Journal des débats de la Commission de la culture et de l’éducation
Version préliminaire
42e législature, 2e session
(19 octobre 2021 au 28 août 2022)
Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.
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Le
mardi 7 décembre 2021
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Vol. 46 N° 3
Étude détaillée du projet de loi n° 96, Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français
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Intervenants par tranches d'heure
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Thériault, Lise
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David, Hélène
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Barrette, Gaétan
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Jolin-Barrette, Simon
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Jolin-Barrette, Simon
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Barrette, Gaétan
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Thériault, Lise
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Skeete, Christopher
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Birnbaum, David
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Thériault, Lise
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Jolin-Barrette, Simon
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Barrette, Gaétan
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Birnbaum, David
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Thériault, Lise
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Barrette, Gaétan
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Jolin-Barrette, Simon
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David, Hélène
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Birnbaum, David
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Skeete, Christopher
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Lévesque, Mathieu
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Proulx, Marie-Eve
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Guillemette, Nancy
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Poulin, Samuel
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Lemieux, Louis
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Ghazal, Ruba
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Bérubé, Pascal
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Thériault, Lise
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Jolin-Barrette, Simon
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David, Hélène
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Barrette, Gaétan
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Thériault, Lise
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Barrette, Gaétan
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Jolin-Barrette, Simon
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Birnbaum, David
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Thériault, Lise
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Barrette, Gaétan
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Thériault, Lise
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David, Hélène
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Birnbaum, David
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Barrette, Gaétan
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Jolin-Barrette, Simon
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Lévesque, Mathieu
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Skeete, Christopher
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Lefebvre, Eric
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Guillemette, Nancy
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Poulin, Samuel
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Bérubé, Pascal
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Proulx, Marie-Eve
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David, Hélène
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Thériault, Lise
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Jolin-Barrette, Simon
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David, Hélène
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Jolin-Barrette, Simon
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Thériault, Lise
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Barrette, Gaétan
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Birnbaum, David
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Thériault, Lise
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Birnbaum, David
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Jolin-Barrette, Simon
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Barrette, Gaétan
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Skeete, Christopher
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Bérubé, Pascal
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David, Hélène
15 h (version révisée)
(Quinze heures seize minutes)
La Présidente (Mme Thériault) :
Votre attention, s'il vous plaît! Votre attention, s'il vous plaît, collègues! Ayant
constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la culture et de
l'éducation ouverte.
Et la commission est réunie afin de
poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 96, Loi sur
la langue officielle et commune du Québec, le français.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La Secrétaire
: Oui, Mme
la Présidente. M. Chassin (Saint-Jérôme) sera remplacé par M. Lévesque
(Chapleau); M. Émond (Richelieu), par Mme Proulx (Côte-du-Sud); Mme Foster
(Charlevoix—Côte-de-Beaupré), par M. Lefebvre (Arthabaska); Mme Rizqy
(Saint-Laurent), par M. Barrette (La Pinière); Mme St-Pierre (Acadie),
par M. Birnbaum (D'Arcy-McGee); Mme Dorion (Taschereau), par Mme Ghazal
(Mercier); et Mme Hivon (Joliette), par M. Bérubé (Matane-Matapédia).
Étude détaillée (suite)
La Présidente (Mme Thériault) :
Parfait. Merci. Lors de notre dernière séance sur cette étude, les discussions
portaient sur un amendement de la députée de Marguerite-Bourgeoys visant à
modifier l'article 7.5 proposé à l'article 5 du projet de loi… 7.1, pardon, et non pas 7.5, à l'article 5
du projet de loi. Je vous informe qu'une nouvelle version a été mise sur
Greffier. La modification concerne la section commentaires, où une partie du
texte a été barrée pour démontrer la partie du texte à supprimer.
Donc, est-ce qu'il y a d'autres interventions
sur cet amendement? Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Écoutez, mon petit
20 secondes qui me reste me servira à dire bonjour à tout le monde. Une
grosse semaine qui commence; on a hâte à autre chose, on a hâte à Noël, on hâte
à s'amuser. Mais, pour l'instant, on doit travailler, cette semaine, dans le
plaisir et l'allégresse, pour ce merveilleux projet de loi. Alors, écoutez,
donc je salue tout le monde et je passe la parole, si c'est possible, Mme la
Présidente, au député de La Pinière.
La Présidente (Mme Thériault) :
Oui, certainement. M. le député de La Pinière, avant de vous reconnaître,
je vais indiquer les temps de parole. M. le député de D'Arcy-McGee, il va
vous rester 13 min 25 s, et vous avez 20 minutes, M. le
député de La Pinière. La parole est à vous.
M. Barrette : C'est presque un
cadeau de Noël, Mme la Présidente.
Une voix : ...
M. Barrette : Avant l'heure.
Et il y en aura d'autres, sans aucun doute. Merci, Mme la Présidente. D'abord,
Mme la Présidente, comme vous le savez, j'ai dû quitter lors de la dernière
séance. J'ai pris connaissance des dernières interventions qui ont été faites
et je ne reviendrai pas sur les considérations félines qui étaient en cours,
entre les chats noirs et blancs, mais je <comprends qu'il y a…
M. Barrette : …vous
le
savez, j'ai dû quitter lors de la dernière séance. J'ai pris connaissance des
dernières interventions qui ont été faites et je ne reviendrai pas sur les
considérations félines qui étaient en cours, entre les chats noirs et blancs,
mais je >comprends qu'il y a une problématique d'interprétation. J'ai
pris connaissance aussi de certains commentaires qui ont été faits de la part
du ministre, qui faisaient référence à un vide juridique qui existait en
matière d'interprétation. C'est le commentaire que le ministre a fait
précédemment.
Et là le ministre a dit quelque chose qui
était assez intéressant et impressionnant. Le ministre a dit qu'à cause de la
problématique dite d'interprétation, et là-dessus je vais vouloir avoir un
échange, un juge pourrait se retrouver dans une espèce de cul-de-sac et il
pourrait se voir forcé, je cite le ministre, là, à réécrire des dispositions.
Alors, ça, ça m'a beaucoup, beaucoup, beaucoup étonné. Est-ce qu'il peut
m'expliquer sur quelle base le ministre s'appuie, n'importe quelle base, là,
pour dire qu'un juge pourrait être amené à réécrire une disposition dans la
loi?
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, Mme la Présidente, si on revient à la base, là, sur les règles
d'interprétation, là, les deux textes, qu'ils soient dans la version française
ou dans la version anglaise, au Québec, ont la même valeur, donc la même
valeur, égale, dans l'interprétation. Parce qu'à Québec et au Parlement
fédéral, les lois sont adoptées dans les deux langues en vertu de l'article 133.
À partir de ce moment-là, il arrive,
devant les tribunaux, des fois, qu'il y a des difficultés d'interprétation
quand les deux textes ne veulent pas… ne disent pas la même chose, donc la version
anglaise et la version française ne disent pas la même chose. Les règles
d'interprétation régulières développées par les sciences juridiques font en
sorte de permettre au juge d'arriver à une situation qui va faire en sorte de
pouvoir dégager quelle est la véritable intention du législateur, pour que
l'interprétation soit cohérente et d'être en mesure d'interpréter
convenablement le texte.
• (15 h 20) •
Or, il peut arriver, dans certaines
circonstances, qu'à la fois les versions anglaises et françaises ne peuvent
être interprétées convenablement et deviennent irréconciliables. Donc, au bout
de ce processus-là, et là j'en suis à la réponse du député de… à la question du
député de La Pinière, lorsqu'on arrive dans cette situation-là, lorsqu'on
se retrouve dans cette impasse-là, bien, le juge, ultimement, non pas
physiquement, mais par sa démarche intellectuelle, lorsqu'il vient pour rendre
jugement, devra, en quelque sorte, réécrire la loi, parce qu'il vient guider…
si les règles d'interprétation ne lui permettent pas d'arriver à une
résolution, il vient statuer : Voici l'interprétation du législateur, <faisant
fi des textes…
M. Jolin-Barrette :
...sa démarche
intellectuelle, lorsqu'il vient pour rendre jugement,
devra, en quelque sorte, réécrire la loi, parce qu'il vient guider… si les
règles d'interprétation ne lui permettent pas d'arriver à une résolution, il
vient statuer : Voici l'interprétation du législateur, >faisant fi
des textes qui sont devant lui, considérant le fait qu'il est passé à travers
la kyrielle de règles d'interprétation juridique.
Donc, comme je le disais la dernière fois,
ça arrive dans de très rares cas, mais, ultimement, on se retrouve dans une
situation où, pour guider le décideur, le magistrat, à la fin du processus, à
la fin de l'ensemble des règles d'interprétation, s'il se retrouve face à une
impasse, il pourra regarder le texte français pour baser sa décision finale.
M. Barrette : Alors, Mme la
Présidente, est-ce que le ministre confond certaines choses? Il a mis dans la
même réponse un concept d'interprétation et un concept d'écriture de la loi. Il
a même dit, je viens de le... j'en ai pris une note, là : Il devra
réécrire la loi, réécrire la loi. Par contre, il a dit, Mme la Présidente, à
plusieurs reprises qu'il devait interpréter la loi. Ça, on comprend ça. Mais
réécrire la loi, là, je pense que ça ne se peut pas. Mais, comme vous savez,
Mme la Présidente, je fais souvent la pratique illégale du droit, je n'ai pas
les connaissances de mon collègue. Bien là, j'aimerais ça que le collègue, le
ministre, précise sa pensée et choisisse les bons mots, s'il y a des bons mots
à choisir. Sinon, s'il n'y a pas de bons mots, bien qu'on me donne un cas, un
précédent ou des précédents, idéalement, où un juge a réécrit une loi.
M. Jolin-Barrette : Bien,
pratico-pratique, oui, cette situation-là se produit, pas dans le sens où le
député de La Pinière, littéral, l'entend. Le juge ne vient pas venir
ouvrir la loi et venir dire : Voici ce qui devrait être lu ici, dans cette
phrase. Mais le juge, il est assis dans son bureau, rend son jugement, étudie
les règles, étudie les propositions qui lui sont faites, regarde de quelle
façon est-ce que les versions anglaise et française sont écrites, tente de
trouver une voie de passage entre les deux versions, parce qu'on est dans une
situation où les deux versions, là, sont contradictoires et ne peuvent pas être
interprétées convenablement.
Alors, le juge, lui, les règles
d'interprétation font en sorte qu'il recherche quelle est la véritable
intention du législateur, hein? Il a plusieurs outils à sa portée pour tenter
de réconcilier les deux textes. Mais, à partir d'un certain moment,
actuellement, il pourrait se retrouver dans une situation où, lorsque je dis
qu'il vient réécrire la loi, c'est qu'il vient dire : Bien, écoutez, les
versions anglaise et française, à partir du moment où j'ai passé à travers
toutes les règles d'interprétation, font en sorte que je suis dans un
cul-de-sac, là, et moi, moi, juge, je suis le décideur. Alors, il va venir
donner une interprétation, au-delà des règles d'interprétation régulières, qui
font en sorte qu'il vient, en quelque sorte, dans le cadre de son jugement,
réécrire ce que veut dire la disposition. Non pas <littéralement, mais
pour les fins de la décision, il va venir dire...
M. Jolin-Barrette :
…et
moi, moi, juge, je suis le décideur. Alors, il va venir donner une
interprétation, au-delà des règles d'interprétation régulières... qui font en
sorte qu'il vient, en quelque sorte, dans le cadre de son jugement, réécrire ce
que veut dire la disposition. Non pas >littéralement, mais pour les fins
de la décision, il va venir dire... il va venir donner l'interprétation à la
portée de la disposition, comme s'il venait le réécrire.
Plutôt et au lieu de se rendre là, nous,
ce qu'on dit, c'est que, quand vous êtes rendus là, au lieu de le faire puis
venir réécrire, en quelque sorte, la disposition, vous devez vous baser sur la
version française, mais ultimement, au bout du processus d'interprétation.
La Présidente (Mme Thériault) :
Le député de La Pinière.
M. Barrette : Pour le bénéfice
de ceux qui nous écoutent, là, le ministre va-t-il être d'accord que le juge ne
va jamais réécrire une loi? Il va interpréter une loi. Un jour, peut-être que
le législateur, dont c'est le rôle, va réécrire la loi, modifier un texte, mais
jamais le juge ne va faire ça.
M. Jolin-Barrette : La
réponse à cette question-là, pour faire clair, la réponse c'est non.
Une voix : …
M. Jolin-Barrette : Non, non,
non, c'est non. Il va la réécrire en interprétant au-delà de l'interprétation
qui est prévue par le législateur. Parce que, lorsque les règles
d'interprétation… Je comprends que ça peut être difficile pour le député de La
Pinière de me suivre, parce qu'il répète abondamment qu'il n'est pas membre du
Barreau et qu'il fait la pratique illégale du droit. D'ailleurs, si c'est le
cas, le syndic doit s'en charger.
M. Barrette : Mais qu'il y
aille.
M. Jolin-Barrette : Cela
étant, cela étant, à partir du moment où vous vous retrouvez dans une situation
où les règles normales d'interprétation ne peuvent pas arriver à une solution,
à ce moment-là, il arrive, en certaines circonstances, que l'effet de
l'interprétation du juge fait en sorte, en quelque sorte, de réécrire les
dispositions, mais tout ça se fait non pas dans le cursus dans lequel nous le
faisons actuellement ici, dans le cadre de l'étude détaillée du projet de loi
et dans le rôle de législateur, mais dans son rôle de magistrat qui vise à
chercher une solution intelligible à la problématique qui lui est soulevée et
relativement à l'interprétation qu'il doit donner à la disposition législative.
Donc, en termes juridiques ou en termes pratico-pratiques, c'est l'équivalent
de réécrire la disposition.
Et l'autre point, c'est qu'il y a un
espace qui est vacant, actuellement, entre l'article 133 et les règles
d'interprétation que nous pouvons faire, comme l'avait proposé Robert Bourassa
en 1974, qui disait qu'ultimement, en cas de conflit d'interprétation, c'est la
version française qui prime.
M. Barrette : Bon, Mme la
Présidente, si je comprends bien, là, ce que le ministre vient de nous dire, c'est
qu'un juge va, pour un cas précis, créer une jurisprudence. Il ne va pas
réécrire la loi. Ça va, ça?
M. Jolin-Barrette : Non. Non,
non, non. Non. La jurisprudence, c'est le fait de décider dans un certain sens
puis d'avoir des précédents, puis là on vient établir : Voici le cas qui
est devant nous puis voici, en fonction des précédents qui ont été établis...
voici la jurisprudence. Là, on est dans un cas plus <précis, des cas qui
se...
M. Jolin-Barrette :
…non, non, non. Non. La jurisprudence, c'est le fait de décider dans un certain
sens puis d'avoir des précédents, puis là on vient établir : Voici le cas
qui est devant nous puis voici, en fonction des précédents qui ont été
établis... voici la jurisprudence. Là, on est dans un cas plus >précis,
des cas qui se présentent peu fréquemment, O.K., où vous avez deux versions à
une loi, O.K., version française, version anglaise, O.K.? Généralement, les
deux versions veulent dire la même chose. Le député de La Pinière est d'accord
avec moi là-dessus?
M. Barrette : ...
M. Jolin-Barrette : Oui? Non?
M. Barrette : Oui.
M. Jolin-Barrette : Oui?
M. Barrette : Normalement,
oui.
M. Jolin-Barrette : Bon,
normalement, oui, puis ça devrait être comme ça. Deuxième étape, ça arrive,
lorsqu'on est rendus devant le juge, relativement à une disposition, que ça
soit pour un constat d'infraction, supposons, au Code de la sécurité routière,
c'est déjà arrivé, où le texte français et le texte anglais ne disent pas la
même chose, ils sont en opposition, en frontal. Là, le juge, dans son panier d'outils,
dans son... pour une utiliser une expression péquiste, dans son coffre à
outils, O.K...
M. Barrette : …commentaire.
M. Jolin-Barrette : ... — bien,
je ne vous vise pas, non plus, j'imageais mon propos, j'imageais mon propos d'un
ancien chef du Parti québécois au moment… le dernier changement de logo, Mme la
Présidente, alors, à cette époque-là — le coffre à outils disponible,
donc, le juge a les différentes règles d'interprétation, par rapport aux
dispositions, pour réussir à réconcilier le texte.
Parfois, la situation est tellement… les
textes sont tellement opposés, versions anglaise et française, qu'à ce
moment-là le juge se retrouve avec les règles normales d'interprétation, il ne
réussit pas à amener une interprétation convenable et intelligible. On est
rendus en bout de course, là. Et là, actuellement, ce qui se produit, c'est que
le juge, bien, il regarde la version anglaise, il regarde la version française,
les règles d'interprétation ne nous permettent pas d'arriver à un résultat
concret, donc il va venir déterminer ce que signifie la disposition, version
anglaise et version française ensemble, et il va arriver à un résultat logique
où le juge, plutôt que se baser sur le texte législatif clair, lui-même, arrive
à une sorte de solution, un peu comme quand il se ramasse en équité, supposons,
et là vient rendre jugement.
Et là c'est là qu'on intervient, parce
que, là, il y a un espace, un niveau de marge de manoeuvre, en fonction de l'article 133,
où là on dit : Avant d'arriver là, là, avant que vous rendiez votre
décision qui ne permet pas d'être réconciliée par les textes anglais et
français, là, à ce moment-là, vous allez regarder le texte français pour
connaître la véritable intention du législateur, en bout de course seulement.
• (15 h 30) •
M. Barrette : Parfait, Mme la
Présidente. Donc, résumons, résumons. Le juge est face à un dilemme qui a sa
source dans la langue. Le juge doit porter un jugement en fonction des textes
de loi qui sont en vigueur, version anglaise, version française. Il doit,
devant un cas précis, tirer une conclusion qui est le fruit d'une réflexion
interprétative. À la fin de son <jugement, là, le texte…
>
15 h 30 (version révisée)
<15397
M.
Barrette : ...Le juge doit porter un jugement en fonction des textes
de loi qui sont en vigueur, version anglaise, version française. Il doit,
devant un cas précis, tirer une conclusion qui est le fruit d'une réflexion
interprétative. À la fin de son >jugement, là, le texte de loi n'a pas
changé, là, on s'entend-tu là-dessus? Le juge va interpréter, mais ne réécrira
pas le texte de loi. Et évidemment son interprétation va avoir une utilité dans
le futur, lorsqu'il y aura une cause similaire qu'il entendra, et qu'un juge
ultérieur aura à se référer à la même problématique parce que le texte de loi
n'aura pas changé. Si le ministre me dit que ça change le texte de loi... Parce
qu'il ne changera pas le texte de loi après son interprétation, là. C'est ça
que je veux savoir. Alors, quand le ministre me dit : Il est pris dans une
situation où il va réécrire le texte, bien, c'est non, la réponse à ça.
M. Jolin-Barrette : C'est oui.
M. Barrette : Bien non, il ne
va pas réécrire le texte de loi.
M. Jolin-Barrette : Bien, c'est
parce que...
M. Barrette : Le texte qui est
dans le corpus législatif va-t-il être réécrit?
M. Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, on va s'entendre sur deux choses, O.K.? Bon, le député de La Pinière
a raison puis, moi aussi, j'ai raison.
M. Barrette : Non.
M. Jolin-Barrette : Bien oui.
M. Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, juste pour bien l'illustrer, là, pour que le député de La Pinière
me suive bien, lorsqu'on est dans la situation, là, où on arrive en bout de
course, là, puis les versions anglaise puis française ne sont pas... les règles
d'interprétation font en sorte qu'elles ne peuvent pas être interprétées
convenablement pour avoir un résultat intelligible, un résultat logique, O.K.,
le juge, il ne débarque pas au Parlement du Québec, à l'Assemblée nationale,
puis il ne dit pas à la direction de l'édition des lois : On ouvre la
shop, puis on réimprime la loi, puis on réouvre, puis on ouvre la commission
parlementaire, puis on demande à Mme la Présidente de siéger, tout ça. Non, ce
n'est pas dans ce sens-là. Donc, il ne vient pas modifier la loi annuelle comme
ça.
Par contre, lorsqu'il rend sa décision,
O.K., et ça, ça arrive dans notre droit que les deux versions ne peuvent
pas être interprétées convenablement, puis il est allé au bout du compte, bien,
ça lui arrive de dire : Bien, voici de quelle façon... quelle est
l'intention du législateur et de quelle façon on doit interpréter la
disposition, ce qui a pour effet, en quelque sorte, de réécrire la disposition
législative. On vient jouer le rôle du législateur, à ce moment-là, et c'est
dans ce sens-là. Lorsque je dis que le juge réécrit la disposition, c'est qu'il
va venir dire : Bien, voici le sens de l'interprétation et voici comment
elle va être faite. Et c'est déjà arrivé que le juge vienne compléter des mots
à l'intérieur d'un texte législatif. Donc, ça doit être lu de cette façon-là.
Et là, après ça, là on se retrouve dans
une situation où ça pourrait être cité à titre de jurisprudence pour dire :
Bien, voyez-vous, cette disposition-là avait été contestée par le passé, il y
avait une difficulté d'interprétation entre les versions anglaise et française,
et, désormais, puisque ça a été porté devant l'attention de la cour, le
législateur... la disposition n'est pas claire, du législateur, mais moi, en
tant que juge, je dois rendre une décision, donc, j'ai fait toutes les règles
d'interprétation, ça m'amène à un <cul-de-sac, à partir de ce moment-là,
voici...
M. Jolin-Barrette :
...par
le passé, il y avait une
difficulté d'
interprétation entre les
versions anglaise et
française, et désormais, puisque ça a été porté
devant l'attention de la cour, le
législateur... la
disposition
n'est pas claire, du
législateur, mais moi, en tant que juge, je dois
rendre une décision, donc j'ai fait toutes les règles d'
interprétation,
ça m'amène à un >cul-de-sac, à partir de ce moment-là, voici l'interprétation
que j'ai donnée en réécrivant la disposition pour qu'elle soit logique et
cohérente à l'intérieur du texte législatif qui a été adopté par le législateur.
Donc, d'où mon propos, lorsque le juge
vient réécrire la loi, mais je suis d'accord avec le député de La Pinière
qu'il ne débarque pas à l'Assemblée nationale pour le faire, mais il le fait
dans le cadre de sa cour de justice et des pouvoirs qui lui sont investis, de
trouver une décision logique et cohérente pour trancher un litige entre deux
parties qui sont portées devant lui.
M. Barrette : Parfait.
M. Jolin-Barrette : À partir
de ce moment-là, ce qu'on fait, et là le député de La Pinière va être
d'accord avec moi, c'est qu'avant d'arriver là on va venir dire :
Attention, avant d'être rendus là, regardez le texte français, et voici la
véritable intention du législateur, le tout conformément à 133 de la Loi
constitutionnelle de 1867.
D'ailleurs, Mme la Présidente, pour le
bénéfice du député de La Pinière, le Pr Jean Leclair, de l'Université de
Montréal, la Faculté de droit de l'Université de Montréal, vous vous souvenez
de son témoignage, Mme la Présidente, on ne peut pas dire qu'il était
particulièrement favorable au projet de loi. Et il a énoncé quelques critiques
bien senties relativement au projet de loi, Mme la Présidente, mais, mais... et,
ça, je pense que, comme on dit, comme on dit, Mme la Présidente, ça donne de la
crédibilité au témoin, hein? On ne peut pas le taxer d'être progouvernement ou
pro-projet de loi n° 96 par le témoignage et l'avis
qu'il a rendus, alors, d'autant plus que la force probante de son témoignage
est renforcée avec les propos qu'il a tenus à la page 13 de son mémoire,
le deuxième paragraphe : «Cela dit, l'article 5 du projet de loi
propose d'introduire dans la Charte de la langue française un nouvel article 5.1
qui prévoirait ceci : "En cas de divergence entre les versions
française et anglaise d'une loi, d'un règlement ou d'un autre acte visé aux
paragraphes 1° ou 2° de l'article 7 que les règles ordinaires
d'interprétation ne permettent pas de résoudre convenablement, le texte
français prévaut." Au premier regard, cette disposition semble entrer en
conflit direct avec l'affirmation de la Cour suprême selon laquelle l'article 133
de la Loi constitutionnelle de 1867 "exige que les lois de la législature
du Québec soient adoptées dans les deux langues officielles, qu'elles fassent
pareillement autorité et qu'elles aient le même statut." Je ne pense pas
que ce soit le cas.»
Alors, le Pr Leclair valide l'article 7.1
tel qu'il est écrit dans le cadre de notre projet de loi. Alors, ça, c'est un
argument d'autorité qui ne vient pas du ministre. C'est encore plus fort, un
professeur d'université de la Faculté de droit de l'Université de Montréal, en
toute indépendance institutionnelle, n'est-ce pas, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys?
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le député de La Pinière.
M. Barrette : Bon, c'est beau,
là, tout ça, là, mais à la...
M. Jolin-Barrette : Non, non,
mais «c'est beau, tout ça», c'est concret, là.
M. Barrette : Là, c'est moi
qui a la parole. M. le ministre, c'est moi qui a la parole. Alors, à la fin de
la journée, là, il n'y a pas de texte qui est réécrit, là, point final. Il y a
un exercice d'interprétation qui est fait par un juge qui vient, et le ministre
le dit, faire l'équivalent d'une jurisprudence.
M. Jolin-Barrette : Non, non,
oh non, on ne se comprend pas, là.
M. Barrette : Non, non, Mme la
Présidente, je vais retirer mon mot, là.
M. Jolin-Barrette : Non, le
ministre me prête des intentions.
M. Barrette : Bien non!
M. Jolin-Barrette : Bien oui!
Ce n'est pas ça que <j'ai dit...
M. Barrette : ...là, point
final. Il y a un exercice d'interprétation qui est fait par un juge qui vient,
et le ministre le dit, faire l'équivalent d'une jurisprudence.
M. Jolin-Barrette :
Non, non. Oh non! On ne se comprend pas, là.
M. Barrette : Non, non.
Mme la Présidente, je vais retirer mon mot, là.
M. Jolin-Barrette :
Le ministre me prête des intentions.
M. Barrette : Bien non.
M. Jolin-Barrette :
Bien oui. Ce n'est pas ça que >j'ai dit.
La Présidente (Mme Thériault) :
...simplement vous rappeler de ne pas vous interpeler. Ça allait très bien. Donc,
juste de ne pas vous interpeler... Chacun votre tour, vous avez vos droits de
parole, vous avez vos temps de parole, ne soyez pas inquiets. M. le député
de La Pinière, vous aviez la parole.
M. Barrette : Je vois
l'impulsivité du ministre. Alors, le ministre, pour résumer la situation, a une
cause, doit interpréter la loi, devant un dilemme anglais-français, doit faire
un cheminement qui l'amène à une conclusion, mais, le ministre l'a dit,
maintenant que c'est clarifié, aucun texte de loi ne sera réécrit. Alors, si
ça, là, ce n'est pas clair, bien là on... Puis je vais lui demander pour une
dernière fois. Est-ce que j'ai raison de dire qu'après l'exercice je comprends
que l'interprétation peut être utilisée par un juge, ultérieurement, mais, dans
les faits, le texte n'est pas réécrit et ne mène pas à une réédition du corpus
législatif en regard de la loi en question? C'est-tu correct, ça?
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : La
réponse, c'est non.
M. Barrette : Bon.
M. Jolin-Barrette : Et je
l'ai très bien illustré. Si le député de La Pinière fait référence à un membre
de la magistrature qui revient au Parlement réécrire la disposition législative
et qui repasse les cinq, six étapes qu'on a, la réponse à cette question-là,
c'est non. Mais l'effet de l'interprétation, quand le juge rend jugement sur
une disposition qui est conflictuelle entre la version anglaise et française,
ultimement, dans certaines situations, la Cour suprême est venue dire que
c'était l'effet... dans le fond, c'est l'équivalent de la réécriture de la loi
pour arriver à une disposition tangible. C'est l'effet. En termes clairs, c'est
ce que ça fait, c'est l'équivalent de réécrire la disposition.
M. Barrette : C'est le fun
quand on est clairs, Mme la Présidente. Je remercie le ministre d'avoir
été clair. Il n'y a donc pas de réécriture. Tout le débat que je viens de faire
a sa source dans l'affirmation du ministre selon laquelle le juge réécrivait.
Il ne réécrit pas. Il y a un effet, je le comprends très bien, mais la loi
n'est pas réécrite, point.
M. Jolin-Barrette : Non.
M. Barrette : Passons à un
autre sujet.
M. Jolin-Barrette : Non, non,
non, c'était important.
M. Barrette : Bon, je n'aurais
pas posé de question, mais il peut y aller.
M. Jolin-Barrette : Je le
sais, Mme la Présidente, mais moi, je veux être certain, là, qu'à la fin
de la présente séance, Mme la Présidente, le député de La Pinière
soit convaincu, hein, de mon propos et comprenne bien ce que je lui partage,
Mme la Présidente. Donc, c'est l'équivalent de la réécriture de la
disposition législative. Je veux juste qu'il me comprenne bien.
M. Barrette : Mme la
Présidente, dans son esprit, c'est une équivalence que je comprends, qui, dans
mon esprit, est l'équivalent d'une jurisprudence qui ne correspond pas à un
équivalent dans son esprit, mais le <texte n'est pas réécrit de...
M. Jolin-Barrette :
...législative. Je veux juste qu'il me comprenne bien.
M. Barrette :
Mme la
Présidente, dans son esprit, c'est une équivalence que je comprends, qui, dans
mon esprit, est l'équivalent d'une jurisprudence, qui ne correspond pas à un
équivalent dans son esprit, mais le >texte n'est pas réécrit de façon
formelle. Si vous me le permettez, Mme la Présidente, je vais aller au sujet
suivant.
M. Jolin-Barrette : Bien non!
M. Barrette : Ah bon! Bien, Mme
la Présidente...
M. Jolin-Barrette : Bien, Mme
la Présidente, je m'excuse, mais c'est parce qu'il faut être clair, là. Les
faits jurisprudentiels, là, c'est l'équivalent d'une décision antérieure de la
jurisprudence, mais, à partir du moment... Vous ne pouvez pas dire, supposons :
Ah! la jurisprudence dit ça. C'est une décision antérieure, mais ça pourrait être
une décision d'un cas unique aussi sur un dossier qui pourrait avoir une
interprétation distincte aussi par rapport à un autre juge, puis ça pourrait
être une décision contradictoire aussi.
M. Barrette : Je comprends
très bien, Mme la Présidente.
M. Jolin-Barrette : Bon, on
est d'accord là-dessus.
M. Barrette : Mais, dans les
faits, dans les faits, le texte n'est pas réécrit, dans les faits.
• (15 h 40) •
M. Jolin-Barrette : Non, mais
vous vous retrouvez dans une situation où vous avez un concept, en common law,
de «judge-made law». Donc, le juge...
M. Barrette : ...d'un concept
laïque du droit.
M. Jolin-Barrette : Un
concept laïque?
M. Barrette : Je suis un laïc
du droit.
M. Jolin-Barrette : Oui, oui,
mais, ça, j'ai compris, mais mon idée, Mme la Présidente, n'est pas de
convertir ni de partir en croisade pour aller sauver l'âme à la dérive du
député de La Pinière, Mme la Présidente. Je souhaite juste le rassurer par
rapport à la disposition que nous mettons, qui vise à faire en sorte d'affirmer
les compétences du législateur, et surtout de répondre à ce que Robert Bourassa
avait fait en 1974, Mme la Présidente. La disposition qui est là, elle est
tirée du Bill 22 du Parti libéral. Donc, je m'inspire de sources qui
peuvent s'avérer intéressantes parfois.
M. Barrette : Oui, bien, j'y
reviendrai à ça dans quelques instants, Mme la Présidente. Alors, bien des gens
ont critiqué le texte proposé par le ministre quand il introduit le mot
«convenablement».
Une voix : ...
M. Barrette : Non, d'autres
aussi.
La Présidente (Mme Thériault) :
Ne vous interpelez pas, s'il vous plaît. M. le député de La Pinière, vous
avez la parole.
M. Barrette : Alors, pourquoi
avoir... C'est quoi, la valeur ajoutée? Il y avait des mots avant dans la loi,
puis là on les remplace par «convenablement». Quelle est la valeur ajoutée de
«convenablement»? Un observateur extérieur se dirait raisonnablement :
Bien, si le ministre a voulu faire ça, c'est qu'il avait une idée dans
l'esprit, il avait une finalité linguistique. Qu'est-ce que ça vient ajouter
et/ou corriger? Ça sort d'où? C'était quoi, le problème à résoudre? C'est quoi,
l'inspiration de son équipe ou même la sienne?
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, voyez-vous, dans la loi 22, la disposition à <l'article 2...
M. Barrette : ...et/ou
corriger? Ça sort d'où? C'était quoi, le problème à résoudre? C'est quoi,
l'inspiration de son équipe ou même la sienne?
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette :
Mais, en fait, voyez-vous, dans la loi 22, la disposition à >l'article 2,
O.K. : «En cas de divergence que les règles ordinaires d'interprétation ne
permettent pas de résoudre convenablement, le texte français des lois du Québec
prévaut sur le texte anglais.»
M. Barrette : «So what?» Ça,
c'est de l'humour.
M. Jolin-Barrette : «So what»
quoi?
M. Barrette : Bien, c'est
parce qu'en français-anglais, «so what»... pas grave, trop compliqué.
M. Jolin-Barrette : Donc, la
genèse, la source de l'inspiration est l'article 2 du projet de loi... de
la loi 22 du gouvernement libéral de 1974, parce que le premier ministre
de l'époque avait jugé important de dire : Bien, écoutez, si vous êtes en
situation de conflit entre les deux lois, que les règles d'interprétation ne
permettent pas convenablement d'arriver à une solution, le texte français
prévaudra. Et c'est ce qu'on fait, mais ce qu'il faut dire, c'est que, depuis
ce temps-là, il y a eu le Parti québécois qui a adopté la loi 101 et qui a
fait disparaître...
Bien, dans le fond, dans la charte, actuellement,
la langue de la législation et de la justice a été... Il y a certaines
dispositions qui ont été supprimées suite à Blaikie, 1979, 1981, les deux
décisions de Blaikie qui ont été à la Cour suprême. Et il reste un espace pour
faire en sorte que, lorsqu'il y a un conflit entre les deux lois, après les
règles d'interprétation, on peut insérer un espace qui va venir dire :
Bien, la langue de la législation puis la langue de la justice, c'est le
français, et voici comment ça s'exprime lorsqu'on se retrouve dans une
situation où ce n'est pas possible de résoudre convenablement la disposition.
M. Barrette : Je n'ai pas eu
de réponse à ma question, Mme la Présidente.
M. Jolin-Barrette : ...je
viens de vous répondre.
M. Barrette : Ma question est
sur la... pas sur le principe du projet de loi, là, pas ça, là, l'utilisation,
la signification juridique du mot «convenablement». C'est un mot qui apparaît,
qui a été changé du passé. Pourquoi, le «convenablement»? Parce que c'est un
mot qui, juridiquement, d'après mes humbles recherches... C'est parce que ce
mot-là, il n'est pas utilisé en droit, là. Il aurait pu utiliser... Le ministre,
il aurait pu utiliser d'autres mots, genre : «qui respecte l'esprit,
l'intention du législateur», et ainsi de suite, là. Pourquoi «convenablement»,
qui, en soi, est un mot qui a une charge relativement subjective? Alors, y a-tu
d'autres significations? Moi, «convenablement», là, ça peut vouloir dire bien
des affaires, là.
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, Mme la Présidente, on vient guider la cour. On vient lui dire :
Bien, écoutez, si vous ne réussissez pas à avoir une solution convenable dans
l'interprétation des textes... Puis le vocable utilisé par le député de
La Pinière sont des synonymes, mais le terme «convenablement» a été
notamment pris par le législateur libéral à l'époque. Alors, on comprend que...
M. Barrette : Bien, prenons <l'angle...
M. Jolin-Barrette :
...solution
convenable dans l'interprétation des textes... Puis le vocable utilisé par le
député
de
La Pinière... sont des synonymes. Mais le terme «convenablement»
a été notamment pris par le législateur libéral à l'époque. Alors, on comprend
que...
