Journal des débats de la Commission de la culture et de l’éducation
Version préliminaire
42e législature, 2e session
(19 octobre 2021 au 28 août 2022)
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Le
mardi 15 février 2022
-
Vol. 46 N° 14
Étude détaillée du projet de loi n° 96, Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français
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11 h (version non révisée)
(Onze heures six minutes)
La Présidente (Mme Thériault) :
Attention, s'il vous plaît! Donc, ayant constaté le quorum, je déclare la
séance de la Commission de la culture et de l'éducation ouverte. La commission
est réunie afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi numéro 96, Loi
sur la langue officielle et commune du Québec, le français.
Madame la secrétaire, y a-t-il des
remplacements?
La Secrétaire : Oui, madame
la présidente : Mme Guillemette (Roberval) sera remplacée par M. Lévesque
(Chapleau); Mme St-Pierre (Acadie) par M. Birnbaum (D'Arcy-McGee);
Mme Dorion...
La Secrétaire : ...Taschereau
par Mme Ghazal (Mercier) et Mme Hivon (Joliette) par monsieur Bérubé
(Matane-Matapédia).
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci beaucoup. Donc, lors de l'ajournement, jeudi dernier, la commission en
était à l'étude de l'article 20 du projet de loi. Et monsieur le ministre,
vous m'avez signalé avoir un amendement déposé sur cet article-là?
M. Jolin-Barrette : Oui.
Faisant suite, Mme la Présidente... Mais tout d'abord, bonjour. Faisant suite
aux discussions que nous avons eues jeudi dernier, vous savez, il y avait des
représentations, notamment, qui étaient faites par l'ordre des CPA, notamment
la Chambre des notaires, également relativement à qui va payer pour les frais
de traduction? Il y avait une inquiétude relativement... et on avait un cas
d'exemple qui avait été souligné par la députée de Marguerite-Bourgeoys
relativement au fait que qu'est-ce qui arrive dans l'éventualité où une
personne morale, dans le fond, demande ses états financiers à un comptable et
il les demande dans une autre langue que le français et là, un actionnaire
demande de les avoir en français, les états financiers, parce que c'est une
personne qui est autorisée. Donc, l'amendement qu'on va introduire, madame la
présidente, c'est pour faire en sorte que ça soit la personne morale... lorsque
c'est une personne morale, c'est elle qui va assumer les frais et non pas le
professionnel.
Et donc je vous lis l'amendement, madame
la présidente. Ajouter à la fin de l'article 20 du projet de loi le
paragraphe suivant. 3, par l'ajout à la fin de l'alinéa suivant : "Malgré
le premier alinéa, lorsque le client ayant fait appel aux services du membre
d'un ordre professionnel est une personne morale, les frais de traduction d'un
document visé au premier alinéa à la demande d'une personne autorisée à obtenir
ce document autre que ce client sont à la charge de celui-ci.".
Donc, l'article 30.1 de cette charte
est modifié. Là, je vous lis... pardon, le commentaire. Cet amendement prévoit
que les frais de traduction à la demande d'un tiers d'un document rédigé par un
professionnel sont à la charge du client de ce professionnel lorsque ce client
est une personne morale. Donc, c'est ça. On vient faire en sorte justement que
l'article 30 point 1 tel qu'amendé, se lirait ainsi : Les membres des
ordres professionnels doivent fournir en français et sans frais de traduction
tout avis, opinion, rapport, expertise ou autre document qu'il rédige à toute
personne autorisée à les obtenir et qui leur en fait la demande. Cette demande
peut être faite à tout moment. Malgré le premier alinéa, lorsque le client
ayant fait appel aux services du membre d'un ordre professionnel est une
personne morale, les frais de traduction de documents visés au premier alinéa à
la demande d'une personne autorisée à obtenir ce document autre que ses clients
sont à la charge de celui-ci. Donc, ça signifie que si le client est une
personne morale, puis qu'il y a une demande de frais de traduction, c'est le
client, personne morale, qui va les assumer.
La Présidente (Mme Thériault) : C'est
bon. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Bien, ça commence
bien la semaine, madame la présidente. Nos discussions ont porté fruit. Je
pense que les arguments convaincants de l'Ordre des comptables professionnels
agréés sont irréfragables.
M. Jolin-Barrette : ...Mme la
Présidente.
• (11 h 10) •
Mme David : Même votre expert
trouve que c'est... il est même étonné de ma courbe d'apprentissage. Alors, je
pense que nous avons là un excellent amendement qui protège... moi qui a été
pendant longtemps, entre autres, dans mes nombreuses vies une professionnelle
autonome qui faisait des contrats, justement, d'expertise psycho légale, je me
serais très difficilement vue être obligée de traduire et de traduire et de
traduire, alors que mon client, c'était une personne morale. Alors la personne
morale a les reins plus solides que le pauvre professionnel autonome. Donc je
pense que c'est sage. Je pense que c'est avisé et je pense que c'est rendre
justice aussi à un excellent mémoire des CPA, je le dis en passant, je l'ai
relu attentivement pour préparer nos heures de discussion aujourd'hui. Celui-là
et celui des notaires sont vraiment excellents. Vous pouvez prendre des notes,
M. le conseiller, parce que vous verrez mes sources d'inspiration pour
discuter. Mais quand il y a des bons mémoires, des gens qui ont travaillé
longtemps, qui se préoccupent, évidemment, je l'avais dit, qu'on entrait dans
une zone complexe qui est celle des ordres professionnels, missions de
protection du public. C'est une zone à la fois très légale et très... en tout
cas, moi, je n'ai jamais trouvé ça très simple, toute la question des ordres
professionnels, mais en lien avec l'enseignement des programmes d'études, mais
aussi les inspections, le code de déontologie, les sanctions, les radiations.
J'ai été moi-même membre de formation continue de mon ordre. J'ai été très
impliquée et c'est d'une complexité législative importante, alors de mettre la
langue française là-dedans...
Mme David : ...on
comprend qu'on n'est pas dans le chapitre le plus simple. Alors même des fois,
je demanderai un peu de compréhension au ministre si jamais je me trompe dans
les mots, les expressions. Mais pour ça, ici, j'ai bien compris que ça causait
un vrai problème et je suis très satisfait de l'amendement.
La Présidente
(Mme Thériault) : Parfait. S'il n'y a pas d'autres questions,
commentaires, on peut mettre aux voix l'amendement. Est-ce que l'amendement est
adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente
(Mme Thériault) : Adopté. Parfait. Monsieur le ministre,
l'article 21
M. Jolin-Barrette : Faut
pas adopter 20?
La Présidente
(Mme Thériault) : Excusez-moi. Article 20 maintenant, tel
qu'amendé. Est-ce qu'il y a d'autres commentaires sur l'article 20?
Désolée.
Mme David : Donc,
c'était le commentaire vraiment principal.
La Présidente
(Mme Thériault) : Il n'y a pas d'autre commentaire. Donc, est-ce
que l'article 20 tel qu'amendé est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente
(Mme Thériault) : Adopté. Parfait. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui.
21, madame la présidente. L'article 32 de cette charte est modifié :
1 dans le premier alinéa : a) par l'insertion, après «utilise», de
«uniquement», b) par l'insertion, après «éqcrite» de «et orale», c) par le
remplacement de «de leurs membres» par «ou une partie de leurs membres et des
candidats à l'exercice de la profession».
2 par leur remplacement, dans le deuxième
alinéa, de «ils peuvent toutefois répondre dans la langue de l'interlocuteur
lorsqu'il s'agit des apostrophes» par «sauf disposition contraire à la présente
loi, ils utilisent uniquement cette langue lorsqu'ils communiquent oralement ou
par écrit avec».
Commentaire. L'article 21 du projet
doit modifie l'article 32 de la Charte de la langue française pour faire en
sorte que les ordres professionnels n'utilisent que le français dans leur
communication écrite et orale avec l'ensemble ou une partie de leurs membres et
des candidats à l'exercice de la profession. De plus, les ordres professionnels
devront uniquement utiliser le français dans leur communication orale ou écrite
avec un de leurs membres, sous réserve de ce qui est prévu par
l'article 40.2 de la Charte de la langue française proposé par
l'article 27 du projet de loi. Et je vais avoir un amendement, Mme la
Présidente.
La Présidente
(Mme Thériault) :Oui. Si vous pouviez en faire la lecture.
M. Jolin-Barrette :
Article 21 Remplacer le paragraphe 2 de l'article 21 du projet
de loi par le paragraphe suivant. 2 par le remplacement du deuxième article par
le suivant : Sauf disposition au contraire de la présente loi, ils
utilisent uniquement cette langue lorsqu'ils communiquent oralement ou par
écrit avec un membre ou un candidat à l'exercice de la profession en
particulier.
Commentaire. Par concordance avec les
modifications apportées apportées au premier alinéa de l'article 32 de la
Charte de la langue française par le paragraphe 1 de l'article 21,
cet amendement ajoute une référence aux candidats à l'exercice de la profession
au libellé du deuxième alinéa de l'article 32 de la Charte de la langue
française.
Donc, tel qu'amendé, là, ça se
lirait : «32 Les ordres professionnels utilisent uniquement la langue
officielle dans les communications écrites et orales avec l'ensemble ou une
partie de leurs membres et des candidats à l'exercice de la profession. Sauf
disposition contraire de la présente loi, ils utilisent uniquement cette langue
lorsqu'ils communiquent oralement ou par écrit avec un membre ou avec un
candidat à l'exercice de la profession en particulier.»
La Présidente
(Mme Thériault) : Madame la députée de Marguerite-Bourgeois.
Mme David : Alors,
écoutez, moi aussi, je vais avoir un amendement, un amendement que j'aime
beaucoup. Je vous le dis, je suis fière de cet amendement-là. Je vous dirai
après ma source pour ne pas trop donner d'indices. Sauf que j'aimerais ça
déposer mon amendement assez rapidement parce que si on accepte mon amendement,
je vais accepter l'amendement qui est déposé là. Un va un peu avec l'autre
parce qu'on parle d'ajouter candidat. Je vois la logique de mettre les
candidats avec les membres, mais je... Il y aurait un «mais» avant qui serait
dans mon... qui serait dans mon amendement. Alors, est-ce que je peux demander
la permission de déposer le mien dans le même espace temporel que celui du
ministre ou pas? Ça doit être un puis après l'autre et lors des...
M. Jolin-Barrette :
Bien, c'est... Là, on peut en discuter, mais dans la mécanique, il faut traiter
de ce que je viens de déposer.
Mme David : Un avant
l'autre.
M. Jolin-Barrette :
C'est ça, mais on peut quand même... Vous pouvez quand même en discuter. Puis
on va faire la discussion sur les... sur les deux en même temps si vous voulez.
Mme David : Mais en
discuter, ça veut dire quoi? Ça veut dire quoi, le déposer puis en discuter?
La Présidente (Mme Thériault) :
Bien là, vous avez 20 minutes à discuter sur l'article... sur l'amendement du
ministre. Après ça, on revient sur l'article. Ça fait que puisque vous
introduisez quelque chose, vous pouvez prendre dans le temps où vous voulez. Il
n'y a pas de problème. Puis, à ce moment-là, le ministre va savoir... avoir une
meilleure idée d'où vous voulez aller avec un amendement possible aussi. Donc
moi, je suis... On est dans le cadre de l'article, là. Je n'y vois pas... Je
n'y vois pas de...
Mme David : Bien, je
vais commencer tranquillement, là. Je vais commencer tranquillement par une
question quand même assez intéressante qui est celle de... C'est une question
que j'ai souvent posée au ministre, qui était pourquoi il mettait seulement
«par écrit» quand il parlait des communications. Puis on en a beaucoup discuté.
Je pense c'était 13.1 ou... Écrit inclut l'oral. Avec le mot du ministre que je
ne comprends toujours pas, c'est : L'écrit emporte l'oral. Mais je pense
qu'emporte ça veut dire inclut. Enfin, je suis sûre que j'interprète bien, là.
Le...
Mme David : ...l'écrit inclut
l'oral quand on parle des communications, etc., mais que c'était trop compliqué
de mettre l'oral, la communication orale pour les communications avec les
citoyens, avec les organismes de l'État. Pourquoi ici, quand on dit que les
ordres sont quand même des organismes parapublics, tout à coup, on peut
facilement mettre le mot «oral», que c'est «les ordres professionnels utilisent
la langue officielle dans les communications écrites», et là vous rajoutez
«uniquement la langue officielle dans les communications écrites et orales»?
Vous-même, vous le rajoutez. Je n'en suis pas sur le mot «uniquement», là,
bien, ce qui est un autre concept, mais pourquoi «orales»? Et après ça on pourra
parler des candidats.
M. Jolin-Barrette : Parce
que, dans le cadre des ordres professionnels, on n'est pas dans le régime de
l'exemplarité de l'État. Donc, l'article 13 points 2 du projet de loi qui
touche les organismes de l'administration, les ordres professionnels ne sont
pas couverts par ça. Donc là, on est dans un régime spécifique, on est sorti de
la partie du projet de loi sur l'administration en général, puis là on est
vraiment dans le régime des ordres professionnels en soi. C'est pour ça qu'on
vient spécifier «oral» et «écrit», c'est un régime distinct en soi. Donc...
Mme David : S'il est
distinct, pourquoi on peut ici mettre le moral puis on ne pouvait pas dans
l'administration de l'État?
M. Jolin-Barrette : Parce que
la façon dont la disposition, elle a été écrite a 13.2 sur l'administration,
l'exemplarité, l'administration, le régime juridique qu'on est venu établir
c'est que l'oral suivait l'écrit. Donc, ça, c'est établi pour ce mécanisme-là.
Là on est dans un autre mécanisme où on vient clairement l'identifier. Donc,
dans le fond, il ne faut pas mélanger la partie du projet de loi 13.2 qui est
un régime applicable à l'État, à l'administration, avec un grand A, versus ce
régime-là qui s'applique aux ordres professionnels.
Mme David : Donc, ici, il n'y
a pas nécessairement écrit qui inclut oral, donc il faut préciser oral et
écrit.
M. Jolin-Barrette : C'est ça.
Mme David : O.K.
M. Jolin-Barrette : Puis
l'autre point, pour des fins de compréhension, ici, ce régime-là, il existe
déjà. Tu sais, le régime des ordres professionnels, dans la Charte de la langue
française, c'est déjà des dispositions existantes. On vient ajouter des choses
à un régime qui existe déjà, tandis que, quand on était dans le régime de
l'exemplarité de l'État, c'est un tout nouveau régime qu'on vient mettre en
place.
Mme David : O.K. Maintenant,
vous dites bien, dans la deuxième partie : «Sauf disposition». On étudie
tout l'article 32, là.
M. Jolin-Barrette : Oui. Bien
là, on est sur l'amendement.
Mme David : On est sur...
M. Jolin-Barrette : Mais on
peut faire la discussion sur tout l'article aussi. Dans le fond...
Mme David : C'est vrai qu'on
est juste sur l'amendement.
M. Jolin-Barrette : Mais
l'amendement, là, l'amendement, ce qui vient rajouter, ce n'est pas juste le
membre, c'est également le candidat à l'exercice de la profession. Ça veut dire
que les communications... Supposons, là, vous prenez un étudiant à l'École du
Barreau du Québec, donc l'article va s'appliquer également à l'étudiant à
l'École du Barreau de Québec parce qu'il est candidat à l'exercice de la
profession, même chose, supposons, il a passé son évaluation au Barreau puis il
est stagiaire, bien, durant le laps de temps de six mois de stage, bien, c'est
un candidat à l'exercice de la profession, même chose quand vous êtes, je ne
sais pas, là, ingénieur junior ou vous êtes... vous faites votre stage de la
Chambre des notaires, qui dure un an, là.
Mme David : Puis ça, ça
n'existe pas dans la... On n'avait pas pensé aux candidats en 1977, si je
comprends bien, puis ça n'a jamais été modifié. Puis là vous semblez trouver ça
très important, de mettre les candidats aux professions.
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, là on est plus sur l'article. L'article visait les ordres professionnels
en général pour dire, ils communiquent en français, mais là nous, on vient
rajouter le fait que...
Mme David : Rajouter dans
l'amendement...
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, dans l'article du projet de loi 96, par rapport à la loi 101, on vient
dire : Dans vos communications avec un membre, ça se passe en français.
Puis également on avait omis d'indiquer, dans le projet de loi 96, le candidat
à l'exercice de la profession, puis c'est un des commentaires qu'on a reçus
lors des consultations également. Donc, on vient couvrir à la fois le membre de
l'Ordre, mais celui qui veut le devenir également.
• (11 h 20) •
Mme David : Puis ça, c'est
une question qui vient de «poper» dans mon petit cerveau. Un candidat à
l'exercice de la profession, là, c'est peut être plus dans votre profession
qu'on parle comme ça, que quelqu'un qui fait son stage au Barreau, c'est un
candidat à l'exercice de la profession parce que le Barreau est une école
professionnelle qui est le seul exemple totalement atypique, et on ne partira
pas là-dessus, mais j'ai fait d'énormes tirades là-dessus dans une autre
ancienne vie... que ça se passe pas à l'université, les notaires ont remis ça à
l'université. Donc, est-ce que les notaires, quand ils font leur maîtrise, eu
autres, ils sont membres candidats?
M. Jolin-Barrette : Bien,
dans le fond, les notaires doivent faire un stage également.
Mme David : Oui, mais votre
définition de stage, là, est ce que... Je vous donne un exemple, là, le
doctorat en psychologie, il y a un internat obligatoire. On n'a jamais
considéré que c'était des membres candidats à l'exercice de la profession. Ils
font leur demande une fois qu'ils ont rempli toutes les conditions exigées par
l'ordre pour la formation universitaire, mais c'est quand ils ont...
Mme David : ...diplôme donné
avec la belle... le beau chapeau sur la tête dont je ne me souviens plus le nom,
là.
M. Jolin-Barrette : C'est ça.
Mais, quand vous êtes candidat, c'est lorsque vous êtes encadré par l'ordre.
Donc, si jamais vous faites des...
Mme David : Vous pensez aux
avocats, surtout?
M. Jolin-Barrette : Bien, aux
avocats, aux notaires, aux comptables...
Mme David : Non, pas aux
notaires.
M. Jolin-Barrette : Oui.
Mme David : Bien, les
notaires, c'est... la maîtrise a été renvoyée... les stages, dans les
universités, ce n'est plus... Il y avait l'École du Barreau, puis les notaires
étaient... Il y a à peu près sept, huit ans.
M. Jolin-Barrette : Mais la
Chambre des notaires exige de faire un stage, non?
Mme David : Bien oui, mais
l'Ordre des psychologues exige des stages; les médecins, les architectes, les
ingénieurs, tout ce monde-là fait des stages. Est-ce que ce sont tous des
candidats à l'exercice de la profession?
M. Jolin-Barrette : En fait,
lorsque c'est prescrit par l'université, lorsque c'est encadré par
l'université, ce n'est pas des candidats à l'exercice de la profession. Quand
c'est exigé par l'ordre professionnel, puis ils sont candidats pour devenir
professionnels, là, à ce moment-là, ça l'est.
Mme David : ...j'ai le goût
de... Ce n'est pas parce que je veux faire travailler plus vos équipes, là,
mais à l'OPQ ils auraient certainement ça, c'est... Qui est touché par cette
définition de candidat à l'exercice de la profession? Parce que c'est l'ordre
qui encadre le stage. Je ne connais pas beaucoup d'exemples, moi. Je ne pense
pas que l'Ordre des ingénieurs encadre les stages en génie, je pense que c'est
les facultés de génie qui encadrent les stages en génie.
M. Jolin-Barrette : Ah non!
Moi, je pense que c'est le... sous réserve, là, mais je pense que c'est l'Ordre
des ingénieurs, parce qu'avant de pouvoir devenir ingénieur avec... ingénieur,
supposons...
Une voix : Normal.
M. Jolin-Barrette : Non, mais
parce que vous avez deux types d'ingénieurs: vous avez les ingénieurs juniors,
puis ils sont assujettis... Dans le fond, un coup que vous diplômez, là,
supposons... de Polytechnique - puis là, comme on dit, ne prenez pas tout, tout
pour du cash, là, je vais faire les vérifications - mais vous faites vos quatre
ans de génie, il peut y avoir des stages à travers ça, tout ça, vous obtenez
votre diplôme de Polytechnique, là, à ce moment-là, vous devenez ingénieur
junior. Mais, avant de devenir ingénieur pour signer, vous avez un certain
nombre d'heures qui sont prescrites en vertu de l'Ordre des ingénieurs de la...
Mme David : On sait que tout
ce qui mène au diplôme donné par l'université, ça ne s'appelle pas «candidat à
la profession». C'est quand le diplôme est terminé que vous avez un stage à
faire après, et là je ne suis même pas sûre que la médecine, ça s'applique...
qui sont candidats à une profession au Collège des médecins ou après ça
résidents, je pense, ce sont des diplômes donnés par les facultés de médecine.
Mais, moi aussi, c'est sous réserve, là, mais c'est parce que tout à coup je me
dis: Il n'y a peut-être pas tant de monde que ça que ça touche, vos candidats à
la profession.
M. Jolin-Barrette : Bien,
quand même, là, les notaires, les comptables, les ingénieurs... Les médecins,
on peut vérifier, parce que les médecins, dans le fond, là, quand vous recevez,
là, votre diplôme de M.D., là, donc le doctorat en médecine, supposons, là, qui
est un doctorat de premier cycle, pas comme un doctorat en psychologie, hein...
Mme David : Merci de faire la
différence.
M. Jolin-Barrette : ...ou pas
comme un doctorat en droit, qui requiert plusieurs années, hein...
Mme David : Absolument.
M. Jolin-Barrette : ...ou un
Philosophia Doctor, quelque chose comme ça...
Mme David : Philosophiae
Doctor.
M. Jolin-Barrette :
...Philosophiae Doctor, c'est ça, donc qui demande plus, plus d'années, comme
on dit, ça, c'est des vrais docteurs.
Mme David : Ça demande une
vraie thèse de doctorat.
M. Jolin-Barrette : C'est ça,
c'est ça. Mais donc, à ce moment-là, vous avez votre diplôme de l'université
qui est délivré, supposons, à l'Université de Montréal c'est cinq ans, à
l'Université de Sherbrooke c'est quatre ans, là, à ce moment-là, pour pouvoir
exercer la médecine, là, il y a une spécialité qui est requise, médecine de
famille...
Mme David : Mais qui est
encadrée.
M. Jolin-Barrette : ...ou
médecine... autre programme, là, à ce moment-là, je crois, et on va faire les
vérifications, que là c'est encadré par l'ordre professionnel.
Mme David : Moi, je ne crois
pas. Mais on va faire les vérifications, parce que tu t'inscris à un programme,
quand tu veux être anesthésiste, au programme d'anesthésiologie de l'université
X, encadré par la faculté de médecine.
M. Jolin-Barrette : On va le
vérifier.
Mme David : Écoutez, on n'en
fera pas un... Mais c'est parce que ça met en balance que ça ne touche pas
l'ensemble des professions, parce qu'il n'y a peut-être pas tant de professions
que ça où il y a ce qu'on appelle des candidats à l'exercice de la profession.
Mais, moi, de toute façon, mon amendement portera sur l'ensemble des membres
dans les communications orales et écrites. Alors, là-dessus, je ne pense pas
que j'aie tellement d'autres choses à dire, Mme la Présidente.
M. Jolin-Barrette : Bien,
pour le bénéfice de la commission, je vais m'amender. Semblerait-il que pour
les ingénieurs, il n'existe plus de juniorat, donc il n'y a plus d'ingénieurs
juniors, alors, voyez-vous, depuis 2019. Alors, moi aussi, je mets mes
compétences à jour, Mme la Présidente.
Mme David : ...projet de loi
omnibus de l'ensemble de la société, on aura ratissé dans tous les coins de
toutes sortes de choses: les ordres professionnels, les entreprises, l'État.
Nommez-les! On est... Alors, je pense qu'on va avoir gagné notre...
Mme David : ...Mme la
Présidente, et notre engagement à notre dur métier d'élu parlementaire, dans ce
cas-ci. Alors, voilà.
J'aimerais beaucoup que, dans vos
formidables équipes, si vous nous trouvez éventuellement... ça ne m'empêche pas
de dire que je n'ai plus rien à dire sur l'amendement... mais ce qu'est un
candidat à la profession et quels ordres professionnels. Vous avez, tout plein,
un bon carnet d'adresses pour trouver la réponse.
M. Jolin-Barrette : On va
faire la vérification.
La Présidente (Mme Thériault) :
Donc, je comprends que vous allez faire la vérification, puis vous allez
revenir avec la liste des professions qui sont assujetties à ça. Parfait. Donc,
s'il n'y a pas d'autres commentaires sur l'amendement, on peut mettre
l'amendement aux voix. Est-ce que l'amendement est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme Thériault) :
Adopté. Ça fait que... Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, pour votre
amendement, maintenant.
Mme David : Alors, moi, je
vais déposer un amendement inspiré beaucoup... je vous le dis tout de suite,
vous pouvez aller relire... des pages 23, 24, 25 de la Chambre des notaires.
La Présidente (Mme Thériault) :
L'amendement est sur Greffier, pour les membres de la commission aussi. Vous
pouvez aller prendre connaissance de l'amendement, le temps que la collègue va
en faire la lecture. Allez-y, madame la députée.
Mme David : Oui, et en toute
honnêteté, je cite mes sources. Donc, on a le droit d'être inspirés par des
gens qui connaissent bien ça.
La Présidente (Mme Thériault) : ...c'est
fait pour ça aussi, de toute façon, lorsque les gens viennent nous donner leur
point de vue, c'est ça.
Mme David : Les consultations
particulières et les mémoires.
La Présidente (Mme Thériault) : Les
consultations servent exactement à faire ce que vous faites...
Mme David : Ils sont
directement impliqués par ça.
La Présidente (Mme Thériault) : ...puis
ça nous permettait qu'on les entende.
Mme David : Donc, article 21
: L'article 32 de la Charte de la langue française, introduit par l'article 22
du projet de loi, est modifié par l'ajout, au deuxième alinéa, des mots «ou
lorsque la santé, la sécurité publique ou les principes de justice naturelle
l'exigent, après les mots «présente loi».
Commentaires. L'article 32 de la Charte de
la langue française introduit par l'article 22 du projet de loi, tel qu'amendé,
se lirait ainsi :
Sauf dispositions contraires à la présente
loi ou lorsque la Santé, Sécurité publique ou les principes de justice
naturelle l'exigent, ils utilisent uniquement cette langue lorsqu'ils communiquent
oralement par écrit avec un membre en particulier.
Pourquoi, madame la présidente, pourquoi?
Je vais retrouver mon mémoire. Chambre des notaires, page 23, je trouve qu'ils
font une présentation très éloquente de la question, en disant... en commençant,
à la page 23... en disant... Puis là on rentre dans le statut légal des ordres
professionnels. Ils peuvent radier un membre. Ça, ce n'est pas rien, hein, ils
peuvent radier... Puis on reçoit, tous les mois, tous les deux mois, bon, de
façon numérique ou papier, des lettres d'information de nos ordres, et on les
voit, les membres qui sont radiés, parce que ça doit être public. C'est
terrible, ça, c'est...
Quand l'inspection professionnelle vient
dans notre bureau ou quand on a une plainte au syndic, je veux dire, on
tremble. C'est aussi pire que d'être accusé, en cour criminelle, de quelque
chose, là, c'est... J'ai des souvenirs, moi, de collègues totalement,
totalement effondrés. Et puis, il y a eu toutes les histoires de relations
sexuelles inappropriées, il y a eu des histoires de... toutes sortes de
raisons, là, pour lesquelles un professionnel peut se retrouver dans des
situations extrêmement stressantes, et l'ordre doit donc prendre des décisions
très importantes, c'est quasi judiciaire, là. Je ne veux pas dire un mot
exagéré, mais ils peuvent suspendre, radier, et tout ça.
Alors, la lecture du libellé, bon, tel que
proposé ici, «amène la chambre à se poser plusieurs questions. Le second alinéa
s'applique-t-il lorsqu'une instance de l'ordre rend une décision qui oblige un
membre à compléter avec succès un stage ou un cours de perfectionnement? Qu'en
est-il lorsqu'elle limite ou suspend le droit d'exercer des activités
professionnelles, quand elle radie un membre ou limite définitivement son droit
d'exercer des activités professionnelles? Toutes ces décisions revêtent une
grande importance pour le membre concerné, puisqu'elles, évidemment, affectent
son privilège d'exercer pleinement... exercer sa profession. Suivant les
principes de justice naturelle, ce membre doit pouvoir comprendre les motifs,
les conditions et, le cas échéant, les limitations».
• (11 h 30) •
Alors, qu'est-ce qui se passe si le membre
n'a pas la connaissance appropriée de la langue officielle? Vous allez
peut-être me dire : Il devrait l'avoir. Mais admettons que dans ces cas-là, on
n'est pas loin de principe de justice naturelle. Et la chambre nous amène à...
nous rappelle... elle dit même : «La chambre ne peut passer sous silence le
fait que, suivant le nouvel article 22.3 de la charte», dont nous, on a
longuement discuté... Vous ne vous en souvenez peut-être plus, Mme la
Présidente, c'est mélangeant, là, mais c'est extrêmement important. Un
organisme de l'administration, et on cite...
11 h 30 (version non révisée)
Mme David : ...peut utiliser,
en plus du français, une autre langue lorsqu'il écrit dans une situation où les
principes de justice naturelle l'exigent. Or, ces mêmes principes de justice
naturelle sont suspendus pour des organismes parapublics tels les ordres
professionnels qui sont pourtant, dans certaines sphères de leurs activités
prévues législativement, des organismes judiciaires investis du pouvoir de
rendre justice.
Donc, la chambre se demande si les
décisions des instances, des ordres ayant une portée individuelle, on comprend
bien, et qui revêt une grande importance pour l'individu concerné pourraient
être rédigées en anglais, et ce, en posant la prémisse que ces instances ne
sont pas des tribunaux judiciaires. Dans ce cas, l'ordre n'aurait pas à joindre
immédiatement et sans délai une version française de celle-ci.
Et là ils vont dans des choses, là, que
monsieur le conseiller, docteur Poirier, connaît très bien. Ils s'appuient
également sur des principes énoncés dans l'arrêt Blaikie, que le terme
«justice» comprend les organismes exerçant des fonctions judiciaires ou quasi
judiciaires. Ça, ce n'est pas moi qui le dis, là, mais je fais tout à fait
confiance à la Chambre des notaires. La garantie accordée à l'article 133
de la Loi constitutionnelle de 1867 quant à l'utilisation du français ou de
l'anglais dans toute plaidoirie ou pièce de procédure par devant tous les
tribunaux ou émanant des tribunaux du Québec, s'applique tant aux cours
ordinaires qu'aux autres organismes ayant un pouvoir de rendre la justice.
Alors là, écoutez, il y a une très longue
note infrapaginale, page 24, que je ne vous lirai pas, mais qui explique
les choses. Ainsi non seulement les parties à des procédures devant les cours
du Québec ou ces autres organismes ayant le pouvoir de rendre la justice, et
cela comprend les plaidoiries écrites et orales... le choix d'utiliser l'une ou
l'autre langue, mais les documents émis en leur nom... peuvent être rédigés
dans l'une ou l'autre langue de ce choix. Et ce choix s'étend au prononcé, à la
publication des jugements ou ordonnances.
Bref, afin d'éviter tout débat devant les
tribunaux quant aux garanties et, le cas échéant... les obligations des
instances, des ordres portant sur la langue de leurs décisions quasi
judiciaires découlant des nouvelles dispositions des articles 7, 10 et 32
de la charte, la Chambre recommande que l'intention du législateur soit
précisée. Une piste de solution pourrait être de prévoir des dispositions
similaires à celles du nouvel article 22.3 de la charte, soit de prévoir
qu'en plus du français, les ordres professionnels peuvent communiquer avec les
candidats à l'exercice de la profession et avec leurs membres dans une autre
langue lorsque la santé, la sécurité publique ou les principes de justice
naturelle l'exigent.
Et ils en font donc une recommandation
majeure. Ça m'a frappé beaucoup, beaucoup cette question là me rappelant
évidemment le drame que peuvent provoquer des situations semblables où un
professionnel est appelé devant son syndic et peut être... faire l'objet de
sanctions voire même de radiation temporaire ou même à vie. Et je vous dis,
c'est aussi pire qu'une sentence de 10 ans de prison pour beaucoup de ces
professionnels.
La Présidente (Mme Thériault) : Monsieur
le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui. Alors,
bien, dans un premier temps, là, pour, madame la présidente, la crainte
relativement, là, aux organismes disciplinaires, là, exemple le Conseil de
discipline, là. Bien entendu, que 133 s'applique, donc, pour le membre, vu que
c'est supralégislatif, la constitution s'applique relativement à cet
élément-là. Donc, il n'y a pas d'enjeu relativement à ça que le membre qui
serait poursuivi en matière disciplinaire puisque c'est quasi judiciaire. Les
garanties associées à 133 s'appliquent, la Loi constitutionnelle.
Mme David : ...intéressante
et je vais demander que ça soit... sous réserve de l'article 133, là,
qu'il y ait un petit amendement à cet effet-là. À ce moment-là, je pense que
vos collègues notaires et avocats vont être très, très, très contents.
M. Jolin-Barrette : Oui, mais
dans tous les cas, ce n'est pas nécessaire de le libeller ainsi parce que la
constitution prime, c'est implicite, là.
Mme David : Oui, mais les
notaires ne sont pas des... tous... Ils citent eux-mêmes l'article 133
puis ils n'ont pas dit ça, donc ça serait peut-être bien de les rassurer.
M. Jolin-Barrette : Oui.
C'est ce que je fais actuellement, je le dis dans le micro.
Mme David : Oui, mais comment
ça se fait qu'eux n'ont pas la même lecture?
M. Jolin-Barrette : Ah! bien
ça, écoutez, il y a beaucoup de gens qui n'ont souvent pas la même lecture. Ça
ne signifie pas, par contre, que dans toutes les dispositions qu'on adopte à
chacun des articles de loi - puis je ne parle pas nécessairement de la Charte
de la langue française - on n'est pas tout le temps en train d'écrire : Sous
réserve de la Loi constitutionnelle, sous réserve de l'article x de la Loi
constitutionnelle. C'est implicite, là. Dans le fond, le régime normatif qui
existe... Dans le fond, vous avez la Constitution de 1867. Accessoirement, vous
avez la Loi constitutionnelle de 1982 à laquelle on n'a pas souscrit. Bon, on
ne repartira pas sur ce débat-là. En fait, c'est quand même d'actualité avec ce
qu'on a vu, hier, à Ottawa, là. Mais là...
M. Jolin-Barrette : …on n'est
pas dans le bon forum.
Mme David : ...l'air, on ne
va pas faire l'histoire du Canada, puis des mesures d'urgence, là...
M. Jolin-Barrette : Bien, on
ne fait pas l'histoire du Canada, mais vous voyez à quel point la loi
constitutionnelle fait partie de nos vies. Parfois, ça a l'air loin...
Mme David : Mais le Canada
fait partie de nos vies aussi. Vous êtes...
M. Jolin-Barrette : Ah! bien,
ça, vous savez, il fait... le Canada fait partie de la vie du député de
Matane-Matapédia et il y a consacré une partie de sa vie. Qu'il le veuille ou
non, ça fait partie de son environnement. Il voudrait en sortir, de cet
environnement-là, mais ça fait part. C'est ça.
Mon point, là, c'est que votre amendement,
là, en lien avec, supposons, le conseil de discipline, bien entendu, c'est
implicite que 133 s'applique. Le point fondamental, là, c'est que les ordres
professionnels, là, les membres d'un ordre professionnel sont supposés
maintenir la compétence linguistique en matière de langue française pour
exercer leur profession. Tout le monde est supposé parler français puis tout le
monde est supposé écrire en français également, lorsque vous êtes un
professionnel au Québec. Parce qu'être membre d'un ordre professionnel, ce
n'est pas un droit, c'est un privilège. C'est un pouvoir régi par l'État
d'exercer une profession où le public, il est protégé. Et la connaissance
appropriée, là, le concept de connaissance appropriée est présent dans la
Charte depuis 1977. Alors ce qu'on fait, c'est qu'on dit : Bien, écoutez,
l'ordre professionnel qui est un régulateur dont le pouvoir est un pouvoir
délégué de l'État, on a choisi au Québec d'abord ce régime, là, puis c'est un
régime historique qui fait part aussi de la France, puis, dans le fond, c'est
un régime distinct du monde anglo-saxon, tu sais, c'est plus... les
corporations de métiers puis tout ça. Alors nous, on a dit : Bien,
écoutez, les professionnels, ils ont un pouvoir délégué qui exerce au nom de
l'État, mais le professionnel doit avoir une connaissance appropriée depuis
1977 de la langue française pour pouvoir exercer sa profession. Donc, nous, ce
qu'on dit : Bien, l'ordre professionnel, lui aussi, s'exprimera
exclusivement en français avec ses membres ou les candidats à l'exercice de la
profession.
Mme David : ...ce que je
comprends, c'est que vous donnez raison quand même à la partie du mémoire de la
Chambre des notaires qui fait référence à l'arrêt... qui fait référence à
l'article 133 et qui dit : malgré les dispositions de
l'article 32, la Chambre s'interroge, et moi, je vais répondre, là, pour
voir si j'ai bien compris ce que vous dites, à savoir si les décisions des
instances des ordres ayant une... des instances des ordres. Des instances des
ordres, là, c'est syndics, inspections professionnelles, c'est les jugements
qui sont rendus, ayant une portée individuelle, donc par rapport à un candidat,
et qui revêt une grande importance pour l'individu concerné, pourraient être
rédigés en anglais, et ce, en posant la prémisse que ces instances ne sont pas
des tribunaux judiciaires, alors...
M. Jolin-Barrette : ...dans
les critères déterminés par 133, donc, qu'il y ait un processus contradictoire.
