Journal des débats de la Commission de la culture et de l’éducation
Version préliminaire
42e législature, 1re session
(27 novembre 2018 au 13 octobre 2021)
Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.
Pour en savoir plus sur le Journal des débats et ses différentes versions
Le
mercredi 22 septembre 2021
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Vol. 45 N° 93
Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 96, Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français
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Intervenants par tranches d'heure
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Thériault, Lise
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Jolin-Barrette, Simon
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Lévesque, Mathieu
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Lemieux, Louis
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David, Hélène
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David, Hélène
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Thériault, Lise
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Birnbaum, David
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Ghazal, Ruba
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Bérubé, Pascal
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Thériault, Lise
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Jolin-Barrette, Simon
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Chassin, Youri
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Lévesque, Mathieu
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David, Hélène
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David, Hélène
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Thériault, Lise
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Birnbaum, David
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Barrette, Gaétan
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Ghazal, Ruba
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Bérubé, Pascal
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Thériault, Lise
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Jolin-Barrette, Simon
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Lemieux, Louis
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David, Hélène
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Birnbaum, David
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Ghazal, Ruba
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Ghazal, Ruba
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Thériault, Lise
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Bérubé, Pascal
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Jolin-Barrette, Simon
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Jolin-Barrette, Simon
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Thériault, Lise
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Lemieux, Louis
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David, Hélène
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Ghazal, Ruba
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Bérubé, Pascal
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Thériault, Lise
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Jolin-Barrette, Simon
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Lévesque, Mathieu
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Lévesque, Mathieu
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Thériault, Lise
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David, Hélène
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Barrette, Gaétan
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Birnbaum, David
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Ghazal, Ruba
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Bérubé, Pascal
11 h 30 (version révisée)
(Onze heures trente minutes)
1355 La
Présidente (Mme Thériault) : À l'ordre, s'il vous plaît! Donc,
ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la culture
et de l'éducation ouverte.
La commission est réunie afin de
poursuivre les auditions publiques dans le cadre des consultations
particulières sur le projet de loi n° 96, Loi sur la langue officielle et
commune du Québec, le français.
Mme la secrétaire, y a-t-il des
remplacements?
La Secrétaire
: Oui,
Mme la Présidente. Mme IsaBelle (Huntingdon) est remplacée par
M. Lévesque (Chapleau); Mme Rizqy (Saint-Laurent), par
M. Barrette (La Pinière); Mme St-Pierre (Acadie), par
M. Birnbaum (D'Arcy-McGee); Mme Dorion (Taschereau), par
Mme Ghazal (Mercier); Mme Hivon (Joliette), par M. Bérubé
(Matane-Matapédia).
Auditions (suite)
La Présidente (Mme Thériault) :
Parfait. Merci beaucoup. Donc, ce matin, nous entendrons la Fédération des
travailleurs et des travailleuses du Québec, qui sont avec nous à l'Assemblée
nationale. Donc, je vous souhaite la bienvenue, messieurs. Je vous invite à
vous présenter, présenter la personne qui vous accompagne. Vous avez environ
une dizaine de minutes pour faire votre exposé, et, par la suite, il y aura les
échanges avec les parlementaires. Bienvenue…
Fédération des travailleurs et travailleuses du
Québec (FTQ)
M. Bolduc (Denis) :
Merci, Mme la présidente de la commission. Mmes, MM. les députés, merci de nous
recevoir pour cet important projet de loi. Mon nom est Denis Bolduc. Je
suis le secrétaire général de la FTQ, et avec moi m'accompagne Gilles Grondin,
conseiller à la francisation à la FTQ.
Alors, la FTQ, on représente
600 000 membres, 600 000 travailleurs et travailleuses au
Québec qui oeuvrent dans tous les secteurs économiques et dans toutes les
régions du Québec. On s'intéresse à la question linguistique depuis la fin des
années 60, donc depuis 50 ans. Aujourd'hui, on poursuit notre travail
en soutenant les comités de francisation dans les entreprises syndiquées. On
mène des campagnes de promotion du français puis on soutient les travailleurs
et travailleuses immigrants dans tout le processus de francisation. Pour les
personnes immigrantes, parler français leur permet non seulement d'améliorer
leurs compétences, mais surtout de mieux connaître et mieux comprendre leurs
droits et leurs responsabilités.
Pour la FTQ, le français est la langue
officielle et usuelle du Québec. Le Québec se doit d'être tout aussi
francophone que le sont les autres provinces du Québec... anglophones. Le
Québec fait face à deux défis majeurs pour assurer l'avenir du français sur son
territoire. Le premier défi, bien, le français, on le constate tous, est une
langue minoritaire sur le continent nord-américain. Deuxième défi, bien, c'est
la mondialisation des échanges économiques et culturels.
La FTQ soutient l'idée d'ajouter, dans le
préambule de la Charte des droits <et libertés de la personne…
M. Bolduc (Denis) :
…
français sur son territoire. Le premier défi, bien, le français, on le
constate tous, est une langue minoritaire sur le continent nord-américain.
Deuxième défi, bien, c'est la mondialisation des échanges économiques et
culturels.
La FTQ soutient l'idée d'ajouter, dans
le préambule de la
Charte des droits >et libertés de la personne,
à l'article 3, le texte suivant : «Toute personne a droit de vivre en
français dans la mesure prévue par la Charte de la langue française.» C'est un
message fort qui sera ainsi envoyé aux tribunaux qui ont souvent interprété de
manière restrictive la Charte de la langue française.
L'État doit être exemplaire en matière
linguistique. Il est important de mettre fin à la pratique du bilinguisme
institutionnel, et on doit garantir le droit de travailler en français au sein
de l'État québécois. D'ailleurs, la FTQ tient à saluer la décision récente du
gouvernement du Québec d'appliquer l'article 1 du projet de loi n° 104
prévoyant que l'État québécois s'adresse en français aux personnes morales sur
son territoire.
Nous sommes aussi heureux de constater la
volonté assumée du gouvernement du Québec de jouer un rôle primordial dans la
coordination de l'utilisation et de la promotion du français dans l'administration
publique. Nous soutenons ainsi l'idée que les organismes de l'administration
doivent rendre compte du nombre de postes pour lesquels ils exigent la
connaissance d'une autre langue que le français ou lorsque cette connaissance
est souhaitée. Évidemment, pour nous, l'État doit donner l'exemple.
Les municipalités font, elles aussi,
partie de l'administration publique, elles doivent travailler à définir le
Québec francophone. Il importe donc de trouver un équilibre entre l'offre de
services à ses citoyens et citoyennes et la vitalité du français au Québec.
Alors, nous croyons que le gouvernement du Québec devrait agir de façon plus
concrète afin que le statut des municipalités bilingues soit modifié. Nous
croyons aussi que la création de comités de francisation paritaires dans les municipalités
comptant plus de 50 employés est plus que jamais nécessaire. Les employés
des municipalités doivent aussi pouvoir s'impliquer dans la francisation de
leurs milieux de travail.
Nous croyons aussi que les milieux de la
santé et d'éducation postsecondaire devraient être encore plus actifs dans le
processus de francisation de l'État. Nous demandons de créer des comités de
francisation paritaires dans les milieux collégiaux et universitaires, et
également pour le secteur… le réseau de la santé.
On salue la création d'un poste de
Commissaire à la langue française, qui va relever directement de l'Assemblée
nationale, tout comme la création d'un ministère de la Langue française qui,
pour nous, viendra jouer un rôle extrêmement important et stratégique dans la
gouvernance linguistique de l'État.
Quant à l'Office québécois de la langue
française, nous croyons à son rôle primordial. On a toujours collaboré avec
l'office à la réussite de la francisation des milieux de travail, et nous
continuerons à le faire. On croit que l'office doit être financé adéquatement
pour assurer sa mission. Un investissement supplémentaire sera donc nécessaire
pour assurer la gestion des programmes et la certification en francisation des
entreprises de 25 à 49 employés. Et on se réjouit aussi de la proposition
à l'effet que l'OQLF soit appelé à fournir des services de formation et de
soutien aux membres <des comités de francisation…
M. Bolduc (Denis) :
...un
investissement
supplémentaire sera donc
nécessaire
pour assurer la gestion des programmes et la
certification en
francisation
des entreprises de 25 à 49 employés. Et on se réjouit aussi de la
proposition
à l'effet que l'OQLF soit appelé à fournir des services de
formation et
de soutien aux membres >des comités de francisation. C'est une mesure
importante pour nous.
De même, nous soutenons le fait que l'Office
québécois de la langue française puisse jouer un rôle plus déterminant dans l'application
et le respect des dispositions de la Charte de la langue française, dont celui
d'ordonner à tout auteur d'un manquement à une disposition de la charte ou à l'un
de ses règlements de cesser de contrevenir à cette disposition sur-le-champ.
Les milieux de travail demeurent
assurément des endroits privilégiés pour assurer le visage français du Québec
auprès de la population. À cet égard, une des mesures les plus importantes
annoncées par le gouvernement est sans aucun doute l'application de la loi aux
entreprises de 25 à 49 employés. C'est une revendication qui est historique
pour la FTQ. On le demande depuis toujours. Travailler en français, c'est non seulement
un droit, mais aussi c'est un élément supplémentaire pour garantir la sécurité
des lieux de travail. On peut affirmer que des accidents de travail auraient pu
être évités si des manuels avaient été écrits en français.
Pour la FTQ, le travail des comités de francisation
dans les entreprises est un apport positif, concret dans la mise en place de
réels milieux de travail francophones. La décision de confier aux comités de francisation
la responsabilité du programme de francisation et du maintien de la
généralisation du français dans l'entreprise est vue très positivement par la
FTQ.
Nous soutenons aussi l'idée que le comité
de francisation pourra donner son avis sur le fait que l'employeur exige une
autre langue que le français au travail. Toutefois, on croit qu'il faudra
envisager à court terme d'aller plus loin que de simplement donner son avis à
ce propos. Bien que le projet de loi permette à l'office de créer un comité de
francisation dans une entreprise de 100 employés et moins, nous croyons qu'il
aurait été préférable d'obliger les entreprises de 50 employés et plus à
former un comité paritaire.
Selon le projet de loi, les employeurs
devront prendre tous les moyens raisonnables avant d'exiger la connaissance d'une
autre langue. Actuellement, il y a trop d'entreprises qui exigent le
bilinguisme d'une grande partie de leurs employés sans avoir à faire la
véritable démonstration claire du caractère nécessaire de cette exigence, et
l'application stricte de cette disposition législative sera nécessaire. Le
gouvernement devra agir avec conviction à ce propos.
Il va de soi que la FTQ appuie sans
réserve les objectifs de garantir un réel visage commercial en français au
Québec en renforçant la nette prédominance du français et en protégeant le
droit du consommateur québécois d'être informé et servi en français. C'est
notamment dans le commerce électronique qu'on croit que les efforts devront
être consentis au cours des prochaines années.
Et, tout comme la majorité des
observateurs de la société québécoise, la FTQ est préoccupée par l'augmentation
fulgurante <du nombre d'étudiants francophones et...
M. Bolduc (Denis) :
...servi en
français. C'est
notamment dans le commerce
électronique qu'on croit que les efforts devront être consentis au cours des
prochaines années.
Et tout comme la
majorité des
observateurs
de la société québécoise, la FTQ est préoccupée par l'augmentation fulgurante >du
nombre d'étudiants francophones et allophones qui fréquentent les cégeps
publics anglophones. Il faut une action gouvernementale plus proactive pour
contrer cette tendance. Nous ne demandons pas, pour le moment, l'application de
la loi 101 dans le réseau collégial. Nous croyons cependant que l'État
québécois doit se fixer des objectifs à court, moyen terme afin que les
pourcentages de fréquentation des cégeps anglophones et francophones soient
proportionnels ou reflètent la proportion des populations du Québec.
• (11 h 40) •
Depuis une quarantaine d'années, le système
d'enseignement a permis avec succès l'accueil et l'intégration dans la société québécoise
de milliers d'enfants de la loi 101. Ce n'est malheureusement pas le cas
pour les nouveaux Québécois adultes qui peinent souvent à compléter leur processus
de francisation. Rappelons qu'au Québec c'est plus de cinq personnes
immigrantes sur 10, donc la moitié, qui se tournent vers l'anglais plutôt que
vers la langue de la majorité, alors que la proportion d'Anglo-Québécois natifs
se situe autour de 10 %.
La création par ce projet de loi de
l'unité administrative Francisation Québec devra rapidement être couronnée de
succès. On croit, à la FTQ, que le processus de francisation doit notamment
s'opérer dans les milieux de travail. Pour l'adulte apprenant, le milieu de
travail est le second milieu de vie après la cellule familiale. Finalement,
nous croyons que les travailleurs et travailleuses temporaires de tous les
secteurs d'activité devraient avoir accès à des cours de francisation.
Améliorer le visage du français au Québec doit se traduire dans le droit à
l'accès à la justice en français.
Bien qu'imparfait, le projet de loi n° 96 insuffle l'espoir d'une avancée pour le dossier de la
langue française au Québec. On assure le gouvernement de notre collaboration
dans l'effort collectif important qui doit être alloué à la promotion du
français dans les prochaines années. On salue d'ailleurs l'idée d'élever la
Charte de la langue française au rang de loi fondamentale. Et en ce qui
concerne les entreprises québécoises de juridiction fédérale, la position de la
FTQ est sans équivoque, tout comme le gouvernement du Québec, nous croyons
qu'il lui revient de légiférer en cette matière et qu'il revient à l'Office
québécois de la langue française d'assurer la réalisation de la francisation
des entreprises de juridiction fédérale au Québec.
Et je vais conclure, Mme la Présidente, en
une seule phrase : Le projet de loi remet enfin, enfin la question de la
langue française au coeur de l'actualité politique québécoise, et, à la FTQ,
nous nous en réjouissons. Et cela dit, notre slogan de la campagne FTQ de la
promotion du français en entreprise : En français, merci.
Des voix
: Ha, ha, ha!
M. Bolduc (Denis) :
En français, merci.
La Présidente (Mme Thériault) :
<Merci pour votre
présentation...
M. Bolduc
(Denis) :
…nous nous en réjouissons. Et cela dit, notre slogan
de la campagne FTQ de la promotion du français en entreprise : En
français, merci.
Des voix
: Ha, ha,
ha!
M. Bolduc
(Denis) :
En français,
merci
.
La Présidente (Mme Thériault) :
>Merci pour votre présentation. Les quelques secondes supplémentaires
que vous avez prises seront retranchées sur le temps du ministre, qui les a
offertes gracieusement. Donc, M. le ministre, vous avez
15 minutes 58 secondes pour faire… pour débuter vos échanges
avec les gens de la FTQ.
M. Jolin-Barrette :
Merci, Mme la Présidente. M. Bolduc, M. Grondin, merci d'être
présents, aujourd'hui, en commission parlementaire. Je tiens, tout d'abord, à
vous féliciter pour la qualité de votre mémoire, la FTQ, et je crois que ça
s'inscrit également dans le travail, dans l'oeuvre de Fernand Daoust,
aussi, qui a été longtemps à la FTQ et qui a permis, et je crois que la FTQ l'a
toujours réalisé, l'importance pour les travailleurs, travailleuses québécois
de pouvoir travailler dans leur langue, de pouvoir travailler en français au Québec,
et je pense que votre mémoire s'inscrit dans cette lignée-là, et je tiens à
vous féliciter pour la qualité du mémoire et aussi pour votre cohérence, aussi,
au fil des années dans votre combat pour la défense de la langue française au Québec,
et je tiens à le souligner fortement parce que je pense que ça demande beaucoup
de courage, aussi, de la part de votre organisation.
M. Bolduc
(Denis) :Merci.
M. Jolin-Barrette : Je
voudrais qu'on parle notamment du bilinguisme institutionnel, parce que, de
plus en plus au sein de l'État québécois, au sein de la société québécoise, il
y a une forme de bilinguisme institutionnel. Comment vous voyez ça par rapport
à la défense du français, le fait que la société québécoise se soit bilinguisée
et que même l'État québécois soit de plus en plus bilingue
institutionnellement?
M. Bolduc (Denis) :
Que la société québécoise soit bilingue institutionnellement?
M. Jolin-Barrette :
Bien, en fait, c'est surtout ce que l'on a constaté, c'est qu'au sein de
l'appareil public, il y a un bilinguisme systématique. Donc, quel est le danger
de ça, du bilinguisme systématique, au sein de nos institutions?
M. Bolduc (Denis) :
Bien, je dirais que, peut-être le mot est un peu fort, là, mais militer pour le
bilinguisme, à Montréal ou au Québec, c'est militer pour la mort du français.
Alors, je pense que c'est un peu... Je ne veux pas exagérer, là, mais dans mes
mots, là, mais il faut que l'État québécois prenne soin de la langue française.
C'est ce qu'on voit dans le projet de loi. L'application de l'article 1,
je l'ai dit en introduction, récemment, par le gouvernement, qui tardait,
depuis longtemps… on le salue parce qu'on croit vraiment que l'État québécois
doit agir dans ce sens-là. Ça prend un État francophone. Un État francophone,
en Amérique du Nord, on est le seul, et donc on ne doit pas être gêné de faire
la promotion du français puis on doit donner l'exemple, et pour nous ça va
au-delà... Vous le voyez dans le mémoire, ça va au-delà du gouvernement, c'est,
par exemple... pour les municipalités, il y a un certain exemple à donner
également.
M. Jolin-Barrette : O.K.
Donc, vous êtes en accord avec le fait que, dans le cadre du projet de loi, on
impose la politique linguistique également aux municipalités, parce que l'on
considère que les municipalités font partie de l'État québécois, et que cette
politique linguistique là, également, doit couvrir l'ensemble <des
travailleurs québécois, mais également…
M. Bolduc (Denis) :
…
municipalités,
il y a un certain
exemple à donner
également.
M. Jolin-Barrette :
O.K. Donc, vous êtes en accord avec le fait que, dans le cadre du
projet
de loi, on impose la
politique linguistique
également aux
municipalités
parce qu'on considère que les
municipalités font partie de l'État
québécois et que cette
politique linguistique là
également
doit couvrir l'ensemble >des travailleurs québécois, mais également les
services qui sont donnés à la population.
M. Bolduc (Denis) :Tout à fait.
M. Jolin-Barrette : O.K.
Sur la question de l'embauche, hier, le SCFP est venu nous dire qu'il y avait
des situations qui dégénéraient. Là, on vient resserrer l'article 46 de la
Charte de la langue française. Selon votre expérience, là, avec les milliers de
travailleurs que vous représentez, là, quel est le portrait de la situation,
là, sur le marché du travail relativement à l'exigence d'une autre langue que
le français à l'embauche, ou pour la promotion, ou pour les mutations?
M. Bolduc (Denis) :
Moi, je constate que c'est facile, c'est trop facile actuellement pour une entreprise
de prétendre qu'elle a besoin, que c'est nécessaire qu'une certaine proportion
des employés parlent anglais. On a vu des dossiers où l'entreprise prétend que
100 % du personnel doit parler français, ou même 80 %, 90 %. On
en voit passer beaucoup.
M. Jolin-Barrette : Doit
parler anglais.
M. Bolduc (Denis) :De parler anglais, oui, je m'excuse. Et donc c'est, pour moi,
pour nous, la FTQ, c'est exagéré, c'est vraiment exagéré. Dans le projet de
loi, on voit qu'il y aura l'obligation pour les entreprises de démontrer cette
nécessité d'exiger des postes bilingues d'une autre langue que le français.
C'est une bonne chose. Dans l'application, il faudra qu'il y ait des dents
là-dessus, là, qu'on ait un pouvoir de… Il faudra que l'entreprise en fasse la
démonstration clairement, et qu'on soit en mesure de dire... bien là, de
contester finalement les demandes de l'employeur. Parce que j'ai trop vu de
dossiers, par exemple des entreprises, dans la dernière année, l'institut des
sports du Québec, l'institut des sports du Québec qui demande pratiquement à 100 %
de son personnel d'être bilingue ou encore la Cinémathèque québécoise, je crois
que le taux d'exigence du bilinguisme à l'emploi est autour de 80 %.