M. Barrette : Bien, prenons
>l'angle du législateur à l'époque. Ma compréhension de l'interprétation
de la loi de l'époque est que l'interprétation se faisait de façon littérale en
1974. Or, là aussi, ma compréhension des règles d'interprétation a changé avec
le temps. Alors, est-ce que le ministre est en train de nous dire qu'on doit
revenir aux règles d'interprétation littérale de 1974, oui ou non?
M. Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, le député de La Pinière est un homme intelligent. Il l'a lu, l'article 7.1,
et qu'est-ce que nous dit l'article 7.1, que les règles ordinaires d'interprétation
ne permettent pas de résoudre... Alors, on ne dit pas de revenir... Puis les
règles littérales, ça date... Dans le fond, il y avait d'autres règles à
l'époque aussi, mais on ne revient pas à une approche littérale, Mme la
Présidente, hein? On dit : Les règles d'interprétation ordinaires qui font
partie des outils, hein, qui sont dans le coffre à outils à la disposition de
la cour, Mme la Présidente.
Alors, première étape, on regarde versions
française et anglaise. Elles ont le même statut et la même valeur juridique. Les
deux versions ne disent pas la même chose. Deuxième étape, règles
d'interprétation ordinaires, tous les outils dans le coffre à outils à la disposition
pour trouver le sens, l'interprétation des deux versions. Ultimement, on
n'arrive pas à un résultat qui est convenable, un résultat intelligible, un
résultat qui permet de rendre jugement en fonction de l'intention du législateur,
une situation qui n'est pas extrême, je vous dirais, qui n'est pas une situation
qui provoquerait une situation incohérente, une situation qui doit être logique,
une interprétation qui doit être logique, qui doit être cohérente, qui doit
être lue dans son contexte. Troisième étape, c'est là qu'on arrive avec 7.1., on
dit au juge : Référez-vous à la version française, mais uniquement en bout
de processus. C'est clair, ça. C'est clair.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le député.
M. Barrette : Pas nécessairement.
M. Jolin-Barrette : Bien oui!
M. Barrette : Bien non!
M. Jolin-Barrette : Bien oui!
M. Barrette : M. le Président,
là... Mme la Présidente... Excusez-moi, Mme la Présidente, là, je promets que
je ne le referai pas. Mme la Présidente, ce n'est pas moi, là, qui ramène tout
à 1974, c'est le ministre qui est toujours très heureux de pointer à la députée
de Marquette... de Marguerite-Bourgeoys, pardon, blablabla, c'est le texte de
1974, elle devrait être contente, c'est Robert Bourassa.
M. Jolin-Barrette : Juste
pour le procès-verbal, je ne dis pas «blablabla».
La Présidente (Mme Thériault) :
Il n'y a pas de «blablabla» dans votre texte, non.
M. Jolin-Barrette : J'utilise
des mots, des termes qui sont clairs, au bénéfice des <collègues...
M. Barrette : ...ministre
qui est
toujours très heureux de pointer à la députée de Marquette... de
Marguerite-Bourgeoys, pardon, ba, ba, ba, c'est le texte de 1974, elle
devrait être contente, c'est Robert Bourassa.
M. Jolin-Barrette :
...juste pour le procès-verbal, je ne dis pas : «ba, ba, ba»
La Présidente (Mme Thériault) :
Il n'y a pas de «ba, ba, ba», dans votre texte, non.
M. Jolin-Barrette :
J'utilise des mots, des termes qui sont clairs, au bénéfice des >collègues.
La Présidente (Mme Thériault) :
Vous avez parfaitement raison, M. le ministre. J'espère qu'on rayera du Journal
des débats les «blablabla».
M. Barrette : Vous avez
raison, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Thériault) :
Continuez, Mme la députée... M. le député.
M. Barrette : Mme la
Présidente, je suis sûr que ceux qui transcrivent nos textes vont, sans aucun
doute, inscrire dans les galées trois points de suspension, suivis de trois
autres, suivis de trois autres.
Ceci dit, c'est quand même le ministre
lui-même qui, avec enthousiasme, va, à répétition... répète, à ma collègue de Marguerite-Bourgeoys,
la notion, la joie de revenir à 74, et, à 74... entre 74...
Une voix : ...
M. Barrette : ...non, je n'ai
pas fini — c'était une interprétation littérale. Comme c'est une
interprétation littérale au départ, Mme la Présidente, vous comprendrez que je
m'interroge sur l'intérêt d'amener «convenablement», parce que, là, si on
remonte le temps, bien là on va opposer «convenablement» à la version anglaise,
qui est «satisfactorily». Je peux le comprendre, en anglais, assez clairement,
mais, en français, là...
Je vais vous donner un exemple, Mme la
Présidente. Mettons qu'un parent regarde pour la première fois le premier chum
de son adolescente de 17 ans, il va se dire : Il est-tu convenable?
Alors là, moi, «convenable», bien, je veux dire, je peux mettre ça à toutes les
sauces. S'il avait voulu être si précis que ça, le ministre, pourquoi il n'a
pas écrit quelque chose du genre «conforme à l'intention du législateur».
«Convenable», là, elle est-tu habillée convenablement, le juge est-il
convenable dans sa... Non, à un moment donné, là, pourquoi le «convenable»? Parce
que c'est le ministre qui nous ramène à 74. 74, c'est littéral. La source du
débat, elle est là. Pourquoi, et pourquoi ne pas avoir écrit autre chose?
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre.
• (15 h 50) •
M. Jolin-Barrette : Bien,
parce que le terme «convenable» permet d'avoir une solution qui est raisonnable,
qui est intelligible, qui est logique. Les règles d'interprétation,
lorsqu'elles sont utilisées, permettent d'avoir un résultat convenable,
conformément à l'intention du législateur. Moi, je m'explique mal, Mme la
Présidente, pourquoi il y a une si grande réticence de la part du député de La Pinière
à venir dire : Bien, écoutez, on est dans une situation où la Loi
constitutionnelle de 1867 fait en sorte qu'on est... On s'est vu imposer le
fait que les textes anglais et français devaient être adoptés dans notre
Assemblée, même chose pour le Parlement <fédéral...
M. Jolin-Barrette :
...la
Loi
constitutionnelle de 1867 fait en sorte qu'on est... on s'est vu
imposer le fait que les textes anglais et
français devaient être adoptés
dans notre Assemblée, même chose pour le Parlement >fédéral. À partir de
ce moment-là, il peut y avoir des conflits relativement aux deux versions. Les
règles sont claires. La Cour suprême est venue le dire, les deux textes ont la
même valeur législative. Les mêmes règles d'interprétation s'appliquent et ont
le même poids.
À partir de ce moment-là, le juge, sa job,
c'est d'interpréter les textes. Un coup que ça se retrouve devant lui, il y a
une série de règles d'interprétation qu'il peut avoir, et c'est ce que 7.1 dit,
les règles ordinaires d'interprétation. On ne retourne pas à 1974, là, pour les
règles d'interprétation. On est en 2021. Après ça, ça peut arriver que les
règles d'interprétation ne permettent pas de résoudre le conflit convenablement,
et donc on dit : Voici, pour l'espace subséquent qui reste, plutôt que de
confier le tout au magistrat, uniquement sur son interprétation unique, on lui
donne un outil supplémentaire dans le coffre à outils décisionnel qui est le
sien. On vient lui dire : Regardez du côté de la version française,
ultimement. Est-ce que le député de La Pinière est en désaccord avec ça?
M. Barrette : Mme la
Présidente, moi, je suis ici pour débattre, pas pour me prosterner devant
l'argumentaire du ministre.
M. Jolin-Barrette : Il n'est pas
question d'être prosterné. Je lui demande : Est-ce qu'il est d'accord avec
cette proposition-là que, dans l'espace qui reste entre l'article 133 puis
les règles actuelles... Est-ce qu'il préfère que ça soit le législateur qui
guide le judiciaire ou il dit : Non, nous, on ne joue pas pleinement notre
rôle de législateurs puis on ne vient pas aller jusqu'au bout du processus que
la constitution nous permet de faire? C'est ça, la question fondamentale.
M. Barrette : La question
fondamentale, Mme la Présidente, n'est pas exactement ça en ce qui me concerne,
parce que, placé comme le ministre l'a fait, ça signifie que la rédaction en
français est parfaite et que la rédaction anglaise ne l'est pas. Remarquez que
c'est possible. Est-il possible que la rédaction anglaise soit mieux faite que
celle en français, notamment?
M. Jolin-Barrette : C'est
oui.
M. Barrette : C'est oui.
Évidemment que c'est oui, la réponse, mais ce que le ministre nous dit, là,
dans le cas de cette imperfection-là, il faut qu'il aille voir du bord... du
côté imparfait. À ma question : Est-ce que c'est possible que la version
française soit imparfaite et que l'anglaise soit meilleure?, alors, si le juge
se pose une question, bien, il doit, avec cet article-là, s'en remettre à la
version imparfaite. Bien là, à un moment donné, là, ça n'a pas de sens. Alors,
Mme la Présidente, c'est encore une fois la source de mon propos.
«Convenablement» est un terme imprécis. Mme la Présidente, le <Barreau,
là, le dit, là...
M. Barrette : ...bien là, à
un moment donné, là, ça n'a pas de sens. Alors, Mme la Présidente, c'est encore
une fois la source de mon propos. «Convenablement» est un terme imprécis. Mme
la Présidente, le >Barreau, là, le dit, là, à la page 16 de son
mémoire : «L'article semble trop vague et imprécis puisqu'il indique que
le texte français prévaudra lorsque la divergence ne sera pas résolue — guillemets — "convenablement".
En se référant au test de la résolution convenable, ceci risque de créer de
nombreux litiges inutiles basés sur une notion non juridiquement définie.» C'est
le Barreau. Eux autres, ils pratiquent légalement le droit, là, je pense, et
ils écrivent ça. Mme la Présidente, je vais faire une petite pause pour laisser
le ministre... et je ne fais plus de pause.
La Présidente (Mme Thériault) :
Je vais... Oui, continuez.
M. Barrette : Alors, Mme la
Présidente, on n'est pas ici pour contester son... cet élément-là de la loi,
là. Le ministre, j'imagine, j'imagine, je ne le sais pas, j'imagine qu'il
serait heureux que son article passe le test des tribunaux. Ici, on a un
certain nombre d'arguments qui vont dans le sens que peut-être qu'il pourrait
être réécrit de façon à ce qu'il passe le test des tribunaux et ne cause pas de
tort à qui que ce soit.
Je reviens à mon exemple, Mme la
Présidente. S'il advenait que la version française soit litigieuse en termes
juridiques et que la version anglaise soit plus précise, et ici, c'est un beau
cas, «convenable» versus «satisfactorily», ce n'est pas la même chose, dans mon
sens à moi, bien là son article de loi donne à la version française, à toutes
fins utiles, un droit de veto sur l'anglaise parce qu'il dit au juge :
Bien, vous allez, là... si ce n'est pas clair pour vous, M. le juge, là, et que
vous vous posez des questions, arrêtez immédiatement, allez voir la version
française. Et, s'il advient que la version française est moins solide
intellectuellement, c'est elle qui va gagner, alors qu'on pourrait très bien
réécrire cet article-là de façon à ce que tout le monde soit protégé d'une, j'allais
dire, erreur, mais disons d'une insatisfaction juridique. Tiens, on va mettre
ça comme ça.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci, M. le député de La Pinière. Je vais passer la parole au ministre,
mais j'ai aussi le député de Sainte-Rose qui a signifié son intention de
prendre la parole. Donc, après, j'irai au député de Sainte-Rose. M. le
ministre.
M. Jolin-Barrette : Bon, pour
répondre au député de La Pinière, on se retrouve dans une situation où les
deux versions doivent être réconciliables quand elles ne disent pas la même
chose. Alors, les règles d'interprétation arrivent dans une situation
appropriée. Si ce n'est pas le cas, s'il ne réussit pas à résoudre
convenablement le texte, si les règles d'interprétation ne réussissent pas à
résoudre convenablement le texte, à ce moment-là, il va se tourner vers la
version <française...
M. Jolin-Barrette :
...ou
les deux versions doivent être réconciliables quand elles ne disent pas la même
chose. Alors, les règles d'interprétation arrivent dans une situation
appropriée. Si ce n'est pas le cas, s'il ne réussit pas à résoudre
convenablement le texte, hein, si les règles d'interprétation ne réussissent
pas à résoudre convenablement le texte, à ce moment-là, il va se tourner vers
la version >française. Je rappellerai au député de La Pinière qu'en
cette enceinte c'est la version française qu'on étudie aussi, sur laquelle on
travaille aussi. Donc, l'intention du législateur, elle est manifeste.
M. Barrette : Mme la
Présidente, ça ne change strictement rien à ce que je viens de dire, là. Et,
juste pour mon information, il me resterait combien de temps?
La Présidente (Mme Thériault) :
Il vous reste quatre minutes, sauf que j'avais déjà signifié mon intention,
oui, pour après. Il vous vous reste quatre minutes.
M. Barrette : Non, non, ça me
va, Mme la Présidente. Je voulais juste savoir où est-ce qu'on était rendus.
La Présidente (Mme Thériault) :
Donc, on va aller au député de Sainte-Rose étant donné que j'avais signifié mon
intention. M. le député de Sainte-Rose.
M. Skeete : Merci, Mme la
Présidente. Bien, effectivement, le ministre vient juste de faire le point que
je voulais faire, c'est qu'on s'est donné comme règlement, dans ce Parlement,
de rédiger en français les projets de loi, et ils sont ensuite traduits. Alors,
l'intention du législateur est toujours exprimée en français. Alors, oui, c'est
vrai, l'humain n'est pas parfait. La version française pourrait ne pas être
exacte, mais la version anglaise est la traduction de cette inexactitude.
Alors, je soumets que la version française est toujours, dans notre Assemblée,
la version la plus près de l'interprétation du législateur. Alors, c'était le
point que je voulais apporter au collègue, simplement, de considérer cela
lorsqu'il fait ses délibérations.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. M. le député de D'Arcy-McGee.
• (16 heures) •
M. Birnbaum : Merci, Mme la
Présidente. «I'm still worried about my white cat.» Là,
je vais revenir au début de notre débat il y a plus qu'une semaine, où le
ministre s'est permis l'exemple de notre «white cat», chat noir. Moi, je m'en
fais pour les deux, qu'on soit clairs. Et j'aimerais établir avec à la fois le
ministre de la Justice, à la fois le ministre responsable de la Promotion de la
langue française, l'objectif ultime de ces deux perspectives de changement
devant nous. Malgré les questions persistantes de mon collègue de La Pinière,
nous sommes toujours à la recherche d'une compréhension des mots, juridique,
dont a prononcé le ministre sur cet article-là. Je veux comprendre.
Eh oui, on a établi, évidemment, que les
textes, tels qu'ordonnés par le Parlement, ne sont pas mutés, modifiés par les
juges, évidemment. J'ai cru comprendre qu'il y a un impact, en quelque part,
jurisprudentiel. Ce que je cherche à comprendre, parce que le but de cette
affaire, j'imagine, dans un premier temps, c'est de sauvegarder de façon égale,
légale et correcte l'accès ultime à la <justice...
>
16 h (version révisée)
<15371
M.
Birnbaum : ...Ce que je cherche à comprendre, parce que le but de
cette affaire, j'imagine, dans un premier temps, c'est de sauvegarder de façon
égale, légale et correcte l'accès ultime à la >justice. Deuxième volet tout
à fait légitime, on est en dedans d'une étude sur les modifications à la Charte
de la langue française pour voir comment on peut veiller davantage à la
promotion, le rayonnement de la langue française. Alors, je comprends ces deux
objectifs.
Je veux comprendre ces deux choses. C'est
où, ce vide juridique? Comment se sont réglés ces genres de situations, dans
les derniers 20 ans, depuis l'adoption de la Charte de la langue française,
où actuellement le fait qu'on parle d'égalité mais, évidemment, les lois ici
sont rédigées en français puis traduites? Alors, il y a un certain déséquilibre
que, comme on a noté, la Cour suprême a reconnu. Mais, de là, qu'est-ce qui
s'est passé? Est-ce que le ministre peut nous donner des exemples où les juges
ont clairement indiqué que la façon que j'ai réglé le conflit entre la version
anglaise et la version française était, en quelque part, de me permettre une
marge de manoeuvre pour développer mon propre langage? Y a-t-il des exemples
qui indiquent qu'on est devant un problème?
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette :
Savez-vous, Mme la Présidente, le nombre de fois que je me suis fait dire :
Est-ce qu'il y a un problème? Cet argument-là, là, il est souvent évoqué :
Est-ce qu'il y a un problème? Est-ce qu'il y a un problème? Pour dire... tous
ceux qui attaquent, supposons, les différentes dispositions législatives qu'on
met en place : Est-ce qu'il y a un problème? Avec la laïcité, je l'ai
souvent entendu : C'est-tu un problème? Il y a-tu un problème? C'est tout
le temps ça, l'argument. L'argument de ceux qui veulent l'immobilisme, c'est
ça.
Alors, pour répondre à la question du
député de D'Arcy-McGee, actuellement, O.K., et sortons de la version française,
anglaise, là, sortons des règles d'interprétation, sortons de l'adoption des
lois, juste dans le processus interprétatif, O.K., puis après on reviendra,
anglais, français. Processus interprétatif, le juge, quand il doit rendre une
décision, se base sur le texte. Il peut regarder la version française, la
version anglaise; généralement, il va regarder les deux. Bien, en fait, il va
regarder la version française. Si on lui soumet la version anglaise, il va
regarder les deux, regarde les dispositions. Il arrive un conflit entre les
deux lois. Là, il utilise, dans son coffre à outils, toutes les règles
d'interprétation qui sont là : l'approche littérale, l'approche
contextuelle, l'ejusdem generis, le contexte, tout ça.
Ultimement, ça arrive que, même après
avoir passé à travers toutes ces règles d'interprétation là, le juge, il <arrive
puis il se dit : Bien...
M. Jolin-Barrette :
...là,
il utilise, dans son coffre à outils, toutes les règles d'interprétation
qui sont là : l'approche littérale, l'approche contextuelle, l'ejusdem
generis, le contexte, tout ça.
Ultimement, ça arrive que, même après
avoir passé à travers toutes ces règles d'interprétation là, le juge, il >arrive
puis il se dit : Bien là, les règles ne me permettent pas de réconcilier
la version anglaise et la version française, donc, à partir de ce moment-là,
moi, dans mon interprétation, je vais venir en quelque sorte réécrire la disposition
pour lui donner un sens logique, un sens convenable, selon le sens commun des
choses. Et là c'est ce bout-là, là, avant d'arriver là, là, entre toutes les
règles d'interprétation ont été respectées, le cheminement d'interprétation
juridique, intellectuel juridique, là, qui vise à faire en sorte de regarder la
construction de la disposition... Puis là, quand le juge, là, il regarde ça,
là, théoriquement, il va regarder les débats parlementaires ou, si jamais la disposition
à 7.1, elle est contestée, ils vont regarder, Mme la Présidente, ce que le
député de La Pinière a dit.
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette :
Bien, certainement, moi aussi, je m'empresserais, Mme la Présidente, d'aller
lire les questions du député de La Pinière, pour le bénéfice de tout le
monde. Et là, à la lecture, Mme la Présidente, des débats parlementaires, des
réponses du ministre de la Justice, le juge va dire : Bien oui, le ministre
de la Justice a répondu adéquatement au député de La Pinière, relativement
à l'intention du législateur.
Donc là, on revient, on revient sur le
bout sur l'interprétation, les règles d'interprétation. Donc, le juge, lui, il
a ses règles d'interprétation, puis c'est comme la... on est dans le milieu,
là, du processus, il n'est pas capable de rendre sa décision. Actuellement, on
vient lui confier, par le vide qui existe actuellement, parce qu'on ne va pas
au bout du processus, là, qu'on peut faire comme législateurs, on vient lui
dire : Bien, trouve-nous une solution, bien, trouve-nous une solution
interprétative que les règlements d'interprétation n'ont pas permis de le
faire. Ça fait qu'en quelque sorte, quand on est rendu ici, c'est qu'il vient
donner un sens à la disposition, en réécrivant, en quelque sorte, la disposition.
Dans l'arrêt Vriend, de la Cour suprême, c'était
ça, le cas, il manquait un motif de discrimination basé sur l'orientation
sexuelle, et la Cour suprême est venue rajouter un terme. Donc, on contestait
pour un motif de discrimination, puis la Cour suprême est venue réécrire la disposition.
Elle a dit : Écoutez, le législateur provincial, quand il a fait ça, c'était
la décision... c'était l'Alberta, relativement à une décision d'orientation
sexuelle, ils disaient : Ce n'est pas un motif de discrimination, mais
nous, Cour suprême, on considère que, dans votre loi, O.K., ça doit être un
motif. Alors, ils sont venus, par une fiction, en réécrivant la disposition, en
voulant dire : Bien, écoute, même si ce n'est pas un motif énoncé de
discrimination, l'orientation sexuelle, l'orientation sexuelle fait partie de
la disposition.
Or là, c'est exactement ça, la réécriture
d'une disposition. Dans le cadre de ça...
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : Bien oui,
c'est ça. Bien oui, bien oui, <bien oui...
M. Jolin-Barrette :
...
dire :
Bien, écoute, même si ce n'est pas un motif énoncé de discrimination,
l'orientation sexuelle, l'orientation sexuelle fait partie de la disposition.
Or là, c'est exactement ça, la
réécriture d'une disposition. Dans le cadre de ça...
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette :
Bien oui, c'est ça. Bien oui, bien oui, >bien oui...
M. Barrette : ...
M. Jolin-Barrette : D'accord,
le député de La Pinière va revenir. Alors, on se retrouve dans une situation
où on vient réécrire la disposition. Alors, avant d'arriver là, O.K., on dit au
magistrat : Vous devez regarder la version française pour connaître la
véritable intention du législateur. Donc, ça arrive uniquement en bout de
course. Et l'article 133 de la Loi constitutionnelle nous permet de faire
ça, il y a un espace qui est vacant, où le législateur vient guider. Et ça, c'est
notre rôle, collectivement, de dire : Lorsque vous êtes dans une
situation, M. le juge, où vos règles d'interprétation usuelles ne permettent
pas d'arriver à un résultat qui est convenable en matière d'interprétation,
référez-vous à la version française.
Donc, voyez-vous, on monte la côte, on
part de la base, ensuite on dit : Regardez les règles d'interprétation. Puis
ensuite, lorsqu'on ne réussit pas à avoir un résultat convenable, plutôt que le
juge lui-même vienne dire : Bien, je vais réécrire la disposition, on lui
dit : Attention, avant d'arriver là, le législateur vous dit : Vous
devez regarder la version française sur le sens qui doit être donné. Alors, j'espère
avoir été clair.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le député de D'Arcy-McGee.
M. Birnbaum : Y a-t-il le
moindre d'inquiétude et, si oui, un seuil à établir, en respectant l'autonomie
des juges, mais pour assurer qu'avec un tel amendement ils ne se permettraient
pas très vite de dire : Ouf! Les deux mots, il ne me semble pas qu'il y
ait un parallèle ici... oui, oui, oui, bien, les règles d'interprétation, j'ai
fait une petite recherche. Mais ça a l'air compliqué, quand, avant cet
amendement, il ou elle aurait eu la tâche de creuser davantage. Y a-t-il la
moindre inquiétude que ça va être, en quelque part, une espèce de raccourci qui
risque d'atteindre les droits à l'accès de justice des intervenants touchés par
une telle cause?
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : La
réponse à cette question-là, c'est très clairement non, et un juge qui ferait
ça serait en contravention des principes jurisprudentiels qui ont été établis
très clairement, en tout respect des décisions rendues en vertu de 133. Parce
qu'il faut le dire, la protection constitutionnelle associée à 133, elle est
là, elle est présente, et elle va demeurer et elle demeure. Alors, en fonction
de l'article 133 de la Loi constitutionnelle de 1867, les lois doivent être
adoptées et publiées dans les deux langues ici, au Québec, par cette assemblée
législative là. Elles ont la même valeur juridique, ça, c'est indéniable, il
n'y a rien qui change. Puis, surtout, l'article, de la façon dont on l'a
construit, c'est justement pour préserver cela, la valeur égale des textes
français et anglais, et ça, on ne change pas ça, relativement aux <textes...
M. Jolin-Barrette :
...et
publiées dans les deux langues ici, au
Québec, par cette assemblée
législative là. Elles ont la même valeur juridique, ça, c'est indéniable, il
n'y a rien qui change. Puis, surtout, l'article, de la façon dont on l'a
construit, c'est justement pour préserver cela, la valeur égale des textes français
et anglais, et ça, on ne change pas ça, relativement aux >textes qui
sont assujettis à la Loi constitutionnelle de 1867, c'est-à-dire les lois. Ça,
je l'ai dit et je le réaffirme très clairement.
Le problème, où on agit, c'est lorsqu'on
se retrouve dans une situation où les deux textes ne sont pas
réconciliables et ils ne permettent pas d'avoir une interprétation convenable
en vertu de toutes les règles ordinaires d'interprétation. Là, à ce moment-là,
on bascule entre soit le rôle du juge ou le rôle du législateur. Et là, moi, ce
que je dis, ce que le gouvernement dit, c'est qu'avant que le législateur...
avant que le judiciaire joue le rôle du législateur sur l'interprétation à
donner relativement à l'intention du législateur, on lui dit : Regardez le
texte français. Mais c'est uniquement en bout de course.
Donc, la situation pour laquelle le député
de D'Arcy-McGee a des préoccupations, elle n'est pas, dans un sens large,
d'accès à la justice, ou de décision, ou dans les deux textes, elle est
vraiment basée sur le dernier volet. Alors, la majorité de l'interprétation se
fait avec les règles d'interprétation ordinaires, donc il n'y a pas
d'inquiétude à y avoir.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le député.
• (16 h 10) •
M. Birnbaum : Merci, Mme la
Présidente. On va en convenir, on est dans le champ de 133 et l'égalité, mais
on ne peut pas...
Une voix : ...
M. Birnbaum : Oui, mais on ne
peut pas dire qu'il y a ligne étanche, et là... Bon, égalité va jusqu'à ce
point-là, là, le juge va faire son... bien, il va trancher entre la version
anglaise et française, suivant les règles d'interprétation, et tout ça, mais
tout ça n'a rien à faire avec le 133.
Le ministre lui-même, parlait... faisait
référence à 133, quand il parlait de la loi 22. Alors, je continue à me
questionner là-dessus. Dans un premier temps, la loi n'existait plus dans... lors
des deux saisies, des deux arrêts de Blaikie. Alors, évidemment, les
décisions de Blaikie ne touchaient pas au principe, qui n'était pas répété dans
la Charte de la langue française, sur le fait que le français prévaut. Alors,
tout ça pour dire qu'on ne sait pas, la cour...
Une voix : ...
M. Birnbaum : Est-ce que je
peux finir ma question? Ce n'est pas moi, l'avocat, ça me prend... Bon, est-ce
qu'on peut comprendre qu'il n'y a pas de... La Cour suprême n'aurait pas
tranché sur quelque chose qui n'existe pas. Donc, ma question : Est-ce que
le ministre peut nous réexpliquer, s'il trouve qu'il l'a déjà fait, comment ce
qui est proposé actuellement, 7.1, est complètement étanche en ce qui a trait à
une contestation potentielle selon les critères de 133?
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Bien, je
rappellerais à cette commission, Mme la Présidente, qu'entre 1974 puis 1977 la
disposition n'a pas été contestée, relativement à <l'article 2 de...
M. Birnbaum : ...étanche
en
ce qui a trait à une contestation potentielle selon les critères de 133?
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette :
Bien, je rappellerais à cette commission, Mme la Présidente, qu'entre 1974 puis
1977 la disposition n'a pas été contestée, relativement à >l'article 2
du «bill» 22, à l'époque, comme on l'appelait.
L'autre point qu'il est important de
comprendre, là, c'est que, dans la Charte de la langue française actuellement,
là, à l'article 7, là, on prévoit déjà, là : «Le français est la
langue de la législation et de la justice au Québec sous réserve de ce qui suit :
les versions française et anglaise des textes visés aux paragraphes 1° et 2°
ont la même valeur juridique.» Et donc, 1° et 2°, c'est notamment les lois
adoptées à l'Assemblée nationale du Québec. Donc, ça, ça demeure, ça ne change
pas.
Et, dans le fond, 133 de la Loi
constitutionnelle de 1867, hein, qui est la loi fondatrice de ce pays-là,
mais qui n'a pas été soumise au vote des électeurs, fait en sorte que
l'Assemblée... Et ce que la Cour suprême nous a dit dans Blaikie, c'est que,
notamment, les deux lois... les deux versions d'une loi ont la même valeur
juridique, et ce qui a fait en sorte d'invalider les dispositions de la Charte
de la langue française relativement à la langue de la législation et la
justice. Donc, les deux valeurs... les deux textes, les
deux versions ont la même valeur juridique. Et c'est ce que je persiste à
dire et c'est ce que nous faisons dans le cadre du projet de loi : on
maintient le statu quo actuel.
Par contre, et là on n'est pas dans la
valeur des textes anglais, français, on est dans le rôle de qui décide de
quelle façon l'interpréter, au bout du compte, au lieu que ça soit le
judiciaire, lorsque les règles d'interprétation, dans sa sphère à lui, au
judiciaire, à la magistrature, lorsque ce n'est pas possible d'arriver à une
solution qui est convenable, et ça peut arriver, plutôt que de réécrire la
disposition, là on dit : Regardez la version française.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le député de D'Arcy-McGee.
M. Birnbaum : Oui. Je remarque
que notre petit débat, que je vais poursuivre, sur le mot «convenable»... Et,
si j'ai bien compris, nous n'avons pas réussi à trouver, dans la jurisprudence,
une utilisation semblable de ce mot-là...
M. Jolin-Barrette : Bien, il
y a au moins...
M. Birnbaum : ...la façon
d'interpréter ce mot-là, peuvent attendre, en quelque part, l'égalité de la
personne concernée par une telle décision. On est dans une discussion,
l'article va au fond de ça, comment trancher en absence, après les processus,
d'une réponse claire, disponible au juge.
Je veux revenir. Mon collègue l'a
introduit un petit peu, le ministre continue à noter que son article était
inspiré de l'article dans la loi 22, où on parle de... «Where
any discrepancy cannot be satisfactorily resolved by the ordinary rules
of interpretation, the French text of the statutes of Québec prevails over the
English text.» Là, ce qu'on a décidé de proposer dans
le projet de loi n° 96, à 7.1 : «In the case of a <discrepancy...
M. Birnbaum :
...la loi 22, où on parle de...
«Where any discrepancy cannot be satisfactorily resolved by
the ordinary rules of interpretation, the French text of the statutes of Québec
prevails over the English text.
» Là, ce qu'on a
décidé de proposer dans le
projet de loi n° 96, à 7.1 :
«In the case of a >discrepancy between the French and English versions
of a statute, regulation or other act referred to in paragraph 1 or 2 of
section 7 that cannot be properly — au lieu de
"satisfactorily", properly — resolved using the ordinary
rules of interpretation, the French text shall prevail.»
Moi, juste pour
deux secondes, et ce n'est pas moi, l'avocat ni le linguiste, je peux vous
énumérer quatre ou cinq différences entre ces deux mots là.
«Satisfactorily» means to
the satisfaction of the parties.
Il y a une connotation,
une dénotation positive et claire.
«Properly» means, bon, we
kind of obeyed the rules and here's what we did. «Convenable», I don't know
what it means, between those two words.
Mais est-ce que le
ministre peut aider les futurs juges à comprendre qu'est-ce qu'ils font avec le
mot «convenablement»? Est-ce que le seuil est «satisfactorily» — I'm happy, this is right, it's exact? — or «properly», bon, I kind of followed the rules and what I did was
proper, was legal? Does it satisfy me that I had made a good decision? Does
it satisfy me that my white cat ou mon chat noir est protégé, aux yeux de la
loi, par un respect?
J'insiste sur l'égalité
du processus devant lui.
What's your judge going
to do with your word «convenablement», when I just shown you two different
legal words used that mean different things? What's your... What does
«convenable» mean?
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Alors,
pour en revenir au chat noir et au chat blanc, manifestement, le député de D'Arcy-McGee
va convenir que ce n'est pas la même chose. Si on étudie, autour de la table,
là, une disposition qui dit : Les chats noirs doivent recevoir trois
médailles, puis, dans la version anglaise, dans la version traduite, il est
écrit : «The white cat should receive three medals»,
ça ne dit pas la même affaire, vous êtes d'accord
avec moi. Puis on en a jasé, là, on en a jasé ici, autour de la table, là, puis
c'était très clair, là, que c'était le chat noir dont on parlait, là, puis là,
bien, à la traduction, il y a eu un enjeu, hein, au lieu d'écrire «black», ils
ont écrit «white», ils se sont mélangés. Le juge, là, il est saisi d'un litige,
là, quelqu'un qui reçoit un constat d'infraction parce que son chat noir, il
n'avait pas trois médailles.
Là, je vous mets ça bien de base, Mme la
Présidente, là, pour illustrer, là, je veux juste... on est au ras des
pâquerettes pour illustrer ça. Ça fait que, là, le juge, lui, il reçoit ça.
Supposons, le défendeur, qui avait un chat noir, il reçoit son constat
d'infraction puis il regarde ça, il regarde la version anglaise puis là il dit :
Bien, mon chat, il est <blanc, hein, il n'est pas noir...
M. Jolin-Barrette :
...on
est au
ras des pâquerettes pour illustrer ça. Ça fait que, là, le juge,
lui, il reçoit ça. Supposons, le défendeur, qui avait un chat noir, il reçoit
son constat d'infraction puis il regarde ça, il regarde la version anglaise
puis là il dit : Bien, mon chat, il est >blanc, hein, il n'est pas
noir. Il plaide ça au juge. Le juge, il regarde ça, là, il fait les règles
usuelles, là, d'interprétation, il va dans les débats parlementaires, tout ça.
Mais, tu sais, là, les règles d'interprétation, là, ne lui permettent pas, là,
d'arriver, là, à réconcilier, là, le chat noir puis le chat blanc, là. En bout
de compte, là, l'interprétation qu'il peut donner n'est pas convenable, là.
Puis là je simplifie au maximum, Mme la
Présidente, vous comprendrez que les règles d'interprétation, c'est pas mal
plus complexe que ça puis les juges ont une expertise particulière là-dedans. Mais,
ultimement, est-ce que le député de D'Arcy-McGee est d'accord avec moi de dire
que, malgré la valeur égale des deux lois, en bout de course, si les règles
d'interprétation ne permettent pas de réconcilier tout ça, bien, le juge, on
lui dit : Regardez la version française? Et c'est ce qu'il va faire. On
est rendus là. Plutôt que de dire : Bien, M. le juge, réécrivez la
disposition dans quelque chose qui va être cohérent, qui va être convenable, on
le guide vers cette dernière interprétation-là, on l'outille, le magistrat,
pour dire quelle est l'intention du législateur.
Mais, cela étant dit, Mme la Présidente,
ça n'enlève rien à l'égalité des versions, qui est prévue et qui a été
déterminée par la Cour suprême et par rapport aux dispositions de l'article 7
de la Charte de la langue française, qui met sur un même pied d'égalité les
versions anglaise et française des deux textes. La différence, là, c'est qu'on
vient combler un espace qui existe au niveau du juge pour le guider.
• (16 h 20) •
Pour la réponse à la question relativement
à «convenable», c'est quelque chose qui... un raisonnement qui est logique, qui
est convenable, qui est acceptable, qui va dans le sens commun des choses. Le
juge cherche toujours la cohérence légistique qui a été développée par le
législateur, le sens commun des choses. La règle, les interprétations, là, qui
sont faites, là, par les juges, là, visent à rendre un jugement qui est
cohérent avec l'intention du législateur. C'est ça, son rôle, ne pas aller
rendre une décision qui est tirée par les cheveux et qui ne respecte pas le
sens commun.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. M. le député de D'Arcy-McGee, il vous reste cinq minutes.
M. Birnbaum : Bon, le ministre
a dit qu'il trouvait des satisfactions devant les questions, souvent :
C'est où, le problème? Bon, c'était la première fois que moi, je l'aurai posée,
et je n'ai toujours pas une réponse. Parce qu'actuellement les juges sont pris
avec ces règles d'interprétation, une hiérarchie de... une série de mesures
qu'ils doivent entamer. Et le ministre, de ma lecture, n'a pas démontré qu'on
est devant un <problème...