Donc c'est comme ça qu'a été interprété 133. Mais je veux juste qu'on revienne
à la base, là. Votre membre, là, il doit avoir une connaissance appropriée du
français. Donc, pour être membre d'un professionnel, vous devez parler
français, vous devez écrire en français. Ça, c'est la base. Donc ça signifie...
puis c'est ça qu'on change, là, dans le régime des ordres professionnels, là.
Tous les membres des ordres professionnels, notamment pour la protection du
public, doivent maintenir cette compétence linguistique, là, au Québec.
Premièrement, la langue du travail, c'est le français. Mais deuxièmement, si
vous êtes investi d'une responsabilité particulière comme professionnel, parce
que soit que vous avez des actes réservés, en psychologie, c'est... Moi, je ne
peux pas faire en sorte de dispenser les actes qui sont réservés aux
psychologues. Par contre, comme avocat, je peux conseiller juridiquement des
gens, mais cette responsabilité-là, ces pouvoirs-là viennent avec également des
exigences, notamment d'avoir la maîtrise de la langue française.
• (11 h 40) •
Mme David : Mais qu'est ce
que vous répondez quand ils disent... parce que je comprends que ça ne
s'appliquerait pas, par exemple, à une lettre qui annonce au candidat qu'il ne
sera pas membre de sa profession parce qu'il échoue ledit stage, là, de
candidat à la profession. Il échoue son stage ou on suspend son activité
professionnelle, ou on... le candidat ne peut pas compléter avec succès un
stage ou un cours de perfectionnement. Là, j'ai l'impression que, vous l'avez
dit, c'est quand il y a débat contradictoire. Alors, le cours de
perfectionnement...
Mme David : ...j'ai
l'impression, où le stage, s'il reçoit sa lettre, on vous annonce que vous avez
échoué, merci, bonjour, c'est dans le cas où ça se rendrait jusqu'au comité X
ou Y, avec le candidat qui a son avocat puis l'ordre qui a son avocat, puis là
ça plaide d'un bord et de l'autre parce qu'il conteste la décision, là il pourrait
le faire dans la langue de son choix parce que c'est sous l'article 133. Mais,
s'il reçoit une lettre disant vous avez échoué votre stage, jusque là, ce n'est
pas contradictoire, donc ça doit être en français. Est-ce que je comprends
qu'on doit diviser les choses là et qu'à ce moment-là il n'y a pas de principe
de justice naturelle qui s'applique, alors que pour l'article 22 3, le principe
de justice naturelle est déjà prévu pour l'exemplarité de l'État? Alors ça, je
ne comprends pas pourquoi vous prenez la peine à 22 3 de le dire puis on ne
peut pas dire ça pour les cas comme ça, qui pourraient être des conditions de
justice naturelle, pour que le membre puisse bien comprendre les motifs, les
conditions, les limitations puisqu'ils sont vraiment... et particulièrement là
qu'on met les candidats, des fois, dans une maîtrise qui s'améliore, mais qui
n'est pas nécessairement encore parfaite.
M. Jolin-Barrette : Bien,
lorsque vous êtes un candidat à l'admission à la profession, vous voulez
devenir un professionnel, O.K.?, vous devez avoir une connaissance appropriée
du français pour pouvoir exercer la profession que vous souhaitez exercer.
Donc, c'est tout à fait normal que l'ordre professionnel communique avec vous
exclusivement en français. Lorsque vous êtes en présence de 133, lorsque vous
êtes dans un processus judiciaire au quasi judiciaire, notamment, qui inclut un
processus contradictoire, effectivement, la façon dont 133 a été interprétée,
jusqu'à ce jour, fait en sorte que 133 s'applique. Mais un ordre professionnel,
c'est un pouvoir délégué de l'État, et donc les membres de l'ordre
professionnel doivent avoir une maîtrise appropriée, une connaissance
appropriée de la langue française. Alors, l'État va communiquer avec eux...
bien, pas l'État, l'ordre professionnel va communiquer avec eux en français.
Mme David : Et donc ce que
vous appelez la portion, même si vous dites : Les ordres, c'est un
organisme quasi judiciaire, ce ne sont pas tous les actes des ordres qui sont
quasi judiciaires, c'est la partie.
M. Jolin-Barrette : Mais,
quand vous êtes devant le conseil de discipline, là...
Mme David : Voilà, c'est là
que je m'en allais.
M. Jolin-Barrette : ...133
pourrait s'appliquer, mais l'ordre lui-même, l'ordre lui-même, dans ses
communications administratives avec les membres, on n'est pas dans une
application de 133.
Mme David : Même si c'est une
communication individuelle qui lui annonce qu'il ne sera plus travailleur
social demain matin parce qu'il a échoué son... en fait, le critère de candidat
à l'exercice de la profession n'a pas été adéquatement relevé ou je ne sais
trop.
M. Jolin-Barrette :
Effectivement.
Mme David : Mais, s'il s'en
va en processus disciplinaire, et que là il y a ce qu'on appelle le débat
contradictoire, là l'ordre, c'est dans sa partie quasi judiciaire qu'il exerce
son mandat de protection du public. Et, à ce moment-là, comme c'est du quasi
judiciaire dans ces fonctions là, ils ne sont pas... autrement dit, un ordre
n'est pas quasi judiciaire à temps plein, là, quand il écrit à tous les membres
pour annoncer que... Il est quasi judiciaire quand il y a un débat
contradictoire, que le membre a le droit de se défende et, bon... Et, à ce
moment-là, là l'article 133 s'applique.
M. Jolin-Barrette :
Effectivement, l'article 133 pourrait être invoqué à cette étape-là lorsqu'il
est devant le conseil de discipline, mais dans un cadre uniquement des communications
entre le membre et l'ordre professionnel ou entre l'ordre professionnel et le
membre, l'ordre doit s'exprimer exclusivement en français.
Mme David : Bon, ça,
j'imagine que...
M. Jolin-Barrette : Et, si je
peux rajouter, là, si on prend un pas de recul, là, tous les membres des ordres
professionnels, là, au Québec, là, doivent avoir une connaissance appropriée de
la langue française. Qu'est-ce que ça signifie si on dit aux ordres
professionnels : Continuez de communiquer avec le bilinguisme
institutionnel qui est répandu dans plusieurs ordres professionnels? Les ordres
professionnels font partie du marché du travail. Il y a quoi,
400.000 professionnels à peu près au Québec... 400.000 professionnels au
Québec environ? Combien d'ordres... Combien de membres d'ordres professionnels?
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : Bon,
300 000, 400 000 personnes qui participent au marché du travail,
46 ordres professionnels. La personne qui obtient...
M. Jolin-Barrette : ...permis
d'exercice qui pratique au Québec, avec des soins québécois, doit avoir une
connaissance appropriée du français. Et vous... Non, mais on...
Mme David : Ce n'est
peut-être pas ça du tout, là.
M. Jolin-Barrette : Bien
oui, mais on est sur la nature même... Puis le Conseil interprofessionnel, là,
nous l'a dit dans son mémoire, là. Il est venu nous dire... Attendez, je vais
retrouver ça. Il nous a dit : Le gouvernement intègre plusieurs mesures
qui visent à freiner une tendance que plusieurs observateurs ont décriée ces
dernières années le bilinguisme institutionnel. Plusieurs articles s'attardent
à la langue de l'administration et resserrent les différents critères qui
allouent d'offrir un service ou de communiquer avec des entités publiques ou
privées dans une autre langue que le français. Les ordres professionnels, comme
organismes étroitement liés à la gestion de l'État, doivent contribuer à cet
objectif. Ça, c'est le Conseil interprofessionnel qui dit ça.
Le Conseil interprofessionnel, pour le
bénéfice de tout le monde qui nous écoute, c'est le syndicat des ordres
professionnels, si on peut dire, ou l'organisme représentant les ordres
professionnels. Mais pour faire simple, on va dire le syndicat. Tiens. Sachant
que l'ensemble des membres des ordres doivent maîtriser le français lors de
leur admission à une profession et que le présent projet de loi prévoit
également le maintien de la connaissance de cette langue tout au long de leur
pratique, le conseil considère qu'il est raisonnable de croire qu'une
communication en français, qu'elle soit orale ou écrite, sera aisément comprise
par les membres. Donc, ça, c'est la position du Conseil interprofessionnel. Je
comprends qu'il y a...
Mme David : ...d'autres
ordres aussi, là, qui disent qu'ils sont tout à fait en respect de ça. Mais je
vais quand même vous poser la question. C'est quoi la différence avec
l'article 22.3 de la charte où, là, vous avez nommément, spécifiquement
inclus une exception quand la justice santé naturelle ou pas... santé et
justice naturelle ou... Bon.
M. Jolin-Barrette : Mais
là, on est l'État dans une situation où l'État est présent, l'administration
avec un grand A, une situation particulière envers le citoyen. Donc, ça, c'est
distinct. On est dans un régime où c'est l'État. Et vous aurez noté dans le
régime, puis on a étudié tout ça la semaine dernière puis l'autre semaine
d'avant également, les exceptions qui sont par directives devront être
approuvées également. Donc, les exceptions sont là, mais elle doit être
approuvée également lorsqu'un organisme se prévaut de ça.
Là, on est dans un régime distinct. Ce
n'est pas les services de l'État qui sont donnés, ce n'est pas les
communications de l'État qui sont données, c'est un ordre professionnel. Puis
l'ordre professionnel, on exige de leurs membres qu'ils aient une connaissance
appropriée du français. Alors, être membre d'un ordre professionnel, là, ce
n'est pas un droit, là, c'est un privilège, être membre d'un ordre
professionnel, de pratiquer une profession. Il y a des règles à respecter. Puis
nous au Québec, on se dit : Vous voulez êtes un professionnel, vous voulez
être membre d'un des 46 ordres professionnels au Québec? Vous devez avoir
la connaissance appropriée. Et ça doit se traduire également dans la
législation, dans les communications que les ordres professionnels ont avec
leurs membres.
Mme David : Donc, la
recommandation de la chambre quand elle dit : Bref, afin d'éviter tout
débat devant les tribunaux quant aux garanties et, le cas échéant, quant aux
obligations des instances des ordres portant sur la langue de leurs décisions
quasi judiciaires découlant des nouvelles dispositions des articles 7, 10
et 32 de la charte, la Chambre recommande, bon, que l'intention du législateur
soit précisée. Vous me répondez : On n'a pas besoin de le préciser parce
que c'est implicite que dans le mot quasi judiciaire, il y a l'implication de
l'article 133 qui entre en scène, et que c'est déjà inclus, et que les
organismes quasi-judiciaires sont inclus et couverts par l'article 133, et
donc qu'à ce moment-là, ça pourrait... il pourrait y avoir une communication
dans une autre langue sous réserve de l'article 133 quand...quand on fait
appel ou quand on est dans une... une instance quasi... dans la partie quasi
judiciaire de débat contradictoire de l'ordre.
Alors, ce que vous dites, c'est que les
notaires devraient être rassurés par votre réponse. Quand eux disent : Aux
obligations des instances des ordres portant sur la langue de leurs décisions
quasi-judiciaires. Donc, on parle de la même chose que vous à ce moment-là.
• (11 h 50) •
M. Jolin-Barrette : Il
n'y a pas d'inquiétude à avoir. Le membre pourra invoquer la protection
associée à l'article 133 s'il se ramasse devant le conseil de discipline
de l'Ordre des notaires.
Mme David : ...
M. Jolin-Barrette : Puis
l'autre élément qui est important, madame la présidente, de savoir également,
là, c'est que là, à 32, on est dans le cadre du permis général, hein, du
candidat à l'exercice de la profession ou du professionnel. Donc, exemple,
madame la députée Marguerite-Bourgeois qui est psychologue, elle a un permis
régulier. Bien, je présume, là, mais je... Elle a un permis régulier. Il y a des
exceptions...
M. Jolin-Barrette : ...au
régime prévu par la Charte de la langue française. Il y a des permis
temporaires, il y a tout ça. Donc, c'est sûr que dans le cadre des régimes
particuliers l'ordre pourra communiquer dans une autre langue que le français
parce que, justement, l'ordre professionnel prévoit des dispositions
particulières où le membre n'a pas nécessairement besoin de parler français
durant cette période de laps de temps là, donc on ajuste les communications.
Mais pour le membre régulier, en règle, par le permis général de 32, la
communication doit être en français. Ça c'est, ce que je vous disais, c'est
40.2.
Mme David : Ça, c'était
pour ce qui a trait, donc, à l'amendement comme tel, principe de... J'aurai
d'autres questions sur la langue de communication par rapport aux examens, par
exemple, que les CPA... la perspective de la protection du public, les CPA sont
très inquiets de plusieurs de ces choses-là. Donc, ça, madame la Présidente, il
me reste du temps hors amendement, précis?
La Présidente
(Mme Thériault) : Vous n'avez presque pas eu de propos sur
l'article comme tel, donc là vous êtes toujours sur l'amendement. Il vous reste
à peu près huit minutes sur votre amendement.
Mme David : Je n'ai
presque pas de propos avec... Alors, tant que vous ne mettez pas déplacé, que
mes propos étaient corrects. Donc...
La Présidente
(Mme Thériault) : On n'a pas fait de discussion sur 21 encore, on
l'a fait sur l'amendement du ministre modeste, et après ça sur votre
amendement.
Mme David : O.K. Donc,
moi, j'ai terminé sur cette partie-là de l'amendement, mais je voulais être
sûre que je pouvais revenir sur d'autres aspects. Donc...
La Présidente
(Mme Thériault) : Donc, s'il n'y a pas d'autre intervention sur
l'amendement, est-ce que vous le retirez ou on le met au vote...
Mme David : Je sais ce
que ça va donner.
La Présidente
(Mme Thériault) : ...suite à la discussion que vous avez eue avec
le ministre? Si vous le retirez, on demande un consentement, sinon on demande
un... on passe au vote.
Mme David : Oui, je
pense je vais le retirer, en tenant compte de ce qui sur l'enregistrement pour
rassurer les notaires.
La Présidente
(Mme Thériault) : Du commentaire du ministre. Parfait. Donc,
est-ce qu'il y a consentement pour retirer l'amendement de la députée?
Des voix : Consentement.
La Présidente
(Mme Thériault) : Consentement. Parfait. Donc, on revient
maintenant à l'article 21, tel qu'amendé, pour la discussion. Madame la
députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Bien,
écoutez, là, on change de... on sort des notaires et puis on s'en va peut-être
plus vers nos amis les CPA. Il y a des inquiétudes réelles sur... et là je vais
aller trouver mes amis, sur la langue, dans une perspective de protection du
public, là, de permettre aux ordres de communiquer dans une autre langue,
surtout pour les communications orales. Parce que, des fois, la personne peut
être vraiment très, très mal prise, et puis il faut absolument lui communiquer
des choses, puis ils ont très, très peur.
Mais ce qui est particulier, par exemple,
c'est que, par exemple, en ce moment, je suis à peu près certaine qu'il y a des
formations qui se donnent en anglais. Prenez, les CPA nous le disent bien, il y
a des nouvelles normes américaines, où là je ne suis pas sûre que j'ai tout
suivi, sur des choses très complexes, là, des normes de comptabilité, là, des
choses extrêmement difficiles, et évidemment que tous les documents sont en
anglais. Il faut faire de la formation continue, on a un nombre d'heures assez
considérable, et je trouve que c'est une... je ne suis pas contre du tout, là,
c'est important. Mais donc il faut qu'il y ait, d'abord, beaucoup de matériel
didactique qui soit directement transmis dans la langue de cesdites normes. Je
ne sais pas qu'ils ne sont pas traduits. Mais donc les CPA sont très, très
inquiets parce qu'ils ont peur que leurs membres ne comprennent pas grand-chose
de ces normes-là, et d'autant qu'ils ont à les appliquer dans la langue,
souvent, dans laquelle elles ont été écrites, c'est-à-dire l'anglais, quand le
CPA fait partie d'une compagnie qui elle-même transige avec une compagnie
américaine.
On comprend que, là, on est dans... Puis
on n'est pas rendu dans les entreprises encore, là, où ça va être compliqué.
Parce qu'au Québec on a quand même mondialisé beaucoup nos entreprises, et
c'est une bonne nouvelle en même temps, même s'il y a des conséquences
négatives aussi. Mais, s'ils ne peuvent plus faire aucune formation en anglais,
ce qui est embêtant, c'est que la langue dans laquelle ils sont susceptibles de
transiger ces normes-là, ça va être une langue autre que le français. Et donc,
quelle va être leur compétence pour faire ça? C'est une question assez
complexe, je trouve. Parce que les comptables, là, il y en a beaucoup, beaucoup
qui travaillent pour des entreprises qui elles-mêmes sont avec des contrats
hors Québec et qui ne sont pas... ça ne se passe pas du tout en français.
Alors, les CPA demandent qu'il soit permis
aux ordres d'offrir des activités de formation continue en anglais et
d'utiliser du...
Mme David :
...pédagogique dans une autre langue que le français. Donc, bonne question. Je
sais un peu quelle va être la réponse, mais je pense qu'il faut être sensible à
la réalité de certains ordres professionnels qui travaillent dans une
perspective très, très, très mondialisée.
La Présidente (Mme Thériault) :
Monsieur le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui,
alors je reviens sur la question de la députée de Marguerite-Bourgeoys, tout à
l'heure, madame la Présidente, relativement aux ordres professionnels et aux
candidats à l'exercice de la profession. Donc, la question, c'était :
Bien, pouvez-vous vous renseigner à savoir quand est-ce qu'on est candidat à
l'exercice de la profession? En fait, pour tous les ordres professionnels, dès
que l'on fait une demande de permis afin de pouvoir devenir un professionnel,
vous êtes un candidat à la profession. Donc, même s'il n'y a pas d'exigence de
stage, supposons, supposons que c'est dans la période où vous soumettez votre
demande pour devenir membre de l'ordre professionnel, donc vous êtes candidat à
l'admission à la profession, ça démarre à partir de ce moment-là. Donc, dans
les professions où vous n'avez pas de stage, supposons, où vous n'avez pas de
période de mentorat, ou quoi que ce soit, vous allez tout de même être visé par
l'article parce que c'est pour devenir membre. Donc, c'est candidat à
l'exercice, entre le moment... Exemple, prenons le cas où je suis diplômé de
l'université, j'ai mon diplôme et, par la suite, je veux devenir membre de
l'ordre professionnel, ce n'est pas automatique, il faut que je fasse les
démarches auprès de l'ordre. Donc là, je suis candidat parce que j'entame des
démarches pour devenir membre de l'ordre professionnel. Il va y arriver,
exemple prenons le Barreau, que je veux devenir avocat. Bien là, à ce
moment-là, oui, je vais entamer des démarches avec l'ordre professionnel, je
m'inscris. Mais par ailleurs le Barreau du Québec m'exige un stage de six mois.
Alors, durant cette période temporelle-là, je suis également candidat à
l'exercice de la profession.
Mme David : Il y a
toujours un délai, quel que soit l'ordre, mais ce n'est pas tellement ces
chiffres-là auxquels je m'intéresse ou aux ordres. C'est l'ordre qui exige, en
plus, quelque chose une fois que le diplôme est terminé. Mais on n'a pas besoin
de ça pour poursuivre le projet de loi. Mais ce que je comprends, je n'avais
pas pensé à ça, vous m'inspirez ce matin, c'est tous les programmes de mise à
niveau pour des professionnels formés à l'étranger. Tous les DHCEU, par
exemple, ça, c'est un bel exemple de candidats à l'exercice d'une profession,
les diplômés hors Québec et Canada, c'est en médecine. On parlait des médecins
chauffeurs de taxi, là, c'est ça, les DHCEU, ça, c'est les médecins... Non,
non, mais je vous parle des candidats à l'exercice d'une profession qui ont
beaucoup de difficulté à se trouver un stage, à réussir un stage, ce sont
vraiment... ils rentrent, eux... ou un pharmacien qui fait un stage de
18 mois dans un programme d'appoint en pharmacie, que je connais bien.
Bien, il y en a 300, par exemple, qui sont candidats à faire ce programme-là.
Il y en a 30 qui sont pris par année. Donc, je ne sais pas s'ils sont, pendant
toutes les années que ça va prendre, des candidats à l'exercice de la
profession, mais, en tout cas, quand ils sont admis dans un programme
d'appoint... Puis là on a, évidemment, depuis des années, depuis au moins 12,
13 ans, qu'on est très, très préoccupés par le manque de professionnels,
donc il y a de plus en plus de recrutement de professionnels formés à
l'étranger : architecture, psycho, n'importe quoi. Et je comprends que ce
sont tous des candidats à l'exercice de la profession quand ils sont, genre,
admis, mais à condition que. Et ça, c'est peut-être même plus les candidats de
l'étranger que des candidats à l'interne, mais le diplôme, presque
automatiquement, t'admet à la profession.
M. Jolin-Barrette : Mais
sous réserve du régime particulier qui s'adresse à eux, s'ils ont une
autorisation de pratiquer avec un permis restrictif ou autre...
Mme David : Ça, c'est
autre chose. Ça, vous en parlez beaucoup, là, les permis restrictifs. O.K. O.K.
Là, je suis mêlée parce que j'étais-tu dans mes... J'étais dans mes normes
internationales puis les formations continues en anglais?
• (12 heures) •
M. Jolin-Barrette : Oui.
Bon, bien, pour les formations, ce qui est important, là, c'est que l'ordre
professionnel communique en français avec ses membres. Bien entendu, s'il fait
référence à une norme internationale, la norme internationale peut être dans une
autre langue que le français. Mais la communication entre l'ordre, les membres
et/ou une partie des membres, ça doit se faire en français, mais la référence à
une norme internationale, bien entendu, si la norme est en anglais, ça va
demeurer en anglais.
Mme David : Bien, je
vais prendre un exemple assez concret, là. Vous êtes membre d'un ordre, je l'ai
été longtemps. Je ne le suis plus, là, je pratique autrement la psychologie en
étant au Parlement...
12 h (version non révisée)
M. Jolin-Barrette : ...mais
faites attention, vous ne pouvez pas dire que vous la pratiquez.
Mme David : Je ne la pratique
pas, attention, je la... je l'observe. Alors je ne la pratique pas. Alors on a
des... on avait, on a, ils ont des activités de formation continue. Donc, vous
allez un samedi dans un... faire vos sept heures, vous êtes inscrit à un
séminaire sur quelque chose. Ce que vous me dites, c'est que le séminaire, là,
il y a quelqu'un en avant qui a bien expliqué les nouvelles normes des CPA en
matière de je ne sais pas quoi. La norme peut être présentée en anglais, mais
il ne faudrait pas que l'ensemble de l'activité se déroule en anglais.
M. Jolin-Barrette : Bien, la
communication, elle doit être faite en français par l'ordre professionnel. Mais
lorsqu'on se retrouve... vous, votre question, c'est : Est-ce que, si le
formateur... en fait, si la formation, elle est accréditée, supposons, elle est
reconnue pour faire partie du règlement sur la formation continue? Est-ce que
ça peut être quelqu'un qui vient de l'étranger, qui vient de donner la
formation? Moi, je vous dirais : Oui, parce que ce n'est pas l'ordre qui
donne la formation, dans le cadre du règlement de formation continue. Et donc,
l'important, c'est la communication qui encadre ça. Mais ce n'est pas l'ordre
qui dispense la formation, c'est un professionnel autre, supposons, qui offre
la formation, là.
Mme David : Bel exemple,
prenons les médecins qui font de la formation continue, et il y a la compagnie,
pour ne pas la nommer, Pfizer, qui vient de Philadelphie présenter un nouveau
médicament avec toutes les.. et, bon, et là, il y a 300 médecins qui
viennent suivre ça. C'est sûr que la personne va s'exprimer dans sa langue, la
seule qu'elle maîtrise, l'anglais, j'imagine, si elle est... S'il donc elle
pourra présenter parce qu'elle n'est pas membre du Collège des médecins. Elle,
elle vient comme conférencier invité.
M. Jolin-Barrette : Oui, mais
là il faut juste faire attention. La qualification, ce n'est pas parce que vous
êtes membre de l'ordre professionnel ou non, là. Deux membres d'un ordre
professionnel, là, peuvent se parler dans une autre langue que le français,
s'ils le souhaitent, là, entre confrères, là. Il n'y a pas ça, on ne vient
pas réglementer ça. Ce qu'on vient réglementer, c'est les communications de
l'ordre professionnel avec le membre. Là, dans le cas que vous donnez, je ne
suis pas sûr que ça serait une activité de formation reconnue par un ordre
professionnel, puis qu'on fait venir une compagnie pharmaceutique pour parler
d'un médicament, supposons, de Pfizer.
Mme David : Ah! les pharmas
sont bien importantes dans la vie médicale.
M. Jolin-Barrette : Oui, mais
prenons l'exemple, là, c'était la Saint Valentin hier. Puis, supposons, Pfizer
venait parler de leur petite pilule bleue. Je ne suis pas sûr que c'est
reconnu...
Mme David : Ah! ...si ça
serait reconnu comme activité, mais vous avez raison, on pourrait débattre
longtemps de ce qui est reconnu et pas reconnu. Il y a eu toutes sortes de
choses des fois qui ont été reconnues, qui étaient un peu particulières. Mais
si c'est reconnu, si c'est reconnu, pardon.
M. Jolin-Barrette : Oui, mais
dans le fond, ça peut arriver que le formateur, dans le cadre d'une activité de
formation reconnue qui est reconnue, ça ne soit même pas un membre de l'ordre
professionnel, ça arrive fréquemment.
Mme David : Bien, c'est ça
que je dis.
M. Jolin-Barrette : Donc,
bien entendu, la personne va pouvoir s'exprimer dans la langue qu'elle
souhaite. Exemple, prenons le Barreau, là. Ça arrive qu'il y a des formations
qui sont données, qui sont reconnues par le Barreau, qui ne sont pas données
par un membre du Barreau. Donc, l'idée de la communication, c'est la
communication de l'ordre avec ses membres, pas le contenu d'une formation qui
vise notamment à obtenir son 30 heures de formation continue.
Mme David : J'allais vous
faire une petite blague, mais vous allez... ça va trop vous stimuler. Alors, je
ne vais pas...
M. Jolin-Barrette : Est-ce
que, madame la présidente, c'est une blague d'ordre constitutionnel? Parce que
ça, ça me stimule beaucoup.
Mme David : Bien, c'est un
peu trop vers ça, effectivement, parce que... elle était bonne, mais on se le
dira hors d'ondes. Je vais vous en soumettre une autre qui est quand même
intéressante, c'est les examens d'entrée aux ordres. Les CPA, l'examen d'entrée
dans la profession de CPA... puis je me demande si les actuaires, ce n'est pas
ça, puis le fameux, fameux examen aussi pour avoir le diplôme de médecine puis
le droit de pratique, là, du LMCC. Ce sont des examens pancanadiens avec
version anglaise et version française. Alors, tu le passes dans langue de ton
choix, mais c'est un examen pancanadien. Alors moi, je ne le savais pas, je ne connais
pas... je connais moins le métier de comptable, mais pour entrer dans la
profession, c'est l'examen final commun EFC, qui est un examen pancanadien
administré au même moment d'un océan à l'autre. Il est offert au choix des
candidats, en français ou en anglais. Alors, tu étudies à Concordia, à l'école
de commerce, tu étudies à McGill, à...
Mme David : ...à John-Molson,
tu étudies à Bishop. Il y a à peu près 300 candidats, chaque année, qui se
présentent à ces examens d'uniquement ces trois universités là, donc qui ont
étudié en anglais, forcément. Est-ce que, comme c'est un examen pancanadien,
ils peuvent le faire en anglais?
M. Jolin-Barrette : ...question-là,
c'est oui si c'est un examen pancanadien, bien entendu que les candidats à
l'exercice de la profession vont pouvoir le faire dans une autre langue que le
français. Donc, on pense notamment aux comptables. On pense au Collège royal
canadien, également...
Mme David : Voilà.
M. Jolin-Barrette : ...pour
la médecine.
Mme David : O.K. Vous voyez,
c'est quand même intéressant parce que là on rassure des gens qui ont des
questions. Si on ne faisait pas cette étude détaillée, il y aurait plein
d'inquiétudes, là, qui restent. Et donc vos réponses sont extrêmement
importantes, mais il faut vous poser les questions. Alors je considère qu'on
remplit notre rôle de parlementaire quand on fait ça, madame la Présidente. Ça,
ça règle ça.
Je pense que ça va. Ça va pour
l'article 21.
La Présidente (Mme Thériault) : Ça
va pour l'article 21. Monsieur le député de D'Arcy-McGee.
M. Birnbaum : ...qui aurait
déjà été discuté, mais je me permets une petite latitude si je peux, madame la
Présidente. Aux yeux de l'article 21, s'il y avait une rencontre, disons,
régionale de l'Ordre des orthophonistes en Outaouais. Une orthophoniste
évidemment pourrait aider un jeune élève, il faut que ça se passe dans la...
Alors, c'est un petit regroupement de membres de l'Ordre des orthophonistes en
Outaouais qui parlent... qui se sont convoqués pour parler, bon, des cas en
particulier et un phénomène qui se manifeste au sein de leur clientèle de
langue anglaise. Ça serait des membres de l'ordre, pas une petite conversation
un à un, ça serait dûment convoqué, disons, comme une petite mini rencontre.
Est-ce qu'ils seraient en train d'aller à l'encontre de l'article 21 s'ils
tenaient une discussion - peut être avec un procès-verbal, même un genre de
rencontre en français, mais - en anglais aussi, parce qu'on parle de
communication orale ainsi qu'écrite?
M. Jolin-Barrette : Oui. En
fait, la communication qui est visée, c'est celle de l'ordre professionnel. Les
professionnels entre eux, lorsqu'ils discutent d'un dossier, ils peuvent le
faire entre deux collègues dans une autre langue que le français s'ils le
souhaitent. Dans le fond, l'article 21 vise la communication qui est entre
l'ordre professionnel vers les membres de l'ordre professionnel, vers les
psychologues, les orthophonistes dans le cas que vous soulevez. Donc, exemple
l'ordre professionnel envoie une convocation à l'assemblée générale annuelle va
l'envoyer en français à ses membres ou envoie une communication à un groupe de
membres, à ce moment-là, ça va être également en français. Mais dans le cadre
de leur... Dans le cas que vous soulevez, dans l'exemple que vous soulevez,
c'est des membres entre eux. Ce n'est pas une communication entre l'ordre et
les membres. Les membres entre eux peuvent communiquer dans une autre langue
que le français s'ils le souhaitent.
• (12 h 10) •
M. Birnbaum : Madame la
Présidente, je tenais justement à offrir un exemple qui est quasi formel. Je ne
fais pas la prétention que ça serait la réunion annuelle générale de cet ordre
d'orthophonistes où je crois que la réponse est assez claire. Mais je parle de
plus qu'une... Et je crois que je me permets d'un exemple qui risque de se
manifester de façon fréquente et dans l'intérêt des clients et du service
offert par un tel ordre. Je parle d'une, oui, une petite rencontre qui serait
dûment convoquée, même de façon formelle ou fort possiblement l'avis de
convocation aurait été rédigé uniquement en français, mais où ça serait compris
qu'en dedans de... en respectant leurs devoirs déontologiques et pratiques,
cette rencontre se déroulerait plus efficacement largement en anglais, peut
être en français aussi, parce qu'il serait en train de parler des cas très
pratiques qui impliquent des jeunes étudiants avec des problèmes de langage
dans leur langue maternelle anglaise comme je dis dans l'Outaouais, Montréal,
bon...
M. Birnbaum : ...dans un tel
exemple, y a-t-il une espèce de dérogation possible et comprise en dedans de
l'article 21? Ou compte tenu que c'est une... l'instance que je décris est
quasi formelle, ce ne serait pas possible?
M. Jolin-Barrette : Ce n'est
pas formel ou quasi formel. C'est lorsqu'il y a une communication de l'ordre
professionnel. Si vous avez une association de psychologues, une association de
psychologues, ce n'est pas l'ordre... bien, pardon, d'orthophonistes, ce n'est
pas l'ordre des orthophonistes. L'ordre des orthophonistes, lui, quand il
communique avec ses membres ou avec une partie de ses membres, c'est en
français, parce que c'est l'ordre professionnel qui est visé. Ce n'est pas un
regroupement de membres d'un ordre professionnel, sur le plan, supposons,
associatif. Dans ce cas-là, les règles de la Charte de la langue française visant
les ordres professionnels ne s'appliquent pas. Dans le fond, l'objet qu'on
vient viser, c'est vraiment l'ordre professionnel lui-même dans ses
communications.
M. Birnbaum : Deux autres
petites précisions. Et je comprends l'objectif, tout à fait légitime, de
l'article. Je vais réviser mon exemple, qui est peut-être crédible. J'ai vécu
une telle situation à l'ancienne commission scolaire de Western Québec, en
Outaouais. Il y avait là, comme il y en a maintenant, une pénurie
d'orthophonistes, et surtout une pénurie d'orthophonistes habiles en anglais
comme en français.
Supposons que cette commission scolaire...
je ne veux pas laisser induire... alors, c'est une situation que j'invente,
quand même... supposons que la commission scolaire Western Québec aurait déposé
une plainte devant l'ordre, et selon les règles d'opération, l'ordre aurait
jugé qu'il fallait en parler à la réunion annuelle générale. Et la plainte,
j'imagine, aurait été...
M. Jolin-Barrette : Juste une
seconde. Dans votre exemple, c'est une commission scolaire qui... C'est qui,
l'ordre?
M. Birnbaum : L'ordre des
orthophonistes. Juste pour m'assurer que j'ai la précision que je cherche, ce
serait une personne physique qui aurait déposé la plainte, mais c'est jugé de
l'ordre assez important que c'est normal que ce soit un sujet lors d'une
réunion formelle, dûment convoquée par l'ordre des orthophonistes. Est-ce que
l'article 21 permettrait un échange formel en dedans d'une telle réunion, parce
qu'on parle d'oral ainsi qu'écrit, un échange en anglais durant cette rencontre
dûment convoquée?
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, Mme la Présidente, dans l'exemple du député de D'Arcy-McGee, la personne
qui fait la plainte n'est pas un membre de l'ordre professionnel, donc pourra
utiliser la langue de son choix pour formuler sa plainte. Et ce qui est
important également, dans votre cas d'exemple, supposons que l'ordre
professionnel convoque une réunion, c'est une communication, donc l'ordre
professionnel le fait en français, parce que c'est une communication entre
l'ordre et les membres. Dans l'exemple que vous donnez, par contre, la plainte
est issue d'un citoyen, donc ce citoyen-là, lui, peut s'exprimer dans la langue
de son choix.
M. Birnbaum : Bon. Dernière
précision. Je me permets de voyager dans le temps. La présidente de l'Ordre des
psychologues a planifié, pour leur réunion annuelle générale... comme je dis,
je voyage dans le temps... d'inviter Sigmund Freud à faire un discours. Est-ce
que la présidente, devant une instance formelle de son ordre, pourrait se
permettre de parler dans une langue comprise par Sigmund Freud, c'est-à-dire de
le présenter devant ses membres, de communiquer devant ses membres, dans cette
espèce d'exemple que j'invente, en anglais, aux yeux de l'article 21?
M. Jolin-Barrette : Bien,
dans le fond, la communication qui est avec Sigmund Freud, s'il ressuscite,
oui, il va pouvoir le faire, pourquoi pas, en allemand, parce que je crois
qu'il était germanophone. Mais oui, lorsqu'il s'adresse à la personne, il peut
le faire dans cette langue-là, l'interlocuteur. Il est là, et il ne parle pas
français. Mais les communications avec les membres, ça, ça se fait en français,
par contre.
M. Birnbaum : Comme je dis, son
discours de présentation, de l'estimé Dr Sigmund Freud, il pourrait le
prononcer s'il était habile en allemand...
M. Birnbaum : …ou en anglais,
son discours formel d'introduction de leurs invités d'honneur.
M. Jolin-Barrette : Donc, bien
entendu, l'ordre professionnel s'adresse à leurs membres en français, donc ça
se déroule en français, la communication. Mais bien entendu la personne qui est
invitée, qui est un conférencier, et qui, lui, n'est pas membre, alors la
discussion peut se faire dans une autre langue que le français. Mais les
communications de l'ordre se passent en français. Qu'elles soient orales ou
écrites.
La Présidente (Mme Thériault) :
Parfait. S'il n'y a pas d'autres interventions à l'article 21, nous serons
prêts à le mettre aux voix. Est-ce que l'article 21 tel qu'amendé est
adopté?
Une voix : ...
La Présidente (Mme Thériault) :
Adopté. Monsieur le ministre, l'article 22.
M. Jolin-Barrette : Oui,
l'article 35 de cette charte est modifié, 1, par le remplacement dans le
premier alinéa de "leur" par "la". 2, par le remplacement
de ce qui précède le paragraphe 1 du deuxième alinéa par ce qui
suit : Un ordre professionnel doit, lors de la délivrance du permis,
considérer qu'une personne a cette connaissance-ci.
Commentaire. Le remplacement du mot
"leur" par le mot "la" proposé au premier alinéa de
l'article 35 de la Charte de la langue française par l'article 22 du
projet de loi vise à éviter de laisser entendre, par le déterminant possessif
"leur", qu'il faut tenir compte de la pratique particulière d'un
professionnel dans l'évaluation de sa connaissance de la langue officielle. Il
faut... ou plutôt évaluer le niveau de connaissance approprié pour l'ensemble
de la profession. Subsidiairement, comme les candidats à la profession
n'exercent pas encore une profession, il convient d'utiliser le déterminant
"la" plutôt que "leur".
La modification proposée au deuxième
alinéa de cet article vise quant à elle à supprimer la présomption irréfragable
de connaissance du français qui est prévue. Un professionnel... un
professionnel devra plutôt considérer, au moment de la délivrance du permis,
qu'une personne a une connaissance appropriée à l'exercice de la profession si
elle est visée par l'un des paragraphes de cet alinéa. Cette modification
s'explique en raison du nouvel article 35 point 2 que propose l'article 23
du projet de loi qui prévoyait certaines mesures qu'un ordre professionnel peut
prendre à l'égard d'un membre qui n'a plus de la langue officielle une
connaissance appropriée à l'exercice de la profession, implique d'une personne
peut... pardon, implique d'une personne peut cesser d'avoir cette connaissance.
