'enseignement à Montréal, et je
pense que c'est nécessaire.
Dans notre comité consultatif, nous avons une participation
très active des anglophones catholiques. On a discuté longuement
des différents aspects du projet de loi vis-à-vis d'eux et
vis-à-vis de nous. On a compris leur point de vue facilement, leur
crainte à l'effet que, dans une commission scolaire, il pouvait y avoir
évidemment une minorité d'anglophones catholiques et que les
ressources pédagogiques, à ce moment-là, pouvaient
être déficientes. C'est pour ça que, dans notre
mémoire, vous allez trouver une suggestion que nos collègues de
langue anglaise ont appelée 1'"overlapping"; c'est le chevauchement, si
vous voulez, des ressources pédagogiques et des ressources
administratives entre les commissions scolaires. Il y a cette
possibilité de chevauchement pour satisfaire ces minorités. C'est
pour ça que nos collègues de langue anglaise dans le
comité se sont facilement ralliés à notre mémoire
et c'est pour ça que, sauf la dissidence que j'expliquais au
début, cela a été l'unanimité entre anglophones et
francophones.
M. SAINT-PIERRE: Merci, M. Grégoire.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je reviens à la question
confessionnelle, M. Grégoire. Vous avez dit tout à l'heure que
vos consultations auprès des parents vous permettent de dire que, dans
l'ensemble, les parents sont satisfaits du projet de loi 28 en ce qui concerne
l'organisation d'écoles confessionnelles.
M. GREGOIRE: M. le Président, comme je le disais, les parents
présentement ne sont pas satisfaits de l'enseignement religieux qui se
fait dans les écoles. Même si notre consultation, dans les
délais que nous avions, est imparfaite je dois le
reconnaître ce qu'on a pu faire sortir de tout cela, c'est qu'en
face du projet de loi 28 il y a une nouvelle confiance. Il semble que les
parents sont prêts à faire confiance à cette nouvelle
structure et, sur le plan confessionnel, on pense que ça peut être
excellent.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Grégoire, dans les circonstances,
compte tenu de ce que vous venez de dire, vous ne seriez pas d'avis que l'on
procède à cette restructuration scolaire de l'île de
Montréal par étapes justement afin de sauvegarder ce que l'on
appelle des droits en matière de confession religieuse pour permettre
une meilleure organisation de l'école catholique sur l'île de
Montréal.
M. GREGOIRE : Nous pensons que le conseil provisoire qui sera
responsable de l'implantation des nouvelles structures, devrait pouvoir
établir son propre échéancier. Pourquoi? Parce qu'il sera,
nous pensons, plus près des réalités du milieu que
je m'excuse, M. le ministre, le ministère de l'Education, et s'il
doit se conformer à des échéances, tant mieux si le
conseil provisoire arrive à l'intérieur des dates que veut bien
lui fixer le ministère. Mais nous sommes d'avis qu'il ne faudrait pas,
pour ça, brusquer les choses.
Nous pensons ainsi parce que c'est important pour nos enfants d'abord,
ça va nécessairement entraîner un certain bouleversement
chez les enfants, chez les parents, chez les enseignants, dans
l'administration, etc. Si nous ne voulons pas que les enfants en souffrent, il
faudra que ça se fasse avec certaines étapes. Et cela c'est
important.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Cela, c'est en ce qui concerne l'organisation
interne...
M. GREGOIRE: Oui.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... de fait qui se fera par le truchement du
comité provisoire. De vos propos, M. Grégoire, pouvons-nous
conclure, vous l'avez dit tout à l'heure, j'aimerais que vous le
répétiez, que vous considérez que ce ne sont pas les
structures qui doivent être catholiques, protestantes ou juives, mais que
ce sont les individus, c'est-à-dire les hommes à
l'intérieur de ces structures qui doivent assumer la
responsabilité d'organiser l'école catholique, juive ou
protestante, enfin, appelons ça d'un terme général,
l'école confessionnelle et que par les comités de parents, les
comités d'écoles, vous avez là les garanties suffisantes
pour que l'enseignement religieux dont vous déploriez tout à
l'heure la qualité soit amélioré.
M. GREGOIRE: C'est juste. Nous pensons qu'au niveau de l'école,
les parents peuvent agir de façon plus concrète pour obtenir un
meilleur enseignement religieux. Puisque présentement, comme je le
disais, ça semble difficile de le faire à l'intérieur
d'une commission scolaire. Au
niveau de l'école, enfin, en ayant étudié le projet
de loi 28, nous pensons que ça peut améliorer. Loin de nous,
évidemment, l'idée d'abandonner la confessionnalité. Les
parents, au contraire, y tiennent, dans la majorité des cas, j'en suis
sûr. C'est la façon d'y arriver. Nous pensons que le projet de loi
28 à ce sujet nous donne les garanties nécessaires.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le projet de loi 28 vous parait donner les
garanties nécessaires. Alors, vous considérez qu'une sorte de
comité de vigilance peut jouer ce rôle de surveillance
nécessaire pour que soit maintenu l'enseignement confessionnel dans les
écoles de l'île de Montréal.
M. GREGOIRE: Si je comprends bien, il y a deux choses qui vont
protéger la confessionnalité, il y a le comité
d'écoles, d'une part, et, d'autre part, les comités
confessionnels à l'article, je pense. 593 et aux suivants qui viennent
ajouter à ça.
Avec ces deux mesures, je pense qu'on devrait pouvoir y arriver et
même améliorer la situation.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Grégoire., on parle de l'engagement
d'un responsable de l'enseignement religieux dans les diverses écoles ou
dans certains groupes d'écoles regroupées; croyez-vous que ce
soit là une mesure suffisante, à votre avis, pour maintenir,
conserver et améliorer l'enseignement confessionnel?
M. GREGOIRE: Je n'ai pas compris la première partie de votre
question. Qu'est-ce qui devrait être suffisant, dites-vous?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): L'engagement d'un responsable de
l'enseignement religieux dans les diverses écoles.
M. GREGOIRE: Je pense que oui, en autant que les parents au
comité de l'école désirent cet enseignement religieux,
qu'ils participent vraiment et qu'ils surveillent la chose. Je pense que cela
peut se faire. Là-dessus, je me souviens que, hier, au cours des
débats, on a parlé des structures à donner aux
comités d'écoles et, là, je rejoins un peu votre question,
M. le député. On a parlé de souplesse vis-à-vis des
comités consultatifs. Il faut s'entendre là-dessus. Nous, nous
pensons qu'il doit y avoir quand même une certaine standardisation pour
qu'on puisse parler tous le même langage et que cela ne soit pas la tour
de Babel à l'intérieur de cela. Il faudrait que dans la loi ou
dans les règlements qui suivront on retrouve certaines modalités
qui seraient les mêmes pour tout le monde. Mode d'élection, par
exemple, des comités consultatifs. Composition du comité
consultatif pour telle grosseur d'école, tant de parents, finance ment,
etc Que les comités soient structurés de la même
façon d'une école à l'autre au niveau de l'île de
Montréal. Je pense que cela serait excellent.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): On nous a fait, M. Grégoire, une
objection au sujet du comité consultatif d'écoles et cette
participation des parents. On nous disait que la participation des parents
était une forme de mécanisme nouveau qui n'était pas
suffisamment rodé pour jouer ce rôle de surveillance en ce qui
concerne le cas spécifique de l'enseignement confessionnel. Avec
l'expérience que vous avez à Montréal, est-ce qu'il vous
apparaît que les parents sont suffisamment avertis, qu'ils ont subi ce
rodage qui les a rendus sensibles à toutes ces questions d'enseignement
confessionnel ou autres?
M. GREGOIRE. C'est loin d'être parfait en ce moment, mais il faut
commencer quelque part. Je pense que cela se fait graduellement. Les parents,
actuellement, à travers les 300 comités consultatifs qui
existent, n'ont pas été sans remarquer la situation. Evidemment,
au point de vue de l'enseignement religieux, nous en avons fait part à
la CECM et je suis certain qu'en ce moment on fait tout ce qui est possible
pour améliorer cette situation. Mais dans les structures actuelles, tout
ce que nous pouvons faire, c'est de nous rendre compte de ce qui se -passe sur
le plan de l'enseignement confessionnel, de faire part de nos craintes au
niveau des commissaires à la CECM et de tenter d'améliorer la
situation.
Dans le contexte du projet de loi no 28, directement à
l'école, on pourrait être plus exigeant, comprenez-vous? Quant
à savoir si les parents sont vraiment rodés, c'est assez
délicat. Je vous répondrai, dans certaines écoles,
présentement, oui, ils sont parfaitement rodés. Cela va
très bien. Dans d'autres milieux, parfois, ils le sont moins. C'est un
problème qui va se poser dans toute l'implantation du projet de loi no
28. La démocratisation des structures, c'est nouveau. Cela n'ira pas
sans certaines difficultés. Il faut en convenir, je pense. Mais si
l'expérience doit être tentée, il faut y faire face.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, M. Grégoire, une
dernière question. Au début de votre témoignage, vous avez
mentionné que de votre consultation, il ressortait qu'un bon nombre de
parents n'étaient pas satisfaits de l'enseignement de la langue seconde
dans les écoles de Montréal. Est-ce que vous pourriez expliciter
un peu plus cette affirmation que vous avez faite?
M. GREGOIRE: C'est que dans presque toutes les réunions de
parents et j'ai assisté à plusieurs réunions au niveau
régional et au niveau des écoles, presque toujours la question
est revenue. On en a fait part d'ailleurs à la CECM. La question est
revenue.
Des gens disent je parle des francophones que
l'enseignement de l'anglais est insuffisant et de mauvaise qualité, et
vice versa du côté anglophone pour ce qui est de l'enseignement du
français. On n'est pas satisfait non plus. Les parents se disent:
Quelles que soient les options politiques du Québec, il demeure qu'il va
falloir que nos enfants, autant que possible, aient une connaissance minimum de
l'anglais dans un contexte nord-américain. Présentement, nous ne
sommes pas satisfaits de l'enseignement de l'anglais dans nos
écoles.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que l'on vous a fait, à ce
sujet, M. Grégoire, des représentations en vue d'améliorer
la situation, d'abord non seulement qualitativement mais quantativement en ce
qui concerne les parents francophones? Est-ce qu'on a demandé qu'il y
ait plus d'enseignement de l'anglais dans les écoles de Montréal
ou s'il s'agissait simplement d'une question de qualité de cet
enseignement?
M. GREGOIRE: Les suggestions que j'ai eues, M. le député,
sont surtout vis-à-vis de la qualité. Trop souvent, les parents
pensent qu'on n'a peut-être pas un nombre suffisant d'enseignants
compétents pour la langue seconde et ils aimeraient voir un plus grand
nombre d'enseignants compétents pour enseigner l'anglais. Enfin, c'est
à peu près tout ce qu'ils peuvent suggérer en ce moment.
Je sais que la Commission scolaire de Montréal, actuellement, fait des
efforts dans ce sens-là. J'espère que cela va
s'améliorer.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, vous avez perçu chez eux une
certaine inquiétude qui les incite à vous demander que
l'enseignement de la langue seconde soit amélioré pour des
raisons d'efficacité qui tiennent à des exigences d'ordre
économique.
M. GREGOIRE: Oui, de richesses culturelles aussi et d'efficacité.
Je dirais d'efficacité en premier parce que là, il faut penser
qu'on est dans un contexte montréalais quand on parle du projet de loi
no 28. Quoi qu'il arrive, si on ne parle pas un peu l'anglais à
Montréal, on est dans une situation de désavantage et cela quelle
que soit la politique linguistique qui viendra plus tard du gouvernement et
à la suite du rapport de la commission Gendron, quelles que soient ses
conclusions. Il reste qu'à Montréal, dans cette grande
métropole, il faut parler anglais le mieux possible.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Merci.
M. GREGOIRE: Et vice versa aussi. Il va falloir que les anglophones
puissent aussi parler français. Evidemment, cela a été
remarqué des deux côtés, de façon...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Merci, M. Grégoire.
M. LE PRESIDENT: La parole est au député de
Dorchester.
M. GUAY: M. le Président, j'aurais une question à poser
à M. Grégoire. A la page 5 de votre mémoire, dans les
recommandations que vous faites quand on parle du conseil scolaire, à la
recommandation no 6 il est dit ceci: "Le conseil devrait adopter des
règlements pour sa régie interne sans autorisation du ministre".
Vous avez répondu partiellement tantôt en disant le pourquoi de
cette recommandation. J'aimerais vous faire préciser l'importance que
vous y accordez. Est-ce que c'est une importance plutôt secondaire que
première? J'ai l'impression que cela vient changer
considérablement le principe même du projet de loi no 28. Est-ce
que vous voyez par là, par exemple, s'il faut toujours, au
préalable, demander l'autorisation au ministre, des difficultés
d'application ou même l'efficacité du système scolaire mise
en cause?
M. GREGOIRE: Il faut laisser une certaine autonomie au conseil scolaire
parce que si l'on ne veut pas que cela devienne trop lourd, il ne faudrait pas
que le conseil scolaire soit toujours obligé d'aller frapper à
Québec pour agir. C'est dans ce sens-là qu'il faut que le conseil
scolaire puisse se donner des règlements. D'ailleurs, on retrouve cela
dans l'article 607 g) du projet de loi no 28. C'est dans ce sens-là.
M. GUAY: En fin de compte, vous prévoyez que l'autorisation du
ministre qui devra être donnée peut avoir, par voie de
conséquence, de ralentir, par exemple, considérablement les
décisions qui devraient être prises et qui normalement pourraient
être prises à l'intérieur du conseil scolaire.
M. GREGOIRE: Oui, c'est possible. Maintenant, on ne peut pas nier au
ministre de l'Education le droit, parce que c'est une question nationale,
l'éducation, de se préoccuper de très près de ce
qui se passe à Montréal.
Mais il ne faudrait pas qu'à cause de cela l'administration des
commissions scolaires et du conseil scolaire de l'île soit ralentie au
point que tout le système d'éducation, si vous voulez, devienne
une affaire centralisée, par exemple, comme en France. Je pense qu'on
tomberait alors dans un excès contraire. Je soumets l'hypothèse
que ce ne serait pas efficace.
M. GUAY Croyez-vous comme dernière question que les
décisions que pourrait prendre le conseil scolaire sans l'autorisation
du ministre seraient différentes de celles qui pourraient être
prises avec l'autorisation du ministre?
M. GREGOIRE : On parle de règlements pour sa régie
interne. Je n'ai pas d'exemple qui me vienne à l'esprit parce que je ne
suis pas un expert dans le domaine. Mais, pour sa régie
interne, il faut que le conseil scolaire puisse fonctionner de
façon relativement autonome. Qu'il ait besoin de l'autorisation du
ministère pour des choses fort précises, j'en conviens, c'est
nécessaire, mais, pour sa régie interne, je pense qu'il doit
avoir une certaine autonomie d'action.
M. BROCHU: M. le Président, croyez-vous que cette recommandation
serait quand même de nature, en ayant le centre de décision chez
vous, à répondre peut-être d'une façon plus
adéquate aux réalités que vous avez à vivre sur
votre territoire...
M. GREGOIRE: Sûrement.
M. BROCHU: ... en rapprochant, de cette façon, le centre de
décision du centre d'exécution? Parce qu'en fait le centre
d'exécution, c'est vous autres.
M. GREGOIRE: M. le Président, pour répondre au
député, si on fait voter tout le monde pour élire des
commissaires, qu'on paie des taxes au conseil scolaire et qu'après cela
tout se décide à Québec, il y a là quelque chose
qui ne marche pas, à mon avis, sur le plan de l'efficacité.
Il faut reconnaître au ministre, évidemment, comme je le
disais tantôt, sur le plan national, une autorité qui va de soi.
Mais il faut que le conseil scolaire ait une autonomie relative. Autrement, il
ne sert à rien d'instaurer des structures démocratisées
à Montréal.
M. BROCHU: Si je comprends bien, d'après les réponses que
vous nous avez fournies, vous accordez quand même une importance
primordiale à l'article 6 de vos recommandations en ce qui concerne le
projet de loi.
M. GREGOIRE: Ce n'est pas une importance primordiale. Ce n'est pas cela
que nous voulions faire ressortir dans le mémoire. Nous avons
passé là-dessus et "il nous a semblé que..." Nous n'en
ferions pas une tête de chapitre, si vous voulez.
M. BROCHU: M. le Président, si vous me le permettez, sur le
même sujet.
M. LE PRESIDENT: Sur le même sujet.
M. BROCHU: Dans un autre ordre d'idée, maintenant, vous avez
mentionné, tout à l'heure, que vous avez fait parvenir à
vos comités de parents, premièrement, le projet de loi et,
ensuite, un document synthèse leur expliquant la situation. J'aimerais
savoir si c'est possible de votre part dans quelle mesure s'est
effectuée la participation des parents au niveau de ces comités
dans les réponses que vous avez obtenues.
M. GREGOIRE: C'est assez difficile à éva- luer d'une
façon précise, mais je peux vous dire que nous avons eu des
réponses, du "feedback", de tous nos comités régionaux.
Maintenant, dans quelle mesure nos comités régionaux ont-ils pu
percevoir les opinions des parents à travers les comités
d'écoles? Je pense que cela a été assez bon.
Si je prends la région 5, que je connais le mieux, sur les 60
comités consultatifs de la région, une quarantaine ont
répondu, dont les présidents sont venus à une
réunion subséquente, après l'avoir étudié
dans leur propre comité d'écoles, parler au niveau
régional. Cela a aussi été fait dans la région 4,
dans la région 3. Dans les régions anglophones, cela a aussi
été fait avec une perspicacité extraordinaire. Ils ont
travaillé très fort à l'étude du projet de loi no
28.
M. BROCHU: D'autres consultations ont semblé se faire,
d'après les informations que nous avons, par d'autres associations, par
d'autres groupements, relativement aux parents. Y a-t-il eu, à un moment
donné, certaines rencontres à ce sujet dans le but
d'établir une action commune au niveau de cette consultation?
M. GREGOIRE: Etant le comité consultatif de la CECM cela
confirme ce que Mme Roux disait hier nous avons consulté la CECM
avant de rédiger notre mémoire et avant qu'elle ne rédige
son mémoire. Nous avons eu une rencontre qui a duré près
d'une journée avec les commissaires. Nous avons discuté du projet
de loi no 28 d'une façon assez complète. Ensuite, nous avons
procédé à l'étude au niveau du comité.
A notre comité, nous avons aussi des
délégués qui sont en minorité, si vous voulez, mais
qui viennent de corps intermédiaires, comme la CSN, la FTQ, la chambre
de commerce, le Centre des dirigeants d'entreprises, qui ont aussi
participé à l'élaboration de ce mémoire.
Il y a aussi les Parents catholiques, les Unions de familles. Nous avons
consulté ces gens via leurs délégués dans notre
comité.
Nous avons reçu aussi de la documentation d'autre groupes qui
présentaient des mémoires, comme la CEQ et l'Alliance des
professeurs, les cadres de la CECM. Nous avons fouillé toute cette
documentation aussi, dans la mesure où c'était possible avant de
tirer nos propres conclusions.
M. BROCHU: Je parle plus strictement au niveau des associations de
parents, parce que vous êtes aussi une association de parents. Est-ce
qu'il n'y aurait pas lieu de concerter des efforts dans un même but,
peut-être en établissant des normes convenues entre les
différents groupes? Différents mémoires sont
déposés ici; nous entendons différents sons de cloche,
relativement aux mêmes parents puisque la clientèle finalement est
toujours la même.
Est-ce qu'il n'y aurait pas eu lieu d'avoir une modalité
d'entente sur une sorte de consulta-
tion, peut-être pas standardisée, mais au moins
établie sur certaines normes acceptées par les différents
groupes, puisque vous regroupez la même clientèle.
M. GREGOIRE: Pour faire cela il aurait fallu plus de temps, d'une part.
D'autre part, les associations de parents, comme vous dites, il n'y en a pas
beaucoup. C'est encore le comité consultatif qui regroupe le plus grand
nombre de parents. Il y a l'Association des parents catholiques dont un
délégué fait partie de notre comité. Evidemment,
ces parents ont, c'est normal, des options précises vis-à-vis de
la confessionnalité surtout, et nous les avons entendus.
Chez les anglophones, Mme Killins me dit que cela a également
été fait de façon sérieuse. On a consulté
à gauche et à droite: le Montreal Council, les associations des
parents dans leur milieu. Cela a été fait dans la mesure
où c'était possible.
M. LE PRESIDENT: La parole est au député d'Olier.
M. PICARD: M. Grégoire, dans votre mémoire, en ce qui
touche le conseil scolaire, vous faites une recommandation qui se lit comme
suit: "Le conseil devrait se donner un comité consultatif de parents."
Si on regarde le bill 28 aux articles 606 et suivants: "Pouvoirs et devoirs du
conseil", je me demande en quoi un comité consultatif de parents
pourrait être utile ou pourrait apporter une contribution valable,
étant donné les devoirs ou pouvoirs hautement techniques et
administratifs du conseil, comme, par exemple, l'étude et l'approbation
des budgets des commissions scolaires, l'émission d'obligations.
En quoi un conseil consultatif de parents pourrait-il être utile
à ce niveau-là?
M. GREGOIRE: D'abord, il nous a semblé logique, s'il y avait un
comité consultatif au niveau de l'école, au niveau de la
commission, qu'il y en ait un aussi au niveau du conseil. Vous dites que le
conseil s'occupe de mesures administratives hautement techniques. C'est
possible. Mais là aussi nous pensons que les parents peuvent être
utiles aux administrateurs du conseil de l'île parce qu'ils vont
être très près de la réalité.
Par exemple, dans le domaine de la péréquation qui va se
faire pour les zones défavorisées, etc., les parents pourront
avoir des suggestions à faire au conseil scolaire, suggestions
j'en suis certain qui pourrait être valables sur l'attribution des
budgets, etc.
C'est un rôle consultatif, si vous voulez, mais je pense que cela
peut être utile au niveau du conseil scolaire. Cela complèterait
la pyramide de participation.
M. PICARD: C'est plutôt parce qu'il y a un conseil consultatif, le
Conseil Supérieur de l'éducation qui est parallèle au
ministère pour ces choses-là.
Quelle serait la méthode utilisée pour la nomination des
membres de ce conseil consultatif?
M. GREGOIRE: Nous ne nous sommes pas arrêtés à
ça. Il faudrait faire à peu près comme nous le faisons en
ce moment, c'est-à-dire que chaque comité de parents au niveau
des commissions scolaires délègue une personne et ce groupe
qui serait de onze, si nous prenons les chiffres tels qu'ils sont dans
le projet de loi 28 pourrait élire un exécutif ou les onze
constitueraient le comité consultatif du conseil scolaire. Toute la
ligne de communication serait complète, de la base jusqu'au conseil de
l'île, parents-administrateurs.
M. PICARD: Vous ne croyez pas qu'il y aurait un danger de placer ces
personnes-là, ces membres du comité consultatif dans une
situation quasi intenable si on leur demande d'approuver certaines
décisions du conseil scolaire, sans leur fournir tous les détails
nécessaires pour la prise d'une décision?
M. GREGOIRE: Vous auriez raison, M. le député, si, comme
vous dites, on leur demandait leur approbation, mais ce n'est pas ce à
quoi on pense. On pense que c'est un rôle consultatif, on leur demande
une opinion et non pas une approbation. Il faut que la décision
appartienne à celui qui est élu et non pas à celui qui
joue un rôle consultatif...
M. PICARD: Il n'en est pas question.
M. GREGOIRE: Il est normal que celui qui est élu, comme vous le
faites d'ailleurs aujourd'hui, consulte les parties intéressées
avant de légiférer, et c'est dans cet esprit-là que notre
participation au conseil scolaire peut être utile, non pas dans un
rôle d'approbation mais de consultation.
M. LE PRESIDENT: Le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. TETLEY: Merci, M. le Président. M. Grégoire, avez-vous
les chiffres par hasard ou une idée du nombre de personnes qui, depuis
le bill 63, ont passé du système anglophone catholique au
système francophone catholique et vice versa.
M. GREGOIRE: Non, à moins que mes collègues aient une
réponse à me donner, moi je n'en ai pas, malheureusement, je dois
répondre par la négative. Il faudrait plutôt trouver
ça dans le mémoire de la CECM qui est beaucoup plus
fouillé; on n'a pas, nous évidemment, les moyens...
M. TETLEY: Je n'ai pu le trouver dans le mémoire.
M. SAINT-PIERRE: Je signalerai au député de
Notre-Dame-de-Grâce, qu'on a soulevé la question hier et les
chiffres contenus dans le mémoire de la CECM s'arrêtent à
1967, mais on nous a dit que, d'ici quelque temps, on comptait pouvoir apporter
des précisions sur la situation en 1970, c'est-à-dire
après la loi 63.
M. TETLEY: Très bien, merci. Est-ce que ces chiffres donnent le
nombre d'élèves qui ne pouvaient pas passer de l'un à
l'autre, surtout du système anglophone au francophone? Je donne un
exemple, la commission scolaire de Mont-Royal, parce qu'il n'y avait pas de
place. Je crois que le bill 28 pourrait régler cette situation. C'est
une des raisons pour lesquelles j'appuie le bill 28, mais c'est un autre
chiffre qu'on doit trouver; vous n'avez pas ce chiffre non plus?
M. GREGOIRE: Malheureusement, M. le ministre, je n'ai pas ces chiffres
et on n'a pas fait d'études de ce côté-là, mais dans
le mémoire de la CECM, à la page 5 de l'annexe B du
mémoire, on me dit 150 du côté anglais au côté
francophone. Mais quant à notre comité, il n'a pas fait
d'étude de ce côté-là.
Evidemment, j'admets comme vous qu'il semblerait là a priori que
le projet de loi 28 facilite le rassemblement, si vous voulez, des ressources,
il serait normal que s'il y a une école où il y a moins
d'élèves, comme l'exemple que vous donnez, j'imagine que c'est ce
qui devrait arriver, mais nous on ne s'est pas penché sur cette question
statistique, je n'ai pas de chiffres. Si vous voulez vous référer
au mémoire de la CECM.
M. TETLEY: Oui, parce qu'il faut aider évidemment les anglophones
qui veulent apprendre le français, qui veulent envoyer leurs enfants aux
écoles catholiques françaises. Voici un exemple, on a
refusé mon enfant, et elle doit quitter la maison à 7 h 30 le
matin ou 7 h 25 afin de se rendre à une école et prendre trois
autobus. Finalement elle a une éducation en langue française,
d'une bonne soeur, une magnifique éducation et dont je suis très
très content, mais c'est un peu injuste lorsqu'il y a une école
juste à cent verges de chez nous.
M. GREGOIRE: M. le ministre, si vous me permettez, je peux vous faire
une suggestion, c'est d'en parler à votre comité consultatif
d'école...
M. TETLEY: Je regrette, je suis protestant.
M. GREGOIRE: et... si vous n'en avez pas, formez-en un le plus tôt
possible.
M. TETLEY: Je suis protestant. Une autre question, M. Grégoire.
C'est une constatation. Dans le comté de Notre-Dame-de-Grâce
je crois que c'est mon devoir de vous aviser d'un fait j'ai plus
de critiques de mes électeurs catholiques, français et anglais,
au sujet de l'instruction de la deuxième langue, que des
protestants.
S'ils ont raison, je ne le sais pas, mais j'ai plus de critiques des
catholiques au sujet de l'enseignement de la langue française. J'en ai
pas mal des protestants, mais j'en ai plus des catholiques.
M. GREGOIRE: M. le ministre, vous parlez de la situation actuelle.
M. TETLEY: Oui.
M. GREGOIRE: Cela rejoint ce que nous avons dit tantôt, c'est une
préoccupation que nous avons pu ressentir, nous aussi les parents, au
sujet de la langue seconde.
M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Jacques.
M. CHARRON: Merci. Pour faire suite à la question du ministre des
Institutions financières...
UNE VOIX: Compagnies et Coopératives.
M. CHARRON: ...je voudrais vous demander votre avis sur une suggestion
que j'ai entendue d'un groupe de parents dans la consultation que j'ai faite
à propos du bill 28. On craint que dans les commissions scolaires qui
vivront chacune avec une minorité il se produise une forme
j'emploie un mot peut-être un peu fort mais vous comprendrez ce que je
veux dire de discrimination à l'égard de la
minorité, c'est-à-dire que la majorité, comme dans
n'importe quel régime, sera servie la première. Nous sommes assez
bien placés, dans le Canada, pour le savoir.
Par la suite, c'est par grignotage ou par rappels constants que la
minorité va obtenir des choses. Enfin, c'est une crainte qui existe chez
des groupes. On m'avait donné comme solution de reconnaître, au
comité d'écoles, une manière de droit d'appel
auprès du conseil scolaire de l'île quand il se dit
maltraité ou non considéré de la part de la commission
scolaire.
M. GREGOIRE: Ce que nous proposons, dans le mémoire, c'est un peu
cela, si vous voulez, puisque nous disons: Il y aurait un comité
consultatif au niveau du conseil scolaire. A ce moment-là, s'il y avait,
comme vous dites, des discriminations, je pense que les parents devraient le
faire savoir, et cela jusqu'au niveau du conseil scolaire, pour corriger
immédiatement une situation de fait qui serait mauvaise. Avec ce que
nous proposons, je pense que nous pouvons atteindre cela. Avec ce que nous
proposons aussi, soit le chevauchement des ressources
pédagogiques et administratives pour pallier cette déficience
vis-à-vis des minorités, si on retrouve cela, je pense qu'on
aurait assez de sécurité vis-à-vis des
minorités.
M. CHARRON: Vous iriez jusqu'à demander que cela figure dans le
texte de la loi même, ce droit d'appel? Appelons-le comme cela pour le
moment.
M. GREGOIRE: A partir du moment où on accepte qu'il y ait un
comité consultatif au niveau du conseil de l'île, cela devient
implicite.
M. CHARRON: S'il n'y avait pas de comité consultatif au niveau du
conseil de l'île, est-ce que vous accepteriez quand même que
figure, dans les pouvoirs du comité d'écoles, le droit, à
certains moments, de faire appel au conseil scolaire?
M. GREGOIRE: Nous ne l'avons pas abordé de cette
façon-là, mais je n'y verrais pas d'objection. D'ailleurs, je
pense que si les parents s'occupent de leurs affaires, et c'est ce que nous
voulons, en somme, ils vont le faire. D'abord au niveau de l'école et
ensuite au niveau de la commission scolaire c'est déjà
reconnu dans le projet tel qu'il est ils vont pouvoir faire valoir leurs
opinions.
En plus, vous allez avoir des commissaires élus. Vous avez aussi
les deux commissaires additionnels que le ministre peut nommer au moment
où une minorité serait en danger. Avec cela, je pense qu'on a
quand même assez de sécurité. Il faudrait voir à
l'expérience, mais pour le moment, je suis porté à penser
que cela pourrait fonctionner. Il faut faire confiance aux gens.
M. CHARRON: Est-ce une crainte que vous avez ressentie aussi chez les
groupes avec qui vous travaillez, cette possibilité-là?
M. GREGOIRE: Du moment que l'on s'adresse à une minorité,
quelle qu'elle soit, il y a toujours une crainte.
M. LE PRESIDENT: Je remercie les représentants du Comité
consultatif de la CECM, et en particulier M. Grégoire, de leur
mémoire.
Soyez assurés que nous allons prendre en considération vos
remarques.
M. GREGOIRE: Je vous remercie, M. le Président, et je remercie
les membres de la commission parlementaire de nous avoir entendus. Bonjour et
bonne journée.
M. LE PRESIDENT: J'inviterais à présent l'Association des
commissions scolaires de la région de Montréal,
représentée par M. Hubert Lavigne, à présenter son
mémoire.
Association des commissions scolaires de la
région de Montréal
M. LAVIGNE: M. le Président, MM. les membres de la commission
parlementaire, je m'appelle Hubert Lavigne, je suis membre de l'exécutif
de l'Association des commissions scolaires catholiques de la région
métropolitaine et président d'une des commissions scolaires
touchées par le projet de loi 28. M'accompagnent, M. Louis-Philippe
Saint-Pierre, à ma droite, également président de l'une
des 17 commissions scolaires touchées par le projet de loi 28; à
ma gauche, M. Jean-Paul Vermette, secrétaire-administrateur de
l'association; M. Mathieu Dispaltro, président d'une autre commission
scolaire de la région, ainsi que M. Lucien Mouton, président
d'une autre des 17 commissions scolaires.
L'Association des commissions scolaires de la région de
Montréal regroupe les 44 commissions scolaires catholiques de la
région métropolitaine, sauf la Commission des écoles
catholiques de Montréal, c'est-à-dire la CECM. Ces 44 commissions
scolaires desservent une population scolaire de 178,000 élèves,
majoritairement de langue française.
L'association a été fondée en 1961 et son
siège social est situé au 2425, rue de Salaberry, à
Montréal. Tel que spécifié dans ses statuts, l'association
a pour but de promouvoir les intérêts de l'éducation.