M. Birnbaum : ...une
réponse.
Parce qu'actuellement les juges sont pris avec ces règles d'interprétation, une
hiérarchie de... une série de mesures qu'ils doivent entamer. Et le ministre,
de ma lecture, n'a pas démontré qu'on est devant un >problème sérieux en
ce qui a trait à la situation actuelle. Notre débat sur le mot
«convenablement», il avait deux volets, on parlait du principe en jeu mais du
mot aussi.
So I'm back to my cats again. La loi exige
que des chats noirs et blancs, tous confondus, doivent être traités de façon...
doivent être traités convenablement. Tous les deux, mon chat
noir, my white cat, how are they getting treated under the law? Satisfactorily
or properly? Voilà, on a deux mots. J'imagine... je ne vais pas sortir
mon Petit Robert tout de suite, mais je risque de voir ces deux mots
traduits de façon différente, un seul qui va être une traduction satisfaisante,
une traduction du mot «convenable». C'est quoi, le sort de mes chats? Comment
le juge va réagir devant ce mot-là? Comme je dis, ce n'est pas pareil, ces deux
mots-là.
Alors, j'ai deux questions. Dans un
premier temps, si le ministre peut, avec cet exemple boiteux, absurde... le
cheminement éventuel d'un tel juge. Et s'il peut me dire... le libellé est
assez parallèle en anglais que ce qui a été fait en 1974, alors est-ce que, peut-être
avec l'aide de l'équipe, on peut comprendre pourquoi le mot «properly», qui a
toute une autre dénotation ainsi que connotation, aurait été choisi pour
remplacer un mot, dont on n'a pas trouvé d'autres exemples dans la
jurisprudence, pour traduire le mot «convenablement»?
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : ...Mme la
Présidente, je ne ferai pas de cas hypothétique sur des situations qui ne sont
pas réellement soumises devant magistrat. D'autant plus, je n'en suis pas un. Cependant,
la question qu'on doit se poser, c'est : Est-ce que le député de D'Arcy-McGee
est à l'aise, dans le fond, de ne pas guider le juge, en bout de course,
lorsqu'il arrive un conflit d'interprétation, que les règles d'interprétation
ordinaires ne permettent pas de résoudre convenablement? Quand le juge...
M. Birnbaum : ...pas compris qu'il
y avait des questions qui se posaient au...
La Présidente (Mme Thériault) :
...ne pas vous interpeller, le ministre...
M. Birnbaum : Le ministre m'a
posé une question, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Thériault) :
J'avais l'impression qu'il n'avait pas terminé encore. Donc là, pour la suite
des choses, je vous demanderais d'attendre que je vous reconnaisse. Donc,
n'ouvrez plus les micros, s'il vous plaît. Merci. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Alors, est-ce
que le député de D'Arcy-McGee est à l'aise, là, à partir du moment, là, où les
règles d'interprétation ordinaires ont été utilisées par le juge... On est
rendus là, là, O.K., il n'arrive pas un résultat logique, selon le sens <commun...
La Présidente (Mme Thériault) :
...d'attendre que je vous reconnaisse. Donc, n'ouvrez plus les micros,
s'il
vous plaît. Merci.
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette :
Alors, est-ce que
le député de
D'Arcy-McGee est à l'aise, là, à
partir du moment, là, où les règles d'interprétation ordinaires ont été
utilisées par le juge... On est rendus là, là,
O.K., il n'arrive pas un
résultat logique, selon le sens >commun, convenablement, en fonction de
pouvoir rendre une décision. Le député de D'Arcy-McGee, qu'est-ce qu'il
préfère? Est-ce qu'il préfère permettre au juge de dire : Bien, moi, je
regarde juste la version anglaise, qui n'a pas, supposons, été étudiée ici, à l'Assemblée
nationale, ou je souhaite plutôt le diriger vers la version française, sur
laquelle on a eu de multiples débats autour de la table? Ultimement, c'est ça,
la question, c'est ça, la question.
Je le réitère, les deux versions, anglais
et français, ont la même valeur juridique. Première étape. Deuxième étape, le
juge doit utiliser toutes les règles d'interprétation qui sont à sa portée,
comme c'est le cas actuellement. Troisièmement, quand il n'arrive pas à une
solution qui est tangible, qui est cohérente, qui est selon le sens commun, qui
est convenable, qui est logique, qu'est-ce qu'on fait? Est-ce qu'on dit :
Nous autres, là, comme législateurs, là, on se ferme les yeux puis on dit :
On n'exerce pas notre rôle de législateurs? C'est-tu ça qu'on fait ou ou dit :
Écoutez, M. le juge, si vous êtes rendu là, là, vous êtes rendu au bout, là,
vous avez le dos acculé au mur, là, vous ne savez plus quoi faire, là, M. le
juge... Est-ce qu'on lui dit : Vous regardez la version française ou on
reste silencieux?
C'est ça, Mme la Présidente, que les
collègues du Parti libéral doivent réfléchir. Nous, on sait très bien ce qu'on
veut faire.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci, M. le ministre. M. le député de D'Arcy-McGee, il vous reste trois
minutes.
M. Birnbaum : Oui. Mais, pour
moi, deux choses. Premièrement... Et nous, on n'est pas devant des obligations,
actuellement, sauf de représenter l'opposition officielle et de chercher le
meilleur projet de loi qu'on peut. Sur la question... Et je soumettrai que, sur
la question de la suprématie parlementaire ou le rôle primordial du
législateur, moi, je soumets que le ministre n'a aucunement démontré que ce
concept-là est le moindrement en jeu. Et, deuxièmement, malgré le fait qu'il
trouve que c'est une question fatigante, je nous trouve devant une non-réponse
en ce qui a trait à la situation pressante et difficile qu'il aurait perçue
comme ministre de la Justice en premier, qui fait en sorte que la façon qu'il a
tranché 7.1 est actuellement nécessaire.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Bien,
moi, je ne trouve pas ça du tout agaçant, Mme la Présidente. Puis,
dans le texte anglais, là, de 7.1, là, c'est : «In the case of a
discrepancy between the French and English versions of a statute, regulation or
other act referred to in paragraph 1 or 2 of <section 7 that cannot be
properly resolved...
M. Jolin-Barrette :
...puis,
dans le texte anglais, là,
de 7.1, là, c'est : «In the case of a discrepancy between the
French and English versions of a statute, regulation or other act referred to
in paragraph 1 or 2 of >section 7 that cannot be properly resolved using
the ordinary rules of interpretation, the French text shall prevail.» Alors, Le petit Larousse nous dit, dans
«convenablement» : «decently», «properly», «suitably», «appropriately».
Alors, les dictionnaires reviennent à utiliser ces termes-là.
Alors, c'est un débat fort intéressant, Mme
la Présidente, puis je crois l'avoir exprimé de différentes façons pour bien
répondre aux questions des collègues, pour leur expliquer pourquoi est-ce qu'on
va faire ça. Mais on n'est pas au niveau de l'égalité des textes devant la loi.
Ça, là, je tiens à le réitérer, là, le débat qu'on fait présentement, là, avec
le député de D'Arcy-McGee, ce n'est pas la version anglaise versus la version française.
Elles ont la même valeur juridique, ce n'est pas ça qui est remis en question.
C'est, ultimement, qui joue le rôle relativement au fait d'indiquer et de
guider le juge. Moi, je crois que c'est le législateur qui doit lui dire :
Bien, écoutez, quand vous êtes en bout de course, voici où vous devez... en
fait, avec quel outil vous allez pouvoir interpréter la disposition.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. Ça vous va? Est-ce que j'ai d'autres interventions? Oui, M. le député de
La Pinière, il vous reste quatre minutes.
M. Barrette : Je ne connais
pas le jugement Viens. Le ministre nous dit que ça a réécrit la loi. Je connais
l'arrêt Carter, par exemple, c'est la même Cour suprême. Ça n'a pas réécrit la
loi. La loi a été réécrite des années plus tard parce que Carter a dit :
Ça ne marche pas, votre affaire, la personne y a droit. La Mme Carter,
elle avait droit à... La loi n'a pas été réécrite par le jugement, elle a été
réécrite à cause du jugement. Je ne veux pas partir de débat là-dessus, juste
mettre les points sur les i...
Une voix : ...
M. Barrette : Bien, s'il veut.
M. Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, si le député met le point sur les i, bien, je vais mettre la barre
sur les t. Dans l'arsenal à la disposition de la Cour suprême, lorsqu'ils
invalident une loi, notamment parce qu'elle est en contravention avec la Loi
constitutionnelle de 1982 , supposons qu'ils font ça, là, O.K., il y a
plusieurs outils qu'ils peuvent utiliser.
• (16 h 30) •
Le meilleur exemple que nous avons, puis
ça va intéresser fortement le député de La Pinière... Le gouvernement du Parti
québécois, à juste titre, puis là c'est dommage que...
La Présidente (Mme Thériault) :
...
M. Jolin-Barrette : ...c'est
dommage, Mme la Présidente, que l'ancien ministre St-Arnaud ne siège plus avez
nous, parce que, Mme la Présidente, le PQ, entre 2012 puis 2014, ont augmenté
les seuils de compétence de la Cour du Québec, O.K., et ils les ont montés à <85 000 $,
notamment...
>
16 h 30 (version révisée)
<15359
M.
Jolin-Barrette :
...
Mme la Présidente, que l'ancien
ministre St-Arnaud ne siège plus avez nous, parce que, Mme la Présidente, le
PQ, entre 2012 puis 2014, ont augmenté les seuils de compétence de la Cour du
Québec, O.K., et ils les ont montés à >85 000 $, notamment
pour favoriser l'accès à la justice, Mme la Présidente. Puis ça avait été jumelé
notamment à une augmentation des seuils aux petites créances.
Et là dernièrement, au mois de juin...
juillet dernier, on a reçu un jugement de la Cour suprême. Savez-vous quoi, Mme
la Présidente? Les juges de la Cour supérieure du Québec ont poursuivi les
juges de la Cour du Québec devant différentes instances pour faire en sorte de
dire : Non, non, non, le montant qui est accordé au niveau de la
compétence de la Cour du Québec est trop élevé, ça relève de la Cour supérieure
en vertu de la Constitution. Bon, il y a eu quelques étapes, Mme la Présidente,
c'est monté jusqu'à la Cour suprême. Qu'est-ce que la Cour suprême, elle a
fait? Elle a dit : La loi québécoise qui visait à doter la Cour du Québec
d'une compétence jusqu'à hauteur de 85 000 $ en matière civile, bien,
c'est inconstitutionnel, parce que ça vient à l'encontre des dispositions de la
Constitution relativement au tribunal de droit commun, qui est la Cour
supérieure. Alors, vous, législateurs, donc le Parlement du Québec, vous devez
modifier votre loi.
Alors, oui, c'est vrai qu'ils le font,
comme dans Carter, c'est ça qu'ils ont fait, et ils suspendent la déclaration
d'invalidité durant généralement une période d'une année. Et je crois que, même
dans Carter, le procureur général avait plaidé devant la Cour suprême pour
reporter le délai parce que le texte n'avait pas été adopté en temps opportun,
et ça arrive fréquemment, ça. Mais ça, c'est un arsenal, c'est un outil qui est
à la disposition de la Cour suprême.
Or, ce que je vous cite, c'est différent.
Ça arrive que, dans certains jugements, ils viennent assimiler un texte et ils
viennent ajouter à une disposition, comme dans cet arrêt-là, pour dire : Bien,
vos motifs de discrimination, ça inclut aussi ça, que le législateur,
nommément, n'avait pas prévu. Alors, ça, c'est une sorte de réécriture de
l'article, parce qu'ils viennent ajouter un terme, un motif de discrimination
qui n'est pas là. Alors, on peut dire : Bien, il ne l'a pas écrit, il n'a
pas trempé sa plume dans l'encre, il n'est pas venu l'écrire dans le texte,
mais l'effet du jugement, c'est celui-là.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le député de La Pinière.
M. Barrette : Et pour que
l'effet s'exerce, il faut que la loi soit réécrite, c'est toujours de même. Madame...
M. Jolin-Barrette : ...
M. Barrette : Non. Mme la
Présidente...
La Présidente (Mme Thériault) :
Non, c'est M. le député...
M. Jolin-Barrette : Mais, Mme
la Présidente, ce n'est pas exact, là, puis il faut que le député de
La Pinière dise les faits tels qu'ils sont.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre, on va laisser le député de La Pinière s'exprimer. Par la
suite, bien, vous ferez votre point, vous aussi, mais là c'est lui...
M. Jolin-Barrette : Mais vous
sentez ma passion pour le convaincre, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Thériault) :
Je sens toute la passion et l'énergie qui vous animent sur votre projet de loi,
évidemment, M. le ministre. Par contre, la parole est au député de
La Pinière. M. le député de La Pinière, allez-y.
M. Barrette : Merci, Mme la
Présidente. Je vais reprendre l'argumentaire du ministre, qui veut avoir
raison, je le comprends, bon, il a le droit de vouloir avoir raison, même quand
il a tort, mais là n'est pas l'enjeu de mon propos, Mme la Présidente. Le
ministre nous dit à répétition, à <répétition que devant la Loi
constitutionnelle de 1987, la...
M. Barrette : ...
qui
veut avoir raison, je le comprends, bon, il a le droit de vouloir avoir raison,
même quand il a tort, mais là n'est pas l'enjeu de mon propos, Mme la
Présidente. Le ministre nous dit à répétition, à >répétition que devant
la Loi constitutionnelle de 1987, la...
Une voix : ...
M. Barrette : ...1867, pardon,
devant la Constitution, Mme la Présidente, les deux ont la même valeur, le même
poids légal. C'est comme ça qu'il le dit, là, puis c'est comme ça que c'est
dans la réalité. C'est ça, la réalité. Or, il nous dit à répétition, là, que si
le juge, en fin de course, est dans une impasse intellectuelle juridique, il
doit se référer à la version française, donc il doit se référer à la logique linguistique
de la version française. Conséquemment, Mme la Présidente, hein, il
amène un déséquilibre vers une version, et ultimement les deux versions ne sont
plus égales devant la Constitution. Je ne dis pas que ce n'est pas bon. Je dis
qu'il crée une situation de droit de veto. Il l'a dit lui-même, là, le juge,
là, il faut l'aider, pas prendre la décision à la place du juge, mais être son
guide suprême. Cher juge, tu es mal pris, on comprend ça, jusqu'à maintenant tu
n'avais pas rien dans ton coffre à outils, on va te donner un instrument.
Pourquoi est-il contre notre amendement
qui, lui, prévaut que, dans certaines circonstances, il se pourrait qu'on
puisse contester la version française? Ça, ça serait une égalité devant la
Constitution. Mais dans l'approche du ministre, non, en fin de course, Mme la
Présidente, le français va prévaloir, et donc il aura la majorité de la
décision intellectuelle. N'est-ce pas là un motif de contestation juridique
inutile qui serait... qu'on pourrait résoudre avec notre amendement?
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : La
réponse, c'est non. Le député de La Pinière a des craintes qui ne sont pas
avérées, Mme la Présidente.
Une voix : ...
La Présidente (Mme Thériault) :
Non, non, c'est le ministre qui a la parole présentement. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Mais, Mme
la Présidente, moi, là, mon objectif, là, c'est de pouvoir guider, hein, le
magistrat qui est dans une situation d'impasse. Et je crois que, comme législateur,
en cohérence avec le fait que la langue de la législation et de la justice au Québec,
c'est le français, il est tout à fait normal, à partir du moment où on respecte
l'article 133, de dire que les deux versions ont une version égale,
qu'ultimement, si on n'est pas capable de réconcilier le tout, ça soit la
version française qui puisse guider le juge. Et je m'explique mal que le député
de La Pinière soit <contre cette...
M. Jolin-Barrette :
...c'est
le français, il est tout à fait normal, à partir du moment où on respecte
l'article 133, de dire que les deux versions ont une version égale,
qu'ultimement, si on n'est pas capable de réconcilier le tout, ça soit la
version française qui puisse guider le juge. Et je m'explique mal que le député
de
La Pinière soit >contre cette possibilité-là, Mme la
Présidente, moi qui le croyais à la défense et à la promotion de la langue
française.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci, M. le ministre. M. le député.
M. Barrette : Mme la
Présidente, point de règlement, on me prête des intentions. Débattre, ça ne
veut pas dire qu'on est pour ou contre.
La Présidente (Mme Thériault) :
Je suis convaincue...
Une voix : ...
M. Barrette : J'exige des
excuses, Mme la Présidente.
M. Jolin-Barrette : ...va
voter en faveur de l'article 7.1, et je pourrai constater à ce moment-là
s'il est en faveur ou il est contre. Alors, Mme la Présidente, je vais
acquiescer à la demande du député de La Pinière, retirer mes propos, et
j'attendrai le moment opportun pour constater son support ou non à la
disposition à l'article 7.1. Parce que là c'est vrai, c'est prématuré, je
réussis difficilement à déterminer s'il est en faveur de la disposition que je
présente.
La Présidente (Mme Thériault) :
Et, puisque nous sommes sur l'amendement, de toute façon, il vous reste un
petit peu moins d'une minute.
M. Barrette : J'aimerais avoir
une courte suspension, Mme la Présidente, parce que la suite des choses va
dépendre de la suspension que vous m'accorderez, j'espère.
La Présidente (Mme Thériault) :
Je vais accorder une courte suspension, oui, effectivement.
Nous suspendons les travaux quelques
instants.
(Suspension de la séance à 16 h 37)
(Reprise à 16 h 47)
La Présidente (Mme Thériault) :
À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, nous poursuivons nos travaux. Au moment de
prendre la petite pause, à la demande du député de La Pinière, c'était le
député de La Pinière qui avait la parole. Il vous reste 48 secondes.
M. Barrette : Merci, Mme la
Présidente. Alors, je vais simplement terminer mon intervention en reposant ou
en formulant différemment ma question. Le ministre, par sa démarche, je sens qu'il
va voter contre l'amendement. Ne crée-t-il pas une situation où, dans les
faits, n'ouvrant pas la possibilité de faire en sorte que la version française
puisse être contestée, qu'ipso facto il crée une situation légale où il y a un
déséquilibre en faveur de la version française devant la Loi constitutionnelle?
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : La
réponse à cette question-là, c'est non. Non, parce que l'article 133 est
pleinement respecté, les deux textes ont la même valeur légale dans le <cadre...
M. Barrette : ...
en
faveur de la version française devant la Loi constitutionnelle?
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette :
La réponse à cette question-là, c'est non. Non, parce que l'article 133
est pleinement respecté, les deux textes ont la même valeur légale dans le >cadre
de l'interprétation qui doit être donnée par les tribunaux. Et ça, ça signifie
que le juge regarde les deux versions, utilise les règles ordinaires
d'interprétation pour résoudre convenablement le conflit. Et là actuellement,
la situation actuelle, c'est ça, on arrête ici. Et, lorsque les règles
d'interprétation ne permettent pas de résoudre convenablement le conflit, qu'est-ce
qui arrive? Bien, le juge peut décider de prendre la version anglaise qui n'a
pas été étudiée ou arranger ça comme il veut, parce qu'on ne le guide pas, on
ne l'outille pas.
Et là c'est l'étape supplémentaire que
nous faisons, un coup que tout ça a été fait et qu'il n'arrive pas à une règle
d'interprétation qui est convenable, bien, on lui dit : Cher juge,
regardez la version française pour vous guider. C'est uniquement ça qu'on fait.
Alors, on respecte en tous points l'article 133, l'égalité des lois, et on
respecte l'article 7 aussi de la Charte de la langue française, qui met
sur un pied d'égalité la version française et anglaise.
Par contre, ultimement, on fait comme
Robert Bourassa a voulu en 1974. Puis je m'explique mal que, du côté du Parti
libéral, on renie l'héritage de Robert Bourassa aujourd'hui, cet après-midi,
parce qu'il me semblait que la cheffe du Parti libéral, la députée de
Saint-Henri—Sainte-Anne, s'en réclamait. Mais je comprends qu'il y a une
brisure entre son héritage et le nouveau Parti libéral.
M. Barrette : ...quelques
secondes?
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le député de La Pinière, vous avez 25 secondes.
M. Barrette :
25 secondes?
La Présidente (Mme Thériault) :
Oui.
M. Barrette : Le ministre, à
répétition, aujourd'hui et avant, renie cet héritage-là lui-même. C'est ça
qu'il dit, là, il dit : Ah! ah! je ne comprends pas qu'on le renie. Donc,
il met beaucoup de valeur à ça, mais lui-même parle des règles d'interprétation
qui sont venues après. Ça fait que dans les... Tu sais, ça fait pas mal Judas,
là, trois fois, là. Alors là, à un moment donné, là...
M. Jolin-Barrette : Ça, Mme
la Présidente, ce n'est pas très laïque.
M. Barrette : ...c'est beau
les interprétations, là, mais il le fait lui-même. S'il veut absolument
retourner à 74, qu'il nous l'explique.
La Présidente (Mme Thériault) :
Et il ne vous reste plus de temps.
M. Barrette : C'est dommage.
La Présidente (Mme Thériault) :
Donc, s'il n'y a plus d'autre intervention, je vais mettre aux voix
l'amendement qui a été déposé par Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys. Mme
la députée.
Mme David : Par appel nominal,
s'il vous plaît.
La Présidente (Mme Thériault) :
Un vote par appel nominal. Mme la secrétaire.
• (16 h 50) •
La Secrétaire
:
Veuillez répondre pour, contre ou abstention. Mme David
(Marguerite-Bourgeoys)?
Mme David : Pour.
La Secrétaire
:
M. Birnbaum (D'Arcy-McGee)?
M. Birnbaum : Pour.
La Secrétaire
: M. Barrette
(La Pinière)?
M. Barrette : Pour.
La Secrétaire
:
M. Jolin-Barrette (Borduas)?
M. Jolin-Barrette : Contre.
La Secrétaire
:
M. Skeete (Sainte-Rose)?
M. Skeete : Contre.
La Secrétaire
:
M. Lévesque (Chapleau)?
M. Lévesque (Chapleau) :
Contre.
La Secrétaire
:
Mme Proulx (Côte-du-Sud)?
Mme Proulx (Côte-du-Sud) :
Contre.
La Secrétaire
: Mme Guillemette
(Roberval)?
Mme Guillemette : Contre.
La Secrétaire
: M. Poulin
(Beauce-Sud)?
M. Poulin : Contre.
La Secrétaire
: M. Lemieux
(Saint-Jean)?
M. Lemieux : Contre.
La Secrétaire
:
Mme Ghazal (Mercier)?
Mme Ghazal : Abstention.
La Secrétaire
: M. Bérubé
(Matane-Matapédia)?
M.
Bérubé
: ...
La Secrétaire
: Et
Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel)?
La Présidente (Mme Thériault) :
Abstention. Donc, l'amendement est rejeté. Nous revenons donc <maintenant
à l'article 7.1...
M. Lemieux : ...Contre.
La Secrétaire
:
Mme Ghazal (Mercier)?
Mme Ghazal : Abstention.
La Secrétaire
:
M. Bérubé (Matane-Matapédia)?
M.
Bérubé
: ...
La Secrétaire
: Et
Mme Thériault (Anjou
—Louis-Riel)?
La Présidente (Mme Thériault) :
Abstention. Donc, l'amendement est rejeté. Nous revenons donc >maintenant
à l'article 7.1. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Bon, on reprend là
où on avait laissé. Mais je reste, Mme la Présidente, extrêmement sur mon
appétit, parce que les vrais enjeux n'ont pas été discutés, parce que notre
amendement était un amendement extrêmement raisonnable, extrêmement réfléchi et
qui prônait même la langue française. Alors, toutes les considérations sur la
langue française, etc., on repassera. Parce que je relis notre amendement :
«En cas de divergence entre les versions française et anglaise d'une loi, d'un
règlement ou d'un autre acte visé au paragraphe 1° ou 2° de
l'article 7 nécessitant — parce qu'on enlève le convenablement,
et tout ça, on se défait des choses compliquées — l'usage des règles
ordinaires d'interprétation législative par un tribunal, la version française
sera présumée correspondre le mieux à l'intention du législateur.
«Cette présomption peut être réfutée par
toute preuve contraire.»
Pourquoi on a fait ça, Mme la
Présidente? On a fait ça pour montrer, d'une part, qu'on y croit, à
l'article 133 de la Loi constitutionnelle, qu'on y croit, à l'égalité des
deux versions. Et on dit, en toute démocratie, que «la version française sera
présumée correspondre le mieux». «Présumée», ça veut dire qu'elle peut être
réfutée. Alors, quand on dit «présumée», c'est pour ça qu'on ajoute après
«cette présomption peut être réfutée par toute preuve contraire». Autrement
dit, il peut y avoir une discussion sur la décision du juge.
Là, il n'y en a pas, de discussion sur la
décision du juge, il y a «le texte français prévaut». Pourquoi il prévaut? Le
ministre a dit quelque chose d'intéressant, d'important : La version
anglaise qui n'a pas été étudiée, qui n'a pas été étudiée. Ça, sous-entendu :
on est au Québec, c'est seulement en français, tout se passe en français, on
fait l'étude article par article en français, il y a une traduction anglaise
après, mais elle n'a pas été étudiée.
Ça veut dire quoi, ça, au niveau de
l'article 133? Ça veut dire que le ministre a... j'ai l'impression qu'il
est en train de dire qu'elle n'est pas aussi valable, la version anglaise,
puisqu'elle n'a pas été étudiée, elle n'est pas aussi valable. Or,
l'article 133, et il l'a dit, l'article 7 dit vraiment : l'égalité
des deux versions.
Alors, s'il y a égalité des deux versions,
pourquoi est-il contre le fait que nous lui proposons de présumer la version
française correspondre le mieux à l'intention du législateur? C'est quand même
très, très affirmatif, ça. Mais, en toute démocratie, en tout respect du
processus, on dit : «Cette présomption peut être réfutée par toute preuve
contraire.» Il me <semble...
Mme David : ...est-il contre
le fait que nous lui proposons de présumer la version française correspondre le
mieux à l'intention du législateur? C'est quand même très, très affirmatif, ça.
Mais en toute démocratie, en tout respect du processus, on dit : «Cette
présomption peut être réfutée par toute preuve contraire.» Il me >semble
que, quand on est soi-même juriste, comme le ministre l'est, c'est le fun de
pouvoir avoir ce débat-là, c'est fait pour ça, la loi, c'est fait pour ça, la
formation légale. Puis, puisqu'il aime beaucoup référer à des gens qui ont un
statut, puis, bon, Jean Leclair, etc., ça, ça... Je l'ai retenue, je l'ai
mise en jaune, ça va être formidable, cette citation du ministre. Je vous
avertis, je vais beaucoup m'en servir, parce qu'il a dit des choses avec
lesquelles vous n'êtes pas du tout d'accord. Mais, comme c'est un grand
juriste, il faut l'écouter, donc nous l'écouterons jusqu'au bout selon vos commentaires.
Ça va être formidable.
Maintenant, s'il dit quelque chose qui est
important, pourquoi on ne peut pas aussi citer le Barreau puis l'Association du
Barreau canadien? Le Barreau dit, par rapport au mot «convenablement», à la
page 16 de son mémoire : «L'article 7.1 semble trop vague et
imprécis puisqu'il indique que le texte français prévaudra lorsque la
divergence ne sera pas résolue "convenablement". En se référant au
test de la résolution convenable, ceci risque de créer de nombreux litiges
inutiles basés sur une notion non juridiquement définie.» Ce n'est pas des deux
de pique, il me semble. Il est membre du Barreau lui-même. Il y a plein de
membres du Barreau, là, qui écoutent ça puis qui disent : Bien, il me
semble que ce n'est pas juridiquement défini. Je pose la question : Pourquoi
ça ne... pourquoi on ne l'enlèverait pas, ce bout-là? Dans notre amendement,
nous, on l'enlève, le mot. Il me semble que ça règle beaucoup de questions.
Et je continue, l'Association du Barreau
canadien, qui dit critiquer... «L'ABC-Québec, comme certains autres
intervenants, est préoccupée par la prépondérance qui serait conférée par cette
disposition à la version française, en cas de divergence entre les versions
française et anglaise d'une loi, d'un règlement ou d'un autre acte. D'un point
de vue constitutionnel, une telle prépondérance semble incompatible avec le
statut d'égalité des versions française et anglaise des actes de la législature
du Québec prévu à l'article 133 de la Loi constitutionnelle de 1867».
Alors, le nouveau texte proposé par notre amendement
ne prévoit pas que la version française prévaut sur la version anglaise en cas
de divergence entre les versions officielles, mais ne fait que prévoir une
présomption simple que la version française correspond le mieux à l'intention
du législateur. Cette présomption, comme le rappelle notre dernier alinéa, peut
être réfutée par toute preuve contraire.
Ce qui est formidable, c'est que le ministre,
au tout début, il y a deux semaines, quand j'ai demandé de définir le
terme «convenablement», le ministre a répondu que «convenablement» voulait dire
«raisonnable», ce qui lui convient tout à fait, et conforme à l'intention du
législateur, vous l'avez dit. Alors, si vous l'avez dit, pourquoi vous ne
trouvez pas que c'est une bonne idée, notre <amendement, de dire...
Mme David : ...quand j'ai
demandé de définir le terme «convenablement», le
ministre a répondu que
«convenablement» voulait dire «raisonnable»
, ce qui lui convient tout à
fait, et conforme à l'intention du législateur, vous l'avez dit. Alors, si vous
l'avez dit, pourquoi vous ne trouvez pas que c'est une bonne idée, notre >amendement,
de dire : La version française sera présumée correspondre le mieux à
l'intention du législateur, et d'accepter que ça puisse être challengé? Mon
collègue a parlé de veto, tout à l'heure, je suis un peu d'accord avec lui, ça
ressemble plus à un mode veto qu'à un mode : Bien, on pourrait réfuter
cette présomption que la version française prévale, puis ça serait peut-être
une très bonne idée.
Alors, je ne comprends pas, puis je ne
comprends pas, il est... vous n'êtes pas revenu sur cette doctrine, qui est
tellement citée par les différents arrêts de la Cour suprême, de Driedger, que
vous connaissez, c'est sûr, puis vous avez 10 jours pour aller relire tout
ça, là. Alors, il y a trois principes, il y a l'esprit de la loi, il y a
l'objet de la loi, puis il y a l'intention du législateur. Puis tout le monde
se base sur cet auteur-là puis sur son livre en 1983, et puis que c'était
vraiment... Construction of Statutes, bon, ça s'appelle comme ça, de ce
professeur-là. Alors, si c'est si important que ça, si la Cour suprême a cité,
à de nombreuses reprises, ces trois principes-là, bien, voulez-vous bien me
dire comment ça se fait... Un, on n'a pas eu d'exemple où le juge a été, comme
vous avez dit, acculé au pied du mur et puis ne plus savoir quoi faire. Puis
pourquoi, en cas de doute, le français a plus d'importance? Puis là j'ai
entendu cette phrase : La version anglaise qui n'a pas été étudiée.
Autrement dit, au Québec, c'est le
français qui est valable, l'anglais ne l'est pas, alors qu'on est encore,
jusqu'à preuve du contraire, sous la Loi constitutionnelle de 1867, sous
l'article 133, où vous avez répété à de multiples reprises que les deux
valeurs... les deux versions, anglaise, française, étaient équivalentes. Donc,
comment concilier que les deux versions sont équivalentes et votre phrase :
Ah! la version anglaise qui n'a pas été étudiée, autrement dit, au parlement?
Puis vous avez même dit une autre phrase
que vous allez répéter très, très, très souvent dans les prochains mois, c'est
toute l'approche, la théorie de la souveraineté parlementaire : Est-ce que
ça veut dire que c'est les juges qui vont décider? Bien oui, c'est les juges
qui vont décider, mais votre juge est acculé au pied du mur, il est...
semble-t-il qu'il ne sait plus quoi faire, il est complètement mal pris, bien,
le Barreau vous dit que ça n'a pas de bon sens. ABC vous dit que ça n'a pas de
bon sens. D'autres profs vous disent que ça n'a pas de bon sens.
• (17 heures) •
Bien là, on vous propose une avenue que je
trouve tellement raisonnable, tellement bien équilibrée, puis ça va être ça pas
mal tout le long, là, une approche équilibrée, raisonnable. Alors, le français
et l'anglais, il est sur son mur. Au lieu de dire : C'est le français
parce que c'est les parlementaires, les élus, la doctrine, la souveraineté
parlementaire, etc., bien, dire : On présume que le français va être la
version retenue, mais, c'est drôle, on pourrait contester ça. Bien, je trouve
que, il me semble, c'est fait pour ça, les tribunaux, de pouvoir avoir... Vous
qui <aimez tant...
>
17 h (version révisée)
<15379
Mme
David : ...au lieu de dire : C'est le français parce que c'est
les parlementaires, les élus, la doctrine de la souveraineté parlementaire,
etc., bien, dire : On présume que le français va être la version retenue,
mais, c'est drôle, on pourrait contester ça. Bien, je trouve que... Il me
semble, c'est fait pour ça, les tribunaux, de pouvoir avoir... Vous qui >aimez
tant débattre, bien, quand vous serez juge, peut-être, un jour, vous allez dire :
Bien, oui, O.K., je vais me laisser challenger par ça, je vais me laisser poser
des questions. Je trouve ça raisonnable, alors que, là, les gens, des gens
quand même importants, des juristes importants, vous disent... puis un ensemble
de juristes, là, le Barreau, puis l'Association du Barreau canadien, c'est
quand même beaucoup de juristes qui disent : Bien, voyons donc, vous
risquez d'être contestés, et puis ça sera... ça va être un peu ennuyant pour
vous, à moins que vous vouliez passer votre vie à être contestés pour les
différentes lois devant la Cour suprême.
Alors, je relis : «La prépondérance
ainsi — et ça, c'est le Barreau — donnée à la version
française par le projet de loi pourrait être considérée comme visant à nier le
statut d'égalité des versions française et anglaise d'une loi ou d'un
règlement, ce qui contreviendrait à l'article 133 de la Loi
constitutionnelle. L'article 7.1 semble trop vague et imprécis puisqu'il
indique que le texte français prévaudra lorsque la divergence ne sera pas
résolue convenablement.» Nous, on vous offre de l'enlever, ce mot-là. On vous
trouve une avenue de... qui est très, très, très convenable, justement, et qui
résout votre problème de... Puis vous n'avez pas répondu. J'ai tellement hâte
d'entendre la réponse. Je n'ai pas entendu la réponse, tout le monde est témoin :
Pourquoi la version anglaise de 96, du projet de loi n° 96, est différente
de la version anglaise de 1974, que, supposément, on aime tant, de 1974?
«Properly» puis «satisfactorily», je ne suis pas une anglophone, mon collègue
l'a dit, puis moi... Pour moi, ça ne veut pas dire la même chose. Dans mon
grand anglais savant, je n'aurais jamais dit «satisfactorily and properly» pour
dire la même chose.
Alors, c'est formidable que vous êtes pris
devant votre propre divergence entre deux versions. Bien oui, parce que ce n'est
pas les mêmes mots. Puis vous vous vantez de prendre exactement le libellé. Puis
je l'ai, j'ai été vérifier. Vous avez raison, la loi 22, c'est l'article 2,
dit exactement votre libellé actuel. Mais on va en anglais en 1974 puis en
anglais en 2021, pouf! l'anglais a changé. Puis ça, c'est vrai, c'est des
faits, là. Vous ne pouvez pas me contester ça. Donc, j'ai hâte que je vous me
répondiez à ça, mais là je veux des vraies réponses. Pourquoi, notre
amendement, il n'est pas acceptable à vos yeux? On vous trouve vraiment une
voie de passage qui est sage, raisonnable, et qui vous évite bien des
poursuites.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Alors,
plusieurs choses, mais moi, je ne suis pas d'accord que je ne réponds pas,
parce que ça fait plusieurs jours qu'on est sur cette disposition-là, puis je
réponds très clairement.
L'utilisation du terme en anglais, bien, en
fait, les légistes et les traducteurs qu'on a nous disent que, par cohérence
avec le corpus qu'on a désormais, c'est les termes qui sont employés, d'où la
divergence entre 1974 et aujourd'hui par cohérence avec le corpus que nous
avons ces jours-ci aussi. On s'entend que ce sont des <synonymes...