Conséquemment, la présomption de connaissance irréfragable et sans limite de
temps que prévoit actuellement l'article 35 ne peut coexister avec
l'article 35 point 2.
La Présidente (Mme Thériault) :
Questions, commentaires sur l'article 22? Madame la députée.
Mme David : Oui. Je trouve
ça. Je trouve ça fort intéressant, le "la" et le "leur". Il
y a des juristes qui ont vraiment travaillé de très, très près, puis là, comme
les candidats sont intégrés dans les deux alinéas, bien, là, ce n'est pas leur
profession parce qu'ils ne sont pas encore admis, ils sont candidats à
l'exercice. Donc il faut passer de "leur", parce que ça ne peut pas
être un pronom possessif, là, ce n'est pas "leur". Ils ne sont pas
encore membres officiellement, donc "la" profession. Aors je
comprends bien l'esprit de ça. On ne veut pas vendre la peau de l'ours avant de
l'avoir tué. C'est ça, la... c'est ça le proverbe. Alors je vais compétitionner
le ministre qui lui, fait parler de lui avec ces images de Youpi, ou de je ne
sais pas qui, de petits enfants là. C'est ce qui revient toujours à Infoman...
pas Infoman, mais À la semaine prochaine, alors il est rendu un personnage.
M. Jolin-Barrette : Ah! de
Goofy. Goofy puis Donald.
Mme David : Goofy. Mais là,
il y en a un nouveau de la semaine dernière, là, puis en tout cas, alors à
chaque fois, c'est en interaction avec moi, donc là, moi j'essaie de faire ma
place, moi aussi, dans ce soleil là.
M. Jolin-Barrette : La course
de Goofy, avec Betty.
Mme David : Voilà. Voilà,
exactement.
M. Jolin-Barrette : Teuf,
teuf, teuf, lentement, mais sûrement.
Mme David : Voilà.
M. Jolin-Barrette : C'est ce
qu'on fait ici, lentement, mais sûrement.
Mme David : Bien, lentement,
là, vous allez... Vous êtes, quand même, là... je trouve que vous êtes un peu
sévère envers nous.
M. Jolin-Barrette : Bien, 50
quelques heures, 21 articles...
• (12 h 20) •
Mme David : Ah! c'est facile
à dire. Donc, "leur" versus "la", je comprends très bien
l'idée. Maintenant, là où les gens sont évidemment un peu... certains ordres
professionnels ont bien vu ça et on est toujours, comme le législateur n'écrit
pas pour ne rien dire, comme on dit toujours, vous avez enlevé
"réputé". Bon, ça, on comprend très bien. Bien, maintenant, je
comprends très bien, je n'aurais pas compris ça il y a six mois, mais
maintenant, je suis devenue une quasi-candidate à la profession, comme on dit
au Barreau, mais "réputé", ça ne marche plus avec le 35.1 parce qu'il
faut maintenir la connaissance. Donc, "réputé", ça veut dire une fois
pour toutes, irréfragable, on ne conteste plus ça. Ça, je comprends très bien
l'esprit de ça, mais c'est ce par quoi vous l'avez remplacé qui m'intrigue. Un
ordre professionnel doit, lors de... "considérer". Ça, c'est du beau
français, mais ce n'est pas l'antithèse de "réputé" qui est toujours
présumé. Alors pourquoi ce n'est pas présumé...
Mme David : ...puis
pourquoi et comment va-t-on opérationnaliser l'expression «doit considérer»?
Comment est-ce que je vous considère un jeune, un moins jeune? Est-ce que je
vous considère avec telle ou telle qualité? Dur à... C'est dur à définir. Je ne
sais pas comment les juristes définissent «considérer», mais je comprends les
critères après, là. Je comprends les critères. Elle a suivi. Bon. Mais «considérer»,
c'est au sens, doivent conclure, doivent porter un jugement.
M. Jolin-Barrette : En
fait, la différence qu'on vient introduire auparavant, avant le projet de
loi 96, c'était réputé. Donc, on est dans le cadre de la présomption irréfragable.
Ça veut dire, on ne pouvait pas repousser cette présomption-là. C'était :
Vous rentrez dans les différentes catégories 1, 2, 3... 1, 2, 3. On... En fait,
on se ferme les yeux.
Mme David : ...
M. Jolin-Barrette : Si
vous rentrez dans les catégories 1, 2, 3, on ne valide pas. On ne valide pas.
Vous remplissez un de ces critères-là. Vous ne parlez pas un mot de français,
mais on ne se pose même pas la question. Si vous ne parlez pas un mot de
français, vous remplissez ces trois critères là, un des trois critères?
Parfait. On vous donne votre permis. On n'en entend même pas parler. Là, ce
qu'on fait, c'est qu'on amène une présomption, mais réfragable. Ça veut dire
qu'elle peut être repoussée. Alors, c'est pour ça le «considérer».
Un ordre professionnel doit, lors de la
délivrance du permis, considérer qu'une personne a cette connaissance si 1, 2,
3. Ça veut dire qu'il y a une présomption. Vous avez suivi à temps plein au
moins trois années d'enseignement de niveau secondaire ou postsecondaire
dispensé en français pour entrer dans cette catégorie-là. Parfait. On présume
que vous parlez ou vous avez une connaissance appropriée de la langue
française.
Mme David : Vous le
dites vous-même, c'est le mot «présumer» que vous employez tout le temps.
Pourquoi il n'est pas là, «doit présumer que»? C'est le mot «considérer», moi,
qui m'inquiète.
M. Jolin-Barrette :
Bien, en fait, on le considère. On le considère, mais ça fait en sorte qu'on va
pouvoir quand même l'évaluer. L'ordre professionnel, désormais, va pouvoir
vérifier si oui...
Mme David : Pas au
moment où il coche. Au moment où il coche, ça, c'est irréfragable, qu'il a
réussi ses examens de français, langue maternelle de la quatrième ou de la
cinquième année du cours secondaire. Vous n'allez quand même pas refaire
l'examen de la quatrième année secondaire, là, avant d'entrer dans l'ordre. Ça,
c'est en arrière. Il coche, là. Dans mon cas, c'est un arrière. Il coche, là.
M. Jolin-Barrette : Non,
non, mais vous ne rentrez pas dans l'ordre professionnel après votre examen de
quatrième secondaire, là?
Mme David : Bien oui,
c'est peut attester à cette connaissance si elle a suivi à temps plein au moins
trois années d'enseignement de niveau secondaire ou postsecondaire dispensé en
français.
M. Jolin-Barrette :
C'est ça. C'est ça, mais entre... Supposons, là, trois...
Mme David : Il coche les
trois choses ou une des trois choses, mais vous n'allez pas aller vérifier. Ça,
c'est une de mes questions. C'est-u les trois choses additionnées? Et on
remonte à 1985, 1986, là. Vous n'étiez pas né. En tout cas, elle obtient au
Québec un certificat d'études secondaires. C'est un des trois ou les trois.
Moi, je pense, c'est un des trois. Mais vous n'allez pas aller vérifier combien
d'années à son examen de quatrième secondaire. C'est ça que je veux dire. Ça,
c'est réputé dans ce sens-là. Mais vous êtes présumé pour la suite des choses.
Ça, je le comprends qu'aux cinq ans, vous allez vérifier la... la maintenance,
j'allais dire, la... si elle a bien maintenu la qualité du français. Puis là,
si c'est non, là, on va tout rentrer dans le 35.1. Mais le «considérer» n'est
pas clair.
M. Jolin-Barrette :
Alors, pour votre question relativement, c'est ce que 1, 2, 3, c'est cumulatif
ou ce n'est pas cumulatif? On va commencer par ça. Alors, est-ce que 1, 2 3,
c'est cumulatif?
Une voix : C'est «ou».
M. Jolin-Barrette :
C'est «ou».
Mme David : Voilà! C'est
«ou».
M. Jolin-Barrette : 1,
2, 3. Donc, partons de là. Donc, 35 1 elle a suivi à temps plein au moins trois
années d'enseignement de niveau secondaire ou postsecondaire dispensé en
français. Prenez cet exemple-là. Donc, vous êtes à 1. J'ai suivi 3 ans
d'études secondaires en français, mais supposons c'est secondaire 1, 2, 3, O.K.
que j'ai suivi en français. Puis là, je me ramasse 15 ans plus tard.
Mme David : Non, je ne
veux pas qu'on se ramasse 15 ans plus tard. Je veux juste à l'admission
pour l'instant.
M. Jolin-Barrette :
Bien, c'est exactement. C'est ce que je veux dire.
Mme David : On l'admet.
M. Jolin-Barrette : Non,
non, mais laissez-les terminer mon exemple. Laissez-moi terminer mon exemple.
Secondaire 1, 2, 3 en français. Puis je décide de devenir avocat quand
j'ai 30 ans. O.K. Ça fait que, là, secondaire 3, là, quand vous
finissez ça, là, vous avez 15 ans. Oui, 15 ans. 15 ans. Je
décide de devenir avocat à 30 ans. Ça fait que, là, je fais mon bac, je
fais mon Barreau. Je suis rendu à 34. Mais là, ça fait 20 ans. Mais moi,
là, je coche, le 1, là. Avec l'ancien article, j'ai une présomption
irréfragable que j'ai une connaissance appropriée du français...
M. Jolin-Barrette :
...j'ai étudié trois ans en français, puis ça se peut que je ne parle pas un
mot de français. Alors, ce qu'on fait maintenant, c'est qu'on va venir le
considérer. On va venir dire : Bien, écoutez, si vous avez encore ces
trois années-là, on le considère, oui. Donc, c'est comme une présomption simple
pour dire : Bien, oui, on le considère, mais on peut quand même aller
vérifier si vous avez une connaissance appropriée de la langue française même
si vous rentrez dans ces critères-là. Ce que ne nous permettait pas l'article
précédent. Si vous aviez 3 ans d'études secondaires en français, là, bien,
l'ordre professionnel ne se posait même pas question : Est-ce qu'il est
apte à communiquer avec le public spécifiquement en français? C'était...
Mme David : Mais là
c'est majeur, là, ce que vous m'expliquez là. En tout cas, je ne sais pas pour
les autres, là, peut-être je suis la seule à m'intéresser aux détails de tout
ça. Mais ça veut dire qu'au moment où il répond, dans le ou, à 1, à 2 ou à 3,
dans votre exemple, il répond à 1, je pensais qu'automatiquement il était admis
à l'ordre, sous réserve de 35 heures qu'il doit avoir maintenues. Mais le
maintenu, pour moi, n'était pas contemporain de l'admission. C'est on va... Là,
ce que vous dites, c'est : On va l'admettre... On ne l'admettra pas, on va
dire : O.K., il a répondu à numéro 1. Maintenant, je peux... Puis là
ça va tout être à installer, ce système, de dire : Peut-être que tu vas
devoir quand même passer un examen de l'office tout de suite, de l'OQLF, tout
de suite, parce que... Mais comment faire pour savoir, avant même qu'il soit
entré à l'ordre, s'il répond à une des trois conditions? On fait quoi? On y
jase puis on trouve qu'il baragouine? L'autre, on trouve qu'il baragouine
moins?
M. Jolin-Barrette : Non,
mais l'ordre va pouvoir avoir recours à une évaluation de français, comme ça se
fait pour des candidats qui souhaitent soit accéder à la profession, donc
d'avoir une connaissance suffisante de la langue française pour pouvoir exercer
sa profession. Prenons un autre cas d'exemple, là, en vertu de 1, là. Je suis
en Colombie-Britannique, O.K. Je fais trois ans d'études, au secondaire, en
français dans un établissement britanno-colombien. J'arrive...
Mme David : Bien, tous
ceux qui font de l'immersion, puis il y en a des centaines de milliers.
M. Jolin-Barrette : Oui,
mais j'arrive 15 ans plus tard, là, au Québec, là. Je n'ai pas retouché au
français depuis le secondaire III, là. Là, actuellement, là, on avait une
présomption, en vertu de paragraphe 1, que vous avez une présomption
irréfragable, que vous avez une connaissance appropriée de la langue française.
On ne se posait pas de question.
Mme David : Mais ça ne
marche pas. Excusez, là, en tout respect, ça ne marche pas. Je dis ça là, c'est
un, ou deux, ou trois, comme Dr Poirier a dit. Puis, après ça, il est
marqué : Dans les autres cas, donc qui sont ni un, ni deux, ni trois, une
personne doit obtenir une attestation. Ça, ça veut dire la personne qui ne
répond pas à ni 1, ni 2, ni 3. Ce que je comprends, c'est que, même comme
candidat à l'exercice de la profession, on parle... Parce qu'après ça, le
35 heures, ça va être l'inspection professionnelle qui va faire ça. Et là
il ne parle pas d'inspection professionnelle, il n'est même pas entré encore dans
la profession.
M. Jolin-Barrette :
...pour pouvoir rentrer dans un ordre professionnel, vous devez avoir une
connaissance appropriée du français.
Mme David : Oui. Mais,
en ce moment, là, je les connais, les examens de l'Office, l'OQLF, qui ont un
peu amélioré les choses, parce que, là, c'est un peu plus ciblé sur profession
par profession. D'ailleurs, on a travaillé très fort pour avoir... être sûr que
le candidat maîtrise au moins le vocabulaire lié à sa profession. Mais ça,
c'est quand ils ne répondent pas à ni un, ni deux, ni trois.
• (12 h 30) •
M. Jolin-Barrette : Mais
là, ils vont...
Mme David : Mais là ils
répondent à un, ou à deux, ou à trois.
M. Jolin-Barrette : Oui.
Sauf qu'on donne le pouvoir à l'ordre de valider qu'ils ont une compétence
adéquate du français.
Mme David : Donc, ce
n'est pas dans les autres cas qu'il faut dire, c'est dans tous les cas,
quasiment, où l'ordre a une...
M. Jolin-Barrette : En
fait, dans les autres cas, là, il n'y a pas de présomption pour les autres cas.
Exemple, là, si vous n'êtes pas dans un, deux, trois, là, là, à ce moment-là,
vous allez passer l'évaluation de l'office.
Mme David : Les examens
de l'office. Ils n'ont jamais étudié en français, ils ont... etc. Ça, je
comprends. Puis ça, ça ne change pas grand-chose à ce qui existe actuellement.
La Présidente
(Mme Thériault) : Je dois suspendre les travaux compte tenu de
l'heure. Donc, vous pourrez poursuivre cette agréable discussion après la
période des affaires courantes et la période de questions. Donc, bon appétit,
tout le monde.
Les travaux sont suspendus.
(Suspension de la séance à 12 h 31)
15 h (version non révisée)
(Reprise à 15 h 27)
La Présidente (Mme Thériault) :
À l'ordre, s'il vous plaît. Donc, la Commission de la culture et de l'éducation
reprend ses travaux. Nous poursuivons l'étude détaillée du projet de loi no 96,
Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français. Lors de la
suspension de nos travaux ce midi, nous en étions à l'étude de l'article 22.
Donc... Et la députée de Marguerite-Bourgeoys, la parole est à vous.
Mme David : On était à
quelques interrogations, je pense, qu'avait le ministre, soit avec lui-même ou
avec son équipe, ce qui est un bon signe par rapport à la clarté, peut-être,
qu'il va falloir apporter sur ces trois conditions-là.
Donc, moi, j'avais une question sur
pourquoi pas présumer et dire à la place «doit considérer». Je trouvais que ce
n'était pas une façon très juridique de dire les choses. Et je ne suis pas la
seule personne parce que des ordres professionnels se posent la même question.
Et, après ça, bien, les trois conditions, c'est du «ou». Une fois qu'on nous
dit «ou», je vais vous citer les CPA, qui disent quelque chose de très
intéressant, je lis leur paragraphe : «Toutefois, malgré la modification
apportée à la présomption de la maîtrise de la langue, on est encore dans le
mot présomption, le libellé proposé de l'article 35 précise toujours qu'un
ordre professionnel doit émettre le permis au candidat qui répond à l'un des
paramètres. Il apparaît...» Donc, eux ont bien lu que c'était «ou» puisqu'ils
disent «qui répond à l'un des paramètres». «Il apparaît important que le
législateur précise son intention à cet égard. Si un ordre professionnel a des
doutes quant à la qualité de maîtrise de la langue française d'un candidat,
pourra-t-il exiger que ce dernier se soumette à un test administré par l'OQLF
avant d'émettre le permis?» Je pense ça ne peut pas dire mieux les questions
que je me posais et que je n'avais pas réalisé que le CPA se posait à peu près
dans les mêmes termes. Nos esprits se sont rencontrés.
M. Jolin-Barrette : Je
constate, madame la présidente, qu'ils ont beaucoup de questions, l'ordre des
CPA.
Mme David : Oui, mais
celle-là a été écrite, puis je ne l'avais pas...
M. Jolin-Barrette : Alors,
Mme la Présidente, en réponse à la question, dans le fond, lorsqu'on est dans
les situations 1, 2, 3, l'ordre va accorder, dans le fond, le permis
d'exercice. Dans l'éventualité où il constaterait que la maîtrise de la langue
française n'est pas présente, bien là, on tombe dans l'article suivant, à
l'article 35, 1. Donc, la personne qui se retrouverait à remplir un des
trois critères 1, 2, 3, 1, 2 ou 3...
Mme David : 1, ou 2, ou
3.
• (15 h 30) •
M. Jolin-Barrette : 1,
ou 2, ou 3, à ce moment-là, son permis lui est donné... En fait, cette
connaissance appropriée là va être considérée, en vertu de 1, ou 2, ou 3, donc
le permis va être accordé. Donc, si vous remplissez le critère d'elle a suivi à
temps plein au moins trois années d'enseignement au niveau secondaire ou
postsecondaire dispensé en français, l'ordre professionnel dit : Ah! vous
rentrez dans cette case-là, parfait, je peux vous émettre votre permis de
pratique professionnelle. Ça va. Mais, si, par ailleurs, suite à ça, l'ordre
professionnel se rend compte que le membre professionnel n'a pas une
connaissance appropriée du français, là on tombe dans 35, 1.
Mme David : Extrêmement
intéressant, la réponse du ministre, parce que, moi, ça correspond après que...
15 h 30 (version non révisée)
Mme David : ...que votre cher
docteur Poirier a répondu que c'était où, c'est exactement ce que je pensais,
c'est vraiment comme ça que je lisais des choses. Et puis que dans les autres
cas, donc les autres cas, ce sont ceux où ça ne coche, ni un, ni deux, ni
trois. Là, c'est le cas un peu classique, là, de... qu'on connaît depuis
toujours, là, d'aller passer l'examen de l'OQLF. Ça va poser une question fort
intéressante, à 35.1, c'est tu as... je sais pas, moi, dans l'ordre auquel
j'appartenais, il y avait 10.000, disons 10 000 membres. Alors dans
les 10.000, il y a un calendrier d'inspections professionnelles, il y a tant à
tous les ans, puis là on discutera de la façon dont les ordres vont devoir
assumer, si tant est que c'est eux qui doivent assumer. Alors là, il y a quand
même quelques petites questions qui vont se poser. Si c'est eux, bien, comment
ils vont évaluer cette fameuse maîtrise du français? Quels outils l'OQLF va
leur donner? Etc.
Mais ça se peut très bien que... bon, on
évaluera la qualité du français de ce nouveau membre qui a répondu à 1 ou 2 ou
3 quand il arrivera en inspection professionnelle. Ça, c'est un trajet
possible. L'autre trajet possible, c'est quelqu'un, un client porte plainte...
ou disent : Je n'ai pas eu le service en français auquel je pensais... que
je pensais recevoir, ou quelque chose comme ça, je n'ai pas eu l'impression
d'être compris. Enfin, le mécanisme, j'imagine, habituel de plainte. Alors, est-ce
que je comprends bien le cheminement d'un nouveau professionnel dans un ordre?
Ça sera après, soit par une plainte, soit par le mécanisme habituel
d'inspection dont on parlera 35.1, c'est sûr, parce que, là, on joue peut être
dans toute la question qui est très régie aussi des inspections
professionnelles, qui procèdent chacun de leur façon, mais qui ne sont pas toutes
aussi gros les uns que les autres. Et on verra comment ça va se passer à ce
moment-là. Est ce que j'ai... tout ça est à peu près correct, ce que j'ai dit
en rapport avec...
M. Jolin-Barrette : Tout est
à peu près correct. Ça veut dire que le projet de loi, il est clair.
Mme David : Il est tellement
clair qu'il a fallu que vous posiez pas mal de questions pour me répondre aussi
clairement.
M. Jolin-Barrette : Mais effectivement,
dans le fond, c'est le cheminement dont vous avez exprimé.
Mme David : O.K. Alors, ça
va, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Thériault) : Ça
va. Si je n'ai pas d'autre intervention sur l'article 22, est que
l'article 22 est adopté? Adopté. M. le ministre, l'article 23 qui
introduit deux articles. Allez-y.
M. Jolin-Barrette : Oui, et
j'aurais un amendement, Mme la Présidente, à l'article 23.
La Présidente (Mme Thériault) : Ah!
oui, vous avez un amendement à 35.1. La députée de Marguerite-Bourgeoys, aussi,
en a un et vous avez préséance. Donc, il n'y a pas de problème.
M. Jolin-Barrette : Alors,
article 23 : Cette charte est modifiée par l'insertion après
l'article 35 des suivants : 35.1 : Le titulaire d'un permis
délivré conformément à l'article 35 doit, tant qu'il le détient, maintenir
une connaissance de la langue officielle appropriée à l'exercice de la
profession. Il ne peut, dans l'exercice de ses activités professionnelles,
refuser de fournir une prestation, pour le seul motif qu'on lui demande
d'utiliser la langue officielle dans l'exécution de cette prestation.
35.2 : L'ordre professionnel qui,
pour des motifs sérieux, considère qu'un de ses membres n'a pas de la langue
officielle une connaissance appropriée à l'exercice de la profession, peut,
outre des mesures qui peuvent être prises à l'égard de celui-ci en vertu du
Code des professions, exiger qu'il obtienne l'attestation délivrée par l'Office
en vertu du troisième alinéa de l'article 35. De plus, les cours de
perfectionnement qu'un membre d'un ordre professionnel peut être obligé de
suivre avec succès, ainsi que toute autre obligation déterminée dans un
règlement pris en vertu de l'article 90 de ce code qui peut lui être
imposée, peuvent avoir pour objet de permettre à un tel membre de recouvrer de
la langue officielle une connaissance appropriée à l'exercice de la profession.
Alors...
La Présidente (Mme Thériault) : 25.1,
pour commencer, avec le commentaire.
M. Jolin-Barrette : Oui,
alors, 35.1, pour le commentaire. L'article 35.1 de la Charte de la langue
française, proposé par l'article 23 du projet de loi, prévoit que les
membres des ordres professionnels qui ont obtenu un permis d'exercice
conformément à l'article 35 de cette charte, devront, parmi leurs
compétences professionnelles, maintenir une connaissance de la langue
officielle appropriée à l'exercice de la profession. Il prévoit également que
les membres des ordres professionnels ne pourront pas, dans l'exercice de leur
activité professionnelle, refuser de fournir une prestation pour le seul motif
qu'on leur demande d'utiliser le français dans l'exécution de cette prestation.
Et pour le commentaire à 35.2, madame la Présidente...
La Présidente (Mme Thériault) : On
les traite séparément, M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Ah! O.K.,
d'accord.
La Présidente (Mme Thériault) : On
fait 35.1. Après ça, on passera à 35.2.
M. Jolin-Barrette : Parfait.
La Présidente (Mme Thériault) :
Vous avez un amendement à 35.1. C'est ça?
M. Jolin-Barrette : Oui,
exactement. Donc...
La Présidente (Mme Thériault) : Allez
avec l'amendement.
M. Jolin-Barrette : Article 23
L article 35.1 de la Charte de la langue française. À l'article 23 du
projet de loi, ajouter, à la fin du deuxième alinéa de l'article 35.1 de
la charte de la langue française qu'il propose, la phrase suivante : Il
est fait exception à cette règle lorsque ces activités professionnelles
reposent par nature sur l'utilisation...
M. Jolin-Barrette :
...d'une autre langue que le français. En ce cas, le titulaire d'un permis
délivré conformément à l'article 35 ne peut toutefois refuser de fournir
une prestation pour le seul motif qu'on lui demande d'utiliser la langue
officielle dans sa relation professionnelle avec la personne qui fait appel à
ses services.
Commentaire. Cet amendement propose de
préciser la portée de l'article 35.1 dans les cas où l'utilisation d'une
autre langue que le français est une composante inhérente des activités
professionnelles d'une profession, telle que celle du traducteur agréé qui
traduit des écrits du mandarin en anglais. En un tel cas, puisque le
professionnel est reconnu à ce titre pour ses compétences qui reposent sur
l'utilisation d'une autre langue que le français, il doit être en mesure de
refuser un mandat devant être exécuté en français puisque ce mandat est
étranger à sa compétence. Cependant, même en un tel cas, le professionnel ne
peut refuser de fournir une prestation si on lui demande d'utiliser la langue
officielle dans ses relations professionnelles avec son client.
La Présidente
(Mme Thériault) : Questions, commentaires? Madame la députée de
Marguerite-Bourgeoys. Sur 35.1. Sur l'amendement, pardon, déposé par le
ministre.
Mme David : Là, on est
sur l'amendement, parce que...
La Présidente
(Mme Thériault) : Oui, on est sur l'amendement déposé par le
ministre.
Mme David : On va les
prendre une par une, parce que, ça, il y a plusieurs petites bombes dans ce
35.1, il y a au moins trois sujets différents. Le premier, je pense le ministre
a été sensible à la question des activités professionnelles qui reposent par
nature sur l'utilisation d'une autre langue que le français. On avait un
amendement qui ressemble à ça qui aurait été : «sauf dans les cas où la
langue est l'objet thérapeutique de la prestation de services». Peut-être que
ça vient... aussi, alors, objet thérapeutique, vous, vous donnez l'exemple des
traducteurs, on ne parlera pas de thérapie. Donc, vous incluez... Alors, vous
dites : «lorsque les activités professionnelles reposent par nature».
Alors, je pense que ça veut dire la même chose, là. Et donc sur l'utilisation
de...
Puis là vous prenez l'exemple des
traducteurs agréés, qui est un exemple intéressant. Moi, j'ai l'exemple des
orthophonistes, évidemment, qui nous ont beaucoup, beaucoup... qui ont dû aussi
vous sensibiliser à leur situation, quand l'orthophonie, c'est les problèmes de
langue par nature, et donc très difficile de traiter la langue quand quelqu'un
ne possède pas la langue. Alors, je voulais juste être sûre. Et j'étais un
petit peu étonnée que vous alliez vers les traducteurs et non pas les
orthophonistes, parce qu'ils ont tellement été inquiets que, là, on va le dire
en ondes, puisque ce n'est pas dit par écrit, mais je pense et je conclus, moi,
que ça inclut aussi ce genre de situation qui repose par nature sur
l'utilisation d'une autre langue. Et donc, cette partie-là, je vais vous
demander de les rassurer. Puis on n'a peut-être pas pensé à tous les cas de
figure, là, mais...
M. Jolin-Barrette :
Bien, Mme la Présidente, je peux les rassurer. Ça couvre les orthophonistes, ça
couvre les audiologistes également, les traducteurs, interprètes. Alors,
l'amendement va permettre de répondre à leurs préoccupations.
Mme David : Donc, tous
ceux qui lisent ça et qui... ça pourrait être contesté, peut-être, là, que leur
nature n'est pas la bonne, mais tous les autres professionnels qui peuvent
répondre à l'affirmation «lorsque leur activité professionnelle repose par
nature sur l'utilisation d'une autre langue que le français». C'est le mot «par
nature». Là, vous êtes juriste, probablement que ça veut dire quelque chose.
M. Jolin-Barrette :
Bien, en fait, c'est parce que c'est la nature des fonctions qu'il va exercer
son rôle professionnel. Donc, nécessairement, si l'orthophoniste, c'est pour donner
des... dans le fond, améliorer la compétence langagière avec les exercices,
tout ça, puis ça se fait en langue anglaise, bien entendu que c'est la nature
même de son travail d'utiliser une autre langue.
Mme David :
L'audiologiste, la même chose, s'il ne parle pas la... c'est dur de traiter des
problèmes d'audition si... Mais je ne veux pas émettre d'idée, peut-être, d'une
version plus étendue de cette nature-là. Mais est-ce qu'il y a plusieurs ordres
professionnels qui pourraient dire que, par nature, il faut qu'ils utilisent
une autre langue, je pense aux CPA, justement, parce qu'ils travaillent avec
des entreprises anglophones? Parce que...
• (15 h 40) •
M. Jolin-Barrette : Non,
je vous dirais non. À la limite, j'accepterais l'argument que nous, on parle le
langage des chiffres. Mais je ne pense pas que c'est une langue...
Mme David : Ah! je
n'avais pas pensé à ça, oui. Parce que c'est peut-être les tribunaux qui auront
à voir si certains ont exagéré sur la définition ou pas. C'est pour ça je vous
fais parler un peu de la définition. Je comprends, moi, l'esprit de ça, là, je
comprends bien l'esprit de ça.
M. Jolin-Barrette :
Alors, soyons très clairs, là, pour le bénéfice si jamais la disposition se
retrouvait dans une salle de cours et que nos débats parlementaires étaient
cités. Alors, la nature de la fonction repose sur l'utilisation d'une autre
langue. Ça signifie que c'est nécessaire de...
M. Jolin-Barrette : ...la
nature même, donc l'orthophoniste, l'audiologiste, le traducteur qui traduit un
texte du russe à l'anglais, supposons, ou de l'anglais au russe. Donc,
nécessairement, on comprend que par la nature même de ses compétences, ce pour
quoi il exerce sa profession, il n'a pas recours à l'utilisation de la langue
française.
Mme David : Moi, je
pense que... Je comprends.
M. Jolin-Barrette :
Donc, c'est intrinsèquement rattaché au geste, là, à l'activité.
Mme David : Oui. Et
quand vous dites, il doit être en mesure, c'est la phrase d'après qui m'embête,
parce que, là, on est dans la subtilité des relations professionnelles. Donc,
prenons l'exemple... Vous dites : Le professionnel ne peut refuser de
fournir une prestation si on lui demande d'utiliser la langue officielle dans ses
relations professionnelles. Alors, là, on sort de l'activité professionnelle
qui repose par nature sur... Il faut lire attentivement. On parle de relation
professionnelle.
Alors, je donne l'exemple, peut-être que
je réponds à votre place, là, mais une maman d'un enfant qui a besoin d'un
orthophoniste, qui parle avec une orthophoniste, mais qui veut s'exprimer en
français pour dire : Ma fille a besoin d'aide. Peut-être que l'exemple ne
tient pas la route parce que si sa fille a besoin d'aide en anglais, c'est
peut-être parce que la mère est anglophone, mais tout d'un coup qu'elle n'est
pas anglophone, c'est le père qui est anglophone.
M. Jolin-Barrette :
Exactement.
Mme David : Bon. Je lis
dans vos pensées. Donc, la mère parle... Et c'est... Est-ce que c'est ça que ça
veut dire? Là, on est dans plus la relation professionnelle qui n'est pas
l'acte réservé professionnel.
M. Jolin-Barrette :
Exactement. On est dans le cadre de la relation du mandat. Dans le fond, je
vous mandate pour...
Mme David : Traiter ma
fille.
M. Jolin-Barrette :
...faire ce travail-là. Bien, le professionnel doit être en mesure de
communiquer avec moi en français, même si la nature de l'activité professionnelle
commande qu'il ne le fasse pas en français. Exemple...
Mme David : Le
traducteur.
M. Jolin-Barrette :
C'est un traducteur puis lui, le traducteur, il fait de l'arabe au mandarin,
supposons. Je le mandate pour ça. Je ne le mandate pas pour traduire du
mandarin en français, parce que ce n'est pas dans son champ de compétence,
supposons. Mais par contre, quand je vais aller le voir pour dire :
Monsieur ou madame la traducteur/traductrice, je voudrais que vous me traduisiez
ça de l'arabe au mandarin. Parfait. Il va falloir qu'il puisse me servir en
français. Il va falloir qu'il puisse m'envoyer ma facture en français. C''est
ça la relation professionnelle.
Mme David : O.K. Tout ce
qui entoure l'acte réservé.
M. Jolin-Barrette :
Exactement.
Mme David : O.K. O.K.
Cette partie-là est claire.
M. Jolin-Barrette :
Donc, je pense que, Mme la Présidente, on peut penser à l'adoption de
l'amendement. Donc, est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'amendement.
Je n'en vois pas.
La Présidente
(Mme Thériault) : Excusez-moi. Donc, s'il n'y a pas d'autre
interprétation...
M. Jolin-Barrette :
C'est ça. On peut voter sur l'amendement.
La Présidente
(Mme Thériault) : On peut voter sur l'amendement.
Mme David : Il peut
faire tous les métiers, je vous dis.
La Présidente
(Mme Thériault) : Oui, définitivement. Désolée.
M. Jolin-Barrette :
Savez-vous, je n'ai jamais eu l'occasion de présider une commission
parlementaire.
La Présidente
(Mme Thériault) : Ah! Bien, c'est un peu plus compliqué que
qu'est-ce qu'on le pense. Et j'étais en discussion avec le député de Beauce
pour qu'il puisse assumer la suite des travaux à un certain moment donné
aujourd'hui. Donc, c'est pour ça que je n'étais pas très attentive. Désolée.
M. Jolin-Barrette : Et
je sais qu'il est capable, Mme la Présidente.
La Présidente
(Mme Thériault) : Il est plus que capable. C'est pour ça que je
me suis tourné vers lui pour pouvoir être capable de faire en sorte que la
commission se déroule bien.
M. Jolin-Barrette : Sans
rien lui enlever, il n'a pas votre expérience.
La Présidente (Mme Thériault) :
Non, mais il a une... Mais il a une capacité d'apprentissage qui est inouïe.
Donc, sur ce, est-ce que l'amendement déposé par le ministre est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente
(Mme Thériault) : Adopté. Est-ce que madame la députée de
Marguerite-Bourgeoys, vous désirez toujours présenter votre amendement que vous
aviez à ce même article-là? Ça va?
Mme David : Bien, on va
parler un peu avant, O.K.?
La Présidente
(Mme Thériault) : Pardon?
Mme David : On peut-u
jaser avant un peu?
La Présidente
(Mme Thériault) : Oui, absolument. Vous revenez sur l'article.
Donc, il n'y a pas de problème pour revenir sur l'article. Puis si vous voulez
déposer votre amendement, vous avez le droit.
Mme David : Oui parce
que là, on va aller au deuxième paragraphe, le deuxième paragraphe de 35.1. On
peut toucher ça, madame la présidente. On est toujours dans le 35.1, là. Il y a
deux alinéas.
La Présidente
(Mme Thériault) : Oui. 35.1.
Mme David : Alors, il ne
peut, dans l'exercice de ses activités professionnelles, refuser de fournir une
prestation pour le seul motif qu'on lui demande d'utiliser la langue officielle
dans l'exécution de cette prestation. Je me serais peut-être attendu à un
amendement, là aussi, parce que ça, ça a fait beaucoup couler... couler
beaucoup d'encre. Parce que là arrive une confrontation énorme entre le Code
des professions, le Code de déontologie et l'exigence, bon, de parler français
et qu'il ne peut pas refuser un mandat...
Mme David : Alors, évidemment
que tout ce qui est ordre professionnel qui a déposé des mémoires disent...
carrément, il y en a qui disent : Retirez-nous ça, ce paragraphe-là, ça
n'a pas bon sens. Les médecins, les comptables, les architectes, les notaires,
alors ils disent : Mais comment, quand on sait que le mandat, avec un M
majuscule, la mission d'un ordre professionnel, c'est la protection du public
et que, dans le code de déontologie, il est marqué vraiment, dans le Code de déontologie
des CPA, je le cite parce que c'est lui, là, que j'ai ici :
«Dans toutes les circonstances, que ce
soit envers le public, un client ou un employeur, le membre doit, avant de
convenir d'un contrat résultant de l'exercice de la profession, tenir compte
des limites de ses aptitudes, de ses connaissances ainsi que des moyens dont il
dispose. Il ne doit pas, notamment, entreprendre des travaux pour lesquels il
n'est pas suffisamment préparé ou n'a pas les aptitudes ou les connaissances
requises sans obtenir l'assistance nécessaire. Dans toutes les circonstances,
que ce soit envers le public, un client ou un employeur, le membre doit, avant
de convenir d'un contrat résultant d'exercice de la profession, tenir compte
des limites de ses aptitudes, de ses connaissances ainsi que des moyens dont il
dispose. Il ne doit pas, notamment, entreprendre des travaux pour lesquels il
n'est pas suffisamment préparé ou n'a pas les aptitudes ou les connaissances
requises sans obtenir l'assistance nécessaire.
«Il en va de la protection du public de
permettre un professionnel de refuser un mandat s'il considère, pour quelque
raison que ce soit, qu'il ne pourra offrir un service de haute qualité.
«Par ailleurs, il importe de préciser que
l'article 24 du Code de déontologie prévoit ce qui suit :
"Si l'intérêt du client l'exige, il
doit, sur autorisation de ce dernier, consulter un autre membre, un autre
professionnel ou une personne compétente, ou le diriger vers l'une de ces
personnes."
«Conséquemment, les membres ont une
obligation de référence qui est expressément prévue par leur code de
déontologie et qui trouverait application dans un contexte où leurs compétences
ne leur permettraient pas d'entreprendre un mandat donné dans la langue
officielle.
«Le professionnel sera alors tenu de
référer son client à un autre professionnel pleinement compétent pour exécuter
le mandat dans la langue demandée.
«Nous sommes d'avis que la nouvelle
interdiction prévue par l'article 35.1 et l'acte dérogatoire», dont on sait
que... vous avez annoncé que ça serait changé, probablement, dans le Code des
professions qui «en découle, bien que reposant sur de nobles intentions,
constitue le plus gros enjeu de protection du public que soulève le projet de
loi», ce n'est pas rien, là, c'est le plus gros enjeu de protection du public,
«dans la mesure où celui-ci met en opposition deux obligations d'ordre public
que devrait désormais respecter un professionnel, soit celle de respecter les
limites de ses compétences et l'interdiction de refuser d'exécuter une
prestation de service en français.