Alors, pour la Cinémathèque québécoise, ça fait sursauter, des chiffres comme
ça. Il faut vraiment resserrer la vis de ce côté-là.
M. Jolin-Barrette : Et
on aura sûrement l'argument, au cours des prochains jours, là, par les groupes
qui vont venir nous rencontrer ici, sûrement, puis c'est ce qu'on entend, il ne
faut pas imposer un fardeau trop élevé, notamment, pour la question de dire :
Bien, j'ai besoin d'employés qui maîtrisent une autre langue que le français.
Qu'est-ce que vous répondez à ces commentaires-là qu'on va recevoir au cours
des prochains jours pour dire : Vous complexifiez les choses avec
l'article 46?
M. Bolduc (Denis) :
Ah! c'est bien trop facile de dire : Parce que j'ai un client à
l'extérieur du Québec qui est anglophone, bien, mon personnel doit parler
anglais. <Pour moi, là, c'est…
M. Jolin-Barrette :
...qui maîtrise une autre langue que le français.
Qu'est-ce que vous
répondez à ces
commentaires-là, qu'on va recevoir au cours des prochains
jours, pour dire : Vous complexifiez les choses avec l'article 46?
M. Bolduc
(Denis) :
Ah! c'est bien trop facile de dire :
Parce que j'ai un client à l'extérieur du Québec qui est anglophone, bien, mon
personnel doit parler anglais. >Pour moi, là, c'est exagéré de prétendre
ça.
On a, par exemple, dans plusieurs villes
du Québec, parce qu'il y a une clientèle anglophone avec laquelle les employés
de la ville doivent faire affaire, doivent répondre, bien, on se retrouve avec
des taux d'exigence de bilinguisme autour de 80 %. C'est le cas,
récemment, là, à Saint-Lambert sur la Rive-Sud de Montréal. Sur un quart de
travail... dans une ville francophone, sur un quart de travail, qu'il y ait une
personne ou deux qui parle anglais, qui peut prendre la relève quand il y a un
appel d'un citoyen en anglais, qui ne peut pas s'exprimer en français, ça peut
aller. Mais, demander que l'ensemble des employés qui sont susceptibles d'avoir
des contacts à l'extérieur avec des citoyens qui ne parlent pas français ou
parlent uniquement anglais, que cette exigence-là devienne quasiment la norme,
pour nous, c'est exagéré. Alors, moi, cet argument-là, je ne l'achète pas.
M. Jolin-Barrette : O.K.
Sur la question de l'application de la Charte de la langue française aux
entreprises de juridiction fédérale, je comprends de votre mémoire que vous
êtes en accord avec le projet de loi pour faire en sorte que ça soit la Charte
de la langue française qui s'applique, et non pas la Loi sur les langues
officielles du fédéral qui vienne empiéter sur les champs de compétence du
Québec.
M. Bolduc (Denis) :
Oui. On l'a dit, d'ailleurs... je l'ai dit, d'ailleurs, dans des rencontres
assez récentes avec le gouvernement fédéral. On croit que c'est l'Office
québécois de la langue française qui devrait gérer la langue sur le territoire
québécois.
M. Jolin-Barrette : O.K.
Parlant de l'OQLF, il y a un nouveau pouvoir d'ordonnance pour l'OQLF à
l'intérieur du projet de loi. Qu'est-ce que vous en pensez, de ce pouvoir-là
qu'on confie à l'OQLF? Et je vous écoute.
• (11 h 50) •
M. Bolduc (Denis) :
Bien, ce que j'en comprends, c'est que l'ordonnance va venir remplacer la mise
en demeure, là, dans le processus actuel, administratif. Donc, avec le projet
de loi, il y a un préavis d'une quinzaine de jours, là, qui est prévu avant
d'émettre l'ordonnance. Il y a un processus aussi de contestation qui est
prévu. Mais moi, je pense que ça va raccourcir le processus administratif, là.
On va entrer dans le processus légal plus rapidement, puis ça va éviter que
certaines entités, certaines entreprises étirent le processus, là. On a vu
beaucoup de dossiers qui ont pris 10 ans, 20 ans à se régler, là. Le
cas de la ville de Montréal en est un bel exemple, là, vraiment, là.
M. Jolin-Barrette : Ça a
traîné durant des années avant qu'ils puissent obtenir leur certificat de
francisation notamment.
M. Bolduc (Denis) :
Oui, oui.
M. Jolin-Barrette : Effectivement.
Sur la question des municipalités bilingues, je souhaiterais vous entendre d'une
façon un peu plus détaillée, parce que, dans le fond, dans le projet de loi, ce
qu'on fait, c'est que les municipalités qui n'ont plus le critère de 50 %
perdront leur statut par l'effet de la loi, sous réserve de l'adoption d'une
résolution du conseil municipal.
<Qu'est-ce que votre organisation
pense de cela...
M. Jolin-Barrette :
...sur la
question des municipalités bilingues, je souhaiterais vous
entendre d'une façon
un peu plus détaillée p
arce que,
dans
le fond, dans le
projet de loi, ce qu'on fait, c'est que les
municipalités qui n'ont plus le critère de 50
% perdront leur statut
par l'effet de la loi, sous réserve de l'adoption d'une résolution du conseil
municipal.
>Qu'est-ce que votre
organisation pense de cela?
M. Bolduc (Denis) :
Ah! bien, pour plusieurs, hein... pour plusieurs organisations, la barre
devrait être à 50 %, là. Si tu n'as pas 50 % de population
anglophone, bien, tu ne devrais pas pouvoir être une ligne... déclarée comme
étant une municipalité bilingue. Nous, on place la barre un peu plus basse, là,
à 40 %. Il y a une certaine tolérance, là, dans cette proposition-là. Puis
on dit également qu'à un certain niveau — puis là on a eu des
discussions pour déterminer est-ce que c'est 10 %, 15 % ou 20 %,
là — mais on dit : Bien, ce sera aux décideurs... aux
législateurs à décider, mais qu'à un certain niveau, là, l'obligation de
fournir des services en anglais, là, pourrait disparaître, là.
M. Jolin-Barrette : O.K.
Je vais céder la parole à mes collègues. Je crois que le député de Saint-Jean
et le député de Chapleau souhaitent intervenir. Mais je vous remercie pour
votre passage en commission parlementaire.
M. Bolduc (Denis) :
Merci, M. le ministre.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. Donc, je vais céder la parole au député de Chapleau. Il reste
6 min 10 s.
M. Lévesque (Chapleau) :
Oui, merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci beaucoup, MM. Bolduc,
Grondin, d'être ici avec nous, votre présentation.
Vous avez parlé de façon assez positive
des mesures et des ressources qui sont ajoutées, là, à l'Office québécois de la
langue française, puis vous avez parlé notamment de soutien, de formation aux
membres des comités de francisation.
J'aimerais peut-être vous m'expliquiez un
peu qu'est-ce que vous faites actuellement avec... bon, qu'est-ce qui se passe
dans les comités puis qu'est-ce que ça va permettre de faire, ces ajouts-là de
mesures et de ressources avec les comités de francisation.
M. Bolduc
(Denis) : Si vous me permettez, Mme la Présidente, Gilles, mon
collègue, travaille en étroite collaboration avec les comités de francisation
au Québec. Je pense qu'il peut donner quand même pas mal de détails.
M. Grondin (Gilles) : Ce
qui est intéressant, dans le dépôt du projet de loi, c'est l'offre de soutien
aux comités de francisation qui va être donnée par l'office québécois,
notamment en formation. Il y a beaucoup... Nous, on en donne, de la formation,
mais on est... Les groupes syndicaux donnent... mais les employeurs n'en
reçoivent même pas de formation. Il y a très peu d'offres de formation. Donc,
l'office va permettre justement de donner une certaine professionnalisation aux
comités de francisation — on en est très content — par
toutes sortes de petites mesures qui sont annoncées dans le projet de loi.
Donc, pour nous, ça va être extrêmement positif parce qu'on considère qu'il y a
là un enjeu de taille pour la francisation des milieux de travail.
M. Lévesque (Chapleau) :
O.K. Est-ce que vous faites le lien également, que vous avez fait initialement,
avec certaines personnes immigrantes qui se retrouvent en emploi, puis vous
venez appuyer, puis vous accompagnez, justement, pour l'apprentissage de la
langue française dans ce...
M. Grondin (Gilles) :
Bien, ça permettrait, je pense... Ce qui serait intéressant, c'est que les
comités de francisation puissent traiter de la francisation des personnes
immigrantes aussi, donc l'offre de cours en francisation sur les lieux de
travail, etc. Les comités de francisation sont plus timides à ce propos, mais
je pense qu'il faudrait qu'ils soient soutenus pour qu'elles-mêmes... pour que
ces milieux-là prennent conscience de leur rôle en matière de francisation parce
que, comme on le mentionnait, le milieu de travail est le deuxième milieu de
vie des personnes immigrantes. Donc, les comités de francisation pourraient
être un lieu d'échange intéressant pour aider à l'intégration et à la
francisation.
M. Lévesque (Chapleau) :
Effectivement, je pense qu'il y a une volonté très forte dans le projet de loi
à ce niveau-là. <Pensez-vous que les mesures...
M. Grondin (Gilles) :
…soutenus pour qu'elles-mêmes… pour que ces milieux-là prennent conscience de
leur rôle en matière de francisation parce que, comme on le mentionnait, le
milieu de travail est le deuxième milieu de vie des personnes immigrantes, donc
les comités de francisation pourraient être un lieu d'échange intéressant pour
aider à l'intégration et à la francisation.
M. Lévesque (Chapleau) :
Effectivement, je pense qu'il y a une volonté très forte, dans le
projet
de loi, à ce niveau-là. >Pensez-vous que les mesures vont être
suffisantes ou vous proposeriez d'autres éléments supplémentaires?
M. Grondin (Gilles) : Ah!
ça, c'est mystère et boule de gomme, mais...
M. Lévesque (Chapleau) : O.K.
Non, mais votre expérience peut être… il y a-tu des éléments qui seraient
pertinents, que vous dites : Bon, bien, ça, ça prendrait telle mesure,
telle mesure, pour que ça fonctionne?
M. Grondin (Gilles) :
Moi, je pense qu'en partant, plus qu'on parle de français, mieux c'est, plus
qu'il y a de lieux d'échange puis plus qu'on va comprendre l'importance du
français, notamment pour la santé et sécurité au travail aussi, donc ça va
aider, et on va prendre… Donc, tout lieu, tout ajout va être important, là. Il
n'y a pas rien de précis plus que ça.
M. Lévesque (Chapleau) :
O.K. Une petite dernière question, là. Vous avez parlé des entreprises avec
25 à 49 employés puis dont vous trouvez que c'est une bonne mesure
que ça vienne s'appliquer. Quels étaient les enjeux problématiques que vous voyiez,
avec ces entreprises-là, actuellement, sans appliquer?
M. Grondin (Gilles) :
Bien, c'est parce qu'on parle très peu de questions de travail en français dans
ces entreprises-là. C'est une revendication de longue date, qu'on puisse
traiter des…
(Interruption)
M. Grondin (Gilles) :
Voyons, pourtant, j'ai bien fermé ça. Il faut que je change mon auto de côté, à
Montréal, parce qu'il y a le nettoyage.
Et donc, ça va être, justement, de
permettre, justement, la discussion dans ces petits milieux de travail là, la
discussion de la place du français, tout comme on croit que les comités de
francisation, on l'a mentionné un petit peu tantôt, devraient être créés à
partir de 50 employés et non pas de 100 employés, là.
M. Lévesque (Chapleau) :
D'accord. Merci beaucoup. Moi, ça complète. Je crois que le député de Saint-Jean
pourrait avoir des questions, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Thériault) :
Absolument. M. le député de Saint-Jean, 2 min 45 s à votre
disposition.
M. Lemieux : Merci,
Mme la Présidente. Messieurs, bien le bonjour. M. Bolduc, je partage
avec vous votre nouveau slogan, enfin, et je note votre espoir d'une avancée,
une avancée qui est, dans les circonstances, je pense, équilibrée, et je vous
amener dans les cégeps pour parler de cet équilibre-là. Je crois comprendre que
les tests en français vous font plaisir et qu'en même temps vous êtes un petit
peu, dans le fond, comme le projet de loi, en train de chercher l'équilibre
dans comment gérer les cégeps, parce que vous n'êtes pas nécessairement de l'opinion
que ça prend l'imposition de la loi dans les cégeps. Vous avez une position, je
ne sais pas s'il faut dire consensuelle, avec le gouvernement, mais vous êtes
pas mal… on est pas mal proche, en tout cas, là.
M. Bolduc (Denis) :
Bien, en fait, il y a un étudiant sur deux, hein, sur l'île de Montréal, qui
s'inscrit dans un programme préuniversitaire en anglais, alors c'est beaucoup,
c'est vraiment beaucoup. Il y a... on note... Je dirais, là, que, dans le projet
de loi, on trouve que le processus… En tout cas, c'est certain, ce qu'on voit,
là, dans le projet de loi, il y a un processus qui est mis en place pour
stopper, finalement, l'augmentation. Ça, je pense qu'on le voit. Maintenant, à
long terme ou à moyen terme, on voit mal, dans le projet de loi, comment on va
réduire... En tout cas, je pense qu'on va réduire <le nombre
d'inscriptions en anglais, mais…
M. Bolduc (Denis) :
…de loi, il y a un processus qui est mis en place pour stopper, finalement, l'augmentation.
Ça, ça, je pense qu'on le voit. Maintenant, à long terme, à long terme ou à
moyen terme, on voit mal, dans le projet de loi, comment on va réduire. En tout
cas, je pense qu'on va réduire >le nombre d'inscriptions en anglais,
mais sur un long terme, puis petit… à petite dose d'année en année. C'est la
lecture qu'on en fait, et on aimerait que le processus soit un petit peu plus
corsé pour qu'on aille plus vite dans ce sens-là.
M. Lemieux : Je suis d'accord
avec vous. Proportionnalité, contingentement, on verra comment ça… en tout cas,
l'ouverture est là.
Une dernière question rapide, le ministre
vous a félicités sur votre mémoire, et pas seulement parce que vous étiez d'accord
avec lui pas mal, mais parce qu'il est très fouillé. Il y a
47 recommandations et presque autant de pages. Je vous amène à la
recommandation n° 19, qui a piqué ma curiosité, en quelques secondes,
parce que la présidente me regarde avec des gros yeux. C'est au sujet de l'OQLF,
qui aurait le pouvoir, s'il y a lieu, d'une analyse de la situation
linguistique dans les entreprises de moins de 25 personnes employées.
Expliquez-moi ça.
La Présidente (Mme Thériault) :
…
M. Lemieux : Oups!
Excusez.
M. Grondin (Gilles) : Et
en 15 secondes. Maintenant, écoutez, oui, je pense qu'il y a aussi dans
les toutes, toutes petites entreprises des contraintes qui pourraient être
imposées et qui devraient être mesurées par l'office, dans ce sens-là qu'on
amène la recommandation, pour s'assurer que ces milieux-là aussi soient en
français, là.
M. Lemieux : Merci
beaucoup.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. Donc, nous allons aller maintenant du côté de l'opposition officielle.
Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, vous avez 11 minutes.
Mme David : Ah! oui, oui,
je voulais partir mon truc, en plus, parce que je suis toujours… Bon.
Alors, merci beaucoup, MM. Bolduc,
Grondin, merci. Je vous l'ai dit tout à l'heure, je le redis publiquement,
effectivement, long mémoire, pas mal d'accord avec le projet de loi, je dirais,
donc beaucoup de recommandations reprennent les propositions du projet de loi,
mais il y a quand même des choses qui vous inquiètent. Il y a quelques trucs
qui vous inquiètent, entre autres, vous dites : Savez-vous combien ça va
faire d'entreprises de plus? Vous chiffrez, c'est 20 000 entreprises
de plus de 25 à 49 employés. Et vous vous inquiétez, vous dites :
Est-ce que l'OQLF — là, la recommandation n° 14 — l'OQLF
va-t-elle avoir des ressources pour ouvrir 20 000 dossiers de plus,
parce que c'est ça que ça veut dire, pour certifier des entreprises? Ça, ça
vous inquiète beaucoup. Je vais vouloir vous entendre là-dessus.
Puis, en même temps, page 20, donc
deux pages après, vous dites : Oui, on est pressés, ça fait 45 ans qu'on
attend, pourquoi encore attendre trois ans? Pourquoi le ministre donne trois
ans pour implanter, donc, les mesures puis pour rendre ça, là, légalement
obligatoire, et tout ça? Alors, en même temps, vous dites : Attention! Là,
l'OQLF est mieux d'être équipé pour rendre les services, sinon ça va être
épouvantable. Puis, en même temps, vous dites : On est tellement pressés
qu'on est impatients, puis trois ans, c'est long.
• (12 heures) •
M. Bolduc (Denis) :
Oui, <effectivement. D'abord, sur…
>
12 h (version révisée)
<15379
Mme David :
...obligatoire, et tout ça. Alors,
en même temps, vous dites :
Attention, là, l'OQLFV est mieux d'être équipé pour rendre les services, sinon,
ça va être épouvantable. Puis,
en même temps, vous dites : On est
tellement
pressés qu'on est impatients, puis trois ans, c'est long.
M. Bolduc
(Denis)T :
Oui, >effectivement. D'abord, sur
votre première remarque, c'est vrai qu'on souligne beaucoup de points positifs,
dans notre mémoire, concernant le projet de loi. C'est quand même assez rare,
là... un ton semblable, là, dans nos mémoires, à la FTQ, mais, vraiment, la question
du français, je le disais en introduction, ça fait 50 ans qu'on pousse sur
cette question-là, puis, depuis plusieurs années, on n'en parlait plus
publiquement, puis là on en parle, puis il y a quelque chose de concret qui est
sur la table. Dans ce sens-là, ça nous réjouit beaucoup.
Pour... Effectivement, c'est le chiffre
qu'on a, 20 000 entreprises et plus. On voit mal, avec les budgets
actuels... puis même s'il y a des sommes qui ont été injectées, des sommes supplémentaires
qui ont été injectées, qui ont été accordées à l'Office québécois de la langue
française, pour mieux rendre sa mission, récemment, bien, on pense qu'il va...
ça va être nécessaire d'en donner davantage. Et il y a un processus, peut-être,
d'embauche aussi qui sera nécessaire, là, parce que ça fait beaucoup de
dossiers supplémentaires.
Puis en même temps, on a cette
impatience-là, vous avez raison de le souligner, on a cette impatience-là, là,
qu'enfin, enfin on agisse. Alors, on comprend un peu le délai, le délai qui est
indiqué, de trois ans, mais ce serait le fun qu'il y ait un effort de voir pour
le rétrécir le plus possible. Est-ce que c'est possible de faire ça en un an et
demi, deux ans, plutôt que trois ans? Bien, c'est un peu dans ce sens-là qu'on
l'écrit, parce qu'on est conscients, là, qu'il y a quand même un défi là, là.
Mme David : Oui. Oui,
gros défi, gros, gros, gros défi, effectivement. Vous êtes vraiment les... Vous
avez mis les mains à la pâte, là, puis on sent que vous y êtes vraiment, probablement,
M. Grondin, beaucoup, là, dans la question de la francisation, et puis
vous êtes vraiment sur le terrain. Et vous dites quelque chose qui retient mon
attention, qu'on soupçonne, mais qu'on... Vous le dites clairement à la page 28,
là, et à la page 22, vous dites : ce n'est pas suffisamment pris au
sérieux, dans les entreprises, ce qu'on appelle les comités de francisation. Ça,
vous le dites, clairement.
Et vous dites... Et j'imagine tellement...
Quand on a travaillé dans des milieux institutionnels ou des entreprises, on...