M. Jolin-Barrette :
...utilisation du terme en anglais, mais, en fait, les légistes et les
traducteurs
qu'on a nous disent que, par cohérence avec le corpus
qu'on
a désormais, c'est les termes qui sont employés, d'où la divergence entre 1974
et
aujourd'hui par cohérence avec le corpus que nous avons ces jours-ci
aussi. On s'entend que ce sont des >synonymes.
Bon, deuxième question, moi, je trouve ça intéressant,
parce que la députée de Marguerite-Bourgeoys nous dit : Aïe! Le Barreau
dit ça, le Barreau du Québec dit ça, l'Association du Barreau canadien dit ça. Qu'est-ce
que pense la députée de Marguerite-Bourgeoys de la procédure judiciaire qui a
été entreprise par le Barreau du Québec en 2018 pour faire invalider toutes les
lois de l'Assemblée nationale du Québec? Était-elle d'accord avec la position
du Barreau du Québec de faire en sorte de placer l'État québécois, de placer
les citoyens du Québec face à une situation, Mme la Présidente, qui aurait
invalidé l'ensemble du corpus législatif?
Alors, je me doute qu'il y a eu des
discussions au Conseil des ministres de l'époque, mais je ne suis pas convaincu
que le Barreau avait raison de faire ça, puis que c'était approprié, puis que
son opinion était la bonne dans ce dossier-là. La preuve, et j'en prends, à
titre, la précédente ministre de la Justice, je pense qu'elle partageait mon
opinion relativement au Barreau. Alors, ce n'est pas parce que le Barreau dit
une chose un jour que, nécessairement, c'est la bonne opinion. Ça peut faire
argument d'autorité, j'en conviens, mais le Barreau peut se tromper aussi.
La Présidente (Mme Thériault) :
Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Je trouve ça... Je
ne sais pas quel mot employer, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Thériault) :
Un propos parlementaire, je vous suggère.
Mme David : Un propos
parlementaire, c'est facile. Est-ce que c'est correct, ça? C'est un peu facile.
Là, vous nous avez dit, vous : Voyons donc, c'est votre héros, c'est le
héros de la cheffe, Robert Bourassa, donc il faudrait être d'accord avec tout,
tout, tout ce qui est arrivé, tout ce qu'il a dit, chaque parole, le Barreau, ah!
regardez, il a dit ça pour telle affaire, donc... Je veux dire, ça n'a pas de
bon sens. Même vous, vous ne voudrez pas passer à l'histoire en disant :
Bien, parce qu'il a fait telle chose, tel jour, à telle heure, tout le reste de
sa carrière et ce qu'il a fait n'a aucune valeur. Ça ne tient pas, ce genre de
réponse là, en tout respect, parce que, O.K., le Barreau a peut-être dit ça à
ce moment-là, mais là il dit autre chose sur un autre sujet, puis l'Association
du Barreau canadien dit ça aussi, puis d'autres personnes disent ça : Attention,
c'est dangereux constitutionnellement. Alors, parlons de ce sujet-là, parlons
du fait que des gens disent : Attention, il y a un risque.
Puis, au-delà de ça, je n'ai pas encore la
réponse. Pourquoi le français doit prévaloir? Pourquoi il doit prévaloir, le français,
si les deux versions sont égales devant l'article 133? Pourquoi choisir le
français, acculé au pied du mur, alors que... Et pourquoi ne pas trouver
raisonnable, intelligent, je ne sais pas quoi, parce que ça ne vient pas de
vous, peut-être, je ne le sais pas... mais notre formulation d'amendement? Elle
n'est pas en <train...
Mme David : ...devant
l'article 133. Pourquoi choisir le
français acculé au pied du mur,
alors que... et pourquoi ne pas trouver raisonnable, intelligent, je ne sais
pas quoi, parce que ça ne vient pas de vous,
peut-être, je ne sais pas,
mais notre formulation
d'amendement? Elle n'est pas en >train de
dire : Le texte anglais prévaut. Elle n'est pas en train de dire : Le
texte français prévaut. Elle est en train de dire : Bien, le texte français
prévaut jusqu'à preuve du contraire, s'il est réfuté. Moi, je le trouve
brillant, notre amendement, en tout respect.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Bien, Mme
la Présidente, avec égards, je ne doute pas que la députée de Marguerite-Bourgeoys
le trouve brillant puisque c'est elle-même qui l'a rédigé. Alors, c'est sûr
que, généralement, on est à l'aise et on trouve ça bon, ce qu'on rédige, puis
je partage son sentiment.
Cela étant, l'amendement vient
complexifier les choses, d'autant plus que la règle, c'est une règle d'interprétation
au bénéfice du juge, qui, lui... Et, vous l'avez bien dit, on vient l'aider. On
vient l'accompagner lorsqu'il se retrouve le dos acculé au mur, qu'il se trouve
dans une impasse. Et, vous, ce que vous dites, bien, vous dites : Bien,
avec notre amendement, on viendrait présumer que c'est correct. Mais le juge,
lui, il a besoin d'une directive pour dire... Le législateur, qu'est-ce qu'il
lui dit? Il dit : À partir du moment, là, où vous êtes dans cette situation,
là, d'impasse là, dans ce cul-de-sac-là, là, voici la règle que vous devrez mettre
en place, ultimement, après les règles d'interprétation. Alors, en tout
point, ça respecte l'égalité des deux textes, la valeur juridique des deux
textes, en français et en anglais. Par contre, ce que l'on fait, c'est qu'on
exerce notre juridiction, en tant que législateurs, de guider le judiciaire et
de dire : Écoutez, dans le cas d'un conflit d'interprétation entre deux
versions d'une loi, voici la marche à suivre, et, ultimement, si vous êtes pris
au piège, voici vers quelle version vous devrez tendre pour interpréter
l'intention du législateur, c'est-à-dire la version française. Ça respecte les enseignements
de Blaikie, ça respecte l'article 133 et ça respecte aussi la Charte de la
langue française, qui dit que les versions française et anglaise ont la même
valeur juridique, mais que la langue de la législation et la langue de la
justice est le français, et c'est ça.
La Présidente (Mme Thériault) :
Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Alors, j'aimerais
que vous me disiez en quoi notre amendement ne respecte pas Blaikie, ne
respecte pas votre vision de la langue française, votre vision de la
prépondérance de la souveraineté parlementaire. Je ne vois pas en quoi notre
version, notre amendement, qui dit : La version française sera présumée
correspondre le mieux... Il me semble, ça aide le juge en titi, ça, de se faire
dire ça. On lui en donne une... parce que vous présumez qu'il a bien fait ses
devoirs, qu'il a pris les trois principes de l'esprit... bien, enfin tout ce
qui est... les trois principes d'interprétation, l'esprit, l'objet, l'intention
du législateur, vous présumez. Mon collègue a dit : Peut-être qu'il va
passer un peu vite puis il va décider d'aller tout de suite à la version
française. Vous avez dit : Non, non, non, il va faire son <travail,
il est obligé, etc. Bon, mais nous, on...
Mme David : ...principes de
l'esprit de... bien, enfin, tout ce qui est... les trois principes
d'interprétation, l'esprit, l'objet, l'intention du
législateur. Vous
présumez... Mon
collègue a dit :
Peut-être qu'il va passer
un peu vite puis il va décider d'aller
tout de suite à la version
française.
Vous avez dit : Non, non, non, il va faire son >travail, il est
obligé, etc. Bon, mais nous, on dit : Bien, mettons une version française
qui va être présumée correspondre le mieux. Présumer, ça veut dire quelque
chose en termes juridiques. On présume que ça correspond le mieux. Moi, je
pensais que vous accueilleriez ça en disant : Bien, c'est raisonnable.
Nous, les articles de loi qui vont être raisonnables, vous l'avez vu jusqu'à
maintenant, on vote pour, puis c'est correct. Alors, on ne va pas être contre
automatiquement. Oui, mais il y en a eu, des choses là-dedans. Il y en a eu,
des choses là-dedans. Alors là, j'ai l'impression... Je n'entends pas de bonnes
raisons pour ne pas acquiescer à notre amendement raisonnable.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre.
• (17 h 10) •
M. Jolin-Barrette : Bien,
moi, Mme la Présidente, je n'entends pas de bonnes raisons pour ne pas accepter
de voter en faveur de l'article 7.1 tel qu'il est formulé. Moi, je ne vois
pas c'est quoi, le malaise du Parti libéral de dire : Écoutez, les deux
textes sont égaux, puis, lorsque les règles d'interprétation ordinaires ne
fonctionnent pas, hein, que ça ne permet pas d'arriver à un résultat qui est
convenable, qui est intelligible, qui est raisonnable, à ce moment-là, on dit
au juge : Tournez-vous vers la version française pour résoudre cette
difficulté d'interprétation là. C'est conforme à l'article 133. C'est
conforme à la charte.
Moi, je m'explique mal le malaise du Parti
libéral, de dire : Bien, écoutez, on est au Québec, oui, les versions sont
égales, mais la langue officielle, c'est le français, les deux textes ont la
même valeur juridique, les règles d'interprétation font en sorte qu'ils sont
interprétés sur un même pied d'égalité. Les lois sont adoptées dans le même
angle, d'accord, mais on pose une situation concrète. Quel est... Pourquoi
cette frilosité-là à dire : Écoutez, là, il y a un problème, là, on est
dans le coin, là, le juge, il est dans le coin, là, il ne peut pas en sortir à
moins que lui-même réécrive la disposition? Alors, nous, on dit : Écoutez,
on va jouer notre rôle de législateurs jusqu'au bout. On lui dit :
Écoutez, quand vous êtes pris dans une telle situation, plutôt que d'arranger
une patente, là, en fonction de la solution que vous allez trouver...
Puis, d'autant plus, la présomption, ça
complexifie les choses, parce que le juge va se dire dans son bureau :
C'est présumé, O.K., mais là qu'est-ce que je fais avec la présomption? La
présomption, elle est appropriée dans le cas où il y a un fardeau de preuve à
faire, pour faciliter le fardeau de preuve ou pour dire : Bien, écoutez,
ça va être ça, puis on ne pas retirer cette présomption-là. Mais là on n'est
pas dans ce débat-là, on est sur le juge par rapport à la disposition. Alors,
au moment où il doit rendre son jugement puis il doit donner l'interprétation
de cela, je m'explique mal le malaise du Parti libéral là-dessus, de dire :
Bien, écoutez, il y a un vide actuellement, comblons-le. Et c'est ce que la
disposition prévue au projet de loi, là, fait. Honnêtement, moi, je trouve
qu'avec la présomption ça complexifie les choses et ça risque d'entraîner des
problèmes juridiques puis des contestations.
La Présidente (Mme Thériault) :
Mme la députée.
Mme David : Oui. Je veux
tellement bien expliquer au <ministre qu'on va déposer un...
M. Jolin-Barrette :
...comblons-le, et c'est que la disposition prévue au
projet de loi
fait.
Honnêtement, moi, je trouve qu'avec la présomption, ça complexifie
les choses et ça risque d'entraîner sur des problèmes juridiques puis des
contestations.
La Présidente (Mme Thériault) :
Mme la députée.
Mme David : Oui. Je veux
tellement
bien expliquer au >ministre qu'on va déposer un autre amendement.
La Présidente (Mme Thériault) :
Vous allez déposer un autre amendement? On va déposer un autre amendement. M.
le député, ça va? Il y a un amendement à déposer. Vous aurez tout votre temps
après quand on viendra sur l'article comme tel, là. Ça va permettre de pouvoir
passer à l'amendement que j'ai déjà en main, et il est sur Greffier puisque
vous le déposez. Donc, si vous voulez en faire la lecture, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Alors,
l'article... L'article... Attendez, il faut que je lise toute cette page-là,
j'imagine. L'article 5 qui... L'article 7.1 de la Charte de la langue
française. L'article 5 du projet de loi est modifié :
1° par le remplacement, dans
l'article 7.1 de la Charte de la langue française qu'il introduit, des mots
«que les règles ordinaires d'interprétation ne permettent pas de résoudre
convenablement, le texte français prévaut» par les mots «nécessitant l'usage
des règles ordinaires d'interprétation législative par un tribunal judiciaire
ou administratif, la version française sera présumée correspondre le mieux à
l'intention du législateur»;
2° l'ajout, à la fin de l'article 7.1
de la Charte de la langue française qu'il introduit, de l'alinéa suivant :
«Cette présomption peut être réfutée par
toute preuve contraire.»
Alors, essentiellement — commentaires — l'article 7.1
de Charte de la langue française introduit par le projet de loi tel qu'amendé
se lirait ainsi :
«7.1. En cas de divergence entre les
versions française et anglaise d'une loi, d'un règlement ou d'un autre acte
visé paragraphe 1° ou 2° de l'article 7 nécessitant l'usage des
règles ordinaires d'interprétation législative par un tribunal judiciaire et
administratif, la version française sera présumée correspondre le mieux à
l'intention du législateur.
«Cette présomption peut être réfutée par
toute preuve contraire.»
La Présidente (Mme Thériault) :
Donc, c'est l'amendement comme tel. Tout le monde en a pris connaissance? Donc,
sur votre amendement, Mme la députée, allez-y.
Mme David : Essentiellement,
pour continuer le débat, parce qu'il n'est pas nécessairement terminé, nous
avons défini les sortes de tribunaux. Alors, on a mis «par un tribunal
judiciaire et administratif» parce que les deux peuvent être touchés. Alors, on
trouvait ça important de le préciser. Et on laisse «la version française sera
présumée correspondre le mieux à l'intention du législateur» parce qu'on pense,
encore une fois, que ça laisse beaucoup plus de place à la réflexion plus
démocratique de pouvoir avoir cette réfutation par toute preuve contraire, et
puis qu'effectivement de dire que c'est la version française qui prévaut est
comme une espèce de dogme de... À partir du moment où il y a cette
contradiction de base, entre le fait que la version française et anglaise sont
équivalentes, là, on s'en va dire que la version française va prévaloir.
Et je n'ai toujours, toujours pas eu d'exemple.
Le député de La Pinière a demandé depuis le début : Donnez-nous donc
des exemples de ce juge acculé au pied du mur, qui est tout mal pris, qui ne
sait pas quoi faire, alors qu'on vit avec les principes, justement, de <règles...
Mme David : ...va prévaloir,
et je n'ai
toujours,
toujours pas eu d'exemple. Le
député
de
La Pinière a demandé depuis le début : Donnez-nous donc des
exemples de ce juge acculé au pied du mur qui est tout mal pris, qui ne sait
pas quoi faire, alors qu'on vit avec les principes,
justement, de >règles
d'interprétation qui permettent toujours de trancher. Il dit : C'est extrêmement
rare. Mais c'est-tu tellement rare que ça ne serait pas besoin d'avoir ça, d'une
part? Et, d'autre part, c'est tellement rare, peut-être, parce que les trois
principes de règles ordinaires d'interprétation législative sont suffisamment
clairs pour toujours arriver à une décision ou bien... Je veux dire, une fois
que tu regardes l'esprit de la loi, l'objet de la loi et l'intention du
législateur, bien, ça veut dire que, vraiment, là, il y a eu un examen à fond
des trois principes, et ces principes-là ont été tellement souvent utilisés
pour arriver à des conclusions que je me demande pourquoi il faut pencher sur
une langue plutôt qu'une autre.
Et là j'ai compris, en filigrane, mais
même pas en filigrane, que, parce qu'on est au Québec, c'est la version
française, parce que la version anglaise n'a pas été étudiée. O.K., mais, à ce
moment-là, qu'il conteste carrément l'article 133, qu'il dise : On
n'a plus besoin d'être dans le Canada, à la limite, puis qu'on fasse nos lois
nous-mêmes, puis ça sera tout en français, parce que, si... Le ministre, il est
mal pris dans sa tête parce qu'il est pris avec des lois constitutionnelles. La
Constitution est canadienne. Elle n'est pas québécoise. Ça, c'est un autre
débat. Elle est canadienne. Elle est canadienne avec un petit tiroir, de
l'article 45, on en convient, mais elle est canadienne quand même.
L'article 133, il s'applique à la grandeur du Canada. On est d'accord. Le
fait que les versions française et anglaise soient d'égale valeur, vous l'avez
répété, c'est très important, et elles sont d'égale valeur. Alors, on donne des
principes qui regardent l'esprit, l'objet, l'intention du législateur puis on
arrive avec : Non, non, non, une fois que tout ça, là, c'est à peu près
égal, bien là il faut décider pour un ou pour l'autre. Il me semble que ça ne
tient pas la route avec le principe d'égalité des deux versions.
Alors, peut-être que j'ai des collègues
qui veulent aussi intervenir, parce que, sinon, je sens que je vais encore parler
trop longtemps.
La Présidente (Mme Thériault) :
Je vais laisser le droit de parole au ministre avant. Après ça, on ira au
député de La Pinière. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Juste
quelques points. Je constate que l'amendement, tout ce qu'il change, là, c'est
qu'on vient rajouter «tribunaux administratifs» puis «tribunaux judiciaires».
Alors, l'amendement, il est pas mal similaire. Alors, je ne ferai pas de
question de recevabilité sur l'amendement à ce stade-ci parce que la discussion
est intéressante, puis je suis sûr qu'on va progresser dans le cadre du projet
de loi aujourd'hui.
Cela étant, si on avait voulu, là, dans le
cadre du projet de loi, venir contourner ou venir contester l'article 33,
on aurait fait la même <chose...
M. Jolin-Barrette :
...puis je suis sûr qu'on va progresser dans le cadre du
projet de loi
aujourd'hui.
Cela étant, si on avait voulu, là, dans
le cadre du
projet de loi, venir contourner ou venir contester
l'article 33,
on aurait fait la même >chose... 133, on aurait fait la même chose que
la loi 101 en 1977. On serait venus enlever l'article 7 de la Charte
de la langue française pour enlever le statut de valeur égale des versions française
et anglaise. Ce n'est pas ça pantoute qu'on fait. Ce n'est pas ça pantoute. Il
n'est pas question de contester l'article 133. Il n'est pas question de
dire que les versions françaises et les versions anglaises n'ont pas la même
valeur, aucunement. Ce qu'on dit, et là c'est davantage au niveau du
judiciaire, c'est qu'à partir du moment où il y a un conflit entre les deux
versions puis que les règles d'interprétation ne permettent pas de résoudre le
conflit, le juge, à ce moment-là, on lui dit : Écoutez, vous êtes dans une
situation où vous ne pouvez pas résoudre le conflit, plutôt que de réécrire la
loi avec votre sagesse, hein, référez-vous à la version de la langue française
pour donner une version intelligible. Ça respecte 133.
Puis là, si on donne des arguments
historiques, tu sais, la Loi constitutionnelle de 1867, elle appartient aux
États fédérés, hein? Le gouvernement fédéral est créé à cause des États fédérés
qui ont choisi cette union économique là. Là, vous me direz... Je n'étais pas
là à l'époque puis vous non plus, mais vous me direz, peut-être, qu'on n'a pas
consulté la population avant, hein, relativement à cette union-là des quatre
provinces à l'origine pour la fondation du Canada, par rapport à la Loi
constitutionnelle de 1867. Bien, ça, on pourrait s'amuser longuement avec ça. Mais,
pire encore, le Québec n'a vraiment pas été consulté sur la Loi
constitutionnelle de 1982, puis ça, c'est un autre débat qu'on risque d'avoir
un petit peu plus loin.
• (17 h 20) •
Alors, le législateur québécois, au fil
des ans, à partir de 1969, hein, a décidé d'apporter et d'amener des lois à
teneur linguistique pour protéger puis valoriser le français, notamment en
1974, hein, qui fait de la langue officielle... qui fait du français la langue
officielle de l'État québécois. Ça, on doit donner ça à Robert Bourassa, son article 2
aussi, qui dit : Bien, écoutez, quand il y a un conflit d'interprétation,
regardez la langue française. 133 était là à cette époque-là, 133 est là, et
133 n'est pas contesté.
Là, j'ai compris, Mme la Présidente, que peut-être
que la députée de Marguerite-Bourgeoys nous invite ou nous incite à adopter une
résolution pour une modification constitutionnelle, je ne sais pas si c'est la
nouvelle position du Parti libéral, peut-être le saurais-je au fur et à mesure
où on va étudier le projet de loi, pour venir modifier l'article 133.
Nous, ce n'est pas notre choix, mais peut-être que c'est le nouveau <nationalisme
du...
M. Jolin-Barrette :
...nous
incite à adopter une résolution ou une
modification
constitutionnelle.
Je ne sais pas si c'est la nouvelle position du
Parti libéral,
peut-être
le saurai-je
au fur et à mesure où on va étudier le
projet de loi
pour venir modifier l'article 133. Nous, ce n'est pas notre choix, mais
peut-être
que c'est le nouveau >nationalisme du Parti libéral qui fera en sorte de
venir modifier l'article 133. Bien, je serais surpris, mais je peux être
surpris de plein de choses. Il y a beaucoup de choses qui changent en politique
ces temps-ci, notamment la redéfinition des partis.
Cela étant, Mme la Présidente, l'amendement,
il est similaire au précédent. Et, nous, ce qu'on vous propose comme texte législatif,
c'est de venir clarifier les choses. Le législateur vient dire au judiciaire :
Écoutez, là, plutôt, là, que de bricoler une solution, hein, parce que vous
n'avez pas été capable, en vertu des règles d'interprétation normales,
d'arriver à une solution qui est convenable, bien, référez-vous, M. le juge, à
la version française, en tout respect des deux versions de la loi, de
l'égalité, tout ça. Je ne peux pas être plus clair que ça.
Moi, tout ce que je trouve avec les amendements
qui sont déposés par la députée de Marguerite-Bourgeoys, c'est que ça
complexifie le processus : présomption... Là, on vient dire :
tribunaux administratifs, tribunaux judiciaires. Est-ce qu'on oublie des
choses? Notre disposition, elle est très, très claire. J'ai eu l'occasion de
l'expliquer à de multiples reprises. Mais je comprends que le Parti libéral est
figé à cet article-là, puis il y a plein d'autres dispositions superintéressantes
à étudier dans le cadre du projet de loi.
Mme David : ...avec le ministre.
Il y a plein d'autres articles, mais on est aussi figés que le ministre est
figé. On est dans de la glace. Il fait froid dehors.
M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente,
la démonstration du fait que je ne suis pas figé, c'est que j'ai accepté des amendements
depuis le départ, Mme la Présidente. Et, écoutez, quand il va y avoir des
bons amendements, je n'ai pas de gêne à dire que je vais les accepter. Mais,
sur celui-ci, moi, je pense que c'est important de dire : Oui, on doit
laisser la marge de manoeuvre en faveur de la langue française, en faveur de l'interprétation,
ultimement, puis je pense que le Parti libéral devrait être d'accord avec ça.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : ...que l'amendement
qui a été accepté, c'est parce que c'était une grosse erreur évidente, sur
«Amérindiens». Alors, je pense, ça aurait été très gênant pour le ministre de
refuser cet amendement-là. Mais je laisserais la parole à un collègue.
La Présidente (Mme Thériault) :
...notre collègue de La Pinière. M. le député de La Pinière, la
parole est à vous.
M. Barrette : C'est toujours
amusant d'écouter le ministre, Mme la Présidente, pour voir comment il passe
par la planète Mars pour arriver à son argument et à sa conclusion, chemin qui
est complètement... qui n'est pas juste complètement inutile, mais qui dévie le
propos. Quand le ministre, Mme la Présidente...
M. Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, c'est prêter des intentions puis ce n'est pas gentil.
M. Barrette : Non, non, non, je
vais étayer mon affaire, Mme la Présidente. Je vais l'étayer avec un exemple
simple que le ministre...
M. Jolin-Barrette : Non, non,
mais... pas le droit de dire ça.
La Présidente (Mme Thériault) :
Là, pour commencer, pour commencer, il y a une personne à la fois qui parle.
Bien, moi, je ne peux pas vous écouter quand j'entends quelqu'un d'autre
parler, puis je suis très attentive à tous les <propos...
M. Barrette : ...propos.
Quand le ministre, Mme la Présidente...
M. Jolin-Barrette :
Mme la Présidente, c'est de prêter des intentions, puis ce n'est pas
gentil.
M. Barrette : Non, non,
non. Je vais étayer mon affaire, Mme la Présidente, je vais l'étayer avec
un exemple simple. Que le ministre...
La Présidente (Mme Thériault) :
Là, pour commencer, pour commencer, il y a une personne à la fois qui parle.
Bien, moi, je ne peux pas vous écouter quand j'entends quelqu'un d'autre
parler, puis je suis très attentive à tous les >propos, peu importe qui
a la parole. Donc, je vais vous demander tous d'écouter l'argumentaire. On
reviendra après. Puis je vais aussi rappeler au député d'essayer d'être prudent
dans les propos, d'essayer de prendre des termes qui n'engendrent pas de débats.
M. Barrette : Alors, l'exemple
que je vais prendre est une citation récente du ministre lorsqu'il fait
référence au Barreau, qui a posé la question : On va-tu invalider toutes
lois? pour venir discréditer notre argumentaire. Mettons qu'on n'est pas dans
le même sujet. On n'est pas dans la même ampleur. On n'est pas dans la même
perspective. Moi, depuis le début, Mme la Présidente, j'essaie de
respecter le sujet et d'aborder les choses de la seule et unique perspective
dont on devrait débattre. 7.1 respecte-t-il... crée-t-il une situation qui va
être en contravention de 133? Alors, moi, j'apprécierais qu'on ne parle
que de ça, ne pas partir... Le Parti libéral, le ceci, le cela. Non, non, on
est des législateurs, on a nos côtés de la table, de la Chambre, puis notre job
est justement de voir s'il pourrait y avoir un problème. Faire ces débats-là,
Mme la Présidente, c'est, en quelque part, apolitique.
Que le ministre... J'ai dit : En
quelque part. Que le ministre veuille, lui, en faire de la politique à cette
étape-ci de l'évolution du projet de loi, c'est complètement inapproprié, parce
que notre enjeu est un enjeu juridique. Je l'ai dit tantôt, Mme la
Présidente, je l'ai dit clairement, nous, on veut juste s'assurer que cet
article-là, après la sanction de la loi, ne soit pas contesté, ce qui devrait
être un souhait du ministre. Des fois, je ne suis pas sûr. Des fois, je me dis,
ça lui plairait, là, ça lui plairait d'aller en cour puis de gagner. Il serait
triste s'il perdait. Mais il y a une chose qui est certaine, là, cet
article-là, techniquement, il n'est pas sous une éventuelle clause dérogatoire
parce que le propos, c'est 133.
Bon, je reviens à mon propos. Le ministre,
là, nous revient tout le temps, tout le temps avec le même argument : On
est les législateurs, l'Assemblée est souveraine, c'est à nous de décider les
affaires. Mais, en même temps, c'est à nous de décider les affaires, c'est
toujours dans un contexte où un pauvre juge va se retrouver devant une impasse,
et on veut lui donner, au pauvre juge qui se retrouve devant une impasse, un
outil pour résoudre comment? Juridiquement. Ce n'est pas la souveraineté, là,
de l'Assemblée. On <veut...
M. Barrette : ...va se
retrouver devant une impasse. Et on veut lui donner, au pauvre juge qui se
retrouve devant une impasse, un outil pour résoudre comment juridiquement, ce
n'est pas la souveraineté, là, de l'
Assemblée. On >veut lui
donner un outil législatif pour exercer le droit, son jugement. Ça revient
quand même à une décision juridique, tout comme un juge n'écrit pas des lois.
Je ne veux pas revenir sur le débat, là.
Quand le ministre revient sur ce débat-là,
il fait exactement ce que je lui reproche. Il parle de d'autres choses pour ne
pas qu'on s'adresse à la chose. La chose, elle est simple. Est-ce que, devant
la Constitution, les deux textes sont égaux? Quand on écoute le ministre,
ils sont égaux au départ et inégaux à l'arrivée. Ils sont tellement inégaux à
l'arrivée, là, que — je vais citer le ministre — le juge
est pris au piège. Il est pris au piège, le juge. C'est l'exemple qu'il a donné
lui-même il y a trois minutes. Il est pris au piège par quoi? Par la
méchante version anglaise. Ce n'est pas explicite, mais pas loin.
M. Jolin-Barrette : Le député
prête des propos que je n'ai pas dits.
M. Barrette : Bien, il est
pris au piège, c'est...
M. Jolin-Barrette : Non, non,
non, j'ai dit «pris au piège» parce qu'il est dans une situation où il ne peut
pas résoudre le conflit.
M. Barrette : Il y a-tu une
question de règlement, Mme la Présidente?
M. Jolin-Barrette : Alors,
Mme la Présidente, on ne peut pas prêter des intentions sur des choses qu'on
n'a pas dites. Ce n'est pas permis de déformer les propos des collègues, avec
égards. Le député de La Pinière sait que je l'aime beaucoup, mais il ne
peut pas faire ça, hein? Ça fait qu'on a une bonne harmonie ici, ça fait qu'il
n'invente pas des affaires. Ce n'est pas ça que j'ai dit.
M. Barrette : Mme la
Présidente?
La Présidente (Mme Thériault) :
Oui, M. le député de La Pinière, je vais juste vous demander de...
M. Barrette : Bon, je n'ai
rien inventé, j'ai fait une citation.
M. Jolin-Barrette : ...pas
exacte, la citation.
M. Barrette : Le juge est pris
au piège entre deux versions. Évidemment que le piège, il n'est sûrement
pas dans la version française, il est pris... Le piège, il est... Puis ça, c'est
le mot du ministre, «piège», ce n'est pas le mien. Le juge est mal pris parce
qu'il y a une discordance d'interprétation entre les deux textes, à moins
que le ministre me dise qu'il est possible que ce soit à cause du texte
français. Ça serait merveilleux. D'ailleurs, je vais la poser, la question. Est-ce
que ça peut être à cause de la version française, le piège?
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre.
• (17 h 30) •
M. Jolin-Barrette : Alors,
Mme la Présidente, la question principale du député de La Pinière, il a
commencé son intervention comme ça, il a dit : Est-ce que... je veux bien
cerner, là, l'enjeu, là. Avant de parler de chasse et pêche, là, sa première
question, c'est : Je veux bien cerner l'enjeu, moi, je vais rester, là,
sur 133, malgré le fait qu'il va à gauche, à droite, depuis tantôt, sur plein
d'autres sujets puis il me reproche de vouloir lui répondre, Mme la Présidente.
C'est bien la première fois que ça arrive. Je vous <donne...
>
17 h 30 (version révisée)
<15359
M.
Jolin-Barrette :
...il a dit : Est-ce que... je veux bien
cerner, là, l'enjeu, là. Avant de parler de chasse et pêche, là, sa première
question, c'est : Je veux bien cerner l'enjeu, moi, je vais rester, là,
sur 133, malgré le fait qu'il va à gauche, à droite, depuis tantôt, sur plein
d'autres sujets puis il me reproche de vouloir lui répondre, Mme la Présidente.
C'est bien la première fois que ça arrive. Je vous >donne des
explications, mais on me dit que je donne trop d'explications. En tout cas.
Alors, sa question, au député de La Pinière,
c'est — et je la résume : Est-ce que ça va contrevenir à l'article 133
de la Loi constitutionnelle de 1867 ? La réponse, c'est non. Ça ne peut
pas être plus clair de ça.
Pour ce qui est du piège, hein, ce que
j'ai dit, c'est que le juge, il est pris au piège parce qu'après les règles
d'interprétation il se retrouve dans une situation, et ça ne lui permet pas de
réconcilier les versions, ça ne lui permet pas d'arriver à une interprétation
raisonnable, convenable, conformément aux règles d'interprétation.
Alors, l'article 133 est respecté.
L'article 7 de la loi est respecté, ce qui fait en sorte que les versions
françaises et anglaises ont la même valeur juridique. Cependant, il existe un
espace pour faire en sorte qu'à partir du moment où les règles d'interprétation
ne permettent pas convenablement de résoudre le conflit, d'indiquer au juge
plutôt que lui-même d'arriver à une conclusion qui est au-delà des règles
d'interprétation, on lui dit : Veuillez vous référer à la version
française. Et ça, c'est conforme à l'article 133.
Puis c'est un peu particulier quand le
député me réfère au Barreau, en 2018, par rapport à son recours qui touchait
les textes linguistiques en lien avec 133, les mêmes arguments que lui-même
fait. Puis c'est drôle, à l'époque, le Barreau disait que c'était la politique,
les mêmes arguments que le député de La Pinière prend.
Alors, est-ce que le Parti libéral a un
malaise à faire en sorte que, dans l'espace qui est le prolongement des
compétences de l'Assemblée nationale relativement à l'interprétation des lois,
relativement au fait que, pour pouvoir outiller le juge, on vienne inscrire le
fait que, s'il est dans une situation d'impasse, il pourra se référer en bout
de course à la version française? Le législateur québécois le fait déjà dans la
Loi d'interprétation, il met en place des balises et guide le juge.
Honnêtement, et pour citer le député de
D'Arcy-McGee, je ne vois pas où est le problème.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le député de La Pinière.
M. Barrette : Le ministre
aurait pu dire : Je choisis de ne pas voir où est le problème. Ce qui est
possible, Mme la Présidente, cette affirmation-là est possible parce qu'il a
choisi de ne pas répondre à ma question, qui était d'une infinie simplicité. Le
juge, lorsqu'il est piégé par un problème d'interprétation, peut-il être
piégé — c'est le mot du ministre qu'il a encore répété — par
une problématique de la version française? Je n'ai pas eu de réponse avec ça. Si
c'était possible, ça <signifie qu'en...
M. Barrette : ...
Le
juge, lorsqu'il est piégé par un problème d'interprétation, peut-il être
piégé — c'est le mot du ministre qu'il a encore
répété — par une problématique de la version française? Je n'ai pas
eu de réponse avec ça. Si c'était possible, ça >signifie qu'en
appliquant son article, on oblige le juge à aller du côté du problème et, à ce
moment-là, de prendre une mauvaise décision. C'est là, Mme la Présidente, qu'il
est, le problème. Devant 133, où les lois sont égales au départ, elles
devraient être égales à l'arrivée. L'arrivée, c'est quand on est pris dans le
piège et qu'il faut, par un raisonnement logique qui est le mot répété à
répétition — c'est un pléonasme — par le ministre, on a le
droit d'en faire des pléonasmes à cette heure-ci, bien, il répète ça : Il
faut que ça soit logique. La logique devrait interdire ça.Alors, égal
au départ, ça doit être égal à l'arrivée. Si c'est égal à l'arrivée, il se
pourrait, dans une circonstance exceptionnelle, on le comprend, que
la version française soit la version problématique. Il se pourrait que la
version anglaise soit bien traduite, ça se pourrait. Et à ce moment-là notre
amendement prend tout son sens, parce que c'est un amendement qui dit quoi?
C'est bien parfait, ça, ce qui est écrit là. On n'a pas de problème avec ça, mais
on veut s'assurer que dans une situation de dilemme de cet ordre-là qu'il
puisse y avoir une espèce de valve de sécurité, hein, qui permette de dire :
Wo! minute, là. Là, la version française peut-être qu'elle est problématique,
d'où la possibilité de contestation, et, à ce moment-là, on avise. Et là au
point d'arrivée, les deux lois se retrouvent totalement égales.
Je ne vois pas comment on peut arriver et
dire qu'en donnant l'outil que le ministre veut donner au juge, on ne crée pas
une situation d'inégalité. Je ne le vois pas. Et si on discute simplement de
ça, ça, là, puis sans partir à gauche, à droite, le parti-ci, le parti-ça,
1912, 1974, aujourd'hui, là, le ministre, un, ne répond pas à ma question et,
deux, ne nous explique pas. Ma collègue de Marguerite-Bourgeoys l'a posé à
plusieurs reprises : Donnez-nous une raison pour laquelle cet
amendement-là est mauvais. Il n'est pas mauvais. Mais, moi, je regarde ça,
là — et là je suis content, je suis dans le micro — je suis
sûr, sûr, sûr que, lorsqu'il y aura une contestation, on va revenir reprendre
le genre d'argument que j'ai fait — peut-être pas mot à mot. Je suis
sûr que ça va se faire. 133, égalité au départ, <égalité à la...
