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Version préliminaire

43e législature, 1re session
(début : 29 novembre 2022)

Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.

Pour en savoir plus sur le Journal des débats et ses différentes versions

Le mercredi 31 janvier 2024 - Vol. 47 N° 37

Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 47, Loi visant à renforcer la protection des élèves


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Journal des débats

11 h (version non révisée)

(Onze heures vingt-trois minutes)

La Présidente (Mme Dionne) : ...à tous ceux et à toutes. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la culture et de l'éducation ouverte.

La commission est réunie les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 47, Loi visant à renforcer la protection des élèves.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. M. Rivet (Côte-du-Sud) est remplacé par Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac).

La Présidente (Mme Dionne) : Merci beaucoup. Donc, cet avant-midi nous entendrons un groupe, soit la Centrale des syndicats du Québec. Donc, je vous souhaite la bienvenue parmi nous.

Donc, vous disposez de 10 minutes pour nous présenter votre exposé. Suite à cela, nous procéderons aux échanges avec les membres de la commission. Donc, je vous invite à vous présenter et ensuite nous faire part de votre exposé.

M. Gingras (Éric) : Oui. Mais merci beaucoup. Merci de nous accueillir. Donc, je suis accompagné... Éric Gingras, président de la CSQ, accompagné de Nathalie Chabot et Jean-François Piché, tous les deux conseillers, conseillères à la centrale.

Écoutez, simplement un petit rappel, la CSQ regroupe plus de 225 000 membres, dont 135 000 membres notamment dans le secteur scolaire, de l'éducation plutôt, et on a des fédérations autant enseignantes, enseignants, privé, public, mais aussi, bien sûr, nos collègues professionnels et personnels de soutien.

Donc, c'est important de le dire, le projet de loi nous tient à coeur. C'est des situations qui sont beaucoup trop souvent déplorables, qui se produisent malheureusement trop souvent aussi, et c'est une responsabilité que nous avons toutes et tous, donc, de contrer cette réalité-là. Et la CSQ partage totalement l'objectif du projet de loi n° 47 qui vise à renforcer la protection des élèves.

Par contre, et c'est le but de notre intervention d'aujourd'hui, dans un but de construire...

M. Gingras (Éric) : ...quelque chose d'encore mieux, car, pour ce faire, le projet de loi mise sur un resserrement et l'encadrement, et la surveillance du personnel. On croit que cette approche est insuffisante et on croit aussi que, dans sa forme actuelle, le projet de loi pourrait engendrer des problèmes d'interprétation, d'application, et nuire à l'objectif, et c'est ça qu'on va tenter de vous démontrer, et vous proposer certaines alternatives.

M. Piché (Jean-François) : Merci. Alors, je vais poursuivre. Bien, en fait, le projet de loi parle de la notion de comportement pouvant raisonnablement faire craindre pour la sécurité physique ou psychologique d'un élève. Donc, c'est cette expression-là qui est utilisée dans le projet de loi. On pense que celle-ci risque de donner lieu à des diverses interprétations et applications, parce qu'elle est vaste, elle est large et elle peut engendrer des situations subjectives.

Prenons un exemple. On est dans une petite école primaire. Il y a un membre du personnel qui marche dans le corridor, capte une conversation entre une enseignante et un élève. Bon, la conversation est à l'effet que l'enseignante monte un peu le ton, parle à l'élève, mais la personne qui passe dans le corridor et entend la conversation les connaît bien. Elle connaît l'élève, elle connaît l'enseignante, elle dit : Ah! O.K., elle doit, encore une fois, intervenir parce que ça peut être un élève parfois turbulent, dérange la classe, donc elle intervient, il n'y a pas de problème, c'est compréhensible, j'ai l'élément de contexte, je passe tout droit.

Même situation dans une grande école, primaire, cette fois-ci. Là, la personne qui passe dans le corridor, elle est un peu surprise par le ton, les mots utilisés, et là se questionne : Bon, j'ai une obligation de signalement. Elle n'a pas le contexte, elle ne connaît pas l'enseignante, ne connaît pas l'élève, donc elle n'est pas capable d'évaluer. Alors, il se pourrait qu'elle signale, en me disant : J'ai une obligation de signalement, je vais le faire, parce que, raisonnablement, faire... ce n'est pas clair pour moi. Puis là est-ce que ce qui a été dit peut affecter l'élève au niveau de son estime? Bon, donc, la question qui se pose : Est-ce que la première personne a eu raison de ne pas signaler? Sans doute. Elle a été capable de contextualiser. Est-ce que l'autre a eu raison de signaler? Peut-être que oui, peut-être que non. Elle n'a pas l'élément de contexte, comme je le disais, et elle n'est pas capable... elle a de la difficulté à appréhencier ce que ça veut dire, «pouvant raisonnablement faire craindre pour la santé psychologique de l'élève», mais elle le dénonce, parce qu'elle a une obligation de signaler.

Conclusion : un libellé aussi vaste et imprécis peut conduire à de multiples faux signalements, qu'il sera long... qui seront, alors, prendre de vue... qui perdent de vue les situations réelles qu'il faut dénoncer, et on pense que ça peut, donc, entraîner une judiciarisation et une certaine méfiance. Donc, c'est ce qu'on craint, et c'est là tout le contraire de ce qu'on cherche à faire avec le p.l. n° 47, protéger les élèves, puis avoir des situations claires où, là, il faut intervenir. Donc, important de clarifier davantage ce qu'on entend par l'expression «pouvant raisonnablement faire craindre pour la santé physique et psychologique d'un élève». Nous proposons que ce travail de clarification là soit fait en concertation avec les acteurs scolaires concernés, pour développer une compréhension commune et, ainsi, favoriser l'adhésion à ça. Donc, à la fois, la révision du guide du ministre, relative aux antécédents judiciaires, va être une occasion pour clarifier ça, et la révision, également, des codes d'éthique que le projet de loi suggère, qui sont rendus obligatoires, serait une bonne occasion, aussi, de faire cette interprétation-là, et c'est en ce sens que la recommandation 1 de notre mémoire est à l'effet. Éric?

M. Gingras (Éric) : Concernant les clauses d'amnistie, écoutez, c'est un sujet qui a été repris à maintes et maintes fois, et on voit dans la jurisprudence, très clairement, que la notion de clauses d'amnistie sert à s'amender. C'est comme ça qu'est construit, d'ailleurs, notre système de justice. La notion de pardon, de réhabilitation, c'est une pierre d'assise de ce qu'on retrouve, là, à plusieurs endroits. Si on garde le texte tel qu'il est, ça voudrait dire qu'une personne qui agresse un citoyen, qui agresse dans la rue, un enfant peut recevoir un pardon, mais si c'est un membre du personnel, bien, à ce moment-là, lorsqu'il y a un élément de cet ordre-là, ça le suit tout le temps, et cet élément là, donc, après 10, 12, 15 ans. D'autant plus que, en fonction de la gravité du geste posé, on n'a pas besoin de suivre la gradation des sanctions. On peut aller directement avec que ce soit un congédiement ou que ce soit quelque chose de plus imposant. Donc, ça, c'est important.

Et le fait d'enlever les clauses d'amnistie, c'est une façon, aussi, de ne pas amener cette possibilité d'amendement, et, surtout, de s'amender, et, surtout, on enlève l'accent mis sur le soutien et la prévention, car, ça aussi, dans beaucoup de jurisprudences, que vient dire les clauses d'amnistie, c'est la...

M. Gingras (Éric) : ...justement, qu'on amène, on oblige l'aspect soutien et de prévention pour ne plus que ça se reproduise. Ça, c'est important de le mentionner. Et finalement rappeler aussi que... rappeler aussi que dans le projet de loi n° 42, on a proposé donc un délai de cinq ans pour les... les gestes à caractère... de violence, pardon, à caractère sexuel, parce que c'est un cas particulier qu'il faut être en mesure de contrer cette culture-là. Mais pour ce qui est du projet de loi n° 47, étant donné la très large définition qu'on peut faire du comportement pouvant raisonnablement faire craindre, bien, ce qu'on propose, c'est de s'en remettre aux discussions des parties au niveau local pour parler de la durée, des mesures de soutien, de l'encadrement de tout ça. Et notre proposition 10 vient d'ailleurs encadrer une période pour le faire. C'est donc une façon d'utiliser la réalité des multiples circonstances qui peut se... qui peut se produire pour nous permettre justement de mieux l'encadrer et non pas de faire du mur à mur, ce qu'on ne veut pas faire, étant donné la largeur, la largesse qu'amène la notion qui nous est présentée.

• (11 h 30) •

Mme Chabot (Nathalie) :Alors, je poursuis. Le projet de loi comporte deux obligations de signalement. La première, c'est une obligation pour le personnel de signaler tout manquement au code d'éthique qui peut faire... raisonnablement faire craindre pour la sécurité physique et psychologique des élèves. Alors, on comprend l'intention de protéger les élèves à l'aide de cette disposition. Mais cette obligation pourrait avoir des revers comme la multiplication de signalements, les gens préférant ne pas prendre de risque et signaler plus que moins, étant donné l'étendue ou l'élasticité de la notion de base du projet de loi. Donc, les cas réellement urgents pourraient être noyés à travers des cas qui finalement s'avéreraient non fondés. Cette multiplication de signalements, elle pourrait aussi être encouragée par le fait que le projet de loi, il est muet quant à ce qui peut se produire si une personne ne signale pas un comportement parce qu'elle a jugé en toute bonne foi qu'il ne faisait pas raisonnablement craindre pour la sécurité des élèves.

Par ailleurs, des mesures de protection contre les représailles pour les personnes qui signalent un comportement sont essentielles, comme ça a été d'ailleurs discuté hier dans vos échanges. Donc, on propose que de telles mesures de protection contre les représailles soient ajoutées dans le projet de loi. Une seconde obligation de signalement au ministre, cette fois, est faite à tout employé qui a un motif raisonnable de croire qu'un enseignant a commis une faute grave dans l'exercice de ses fonctions ou un acte dérogatoire à la dignité et à l'honneur, mettant en cause un comportement pouvant raisonnablement faire craindre. Comme on vient de l'évoquer, il y a déjà une obligation de signalement pour tous les membres du personnel à travers le code d'éthique. Ça fait que, dans un souci de simplification des processus, parce qu'on partage aussi les craintes qui ont été soulevées hier quant à la multiplication des recours puis les risques de confusion. Donc, dans un souci de simplification, mais aussi dans un souci de partage des responsabilités, on est d'avis qu'il n'est pas nécessaire d'ajouter cette obligation-là. On croit qu'il revient aux directions, aux cadres des centres de services scolaires et des établissements privés qui reçoivent les signalements en vertu du code d'éthique, de juger de la gravité de la situation. Et.

La Présidente (Mme Dionne) : ...en terminant. Mme Chabot.

Mme Chabot (Nathalie) :Ah! de...

La Présidente (Mme Dionne) : Il reste 10 secondes.

Mme Chabot (Nathalie) :Je laisse le dernier mot à Éric.

M. Gingras (Éric) : Simplement vous dire que ça passe par la prévention aussi, bien sûr, et la responsabilité de l'employeur de contrer aussi ces éléments-là.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci infiniment pour cet exposé. Donc, nous allons procéder aux échanges avec les membres de la commission. Donc, M. le ministre, je vous cède la parole.

M. Drainville : Oui, merci beaucoup pour cette intervention. Merci de participer à nos échanges, c'est très apprécié. D'abord, je veux juste vous dire, par rapport à la définition, là, du comportement pouvant faire craindre ou pouvant raisonnablement faire craindre pour la sécurité physique et psychologique, je veux juste vous dire : J'ai ici devant moi le guide sur les antécédents judiciaires, sur la vérification des antécédents judiciaires. À la page 22, on donne des exemples, là, d'infractions susceptibles de retenir l'attention, puis là, on a des exemples, donc, d'antécédents judiciaires. Notre intention, c'est de donner des exemples comme ceux-là pour les comportements pouvant faire craindre pour la sécurité physique et psychologique des élèves. Donc, on est...


 
 

11 h 30 (version non révisée)

M. Drainville : ...est conscients du fait qu'il faut faire un... comment dire, acte de vulgarisation et donc, de cette manière-là, faciliter la mise en œuvre du projet de loi. Donc, ça fait partie des changements que nous allons souhaiter apporter dans le nouveau guide, dans le fond, parce que là, on va... on va avoir un nouveau guide qui va couvrir à la fois les antécédents judiciaires, mais plus largement, les comportements pouvant faire craindre pour la sécurité physique et psychologique des élèves.

L'autre chose sur laquelle je voulais attirer votre attention sur la protection, vous y avez fait référence. Vous avez fait référence au fait, Mme Chabot... On prononce bien Chabot? Chabot? Ça va, Chabot? Pas Chabot, Chabot?

Mme Chabot (Nathalie) :...

M. Drainville : Chabot. Très bien. Alors, vous aviez raison de dire... Je vois que vous avez suivi avec attention nos travaux hier, et donc vous avez raison de noter qu'on va devoir réfléchir à une façon de mieux protéger les personnes qui pourraient dénoncer, ou qui pourraient signaler, ou porter plainte contre d'éventuelles mesures de représailles. Alors, là-dessus aussi, on a du travail à faire. Le projet de loi peut être bonifié, les consultations servent à ça, donc on va travailler là-dessus.

Bon, sur la question des amnisties, des clauses d'amnistie, bon, comme vous le savez, vous n'êtes pas les premiers à souligner ou à porter à notre attention un questionnement, sinon une inquiétude, mais je vais vous dire franchement : Jusqu'à maintenant, je n'ai pas entendu d'arguments qui m'ont convaincu de ne pas aller de l'avant dans ce qui est prévu par le projet de loi. Et je ne dis pas que les arguments que vous soulevez ne sont pas valables, ce n'est pas ça que je dis, là. Je respecte très bien l'argumentaire que vous soulevez, mais je... je pense sincèrement qu'il faut porter et qu'il faut poser, dis-je, des gestes forts pour mieux protéger nos élèves dans le contexte scolaire actuel. Et donc je pense que sur les clauses d'amnistie, il n'y a pas de... il n'y a pas de compromis à faire. Je pense sincèrement que, quelqu'un qui a posé des gestes répréhensibles envers les enfants, ces gestes-là ne doivent pas être effacés de son dossier après une certaine période de temps. Je suis convaincu de ça. Alors, je ne sais pas si vous souhaitez réagir, M. Gingras. Peut-être, ou M. Piché...

M. Gingras (Éric) : Bien...

M. Drainville : ...qui en a parlé.

M. Gingras (Éric) : Bien, je vous dirais : Oui, j'aimerais ça réagir, mais... mais je comprends que je ne vous ferai pas changer d'idée.

Par contre, l'enjeu, la réalité de ce qui se passe dans les milieux, là, c'est que la façon qui est écrit le texte, c'est que 10, 12, 15 ans plus tard, alors que la personne s'est amendée, on peut y faire référence pour x raisons. Puis la réalité du milieu, c'est que les gens se parlent, il se passe des choses. Quelqu'un à la retraite dit : Ah! j'ai déjà entendu ce nom-là. Il y fait référence. C'est ce genre de choses là qu'on veut... qu'on veut éviter, parce qu'on voit, là, même... Parce que là vous comprenez qu'on fait plusieurs projets de loi en même temps, là, et hier, on était sur p.l. 47...

M. Drainville : ...

M. Gingras (Éric) : 42, oui. Désolé, je me mélange, M. le ministre. Mais à plusieurs endroits, on note l'importance de se réhabiliter, à plusieurs endroits, même quand on vient parler des lois sur la construction pour... pour permettre de ramener des gens au travail. On dit :  Bien, on devra faire attention au casier judiciaire puis... Donc, tout ça, cette notion-là au Québec est utilisée, mais dans votre projet de loi... Et bien conscient qu'il faut protéger les enfants, puis on est là pour ça, on reconnaît, mais il y a une limite qu'on ne peut pas passer, puis on pense qu'avec... les clauses d'amnistie... Puis je veux vous ramener, là, on ne dit pas de biffer, hein, ce qu'on dit de notre côté, c'est qu'on veut envoyer ça au local pour qu'il y ait une discussion sur la portée, sur la durée. On pense qu'au Québec le mur-à-mur n'est pas nécessaire tout le temps.

M. Drainville : ...M. Gingras que le local nous a bien servi en cette matière? Parce que les... les... les écarts d'une convention collective locale à une autre sont parfois très importants. Dans certains cas, la faute est effacée après quelques semaines, quelques mois, dans certains cas, la période est beaucoup plus longue. Et sur un enjeu comme celui-là, il me semble que... Encore une fois, je... je ne vois...

M. Drainville : ...pas comment on peut accepter, comme société... avec toutes les histoires qu'on a vécues ces derniers... dernières années, derniers mois, dernières années, je ne vois pas comment on peut accepter qu'il y ait autant de différences d'une convention collective à l'autre quand on parle de la protection des enfants, je...

Alors, on m'écrit ici, c'est de six mois à cinq ans actuellement. Dans certaines conventions collectives locales, la faute disparaît du dossier après six mois. Dans d'autres cas, ça peut aller jusqu'à cinq ans. Est-ce que vous êtes à l'aise avec ça, M. Gingras?

• (11 h 40) •

M. Gingras (Éric) : Écoutez, juste avant... je vais laisser mon collègue aussi y aller, mais je vous rappelle que, dans notre mémoire, on propose des balises aussi. On dit qu'il faut que les... il y ait une discussion entre les parties puis on donne certains points. On pense vraiment que la notion de réhabilitation ne doit pas être tassée, et, avec ce qui est proposé, on le met complètement à côté. Donc, comment trouver un juste milieu? Alors, est-ce que ce qu'on propose... matière à discussion, c'est pour ça qu'on l'amène au local, avec certaines balises. Je vais laisser mon collègue continuer.

M. Piché (Jean-François) : Dans les milieux de travail, il peut arriver toutes sortes de situations. Là, évidemment, quand on pense à un projet de loi n° 47 et on a en tête une agression physique qui est totalement inacceptable, évidemment... et là, quand ça se produit, on espère que ça ne se produira pas, mais on est là pour se dire que ça peut arriver, malheureusement, un employeur, face à une agression claire, va pouvoir passer directement au congédiement, là. La présence d'une clause d'amnistie ne l'empêchera pas de faire ça.

D'autre part, on a probablement... on va avoir probablement dans les milieux de travail, dans les... dans les établissements et les centres de services scolaires.... faire face à des situations où ça va être un peu limite, des paroles prononcées, on se dit : Ce n'était peut-être pas approprié. Et là est-ce qu'on va marquer ça à vie? C'est là où on a un bémol. C'est toutes ces situations-là où il se produit des gestes qui sont regrettables mais qu'on permet à la personne de s'amender parce qu'on se dit : Écoute, ce n'était pas acceptable ce que tu as fait, mais... donc il y a une trace à ton dossier, mais, si tu... si ça va bien dans les... dans les prochaines années, on va... on va effacer. C'est à ça qu'on réfère. On ne réfère pas d'effacer un geste brutal, une violence claire et nette, ce n'est pas ça, là, où ça, l'employeur a suffisamment d'outils pour aller au congédiement direct, même s'il n'y a pas eu de mesure avant, même si l'employé fautif n'a pas commis d'autres actes avant. Donc...

M. Drainville : Mais, si vous me permettez, M. Piché, de vous interrompre, nous, les rapports que nous avons, notamment des parents, c'est que les clauses disparaissent puis il n'y a eu aucune forme d'amendement de la personne qui avait commis une faute pour laquelle son dossier avait été modifié, là, une faute qui avait mené donc à une forme de sanction, peut-être, là, dans certains cas, bon, bien,  la sanction est disparue du dossier, puis l'employé ne s'est jamais amendé, ça a continué, tu sais, il n'y a jamais eu de... En tout cas, c'est des témoignages qu'on nous rapporte. En d'autres mots, c'est arrivé, là, selon des témoignages que nous avons, qui sont tout à fait crédibles, que ce processus de réhabilitation dont vous vous réclamez ne se vérifie pas, ne se confirme pas. La personne sait... parce qu'elle a la convention collective locale, elle sait qu'après quelques mois la faute va disparaître de son dossier. Ça fait que j'imagine que, dans certains cas, tu te tiens tranquille, tu fais attention puis tu sais qu'au bout de quelques mois on recommence à zéro, c'est la... c'est la page vierge. Alors, c'est la réalité qu'on nous rapporte.

M. Gingras (Éric) : Est-ce que tu veux y aller rapidement?

M. Piché (Jean-François) : Oui, bien, rapidement, est-ce que les parties locales, parce qu'on ramène toujours aux parties locales, pourraient peut-être décider de dire : Bien, lorsque ça se produira, des gestes qui ne méritent pas un congédiement directement... des mesures mises en place destinées aux personnes qui ont commis les fautes de se réhabiliter, un processus interne par lequel la personne va devoir réfléchir, va devoir faire un... je ne sais pas, moi, des démarches pour reconnaître que son comportement est inapproprié et s'amender? Je pense que, là, les milieux de travail peuvent avoir des outils en ce sens aussi.

M. Gingras (Éric) : Et vous apportez l'exemple de paroles de... qui vous sont rapportées, puis impossible non plus pour moi de vous dire que ce n'est pas vrai, là, mais la réalité... Présentement, je suis président de la CSQ, mais j'ai été président d'une organisation locale sur la Rive-Sud de Montréal qui représentait 10 000... qui représente encore 10 000 membres...

M. Drainville : On a fait des entrevues, vous et moi, d'ailleurs...

M. Drainville : ...à ce titre?

M. Gingras (Éric) : C'est déjà arrivé, c'est déjà arrivé. Mais la réalité, là, c'est que les éléments dont vous parlez... Écoutez, un parent... Lorsqu'arrive cette clause d'amnistie en jeu, ça peut se passer sur plusieurs années, là, vous l'avez dit vous-même, entre six mois et cinq ans, là, le parent dit : Il ne s'est rien passé, mais moi, je vous dirais : Ce n'est pas tout à fait vrai. Donc, c'est pour cette raison, je pense que là, on essaie complètement de tasser la notion de réhabilitation.

Alors, ce qu'on vous ramène, c'est l'idée de dire : on comprend où vous voulez aller, on comprend le fait qu'il y a quelque chose à travailler, parce que, pour certains gestes... Puis on le reconnaît, on dit même que... c'est un syndicat qui vous dit, on dit même que, pour certains gestes, pas de gradation des sanctions, puis allons-y directement avec une sanction plus importante.

M. Drainville : De congédiement...

M. Gingras (Éric) : Pouvant aller jusqu'au congédiement, bien sûr. On ne défendra jamais l'indéfendable. Par contre, la notion de réhabilitation doit rester. Et là, le projet de loi le... l'enlève complètement. C'est davantage ça.

Peut-être tu voulais ajouter quelque chose?

Mme Chabot (Nathalie) :Bien, simplement l'importance des mesures, justement, mises en place pour favoriser cette réhabilitation-là, dans une optique aussi de prévenir la répétition de ces... de ces comportements malheureux. Donc, c'est là tout le sens de la notion de réhabilitation puis c'est ça qu'on veut conserver. Puis, s'il y a de quoi à faire de plus, bien, mettons des mesures pour s'assurer que ça ne se reproduise pas.

M. Drainville : Il me reste combien de temps, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Dionne) : Il vous reste 4 minutes, M. le ministre.

M. Drainville : Vous nous faites une suggestion, votre recommandation six, vous proposez, dans le fond, que le signalement se fasse par le centre de services scolaire plutôt que par la personne qui aurait observé, donc, un comportement mettant en danger la sécurité de l'enfant. Alors, ce que l'on dit actuellement, nous, c'est que, s'il y a un tel comportement qui est observé par un employé de centre de services scolaire, bien, à ce moment-là, s'il voit qu'un enseignant a commis une faute grave, il doit signaler sans délai la situation au ministre. Vous, vous souhaitez un changement à cette disposition. Expliquez-nous le sens de la proposition que vous faites.

Mme Chabot (Nathalie) :Oui. Bien, dans le fond, ce qu'on dit, c'est il y a déjà une obligation de signalement à travers le code d'éthique pour tout comportement pouvant raisonnablement faire craindre pour la sécurité. On a...

M. Drainville : ...au centre de services scolaire, dans ce cas-ci.

Mme Chabot (Nathalie) :Au centre de services scolaire, c'est ça, exactement. Donc, on ne voit pas la nécessité. Parce que, dans notre mémoire, on a aussi... on n'en a pas parlé, mais on a une section aussi sur la multitude de voies possibles pour faire des signalements, qui peuvent entraîner de la confusion, à un moment donné, chez les gens. Puis ça... ça a été relevé d'ailleurs dans le rapport d'enquête administrative, les gens ne savent plus à quelle porte cogner. Donc, il y a déjà une obligation de signalement, à travers le code d'éthique, auprès du centre de services scolaire.

Ça fait que nous, ce qu'on dit, c'est : simplifions les choses, les gens, ils l'ont, l'obligation, alors qu'ils le fassent auprès de leur direction, de leur centre de services scolaire. Et là, eux, les cadres, les directions, les cadres en charge du traitement des plaintes, des signalements, seront, premièrement, beaucoup plus à même de juger si le cas dont il est question est suffisamment grave pour être référé au ministre. Parce que ce n'est pas si évident pour tout le monde, de pouvoir juger de ça, surtout avec une notion aussi large que celle qu'on a dans le projet de loi. Donc, ces gens-là, ils sont plus habitués, ils sont plus habilités à poser un jugement.

Et l'autre chose, c'est que ça peut être peut-être plus facile d'en parler à sa direction ou à son centre de services scolaire que se dire : Oh! il faut que je le dise au ministre, comment je fais ça, par où, par quelle porte je fais ça? Donc, il y a l'obligation, ça se fait à l'établissement, au centre... ou au centre de services scolaire, ensuite, ça chemine au ministre, si c'est... si c'est nécessaire. Et là, là le ministre peut déclencher une enquête après avoir vérifié les renseignements, tel que prévu dans le projet de loi.