Ah! bien, il faut des réunions, mais, tu sais, on fait la réunion, puis ce
n'est pas vraiment important, puis, etc. C'est comme la connaissance des
politiques linguistiques. Beaucoup d'employés, même au gouvernement, n'ont
aucune idée que les politiques linguistiques existent, dans les universités où
j'ai été non plus, donc. Et vous dites... vous saluez, donc, qu'il y ait plus
de... Bien, deux fois par année, ce n'est pas très,
très exigeant. Vous allez même, vous, jusqu'à trois fois par année, vous
dites : Aux quatre mois, là, ce serait mieux. Mais parlez-moi de ce que
vous trouvez n'être pas pris au sérieux, les comités de francisation.
M. Grondin (Gilles) :
Bien, effectivement, je pense que, trop souvent, on va dire : Bon, bien,
il nous faut deux <personnes...
Mme David : …
ce
n'est pas très, très exigeant. Vous allez même, vous, jusqu'à trois fois par
année, vous dites : Aux quatre mois, là, ce serait mieux. Mais parlez-moi
de ce que vous trouvez n'être pas pris au sérieux, les comités de
francisation.
M. Grondin (Gilles) :
Bien,
effectivement, je pense que, trop souvent, on va dire : Bon,
bien, il nous faut deux >personnes, là, regarde, toi puis toi, tu y vas,
puis tu t'en vas sur le comité de francisation, puis toi, du côté patronal
aussi, puis vas-y, on te choisit. Il y a un enjeu de taille, au niveau des
comités de francisation, c'est, notamment, évidemment de s'assurer de la santé,
et de la sécurité, et d'autres choses. Et, oui, ce n'est pas nécessairement
pris au sérieux, c'est vrai. On ne peut pas dire que les syndicats le prennent complètement
au sérieux non plus, là. Eux autres aussi, parfois, il peut arriver... Mais
c'est en la rendant plus attrayante, plus professionnelle, en offrant du
soutien, de la formation, comme on dit, que l'office pourrait donner, que ça va
rendre les enjeux beaucoup plus pertinents, comme on peut trouver en santé et
sécurité au travail, par exemple, avec les comités de santé et sécurité au
travail dans les entreprises. Nous, c'est un peu notre défi, notre objectif,
c'est de le prendre aussi au sérieux qu'en santé et sécurité au travail, là.
Mme David : ...c'est intéressant.
Vous y allez, page 28, d'une suggestion assez audacieuse. Je ne suis pas
sûre que les patrons vont aimer ça beaucoup. Alors, vous voulez associer les
comités de francisation dans la définition des postes de travail où l'exigence
d'une autre langue que le français est demandée. Avez-vous l'impression que
vous allez avoir une réception positive des employeurs?
M. Grondin (Gilles) : On
pensait que oui, jusqu'à présent, là, mais là vous me mettez un doute. Non, effectivement,
on sait bien qu'on va évoquer le droit de gérance, on va évoquer un paquet de
choses, mais il y a toujours possibilité de rêver et d'espérer que l'ensemble
de la société québécoise, incluant les employeurs, prenne au sérieux la question
de la francisation. Vous savez, des fois, on a des... Je furetais, à un moment
donné, sur un site d'une entreprise, puis ils cherchaient un gardien de nuit en
Mauricie, dans une grosse compagnie, puis ils exigeaient le bilinguisme. À un
moment donné, je pense qu'il faut être sérieux, là, tu sais. Je ne pense pas
qu'un gardien de nuit, en Mauricie, a besoin d'être bilingue pour exécuter son
travail, tu sais.
Donc, je pense que c'est un appel à ce que
tout le monde prenne conscience que l'enjeu de la langue est important au
Québec, là.
Mme David : C'est
intéressant. Je vais laisser la parole à mon collègue de D'Arcy-McGee. Je
reviendrai, s'il reste du temps, parce que ça soulève beaucoup de questions,
votre mémoire.
La Présidente (Mme Thériault) :
Et vous avez 4 min 25 s, M. le député.
M. Birnbaum : Merci, Mme
la Présidente. Merci, MM. Bolduc et Grondin, pour votre présentation ainsi
que l'implication constante et de longue date de la FTQ dans cette question
très importante. Je vois aussi, dans vos remarques préliminaires, vous avez
parlé du fait qu'il faut mettre fin au bilinguisme institutionnel. Dans un premier
temps, je crois qu'on pourrait discuter de l'étendue et de l'ampleur de ce
bilinguisme institutionnel, mais, par contre, je vais aller ailleurs.
Il y a un consensus, au Québec, qui
perdure depuis 30 ans, partagé par des gouvernements, tous confondus, du
PQ, libéral, les établissements, ainsi, j'ose dire, que par les syndicats, et
je parle de ce qui a trait à l'accès à des services désignés et limités de
santé et services sociaux en anglais. Vous allez vous rappeler que l'ancien
premier ministre lui-même, Lucien Bouchard, a constaté que, rendu à l'hôpital
pour un test sanguin, on n'a pas <besoin…
M. Birnbaum : …
j'ose
dire, que par les syndicats, et je parle de ce qui a trait à l'accès à des
services désignés et limités de santé et services sociaux en anglais. Vous
allez vous rappeler que l'ancien premier ministre lui-même, Lucien Bouchard, a
constaté que, rendu à l'hôpital pour un test sanguin, on n'a pas >besoin
d'un test de langue. Je serais curieux de savoir si les travailleurs de la FTQ
qui auraient participé, depuis 30 ans, dans ce consensus ont maintenant
des questions, et, si, de votre lecture, le gouvernement remet en question
aussi ce consensus, dont, je vous soumets, le Québec devrait être très fier.
M. Bolduc (Denis) :
Offrir un service de santé… Quelqu'un qui est unilingue anglais qui se présente
dans un hôpital, qui a besoin de soins, on peut facilement penser qu'il doit
pouvoir expliquer qu'est-ce… c'est quoi, son problème, en anglais. Mais, cela
dit, il y a quand même… c'est une… ce n'est pas nécessaire que l'ensemble du
personnel parle anglais, hein? Donc, ça prend quelques personnes, hein, ça
prend quelques personnes, là, qui puissent répondre. Mais il ne faut pas être
gênés, quand même, d'affirmer que la langue principale, la langue commune au Québec,
c'est le français. Les Suédois l'ont fait, hein, ils ont légiféré pour
introduire… donc, pour affirmer que la langue principale commune en Suède,
c'est le suédois. Il y a également, dans la législation suédoise, une responsabilité
dans l'emploi des autorités publiques. Ils ont introduit le test des langues,
des tests de langue et de connaissances civiques, même, en Suède, concernant le
français.
Alors, oui, les gens… On ne peut pas
mettre la vie d'une personne en danger parce qu'elle ne parle pas français,
mais, en même temps, il ne faut pas se servir de ce prétexte-là pour en faire
une généralisation, où, dans les hôpitaux, il faut absolument que le personnel
parle anglais, là. Tu sais, la situation est grandement différente entre sur l'île
de Montréal puis en région, là. Si on parle de la Côte-Nord ou de l'Abitibi-Témiscamingue,
ce n'est pas la même situation qu'à Montréal. À Montréal, il y a des hôpitaux
anglophones.
La Présidente (Mme Thériault) :
Je m'excuse. On doit suspendre les travaux, on a un problème d'enregistrement.
Donc, on va suspendre quelques instants,
le temps de régler le petit problème technique.
(Suspension de la séance à 12 h 09)
>
(Reprise à 12 h 15)
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. Donc, nous allons poursuivre nos travaux. Il y a un petit problème
technique qui s'est présenté dans toutes les salles de commission. Donc, Mme la
députée de Marguerite-Bourgeoys, il vous reste 1 min 16 s pour
aller avec la fin de la présentation.
Mme David : Bon, je vais
y aller le plus vite possible. Je vous ai souligné tout à l'heure que
j'appréciais beaucoup votre exemple des toutes petites entreprises, ou alors,
de travailleurs, souvent, avec un statut temporaire. Et à la page 36, vous
parlez du service… des entrepreneurs de services d'édifices Québec inc., où
vous avez une entente avec l'UES-800. Mais tout ça pour dire que l'industrie de
l'entretien ménager, pour vous, c'est une industrie importante, où il y a <beaucoup
de…
Mme David : ...souvent,
avec un statut temporaire. Et à la page 36, vous parlez du service… des
entrepreneurs
de services d'édifices
Québec inc., où vous avez une entente avec
l'UES-800. Mais tout ça pour dire que
l'industrie de l'entretien
ménager, pour vous, c'est une
industrie importante, où
il y a >beaucoup
de francisation à faire, et j'en suis tout à fait d'accord, et vous avez des
propositions. Alors, parlez-nous-en un peu, parce que vous voudriez que la CPMT
augmente le financement.
La Présidente (Mme Thériault) :
En 40 secondes.
M. Grondin (Gilles) :
Bien, écoutez, oui, il y a une entente particulière de signée, comme il y a un
décret de convention collective. Ça facilite les choses, donc, entre l'union
des employés de service et l'association patronale. Donc, ils ont mis sur pied
un processus de francisation fort intéressant, donc, avec le support de la
CPMT. Le syndicat reçoit une subvention, francise des travailleurs. Ces mêmes
travailleurs-là ne sont pas pénalisés sur leur chèque de paie, et c'est le
syndicat qui rembourse l'employeur pour les dépenses, tu sais. Donc, c'est un
processus qui roule assez bien, qui permet, justement, avec ton univers,
d'avoir des cours de français des gens de ton groupe, et ça donne des beaux
résultats, et on en parle beaucoup dans le film Langue à l'ouvrage — Migrer
vers le français au travail, que je vous invite à voir. Donc, je cherchais
une façon de le pluguer, et c'est fait.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci, M. Grondin. Je dois mettre fin à l'échange. Je me tourne maintenant
du côté de la députée de Mercier pour votre échange, de
2 min 45 s.
Mme Ghazal : Merci, Mme
la Présidente. Je vais sûrement le regarder, ça m'intéresse. Justement, je veux
vous parler de francisation en entreprise, qui est un sujet très, très
important. La recommandation n° 37, vous parlez de
maintenir l'esprit du fonds de développement et de reconnaissance des
compétences — donc, ça, c'est la loi du 1 % — et même,
voir à rehausser le seuil d'assujettissement de la loi afin de bonifier le
financement et l'offre de francisation via ce fonds, ce qui n'est pas le cas actuellement.
Moi, j'ai fait une proposition, au nom de Québec solidaire, un petit peu
semblable pour l'augmenter, pour que les entreprises paient 0,5 %, au
lieu... en plus du 1 %, pour que ce soit à Montréal, donc, parce
qu'ailleurs ça se pose moins. Donc, j'aimerais vous entendre un peu plus en
détail sur cette proposition-là.
M. Bolduc (Denis) :
Vous aussi, vous ne devez pas être très populaire auprès du patronat.
Des voix
: Ha, ha, ha!
Mme Ghazal : On est
pareils.
M. Bolduc (Denis) :Mais on réclame...
Mme Ghazal : Vous voyez
juste.
M. Bolduc (Denis) :
Oui, parce que ce qu'on s'est rendu compte, c'est que, sans la loi du 1 %,
la formation en entreprise serait beaucoup moindre, il y a beaucoup... On a
fait des tests, puis la réponse qu'on a eue de beaucoup d'employeurs, c'est
qu'on le fait, la formation parce que la loi est là puis nous oblige à le
faire. Sinon, sinon, ils ne le feraient pas. Alors, ça prend ce genre de loi là
pour inciter les entreprises.
Mme Ghazal : C'est quoi,
la bonification que vous mettez dans votre... Quand vous dites «bonifier»,
ça... Parce qu'en ce moment ça s'applique aux entreprises de 2 millions
de... voyons...
M. Bolduc (Denis) :
De masse salariale.
Mme Ghazal : ...de
salaires, là, salariale... masse salariale. Est-ce que vous dites qu'il
faudrait que ce soit plus bas? Quelle bonification vous voyez avec cette
mesure-là?
M. Bolduc (Denis) :
En fait, sur le pourcentage, hein, on a déjà parlé de 2 %, nous.
Mme Ghazal : 2 %.
M. Bolduc (Denis) :
Oui. On a déjà parlé de 2 % sur cette question-là. Sur le plafond <salarial...
Mme Ghazal : ...
Est-ce
que vous dites qu'il faudrait que ce soit plus bas? Quelle bonification vous
voyez avec cette mesure-là?
M. Bolduc
(Denis) :
En fait, sur le pourcentage, hein, on a déjà
parlé de 2 %, nous.
Mme Ghazal : 2 %.
M. Bolduc
(Denis) :
Oui, on a déjà parlé de 2 % sur cette
question-là. Sur le plafond >salarial, honnêtement, là, ça fait
longtemps qu'on a eu des discussions, là, à ce propos-là.
Mme Ghazal : Mais vous
voyez qu'il faudrait que ce soit bonifié, puis qu'on fasse la francisation
aussi via ce fonds, ce qui est une bonne chose.
Je voulais aussi vous entendre sur les
travailleurs et travailleuses temporaires. Vous dites qu'elles et eux aussi
devraient avoir de la francisation. Le problème n'est pas en amont, le fait
qu'il y a beaucoup trop de travailleurs et travailleuses étrangers, puis c'est
vers ça un petit peu que le gouvernement veut de plus en plus aller, dans
l'immigration, pour avoir de la main-d'oeuvre. Est-ce que vous avez une
position là-dessus?
La Présidente (Mme Thériault) :
En 15 secondes.
M. Grondin (Gilles) :
Bien, écoutez, les travailleurs et travailleuses, on pense que, oui, le
processus de francisation est important pour eux et elles aussi, là, donc,
parce qu'il y en a plusieurs qui vont devenir, possiblement, des demandeurs de
citoyenneté.
Mme Ghazal : ...est-ce
que la FTQ a une position là-dessus ou on fait avec le gouvernement?
M. Grondin (Gilles) : On
n'est peut-être pas dans la bonne commission parlementaire. Je vais laisser...
La Présidente (Mme Thériault) :
Et je n'ai plus de temps, donc je dois mettre fin à votre échange. Et je
regarde immédiatement le député de Matane-Matapédia pour lui céder la parole.
• (12 h 20) •
M. Bérubé : Merci, Mme la
Présidente. Bienvenue à la fédération des travailleurs du Québec. Tout à
l'heure, vous avez dit : Enfin, une intervention en matière de langue!
Vous avez quand même oublié le projet de loi n° 14, en 2013. Puis je
regarde votre site Internet, vous aviez condamné avec beaucoup de force le
Parti libéral du Québec et la Coalition avenir Québec de ne pas avoir appuyé ce
projet de loi, qui réglait plein d'enjeux importants. Je vous le rappelle parce
que c'était une pièce importante. Et Partenaires pour un Québec français, dont
vous êtes membre, avait appuyé sans réserve cette initiative législative. Donc,
je voulais le rappeler pour le débat.
Vous critiquez une mesure du projet de loi
n° 96 concernant le contingentement en matière d'enseignement supérieur.
Vous mentionnez, et je vous cite : «Cette mesure n'est pas une mesure pour
renforcer les réseaux scolaires postsecondaires francophones, mais plutôt une
politique tiède visant à ne pas heurter la susceptibilité des institutions
scolaires anglophones.» Je vous laisse développer là-dessus.
M. Bolduc (Denis) :
Ça revient un petit peu à ce que je disais tout à l'heure. On sent, dans la
proposition législative, qu'on veut stopper, finalement, l'hémorragie, je le
dirais comme ça, là. Il y a de plus en plus de francophones qui s'inscrivent en
postsecondaire en anglais, donc on sent qu'on veut stopper. Mais, à long terme,
on voit qu'on cherche une diminution, mais, pour nous, ce n'est pas suffisant,
une diminution timide. On aimerait quelque chose qui viendrait, finalement,
forcer le pas, là, pour qu'il y ait moins de francophones qui s'inscrivent à
l'école anglophone.
M. Bérubé : Je vous
suggère humblement qu'on peut l'empêcher pour les francophones et les
allophones. Avez-vous une réflexion là-dessus?
M. Bolduc (Denis) :
Mais, en fait, on a... Oui, on pourrait, hein, on pourrait, mais on ne va pas
jusqu'à ce point-là <actuellement...
M. Bérubé : …
pour
les francophones et les allophones. Avez-vous une réflexion là-dessus?
M. Bolduc
(Denis) :
Mais, en fait, on a... Oui, on pourrait, hein,
on pourrait, mais on ne va pas jusqu'à ce point-là >actuellement.
M. Bérubé : D'accord. L'accès,
pour un travailleur… En fait, le droit de travailler en français… Ne serait-il
pas mieux, selon vous, explicitement, d'interdire à l'embauche? Parce que ce
n'est pas ce que le projet de loi fait, il tourne un peu autour du pot, là.
Pour une organisation de travailleurs, il me semble qu'il faudrait que ce soit
plus clair. On interdit le critère de l'utilisation de l'anglais, puis ça finit
là.
La Présidente (Mme Thériault) :
En 25 secondes.
M. Grondin (Gilles) :
Les processus ne sont pas simples non plus, là, quand il arrive une embauche.
Vous avez, tous et toutes, passé par des embauches, des comités de sélection,
etc. Il y a plein de mesures, il y a plein de façons de faire pour détourner l'attention.
On aurait beau l'interdire, l'empêcher, mais il y a toujours une manière pour
essayer de placoter en anglais avec le candidat, puis voir s'il le parle ou s'il
ne le parle pas, puis d'aller sur une autre décision. Donc, on s'est dit que
nous… Oui, il y a des mesures, il y a peut-être un dialogue social à établir
là-dessus, mais c'est loin d'être très… aussi simple que ça, là.
La Présidente (Mme Thériault) :
Et je dois vous remercier pour votre parution en commission, merci pour les
échanges.
Et je vais maintenant suspendre les
travaux de la commission jusqu'à 15 heures. Bon appétit à tous.
(Suspension de la séance à 12 h 22)
15 h (version révisée)
(Reprise à 15 h 05)
La Présidente (Mme Thériault) :
À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, la Commission de la culture et de
l'éducation reprend ses travaux. Nous poursuivons les auditions
publiques dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi n° 96, Loi sur la langue officielle et
commune du Québec, le français.
Cet après-midi, nous entendrons l'Union
des municipalités du Québec, M. Patrick Sabourin et Guy
Rocher ainsi que le Mouvement national des Québécoises et
Québécois. Donc, nous aurons quatre groupes.
Donc, j'aimerais souhaiter la bienvenue
aux représentants de l'Union des municipalités du Québec. Je vais vous
demander, M. Côté, de peut-être décliner votre identité, votre fonction et
nous présenter les personnes qui vous accompagnent et, par la suite, de nous
faire votre présentation d'une durée de 10 minutes avant les échanges avec
le ministre. La parole est à vous.
<N-2>Union des municipalités du Québec (UMQ)
M. Côté (Daniel) :
Parfait. Merci, Mme la Présidente de la commission, M. le ministre responsable
de la Langue française, Mmes et MM. les membres de la commission.
Alors, je m'appelle Daniel Côté, je suis président de l'Union des municipalités
du Québec et aussi maire de la ville de Gaspé. Je suis accompagné par
Mme Sylvie Pigeon, qui est conseillère aux politiques de l'UMQ.
Donc, je vous remercie de nous recevoir aujourd'hui
dans le cadre des consultations sur le projet de loi n° 96, Loi
sur la langue officielle et commune du <Québec...
M. Côté (Daniel) : ...
Mmes et MM. les membres de la commission. Alors, je m'appelle Daniel Côté, je
suis président de l'
Union des municipalités du Québec et aussi maire de
la ville de Gaspé. Je suis accompagné par Mme Sylvie Pigeon, qui est
conseillère aux politiques de l'UMQ.
Donc, je vous remercie de nous recevoir
aujourd'hui dans le cadre des consultations sur le projet de loi n° 96,
Loi sur la langue officielle et commune du >Québec, le français.
D'abord, j'aimerais rappeler que depuis
maintenant plus de 100 ans, l'UMQ rassemble les gouvernements de proximité
de partout au Québec, dans toutes les régions, afin de mobiliser l'expertise
municipale, accompagner ses membres dans l'exercice de leurs compétences et
valoriser la démocratie municipale. Nos membres représentent plus de 85 %
de la population du Québec.
