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Version préliminaire

42e législature, 1re session
(27 novembre 2018 au 13 octobre 2021)

Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.

Pour en savoir plus sur le Journal des débats et ses différentes versions

Le mardi 28 septembre 2021 - Vol. 45 N° 96

Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 96, Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français


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Intervenants par tranches d'heure

  • 9 h 30

    • Thériault, Lise
    • Jolin-Barrette, Simon
  • 10 h

    • Jolin-Barrette, Simon
    • Thériault, Lise
    • Lévesque, Mathieu
    • David, Hélène
    • Birnbaum, David
    • Ghazal, Ruba
    • Bérubé, Pascal
  • 10 h 30

    • Bérubé, Pascal
    • Thériault, Lise
    • Jolin-Barrette, Simon
    • Skeete, Christopher
  • 11 h

    • Skeete, Christopher
    • Thériault, Lise
    • David, Hélène
    • Barrette, Gaétan
    • Ghazal, Ruba
    • Bérubé, Pascal
  • 11 h 30

    • Thériault, Lise
    • Jolin-Barrette, Simon
    • Lemieux, Louis
    • David, Hélène
  • 12 h

    • David, Hélène
    • Thériault, Lise
    • Birnbaum, David
    • Ghazal, Ruba
    • Bérubé, Pascal
  • 15 h

    • Thériault, Lise
  • 15 h 30

    • Thériault, Lise
    • Jolin-Barrette, Simon
    • Skeete, Christopher
    • David, Hélène
  • 16 h

    • David, Hélène
    • Thériault, Lise
    • Birnbaum, David
    • Ghazal, Ruba
    • Bérubé, Pascal
    • Jolin-Barrette, Simon
  • 16 h 30

    • Thériault, Lise
    • Jolin-Barrette, Simon
    • Lemieux, Louis
    • Lévesque, Mathieu
    • David, Hélène
    • Birnbaum, David
  • 17 h

    • Thériault, Lise
    • Ghazal, Ruba
    • Bérubé, Pascal
  • 17 h 30

    • Thériault, Lise
    • Jolin-Barrette, Simon
    • Lemieux, Louis
    • David, Hélène
  • 18 h

    • David, Hélène
    • Thériault, Lise
    • Ghazal, Ruba
    • Bérubé, Pascal
    • Jolin-Barrette, Simon
  • 18 h 30

    • Jolin-Barrette, Simon
    • Thériault, Lise
    • David, Hélène
    • Birnbaum, David
    • Lemieux, Louis
    • Ghazal, Ruba
    • Bérubé, Pascal
  • 19 h

    • Lemieux, Louis

 

Journal des débats

9 h 30 (version révisée)

(Neuf heures quarante-six minutes)

La Présidente (Mme Thériault) : À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la culture et de l'éducation ouverte.

La commission est réunie afin de poursuivre les auditions publiques dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi n° 96, Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. Mme IsaBelle (Huntingdon) sera remplacée par M. Lévesque (Chapleau); Mme Rizqy (Saint-Laurent), par M. Barrette (La Pinière); Mme St-Pierre (Acadie), par M. Birnbaum (D'Arcy-McGee); Mme Dorion (Taschereau), par Mme Ghazal (Mercier); et Mme Hivon (Joliette), par M. Bérubé (Matane-Matapédia).

Auditions (suite)

La Présidente (Mme Thériault) : Merci beaucoup. Donc, cet avant-midi, nous entendrons la Chambre des notaires du Québec, suivie par la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal et le Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec.

Donc, sans plus tarder, je souhaite la bienvenue aux représentants de la Chambre des notaires. Je vous rappelle que vous avez 10 minutes pour votre exposé. Par la suite, nous procéderons à la période d'échange, tout d'abord, avec le ministre et, par la suite, avec les députés des oppositions. Donc, Mme Potvin, je vous cède la parole et présentez-nous la personne qui vous accompagne.

Chambre des notaires du Québec (CNQ)

Mme Potvin (Hélène) : Parfait. Alors, merci beaucoup. Bonjour à tous. Alors donc, je vous présente Me Michel Vermette, qui est notaire émérite, et qui a agi comme expert dans ce dossier, et a participé à la rédaction du mémoire, et moi-même, Hélène Potvin, donc je suis notaire et présidente de la Chambre des notaires du Québec.

Alors, Mme la Présidente, M. le ministre, Mmes, MM. les députés, au nom de la Chambre des notaires du Québec, je vous remercie d'avoir invité notre ordre professionnel à participer aux consultations particulières portant sur le projet de loi n° 96. La chambre estime qu'en déposant le projet de loi n° 96 le ministre de la Justice et de la Langue française prend les moyens nécessaires pour freiner le déclin de la langue française au Québec, situation qui a été évoquée plus tôt dans le cadre des présentes consultations particulières. En conséquence, la chambre appuie, de façon générale, cette pièce législative importante pour l'avenir du français au Québec.

Les notaires participent à l'évolution de la société québécoise depuis plus de quatre siècles. La Chambre des notaires a donc toujours défendu le caractère distinct et l'identité nationale du Québec. La langue française constituant la pierre <d'assise...

Mme Potvin (Hélène) : ... cette pièce législative importante pour l'avenir du français au Québec.

Les notaires participent à l'évolution de la société québécoise depuis plus de quatre siècles. La Chambre des notaires a donc toujours défendu le caractère distinct et l'identité nationale du Québec. La langue française constituant la pierre >d'assise de cette identité nationale, il va sans dire que la chambre a souvent pris position pour une plus grande protection et valorisation du français, notamment lors des travaux sur le projet de loi n° 14 en 2013.

Nos recommandations et nos observations porteront principalement sur deux volets : le droit professionnel et le droit des contrats. Ces dernières sont émises, je tiens à le préciser, dans l'objectif d'atteindre un équilibre entre la protection du français et la sauvegarde des droits individuels qui s'exercent à travers notre système de justice, notamment dans la pratique quotidienne des notaires.

Afin d'atteindre ces objectifs de protection et de valorisation du français, le projet de loi n° 96 comporte plusieurs dispositions ayant un impact considérable sur le droit professionnel. Ainsi, la chambre voit d'un bon oeil ces dispositions qui, globalement, visent à améliorer les compétences en français des professionnels en donnant les outils nécessaires aux instances des ordres pour y parvenir. On pense, par exemple, à la possibilité d'imposer des stages et des cours de perfectionnement aux membres n'ayant pas une connaissance suffisante du français pour l'exercice de leurs fonctions.

La nouvelle marge de manoeuvre qu'offre le projet de loi aux ordres professionnels trouve particulièrement écho au sein de la pratique notariale. En effet, en raison de son statut d'officier public et parce qu'il est délégataire d'une parcelle des pouvoirs de l'État, le notaire exerce une charge publique. Dans l'exercice de ses fonctions, il va sans dire qu'une très grande connaissance de la langue officielle du Québec est nécessaire, notamment dans la rédaction d'actes authentiques et afin de bien informer les parties de leurs droits et leurs obligations pour qu'elles puissent donner un consentement éclairé.

• (9 h 50) •

La chambre accueille très positivement la modification de l'article 35 de la charte, qui permettra désormais à notre ordre professionnel de faire la preuve qu'un candidat à l'exercice de la profession ne détient pas les connaissances suffisantes de la langue française pour exercer le notariat. La modification proposée par le projet de loi constitue une avancée importante dans ce domaine, et la Chambre des notaires s'en réjouit.

Par ailleurs, et considérant l'importance du français dans l'exercice de la profession notariale et le fait que les notaires assument une charge publique, la chambre aimerait obtenir la discrétion nécessaire pour établir ses propres critères et modalités de vérification, tout comme c'est déjà le cas pour les organismes de l'administration. De cette façon, l'ordre, en collaboration avec l'Office des professions du Québec, l'Office québécois de la langue française et le commissaire aux admissions, pourrait véritablement s'assurer de la bonne maîtrise de la langue française par ses membres.

La chambre soutient qu'une grande maîtrise du français est indispensable à l'exercice de la profession de notaire. Toutefois, la chambre se questionne si le <fait de ne...

Mme Potvin (Hélène) : ... l'Office québécois de la langue française et le commissaire aux admissions, pourrait véritablement s'assurer de la bonne maîtrise de la langue française par ses membres.

La chambre soutient qu'une grande maîtrise du français est indispensable à l'exercice de la profession de notaire. Toutefois, la chambre se questionne si le >fait de ne pas maintenir une connaissance suffisante de la langue officielle par un professionnel devrait être considéré comme étant un acte dérogatoire à la dignité de la profession.

En effet, bien qu'elle comprenne l'objectif visé par cet article, la chambre croit que le moyen de l'atteindre passe plutôt par des mesures d'accompagnement qui auraient l'effet concret d'améliorer la maîtrise du français par le professionnel plutôt que par des mesures coercitives et punitives qui, selon nous, n'atteindraient pas les résultats escomptés.

Le p.l. n° 96 vient aussi modifier l'article 32 de la charte afin d'obliger les ordres professionnels à utiliser uniquement le français dans leurs communications orales et écrites aux membres. Pour votre information, la chambre remplit déjà cette exigence en communiquant exclusivement en français dans les documents d'information destinés à nos membres. Le législateur a délégué aux ordres professionnels des pouvoirs de limiter l'exercice ou d'imposer des mesures envers leurs membres pour la protection du public. Lorsqu'une instance de l'ordre agit dans ce cadre, la décision rendue doit pouvoir encore être rédigée en anglais, si nécessaire, si le membre est plus à l'aise dans cette langue. En effet, le professionnel doit être en mesure de bien comprendre les motifs de la décision rendue. Il en va ici du respect, de principes de justice naturelle, un des fondements de notre système juridique. Il serait donc important que les modifications projetées à l'article 32 de la charte ne soient pas interprétées comme limitant les principes de justice naturelle.

Enfin, et pour clore nos commentaires sur le droit professionnel, la chambre rappelle le caractère fondamental du secret professionnel du notaire et tient à s'assurer que le p.l. n° 96 ne viendra en aucun temps le compromettre.

La seconde partie de notre mémoire porte sur l'impact qu'auront les dispositions du p.l. n° 96 sur le droit des contrats au Québec. Ainsi, la chambre a analysé le projet de loi sous la loupe des notaires praticiens afin de déterminer de quelle façon il modifiera les pratiques en cours. Ce faisant, nous avons constaté que certains articles du projet de loi allaient nécessairement se buter à des réalités juridiques s'ils demeurent inchangés.

La chambre estime que sa recommandation la plus importante à ce sujet concerne la publicité des droits. En effet, les notaires doivent quotidiennement publier des droits au Registre foncier, le plus souvent, dans le cadre de transactions immobilières.

Or, le p.l. n° 96 vient modifier le droit actuel en mentionnant que les réquisitions d'inscription, ce qui est publié au registre, doivent être rédigées exclusivement en français. De plus, ces réquisitions doivent être présentées, accompagnées de documents qui, s'ils sont rédigés dans une langue autre que le français, doivent en plus être accompagnés d'une traduction <vidimée...

Mme Potvin (Hélène) : ...en mentionnant que les réquisitions d'inscription, ce qui est publié au registre, doivent être rédigées exclusivement en français. De plus, ces réquisitions doivent être présentées, accompagnées de documents qui, s'ils sont rédigés dans une langue autre que le français, doivent en plus être accompagnés d'une traduction >vidimée au Québec.

La mise en oeuvre de ces modifications entraînera inévitablement des impacts majeurs, non seulement dans la pratique des notaires, mais aussi pour leurs clients, et même pour le bon déroulement des transactions immobilières, partout au Québec.

Pour bien comprendre les problématiques anticipées, prenons l'exemple d'une vente d'immeuble. Cette vente doit être inscrite au Registre foncier pour que les droits qu'elle contient produisent tous ces effets, notamment pour être opposables aux tiers, c'est-à-dire faire en sorte que personne ne puisse venir contester le type de propriété de l'acheteur. La publication d'une vente immobilière est donc une étape capitale dans le cheminement d'une transaction immobilière au Québec.

Or, le projet de loi vient mentionner que la réquisition d'inscription d'un droit immobilier doit être rédigée exclusivement en français. Cette situation entraîne des problèmes importants. Tout d'abord, l'acte de vente qui est rédigé en anglais ne pourra être publié tel quel au Registre foncier. Le notaire devra rédiger en plus un sommaire en français de l'acte et l'accompagner d'une copie et d'une traduction en français. Par conséquent, il y aurait dépôt de trois documents au lieu d'un seul, comme c'est le cas aujourd'hui. Cela entraînera inévitablement des coûts supplémentaires pour les parties pour la préparation du sommaire par le notaire, ainsi que pour la traduction de l'acte.

Un autre problème est la traduction vidimée de l'acte notarié devant être déposée au Registre foncier. Cette traduction ne pourra pas être équivalente à une copie conforme de l'acte authentique, laquelle doit être une reproduction fidèle du contenu de l'acte et ne peut être délivrée que par le notaire. Sa valeur ne pouvant être authentique, la personne qui consulterait cette traduction au Registre foncier ne pourrait prétendre consulter une copie conforme à l'original.

L'autre problème concerne les délais de publication. Actuellement, le délai pour la transmission de l'acte au Registre foncier est très rapide, souvent dans les heures suivant la clôture de l'acte. Avec les changements proposés, les délais pour la traduction de l'acte et la préparation du sommaire s'ajouteront, créant ainsi une augmentation substantielle du délai pour le dépôt à la publication. Ces délais ont des conséquences importantes.

Tout d'abord, le notaire doit attendre que l'acte soit publié pour remettre l'argent au client. Donc, le vendeur devra peut-être attendre plusieurs jours pour obtenir l'argent de la vente de sa maison. Sachant que le vendeur utilise souvent l'argent du prix de vente de sa maison pour financer l'achat d'une autre résidence, les délais en question retarderont en cascade les transactions immobilières subséquentes.

Considérant les conséquences importantes de ces modifications, la chambre recommande donc au législateur de retirer les articles 124, 125, 126 et 196 du projet de loi et de <ne pas...

Mme Potvin (Hélène) : ...les délais en question retarderont en cascade les transactions immobilières subséquentes.

Considérant les conséquences importantes de ces modifications, la chambre recommande donc au législateur de retirer les articles 124, 125, 126 et 196 du projet de loi et de >ne pas intervenir en matière de publicité des droits.

En terminant, la chambre rappelle qu'elle demeure disponible afin de travailler étroitement avec l'ensemble des parties prenantes dans ce dossier et soyez assuré, M. le ministre, de notre entière collaboration pour la suite des travaux entourant le projet de loi n° 96. Alors, je vous remercie de votre attention.

La Présidente (Mme Thériault) : Merci, Me Potvin. Donc, vous avez pris une trentaine de secondes supplémentaires qui seront retranchées, offertes gracieusement par le ministre. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. Je souhaite vous souhaiter une bonne semaine, Mme la Présidente, qui sera chargée. Me Potvin, Me Vermette, bonjour. Merci de votre présence en commission parlementaire.

Vous l'avez dit d'entrée de jeu et vous le dites dans votre mémoire, la Chambre des notaires et les notaires, depuis 400 ans, au Québec, en Amérique du Nord, ce sont des gens qui, continuellement, ont tenu la présence du français dans les documents officiels, hein? On se souvient, au fil des années, qui était présent, qui est resté sur le territoire québécois suite à la guerre de la Conquête, notamment les notaires. Et c'est ce qui a permis d'assurer, notamment, une histoire, un historique à la nation québécoise.

Cette identité particulière là, vous en faites mention, vous dites : Nous sommes pour le caractère distinct du Québec, et notamment, ce caractère distinct du Québec passe par la langue française. Vous faites référence également, dans votre mémoire, à votre déception suite à l'accord du lac Meech, la non-ratification. Et vous dites : La chambre a toujours pris une position qui se dit nationaliste pour faire en sorte de défendre la langue française. Et donc, vous comprenez toute l'importance de protéger la langue publique, la langue commune, la langue officielle du Québec, à la fois dans ce que constitue le Québec au sein, notamment, de la fédération canadienne, mais aussi au sein des documents officiels. Donc, est-ce que je résume bien votre propos?

Mme Potvin (Hélène) : Tout à fait. Tout à fait. La Chambre des notaires... vous savez, les notaires font partie de la spécificité du droit civil. Donc, nous sommes la seule province au Canada où le droit civil est présent. Alors... et les notaires font partie intégrante du concept de droit civil. Donc, effectivement, nous avons toujours... nous nous sommes sentis vraiment partie de cette société distincte là et nous en faisons la promotion depuis, effectivement, le début de la colonie.

• (10 heures) •

M. Jolin-Barrette : O.K. Un notaire, là, si je ne me trompe pas, c'est un officier public, hein? Puis vous avez un <rôle particulier aussi dans ce que le notaire fait...

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10 h (version révisée)

<      Mme Potvin (Hélène) : ...nous nous sommes sentis vraiment partie de cette société distincte là et nous en faisons la promotion depuis, effectivement, les débuts de la colonie.

M. Jolin-Barrette : O.K. Un notaire, là, si je ne me trompe pas, c'est un officier public, hein? Puis vous avez un >rôle particulier aussi, dans ce que le notaire fait, ça a un caractère officiel aussi dans les documents que vous faites. Donc, souvent, la publication ou les actes que vous faites sont à caractère public et officiel. Donc, moi, je vois un petit peu un lien avec la langue officielle du Québec. Comment vous voyez ça?

Mme Potvin (Hélène) : Mais, écoutez, le notaire, comme vous dites, est un officier public, donc tire ses pouvoirs de l'État en rendant authentiques les documents, donc ayant... ce qui permet d'avoir une valeur aussi forte qu'un document qui émane du gouvernement. Alors, pour nous, c'est important, effectivement, que le notaire puisse encore mieux maîtriser la langue française pour jouer son rôle, jouer encore mieux son rôle d'officier public et vraiment de protéger et de valoriser la langue française.

M. Jolin-Barrette : Donc, dans certains cas, un document authentique fait par le notaire, c'est l'équivalent d'un document de l'État. Ça a le même caractère exécutoire et fondamental?

Mme Potvin (Hélène) : Tout à fait.

M. Jolin-Barrette : O.K. J'aimerais ça qu'on aborde la question de l'article 35 du projet de loi relativement aux ordres professionnels. Et actuellement, la façon dont la Charte de la langue française était effectuée, il y avait une présomption irréfragable de la connaissance du français pour les membres, avec certains critères.

Bon, qu'est-ce que ça signifie, une «présomption irréfragable»? Pour les non-initiés, c'est une présomption qui ne peut pas être repoussée. Donc, autant dire que le ciel est bleu puis l'enfer est rouge, si on résume ça comme ça.

Une voix : ...

M. Jolin-Barrette : C'est une blague, c'est une blague.

Une voix : ...

M. Jolin-Barrette : Pas tant que ça, là, mais je vous taquine. Je vous taquine.

Une voix : ...

M. Jolin-Barrette : Alors, Mme la Présidente, un peu de sérieux.

Des voix : Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Thériault) : C'est vous qui avez déclenché ça, M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Je sais que ça fait plaisir au député de La Pinière. Alors, ma question plus fondamentale, le fait d'enlever la présomption irréfragable, ça va permettre aux ordres professionnels de vérifier véritablement et de s'assurer du maintien de la connaissance de leurs membres de pouvoir s'exprimer et de travailler en français. Pourquoi c'est important pour la Chambre des notaires?

Mme Potvin (Hélène) : Présentement, le texte actuel, comme vous l'avez si bien expliqué, donc, démontrait une présomption où, dès qu'on a un secondaire III... Donc, on a étudié en français, on a un secondaire III, nous sommes réputés avoir la connaissance requise de la langue française.

Donc, pour nous, les modifications, ça va nous permettre de démontrer que ce n'est pas le cas, même si on a ces études-là. Donc, on est capable de démontrer que ce n'est pas le cas et on va pouvoir imposer des cours de perfectionnement, des cours complémentaires, donc, pour améliorer la qualité du français du notaire. <Donc, ça, c'est très, très bien...

Mme Potvin (Hélène) : ...permettre de démontrer que ce n'est pas le cas, même si on a ces études-là. Donc, on est capable de démontrer que ce n'est pas le cas et on va pouvoir imposer des cours de perfectionnement, des cours complémentaires, donc, pour améliorer la qualité du français du notaire. >Donc, ça, c'est très, très bien.

Et nous, on va plus loin en demandant que l'on puisse établir, nous-mêmes, nos critères et les modalités, en collaboration avec les autres instances, pour vraiment, vraiment ajouter des compétences supplémentaires au notaire, parce que le français, pour les notaires, c'est un instrument de travail très important. Donc, on utilise le français pour démontrer la volonté des parties, pour l'exprimer, pour la préciser, pour la nuancer. Donc, l'importance d'une très, très bonne connaissance est très importante. Alors donc, nous, on voit d'un très, très bon oeil, comme je le disais en entrée de jeu, cette modification-là, mais on aimerait quand même avoir des outils supplémentaires pour pouvoir s'assurer que nos membres ont une connaissance et une maîtrise importante de la langue française.

M. Jolin-Barrette : Je veux qu'on reste sur ce sujet-là, parce que, si on l'image, là, dans le fond, les notaires, dans un premier temps, c'est des officiers publics, mais également... et ils sont membres de l'ordre professionnel, donc de la Chambre des notaires. Quelle est l'importance pour un professionnel, pour un membre d'un ordre professionnel, d'être capable de communiquer avec un client, avec un citoyen ou une citoyenne québécoise en français? Pourquoi cette importance-là d'avoir une obligation pour les membres des ordres professionnels d'être capables, tout au long de leur carrière, de communiquer avec le public en français?

Mme Potvin (Hélène) : Écoutez, le notaire vient... travaille avec, il vient expliquer, il doit s'assurer d'avoir un consentement des parties, donc d'être bien capable d'expliquer les droits, les obligations à ses clients. Donc, c'est vraiment fondamental qu'il puisse s'exprimer, donc, tant à l'oral qu'à l'écrit, alors avec un français qui lui permette vraiment de bien comprendre, de bien expliquer la situation et de bien recevoir le consentement des parties qui sont impliquées dans ces transactions.

M. Jolin-Barrette : Et là, dans votre proposition de mémoire, vous proposez d'avoir des pouvoirs supplémentaires plus loin que ce qui est prévu dans le projet de loi n° 96. Pourquoi? Est-ce qu'au cours des années, vous avez constaté certaines situations? Pourquoi est-ce que vous voulez qu'on renforce le projet de loi sur ce volet-là?

Mme Potvin (Hélène) : Effectivement, nos inspecteurs nous rapportent que certaines... qu'il existe certaines problématiques chez nos membres, donc une qualité qui n'est pas toujours à la hauteur de ce qu'on pourrait s'attendre. Et on a aussi... on a mis en annexe, là, certaines statistiques à notre mémoire qui vient démontrer qu'il peut y avoir des lacunes auprès de certains membres.

Donc, c'est pour cette raison-là qu'on aimerait avoir des outils supplémentaires pour pouvoir hausser, si c'est nécessaire, les compétences par rapport à d'autres ordres professionnels qui n'auraient pas <les mêmes besoins que nous...

Mme Potvin (Hélène) : ...vient démontrer qu' il peut y avoir des lacunes auprès de certains membres.

Donc, c'est pour cette raison-là qu'on aimerait avoir des outils supplémentaires pour pouvoir hausser, si c'est nécessaire, les compétences par rapport à d'autres ordres professionnels qui n'auraient pas >les mêmes besoins que nous.

M. Jolin-Barrette : O.K. Vous avez abordé, tout à l'heure, en fin de discussion, les effets du projet de loi, notamment sur les transactions immobilières et sur l'inscription au Registre foncier.

Je vais vous donner un cas d'exemple. Je souhaite acquérir une propriété au centre-ville de Montréal. La propriété que je souhaite acquérir, c'est une copropriété dans une tour à condo. L'ensemble du développement immobilier s'est fait en anglais. J'arrive chez le notaire, le vendeur veut que la... Dans le fond, j'arrive chez le notaire, mais la transaction, bien, le projet de contrat d'acte de vente est en anglais, la déclaration de copropriété en anglais. Est-ce que, dans un État de langue française comme le Québec, on ne devrait pas faire en sorte que le citoyen puisse avoir accès à ces documents-là en français au niveau de la déclaration de copropriété, au niveau de l'acte de vente également, sans qu'il y ait un débalancement entre les parties? Parce que, vous savez, le marché immobilier peut être en effervescence.

Alors, je vais vous vendre en anglais la déclaration de copropriété, et même les citoyens peuvent ne pas comprendre ce qui est indiqué dans la déclaration de copropriété. Et, au-delà de ça, lorsque je consulte le Registre foncier actuellement, la publication peut être uniquement en anglais. Et là le citoyen qui va sur un registre de l'État, donc le Registre foncier, constate que des documents officiels qui affirment justement la chaîne de titre et la possession aux yeux des tiers est uniquement dans une autre langue que la langue officielle. Vous ne trouvez pas là qu'il y a un enjeu, pour les Québécois et Québécoises, de pouvoir comprendre, de pouvoir connaître et de pouvoir prendre les décisions éclairées à ce niveau-là?

Mme Potvin (Hélène) : Dans l'exemple que vous évoquez, c'est certain qu'il ne pourra pas avoir... ça ne corrigera pas le passé. Donc, si vous achetez aujourd'hui un immeuble dans une tour à condo, les documents, s'ils sont déjà en anglais, vont rester en anglais. Donc, ce que vous pourriez exiger, effectivement, c'est la copie de votre contrat en français.

Par contre, nous, ce qu'on travaille surtout, ce qu'on recommande surtout, c'est de ne pas toucher à la publicité des droits, donc ne pas... parce que ça va vraiment causer des problèmes au niveau des délais et des coûts comme je l'expliquais sommairement. Alors, c'est certain que, pour nous, il y a peut-être d'autres façons de faire, mais nous, on recommande vraiment, pour l'instant, de ne pas toucher à le... aux articles, pardon, sur la publicité des droits.

M. Jolin-Barrette : Ça, je comprends sur la mécanique, mais, sur le fond... <Je veux vous entendre...

Mme Potvin (Hélène) : ...comme je l'expliquais sommairement. Alors, c'est certain que, pour nous, il y a peut-être d'autres façons de le faire, mais nous, on recommande vraiment, pour l'instant, de ne pas toucher à le... aux articles, pardon, sur la publicité des droits.

M. Jolin-Barrette : Ça, je comprends, sur la mécanique, mais, sur le fond... >Je veux vous entendre sur le fond. Quand j'achète un condo à Montréal, est-ce que la déclaration de copropriété qui devrait m'être soumise et l'acte de vente... que j'aie la possibilité de contracter en français?

• (10 h 10) •

Mme Potvin (Hélène) : Écoutez, je vous laisse le soin de faire... de débattre là-dessus. Et puis nous, on... je crois que ce n'est pas notre rôle, à la Chambre des notaires, de déterminer si tous les actes devraient être en français.

M. Jolin-Barrette : Juste une dernière question avant de céder la parole. Pensez-vous que ça arrive, dans certains bureaux de notaires, particulièrement à Montréal, qu'il y a une déclaration de copropriété en anglais, un acte de vente en anglais, puis que la personne ne comprend pas tous les tenants et aboutissants de la déclaration de copropriété parce que la personne qui fait l'acquisition de la copropriété divise, elle ne parle pas anglais? Pensez-vous que ça arrive, ça, des gens unilingues francophones qui achètent un condo puis qui ne comprennent pas ce qui est écrit dans la déclaration de copropriété?

Mme Potvin (Hélène) : Bien, en théorie, le rôle du notaire est d'expliquer les contrats, de s'assurer que la personne connaît bien les obligations, les restrictions qui sont dans la déclaration de copropriété. Alors, j'ose croire que la personne comprend bien ce qu'elle signe avant de signer les contrats.

M. Jolin-Barrette : Je vous remercie.

La Présidente (Mme Thériault) : Merci. M. le député de Chapleau, il vous reste un peu plus de trois minutes à l'échange.

M. Lévesque (Chapleau) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Me Potvin, Me Vermette, merci beaucoup d'être ici avec nous ce matin, merci de votre présentation.

Vous disiez d'ailleurs, le notaire comme officier public, le notaire comme ayant une délégation parcellaire, dans le fond, de l'État, en quelque sorte. Vous avez utilisé ces mots-là. Vous-mêmes, à l'ordre... à la Chambre des notaires, vous faites preuve d'exemplarité dans vos communications avec vos membres.

J'aimerais peut-être revenir, justement, sur l'idée du Registre foncier qui est assez essentiel en droit immobilier, là, vous en conviendrez, également la publicité des droits. C'est quand même une portion de l'État, il y a des documents officiels qui sont publiés là. Vous parlez de délais, de coûts supplémentaires en lien avec, notamment, peut-être une traduction de ces éléments-là. Mais justement, dans la foulée d'exemplarité que, justement, la Chambre des notaires se donne et a voulu se donner depuis le début de la colonie, on en parlait, ça ne serait pas nécessairement... Ne serait-ce pas un pas, justement, à faire également au Registre foncier, qu'il y ait la possibilité que ce soit aussi en français, au-delà des coûts et des délais?

Mme Potvin (Hélène) : Mais, écoutez, il faut... Nous, on a rédigé notre mémoire sous la loupe des notaires praticiens. Alors, effectivement, ce qu'on va constater, c'est une augmentation des coûts. Il va y avoir nécessairement, donc, une problématique dans les transactions en cascades où on va devoir préparer... prendre du temps pour préparer un sommaire de l'acte, préparer une traduction du français.

Alors donc, comment ça va se passer dans la réalité sur le terrain? Alors, c'est sûr qu'il y a des conséquences, il y a des conséquences économiques et il y a des conséquences également à... Ce qu'on souhaite, c'est que tous les citoyens soient traités également aussi. Donc, il ne faudra pas oublier que le notaire va devoir expliquer à son client qui souhaite faire un contrat anglophone qu'il aura des délais supplémentaires et des coûts supplémentaires. Alors, ça peut être problématique au niveau de la mise en oeuvre, là, du projet de loi.

M. Lévesque (Chapleau) : Au-delà de ça, au-delà du client, il y a aussi... On peut consulter le Registre foncier? Il est possible... La population en général peut consulter le Registre foncier? Oui. O.K. et donc...

La Présidente (Mme Thériault) : Je m'excuse, M. le ministre a un questionnement, M. le député.

M. Jolin-Barrette : Sur cette question-là... parce que vous dites, Me Potvin, que ça va être plus compliqué puis c'est plus complexe. Je comprends que ça va être plus complexe pour le notaire parce qu'il va avoir plus d'actes à rédiger, sauf que, pour le public, le fait que les actes soient en français, ça va être pas mal plus simple de comprendre.

Est-ce que je comprends que, pour le notaire, ça complexifie les délais, ça complexifie le travail qu'il va avoir à faire, mais, pour le public, il va avoir accès en français, désormais, aux copies?

Mme Potvin (Hélène) : Oui. Il va y avoir, effectivement, un délai supplémentaire, mais effectivement les documents seront en français pour ceux qui sont plus à l'aise en français. Mais il y a quand même des Québécois qui sont plus à l'aise dans la langue anglaise, donc qui doivent aussi avoir accès à ces documents-là dans leur langue si eux-mêmes sont parties à l'acte.

M. Jolin-Barrette : Effectivement, et le projet de loi n'empêche pas que ceux-ci aient accès à des documents en anglais dans leur langue et qu'ils puissent signer leur copie, leur transaction, leur contrat dans leur langue, en anglais.

Mme Potvin (Hélène) : Oui. Il ne faut pas oublier aussi que la traduction française, donc, ne pourra pas nécessairement être faite par le notaire. Donc, il va peut-être falloir prendre un tiers et, si le contrat a une centaine de pages, bien, il faut quand même calculer qu'il va y avoir des délais et des coûts.

La Présidente (Mme Thériault) : Et je dois mettre fin à l'échange, malheureusement. Donc, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, la parole est à vous pour votre 11 min 20 s.

Mme David : Merci beaucoup. Vous avez passé du beau ciel bleu du ministre à peut-être, je n'espère pas, l'enfer de mes questions, et ça ne sera pas l'enfer parce que j'ai beaucoup apprécié votre mémoire. Je l'ai trouvé fort intéressant.

J'ai, moi aussi, évidemment, appris un nouveau mot, le mot «irréfragable» qui veut dire, dans le fond, qu'on ne peut pas contredire, c'est irrécusable. Puis là je me demandais si ça ne revenait pas à votre proposition <d'enlever le mot «réputé»...

Mme David : ...j'ai beaucoup apprécié votre mémoire. Je l'ai trouvé fort intéressant.

J'ai, moi aussi, évidemment, appris un nouveau mot, le mot «irréfragable» qui veut dire, dans le fond, qu'on ne peut pas contredire, c'est irrécusable. Puis là je me demandais si ça ne revenait pas à votre proposition >d'enlever le mot «réputé», parce qu'en droit c'est un mot extrêmement puissant, et donc «irrécusable», «irréfutable», etc., on ne peut pas contredire par «présumer». Donc, ça me semble quelque chose de très important parce que vous parlez beaucoup de l'importance du français. Ça peut être... En fait, non, vous parlez de l'importance de très bien maîtriser la langue de votre client. Dans le fond, c'est ça que vous dites, parce que ça peut être très bien maîtrisé, la langue anglaise, si vous avez un client anglais. D'ailleurs, je vais revenir là-dessus tout à l'heure. Mais parlons d'une majorité qui sont probablement vos clients francophones, j'ai beaucoup aimé votre introduction sur la qualité du français.

Alors, une fois qu'on a dit ça, vous dites effectivement : Admettons que la qualité du français n'est pas au niveau que ça devrait être parce que vous jouez constamment avec le détail des mots dans les contrats, là, dans... Et je n'ai pas fait souvent affaire avec un notaire, mais les quelques fois, effectivement, il faut que vous soyez très, très pertinents. Et donc, si je comprends bien, vous n'aimez pas le mot «réputé», il est enlevé dans la suggestion du projet de loi, mais vous, vous mettriez «présumé», alors que le ministre enlève complètement cette référence-là.

Alors, expliquez-moi pourquoi vous voudriez remettre le mot «présumé», qui est moins lourd en termes de conséquences et qui vous permet, et là je réponds à votre place, de pouvoir aller au maintien de la langue. Parce que ce n'est pas tout, une fois... c'était ça, le projet de loi actuel, tu es réputé un jour, tu es donc francisé toujours. C'est ça que ça veut dire. Là, vous voulez «présumé», puis on va aller vérifier.

Alors, j'ai deux questions, ça va aller plus vite. C'est : Pourquoi «présumé»? Parlez-nous de ça. Et deuxièmement, comment... Vous êtes un ordre professionnel dont la qualité du français est très importante, la qualité de la langue, donc il n'y a rien qui est dit. J'ai demandé à la présidente de l'OQLF, ce n'est pas encore clair, la réponse. Comment vous allez maintenir le niveau de français, cinq ans, 10 ans, 15 ans, 25 ans, 30 ans après? Comment vous voyez ça?

Mme Potvin (Hélène) : Alors, vous avez... Merci pour votre question. Effectivement, vous avez raison, donc, le projet de loi utilise le mot «doit». Alors donc, juste pour souci de cohérence avec les lois qui sont en vigueur, on suggère d'utiliser «présumé», donc, qui effectivement, comme vous le disiez, là, constitue une preuve qui peut être contredite. Alors donc, on va s'assurer comme ça qu'on peut démontrer le contraire pour démontrer qu'un de nos membres n'a pas les connaissances requises. Alors, je crois que ça, vous aviez bien, bien résumé.

Quant à l'autre question qui était de...

Mme David : Maintenir.

Mme Potvin (Hélène) : ...maintenir, oui, pardon. <Alors donc, nos membres font...

Mme Potvin (Hélène) : ...on peut démontrer le contraire pour démontrer qu'un de nos membres n'a pas les connaissances requises. Alors, je crois que ça, vous aviez bien, bien résumé.

Quant à l'autre question qui était de...

Mme David : Maintenir.

Mme Potvin (Hélène) : ...maintenir, oui, pardon. >Alors donc, nos membres font l'objet d'inspections à des fréquences régulières. Alors, nous, nos inspecteurs vont dans les bureaux de notaires, vérifient les dossiers, vérifient les contrats, vérifient si les règles sont respectées. Alors donc, il y aura un volet où l'inspecteur pourra vérifier la qualité du français, donc, avec des outils qu'il aura pour le vérifier. Et donc nous, c'est qu'on veut avoir... donc être capables de dire, même si un notaire est notaire... est membre de l'ordre depuis 10 ans, donc il ne maîtrise pas suffisamment le français, et qu'on puisse maintenant l'obliger à suivre des cours de perfectionnement.

Mme David : Donc, vous êtes plus précise que la présidente de l'OQLF. Et moi, j'ai été inspectrice de mon ordre dans un temps ancien, et vous me confirmez que c'est l'inspecteur, qui est toujours un membre de l'ordre, un notaire nommé inspecteur pour un an, deux ans, trois ans, qui va avoir la compétence pour évaluer la compétence langagière. Moi, j'aurais été bien mal prise d'évaluer la compétence langagière de mes collègues.

Mme Potvin (Hélène) : Bien, c'est-à-dire qu'on va développer des outils avec l'OQLF et l'Office des professions pour effectivement avoir des outils qui seront justes, qui seront équitables et qui pourront être expliqués facilement aux notaires. Et il y a le volet... il n'y a pas simplement les inspecteurs aussi, il ne faut pas oublier qu'on a nos candidats à la profession, donc qui ne sont pas avec les inspecteurs, donc qui vont faire l'objet d'autres vérifications au départ.

Mme David : J'ai hâte de voir ça, pour tous les ordres professionnels, de transformer les inspecteurs en évaluateurs de langage. J'ai vraiment hâte.

• (10 h 20) •

Mme Potvin (Hélène) : Ce n'est pas notre intention, mais il faut y avoir des outils précis.

Mme David : ...il va falloir maintenir la compétence, que vous en fassiez la démonstration, alors ça va être de toute beauté.

Maintenant, si la personne refuse de... le notaire refuse de prendre un client pour cause de langue, et vous dites à quel point la langue est importante, c'est... et ça, moi, quand je l'ai lu, j'ai trouvé ça très, très sévère l'article 35.1, que ça devient un acte dérogatoire à la dignité de la profession.

Vous en parlez, page 26, vous dites : «La chambre note aussi qu'un manquement au premier alinéa de l'article 35.1 devient également un acte dérogatoire.» Est-ce qu'on sait ce que c'est, ça, l'acte dérogatoire à la dignité de la profession? C'est la collusion, la corruption, c'est l'abus de pouvoir, relation sexuelle avec un patient, etc. C'est énorme. Ça ne peut pas être plus grave comme geste. Donc, ça serait ça dont serait accusé le notaire qui refuse de donner un service dans sa langue, dans une autre langue, en français. Or, vous dites que la compétence en français est extrêmement importante <pour le rapport avec...

Mme David : ...d'un patient, etc. C'est énorme. Ça ne pas être plus grave comme geste. Donc, ça serait ça dont serait accusé le notaire qui refuse de donner un service dans sa langue, dans une autre langue, en français. Or, vous dites que la compétence en français est extrêmement importante >pour le rapport avec un client. Si le notaire est anglophone et que son client est francophone, et qu'il est inquiet, et qu'il dit : Non, je pense que c'est trop sophistiqué, je vais te référer à un collègue francophone, il peut être accusé d'acte dérogatoire, si je comprends bien.

Mme Potvin (Hélène) : Bien, c'est pour ça que nous, on suggère de ne pas mettre cette disposition-là dans cette...

Mme David : ...mais vous êtes d'accord avec ma façon de le présenter, de dire : Ça pourrait être une accusation d'acte dérogatoire, et donc vous allez aller vers votre syndic, puis là la machine s'enclenche à l'accusation, là.

Mme Potvin (Hélène) : Nous, ce qu'on trouve, c'est que ça ne viendra pas améliorer le français. Même si on a une amende, même si on a une suspension, ça ne viendra pas corriger le problème. Alors, c'est pour ça qu'on veut vraiment travailler sur les mesures d'accompagnement, de perfectionnement du membre pour que ça soit vraiment positif, qu'il s'améliore et qu'on vienne vraiment régler son problème et non...

Mme David : Excusez-moi, parce qu'on n'a pas trop de temps, je vais passer la parole à mon collègue. Je peux conclure que la référence au Code des professions, à l'article je ne sais plus quoi, mais qui est mentionné à l'article 35.1 du projet de loi, est nettement excessif et disproportionné par rapport à l'accusation — je n'aime pas ce mot-là trop, trop — mais à l'accusation de préférer référer un collègue.

Mme Potvin (Hélène) : Surtout que nous, on ne trouve pas que ça va atteindre les résultats qu'on souhaite. C'est dans ce sens-là.

Mme David : Merci beaucoup. Mon collègue.

La Présidente (Mme Thériault) : M. le collègue de D'Arcy-McGee, vous avez à peine trois minutes, question, réponse.

M. Birnbaum : Merci, Mme la Présidente. Merci, Mes Potvin et Vermette, pour votre présentation, et pour votre rappel de votre rôle en tant qu'officier public d'exemplarité. C'est noté, et compris, et très important.

Vous parlez, aux pages 26 jusqu'à 30 de votre mémoire, des pouvoirs d'inspection, d'enquête de l'Office québécois de la langue française, et je vous cite à la fin : «Bref, devant les termes de l'article 175 — qui a trait à ça — il y a lieu de se poser la question de savoir si un inspecteur ou un enquêteur de l'OQLF pourrait exiger d'un syndic d'un ordre professionnel la communication d'un renseignement ou d'un document contenu à son dossier d'enquête sachant que toute atteinte à la confidentialité de ce dossier pourrait nuire à l'objectif de la protection du public, soit le mandat premier de tout ordre professionnel.»