M. Drainville : O.K., je comprends votre... Je comprends la logique de votre proposition. Mais je ne veux pas qu'on s'obstine, là, comme dirait l'autre, mais vous êtes conscients du fait que, dans le cas de 262, c'est en lien avec l'article 26 de la Loi sur l'instruction publique, là, c'est le mécanisme qui permet au ministre de déclencher un comité d'enquête qui pourrait... qui pourra ou qui pourrait recommander soit la...

M. Drainville : ...ou même la révocation du brevet, ou rien du tout, là, ça arrive, ça aussi, évidemment. Donc, c'est... L'article 262 se situe dans le prolongement de l'article 26, on s'entend là-dessus. Très bien. Oui, c'est ça, c'est en lien avec mes fonctions vis-à-vis les autorisations d'enseigner, puisque c'est le ministre qui délivre les autorisations d'enseigner, donc le brevet, l'autorisation provisoire d'enseigner et le permis probatoire.

La Présidente (Mme Dionne) : En 10 secondes, M. le ministre.

M. Drainville : Bon, bien, 10 secondes, assez pour vous remercier de vous être déplacés et vous remercier pour votre état d'esprit très constructif. Merci.

• (11 h 50) •

La Présidente (Mme Dionne) : Merci beaucoup pour ces échanges. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Saint-Laurent.

Mme Rizqy : Merci beaucoup. Bonjour et bienvenue parmi nous. Juste pour revenir, parce que... Dans les fautes qui peuvent être commises, là, dans la jurisprudence et dans... pour aller dans un congédiement, on parle d'une faute grave, là, c'est... puis, des fois, on n'a pas les critères. Puis, nous, comme législateurs... demain matin, là, moi, je ne peux pas commencer à imposer qu'est-ce que moi, personnellement, je considère une faute grave. Je vais vous donner quelques exemples. Évidemment, quand on est dans un cas d'agression sexuelle, là, c'est assez une faute grave, là, pour tout le monde. La jurisprudence là-dessus est assez claire.

Par contre, hier, j'ai donné en exemple des sextos graphiques : pêches, aubergines. Nous, les adultes, on comprend ça assez vite, mais les jeunes aussi comprennent assez vite. Là, première offense. Ce n'est peut-être pas assez grave pour mener à un congédiement, mais à une suspension, mais ça reste à caractère sexuel. Et, disons que la personne, par la suite, on apprend, texte le soir un élève, entre 22 h et 2 h du matin, ce qui est complètement inapproprié. Ça ne sera pas considéré une faute grave pour le congédiement, mais c'est quand même quelque chose qui est important. Et c'est là qu'on veut appliquer la gradation des sanctions. Je veux dire, ce n'est pas la première fois. Une fois, il a traversé la ligne, mais là, cette fois-ci, il a été assez intelligent, la personne... la personne a été assez intelligente pour ne pas traverser la ligne de sens graphique, mais continue d'entretenir cette relation, et c'est quand même très difficile, à ce moment-là, de protéger.

Moi, ma question... est-ce qu'on devrait plutôt... J'ai l'impression que, pour vous... puis peut-être parce que le projet de loi ne le mentionne pas clairement qu'on vise des déviances à caractère sexuel, ce n'est pas marqué nulle part, violences à caractère sexuel. Est-ce qu'on devrait circonscrire que qu'est-ce qu'on veut vraiment enlever, c'est l'amnistie en matière de tout ce qui est à connotation sexuelle, mais aussi les violences physiques, psychologiques? Je ne parle pas, ici, par exemple, d'un impair qui a été commis au travail, que, par exemple, la personne arrive très souvent en retard, là, ce n'est pas ça que je vise, là, mais vraiment lorsqu'on parle de l'intégrité physique et psychologique d'un élève, là.

M. Gingras (Éric) : Bien, écoutez, je pense qu'on a démontré, puis je vais juste vous le rappeler, comme j'ai dit, on a plusieurs commissions, mais, lorsqu'on parle de violences à caractère sexuel, on reconnaît la gravité, au niveau de la CSQ, et on reconnaît que ça doit être traité à part. Et c'est pour cette raison-là qu'on a parlé, dans l'autre projet de loi, de la notion de cinq ans. Puis, soi dit en passant...

Mme Rizqy : La notion de quoi?

M. Gingras (Éric) : La notion d'avoir une amnistie, mais sur cinq ans, donc de permettre quand même de les garder, mais pendant cinq ans, donc de prolonger la période. Puis je vais juste terminer avec ça parce que, même le trio d'expertes, là, qui avait été mandatées par le gouvernement est venu confirmer, même, hier, en commission parlementaire, que, malgré tout, malgré l'importance des gestes à caractère sexuel, des violences à caractère sexuel, ça prend quand même un délai. C'est comme ça qu'est construit notre droit, et, dans ce sens-là, non seulement il faut être en mesure de circonscrire certains éléments, vous le nommez très bien, mais il faut être en mesure quand même de garder un certain délai.

Et c'est là qu'on arrive, où on se dit : Bien, au niveau de la violence à caractère sexuel, là, à ce moment-là, bien, on vient augmenter puis, quand on arrive avec les éléments... qui est très large, avec notamment comportement pouvant raisonnablement faire craindre, bien là, on dit : Je pense qu'il y a une discussion à avoir, puis se dire, bien, effectivement... et on donne un cadre, donc des moments, d'avoir cette discussion-là, qu'est-ce que ça doit inclure.

Puis ça m'amène à rappeler qu'on dit même aussi qu'on devrait y mettre aussi toute la notion de réhabilitation, ce qu'on veut. Donc, on vient le faire, donc, ici, le ministre tantôt disait que, des fois, ça ne se produit pas, on vient l'ajouter dans notre cadre qu'on propose.

Mme Rizqy : O.K., parce que... Deux choses. C'est parce que la notion de raisonnablement craindre, ça, c'est pour un autre article. Au niveau des clauses d'amnistie, c'est vraiment : la faute a été commise. Puis même, par exemple, lorsqu'une personne fait une demande de pardon en matière de...

Mme Rizqy : ...sexuel, ça reste quand même dans le dossier pour... Lorsqu'on demande une absence d'empêchement qui vise des personnes vulnérables, automatiquement, ça va être indiqué. Donc, même au niveau, là, criminel, lorsque c'est caractère sexuel, ça ne disparaît pas... en fait, ça ne disparaît jamais, là, lorsqu'on ça vise les personnes vulnérables, et, dans les vulnérables, évidemment, ce sont les mineurs et les personnes aînées. Peut-être que, là-dessus, moi, je suis plus trop fort, casse pas, là, je suis comme ça dans... pour... parce qu'honnêtement on a eu trop de cas.

Puis vous, vous représentez les TES notamment, pas juste les TES, mais les techniciens en éducation spécialisée. Eux voient plusieurs élèves, ils ne sont pas juste dans une classe, alors souvent c'est eux qui recueillent le témoignage. Puis, de ce que moi, j'ai entendu, c'est qu'ils dénoncent à... disons, à la direction. On fait un signalement, après ça, plus rien. Et, eux, ça crée de la frustration parce qu'ils... ils ne savent plus... O.K., mais pourquoi qu'il n'est pas arrivé quelque chose? Puis, après ça, on apprend que la personne qui a été dénoncée, elle est rendue dans une autre école, a été changée de place. Et j'ai l'impression que, même pour vos membres, c'est important de savoir que le ménage est fait correctement, parce que malheureusement il y a des gens qui ne sont pas à la bonne place, que ce n'est pas leur place à l'école avec des mineurs et qui savent profiter du système. Puis moi, je vous le dis, la très, très grande majorité, là, on n'aura pas de problème avec ça. J'ai l'impression que c'est une infime... que c'est une minorité, là, mais qui savent pertinemment quand le compteur arrête puis quand est-ce qu'ils peuvent recommencer leur stratagème.

M. Gingras (Éric) : Mais c'est pour cette raison-là qu'on va dans le sens aussi de... lorsque la faute est rapportée à la direction, par exemple, comme vous nommez les TES qui le font, bien là, on dit que, l'obligation, on ne remet pas en question l'obligation de le dire au ministre à ce moment-là pour qu'il se passe quelque chose. Donc, c'est vraiment ce qu'on a cherché à faire dans le mémoire proposé, c'est de regarder l'ensemble, bien sûr, de ce qui nous... de ce qui était sur la table, mais d'avoir un certain équilibre en fonction des gestes posés, en fonction des réalités aussi du terrain. Parce que c'est certain qu'on aborde les cas les plus graves, puis je pense qu'il faut... Puis, quand on parle de grave, on parle de... souvent de séquelles et non pas simplement du geste qui va... qui va amener, en relation de travail, un congédiement. Ça, on peut dire que c'est... La notion de grave, ça, c'est ce que vous disiez, mais la notion de grave, c'est sur l'impact sur les jeunes. Donc, c'est pour ça qu'on cherche à l'encadrer, et non pas minimiser, mais à aller chercher, là, quelque chose qui nous permet d'avoir un certain équilibre. Et c'est ça qu'on fait dans l'ensemble du mémoire, là.

Mme Rizqy : Puis certains de vos membres, tu sais, c'est sûr, sur les réseaux sociaux, ils nous communiquent, disent la chose suivante : Moi, je n'ai eu aucun support une fois que j'ai dénoncé, que j'ai pris mon courage, je suis allé dénoncer. Puis ces gens-là recueillent des témoignages assez bouleversants et, des fois, quand ils sentent qu'il y a eu de l'impunité ou qu'il n'y a pas eu... en fait, d'arrêt d'agir pour mieux protéger les jeunes... Puis, rendu dans les autres écoles, eux autres, ça vient les chercher. Ils ont un sentiment qu'on n'est pas allé au bout des choses, on n'a pas correctement... Alors, ils portent ce fardeau aussi entre eux. Mais ce n'est pas eux, la victime, ça devient des victimes collatérales. Et, s'ils osent poser une question de suivi, on leur dit : Mêle-toi de tes affaires. Alors, il y a ça aussi qui est comme un enjeu, mais il me semble qu'on devrait mieux accompagner ceux qui vont dénoncer.

Mme Chabot (Nathalie) :Tout à fait. Ce que vous dites, c'est important parce que c'est toute la notion de prise en charge aussi de la personne qui connaît des gestes malheureux, des gestes qui ne devraient pas être commis. Et c'est pour ça qu'on insiste dans notre mémoire pour dire : Il faut en mettre en place, des mesures qui vont... qui vont aider la personne, là, de manière à ce que ça ne se reproduise pas. C'est sûr, ça ne suffit pas, là, de dire : Bien, on va... on va changer la personne d'école, comme dans l'exemple que vous dites, là. Donc, ça, c'est un... Ça, c'est très important. Puis là on est dans la prise en charge, et ce n'est pas les... Les clauses d'amnistie, elles ne vont pas empêcher cette prise en charge. Ça fait qu'il y a quelque chose, là, il y a une faille, là, à travailler, puis c'est pour ça que, dans notre recommandation, on dit : Il faut regarder les mesures à mettre en place et... c'est ça. Puis, oui, effectivement, les personnes qui signalent, on parlait tantôt de mettre en place des protections contre les représailles, mais aussi c'est vrai qu'il ne faut pas les laisser comme ça dans le vide, sans suivi, là. Je pense que ça, ça... c'est important aussi.

M. Gingras (Éric) : Et peut-être, peut-être juste ajouter, là, aussi, il y a deux éléments. Parce qu'on parle l'importance, donc, de la prévention, l'importance de l'encadrement, mais l'importance de la responsabilité de l'employeur aussi, hein, la responsabilité de l'employeur d'offrir un milieu exempt de violence, là, ce n'est pas... ce n'est pas n'importe quoi. Donc, ce qu'on veut, c'est qu'ils puissent continuer à avoir cette obligation-là. Et, bien souvent, si on dit qu'on ne donne pas suite, bien...

M. Gingras (Éric) : ...souvent, c'est parce qu'on préfère mettre ça en dessous du tapis. Donc, la responsabilité de l'employeur est primordiale. Et moi, je vous dirais que l'ensemble de nos membres vont être bien contents d'avoir un employeur qui va réellement s'occuper de ces enjeux-là. Donc, c'est pour cette raison-là que cet aspect-là devient très important. Puis ma collègue le disait, là, le but de notre mémoire, c'est d'être en mesure d'avoir cette équipe... cet équilibre-là, de permettre à l'employeur, justement, de prendre ses responsabilités. Et ça, c'est... c'est vraiment le message qu'on veut aussi... aussi envoyer, là.

• (12 heures) •

Mme Rizqy : Et ce qu'on ne dit pas... J'ai deux questions en terminant. On ne mentionne pas les... les actes dérogatoires, élèves entre élèves, élèves envers le personnel, et on ne mentionne pas non plus tout le volet sportif qui se passe dans les plateaux sportifs qui appartiennent aux écoles. C'est les mêmes élèves, sur le même gymnase. Et tout à coup, les fédérations sportives ne sont pas visées alors qu'ils rentrent en contact avec des élèves et que ça peut très bien arriver que ce soit un... un de vos membres qui reçoit le témoignage qu'il est arrivé telle chose avec son entraîneur. Donc, est-ce qu'on ouvre puis on ratisse beaucoup plus large et on s'assure de couvrir aussi ces aspects-là?

Deuxième question. Moi, j'aimerais ça qu'un jour qu'on m'explique comment ça va... Reprenons l'exemple de la classe... la classe à Chantal, où est ce qu'elle criait tellement fort que tu dis que c'est impossible que personne ne m'ait entendu. Mais est ce que c'est possible que tout le monde... beaucoup de monde l'ont entendu, mais se sont dit : Bien, la direction aussi est supposée de l'entendre tellement que... que ce n'était pas la première fois. Pourquoi qu'il n'y a pas eu un arrêt d'agir? Pourquoi qu'il n'y a pas eu de... Justement, la prévention ou... Parce qu'à un moment donné c'était rendu tellement fort, pourquoi que les gens n'ont parlé? Est-ce que c'est parce qu'ils ont tous eu peur de parler?

M. Gingras (Éric) : ÀBien, à votre dernier élément, là, je pense que ma collègue va pouvoir vous répondre sur élargir, mais... Mais pour ce qui est du dernier élément, moi, je vous... je vous dirais que j'ai à intervenir publiquement beaucoup sur ces notions-là, puis c'est tolérance zéro, là, qui devrait être prônée par l'ensemble de la société.

Une voix : ...

Mme Rizqy : Moi, la tolérance zéro, je l'ai vue dans plein d'affiches.

M. Gingras (Éric) : Oui.

Mme Rizqy : Je ne l'ai jamais constaté sur le terrain.

M. Gingras (Éric) : Oui, mais c'est là que je vous dis... Et ça passe notamment par le rôle de l'employeur de ne pas minimiser ce qui se passe. Et bien souvent les membres tentent de faire des interventions, et des fois, oui, ils vont préférer fermer la porte de leur classe parce qu'ils vont se dire : Bien, c'est à l'employeur aussi de le faire. C'est ce message-là aussi qui est... qui est donné. Donc, la tolérance... Mais je dirais qu'on le voit par écrit, mais je vous dirais que ça prendrait un réveil de la société en général aussi, là, pour bien le comprendre, pas juste dans les écoles, mais dans l'ensemble des milieux, là. Veux-tu...

Mme Chabot (Nathalie) :Oui. Pour ce qui est d'étendre par exemple tout le volet sportif ou... Effectivement, le projet de loi ouvre déjà pour d'autres personnes que le personnel. Mais, oui, pourquoi ne pas aller jusqu'au bout, jusqu'au bout de l'oeuvre? Effectivement, c'est tout à fait pertinent.

La Présidente (Mme Dionne) : En terminant, Mme Chabot.

Mme Chabot (Nathalie) :Ah! O.K. Je termine.

La Présidente (Mme Dionne) : Désolée. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Mercier.

Mme Ghazal : Bien, merci. Merci beaucoup pour votre présentation. On a quatre minutes, c'est ça? Quatre ou trois, je ne sais plus.

La Présidente (Mme Dionne) : Quatre minutes exactement, oui.

Mme Ghazal : Par rapport aux clauses d'amnistie, là, j'écoute ce que vous dites, puis j'ai lu ce que vous avez écrit dans votre mémoire, est ce que ça veut dire que vous... Vous dites qu'il faut qu'il y ait aussi une culture de la prévention. Ça ne peut pas être juste sur les épaules des individus. Mais les clauses d'amnistie, c'est important, là. Si quelqu'un a fait un comportement grave ou qui a amené de la violence, par exemple, avec un élève et tout ça. Puis vous parlez d'un processus de réhabilitation, pas juste l'effacer comme ça parce que le délai est terminé. Ça serait quoi par exemple? Comment est-ce qu'on... Ça serait quoi, un processus de réhabilitation? Puis comment est-ce qu'on peut s'assurer qu'il a été effectif? Est-ce que c'est quelque chose qu'on mettrait dans le dossier de l'employé? Est-ce que c'est une formation? Concrètement, ça veut dire quoi puis comment est ce qu'on peut s'en assurer?

M. Piché (Jean-François) : Bien, pour des... Pour une réhabilitation, ce qu'on peut penser dans les milieux de travail, il y a des programmes d'aide aux employés qui peuvent servir à ça. Donc, que l'employé soit... passe par que par ce biais-là, l'employé fautif, passe par ce biais-là pour suivre une thérapie dans laquelle il va pouvoir s'amender, comprendre que son comportement est acceptable socialement et qu'on ne peut pas s'en prendre à des élèves, etc., etc. Donc, je pense que les milieux de travail ont des outils où... Et dans ce cadre-là, il y a des... Je pense qu'il y a eu des suggestions à cet effet-là, là. Donc, dans le cas d'une agression comme on parle, il pourrait y avoir obligation de passer par là. Même si ce n'est pas écrit textuellement, il y a de la jurisprudence à l'effet... Et les arbitres vont être sensibles à ça. Si... Supposons qu'il arrive un deuxième événement, puis l'employeur s'appuie sur le premier événement, donc, la gradation des sanctions, impose des mesures disciplinaires plus sévères ou va au congédiement. Bien, à ce moment-là, l'arbitre va tenir compte, est-ce que cette personne-là, dans son...


 
 

12 h (version non révisée)

M. Piché (Jean-François) : ...de réhabilitation, a des efforts, à poser les gestes pour prendre conscience que c'est inacceptable et de cesser son comportement. Donc, ça, ça va être pris en compte au niveau de la jurisprudence quand il va y arriver des situations comme ça. Donc, les lieux de travail ont les outils pour permettre...

Mme Ghazal : Puis, pour s'en assurer, il ne faut pas que la première, la gradation, la première soit effacée, tu sais, parce que ça se pourrait que la deuxième arrive après que la première soit effacée, ça fait qu'il n'y a pas de gradation de sanction.

M. Gingras (Éric) : Ce qui est important, je pense... je pense que votre question illustre très bien aussi pourquoi on souhaite que les milieux puissent l'encadrer. Parce qu'en fonction du type de geste de ce qui est arrivé, ça nous permet justement de se questionner. Parce que, là, on se dit : Bien oui, on doit le garder, O.K., mais ça dépend c'est quoi. L'exemple ici, on dit : Bon, bien là, tu suis une thérapie, suivre une thérapie, c'est une chose, en fonction du type de gestes posés. Par contre, il y a d'autres moments où ça va être parlé trop fort. Donc, ça, c'est autre chose, là.

Mme Ghazal : Je n'ai pas beaucoup de questions. Vous, vous... vous n'accepteriez pas qu'il y ait une exception, là, par rapport à votre position pour les clauses d'amnistie, pour les violences à caractère sexuel, peu importe leur ampleur? C'est-à-dire que pour... Est-ce que... Est-ce que vous accepteriez de dire : Bien, pour les violences à caractère sexuel, ça, le fait d'enlever les clauses d'amnistie, ça, on est d'accord, mais par exemple, pour d'autres, ou, non, vous parlez de tous les...

M. Gingras (Éric) : On parle de tout. Par contre, lorsque vient le temps de parler de violences à caractère sexuel, on reconnaît qu'il y a quelque chose de particulier là, mais on ne veut pas les retirer.

Mme Ghazal : Vous ne voulez pas les retirer pour ce... pour... parce que c'est différent. Puis vous parlez beaucoup de la culture de prévention, et tout ça. Est-ce que... je comprends que peut-être, dans le projet de loi, ce n'est pas aussi présent. Est-ce que vous êtes en faveur qu'il y ait une loi-cadre? Tu sais, moi, j'en ai déposé une, là. Il y en a qui disent : Bien, s'il y en a une, on va la regarder, mais ce n'est pas nécessaire. Il y en a d'autres qui disent : Oui, c'est nécessaire. Vous, ce n'est pas écrit. J'aimerais vous entendre là-dessus, une loi cadre sur les violences à caractère sexuel, comme celles qui existent dans les cycles supérieurs.

La Présidente (Mme Dionne) : Il vous reste 30 secondes.

Mme Chabot (Nathalie) :Eh bien, je vais vous répondre ce que vous avez répondu, c'est... ça peut-être une voie intéressante, il faut faudrait voir.

Mme Ghazal : Mais ce n'est pas quelque chose que vous réclamez...

Mme Chabot (Nathalie) :Qu'est-ce que...

Mme Ghazal : J'essaie de voir l'ajout... des gens dans la société qui le demandent.

M. Gingras (Éric) : Ce n'est pas écrit dans le mémoire, mais on serait prêt à la regarder.

Mme Ghazal : O.K., très bien, merci.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci beaucoup pour votre contribution à notre commission. Donc, je vous... et, étant donné l'heure, bien, la commission suspend ses travaux jusqu'à 15 h 50.

(Suspension de la séance à 12 h 07)


 
 

15 h 30 (version non révisée)

(Reprise à 15 h 53)

La Présidente (Mme Dionne) : La Commission de la culture et de l'éducation reprend maintenant ses travaux. Donc, j'aimerais souhaiter la bienvenue à Mme Claire Beaumont, professeur titulaire à la Faculté des sciences de l'éducation à l'Université Laval. Donc, bonjour, Mme Beaumont. Je vous rappelle que vous avez 10 minutes pour nous faire votre exposé. Suite à cela, on pourra procéder aux échanges avec les membres de la commission. Alors, je vous cède la parole.

Mme Beaumont (Claire) : Parfait. Alors, Mme la Présidente, M. le ministre, Mmes et MM. les députés, je vous remercie de m'avoir invité à émettre mes propos concernant cette loi si importante. Alors, vous avez bien pris connaissance du mémoire que j'ai déposé. Alors, je vous assure que je ne le relirai pas au complet avec vous. C'est l'histoire de deux heures. Donc, ce que je vais faire, c'est que je vais revoir avec vous certains... certains passages pour arriver très rapidement à la partie qui est... qui est intéressante, qui intéresse le plus de monde possible sur les recommandations.

Donc alors, le mémoire comporte essentiellement des informations qui vont permettre de comprendre comment on peut mettre en place — alors, je vous invite à rentrer dans une école — comment concrètement on peut mettre en place des moyens pour arriver à faire respecter la loi, parce qu'on vise, bien sûr, la protection des enfants et leur bien-être...

Mme Beaumont (Claire) : ...alors on va parler de comportement de maltraitance des adultes, qu'il soit de gravité majeure ou de gravité mineure. Quelques données sur quel est le portrait actuellement au niveau de ces types de comportements-là. On va regarder rapidement les conséquences et pourquoi certains membres du personnel scolaire agissent de façon agressive ou de façon inappropriée envers les enfants. On peut voir comment que la lutte contre la violence à l'école, ce n'est pas que l'affaire des enfants. Et enfin on va regarder la... on va porter une petite attention, une attention, là, aux dérives judiciaires qui peuvent être causées par des imprécisions dans le processus d'analyse des signalements.

Alors, aujourd'hui, on parle davantage d'école bienveillante, O.K., on parle... Je parlais avec des collègues de l'UNESCO la semaine dernière, ils me parlaient des nouveaux concepts d'école positive, des «happy schools», comment on vise aujourd'hui à créer des environnements propices aux apprentissages et au climat scolaire. Alors, c'est donc dans ce but-là où j'en profite pour amener l'importance, comment les... la qualité des relations interpersonnelles entre des enseignants et les élèves, comment c'est important et comment ça a des répercussions sur leurs apprentissages.

Donc, on sait que si la grande majorité du personnel scolaire, là, fait bien son travail avec des valeurs de bienveillance, est bien intentionné envers les enfants, malheureusement, il va encore y avoir quelques individus qui vont avoir besoin d'être ramenés à l'ordre très sérieusement.

Donc, les comportements de maltraitance, alors c'est comme ça que je les ai nommés, parce que ça comprend toutes les sortes de comportements dans les recherches qu'on mène depuis 2012 au Québec avec notre monitorage national. Excusez, je fais fermer ça. Donc, avec le monitorage national sur la violence dans les écoles, on a appelé les comportements de maltraitance ou des comportements d'agression que des adultes peuvent avoir envers des enfants à l'école. Donc, quelques données qui sont tirées, vous pouvez voir à la page 3, en 2019, on disait qu'il y avait un élève sur six au primaire et un élève sur cinq au secondaire qui disaient avoir subi des cris, des humiliations, des regards méprisants.

Excusez-moi, je vais arrêter ça. Voilà. Bon.

Des regards méprisants ou qui avaient subi des comportements de cet ordre-là de la part d'un adulte à l'école. Je dirais aussi qu'en 2013, alors le personnel scolaire voyait aussi de la maltraitance que j'appellerais de la maltraitance, était aussi témoin des comportements, des cris ou des humiliations de certains de leurs collègues envers les enfants. Donc, en 2013, on disait qu'il y en avait 18,2 % des adultes d'une école au secondaire... euh, pardon, 18 % au primaire et 36 % au secondaire, des adultes qui voyaient des collègues avoir ce genre de comportement-là envers les enfants.