Tout comme le gouvernement, l'UMQ est
préoccupée par les dernières statistiques produites par l'Office québécois de
la langue française sur le déclin du français. C'est pourquoi nous
accueillons favorablement la volonté du gouvernement de faire du français la
langue officielle et commune de l'État. Il est toutefois important, pour l'UMQ,
que le projet de loi préserve le climat de paix linguistique dans les
municipalités qui bénéficient en ce moment d'un statut d'organisme bilingue.
Les dispositions prévues dans la pièce législative sont donc satisfaisantes
pour l'UMQ, dans la mesure où il sera possible pour ces municipalités de
conserver leur statut.
Nous avons, toutefois, quelques
préoccupations en ce qui concerne l'application de la loi, notamment, en ce qui
a trait à la politique linguistique de l'administration ainsi que les effets de
la loi sur la gestion des contrats municipaux. Nos recommandations porteront
donc sur ces deux sujets.
D'abord, nous sommes d'accord avec
ministre, à titre d'organisme public, les municipalités doivent être
exemplaires en matière de langue française autant dans leurs communications
orales que dans leurs communications écrites avec leurs concitoyennes et
concitoyens. Ainsi, les municipalités devront se conformer aux exigences de la
nouvelle politique linguistique de l'administration et déterminer, de un, les
cas où elles pourront communiquer dans une autre langue que le français.
Chacune d'entre elles devra alors adopter une directive dans à ce sujet qui
sera ensuite approuvée par le ministre et en rendre compte annuellement. De
deux, les moyens de contrôle de la qualité du français au sein de la
municipalité. Et, de trois, plusieurs autres aspects, dont la mise en place
d'un environnement de langue française. Il s'agit donc de nouvelles obligations
pour les municipalités qui pourraient être difficiles à mettre en oeuvre,
surtout pour les municipalités moins populeuses, détenant moins de personnel en
poste.
En ce qui concerne, par exemple, la
directive selon laquelle chaque municipalité doit déterminer les situations où
elle pourra communiquer dans une autre langue que le français, l'UMQ se demande
sur quels critères le ministre va pouvoir se baser pour les approuver ou non
puisqu'il existe plusieurs situations où une municipalité pourrait avoir besoin
de communiquer dans une autre langue que le français — je pense
notamment au cas des nouveaux arrivants. Le projet de loi prévoit un délai
d'adaptation de six mois suivant leur arrivée au Québec. Après cette date,
la communication devra se faire en français seulement. Ce délai nous semble
particulièrement court, notamment pour les 14 municipalités qui sont des
pôles d'accueil pour les réfugiés qui arrivent au Québec. Certains d'entre eux
ne connaissent pas du tout le français à leur arrivée sur le territoire, donc
un six mois, ça nous paraît court. Mais il est certain que, dans un monde
idéal, nous désirons que toute la population puisse communiquer facilement en
français avec leurs municipalités, surtout pour les services essentiels.
Malheureusement, il faut reconnaître que ce n'est pas toujours une possibilité
puis il va falloir faire preuve d'une certaine flexibilité, surtout lorsqu'il
est question de santé puis de <sécurité. Donc...
M. Côté (Daniel)T : ...
Mais il est certain que, dans un monde idéal, nous désirons que toute la
population
puisse communiquer facilement en français avec leurs
municipalités,
surtout pour les services
essentiels. Malheureusement, il faut
reconnaître que ce n'est pas toujours une possibilité puis il va falloir faire
preuve d'une certaine flexibilité, surtout lorsqu'il est question de santé puis
de >sécurité.
• (15 h 10) •
Donc, tout en favorisant l'apprentissage
du français chez ces personnes, nous pensons qu'il faut laisser une certaine
souplesse aux municipalités afin qu'elles puissent continuer à offrir des
services adaptés à leur situation particulière, ce qui m'amène à la première recommandation,
qui est que l'UMQ demande au ministre de prévoir une période de
transition assez longue pour que les municipalités puissent se conformer aux
nouvelles dispositions de la loi. Ensuite, l'adoption du projet de loi n° 96 et de la politique linguistique doivent, selon nous,
pouvoir insuffler la volonté d'agir concrètement pour protéger la langue
française et favoriser son utilisation avec exemplarité dans les municipalités.
Il serait dommage qu'elle soit perçue comme une nouvelle contrainte
administrative. Nous considérons que les municipalités sont des partenaires du gouvernement,
et l'UMQ souhaite, donc, travailler étroitement avec le ministre lorsqu'il
entamera ses travaux menant à l'adoption de la politique linguistique. Il
s'agit, selon nous, d'une condition essentielle pour que cette politique
suscite une forte adhésion du milieu municipal et qu'elle corresponde aussi à
nos réalités propres sur le terrain.
Donc, notre deuxième recommandation se
décline en deux points. D'abord, que le ministre consulte officiellement le milieu
municipal lors de l'élaboration de la politique linguistique de
l'administration et qu'il tienne compte de leurs diverses réalités,
conformément à la politique gouvernementale de consultation et de
simplification administrative à l'égard des municipalités, et ensuite, qu'elle
accompagne le milieu municipal en lui fournissant des guides, des formations et
divers documents ou modèles de documents adaptés à la réalité administrative
des municipalités pour faciliter la mise en oeuvre de la politique.
Finalement, l'UMQ a des préoccupations au
sujet des impacts du projet de loi sur la gestion contractuelle municipale et
les sanctions civiles découlant d'un manquement à la Charte de la langue
française. L'octroi de contrats est très important pour les
municipalités, parce que c'est ce qui leur permet d'offrir des services souvent
très essentiels à la population en déneigement, enlèvement des matières
résiduelles, eau potable, eaux usées, etc. Il y a plusieurs modifications
législatives qui ont été apportées dans les dernières années pour que les
contrats de construction, d'approvisionnement et de services puissent être
octroyés rigoureusement. Donc, à l'UMQ, nous offrons, d'ailleurs, à nos membres
un service d'accompagnement juridique, parce que la valeur des contrats
octroyés chaque année par l'ensemble des municipalités du Québec représente des
centaines de millions de dollars.
Ainsi, on est préoccupés par les sanctions
civiles entraînées par un manquement à la Charte de la langue
française, qui pourrait amener à l'annulation automatique d'un contrat
octroyé par la municipalité. Le gouvernement du Québec pourrait même demander
la résolution, la résiliation ou la suspension de l'exécution d'un contrat en
cours dans une municipalité. Ça pourrait occasionner de très lourdes
conséquences, par exemple, des retards dans la réalisation de projets
d'infrastructure majeurs, des retards dans l'approvisionnement de produits
nécessaires au bon fonctionnement de la municipalité ou même l'arrêt
d'activités essentielles comme le déneigement, l'enlèvement des déchets ou la
fourniture d'eau potable. Donc, c'est pourquoi l'UMQ recommande que le ministre
précise la portée des manquements possibles à la Charte de la langue
française, afin que ça n'entraîne pas l'annulation automatique des
contrats octroyés par les municipalités dans le contexte que je viens de
mentionner.
En terminant, je réitère la volonté de l'UMQ
de travailler en partenariat avec les parlementaires pour que cette réforme
majeure porte ses <fruits...
M. Côté (Daniel) : ...
Donc, c'est pourquoi l'UMQ recommande que le ministre précise la portée des
manquements possibles à la Charte de la langue française,
afin que ça
n'entraîne pas l'annulation automatique des contrats octroyés par les
municipalités dans le contexte que je viens de mentionner.
En terminant, je réitère la volonté de
l'UMQ de travailler en partenariat avec les parlementaires pour que cette
réforme majeure porte ses >fruits, mais surtout qu'elle nous donne le
goût, à nous, tous et toutes, de préserver notre langue française. Je vous
remercie de votre écoute puis je suis disposé à répondre à vos questions avec
ma collègue Sylvie.
La Présidente (Mme Thériault) :
Parfait. Merci beaucoup, M. Côté. Donc, M. le ministre, la parole est à
vous.
M. Jolin-Barrette : Oui.
Bonjour, Mme la Présidente. Merci. Bonjour, M. Côté et Mme Pigeon, un
plaisir de vous retrouver ici en commission parlementaire. Merci pour votre
présence.
D'entrée de jeu, je souhaite remercier l'UMQ,
parce que vous accueillez favorablement la volonté du gouvernement de renforcer
le statut du français. Et je crois que les municipalités font partie de l'État
et, en tant que corps public, je trouve ça très intéressant que vous vous
positionnez du fait qu'effectivement les municipalités ont un rôle à jouer tout
comme les entreprises, les organismes gouvernementaux, que les municipalités
font partie de la solution. Et je pense que c'est tout à votre honneur de le
souligner, tout comme les cégeps, les universités, de prendre cette
responsabilité-là en tant que corps public. Alors, je tiens à vous remercier
pour ça.
Je voudrais vous entendre sur la question
des municipalités bilingues parce que, nécessairement, ça touche certains de
vos membres, et c'est une partie du projet de loi qui a été analysée. Certains
ont dit... On rappelle la mécanique, dans le fond, à partir du moment où une
municipalité n'a plus 50 % de sa population de langue anglaise, elle
perdrait le statut par l'effet de la loi, en fonction du recensement, à moins
que son conseil municipal adopte une résolution pour préserver ce statut-là. Alors,
certains nous ont dit : Vous devriez complètement, de façon permanente,
enlever le statut des municipalités bilingues. D'autres disent : Vous
devriez abaisser le seuil. Certains disent : Bien, oui, vous devriez les
laisser comme ça. Alors, quelle est l'opinion de l'UMQ à ce niveau-là?
M. Côté (Daniel) :
Merci, M. le ministre, pour votre question. En fait, on est d'avis que le
projet de loi qui est en analyse présentement a atteint le point d'équilibre
requis à cet effet-là. Donc, on croit que ce que vous avez mentionné dans le
projet de loi répond aux attentes des municipalités, répond aussi aux attentes
en particulier des municipalités bilingues, et que le processus qui est dans le
projet de loi actuellement fourni atteint le point d'équilibre requis pour
garder une paix linguistique au Québec.
M. Jolin-Barrette : O.K.
Hier, on a entendu le Syndicat canadien de la fonction publique, qui a
indiqué... bien, en fait, ils ont beaucoup de membres, eux, dans les
municipalités, et je pense qu'ils ont 70 % des employés qui travaillent
pour les municipalités, au Québec, qui sont membres de leur syndicat, et qui
disait... notamment dans certaines villes, notamment Gatineau, pour dire qu'il
y avait des exigences démesurées au niveau des exigences pour la connaissance
de l'anglais d'une façon systématique. On l'a constaté un peu également avec
l'étude de l'OQLF, notamment à Montréal, hein, près de 50 % des
municipalités sur l'île de Montréal où les arrondissements <exigeaient...
M. Jolin-Barrette :
... dans certaines villes,
notamment
Gatineau, pour dire
qu'il
y avait des exigences démesurées
au niveau des exigences pour la
connaissance de l'anglais d'une façon
systématique. On l'a constaté un
peu également avec l'étude de l'OQLF, notamment à Montréal, hein, près de
50 % des municipalités sur l'île de Montréal où les arrondissements >exigeaient
la connaissance d'une autre langue que le français à l'embauche. Quel est votre
son de cloche, par rapport à ça, sur le fait que certaines municipalités
exigent systématiquement la connaissance d'une autre langue que le français à
plusieurs corps de métier, à plusieurs employés?
M. Côté (Daniel) :
Bien, en fait, d'une part, il faut se rappeler aussi que les municipalités sont
dans les services essentiels à la population, en tout cas, dans la plupart des
services qu'on a, donc c'est important qu'on puisse communiquer avec les gens
et qu'on soit compris, surtout quand il arrive des situations d'urgence, par
exemple, donc, que les gens puissent nous comprendre.
On comprend que l'objectif ultime de la
loi, ce sera que la langue française soit vraiment pleinement déployée partout,
au Québec. Par contre, sur les prochaines échéances, il faut quand même que les
municipalités se fassent comprendre et les municipalités parlent via des
employés. Donc, là-dessus, je pense qu'il y a des éléments qu'on devra
travailler ensemble dans le cadre des prochaines consultations, là, sur la
politique linguistique de l'administration, c'est l'une de nos recommandations,
qu'on travaille ensemble sur les détails du déploiement de cette loi-là, sur
les impacts que ça pourrait avoir, aussi, au niveau des ressources humaines. On
pourra trouver une voie de passage qui sera à la satisfaction de tout le monde
pour atteindre les objectifs nécessaires qui sont ciblés par votre projet de
loi, mais aussi, pour respecter, aussi, le fait qu'on dessert des services
essentiels, souvent, dans les mesures d'urgence, dans des contextes très
particuliers, et on doit s'assurer, aussi, que les municipalités soient
comprises de la part de leurs citoyens.
Donc, on trouvera la voie de passage
requise, je suis certain, lorsque vous nous consulterez sur la politique.
M. Jolin-Barrette :
Bien, ça nous fera très, très plaisir de vous consulter lorsque le projet de
loi sera adopté pour le développement de la politique, qui doit rentrer en
vigueur au maximum un an après la sanction de la loi.
Je tiens, par contre, dès maintenant, à
vous rassurer relativement aux enjeux que vous soulevez en termes de santé et
de sécurité et de situations d'urgence. C'est déjà prévu, ces exceptions-là,
dans la loi. Alors, ce que fait la loi, le principe général, c'est
l'exemplarité de l'État, l'usage exclusif du français, donc, ça, c'est le cadre
général. Mais, bien entendu, on a mis des exceptions dans des cas comme ça,
comme vous le soulignez. Donc, en matière de santé, en matière de sécurité, en
matière de situations d'urgence comme celle-là, effectivement, ce sera
possible, dans ces situations-là, pour les citoyens de communiquer dans une
autre langue que le français. Même chose, également, pour les ayants droit, ils
conservent leur droit de recevoir leurs communications et de communiquer avec,
notamment, les municipalités dans leur langue, en anglais. Alors, ça, je tiens
à vous rassurer, dès le départ, pour faire en sorte que ça soit très clair et
qu'il n'y ait pas d'enjeu à ce niveau-là.
Mais revenons sur la question, là... parce
que, là, ça, c'est le dépôt du projet de loi, puis ce que vous soulevez, c'est :
Voici ce à quoi ça pourrait nous amener et voici la crainte que nous avons, à
laquelle je viens de vous répondre. Mais sur la question du taux d'exigence,
avec la Charte de la langue française <actuelle, là...
M. Jolin-Barrette :
...
pas d'enjeu à ce niveau-là.
Mais revenons sur la question, là...
parce que, là, ça, c'est le dépôt du projet de loi, puis ce que vous soulevez,
c'est : Voici ce à quoi ça pourrait nous amener et voici la crainte que
nous avons, à laquelle je viens de vous répondre. Mais sur la question du taux
d'exigence, avec la Charte de la langue française >actuelle, là, la
situation factuelle en fonction des études que certaines municipalités exigent.
Pour les travailleurs, ça peut représenter un frein à l'employabilité également
ou un frein à obtenir une promotion.
M. Côté (Daniel) :
Je comprends ce que vous me mentionnez. En fait, les dossiers qui ont été
soumis à la commission, hier, on parle de deux municipalités, alors qu'il y en
a 1 100 au Québec, là. Je ne pense pas que c'est si généralisé que ça et
que ce soit un énorme frein à l'embauche.
Par contre, on est ouverts à en discuter,
ça, c'est clair qu'on est ouverts à en discuter et trouver la voie de passage nécessaire,
tout comme ce sera nécessaire aussi de trouver ou de saisir les nuances qu'il y
a au niveau des questions de santé et de sécurité publique que vous mentionniez
tout à l'heure. Oui, la loi le prévoit d'une manière, cependant, jusqu'où on va
dans l'application très précise et très concrète? Par exemple, s'il y a un bris
de conduite d'alimentation en eau potable, est-ce que c'est une question de
santé et de sécurité au sens de la loi ou est-ce qu'on est sur une zone
d'entre-deux entre un service public et une question de santé et de sécurité?
Bref, vous voyez, il y a 50 nuances,
là, possibles. Donc, toutes ces nuances-là, on devra... bien, on devrait les
clarifier lors de l'élaboration de la politique. C'est pour ça... Puis c'est la
même chose aussi au niveau des ressources humaines, il y a plein de possibilités,
il y a plein de cas de figure.
Nous, comme UMQ, ce qu'on
revendique beaucoup, c'est des questions que... on a été reconnus comme des gouvernements
de proximité, là, puis on devrait disposer d'un maximum d'autonomie que
possible. Mais on comprend que l'enjeu de la langue française nous chapeaute ou
est par-dessus tout ça. Donc, il y a, encore une fois, de trouver le juste
équilibre entre la protection de la langue française, le respect de l'autonomie
municipale et comment on peut déployer tout ça ensemble.
Mais on partage les mêmes objectifs, ça, c'est
l'excellente nouvelle, mais sur les... des fois, des détails techniques qui
peuvent accrocher puis on veut s'assurer que, quand la loi va entrer en oeuvre,
qu'elle retombe comme il faut sur le terrain, qu'il n'y ait pas trop d'écueils.
C'est pour ça qu'on soulève un peu quelques préoccupations. Mais je suis
content qu'on va pouvoir les travailler ensemble puis atténuer peut-être ces
petits écueils potentiels là, si on veut que la loi atterrisse là où elle doit
atterrir.
• (15 h 20) •
M. Jolin-Barrette : Tout
à fait. Je suis d'accord avec vous. Peut-être une dernière question avant de
céder la parole à mes collègues qui souhaitent vous poser vos questions. La
ville de Montréal est membre de l'Union des municipalités du Québec
notamment. On a vu, au cours des derniers mois, bon, certains arrondissements
ont obtenu finalement leur certification, ça faisait des années et des années,
depuis la nouvelle fusion, la nouvelle ville.
Pour l'UMQ, Montréal occupe une place
importante au sein de l'UMQ. Quel est... Comment est-ce que Montréal peut, à
l'intérieur de l'UMQ, être un vecteur, une locomotive pour faire en sorte que
l'ensemble des municipalités puissent prendre exemple sur Montréal? Comment
vous voyez le rôle de Montréal dans la protection, la promotion du français, à
l'intérieur de votre organisation, pour faire en sorte que ça constitue un
vecteur de <changement...
M. Jolin-Barrette :
... peut, à l'intérieur de l'UMQ, être un vecteur, une locomotive pour faire en
sorte que l'ensemble des municipalités puissent prendre
exemple sur
Montréal?
Comment vous voyez le rôle de
Montréal dans la protection, la promotion
du français, à l'intérieur de votre
organisation, pour faire en sorte
que ça constitue un vecteur de >changement?
M. Côté (Daniel) :
Bien, en fait, Montréal, oui, est la principale ville au Québec, est membre de
l'UMQ, vous faites bien de le mentionner. L'UMQ compte tout près de 400 membres.
Donc, c'est certain que l'opinion de Montréal, comme métropole québécoise, a
souvent... en fait, a du poids auprès de nos membres, c'est clair. Par contre,
l'UMQ fédère, dans le fond, la réalité de toutes sortes de municipalités de la
plus petite à la plus grande au Québec. Donc, Montréal est, oui, un membre important
chez nous, mais, au-delà de ça, il y a aussi tout près de 400 autres
membres qui ont aussi leur mot à dire sur la façon dont ils exercent leurs
pouvoirs, la façon dont ils voient certains enjeux. Les enjeux sont souvent
différents d'une municipalité de 200 habitants versus la métropole. Donc,
à l'UMQ, on laisse de la place à tout le monde.