«Conséquemment, nous demandons le retrait
du deuxième alinéa de l'article 35.1 tel que proposé.»
Ça, c'est l'Ordre des comptables. Alors,
je peux continuer. Ils sont tous de la même, de la même teneur. On pourrait
dire, parce que chacun y va de sa façon d'expliquer la même chose. On ne pourra
jamais faire cohabiter 35. et le code de déontologie parce que ça ne peut pas
fonctionner ensemble, c'est vraiment beaucoup trop... Ils disent, la Chambre
des notaires disent la même chose, ils sont très inquiets de l'acte
dérogatoire, d'une part, mais, d'autre part, de ne pas être capable de faire ce
qu'il faut pour être capable de remplir le mandat puis d'être obligé... est
obligé d'accepter tous les mandats.
• (15 h 50) •
Donc, moi, je me demandais vraiment, là,
comment on pourrait faire pour concilier le Collège des médecins. Il y a des
lettres de médecins qui nous ont été envoyées en disant : On ne pourra
jamais faire ça, ça n'a pas de bon sens, on ne peut pas accepter des mandats
pour lesquels on n'a pas la compétence parce que ça exige une compétence
langagière. Alors, je vous avoue, je suis un peu embêtée. Je conçois que vous
nous avez avertis qu'à l'article 142 je crois, quand ça touche le code de
déontologie, ça va être un peu moins, bien, sévère. Ça ne peut pas être plus
sévère que ce que vous proposez. L'acte dérogatoire, c'est comme la
condamnation de la peine criminelle la plus importante. Donc, il faut absolument
ramener ça à de plus justes proportions. Mais comment vous pensez être capable
de concilier protection du public, Code de déontologie et votre deuxième
paragraphe qui est de «il ne peut pas refuser de fournir une prestation pour le
seul motif qu'on lui demande d'utiliser la langue officielle...
Mme David : ...l'exécution de
cette prestation. Alors, c'est comme de dire : Je n'ai pas le droit de
refuser en disant : Bien, écoutez, je ne parle pas assez français pour
faire une plaidoirie pour votre cause, pour faire un acte en français de... je
ne sais pas, ou pour être... pour vous représenter comme comptable, pour être
votre médecin dans telle ou telle chose. J'essaie de comprendre ce qui vous a
amené à ça et quelle est la valeur ajoutée dans la question de la langue
française au Québec.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Bien,
discutons de ça, parce qu'on avait donné des exemples de comptables, de
médecins, d'avocats. Ça veut dire, là, avec cette prémisse là, là, c'est qu'au
Québec, on a des médecins qui ne sont pas capables de parler en français aux
patients, aux citoyens québécois. Dans le fond, là, la crainte des ordres
professionnels, là, c'est ça, là. Dans le fond, depuis 1977, là, le professionnel
au Québec est supposé avoir une connaissance appropriée de la langue française
pour servir le public. Là, dans les exemples que la députée de Marguerite
Bourgeoys me donne, le cas d'un médecin. Ça veut dire que cette thèse-là est
accréditée, ça veut dire qu'on a des médecins qui ne sont pas aptes à
renseigner adéquatement un patient en français au Québec.
Mme David : ...d'un médecin.
Il y a des médecins qui sont en contact relationnel beaucoup plus subtil que ce
que vous décrivez, là. Je pense à des psychiatres, je pense à des années des
médecins qui accompagnent, même des médecins de famille qui accompagnent des
patients dans des dépressions, dans des ci, dans des ça, ça peut être... Puis
l'exemple du médecin, bon, il y a tout l'article 15 de la loi santé,
services sociaux. Je pense qu'on ne devrait même pas prendre l'exemple des
médecins, il faudrait prendre plus l'exemple des comptables ou des notaires,
par exemple.
M. Jolin-Barrette : C'est
vous qui l'avez donné...
Mme David : Je le sais.
M. Jolin-Barrette : ...l'exemple
des médecins que je sais. Moi, là, j'arrive, là, avec un médecin, là...
Mme David : Je vous ramène au
comptable.
M. Jolin-Barrette : Mais
vidons la question des médecins en premier, là.
Mme David : Oui, mais il y a
l'article 15 de la LSSS.
M. Jolin-Barrette : Oui, mais
l'article 15 de la LSSS est en faveur du citoyen.
Mme David : Oui.
M. Jolin-Barrette : Il est
faveur du citoyen. Le citoyen, lui, il va se faire servir, en vertu de
l'article 15, en français ou en anglais. L'enjeu que je pose, c'est de
dire : Dans le fond, on a, selon votre propos, des médecins qui ne
seraient pas capables de se conformer à traiter un patient dans la langue officielle,
en français.
Mme David : Bien, c'est parce
que votre conception est très simpliste de ce qu'est un acte médical, là. C'est
compliqué, la médecine. Il y en a qui sont de la médecine de relation
thérapeutique. C'est le geste le plus posé par des médecins de famille. C'est
le geste le plus facturé, les questions de santé mentale. Bien, les questions
de santé mentale, je suis d'accord avec vous qu'ils sont obligés d'avoir une
connaissance minimale, mais là on pose un geste professionnel.
M. Jolin-Barrette : Ce n'est
pas une connaissance minimale. Depuis 1977, tous les professionnels au Québec
sont supposés d'avoir une connaissance appropriée la langue française,
notamment à l'égard de leur fonction. Ça, ça signifie que, si vous êtes un psychiatre,
là, ou si vous êtes un médecin de famille, là, au Québec, vous devez être en
mesure de fournir, en français, un service au citoyen, à la personne qui se
présente dans votre bureau, là. Quand vous faites du sans rendez-vous, là,
supposons vous êtes un médecin de famille, là, vous ne savez pour qui qui va se
présenter. Est ce qu'on veut, au Québec, de dire : Le médecin n'a pas une
compétence langagière appropriée pour soigner un francophone?
Moi, honnêtement, on en a discuté tantôt,
là, on l'a dit très clairement, le fait d'être membre d'un ordre professionnel,
c'est un privilège, hein, ce n'est pas un droit. Alors, on a décidé, en 1977,
qu'il fallait avoir un niveau approprié pour permettre d'exercer la profession
en français. Puis là vous avez 46 ordres professionnels, puis 50 quelque
profession. Ça fait que, là, c'est comme si on viendrait cautionner le fait de
dire : Bien, c'est correct de ne pas avoir une connaissance appropriée de
la langue française dans l'exercice du métier. Puis on s'entend, on ne demande
pas à un médecin d'utiliser des termes d'ingénierie, là, on ne demande pas à un
comptable de parler comme un avocat. Mais par contre, dans leur champ
d'expertise de la connaissance appropriée, c'est le coeur même des pouvoirs que
l'État vient leur confier, les actes réservés. Lorsqu'une personne, au Québec,
décide d'aller consulter un professionnel, ce professionnel-là doit être en
mesure de pouvoir le servir dans la langue officielle...
M. Jolin-Barrette : ...puis
tout le régime est basé là-dessus, sur le fait qu'il doit avoir une
connaissance appropriée de la langue officielle en fonction de l'exercice de sa
profession. Et là, ce qu'on vient formaliser, c'est qu'on vient dire :
Bien, écoutez, vous devez maintenir des compétences en matière de langue
française tout au long de l'exercice de votre vie professionnelle. Ça fait
partie de vos obligations déontologiques d'avoir cette compétence-là. C'est
aussi important, cette compétence langagière là qu'une compétence technique
parce que l'objectif d'un ordre professionnel, c'est de protéger le public.
Mme David : Est-ce que le
public est bien servi si l'avocat doit faire une plaidoirie, qui est une
question quasiment de vie ou de mort, pour son client, et que l'avocat ne maîtrise
tellement pas suffisamment le français qu'il n'est pas très convaincant devant
un jury, par exemple.
M. Jolin-Barrette : Alors là,
vous m'amenez un article intéressant, parce qu'en vertu de l'article 133
de la Loi constitutionnelle de 1867, l'avocat n'a pas à plaider en français. Il
va pouvoir le faire en anglais.
Mme David : Alors, on va
prendre un exemple d'un psychologue. Un psychologue qui se fait demander par un
patient anglophone : Voulez-vous me suivre? Bon, il va peut être dire oui,
parce que... mais si la personne ne se sent pas suffisamment à l'aise, je ne
suis pas sûre qu'à moins qu'elle manque beaucoup de patients, puis qu'elle
accepte tous les patients qui se présentent, je ne suis pas sûre qu'elle va
rendre le meilleur service possible à son patient parce que ça va dans les
grandes subtilités, là, de... passer quatre ans, deux fois par semaine avec
quelqu'un qui vous raconte vraiment des choses, puis qui est dans un état
mental très perturbé, disons, ce n'est pas évident quand on ne possède pas la
langue. Est-ce que vous allez me dire que, dans ce cas là, la nature de l'acte
pourrait permettre d'utiliser une langue autre parce qu'on est santé mentale,
donc on est santé? Peut-être que vous allez me répondre qu'il y a une porte de
sortie pour un geste thérapeutique à moyen ou à long terme avec un patient.
M. Jolin-Barrette : On a
voté, dans les droits fondamentaux, plus tôt, là, dans le projet de loi, au
début du projet de loi : Toute personne a le droit que communique en
français avec elle, l'administration, les services de santé et services
sociaux, les autres prestataires d'un service régi par la Loi sur les services
de santé et les services sociaux, les entreprises d'utilité publique, les
ordres professionnels, leurs membres titulaires d'un permis délivré
conformément à l'article 35. Ça, on est venu enchâsser ça comme droit
fondamental dans le projet de loi 96.
Il m'apparaît tout à fait raisonnable que
lorsqu'on est un professionnel au Québec, on puisse s'adresser, on puisse
offrir les services en français à tout citoyen québécois. Parce que si on ne le
fait pas, ça signifie, dans le fond, qu'on tasse la Charte de la langue
française. On dit : Bien, ce n'est pas grave. Ce n'est pas grave que vous
ne donniez pas vos services... Dans le fond, la connaissance appropriée de la
langue, qu'est ce que ça signifie? C'est une des...
Mme David : ...
M. Jolin-Barrette : ...mais
c'est une des exigences fondamentales qui doit être au coeur de la Charte de la
langue française. Dans le cadre du système professionnel, là, c'est indiqué que
tout au long de leur parcours de vie professionnelle, ils doivent avoir une
maîtrise appropriée de la langue française à l'exercice de leurs fonctions. Le
fait d'exercer une profession au Québec, vous devez maintenir une compétence
linguistique en matière de langue française, et c'est notamment pour ça qu'on
donne des pouvoirs aux ordres professionnels à ce niveau-là.
Mme David : Bon, admettons,
là...
M. Jolin-Barrette : Et ça,
là, ça se détaille à la fois avec l'avocat, le notaire, le médecin,
l'ingénieur, le comptable, le géologue, l'arpenteur, pour tout le monde. Si on
veut faire du français la langue officielle, autant du travail, des affaires,
la langue commune, ça va de pair. Il faut que le professionnel, on considère
que c'est le standard minimal, là.
• (16 heures) •
Mme David : Donc, ce que vous
dites, c'est si un client... un client, là, on va sortir de la santé, un client
n'est pas satisfait, soit de son avocat, dans la plaidoirie qu'il a fait qui
n'était pas convaincante parce qu'il s'enfargeait à tous les deux mots, disons...
M. Jolin-Barrette : La
plaidoirie, c'est prévu par l'article 133.
Mme David : Non, bon...
Alors, il n'est pas satisfait du service de comptabilité qui a eu du... des
rapports de son professionnel, qui a engagé, payé, etc. Il pourra donc se
plaindre en vertu du Code des professions. Probablement que le professionnel
n'était pas compétent, soit pas compétent dans son type de professionnel. C'est
ça qui inquiète beaucoup, évidemment, les professionnels. Normalement, si je
n'avais pas eu cet article-là, je l'aurais référé à un collègue, mais là il a
fallu que je le...
16 h (version non révisée)
Mme David : ...le client n'est
pas content, donc il a porté plainte. Donc c'est-u le Code des professions ou
si c'est votre fameux recours à l'acte dérogatoire, là, qui va être entré en
cause si le client n'est pas content et porte plainte? Qu'est-ce qui va primer,
là, le code de déontologie en vertu de la langue ou en vertu de l'incompétence,
parce qu'il n'a pas la langue, suffisamment, la compétence langagière?
M. Jolin-Barrette : Théoriquement,
là, les professionnels au Québec, là, ont le niveau approprié de français pour
leur permettre d'exercer leur profession en français. C'est de même depuis
1967.
Mme David : Oui, mais on se
comprend que...
M. Jolin-Barrette : Non, non,
on ne se comprend pas.
Mme David :Bien, c'est pour
ça que vous mettez "doit maintenir", parce que c'était réputé.
M. Jolin-Barrette : Bien, ce
que je veux dire, là, c'est que si on veut faire... si on veut avancer, là,
pour la protection puis l'utilisation de la langue française, là, est-ce que
vous trouvez normal qu'un professionnel au Québec ne puisse pas offrir en
français ses services professionnels? C'est ça, la question, là. La question,
c'est de dire : Pourquoi est-ce qu'on négligerait une compétence
linguistique qui est exigée depuis 1977 pour être membre d'un ordre
professionnel? C'est tout aussi important que les compétences de nature
technique parce que le public est en contact avec ce professionnel-là. Donc, le
professionnel doit être en mesure d'expliquer à tout citoyen les gestes, les
activités professionnelles qu'il va faire dans son dossier en lien avec
l'exercice de sa profession.
Mme David :Donc, dans le
fond, on demande un bilinguisme qui va être... qui va devoir être soutenu et
très affirmé, un vrai, vrai bilinguisme de niveau... je ne sais pas s'il y a
des niveaux, là, mais un très bon bilinguisme, s'il est d'origine d'une langue
autre que le français.
M. Jolin-Barrette : Non, ce
n'est pas du bilinguisme. C'est depuis 1977, ce qui est demandé, c'est la
connaissance appropriée de la langue officielle rattachée à l'exercice...
Mme David :De la fonction.
M. Jolin-Barrette : De sa
fonction. Puis écoutez, même, là, le gouvernement libéral, monsieur Bourassa,
dans le projet de loi, dans le Bill 22, comme on disait à l'époque,
article 21 : Nulle corporation professionnelle ne peut délivrer un
permis à une personne qui n'a pas une connaissance d'usage de langue française
déterminée suivant les normes établies à cette fin par règlement du lieutenant-gouverneur
en conseil. Alors, même un gouvernement libéral avait imposé ça, en 1974.
Mme David : ...là, c'est que
vous ajoutez un paragraphe qui est assez costaud, qui met : "il ne
peut, dans l'exercice de ses activités professionnelles, refuser de fournir une
prestation." Je pense que c'est le mot refuser. Il ne peut pas dire :
Je vais l'envoyer à un collègue parce que je ne me sens pas... je peux
l'envoyer à un collègue si je ne me sens pas compétent dans l'objet de sa
demande, mais je n'ai pas le droit... puis ça, ça, ça correspond tout à fait au
code de déontologie que je vous ai lu. Si vous, vous êtes un ingénieur des
ponts et chaussées, comme ils disent en France, vous n'êtes pas un ingénieur
chimique. Alors, si on vient vous voir pour faire du génie chimique, vous allez
dire : Non, c'est parce que ce n'est pas tout à fait... mais si on vient
vous... Alors vous avez le droit de refuser le service, parce que votre code de
déontologie dit : Fais des gestes, pose des actes professionnels pour
lesquels tu as des compétences. Mais si on vient vous voir comme ingénieur des
Ponts et chaussées, mais en français, puis vous n'êtes pas assez à l'aise. Là,
vous n'avez pas le droit de refuser le contrat. Vous avez le droit de le
refuser pour des raisons de compétences liées à votre profession, mais pas pour
des raisons de compétences liées à votre langue. Est-ce que je résume bien?
M. Jolin-Barrette : La langue
française, au Québec, c'est un minimum. C'est un minimum. Ce n'est pas
l'équivalent de : Je suis spécialisé en droit corporatif, versus : Je
ne peux pas prendre le dossier de droit familial. C'est le minimum. Pour être
membre d'un ordre professionnel, là, vous devez avoir de bonnes moeurs, comme
ils disaient, dans le temps, là, maintenant, c'est probité, intégrité, tout ça.
Hein, ça, ça s'applique à tous les professionnels : Probité et intégrité.
Bien, la langue aussi, ça s'applique, puis c'est de même depuis 77.
Mme David :Alors, ce qu'il
reste à faire pour le client, s'il veut être sûr d'avoir un bon service où il
se sent bien compris, c'est de trouver un professionnel qui parle sa langue, et
puis c'est... Là, ça va être le contraire qui risque de se passer, c'est que
s'il s'aperçoit que la personne qu'on lui a assignée ou qu'il est allé voir,
dit : Bien là je vais changer, moi, je pense, de professionnel, parce que
je n'ai pas l'impression qu'il m'a vraiment compris dans mon besoin. Donc, ce
n'est pas le professionnel qui va avoir à refuser, c'est pas mal plus le client
qui va décider d'aller voir ailleurs.
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait...
M. Jolin-Barrette : ...c'est
surtout aussi pour envoyer un signal très clair que, pour exercer sa profession
au Québec, il faut avoir et maintenir une connaissance appropriée de la langue
française.
Mme David : «Appropriée»,
c'est ça, mais c'est parce qu'il y a des appropriations plus difficiles que
d'autres parce qu'il y a des métiers plus langagiers que d'autres, disons ça,
comme ça. Je pense qu'il y a certains métiers très techniques où il n'y a pas
beaucoup de relationnel, je dirais ça, comme ça, et il y a d'autres métiers, il
y a d'autres gestes professionnels qui sont très, très, très linguistiques, je
veux dire, c'est mal dit, là, mais très relationnels. Dans la relation,
d'habitude, on se parle, on ne se fait pas juste regarder dans les yeux. Donc,
quand on se parle, bien, la parole, la façon dont c'est dit, les intonations,
ça va chercher beaucoup plus de subtilités. Donc, on pourrait dire que le
maintien du français technique pour la profession qu'on exerce, mais pour
certains, c'est beaucoup plus exigeant que pour d'autres. Peut être que l'ordre
des... Je ne veux pas nommer d'ordre, là, mais il y a certains métiers que la
compétence technique vient assez rapidement, tu sais comment dire tel mot, tel
mot, tel mot en français, puis c'est à peu près ça que le client, puis il ne
lui raconte pas sa vie, alors c'est correct. Mais, dans d'autres métiers,
c'est... On parlait des orthophonistes et tout ça, mais sans parler de ça, là,
je dirais, c'est la relation qui est la thérapie. Quelque part, c'est la
relation. Même... Là, vous m'avez dit qu'il ne faut plus que je parle des
avocats ni des médecins, donc.... Mais des avocats, c'est beaucoup la relation
aussi, puis la plaidoirie, et tout ça, même si ça ne va pas en cour, là, mais
le client, il veut se sentir compris.
Alors, moi, je comprends que, si je vais
voir un professionnel avec cette loi-là, bien, je vais m'assurer qu'il me
comprend bien. Peut être que ça va donner comme résultat, ce paragraphe-là, et
surtout ce qui s'en vient, de maintenir, que ça va donner des professionnels
plus bilingues. Ça, je le conçois, là, puis je ne suis pas contre ça, là, que
les gens maintiennent une compétence en français. Je suis tout à fait d'accord.
Maintenant, un, il va falloir le mesurer, que les inspections professionnelles
aient les outils, etc. Mais, deuxièmement, il y a quand même des professions
qui exigent beaucoup plus de nuances dans la relation en français. Donc, pour
ces professionnels-là, ça va être peut-être plus exigeant que pour des
professions plus techniques.
M. Jolin-Barrette : C'est
inhérent. Depuis 1977, vous me donnez l'exemple du psychologue, là, depuis
1977, le régime, il est construit de cette façon-là. Donc, dans les faits, le
psychologue, là, ça fait partie des compétences minimales qu'il devait avoir
pour exercer ses fonctions en vertu de la Charte de la langue française. Ce que
nous faisons de différent cette fois-ci, c'est que nous venons ajouter
également un mécanisme de vérification pour s'assurer qu'il ait maintenu cette
compétence langagière pour exercer sa profession au Québec parce qu'il offre
des services au public, il doit s'assurer de le faire dans la langue officielle
du Québec, ce qui est prévu dans la Charte en français. Mais revenons sur votre
exemple du médecin. Comment se fait-il qu'il y aurait des membres du Collège
des médecins qui ne sont pas en mesure de communiquer en français avec des
citoyens québécois?
Mme David : Alors, c'est
intéressant, vous employez le mot «communiquer». Pour moi, communiquer, c'est
pas du tout de la relation ça, communiquer, c'est bonjour, comment allez-vous,
je vous ai diagnostiqué un lymphome de quelque chose. Ça, c'est de la
communication. Puis on est dans les ères de communication, vite, un tweet, des
mots pas complétés, etc., bing, bang, bang.
M. Jolin-Barrette : Bien,
j'espère que votre médecin ne vous tweete pas qu'il vous a trouvé un lymphome.
Ça, je ne suis pas sûr ça respecte le code de déontologie...
Mme David : Non. Moi aussi.
Mais la communication, ce n'est pas la même chose que la relation qui est
beaucoup plus subtile.
M. Jolin-Barrette : Non, mais
prenons le cas...
Mme David : C'est ça que je
veux dire.
M. Jolin-Barrette : Non, non,
mais revenons sur ça. Mais, sur le cas d'un médecin, là, il faut-u qu'il...
Mme David : Mais oui, mais un
médecin, là, il en y a qui... Un dermatologue, c'est peut-être moins compliqué
un peu parce qu'il prescrit puis il y a des mots techniques.
M. Jolin-Barrette : Oui, mais
vous, là, vous dites : Le psychiatre au Québec, il n'a pas besoin de
parler français.
Mme David : Ah! je ne dis pas
ça du tout, mais ce que je dis...
M. Jolin-Barrette : Mais
c'est ça.
• (16 h 10) •
Mme David : ...c'est que les
exigences, moi, si j'allais voir quelqu'un puis je disais au psychiatre, au
psychologue : Je veux une thérapie, je m'assurerais qu'il me comprend
bien, même à la limite, quand je ne parle pas trop, puis qu'il faut qu'il
décode mes émotions, puis il faut que... et qu'il faut que moi, je comprenne
qu'est-ce qu'il me dise quand il parle aussi, et donc c'est beaucoup plus sur
la relation langagière que ça se passe, c'est pas juste la communication,
M. Jolin-Barrette : Mais ma
question, madame la présidente, c'est pourquoi voulez-vous exonérer les
professionnels de cette obligation-là?
Mme David : Je n'exonère pas.
C'est pour ça que je vais vous dire que je suis d'accord avec le maintien de la
compétence langagière. Là où...
Mme David : ...vous
ajoutez une petite coche de plus, là, une grosse coche, c'est qu'il ne peut pas
refuser de traiter un patient en disant : Ça, je pense ça demanderait
vraiment, là, une subtilité langagière que je dois concéder que je n'ai pas.
Alors là, s'il prend le patient, parce qu'il n'a pas le droit de le refuser, il
pourrait se retrouver, effectivement, avec une infraction à son Code des
professions. Puis là, vous, en plus, vous mettez que c'est un acte dérogatoire.
Alors là, c'est la pire des condamnations. Donc, on additionne les couches de
mesures, et ça rend le professionnel coupable de la pire infraction au même
niveau que la collusion, la corruption, les abus sexuels, etc., là, si vous ne
changez pas votre idée, puis vous avez annoncé que vous aviez peut-être changé
votre idée. Mais, l'acte dérogatoire, c'est ça. Donc, c'est le fait qu'il ne
peut pas refuser. Alors, on va devoir, quand on va parler du maintien des
compétences, parler vraiment de comment on va maintenir ces compétences.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette :
Bien, Mme la Présidente, on est dans une situation où est-ce que ça veut dire
quelque chose, avoir une connaissance appropriée ou non de la langue officielle
pour servir le public? Je reviens à mon cas du médecin, là, clinique de sans
rendez-vous. Je ne sais pas, là, vous avez une douleur quelconque, là, un
samedi matin. Ça adonne que votre GMF ou votre médecin de famille n'est pas
disponible, mais il faut que vous voyiez un médecin. Vous allez soit à l'urgence
soit à une clinique sans rendez-vous. Quand vous vous présentez, là, avec votre
carte Soleil, là, vous entrez dans le bureau du médecin, là, le médecin, au
Québec, qui vous reçoit, est-ce qu'il doit parler français ou on l'exonère? Le
médecin, il dit-u : Je suis désolé, je ne vous servirai pas aujourd'hui
parce que je ne parle pas français? Est-ce que... Non, mais c'est...
Une voix :...
M. Jolin-Barrette : Non,
non, non, je ne caricature pas du tout, du tout, du tout. Puis c'était un
exemple qui était amené par vous relativement au médecin. Alors, est-ce que le
médecin, au Québec, qui fait sans du rendez-vous doit parler français?
Mme David : C'est clair.
M. Jolin-Barrette : Bon.
Bien, l'article est là pour ça.
Mme David : Non, parce
que, là, on tombe dans les autres articles de la Loi sur la santé et services
sociaux. Prenons un avocat qui fait de la médiation familiale, de la médiation
de couples qui sont en chicane. Là, les balles passent vite entre les deux, là.
Puis là lui, il parle français. Mais est-ce qu'il parle à ce point-là de
comprendre toutes les subtilités de ce qui se passe devant lui où, même quand
c'est dans ta propre langue, tu as de la misère à suivre?
M. Jolin-Barrette : Un
des rôles de l'avocat, là, qui fait de la médiation, O.K., dans le cadre de son
métier, c'est un professionnel du droit, c'est un médiateur accrédité. Il
s'affiche comme médiateur accrédité au public, là, il dit : Moi, je suis
un médiateur accrédité. Un citoyen, une citoyenne québécoise vont le voir, au
Québec, là, il est en affaires, il peut exercer des actes réservés. On lui
dit : Vous devez avoir une connaissance appropriée, à l'exercice de vos
fonctions, de la langue officielle depuis 77, même depuis 74. On lui dit :
Bien, dans le fond, ce n'est pas grave, ce n'est pas grave que tu ne
maintiennes pas de connaissance, parce que tu ne te sens pas à l'aise, tu ne le
fais pas.
C'est au coeur même, au coeur même de
l'importance, également, du système professionnel, c'est une compétence
minimale. Est-ce qu'on accepte qu'un professionnel ne fasse pas preuve de
probité ou d'intégrité? La réponse à cette question-là, c'est non. Tous les
professionnels doivent faire preuve de probité et d'intégrité. Alors, pour la
langue, ça serait différent? On dit : C'est moins grave.
Mme David : ...refuser
de fournir qui est très, très, très inquiétant. Il ne peut pas refuser, donc il
ne va pas refuser. Il ne va pas refuser, il n'a pas le droit de refuser, il n'a
pas le droit de dire... Il est mieux de ne pas répondre au téléphone ou il est
mieux de dire... Est-ce qu'il peut répondre : Bien, je n'ai pas de classe?
M. Jolin-Barrette :
Donc, on part du principe... Pardon...
Mme David : Un avocat
qui dit : Écoutez, là, moi, je n'ai vraiment pas de... je ne peux pas vous
prendre, je n'ai pas de place. Il donne, dans le fond, une autre raison. Ça, le
client ne peut pas juger de ça, là, si c'est...
Mme David : ...vraies raisons
qui lui a données. «Écoutez, monsieur, je n'ai vraiment pas de disponibilité.»
M. Jolin-Barrette : Donc, on
part d'un principe de dire : Le français, ce n'est pas une compétence
minimale pour être membre d'un ordre professionnel. Ça revient à ça.
Mme David : ...français, là.
Vous êtes, on est dans des fois dans des exigences de français très, très
élaborées, je dirais.
M. Jolin-Barrette : Mais ce
n'est pas élaboré. Si vous voulez exercer votre profession au Québec, vous
devez être en mesure de le faire en français. C'est un prérequis depuis 1977
d'avoir une connaissance appropriée à l'exercice de sa profession. La question,
c'est : Est-ce que ça veut dire quelque chose ou ça ne veut rien dire le
fait que les professionnels doivent pouvoir exercer leur profession dans la
langue officielle?
Mme David : Donc, on conclut
que, dans l'article où on va dire «doit maintenir ses compétences», on met tout
un fardeau sur les ordres professionnels, les inspections professionnelles,
d'avoir un niveau pour certains métiers plus que d'autres, peut être très, très
exigeant. Quelqu'un va le vérifier, ça. Quelqu'un va devoir vérifier la... pas
la maintenance, mais le maintien de la langue française pour le métier en
question. Puis il y a des métiers relationnels. J'y reviens, là.
M. Jolin-Barrette : Mais le
métier relationnel, là, entre aujourd'hui puis le 10 mai 2021, là... bien
sûr, il y a de la formation continue, il y a de l'actualisation, tout ça, mais
ça n'a pas changé tant que ça. Puis le 10 mai, là, 2021, là, le
professionnel devait avoir une connaissance appropriée à l'exercice de ses
fonctions.
Mme David : Je pense que je
vais déposer mon amendement.
La Présidente (Mme Thériault) :
Pas de problème si vous nous en faites la lecture. Il est déjà sur Greffier,
donc les collègues députés peuvent en prendre connaissance.
Mme David : Alors,
l'article 23 : L'article 35.1 de la Charte de la langue
française, introduit par l'article 23 du projet de loi, est modifié par
l'ajout au deuxième alinéa des mots «en tout respect de la mission des ordres,
soit celui de la protection du public et de leur code de déontologie» après le
mot «prestation.» Commentaire : L'article 35.1 de la Charte de la
langue française introduit par l'article 23 du projet de loi tel
qu'amendé, se lirait ainsi : Il ne peut, dans l'exercice de ses activités
professionnelles, refuser de fournir une prestation pour le seul motif qu'on
lui demande d'utiliser la langue officielle dans l'exécution de cette
prestation en tout respect de la mission des ordres, soit celui de la
protection du public et de leur code de déontologie.
Alors, pourquoi je dépose ça? C'est parce
que c'est exactement ce que les ordres professionnels nous disent quand ils
expriment leurs inquiétudes. C'est comment concilier protection du public et la
mission des ordres professionnels. Ce n'est pas la protection des
professionnels, c'est la protection du public. Ils ont des codes de
déontologie, et, en même temps, ils ne peuvent pas refuser de fournir une
prestation. Alors, moi, je dis : Essayons de penser ici, et peut être en
fonction de ce qui s'en vient, c'est-à-dire comment maintenir cette qualité du
français, mais tout ça en respect de la mission des ordres, c'est-à-dire de
bien protéger le public, donc de faire en sorte que le public reçoive, si tel
est le but de cet article-là, des services en français d'aussi bonne qualité
que si c'était dans une autre langue. Alors, on protège le public puis on doit
protéger le code de déontologie pour être sûr que le professionnel ne
contrevienne ni à la protection du public ni au code de déontologie. Et peut
être que pour le ministre, dans le fond, ça ne... dans la perspective de ce
qu'il a dit, il n'y a pas tant de conséquences que ça.
• (16 h 20) •
M. Jolin-Barrette : Bien,
moi, madame la présidente, je suis un homme de bonne volonté, alors je cherche
le consensus, et je souhaite rassurer la collègue. Alors, si vous permettez,
j'ai pris en note votre amendement, on va le travailler et on vous proposerait
quelque chose. Cela étant, puis je être très clair, puis que ça soit dit dans
le micro : Tous les professionnels au Québec doivent pouvoir fournir leurs
services professionnels dans la langue officielle. C'est l'intention du
législateur et c'est également l'obligation légale qui est prévue à la Charte
de la langue française depuis 1977. Les amendements... en fait, que nous
faisons à la loi 101 par le biais de ce projet de loi 96, vont tous
en ce sens-là pour s'assurer qu'au Québec tous les professionnels, sans
exception, soient en mesure de servir en français...
M. Jolin-Barrette :
...les Québécois et les Québécoises, sans distinction aucune. Alors,
j'accueille votre amendement. Si vous permettez, on va suspendre quelques
instants, Mme la Présidente.
Mme David : ...un petit
quelque chose? Est-ce que je peux, Mme la Présidente?
La Présidente
(Mme Thériault) : ...
Mme David : Je dois dire
que oui. Et je pense que votre outil pour ça, pour ce faire, ça va être le
maintien des compétences. Puis là il va falloir... Le maintien des compétences
qui s'en viennent, là, dans le 35.2, je crois, "doit maintenir sa
compétence en français". Alors, la question, ça va être... Puis ça,
sincèrement, je ne pense pas que ça n'a jamais... Bien, ça ne l'a jamais été
fait, ça, depuis... C'était réputé. Alors, le mot "réputé", c'était
jusqu'à fin de ses jours. Mais là, dans le maintien de la compétence, un, je
pense que les jeunes professionnels sont beaucoup plus bilingues que peut-être
leur père, ou leur grand-père, ou leur grand-mère ou leur mère. Parce qu'il y
a... Parce que le "réputé", vous l'avez dit vous-même, tu es réputé,
à 24 ans, tu rentres dans un ordre professionnel, tu as fait ton trois ans
d'école secondaire en français, bon, mais ça fait 30 ans que tu ne parles
pas français. Donc, c'est clair qu'il y a des professionnels en ce moment qui
doivent trouver ça un peu inquiétant.
Par ailleurs, le maintien, ça veut dire de
mettre en place un tout nouveau système dans les inspections professionnelles
de... Oui, mais comment? L'OQLF va être très, très occupé à accompagner les
ordres professionnels. Il y a même un ordre professionnel, je me demande si ce
n'est pas encore des CPA, qui propose, avec raison, de mettre ça dans le Code
des professions, cette question du maintien, de faire un amendement au Code des
professions.
Donc, c'est parce que ça, c'est une toute
nouvelle mission. J'ai été inspectrice professionnelle. Je sais ce que c'est
d'aller dans le bureau d'un collègue puis de vérifier la tenue de ses dossiers,
vérifier ses compétences théoriques, sa compétence pratique. On ne m'a jamais
demandé de vérifier les compétences langagières, mais, comme par hasard,
j'allais visiter des collègues qui étaient de la même langue que moi, donc qui
parlaient français. Mais, si j'avais eu à vérifier ça chez un collègue plutôt
d'origine... d'une autre langue... D'ailleurs, maintenant, il y a des
professionnels de plein de langues, là, qui... Bien, ça aurait été toute une
autre affaire. Puis là les gens disent: O.K., mais moi, je ne suis pas
linguiste. Comment je vais faire pour évaluer ça? C'est un critère de un à 10.
Il est-u à 6, 7, 8, 9? Ça, là, vous avez toute une armature, je dirais,
organisationnelle, et affaires... dont on parlera. Mais, si on a tout ça, votre
problème va être de beaucoup amélioré, je pense, sur la maîtrise du français.
La Présidente
(Mme Thériault) : Monsieur le ministre.
M. Jolin-Barrette :
...madame la Présidente. Ce qui est fondamental, c'est qu'au Québec les
professionnels puissent et doivent exercer leurs fonctions en français. Comme
on dit...
Mme David : ...77, ils
sont réputés, mais ça se perd, vous le savez.
M. Jolin-Barrette :
Bien, il ne faut pas que ça se perde. Il ne faut pas que ça se perde, là. Puis,
comme on dit en bon Québécois, là, un "walk-in" qui rentre dans le bureau,
là, du professionnel, là, il faut que le professionnel, il puisse le servir en
français.
Mme David : Faites
attention avec votre expression anglaise.
M. Jolin-Barrette : Mais
oui.
La Présidente
(Mme Thériault) : Le client de passage plutôt que le
"walk-in".
Mme David : Je voulais
être sûr d'être bien compris.
La Présidente
(Mme Thériault) : C'est un client de passage.
Mme David : Mais moi, je
vais même plus loin que ça. Il faut qu'il fasse plus comprendre, pour une fois,
de passage, mais la compétence maintenue, c'est un niveau de compétence un
petit peu plus élevé que ce que vous décrivez, je pense.
La Présidente (Mme Thériault) :
Donc, sur ce, puisque, monsieur le ministre, vous nous avez demandé une
suspension le temps de regarder de quelle manière vous allez proposer ou
trouver une voie de passage à l'amendement de la députée de
Marguerite-Bourgeoys, nous allons suspendre nos travaux pour laisser le temps
aux légistes de travailler. Et on reviendra. S'il faut retirer l'amendement, on
le fera.
Donc, on suspend les travaux.
(Suspension de la séance à 16 h 25)
16 h 30 (version non révisée)
(Reprise à 16 h 42)
La Présidente (Mme Thériault) :
Donc, nous allons poursuivre nos travaux.
Des voix : ...
La Présidente (Mme Thériault) :
Collègues, collègues, s'il vous plaît! Merci beaucoup pour votre attention.
Donc, monsieur le ministre nous avait annoncé un amendement, mais je pense que
finalement il n'y en aura pas. Monsieur le ministre.
M. Jolin-Barrette : Non,
effectivement, suite à discussions, réflexions, consultations des équipes.
Notamment, un souhait qui est formulé par la députée de Marguerite-Bourgeoys,
c'est notamment le fait de dire qu'est ce qui arrive quand... Bien, en fait,
revenons au principe de base. Le principe de base, c'est que tout professionnel
au Québec doit être en mesure de servir en français tous les Québécois et
toutes les Québécoises. Et c'est pour ça, notamment, qu'on s'assure du maintien
de la compétence linguistique en français tout au long de la vie
professionnelle du professionnel.
Or, s'il arrivait, de par la nature et de
la profondeur du traitement thérapeutique qui serait donné par le
professionnel, que le professionnel sentirait qu'il ne pourrait, parce qu'il
n'a pas une connaissance de la langue française qui plus... qui n'a pas...
qu'il a une connaissance appropriée de la langue française, mais qui n'est pas,
à l'exercice de ses fonctions, supérieure à la norme prévue à la Charte de la
langue française, donc la connaissance appropriée pour servir le client, il
pourrait bénéficier de l'exception de par nature.