Décidément, ça n'arrêtera pas. Excusez.

Alors, il fallait... aussi pour voir les conséquences. Alors, les conséquences sur... ça a des conséquences énormes sur le climat scolaire. Lorsqu'on voit ce type de comportement-là envers des enfants, le malaise que ça crée, par des membres du personnel scolaire, de voir des collègues agir de la façon... de cette façon-là, il y a des conséquences personnelles sur les élèves qui le voient, qui le subissent et aussi sur le climat de l'école. Alors, il y a vraiment des conséquences importantes là-dessus.

Alors, pourquoi certains membres du personnel agissent de cette façon-là? Est-ce que vous l'entendez?

Une voix : ...

Mme Beaumont (Claire) : Oui, hein, parfait. Parce que là, là, je ne sais pas trop ce qui se passe avec ça. Je l'avais fermé. C'est l'Internet. Et voilà, ça ne devrait plus se passer.

• (16 heures) •

Alors, pourquoi certains adultes agissent de cette façon-là? C'est important de le savoir parce que si on veut mettre en place des moyens de prévention pour les prévenir et si on veut mettre en place des moyens pour sensibiliser l'ensemble du personnel scolaire, il faut comprendre pourquoi des personnes agissent de cette façon-là. Alors, on a identifié des raisons dans la recherche, des... qu'est-ce qui expliquait pourquoi. Alors, on... le poids d'une tradition disciplinaire. Il y a des enseignants puis des adultes qui pensent vraiment que c'est essentiel et que c'est efficace d'utiliser des méthodes en humiliant, ou en criant, ou vraiment en rabaissant les élèves, c'est une croyance d'efficacité, un manque d'habileté de gestion de classe, et j'entends ici, gestion de classe, ce n'est pas juste gérer les comportements des enfants, mais c'est de gérer toute la vie dans une classe, un faible sentiment d'efficacité et des difficultés socioémotionnelles de la part des...


 
 

16 h (version non révisée)

Mme Beaumont (Claire) : ...des adultes. Alors, ils ont de la difficulté à gérer leurs émotions. On peut dire, bon, parfois il y en a qui pètent une coche, si on peut dire, mais ont la difficulté à gérer tout ça. Donc, la lutte contre la violence dans les écoles, ce n'est pas juste l'affaire des élèves. En fait, on voit que dans des écoles où on observe des mauvais... plus on observe des mauvais traitements des adultes envers les élèves, on observe aussi plus d'agressions entre les élèves et on observe aussi plus d'agressions des élèves envers le personnel scolaire. Donc, ce sont toutes des interactions qu'il faut prendre en compte quand on parle d'établir un climat scolaire sain, et sécurisant, et agréable, O.K. Donc, quand les élèves voient des adultes agir de cette façon-là, alors qu'eux, lorsqu'ils se comportent de cette façon-là, on ne leur permet pas, alors ils se posent de sérieuses questions.

Alors, on pourrait faire... on pourrait parler aussi de faire attention aux dérives judiciaires qui sont susceptibles de causer des dommages, O.K., parce que, quand on parle de toucher physique, alors, dans la littérature, on voit que les comportements de toucher envers des enfants, ça peut être aussi favorisant... c'est bon pour l'équilibre des enfants. Donc, ils établissaient dans la littérature... Mon collègue Denis Jeffrey, notamment, un chercheur québécois, identifiait quatre types de touchers qu'il indique «pédagogiques», mais qui pouvaient être mal interprétés lorsqu'on analyse des situations, donc des touchers pédagogiques bienveillants, sécurisants.

Alors, les articles de loi. Je vais arriver aux recommandations. Je n'aurai pas le temps de toutes les voir, mais vous me reprendrez dans le tournant avec vos questions. Alors, bien sûr, les articles sur... concernant les articles de loi, alors, je suis d'avis aussi qu'il ne faut pas limiter seulement à... la loi à inclure juste les élèves mineurs, puisqu'on peut voir qu'il y a même... Dans les documents que je vous ai remis, la dernière étude de l'Institut de la statistique du Québec, qui vient juste, juste de sortir, montre que pour des élèves de plus de 12 ans, qui incluent des adultes, on a aussi à peu près 18 %, il s'agirait d'agressions qui viendraient du personnel scolaire. Alors, vous avez ça dans le mémoire.

Dans le contexte scolaire, il serait plus pertinent de considérer aussi tous les types d'intervenants, O.K., alors pas seulement les enseignants, c'est vraiment important. C'est dans ce sens-là qu'on travaille pour la lutte contre la violence à l'école dans les plans de lutte depuis 12 ans, alors on sensibilise tous les adultes. Alors :

Baliser et décrire précisément les comportements qui sont admis versus ceux qui ne sont pas admis et s'assurer aussi que les gens qui lisent les documents ou qui analysent les situations le fassent en contexte scolaire, parce que c'est un contexte bien particulier, et dans les écoles on sait que toutes les professions qui ont eu à... qui ont rapport à l'éducation, ce sont les professions relationnelles, donc la qualité des relations est d'une importance capitale.

Clarifier certains termes dans la loi, où on a eu des difficultés aussi avec ces termes-là dans les plans de lutte, et ça continue encore, de clarifier «signalement» et le terme «plainte», qui posent vraiment des problèmes d'interprétation tant pour le personnel scolaire que pour les directions aussi.

S'assurer tout au long du processus — ça, bon, ça, j'en ai parlé — qu'on comprenne les situations, qu'on analyse les situations en contexte, O.K., parce que les intervenants scolaires ont souvent à agir en situation d'urgence, toujours centrés entre... On souhaite qu'ils soient toujours centrés sur le bien-être des enfants, alors le bien-être des autres, s'il arrive une situation problématique.

Le guide dont il est question... qu'il sera question, il faudrait qu'il porte, à mon avis, vraiment sur les... préciser qu'est-ce qu'on entend. Si on veut aller chercher la mobilisation du personnel scolaire ou des adultes, les sensibiliser aux notions de bien-être qu'il y a derrière, par exemple, le fait de signaler, alors, ce n'est pas évident quand on dit de dénoncer, ça ne fonctionnait pas avec les enfants ou avec les adolescents dans le plan de lutte. Quand on a commencé à changer le terme «dénoncer» pour «signaler», et quand on travaille sur le fait que c'est pour le bien des enfants et c'est pour le bien qu'on fait ça, on a plus de chances que la mobilisation des... des personnes se mobilisent pour vraiment aller toutes dans le même sens.

Alors, des moyens. Moi, je proposerais que le guide soit accompagné des conditions qui permettent, O.K., comme des suggestions à donner au milieu scolaire pour des conditions à mettre en place pour sensibiliser le personnel à l'importance du bien-être et de la protection. Je ne parle pas juste de la protection, je parle aussi du bien-être des enfants, et... parce que nous autres, en contexte scolaire...

La Présidente (Mme Dionne) : En terminant, Mme Beaumont. Il vous reste 10 secondes.

Mme Beaumont (Claire) : Parfait. Alors, en contexte scolaire, ce qu'on fait, c'est qu'on travaille pour des meilleures relations et on travaille pour mettre en place des conditions qui feront que la loi sera mieux respectée aussi. Alors, voilà.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci pour cet exposé. Donc, nous allons maintenant procéder à la...

La Présidente (Mme Dionne) : ...période d'échanges. Donc, M. le ministre, je vous laisse la parole.

M. Drainville : Bonjour, Mme Beaumont. Merci beaucoup. J'ai trouvé votre mémoire bien... bien schématisé et bien vulgarisé. Je vous en félicite.

Mme Beaumont (Claire) : Merci.

M. Drainville : Quelques questions. D'abord, je veux juste vous dire, je pense que vous devez le savoir déjà, là, que sur... l'idée de ne pas se limiter aux élèves mineurs, on en a pris bonne note, là. On va bonifier, on va dire ça comme ça, O.K.?

Alors, sur le guide, le guide élargi des antécédents judiciaires, donc qui va... qui va être... qui va s'appliquer dorénavant aux antécédents, mais aussi aux comportements pouvant faire craindre pour la sécurité physique et psychologique, c'est sûr qu'il y aura des ajouts, il y aura des détails supplémentaires. On va essayer d'outiller le plus possible les personnes qui doivent appliquer la loi avec un guide qui soit le plus complet possible, là. Tu sais, on va essayer d'être le plus vulgarisé... justement, d'avoir un guide qui soit le plus vulgarisé possible, puis... Alors ça, je veux que vous sachiez que vous êtes bien entendue là-dessus.

Alors, dites-moi... Vous dites : Revoir les termes «signalement» et «plainte».  Pour les fins de la discussion ou pour les gens qui nous écoutent, la différence entre les deux, entre «signalement» et «plainte» d'une manière schématisée, là?

Mme Beaumont (Claire) : Bien, je dirais qu'une plainte, c'est lorsqu'on n'est pas satisfait d'avoir... d'avoir obtenu un service auquel on s'attendait. Puis un signalement, c'est différent, c'est de signaler des situations qui sont problématiques, O.K.?

M. Drainville : O.K.

Mme Beaumont (Claire) : Et ça peut être... Un signalement peut vraiment faire rentrer quelque chose dans l'ordre, alors que si je signale, je passe mon temps à signaler, puis il ne se passe rien, bien là, je pense que je vais avoir envie de faire une plainte.

M. Drainville : Oui, mais... Si vous... Si vous me répondez que la définition est somme toute assez convenue, si c'est déjà assez clair, quelle est la différence entre les deux, pourquoi est-ce que vous sentez le besoin de nous recommander que les termes soient bien définis?

Mme Beaumont (Claire) : Pour faciliter, je dirais... Ce n'est pas évident de faire une plainte, O.K.? Dans le fond, ce n'est pas évident de signaler... même de signaler, parce qu'il y a toutes sortes d'enjeux qui sont là-dedans, O.K., toutes sortes d'enjeux. Donc, moi, si je signale, si je veux inciter les gens à faire plus de signalements, O.K., ou à... déclarer davantage, il faut qu'ils aient l'impression que c'est pour le bien. Alors, on peut... C'est des termes qui sont, à mon avis, très différents sur le terrain aussi, là, O.K.? Une plainte, ça peut... O.K., bon, je peux peut-être préciser... Une plainte, ça peut être quelque chose qui est soumis à un décideur ou quelque chose qui va vouloir faire aller plus loin, parce que je n'ai pas été entendu, alors qu'il y a des parents qui signalent très souvent, supposons, à une direction d'école : Bon, mon enfant a vécu telle chose. Une fois. Ils rappellent : Écoute... Il signale... plus, là, pour essayer de trouver une solution. Et finalement, quand ça fait cinq, six fois puis qu'il voit qu'en signalant la situation, il n'arrivera pas à avoir plus de services, bien, je pense qu'il faut qu'il aille à une étape supérieure. Il peut se plaindre de ne pas avoir reçu le service. C'est du moins la façon dont moi j'interprète ce que ça veut dire «plainte». Je sais... ...et «signalement». Je sais que... et j'ai vraiment... on a vraiment travaillé fort là-dessus dans les écoles, quand on utilisait le terme «dénoncer», O.K.? Alors, les élèves ne voulaient pas dénoncer, les pères ne voulaient pas dénoncer des situations lorsque des jeunes se faisaient intimider parce que dénoncer, c'était comme «stooler», puis ils n'étaient pas dans la gang, et tout ça. Et lorsqu'on utilise des termes comme «signaler» par exemple, O.K., c'est... et qu'on le contextualise dans le sens que par leurs actions, ils vont pouvoir créer le bien ou le bien-être de quelqu'un, c'est important. Donc, si on veut mobiliser... il faut bien choisir les mots. Je ne suis pas sûre... Est-ce que j'ai répondu à éclaircir la situation? Je ne suis pas sûre.

M. Drainville : Quand vous faites référence... Toujours au point 1.4, vous faites référence à la Loi visant à prévenir la violence à l'école, vous dites qu'il faut revoir les termes «signalement» et «plainte». Enfin, vous dites : Revoir aussi partout si les termes «signalement»...

M. Drainville : ...et plaintes sont bien définis, pour éviter les mêmes problèmes que ceux rencontrés dans l'application de la loi visant à prévenir la violence à l'école.» Ça, c'est la loi de Mme Beauchamp, c'est ça, qui a mené à la création de...

• (16 h 10) •

Mme Beaumont (Claire) : C'est la loi... En fait, c'était... c'est ce qu'on lit dans les documents pour faire les plans de lutte sur la violence et l'intimidation, exactement.

M. Drainville : C'est ça, c'est que je... Voilà, exact, c'est la loi de Mme Beauchamp.

Mme Beaumont (Claire) : C'est ça. Et, quand je dis «revoir», excusez-moi, je ne veux pas dire de toutes les remplacer, mais je veux dire de s'assurer que, partout dans les documents, quand on utilise, là, ces termes-là... que c'est ça qu'on veut dire, parce que, quand ça redescend sur le terrain, ce n'est pas compris de la même façon, nécessairement.

M. Drainville : Très bien.

Mme Beaumont (Claire) : Et un parent qui n'est pas content, par exemple, d'une situation qui se produit envers son enfant, bien, pour lui aussi, c'est différent, parce que le signalement, il va... c'est le signe, ça le dit dans le terme, là, c'est le signe qu'il n'est pas content ou qu'il voudrait avoir un service.

M. Drainville : Le point 1.5 : «S'assurer, tout au long du processus, que les personnes qui analysent les dossiers aient une bonne connaissance du milieu scolaire afin qu'elles puissent juger de l'intentionnalité des gestes posés, exemple gestes pédagogiques, bienveillants, sécurisants et protecteurs et/ou liés à des soins corporels, et du contexte.» Est-ce que vous pouvez nous donner un petit peu plus de détails sur ces différents exemples que vous donnez?

Mme Beaumont (Claire) : Oui, bien sûr. En fait, je vous référerais, là, au... à l'ouvrage de Denis Jeffrey, qui s'intitule Enseignants et enseignantes ont tous un risque de poursuites criminelles pour voies de fait, O.K.? Dans le sens qu'il est arrivé...

M. Drainville : Attendez un peu, là. Répétez ce que vous venez de dire.

Mme Beaumont (Claire) : En fait, dans mon mémoire, je fais référence à un ouvrage de Denis Jeffrey, qui est spécialiste en éthique, et il travaille beaucoup avec les milieux scolaires, et son ouvrage s'appelle Enseignants et enseignantes. Tous et toutes à risque d'une poursuite criminelle pour voies de fait ou ou attouchements sexuels. Dans son livre, il mentionne des situations ou des cas où des adultes, des enseignants, qui faisaient, de bonne foi... en tout cas, c'était écrit comme ça... qui avaient des intentions positives, qui avaient posé des gestes, qui se sont retrouvés avec des accusations criminelles, pour, finalement, être acquittés, au final, O.K.?

M. Drainville : Au Québec, ça?

Mme Beaumont (Claire) : Il semble que oui. C'est extrêmement... C'est un volume extrêmement intéressant. Et je... mon collègue Jeffrey a aussi déposé un mémoire — je crois qu'il l'a fait ou qu'il va le faire, là — sur les aspects éthiques au niveau des comportements qui sont... bien, je veux dire, au niveau de ce qui pourrait être balisé comme comportements physiques, comme touchers physiques. C'est vraiment extrêmement intéressant. Moi, ce n'est pas mon domaine. Par contre, je voulais vraiment l'apporter, parce que... pour mentionner comment le contexte scolaire est particulier, et comment... comment... que des enseignants se font dire de ne plus toucher à des élèves, ou des... ou de ne plus jamais être seul avec des élèves, par crainte d'avoir à subir des poursuites, là.

Tu sais, il y a comme... ce n'est pas évident, mais il y a comme une... des justes... une juste compréhension à avoir pour, aussi, baliser les comportements des... les interventions des adultes, je veux dire, quand on parle de donner une poignée de main, de serrer la main, de toucher un élève pour le consoler ou, bon, des choses comme ça. Alors, dans les quatre aspects que j'ai mis dans la parenthèse, de dire de vraiment s'assurer que les personnes comprennent le contexte quand ils vont juger les causes.

M. Drainville : Vous croyez qu'on en est rendus là, c'est-à-dire une enseignante qui pose la main sur l'épaule d'un enfant ou un enseignant qui pose la main sur l'épaule d'un enfant pour le réconforter et qui pourrait être... en fait, ce geste de bienveillance pourrait avoir pour effet de mener à une dénonciation, par exemple...

Mme Beaumont (Claire) : Mais, en fait, ce n'est pas...

M. Drainville : ...pourrait être mal... tellement mal interprété que, plutôt que d'être un geste de douceur puis un geste de réconfort, ça devienne un geste d'agression ou à tout le moins un geste qui remet en question la sécurité physique ou psychologique de l'enfant, vous croyez qu'on en est rendus là, Mme Beaumont?

Mme Beaumont (Claire) : Bien, ce que je pense, c'est que le contexte... on ne connaît pas les éléments de contexte, la relation avec les... la relation qui se passe avec les parents, la relation... tout le contexte autour doit être pris en considération, O.K.?...

Mme Beaumont (Claire) : ...alors ce que je trouve un peu dommage, mais qui est, quand même, les faits, c'est que des étudiants se font dire, dès la formation initiale, puis des enseignants aussi se font dire de ne pas toucher les élèves, de ne pas être seul dans des circonstances, tout seul avec un élève. Ce n'est vraiment pas... Ce n'est pas nouveau, ce n'est pas rare qu'on entend. Et je crois même qu'il y a une... l'Ordre des, il faudrait vérifier, mais l'ordre des enseignants en Ontario a quelque chose là-dessus, à ce propos-là, qui est de ne pas être seul avec un élève. Il y a quand même... Il y a des balises, l'idée, c'est de ne pas tomber dans les extrêmes, mais je pense qu'il faut regarder ces choses-là.

Mon propos, c'était plus de dire qu'il y a des choses qui se produisent en situation urgente. Parfois, un prof qui va tenir le bras d'un élève pour arrêter... par exemple, qui est en train de vouloir en battre un autre ou qui... pour aussi pour son propre... sa propre sécurité, peut-être pour ne pas se faire de mal. Alors, il peut être interprété, il peut faire mal, il peut y avoir des rougeurs sur le bras, et l'élève, s'il n'a pas une bonne relation avec son enseignant, bien, ça peut...  ça peut prendre toutes sortes de tournures. Et c'est des choses qui arrivent depuis un bout de temps. Puis c'est des choses... Oui, c'est ça, oui. Mais, comprenez-moi bien, moi, je vous parle du contexte, de l'analyse du contexte dans lequel la situation s'est produite.

M. Drainville : Oui, je comprends, je comprends. Je note l'annexe I de votre mémoire : Gardez en mémoire cinq caractéristiques qui décrivent des comportements bienveillants de l'adulte à l'école pour bien les modeler auprès de vos élèves. Le modèle, CEFER : C pour calme, E pour exigeant F pour ferme, E pour encourageant et soutenant et, le dernier, R respect de la dignité de chacun. C'est tiré de Beaumont et Boissonneault 2023.

Alors, juste pour les fins de la discussion, pour que les gens qui nous écoutent, je trouve ça intéressant. Alors, CEFER, donc C, calme, c'est-à-dire maîtrise de soi, de ses émotions, de son ton. L'adulte montre ainsi aux jeunes comment faire face aux situations en demeurant posé, en acte et en parole. E, exigeant, maintien des exigences selon le niveau de maturité de l'élève et le contexte. Le soutien de l'adulte est accru pour favoriser le sentiment de réussite de l'élève. Donc, le soutien de l'adulte est accru pour favoriser le sentiment de réussite de l'élève. F pour ferme. Alors, ferme, ça veut dire, assurance et rigueur dans l'expression et l'exécution des actions. Les attentes sont clairement et calmement exprimées tout en offrant son soutien, entre parenthèses, une autorité sécurisante. E, encourageant et soutenant, volonté d'aider l'élève. Ce dernier doit sentir que l'adulte est déterminé à le soutenir et qu'il peut compter sur lui pour l'aider à atteindre les exigences. Et respect de la dignité de chacun, c'est-à-dire une attitude respectueuse lors des interventions éducatives. L'adulte comprend l'importance de préserver la dignité morale et physique de tous les élèves, même lors des mesures disciplinaires. Donc, ça, ce sont les cinq caractéristiques qui décrivent les comportements bienveillants de l'adulte à l'école, auprès des élèves.

Je me pose la question, là on déborde un petit peu du strict cadre du projet de loi : Est-ce que vous croyez que, dans l'ensemble des comportements, est-ce que vous croyez qu'il faut revaloriser la notion d'autorité? On l'entend parfois chez les parents qui souhaiteraient qu'on respecte davantage la notion d'autorité à l'école... en fait, ils déplorent que ça se soit un petit peu perdu. Je ne vois évidemment aucune référence ici, là, à cette notion, mais je vous pose la question. C'est très... C'est un petit peu... Ça sort un petit peu du cadre, mais, comme vous êtes une grande spécialiste de la question, de la question de l'éducation... Ça fait combien d'années que vous travaillez dans ce domaine-là? Une vingtaine d'années, vous êtes notamment...

Mme Beaumont (Claire) : 40 ans dans le milieu scolaire.

M. Drainville : Oui, mais, dans votre feuille de route ici, là, on voit psychologue scolaire et clinicienne pendant 20 ans auprès des jeunes présentant des difficultés d'adaptation socioémotionnelles et leurs familles. Doctorante... ou au doctorat... Détentrice d'un doctorat en psychopédagogie, des stages à l'étranger. Vous êtes conseillère également auprès du ministère français de l'Éducation nationale. Donc, sur la notion d'autorité, qu'est-ce que vous en pensez, vous?

• (16 h 20) •

Mme Beaumont (Claire) : Je suis contente que vous posiez la question, parce que même la...

Mme Beaumont (Claire) : ...de bienveillance, qui est supposée être la valeur qui éclaire nos actions en éducation. C'est une des principales valeurs. Quand on... Ça veut dire de montrer le bien de... que nos actions soient motivées par faire le bien, O.K.? Même cette notion-là, actuellement, qui a beaucoup circulé depuis les dernières années... il y a des personnes dans les écoles qui n'ont plus envie d'entendre parler de la bienveillance, parce qu'ils sont tannés d'entendre ça, mais c'est possiblement parce qu'ils la voient peu incarnée, parce que ce sont des termes qui ne sont pas bien connus. Quand vous me parlez d'autorité, alors quand... je vous dirais que, dans le modèle... que j'ai élaboré pour décrire c'est quoi, un comportement bienveillant, pour qu'on s'entende tous sur la même définition puis qu'on soit guidé, que ce ne soit pas juste un terme parapluie, comme ça. La notion de "ferme", elle est extrêmement mélangée avec "crier", O.K.? Donc, être ferme... quand on est ferme dans nos consignes et qu'on garde notre calme, qu'on garde un ton apaisant mais qu'on répète, et qu'on continue, et qu'on ne lâche pas notre bout, l'enfant finit par se tanner, et il n'y a pas de crise, il n'y a pas rien. On est ferme. La notion de bienveillance est encore mélangée avec la notion de laxisme. Comme si, moi, je veux être bienveillant avec quelqu'un, ce n'est pas... je ne vais pas diminuer mes exigences, O.K.? Et, si je veux être bienveillant envers une personne, par exemple, que je vois qui ne va pas bien ou qu'elle fait un comportement qui n'est pas adapté, à ce moment-là, bien, je dirais que la bienveillance c'est de vouloir le bien. Donc, l'autorité, on a tous une définition de ce que c'est...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci beaucoup. C'est malheureusement tout le temps...

Mme Beaumont (Claire) : Pardon.

La Présidente (Mme Dionne) : C'est malheureusement tout le temps d'échange qu'on a avec M. le ministre. Je vais maintenant céder la parole, avec Mme la députée de Saint-Laurent, qui pourra poursuivre les échanges avec vous.

Mme Rizqy : Bonjour.

Mme Beaumont (Claire) : Bonjour.

Mme Rizqy : Bienvenue et merci beaucoup de participer avec nous, avec votre très longue feuille de route. Vous conseillez aussi le ministère de l'Éducation français?

Mme Beaumont (Claire) : En fait, ça fait... ça fait... Dans les années 2010, O.K., quand le ministère français a commencé à faire des gros plans d'action sur la violence à l'école, il s'est doté d'un comité d'experts international, pour ne pas avoir le point de vue de chercheur juste de sa place. Alors, on était une quinzaine et on faisait partie de ces experts-là. Ce sont beaucoup de chercheurs qui continuent à être des collègues avec moi dans l'observatoire international et c'était extrêmement, extrêmement intéressant de pouvoir participer. On a... bon, le comité est dissous, présentement, mais ça a duré pendant quelques années, et, notamment, bon, un exemple, lorsqu'est arrivé les événements à Charlie Hebdo, par exemple, à... alors, on était, pendant la nuit, les experts en ligne, on parlait de ça. Donc, tu sais, c'était vraiment extrêmement intéressant et c'était une pratique que je n'oublierai jamais et qui était vraiment... qui permettait aussi de partager les points de vue dans les différents pays, de regarder le problème de la violence à l'école dans différents aspects, de la comprendre et de ne pas considérer le point de vue seulement sous un simple angle, parce que c'était vraiment très, très riche, comme échanges.

Mme Rizqy : Vous êtes la première, dans son mémoire, qui parle de maltraitance et de bientraitance, et je me suis posé la question : Est-ce que peut-être que c'est nous, quand on regarde ce qui se passe dans nos écoles, les interactions élèves-adultes, mais aussi entre adultes... est-ce qu'on est trop dans l'après, pas assez dans le début... bientraitance, je vais finir par bien le dire?