M. Barrette : ...
est
mauvais. Il n'est pas mauvais. Mais, moi, je regarde ça, là — et là
je suis content, je suis dans le micro — je suis sûr, sûr, sûr que,
lorsqu'il y aura une contestation, on va revenir reprendre le genre d'argument
que j'ai fait — peut-être pas mot à mot. Je suis sûr que ça va se
faire. 133, égalité au départ, >égalité à la fin. C'est quoi, le
problème, là?
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Bien, Mme
la Présidente, je ne suis pas du tout, du tout d'accord avec le député de La Pinière,
puis je sais très bien ce qu'il fait présentement, il cherche à étirer le
plaisir, Mme la Présidente, puis ça lui appartient.
M. Barrette : Mme la
Présidente, on me prête des intentions, là.
La Présidente (Mme Thériault) :
...M. le ministre, ne pas prêter des intentions au collègue. Merci.
M. Jolin-Barrette : Bien,
loin de moi l'idée de prêter des intentions.
M. Barrette : Mme la
Présidente, il fait exactement ce que je lui reproche, le ministre.
M. Jolin-Barrette : Mme la
Présidente...
La Présidente (Mme Thériault) :
Là, je vais vous demander quand même d'arrêter de vous interpeller et puis de
me laisser présider. Je vous ai dit : Je ne peux pas entendre deux
personnes qui parlent en même temps. C'est le ministre qui a la parole. M. le
ministre, la parole est à vous.
M. Jolin-Barrette : Bon, revenons
à la chasse et aux pièges. La version française ne piège pas le juge ni la
version anglaise, Mme la Présidente. Il est 5 h 39, M. le député de La
Pinière. Il vous reste encore un peu de temps à faire sur votre amendement.
Donc, le juge est coincé par le caractère irréconciliable de la version
anglaise et de la version française. Le problème, là, ce n'est pas les deux
versions. L'enjeu, c'est qu'il se retrouve dans une situation où les règles d'interprétation
ne permettent pas de réconcilier les deux versions, alors ce n'est pas l'une,
ce n'est pas l'autre. L'article permet de respecter l'article 133. Puis l'arrivée
du processus législatif, c'est la sanction de la loi. Donc, les deux lois sont
égales, les deux versions de la loi sont égales, et les règles d'interprétation
les traitent sur le même pied d'égalité.
Ce que l'on fait, par contre, c'est qu'au
bout du processus... puis je vous l'ai dit à de multiples reprises, puis je
suis un peu déçu, Mme la Présidente, que le député de La Pinière dise que je
ne réponds pas à ses questions, alors que je le fais avec bonhomie depuis le
début de l'après-midi, Mme la Présidente, sur les deux amendements qui ont été
déposés par la députée de Marguerite-Bourgeoys. Alors, l'objectif de la
disposition, il est très clair.
Puis moi, je me questionne à l'effet de
pourquoi le Parti libéral est si chatouilleux par rapport au fait de dire au
juge : Écoutez, quand vous êtes dans une situation irréconciliable, que
toutes les règles associées à la science juridique ne vous permettent pas de
résoudre convenablement, on a du mal à dire : Bien, M. le juge,
tournez-vous vers la version française, ultimement, pour résoudre le conflit.
Il n'y a rien qui change. C'est égal au début, c'est égal au départ, égal en
cours de route, égal à la fin aussi. Les lois, les deux versions des lois ont
la même valeur juridique devant les <tribunaux...
M. Jolin-Barrette :
... ultimement, pour résoudre le conflit. Il n'y a rien qui change. C'est égal
au début, c'est égal au départ, égal en cours de route, égal à la fin aussi.
Les lois, les deux versions des lois ont la même valeur juridique devant les
>tribunaux. C'est indéniable. Alors, je ne pense pas qu'on va pouvoir
s'entendre là-dessus, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le député de La Pinière.
M. Barrette : Mme la
Présidente, regardez-moi bien. Est-ce que vous pensez que je suis surpris que
le ministre dise qu'on ne va pas s'entendre? Franchement, c'est sûr qu'on ne va
pas s'entendre. C'est son choix. Alors, Mme la Présidente... Mais on va
continuer à faire le débat, Mme la Présidente. J'imagine qu'on peut faire ça.
Alors, Mme la Présidente, là, pourquoi, pourquoi,
là, je vais poser la question au ministre, là, pourquoi l'interprétation de la
version anglaise doit-elle être balayée du revers de la main en partant? Pourquoi
notre clause, notre clause, qui permet, dans un cas exceptionnel, là, parce que
c'est assez clair, là, si on donne la possibilité de réfuter une position, un
raisonnement, pourquoi, ça, ce n'est pas correct? Est-ce que ça vient simplement
parce que ça vient de la version anglaise?
• (17 h 40) •
La réalité, Mme la Présidente, là, c'est
que, ce que le ministre nous dit, il nous dit qu'il n'y a pas de possibilité
qu'en lisant la version anglaise, un raisonnement logique puisse faire pencher
la balance de ce bord-là. C'est ça qu'il nous dit. Quand il nous dit, là, que
tout est correct au fil d'arrivée, mais qu'il nous dit que tout est correct
quand on a... on s'est référé à la version française, ce n'est pas juste une
référence à la version française, c'est une référence à une logique qui est
celle de la version française. Et ce qu'il nous dit, c'est que c'est impossible
que la logique de la version anglaise ait préséance ou soit meilleure. Ce n'est
pas possible qu'une partie dans un procès puisse réfuter ça ou questionner ça. Conséquemment,
la version française se trouve dans une position plus prépondérante ou
prépondérante vis-à-vis 133. On n'est pas dans la charte puis ces affaires-là,
là, on est dans une situation où il n'y en aura pas, de clause dérogatoire
parce qu'il ne peut pas y en avoir.
Je suis sûr que le ministre, s'il pouvait
mettre une clause dérogatoire à l'entièreté de la Constitution, il le ferait.
Je suis sûr, sûr, sûr. D'ailleurs, il a dû y penser ou y rêver.
M. Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, c'est prêter des intentions, hein?
M. Barrette : Je suis
convaincu, convaincu, convaincu.
Maintenant, à l'argument que je mets sur
la table, c'est quoi le contre-argument? Le contre-argument, c'est : Ça
complexifie les choses. Ce à quoi je réponds : Ça simplifie tellement les
choses que ça crée un <déséquilibre vis-à-vis...
M. Barrette : ...
convaincu, convaincu.
Maintenant, à l'argument que je mets
sur la table, c'est quoi le contre-argument? Le contre-argument, c'est :
Ça complexifie les choses. Ce à quoi je réponds : Ça simplifie tellement
les choses que ça crée un >déséquilibre vis-à-vis la constitution. C'est
ça que je dis. Alors, j'aimerais entendre un argument d'une nature logique,
constitutionnelle, pour dire que je n'ai pas raison. Comment, avec un article
de même, là, par rapport à notre amendement, là, comment on peut dire que notre
amendement est inéquitable... non, ce n'est pas le mot qui a été utilisé...
complexifie les choses? C'est vrai, O.K., ça complexifie, mais je dis et
j'oppose le fait que ça simplifie tellement en faveur d'un bord que ça devient
inégal devant la constitution.
Je vais poser une question là-dessus à la
fin, Mme la Présidente : En droit, qu'est-ce que signifie le mot
«prévaloir»?
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre.
M. Barrette : Alors, juste
pour faire ça clair, parce que je pense qu'il y a un problème de compréhension
de la part du député de La Pinière, les versions ne sont pas balayées, hein,
les versions, elles sont égales. Et je vous l'ai exposé à plusieurs reprises,
on respecte l'article 133, hein? Il y a un espace où le législateur peut
agir, conformément à ce que les législateurs précédents ont fait ici, en cette
Assemblée. Et le fait de pouvoir se référer à la version française, ultimement,
en bout de course, hein...
Parce qu'on dirait qu'on semble penser, du
côté du Parti libéral, que là, là, l'égalité entre la version anglaise et la
version française n'est plus avérée. Or, ce n'est pas ça du tout, Mme la
Présidente. Les deux versions, anglaise et française, ont le même statut,
conformément à l'article 133 de la Loi constitutionnelle de 1867, mais, à
partir du moment où il y a un conflit d'interprétation, c'est impossible de
résoudre convenablement le conflit d'interprétation entre deux versions d'une
loi, pour lesquelles les règles d'interprétation ne réussissent pas à arriver à
une solution raisonnable, intelligible, convenable, dans le sens commun, Mme la
Présidente, là, à ce moment-là, on permet au juge, dans l'espace qui lui
revient, de le guider et de dire que la version française prévaut. Et, à ce
moment-là, Mme la Présidente, le juge, plutôt que de n'être guidé par aucune
règle et d'arriver à une solution que lui-même détermine, le législateur le
guide et lui dit : Veuillez vous référer à la version française pour connaître
l'intention du législateur, et surtout pour développer un sens logique, un sens
commun, un sens qui va vous permettre de résoudre la situation juridique à
laquelle vous êtes confronté et pour laquelle vous devez rendre une décision
entre deux justiciables, au moment de rédiger votre jugement et de rendre une
décision. Ce n'est pas très <compliqué, là, mais on...
M. Jolin-Barrette :
...
un sens qui va vous permettre de résoudre la situation juridique à laquelle
vous êtes confronté et pour laquelle vous devez rendre une décision entre deux
justiciables, au moment de rédiger votre jugement et de rendre une décision. Ce
n'est pas très >compliqué, là, mais on complexifie les choses.
Puis surtout, c'est drôle, parce qu'on me
fait des arguments de nature constitutionnelle. Tantôt, quand je parlais de la constitution,
on me disait : Le député... le ministre fait référence à la constitution,
il passe par Mars, puis tout ça, alors que, là, le député de La Pinière
ramène la constitution, ramène 133. Il faudrait se brancher, là, du côté
du Parti libéral. Je le sais, là, qu'on ralentit le processus, là, ici, là,
mais...
M. Barrette : Bien là...
M. Jolin-Barrette : Bien,
c'est vrai, écoutez, ils ont déposé le même amendement, Mme la Présidente,
en rajoutant «tribunal administratif», «tribunal judiciaire». Mme la
Présidente...
M. Birnbaum : Recevable ou
non? C'est recevable? Let's stop.
La Présidente (Mme Thériault) :
Bien non. Bien là...
M. Jolin-Barrette : Bien, je
vous ai dit nommément que je n'ai pas...
La Présidente (Mme Thériault) :
Aïe! Aïe! Wo! Wo! Wo! Le ministre ne m'a pas demandé si c'était recevable ou
pas. Donc, à partir du moment où on ne le demande pas, le débat s'engage. Nous
sommes dans un parlement, le but, c'est de débattre et de faire la meilleure
loi possible. Donc, il aurait pu le faire, il ne l'a pas fait, donc il permet
la discussion. Et c'est le but de l'étude article par article, permettre les
discussions et les échanges. Nous débattons. Donc, je ne laisserai pas
personne, ni le ministre ni les députés, prêter des intentions, si on étire le
temps ou on n'étire pas le temps, je ne crois pas que c'est pertinent
d'utiliser ce type de propos présentement, on est à l'étude article par
article.
M. le ministre, si vous voulez
soulever la recevabilité, faites-le, sinon, bien, les règles sont claires, c'est
20 minutes par intervenant. Puis il vous reste à peu près 5 minutes,
si je ne m'abuse, à peu près, donc, si vous voulez prendre le temps, vous le
prenez, si vous ne voulez pas, on passe à un autre intervenant. Il n'y a pas de
problème.
c15397 M.
Barrette : C'est sûr que je veux le prendre. Mme la Présidente,
le ministre me reproche de parler de constitution alors que je ne fais que ça.
Je ne fais que mettre les choses dans sa bonne perspective. C'est un article
qui traite de la constitution. Le ministre ne fait qu'argumenter que tout est
égal devant la constitution, devant 133 alors que tout ce que j'argumente,
c'est pour en démontrer le contraire.
Il ne répond pas à mes questions. Je lui
ai posé une question simple : Que veut dire, en droit, le mot «prévaloir»?
Bien, moi, je vais vous le dire, Mme la Présidente, mon interprétation
tout à fait commune. Quand il dit ça, «la version française prévaut», là, il y
a quelque chose d'attaché à ça, qui est la logique. C'est son terme, qu'il
utilise tout le temps, alors il y a une logique avec ça. Alors, lui, là, ce
n'est pas compliqué, il a une vision papale de son rôle. Papale dans le sens où
il est infaillible. Ça ne se peut pas qu'il ait écrit un texte, que ses
officiers aient traduit en anglais, dans lequel la version française peut être
problématique et pas l'anglaise. Et c'est tout ce qu'on dit, nous. Vous voulez <suivre
la...
M. Barrette : ... dans le
sens où il est infaillible. Ça ne se peut pas qu'il ait écrit un texte, que ses
officiers aient traduit en anglais, dans lequel la version française peut être
problématique et pas l'anglaise. Et c'est tout ce qu'on dit, nous. Vous voulez
>suivre la règle de l'égalité. Je maintiens ma position : si c'est
égal au départ, ça doit l'être à la fin. Et, à la fin, ça veut dire que le juge
qui est dans sa problématique, dans son dilemme, à un moment donné, il ne peut
pas être menotté sur une version qui a sa logique. Ça se pourrait même, Mme la
Présidente, il n'est pas capable, le ministre, de nous donner des cas de figure
de ce genre-là parce qu'il n'y en a probablement pas, puis on n'en a jamais eu,
de cas de figure de rien du tout. Il est même possible, Mme la Présidente, que
la logique soit mieux exprimée dans la version anglaise que dans la version
française pour son intention.
Et nous, tout ce qu'on dit, là, dans notre
amendement, tout ce qu'on dit : Laissez la chance au coureur. On va plus
loin que le ministre. Nous, on dit : Pauvre juge qui est mal pris,
libérons-le d'un carcan qui est celui de la CAQ et laissons-lui le choix,
laissons-lui regarder, réfuter. Ça, c'est juste une toute petite porte de rien
du tout ouverte à la possibilité de parfaire les choses.
Non, le ministre est infaillible. Alors,
tout ce qui est écrit, Mme la Présidente, ce n'est pas bon. On ne peut pas
l'accepter, ça complexifie les choses. Alors, Mme la Présidente, si le
ministre, après toutes ces réflexions, va en convenir, ça, ça serait
convenable, qu'on a un point.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, honnêtement, je vais peut-être surprendre le député de
La Pinière, mais moi, je ne pense pas que je suis infaillible...
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : Pardon?
• (17 h 50) •
La Présidente (Mme Thériault) :
Je n'ai pas compris ce que vous avez dit.
M. Jolin-Barrette : Je dis :
Je ne pense pas que je suis infaillible. Je pense que je fais des erreurs comme
tout le monde, j'essaie de faire du mieux possible dans la vie, surtout dans
mon rôle de député, de ministre. On s'engage en politique pour améliorer les
choses. On s'engage en politique pour servir le public, servir la communauté.
Puis loin de moi de penser que je ne fais pas d'erreur, j'en fais à tous les
jours, puis j'essaie d'en faire le moins possible.
Moi, c'est la vision que j'ai, mais, si le
député de La Pinière dit que je suis infaillible, bien, ça veut dire qu'il
a une bonne opinion de moi, puis qu'il apprécie beaucoup mon travail, puis je
le prends comme un compliment, puis je tiens à le remercier, Mme la Présidente.
M. Barrette :
...article 73, on me prête des intentions. Je vous assure que je ne les ai
pas.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le député de La Pinière, je pense que M. le ministre a interprété, donc,
vos propos, ce qui est le cas de tous ceux qui entendent ici. On entend quelque
chose et on va l'interpréter dans le sens qu'on veut bien. La parole est à
vous.
M. Barrette : Oui, bon, Mme la
Présidente, la situation devant laquelle on est ici est une <situation...
La Présidente (Mme Thériault) :
...
M. le député de La Pinière, je pense que M. le ministre a
interprété, donc, vos propos, ce qui est le cas de tous ceux qui entendent ici.
On entend quelque chose et on va l'interpréter dans le sens qu'on veut bien. La
parole est à vous.
M. Barrette : Oui, bon. Mme
la Présidente, la situation devant laquelle on est ici est une >situation
d'amélioration de droit, mais on n'a toujours pas de réponse, hein, à l'argument.
C'est juste ça qu'on essaie de faire, là. Alors, ce n'est pas compliqué,
l'Association du Barreau du Canada, le Barreau du Québec, tous ces gens-là qui
soulèvent ce point-là ont tort. On en fait le débat, on pose des questions, on
n'a pas de réponse directe, bien, même pas indirecte, mais on a tort. C'est sûr
que ça fait des débats qui sont difficiles, là, qui sont difficiles.
Alors, la question qui se pose aujourd'hui :
Est-ce que le ministre préfère — ça m'étonne, d'ailleurs — est-ce
qu'il préfère aller de l'avant avec le risque de contestation judiciaire plutôt
que de faire un... d'accepter un amendement qui est, somme toute, assez bénin,
là? Alors, c'est une question, est-ce que je vais avoir une réponse.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, je dois comprendre que le député de La Pinière évalue des risques de
contestation judiciaire à la lumière de sa lecture par rapport au projet de loi
puis il évalue que, s'il y avait une contestation, son amendement, l'amendement
de la députée de Marguerite-Bourgeoys ferait en sorte d'éviter des
contestations.
Moi, Mme la Présidente, toutes les lois du
Québec peuvent être contestées devant les tribunaux, toutes, sans exception. Ça
fait partie de notre démocratie. Puis chacun joue son rôle, nous, on fait des
lois, le gouvernement exerce le pouvoir exécutif, le législateur ici fait les
lois, le judiciaire est chargé de vérifier la constitutionnalité des lois,
chaque citoyen a le droit de pouvoir contester les lois s'il le souhaite.
Alors, on ne travaille pas dans cette optique-là pour faire en sorte que les
lois soient contestées ou non. Pour nous, on établit un texte qui est conforme
à la constitution, comme je l'ai dit, et l'article 7.1 est conforme à la constitution.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le député.
M. Barrette : ...
La Présidente (Mme Thériault) :
Un peu plus de trois minutes. Je ne vous avais pas donné le bon temps tout
à l'heure.
M. Barrette : Mme la
Présidente, j'ai encore posé une question à laquelle, encore une fois, je n'ai
pas eu de réponse, et, en plus, on m'a prêté des intentions, ce que je n'ai pas
relevé. Oui. Mme la Présidente, là, l'opinion que j'ai exprimée, c'est
l'opinion du Barreau puis de l'Association du Barreau canadien. Je veux dire, c'est...
Là je le sais qu'on va me répondre un certain nombre de choses qui vienne du
passé, ta, ta, ta, mais ce monde-là, là, ils doivent avoir une expertise. Ça, c'est
comme la juge Rondeau, les 12 juges qui poursuivent le ministre
actuellement, ils doivent avoir une expertise, eux autres, je ne peux pas
croire. Mais c'est sûr que le ministre a raison, c'est... Vous savez, il y
avait une émission, quand on était jeunes, vous et moi, qu'on pourrait traduire
aujourd'hui par Le ministre a raison.
M. Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, j'ai une question pour le <député de La Pinière...
M. Barrette : ...
une
expertise, eux autres, je ne peux pas croire. Mais c'est sûr que le ministre a
raison, c'est... Vous savez, il y avait une émission, quand on était jeunes,
vous et moi, qu'on pourrait traduire aujourd'hui par Le ministre a raison.
M. Jolin-Barrette :
Mme la Présidente, j'ai une question pour le >député de La Pinière.
Est-ce qu'il est d'accord pour que tous les juges nommés à la Cour du Québec,
pour être nommés à la Cour du Québec, O.K., tous les juges du Québec doivent
avoir une maîtrise de la langue anglaise pour pouvoir accéder à un poste à la
magistrature, au Québec, à la Cour du Québec? Est-ce que le député de La Pinière
est d'accord avec ça?
La Présidente (Mme Thériault) :
Député de La Pinière.
M. Barrette : Encore une
diversion. On va en parler dans un autre article.
M. Jolin-Barrette : Non, non,
non, Mme la Présidente, désolé...
M. Barrette : Ce n'est pas
moi. Mme la Présidente, j'ai la parole.
M. Jolin-Barrette : Le député,
nommément, fait référence à un dossier qui est devant les tribunaux par rapport
à la juge en chef et il dit... très clairement, il fait référence à ce cas-là.
Moi, je vous pose une question sur le fond du litige. Est-ce que le député de La Pinière
est d'accord avec le fait que, pour devenir juge, au Québec, la maîtrise de la
langue anglaise soit requise, oui ou non? La question, elle est très claire, et
le député de La Pinière devrait répondre à cette question-là, c'est lui
qui a amené le sujet. Oui ou non, êtes-vous d'accord avec cette proposition-là?
M. Barrette : Mme la
Présidente, je n'ai pas déposé ni d'amendement ni fait de proposition de débat,
c'est hors d'ordre. Et pour ce sujet-là...
M. Jolin-Barrette : Le député
de La Pinière, par ses propos, a amené le sujet dans le cadre de la discussion.
C'est une question très claire. Est-ce que le député de La Pinière est d'accord
que, pour devenir juge au Québec, vous devez maîtriser la langue française dans
tous les cas, oui ou non?
M. Barrette : Mme la
Présidente...
M. Jolin-Barrette : Et s'il
ne répond pas à la question, on saura où il loge.
M. Barrette : Mme la
Présidente, vous allez savoir où je loge lorsque je lui aurai donné mon
adresse, ça va me faire plaisir de la lui donner. Alors, ce n'est pas l'objet
de cet amendement-là. Le ministre, habilement, continue de m'interrompre pour
m'empêcher de parler...
M. Jolin-Barrette : Oui, certainement,
Mme la Présidente, le député de La Pinière ne...
M. Barrette : ...ce qui est
une tactique habituelle de la...
La Présidente (Mme Thériault) :
S'il vous plaît! S'il vous plaît!
M. Barrette : ...
La Présidente (Mme Thériault) :
Non. Là, il n'y a aucun micro qui est ouvert, sauf le mien. Merci. Donc, on va
avoir un débat calme. Je veux juste vous rappeler également que, lorsqu'il y a
une cause qui est devant les tribunaux, habituellement, les parlementaires n'en
parlent pas. Ça, c'est une règle qui devrait guider tous les débats ici, tous
les parlementaires.
Donc, M. le député de La Pinière, il
vous reste 1 min 40 s.
M. Barrette : Vous avez raison
sur un point, Mme la Présidente, qui est sous-jacent. À la CAQ, on a voulu
faire une réforme du parlementarisme. Je leur ai toujours suggéré, et je
l'avais dit personnellement au ministre : Ça serait le fun, juste une
chose, vous répondez aux questions, «sous peine de». En tout cas, si on avait
une réforme de ce type-là, la session d'aujourd'hui n'aurait pas duré <longtemps...
M. Barrette : ... À la CAQ,
on a voulu faire une réforme du
parlementarisme. Je leur ai toujours
suggéré, et je l'avais dit personnellement au ministre : Ça serait le fun,
juste une chose, vous répondez aux questions, sous peine de. En tout cas, si on
avait une réforme de ce type-là, la session d'aujourd'hui n'aurait pas duré
>longtemps parce que «sous peine de», c'est une conséquence. Le
ministre, il ne répond pas aux questions, hein, et...
M. Jolin-Barrette : Ce n'est
pas vrai, Mme la Présidente.
M. Barrette : Bien là.
M. Jolin-Barrette : Ce n'est
pas vrai.
La Présidente (Mme Thériault) :
Là, je vais vous demander d'arrêter de vous interrompre.
M. Jolin-Barrette : Ce n'est
pas vrai, Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Thériault) :
Non, M. le ministre, je vais vous passer la parole après. Vous pourrez répondre
à l'observation du député de La Pinière. M. le député de La Pinière, je vous
entends, allez-y.
M. Barrette : Merci, Mme la
Présidente. Ce sont des observations, et qui sont fondées...
Une voix : ...
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le député de La Pinière, vous avez la parole. Votre micro est ouvert. À
vous.
M. Barrette : Merci, Mme la
Présidente. Alors, elles sont fondées. Je pose des questions, je n'ai pas de
réponses. Je soumets que probablement que le ministre, qui ne veut rien
entendre, il a une vision assez parfaite de sa position. Il me dit non et je
fais une autre observation que vous souhaitez que je ne fasse pas, très bien, c'est
votre rôle, vous me le dites, j'accepte, mais ça n'empêche pas le fait qu'il ne
réponde pas à mes questions. Et à la fin, à la fin de ce débat-là, parce que je
sais que mon temps va bientôt se terminer, bien, on n'a pas réglé cet enjeu-là,
on ne l'a pas réglé, et la question demeure, et les arguments que j'ai mis sur
la table n'ont pas été contredits autrement que de me dire : Ah, bien, ça
va complexifier les affaires, ce n'est pas nécessaire. Bien, ça, ce n'est pas
une réponse, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci, M. le député de La Pinière. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Alors, je
pense que j'ai répondu abondamment à toutes les questions. Mme la Présidente, à
un moment donné, si on ne veut pas entendre les réponses, bien là ça appartient
au député de La Pinière. Mais moi, lui, il n'a pas répondu à ma question qui se
répond par oui ou par non : Est-il d'accord que pour devenir juge au Québec,
tous les juges doivent avoir une maîtrise de la langue anglaise pour pouvoir
être nommés, oui ou non?
M. Barrette : Mme la
Présidente, c'est facile, c'est facile, je n'ai pas à recevoir de questions.
M. Jolin-Barrette : Pourquoi?
Ce n'est pas vrai, l'article 213 nous permet de vous poser des questions
après une intervention.
M. Barrette : Mme la
Présidente, ici, le débat est sur l'article. Il est hors d'ordre.
La Présidente (Mme Thériault) :
...
M. Jolin-Barrette : Pas du
tout. Vous avez amené vous-même le point dans le cadre de votre intervention,
nous avons un échange...
M. Barrette : On n'en parlera
plus.
M. Jolin-Barrette : Pourquoi
vous ne voulez pas en parler tout de suite? Pourquoi vous ne voulez pas...
La Présidente (Mme Thériault) :
Là, M. le ministre, M. le ministre, chacun votre tour. Le micro sera ouvert.
Merci. M. le député.
M. Barrette : Il me reste
combien de temps, Mme la ministre?
La Présidente (Mme Thériault) :
45 secondes.
M. Barrette : 45 secondes.
Il y a un article qui s'en vient où on aura un débat de cet ordre-là, Mme la
Présidente. Il y a un article, là, où on va avoir de magnifiques échanges. Un
article où on va, là aussi, montrer que la position du ministre elle est très
discutable pour ne pas dire «débattable», ou plutôt «débattable» pour ne pas
dire discutable. Je comprends le ministre qu'il veuille faire la diversion à
cette étape-ci, je le comprends, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Thériault) :
Je vais vous demander d'être prudent dans vos propos, «diversion».
M. Barrette : O.K. Je
comprends, Mme la Présidente, qu'il veuille aller sur un autre sujet, je le <comprends.
La Présidente (Mme Thériault) :
Et, compte tenu...
>
18 h (version révisée)
<15397
M.
Barrette : ...pour ne pas dire «débattable», ou plutôt «débattable»
pour ne pas dire discutable. Je comprends le ministre qu'il veuille faire la
diversion à cette étape-ci, je le comprends, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Thériault) :
Je vais vous demander d'être prudent dans vos propos, «diversion».
M. Barrette :
O.K.
Je comprends, Mme la Présidente, qu'il veuille aller sur un autre sujet. Je le >comprends.
La Présidente (Mme Thériault) :
Et, compte tenu de l'heure... Malheureusement, M. le député, il ne vous reste
plus de temps.
Compte tenu de l'heure, je suspends les
travaux jusqu'à 19 h 30.
(Suspension de la séance à 18 heures)
19 h 30 (version révisée)
(Reprise à 19 h 38)
La Présidente (Mme Thériault) :
Votre attention, s'il vous plaît! La Commission de la culture et de l'éducation
reprend ses travaux. Et nous poursuivons l'étude détaillée du projet de loi
n° 96, Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le
français.
Lors de la suspension de nos travaux, nous
en étions à l'étude de l'amendement qui avait été déposé par la députée de
Marguerite-Bourgeoys à l'article 7.1 de l'article 5 du projet de loi.
Donc, M. le député de La Pinière, vous aviez épuisé le temps de parole.
Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Moi aussi, j'ai
pas mal épuisé le temps de parole et je pense que nous avons un peu épuisé le
ministre, le sujet et la discussion. Alors, je serais prête à soumettre au
vote.
La Présidente (Mme Thériault) :
Vous demandez le vote. On passe au vote. Parfait. Un vote par appel nominal.
Mme la secrétaire.
La Secrétaire
:
Veuillez répondre pour, contre ou abstention. Mme David
(Marguerite-Bourgeoys)?
Mme David : Pour.
La Secrétaire
:
M. Birnbaum (D'Arcy-McGee)?
M. Birnbaum : Pour.
La Secrétaire
:
M. Barrette (La Pinière)?
M. Barrette : Pour.
La Secrétaire
:
M. Jolin-Barrette (Borduas)?
M. Jolin-Barrette : Contre.
La Secrétaire
:
M. Lévesque (Chapleau)?
M. Lévesque (Chapleau) :
Contre.
La Secrétaire
:
M. Skeete (Sainte-Rose)?
M. Skeete : Contre.
La Secrétaire
:
M. Lefebvre (Arthabaska)?
M. Lefebvre : Contre.
La Secrétaire
: Mme Guillemette
(Roberval)?
Mme Guillemette : Contre.
La Secrétaire
:
M. Poulin (Beauce-Sud)?
M. Poulin : Contre.
La Secrétaire
: Mme
Ghazal… <pardon. M. Bérubé (Matane-Matapédia)?…
La Secrétaire
: M. Jolin-Barrette
(Borduas)?
M. Jolin-Barrette :
Contre.
La Secrétaire
:
M. Lévesque (Chapleau)?
M. Lévesque (Chapleau) :
Contre.
La Secrétaire
:
M. Skeete (Sainte-Rose)?
M. Skeete : Contre.
La Secrétaire
:
M. Lefebvre (Arthabaska)?
M. Lefebvre : Contre.
La Secrétaire
:
Mme Guillemette (Roberval)?
Mme Guillemette : Contre.
La Secrétaire
:
M. Poulin (Beauce-Sud)?
M. Poulin : Contre.
La Secrétaire
: Mme Ghazal…
>pardon. M. Bérubé (Matane-Matapédia)?
M.
Bérubé
:
Contre.
La Présidente (Mme Thériault) :
Il manque Mme la députée de…
La Secrétaire
: Oh! pardon.
Mme Proulx (Côte-du-Sud)?
Mme Proulx (Côte-du-Sud) :
Contre.
La Secrétaire
: Et Mme Thériault
(Anjou—Louis-Riel)?
La Présidente (Mme Thériault) :
Abstention. Donc, l'amendement à l'article 7.1 est rejeté. Donc, nous
revenons à l'étude de l'article 7.1. Y a-t-il d'autres interventions? Si
je ne vois pas d'autre intervention, on est prêts à passer…
Une
voix : ...
La Présidente (Mme Thériault) :
Ah! on passe au suivant, on ne l'adopte pas tout de suite. Pardon. Excusez-moi.
Donc, à ce moment-là, nous allons procéder à l'article 8. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui.
Bien, en fait, j'avais lu la totalité de… Parce que, dans le fond, on est à l'article 5,
mais on vient modifier 7.1… Dans le fond, on vient… à 5, c'est : Les articles 8
et 9 de cette charte sont remplacés par les suivants. Puis là on vient rentrer
un bloc d'articles, 7.1, 8, 9, 10, 11, 12. Donc, voulez-vous que je refasse la
lecture de 8?
La Présidente (Mme Thériault) :
Je vous suggérerais peut-être juste l'article 8, étant donné qu'on a fait
la lecture de cet article-là il y a déjà plus d'une semaine, et ça nous
permettrait de juste se remettre dans le contexte sur le point 8. Et à
chaque paragraphe ou nouvelle numérotation, je vais vous demander de nous en
faire la lecture, et on fera le débat par la suite.
• (19 h 40) •
M. Jolin-Barrette : Puis on a
passé beaucoup de temps aussi, c'est pour ça que ça fait longtemps. 8... Mme la
Présidente, il faut bien taquiner les collègues. «8. Les...»
La Présidente (Mme Thériault) :
Bien, je peux vous le lire aussi, si vous voulez.
M. Jolin-Barrette : Ça va
aller. Ça va aller.
La Présidente (Mme Thériault) :
D'accord.
Une voix : …
M. Jolin-Barrette : «8. Les
règlements et les autres actes de nature similaire auxquels ne s'applique pas l'article 133
de la Loi constitutionnelle de 1867, tels que les règlements municipaux,
doivent être rédigés, adoptés et publiés exclusivement en français.
«Les organismes et les établissements
reconnus en vertu de l'article 29.1 peuvent rédiger, adopter et publier
ces actes à la fois en français et dans une autre langue; en cas de divergence,
le texte français d'un tel acte prévaut sur celui dans une autre langue.»
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. Questions, commentaires sur l'article 8? Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Le ministre va
être content, parce qu'on ne trouve pas beaucoup de différence entre ces
formulations-là et ce qui existe dans l'article 8 actuel de la Charte de
la langue française. Nous n'aurons donc aucun amendement à déposer, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Thériault) :
C'est bon. Je vois que j'ai le député de La Pinière qui a des
commentaires. M. le député.
M. Barrette : Très brefs, Mme
la Présidente, le ministre va trouver ça sympathique. Comme on n'est pas dans l'environnement
de 133, le libellé actuel ne m'inquiète pas.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre, ça vous va?
M. Jolin-Barrette : C'est
bien noté.
La Présidente (Mme Thériault) :
C'est bien noté. Donc, il n'y a pas d'autre commentaire sur l'article 8. <Parfait…
La Présidente (Mme Thériault) :
…
M. le député.
M. Barrette : Très brefs.
Mme
la Présidente, le
ministre va trouver ça sympathique. Comme on n'est pas
dans
l'environnement de 133, le libellé actuel ne m'inquiète pas.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre, ça vous va?
M. Jolin-Barrette :
C'est bien noté.
La Présidente (Mme Thériault) :
C'est bien noté. Donc,
il n'y a pas d'autre commentaire sur
l'article 8.
>Parfait. Nous allons passer à l'article 9. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : L'article 9 :
«Une traduction en français certifiée doit être jointe...» Et j'aurai un
amendement, Mme la Présidente, qui est sur Greffier.
La Présidente (Mme Thériault) :
Qui est sur Greffier présentement, et j'ai une copie en main aussi. Allez-y.
M. Jolin-Barrette : «9. Une
traduction en français certifiée doit être jointe à tout acte de procédure
rédigé en anglais émanant d'une personne morale.
«La personne morale assume les frais de la
traduction.»
Avec votre permission, Mme la Présidente,
je vais lire l'amendement qui est déjà envoyé sur Greffier : À
l'article 5 du projet de loi, insérer, dans le premier alinéa de
l'article 9 de la Charte de la langue française qu'il propose et après
«certifiée», «par un traducteur agréé».
Cet amendement modifie l'article 9 de
la Charte de la langue française que propose l'article 5 du projet de loi
afin de préciser que la traduction de l'acte de procédure qui y est visé doit
être certifiée par un traducteur agréé, c'est-à-dire un membre de l'ordre
professionnel des traducteurs, terminologues et interprètes agréés du Québec.
Donc, le texte amendé de l'article 9
tel qu'il se lirait : «Une traduction en français certifiée par un
traducteur agréé doit être jointe à tout acte de procédure rédigé en anglais
émanant d'une personne morale.
«La personne morale assume les frais de la
traduction.»
Donc, l'objectif de l'amendement est de
faire en sorte que la traduction certifiée en français doit l'être par un
membre d'un ordre professionnel. On a eu l'Ordre des traducteurs qui sont venus
en consultations. Ils nous ont exprimé qu'il serait approprié de faire en sorte
qu'un tel acte soit certifié par un traducteur. Ça garantit, dans le fond, le
fait que le membre de l'ordre professionnel puisse faire cet acte-là puis que
ça ne soit pas n'importe qui qui puisse faire la traduction.