Parce qu'on donnait l'exemple, tout à
l'heure, d'un, supposons, d'un psychologue qui fait une psychothérapie et que, supposons,
qu'on a un enfant qui, supposons, qui a été agressé sexuellement, un enfant
francophone qui a été agressé sexuellement, et qu'il est extrêmement important
d'avoir, dans le cadre de la relation thérapeutique, les mots et la subtilité
linguistique qui va au-delà de la connaissance appropriée de la langue
française, qui est plus exigeant que la connaissance appropriée, à ce moment-là,
le professionnel pourrait décliner le mandat en vertu de ses règles
déontologiques mais en vertu de l'exception qu'on vient d'insérer du fait que,
de par la nature même du geste et de la fonction du traitement qu'il offre à
l'enfant, cette compétence langagière doit être supérieure à la connaissance
appropriée. Alors, il pourrait bénéficier de l'exception.
La Présidente (Mme Thériault) :
Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Oui. Là on tombe
effectivement dans des subtilités où, quand même... je sais que le député de
D'Arcy-McGee pourra faire une intervention, il voudra faire une intervention,
mais je pense que le ministre a saisi quand même la subtilité et son exemple
est assez révélateur, effectivement, d'une situation où ça serait presque
intenable...
Mme David : ...vous
savez, dans le domaine des relations thérapeutiques, là, le mot veut dire
quelque chose, il y a quelque chose qui s'appelle l'alliance thérapeutique. Et
je ne pense pas qu'un enfant agressé sexuellement, qui ne se sent pas entendu,
déjà qu'il peut être assez traumatisé comme ça, d'autres situations
traumatiques de toutes sortes, il faut qu'il ait au moins la confiance du
professionnel et qu'il se sente en confiance. Et, pour se sentir en confiance,
il faut se sentir compris. Mais des fois compris, c'est entendu, mais, des
fois, c'est émotif, c'est langagier. Alors, je pense que, si ça rentre dans un
concept de nature, bien, tant mieux. Parce que le «par nature» veut, à ce
moment-là, quand même dire qu'il y a des relations qui, comment dirais-je, vont
bien au-delà des mots et qui demandent une sensibilité extrême à des situations
qui sont apportées. Ce qui n'est pas si courant que ça dans la quantité d'ordres
professionnels dont on parle, mais qui, quand même, réfère à des situations où,
comme dit le ministre, ça dépasse le niveau attendu même d'une bonne compétence
en français.
Alors, je pense que ça permet d'éclaircir
le concept «par nature» et d'apporter, donc, un peu d'assurance en ce qui a
trait à ça. Je reviendrai, parce que, là, je pense que, là-dessus, je ne sais
plus où j'en suis dans mon temps, puis je veux laisser parler le député de
D'Arcy-McGee. Je reviendrai sur le maintien de la connaissance de la langue
officielle, dont on n'a pas vraiment encore parlé. On a l'impression de faire
du coq à l'âne parce que je suis allée plus au deuxième alinéa, mais je
reviendrai.
La Présidente
(Mme Thériault) : Je vais avoir besoin d'éclaircissements. Là,
vous avez déposé un amendement. Est-ce qu'à ce moment-ci vous voulez que le
collègue de D'Arcy-McGee fasse une intervention sur l'amendement? C'est ce que
je comprends?
Mme David : Oui, je
pense que c'est ça, oui.
La Présidente (Mme Thériault) :
Parfait. Donc, monsieur le collègue de D'Arcy-McGee, la parole est à vous.
M. Birnbaum : Merci,
madame la présidente. En quelque part, je trouve très recevable l'explication
que vient de donner le ministre. Mais, avec tout respect, j'entends là-dedans
une justification claire et raisonnable de l'importance de notre amendement.
L'idée, c'est de comprendre l'objectif de base de l'article 35.1. Le
ministre l'a réitéré à plusieurs reprises, et c'est compris. Mais là où il
risque d'avoir une confrontation... Et j'insiste que c'est une possibilité
assez responsablement s'est construite par notre amendement. Là où il risque
d'avoir... de se manifester un conflit potentiel entre la dispensation d'un
service en langue française et les obligations très sérieuses de l'ordre
déontologique imposées sur le membre d'un ordre, à titre exceptionnel, l'ordre
qui voit ses responsabilités déjà accrues dans la surveillance de la capacité
langagière en langue commune de ses membres, l'ordre aurait à trancher sur la
possibilité, de façon exceptionnelle, l'ordre aurait, selon un amendement, la
responsabilité aussi que la capacité, comme j'insiste, assez circonscrite, de
dire, pour des raisons déontologiques, un de ses membres qui, dûment et
correctement, fait son possible pour maîtriser le français, se sent devant une
problématique. Donc, peut-être, ça serait un cas très exigeant où ce
professionnel, ce membre d'un ordre, dirait que je me sens, en toute bonne
foi... Pas que de A à Z, ouf, ma clientèle de langue anglaise, là, m'a donné le
souci de servir un client français, je n'ai pas le goût, alors, de façon
routinière, je laisse à côté cette obligation, ce n'est pas ma clientèle. On ne
parle aucunement d'une telle situation dans notre...
M. Birnbaum : ...proposition.
Notre proposition, c'est ou... - pour moi, moi, je la vois comme ça - ça
serait: ou d'offrir le service exemplaire aux clients dans la langue française
risque d'être problématique, selon la lecture sérieuse, et supervisée, et
nécessairement validée par son ordre, est un seuil impossible pour lui, malgré
sa maîtrise, plus ou moins, mais maîtrise comme obligée du français. N'y a-t-il
pas intérêt à trouver cet équilibre, comme je dis, quand je lis les mots de
notre amendement, «sont de nature exceptionnelle»? Alors, n'y a-t-il pas une
façon de garder l'esprit ainsi que la lettre de l'article tel que proposé par
le ministre avec l'amendement que nous aurions mis sur la table?
• (16 h 50) •
M. Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, là, on est dans le régime distinct des ordres professionnels. Le
député de D'Arcy McGee a fait référence à un service exemplaire de la part des
professionnels en matière de langue française. Ce n'est pas le critère qui est
exigé, c'est la connaissance appropriée de la langue à l'exercice de ses
fonctions. Donc, le niveau d'exigence pour les professionnels, il est moins.
Cependant, ils doivent fournir les services en français. Alors, avec
l'amendement que nous avons déposé, ça permet de faire en sorte... De par la
nature, c'est une circonstance extrêmement exceptionnelle qui permet, oui, aux
professionnels, dans ce cas-ci, de refuser un mandat, mais pour des raisons
grandement exceptionnelles, parce qu'en raison de la nature du traitement
offert, ça aurait un impact pour le fait de ne pas offrir ce service-là à la
personne, au citoyen.
Alors, je comprends l'amendement qui est
déposé par la députée de Marguerite-Bourgeoys, je comprends le sens de
l'intervention du député de D'Arcy-McGee, mais l'objectif du projet loi 96,
notamment, c'est de faire en sorte véritablement que, pour les membres des
ordres professionnels, l'exercice de la profession puisse se faire notamment en
français, donc, lorsqu'il y a un citoyen qui se présente, qu'il puisse être
servi en français par le professionnel, et qu'il ne puisse pas refuser
simplement parce que le citoyen souhaite se faire servir en français par le
professionnel. Donc, ça, ça doit être très clair, ça, c'est le principe. Avec
l'exception qui est prévue, «par la nature», le cas évoqué par la députée de
Marguerite-Bourgeoys pourrait s'avérer une situation qui est couverte par le
«par nature», parce qu'en raison de la nature intrinsèque et profonde de la
relation, ça nécessite des compétences langagières supérieures à la connaissance
appropriée de la langue française.
M. Birnbaum : J'apprécie,
bon, plus que la nuance, la précision qu'y fait le ministre quand il parle du
fait que le seuil n'est pas dans ce cas-ci l'exemplarité. Mais, pour moi, ça
rend même plus important notre amendement, qui, j'insiste à nouveau, ne remet
pas en question le principe derrière l'article devant nous, et je m'explique.
Il risque d'y avoir des cas très complexes
qui ne seraient pas couverts par une mention de la nature du travail, ça peut
être dans le travail d'un ordre qui ne touche pas directement aux relations
humaines, mais où, pour fonctionner comme il faut, pour offrir un service qui
serait fidèle aux obligations déontologiques d'un membre d'un ordre, le niveau
de sophistication, d'expertise en langue française ne serait pas au
rendez-vous. J'insiste qu'on parle... on ne s'attendrait aucunement, advenant
l'adoption de notre amendement, que les ordres donnent des dispensations à
leurs membres, comme je dis, de dire: Bon, retournez dans votre coin, refusez
tous, tous les clients québécois francophones ou francophones autres que vous
voulez. Aucunement, aucunement! Je peux imaginer des membres de n'importe quel
des ordres, à titre très exceptionnel, qui se dirait: Là, je suis devant un
cas...
M. Birnbaum : ...très
complexe. Donc, je me permets un autre genre d'exemple. Je suis devant un cas
qui risque d'être très médiatisé. Je suis devant un cas où les conséquences en
termes de jurisprudence possible, les conséquences en termes financiers aux
causes de la... les particularités du client devant moi, francophone, sont très
sérieuses. Je m'imagine dispenser mes services à ma pleine capacité et dans ce
cas-ci, je me sens confronté par mes obligations solennelles et déontologiques
d'inviter le client à s'assurer un service un petit peu plus complet dans sa
langue, qui n'est pas la mienne.
Pour moi, c'est ça le sens de notre
amendement qui est tout à fait potentiellement complémentaire au principe qui
énonce le ministre et est exercé par l'article tel que rédigé. Est-ce que ce
n'est pas ces genres de situations où on veut assurer la moindre souplesse
surveillée par nécessité par les ordres eux-mêmes?
M. Jolin-Barrette :
Mais, madame la présidente, je pense que c'est très clair, là. Ce qu'on
souhaite au Québec, c'est de faire en sorte que les citoyens québécois,
lorsqu'ils vont voir un professionnel, soient servis en français. Et les
modifications législatives qu'on amène et qu'on propose visent justement à
faire en sorte que les professionnels doivent maintenir la compétence
linguistique en langue française, tout comme la probité, tout comme
l'intégrité. Ça ne doit pas être négociable. Les professionnels doivent pouvoir
communiquer, servir les Québécois et les Québécoises en français. Puis, je
pense qu'avec les explications que j'ai données par rapport à l'amendement que
j'ai déposé, ça fait en sorte de répondre aux préoccupations des collègues.
M. Birnbaum : M. le
Président, ou l'autre, je me permets une dernière intervention là-dessus, si je
peux. Et je me permets, soit de façon subtile ou assez souvent non subtile, le
ministre a tendance à décider, j'ai l'impression, d'entendre ce qu'il veut
entendre, plus que les mots qui sont exprimés. Combien de fois est-ce que j'ai
encadré mes suggestions comme complémentaires aux objectifs qui visent le
ministre? Et combien de fois est-ce que j'ai l'obligation d'entendre que, ah,
le député de D'Arcy-McGee n'a pas l'air de comprendre que le principe, c'est
qu'un membre de l'ordre doit être en mesure de desservir ses clients en
français. Est-ce qu'on peut s'entendre que mes interventions sont basées sur le
fait que je suis d'accord avec le principe?
Là, si le ministre écarte la possibilité
que, pour des raisons déontologiques tout à fait louables, il y a des membres
des ordres qui veulent assurer que leur client ait le meilleur service possible
optimal dans la langue française et contenu, comme le ministre lui-même a dit
que le seuil n'est pas une exemplarité, c'est une compétence en français comme
l'ordre, j'espère qu'il ferait confiance aux ordres, selon notre amendement,
risquerait de comprendre que dans ces cas circonscrits et clairs, et de façon
exceptionnelle, ça devrait être recevable pour un tel professionnel membre d'un
ordre de se désister ou d'inviter même le client de comprendre qu'il propose
désister, de lui donner un service parce qu'il prend au sérieux ses obligations
et il s'inquiète de sa capacité, malgré son expertise jusqu'à un certain point
en français, de donner honneur à ses obligations auprès de ce client
francophone.
• (17 heures) •
Le Président (M. Poulin) :
Merci, M. le député de D'Arcy-McGee, vous comprendrez que comme président qui
prend mon rôle extrêmement au sérieux, que je ne peux pas juger de la teneur des
propos qui sont tenus à la fois par des ministres ou par vous. Évidemment, je
vous invite à continuer dans le respect...
17 h (version non révisée)
Le Président (M. Poulin) : ...des
échanges dans une idée de construction commune, M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Alors, M.
le président, je comprends le point de député de D'Arcy-McGee, mais ce qu'il
nous invite à faire, c'est un élargissement de l'exception et je ne suis pas
prêt à faire ça parce que ce que nous faisons, c'est justement de dire :
Écoutez, désormais, les professionnels doivent rendre un service en français,
et l'exception qui est là, elle est tout à fait raisonnable, de si, par la
nature, la profondeur de la relation, comme l'exemple que nous avons eu de la
relation thérapeutique avec un enfant agressé sexuellement, le professionnel
doit recevoir avec le professionnel une subtilité linguistique tellement
importante, ça pourrait bénéficier de l'exception. Alors moi, je fais confiance
aux ordres pour s'assurer que leurs membres aient une connaissance appropriée
du français pour exercer leur profession en français. Et ça fait part des
articles suivants qu'on va voir.
Le Président (M. Poulin) : Merci,
M. le ministre. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'amendement? Je
comprends qu'il... Oui, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Je ne sais plus
s'il me reste du temps, je ne pense pas qu'il me reste beaucoup de temps, de
toute façon.
Le Président (M. Poulin) : Il
vous reste, oui, quelques minutes, 13 min 30 s. C'est bien ça?
Mme David : Ah! oui, 13.
Le Président (M. Poulin) : 13
min 30 s.
Mme David : Bien, coudon. Je
comprends, j'insiste pour le redire, qu'on a élargi la... pas élargi, mais on a
précisé la notion de "par nature", et il faudra peut être que les
ordres... Ça, je ne sais pas comment ça peut fonctionner, à part de nous
écouter là, je ne sais pas comment ça se traduit en pratique, comment les
ordres, à partir de ça, disent, par exemple : OK, on a parlé de ça, on a
parlé de certaines situations thérapeutiques très complexes où la langue
devient un outil majeur de compétence à aider le client, la cliente. Comment ça
se traduit en termes d'autofonctionnement pour les ordres professionnels? Ça,
c'est une vraie question, là, je ne sais pas comment ça marche, puisque oui,
l'amendement va être intégré dans la loi. L'amendement est passé par nature,
mais est-ce qu'ils vont tous nous réécouter pour nous... pour comprendre ce que
ça veut dire? Comment ça fonctionne?
M. Jolin-Barrette : Je suis
convaincu que de nombreuses personnes qui travaillent dans les ordres
professionnels qui sont à l'écoute pour cette section du projet de loi.
Mme David : Moi aussi.
M. Jolin-Barrette : Convaincu.
Mme David : Moi aussi. Mais
tout ça se transforme éventuellement en jurisprudence, j'imagine.
M. Jolin-Barrette : Hum-hum.
Et, M. le Président, ces nouvelles normes vont s'appliquer dans ce que les
ordres font déjà, dont ils connaissent la Charte de la langue française, ils
vont s'y référer, et vont constater également que ça demande une petite mise à
jour, si je peux dire, notamment au niveau des inspections professionnelles,
notamment au fait que désormais il n'y a plus de présomption irréfragable et
sur le fait que tous leurs professionnels doivent être en mesure de servir les
Québécois et les Québécoises en français.
Mme David : Oui, puis je
pense que s'ils ont... ils doivent tous savoir parce qu'ils sont dans des
ordres professionnels. Et j'ai toujours été étonnée de la complexité légale
dans un ordre... pas comme membre, quand tu administres un ordre professionnel,
c'est... tu administres une loi assez complexe. Et donc je suis sûre qu'ils
nous écoutent attentivement. Mais ils vont devoir opérationnaliser, définir.
Puis là dessus, je pense que vous avez fait, avec raison, des précisions sur le
mot nature. On avait commencé, mais là on a continué. Et si j'étais présidente
d'un ordre ou juriste dans un ordre, ils ont toujours un secteur juridique
important, plus l'ordre est grand, ou au CIQ, ils doivent surveiller ça ou...
le Conseil interprofessionnel, c'est ça, sur : OK, qu'est-ce qui va
s'appliquer à nous ou pas dans la diversité des actes réservés que nous avons?
Et je pense que ce mot...
M. Jolin-Barrette : Ils n'ont
pas d'actes réservés... qui ont juste des titres réservés.
Mme David : Oui, mais disons
que le mot nature va quand même être intéressant et important à regarder entre
eux et dans la spécificité de leurs titres ou de leurs actes, ou... et dans
divers... parce qu'il y a des actes partagés aussi. Alors, on a parlé tout à
l'heure, par exemple d'abus sexuel, d'abus...
Mme David : ...choses
très, très, très difficiles et très traumatiques, bien, ça peut être l'Ordre
des travailleurs sociaux, ça peut être l'Ordre des psychologues, ça peut être
le Collège des médecins, ça peut être l'Ordre des psychoéducateurs, ça peut
être l'ordre des... bien, conseillers d'orientation sont avec travailleurs
sociaux, mais on comprend qu'il y a plusieurs ordres qui touchent à la relation
humaine qui feront, j'imagine, une analyse la plus rigoureuse possible de nos
échanges. Et, là-dessus, je dois dire que je trouve ça important quand même
d'avoir eu cet échange-là. On est toujours sur l'amendement, j'imagine, M. le
Président?
Le Président (M. Poulin) :
...de clarification, le temps qu'il vous restait était effectivement sur
l'amendement, alors qu'il vous restait 1 min 30 s sur l'article. Donc, il vous
reste, quoi, dix minutes sur l'amendement. Oui, on est toujours sur
l'amendement.
Mme David : Oui, mais,
après ça... Là, je vous pose une question technique parce que j'ai vraiment
besoin, puis je pense le ministre est d'accord, là, qu'on revienne sur la
question de maintenir. Comment les ordres vont faire? Et je pense qu'il y a des
suggestions fort intéressantes. Puis moi, je pensais que ça venait plus loin,
alors j'étais moi-même un peu mêlée dans l'ordre, j'ai pris le deuxième
paragraphe avant de prendre le premier. Et donc on m'a dit, après, qu'on peut
revenir sur l'ensemble de l'article 23, je retrouverais un 20 minutes
pour parler du premier paragraphe de 35.1. C'est juste ça dont je veux
m'assurer. Trouvez-moi la façon de retrouver du temps, autrement dit.
Le Président (M. Poulin) :
Je ne sais pas, M. le ministre, aviez-vous une suggestion ou non? O.K.
M. Jolin-Barrette :
...20 minutes sur 35.1, puis là il vous reste une minute sur 35.1. Là, on
est sur votre amendement, où il vous reste dix minutes. C'est ma compréhension,
monsieur le Président.
Le Président (M. Poulin) :
Tout à fait.
M. Jolin-Barrette : Et
ensuite, suite à votre minute qui va être écoulée, là, on va passer à 35.2.
Mme David : ...ce qui me
reste sur l'amendement même si je parle... j'étends la notion d'amendement,
disons, sur la notion de maintenir une connaissance.
M. Jolin-Barrette : Je
pourrais soulever une question de règlement sur la notion de la pertinence,
mais je ne le ferai pas.
Mme David : Bien, disons
que j'élargis le concept de la prestation dans la langue officielle. Et je
pense que c'est pour les fins d'une bonne... je pense c'est pour une bonne
cause que de se dire... d'abord de rassurer... pas de rassurer, mais d'être
clair, dans votre tête, que la tâche, la responsabilité, puis là ça veut dire
quelque chose pour les ordres professionnels, la responsabilité d'évaluer la
maîtrise du français va incomber au comité d'inspection professionnelle des
ordres, dans un premier temps.
M. Jolin-Barrette : Oui.
Donc, les inspecteurs vont être chargés d'assurer le maintien. Dans le fond, c'est
un outil qu'on rajoute dans leur coffre à outils en termes d'inspection
professionnelle.
Mme David : Alors, ce
qui est intéressant, c'est que, par exemple, dans l'Ordre des comptables
agréés, bien, ce sont des gens experts en comptabilité, en fiscalité, en audit.
Et là on leur demande de devenir des linguistes ou des terminologues... bien,
disons des linguistes. Alors là se pose la question du rôle de l'OQLF, du
niveau de maîtrise attendu. Parce que, là, les tests de français, vous le savez,
les TFI, puis ces trucs comme ça, c'est très, très, très sophistiqué. Les
outils qui vont être mis à la... qui devront être développés pour établir des
standards, et les ordres professionnels n'ont évidemment ni l'expertise ni les
ressources, donc il va falloir un programme de surveillance, il va falloir des
inspecteurs assignés à cette tâche-là. Et c'est de là où cet ordre
professionnel-là, mais peut-être que les autres aussi diraient : Bien, il
va falloir le consigner au Code des professions. Parce que, là, c'est une toute
nouvelle tâche confiée au comité d'inspection professionnelle. Alors, je
voulais demander au ministre : Qu'est-ce que vous aviez, comme, prévu? Un
jour, la loi sera adoptée. Combien de temps de transition pour maintenir ce
français, pour aller chercher les compétences de ça, etc.? Et puis qui, quand,
comment faire tout ça?
• (17 h 10) •
M. Jolin-Barrette :
Bien, en fait, la question, elle est pertinente, là. L'OQLF va être là pour
accompagner les ordres professionnels, notamment pour évaluer la connaissance
pour développer les outils. Vous savez, déjà, l'OQLF, et ça a été fait au cours
des dernières années, ils ont actualisé tous les examens en lien avec les
compétences pour faire en sorte que les compétences linguistiques qui sont
évaluées sont évaluées en lien avec l'exercice de la profession, donc une
connaissance appropriée de la langue officielle en lien avec...
M. Jolin-Barrette : ...la
profession. Donc on va pouvoir... l'OQLF va travailler avec les ordres
professionnels pour évaluer le maintien et la connaissance de la langue. Donc,
l'OQLF va développer ses ressources au bénéfice des ordres professionnels pour
accompagner les inspecteurs dans ce cas-là.
Mme David : Et est-ce qu'on
peut donc dire que chaque ordre professionnel développera ses standards de
maintien de la connaissance du français avec l'accompagnement de l'OQLF? Parce
qu'il faut des standards. Le pauvre inspecteur qui est un ingénieur chimique,
là, il n'a jamais fait ça, lui.
M. Jolin-Barrette : Voyez-vous...
Oui, ça va être fait en collaboration avec l'OQLF. Et vous savez, c'est déjà le
cas, là. Lorsqu'on a quelqu'un, là, qui veut un permis professionnel pour
pratiquer une profession et qui ne rentre pas dans les exceptions qui sont
prévues, là, à 1 ou 2 ou 3, bien, il y a déjà une évaluation de français qui
est faite avec l'OQLF. Alors, en fonction des besoins qui vont être exprimés
par les ordres, l'OQLF va être là pour les accompagner, pour développer les
différents outils.
Mme David : Mais on convient
qu'il va y avoir quand même, je pense, disons, 90 % qui viennent d'une... qui
sont francophones, disons, dans un ordre professionnel. Ce n'est pas eux où ça
va... Tout va se passer en français, puis tout de suite l'inspecteur n'aura pas
de soucis. C'est pour le 10 %, admettons, oui, là, il va falloir évaluer ça.
Vous dites : Oui, ça pourra peut-être être
l'inspecteur quand il va littéralement s'asseoir dans le bureau du
professionnel puis il vérifie la tenue de dossiers, il pose plein de questions
professionnelles sur ses compétences théoriques, pratiques, etc. Il pose même
des... Il regarde même comment le bureau... C'est rendu, là, très spécialisé,
là. Y a-tu une porte d'entrée séparée de la maison? Est-ce que l'insonorisation
est bonne? Etc. Puis là, il va rajouter : Est-ce que son niveau de français est
bon? J'imagine, avec des outils de l'OQLF. Puis si ça me... s'il dit : O.K.
celui là, je pense qu'on va le référer à la section langagière de notre ordre,
et là, il va pouvoir faire ça. Est-ce que je résume un peu assez clairement?
M. Jolin-Barrette : Oui.
Bien, en fait, déjà, là, l'OQLF travaille avec les ordres professionnels. Je
pense qu'il y a 320 scénarios différents qui sont adaptés aux différentes
réalités des pratiques professionnelles déjà. Ça fait qu'il y a déjà une grande
collaboration entre les ordres. Très bien. Ça fonctionne très bien entre les
ordres puis l'OQLF, puis ça va continuer comme ça.
Mais oui, les inspecteurs vont être outillés, avec
des outils linguistiques notamment. Alors, les ordres et l'OQLF vont travailler
ensemble pour développer ça. Et c'est un outil supplémentaire qu'on ajoute dans
le coffre à outils des inspecteurs, justement parce qu'on vient rajouter le
fait que les ordres professionnels également doivent s'assurer du maintien de
la compétence linguistique de leurs membres. Donc, c'est une responsabilité
qu'on confie à l'ordre.
Mme David : Confiée à
l'ordre. Et on confie à l'ordre aussi ce qui s'en vient au 35.2, c'est à dire
dans le cas où, pour des motifs sérieux, ça ne va pas, bien, c'est l'ordre qui
va intervenir à travers son Code des professions. Et c'est là que vous nous
réservez une petite surprise, j'espère, qui va rassurer les ordres par rapport
à l'acte dérogatoire. Est-ce que je comprends bien que c'est plus à partir de
35.2 qu'on va faire référence à 142 ou à...
M. Jolin-Barrette : Mais les
mesures qui vont être prises, dans le fond, ça va être justement...
l'inspecteur constate que le niveau de français n'est pas atteint et donc
l'ordre professionnel va pouvoir inviter le professionnel à prendre les mesures
requises pour assurer le maintien de sa compétence langagière.
Mme David : Et ça sera
l'ordre qui vérifiera qu'il y aura un processus pour dire : Là, ça ne va pas,
là, le maintien n'est pas du tout satisfaisant, donc... Et là, il y aura
différentes mesures liées à ça, avec éventuellement l'article 35.2 qui va
arriver dans le cas de non-respect finalement de cette disposition-là.
M. Jolin-Barrette : Oui.
Puis, dans le fond, l'ordre professionnel peut dire à son professionnel membre
: Je t'ordonne d'aller suivre des cours de formation continue, d'améliorer tes
compétences langagières en français pour que tu puisses rencontrer les standards
de la Charte de la langue française, pour que tu puisses maîtriser adéquatement
le français parce que c'est une obligation légale, au même titre que la probité
ou l'intégrité d'un membre.
Mme David : Ou au même titre
de choses que j'ai connues, là, parce qu'on sait que ça existe, c'est de... La
tenue de dossier, par exemple. Votre tenue de dossier, monsieur, n'est pas
adéquate. Il n'y a pas assez de détails. Alors on vous...
Mme David : ...demande, on va
vous suivre pendant un an. Vous allez avoir un mentor qui va venir regarder,
avec trois dossiers que vous allez lui présenter, votre tenue de dossier. Parce
que tenue de dossier, là, c'est devenu quelque chose d'extrêmement important.
Alors, ça va être un peu la tenue de la langue, comme la tenue de dossier, si
je comprends bien. Sauf que tenue de dossier, c'est un peu plus facile parce
que le professionnel qui est inspecteur s'y connaît plus un contenu. Mais en
contenant, là, qui est la langue, ça, c'est un peu plus difficile. Alors, on
peut comprendre les ordres de dire : Oh! c'est un tout nouveau mandat
qu'on me confie.
Alors, eux vous proposent de consigner ça
dans le Code des professions. Je ne sais pas ce que vous en pensez. Ça, c'est
ma première question. Il faudrait des ressources financières et techniques.
Bon, c'est l'OQLS, ressources financières, je ne le sais pas.
Et la transition, ça, j'ai relu vos
commentaires, il n'y a rien là-dessus. Ça fonctionne comment, à partir de la
sanction de la loi, par rapport à ces mesures-là?
M. Jolin-Barrette : Par
rapport au fait que les inspecteurs vont devoir vérifier?
Mme David : Oui.
M. Jolin-Barrette : Bien, ils
vont travailler avec l'OQLF pour développer les différents outils. Déjà, les
outils, en termes d'évaluation de connaissances du français, pour donner le
permis professionnel basé sur l'examen de l'OQLF, ça existe déjà. Donc, ils
vont travailler à développer les différents outils avec l'OQLF pour faire en
sorte que l'inspecteur va évaluer la compétence langagière également. Mais
l'OQLF, déjà à ce jour, travaille avec les ordres professionnels. Donc, c'est
une continuité de travail. Mais on confie aux ordres professionnels un nouveau
mandat et ils vont s'acquitter de leurs tâches avec l'OQLF.
Le Président (M. Poulin) : ...Marguerite-Bourgeoys,
je sais que vous avez cet intérêt. Il vous reste 3 minutes
30 secondes sur l'amendement effectivement.
Mme David : Merci beaucoup,
monsieur le Président, nouveau président, enfin. Alors, si je comprends bien,
les ordres vont avoir vraiment une nouvelle responsabilité, là, qui leur
incombe. L'OQLF a déjà une expertise là-dedans pour un petit nombre, là, c'est
à dire des gens dont on doit évaluer la compétence pour l'entrée à la
profession, le réputé, etc., bon. Mais là, on parle d'autre chose, là, on parle
de maintenir en continu, donc ça va prendre pas mal de ressources. L'OQLF, on
en parle beaucoup, on n'a pas fini d'en parler : on va en reparler dans la
langue du travail, on en parle en francisation. On en a parlé déjà. Voulez-vous
bien me dire combien... Ça va finir avec combien de ressources on va terminer,
à l'OQLF, pour être en mesure de donner le service?
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, notre gouvernement n'a pas peur d'investir pour la protection puis la
valorisation de la langue française. Lors du dernier budget, vous avez pu le
constater également. Puis il y aura un budget prochainement également qui sera
déposé. Alors, mais il faut dire également qu'il s'agit d'une priorité
gouvernementale. Puis, je pense que ça devrait être une priorité parlementaire,
si je pourrais dire, d'adopter rapidement ce projet de loi là pour faire en
sorte, justement, qu'on redresse la situation du français.
Alors, c'est important de donner les
outils aux ordres professionnels rapidement, que l'OQLF soit mandaté rapidement
pour agir à ce niveau-là. Parce qu'à chaque...
Mme David : ...de vous
l'entendre dire mais...
M. Jolin-Barrette : ...jour
qui passe, c'est un jour de trop qu'on n'a pas les outils pour agir sur le
déclin du français.
Mme David : Alors, si vous
voulez effectivement voir que votre projet de loi, qui va devenir une loi un
jour, soit vraiment efficace, il va falloir vraiment aider l'OQLF. Quand
j'avais le privilège de servir dans ces fonctions-là effectivement... Je sais
que vous avez rajouté des... de l'argent et tout ça, mais là on leur ajoute
tellement des gros, gros mandats qu'il va falloir que ça soit vraiment une
organisation... Parce que les tests langagiers, j'avais eu des longues
conversations avec eux effectivement, ce n'était pas une équipe très, très,
très élaborée, là, et ils n'avaient pas tellement de monde. Là on vient de
mettre... Vous avez dit, tout à l'heure, 300 000, 400 000 professionnels
à.... Je ne dis pas que les 400 000 sont des...
M. Jolin-Barrette : Bien,
c'est ça l'enjeu. Il n'y a pas 400 000 professionnels qui n'ont pas
une connaissance appropriée. On se retrouve...
Mme David : ...à maintenir,
on vient de multiplier beaucoup, pendant toute la carrière, une surveillance
de... puis on part peut-être, dans certains cas, d'assez loin. Donc, il va y
avoir quelques années, je pense, assez occupées où ils ne pourront jamais
remplir leur mandat, l'OQLF ni les ordres s'ils ne sont pas bien accompagnés.
M. Jolin-Barrette : Ils vont
être bien accompagnés, bien dotés. Mais ce n'est pas parce que la montagne,
elle est grande, elle est haute qu'il ne faut pas la monter.
Mme David : Je ne suis pas
une grimpeuse de montagne. C'est des choses que je n'aime pas beaucoup, mais je
comprends votre image.
M. Jolin-Barrette : Bien, ce
n'est pas parce que le défi est important qu'il ne faut pas s'y attaquer.
• (17 h 20) •
Mme David : Je comprends tout
à fait votre image, mais justement, pour monter le Kilimandjaro, il faut se
préparer beaucoup, beaucoup, beaucoup, et puis il faut être bien équipé.
Donc, si on monte l'Everest, ici, il va
falloir qu'il y ait vraiment l'équipement...
Mme David : ...qui suit
soit... et pas soit... et pour les ordres, et pour l'OQLF.
Le Président (M. Poulin) : J'avais
une demande d'intervention, j'imagine que c'est sur l'amendement, du député de
Matane-Matapédia.
M. Bérubé : Merci, M. le Président.
Ce n'est pas que je veux interrompre le dialogue entre la députée de
Marguerite-Bourgeoys et le ministre, mais j'ai entendu le ministre dire que
chaque jour qui passe est important, chaque jour qui passe où on ne demande pas
la connaissance du français pour les immigrants, c'est un jour de trop. Chaque
jour qui passe où on n'intervient pas au niveau collégial pour demander que la
formation se fasse en français, c'est un jour de trop aussi. Je voulais le
rappeler au ministre.
Le Président (M. Poulin) : Merci
beaucoup, M. le député de Matane-Matapédia. Est-ce que, monsieur le ministre,
vous aviez une réaction?
M. Jolin-Barrette : Bien oui,
je suis heureux d'entendre ça parce que, justement, dans le projet de loi, on
impose une épreuve uniforme de français au collégial anglophone. Alors plus
rapidement le projet de loi va être adopté, pour être diplômé, on va nécessiter
des compétences en langue française.
Le Président (M. Poulin) : M.
le député de Matane-Matapédia.
M. Bérubé : M. le Président,
je connais bien le projet de loi du ministre, il sait ce que j'en pense. C'est
un projet de loi qui est particulièrement faible. Il n'est pas trop tard pour
l'améliorer. Tant qu'à être dans ces débats-là, le ministre peut toujours
continuer sa bataille à l'intérieur du caucus pour essayer de convaincre ses
collègues. Je suis prêt à l'aider,
M. Jolin-Barrette : Bien, M.
le Président...
Le Président (M. Poulin) : Monsieur
le ministre.
M. Jolin-Barrette : Voyez
vous toute la pertinence de se rendre rapidement à l'article qui intéresse le
député de Matane-Matapédia sur les dispositions du Cégep, qui sont aux
articles 88.0 point quelque. Alors, ce moment-là, on aura des discussions
intéressantes avec le député de Matane-Matapédia. Mais il faut avancer,
n'est-ce pas?
Le Président (M. Poulin) : M.
le député de Matane-Matapédia.
M. Bérubé : M. le Président,
j'ai déjà été leader parlementaire. Je connais bien toutes ces règles. À moins
que le ministre m'annonce maintenant qu'il est prêt à se joindre à notre
proposition, je ne vois pas l'intérêt d'accélérer les démarches.
Le Président (M. Poulin) : Est
ce qu'il y a d'autres interventions sur ces propos du député de
Matane-Matapédia? Non. Excellent. Madame la députée de Marguerite-Bourgeoys, il
vous reste une minute trente et une seconde sur l'amendement, est-ce que vous
souhaitez compléter?
Mme David : Bien, je vous
dirais juste que, d'une part, nous, on propose trois cours en français. Alors,
j'ai très hâte d'arriver au collégial aussi. Nos propositions sont claires et
ce que je veux dire aussi, c'est qu'on avance en tout respect des clientèles
qui sont touchées, des secteurs de la société qui sont touchés et avec le sens
des responsabilités qui doit aller avec ça.
M. Jolin-Barrette : Bien,
voyez-vous, c'est là où on diverge profondément, parce que, quand vous
dites : En fonction des clientèles, pourquoi est-ce qu'on a la Charte de
la langue française? Pourquoi est-ce qu'on a le projet de loi 96? On ne
fait pas de clientélisme. On s'assure de faire en sorte que la langue française
au Québec, ça soit la langue commune, la langue d'usage. Et c'est justement
pour ça que durant des années, il n'y a pas eu de changements significatifs
comme nous le faisons. Parce qu'il y a toujours une clientèle qui dit :
Non, non, pas nous autres, non, non, pas nous autres, non, non, pas nous
autres. On est en faveur de la langue française, là, oui, oui, oui, c'est bien
important de protéger la langue française, vraiment superimportant, je suis
d'accord avec les objectifs, puis tout ça, mais moi, ah! non, il ne faut pas
que ça s'applique à mon groupe, il ne faut pas que ça s'applique à l'autre
groupe. C'est ça, le problème. Puis si on veut être cohérent, tout le monde
doit faire son effort. Puis c'est surtout pour ça que le projet de loi 96,
il touche tous les domaines de la société, tous les paramètres de la société.
Mais il faut que chaque personne ou chaque clientèle ou chaque groupe se pose
la question : Qu'est ce que je peux faire pour mieux protéger, pour mieux
valoriser la langue française? C'est un effort collectif qui est requis et
l'organe qui est... qui doit faire son plus grand effort, c'est l'État
québécois. Puis là, on s'est imposé des obligations d'exemplarité. Nous, on
relève le défi, on le fait. Mais là il faut que tout le monde embarque dans le
train, comme on dit. Le train, il a quitté la gare. Mais il ne faut pas
défendre des clientèles, il faut penser au statut de la langue parce que ça va
nous transcender dans vingt ans, dans 30 ans, dans 40 ans, dans
50 ans. Bien, si on ne prend pas des actions maintenant, au bout de la
ligne, il va y avoir des conséquences.
Le Président (M. Poulin) : Il
vous reste une minute, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Bien, je pense
que c'est assez, quand même de prendre une minute pour dire que le ministre
interprète fort mal le mot clientèle ou l'esprit dans lequel j'ai pu le dire.