Donc, oui, Montréal peut assumer souvent
un rôle de locomotive ou un rôle de leadership fort, mais on tient aussi compte
de la réalité terrain de différentes municipalités. La moitié de nos membres, à
peu près, ont moins de 2 000 habitants, donc c'est une réalité qui
est tout autre. Et ça nous amène aussi à toute la question qu'on mentionnait
dans notre préambule sur les étapes au niveau de la reddition de comptes et de
la mise en oeuvre de la loi où, pour les plus petites municipalités, souvent,
c'est des éléments qui sont peut-être un peu plus difficiles parce qu'ils n'ont
pas nécessairement de ressources humaines. Quand tu as un directeur général et
un employé aux travaux publics dans ta municipalité, remplir des rapports et
faire des formulaires supplémentaires, des fois, ça pourra peut-être poser
certaines problématiques.
Donc, les réalités sont différentes, l'UMQ
conjugue tout ça, et c'est ce qu'on vient vous présenter aujourd'hui. Mais
évidemment on comprend qu'il y a des enjeux spécifiques à la métropole, mais on
respecte tout ça et on tente de fédérer tout ça.
M. Jolin-Barrette : Merci
beaucoup, M. Côté. Alors, merci pour votre passage en commission. Je cède
la parole à mes collègues.
La Présidente (Mme Thériault) :
Oui. Alors, sans plus tarder, le député de Saint-Jérôme,
6 min 30 s à votre disposition.
M. Chassin :Merci, Mme la Présidente. Bonjour à vous, M. Côté, Mme Pigeon.
Dans le fond, je voudrais peut-être vous poser, essentiellement, une question,
j'ai l'impression de comprendre, grosso modo, qu'effectivement on s'entend sur
les objectifs, même sur un certain nombre de mécanismes, puis qu'en même temps
vous demandez certaines précisions ou certaines indications sur la suite des
choses. Puis, en même temps, puis là je ne veux pas vous prêter d'intention,
là, je vous appelle à me corriger si vous pensez que j'erre dans mon
interprétation, mais vous parlez, entre autres, par exemple, des directives qui
vont devoir être adoptées chez vous par vos municipalités, puis, à la limite,
vous demandez, en plus, des précisions là-dessus puis des délais. Mais est-ce
que ce n'est pas là, justement, un respect, en partie, de l'autonomie des municipalités
pour que chacune puisse avoir cette souplesse d'adapter à ses propres
circonstances les tenants et aboutissants de la loi?
M. Côté (Daniel) :
Effectivement... oui, effectivement, on le reconnaît, on le reconnaît très bien
aussi qu'il y a une certaine souplesse qui est offerte aux municipalités. L'une
des craintes qu'on a, c'est <souvent...
M. Chassin :... l'autonomie des
municipalités pour que chacune
puisse avoir cette souplesse d'adapter à ses propres circonstances les tenants
et aboutissants de la loi?
M. Côté (Daniel) :
Effectivement...
oui, effectivement, on le reconnaît, on le reconnaît très bien aussi qu'il y a
une certaine souplesse qui est offerte aux municipalités. L'une des craintes
qu'on a, c'est >souvent sur les délais d'application, où on va peut-être
avoir besoin d'une certaine souplesse supplémentaire, c'est pour ça qu'on vous
invite un peu à la prudence sur les délais d'application, notamment le délai de
six mois pour que les nouveaux arrivants doivent apprendre le français. On
comprend qu'ils peuvent avoir une certaine base pour aller faire leurs courses
et/ou répondre à certains besoins essentiels, mais, dans les cas, souvent,
d'éléments un peu plus techniques au niveau de la santé et de la sécurité,
etc., des mesures d'urgence, je comprends qu'il y a une exception à la loi pour
ce type d'items là. Cependant, il y a toutes les nuances qui viennent derrière
les exceptions, c'est ça qu'on va avoir besoin de préciser, où on va avoir
besoin du maximum de souplesse que possible.
Et c'est la même chose en reddition de
comptes. Si on doit remplir une panoplie de paperasse à chaque année... en
fait, on en veut le moins possible, de paperasse, le rapport Perrault
était clair à cet effet-là, et que moins on remplit de paperasse, mieux on se
consacre aux services citoyens et plus c'est un signe de confiance, aussi, du
gouvernement du Québec envers ses municipalités, quand on nous demande un peu
moins de paperasse.
M. Chassin :
Je suis très sensible à cette demande, de moins de paperasse. Évidemment, je
pense que le ministre l'a précisé, là, il y a une certaine souplesse,
justement, par exemple, pour des notions de santé et sécurité. Dans le fond,
là, je comprends qu'il y a parfois des enjeux, notamment pour des municipalités
peut-être plus petites, et qu'à l'UMQ, justement, vous avez des
services d'accompagnement juridique. À quel point est-ce que vous seriez prêts
à participer, même, à l'élaboration de guides ou d'exemples, de références,
etc., pour que ça puisse être des outils pertinents pour les municipalités,
pour vos membres?
M. Côté (Daniel) :
C'est clair qu'on va être au rendez-vous aussi pour accompagner nos membres. Ce
qu'on a besoin, aussi, en fait, ça va être de s'entendre, d'abord, sur jusqu'où
on fait atterrir la loi, c'est quoi, toutes les nuances dont on parlait tout à
l'heure, on va d'abord s'entendre là-dessus. Mais ensuite, oui, l'UMQ a
toujours été un partenaire du gouvernement du Québec pour la mise en oeuvre de
toutes sortes de politiques publiques, celle-ci en sera une, aussi, de plus, où
on pourra agir en partenariat, où on pourra guider nos membres. Mais avant de
guider nos membres, ça va nous prendre, un peu, votre propre guide.
M. Chassin :
Évidemment. Puis là, évidemment, on commence par la loi, hein, puis, après ça,
il y a quand même un exercice de détailler, après la loi, d'autres éléments.
Et, d'ailleurs, je reviens à votre
première recommandation, vous parlez d'une période de transition suffisamment
longue. Il y en a déjà une, en quelque sorte, là, ça ne sera pas à la sanction
de la loi qu'on va exiger, du jour au lendemain... il y a une certaine période
pour vous permettre de mettre en place, dans le fond, les mécanismes adéquats.
Est-ce que vous avez l'impression que ce qui est prévu dans le projet de loi
est trop court? Parce que vous ne précisez pas, dans le fond, qu'est-ce que
serait une période de transition adéquate, en même temps, sachant qu'il y a
quand même une volonté d'agir, là.
M. Côté (Daniel) :
Effectivement, sans être tout à fait précis là-dessus, sur la question des
délais, je pense que c'est un peu à géométrie variable d'une municipalité à
l'autre. Puis on n'a pas nécessairement toute la précision, encore, sur quel
sera l'impact <concret...
M. Chassin :
... adéquate, en même temps, sachant qu'il y a quand même une volonté d'agir,
là.
M. Côté (Daniel) :
Effectivement, sans être tout à fait précis là-dessus, sur la question des
délais, je pense que c'est un peu à géométrie variable d'une municipalité à
l'autre. Puis on n'a pas nécessairement toute la précision, encore, sur quel
sera l'impact >concret dans chacune des sphères de la vie des municipalités,
donc c'est un peu hasardeux d'arriver avec un délai très précis aujourd'hui.
Ceci dit, c'est qu'il nous faut le maximum
de souplesse que possible pour faire atterrir la loi là où elle doit atterrir.
C'est pour ça qu'on se garde une certaine latitude au niveau des délais, mais
on estime déjà... Il y en a un qu'on a mis en exemple, c'est le délai de six
mois pour les nouveaux arrivants. Ça peut arriver qu'on frappe un écueil, un
certain moment donné, en tout cas, à l'égard de certaines personnes dont la
langue maternelle était très loin du français, donc ça peut arriver qu'on
frappe un écueil, c'est pour ça qu'on lève la main sur celui-là. Sur les
autres, je vous dirais que ça va prendre le maximum de souplesse que possible,
et se faire confiance mutuellement là-dedans.
M. Chassin :
Merci, Mme la Présidente. Je pense que j'ai un autre collègue qui...
La Présidente (Mme Thériault) :
Oui. M. le député de Chapleau, il reste 1 min 35 s.
M. Lévesque (Chapleau) : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Donc, je tâcherai de faire ça rapidement. Merci
beaucoup de votre présentation. Puis là j'aimerais peut-être revenir sur un
point dont le ministre faisait mention tout à l'heure, là. Certaines municipalités,
sans avoir de statut bilingue, vont avoir quand même de fortes obligations en
termes d'employabilité. Puis avec le critère, justement, de langue anglaise,
bien, pour certains postes, il va y avoir des proportions très élevées en
termes de nombre de postes. Puis ça, ça va au-delà de la santé et de la
sécurité dont vous faisiez mention. Je prends l'exemple, là, hier, on a
mentionné Gatineau, où est-ce que la ville n'est pas bilingue puis il y a plusieurs,
plusieurs postes qui sont... qui ont des demandes de critères, donc, de langue
anglaise. Comment vous allez percevoir ça, en termes de capacité d'adaptation puis
de se conformer à cette exigence-là, chez vos membres, particulièrement?
La Présidente (Mme Thériault) :
En 40 secondes...
M. Côté (Daniel) :
Oui. En fait, sans aller dans tous les cas d'espèce possibles au Québec, ce qui
va être important, c'est qu'une municipalité suive la loi, mais il faut que la
loi soit aussi fidèle à ce qu'on peut faire sur le terrain, en respect aussi
des services qu'on doit offrir à la population. Donc, il y a un équilibre à
trouver, il y a des points d'équilibre qui sont drôlement intéressants dans le projet
de loi, dont celui sur le statut des municipalités bilingues. Dans ce cas-ci,
bien, je pense qu'il y a un point d'équilibre à trouver, mais je n'ai pas la
réponse parfaite pour cet après-midi.
M. Lévesque (Chapleau) :
Merci.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. Donc, je me tourne maintenant du côté de l'opposition officielle, avec Mme
la députée de Marguerite-Bourgeoys. La parole est à vous.
• (15 h 30) •
Mme David : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. M. Côté, Mme Pigeon, bonjour.
Très intéressant de vous écouter, M. Côté, vous êtes clair et vous avez un
art de la communication qui est formidable. Alors, bon, je vais commencer par
les compliments et puis je vais aller tout de suite sur quelque chose de fort intéressant.
Vous faites référence à 2016, on en sait quelque chose, on était aux Affaires, à
ce moment-là, et je me souviens très bien de la Politique gouvernementale de
consultation et de simplification administrative à l'égard des
municipalités. Je dirais juste au ministre qu'il est très conscient
qu'il doit garder l'UMQ de bonne humeur. Alors, on va essayer de vous garder de
bonne humeur, mais, quand on est au gouvernement, il faut garder les <municipalités
de bonne humeur...
>
15 h 30 (version révisée)
<(Visioconférence)
Mme David : ...
politique
gouvernementale de
consultation et de simplification administrative
à
l'égard des
municipalités. Je dirais juste au
ministre qu'il est
très conscient qu'il doit garder l'UMQ de bonne humeur. Alors, on va essayer de
vous garder de bonne humeur, mais quand on est au
gouvernement, il faut
garder les >municipalités de bonne humeur, et je pense qu'à ce
moment-là, en 2016, on les avait mises de bonne humeur. Et vous avez donné des
mots clés que sont, entre autres, l'autonomie municipale et le besoin de
consultation, d'être consulté. Or, vous dites, à la page 8 : «Or,
aucune consultation formelle n'a été faite jusqu'à présent en amont de ce
projet de loi...» Oui, votre recommandation n° 2 dit : Demande de
consulter «officiellement le milieu municipal lors de l'élaboration de la
politique linguistique», mais je crois lire ou que vous sous-entendez que vous
auriez aimé être consulté en amont aussi du dépôt du projet de loi. Est-ce que
je me trompe?
M. Côté (Daniel) : En
fait, on apprécie toujours être consultés autant sur cet enjeu que sur tous les
enjeux. On apprécie être consultés sur tout ce qui, à quelque part, va atterrir
dans notre cour un jour ou l'autre. Donc, dans ce cas-ci, on sollicite une consultation,
et le ministre vient de nous répondre par l'affirmative qu'on sera consultés
pour la politique de mise en oeuvre, mais, oui, on apprécie toujours être
consultés. Si c'est... telle est votre question, telle est ma réponse.
Mme David : Parfait. Et
vous avez aussi dit que vous étiez inquiet pour le fait que le ministre, sur
quoi il va se baser, dites-vous à la page 7, sur quel critère pour ne pas
approuver une directive. Alors, c'est l'inverse de dire : Comment? Sur
quel critère il va approuver? Mais comment va-t-il refuser une directive?
Pouvez-vous élaborer un peu?
M. Côté (Daniel) : Oui.
Bien, en fait, ça revient un peu à ce que je mentionnais dans les dernières
minutes, c'est toute la question des nuances qui sont... où on a toujours une
crainte de frapper... d'avoir un écueil, c'est-à-dire, quand je vous donnais l'exemple,
tout à l'heure, des questions, par exemple, de bris de conduit d'eau potable.
Oui, on s'entend que l'eau potable est un service essentiel, mais est-ce que c'est
un enjeu de santé ou de sécurité publique au sens que la loi l'apporte? Pas nécessairement.
Mais est-ce qu'on peut communiquer avec les citoyens de langue anglaise pour
les informer qu'ils n'auront pas d'eau pendant les 24 prochaines heures?
C'est là, des fois, où il y a une certaine nuance qui n'est pas encore tout à
fait claire.
Cependant, on souhaite mettre en oeuvre
cette loi-là, mais il faut juste s'assurer de tous ces petits enjeux là subtils
qui, dans notre cour à nous, on voit, on voit où est-ce qu'on devrait aller, où
est-ce qu'on ne devrait pas aller, mais on doit s'entendre au niveau de la politique
de mise en oeuvre du projet de loi, on doit juste s'entendre sur la façon de le
livrer pour s'assurer d'atteindre les objectifs de la loi, mais tout en
respectant ce qu'on doit offrir aussi en termes de services essentiels à notre population.
Mme David : Donc, on peut
conclure pour ma partie, parce que, Mme la Présidente, je vais passer la parole
à mon collègue de D'Arcy-McGee, que le diable pourrait être dans les détails.
Alors, il va falloir être très prudent. Donc, si vous le permettez, je
passerais la parole à monsieur...
La Présidente (Mme Thériault) :
Vous avez 7 min 55 secondes, M. le député.
M. Birnbaum : Merci, Mme
la Présidente. À mon tour, je vais laisser du temps pour mon collègue de La Pinière.
Bonjour, M. le maire Côté et Mme Pigeon, et merci beaucoup pour votre
présentation.
Vous constatez qu'il y a une trentaine de
vos membres <municipalités qui...
Mme David : ... à
monsieur...
La Présidente (Mme Thériault) :
Vous avez 7 min 55 secondes,
M. le député.
M. Birnbaum :
Merci,
Mme la Présidente. À mon tour, je vais laisser du temps pour mon
collègue
de
La Pinière. Bonjour, M. le maire Côté et Mme Pigeon,
et
merci beaucoup pour votre présentation.
Vous constatez qu'
il y a une
trentaine de vos membres >municipalités qui ont le statut de municipalité
bilingue selon les exigences de 29.1. J'aimerais que vous nous aidiez à
préciser parce qu'il y a peut-être une «mésappréhension» qu'on parle d'un
bilinguisme institutionnel, une obligation sur chaque employé. C'est assez
circonscrit. Qu'est-ce que sont les droits additionnels qu'elles ont, ces
municipalités-là?
M. Côté (Daniel) :
Sylvie, est-ce que tu pourrais y aller?
Mme Pigeon (Sylvie) :
Oui, oui, bien sûr. Selon donc l'article 29.1 de la Charte de la langue
française, les municipalités qui ont le statut d'organisme bilingue peuvent
faire toutes leurs communications à la fois en anglais et en français, donc,
par exemple, le site Internet, toutes les communications, dans le fond,
officielles de la municipalité peuvent se faire à la fois en français et en
anglais, donc. Puis c'est pour ça aussi qu'elles peuvent embaucher aussi des
personnes qui sont capables de s'exprimer dans les deux langues, parce que c'est
leur statut de municipalité bilingue qui leur permet de faire ça.
M. Birnbaum : Merci. Je
vous cite dans votre mémoire, et, dans vos remarques, vous parlez de
l'importance de maintenir le climat de paix linguistique vécu actuellement dans
les municipalités. Suite à ça, vous notez que vous êtes à l'aise avec 29.2 du
projet de loi où on parle, et je cite : «Que la reconnaissance obtenue par
la municipalité lui est retirée du seul effet de la loi à l'échéance d'un délai
de 120 jours à compter de la réception de l'avis transmis par l'office. La
reconnaissance est toutefois maintenue si la municipalité adopte, avant cette
échéance, une résolution à cette fin. Elle en avise alors l'office sans délai.»
Bon.
M. le maire, vous êtes maire d'une municipalité
quand même, vous ne trouvez pas que, là, on parle d'un seuil, qui n'aurait plus
à être atteint, de 50 %. Donc, il y aurait des municipalités qui se réjouissent
depuis longtemps d'un consensus qui n'aurait pas été nécessairement mis en
question par qui que ce soit, soit un employé, soit un membre de la communauté.
Là, vous avez un processus qui déclenche automatiquement avec un délai assez
court, et un débat ordonné par le gouvernement du Québec. Est-ce que, pour
vous, ça rejoint votre objectif de maintenir la paix linguistique au sein de
ces communautés-là?
M. Côté (Daniel) : On
croit, en fait, que la manière dont est formulé le projet de loi, et ça fait
suite aussi à certaines recommandations qu'on avait pu faire en amont et
certaines représentations qu'on avait faites, on croit en fait qu'on atteint un
juste équilibre avec la... de la manière dont c'est formulé dans la loi. Donc,
les municipalités qui ont un statut bilingue peuvent le conserver, même si
elles n'ont pas le seuil du 50 % de population <anglophone...
M. Côté (Daniel) : ...
la manière dont est formulé le projet de loi, et ça fait suite aussi à
certaines recommandations qu'on avait pu faire en amont et certaines
représentations qu'on avait faites, on croit en fait qu'on atteint un juste
équilibre avec la... de la manière dont c'est formulé dans la loi. Donc, les
municipalités qui ont un statut bilingue peuvent le conserver même si elles
n'ont pas le seuil du 50 % de population >anglophone, si elles le
demandent par voie de résolution adoptée à la majorité des membres du conseil.
Donc, on croit qu'on arrive à un certain
équilibre à cet effet-là puis on pense que ça fait peut faire le travail au
niveau... autant de l'effort requis pour la mise en oeuvre de la loi que de
préserver un peu des droits acquis qu'il y a au sein des municipalités
présentement.
Donc, pour le maintien de la paix
linguistique, ce qui figure au projet de loi à cet effet-là, pour nous, est
satisfaisant.
M. Birnbaum : Et le fait
que le débat, c'est ordonné, ce n'est pas qu'une municipalité est invitée à
réexaminer l'affaire, vous êtes à l'aise avec ça?
M. Côté (Daniel) : Bien,
en fait, on est un peu... c'est un peu comme si on était consultant, on nous
donne 120 jours pour se positionner par voie de résolution, dans le cas
des municipalités qui avaient le statut bilingue, sans avoir le 50 % de
population anglophone. Donc, un peu comme... c'est ça, un peu comme si on nous
laissait le choix entre ce... dans le fond, perdre notre statut de ville
bilingue ou le maintenir. Donc, en termes de finalité, on a exactement le même
choix, que ce soit ordonné ou que ce ne le soit pas. On est plus, à mon avis,
en tout respect, dans une question de sémantique plutôt que de finalité. Au
niveau de la finalité, on arrive exactement à la même finalité, c'est nous qui
avons le choix.
M. Birnbaum : Merci.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci... maintenant le député de La Pinière. Il vous reste
3 min 20 s.
M. Barrette : Merci, Mme
la Présidente. Alors, M. Côté et Mme Pigeon, un plaisir de vous
recevoir aujourd'hui, et permettez-moi de vous remercier aussi pour la qualité
de votre mémoire.
J'ai pris une note, hier, des propos du
ministre, parce qu'il nous a parlé, comme mon collègue vient de le rappeler, ce
sont ses mots, de bilinguisme institutionnel, même systématique. Or, vous êtes
un palier de pouvoir qui représentez, vous l'avez dit, 85 % de la
population, ce qui n'est pas rien. Est-ce que vous avez l'impression de vivre
dans un bilinguisme systématisé?