M. le Président, si vous le permettez, je vais sauter
l'énumération des buts spécifiques de a) à g), et
je continue à la page 2.
Des 44 commissions scolaires membres de l'association, ce sont toutefois
les 17 commissions scolaires catholiques de l'île de Montréal qui
seront directement touchées par l'application éventuelle des
mesures contenues dans le projet de loi 28. Ces commissions scolaires sont:
Baldwin-Cartier, D'Anjou, Dorval, Lachine, Lasalle, Montréal-Est,
Mont-Royal, Outremont, Pointe-aux-Trembles, Saint-Laurent,
Saint-Léonard, Saint-Pierre-aux-Liens, Saint-Raphaël de l'île
Bizard, Sainte-Anne-de-Bellevue, Très-Saint-Sacrement de Lachine, Verdun
et la régionale Le Royer.
A leur niveau, ces commissions scolaires doivent répondre de la
qualité de l'éducation auprès d'une population
approximative de 433,000 personnes, tant de l'ouest que de l'est, tant du nord
que du sud de l'île de Montréal. Elles desservent plus
précisément une population scolaire de 99,516
élèves et elles doivent administrer des budgets de l'ordre de
$100 millions par année. Elles comptent 4,811 instituteurs et
institutrices à leur emploi.
Après les avoir consultées au sujet du projet de loi 28,
c'est le point de vue de ces commissions scolaires que l'association veut
présenter à la commission parlementaire de l'Education de
l'Assemblée nationale. Nous tenons à le faire le plus
succinctement et le plus clairement possible.
Précisons que les 17 commissions scolaires catholiques de
l'île de Montréal vivent quotidiennement plusieurs des situations
qui ont déjà fait l'objet de représentations et de
recommandations à cette commission parlementaire. C'est pourquoi notre
approche sera la plus réaliste possible. Avant les théories, ce
sont les faits qui nous préoccupent.
Dès qu'il s'agit de confessionnalité, de bilinguisme, des
droits des parents, et des enfants, de participation des groupes
intéressés à l'éducation, de répartition des
pouvoirs entre les divers organismes responsables de l'enseignement, de
financement et de taxation, les membres des 17 commissions scolaires
catholiques de l'île de Montréal prétendent posséder
une certaine expérience. Leurs remarques, croyons-nous, méritent
d'être prises en bonne considération.
L'Association des commissions scolaires de la région de
Montréal accepte le principe des commissions scolaires unifiées
contenu dans le projet de loi 28. Ces commissions scolaires établies
selon des bases géographiques permettront d'assurer un même
enseignement de qualité à tous les jeunes de l'île de
Montréal, sans distinction de langue, de race ou de religion. Elles
permettront aussi de répartir équitablement le fardeau fiscal
entre tous les contribuables.
Nous croyons que ceux qui le désirent devraient continuer de
pouvoir recevoir un enseignement religieux à l'école, comme le
prévoit d'ailleurs le projet de loi 28. A ce sujet, nous estimons qu'il
appartiendra avant tout aux parents membres des comités catholiques et
des comités protestants constitués pour chacune des commissions
scolaires de veiller à la qualité de l'enseignement religieux.
Ces comités confessionnels, prévus dans le bill 28, devront
garantir la permanence de la représentation des parents.
A l'article 594 du bill 28, il est stipulé que "ces
comités sont composés de trois membres élus avant le 31
octobre de chaque année parmi et par les parents membres des
comités consultatifs visés à l'article 66 et
établis pour les écoles publiques catholiques ou les
écoles publiques protestantes, selon le cas." Nous approuvons le texte
de cet article, mais notre expérience dans le domaine de
l'éducation nous a maintes fois démontré la
difficulté d'amener les parents à s'intéresser activement
et sur une longue période aux questions scolaires.
Nous ne jugeons pas les parents qui refusent de prendre part aux
activités de leurs commissions scolaires. Nous sommes en faveur de la
participation, mais nous sommes obligés de noter que la participation
est souvent plus un mot qu'une réalité, le nombre de ceux qui
sont prêts à consacrer du temps pour discuter de questions
scolaires étant parfois limité.
Or, comme la qualité de l'enseignement religieux dépendra
en partie de la participation et de la vigilance des membres des comités
confessionnels, tout doit être mis en oeuvre pour garantir ou du moins
pour assurer raisonnablement la permanence de ces comités.
Il est prévu à l'article 594 a) du projet de loi que les
"modalités d'élection des membres de ces comités et les
modalités de fonctionnement de ces comités sont
déterminés par règlement des comités catholique ou
protestant du Conseil supérieur de l'éducation, selon le
cas".
Nous acceptons les dispositions de cet article, mais nous estimons qu'il
ne faudrait pas trouver chaque année, avant le 31 octobre, les trois
nouveaux membres des comités catholiques ou protestants. On devrait voir
à assurer une certaine rotation chez ces membres de manière,
peut-être, que chaque année il ne faille en choisir qu'un ou
deux.
C'est pourquoi nous recommandons que l'élection et le
remplacement des membres des comités confessionnels se fassent selon des
modalités qui s'inspirent largement du premier paragraphe de l'article
585 du projet de loi no 28, de manière à assurer une rotation
chez les membres de ces comités.
En effet, nous ne voyons pas pourquoi les modalités
d'élection aux comités confessionnels ne pourraient pas
être sensiblement les mêmes que celles des commissaires.
Au sujet de ces comités, auxquels nous attachons une grande
importance, un autre fait préoccupe l'Association des commissions
scolaires de la région de Montréal.
Il est précisé au second paragraphe de l'article 595 du
projet que "les commissaires doivent les consulter pour la nomination des
directeurs d'écoles catholiques ou protestantes, selon le cas".
Nous estimons que ce droit de consultation n'est pas suffisant, car rien
dans le projet de loi n'oblige de quelque façon que ce soit les
commissions scolaires à tenir compte de l'avis des comités
confessionnels. A notre avis, les commissaires doivent tenir compte des
opinions des membres des comités catholiques ou protestants. Les
directeurs d'écoles auront une grande responsabilité en ce qui
touchera l'enseignement confessionnel donné aux enfants et si les
commissions scolaires doivent, en dernier lieu, prendre la décision de
les embaucher, les parents membres des comités doivent être
assurés que leurs suggestions auront de bonnes chances d'être
considérées.
C'est pourquoi nous recommandons que les commissaires soient
obligés de tenir compte de l'opinion des comités confessionnels
au sujet de la confessionnalité dans la nomination des directeurs
d'écoles catholiques ou protestantes.
Concernant l'enseignement religieux dans les écoles, nous avons
axé nos remarques sur le fonctionnement des comités
confessionnels. Selon nous, c'est là que les parents seront le mieux
à même de faire respecter leurs droits au sujet de l'enseignement
catholique ou protestant que pourront recevoir leurs enfants.
Nous croyons que les commissaires ne devraient pas craindre de perdre
une partie des pouvoirs décisionnels que leur octroie à ce sujet
le bill 28, si cela se traduit par des garanties supplémentaires
données aux parents qui peu-
vent s'inquiéter de la qualité de l'enseignement religieux
donné à leurs enfants.
Nous croyons également qu'en assurant la permanence et la force
de ces comités confessionnels, le législateur pourra être
à même de calmer les appréhensions de ceux pour qui le
projet de loi constitue une menace pour l'enseignement de la religion et la
transmission de certaines valeurs spirituelles.
Pour nous qui représentons des commissions scolaires et surtout
des commissaires d'écoles, il revient d'abord aux parents et aux enfants
d'accepter ou de refuser l'enseignement de la religion. Mais à cette
liberté de choix doit correspondre, pour les commissions scolaires, une
obligation de donner un enseignement confessionnel à ceux qui en font la
demande.
M. CHARRON: Si vous me le permettez...
M. LE PRESIDENT (Pearson): L'honorable député de
Saint-Jacques.
M. CHARRON: ...nous pourrions peut-être procéder tout de
suite aux questions sur cet aspect confessionnel. Cela vous donnerait le
temps...
M. LAVIGNE: Libre à vous.
M. CHARRON: ...de reprendre votre souffle.
Vous faites deux recommandations, en fin de compte, en matière
confessionnelle. La première suggère d'adopter le système
de rotation que plusieurs autres témoins qui vous ont
précédé ont condamné. Il s'agit d'accepter ce
système de rotation jusqu'au niveau du comité d'écoles. Je
dois vous dire que je ne comprends pas exactement la motivation dans le texte
que vous soumettez là. Ce serait pour assurer une stabilité dans
le comité confessionnel de l'école. C'est pour cela que vous
faites cela?
M. LAVIGNE: Une continuité. Si je peux me le permettre, vous
savez tous que, lorsqu'on est élu à un poste, il faut quand
même un certain temps pour se roder au travail. Si quelqu'un est
élu commissaire d'écoles, avant qu'il soit au courant de ce qui
se passe et en mesure de participer pleinement à l'administration, cela
peut prendre quelques mois. Admettons qu'une année on nomme trois
nouveaux membres au comité et que ce sont trois personnes qui ne se sont
pas, jusqu'à ce moment, occupées très activement de la
chose scolaire, cela comporte quand même un risque. Nous croyons que,
s'il restait à ce comité au moins un membre et peut-être
deux membres qui ont eu l'expérience d'une ou deux années, le
comité continuerait à fonctionner normalement et le nouveau
membre, évidemment, pourrait prendre de l'expérience. C'est dans
ce sens que nous croyons que cela ajouterait de la continuité et
également peut-être aussi de la permanence.
M. CHARRON: Vous admettrez avec moi que si, dans une telle
modalité, vous vous trouveriez à amplifier le caractère de
continuité, vous affectez, par contre, dans le sens négatif,
l'autre disposition, celle du choix des parents. Parce que, si c'est par
rotation, il peut se trouver qu'un des trois membres du comité ne fasse
pas l'affaire des parents tellement, mais qu'ils doivent attendre trois ans
avant que son tour vienne à échéance pour pouvoir le
changer. Il peut se révéler, au cours d'une année
scolaire, des parents inconnus au départ, en septembre ou octobre, mais
qui, par leurs activités à travers le comité
d'écoles toute l'année, se signalent à l'attention de
l'ensemble des parents au comité par différentes qualités.
Quelqu'un pourrait être le choix des parents, à ce
moment-là, qui le nommeraient au comité d'écoles
confessionnel. Mais ils ne pourront pas le faire puisque, chaque année,
il n'y aura qu'un poste d'ouvert.
Je reprends l'opinion que j'ai souvent émise sur ce domaine
confessionnel. C'est qu'on a tort de considérer aussi le confessionnel
ou le catholique ou le protestant comme un bloc. Il y a des courants
d'idées aussi à l'intérieur de cela. Vous allez avoir des
catholiques progressistes, qui "swing" comme on dit et, d'un autre
côté, vous allez avoir des catholiques nettement plus
conservateurs, respectant plus à la lettre les messages, les bulles ou
les encycliques. Entre les deux, on aurait tort de penser que le comité
confessionnel va être un comité sans conflit. Vous allez avoir des
courants d'opinions. Si on accepte votre modalité de rotation, cela va
prendre du temps avant que le changement s'effectue au niveau du comité
confessionnel. Puisque le nombre est si petit, il me semble que c'est possible
pour des parents qui sont de 50 à 70, à ce qu'on dit, d'en
choisir trois par année entre eux.
M. LAVIGNE: Remarquez que ce que vous apportez constitue une
difficulté et nous le reconnaissons. Par contre, c'est une
difficulté qui existe à tous les niveaux. Par exemple, au niveau
de la commission scolaire, un commissaire d'écoles est élu pour
trois ans et, si cela ne fait pas l'affaire, il faut l'endurer pendant trois
ans. Cela existe au niveau des municipalités.
M. CHARRON: Les députés aussi.
M. LAVIGNE: Oui. Cela existe à tous les paliers. Nous
reconnaissons que cela constitue une difficulté. Entre les deux
difficultés, entre les deux maux, nous croyons que nous devons choisir
le moindre.
M. CHARRON: D'accord. Votre deuxième recommandation, à
moins que quelqu'un n'ait des questions sur la première, demande que les
comités confessionnels aient droit de nommer le directeur.
M. LAVIGNE: Non. M. CHARRON. Non?
M. LAVIGNE: Dans le texte de loi, on parle de pouvoir consultatif,
c'est-à-dire qu'avant de nommer un directeur d'école la
commission scolaire doit consulter les comités confessionnels.
Pour prendre un exemple bien concret, chez moi, nous pourrions avoir une
commission scolaire où les quinze commissaires d'école seraient
tous catholiques, et où il serait question de nommer un directeur pour
une école protestante. Sachant que les êtres humains sont parfois
des êtres humains avec leurs défauts et leurs qualités,
pour des raisons que nous pouvons difficilement concrétiser mais qui
sont quand même possibles, une commission scolaire à
majorité catholique pourrait nommer directeur d'une école
protestante un catholique parce qu'on aurait pu consulter le comité
confessionnel, mais consulter ne signifie pas tenir compte de l'opinion. Alors
nous, nous voulons aller un peu plus loin que la consultation. Nous voulons que
la commission scolaire soit obligée de tenir compte de l'opinion. Cela
ne veut pas dire que c'est le comité qui le nomme mais c'est un moyen de
pression beaucoup plus fort. Si ma commission scolaire, à un moment
donné...
M. SAINT-PIERRE: Ecoutez, monsieur, ce point m'intéresse, mais je
pense qu'en saine administration, il faut savoir qui prendra les
décisions. Dans le projet de loi no 28, nous pouvons être
totalement dans l'erreur nous avons dit que ce sont les commissaires qui
prendront la décision. Mais nous disons qu'avant de prendre les
décisions, ils sont obligés de consulter un comité
confessionnel pour avoir son avis, comme dans notre législation
scolaire, à l'occasion, le ministre prend les décisions mais est
obligé de consulter le Conseil supérieur de l'éducation
qui, lui, peut rendre son avis public. Il y a une espèce de pression
morale.
Nous pouvons être dans l'erreur. Nous pourrions faire l'inverse.
Je pense que c'est le sens de la question du député de
Saint-Jacques. Nous pouvons dire: Ce sont les comités qui
décideront mais le comité confessionnel sera tenu de consulter
les commissaires. Nous pourrions mettre cela à l'inverse. Qu'est-ce que
cela veut dire, "soit obligé de tenir compte"? Est-ce que cela veut dire
qu'on doit entériner ce qui a été décidé par
d'autres?
M. LAVIGNE: M. le ministre, à notre point de vue, cela veut dire
que si le conseil confessionnel fait une recommandation et que la commission
scolaire n'en tient pas compte, la commission scolaire doit se justifier, alors
que si on a tout simplement un pouvoir de consultation, on peut consulter, mais
est-on justifié vis-à-vis des contribuables?
M. SAINT-PIERRE: Mais cela, je pense que nous ne sommes pas
obligés de l'indiquer dans le projet de loi. Ce sont des questions qui
se poseront par les contribuables eux-mêmes. Ils diront: Comment se
fait-il qu'à l'école Jean-de-Brébeuf, pour prendre un cas,
le comité confessionnel s'était opposé à la
nomination de M. X et que vous l'avez nommé? Mais je pense que c'est
nécessaire, pour l'administration dans la loi, d'être très
précis. Veut-on que ce soient les trois membres du comité
confessionnel qui choississent les principaux, quitte à consulter les
commissaires, à consulter bien du monde et à rendre des comptes?
Ou est-ce qu'au contraire, on dit: Les commissaires seront là pour
administrer et ce sont eux qui décideront? Comme la loi le dit, ils sont
obligés c'est un mécanisme qui est très
précis de consulter, ce qui veut dire qu'on ne pourrait pas
nommer quelqu'un à la vapeur. On est obligé de soumettre cela par
écrit avant de ratifier.
M. LAVIGNE: Dans notre esprit, ce sont définitivement les
commissaires d'écoles et la commission scolaire qui ont le pouvoir de
décider. C'est la commission scolaire qui décide. Dans notre
esprit, c'est clair. Tout ce que nous voulons ajouter, c'est un moyen de
pression un peu plus fort que tout simplement de la consultation.
M. SAINT-PIERRE: Oui, mais la consultation, c'est assez fort.
M. LAVIGNE: C'est déjà fort.
M. SAINT-PIERRE Lorsque le conseil des universités me dit,
à moi, que je suis dans l'erreur sur telle recommandation, c'est fort,
parce que cela va dans l'opinion publique et, après cela, j'ai des
comptes à rendre à savoir pourquoi nous n'avons pas tenu compte
d'un avis soit du conseil des universités, soit du Conseil
supérieur de l'éducation.
Mais dans notre législation scolaire, cependant, il est
très clair que ce ne sont pas eux qui décident, que c'est
quelqu'un qui doit rendre des comptes à des gens qui sont élus
par le peuple qui, lui, décide.
M. LAVIGNE: Nous croyons que ce pouvoir de décider doit demeurer
à la commission scolaire. Nous voulons tout simplement suggérer
une possibilité. Laquelle, au juste, d'une façon précise?
Une possibilité d'augmenter le pouvoir de pression du comité
confessionnel.
M. SAINT-PIERRE: Je tentais de faire préciser, dans le concret,
ce que voulait dire "soit obligée de tenir compte de l'opinion des
comités."
M. LAVIGNE: Dans notre esprit, cela voudrait tout simplement dire que la
commission scolaire ne peut pas consulter le comité confessionnel, se
retourner et prendre une décision tout à fait contraire sans
donner aucune expli-
cation. Cette explication pourrait même être donnée,
tout simplement, trois ans plus tard, quand celui qui serait soumis à
une élection donnerait cet exemple vis-à-vis de la
population.
M. SAINT-PIERRE: Mais il me semble que nous ne pouvons pas mettre cela
dans un texte de loi, dire qu'en dedans de trois ans, vous pouvez expliquer vos
gestes. C'est la démocratie.
M. LE PRESIDENT: Le député de Chicoutimi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Lavigne, la proposition que vous faites
à la page 8, qui a fait l'objet des questions du ministre de
l'Education, en principe, si vous voulez, se présente bien.
Seulement lorsqu'on entre dans la mécanique législative
et là on a un texte de loi il est assez difficile de
concilier, d'une part, les pouvoirs décisionnels qu'on accorde aux
commissaires et, d'autre part, de rogner ces pouvoirs décisionnels
à l'avantage des représentants des comités confessionnels.
Ou bien les commissaires ont le pouvoir de décider ou ils ne l'ont pas.
Ou ce sont les comités consultatifs qui ont le pouvoir de décider
ou ils ne l'ont pas.
On ne peut pas partager, dans un domaine comme celui-là, le
pouvoir décisionnel. Il faut absolument que ce soit un corps qui l'ait
ou un autre.
La proposition que vous faites, pour valable qu'elle soit, me parait
mécaniquement impraticable. Vous voudriez et je comprends
très bien votre point de vue "que les commissaires soient
obligés de tenir compte de l'opinion des comités confessionnels
au sujet de la confes-sionnalité dans la nomination des directeurs
d'écoles catholiques ou protestantes". Vous voulez, en quelque
façon, que ces gens-là aient plus de poids moral.
Mais, par ailleurs, dans votre mémoire, vous parlez des pouvoirs
décisionnels, ce qui nous a portés, nous, à
interpréter votre proposition comme une sorte de fractionnement des
pouvoirs décisionnels. Et ce que je veux vous faire entendre je
pense que vous le comprenez très bien, parce que vous avez
l'expérience c'est: Qui décidera quoi? Est-ce que ce
seront les commissaires ou ces comités qui décideront?
Moi je suis d'accord avec vous que ces comités aient plus de
poids, que leurs voix soient entendues de façon impérieuse
à certains moments. Vous ne nous demandez pas de les constituer en
autorité, si vous admettez qu'ils soient simplement consultatifs.
Dès lors que vous acceptez qu'ils soient consultatifs, vous
rejetez immédiatement l'idée qu'ils aient part aux
décisions. Par conséquent, leur rôle est strictement un
rôle d'aviseur et il a l'importance que l'on accorde aux comités
consultatifs. Vous voyez la difficulté mécanique d'inscrire dans
un projet de loi une disposition qui fractionnerait le pouvoir de
décision, en donnant une petite partie aux commissaires, une autre
partie aux comités consultatifs.
J'aimerais que vous m'expliquiez de façon encore plus
précise comment dans votre esprit ça pourrait fonctionner. Je
pose cette question en toute bonne foi, parce que c'est arrivé à
quelques reprises que ce genre de proposition nous ait été faite.
Evidemment, on achoppe à la technicité de la loi; ou c'est l'un
qui a le pouvoir ou c'est l'autre.
M. LAVIGNE: M. le député, la langue française est
très belle et très riche et, si nous possédions aussi bien
notre langue que vous-même, il est fort probable que nous aurions pu nous
exprimer d'une façon beaucoup plus claire.
Dans notre esprit, pour expliciter le texte de façon que
rien ne demeure confus le pouvoir de décision demeure et doit
demeurer entre les mains de la commission scolaire. Tout ce que nous cherchons
est d'ajouter un moyen de pression un peu plus prononcé entre les mains
du comité confessionnel. Et nous avons fait une distinction au sujet de
la consultation. Je peux consulter n'importe quelle personne, me tourner de
bord, prendre la décision comme je l'entends et je n'ai pas de raison
à donner. Tandis que, si je suis obligé de tenir compte de
l'opinion de quelqu'un, je peux me tourner de bord et prendre la
décision en sens contraire; mais à ce moment-là j'ai une
obligation morale beaucoup plus marquée de justifier ma décision.
Et c'est en ce sens-là, notre recommandation.
Nous voulons seulement ajouter. D'une façon pratique, technique,
nous admettons que ce n 'est pas facile de le faire dans un texte de loi. Nous
ne sommes pas des experts, nous sommes évidemment des profanes en la
matière.
C'est surtout l'idée que nous avons voulu lancer. Quelles sont
les façons, la technique légale et pratique de le passer dans le
texte de loi? Je crois que cela dépasse notre compétence.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Lavigne, si vous permettez, pour reprendre
le problème général de la religion que nous avons
commencé d'aborder, puisqu'on vous a interrompu à ce stade-ci de
notre étude, de l'étude de votre mémoire, dans l'ensemble
je vous demande une opinion globale, naturellement, on tiendra compte
des nuances que vous avez apportées dans votre mémoire
est-ce que la loi 28 vous apparaît comme un instrument qui soit de nature
à protéger et à assurer l'enseignement confessionnel?
M. LAVIGNE: M. le député...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Sous toutes les réserves que vous avez
déjà faites dans votre mémoire?
M. LAVIGNE: M. le député, assurément, parce que
quand nous voulons protéger quelque chose, qu'il s'agisse de
confessionnalité, de langue ou de culture, il y a deux façons de
protéger ce bien: par les structures, d'une part, et par le dynamisme de
chaque citoyen. Il peut se faire qu'au cours des années ce dynamisme
faiblisse. C'est à ce moment-là que les structures viennent comme
garantie supplémentaire de façon que, pendant une période
ou le dynamisme est affaibli, tout ne tombe pas. Mais à notre point de
vue, assurément, les garanties religieuses sont suffisantes, pour autant
que les structures soient un petit peu améliorées et qu'il y ait
ce dynamisme individuel et indispensable de la part des parents.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Lavigne, là-dessus, ça
me rassure ce que vous me dites vous parlez dans votre mémoire au
chapitre de la religion de ce dynamisme des parents et de leur participation.
Quelqu'un nous a déjà fait des observations ici, nous disant que
les mécanismes de participation et l'habitude de la participation chez
les parents, ce n'est pas quelque chose qui soit suffisamment rodé pour
constituer une garantie en ce qui concerne la protection de l'enseignement de
la religion dans les écoles. Il m'apparaît, en lisant votre
mémoire, que vous faites confiance aux parents, aux comités
d'écoles et que vous croyez que si ces comités d'écoles
fonctionnent comme ils doivent fonctionner, c'ést-à-dire que les
parents y participent vraiment, à ce moment les structures de la loi 28
ne présentent pas de danger en ce qui concerne l'enseignement
professionnel.
M. LAVIGNE: Je suis tout à fait d'accord avec vous et nous sommes
d'accord, M. le député. Même s'il y a un manque
d'expérience chez les membres d'un comité, si le dynamisme est
là... Je peux bien ne pas être un expert dans un domaine
donné ou dans plusieurs domaines donnés mais si j'ai ce
dynamisme, si j'ai cette volonté de défendre ce à quoi je
crois, nous sommes persuadés que ce dynamisme va nous permettre de
défendre et de faire valoir ces droits et de faire valoir ces croyances,
même s'il n'y a pas à la base l'expérience souhaitable.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, M. Lavigne, est-ce que je pourrais
inférer des propositions que vous avez soumises que, dans votre esprit,
ce ne sont pas les structures comme telles qui doivent être catholiques,
protestantes ou juives, qui doivent être, si vous voulez religieuses,
appelons ça d'un terme général, mais que ce sont ceux qui
deviennent les moteurs de ces structures qui doivent les animer et faire en
sorte que la vie religieuse se diffuse à travers ces structures?
M. LAVIGNE: C'est exactement le fond de notre pensée.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Par consé- quent, M. Lavigne, vous ne
seriez pas d'accord pour que l'on retarde l'adoption du projet de loi 28 sous
prétexte qu'on n'a pas suffisamment fait l'expérience de ces
comités, appelons-les de participation, comités de parents,
comités d'écoles, etc.?
M. LAVIGNE: Nous ne serions pas d'accord pour que l'on retarde le projet
de loi 28 pour cette raison.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous pensez que le statut provisoire, qui
existera pendant x mois ou x années, permettra de roder le
système et, en somme, d'engager les parents dans cette grande
réforme de l'éducation sur l'île de Montréal.
M. LAVIGNE: Nous sommes confiants de pouvoir y réussir. Il y aura
certainement des difficultés, comme il y en a dans le système
actuel, et comme il y en aurait dans n'importe quel système, mais nous
sommes confiants qu'il est possible de faire participer les parents en autant
que l'on fasse en sorte que les parents s'y intéressent et non pas
qu'ils s'en désintéressent. H y a deux possibilités,
évidemment.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Qu'est-ce que vous voulez dire par "pour qu'on
ne fasse pas en sorte de désintéresser les parents"?
M. LAVIGNE: Dans la pratique, il est évidemment possible
d'intéresser les parents en leur fournissant les renseignements
nécessaires, en les tenant continuellement bien informés
qu'ils sachent ce qui se passe comme, dans la pratique, on peut retenir
le plus possible l'information. Si on fait cela, évidemment on risque,
à un moment donné, que les parents se disent: Il y a un mur, on
ne peut pas passer. On risque que les parents se désintéressent,
petit à petit, de la chose.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Lavigne, je pourrais conclure, si vous
m'autorisez à le faire, à la suite de ce que vous avez dit, que
les structures proposées par le projet de loi 28 vous paraissent de
nature à intéresser les parents à cette participation et
qu'il appartiendra aux parents de veiller à ce que ces structures ne
deviennent pas des instruments de paralysie qui empêchent les parents de
participer à la vie de l'école.
Le projet de loi comme tel ne vous apparaît pas comme dangereux,
à l'heure actuelle.
M. LAVIGNE: Absolument pas.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je vous remercie, M. Lavigne.
M. LE PRESIDENT: La parole est au député de
Saint-Jacques.
M. CHARRON: J'aurais une autre question
sur cet aspect confessionnel, celui qui a percé hier durant les
travaux de la commission, c'est une inquiétude que nous avons au sujet
de l'aménagement pratique d'un système qui permet six
différents types d'enseignement.
Il y a des polyvalentes à Montréal je pense
à celle de la régionale Le Royer qui est membre de votre
association de 2,000 à 2,500 étudiants. Il est bien
possible qu'un si bel édifice ne contienne pas, après
l'aménagement, que des catholiques. Il est bien possible
également qu'on y retrouve des francophones protestants ou alors des
catholiques anglophones, mais il n'est pas sûr qu'il y ait une
homogénéité de confessions et de langues à
l'intérieur du même édifice, surtout dans un très
gros comme celui-là.
Qu'est-ce qui va arriver à l'ambiance catholique puisque
c'est une question d'ambiance, l'école catholique, nous a-t-on
répété s'il y a, en même temps, un autre
groupe minoritaire à l'intérieur de l'école qui, lui, aura
choisi de ne pas vivre dans cette ambiance? Comment cela va-t-il se faire
à l'intérieur d'une polyvalente?
Je vous pose une deuxième question parallèle. Vous, comme
administrateur scolaire, aurez à distribuer les édifices
scolaires selon les confessionalités, selon la langue. Qu'est-ce qui va
arriver dans le favoritisme qu'une confes-sionalité ou qu'une langue
pourra recevoir? Par exemple, l'école polyvalente Edouard-Mont-petit
je pense que c'est dans la régionale Le Royer en est une
très belle. A côté, on peut avoir un "shack" qui tient
à peine debout. Qu'est-ce qui va arriver?
M. LAVIGNE: Je répondrai à la première question en
commençant par un principe général. Nous ne croyons pas
que pour défendre une valeur il faille bâtir alentour de soi une
clôture ou un mur de trente pieds de haut, avec un isolant additionnel
par-dessus ce mur ou cette clôture, pour que nous ne venions pas en
contact avec d'autres valeurs.
Une valeur en laquelle nous croyons, que ce soit du point de vue
religieux ou du point de vue culturel, une valeur en laquelle un individu
croit, il doit la conserver non pas en s'isolant mais par son dynamisme
individuel, non seulement conserver cette valeur, mais la faire refléter
chez autrui.
Donc, dans notre esprit, s'il y a un danger à ce que deux
confessionnalités se côtoient, le danger ne vient pas du
côtoiement mais plutôt de la faiblesse de l'un ou l'autre des
groupes.
Pour ce qui est de la répartition des immeubles, nous savons que
ça constitue des difficultés, mais je répète que
peu importe le système en vigueur, il y aura toujours des
difficultés auxquelles nous devrons faire face. Je peux vous donner, non
pas sur le plan confessionnel mais sur le plan linguistique, un exemple
vécu dans une commission scolaire que je connais très bien,
où un seul et même immeuble sert à la fois à un
groupe d'élèves d'environ 350 à 375
Canadiens d'expression française et, également, à
un groupe d'élèves d'environ 200 Canadiens d'expression anglaise.
Nous sommes dans la troisième année et il n'y a eu aucun
problème. Je rencontrais dernièrement un concitoyen de langue
anglaise qui fait donc partie de la minorité et il était question
que cette partie de population étudiante soit établie dans un
autre immeuble, un peu plus loin. Ceci rejoint certains commentaires que le
ministre de l'Education passait hier. Or, nous avons offert aux gens
d'aménager ces élèves dans un autre immeuble mais ces
derniers ne sont pas en faveur; ils préfèrent demeurer là
et ils n'ont pas peur d'être, à un moment donné,
assimilés par la majorité.
Je présume que, sur le plan confessionnel, la même chose
peut se réaliser. J'admets toutefois que ça devient une
difficulté beaucoup plus grande lorsque, dans un secteur donné,
il y a un très petit groupe de 30, de 35 ou encore de 15
élèves. Il faudra peut-être faire alors ce que l'on fait
présentement, il faudra peut-être utiliser le transport de
façon à grouper un nombre suffisant d'élèves dans
un secteur donné pour utiliser un immeuble ou une partie de l'immeuble.
Alors il faudra peut-être utiliser du transport pour déplacer les
élèves un peu plus loin. C'est bien possible. Mais ça se
pratique actuellement.
Dans le secteur protestant, on va chercher des élèves qui
sont à un mille et demi, deux et trois milles de l'école et on
les amène en autobus.
M. CHARRON: Est-ce que vous ne croyez pas qu'une conséquence du
projet de loi 28 est que ce phénomène va s'amplifier?
M. LAVIGNE: Peut-être pas puisque, actuellement, nous avons des
autobus qui vont chercher les élèves protestants et qui les
amènent dans une école, et nous avons d'autres autobus qui vont
chercher les élèves catholiques dans le même secteur
donné. Ça fait deux autobus qui vont dans le même coin, le
même matin, à la même heure, pour aller chercher les
élèves et les amener dans le même secteur. C'est une
question de planification qui présentera définitivement des
problèmes, mais je crois que ce ne sont pas des problèmes
insolubles.
M. CHARRON: Si vous me le permettez, je vais vous poser une autre
question parce que je sais qu'on va en parler encore même quand la loi
sera adoptée. On nous a défini l'école confessionnelle
comme étant une ambiance. D'après les conversations que j'ai eues
avec les parents catholiques, ils définissent ça un peu je
ne veux pas exagérer mais je veux être sincère et franc
comme une contrepartie disciplinaire à ce qu'a apporté
l'école publique.