Je suis tout à fait d'accord et effectivement, si ça ne me dérangeait
absolument pas, la question de protéger la langue française, je ne serais pas
ici à passer autant d'heures depuis autant de mois à regarder pour avoir le
meilleur projet de loi possible. Alors, je pense qu'on travaille très...
Mme David : ...et que le
ministre lui-même a déposé plusieurs amendements. Donc, il trouve lui-même que
sa loi peut être améliorée. Je fais des propositions les plus honnêtes possible
pour améliorer aussi. Et ce n'est pas parce qu'on pense à une clientèle ou à
une autre clientèle, mais ça touche tous les pans de la société, puis c'est de
notre devoir de faire le travail de parlementaires. La seule autre option, ce
serait quoi? Ça serait quoi? Ça serait de regarder le projet de loi puis dire:
O.K., tout est correct, on ferme les livres. Merci, bonjour. C'est ça que le
ministre veut? C'est vraiment ça, qu'on soit déjà rendus à la fin, puis que
c'est terminé, puis c'est le plus beau projet de loi de la Terre a jamais
porté...
Le Président (M. Poulin) :
Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, il ne nous reste plus de temps sur
l'amendement.
Mme David : ...
Le Président (M. Poulin) :
D'accord. Est-ce que maintenant, nous sommes prêts à passer... Est-ce que vous
souhaitez retirer votre amendement ou vous souhaitez voter sur... Vous le
retirez? Parfait. Alors, nous revenons... Ah! ça me prend le consentement pour
retirer l'amendement. Monsieur le ministre, vous avez... Vous consentez? Les
membres du gouvernement également? Alors, nous consentons à retirer
l'amendement. Nous retournons donc à l'article 23. C'est bien ça? 35.1.
35.1. Donc, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, il vous restait donc
1 min 30 s à ce niveau-là. C'est bien ça?
Mme David : Alors, je
comprends plus le temps que j'ai, mais ce n'est pas grave, je vais le prendre.
Je finis juste ce que je voulais dire sur le fait que l'argument est très...
disons, peut être débattu, disons ça comme ça, de dire que, parce qu'on pose
des questions, parce qu'on dépose des amendements... Il y en a quand même
plusieurs qui ont été acceptés par le ministre. Et donc ils ne devaient pas
être si mauvais que ça. Puis il y en a même plusieurs qui ont été déposés par
le ministre parce que peut-être qu'il a eu, lui-même... en se rendant compte
qu'il y avait des ajustements à apporter.
Moi, quand j'ai déposé des projets de loi,
ce n'était certainement pas pour dire aux oppositions: Vous n'avez pas un mot à
dire. Puis je n'ai de cesse de féliciter les oppositions sur l'amélioration que
ça a apportée au projet de loi, vraiment. Puis je le dis avec sincérité, que ça
soit sur le conservatoire, que ça soit sur la BANQ, que ça soit sur les
violences, la loi pour prévenir et contrer les violences sexuelles. Alors, les
oppositions ont été formidables, et je le dis, et je leur ai dit à ce
moment-là, et je le redis encore. Alors j'aimerais ça que le ministre ait la
même attitude par rapport à notre travail. On ne le fait pas...
Le Président (M. Poulin) :
M. le député de Chapleau, vous avez une question de règlement?
M. Lévesque (Chapleau) :
Oui... je pense que...
Le Président (M. Poulin) :
Vous pouvez retirer afin qu'on puisse bien vous entendre.
M. Lévesque (Chapleau) :
Oui, c'est vrai. Merci, M. le Président. Je pense que la collègue de
Marguerite-Bourgeoys prête des intentions au ministre actuellement. Puis je
pense que les travaux vont bien et les travaux avancent. Effectivement, on
souhaite que tout aille rondement et continue d'aller rondement. Donc, voilà.
Le Président (M. Poulin) :
Effectivement, en vous rappelant à la prudence, Mme la députée de
Marguerite-Bourgeoys, il vous reste 18 secondes.
Mme David : La
prudence... définition...
Le Président (M. Poulin) :
...des intentions que vous faites aux collègues parlementaires.
Mme David : Bien, moi,
je n'ai jamais, jamais fait cette question de règlement pour le ministre,
jamais. Alors, je suis vraiment d'une... Me dire ça à moi... Même lui est complètement
surpris.
Le Président (M. Poulin) :
Ça allait bien. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys. On continue.
Mme David : Bien, je
n'ai plus rien à dire.
Le Président (M. Poulin) :
D'accord, bien, je vous remercie pour votre intervention. Donc, toujours à
l'article l'article 35.1, est ce qu'il y avait d'autres interventions? Je vois
que non. Alors, nous allons procéder à sa mise aux... Non? Non, on passe tout
de suite à 35.2 parce qu'on le vote en bloc, c'est vrai. Parfait, excusez-moi.
Alors, l'article 35.2, monsieur le ministre en fait la lecture, c'est bien
ça? Parfait.
M. Jolin-Barrette :
Bien, je l'avais déjà lu, mais je vais le relire, monsieur le Président.
"L'ordre professionnel qui, pour des motifs sérieux, considère qu'un de
ses membres n'a pas de la langue officielle une connaissance appropriée à
l'exercice de la profession peut, outre des mesures qui peuvent être prises à
l'égard de celui-ci en vertu du Code des professions, exiger qu'il obtienne
l'attestation délivrée par l'office en troisième du troisième alinéa de
l'article 35.
"De plus, les cours de
perfectionnement qu'un membre d'un ordre professionnel peut être obligé de
suivre avec succès, ainsi que toute autre obligation déterminée dans un règlement
pris en vertu de l'article 90 de ce code qui peut lui être imposé, peuvent
avoir pour objet de permettre à un tel membre de... de la langue officielle une
connaissance appropriée à l'exercice de la profession."
Et les commentaires, monsieur le Président.
Le premier alinéa de l'article 35.2 de la Charte de la langue française
proposé par l'article 23 de la loi prévoit, outre les mesures que prévoit
le Code des professions, les mesures qui peuvent être prises par un ordre
professionnel qui, pour des motifs sérieux, considère qu'un de ses membres n'a
pas de la langue officielle une connaissance appropriée de l'exercice de la
profession.
Le deuxième élément de cet article rend
explicites que les obligations que peut imposer le conseil d'administration d'un
ordre à la suite d'une inspection professionnelle peuvent viser à assurer que
le membre se conforme à son devoir de maintenir une connaissance du français
appropriée à l'exercice de la profession.
Le Président (M. Poulin) :
Merci, monsieur le ministre. Est-ce que vous aviez des commentaires sur le
35.2?
• (17 h 30) •
M. Jolin-Barrette : Oui,
c'est ce que je viens de vous lire.
Le Président (M. Poulin) :
O.K., mais autre...
17 h 30 (version non révisée)
Le Président (M. Poulin) :
...de votre part?
M. Jolin-Barrette : Non, non,
ça va.
Le Président (M. Poulin) :
Aucune mise... O.K., parfait. Est-ce que d'autres collègues souhaitent
intervenir? Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Je vais
intervenir pour vous dire que je n'ai pas de commentaires sur cet article-là,
mais j'insiste pour le dire parce que quand je fais des commentaires, c'est
parce que je trouve que c'est important. Puis quand je n'ai pas de
commentaires, parce que je trouve que l'article est bien, bien charpenté, bien
mis, bien dit. Mais ça s'adonne qu'on va passer vite. Puis je vous annonce
qu'il y a plein d'articles où je vais passer assez vite. Alors, quand on me dit
toujours, et me on répète et on répète qu'on retarde, puis c'est long puis
tatatitatata, bien, moi, écoutez, je travaille avec la rigueur qu'on me
connaît. Je ne vais pas arrêter à la période où je suis rendue dans ma vie, et
quand je n'ai pas de commentaires, bien, je n'ai pas de commentaires parce
qu'il est correct cet article-là. Puis je pense que le ministre a beaucoup
d'exemples antérieurs où je n'ai pas eu de commentaires. Donc, quand j'ai des
commentaires, c'est parce qu'on les a travaillés très sérieusement. Merci,
monsieur le président.
Le Président (M. Poulin) :
Merci beaucoup, madame la députée de Marguerite-Bourgeoys. Monsieur le député
de D'Arcy-McGee.
M. Birnbaum : M. le
Président, je tiens à faire la même précision. Moi, je n'ai pas de commentaire
non plus sur cet article. Je réserve le droit et la responsabilité d'avoir
d'autres commentaires offerts de façon constructive dans les articles qui s'en
viennent. Merci.
Le Président (M. Poulin) :
Absolument. Merci beaucoup. Est-ce que d'autres collègues souhaitent
intervenir? Je crois que nous allons donc pouvoir procéder à la mise aux voix.
Donc, nous allons voter le 35.1 et le 35.2...
Une voix : ...
Le Président (M. Poulin) :
...l'article 23 de façon officielle, qui contient 35.1 et 35.2. Alors,
nous allons procéder à la mise aux voix qui... est-ce qu'on... oui, qui sont en
faveur de...?
M. Jolin-Barrette : Adopté.
Le Président (M. Poulin) :
Est-ce que l'article 23 est adopté? Je n'avais pas la phrase exacte...
qu'il est adopté. Merci beaucoup. Nous allons maintenant procéder à l'article 24.
Nous avons un... bien, je vais laisser monsieur le ministre en faire la lecture
tout d'abord.
M. Jolin-Barrette : ...pour
l'article 24, et je vous annonce qu'on aura un amendement qui est déjà sur
Greffier. Donc : «L'article 37 de cette charte est remplacé par le
suivant : Malgré l'article 35, un ordre professionnel peut délivrer
un permis visé aux articles 40 à 42.2 du Code des professions à une
personne qui n'a pas de la langue officielle, une connaissance appropriée à
l'exercice de la profession, pourvu à la fois : 1. que le permis soit
temporaire 2. que la personne ait, à l'extérieur du Québec, suivi avec succès
la formation ou obtenu le diplôme nécessaire à l'exercice au Québec de cette
profession. Le permis délivré en vertu du premier alinéa est valable pour une
période d'au plus un an.» Et l'amendement, monsieur le Président : À
l'article 24 du projet de loi, remplacer le paragraphe 2 du premier
alinéa de l'article 37 de la Charte de la langue française qu'il propose
par le paragraphe suivant : 2. que la personne ait acquis à l'extérieur du
Québec les compétences professionnelles requises pour l'obtention d'un tel
permis. Commentaire : Cet amendement vise à revoir la formulation du
paragraphe 2 du premier alinéa de l'article 37 de la Charte de la
langue française proposé par l'article 24 du projet de loi afin de
respecter la pratique actuelle à cet égard. Il permet donc la délivrance d'un
permis temporaire à une personne qui a acquis les compétences professionnelles
requises, que celle-ci soit démontrée, selon le cas, par l'obtention d'un
diplôme ou d'une autorisation légale, par la réussite d'une formation ou
autrement.
Donc, en conséquence, l'amendement qu'on
propose à 37, c'est parce qu'on référait, dans le projet de loi, à un diplôme.
Or, parfois, on réfère à un diplôme ou à une expérience professionnelle, donc
c'est pour ça qu'on vient l'ajouter.
Le Président (M. Poulin) :
Merci beaucoup, monsieur le ministre. Alors, nous sommes prêts à entamer la
discussion sur l'amendement. Madame la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Je n'ai pas de
commentaire, monsieur le Président.
Le Président (M. Poulin) :
Merci, Madame la députée. Est-ce que d'autres collègues souhaitent intervenir?
Non. Alors, nous allons pouvoir procéder à la mise aux voix de l'amendement.
Est-ce que l'amendement est adopté?
M. Jolin-Barrette : Adopté.
Le Président (M. Poulin) :
Adopté. Alors, c'est adopté. Toujours à l'article, nous avions un autre
amendement. C'est bien ça? Non. Alors, nous allons procéder à la mise aux voix.
Est-ce qu'il y a des commentaires sur l'article tel qu'amendé?
Mme David : Je n'ai pas de
commentaires, M. le Président.
Le Président (M. Poulin) :
Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, je vais vous reconnaître.
Mme David : Je veux que ça
soit noté.
M. Jolin-Barrette : Inscrit
au procès-verbal.
Le Président (M. Poulin) :
D'accord. Alors, merci, Mme la députée. Est-ce qu'il y avait d'autres
commentaires sur l'article 24 tel qu'amendé? Non. Nous allons pouvoir
procéder à sa mise aux voix. La phrase exacte. Est-ce que l'article 24 tel
qu'amendé est adopté?
M. Jolin-Barrette : Adopté.
Le Président (M. Poulin) :
Adopté. Merci. Nous procédons maintenant à l'article 25, je vais laisser
monsieur le ministre en faire la lecture.
M. Jolin-Barrette : Oui.
«L'article 39 de cette charte est abrogé.» Commentaire : L'article 25
du projet de loi propose d'abroger l'article 39 de la Charte de la langue
française étant donné qu'il ne...
M. Jolin-Barrette :
...produit plus d'effet juridique depuis la fin de l'année 1980.
Le Président (M. Poulin) :
Merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y a des commentaires sur l'article 25?
Non. Alors, s'il n'y a pas d'autres interventions, nous allons procéder à la
mise aux voix. Est-ce que l'article 25 est adopté?
Des voix : Adopté.
Le Président (M. Poulin) :
Adopté. Merci beaucoup.
M. Jolin-Barrette : ...
Le Président (M. Poulin) :
Oui.
M. Jolin-Barrette :
L'article 40 de cette charte est modifié par l'ajout, à la fin, de
l'alinéa suivant : «L'office peut, au moment où il autorise un ordre à délivrer
un tel permis, en déterminer la durée et les autres conditions qui s'y
rattachent.».
Commentaires : La modification proposée à
l'article 40 de la Charte de la langue française par l'article 26 du
projet de loi permettra à l'Office québécois de la langue française de
déterminer la durée et les conditions qui se rattachent à un permis restrictif
lorsqu'il autorise un ordre professionnel à en délivrer.
Et j'ai un amendement, monsieur le
président, qui est sur Greffier également. Donc, article 40... Bien,
article 26, article 40 de la Charte de la langue française : Supprimer, à
l'article 26 du projet de loi, «et les autres conditions qui s'y
rattachent».
Commentaires : Cet amendement supprime, à
l'article 26 du projet de loi, la mention de conditions se rattachant au
permis restrictif délivré en vertu de l'article 40 de cette charte. Donc,
on supprime ce qu'on avait ajouté parce que ce n'est pas nécessaire. Il n'y a
pas d'autres conditions qui s'y rattachent. C'est uniquement la durée que
l'Office détermine.
Le Président (M. Poulin) :
Merci, monsieur le ministre. Est-ce qu'il y avait des interventions sur
l'article... sur l'amendement de l'article 26?
Une voix : ...
Le Président (M. Poulin) :
Le ministre a, oui, proposé un amendement à l'article 26, qui était sur le
Greffier, c'est bien ça?
M. Jolin-Barrette :
Exactement. Donc, si je résume l'amendement, là, c'est parce que dans le projet
de loi, on venait ajouter: L'office au moment où il autorise un ordre à
délivrer un tel permis en détermine la durée et les autres conditions qui s'y
rattachent. Mais il n'y a pas d'autre condition, à part la durée. Donc, c'est
un pouvoir que l'office n'a pas de besoin.
Le Président (M. Poulin) :]
Merci. Est-ce qu'il y a d'autres interventions. S'il n'y a pas d'autre
intervention, nous allons procéder à la mise aux voix de l'article 26, tel
qu'amendé. Pardon, de l'amendement. Pardon. Alors, de l'amendement. Donc,
est-ce que cet amendement est adopté?
Des voix : Adopté.
Le Président (M. Poulin) :
Adopté. Donc, nous allons voter l'article, tel qu'amendé. Est-ce qu'il y a des
commentaires? S'il n'y a pas d'autre commentaire, nous allons procéder à sa
mise aux voix. Celles et ceux qui sont en faveur?
Des voix : Adopté.
Le Président (M. Poulin) :
Adopté. Oui, parfait. Nous allons maintenant passer à l'article 27.
M. Jolin-Barrette : Oui,
monsieur le président. Cette charte est modifiée par l'insertion après
l'article 40 des suivants 40.1. L'Office des professions transmet
annuellement à l'office, pour chaque ordre professionnel, le nombre de permis
délivrés visés à l'article 37 et le nombre d'autorisations spéciales
accordées en vertu de l'article 42.4 du Code des professions ainsi que le
nombre de renouvellements de telles autorisations spéciales. L'office indique
dans le rapport annuel des activités les renseignements ainsi transmis par
l'Office des professions.
40.2. Un ordre professionnel peut utiliser
une autre langue en plus de la langue officielle dans une communication écrite
particulière à l'une des personnes suivantes. 1 un candidat à l'exercice de la
profession qui demande à ce qu'un permis lui soit délivré conformément à
l'article 37 ou en vertu de l'article 40. 2 un membre de l'Ordre qui,
en vertu de la présente loi, n'est pas tenu d'avoir de la langue officielle une
connaissance appropriée à l'exercice de la profession. Un ordre professionnel
peut également utiliser cette autre langue dans une communication orale
particulière avec l'une de ces personnes, sans avoir à utiliser en même temps
la langue officielle.
Commentaire. L'article 40.1 que
propose d'ajouter à la Charte de la langue française, l'article 27 du
projet de loi prévoit que l'Office des professions doit transmettre chaque
année des données concernant les permis, les permis temporaires, les permis
restrictifs temporaires, les permis spéciaux et les autorisations spéciales
accordées par les autres professionnels. L'Office québécois de la langue
française indiquera ces renseignements dans son rapport annuel d'activité.
Le Président (M. Poulin) :
Merci, monsieur le ministre. Est-ce qu'il y a des interventions sur
l'article 27? 40.1
M. Jolin-Barrette : Non.
40.2 Le commentaire. L'article 40.2 de la Charte de la langue française
proposé par l'article 27 du projet de loi permet à un ordre professionnel
de communiquer par écrit dans une autre langue en plus du français dans
certaines situations. Il prévoit également qu'un ordre professionnel peut, dans
ces situations, communiquer oralement dans une autre langue que le français
sans utiliser en même temps le français.
Le Président (M. Poulin) :
Des interventions sur 40.2? S'il n'y a pas d'autre intervention, nous n'allons
pas pouvoir procéder à la mise aux voix de l'article 27. Est-ce que donc
l'article est adopté?
Des voix : Adopté.
• (17 h 40) •
Le Président (M. Poulin) :
Adopté. L'article 28.
M. Jolin-Barrette : 28
Cette charte est...
M. Jolin-Barrette : ...après
l'intitulé du chapitre 6 qui précède l'article 41, de l'article
suivant :
«40.3 pour l'application du présent
chapitre :
«1 un salarié s'entend d'un salarié auquel
s'applique la section 5.2 du chapitre 6... pardon, du chapitre 4
de la Loi sur les normes du travail;
«2 un travailleur s'entend d'un salarié et
d'une personne dont les conditions d'engagement ou de rémunération ou dont la
rétribution de service sont prévues par une entente collective;
«3 une entente collective est celle autre
qu'une convention collective de travail qui est conclue par une association ou
un autre groupement habilité par une loi à la négocier et qui, en vertu de
cette loi, s'applique même à des personnes qui ne sont pas membres de cette
association ou de cet autre groupement;
«4 un employeur s'entend de quiconque fait
effectuer un travail par un salarié ou, étant régi par une convention... par
une entente collective, procure travail à un travailleur ou coordonne les
services offerts par celui-ci;
«5. une association de travailleurs
comprend, outre une association de salariés au sens du Code du travail,
l'association et le groupement visés au paragraphe 3.»
Commentaires : L'article 27 du
projet de loi propose à d'ajouter un article 40.3 à la Charte de la langue
française pour définir certains concepts utilisés dans les dispositions
relatives à la langue du travail. Cette définition vise à protéger les droits des
personnes qui sont des salariés et de certaines autres personnes qui sont
plutôt considérées comme des travailleurs autonomes.
Le Président (M. Poulin) : Merci,
M. le ministre. Est-ce qu'il y a des commentaires sur l'article 28? Il n'y
a pas de commentaires, alors nous allons pouvoir procéder à sa mise aux voix.
Est-ce que l'article 28 est adopté?
Des voix : Adopté.
Le Président (M. Poulin) : Nous
allons pouvoir procéder à l'article 29.
M. Jolin-Barrette : Oui.
L'article 41 de cette charte est modifié :
1 par le remplacement de «rédige dans la
langue officielle, les communications qu'il adresse à son personnel. Il rédige
et publie en français les offres d'emploi ou de promotion» par «doit respecter
le droit du travailleur d'exercer ses activités en français. Il est en
conséquence notamment tenu»;
2 par l'ajout, à la fin de ce qui
suit :
«1 de voir à ce que toute offre d'emploi,
de mutation ou de promotion qu'il diffuse soit en français;
«2 de voir à ce que tout contrat
individuel de travail qu'il conclue par écrit soit rédigé en français;
«3 d'utiliser le français dans les
communications écrites, même celles suivant la fin du lien d'emploi, qu'il
adresse à son personnel, à une partie de celui-ci ou à un travailleur en
particulier ou une association de travailleurs représentant son personnel ou
une partie de celui-ci;
«4 de voir à ce que les documents visés
ci-dessous qu'il rend disponibles soient rédigés en français, et s'il les rend
aussi disponibles dans une autre langue... pardon - à ce que leur version
française soit accessible dans des conditions au moins aussi favorables :
«a) les formulaires de demande d'emploi;
«b) les documents ayant trait aux
conditions de travail;
«c) les documents de formation produits à
l'intention de son personnel.
«Malgré le paragraphe 2 du premier
alinéa, les parties au contrat individuel de travail qui est un contrat
d'adhésion ou dans lequel figurent des clauses types peuvent être liées
seulement par sa version dans une autre langue que le français si, après avoir
pris connaissance de sa version française, telle est leur volonté expresse.
Dans les autres cas, un contrat individuel de travail peut être rédigé
exclusivement dans une autre langue que le français si telle est la volonté
expresse des parties.
«Malgré le paragraphe 3 du premier
alinéa, l'employeur peut communiquer par écrit exclusivement dans une autre
langue que le français avec un travailleur lorsque celui-ci lui en fait la
demande.»
Commentaires : les modifications à
l'article 41 de la Charte de la langue française, proposées par
l'article 29 du projet de loi, visent à ce que les employeurs soient tenus
de respecter le droit que l'article 4 de la charte confère aux travailleurs
d'exercer leurs activités en français.
Pour ce faire, les modifications proposées
prévoient certaines des exigences que les employeurs doivent satisfaire pour
assurer le respect de ce droit. Ainsi, l'employeur doit notamment utiliser le
français dans les offres d'emploi qu'il diffuse, dans les contrats de travail
qu'il conclut ainsi que dans ses communications écrites avec les travailleurs
et les associations de travailleurs. Il doit également voir à ce que divers
documents qu'il rend disponibles dans le cours de ces activités soient rédigés
en français.
Le Président (M. Poulin) : Merci,
monsieur le ministre. Est-ce qu'il y a des interventions sur l'article 29?
Madame la députée de Mercier.
Mme Ghazal : Merci, monsieur
le président. Donc là, ici, on est rentrés dans les... dans la section de la
langue du travail. Et je pense que j'en ai amplement parlé et dit à quel point
le recul du français, une des causes du recul du français au Québec, depuis de
nombreuses années, c'est la langue qui est parlée au travail.
Un autre élément aussi que j'ai souvent
mentionné, c'est le fait qu'on accueille, par exemple, des immigrants souvent
qui parlent français - ce n'est pas tous des immigrants ou des nouveaux
arrivants qui ne parlent pas français, parce qu'ils parlent français - et quand
ils arrivent ici, ils se rendent compte que, sur le marché du travail, leur
anglais n'est pas bon, ils doivent parler anglais pour pouvoir avoir des bons
postes, des bons emplois.
Donc, ça, c'est vraiment un sujet qui est
extrêmement, extrêmement, extrêmement important...
Mme Ghazal : ...on peut
franciser partout dans les écoles, les cégeps, les universités, dans les
maisons, puisqu'on veut aussi vérifier la langue parlée à la maison, partout,
partout, mais, si la langue du travail, ce n'est pas le français et que le
français n'est pas renforcé dans le monde du travail, bien, on n'y arrivera
jamais. On n'y arrivera jamais.
J'aimerais poser des questions au
ministre. J'aurais un amendement. Je le dis tout de suite, mais tout d'abord,
je voudrais poser une question au ministre. De quelle façon si... modifications
font en sorte qu'il n'y aura pas de recul du français dans le monde du travail?
C'est quoi, les éléments importants dans les changements qu'il fait, là, à
l'article 41, donc l'article 29 du projet de loi mais qui modifie l'article 41
de la Charte? Quels sont les éléments qui nous disent : Ah! bien, en faisant
ces changements là, on va faire... on va protéger le français ou faire reculer,
disons, l'anglais au travail?
Le Président (M. Poulin) :
Merci. Mme la députée de Mercier, pour ma compréhension, vous souhaitez
attendre avant de faire le dépôt de l'amendement, c'est bien ça?
Mme Ghazal : Oui, oui.
Le Président (M. Poulin) :
Compte tenu qu'on ne l'a pas, on suspendra pour pouvoir recevoir votre
amendement.
Mme Ghazal : Oui.
Le Président (M. Poulin) : Il
n'y a pas de problème. Alors, monsieur le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui, puis
d'entrée de jeu, je souhaite informer, moi aussi, que j'ai un petit amendement,
qui va être communiqué au secrétariat, monsieur le Président, très court
amendement.
Alors, écoutez, on fait plusieurs choses.
On vient garantir, notamment à l'article 41, supposons que vous prenez le
paragraphe 3°, d'utiliser le français dans les communications écrites, même
celle suivant la fin du lien d'emploi, qu'il adresse à son personnel, à une
partie de celui-ci, ou à un travailleur en particulier, ou une association de
travailleurs représentant son personnel ou une partie de celui-ci.
Prenez le cas d'un travailleur qui a
travaillé toute sa vie pour une entreprise. Prenons le cas d'un travailleur,
supposons, qui travaillait dans une papetière sur la Côte-Nord. Il a passé 30
ans de sa vie là-bas. Du jour au lendemain, il est congédié, avec son préavis,
et tout ça, mais ce travailleur-là, supposons qu'il n'était pas syndiqué. Puis
là bien, dans le fond, l'employeur lui dit : Bien, on met fin à ton lien
d'emploi. Mais on fait ça en anglais. Le travailleur, il est unilingue
francophone, puis là on lui dit : Bien, écoute, on t'offre... comme on dit en
utilisant une expression anglophone, on t'offre un package, mais dans le
package qu'on t'offre pour mettre fin à ton emploi, c'est juste en anglais,
votre indemnité de fin d'emploi, vos vacances, votre salaire, votre régime de
retraite. Ça adonne que l'employeur, dans le fond, il y a une place d'affaires
au Québec, mais la maison mère est aux États-Unis.
Ça fait que là, on congédie un employé,
après de nombreuses années de service, puis on lui dit : Bien, on ne fera pas
ça dans ta langue, on ne fera pas ça en français. Alors ça, ça vient protéger
le travailleur qui... notamment, il y a une terminaison de son lien d'emploi,
où on dit d'utiliser le français dans les communications écrites, même à
celles... même celles suivant la fin du lien d'emploi, qu'il adresse à son
personnel, à une partie de celui-ci ou à un travailleur en particulier.
Ça, c'est majeur. C'est pour dire, dans le
fond, que le travailleur, il a le droit de recevoir la documentation écrite de
son employeur en français. Puis c'est arrivé au Québec récemment, encore, que
des gens soient congédiés uniquement dans une autre langue que la langue
commune, puis que leurs épargnes, leurs vacances, bien, la personne ne comprend
même pas, au Québec. Qu'est-ce que ça signifie? Ça fait qu'on vient garantir le
droit, au travailleur, qu'on communique avec lui en français.
Mme Ghazal : ...dans la loi
actuelle, dans la charte, c'est permis, quand il y a une cessation, la fin d'un
lien d'emploi, de communiquer... que l'employeur communique en une autre langue
que le français. C'est permis. C'est-à-dire que la façon que c'est rédigé,
l'employeur... ce qui a été biffé, là... rédige dans la langue officielle des
communications qu'il adresse à son personnel. Il rédige et publie en français
les offres d'emploi ou de promotion. Comme on ne parlait pas explicitement de
la fin du lien d'emploi, on ne pouvait pas, avec cet article, là, dire
qu'implicitement, c'était obligé. Est-ce que c'est le cas?
M. Jolin-Barrette :
Exactement.
Mme Ghazal : Donc, ce n'était
pas obligatoire, et non pas... On vient juste préciser quelque chose qui est
obligatoire?
M. Jolin-Barrette : Oui,
bien, ce n'était pas obligatoire.
Mme Ghazal : Ce n'était
pas...
• (17 h 50) •
M. Jolin-Barrette : Il
fallait le préciser, parce qu'on pourrait se retrouver dans une situation où ce
n'était pas fait. L'autre élément également, dans le projet de loi, dans les...
M. Jolin-Barrette : ...avant
de pouvoir avoir un contrat de travail dans une autre langue que le français,
la version française doit être présentée préalablement.
Mme Ghazal : Pour un contrat?
M. Jolin-Barrette : Pour un
contrat pour un contrat de travail.
Mme Ghazal : Ça, c'est dans
quel article?
M. Jolin-Barrette : Quand le
contrat est... adhésion. Donc, c'est le paragraphe 2. C'est ça. Donc, de
voir à ce que tout contrat individuel de travail qu'il conclut par écrit soit
rédigé en français.
Mme Ghazal : Donc, ça, c'est
beaucoup les communications écrites?
M. Jolin-Barrette : Oui.
Mme Ghazal : Est ce qu'il y a
un autre endroit dans le projet de loi, là, je me rappelle plus des articles
exactement, où on parle aussi des communications orales? Où est-ce que là
aussi, quand on dit "écrites", quand on a des exigences pour la
communication écrite, donc implicitement, l'oral suit, ou ce n'est pas la même
chose, comme les autres articles dont on a parlé?
M. Jolin-Barrette : Oui.
Bien, en fait, il faut comprendre l'article 41 qui est la suite logique de
l'article 4 qu'on est venus insérer, de la Charte, qui confère le
droit aux travailleurs d'exercer leurs activités en français. Donc ça, c'est
l'opérationnalisation de qu'est-ce que... en quoi constitue le droit
fondamental de travailler en français.
Mme Ghazal : O.K. Ça, c'est
l'article 4 qui dans la charte?
M. Jolin-Barrette : Oui.
Mme Ghazal : Mais qu'on dit
qu'il faut que ça se passe en français, mais qu'après ça, comme on dit, le
diable est dans les détails, les détails faisaient en sorte qu'il y avait
beaucoup de façons de contourner cette exigence de l'article 4.
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, l'article 4, il n'était pas exécutoire. Dans le fond, il est là,
vous avez le droit de travailler en français, mais il n'y a pas d'outils pour
le faire respecter. Alors ce qu'on vient faire, notamment à l'article 41,
c'est qu'on vient l'ajouter.
Mme Ghazal : Et, tu sais, moi,
j'ai beaucoup travaillé dans le milieu privé et souvent, même les sièges
sociaux des entreprises où j'ai travaillé étaient américaines ou ailleurs au
Canada. Puis ça arrivait, tu sais, souvent, même quand il n'y avait pas des
gens de siège social qui étaient présents, quand ils étaient présents, ça se
passe en anglais, c'est terminé, là, même un haut dirigeant venait faire une
présentation lors des... ce qu'on appelle les town hall, les... quand on avait
des rencontres de tous les employés de l'usine, ils venaient parler en anglais,
puis là, on avait le directeur des ressources humaines qui faisait la
traduction parce que la majorité des employés étaient francophones. Mais ça
arrive souvent, en dehors du fait qu'il y a des gens qui viennent de l'étranger,
là, dans l'entreprise, dès qu'il y a un travailleur qui habite au Québec, hein,
et qui ne parle pas français, ou un cadre, bien, que dans les conversations,
dans les réunions, il est seul, il est l'unique unilingue anglophone et c'est
fini, là, tout se passe en anglais, sans aucune exception.
Moi, j'ai vécu ça tout le temps, toujours,
même quand je travaillais dans la très ancienne, très francophone Bombardier.
Je me rappelle très bien. Il fallait que je donne une formation en santé,
sécurité et environnement au travail et il y avait quelques travailleurs qui
étaient unilingues francophones là, des Québécois... anglophones, des
Québécois, qui étaient là. Et là on disait à tous les travailleurs qui, dans la
majorité des francophones : C'est correct, pour ne pas perdre du temps, on
fait ça en anglais seulement, puis là tout le monde, pour montrer qu'ils
parlaient anglais puis qu'ils comprenaient : Oui, oui, il n'y a pas de
problème, on comprend, on comprend. Puis là, on faisait une formation en santé,
sécurité et en anglais seulement. Maintenant, ma question : Est ce que ce
genre de situation là, avec un article comme celui-là, même si on parle juste
de la communication écrite, n'aurait plus lieu?
Le Président (M. Poulin) : Merci,
Mme la députée. Monsieur le ministre.
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, on va le voir plus loin, notamment, c'est notamment au niveau de la
procédure de francisation qu'on vient tendre aux entreprises de 25-49. Donc,
les programmes de francisation ont pour but la généralisation de l'utilisation
du français à tous les niveaux de l'entreprise : Un, la connaissance de la
langue officielle chez les dirigeants, les membres des ordres professionnels,
les autres membres du personnel. Deux, l'augmentation s'il y a lieu à tous les
niveaux de l'entreprise, y compris au sein du conseil d'administration, du
nombre...
Mme Ghazal : Ça, c'est quel
article?
M. Jolin-Barrette : C'est 141
de la Charte, actuellement. On va voir plus loin également qu'on a des mesures
pour renforcer 141 dans le projet de loi 96. Donc...
Mme Ghazal : Et vous avez
parlé des membres du C.A. et des hauts dirigeants. Est-ce qu'on parlait des
hauts dirigeants?
M. Jolin-Barrette : Oui, des
hauts dirigeants.
Mme Ghazal : O.K.
M. Jolin-Barrette : Donc, ça,
c'est 141 de la Charte. Quand l'entreprise est assujettie à la procédure de
francisation, c'est 141 qui s'applique. Donc, nous, dans le projet de
loi 96, on va venir renforcer également l'article 141, on va le voir
plus loin... pardon. Alors, c'est la procédure de francisation qui s'applique à
votre cas d'exemple que vous parlez, du...
M. Jolin-Barrette :
P.D.G. qui...
Mme Ghazal : C'est...
M. Jolin-Barrette : Puis
juste pour vous spécifier. Dans le fond, là, ce qu'on étudie, c'est l'écrit.
Dans le fond, c'est les règles écrites pour les travailleurs, donc, tout ça.
L'oral, ça va être plus loin, notamment avec la procédure de francisation. Mais
ce qu'on fait, là, c'est vraiment, tu sais, dans le fond, tout ce que le
travailleur, l'environnement écrit de 41. Dand le fond, le droit de travailler
en français par l'écrit, en quoi ça consiste. Parce qu'exemple le contrat de
travail à 41, bien, nécessairement, c'est un document écrit, là. Ce n'est pas
un document oral, là. Donc, on part du principe général du droit du travailleur
d'exercer ses activités en français, puis dans le fond, ici, on vise les
documents qui vont être dans la vie, comment je pourrais dire, dans la vie
professionnelle d'un travailleur, quels seront les documents qu'il consultera.
Quand vous allez à 1, bien, offre
d'emploi, les offres d'emploi, ils doivent être en français. Mutations,
promotions qu'ils diffusent soient en français. Après ça, 2, on dit: Contrat
individuel de travail qu'il conclut, il faut qu'il soit rédigé en français. 3
Utiliser le français dans les communications écrites, même celles suivant la
fin du lien d'emploi qu'il adresse à son personnel, à une partie de celui-ci, à
un travailleur en particulier ou une association de travailleurs. Exemple, les
communications avec le syndicat. Des communications... L'infolettre, ça doit
être en français. Les communications... Un avis disciplinaire va devoir être en
français.
4. De voir à ce que les documents visés
ci-dessous qu'il rend disponibles soient rédigés en français et, s'il les rend
aussi disponibles dans une autre langue, à ce que leur version française soit
accessible dans des conditions au moins aussi favorables, c'est-à-dire les
formulaires de demande d'emploi, les documents ayant trait aux conditions de
travail, les documents de formation produits à l'intention de son personnel. Ça
fait que si jamais l'employeur veut le rendre dans une autre langue aussi,
bien, il faut que ça soit la même chose, là, en français, là. Exemple,
supposons il y a une offre d'emploi dans un journal. Bien, il faut offert,
l'offre d'emploi dans un journal, dans une situation équivalente dans le
journal francophone supposons. Ça fait que c'est ça. Ça fait qu'à ce moment-ci,
j'introduirais l'amendement, si vous le permettez ou vous voulez qu'on
continue?
Mme Ghazal : Bien, moi,
j'avais un amendement. Donc, on pourrait... Je ne sais pas, est-ce que...
M. Jolin-Barrette :
Est-ce que c'est un court, court amendement que sur les clauses types?
Le Président (M. Poulin) :
L'amendement du ministre vient avant le vôtre. Alors, peut-être ça pourrait
faciliter l'article par article, là.
Mme Ghazal : Ah! O.K.
Le Président (M. Poulin) :
Parce qu'on cible les deux alors que, vous, vous étiez au 5.
Mme Ghazal : O.K.
Le Président (M. Poulin) :
Ça fait qu'on pourra y revenir sans problème. Oui, monsieur le ministre,
allez-y.
M. Jolin-Barrette :
Donc, à l'article 29 du projet de loi, dans le paragraphe 2 supprimer
dans le deuxième alinéa de l'article 4 de la Charte de la langue française
qu'il propose ou dans laquelle figurent des clauses types.