M. Côté (Daniel) : La
réponse est non. En fait, en tant que gouvernement de proximité, on est un peu
à géométrie variable, si on veut. La situation chez moi, à Gaspé, est fort
différente de celle de la ville de Sept-Îles ou de celle de la ville de
Montréal. Donc, en tant que gouvernement de proximité, notre travail, c'était
de s'assurer d'avoir les services publics qui correspondent à la réalité de
notre territoire. Chez moi, à Gaspé, il y a 13 % de la population qui est
anglophone, on a un fort historique anglophone du côté particulièrement du
centre-ville, qui était anglophone il y a une cinquantaine d'années passées,
tout juste. Ceci dit, on n'a pas le statut de ville bilingue, donc je ne peux
pas le réclamer. Mais, d'un autre côté, on s'accommode. Tant qu'on est capable
de communiquer en langue anglaise avec les citoyens qui ont ces besoins de
service là, on s'y accommode.
Donc... et la réalité est tellement
différente d'un endroit à l'autre que c'est difficile. Je ne peux pas parler de
systématique, loin de là.
M. Barrette : Sur la
question des contrats, vous réclamez des précisions. Si vous réclamez des
précisions, c'est que vous avez identifié, dans votre quotidien, un certain
nombre, petit et probablement grand, où déjà, aujourd'hui, vous <considérez...
M. Côté (Daniel) : ...
la réalité est tellement différente d'un endroit à l'autre que c'est difficile.
Je ne peux pas parler de systématique, loin de là.
M. Barrette : Sur la
question des contrats, vous réclamez des précisions. Si vous réclamez des
précisions, c'est que vous avez identifié dans votre quotidien un certain
nombre, petit et probablement grand, où déjà, aujourd'hui, vous >considérez
qu'il y a un risque important pour vous comme donneur d'ouvrage, signataire de
contrat, si les choses ne sont pas claires. Ça, ça veut dire que tel qu'elles
sont écrites, ça va poser un problème. Pouvez-vous être plus précis en nous
donnant des exemples qui font en sorte qu'actuellement, la loi peut vous mettre
en péril? Et le péril, ce sont les millions de vos contribuables.
• (15 h 40) •
M. Côté (Daniel) : Oui,
en effet. Les périls qu'on voit, c'est, par exemple, si on octroie un contrat,
je peux donner le déneigement, par exemple, ou le ramassage des matières
résiduelles sur le bord de la route ou peu importe quel service essentiel qui
est offert par les municipalités, la fourniture d'eau potable, etc., souvent,
il y a des approvisionnements qui nous viennent de l'externe. Évidemment, la
municipalité ne produit pas tous ses biens et tous ses services par elle-même,
on donne des contrats. Mais, s'il y a des contrats dans le service essentiel
qui ne respecteraient pas toutes les exigences de la loi et qu'on se faisait
annuler ces contrats-là, bien, ça pourrait se traduire, à ce moment-là, par des
ruptures de services en déneigement, en eau potable, en matières résiduelles ou
dans d'autres services essentiels.
C'est là où on voit un certain écueil, où
il faut avoir une certaine souplesse dans la mise en oeuvre de tout ça. Notre
objectif, c'est de se conformer à la loi. Il n'y a pas de problème, on veut
préserver et valoriser la langue française, mais, techniquement, il y a,
quelque part, une certaine... je dirais, un certain dosage à faire entre
l'objectif ultime et ce qu'on offre en services essentiels.
M. Barrette : Maintenant,
de nous identifier les articles qui vous apparaissent trop rigides.
La Présidente (Mme Thériault) :
En 10 secondes.
M. Côté (Daniel) : J'ai
entendu «en 10 secondes». Les articles, Sylvie?
Mme Pigeon (Sylvie) :
Oui. C'est à partir du nouvel article, là, 204.17 et les suivants. Puis ce
qu'on constatait, tu sais, à l'analyse du projet de loi, c'est : Quels
types de manquements à la charte qui pourraient entraîner, par exemple,
l'annulation d'un contrat? Et dans quelles circonstances aussi le gouvernement
du Québec pourrait intervenir et demander la résiliation du contrat? On parle
de manquements, mais il nous manque, là, d'exemples pour bien saisir la portée,
là, de ces modifications législatives là.
La Présidente (Mme Thériault) :
Et je dois mettre fin à l'échange avec le député de La Pinière. On va aller
maintenant du côté de la députée de Mercier.
Mme Ghazal : Merci, Mme
la Présidente. Bonjour, madame, bonjour, monsieur. Merci pour votre
présentation. Moi, j'ai 2 min 45 s. Justement, par rapport aux
contrats, moi aussi j'avais cette question-là, de quelles exigences... quelles
sont les exigences dont vous êtes inquiets, que les municipalités ne pourraient
pas répondre? Est-ce que c'est, par exemple, les contrats sont rédigés en
anglais? C'est quoi... D'où vient votre inquiétude qu'il y ait un bris de
service parce qu'on ne respecte pas la Charte de la langue française?
Mme Pigeon (Sylvie) :
Oui. La majorité des contrats sont rédigés en français, actuellement, dans les
municipalités, sauf peut-être certaines exceptions, quand les entreprises avec
qui la municipalité fait affaire est située à l'extérieur du Québec. Par
exemple, même à l'interne, nous, à l'UMQ, <on a des...
Mme Ghazal : ...
un bris de service parce qu'on ne respecte pas la Charte de la langue
française?
Mme Pigeon
(Sylvie) : Oui. La majorité des contrats sont rédigés en
français, actuellement, dans les municipalités, sauf peut-être certaines
exceptions, quand les entreprises avec qui la municipalité fait affaire est
située à l'extérieur du Québec. Par exemple, même à l'interne, nous, à l'UMQ,
>on a des regroupements d'achats pour les assurances, et, à un moment
donné, il y a eu un enjeu, parce que comme... la compagnie était basée en
Angleterre, donc il y avait eu des enjeux. Et là est-ce que la loi va être extrêmement
stricte, par exemple, s'il y a un manquement, c'est ça, dans l'exécution du
contrat? Est-ce que ça pourrait être, par exemple, l'utilisation d'un logiciel
qui n'est pas complètement en français ou, bon, entre... des communications
orales entre certaines personnes qui sont impliquées dans le contrat, ça va
donner lieu à un manquement à la charte? C'est ça, il nous manque de précision
dans le... jusqu'où ce sera strict dans l'application de ces nouveaux articles
là.
Mme Ghazal : Entre les
contrats qui sont rédigés dans une autre langue que le français, etc., vous,
est-ce que vous demandez... si c'est strict, est-ce que vous allez demander...
les municipalités pourraient pallier à ça par des services de traduction, et
tout ça, ou est-ce que vous demanderez que le gouvernement vous aide là-dedans?
Mme Pigeon (Sylvie) :
Bien oui, dans certains cas, oui, on pourrait faire affaire avec des
traducteurs pour vraiment, là, traduire les contrats. Mais c'est ça, puis il y
a certaines municipalités aussi, par exemple, dans certains contrats, on fait
affaire aussi avec des multinationales qui ne sont pas basées au Québec, et
tout ça, donc des fois ça peut être... la connaissance du français n'est pas
nécessairement toujours adéquate, là.
Mme Ghazal : ...peu de temps.
Une dernière question que je ne veux pas manquer : Le six mois, vous dites
que c'est trop court. Quel délai vous voyez? Quel autre délai raisonnable vous
voyez?
M. Côté (Daniel) : C'est
très difficile à établir et c'est vraiment des cas d'espèce. Quand le nouvel
arrivant arrive ici, et avec une, je dirais, une connaissance de base du français
ou avec une langue d'origine latine, par exemple, où le français est plus
facile à apprendre, peut-être que le six mois est suffisant. Mais, dans
certains autres cas où ça va être complètement... en fait, ça va devenir très,
très, très difficile d'avoir une connaissance requise pour bien comprendre ce
que la municipalité offre comme services.
Mme Ghazal : Parce que,
dans la loi, il faut mettre un temps. Là, vous... c'est ça, c'est juste
qu'est-ce qu'on peut proposer autre que six mois? Est-ce que j'ai encore
quelque temps?
M. Côté (Daniel) :
J'aimerais vous lancer une réponse, mais je ne veux pas commettre d'impair.
Mme Ghazal : Très bien.
Merci.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. Le temps est écoulé. Je vais maintenant du côté du député de Matane-Matapédia,
pour votre 2 min 45 s, vous aussi.
M.
Bérubé
:
Bienvenue. Question courte, réponse courte : Vous trouvez, donc,
acceptable qu'une municipalité qui ne compte que 12 % d'anglophones puisse
avoir le statut bilingue et le maintenir?
M. Côté (Daniel) : Dans
l'optique où elle avait ce droit-là jusqu'à maintenant, bien, dans l'optique du
maintien des droits acquis, la réponse est oui si la municipalité est à l'aise
à conserver son statut.
M.
Bérubé
:
Si je vous suggère que j'ai devant moi une offre d'emploi d'une municipalité
qui compte 12 % d'anglophones et qui exige le bilinguisme pour être engagé,
c'est une des trois conditions, pour une offre d'emploi qui se terminait le 20
août dernier, est-ce que vous trouvez ça toujours acceptable?
M. Côté (Daniel) : Dans
l'optique où on doit préserver au maximum l'autonomie municipale tout en
respectant évidemment d'autres objectifs linguistiques, c'est l'autonomie
municipale qui prime, tant qu'à moi, <là-dessus...
M. Bérubé : ... et qui
exige le bilinguisme pour être engagé, c'est une des trois conditions, pour une
offre d'emploi qui se terminait le 20 août dernier, est-ce que vous trouvez ça
toujours acceptable?
M. Côté (Daniel) :
Dans l'optique où on doit préserver au maximum l'autonomie municipale tout en
respectant évidemment d'autres objectifs linguistiques, c'est l'autonomie
municipale qui prime, tant qu'à moi, >là-dessus.
M. Bérubé : D'accord Le
poste, c'est chef de division sport et programmes à la ville de Rosemère.
Pouvez-vous me confirmer si cette ville est membre de votre organisation?
M. Côté (Daniel) :
Sylvie, est-ce que tu y vas?
Mme Pigeon (Sylvie) :
Oui. Oui, de mémoire, oui.
M. Bérubé : Merci. Alors
donc, Rosemère est membre de votre organisation, 12 % d'anglophones, exige
le bilinguisme pour engager quelqu'un à un poste de sports et loisirs, et vous
trouvez ça acceptable. J'ai un autre exemple pour vous.
Mme Pigeon (Sylvie) :
Pourquoi?
M. Côté (Daniel) : Oui,
allez-y.
M. Bérubé : Une autre
municipalité, 18 % d'anglophones, ville Mont-Royal, pour travailler à un
poste de sécurité publique qui s'est terminé récemment, on demande l'anglais
oral et écrit. Est-ce que vous trouvez ça acceptable?
M. Côté (Daniel) : Si la
municipalité a le statut bilingue et qu'elle dispose de l'autonomie requise en
vertu de la loi, c'est l'autonomie qui prime.
M. Bérubé : Est-ce que
ville Mont-Royal est membre de votre organisation?
Mme Pigeon (Sylvie) :
Oui.
M. Bérubé : Écoutez, je
vais me permettre un commentaire. Je ne sais pas si la paix linguistique que
vous voulez préserver ou la paix dans votre organisation, mais, en ce qui nous
concerne, des municipalités qui comptent moins de 20 % de la population et
qui veulent exiger une connaissance de l'anglais à l'embauche, c'est un
obstacle, c'est inacceptable au Québec. Vous comptez 13 % d'anglophones à
Gaspé, est-ce que vous demandez le bilinguisme?
M. Côté (Daniel) : Non,
parce qu'on n'a pas le statut de ville bilingue non plus.
M. Bérubé : Merci. Pas
d'autre question, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. Donc, il ne me reste plus qu'à vous remercier d'avoir participé à cette
commission parlementaire, qui enrichira certainement les travaux, la réflexion
du ministre.
Et nous allons suspendre quelques instants
pour permettre à l'autre groupe de prendre place. Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à 15 h 47)
<
>
(Reprise à 15 h 52)
La Présidente (Mme Thériault) :
Bonjour. Donc, nous reprenons nos travaux. Et, sans plus tarder, nous allons
entendre M. Sabourin, qui est démographe. M. Sabourin, vous avez une
dizaine de minutes pour nous présenter vos recommandations, votre exposé, par
la suite, il suivra un échange avec le ministre et les différents partis
d'opposition. Donc, bienvenue en commission parlementaire, la parole vous
appartient.
M. Patrick Sabourin
M. Sabourin (Patrick) :
Ça marche. Merci beaucoup, Mme la Présidente, merci beaucoup, pardon.
Donc, mon nom est Patrick Sabourin, on vous l'a dit déjà, je suis démographe à
l'Institut national de la recherche scientifique, mais je témoigne ici à titre
personnel. Mon collègue Guillaume Marois, qui devait être là, ne peut
malheureusement pas se joindre à nous, et il s'en excuse. Mais, entre vous et
moi, comme d'habitude, il m'a laissé tout le boulot. J'aimerais m'excuser aussi
à la commission de ne pas avoir soumis notre mémoire plus tôt, je blâme mes
enfants, bien sûr, mais je vais le faire parvenir à la commission d'ici la fin
de la semaine, sans faute.
Avant de vous donner mes propositions,
j'aimerais souligner, d'abord, quelques-unes des avancées majeures qui se
trouvent dans le projet de loi n° 96.
Donc, l'exemplarité de l'État en matière
de protection de la langue française, une notion qui traverse tout le projet de
loi, apparaît aujourd'hui tellement évidente qu'on est surpris que ça ait pris
plus de 40 ans pour y parvenir — mais ce n'est pas parce qu'on y
voit, après coup, une évidence qu'il aurait été simple d'y arriver — alors,
ça, c'est très bien, on dit bravo! La francisation de l'État québécois et
l'utilisation exclusive du français dans les relations de l'État avec les
citoyens constituent, donc, un grand pas en avant.
Le renforcement du droit de vivre en
français, au Québec, est également une avancée significative sur le plan
juridique, notamment en ce qui a trait à la langue utilisée au travail. Donc,
les Québécois qui ne parlent pas anglais, ils sont de plus en plus rares par
ailleurs, doit-on le souligner, ne devraient pas être discriminés sur le marché
de l'emploi.
Finalement, on ne peut qu'approuver la
volonté du gouvernement d'offrir des services de francisation cohérents et
efficaces par l'entremise de l'organisme Francisation Québec. Donc, les
structures d'intégration des immigrants, pourtant si essentielles, ont trop
souvent été le parent pauvre de la politique linguistique.
Donc, maintenant, on a envoyé quelques
fleurs, maintenant, c'est l'heure des pots. Mes propositions vont porter sur
trois aspects de la politique linguistique et du projet de loi n° 96.
Donc, le premier volet, ça va être la production des connaissances, deuxième
volet, ce sera la politique <d'immigration, et le...
M. Sabourin (Patrick) :
... pourtant si essentielles, ont trop souvent été le parent pauvre de la
politique linguistique.
Donc, maintenant, on a envoyé quelques
fleurs, maintenant, c'est l'heure des pots. Mes propositions vont porter sur
trois aspects de la politique linguistique et du
projet de loi
n° 96. Donc, le premier volet, ça va être la production des connaissances,
deuxième volet, ce sera la politique >d'immigration et troisième volet
sera le financement institutionnel.
Donc, on va commencer par la question de
la production des connaissances. Donc, on est démographes, puis, en mémoire, on
veut toujours plus de données, toujours plus d'enquête, c'est dans notre
nature, mais, sur la question linguistique, il faut admettre qu'il y a un réel
manque de profondeur dans la recherche et dans les données de recherche, et il
y a plusieurs facteurs en cause là-dessus.
D'abord, la collecte de données. La
plupart des données de recherche sont produites à Ottawa par Statistique Canada
et sont soumises à des contraintes qui sont spécifiques au gouvernement, aux
objectifs du gouvernement fédéral. Donc, Statistique Canada n'est pas en cause
ici, l'agence fait un excellent travail, mais elle répond du gouvernement
fédéral, dont les priorités ne sont pas celles du Québec.
Un autre problème avec le mandat de
recherche de la charte qui est écrit dans la charte est dispersé au sein de ces
organismes, ce qui laisse place à interprétation sur qui doit donner l'heure
juste sur la situation du français. Ce flou a, dans le passé, nuit à la
production scientifique en créant une tension entre le mandat de recherche de
l'OQLF et celui du Conseil supérieur de la langue française. Donc, le projet de
loi n° 96 ne règle pas ce problème. Il reste un flou encore sur les
responsabilités en termes de recherches.
Finalement, la démolinguistique et la
sociologie des langues... la sociologie quantitative des langues a pratiquement
disparu des universités. Il y a une abondance de recherches qualitatives à
l'université, mais ce type de recherche est, à notre avis, mal adapté à
l'élaboration des politiques publiques. Donc, j'ai trois propositions dans ce
volet.
Proposition 1.1 : ajouter un
poste de directeur de la recherche indépendant — c'est le mot
«indépendant» qui est important — qui serait chargé de développer,
coordonner et diffuser la recherche sur langue.
Proposition 1.2 : confier un
mandat clair à l'Institut de la statistique du Québec pour collecter des
données et publier les indicateurs nécessaires au suivi de la situation
linguistique.
Proposition 1.3 : établir des
chaires de recherche en démolinguistique et en sociologie quantitative des
langues afin que ces disciplines reprennent racine dans les universités québécoises.
Maintenant, deuxième volet. La politique
d'immigration, c'est un enjeu très complexe et difficile d'aborder
succinctement, surtout dans le cadre d'une audition en commission
parlementaire, mais on va essayer de faire ça rapide et clair. On va commencer
par donner un peu de contexte. Donc, dans les années 70, au moment
d'adopter la loi 101, l'immense majorité des immigrants s'intègrent à la
communauté anglophone, mais, à partir de la loi 101, la proportion des
transferts linguistiques vers le français s'améliore graduellement. On a
souvent attribué ce revirement... encore aujourd'hui, on lit ça dans les
journaux, on a attribué ce revirement de situation à la loi 101 parce que
ça coïncide, là, disons qu'il y a une amélioration des transferts linguistiques
à peu près en même temps que l'arrivée de la loi 101, mais c'est plutôt du
côté de la politique d'immigration qu'il faut se tourner pour comprendre les
améliorations. Parce que c'est, également, à partir de cette période que le
Québec obtient des nouveaux... en immigration et qu'il les exerce. Donc, la
priorité est donnée aux immigrants déjà francisés ou fortement susceptibles de
se franciser, ce qu'on appelle les francotropes, et les candidats sont
interviewés et évalués par des agents d'immigration, on a une grille de
sélection. Et voilà. Donc, la politique de sélection des immigrants est, <sans
contredit...
M. Sabourin (Patrick) :
...
à partir de cette période que le Québec obtient des nouveaux en
immigration et qu'il les exerce. Donc, la priorité est donnée aux immigrants
déjà francisés ou fortement susceptibles de se franciser, ce qu'on appelle les
francotropes, et les candidats sont interviewés et évalués par des agents
d'immigration, on a une grille de sélection. Et voilà. Donc, la politique de
sélection des immigrants est >sans contredit — c'est ce que
montrent mes travaux, les travaux d'autres aussi — la mesure la plus
conséquente de la politique linguistique du Québec.
Or, depuis 10 ans, le gouvernement du
Québec abandonne sa stratégie et compte de plus en plus sur l'immigration
temporaire et le Programme de l'expérience québécoise pour admettre les
immigrants. Le gouvernement du Québec laisse, donc, toute la place au fédéral
sur la sélection des immigrants puisque les immigrants temporaires relèvent du
gouvernement fédéral. Les immigrants arrivent donc au Québec avant d'avoir été
sélectionnés et entament leur processus d'intégration dans les entreprises ou
dans les établissements d'éducation où la présence de l'anglais est souvent
importante. Le gouvernement mise donc sur la francisation sur place plutôt que
sur la sélection dans les pays sources. Cette stratégie nous apparaît très
risquée.