Ce qui m'amène à deux questions. Dans un premier temps, de votre avis professionnel, cette disposition, si ce n'était pas à l'abri des deux chartes des droits et libertés par l'imposition proposée mur à mur de la clause dérogatoire, est-ce que, de votre avis, cet article serait très <vulnérable aux...

M. Birnbaum : ...cette disposition, si ce n'était pas à l'abri des deux chartes des droits et libertés, par l'imposition proposée mur à mur de la clause dérogatoire, e st-ce que, de votre avis, cet article serait très >vulnérable aux contestations judiciaires? Et dans un deuxième temps, est-ce que, de votre avis, ces pouvoirs, en quelque part exceptionnels, s'avèrent nécessaires?

Mme Potvin (Hélène) : Je rappelais d'emblée que le secret professionnel du notaire est un enjeu très, très important. Donc, nous sommes un ardent défenseur, à la Chambre des notaires, du secret professionnel pour que le public, le client du notaire, puisse vraiment expliquer toutes les informations, lui donner toutes les informations en sachant que cette information-là est protégée.

La même chose du côté de notre syndic, on veut que la population, les clients puissent vraiment bien exprimer et tout dévoiler au syndic sans faire l'objet de... sans être obligés... sans avoir peur, finalement, que les informations soient dévoilées. Alors donc, c'est une préoccupation que nous avons, comment ces droits-là des inspecteurs, des enquêteurs seront mis en oeuvre sur le terrain, donc quel est... dans quel cadre ils vont le demander. Alors, c'est dans ce cadre-là, nos préoccupations.

M. Birnbaum : Et, de votre lecture, est-ce que l'imposition de la clause dérogatoire serait nécessaire pour protéger cet article tel qu'il est rédigé actuellement?

La Présidente (Mme Thériault) : En 20 secondes.

Mme Potvin (Hélène) : Écoutez, on va laisser, je pense, les spécialistes des chartes s'exprimer là-dessus.

La Présidente (Mme Thériault) : Ça va? Merci. Donc, nous allons aller maintenant du côté de la députée de Mercier. Vous avez 2 min 50 s.

Mme Ghazal : Merci. Merci pour votre présentation. Moi aussi, je m'intéresse à la question du secret professionnel des notaires que... vous dites qu'en fait le sort du secret professionnel, qui est très important, est remis en question par les dispositions qui donnent des pouvoirs d'inspection à l'OQLF. J'aimerais que vous en parliez un peu plus. Puis comment est-ce que vous voyez le rôle de l'OQLF avec les notaires?

M. Vermette (Michel) : Bien, je pense que, comme l'a dit la présidente, il ne faut pas oublier que des constitutionnalistes se pencheront probablement là-dessus, mais c'est qu'on voulait poser des questions. Est-ce que vraiment... La Chambre a investi beaucoup, et il y a eu deux litiges importants qui ont été jusqu'en Cour suprême, avec la Fédération des ordres professionnels de juristes du Canada et la Chambre elle-même. Il y a des décisions de 2015 et 2016 qui ont été rendues en matière de secret professionnel. Et ici on se demande si, nonobstant l'article 214, là, qui disons... que met de côté ou déroge à la charte canadienne et à la charte québécoise, on se demande, <si l'article 7 qui parle...

M. Vermette (Michel) : ...en matière de secret professionnel. Et ici, on se demande si, nonobstant à l'article 214, là, qui disons... que met de côté ou déroge à la charte canadienne et à la charte québécoise, on se demande, >si l'article 7 qui parle de justice fondamentale, l'article 8 qui traite des fouilles, des perquisitions et des saisies abusives, si, à un moment donné, nonobstant la prise de position dans le projet de loi n° 96, des gens ne pourraient pas prétendre que ces droits fondamentaux ou ce droit fondamental qu'est le secret professionnel n'est pas antérieur aux chartes et qu'à ce moment-là, en vertu d'une... on a appelé ça une constitution non écrite, là, il y aurait, à ce moment-là, risque que, nonobstant l'article 214, les dispositions qui traitent, 174 et 175, là, qui traitent de la possibilité pour l'Office des professions d'accéder aux dossiers des notaires, etc., soient jugées inconstitutionnelles? C'est plus des questions qu'on pose. On a des inquiétudes à ce niveau-là et, à ce moment-là, on voulait quand même sensibiliser, vous sensibiliser tous à ces réflexions qu'on a eues sur le sujet.

Mme Ghazal : Je comprends donc qu'il y a un risque, mais vous ne dites pas que vous seriez contre totalement. C'est juste qu'il y a un risque, atteinte aux droits de la charte des droits et libertés.

M. Vermette (Michel) : Puis, comme l'a mentionné la présidente, il y a aussi un arrêt important, Pharmascience, qu'on a cité, là, qui traite des pouvoirs des syndics d'aller chez les notaires, où... dans le cas, c'étaient des pharmaciens, et il y a toujours, à ce moment-là, ce pouvoir du syndic sur lequel on se pose des questions.

Mme Ghazal : Très bien. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Thériault) : Parfait. Je dois mettre fin à l'échange. Donc, je vais du côté du député de Matane-Matapédia pour votre 2 min 50 s.

M. Bérubé : Bonjour. Vous êtes ici pour plaider pour vos membres qui n'ont pas une connaissance suffisante du français. Nous, au Parti québécois, on considère que les officiers de l'État doivent fournir des services publics aux citoyens en français et de ne pas le faire, c'est grave. C'est notre prétention, c'est même une conviction assez sincère, je peux vous le dire. Ma question : Combien de vos membres sont unilingues anglais et n'ont pas une connaissance suffisante du français?

Mme Potvin (Hélène) : Alors, on n'a pas de statistiques, parce que, nous, il y a une présomption, donc ils sont tout de suite réputés connaître le français. Alors donc, on n'a pas à le mesurer.

• (10 h 30) •

M. Bérubé : C'est assez incroyable. Vous me permettrez d'être étonné que vous veniez faire une telle présentation sans connaître l'état des lieux. Est-ce que votre mémoire sert à défendre cinq membres, 10 membres, et c'est pour ça qu'on devrait changer la loi présentée par le gouvernement? Ça m'apparaît, pour le moins, insuffisant. Et j'aurais aimé avoir des <statistiques parce que...

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10 h 30 (version révisée)

<991 M. Bérubé : ...d'être étonné que vous veniez faire une telle présentation sans connaître l'état des lieux. Est-ce que votre mémoire sert à défendre cinq membres, 10 membres? Et c'est pour ça qu'on devrait changer la loi présentée par le gouvernement? Ça m'apparaît, pour le moins, insuffisant. Et j'aurais aimé avoir des >statistiques, parce que, quand on veut changer une loi ou quand on veut présenter des amendements, ça doit s'appuyer sur quelque chose d'assez significatif.

Vous avez parlé tantôt de règles pour accompagner les notaires. Le Québec, sa langue officielle c'est le français depuis un bon moment. La loi 101 a été adoptée en 1977. Qu'est-ce que ça va prendre de plus pour convaincre les notaires qui pratiquent au Québec d'avoir une connaissance suffisante du français? Je suis non seulement surpris, mais je suis étonné, puis voire même irrité d'apprendre ça.

Mme Potvin (Hélène) : Je vous rappelle que la Chambre des notaires n'est pas là pour défendre ses membres, mais défend la protection du public. Alors donc, les notaires sont... fournissent des services à des clients et la chambre vient...

M. Bérubé : ...bien d'accord. Alors, à ce moment-là, je préférerais qu'un citoyen, un client vienne nous dire qu'il veut être servi en anglais, que la Chambre des notaires ait à le faire. C'est ma perception.

Sur votre site Internet, présentement, vous relayez des offres d'emploi où on demande une connaissance avancée de l'anglais oral et écrit. Quand je vois ça, je me dis que c'est une discrimination à l'embauche dans certains cas. Est-ce que vous avez une réflexion là-dessus aussi?

Mme Potvin (Hélène) : Bien, il faut que certains emplois, donc, on ait une connaissance suffisante de l'anglais pour communiquer avec les membres. Je ne sais à quelle annonce que vous faites référence.

M. Bérubé : Je ne veux pas accabler le cabinet que je viens de voir, mais je peux vous en sortir plusieurs sur votre site Internet, et vous avez choisi de les partager. Alors, ça fait partie de ce qui existe présentement comme offres d'emploi au Québec. Alors, un notaire diplômé au Québec qui n'aurait pas une connaissance avancée de l'anglais oral et écrit serait discriminé à l'embauche chez un de vos membres.

Mme Potvin (Hélène) : Mais ça dépend c'est quoi ses fonctions, là. Alors, je ne peux pas vous répondre.

M. Bérubé : Un notaire qui pratique au Québec.

Mme Potvin (Hélène) : Bien, vous savez, les notaires pratiquent dans différentes régions avec différentes clientèles. Certains ont des clientèles très internationales. Alors donc, il y a toutes sortes de situations.

M. Bérubé : ...on ne retiendra pas vos propositions.

La Présidente (Mme Thériault) : Il n'y a plus de temps à l'échange. Donc, Me Potvin, Me Vermette, merci de votre participation en commission parlementaire.

Nous allons suspendre quelques instants pour permettre au prochain groupe de prendre place. Merci.

(Suspension de la séance à 10 h 32)

> (Reprise à 10 h 37)

La Présidente (Mme Thériault) : Nous reprenons nos travaux. Donc, nous recevons maintenant la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal, donc Mme Marie-Anne Alepin, la présidente générale. Donc, vous avez une dizaine de minutes pour nous faire votre présentation, donc, si vous voulez nous présenter la personne qui vous accompagne, et la parole est à vous.

Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal (SSJBM)

Mme Alepin (Marie-Anne) : Merci beaucoup. Mme la Présidente, M. le ministre, Mmes et MM. les députés, bonjour et merci de nous avoir invitées ici, à la commission, pour témoigner sur le projet de loi n° 96. Je m'appelle Marie-Anne Alepin, je suis présidente générale de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal, et je suis également comédienne, productrice et réalisatrice. Et je suis accompagnée de Anne Michèle Meggs, membre également du Conseil général de la Société Saint-Jean-Baptiste. Elle a été directrice de la planification au ministère de l'Immigration du Québec, et directrice de recherche à l'OQLF, et directrice de cabinet du ministre des Affaires francophones de l'Ontario.

Alors, le mémoire que nous vous déposons intègre notre perspective historique et contemporaine. Comme vous savez, notre organisation existe depuis 1834. La Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal ne jaugera pas la valeur de ce projet de loi seulement à l'aune de ses propres ambitions, mais avec un objectif plus large, celui d'assurer la pérennité de la langue française en Amérique.

Avant de débuter, nous aimerions saluer le travail colossal accompli dans ce projet de loi par le ministre Jolin-Barrette et son équipe, qui compose de grandes avancées, comme la création d'un poste de commissaire à la langue française qui va relever directement de l'Assemblée nationale ou la création d'un ministère de la langue française. Cependant, vous comprendrez que notre rôle à nous, ici, n'est pas de venir souligner nécessairement tous les points forts, mais de tenter de vous convaincre que le projet de loi est encore insuffisant pour garantir la pérennité de la langue française.

La langue française est ce qui nous rassemble. Et je pense qu'il est juste de dire que nous avons tous ici le même <objectif...

Mme Alepin (Marie-Anne) : ... ici, n'est pas de venir souligner nécessairement tous les points forts, mais de tenter de vous convaincre que le projet de loi est encore insuffisant pour garantir la pérennité de la langue française.

La langue française est ce qui nous rassemble. Et je pense qu'il est juste de dire que nous avons tous ici le même >objectif, hein : défendre et préserver la vitalité et la pérennité de la langue française. C'est un très bon point de départ, je trouve.

• (10 h 40) •

En 1977, grâce au travail de Camille Laurin et de ses collègues, le gouvernement du Québec adopte une politique ambitieuse en matière de droits linguistiques, de langue de législation, d'administration, de travail, d'enseignement, j'en passe. La Charte de la langue française fait alors du français la seule langue commune du Québec, mais, au fil des années, comme vous le savez, de nombreuses contestations judiciaires sont venues l'affaiblir. Mais son plus grand ennemi demeure encore l'attrait que l'anglais exerce de plus en plus comme langue d'ascension sociale, un attrait qui ne cesse de s'accroître avec la mondialisation.

L'environnement linguistique québécois s'anglicise à vitesse grand V, et c'est devenu perceptible au jour le jour par les citoyens. Ne pelletons pas, s'il vous plaît, le problème dans la cour de la prochaine génération. Transmettons-leur plutôt l'amour que nous portons à notre langue. Ce serait là le plus beau des cadeaux à leur offrir. Pensons aussi à nos petits-enfants, qui, si les choses continuent ainsi, en arriveront à ne plus comprendre un fichtre mot en français, car ils seront bien plus d'angle de «talker» en anglais.

Le processus est déjà enclenché. Il n'y a qu'à écouter nos adolescents pour constater l'emprise qu'a l'anglais sur leur vocabulaire. C'est indéniable. Si nous voulons respecter également nos ancêtres, qui se sont battus pour défendre le français, si nous voulons nous respecter nous-mêmes, nous devons sans plus tarder lui redonner toute l'importance qu'il mérite, et, pour ça, il faut travailler tous et toutes en équipe.

Pour contrer ce recul, il est possible que le gouvernement doive nous ébranler, et ça prend parfois des petites révolutions pour faire de grands changements. Il ne faut pas penser en termes de politiques à court terme, et nous constatons, oui, qu'il y a de belles avancées dans le projet de loi.

Par contre, plusieurs mesures d'exception viennent saper tout ça. Ainsi, nous avons entendu ici, à la commission, que certains craignaient que la paix linguistique des dernières années ne soit ébranlée par ce projet de loi. Pendant cette paix, l'anglais faisait toute une remontée. J'ai aussi entendu en commission que la loi est consensuelle. Nous vous demandons officiellement de faire plutôt la meilleure loi possible, et oser un peu plus, par exemple, étendre les dispositifs de la Charte de la langue française aux cégeps.

Est-ce que la situation du français au Québec est raisonnable? À Montréal, vous connaissez tous et toutes la réponse. Nous croyons alors qu'une réforme dite raisonnable, comme le mentionnait notre premier ministre... je ne pense pas que c'est raisonnable. Nous sommes tous capables de faire mieux. Une réforme de notre Charte de la langue française, c'est un moment crucial pour <travailler tous...

Mme Alepin (Marie-Anne) : ... vous connaissez tous et toutes la réponse. Nous croyons alors qu'une réforme dite raisonnable, comme le mentionnait notre premier ministre... je ne pense pas que c'est raisonnable. Nous sommes tous capables de faire mieux. Une réforme de notre Charte de la langue française, c'est un moment crucial pour >travailler tous ensemble sur la pérennité du français, et c'est à vous, les décideurs, de faire ce que doit.

Dans ce mémoire, nous revenons brièvement sur quelques mémoires que nous avons déjà produits pour l'Assemblée nationale. C'est troublant, parce qu'en les relisant, nous avons constaté que nous aurions pu vous remettre, aujourd'hui, quelques-uns de ces mêmes mémoires, à quelques passages près, tellement la situation est demeurée inchangée, et les mêmes problèmes sont soulevés.

Nous vous proposons aujourd'hui plusieurs recommandations. Nous avons aussi beaucoup de questions, mais la Société Saint-Jean-Baptiste se porte volontaire pour poursuivre le débat avec vous, parce qu'on le sait qu'en 45 minutes on va seulement effleurer.

Donc, nous souhaitons une politique linguistique plus large afin d'inclure d'autres aspects qui ne font pas partie de cette loi. Camille Laurin disait à l'époque que la loi qu'il a présentée n'était qu'un départ et que ça prenait d'autres mesures pour pallier au recul du français.

C'est un projet de loi ambitieux, et les progrès sont réels en matière de langue du travail, de langue de la justice, de langue de l'administration ou des organismes publics, mais nous avons néanmoins certaines préoccupations et avons des réserves, quelques réserves, au sujet des initiatives qui touchent la francisation.

Enfin, la société propose principalement au gouvernement du Québec d'aller plus loin dans trois secteurs pour assurer la pérennité de notre nation en matière d'immigration, de langue d'enseignement et de culture.

Nous savons tous qu'un meilleur contrôle en immigration serait l'idéal pour protéger la langue française, et, pour nous, le gouvernement ne se sert pas suffisamment des pouvoirs existants dans ce domaine. Il est, en effet, plus important de sélectionner en grande majorité des individus maîtrisant déjà le français que de débattre de volume et de catégories.

Nous expliquons dans notre mémoire que l'État doit être plus vigilant et exercer davantage le contrôle sur l'immigration temporaire. Par exemple, le projet de loi n° 96 ne doit plus permettre aux personnes détenant un permis de séjour temporaire de contourner l'esprit de la loi 101 et d'envoyer leurs enfants dans les écoles anglophones publiques.

Nous demandons aussi que les dispositions similaires à celles de la loi 101 soient appliquées au cégep. Et aussi le surfinancement des institutions universitaires anglophones nous apparaît également incompatible avec les objectifs affichés du projet de loi n° 96.

Nous disons également que le gouvernement doit investir massivement en matière de promotion de la culture. Nous aurons beau un jour avoir la plus belle loi du monde et avoir un succès avec sa mise en application, nous sommes peu nombreux en Amérique du Nord à parler le français, et il est fort difficile de se mesurer à la culture anglophone américaine dominante. Il faut investir en culture, oui, mais il faudra bien éventuellement contrôler les ondes sur notre territoire. Le problème du respect des quotas dans les radios d'ici est loin d'être nouveau, vous le savez. Nous sommes heureux de constater que vous introduisez, dans le <projet de loi...

Mme Alepin (Marie-Anne) : ... de se mesurer à la culture anglophone américaine dominante. Il faut investir en culture, oui, mais il faudra bien éventuellement contrôler les ondes sur notre territoire. Le problème du respect des quotas dans les radios d'ici est loin d'être nouveau, vous le savez. Nous sommes heureux de constater que vous introduisez, dans le >projet de loi, le fait que la musique en français devrait être prioritaire dans les lieux qui relèvent de l'administration. Mais qu'en est-il des lieux publics comme les centres commerciaux, par exemple?

 Pour terminer, nous ne pourrons jamais, mais jamais nous accomplir collectivement tant que nos élus seront soumis à la supervision et à la gouvernance d'une autre nation. Il y a un gouvernement de trop. Si nous étions vraiment maîtres chez nous, on ne serait pas tous ici à discuter de virgules ou de changement de mots pour préciser un article de loi afin de préserver la langue officielle de notre nation. Il me semble que le rêve de toute nation est d'être libre et indépendante. Je suis certaine qu'il y en a quand même plusieurs ici qui rêvent de voir un Québec maître de son destin.

Nous croyons que les mesures annoncées dans le projet de loi n° 96, bien qu'appréciables, sont insuffisantes et nous réaffirmons que l'indépendance du Québec incarne une voie viable et pérenne en ce qui a trait à la protection du français sur notre territoire.

Et je voudrais terminer par ces quelques lignes puisqu'il me reste une minute : Et c'est en renforçant notre amour de la langue française, en la valorisant, en la parlant mieux, en l'écrivant mieux, et surtout en s'occupant de l'inacceptable pourcentage de 53 % d'analphabètes au Québec que nous consoliderons notre société en français. Merci pour votre attention.

La Présidente (Mme Thériault) : Merci, Mme Alepin, pour votre présentation. Sans plus tarder, je vais aller au bloc d'échange avec le ministre. Vous avez 17 minutes, M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente, Mme Alepin, Mme Meggs. Bonjour, merci d'être en commission parlementaire aujourd'hui et de venir présenter le mémoire de la Société Saint-Jean-Baptiste.

Écoutez, on est au début de la deuxième semaine et, bon, on a entendu plusieurs témoignages la semaine dernière. Et notamment, on a eu l'OQLF qui a publié une étude l'an passé, je crois, ou cette année, il y en a eu plusieurs, notamment sur le fait d'exiger à l'embauche la connaissance d'une autre langue, dans une proportion, à Montréal, de 63 %. On a eu également des gens qui sont venus nous dire que, bien, la langue maternelle à la maison déclinait. On a eu le démographe Sabourin qui est venu, on a parlé également de l'exemplarité de l'État, et le groupe qui vous suit va certainement nous en parler également.

D'un autre côté, on a certains groupes qui ont de la difficulté ou, en fait, qui nous disent : Le déclin du français, ce n'est pas avéré, on n'a pas de démonstration, ou ça n'existe pas. Alors, comment vous réagissez à cela, de se faire dire que c'est peut-être un mythe, le déclin du français au Québec, et ce n'est pas <démontré?

M. Jolin-Barrette : ... on a certains groupes qui ont de la difficulté ou, en fait, qui nous disent : Le déclin du français, ce n'est pas avéré, on n'a pas de démonstration, ou ça n'existe pas. Alors, comment vous réagissez à cela, de se faire dire que c'est peut-être un mythe, le déclin du français au Québec, et ce n'est pas >démontré?

Mme Alepin (Marie-Anne) : Bien, je vais répondre à votre question, après, je vais passer la parole à ma collègue. Bien, le déclin est perceptible vraiment chez M., Mme Tout-le-monde. Je veux dire, tout le monde a vu l'enquête, le bureau d'enquête du Journal de Montréal, par exemple. Je veux dire, c'est perceptible quand on va à Montréal. Je veux dire, on se fait servir une fois sur deux en anglais, il y en a beaucoup qui ne parlent pas français.

Mais ce qui est pire dans tout ça, c'est que, si on regarde même la dernière étude de l'OQLF, je pense, c'est la quinquennale, qui est sur la culture, et qui est sur les jeunes, à savoir qu'est-ce qu'ils consomment comme culture, est-ce que c'est en français, est-ce que c'est en anglais, il y a un schisme énorme. Je n'ai pas les chiffres, je pourrais aller vous les trouver, là, le temps que quelqu'un d'autre discute, mais il y a un schisme énorme. Il y a un désintérêt déjà en partant. Donc, qu'on dise que le français ne recule pas, c'est plutôt ça qui est un mythe.

• (10 h 50) •

Mme Meggs (Anne Michèle) : Moi, le point que la société essaie de faire passer, c'est qu'une politique efficace se base sur les recherches scientifiques, pas sur les anecdotes. C'est bien tentant, là, les anecdotes peuvent être très utiles pour expliquer les résultats d'une recherche, mais on a chacun notre histoire personnelle, et des amis qu'on a, puis des situations qu'on a vues. Baser une politique publique là-dessus est moins utile.

Ce que j'ajouterais, c'est qu'en plus la recherche scientifique pour... avoir la confiance de l'État et la confiance dans la recherche, d'être autonome. Donc, on mentionne dans notre rapport, un peu comme M. Sabourin et, je pense, même M. Lacroix, là, que ce ne serait pas mauvais que la fonction de la recherche soit sous la responsabilité, disons, du commissaire. L'office, on l'explique dans le mémoire, là... C'est bien tentant, là, quand on relève d'un ministre et d'un cabinet, là, de vouloir plaire le ministre et le cabinet. Ça va, c'est en partie la fonction de l'administration, mais ce n'est pas tout ce que l'administration a à faire.

Et le dernier point que je ferais, c'est que, malheureusement, on le mentionne un peu aussi dans le mémoire, les données de l'immigration et de linguistique, la plupart sont dépendantes du fédéral. On a des... Le recensement est fédéral. Dans la constitution, c'est fédéral, et ça veut dire qu'ils posent des questions en fonction des politiques fédérales. On ne peut pas... c'est très <difficile...

Mme Meggs (Anne Michèle) : ... linguistique, la plupart sont dépendantes du fédéral. On a des... Le recensement est fédéral. Dans la constitution, c'est fédéral, et ça veut dire qu'ils posent des questions en fonction des politiques fédérales. On ne peut pas... c'est très >difficile de faire ajouter des questions que nous autres, on aimerait peut-être savoir, comme... plutôt que le transfert linguistique de première génération, le transfert linguistique de deuxième génération. Ça pourrait être intéressant, mais ce n'est pas une statistique que StatCan va sortir régulièrement.

Donc, ça, c'est un problème et c'est clair que les éléments, là, que vous avez souligné, comme l'exigence de l'anglais à l'embauche... Écoutez, il y a bien des employeurs qui n'exigent même pas le français à l'embauche, mais beaucoup d'immigrants temporaires en particulier, là, qui arrivent puis il n'y a aucune exigence linguistique, on le souligne aussi. Et donc c'est une obligation, pour les fins d'inclusion, que ce soit des personnes qui ne parlent ni le français ni l'anglais ou que ce soit pour inclure tous et toutes les Québécoises et tous les Québécois, peu importe la langue d'origine, y inclut l'anglais, de participer pleinement à la société québécoise dans la langue commune. Donc, c'est un peu l'approche que la société aborde.

M. Jolin-Barrette : Peut-être une question et une sous-question, là, Mme Meggs, là, en lien de ce que vous venez de dire. Dans le fond, les indicateurs linguistiques, ce qui est important pour la société, c'est l'indépendance, notamment, rattachée aux indicateurs linguistiques. Donc, vous nous invitez à envoyer la recherche sur ces indicateurs-là du côté du commissaire à la langue. Actuellement, ce qu'on a prévu, c'est que les indicateurs allaient être développés avec l'approbation du commissaire à la langue. Donc, ça allait être l'OQLF qui allait mener la recherche, mais que ça allait être conjointement décidé avec le commissaire à la langue. Donc, vous nous invitez à envoyer ça au commissaire à la langue.

J'aimerais ça vous entendre, parce que vous dites : Dans les dossiers linguistiques, le fait que ça relève de l'OQLF, bien, l'administration, le politique et le cabinet peuvent s'en mêler. Est-ce que vous pouvez détailler davantage là-dessus? Parce que, publiquement, on l'a étayé. Il y a des études de l'OQLF qui ont été cachées pendant des années et des années. C'est ma collègue la ministre de la Culture actuelle qui a rendu publiques ces études-là. Est-ce que vous avez une expérience? Vous avez travaillé à l'OQLF à l'époque. Pouvez-vous nous en parler de ça?

Mme Meggs (Anne Michèle) : Mais pas à cette époque-là, mais plus récemment. Ce n'est pas les indicateurs comme tels, ce n'est pas des résultats comme tels, c'est l'interprétation des résultats. Et la tendance, souvent, c'était de... quand on a vu et préparé un rapport, que soit regardé si les résultats n'étaient pas aussi positifs qu'on aurait voulu ou si on... que, bon, bien, est-ce que vous avez analysé ceci? Allez chercher un échantillonnage de ça.

C'est de cette manière-là qu'ils essayaient de <tirer des...

Mme Meggs (Anne Michèle) : ... que soit regardé si les résultats n'étaient pas aussi positifs qu'on aurait voulu ou si on... que, bon, bien, est-ce que vous avez analysé ceci? Allez chercher un échantillonnage de ça.

C'est de cette manière-là qu'ils essayaient de >tirer des études, les résultats voulus, et c'est beaucoup de travail de retravailler et retravailler des études pour essayer qu'elles soient un peu moins négatives. Disons, là, les choses, les vraies affaires. Et donc ce n'est pas strictement de quels indicateurs, ce qui est très important, puis on n'en a quasiment pas en francisation du tout, et ça, c'est très complexe, mais les indicateurs qui sont utilisés par le fédéral et même le... et on est pris avec le recensement, même l'ISQ est pris avec le recensement.

M. Jolin-Barrette : Dans le projet de loi, ce qu'on fait, c'est qu'à l'article 145 on vient confier une responsabilité à l'Institut de la statistique du Québec d'aider le suivi de la situation linguistique du Québec, dont les indicateurs de l'usage du français dans la sphère publique par la population québécoise. Mais je comprends que vous voulez qu'on confie davantage de rôles à l'institut du Québec en matière de français.

Je vais juste vous poser une question sur un autre sujet, parce que, par la suite, je vais laisser le député de Sainte-Rose... du temps au député de Sainte-Rose. C'est sur la question des séjours temporaires, là. Dans votre mémoire, là, vous nous invitez... Actuellement, ce que la Charte de la langue française fait, c'est qu'on peut envoyer les enfants à l'école anglaise avec renouvellement, donc il n'y a pas de limite. Ce qu'on fait avec le projet de loi, c'est que, pour les travailleurs étrangers temporaires, on met une limite de trois ans, et, par la suite, ils doivent intégrer le réseau francophone. Vous, vous nous invitez à retirer cette disposition-là puis à dire : Tous les temporaires, les enfants doivent aller à l'école en français.

Mme Meggs (Anne Michèle) : Oui. Bien, c'est l'esprit de la charte originale que les personnes qui arrivent ici... Et on le fait parce qu'on regarde les tendances en matière d'immigration temporaire, et les tendances sont importantes, très importantes. Quand la charte a été élaborée au début, temporaire, c'était temporaire.

Maintenant, tout est mis en place pour encourager les temporaires de rester, mais leur arrivée, les conditions d'embauche, et tout ça, sont faites essentiellement... Les conditions de tous ces programmes d'immigration temporaire relèvent du fédéral. On pourrait faire un peu plus, on suggère certaines suggestions, mais la question... Et on l'a remarqué que, pour la plupart des temporaires dans le projet de loi n° 96, ils ne pourraient pas renouveler après trois ans. Ça, on l'a remarqué, sauf que, si un enfant s'inscrit à partir de deuxième année primaire, forcément, il va avoir fait la majeure partie de son primaire au Québec. Et dès que ses parents deviennent <citoyens...

Mme Meggs (Anne-Michèle) : ...de loi n° 96, ils ne pourraient pas renouveler après trois ans. Ça, on l'a remarqué, sauf que, si un enfant s'inscrit à partir de deuxième année primaire, forcément, il va avoir fait la majeure partie de son primaire au Québec. Et dès que ses parents deviennent >citoyens ou l'enfant... normalement, tu sais, ils deviennent ayants droit et ils vont pouvoir envoyer ses... toute sa progéniture dans les écoles anglaises. Même le...

Il y a un point intéressant dans notre mémoire, où on avait indiqué que la Société Saint-Jean-Baptiste, à cette table-ci, en 1977, là, avait même des réserves sur l'idée en soi de permettre des enfants, quelque enfant que ce soit, à continuer dans les... à s'inscrire dans les écoles anglaises, disant qu'on va le tolérer comme mesure temporaire sujette à révision, si ces dispositions nuisent en quoi que ce soit au développement et au rayonnement du français au Québec ou à l'intégration de la minorité anglophone à la vie communautaire du Québec. Donc, l'objectif, dès ce moment-là, de la société était d'intégrer tout le monde, y inclus les anglophones.

M. Jolin-Barrette : Je vous remercie. Je...

La Présidente (Mme Thériault) : Merci. Oui, Mme Alepin.

M. Jolin-Barrette : Je vais peut-être céder la parole. Allez-y.

La Présidente (Mme Thériault) : Oui, Mme Alepin, allez-y.

Mme Alepin (Marie-Anne) : Juste rajouter. J'aime ça aussi poser des questions à savoir est-ce que c'est normal, quand on a des nouveaux Québécois qui arrivent ou, en fait, des immigrants qui arrivent, puis ils s'en vont... C'est des francophones, mais ils préfèrent envoyer leurs enfants à Montréal dans une école en anglais, pour apprendre l'anglais. Mais après, ce qui se passe aussi, c'est qu'on développe la culture. Et puis vous savez comment c'est difficile, en ce moment, par rapport à notre positionnement en Amérique du Nord.

Donc, ça développe tout une nouvelle perspective où ces personnes-là s'en vont directement dans la culture anglophone. Donc, moi, je pense, quand on les accueille, il faut les accueillir aussi avec notre langue commune.

La Présidente (Mme Thériault) : Merci. Donc, M. le député de Sainte-Rose, il vous reste 4 min 45 s à l'échange.

M. Skeete : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci beaucoup pour votre présence aujourd'hui. Je suis assez ravi d'entendre le mot «cadeau» quand on parle de la langue française. J'ai perdu ma mère très jeune, puis le plus beau cadeau qu'elle m'a fait, c'est la langue française. Alors, assez d'accord avec vous. Ça me permet non seulement de m'épanouir au Québec mais ça permet aussi une compréhension plus subtile de la culture québécoise qu'on perd si on n'est pas adéquatement... on ne baigne pas adéquatement dans la langue.

• (11 heures) •

J'aimerais vous entendre parce que vous avez piqué ma curiosité, un peu comme le ministre, sur le commissaire indépendant. On le sait, là, le... En tout cas, une des plus grosses demande que je reçois, moi, en tant que responsable de la communauté d'expression anglaise, c'est de dépolitiser la langue. Je vous entends un peu dans le même écho, là, de dire : Enlevons la politique de ça et arrivons à des vraies données par des personnes indépendantes. Vous avez parlé aussi de statistiques qui <viennent du recensement fédéral...

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11 h (version révisée)

<17873 M. Skeete : ...anglaise, c'est de dépolitiser la langue. Je vous entends un peu dans le même écho, là, de dire : Enlevons la politique de ça et arrivons à des vraies données, par des personnes indépendantes. Vous avez parlé aussi de statistiques qui >viennent du recensement fédéral, assez intéressant aussi. C'est comme si on s'approprie une partie de l'immigration, on s'approprie une partie de la culture au Québec, une représentation à l'étranger. Ça fait que le Québec, déjà, prend beaucoup de place, mais ce que j'entends de vous, c'est que peut-être qu'il faudrait prendre une place aussi, côté statistiques, de se donner ce pouvoir-là de poser les questions qu'on veut.

Mais, pour nous ramener dans la réalité d'aujourd'hui, le gouvernement fédéral se sert beaucoup de ce qu'on appelle «première langue officielle parlée», le fameux p.l.o.p. Et il y a des chercheurs qui tentent de nous dire que le français n'est pas en déclin, qui utilisent cette donnée-là pour dire : Bien, non, en fait, ce n'est pas une variable. Je serais curieux de vous entendre là-dessus.

Mme Meggs (Anne Michèle) : Oui. C'est complexe, le domaine des données linguistiques. Mais c'est un peu le propos de la société par rapport à des données indépendantes, et le fait que le recensement de n'importe quelle nation va contenir des questions qui vont leur permettre de mieux avoir des informations utiles pour le type de politique publique qu'ils veulent mettre en place. Et la politique publique du gouvernement canadien est l'anglais et le français et, surtout, tu sais, des services en français à l'extérieur du Québec, et anglais ici, donc. Et, puisque la population francophone hors Québec est en diminution, et ils veulent quand même justifier des services en français au Canada anglais, ils gonflent, dans un sens, avec cet indicateur-là... Tant mieux pour nos collègues, là, ou nos compatriotes francophones hors Québec, mais ça veut dire qu'ils incluent plusieurs différentes réponses, à différentes questions, dans un même... pour créer un indicateur composite, qu'on dirait qu'ils gonflent les chiffres, dans un sens... bien, gonflent... tu sais, c'est-à-dire que ça sert, c'est utile pour eux autres, là, de leur point de vue de leur politique publique. Mais c'est... Et il est important que le Québec soit capable de poser les questions qui sont pertinentes pour notre politique linguistique.

M. Skeete : Si je comprends bien, le gouvernement fédéral, dans le but d'assurer une vitalité communautaire de la langue française extra Québec, pose des questions qui ont comme effet d'augmenter le nombre... ou, du moins, de favoriser l'inclusion d'un plus grand nombre de personnes de la minorité francophone. C'est quoi, l'impact de ça, au Québec?

Mme Meggs (Anne Michèle) : Bien, ça fait la <même...

M. Skeete : ... d'assurer une vitalité communautaire de la langue française extra Québec, pose des questions qui ont comme effet d'augmenter le nombre... ou, du moins, de favoriser l'inclusion d'un plus grand nombre de personnes de la minorité francophone. C'est quoi, l'impact de ça, au Québec?

Mme Meggs (Anne Michèle) : Bien, ça fait la >même chose pour la minorité anglophone.

M. Skeete : Je comprends.

Mme Meggs (Anne Michèle) : Bien, elles sont équitables. C'est une politique symétrique, bien, jusqu'à tout récemment, là, où apparemment qu'ils ont voulu bouger...

M. Skeete : Bien, ça, c'est un bon point, parce que vous dites que cette question-là vient d'une philosophie d'égalité symétrique des langues. Là, on reconnaît un changement...

Mme Meggs (Anne Michèle) : Québec et hors Québec.

M. Skeete : Oui, et là on reconnaît un changement, de la part du gouvernement fédéral, où est-ce qu'on reconnaît l'asymétrie.

Mme Meggs (Anne Michèle) : On verra. Bien, il y a eu des élections entre-temps. Là, le projet de loi est tombé. On verra. Et même avec le projet de loi qu'ils avaient, ça n'a pas été mis en place. On ne sait pas qu'est-ce que ça va donner. Ça me surprendrait bien gros, parce que...

La Présidente (Mme Thériault) : Et je dois mettre fin à l'échange, malheureusement, désolée.

M. Skeete : Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Thériault) : Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, pour votre bloc de 11 min 20 s.

Mme David : Merci beaucoup. Bonjour, mesdames, bienvenue, pour une ixième fois, sûrement. Ce n'est pas la première fois que vous venez, dans une commission parlementaire, parler de langue, en particulier.

En 2002, il y a eu la fameuse loi n° 104, sous le PQ, qui a remanié, justement, ces fameux pouvoirs de faire de la recherche, et que c'est passé du Conseil supérieur de la langue française à l'OQLF, qui a pris encore plus de pouvoirs. J'en ai parlé souvent, à l'étude des crédits, avec le ministre. Et puis là le conseil supérieur a dépéri, dépéri, dépéri. Finalement, il est transféré au commissaire. Mais on ne touche toujours pas à l'OQLF pour le pouvoir de la recherche, et, pour moi, c'est comme une sorte de point d'interrogation.

Faire de la recherche, vous le savez, hein, faire de la recherche, ça veut dire connaître les outils de recherche, connaître les indicateurs. Moi, j'aurais pensé, parce qu'on prône, depuis longtemps, la création d'un commissaire à la langue française... moi, je me serais imaginé, automatiquement, que la recherche allait là, ça... Un centre de recherche, faire de la recherche, là, vous le savez, ce n'est pas rien, ça prend beaucoup, beaucoup de compétences.

Alors, moi, je me demandais si... parce que vous avez dit : Ça devrait aller au Commissaire à la langue française. J'aurais le goût de poser la question au ministre, mais, comme je ne peux pas, je vous la pose à vous : Pourquoi vous pensez que ça reste encore à l'OQLF, en plus d'étendre les pouvoirs à plein, plein de choses, pour l'opérationnalisation des mesures du p.l. n° 96? Mais la recherche, c'est comme un autre volet.

Mme Alepin (Marie-Anne) : Je voudrais juste répondre en une phrase. Bien, justement, pour garantir la pérennité et la vitalité de la langue française, il ne faut pas que ça reste au sein d'un parti politique. Il faut dépasser tout ça, il ne faut pas qu'il y ait d'emprise et de mainmise. Mais je vous...

Mme Meggs (Anne Michèle) : Oui, non, c'est... Écoutez, le projet de loi fait énormément de changements dans beaucoup de différents domaines. Est-ce que c'est un élément <qui...

Mme Alepin (Marie-Anne) : ... d'un parti politique. Il faut dépasser tout ça, il ne faut pas qu' il y ait d'emprise et de mainmise. Mais je vous...

Mme Meggs (Anne Michèle) : Oui, non, c'est... Écoutez, le projet de loi fait énormément de changements dans beaucoup de différents domaines. Est-ce que c'est un élément >qui n'a pas été priorisé? Je ne peux pas répondre pour le ministre. Mais ce que je dirais, c'est que soit le commissaire ou même l'ISQ est quand même sous le ministre des Finances. Je ne pense pas que c'est le cas avec Statistique Canada, je pense que ça relève du Parlement. Et donc, l'objectif, c'est de...

Ceci étant dit, je pourrais ajouter, là, qu'il y a beaucoup de données qui, peu importe l'instance qui va s'en servir, viennent des données administratives, donc toutes les données sur la sélection et... sélection, voire les admissions, mais ça, c'est... sélection des immigrants, ça vient des données administratives. Les écoles, toutes nos données sur l'enseignement, et tout ça, en général, on peut mieux se fier sur ça. Et l'instance qui va être responsable de la recherche va être dépendante quand même des données qui viennent de différents ministères.

Mme David : On se comprend, on se comprend. Mais, enfin, l'idée du commissaire... Il y avait une autre idée aussi que nous avions soumise dans nos 27 propositions, c'est que l'OQLF... et vous faites référence à la dépendance-indépendance... on proposait un conseil d'administration. Il n'y a pas de conseil d'administration à l'OQLF. Quelque chose qui rend plus de transparence, d'imputabilité, qui se sépare un peu du gouvernement. Avez-vous une opinion là-dessus?

Mme Meggs (Anne Michèle) : Je pense que la société serait d'accord que... tout ce qu'on peut faire pour rendre les fonctions de l'office le plus indépendant possible. On mentionne dans notre rapport aussi, là, la question des plaintes, parce que les plaintes et même les enquêtes pourraient arriver auprès des entreprises qui sont névralgiques. Et, tu sais, on essaie de donner une subvention pour encourager un certain secteur, mais l'office découvre que ce secteur ne rencontre pas ses exigences linguistiques, ça devient plus délicat. Ça fait que c'est tout ce qui peut être fait. Si c'est meilleur, un autre type de gouvernance pour l'office, ça pourrait être une partie de solution.