Commentaire. Cet amendement apporte au
deuxième alinéa de l'article 41 de la Charte de la langue française que
propose l'article 29 du projet loi une modification en concordance avec un
amendement qui sera présenté à l'article 44 du projet de loi modifiant
l'article 55 de la charte, et ce, afin d'en retirer la mention des contrats
comportant des clauses types. Donc, on vient juste barrer dans l'amendement la
section sur les clauses types, là, dans l'avant-dernier alinéa, là, dans lequel
figurent les clauses types.
Le Président (M. Poulin) :
Est ce qu'il y a des interventions sur l'amendement du ministre? S'il n'y a pas
d'intervention à l'amendement, nous allons procéder à la mise aux voix. Est-ce
que l'amendement est adopté?
Des voix : Adopté.
Le Président (M. Poulin) :
Adopté. Alors, Mme la députée de Mercier, est-ce que vous souhaitez déposer dès
maintenant, votre amendement?
Mme Ghazal : Bien, je
voulais juste comme continuer la discussion. Quand le ministre me parle de
l'article 141 de la charte, donc, dans le...
M. Jolin-Barrette : Oui,
de la langue française.
Mme Ghazal : Puis le
projet, il dit qu'on le renforce. Donc, dans le projet de loi, c'est
l'article... En faisant une recherche rapide, c'est l'article 84. C'est
ça?
M. Jolin-Barrette : Je
ne suis pas rendu là, je vous dirais, mais...
Mme Ghazal : C'est parce
que j'essaie de... Mais ce n'est pas grave. De ce que je vois, ça ne vient pas
toucher au sujet dont je veux parler. À l'article 4 qui devient exécutoire
avec le projet de loi 96, est-ce que ça fait en sorte que les hauts
dirigeants aussi doivent parler le français?
M. Jolin-Barrette : En
fait, à cause de la procédure de francisation, c'est l'article 41 qui
s'applique. Donc, dans l'article 41 de la charte, quand on y va, là...
Mme Ghazal : Ah! C'est
41 de la charte.
M. Jolin-Barrette : 141,
pardon.
• (18 heures) •
Mme Ghazal : 141. Oui.
M. Jolin-Barrette :
Donc, 141. Oui, les hauts dirigeants...
18 h (version non révisée)
M. Jolin-Barrette : ...doit
parler le français, parce qu'on dit, là: la connaissance... on dit: «Les
programmes de francisation ont pour but la généralisation de l'utilisation du
français à tous les niveaux de l'entreprise par: 1° la connaissance de la
langue officielle chez les dirigeants, les membres des ordres professionnels et
les autres membres du personnel», puis...
Mme Ghazal : Les dirigeants?
M. Jolin-Barrette : Oui, les
dirigeants. Puis ensuite, à 2°, vous avez: «l'augmentation, s'il y a lieu, à
tous les niveaux de l'entreprise, y compris au sein du conseil
d'administration, du nombre de personnes ayant une bonne connaissance de la
langue française de manière à en assurer l'utilisation généralisée.»
Mme Ghazal : Donc, ce que la
charte actuelle dit et qui, visiblement, n'est pas respecté, elle dit que les
dirigeants... mais elle ne dit pas tous les dirigeants, elle dit: Les
dirigeants doivent avoir une connaissance de la langue officielle. Puis après
ça, quand on dit «l'augmentation, s'il y a lieu, à tous les niveaux de
l'entreprise...» Ah! Oui...
M. Jolin-Barrette : Bien,
chez les dirigeants. Ce n'est pas un dirigeant sur deux, là, c'est chacun des
dirigeants.
Mme Ghazal : Donc, c'est:
chacun des dirigeants doit parler le français dans la charte actuelle, dans
notre monde actuel avant 96?
M. Jolin-Barrette : Oui. Avec
la procédure de francisation.
Mme Ghazal : Avec la
procédure de francisation, là, qui s'appliquait aux entreprises de...
M. Jolin-Barrette : Aux 50 et
plus; aux 50 et plus.
Mme Ghazal : 50 et plus.
Maintenant, c'est 25.
M. Jolin-Barrette : Nous, on
amène ça à 25-49.
Mme Ghazal : Et d'augmenter
le niveau de connaissance partout. O.K. Mais, en ce moment, ça, ce n'est pas
respecté, ces articles-là ne sont pas respectés. Dans le projet de loi 96, où
est-ce qu'on renforcit ça?
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, actuellement, les entreprises sont accompagnées par l'OQLF dans la
démarche de francisation.
Mme Ghazal : Parce que, dans
le fond, mon point, c'est que dans une entreprise comme... J'ai mentionné
quelques exemples où ce n'est même pas les hauts dirigeants, là. Il suffit
juste que quelques employés du même niveau que les autres employés ne sachent
pas parler le français, et dans le monde qui travaille, c'est terminé, tout se
passe en anglais. Je veux dire, il n'y a personne qui n'a pas vécu... qui n'a
pas travaillé dans une entreprise qui n'ait pas vécu ça, à moins que ce soit une
entreprise de deux personnes puis qu'il y ait juste trois francophones, là. Je
parle des entreprises moyennes normales, là. Moi, j'ai souvent travaillé dans
des entreprises de plus de 100 employés, donc c'est sûr que la francisation, le
processus de francisation s'applique. Et on a aussi des cas en ce moment qui
sortent beaucoup dans les médias sur des hauts dirigeants qui ne parlent pas le
français, et je ne parle même pas des entreprises à charte fédérale où le
projet de loi, maintenant, veut que la Charte de la langue française
s'applique, qu'on pense juste au célèbre cas d'Air Canada, avec Michael
Rousseau, je ne parle même pas de ces cas-là, je parle d'entreprises
québécoises, siège social au Québec, et les hauts dirigeants... conseil
d'administration, mais même pas, les hauts dirigeants dans l'entreprise, des
cadres ne parlent pas notre langue nationale. C'est le cas en ce moment avec la
charte qu'on a, qui dit qu'il faut qu'ils la parlent. Donc, clairement, elle
n'est pas respectée, puis, je ne sais pas, peut-être que là, ils ne sont pas
très bien accompagnés avec l'OQLF, ou il y a eu une démission, on a dit: Bien,
c'est comme ça que ça se passe. Le monde des affaires, c'est en anglais, puis
on a démissionné.
Maintenant, qu'est-ce qui, dans la Charte de
la langue française, vient renforcer ça pour que ça soit différent une fois que
le projet de loi 96 est adopté, pour que cette situation change, puisque c'est
exigé dans la charte actuelle et ce n'est pas respecté, et la situation s'est
empirée, elle s'est empirée au Québec?
M. Jolin-Barrette : Bien,
dans un premier temps, là, vous avez fait référence à la situation de Michael
Rousseau à Air Canada. Dans le fond, Air Canada, c'est une entreprise de
juridiction fédérale, on va venir l'assujettir. Puis, puisqu'on va venir
l'assujettir, on va appliquer la procédure de francisation, c'est une
entreprise de 25 employés et plus. Donc, ils vont être accompagnés par l'OQLF
pour amener la généralisation de l'utilisation du français, notamment au
conseil d'administration, mais également chez les hauts dirigeants. Premier
élément.
Également, on rend exécutoires les droits
des travailleurs que leur environnement soit de langue française. Donc, ça
signifie qu'il y a des recours à la portée des travailleurs pour travailler
dans un environnement de langue française.
Mme Ghazal : Moi, je...
M. Jolin-Barrette : Et je
tiens juste à réitérer également que, dans la foulée des événements de la
conférence à la Chambre de commerce... Montréal métropolitain, l'OQLF a déjà
offert à Air Canada une offre d'accompagnement, qui a été à ce jour déclinée.
Alors...
Mme Ghazal : Qu'est-ce que
vous avez l'intention de faire avec... On vous dit non, c'est terminé? Ça se
termine là?
M. Jolin-Barrette : Justement,
un coup qu'on va avoir la loi, on va s'assurer qu'ils s'impliquent, ils vont
devenir assujettis à la juridiction...
M. Jolin-Barrette : ...donc à
la loi 101, et donc on va appliquer la procédure de francisation.
Mme Ghazal : Et est-ce qu'on
va lui donner un délai de six mois?
M. Jolin-Barrette : Non, il
n'y a pas de délai de six mois pour que la loi s'applique aux entreprises de
juridiction fédérale.
Mme Ghazal : Mais en ce
moment, moi, je vais juste regarder la liste, là, d'entreprises, parce que, là,
j'ai parlé de Michael Rousseau en disant : Bien, c'est une entreprise à charte
fédérale. On peut comprendre, admettons, vu que le projet de loi 96 n'est
pas encore adopté, il est supposé s'y appliquer, mais prenons juste des
exemples d'entreprises très, très, très. Québec inc., où les hauts dirigeants
ne parlent pas français. Alimentation Couche-Tard. Ça, je pense que le ministre
est au courant. Rio Tinto Alcan. SNC-Lavalin. Et là, je ne parle pas des... je
ne parle même pas des... je parle des hauts dirigeants dans l'entreprise, les
plus hauts dirigeants, qui doivent probablement, quand ils embauchent,
embaucher des gens de leurs connaissances, de leurs contacts, et plus bas dans
la hiérarchie, plus bas, il va toujours avoir probablement des anglophones
unilingues. Donc, comment est-ce que l'article 4 va être respecté?
J'essaie de trouver, moi, j'ai un
amendement qui serait très, très clair et très simple, pour que ça soit
respecté, puisque dans la situation actuelle, avec la charte actuelle qui leur
exige, et j'ai l'impression que de ce que j'entends des réponses du ministre,
c'est que ce qui est écrit à l'article 141 de la charte actuelle est
suffisant. Il ne le modifie pas. Il dit: Bien, c'est écrit, on exige aux
entreprises du Québec, là, et maintenant aussi à charte fédérale, dans un autre
article, mais concentrons-nous juste sur les entreprises du Québec, 'est écrit
qu'on exige le français pour les dirigeants, les professionnels, etc.
L'article 141, ce n'est pas le cas. Et le ministre ne vient même pas
renforcer cet article-là. Donc, comment est ce que la situation va changer?
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, deux choses l'une. Les entreprises ont le droit d'embaucher des gens qui
ne parlent pas français. Dans le fond, ce sont des entreprises privées et ils
peuvent embaucher des patrons, peuvent embaucher des dirigeants ou des
travailleurs qui ne maîtrisent pas le français, sous réserve d'est-ce qu'ils
sont assujettis à d'autres parties de la Charte de la langue française?
Exemple, vous allez chez Lavalin, O.K., puis vous êtes un ingénieur. Bien, pour
être un ingénieur qui travaille chez Lavalin, nécessairement, vous allez parler
français parce que vous avez... vous devez avoir une connaissance appropriée de
la langue officielle. Ça fait que premier élément. Là, on est dans le cadre des
dirigeants. La procédure de francisation s'applique, donc à partir du moment où
la personne est embauchée et rentre dans la procédure de francisation. La
distinction qu'il y a entre avant le projet de loi 96 et après le projet
de loi 96, c'est au niveau des droits fondamentaux, notamment pour les
travailleurs. Les travailleurs ont le droit de travailler en français et ces
mesures-là sont exécutoires. Donc ils vont pouvoir exiger que ça se passe en
français.
Mme Ghazal : Et comment ça va
arriver pour les travailleurs? C'est à dire que le travail va être dans une...
rencontre, comme j'ai mentionné, par exemple, pour une formation, puis il y a
deux personnes dans la rencontre, qui sont un groupe, là, de travailleurs, et
deux personnes ou une personne parle anglais. Et déjà, on change de langue puis
tout le monde parle en anglais parce que tout le monde comprend à peu près. Ça
fait qu'ils disent : Ce n'est pas grave, là, on n'a pas de temps à perdre de
traduire ou de parler avec les deux langues. On comprend quand même assez bien,
pas besoin. Ça, c'est quand d'autres travailleurs parlent anglais.
Ça fait qu'imaginez quand c'est le boss.
Souvent, on dit, dans les cours ou les articles de gestion, souvent la culture
d'entreprise, bien, elle est imprégnée de la stratégie ou de la vision des
hauts dirigeants à l'intérieur de l'entreprise. Donc, si déjà, dans les faits,
le haut dirigeant parle en anglais parce qu'il est unilingue anglophone, qu'on
le veuille ou pas, ça va se percoler ou ça va déteindre, ou ça va influencer
tous les niveaux hiérarchiques de l'entreprise. C'est sûr et certain, c'est sûr
et certain.
Le Président (M. Poulin) :
Merci, Mme la... Merci. Je ne sais pas si vous avez complété votre
intervention?
Mme Ghazal : Bien, je suis en
train de discuter. Oui. Non, je n'ai pas complété.
Le Président (M. Poulin) :
Ah! d'accord. C'était une pause pour...
Mme Ghazal : e réfléchis en
même temps que je parle.
Le Président (M. Poulin) :
Ah! c'était une pause. D'accord.
• (18 h 10) •
Mme Ghazal : Oui, je sais,
moi, je suis du genre à... il n'y a pas... jamais de silence dans mes phrases,
puis... mais là, je voulais faire de l'effet et avoir un silence et vous avez
pensé que j'ai terminé.
Le Président (M. Poulin) :
...coupée. Désolé...
Le Président (M. Poulin) :
...c'est de ma faute. J'ai le député de Matane-Matapédia, qui a également levé
sa main simplement, mais je vous laisse compléter, Mme la députée de Mercier.
M. Bérubé : Merci, M. le
Président. Question de...
Le Président (M. Poulin) :
Ah! bien, je laissais la députée de...
Mme Ghazal : Bien, ce n'est
pas grave... Il a commencé.
Le Président (M. Poulin) : Ah!
ça vous va? O.K.
M. Bérubé : Très court, mais
ça va aider tout le monde, je pense. Question de compréhension. Le ministre
nous indique une fois qu'une fois que le projet de loi serait éventuellement
adopté, la loi s'applique aux entreprises à charte fédérale. Alors, je veux
savoir comment ça fonctionnerait pour Air Canada, pour le CN. Alors, si je
comprends bien, l'exemple qu'il a donné, d'accompagnement pour Air Canada, ça a
été refusé. À partir du moment où ça fonctionne, les fonctionnaires du
gouvernement du Québec peuvent entrer, puis le gouvernement fédéral se dit : On
n'applique pas la loi, mais une fois qu'elle est adoptée, O.K., vous pouvez
venir.
J'aimerais ça qu'il m'indique les
assurances qu'il a que le gouvernement fédéral va accepter cela au moment où il
va adopter sa loi. Je ne sais pas s'il a de la correspondance qui peut nous
démontrer que le gouvernement fédéral est en accord, qu'il va abandonner sa juridiction?
Ça fait plusieurs fois que je pose la question, mais pour l'instant, ça repose
uniquement sur le mode incantatoire du ministre, qui dit : Ça va arriver, tu
sais, mets-le dans le projet de loi, puis ça va arriver. Pas convaincu de ça,
moi, puis comme je n'ai pas de preuve de ça, je continue de dire que c'est du
n'importe quoi, M. le Président.
Le Président (M. Poulin) :
Merci, monsieur le député de Matane-Matapédia. M. le ministre, est-ce que vous
avez une réaction?
M. Jolin-Barrette : Bien,
oui. La première des choses qu'il faut faire, c'est d'assujettir les
entreprises de juridiction fédérale à la Charte de la langue française. À
partir du moment où le Parlement du Québec adopte la loi, bien, les entreprises
sont soumises et vont être assujetties à un processus de francisation, puis à
l'ensemble du régime de la Charte de la langue française. Et l'OQLF a tous les
moyens requis pour imposer notamment un pouvoir d'ordonnance aux entreprises
qui ne s'assujettiraient pas aux programmes de francisation.
M. Bérubé : ...dernière
intervention là-dessus.
Le Président (M. Poulin) : M.
le député, oui.
M. Bérubé : Je présume qu'il
y a eu des échanges avec le gouvernement fédéral, ne serait-ce que parce que le
gouvernement fédéral est au courant qu'il y a ce projet de loi, qu'il y a eu
des échanges. Est-ce que le ministre peut nous indiquer c'est quoi, la
réceptivité du gouvernement du Canada, face à une intention unilatérale du
gouvernement du Québec d'intervenir dans un champ de juridiction fédérale?
Parce qu'à la rigueur, on pourrait décider qu'on est les seuls gestionnaires de
la culture uniquement parce qu'on le met dans un projet de loi, qu'on ait un
seul rapport d'impôt... Je pourrais continuer très longtemps les exigences du
Québec. On pourrait se débarrasser de la monarchie... Tu sais, je pourrais
continuer très longtemps. Pourquoi ce serait l'unique cas où ça fonctionnerait
parce que le ministre en a décidé ainsi?
Le Président (M. Poulin) : M.
le ministre.
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, c'est parce que là, le député de Matane-Matapédia fait référence parfois
à des champs de compétence qui sont prévus dans la Constitution nommément.
Alors là, ce n'est pas un champ de compétence qui est prévu par la
Constitution. Et le fédéral n'a pas à se retirer de sa juridiction. Le critère,
c'est, au Québec, c'est la loi québécoise qui s'applique. Et il n'y a rien qui
entrave la compétence fédérale, supposons, sur les chemins de fer, que les
Québécois puis les Québécoises puissent travailler dans leur langue en français
au Québec.
Alors, ce n'est pas le fait que le fédéral
a une juridiction sur les avions ou sur les trains. C'est le droit fondamental
des Québécois de travailler dans leur langue en français. Alors, ça, ça doit
s'appliquer, et ce n'est pas un motif d'exclusion. Et la Charte québécoise va
s'appliquer parce qu'on vient viser toutes les entreprises.
Le Président (M. Poulin) : Merci,
monsieur le ministre. Mme la députée de Mercier.
Mme Ghazal : Oui. Bien, en ce
moment, là, dans le monde réel dans lequel on vit, la Charte de la langue
française est bafouée à tous les jours dans les entreprises privées. C'est le
cas. J'essaie de trouver, dans le projet de loi, quelque chose qui va faire que
ça va être différent après son adoption. Je ne le vois pas.
Mais le ministre est d'accord avec moi. Il
dit qu'il faut que les dirigeants aussi parlent français, et ça s'applique à
eux, pas uniquement aux employés. Même si les entreprises, les employeurs ont
le droit d'embaucher des unilingues anglophones, il faut quand même respecter
le droit de tout le monde de travailler en français. Mais là on est comme dans
un... comment dire... le chien qui se mord la queue.
C'est parce que le problème, c'est que,
quand on des hauts dirigeants, puis des dirigeants, puis des cadres qui sont
unilingues anglophones, ça fait en sorte que les employés, je veux dire, ils
vont... ils se sentent mal de défendre leur droit de parler en français. Admettons,
je ne sais pas, là, qu'ils veulent négocier une hausse ou une augmentation, par
exemple, dans des cas d'employés non syndiqués, comme il y en a beaucoup au
Québec. Moi, j'ai travaillé dans des entreprises et syndiquées et non
syndiquées, de plus d'une centaine d'employés, avec... dans des usines, là, des
shops. Et c'est difficile d'avoir l'employé tout seul qui doit défendre sa
langue devant celui qui lui donne sa...
Mme Ghazal : ...paie, celui
qui paie le pain qu'il amène à la maison.
Donc, si le ministre est d'accord avec moi
qu'il faut que les dirigeants aussi parlent la langue. Et s'il trouve que c'est
important puis qu'il trouve que c'est une bonne chose que le projet de loi fait
en sorte que l'article 4 devienne exécutoire, bien, ça va être important
de clarifier cet aspect-là parce que c'est là le nerf de la guerre. C'est ça
qui est le plus important. On ne peut pas juste exiger des immigrants de parler
français quand, dans les entreprises, ce n'est pas le cas, on parle des deux
côtés de la bouche.
Donc, moi, je demande... Je ne sais pas si
le ministre veut ajouter quelque chose à ce que j'ai dit.
M. Jolin-Barrette : Bien, je
pense... vous avez un amendement.
Mme Ghazal : Oui, mais
l'amendement, je suis certaine, après la discussion que j'ai eue avec le
ministre, qu'il va être d'accord avec ça puisque, lui-même, il a dit oui, il
faut que les hauts dirigeants et les dirigeants parlent aussi français pour que
ça se passe en français dans les entreprises.
Donc, moi, je viens juste clarifier ce
avec quoi, il est d'accord avec moi.
M. Jolin-Barrette : Juste
pour être clair, là, dans le fond, on vient conférer au travailleur le droit de
travailler en français. Ça veut dire, si le patron s'adresse dans une autre
langue que le français aux employés, l'employé a un recours en vertu de la Loi
sur les normes du travail ou en vertu d'une poursuite civile également.
Mme Ghazal : Bien, c'est
ça que j'étais en train de dire, et que le ministre n'a pas entendu. C'est très
difficile de mettre sur les épaules d'un simple employé, d'un employé et même
d'un cadre dont le boss est unilingue, par exemple, dans la hiérarchie,
unilingue anglophone, de mettre sur ses épaules le poids de défendre sa langue,
de défendre la langue commune en ayant des recours face à la personne qui lui
paie un salaire, face à la personne qui, comme je le disais, fait en sorte
qu'il est capable de vivre, de payer ses factures. C'est très, très difficile.
Il faudrait que, partout dans l'entreprise, on exige, on ait la même exigence
de tout le monde, des hauts dirigeants aussi de parler... des dirigeants et des
hauts dirigeants de parler la langue officielle. Je sens que le ministre est
tout d'un coup plus accommodant, disons, maintenant qu'on parle de la langue du
travail et des employeurs et des dirigeants contrairement à quand on discutait
des articles pour les nouveaux arrivants où là, il était plus vindicatif et
très, très certain, là, qu'ici au Québec, ça se passe en français. Il ne m'a pas
répété la phrase «Ici, au Québec, ça se passe en français, ici, au Québec»
plusieurs fois peut-être parce qu'il a compris qu'on était d'accord sur ce
point.
Le Président (M. Poulin) : En
vous invitant à la prudence évidemment, monsieur le ministre.
M. Jolin-Barrette : Bien, si
c'est pour faire plaisir à la députée de Mercier, ce qui est mon plus grand
souhait, alors effectivement, ici au Québec, ça doit se passer en français
partout, dans toutes les entreprises. Et pourquoi j'y faisais référence
abondamment préalablement? Parce qu'on parlait de l'exemplarité de l'État.
L'organe qui doit donner l'exemple, qui doit prendre tous les moyens requis, au
premier titre, c'est l'État québécois qui est, lui, le vecteur de
communication, le vecteur d'influence également pour l'ensemble de la société
québécoise. Écoutez, 500 000 employés au niveau de l'État québécois,
alors c'est un employeur important, et tout le monde a des communications avec
l'État québécois.
Bon, pour répondre à votre question, notamment
sur le droit des travailleurs, bien, c'est sûr que là, ce qu'on a fait dans le
cadre du projet de loi, c'est que, lorsque l'employé, il est conventionné, donc
il y a une convention collective qui s'applique, ça va être le mécanisme de
grief qui va s'appliquer.
Donc, lorsque la députée de Mercier disait
: Bien, écoutez, on ne veut pas faire reposer uniquement sur les épaules de
l'employé le fait de formuler une plainte à cet effet-là. Bien, lorsqu'il y a
une convention collective, ça passe par la procédure de grief, et là il est
accompagné par son syndicat. Lorsqu'on est dans le cadre d'un employeur qui n'a
pas de syndicat, là effectivement, à ce moment-là, c'est un recours qui est
effectué en vertu de la Loi sur les normes du travail. Par contre, il faut
savoir que le mécanisme de plainte à la Commission des normes du travail, c'est
que vous êtes accompagné, vous êtes représenté par la Commission des normes du
travail. Donc, il y a des avocats qui sont disponibles pour prendre en charge
la plainte et qui sont des avocats de la Commission des normes... Ça a été
fusionné, là, avec la CSST, donc l'équité... CNESST. Donc, eux prennent fait et
cause et vous représentent.
Mme Ghazal : Combien de cas
où des gens se sont plaints de leur employeur alors qu'ils n'étaient pas
syndiqués? J'ai travaillé, moi, dans des entreprises, comme je le disais, et
syndiquées et non syndiquées qui se sont dit : Tiens, moi, je vais aller
jusqu'aux normes juste pour ça. Des fois, c'est d'autres droits qui étaient très,
très...
Mme Ghazal : ...oui, puis ce
n'est pas évident.
M. Jolin-Barrette : La
langue, c'est zéro, parce qu'ils n'étaient pas exécutoires, les droits. Là, on
les rend exécutoires.
• (18 h 20) •
Mme Ghazal : Et là, les gens
vont trouver le courage de défendre la langue, alors que dans la culture de
l'entreprise qui est imprégnée de la vision et du haut dirigeant et des
dirigeants... Vous parlez de l'exemplarité de l'État, comment faire en sorte
que l'exemplarité de l'État soit suivie par les entreprises? Parce que vous
êtes ferme, vous disiez : Moi, j'étais ferme parce que c'est l'exemplarité de
l'État. Donc je suis ferme face aux nouveaux arrivants. Mais comment faire en
sorte qu'elle soit suivie, cette exemplarité, partout, pour que la personne qui
arrive, le nouvel arrivant qui ne se fait parler qu'en français, même si ça
fait sept mois qu'il est au Québec, par les gens de... pour obtenir des
services publics quand il se tourne pour avoir du travail, finalement, le
français est bafoué tous les jours, on parle des deux côtés de la bouche. Et je
vais demander une suspension pour pouvoir juste prendre le temps de déposer mon
amendement, M. le Président.
Le Président (M. Poulin) :
D'accord. Alors, nous suspendons. Merci.
(Suspension de la séance à 18 h 21)
(Reprise à 18 h 29)
Le Président (M. Poulin) :
Nous allons pouvoir reprendre nos travaux. Mme la...
Une voix : ...
Le Président (M. Poulin) :
Pardonnez?
Une voix : D'accord. O.K.
Alors, on va pouvoir reprendre nos travaux. Mme la députée de Mercier, vous
déposez un amendement?
Mme Ghazal :Oui, il est
déjà sur Greffier, si je ne me trompe pas. Donc, je vais le lire: Insérer,
après le paragraphe 4 du premier alinéa du paragraphe 2 de
l'article 29 du projet de loi, le paragraphe suivant: 5 de voir à ce que
tous les hauts dirigeants de son entreprise aient une bonne connaissance de la
langue française. Donc, avec la modification de l'article 41, là, par le
projet de loi 96... 40... par le projet de loi 96 qui vient d'être
ajouté, c'est que l'employeur doit respecter le droit du travailleur d'exercer
ses activités en français, toutes sortes d'activités, c'est ce qui est écrit,
c'est ce qui est mentionné dans le projet de loi.
• (18 h 30) •
Et il est en conséquence tenu de voir
plusieurs... de faire plusieurs choses. Il a plusieurs obligations qui sont
listées ici, quatre éléments. Et moi, je viens d'en ajouter un qui est de voir
à ce que les hauts dirigeants de son entreprise aient une bonne connaissance de
la langue française. Et comme je l'ai mentionné tantôt, c'est ça, le nerf de la
guerre. Si on veut que partout dans l'entreprise ça se passe en français puis
que le message soit clair que c'est la langue officielle du Québec qui doit
être respectée pour pouvoir travailler, pour pouvoir gagner son pain, hein,
comme on dit, c'est...
18 h 30 (version non révisée)
Mme Ghazal : ...c'est un des
meilleurs incitatifs. Si vous voulez que les gens partout au Québec parlent
français, là, un des meilleurs incitatifs, c'est que dans le monde du travail,
ça se passe en français puis que ça soit difficile de gagner sa vie au Québec
si on ne parle pas français.
Actuellement, ce n'est pas le cas. Il est
tout à fait possible de bien gagner sa vie et de très bien la gagner en ne
connaissant que l'anglais, en étant unilingue anglophone, ce qui n'est vraiment
pas le cas, par exemple, ailleurs au Canada, bien, ça ne marche pas, là, si on
est unilingue francophone. Et même, pour certains nouveaux arrivants, ce qu'ils
disent, c'est que si je veux avoir accès à des postes à la hauteur de mes
compétences, il faut que j'aie une bonne connaissance de l'anglais, pour être
capable aussi de monter dans la hiérarchie. Pourquoi? Bien, parce que plus on
monte dans la hiérarchie des entreprises, plus ça se passe en anglais, et pas
uniquement à cause des questions à l'international.
Donc, voilà une façon, vu que le ministre
est d'accord avec moi, qu'il faut que ça se passe en français dans le monde du
travail. Et j'espère qu'il est d'accord que sa façon de s'assurer que le
français soit protégé dans le monde du travail ne soit pas uniquement le fait
que le pauvre petit travailleur doit lui-même se lever de bonne heure pour
aller contre son employeur aux normes du travail pour dire : Mon droit de
travailler en français n'est pas respecté. Il faut faire les choses de façon
beaucoup plus systématique et différente que ça. Et de la même façon que ce
gouvernement n'hésite jamais à montrer les gros bras face aux nouveaux
arrivants pour dire : Voici, ça se passe en français, puis à les regarder
comme si eux, leur objectif dans la vie n'est pas ça. C'est ça, leur objectif,
c'est de s'intégrer dans leur société. Et si c'est en français que ça se passe,
bien, ça va être en français, comme dans n'importe quel pays normal dans le
monde. Quand on va dans une... n'importe quelle société, les gens sont prêts à
apprendre n'importe quelle langue si c'est ça que ça prend, puis que si c'est
une condition pour s'intégrer. Donc, pour que ça se passe en français dans les
entreprises, je viens de ce monde-là, je vous le dis, ça prend... il faut que
les hauts dirigeants, il faut qu'on soit aussi ferme envers eux qu'on l'est
envers les nouveaux arrivants. Et donc, je ne vois pas comment le ministre ne
peut pas... ne peut pas accepter et voter pour l'amendement qui est très
simple, très clair, qui ne laisse aucune place à l'ambiguïté, que je viens de
déposer.
Le Président (M. Poulin) : Merci,
madame la députée de Mercier. Est-ce qu'il y avait d'autres interventions sur
l'amendement? Monsieur le ministre.
M. Jolin-Barrette : Mais peut-être
je pourrais faire une suggestion à la députée de Mercier. Son amendement, je le
trouve légitime, par contre, je trouve qu'il serait plus approprié dans le
cadre de l'article 141, donc, lorsqu'on parle des programmes de
francisation, Parce que là, à l'article 41, on se retrouve dans une situation
où on est, par rapport aux documents écrits, par rapport aux travailleurs,
quelles sont les exigences? Vous, votre amendement, il touche relativement...
de voir à ce que tous les hauts dirigeants de son entreprise aient une bonne
connaissance de la langue française. Alors ça... tu sais, déjà à 141 on prévoit
des obligations pour les hauts dirigeants. Là, vous, vous bonifiez ça, en
visant... Il est écrit "les dirigeants", là, vous, vous rajoutez
"tous les hauts dirigeants". Ça, je n'ai pas d'enjeu. "Aient une
bonne connaissance de la langue française", alors, je vous suggérerais,
lorsqu'on va être à 141, je vous annonce qu'un tel type d'amendement je
l'accepterais, mais à 141. Parce qu'à 41, c'est vraiment pour le travailleur,
les documents écrits, notamment en lien avec les garanties associées au droit
de travailler en français.
Mme Ghazal : ...revenir sur
cette technicalité-là, du fait que ça soit à 41 ou pas. Mais est ce que j'ai
bien entendu le ministre me dire que si je dépose un amendement à 141, où je
vais modifier le premier alinéa, là, si je me rappelle bien, et que ça soit
écrit "tous les hauts dirigeants" et peut-être que je vais voir...
M. Jolin-Barrette : ...connaissance.
Mme Ghazal : …ça, le ministre
va voter pour?
M. Jolin-Barrette : Oui.
Mme Ghazal : O.K.
Le Président (M. Poulin) : Alors,
qu'est ce qu'on fait?
Mme Ghazal : Bien, attendez,
je veux juste revenir sur l'aspect que ce n'est pas là que ça va. Avant, là,
dans l'article 41 actuel, c'est écrit... et qui est biffé, là mais je vais
le lire : L'employeur rédige, donc... écrit rédige dans la langue
officielle des communications qu'il adresse à son personnel, il rédige et
publie en français les offres d'emploi ou de promotion. Tout ça est biffé. Il y
a plus de rédige, ce n'est plus ça. Mais ce qui est écrit, c'est :
L'employeur doit respecter le droit du travailleur d'exercer ses activités en
français. Et là, il doit : ta, ta, ta. Et moi, j'ajoute les hauts
dirigeants. Il y a eu comme...
Mme Ghazal : ...un choix
de... Même si l'aspect écrit n'est plus dans le libellé, il a eu le choix de,
à 1, 2, et 3 ,et 4 de parler des documents, de ce qui est écrit, alors que le
libellé d'en haut, là, le premier alinéa ou principal, là, si on veut, le
paragraphe principal en haut, c'est d'exercer ses activités en français. Donc,
ce n'est pas juste rédiger. Ce n'est pas juste des documents, ça peut être
tenir une réunion, avoir une formation, etc. Donc, ça se justifie quand même de
le mettre à cet endroit-là. Mais si le ministre a cette ouverture-là, est-ce
que c'est possible, vu qu'on est dans le vif du sujet, tu sais, comme on dit,
avec le consentement, tout est possible, d'aller vers 141 maintenant et de me
donner le temps de rédiger un amendement, de suspendre?
M. Jolin-Barrette :
Bien, en fait, ce que je vous propose, c'est qu'on rédige le libellé adéquat
pour 141 et puis qu'on continue 41. Puis, lorsqu'il est prêt, on passe à 141.
Mme Ghazal : Juste avant
que ce soit écrit par l'équipe du ministre, c'est important qu'on l'écrive
ensemble pour ne pas qu'après ça, on recommence. On pourrait... C'est-à-dire
que je ne sais pas comment ça va être écrit. Tout ce qu'on va faire, c'est tous
les hauts dirigeants. Est-ce qu'on va ajouter «et une bonne connaissance»? Il
faudrait que je vois le détail.
M. Jolin-Barrette : Dans
le fond, vos éléments importants, c'est «tous les hauts dirigeants»...
Mme Ghazal : Oui.
M. Jolin-Barrette : ...
puis «une bonne connaissance».
Mme Ghazal : Oui.
M. Jolin-Barrette : Sur
ces deux éléments là, moi, je n'ai pas d'enjeu.
Mme Ghazal : O.K.
M. Jolin-Barrette : Ça
fait que si vous permettez, continuons sur 141. Puijs quand l'amendement est
prêt, je suggère à la commission d'aller à 141. Puis ensuite on va revenir
après.
Mme Ghazal : J'apprécie
l'ouverture du ministre, même le président, monsieur le Président, est étonné.
Le Président (M. Poulin) :
Je n'irai pas là, mais je peux constater l'excellente collaboration des
parlementaires à trouver des solutions. Alors, est-ce que, Mme la députée, vous
souhaitez retirer votre amendement à ce moment-ci?
Mme Ghazal : C'est quoi
la procédure? Je retire ou...
Le Président (M. Poulin) :
Bien, en fait, vous avez l'option de retirer votre amendement et on continue la
discussion sur l'article. Compte tenu que vous avez un engagement du ministre
de revenir à votre question un peu plus tard dès que l'amendement est rédigé.
Je résume bien les échanges? Oui.
Mme Ghazal : O.K. Donc,
je demande le consentement à ce qu'il soit retiré.
Le Président (M. Poulin) :
Est-ce qu'il y a consentement? Il y a consentement. Alors, nous retirons l'amendement
de la députée de Mercier. Nous continuons la discussion sur l'article 29
s'il y a effectivement des interventions. S'il n'y a pas d'autre intervention,
nous allons procéder à la mise aux voix. Est-ce que l'article 29 est
adopté?
Des voix : Adopté.
Le Président (M. Poulin) :
Donc, l'article 29 est adopté. Nous allons à l'article 30.
M. Jolin-Barrette :
L'article 42 de cette charte est modifié: 1 par le remplacement d'«emploi
concerne un emploi dans l'administration, dans un organisme parapublic ou dans
une entreprise qui doit, selon le cas, instituer un comité de francisation,
posséder une attestation d'application d'un programme de francisation ou
posséder un certificat de francisation l'» par «visant à pourvoir un poste,
notamment par recrutement, embauche, mutation ou promotion diffusée par un».
2 par la suppression de «qui publie cette
offre d'emploi dans un quotidien diffusant».
3 par le remplacement de «doit la publier»
par «en plus de l'offre qu'il est tenu de diffuser en français en vertu du
paragraphe 1 du premier alinéa de l'article 41, il doit s'assurer que
ces offres sont diffusées».
4 par le remplacement de «dans un
quotidien diffusé en français, et ce, dans une présentation au moins
équivalente» par «et par des moyens de transmission de même nature et
atteignant un public cible de taille comparable, toutes proportions gardées».
Commentaire. L'article 30 du projet
de loi propose de modifier l'article 42 de la Charte de la langue
française pour faire en sorte que les offres visant à pourvoir un poste qui
sont diffusées par un employeur dans une autre langue que le français doivent
être diffusées simultanément avec l'offre qui doit être diffusée en français en
vertu du paragraphe 1 du premier alinéa de l'article 41, tel que
modifié par l'article 29 du projet de loi. De plus, les deux offres
devront être diffusées par des moyens de transmission de même nature et
atteignant un public cible de taille comparable, toutes proportions gardées.
Le Président (M. Poulin) :
Merci, monsieur le ministre. Est-ce qu'il y a des interventions sur
l'article 30? S'il n'y a pas d'intervention, nous allons procéder à la
mise aux voix. Est-ce l'article 30 est adopté?
Des voix : Adopté.
Le Président (M. Poulin) :
Adopté.
M. Jolin-Barrette : 31,
M. le Président.
Le Président (M. Poulin) :
31.
• (18 h 40) •
M. Jolin-Barrette :
L'article 43 de cette charte est modifié par l'ajout, à la fin de
l'alinéa, de l'alinéa suivant: «Une entente collective, si elle n'est pas déjà
rédigée en français, doit également être disponible dans cette langue dès sa
conclusion.».