Quand on a abordé la question ici, en commission, l'autre jour,
lors du témoignage d'un groupe de parents et dans la discussion qui
s'est élaborée par la suite, on voulait dire la
différence fondamentale entre l'école catholique et
l'école non catholique, c'est que dans l'école catholique on va
professer les valeurs catholiques. On s'est entendu pour dire qu'il n'y avait
pas de façon catholique d'enseigner la géographie mais il y a une
façon catholique de vivre le milieu de l'éducation.
Par une série de questions et par contacts, on sent que les
parents catholiques recherchent un sain équilibre chez
l'étudiant. Quand on leur demande les modalités concrètes
dans lesquelles on va déterminer ce sain équilibre et ces
valeurs, on s'aperçoit que ça peut se transposer dans une
discipline je ne veux pas dire de collège classique,
j'espère que c'est disparu à jamais un tant soit peu plus
rigoureuse que celle qui existe dans les polyvalentes.
Par exemple, celle où il y a 2,500 élèves en
grève à Montréal parce qu'ils demandent le droit de porter
des jeans, les cheveux longs. Les parents inquiets de ça sentent un
besoin, faux à mon avis, de passer par la confessionnalité
qui n'a rien à voir avec la discipline, quant à moi pour
rétablir cette espèce de système là où un
ordre régnerait.
Mais puisqu'il est possible, selon votre dernière réponse,
qu'il existe, au sein d'une même bâtisse scolaire, des gens
confessionnels et des gens non confessionnels, vous imaginez le genre
d'ambiance que ça va créer? Chacun des groupes, d'après la
loi, aura son directeur. Les 24 classes catholiques de l'école, par
exemple, seraient soumises à une discipline ou à une ambiance ou
une façon de vivre différente de celle des dix autres classes
qui, elles, seront là simplement parce qu'elles seront venues en
autobus, comme vous venez de me le décrire, et qui, elles, ne devront
pas, puisque ça aura été leur libre choix aussi,
être soumises à l'ambiance catholique que leurs parents auront
refusée en les inscrivant à l'école neutre, par exemple.
Que fera-t-on dans ce temps là? Moi je pense que ça fout par
terre la confessionnalité parce qu'il ne sera pas possible, à
moins de les isoler, de créer une ambiance qui ne sera pas
détruite à chaque jour par la venue d'autres étudiants.
Vous ne pensez pas?
M. LAVIGNE: Je serais d'accord que l'on pourrait fouter par terre la
confessionnalité si on mettait dans un même local des enfants
catholiques, neutres, protestants, à coeur de jour. Dans une classe de
30 élèves, il y aurait, je ne sais pas, dix catholiques, dix
protestants, dont cinq français et cinq anglais, des catholiques, quatre
français, six anglais et des neutres. Ces gens-là vivraient
continuellement ensemble. Je suis d'accord, mais, si je reviens à
l'exemple que je vous ai donné sur le plan linguistique, nous avons
quand même 350 élèves de langue française et 200 ou
225 élèves de langue anglaise dans le même édifice
et il n'y a pas de problème. Il n'y a pas de problème du point de
vue de la discipline. Evidemment, une coopéra- tion existe entre les
deux principaux d'école; c'est entendu que l'un ne donnera pas la
permission de faire telle chose, par exemple fumer dans les passages, si les
élèves avaient le droit de fumer, et l'autre ne pas le faire. On
va essayer de coordonner ensemble la vie de cet immeuble. Cela n'enlève
pas quand même la possibilité de conserver une" atmosphère
catholique, une atmosphère protestante ou une atmosphère
où la culture anglaise est prédominante et où la culture
française est prédominante. Je répète qu'à
notre point de vue ce ne sont pas les structures d'abord qui doivent
sauvegarder une valeur mais le dynamisme individuel et le dynamisme d'un
groupe.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Lavigne, j'écoutais mon
collègue de Saint-Jacques, qui parlait de ce problème de
l'ambiance qui peut exister dans une école dite confessionnelle. Mon
collègue de Saint-Jacques carricature un peu, je pense, lorsqu'il dit
qu'il n'y a pas de façon catholique d'enseigner la géographie,
les sciences ou ci ou ça. Je ne suis pas de son avis là-dessus.
Il y a une façon catholique d'enseigner la géographie, il y a une
façon catholique d'enseigner les sciences, et ça dans le plus
grand respect de la discipline que l'on professe, parce qu'il y a un
comportement religieux. On a une foi, une croyance et cela comporte une
éthique, une morale. En conséquence, si je suis professeur de
sciences, je vais donner un enseignement qui peut être rigoureusement
scientifique en matière de fission nucléaire, par exemple, en ne
m'inspirant pas des principes du positivisme que vous connaissez bien mais
m'inspirant de ma foi à moi. Si la majorité des professeurs qui
enseignent diverses disciplines, y compris celles qui ne semblent pas avoir de
rapport direct avec la foi, selon un esprit conforme à leur foi et
à la morale qu'ils professent, à ce moment-là le climat
devient un climat religieux d'inspiration chrétienne ou juive.
L'école est confessionnelle à ce moment-là parce
que l'esprit de ceux qui y enseignent est disposé de telle façon
que l'ambiance n'est pas celle que l'on peut trouver dans des écoles
où l'on n'a aucune sorte d'égard pour les vérités
de la foi, quelle que soit la foi que l'on professe.
Je crois que c'est aller trop loin que de dire qu'il n'y a pas une
façon catholique, protestante, juive d'enseigner telle ou telle
discipline. Sur le plan scientifique, je suis d'accord que l'on doit respecter
les règles afférentes à telle discipline, mais le
comportement du professeur, l'esprit du professeur, la façon dont il
dispense l'enseignement et son exemple, ce sont les vertus exemplaires qui
doivent se retrouver dans l'école catholique, dans l'école
confessionnelle, qu'elle soit juive ou protestante, comme cela doit se
retrouver dans le foyer, comme cela doit se retrouver dans toutes les
associations où se regroupent des gens qui, majoritairement, professent
la même foi.
Par conséquent, je ne lui fais pas la leçon,
mais mon collègue comprendra que nous ne sommes pas d'accord
lorsqu'il affirme cela. Une des premières choses que, personnellement,
j'ai dénoncées lors de la parution de la première tranche
du rapport Parent, cela a été précisément ce
nivellement par la base qui nous amènerait fatalement à poser des
problèmes comme nous sommes obligés d'en poser aujourd'hui.
Nous acceptons le pluralisme, mais nous voulons quand même
maintenir des écoles confessionnelles. Nous voulons que, dans ces
écoles confessionnelles, il y ait un esprit qui soit le reflet de la foi
de ceux qui fréquentent lesdites écoles. Je comprends très
bien qu'un professeur, disons maoïste ou je ne sais pas trop quoi, qui
enseigne les sciences bien, va faire comme Jean Rostand. Il va dire tout
simplement que c'est le hasard qui a tout fait. Mais moi, je suis catholique;
je ne fais pas mystère de mes croyances. Quand j'enseignais à
l'université Laval, que ce fussent l'histoire de la littérature
ou l'histoire de l'éducation en éducation comparée...
M. CHARRON: Vous, vous allez dire que c'est vous.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ...je donnais un enseignement, mais un
enseignement inspiré par la foi que je professais, tout en respectant
les règles rigoureuses de la discipline scientifique.
M. LAVIGNE: M. le député, je suis persuadé que, si
les membres des comités confessionnels et les individus faisant partie
d'un groupe représentant une culture ou une confessionnalité
montrent autant de dynamisme pour faire valoir cette valeur à laquelle
ils croient que le député de Saint-Jacques en met à
défendre ses idées, tout sera sauvegardé.
M. CHARRON: Merci, M. Lavigne.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous savez, M. Lavigne, je reviens à
des faits un peu plus anciens. Quand nous avons abordé ces
problèmes de confessions religieuses, il y a déjà bien des
années, et particulièrement au moment de la création de la
commission d'enquête Parent et lors de la création du
ministère de l'Education, il y avait un très grand nombre de
parents catholiques, d'enseignants catholiques qui ont exprimé des
doutes sur les orientations gouvernementales et qui ont demandé à
la hiérarchie de leur Eglise de leur donner des indications.
Je le dis ici publiquement et sans égard aux conséquences
politiques de mes paroles, pour moi et même pour mon parti, qu'au
Québec nous avons vécu l'Eglise du silence. Si, aujourd'hui, nos
chefs hiérarchiques décident de se prononcer, nous en sommes fort
heureux, nous catholiques en ce qui me concerne, je suis catholique
parce que nous attendions, depuis des années, des directives qui
ne sont pas venues à des moments stratégiques.
M. LE PRESIDENT: M. Lavigne.
M. LAVIGNE: Nous abordons maintenant le problème de la langue.
Vous me permettrez de lire le mémoire parce que je ne voudrais pas, en
m'exprimant oralement, trahir l'esprit du mémoire. C'est pourquoi je
tiens beaucoup à en faire une lecture la plus compréhensible
possible.
Concernant les questions linguistiques, nous avouons que nos positions
ne sont pas aussi tranchées que celles de certains groupes qui se sont
fait entendre devant cette commission parlementaire. Les francophones de
l'île de Montréal peuvent s'inquiéter de leur avenir, mais
ils sont loin de faire l'unanimité quant aux mesures à prendre
pour corriger certaines situations. Les anglophones de l'île de
Montréal revendiquent la protection de leurs droits acquis et ils
estiment que le système scolaire montréalais doit leur garantir
une place convenable.
Si la métropole connaît certaines tensions culturelles,
nous croyons comprendre que le législateur n'a pas voulu, par le biais
du projet de loi no 28, sécuriser les uns et les autres ou assurer
à tout le monde une protection culturelle qu'ils ne pourront pas obtenir
uniquement par l'école. Plus précisément, nous croyons
comprendre que ce n'est pas avec le projet de loi no 28 que le
législateur calmera les inquiétudes que l'on constate dans
certains milieux ou qu'il permettra à un groupe linguistique d'imposer
sa volonté à l'autre.
Quant à nous, notre position peut se ramener à ceci: S'il
y a des problèmes linguistiques et culturels sur l'île de
Montréal, nous ne croyons pas que l'école seule permettra de les
résoudre. Tant que le gouvernement du Québec n'aura pas, en
particulier, précisé ses politiques linguistiques, ceux qui ont
la charge de l'enseignement ne peuvent absolument pas accepter que l'on
règle le problème de la langue sur le dos des
élèves.
Pour accepter des commissions scolaires unifiées et pour refuser
la formation de commissions scolaires divisées selon la langue, nous
partons du fait que des francophones et des anglophones vivent sur l'île
de Montréal et qu'il est illusoire et même néfaste de
vouloir élever des murs entre ces deux communautés linguistiques.
A une position de repli, nous préférons un comportement plus
ouvert qui consiste à accepter l'autre tel qu'il est. Les faits,
d'ailleurs, nous y obligent.
Qu'il nous soit permis de rappeler que quelques-unes des commissions
scolaires membres de l'association desservent depuis des années une
clientèle scolaire de langue française et de langue anglaise sans
que, dans la très grande majorité des cas, cela pose des
problèmes sérieux. Les commissaires et les adminis-
trateurs de ces commissions scolaires ont accepté le fait qu'ils
doivent vivre ensemble et cette attitude positive leur permet de faire face
à leurs obligations envers les élèves.
L'association trouve pour sa part satisfaisantes les garanties
accordées aux minorités linguistiques dans les onze commissions
scolaires unifiées et au niveau du conseil scolaire de l'île de
Montréal. C'est pourquoi, même si elle s'oppose, en principe,
à toute nomination gouvernementale là où la population
peut élire ses représentants, l'association est prête
à accepter l'article 583 du projet de loi qui traite de la composition
des futures commissions scolaires de l'île de Montréal.
Cet article précise que chaque commission scolaire est
composée de quinze commissaires élus et que "le
lieutenant-gouverneur en conseil peut, s'il constate que la minorité
francophone ou anglophone, selon le cas, n'est pas représentée
par suite de l'application de l'alinéa précédent, nommer,
sur la recommandation du ministre, deux autres commissaires d'écoles
pour des mandats d'une année scolaire, après consultation des
présidents des comités consultatifs d'écoles de la
minorité concernée".
Si nous acceptons aussi facilement ces dispositions, c'est que nous
avons aussi lieu de croire, compte tenu des réalités
démographiques montréalaises, que la minorité francophone
ou anglophone sera presque toujours représentée dans les
commissions scolaires par au moins quelques commissaires.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Avez-vous terminé, M. Lavigne?
M. LAVIGNE: Sur la langue, oui.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Lavigne, je voudrais vous interroger
là-dessus. Nous avons évidemment déjà entendu
plusieurs organismes qui nous ont fait des propositions sur la question de la
langue. Vous abordez le problème de façon très sereine,
très réaliste. Je voudrais vous poser quelques questions à
partir de propositions qui nous ont été faites.
Est-ce que, selon vous, le gouvernement devrait accepter la proposition
qui nous a été faite, à savoir que le projet de loi no 28
soit amendé de façon que le conseil scolaire et les commissions
scolaires soient unilingues français et qu'en conséquence le
français soit la seule langue officielle de travail et d'administration
scolaire sur l'île de Montréal?
M. LAVIGNE: Nous ne le croyons pas.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): On nous demandait, d'autre part, que l'on
dispense dans les écoles anglophones au moins la moitié de
l'enseignement en langue française. Etes-vous d'accord sur cette
proposition?
M. LAVIGNE: Ceci demanderait peut-être une explication
peut-être un peu plus longue qu'une simple réponse par oui ou
non.
Nous croyons que le français devrait être enseigné
aux francophones et aux immigrants et qu'à cela, nous devrions offrir
l'opportunité d'apprendre l'anglais comme langue seconde mais non pas
comme langue non importante.
Apprendre l'anglais comme langue seconde, à tel point que l'on
puisse parfaitement bien maîtriser cette langue lorsqu'on se lancera
d'une façon définitive pour occuper des postes importants.
Nous craignons que, dans dix ans d'ici, il y ait de plus en plus
d'anglophones bilingues et peut-être très peu de francophones
bilingues. Et qui peut imaginer le premier ministre de la province de
Québec comme étant unilingue français? Qui peut imaginer
une personne occupant un poste-clé à quelque niveau que ce soit
dans les services publics ou dans l'entreprise privée, qui peut imaginer
qu'un unilingue français puisse avoir autant de chances d'occuper un
poste-clé?
M. CHARRON: C'est ça, le malheur.
M. LAVIGNE: Nous sommes dans un contexte nord-américain et une
entreprise de quelque importance ou un service public de quelque importance
devra nécessairement communiquer avec un secteur de la population de
langue anglaise, que ce soit des autres provinces ou des Etats-Unis, et si je
ne suis que francophone unilingue, comment puis-je espérer dans un tel
contexte détenir un poste-clé? Je ne serai même pas capable
d'entrer en communication avec la grande majorité de la clientèle
que je devrai desservir.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Lavigne, je vous pose ces questions non pas
pour vous opposer à des propositions qui nous ont été
soumises, mais simplement pour m'éclairer sur l'état d'esprit de
la population de Montréal. Vous représentez un organisme
très important qui regroupe un nombre considérable de citoyens et
une clientèle scolaire très importante.
Je vous pose ces questions parce que nous aurons, nous, comme
législateurs, à poser des gestes, à prendre position et je
dois vous dire vous avez pu le constater d'ailleurs que nous
avons été promenés souvent entre deux extrêmes, pas
seulement à cette commission-ci mais à des commissions qui ont
siégé auparavant, cette année ou dans les années
antérieures.
On nous demande, par exemple et ça, c'est discutable et
moi je serais prêt à le discuter sur une base de collaboration
dans un autre mémoire que la langue des communications
écrites et parlées dans l'administration scolaire sur l'île
de Montréal soit le français.
C'est une proposition qui nous a été faite. Moi,
personnellement, j'estime que ça peut se discuter et qu'on pourrait
peut-être admettre cela.
Par ailleurs, on nous demande que la langue d'enseignement dans les
écoles de l'île de Montréal soit le français.
L'anglais pourra être enseigné comme langue seconde. Que vous en
semble d'une proposition comme celle-là?
M. LAVIGNE: Je doute que les deux groupes principaux formant la
population de la province de Québec...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Excusez-moi, M. Lavigne, mais avant de vous
permettre de répondre, pour être honnête, le groupe qui nous
a fait cette proposition a quand même suggéré que cela soit
fait par étapes, mais en somme ça revient à instituer dans
les écoles de l'île de Montréal, l'unilinguisme
français, même dans les écoles anglophones où
l'anglais serait enseigné comme langue seconde.
M. LAVIGNE: Je doute, pour reprendre le début de mon
exposé, qu'aussi bien dans la province de Québec qu'ailleurs au
Canada on puisse jamais bâtir quelque chose de vraiment valable en
prenant d'une part ou d'autre part des positions extrêmes et
draconiennes. Partant de ce principe, je conçois très mal que,
dans une commission scolaire donnée où sur 15 commissaires il
pourrait y en avoir 14 de langue anglaise et unilingues anglais, on leur impose
le français comme langue de travail, c'est impensable, comme ce serait
impensable, à mon point de vue et je crois représenter,
même si ce n'est pas dans le mémoire, d'après les
discussions que nous avons eues à notre association, la majorité,
certainement, des représentants de cette association que l'on
puisse imposer à la population anglaise la langue française comme
langue première et la langue anglaise comme langue seconde
Je crois, et je pense représenter fidèlement la
majorité de l'opinion des membres de notre association, en disant ceci:
que les Anglais ou les Canadiens d'expression anglaise et je dis bien
d'expression et de culture anglaise ont le droit d'avoir leur langue
comme langue première, mais ils veulent et j'insiste sur le mot
vouloir il y a une tendance prononcée actuellement chez la
population anglophone pour apprendre le français.
Par contre l'élément francophone doit avoir comme langue
prioritaire évidemment le français.
Je crois que, si on veut être logique et si les Canadiens
français veulent vraiment faire leur chemin, ils doivent
également apprendre la langue de communication pour pouvoir entrer en
contact avec les 200 millions de gens qui les entourent.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Lavigne, si mon collègue me le
permet, sur ce sujet-là, nous sommes placés dans une situation
très difficile comme législateurs. J'ai devant moi les
propositions d'un autre mémoire d'une association très importante
qui groupe des professeurs, donc des gens qui enseignent dans vos écoles
et dans nos écoles. On nous demande ceci: Que le gouvernement proclame
l'unilinguisme français; que le français soit implanté
dans les écoles.
Du même souffle, on nous dit que, par ailleurs, tout cela doit se
faire dans le respect des droits de la minorité, en l'espèce la
minorité anglophone. L'autre jour, j'ai interrogé assez
longuement un témoin afin de savoir comment il pouvait concilier ce
qu'il considérait comme deux exigences, soit l'instauration de
l'unilinguisme français au Québec à tous les paliers, en
commençant par celui de l'école, avec le respect du droit des
minorités. Je lui ai demandé: Expliquez-nous,
mécaniquement, comment cela peut se faire? A la suite de cet
interrogatoire, un journal je l'ai rappelé hier et j'y reviens
a déclaré que je m'étais porté à la
défense des droits des anglophones, ce qui était une
interprétation pour le moins abusive.
Placez-vous dans notre situation de législateurs. J'y ai
été placé de façon très nette lors de la
présentation de la loi 63 dont je n'ai aucune crainte de parler. Nous
avons à respecter, d'un côté, les exigences du
français, de la culture française, à la faire
s'épanouir, etc. d'un autre côté, nous admettons, comme les
organismes qui nous ont proposé des solutions radicales, qu'il faut
défendre ou respecter, appelons cela comme ça, les droits des
minorités. Est-ce qu'il vous apparaît, à vous, possible de
concilier deux points de vue aussi éloignés l'un de l'autre: d'un
côté, l'unilinguisme français, l'unilinguisme dans les
écoles même anglaises où l'anglais deviendrait langue
seconde et, par ailleurs, une déclaration solennelle du respect du droit
des minorités?
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! Est-ce que le
député de Chicoutimi permettrait à M. Lavigne de
préparer sa réponse pendant l'heure du dîner?
M. LAVIGNE: M. le Président, je serais tout à fait
d'accord.
UNE VOIX: Je m'y oppose.
M. LAVIGNE: En revenant, j'apprécierais que le
député reformule sa question au cas où un certain
élément m'aurait échappé. La séance est
suspendue...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): D'accord. M. LAVIGNE: Je vous remercie.
M. LE PRESIDENT: La commission suspend ses travaux jusqu'à 2 h
30.
M. TETLEY: M. President, will you permit me to... parce que je vais
adresser la parole à un groupe anglophone, vous me permettez, M. le
Président, de m'absenter cet après-midi. J'ai une
réunion, dont je suis le président, qui est
déjà fixée. Certaines personnes viennent de toute la
province, de 44 endroits de la province, et je ne peux pas être ici. I
would like to give my apologies to the Canadian Jewish Congress,
l'Archevêché de Montréal, l'Association des cadres de la
commission des écoles catholiques de Montréal, the Quebec
Association of School Administrators and, in particular, the Montreal Teachers
Association qui ont leur siège social dans le beau comté de
Notre-Dame-de-Grâce. Merci, M. le Président.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): I will speak on your own behalf, Bill.
M. TETLEY: Je préfère que ce soit un autre
représentant. Reprise de la séance à 14 h 41
M. PILOTE (président de la commission parlementaire de
l'Education): A l'ordre, messieurs!
Je vous prierais d'excuser le retard du ministre, qui avait à
prononcer une conférence ce midi. Nous allons quand même continuer
en son absence les délibérations. Je demanderais à ceux
qui présentent un mémoire d'essayer d'être le plus concis
possible. Je remarque que des groupes sont venus trois fois à la
commission pour présenter leur mémoire et ils n'ont pas eu
l'occasion de le faire.
Je sais qu'il faut donner justice un temps égal à tout le
monde, mais il reste quand même une grande quantité de
mémoires à entendre et nous n'en avons pas même la
moitié d'entendus présentement.
Alors, si vous voulez avoir des réponses assez brèves et
les membres de la commission, des questions plutôt brèves, pour
permettre aux autres de se faire entendre.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président...
M. LE PRESIDENT: Pardon, je n'ai nommé personne, j'ai simplement
regardé.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Heureusement, M. le Président, que vous
êtes de la même région que moi parce que j'aurais vraiment
protesté.
M. VAILLANCOURT: Vous vous connaissez.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ah oui! très bien. Il n'a pas
été un de mes élèves mais il a subi l'enseignement
d'un professeur que j'ai formé. Vous voyez le résultat. C'est
comme la CECM, c'est vieux.
M. le Président, j'étais en train de poser une question
à M. Lavigne, à la fin de la séance de ce matin; je la
reformule à sa demande. Elle sera aussi brève que possible.
Je vous disais, M. Lavigne, qu'on nous avait posé un
problème sérieux, à nous législateurs, en nous
demandant, d'une part, c'est-à-dire au gouvernement et aux
législateurs, de décréter l'unilinguisme français
par tout le territoire du Québec, même dans les écoles
anglophones, où l'anglais deviendrait la langue seconde.
Par ailleurs, on affirmait solennellement que l'on voulait, en
même temps, protéger les droits de la minorité. Alors, la
question que j'avais posée au témoin que j'interrogeais
était la suivante: Comment pouvez-vous concilier cette exigence vraiment
radicale en ce qui concerne le statut que le gouvernement devrait, selon ces
gens-là, accorder à la langue française et, d'autre part,
le respect des droits de la minorité?
Je vous demande à vous, M. Lavigne, s'il vous apparaît
possible de décréter l'unilinguis-
me français, de faire que les écoles sur l'île de
Montréal, même les écoles anglaises, soient unilingues
françaises, qu'on y enseigne l'anglais comme langue seconde et que tout
cela se fasse dans le plus grand respect des droits de la minorité.
M. LAVIGNE: M. le Président, je ne sais pas si le groupe qui a
présenté un tel mémoire a trouvé une solution, mais
personnellement, aussi bien en mon nom personnel qu'au nom de notre
association, je crois que ces deux points de vue ne sont pas conciliables,
à savoir que l'on ne peut pas déclarer l'unilinguisme
français et en même temps sauvegarder les droits de la
minorité anglophone.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Merci, M. Lavigne, cela répond à
ma question. Alors, en ce qui concerne les autres parties de votre
mémoire, pour ma part, je n'ai pas de commentaire puisqu'il s'agit de
problèmes d'ordre technique et que nous avons votre mémoire qui
est très clair, très positif. Alors, quant à moi, je vous
remercie.
M. SAINT-PIERRE: J'aurais une dernière question à poser
à M. Lavigne. M. Lavigne, je pense que, dans votre mémoire, on
sent quand même que vous êtes conscient que tout ce problème
de restructuration pour l'ensemble des commissions scolaires, pour les parents,
pour les enseignants, cela va être une expérience assez difficile.
Et peu importe la précision des textes de loi, peu importe
l'à-propos des dispositions dans la loi no 28, même si on avait un
texte presque parfait, cela demanderait quand même beaucoup de bonne
volonté, de jugement, beaucoup de doigté chez ceux qui auront
à vivre ce texte de loi. Si jamais la restructuration était une
faillite, ce qui serait très grave pour le milieu montréalais,
êtes-vous d'accord avec moi que celui qui en serait blâmé,
ce serait surtout le gouvernement provincial responsable de l'éducation
dans la province?
M. LAVIGNE: M. le ministre, je suis d'accord que celui qui serait
blâmé serait fort probablement le gouvernement responsable de
l'adoption de cette loi. Mais si on va au fond des choses, il faudrait
certainement faire porter une partie de la responsabilité et une
très grande partie de la responsabilité par les gens du milieu
qui n'auraient pas su prendre leurs responsabilités. Je suis d'accord
pour qu'il y ait des lois qui soient les mieux faites possible, mais il reste
que, dans un domaine scolaire comme celui-ci, c'est au niveau local que cela
doit s'appliquer et ce sont les gens du milieu qui doivent travailler ensemble.
Si on juge que la loi n'est pas aussi parfaite qu'on le souhaiterait, il est
toujours possible de revenir à la charge pour la faire amender.
Mais il appartient d'abord aux gens du milieu de faire le travail.
M. SAINT-PIERRE: Ma première question ne se voulait pas une
affirmation. Je voulais simplement souligner qu'en dehors des dispositions de
la loi et des structures, ce qui va assurer le succès de la
restructuration scolaire ce sont, dans un sens, beaucoup plus les hommes qui
vont avoir des responsabilités à choisir. Or, c'est bien
évident que les hommes, à plus d'un niveau, que ce soit, je
prends des exemples, au niveau des syndicats d'enseignants ou au niveau des
comités de parents, le gouvernement ne peut pas les choisir. Certaines
personnes auront des responsabilités plus grandes que d'autres et je
pense, en particulier, au président et au vice-président du
conseil scolaire. Vous savez le principe de la démocratie me plaît
beaucoup. Mais je me dis que compte tenu qu'on investit plus de $500 millions
par année dans l'éducation à Montréal, compte tenu
que c'est une opération très délicate dans laquelle on
engage tous les gens, est-ce qu'on est justifié, tout au moins au
départ là c'est peut-être une modification avec le
texte de loi; on pourrait éventuellement dire que ce sont les gens qui
vont élire le président pour avoir toutes les chances de notre
côté que la restructuration, pour le bénéfice des
gens, réussisse de choisir un peu nous-mêmes la personne
qui va avoir ce rôle extrêmement important de premier
président du conseil provisoire, en particulier, et aussi du conseil
scolaire? Est-ce que vous seriez plus favorable d'atténuer,
peut-être, votre recommandation 6 pour dire qu'après un premier
terme il serait peut-être désirable que le président et le
vice-président soient élus, mais que dans un premier terme,
compte tenu de nos responsabilités et compte tenu des $500 millions
qu'on investit, on est peut-être justifié de choisir l'homme
clé qui va réussir dans les structures et dans les dispositions
de la loi à obtenir un véritable succès avec la
restructuration scolaire?
M. LAVIGNE: M. le Ministre,...
M. SAINT-PIERRE: Je fais un peu une analogie avec la communauté
urbaine et mon collègue des Affaires municipales n'étant pas ici,
je serai assez discret dans mon analogie.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Heureusement.
M. SAINT-PIERRE: Mais chose certaine, quant à la
communauté urbaine, peu importe le jugement qu'on peut porter à
Montréal, cela dépend beaucoup de celui qui en est responsable.
Je pense à M. Lucien Saulnier. On peut se dire: Si cela avait
été un homme élu, peu importe, par un collège
électoral ou par l'ensemble des citoyens, peut-être que cela
aurait eu encore beaucoup moins de succès que cela a pu en avoir, tout
étant relatif.
M. CARDINAL: M. le Président, permettez-moi, avant M. Lavigne,
d'intervenir afin de
répondre à cela. Dans le projet de loi no 62, il
était aussi prévu que le président était
nommé par le gouvernement. Je ne voudrais absolument pas que l'on parte
dans une question de partisanerie, absolument pas. Cela me surprend beaucoup de
la part du ministre actuel, c'est-à-dire, cela ne me surprend pas, parce
qu'il est peut-être différent de certains qui l'ont
précédé dans ce parti; justement, il présente cette
thèse que j'avais moi-même présentée et qui avait
alors été combattue par le critique officiel de l'Opposition
libérale. Ce que le ministre vient de dire, je serai bref mais je vais
enchaîner quand même, c'est que malgré le jeu de la
démocratie qui doit exister dans le bill 28, aux trois niveaux et au
maximum...
D'ailleurs, au début des travaux de cette commission, j'ai fait
une intervention où j'ai formulé certaines critiques à
l'endroit du projet de loi no 28, parce que je trouvais que certains aspects
créaient des anicroches à la démocratie. Sur ce point, je
n'attaquerai certainement pas le ministre, puisque j'avais la même
position que lui au moment où je présentais le projet de loi no
62, c'est-à-dire que je pense qu'il faut procéder par
étapes. Il ne s'agit pas ici de toujours considérer les
politiciens comme des gens qui nommeront nécessairement, à un
poste important, un de leurs hommes clés pour réaliser leurs
projets personnels ou leurs projets politiques. Mais au moment où l'on
fait démarrer quelque chose de nouveau, que ce soit autrefois le Conseil
supérieur de l'éducation, dont le président était
nommé par le ministre après consultation, que ce soit tout autre
organisme qui a été crée par la suite depuis sept ans, il
faut quand même que l'Etat, en matière d'éducation, au
Québec, en plus des parents, des enseignants, des étudiants,
etc., ait un rôle de leadership à jouer.
Je me demande je rejoindrai là entièrement le
ministre si la dernière suggestion qu'il vient de faire sous
forme de question n'est pas la réponse. Ne devrait-il pas y avoir, au
début, une nomination non pas de quatre membres peu importe le
nombre à certains postes clés par le gouvernement, quitte
à ce que le projet de loi lui-même, pour garantir l'avenir,
contienne des dispositions qui permettent, au bout d'un certain temps, d'en
sortir et de laisser jouer librement, entièrement et complètement
la démocratie.
M. LAVIGNE: M. le Président, M. le ministre, M. le
député, c'est certainement un problème complexe. Il y a
tout d'abord le principe de la démocratie qu'il faut respecter chaque
fois que c'est possible. Nous devons déployer des efforts marqués
pour respecter ce principe.
Nous constatons qu'il y aura, à travers l'île de Montre'al,
165 commissaires d'écoles élus, ce qui est plus que le nombre
d'élus à l'Assemblée nationale.
Nous présumons que parmi 165 personnes, il devrait se trouver
quand même quelqu'un qui a à la fois la compétence et la
disponibilité pour remplir de tels postes que ceux de président
et de vice-président de cet organisme.
Nous avons longuement discuté ce sujet. Nous en sommes venus
à un compromis puisque vous, messieurs, vous savez fort bien que
l'art de gouverner est en premier lieu l'art du compromis à
savoir que le lieutenant-gouverneur en conseil pourrait quand même faire
une nomination justement pour sauvegarder la bonne mise en marche de ce projet
et sauvegarder aussi à la fois cet élément
démocratique auquel nous tenons beaucoup.
Nous réalisons que de mettre en marche le projet de loi 28 est
quelque chose de terriblement complexe et que nous ne pouvons pas, pour la
communauté québécoise, nous permettre que ce soit un
fiasco. Nous devons tâcher de mettre de notre côté et
quand je dis de notre côté, je parle de tous les citoyens de la
province toutes les garanties possibles pour que ça
réussisse.
Par contre, si le lieutenant-gouverneur en conseil nomme d'office,
après consultation avec le ministre de l'Education, le président
et le vice-président du conseil scolaire de ville de Montréal,
cela comporte également des dangers. Je n'ai pas besoin de vous
décrire ce qu'est l'être humain. L'être humain, peu importe
le poste qu'il occupe, peu importe l'endroit où il est, demeure
l'être humain avec ses points forts et ses points faibles.
Nous avons donc voulu à la fois donner la possibilité
d'aller chercher l'homme compétent et disponible qui serait choisi parmi
165 personnes, et, à la fois, conserver cet élément
démocratique qui nous est tellement cher.