Mme David : Merci beaucoup. Aussi, encore dans nos 27 propositions, on propose deux choses, on propose... parce que je sais, je connais votre opinion sur le collégial, et là où vous voudriez que le ministre aille, et qu'il a dit qu'il n'irait pas. Alors, vivons avec ces déclarations et celles du premier ministre et disons que nous proposons qu'il y ait trois cours suivis en français. Là, je pense à l'interaction, fort intéressante, dans votre mémoire, langue et culture. Alors, la langue, ce n'est pas que fonctionnel, c'est la culture aussi, et, si les cégépiens qui fréquentent les collèges anglophones <pouvaient...

Mme David : ... ministre et disons que nous proposons qu'il y ait trois cours suivis en français. Là, je pense à l'interaction, fort intéressante, dans votre mémoire, langue et culture. Alors, la langue, ce n'est pas que fonctionnel, c'est la culture aussi, et, si les cégépiens qui fréquentent les collèges anglophones >pouvaient suivre des cours, en français, d'histoire du Québec, sociologie, etc., dans ce qu'on appelle les humanités... Est-ce que vous avez une opinion sur le fait de suivre trois cours en français, toutes langues confondues, anglophones, allophones, francophones, et aussi de faire des stages d'immersion dans des milieux francophones?

• (11 h 10) •

Mme Alepin (Marie-Anne) : Moi, j'aurais envie de répondre par : Bien, peut-être que le gouvernement pourrait aussi changer d'idée, parce que ça fait quand même... bien, la semaine dernière, on est à la deuxième semaine... on entend quand même de plus en plus de gens qui disent que, bien, ce serait peut-être la solution pour garantir la pérennité de notre langue française, justement, d'étendre les dispositions de la loi 101 aux cégeps. Mais pour...

Mme David : Excusez-moi, mais ma question n'est pas celle-là. Moi, ma question, c'est donner des cours en français dans...

Mme Alepin (Marie-Anne) : Oui, oui, je comprends, mais c'était par rapport à... parce que vous dites : puisqu'il l'a déjà décidé. Bien, peut-être que ça peut changer. Bien, moi, des cours en français pour quiconque, moi, personnellement... Nous, on ne s'est pas prononcés sur ça, à la société, mais moi, je dirais, moi, je ne suis pas contre. Mais, par contre, quelqu'un qui a déjà tous ses acquis en français, reprendre d'autres cours en français, je ne sais pas... Il faudrait...

Mme Meggs (Anne Michèle) : Moi, j'ajouterais juste que je trouve que c'est curieux jusqu'à quel point on veut mettre plus de français dans les établissements anglophones, quand des établissements francophones suffiraient à la tâche.

Mme David : C'est votre point de vue. Je vais passer la parole, si vous voulez bien, à mon collègue de La Pinière.

La Présidente (Mme Thériault) : La Pinière, parfait. M. le député de La Pinière, il vous reste 4 min 40 s.

M. Barrette : Merci. Dans votre mémoire, vous... J'ai été un peu surpris, je dois vous avouer. À la page 16 de votre mémoire, vous considérez que l'existence de services à la communauté anglophone accélère l'anglicisation et vous prônez... ce n'est pas exactement comme ça comme vous le dites, mais ça revient à ça, qu'il faudrait s'assurer que tous les dispensateurs de services parlent français. Vous allez aussi loin que de suggérer que la tenue de dossiers se fasse exclusivement en français. Vous avez dit aussi dans votre présentation que vous prôniez la prise de décision basée sur des données les plus scientifiques possible, sur des études.

Alors, première question : En quoi l'existence de services de santé à la communauté anglophone vient angliciser le Québec?

Mme Alepin (Marie-Anne) : Bien, en fait, c'est juste qu'il ne faudrait juste pas que les droits, en fait, des services de santé en... Vous parlez des droits de santé, là, on parlait?

M. Barrette : Oui, oui, les deux...

Mme Alepin (Marie-Anne) : O.K. Bien, en fait...

M. Barrette : Deuxième, troisième paragraphes de votre page 16, là.

Mme Alepin (Marie-Anne) : Oui, c'est ça. En fait, tout simplement dire : Bien, le droit des services de santé en anglais ne doit pas juste être un prétexte, en fait, pour angliciser le milieu de <travail...

M. Barrette : ...le Québec?

Mme Alepin (Marie-Anne) : Bien, en fait, c'est juste qu'il ne faudrait juste pas que les droits, en fait, des services de santé en... Vous parlez des droits de santé, là, on parlait?

M. Barrette : Oui, oui, les deux...

Mme Alepin (Marie-Anne) : O.K. Bien, en fait...

M. Barrette : Deuxième, troisième paragraphes de votre page 16, là.

Mme Alepin (Marie-Anne) : Oui, c'est ça. En fait, tout simplement dire : Bien, le droit des services de santé en anglais ne doit pas juste être un prétexte, en fait, pour angliciser le milieu de >travail pour tout le personnel de la santé et le personnel de soutien. C'était tout simplement pour vous dire qu'il y comme une espèce de confusion avec... Bon, on sait qu'il y a le renforcement des exemplarités, les conformités, là, pour... C'est des aspects positifs pour la langue de la santé, mais, si c'est appelé à interagir avec la loi des services de santé et des services sociaux, qui prévoit le droit à des services en anglais, je veux dire, comment ça va se faire? Nous, en fait, ce qu'on dit, c'est qu'on souhaite que tout le monde puisse recevoir des services en français sans qu'il ait à le demander.

M. Barrette : Ça, je pense qu'on est tous d'accord là-dessus, là, puis ça, il n'y a pas de doute, et je pense... puis je dois vous dire très franchement, je pense que, du côté de la communauté anglophone, ils sont d'accord avec ça. Je ne pense pas que, dans la communauté anglophone, dans le territoire de santé où ils ont des services garantis, ce serait même... ça leur effleurerait l'esprit de ne pas donner l'accès de services en français. C'est ma perception de la communauté anglophone. Mais aujourd'hui, là, est-ce que vous considérez qu'il y a un problème?

Mme Alepin (Marie-Anne) : Bien, il faut clarifier, en fait, comment ça va se passer, ce processus-là, je veux dire, comment ça va coexister.

M. Barrette : Et ce qui existe actuellement, est-ce que vous considérez que ça doit changer?

Mme Alepin (Marie-Anne) : Bien, évidemment.

M. Barrette : Dans quel sens?

Mme Alepin (Marie-Anne) : Bien, on parle des soins de santé, le service...

M. Barrette : Oui, juste le... je parle juste... Le sujet que j'adresse... auquel je m'adresse, je m'excuse, parce que ça ne se dit pas en français, là, le sujet que j'apporte, là, c'est simplement le fait qu'il y a, au Québec, un secteur de la santé qui est garanti, dans certaines conditions, à la communauté anglophone. Est-ce que ça, actuellement, vous considérez que ça doit changer? Et, si oui, dans quel sens?

Mme Alepin (Marie-Anne) : Écoutez, ce qui doit changer, c'est la façon de faire. Nous, ce qu'on demande... En fait, c'est à vous de nous trouver les solutions, comment faire pour faire que la coexistence va bien se faire.

M. Barrette : Mais elle se fait bien. Vous ne trouvez pas qu'elle se fait bien actuellement?

Mme Alepin (Marie-Anne) : Bien non.

M. Barrette : Dans quel sens?

Mme Alepin (Marie-Anne) : Pas en ce moment. Je veux dire, il y a des gens qui peuvent encore se faire servir en anglais. Je veux dire, ce n'est pas normal, au Québec. On ne va pas rentrer dans les petites anecdotes, mais, je veux dire, ce n'est pas normal. Donc, justement, c'est pour ça que nous, ce qu'on demande, c'est de clarifier vraiment l'application des nouvelles dispositions afin de garantir les services de soins de santé en français, sans que quiconque ait à le demander, même chose pour les dossiers médicaux.

M. Barrette : C'est-à-dire, pour les... Écoutez, moi, mon vécu, là, et mon expérience, et ce que je constate dans le réseau, c'est que vous allez du côté anglophone et vous allez pouvoir recevoir des services en français. Et là, si vous considérez que ce n'est pas le cas, bien, j'aimerais qu'on me donne des données, là, moi, personnellement. Parce qu'il arrive, à un moment donné, là, où vont s'opposer les règles actuelles, qui garantissent à la communauté anglophone des services dans leur langue dans certaines circonstances. On a <préservé...

M. Barrette : ...si vous considérez que ce n'est pas le cas, bien, j'aimerais qu'on me donne des données, là, moi, personnellement. Parce qu'il arrive, à un moment donné, là, où vont s'opposer les règles actuelles, qui garantissent à la communauté anglophone des services dans leur langue dans certaines circonstances. On a >préservé ça à date. Moi, je pense qu'il faut continuer à préserver ça, ce qui ne veut pas dire qu'un francophone qui arrive à l'Hôpital Royal Victoria, maintenant qui est le CUSM, ça ne veut pas dire qu'il ne se fera pas soigner en français. Ça, c'est une première chose. Moi, je pense qu'il faut préserver ça. Je vous demande votre opinion.

La Présidente (Mme Thériault) : ...juste devoir...

M. Barrette : Deuxièmement, les dossiers en français, est-ce que c'est vraiment faisable?

La Présidente (Mme Thériault) : Je suis vraiment désolée, M. le député de La Pinière, je n'ai plus de temps.

M. Barrette : Je suis désolé moi aussi, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Thériault) : Plus de temps. Donc, on va aller à la députée de Mercier. Mme la députée de Mercier, pour votre 2 min 50 s.

Mme Ghazal : Merci. Merci beaucoup pour votre présentation et votre présence.

J'ai envie de vous parler de culture. Vous proposez, à la recommandation n° 26, de créer un conseil québécois de la radiodiffusion et des télécommunications, donc un CQRT, pour remplacer le CRTC. À Québec solidaire, dans notre programme, on a une demande historique, et on la fait toujours, c'est celle de rapatrier toutes les compétences du fédéral en communication et en culture et aussi de créer un organisme comme celui-là. Évidemment, vous l'avez dit, le meilleur moyen, c'est de faire l'indépendance pour protéger le français. À Québec solidaire, nous sommes, évidemment, d'accord avec ça. Mais pour ce qui est du rapatriement des compétences, la CAQ n'a rien fait, à date, par rapport à ça.

Selon vous, qu'est-ce que ça prendrait pour qu'on puisse créer un tel organisme et qu'on puisse avoir... contrôler nos ondes sur notre territoire?

Mme Alepin (Marie-Anne) : Bien, en fait, moi, je ne suis pas juriste, mais pour contrôler nos ondes, premièrement, ça va passer par l'indépendance, je veux dire, être maîtres de toutes nos lois. Et après, ça devient aussi international, là, se disputer les ondes. Donc, je n'ai pas de... Moi, je n'ai pas la solution, mais si quelqu'un ici a une solution...

Mme Ghazal : Mais, en créant le CRTQ, on n'a pas besoin d'attendre de faire l'indépendance, en attendant.

Mme Alepin (Marie-Anne) : Bien, c'est sûr, sauf que, premièrement, si on peut déjà... si le gouvernement peut déjà s'assurer que le CRTC... en fait, non, si le gouvernement peut déjà s'assurer qu'il y a déjà un respect des quotas... En ce moment, vous le savez, il y a déjà des façons de détourner les quotas. On met la musique en anglais bien, bien, bien tard le soir. Comme ça, on remplit déjà les normes du CRTC. Mais concrètement, pour moi, c'est complètement insensé que ce soit une autre entité qui vienne contrôler nos ondes sur notre territoire, mais...

Mme Ghazal : Mais ça prendrait de la volonté politique pour rapatrier ces pouvoirs-là, au moins, de travailler là-dessus, comme on le fait dans d'autres sujets. Vous dites... Tu sais, vous parlez de radio, télévision, la musique, et tout ça. Les jeunes, ils ne sont plus sur cette plateforme-là. Qu'est-ce qu'on doit faire pour aller les rejoindre? Par exemple, une politique de découvrabilité? Parce qu'ils sont sur d'autres plateformes.

Mme Alepin (Marie-Anne) : Bien, en fait, là, c'est sûr que... Moi, je pense qu'il faut faire vraiment une grosse relance pour vraiment valoriser la culture en français, par une campagne de type <Consommons...

Mme Ghazal : Les jeunes, ils ne sont plus sur cette plateforme-là. Qu'est-ce qu'on doit faire pour aller les rejoindre? Par exemple, une politique de découvrabilité? Parce qu'ils sont sur d'autres plateformes.

Mme Alepin (Marie-Anne) : Bien, en fait, là, c'est sûr que... Moi, je pense qu'il faut faire vraiment une grosse relance pour vraiment valoriser la culture en français, par une campagne de type >Consommons la culture québécoise francophone — d'ailleurs, c'est une des recommandations — puis la rendre plus attrayante. Parce que, bon, ça, ça ne va pas nécessairement passer par le projet de loi n° 96, mais il faut rendre cette langue attrayante, parce qu'elle se bute contre la langue, la culture anglophone qui nous entoure — elle est merveilleuse, mais ce n'est juste pas la nôtre — puis les jeunes, de plus en plus, vont s'y intéresser. Je veux dire, tout est là, je veux dire, les chiffres aussi, les données sont là, il y a les Netflix de ce monde, il y a... Tout est là, c'est tellement facile, sur le bout du téléphone.

La Présidente (Mme Thériault) : Et je dois mettre fin à l'échange, malheureusement. On a déjà dépassé d'une quinzaine de secondes. M. le député de Matane-Matapédia, pour votre temps, 2 min 50 s aussi.

M. Bérubé : Merci. Bienvenue, mesdames. C'est une vénérable institution qu'est la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal.

Parlons d'immigration. Je me souviens qu'en 2018 le premier ministre, en campagne électorale, avait dit cette phrase-choc suivante : il craignait que nos petits-enfants ne parlent pas français. Il a dit ça, il se plaignait que le gouvernement de son prédécesseur, Philippe Couillard, n'en avait pas fait assez pour s'assurer que les immigrants parlent français. Or, trois ans plus tard, ce gouvernement ne donne aucune cible quant à la francisation des immigrants. Ce n'est même pas dans le projet de loi. Le gouvernement de la CAQ a choisi d'occulter cette question-là. Aucune cible, aucune volonté de rendre obligatoire la connaissance du français. Quand vous dites, dans votre intervention, que vous croyez que ça n'ira pas assez loin, vous avez raison. Mais le gouvernement entend ce message-là et il a décidé de ne pas bouger sur l'immigration, de façon notable. Alors, j'aimerais que vous puissiez revenir sur cet enjeu-là fondamental.

• (11 h 20) •

Quand j'ai lu également, dans la même intervention, 2018, que la ministre maintenant responsable de la Métropole disait qu'elle n'était pas inquiète pour l'avenir du français à Montréal... Peut-être, dans sa circonscription de Pointe-aux-Trembles, présentement, mais quiconque habite à Montréal ou visite Montréal peut constater que ce n'est pas le cas. Le français est menacé à Montréal, et à Laval, et ailleurs. Alors, sur l'immigration, pourquoi est-il si nécessaire de connaître le français à l'arrivée?

Mme Meggs (Anne Michèle) : Ce qu'on fait ressortir dans le mémoire, c'est l'anglicisation de l'immigration qui arrive, que ce soit permanent ou temporaire. Et donc tous les oeufs sont mis dans le panier de la francisation, et on n'a aucune donnée qui indique, malheureusement, si à prendre un cours ou même prendre... faire un test de linguistique, ça va donner un transfert linguistique. Ce n'est pas...

M. Bérubé : Il vaut mieux contrôler à l'arrivée. Et le Québec a le droit de faire le choix politique d'accepter l'immigration francophone?

Mme Meggs (Anne Michèle) : Oui, permanent. Mais temporaire, il n'y a pas d'exigence linguistique.

M. Bérubé : Bien, nous, on le demande, en tout cas.

Mme Meggs (Anne Michèle) : Non, pas le Québec, pas le <temporaire...

M. Bérubé : Il vaut mieux contrôler à l'arrivée. Et le Québec a le droit de faire le choix politique d'accepter l'immigration francophone?

Mme Meggs (Anne Michèle) : Oui, permanent. Mais temporaire, il n'y a pas d'exigence linguistique.

M. Bérubé : Bien, nous, on le demande, en tout cas.

Mme Meggs (Anne Michèle) : Non, pas le Québec, pas le >temporaire. C'est-à-dire qu'on le demande quand ils veulent devenir permanents,mais quand ils arrivent... et ils sont ici pendant plusieurs années avant de demander la résidence permanente et ils vivent, souvent, beaucoup en anglais.

M. Bérubé : Ce que je veux vous dire, c'est que nous, au Parti québécois, on le demande que ça se passe en français. On l'a demandé, le ministre a entendu ça, on le demande à nouveau. Je veux dire, il y a tout le temps des bonnes raisons... Puis à l'époque, vous savez, c'était pour des diplomates qu'on avait fait ça. C'était une mesure un peu à part pour ça. Toute l'immigration devrait se faire en français au Québec, c'est un choix. Si on ne fait pas ce choix-là, bien, on n'assure pas l'avenir du français, selon moi, on choisit une érosion.

Mme Thériault : Et je dois mettre fin à l'échange sur ces paroles, M. le député de Matapédia, Matane-Matapédia. Merci, Mme Alepin et Mme Meggs, de votre passage en commission parlementaire.

Nous allons maintenant suspendre quelques instants... (panne de son) ...au prochain groupe de prendre place. Merci.

(Suspension de la séance à 11 h 22)

> (Reprise à 11 h 29)

La Présidente (Mme Thériault) : Bonjour. Donc, nous reprenons nos travaux. Et nous recevons maintenant le Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec, M. Christian Daigle, le président général. Vous allez faire la présentation, vous avez à peu près une dizaine de minutes. Je vais vous demander de nous présenter la personne qui vous accompagne, et, par la suite, les échanges avec les parlementaires, en commençant par le ministre, vont se faire. Donc, la parole est à vous, bienvenue au Parlement.

Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec (SFPQ)

M. Daigle (Christian) : Parfait. Merci, Mme la Présidente. Alors, je m'appelle Christian Daigle, président général du Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec. Je suis accompagné par M. Louis-Joseph Saucier, conseiller au service de la recherche et spécialiste au niveau de la langue française dans notre organisation.

• (11 h 30) •

Alors, Mme la Présidente, MM. et Mmes les députés, M. le ministre, le français est fragile dans notre coin de pays, en <Amérique du Nord même, je pourrais dire...

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11 h 30 (version révisée)

<      M. Daigle (Christian) :...suis accompagné par M. Louis-Joseph Saucier, conseiller au service de la recherche et spécialiste au niveau de la langue française dans notre organisation.

Alors, Mme la Présidente, MM., Mmes les députés, M. le ministre, le français est fragile dans notre coin de pays, en >Amérique du Nord même, je pourrais dire. Les projections de l'Office québécois de la langue française, c'est qu'entre 2016 et 2036, la proportion de francophones, pour la langue parlée, pourrait passer de 82 % à environ 75 %. Plusieurs volets sont importants pour protéger le français au Québec : la langue de l'enseignement, la langue de travail, la langue du commerce, mais l'exemplarité de l'État est essentielle et centrale pour ce faire. C'est la langue commune au Québec. Le mémoire du SFPQ porte sur cette question, sur l'exemplarité de l'État. Nous en faisons une bataille, au SFPQ, depuis plusieurs années. Nous sommes un acteur de premier plan dans ce dossier et avec différents partenaires également à travers l'ensemble de la société québécoise. En représentant des dizaines de milliers de travailleurs et de travailleuses au sein de l'appareil d'État qui donnent des services au quotidien aux citoyens et citoyennes du Québec, le SFPQ veut notamment protéger leur droit de travailler en français.

Le constat général : c'est l'unilinguisme qui a été annoncé, mais on se retrouve plutôt avec un bilinguisme de fait. Le français est notre langue officielle depuis 1974, la loi 101, adoptée en 1977, avec son préambule qui nous fait mention qu'on est résolus à faire du français la langue de l'État. Mais, dans les faits, ce n'est pas l'unilinguisme autour de notre langue officielle qui s'est instauré dans l'administration publique, mais un bilinguisme institutionnel. En 2019, après des pressions politiques, au niveau du SFPQ, pour demander un portrait des pratiques linguistiques de l'administration, le Conseil supérieur de la langue française a publié une étude qui a révélé que 34 % des ministères et organismes de l'administration n'avaient toujours pas procédé à l'adoption d'une politique linguistique. Bref, pas de directive claire pour les pratiques linguistiques.

L'étude du Conseil supérieur de la langue française et notre étude, notre propre étude au niveau du SFPQ, ont également révélé que les ministères n'avaient soit pas de politique, soit qu'elle n'était pas appliquée, et même que les employés n'étaient pas ou peu au courant du fait français et de la pratique qui devait être instaurée à travers chaque ministère et organisme.

Il existe aussi des problèmes avec les exigences linguistiques autour des embauches et des promotions au sein même de l'appareil public. Trop souvent, la connaissance de l'anglais est nécessaire pour obtenir une promotion pour nos membres. Ça devient un frein à ces gens-là, alors que, dans les faits, il n'est pas nécessaire d'avoir une connaissance de l'anglais à un tel niveau. En juin, les résultats d'une vérification ponctuelle de la Commission de la fonction publique l'ont clairement démontré. Les recommandations portaient sur la nécessité d'exiger l'utilisation de l'anglais, mais n'avaient pas cette prétention-là dans les faits. Dans l'enquête du SFPQ, 18 % des gens questionnés ont répondu que les promotions liées à leur emploi étaient réservées aux personnes bilingues, alors que l'intention ne devait pas y être. Être unilingue francophone ne devrait pourtant pas être pris comme un handicap pour une progression de carrière dans notre fonction publique.

Comment nous accueillons maintenant le <projet de loi...

M. Daigle (Christian) : ... 18 % des gens questionnés ont répondu que les promotions liées à leur emploi étaient réservées aux personnes bilingues, alors que l'intention ne devait pas y être. Être unilingue francophone ne devrait pourtant pas être pris comme un handicap pour une progression de carrière dans notre fonction publique.

Comment nous accueillons maintenant le >projet de loi n° 96 au niveau de l'exemplarité de l'État? À première vue, le projet de loi n° 96 semble enfin faire la part belle à l'exemplarité de l'État en matière d'utilisation du français, mais il y a une faille majeure, et on y reviendra un petit peu plus tard. Dans les notes explicatives du projet de loi, on dit : «donne ainsi à l'administration le devoir d'utiliser le français de façon exemplaire et exclusive, sous réserve de certaines exceptions», et c'est là que, pour nous, il y a un problème. Toutefois, le SFPQ recommande d'adopter les dispositions du projet de loi pour jeter les bases de l'utilisation exclusive du français dans l'administration, tant à l'oral qu'à l'écrit, dans un périmètre un peu élargi de l'administration, et également pour les services publics et les sous-traitants.

Afin que l'unilinguisme en français prenne forme et soit soutenu par des institutions, le SFPQ recommande d'adopter les dispositions du projet de loi pour l'instauration d'une politique linguistique de l'État, pour la création d'un ministère de la langue française, pour la création d'un poste de commissaire à la langue française, pour accroître le champ d'action de l'Office québécois de la langue française à la mise en oeuvre des programmes de conformité de l'administration.

Le SFPQ recommande également d'adopter les dispositions pour l'utilisation exclusive du français par le personnel de l'administration dans leurs communications au sein de l'État, pour la reddition de comptes obligatoire des organismes de l'administration pour qu'ils dénombrent le nombre de postes où la connaissance d'une autre langue est attendue, pour favoriser les possibilités de recours, pour tous les travailleurs et travailleuses du Québec, contre les exigences linguistiques indues de la part de leur employeur.

Le SFPQ est également favorable à certaines exceptions légitimes à l'unilinguisme français de l'État, entre autres, pour les autochtones, en établissant, au sein de l'État, un service d'interprétariat pour les langues autochtones dans les services publics de l'administration, pour les ayants droit à l'enseignement en anglais, pour les nouvelles personnes arrivantes, en allongeant le sursis prévu à deux ans, plutôt que six mois, et en établissant au sein de l'État un service d'interprétariat de plusieurs langues pour faciliter leur accès aux services publics et leur intégration dans la société québécoise, finalement, en matière de santé et sécurité publique, et pour faciliter les relations internationales également.

Là où le bât blesse et où que nous pensons que le projet de loi pourrait faire du surplace pendant plusieurs décennies, c'est avec le deuxième alinéa de l'article 22.2, qui se veut une faille béante dans l'exemplarité de l'État. Le projet de loi n° 96 prévoit toutefois de créer un autre statut d'ayants droit pour une multitude de personnes qui ne font pas partie des ayants droit à l'enseignement en anglais, communautés historiques anglophones, des peuples autochtones ou des nouveaux arrivants, et qui pourraient réclamer des services gouvernementaux en anglais toute leur vie avec tous les organismes publics avec lesquels ils ont déjà correspondu en anglais. C'est le SFPQ qui a vu en premier cette problématique dans le projet de loi.

Et, autrement dit, pour une personne établie au Québec depuis 10 ans, elle pourrait avoir <communiqué en...

M. Daigle (Christian) : ... en anglais toute leur vie avec tous les organismes publics avec lesquels ils ont déjà correspondu en anglais. C'est le SFPQ qui a vu en premier cette problématique dans le projet de loi.

Et, autrement dit, pour une personne établie au Québec depuis 10 ans, elle pourrait avoir >communiqué en anglais avec un maximum de ministères et d'organismes publics, et ça lui donnerait le droit à un laissez-passer pour une vaste palette de services gouvernementaux en anglais aussi longtemps qu'elle le souhaiterait. Malgré les effets d'annonce autour du projet de loi sur l'exemplarité de l'État, cette clause d'antériorité viendrait donc, dans les faits et pour l'essentiel, cimenter le bilinguisme de l'État québécois pour des décennies.

Le recours aux services gouvernementaux en anglais est une pratique très répandue au Québec. À titre comparatif, selon les dernières statistiques, 7,5 % de la population du Québec avait l'anglais comme langue maternelle, tandis que 10,4 % des élèves du préscolaire, du primaire et du secondaire étaient admissible à l'enseignement en anglais. En réponse à notre demande d'accès pour connaître les conséquences possibles de 22.2, Retraite Québec nous a indiqué que la proportion des citoyens qui ont l'anglais comme langue de correspondance est de 15,4 %; à la RAMQ, 30,2 %.

En plus, en s'appliquant indépendamment d'un organisme à l'autre, on viendrait créer une hydre où certains organismes devraient gérer des cas d'autorisation aux services en anglais qui ne seraient pas les mêmes que dans d'autres organismes. Un beau fouillis au niveau gouvernemental de même que pour les citoyens qui auraient des droits dans certains ministères, mais pas dans d'autres. Prenons l'exemple d'une personne qui arrive, Régie de l'assurance maladie du Québec, elle a communiqué en anglais, elle a un droit. Plus tard, elle arrive à sa pension, mais la Régie des rentes n'a jamais communiqué avec elle, donc elle serait due pour être servie en français dans cet autre ministère. Pour nous, c'est incompatible.

Devant les difficultés d'application sur le droit du deuxième alinéa s'étendant d'un organisme à l'autre par des registres communs ou de toute autre manière, on irait même jusqu'à accroître l'anglicisation de l'administration publique. Nous proposons donc d'amender le projet de loi pour retirer la clause d'antériorité ou de restreindre sa portée. Nous ne faisons pas juste que critiquer, nous avons des solutions.

Il pourrait y avoir une clause de temporisation de trois ans avant de passer aux services en français. Il pourrait également y avoir une exception pour les personnes âgées. Pendant ces trois ans, on pourrait faciliter l'accès de ces personnes à des programmes de francisation, à des services d'interprétariat dans plusieurs autres langues que l'anglais, à des modalités de procuration auprès d'un ou des mandataires. Ainsi, pour faciliter leurs communications avec les services publics, nous aurions différentes solutions. De meilleures avenues sont possibles que de simplement reconduire pour des décennies les erreurs du passé. Cet amendement au projet de loi est absolument essentiel si l'on veut mettre en oeuvre sérieusement l'exemplarité de l'État par ce projet de loi.

Après l'entrée en vigueur de la loi, il faudra également s'assurer que le ministère de la Langue française consulte le SFPQ avant d'approuver les directives soumises par les ministères et organismes pour établir dans quelles circonstances ils peuvent déroger à l'unilinguisme du français. Il faudra également s'assurer que l'ensemble des employés soient adéquatement informés quant à la <portée...

M. Daigle (Christian) : ... de la loi, il faudra également s'assurer que le ministère de la Langue française consulte le SFPQ avant d'approuver les directives soumises par les ministères et organismes pour établir dans quelles circonstances ils peuvent déroger à l'unilinguisme du français. Il faudra également s'assurer que l'ensemble des employés soient adéquatement informés quant à la >portée des différents articles du projet de loi. Enfin, si on veut donner un véritable coup de barre et qu'on veut démontrer notre sérieux avec ce projet de loi, il faut adopter ces principes, sauf l'article 22.2 qui doit être remanié. Sur ce, je vous remercie de votre attention et de votre écoute.

• (11 h 40) •

Mme Thériault : Merci, M. Daigle. Donc, sans plus tarder nous allons passer au premier bloc d'échange avec M. le ministre. La parole est à vous.

M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. M. Daigle, M. Saucier, merci d'être présents en commission parlementaire, et je tiens à souligner la qualité du mémoire du SFPQ et aussi, au fil des années, votre cohérence en faveur de la défense de la langue française. Je crois que, comme employés de l'État, à juste titre, vous avez, au fil des années, été cohérents avec vos positions et démontré l'importance, également, pour l'État québécois aussi d'être un vecteur, un, de préservation, de protection de la langue, mais également de promotion. Alors, pour ça, je tiens à souligner la qualité de votre travail et vous féliciter également pour le mémoire.

Vous l'avez abordé un peu au début de votre intervention, en termes de bilinguisme institutionnel, donc, bon, il y a eu l'étude du Conseil supérieur de la langue française qui est sortie en... je pense, septembre, octobre 2019, quand j'arrivais comme ministre de la Langue française. Vous avez réalisé un sondage auprès de vos membres. Ce qui ressort beaucoup de ça, c'est que, bon, la politique linguistique, elle n'est pas connue, elle n'est pas appliquée, les employés de l'État ne sont pas au courant, les gestionnaires ne font pas de suivi par rapport à ça. Dans le fond, c'est un peu laissé à la va-comme-je-te- pousse au sein de l'État québécois.

On se retrouve dans des situations également où c'est les employés de l'État qui sont un peu les arbitres de quand est-ce que j'utilise le français ou quand est-ce que j'utilise une autre loi. Il y a eu une approche au sein de l'État, je pense que vous décrivez, qui est très... une approche client. Donc, les gestionnaires disent : Bien, c'est une clientèle, donc vous utilisez la langue de la clientèle sans se soucier de la politique linguistique, tout ça.

Je voudrais qu'on revienne, là, sur ce bilan-là, là, parce que moi, c'est quelque chose qui me préoccupe grandement, puis c'est pour ça que je souhaite rendre l'État exemplaire. Donc, votre constat, il est à l'effet qu'on doit agir.

M. Daigle (Christian) : Tout à fait. L'État est le plus gros employeur au Québec. Nous devons être exemplaires, nous sommes même la porte d'entrée pour toute personne qui arrive de l'extérieur aussi. Donc, l'exemplarité de l'État est nécessaire dans ces circonstances-là, et nos gens sont trop souvent laissés à eux-mêmes. Vous l'avez dit, M. le ministre, c'est les gens souvent qui doivent se dire : Bien, est-ce que j'applique, je n'applique pas, comment est-ce que ça fonctionne, même lorsqu'il y a des politiques qui sont claires, même au niveau de la Régie de l'assurance maladie du Québec, où est-ce qu'on disait qu'on allait garder un statut langue deux, langue anglophone pour un certain temps, et qu'on devait changer par la suite. Dans les faits, la personne ne change jamais son statut de langue.

Alors, pour nous, on n'a pas le choix d'être <exemplaires...

M. Daigle (Christian) : ... doivent se dire : Bien, est-ce que j'applique, je n'applique pas, comment est-ce que ça fonctionne, même lorsqu'il y a des politiques qui sont claires, même au niveau de la Régie de l'assurance maladie du Québec, où est-ce qu'on disait qu'on allait garder un statut langue deux, langue anglophone pour un certain temps, et qu'on devait changer par la suite. Dans les faits, la personne ne change jamais son statut de langue.

Alors, pour nous, on n'a pas le choix d'être >exemplaires et d'aller vraiment au maximum de ce qu'on peut faire et de ce qu'on doit faire. Nous sommes l'unicité francophone en Amérique du Nord, et on doit le demeurer. Et, pour ça, on doit se donner des moyens qui sont clairs pour nous là-dessus. Il faut que les gens soient au courant.

Souvent, comme vous le disiez également, c'est selon la volonté, des fois, du ministre, ou du ministère plutôt, ou des employeurs, des gestionnaires, à savoir est-ce qu'on va informer les employés des politiques linguistiques qu'il peut y avoir. Pour nous, on ne peut pas continuer comme ça. Nos gens ne sont pas des personnes qui sont décisionnelles. C'est des gens qui sont là pour exécuter. Puis ce n'est pas péjoratif, ce que je dis. C'est des personnes qui ont à exécuter des tâches, qui le font très bien. Mais, pour ça, ça prend d'avoir des directives qui sont claires... qui sont claires également.

Alors, ce qu'on espère avec le projet de loi, c'est une mise en oeuvre de la part du gouvernement à travers tous les ministères et organismes pour que ce soit connu et qu'on applique cette exemplarité-là du français dans les services publics.

M. Jolin-Barrette : Et c'est l'objectif. C'est pour ça qu'on amène une politique linguistique de l'État qui va être développée par le ministère de la langue française et qui va être appliquée à l'ensemble des ministères et des organismes. Alors, je crois comprendre de votre mémoire que vous êtes en accord avec la politique linguistique, le fait qu'il y ait un ministère de la langue française, le fait qu'il y ait un commissaire à la langue française. Vous êtes en accord également avec le renforcement de l'article 46 également dans la Charte de la langue française, mais vous avez un bémol, puis vous l'avez exprimé tout à l'heure, relativement aux dispositions sur la clause d'antériorité qu'on est venu insérer.

J'aimerais ça qu'on ait une discussion plus approfondie sur ce volet-là, parce qu'actuellement quelqu'un qui appelle au sein du gouvernement du Québec peut théoriquement se faire servir dans une autre langue que le français. Il n'y a pas vraiment de balise. Bah! Il y a une politique linguistique gouvernementale, mais, des fois, elle n'est même pas là. Nous-mêmes, au sein du ministère de la Justice, on est en train de la réviser parce qu'il y a des lacunes également. Parlez-nous de cet élément-là, parce que l'objectif est de faire en sorte que l'État soit exemplaire, mais de faire aussi en sorte de pouvoir préserver les droits de la communauté anglophone, des ayants droit. Alors, explicitez-nous ça, là, votre bémol-là, sur le projet... la proposition de projet que nous avons.

M. Daigle (Christian) : C'est que l'article 22, le deuxième alinéa de 22.2 ne s'adresse pas à ces groupes-là qui ont droit d'être servis en anglais, qui ont historiquement un droit qui est prévu. Ça s'adresse aux personnes, les nouveaux arrivants qui arrivent au Québec et qui, de par la nature et de par, souvent, l'approche client que nous, nous dénonçons... même la nature même de ces termes-là, ce n'est pas une approche client. Si je suis un client, c'est que j'ai le choix d'aller à un endroit ou à un autre. Excusez-moi de diverger un petit peu, là, mais j'ai le droit d'aller à un endroit ou à un autre pour aller me faire servir. Je peux aller dans un garage, je peux aller dans un autre garage. Je vais être un client pour eux autres. Je peux aller à une compagnie d'assurance ou une autre compagnie d'assurance.

Au niveau des services gouvernementaux, nous servons tous les citoyens. Nous sommes la seule porte d'entrée. Donc, ce n'est pas des <clients...

M. Daigle (Christian) : ... la nature même de ces termes-là, ce n'est pas une approche client. Si je suis un client, c'est que j'ai le choix d'aller à un endroit ou à un autre. Excusez-moi de diverger un petit peu, là, mais j'ai le droit d'aller à un endroit ou à un autre pour aller me faire servir. Je peux aller dans un garage, je peux aller dans un autre garage. Je vais être un client pour eux autres. Je peux aller à une compagnie d'assurance ou une autre compagnie d'assurance.

Au niveau des services gouvernementaux, nous servons tous les citoyens. Nous sommes la seule porte d'entrée. Donc, ce n'est pas des >clients qu'on sert, c'est des citoyens. On a adopté l'approche client pour des raisons de justifier la numérisation ou le décomptage du nombre de dossiers traités. Alors, pour nous, ce qu'on doit faire, c'est de traiter avec des citoyens. Ces citoyens-là sur lesquels on a donné un droit d'être servi en anglais à travers les années sont des personnes qui arrivent au Québec, qui, souvent, l'anglais ou le français ne sont même pas leur langue de départ, et on les met en anglais pour faciliter la chose. Alors, ces gens-là devraient avoir eu des cours de francisation qui, malheureusement, se sont perdus avec le temps, qu'on devrait réinstaurer. Ces gens-là auraient dû s'intégrer à la société québécoise car, en venant ici, ils savaient que c'était une société qui était francophone. Donc, ce qu'on veut, nous, c'est ramener ce droit-là et ce service-là en français qui doit se faire, parce que les gens sont... doivent, à ce moment-là dans certains endroits, être servis dans la langue également quand on arrive.

Je viens du ministère de l'Aide sociale, plus particulièrement du centre du recouvrement, et, lorsqu'on avait des gens qui parlaient russe, qui parlaient espagnol, moi-même, je parlais en anglais, bien, on donnait des dossiers dans ces langues-là, alors que ce n'est pas ça qui est prévu présentement, ce n'est pas ça qui devrait se faire. Mais, pour faciliter le travail, pour avoir une approche plus proche de ces gens-là, bien, on demandait aux gens d'utiliser la langue. J'avais un... excusez-moi l'anglicisme, ça fait bizarre... un «caseload», j'avais un inventaire d'environ 3 000 à 5 000 dossiers uniquement en anglais. Je travaillais 100 % du temps en anglais. Le seul temps que je parlais français, c'était pendant mes pauses ou l'heure du dîner. Ce n'est pas normal, selon moi, parce que ces gens-là ne sont pas des gens qui étaient historiquement avec un droit. C'est ça, la différence.

M. Jolin-Barrette : M. Saucier, allez-y.

M. Saucier (Louis-Joseph) : Puis, en complétant ce que dit notre cher président du SFPQ, là où le bât blesse, avec, justement, l'exception telle qu'elle est tournée, avec le deuxième alinéa de 22.2, c'est que ce ne serait pas un nouveau statut d'ayant droit pour les ayants droit en enseignement anglais, pour lesquels on est déjà favorables à l'extension de leurs droits à celui des services gouvernementaux de façon plus large. Ce ne serait pas non plus un droit pour les nouveaux arrivants, alors qu'il y a déjà une disposition qui le prévoit, puis d'ailleurs où on propose même d'allonger le sursis à deux ans et de l'accompagner par des services d'interprétariat dans d'autres langues, d'ailleurs, que l'anglais. Ce ne serait pas non plus des gens qui peuvent bénéficier de l'exception en tant qu'autochtone, là où d'ailleurs aussi on propose d'ajouter des modalités de services d'interprétariat, d'instaurer un service d'interprétariat au gouvernement du Québec dans des langues autochtones.

Non, ce serait pour reconduire, toute la vie durant, à un droit, un autre statut d'ayant droit aux services en anglais, ce qui correspondrait un peu à reconduire, malheureusement, les erreurs du passé que de s'être confiné aux services en anglais dès que c'était un peu <difficile...

M. Saucier (Louis-Joseph) : ... à un droit, un autre statut d'ayant droit aux services en anglais, ce qui correspondrait un peu à reconduire, malheureusement, les erreurs du passé que de s'être confiné aux services en anglais dès que c'était un peu >difficile d'offrir des services en français, alors que nous, on n'arrive pas les mains vides, on a des propositions qui sont plus porteuses en ce sens-là.

M. Jolin-Barrette : J'ai deux questions, avant de céder la parole à mes collègues, particulièrement sur ce point-là. Vous nous dites, pour les nouveaux arrivants... Actuellement, ce qu'on a prévu dans le projet de loi pour l'accueil, c'est une période transitoire de six mois où l'État pourrait accueillir dans une autre langue que le français. Donc, ça ne veut pas nécessairement dire en anglais, ça veut dire... ça peut être en mandarin, ça peut être en portugais. Mais tout le monde nous dit : Assurez-vous, dès le départ, de bien intégrer en français les personnes immigrantes.

Alors, le fait d'étendre de six mois à deux ans, comme vous le proposez, ce n'est pas un peu contradictoire sur l'intégration des personnes immigrantes, si déjà l'État continue de communiquer pour une période de deux ans, ce qui est quand même assez long, dans une autre langue que le français?

M. Saucier (Louis-Joseph) : Sous cet aspect-là, ce qu'on dit, c'est... Quand on dit six mois, c'est à partir du moment où est-ce que la personne arrive au Québec. Le temps de s'établir, le temps de se trouver un travail, le temps de prendre des cours de francisation, en dedans de six mois, je trouve que c'est très rapide pour s'intégrer à une nouvelle société. Souvent, les gens vont venir d'un endroit peut-être qui n'est pas comparable à l'ensemble de la société québécoise. Donc, il faut s'acclimater également un peu à l'environnement et à la culture aussi. C'est pour ça que nous, on prévoyait qu'un deux ans serait une bonne transition à ce moment-ci.