La Présidente (Mme Thériault) :
Parfait. Questions, commentaires? Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Bien, évidemment,
on ne peut pas être contre la vertu de la compétence, hein, c'est évident. On a
eu l'Ordre des traducteurs, ils sont très présents, ils nous écoutent, ils sont
très attentifs. Ils vont être très occupés avec tout ce projet de loi là. Ils
auront beaucoup de travail, mais ils nous ont bien dit qu'en principe ils
étaient capables de faire face à tout ça et que tout ce qui concernait la
langue... la justice, et tout ça, ça occupait peut-être 2 % de leur temps.
Donc, on imagine que le ministre va ouvrir les… parce qu'il va falloir qu'il
ouvre son portefeuille très largement pour payer tout ça, parce que ça va être
beaucoup, beaucoup, beaucoup de traductions de toutes sortes de choses. Alors,
oui, on est d'accord que ça soit un traducteur agréé, certainement.
La Présidente (Mme Thériault) :
Parfait. D'autres questions, commentaires sur cet article-là? Je n'en vois pas.
Parfait. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Adopté.
La Présidente (Mme Thériault) :
Pour l'amendement, oui. On met aux voix l'amendement. Est-ce que l'amendement
est adopté?
M. Jolin-Barrette : Adopté.
Une voix : ...
La Présidente (Mme Thériault) :
Pardon?
M. Barrette : Est-ce qu'on
peut faire un pas en arrière pour les commentaires?
La Présidente (Mme Thériault) :
Sur l'amendement? Sur l'amendement ou sur l'article amendé?
M. Barrette : Ah! non, sur... je
m'excuse, je m'excuse, je m'excuse, c'est moi qui est allé trop vite.
La Présidente (Mme Thériault) :
Parfait. Donc, <l'amendement…
La Présidente (Mme Thériault) :
…oui. On met aux voix l'amendement. Est-ce que l'amendement est adopté?
M. Jolin-Barrette :
Adopté.
Une voix : ...
La Présidente (Mme Thériault) :
Pardon?
M. Barrette : Est-ce qu'on
peut faire un pas en arrière pour les commentaires?
La Présidente (Mme Thériault) :
Sur l'amendement? Sur l'amendement ou sur l'article amendé?
M. Barrette : Ah! non,
sur... je m'excuse, je m'excuse, je m'excuse, c'est moi qui est allé trop vite.
La Présidente (Mme Thériault) :
Parfait. Donc, >l'amendement est adopté. Si vous voulez faire un
commentaire sur l'article amendé, maintenant, c'est possible. Oui, Mme la
députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Je veux être sûre
qu'on se comprend. Là, on a un article amendé...
La Présidente (Mme Thériault) :
Oui.
Mme David : ...auquel, moi, je
peux apporter un amendement et je vais déposer un amendement.
La Présidente (Mme Thériault) :
Vous pourriez.
Mme David : Et je vais le
faire. Je vous annonce que j'ai un amendement à apporter qui va bonifier l'amendement
du ministre.
La Présidente (Mme Thériault) :
D'accord. Et je n'ai pas votre amendement.
Mme David : Vous l'avez quelque
part, là, dans le nuage.
La Présidente (Mme Thériault) :
Il vient de rentrer, sauf que, moi, je ne l'ai pas.
Donc, je vais suspendre quelques instants,
le temps que j'aie une copie papier entre les mains.
(Suspension de la séance à 19 h 46)
(Reprise à 19 h 54)
La Présidente (Mme Thériault) :
Donc, nous poursuivons nos travaux. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, si
vous voulez nous lire votre amendement ainsi que les commentaires, s'il vous
plaît.
Mme David : Merci, Mme la
Présidente. Alors, voilà : L'article 9 de la Charte de la langue
française tel qu'amendé, introduit par l'article 5 du projet de loi, est
modifié par l'insertion dans son premier alinéa, après le mot «agréé», des mots
«ou une attestation indiquant que la partie a donné <instruction à un
traducteur agréé de...
Mme David : ...
Mme la
Présidente. Alors, voilà : L'article 9 de la Charte de la langue
française tel qu'amendé introduit par l'article 5 du projet de loi est
modifié par l'insertion dans son premier alinéa, après le mot «agréé», des mots
«ou une attestation indiquant que la partie a donné >instruction à un
traducteur agréé de traduire l'acte de procédure».
Commentaires : L'article 9 de la
Charte de la langue française, introduit par le projet de loi tel qu'amendé, se
lirait ainsi : «Une traduction en français certifiée par un traducteur
agréé ou une attestation indiquant que la partie a donné instruction à un
traducteur agréé de traduire l'acte de procédure doit être jointe à tout acte
de procédure rédigé en anglais émanant d'une personne morale.»
Alors, pourquoi pensez-vous que nous avons
déposé cet amendement si ce n'est que le plaisir d'échanger avec le ministre,
mais pour ce que nous croyons être une bonne cause? Une bonne cause, il faut
comprendre qu'est-ce que c'est, un acte de procédure, puis ce n'est pas... Je
devrais demander au ministre, en fait, de nous le dire, là. Moi, j'ai fait mes
devoirs, mais, pour le bien et le bénéfice de nos concitoyens fort nombreux qui
nous écoutent, qu'est-ce que ça inclut, un acte de procédure, qu'est-ce que ça
veut dire concrètement dans la vie réelle et qu'est-ce que c'est une personne
morale? Nous, on pense, effectivement... on a chacun notre idée, mais c'est
plus large que, même moi, je pensais au début.
Donc, il faut comprendre l'importance des
deux, j'oserais dire, des deux concepts pour comprendre le sens de notre amendement,
c'est de donner du temps au temps. En fait, c'est exactement, ça, là, de donner
du temps au temps, parce qu'il y a... un acte de procédure, ça peut être
beaucoup, beaucoup de choses. C'est habituellement prévu au Code de procédure
civile ou au Code de procédure pénale.
Et puis les exemples que moi, j'ai... en
fait, qui me parlent un peu plus, c'est, par exemple, ce qu'on appelle une
poursuite, savamment dit, une demande introductive d'instance, une demande
d'injonction. Donc, ça, une demande d'injonction, ça peut être très, très, très
rapide. Puis vous allez voir tout de suite, vous entrevoyez déjà... le ministre
a l'air déjà de me trouver rigolote, mais, bon, une injonction, ça vient vite,
et d'avoir tout de suite une traduction, ça peut être embêtant. Une requête en
divorce, une défense, tout ce qui a trait... une requête Jordan pour délai
déraisonnable, ça, le ministre en a beaucoup parlé avec sa prédécesseure, et,
dans ces actes de procédure, il y a beaucoup d'actes qui ont un caractère assez
urgent. Donc, traduction tout de suite, tout de suite, ce n'est pas évident.
Et, si on ajoute à ça le fait que, quand
on parle de personne morale, on a toujours en tête... bien, moi, en tout cas,
j'avais en tête, puis probablement le commun des mortels, personne morale,
c'est une compagnie, puis une compagnie, là, quand j'ai lu le projet de loi la
première fois, j'ai dit : Regarde, «compagnie», c'est capable de se payer
ça, ils ont quasiment leur <équipe de traducteurs...
Mme David : ...
le
fait que, quand on parle de personne morale, on a toujours en tête... bien,
moi, en tout cas, j'avais en tête, puis probablement le commun des mortels,
personne morale, c'est une compagnie. Puis une compagnie, là, quand j'ai lu le
projet de loi la première fois, j'ai dit : Regarde, compagnie, c'est
capable de se payer ça, ils ont quasiment leur >équipe de traducteurs,
comme ils ont leur équipe de relationnistes, leur équipe de ci, de ça, et puis
ça se traduit comme ça, et puis qu'ils paient, puis tout ça, ça ne me dérange
pas trop, parce que c'est des gens qui ont les reins habituellement assez
solides, qui sont capables de se payer ça, ils ont des conseillers légaux, etc.
Mais une personne morale, là, ça peut autant être un OSBL, ça peut être un
petit organisme, ça peut être une organisation religieuse, ça peut être une
association, ça peut être une grande multinationale, mais ça peut être une
toute petite PME de quatre employés.
Puis des exemples de, justement, dire :
O.K., je dois demander une injonction ou je dois intenter une poursuite pour
telle et telle chose, tu n'as pas toujours ni les moyens, donc accessibilité à
la justice à travers les frais de traduction et, des fois, le temps presse, ce
qui fait que tu es obligé de prendre un délai, vraiment, qui peut te nuire et
qui peut nuire à l'accessibilité à la justice de devoir traduire comme ça
immédiatement... Donc, c'est deux problématiques importantes.
Puis le ministre va être content, et je
regarde le député de La Pinière, parce qu'on va revenir à
l'article 133. Parce qu'il y a, d'une part, l'accessibilité à la justice,
puis, deuxièmement, ça contrevient à l'article 133, parce qu'il faut avoir
la possibilité de faire un usage égal du français et de l'anglais devant les
tribunaux. Alors, est-ce que c'est égal, s'il y a des délais puis qu'il faut
attendre la traduction? Puis il faut payer, en plus, et puis payer le
traducteur, dont on vient de dire qu'il devait être agréé plus que certifié. Bien,
ça coûte des sous. Puis, plus c'est une demande rapide, injonction un samedi,
un dimanche, un vendredi, évidemment que le traducteur va coûter encore plus
cher.
Alors, tout obstacle, on pourrait dire, à
l'accès à la justice par l'ajout d'un fardeau financier pour les personnes
morales au Québec... Puis entendons-nous, personne morale, ce n'est pas que des
grosses compagnies, ce sont des touts petits OBNL ou des petites PME qui vont
avoir le même fardeau de traduction. Alors, c'est difficilement conciliable
avec les objectifs qui sous-tendent l'adoption, bon, entre autres, nous dit-on,
du nouveau Code de procédure civile par le gouvernement du Québec, soit
d'assurer l'accessibilité, la qualité et la célérité de la justice civile,
l'application juste, simple, proportionnée et économique de la procédure et
l'exercice des droits des parties dans un esprit de coopération et d'équilibre.
• (20 heures) •
Alors, déjà, on a un problème à ce
niveau-là. Puis l'article 133, bien, c'est évidemment... Et là le ministre
va être content parce que je vais citer un autre expert, tout à l'heure, il
citait Jean Leclair, maintenant on va citer Hugo Cyr, qui était doyen
de la Faculté de droit de science politique de l'UQAM. Alors, il dit :
«Puisque l'article 133 permet à toute personne d'utiliser indifféremment
le <français ou...
>
20 h (version révisée)
<15379
Mme
David : ... le ministre va être content parce que je vais citer un
autre expert, tout à l'heure, il citait RJean Leclair, maintenant on va citer
Hugo Cyr, qui était doyen de la Faculté de droit de science politique de
l'UQAM. Alors, il dit : «Puisque l'article 133 permet à toute personne
d'utiliser indifféremment le >français ou l'anglais dans toute pièce de
procédure devant les tribunaux du Québec, l'article 9, tel que proposé,
risque d'être déclaré inconstitutionnel.» Alors, Hugo Cyr est de cet avis dans
son mémoire.
Alors, notre amendement essaie, encore une
fois... pas de dire que ça n'a pas de bon sens, la question de la traduction,
ce n'est pas vrai, ce n'est pas ça qu'on veut dire, mais ce qu'on suggère,
c'est d'amoindrir l'impact sur l'accessibilité à la justice pour cette nouvelle
obligation, évidemment, pour les personnes morales. Alors, l'ajout de
«attester», une attestation, en disant : Oui, oui, je veux, j'accepte de
le faire traduire, mais laissez-moi un peu de temps, mais je... j'ai... c'est
une attestation en bonne et due forme, permets à un représentant d'une personne
morale, donc, de déposer une procédure en anglais sans devoir attendre le délai
pour obtenir la traduction certifiée. D'autant, comme je l'ai dit, qu'il y a
des actes de procédure qui sont dans... qui ont un caractère d'urgence, comme
par exemple une injonction.
Alors, une telle attestation, c'est des
choses qui existent, entre autres, dans le Code de procédure civile, d'avoir
une attestation dans l'attente d'obtenir un document, c'est ça que nous
proposons. Et, comme on a dit, ça se pourrait que les délais soient longs pour
la traduction. Et, si on veut un accès à la justice équitable pour tout le
monde, bien, ne pensons pas seulement aux grosses entreprises, pensons à nos
petites PME, pensons à des toutes petites entreprises.
Je pensais à... J'avais un drôle d'exemple.
Mais, disons, un propriétaire de dépanneur qui est... dont la langue la plus
naturelle... parce qu'il est souvent un nouvel arrivant et qu'il parle plus
facilement anglais que français, a besoin d'avoir une injonction parce qu'il y
a des groupes, ou je ne sais pas quoi, qui occupent une partie de son terrain,
puis qui est un peu peut-être menaçant pour des clients qui dit : Bien,
moi, je n'irai pas à ce dépanneur-là parce qu'il y a comme des regroupements,
puis je n'aime pas ça, de gens, et tout ça, il essaie d'avoir une injonction
pour pouvoir faire en sorte que des groupes n'élisent pas domicile à sa table à
pique-nique, par exemple, bien, pour pouvoir retrouver sa clientèle, alors,
évidemment, tout ça, il va plus naturellement le faire en anglais, le faire
traduire en français, etc. Tout ça, ce sont des démarches qui sont assez
lourdes.
Encore une fois, on ne dit pas qu'obligatoirement
ça doit être fait en français d'emblée. Le ministre va nous dire : Je
respecte l'article 133, il a le droit d'écrire en anglais, mais ça doit
être déposé, donc, dans une... ça doit être traduit en... par un traducteur
agréé. Et ce qu'on <demande, donc, c'est que...
Mme David : ...que c'est...
obligatoirement,
ça doit être fait en français d'emblée. Le ministre va nous dire : Je
respecte l'article 133, il a le droit d'écrire en anglais, mais ça doit
être déposé, donc, dans une... ça doit être traduit en... par un traducteur
agréé. Et ce qu'on >demande, donc, c'est que ça soit fait... qu'il
puisse y avoir la possibilité de dire qu'on a donné instruction à un
traducteur, donc que la démarche est en cours, mais qu'elle n'est pas nécessairement
dans le temps... elle est séquencée parce que ça va arriver dans trois jours,
dans quatre jours, mais il peut au moins déposer sa procédure.
Alors, c'est l'esprit, en toute collaboration,
encore une fois, dans cet article de loi là, mais pour permettre au plus...
disons, au plus humble des citoyens, je ne sais pas comment on les appelle,
déjà, en langage juridique, mais de pouvoir avoir, eux aussi, accès à la
justice.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui.
Alors, l'article 9, tel qu'on vient l'introduire par le biais de l'article 5
du projet de loi, il est là pour faire en sorte de permettre aux citoyennes et citoyens
québécois d'avoir accès à la justice en français. Il faut comprendre d'où on
part. Actuellement, devant les tribunaux, les personnes morales, et ça, ça
demeure ainsi, là, peuvent utiliser l'anglais ou le français. Dans le fond,
toute personne qui va devant les tribunaux, en vertu de 133, peut utiliser
l'anglais ou le français. Ça, ça ne change pas.
Par contre, on se retrouve dans des situations
où une personne, supposons, physique, au Québec, qui est francophone se fait
poursuivre par une personne morale en anglais, avec des documents, des
procédures en anglais. L'article 9, il est là pour faire en sorte que, si
une personne morale décide d'utiliser la langue anglaise pour entreprendre,
notamment, des poursuites à l'endroit d'un citoyen ou d'une citoyenne
québécoise, il doit y avoir une traduction française des procédures.
Alors, la personne morale, elle, peut
toujours utiliser des procédures en anglais ou en français à sa guise, mais, si
elle décide d'utiliser des procédures en anglais, à ce moment-là, elle va
devoir fournir une traduction en français de la procédure comme telle.
La Présidente (Mme Thériault) :
Mme la députée.
Mme David : C'est exactement
la lecture que je faisais sans mon amendement, exactement ça, tout à fait, mot
à mot. Mais je ne comprends pas que... Alors, je vais vous le dire en forme de
question : Qu'est-ce que vous faites dans le cas d'un acte de procédure
qui implique une urgence? Comment il fait, le propriétaire d'un dépanneur, qui,
vite, vite, vite... il faudrait qu'il trouve un traducteur puis qu'il traduit?
Pourquoi le délai de quelques jours pour la version en français pourrait être
si préjudiciable?
M. Jolin-Barrette : Mais
parce que... Bien, pour plusieurs raisons. Prenons votre exemple. Dans un
premier temps, je suis mal à l'aise avec la prémisse parce qu'on dit : Un
propriétaire de dépanneur qui ne parlerait pas français ou qui ne serait pas à
l'aise avec le français parce que c'est une personne immigrante. Premier enjeu,
il faut travailler là-dessus, parce que toutes les personnes immigrantes qu'on
accueille au Québec, on doit <faire...
M. Jolin-Barrette :
...dans
un premier temps, je suis mal à l'aise avec la prémisse parce qu'on dit :
Un propriétaire de dépanneur qui ne parlerait pas français ou qui ne serait pas
à l'aise avec le français parce que c'est une personne immigrante. Premier
enjeu, il faut travailler là-dessus, parce que toutes les personnes immigrantes
qu'on accueille au Québec, on doit >faire un effort pour vraiment s'assurer
qu'elles puissent se franciser. Puis Francisation Québec, on le voir dans le
projet de loi, il est là, justement, pour faire en sorte que des situations
comme lesquelles vous décrivez, que quelqu'un qui est ici, qui est un
commerçant depuis plusieurs années, qui est issu de l'immigration, ne parle pas
français ou ne communique pas en français... ça m'apparaît un enjeu de société
de dire : Bien, comment ça se fait qu'on n'a pas réussi à intégrer les personnes
qui ont choisi de venir au Québec en français? Premier enjeu. On présume que la
personne ne parle pas français, alors qu'elle mène une vie active, elle
contribue au Québec, elle a développé son entreprise, elle a acheté un
dépanneur, ou elle l'a parti, on est fiers de ça, mais il faut l'accompagner en
français. Ça fait que, premier élément, ça fait partie du projet de loi, on va
accompagner les personnes qui choisissent de venir au Québec en français pour
pouvoir les intégrer dans toutes les régions du Québec en français.
Deuxième élément. Vous dites : C'est
une personne morale, puis là, vite, vite, vite, il faut qu'elle prenne une
injonction, donc ça prend une traduction. Premièrement, c'est tout aussi urgent
pour le citoyen québécois qui reçoit la procédure dans une langue autre que la
langue officielle puis la langue commune. Pourquoi est-ce que le citoyen
québécois qui se fait poursuivre par une entreprise, hein, par une personne
morale, n'aurait pas droit à une procédure dans la langue officielle du Québec?
Deuxième élément.
Troisième élément. La personne morale,
pour agir devant les tribunaux, pour ester en justice, elle doit être
représentée par un membre du Barreau, dans tous les cas, à l'exemption des
petites créances, s'il y a moins de x employés et si l'autre partie accepte,
mais, en tout cas, il y a des règles particulières là-dessus. Mais le principe
général, c'est ça. Tous les membres du Barreau se doivent d'avoir une maîtrise
adéquate de la langue française pour exercer leur profession. Et donc ça
signifie que, si jamais il y a une procédure en urgence, l'avocat membre du
Barreau pourra la rédiger en français aussi. Alors, voyez-vous, moi,
là, je mets ça dans la balance, O.K.? On a des compagnies, là, ici, au Québec,
là, des grosses entreprises, O.K., qui poursuivent parfois en matière de
crédit, qui poursuivent des citoyens ou qui interviennent dans différents
litiges. Puis là ces entreprises, qu'elles soient grosses ou petites, mais
prenons le cas d'une grosse entreprise qui envoie des procédures judiciaires en
anglais, puis là vous avez le citoyen québécois qui, lui, est au Québec, qui ne
peut pas recevoir une procédure dans sa langue et qui, lui-même, là, dans son
droit, là, ne comprend pas la procédure au Québec, qui n'est pas en français, moi,
je m'explique mal pourquoi est-ce qu'on ferait en sorte de ne pas venir <encadrer...
M. Jolin-Barrette :
...qui,
lui, est au Québec, qui ne peut pas recevoir une procédure dans sa langue et
qui, lui-même, là, dans son droit, là, ne comprend pas la procédure au Québec,
qui n'est pas en français, moi, je m'explique mal pourquoi est-ce qu'on ferait
en sorte de ne pas venir >encadrer, pour les personnes morales qui
viennent au Québec, qui sont représentées par avocat, de fournir une version française
de leurs procédures judiciaires.
Mme David : Comprenons-nous
bien. Deux choses. On n'est pas contre le fait que la personne qui reçoit la
procédure la reçoive dans sa langue à elle, donc en français, on n'est pas
contre ça. Si la personne qui doit la recevoir est francophone, je suis d'accord
qu'il y ait un traducteur, je suis d'accord qu'il y ait une traduction. Ce
n'est pas là l'enjeu.
La personne, par exemple, qui est
d'expression anglaise... Je n'aurais peut-être pas dû prendre l'exemple de quelqu'un
qui est un nouvel arrivant ou dont c'est la langue seconde. Ça peut être la
langue de... parce que la personne est une personne qui fait partie de la
communauté d'expression anglaise et qui donc dépose une procédure, mais il faut
que ça soit en urgence. Alors là, vous dites : Oui, mais ça veut dire que
son avocat est obligé de parler français, donc il va l'écrire en français. Mais
il va falloir forcément qu'il la traduise en anglais pour sa personne morale
qui le paie pour le représenter, il va falloir qu'il y ait une version
anglaise, que l'avocat lui-même traduise. Puis, pour faire tout ça, quand il y
a des délais qui sont vraiment très, très courts, on dit : Pourquoi ça ne
pourrait pas... y avoir une attestation qui permet justement que la procédure
soit rédigée en anglais, puis après ça qu'il y ait un certain temps, le cas
échéant?
• (20 h 10) •
Parce que ça se peut très bien, ça se peut
très bien que le temps le permette, d'avoir la traduction en français. On ne
conteste pas la question de la traduction en français. Mais, dans les cas où il
y a urgence et où ce n'est pas possible de le faire immédiatement, pourquoi il
n'y aurait pas cette ouverture à dire que l'attestation est acceptée à ce
moment-là et, genre, ça s'en vient, là, ça s'en vient? Parce que ça prend un
traducteur agréé, là. Ce n'est pas une traduction sur le coin de la table de ta
voisine qui baragouine le français ou l'anglais puis qui dit : Je vais
aller expliquer ça à ton client, ou je ne sais pas quoi, là. Ça ne marche pas
de même, là. Il faut que ça soit une vraie traduction qui coûte cher.
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, plusieurs choses. La Charte de la langue française, là, elle n'est pas là
pour protéger les francophones, elle est là pour protéger la langue française
au Québec au bénéfice de tous les citoyens québécois. On a fait le choix, en
1977, bien, même avant ça, en 1974, de faire du français la langue officielle
de l'État québécois. En 1977, on est venus élargir les protections associées à
l'utilisation du français, et ce que le projet de loi n° 96
fait, c'est qu'il en fait la langue commune. La langue commune de la nation
québécoise, au Québec, c'est en français, la langue commune, donc à travers les
différentes institutions.
Il y a des droits qui sont garantis, en
vertu de l'article 133, de <pouvoir...
M. Jolin-Barrette :
...associées
à l'utilisation du français, et ce que le projet de loi
n°
96 fait, c'est qu'il en fait la langue commune.
La langue commune de la nation québécoise, au Québec, c'est en français, la
langue commune, donc à travers les différentes institutions.
Il y a des droits qui sont garantis, en
vertu de l'article 133, de >pouvoir, pour les justiciables, agir
devant les tribunaux en anglais et en français.
Cela étant, le cas d'urgence que la
députée de Marguerite-Bourgeoys me souligne, là, supposons, là... il y a trois
types d'injonctions, O.K.? Injonction interlocutoire provisoire, ça, c'est
urgent, urgent, urgent. Le juge, lorsqu'il rend un jugement là-dessus, c'est maximum
10 jours, O.K.? Le débat se fait souvent sur affidavit, sur déclaration
assermentée, le juge est saisi du dossier rapidement. Deuxième type
d'injonction, une injonction interlocutoire, qui est à moyen terme. Troisième
type d'injonction, injonction permanente, c'est à long terme.
Parlons d'injonction interlocutoire
provisoire. L'argument que vous faites est à l'effet de dire : Bien,
écoutez, c'est une situation d'urgence, mais la requête... bien, en fait, maintenant
ça ne s'appelle plus une requête, ça s'appelle une demande, la demande doit
être instruite d'urgence, donc ça presse, donc pas le temps d'aller la faire
traduire. Avec votre amendement, on va envoyer un avis puis on va dire :
Bien oui, la traduction s'en vient. Mais le justiciable, lui, qui reçoit la
procédure de la part d'une personne morale — on ne parle pas de personne
physique, on parle d'une personne morale — il reçoit la procédure,
est francophone ou n'a pas de maîtrise adéquate de la langue anglaise sans être
francophone, puis là, lui, il se retrouve à se présenter devant le tribunal
puis il ne peut même pas savoir, sur sa demande, de quoi il est poursuivi. Ça
m'apparaît raisonnable de demander aux personnes morales, lorsqu'elles
poursuivent un citoyen ou une citoyenne québécoise, d'avoir une copie en
français. Puis je le redis : tous les membres du Barreau doivent avoir une
maîtrise adéquate de la langue française. Alors, c'est possible pour eux de
rédiger leur acte de procédure en français.
Puis l'autre élément, l'autre élément qui
est important, c'est de faire en sorte aussi de rappeler aux entreprises que la
langue officielle et commune du Québec, c'est le français.
Prenons un cas, là. Supposons, là, une
grosse entreprise de juridiction fédérale qui fait affaire avec des bureaux
montréalais puis qui poursuit des citoyens québécois : on ne souhaiterait
pas que cette entreprise-là, si elle décide de poursuivre des citoyens
québécois, elle fasse ses actes de procédure en français ou, à tout le moins,
qu'elle daigne envoyer une traduction en français, lorsque vous recevez une
procédure judiciaire au Québec de la part d'une personne morale? Ça m'apparaît
raisonnable, d'autant plus que, vous savez, tu sais, recevoir une procédure
judiciaire, pour la majorité des citoyens, ça peut être stressant, hein? Ça
peut être préoccupant. Ça peut être agréable d'aller à la cour, dans certaines
circonstances, quand c'est pour des homologations, supposons, ou pour une
adoption, tout ça, mais, bien souvent, aller devant le tribunal, ça amène un
certain lot de stress ou d'inconfort pour les <gens...
M. Jolin-Barrette :
...ça
peut être stressant, hein? Ça peut être préoccupant. Ça peut être
agréable d'aller à la cour, dans certaines circonstances, quand c'est pour des
homologations, supposons, ou pour une adoption, tout ça, mais, bien souvent, aller
devant le tribunal, ça amène un certain lot de stress ou d'inconfort pour les
>gens.
Alors, moi, il m'apparaît requis que,
lorsqu'une personne morale décide d'entamer des procédures judiciaires, bien,
qu'en général... puis il faut le dire, les procédures, elles sont publiques, hein?
À partir du moment où elles sont déposées au greffe de la cour, elles sont
publiques. Donc, si ça signifie quelque chose que la langue de la justice,
c'est le français, comme on l'a inscrit dans la loi, il m'apparaît raisonnable
de dire que les personnes morales devront, à tout le moins, joindre leurs
procédures en français avec une traduction immédiatement pour que le citoyen
puisse savoir de quoi il en est, que le public puisse savoir de quoi il en est
aussi, que les journalistes puissent savoir de quoi il en est aussi.
Alors, je comprends l'argument sur
l'urgence, mais il se plaide des deux côtés, parce qu'il ne faudrait pas que
ça... de l'autre côté, on se retrouve dans une situation sur un cas
d'injonction où le citoyen qui la reçoit puis qu'elle est juste en anglais :
Bien, pourquoi lui serait différent? On lui dit : Aïe! ton avis va s'en
venir, là, d'ici trois semaines, ça va être traduit? Il n'y a pas de délai dans
votre amendement.
La Présidente (Mme Thériault) :
Mme la députée.
Mme David : Alors, le ministre
m'offre toutes sortes de portes où... qu'on pourrait peut-être discuter, mais,
moi aussi, j'ai beaucoup, donc... j'ai trois questions par rapport à ça.
Le premier, une personne morale anglophone
envoie une injonction interlocutoire provisoire à un anglophone. Ça se peut, ça.
Ça se peut qu'il rédige en anglais mais pour quelqu'un qui parle anglais. Donc,
il n'y a pas une urgence bien, bien forte de l'avoir en français, d'une part,
pour ce qui est de... On est en injonction interlocutoire provisoire, urgence,
urgence. Donc, d'un anglais à un autre anglais, il faut que ça passe par la
traduction en français.
La traduction, vous dites : Ce n'est
pas grave, tous les avocats sont obligés d'être bilingues, puis là il va
falloir qu'ils maintiennent leur bilinguisme jusqu'à la... pendant leur
carrière, etc. Je veux bien, mais, à ce que je sache, un juriste, ni vous ni
les autres sont des traducteurs agréés. Alors, qui va être agréé? L'avocat va
être un traducteur agréé? Parce que vous dites que c'est l'avocat qui va
traduire, finalement, si c'est urgent, là, parce qu'il est supposé savoir
parler français. Ce n'est pas un traducteur. En tout cas, vous me répondrez à
cet aspect-là parce que je ne le comprends pas, ce bout-là.
M. Jolin-Barrette : Pour
répondre à la question de la députée de Marguerite-Bourgeoys, l'avocat peut
rédiger sa procédure en français.
Mme David : Mais oui, mais là
il nuit à son client.
M. Jolin-Barrette : Pourquoi?
Mme David : Son client ne
pourra pas lire la procédure puisqu'il ne parle pas le français.
M. Jolin-Barrette : Bien là,
vous présumez que le client ne parle pas le français. Comme dans le cadre d'une
personne...
Mme David : Bien, c'est ça,
l'objet de tout ça, là.
M. Jolin-Barrette : ...une
personne morale, vous dites que la personne morale, elle, ne s'exprime pas en
français au Québec.
Mme David : Bien, écoutez, l'article 133
parle de deux langues.
M. Jolin-Barrette : Bien non!
Mme David : Devant les cours
de justice, les procédures doivent être dans la langue... une des deux langues
officielles au Québec. C'est clair.
M. Jolin-Barrette : Tout à
fait. Et on respecte, en tous <points, 133...
M. Jolin-Barrette :
...une
personne morale, vous dites que la personne morale, elle, ne s'exprime
pas en français au Québec.
Mme David : Bien, écoutez,
l'article 133 parle de deux langues.
M. Jolin-Barrette :
Bien non!
Mme David : Devant les
cours de justice, les procédures doivent être dans la langue... une des deux
langues officielles au Québec. C'est clair.
M. Jolin-Barrette :
Tout à fait. Et on respecte, en tous >points, 133.
Mme David : Donc, ça se peut
que quelqu'un dépose en anglais. Ça se peut, ça. Vous êtes d'accord?
M. Jolin-Barrette : Ah! bien,
je suis d'accord.
Mme David : Mais pourquoi il
dépose en anglais?
M. Jolin-Barrette : Puis il
peut le faire. Mais il peut le faire. Avec l'article que l'on fait, c'est... il
peut le faire. Puis la personne morale...
Mme David : Il est supposé
comprendre le français, que ça ne se peut pas qu'il dépose en anglais ou qu'il
ne puisse pas lire une procédure en français.
M. Jolin-Barrette : Il est
loisible à la personne morale, hein? Parce qu'on parle d'une entreprise
incorporée, bien souvent, il y a différentes formes.
Mme David : ...
M. Jolin-Barrette : Bien,
petites ou grandes, mais c'est un choix de s'incorporer ou non, hein? C'est un
choix. Puis ça vient avec des avantages aussi, une personnalité juridique
distincte. Hein, on se le dit, Mme la Présidente. Une personne physique...
Mme David : Là, je sens que
vous voulez divertir, là.
M. Jolin-Barrette : Non, pas
du tout.
Mme David : Mais allez,
continuez, vous êtes bien parti.
M. Jolin-Barrette : Ça va
avec mon explication, hein? Une personne morale, c'est une fiction juridique.
Une personne morale, hein, on vient créer de toutes pièces une compagnie, on
appelle ça une compagnie. Avant, c'était la loi sur... Maintenant, je pense que
c'est la Loi sur les compagnies du Québec, la loi sur les sociétés...
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : Oui, mais
ça a changé depuis.
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : Sociétés
par actions? La nouvelle loi? O.K. C'est ça. Avant, c'était la Loi sur les
compagnies, partie III, partie I, puis tout ça. Dans mon temps, c'était la
Loi sur les compagnies, mais maintenant c'est rendu la Loi sur les sociétés par
actions.
Une voix : ...
• (20 h 20) •
M. Jolin-Barrette : Dans mon temps.
Et il y a toutes sortes de personnes physiques qui décident de se créer une
personnalité juridique distincte.
On a eu une discussion intéressante avec le
député de La Pinière, il y a deux semaines, là-dessus, sur l'incorporation
des avocats ou des membres d'une corporation professionnelle médicale. Donc,
c'est un choix qui est fait, c'est un choix qui est fait de s'incorporer. Nous,
ce qu'on dit, c'est : Lorsque vous faites le choix de vous incorporer,
d'être en affaires, de bénéficier des avantages associés à l'incorporation, notamment,
lorsque vous allez présenter une procédure, une demande, une requête, vous
devrez, dans vos actes de procédure, si vous faites le choix de le faire en
anglais, joindre une traduction certifiée en français. Pourquoi? Parce que la langue
officielle du Québec, c'est le français, parce que la langue de la législation
et de la justice, c'est le français, et ça doit se répercuter. Et ça, le fait
d'exiger une traduction, ça n'empêche aucunement de plaider, d'interagir devant
les tribunaux dans la langue de leur choix, que ça soit en français ou que ce
soit en anglais. Mais par contre on vient dire : C'est primordial d'avoir,
pour les personnes morales, une copie en français.
Mme David : Mais je repose
quand même ma <question. Quand on dit : «Puisque...
M. Jolin-Barrette :
...n'empêche
aucunement de plaider, d'interagir devant les tribunaux dans la langue
de leur choix, que ça soit en français ou que ce soit en anglais. Mais par
contre on vient dire : C'est primordial d'avoir, pour les personnes
morales, une copie en français.
Mme David : Mais je repose
quand même ma >question. Quand on dit : «Puisque l'article 133
de la Loi constitutionnelle de 1867 permet à toute personne d'utiliser
indifféremment le français ou l'anglais dans toute pièce de procédure devant
les tribunaux du Québec, l'article 9, tel que déposé, risque d'être
déclaré inconstitutionnel», et ça, là, vous... Je ne comprends pas que vous
trouviez que tous vos... tous ces articles-là liés à l'article 5, là, que
ça soit le 7.1, 8, 9, 10, 11, 12, ça... il n'y a aucun risque. Il me semble, si
c'était si simple que ça, on l'aurait pensé avant, non? Que des profs, des
doyens de droit, du monde du Barreau, des... Je suis très... Je ne sais pas si
je dois être étonnée, étonnée ou... de votre calme devant des gens qui s'y
connaissent à ce point-là, puis de dire : Non, j'ai raison, eux, ont tous
tort. C'est...
Des fois, je pense que je suis jalouse,
là. J'aimerais ça, avoir une telle certitude sur la vie, la mort, sur la... qu'est-ce
qu'on fait sur cette terre, sur les lois constitutionnelles. Vous avez l'air...
Je suis presque jalouse, là, de dire : Ça n'a pas de bon sens d'être aussi
certain que, non, ça ne sera jamais déclaré inconstitutionnel, non, il ne peut
pas y avoir un Anglais qui poursuit un autre Anglais, mais que tout ça, c'est...
Il n'y a rien de grave, on dirait. Tout ce qu'on vous apporte, ça coule comme
ça, comme... Je suis vraiment... Je ne sais pas si je dois être impressionnée
ou découragée, mais, quand je lis des choses comme ça, je me dis : Quand
même, là, un doyen de Faculté de droit, c'est des gens qui vous ont enseigné,
des gens qui ont fait des...
M. Jolin-Barrette : Pas lui.
Mme David : Ce n'est pas
grave. L'autre vous avait enseigné, mais l'autre, il...