M. CARDINAL: M. le Président, c'est une excellente
réponse. D'ailleurs, M. Lavigne a donné des réponses
très claires depuis le début. Comme je l'ai déjà
dit, je ne suis pas ici pour défendre le gouvernement. Au contraire. Je
ne suis pas ici pour l'attaquer non plus. M. Lavigne, pour une fois, dans sa
dernière réponse, est resté dans l'ordre des
principes.
Quand il dit: Les hommes sont ce qu'ils sont, je l'admets. J'admettrais
même, par expérience personnelle, que, quand il s'agit d'hommes
politiques, on les considère comme des hommes je ne sais pas
quelle expression employer pires que les autres.
Dans le jeu de la démocratie tel que vous le décrivez, et
que j'admets dans sa plus grande partie, surtout quand vous faites cette
comparaison avec l'Assemblée nationale, où il ne faut pas oublier
quand même que les chefs de parti ne sont pas élus par la
population mais dans des congrès, à ce moment-là, votre
comparaison je m'excuse, M. Lavigne comme toute comparaison,
boite un peu.
M. LAVIGNE. D'accord.
M. CARDINAL: C'est une question de systè-
me et ce n'est pas le sujet de cette commission parlementaire.
D'ailleurs, je ne suis pas d'accord et je l'ai déjà dit. M.
Lavigne, ne pensez-vous pas que, pour une période provisoire, on puisse
concilier les impératifs de la démocratie avec, non pas une
emprise, une hégémonie du ministère de l'Education, mais
ce que j'ai appelé tantôt un leadership? Je ne me
référerai pas à un article du Devoir d'aujourd'hui,
où on exprime qu'un des partis à cette table est très
mêlé, pour démontrer comment cette opération est
délicate et difficile.
Est-ce que vous croyez que 165 personnes vont se réunir dans une
espèce de congrès, qu'il y ait ou non des fanfares ou autre
chose, pour choisir l'homme compétent? Quand on me dit que c'est
toujours le meilleur homme qui est élu, c'est bien beau, tant mieux,
nous sommes tous les meilleurs ici. Je ne sais pas mais avec onze divisions,
165 commissaires, des groupes majoritaires et des groupes minoritaires, est-ce
qu'on va réussir à s'entendre pour choisir cet être
compétent? Est-ce qu'il n'y aurait pas un mécanisme
intermédiaire et je vais plus loin dans ma pensée
qui permettrait à la fois à ces 165 commissaires ou à un
collège électoral choisi parmi ces 165 commissaires, de concert
avec le ministère ou le ministre de l'Education parce que le
lieutenant-gouverneur en conseil est une formule que j'appellerais une clause
de style; le lieutenant- gouverneur, comme vous le savez, n'est là que
pour signer au bout de la ligne de concilier cette démocratie de
participation vers laquelle nous tendons au maximum, surtout à ces trois
niveaux où il y a les parents, les électeurs et le conseil?
Je m'excuse, M. le ministre, de vous interrompre dans votre lecture, ce
n'est pas une méchanceté. Ne serait-il pas possible de trouver
une solution intermédiaire qui ne serait peut-être pas celle que
vous proposez, qui ne serait peut-être pas celle qui est proposée
par le gouvernement mais qui permettrait de réussir l'opération,
de garantir la démocratie dans l'avenir mais de savoir comment on la
part, l'opération et non pas de la laisser au libre jeu de je ne sais
quelle majorité? Je sais que ma question est difficile; la
réponse est peut-être encore plus difficile.
M. LAVIGNE: M. le Président, évidemment si nous
choisissons le président et le vice-président de ce conseil
scolaire parmi les 165 commissaires d'écoles élus, ce n'est quand
même peut-être pas une garantie à 100 p.c. mais c'est une
certaine garantie contre ce à quoi M. le député faisait
allusion. Et la démocratie est quand même respectée, avec
certaines entorses mais respectée à un certain pourcentage. Par
contre, à cause d'influences difficiles à déterminer
on ne met pas à la tête de cet organisme des gens qui
n'auraient pas la disponibilité, peut-être pas toute
l'expérience voulue pour remplir adéquatement ces postes
nous avons accepté, comme association, que le prési- dent et le
vice-président soient nommés par le lieutenant-gouverneur en
conseil après consultations avec le ministre de l'Education.
C'est un mi-chemin. Nous accepterions probablement qu'il y ait une
période initiale où on puisse faire peut-être certaines
concessions additionnelles du côté de la démocratie. Vous
réalisez beaucoup mieux que moi que le projet de loi 28 est
extrêmement complexe lorsqu'il s'agit de l'appliquer dans la pratique. Et
je ne pense pas que nous puissions rédiger un projet de loi assez
parfait pour qu'il n'y ait pas de problèmes réels dans
l'application. Il faudra certainement partir avec ce qu'il y a de mieux, le
mettre en pratique et réajuster son tir au fur et à mesure que le
temps passera.
Remarquez que c'est un point de vue que nous avons
présenté. Nous n'avons pas présenté ce point de
vue-là, d'ailleurs, nous n'avons présenté aucun point de
vue avec l'idée de l'imposer. Nous avons présenté ces
points de vue pour attirer l'attention du législateur et il appartient
au législateur de déterminer si notre point de vue est valable,
s'il est réalisable et si c'est une amélioration ou non sur ce
qui existe ou sur ce qui a été proposé par d'autres
groupes.
M. CARDINAL: M. Lavigne, votre réponse me satisfait
entièrement. Cette intervention, je l'ai faite dans un sens très
positif justement pour que le ministre revoie un peu ses positions, en ce sens
que je cherche une position intermédiaire qui ne fasse pas que le projet
de loi 28 dans ce domaine-là comme dans le domaine de la langue, comme
dans le domaine de la confessionnalité, comme dans le domaine des
relations syndicales établisse un état non plus de fait mais de
droit qui fasse que dans deux, quatre ou cinq ans, nous nous réunissions
à cette même table, ceux qui y seront encore, pour discuter de
droits acquis, ce dont on entend souvent parler, parce qu'il y aura eu un
projet de loi d'adopté à un certain moment, comme si les lois
étaient immuables et donnaient des droits qui ne pouvaient plus jamais
être modifiés.
Vous avez vous-même cité l'exemple de l'Assemblée
nationale. Quand on parle de garanties de structure, de garanties de ci, de
garanties de ça, je m'interroge toujours parce que chaque gouvernement
qui vient, l'un après l'autre et l'on sait comment ils changent
rapidement ces temps-ci peut modifier la loi qui a été
adoptée par le gouvernement précédent et, par
conséquent, je pense qu'une espèce de fausse croyance en des
garanties devant des textes de loi qui ne sont pas des actes constitutifs,
comme dirait mon cher collègue de Chicoutimi...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Mon savant collègue.
M. CARDINAL: ...mon savant collègue de
Chicoutimi, et qui par conséquent peuvent être
modifiés par n'importe quel législateur qui vient, y compris
même ceux qui demeurent. Parce qu'en fait, certains qui sont venus devant
nous ont semblé plutôt craindre les hommes qui pouvaient se
remplacer. Ce n'est pas ce que je crains, moi, absolument pas. Vous avez
été très objectif et très positif en parlant du
dynamisme des gens, des parents, des commissaires, etc. Je pense que l'on peut,
d'autre part, malgré tous les mythes et toutes les légendes,
espérer le même dynamisme des gouvernements
québécois qui se succéderont et je suis
peut-être trop optimiste, vous avez un sourire qui me laisse sceptique
non...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est parce qu'il souhaite que ça
change.
M. CARDINAL: Ah bon! d'accord. Mais, pour revenir au sérieux de
la question, c'est que vraiment le projet de loi no 28 est plus difficile
d'application que le projet de loi no 27. Il s'applique dans une
communauté qui contient peut-être les deux tiers de la population
du Québec, qui coûte je ne sais pas, moi $500
millions au Québec, qui rapporte en impôts probablement les quatre
cinquièmes de tout ce que rapporte le Québec, qui est dans une
conjoncture spéciale au point de vue linguistique et au point de vue
confessionnel.
Je suis bien d'accord pour le libre jeu de la démocratie. Il fut
un temps à Montréal où, malgré ce qu'on a dit hier,
le maire était tantôt de langue française, tantôt de
langue anglaise, ce qui est un singulier phénomène. Je me dis
qu'il faut rechercher, avant l'adoption en troisième lecture du projet
de loi no 28, un mécanisme qui permette un excellent départ de
l'application de ce projet, mais qui garantisse pour l'avenir qu'il n'y ait pas
une intervention politique j'emploie le mot dans la marche, les
démarches et la réalisation de ce qui se produira dans les
années à venir, parce que je ne pense pas que ce projet soit
modifié dans deux ans ou dans cinq ans. Cela fait 125 ans qu'on n'a pas
modifié la situation.
M. LAVIGNE: M. le Président, mon sourire n'était
certainement pas un sourire qui questionnait quoi que ce soit au sujet de
l'Assemblée nationale. Je crois que nous pouvons, quand même,
être sereins et de bonne humeur tout en discutant des choses
sérieuses.
M. CARDINAL: Entièrement d'accord.
M. LAVIGNE: Je suis d'accord avec vous, M. le député, que
les influences politiques ne doivent pas jouer dans la nomination non seulement
du président et du vice-président, mais également des
quatre autres membres du conseil dont il est question dans le projet de loi.
Tantôt, vous avez parlé de leadership. Nous concevons parfaitement
bien que le ministère de l'Education est impliqué pour des sommes
considérables dans le système scolaire. Mais, si le
lieutenant-gouverneur en conseil, après consultation avec le
ministère de l'Education, nomme quatre personnes au conseil scolaire,
nous croyons être dans le droit chemin en disant que ces quatre personnes
devraient avoir suffisamment de leadership pour protéger ce qui
est un terme, quand même, un peu plus fort que ce que j'ai au fond de ma
pensée les intérêts du ministère de
l'Education et des citoyens de la province de Québec. Donc, ces quatre
personnes vont jouer un rôle considérable si elles le veulent
bien.
Tenant compte de ce fait, cela renforce notre position à l'effet
que le président et le vice-président devraient être
choisis parmi les 165 commissaires élus, quitte à ce que ce soit
le lieutenant-gouverneur en conseil qui nomme ce président et ce
vice-président, qui auraient cependant été choisis
à même les 165. Je crois que dans notre association, nous serions
d'accord qu'il y ait une période où on peut accepter un certain
compromis un peu plus marqué. Mais, un fait est extrêmement
important et vous l'avez mentionné, M. le député de Bagot,
c'est qu'on ne doit pas laisser la possibilité pour les années
à venir et quand je dis "années à venir", ce n'est
pas dans un quart de siècle on ne doit pas laisser la
possibilité, vous me passerez l'expression, cela ne se fait pas mais je
vais employer quand même le terme, que des manipulations politiques
entrent en ligne de compte pour ces nominations. Je sais que cela ne se fait
pas habituellement.
M. CARDINAL: Là, c'est moi qui souris. M. CHARRON: Parfois.
M. LE PRESIDENT: M. Lavigne, nous vous remercions. S'il n'y a pas
d'autre question, nous passerons au mémoire suivant, celui du
Congrès juif canadien. M. Samuel Lewin.
M. LAVIGNE: M. le Président, avant de terminer, si vous voulez me
le permettre, je voudrais remercier les membres de la commission parlementaire
pour l'attention soutenue qu'on a bien voulu manifester lors de la
présentation du mémoire de l'Association des commissions
scolaires. Je vous remercie.
Congrès juif canadien
M. BESSNER: M. le Président, M. le ministre, MM. les membres de
la commission de l'Education. Mon nom est Morton Bessner. J'ai l'honneur de
représenter le Congrès juif canadien. J'ai avec moi, dans la
délégation aujourd'hui, à ma gauche, M. Léon
Teitelbaum et M. Mervin Rosenstein, à ma droite, M. Samuel Lewin et M.
Mayer Levy qui a apporté à la commission quelques copies
additionnelles de notre mémoire.
Le Congrès juif canadien, région de l'Est, en sa
qualité de porte-parole reconnu de la Communauté juive de la
province de Québec, est heureux d'avoir l'occasion de soumettre ses
recommandations et son avis concernant le projet de loi no 28. Nous avons, en
de nombreuses occasions précédentes, durant les sept
dernières années, déposé devant le gouvernement du
Québec des mémoires au sujet de l'éducation.
Nous avons déposé, la dernière fois que nous sommes
venus ici, je pense que c'est le 30 septembre, sept mémoires sur cette
question. C'est sur la base des mémoires précédents que
nous venons aujourd'hui avec nos recommandations et nos avis.
La position de base du Congrès juif canadien est, en deux
paragraphes, que le but ultime des amendements à la Loi de
l'éducation devrait être l'établissement d'une
administration scolaire unifiée, démocratiquement élue,
comprenant des sauvegardes adéquates écrites dans la loi, en vue
d'assurer l'égalité de l'éducation et les conditions
nécessaires afin de fournir des cours d'études de la plus haute
qualité dans la langue choisie par les parents.
We believe that our educational system ought to be based on linguistic
duality within one overall school administration with the option open to all
parents to send their children to schools of their choice. We believe that the
aim of all schools must be an educational process equipping all students with a
working knowledge of French and English as languages of communication.
The Jewish community as a whole subscribes to the principle of
linguistic duality and cultural pluralism as the foundation of the public
education system, with the rights of parents to choose the language of
instruction and the type of school for their children.
Si vous me permettez, je voudrais faire quelques observations sur des
points définis dans le projet de loi no 28. Ces recommandations sont
faites pour établir un système scolaire valable dans la province
de Québec, sur l'île de Montréal, pour tous les
citoyens.
Dans l'article 583 du projet de loi, nous voyons que chaque commission
scolaire sera composée de quinze commissaires élus. La
méthode d'élection, je vous en parlerai dans quelques minutes. On
disait aussi, à l'article 583: "Toutefois, le lieutenant-gouverneur en
conseil peut, s'il constate que la minorité francophone ou anglophone,
selon le cas, n'est pas représentée par suite de l'application de
l'alinéa précédent, nommer, sur la recommandation du
ministère, deux autres commissaires d'écoles pour des mandats
d'une année scolaire je vous demande de noter les mots qui
suivent après consultation des présidents des
comités consultatifs d'écoles de la minorité
concernée".
Respectueusement, messieurs, notre déléga- tion pense
qu'il y a peut-être une erreur dans ces derniers mots. Si on lit la loi
en question, on ne retrouve pas ces comités, c'est-à-dire les
comités linguistiques anglophones ou francophones, dans la Loi de
l'éducation ni dans ce projet. Respectueusement, nous suggérons
qu'il y a une erreur.
Ces deux membres additionnels qui sont là, supposons, pour
représenter, selon le cas, la minorité francophone ou anglophone,
doivent être nommés et j'ai utilisé le mot "doivent"
après consultation avec les organisations les plus
représentatives de la minorité concernée.
C'est le premier point que j'expose au sujet de cet article.
Deuxièmement, sur ce point, if it is the intention to give true
representation to the minority concerned and we believe that is the
intention we suggest that instead of a term of one school year which
would mean in and out and not having the same mandate as the elected
representatives, that they would be appointed with the same term of office as
the elected representatives.
And the third point that we wish to make on that particular issue is
that we feel that it should not be a discretionary matter but the word "peut"
should be changed to the word "doit". So that one could be assured of true
representation in the local school board.
Continuons avec les commissions scolaires. Le projet disait que, pour
être élue ou pour se présenter aux élections, une
personne doit avoir la citoyenneté canadienne. We believe that the
provisions found in the present articles 95 and 99 as amended by bill 27,
automatically would exclude a large portion of the community which is
intimately concerned about educational matters, that is parents of children who
we may call, for lack of a better term, new settlers.
These people must wait a minimum of five years before they can become
Canadian citizens. However, during this minimum period, most of them have young
children attending our school, most of them are very concerned about their
entrance into our school. To remove these people from the electoral process
because of the Canadian citizenship barrier, we believe, is excluding a large
portion of the student community. We therefore recommend that with regard to
the election for school commissioners in article 95, and the standing for
election to school commissioners in 99, that a period of Canadian residence in
excess of one year is fully sufficient to make persons éligible to vote
at the election of a school commissioner or to hold office.
M. SAINT-PIERRE: Est-ce que je pourrais poser une question? Dans vos
recherches que vous avez faites sur la législation scolaire dans
d'autres pays, pouvez-vous m'indiquer les pays où les gens qui n'ont pas
la citoyenneté du pays
peuvent se présenter comme commissaires ou voter dans une
élection scolaire? Je ne sais pas, moi...
M. BESSNER: Respectueusement, M. le ministre, je ne peux pas vous citer
un autre pays où cette situation existe.
J'espère que le Québec sera "in the forefront" en
éducation. J'espère qu'à cette situation-là on
pourra je crois que le député a parlé de leadership
donner un leadership. Ces nouveaux arrivés, après un an,
s'ils ont des enfants dans une école et qu'ils sont
intéressés à l'éducation de leur enfant... Ceux qui
sont ici depuis plus de cinq ans, sont des citoyens canadiens. Ensuite de cela,
je pense qu'au Canada et à Québec nous avons plus d'immigration
qu'en Europe, plus d'immigrants qui viennent ici définitivement. C'est
la raison pour laquelle on a utilisé le terme d'un an; cela va indiquer
une permanence, pas une transition.
C'est peut-être un autre moyen d'encourager les immigrants
à venir à Québec parce qu'ils seront immédiatement
admis, après un an, dans le milieu d'une chose essentielle pour chaque
parent, chaque immigrant avec des enfants, soit une voix à la commission
scolaire, dans le rôle de l'éducation dans leur pays.
The next section, to which we would like to address ourselves with
regards to Bill 28, deals with the question of language of instruction. Section
203 of the Education Act was amended in November 1969 by what is commonly known
as Bill 63. This body knows well the responsibilities placed on school boards
"to take the measures necessary to have the courses of study from the first
year level to the eleventh year level inclusive, adopted or recognized for
Catholic, Protestant or other public schools, ...given to all the children
domiciled in the territory under their jurisdiction..." Such courses must be
given in the French language, unless the parents of the child, at the time of
the enrolment of that child opt for the course to be given in English language
at which time "the curricula and examinations must ensure a working knowledge
of the French language". The Minister must therefore take the measures
necessary for this purpose.
Nous sommes convaincus qu'il est important pour le public d'être
non seulement rassuré et systématiquement informé au sujet
de chaque commission disposant des moyens de fournir des cours d'étude
dans la langue choisie par les parents, mais aussi de savoir comment ce
système agira sous l'administration scolaire unifiée
proposée.
We therefore recommend that article 589 includes provisions that it will
be the duty and responsibility of the deputy directors general to see that the
courses of the highest quality are available in the language of instruction
chosen by the parents, in each of the schools under the jurisdiction of the
board and that the deputy directors general had a power and resources to
fulfill the request of parents. The adequate staff is available at all levels
to establish and supervise such course. As the right to choose the language of
instruction is a paramount importance to parents, we would also recommend that
consideration be given to incorporating into the Education Act provisions which
would permit an appeal to the Provincial Courts in case a board would fail to
implement the provisions of article 203 (2) and 203(4) of the Education Act
establishing this right.
And we therefore suggest that this appeal procedure be implemented as an
amendment to the Education Act following article 508.
We foresee six types of schools under bill 28 which will be available
under the jurisdiction of each school board. And we believe that it is
essential that each parent be aware of the options available; we believe that
the parents must be aware of these options and we believe that the board must
take the measures necessary for the exercise by these parents of the
options.
And some of the options we see are the type of school they wish their
children to attend, that is Catholic, Protestant or other; the language of
instruction, taht is whether they wish their child to be taught in English or
French; and the nature of religious instruction, that is what kind of religious
instruction they want their children to get or whether they would prefer their
children to have moral instruction instead of courses in religion.
We therefore recommend that article 587 be amended to include provisions
that each school board must take the measures necessary for the exercise of
these parental options in all of their aspects, in all of the school boards,
and that such options be opened to exercise by all parents.
Quand nous étudions l'article 589 et les articles 593 à
596 de ce projet concernant les comités confessionnels et les personnes
responsables des questions religieuses, nous devons porter à votre
attention les trois points suivants. Comme nous l'avons déjà
souligné, parce que chaque commission scolaire peut être
appelée à dispenser des cours d'instruction religieuse ou morale
autres que catholiques ou protestants, dans toutes ces écoles non
seulement dans celles qui ne sont pas confessionnelles, on aurait dû
s'attendre que des dispositions soient édictées dans le projet
pour qu'un troisième comité supervise ces cours. Ceci pour
être conforme à l'esprit et à la lettre du rapport
Parent.
Néanmoins, en vue de prévenir de futures fragmentations,
nous ne suggérons pas l'établissement d'un comité
séparé pour l'éducation non confessionnelle. Mais nous
sommes préoccupés par la rédaction actuelle de l'article
589 déclarant que les commissaires d'écoles doivent
désigner "deux personnes responsables des questions religieuses, l'une
pour les catholiques et l'autre pour les protestants." Il nous
apparaît
que cette définition va bien au-delà de ce qui est
envisagé par l'établissement de comités confessionnels qui
doivent veiller à l'application des règlements des comités
catholiques ou protestants du Conseil supérieur de l'éducation.
"Questions religieuses" a un sens beaucoup trop large et est pratiquement un
terme trop vaste.
De plus, nous pensons qu'il est prévisible que plusieurs
élèves catholiques ou protestants fréquenteront des
écoles non confessionnelles. La loi ne devrait attribuer à ces
personnes aucune juridiction sur les étudiants catholiques et
protestants en dehors des écoles publiques catholiques et protestantes
à moins que ces étudiants n'optent pour une éducation
catholique ou protestante au sein des écoles non confessionnelles et,
ainsi, uniquement pour une pareille instruction.
As a consequence of this, we have three suggestions. One we have already
made that if confessional comittees are to be maintained and we
respectfully appreciate and adhere to the right of those who wish confessional
committees to be maintained, but they will be maintained in the public school
sector we say that in this regard the question of exercising the option
must be clearly defined and clearly available.
Secondly, we suggest that the wording of article 589, stating that
school commissioners must appoint two persons "responsible for religious
matters: one for Catholics and the other for Protestants", would go too far and
therefore we suggest that the wording be changed to read as follows: At the
request of the commitees contemplated in section 593, the school commissioners
must appoint two persons responsible for the implementation of the regulations
of the Catholic or Protestant committees of the Superior Council of Education
as the case may be and not to have jurisdiction over all Catholics and all
Protestants, especially those who may have opted to go outside the Catholic or
Protestant schools into the for a lack of a better term non
denominational school.
M. SAINT-PIERRE: You have a paragraph in page 8 which is hard to
understand. You said that confessional committees should have no jurisdiction
over Catholic or Protestant students who have opted to go into the
non-denominational school, unless the same person decides to have, within the
non-denominational school, Catholic or Protestant education.
You know, the basic choice you have to make is whether you are going to
go to a Catholic school, a neutral school, or a Protestant school. Once you
have decided you are going to have religious instruction, I do not think that
the law should allow in a sense Catholic or Protestant instruction within a
neutral school, otherwise the term neutral school becomes meaningless.
M. BESSNER: I think on that point one could opt to have religious or
moral instruction without having Catholic or Protestant education. I think one
was talking of a course such as mathematics, history, etc., and the other was
talking about a total educational approach.
M. SAINT-PIERRE: I will be more specific. It seems to me a bit nonsense
that I am sorry about the term in the last two lines of the third
paragraph of page 8, you say "...students opt for Catholic or Protestant
instruction in the non-confessional schools." You know, you cannot opt for a
Catholic instruction in a non-confessional school. If you want to have a
Catholic instruction, you opt for Catholic schools. Otherwise, we will have
people today who want to have neutral instruction in a Catholic school. It is
so complicated to start with that I would not like to have more...
M. BESSNER: I respectfully submit that perhaps it is complicated to
start with, but I personnally can see a person opting for courses in moral or
religious instruction, Catholic, Protestant, Jewish, Greek Orthodox. One could
opt for a course of religious or moral instruction as a course of study without
opting to be within the framework of a Catholic public school.
M. SAINT-PIERRE: Yes.
M. BESSNER: That is the distinction I am making, Mr. Minister and
members of the Committee.
M. SAINT-PIERRE: Well, I do not know... If people are really Catholic
and Protestant, I presume they would opt for a Catholic school. People who go
to a neutral school, I am not saying that they could not have moral
instruction, but this moral instruction cannot be tied into a particular
religion. It might be natural morals, I do not know what kind, and we have
actually a course of this type foreseen for neutral school.
M. BESSNER: Mr. Minister, I respectfully submit that it is foreseeable
that Catholic parents and Protestant parents could opt to send their children
to the public school which is neither Catholic nor Protestant. And within that
school, the Parents Advisory Committee could suggest that they would like the
course which you now suggest, of moral instruction, be Protestant moral
instruction or Catholic religious instruction. I am not making the option but I
do say that it is foreseeable that one could have a course of moral instruction
and still not be in a religious public school.
M. SAINT-PIERRE: And more specifically, would this not be a disguised
way of having two religious types of school plus one neutral and
trying to have the neutral become, you know, twenty-five different
religions? We could at the end have 75 different types of schools because the
Mormons, as a religious group, would like to take all the neutral school, and
say we are going to have Mormon instruction into that. We could go in Buddhism
and all the rest of it.
I am not saying this is wrong, but so far this has not been the rule of
the game.
M. BESSNER: I think that there is a safeguard in all these matters. One
must talk of being practical and I think it is the question of whether there is
sufficient demand for this kind of course, just as there could be other
courses, except the ones that one requires for matriculation purposes that are
electives. Again, that is a question of demand. The electives that one has in a
school depend on demands, not anything else. That is the practical
criterion.
M. CARDINAL: M. le Président, what are the reasons of the goals
of such recommendations? In fact, I an in the same situation as the Minister. I
do not understand why you suggest such a thing. There should be a reason which
would explain this paragraph.
M. BESSNER: Well, I am reading first what I see as being proposed in the
bill ; the definition as suggested, I respectfully submit, goes beyond what was
intended, namely the words religious matters are much broader that the
definition for implementation of the regulations made by the Catholic and
Protestant school committee, under the Superior Council of Education. That is
point number 1.
M. CARDINAL: Right. Je m'excuse de vous interrompre. Je vais parler
français. Dans la Loi du Conseil supérieur de l'éducation,
on prévoit l'enseignement catholique, protestant ou autre. Est-ce que je
dois comprendre ma question va être très précise
que le Congrès juif désirerait je ne veux pas
imputer d'intention ici que les membres de la religion juive
choisissent, de préférence aux écoles protestantes, les
écoles neutres, où ils désireraient avoir un enseignement
religieux qui se rattache à leurs croyances? Is my question clear?
M. BESSNER: Your question is: Do we anticipate having a religious
attachment to the neutral school?
M. CARDINAL: Yes.
M. BESSNER: No, we do not see a religious attachment to the neutral
school. We see it as the Government has defined as a school other than Catholic
or Protestant and, to use the term that has been used around the table, a
neutral school, where, hopefully, there will be children of all professions,
all sorts at the school. But we do foresee that even in this school, just as
there are other options available, except those which are specifically required
to get a matriculation at the end of grade eleven, there are other optional
courses available, if there is the kind of demand that wants a course in moral
instruction.
Then, I suggest that we recommend it be available as well. But we do not
foresee giving a religious character to the neutral school. We foresee it as a
neutral school having a non-confessionnal, non-religious connotation.
M. CARDINAL: The school will be neutral but if the parents ask for moral
or religious instruction, the neutral school will be obliged to give such
instruction.
M. BESSNER: If the demand is sufficient to warrant it,...
M. CARDINAL: O.K.
M. BESSNER: ... I respectfully submit however that it probably is more
practical to anticipate what the Minister of Education refer to as if Catholic
parents want Catholic instruction, they would probably opt for a Catholic
school system. But, we do foresee in the neutral school some liberality. I am
not suggesting that it will happen but we call to the Government's attention
that it is a possibility because there is a possibility that Catholic parents
and Protestant parents may choose to send their children to the neutral school
system.
M. CARDINAL: It may happen, yes.
M. BESSNER: And, in that event, that is why we suggest that. It is
really why we are suggesting it, parce que dans l'article 589 les mots sont
trop larges. If a parent chooses to send his child to the neutral school, we
suggest that the regulations of the Protestant and Catholic committees should
not affect the people who have opted not to be affected and who should go to
the neutral school.
M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Jacques.
M. CHARRON: Je comprends le sens de votre remarque. Il est
prévisible, en effet, que des parents qui auraient opté pour une
école confessionnelle... Je reprends mon vieux "bag" sur la
confessionnalité. Il y a plusieurs confessionnalités à
l'intérieur de la même confession. Supposons que des parents,
ayant opté pour une école catholique, les parents catholiques de
gauche, et qui se ramassent avec un comité consultatif qui soit beaucoup
plus conservateur, considèrent qu'il est mieux pour le catholicisme de
leurs enfants de les mettre dans une école neutre que de les mettre avec
les catholiques de l'ancienne époque. Et les ayant mis dans une
école neutre, qu'ils puissent se servir du comité
consultatif pour demander un enseignement moral conforme à leurs
ambitions. Je comprends le sens et c'est prévisible en effet; je connais
une multitude de parents qui, bien que catholiques pratiquants, vont opter pour
l'école neutre pour leurs enfants plutôt qu'une école
confessionnelle d'arrière-garde. Sur le plan administratif, vous
imaginez ce que cela veut dire: une tour de Babel. Parce que nous aurions des
écoles confessionnelles d'un style, confessionnelles d'un autre, et
partiellement neutres, et vraiment neutres, et totalement neutres. La loi, en
créant six types d'enseignement, se donne suffisamment d'ennuis
administratifs sans pousser plus loin. La rédaction de l'article 589 est
satisfaisante à cet égard-là.
Ne croyez-vous pas qu'on augmente les dangers de chaos administratif
avec un amendement comme celui-là?
M. BESSNER: M. le député, quand vous parlez du pouvoir de
consulter, je suis d'accord que pour l'économie, cela va être
essentiel, cela va être pratique. Mais le point qu'on essaie
d'établir, peut-être qu'on ne l'a pas fait encore, est que, dans
les écoles publiques non catholiques, non protestantes on les
appelle neutres pour le moment on ne voudrait pas que ces gens aient le
droit de rentrer dans cette école sans invitation.
C'est la seule réserve que nous vous démontrons. Nous
disons que le projet de loi, tel que rédigé, à notre avis,
donne à ces personnes le droit d'entrer dans les écoles neutres
sans invitation. Nous suggérerions respectueusement que dans
l'intérêt d'avoir une école publique non catholique et non
protestante, c'est-à-dire neutre, elles n'aient pas le droit d'y entrer
mais elles doivent y être invitées. Il serait essentiel et
pratique d'utiliser leurs expériences, leurs services mais par
invitation.
M. CHARRON: Qui les inviterait?
M. BESSNER: Les parents, les éducateurs, les directeurs
généraux adjoints, ceux qui ont la charge de donner ces cours,
s'ils sont demandés. Mais je fais une distinction entre le droit
d'entrer et l'invitation. Dans le cas de l'école neutre, on parlait
d'une invitation. Je pense que vous avez raison, il sera nécessaire de
l'utiliser mais par invitation et non par droit, parce que comment peut-on
désigner quel élève a le droit de le chercher dans
l'école neutre? C'est le problème. Alors par invitation, si un
groupe de parents le voulaient et s'il était pratique d'avoir un cours
d'instruction morale, le comité catholique a les moyens de le donner,
certainement c'est pratique de l'utiliser par invitation, par utilisation, par
demande mais pas par droit d'entrer dans l'école neutre en disant: Nous
avons ce cours d'instruction morale, vous, catholiques, devez le prendre.
M. LE PRESIDENT: M. Bessner, étant don- né que nous avons
plusieurs mémoires, serait-il possible de vous demander de lire les
recommandations?
M. BESSNER: J'ai presque fini. Je ferais mieux d'arrêter ici.
Tenez pour acquis que mon mémoire est déjà lu. Je
répondrai à vos questions. Si c'est préférable pour
les membres de la commission, je suis prêt à essayer de
répondre à leurs questions.
Je laisse donc le mémoire ici et demande au président de
le déposer au journal des Débats, ainsi que les autres
mémoires déjà déposés. (Voir annexe B).
M. LE PRESIDENT: Très bien. Le député de
Saint-Jacques.
M. CHARRON: Au niveau du conseil scolaire de l'île, vous demandez
que la disposition prévue à l'article 583, au niveau des
commissions scolaires, qui permet au ministre d'ajouter deux commissaires
là où la minorité n'est pas représentée,
soit reportée également au niveau du conseil scolaire de
l'île. Or, il existe déjà une disposition, dans le projet
de loi actuel, qui réserve au ministre le droit de nommer quatre
personnes sur quinze. Ne trouvez-vous pas que c'est par ces quatre nominations
qu'il pourrait corriger si c'est un objectif, évidemment
la faiblesse de représentation d'une minorité, non pas lui
ajouter, en plus de son droit de quatre nominations sur quinze, un droit d'en
nommer deux autres? S'il ne l'a pas fait dans ses propres nominations, c'est
bien sa faute si les minorités ne sont pas
représentées.