M. Jolin-Barrette : Juste une sous-question là-dessus, dans les autres États dans le monde, là, qui reçoivent de l'immigration, là, c'est plutôt rare qu'on va parler dans la langue... dans une langue autre aux personnes immigrantes, alors qu'ils intègrent un État national?

• (11 h 50) •

M. Saucier (Louis-Joseph) : C'est possible. On n'a pas fait d'études à ce niveau-là, mais nous, ce qu'on pense, c'est que ça va permettre aux gens de se sentir peut-être mieux accueillis à ce moment-là. Donc, on espère pouvoir, justement, aider un petit plus loin, puis je vais laisser mon collègue peut-être compléter rapidement sur la réponse.

M. Daigle (Christian) : Puis sur le fait que l'État puisse s'adresser dans d'autres langues que la langue officielle, effectivement, ce sont des exceptions. Mais nous, le SFPQ, on s'est montrés favorables à plusieurs exceptions puis on propose même des modalités pour que ce soit plus riche, mais que ça ne tombe pas nécessairement... ou que ça ne tombe pas que dans l'ornière de l'anglicisation étatique. Mais, par contre, autant où, oui, on est favorables à certaines exceptions, autant on croit que 22.2, deuxième alinéa, devrait être amendé pour ne pas reconduire, par contre, une anglicisation de l'administration pour des décennies à venir tout en mettant en oeuvre ce qui pourrait être un aménagement linguistique tout à fait exemplaire, qu'on souhaiterait voir dans d'autres provinces et dans d'autres États.

M. Jolin-Barrette : Dernière question rapide avant de céder la parole. Vous, justement, sur 22.2, vous dites : Bien, écoutez, ça devrait être une clause d'antériorité qui prend fin après trois ans, <donc une...

M. Daigle (Christian) :...de l'administration pour des décennies à venir tout en mettant en oeuvre ce qui pourrait être un aménagement linguistique tout à fait exemplaire, qu'on souhaiterait voir dans d'autres provinces et dans d'autres États.

M. Jolin-Barrette : Dernière question rapide avant de céder la parole. Vous, justement, sur 22.2, vous dites : Bien, écoutez, ça devrait être une clause d'antériorité qui prend fin après trois ans, >donc une disposition transitoire, une crépusculaire trois ans et ça prend fin, et une exception pour les personnes âgées. Je voudrais vous demander : qu'est-ce qu'une personne âgée? Parce que moi, ma fille de quatre ans, elle trouve que je suis âgé. Donc, c'est quoi, une personne âgée?

M. Daigle (Christian) : On ne veut pas vous dire aujourd'hui que c'est 65 ans, c'est 70 ans. Ça, à partir du moment où est-ce que vous accepterez de modifier 22.2, on pourra en rejaser, si vous le souhaitez. Parce qu'on sait qu'à 65 ans il y a des gens qui sont encore très actifs. Il y a des gens qui prennent leur retraite puis qui retournent aux études. Il y a des gens qui, à 75 ans, sont encore très actifs également. Pour nous, c'est de dire : Les gens qui ont atteint un certain âge, mais, tu sais, qu'on voit que c'est plus difficile, bien, on pourrait, à ce moment-là, avoir une bienveillance pour ces personnes-là.

On ne voulait pas les laisser avec une clause de trois ans et ne plus avoir rien après, donc, que ces gens-là vivent une certaine insécurité à l'aube d'une période où est-ce que c'est la vieillesse qui avance un petit peu plus... un peu plus vite. Donc, on n'a pas voulu statuer sur l'âge à ce moment-là. Et ça, on laisse... On pourra en discuter, si vous le souhaitez, puis on va être très ouverts, à ce moment-là, à regarder les possibilités là-dedans. Mais ce qu'on voulait, c'est de permettre à tout le monde d'être quand même... d'avoir un suivi quand même décent parce qu'elles ont été servies en anglais pendant la majeure partie de leur vie, malheureusement. Mais cette fois-ci, on ne veut pas juste non plus couper les ponts. On veut quand même avoir un degré de suivi quand même avec ces gens-là.

M. Jolin-Barrette : Je vous remercie.

La Présidente (Mme Thériault) : Merci. M. le député de Saint-Jean, vous avez un peu moins de quatre minutes pour faire votre intervention.

M. Lemieux : Merci. Oui, merci beaucoup, Mme la Présidente. MM. Daigle et Saucier, bonjour. Ce n'est pas le festival de la flagornerie, là, mais le ministre vous a félicité sur votre mémoire, sur le fond. Permettez-moi de vous féliciter sur la forme, parce que vous avez fait quelque chose dans la présentation qui m'a gardé, pas malheureusement, mais qui m'a forcé à rester jusqu'à la fin avec votre titre, Pour l'exemplarité de l'État. À une clause près d'une nette avancée.

La 22.2, deuxième alinéa, arrive à la 26e page. Je l'ai lu, votre mémoire, au moins jusque-là, parce qu'effectivement c'est une question passionnante et surtout rendu où on est dans la conversation avec le ministre. Mais juste avant d'aller sur le fond, «une nette avancée»... «Avancée», c'est vraiment un mot clé ici, dans les consultations sur le projet de loi n° 96. Le gouvernement parle de modéré, plusieurs arrivent en parlant d'avancée. Personne ne parle de recul ou, en tout cas, très peu, là. Alors, ça, c'est la bonne nouvelle.

Ce que j'entends dans ce que vous dites au sujet de 22.2, alinéa deux, c'est que, pour vous, c'est comme une clause grand-père pour un statut particulier pour une certaine... Là, il ne faut pas que j'utilise le mot «clientèle», là, parce que ça ne fait pas partie de ça. La clause de temporisation, expliquez-moi ça. Ça fonctionnerait comment?

M. Daigle (Christian) : Bien, ce trois ans-là serait un trois ans d'encadrement. Ces gens-là n'ont vraiment probablement jamais suivi de <cours de...

M. Lemieux : ... une clause grand-père pour un statut particulier pour une certaine... Là, il ne faut pas que j'utilise le mot «clientèle», là, parce que ça ne fait pas partie de ça. La clause de temporisation, expliquez-moi ça. Ça fonctionnerait comment?

M. Daigle (Christian) : Bien, ce trois ans-là serait un trois ans d'encadrement. Ces gens-là n'ont probablement jamais suivi de >cours de francisation. Ils sont arrivés, ils se sont fait offrir des services en anglais, malheureusement, et ça a perduré à travers le temps. Donc, ces gens n'ont pas eu besoin d'aller plus loin, peut-être, dans leur apprentissage du français.

Alors, ce qu'on demande, justement, c'est d'avoir un accompagnement pour ces gens-là avec des cours de francisation durant ces trois années-là, d'avoir droit également aussi peut-être à, comme on disait tantôt, un groupe, mettons, ou à un service d'interprétariat, si jamais c'est une autre langue que l'anglais qui est leur maternelle, pour les aider à naviguer à travers tous ces services publics là. Parce qu'on comprend que différents ministères, différents services avec différents intervenants, c'est plus difficile, parfois.

M. Lemieux : Je reviens... Malheureusement, c'est ce qui m'intéressait. Alors, même si vous en avez discuté avec le ministre, je reviens sur le six mois, deux ans, parce que je voudrais introduire là-dedans, dans la réflexion, la partie de services d'interprétation. Ça, c'est quelque chose, si je le comprends bien, qui vous déçoit, dans la mesure où on est tombé par défaut vers l'anglais, parce que c'était une langue commune du nouvel arrivant et que... Puis là on ne parle pas des ayants droit, là, on parle des nouveaux Québécois.

Le service d'interprétation, est-ce que c'est trop ambitieux de se dire qu'on va réussir à parler dans la langue de ce nouvel arrivant dans la plupart des cas ou dans la majorité des cas? Est-ce que ça, ça ne serait pas une avancée de plus?

M. Daigle (Christian) :Nous, on pense que oui, c'est quelque chose de super intéressant puis qui est vraiment une plus-value pour l'ensemble de la société québécoise. Déjà, au lieu que les gens se tournent vers l'anglais en arrivant, parce que c'est une langue qui est souvent plus facile à apprendre pour un nouvel arrivant qui ne maîtrise ni le français, ni l'anglais, bien, à ce moment-là, avec un service d'interprétariat, elle aurait un service dans sa langue. De plus, retombée également positive, c'est qu'on vient offrir un emploi à des gens qui ont la maîtrise de cette langue-là, qui vont souvent faire partie de ces communautés-là et qui vont pouvoir aider leurs concitoyens. On va pouvoir les intégrer à travers la fonction publique québécoise également, où elles pourront, par la suite, avoir des promotions, avoir un changement puis elles pourront découvrir l'administration publique, qui souvent fait défaut dans l'administration publique. On a peu de gens de différents...

M. Lemieux : Vous parlez à un gars qui a travaillé longtemps à Radio-Canada, où il y avait un Radio-Canada International qui est devenu une peau de chagrin, qu'on ne sait même plus où il se trouve dans la bâtisse. Là, je comprends l'idée. Sans devenir une tour de Babel, est-ce que, réalistement, sans investir la moitié de notre budget là-dessus, on est capable, avec le monde qu'on a puis le monde qu'on aurait, est-ce qu'on est capable d'aller vers là?

M. Daigle (Christian) : Ah mon Dieu! oui. Les gens, les jeunes d'aujourd'hui maîtrisent deux langues, trois langues assez facilement. On est capables. Pour la jeune génération, je pense, qui parle une autre langue à la maison et qui parle le français à l'école, ou qui se sont développés en français, on est capables facilement de mettre ça en place avec une... quelques dizaines de personnes.

M. Lemieux : ...on peut vous dire merci.

La Présidente (Mme Thériault) : Merci pour votre réponse. Je dois mettre fin à l'échange. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, pour votre 11 min 30 s... 20 s.

Mme David : Merci beaucoup. Bonjour, MM. Daigle et Saucier. Mémoire effectivement très intéressant, qui pose plusieurs questions, et je vais vous faire part de mon... de littéralement de mon vertige, mais je l'ai <depuis...

La Présidente (Mme Thériault) : Merci pour votre réponse. Je dois mettre fin à l'échange. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, pour votre 11 min 30 s... 20 s.

Mme David : Merci beaucoup. Bonjour, MM. Daigle et Saucier. Mémoire effectivement très intéressant, qui pose plusieurs questions, et je vais vous faire part de mon... de littéralement de mon vertige, mais je l'ai >depuis longtemps, mais vous êtes l'occasion rêvée, c'est la question de l'accès à la francisation. Tout repose là-dessus : nouveaux arrivants, clauses de... comment vous l'appelez, de... la transition de trois ans.

On va franciser ces gens-là que ça fait 30 ans, disons, qu'ils parlent russe et un peu anglais chez eux, etc. En ce moment, ça prend trois mois pour avoir accès à la francisation en Montérégie, c'est un exemple, là, pour... trois mois. On parle de six mois... c'était ma question, moi aussi, le ministre est allé sur les deux sujets dont je voulais traiter, et donc aller à deux ans. Moi, mon vertige, c'est... ça va prendre, j'allais dire une corvée mais je n'aime pas le mot parce que c'est péjoratif, appelons ça une mission nationale de francisation, mais une vraie mission, comme la vaccination en ce moment, partout au Québec, là. Ça va nous prendre un Daniel Paré de la francisation qui est partout, pour toutes sortes de clientèles, on se comprend, là, parce que, partout dans le projet de loi, c'est la prémisse de base pour tous les articles de loi.

Alors, je ne le sais pas comment vous voyez ça. J'ai été surprise de vos chiffres, 15 % de Retraite Québec, 15,4 % qui demandent d'avoir une correspondance en anglais ou de parler anglais. Il y a d'autres chiffres autour de ça. Par contre, vous dites : Laissez-leur deux ans au moins pour les nouveaux arrivants. Comment on va y arriver, s'il n'y a pas une mission nationale de francisation?

M. Daigle (Christian) : C'est certain que le gouvernement doit se doter ou se redoter de services de francisation dignes de ce nom, à l'intérieur de l'ensemble des régions du Québec également aussi, pas juste à Montréal, pas juste à Québec. L'intégration des nouveaux arrivants doit se faire à la grandeur de la province, et ces services de francisation également doivent se faire à la grandeur de la province.

Le deux ans va permettre d'avoir peut-être un certain délai comme on connaît présentement pour y avoir accès, mais, par la suite, va permettre de s'intégrer à ces gens-là de mieux en mieux à travers leur nouveau milieu de vie, que ce soit en région ou dans les grands centres urbains, va éviter également d'envoyer quelqu'un en région, pensant qu'il va pouvoir s'établir, mais devant le fait que la personne ne parle pas beaucoup la langue française, va devoir retourner vers un milieu où elle a des compatriotes peut-être, qui sont plus présents à ce moment-là. Donc, on ne veut pas justement ça, on veut pouvoir... on veut que les gens puissent s'épanouir sur l'ensemble du territoire québécois et on veut pouvoir y arriver, justement.

C'est pour ça que la clause de deux ans, pour nous, permet d'avoir un suivi avec ces personnes-là aussi, et pas de dire : On vous prend pendant six mois puis, au bout de six mois, après ça, on vous laisse à vous-mêmes. Donc, d'avoir un suivi de deux ans permet de pouvoir suivre la personne, de pouvoir l'aider à bien s'intégrer à travers ces deux années-là, parce qu'on ne pense pas qu'en six mois on puisse y arriver.

• (12 heures)

Mme David : O.K. Là, l'autre aspect de mon vertige, c'est qui va enseigner? Il y a une pénurie d'enseignants, elle est déjà documentée, la pénurie d'enseignants de français langue seconde. J'ai vraiment un vertige, <partout en région...

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12 h (version révisée)

<      M. Daigle (Christian) :...de pouvoir suivre la personne, de pouvoir l'aider à bien s'intégrer à travers ces deux années-là, parce qu'on ne pense pas qu'en six mois on puisse y arriver.

Mme David : O.K. L'autre aspect de mon vertige, c'est qui va enseigner? Il y a une pénurie d'enseignants. Elle est déjà documentée, la pénurie d' enseignants de français langue seconde — j'ai vraiment un vertige — >partout en région, et, quand on dit... trois mois, 90 jours, trois mois d'attente en Montérégie. Mais où est-ce que le ministre va trouver tous ces enseignants-là de français? Il va falloir les payer, il va falloir qu'ils soient partout. Je vous dis, c'est la base même de la survie du français au Québec, là, c'est l'enseignement du français.

M. Daigle (Christian) : Effectivement, il peut y avoir certaines difficultés. Avec les nouvelles technologies, par contre, on peut peut-être trouver une façon de donner ce service-là. Pas obligé d'avoir quelqu'un dans chaque ville, chaque village ou chaque endroit où les personnes vont s'implanter, à partir du moment où est-ce qu'on a un côté numérique qui va être développé sur le territoire québécois, les nouvelles technologies. La pandémie aura peut-être eu ça de bon qu'elle va pouvoir avoir permis de développer cette technologie-là et nous permettre d'avoir peut-être un enseignement à distance aussi pour certaines personnes. Ça s'est développé avec les dernières années. Nous, on pense qu'il y a peut-être un intérêt à regarder cette façon-là de faire pour intégrer les gens, autant au niveau technologique qu'avec également la langue française.

Mme David : C'est plus difficile pour les nouveaux arrivants, mais peut-être qu'on peut faire des miracles.

Il y a un mot que vous avez prononcé que j'aime beaucoup, beaucoup : bienveillance. Bienveillance pour des gens qui, peut-être, depuis 30 ans, 35 ans, reçoivent des correspondances en anglais, même s'ils sont originaires de Serbie, de Russie, de plein de différentes régions dans le monde. Bienveillance aussi pour les personnes âgées. Alors, le ministre a peut-être juste 34 ans, je lui ai déjà dit que je pouvais être sa mère, donc ça vous donne... et donc la bienveillance pour les personnes âgées.

La question est bonne : À quel âge on est âgé? Moi, je suis très, très jeune, il n'y a pas de problème. Mais vous avez raison, il ne faut pas non plus traumatiser les gens. Et il y a la question du droit... des ayants droit qui sont d'origine anglophone, et qui ont toujours eu ça, et qui vont continuer à l'avoir. Mais comment on va opérationnaliser cette bienveillance, c'est quelque chose, quand même, d'intéressant. Bien que vous dites : On va y mettre le temps, on va y mettre des cours de francisation... ça, ça veut dire sortir des gens, peut-être, de leur univers. Ils n'ont jamais pensé qu'un jour ils suivraient des cours de francisation. C'est un changement de paradigme important.

M. Daigle (Christian) : Oui, tout à fait. Pour les cours de francisation pour les gens, ce ne seraient pas des gens qui seraient visés, mettons, par une clause où est-ce qu'à cause de l'âge elles pourraient conserver l'anglais, à ce moment-là, bien que, si elles souhaitent être actives et reprendre des cours de francisation pour se débrouiller un petit peu plus, pas de problème. Mais ce qu'on vise avec ces gens-là, c'est de pouvoir, justement, les accompagner dans une langue qui, malheureusement, a été l'anglais tout au long de leur présence au Québec.

Donc, ces gens-là, oui, on veut les protéger quand même, parce que ça fait un gros changement dans leur vie, peut-être, d'avoir à correspondre en français avec l'État québécois. Mais pour les autres personnes, on espère, justement, pouvoir faire cette transition-là à travers les trois années qui nous permettraient d'y arriver. Puis je sens que mon collègue veut intervenir également sur le sujet.

M. Saucier (Louis-Joseph) : Juste pour ajouter un petit détail, là, une sous-proposition de plus, là, qu'on <fait...

M. Daigle (Christian) : ... en français avec l'État québécois. Mais pour les autres personnes, on espère, justement, pouvoir faire cette transition-là à travers les trois années qui nous permettraient d'y arriver. Puis je sens que mon collègue veut intervenir également sur le sujet.

M. Saucier (Louis-Joseph) : Juste pour ajouter un petit détail, là, une sous-proposition de plus, là, qu'on >fait en substitution à la clause d'antériorité qui est proposée, pour l'instant, dans le projet de loi, c'est qu'outre la clause de temporisation, c'est-à-dire, là... c'est, disons, trois ans, outre les services d'interprétariat dans d'autres langues aussi, pendant... aussi le fait que des gens puissent commencer à se familiariser davantage avec le français, il y aurait aussi d'offrir des modalités accrues, ou des modalités tout court, de procuration, pour soutenir les gens qui ont... en soutien à ces personnes-là, pour l'accès à leurs services publics, c'est-à-dire ce serait d'offrir des modalités où certains mandataires, des personnes dans leur entourage, pourraient les aider dans leurs démarches auprès de l'administration publique.

Mme David : Ce qui existe probablement déjà de facto, là, que c'est l'enfant qui appelle. Je passerais la parole à mon collègue de D'Arcy-McGee.

La Présidente (Mme Thériault) : M. le député, vous avez quatre minutes au bloc d'échange.

M. Birnbaum : Merci, Mme la Présidente. Merci, MM. Daigle et Saucier, pour votre exposé, très intéressant. Écoutez, est-ce que je suis pour comprendre, et, si oui, j'espère l'appui des témoignages, des données, qu'il y a une épidémie de services de dispensés en anglais en santé, en éducation, partout aux instances gouvernementales, qu'il y a une crise de bilinguisme institutionnel au sein de l'octroi des services en anglais, et en région, ainsi qu'à Montréal?

M. Daigle (Christian) : Présentement, la facilité que les gens ont, lorsqu'ils arrivent au Québec, c'est d'avoir une langue anglaise qui est inscrite à leur dossier, plutôt qu'une langue française. Par la suite, on ne change pas celle-ci à travers le temps, et c'est là que les services se perpétuent en anglais. Également, à travers l'ensemble de l'administration québécoise, il y a des demandes pour une connaissance de l'anglais sur les affichages de postes, sur les postes en promotion, également, à l'interne, qui n'ont aucun lien avec le poste qui est demandé.

Donc, à partir du moment où est-ce qu'on inscrit, même dans notre C.V., qu'on parle une autre langue, on peut être appelé, par l'employeur, à l'utiliser. Donc, quelqu'un qui arrive puis qui dit qu'il parle anglais, qu'il parle espagnol, qu'il parle russe peut être appelé à l'utiliser s'il l'a indiqué dans son curriculum.

M. Birnbaum : Si je peux... Évidemment, le droit de travailler en français est une pierre angulaire de nos efforts collectifs, on va en convenir. Est-ce que vous avez les données à l'appui, comme je dis, sur l'étendue de l'octroi des services en anglais actuellement?

M. Daigle (Christian) : Présentement, je n'ai pas ces données-là avec moi. Je ne sais pas si... Bien, on avait fait l'étude, mais je n'ai pas les chiffres exacts. Je vais peut-être passer la parole à mon collègue.

M. Saucier (Louis-Joseph) : Je vous inviterais à regarder de plus près, par exemple, l'étude qui a été publiée, en 2019, par le Conseil supérieur de la langue française, étude qui, d'ailleurs, avait été produite dans la <foulée...

M. Daigle (Christian) : Bien, on avait fait l'étude, mais je n'ai pas les chiffres exacts. Je vais peut-être passer la parole à mon collègue.

M. Saucier (Louis-Joseph) : Je vous inviterais à regarder de plus près, par exemple, l'étude qui a été publiée, en 2019, par le Conseil supérieur de la langue française, étude qui, d'ailleurs, avait été produite dans la >foulée d'une proposition d'un ministre précédent — c'est le ministre Fortin — qui était dans les suites, beaucoup, de représentations qu'on avait faites et qui, pour une fois, établissait certains portraits des pratiques linguistiques dans l'administration publique et, surtout, dans la fonction publique et parapublique du Québec, où notamment, chiffres à l'appui, il était démontré que... bien, notamment, que 56 % des membres du personnel ignorent l'existence de documents administratifs sur l'usage des langues dans leur organisation.

M. Birnbaum : Pour bien comprendre, quand vous parlez de 22, et un comité historique des ayants droit pour les services en anglais, proposez-vous que la personne arrive à l'hôpital quelconque avec son certificat d'éligibilité à l'accès à l'école anglaise avant d'être servie à l'urgence? Est-ce qu'on écarte la réalité... Vous parlez louablement des communautés autochtones. Vous n'êtes pas sans savoir qu'il y en a plein, de communautés autochtones, où le monde est plus à l'aise en anglais qu'en français. Est-ce que c'est des ayants droit? Est-ce que la personne ici depuis 40 ans, qui parle anglais à la maison, doit montrer son accès à l'école anglaise avant de se prévaloir des services? Comment ça fonctionnerait, tout ça?

La Présidente (Mme Thériault) : 46 secondes.

M. Daigle (Christian) : Bien, notre syndicat représente les services publics. On n'est pas dans le domaine de la santé ni dans le domaine de l'éducation. Sur les modalités d'application dans ces services-là, dans les services publics au niveau de la santé puis de l'éducation, je ne pourrais pas vous dire comment ou c'est quoi, la meilleure pratique qui serait à mettre en place. Pour nous, au niveau des services publics, les gens, d'habitude, quand ils nous appellent, ils ont déjà un dossier d'ouvert dans le ministère ou l'organisme, donc c'est plus facile de voir, avec un statut qui serait indiqué au dossier, si la personne est un ayant droit.

M. Birnbaum : Mais je persiste avec la question. Alors, on va écarter les hôpitaux. On va parler des services dont vous avez toute une implication. C'est quoi qui se passe au moment d'une demande d'être servi? Il y a un questionnaire? Il faut que ce soit inscrit au dossier? Comment ça marche?

La Présidente (Mme Thériault) : Et je vais vous demander de répondre en 10 secondes seulement.

M. Birnbaum : Ah! je m'excuse, bon.

La Présidente (Mme Thériault) : 10 secondes, désolée.

M. Daigle (Christian) : Bien, la personne, lorsqu'elle se présente, si je prends mon exemple personnel, elle donnait son numéro de dossier, et là le dossier affichait à l'écran, puis, à ce moment-là, il y a un code qui apparaissait sur le niveau de langue. Alors, c'est de même qu'on l'identifiait.

La Présidente (Mme Thériault) : Parfait. Ça met fin à l'échange. Merci. Donc, Mme la députée de Mercier, c'est à votre tour.

Mme Ghazal : Merci beaucoup, messieurs, pour votre présentation. Par rapport aux services d'interprétariat, moi, je trouve ça superintéressant parce que, dans le fond, ça favorise l'utilisation d'une autre langue, de la langue maternelle de la personne, au lieu de la laisser parler en anglais, puis, après ça, ça continue. Donc, c'est vraiment bien, puis je suis certaine... comme quand vous répondiez que c'est possible de le faire si on a cette volonté-là, parce que, si on la laisse aller à l'anglais, ça peut rester longtemps <comme ça.

Mme Ghazal : ... d'une autre langue, de la langue maternelle de la personne, au lieu de la laisser parler en anglais, puis, après ça, ça continue. Donc, c'est vraiment bien, puis je suis certaine... comme quand vous répondiez que c'est possible de le faire si on a cette volonté-là, parce que, si on la laisse aller à l'anglais, ça peut rester longtemps >comme ça.

Puis par rapport à la clause grand-père, selon vous, est-ce que cette clause-là, dans le projet de loi, maintient un bilinguisme institutionnel au Québec?

• (12 h 10) •

M. Daigle (Christian) :...tout à fait, et c'est pour ça qu'on se doit de l'enlever. Les gens ont été servis en anglais, malheureusement, et ce droit-là va être perpétué pendant des décennies et des décennies, et ce ne sera pas possible de l'enlever par la suite, là. On a commis une erreur, à l'époque, en ne changeant pas leur code de langue, en ne les intégrant pas à travers la société québécoise francophone.

Donc, on se doit de corriger le tout avec ce projet de loi là. Puis, pour nous, de ne pas faire ça, c'est... l'ensemble des pratiques vont être à adapter tout le temps en fonction des personnes, qui vont changer. Cette personne-là, qui était une personne qui n'a pas un droit, ce n'est pas un ayant droit historique, lorsqu'elle va être transférée dans un autre ministère, on dit même que le code ne changera pas. Donc, comment faire pour que la personne même s'y retrouve? Elle va arriver au niveau de la Régie des rentes du Québec puis elle n'aura jamais traité avec la Régie des rentes. Alors là, elle va être traitée en français, mais, quand elle va rappeler la Régie de l'assurance maladie, elle va être traitée en anglais, à ce moment-là. La personne ne s'y retrouvera pas elle-même. Alors, pour nous, c'est une incongruité d'aller vers ça.

Mme Ghazal : En faisant attention pour les exceptions... les personnes âgées, mais d'autres situations exceptionnelles qui pourraient être définies dans la loi ou...

M. Daigle (Christian) : Oui, oui, oui, ça, on n'a aucun problème, aux personnes qui ont droit à des services dans une autre langue que le français, de maintenir ces droits-là. Il n'y a pas de problème.

Mme Ghazal : Pour le deux ans, au lieu du six mois, est-ce que, tu sais, vous le faites parce que c'est important, parce que vous pensez à la population, de façon générale, les gens qui viennent, ça va être difficile, ou vous le faites parce que vos membres, quand ils transigent avec la population, ils sentent qu'il y a ce besoin-là?

M. Daigle (Christian) : On est les services publics, on est la première ligne. Les gens qu'on représente, ce n'est pas des professionnels, ce n'est pas des gens qui sont des professeurs. C'est les gens qui répondent aux gens «day to day», en bon français, au jour le jour, lorsque la personne, elle arrive puis elle appelle. C'est un préposé aux renseignements, c'est un agent de secrétariat, c'est un agent de bureau, c'est un ouvrier. Donc, c'est des gens qui sont vraiment à la base même des services publics, et ces gens-là ont les services publics à coeur. Pour ces gens-là, on voit que l'accompagnement est important aussi. On a beaucoup de gens, des travailleurs sociaux, qui viennent dans différents emplois. On a des gens, vraiment, qui sont là pour accompagner ces personnes-là dans les services publics et, pour nous, on pense que l'important, justement, d'accompagner un certain temps va démontrer l'intérêt qu'on porte à l'individu également, plutôt que de le prendre pour six mois seulement.

La Présidente (Mme Thériault) : Et je dois mettre fin à l'échange. M. le député de Matane-Matapédia, c'est à vous.

M. Bérubé : Merci. Bonjour, messieurs. Le gouvernement du Québec a fait de l'exemplarité de l'État une des pierres d'assise de son projet de loi. Or, la Commission de la fonction publique a dévoilé les résultats d'une vérification portant sur les exigences linguistiques dans les offres d'emploi de ce gouvernement dans la période allant du 1er septembre 2019 au 30 septembre 2020. Probablement que vous connaissez ce rapport.

Qui nous indique quoi, essentiellement? <Le constat...

M. Bérubé : ...la Commission de la fonction publique a dévoilé les résultats d'une vérification portant sur les exigences linguistiques dans les offres d'emploi de ce gouvernement dans la période allant du 1er septembre 2019 au 30 septembre 2020. Probablement que vous connaissez ce rapport.

Qui nous indique quoi, essentiellement? >Le constat : «Concernant la justification de l'exigence de la langue anglaise dans la nécessité de l'accomplissement des tâches exigées pour l'emploi, plusieurs non-conformités ont été relevées», écrit la commission. «Sur 14 processus d'embauche vérifiés, 12 — 86 % — ne respectent pas la loi.» Donc, ça, c'est l'exemplarité de l'État, du gouvernement actuel. J'aimerais vous entendre sur ce rapport et sur les efforts supplémentaires que le gouvernement actuel devrait faire avant d'exiger, dans un projet de loi, l'exemplarité de l'État.

M. Daigle (Christian) : La première difficulté vient du fait que les directives ne sont pas appliquées, les directives ne sont pas claires ou ne sont pas connues. Donc, dans un premier temps, si, lorsqu'il y a affichage, on s'informait des modalités et on établissait également le registre des emplois nécessitant la connaissance d'une autre langue que le français, à ce moment-là, on serait capables, je pense, d'avoir un meilleur portrait de la situation, ce qui n'est pas le cas présentement.

Et, en plus, en changeant même les règles, présentement, au niveau de l'embauche, au niveau des listes de déclaration d'aptitudes et tout le processus d'embauche, on laisse à chaque ministère, à chaque, même, direction, une certaine latitude pour émettre eux-mêmes ou partir eux-mêmes le processus d'embauche, ce qui est complètement aberrant, parce que, là, on va multiplier les portes d'entrée pour des emplois ou des demandes d'emploi qui seraient non-conformes, à ce moment-là, avec l'exigence du français et de l'anglais.

M. Bérubé : Donc, dans le projet de loi, ça devrait être très clair qu'il y a une politique unique qui s'applique à l'ensemble des ministères et organisations, que ce soit très clair et qu'on puisse suivre les règles pour arriver à l'objectif qu'on respecte l'esprit de la loi, on respecte les règles. Donc, je présume que c'est quelque chose qui vous intéresse beaucoup. Je vous ai entendu depuis tout à l'heure, vous allez suivre ça avec beaucoup d'intérêt. Mais, comme je n'avais pas entendu le ministre en parler, suite à un article, d'ailleurs, qui est paru il n'y a pas tellement longtemps, qui s'appelle Un couac pour la CAQ, j'ai dit : Bien, c'est l'occasion d'en parler avec vous. Alors, je vous prends à témoin pour en parler.

Des citoyens qui ont déjà eu un service en anglais, puis là c'est une brèche que vous indiquez dans votre mémoire, pourraient continuer à en avoir parce qu'une fois ils ont eu recours à un service de l'État en anglais. C'est quand même incroyable, là. Quelqu'un, par exemple, qui se définit comme anglophone, à tort, mais disons que c'est... il est... il se considère comme un anglophone, une fois, il aurait eu un service, puis c'est inscrit à quelque part qu'il peut continuer de recevoir des services en anglais du gouvernement du Québec. C'est bien ça? Et c'est la brèche que vous voulez qu'on...

La Présidente (Mme Thériault) : En 10 secondes.

M. Daigle (Christian) : Tout à fait. Et une des choses qui est difficile également, c'est d'établir quel service il a reçu en anglais, parce que l'État ne garde pas nécessairement, après des années, les documentations, les lettres qui sont envoyées. Donc, là encore, on aurait vraiment de la difficulté à identifier nous-mêmes ceux qui ont déjà reçu une correspondance en anglais. Donc, il faut vraiment colmater cette brèche-là en l'enlevant du projet de loi.

La Présidente (Mme Thériault) : Et je dois mettre fin, malheureusement... J'ai déjà donné un petit peu plus de temps. Donc, M. Daigle, M. Saucier, merci beaucoup de votre passage en commission parlementaire.

Et nous allons suspendre les travaux jusqu'après les affaires courantes. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 15)


 
 

15 h (version révisée)

(Reprise à 15 h 26)

La Présidente (Mme Thériault) : À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, la Commission de la culture et de l'éducation reprend ses travaux.

Nous poursuivons les auditions publiques dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi n° 96, Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français.

Cet après-midi, nous entendrons Québec Community Groups Network, la Fondation Lionel-Groulx, l'Assemblée des premières nations Québec-Labrador et M. Charles Castonguay, auteur et mathématicien.

Donc, sans plus tarder, je souhaite la bienvenue aux représentants de Québec Community Groups Network. La parole est à vous, Mme Jennings. Vous avez 10 minutes à votre disposition.

Québec Community Groups Network (QCGN)

Mme Jennings (Marlene) : Merci, Mme Thériault, Mme Guillemette, Mmes et MM. les députés. Je suis très heureuse d'être ici aujourd'hui. Je m'appelle Marlene Jennings. Je suis la présidente de Québec Community Groups Network, le QCGN. Il s'agit d'un organisme à but non lucratif qui a pour but d'assurer le développement, de soutenir et d'améliorer la vitalité des communautés minoritaires d'expression anglaise du Québec.

Je suis aujourd'hui accompagnée de M. Clifford Lincoln, ancien ministre et ancien député à l'Assemblée nationale, de notre conseillère juridique, <Me Marion Sandilands, et de...

Mme Jennings (Marlene) : ...améliorer la vitalité des communautés minoritaires d'expression anglaise du Québec.

Je suis aujourd'hui accompagnée de M. Clifford Lincoln, ancien ministre et ancien député à l'Assemblée nationale, de notre conseillère juridique, >Me Marion Sandilands, et de l'avocate Pearl Eliadis, spécialisée dans des questions de droits de la personne.

Bill 96 proposes the most extensive overhaul of Québec's legal order since the Quiet Revolution. It would fundamentally alter the structure of the State. It proposes to upend 14 years of human rights protection. It seeks to fundamentally transform how Québec is governed. It would have a significant impact on the relationship between Canada and Québec, the lives of all Quebeckers and the type of society we wish to build together.

Plus tôt ce mois-ci, le QCGN a tenu une consultation communautaire parallèle. Pendant cinq jours, nous avons entendu les présentations de 50 personnes. Des juristes, des universitaires, des éducateurs, des entrepreneurs et des chefs d'entreprise, ainsi que des représentants du secteur de la santé et des services sociaux, du milieu des arts, des groupes de défense des droits des femmes et de communautés sous-représentées nous ont fait une présentation.

The QCGN, and indeed most in our community, favor promoting and protecting the French language in Québec and throughout Canada, but we are convinced there are more effective and inclusive ways to achieve this goal than those outlined in Bill 96.

Le gouvernement a sauté une étape cruciale. Il a omis de rassembler les Québécois afin d'identifier les défis, d'établir une distinction entre les mythes et la réalité et, ce qui est le plus important, d'établir un consensus quant à la meilleure voie d'avenir.

Il y a trois enjeux fondamentaux que nous souhaitons mettre en lumière. Premièrement, la modification constitutionnelle. Le projet de loi n° 96 propose de modifier unilatéralement la Loi constitutionnelle de 1867. Les implications pour la minorité québécoise d'expression anglaise ne sont pas claires. Toutefois, une telle modification ne serait pas anodine. Même le ministre de la Justice, M. Jolin-Barrette, a, à certaines occasions, déclaré que la modification proposée aurait une incidence sur le plan constitutionnel.

Given recent Government's immigration policies, Law 21 and this bill, the picture that emerges is that the Québec nation does not include everyone who lives in Québec.

• (15 h 30) •

Nous devons comprendre les implications d'une telle modification constitutionnelle révolutionnaire. C'est pourquoi nous demandons <instamment au gouvernement de soumettre...

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15 h 30 (version révisée)

<       Mme Jennings (Marlene) : ...this bill, the picture that emerges is that Québec nation does not include everyone who lives in Québec .

Nous devons comprendre les implications d'une telle modification constitutionnelle révolutionnaire. C'est pourquoi nous demandons >instamment au gouvernement de soumettre à la Cour d'appel du Québec une question de renvoi sur la constitutionnalité et sur la signification de cette modification.

Deuxièmement, la création d'une zone où la charte ne s'applique pas. Le projet de loi n° 96 constitue la dérogation la plus importante des chartes des droits de la personne de l'histoire du Québec et du Canada.

Québec Charter of Human Rights and Freedoms was arguably the crowning jewel of the Quiet Revolution. Premier René Lévesque was so proud of 1983 version of the Charter that he mailed a copy to every single household in Québec.

Les chartes des droits protègent les personnes contre les abus de l'État. Toutefois, avec la loi n° 21 et le projet de loi n° 96, le gouvernement a tourné le dos à une fière tradition québécoise des défenses des droits de la personne. Avec le projet de loi n° 96, il serait plus difficile, sinon impossible, de contester quelque violation des droits en raison de la suspension des chartes de droits de la personne. Le gouvernement est en train de créer un Québec où la charte ne s'applique pas.

Ce projet de loi d'une grande portée a une incidence sur plusieurs secteurs d'activité. Si l'on viole des droits qui seraient autrement protégés, les tribunaux ne pourront pas se pencher sur ces violations ni, le cas échéant, remédier à la situation au titre des chartes canadienne ou québécoise.

Comme nous l'avons demandé dans une lettre ouverte adressée au ministre Jolin-Barrette la semaine dernière : Pourquoi la protection de la langue française nécessite-t-elle la suspension sans réserve des droits de la personne? Notre conclusion est qu'il n'y a rien qui le justifiait. C'est pourquoi nous demandons de laisser de côté le recours à la disposition dérogatoire.

Third, who is an English-speaking Quebecker? Bill 96 attempts to limit services in English to citizens eligible to attend English schools. This, apparently, is the Government's attempt to identify a historic anglophone community. Unfortunately, eligibility to attend school in English is not in any way linked to the language of the student or the parent. Rather, it is linked to the language of instruction received by the parents.

Cela n'a rien à voir avec l'auto-identification <de la communauté...

Mme Jennings (Marlene) : ... eligibility to attend school in English is not in any way linked to the language of the student or the parent. Rather, it is linked to the language of instruction received by the parents.

Cela n'a rien à voir avec l'auto-identification >de la communauté. Ce concept révoque le droit à l'accès à des services en anglais pour environ 300 000 à 500 000 Québécois d'expression anglaise. En conséquence, le QCGN maintient que le droit de communiquer et de recevoir des services en anglais ne devrait jamais être fondé sur l'admissibilité à l'enseignement en anglais.

We have a host of other concerns. We oppose provisions that would increase the powers of the «Office de la langue française» particularly that it be in power to conduct searches and seizures without a judicial warrant. In addition, the provisions in the bill would also make it more challenging to do business in Québec. In the time of global competition for investment, why erect new barriers?

En conclusion, la déclaration de principe du QCGN engage notre organisme à respecter le français en tant que langue officielle du Québec, et nous serons prêts à engager avec le gouvernement pour atteindre un tel objectif.

We need a better and unified path forward then that which is offered by Bill 96. Once again, we urge the Government to withdraw the bill and launch a public consultation to determine how all Quebeckers can come together to promote the use of French.

Le projet de loin° 96 ne reflète pas le Québec moderne inclusif que les membres de notre communauté ont contribué à bâtir. Clifford Lincoln, que j'invite à prononcer le mot de la fin, est d'ailleurs l'un de nos bâtisseurs de ponts. Clifford, je vous cède la parole maintenant.

M. Lincoln (Clifford) :Mme la Présidente, le français est une partie importante de mon héritage culturel. Et, en fait, le français est la première langue que j'ai parlé sur les genoux de ma mère. Tout ce qui peut faire avancer le français, tout ce qui peut promouvoir le français, j'en suis et j'en suis d'emblée.

Ce que je reproche au projet de loi n° 96, c'est la façon qu'il est arrivé, une façon coercitive, une façon négative qui divise. Et, Mme la Présidente, j'ai passé, et j'en suis fier, neuf ans et demi à l'Assemblée nationale. Pendant que j'y étais, durant mon parcours à l'opposition, j'avais participé à une commission pour la révision de la loi 101, présidée par Gérald Godin, <et Camille Laurin y assistait...

M. Lincoln (Clifford) : ...j'y étais, durant mon parcours à l'opposition, j'avais participé à une commission pour la révision de la loi 101, présidée par Gérald Godin, >et Camille Laurin y assistait régulièrement, et Gérald Godin nous avait incités à trouver des solutions de part et d'autre, des solutions honorables qui mèneraient à un consensus, et cela, nous l'avions réalisé. Plusieurs années avant, plusieurs années auparavant, l'Assemblée nationale avait réussi...