M. Jolin-Barrette : Non, il
ne m'a pas enseigné non plus.
Mme David : Non, il était
directeur de mémoire de maîtrise.
M. Jolin-Barrette : C'est ça.
Je ne sais pas s'il va vouloir rester avec moi, par contre.
Mme David : Bon, en tout cas,
on va y revenir, on va y revenir, parce qu'il a dit beaucoup de choses qu'avec
lequel, là, vous allez dire... vous ne serez pas d'accord. Vous nous avez même
avertis. Mais ce qui me frappe, c'est... il me semble que ça a tellement de bon
sens que, dans certains cas, il puisse y avoir un délai nécessaire. Par contre,
il y a une urgence juridique mais un délai... si vous voulez qu'on le mette, le
délai, on va le mettre, là, mais il me semble que ça permet quand même de rendre
la justice un peu plus accessible, un peu plus respectueuse de l'arrêt Blaikie,
non?
M. Jolin-Barrette :
Deux choses. Je souhaite rassurer la députée de Marguerite-Bourgeoys, je
n'ai que deux certitudes dans ma vie : le fait qu'il va y avoir la mort
et le fait que je vais payer des impôts. C'est les deux certitudes que
j'ai. Les <autres, je ne les ai pas. Je suis...
M. Jolin-Barrette :
...deux
choses. Je souhaite rassurer la députée de Marguerite-Bourgeoys, je n'ai
que deux certitudes dans ma vie : le fait qu'il va y avoir la mort et
le fait que je vais payer des impôts. C'est les deux certitudes que j'ai.
Les >autres, je ne les ai pas. Je suis vulnérable devant l'Éternel,
comme on dit.
Pour ce qui est, Mme la Présidente, de
133, en tous points on respecte ça, mais on se retrouve dans des situations,
actuellement, là, où on a des entreprises, au Québec, qui décident d'utiliser
exclusivement la langue anglaise pour leurs actes de procédure. Alors, il
m'apparaît tout à fait normal de faire en sorte que les personnes morales qui
s'incorporent, hein, c'est une fiction juridique, de requérir de leur part que,
lorsqu'elles décident d'utiliser le système de justice, qu'elles puissent
fournir une traduction certifiée au bénéfice de l'ensemble de la société
québécoise. Les documents sont publics aussi. Vous prenez un acte de procédure,
c'est un document qui est public. Tout le monde peut y avoir accès. La langue
officielle du Québec, c'est le français, la langue de la justice, c'est le français
également.
Donc, l'entreprise, la personne morale,
pourra décider, du début de son processus, à partir de la demande introductive
d'instance jusqu'au jugement, de fonctionner en anglais, de faire toutes ses
représentations en anglais si elle le souhaite. C'est ce que prévoit
l'article 133. Mais ce qu'on dit, par contre, c'est que, dans ses actes de
procédure, elle devra fournir une traduction certifiée en français. Donc, il
lui revient de choisir. Donc, elle veut faire l'ensemble de ses procédures en
anglais, elle pourra continuer à le faire, il n'y a pas de problème. Mais par
contre rappelez-vous qu'au Québec la langue française, c'est la langue
officielle, et il m'apparaît normal que les citoyens québécois qui reçoivent
une poursuite puissent l'avoir en français, dans leur langue.
La Présidente (Mme Thériault) :
Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, j'ai le député de La Pinière aussi
qui voudrait intervenir. Trois minutes, un petit peu plus que trois minutes.
Mme David : Alors, je vais
poser la question empathiquement, à l'envers. Est-ce que vous pouvez voir des
cas, dans votre article, des exemples où ça pourrait être embêtant pour une
personne morale, puis oublions les grosses compagnies qui ont toutes leurs
bureaux d'avocats, et tout ça, un cas d'une toute petite compagnie qui a une
urgence, qui doit déposer? Est-ce que vous pouvez imaginer les cas qui, moi, me
préoccupent? Est-ce que ça peut exister ou il n'y a aucun cas de figure, pour
vous, qui est problématique avec cet article-là?
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Toutes
les personnes morales qui sont incorporées au Québec doivent être représentées
par un membre du Barreau devant les tribunaux. Donc, si jamais il y avait une
situation d'urgence quelconque qui empêche d'avoir une traduction <certifiée...
M. Jolin-Barrette :
...morales qui sont incorporées au Québec doivent être représentées par un
membre du Barreau devant les tribunaux. Donc, si jamais il y avait une
situation d'urgence quelconque qui empêche d'avoir une traduction >certifiée,
il revient à l'avocat de faire les choix qui s'imposent devant lui. Il y a une
chose qui est sûre, il va toujours pouvoir faire ses représentations en anglais
devant les tribunaux. La personne...
Mme David : Bien, il ne pourra
pas les faire s'il ne peut pas déposer son injonction. Il va toujours bien... Les
choses sont dans l'ordre, là. Il faut qu'il dépose son acte de procédure. S'il
n'est pas certifié, je comprends, avec... si on vote pour cet article-là, il ne
pourra pas déposer quelque acte de procédure que ce soit s'il n'a pas, broché
après, la traduction certifiée. Puis ça, ça couvre tous les cas de figure pour
vous, il n'y a aucun problème.
M. Jolin-Barrette : Il peut
déposer... Un avocat qui représente une personne morale peut déposer un acte de
procédure à tout moment. S'il décide de le rédiger en anglais, il devra y
joindre une traduction certifiée faite par un traducteur agréé. C'est la
différence que nous faisons, que nous apportons à la loi, conformément...
contrairement à ce qui se fait actuellement.
Actuellement, vous avez des personnes
morales qui fonctionnent exclusivement en français, qui poursuivent les
citoyens, citoyennes québécoises exclusivement en anglais, puis le fardeau
revient aux citoyens québécois de comprendre la poursuite. Ce sont des
documents judiciaires dans un État dont la langue officielle est le français,
et ce n'est pas normal que des personnes morales poursuivent en n'utilisant que
la langue anglaise.
Et même, je vous dirais aussi, il y a un
signal plus important que ça qu'on doit envoyer aussi, parce que tout le monde
est d'accord — et je présume que tout le monde est d'accord — sur
le fait que la langue officielle du français... du Québec, c'est le français,
que la langue commune, c'est le français, que la langue du travail, ça doit
être le français — vous avez des propositions en ce sens-là dans
votre document de 27 propositions — que la langue des affaires
devrait être le français — on a eu des exemples patents, récemment,
hein, à la Chambre de commerce Montréal métropolitain qui nous démontrent qu'on
a encore du travail à faire — que la langue d'intégration des
personnes immigrantes, ça doit être le français, que le marché du travail doit
se passer en français.
Alors, quel est le message qu'on envoie
quand on dit, relativement aux procédures judiciaires : Écoutez, il n'y a
pas d'enjeu, fonctionnez dans le milieu judiciaire exclusivement en anglais
lorsque vous êtes une personne morale?
Les multinationales, là, qui viennent au
Québec, là, puis qui poursuivent pour bris de contrat...
Mme David : Excusez-moi de
vous interrompre, M. le ministre, mais je n'ai jamais dit ça. Là, vous me
faites vraiment aller plus loin que ma pensée, là.
M. Jolin-Barrette : Non, non,
mais moi, je vous explique, je vous explique le...
• (20 h 30) •
Mme David : Je vous ai dit
qu'on est <d'accord. On est juste contre la...
>
20 h 30 (version révisée)
<15359
M.
Jolin-Barrette :
...Les multinationales, là, qui viennent au
Québec, là, puis qui poursuivent pour bris de contrat...
Mme David : Excusez-moi de
vous interrompre, M. le ministre, mais je n'ai jamais dit ça. Là, vous me
faites vraiment aller plus loin que ma pensée, là.
M. Jolin-Barrette :
Non, non, mais moi, je vous explique, je vous explique le...
Mme David : Je vous ai dit
qu'on est >d'accord. On est juste contre la simultanéité. C'est juste
ça, là, ce n'est pas... Je sais qu'il y a tout un discours à tenir sur la
langue française, là, mais ce n'est pas ça. C'est juste de dire :
Donnez-leur une petite chance, à ceux qui ne peuvent pas nécessairement le
faire immédiatement.
M. Jolin-Barrette : Une
personne morale, là, ça n'a pas de langue, une personne morale. Une personne
morale, la langue qui lui est attribuée, c'est celle que l'État veut bien lui
donner. Ce n'est pas une personne physique, une personne morale.
Mme David : Oui, mais souvent
ce n'est pas loin de la personne physique. Quand la personne morale incorporée,
ça a deux, trois employés, là, ce n'est pas loin de la personne physique, ça.
M. Jolin-Barrette : C'est un
choix. L'incorporation, ça demeure un choix. Moi, ce que je dis, c'est que l'article 133
est respecté, et c'est toujours permis de faire les représentations devant les
tribunaux. On respecte l'article 133.
Cependant, il m'apparaît, dans notre
société, qu'il est fondamental d'envoyer un signal très clair à l'effet que les
Québécois et les Québécoises ont le droit de recevoir, à tout le moins, à tout
le moins, une procédure dans leur langue, en français, au moment où une
entreprise, une compagnie, une personne morale décide d'entreprendre des
recours judiciaires devant les tribunaux québécois, que ça soit à la Cour du
Québec, à la Cour supérieure, à la Cour d'appel.
Il me semble que, partout à travers le
Québec, quand une personne morale, une compagnie poursuit un citoyen québécois,
bien, le citoyen devrait pouvoir recevoir une procédure en français ou, au
moins, une traduction en français. Puis vous... Mme la Présidente, la députée
de Marguerite-Bourgeoys me plaide l'urgence. Bien, ça va des deux côtés.
Mme David : Je vais juste
faire un dernier constat, si j'ai quelques secondes, avant de passer la parole.
Le constat... l'image que le ministre donne, c'est qu'il y a les bons puis les
méchants, il y a les... La personne morale, par définition, a l'air d'être la
plus pas fine, puis la personne poursuivie a l'air d'être la plus fine, et ça
ressemble à ça. C'est que la personne morale, elle fait de l'argent, elle
devrait être capable de parler, et d'écrire en français, puis d'avoir tout de
suite ça, puis que la pauvre victime qui reçoit ça dans une langue qu'elle ne
connaît pas... Mais, des fois, la vérité est un peu différente. C'est que c'est
peut-être la petite personne morale qui n'a pas beaucoup d'employés, qui est
vraiment victime de citoyens qui font des choses pour lesquelles elle est
obligée, par exemple, je reviens à mon exemple, de prendre une injonction. Ça
se peut, ça.
M. Jolin-Barrette : Le
véhicule corporatif, parce qu'on parle de ça, on parle d'un véhicule corporatif...
Nous, ce qu'on dit, c'est que, si vous utilisez un véhicule corporatif, <lorsque...
Mme David : ...elle
est
obligée, par exemple, je reviens à mon exemple, de prendre une injonction. Ça
se peut, ça.
M. Jolin-Barrette :
Le véhicule corporatif, parce qu'on parle de ça, on parle d'un véhicule
corporatif... Nous, ce qu'on dit, c'est que, si vous utilisez un véhicule
corporatif, >lorsque vous entreprenez une procédure judiciaire, vous
devez y joindre une traduction en français. Si vous faites le choix et si vous
mandatez votre procureur de le faire en anglais, ça prend une traduction en
français.
Mme David : ...passer la
parole...
La Présidente (Mme Thériault) :
Pardon? Oui?
Mme David : ...à mon collègue.
Je suis prête à passer la parole...
La Présidente (Mme Thériault) :
Là, j'ai... j'avais le député de La Pinière qui voulait parler, aussi, qui
avait déjà signifié son intérêt. Après ça, on ira au député D'Arcy-McGee. M. le
député de La Pinière.
M. Barrette : Mme la
Présidente, je vais juste prendre la balle au bond, de ma collègue et non du
ministre, là. C'est vrai que ça a l'air de ça : la personne morale est
l'agresseur et la personne autre est l'agressé. Je comprends que le ministre
n'a pas utilisé ces mots-là, mais tous les exemples que le ministre prend, ce
sont des exemples de David et de Goliath, histoire dans laquelle David perd.
M. Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, retournons ça de bord, là, prenons deux multinationales étrangères
qui ont des places d'affaires au Québec, qui décident de se poursuivre l'une et
l'autre, O.K.? On est au Québec. Est-ce que le député de La Pinière serait
d'accord pour qu'entre deux personnes morales, là, il y ait une version française,
pour que le public puisse y avoir accès? Si ça signifie quelque chose que la
langue française, c'est la langue officielle de l'État puis que c'est la langue
de la justice et... il faut que ça puisse se traduire.
Et ce que nous faisons est en tout respect
de l'article 133. Il n'est pas question de bons, de méchants, de David, de
Goliath, de gros, de petits, de plus de moyens, de pas plus de moyens. Ici, on
parle des institutions de l'État québécois, on parle des tribunaux, on parle de
l'accès à la justice et on vient de faire en sorte de permettre qu'il y ait une
version française qui soit accessible. Et on vise les personnes morales, donc
un véhicule corporatif distinct des personnes physiques.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le député de La Pinière, est-ce que ça va?
M. Barrette : Bien, je n'ai
pas fini, là.
La Présidente (Mme Thériault) :
Vous n'avez pas fini? Allez-y.
M. Barrette : Je ne m'en
allais pas là du tout. Honnêtement, là, ça a peu d'intérêt.
M. Jolin-Barrette : Ça a beaucoup
d'intérêt.
M. Barrette : Je dis
simplement, Mme la Présidente, simplement que tous les exemples qui sont pris
par le ministre sont des exemples de : gros, petit. Il y en a un, là, qui
est attaqué par une grosse machine qui est une personne morale. Si le ministre
considère que les exemples qu'il prend ne laissent pas cette impression-là,
libre à lui, c'est correct. Mais n'importe qui qui écoute cette séance-ci,
c'est de ça que ça a l'air.
L'enjeu, pour moi, n'est pas là. L'enjeu
est encore 133. Bon, le ministre nous a dit... puis, ça, j'étais <content
de l'entendre que son projet de loi, à cet égard-là...
M. Barrette : ...c'est correct.
Mais
n'importe qui qui écoute cette séance-ci, c'est de ça que ça a
l'air.
L'enjeu, pour moi, n'est pas là.
L'enjeu est encore 133. Bon, le ministre nous a dit, puis, ça, j'étais >content
de l'entendre que son projet de loi, à cet égard-là, respecte 133. Toute la
procédure judiciaire, de A à Z, peut se faire dans la langue du choix de la
personne morale. J'ai bien compris, Mme la Présidente? M. le ministre?
M. Jolin-Barrette : 133
permet au procureur, aux parties d'utiliser la langue de leur choix devant les
tribunaux.
M. Barrette : Parfait.
Mais là j'ai une question avant d'aller plus loin, Mme la Présidente. Là, ici,
là, puis là c'est une question d'ignorance du droit à mon égard... de ma part,
plutôt, pas à mon égard, alors, est-ce que la traduction concerne toute
documentation, là, la preuve, et ainsi de suite? Est-ce que ça comprend tout ça
ou c'est juste, par exemple, la requête d'instance... introductive d'instance?
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Non,
ça contient uniquement les pièces de procédure qui n'incluent pas la preuve.
M. Barrette : O.K. Alors,
est-ce que le ministre peut nous indiquer si, dans certaines circonstances,
cette documentation-là peut être volumineuse? C'est-tu possible, ça?
M. Jolin-Barrette :
Qu'est-ce que vous voulez dire? Les pièces de procédure, les requêtes?
M. Barrette : Bien, ce
qui est visé comme étant obligatoirement traduit en français, est-ce que ça
peut être volumineux?
M. Jolin-Barrette : Ça
dépend de chacun des dossiers. Vous pouvez avoir une demande introductive...
M. Barrette : Bien, je le
sais, mais la question que je pose, Mme la Présidente, c'est : Ça se peut-tu?
M. Jolin-Barrette : Si
je peux compléter ma réponse, donc, la demande introductive d'instance peut
avoir trois pages comme elle peut en avoir 100, la demande, tout dépendant de
la nature du litige. Il arrive souvent, quand il y a des litiges importants,
que la requête... la demande introductive d'instance soit, disons, détaillée.
M. Barrette : Est-ce
qu'il est possible, Mme la Présidente, qu'au-delà qu'il y ait des documents...
Est-ce que la loi, puis là c'est une question purement liée au projet de loi,
là... est-ce que ça va viser potentiel d'autres documentations qui, elles
aussi, pourraient être volumineuses?
M. Jolin-Barrette : Les
actes de procédure sont visés.
M. Barrette : Donc, il y
a d'autres documents potentiels?
M. Jolin-Barrette : Bien,
les autres documents, on peut parler de la défense écrite, on peut parler d'une
requête en cours d'instance, on peut parler des différents actes de procédure,
tous les actes de procédure.
M. Barrette : Très bien.
Ça me va, Mme la Présidente. Je remercie le ministre, c'est vraiment mieux que
cet après-midi, on a des réponses. Je veux remercier le ministre de me donner
des réponses. Je le remercie, je le remercie...
M. Jolin-Barrette : J'ai
donné des réponses tout l'après-midi, Mme la Présidente.
M. Barrette : Alors, Mme
la Présidente, est-ce que le ministre va être inconfortable si je lui dis que
ce dont il parle est, en soi, un fardeau d'ampleur variable, mais ça devient un
fardeau par rapport à l'état actuel du droit?
M. Jolin-Barrette : Moi,
Mme la Présidente, le fait de <rendre disponibles...
M. Barrette : ...
je
lui dis que ce dont il parle est, en soi, un fardeau d'ampleur variable mais ça
devient un fardeau par rapport à l'état actuel du droit?
M. Jolin-Barrette :
Moi, Mme la Présidente, le fait de >rendre disponibles des documents
judiciaires dans la langue officielle du Québec, dans la langue commune du
Québec, ça ne représentera jamais un fardeau. Le fait que la population, le
fait que les citoyens, le fait que les journalistes, le fait que les membres du
Barreau puissent accéder à une copie en français... Pour moi, le français, ce
n'est pas un problème, ce n'est pas un fardeau. Je ne comprends pas les propos
du député de La Pinière, qui assimile la traduction dans la langue de
l'État, dans la langue officielle de l'État, comme étant un fardeau. Est-ce que
ce sont ses propos? Est-ce qu'il considère que le fait de traduire en français
des procédures judiciaires, ça représente un fardeau, pour que les gens, dans
un souci d'accessibilité et d'accès à la justice...
M. Barrette : Mme la
Présidente, la question que je pose est tellement simple, là. Je ne lui demande
pas de qualifier le fardeau, bon ou mauvais, je ne demande pas au ministre de
dire si ça a une valeur morale ou non en fonction de la situation du Québec. Ce
que je lui demande, c'est : Objectivement, est-il adéquat de nommer ça
comme étant un fardeau, je vais le qualifier, financier? Je ne le qualifie pas...
je ne l'approuve pas ni ne le désapprouve, je veux simplement que le ministre
établisse, oui ou non, si ça, c'est un fardeau financier additionnel par
rapport à l'état actuel du droit. C'est tout. Je n'ai pas besoin d'une
dissertation politique sur le français, je veux simplement que le ministre
établisse si, dans son esprit, ça, c'est un fardeau.
• (20 h 40) •
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : La
réponse, Mme la Présidente, c'est non. Non, ça ne représente pas un fardeau.
Moi, ma question, Mme la Présidente, c'est : Est-ce que, pour le député de
La Pinière, le fait d'exiger une traduction certifiée par un traducteur
agréé, ça représente un fardeau? Est-ce qu'il croit qu'au Québec les personnes
morales ne devraient pas signifier leurs procédures judiciaires, si elles le
font... si elles décident de le faire en anglais, ne devraient-elles pas le
faire également et joindre une copie certifiée en français, dans la langue de
l'État?
Parce qu'il faut savoir, Mme la Présidente,
les tribunaux, hein, le fait de pouvoir agir devant ces institutions-là
québécoises, qui font partie de l'État québécois, le tout dans la séparation
des pouvoirs, Mme la Présidente, elles appartiennent aux Québécois. La justice,
sauf exception, Mme la Présidente, est rendue publiquement. C'est un des
principes mêmes du système de justice. Et le fait de permettre à plus de
Québécois de comprendre ce qui se passe dans les <salles de cour...
M. Jolin-Barrette :
...elles
appartiennent aux Québécois. La justice, sauf exception, Mme la
Présidente, est rendue publiquement. C'est un des principes mêmes du système de
justice. Et le fait de permettre à plus de Québécois de comprendre ce qui se
passe dans les >salles de cour, dans les litiges, ça ne m'apparaît pas
un fardeau, que ça soit fait, et que ça soit connu, et que ça soit publicisé
dans la langue officielle de l'État, en français.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le député de La Pinière. Après ça, j'irai à l'autre député.
M. Barrette : C'est sûr qu'on
est dans une situation, Mme la Présidente, insoluble, là. Ça, on est dans la situation
classique : Il croit au bon Dieu, l'autre n'y croit pas, personne ne va
avoir raison à la fin. Si le ministre décide d'essayer de me convaincre que les
lumières sont éteintes actuellement, là, bien, il peut, il peut décider que les
lumières sont éteintes, mais elles sont ouvertes.
M. Jolin-Barrette : Bien, Mme
la Présidente, je ne veux pas contredire le député de La Pinière, mais je
constate, dans la salle, plusieurs lumières qui sont éteintes, donc tous les
chandeliers sont éteints. Alors, on décide bien de voir ce qu'on veut voir, du
côté du Parti libéral. Mais la question qui se pose, c'est la même : Est-ce
que le fait d'exiger la connaissance du français pour exercer une profession,
ça représente un fardeau au Québec? Est-ce que le fait, pour être membre d'un
ordre professionnel, d'être membre du Collège des médecins ou d'être membre du Barreau
du Québec, c'est un fardeau? Parce que ça pourrait être plus simple...
M. Barrette : Mme la
Présidente...
M. Jolin-Barrette : ...puis
on pourrait dire, Mme la Présidente, même plus simple : On ne devrait pas
exiger que les gens parlent français pour devenir membre d'un ordre professionnel.
Ça revient à cette question-là aussi, là.
M. Barrette : Bien non.
M. Jolin-Barrette : Bien oui,
bien oui, bien oui.
M. Barrette : Mme la
Présidente, j'espère que le ministre va m'inviter chez lui un jour, le soir,
juste pour voir si, quand il va entrer dans la maison, il va ouvrir toutes les
lumières de la maison. Il va en ouvrir une, puis, si je lui demande : Les
lumières sont-tu allumées, il va dire : Oui. Mais il n'aura pas ouvert
toutes les lumières de la maison ainsi que la porte du frigidaire. Ce n'est pas
bien, bien compliqué, là, cette affaire-là.
Ceci dit, Mme la Présidente, l'enjeu, pour
moi, ici, là, est d'établir si, dans l'absolu juridique, il y a un fardeau. Pourquoi?
Le ministre ne répond que sur la base d'un cadre de référence. Une corporation,
une... une personne morale...
M. Jolin-Barrette : Une personne
morale.
M. Barrette : ...je m'excuse, une
personne morale va écrire... poursuit une... va écrire une requête introductive
d'instance, un acte...
M. Jolin-Barrette : Une
demande, maintenant.
M. Barrette : ...demande à un citoyen
francophone. Puis là-dessus, Mme la Présidente, on est bien d'accord que
le citoyen doit comprendre ce qui se passe, on est d'accord. Mais les lois sont
aussi faites pour prévoir les cas de figure où ça pourrait poser un problème.
Et, moi, ce n'est que là où je vais. Le ministre me répond avec son cadre de
référence, sa vision, ses exemples, la personne morale goliathienne et le citoyen
francophone davidien, et lui, il faut le protéger. Pas de problème avec ça. Maintenant,
est-ce que c'est possible, Mme la Présidente, que, dans notre cadre législatif,
ce que le ministre refuse de nommer comme un fardeau puisse nuire à un citoyen
de par le <fardeau...
M. Barrette : ...lui, il
faut le protéger. Pas de
problème avec ça.
Maintenant,
est-ce
que c'est possible,
Mme la Présidente, que, dans notre cadre législatif,
ce que le
ministre refuse de nommer comme un fardeau puisse nuire à un
citoyen
de par le >fardeau?
Un camionneur, là, qui est propriétaire de
sa compagnie d'un camion, qui a le droit d'être une personne morale, peut, devant
une situation qui exige d'aller à la cour... pourrait ne pas pouvoir y aller à
cause du fardeau. Alors là, ça s'appelle un frein à l'accès à la justice en
fonction de 133. Alors, d'un côté, le ministre prend ses cas de figure, qui
sont toujours les mêmes, purs, bleu CAQ... je m'excuse, je vais le retirer, purs
et absolument inattaquables, mais refuse de regarder les autres. Il y a
potentiellement des situations qui sont celles que je viens de décrire.
Le camionneur, là, le chauffeur de taxi,
là, qui est propriétaire et qui a, lui, une compagnie, pourrait-il, à cause de
ce fardeau-là, choisir de ne pas aller à la cour? Bien, la réponse, c'est oui.
Qu'est-ce qu'on fait avec ça? Alors, c'est le sens de l'amendement qui est
proposé. Puis il y a d'autres amendements qui vont être proposés de notre part.
133, qui est censé, dans la Constitution, dans notre société de droit, faire en
sorte que c'est la primauté du droit et qu'on doit avoir accès, ne devons-nous
pas, nous, comme législateurs, prévoir ces cas de figure là?
Là, le ministre, il va me répondre encore
une fois : Oui, mais la grosse corporation? Bien oui, bien oui, bien oui.
Bien, on le sait, là, mais maintenant, là...
Une voix : ...
M. Barrette : Hein? Oui,
je le sais, il va le dire comme ça. Alors, la situation, Mme la Présidente, là,
tel que c'est écrit, et le refus du ministre d'envisager un amendement ou de
débattre d'un amendement sur la base sempiternelle, et je pèse mon mot, de
David contre Goliath, à un moment donné, là, on n'est pas censés de s'occuper
du petit, ne serait-ce... même s'il est anglophone? Là, je le sais, je viens de
dire quelque chose de grave. Mais c'est ça, la question, Mme la Présidente. Je
laisse la parole au ministre, pour qu'il me parle qu'on est encore dans David...
Goliath contre Goliath, David... Goliath contre David, puis ça va être quoi,
après, là?
La Présidente (Mme Thériault) :
Je vais laisser la parole au ministre. Et après j'ai le député de D'Arcy-McGee
qui m'a demandé la parole depuis un certain bout. Donc, M. le ministre, la
parole est à vous.
M. Jolin-Barrette :
Bien, vous comprendrez, Mme la Présidente, que je ne partage aucunement, Mme la
Présidente, les propos qui ont été tenus par le député de La Pinière. Puis
surtout qu'il m'attribue certaines choses qui ne sont pas du tout avérées puis
qu'il ne fait pas de très bonnes imitations de moi, de la façon dont je réagis.
Mais, Mme la Présidente, je vais passer par-dessus ça.
Ce qui est particulier, Mme la Présidente,
dans <l'argumentation du député de La Pinière...
M. Jolin-Barrette :
...certaines
choses qui ne sont pas du tout avérées puis qu'il ne fait pas de très
bonnes imitations de moi, de la façon dont je réagis. Mais, Mme la Présidente,
je vais passer par-dessus ça.
Ce qui est particulier, Mme la
Présidente, dans >l'argumentation du député de La Pinière, c'est
qu'il est en contradiction avec celui de la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Puis là, si j'étais le coach, l'autre bord, je dirais : Là, il faut se
parler, parce qu'on est en train de scorer dans notre but.
Mme la Présidente, la députée de Marguerite-Bourgeoys
nous a dit tout à l'heure : On est d'accord avec l'article 9, tel
qu'il est rédigé, mais, par contre, nous, on a un amendement — nous,
le Parti libéral — pour faire en sorte d'amener un certain délai pour
une question d'urgence. Mais on est d'accord, là, sur le fond de l'article 9.
Je l'ai entendue tout à l'heure, la députée de Marguerite-Bourgeoys, nous dire,
me confirmer qu'elle était d'accord avec cela, sur l'article 9. Mais elle
dit : Écoutez, nous, c'est une situation d'urgence, un cas d'injonction.
Là, après ça, on se tourne vers le député
de La Pinière, qui n'a pas du tout le même argumentaire, Mme la
Présidente, et qui nous dit, dans le fond : Ce n'est pas une question
d'urgence, là, c'est une question d'accès à la justice, alors que la députée de
Marguerite-Bourgeoys disait que c'était... ça avait bien de l'allure de faire
en sorte que les procédures judiciaires soient rendues disponibles en français.
Voyez-vous, Mme la Présidente, les intérêts opposés? Ils ne plaident pas du
tout la même chose, puis j'ai de la difficulté à réconcilier la position du
Parti libéral sur ce point-là. Alors, très concrètement, il ne s'agit pas de
gros, de petit, il s'agit de personnes morales qui décident d'intervenir devant
les tribunaux.
• (20 h 50) •
Et l'autre point qui est important — ça
me fait penser, Mme la Présidente, j'avais perdu le fil, mais je l'ai retrouvé — le
camionneur de M. le député de La Pinière, dans tous les cas, la personne
morale doit être représentée par un membre du Barreau devant les tribunaux,
dans tous les cas. Il n'y a personne qui ne pourra pas plaider, faire valoir
ses droits dans les deux langues qui sont prévues à l'article 133, que ce
soit en français ou en anglais. Par contre, ce que l'on dit : Quand vous
avez un véhicule corporatif qui est une entreprise, si vous faites le choix
d'utiliser l'anglais dans le cadre de ces procédures judiciaires là, vous
devrez fournir une copie certifiée par un traducteur agréé, en anglais. La
langue officielle de l'État, c'est le français. La langue officielle de l'État,
c'est le français, et ça permet aux justiciables, aux journalistes, aux
avocats, aux procureurs de pouvoir avoir une version dans la langue officielle
de l'État.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. M. le ministre.
M. Barrette : Mme la
Présidente, on va clarifier les choses...
La Présidente (Mme Thériault) :
Je vais vous demander de le faire rapidement parce que j'avais déjà avisé...
M. Barrette : Très bien.
La Présidente (Mme Thériault) :
...que je reconnaîtrais le député de D'Arcy-McGee.
M. Barrette : Il est habile,
mais on voit clair dans le jeu du ministre. Ma collègue de Marguerite-Bourgeoys
a pris un cas de figure qui n'est pas en opposition avec mon cas de figure,
parce que ce sont deux cas de figure totalement distincts, totalement
distincts. Et j'ai même dit, essentiellement, la même chose, que le justiciable
francophone <reçoive...
M. Barrette : ...la
collègue
de
Marguerite-Bourgeoys a pris un cas de figure qui n'est pas en
opposition avec mon cas de figure, parce que ce sont deux cas de figure
totalement
distincts,
totalement distincts. Et j'ai
même dit
essentiellement
la même chose, que le justiciable francophone >reçoive... C'est
ce que ma collègue a dit.
L'enjeu ici, là, c'est une question de
fardeau, dans le cas de figure que je prends. Et il n'y a aucune contradiction
possible entre nos positions, aucune. Mais ce sont deux cas de figure
différents. Dans un cas, le cas de figure d'une injonction, il y a un enjeu de
temps. Dans mon cas, il y a un enjeu de coût, et aussi de temps, parce que... Le
ministre, Mme la Présidente, il est avocat, là, j'imagine qu'il a déjà dans sa
vie travaillé dans des bureaux d'avocats, ils chargent des frais, selon une
modalité qui leur appartient, et ils les exigent. Et il est possible qu'un
pauvre justiciable arrive devant une situation où il décide de ne pas aller de
l'avant parce qu'on lui demande de l'argent trop vite, parce que, parce que,
parce que... surtout s'il y a bien, bien, bien des documents à traduire. En
général, chez les avocats, on aime être payé, en général.
Alors, je dis simplement qu'il y a des cas
de figure potentiels dans des cas de... des problèmes potentiels dans des cas
de figure différents, tout simplement. Je comprends que le ministre ne veuille
pas s'y adresser directement et qu'il veuille, par la bande, passer à côté,
mais c'est réel. C'est tout, Mme la Présidente. Et je n'ai pas de question,
alors pas nécessaire d'avoir une dissertation.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. Donc, je vais passer maintenant la parole au député de D'Arcy-McGee. M.
le député de D'Arcy-McGee.
M. Birnbaum : Merci, Mme la
Présidente. Moi aussi, j'ai trouvé les interventions de mes collègues assez
complémentaires. Et moi, je n'avais pas compris qu'un fardeau de cette commission
était pour le gouvernement de conseiller l'opposition officielle sur sa
performance ni de nous donner des leçons, qui se sont arrivées assez souvent
jusqu'à date, sur notre loyauté, notre détermination de voir au rayonnement et
la protection de la langue française, ce qui devient un petit peu, moi, je trouve,
assez achalant.
Je me permets d'aller dans le même sens
complémentaire de mes deux collègues, si le ministre veut bien, et de parler
des personnes morales...
Une voix : ...
M. Birnbaum : Je crois que
c'est à moi, Mme la Présidente? Oui, merci. Et, comme mes deux collègues ont
dit, et de façon complémentaire, je veux aussi explorer «personne morale». Je
comprends qu'on peut faire l'abstraction, ce n'est pas une personne physique,
je le sais, mais on est en train, de ce côté-ci, de nous assurer l'accès à la
justice équitable, telle qu'est la tradition très bien ancrée et dont on est
fiers, au Québec, pour ne pas parler de 133. Alors, je veux juste avoir
quelques conseils du ministre sur son exemple d'une personne <morale...
M. Birnbaum : ...
équitable,
telle qu'est la tradition très bien ancrée et dont on est fiers, au Québec,
pour ne pas parler de 133. Alors, je veux juste avoir quelques conseils du
ministre sur son exemple d'une personne >morale : pêcheur, à
La Tabatière, qui est Québécois d'expression anglaise, qui s'est incorporé
avec son fils puis son oncle et qui se trouve à poursuivre un autre pêcheur
québécois de langue anglaise, d'origine écossaise de cinquième génération, québécois,
à La Tabatière ou Tabatière, comme lui l'épellerait. Premièrement,
j'aimerais comprendre si le ministre va admettre qu'il y a un fardeau, si je
peux répéter le mot sans ajouter une valeur qui n'a rien à faire avec la
compréhension du bien-fondé de respecter les voeux et les droits des Québécois
francophones d'avoir des documents dans la langue commune et officielle.
Dans l'exemple que je donne, deux petites
questions pour commencer. Est-ce que je peux comprendre, contrairement à la
Charte de la langue française actuelle, qui ne voit aucunement un tel besoin,
l'intérêt public d'inciter des délais nécessaires? Je ne sais pas si vous aurez
visité La Tabatière, il n'y a pas tant d'avocats que ça ni de traducteurs,
traductrices certifiés, agréés. Alors, est-ce que le ministre peut me répondre
à deux questions? Dans un premier temps, est-ce qu'il peut expliquer l'intérêt
public, qui n'était aucunement reconnu dans... qui n'est aucunement reconnu
dans la Charte de la langue française actuelle, de demander sans, sans, sans
exception et tout de suite, une traduction ou si, dans la Charte de la langue
française actuelle, aucun délai de prescrit tout de suite? Est-ce que le
ministre peut m'élaborer sur l'intérêt public d'imposer le fardeau? Parce qu'il
risque d'y avoir délai pour brocher le document en français à Tabatière, où il
n'y a peut-être pas de traductrice ou traducteur de disponible.
Alors, dans un premier temps, de clarifier
pour nous l'intérêt public d'exiger ce document et, dans un deuxième temps,
justement, de nous dire, oui ou non, y a-t-il un fardeau qui risque de
s'imposer dans le cas que je donne, qui risque, en quelque part, de miner ou de
compromettre l'accès à la justice? Parce que mes deux pêcheurs risquent d'avoir
à attendre quelques semaines, qui sait, peut-être plus long que ça, pour régler
leur cas dans leur intérêt comme, oui, personne morale derrière laquelle il y a
des personnes physiques.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette :
Alors, puisque c'est mon temps de <parole, le député de D'Arcy-McGee...