Proposition 2.1 : revenir à un
processus de sélection rigoureux dans les pays sources afin que les requérants
soient interviewés et évalués par un agent d'immigration du Québec avant leur
arrivée.
Proposition 2.2 : inscrire dans
la loi, comme le suggère le rapport de la CAQ, une langue commune à tous et
pour tous, que le ministre de la Langue française soit aussi le ministre de
l'Immigration, et ce, afin d'assurer une cohérence dans les politiques.
Proposition 2.3 : instaurer des
enquêtes suivies obligatoires de la sélection des immigrants jusqu'à
cinq ans après l'émission du certificat de sélection afin de déterminer
les parcours linguistiques et économiques des immigrants.
Finalement, mon troisième et dernier point,
il faut, je crois, rapprocher la part du financement des institutions
anglophones du poids démographique des anglophones. Concrètement, ce que ça
veut dire, c'est : présentement, par exemple, dans les institutions
postsecondaires, on investit 2 $ à 3 $ d'argent public dans les
établissements de langue anglaise pour chaque anglophone alors que, pour chaque
francophone, on investit entre 0,80 $ et 0,90 $ pour les
établissements de langue française. Donc, le projet de loi n° 96 va dans
ce sens-là, avec un plafonnement des places aux cégeps anglais.
Mais d'autres actions du gouvernement vont
à contre-courant, par exemple avec l'injection de 100 millions de dollars
pour l'expansion du collège Dawson ou la cession de l'Hôpital Royal-Victoria ,
à McGill, pour la création d'un centre de recherche international. Ces éléments
auront clairement un impact important sur la situation linguistique à Montréal.
Donc, proposition 3.1 : appliquer
la loi 101 au cégep, la solution retenue par le gouvernement, et le
plafonnement des admissions avec cliquet, c'est fragile et, dans une certaine
mesure, arbitraire. Les mécanismes de la loi 101 sont éprouvés, rigoureux,
structurants et justes en ce qu'ils réservent l'accès aux établissements
anglophones à ceux dont les parents ont également fréquenté l'école anglaise.
Nous comprenons que le gouvernement a
cherché à couper la poire en deux en agissant pour rééquilibrer le financement
des institutions postsecondaires anglophones, mais ce compromis nous apparaît
davantage comme un compromis politique que comme une solution rationnelle à un
problème donné.
• (16 heures) •
Proposition 3.2 : créer un bureau
d'audiences publiques sur la langue qui examinerait l'impact linguistique de
tous les investissements publics dans les institutions de langue anglaise. En
fait, une idée serait de créer un organisme similaire au BAPE, le Bureau
d'audiences publiques en environnement, pour évaluer l'impact linguistique des
projets. Donc, on organise des audiences publiques pour s'assurer de sauver les
grenouilles et les milieux humides, puis ça, je n'ai rien contre les
grenouilles et les milieux humides, j'ai une <maîtrise en...
>
16 h (version révisée)
< M. Sabourin (Patrick)T :
...examinerait l'impact
linguistique de tous les
investissements
publics dans les
institutions de langue
anglaise. En fait, ce
serait... l'idée serait de créer un
organisme similaire au BAPE, le
Bureau
d'audiences publiques en environnement, pour évaluer l'impact
linguistique
des projets. Donc, on
organise des audiences publiques pour s'assurer de
sauver les grenouilles et les milieux humides — alors, vous savez, je
n'ai rien contre les grenouilles et les
milieux humides, j'ai une >maîtrise
en biologie, mais on octroie et on coule des centaines de millions de dollars
dans des projets qui changent totalement la donne linguistique sans même en
examiner les impacts. Donc, je pense qu'un bureau d'audiences publiques en
langue nous permettrait de mieux... de pouvoir mieux évaluer l'impact sur
l'aménagement linguistique qu'ont les investissements publics.
Donc, voilà, tels étaient mes trois points.
Je vous remercie de votre attention et j'attends vos questions.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci beaucoup, M. Sabourin, pour votre présentation. Donc, sans plus
tarder, nous allons du côté ministériel. M. le ministre, la parole est à vous pour
vos 16 min 40 s.
M. Jolin-Barrette :
Merci, Mme la Présidente. Bonjour, M. Sabourin. Merci d'être présent
aujourd'hui en commission parlementaire et merci pour votre intervention.
Au cours de la dernière année, même au
cours des deux dernières années, M. Sabourin, je crois personnellement que
c'est indéniable qu'il y a eu la démonstration que le français est en déclin au
Québec. Certains ont contesté cet état de fait là. On l'a vu, là, dans les
médias, à plusieurs reprises, il y en a qui disent : Tout va bien, Mme la
marquise, tout est beau, il n'y a pas de déclin du français. Quel est le juste
portrait? Est-ce qu'il existe un déclin du français au Québec? Et, surtout, je
crois que vous avez déjà abordé la question avec M. Pratte en lui
répondant à sa lettre ouverte, mais j'aimerais vous entendre. Quelle est votre
opinion par rapport à la situation du français au Québec?
M. Sabourin (Patrick) :
Bien, le français au Québec est en situation de déclin. Excusez-moi, M. le
ministre, est-ce que vous... O.K., ce n'est pas... Excusez-moi, mon image était
décalée. Je vous voyais encore... mais je ne vous entendais pas.
Donc, ma position — bien, ma
position, c'est la position des données qu'on a — c'est que le
français est en déclin au Québec, et ce, depuis des décennies, et la raison est
simple et indéniable, c'est qu'à la fois les francophones et les anglophones au
Québec sont en état de sous-fécondité, c'est-à-dire qu'ils ne font pas assez
d'enfants pour renouveler leur population, donc, ce qui permet à la population
de ne pas décroître, ce sont les apports en immigration. Or, les immigrants
choisissent l'anglais à peu près une fois sur deux, ce qui est nettement
insuffisant pour maintenir le poids démographique du français. Donc, là, il y a
certains...
J'aime bien comparer la question
linguistique à l'environnement. Donc, les chiffres, en population et en
démographie, ne bougent pas très vite, c'est long. C'est un peu comme la
température terrestre, finalement. Donc, on ne peut pas voir les effets dans le
court terme. Mais, si on regarde les grandes tendances, le déclin du français
est évident et indéniable.
M. Jolin-Barrette :
Depuis quand est-ce que le français... on constate que le français est en
déclin au Québec?
M. Sabourin (Patrick) :
Bien, on le sait à peu près depuis que la fécondité est passée sous la barre du
seuil de remplacement. Donc, je dirais, depuis les <années 90, on
fait...
M. Jolin-Barrette :
Depuis quand
est-ce que le
français... on constate que le
français
est en déclin au
Québec?
M. Sabourin (Patrick) :
Bien, on le sait
à peu près depuis que la fécondité est passée sous la
barre du seuil de
remplacement. Donc, je dirais, depuis les >années 90,
on fait... 80, 90, on fait des projections qui montrent que le français est en
déclin. Il y a des variables qui changent, hein? Par exemple, dans les années 80
et 90, il y a beaucoup d'anglophones qui sont partis du Québec, ce qui a eu
pour effet de rehausser le poids des francophones par la bande. Mais ce n'était
pas vraiment un... comment dire, une amélioration... Ce n'était pas dû à l'amélioration
de la francisation des immigrants, par exemple. Forcément, c'était vraiment
parce que les Anglais partaient, ça francisait le Québec par défaut. Mais là
les anglophones partent moins. Alors donc, ça, ça fait... c'est un autre
facteur qui fait que le français décline un peu plus, surtout depuis le début
des années 2000. Donc, je vous dirais que c'est... on le sait depuis peut-être
30 ans, et puis, depuis le début des années 2000, ça s'accélère un
peu, parce qu'il y a eu moins de départs des anglophones vers les autres
provinces canadiennes.
M. Jolin-Barrette :
Donc, si je comprends bien, on le sait depuis fin des années 80, 90 que le
français décline, on constate également au tournant des années 2000 qu'il
y a une accélération du déclin du français. Donc, lorsque l'ancien député de
Borduas, M. Curzi, en 2009, 2010, 2011, indiquait clairement qu'il fallait
agir sur la question de la langue, je comprends que les données, les statistiques,
les tendances étaient là, et tout le monde le savait qu'il y avait un déclin du
français à ce moment-là.
M. Sabourin (Patrick) :
Ah oui, oui! Écoutez, les recensements qui sont clés, là, dans la question du
déclin du français sont les recensements de 2001 et 2006. Donc, en 2001 et
2006, il y avait des indications claires qu'il se passait quelque chose,
surtout en 2001, où l'exode des anglophones a vraiment beaucoup ralenti. Donc
là, le poids des francophones a chuté. Donc, c'est depuis au moins les années 2000,
là, au moins le recensement de 2001.
M. Jolin-Barrette : Tout
à l'heure, vous avez abordé la question des structures associées à la langue
française. Vous, là, comme démographe, là, comment vous expliquez que les
données de l'OQLF n'étaient pas rendues disponibles durant des années, que les
études n'étaient pas rendues publiques?
M. Sabourin (Patrick) :
Bien, c'est une question un peu torvice. Bien, mon... évidemment, mon opinion,
c'est que c'est une question politique. Donc, la présidente de l'office... le
président ou la présidente de l'office, c'est une personne nommée par le
ministre, donc dépend du ministre, et donc, s'il y a des choses qui ne sont pas
convenues sur le plan politique, eh bien, on peut les retenir, on peut
attendre. Donc, il n'y a pas de règle. Le problème, c'est... un, c'est que la
présidente de l'office, c'est une nomination politique. Deuxièmement, c'est qu'il
n'y a pas d'obligation de résultat fort sur... par exemple, sur la publication
des indicateurs, ou sur la publication des projections, ou ne serait-ce que sur
l'émission d'un avis. Je me souviens, on demandait à la présidente de l'office :
Bon, est-ce que le français va bien ou ne va pas bien? La réponse, c'était :
Oui, vous savez, c'est comme une grande famille, le français, il y en a des
choses qui vont bien, des choses qui ne vont pas bien. Alors, c'est extrêmement
difficile pour le citoyen de comprendre quelque chose, d'avoir une espèce de
synthèse de ce qui se passait au niveau de la langue.
Alors, il manque... Donc, pour revenir à
votre... pour <faire un...
M. Sabourin (Patrick) :
...la présidente de l'office :
Est-ce que le français va bien ou ne
va pas bien? Et la réponse était : Oui, mais, vous savez, c'est comme une
grande famille, le français, il y a des choses qui vont bien, des choses qui ne
vont pas bien. Alors, c'est
extrêmement difficile pour le citoyen de
comprendre
quelque chose, d'avoir une espèce de synthèse de ce qui se
passait au niveau de la langue.
Alors, il manque... Donc, pour revenir
à votre... pour >faire un... revenir à votre question, il manque une
nomination non partisane du président de l'office ou d'une autre structure — je
sais que, dans le projet de loi, il y a la question du commissaire — et
la définition... une définition claire des indicateurs et des éléments de
recherche qu'on veut publier à des dates fixes.
M. Jolin-Barrette : C'est
intéressant, vraiment, votre dernière intervention. Dans le projet de loi, ce
qu'on fait, c'est qu'on vient faire en sorte que l'office devra publier des
rapports, donc un rapport aux cinq ans, un autre rapport périodique également à
mi-terme entre les deux, et l'office va indiquer clairement les indicateurs sur
lesquels elle va se pencher, mais ça va être validé par le Commissaire à la
langue française, qui, lui, va être nommé aux deux tiers de l'Assemblée
nationale.
Qu'est-ce que vous pensez de cette
proposition-là, du fait que l'office va devoir faire préapprouver ses
indicateurs, justement, pour avoir un véritable portrait de la situation par
une personne neutre et indépendante?
M. Sabourin (Patrick) :
Oui, c'est un bon pas en avant. Comme je l'ai mentionné dans mon allocution, et
c'est vrai que ça va vite, là, mais je l'ai... on l'a aussi mis dans le
mémoire, je pense qu'il faut aussi nommer ou... ça peut être soit l'Assemblée
nationale qui nomme ou le commissaire, mais un responsable de la recherche,
quelqu'un qui va vraiment guider la recherche. Et donc, si cette personne
travaille au sein du commissariat à la langue officielle, bon, bien, cette
personne pourra valider les indicateurs. Je pense que c'est une très bonne idée,
c'est la... l'idée est là.
Je pense qu'il faut centraliser la
recherche. Là, présentement, elle est un peu dispersée dans les organismes, au
conseil, à l'office, et là, dans le projet de loi n° 96, elle est un peu
dispersée à l'office et au commissariat à la langue officielle. Je pense qu'il
faudrait concentrer les activités de recherche et l'autorité sur la recherche à
un seul endroit. Moi, je propose, dans mon mémoire, que ce soit un directeur de
la recherche nommé. J'imagine que vous pouvez peut-être trouver une autre structure
qui s'y apparenterait. Mais avoir un directeur de la recherche indépendant qui
puisse mener ses propres enquêtes, ses propres questions... à faire avancer ses
propres questions de recherche serait quelque chose de... un plus important.
M. Jolin-Barrette : Dans
le projet de loi, on prévoit... Parce que, tout à l'heure, vous avez dit :
On est tributaires et on est dépendants de la recherche qui est effectuée par
le fédéral en fonction... Et vous avez dit quelque chose de très intéressant,
vous avez dit : Écoutez, les données que nous avons sont en fonction des
besoins ou de l'orientation du gouvernement fédéral. Donc, on utilise des
données où le demandeur ou celui qui passe la commande cherche un objectif
aussi. Ça fait que ça peut teinter les indicateurs.
M. Sabourin (Patrick) :
Exact.
M. Jolin-Barrette : Il y
a un volet dans le projet de loi où on confie à l'Institut de la statistique du
Québec également un mandat de recherche, également. Est-ce que, sans
nécessairement... Parce que, là, je vous entends, vous nous dites : Ça
prendrait un directeur de la recherche. Mais, si on confie une partie du mandat
ou le mandat en totalité à l'Institut du Québec... <l'Institut de la...
M. Jolin-Barrette :
...ça peut teinter les indicateurs.
Il y a un volet dans le
projet
de loi où on confie à l'
Institut de la statistique du Québec
également
un mandat de recherche
également. Est-ce que, sans
nécessairement...
Parce que, là, je vous entends, vous me dites : Ça prendrait un directeur
de la recherche. Mais, si on confie une partie du mandat ou le mandat en
totalité à l'Institut du
Québec... >l'Institut de la statistique
du Québec, est-ce que vous pensez qu'on est dans la bonne voie?
• (16 h 10) •
M. Sabourin (Patrick) :
C'est une bonne avenue. D'ailleurs, dans le mémoire, on propose qu'une partie,
surtout la collecte de... ce qui a rapport à la collecte des données, à
l'analyse des données, ce soit fait à l'Institut de la statistique du Québec.
Donc, ça, c'est une bonne chose.
Mais il faut se demander si l'Institut de
la statistique du Québec aurait l'indépendance et la latitude pour mener les programmes
de recherche qu'il veut sur la question linguistique. Si je vous entends bien,
vous me demandez peut-être si on pourrait peut-être déplacer la recherche vers
l'Institut de la statistique du Québec en sa totalité. Peut-être, peut-être, c'est
quelque chose à voir, c'est... Je ne suis pas contre, là, d'emblée, c'est
quelque chose qui pourrait être intéressant. Nous, on...
M. Jolin-Barrette :
Parce que...
M. Sabourin (Patrick) :
Oui. Allez-y.
M. Jolin-Barrette :
Allez-y, allez-y.
M. Sabourin (Patrick) :
Chez nous, on proposait de joindre ça au commissaire, parce que le commissaire,
lui, dans l'exercice de ses fonctions, va faire face à différentes questions,
va constater différentes choses, et il pourrait alimenter, je pense, un
directeur de la recherche en lui disant : Bon. Là, ici, on a telle, telle
problématique, mais on a un angle mort, on ne sait pas pourquoi ça se passe.
Bon. Est-ce que vous pourriez... Est-ce que vous pensez que c'est possible de
faire de la recherche là-dessus? Il y aurait... Je pense qu'il y aurait une
certaine synergie entre le commissaire et le directeur de la recherche qui
pourrait être intéressante. Mais, comme je vous dis, il n'y a... pas dogmatique
là-dessus, ça pourrait être aussi un groupe de l'ISQ qui s'occupe de toute la
recherche sur la langue.
M. Jolin-Barrette :
Parfait. Je vous remercie beaucoup, M. Sabourin. Ce que je retiens notamment
pour vous, c'est le critère d'indépendance des données de la recherche pour vraiment
que les Québécois aient un portrait juste.
Donc, je vais céder la parole, je sais que
j'ai mes collègues de Saint-Jean et Chapleau qui souhaitent intervenir. Merci,
M. Sabourin.
M. Sabourin (Patrick) :
Grand plaisir.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. Donc, nous allons passer avec le député de Saint-Jean. Vous avez
6 min 50 s.
M. Lemieux :
6 min 50 s. Merci, Mme la Présidente. Bonjour, M. Sabourin.
Si vous le permettez, je pense que vous allez être content, on va continuer de
parler de recherche, mais l'idée, c'est... je voulais aller aussi dans le
résultat des recherches, que vous avez fait avec le ministre, mais le dernier
bout me passionne davantage, c'est-à-dire la recherche elle-même, comment on la
fait, pourquoi on n'en avait pas autant et l'explication de dire que la
commande est passée par le fédéral, qui a des besoins bien précis, là, sans
arrière-pensées nécessairement, mais des besoins précis, pose les questions
pour avoir les réponses qu'elle cherche. Bon.
Corrigez-moi si je me trompe, mais, quand
il est question de langue, c'est autodéclaré dans le questionnaire qu'on
remplit, «langue maternelle», «langue parlée à la maison». Il n'y a pas
d'évaluation très stricte, là, on autodéclare, et la recherche part de là. Ou
est-ce qu'on va valider ensuite avec des recherches plus fines les données
fondamentales avec lesquelles on travaille pendant toutes ces années, là?
M. Sabourin (Patrick) :
Non, vous avez raison, c'est autodéclaré. D'ailleurs, toutes les questions du
recensement se font <autodéclarées...
M. Lemieux : …«langue
parlée à la maison». Il n'y a pas d'
évaluation très stricte, là, on
autodéclare, et la recherche part de là. Ou
est-ce qu'on va valider
ensuite avec des recherches plus fines les données
fondamentales avec
lesquelles on travaille pendant toutes ces années?
M. Sabourin (Patrick) :
Non, vous avez raison, c'est autodéclaré. D'ailleurs, toutes les
questions
du recensement se font >autodéclarées, incluant… bien, maintenant, c'est
moins vrai, mais à une certaine époque, là, bien, incluant le revenu, ce qui se...
posait toutes sortes de problèmes, la religion, etc. Donc, tout est autodéclaré
et, bon, je vais donner un exemple qui va dans le sens de ce que vous me dites.
Dans le recensement, il y a une question sur la connaissance des langues
officielles. Donc, on demande aux gens : Est-ce que vous êtes capable de
soutenir une conversation en français ou en anglais?, et les gens répondent
oui, non à cette question-là. Donc, on a une estimation du bilinguisme des Québécois
et des Canadiens, mais on n'a pas une mesure vraiment précise de ce
bilinguisme-là. Donc, quand je parlais, tout à l'heure, qu'il reste des grands…
il reste des trous dans notre connaissance, ça, c'est ce genre de trous là dont
je parle.
M. Lemieux : Bon. Mais là,
on a une donnée quantitative que j'oserais appeler d'approximative, mais je ne
suis pas démographe, encore moins statisticien, là, puis sur le qualitatif,
bien là, on repassera, là.