M. BESSNER: Vous avez raison. C'est une chose qui est à la
discrétion du ministère. Les deux modalités sont à
la discrétion du ministère. Mais je pensais qu'en donnant toute
la bonne foi au ministère, il arriverait peut-être qu'une
minorité ou l'autre, selon le cas, ne soit pas assez
représentée. Alors nous suggérons qu'il ait le droit d'y
réfléchir de nouveau et de faire une nomination de deux autres
personnes pour que ce groupe de la minorité soit
représenté.
Même à la commission scolaire, on ne parlait pas d'un
mandat d'une année. On disait que, si un groupe doit être
représenté, il doit l'être durant tout le mandat de la
commission, c'est-à-dire trois ou quatre ans selon le cas.
M. LE PRESIDENT: Est-ce que d'autres membres aimeraient questionner M.
Bessner? Est-ce que vous avez terminé, M. Bessner?
M. BESSNER: Il y a peut-être un point dont nous allons parler dans
un moment, c'est du conseil scolaire de l'île de Montréal. La loi
parle des personnes spécifiques, des protestants, des catholiques, et
des écoles qui existent dans le moment. Elle énumère ceux
qui seront nommés à ce conseil. Dans la section des
dispositions
transitoires, en plus des personnes qui sont déjà
désignées à l'article 9, vu que, peut-être des
personnes qui auront choisi l'école non confessionnelle n'y sont pas
représentées nous suggérons respectueusement, à ce
point de vue là, que la loi soit amendée pour qu'une ou des
personnes puissent représenter ce groupe de personnes qui veulent un
système non confessionnel. Cela peut aider, durant cette période
de transition, la commission scolaire de l'île de Montréal. Nous
suggérons cela respectueusement comme un point essentiel dans notre
présentation.
M. CHARRON: J'aurais une question, si vous me le permettez. Dans la
recommandation, vous vous dites d'accord sur la disposition de la loi qui dit
qu'il y aura des adjoints de la langue de la minorité dans chacune des
commissions scolaires. Vous allez plus loin et vous demandez même que ces
adjoints-là c'est votre recommandation no 6 "aient le
pouvoir et les moyens de répondre à la requête des parents
et disposent d'un personnel adéquat à tous les niveaux pour
établir et superviser ces cours". Est-ce que ça ne veut pas dire,
finalement ce que d'autres groupes à la table où vous êtes
actuellement ont exprimé comme craintes, soit qu'on se ramasse, en
réalité, avec 22 commissions scolaires plutôt que onze?
Elles ne seraient unifiées qu'à la table des commissaires
élus au suffrage universel, mais, dans le fonctionnement quotidien de
l'administration des commissions scolaires, il y aurait celle des Anglais et
celle des Français dans chacune. Finalement, si vous demandez qu'il y
ait tous les personnels, tout le tralala, toute la bureaucratie d'une langue,
toute la bureaucratie d'une autre, on va se gargariser pour rien quand on va
dire qu'on a unifié les commissions scolaires.
M. BESSNER: On ne veut pas deux systèmes séparés,
mais il y a une chose essentielle, c'est qu'ils doivent avoir le pouvoir. On
pourra utiliser le même personnel dans la région scolaire
unifiée pour que les demandes des parents soient
réalisées. On ne demande pas que, dans chaque étape, il y
ait deux personnes, une de langue anlaise, une de langue française, mais
seulement dans les étapes où les parents demandent d'avoir le
pouvoir, le personnel, les écoles, les salles de classe, les livres, les
modalités. Mais chaque fois qu'on a reçu une demande, on ne doit
pas nommer nécessairement un Anglais et un Français, parce que ce
n'est pas pratique.
M. CHARRON: A ce moment-là, on peut se baser simplement sur
l'article 587, qui oblige les commissions scolaires à assurer un
enseignement de qualité à tous, qu'ils soient Anglais ou
Français, catholiques, protestants ou autres. Si vous n'imposez pas le
dédoublement de A à Z, c'est vrai que les commissions scolaires,
là où il faudra nommer des adjoints dans la langue de la
minorité, le feront, mais qu'on ne consacre pas un dédoublement
d'un bout à l'autre.
Je suis bien convaincu, moi aussi, qu'une commission scolaire qui va
desservir une clientèle disons à 30 p.c. de la langue d'une
minorité, quelle qu'elle soit dans cette commission-là, devra
engager du personnel de la langue de cette minorité là.
Particulièrement pour le gars qui travaille avec des étudiants,
c'est bien mieux qu'il parle leur langue, etc. Ma compréhension de votre
recommandation no 6 était que vous obligiez le dédoublement de
haut en bas. Là, vous faites simplement exprimer un souhait que vous
portez aux commissaires. A ce moment-là, cela va.
M. LE PRESIDENT: Je vous remercie, M. Bessner.
M. BESSNER: Merci, M. le Président, merci aux membres de la
commission.
M. LE PRESIDENT: Il est bien entendu que votre mémoire sera
transcrit en entier au journal des Débats pour fins de
référence.
Nous entendrons maintenant l'Office de l'éducation de
l'archevêché de Montréal.
Office de l'éducation de
l'archevêché de Montréal
M. LAFONTAINE: M. le Président, M. le ministre, MM. les
députés, j'aimerais d'abord vous présenter les membres de
cette délégation qui représente l'archevêque de
Montréal.
M. LE PRESIDENT: Pourriez-vous vous identifier pour le journal des
Débats?
M. LAFONTAINE: Mon nom est Jean-Marie Lafontaine, je suis vicaire
général et coordonna-teur général du
diocèse. J'aimerais maintenant présenter les membres de la
délégation qui représentent l'archevêque de
Montréal. En commençant par la gauche, Mlle Jeanne Leroux,
directrice d'école secondaire à la Commission scolaire de Verdun;
Mgr Léonard Crowley, évêque auxiliaire à
Montréal; l'abbé Maurice Audet, directeur de l'Office de
l'éducation du diocèse de Montréal; M. Yves-Aubert
Côté, directeur du département des sciences comptables
à l'Ecole des hautes études commerciales; l'abbé Jean-Paul
Rivest, secrétaire du comité exécutif diocésain
Mlle Denise Gaudet, directrice d'école primaire à la Commission
scolaire d'Outremont, et M. Jacques Hulman, catéchète et
directeur adjoint de l'Office d'éducation du diocèse de
Montréal.
Nous représentons l'archevêque de Montréal qui est
actuellement, comme vous le savez, à Rome pour participer au synode.
Nous essaierons de transmettre le point de vue et l'avis, le plus
fidèlement possible, de celui qui est le chef spirituel de la
communauté catholique de Montréal, de celui qui, au début
de 1970, a quand
même essayé de faire un effort de consultation qui a
provoqué l'intérêt des paroissiens dans 18 paroisses et
quatre associations de parents, 10 associations ou groupements de
maîtres, un groupe d'étudiants-maîtres, deux groupes
d'administrateurs scolaires et sept mouvements ou organismes de l'Eglise. C'est
vous dire qu'au début de 1970, au sujet du projet de loi 62, environ
6,000 personnes se sont exprimées effectivement et environ 85 p c. de
ces personnes ont souhaité que, dans le contexte actuel, demeurent les
commissions scolaires confessionnelles.
Je commenterai brièvement l'avis de l'archevêque de
Montréal à la commission parlementaire et, ensuite, s'il y avait
des questions, je pense qu'il y aurait lieu que mes collègues de la
délégation puissent participer aux réponses ou à
l'élaboration des réponses.
Pour citer peut-être un document que je ne pourrais pas endosser
dans toutes ses parties, loin de là, celui de l'Alliance des professeurs
de Montréal, qui répète à deux reprises qu'il ne
fait aucun doute que les catholiques montréalais désirent des
écoles catholiques, le projet de loi ne met pas en cause l'existence de
l'école catholique puisqu'à l'article 587, je crois, on donne
comme mandat aux commissions scolaires qui naîtraient du projet de
dispenser l'enseignement catholique pour les écoles catholiques.
S'il ne fait aucun doute que les catholiques de Montréal
désirent des écoles catholiques, je pense qu'il incombe au
premier chef spirituel de la communauté catholique, l'archevêque
de Montréal, de se demander si ce souhait ou cette volonté doit
être vraiment respectée.
Dans le mémoire, au premier paragraphe, on remarque une courte
énumération des objectifs que se propose le projet de loi:
l'égalité des services sur tout le territoire; une participation
plus large de la population, notamment des parents, mais aussi de ceux qui
seraient appelés à élire des commissaires; le respect du
pluralisme religieux.
L'archevêque de Montréal, dans l'avis qu'il a
exprimé à la commission parlementaire, s'inspire d'un certain
nombre de données. D'abord, l'importance, dans l'édification de
la société, de valeurs telles que la dimension spirituelle de
l'homme. Quand on parle aujourd'hui de plus en plus d'éducation humaine,
je pense qu'on se réfère de plus en plus à la
possibilité pour l'étudiant, puisqu'il s'agit de lui, de
construire lui-même sa propre échelle des valeurs et d'être
dans une situation qui lui permette de le faire.
L'archevêque aussi s'inspire des exigences de la paix sociale et
aussi du respect des autres, de même que du rôle subordonné
mais nécessaire des structures par rapport à ces valeurs. Je
pense que, depuis de nombreuses décennies dans un grand nombre de pays,
les catholiques ont manifesté qu'ils accordaient beaucoup d'importance
à l'école catholique, qu'il s'agisse de la province de
Québec, qu'il s'agisse des autres provinces du Canada, d'un certain
nombre de pays d'Europe ou des Etats-Unis, où on a quand même
consenti des sacrifices assez importants pour maintenir des écoles
catholiques. C'est signifier qu'elle peut constituer un apport
considérable pour la promotion des valeurs spirituelles; c'est signifier
que l'école n'est pas envisagée uniquement comme un endroit
où on forme des producteurs mais où on essaie de
développer l'esprit créateur, ce qui suppose une vie
intérieure et la construction d'une hiérarchie des valeurs.
Par ailleurs, tout le monde est conscient qu'à Montréal il
y a plusieurs familles spirituelles, il y a plusieurs groupes culturels et
c'est l'intention de tout le monde, je crois, de voir à ce que la
réforme du système d'éducation à Montréal
puisse se réaliser le plus possible dans la paix. Tous ces groupes
différents ont droit à des services adéquats, sans que
pour autant soient compromis les droits de la majorité.
On a souvent dit que l'Eglise catholique avait mis beaucoup l'accent sur
ce qu'on a appelé le juridisme; cela a pu être vrai, surtout si on
se limite à un regard rapide de l'histoire. Mais, pour le moment,
l'archevêque de Montréal nous indique comment l'engagement des
personnes est fondamental mais que, pour assurer la stabilité à
des projets, les soutiens juridiques sont importants. Et il faut que la
philosophie, les objectifs de l'éducation catholique puissent se
concrétiser dans un réseau de décisions et
d'autorités qui les assume pleinement.
C'est ainsi que, si on fait le raisonnement que les catholiques en
grande majorité à Montréal veulent des écoles
catholiques, il faut s'assurer qu'il y ait justement un réseau de
décisions et d'autorités qui assume pleinement les objectifs de
l'école catholique.
Or, si l'on considère le projet de loi 62, on peut se rendre
compte qu'on affirme maintenir l'école catholique mais sans
prévoir les mécanismes de gestion appropriés à la
vie et au développement de cette école. On ne trouve pas non plus
de fonction de direction bien identifiée comportant un mandat
spécifique pour la gestion des écoles catholiques.
Le comité confessionnel qui affectera la commission scolaire est
de ce fait réduit à un rôle de vigilance et il risque
justement d'être peu efficace parce qu'il ne sera pas articulé sur
des fonctions ou un réseau de décisions de l'ordre que j'ai
mentionné précédemment. Et ceux qui ont essayé de
proposer des amendements qui donneraient au comité confessionnel de plus
grandes responsabilités, parfois on dirait plus de pouvoirs, se sont
rendu compte assez rapidement qu'ils essayaient d'organiser la quadrature du
cercle, parce que plus on donnera de pouvoirs au comité confessionnel,
plus on risquera d'avoir une autorité bicéphale dans un
système scolaire, on en enlèvera aux commissaires pour en donner
davantage aux membres du comité confessionnel avec tous les risques
qu'une autorité bicéphale peut entraîner.
Le projet de loi prévoit aussi l'engagement
d'un responsable des questions religieuses. Je suis convaincu qu'on n'a
pas eu recours à cette expression dans une intention de minimiser. Il
reste quand même que, pour ma part, à première vue,
lorsqu'on parle de responsable des questions religieuses, c'est une expression
qui accentue la marginalité de la vie religieuse, comme si tous les
autres n'avaient pas des responsabilités, ne serait-ce qu'en vertu de
leur foi et parfois même en vertu de leur mandat. De toute
manière, quant à ce responsable nommé de cette
façon, on ne sait pas ce qui lui sera confié, quel sera son
rôle, ses capacités d'agir.
Pour ce qui concerne les comités consultatifs d'école, je
pense que sans avoir à se targuer de résultats
phénoménaux, on peut constater que, dans beaucoup d'endroits dans
la province et en particulier à Montréal, il y a eu beaucoup
d'efforts de faits pour intéresser les parents à la chose
scolaire.
Pour parler de Montréal, depuis deux ans, nous avons des
activités qui ont été inspirées par le programme
pastoral. Nous avons signifié la volonté d'intéresser les
parents à la chose scolaire. Mais nous nous rendons compte quand
même que la participation à la chose scolaire, comme la
participation en général d'ailleurs, est difficile. Quant
à la chose scolaire, il nous apparaît que l'expérience de
cette participation n'est pas assez avancée pour qu'on puisse
prévoir l'influence réelle des parents à
l'école.
Comme j'ai essayé de l'indiquer tout à l'heure,
l'étude du projet de loi lui-même, c'est en haut de la page 3,
fait apparaître la difficulté qu'il y a, en raison même de
l'économie du projet, de bien définir les soutiens juridiques qui
garantissent l'école.
A cette difficulté s'ajoutent les problèmes qui pourront
être engendrés par une unification trop rapide des structures et
par la mise en place ou ensemble de gens de diverses confessions religieuses,
de diverses cultures, pour administrer des écoles également
diverses.
Pour toutes ces raisons, l'archevêque de Montréal propose
une restructuration progressive du système scolaire
montréalais.
Progressive ne veut pas dire ici que nous voulons le statu quo aussi
longtemps que possible. Au contraire, l'archevêque, sans entrer dans
l'élément technique, propose que d'abord on institue le conseil
scolaire qui, lui, est susceptible justement d'atteindre un objectif qui est
souhaité à savoir une meilleure répartition des
ressources, une meilleure répartition des services. Il propose aussi
qu'on redonne une impulsion aux comités d'école justement pour
que nous puissions juger, à la faveur d'une expérience plus
longue, de l'influence réelle des parents au niveau de l'école.
Il propose aussi que, pour fins de simplification administrative, si on le juge
à propos, on puisse regrouper ou rediviser les commissions scolaires
mais en maintenant ces commissions scolaires catholiques, protestantes ou
autres, si besoin est. Et cela pourrait, dans notre esprit, être mis en
pratique dès la mise en vigueur de la loi. Ce qui veut dire que les
principaux objectifs, l'égalité des services, le respect des
autres et de leur foi différente, ce qui veut dire qu'une certaine
simplification pourrait se faire immédiatement.
Ce qui veut dire aussi que des dispositions pourraient être
gardées pour assurer le maintien du développement de
l'école catholique. Par la suite, une fois l'expérience
vécue, on pourrait voir quel est le type de commission scolaire qu'un
sain réalisme commande.
Il s'agit ici d'une loi interne, de croissance, des mentalités et
de l'expérimentation. D'ailleurs, on a un peu de difficultés
à voir pourquoi, en particulier dans le Montréal
métropolitain et c'est vrai pour le reste de la province
vous auriez dans un même diocèse ou dans le Montréal
métropolitain deux systèmes scolaires. A Montréal, par
exemple, le diocèse s'étend jusqu'à l'île
Jésus, où s'appliquerait la loi no 27. D'autre part, nous avons
des voisins, de l'autre côté du fleuve, sur la rive sud, où
s'appliquerait la loi no 27. Je ne pense pas que les caractéristiques
culturelles de la population soient à ce point différentes qu'on
puisse expliquer le bien-fondé de deux système scolaires dans un
même diocèse ou dans le même Montréal
métropolitain. Il semble que l'inspiration de la loi no 27 pourrait
être retenue pour faire face aux problèmes que pourrait engendrer,
du moins à mon avis, l'application du projet de loi no 28.
L'attitude pastorale de l'évêque s'exprime de la
façon suivante: Est-ce que, dans ce nouveau contexte, l'école
aura l'aptitude de favoriser l'éducation de la foi des jeunes dans
l'hypothèse où les parents le désirent pour eux, ou dans
l'hypothèse où les jeunes, même rendus à un certain
âge, ont choisi ce type d'école?
C'est l'ensemble du mémoire et quelques commentaires que j'ai cru
utile d'ajouter.
M. LE PRESIDENT (Pearson): Le député de Saint-Jacques.
M. CHARRON: M. Lafontaine, j'aurais d'abord une première remarque
à faire avant de passer à des questions sur l'aspect plus
spécifiquement traité dans l'avis que l'archevêque de
Montréal envoie par votre délégation aujourd'hui. Je ne
voudrais pas que vous la preniez comme étant impolie ou comme voulant
manquer d'égard à qui que ce soit, y compris et surtout à
l'archevêque de Montréal, mais je suis déçu,
à la lecture de l'avis de Mgr Grégoire une fois de plus je
dois dire du comportement de l'Eglise dans les matières cruciales
qui se débattent au Québec depuis quelques années.
Vous venez parler sur un projet de loi qui a d'éminentes
conséquences dans plusieurs domaines. Il en a sur la
confessionnalité, si vous voulez, sur la foi des Montréalais,
soit. C'est votre premier devoir. Il n'y a pas mieux placé que le chef
spirituel de l'Eglise à Montréal pour
le faire. Mais il ne fait pas que cela. Il aborde un problème
linguistique et culturel crucial où c'est à peu près faire
l'autruche que de ne pas en parler et de ne pas le voir. D'autre part, la
restructuration scolaire s'est vu mandatée par plusieurs organismes qui
sont venus parler, ici à la table où vous êtes, d'un besoin
de rattrapage, de péréquation et de redistribution pour les zones
défavorisées de Montréal, d'un besoin de justice sociale,
d'un besoin de justice dans la répartition des équipements. Mgr
Grégoire n'en touche aucun mot.
On dirait que vous êtes venus défendre vos seuls
intérêts, que je conçois parfaitement. Il n'y a pas mieux
placé que vous pour le faire. Mais l'absence de préoccupation
sociale et de préoccupation culturelle à l'égard de la
majorité de Montréal, comme s'il n'y avait dans le projet de loi
qu'un article, celui qui crée les comités confessionnels, me
blesse. Je dois le dire. Je ne suis pas catholique, mais je suis
chrétien. Une des choses que j'ai reprochées à plusieurs
reprises, c'est une espèce d'absence complète des
problèmes sociaux. Je ne suis pas le premier que vous entendez en faire
le reproche, je suppose, à l'Eglise catholique.
On lui a toujours reproché c'est une des raisons pour
lesquelles je ne suis plus catholique sa façon discrète de
se dire qu'elle est réservée aux choses spirituelles, de
s'échapper des problèmes matériels et ainsi de les
conserver dans leur état actuel. C'est se cacher soi-même les deux
yeux, se mettre les mains sur les yeux pour ne pas parler des problèmes
sociaux, des problèmes culturels qui craquent dans Montréal d'une
façon, vous admettrez avec moi, toute aussi éclatante que le
problème de la religion.
Cette première remarque étant dite sur l'ensemble de vos
avis, je reviens au contenu même de l'avis de Mgr Grégoire. Le
comité confessionnel dont vous parlez, tel que défini dans le
projet de loi actuellement, a un pouvoir de recommandation. Est-ce que vous
iriez jusqu'à lui suggérer, dans certains domaines, un pouvoir de
décision? Où, à quel endroit et sur quelle
matière?
Deuxièmement, est-ce que vous préconisez une autre forme
que l'élection par les comités de parents pour le choix des
personnes membres du comité confessionnel?
M. LAFONTAINE (Jean-Marie): Tout d'abord, je pense bien qu'on me donnera
l'occasion de réagir aux remarques que vous avez faites. C'est sûr
que, si nous avions l'occasion de discuter longuement,, cela pourrait
être plus développé. Mais, pour ma part, je ne reconnais
pas le bien-fondé de votre remarque lorsque vous dites que les
problèmes sociaux des défavorisés ont été
oubliés. D'une part, quand l'évêque parle de
l'égalité des services sur tout le territoire,
égalité qui, sans doute, doit être
interprétée non pas comme une égalité
mathématique mais aussi une égalité définie en
fonction des besoins et en fonction du rattrapage, ce n'est pas du tout exclu
là-dedans.
Deuxièmement, vous me placez dans une situation où je
serais obligé de faire de l'apologétique. Mais à
Montréal même, pour ce qui concerne les défavorisés,
sans avoir été les seuls à s'en occuper, nous pensons
à l'investissement de $100,000 pour l'animation sociale dans Pointe
Saint-Charles, non pas uniquement dans le sens de l'argent investi mais aussi
de la participation de l'évêque lui-même et de ses
collaborateurs dans ces comités, les rencontres qu'il a accepté
de faire avec eux avec plaisir. On pense aussi aux investissements en personnes
et en temps qui se font actuellement dans Hochalaga-Maisonneuve, dans le
secteur centre-sud. Je pourrais donner d'autres réalisations.
D'autre part, je ne pense pas que c'était l'occasion de faire un
grand laïus sur les défavorisés à partir du moment
où justement une meilleure perception des fonds et une meilleure
redistribution faisaient l'objet de l'adhésion générale.
On dit tout simplement qu'on est d'accord sur cela. Alors, c'est pour cela que
votre remarque sur la question des défavorisés, je ne la trouve
pas bien fondée, tout en respectant votre opinion.
Deuxièmement, la question de la langue. Je reconnais que l'aspect
linguistique n'est pas mentionné dans ce document parce que, justement,
on s'est dit, puisque le projet de loi propose des écoles catholiques et
veut même des mesures favorisant le maintien et le développement
de ces écoles catholiques, on va examiner cette question-là.
Deuxièmement, ce n'est pas dans le texte mais on s'est
préoccupé de cette affaire en essayant de voir comment tout
serait agencé. Or, à mon avis, si à Montréal, vous
avez des commissions scolaires confessionnelles j'ai des chiffres ici et
des cartes francophones et anglophones qui ont été faites par nos
experts; on s'est préoccupé de cela on se rend compte
qu'environ 80 p.c. des enfants qui vont être assujettis vont être
des francophones. Ce qui veut dire que là vous aurez un climat, des
données et des conditions qui vont permettre le développement de
la culture française. Ensuite, je crois que, si l'on veut aborder cela
comme citoyen, dans le fond ce n'est pas le projet de loi no 28 qui peut
régler cette situation-là. Ce sont des amendements qu'on devrait
apporter à la loi no 63; alors qu'on en traite là. Mais je pense
qu'on est venu ici pour traiter du projet de loi no 28.
M. LE PRESIDENT (Pearson): La parole est au ministre de l'Education.
M. SAINT-PIERRE: Avez-vous terminé? Il y avait une question, je
crois.
M. LAFONTAINE (Jean-Marie): Je m'excuse. J'ai simplement réagi
sur ses remarques...
M. SAINT-PIERRE: Oui.
M. LAFONTAINE (Jean-Marie): ...mais je n'ai pas répondu à
sa question.
M. LE PRESIDENT (Pearson): Continuez.
M. COTE: J'aurais souhaité simplement signaler à M. le
député que l'idée du conseil scolaire, au premier palier,
est préconisée par l'archevêque.
Il faut y voir là, évidemment, les avantages que l'on a
soulignés antérieurement à l'égard de cette
répartition plus équitable des ressources fiscales du secteur qui
nous intéresse présentement.
M. LAFONTAINE (Jean-Marie): La question que vous aviez posée
était de savoir si nous pouvons suggérer plus de pouvoirs au
comité confessionnel. Je pourrais faire quelques suggestions. Je trouve
d'abord qu'on devrait lui donner un véritable rôle de promotion
plutôt qu'un rôle de veiller à l'application des
règlements catholiques. Un rôle de promotion. Mais cela n'est pas
un pouvoir énorme. Ce n'est pas décisionnel. C'est un
comité consultatif.
Mais si on veut, comme je l'ai dit tout à l'heure, lui en donner
davantage, notre problème est le suivant: L'archevêque de
Montréal était aux prises avec un problème
d'honnêteté, dans le fond. Il y a quand même un certain
nombre de catholiques, à Montréal. Il y en a quand même un
certain nombre, dans le milieu, qui lui font confiance. Alors lui, s'il est
d'accord là-dessus, il se trouvera à sécuriser les parents
catholiques, à Montréal, ou les gens qui veulent avoir une
éducation catholique pour leurs enfants. Il les sécurisera,
sûrement. Y a-t-il quelqu'un de responsable, prévu dans ce projet
de loi, du maintien du développement? Y a-t-il un réseau
décisionnel approprié? Y a-t-il des mécanismes de gestion
appropriés en ce qui concerne la direction des écoles
catholiques? A l'examen, nous concluons que la réponse est non.
Deuxièmement, si on essaie de donner plus de pouvoirs au
comité catholique, on aboutit à la quadrature du cercle,
c'est-à-dire à une autorité bicéphale. Je comprends
très bien que les commissaires qui seront élus doivent avoir le
pouvoir décisionnel. Si vous mettez un comité, à
côté, qui en a presque autant, ou la moitié, ou le quart,
vous vous situez dans une structure de conflits.
C'est pourquoi nous ne proposons pas des pouvoirs nouveaux au
comité confessionnel. Nous proposons plutôt que dans un esprit de
continuité et de progrès, on maintiennne les commissions
scolaires confessionnelles pour que, pendant la période
d'expérimentation, on puisse voir si, premièrement, les parents
seront capables d'exercer une influence ou auront été
amenés à exercer une influence qui leur donne un rôle ou
une prise réelle sur l'école, pour pouvoir, également
parce que ce n'est pas directement en cause donner des
réponses à des questions qui n'en ont pas, actuellement:
Qu'est-ce qu'une école catholique? Officiellement, je peux vous
répondre par les règlements du comité catholique. Mais
beaucoup de gens se disent: Dans le cadre actuel, ces règlements ne sont
pas applicables. Est-ce que les parents ont le choix, actuellement, de
l'école catholique ou non? Toutes les écoles sont pratiquement
catholiques dans le moment. Est-ce que les maîtres c'est la grande
question ont le choix de dire: Moi, je veux enseigner dans une
école où il y a une équipe d'éducateurs qui
tâchera, sous l'inspiration de l'évangile, d'aider les jeunes
à bâtir leur échelle de valeurs, ou, j'aime mieux aller
enseigner dans une autre école?
M. SAINT-PIERRE: Justement, en reconnaissant le pluralisme religieux et
en permettant l'école neutre je l'ai déjà dit dans
une allocution, je ne sais pas si vous partagez ce point de vue
n'aide-t-on pas à rendre plus vivante et à fortifier
l'école catholique puisque là, l'école catholique
présuppose un choix de la part des parents et un choix, cela
présuppose une acceptation d'une série d'états de choses
qui seront différents dans l'un ou dans l'autre? Alors qu'actuellement,
sous le couvert d'un système qui, à la fois dans les structures
et dans les écoles, se dit catholique, on convient qu'il y a un
élément qui n'accepte pas cette décision fondamentale et
qui rend difficile d'établir un climat qui pourrait correspondre
davantage à une définition véritable de l'école
catholique.
M. LAFONTAINE (Jean-Marie): C'est sûr que l'article qui
prévoit les écoles neutres va aider à clarifier les
choses. Mais, il faut dire que ce n'est pas encore fait. Il faut dire, aussi
c'est pour cela qu'on parle de progressif, d'expérimentation
que le comité catholique du conseil supérieur a
essayé d'élaborer un mécanisme de reconnaissance des
écoles. L'an dernier, il a été obligé de
l'abandonner, parce que difficile, compliqué, etc. Alors, on se dit: Il
y a une difficulté. Peut-être qu'en réalisant ce qu'il y a
moyen de réaliser aujourd'hui et en faisant confiance un peu à
l'expérience qui va suivre, on saura comment sortir de ces
difficultés-là. Peut-être qu'on saura quelle clarification
a apporté l'école neutre, quand elle sera
créée...
M. SAINT-PIERRE: Avant de laisser ce point du comité
confessionnel, vous dites: Il n'y a pas de pouvoirs, on laisse beaucoup de
questions, il y a toujours ce dilemme pour le législateur, savoir si on
tente de mettre les points sur les "i" et de tracer exactement le mandat
très précis, cela devient un petit peu restrictif et les gens
diront:
On ne peut pas s'occuper d'autre chose que ce qui est dans la loi.
L'autre dilemme est de mettre ça assez général,
espérant que, par usage, les gens trouveront des mécanisme pour
délimiter. Je me demandais: Est-ce que l'archevêque aurait des
suggestions concrètes d'un mandat qui pourrait se retrouver
textuellement dans un texte de loi de l'école catholique, sans faire
abstraction d'une philosophie, tenant compte d'une commission scolaire
unifiée? Est-ce que vous avez quelque chose de précis que vous
aimeriez recommander comme mandat d'un comité confessionnel, compte tenu
de l'élection d'un an que vous soulevez? Je vous le déclare
à peu près immédiatement sous réserve que quelqu'un
me prouve la contraire, nous serions favorables maintenant à trois ans.
On avait prévu un an parce qu'il y a tellement de changement, de
mobilité des gens d'un quartier à l'autre qu'on pensait que
peut-être qu'il faudrait le revoir annuellement mais trois ans, ça
semble se dégager comme un consensus.
Il y a un point, Monseigneur, que j'aimerais soulever, si vous
permettez, dans le projet de loi 28, au sujet des commissions scolaires
unifiées et l'existence à Montréal de minorités
à la fois linguistiques et religieuses: il se pose ce problème:
On dit qu'il ne faut pas que la majorité impose ses vues, qu'il faut
respecter, donner des garanties aux minorités pour leur permettre de
survivre. Mais lorsqu'on aborde la question catholique, la question religieuse
catholique, se pose cette question que j'aimerais vous soumettre: Est-ce que,
finalement, l'entité catholique n'est pas majoritaire? Et, lorsqu'on
examine la viabilité de l'école catholique, en plus de
considérer comme vous l'avez fait les garanties religieuses que nous
avons mises au plan du comité confessionnel, au plan du responsable des
questions religieuses, de la consultation pour le principal, compte tenu de son
influence pour l'école catholique, est-ce qu'en plus de ça, il ne
faut pas examiner aussi sur le plan des statistiques et là vous
les connaissez plus que moi le fait que, dans la très grande
majorité des cas, ce sont les commissaires de foi catholique qui sont
majoritaires? En d'autres termes, je comprendrais tantôt que les juifs
puissent être inquiets puisqu'eux, définitivement, seront
minoritaires et que les protestants, dans bien des endroits, seront
définitivement minoritaires. Mais lorsque j'analyse les statistiques, je
me repose la question: Est-ce que le groupe catholique n'est pas un groupe
majoritaire et est-ce que les commissaires unifiés ne sont pas, somme
toute, dans bien des cas, des commissaires catholiques?
M. LAFONTAINE (Jean-Marie): A ce moment-là, voyez-vous si je fais
la comparaison avec la loi 27, je pense que, selon la loi 27, les commissaires
qui auront été élus pour diriger les commissions
catholiques auront été élus en fonction d'un mandat de la
population. Il y aura une liste et ce seront les catholiques qui diront: Nous
voulons des commissaires catholiques pour diriger les écoles
catholiques. Tandis que, dans les commissions scolaires unifiées,
à ce moment-là, c'est indistinct. Personne ne reçoit un
mandat précis par rapport à l'aspect de l'éducation
chrétienne.
M. SAINT-PIERRE: Mais, compte tenu des statistiques, on peut s'attendre
que dans pratiquement dix des commissions sur onze, il y en a une
où c'est assez surprenant, c'est la commission no 2, qui tombe dans
Outremont et qui n'est pas à majorité catholique la
majorité des électeurs sont catholiques.
Présumément, on pourrait penser que la majorité des
commissaires unifiés sont des commissaires catholiques et que, s'il y a
là un problème de minorité religieuse, c'est pour les
non-catholiques.