La Présidente (Mme Thériault) : Et malheureusement... et malheureusement, M. Lincoln, je suis désolée, je suis la gardienne du temps. Vous avez dépassé les 10 minutes, donc je dois mettre fin à votre présentation et laisser le ministre débuter les échanges avec vous pour une période de 17 minutes. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. Mme Jennings, Mme Sandilands, M. Lincoln, Mme Eliadis, merci d'être à la commission parlementaire aujourd'hui avec votre groupe

D'entrée de jeu, je tiens à rappeler que la nation québécoise, elle est plurielle. Elle inclut l'ensemble des Québécois et des Québécoises au Québec, incluant les communautés d'expression anglaise. Le français au Québec est la langue commune, c'est la langue officielle du Québec. Vous savez, le Québec a toujours respecté et continuera de respecter les institutions anglophones, que ça soit dans le réseau de la santé, dans le réseau de l'éducation, que ça soit dans le cadre des services publics également que la communauté anglophone pourra recevoir et continuera de recevoir dans sa langue.

So, I want to reassure the English-speaking community, as I made before when I tabled that bill, Bill 96, that bill is for inclusion, to include every Quebecker born in Québec, that everybody is part of the society. And I want to say to the English-speaking community again, nothing changes for the services, for the health services, for the institutions, English institutions, or schools for higher education. So, that's really important to say that, because I heard a lot of things about that, and I'm sad toward them, because we all work together to be sure that the official language is French and to protect that language, but we don't take away any rights to anybody in that bill. And I want to be clear, and I will always be clear on that for all the commission.

Donc, j'ai pris connaissance de votre mémoire, et il y a certains éléments dans le mémoire qui me laissent sceptique, disons. À la page 25, à la page 36, le QCGN indique que l'affirmation du français menace les droits de la personne et est dangereux. À la page 13, on dit que l'affirmation du français va nuire à l'économie du Québec. <À la page 11, à la page 20...

M. Jolin-Barrette : ...qui me laissent sceptique, disons. À la page 25, à la page 36, le QCGN indique que l'affirmation du français menace les droits de la personne et est dangereux. À la page 13, on dit que l'affirmation du français va nuire à l'économie du Québec. >À la page 11, à la page 20, on dit que l'affirmation du français est un geste d'exclusion.

Écoutez, quand je lis ça dans un mémoire, je trouve ça problématique. Il y a eu les consultations également que vous avez tenues, et on peut qualifier certains propos d'individus qui ont participé à vos consultations... On pourrait qualifier ça de dérapage quand on parle de Gestapo en lien avec le projet de loi, quand on dit que l'affirmation du français causera des décès, des morts, comme M. Chambers l'a dit. Je trouve que, malheureusement, ce sont des propos exagérés, et plutôt que de travailler ensemble à construire un consensus qui va faire en sorte de permettre de renforcer le français dans le respect des droits de la communauté anglophone, on se retrouve dans une situation où, manifestement, on attise certaines difficultés qui n'ont pas lieu d'être.

Alors, je voudrais vous céder la parole pour voir comment est-ce que vous recevez ça.

• (15 h 40) •

Mme Jennings (Marlene) : Premièrement, M. le ministre, je suis heureuse, au nom... et là je parle au nom de toute la communauté d'expression anglaise au Québec, de vous entendre dire formellement que tous les Québécois, peu importe leurs origines, peu importe leur langue maternelle, font partie de la nation québécoise, heureuse. C'est la première fois de ma vie que j'entends ça depuis que le premier ministre René Lévesque l'a déclaré, que tout le monde qui était au Québec faisait partie de la nation québécoise. Depuis ce temps-là, je ne l'ai pas entendu, alors je vous remercie infiniment.

Deuxièmement, les affirmations que vous venez de faire au sujet de notre mémoire, en citant certaines pages, ne sont pas exactes. Nulle part, surtout pas à les pages que vous avez citées, dites... le QCGN, que l'affirmation du français met en péril les droits de la minorité linguistique anglophone, nulle part. On dit que le projet de loi, dans plusieurs de ses aspects, met en péril ou pourront mettre en péril... Et je vous donne un exemple très simple. Au niveau de la santé et la sécurité sociale, nulle part, dans 96, est dit, édicté que l'article 15 de la loi sur la santé et les services sociaux prime sur le projet de loi n° 96. Et, dans le projet de loi n° 96, on indique que seulement <les personnes ayant le...

Mme Jennings (Marlene) : ...que l'article 15 de la loi sur la santé et les services sociaux prime sur le projet de loi n° 96. Et, dans le projet de loi n° 96, on indique que seulement >les personnes ayant le certificat d'éligibilité à l'instruction en anglais pourront avoir la communication écrite du gouvernement.

Donc, quelqu'un qui est assujetti à avoir une intervention chirurgicale doit signer des documents, doit recevoir des informations sur la portée de cette intervention chirurgicale, le diagnostic, les sous-effets secondaires possibles et tout, et selon notre lecture légale, juridique de votre projet de loi, seulement les personnes ayant l'éligibilité, l'admissibilité à l'instruction en anglais pourront recevoir la documentation de cet hôpital, ou d'une clinique, ou de l'Urgences-Santé par écrit en anglais. Si j'ai tort, j'aimerais bien avoir tort. Montrez-moi l'article dans le projet de loi n° 86 qui dit que ce n'est pas ça, que toute personne qui demande le service, qui demande le document en français d'un hôpital, d'une clinique, de l'Urgences-Santé peut le recevoir en anglais simplement sur la foi de sa demande. Dites-moi où c'est édicté dans le projet de loi n° 96.

M. Jolin-Barrette : Alors, le projet de loi n° 96 indique que le projet de loi n° 96 prime sur les lois postérieures, donc ce qui signifie que la loi sur la santé et les services sociaux, notamment l'article 15 que vous avez édicté, est antérieure, et donc il n'y a rien qui change à ce niveau-là relativement aux soins de santé. Et ça, je l'ai dit dès le départ, et c'est important de le souligner.

Alors, je crois qu'il faut dire les choses comme elles le sont, pour les membres de la communauté anglophone du Québec, il n'y a absolument rien qui change, et je l'ai dit au moment où j'ai déposé le projet de loi et je pense qu'il faut le réaffirmer. Lorsqu'on voit qu'il y a certaines affirmations importantes qui sont faites dans votre mémoire, qui semblent attiser certaines craintes qui ne sont pas fondées, je crois que vous avez une responsabilité également là-dedans de rassurer vos membres de votre organisation pour dire véritablement ce qui est indiqué dans le projet de loi.

Sur un autre sujet, sur la question du déclin du français, l'OQLF a publié des études. Il y a plusieurs personnes qui sont venues ici, à l'Assemblée nationale, qui ont témoigné du déclin du français. Le Parlement fédéral aussi semble reconnaître le déclin du français, avec le gouvernement fédéral qui a déposé le projet de loi, <par le biais de Mme Joly, qui est...

M. Jolin-Barrette : ...l'OQLF a publié des études. Il y a plusieurs personnes qui sont venues ici, à l'Assemblée nationale, qui ont témoigné du déclin du français. Le Parlement fédéral aussi semble reconnaître le déclin du français, avec le gouvernement fédéral qui a déposé le projet de loi, >par le biais de Mme Joly, qui est mort au feuilleton. Est-ce que vous reconnaissez, en tant qu'organisation, le déclin du français au Québec?

Mme Jennings (Marlene) : Excellente question, M. le ministre. Évidemment, il y a deux conversations différentes actuelles et elles utilisent toutes les deux les mêmes termes. Premièrement, comme l'a souligné l'Office québécois de la langue française dans le document intitulé, Scénario de protection de certaines caractéristiques linguistiques de la population du Québec (2011 à 2036), il souligne... l'office souligne que, si on utilise le terme ou la mesure francophone «langue maternelle», oui, il y a un déclin, il y a un déclin du nombre de francophones dont la langue maternelle est le français. Et je dois avouer que la situation, selon les démographes, est la même pour la communauté d'expression anglaise. Il y a un déclin du nombre d'anglophones dont la langue maternelle est l'anglais. Si on parle sur l'usage du français, selon l'office, il y a eu une augmentation. Et si on regarde... je ne peux pas parler au niveau des anglophones, mais il y a une augmentation du pourcentage des gens qui parlent, qui utilisent le français au Québec.

Donc, moi, ma question à vous, c'est : Quelle de ces deux mesures est-ce que la loi n° 96 veut s'attaquer? Est-ce que c'est pour augmenter l'usage du français ou est-ce que c'est pour augmenter le nombre de francophones dont la langue maternelle est le français? Et laquelle des deux? Parce que, normalement, ce n'est pas les mêmes conditions, pas les mêmes mesures que nous allons prendre pour s'attaquer à l'un ou à l'autre. Alors...

M. Jolin-Barrette : Mais juste sur le fond de la question, là...

Mme Jennings (Marlene) : Est-ce que le fond de la question...

M. Jolin-Barrette : ...est-ce que vous reconnaissez qu'il y a un déclin du français au Québec et à Montréal? Parce que je comprends que vous pouvez me citer certaines études, certaines autres, mais ce n'est pas une question de sémantique, là. Est-ce que le français décline, oui ou non?

Mme Jennings (Marlene) : Pour vous, c'est quoi, une question de sémantique? La question que je vous demande : Est-ce que vous parlez d'un déclin de l'usage du français? Si c'est le cas, selon l'Office québécois de la langue française, non. Si vous parlez d'un déclin du nombre de francophones dont la langue maternelle est le français, <la réponse est aussi claire, c'est...

Mme Jennings (Marlene) : ...vous parlez d'un déclin de l'usage du français? Si c'est le cas, selon l'Office de la langue française, non. Si vous parlez d'un déclin du nombre de francophones dont la langue maternelle est le français, >la réponse est aussi claire, c'est oui, et c'est l'effet de l'immigration.

Nous croyons, le QCGN et notre communauté d'expression anglaise, croyons au fond de notre coeur qu'on a un devoir de promouvoir, et de protéger, et de défendre le français comme langue officielle et langue commune au Québec. Et on demande, on tend la main au gouvernement pour dire : Embarquez avec nous sur cette grande aventure parce qu'on a des idées. C'est notre communauté qui a accueilli tout le concept des écoles d'immersion française. C'est notre communauté qui a fait l'effort d'apprendre le français. Nos jeunes sont plus bilingues que n'importe... que le groupe majoritaire francophone du même âge, 15 à 30 ans.

Écoutez, ce n'est pas notre communauté qui est fâchée contre le français. C'est nous qui ont resté. On a resté, on a bâti des familles, on a élargi notre connaissance du français, on l'a approfondie. On veut que le français soit protégé et on veut promouvoir le français. D'ailleurs, c'est pour ça qu'à l'extérieur du Québec on a intervenu sur le côté des communautés et organismes francophones hors Québec dans leur contestation judiciaire sur des lois et règlements adoptés par des gouvernements provinciaux. C'est nous qui étaient à leurs côtés pour défendre le français.

• (15 h 50) •

M. Jolin-Barrette : Je vous remercie, Mme Jennings. Je vais céder la parole à mon collègue de Sainte-Rose. Alors, merci pour votre présence en commission parlementaire.

La Présidente (Mme Thériault) : Merci. M. le député de Sainte-Rose, 3 min 30 s à votre échange

M. Skeete : Merci. Je vais être bref parce que le temps s'est écoulé. Je voudrais savoir, dans les 624 pages de votre mémoire, quelle est la différence entre votre opinion et ceux que vous collectez à l'intérieur de votre rapport.

Mme Jennings (Marlene) : Je ne comprends pas votre question.

M. Skeete : Bien, en fait, il y a différents points de vue de différents groupes que vous insérez dans votre mémoire. Est-ce que vous acceptez d'emblée les conclusions de tous les groupes quand vous soumettez ce rapport-là pour considération ou vous les mettez à titre d'annexe? C'est-tu l'opinion du QCGN? C'est-tu l'opinion de certains groupes? C'est-tu l'opinion de la communauté d'expression anglaise? C'est l'opinion de qui au juste?

Mme Jennings (Marlene) : L'opinion du QCGN est <énoncée dans notre mémoire. Les annexes...

M. Skeete : ...pour considération ou vous les mettez à titre d'annexe? C'est-tu l'opinion du QCGN? C'est-tu l'opinion de certains groupes? C'est-tu l'opinion de la communauté d'expression anglaise? C'est l'opinion de qui au juste?

Mme Jennings (Marlene) : L'opinion du QCGN est >énoncée dans notre mémoire. Les annexes sont les présentations que le QCGN a reçues lors de nos consultations communautaires publiques parallèles à celle à laquelle on participe aujourd'hui. Et compte tenu que beaucoup de ces personnes, sinon toutes ces personnes et organismes n'ont pas eu la chance de présenter leur point de vue devant cette commission, on a promis de le mettre en annexe pour que votre commission parlementaire puisse en prendre connaissance.

M. Skeete : Mon temps est limité, alors je vais vous bousculer un petit peu. Est-ce que le QCGN est d'accord avec le passage de la loi 101 en 1977? Est-ce que le QCGN accepte que cette loi-là était nécessaire pour la survie du français en Amérique du Nord?

Mme Jennings (Marlene) : Le QCGN est un défenseur de la langue française. On croit que la loi 101 a eu des bons impacts.

M. Skeete : Je veux juste rapidement, là... Est-ce que c'est oui ou non? Parce qu'il y a plein de défenseurs de la langue française sur la planète, mais ils ne sont pas tous pour le projet de loi 101. Ma question : Est-ce que le QCGN est d'accord avec la loi 101?

Mme Jennings (Marlene) : Oui, le QCGN est en accord avec la loi 101 dans le sens qu'on pense que ça a eu des effets positifs et on pense que ça n'a pas été utilisé à 100 %. Et on pose la question : Pourquoi 96, compte tenu qu'il y a plein de choses dans la loi 101 qui ne sont même pas utilisées?

M. Skeete : Donc, pourquoi d'abord le QCGN, s'il accepte les notions de la loi 101, serait pour permettre, par exemple, la scolarité de personnes venant de la Grande-Bretagne, l'Australie, l'Inde dans le réseau public scolaire où à titre d'anglophones... ou de recevoir des documents en anglais? Pourquoi le QCGN, s'il accepte la loi 101, ne veut pas une intégration en français des nouveaux arrivants au Québec?

La Présidente (Mme Thériault) : Vous avez 30 secondes pour répondre à la question, Mme Jennings.

Mme Jennings (Marlene) : Je regrette, je n'ai pas compris la question.

M. Skeete : En fait, si on est d'accord avec la loi 101, on est d'accord pour dire que les allophones doivent se faire scolariser en français. Bien sûr, ça exclut les Québécois d'expression anglaise, mais les allophones, eux, qui viennent d'un autre pays, issus de l'immigration, doivent suivre un parcours en français. Vous, vous prétendez que des autres personnes qui ne sont pas issues de la communauté doivent recevoir des documents, des communications en français. J'essaie de comprendre, elle est où, la ligne pour le QCGN.

La Présidente (Mme Thériault) : Et vous allez devoir échanger en dehors des micros. Désolée, Mme Jennings, je n'ai plus de temps. On est 10 secondes de trop. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, la parole est à vous.

Mme Jennings (Marlene) : ...répondre.

La Présidente (Mme Thériault) : Non, je dois passer la parole à Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys. Si elle veut utiliser son temps pour la réponse, <c'est à elle...

M. Skeete : ...comprendre elle est où, la ligne pour le QCGN.

La Présidente (Mme Thériault) : Et vous allez devoir échanger en dehors des micros. Désolée, Mme Jennings, je n'ai plus de temps. On est 10 secondes de trop. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, la parole est à vous...

Mme Jennings (Marlene) : ...répondre.

La Présidente (Mme Thériault) : Non, je dois passer la parole à Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys. Si elle veut utiliser son temps pour la réponse, >c'est à elle, c'est à sa discrétion. Désolée.

Mme David : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Bonjour, mesdames. M. Lincoln, enchantée de vous avoir ici pour discuter de cet important projet de loi.

J'aimerais revenir sur votre position, justement, sur la langue officielle du Québec, le français. Vous avez dit à plusieurs reprises que c'était la langue, justement, officielle, mais il y a quelque chose qui semble vous énerver, vous inquiéter beaucoup dans l'article 90.2 qui dit que le français est la seule langue officielle du Québec. Et vous vous inquiétez en vous disant : Est-ce que ça modifie la portée de l'article 133 de la Loi constitutionnelle de 1867 qui prévoit l'emploi du français et de l'anglais à l'Assemblée législative et dans les tribunaux du Québec, à la page 20 de votre mémoire?

Alors, je me demandais si vous pouviez élaborer un peu sur les enjeux que vous voyez d'inclure cette disposition dans la section du Québec de la Loi constitutionnelle. Et, deuxième volet, si on apportait une précision à l'égard de l'article 159 du projet de loi concernant l'article 133 de la Loi constitutionnelle, est-ce que ça vous rassurerait?

Mme Jennings (Marlene) : Je vais demander à Me Sandilands de répondre à votre question.

La Présidente (Mme Thériault) : ...vous demander d'enlever le masque pour qu'on vous entende bien. Oui, allez-y.

Mme Sandilands (Marion) : Très bien. Pour votre première question, l'inquiétude... principe d'interprétation constitutionnelle qui dit qu'il faut interpréter un article de la Constitution à la lumière d'autres articles de la Constitution. Alors, si on voit un nouvel article dans la Loi constitutionnelle de 1867, qui dit que la langue officielle du Québec est le français, est la seule langue officielle, et on voit aussi l'article 133 qui dit qu'on peut utiliser l'anglais et le français dans l'Assemblée nationale et les tribunaux, et on se demande : Est-ce qu'il y a... Comment est-ce que les tribunaux vont interpréter ces deux articles ensemble? Et c'est pour ça que nous demandons un renvoi à la cour d'arrêt du Québec, pour clarifier. Ça, c'est une des questions qu'on veut clarifier. Et je m'excuse, je n'ai pas bien compris votre deuxième question.

Mme David : Bien, si on incluait, justement, une précision à l'article 159, en disant : en tout respect de l'article 133... Autrement dit, si on avait ce genre d'amendement, est-ce que ça vous rassurerait?

Mme Sandilands (Marion) : Ça serait peut-être quelque chose à discuter, mais ça ne résout pas toutes les questions qu'on avait au sujet de la modification constitutionnelle. Alors, on demanderait encore le renvoi quand même.

Mme David : O.K. Merci. Par rapport aux pouvoirs d'enquête et de surveillance, je sais que vous êtes bien inquiets de ça. Vous n'êtes pas les seuls, ça a été discuté dans d'autres forums, avec d'autres... d'autres invités, d'autres témoins, et c'est beaucoup par rapport à l'OQLF qui n'a pas d'autorisation judiciaire préalable à demander <pour procéder à une inspection...

Mme David : ...les seuls, ça a été discuté dans d'autres forums avec d'autres... d'autres invités, d'autres témoins, et c'est beaucoup par rapport à l'OQLF qui n'a pas d'autorisation judiciaire préalable à demander >pour procéder à une inspection. Et vous vous inquiétez beaucoup qu'il y ait une disposition de dérogation sur cette... particulièrement en lien avec ces pouvoirs-là.

Alors, si on ajoutait une précision qui viendrait baliser le pouvoir d'enquête de l'OQLF, est-ce que, selon vous, cette problématique du pouvoir d'enquête que vous soulevez dans votre mémoire serait toujours aussi problématique?

Mme Jennings (Marlene) : Je crois que le QCGN et moi en particulier ne pourrons pas répondre de façon définitive à votre question sans avoir vu au préalable c'est quoi, l'exemption ou les contraintes qu'un amendement portera à l'article 174 et autres du projet de loi n° 96. On ne peut pas répondre sans voir l'amendement.

Mais, Mme David, ce projet de loi doit soit être retiré complètement, et le gouvernement doit mener une consultation auprès de tous les Québécois dans tous les secteurs d'activité, un. Et, deuxièmement, sur l'utilisation de la clause dérogatoire et l'amendement constitutionnel unilatéral, on vous prie de convaincre le gouvernement de faire le renvoi, de retirer ce projet de loi et de faire un renvoi à la Cour d'appel du Québec pour, justement, avoir la clarté sur toutes ces questions où on n'a même pas consensus chez la communauté juridique, les experts constitutionnels. Il n'y a même pas une unanimité là-dessus.

Mme David : Vous dites d'ailleurs, c'est votre première recommandation : retirez entièrement le projet de loi. Là, vous référez surtout aux articles constitutionnels et aux dispositions de dérogation. Est-ce qu'il y a d'autres choses qui justifieraient de retirer complètement le projet de loi?

Mme Jennings (Marlene) : Je vais demander à mon collègue Clifford Lincoln de répondre à cette question.

M. Lincoln (Clifford) : Mme David, moi, je pense qu'au départ... pardon...

Une voix : ...

La Présidente (Mme Thériault) : Allez-y.

M. Lincoln (Clifford) : Vous m'entendez?

La Présidente (Mme Thériault) : Oui.

M. Lincoln (Clifford) : Vous m'entendez, Mme David?

Mme David : Je vous entends très bien. Excusez-moi, M. Lincoln.

• (16 heures) •

M. Lincoln (Clifford) : Oui. Je voulais dire qu'au départ, si vous prenez comme principe qu'on met de côté les deux chartes canadiennes et du Québec, c'est que certainement le gouvernement doit croire qu'il y a beaucoup de problèmes avec <plusieurs articles...

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16 h (version révisée)

<      M. Lincoln (Clifford) : ...je voulais dire qu'au départ, si vous prenez comme principe qu'on met de côté les deux chartes, canadienne et du Québec c'est que, certainement, le gouvernement doit croire qu'il y a beaucoup de problèmes avec >plusieurs articles qui ne tiendraient pas le coup devant l'épreuve du 6. Autrement, pourquoi introduire, de façon préventive, les deux... la clause dérogatoire sur les deux chartes? Si le ministre, par exemple, pense que sa loi est tout à fait juste et claire, pourquoi est-ce qu'il introduit la clause dérogatoire? Au départ, ça nullifie tout l'effet de la loi elle-même, parce qu'aucun citoyen ne peut aujourd'hui aller contester des clauses qu'il pense négatives ou conflictuelles. Au départ, la loi est protégée par le fait même que les chartes sont mises de côté. Si le ministre est tellement clair de sa loi, pourquoi est-ce qu'il a inclus la clause dérogatoire sur les deux chartes de façon préventive? C'est à lui à nous expliquer cela.

Mme David : ...beaucoup, M. Lincoln. Je vais passer la parole à mon collègue de D'Arcy-McGee.

La Présidente (Mme Thériault) : Parfait. M. le député, vous avez quatre minutes pour terminer le bloc d'échange.

M. Birnbaum : Merci, Mme la Présidente. Merci beaucoup, Mme Jennings, surtout, M. Lincoln, plaisir de vous revoir à l'Assemblée nationale, Me Eliadis et Me Sandilands. Je veux, dans un premier temps, reconnaître vos efforts pour offrir l'opportunité à la communauté d'expression anglaise au Québec de contribuer pleinement à ces audiences. Vous l'avez mentionné vous-mêmes que seulement quatre groupes ont été choisis par le côté ministériel pour participer. Alors, c'est un exercice tout à fait légitime et nécessaire.

Je veux revenir à votre discussion, on en a parlé un petit peu, à la page 37, 38, 39, sur le consensus qui existe, depuis 35 ans, en ce qui a trait aux services de santé et services sociaux en anglais. Malgré les assurances... pas trop de précisions, mais les assurances du ministre, vous n'avez pas l'air d'être satisfaits que ce consensus ne serait pas mis, en quelque part, en péril. Vous énumérez sept préoccupations là-dessus et vous suivez par des recommandations très claires, il me semble, qui, une fois respectées par le ministre, en quelque part, donneraient l'heure juste, à ces protestations, qu'il n'y a aucun risque. Je vous invite à élaborer sur ce consensus actuel sur l'accès aux services de santé et services sociaux en anglais.

Mme Jennings (Marlene) : Nous ne sommes pas convaincus, ni le QCGN, ni les groupes et les personnes qui se sont <présentés...

M. Birnbaum : Je vous invite à élaborer sur ce consensus actuel sur l'accès aux services de santé et services sociaux en anglais.

Mme Jennings (Marlene) : Nous ne sommes pas convaincus, ni le QCGN, ni les groupes et les personnes qui se sont >présentés devant nos consultations communautaires parallèles, nous ne sommes pas convaincus par les déclarations du ministre Jolin-Barrette que le projet de loi n° 96 n'aurait aucune incidence sur les droits d'accès en anglais aux services de santé et services sociaux. Et on a des experts, autant de la loi de la santé et services sociaux que de la loi sur... la loi 101, et ces personnes ne sont pas claires si nos droits seront existants et avec la même ampleur qu'on a aujourd'hui, une fois la loi n° 96 adoptée.

Donc, on demande au gouvernement d'inclure... Si la loi n° 96 n'est pas retirée dans son entier, on demande que le gouvernement inclue une clause d'exclusion explicite pour ce droit d'accès aux services de santé et des services sociaux en anglais dans le projet de loi n° 96 lui-même.

M. Birnbaum : Bon, avec le temps qu'il reste, j'aimerais vous inviter à parler du rôle antérieur, présent et futur de la communauté québécoise de langue anglaise dans le rayonnement, la protection et le renforcement du français, ainsi que les établissements qui s'y attachent, McGill, les hôpitaux identifiés avec la communauté de langue anglaise. J'ai posé la même question à quelques-uns des témoins, et donc deux anciens ministres du gouvernement, et on aurait dit que je parlais des tortues en voie d'extinction des îles Galápagos. Je me demande si vous aurez quelque chose à nous dire sur le rôle de la communauté d'expression anglaise dans le rayonnement de notre langue commune.

La Présidente (Mme Thériault) : Et vous avez 15 secondes pour le faire, Mme Jennings, sinon, je vais devoir mettre fin à l'échange. 15 secondes.

Mme Jennings (Marlene) : Alors, ce que je vais faire, c'est que... merci beaucoup pour la question. Nous allons répondre par écrit à votre question, pour s'assurer que tout le monde, au comité, le reçoive. Merci.

La Présidente (Mme Thériault) : Merci beaucoup. Ça met fin au bloc d'échange avec l'opposition officielle. Je vais maintenant du côté de la députée de Mercier pour votre 2 min 50 s.

Mme Ghazal : Merci, Mme la Présidente. Merci, mesdames et monsieur, pour votre présence.

Vous avez dit que vous appuyez la loi 101. Maintenant, vous savez que la loi 101, aujourd'hui, ne ressemble plus du tout à ce qu'elle était en 1977. Elle a été totalement charcutée par toutes les cours, Cour supérieure, suprême et d'appel. Ça a occasionné plusieurs reculs dans cette <loi-là...

Mme Ghazal : ... la loi 101. Maintenant, vous savez que la loi 101, aujourd'hui, ne ressemble plus du tout à ce qu'elle était en 1977. Elle a été totalement charcutée par toutes les cours, Cour supérieure, suprême et d'appel. Ça a occasionné plusieurs reculs dans cette >loi-là.

Maintenant, je comprends que vous êtes contre la clause de dérogation sur toutes les dispositions du projet de loi n° 96, mais, si le ministre, par exemple, disait que cette clause de... la clause dérogatoire s'appliquait sur quelques articles, pour s'assurer qu'elle ne soit pas enlevée, plus tard, par des poursuites, est-ce que vous serez d'accord avec ça ou vous êtes contre l'utilisation de cette clause, peu importe que ce soit pour l'ensemble ou pour quelques articles?

Mme Jennings (Marlene) : Nous croyons que la clause dérogatoire devrait être utilisée, à la limite, une fois que le judiciaire, qui est le troisième pilier de notre système légal, juridique au Québec... L'exécutif, le législatif et le judiciaire, chacun a son rôle à jouer, et le judiciaire est là, justement, pour faire le jugement si une clause d'une loi déroge à un droit fondamental garanti soit dans la charte québécoise des droits et libertés de la personne, soit dans la Charte canadienne des droits et libertés, et, si c'est le cas échéant, recommande ou édicte c'est quoi, la solution, c'est quoi, le remède. Mais je demanderais à ma collègue Me Eliadis, parce qu'elle est un expert.

Mme Ghazal : Parce que j'ai peu de temps, j'ai très, très peu de temps pour aller plus loin... Donc, vous ne reconnaissez pas la légitimité de l'Assemblée nationale, ici, des élus de protéger les droits collectifs?

Mme Eliadis (Pearl) : Mme la députée, si je peux interrompre très brièvement, c'est très clair dans toute société démocratique et libérale — petit «l», bien sûr — qu'effectivement le judiciaire a un rôle fondamental à jouer avec la législature et que le judiciaire est là pour protéger les droits en lien avec ce que la législature fait. C'est «Politics 101», vous le savez très bien, et c'est très clair que, dans ce projet de loi, on est en train d'éliminer le rôle des juges de protéger les Québécois et les Québécoises. Merci.

Mme Ghazal : ...l'Assemblée nationale, ici, les élus n'ont pas la légitimité de protéger les droits collectifs, parce qu'il y a les droits individuels qui sont fondamentaux?

La Présidente (Mme Thériault) : Et je dois mettre fin à l'échange, malheureusement. On a encore dépassé un petit peu. Donc, sans plus tarder, on va aller du côté du député de Matane-Matapédia, vous aussi, pour vos 2 min 50 s.

M. Bérubé : Merci. Lorsqu'on vous a posé la question si vous reconnaissez que le français est en déclin, vous avez refusé de répondre directement à une question pourtant toute simple. Je vous en pose une autre : Est-ce que vous considérez que l'anglais est en déclin au Québec?

Mme Jennings (Marlene) : Non, on ne l'a jamais prétendu. Ce qu'on prétend... Et sinon, ce qu'on <prétend...

M. Bérubé : Lorsqu'on vous a posé la question si vous reconnaissez que le français est en déclin, vous avez refusé de répondre directement à une question pourtant toute simple. Je vous en pose une autre : Est-ce que vous considérez que l'anglais est en déclin au Québec?

Mme Jennings (Marlene) : Non, on ne l'a jamais prétendu. Ce qu'on prétend... Et sinon, ce qu'on >prétend, c'est que la vitalité de la communauté d'expression anglaise au Québec est en danger, est en péril et que nous sommes vulnérables.

• (16 h 10) •

M. Bérubé : Merci. Donc, l'anglais n'est pas menacé au Québec. C'est ce que vous m'avez dit, non?

Mme Jennings (Marlene) : Mais, avec 96, ça pourrait l'être.

M. Bérubé : Vraiment? Bon, on avance... ou pas. Vous avez conduit un sondage auprès de vos membres à savoir s'ils étaient en accord avec le fait d'inclure que le Québec est une nation dans la partie québécoise de la Constitution canadienne. Vos membres ont répondu à près de 60 % non. Donc, vous portez ce mandat-là. Je vous avoue que ça va être difficile d'avoir un consensus là-dessus. Nous-mêmes, on n'est pas tout à fait en accord avec le ministre, pas pour les mêmes raisons que vous. On considère que ça ne va pas assez loin.

Souvent, on prend à témoin René Lévesque. C'est toujours intéressant de le placer dans une conversation en disant : René Lévesque a fait ci et ça. Quand René Lévesque et Camille Laurin, en 1977, ont fait adopter la loi 101, il a fallu beaucoup de courage. Il y a eu de l'opposition de la communauté anglophone, d'organisations antérieures à la vôtre, qui ont tout fait pour ne pas que ça arrive, et les accusations qu'on a retrouvées au cours des dernières semaines, ils les ont vécues, à l'époque.

Alors, je ne sais pas sur quelle base on va trouver un consensus, mais moi, je considère que le français est menacé au Québec, et, si on est sérieux dans ce qu'on entreprend, on prend des mesures pour aller de l'avant. Mais je ne sais pas qu'est-ce qui va vous satisfaire. Vous demandez de retirer un projet de loi. Moi, j'aimerais le bonifier, parce qu'il ne va pas assez loin. Soyons clairs, il n'y a rien, de mesures supplémentaires de la langue, qui va vous satisfaire, sinon des mesures cosmétiques.

Mme Jennings (Marlene) : Est-ce que je peux répondre?

La Présidente (Mme Thériault) : ...30 secondes pour le faire.

Mme Jennings (Marlene) : Premièrement, le sondage dont vous parlez, je n'ai aucune connaissance... Personne, à QCGN, ne sait de quoi vous parlez quand vous dites que nous avons fait un sondage...

M. Bérubé : ...site Internet.

Mme Jennings (Marlene) : ...dans le... vous avez mentionné. Deuxièmement, nous sommes pour la protection et la promotion du français. Et je vais vous dire une chose, ceux qui étaient en opposition à la loi 101, dans les années 80 et le début des années 90, sont... ils ont pris la 401. Nous qui sommes restés ici, nous sommes restés parce qu'on chérit le Québec, on se considère comme Québécois et Québécoises pleines et entières...

La Présidente (Mme Thériault) : Merci, Mme Jennings. Je dois mettre fin aux échanges. Je suis la gardienne du temps, vous le savez. Je ne veux pas paraître impolie, mais malheureusement, je dois mettre fin. Je vous remercie pour votre passage en commission parlementaire, mesdames, monsieur.

Et nous allons suspendre quelques instants pour permettre à <l'autre...

La Présidente (Mme Thériault) : ...Mme Jennings. Je dois mettre fin aux échanges. Je suis la gardienne du temps, vous le savez. Je ne veux pas paraître impolie, mais malheureusement, je dois mettre fin. Je vous remercie pour votre passage en commission parlementaire, mesdames, monsieur.

Et nous allons suspendre quelques instants pour permettre à >l'autre groupe de prendre place. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 16 h 12)

> (Reprise à 16 h 19)

La Présidente (Mme Thériault) : Nous poursuivons nos travaux et nous recevons maintenant la Fondation Lionel-Groulx, avec son président, M. Jacques Girard. M. le président, si vous voulez nous présenter la personne qui vous accompagne et procéder à votre exposé d'environ 10 minutes. Et, par la suite, ce sera les échanges avec les parlementaires. La parole est à vous.

Fondation Lionel-Groulx

M. Girard (Jacques) : Alors, Mme la Présidente de la commission, je suis accompagnée de Mme Myriam D'Arcy, qui est notre directrice générale. Je voudrais saluer, tout d'abord, après vous avoir saluée nous-mêmes, le ministre M. Jolin-Barrette, saluer également Mmes et MM. les députés, et vous dire, d'entrée de jeu, qu'il me fait grand plaisir de présenter les observations et recommandations de la fondation sur le projet de loi n° 96 sur le français, langue officielle et commune du Québec.

Comme vous le savez sans doute, la fondation a été créée par l'historien Lionel Groulx et ses amis en 1956. Sa mission est d'œuvrer au développement et au rayonnement de la nation québécoise par la promotion de son histoire, de sa langue et de sa culture. Elle travaille donc sans relâche à la promotion et à la défense de la langue française ainsi qu'au rayonnement de la culture québécoise. À cet égard, elle réclame, depuis de nombreuses années, le renforcement de la Charte de la langue française et fait état de l'urgence de lui joindre une politique de développement culturel, qui en serait le prolongement tout naturel.

D'emblée, nous nous réjouissons du dépôt de l'actuel projet de loi n° 96 et nous saluons la volonté affirmée du gouvernement de modifier la Loi constitutionnelle de 1867 afin d'y reconnaître la nation québécoise, dont la langue officielle et commune est le français.

Si nous saluons le projet de loi, nous considérons cependant que certaines mesures qui y sont prévues auraient <avantage...

M. Girard (Jacques) : ... afin d'y reconnaître la nation québécoise, dont la langue officielle et commune est le français.

Si nous saluons le projet de loi, nous considérons cependant que certaines mesures qui y sont prévues auraient >avantage à être renforcées pour assurer l'essentielle protection du français et soutenir sa promotion efficace dans toutes les sphères de la société québécoise car malheureusement la loi 101 n'a pas mis fin à la dynamique d'anglicisation du Québec, contrairement aux espoirs à l'époque de son adoption. On doit d'ailleurs déplorer une baisse historique sans précédent de la proportion de personnes ayant le français comme langue maternelle, et les projections pour 2036 sont encore plus sombres. C'est certainement ce qui a motivé le gouvernement à légiférer pour endiguer cette érosion, une décision que nous approuvons totalement.

La fondation a choisi de formuler ses recommandations relativement à deux grands projets du projet de loi, à savoir les enjeux linguistiques dans les institutions d'enseignement postsecondaire et l'exemplarité de l'État.

Plus de 40 ans après l'adoption de la loi 101, nous faisons le constat que la période charnière où les Québécois choisissent leur univers linguistique pour étudier, travailler et vivre est celle passée dans le réseau collégial. Tout ou presque se joue lors de ces quelques années. Or, malheureusement, comme le mentionnent les démographes Sabourin, Dupont et Bélanger, des données confirment que la fréquentation du cégep anglais s'avère, de fait, un choix anglicisant. D'ailleurs, près de trois quarts des enfants de la loi 101 ayant reçu une formation collégiale en anglais projettent de travailler en anglais, et seulement 8 % d'entre eux s'attendent à travailler en français. Bien que ces allophones aient reçu une formation en français au primaire et au secondaire, c'est la formation collégiale qui les oriente vers l'univers linguistique de leur milieu de travail.

Les statistiques ne sont pas plus encourageantes du côté des francophones titulaires d'un diplôme collégial d'un cégep anglophone. Seulement 19 % d'entre eux s'attendent à travailler en français. Ce constat accrédite la thèse selon laquelle on ne s'inscrit pas dans un cégep anglophone pour apprendre l'anglais, mais plutôt pour intégrer le monde anglo-saxon nord-américain.

Face à cette situation inquiétante, nous considérons que le gel de places proposé par le <gouvernement...

M. Girard (Jacques) : ... selon laquelle on ne s'inscrit pas dans un cégep anglophone pour apprendre l'anglais, mais plutôt pour intégrer le monde anglo-saxon nord-américain.

Face à cette situation inquiétante, nous considérons que le gel de places proposé par le >gouvernement n'est pas suffisant pour endiguer l'anglicisation. Nous demandons donc de limiter l'accès aux cégeps anglophones aux ayants droit, comme c'est le cas pour l'accès aux institutions d'enseignement primaire et secondaire. Il s'agit d'une mesure forte, qui enverra un message clair à tous les Québécois et qui liera les gouvernements à venir. Notons d'ailleurs que cette mesure reçoit l'appui de plus de 58 % des Québécois, selon un sondage du printemps dernier.

En tant qu'observatrice attentive de l'évolution de la société québécoise, la fondation a constaté l'existence d'un grave déséquilibre entre le poids démographique des différents groupes linguistiques et le financement des institutions d'enseignement, un fossé qui tend à se creuser. La communauté anglophone historique représente environ 8,1 % de la population du Québec. Elle jouit des droits et des institutions que toute société démocratique qui se respecte doit mettre à la disposition d'une minorité. Cependant, on peut se demander si ces citoyens québécois anglophones ne devraient pas avoir accès à une proportion de 8,1 % du budget pour financer leurs infrastructures et leurs institutions, comme les cégeps et les universités de langue anglaise.

Poser la question non pas pour opérer un changement brusque dans les façons de faire, mais pour lancer ce qu'il nous paraît essentiel, une réflexion collective, et ouvrir un débat de société, que nous considérons nécessaire. Si les concepteurs de la loi 101 avaient attendu, en 1977, de faire l'unanimité pour agir, rien ne se serait fait, alors qu'aujourd'hui même ses plus farouches détracteurs de l'époque conviennent qu'elle a eu des effets positifs non négligeables pour la protection du français et de la vie collective au Québec.

La réflexion sur le financement en fonction du poids démographique s'impose donc car les Québécois financent le réseau collégial anglophone à hauteur de 19 % et le réseau univers anglophone à hauteur de 22 %. C'est plus de deux fois et demie leur représentation démographique. Loin de nous l'idée d'asphyxier un réseau anglophone de qualité, mais nous en appelons à un <rééquilibrage...

M. Girard (Jacques) : ... 19 % et le réseau univers anglophone à hauteur de 22 %. C'est plus de deux fois et demie leur représentation démographique. Loin de nous l'idée d'asphyxier un réseau anglophone de qualité, mais nous en appelons à un >rééquilibrage du financement, de façon à mieux soutenir les institutions d'enseignement supérieur de langue française.

Évidemment, le réseau anglais n'est pas fréquenté que par des anglophones et des allophones. Cependant, il est financé dans une proportion équivalente au poids démographique de ces deux communautés. De la part d'un État qui souhaite intégrer les allophones au Québec français, cette statistique est troublante et contradictoire. C'est comme si le gouvernement incitait les allophones à rejoindre le réseau anglophone dès le collégial, tout en leur demandant d'intégrer le Québec français.

Notre recommandation est donc que le gouvernement lance un chantier de réflexion sur l'évolution du financement des institutions postsecondaires en relation avec le poids démographique, d'une part, de la population francophone et allophone du Québec et, d'autre part, de la communauté anglophone historique, ceux que l'on appelle les ayants droit. Dans le même esprit, nous demandons l'application d'un moratoire sur le financement des projets d'expansion du collège Dawson et de l'Université McGill jusqu'à la conclusion de cette réflexion de fond.

Dans un autre ordre d'idées, la fondation est très préoccupée par l'hégémonie de l'anglais dans la culture scientifique et considère que le Québec doit mener, en concertation avec tous les partenaires concernés à travers la francophonie, notamment, bien sûr, les universités et les centres de recherche, une vaste réflexion sur la présence du français comme langue de la recherche, de la science, du savoir et de l'enseignement supérieur. Il n'y a pas de réponse simple à un enjeu de cette ampleur, mais nous considérons que c'est en prenant l'initiative de se concerter avec la francophonie qu'il sera possible de trouver des pistes de solution porteuses.