Puis j'avais en tête un exemple concret qui est arrivé l'an dernier. C'était dans les médias, c'est une école à Montréal où... des allégations qu'un enseignant homme ne voulait pas l'accès des professionnels femmes dans sa classe, qu'il ne disait pas bonjour aux femmes. Puis je me rappelle une question qui... un des moyens de défense soulevés... dit : Oui, oui, mais c'est juste entre les adultes, ça. Puis, moi, j'avais répondu : Bien non, il y a des enfants, là, qui sont témoins de cela, et il me semble que c'est... Et j'ai l'impression que, dans votre mémoire, c'est ça aussi que vous mettez en relief, c'est le comportement des adultes entre eux qui va avoir un impact aussi sur les élèves, qui sont les principaux témoins.

Mme Beaumont (Claire) : C'est sûr. C'est clair, net, je veux dire, dans l'enquête, le monitorage national qu'on a effectué entre 2012 et 2019, on prenait vraiment des sondages aux deux ans. Pendant toute cette période-là, les grosses conclusions, en 2019, c'était que les élèves s'étaient améliorés légèrement au fil des années, mais que quand on... parce qu'on questionnait aussi, il y a des données sur les comportements des adultes entre eux puis envers les élèves, mais il n'y avait eu aucun changement pendant sept...

Mme Beaumont (Claire) : ...sur les comportements des adultes, on ne s'en occupait pas, on n'en parlait pas, alors que, dans tous ces rapports-là, on a des données qui indiquent des comportements de maltraitance, O.K., dans à peu près 10 % des cas, des relations difficiles puis et des comportements d'agression entre le membre... les membres du personnel, que les enfants voient, et des relations difficiles entre les parents et les adultes de l'école, que les enfants voient. Et...

Mme Rizqy : ...d'une façon qu'un parent peut parler à l'adjointe administrative, pas contente que son enfant n'ait pas été admis dans un programme particulier, crie sur l'adjointe administrative, ça, on n'en... ce n'est pas comme si on l'a documenté assez, là. C'est ça?

Mme Beaumont (Claire) : Mais les parents qui débarquent dans la classe, qui invectivent les profs, qui... Les enseignants font face à plusieurs, plusieurs acteurs qui leur... qui... qui peuvent propager de la violence. O.K. Ils sont... et ils font face à toutes sortes, toutes sortes de situations. Ils doivent gérer beaucoup, beaucoup de choses des... et en même temps ils doivent enseigner à leurs... aux élèves. Mais mon propos, c'est que les enfants voient, hein? Ils font beaucoup plus ce qu'ils voient, que ce qu'on leur demande de faire. Donc, quand les... quand les... quand on dit que les bottines ne suivent pas les babines, alors que le prof, comme par exemple, veut que ça se passe bien, enseigne ou donne des ateliers d'habiletés sociales, des choses comme ça et que c'est important le respect et tout ça, puis qu'il se retrouve dans le corridor, puis à parler d'une façon inappropriée ou irrespectueuse à son collègue ou même à un parent, qu'est ce que l'enfant comprend? Alors...

Mme Rizqy : Qu'il peut être, lui aussi, irrespectueux.

Mme Beaumont (Claire) : Exactement. Puis quand on veut vraiment apprendre des comportements aux enfants, on sait très bien... puis que, les comportements, on les... Nos changements de comportement sont motivés par nos valeurs. O.K.? Les lois, c'est extrêmement important, ça envoie un signal clair et précis que, comme collectivité, on veut plus de ça.

Maintenant, quand on arrive dans les écoles, on a un devoir d'éducation à faire, et il faut prendre les moyens pour le faire. Si je reviens sur la lutte contre la violence dans les écoles, on le sait... on sait bien quoi faire depuis des dizaines... Depuis une dizaine d'années, les recherches tournent aussi autour de ça. On connaît les pressions, on connaît les interventions qui sont... qui risquent d'être plus efficaces. Mais est-ce qu'on a les conditions? Est-ce qu'on se donne les conditions dans les écoles de les mettre en application? C'est plutôt ça, moi, que je questionnerais.

Mme Rizqy : Dites-moi... parce que, tantôt, vous disiez, que de 2012 à 2019, à chaque deux ans, il y avait un sondage qui est fait, mais depuis il n'y en a pas eu, puis je vois que la chaire de recherche que... dont vous étiez titulaire n'existe plus. Est-ce qu'il y a une raison?

Mme Beaumont (Claire) :  En fait, le financement n'a pas été reconduit.

Mme Rizqy : O.K. Parce que, nous, on a fait des demandes d'accès après la pandémie puis on a vu qu'il y a une explosion de cas partout au Québec, de... d'actes de violence dans les écoles, puis... et je trouve ça bien que vous, vous avez comme un continuum de pouvoir garder une perspective globale, de pouvoir étudier ce phénomène puis de le documenter, parce que, quand on a des données, mais ça nous permet aussi d'agir, de voir est-ce qu'on s'est amélioré, est ce que vous ne vous êtes pas amélioré, est ce qu'on doit faire d'autres approches?

Là, ce n'est même pas une question pour vous. M. le ministre, moi, je plaide la cause de Mme Beaumont. Engagez-la, s'il vous plaît. Moi, je la trouve extraordinaire pour vrai, là. Je... c'est un mémoire de très, très bonne qualité, là, puis on en lit beaucoup. Faites-nous confiance. Vous auriez pu nous écrire quelque chose de très long, mais vous avez synthétisé votre propos. Je ne sais pas, vous... je sais que vous avez eu une longue carrière, là, mais vous avez l'air très en forme. Moi, je ne le sais pas pour vous, mais avec le plan que vous avez mis en place de lutte contre les violences dans les écoles puis l'intimidation, je pense que ça serait à propos d'avoir une expertise de plus parce que, sincèrement, je vous le dis, là, vous êtes du haut calibre. J'aurais aimé vous avoir comme prof, sincèrement.

Mme Beaumont (Claire) : C'est ce qu'on me dit, oui. Puis je...

Mme Rizqy : Donc ça, ce n'était pas une question. Ça, c'est moi qui veux vous avoir avec nous, parce que ça prend de l'expertise autour de la table, parce que vous êtes la première à dire bientraitance. Alors, qu'est ce qu'on devrait faire de mieux dans nos écoles? Donc, j'ai compris prévention. Mais en actions concrètes, ça serait quoi qu'on devrait commencer par changer?

Mme Beaumont (Claire) : La... la... la conscience des comportements qu'on a, du modèle qu'on a comme adultes envers les élèves. O.K. Actuellement, je donne des formations sur les compétences, développer des compétences socioémotionnelles.

Mme Rizqy : ...

• (16 h 30) •

Mme Beaumont (Claire) : Pardon. O.K. Alors actuellement, je... je... bon, j'ai commencé à travailler en prévention de la violence. Maintenant, quand j'ai vu que les... Les changements de comportement ne se faisaient pas au niveau des adultes, mais parce qu'ils n'ont pas d'intervention là-dessus, parce qu'on n'en parle pas. Là, maintenant, je travaille pour enseigner des compétences socioémotionnelles aux enfants dans les écoles et pour habiliter les profs à le faire. O.K. Maintenant, la...


 
 

16 h 30 (version non révisée)

Mme Beaumont (Claire) : ...je... J'ai perdu votre question.

Mme Rizqy : Non, mais il y a beaucoup de trucs qu'on devrait, je pense, améliorer...

Mme Beaumont (Claire) : Oui, O.K., mais qu'est-ce qu'on devrait améliorer, oui.

Mme Rizqy : Moi, ce que j'ai compris, là, c'est... un, c'est le comportement des adultes, parce que, peu importe ce qu'on va dire, si nos gestes ne suivent pas, les enfants vont juste répéter ce que nous, les adultes, on fait au quotidien.

Mme Beaumont (Claire) : Exactement. Et je me dis... Tantôt, quand je parlais qu'on sait qu'est-ce qu'il faut faire, mais on ne met pas... on n'a pas les conditions, on ne les met pas en place pour le faire, par exemple, s'il y a une dizaine... une liste de 10 composantes pour créer un bon climat scolaire, puis, bon, on en met... on en met lourd sur le dos des directions d'établissement, mais le leadership d'un établissement, c'est important. O.K.? C'est une condition, on le sait, ça a fait ses preuves. Mais qu'est-ce qu'on met en place, comment les directions d'établissement voient pour arriver à ça, O.K? Donc, c'est le même principe pour la loi, ici, qu'on est en train d'étudier. Je veux dire, oui, il y a une loi, elle est importante, il faut la faire, il faut... mais, sur le terrain, qu'est-ce que je mets en place pour favoriser que les gens vont... pas pour respecter la loi, pour respecter le sens de la loi? Alors, ce que je dis, c'est que les comportements de bienveillance, O.K., c'est ça, il faut... il faut vraiment éveiller, il faut mobiliser les troupes des adultes, puis des élèves, puis des parents, puis tout ça, pour travailler tous ensemble dans le même sens.

Je parlais, par exemple, dans les moyens que je proposais... Alors, on parlait d'un code d'éthique à mettre dans les écoles. Mais ça pose un problème, un code d'éthique, parce qu'il y a les professions qui ont leur... ils ont leur propre code d'éthique. Alors, moi, je travaille dans mes formations, parce que j'ai un microprogramme sur la prévention de la violence à l'école... En passant, dans le dernier rapport qu'on avait fait en 2019, là, le personnel scolaire disait qu'il y n'avait pas plus de formation qu'il n'y en avait auparavant, hein, c'est étonnant, mais bon, c'est ça. Alors, moi, je travaille avec la création d'une charte relationnelle, O.K., et non d'un code d'éthique.

Mme Rizqy : Oui. Ça ne vous dérange pas, parce que le ministre est vraiment aussi très intéressé...

M. Drainville : Je voulais juste répondre à l'enthousiasme de la députée de Saint-Laurent pour souligner le fait que Mme Beaumont a été... fait partie du groupe d'experts qui ont été consultés pour le plan de lutte à la violence au mois de juin dernier. Je voulais juste le dire. Donc, on... on vous remercie.

Mme Rizqy : ...bravo!

M. Drainville : Vous allez contribuer à ce plan. C'est la députée de Lotbinière Frontenac qui était présente lors de cette discussion.

Mme Rizqy : Merci, mais là vous êtes sur mon temps.

M. Drainville : Oui, je sais, mais...

La Présidente (Mme Dionne) : D'accord. On revient. Il vous reste moins de deux minutes, Mme la députée.

M. Drainville : ...

Mme Rizqy : D'accord. Bien, merci.

La Présidente (Mme Dionne) : Un à la fois...

Des voix : ...

La Présidente (Mme Dionne) : Oui. Merci. S'il vous plaît, pour le bien de ceux qui nous écoutent, on ne parle pas en même temps. Mais poursuivez, Mme, il vous reste une minute 30.

Mme Rizqy : Bien, merci. Bien, elle avait aussi participé, avec Francine Charbonneau, dans le plan contre lutte à l'intimidation, à l'époque, quand elle était ministre et qu'ils ont mis le grand plan, donc pour ça que moi, je la trouve très pertinente, parce que sincèrement, avec autant d'années d'expérience, je ne pense pas qu'on peut s'en priver au Québec. Alors, moi, là, trouver quelque part, au ministère de l'Éducation, là... je pense qu'on devrait l'avoir de façon permanente. Alors, prenez-en bonne note, et je... on en rencontre, là, des gens, puis c'est rare que je fais ça comme intervention. Puis, sinon, que... qu'on... rallumer la flamme dans cette chaire de recherche. Parce que ce qu'elle vient de dire, que peut-être que vous avez manqué, c'est qu'en 2019, lorsqu'ils ont sondé, le personnel de soutien disait qu'ils n'ont pas eu plus de formation. Et, je pense, c'est ça qui est le nerf de la guerre, de s'assurer que les gens, peut-être, ne comprennent pas que leurs comportements, même entre adultes, c'est inacceptable à l'école. Tantôt, vous avez parlé, M. le ministre, avec beaucoup d'éloquence, que je vous connais, sur l'autorité, mais la notion de respect doit revenir de façon beaucoup plus pointue. Alors, sur les dernières... Il vous reste une minute, je vais vous la laisser, Mme Beaumont, sur le mot de la fin. Qu'est-ce que vous voulez qu'on change absolument dans ce projet de loi? Parce que vous parlez beaucoup de violence, mais je crois que c'est... vous devez écrire aussi violence sexuelle, j'imagine.

Mme Beaumont (Claire) : En fait, moi, ce que je pense, c'est que, si on continue à travailler en silo, O.K., si on n'intègre pas les choses... Les gens, dans le milieu scolaire, là, ils reçoivent toutes sortes de demandes, O.K., de faire... de veiller à la santé mentale, au bien-être, de faire un climat, de lutter contre la violence, et tout ça. Puis on arrive avec toutes des choses séparées. Il faut vraiment intégrer. Parce qu'ils n'en peuvent plus. Et c'est ça qu'il faut comprendre si on veut qu'ils soient...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci beaucoup.

Mme Beaumont (Claire) : ...qu'ils les mettent en application...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci. C'est tout le temps qu'on a.

Mme Rizqy : Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Dionne) : Mais on va poursuivre encore les échanges avec la députée de Mercier.

Mme Ghazal : Bien, merci, merci beaucoup pour votre présence ici parmi nous. Ça serait quoi... Vous dites qu'il faut travailler de manière intégrée. Donc, comment est-ce qu'on fait ça concrètement? Parce que, là, nous, on a, devant nous, un projet de loi qui vient s'ajouter à plein d'autres choses, puis c'est comme si... j'ai l'impression, par ce que vous vous dites, c'est que ça vient encombrer les écoles puis que ça ne met pas en place les conditions. C'est-à-dire, ce qu'on a devant nous, est-ce que les conditions sont en place pour favoriser les comportements bienveillants? Est-ce que le projet de loi aide à ça?

Mme Beaumont (Claire) : Je pense que le projet de loi donne un signal clair, O.K., mais il ne dit pas aux écoles comment faire ça, peut-être parce que c'est un mécanisme tellement complexe que de...

Mme Beaumont (Claire) : ...les gens pour travailler dans le même sens. Tantôt, je disais qu'au lieu de faire un code d'éthique, O.K.... Parce que ça accroche, le code d'éthique. Dans un code d'éthique, on ne met pas de... dans un document éthique, on ne met pas de punition, on ne met pas des choses comme ça. Dans un code d'éthique, c'est un appel à la volonté des gens de s'harmoniser autour d'un certain type de valeurs, dans les écoles, on a des codes d'éthique, des psychologues, des... toutes les... par profession.

Alors, moi, je travaille, dans mes cours, plutôt d'établir une charte relationnelle avec l'ensemble des commissaires. Parce que l'éducation, c'est une profession, c'est... Toutes les professions, ce n'est pas basé sur la relation. Alors, la charte relationnelle, vous pourrez le lire à la page huit du mémoire, c'est vraiment un document qui n'est pas légal, ce n'est pas... ce n'est pas... il n'y a aucune légalité là-dedans, mais c'est un appel à l'ensemble, à... aux élèves, aux parents, à tous les partenaires. Alors, on crée ensemble une charte, on la fait, bien, valider par un groupe de parents, un groupe d'élèves, et des... des gens qui sont là. Et même on peut... on les fait signer, s'ils veulent, mais l'engagement... Et c'est connu... Et la façon dont on le travaille, c'est qu'on le met même dans le... dans l'agenda des enfants, avec... modalité des enfants, avec des petits bonshommes. On... Tu sais, on n'est plus dans un mode de dire : ne fais plus ci, ne fais plus ça, ça ne fonctionne pas aussi bien...

Mme Ghazal : C'est ce qu'un code d'éthique ferait?

Mme Beaumont (Claire) : Oui. En fait, on... il faut montrer ce qu'on veut. Donc, pour arriver à mobiliser les troupes pour travailler dans le même sens, dans des comportements bienveillants, par exemple, pour revaloriser cette valeur-là, alors il faut vraiment travailler ensemble sur la définition de ce qu'on entend. Et, dans cette charte relationnelle là, on y va avec les valeurs de l'école qui sont discutées, on y va avec des comportements, on décrit quels comportements on... on peut observer ces valeurs-là, et on donne l'engagement qu'on va faire notre possible pour y aller le plus possible. Et qu'on se... qu'on... on donne l'engagement aussi qu'on va tout faire qu'est-ce qui est dans notre pouvoir de faire respecter que dans notre école, c'est ça, ces valeurs-là, toujours avec des valeurs de bienveillance. Mais...

Mme Ghazal : Mais est-ce que tout ça peut être contenu puis l'appeler code d'éthique quand même, là? Parce que je ne suis pas sûre que l'amendement, l'appeler «charte émotionnelle», va être accepté.

Mme Beaumont (Claire) : Je ne le sais pas. Bien, écoutez, moi, ce que je dis, c'est ce que je fais pour essayer de ne pas naviguer avec des codes de profession, et tout ça, parce que c'est comme... Mais quand on parle plus d'une charte relationnelle, ce que mes étudiants me disent aussi, quand qu'ils l'appliquent ou quand on... quand on l'applique dans une école, c'est vraiment un appel à la volonté de travailler dans le même sens.

Mme Ghazal : Puis la mobilisation des troupes, ça, vous l'avez dit plusieurs, plusieurs fois.

Mme Beaumont (Claire) : C'est la mobilisation, oui.

Mme Ghazal : Puis est-ce que ça prend une loi-cadre, une loi-cadre pour les agressions à caractère... les violences à caractère sexuel? C'est-à-dire que, est-ce qu'en ce moment, par exemple, pour les violences à caractère sexuel, si on veut les prévenir, est-ce que ce qu'on a devant nous, que ce soit cette loi-là, tout ce qui existe déjà, le protecteur national de l'élève, est-ce que c'est suffisant pour les prévenir?

La Présidente (Mme Dionne) : En 30 secondes, Mme la députée.

Mme Ghazal : Ou est-ce que ça prendrait une loi-cadre spécifique pour les violences à caractère sexuel?

Mme Beaumont (Claire) : Moi, je suis plutôt d'avis de parler des violences, O.K., et de parler en termes de gravité des gestes. C'est ce qu'on fait quand on veut modifier des comportements. Et puis il faut éviter d'en ajouter, parce que, si on veut que ça soit bien appliqué, il faut que les gens aient l'espace dans le cerveau pour entrer toutes les choses qu'on leur demande de faire là-dedans, donc de bien nommer. À mon avis, il faut intégrer.

Mme Ghazal : Violence à caractère sexuel?

La Présidente (Mme Dionne) : C'était malheureusement tout le temps...

Mme Beaumont (Claire) : Mais la nommer très précisément, exactement.

Mme Ghazal : O.K.

La Présidente (Mme Dionne) : Malheureusement, c'est tout le temps qu'on a. Merci. Alors, merci beaucoup pour votre contribution, Mme Beaumont.

Je suspends les travaux de la commission quelques instants pour accueillir notre prochain groupe.

(Suspension de la séance à 16 h 39)

(Reprise à 16 h 42)

La Présidente (Mme Dionne) : La commission reprend maintenant ses travaux. Donc, je souhaite la bienvenue à notre prochain groupe en visioconférence. Donc, c'est le Regroupement québécois des centres d'aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel. Bonjour, mesdames. Donc, je vous rappelle que vous avez 10 minutes pour nous faire votre exposé. Donc, je vous demanderais d'emblée de vous présenter et nous expliquer vos propos par la suite, et nous procéderons ensuite à la période d'échange avec les membres de la commission.

Mme Dépault (Caroline) : Merci. Bonjour. Caroline Dépault, co-responsable au volet prévention, co-coordonnatrice au RQCALACS.

Mme Chénier (Justine) : Bonjour. Je suis Justine Chénier, responsable aux communications et aux affaires publiques, également co-coordonnatrice du RQCALACS.

Mme Dépault (Caroline) : Nous tenons d'abord à vous remercier, M. le ministre et la Commission de la culture et de l'éducation, de nous avoir invités à prendre part aux consultations particulières sur le projet de loi n° 47 portant sur le renforcement de la protection des élèves.

Mme Chénier (Justine) : Le Regroupement québécois des centres d'aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel, le RQCALACS, est un organisme féministe à but non lucratif qui rassemble les CALACS membres à travers le Québec depuis plus de 40 ans. À titre de groupe national en violence sexuelle, nos champs d'activité et ceux de nos CALACS se concentrent principalement sur des actes sensibles en prévention et sensibilisation en matière de violence sexuelle, en intervention auprès des personnes survivantes ainsi qu'en défense de droits.

Mme Dépault (Caroline) : On imagine que notre présence parmi vous aujourd'hui est liée à notre expertise en matière de lutte contre les violences sexuelles et plus largement de violences basées sur le genre, même si la violence sexuelle n'est jamais mentionnée explicitement dans le projet de loi n° 47. M. le ministre et membre de la commission, la situation en ce qui concerne les violences sexuelles dans les établissements scolaires primaires et secondaires est alarmante et nous croyons que ça constitue l'une des plus grandes menaces à la sécurité des jeunes dans les écoles au Québec. Nos CALACS aux premières loges de cette situation depuis des décennies, et nous le constatons plus particulièrement lorsque nos intervenantes vont dans les écoles secondaires pour animer notre programme de prévention, le programme Empreinte. Selons nous, l'heure est grave.

Mme Chénier (Justine) : Contrairement à ce que le Protecteur national de l'élève a mentionné en commission hier, le RQCALACS et ses membres considèrent que ce qui est en place actuellement, ainsi que le projet de loi n° 47, sont des mesures insuffisantes pour adresser la sécurité des jeunes dans les établissements scolaires, particulièrement en ce qui a trait aux violences sexuelles. Encore une fois, les besoins des jeunes victimes et l'expertise des réseaux spécialisés comme la nôtre ne sont pas entendus. Les jeunes, les organisations communautaires avec des programmes de prévention en milieu jeunesse, les fédérations professionnelles ainsi que certains membres présents aujourd'hui autour de la table, et même votre propre rapport d'enquête le mentionnent : une loi-cadre, comme dans les cégeps et les universités, est nécessaire pour lutter contre les violences sexuelles en milieu scolaire. Vous avez l'opportunité aujourd'hui de faire une réelle différence dans la vie des jeunes du Québec et de contribuer à faire émerger une société plus juste, égalitaire. Il faut la saisir, M. le ministre. Le RQCALACS appuie solidairement le collectif La voix des jeunes compte. Depuis plus de six ans, elle demande au gouvernement du Québec l'adoption d'une loi-cadre contre les violences sexuelles en milieu scolaire primaire et secondaire.

M. le ministre et membre de la commission, elles vous ont écrit une lettre aujourd'hui en réaction au projet de loi n° 47, qu'elles nous ont demandé de vous lire parce qu'elles ne pouvaient être présentes. Elles travaillent et elles vont à l'école...

Mme Dépault (Caroline) : ...la lettre va comme suit. Bonjour, aujourd'hui, nous revivons la même chose que nous avions vécue lorsque vous nous avez convoqués pour donner notre point de vue sur le protecteur national de l'élève. Résultat : personne ne nous a écoutés. Voilà qu'aujourd'hui, trois ans plus tard, M. Jean-François Bernier en vient aux mêmes conclusions que nous. Lorsqu'une personne communique avec son bureau sur ces questions, on lui dit assez rapidement, après l'avoir écoutée, de ne pas entrer trop dans les détails, que le rôle du protecteur n'est ni celui de psychologue ni celui d'un travailleur social. Nous sommes fatigués de vous répéter que traiter les violences sexuelles de façon fragmentée ne fonctionne pas.

Dans le cadre de ce projet de loi, nous tenons à indiquer notre déception quant au fait que le temps consacré au p.l. n° 47 aurait pu servir à étudier le projet de loi n° 397 déposé par la députée solidaire Ruba Ghazal le 27 avril 2023 et soutenu par les partis d'opposition. À travers le p.l. n° 47, vous décidez de traiter la problématique des violences sexuelles au même niveau que toute autre forme de violence. C'est de bien mal comprendre les violences sexuelles. Les violences sexuelles étant une problématique particulière, nous vous signalons depuis déjà six ans la nécessité d'un projet de loi spécifique à celles-ci. Nous avons d'ailleurs fait déposer pas un, mais bien deux projets de loi en la matière. Les recommandations vous ont également été envoyées, que ce soit à l'ancien ministre de l'Éducation, Jean-François Roberge, au présent ministre l'Éducation, Bernard Drainville, ainsi qu'à d'autres députés de votre parti. Ces recommandations ont été intégrées de manière fragmentée dans les multiples projets de loi éparpillés où la problématique des violences sexuelles est abordée en second plan. Encore une fois, aujourd'hui, nous avons manqué l'occasion de régler la situation.  À n'aucune reprise les violences sexuelles sont mentionnées dans le projet de loi. Dans le cadre de ce projet de loi, nous parlons de la mise en place de codes d'éthique déterminés par chaque centre de services scolaire et non d'un seul code à l'ensemble du réseau.

Mme Chénier (Justine) : Nous tenons à rappeler que les violences sexuelles sont déjà reconnues par le Code criminel, en plus des autres obligations légales pour toute personne témoin de tels actes. Nous nous demandons dans quelle mesure une personne qui ne respecte déjà pas la loi serait incitée à respecter un code d'éthique. Les écoles sont justement des lieux de prédilection pour ces personnes en raison de la proximité qu'ils procurent avec des jeunes et des personnes vulnérables. Autrement dit, est-ce qu'on a vraiment besoin d'un code d'éthique pour inciter les gens à ne pas enfreindre la loi? Nous tenons à saluer le retrait des clauses d'amnistie aux dossiers des enseignants et des enseignantes. En entrevue, le ministre Bernard Drainville a indiqué le 6 décembre 2023 : «Ce n'est pas normal qu'un enseignant puisse commettre des gestes à caractère sexuel en toute impunité et se déplacer d'un centre de services à l'autre ou d'une école à l'autre sans conséquences.» Ce qui se reflète dans la formulation de la proposition faite à l'égard des clauses d'amnistie. Toutefois, nous désirons rappeler que le corps enseignant n'est pas le seul à être en contact avec les jeunes, les TES, les secrétaires, les concierges, les coachs et toute personne qui côtoie de près ou de loin les élèves le sont également.