Commentaire. La modification proposée à
l'article 43 de la Charte de la langue française par l'article 31 du
projet de loi prévoit qu'une entente collective, si elle n'est pas déjà rédigée
en français, doit également...
M. Jolin-Barrette :
...disponible dans cette langue dès sa conclusion.
Le Président (M. Poulin) :
...des interventions sur l'article 31? S'il n'y a pas d'intervention, nous
allons procéder à sa mise aux voix. Est-ce que l'article 31 est adopté?
M. Jolin-Barrette : Adopté.
Le Président (M. Poulin) :
Merci. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette :
...Président, l'article 44 de cette charte et modifié, un, par le
remplacement de "toutes" par "une version française doit être
jointe immédiatement et sans délai à toutes". Deux, par le remplacement de
"faisant suite à l'arbitrage d'un grief ou d'un différend" par
"rendu en anglais à la suite de l'arbitrage, d'un grief, d'une mésentente
ou d'un différend, soit". Trois, par le remplacement de "est à la
demande d'une partie traduite en français ou en anglais selon le cas, aux frais
des parties" par "ou d'une entente collective, soit résultant de
l'interprétation ou de l'application d'une telle convention ou d'une telle
entente". 4, par l'ajout, à la fin des alinéas suivants, "une telle
sentence rendue en français et traduite en anglais lorsqu'une partie le
demande, toute traduction effectuée en application du présent article doit être
certifiée. Les frais de traduction nécessaires à l'établissement de la version
française prévue au premier alinéa sont assumés le cas échéant, par les
parties. Elles sont, dans les autres cas, à la charge de la partie qui demande
la traduction.".
Commentaire. Le premier alinéa de
l'article 44 de la Charte de la langue française, tel que modifié par
l'article 32 du projet de loi, prévoit qu'une version française doit être
jointe immédiatement et sans délai à toute sentence arbitrale rendue en anglais
en matière de relations de travail. Le deuxième alinéa de cet article maintient
la règle actuelle permettant d'obtenir sur demande la traduction anglaise d'une
sentence arbitrale rendue en français.
Enfin, le troisième alinéa de cet article
prévoit que toute traduction effectuée en vertu de cet article doit être
certifiée. Il prévoit également des règles permettant de déterminer les parties
tenues d'assumer les frais de traduction. Les dispositions de l'article 32
entreront en vigueur six mois après la sanction du projet de loi ou à une date
antérieure que peut déterminer le gouvernement, ainsi que le prévoit le
paragraphe 2 de l'article 201.
Le Président (M. Poulin) :
Est-ce qu'il y a des interventions sur l'article 32? S'il n'y a pas
d'intervention, est-ce que l'article 32 est adopté?
M. Jolin-Barrette : ...
Le Président (M. Poulin) :
Article 33, monsieur le ministre.
M. Jolin-Barrette :
L'article 45 de cette charte est modifié dans le premier alinéa par le
remplacement de "pour la seule raison que ce dernier ne parle que le
français ou qu'il ne connaît pas suffisamment une langue donnée autre que la
langue officielle, ou parce qu'il a exigé le respect d'un droit découlant des dispositions
du présent chapitre" par "d'exercer à son endroit des représailles ou
de lui imposer toute autre sanction pour la seule raison que ce dernier ne
parle pas... ne parle que le français ou qu'il ne connaît pas suffisamment une
langue donnée autre que la langue officielle pour l'un ou l'autre des motifs
suivants." B, par l'ajout, à la fin des paragraphes suivants : 1. Il a
exigé le respect d'un droit découlant des dispositions du présent chapitre. 2.
Pour le dissuader d'exercer un tel droit. 3. Parce qu'il n'a pas la
connaissance ou un niveau de connaissance spécifique d'une autre langue que la
langue officielle, alors que l'accomplissement de la tâche ne le nécessite pas.
4. Parce qu'il a participé aux réunions d'un comité de francisation institué en
vertu de l'article 136 ou de l'article 140 ou d'un sous-comité créé
par celui ci ou parce qu'il a effectué des tâches pour eux. 5. Pour l'amener à
souscrire en application du premier alinéa de l'article 138 point 2
un document visé à l'article 138.1 ou pour l'en dissuader. 6. Parce qu'il
a de bonne foi, communiqué à l'office un renseignement en vertu de
l'article 165.22 ou collabore à une enquête menée en raison d'une telle
communication.
2. Par le remplacement des deuxième et
troisième alinéas par le suivant : "est assimilé à une pratique interdite
visée au premier alinéa le fait pour un employeur d'exiger d'une personne, pour
qu'elle puisse rester en poste ou y accéder, notamment par recrutement,
embauche, mutation, promotion, la connaissance ou un niveau de connaissance
spécifique d'une autre langue que la langue officielle, à moins qu'il ne
démontre, conformément aux articles 46 et 46 point 1, que
l'accomplissement de la tâche nécessite une telle connaissance et qu'il a au
préalable pris tous les moyens raisonnables pour éviter d'imposer une telle
exigence.
Commentaire. Les modifications proposées à
l'article 45 de la Charte de la langue française par l'article 33 du
projet de loi prévoient davantage de pratiques interdites qu'un employeur ne
peut adopter à l'égard d'un membre de son personnel. Il assimile également une
pratique interdite, le fait pour un employeur d'exiger d'une personne, pour
qu'elle puisse rester en poste ou accéder à un poste, la connaissance ou un
niveau de connaissance spécifique d'une langue autre que la langue officielle,
à moins qu'il ne démontre que l'accomplissement de la tâche nécessite une telle
connaissance et qu'il a au préalable pris tous les moyens raisonnables pour
éviter d'imposer une telle exigence. Les deuxième et troisième alinéas de
l'article 45 de la Charte sont supprimés, vu que les articles 47 et
50 de la Charte proposée par les articles 37 et 39 du projet de loi
prévoient le recours... les recours applicables en cas de manquement.
Le Président (M. Poulin) :
Merci, monsieur le ministre. Est-ce qu'il y a des interventions sur
l'article 33? Je crois que oui. Madame la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Oui, je voudrais
juste être sûre que le dernier paragraphe ne présume pas de l'adoption du
prochain paragraphe, du prochain article 46. Alors, quand on dit : Est
assimilé à une pratique interdite, bon, d'exiger d'une personne... bon, la
connaissance, ta, ta, ta, à moins qu'il ne démontre, conformément aux
articles 46 et 46.1. Alors ce n'est pas encore adopté, 46, 46.1, donc je
veux être sûre qu'en adoptant celui-là on ne présume pas de l'adoption...
Mme David : ...dans la facture
actuelle, tout d'un coup qu'il y a des amendements.
M. Jolin-Barrette : Non. Dans
le fond, ça fait référence à 46 puis 46.1, mais 46 puis 46.1 ne sont pas
adoptés. On aura le débat sur 46 puis 46.1.
Mme David : Et ça ne nous
empêchera pas de...
M. Jolin-Barrette :
...d'amender 46 ou 46.1.
Mme David : ...proposer des amendements
à 46, 46.1 même si on a voté pour cet article-là?
M. Jolin-Barrette :
Exactement.
Le Président (M. Poulin) :
Est-ce que... Mme la députée de Mercier, et par la suite, M. le député de
D'Arcy-McGee. Mme la députée de Mercier.
Mme Ghazal : ...juste une
question par rapport à ce qui a été enlevé, et le troisième paragraphe, là, qui
a été ajouté. C'est-à-dire que là, il est interdit à un employeur de congédier,
mettre à pied, les représailles, etc., parce qu'il n'a pas la connaissance ou
un niveau de connaissance spécifique d'une autre langue que la langue
officielle alors que l'accomplissement de la tâche ne le nécessite pas. C'est
juste, comme, m'expliquer, est-ce que... «entreprise», qui a été enlevé, on l'a
mis, ou il y a quelque chose de différent?
M. Jolin-Barrette : À quel
alinéa?
Mme Ghazal : Bien, à l'alinéa
3°. Et je veux juste savoir si c'est la même chose, ou il y a comme une
subtilité... C'est-à-dire, qu'est-ce qui était en haut a été mis à l'alinéa 3°,
ce qui était en haut, ce qui est biffé, là, «pour la seule raison que ce
dernier ne parle pas français ou qu'il ne connaît pas suffisamment une langue
donnée», autre langue officielle. C'est la même chose, qui a été juste
déplacée, dans le fond?
M. Jolin-Barrette : Oui. Bien
là, on a «niveau de connaissance spécifique d'une autre langue que la langue
officielle alors que l'accomplissement de la tâche ne le nécessite pas»,
effectivement.
Mme Ghazal : Alors qu'avant,
il n'y avait pas «l'accomplissement de la tâche ne le nécessite pas».
M. Jolin-Barrette :
Exactement.
Mme Ghazal : Il y avait
juste... On ne peut pas lui exiger ça. Puis est-ce que la façon de dire... de
déterminer ça, est-ce que la tâche le nécessite, ou est-ce que la tâche ne le
nécessite pas? Ça, comment est-ce que... c'est mentionné où?
M. Jolin-Barrette : Ça, c'est
46... à l'article 46, 46.1, qu'on va voir.
Mme Ghazal : Ça, ce n'est pas
l'embauche? Non, hein? L'embauche, c'est 35.
M. Jolin-Barrette : C'est
pour tout. C'est embauche, mutation, promotion, 46, 46.1.
Mme Ghazal : O.K. Ça, c'est
dans l'article 35 du p.l., c'est ça?
M. Jolin-Barrette : Oui, 36,
36.
Mme Ghazal : L'article 46,
c'est l'article 35 du p.l. Donc là, on va le voir en détail, où... comment
est-ce que ça va être justifié.
M. Jolin-Barrette : C'est ça,
parce qu'on vient imposer des nouveaux critères, pour 46.1.
Mme Ghazal : Oui... pour l'embauche.
O.K., très bien.
Le Président (M. Poulin) :
Merci. J'avais M. le député de D'Arcy-McGee.
M. Birnbaum : Merci, Monsieur
le Président. Je crois comprendre que le législateur a une obligation d'agir
sur le principe de nécessité. Peut-être que je n'exprime pas ça de façon
légale, mais en l'absence d'une exigence déjà présente, on peut évidemment
légiférer sur toutes sortes de choses. Est-ce qu'on est dans l'absence, déjà,
d'une stipulation qui réglerait des problèmes dans les alinéas 4° et 6°? Est-ce
que les normes de travail, les exigences de la charte actuelle ne rendraient ça
pas difficile, pour un employeur prospectif, de congédier quelqu'un parce qu'il
a participé aux réunions d'un comité de francisation institué en vertu de l'article
136 ou de l'article 140, ou d'un sous-comité créé par celle-ci, ou parce qu'il
a effectué des tâches pour... ou, 6°, parce qu'il a de bonne foi, communiqué de
bonne foi, communiqué à l'office un renseignement en vertu de l'article 165.22
ou collaboré à une enquête menée en raison d'une telle communication?
• (18 h 50) •
Est-ce que je peux comprendre si le
ministre peut m'affirmer qu'en l'absence de ces deux alinéas là, on risque
d'avoir une épidémie de congédiements pour quelqu'un qui a osé, en bonne et due
forme, assisté à une rencontre, en bonne foi, ou à collaborer avec une enquête?
On n'écrit pas pour rien. Ou, des fois, oui, peut-être, on écrit pour rien, ou
pour avoir l'impression d'être très vigilant. Est-ce que je peux comprendre
s'il peut imaginer une circonstance, s'il est décidé de rayer les alinéas 4° et
6°... Est-ce qu'il a peur que, pour les deux raisons citées dans ces alinéas,
on risque de voir des gens de...
M. Birnbaum : ...congédiés
pour ces deux raisons-là, ou est-ce que ça se peut que des gens, notre panoplie
de lois, de normes de travail, d'exigences sur quelque employeur que ce soit
d'agir de façon responsable, ces deux éventualités ne se présenteraient jamais?
Est-ce que je me trompe?
Le Président (M. Poulin) : Merci,
monsieur le député. Monsieur le ministre.
M. Jolin-Barrette : Alors,
pourquoi paragraphe 4 et paragraphe 6 sont là? C'est notamment pour
protéger les travailleurs contre des sanctions linguistiques. Un travailleur
qui participerait au comité de francisation de son entreprise, on ne voudrait
pas qu'il soit congédié parce qu'il assiste au comité de travail. On ne
voudrait pas qu'un employé, parce qu'il collabore à une enquête de l'office, ça
soit une mesure de représailles. Donc, on vient nommément dire : Écoutez,
c'est une pratique interdite. Et on vient l'indiquer clairement.
M. Birnbaum : Oui, je
comprends. Ma question, c'est d'établir si on est devant une rédaction qui est
claire et nécessaire. Je ne dis pas que ces deux choses devraient être des
actes qui peuvent mener, en quelque circonstance que ce soit, au congédiement.
Je me permets la question, est-ce que le ministre peut crédiblement me dire, en
absence de ces deux choses là, 4 et 6, il n'y a pas de lois, de contraintes auxquelles
serait confronté un employeur qui oserait si ridiculement songer à congédier
quelqu'un. C'est ça, ma question.
M. Jolin-Barrette : Bien, je
vous dirais comme réponse... Puis la discussion, j'avais avec la députée de
Mercier tantôt, c'était une bonne discussion. La députée de Mercier me
disait : Écoutez, l'employé, le travailleur, parfois, va être intimidé, va
être intimidé parce que le boss parle une autre langue que le français. Donc,
il n'osera pas, il n'osera pas, là, aller à l'encontre de la directive du
patron même si c'est ses droits fondamentaux, même si c'est loi.
Donc, il faut assurer aux travailleurs, au
Québec, les garanties... Et notamment le législateur effectivement ne parle pas
pour ne rien dire. On considère que c'est fort important d'indiquer très
clairement aux travailleurs : Vous ne pourrez pas être congédiés pour ce
motif-là. Tu sais, on pourrait faire le parallèle de se dire : Une dame
qui est enceinte, on ne devrait pas la congédier pour ça, parce qu'elle est
enceinte. Bien, le législateur, il a prévu... Parce que ça va de soi, vous êtes
d'accord avec moi, monsieur le Président, qu'on ne devrait pas congédier une
femme parce qu'elle est enceinte, parce qu'elle prend un congé de maternité.
Mais il a fallu, au Québec, à un moment donné dire : C'est une pratique
interdite, puis vous ne pouvez pas congédier une femme qui est enceinte puis
qui va prendre un congé de maternité. Ça allait de soi que vous ne voulez...
que, selon le sens commun, on ne voulait pas ça, on ne voulait pas congédier
une femme qui est enceinte. Mais pourquoi ça a été mis là? Parce qu'il fallait
assurer la protection des travailleuses sur des pratiques interdites.
Alors, c'est la même chose, on vient
simplement garantir le droit du travailleur. Alors, s'il va dans un comité de
francisation, il n'aura pas de conséquence. S'il participe à une enquête de
l'OQLF, il n'aura pas de conséquence pour son emploi. Moi, je pense qu'il
s'agit de droits importants. Puis on vient créer un environnement où le fait de
protéger le travailleur d'une sanction parce qu'il participe à certains droits
qui lui sont conférés, moi, je pense que c'est un signal positif qu'on envoie
en termes de protection, et également si on veut rendre la langue française
comme la langue du travail au Québec.
Le Président (M. Poulin) : Monsieur
le député de D'Arcy-McGee.
M. Birnbaum : Alors, on est
dans une nouvelle catégorie d'intimidation linguistique. Je répète ma question.
En absence... J'essaie juste de voir... Et le ministre vient de dire qu'il y a
un symbole qu'on vient de lancer. On ne rédige pas des articles dans un projet
de loi pour être symbolique. On parle de la chose concrète. J'essaie juste de
comprendre si le ministre affirme que, selon ces scénarios-là, qu'il n'y a rien
dans notre corpus législatif actuellement qui rendrait un congédiement
irrecevable. Déjà, si un employeur essaie de congédier quelqu'un parce qu'en
bonne foi, il aurait communiqué avec l'office un renseignement en vertu de
l'article 165...
M. Birnbaum : ...105.22.
J'essaie d'établir si on est devant quelque chose sur le plan législatif qui
est pertinent et nécessaire. Est-ce que le ministre me dit qu'actuellement
quelqu'un devant la situation telle qu'identifiée dans l'alinéa six et risque
d'être congédié, et sans recours, sans son alinéa six? Voilà ma question.
Le Président (M. Poulin) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette :
Alors, M. le Président, la question qui se pose, c'est pourquoi est-ce que le
député de D'Arcy-McGee est réticent à inscrire noir sur blanc que c'est une
pratique interdite de congédier quelqu'un parce qu'il a participé aux réunions
du comité de francisation et/ou qu'il a communiqué un renseignement à l'OQLF?
Moi, là, le fait de venir nommer des pratiques interdites, je n'ai pas de
malaise avec ça. On veut que les travailleurs québécois, là, soient à l'aise de
pouvoir travailler dans leur langue puis surtout qu'il n'y ait pas de motif qui
comprendrait quelconque ambiguïté.
Alors, on dit que c'est un élément qui est
important. On garantit le droit aux travailleurs québécois prévu à 1 à 6, et ça
constitue des pratiques interdites que l'employeur ne peut pas faire. Alors, à
la question du député de D'Arcy-McGee, est-ce que quelqu'un qui serait congédié
pour ça aurait un recours? Bien, fort probablement qu'il y aurait un recours.
Mais là on est dans un... dans un code. Je reviens à l'équivalent du Code civil
avec la Charte de la langue française, où on vient prévoir que les droits
fondamentaux de travailler en français sont exécutoires puis on vient donner
des droits aux travailleurs. On vient garantir également qu'ils ont des
rapports si jamais il y a une pratique interdite. Et le fait de nommer ces
pratiques interdites là, ça fait peur également du fait qu'on vient protéger
les travailleurs de ne pas avoir de sanction linguistique.
Le Président (M. Poulin) :
Merci, monsieur le ministre. Est-ce qu'il y avait d'autres choses à ajouter, M.
le député de D'Arcy-McGee?
M. Birnbaum : Non.
Le Président (M. Poulin) :
D'accord. Alors, est-ce qu'il y avait d'autres interventions sur
l'article 33. S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à
sa mise aux voix. Est-ce que l'article 33 est adopté?
Des voix : Adopté.
Le Président (M. Poulin) :
Adopté. Article 34, Monsieur le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui.
Alors, cette charte est modifiée par l'insertion, après l'article 45, du
suivant:
«45.1 Tout salarié a droit à un milieu de
travail qui soit exempt de discrimination ou de harcèlement parce qu'il ne
maîtrise pas ou peu une langue autre que la langue officielle, parce qu'il
revendique la possibilité de s'exprimer dans la langue officielle ou parce
qu'il a exigé le respect d'un droit découlant des dispositions du présent
chapitre. L'employeur doit prendre les moyens raisonnables pour prévenir ce
type de conduite et lorsqu'une telle conduite est portée à sa connaissance pour
la faire cesser.».
Commentaire L'article 45 de la Charte
de la langue française proposé par l'article 34 du projet de loi reconnaît
à tout salarié le droit à un milieu de travail exempt de discrimination ou de
harcèlement qui découle de son manque de maîtrise d'une autre langue que le
français, du fait qu'il revendique la possibilité de s'exprimer en français ou
du fait qu'il a exigé le respect d'un droit relatif à son droit d'exercer ses
activités en français. Cet article prévoit également que les employeurs doivent
prendre les moyens raisonnables pour prévenir les situations de harcèlement et
de discrimination. Si une telle conduite est portée à leur connaissance, ils
devront prendre les moyens raisonnables pour la faire cesser.
Le Président (M. Poulin) :
Merci, monsieur le ministre. Est-ce qu'il y a des interventions sur
l'article 34? S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à
sa mise aux voix. Est-ce que l'article 34 est adopté?
Des voix : Adopté.
Le Président (M. Poulin) :
Adopté. M. le ministre, l'article 35.
M. Jolin-Barrette :
L'article 35. L'article 46 de cette charte est modifié:
1 dans le premier alinéa, a) par le
remplacement de «pour l'accès à un emploi ou à un poste» par «d'une personne
pour qu'elle puisse rester en poste ou y accéder, notamment par recrutement,
embauche, mutation ou promotion.
2 par l'insertion, à la fin, de «même,
alors, il doit au préalable avoir pris tous les moyens raisonnables pour éviter
d'imposer une telle exigence».
2 par la suppression des deuxième,
troisième, quatrième, cinquième et sixième alinéas.
Commentaire. L'article 35 du projet
de loi propose d'abord de modifier l'article 46 de la Charte de la langue
française pour qu'il soit dorénavant interdit à un employeur d'exiger d'une
personne pour qu'elle puisse rester en poste ou accéder à un poste, la
connaissance ou un niveau de connaissance spécifique d'une autre langue que le
français, à moins que l'accomplissement de la tâche ne nécessite une telle
connaissance. Cet article est également modifié pour prévoir qu'un employeur
qui exige la connaissance ou un niveau de connaissances spécifiques d'une
langue autre que le français doit au préalable avoir pris tous les moyens
raisonnables pour éviter d'imposer une telle exigence.
Enfin, les derniers alinéas de cet article
sont supprimés vu que les articles 47 et 50 de la charte proposés par les
articles 37 et 39 du projet de loi prévoient des recours applicables en
cas de manquement.
• (19 heures) •
Le Président (M. Poulin) :
Merci, monsieur le ministre. Est-ce qu'il y a des interventions sur
l'article 35? Je vois la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Oui,
monsieur le Président, article...
19 h (version non révisée)
Mme David : ..extrêmement
important, qui, évidemment... 46, et 46.1. Je dirais peut être encore plus
46.1, mais dès 46, qui ont fait réagir tous les... les associations, les
Conseil québécois du commerce de détail, Chambre de commerce Montréal métropolitain,
Conseil du patronat et d'autres, là, on a toute la liste, qui sont très
inquiets par les conditions. Nous avons été les premiers dans notre plan
d'action en langue française de dire qu'il fallait baliser l'article 46.
Et pour ça, je suis d'accord qu'on y travaille. Maintenant, peut être que le
ministre a peut être été très, très, très loin dans le balisage, alors je pense
que les entreprises et... puisque je pense qu'il est important de dire à tout
le monde que l'article 46 et 46.1 s'appliquent à toutes les entreprises,
petites, moyennes et grandes. Vous allez me le confirmer, monsieur le ministre?
D'un employé à 10.000, 15.000 employés, on est dans... parce que là, quand
on parle de toute, toute petite entreprise, le Conseil du patronat a de très
importantes statistiques là-dessus, Conseil québécois de commerce de détail,
quand on dit commerce de détail, on parle de gens, habituellement, qui ont du 0
à 10 employés, ou zéro à 20 employés. Ça, c'est beaucoup, beaucoup,
beaucoup de monde, là, et on pense que... enfin moi, je pensais que l'article 46,
46.1 s'appliquait aux 25-49 employés ou... à cause de la loi, là, on
commence à 25, mais non. C'est toutes les entreprises qui sont visées par cet
article-là. Donc imaginez une seconde l'application des trois critères, ça va
être assez exigeant. Donc, première chose, est-ce que le ministre peut me
confirmer que ça s'applique à toutes les entreprises, les très, très PME, très,
très petites PME, puis les PME, puis les grandes entreprises?
Le Président (M. Poulin) : Merci,
Madame la députée. Monsieur le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui, ça
s'applique à tous les employeurs.
Mme David : Donc, un
employeur peut avoir dans un tout petit commerce deux employés. Bon.
Maintenant, deuxième question. Est-ce qu'on applique au mot employé un EETP, un
équivalent, EETP, c'est dans le réseau collégial, ça, ça va devenir très
important quand on va arriver au collège, mais est-ce que ce sont des
équivalents temps plein ou un employé qui travaille 5 heures semaine, un
étudiant qui vient un jeudi soir travailler au dépanneur est considéré comme un
employé et que s'il y a 10 employés pour faire un chiffre de 40 heures
ou huit employés qui font 5 heures, ça correspond à huit employés? C'est-u
de l'équivalent temps plein?
M. Jolin-Barrette : Ça
s'applique à tous les employés à temps plein.
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : Temps
plein, temps partiel, effectivement.
Mme David : Et temps très,
très, très partiel et tout ça.
M. Jolin-Barrette : Oui.
Mme David : Parce que ça va
devenir drôlement important dans l'opérationnalisation de ça quand on voit
qu'il faut avoir vérifié dans les autres employés, s'il y en a pas d'autres qui
parlent anglais, etc., qui parlaient, qui étaient bilingues, est-ce que
l'accomplissement des tâches... bon. Alors, ça va devenir assez compliqué, mais
donc ça s'applique, c'est 10 employés, ça veut dire 10 sur le... qui ont
des chèques de paie, comme on dit. Mais ces chèques-là peuvent être pour 5 heures
semaine. C'est ça? Autant que 40 heures semaine.
M. Jolin-Barrette : Dans le
fond, ça couvre, pour l'employeur, c'est lorsqu'il fait une embauche, donc ça
couvre tous les types de postes.
Mme David : Même un jeune de
15 ans qui fait quelques heures à surveiller la piscine ou des choses
comme ça?
Dans le fond, l'employeur, lui, c'est un
employeur. Donc il ne s'agit pas de segmenter, de dire : Pas cet employé-là,
oui cet employé-là. 46, 46 point 1 est là pour garantir le droit de
travailler en français, notamment. Donc, les critères associés à la nécessité,
puis on va les voir à 46 point 1, pour éviter d'imposer une telle
exigence, à moins que ça soit nécessaire, puis on va avoir des critères. Dans
le fond, ça s'applique aux employeurs, à tous les employeurs.
Mme David : ...très petites
organisations, on peut dire, jusqu'aux plus grandes?
M. Jolin-Barrette : Tous les
employeurs visent tous les employeurs, autant la multinationale qui est au
Québec, qui a 5000 employés que le restaurant que le restaurant qui a 10 employés.
Mme David : Vos amis de la
Chambre de commerce du Montréal métropolitain posent une question intéressante.
Ils disent...
M. Jolin-Barrette : Vous avez
dit : mes amis ou vos amis?
Mme David : J'ai dit : vos
amis.
M. Jolin-Barrette : Mes amis
à moi ou vos amis à vous...
Mme David : ...J'ai dit «vos
amis».
M. Jolin-Barrette : Ah! mes
amis. O.K. Je voulais juste être sûr que vous ne voyez pas mes amis.
Mme David : Vos amis. Donc,
qui précise que... Ils disent d'ailleurs dans leur mémoire, à la page 6,
«l'enjeu est de déterminer qui décide de la nécessité de connaître l'anglais.
Est-ce l'entreprise, le candidat au poste, un fonctionnaire ou encore un
processus gouvernemental normé?»
M. Jolin-Barrette : Est-ce
que... Pouvez-vous répéter?
Mme David : Alors, la
question, c'est «l'enjeu...
M. Jolin-Barrette : Oui.
Mme David : ...ils soulignent
ça - est de déterminer qui décide de la nécessité de connaître l'anglais - avec
les critères, là. Est-ce que c'est l'entreprise elle-même, le candidat au
poste, un fonctionnaire ou encore un processus gouvernemental normé?»
M. Jolin-Barrette : Bien, le
mécanisme ne change pas avec les amendements qu'on fait à l'article 46 ou
à l'article 46.1. Ça demeure l'employeur qui est souverain en lien avec
ces articles-là, comme c'est le cas actuellement.
Mme David : Comme c'est le
cas actuellement.
M. Jolin-Barrette : Comme
c'est le cas actuellement.
Mme David : Donc, c'est
l'employeur qui doit répondre à ces critères-là.
M. Jolin-Barrette : Exactement.
C'est l'employeur qui a la responsabilité, comme c'est le cas actuellement.
Puis pour mes amis de la Chambre de commerce Montréal métropolitain, faire peur
au monde, faire peur aux employeurs, ce n'est pas une bonne idée puis ce n'est
pas très crédible non plus.
Mme David : Bon, moi, je n'ai
pas de commentaires sur ça. Bien, je continue sur...
M. Jolin-Barrette : Vous
devriez. Vous devriez parce que c'est ce qui est arrivé en commission
parlementaire.
Mme David : Bien, je continue
sur l'article 46. Quand on dit qu'un niveau de connaissance spécifique
d'une langue autre que la langue officielle, à moins que l'accomplissement de
la tâche ne nécessite une telle connaissance. On verra avec le Conseil du
patronat qu'ils ont beaucoup de réserve à l'utilisation du mot «tâche» - parce
que ça va revenir plus loin, là, le mot «tâche» - parce qu'ils disent : C'est
très, très segmenté. Un emploi peut comporter plusieurs tâches, alors là ça
complique encore plus les choses. Alors, ça va peut-être être plus pertinent
d'amender à 46.1. Mais ils vont vous recommander... et je pourrai relayer leur
suggestion, mais je voulais déjà savoir pourquoi, c'est l'accomplissement de la
tâche et non pas de l'emploi. Et vous pourriez me dire, mais ça ne veut pas
dire qu'on ne peut pas bonifier, que c'était déjà là dans la Charte de la
langue française actuelle, qu'on parlait de tâche. Mais peut-être que là, 43,
44 ans après, ça s'est un peu complexifié, puis qu'on peut parler
d'emploi. Alors, voilà, pour l'instant... Parce qu'il était marqué dans
l'article 46 d'origine, mais qui a été enlevé, «Il est interdit à un
employeur d'exiger, pour l'accès à un emploi ou un poste...» Puis là c'est
devenu «pour qu'elle puisse rester en poste ou y accéder, notamment par
recrutement, embauche... la connaissance spécifique d'une langue, à moins que
l'accomplissement de la tâche...» Alors là, il y a confusion. Il y a trois mots
possibles. Il y a le poste, il y a un emploi ou il y a la tâche. Là, on a l'air
de faire vraiment de la sémantique, mais c'est parce que les employeurs, eux
autres, ils savent ce que ça veut dire. Alors, dans les critères, ça va devenir
très important, la différence entre «poste», «tâche» et «emploi»
M. Jolin-Barrette : Bien,
«tâche» était déjà là à 46.
Mme David : Je le sais, mais
ça ne veut pas dire qu'on ne peut pas l'améliorer, hein, la charte existante.
M. Jolin-Barrette : Oui, mais
il faut s'inspirer également des bonnes choses qui ont été faites dans le passé
aussi.
Mme David : Alors, pourquoi
c'est une bonne chose?
M. Jolin-Barrette : Bien,
dans le cadre d'un emploi, vous avez plusieurs tâches.
Mme David : C'est ça.
M. Jolin-Barrette : Oui.
Mme David : C'est ça. Mais
vous dites «de la tâche... à moins que l'accomplissement de la tâche...» comme
si l'employé avait juste une tâche.
M. Jolin-Barrette : Oui. Mais
il est interdit à un employeur d'exiger d'une personne, pour qu'elle puisse
rester en poste ou y accéder, notamment par recrutement, embauche, mutation,
promotion, la connaissance ou un niveau de connaissance spécifique d'une langue
autre que la langue officielle, à moins que l'accomplissement de la tâche ne
nécessite une telle connaissance. Même alors, il doit au préalable avoir pris
tous les moyens raisonnables pour éviter d'imposer une telle exigence.
Donc, le poste ou l'emploi, c'est... Comme
on dit, c'est la tablette, la tablette ou vous êtes sur une chaise, hein,
souvent, on dit ça, là. Dans le fond, un poste, c'est une chaise. Mais pour
définir qu'est ce que vous faites, dans le cadre de votre poste, bien, ça,
c'est une tâche.
Mme David : Il peut y avoir
plusieurs tâches dans un poste. Vous en êtes l'exemple incarné.
M. Jolin-Barrette : Oui, mais
j'ai plusieurs postes.
• (19 h 10) •
Mme David : Peut-être qu'il y
a des tâches qui impliqueraient que vous parliez une langue autre que le
français, exemple être ministre des Relations internationales - ce que vous
n'êtes pas, mais que, peut-être un jour, on ne le sait pas - ou être dans une
tâche x. Et dans 80 % du reste de vos autres tâches...
Mme David : ...il n'y a aucune
exigence de vous exprimer dans une langue autre.
M. Jolin-Barrette :
Exactement. C'est pour ça que le critère de nécessité est important.
Mme David : Et c'est là que
l'employeur va être très, très, très mal pris, parce qu'il va falloir qu'il
segmente non seulement les postes, mais les tâches, pour être sûr que cette
tâche-là, il n'y a personne d'autre qui peut l'avoir, mais là, peut-être qu'il
y a un employé quelque part qui, lui, sait... connaît déjà une langue autre que
le français, disons, qui parle... il est un peu plus bilingue, et puis là,
cette tâche-là, donc, il va falloir que l'employeur scinde le poste pour donner
une partie de la tâche à quelqu'un qui l'a déjà, mais ça ne marche pas dans son
organigramme. C'est plate à dire, mais c'est ça, les préoccupations d'un
employeur, et vous vous trouveriez bien triste, probablement, de vous mettre
trop à dos ou trop mécontentes je ne sais pas combien, 45 000 PME qui ont
beaucoup de craintes par rapport à ça.
M. Jolin-Barrette : Bien,
46.1, on fait référence à 3, on fait référence à «tâches» au pluriel également.
Donc, on comprend le concept relativement à plusieurs tâches. Donc, on va le
voir, c'est une analyse globale, à 46.1, qui doit être effectuée, en prenant en
compte les trois critères.
Mme David : Bon. Mais je
trouve que ça ne simplifie pas les choses, parce que dans la même phrase vous
avez cette confusion entre «poste» et «tâche» pour que... «Il est interdit à un
employeur d'exiger d'une personne, pour qu'elle puisse rester en poste ou y
accéder... la connaissance, à moins que l'accomplissement de la tâche...»,
comme s'il ne faisait rien qu'une tâche puis que c'est un synonyme, alors
qu'après on parle des tâches. J'essaie, parce que ça va être tellement
important, dans cet article-là, que tout le monde sorte. Là, je parle plus des
entreprises, là. Ce n'est pas nous qui allons vivre avec le projet de loi,
c'est eux.
M. Jolin-Barrette : Mais le
poste n'est pas une tâche. Dans un poste, vous avez une tâche ou plusieurs
tâches...
Mme David : C'est ça.
M. Jolin-Barrette : ...mais
le poste, ce n'est pas la tâche en soi.
Mme David : C'est ça. Alors,
c'est... là, on met un équivalent, «à moins que l'accomplissement de la
tâche...». C'est parce qu'on a pris deux bouts de phrase du nouveau et puis de
la charte actuelle.
M. Jolin-Barrette : Bon,
bien: «Il est interdit à l'employeur d'exiger d'une personne, pour qu'elle
puisse rester en poste ou y accéder, notamment par recrutement, embauche,
mutation ou promotion, la connaissance ou un niveau de connaissance spécifique
d'une langue autre que la langue officielle, à moins que l'accomplissement de
la tâche ne nécessite une telle connaissance. Même alors, il doit au préalable
avoir pris tous les moyens raisonnables pour éviter d'imposer une telle
exigence.»
Mme David : Oui.
M. Jolin-Barrette : Mais ce
n'est pas contradictoire. On accède à un poste, on accomplit une tâche.
Mme David : Oui. Mais c'est
parce que j'ai peur que ça soit assez confus quand on va dire pour l'employeur,
s'il y a plusieurs tâches pour un même poste... Là, peut-être qu'une partie de
ses tâches, dans la mutation ou la promotion, là, va exiger l'anglais, puis pas
les autres parties de la tâche. Donc, il faut qu'il revoie son organigramme, il
faut qu'il... et c'est un peu compliqué, là.
M. Jolin-Barrette : Bien, on
va voir à 46.1. Dans le fond, on n'empêche pas un employeur d'exiger une autre
langue que le français. Mais, par contre, il y a des critères à respecter. Ce
n'est pas parce que... Dans le fond, là, le problème, puis vous l'avez vu à
Montréal, là, avec les enquêtes qui ont été rendues publiques, là, que ça soit
par les différentes sources journalistiques, que ça soit par l'OQLF, notamment,
relativement au fait qu'on exige systématiquement une maîtrise de la langue
anglaise pour des postes qui... Est-ce que c'est nécessaire dans tous les
postes? Est-ce qu'on doit faire en sorte qu'un poste de concierge, on exige
l'anglais pour travailler à Montréal?
Mme David : On est d'accord,
on est d'accord.
M. Jolin-Barrette : Oui, je
ne pense pas, mais c'est pas mal plus... Tu sais, ce n'est pas...
Mme David : Bien, un poste de
concierge, il n'a peut-être pas beaucoup, beaucoup de tâches différentes,
c'est-à-dire, c'est la tâche, c'est... Le poste lui-même, ça serait probablement
suffisant de parler de poste dans ce cas-là.
M. Jolin-Barrette : Bien non,
parce qu'un poste... Un poste, là, c'est la chaise sur laquelle vous êtes
assis, là.
Mme David : Bien, c'est un
peu réducteur.
M. Jolin-Barrette : Non, mais
ce que je veux dire, c'est que souvent, là, supposons, sur... dans les
conventions collectives, là, il crée des nombres de postes, OK. Ça fait que
c'est ce que je veux dire, là, c'est... la chaise physique, là, c'est un poste.
Mais ça ne veut pas... on ne sait pas c'est quoi, la tâche rattachée au poste,
chaque poste a une tâche ou des tâches différentes. Donc, ce n'est pas normal
qu'à Montréal on exige pour tous les postes... Parce que c'est ça, le critère,
hein? C'est toujours plus facile d'exiger le bilinguisme. On ne se pose pas de
question, là, on ne fait pas d'effort, là, on dit: Le mur-à-mur, là...
M. Jolin-Barrette : ...on
exige le bilinguisme autant pour servir de la crème glacée, que vendre des
jeans, que de répondre au téléphone, que...
Le Président (M. Poulin) :
...cher collègue, je dois malheureusement vous remercier. Compte tenu de
l'heure, la commission ajourne ses travaux. Sachez que ça a été un plaisir pour
moi de présider en votre compagnie et je salue la députée d'Anjou-Louis-Riel
également. Merci beaucoup. Bonne soirée.
(Fin de la séance à19 h 16)