À cet égard, j'aimerais souligner avec plaisir la nomination récente du Scientifique en chef du Québec, M. Rémi Quirion, au poste de président de l'International Network for Government Science Advice. À cette occasion...

La Présidente (Mme Thériault) : Et je vais devoir, malheureusement, vous interrompre, puisque nous n'avons plus de temps de présentation. On a déjà dépassé de presque une minute. Donc, je vais, sans plus tarder, céder la parole à M. le ministre.

• (16 h 30) •

M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. M. Girard, Mme D'Arcy, merci beaucoup pour la présentation de votre mémoire. Je tiens à vous <féliciter pour la qualité et la vision...

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16 h 30 (version révisée)

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La Présidente (Mme Thériault) : ...puisque nous n'avons plus de temps de présentation. On a déjà dépassé de presque une minute. Donc, je vais, sans plus tarder, céder la parole à M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. M. Girard, Mme D'Arcy, merci beaucoup pour la présentation de votre mémoire. Je tiens à vous >féliciter pour la qualité et la vision du mémoire qui a été développé par la Fondation Lionel-Groulx. Et je tiens à souligner également, M. Girard, vous avez été sous-ministre à l'Éducation, à une certaine époque, vous avez travaillé dans le milieu des affaires, notamment, bien, vous avez travaillé à Télé-Québec, je crois, Québecor, également à Montréal International. Alors, je pense que, dans le milieu, vous savez de quoi vous parlez puis vous avez vu l'évolution de la société également au cours des années. Puis je crois également que, sur votre conseil d'administration, il y a l'historien Éric Bédard qui est là, le sociologue Jacques Beauchemin aussi. Donc, je pense que la Fondation Lionel-Groulx jouit d'une bonne crédibilité.

D'entrée de jeu, je voudrais qu'on discute de l'évolution du français, et vous l'avez abordée un petit peu tout à l'heure, sur la question collégiale. M. Rocher est venu la semaine dernière, il nous a dit : Écoutez, nous avons commis une erreur d'avoir oublié... mais, pas d'avoir oublié, mais de ne pas avoir inclus le réseau collégial à l'application des dispositions de la Charte de la langue française, et, avoir su, on l'aurait fait. C'est ce qu'il nous a dit la semaine dernière.

Qu'est-ce qui explique, selon vous, qu'au cours des 44 dernières années, aucun gouvernement successif n'a imposé la loi 101 aux cégeps?

M. Girard (Jacques) : Bien, je pense que l'évolution s'est faite tout doucement, comme ça arrive dans toute société. La prise de conscience du problème auquel on fait face en n'imposant pas, aux cégeps, la loi 101, cette prise de conscience s'est faite progressivement, et elle devient de plus en plus évidente, particulièrement, j'en suis bien conscient, dans la grande région métropolitaine.

Et, à cet égard, je voudrais souligner que je me réjouis que vous-même et votre gouvernement aient pris conscience de la situation et soient déterminés à la corriger. J'ai eu le plaisir d'écouter M. Rocher. Je le connais bien et je dois dire que je partage tout à fait son point de vue. L'évolution des dernières années fait en sorte, à mon avis et de l'avis de la fondation, que nous n'avons pas d'autre choix. Pourquoi est-ce qu'on ne l'a pas fait avant? C'est une bien bonne question. Mais je répète ce que j'ai dit tantôt, parfois, on met du temps à constater ce qui existe et à prendre des mesures nécessaires pour corriger la situation. Ce qui m'amène à dire qu'on ne devrait jamais baisser la garde et être toujours conscients de l'évolution qui se fait dans notre société.

M. Jolin-Barrette : Et, pour vous, les dispositions du projet de loi n° 96 sur les cégeps, le fait de mettre un plafond et de freiner la progression, ce n'est pas suffisant?

M. Girard (Jacques) : Bien, c'est <déjà un bon...

M. Girard (Jacques) : ...qui m'amène à dire qu'on ne devrait jamais baisser la garde et être toujours conscients de l'évolution qui se fait dans notre société.

M. Jolin-Barrette : Et, pour vous, les dispositions du projet de loi n° 96 sur les cégeps, le fait de mettre un plafond et de freiner la progression, ce n'est pas suffisant?

M. Girard (Jacques) : Bien, c'est >déjà un bon premier pas. Je pense que... mais je pense...

La Présidente (Mme Thériault) : On a un petit problème technique.

Nous allons suspendre quelques instants pour s'assurer que vous puissiez répondre à la question et qu'on puisse l'entendre. Désolée.

(Suspension de la séance à 16 h 33)

(Reprise à 16 h 35)

La Présidente (Mme Thériault) : Nous reprenons nos travaux. Ce sont des petits pépins qui arrivent avec la technologie. Donc, M. Girard, on va vous demander de reprendre votre réponse, s'il vous plaît.

M. Girard (Jacques) : Alors, ce qui s'est passé au cours des 44 dernières années est important. Qu'à l'époque on n'ait pas jugé nécessaire de faire en sorte que la loi 101 s'applique aux cégeps, c'est en raison du fait qu'on était dans une situation différente. L'évolution des dernières années a démontré hors de tout doute qu'il nous fallait revoir la situation.

On constate en particulier, ce qui n'était pas nécessairement le cas à l'époque, que les années passées au cégep par les jeunes Québécois sont des années déterminantes par rapport au choix de la langue qu'ils vont faire, de la langue dans laquelle ils vont travailler, de la langue dans laquelle ils vont consommer des produits culturels. Et il devient évident que, s'ils décident d'aller au cégep anglophone, bien, leur choix est fait, comme je le disais dans mon introduction, et ils s'attendent tout naturellement à travailler en anglais. Ils ont des amis anglophones, ils ont vécu dans un milieu où la culture était davantage branchée sur la réalité nord-américaine <que sur...

M. Girard (Jacques) : ...choix est fait, comme je le disais dans mon introduction, et ils s'attendent tout naturellement à travailler en anglais. Ils ont des amis anglophones, ils ont vécu dans un milieu où la culture était davantage branchée sur la réalité nord-américaine >que sur la réalité québécoise.

Je pense qu'il ne faut jamais baisser la garde et que c'est un exemple de ce qu'on ne devrait pas faire. Et de tarder aussi longtemps, à mon avis, a été malheureux. Mais je salue le courage de ce gouvernement et de vous-même, M. le ministre, une fois la prise de conscience faite, d'avoir décidé de passer à l'action.

M. Jolin-Barrette : Merci pour votre commentaire.

Un autre aspect que vous abordez dans vos recommandations, c'est sur l'aspect culturel, et on a eu des intervenants qui sont venus nous en parler également. J'aimerais vous entendre sur ce point-là précisément. Vous abordez la question de la convergence culturelle, qui inclurait le rapatriement au Québec de pouvoirs en matière de culture et de communication.

Quelle est l'importance pour la nation québécoise de ce volet-là de convergence culturelle? Et quelle forme ça doit prendre? Est-ce que ça doit être inscrit dans la Charte de la langue française? Est-ce que ça doit être des politiques? Comment voyez-vous ça? Quelle est l'importance d'encadrer ce volet-là?

M. Girard (Jacques) : Je pense que c'est d'une importance capitale. D'ailleurs, à l'époque de la loi 101, on avait assorti la promulgation de la loi dans les mois qui ont suivi d'une politique culturelle. Mais j'aimerais, sur cette question, si vous me permettez, M. le ministre, passer la parole à notre directrice générale.

Mme D'Arcy (Myriam) : Bonjour, M. le ministre. Bonjour, Mme la Présidente de la commission et les députés.

Alors, nous proposons une politique de développement culturel qui serait un projet de loi distinct du projet de loi n° 96. Rappelons que la loi 101 et la loi n° 96... le projet de loi n° 96 visent à préserver les droits des Québécois francophones et allophones à vivre en français en délimitant les endroits et les moments où l'utilisation d'une langue autre que le français est acceptable. Ça fait en sorte que ces lois sont... appréhendent le français comme un outil de communication, alors que la langue française au Québec ne peut exister sans culture, sans que la culture québécoise qui lui donne corps.

Donc, nous proposons d'élaborer une politique de développement culturel qui viendrait mettre de l'avant le lien étroit entre la culture et la langue. Cette politique pourrait s'attaquer aux carences linguistiques du système d'éducation, de l'économie, de la politique d'immigration, développer une politique de développement... une stratégie, pardon, de développement numérique.

Et cette politique de développement culturel pourrait... en éducation, pourrait toucher, par exemple, l'adoption d'un corpus commun de grandes oeuvres de la littérature québécoise dans les écoles primaires et secondaires, comme l'a judicieusement proposé la Commission de la relève de la CAQ.

En culture, ça pourrait vouloir dire rapatrier tous nos pouvoirs en matière de culture auprès du gouvernement fédéral, ce qui nous permettrait de financer adéquatement la culture en fonction de nos <priorités...

Mme D'Arcy (Myriam) : ...littérature québécoise dans les écoles primaires et secondaires, comme l'a judicieusement proposé la Commission de la relève de la CAQ.

En culture, ça pourrait vouloir dire rapatrier tous nos pouvoirs en matière de culture auprès du gouvernement fédéral, ce qui nous permettrait de financer adéquatement la culture en fonction de nos >priorités. Ça voudrait dire aussi la création d'un CRTC québécois qui permettrait de définir clairement et plus globalement notre politique culturelle et réglementer nos activités de radiodiffusion et de télécommunication. D'ailleurs, c'est une proposition qui est reprise par le Parti libéral du Québec, et nous saluons cette proposition-là.

Et, en immigration, ça voudrait dire, en plus des cours de francisation, une politique de développement culturel pourrait vouloir dire aussi des cours d'histoire, des cours d'intégration à la culture québécoise, où on bonifie, en fait, la francisation par la culture et l'histoire. Voilà.

• (16 h 40) •

M. Jolin-Barrette : Je vous remercie. Je vais céder la parole à mes collègues qui souhaitent également vous poser des questions. Merci pour votre passage en commission parlementaire.

La Présidente (Mme Thériault) : Merci. Donc, je vois M. le député de Saint-Jean. Il vous reste huit minutes à l'échange.

M. Lemieux : Oui, et le député de Chapleau... désolé, j'ai deux affaires à enlever, voilà, écouteurs, masques. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Le député de Chapleau va me suivre, mais je voulais converser quelques minutes avec M. Girard et Mme D'Arcy. Bonjour, messieurs, dames.

D'abord, il faut que je vous dise que le rôle de député en arrière du ministre est bien ingrat, parce que, des fois, on a la même idée, mais les félicitations que je vais vous faire par rapport — c'est la deuxième fois aujourd'hui, ça devient une manie — par rapport à votre mémoire, c'est que ça se lit presque comme un roman, vous racontez l'histoire. Suggestion... Non, mais c'est vrai, c'est... Le mémoire est captivant de ce point de vue là.

Mais c'est dans ce que vous avez dit tout à l'heure au sujet de la recherche scientifique et de la publication scientifique sur laquelle je voulais vous amener un tout petit peu, parce que vous avez déjà abordé le lien de la culture avec le ministre, et c'est vrai que c'est fondamental, mais, pour la recherche scientifique, c'est plus compliqué parce que la publication scientifique... puis vous étiez en train de dire que le Scientifique en chef avait été nommé... puis là on est obligés d'arrêter, puis je voudrais entendre ce que vous aviez a dire et comment vous voyez la suite des choses pour la recherche scientifique québécoise en français dans une recherche scientifique anglophone dominante partout sur la planète.

M. Girard (Jacques) : La première chose, je pense qu'il faut une action concertée avec les autres gouvernements francophones. Ça pourrait être un bel objet de politique de la part de l'Agence universitaire de la Francophonie. Et je vous cite ce que j'allais faire tantôt, ce que M. Quirion a dit au moment où il prenait ses fonctions, il a dit ceci, «que la littérature et la culture scientifique à l'heure actuelle ont une approche très anglo-saxonne qui n'est pas nécessairement bien comprise dans d'autres cultures ou d'autres langues. Ce sera donc un de mes principaux objectifs, faire davantage de place en science pour les <pays de...

M. Girard (Jacques) : ... culture scientifique à l'heure actuelle ont une approche très anglo-saxonne qui n'est pas nécessairement bien comprise dans d'autres cultures ou d'autres langues. Ce sera donc un de mes principaux objectifs, faire davantage de place en science pour les >pays de la francophonie, entre autres», disait-il. Fin de la citation.

Ça me paraît extrêmement intéressant, voir une première personne qui va s'en occuper, mais je pense que le gouvernement devrait plus largement lancer un chantier de réflexion avec les universités, des centres de recherche, mais aussi les autres pays francophones.

M. Lemieux : Parce que vraisemblablement, même si c'est notre langue commune quand on veut parler au reste de la planète sur une base scientifique, mais quand on veut être lu par le reste des scientifiques de la planète, il y a quand même un code à respecter. De la même façon, qu'on écrive un roman ou qu'on écrive un mémoire de maîtrise, ça a beau être intéressant dans le roman, ce n'est pas comme ça que ça s'écrit dans un mémoire de maîtrise. Donc, forcément, il y a des façons d'aborder le sujet de la recherche scientifique et de sa publication, et ce n'est pas simple.

Ce qui m'amène à ma dernière question, et une petite réponse, s'il vous plaît, puis le député de Chapleau va suivre. Quand vous parlez du monde anglo-saxon, quand on parle de recherche scientifique, on a tendance à se voir un peu comme des Gaulois, le Québec puis le reste de la planète. En fait, les pressions qu'on subit, quand vous parlez de culture, puis vous étiez en train de parler des cégeps, à ce moment-là, avec le ministre au sujet de la culture dans laquelle il s'anglicise, c'est vrai partout sur la planète, ça, jusqu'à un certain point, M. Girard, non?

M. Girard (Jacques) : C'est tout à fait vrai sur l'ensemble de la planète. Le problème que l'on souligne dans les universités québécoises ou dans les cégeps québécois existe en France, existe en Belgique, existe dans les pays d'Afrique. Il y a une domination, à l'heure actuelle, particulièrement des États-Unis. On sait les sommes qu'ils consacrent à la recherche. Donc, il faut en prendre conscience et voir, de façon très réaliste et pragmatique, ce que l'on peut faire.

M. Lemieux : Merci, M. Girard. Merci, Mme la Présidente. Le député de Chapleau va suivre.

La Présidente (Mme Thériault) : Oui. Il vous reste quatre minutes, M. le député de Chapleau.

M. Lévesque (Chapleau) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Bien apprécié. M. Girard, Mme D'Arcy, merci beaucoup de votre présentation. C'est un plaisir de vous accueillir, là, cet après-midi.

Vous avez parlé, donc, de politique de développement culturel. On a eu plusieurs intervenants qui sont venus nous entretenir notamment sur l'idée de culture de convergence, un peu, qui se veut un modèle différent du multiculturalisme canadien qui serait appliqué ici, au Québec. J'aimerais savoir si vous avez un peu énuméré ce que contiendrait la politique culturelle. Est-ce que ça s'inscrit également dans cette vision-là de la culture de convergence québécoise, donc que les nouveaux arrivants viennent, apportent avec eux leur bagage, mais également se joignent à la majorité francophone? Est-ce que c'est ce dont vous parlez en termes de politique de développement culturel?

M. Girard (Jacques) : Oui, et je pense que pour ce qui <est des...

M. Lévesque (Chapleau) : ... dans cette vision-là de la culture de convergence québécoise, donc que les nouveaux arrivants viennent, apportent avec eux leur bagage, mais également se joignent à la majorité francophone? Est-ce que c'est ce dont vous parlez en termes de politique de développement culturel?

M. Girard (Jacques) : Oui, et je pense que pour ce qui >est des cas précis ou des mesures précises, plutôt avant, Mme D'Arcy a donné des exemples, elle peut peut-être en ajouter d'autres, si elle le souhaite. Mais c'est tout à fait dans l'esprit que vous avez mentionné qu'on le propose ou qu'on propose cette convergence.

M. Lévesque (Chapleau) : D'accord. Oui?

Mme D'Arcy (Myriam) : Je vais juste... dans le fond, l'idée, c'est de parachever le modèle québécois d'intégration et de vivre ensemble au moyen de la langue et de la culture. Donc, c'est l'inverse du multiculturalisme. La convergence culturelle affirme l'existence d'un noyau culturel qui n'attend qu'à être enrichi et nourri par diverses communautés qui communiquent par l'entremise de leurs différences, bien sûr, mais autour d'un socle commun, d'un noyau culturel qui est celui de la majorité historique francophone présente depuis 400 ans au Québec. À cette communauté s'ajoutent évidemment ceux qui arrivent, et puis ensemble on construit la suite.

M. Lévesque (Chapleau) : Merci. Vous avez parlé également de financement, vous avez mis ça en lien avec le poids démographique, notamment de la communauté anglophone, du moins d'expression anglaise. Pouvez-vous peut-être nous en dire davantage? Vous avez dit, bon, de façon modérée et proportionnelle dans le temps, une réduction des financements. Ce serait quoi, pour vous, cet avènement, en fait, en quelque sorte?

M. Girard (Jacques) : Bon, il est sûr qu'on doit d'abord être conscient du fait que l'on finance, de façon très généreuse, le réseau des cégeps anglophones et le réseau des universités. Il est aussi sûr qu'il y a... Comment je le dirais? J'allais dire un sous-financement, mais le mot est trop fort, mais que les institutions francophones ont un besoin d'argent additionnel.

Et je pense qu'il est tout à fait normal qu'ayant constaté des faits, on parle de réalités, il faut se demander si c'est juste de financer dans cette proportion les institutions anglophones par rapport aux institutions francophones. Mais on se veut très pragmatiques, et ce qu'on suggère, c'est précisément de regarder encore une fois le problème bien en face et, avec tous les intervenants, d'élaborer une politique de financement qui corresponde davantage à une juste proportion pour les francophones et les anglophones.

M. Lévesque (Chapleau) : Et donc ce serait dans le temps qu'il y aurait un changement en termes de financement. C'est bien ça?

M. Girard (Jacques) : Ce serait dans le temps. Je pense qu'on ne peut pas imposer un tel changement du jour au lendemain. Je pense qu'il y a des périodes de transition qui sont essentielles, mais je pense qu'on ne peut pas admettre que la <situation...

M. Lévesque (Chapleau) : ... un changement en termes de financement. C'est bien ça?

M. Girard (Jacques) : Ce serait dans le temps. Je pense qu'on ne peut pas imposer un tel changement du jour au lendemain. Je pense qu'il y a des périodes de transition qui sont essentielles, mais je pense qu'on ne peut pas admettre que la >situation actuelle continue d'exister. Une fois qu'on a pris conscience du problème, je pense encore une fois qu'on doit intervenir en consultant tous les intéressés.

M. Lévesque (Chapleau) : Maintenant, une autre question en lien avec la Constitution. Vous avez dit... le changement constitutionnel proposé au projet de loi, vous avez dit être en faveur de cela. Qu'est-ce qui, selon vous, là... qu'est-ce que ça ajoute? Qu'est-ce que ça apporte à la nation québécoise, ce changement-là?

La Présidente (Mme Thériault) : Et je m'excuse, M. le député.

M. Lévesque (Chapleau) : Excusez-moi. J'étais emporté. Merci.

La Présidente (Mme Thériault) : Malheureusement, il n'y a plus de temps. Désolée. Je vais maintenant du côté de la députée de Marguerite-Bourgeoys. Mme la députée, la parole est à vous pour 11 min 30 s.

Mme David : Merci, Mme la Présidente. M. Girard, Mme D'Arcy, bonjour. M. Girard, vous avez été président de l'Association des diplômés de l'Université de Montréal?

M. Girard (Jacques) : Je le suis toujours.

Mme David : Vous l'êtes toujours, en plus. Donc, vous n'avez pas fait comme moi, vous n'avez pas quitté l'Université de Montréal.

Écoutez, comme vous allez beaucoup sur le terrain de la recherche et du financement des institutions postsecondaires, je vais justement vous amener sur le terrain du financement. Vous avez en plus été, comme moi, sous-ministre à l'Enseignement supérieur, donc on a des points en commun, M. Girard. Et, étant donné que j'ai été aussi vice-rectrice, j'en connais quand même un bon petit bout. Et je m'excuse d'être un peu technique avec les gens qui nous écoutent sur le financement et les modèles de financement.

Et vous savez que ce sont des financements réseau, réseau universitaire. Les codes CLARDER, ça doit vous dire quelque chose. J'ai transformé ça en CAFF, mais ce n'est pas important. L'idée, c'est que le revenu, le financement des universités va aux types de cours qui sont enseignés. Alors, il n'y a pas un code de financement de génie à l'Université McGill qui est différent de l'École polytechnique et il n'y a pas... ou de l'ETS, ou autre. C'est le même financement pour un programme donné, quelle que soit la langue d'enseignement. Ça, je pense que vous le savez.

• (16 h 50) •

M. Girard (Jacques) : Oui, oui, je le sais, on en est conscients, et c'est pour ça qu'on...

Mme David : Quand vous dites que le financement est inéquitable, le financement est totalement équitable d'une université à l'autre. En médecine, un étudiant en médecine de McGill est financé de la même façon, l'université, que la médecine à l'Université de Sherbrooke. Si on s'entend là-dessus, on va continuer notre discussion.

Vous dites donc que ces institutions postsecondaires, et je pense à McGill et Concordia, parce que vous osez ce que d'autres n'ont pas fait, aller même au niveau universitaire, vous dites : Ça devrait être définancé. Définancer, pour un financement réseau, ça veut dire, donc, diminuer le nombre d'étudiants. Il n'y a pas d'autre façon, au poids démographique... Vous dites même, dans votre mémoire et oralement, ça veut dire, disons, diminuer à 8,9 % le financement des étudiants dits anglophones ayant droit d'aller à l'université anglophone. Et <92 % ou...

Mme David : Il n'y a pas d'autre façon, au poids démographique... Vous le dites même dans votre mémoire et oralement, ça veut dire, disons, diminuer à 8,9 % le financement des étudiants dits anglophones ayant droit d'aller à l'université anglophone. Et >92 % ou 91,2 % seraient financés comment, le reste des étudiants?

M. Girard (Jacques) : Alors, vous et moi savons que la formule de financement qui s'applique aux universités est l'objet de discussions chaque année, qu'au-delà de ce que vous avez mentionné, il y a des exceptions, il y a des subventions additionnelles.

Je suis d'accord avec vous sur le fait que c'est financé à partir du nombre d'étudiants et c'est la raison pour laquelle recommander de passer, immédiatement, pour reprendre ce que vous venez de dire, à 8,5 %, ça ne nous paraissait pas réaliste. Je pense qu'on peut, par ailleurs, s'interroger sur le fait qu'ayant la population anglophone que nous avons, on peut s'interroger sur le niveau de financement, d'autant plus, et vous le savez très bien, ayant été vice-rectrice à l'université, que les universités francophones ont besoin d'argent additionnel, que ce soient l'Université de Montréal, l'Université Laval  ou les différents... l'Université de Sherbrooke, les différents campus de l'Université du Québec. Et je pense que ça vaut la peine, donc, de regarder la situation bien en face. Ce n'est pas la...

Mme David : Si on va au poids démographique, ça veut dire que McGill passerait de 40 000 étudiants à 4 000 étudiants.

M. Girard (Jacques) : Oui, et quand vous le dites comme ça, ça apparaît tout à fait irresponsable. C'est donc la raison pour laquelle on propose un chantier. Je pense qu'il n'y a pas là... on ne se sentait pas, en tout cas, capable. C'est la responsabilité du gouvernement de proposer des chiffres de façon définitive, de bousculer l'écosystème tel qu'il existe. Mais prenant conscience d'un problème et peut-être bien d'un surfinancement du côté anglophone, il faut regarder la situation bien en face, s'interroger et tenter de trouver la meilleure solution qui rende justice à tous les intervenants.

Mme David : Mais comme l'argent ne pousse pas dans les arbres, c'est bien évident que l'Université McGill et Concordia deviendraient, ainsi que les collèges anglophones, totalement privatisés. Il n'y a pas d'autre solution. Alors, ça m'inquiète, moi, au plus haut point, qui suit une ardente défenderesse de l'accessibilité aux études supérieures.

Je vais vous amener sur la recherche puisque vous connaissez bien l'UdeM. Vous connaissez évidemment très bien Robert Lacroix, ex-recteur et qui a été à la fondation de CIRANO, vous connaissez Pavel Hamet très, très bien, vous connaissez l'IRIC, l'Institut de recherche en immunologie et cancérologie de l'Université de Montréal, vous connaissez Jean-Claude Tardif, chercheur en cardiologie, vous connaissez <Jean-Lucien Rouleau...

Mme David : ...vous connaissez bien l'UdeM. Vous connaissez évidemment très bien Robert Lacroix, ex-recteur et qui a été à la fondation de CIRANO, vous connaissez Pavel Hamet très, très bien, vous connaissez l'IRIC, l'Institut de recherche en immunologie et cancérologie de l'Université de Montréal, vous connaissez Jean-Claude Tardif, chercheur en cardiologie, vous connaissez >Jean-Lucien Rouleau, ex-doyen de la Faculté de médecin et un des plus grands chercheurs en cardiologie, vous connaissez Gilles Brassard qui a presque reçu un prix Nobel et qui a obtenu le plus grand prix mondial jamais donné en physique, qui est le prix Wolf, en 2018.

Ils ont quoi en commun, tous ces gens-là? Ils sont francophones et ils publient dans toutes les langues. Alors, ils publient évidemment en anglais, mais ils publient aussi en français. Et quand je vous entends dire que la recherche doit, devrait se faire ne français et publiée en français, que seraient devenus ces grandes stars mondiales qui ont fait avancer la science? Pavel Hamet, là, c'est un immense atout dans le domaine de la recherche vasculaire, et tous les autres, on pourrait les nommer et, en temps de COVID, on a cherché le vaccin puis on beaucoup, à un moment donné, parlé de chercheurs québécois. Je ne comprends pas votre idée de publier uniquement en français. C'est... Si la lingua franca était espagnole, est-ce que vous auriez la même opinion?

M. Girard (Jacques) : Écoutez, si vous permettez, Mme David, nous n'avons jamais dit qu'il fallait publier uniquement en français, que la recherche devait se faire uniquement en français. Nous sommes parfaitement conscients de la situation qui existe, mais, avec M. Quirion, là, dont j'ai cité les mots, il nous semble qu'il y a un effort à faire pour faire en sorte, précisément, que l'on redonne au français une place qu'il a perdue. Les Espagnols peuvent en dire tout autant, les gens d'autres langues peuvent en dire tout autant, il y a une domination de la langue anglo-saxonne... de langue anglaise, pardon.

On le constate, on ne veut pas que les gens cessent de publier en anglais, mais on se demande ce que l'on peut faire entre francophones pour assurer une meilleure place au français. Il ne s'agit pas d'éliminer l'anglais, je sais fort bien... Vous avez parlé de l'IRIC en particulier, j'ai un fils qui y travaille, je sais très exactement comment ça se passe. Alors donc, je vais être très précis là-dessus, là, ce n'est pas une interdiction de publier en anglais que l'on propose, ce serait tout à fait irréaliste. Je suis d'accord avec vous.

Mme David : Mais quand, par exemple, vous proposez de rédiger les thèses de doctorat en français, bien, maintenant, ce sont très majoritairement des thèses par articles, particulièrement des thèses qui sont faites dans des centres de recherche en santé comme l'IRIC. Alors, comme ce sont des thèses par articles, il y a au moins deux articles sur trois qui sont en anglais puisqu'il faut que ce soit publié dans des revues de très <haut niveau...

Mme David : ...en français, bien, maintenant, ce sont très majoritairement des thèses par articles, particulièrement des thèses qui sont faites dans des centres de recherche en santé comme l'IRIC. Alors, comme ce sont des thèses par articles, il y a au moins deux articles sur trois qui sont en anglais puisqu'il faut que ce soit publié dans des revues de très >haut niveau.

Alors, comment faire pour... c'est une quadrature du cercle. Là où je suis d'accord avec vous, c'est que la recherche en français est très importante aussi puis la valorisation du français. J'ai été membre du conseil d'administration de l'AUF, j'en connais un bout, on a fondé le G3 des universités francophones. Oui, il y a des choses à faire, mais il ne faut pas laisser les gens sous l'impression que c'est... de dire que c'est dangereux, que c'est mauvais de publier dans une langue autre que le français. Mais, en même temps, on n'aurait pas ces stars que j'ai nommées s'il n'y avait pas eu une reconnaissance, et elle est à l'échelle mondiale. Parce qu'au Québec on voit grand puis on veut être reconnus à l'échelle mondiale. Et on a d'extraordinaires chercheurs qui sont reconnus, mais ils n'auraient pas pu être reconnus juste en français.

M. Girard (Jacques) : Et je répète, on ne propose pas qu'ils ne puissent pas faire de la recherche en anglais, qu'ils ne puissent pas publier en anglais. Je le dis et le redis, c'est irréaliste. Tout ce qu'on demande, c'est une concertation et une volonté de faire en sorte qu'on donne, dans la mesure du possible, une place plus grande au français. Et je pense qu'il y a des intervenants dans d'autres pays qui sont d'accord avec ça. Et, comme vous le savez aussi bien, sinon mieux que moi, les universités... je pense que toutes les universités francophones se sont donné une politique à l'égard de l'utilisation de la langue française. Ce qu'on demande, c'est d'aller...

Mme David : Merci, puis on va les renforcer. C'était une de mes suggestions. Est-ce que le député de D'Arcy-McGee... il reste un peu de temps?

La Présidente (Mme Thériault) : Une petite question, une question-réponse, 1 min 15 s.

M. Birnbaum : Bon, c'est quand même... j'essaie de comprendre votre échange avec ma collègue. Est-ce que vous, donc, retirerez votre recommandation n° 5, n° 6, compte tenu que vous venez de dire que l'impact sur le financement, à McGill, par exemple, serait de 40 000 $... 4 000 $? Alors, vous renvoyez la balle au gouvernement de décider quoi faire. Alors, votre recommandation, est-ce que ça tient toujours?

M. Girard (Jacques) : Bien, notre recommandation tient dans la mesure où sa formulation est très claire : lancer un chantier de réflexion sur l'évolution du financement des institutions postsecondaires en relation avec le poids démographique, d'une part, de la population francophone et anglophone du Québec et, d'autre part, de la communauté anglophone historique. On ne peut pas... la proposition est claire, c'est ce que l'on demande, et on demande un moratoire dans le même temps.

• (17 heures) •

Et là je profiterai de l'occasion pour dire que la générosité du Québec à l'égard de ces institutions anglophones est <largement supérieure à tout ce qu'on retrouve ailleurs au Canada...

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17 h (version révisée)

<       M. Girard (Jacques) : ...la proposition est claire, c'est ce que l'on demande, et on demande un moratoire dans le même temps.

Et là je profiterai de l'occasion pour dire que la générosité du Québec à l'égard de ses institutions anglophones est >largement supérieure à tout ce qu'on retrouve ailleurs au Canada pour ce qui est des francophones. Alors, je n'ai aucune honte à proposer qu'on étudie la répartition.

La Présidente (Mme Thériault) : Et je dois mettre fin à l'échange. Je vais regarder maintenant la députée de Mercier, pour vos 2 min 50 s.

Mme Ghazal : Merci. Merci beaucoup pour votre mémoire et votre présentation. C'était très intéressant.

Par rapport à la question du système d'éducation supérieure, moi, je suis contente, je me réjouis de vos recommandations 2 et 3, parce qu'à Québec solidaire, dans notre programme aussi, on propose de revoir graduellement le financement des réseaux d'enseignement supérieur francophones et anglophones pour qu'ils représentent le poids démographique de chacune des deux communautés. C'est la même chose aussi pour le collège Dawson et l'Université McGill, et ça, il faut le faire tout de suite. Puis vous avez raison, le financement, c'est par tête de pipe. Si, à un moment donné, il n'y a plus personne qui va à l'université... aux universités francophones, puis tout le monde converge vers les universités anglophones, on ne peut pas dire que c'est équitable. Donc, il faudrait revoir le financement, ça, c'est sûr et certain.

J'avais une question plus précise, puis vous en avez parlé un peu, sur la convergence culturelle, à la page 16. La définition que je vois ici ressemble beaucoup au modèle d'intégration dont le Québec s'est toujours réclamé, sans le mettre dans une politique officielle, qui est l'interculturalisme. Mais vous, vous appelez ça «convergence culturelle». Je l'entends de plus en plus. D'autres vont appeler ça «culture de convergence», la culture vers laquelle tous les Québécois vont converger. Qu'est-ce qui se passe avec l'interculturalisme? Ce n'est pas exactement la même définition?

M. Girard (Jacques) : Oh! je pense que l'utilisation des mots... Écoutez, personnellement, en tout cas, l'interculturalisme me conviendrait tout aussi bien que la convergence culturelle.

Mme Ghazal : Je comprends très bien. Donc, on s'entend, parce que vous n'êtes pas le premier, j'ai eu la discussion avec d'autres, puis je suis contente que vous dites que l'interculturalisme, qui n'a jamais été mis dans une politique officielle au Québec... même si on en parlait tout le temps, tellement que des gens mélangeaient ça aussi avec le multiculturalisme, puis on disait que c'était la même chose, puis on rejetait les deux modèles, alors qu'on ne l'a jamais vraiment, vraiment adopté, un système propre à nous. Donc, je suis très, très heureuse de vous entendre.

M. Girard (Jacques) : Bien... Et je pense surtout qu'il y a urgence à se donner une politique culturelle...

Mme Ghazal : Et culturelle.

M. Girard (Jacques) : ...qui aille dans le sens de la convergence ou de l'interculturalisme.

Mme Ghazal : Très bien, merci.

La Présidente (Mme Thériault) : Ça va? Merci. M. le député de Matane-Matapédia.

M. Bérubé : Oui. M. Girard, Mme D'Arcy, un plaisir d'échanger avec vous. J'ai entendu le ministre dire de très bonnes choses sur votre organisation, sur vous, M. Girard. Je pourrais en dire autant de Mme D'Arcy, que je connais depuis des années. Il ne reste maintenant qu'à suivre vos recommandations, si on a une telle estime de vos propos et de votre crédibilité, notamment sur la fréquentation en français des cégeps. Vous savez que, des <quatre...

M. Bérubé : ... dire de très bonnes choses sur votre organisation, sur vous, M. Girard. Je pourrais en dire autant de Mme D'Arcy, que je connais depuis des années. Il ne reste maintenant qu'à suivre vos recommandations, si on a une telle estime de vos propos et de votre crédibilité, notamment sur la fréquentation en français des cégeps. Vous savez que, des >quatre formations politiques qui sont ici, la seule qui en fait la promotion, c'est le Parti québécois, la seule formation politique qui assume ce choix, qui fait le choix éclairé de poser un jalon supplémentaire. Nous avons évolué en ce sens-là. Ce n'était pas ma position ni celle de ma formation politique il y a quelques années à peine, mais il y a une nécessité.

Et, quand j'entends Guy Rocher nous dire qu'on est rendus là, quand j'entends Christian Dufour nous dire cela, quand je vous entends dire ça, je trouve qu'on est en bonne compagnie et qu'on fait une analyse partagée que, si ce gouvernement veut faire preuve de courage, et qu'il cesse de dire que ça prend un consensus... parce qu'il n'y en aura pas, de consensus. Si vous avez entendu le groupe précédent, vous allez voir qu'il n'y en aura pas, ce sera toujours trop. Alors, moi, je suis d'avis qu'il faut poser des gestes courageux, qui vont être durables, qui vont nous survivre et qui vont assurer, au français, une vitalité. Alors, moi, j'en pose quatre, et vous choisirez sur lequel vous voulez rebondir, qui montrent ce courage-là, soit le cégep en français... en fait, pas «soit», ça, plus une immigration francophone à l'entrée, et mettre fin au financement, déjà annoncé, des projets respectifs de Dawson et de McGill avec le Royal Vic.

Alors, ça, c'est quatre indicateurs, quant à moi, du courage du gouvernement. À date, il n'en coche aucun. Si vous aviez un des quatre, là, sur lequel vous voulez appuyer, ce serait lequel?

M. Girard (Jacques) : Je commencerais par le cégep, je pense, étant donné ce que vous avez lu dans notre rapport, étant donné l'évolution qu'on a connue au cours des dernières années. Et je pense d'ailleurs que nous ne sommes pas les seuls à vouloir l'application de la loi 101 aux cégeps. Il y a eu beaucoup d'intervenants, devant la commission, qui sont allés dans ce sens. Et je pense que c'est un geste fort, un geste que l'on doit poser.

Et je rappelle qu'au moment où la loi 101 a été déposée il y a eu une levée de boucliers, mais après, les gens ont tous reconnu que cette loi... tous, du côté anglophone, du côté fédéral, de tous les côtés, que cette loi était essentielle et qu'elle avait amené une stabilité de notre vie commune en société. Je pense qu'il en va de même de la recommandation que l'on fait pour les cégeps. Il va y avoir des réactions, il peut y avoir des réactions violentes, ce que je ne souhaite pas...

La Présidente (Mme Thériault) : ...ceci met fin à l'échange. Merci, M. Girard, merci, Mme D'Arcy, d'avoir accepté de venir nous rencontrer en commission parlementaire.

Nous allons suspendre quelques instants pour permettre à l'autre groupe de prendre place. <Merci.

(Suspension de la séance à 17 h 06)

La Présidente (Mme Thériault) : ... accepté de venir nous rencontrer en commission parlementaire.

Nous allons suspendre quelques instants pour permettre à l'autre groupe de prendre place. >Merci.

(Suspension de la séance à 17 h 06)

> (Reprise à 17 h 21)

La Présidente (Mme Thériault) : Donc, nous poursuivons nos travaux et nous recevons maintenant l'Assemblée des premières nations Québec, Labrador. Nous avons avec nous, à l'Assemblée nationale, le chef John Martin, qui est chef de la communauté micmaque de Gesgapegiag et chef porteur du dossier de l'éducation, ainsi qu'en visioconférence le chef Ghislain Picard, qui est le chef des Premières Nations Québec, Labrador. Bienvenue parmi nous. M. le chef Martin, la parole est à vous.

Assemblée des premières nations du Québec et du Labrador (APNQL)

M. Martin (John) : [Interprétation] <Merci...

La Présidente (Mme Thériault) : ...micmaque de Gesgapegiag et chef porteur du dossier de l'éducation, ainsi qu'en visioconférence le chef Ghislain Picard, qui est le chef des Premières Nations Québec, Labrador. Bienvenue parmi nous. M. le chef Martin, la parole est à vous.

M. Martin (John) : [Interprétation] >Merci. Bonsoir à tous les membres ici présents. Je m'appelle John Martin. Je suis le chef des Micmacs de Gesgapegiag, une communauté micmaque située en Gaspésie, au Gespe'gewa'gi du Nord, le septième district de notre terre natale micmaque. Gespe'gewa'gi fait partie des terres et cours d'eau traditionnels non cédés où vit le peuple micmac depuis des temps immémoriaux. J'ai aussi le plaisir d'être porteur du dossier de l'éducation au nom des chefs de l'Assemblée des premières nations Québec-Labrador.

En tant qu'enseignant de formation, je peux affirmer sans hésiter que ma plus grande passion est la réussite éducative des enfants des Premières Nations. Je crois sincèrement que l'éducation est le catalyseur de la transmission de nos valeurs, de nos langues et de notre culture, mais aussi du bien-être et de la prospérité de nos peuples. Cependant, à la lumière des circonstances qui m'ont amené jusqu'ici, je peux aussi dire que la réussite scolaire des enfants de Premières Nations est en péril, entravée par des barrières multiples, systématiques et assimilationnistes.

Bien que je parle et comprenne le français, ce n'est ni ma langue maternelle ni ma langue seconde, c'est une langue étrangère. Les langues des Premières Nations ont vu le jour ici, sur des terres relevant de la souveraineté autochtone. On s'est attaqué pendant longtemps à notre peuple pour avoir parlé notre langue dans vos écoles. On nous a confinés dans des réserves, dans la pauvreté, où les normes en matière de qualité de vie étaient tout autres. Et maintenant, votre projet de loi n° 96 est utilisé pour empêcher nos enfants de poursuivre leur parcours scolaire jusqu'à la fin. Depuis un bon moment déjà, cette loi linguistique est la cause directe de l'abandon scolaire et du départ de nos enfants, ce qui réduit considérablement leur capacité de bien gagner leur vie. Voilà ce à quoi de nombreux enfants des Premières Nations doivent faire face, jour après jour, lorsqu'ils exercent leur droit humain fondamental à l'éducation, un droit inscrit dans le droit international et la loi constitutionnelle.

Aujourd'hui, comme c'était le cas il y a 40 ans, les enfants des Premières Nations au Québec sont aux prises avec les barrières systémiques de la Charte de la langue française, qui exige que les élèves soient instruits en français ou qu'ils obtiennent des crédits en langue française au secondaire et au collégial. La charte s'applique à l'éducation des enfants des Premières Nations sans tenir compte de leur langue <maternelle...

M. Martin (John) : ... aux prises avec les barrières systémiques de la Charte de la langue française, qui exige que les élèves soient instruits en français ou qu'ils obtiennent des crédits en langue française au secondaire et au collégial. La charte s'applique à l'éducation des enfants des Premières Nations sans tenir compte de leur langue >maternelle et en faisant fi du droit inhérent et constitutionnel à l'autonomie gouvernementale et à l'autodétermination. L'éducation est un élément essentiel à l'autonomie gouvernementale, qui ne peut tout simplement pas être écarté du revers de la main ou relégué au second plan par une législation provinciale, quel que soit le lieu où les enfants des Premières Nations reçoivent cette éducation.