Malgré le retrait des clauses d'amnistie, nous observons un problème majeur. La vérification des antécédents se fait par le biais d'une autodéclaration des antécédents d'emploi de la part de la personne qui se fait embaucher. Miser sur l'honnêteté des personnes ayant commis des violences sexuelles, c'est mettre en danger les jeunes. Quant au traitement des plaintes, comment le ministre va-t-il éviter la confusion des rôles et respecter les responsabilités exclusives de la DPJ dans le cadre de l'entente multisectorielle et éviter de contaminer la preuve? Ces commentaires ne portent que sur une toute petite partie du projet de loi que vous proposez. Or, les enjeux qu'il soulève sont majeurs. Nous croyons que cela est une démonstration claire de l'inadéquation d'une loi générale pour traiter d'un problème qui, lui, est spécifique. Nous tenons à réitérer l'importance d'un projet de loi propre aux violences sexuelles. Nous ne pouvons pas les traiter de la même manière que l'intimidation.

Nous avons une pensée pour toutes les jeunes victimes et témoins de violences sexuelles dans leur établissement scolaire, notamment les victimes et les personnes qui ont été témoins de M. P, cet ancien professeur de l'école secondaire Louise-Trichet, dont l'histoire a été révélée par une enquête journalistique dans Le Devoir. En quoi les propositions actuelles vont permettre la fin de cette culture du silence qui permet encore aujourd'hui à des personnes de récidiver pendant des décennies sans conséquences? Qu'en est-il de M. P à l'heure actuelle? Si une personne change de centre de services scolaire avant même la tenue d'une enquête, comme c'est le cas de M. P, en quoi les dispositions présentement proposées assurent la sécurité des jeunes? Ce que nous demandons depuis le début, c'est une loi, et pas n'importe laquelle, une loi visant à prévenir et à lutter contre les violences sexuelles dans les écoles primaires et secondaires au Québec.

Nous désirons profiter de ce moment pour remercier toutes les personnes qui ont amplifié nos voix et qui ont mis de l'avant le caractère fondamental de la loi que nous demandons. #Metooscolaire. Fin de la lettre.

• (16 h 50) •

Mme Dépault (Caroline) : En conclusion, le RQCALACS constate, depuis le début des travaux, une incompréhension de l'application du projet de loi car ça s'applique de manière large pour un enjeu spécifique qui n'est même pas mentionné. On constate aussi qu'il semble y avoir une grande mécompréhension en ce qui a trait à...

Mme Dépault (Caroline) : ...de la prévention. Les codes d'éthique et la vérification d'antécédents n'est pas de la prévention, c'est l'instauration de mesures de sécurité de base. La prévention vise à poser des actions pour réduire, diminuer des comportements, attitudes, faire passer des messages clés, etc. Tout miser sur le bon vouloir des directions et centres scolaires est un terrain glissant, car, comme nous le savons, il arrive plus fréquemment qu'on le pense que des directions cherchent à tenir sous silence ou cacher certains cas de violence sexuelle rapportés, et ce, pour plusieurs raisons. C'est dans ces cas que nous nous considérons choyés de vivre dans une société démocratique où le travail journalistique constitue parfois le seul recours pour visibiliser des enjeux comme la violence sexuelle.

Finalement, on trouve aussi dommage le manque de considération pour les réalités spécifiques des communautés autochtones, car pour l'instant, comme le soulignait Mme Rizqy hier, les établissements scolaires autochtones ne sont pas pris en compte.

Mme Chénier (Justine) : Pour finir, nous voyons, dans le cadre de ce projet de loi, qu'on... nous voyons, dans le cadre de ce projet de loi, qu'on ajoute la possibilité que le ministre effectue une enquête selon son estimation de ce qui constitue une preuve suffisante pour déterminer que l'action dénoncée ait eu lieu. Considérant qu'il y a des enquêtes dans les cas de violences sexuelles et qu'il s'agit de crimes, nous cherchons donc à savoir si ces enquêtes empiètent sur ce qui peut être fait dans l'éventualité d'un litige, notamment en termes de contamination de la preuve. Ces enquêtes sont-elles administratives? Et, si oui, quelles sont les personnes interrogées dans le cadre de celles-ci? Est-ce que les victimes préjugées... présumées, pardon, témoins et personnes visées par les dénonciations sont questionnées?

On a également une autre question pour vous, le ministre. Les centres de santé... les centres de services scolaires sont-ils en mesure de déterminer si une personne a omis un ancien lieu d'emploi, les lieux d'emploi, qui répondent aux demandes des centres de services scolaires? Dans le cadre de la validation des antécédents d'emploi, s'exposent-ils à des poursuites en diffamation en répondant à de telles enquêtes? La vérification des antécédents d'emploi s'applique-t-elle aux coachs sportifs? Dans la mesure où l'enquête déclenchée, suite au scandale de l'école Saint-Laurent, indiquait que l'intégrité des joueuses avait été mise en danger pendant des décennies, comment le ministre va s'assurer que des personnes pouvant porter atteinte à la sécurité et à l'intégrité des jeunes ne soient pas en contact avec ceux-ci? Les jeunes n'étant pas...

La Présidente (Mme Dionne) : Mesdames, c'est malheureusement tout le temps que nous avions. Désolée. Nous allons débuter les échanges avec les membres de la commission. Donc, M. le ministre, c'est à vous la parole.

M. Drainville : Oui. Alors, merci pour votre témoignage. Je vais juste vous dire, je ne sais pas si vous avez eu connaissance, là, quand on a rendu public le plan de lutte contre la violence et l'intimidation dans les écoles, ça, c'était au mois d'octobre, il y avait dans ce plan-là quand même des références aux violences sexuelles. Notamment, je disais que ce plan-là fera en sorte que l'ensemble du personnel scolaire sera formé sur les actions préventives et les interventions les plus efficaces lorsqu'il y a des situations de violence et d'intimidation. La formation va inclure notamment les violences à caractère sexuel. Donc, je comprends très bien la... comment dire, le très grand engagement qui est le vôtre sur tout cet enjeu des violences sexuelles, mais je veux que vous sachiez que, quand nous parlons de lutte aux violences, ça inclut les violences sexuelles. Est-ce qu'on pourrait plus souvent y faire référence explicitement? Peut-être. De la même manière que j'ai déjà dit hier qu'à l'intérieur de ce concept de comportement pouvant faire craindre pour la sécurité physique ou psychologique des élèves, il y a, bien entendu, le... la question des violences sexuelles. Une violence sexuelle, par définition, fait craindre pour la sécurité physique ou met en cause la sécurité physique ou menace la sécurité physique et la sécurité psychologique des élèves. Donc, je veux quand même que vous sachiez que nous sommes très conscients de cette... de cette réalité. Et j'ai déjà dit hier qu'on pourra, dans la bonification que nous apporterons... dans les bonifications que nous apporterons au projet de loi, il sera possible de préciser que, quand on parle de violence psychologique ou de violence physique, de sécurité psychologique et de sécurité physique, ça comprend notamment la question des violences sexuelles.

Je voulais juste porter à votre attention également, quand vous disiez : Les enseignants ne sont pas les seuls, là, à côtoyer... comment vous avez dit ça? Les enseignants ne sont pas les seuls?

Mme Chénier (Justine) : Les seuls à côtoyer les jeunes.

M. Drainville : Voilà.

Mme Chénier (Justine) : Dans le sens qu'il y a toute une panoplie de personnels scolaires, qui inclut TES, personnel administratif...

M. Drainville : Exact...

Mme Chénier (Justine) : ...sportif qui sont en relation avec les jeunes dans les écoles au Québec.

M. Drainville : Voilà. Alors, je voulais juste attirer votre attention sur le fait que l'article 263, qui est l'article, donc, sur la fin des clauses d'amnistie, là, dit ceci. Alors : «Une disposition d'une convention ou d'un décret au sens de la loi sur les normes... ne peut avoir pour effet d'empêcher un centre de services scolaire, lorsqu'il impose une mesure disciplinaire à un employé...», donc pas seulement à un enseignant, «à un employé qui œuvre auprès d'élèves mineurs ou qui est régulièrement en contact avec eux en raison d'un comportement pouvant faire craindre pour la sécurité physique ou psychologique...», etc. Donc, sur l'élimination des clauses d'amnistie, ça ne concerne pas que les dossiers des enseignants, ça concerne les dossiers des employés des centres de services scolaires. Je voulais juste apporter cette précision.

Une question peut-être plus générale. Alors, vous militez pour la loi-cadre, c'est une bataille tout à fait légitime. Pour les gens qui vous écoutent, sans trop s'étendre, là, mais quelles sont les deux ou trois choses que ça changerait, une loi-cadre, là, très concrètement, là, dans le fonctionnement d'une école, là, primaire ou secondaire? Très concrètement. Je ne veux pas le concept, les concepts, je les maîtrise bien, je veux vraiment savoir par des exemples concrets qu'est-ce qu'une loi-cadre pourrait changer.

Mme Chénier (Justine) : Bien, si vous me permettez, je vais répondre à la question puis je vais me permettre aussi de rebondir sur certains commentaires que vous avez formulés un peu plus tôt. Qu'est-ce qu'une loi-cadre va changer dans les écoles primaires, secondaires, au Québec, M. le ministre, c'est assez simple. Premièrement, c'est une reconnaissance des établissements puis des institutions politiques de la problématique des violences à caractère sexuel dans les écoles. Quand on adopte une loi, c'est un pas dans la bonne direction parce qu'on reconnaît qu'il y a un problème puis on est prêt à travailler à mettre en œuvre des mesures concrètes pour le combattre. Une loi-cadre, aussi, qu'est-ce que ça va permettre? Si on se fie un peu à l'expérience des cégeps et des universités, ça a permis la mise en place de protocoles clairs, et efficaces, et surtout uniformes dans l'ensemble des établissements pour lutter contre les violences sexuelles, mais ça a également permis le développement de programmes spécifiques.

D'autant plus qu'un élément qui est très important à considérer, c'est que, si on veut voir émerger une société plus juste et égalitaire, nos jeunes sont très importants. Nous, dans l'approche CALACS, on travaille sur trois principaux volets : la prévention, la sensibilisation, évidemment, l'aide aux personnes survivantes, mais aussi la défense de droits. Puis on pense que la lutte contre les violences sexuelles, ça passe par la prévention et la sensibilisation. Ça fait qu'avec une loi-cadre, qu'est-ce que ça va permettre? Bien, c'est justement, une reconnaissance des instances politiques de la problématique, mais ça va venir donner les bons outils aux établissements et aux ressources spécialisées pour agir sur la problématique.

Si vous me permettez, vous avez mentionné aussi, préalablement à votre question, ça répondait, selon moi, là, à la question loi-cadre, là, de mon côté... vous avez mentionné quand même plusieurs éléments. Vous avez parlé du plan d'action violences sexuelles, intimidation. Il faut se remettre quand même dans la perspective que, nous, on est un groupe national en violences sexuelles qui cumule 40 ans d'expertise en la matière. Le regroupement a été fondé en 1970. Ça fait très longtemps qu'on développe de l'expertise sur ces enjeux-là. On ne peut pas mettre, dans un plan d'action, les violences sexuelles sur le même pied que l'intimidation, parce que c'est une problématique qui est très spécifique et qui a des enjeux très spécifiques en ce...

M. Drainville : ...cohabiter? Ça ne peut pas... Mme, excusez-moi.

Mme Chénier (Justine) : Non, ça ne cohabite pas. Désolée.

M. Drainville : Je comprends que c'est une problématique différente de l'intimidation, mais il me semble qu'on peut avoir un plan de lutte qui se... comment dire, s'attaque au phénomène de l'intimidation et au phénomène des violences sexuelles. L'un n'exclut pas l'autre, là.

Mme Chénier (Justine) : Malheureusement, non, ce n'est pas possible, parce que les violences sexuelles méritent des stratégies puis des ressources qui leur sont propres. C'est des enjeux qui sont différents de l'intimidation. On n'est pas sur la même racine des violences. Ça, c'est une première chose.

• (17 heures) •

Deuxième chose, dans le regroupement des CALACS, nous, on a le programme Empreintes, qui est un programme qui a été développé en collaboration avec une chaire de recherche à l'UQAM, qui est d'ailleurs financé par votre gouvernement, le Secrétariat à la Condition féminine, qui est un programme de prévention dans les milieux scolaires et dans les écoles du Québec. Dans le fond, on a des intervenantes qui vont venir donner des ateliers de formation, sensibilisation aux élèves, au personnel scolaire, mais aussi aux parents. Dans le fond, c'est un programme en six étapes qui est donné dans vraiment beaucoup d'écoles. Puis, nous, actuellement, on voit plusieurs enjeux qui émergent, avec nos relations, là, dans les écoles, que la loi permettrait de répondre. Premièrement, quand on rentre dans les écoles, il y a beaucoup de... c'est des choses qui sont documentées, là, notamment...


 
 

17 h (version non révisée)

Mme Chénier (Justine) : ...par la chaire de recherches. Ma collègue Caroline, c'est son programme, elle va pouvoir le commenter. Il y a quand même une certaine réticence des directions d'école à nous permettre d'aborder ces problématiques-là. On... aussi en parallèle, c'est des... nous, on cumule des données là-dessus, là, c'est très statistique, on voit vraiment une augmentation marquée quand on va donner les programmes de formation dans les écoles, des demandes d'aide de la part des adolescents et des adolescents. Je ne sais pas si,  Caroline, tu avais quelque chose d'autre à rajouter sur Empreinte.

Mme Dépault (Caroline) : Oui. Bien, notamment aussi ce qui est important de savoir pour le programme Empreinte, c'est l'élément qu'on a le plus de difficulté à donner en ce moment, c'est la formation au personnel scolaire, pour toutes les raisons qu'on connaît, la situation scolaire actuellement est difficile, mais reste que c'est... le personnel scolaire constitue une partie importante du programme pour réussir à enrayer les violences sexuelles dans le milieu scolaire.

Vous avez mentionné tout à l'heure qu'en effet il y a eu une addition dans le plan de lutte à l'intimidation et à la violence puis il est maintenant demandé aux écoles de créer leur propre plan en matière de violence sexuelle, qui inclut une formation obligatoire pour la personne scolaire. Ça, c'est vrai. Par contre, il n'y a aucune modalité qui est précisée, il n'y a pas de durée par rapport à cette formation-là, à quelle... la formation doit durer combien de temps? À quelle fréquence elle doit se répéter pour s'assurer de rattraper tout le personnel qu'il y a au cours d'une année avec le grand roulement de professeurs? Il n'y a pas non plus la fréquence à laquelle elle doit être donnée. Donc, tout ça permet finalement à une école de dire : Bon, bien, nous, on a donné une formation à notre personnel, oui, ça a été obligatoire, on l'a fait une heure sur le midi quand les profs sont relativement disponibles. Donc, pour nous, ça, c'est quand même un grand écueil actuel, parce qu'une formation d'une heure en violence sexuelle, on a le temps d'aborder pas grand-chose, on a à peine le temps de donner la définition de ce qu'est une violence sexuelle.

Donc, pour nous, il y a des éléments qui ont été ajoutés, mais ce n'est pas suffisant, notamment parce qu'il y a d'une part, comme Justine l'a dit, la violence sexuelle ne peut pas être mise sur le même pied que la violence de manière générale ni sur le même pied que l'intimidation, et aussi parce qu'il y a très peu de balises finalement qui ont été mises dans le plan de lutte contre l'intimidation et la violence, ce qui fait que les écoles sont un peu... peuvent un peu faire ce qu'elles veulent et que ça risque de créer des situations qui sont très... qui ne sont pas uniformes. Il y a un risque que des écoles développent des plans super et d'autres non. Finalement, ce n'est pas équitable pour les écoles... pour les élèves à travers la province. Et le principe d'égalité des chances n'est finalement pas mis de l'avant parce qu'on s'en remet aux écoles à développer les procédures qu'elles jugent les meilleures pour leur école. Tandis qu'avec une loi-cadre, bien là, on vient mettre des bases qui sont communes à tout le monde, on vient s'assurer de l'imputabilité des écoles de manière uniforme à travers la province.

M. Drainville : O.K. Très bien. Bien, écoutez, ça met fin à mes questions. Merci.

La Présidente (Mme Dionne) : Est-ce qu'il y a d'autres interventions du côté du gouvernement? M. le... Ça va? D'accord. Alors, je cède maintenant la parole à Mme la députée de Saint-Laurent.

Mme Rizqy : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Bonsoir. Merci de participer à nos travaux. Évidemment, vous comprendrez que mon ancienne collègue Hélène David avait déposé une loi-cadre en enseignement supérieur, avec des montants aussi qui étaient alloués, et ça a été fait assez rapidement, dans la foulée du scandale #moiaussi, et ça a été très bien accueilli dans le monde universitaire et collégial, et c'est toujours aujourd'hui valide et le souhait de plusieurs qui sont venus aujourd'hui et aussi hier disaient qu'effectivement une loi-cadre permettrait vraiment de chapeauter le tout.

Aujourd'hui, ce n'est pas le mécanisme qui est choisi par le gouvernement, donc nous, on doit travailler avec qu'est-ce qui nous est offert. Est-ce que vous accueillez quand même favorablement cette étape? Parce que nous, dans l'autre législature, pendant quatre ans, on avait beau s'époumoner pour demander un avancement de considération puis La voix des jeunes compte est venu ici à Québec rencontrer le ministre avec des élèves qui ont été victimes, d'autres qui ont été témoins, qui ont accompagné les victimes et qui ont porté pendant six ans, ces jeunes femmes, ce projet de voir un jour naître, un, un intérêt politique, mais, deux, que ce soit concrétisé dans une loi-cadre. Est-ce que vous accueillez quand même favorablement cette étape qui est une avancée par rapport à l'autre législature où est-ce qu'on avait constamment une fin de non-recevoir?

Mme Chénier (Justine) : Merci, Mme la députée. Donc, en fait, nous, c'est sûr, on est un groupe national en violence sexuelle, on a des programmes de prévention dans les milieux scolaires, donc c'est vraiment notre cheval de bataille. Comme on l'a mentionné un peu plus tôt dans notre présentation, les CALACS, ils sont en place depuis les années 70.

Ceci étant dit, actuellement, dans le projet de loi, tu sais, on est satisfaits de voir un intérêt politique d'adresser la...

Mme Chénier (Justine) : ...question des violences sexuelles en milieu scolaire, primaire et secondaire, particulièrement si on y va dans une vision de... Si on forme, on fait de la prévention auprès de nos jeunes, bien, on a une chance de poursuivre la lutte contre les violences sexuelles et puis l'enligner dans une certaine direction. Actuellement, le p.l. no 47, moi, de la façon que je l'ai lu avec ma collègue, mais aussi avec le collectif de La Voix des jeunes... il ne mentionne pas la question des violences sexuelles de façon explicite. Et puis il y a quand même certaines lacunes qu'on a relevées durant l'analyse et qu'on vous a partagées un peu plus tôt. Donc, en fait, en ce sens, on accueille favorablement l'intérêt politique du ministère de l'Éducation à traiter de la problématique, mais actuellement le projet de loi no 47... on traite des problématiques de violences sexuelles, mais ce n'est pas nommé. Donc, on émet quand même certaines réserves, comme on l'a mentionné au début, à le... à l'appuyer publiquement. On considère que c'est une mesure qui est insuffisante. Et c'est ça notre position d'organisation.

Mme Rizqy : ...même surprise parce que dans le mémoire du ministre déposé au Conseil des ministres, la partie qui est accessible, évidemment, là, il nomme neuf fois violences à caractère sexuel, mais dans le projet de loi zéro. Alors, c'est ça que je pense qu'on devrait quelque part l'inscrire pour savoir qu'en fait on donne suite à plusieurs enquêtes ainsi qu'une enquête générale qui porte sur les violences à caractère sexuel dans les écoles. Est-ce que vous êtes du même avis?

Mme Chénier (Justine) : Bien, actuellement, la question que, nous, on se pose, et puis c'est une question qu'on a quand même pris la peine de poser un peu plus tôt, Caroline, tu pourras compléter, c'est qu'en ce moment on est... on ne va pas en profondeur pour traiter la problématique, alors qu'on voit qu'il y a une opportunité. Pourquoi ne pas adopter la loi-cadre directement, dès maintenant et commencer à travailler autour de ça? Il y a déjà eu deux projets de loi qui ont été déposés. Donc, vraiment, là, les violences sexuelles ont besoin de solutions qui sont spécifiques. Actuellement, la... le projet de loi ne s'articule pas autour de ça, même s'il y a de l'intérêt derrière, mais il faut que l'intérêt se concrétise en actions et en actions concrètes. Et c'est ça qu'on attend.

Mme Rizqy : Oui, mais... Mais l'avis, je le partage, là. Vous comprendrez que là, nous, on n'est pas au gouvernement et qu'ils sont 89. Ils ont une double majorité. Alors, nous, on va travailler avec qu'est ce qu'on a sur la table. Et là, moi, si j'ai le projet de loi no 47 que... où est-ce qu'on essaie de mettre le maximum d'amendements dans le cadre de ce projet de loi, vous... Puis je veux aussi, évidemment, on a... Je ne peux m'empêcher de saluer le travail de Loriane puis Mélanie qui... Elles l'ont fait, bénévolement. On va se le dire très franchement, eux, quand elles recueillent des témoignages des jeunes, la première chose qu'elles m'ont dite, c'est qu'il y a des jeunes élèves qui ne savent même pas qu'elles sont en fait victimes de violence sexuelle. Et ça, c'est assez troublant de ne même pas savoir que le geste qui a été posé est quelque chose qui est totalement inacceptable, inadéquat et même criminel. Puis vous, à CALACS, j'imagine que c'est la même chose, que des fois les gens doivent vous appeler pour juste savoir, est-ce que, oui ou non, je suis victime d'une violence à caractère sexuel?

Mme Dépault (Caroline) : Oui, totalement. Puis je suis avec le programme de prévention. En fait, justement, dans les CALACS, on la nomme. Et après, quand on passe dans les écoles, il y a une augmentation des demandes de la part des... de la part des jeunes dans ces écoles-là. On voit que de passer faire de la prévention, ça permet aux jeunes de comprendre qu'est-ce que la violence sexuelle, puis... Ah! Bien, j'en vis. Qu'est-ce que je peux faire avec ça? Et puis depuis aussi quelques années, on voit une augmentation des demandes d'aide de la part des jeunes. Avant, les CALACS recevaient un profil type de victimes, des femmes plus âgées qui avaient vécu de la violence sexuelle dans leur enfance.

Donc, il y a... Les manières de venir en aide à ces femmes-là étaient différentes, là. C'est... Un jeune qui a vécu la... de la violence sexuelle récemment en milieu scolaire, il côtoie son agresseur parce que c'est soit un membre du personnel scolaire ou un jeune. Donc, c'est sûr que du côté des CALACS, ça amène aussi un changement dans la manière qu'on... qu'on vient en aide à ces victimes-là. Puis c'est sûr que de passer dans les écoles, on le voit, ça... ça aide, mais évidemment ce n'est pas... ce n'est pas suffisant non plus. Il faut des balises de sécurité, il faut que les écoles puissent être imputables, il faut des solutions pour que les... les élèves puissent se sentir en sécurité puis puissent savoir clairement quoi faire si jamais ils en vivent également, ce qui n'est pas le cas en ce moment. Puis, bien, comme on l'a dit, ce qui... C'est sûr que c'est... Toutefois, ce n'est pas idéal en ce moment, mais, pour nous, ce n'est pas suffisant, les... le projet de loi no 47 et les changements qui seraient apportés, comme le plan de lutte à la violence et à l'intimidation.

Mme Rizqy : Tantôt, on a eu le privilège d'avoir Mme Claire Beaumont, vraiment, avec un mémoire. Puis le ministre a une question qui disait : Est-ce qu'on est rendus là au Québec, à s'interroger si, oui ou non, la...

Mme Rizqy : ...main sur une épaule pourrait être quelque chose à caractère sexuel. Puis elle avait répondu : Attention, là, il y a du contexte. Ça va... ça va dépendre, là, de quoi il est question.

• (17 h 10) •

Et ça m'a rappelé quelque chose qui est arrivé à l'université. Une de mes camarades de classe, Natalie, était vraiment troublée. Je lui ai dit : Qu'est-ce qui est arrivé? Elle dit : Écoute, Marwah, c'est tellement bizarre, il a passé ça maintenant mon dos, le prof, le chargé de cours. Bien, c'est ça, c'est que, tu sais, c'est remettre en contexte. Est-ce que c'est approprié ou pas approprié, et dans quel cadre que ça a été fait? Puis là, c'était en fait dans une préparation d'entrevues dans le cadre d'une course aux stages, donc le... complètement pas en matière de bienveillance. Et c'est pour ça que je trouvais ça très à propos ce qu'elle disait. Tu sais, de dire : Oui, qu'est ce qui est bienveillant puis qu'est ce qui ne l'est pas? Ce qui peut être un geste des fois anodin, dépendant d'un contexte, peut ne pas être anodin. Alors, je pense qu'on a encore beaucoup de travail à faire, au Québec, pour vraiment donner des exemples aux gens, puis d'aller faire de l'éducation pour s'assurer que même le jeune comprenne qu'est-ce qui lui arrive. Puis il y a une notion que c'est Mélanie Lemay qui me l'a apprise, de tout ce qui est du «grooming», je ne connaissais pas ça. Mais honnêtement, je trouve que c'est quelque chose qu'on devrait vraiment en parler plus, parce que c'est vrai que, des fois, le prédateur sexuel ne va pas arriver avec ses grands sabots, il s'installe tranquillement. Mais il faut voir les signes avant-coureurs, puis il faut alerter le jeune avant qu'il soit pris dans son engrenage. Et je me pose la question : Avons-nous assez de ressources? Puis honnêtement, j'ai l'impression que non. Puis je suis contente de vous avoir, CALACS, parce que j'aimerais... je vais vous donner beaucoup de temps, là, maintenant. Je vais arrêter de parler parce que je veux que vous me donniez vous, qu'est ce que vous, vous entendez? Qu'est-ce que vous, là, les signaux de détresse que vous recueillez? Puis des fois, quand vous n'êtes pas capable de tout répondre, là, c'est quoi votre frustration, à la fin de la journée, quand vous n'êtes pas capable de dire : O.K., j'ai eu le temps de répondre à tout le monde correctement?