M. LAFONTAINE (Jean-Marie): Je comprends, mais je reviens
là-dessus. Si je compare la loi 27 au projet de loi 28, dans la loi 27,
il y a quelqu'un qui recevra un mandat spécifique pour diriger les
écoles catholiques et dans le projet de loi 28, il y a sûrement
des catholiques, c'est impossible qu'il n'y en ait pas sur 165, je crois, mais
ils n'auront pas reçu de mandat à cet effet.
M. SAINT-PIERRE: En page 4 de votre mémoire, vous dites que le
Montréal métropolitain est un milieu socio-culturel pratiquement
identique à celui du reste de la province et vous vous demandez pourquoi
la différence entre les lois 27 et 28. Je m'en doute un peu. Est-ce que,
dans Montréal, il n'y a pas un milieu socioculturel qui est passablement
différent du milieu qu'on rencontre à l'extérieur de la
province?
M. LAFONTAINE (Jean-Marie): Oui, mais là-dessus, j'aimerais,
étant donné que j'ai affirmé ça tout à
l'heure, faire une correction. Je n'ai pas comparé au reste de la
province. Vous avez Montréal, à côté la rive sud,
vous avez l'île Jésus, dans le même diocèse. A ce
moment-là, vous allez avoir une population dont les
caractéristiques socio-culturelles sont à peu près les
mêmes, qui vont être sous l'empire de deux lois différentes
à ce point de vue-là. C'est ça que j'ai voulu dire en
parlant de la rive sud: Longueuil, Saint-Lambert et le reste, c'est très
différent de Montréal.
M. SAINT-PIERRE: Enfin, sur les objectifs, je sais qu'il y a
sûrement des groupes ici il est inutile de les mentionner
qui ont trouvé que nous donnions trop de garanties aux minorités
religieuses. Inutile pour moi de vous retracer certains des mémoires qui
ont été mentionnés. Personnellement, j'apprécierais
que l'archevêché puisse concrètement nous dire, à la
fois pour le terme "question religieuse", et ses relations avec les
commissaires, et son mandat. La personne responsable qui a dit: Moi, je peux
bien, je ne voudrais pas abuser de mes responsabilités, je suis bien
prêt à l'appeler Cardinal. Pour la question religieuse si
ça peut aider dans le débat, j'admets que le terme "question
religieuse," est très vague, mais c'est de ça que le type va
s'occuper.
Maintenant, je ne sais pas, mais si monseigneur avait des
recommandations tant sur le
terme que sur les relations et sur le mandat du comité
confessionnel, j'apprécierais de les recevoir.
M. LAFONTAINE (Jean-Maire): Là-dessus, je vais vous faire part
des difficultés. Le type qui s'occupe des questions religieuses, si vous
l'appeliez directeur de l'enseignement catholique, au moins, il aurait une
responsabilité au niveau des cadres. A ce moment-là, on
défait votre article 589 où vous avez une direction
générale, un directeur adjoint francophone et anglophone. Je peux
bien vous faire la suggestion, mais si vous me demandez comment cela va
fonctionner, je vais vous dire que je ne le sais pas.
Deuxièmement, en ce qui concerne les comités, j'ai
mentionné tout à l'heure qu'on pourrait peut-être essayer
de leur donner plus de pouvoirs, mais est-ce que cela ne posera pas de
problèmes par rapport aux responsabilités propres d'un
commissaire? Si vous me le permettez, je vais vous donner un exemple.
M. SAINT-PIERRE: Vous avez de bonnes questions que, nous aussi, nous
avons à résoudre. Si vous pensez que nous en avons donné
trop aux commissaires et pas assez aux comités confessionnels, compte
tenu qu'aux comités confessionnels ce sont des gens qui sont catholiques
et élus exclusivement par des catholiques, et les prérogatives du
bien commun étant sauvegardées, je suis bien prêt à
déplacer un peu le rôle. Je vous demandais
concrètement...
M. LAFONTAINE (Jean-Marie): Concrètement, nous suggérons
que ce qui peut être fait immédiatement soit fait
immédiatement. Pendant la période d'expérimentation, que
l'on maintienne les commissions scolaires confessionnelles. Je vais me
référer à un mémoire qui vous a été
présenté, celui de la CECM, où on a introduit un directeur
de pastorale qui doit s'assurer que les commissaires prennent les dispositions
nécessaires pour respecter intégralement les droits. On peut,
encore là, interpréter cette suggestion. Je ne veux pas discuter
les mémoires des autres, mais, tout simplement, donner cela à
titre d'illustration.
On peut interpréter cette suggestion comme un rôle de
vigilance, par exemple. A ce moment-là, il fera ce qu'il pourra. Encore,
on peut interpréter cela d'une façon très stricte et on se
dit: Il va donner des ordres aux commissaires, lui, s'il doit s'assurer que les
commissaires prennent les dispositions nécessaires pour que les droits
soient intégralement respectés. Quand je lis cela, je me dis que
c'est une illustration de la difficulté de respecter à la fois
l'économie du projet de loi et, ensuite, d'avoir un réseau de
décisions et de responsabilités approprié pour assurer le
maintien et le développement des écoles catholiques.
C'est pourquoi, incapables de faire la quadrature du cercle dont je
parlais, nous nous disons: Pendant la période d'expérimentation,
maintenons, les commissions scolaires confessionnelles.
M. SAINT-PIERRE: Monseigneur, c'est peut-être difficile dans le
texte, mais, compte tenu des clarifications apportées sur la question
des garanties religieuses, les comités confessionnels, les questions
religieuses et d'autres choses semblables, deuxièmement, d'une
suggestion fort intéressante d'étaler sur une plus longue
période la phase de transition et de mettre en place le conseil, les
comités de parents et peut-être de démarrer plus tard au
niveau des commissions scolaires, dois-je comprendre parce que là
on parlait de mettre au point le type de commissions scolaires qu'un sain
réalisme commandera que monseigneur Grégoire
considère que, cette période de transition étant plus
grande et les garanties étant plus précises, il est possible
d'avoir une école catholique qui offre toutes les garanties dans le
cadre d'une commission scolaire unifiée?
M. LAFONTAINE (Jean-Marie): La réponse à cela, en un mot,
est affirmative, dans le sens que ce qu'un sain réalisme pourra nous
suggérer, après que l'on aura essayé de donner des
réponses aux questions sans réponse, cela pourra être une
commission scolaire unifiée, d'autant plus que l'on aura
l'expérience, si vous voulez, d'une collaboration des divers types de
familles spirituelles au niveau du conseil de l'île.
En d'autres termes, la position de l'archevêque de Montréal
n'est pas une thèse; c'est la position dictée par la prudence
d'un pasteur. Ce n'est pas une thèse pour dire que, de toute
éternité, il sera nécessaire d'avoir des commissions
scolaires confessionnelles. Ce qu'il y a d'important et cela peut
évoluer c'est qu'il y ait un réseau de
responsabilités apte à assurer l'aptitude de l'école
à contribuer à la formation chrétienne des jeunes. Pour
illustrer ma pensée: si, par exemple, vous avez, d'une part, les
comités d'écoles qui sont très actifs et qui sont
écoutés et si, d'autre part, vous avez une évolution
scolaire qui a pour effet de transporter, au niveau de l'école et de sa
direction, un ensemble de décisions qui sont prises ailleurs,
actuellement comme, par exemple, la sélection des maîtres,
le choix des manuels, les options à prendre dans tout ce que les
programmes peuvent offrir, à ce moment-là on se dira: C'est au
niveau de l'école que peut s'assurer la confessionnalité.
Actuellement, quand on considère que les commissions scolaires
ont le pouvoir d'engager des professeurs, de présenter des budgets pour
la pastorale, pour l'enseignement religieux et aussi... Prenez simplement des
cas très concrets comme celui-ci, où on peut faire un effort
considérable de renouveau catéchétique, ça suppose
que les martres puissent se rencontrer et étudier ce renouveau
catéchétique. Mais si, par exemple, l'administration et les
règlements qui sont là interdisent cette rencontre des
maîtres ou ne les rendent pas faciles, il y a quelqu'un en haut pour
prendre les décisions de ce genre.
En définitive, ce n'est pas une thèse, c'est
une position dictée par la prudence et là où
l'impact des décisions sur la qualité catholique de
l'école pour ceux qui en veulent se fera, c'est là qu'il faudra
que des gens aient des responsabilités appropriées. C'est donc
dire que l'expérience peut nous orienter vers beaucoup de choses, y
compris l'application des thèses de Ulich sur "Deschooling America" et
l'on verra à ce moment-là où il faut faire porter nos
efforts.
M. SAINT-PIERRE: Monseigneur, c'est mon dernier point, après
ça, je vais me taire. Je trouve qu'il serait sensé
également de ne pas perdre de vue et je suis certain que dans
votre cas vous êtes au courant les pouvoirs de
réglementation je ne veux pas renvoyer la balle à d'autres
très vastes que possède le comité catholique du
Conseil supérieur de l'éducation. Vous les connaissez mais, pour
d'autres parlementaires, je mentionne ces pouvoirs, à l'article 22 de la
Loi du Conseil supérieur de l'éducation: "Faire des
règlements pour reconnaître les institutions d'enseignement
confessionnel comme catholiques": J'imagine tantôt qu'il va y avoir des
règlements pour savoir ce qu'est une école catholique.
"Reconnaître comme catholiques, "selon le cas", c'est donc un processus
de reconnaissance des institutions d'enseignement qui veulent se dire
catholiques. Troisièmement: "Faire des règlements concernant
l'éducation chrétienne, l'enseignement religieux et moral, le
service religieux dans les institutions d'enseignement reconnues comme
catholiques", ça déborde le pouvoir du ministre. "De faire des
règlements et là c'est très important sur la
qualification du point de vue religieux et moral du personnel dirigeant et
enseignant dans ces institutions d'enseignement; d'approuver au point de vue
religieux et moral les programmes, les manuels et le matériel
didactiques pour l'enseignement non pas religieux
général dans ces institutions d'enseignement."
Je reconnais qu'il y a des difficultés au sein du comité
catholique, le gouvernement est complètement étranger, parce
qu'on n'est pas majoritairement représenté au sein de ce
comité mais je me pose cette question: Est-il possible que les membres
du comité catholique qui pourraient expliquer ces difficultés
aient attendu que le gouvernement prenne ses responsabilités au niveau
des nouvelles structures qui avaient déjà été
annoncées, les projets de loi 27 et 28, et que peut-être, dans un
deuxième temps, compte tenu de ces vastes pouvoirs de
réglementation que possède le comité provincial
catholique, il soit beaucoup plus à l'aise pour formuler une
réglementation qui pourrait répondre à certaines des
craintes des groupes catholiques ou de l'archevêque?
M. LAFONTAINE (Jean-Marie): M. le ministre, ça fait partie
justement des questions qui, à mon avis, sont encore laissées
sans réponse. C'est vrai que le comité catholique du conseil
supérieur a des pouvoirs de réglementation importants; c'est vrai
aussi qu'il a fait des règlements; c'est vrai qu'ils sont très
difficiles d'application à cause du contexte dans lequel on vit et
à cause justement des réponses qu'on n'a pas encore
apportées à un certain nombre de questions. Alors, l'influence du
comité catholique et son rôle, c'est encore, à
l'expérience, un peu plus avancé; peut-être qu'en modifiant
le contexte, en clarifiant davantage les choses avec les écoles neutres,
par exemple, on pourra voir ce que ça peut avoir comme impact. De
là, la suggestion d'une restructuration progressive.
M. LE PRESIDENT (Pearson): La parole est maintenant au
député de Bagot. J'espère qu'il n'y aura pas de conflit
majeur entre le cardinal et son évêque.
M. CARDINAL: Monseigneur, un commentaire avant de poser des questions.
Dans la lecture de votre mémoire, de l'avis de Mgr Grégoire, vous
avez sauté le paragraphe 3 à la page 3. Vous me permettrez de
faire une mise au point pour que la vérité soit complète.
Dans ce paragraphe 3, que vous n'avez pas lu mais que j'ai lu et qui m'a fait
un petit peu sursauter, il y a la phrase suivante: "D'ailleurs, notre
mémoire de février 1970, qui exprimait cette position, n'a pas
été l'objet, il y a peut-être une mauvaise
rédaction là, je ne sais pas de la part des
autorités concernées, d'une étude dont les
résultats nous seraient parvenus."
Permettez-moi de rappeler les faits. En 1970, au mois de février,
quand Mgr Grégoire a donné son avis, il n'y a pas eu de
représentant de votre commission ou de votre office, ni de la
hiérarchie, devant la commission parlementaire qui siégeait
depuis le mois d'octobre 1969.
Le mémoire a été reçu au ministère de
l'Education, pour autant que ma mémoire est bonne, vers la fin de
février 1970. Il a été immédiatement remis aux
officiers du ministère ce n'est pas la personne qui vous parle
qui veut se défendre, mais elle veut défendre les officiers du
ministère qui étudiaient tous les mémoires qui
arrivaient. Un système avait été établi; il en est
arrivé environ 102. Le secrétaire de la commission parlementaire
pourrait me corriger et peut-être dire que c'est 109. Donc, votre
mémoire, comme les autres, a été étudié.
Preuve qu'il a été étudié, d'ailleurs; dans le
projet de loi no 28 on a ajouté des garanties qui n'existaient pas dans
le projet de loi no 62.
Je suis heureux d'une part que vous n'ayez pas lu ce texte, mais d'autre
part je me demande pourquoi on a mis cette phrase dans un avis qui est par
ailleurs très serein, phrase qui semble être un reproche à
l'égard du ministère de l'Education et non pas d'un ministre de
l'Education en particulier. Ce mémoire, comme les autres, je puis vous
l'assurer j'étais là à ce moment, les
élections ont été déclenchées, je le
rappelle, le 12 mars 1970 et les mémoires ont
continué à arriver quand même par la suite a
été étudié par les officiers du ministère de
l'Education, au moment où j'étais là comme après
mon départ, comme ils l'ont fait pour les autres.
Mais j'ajoute, pour que la vérité soit entière,
qu'aucun des mémoires reçus n'a eu de réponse parce qu'ils
étaient étudiés en commission parlementaire et que la
réponse devait venir en deuxième lecture, comme cela se fait,
selon la procédure, au moment où le gouvernement dépose un
projet de loi révisé après étude en commission
parlementaire. Ce qui est un cas très exceptionnel. A ma connaissance,
cela ne fait que quatre fois en quatre ans que des projets de loi sont
étudiés avant la deuxième lecture pour que le gouvernement
puisse justement entendre les intéressés et les modifier pour
partir de documents de travail et en faire de véritables projets de loi
au sens juridique du terme.
Enfin, me permettra-t-on d'ajouter, avec tout le respect que je vous
dois, que je suis un petit peu malheureux que cela ait été mis
là.
Deuxième commentaire, vous avez parlé tantôt de la
division des diocèses. Cet argument ne me frappe pas beaucoup parce que
c'est un argument qui peut nous amener loin. Les diocèses, si on les
place sur le plan religieux comme il n'y a pas de concordat entre le
Québec ou le Canada et Rome n'existent pas juridiquement pour
l'Assemblée nationale, ni pour les municipalités, ni pour les
commissions scolaires. Avec le résultat, d'ailleurs, que vous avez des
diocèses qui chevauchent par exemple les provinces d'Ontario et de
Québec avec tous les problèmes que ceci pose au point de vue
linguistique; qui chevauchent le Labrador qui appartient on ne sait
à qui, cela dépend d'une décision du Conseil privé
et peut-être du rapport Dorion et le Québec; qui
chevauchent, peut-être, je peux me tromper, le Nouveau-Brunswick et le
Québec. Quand on parle de diocèses dans la région de
Montréal, vous avez parfaitement raison dans les faits et dans le droit
canonique aussi de dire que vous avez des situations où dans un
diocèse donné les lois différentes s'appliqueront.
Evidemment, je ne vois pas comment un gouvernement d'une juridiction
donnée, qui a un territoire plus ou moins précis à cause
du Labrador, puisse tenir compte prioritairement de la division des
diocèses, parce qu'à ce moment vous avez un drôle de
phénomène qui se présente et qui s'est
présenté dans la constitution des collèges d'enseignement
général et professionnel. La question qui se posait était
de savoir si c'étaient les comtés, les circonscriptions
électorales ou les diocèses qui avaient le droit d'avoir un
collège d'enseignement général et professionnel. C'est que
vous avez alors deux points de vue différents: le point de vue de l'Etat
qui, lui, a ses divisions juridictionnelles et le vôtre, car vous avez
aussi les vôtres. Votre objection dans l'ordre socio-économique
est juste, mais jusqu'à un point X que je ne peux pas évaluer.
Enfin, je connais très bien l'île Jésus comme l'île
de Montréal, pour avoir vécu dans les deux endroits, et,
évidemment, même dans l'île Jésus, même dans ce
qui s'appelle Laval aujourd'hui, la situation est singulièrement
différente de ce qu'elle est dans ce que l'on pourrait appeler le "grand
Montréal" et ce que les anglophones appellent The Greater Montreal.
Ceci dit, pour détruire non pas votre thèse vous
avez dit vous-même que ce n'était pas votre thèse
mais une objection qui me paraît être marginale.
Ma dernière remarque est celle-ci. C'est une question. Votre
mémoire est complété par un document de travail qui, pour
nous, porte le numéro 18 A et qui pose une série de questions.
Là, je pense que je rejoins le ministre. Ce que nous souhaiterions, dans
le fond, cela ne serait pas tellement que l'on pose des questions aux
parlementaires, parce qu'une loi est présentée par un
gouvernement, mais elle est adoptée par l'Assemblée nationale.
Nous sommes tous impliqués et en notre conscience et en tant que
mandatés par une circonscription donnée. Je reviens à ce
que disait le ministre tantôt. Je pense qu'il serait utile que l'on nous
dise: Nous avons non seulement une position dictée par la prudence
ce qui est normal pour la hiérarchie ecclésiastique
mais nous sommes disposés à faire au ministère de
l'Education, au gouvernement ou à l'Assemblée nationale je
ne sais pas, mais vous avez toute la liberté des suggestions
d'ordre concret qui permettraient justement d'amender le projet de loi no 28,
si vous êtes d'accord sur les principes. Cela semble découler du
premier alinéa de votre projet où vous semblez d'accord avec les
objectifs qui étaient ceux, d'ailleurs, du projet de loi no 62
présenté au mois d'octobre 1969.
Evidemment, je vous fais ces remarques avec tout le respect qui s'impose
dans les circonstances, mais je ne pouvais pas quand même
m'empêcher, si vous voulez, en toute honnêteté
intellectuelle, de le souligner.
M. LAFONTAINE (Jean-Marie): D'abord, je reviens sur votre observation
concernant les diocèses. Vous dites que l'argument ne vous frappe pas
beaucoup. Il ne me frappe pas, non plus, remarquez. D'abord, je vous ferai
remarquer qu'il n'est pas dans le texte.
M. CARDINAL: Mais vous l'avez dit.
M. LAFONTAINE (Jean-Marie): C'est pour illustrer que j'ai dit: Dans un
même diocèse. Ce qui est le plus important et ce que j'ai
essayé d'indiquer, c'est que, pour une population qui a à peu
près les mêmes caractéristiques culturelles et religieuses
je parle de l'île Jésus, de Laval et de Montréal,
qui est différente, mais différente dans ses parties à
elle dans l'ensemble, on va avoir deux systèmes.
L'affaire du diocèse, c'est sûr, c'était seule-
ment à titre d'illustration, parce que nous sommes en relation
avec des prêtres à l'île Jésus, avec des laïcs,
etc. Ils nous disent : Nous autres, nous sommes dans le même
diocèse. C'est si peu important que cela n'a pas été
mentionné dans le texte.
M. CARDINAL: Non, c'est important quand même, si vous me permettez
de vous interrompre. Ici, je peux révéler un fait qui n'est pas
confidentiel puisqu'il n'a jamais été devant le cabinet, mais un
fait que connaissaient les sous-ministres du ministère de l'Education,
quand j'y étais. J'avais posé la question suivante et,
aujourd'hui, je la soumets au ministre. Je ne lui demande pas de me
répondre; je la lui soumets à titre de réflexion. Je me
suis demandé: Pourquoi faisons-nous la restructuration scolaire de
l'île de Montréal et non pas la restructuration scolaire de
l'île Jésus? Notre position je l'ai clairement
indiqué au début de cette commission parlementaire c'est
que le projet de loi 28 aurait dû précéder le projet de loi
27, qu'on aurait dû procéder à la restructuration scolaire
de l'île de Laval, qui est déjà restructurée sur le
plan urbain, et qu'ensuite on aurait dû procéder au projet de loi
27, ce que j'ai dit en deuxième lecture, d'ailleurs, lors de
l'étude du projet de loi 27. Sur le fond de la question, nous ne sommes
pas en désaccord; c'est sur le libellé de l'affirmation.
M. LAFONTAINE (Jean-Marie): Je pense que nous sommes d'accord pour dire
que nous ne vous demandons pas de tenir compte des divisions paroissiales,
diocésaines ou des zones de pastorale pour la restructuration scolaire.
Ce n'est pas du tout cela. Si j'ai dit cela en fin de phrase, c'est à
titre d'illustration qui peut frapper un certain nombre de gens, non pas comme
argument primordial, mais comme un autre type d'illustration.
Quant à votre première remarque, je dirai, d'abord, que je
n'ai pas lu ce paragraphe-là, mais ce n'est pas à dessein. Il y
en a un certain nombre d'autres que je n'ai pas lus. Nous estimons c'est
dit, d'ailleurs, d'une façon assez polie, je l'espère; du moins,
cela voulait être dit poliment vu qu'après avoir
consulté environ 6,000 personnes, l'archevêque a fait parvenir un
avis et proposé que, dans une période d'expérimentation,
il y ait encore des commissions scolaires confessionnelles, quitte à
voir, après, qu'il aurait été normal qu'on puisse dire au
chef spirituel du diocèse de Montréal: Bien, voici pourquoi votre
suggestion ne peut pas être appliquée. Je tiens compte des
circonstances, il y a eu la période électorale, etc.
Deuxièmement, comme nous sommes présents ici, nous aurions aussi
été présents à la commission parlementaire qui a
étudié le bill 62 si les travaux n'avaient pas été
interrompus pour des raisons que vous connaissez mieux que moi.
M. CARDINAL: D'accord. Sur la dernière question que j'ai
posée, et que le ministre a posée, est-ce que l'archevêque
de Montréal est disposé à faire des suggestions
concrètes et précises?
M. RIVET: Dans son mémoire, l'archevêque a relevé ce
qui lui paraissait les points faibles de la loi. Pour résumer ces points
faibles, quitte à employer une expression un peu forte, c'est que la
confessionnalité est perçue comme une chose marginale. La loi est
telle chose et, pour compléter la loi, on fait appel à des
organismes extérieurs ou encore à des forces de pression ou
encore à la bonne foi des gens. Je pense qu'on change de palier à
ce moment-là. Si une loi a une force juridique, elle doit pouvoir dire
des choses qui sont à l'intérieur, si elle commande. Tous les
compléments qui sont ajoutés, disons comités
confessionnels, pressions des parents, responsabilités des questions
religieuses, apparaissent, à notre regard en tout cas, comme des choses
surajoutées, extérieures et qui sont là comme vigilance
mais non pas comme centre de décision. Alors, la faiblesse de la loi, au
point de vue que nous défendons, c'est qu'il n'y a pas, pour reprendre
les propos de Mgr Lafontaine, à l'intérieur même de la
structure ce réseau de décision, ce réseau
d'autorités qui correspond aux désirs d'une école qui,
à la base, est catholique.
Alors, tout ce que nous pourrions ajouter est encore d'ordre de la
pression, de la complémentarité mais non pas de l'ordre de
l'essence.
M. CARDINAL: Si vous permettez, ce que je vais dire est dit sans aucune
mauvaise intention. Ce qui me surprend, ce sont diverses expériences
passées que j'ai eu à vivre et l'expérience
présente, depuis deux ans, quant à ce projet de
restructuration.
Je sais très bien que c'est l'archevêque de Montréal
qui a laïcisé l'Université de Montréal et que,
maintenant, les prêtres reçoivent leur formation sur le campus de
cette université laicisée alors qu'ils doivent être
eux-mêmes ceux qui iront ensuite faire la pastorale au sein de la
population. L'on pourrait me répondre que le niveau universitaire est
différent du niveau élémentaire et du niveau secondaire.
Mais, encore, ce qui me frappe, c'est l'attachement aux structures, alors que
nous avons entendu de nombreuses personnes qui se sont plaintes de la mauvaise
qualité de l'enseignement religieux dans un système où les
structures sont entièrement religieuses. Cela me pousse à me
poser énormément de questions. J'admets, comme le ministre l'a
dit tantôt d'ailleurs et je l'avais dit à l'occasion du projet de
loi no 62, que dans un domaine semblable où le changement est radical,
je l'avoue, il y a lieu d'être prudent et de procéder par un
certain nombre d'étapes. Par conséquent, par exemple, le
comité provisoire devrait peut-être établir, comme
quelqu'un l'a suggéré ce matin, son propre
échéancier plutôt que de le voir établi par
quelqu'un qui serait lointain dans la vieille capitale du Québec.
C'est-à-dire que je cherche, dans tout ceci, en toute
sincérité, une cohérence là, on pourrait
s'en aller très loin dans le système de l'Eglise actuelle;
au cours des dernières années, nous avons vu, pour toutes sortes
de raisons, et je ne veux pas développer un débat ici, des
institutions privées se laiciser elles-mêmes et nous savons qu'il
y a une majorité de parents qui veulent que leurs enfants aillent dans
des écoles catholiques. Mais j'ai l'impression, après de
très nombreux contacts avec la population de Montréal, soit dans
des conférences, dans des colloques, soit à la radio
comment traduire "hot lines", je ne le sais pas, je n'ai pas encore
retrouvé d'expression...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Les lignes ouvertes.
M. CARDINAL: ... les lignes ouvertes, si vous voulez; ce n'est pas tout
à fait exact malgré le respect que j'ai envers mon
collègue de gauche...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est que la langue anglaise est plus
forte.
M. CARDINAL: Ces contacts directs m'ont fait constater que les gens,
voulant quand même ceci, ne sont pas satisfaits des structures qui
devraient garantir cela présentement. Alors, c'est pourquoi, comme le
gouvernement et en tant que législateur, je suis obligé de
m'interro-ger assez longuement. C'est pourquoi, au début, j'ai dit au
ministre qu'il fallait prendre du temps, non pas pour repousser aux calendes
grecques ce projet de loi, mais pour l'étudier très
sérieusement. C'est purement dans ce sens que j'ai fait ces
commentaires, ces remarques. J'ai posé, tout haut, ces questions que je
me pose à moi-même.
M. LAFONTAINE (Jean-Marie): J'aimerais dire, M. le député,
que quand vous prenez l'exemple de l'université, d'une part, il faut
penser que la charte prévoit que l'archevêque de Montréal
est modérateur des facultés ecclésiastiques.
M. CARDINAL: D'accord.
M. LAFONTAINE (Jean-Marie): En raison de cela c'est discutable
mais c'est un fait il a le pouvoir de nommer deux personnes au conseil
de l'université, lesquelles sont même éligibles au
comité exécutif. Cela a été aussi un fait que des
personnes nommées par l'archevêque, au conseil, ont
été élues à l'exécutif. Cela veut dire que
là où il est question de la faculté de théologie
catholique, qui relève du magistère, la charte prévoit une
autorité au point que sur cette faculté, vous avez deux
autorités: l'autorité du conseil de l'université et
l'autorité du modérateur, qui est l'archevêque de
Montréal, pour ce qui le regarde.
Il est sûr que nous le souhaitons comme vous. L'archevêque
de Montréal n'a pas du tout l'intention d'imposer des écoles
catholiques à une population qui n'en veut pas. Par conséquent,
s'il y avait un recensement pour fins scolaires, nous pourrions savoir un peu
plus, un peu mieux, ce que les parents veulent, etc. Mais ce qu'il y a de
certain, c'est qu'avec les moyens dont nous disposons, en 1970 il y a eu une
consultation à laquelle ont participé 6,000 personnes.
Ce qu'il y a de certain, aussi,... Je peux vous faire part,
brièvement, d'une expérience personnelle. Comme membre de la
commission Du-mont, qui a été mise sur pied par les
évêques, j'ai fait le tour de la province avec mes
collègues. Il n'y a pas une séance dans beaucoup
d'endroits, nous nous y sommes rendus trois ou quatre fois où les
gens ne nous ont pas parlé des problèmes scolaires, en exprimant
à leur façon comme je m'exprime à la mienne
leurs angoisses et aussi leur désir d'avoir des écoles
catholiques le plus souvent pour leurs enfants.
Maintenant, je ne peux pas vous donner les résultats d'un
recensement qui aurait été fait pour fins scolaires puisqu'il n'a
pas été fait.
M. CARDINAL: Vous admettez avec moi que, même dans la situation
actuelle où il y a des structures confessionnelles, les gens se
plaignent de l'enseignement religieux, même si on ne fait pas le
recensement.
M. LAFONTAINE (Jean-Marie): Cela fait partie de l'ensemble des questions
dont j'ai parlé, questions qui sont sans réponses. C'est
qu'actuellement, on pourrait nous dire: Vous avez, dans les écoles
catholiques, des professeurs qui ne croient pas à l'école
catholique. Je suis absolument convaincu de cela. Je sais que c'est vrai. Vous
ne pouvez pas savoir quelle est l'ampleur du phénomène. Vous avez
aussi, dans ces écoles, des enfants dont les parents veulent
peut-être les voir ailleurs. Cela doit être sûrement vrai
mais je ne sais pas l'ampleur du phénomène. Il faut dire que les
gens n'ont pas le choix, non plus. Actuellement, les gens n'ont pas le choix.
Les écoles de la CECM, pour prendre cet exemple, sont confessionnelles
par définition.
Le jour où on aura des écoles pour autres, pour ceux qui
en veulent d'autres, la chose sera clarifiée, peut-être pour les
maîtres comme pour les parents et comme pour les étudiants. A ce
moment-là, on se rendra compte si les catholiques qui veulent des
écoles catholiques pour leurs enfants sont en nombre suffisant pour
qu'on puisse tenir compte de leur avis.
Mais pour le moment je l'ai cité tout à l'heure
peut-être en blaguant le texte de l'alliance nous dit que la
majorité des catholiques montréalais veulent avoir des
écoles catho-
liques. Remarquez que je pense aussi que c'est vrai. Mais si on me
demande de le prouver, je n'ai pas de statistiques ni de recensements qui ont
été faits à cet effet. Mais les contacts que nous pouvons
avoir, parce que nous aussi, nous nous promenons dans le milieu, nous indiquent
qu'il y a sûrement une volonté dont il faut tenir compte, à
ce propos.
M. CARDINAL: Je vous remercie, monseigneur.
M. LE PRESIDENT: Le député de Chicoutimi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Monseigneur, je vous remercie d'être
venu exprimer l'avis de l'archevêque catholique romain de Montréal
sur ce problème du projet de loi no 28. Je me serais toutefois attendu,
de la part de la hiérarchie, à un document qui fût beaucoup
plus positif. Certes, les positions de principe exprimées par Son
Excellence Mgr Grégoire sont fort valables. Elles sont un rappel de ce
que l'on nous a enseigné, ce que nous continuons de croire, nous, les
catholiques romains, mais l'avis que Son Excellence nous a fait parvenir ne
comporte on l'a souligné à plusieurs reprises depuis que
l'on a commencé de vous interroger aucune suggestion
concrète, sinon ce que je pourrais appeler une directive nous demandant
de retarder non pas l'adoption du projet de loi mais de procéder par
étapes.
Le document de Son Excellence, de même que le document de travail
préparé par l'Office de l'éducation de
l'archevêché de Montréal, est tout aussi négatif, en
ce sens que l'on pose des questions.
Permettez-moi, monseigneur, de vous dire que les problèmes qui
vous inquiètent, à l'heure actuelle, inquiètent depuis
longtemps les catholiques du Québec. Beaucoup de catholiques se trouvent
dans un état d'angoisse et, à bien des égards, dans un
état de désarroi religieux et cela est dû au silence trop
prolongé de la hiérarchie catholique sur les sujets fondamentaux
de la foi et de son insertion dans le monde temporel.
Nous avons assisté, depuis dix ans et auparavant, à des
changements majeurs de la société québécoise et
notamment dans le domaine de l'éducation.
J'ai souvenir du débat que l'on avait institué en Chambre
au moment de la création du ministère de l'Education.
J'étais présent en Chambre, non pas en qualité de
député, mais en ma qualité de professeur à
l'université Laval et de conseiller, à ce moment-là, du
chef de l'Opposition. Nous nous attendions à ce que l'épiscopat
nous fil connaître son avis sur la création du ministère de
l'Education dont il était évident qu'il comporterait, à
plus ou moins brève échéance, d'autres changements de
structures de la nature de celles que nous examinons aujourd'hui et qui sont
contenues dans le projet de loi.