Et la Charte de la langue française et le projet de la loi n° 96 violent les droits à l'éducation des enfants des Premières Nations. La moitié des enfants des Premières Nations fréquentent une école à l'extérieur de leurs communautés, et nombre d'entre eux passent entre les mailles du filet. L'imposition de l'application de la charte au cheminement scolaire des enfants des Premières Nations dévalorise et marginalise les langues et cultures des Premières Nations pour renforcer l'idée selon laquelle la langue et la culture des colonisateurs sont supérieures et ont une plus grande valeur. Par conséquent, la langue se perd, et les objectifs de colonisation et d'assimilation sont atteints. Et pourtant, il a été démontré, encore et encore, que ce fossé linguistique ne fait rien pour stimuler les élèves, a un impact négatif sur leur estime de soi, fragilise leurs liens culturels et communautaires et crée une culture d'assimilationnisme et de monolinguisme. Il a pour effet d'exacerber la tendance au décrochage scolaire et les écarts socioéconomiques, en plus de menacer nos langues et notre culture.

Vous imposez aux Premières Nations des contraintes systémiques et psychologiques destructrices. Votre loi inflige des effets systémiques et psychologiques dévastateurs sur les enfants des Premières Nations en refusant de reconnaître les barrières systémiques qui continuent d'entraver leur réussite éducative.

Je n'ai aucun doute que vous êtes tous convaincus de l'importance de l'éducation. L'éducation est le facteur déterminant de la mobilité sociale, de la santé et du développement communautaire. Je vous demande de penser à ceci : en élaborant ces lois, ne continuez-vous pas à adopter la même mentalité à l'égard des Premières Nations? L'accès à l'éducation devrait être, pour nos enfants, la voie vers la réalisation de leurs rêves, et non un moyen de les ancrer dans le désespoir et la pauvreté. Ces barrières systématiques, associées à des facteurs historiques, tels que les traumatismes intergénérationnels causés par des années passées dans le système des <pensionnats...

M. Martin (John) : ... devrait être, pour nos enfants, la voie vers la réalisation de leurs rêves, et non un moyen de les ancrer dans le désespoir et la pauvreté. Ces barrières systématiques, associées à des facteurs historiques, tels que les traumatismes intergénérationnels causés par des années passées dans le système des >pensionnats pour autochtones, ont des effets néfastes pour la réussite scolaire des enfants des Premières Nations. Vous tous, ici présents, avez le pouvoir de changer le cours des choses.

Vous tous, qui faites partie de cette Assemblée des représentants du Québec, ouvrez votre esprit. Nous sommes à deux jours du 30 septembre, une journée destinée à se remémorer tous ces enfants qui ont perdu la vie dans les pensionnats pour autochtones et ceux qui ont survécu aussi. Souvenez-vous, l'intention était de tuer l'indien chez l'enfant. Interrogez-vous sur la Charte de la langue française et le projet de la loi n° 96 qui vous occupe. N'ont-ils pas les mêmes effets pervers sur les enfants des Premières Nations? Cette journée sert à nous rappeler des gestes posés contre nos peuples, contre nos enfants, afin que jamais ils ne se reproduisent. Cette journée est aussi un rappel pour vous, les décideurs, afin que vous ne répétiez pas les torts causés à nos enfants et à notre peuple.

J'ai fréquenté ces pensionnats, où nous nous faisions battre pour avoir parlé notre langue. Je vous demande à vous, décideurs de cette Assemblée : ne faites pas cela à notre peuple, à nos enfants. Laissez nos enfants des Premières Nations réaliser leur rêve d'une vie meilleure. Laissez-les poursuivre leurs études au Québec afin qu'ils puissent apporter leur contribution, et à leurs communautés, et au Québec. Je vous remercie et je prie le Créateur afin qu'il vous aide à agir dans l'intérêt de nos enfants. [Fin de l'interprétation]

La Présidente (Mme Thériault) : Merci. Chef Picard, il reste 2 min 37 s à la présentation. Par contre, la députée de Marguerite-Bourgeoys me dit que, si vous avez besoin de quelques petites minutes supplémentaires, une ou deux, vous pouvez les prendre sur son temps. Allez-y.

M. Picard (Ghislain) : [Interprétation] Bonjour. Je vous remercie de me donner du temps et je vous salue tous. Je m'appelle Ghislain Picard. Et je remercie aussi Lino, qui provient de la même communauté que moi, de Pessamit. Encore une fois, on vous remercie de nous donner du temps pour parler de la loi n° 96... que vous voulez défendre la langue française. Et je remercie les interprètes, parce que c'est très important, ce que nous amenons aujourd'hui, c'est ce que nous voulions vous faire part aujourd'hui.

• (17 h 30) •

Vous ne serez pas surpris, si je vous dis que je suis tout à fait d'accord avec les propos du chef, sur ce qu'il vient de dire, et je suis derrière lui. Il se souvient de tout ce qu'on a subi lorsqu'on parle de toutes les <réglementations qui ont touché nos communautés et nos enfants...

>


 
 

17 h 30 (version révisée)

<      M. Picard (Ghislain) : ...et je suis derrière lui. Il se souvient de tout ce qu'on a subi lorsqu'on parle de toutes les >réglementations qui ont touché nos communautés et nos enfants, puis ce n'est pas la première... ce n'est pas nouveau, ça fait longtemps que ça dure. Les Innus, ça fait plusieurs années qu'ils essaient de défendre leur culture, leur langue et leurs droits ancestraux, mais ils sont tout le temps face à un mur lorsqu'on parle de ces situations-là. On nous a toujours... on a toujours essayé de nous intégrer comme des blancs. Lorsqu'on parle des enfants, on a vu ce qui s'est passé, puis nos enfants... les parents, il y a beaucoup de problèmes avec les problèmes qu'ils connaissent concernant leur langue, leur identité... leur langue et leur...

Il y a deux semaines, l'APNQL est intervenue devant la Cour d'appel du Québec dans le cadre du renvoi relatif à la Loi concernant les enfants, les jeunes et les familles des Premières Nations, des Inuits et des Métis, la loi C-92, pour défendre sa position... que cette loi fédérale est valide. Il va sans dire que la position de la province est inconciliable avec la nôtre... comparativement à nous, ce qu'on pense de cette loi. Pour rajouter à cela, il y a maintenant le projet de loi n° 96 avec lequel la province souhaite modifier unilatéralement la loi sans prendre en compte les enjeux des Premières Nations. Le projet de loi n° 96 vise un objectif en lui-même noble, et c'est qui m'amène aujourd'hui devant votre groupe de parlementaires. [Fin de l'interprétation]

Nos droits ancestraux, protégés par le paragraphe 35.1° de la Loi constitutionnelle de 1982, comportent des droits linguistiques. Et l'article 13 de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones vient ajouter que ces droits linguistiques comprennent le droit des Premières Nations de revivifier, d'utiliser, de développer et de transmettre aux générations futures leur langue. C'est de nos droits dont on parle et c'est notre survie culturelle qui est jeu.

La suprématie d'une nation sur les autres ne fait pas partie des valeurs mises de l'avant par les chefs de l'APNQL. Pour eux, une grande nation digne et fière se définit d'abord par le respect des autres. On a le droit d'être en désaccord, on n'a pas le droit de contraindre, d'imposer, de se placer au-dessus des autres. Dans ses gestes quotidiens, l'actuel gouvernement de la province de Québec nie l'existence des droits les plus fondamentaux des Premières Nations. Le chef Martin a très bien exprimé cette position. Au nom des prérogatives qu'il s'attribue lui-même, il <impose ses...

M. Picard (Ghislain) : ... de se placer au-dessus des autres. Dans ses gestes quotidiens, l'actuel gouvernement de la province de Québec nie l'existence des droits les plus fondamentaux des Premières Nations. Le chef Martin a très bien exprimé cette position. Au nom des prérogatives qu'il s'attribue lui-même, il >impose ses lois, ses vues, aujourd'hui en matière linguistique, hier ou demain sur les enjeux territoriaux, toujours de façon unilatérale en s'attribuant une autorité que les Premières Nations, en tout respect, n'ont jamais reconnue et ne sont pas prêtes à reconnaître parce qu'elle est, selon nous, sans autre fondement que des lois coloniales et caduques.

Les Premières Nations se présentent devant votre groupe de parlementaires avec des propositions, des adaptations basées sur le respect mutuel, visant en particulier à corriger l'impact négatif de mesures imposées par votre cadre juridique actuel et qui créent, depuis des années, des dommages importants amplement décrits dans le document de positionnement politique que nous vous proposons.

En terminant, l'APNQL, je tiens à le rappeler devant vous aujourd'hui, invite les parlementaires québécois à une rencontre entre votre Assemblée et la nôtre sous forme d'une commission parlementaire spéciale dédiée aux relations entre nous, au rétablissement du respect entre nos formes de gouvernance aussi distinctes que respectivement valables. [Interprétation] Je vous remercie, vous tous. [Fin de l'interprétation] Merci.

La Présidente (Mme Thériault) : Merci. Donc, on retranchera trois minutes du temps de la députée de Marguerite-Bourgeoys. C'est le temps qui a été pris en supplémentaire pour la présentation. Sans plus tarder, je vais aller du côté de M. le ministre. La parole est à vous pour votre bloc de 17 minutes.

M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. M. Picard, M. Martin, M. Gros-Louis, bonjour, bienvenue à l'Assemblée nationale. Merci pour votre présence et la présentation de votre mémoire.

D'entrée de jeu, je dois dire que je suis assez d'accord avec vous sur le fait que chaque nation devrait avoir la possibilité de protéger sa langue. Vous faisiez référence, M. Martin, tout à l'heure, aux langues ancestrales, le droit de pouvoir maîtriser et apprendre sa langue, et je pense que c'est fondamental de valoriser toutes les langues, notamment les langues autochtones, parce que c'est ce qui fait en sorte... qui amène la vitalité des différentes nations. Et globalement, à chaque fois qu'une langue s'éteint, à chaque fois qu'une langue disparaît ou à chaque fois que le nombre de locuteurs de la langue diminue, c'est déplorable et c'est dramatique, parce que c'est ce qui fait, et là-dessus je suis d'accord avec vous, c'est ce qui fait l'âme d'une nation, l'identité d'un peuple. Alors, il faut avoir des mesures pour favoriser la vivacité de ces différentes langues.

Donc, plus précisément je comprends que votre souhait est de faire en sorte notamment que les enfants, vos enfants de vos différentes nations puissent apprendre leur langue de leur communauté, puissent la <maîtriser...

M. Jolin-Barrette : Donc, plus précisément je comprends que votre souhait est de faire en sorte notamment que les enfants, vos enfants de vos différentes nations puissent apprendre leur langue de leur communauté, puissent la >maîtriser. Essentiellement, c'est le souhait, qui est tout à fait légitime, de faire en sorte d'obtenir cette connaissance et le fait que les différentes nations puissent utiliser leurs langues. Est-ce que je me trompe? Je ne sais pas si M. Martin ou M. Picard...

M. Martin (John) : Je pense que oui. La langue ne se vit pas dans un vacuum. C'est des communautés, des cultures, des valeurs qui sont attachées à ces langues. Et, pour nous, on se trouve dans une situation où on ne peut pas retourner ailleurs pour aller chercher une langue qui est perdue. Donc, c'est important que nos langues soient valorisées, qu'elles soient reconnues, pas seulement avoir le droit de parler, d'écrire et de se communiquer. La langue est inhérente à nous, à nos cultures, et c'est important que le système qui est là présentement, qui empêche nos jeunes de progresser au niveau de l'éducation, les jeunes qui représentent notre futur, qui représentent notre développement, fasse face à des obstacles ou... les résultats, c'est le décrochage, et ils ne poursuivent plus d'études, puis ils s'en vont ailleurs. Leur langue est dévalorisée aussi bien que leur culture.

Donc, c'est important que les systèmes publics soient en support des initiatives qu'on propose. C'est important pour la valorisation. Tout le monde le sait, comme j'ai dit dans la présentation, quand on crée des obstacles au niveau de la langue, de l'apprentissage, c'est très difficile pour un jeune de faire du progrès. C'est quelque chose qu'on vit, nos étudiants vivent à tous les jours. Ça fait 40 ans que ma communauté et d'autres communautés, on fait face à des <décrocheurs...

M. Martin (John) : ... de l'apprentissage, c'est très difficile pour un jeune de faire du progrès. C'est quelque chose qu'on vit, nos étudiants vivent à tous les jours. Ça fait 40 ans que ma communauté et d'autres communautés, on fait face à des >décrocheurs, du monde qui ont tout simplement laissé les études ou s'en vont ailleurs suite à leur résultat de la charte française. Pas d'accommodement à ce niveau-là.

Pourtant, c'est assez simple, au niveau des Premières Nations, de faire des accommodements pour assurer que pas seulement notre langue, que notre culture et notre façon de faire est reconnue et est respectée, et de comprendre aussi que la langue, pour nous, c'est notre vie, et c'est notre continuité. La perte de la langue, pour nous, éventuellement, on se trouve complètement assimilés et perdus. Il y a cette loi-là que vous avez en place... s'en va dans ce sens-là, dans une vieille tradition très coloniale. Je pense que c'est important d'avoir une ouverture d'esprit pour... en ce qui concerne les Premières Nations.

• (17 h 40) •

M. Jolin-Barrette : Alors, sur ce point-là, le gouvernement du Québec est très... je veux bien cerner l'enjeu, parce que vous dites ou... parce que manifestement, l'enjeu, il est sur la Charte de la langue française, donc la loi qui a été adoptée en 1977, parce que le projet de loi que j'ai déposé, le projet de loi n° 96, c'est le statu quo par rapport à la situation actuelle. Et tous les droits rattachés aux nations autochtones sont garantis, et même à l'époque, c'est... la loi 101 a fait en sorte de venir inscrire... c'était le premier État au Canada à venir reconnaître le statut particulier des nations autochtones. Mais ce que je comprends de votre propos notamment, c'est le fait que vous souhaitez que les jeunes de vos communautés puissent étudier, grandir et vivre dans leur langue, donc dans leur langue de leur nation.

Essentiellement, quand vous dites : La langue, c'est la communauté, c'est la culture, c'est l'identification, je suis d'accord avec vous. Donc, comment est-ce que l'État québécois peut vous aider, par rapport aux langues autochtones, à maintenir, à développer et à avoir l'apprentissage des langues autochtones?

M. Martin (John) : Mister, the answers aren't here, in terms of how the QuébecGovernment can assist us in terms of correcting the situation. Because, like I said, for 40 years, we have been dealing with the situation of our students dropping out of high schools, leaving high schools simply because they can't finish their credits, not being able to go to the university in Québec because they can't be at their <credits here...

M. Martin (John) : ...can assist us in terms of correcting the situation . Because, like I said, for 40 years, we have been dealing with the situation of our students dropping out of high schools, leaving high schools simply because they can't finish their credits, not being able to go to the university in Québec because they can't be at their >credits here.

And what I'm saying is that needs to be recognized. We provide solutions, options where it would be possible for the Government here to allow our students to get their credits, provide a ... language credit program, whatever. But I think the solutions are there in terms of being able to move forward and improve, improve your law without taking absolutely nothing away from Québec or the French language.

In the situation that you're playing right now, where Québec is in a difficult situationvis-à-vis North America, you should be a lot more understanding of our situation. Our languages are precarious, they are disappearing. And that road, we know where it goes. And you, the QuébecGovernment here, alright, can do something about that. We bring propositions to the table that are very realistic, very simple, which would allow our students, First Nations' students to be able to get the credits that they need to graduate. There are also issues of professionals in the communities that don't receive recognition.

All of that is in here, in this document here, right here. The answers are all there. And I tell you, you should take a serious read and look at it, because it takes absolutely nothing away from Québec, it does not take anything away from the Québec language. But it does allow us to flourish in Québec and become contributors to Québec, just like our communities. That is our hope, this is why we are here.

We are here to talk to you and tell you what we have been experiencing in our communities for decades. And when I hear people saying that there is nothing that is going to change, well, that tells me that the same colonialist mindset that created the residential schools and the same mindset that is there, which allows native women in this land to be abused, and mistreated, and murdered is going to continue. Things have to change.

You can protect your French language very well. We have nothing against that. We support that. We think it's a good thing to do considering your situation in North America, but consider our situation. We cannot go back to France if we lose our language.

We have the solutions here, in front of you, in this document. Take the time to read them, look at them, study <them all...

M. Martin (John) : We think it's a good thing to do considering your situation in North America, but consider our situation . We cannot go back to France if we lose our language.

We have the solutions here, in front of you, in this document. Take the time to read them, look at them, study >them all, because they're taking nothing away from any «Québécois», or any French-speaking citizen in Québec, or the Québec Government, for that matter. In fact, it probably would put us in a very good relationship to dialog and move forward together and build together, rather than have to struggle and fight all the time.

M. Jolin-Barrette : Dans votre mémoire, essentiellement, une des propositions est de faire en sorte, dans le fond, que la loi 101 ou la Charte de la langue française ne s'applique pas. Parce que je suis d'accord avec vous sur l'objectif que les membres des différentes nations puissent maîtriser, apprendre et vivre dans leur langue, mais essentiellement, je comprends que le régime linguistique ne doit pas être appliqué.

Dans le fond, ce que vous souhaitez, c'est avoir le choix, pour l'ensemble des membres des nations autochtones, d'aller à l'école en anglais au niveau des études supérieures, au secondaire, notamment. Parce que l'enjeu, il est à l'effet que dans les communautés, parfois, le primaire, ça se fait dans la langue de la communauté, mais, par la suite, que l'école est en français. Or, idéalement, puis vous me corrigerez si je me trompe, idéalement, ce serait d'avoir la possibilité de pouvoir étudier tout le temps dans votre langue, donc dans la langue autochtone.

M. Martin (John) : It is much more than that. It is much more than that. When we're looking at primary education in our community, that's something that is entirely under our control. When we go to the public school system and students wish to graduate from high school, they cannot get their high school leaving. Probably 80% of the time, 90% of the time, students have great difficulty with that, and a significant number of them are dropping out because of that particular law. And that has a direct impact on the leadership that we will have tomorrow, on the development of our community, on the development of our culture and sustaining ourselves as a people. It's that simple.

If we did not have to deal with this law that's there, that's preventing them from getting their high school leaving in Québec. Maybe we'd have more lawyers, we'd have more doctors, we'd have more business people. Everybody knows, if you're going to have good government in a community, you require educated people, you need people to <pursue...

M. Martin (John) : ...this law that's there, that's preventing them from getting their high school leaving in Québec. Maybe we'd have more lawyers, we'd have more doctors, we'd have more business people. Everybody knows, if you're going to have good government in a community, you require educated people, you need people to >pursue their studies to higher education. So, that's tied directly, directly to that. I mean, our language is our language, we own that. That's ours. Like this is far more than that. Language does not live in a vacuum, and that's what we need to remember.

The solutions we propose are very simple, very straight forward. If you actually took the time to read the solutions that we are proposing, it makes it possible for our students to continue on graduate from high school and continue school in Québec, you know. But right now, the way the law is, we're being excluded. We're being excluded from getting access to these institutions and pursuing. It reduces the percentage of students that go to schools in Québec universities quite significantly, and that's having a direct impact on us, on our people, and our communities.

La Présidente (Mme Thériault) : Il reste deux minutes, M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Merci pour la présentation de votre mémoire. Je vais céder la parole à mes collègues. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Thériault) : Et je vois M. le député de Saint-Jean, à peine... votre échange, M. le député, question, réponse, deux minutes.

• (17 h 50) •

M. Lemieux : Merci beaucoup. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Décidément, toutes les langues sont sujet de passion et d'échanges passionnés, mais, en même temps, de raison. Et je ne sais pas si vous vous en rendez compte, mais on vient de faire l'histoire, aujourd'hui, jusqu'à un certain point, en tout cas dans cet immeuble et dans cette salle, parce qu'on avait trois interprètes dans trois langues.

La dernière fois que je suis passé au Parlement des Territoires du Nord-Ouest à Yellowknife, il y avait huit ou neuf petites cabines de traduction comme ça pour les parlementaires, les députés des Territoires du Nord-Ouest autour de la table, et ça fait longtemps. Je ne sais pas où ils sont rendus, mais je pense qu'aujourd'hui on vient de faire un bon bout de chemin. Je regarde le chef Picard du coin de l'oeil. J'écoutais, je buvais les paroles du chef Martin dans son petit paradis de Gesgapegiag, niché dans le fond de la baie entre New Richmond puis Maria. À force de se parler on va de plus en plus se comprendre et, avec ce qu'on vient de faire aujourd'hui, j'espère, s'entendre. Merci beaucoup, chef. Merci, M. Picard.

La Présidente (Mme Thériault) : Merci, M. le député de Saint-Jean. Le chef Picard nous signale qu'il aurait aimé s'adresser à nous. Il reste encore une quarantaine de secondes. Allez-y, chef Picard.

M. Picard (Ghislain) : Non, en fait, je voulais surtout contribuer à la discussion un peu plus tôt. Je remercie, M. le député, pour ses commentaires. Et peut-être parce que le ministre nous a <ramenés à...

La Présidente (Mme Thériault) : Le chef Picard nous signale qu'il aurait aimé s'adresser à nous. Il reste encore une quarantaine de secondes. Allez-y, chef Picard.

M. Picard (Ghislain) : Non, en fait, je voulais surtout contribuer à la discussion un peu plus tôt. Je remercie M. le député pour ses commentaires. Et peut-être parce que le ministre nous a >ramenés 50 ans en arrière, et 50 ans en arrière, effectivement, il y avait la loi 101, et un des gestes causés... parce qu'à ce moment-là aussi c'était un cadre juridique, en quelque sorte, imposé. Il y a eu une réaction très vive du côté de nos communautés, notamment une cohorte d'étudiants de la communauté de Kahnawake qui sont sortis de leur école secondaire pour bâtir leur propre école dans la communauté, qui existe toujours aujourd'hui.

Mais, au-delà de tout ça, je pense qu'il faut relever l'importance de la démarche dans son sens le plus global... Je pense qu'il y a une relation fondamentale ici qui fait défaut, et c'est aussi ça qu'on veut mettre en évidence, parce que, d'un côté, sur un autre champ, le Québec, finalement, plaide que le gouvernement canadien ne consulte pas assez.

Et finalement, c'est ce qu'on vous met sous la dent aujourd'hui, en marge de l'étude du projet de loi n° 96, c'est que... bon, on est où? On est... On se retrouve un peu devant vous aujourd'hui... un peu dans une situation, un peu, de compromis. On accepte les règles de vos commissions, de vos institutions, mais sachez qu'on souhaiterait vivement qu'il y ait un espace beaucoup plus approprié à la relation que vous vantez vous-mêmes, la relation de nation à nation, et ce n'est pas ce qu'on constate aujourd'hui.

Je pense qu'il y a des éléments importants, oui, qui touchent l'histoire, qu'il est utile d'utiliser comme référence, mais il y a le contexte d'aujourd'hui aussi qui doit s'appliquer. Donc, je pense qu'à l'intérieur des 50 minutes que nous avons aujourd'hui, il n'y aura pas moyen, là, de vider cette question-là, parce qu'elle est extrêmement fondamentale d'abord, mais contient également beaucoup, beaucoup d'éléments, je pense, qui méritent notre attention et la vôtre, surtout.

La Présidente (Mme Thériault) : Et, chef Picard, je dois passer la parole maintenant à la députée de Marguerite-Bourgeoys. Donc, Mme la députée, il vous reste 8 min 20 s à votre intervention.

Mme David : Merci beaucoup. Chef Martin, chef Picard, merci beaucoup d'être ici pour avoir ce très, très important échange sur la question des Premières Nations et particulièrement dans le secteur de l'éducation. Et vous le prenez sous l'angle, comme vous le dites, M. Picard, sous l'angle, en ce moment, de l'éducation, mais ça pourrait être beaucoup plus large que ça. Mais, à travers l'angle du projet de loi n° 96, bien, ça fait <parler de...

Mme David : Et vous le prenez sous l'angle, comme vous le dites, M. Picard, sous l'angle, en ce moment, de l'éducation, mais ça pourrait être beaucoup plus large que ça. Mais, à travers l'angle du projet de loi n° 96, bien, ça fait >parler de minorités linguistiques. Le Québec a une minorité... est une minorité linguistique francophone, on le dit souvent, dans la mer anglophone nord-américaine, mais vous vous réclamez de la même minorité linguistique et de la protection de vos nombreuses langues des Premières Nations. Il n'y en a pas qu'une, il y en a plusieurs.

Et je salue donc la commission ici, je salue les traducteurs de nous permettre d'avoir, justement, cet accès et vous donner accès dans les langues dans lesquelles vous voulez et vous devez vous exprimer pour réclamer, dans le fond, un immense chantier, c'est ce que j'entends aujourd'hui, non seulement sur le projet de loi n° 96, mais sur l'éducation.

Pour avoir été à l'enseignement supérieur, pour avoir visité... avoir assisté à des graduations à Kiuna, au centre d'études collégiales, qui est une merveille... mais il devrait y avoir des Kiuna, plusieurs, plusieurs à travers le Québec. Mais vous nous dites aussi : Mais depuis 40 ans... la loi 101 ne s'appliquait pas plus il y a 40 ans que maintenant, mais maintenant il faut en parler.

Je voudrais vous entendre encore plus, parce que, oui, j'ai lu le mémoire, et chef Martin a raison de dire qu'il y a beaucoup, beaucoup de recommandations. C'est un chantier sur le régime, par exemple, d'études collégiales. Il faudrait changer des choses. C'est à la ministre de l'Enseignement supérieur que vous devriez parler, et entreprendre ce chantier, ça inclut évidemment par le biais de la langue, mais je sais que le ministre... le futur ministre de la Langue française, de son ministère, aura un mot important à dire, mais la ministre aussi de l'Enseignement supérieur, le ministre de l'Éducation aussi, probablement.

Alors, qu'est-ce que vous nous conseillez à partir de maintenant, si on veut écouter vos recommandations?

La Présidente (Mme Thériault) : Chef Picard, il vous reste 5 min 30 s, à peu près, à l'échange.

M. Picard (Ghislain) : ...oui, merci beaucoup pour la question. Je laisserais le soin au chef Martin de compléter, s'il le souhaite.

En fait, quand je dis que c'est très, très fondamental... vous me parlez d'éducation, mais c'est beaucoup plus large que ça. Et c'est pour ça que j'ai pris soin de terminer mon commentaire, un peu plus tôt, avec la nécessité qu'il y ait un forum approprié. Sinon, on est condamnés, nous, de notre côté, à faire des apparitions ponctuelles, comme on le fait aujourd'hui, pour traiter d'un dossier extrêmement urgent. Et je comprends ici que c'est en dehors de votre confort habituel, hein, parce que vous êtes une commission parlementaire qui traite d'un dossier en particulier, dans ce cas-ci, le projet de loi n° 96. Mais, en même temps, est-ce qu'on a la capacité, est-ce que vous avez la capacité de créer cet espace-là qui nous permettrait... qui permettrait à <chaque...

M. Picard (Ghislain) : ... extrêmement urgent. Et je comprends ici que c'est en dehors de votre confort habituel, hein, parce que vous êtes une commission parlementaire qui traite d'un dossier en particulier, dans ce cas-ci, le projet de loi n° 96. Mais, en même temps, est-ce qu'on a la capacité, est-ce que vous avez la capacité de créer cet espace-là qui nous permettrait... qui permettrait à >chaque nation de vraiment se prononcer sur l'éducation, sur le projet de loi n° 96 et sur une foule d'autres sujets qui minent actuellement la relation qu'on souhaite harmonieuse de part et d'autre?

Et c'est pour ça que nous avons transmis une lettre au premier ministre l'invitant à créer cette commission spéciale, une commission parlementaire spéciale qui a d'ailleurs vu le jour en 1983 sous M. le premier ministre de l'époque, feu René Lévesque, et qui a donné lieu à la reconnaissance que le ministre citait un peu plus tôt, d'un certain nombre de droits incluant le droit à nos langues. Donc, ça, c'est... on recule 50 ans en arrière. Y a-t-il moyen d'actualiser tout ça? Et pour moi, bien, le Québec en sortirait grandi de pouvoir finalement passer une commande précise pour mettre à jour une relation, là, qui mérite d'être mise à jour.

La Présidente (Mme Thériault) : Vous voulez ajouter? Oui, allez-y.

M. Martin (John) : Yes. I'm just listening to Chief Picard, and he had a question about the capacity. I don't believe it's about capacity, I think it's about the Government's desire and the will. I think you have the capacity to be able to do it, there is no question about it. It's about the desire and the will to work with First Nations towards a solution, here, you know, and mutual respect, you know. I think that's something that needs to be remembered and I think that what the Regional Chief is proposing is certainly an honourable proposal and it should be followed through on.

But I think it's not a question of capacity, again, I just wanted to make that point, it's about the will and the desire to work with First Nations, to build the future and work together.

La Présidente (Mme Thériault) : Merci. Il vous reste deux minutes.

• (18 heures) •

Mme David : Quand, M. le chef Picard, vous parlez justement du fait que c'est beaucoup plus large que la question de l'éducation... mais vous dites quand même dans vos recommandations, la recommandation n° 3, qu'étant donné les modifications ou certaines dispositions constitutionnelles, vous auriez aimé évidemment faire un dialogue de gouvernement à gouvernement. Et vous vous inquiétez, peut-être, de certaines parties du projet de loi n° 96 concernant des modifications constitutionnelles. Ça, c'est intimement lié au projet de loi n° 96, donc ça ne peut pas attendre un dialogue plus large sur l'ensemble des enjeux.

Alors, qu'est-ce que vous proposez pour cette partie-là, qui <traite de modifications...

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18 h (version révisée)

<15379 Mme David : ...du projet de loi n° 96 concernant des modifications constitutionnelles. Ça, c'est intimement lié au projet de loi n° 96, donc ça ne peut pas attendre un dialogue plus large sur l'ensemble des enjeux. Alors, qu'est-ce que vous proposez pour cette partie-là, qui >traite de modifications constitutionnelles?

M. Picard (Ghislain) : Bien, écoutez, on a déjà fait appel au gouvernement là-dessus. Je crois que, sans égard aux positions qui vous ont été transmises jusqu'à maintenant, qui vous ont été partagées et celles qui viendront pour la suite, parce qu'on est conscients que c'est un dossier qui interpelle beaucoup de monde, hein, au-delà des Premières Nations, mais on insiste toujours sur le fait qu'on n'est pas un groupe de pression, ici. On représente des nations, des gouvernements avec un statut qu'ils considèrent comme étant aussi valable que le vôtre, finalement. Et ce qu'on souhaite, c'est que... d'abord, qu'ils puissent... Il aurait pu y avoir une consultation en amont, hein, pour essayer de vérifier ou de valider certaines positions que le gouvernement croit savoir sur le positionnement des différentes communautés.

L'exemple que je me permets d'ajouter à mon commentaire, c'est sur la question de l'ordre des professions, par exemple, et il y a une limite importante par rapport à cette capacité-là au sein même de nos nations, et il y a une crainte que finalement le projet de loi, dans sa finalité, puisse peut-être ajouter des barrières à certaines personnes qui sont issues de différentes nations qui utilisent l'anglais comme seconde langue ou, des fois, comme première langue et qui pourraient voir peut-être s'ériger des barrières leur empêchant de... peut-être de pratiquer au-delà de leur communauté. Donc, ça, c'est un aspect important qui mérite très certainement d'écoute...

La Présidente (Mme Thériault) : Merci.

M. Picard (Ghislain) :...et c'est pour ça que je dis qu'il y a une réalité qui est la nôtre, qui n'est pas celle des autres groupes et qui mérite très certainement un espace approprié, une écoute appropriée.

La Présidente (Mme Thériault) : Oui. Merci, M. Picard. Je dois maintenant aller du côté de la députée de Mercier, 2 min 50 s.

Mme Ghazal : Merci. Merci beaucoup pour votre présence, chef Martin, chef Picard, et vous pouvez être sûrs qu'on va considérer le mémoire que vous avez déposé.

J'aimerais savoir... Vous avez parlé, monsieur... chef Picard, de la création d'une commission spéciale parlementaire pour les autochtones, et vous avez même... vous en avez parlé depuis le mois de juin, où vous invitiez tous les élus à y répondre, et je voulais savoir : Est-ce que vous avez eu une réponse de la part du gouvernement?

M. Picard (Ghislain) : Bien, à l'exception d'un commentaire au niveau ministériel, la lettre qui a été transmise à la fin de l'été au premier ministre est toujours sans réponse, et pour nous, là, c'est important. Encore une fois, je me permets d'insister. Bon, on a un gouvernement qui <parle...

M. Picard (Ghislain) :  ...à l'exception d'un commentaire au niveau ministériel, la lettre qui a été transmise à la fin de l'été au premier ministre est toujours sans réponse, et pour nous, là, c'est important. Encore une fois, je me permets d'insister. Bon, on a un gouvernement qui >parle... On a une table politique, hein, et je pense que je ne vous apprends rien, à...

Mme Ghazal : Oui, puis je peux vous dire qu'on appuie...

M. Picard (Ghislain) : ...à tout le monde, là, il y a une table politique qui est en marche. Mais, au-delà de ça, le gouvernement parle aussi d'ententes plus particulières avec chaque nation, et, pour moi, ça prend un espace pour pouvoir en parler, parce que la nation attikamek a peut-être des priorités que la nation algonquine n'a pas. Et pour moi, là, c'est vraiment pour mettre en évidence un peu, je dirais, les lacunes dans ce que tout le monde souhaite, là, une relation positive, et harmonieuse, et productive avec chaque nation. Donc, on est toujours sans réponse à votre question.

Mme Ghazal : Tout à fait, et j'espère que tous les élus vont appuyer... Bof! il y a comme un délai. J'espère que tous les élus aussi vont appuyer cette demande. Et, vu qu'on parle de langues autochtones, comment est-ce que cette commission spéciale parlementaire autochtone pourrait aider à protéger et à reconnaître les langues autochtones?

La Présidente (Mme Thériault) : Là, je vais vous demander un tour de force, M. Picard.

M. Picard (Ghislain) : Là, écoutez, il y a... les défis sont divers. Il y a une grande diversité dans nos communautés, des langues qui sont en situation très précaire plus que d'autres, et, pour moi, il y a cette diversité-là qui mérite d'être bien comprise, d'être mieux connue. Et il en revient aux différents dirigeants des communautés, là, de proposer des solutions en ce sens, et pour moi, là, les questions qui sont liées au projet de loi n° 96 pourraient très bien être un sujet qui mériterait cet espace-là.

Mme Ghazal : Très bien. Merci beaucoup. Merci.

Mme Thériault : Merci. Donc, on va aller du côté du député de Matane-Matapédia. M. le député.

M. Bérubé : Merci, chef Picard, chef Martin. Alors, chef Martin, je suis le député de Matane-Matapédia, deux noms micmacs, «Matane» qui veut dire «vivier de castors», et «Matapédia», «jonction de deux rivières», et ma circonscription est juste en face, de l'autre côté du fleuve, là, celle de Pessamit. Alors, je me sens en territoire connu.

Écoutez, j'ai écouté avec attention surtout le chef Martin, sur le cursus scolaire, et ce que j'ai besoin de comprendre... Bien sûr, on a lu le mémoire, et puis on va continuer de lire, puis, si vous le permettez, on va rester en contact. Mais quelles libertés manque-t-il à votre nation dans le domaine scolaire? Par exemple, au primaire et au secondaire, ça se passe en langue micmaque. Mais qu'est-ce qui manque qui vous permettrait d'atteindre les objectifs de réussite scolaire, de réussite sociale, de mobilité sociale?

Très concrètement, qu'est-ce qu'on pourrait faire pour améliorer ça? Parce que, pour moi, ce que vous proposez, ce n'est pas une menace au français, même que notre statut de minoritaires, vous l'avez dit, en Amérique du Nord devrait nous inciter davantage à échanger ensemble sur ce statut-là et à devenir des alliés. Alors, si vous aviez une mesure en particulier à exposer, ce serait laquelle?

Mme Thériault : Et je voudrais vous demander, peu importe qui répond, que ce soit le chef Martin ou le chef Picard, de le faire en 1 min 30 s <avant...

M. Bérubé : ...même que notre statut de minoritaires, vous l'avez dit, en Amérique du Nord devrait nous inciter davantage à échanger ensemble sur ce statut-là et à devenir des alliés. Alors, si vous aviez une mesure en particulier à exposer, ça serait laquelle?

La Présidente (Mme Thériault) : Et je voudrais vous demander, peu importe qui répond, que ce soit le chef Martin ou le chef Picard, de le faire en 1 min 30 s >avant de suspendre les travaux. Chef Martin.

M. Martin (John) :Thank you for the question. As I pointed out in my presentation, we do have a significant number of students across Québec that attend the provincial school system. In our communities, we control the issue of education, but the issue that we're dealing with, with the French language law, the charter and the current bill that's being looked at, C-96, has to do with the completion and success.

When our students, especially, I think, from the English-speaking communities hit high school, at the upper levels of high school, they begin to encounter the problem of being able to succeed in French. So, quite often, what happens is that... the high school level is that they do not get the credits that they require to be able to get their high school leaving and do not... therefore, cannot get their high school certificate from graduation to be able to proceed on to institutions of higher learning in Québec. So, quite often, what they do is quit.

I think the solution has been proposed here, in the document. Again, I show you this document here. There is a lot of answers in here responding specifically to your question, because of what can be done.

La Présidente (Mme Thériault) : Merci. Merci, chef Martin, merci, chef Picard, merci, M. Gros-Louis, pour votre passage en commission parlementaire.

Nous allons donc suspendre nos travaux, permettre au prochain intervenant de pouvoir prendre place. Merci d'être venus parler avec nous. Nous suspendons les travaux. Merci.

(Suspension de la séance à 18 h 08)

> (Reprise à 18 h 16)

La Présidente (Mme Thériault) : Donc, nous reprenons les travaux de la commission et, comme dernier intervenant de cette journée fort chargée, nous recevons M. Charles Castonguay, qui est auteur et mathématicien. M. Castonguay, vous avez la parole pour une dizaine de minutes. Par la suite, il y aura des échanges avec les parlementaires, en débutant par le ministre. La parole est à vous. Bienvenue au Parlement.

M. Charles Castonguay

M. Castonguay (Charles) : Merci, Mme la Présidente. Je vous remercie de votre invitation à exprimer mon avis sur le projet de loi n° 96. Je tâcherai d'y répondre avec le souci de rigueur que l'on attend d'un mathématicien. Depuis bientôt 50 ans, je suis de près l'évolution de la situation linguistique au Québec. J'ai résumé mes observations à ce sujet dans mon livre Le français en chute libre, qui est paru l'hiver dernier.

Depuis le début des années 2000, la chute spectaculaire du poids de la population de langue française au Québec s'accompagne d'une stabilisation inédite et même d'une progression tranquille du poids de celle de langue anglaise. Le rapport de force entre le français et l'anglais ne cesse, par conséquent, de se détériorer. Autrement dit, l'anglicisation du Québec est en marche.

Tout comme la loi 101, le projet de loi n° 96 vise à faire du français la langue commune au Québec. Cependant, au contraire de la loi 101 dans sa version d'origine, le <projet de loi 96 n'est...

M. Castonguay (Charles) : Tout comme la loi 101, le projet de loi n° 96 vise à faire du français la langue commune au Québec. Cependant, au contraire de la loi 101 dans sa version d'origine, le >projet de loi n° 96 n'est pas susceptible d'atteindre cet objectif. La loi 101 comptait de nombreuses mesures contraignantes qui, prises ensemble, promettaient de faire vraiment du français la langue commune. Elle imposait l'école française pour les enfants des futurs immigrants, l'école française pour les enfants des futurs migrants en provenance de l'Ontario et d'ailleurs au Canada, l'école française pour les enfants des francophones de souche, l'affichage commercial en français seulement, et j'en passe. Par comparaison, l'économie générale du projet de loi n° 96 tombe à plat. Le rôle exemplaire qu'il assigne à l'administration ne s'appuie sur aucune combinaison de mesures contraignantes qui imposerait l'usage du français comme langue commune dans la vie de tous les jours. Les simples soldats de l'État se retrouveront fin seuls en première ligne à gérer la langue de communication avec leurs clients. Libre à peser de tout son poids, l'inertie de l'anglais en tant que langue commune du Canada, sinon du monde entier, fera le reste.

Que le projet de loi n° 96 n'ait pas les moyens de ses ambitions ressort clairement de la persistance coriace de la supériorité de l'anglais comme langue d'assimilation.

• (18 h 20) •

En déposant le projet de loi actuel, son auteur a fixé 90 % comme cible pour la part du français dans l'assimilation des allophones. C'est parfaitement bien visé. C'est la part de l'assimilation des allophones qui doit revenir au français, si l'on veut stabiliser le rapport de force entre le français et l'anglais au Québec. Toutefois, il est tout aussi impératif de mettre fin, en même temps, à l'anglicisation des francophones eux-mêmes, actuellement en plein essor sur l'île de Montréal. Le projet de loi n° 96 ne permettra d'atteindre ni l'une ni l'autre de ces cibles.

Avant la loi 101, la part du français dans l'assimilation des allophones n'était ni de 0 %, ni de 10 %, ni de 20 %, comme l'ont avancé divers intervenants. Elle était, selon le recensement de 1971, de 27 %, assez appréciable. En 2016, elle s'élevait à 55 %. Cela représente au total une hausse de 28 points de pourcentage. Dans mon livre, j'ai <démontré qu'au moins 18 de...