Mme Chénier (Justine) : Bon, pour ce qui est, par exemple, du «grooming», ce qui est intéressant, c'est que, tranquillement, on est en train d'intégrer évidemment, nous, le terme français, là, à nos services. C'est le pédo... pédo... pédo... coudon, le pédopiégeage, pardon, excusez-moi, et c'est la traduction française, et c'est quand même, tu sais, des phénomènes qui sont assez communs.

Au niveau de ce qui est observé dans nos centres, c'est sûr qu'il faut ramener quand même, une certaine situation qui est particulière. Et nous, au Regroupement des CALACS, on est à plus d'une vingtaine de membres actifs, de membres répartis à travers la province, qui ont des réalités régionales qui leur sont propres. Et puis ça, c'est quand même un élément qui est assez important à considérer, chaque région a ses propres réalités, tu sais, qu'on parle d'accès aux soins... aux soins... d'accès aux soins de santé, c'est quand même un élément qui est assez majeur au niveau des personnes survivantes. Par exemple, quelqu'un qui vit une agression sexuelle, c'est quoi les problématiques qu'elle va et observer ou enregistrer pour justement aller chercher de l'aide? Aussi, dans nos centres mêmes, on est quand même des organisations communautaires. Les CALACS, c'est ça, c'est important de ne pas le perdre de vue. Donc, on est quand même aux prises avec des enjeux en lien avec le financement, des listes d'attente assez importantes. Il y a des CALACS qui ont des listes d'attente pour obtenir des services de plus de un an. Ce qui est quand même assez frustrant aussi que, je pense, qu'on observe au niveau de nos centres, c'est que tant au niveau des dossiers prévention, sensibilisation, mais aussi des dossiers en défense de droits, c'est qu'on est un... on est le seul groupe national en violence sexuelle au Québec, donc on porte vraiment plusieurs chapeaux, puis on observe vraiment beaucoup d'enjeux, puis on voit en même temps les ressources et qu'on a s'amenuiser justement parce qu'on est des organisations communautaires qui ont des enjeux de financement, puis on... Donc, voilà, je laisserais ma collègue Caroline poursuivre.

Mme Dépault (Caroline) : Oui, bien, je voulais revenir aussi sur l'exemple que vous donniez, Mme Rizqy, sur la main sur l'épaule. C'est des commentaires que... un peu dans le même sens, on ne peut plus rien dire, on ne peut plus rien faire, et tout passe par la prévention. C'est souvent des... des choses que le personnel scolaire amène quand on fait la formation auprès du personnel scolaire avec Empreintes, puis c'est... justement, c'est très contextuel, mais c'est important d'avoir ces discussions-là puis de démystifier ça avec les adultes qui entourent nos jeunes pour qu'ils comprennent que, bien oui, il y a des choses qu'ils peuvent se garder une gêne parce qu'on ne sait jamais non plus comment ça peut être reçu. Et il y a toujours une relation de pouvoir entre le personnel scolaire et les jeunes.

Aussi un enjeu qu'on rencontre, on l'a nommé, c'est difficile d'aller donner la formation au personnel scolaire dû à la réalité dans les écoles, au roulement, etc. C'est pour ça que l'élément de formation personnel scolaire qui est mentionné dans les plans de lutte contre l'intimidation et la violence, selon nous, est insuffisant parce qu'on le sait il y a tellement roulement... il y a tellement de roulement au sein du personnel scolaire que de dire on va faire une formation aux deux ans sur l'heure du midi. Ça va durer une heure on va manquer la moitié finalement du personnel scolaire qui passe dans l'école...

Mme Dépault (Caroline) : ...à travers l'année, parce que ça change quasiment à chaque mois, on sait bien. Puis aussi, quand on passe dans les écoles, on le voit, puis ça, ça a été... c'est une problématique qui a été relevée par nos centres, on va faire des animations dans les classes, c'est en secondaire II, III et IV, principalement, puis les jeunes sont très réceptifs, ça va bien. Parfois, c'est sûr, on rencontre des commentaires... des commentaires misogynes ou des commentaires qui entretiennent la culture du viol...

La Présidente (Mme Dionne) : En terminant.

Mme Dépault (Caroline) : ...mais ça vient aussi des professeurs et, parfois, ça vient vraiment passer toute l'animation puis la prévention qu'on vient faire. Donc, c'est important, vraiment, de s'intéresser, là, au personnel scolaire, en matière de formation.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci. Je crois savoir que le ministre aimerait reprendre son temps de parole, il reste six minutes, et que...

M. Drainville : Je prendrais seulement deux minutes puis je laisserais la balance de l'enveloppe à ma collègue de Mercier.

La Présidente (Mme Dionne) : Est-ce qu'il y a consentement de la part des membres?

Des voix : Consentement.

La Présidente (Mme Dionne) : Oui, d'accord. Alors, allez-y, M. le ministre.

M. Drainville : Oui. Je voulais juste préciser, pour les gens qui nous écoutent, là, je pense que c'est important que les gens le sachent, de rappeler que «le conseil d'établissement qui adopte un plan de lutte contre l'intimidation et la violence doit prévoir une section distincte du plan de lutte qui doit être consacrée aux violences à caractère sexuel», là. Ça, je pense que c'est important. Cette section-là doit prévoir, en plus des éléments prévus... alors, je cite la loi, là, «doit prévoir, en plus des éléments prévus à l'alinéa... les éléments suivants, c'est-à-dire : des activités de formation obligatoire pour les membres de la direction et les membres du personnel et aussi des mesures de sécurité qui visent à contrer les violences à caractère sexuel. Un document qui explique le plan de lutte contre l'intimidation et la violence est distribué aux parents. Ce document doit faire état de la possibilité d'effectuer un signalement ou de formuler une plainte concernant un acte de violence à caractère sexuel au protecteur régional de l'élève».

Et j'ajoute à cela, c'est important de le rappeler, que, quand on a créé le Protecteur national de l'élève, on a prévu une voie rapide, une voie directe au protecteur national dans les cas de violences sexuelles. Donc, je pense que c'est important... si on est pour faire le portrait global du filet de sécurité qui protège les élèves en matière de violence sexuelle, je pense que c'est important de noter ces éléments-là. Alors, je termine là-dessus. Je cède la parole, Mme la Présidente, avec votre accord, à la députée de Mercier.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci, M. le ministre. Mme la députée, vous avez huit minutes.

Mme Ghazal : Très bien. Bien, merci. Merci beaucoup pour votre présence. Je ne sais pas si vous voulez réagir à ce que le ministre vient de dire, le fait qu'il y ait, dans le plan de lutte contre les violences... il y a une section pour parler des violences sexuelles plus spécifiquement, est-ce que ça vous satisfait, comme expertes en matière de violences sexuelles?

Mme Dépault (Caroline) : Bien, comme on l'a dit précédemment, ce n'est pas suffisant, selon nous.  Encore une fois, les modalités de, par exemple, la formation, les balises ne sont pas nommées. Chaque école, finalement, est libre de monter son propre plan. On a vu des cas super, exceptionnels de plans, mais on sait que ce n'est pas la réalité de toutes les écoles non plus, qui ont... les ressources qui ont souvent accès à des ressources pour les aider. Pour monter ces plans-là aussi, ça prend des ressources financières. Parfois, on sait que les écoles aussi, ce n'est pas toujours le cas. Donc, on voit surtout le risque d'iniquité d'une ressource à l'autre, puis finalement c'est les élèves qui en paient le prix si le plan est très peu développé, peu accessible malgré qu'il ait été distribué, si la formation n'est pas assez... Bref, le filet est là, mais, selon nous, il comporte encore beaucoup de trous pour qu'il soit suffisant pour réellement assurer la sécurité des jeunes.

Mme Ghazal : Puis, tu sais, vous l'avez vraiment bien expliqué, puis vous étiez ferme là-dessus, c'est qu'on ne peut pas mettre violence de façon générale et dire : Bien, ça inclut aussi les violences sexuelles, puis qu'on va en traiter un petit peu, il faut qu'il y ait quelque chose de plus complet, là, concernant les violences sexuelles, parce que ça ne vient pas... comment vous comment vous avez dit ça, de la même racine de la violence, je pense, vous avez dit ça comme ça.

Puis vous avez lu... je n'ai pas vu que vous aviez votre mémoire, vous avez lu un document, est-ce que c'est possible de le déposer à la commission, l'envoyer, comme ça, on pourrait l'avoir, tout le monde pourrait avoir votre point de vue par rapport à ça? Puis, moi, en fait, je suis comme vous, j'aurais aimé qu'on soit en train d'étudier le projet de loi no 397 que j'ai déposé, qui a été déposé pour une deuxième fois. Puis il y a plusieurs organisations aussi qui ont demandé qu'il y en ait un clair, spécifique, de la même façon qu'il y en a aussi pour les cycles supérieurs, c'est sûr et certain, mais ce n'est pas ce projet de loi là qu'on a devant nous. Pourtant, des fois, le gouvernement, il va appeler des projets de loi, des oppositions. Ça n'arrive pas souvent. En ce moment, il y a l'étude d'un projet de loi d'une de mes collègues, que c'est elle qui l'a déposé, le 495, un projet de loi sur l'accaparement des terres, puis, en ce moment, il y a l'adoption du principe. Donc, ça peut arriver qu'un parti d'opposition dépose une loi, puis que le gouvernement...

Mme Ghazal : ...l'appelle. Donc, j'imagine, on ne sait pas, il faut... Moi, je vais continuer à talonner le ministre, comme je l'ai fait précédemment, pour dire qu'il faudrait qu'il y ait une loi-cadre spécifiquement pour les violences à caractère sexuel.

• (17 h 20) •

Par... Est-ce que... Est-ce... Vous avez parlé du programme Empreinte, est-ce que, dans ce programme-là... comment... est-ce qu'il est présent dans plusieurs écoles? Je comprends que c'est quelque chose de volontaire, il y a combien d'écoles qui s'en font prévaloir? Puis comment est-ce qu'on peut donner... vous donner une réelle place, les CALACS, et un pouvoir d'agir dans les écoles, plus concrètement? Peut-être nous en parler un peu plus, de ce programme-là, est-ce qu'il est suffisamment connu, suffisamment implanté dans différentes écoles, etc.

Mme Dépault (Caroline) : Oui. C'est un programme qui a été monté en collaboration avec des chercheurs à l'UQAM, dont Manon Bergeron, Martine Hébert, puis qui est financé depuis... depuis 2018 avec le secrétariat à la Condition féminine. Mais on n'a pas le nombre d'écoles qui ont été rejointes parce qu'on y va plus par nombre de jeunes et nombre du membre de personnel scolaire. Mais pour l'année 2021-2023, on avait 86 000 jeunes... 86 000 jeunes qui ont été rejoints par le programme. Et, en fait, les écoles qui sont... les régions qui sont couvertes par le programme, c'est celles qui ont un CALACS membre, donc c'est environ 26 CALACS, donc 26 régions qui sont couvertes. Il y a quelques-unes au Québec, malheureusement, qui ne reçoivent pas le programme Empreinte. Puis ensuite, ça dépend aussi, bon, bien, est-ce que les écoles sont ouvertes à recevoir le programme, est-ce que... Il y a des régions qu'il y a énormément de demandes pour la taille du CALACS, tandis qu'il y a des CALACS qui attendent seulement d'être appelés par les CALACS de... par les écoles de la région. Malheureusement, il y a certaines écoles qui sont fermées à ce que des ressources en violence sexuelle viennent dans leurs écoles malgré qu'on sait qu'il y a des cas de violence sexuelle dans ces écoles-là. Donc, la... ça varie beaucoup.

Mme Ghazal : Mais ça, ça me préoccupe, quand vous dites qu'il y a des écoles... parce que j'en ai aussi entendu parler, il y a des écoles qui ne veulent pas vous avoir à l'intérieur. Est-ce que vous pouvez en parler plus, de ce phénomène-là? Moi, je le trouve extrêmement inquiétant, qu'un organisme comme vous, on nous ferme les portes en disant : Ah! chez nous, ça n'existe pas, alors qu'on sait pertinemment, vous le dites que vous le savez, qu'il existe des cas. Peut-être nous en parler un peu plus puis du fait... C'est d'où aussi l'intérêt d'avoir une loi. Bien, une loi, c'est obligatoire de mettre en place des actions puis d'avoir les ressources. Puis une des ressources, bien, ça serait les CALACS aussi pour mettre en place les éléments d'une loi, qui l'exigerait, une loi-cadre.

Mme Dépault (Caroline) : Exactement. Puis je voulais juste faire un petit retour rapide sur l'idée de violence versus violence sexuelle. Un cas un peu qui est peut-être parlant de ça, pourquoi c'est important de vraiment faire une loi qui est spécifique, c'est que, par exemple, dans un cas de violence générale, on peut s'imaginer que parfois, dans un processus de régler le conflit ou quoi que ce soit, les élèves vont peut-être être amenés à en parler ensemble dans un bureau pour tenter de régler la situation. En matière de violence sexuelle, en fait, c'est que les élèves ne devraient pas se retrouver dans un même bureau, la victime avec l'agresseur, pour essayer de régler la situation, d'avoir les excuses de l'agresseur. On s'entend que ce n'est pas la situation... ce n'est vraiment pas une situation qu'on recommande, qui est idéale. C'est pour ça qu'au niveau violence, violence sexuelle, il faut traiter ça de manière différente.

En ce qui concerne la difficulté à entrer dans les écoles, il y a beaucoup de raisons. Des fois, c'est parce que les écoles disent qu'elles ont une ressource à l'interne, donc une sexologue qui s'occupe de la prévention dans leurs écoles. Quand on sait que la sexologue, elle couvre 14 écoles primaires, une dizaine d'écoles secondaires sur une région de plus de 100 kilomètres, donc on s'imagine que, bon, bien, ce n'est peut-être pas... ce n'est peut-être pas réaliste, en fait, que la ressource à l'interne fasse, en effet, tout le... tout le travail de la prévention en plus du travail de soutien en plus des autres cas qui l'occupent.

Mme Ghazal : Puis j'ai une question, là : Comment ça fonctionne? C'est-à-dire que, quand l'école dit : Ah! je ne veux pas vous avoir, est-ce que c'est quelqu'un du personnel scolaire qui contacte un CALACS pour dire : on aimerait... Comment ça fonctionne pour que vous sachiez qu'il y a des écoles qui le fassent? Est-ce que c'est documenté, que... quelles écoles le font ou quelles écoles le refusent? Oui.

Mme Dépault (Caroline) : C'est documenté. Bien, on le sait plus parce que nos CALACS nous en parlent, de leur réalité régionale, mais aussi, c'est qu'on est en année transitoire, en fait, entre l'ancien plan d'éducation à la sexualité et le nouveau cours CCQ. Donc, actuellement et avant, c'est qu'il y a des profs, par exemple, qui invitaient les CALACS dans leur classe pour venir parler de violence sexuelle, parce que, bon, bien, c'était la réalité de tous les profs et aucun prof en même temps. Avec le cours de CCQ, ça change un peu, puis c'est le professeur de CCQ qui va faire l'éducation à la sexualité, qui va parler de violence sexuelle, qui amène... d'autres enjeux par rapport à ça. Donc, parfois, c'est un professeur qui va appeler à...

Mme Dépault (Caroline) : ...qui va appeler le CALACS pour dire : Ah! ça serait intéressant que vous passiez dans ma classe. Parfois, c'est la direction. Parfois, c'est le CALACS qui contacte l'école pour dire : Bon, bien, nous, on offre un programme clé en main, on vient former votre personnel scolaire, on s'adresse aux parents également. Puis il suffit que l'école a eu une situation qu'ils veulent garder sous silence... Ah! non, on ne veut pas que vous rentriez parce qu'il y a un potentiel explosif. Et nous, on sait déjà aussi qu'à l'école il y a plusieurs, plusieurs cas de violences sexuelles à cette école-là, mais... une omerta.

Mme Ghazal : Bien, moi, ça... ça, je trouve ça vraiment, vraiment problématique...

La Présidente (Mme Dionne) : En terminant.

Mme Ghazal : ...cet élément-là que vous amenez, là. Puis aussi, bien, on n'a pas le temps, là, de parler du cours CCQ versus celui qui était là avant, concernant l'éducation à la sexualité, mais on pourrait aussi développer là-dessus aussi, sur la différence.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci. Merci beaucoup. Merci infiniment pour votre contribution à nos travaux de la commission.

Donc, moi, je suspends les travaux pour accueillir le prochain groupe. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 17 h 26)


 
 

17 h 30 (version non révisée)

(Reprise à 17 h 31)

La Présidente (Mme Dionne) : La commission reprend maintenant ses travaux. Donc, je souhaite la bienvenue à notre dernière intervenante de la journée.

Donc, Mme Mélanie Lemay, co-fondatrice du Mouvement Québec contre les violences sexuelles. Donc, Mme Lemay, je vous rappelle que votre temps de parole est de 10 minutes pour nous présenter votre exposé. Suite à cela, nous procéderons aux échanges avec les membres de la commission. Alors, je vous cède la parole.

Mme Lemay (Mélanie) : Bonjour à vous et merci pour l'invitation. Je m'appelle Mélanie Lemay, je suis étudiante au doctorat en sociologie et co-fondatrice de Québec contre les violences sexuelles ainsi que pour co-coordonnatrice de La voix des jeunes compte.

Concrètement, en ce qui concerne le hockey et le football, j'ai été témoin, pendant une bonne partie de ma jeunesse et ma vie professionnelle, des conséquences de l'omerta et de la culture du silence. Quand Facebook s'est popularisé en 2007, il n'y avait aucune littérature entourant le phénomène du catfishing et pratiquement aucune loi ou jurisprudence entourant la violence en ligne. Cette forme de cyberimposture, en français, vise entre autres à se fabriquer une fausse identité en ligne pour tromper quelqu'un dans une fausse relation. Néanmoins, dans ma situation, une tierce personne, dont la mère avait d'ailleurs été mon orthopédagogue quand j'avais huit ans, avait crée un faux profil avec mon visage afin d'entrer en contact avec l'équipe locale de junior majeur. Rapidement, avec la complicité et le chantage de sa mère qui me menaçait ouvertement via la DPJ de me retirer ma famille si je ne coopérais pas, j'étais contraint de produire de la pornographie juvénile. Je venais tout juste d'avoir 14 ans. L'équipe savait que j'étais mineure et elle s'en fichait, tout cela émanait de leur demande. L'un d'eux a même joué dans la NHL, il était un héros local. Ce dur épisode de ma vie m'a désensibilisé quant aux dangers qu'il y avait autour de moi. Et même si je n'ai jamais été trafiquée, j'étais à deux doigts d'être exploitée. Ce degré de violence, avec la complicité d'une intervenante, me hante encore aujourd'hui. Cependant, par mes propres moyens, j'ai réussi à fuir cet environnement toxique et j'ai changé de région pour étudier ailleurs au cégep. Malheureusement, ma route a de nouveau été abîmée par d'autres personnes mal intentionnées.

En effet, l'agression sexuelle violente que j'ai vécue à 17 ans est une expérience devenue expertise que je n'ai pas choisie. Je la vis et je la peaufine, faute de pouvoir l'effacer, et c'est pour illustrer le phénomène de victimisation secondaire que je continue de témoigner. Cette agression par un presque inconnu a été coordonnée en complicité avec deux amis en qui j'avais confiance. Ils étaient tous membres de la même équipe de football de celle de mon agresseur. Ils m'avaient convié à un «after party» chez ce dernier, que je ne connaissais à peine, auquel ils ne se sont jamais présentés. Ses amis n'ont donc pas participé à l'acte en tant que tel, mais ils ont été complices, en plus d'avoir participé au camouflage et au harcèlement continu, avec le soutien d'autres membres de l'équipe, dont j'ai fait l'objet. Suite au dévoilement de cette situation, une personne que je croyais être une amie... cette dernière, ayant été violée par le même gars l'année précédente, a divulgué mon histoire sans mon consentement à l'un des capitaines de l'équipe qui a eu l'effet d'une bombe. Les adultes en position d'autorité ont par la suite tenté, avec leurs pouvoirs institutionnels, de taire mon histoire et j'ai été directement témoin d'autres jeunes filles qui, elles aussi, furent silenciées dans d'autres dossiers, puisque l'image et la réputation de l'établissement étaient plus importantes que nos vies. Je n'ai jamais pu étudier en droit en raison de l'impact sur mes résultats scolaires, même si c'était mon rêve.

«Oui, je t'ai violée, so what? Je l'ai fait parce que je dois te rappeler que tu n'es rien d'autre qu'une plotte qu'on baise puis que tu n'es personne ici. Moi je suis un gars de foot, puis si tu n'arrêtes pas d'en parler avec mes parents, on va te poursuivre, ils sont au courant». Ces mots, c'est mon agresseur qui me les a dits lors d'une soirée où un cercle s'est formé autour de nous et on m'a obligé à lui serrer la main. Il m'a entraîné dehors pour me menacer pour la énième fois. Du haut de ses 19, 20 ans, il savait déjà que l'argent, la justice et le pouvoir étaient de son bord. Je l'avais enregistré, mais ce soir-là, on m'a volé mon téléphone. Ces textos, menaces de harcèlement, de lui en train de se masturber ou les preuves de mes demandes répétées pour qu'il me fiche la paix se sont envolées. Je suis vite devenue la risée du cégep dans mes tentatives pour le retrouver, mais c'était peine perdue. Le... que tout le monde me renvoyait était que j'exagérais et que je semais le drame partout où que j'allais.

L'énergie du désespoir m'a poussé à contacter la police pour une première fois. J'ai parlé du cellulaire volé, de ce qui s'était passé, mais j'ai été coupé au milieu de mon récit pour me faire demander, sur un ton accusateur, c'est-tu ton ex? Parce que si oui, ça serait vraiment bas d'essayer de te venger comme ça. Sur le moment, j'ai figé. Mon réflexe a été de raccrocher. Quelques mois plus tard, quand j'ai repris tout mon petit change pour les contacter à nouveau, le policier m'a dit, au bout du fil : C'est bien triste ce qui t'est arrivé, mais tu réalises-tu que tu vas détruire sa vie si tu portes plaine? À l'époque, j'avais 17 ans et tout ce que je croyais être vrai jusqu'à là était mort à mes yeux. J'ai compris que la vie ne valait rien à côté de la sienne, ou plutôt de sa carrière présumée. Et lui aussi, il le savait. C'est d'ailleurs ce qui lui permet...

Mme Lemay (Mélanie) : ...en toute quiétude et de bander si fort.

Quelques années plus tard et suite à mon passage à Tout le monde en parle, le chef de police de la ville où j'habitais m'a convoquée à son bureau, insulté que j'aie dévoilé sur la place publique ce qui m'était arrivé. Il était en compagnie de son responsable aux communications. Il m'a fait croire que ma posture témoignait de mon incapacité à passer à autre chose. Aujourd'hui, je sais que cette rencontre était un piège, et c'est celui qu'on tend aux victimes, qui les pousse à croire que leur point de vue n'est valide que si leur agresseur a été déclaré coupable. L'histoire qu'on ne dit pas, là-dedans, dans ce scénario, ça... c'est que ce scénario relève de l'exception plutôt que de la règle. Le DPCP a d'ailleurs maintenu, dans une rencontre où je contestais la décision de ne pas aller à procès, qu'il préfère avoir des milliers de coupables en liberté qu'un seul innocent en prison. Je peux comprendre pour les délits mineurs, mais, en cas de crime contre la personne, un agresseur peut faire plusieurs victimes au courant de sa vie, et des alternatives mériteraient d'être trouvées. Combien de vies brisées pour maintenir en place la réputation de toutes ces institutions?

J'ai d'ailleurs allégué, dans une plainte déposée à la Commission des droits de la personne et de la jeunesse, que j'ai été violée une deuxième fois pendant la déposition enregistrée de ma plainte lorsque l'enquêtrice m'a demandé de m'imaginer à quatre pattes à terre et de revivre à plusieurs reprises et sous différentes variations mon viol. J'étais contrainte de le faire, car il s'est agi prétendument de techniques d'enquête. Cette situation humiliante et dégradante m'a fait perdre tous mes moyens. La procureure me l'a d'ailleurs reproché par la suite, non sans me rappeler que ça minait ma crédibilité ainsi que ma capacité à passer à travers un procès. Elle m'a aussi dit que j'avais menti en prétendant que mon agresseur n'avait pas eu de conséquence puisque supposément il n'avait pas pu jouer au football universitaire en raison du stress qu'aurait suscité en lui ma dénonciation.