Or, tout ce que nous avons appris de l'épiscopat, nous l'avons
appris par la lecture qu'avait faite en Chambre le premier ministre d'alors
d'une lettre de Son Excellence Mgr Roy nous disant qu'il y avait, dans le
projet de loi qu'on discutait alors, ce qu'il appelait le minimum pour assurer
le maintien de l'enseignement confessionnel dans les écoles.
A partir de ce moment-là, nous avons assisté à la
déconfessionnalisation massive d'un ensemble d'institutions, et je donne
au mot "institutions" son sens étymologique. Il y a eu d'autres projets
de loi, il y a eu d'autres événenements qui se sont produits et,
en aucun temps, de façon directe, la hiérarchie catholique ne
nous a fait connaître son opinion précise.
C'est exactement le cas aujourd'hui. L'avis de Son Excellence, Mgr
Grégoire est un ensemble de questions et d'interrogations. Le document
qui a été préparé par votre office est aussi un
ensemble de questions. Or, il existe chez vous, à
l'archevêché de Montréal, comme il existe au
ministère de l'Education, un comité catholique. Je me demande
comment il se fait que le comité catholique et l'Assemblée des
évêques du Québec, face à des mesures
législatives comme celle que nous propose le gouvernement, n'aient pas
pris la peine de préparer, sur le problème spécifique de
la confession dans les écoles, un document beaucoup plus précis,
beaucoup plus systématique, beaucoup plus articulé en vue de nous
suggérer des amendements au projet de loi ou d'indiquer au ministre
quels doivent être les principes qui inspireront la réglementation
afférente à ce projet de loi qui deviendra une loi.
Il n'y a rien dans les documents que vous nous avez fournis qui nous
permette de penser que vous avez fait des recherches, que vous avez, en somme,
pensé à des amendements, que vous avez déjà dans
l'esprit une réglementation qui vous satisferait et répondrait
aux questions que vous vous posez et que vous nous posez. Je suis certain que
vous avez travaillé là-dessus, mais où sont les
résultats de cette recherche? Vous nous posez des questions; vous
n'apportez pas de réponses et vous ne nous fournissez pas d'indications,
sauf des indications doctrinales que nous acceptons.
Je ne vous ferai pas les reproches que vous a faits tout à
l'heure mon collègue, le député de Saint-Jacques. Il est
plus jeune que moi; ce n'est pas un reproche que je lui fais...
M. CHARRON: Merci.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... mais s'il était encore catholique
romain, il aurait quand même lu tout au moins, compte tenu de son
âge, les encycliques des papes Pie XIl, Jean XXIIl et Paul VI sur les
problèmes sociaux, etc., et il aurait été sans doute aussi
attentif à tout ce qui s'est fait dans l'archidiocèse de
Montréal, dans celui de Québec et dans les autres diocèses
pour assurer la présence et la
collaboration de l'Eglise à l'édification d'une meilleure
société et d'un meilleur partage des richesses.
Ce n'est pas là le propos qui nous intéresse. Ce qui nous
intéresse, c'est le projet de loi 28. Je vous dis, monseigneur, que je
suis très heureux de voir que vous avez accepté de venir devant
cette commission nous faire connaître votre point de vue, mais nous ne
sommes pas plus avancés, à la fin de ce témoignage que
vous avez bien voulu nous donner, que nous ne l'étions avant que vous ne
comparussiez. Tout ce que nous savons, c'est que vous entretenez des craintes
au sujet du projet de loi 28. Il nous faudrait beaucoup plus que cela.
Nous sommes et c'est le cas de la majorité des
députés de cette Assemblée des catholiques romains
pratiquants ou des protestants ou des juifs. Même lorsque nous
légiférons en une matière civile qui relève de la
compétence de l'Etat civil, nous nous posons des questions. La question
que je me pose personnellement est: Est-ce que les gestes législatifs
que nous nous apprêtons à poser seront conformes aux principes qui
soutendent l'enseignement religieux que nous avons reçu et les dogmes de
la foi que nous professons? Votre document ne m'apporte, à moi, aucune
lumière, ne me rassure pas sur le plan de ma conscience. C'est un avis
dicté par la prudence que je suis obligé de prendre comme tel.
Comme citoyen du Québec, ayant à oeuvrer au sein de
l'Assemblée nationale, je ne suis pas capable de trouver, dans les
documents que vous nous avez soumis, des propositions concrètes qui nous
permettraient de soumettre au gouvernement des amendements au projet de loi, de
lui soumettre des projets de réglementation, des articles de
réglementation. Rien! Nous n'avons aucun élément, dans les
documents que vous nous avez fournis, qui nous aide à le faire, sinon
certains grands principes de doctrine, que nous ne discutons pas, au contraire,
mais que nous acceptons, lesquels sont d'ailleurs acceptés par la
majorité des gens qui sont venus devant nous.
Il y a une chose qui me frappe. Je crois que vous étiez ici ce
matin quand j'ai interrogé particulièrement l'Association des
commissions scolaires de la région de Montréal, hier la CECM et
ce matin le comité consultatif de la CECM. Ces organismes, qui
représentent quand même une majorité de parents
catholiques, ne semblent pas de l'avis de l'archevêque de
Montréal, Son Excellence Mgr Grégoire. Vous avez poursuivi une
consultation auprès, dites-vous, d'environ 6,000 personnes. Ces
gens-là nous disent avoir aussi poursuivi des consultations. Nous sommes
donc ce soir dans la situation suivante: Qui a raison et sur quoi? Les
lumières que vous nous avez apportées, monseigneur, je suis
obligé de vous le dire avec le plus grand respect, ne nous ont pas
éblouis au point où nos consciences de catholiques romains
pratiquants ou nos consciences de chrétiens soient plus
rassurées.
Je vous formule ces propos avec une certaine hésitation parce que
tout ce qui touche à la foi catholique et à l'Eglise à
laquelle j'appartiens m'est extrêmement cher et je ne voudrais pas que
les adversaires de l'Eglise s'en servent contre l'Eglise catholique
romaine.
Mais permettez-moi de vous dire, monseigneur, que j'ai l'impression que
se poursuit encore dans l'Eglise catholique romaine du Québec et du
Canada, à laquelle j'appartiens, une politique de silence qui dure
depuis plus de dix ans, qui inquiète tous les catholiques. Et je vous
prie très respectueusement de nous soumettre, de grâce, des
propositions concrètes afin que nous puissions voir si nous sommes sur
la bonne voie, si, en légiférant, nous respectons les principes
de l'enseignement religieux que nous avons reçu et si nous
représentons aussi et cela est très important la
population en majorité catholique qui nous a élus. Parce qu'il y
a un grand nombre d'organismes qui viennent ici devant nous et qui se
présentent comme des organismes représentatifs des parents
catholiques, d'associations catholiques, etc., qui nous font des propositions.
Nous les examinons avec beaucoup d'égards mais et je l'ai fait
à plusieurs reprises depuis quelques mois toutes les fois que des
organismes de cette nature sont venus devant nous, je leur ai dit: Je suis
très heureux d'entendre votre point de vue mais combien plus j'aimerais
entendre la voix de la hiérarchie de mon Eglise.
Monseigneur, quand je parle de l'Eglise du silence, je voudrais bien que
l'on s'entende. Je ne vous fais pas le reproche à vous personnellement;
je ne fails pas reproche aux évêques individuellement; je fais ce
reproche aux prêtres, aux évêques, au clergé et
à tous les catholiques y compris les laïcs, parce que nous avons
pratiqué une politique de silence. Et si je parle aujourd'hui, c'est
pour me réveiller moi-même et pour essayer de réveiller
ceux qui ont pendant trop longtemps dormi.
M. LAFONTAINE (Jean-Marie): Vous me permettez de soulever une couple de
points. D'abord, je me réjouis que vous n'ayez pas décidé
de faire des reproches parce que je me demande où ça aurait
été.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Cela ressemble, monseigneur, vous savez, aux
avertissements polis que Bossuet donnait au roi.
M. LAFONTAINE (Jean-Marie): Je crois beaucoup qu'on exagère le
silence de l'Eglise au Québec et même au Canada. Je vais vous
donner des faits concrets. Sur les questions de l'éducation, le cardinal
Léger a fait, à la fin de son règne si je peux
parler ainsi deux interventions importantes auprès de principaux
et de maîtres d'écoles dans la région de Montréal et
ces interventions ont été perçues dans d'autres
endroits.
Deuxièmement, à l'occasion de la Loi du ministère
de l'Education, l'épiscopat du Québec a envoyé une
communication officielle, et pas uniquement une lettre, qui a été
rendue publique et qui a d'ailleurs entraîné des amendements au
projet de loi 60 du temps.
Troisièmement, le cardinal Roy, en présence de tous les
députés, au moment où il a été nommé
cardinal, a fait une allocution qui, encore là, a eu un certain
retentissement et ç'a été sur l'éducation
catholique.
L'archevêque de Montréal intervient deux fois en l'espace
d'un an, sur les problèmes de l'éducation. C'est la même
chose quand on pense aux problèmes sociaux, quand on pense au message de
la Fête du travail et aussi à d'autres textes. Seulement, ce qui
peut arriver, c'est que le style a changé, d'une part. D'autre part,
l'importance des moyens de communication s'est accrue et en même temps
ils ont peut-être donné moins d'importance à ce que disent
les chefs religieux.
C'est pourquoi je ne pense pas qu'on puisse parler de silence. On
pourrait peut-être chercher des raisons pour dire: Comment se fait-il que
ça n'a pas davantage produit d'impact?
Est-ce le style, la façon de parler, l'inattention des gens? Il
pourrait y avoir plusieurs facteurs. Mais le silence, je pense qu'on
l'exagère. Je ne veux pas dire par là que la parole a
été aussi souvent prise qu'elle aurait pu l'être, mais en
matière d'éducation, depuis l'introduction du ministère de
l'Education, l'Assemblée des évêques est intervenue au
moins trois fois; le cardinal est intervenu et aujourd'hui je vous
présente un mémoire qui a l'appui de l'épiscopat du
Québec, comme d'ailleurs le mémoire sur le projet de loi 62 avait
l'appui de l'épiscopat du Québec. Le mémoire sur le projet
de loi 62 était de beaucoup plus élaboré justement parce
que c'était le premier projet de loi. On n'a pas trouvé qu'il y
avait, au point de vue de l'attitude de l'école à contribuer
à la formation chrétienne des jeunes, tellement de
différence entre les deux qu'il faille reprendre tout ce qui avait
été dit là-dedans.
Maintenant, vous dites que c'est un mémoire négatif qui
n'éclaire pas. Moi je pense plutôt que c'est un mémoire
positif. Il faut faire la distinction entre le texte lui-même et l'annexe
que vous avez eue; l'annexe a été faite par un office
diocésain qui pose des questions pour savoir, par exemple, ce que va
faire le type des questions religieuses. La loi ne nous le dit pas. Mais, dans
le document principal présenté par l'évêque et
signé de lui-même, je crois, au contraire, que vous avez une
attitude qui est progressive, qui est ouverte sur l'avenir. Je crois que ce
document dit il ne pose pas tellement de questions
premièrement: Vous voulez prendre des mesures pour
l'égalité des services à Montréal en tenant compte
du rattrapage, nous sommes d'accord; vous voulez que les commissaires soient
élus, nous sommes d'accord; vous voulez qu'une impulsion nouvelle soit
donnée pour la participation des parents, nous sommes d'accord; vous
voulez que l'école catholique continue d'exister; nous sommes d'accord.
La seule question que nous posons, mais nous donnons aussi une suggestion,
c'est: Y aura-t-il des réseaux décisionnels aptes à
maintenir l'école catholique et à la développer? A ce
moment-là, on se dit, en respectant l'économie du bill, la
mentalité de la population et les diversités à
Montréal, la seule chose que nous souhaitons c'est qu'on donne la place
à l'expérimentation. Quand on sait que les principaux objectifs
du bill peuvent être réalisés dès la mise en vigueur
de la loi, au moins pour ce qui concerne l'administration et les réseaux
décisionnels, qu'on fasse l'expérimentation, qu'on essaie de
répondre aux questions pour lesquelles nous n'avons pas de
réponses actuellement, personne d'ailleurs, parce que faute
d'expérience.
Alors, je ne pense pas que l'on puisse dire qu'il y a là un
mémoire négatif qui pose des questions; l'archevêque ne
pose pas de questions, il apprécie.
J'aimerais faire remarquer une autre chose. La confessionnalité,
nous l'examinons par voie de conséquence. Il ne faut pas oublier
ça, ce projet de loi ne met pas en cause directement et de front la
confessionnalité. Il n'est pas question là-dedans de savoir si,
par exemple, les écoles catholiques vont continuer d'exister. On le dit
à l'article 587 en donnant les devoirs des commissions scolaires. Alors,
on n'a pas traité, dans ce document, de confessionnalité, de
formation chrétienne, de ce que ça veut dire la formation
chrétienne, de ce que ça veut dire l'école catholique. On
n'a rien dit de tout cela mais on a essayé simplement de répondre
la question que posait le projet de loi: Est-ce que l'école catholique,
qu'on dit vouloir garder, va pouvoir être appuyée par un
réseau approprié de décisions? On répond non
à cette question-là.
C'est pourquoi nous pensons que l'expérimentation permettra de
voir comment plus tard l'administration scolaire pourra être faite
à ce sujet-là, mais pour le moment il n'y a pas suffisamment de
données; maintenons les commissions scolaires confessionnelles. C'est
quand même une suggestion concrète.
Si vous me demandez des amendements à apporter au bill sur les
comités catholiques, etc., j'ai essayé, je me suis
peut-être mal exprimé, de vous dire qu'à l'examen de tout
cela on a l'impression qu'on ne peut pas le faire à cause des questions
laissées sans réponses et à cause, deuxièmement, du
danger de proposer une autorité bicéphale pour le système
scolaire à Montréal, ce que nous nous interdisons de faire.
Alors, je ne crois pas que ce soit négatif, il n'y a pas que des
questions, il y a une suggestion concrète; ce n'est peut-être pas
celle que vous attendez mais c'est la nôtre.
M.TREMBLAY (Chicoutimi): Monseigneur, lorsque j'ai dit tout à
l'heure que le mémoire était négatif, j'ai bien pris soin
de vous dire qu'il y avait des positions doctrinales très
précises.
Pour nous, législateurs, ces positions doctrinales et ces
suggestions qu'il fait de procéder par étapes ne sont pas des
choses satisfaisantes pour des législateurs, et vous sachant conscient
de l'importance de ce projet de loi, nous nous attendions à ce que vous
présentiez un ensemble appelons cela comme cela
d'amendements ou de suggestions pour bonifier la loi de façon qu'elle
réponde aux exigences que vous croyez essentielles de l'enseignement
confessionnel. Je ne dis pas que tout l'avis de Son Excellence est
négatif, mais le style en est négatif, parce qu'il est
interrogatif et qu'il se présente beaucoup plus comme un avertissement
que comme un ensemble de propositions concrètes qui soient de nature
à nous aider à reprendre le travail de rédaction de ce
projet de loi.
M. LAFONTAINE (Jean-Marie): Si le législateur veut voter une loi
qui comprend un conseil scolaire, disons que nous sommes d'accord avec
l'essentiel. Si le législateur veut donner une impulsion au
comité d'école, nous sommes d'accord, c'est assez concret, cela
vient des projets de loi.
Deuxièmement, si vous voulez vraiment, à notre avis,
favoriser le développement de l'école catholique pour ces
écoles, quitte à en créer d'autres, c'est
écrit aussi là-dedans pour ces écoles, maintenir
des commissions scolaires confessionnelles, au moins d'ici à ce que
l'expérimentation soit faite, il me semble que c'est concret.
Ayant pris cette position-là, je ne peux pas, en même
temps, vous faire des amendements sur le projet de loi. Je me contredis
moi-même. Je m'excuse de dire cela, mais c'est cela que cela voudrait
dire. Si je dis: Il va y avoir des commissions scolaires, d'autre part, des
comités confessionnels avec des pouvoirs extraordinaires qui vont nier
les pouvoirs des commissions scolaires ou qui s'harmonisent mal, je me
contredirais moi-même, à partir du moment où je dis que la
commission scolaire unifiée ne paraît pas apte à assurer le
maintien et le développement de l'école catholique. C'est
pourquoi, pendant les périodes où on essaie de répondre
aux questions et à faire de l'expérimentation, c'est mieux de
maintenir les commissions scolaires confessionnelles et les écoles
catholiques.
Je pense que j'ai été le plus concret possible. A partir
du moment où j'ai dit cela, je me suis interdit d'essayer de faire un
autre projet de loi, pour dire: Les comités confessionnels pourraient
faire ceci. Ou encore: Le type des questions religieuses pourrait faire
cela.
Nous prenons, dans le projet de loi, l'ensemble de ce qu'on pourrait
appeler les garanties qui placent la confessionnalité dans la margina-
lité et on dit: C'est marginal. On dit: La garantie va se trouver
là où se prennent les décisions, dans les commissions
scolaires confessionnelles. Je ne vois pas comment on pourrait être plus
concret.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est une question de style!
Pour un législateur, ce n'est pas très concret. Enfin,
monseigneur, je ne veux pas vous en faire grief plus que de raison, mais je
vous ai donné bien franchement mon opinion. Et cela ne m'empêchera
pas, monseigneur, d'aller à votre cathédrale le dimanche. J'ai
toujours beaucoup de joie à assister aux messes.
UNE VOIX: C'est un catholique romain pratiquant.
M. LE PRESIDENT: La parole est au député de
Dorchester.
M. GUAY: M. le Président, depuis déjà un bon bout
de temps j'avais demandé la parole, disons même avant le petit
exposé ou la petite homélie du député de Chicoutimi
à la suite des propos qu'a tenus monseigneur. Je pense qu'on a
répondu clairement à ma question. Il s'agissait d'analyser
actuellement la majorité tout de même assez confortable qui existe
dans les commissions scolaires de Montréal et, advenant, par exemple,
l'application de la loi 28 et quelles seraient les tendances à venir,
soit une augmentation ou une diminution de cette majorité de cette voix
catholique, je pense que Mgr Lafontaine y a très bien répondu. Je
vous remercie.
M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Jacques.
M. CHARRON: Il ferait un bon prédicateur, il fait ses
homélies courtes.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Il répète le curé.
M. CHARRON: M. le Président, je comprends le sens des
réponses de Mgr Lafontaine au député de Chicoutimi, mais
je suis quand même porté à lui poser des questions encore
plus précises. Si le législateur maintient sa volonté
telle qu'exprimée dans le projet de loi 28 de créer des
commissions scolaires unifiées neutres et s'il doit, par le fait
même aussi, assurer des écoles confessionnelles et des
comités confessionnels, dans cette hypothèse, de-manderiez-vous
que les trois membres du comité confessionnel soient choisis parmi les
parents ou soient nommés d'office par l'archevêché ou je ne
sais trop qui, par la paroisse?
Est-ce que vous êtes d'accord sur le principe qui figure
actuellement dans le projet de loi no 28 qui dit que dans l'hypothèse
où les commissions scolaires sont unifiées, ce sont les parents
des comités consultatifs des écoles catholiques
qui forment le comité de trois personnes que le projet de loi
reconnaît?
M. LAFONTAINE (Jean-Marie): Quels que soient sa composition et le mode
de nomination, je resterai convaincu que, dans le cadre actuel, cela restera un
organisme d'influence marginale. Maintenant, pour répondre directement
à votre question, je ne crois pas que ce soit absolument
nécessaire que les trois personnes soient nommées uniquement
parmi les membres de ces comités d'école. Elles pourraient
être choisies parmi les parents. Je crois que le réalisme de cette
suggestion serait plus grand si, par exemple, ces trois personnes qui seront au
comité confessionnel étaient élues par des parents,
membres de comité ou non, qui ont inscrit leur enfant comme catholique
et qui veulent avoir une école catholique, de telle manière que
les gens qui veulent avoir une école catholique puissent élire
ceux qui sont chargés de veiller, comme on dit, à l'application
des règlements du comité catholique.
M. CHARRON: Vous êtes d'accord qu'elles soient élues par
les parents.
M. LAFONTAINE (Jean-Marie): Absolument et on ne demanderait pas qu'elles
soient nommées par l'évêque. Je pense aux interventions
je dis cela à titre d'illustration encore, parce que ce n'est pas
la même chose du cardinal Léger et de Mgr Grégoire,
justement, pour dire: Nous ne croyons pas qu'il appartient actuellement
à l'archevêque de Montréal de nommer des commissaires
à la CECM. C'est parce que la loi est encore en vigueur. On a
oublié la loi comme de bons citoyens. Mais seulement qu'il y ait des
liens avec l'autorité religieuse, ce n'est pas absolument
nécessaire que ce soit inscrit dans le projet de loi mais ce sera
sûrement nécessaire qu'il y en ait pour que...
M. CHARRON: Cela va être laissé à la
discrétion des parents, justement, s'ils les élisent, de choisir
quelqu'un qui a l'appui de l'archevêché. C'est à eux de
décider du lien entre leurs élus et l'autorité
religieuse.
M. LAFONTAINE (Jean-Marie): C'est-à-dire que si c'était un
comité qui a pour fonction de maintenir et de développer
l'école catholique, à un moment donné, je suppose qu'il va
vouloir avoir la collaboration de ceux qui s'y emploient aussi à leur
manière et selon leurs compétences.
M. CHARRON: Merci.
M. LE PRESIDENT (Pearson): Le député de
Jacques-Cartier.
M. SAINT-GERMAIN: Si vous me permettez, M. le Président, la
Commission des écoles catholiques de Montréal, actuellement, se
dit catholique. Si nous considérons le statu quo, actuellement, comme on
l'a dit et comme vous l'avez admis, ceux qui ne sont pas catholiques n'ont pas
le choix, surtout les citoyens de langue française. Alors, il s'est
créé, à mon avis, devant ces faits, une situation assez
curieuse. Nous avons assisté, lors de nos travaux, à la lecture
de certains mémoires, à la présentation de certains
documents où ceux qui avaient à le faire étaient à
l'emploi de commissions scolaires, soi-disant catholiques et j'ai
personnellement remarqué que ces gens étaient non pas
indifférents vis-à-vis de l'Eglise mais même d'un
anticatholicisme militant.
Alors, dans cette situation, je me demande si malgré les
structures, malgré qu'on dise que ces commissions scolaires sont
catholiques, s'il peut réellement se donner, dans ces écoles, une
éducation catholique.
M. LAFONTAINE (Jean-Marie) : La situation actuelle, voyez-vous, est
sûrement ambiguë. Que vous ayez constaté cela, je l'ai
constaté moi-même. Mais seulement, dans la proposition
concrète de Mgr Grégoire, il est question de commissions
scolaires catholiques et autres, ce qui permettrait justement de faire les
nuances et les distinctions entre ceux qui en veulent et ceux qui n'en veulent
pas. Ceux qui veulent s'aventurer dans l'école catholique en apportant
leur contribution comme telle, cela va être clair aussi. C'est pour cela
que, si l'on veut comprendre la suggestion de Mgr Grégoire, à mon
avis, il ne faut pas uniquement se référer à la situation
existante où il y a un grand nombre de problèmes et où il
y a de l'ambiguïté. La CECM est une commission scolaire catholique
selon la loi et qui administre des écoles catholiques selon la loi.
Alors, les gens qui veulent aller dans les écoles de la CECM, ils vont
dans des écoles catholiques. Je ne suis pas convaincu que toutes ces
écoles-là devraient être catholiques. Je suis convaincu, au
contraire, qu'il devrait y en avoir pour ceux qui n'en veulent pas pour
eux.
Mais cela n'existe pas actuellement. C'est pour cela que la meilleure
façon de comprendre le texte de Mgr Grégoire, ce n'est pas
nécessairement de dire: Il veut le statu quo. Il a été
aussi question de division et de regroupement des commissions scolaires. Si
vous voulez avoir onze commissions scolaires à Montréal, il n'y a
rien qui s'oppose à ce que cela soit fait, avec la suggestion de Mgr
Grégoire. A ce moment, il pourrait y avoir une commission scolaire pour
"autres" et il pourrait y avoir des commissions scolaires pour ceux qui veulent
avoir des écoles catholiques. Le choix serait possible.
J'ai été, moi aussi, professeur à
l'Université de Montréal. C'est sans doute moins bon qu'à
l'université Laval, M. le député, c'est sûrement
moins ancien aussi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Montréal est une fille de Laval!
M. LAFONTAINE (Jean-Marie): C'est cela.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est la fille prématurée.
M. LAFONTAINE (Jean-Marie): Il est sûr que rien ne peut
empêcher quelqu'un de fonctionner. Je pense à un professeur de
religion dans une université ou dans une classe donnée où
il y a 10 p.c. ou plus des élèves qui n'en veulent pas. A ce
moment, vous avez l'attitude des étudiants qui n'en veulent pas, qui se
sentent obligés d'être là, qui ne voudraient pas y
être et qui réagissent d'une façon très
compréhensible, mais qui empêchent ceux qui veulent avoir ce cours
de l'avoir et qui empêchent le professeur de fonctionner. Mais si vous
avez un système où ces étudiants peuvent choisir, vous
clarifierez les choses.
C'est la même chose pour les parents. Je comprends qu'il y a des
parents je respecte leurs convictions, nous le disons d'ailleurs dans le
document qui désireraient avoir d'autres écoles que des
écoles catholiques pour leurs enfants. Qu'on en crée! Qu'on en
crée au plus tôt!
M. SAINT-GERMAIN: M. le Président, en admettant que le statu quo
a de sérieux inconvénients relativement à l'école
catholique, malgré les réticences que vous apportez,
considérez-vous que le bill 28 sera tout de même une
amélioration relativement au statu quo? Je parle toujours relativement
à la catholicité des écoles.
M. LAFONTAINE (Jean-Marie): Cela pourrait l'être par voie de
conséquence et indirectement. C'est qu'étant donné que le
projet de loi no 28 annonce des écoles "autres", c'est là que la
distinction se fera. Remarquez qu'il y a longtemps que c'est souhaité
par beaucoup de monde, y compris par votre humble serviteur. Cela permettra de
clarifier les choses. C'est une amélioration sur la situation existante.
Mais je ne suis pas convaincu qu'il faut des commissions scolaires
unifiées pour faire des écoles "autres". La loi 27 pourra
permettre, justement, des écoles "autres". Et il y a des commissions
scolaires pour les catholiques et pour les protestants, voyez-vous?
L'important pour nous, remarquez, c'est que là où se
prennent les décisions susceptibles d'affecter la commission scolaire
catholique, des gens aient des mandats précis pour les prendre.
Actuellement, c'est la commission scolaire qui a ce mandat.
M. SAINT-GERMAIN: Vous semblez, monseigneur, attacher beaucoup
d'importance aux solutions que pourraient vous fournir les expériences
des modifications que vous apportez dans votre mémoire. Serait-il
possible que les expériences qu'apportera l'application du bill 28 ne
soient pas, à ce point de vue, aussi positives, aussi valables que les
expériences qui pourraient être apportées par le
système que vous proposez? Parce qu'enfin, une législation, ce
n'est pas éternel. Cela se modifie. J'imagine bien qu'avec une nouvelle
législation comme le bill 28, il faudra nécessairement, un jour,
la modifier, comme résultat des expériences et des connaissances
qui seront acquises par la mise en application du bill même.
M. LAFONTAINE (Jean-Marie): Que l'application du bill 28 puisse apporter
un certain nombre d'expériences valables, je n'en doute aucunement.
Mais je n'en doute aucunement, remarquez. Mais je me dis: Pourquoi ne
pas tout faire aujourd'hui ce qu'on peut faire, et faire l'expérience,
pour voir, avant de changer le réseau de décisions susceptible
d'affecter les écoles? C'est ça le fond de la question. Vous
pouvez me dire: Après expérience, on pourra peut-être se
rendre compte que ça va être bon. Peut-être, mais on se dit
actuellement que vous n'avez pas, par ce projet de loi, confié à
des organismes à influence marginale le soin de prendre des
responsabilités pour les évêques catholiques. A mon avis,
c'est mieux que la population le sache aussi. On se demande: Est-ce que ces
structures-là sont aptes à maintenir et à
développer l'école catholique? On dit non parce que les
expériences n'ont pas été faites. On est mieux de les
faire avant, ce qui n'empêcherait pas, comme je le disais tout à
l'heure, de réaliser les principaux objectifs du bill, de mettre en
place les structures, comme le conseil scolaire, les comités
d'école, et puis de regrouper les commissions scolaires, de les
rediviser mais en maintenant les réseaux de décisions
appropriés pour les tâches et les finalités à
organiser.
M. SAINT-GERMAIN: Puisque vous admettez à la longue
l'unification, ça deviendrait simplement une question de moyens pour
parvenir au même but, c'est-à-dire s'instruire de
l'expérience de votre projet ou s'instruire de l'expérience du
bill 28. On pourrait, par une voie ou par l'autre, à la longue, arriver
pratiquement au même résultat. Est-ce que je pourrais affirmer
cette chose-là?
M. LAFONTAINE (Jean-Marie): Vous pouvez sans doute l'affirmer mais je
n'y souscrirai pas.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Monseigneur, je vais vous poser une autre
question qui va vous paraître naive: Est-ce qu'un catholique peut voter
la loi 28?
M. LAFONTAINE (Jean-Marie): Ah oui! Tout à l'heure, vous avez dit
vous-même que vous avez reçu des mémoires qui ont dit des
choses différentes. On est dans la société d'aujourd'hui
et on est dans l'Eglise d'aujourd'hui. Vous avez simplement à lire les
comptes-
rendus de ce qui se passe au synode, il y a des questions importantes,
c'est encore la même chose. Dans l'Eglise de Montréal, il y a des
gens qui pensent qu'un réseau de décisions approprié des
écoles catholiques, c'est bon, et d'autres qui disent qu'on n'en aura
pas besoin parce qu'on fait confiance aux hommes. On va ignorer l'importance du
droit pour s'abandonner aux organismes de pression. Il y en a qui aiment mieux
la pression que la loi qui définit les lois qui les garantit. C'est leur
affaire et je respecte tout ça. On est dans cette
société-là, dans cette Eglise-là.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Monseigneur, si je vous ai posé la
question sous cette forme-là, c'est que je voulais que vous me donniez
cette explication et, en même temps, je voulais rassurer certains de nos
collègues qui pourraient avoir des hésitations.
M. LAFONTAINE (Jean-Marie): On est vraiment au niveau des moyens.
M. LE PRESIDENT: Je remercie Mgr Lafontaine, représentant de
l'archevêché de Montréal, du mémoire qu'il nous a
présenté. Soyez assuré qu'on va en prendre bonne note. Je
cède la parole au ministre de l'Education.
M. SAINT-PIERRE: Je voudrais simplement annoncer qu'en accord avec les
autres partis, nous avons convenu d'avoir une séance de la commission
mardi prochain, c'est-à-dire la première journée où
l'Assemblée nationale aura à siéger. Les séances de
la commission parlementaire auraient lieu après la période des
questions, c'est-à-dire de 4 heures à 6 heures et de 8 heures
à 10 heures. Je suis conscient que nous n'avons pas abattu tout le
travail qu'on s'était proposé, c'est d'une part qu'on ne voulait,
chez aucun groupe, laisser l'impression qu'on voulait bousculer les choses,
qu'on voulait passer à la vapeur les mémoires.
Je pense que si, d'une part, on doit être déçu de ce
que des groupes soient obligés de revenir, c'est malheureusement le prix
qu'il faut payer si on veut bien laisser à chacun le droit d'exprimer
son point de vue.
Il nous reste, avant l'heure réglementaire de six heures pour le
travail de la commission, vingt minutes. Je laisse le choix à
l'association des cadres de prendre la parole aujourd'hui ou de passer comme
premier groupe mardi prochain. Vous préférez mardi prochain? M.
le Président, je suggérerais que les travaux de la commission
soient ajournés à mardi prochain, après la période
des questions.
M. LE PRESIDENT: Les travaux de la commission sont ajournés
à mardi prochain, après la période des questions, vers
quatre heures.
(Fin de la séance: 17 h 45)
ANNEXE A
MEMOIRE DU COMITE CONSULTATIF DE LA
C.E.C.M.
PREAMBULE
LE COMITE CONSULTATIF DE LA
CECM
Le Comité consultatif de la Commission des Ecoles catholiques de
Montréal est un organisme composé de parents et de
représentants de corps intermédiaires. Les parents, membres des
comités consultatifs des écoles (soit environ trois cents
comités dans les écoles françaises et anglaises)
s'élisent des représentants au sein des comités
consultatifs des régions administratives, lesquels ont chacun un
représentant au Comité de la Commission. C'est la structure de
consultation et de participation des parents des écoles de la CECM. A ce
nombre s'ajoutent les délégués de l'Association des
Parents catholiques, de la Fédération des Unions de familles et
du Montreal Council of Parent Teacher Associations. Se joignent aux parents, un
délégué de chacun des organismes suivants: le Conseil
central de Montréal, le Conseil du Travail de Montréal, la
Chambre de Commerce de Montréal, le Centre des dirigeants d'entreprise
et la Fédération des CEGEP.