M. Castonguay (Charles) : ...1971, de 27 %, assez appréciable. En 2016, elle s'élevait à 55 %. Cela représente au total une hausse de 28 points de pourcentage. Dans mon livre, j'ai >démontré qu'au moins 18 de ces points s'expliquent par des modifications apportées au questionnaire du recensement d'abord en 1991, oui, et encore en 2001, et par l'arrivée successive de cohortes d'immigrants allophones qui étaient en majorité francotropes et qui d'ailleurs avaient souvent adopté le français comme langue d'usage avant même d'immigrer au Québec. La loi 101, en propre, n'aurait donc fait progresser la part du français dans l'assimilation des allophones que de 10 points tout au plus. Par comparaison, il est évident que le projet de loi n° 96 n'offre rien de comparable aux dispositions scolaires de la loi 101 et qui permettrait de combler les 35 points qui manquent pour atteindre le 90 %.

Quant à l'anglicisation des francophones, sa dernière hausse, entre 2011 et 2016, a annulé à peu près totalement le progrès, durant la même période, du français comme langue d'assimilation des allophones. Autrement dit, l'anglicisation des francophones compromet maintenant le rattrapage qu'opérait, depuis 1971, le français sur l'anglais sur le plan du gain global que tirent chacune des deux langues du phénomène d'assimilation. C'est ainsi que le Québec a dépassé maintenant le point de bascule. En 2016, le taux d'anglicisation des jeunes adultes francophones sur l'île de Montréal avait atteint 6 %. Le même taux était autour de 20 % dans chacune des municipalités à majorité anglophone de l'île de même que dans chacune des municipalités à majorité anglophone de l'Outaouais. Il n'y a rien, dans le projet de loi n° 96, qui serait susceptible de mettre fin à cette anglicisation des francophones.

J'aimerais avancer quelques mesures à envisager éventuellement. J'ai démontré au cours de mes recherches que les dispositions scolaires de la loi 101 sont les seules à avoir fait progresser de façon significative le français comme langue d'assimilation des allophones. Au vu de ce mince progrès d'au plus 10 points de pourcentage et des 35 points qu'il reste à combler et au vu de l'assimilation croissante des francophones à l'anglais, étendre la loi 101 aux études collégiales est incontournable. C'est aussi insuffisant pour renverser l'anglicisation du Québec qui est en marche depuis le début des années 2000.

Autrement dit, pour <donner...

M. Castonguay (Charles) : ...des francophones à l'anglais, étendre la loi 101 aux études collégiales est incontournable. C'est aussi insuffisant pour renverser l'anglicisation du Québec qui est en marche depuis le début des années 2000.

Autrement dit, pour >donner au français un élan décisif dans l'assimilation des allophones et pour mettre fin réellement à l'anglicisation des francophones à Montréal et dans l'Outaouais, le principe de précaution commande également d'étendre la loi 101 au baccalauréat. La recherche à cet égard est concluante, la langue des études pertinentes à l'exercice d'un métier ou d'une profession a un lien indéniable avec la langue utilisée par la suite sur le marché du travail. Celle-ci, à son tour, a un lien indéniable avec la langue d'usage à la maison, et le nombre total d'années d'études en français est en corrélation positive avec son emploi subséquent, tant comme langue de travail que comme langue d'usage au foyer.

Concrétiser le statut du français comme langue commune en réinstaurant le français comme unique langue d'affichage paraît également indispensable. Rien dans le projet de loi n° 96 n'oblige des nouveaux arrivants adultes qui ignorent le français à leur arrivée à l'apprendre et à l'utiliser dans leur vie quotidienne. Au contraire, l'affichage instauré à l'origine par la loi 101 faisait de l'apprentissage et de l'utilisation du français une obligation pratique de tous les jours. De façon plus puissante et immédiate que toute autre mesure, il faisait une promotion de tous les instants de l'usage du français comme langue commune des Québécois, y compris entre francophones et anglophones de souche.

Je vous remercie de votre attention.

La Présidente (Mme Thériault) : Merci beaucoup, M. Castonguay. Donc, sans plus tarder, nous allons aller du côté du ministre. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. Bonjour, M. Castonguay. Merci d'être présent aux travaux de la commission.

Vous êtes quelqu'un qui a participé au débat linguistique depuis plusieurs années. Je pense même que vous avez déjà contribué en 1974, lors du... en fait...

M. Castonguay (Charles) : ...22.

M. Jolin-Barrette : 22, qui a fait de la loi... de la langue française la langue officielle du Québec. Donc, on va donner ça à mes amis d'en face.

M. Castonguay (Charles) : Sur papier.

M. Jolin-Barrette : Sur papier. Vous avez bien raison de me reprendre. Vous avez bien raison de me reprendre.

Vous avez travaillé notamment sur, bon, les indicateurs linguistiques, les tendances, et, au niveau, là, du transfert linguistique, je crois que c'est vous qui avez développé cet indicateur-là pour faire en sorte qu'on assure la vitalité du français, là. On dit qu'il faudrait <tendre vers...

M. Jolin-Barrette : ...sur, bon, les indicateurs linguistiques, les tendances, et, au niveau, là, du transfert linguistique, je crois que c'est vous qui avez développé cet indicateur-là pour faire en sorte qu'on assure la vitalité du français, là. On dit qu'il faudrait >tendre vers 90 % de taux de transfert linguistique. C'est exact?

M. Castonguay (Charles) : Oui. Ça ne vient pas de moi, ça vient plutôt de Jacques Henripin, dans un livre publié en 1974, L'immigration et le déséquilibre linguistique, publié par le ministère de Commerce, etc., du Canada à l'époque.

Et, pour ce qui est de l'intérêt pour l'assimilation linguistique, je vous signale que «transfert linguistique» est un anglicisme. Il faudrait parler de «substitution linguistique», en bon français. Un transfert, c'est un «shift», c'est quelque chose qui se déplace. La langue ne se déplace pas. L'anglais est très ambigu, ce qui le rend très intéressant comme langue, mais le français est bien précis, comme vous le savez comme juriste.

C'est plutôt la commission BB qui est à l'origine de l'intérêt pour la langue parlée à la maison comme langue principale au moment du recensement, et c'est par la suite que Statistique Canada a proposé... a posé la question sur la langue d'usage à la maison pour la première fois en 1971. Et après, il suffisait de... Je ne suis pas le premier à faire l'analyse de ça, le premier était Richard J. Joy.

M. Jolin-Barrette : Mais, pour atteindre cette substitution linguistique, je dois comprendre de vos propos que le projet de loi n° 96 ne nous permet pas d'aller atteindre, selon votre opinion, cette substitution linguistique.

Qu'est-ce que ça prendrait? Vous avez parlé tout à l'heure d'imposer la loi 101 jusqu'au baccalauréat. Des intervenants avant vous sont venus nous dire : jusqu'au cégep. Vous, vous allez plus loin, vous dites : jusqu'au baccalauréat. Est-ce que cette mesure-là serait suffisante ou qu'est-ce qu'il faudrait rajouter pour atteindre cet objectif-là?

M. Castonguay (Charles) : Non, il faudrait un faisceau de mesures contraignantes, comme ça existait dans la version d'origine de la loi 101, qui ensemble interagiraient de manière à orienter le Québec vers le français, langue commune. L'objectif du français, langue commune, qui a été proposé par la commission Gendron d'ailleurs en 1972, c'est incontournable, c'est ce qu'il faut faire. Il faut faire en sorte que pendant... comme c'était le cas pendant deux ou trois ans après l'adoption de la loi 101.

• (18 h 30) •

Spontanément, en se rencontrant, on s'adressait la parole en français, y compris entre anglophones. J'ai été témoin, moi... Bien, je suis un anglophone moi-même de souche, d'Ontario, et j'ai des amis anglophones du Québec, et on s'en parlait, on était des chercheurs et on se disait : Regardez-moi ça, c'est devenu ce qu'on appelle en anglais le <«default language of communication»...

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18 h 30 (version révisée)

<       M. Castonguay (Charles) : ...été témoin, moi. Bien, je suis un anglophone moi-même, de souche, d' Ontario, et j'ai des amis anglophones du Québec, et on s'en parlait... On était des chercheurs et on se disait : Regardez-moi ça, c'est devenu ce qu'on appelle en anglais le >«default language of communication». C'est la langue auquel on a recours quand les deux personnes en question, ou les trois, ou quatre, ils ne parlent pas... ils n'ont pas tous la même langue maternelle. Ça, c'est vraiment la clé, faire en sorte que ça vienne comme ça, spontanément. Et c'était en marche pendant cette brève période de temps, que j'appelle l'embellie, et qui a pris fin avec le référendum de 1980 et le coup de force constitutionnel de 1982.

Alors, je crois que les objectifs sont bien judicieux, le 90 %. J'ajouterais le 0 % d'anglicisation nette des francophones, parce qu'il faut quand même qu'il y en ait un peu, d'anglicisation des francophones, mais il faut qu'il y ait aussi de la francisation des anglophones, de manière à ce que ça s'annule, que ça se neutralise. Il ne faut pas que ce soit comme maintenant, à Montréal et dans l'Outaouais, c'est-à-dire un plus grand nombre de francophones optent pour l'adoption de l'anglais comme langue d'usage à la maison, que d'anglophones qui suivent le chemin inverse. C'est normal, hein, qu'il y ait du ping-pong comme ça.

C'est fascinant, d'ailleurs, de faire la recherche là-dessus. On constate que les anglophones, au Québec, qui se francisent, la moitié ont le français comme origine ethnique. Alors, vous me regardez et vous pensez que je suis un francophone. Jamais de la vie. Je n'ai jamais parlé le français à la maison jusqu'à l'âge de 24 ans, consécutivement à un coup de foudre. Cherchez la femme, comme on dit dans ma langue maternelle. Mais, voilà, je pense que les objectifs sont clairs, ils ont été articulés par Henripin, qui était le doyen de la démographie québécoise, il y a très longtemps. Et j'ai suivi le mouvement de l'assimilation linguistique au Québec, à l'extérieur du Québec, en Ontario, dans ma région natale, Ottawa, en Acadie, et, une fois que s'est mise en branle l'anglicisation des francophones, on n'a réussi nulle part, au Canada, de renverser la tendance.

À Ottawa, quand j'étais... Bien, quand j'étais petit, il n'y avait pas de données, mais quand j'avais 31 ans, le taux d'anglicisation net de la population de langue maternelle française était de 17 %, malgré la Loi sur les langues officielles du Canada, et tout ce que ça a pu apporter, comme possibilités, pour employer le français comme langue de travail à la fonction publique canadienne, et tout ça. C'était beau sur papier, ça demeure beau sur papier. Mme Joly nous promet qu'on va réellement créer l'égalité des deux langues officielles du Canada. Oui, Mme Joly, mais ça fait un demi-siècle depuis ça, depuis que vous avez adopté la loi de 1969, et vous n'avez pas réussi <encore...

M. Castonguay (Charles) : ... et tout ça. C'était beau sur papier, ça demeure beau sur papier. Mme Joly nous promet qu'on va réellement créer l'égalité des deux langues officielles du Canada. Oui, Mme Joly, mais ça fait un demi-siècle depuis ça, depuis que vous avez adopté la loi de 1969, et vous n'avez pas réussi >encore. Et avec vos... Pensez-vous qu'avec vos petites modifications...

Là, je ne suis pas devant cette commission-là, là, j'espère être invité. Mais il n'y a rien... il n'y a rien, ça ne change pas le... le fusil ne change pas d'épaule. Ils essaient encore la même recette, et ça ne marche pas, la preuve est faite. C'est 34 % aujourd'hui, c'est-à-dire en 2016, le taux d'anglicisation des francophones net, dans la ville d'Ottawa, et 40 % chez les jeunes adultes, et c'est là où on voit l'avenir. Quand le mouvement est là, en hausse, chez les jeunes adultes, comme c'est le cas, à l'heure actuelle, sur l'île de Montréal, vous pouvez mettre votre main au feu qu'au recensement de 2021, dont on connaîtra les résultats l'été prochain, eh bien, ça va continuer à monter. C'est comme ça.

Alors, il y a une dynamique. C'est vrai que j'ai été le pionnier — excusez-moi si je parle beaucoup — de cette façon d'envisager l'assimilation par groupes d'âge et de reconnaître que c'est parmi les jeunes qui annonce qu'est-ce que ça va être quand ils vont avoir l'âge d'élever des enfants. S'ils ont passé à l'anglais, langue d'usage à la maison, ils vont transmettre l'anglais comme langue maternelle à leurs enfants. Et ce sont les locuteurs natifs d'une langue, de par le monde, qui assurent la pérennité de cette langue. Ce n'est pas ceux qui s'en servent comme langue seconde, ce sont les locuteurs natifs. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est Nicholas Ostler, dans ses publications, un historien des langues. Il a étudié le perse, il a étudié l'araméen, le copte, plein de grandes langues, le latin et le... Et même, les langues, hein, elles ont des... il y a un mouvement ascendant, puis ensuite, ça décline puis... C'est vrai. C'est comme la nature, c'est en mouvement continuel.

M. Jolin-Barrette : Peut-être vous poser une question avant de céder la parole à mes collègues. Il y a plusieurs mesures, dans le projet de loi n° 96, là, bon, langue de travail, langue normale des études, langue commune. Notamment, on fait le constat qu'à Montréal il y a plusieurs enjeux.

Pouvez-vous nous parler du constat de Montréal? Et je reviens à ma première question. Vous m'avez dit : C'était une série de mesures, la loi 101, à l'époque. Là, on met une série de mesures, mais je crois comprendre que vous trouvez que ce n'est pas suffisant pour inverser la tendance. Alors, quelles sont les mesures... et quelle est la situation à Montréal? Est-ce qu'on est à un point de rupture? Est-ce que c'est dramatique?

M. Castonguay (Charles) : Oui, c'est dramatique. Je pense qu'on a perdu le contrôle, si on ne l'a jamais eu.

Pour ce qui <est...    

M. Jolin-Barrette : ...quelles sont les mesures... et quelle est la situation à Montréal? Est-ce qu'on est à un point de rupture? Est-ce que c'est dramatique?

M. Castonguay (Charles) : Oui, c'est dramatique. Je pense qu'on a perdu le contrôle, si on ne l'a jamais eu.

Pour ce qui >est des mesures visant la langue de travail, c'est bien beau d'abaisser le nombre d'employés, dans une entreprise, qu'on vise avec nos mesures de francisation de langue de travail, mais les entreprises de 100 employés et plus étaient visées vraiment de manière centrale, principale, par la loi 101. Les mesures étaient là. Je présume que les mesures étaient appliquées, il y avait des syndicats qui étaient impliqués là-dedans, ils étaient... il y avait de l'action. Ça voulait changer les choses.

Début des années 2000, l'OQLF a publié une étude, par Virginie Moffet et deux autres chercheurs, intitulée La langue de travail dans les grandes entreprises à Montréal. Ils ont constaté que la langue commune de communication entre les employés de langue maternelle française et de langue maternelle anglaise... Non, ce n'était pas seulement à Montréal, c'était dans l'ensemble du Québec. Alors, pour l'ensemble du Québec, les résultats étaient les suivants. La langue commune employée entre deux personnes de langues différentes, anglaise et française, était... 40 % du temps, le répondant disait... bien, il utilisait le plus souvent le français, 40 % du temps, le répondant disait qu'il utilisait le plus souvent l'anglais dans ses communications avec ses supérieurs, ses subalternes, ses pairs de langue anglaise, et l'autre 20 %, c'étaient les deux, à parts égales. Ça, c'était dans l'ensemble du Québec. Ça, ça veut dire qu'à Montréal c'était probablement quelque chose comme 30 % français, 50 % anglais puis 20 % bilingue, ou quelque chose de cet ordre-là.

Alors, même la loi 101, avec les mesures que vous allez probablement vouloir répercuter pour les entreprises de 25 employés et plus, ou peut-être que vous allez modifier le seuil... mais sachez que déjà, au début des années 2000, donc 25 ans ou plus après l'adoption de la loi 101, ce n'était pas fait encore. La langue commune de travail n'était pas devenue le français dans les grandes entreprises visées, en tout premier lieu, par la loi 101.

Alors, je ne peux pas qu'être sceptique devant des propositions de faire du français la langue de travail tout en permettant le libre choix de la langue d'enseignement au collège et à l'université. Ça ne va pas de soi. Ça ne va pas de soi. Je l'ai dit d'ailleurs à Mme David quand elle était à la direction de Québec solidaire, je lui ai supplié de rester en <contact...

M. Castonguay (Charles) : ...le libre choix de la langue d'enseignement au collège et à l'université. Ça ne va pas de soi. Ça ne va pas de soi. Je l'ai dit d'ailleurs à Mme David quand elle était à la direction de Québec solidaire, je lui ai supplié de rester en >contact avec moi, parce que je faisais de la recherche sur ces interactions-là. Jamais eu d'autres réponses.

Mais c'est impossible de franciser la langue de travail si vous ne francisez pas la langue dans laquelle le jeune se prépare à travailler. Et c'est au cégep et c'est à l'université que les professionnels, ou les travailleurs, ou les... ils se font à l'anglais langue d'usage, langue commune, pardon, ils se font à l'utilisation de l'anglais comme langue commune quand ils fréquentent le cégep anglais, quand ils fréquentent l'université anglaise. Tout leur vocabulaire est là, tous les réflexes sont là. Les réseaux qui se sont faits pendant ces études-là vont leur profiter énormément par après, dans leur vie active, et ça y est. Ce n'est pas vrai... ce n'est pas vrai qu'on peut fréquenter le cégep anglais sans aucun... sans que ça déteigne.

• (18 h 40) •

Vous savez, il y a eu une recherche par Karine Vieux-Fort. Elle a eu un doctorat avec cette recherche à l'Université Laval, ici, à Québec. Ça a fait les manchettes dans le journal La Presse. Elle avait interrogé un échantillon de 47 étudiants... pardon, diplômés de cégeps anglais, francophones, donc langue maternelle, diplômés de cégeps anglais. Ça a fait les manchettes, et ça a été retentissant, et probablement que l'idée court que, bon, fréquenter le cégep anglais, fréquenter l'université anglaise, ça... Non. J'ai regardé sa thèse de doctorat, 500 pages, j'ai regardé surtout la partie méthodologie. Parmi les 47 étudiants, 20 étudiaient ici, à Québec, au collège Champlain. Les 27 autres étudiaient ailleurs au Québec. Mais ce n'est déjà pas un... c'est un drôle d'échantillon, et, en fait, son échantillon a été élaboré par la méthode qu'on appelle, dans ma langue maternelle, de «snowball». On connaît quelqu'un qui connaît quelqu'un qui est allé au cégep anglais, qui est un francophone, est-ce que cette personne serait intéressée peut-être à participer à la recherche comme sujet, là, pour interviewer. Ça passe... Elle a pris des mois pour constituer son échantillon. Ça n'a rien à voir avec un échantillon aléatoire, comme celui, par exemple, employé par Mme Moffet dans son étude sur la langue de travail dans les grandes entreprises. Ça ne vaut rien sur le plan scientifique, mais ça fait les manchettes.

Alors, je ne sais pas quoi vous dire de plus. Il faut d'autres mesures contraignantes pour vous aider à réaliser cet objectif de faire du français la langue commune de <travail. Et...

M. Castonguay (Charles) : ... dans les grandes entreprises. Ça ne vaut rien sur le plan scientifique, mais ça fait les manchettes.

Alors, je ne sais pas quoi vous dire de plus. Il faut d'autres mesures contraignantes pour vous aider à réaliser cet objectif de faire du français la langue commune de >travail. Et ce n'est pas tout le monde, évidemment, qui vont au cégep, ce n'est pas tout le monde qui vont à l'université. On a fait déjà le maximum, avec la loi 101, en ce qui concerne... ou, en tout cas, on a fait le maximum que la Cour suprême nous a permis de faire, avec les contraintes touchant la scolarité en français, la scolarisation obligatoire en français. Bien, il y en a beaucoup, hein, qui ne font pas leur cégep ou qui laissent tomber après un an ou deux, ils ne complètent pas leurs diplômes. Il faut quelque chose aussi pour rassembler ces gens-là autour de la même... pour faire société avec tout le monde, pas juste ceux qui vont au cégep, ceux qui vont à l'université.

L'affichage en français, c'était quelque chose, et, je vous jure, ça faisait en sorte que deux anglophones, c'était comme des francophones hors Québec qui se rencontrent, d'accord? Ils se parlent en anglais, puis ensuite, au détour d'un petit accent, on découvre que l'autre, il est francophone. Alors là, ça se met... Ah! you're a friend, you're a frog, aren't you? Puis l'autre dit oui. Puis comme Biz a dit dans un sketch, ça continue à parler en anglais. Mais...

La Présidente (Mme Thériault) : Merci. Et je dois mettre fin à l'échange... on a dépassé le temps.

M. Castonguay (Charles) : Je m'excuse.

La Présidente (Mme Thériault) : Il n'y a pas de problème.

M. Castonguay (Charles) : Je n'ai pas souvent l'occasion de parler.

La Présidente (Mme Thériault) : Bien, il n'y a pas de problème. C'est mon rôle d'être la gardienne du temps ici. Donc, sans plus tarder, on va aller du côté de la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme David : Merci beaucoup. Bonjour, M. Castonguay.

M. Castonguay (Charles) : ...que je voulais dire.

Mme David : Oui, mais on a beaucoup et on a eu souvent cette discussion-là sur les cégeps, ne vous inquiétez pas. Je ne sais pas si c'est vous ou moi qui l'avons le mieux influencé, vous lui demanderez.

Comme on n'avait pas de mémoire, je suis allée dans vos articles récents. Vous publiez beaucoup dans L'Aut'Journal, alors on voit, évidemment... et on sait quelles sont les orientations, et le 19 mai, vous avez un article, vous en avez un autre le 14 juin, où, dans les deux cas, vous êtes assez direct, c'est le moins qu'on puisse dire, dont, entre autres, pour parler de la thèse de Karine Vieux-Fort, dont vous venez de parler, où vous dites carrément que cette thèse est sans intérêt. Bon, après ça, vous parlez de quelqu'un qui n'est pas réputé très, très fédéraliste, Jean-Benoît Nadeau, qui est un journaliste extrêmement rigoureux du Devoir — en fait, je ne suis pas sûre que c'est votre opinion, mais c'est la mienne — et qui... vous dites : «Chroniqueur occasionnel au Devoir, Jean-Benoît Nadeau se moque aussi des déclinistes sur le site de L'Actualité. Le 4 mars, il y travestit mon livre Le français en chute libre en un unique constat simpliste, soit que le français recule comme langue maternelle.» Bon, vous parlez donc de fabulation, etc.

 Et, au mois de juin, vous n'êtes pas tellement plus, je dirais, de bonne humeur, là, vous commentez Francine Pelletier, qui est une <journaliste...

Mme David : ... en un unique constat simpliste, soit que le français recule comme langue maternelle.» Bon, vous parlez donc de fabulation, etc.

 Et, au mois de juin, vous n'êtes pas tellement plus, je dirais, de bonne humeur, là, vous commentez Francine Pelletier, qui est une >journaliste aussi au Devoir, et vous dites : «Dans LeDevoir du 19 mai, Francine Pelletier s'est empressée, elle aussi, de dire n'importe quoi. Pour faire ressortir la faible envergure du projet de loi n° 96, elle amplifie grossièrement la réussite de la loi 101 auprès des allophones.» Bon.

Et, après ça, quatrième personne que, je pense, vous aimez bien critiquer et qui est le spécialiste de la statistique linguistique à Statistique Canada, Jean-Pierre Corbeil : «Jean-Pierre Corbeil, de Statistique Canada, ajoute à la confusion. Il multiplie, dans les mêmes pages, le 3 juin, toutes sortes de considérations douteuses dans le but de détourner notre attention de l'assimilation au profit d'une vague "orientation linguistique", faite d'un ramassis de comportements, voire de simples aptitudes linguistiques au travail, à l'école et dans on ne sait combien d'autres domaines d'activité publique. Or, l'adoption du français ou de l'anglais comme langue usuelle au foyer constitue déjà l'indicateur d'orientation linguistique par excellence — ça, je pense, c'est votre mantra — il convient de ne pas s'en laisser distraire.»

Donc, voilà quatre personnes qui me semblent, quand même, avoir un peu voix au chapitre, que vous ne trouvez pas du tout pertinentes, mais ça traite toujours d'un sujet, je sais, qui vous tient très à coeur, la langue parlée à la maison. Parce que vous dites : Ça, c'est l'indicateur qui est l'indicateur, justement, d'orientation linguistique par excellence, la langue usuelle au foyer. Je ne comprends toujours pas, moi, l'importance de cet indicateur-là et pourquoi, tous les autres, vous dites que c'est un simple ramassis de comportements. La langue de l'espace public est quand même une langue importante, la langue du travail, c'est important. Alors, expliquez-moi un petit peu ça, puis après, je passerai la parole à mon collègue.

M. Castonguay (Charles) : ...vous en avez posées plusieurs, et je n'ai malheureusement, pas pris des notes j'étais trop estomaqué. Bon, M. Nadeau, si vous voulez parler de M. Nadeau, bon, lui, il trouve qu'au Canada, à l'extérieur du Québec il y a 2 700 000 francophones. Ils appellent ça des francophones, mais ce sont des gens qui disent, au recensement, qu'ils sont capables de soutenir une conversation en français.

Statistique Canada a fait un test, en 1988, de cette fameuse question : Cette personne est-elle capable de soutenir une question en français ou en anglais? C'est très mou comme question. Parmi les Five Eyes, comme on les appelle, c'est-à-dire la Nouvelle-Zélande, l'Australie, le Royaume-Uni, les États-Unis et le Canada, on a les pires questions sur la connaissance des langues. En Australie, en Nouvelle-Zélande, au Royaume-Uni, etc., ils cherchent à savoir : «bien», «un peu», «passionnément», «pas du tout», une gamme de compétences, comme ça, à certains niveaux. Statistique Canada refuse obstinément de changer sa question depuis qu'on a commencé à critiquer cette <question...

M. Castonguay (Charles) : ...des langues. En Australie, en Nouvelle-Zélande, au Royaume-Uni, etc., ils cherchent à savoir : «bien», «un peu», «passionnément», «pas du tout», une gamme de compétences, comme ça, à certains niveaux. Statistique Canada refuse obstinément de changer sa question depuis qu'on a commencé à critiquer cette >question.

Excusez-moi, je vais citer le principal responsable des données linguistiques à Statistique Canada,  John Kralt, dans le temps qu'on ne nommait pas continuellement des francophones de service à la tête de cet organisme-là... de ce domaine-là. Je m'excuse, je ne mâche pas mes mots. Je n'ai pas de temps à perdre. Et c'est pour ça que j'écris des chroniques, parce qu'on a beau publier des livres, des articles scientifiques, etc., dans les revues internationales, et tout ça, ça ne filtre pas, ça arrive... on n'en parle pas. Les chroniques aussi, c'est souvent des choses... des bouteilles à l'eau, des bouteilles à la mer. On fait ce qu'on peut.

Mais  John Kralt a qualifié ces statistiques-là, en 1977, dans un rapport, de «primitive, at best», au mieux, primaires, ces informations sur la compétence linguistique. Quand j'étais à l'OQLF, sur le premier Comité de suivi de la situation linguistique au Québec, entre 2003 et 2008, j'ai demandé au directeur de la recherche de faire le maximum pour qu'on fasse des pressions sur Statistique Canada d'améliorer sa question sur la connaissance du français. Ce n'est pas un référendum, là. «Are you a good Canadian? Can you speak French? Can you speak English?» C'est les premières questions, maintenant, qu'on pose dans le volet Langues du recensement, et c'est les questions les plus molles. Ce qui est important : langue maternelle, langue principale parlée à la maison. Ça, c'est un comportement dominant ou même exclusif. C'est bien loin d'autre chose.

• (18 h 50) •

Kralt avait raison de dire que c'était «primitive, at best», parce qu'il y a eu assez de critiques, au sujet de cette question-là, que Statistique Canada a essayé une autre question : Est-ce que cette personne est capable... en 1988, a testé la question suivante : Cette personne est-elle capable de soutenir une conversation assez longue sur divers sujets en français et en anglais? Bien là, le nombre d'anglophones, à l'extérieur du Québec, qui se sont dits compétents en français a diminué de moitié. Alors, entre être capable de soutenir une conversation, «whatever that means», et une conversation assez longue sur divers sujets, il y a un monde.

M. Nadeau, c'est un euphoriste ou, je ne sais pas, un jovialiste. Je ne sais pas s'il veut m'appeler quelque chose comme un décliniste. Moi, je le traiterais de ces épithètes-là. Et il fait toujours, là : Ah! il va y avoir 750 000 francophones dans le monde, selon l'Organisation internationale de la Francophonie. Mais cette fameuse Organisation internationale de la Francophonie compte comme francophones, cette organisation aussi, toutes les personnes qui disent qu'ils sont capables de soutenir une conversation en français au Canada. C'est pire encore aux États-Unis. M. Nadeau compte comme francophones, aux États-Unis, tous ceux qui sont d'origine <française ou...

M. Castonguay (Charles) : ... Organisation internationale de la Francophonie compte comme francophones, cette organisation aussi, toutes les personnes qui disent qu'ils sont capables de soutenir une conversation en français au Canada. C'est pire encore aux États-Unis. M. Nadeau compte comme francophones, aux États-Unis, tous ceux qui sont d'origine >française ou partiellement d'origine française, aux recensements. Et là, moi, je suis d'origine française, je ne parlais pas un mot de français à la maison et je l'ai appris à l'école. Mais ce n'est pas la même chose. Mais là...

Mme David : Je voudrais laisser du temps à mon collègue parce que...

M. Castonguay (Charles) : Oui, mais j'ai plein d'autres choses à vous dire.

Mme David : Oui, mais c'est parce que...

La Présidente (Mme Thériault) : Bien, c'est ça, c'est parce que...

M. Castonguay (Charles) : Vous aviez une question...

Mme David : Il faut que ce soit un peu équitable.

M. Castonguay (Charles) : Ce n'est pas moi, madame, qui mets l'accent sur la langue parlée le plus souvent à la maison, c'est la Commission Laurendeau-Dunton. Je vous propose de relire ce livre, surtout le premier, sur les langues officielles. Je l'ai lu plusieurs fois.

La Présidente (Mme Thériault) : M. Castonguay...

M. Castonguay (Charles) : Excusez-moi, madame.

La Présidente (Mme Thériault) : ...c'est important de favoriser le plus d'échanges.

M. Castonguay (Charles) : Excusez-moi, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Thériault) : Il n'y a pas de problème. Je veux simplement vous signifier qu'il reste 3 min 6 s à la question et la réponse pour terminer le bloc avec l'opposition officielle. M. le député.

M. Birnbaum : Merci, Mme la Présidente. Merci, M. Castonguay, pour votre exposé. Premièrement, je me permets de vous rappeler que le doyen des démographes, Jacques Henripin, dans ses dernières années, privilégiait des moyens très inclusifs pour promouvoir le français. Ses pensées ont bien évolué. Je constate aussi... Je ne partage pas, mais je comprends, à quelque part, votre pessimisme quand vous venez de dire que même les gens qui maîtrisent le français langue seconde ne vont pas trop aider à la pérennité de notre langue. Alors, ce serait intéressant de savoir comment on va assurer un certain pourcentage de Québécois de langue maternelle francophone en pérennité.

Mais ma question, ma question : Est-ce que vous faites abstraction totale de la possibilité, de la réalité, de ma connaissance, des nouveaux arrivants, j'ose dire, des Québécois d'expression anglaise, de la réalité qu'ils sont tellement attirés à notre belle langue commune qu'ils sont souvent très motivés de participer au rayonnement et le renforcement de notre langue française? Est-ce que ça entre, premièrement, dans votre perception des choses, et, si oui, dans vos calculs démographiques?

M. Castonguay (Charles) : Je n'ai pas trop bien compris votre question, je regrette. Si vous préférez, on peut se parler en anglais.

M. Birnbaum : Il ne me reste pas grand temps. Je vous invite à l'interpréter comme vous voulez. Il me semble que c'était clair.

M. Castonguay (Charles) : Je répète, je n'ai pas très bien compris la question.

M. Birnbaum : Ah bon! Je vous invite de me dire, bien, si vous acceptez la possibilité et si ça entre dans vos calculs que les nouveaux arrivants, toutes langues confondues, ainsi que les Québécois de langue anglaise, sont souvent tellement en amour et passionnés par notre langue commune, le français, qu'ils veulent contribuer à la francisation du Québec.

M. Castonguay (Charles) : Moi, là, je suis <ce que...

M. Birnbaum : ... de langue anglaise, sont souvent tellement en amour et passionnés par notre langue commune, le français, qu'ils veulent contribuer à la francisation du Québec.

M. Castonguay (Charles) : Moi, là, je suis >ce que vous décrivez, hein, je suis un migrant de l'Ontario de langue maternelle française... anglaise. Ma mère ne me parlait pas en français, elle était d'origine allemande. Mon père était dangereusement bilingue, il ne m'a jamais parlé en français. Ma grand-mère, qui s'appelait «mémère», je l'appelais «mémère», on se parlait anglais. Il y a 20 ans, j'ai compris que «mémère», ce n'était pas son nom, c'était Brigit-Ann. Elle était Irlandaise. Mais j'étais aussi anglo que ça.

Je contribue, au maximum de mes moyens, à ce que vous dites, le rayonnement du français comme langue commune. Alors, c'est sûr que je fais entrer ça en ligne de compte, mais je ne veux pas... I don't want to make a mountain out of a molehill. Ce n'est pas nécessairement le comportement dominant.

Le Président (M. Lemieux) : M. Castonguay, la période d'échange avec l'opposition officielle est terminée. On passe maintenant à la députée de Mercier pour 2 min 50 s.

Mme Ghazal : Oui. Bonjour, M. Castonguay. Merci pour votre présentation puis votre passion qu'on sent très, très, très profonde. Écoutez, je vais continuer sur le même sujet, la langue parlée à la maison. C'est utilisé depuis 1971, il y a beaucoup de personnes, depuis très longtemps, qui disent que c'est l'indicateur le plus important et le plus déterminant. Mais n'est-il pas temps d'en ajouter d'autres?

Vous avez parlé des questions de Statistique Canada qui sont molles. Il y a eu le démographe Patrick Sabourin qui est venu. Je lui ai posé la question, parce que, lui aussi, il tenait à la langue parlée à la maison, mais il disait que les autres indicateurs, bien, ils ne sont pas suffisants pour nous permettre de voir quelqu'un qui parle une autre langue à la maison, à l'extérieur, dans sa vie, à l'extérieur, de façon générale, s'il parle le français. On n'est pas capables de le savoir, parce qu'on n'a pas les données. Et justement, donner un mandat à Statistique Québec, l'OQLF, avec des bonnes questions... Évidemment, ils ne font pas le recensement, mais des bonnes études...

Là, il va y avoir le commissaire à la langue française. Il n'est pas temps d'augmenter puis d'élargir notre vision et les données qu'on a, pour peut-être être un petit peu moins pessimiste que vous? Mais je dis ça, mais même la langue parlée au travail, on le sait qu'elle a baissé aussi, là. La situation n'est pas bonne dans la langue d'usage parlée à l'extérieur de la maison.

M. Castonguay (Charles) : Oui, l'OQLF aurait dû jouer un rôle majeur dans la recherche sur la situation linguistique, sous tous ses aspects, dès 2002, dès la réforme de la loi 101, à cette époque-là, dès qu'il a reçu la responsabilité et le mandat de faire rapport, à tous les cinq ans, sur les comportements et les attitudes, les attitudes linguistiques. Je regrette que l'office n'ait pas fait son travail. Quand j'ai quitté mes cinq ans, je leur ai dit : Écoutez, faites une enquête, à tous les cinq ans, sur la compétence <linguistique...

M. Castonguay (Charles) : ...de faire rapport, à tous les cinq ans, sur les comportements et les attitudes, les attitudes linguistiques. Je regrette que l'office n'ait pas fait son travail. Quand j'ai quitté mes cinq ans, je leur ai dit : Écoutez, faites une enquête, à tous les cinq ans, sur la compétence >linguistique de tout un chacun en français et en anglais, s'il vous plaît, au Québec. On n'a pas d'informations adéquates. Statistique Canada ne veut pas le faire, ne veut pas le faire, alors, s'il vous plaît, faites-le. Faites des enquêtes sur le français langue commune.

La précédente personne qui m'a posé des questions, c'était... bon, ça concerne... Oui, je connais des anglophones. On se parle, des fois, en français. On parle en anglais, autrement, je suis en train de perdre mon anglais, tellement que je parle français. Non, c'est vrai. J'ai même un accent en anglais, à cette heure. Quand je m'écoute interviewé en anglais, c'est affreux, j'ai un accent franco, et j'ai un accent anglo en français. Alors, je suis fait, hein?

Mme Ghazal : ...qu'on fait pour le futur?

M. Castonguay (Charles) : Mais c'est à l'OQLF de faire ça. Et je vous ai cité la seule étude que je connaisse que l'OQLF a jamais faite, c'était sur la langue commune de travail dans les grandes entreprises au Québec, question névralgique, donc. Mais pourquoi ils n'en ont pas fait d'autres?

Le Président (M. Lemieux) : Je vous en prie, M. Castonguay. Merci beaucoup, Mme la députée de Mercier. Il reste un intervenant aux échanges, c'est le député de Matane-Matapédia, pour 2 min 50 s.

M. Bérubé : Merci. M. Castonguay, c'est un plaisir de vous accueillir. On évoque souvent la science ces temps-ci. Bien, on a la science devant nous, et c'est une démonstration éloquente, sur toute votre carrière, de ce qu'il faut considérer, et merci de venir nous livrer ça. Je pourrais aussi vous faire une revue de presse de vos études, ce serait éloquent. Je ne le ferai pas. Je vous dirai, comme vous, que je n'ai pas de temps à perdre, moi non plus. Je suis un indépendantiste, mais, au-delà de ça, il y a la question linguistique. Le temps nous est compté.

Deux mesures sont fondamentales : l'immigration francophone, ce que vous évoquez, notamment, et la fréquentation du cégep en français. Si le gouvernement choisit de ne pas aller de l'avant, c'est qu'il a fait un autre choix politique. Ces mesures-là ne le rendront pas populaire. Ce n'est pas pour ça qu'on fait ça. On fait ça parce que c'est nécessaire, si on y croit vraiment. Si on ne le fait pas, c'est qu'on se dit : on va avoir l'air de s'occuper de la langue, mais on ne va pas trop causer de problèmes, on n'aura pas trop de vent qui va souffler. Moi, je ne suis pas de cette école-là. Ce que je dis depuis le début de cette commission ne nous rendra pas populaires au Parti québécois, mais c'est nécessaire. Et je veux saluer votre courage de le dire depuis longtemps, et vous êtes entendu de plusieurs personnes, notamment de moi.

Alors, je m'arrête là et j'aimerais vous entendre parler de la nécessité d'avoir une immigration où le français est important à l'arrivée, comme facteur déterminant.

• (19 heures) •

M. Castonguay (Charles) : Excellente question. Parmi les immigrants qui nous arrivent, anglophones et allophones, et qui ignorent le français à l'arrivée, une enquête de Statistique Canada a confirmé que, longtemps après être arrivés, la plupart de ceux qui ignoraient le français à l'arrivée l'ignoraient encore. <Quand je dis «longtemps», je veux dire...

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19 h (version révisée)

<       M. Castonguay (Charles) : ...et allophones et qui ignorent le français à l'arrivée, une enquête de Statistique Canada a confirmé que, longtemps après être arrivés, la plupart de ceux qui ignoraient le français à l'arrivée l'ignoraient encore. >Quand je dis «longtemps», je veux dire 10 ans après l'arrivée et quand je dis «beaucoup», c'étaient... les deux tiers de ceux qui l'ignoraient à l'arrivée, l'ignoraient encore. Alors, ça, c'est la majorité. Ce n'est pas nécessairement participer à faire du français la langue commune. C'est une ignorance, je dirais, coriace, du français, et c'est très important, je pense, de s'occuper de cela. Et je crois que l'affichage en français s'adressait à ces gens-là. Ils étaient obligés de décoder : C'est quoi, cette affaire-là? C'est quoi ça? Où je vais? Comment je fais ci? Comment je... Qu'est-ce qu'ils veulent? Ainsi de suite, c'est très important.

Maintenant, est-ce qu'on doit exiger des nouveaux arrivants une connaissance préalable du français? Et on a donné des points supplémentaires déjà dans la sélection, mais, d'après ce que je comprends de ce qui arrive à l'immigration, et du contrôle, et du degré de sélection des immigrants par le Québec... excusez-moi encore, je vais m'excuser...

Le Président (M. Lemieux) : En terminant, rapidement, s'il vous plaît, M. Castonguay.

M. Castonguay (Charles) : ...ma langue maternelle, «the shit has hit the fan» parce qu'on est devant maintenant des mécanismes d'arrivée à la citoyenneté, à la... statut d'immigrant et ensuite citoyenneté, des mécanismes qui privilégient les travailleurs temporaires et les étudiants temporaires...

Le Président (M. Lemieux) : Et c'est terminé, monsieur...

M. Castonguay (Charles) : ...qui ne connaissent pas nécessairement, et ainsi de suite. Alors, on a un énorme problème, là.

Le Président (M. Lemieux) : M. Castonguay, quand je vous ai dit en terminant, c'est parce que c'était terminé.

Merci beaucoup, M. Castonguay, d'avoir participé à nos travaux de la Commission de la culture et de l'éducation, qui va reprendre demain, après cet ajournement, son étude... ses consultations sur le projet de loi n° 96, demain, mercredi 29 septembre, après les affaires courantes. Bonne soirée, collègues.

(Fin de la séance à 19 h 02)


 
 

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