Ce que j'en tire comme conclusion, c'est qu'aux yeux de cette procureure la valeur de ma vie passait après la carrière potentielle ou plutôt le privilège de ce violeur multirécidiviste, parce que, oui, j'ai reçu d'autres témoignages, à faire partie d'une équipe sportive. Le plus étonnant, c'est que ce dernier aurait reconnu pendant l'enquête qu'il avait effectivement séquestré et étranglé avec mes clés, mais que c'était pour me rapprocher romantiquement de lui. Ainsi, même s'il l'a avoué et que j'ai encore la marque de ses ongles gravée sur mon avant-bras, la procureure et l'enquêtrice m'ont toutes deux dit que c'était ma parole contre la sienne, ce qui est un mythe, soit dit en passant, en vertu du Code criminel. Et, si la plainte avait été retenue, l'avocat de la défense aurait eu accès à cette vidéo et mon agresseur aussi. D'ailleurs, s'il le souhaite, il peut toujours obtenir une copie de ces dépositions filmées et notamment me poursuivre au civil s'il juge que je le diffame. Ma déposition lui appartient. De mon côté, je n'ai pas le droit d'y accéder ni aucun autre recours. Même la CDPDJ m'a avisée formellement qu'elle n'était pas le bon véhicule pour déterminer le caractère systémique des violences faites aux femmes.

Être confrontée à tant d'incohérences soulève des questions, surtout que, dans aucun manuel scolaire, on ne nous explique comment survivre à un violeur, à la victimisation subséquente, ni même à comment poursuivre une vie par après. C'est pour ça que je parle de tout ça aujourd'hui. Je suis un exemple vivant des failles de nos lois actuelles et je refuse d'avoir vécu tout cela en vain. Et ce n'est pas le p.l. no 47... le ministre, ni le Protecteur national de l'élève qui auraient fait une différence. Leurs rôles ne sont que symboliques. Ils ne contribuent pas à la sensibilisation ou à la prévention de ces violences. On est sur le... elles ne parviennent pas non plus à mettre en place des ressources supplémentaires de soutien et d'assistance pour les jeunes, les témoins et leurs familles. Soumettre des élèves à de telles embûches bureaucratiques les expose inutilement à diverses formes de victimisation, mais complique aussi la procédure. En conséquence, ça risque d'entraver des enquêtes, voire même de contaminer des éléments de preuve qui pourraient s'avérer déterminants pour ce type de crime.

Selon l'information recueillie par le rapport d'enquête concernant l'école Saint-Laurent, il n'existe pas de mécanisme officiel pour le partage d'informations entre les fédérations sportives, les établissements d'enseignement, le gouvernement, les mécanismes de traitement des plaintes. Par conséquent, des plaintes peuvent être déposées à l'une ou l'autre de ces instances, notamment en utilisant Je porte plainte, sur le site de Sports Aide, sans que les autres parties en cause en soient informées. Un entraînement... un athlète peut donc accumuler les signalements concernant des comportements inacceptables sans jamais faire l'objet d'un examen approfondi ou particulier. Le cadre juridique actuel permet aux équipes-écoles, aux directeurs d'école, aux centres de services scolaires d'ignorer les lois québécoises en matière de protection de la jeunesse, et ce, en toute impunité.

Jusqu'à maintenant, la réponse du gouvernement a toujours été de multiplier les enquêtes, les... et les mécanismes inadaptés qui se dédoublent au devoir de dénoncer au service de police et à la DPJ. Le protecteur de l'élève et l'officier des plaintes n'ont pas l'autorité nécessaire pour contraindre les agresseurs à un cessez d'agir. Ils n'ont pas l'expertise non plus pour apporter guérison et réparation aux victimes ainsi qu'à leurs proches. Souvent, ce qui prédomine dans le discours populaire mais qui n'a aucun fondement juridique réel, c'est que le droit à la vie privée prime sur le droit à la sécurité ou à la liberté d'expression des jeunes victimes. Je crois qu'il faut redéfinir le sens même de ce qu'on veut protéger. Personnellement, je crois que ça ne devrait plus être l'image ou la réputation d'une organisation ou d'une institution, mais plutôt l'intégrité des jeunes. Par ailleurs, des athlètes et des élèves signent régulièrement des ententes de confidentialité. Il y a des avocats et des juristes derrière ces pratiques, et les barreaux de toutes les provinces devraient s'engager à mieux encadrer la profession. Que les entraîneurs soient affiliés ou non ou que les enseignants soient titulaires d'un brevet d'enseignement ou pas, quel que soit le casier judiciaire des individus, l'actualité a vastement démontré que ces formes de violence sont souvent négligées ou minimisées, qu'elles aient été judiciarisées ou pas.

• (17 h 40) •

Plus que jamais, le pédopiégeage, «grooming», doit être officiellement reconnu comme un acte dérogatoire. Il en est de même pour les violences psychologiques et celles exercées en ligne. Certains tournois ont lieu dans différentes régions ou provinces et...

Mme Lemay (Mélanie) : ...des compétitions sont aussi organisées à l'international. Il est urgent de redéfinir le sens même de l'excellence sportive et ses valeurs, et surtout la sécurité qui est offerte aux élèves et aux athlètes. De toute évidence, il va falloir élargir notre vision pour faciliter l'accès à la justice et à la réparation. Il faut aussi veiller à ce que les mesures soient applicables, que l'événement ait eu lieu à l'école comme à l'extérieur, car les répercussions se font autant sentir sur les bancs d'école qu'à la maison.

Ça commence par des mesures simples, telles qu'abolir les codes vestimentaires, qui ne sont que des terrains glissants pour toutes sortes de dérives, comme on l'a vu dans l'espace public, ou encore s'assurer de ne pas complexifier les processus de plaintes par des mesures inadaptées aux besoins réels des jeunes. Tout ajout ou modification législative devrait permettre des espaces sécuritaires, intégrés, spécialisés et respectueux sur le plan culturel. Ça doit rassembler les différents services d'aide tout en unissant les différentes perspectives et approches thérapeutiques dont les victimes ont besoin pour être véritablement placées au cœur du processus.

La Présidente (Mme Dionne) : En terminant, Mme Lemay.

Mme Lemay (Mélanie) : Il me reste 30 secondes. Je crois qu'il est franchement naïf d'imaginer que c'est un simple code d'éthique qui va empêcher un agresseur de passer à l'acte ou d'exercer une pression sur sa victime pour qu'elle se taise ou la punir d'avoir dénoncé. Vous semblez sous-estimer le degré de violence auquel les jeunes sont quotidiennement exposés, et, à mon avis, il s'agit d'un problème fondamental en matière de droits de la personne. Merci de m'avoir écoutée.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci infiniment, Mme Lemay, pour votre exposé. Nous allons débuter les échanges avec les membres de la commission. Donc, M. le ministre, c'est à vous la parole.

M. Drainville : Oui. Bien, merci pour votre témoignage, Mme Lemay. Je suis vraiment profondément désolé de ce qui vous est arrivé, là, je veux que vous sachiez que je compatis avec ce que vous avez vécu et je suis très sensible aux douleurs et aux blessures que ces agressions vous ont apportées, là. Et donc je comprends que vous ayez décidé de donner un sens, d'une certaine manière, à ces agressions, pour faire en sorte que ce que vous avez vécu n'arrive pas ou n'arrive plus à d'autres femmes comme vous, là. Et donc je comprends tout à fait que vous ayez décidé, donc, de vous engager dans ce combat, là, pour mieux protéger les élèves contre les violences sexuelles.

J'ai posé cette question-là tout à l'heure au groupe qui vous a précédée. Pour les gens qui ne sont pas nécessairement familiers comme vous de ces questions ou de ces enjeux de violence sexuelle, si vous deviez résumer en quelques points ce qu'une loi-cadre changerait dans le fonctionnement, dans le quotidien d'une école ou dans le quotidien d'un réseau scolaire... J'ai vu, là, dans votre mémoire, une description quand même assez élaborée des différentes mesures que cela impliquerait, mais je vous demanderais de vous concentrer peut-être sur les deux ou trois principales mesures qu'une telle loi-cadre produirait comme effets.

Mme Lemay (Mélanie) : Bien, la plus importante, selon moi, c'est que ça oblige les directions d'école et les commissions scolaires à rendre des comptes sur l'état réel des violences sexuelles dans les écoles. En ce moment, on n'a pas un portrait global, malgré le protecteur de l'élève. Selon moi, le fait qu'en ce moment il nomme qu'il y a 14% des plaintes qui sont en violences sexuelles, ce n'est pas suffisant ni représentatif de ce qui se passe véritablement sur le terrain. Pourquoi? Parce qu'on constate que les commissions scolaires vont parfois pousser vers la sortie des individus qui commettent des gestes de violence sexuelle. Ça va se traduire après vers un glissement dans une autre école, exactement comme on faisait avec les curés qui sentaient l'eau chaude, autrefois, dans les paroisses. Ça fait que, moi, ça, déjà, c'est un argument béton.

Le deuxième, c'est que ça vient créer des mécanismes et des outils concrets. Ça vient avec du financement à la clé pour créer un changement de culture. Donc, une loi-cadre, ce n'est pas une finalité en soi, c'est une ligne de départ pour toute une série d'initiatives qui doivent être englobées. Et on l'a nommé plus tôt, dans la précédente commission, que ça participe aussi à faire naître des initiatives. Et, si ça peut sauver juste une seule personne de l'horreur d'avoir à vivre avec des agressions sexuelles, bien, moi, je pense que c'est des efforts qui en... méritent qu'on s'y attarde.

M. Drainville : Vous avez parlé de 14 %. Est-ce que... Le son n'est pas parfait, alors je m'excuse si je n'ai pas bien compris. C'est bien 14 %?

Mme Lemay (Mélanie) : Oui, bien, ce que le...

Mme Lemay (Mélanie) : ...de l'élève a mis dans l'espace public...

M. Drainville : Ah, oui, tout à l'heure. Hier, en fait. Oui, oui, oui, bien sûr. Bien sûr, oui. Mais le fait que le protecteur ait témoigné et ait souligné le fait qu'il y a quand même une proportion, à peu près une plainte sur sept, là, qui lui est acheminée, qui porte sur les violences sexuelles, ça, c'est déjà une indication à la fois du fait que c'est un phénomène important, mais aussi du fait qu'on commence en, comment dire, en dessiner les contours, on commence à voir cette réalité-là, on commence à la documenter, d'une certaine manière, à travers les plaintes qui sont acheminées au protecteur de l'élève.

Mme Lemay (Mélanie) : C'est une jeune fille sur trois avant l'âge de 16 ans qui va vivre un premier geste de violence à caractère sexuel. C'est un garçon sur 10...

M. Drainville : Une sur trois, vous avez dit?

Mme Lemay (Mélanie) : Avant l'âge de 16 ans.

M. Drainville : Avant l'âge de 16 ans?

Mme Lemay (Mélanie) : Oui.

M. Drainville : O.K. Puis...

Mme Lemay (Mélanie) : Puis entre la... à 80 % des agresseurs, et toutes ces statistiques-là se retrouvent dans le document que je vous ai envoyé, vont commettre leur premier geste de violence sexuelle en étant mineur. Ça fait qu'on constate qu'il y a vraiment un besoin, si on veut éviter de se retrouver avec toute une trajectoire de vie... qui vit avec les impacts et les conséquences. Moi, j'ai fait une section dans mon mémoire qui traite, entre autres, des conséquences physiologiques. Il y a même un annexe qui permet, en fait, de démontrer qu'est-ce qui se passe chez un jeune qui subit cette violence-là sur une trajectoire de vie. C'est quoi les impacts qui vont se cristalliser? Ça veut dire qu'il y a la déscolarisation, ça veut dire qu'il y a des jeunes qui se retrouvent dans une posture où finalement on doit aller vers eux. Puis les jeunes femmes, ça peut prendre jusqu'à le quart, c'est... ça prend 13 ans avant qu'elles décident de dévoiler la première fois. Puis les hommes, ça peut prendre jusqu'à 40 ans pour des événements vécus dans mon enfance. Ça fait que c'est pour ça, selon moi, que l'école est un incontournable pour faire de la prévention et de la sensibilisation, ne serait-ce que par respect à tous ces jeunes-là qui se retrouvent enfermés dans des murs de silence.

M. Drainville : D'accord, mais tout à l'heure, vous avez parlé de... d'un phénomène qui se produit dans les dans le réseau scolaire, qui ressemble un peu à celui du temps des curés déviants qui se promenaient d'une paroisse à l'autre dès que... dès qu'ils sentaient la soupe chaude ou dès que des paroissiens les dénonçaient. Donc, vous devez vous réjouir quand même, là... Malgré toutes ces imperfections que vous avez soulignées, vous devez quand même vous réjouir du fait qu'il y a dans le projet de loi n° 47 des mesures qui vont faire en sorte justement que ce sera possible dorénavant pour un centre de services scolaires qui voit un prof arriver, qui vient donc postuler, ce sera possible, pour le centre de services scolaires qui voit arriver cette candidature, d'obtenir le dossier de l'enseignant, là, mettons que c'est un enseignant, d'obtenir le dossier de l'enseignant auprès du premier centre de services scolaires pour savoir s'il a commis des gestes ou s'il a eu des comportements pouvant mettre à risque la sécurité physique ou psychologique des élèves. Ça, il me semble que c'est une avancée, là, si je... si je pars du propos qui est le vôtre, là.

Mme Lemay (Mélanie) : Bien, c'est certain. Mais en même temps, moi, ce que je me questionne c'est pourquoi ce n'était pas déjà en place dans la mesure où on a eu, entre autres dans l'espace public parce que je vais nommer des situations publiques, comparativement à celles aussi que j'ai reçues en privé et qui n'ont pas nécessairement fait l'objet de reportages, parce que vous seriez encore plus effrayé, selon moi, par l'horreur de ce qu'on entend. Mais, entre autres, il y a quelqu'un qui s'est faufilé pendant des années, qui était un... qui avait été condamné pour... comme pimp. Et moi je pense que, malheureusement, on sous estime en réalité comment il y a des réseaux de la criminalité qui sont bien implantés dans différents espaces un peu partout au Québec, qui bénéficient du fait que, ces jeunes-là, il y a toute une dynamique de violence qui s'installe. ÇA fait que, si vous me demandez spécifiquement sur, si oui ce petit volet, là, de votre projet de loi est convaincant ou satisfaisant, je ne peux pas m'y opposer. Ça, c'est du gros bon sens. Mais est ce que je me questionne, c'est : Comment se fait-il en fait qu'il n'y a pas non plus la volonté de s'assurer que, tout au long du lien d'emploi, il va y avoir aussi des vérifications? Puis ce n'est pas une finalité non plus, les antécédents criminels. Comme j'ai mentionné plus tôt, ce n'est pas toutes les situations qui vont être judiciarisées. Ça fait qu'il faut trouver des dynamiques et des perspectives qui vont permettre finalement une meilleure capacité de dépister et d'aider les jeunes qui ont...

Mme Lemay (Mélanie) : ...vécu ces violences-là, parce que c'est un peu l'objet de mon mémoire aussi, c'est d'ajouter tous les contextes qui expliquent pourquoi ce n'est pas facile de dénoncer.

• (17 h 50) •

M. Drainville : Encore une fois, je reconnais, là, que vous jugez le projet de loi bien insuffisant, mais j'essaie de trouver des points d'accord entre vous et moi, là, de la même manière que le fait que dorénavant les clauses d'amnistie vont faire en sorte que les fautes commises par, par exemple, un enseignant qui a posé des gestes répréhensibles qui mettaient à risque la sécurité physique ou psychologique d'un élève, de tels gestes vont demeurer au dossier de l'enseignant, j'ose croire que c'est une avancée, c'est un pas dans la bonne direction dans votre esprit, n'est-ce pas? Ça... C'est une bonne mesure qui, sans être... sans aller aussi loin que ce que vous souhaitez, est quand même une avancée positive. Est-ce qu'on peut dire ça?

Mme Lemay (Mélanie) : Bien, moi, je pense que, si on garde un lien d'emploi avec quelqu'un qui a commis des gestes à caractère sexuel sur un mineur en proximité d'autres jeunes, moi, personnellement, ce n'est pas une avancée, là, ça revient un peu à qu'est-ce que vous acceptez d'ajouter comme définitions dans votre projet de loi. Et moi, sincèrement, je préfère, à la limite, aller vers la création d'un projet de loi à part entière qui serait dédié aux questions des violences sexuelles que de faire des compromis tièdes qui passent à côté, finalement, de la cible.

M. Drainville : Oui, mais Mme Lemay, je ne pense pas qu'on... Quand vous dites de garder quelqu'un à l'emploi du réseau, alors qu'il a commis des gestes d'agression, si je vous ai bien comprise, je n'ai pas dit ça, là, moi, là, au contraire, là. Quelqu'un qui commet une agression sexuelle ne reste... ne doit pas rester à l'emploi, c'est même criminel, là, rendu là, là. Alors, je ne sais pas, là, peut-être que... Je ne sais pas ce qui vous amène à dire que cela est ma position ou notre position, ce n'est pas du tout notre position, là. Moi, ce que je vous dis, c'est qu'actuellement les conventions collectives locales font en sorte que quelqu'un qui pose un geste qui est répréhensible, qui est condamnable, un geste d'inconduite sexuelle, par exemple, peut, au terme d'une période de quelques mois, voir cette faute grave disparaître de son dossier, et ce que je vous dis, c'est que le projet de loi prévoit que ça ne disparaîtra plus de son dossier, et j'ose croire que pour vous c'est une avancée positive.

Mme Lemay (Mélanie) : Mais, si ça ne disparaît pas de son dossier, ça implique qu'il y a encore un lien d'emploi, puis, moi, c'est ça que je vous expliquais, c'est que, de mon côté... Je vais vous poser la question à l'envers : Comment se fait-il, quand votre collègue Jean-François Roberge était à l'opposition et qu'on traitait de la question David en commission parlementaire, comme on le fait en ce moment... il m'a posé la question explicitement, il m'a dit : Mme Lemay, pensez-vous que les protections garanties par le p.l. 151, qui est désormais la loi David, 22.1... est-ce que ça devrait s'appliquer aux écoles primaires et secondaires? Ma réponse était un oui sonnant. Ce que je ne m'explique pas, c'est pourquoi, malgré le fait que vous êtes majoritaires, que ça fait quand même plusieurs années que vous êtes bien installés au pouvoir... qu'est-ce qui bloque dans votre parti pour faire en sorte qu'on ne puisse pas l'avoir, cette loi-là, alors qu'il semblait y avoir un consensus assez important, et encore aujourd'hui, dans l'espace public, sur la nécessité d'avoir une loi-cadre?

M. Drainville : Bien, il n'y a rien qui bloque. Notre position, nous, puis la mienne en particulier, c'est que, si on prend les éléments du protecteur national de l'élève, si on prend l'obligation pour chaque établissement de se donner un plan de lutte qui comprend une section dédiée aux violences sexuelles, si on ajoute à ça le plan d'action contre les violences et l'intimidation que j'ai déposé avant les fêtes, si on ajoute à ça le projet de loi n° 47 qui est devant nous aujourd'hui, si on additionne tous ces éléments-là, ça constitue, à notre avis... puis je comprends qu'on a un désaccord là-dessus, mais ça constitue, à notre avis, un dispositif de sécurité très solide pour bien protéger nos élèves dans les écoles contre les violences et en particulier contre les violences à caractère sexuel. Ça, c'est notre position. Donc...

Mme Lemay (Mélanie) : Donc, si j'entends bien, il y a une volonté...

M. Drainville : ...qu'on ne soit pas d'accord... En démocratie, on n'est pas obligés d'être...

M. Drainville : ...d'accord sur tout, mais je pense que, quand on additionne tous ces éléments-là, il y a là un filet de sécurité qui me semble sérieux et qui me semble important, donc pour bien protéger nos élèves dans les écoles du Québec.

Mme Lemay (Mélanie) : Donc, si j'entends, il y a une volonté de votre gouvernement de veiller à ce que, par exemple, à la prochaine étude de crédits, on puisse s'assurer qu'une partie des fonds fédéraux qui viennent pour l'implantation du plan d'action national pour l'élimination des violences fondées sur le genre doit être dédiée... dans le cadre de la stratégie dédiée par le Québec ou définie par le Secrétariat à la condition féminine, de s'assurer finalement que cette année, il va enfin y avoir des crédits d'alloués pour prévenir les violences sexuelles dans les écoles, exceptionnellement. Parce que l'année passée, malheureusement, je pense qu'on a eu accès à des documents qui nous ont démontré qu'il y avait 0 $ qui avait été investi. Ça fait que j'imagine que cette volonté-là de votre gouvernement de faire plus va se traduire aussi dans des nouveaux investissements massifs. Parce qu'on s'entend d'une région à l'autre, l'accès aux soins et à l'aide pour les jeunes victimes d'agressions sexuelles n'est pas réparti de façon équitable.

M. Drainville : Bien là, Mme Lemay, vous me demandez ce que contiendra le prochain budget. Comme vous le savez, le prochain budget est un exercice confidentiel. Alors, lorsque le prochain budget sera rendu public, on pourra en discuter. Mais chacune des mesures, dont je vous ai parlé, sont accompagnées de moyens financiers, là, ce n'est pas juste des mesures qu'on annonce sans qu'il y ait des moyens financiers qui sont conséquents.

J'ai mon collègue, Mme la Présidente, le député de Vanier-Les Rivières qui souhaiterait intervenir.

Mme Lemay (Mélanie) : ...

La Présidente (Mme Dionne) : Oui. Merci, M. le ministre. M. le député, la parole est à vous.

M. Asselin : ...Mme Lemay, simplement quelques mots pour vous dire que j'ai trouvé que vous... vous avez démontré beaucoup d'aplomb, et, comme ex-directeur d'école, je suis fier d'avoir entendu votre témoignage.

Mme Lemay (Mélanie) : Merci beaucoup. C'est très gentil.

M. Drainville : ...

M. Asselin : Oui...

M. Drainville : ...

La Présidente (Mme Dionne) : Ça conclut? O.K. Parfait. Merci beaucoup. Alors, je cède maintenant la parole à Mme la députée de Saint-Laurent.

Mme Rizqy : Merci beaucoup. Mme Lemay, vous êtes une femme très courageuse, qui porte ce dossier depuis maintenant plusieurs années. Merci beaucoup pour votre engagement pour cette cause, mais aussi d'avoir été, je vais le dire ainsi, la dépositaire de plusieurs confidences un peu partout au Québec, de plusieurs jeunes qui sont venus... pas venus, mais qui vous ont appelés, vous puis La voix des jeunes compte, pour raconter leur désarroi. Et surtout comment qu'elles se sentent, seules, même s'ils elles ont parlé.

Et aujourd'hui, je vais vous poser une première question, oui, le protecteur national de l'élève existe, mais comment explique-t-on qu'il y a encore beaucoup de jeunes au Québec qui se tournent vers vous, vers la CALACS et vers La voix des jeunes compte qui est... malheureusement, les jeunes filles, après six ans de bénévolat, ont décidé d'exister de façon différente, mais se tournaient aussi La voix des jeunes compte pour pouvoir parler. Alors, je sais que ça fait juste à peine six mois que le Protecteur national de l'élève existe, mais il n'en demeure pas moins que votre téléphone continue à sonner, ainsi que celui de la CALACS.

Mme Lemay (Mélanie) : Entièrement, parce que qu'est-ce qui manque, dans le réseau scolaire, en ce moment, c'est un corridor de services intégré dans le quotidien des gens, pour pouvoir absorber tous ces témoignages-là. C'est d'abord des visages qui sont familiers, qui sont réconfortants. Parce que le jeune, peut-être qu'il pourrait avoir un lien très fort avec son coach ou avec quelqu'un qui est de confiance à l'école. Puis, moi, ce qui m'a... ce que je trouve vraiment décevant, en fait, c'est que c'est un besoin qui est réel. Ce n'est pas quelque chose qui est un caprice, on veut une loi-cadre pour avoir une loi-cadre. On veut des moyens à la clé. On veut la création d'un réseau qui va venir en aide aux jeunes. Parce qu'à l'heure actuelle, on a des CALACS qui peuvent prendre des jeunes filles de 12 ans et plus, mais on fait quoi avec les garçons? On fait quoi avec les jeunes qui n'ont pas encore atteint 12 ans?

Ça fait que, moi, c'est ce que je me questionne, c'est : Comment se fait-il que c'est si compliqué d'avoir une réponse claire? Puis ce n'est pas juste des enfants qui ont besoin de soutien, ça va être les familles aussi de ces jeunes là, puis, pour les enfants aussi, qui ont des comportements sexuels problématiques, ou les jeunes aussi qui ont commencé à poser certains gestes d'agression sexuelle à l'adolescence. Moi, je pense que c'est un endroit fort, l'école, pour faire une différence, puis, si on veut être cohérent avec le mouvement MeToo, il faut commencer à planter des graines dès la petite enfance.

• (18 heures) •

Mme Rizqy : Vous parlez de services intégrés, puis tantôt vous parliez, que, dans une première... avoir raccroché dans une première tentative de porter plainte et d'avoir pris un certain temps avant de rappeler. Pour retrouver votre courage de pouvoir...


 
 

18 h (version non révisée)

Mme Rizqy : ...continuer à faire une dénonciation.

La ligne cruauté animale est disponible 24 h sur 24, sept jours sur sept, au Québec, cruauté animale. Puis, moi, j'ai un chien, puis j'ai toujours eu des chiens, puis honnêtement, je trouve ça très important. Comment qu'on explique qu'au Québec, un jeune qui veut dénoncer doit le faire entre 8 h et 4 h 30, mais pas entre 12 h et 1 h parce qu'on est fermé? Et j'essaie de comprendre. Il me semble que la victime, là, on ne sait pas quand est-ce qu'elle va avoir le courage de dénoncer. Puis est-ce que c'est normal qu'elle peut se buter à une boîte vocale?