Ce comité adresse ses requêtes, ses mémoires
à la Commission scolaire dont il est une création. C'est
l'importance du projet de loi 28 qui amène le Comité, par
exception et en accord avec la CECM, à présenter ce
mémoire à la Commission parlementaire.
LA PREPARATION DE CE MEMOIRE
Les circonstances dans lesquelles ce mémoire a été
préparé n'ont pas permis au Comité de mettre en branle
tous les mécanismes de consultation dont il dispose pour sonder
l'opinion de la population.
Toutefois, dans le temps qu'il avait, le Comité s'est
efforcé de rejoindre le plus grand nombre possible de personnes
susceptibles de lui donner la réaction du milieu et des parents
principalement. Compte tenu de la diversité des groupes qui le composent
et de l'effort de chacun de ses membres à consulter les parents, le
Comité est en mesure d'exprimer un point de vue qui est celui d'une
fraction importante de la population.
UNE DISSIDENCE
Le délégué de l'Association des Parents catholiques
enregistre sa dissidence face au principe des commissions scolaires
unifiées et opte pour des commissions scolaires confessionnelles,
catholiques, protestantes et autres comme garantie de la
confessionnalité.
Mais le délégué est d'accord sur la restructuration
scolaire, sur la création du Conseil, l'élection des commissaires
et les mesures prises pour assurer la participation des parents.
INTRODUCTION
Le Comité consultatif de la Commission scolaire de
Montréal reconnaît la nécessité de la
restructuration scolaire à Montréal et considère le projet
de loi 28 comme une mesure législative qui, dans son ensemble, devrait
répondre aux besoins de la communauté montréalaise.
Conséquemment le Comité se dit d'accord sur: a)
création d'un Conseil scolaire pour l'île de Montréal; b)
le principe des commissions scolaires unifiées.
Les principaux avantages de cette loi sont: a) la création d'un
Conseil capable d'assurer une meilleure distribution des ressources humaines et
matérielles du milieu et une meilleure coordination des
activités.
Nous demandons que le partage du revenu de la taxe ne soit pas
obligatoirement relié au seul per capita mais qu'on tienne compte par un
mécanisme de péréquation des besoins particuliers des
commissions scolaires les moins favorisées; b)les moyens mis en oeuvre
pour respecter la diversité culturelle, linguistique et confessionnelle
de la population et l'occasion qui s'offre aux groupes composants de
s'intégrer progressivement à la société
québécoise; c) la démocratisation du système: 1-
par l'élection des commissaires, 2- par la participation organique et
permanente des parents.
LES ASPECTS PARTICULIERS DE LA LOI
Considérant les divers organismes nécessaires à la
restructuration, le Comité formule les remarques, les commentaires ou
les recommandations qui suivent:
LE CONSEIL SCOLAIRE
1- Les quinze membres du Conseil
devraient avoir un mandat d'une durée de quatre ans. 2- Le choix du
président et du vice-président devrait être fait par les
membres. 3- Le choix des membres nommés par le gouvernement devrait
refléter la réalité des principaux groupes composant la
population scolaire de l'île. 4- Le Conseil devrait se réunir deux
fois par mois au moins. 5- Les décisions importantes qui affectent une
commission scolaire en particulier devraient être prises après
consultation avec la commission scolaire concernée. 6- Le Conseil
devrait adopter des règlements pour sa régie interne sans
autorisation du ministre. 7- Le Conseil devrait se donner un comité
consultatif de parents.
LA COMMISSION SCOLAIRE
La division du territoire, quelle qu'elle soit, présentera des
inconvénients pour des groupes minoritaires, francophones ou
anglophones.
C'est pourquoi, il est très important que l'on assure un
chevauchement des services administratifs, pédagogiques ou autres entre
les commissions scolaires pour répondre aux besoins des groupes
minoritaires et de cette façon donner une même qualité de
service à tout le monde (overlapping services). 1- Chaque commission
scolaire devrait compter neuf commissaires. 2- L'élection des
commissaires se fait simultanément à tous les quatre ans, en
même temps que les élections municipales. 3- Les deux tiers des
commissaires sont élus au suffrage universel. 4- L'autre tiers est
élu par le collège électoral constitué par les
parents des comités d'école. 5- La division par quartiers est
confiée à un comité d'experts et non à la
commission scolaire. Il y a autant de quartiers que de commissaires élus
au suffrage universel. 6- La loi devrait préciser les règles
générales de la campagne électorale: financement,
publicité, etc. 7- Le Comité est d'accord sur la nomination par
le gouvernement de deux autres commissaires pour représenter les
minorités au besoin, mais le mandat de ces commissaires devrait
être d'une durée de quatre ans. 8- Le directeur
général, le directeur général adjoint, le
sous-directeur général francophone et le sous-directeur
général anglophone devraient siéger
régulièrement avec les commissaires.
9- Le droit de vote devrait être établi comme suit: a) un
vote par personne, b) un propriétaire de plusieurs immeubles a droit
à un seul vote dans le quartier de son choix, c) un vote aux parents
membres du collège électoral, un parent membre de plus d'un
comité n'a qu'un droit de vote; d) les parents qui n'ont pas la
citoyenneté canadienne ont droit de vote après avoir
habité durant un an sur le territoire du Conseil scolaire. 10- Le
comité consultatif de parents de chaque commission scolaire est
formé par les présidents des comités d'école.
LE COMITE D'ECOLE
1- Le Comité juge acceptable les
fonctions attribuées au comité d'école.
Il importe, toutefois, de donner à ces comités un
rôle déterminant en certains cas pour en souligner
l'utilité aux yeux des parents et stimuler leur participation. C'est
pourquoi les comités d'école devraient: a) constituer un
collège électoral pour l'élection d'un tiers des
commissaires dans chacune des commissions scolaires; b)les comités
devraient également faire connaître à la commission
scolaire, lors de la nomination d'un directeur d'école, les besoins
particuliers du milieu quant aux qualités requises du directeur à
nommer. 2- La présence des enseignants au sein des comités
d'école est nécessaire aux parents dont la participation sera
largement éclairée par la présence des enseignants. 3- Le
tiers des membres du comité d'école devrait être des
enseignants membres à part entière. Le nombre des parents devrait
être déterminé comme suit: 3 pour une école de moins
de cinq cents élève, 6 pour plus de cinq cents et moins de mille
élèves et de 9 pour une école de plus de mille
élèves.
LE CONSEIL PROVISOIRE
Vu les tâches énormes qui l'attendent, ce Conseil devrait
être créé le plus tôt possible pour procéder
à l'inventaire des ressources et à la préparation d'un
projet d'unification qui tienne compte de l'aspect humain tout autant que de
l'aspect physique du changement et de façon à pertuber le moins
possible la vie scolaire à Montréal.
On devrait accepter le principe de prolonger le délai du 1er
juillet 1973 si les circonstances l'exigeaient et laisser au Conseil toute la
liberté possible dans la préparation de son
échéancier. 1- Nous sommes d'accord que le Conseil compte treize
membres dont trois nommés par le gouvernement. 2- Nous demandons que les
membres soient choisis de façon à réfléter les
caractéristiques (culturelles, religieuses, linguistiques) de la
population à servir. 3- Nous acceptons l'article 11 sur les pouvoirs et
devoirs du Conseil mais nous proposons que l'alinéa b se lise comme
suit: "dresser, en collaboration avec les commissions scolaires existantes, les
syndicats et les associations concernés, un plan d'intégration de
leur personnel au sein du Conseil et des commissions scolaires nouvelles et
effectuer les consultations appropriées. 4- Nous demandons que la
nomination des quatre nouveaux commissaires à la CECM soit
précédée d'une consultation auprès des organismes
locaux, soit par exemple le Comité consultatif de la Commission. 5- Nous
demandons que les représentants de la CECM au conseil soient choisis par
les onze commissaires eux-mêmes.
ANNEXE B
MEMOIRE DU CONGRES JUIF
CANADIEN
SOMMAIRE DES RECOMMANDATIONS
1. Le but ultime des
amendements à la Loi sur l'éducation devrait être
l'établissement d'une administration scolaire unifiée,
démocratiquement élue comprenant des sauvegardes écrites
adéquates dans la loi en vue d'assurer l'égalité des
opportunités éducatives et les conditions nécessaires afin
de fournir des cours d'études de la plus haute qualité dans la
langue choisie par les parents. 2. Le développement du système
éducatif scolaire suggéré devrait inclure la pleine
reconnaissance par le gouvernement du Québec du secteur des
écoles indépendantes faisant l'objet d'une aide gouvernementale
au plus haut point, et dans lequel chaque groupe peut, s'il le désire,
assumer personnellement des responsabilités supplémentaires en
vue de développer son héritage culturel et religieux et ce,
conformément aux idéaux démocratiques du Québec et
du Canada. 3. Que la désignation des membres additionnels aux
commissions scolaires édictée à l'article 583 soit
obligatoire et que le terme de la charge des personnes désignées
soit égal à celui des membres élus de la commission; que
des consultations concernant la désignation de ces membres ait lieu avec
les organisations les plus représentatives de la minorité
concernée, à la discrétion du Ministre. 4. Que soit pris
en considération un amendement aux articles 95 et 99 de la Loi sur
l'éducation, afin de remplacer la qualification de citoyenneté
canadienne en vue du vote des commissaires scolaires et officiels par la
qualification d'une résidence canadienne pour une période en sue
d'une année. 5. Que l'article 587 inclue des dispositions en vue de
l'exercice de l'option par les parents du type d'écoles, de la langue
d'instruction et de l'instruction religieuse et morale pour leurs enfants; que
cette option soit accessible à tous les parents. 6. Que l'article 589
inclue des dispositions suivant lesquelles il sera du devoir et de la
responsabilité des directeurs généraux adjoints de
s'assurer que des cours de la plus haute qualité soient disponibles dans
la langue d'instruction choisie par les parents, dans chacune des écoles
sous la juridiction de la commission et que les directeurs
généraux adjoints aient le pouvoir et les moyens de
répondre à la requête des parents et disposent d'un
personnel adéquat à tous les niveaux pour établir et
superviser ces cours. 7. Qu'une considération soit accordée en
vue de modifier l'article 508 de la Loi sur l'éducation afin de
permettre un appel devant les Cours Provinciales dans le cas où la
commission manquerait de mettre à exécution les dispositions de
l'article 203 de la Loi sur l'éducation qui assurent le droit aux
parents de choisir une langue d'instruction pour leurs enfants. 8. Que
l'article 589 (dernier paragraphe) soit modifié en vue de correspondre
aux dispositions de l'article 594 (a) et soit rédigé comme suit:
"A la demande des comités visés à l'article 593, les
commissaires scolaires doivent nommer deux personnes responsables pour
l'exécution des règlements des comités catholiques ou
protestants du Conseil supérieur de l'éducation, tel que le cas
pourrait être, dans les écoles publiques Catholiques ou dans les
écoles publiques Protestantes". 9. Qu'un paragraphe soit ajouté
à l'article 594 autorisant le ministre de l'Education à sa
discrétion, d'approuver des cours en instruction morale ou religieuse,
autres que catholiques ou protestants dans toutes les écoles et
d'obliger les commissions à mettre à exécution ces cours,
s'il existe une demande suffisante de ceux-ci de la part des parents. 10. Que
l'article 600 soit modifié par l'ajout de dispositions suivant
lesquelles le lieutenant-gouverneur en conseil, s'il considère que la
minorité francophone ou anglophone, tel que le cas pourrait être,
n'est pas représentée au conseil scolaire de l'île de
Montréal, peut désigner, sur recommandation du ministre, deux
autres membres pour un terme égal à celui des autres membres
après consultation avec les organisations les plus
représentatives de la minorité en question et ce, à la
discrétion du ministre.
11. Que l'article 606 doit modifié et les pouvoirs du conseil
scolaire de l'île de Montréal soient plus clairement
définis et limités au financement des commissions scolaires qui
doivent avoir les mains libres et posséder la flexibilité
nécessaire en vue d'initier les programmes, dresser les plans
opérationnels et créer des services. 12. Que l'article 617 soit
modifié en vue d'édicter que le président et le
vice-président du conseil scolaire de l'île de Montréal,
soient élus par les membres de ce conseil et parmi eux. 13. Qu'une
étude subséquente soit accordée aux recommandations de la
Commission royale d'enquête sur l'éducation Commission
Parent qui envisageait seulement d'établir sept commissions
scolaires municipales, et au cas où le nombre de commissions serait
maintenu, tel que prévu dans la loi No. 28, nous recommandons que les
limites en soient modifiées à la lumière de
considérations démographiques et en particulier, qu'une portion
de la municipalité scolaire no 4 soit ajoutée à la
municipalité scolaire no 2, qui lui est limitrophe, et ce, en vue d'une
administration plus efficiente et plus cohésive des écoles de
cette région. 14. Que l'article 9 des dispositions transitoires et
finales soit modifié en incluant des dispositions rendant obligatoire
pour le lieutenant-gouverneur en conseil de désigner, sur la
recommandation du ministre de l'Education, au moins une personne qui sera
représentative du segment de la population désireuse d'avoir des
écoles autres que catholiques et protestantes. 1.
INTRODUCTION
Ce mémoire est présenté par le Congrès juif
canadien, région de l'est, en sa qualité de porte-parole reconnu
de la communauté juive de la province de Québec.
Le Congrès juif canadien a, en de nombreuses occasions
précédentes, exprimé son point de vue au gouvernement,
à son Assemblée nationale et à ses commissions, sur le
système éducatif en la province de Québec. Nos
recommandations relatives à la Loi No. 28 sont fondées sur les
considérations déjà exposées dans ces
précédents mémoires qui comprennent: a) Mémoire
soumis au Comité permanent de l'Education relatif à la Loi 62
(Février 1970) b) Mémoire soumis à la Commission
d'enquête sur la position de la langue française et les droits
linguistiques au Québec (Août 1969) c) Mémoire soumis
à la Commission royale d'enquête sur l'éducation (Mars
1962) d) Mémoire soumis au Comité parlementaire sur la
constitution (Juin 1964) e) Mémoire soumis au Conseil supérieur
de l'éducation du Québec (Octobre 1966) f ) Mémoire soumis
au Comité de l'éducation de l'Assemblée nationale
relativement à la
Loi No. 56 Loi sur l'éducation privée (Novembre
1968) g) Mémoire soumis au Comité de l'éducation de
l'Assemblée nationale du Québec relativement à la Loi no
85 (janvier 1969) h) Mémoire soumis à la Commission Royale sur la
taxation au Québec (janvier 1964).
Nous soumettons respectueusement que ces mémoires, qui sont
déposés, soient considérés partie intégrante
du présent. 2. POSITION DE BASE
Notre opinion bien considérée est que le but ultime des
amendements à la Loi sur l'éducation doit être
l'établissement d'une administration scolaire unifiée,
démocratiquement élue, comprenant des sauvegardes
adéquates écrites dans la loi, en vue d'assurer
l'égalité des opportunités éducatives et les
conditions nécessaires afin de pourvoir des cours d'études de la
plus haute qualité dans la langue choisie par les parents.
Nous sommes convaincus que notre système éducatif doit
-être basé sur une dualité linguistique dans un
système scolaire général, avec l'option offerte à
tous les parents de diriger leurs enfants vers les écoles de leur choix.
Le but de toutes écoles doit être un processus éducatif
donnant à tous les élèves une connaissance du
français et de l'anglais en tant que langues de communication.
La communauté juive en son entité souscrit au principe de
la dualité linguistique et du pluralisme culturel en tant que fondement
du système éducatif public; du droit des parents de choisir la
langue d'instruction et le type d'école pour leurs enfants, du
caractère démocratique des structures administratives
élues par suffrage universel, de la participation des parents dans
l'élaboration de la décision prise et de l'égalité
de taxation.
Le développement du système éducatif
suggéré doit inclure la pleine reconnaissance par le gouvernement
du Québec du secteur scolaire indépendant,
bénéficiant d'une aide gouvernementale
la plus étendue et dans laquelle chaque groupe peut, s'il le
désire, assumer des responsabilités additionnelles de son propre
chef, en vue de développer sa propre culture et son héritage
religieux d'accord en ceci avec les idéaux démocratiques du
Québec et du Canada. Nous nous étendons plus longuement sur cet
aspect au chapitre 10 de ce mémoire.
C'est en retenant ce point de vue que le Congrès Juif Canadien
soumet respectueusement certaines suggestions et recommandations
développées ci-après, que nous considérons
essentielles au développement d'un système éducatif viable
qui a "ses racines dans les traditions et regarde de l'avant vers ce qui est
à venir". (Rapport de la Commission Parent). 3. COMMISSIONS
SCOLAIRES a) Composition
L'article 583 tel que proposé par la Loi No. 28,
édicterait qu'au cas où le lieutenant-gouverneur en conseil,
considérerait que la minorité francophone ou anglophone, selon le
cas, n'est pas représentée au sein de la commission, peut nommer
sur la recommandation du ministre, deux autres commissaires d'écoles
pour un mandat d'une année scolaire après consultation "des
présidents des comités consultatifs d'écoles de la
minorité concernée".
Etant d'une importance primordiale que les commissions scolaires soient
pleinement représentatives, nous recommandons que la désignation
des membres additionnels auprès des commissions, tel
qu'édicté par l'article 583, soit obligatoire et non seulement
facultative ("doit" au lieu de "peut") et que la durée du mandat de ces
commissaires ainsi désignés, soit égale à celle des
membres élus de la commission.
En vue de sauvegarder la clarté, nous attirons respectueusement
l'attention du Comité sur l'éducation de l'Assemblée
nationale, que les termes actuellement employés dans l'article 583
suivant lesquels le ministre doit consulter "le président des
comités consultatifs d'écoles de la minorité
concernée", sont ambigus s'ils n'induisent pas en erreur, de pareils
comités linguistiques n'étant pas envisagés. Nous
recommandons en conséquence que la rédaction en soit
modifiée et que la consultation ait lieu avec les organisations les plus
représentatives de la minorité concernée, à la
discrétion du Ministre. b) Election
Conformément à l'article 99 de la Loi sur
l'éducation, il est nécessaire entr'autres, d'être citoyen
canadien en vue de posséder le droit de vote à toute
élection de commissaires scolaires ou fiduciaires. Les mêmes
exigences s'appliquent en ce qui concerne les qualifications de personnes
éligibles en tant que commissaires scolaires ou fiduciaires (art.
95).
Cette disposition excluerait automatiquement les parents qui sont
nouvellement établis au Canada, durant la période qui doit
s'écouler afin qu'ils deviennent éligibles à la
citoyenneté canadienne, soit un minimum de 5 ans. Les élections
scolaires, si importantes pour le total de la population, sont d'un
intérêt primordial pour ceux le plus directement touchés,
soit les parents. La Loi sur l'éducation reconnaît à bon
droit le rôle si important des parents dans la décision prise en
ce qui concerne l'éducation de leurs enfants et accorde un droit de vote
à tous les parents, sans exception, au niveau des comités
scolaires. Nous soumettons que le même principe devrait être
appliqué à l'élection des commissaires scolaires. Nous
sommes convaincus qu'une résidence au Canada, supérieure à
un an est pleinement suffisante pour rendre apte une personne à voter
aux élections d'un commissaire scolaire ou d'en remplir les fonctions.
Nous recommandons en conséquence que la qualification de
citoyenneté canadienne en vue de pouvoir élire les commissaires
scolaires ou d'en remplir les fonctions, soit abrogée et
remplacée par une obligation de résidence au Canada
n'excédant pas une année. 4. LANGUE
D'INSTRUCTION
L'article 203 de la Loi sur l'éducation, tel qu'amendé par
la Loi No. 63, impartit aux commissions scolaires l'obligation de dispenser des
cours d'études à partir de la première année
jusqu'à la onzième inclusivement, adoptés ou reconnus pour
les écoles catholiques, protestantes ou autres, en langues
française et anglaise, à tout enfant, dont les parents ou les
personnes agissant en leurs lieu et place le requièrent lors de son
enregistrement.
Nous sommes convaincus qu'il est important pour la communauté
d'être non seulement réassurée et systématiquement
informée au sujet de chaque commission disposant des moyens de fournir
des cours d'études en la langue de choix des parents, mais aussi de
savoir comment ce système oeuvrera sous l'administration scolaire
unifiée proposée.
Nous recommandons en conséquence que l'article 589 inclue des
dispositions suivant lesquelles il sera du devoir et de la
responsabilité des directeurs généraux adjoints, de
veiller à ce que des cours de la plus haute qualité soient
disponibles dans la langue d'instruction choisie par les
parents dans chaque école sous la juridiction de la commission,
et que les directeurs généraux adjoints aient le pouvoir et les
moyens d'exécuter les requêtes des parents et un personnel
disponible adéquat à leur disposition à tous les niveaux,
pour établir et superviser ces cours.
Le droit de choisir la langue d'instruction étant pour les
parents d'une importance primordiale, nous recommanderions également que
soit considérée l'incorporation dans la Loi sur
l'éducation, des dispositions qui permettraient un recours en appel
devant les cours Provinciales, dans le cas où une Commission manquerait
d'exécuter les dispositions de l'article 203-3 et 203-4 de la Loi sur
l'éducation qui établit ce droit d'appel. Ceci pourrait
être atteint par un amendement à l'article 508 de la Loi sur
l'éducation. 5. OPTION DES PARENTS
Etant donné qu'il existera six types d'écoles sous la
juridiction de chaque commission, il y a lieu d'assumer qu'il appartiendrait
aux parents de choisir le type d'écoles que leurs enfants
fréquenteraient (catholiques - protestantes ou autres).
Les parents auront aussi à choisir la langue d'instruction et
s'ils désirent que leurs enfants reçoivent une instruction
religieuse et, dans ce cas quel genre; ou s'ils préféreraient que
leurs enfants reçoivent une instruction morale au lieu de cours
religieux.
En conséquence, l'option des parents se présente
actuellement sous trois formes: a) Le type d'école: catholique,
protestante ou autre b) la langue d'instruction: français ou anglais c)
la nature de l'instruction religieuse.
En vue de s'assurer que toutes ces options ne sont pas seulement
offertes aux parents, mais que des dispositions existent en vue de leur
exercice, nous recommandons que l'article 587 comprenne une disposition selon
laquelle chaque commission scolaire prendra des mesures nécessaires pour
l'exercice de l'option des parents en tous ses aspects et dans toutes ses
écoles et que pareille option est ouverte à tous les parents. 6.
COMITES CONFESSIONNELS, ET PERSONNEL RESPONSABLE DES QUESTIONS
RELIGIEUSES
La loi no 28 propose l'établissement d'un comité
catholique et d'un autre protestant pour chaque commission scolaire, qui
veillera à l'application des règlements du comité
catholique ou de celui protestant du Conseil supérieur de
l'éducation pour les écoles dépendant de leur commission
scolaire et auxquelles ces règlements sont applicables (Art. 593-596).
Il est également édicté à l'article 589 qu'à
la requête des comités confessionnels "les commissaires
d'écoles doivent nommer deux personnes responsables des questions
religieuses, l'une pour les catholiques, l'autre pour les protestants".
Chaque commission scolaire pouvant être appelée à
pourvoir des cours d'instruction religieuse ou morale, autres que catholiques
ou protestants, dans toutes ses écoles et non seulement dans celles
non-confessionnelles, on aurait dû s'attendre à ce que des
dispositions soient édictées pour qu'un troisième
comité supervise ces cours. Ceci aurait été conforme
à l'esprit et à la lettre du Rapport de la Commission Parent qui
a recommandé que: "chaque commission scolaire établisse une
direction pédagogique pour chacune des formes d'éducation
romaine catholique, protestante et non-confessionnelle, française et
anglaise qui sont dispensées dans ses écoles.
Néanmoins, en vue de prévenir de futures fragmentations,
nous ne suggérons pas l'établissement d'un comité
séparé pour l'éducation non-confessionnelle. Nous sommes
convaincus qu'il ne serait aucunement nécessaire d'avoir des
comités confessionnels; les droits religieux garantis par l'Acte de
l'Amérique du Nord Britannique pouvant adéquatement être
assurés au sein d'une administration générale. Si
cependant de pareils comités devraient être maintenus, nous
soumettons que les intérêts de l'éducation
non-confessionnelle seront protégés par l'amendement
suggéré à l'article 587.
Nous sommes cependant préoccupés par la rédaction
actuelle de l'article 589 déclarant que les commissaires d'écoles
doivent désigner deux personnes "responsables des questions religieuses,
l'une pour les catholiques et l'autre pour les protestants". Il nous apparait
que cette définition va bien au-delà de ce qui est
envisagé par l'établissement des comités confessionnels
qui doivent veiller à l'application des règlements du
comité catholique ou protestant, du Conseil supérieur de
l'éducation. "Questions religieuses" a un sens beaucoup trop large et
est pratiquement un terme trop vaste.
Au surplus, il est prévisible que plusieurs élèves
catholiques ou protestants fréquenteront des écoles
non-confessionnelles et la loi ne devrait attribuer à ces personnes
aucune juridiction sur les étudiants catholiques et protestants, en
dehors des écoles publiques catholiques et protestantes, à moins
que ces étudiants n'optent pour une instruction catholique ou
protestante au sein des écoles non-confessionnelles, et ainsi uniquement
pour une pareille instruction.
Nous suggérons en conséquence que la rédaction du
4ème paragraphe non numéroté de
l'article 589 soit modifiée en vue de correspondre aux
dispositions de l'article 594 (a) et soit ainsi conçue en ces termes: "A
la demande des comités visés à l'article 593, les
commissaires scolaires doivent nommer deux personnes responsables pour
l'exécution des règlements des comités catholiques ou
protestants du Conseil Supérieur de l'Education, tel que le cas pourrait
être".
Nous recommandons également qu'un nouveau paragraphe soit
ajouté à l'article 594 qui autoriserait le ministre de
l'Education, à sa discrétion, d'approuver des cours en
instruction morale ou religieuse, autres que catholiques et protestants dans
toutes les écoles et d'obliger les commissions à mettre à
exécution ces cours, s'il existe une demande suffisante de ceux-ci de la
part des parents. 7. CONSEIL SCOLAIRE DANS L'ILE DE
MONTREAL
Il est hautement essentiel que le conseil reflète pleinement la
communauté en sa totalité et représente tous les types
d'éducation qui seront dispensés par les commissions, que ce soit
des cours d'études adoptés ou reconnus pour les écoles
publiques catholiques, pour les écoles publiques protestantes et pour
les écoles publiques autres que catholiques et protestantes, chacun de
ces cours disponibles en français ou en anglais en tant que langue
d'instruction.
Nous soumettons que les dispositions qui ont été
établies dans la Loi No. 28 (Art. 583) en vue de s'assurer que chaque
commission scolaire possède une représentation du groupe
francophone et du groupe anglophone, soient également applicables
à la composition du conseil scolaire et un paragraphe devrait être
ajouté à l'article 600 disposant que: "Le lieutenant-gouverneur
en conseil, s'il considère que la minorité francophone ou celle
anglophone, tel que le cas pourrait être, n'est pas
représentée en application de l'article précédent,
il peut désigner sur la recommandation du ministre, deux autres membres
pour un terme égal à celui des autres membres, après
consultation avec les organisations les plus représentatives de la
minorité en question et ce, à la discrétion du
ministre".
Nous sommes convaincus que les pouvoirs du Conseil, tels que
définis en l'article 606, sont de beaucoup trop étendus et
pourraient imposer des restrictions indues aux commissions. Nous proposons que
les pouvoirs du conseil devraient être plus clairement définis et
limités au financement des commissions scolaires, qui doivent avoir les
mains libres et posséder la flexibilité nécessaire en vue
d'initier des programmes, dresser les plans opérationnels et
créer des services. Nous recommandons que l'article 606 soit
rédigé à nouveau en vue de refléter ce point de
vue.
Nous recommandons également qu'afin de donner un vrai sens
démocratique au conseil de l'île, les président et
vice-président soient élus par les membres du conseil parmi eux
et ne soient pas désignés par le ministre de l'Education, tel
qu'actuellement édicté par le projet de loi et que l'article 617
soit modifié en conséquence. 8. DISPOSITIONS
TRANSITOIRES
L'article 9 des dispositions transitoires et finales stipule que
jusqu'à ce que les membres du conseil soient désignés en
vertu de l'article 600, le Conseil consistera en 13 membres
désignés par le lieutenant-gouverneur en conseil sur la
recommandation du ministre de l'Education. Dix de ceux-là devront
être choisis parmi les membres des commissions scolaires centrales
actuelles, catholiques et protestantes.
Nous soumettons respectueusement que des dispositions soient incluses
afin que le lieutenant-gouverneur en conseil désigne, sur la
recommandation du ministre de l'Education, au moins une personne
représentative de cette section de la population qui désire des
écoles autres que catholiques ou protestantes, qui, nous le relevons
à toutes fins utiles, n'existent pas actuellement malgré les
dispositions de la Loi sur l'éducation déjà en
vigueur.
Il est du plus grand intérêt d'assurer une transition
ordonnée et souple du système actuel vers celui envisagé
par la loi no 28, afin d'être sûrs que tous les segments sont
pleinement représentés dès le tout début des
opérations du nouveau système et il est en conséquence
très important de posséder un représentant de ces segments
de la population au sein du Conseil, durant également cette
période transitoire. 9. MUNICIPALITES SCOLAIRES
Nous soumettons que l'organisation scolaire à Montréal
fonctionnerait plus efficacement si le nombre des commissions envisagées
était moindre, pourvoyant ainsi un contrôle plus efficient et
effectif des écoles soumises à la juridiction d'une commission
individuelle.
Nous recommandons qu'une étude subséquente soit
accordée aux recommandations de la Commission d'enquête sur
l'éducation au Québec Commission Parent qui
envisageait seulement sept commissions pour l'île de Montréal.
Au cas où le nombre de onze commissions serait maintenu, tel que
prévu dans la loi no 28, nous recommandons que les limites en soient
modifiées à la lumière de considérations
démographiques et en particulier qu'une portion de la
municipalité scolaire no 4 soit ajoutée à la
municipalité scolaire no 2 qui lui est limitrophe et ce, en vue d'une
administration plus efficiente et plus cohésive des écoles de
cette région.
A l'appui de cette recommandation, nous joignons une copie d'une
étude qui indique la position spécifique des enfants juifs
fréquentant actuellement les écoles protestantes dans cette
région et les avantages y relatifs découlant des changements
proposés. 10. ECOLES PRIVEES
Près de 5,000 enfants juifs représentant 25 à 30
pour cent de la population infantile juive totale fréquentent les
écoles juives diurnes de Montréal, dans lesquelles ils
reçoivent leur instruction générale en sus des cours
d'études de culture et religion juives.
Actuellement, ces écoles jouissent de rapports contractuels avec
la Commission scolaire protestante du Grand Montréal et la Commission
scolaire protestante du Grand St-Martin rendus possibles en vertu de l'article
496 de la Loi sur l'éducation tel qu'amendée en 1967
Nous comprenons que la loi no 28 n'altérera ou
préjudiciera en aucune façon aux dispositions de la Loi sur
l'éducation privée adoptée en 1968, ou à l'article
206 de la Loi sur l'éducation, relativement à l'aide fournie aux
écoles indépendantes dans le domaine du transport des
élèves et à l'article 496 en ce qui concerne les accords
financiers entre les commissions et ces écoles. 11.
CONCLUSIONS
Dans une société multiculturelle, telle que la
nôtre, il n'y a aucun doute qu'une emphase spéciale est
nécessaire sur cet aspect de l'instruction publique qui doit aboutir
à une plus profonde et durable compréhension mutuelle entre les
nombreuses différences religieuses et le maintien de la dualité
linguistique. Nous nous dédions tous à cette fin. Il est de notre
espoir que la nouvelle perspective qui s'annonce actuellement en ce qui
concerne l'organisation scolaire à Montréal apportera une
nouvelle vitalité et force à ces conceptions de base. Le chemin
entre la théorie et la pratique est souvent long, imprécis et pas
clair et des efforts énergiques sont requis afin de s'assurer de la
compréhension, de l'appui et de la confiance de toute la population.
Nous sommes reconnaissants de l'opportunité qui nous est
donnée d'exprimer nos vues et sommes confiants que les problèmes
présentés dans ce mémoire bénéficieront
d'une considération attentive.
Respectueusement soumis de la part du Congrès juif canadien,
région de l'Est.
Nathan Gaisin, Julian Kotler,
Président Président
Congrès Juif Canadien, Comité de Rédaction
Région de l'Est Loi 28
Morton Bessner, Dr. Samuel Lewin,
Président Directeur Exécutif,
Comité sur la Position des Juifs Région de l'Est en
matière du Système Educatif au Québec