M. Birnbaum : ...
peut-être
plus long que ça, pour régler leur cas dans leur intérêt comme, oui,
personne morale derrière laquelle il y a des personnes physiques.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette :
Alors, puisque c'est mon temps de >parole, le député de D'Arcy-McGee me
dit que je leur prête des intentions sur le fond et le contenu. Bien, moi, je
vais lui dire une chose, le projet de loi n° 96, là, ultimement, à la fin
de l'étude, au vote, là, on va voir comment le Parti libéral va voter. S'il
vote pour, s'il votre contre...
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : Non, non,
c'est dessus. Alors, moi, j'espère être agréablement surpris par le Parti
libéral puis qu'il vote pour le projet de loi. Mais j'ai des immenses réserves.
Mais je pourrais être surpris. Alors, on va voir si vous allez faire la même
erreur qu'en 1977 puis si vous allez voter contre le projet de loi n° 96.
Parce que ce que vous faites, ça a déjà été fait dans le passé.
Puis moi, Mme la Présidente, je vais vous
le dire, la Charte de la langue française, le projet de loi n° 96, est là
pour renforcer le statut du français au Québec, en tout respect des obligations
constitutionnelles dans lesquelles le Québec est assujetti, notamment
l'article 133. Mais, lorsqu'on arrive avec des propositions pour faire en
sorte de permettre aux citoyens québécois, de permettre à la nation québécoise
d'avoir accès à des procédures judiciaires dans la langue officielle de l'État,
pour moi, c'est clair que ça ne représente pas un fardeau. D'autant plus, et je
l'ai expliqué tout à l'heure à la question de la députée de
Marguerite-Bourgeoys, l'ensemble des membres du Barreau doivent avoir une
maîtrise adéquate de la langue française.
Les personnes morales qui décident de
s'incorporer font un choix. De A à Z, donc du début à la fin du processus
judiciaire, ils vont pouvoir fonctionner en français ou en anglais, comme c'est
prévu à 133. Ce que l'article 9 prévoit, c'est que, lorsqu'une personne
morale, par contre, qui est dans le décor... celle-ci devra, si elle fait le
choix de produire ses pièces de procédure en anglais, elle devra joindre,
notamment pour le public, une copie en français.
• (21 heures) •
Alors, il y a plusieurs cas d'exemples qui
peuvent être soulevés. Tous les cas de figure que vous soulevez peuvent être soulevés,
de l'autre côté. Il y a une multitude de cas de figure. Mais par contre, au
Québec, et on doit se le dire, la place du français, elle est fondamentale et
surtout, notamment, dans les institutions étatiques, en tout respect du droit
des citoyens et des citoyennes du Québec d'utiliser le français ou l'anglais
devant les tribunaux. Et ça, ça sera toujours garanti, et ça l'est, et le
projet de loi est conforme à l'article 133.
Ça ne signifie pas qu'on ne doit pas
mettre en place des outils pour valoriser notre langue et surtout dans un souci
<d'accès à la...
>
21 h (version révisée)
<15359
M.
Jolin-Barrette :
...tout respect du droit des citoyens et des
citoyennes du Québec d'utiliser le français ou l'anglais devant les tribunaux.
Et ça, ça sera toujours garanti, et ça l'est, et le projet de loi est conforme
à l'article 133.
Ça ne signifie pas qu'on ne doit pas
mettre en place des outils pour valoriser notre langue et surtout dans un souci
>d'accès à la justice. Et ce n'est pas une question d'être David contre
Goliath, un petit, un gros, un gros qui a de l'argent, un petit qui n'a pas
d'argent, ce n'est pas des questions comme ça, il faut le voir plus largement,
en tant qu'État au bénéfice des citoyens, le fait de pouvoir accéder à une procédure
judiciaire dans la langue officielle du Québec.
Est-ce que vous êtes contre ça, le fait
que les procédures judiciaires des personnes morales au Québec soient
disponibles en français? C'est ça, la question fondamentale. Le reste, c'est
beaucoup de la diversion. Puis je comprends que vous faites votre travail, mais,
fondamentalement, c'est ça, Mme la Présidente, ce qu'on m'accuse de faire, ça,
quand je réponds, alors que les cas d'exemples qui me sont cités, c'est ça.
Alors, sur le fond, est-ce que le député de D'Arcy-McGee est d'accord? Est-ce
qu'il est d'accord que les procédures judiciaires des personnes morales soient
disponibles en français?
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le député de D'Arcy-McGee.
M. Birnbaum : Ouf! oui, ça va
vous surprendre que j'aie d'autres questions, Mme la Présidente. Dans un
premier temps, j'imagine qu'il n'y a pas de question...
La Présidente (Mme Thériault) :
C'est sûr, vous avez d'autres questions, et je veux simplement indiquer que le député
de Sainte-Rose aussi m'a demandé la parole. Mais c'est à vous maintenant, il
n'y a pas de problème.
M. Birnbaum : Oui, mais moi...
le député de Sainte-Rose... j'imagine que j'ai l'opportunité d'entamer un petit
dialogue, c'est normal...
La Présidente (Mme Thériault) :
Vous avez le temps, sans problème. Je fais simplement aviser, comme je l'ai
fait tout à l'heure au député de La Pinière, que vous étiez le suivant en
ligne. Maintenant, c'est à vous. Par la suite...
M. Birnbaum : Je comprends.
Vous allez comprendre dans mon irritation. Après chaque réponse...
La Présidente (Mme Thériault) :
Oui, mais ne parlez pas par-dessus moi. Vous ne parlez pas par-dessus moi, je
suis la présidente. Je ne vous permets de vous interpeller entre vous. Je ne
vous permettrai pas non plus de m'interpeller comme ça. Depuis le début, c'est
ce que je fais, j'indique les droits de parole dans l'ordre que les gens se
signifient. Je n'ai pas dit que je vous interrompais, je vais vous laisser
parler. J'indiquais simplement, à titre informatif, comme je l'ai fait avant
que vous preniez la parole quand c'était le député de La Pinière, que vous
vouliez parler. Je fais exactement la même chose avec le député de Sainte-Rose.
Donc, vous avez la parole, votre micro va s'ouvrir.
M. Birnbaum : Mes excuses, Mme
la Présidente. Et je me permets d'exprimer ma colère, à répétition, d'être
assujetti au discours magistral avec l'abstraction totale à la question de
posée. De ce côté de la table, nous n'avons aucune leçon à apprendre. La députée
de Marguerite-Bourgeoys a déposé 27 propositions tellement constructives
et inclusives et sérieuses en tout ce qui a trait au rayonnement, protection et
bonification de la Charte de la langue française. Alors, s'il préambule sans
avoir des réponses directes, risque de nous rendre impatients un petit peu, et
je m'en excuse.
Can I get back to my
fishermen from Tabatière, please, and get an answer to, yes, the additional
burden, <«fardeau sur eux»...
M. Birnbaum : ...
bonification de la
Charte de la langue française. Alors, s'il préambule
sans avoir des réponses directes, risque de nous rendre impatients un petit
peu, et je m'en excuse.
Can I get back
to my fishermen from Tabatière, please, and get an answer to, yes, the
additional burden, >«fardeau sur eux»?
Comme a expliqué
clairement le député de La Pinière, fardeau, ce n'est pas un mot lourd de
valeur, de contexte, je ne fais aucunement référence à l'idée que, des fois, à
juste titre, pour défendre, et de façon fière, notre langue, oui, ça va être un
fardeau ici et là. On va être conséquents, c'est normal. Oui, ça va impliquer
des frais. Oui, pour faire la francisation, d'ailleurs, comme il faut, c'est un
fardeau et c'est de l'argent qui doit être dépensé là-dessus, aux dépens
d'autres priorités et à juste titre. Alors, j'insiste, comme mon collègue a
réutilisé le mot «fardeau».
Je soumets que mes pêcheurs, mes deux
instances morales de La Tabatière sont Québécois de langue anglaise. Est-ce que,
dans ma première question, le ministre peut me clarifier sur l'intérêt public
d'insister sur un document traduit en français et simultanément, dans le cas
que je décris, dans un premier temps. Ça, c'est une question. Mais la deuxième
question, est-ce qu'on peut convenir... Bon, je vais laisser à côté le mot qui
a l'air de déranger. Est-ce qu'on peut convenir que ces deux pêcheurs... et peut-être,
quand une saison est très courte, où leur famille en dépend, de revenus, qui va
se réaliser seulement si ce cas est réglé dans un temps réaliste, est-ce qu'on
peut imaginer que, dans mon exemple, il y aurait des délais, et peut-être
importants dans le cas que je décris, si on restait avec l'article comme tel, un
problème qui ne se présenterait pas si on respectait et on acceptait
l'amendement que nous proposons? Alors, est-ce que je peux avoir des réponses à
ces deux questions-là?
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Alors,
Mme la Présidente, la traduction en français ne constitue pas un fardeau, Mme
la Présidente, hein?
Vous savez, au Québec, les deux langues
peuvent être utilisées devant les tribunaux, et ça demeure ainsi. Cependant,
pour les personnes morales, elles devront, si elles décident de rendre leurs
procédures en anglais, elles devront également y joindre une traduction
certifiée par un traducteur agréé. Le député de D'Arcy-McGee peut donner des
exemples hypothétiques de multitudes de situations. Chaque cas est un cas
d'espèce, mais on pourrait présenter tous les cas <d'espèce aussi...
M. Jolin-Barrette :
...
rendre leurs procédures en anglais, elles devront également y joindre une
traduction certifiée par un traducteur agréé. Le député de
D'Arcy-McGee
peut donner des exemples hypothétiques de multitudes de situations. Chaque cas
est un cas d'espèce, mais on pourrait présenter tous les cas >d'espèce
aussi à l'inverse de toutes les personnes au Québec qui reçoivent une procédure
judiciaire sans traduction de langue française, des personnes qui sont dans une
situation de vulnérabilité.
Alors, l'objectif est de faire en sorte de
permettre à toutes les personnes, qu'elles soient physiques ou morales, au Québec,
de pouvoir continuer d'utiliser la langue qu'elles souhaitent devant les
tribunaux au Québec. Cependant, dans le cas des personnes morales, si elles
décident d'utiliser la langue anglaise dans le cadre de leur procédure
judiciaire... dans leurs actes de procédure, je devrais dire, elles devront
rendre ces actes de procédure disponibles pour l'ensemble de la société, des
justiciables, des citoyens, des acteurs du système de justice, pour les
journalistes. Le français, c'est la langue commune du Québec et ça doit se
traduire dans tous les paramètres, dans toutes les sphères de la société
incluant dans le système de justice, et c'est ce qu'on fait.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le député D'Arcy-McGee.
M. Birnbaum : Il me semble
que, bon, comme je dis, la Charte de la langue française actuelle, telle que
rédigée par un gouvernement qui tenait mordicus à la protection de notre
langue, que le Dr Camille Laurin ne voyait aucune contrainte en ce qui a
trait à mes deux pêcheurs à La Tabatière. Alors, je renvoie la balle. Le
ministre, par contre, il voit un problème dans l'exemple hypothétique. Voyons
donc, c'est un exemple qui va se présenter à plusieurs reprises, évidemment, il
y en aurait d'autres aussi. Mais est-ce que je peux comprendre que le ministre
défend la nécessité, dans le cas que je présente, d'imposer un délai... pas de
délai, une traduction simultanée, tout de suite? Et, si oui, est-ce qu'il peut
choisir le mot qu'il veut, mais est-ce qu'il peut convenir avec nous que, dans
la situation que je décris, la justice, elle risque de prendre un petit peu
plus de temps aux causes de contraintes potentielles dans l'article tel que
rédigé par le ministre?
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Non, je
ne suis pas d'accord avec ça, Mme la Présidente, pour tous les motifs que j'ai
énoncés précédemment. L'autre point, là, je reviens à la question du fardeau.
Écoutez, le français, ce n'est pas un fardeau. Au Québec, en tout cas, j'espère
que les députés d'opposition du Parti libéral ne me disent pas que le français
est un <fardeau...
M. Jolin-Barrette :
...
d'accord avec ça, Mme la Présidente, pour tous les motifs que j'ai énoncés
précédemment. L'autre point, là, je reviens à la question du fardeau. Écoutez,
le français, ce n'est pas un fardeau. Au Québec, en tout cas, j'espère que les
députés d'opposition du Parti libéral ne me disent pas que le français est un
>fardeau. Parce que, Mme la Présidente, dans le reste du Canada, là,
semblerait-il que le français, ça représente un fardeau. Pour le gouverneur
général du Canada, le français, c'est un fardeau. Durant la pandémie, on a
suspendu l'étiquetage en français parce que c'était un fardeau, le français.
L'autre point, Mme la Présidente, en
Ontario...
M. Barrette : ...bien voyons!
M. Jolin-Barrette : ...en
Ontario, ça se passe en anglais, le français, c'est un fardeau devant les
tribunaux aussi. C'est peut-être parfois permis d'utiliser la langue française.
Je ne pense pas que, comme société, on doit se dire que le français, c'est un
fardeau au Québec. Si c'est ce que le Parti libéral me dit que le fardeau est
le français, c'est problématique, Mme la Présidente.
Écoutez, on part d'une situation, là, dans
la loi, là, où est-ce que ce n'est pas encadré. O.K.? Les personnes morales
peuvent produire, du début à la fin, leur procédure judiciaire, leurs actes de
procédures en anglais sans jamais ne mettre une once de français. Donc, des
entreprises, notamment multinationales qui sont au Québec, ou des entreprises
québécoises, des entreprises canadiennes, à Montréal, on fonctionne 100 %
en anglais sur des poursuites judiciaires. Elles peuvent le faire, Mme la Présidente,
mais il m'apparaît, pour l'intérêt de la justice, l'intérêt du public aussi,
qu'à tout le moins il y ait une traduction des actes de procédure en français.
Air Canada, est-ce qu'ils fonctionnent en français? On a eu un bon exemple, là,
avec M. Rousseau, là, à quel point il méprisait les Québécois. Est-ce
qu'on serait d'accord pour qu'Air Canada, s'ils décident de prendre... Je vois
le député de D'Arcy-McGee qui soupire...
• (21 h 10) •
M. Birnbaum : Bien, avec
raison.
M. Jolin-Barrette : Écoutez,
Mme la Présidente, je pense qu'il y a beaucoup de Québécois qui ont soupiré
quand ils ont entendu Michael Rousseau dire : Ça n'avait pas de bon sens.
Bien, trouvez-vous, M. le député de D'Arcy-McGee, qu'une entreprise comme Air
Canada, Mme la Présidente, par votre entremise...
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre...
M. Jolin-Barrette :
...trouvez-vous, Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Thériault) :
...oui, je vais vous demander de passer par moi, M. le ministre, plutôt que
d'interpeller le député directement, s'il vous plaît. La fatigue commence à se
faire sentir, je crois.
M. Jolin-Barrette :
Trouvez-vous, Mme la Présidente, qu'une entreprise comme Air Canada devrait, si
elle est en litige avec un citoyen québécois au Québec, ne devrait pas juste le
poursuivre en anglais, mais devrait au moins lui envoyer une copie de la
procédure en français? Ça serait-tu normal, au Québec, ça? Ça serait-tu normal?
Pensez-vous, Mme la Présidente, que, dans les bureaux d'avocats à Montréal, là,
ils sont capables de rédiger des procédures en français pour les personnes <morales?
Ça se peut-tu, ça? Ça se peut-tu ou le...
M. Jolin-Barrette :
...
une copie de la procédure en français? Ça serait-tu normal, au Québec, ça? Ça
serait-tu normal? Pensez-vous, Mme la Présidente, que, dans les bureaux
d'avocats à Montréal, là, ils sont capables de rédiger des procédures en
français pour les personnes >morales? Ça se peut-tu, ça? Ça se peut-tu
ou le Parti libéral veut le statu quo? Est-ce que le Parti libéral veut
défendre le français, véritablement, ou non? Moi, je pense que la proposition
qu'on a, là, c'est tout à fait raisonnable. On dit : Écoutez, on respecte
l'article 133, mais on fait en sorte que les personnes morales devront
joindre une copie certifiée en français, au Québec. Ça m'apparaît raisonnable.
Mais il faut croire que c'est peut-être trop pour le Parti libéral.
M. Barrette : Mme la
Présidente, ça fait plusieurs fois que je veux faire un point de règlement.
La Présidente (Mme Thériault) :
Vous avez une question de règlement? Allez-y, M. le député.
M. Barrette : 35, ça fait
depuis 7 h 30 ce soir, et certainement avant, mais je n'étais pas la
tout le temps, que le ministre nous prête des intentions, sans arrêt, sans
arrêt et sans arrêt. Vous l'entendez comme moi.
Alors, le Parti libéral est ici comme
opposition officielle pour débattre et d'améliorer la loi. C'est pour ça qu'on
est ici. Alors, faire ça et d'insinuer qu'on est là : Le français, le Parti
libéral... pour le Parti libéral, le français... Non, non. On n'est pas là, là.
Il nous prête des intentions sans arrêt, Mme la Présidente. Il est donc sans
arrêt hors sujet. On est sur un article pour lequel, Mme la Présidente, on
souhaite apporter des aménagements pour s'assurer que tous les citoyens du
Québec ne soient... aucun citoyen du Québec ne soit pénalisé. Ça n'ouvre pas la
porte à dire à toutes les deux phrases : Le Parti libéral ne veut pas
protéger le français. Le Parti libéral, ceci, le Parti libéral cela. Je
comprends que le ministre, là, joue bien son rôle de politicien, mais ici, c'est
un rôle de législateur. Il est-tu capable de faire la différence? À date, non.
La Présidente (Mme Thériault) :
Bon. Est-ce que votre question de règlement est terminée?
M. Barrette : Oui, Mme la
Présidente. Alors, j'aimerais que vous statuiez là-dessus, et je vous invite,
Mme la Présidente, avec respect, d'être vigilante.
La Présidente (Mme Thériault) :
Oui. Pour commencer, je vais vous demander à tous d'arrêter de vous
interpeller, et de vous regarder, et de passer par la présidente. Il reste
15 minutes aux travaux.
Sur ce que vous avez fait dans votre
question de règlement, M. le député, il reste 15 minutes à nos travaux. J'espère
bien que notre soirée sera aussi agréable que le début de la commission qu'on a
connue, la fin de soirée.
Deuxième des choses, je vais vous demander
à tous de vous coller sur la règle de la pertinence. Effectivement, dans votre
question de règlement, vous aviez raison, où on était sur l'article et sur l'amendement
de la collègue, qui a été déposé par la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Et, troisièmement, je dirais tout
simplement que vous avez tous un rôle à jouer, que ce soit le ministre, que ce
soit les députés de la partie ministérielle, que ce soit les députés
d'opposition, vous pouvez avoir des points de vue, des manières de voir,
d'interpréter différemment les propos de tous et chacun ici. Moi, je ne suis
pas là pour <savoir...
La Présidente (Mme Thériault) :
... déposé par la députée de
Marguerite-Bourgeoys.
Et, troisièmement, je dirais tout
simplement que vous avez tous un rôle à jouer, que ce soit le ministre, que ce
soit les députés de la partie ministérielle, que ce soit les députés
d'opposition, vous pouvez avoir des points de vue, des manières de voir,
d'interpréter différemment les propos de tous et chacun ici. Moi, je ne suis
pas là pour >savoir qui a raison, qui est correct, qui n'est pas
correct, je suis là pour essayer de faire appliquer le règlement, et qu'on
respecte le règlement, et que tout ça se déroule dans la bonne entente, la
bonne humeur, puis qu'on puisse faire avancer le projet de loi. J'essaie en
même temps de garder les droits de parole de tous mes collègues qui sont alentour
de la table et de les respecter dans la convivialité.
Donc, je vais rappeler aux gens qui
s'occupent des micros de ne pas ouvrir les micros tant que je n'ai pas reconnu
les collègues même s'il y a des collègues qui veulent s'interpeller d'un côté
ou de l'autre. Je vais vous nommer, on ouvrira votre micro. Malheureusement, je
fais partie des gens qui ne sont pas capables d'écouter deux personnes en même
temps, donc j'écoute la personne dont le micro est ouvert.
Donc, nous en étions rendus suite à la
réplique du ministre. Je vais vous laisser, parce qu'il vous reste encore du
temps, M. le député de D'Arcy-McGee, et, par la suite, j'irai au député de
Sainte-Rose.
M. Birnbaum : Merci, Mme la
Présidente. Voilà le talent qui est exprimé à maintes reprises par le ministre
et son gouvernement de construire des épouvantails et de les démanteler après.
Voyons donc! Moi et mes pauvres deux...
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le député de D'Arcy-McGee...
Une voix : ...
La Présidente (Mme Thériault) :
Non, M. le député, s'il vous plaît! Je suis la présidente, je suis capable de
faire respecter le règlement, je vais vous demander le silence. J'arrivais à
demander au député de D'Arcy-McGee d'être prudent dans ses propos. Je viens de
faire une mise au point. Choisissez vos mots avec soin. Vous êtes un gentleman,
vous êtes capable de le faire, vous avez assez d'expérience pour ça. S'il vous
plaît, allez-y.
M. Birnbaum : Est-ce que je
peux comprendre si le ministre fait un parallèle entre un acte déplorable de
Michael Rousseau, que j'ai eu l'honneur de déplorer moi-même, et mes deux
pêcheurs à La Tabatière qui cherchent, et je veux une réponse là-dessus, qui
cherchent, dans mon exemple tout à fait plausible et réel, le soulagement juste
et correct et normal qui serait possible avec l'amendement tel que proposé par
la députée de Marguerite-Bourgeoys.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui, deux
choses, en premier sur la réponse au député de D'Arcy-McGee, par la suite sur l'intervention
du député de La Pinière.
Donc, avec l'amendement de la députée de Marguerite-Bourgeoys,
je comprends que, dans le cas que vous soulevez, bien, il n'y a pas de délai
rattaché à la traduction française. Donc, les justiciables n'auraient pas
davantage accès à la traduction française. On indique, dans le cadre de l'amendement,
que, dans le fond, c'est un acte, dans le fond, la traduction s'en vient, s'en
vient. Là, la députée de Marguerite-Bourgeoys va dire : Ah! bien, si vous
voulez, M. le ministre, on va mettre un délai, trois mois plus tard, deux mois
plus tard. Moi, je ne <pense...
M. Jolin-Barrette :
...
n'auraient pas davantage accès à la traduction
française. On indique,
dans le cadre de
l'amendement, que,
dans le fond, c'est un acte,
dans
le fond, la traduction s'en vient, s'en vient. Là, la
députée de
Marguerite-Bourgeoys
va dire : Ah! bien, si vous voulez,
M. le ministre, on va mettre un
délai, trois mois plus tard, deux mois plus tard. Moi, je ne >pense pas
que ça répond à la volonté de ce qu'on souhaite faire, notamment de rendre les
actes de procédure disponibles à la fois pour les parties au litige, mais à la
fois également pour le public. Une personne morale, lorsqu'elle agit devant les
tribunaux, elle devrait rendre ses actes de procédure disponibles en français.
Autre point, dans l'intervention du député
de La Pinière, jusqu'à maintenant, Mme la Présidente,
c'était — et je fais bien attention — que le français
représentait un fardeau. Mais là, le député de La Pinière nous a dit :
Ça ne représente pas juste un fardeau, ça devient pénalisant, le français. Il a
utilisé le terme «pénalisant». Écoutez, Mme la Présidente, je croyais qu'avec
les 27 propositions que le Parti libéral avait mises en place, il
souhaitait protéger le français. Mais là, on est rendu que le français, ça
devient pénalisant, et je ne peux pas accepter ce genre de termes là, Mme la
Présidente, alors qu'on débat d'un projet de loi qui est important pour faire
en sorte de permettre au français de demeurer la langue commune, de demeurer la
langue officielle et surtout d'améliorer son statut au Québec.
La Présidente (Mme Thériault) :
J'ai le député... Non. J'ai dit que je reconnaîtrais le député de Sainte-Rose.
Gardez en réserve votre intervention, M. le député de La Pinière, il vous
reste du temps, donc il n'y a pas de problème. M. le député de Sainte-Rose.
• (21 h 20) •
M. Skeete : Merci, Mme la
Présidente. Je crois que lors de l'intervention de mon collègue de
D'Arcy-McGee, j'ai compris un peu où on ne voit pas la vie de la même façon. Ça
fait que je me permets de m'introduire pour essayer peut-être d'apporter une
perspective qu'on pourrait peut-être apprendre à s'entendre.
Dans l'exemple des deux pêcheurs,
l'exemple qu'il soulève est certes plausible, même si c'est minime comme
circonstance, compte tenu de... le poids et le nombre de recours que le Québec
va traiter dans une année donnée, là, mais, dans cet exemple-là, je pense,
qu'est-ce qu'on oublie, c'est les autres autour du scénario, comme le juge,
parce que dans l'exemple du collègue, est-ce que le juge doit être
nécessairement anglophone bilingue, ou il peut ou elle peut être unilingue
français? Toute l'équipe qui entoure la cour, les étudiants en droit qui
veulent étudier la jurisprudence qui va en découler, tous ces gens-là, c'est
des gens qui habitent au Québec et ont le droit de recevoir et de voir les
documents disponibles en français, et, je pense, c'est là que la langue commune
prend tout son sens. Et, je pense, dans l'exemple... puis on l'avait vue un
petit peu dans le projet de loi n° 21, cette
focalisation sur l'individu, et pas de voir vraiment le large, le large qui est
le Québec dans son entier et l'importance de la <langue commune. Parce
que, si on fait ce que mes collègues de...
M.
Bérubé
: ...
dans l'exemple... puis on l'avait vue un petit peu dans le projet de loi
n°
21, cette focalisation sur l'individu, et pas de
voir vraiment le large, le large qui est le Québec dans son entier et
l'importance de la >langue commune. Parce que, si on fait ce que mes collègues
de l'opposition veulent faire, bien, ces mêmes pêcheurs incorporés là, bien,
ils pourraient interagir tout le temps avec l'État en anglais parce que ça
serait la chose à faire pour reconnaître...
Puis là, rapidement, on s'éloigne, on
s'éloigne de la langue commune, et je pense qu'il faut être très prudent. Parce
qu'on l'a essayé, ça, on l'a essayé, ça fait... s'il y a un problème aujourd'hui
que le projet de loi n° 96 tente de régler, bien, c'est bien à cause de
ces effritements-là, dans la notion de la langue commune.
Donc, j'inviterais peut-être les collègues
à essayer de voir ça un peu de ce point de vue là, de dire que l'État a
l'obligation d'être exemplaire et que les citoyens du Québec ont le droit de
pouvoir recevoir des services en français, de vivre en français, et même,
j'oserais dire, d'être unilingues français. Alors, c'est une perspective que je
pense qui pourrait nous aider à nourrir un petit peu notre point de vue dans
les échanges. Merci.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. M. le député de Sainte-Rose, j'avais dit au député de La Pinière
que je le reconnaîtrais, j'ai aussi la députée de Marguerite-Bourgeoys qui
voudrait faire une intervention. Donc, on va aller avec la députée de...
M. Barrette : ...Mme la
Présidente?
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le député de La Pinière, il vous reste... bien, nous, on va jusqu'à
9 h 30, il vous reste 9... un peu plus de 9 minutes et la
députée de Marguerite-Bourgeoys, il lui reste 1 min 30 s, à peu
près.
M. Barrette : Je veux bien
être clair, là, Mme la Présidente, là, ce à quoi on assiste... Et je dois
vous dire que les propos les plus surprenants, ce n'est pas le bon mot, là,
mais les autres mots, là, je pourrais... ça serait trop méchant, que j'aurai
entendus dans ce projet de loi là, je viens de les entendre du député de Sainte-Rose.
Et je vous explique, Mme la
Présidente, ce n'est pas compliqué, là. Ce projet de loi là, là, nous, comme
parlementaires, si on veut l'améliorer dans le sens de s'assurer que certains citoyens
du Québec ne soient pas lésés, c'est une attaque frontale au français :
c'est tout le temps ça, tout le temps ça. Et quand j'écoute le député de Sainte-Rose,
là, il aurait pu continuer, en disant : À la fin, nous, ce qu'on veut,
c'est que 100 % du monde au Québec parlent français, point, et que tout se
passe en français.
Ça, il y a des mots pour ça dans
l'histoire, que je ne prononcerai pas. Alors, c'est ça, là, qui se passe ici,
là. Le ministre aurait pu accepter, à différentes étapes de son projet de loi...
il aurait pu choisir de l'écrire en prévoyant certains cas de figure et
certaines conditions qui font que... O.K.? Ce n'est pas une attaque contre le
français de dire que sa mesure peut amener un fardeau qui pourrait mener à une
diminution ou à une altération de l'accès, ce n'est pas un bon mot en français,
une atteinte à l'accès à la justice selon 133. Ce n'est pas une attaque au
français, dire ça. Dire ça, ça veut <juste dire...
M. Barrette : ... peut
amener un fardeau qui pourrait mener à une diminution ou à une altération de
l'accès, ce n'est pas un bon mot en français, une atteinte à l'accès à la justice
selon 133. Ce n'est pas une attaque au français, dire ça. Dire ça, ça veut
>juste dire : On est-tu capable, là, de regarder objectivement s'il
y a possibilité que des citoyens soient lésés et de le prendre en considération
et de faire des ajustements dans la loi? Ça, Mme la Présidente, là, c'est non,
la réponse à ça, et c'est un non extrêmement brutal dans les propos du député
de Sainte-Rose parce que ses propos, c'est : Tout le monde en français,
puis les autres, ce n'est pas grave. Et dans...
Des voix : ...
La Présidente (Mme Thériault) :
Non. O.K.
M. Barrette : Non, c'est
une...
Des voix : ...
La Présidente (Mme Thériault) :
Là... S'il vous plaît! Non. Là, je m'excuse, là, je vous l'ai dit, je ne peux
pas entendre trois personnes qui parlent en même temps. Je vous ai dit qu'il
restait très peu de temps. Je vous ai demandé d'être prudents dans vos propos.
O.K. Vous avez tous...
M. Barrette : ...
La Présidente (Mme Thériault) :
Oui, vous les retirez. Merci beaucoup. Je vais vous permettre de poursuivre en
vous mentionnant que la députée veut prendre la parole après vous aussi.
M. Barrette : On
continuera.
La Présidente (Mme Thériault) :
Allez-y.
M. Barrette : Mais je
termine là-dessus, Mme la Présidente, et toutes les interventions du ministre
sont dans un sens au bout duquel il y a un groupe qui compte et, l'autre
groupe, on ne peut pas s'y adresser. C'est un refus catégorique. On ne peut pas
nommer, on ne peut pas moduler, on ne peut pas ajuster parce que la
philosophie, elle est celle-là. Ça, c'est particulier, Mme la Présidente. Il y
a des mots là-dessus, puis je pense que vous ne les aimerez pas. Les mots, je
ne les utiliserai pas, mais il y a une chose qui est certaine, là, qu'on ne
nous reproche pas de faire l'exercice de voir s'il y a des conséquences et de
tenter d'y pallier. Ce n'est pas, en le faisant, une attaque contre le fait
français oui la nécessité de mieux protéger la langue française. Je trouve
ça... et je vais terminer là-dessus, c'est ma dernière phrase, l'attitude du
ministre à l'égard de nos propos, je la trouve méprisante, et ça, je ne le
retirerai pas.
Des voix : ...
La Présidente (Mme Thériault) :
Je pense que votre... le dernier mot, il n'était pas nécessaire.
M. Barrette : C'est mon
sentiment.
La Présidente (Mme Thériault) :
Le dernier mot, il n'était pas nécessaire, je vais vous demander de le retirer,
s'il vous plaît. Je vais vous demander de le retirer, M. le député de
La Pinière, s'il vous plaît.
M. Barrette : Je le
retire, Mme la Présidente, mais...
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci beaucoup. Ça vous honore. Il n'y a pas de problème, et je vous remercie
infiniment.
Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, je
vous reconnais. Vous aviez demandé la parole. Il n'y avait pas de question. C'était
en réaction à des propos que M. le ministre a tenus. Le député a retiré ses
propos, M. le ministre, après... Le député a retiré ses propos, donc
évidemment, j'imagine que vous ne reviendrez pas là-dessus. Mais ce n'est pas à
vous tout de suite, je fais juste vous dire que, là, c'est la députée de
Marguerite-Bourgeoys qui va prendre la parole. Non, parce qu'il a retiré ses propos
simplement.
Des voix : ...
La Présidente (Mme Thériault) :
Non, vous ne <commencerez pas à vous relancer, là. Ne faites pas comme
quand on est en Chambre, ne faites pas comme quand on est en Chambre. Je ne
suis pas le...
La Présidente (Mme Thériault) :
...
retiré ses propos, donc évidemment, j'imagine que vous ne reviendrez
pas là-dessus. Mais ce n'est pas vous tout de suite, je fais juste vous dire
que, là, c'est la députée de Marguerite-Bourgeoys qui va prendre la parole.
Non, parce qu'il a retiré ses propos simplement. Non, vous ne >commencerez
pas à vous relancer, là. Ne faites pas comme quand on est en Chambre, ne faites
pas comme quand on est en Chambre. Je ne suis pas le président de la Chambre.
Je suis la présidente de la commission. Vous n'êtes pas le leader, vous êtes le
ministre. Il reste peu de temps.
J'avais déjà dit que je reconnaîtrais la
députée de Marguerite-Bourgeoys et possiblement après ça... Étant donné que je
regarde l'heure puis le peu de temps qu'il lui reste, je pense qu'après ça, on
va devoir se reparler demain matin, si je ne m'abuse, M. le ministre. Je vous
entendrai demain matin. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, la parole est à
vous.
Mme David : Alors, disons que
j'avais l'impression d'être en période de questions avec un leader qui se lève
et qui dit : Question de règlement.
Moi, je suis infiniment triste de ce que
je vois ce soir. Et si j'ai accepté la responsabilité d'être porte-parole de la
langue française, c'est parce que je crois en la langue française et c'est parce
que je crois qu'on peut travailler intelligemment sans faire de généralisations
avec un P.D.G. d'Air Canada qui a parlé en anglais dans une chambre de
commerce. J'ai publié une lettre ouverte avec la cheffe. Arrêtez de viser et de
parler indirectement à ce que vous ne pouvez pas faire directement, M. le
ministre.
Alors, je suis...
La Présidente (Mme Thériault) :
Mme la députée, je vais vous demander de vous adresser à moi.
Mme David : Oui. C'est parce
que ça va aller mieux.
La Présidente (Mme Thériault) :
Regardez le pas. Adressez-vous à moi. Moi, je vous écoute.
Mme David : Donc, je suis
infiniment triste de voir que tout, sauf l'objet de mon amendement, est
discuté. Mon amendement, il ne dit pas qu'il ne faut pas qu'il y ait de français.
Voyons donc! Est-ce qu'on sait lire? On dit : «Une traduction en français
certifiée par un traducteur agréé ou une attestation indiquant que la partie a
donné instruction à un traducteur agréé...» Et j'ajouterais, dans un amendement,
«dans un délai raisonnable». C'est exactement ce que le ministre me propose.
Alors, j'espère que demain, on sera à la
hauteur de nos responsabilités, qu'on ne fera pas de petite politique, qu'on ne
fera pas...
La Présidente (Mme Thériault) :
Non.
Mme David : ...toi, tu es
libéral, toi tu es caquiste.
La Présidente (Mme Thériault) :
Non, je m'excuse. Je m'excuse Mme la députée...
Une voix : ...
La Présidente (Mme Thériault) :
Oui, parce que «petite politique» est un terme qui fait partie du lexique
antiparlementaire.
Mme David : Bon, alors on ne
fera pas de la politique et qu'on va pouvoir travailler les articles un par un,
amendement par amendement, sérieusement, sans essayer de faire des grandes
déclarations à l'emporte-pièce qui n'ont plus rien à voir avec l'amendement que
j'ai déposé.
Alors, si c'est le cas, je serai
extrêmement satisfaite du travail qu'on fait. Mais là je trouve que ce n'est
pas très inspirant, disons, et ce n'est pas bien le fun de revenir demain matin
dans ces conditions-là.
La Présidente (Mme Thériault) :
Et il ne vous reste plus de temps de parole.
Et compte tenu de l'heure, j'ajourne les
travaux, et nous les reprendrons demain, après les affaires courantes. Merci.
Bonne fin de soirée, tout le monde.
(Fin de la séance à 21 h 30)