Mme Lemay (Mélanie) : On est dans le secret des dieux. Parce que, moi aussi, je n'ai pas de réponse à une telle incohérence. Selon moi, ça fait juste témoigner de toute la culture du silence autour des jeunes. Tu l'as... vous l'avez mentionné plus tôt aujourd'hui, des fois, ils ne sont même pas capables de l'identifier, qu'ils ont été victimes de quelque chose. Parce que, malheureusement, l'arme du crime, chez les mineurs, c'est beaucoup le chantage émotionnel, c'est la confiance, le de créer un lien privilégié avec le jeune qui va faire en sorte que, tranquillement, ses défenses vont baisser. C'est rarement des inconnus. C'est des gens qu'ils vont côtoyer à l'école, dans les milieux de jour... des camps de jour. Ça fait que c'est ça que je trouve triste, en fait, et décevant, c'est que la violence ne va pas s'exprimer pareil chez un jeune comparativement aux personnes adultes. Puis, malgré tout, dans le cadre des travaux du tribunal spécialisé, il n'y a même pas eu la réflexion, pendant les travaux, à réfléchir, bien, comment on peut aussi s'assurer qu'il y a une concomitance entre ce qu'on est en train de faire aujourd'hui pour les adultes et ce qu'on fait vivre aux jeunes. Demain matin, un jeune dévoile une agression sexuelle, on ne va même pas l'accompagner, on ne va même pas l'aider. On va tout de suite appeler la police. Ils vont se retrouver un peu coincés dans toutes sortes de rouages.

Moi, ce que je me demande, c'est pourquoi on ne fait pas mieux, en fait, pour s'assurer aussi que ces jeunes-là puissent recevoir de l'aide. Des fois, c'est la première étape. Ça ne veut pas dire qu'on va reporter le dévoilement, mais on peut-tu s'assurer qu'ils puissent le faire d'une façon qui ne sera pas revictimisante et traumatisante? C'est ça que je me demande, en fait, c'est : Qu'est-ce qui reste à expliquer, dans quelle langue pour que ça puisse finalement atterrir puis devenir finalement une ressource qui est cohérente pour tous les jeunes du Québec?

Mme Rizqy : Dites-moi, est-ce que c'est normal qu'on couvre les élèves à l'école, mais pas les élèves athlètes, alors qu'ils pratiquent leurs sports à l'école?

Mme Lemay (Mélanie) : Puis moi, ce que je me demande, c'est : On fait quoi quand ils partent en tournoi à l'étranger puis qu'il se passe des incidents? Est-ce que, soudainement, ils ne sont plus Québécois ou Canadiens? Est-ce que, soudainement, ce n'est plus la responsabilité de l'école? Moi, il y a toutes sortes d'incohérences que je ne m'explique pas non plus, dans le monde du sport. On va pousser à bout certains athlètes, on va les mettre dans des conjonctures psychologiques qu'on n'accepterait jamais pour un adulte. Moi, je trouve qu'il y a des situations aussi où il y a des jeunes pour qui ça peut être un tremplin vers les études supérieures, le fait de performer dans le sport, et de savoir qu'il y a des gens malveillants qui coupent les ailes à tellement de jeunes, qui les mettent sous emprise et qui profitent d'un contexte de vulnérabilité, moi, ça me met hors de moi, en tant que citoyenne, je suis incapable de rester calme ou impassible, je trouve que c'est d'une injustice infinie.

Mme Rizqy : Je connais assez bien le ministre pour pouvoir mettre, des fois, des mots dans sa bouche, de temps en temps, tantôt, quand on parlait, là, de congédiement, je connais assez bien le ministre pour savoir qu'en cas d'agression sexuelle, là, c'est un acte dérogatoire, merci, bonsoir, c'est terminé. Mais il y a des notions qu'on apprend, nous autres aussi, comme élus, puis, moi, je l'ai appris grâce à vous : le «grooming», le pédogrooming, puis ce n'est pas nécessairement tout de suite, hein, qu'on arrive avec des symboles graphiques, mais, si, par exemple, il y a une dénonciation qui est faite puis qu'on est au début, là, on n'est pas encore dans une faute qui est assez grave, parce que... là, on se rend compte que, par exemple, il texte après le souper, 21heures, 22 heures. Là, nous autres, on considère que, non, non, non, ça, ce n'est pas approprié, mais ce n'est pas une faute assez grave pour congédier parce qu'il n'a pas encore traversé la ligne. Je pense que c'est ça qu'il voulait faire référence pour dire : Là, ça va être dans le dossier et ça va rester dans le dossier.

Parce qu'on se rend compte qu'aujourd'hui, et ce n'est pas des farces...en ce moment, les amnisties, quelle aberration : entre six mois et cinq ans, au Québec, selon la convention. Et certains groupes nous demandent que ce soit eux qui gèrent ça de façon locale. Vous, vous l'avez vu au niveau universitaire, des gens qui se promènent. Ah! il est arrivé quelque chose au Vieux-Montréal, on s'en va du Vieux-Montréal, on débarque à UQAM, et personne ne s'est parlé, le dossier était confidentiel.

Alors, moi, ma question, c'est la suivante : Si on tient pour acquis qu'on parle d'une faute qui...

Mme Rizqy : ...pas suffisamment lourde pour le congédiement, mais qui nous... soit drapeau, là, qu'on sait qu'il y a un drapeau, on le met dans son dossier. Êtes-vous d'accord que ce soit aussi partagé aussi au niveau collégial et universitaire, qu'on élargisse cette notion? Parce que ça se peut qu'une fois que, nous, on a fermé toutes les portes pour cette personne-là au niveau scolaire, bien, elle s'essaie au cégep, là.

Mme Lemay (Mélanie) : Bien, regarde, je vais donner un excellent exemple. Au Cégep, tu as des mineurs puis tu as des majeures qui côtoient le même établissement scolaire. Moi, ça m'est arrivé, là, d'avoir un prof qui avait tellement bien développé son stratagème qu'il gardait un matelas dans son bureau. Puis c'était un campus qui était partagé entre le cégep puis l'université.

Mme Rizqy : Un matelas.

Mme Lemay (Mélanie) : Ça fait que, quand... problème, quand il s'est passé une dénonciation de cette ordure-là, bien, imaginez-vous que la solution facile a été de dire : Ah bien, ce n'est pas compliqué, il va arrêter d'enseigner au cégep parce qu'il y a des mineurs, mais il va continuer de garder son poste à l'université. Il a gardé le même comportement après. Ça fait que c'est là où tu te dis : Comment ça se fait qu'on va créer des climats où... c'était rendu que le département ou le corps professoral trouvait ça très rigolo, en fait, d'avoir des aventures avec des mineurs ou avec d'autres étudiantes qui étaient sous leur gouverne.

Je me souviens que, quand on a traité de la question de la loi 22.1 en commission parlementaire, il y avait même eu une sortie, où ça faisait prétendument partie de la liberté pédagogique que de pouvoir coucher avec des étudiants avec lesquels tu avais un rapport d'autorité. Ça fait que, moi, je me dis que peut-être que je suis allergique au contrôle et au pouvoir, mais ça reste que c'est quelque chose, selon moi, qui mérite une réflexion plus globale. Parce que, malgré tous les mérites qu'elle a aussi, la loi 22.1, il reste aussi des choses à améliorer. Ça fait que je pense que les travaux qu'on fait vont certainement bonifier ce qui reste à faire, mais, à l'inverse, il reste encore du chemin aussi à accomplir pour ce qui est des écoles primaires et secondaires.

Mme Rizqy : Dans un autre projet de loi... On regarde, en matière de services de garde, pour, donc... eux vont plus loin. Ce n'est pas des antécédents, qu'ils regardent, là, donc on n'attend pas que la personne soit reconnue coupable, on regarde ce qu'on appelle les clauses d'empêchement, là, ce qui... au fond, vous avez une accusation puis aussi, par exemple, si ça fait... si c'était dans votre dossier ou même si, par exemple, vous avez obtenu un pardon, lorsque... question en matière de violence sexuelle, la clause d'empêchement fait en sorte qu'on doit dire, vu que vous êtes en contact avec des personnes vulnérables, c'est-à-dire une personne mineure ou une personne aînée, bien, à ce moment-là, vous ne pouvez pas travailler avec eux, là, vous avez... dans vos antécédents, nonobstant votre pardon, ça demeure quelque chose de sexuel qu'il faut signaler, là. Est-ce que ça, vous, vous êtes à l'aise qu'on aille dans un amendement comme ça, d'élargir, et aller plus loin, et de le mettre aussi dans la loi? Parce que c'est marqué, dans le projet de loi, en ce moment, «dans un guide». Nous, on irait de façon statutaire, aux trois ans, vous devez le faire. Et aller aussi loin que de voir comment qu'on peut articuler ça avec le tribunal pour qu'au niveau du DPCP, là, dans les conditions, là, de remise, là, que ce soit vérifié que la personne l'a divulgué à son employeur. Parce que, là, en ce moment, ils ont l'obligation de le dire. Il y en a qui ne le disent pas, alors ils peuvent tomber dans un trou que, pendant trois ans, on ne le sait pas, qu'il y a eu en fait une cause au niveau criminel qui touche, par exemple, certains actes.

Puis on a un guide qui nomme certaines infractions, donc : agression sexuelle, action indécente, sollicitation, incitation à la prostitution, pornographie juvénile, harcèlement, l'intimidation, séquestration, menaces, voies de fait, enlèvement. Donc, tu sais, on pourrait s'inspirer de ce guide qui a été fait par le ministère de l'Éducation puis dire : Voici, ça, c'est des infractions que, nous, on juge suffisamment graves, qu'il faut que le tribunal aussi nous le communique, parce que, si on ne fait qu'attendre que le prévenu nous le dise, on risque d'attendre longtemps, et c'est basé sur la bonne foi de l'accusé.

Mme Lemay (Mélanie) : Je pense que c'est de... de ne pas le faire, c'est un peu présumer que ces gens-là, justement, vont, naturellement, agir de façon adéquate, soudainement, parce que, là, tout d'un coup, il vient une illumination. Moi, je pense sincèrement que ça fait... c'est juste le gros bon sens que de s'assurer, en fait, que ce genre de modèle là puisse, finalement, être utilisé pour le projet de loi, là. Moi, je pense que tout élément qui peut bonifier mérite d'être entendu, dont, entre autres, la création d'une loi-cadre, mais ça, c'est un autre débat, là, je m'excuse.

• (18 h 10) •

Mme Rizqy : Non, mais on est d'accord. Puis je vais vous dire merci, je vais céder la parole à ma collègue députée de Mercier. Puis je vais aussi en profiter pour lui dire merci, parce que, deux fois plutôt qu'une, elle nous a invités dans son comté, avec des jeunes, pour leur donner, à eux, la parole. Alors, merci aussi à vous d'être le porte-voix de plusieurs jeunes au Québec. Merci...

Mme Lemay (Mélanie) : ...merci à vous.

La Présidente (Mme Dionne) : Oui, excusez-moi, j'étais distraite. Alors, oui, Mme la députée de Mercier, la parole est à vous, désolée.

Mme Ghazal : Bien, merci. Merci, merci beaucoup, Mélanie, merci pour... je me permets de te tutoyer, pour ton éloquence, pour ton engagement depuis tant d'années. Puis tu le disais, à quel point... Tu ne sais plus dans quelle langue il va falloir parler. Bien, aujourd'hui, tu as décidé de parler la langue du courage. Puis ce n'est pas la première fois, ton histoire, ça fait très, très longtemps que tu en as parlé, puis tu as décidé de le faire pour justement prendre les moyens pour ne plus que ça arrive puis que ça soit compris par la... par les politiciens, les élus, mais la société aussi dans son ensemble. Puis d'ailleurs j'invite tout le monde ici, qui ne l'a pas déjà regardé, de voir le documentaire Pour une culture du consentement. Je pense qu'il est encore sur Tou.TV, donc, où justement tu parles de ce que tu as vécu, puis ça, c'est extrêmement important de le dire puis de le répéter. Il faut le répéter tant qu'il faudra, tant qu'il faudra pour que ça soit compris, qu'il faut prendre ça à bras le corps. Puis moi, je ne m'explique pas, de la même façon que toi, que La voix des jeunes compte, que tous ces jeunes qui portent sur leurs épaules de dénoncer cette situation-là qui se déroule encore dans nos écoles puis qui risque encore de continuer à se dérouler, des cas d'agressions sexuelles qui pourraient peut-être ne pas être dénoncés. Parce que, des fois, les jeunes ne le savent pas, des fois, il n'y a pas de témoin, etc., malgré la loi qu'on a ici devant nous. Et il existe plein d'outils un petit peu à gauche et à droite, mais il n'y a rien d'intégré.

Puis pourtant, quand il y a eu le mouvement Moi aussi, l'ancienne ministre de l'Éducation supérieure a mis en place une loi pour protéger, notamment, des jeunes adultes dans les cégeps, dans les universités. Plus récemment, il y a eu les cas d'agressions sexuelles dans des... dans le monde du hockey, ça a fait les manchettes, on se le rappelle. Mon collègue le député de Rosemont a demandé un mandat d'initiative. Et la ministre des Sports a décidé d'agir, puis il y a eu un mandat d'initiative pour en discuter, pour en... pour parler de ça, pour dire : Comment est-ce qu'on peut mettre fin aux violences sexuelles, notamment dans le hockey?

Alors là, on a les écoles, les écoles, c'est un milieu de vie, ce n'est pas juste pour la réussite, pour que les jeunes aient un métier plus tard, mais c'est aussi un milieu de vie où ils apprennent toutes sortes de choses, le vivre ensemble, puis aussi un milieu de vie où c'est important de s'assurer, pas juste de leur réussite, mais de leur bien-être. Et ça, c'est la moindre des choses. Donc, moi, je suis absolument convaincue, puis il y a plein de... il y a de plus en plus d'organisations, il n'y a pas juste La voix des jeunes compte, il n'y a pas juste toi, Mélanie, qui dites que ça prend une loi-cadre comme celle qui existe pour protéger les jeunes adultes.

Le projet de loi existe. Ça arrive, je l'ai mentionné avant, ça arrive des fois que les gouvernements appellent des projets... c'est très rare, mais ça arrive quand même qu'ils appellent des projets de loi qui ont été déposés par les oppositions ou qu'ils écrivent eux-mêmes un projet de loi, une loi-cadre, en s'inspirant par exemple de ce qui a été fait par les partis d'opposition. Puis, ce que je t'ai entendu dire, c'est qu'une loi cadre, c'est un point de départ, c'est un point de départ pour une suite. Peux-tu juste expliquer pourquoi c'est un point de départ? Parce que ça reste quand même une loi. C'est... c'est sur du papier, c'est sûr que c'est beaucoup plus fort que, par exemple, un plan d'action. Mais qu'est-ce que tu veux dire par c'est un point de départ? C'est quoi, la suite?

Mme Lemay (Mélanie) : Bien, premièrement, c'est de s'assurer en fait que, malgré les codes d'éthique, malgré les plans d'intervention, malgré toutes les belles choses papier qu'on peut avoir sur un bureau, ou autres, bien, ça garantit en fait une reddition de comptes, puis s'assurer en fait qu'à quelque part il y a quelqu'un qui s'assure qu'on est en train de mettre en branle différentes initiatives, que ce soit de s'assurer que, dans des périodes fortes de l'année, il y a des intervenants qui viennent, comme les CALACS avec le programme Empreinte, de s'assurer aussi qu'il y a des gens comme nouveau cadre, c'est super intéressant, c'est un outil un peu comme l'art visuel, qui font des immersions où ça entraîne des discussions en classe avec des sexologues. Il y a plein de choses comme tu le nommes qui existent dans l'écosystème québécois, mais il n'y a rien, en fait, qui est étendu de façon égale et équitable à l'échelle du Québec.

Puis je pense que, quand on dit qu'il faut que ça soit un point de départ, c'est par rapport à un changement de culture, c'est que, par défaut, en ce moment, c'est la culture du silence qui prône, c'est la culture du viol, parce que les jeunes apprennent des modèles inadaptés. Puis aujourd'hui, avec les réseaux sociaux, les algorithmes, on voit une montée de la haine en ligne qui n'était pas là avant, puis ces jeunes-là sont connectés 24 h sur 24 sur leur téléphone. Ça fait que, si on ne vient pas communiquer avec...

Mme Lemay (Mélanie) : ...de manière transversale en des contenus qu'il voit en classe. Comment voulez-vous qu'on fasse contrepoids à toute cette culture-là, en fait, qui est omniprésente dans leur quotidien? Puis moi, je pense que c'est pour ça aussi que malgré qu'il y a des nouvelles avancées avec un nouveau cours sur l'éducation à la citoyenneté, c'est bien, mais ce n'est pas suffisant pour se dire que ça va jouer ou ça va devenir un «game changer» par rapport à ce qui s'en vient parce que, malheureusement, les jeunes grandissent avec des influences d'un peu partout, ils s'américanisent aussi, puis je pense que c'est décevant sachant qu'on a une expertise puis des personnes qui sont reconnues à l'international avec des chaires de recherche pour ce qui est de faire, finalement, un changement par rapport au... de paradigme. Ça fait que moi c'est un peu ce que j'ai comme espoir quand j'en parle parce que, quand je m'exprime, je sais que j'ai peut-être la mèche courte, mais c'est que j'écoute des témoignages de viols d'enfants qui me viennent à... en esprit, c'est les parents qui sont complètement impuissants face à une direction. Je pense juste au cas des Pères maristes qui s'est déroulé à quelques pas du Parlement. Même le ministre il avait un rapport qui démontrait... qu'il n'avait pas... qu'il avait les mains liées à l'heure actuelle par rapport aux décisions des directions d'école. Et même un juge ne peut pas sanctionner un directeur d'école d'empêcher, par exemple, qu'une jeune ne côtoie pas son agresseur dans sa classe. Et moi, je trouve ça triste que, par défaut, c'est tout le temps les victimes qui écopent puis qu'il n'y ait pas davantage d'outils qui sont donnés aux jeunes qui ont des comportements sexuels problématiques, parce que cette expertise-là, elle existe ici au Québec, même qu'elle est exportée ailleurs. Ça fait que c'est un peu ça le sens de mon intervention.

Mme Ghazal : Oui. Puis la loi qui existe maintenant depuis 2017, je pense, dans les cégeps et les universités, il y a une évolution, là, puis il y a une... des mesures qui ont été mises... c'est-à-dire pas des mesures, mais on a mesuré ou on est en train de mesurer l'implantation un peu partout. Puis j'imagine que ce n'est pas parfait, ce n'est pas parce que c'est... il y a une loi-cadre que c'est parfait. Est-ce que ça, c'est quelque chose que tu as suivi? Est-ce qu'il y a des choses, par exemple, dans la loi, qui existent dans les cégeps et les universités, que si, à un moment donné, il y a un ministre ou un gouvernement qui a le leadership de dire : Bon, là, ça suffit, il va falloir qu'on protège réellement contre les agressions à caractère sexuel, spécifiquement dans les écoles, puis qui décide de mettre une loi-cadre... des apprentissages qui peuvent être faits par rapport à ce qui s'est passé dans les cégeps et les universités?

Mme Lemay (Mélanie) : Moi, le gros glissant que j'ai vu et qui est très malheureux, c'est que, désormais, on ne jure que par la formation en ligne des étudiants pour faire une reddition de compte où on dit : Check, on a envoyé un lien à tous nos étudiants. Ça, sincèrement, pour moi, c'est une grande peine que je porte, parce que je voyais les assos étudiantes hyper actives au début, quand c'était foisonnant, quand la loi venait d'arriver, il y avait des choses où on allait dans des événements... des partys d'intégration où on donnait des outils ou des stratégies, quand il y avait de la surconsommation d'alcool, il y avait une fenêtre de temps où on savait que 80 % des agressions se déroulent dans les huit premières semaines de cours. Ça fait qu'il y avait beaucoup... il y avait un éveil qui était très intéressant. C'est sûr que la pandémie n'a pas aidé, mais je trouve que, dans tous les cas, il y a des initiatives qui sont prometteurs... prometteuses puis c'est les campagnes où il y a des gens viennent, puis après ça permet de faire des liens avec les ressources et les organismes parce que ça permet de s'assurer une continuité dans l'intervention puis que les jeunes ne restent pas pris avec ça.

Mme Ghazal : C'est ça. Donc, pas pour les formations en ligne ou... Dans les recommandations, il y a la recommandation 2 où c'est écrit, dans le mémoire : «de veiller à ce que l'école devienne des espaces de guérison des différentes formes de violence systémiques dans le cursus scolaire». Puis ça parle... «et aussi dans les activités parascolaires. En plus de créer un corridor de services intégrés à même les milieux de vie des jeunes». Donc souvent, une des critiques, c'est dire : Bien, le protecteur national de l'élève ne connaît pas le milieu scolaire, il est à l'extérieur, il n'y a aucun jeune qui va prendre le téléphone ou texter le protecteur national de l'élève, sauf exceptionnellement. Mais ça veut dire quoi créer un corridor de service intégré, c'est un peu ce que tu viens de mentionner tantôt? Est-ce qu'il y a d'autres choses aussi?

• (18 h 20) •

Mme Lemay (Mélanie) : Ce que je trouve intéressant, c'est par rapport aux autres violences systémiques, c'est qu'on ne peut pas voir une victime comme étant unidimensionnelle, il y en a qui sont en situation de handicap, il y en a qui sont issus de l'immigration, il y en a qui viennent de certaines communautés LGBT ou autres. Ça fait que c'est sûr que si on a un regard très hétéronormatif, blanc, envers l'intervention, bien, on ne va pas aller chercher les jeunes qui ne fittent pas parfaitement dans cette case-là, ils vont rester coincés avec les expériences de victimisation dans lesquelles ils se situent, ça fait qu'on doit travailler sur les différentes formes de discrimination qui existent dans notre société pour qu'on puisse s'assurer, en fait, que tout ce qu'on mettra en place que ce soit des formations, des nouvelles politiques, des contenus transversaux, des... tu sais, on s'assure, en fait, qu'il y a une richesse puis il y a une transmission culturelle qui est faite par rapport...

Mme Lemay (Mélanie) : ...aux outils puis aux connaissances aussi. Ça fait que c'est pour ça que je le mentionnais comme ça dans mon mémoire, c'est peut-être maladroit, mais ce que je veux dire en disant ça, c'est vraiment que les victimes ne sont pas unidimensionnelles. Elles ont toutes des parcours qui sont des fois complexes, puis on a besoin de le savoir et de le comprendre pour vraiment venir à la rencontre des gens.

Mme Ghazal : Puis, dans le fond, de tenir compte des contextes, des... c'est-à-dire ne pas genre dire : O.K., on fait une formation, puis c'est du mur-à-mur à tout le monde, il faut l'adapter aussi au contexte.

Par rapport à la clause d'amnistie, comment c'est formulé dans le projet de loi, est-ce que c'est satisfaisant pour toi... pour vous, comment c'est formulé dans le projet de loi? Est-ce que le fait que ça n'existe... qu'on ne puisse jamais effacer un comportement d'un prof dans le dossier... dans son dossier d'employé... est-ce que c'est satisfaisant?

Mme Lemay (Mélanie) : Moi, je ne pense pas que c'est une mauvaise idée de faire ça, mais là où j'ai de la difficulté, disons, c'est par comment le fait qu'on ajoute cette mesure-là est ensuite instrumentalisé ou récupéré...

La Présidente (Mme Dionne) : ...Mme Lemay.

Mme Lemay (Mélanie) : ...pour donner l'impression de faire des pas de géant. Donc, c'est plus là où moi, je mets une nuance, c'est que ce n'est pas satisfaisant juste une mesure. Il faut que ce soit intégré dans un tout qui est cohérent. C'est pour ça, selon moi, que c'est bien, on ne peut pas s'y opposer, mais ça reste qu'à la fin de la journée est-ce que c'est assez...

La Présidente (Mme Dionne) : Merci.

Mme Lemay (Mélanie) : ...une mesure? Non.

La Présidente (Mme Dionne) : Merci. Merci beaucoup. Malheureusement, c'est... c'est tout le temps que nous avions. Merci beaucoup, Mme Lemay, pour la... votre contribution.

Mme Ghazal : ...il restait combien de temps du ministre?

La Présidente (Mme Dionne) : M. le Ministre, il restait huit minutes au temps du gouvernement.

M. Drainville : Oui, mais moi, je dois m'absenter, Mme la Présidente.

Mme Ghazal : Mais est-ce que c'est...

M. Drainville : Sachant que je... Sachant qu'on avait seulement un des deux groupes, là, j'ai prévu d'autres engagements.

Mme Ghazal : Mais j'aimerais... Est-ce que... J'aimerais quand même demander...

La Présidente (Mme Dionne) : Posez votre... Bien, qu'est-ce que vous alliez demander, Mme la députée?

Mme Ghazal : Bien, d'avoir les... le temps restant du ministre.

La Présidente (Mme Dionne) : O.K. Ça prend un consentement. Est-ce qu'il y a consentement pour redistribuer le temps du ministre à la députée de Mercier? Donc, il y a...

M. Drainville : Moi, c'est impossible... C'est impossible pour moi de rester, là.

Mme Ghazal : C'est huit minutes, hein?

M. Drainville : Moi, je dois y aller.

La Présidente (Mme Dionne) : Donc, il n'y a pas de consentement?

Mme Ghazal : Pas de consentement pour avoir le huit minutes?

M. Drainville : Pas de consentement, non, je dois y aller, moi.

La Présidente (Mme Dionne) : Alors, merci beaucoup... Merci beaucoup, Mme Lemay. Donc, avant de conclure les auditions, je procède au dépôt des mémoires des personnes et des organismes qui n'ont pas été entendus lors des auditions publiques. Et, sur ce, je vous remercie infiniment pour votre contribution à ces travaux.

Je... Compte tenu de l'heure, la commission ajourne ses travaux sine die. Merci et bonne soirée.

(Fin de la séance à 18 h 23)


 
 

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