M. Sabourin (Patrick) :
Oui. Bien, sur le qualitatif, il y a quand même pas mal de recherches en...
qualitatives sur la langue. D'ailleurs, c'est presque exclusivement qualitatif maintenant
sur la langue, sauf ce qui a trait aux données qui sont recueillies par Statistique
Canada, mais la recherche originale, avec des nouvelles questions, des
nouvelles données, c'est surtout de la recherche qualitative qu'on fait.
M. Lemieux : Sur la
qualité de la langue parlée?
M. Sabourin (Patrick) :
Sur la langue.
M. Lemieux : O.K. Là,
quand on est en train de considérer vos axes de travail, la recherche, vous
dites, il y a un flou. Ce n'est pas parce qu'on ne sait pas ce qu'on a de
besoin comme réponse, c'est qu'on ne prend pas les moyens pour aller la
chercher. Votre dernier bout de conversation avec le ministre va peut-être vous
emmener plus proche, ce qu'il y a aussi comme provisions dans le projet de loi
pour aller chercher ces statistiques-là. Mais, au final, est-ce qu'on a une
idée de — puis là on sort d'une élection fédérale, on va
comprendre — la marge d'erreur avec laquelle on travaille? Les
démographes s'entendent sur quelle sorte de marge d'erreur par rapport à ce qu'on
véhicule comme données fondamentales pour dire que le français est en déclin?
Et je ne le nie surtout pas, là, mais j'essaie juste d'avoir une idée, pendant
que je vous ai, de ce que ça représente en réalité.
M. Sabourin (Patrick) :
Non, non, c'est très bien de discuter. Moi, je suis pour. La marge d'erreur est
extrêmement faible, parce que les données qu'on a sur la langue, c'est nos
données de recensement. Donc, il y a des... Évidemment, il y a des incertitudes
par rapport à l'autodéclaration des réponses, mais, sur la question de la
langue maternelle et de la langue parlée à la maison, il y a des enquêtes
suivies aussi qui sont faites qui montrent que les données sont quand même
bonnes. Et, comme l'échantillon est énorme, tu sais, le recensement est sur un
échantillon de 20 % de la population canadienne, et sur certaines
questions c'est 100 %, alors la marge d'erreur est quand même assez
faible. Là, on a vraiment des bonnes indications, on est vraiment très
confiants de ce qu'on dit quand on dit que le français décline.
M. Lemieux : Et, quand on
a des chiffres supplémentaires — on a été longtemps au Québec sans en
avoir, là, pour se réveiller avec un «Bonjour! Hi!» chiffré, à un moment donné,
en se disant : Bien voyons donc! On est rendu là? — ça, ça
découlait de quoi, ces <chiffres-là…
M. Sabourin (Patrick) :
...on a
vraiment des bonnes indications, on est
vraiment très
confiants de ce qu'on dit quand on dit que le
français décline.
M. Lemieux : Et, quand
on a des chiffres
supplémentaires
— on a été
longtemps
au
Québec sans en avoir, là, pour se réveiller avec un «Bonjour! Hi!»
chiffré,
à un moment donné, en se disant : Bien voyons donc! On est
rendu là? — ça, ça découlait de quoi, ces >chiffres-là
et ce réveil assez brutal de réévaluer l'état du français, au moment où on a eu
les rapports il y a deux ans?
M. Sabourin (Patrick) :
Oui. Ça, cette enquête-là, je crois, est une enquête... Je ne veux pas parler à
travers mon chapeau, mais je crois que c'était une enquête de l'office. Mais il
y a aussi beaucoup de travail journalistique qui a été fait, il y a eu beaucoup
de... dans les médias Québecor, notamment, où on a été sur
le terrain pour voir ce qui se passait. Mais ça, c'est intéressant aussi, parce
que, dans le recensement il y a des questions sur la langue de travail, mais
les questions sont un peu floues et ne nous permettent pas vraiment ou nous
permettent difficilement de mesurer l'évolution de l'anglais dans les milieux
de travail. Alors, encore là, c'est vraiment... c'est une question qui a des
objectifs et des visées qui sont déterminés par le gouvernement fédéral qui ne
sont pas si utiles que ça pour nous.
M. Lemieux : Je sors de
la recherche, avec le temps qu'il reste, là, pour revenir sur certaines choses
comme... On s'en va vers un guichet unique, Francisation Québec, on essaie
de réorienter l'effort pour franciser les gens. Ce levier-là de la
francisation, quand on ignore la partie langue maternelle et puis les
statistiques qu'on connaît puis on se dit : Est-ce qu'il y a moyen de
corriger un peu le tir, d'améliorer le sort du français?, est-ce que la
francisation bien faite est un levier majeur?
M. Sabourin (Patrick) :
Bien, comme j'ai mentionné dans mon témoignage, je pense que cette idée de
centraliser la francisation et d'améliorer l'accès à la francisation, c'est
nécessairement positif, je pense. Par contre, il n'y a pas vraiment d'étude
quantitative et de suivi qui montre l'impact à moyen terme de la francisation,
donc on ne sait pas si la francisation aide à... On sait que ça aide à
apprendre le français, mais est-ce que ça aide à vivre en français? Parce
qu'ultimement, c'est l'objectif de la loi 101, c'est que les nouveaux
arrivants s'intègrent au Québec français et puissent vivre, travailler en
français. Alors, c'est sûr que, là-dessus, on ne sait pas vraiment si la
francisation a un impact déterminant. C'est une des questions qu'il faudrait
creuser.
M. Lemieux : J'ai terminé
mon temps, mais je termine en disant qu'on se demande tout le temps jusqu'où va
le déclin, j'ai commencé en disant ça. Moi, j'ai l'impression que le français
va toujours avoir besoin d'être protégé, c'est une conviction. Il s'agit de
trouver les bons leviers, et les statisticiens et les démographes comme vous
vont nous aider à comprendre comment on se rend là. Merci beaucoup.
M. Sabourin (Patrick) :
Merci.
La Présidente (Mme Thériault) :
...procéder maintenant aux échanges avec l'opposition officielle. Mme la
députée de Marguerite-Bourgeoys, vous avez 11 min 20 s
Mme David : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Bonjour, M. Sabourin.
M. Sabourin (Patrick) :
Bonjour.
Mme David : C'est dommage
que je n'aie pas eu ou qu'on n'ait pas eu accès à votre mémoire avant, parce
que c'est beaucoup, beaucoup, beaucoup de données en très peu de temps. C'était
très clair. Mais, quand même, j'ai essayé de prendre des notes comme ça, à pied
levé, même si je vous avais quand même lu avant dans différents médias ou
publications.
La première question, ça serait :
Quand vous <parlez...
Mme David : …que je n'aie
pas eu ou qu'on n'ait pas eu accès à votre mémoire avant,
parce que c'est
beaucoup,
beaucoup,
beaucoup de données en très peu de
temps. C'était très clair. Mais,
quand même, j'ai essayé de prendre des
notes comme ça, à pied levé, même si je vous avais
quand même lu avant
dans différents médias ou publications.
La première
question, ça serait :
Quand vous >parlez d'institutions anglophones — vous avez dit :
Il faut diminuer le financement des institutions anglophones — qu'est-ce
que vous incluez dans les institutions anglophones? Est-ce que vous incluez par
exemple le système de santé?
M. Sabourin (Patrick) :
J'inclus généralement les institutions, les établissements dont la langue de
fonctionnement est l'anglais. Donc, il y a certains établissements de santé
dont la langue de fonctionnement est l'anglais. La question est…
Mme David : …incluez aussi
les universités, j'imagine?
M. Sabourin (Patrick) :
Oui, exactement. Donc, si vous allez à McGill et Concordia, la langue du
fonctionnement, toute l'administration, tout se passe en anglais. Alors, c'est…
Mme David : Donc, le
principe de votre approche, ça serait, disons, 8 % d'anglophones dits de
souche, même si on n'aime pas beaucoup le mot, ou d'anglophones ayants droit,
etc. Vous feriez quoi avec les hôpitaux, à 8 % de financement de ce qu'ils
ont actuellement?
M. Sabourin (Patrick) :
Non, ils n'auraient pas 8 % de ce qu'ils ont actuellement, là. Bien,
actuellement, les hôpitaux, je n'ai pas les chiffres, là, clairement en tête, j'avais
surtout les institutions postsecondaires. Donc, on parlait des cégeps et des
universités.
Mme David : Oui, mais les
hôpitaux, j'insiste, là, parce que c'est une institution anglophone, vous venez
de le dire. Alors, si on vous prend...
M. Sabourin (Patrick) :
Oui.
Mme David : ...dans cet
esprit-là, ça veut dire que les hôpitaux anglophones ne traiteraient que la
population anglophone ayant droit...
M. Sabourin (Patrick) :
Non, non!
Mme David : ...comme les
cégeps ne recevraient...
M. Sabourin (Patrick) :
Non! Non!
Mme David : ...que les
anglophones ayant droit ou McGill, que les anglophones ayant droit pour le
financement de l'État?
M. Sabourin (Patrick) :
Vous me faites dire des choses que je n'ai pas dites.
Mme David : Non, non,
mais c'est pour ça que je vous pose la question.
• (16 h 20) •
M. Sabourin (Patrick) :
L'idée, c'est de... la langue du fonctionnement de ces établissements. Donc, il
faudrait que les établissements qui ont une dénomination anglophone, donc où la
langue de travail est l'anglais, aient une langue de travail… soient... deviennent
des endroits où la langue de travail est le français. Donc, dans certains
établissements anglophones, donc, les dossiers des patients, la langue de
travail, tout cela se fait en anglais. Il ne s'agit pas d'empêcher les services
aux anglophones, les anglophones ont déjà des… peuvent déjà avoir, obtenir des
soins en anglais dans des hôpitaux dont la langue de travail est le français
dans l'est.
Mme David : ...donnez-moi
un CUSM...
M. Sabourin (Patrick) : Donc,
ça n'a aucun rapport l'un avec l'autre, là.
Mme David : O.K. C'est
parce que j'essaie vraiment de comprendre, parce que c'est une idée qui circule,
là. On va avoir d'autres chercheurs demain qui sont convoqués et qui vont… qui
ont cette approche-là aussi. Alors, j'essaie vraiment de comprendre. Diminuer
le financement d'institutions d'anglophones, c'est vraiment… c'est des mots
prononcés, là, «diminuer le financement». Alors, on fait quoi? Puis on mesure
ça comment? Par rapport à la proportion d'anglophones qui reçoivent les
services? C'est ça pour le cégep, là, quand vous parlez du postsecondaire, ou
ça serait ça pour McGill ou Concordia.
M. Sabourin (Patrick) :
Bien, je pense... Ce qu'il faut faire, je crois, c'est qu'il faut considérer
les institutions dans ce qu'elles ont de structurant. Donc, par exemple, les
universités... l'Université McGill forme des médecins, forme des infirmières,
forme toutes sortes de gens qui ont des professions, qui vont aller travailler
en anglais, ces établissements-là emploient eux-mêmes des gens qui travaillent
en <anglais, donc ils ont…
M. Sabourin (Patrick) :
...par
exemple, les universités...
l'Université McGill forme des
médecins, forme des infirmières, forme toutes sortes de gens qui ont des
professions, qui vont aller travailler en anglais, ces établissements-là
emploient eux-mêmes des gens qui travaillent en >anglais, donc ils
ont... ils créent un environnement, ils ont un impact sur la société québécoise
qui est disproportionné par rapport au poids démographique des anglophones. C'est
ce que moi, je dis, c'est ce que les autres disent aussi.
Alors, ce que ça dit... Au fond, on peut
prendre la question à l'envers. On n'est pas obligé de dire qu'il faut diminuer
le financement des institutions anglophones, on peut dire que les institutions
francophones sont sous-financées par rapport aux institutions anglophones.
Mme David : Là, j'ai de
la misère à vous suivre, là, j'ai vraiment de la misère à vous suivre. Ça veut
dire quoi, par exemple, UdeM par rapport à... d'où je viens, par rapport à
McGill? On enlève des étudiants d'un... Je ne comprends pas votre... J'ai été
ministre de l'Enseignement supérieur. Je ne sais pas comment je ferais avec
votre recommandation, là.
M. Sabourin (Patrick) :
Bien, il y a... c'est que, là, présentement, il y a un financement qui est à...
qui est par tête de pipe. Ça fait que c'est sûr, c'est compliqué. Si vous
financez par tête de pipe, là, ça vient avec la clientèle. Donc, si McGill dit :
J'ai une telle clientèle, l'Université de Montréal : J'ai telle clientèle,
donc le financement arrive comme ça. Il faudrait restructurer un peu le
financement des institutions postsecondaires.
Mme David : Financer
comme... par approche historique, comme c'était avant la réforme de 2001?
M. Sabourin (Patrick) : Par
approche... comme par... Oui, par exemple, par exemple, par exemple.
Mme David : Mais une
approche historique se basait quand même sur la quantité d'étudiants. Ça veut
dire que l'approche historique ne prendrait en compte que le nombre d'étudiants
anglophones? Disons qu'il y a 32 000 étudiants à McGill.
M. Sabourin (Patrick) :
Je veux dire, il y a... C'est... Là, vous m'emmenez dans la poutine spécifique
de ce que devraient être les critères. Je pense qu'on peut discuter...
Mme David : Non, mais
j'essaie de comprendre, M. Sabourin, là. Vous êtes un chercheur, là,
alors... Vous parlez de financement.
M. Sabourin (Patrick) :
Oui, mais ça, c'est une... ça, c'est une... pardon, puis ça, c'est une question
politique. Le critère que vous allez choisir, ça pourrait être les... si vous
parlez de la minorité anglophone historique, c'est une minorité qui est...
aujourd'hui, qui est autour de 5 %, 6 %; si vous parlez de
l'anglophone langue maternelle, c'est une minorité qui est d'à peu près
8 %; si vous parlez des ayants droit, vous êtes plus autour de 10 %.
Alors...
Mme David : Alors?
M. Sabourin (Patrick) :
...le choix du critère est un choix politique. Moi, je peux vous dire c'est
quoi, ces chiffres-là, qu'est-ce que... donc, la langue maternelle...
Mme David : Oui, mais le
choix politique que vous faites, c'est, justement, de dire : Il faut moins
financer.
M. Sabourin (Patrick) :
Oui.
Mme David : Par exemple,
Dawson avait besoin de mise à niveau, qui n'est pas un agrandissement, qui est
une mise à niveau, ou McGill...
M. Sabourin (Patrick) :
Non!
Mme David : ...dont
l'Hôpital Royal Victoria... est un hôpital universitaire de McGill depuis
150 ans, vous n'investiriez pas là-dedans, mais vous... Il n'y a pas
32 000 ayants droit, là, à McGill, disons qu'il y en a 10 000. Mais
qu'est-ce qu'on fait avec les 22 000? C'est une vraie question, là.
M. Sabourin (Patrick) :
Qu'est-ce qu'on... Vous voulez dire... Bien, les...
Mme David : On arrête de
les financer?
M. Sabourin (Patrick) : Je
veux dire, il n'y aurait plus ces places-là financées à l'université aux...
puis ça serait des places autofinancées, par exemple. Ça, ça pourrait... Je
veux dire, il n'y a personne qui a...
Mme David : Voilà. Donc,
c'est ce que le professeur Rousseau nous disait hier pour les cégeps, ça serait...
ça deviendrait privé.
M. Sabourin (Patrick) :
Oui, absolument, oui.
Mme David : Donc,
peut-être, l'hôpital deviendrait privé, McGill, le CUSM, etc.?
M. Sabourin (Patrick) : Non!
Non. Bien non!
Mme David : Bien oui!
Dawson aussi.
M. Sabourin (Patrick) : Mais
non! Non, ça...
Mme David : Alors, on
fait quoi s'ils ne sont pas privés?
M. Sabourin (Patrick) : Là,
Dawson... Tantôt, vous avez dit que Dawson, ce n'était pas une expansion, mais <Dawson...
Mme David : …ce que le
professeur Rousseau nous disait hier pour les cégeps, ça serait... ça
deviendrait privé.
M. Sabourin (Patrick) :
Oui, absolument, oui.
Mme David : Donc,
peut-être,
l'hôpital deviendrait privé, McGill, le CUSM, etc.?
M. Sabourin (Patrick) :
Non! Non. Bien non!
Mme David : Bien oui!
Dawson aussi.
M. Sabourin (Patrick) :
Mais non! Non, ça...
Mme David : Alors, on
fait quoi s'ils ne sont pas privés?
M. Sabourin (Patrick) :
Là, Dawson... Tantôt, vous avez dit que Dawson, ce n'était pas une expansion, mais
>Dawson… Dans le fond, ce que le 100 millions vient faire, c'est
qu'il vient régulariser le… les...
Mme David : Le nombre
d'étudiants actuels, pour lequel il y avait un manque.
M. Sabourin (Patrick) :
Le nombre d'étudiants actuels, qui était au-dessus de 10 % en haut du
devis. Je veux dire, à un moment donné, il faut dire les choses comme elles
sont...
Mme David : Oui. Bien,
parlons des cégeps francophones aussi, qui sont...
M. Sabourin (Patrick) :
...c'est une expansion par rapport au devis qu'ils avaient.
Mme David : Oui, mais ça
fait depuis 1998 qu'ils ont 7 800 étudiants, M. Sabourin...
M. Sabourin (Patrick) :
Au-dessus de leur devis. Qu'ils sont... Non, pas 7 800, pas au-dessus de
leur...
Mme David : ...ça fait
25 ans, et puis les autres cégeps de Montréal sont aussi en agrandissement
pour des centaines de millions, et ce sont des cégeps francophones.
Mais, quand même, je vais laisser la
parole à mon collègue de D'Arcy-McGee, parce que je pense qu'il avait aussi des
commentaires.
La Présidente (Mme Thériault) :
Et il vous reste 4 min 15 s.
M. Birnbaum : Merci,
Mme la Présidente. Bon. Peut-être... Merci, M. Sabourin, pour votre
présentation. Peut-être... on peut revenir à la recherche, où vous avez l'air
d'être un petit peu plus à l'aise.
Là, on parle souvent du critère de langue
parlée à la maison. J'aimerais vous entendre là-dessus. Est-ce que, pour vous,
c'est une variable pertinente pour évaluer la stabilité, la force de notre
langue commune, le français? Et j'aimerais savoir comment, si votre réponse est
oui.
M. Sabourin (Patrick) : Bon.
Donc, ma réponse est oui, et... Mais il faut bien se comprendre, hein? Le but,
là, ce n'est pas… L'objectif, ce n'est pas que les gens se mettent à parler
forcément français à la maison, ce n'est pas… c'est parce... c'est que la
langue parlée à la maison est un indicateur des comportements linguistiques
aussi à l'extérieur de la maison. Alors, quand on fait le suivi de la langue
parlée à la maison, on peut avoir une estimation de quelle sera la langue
parlée dans l'espace public aussi, parce que ça transpire dans l'espace public,
la langue parlée à la maison. Donc, quand on observe la langue parlée à la
maison, on voit que des nouveaux arrivants parlent anglais ou français à la
maison, on sait que leurs comportements linguistiques à l'extérieur de la
maison vont se rapprocher de la langue qu'ils ont choisie à la maison. Donc, si
on... quand on fait le suivi de la langue parlée à la maison, l'idée, ce n'est
pas de policer la langue parlée à la maison, mais c'est de bien voir quels sont
les choix linguistiques des gens, et ça nous permet de voir que… d'anticiper
les conséquences de ces choix-là dans l'espace public.
M. Birnbaum : Si je suis vos...
les objectifs que vous venez énoncer dans... lors de votre discours, il y a une
suite logique qu'il y ait des limites accrues sur l'immigration. Est-ce que... Y
a-t-il une façon de nier qu'il y ait un lien, si c'est préoccupant si la langue
parlée à la maison est autre que le français, et ces chiffres sont en montée...
qu'il y a un problème qui se réglerait par des... l'imposition accrue des
limites sur l'immigration?
M. Sabourin (Patrick) :
C'est une façon de voir la chose. Mais l'autre option, c'est aussi d'avoir une
sélection des immigrants qui est <différente. …
M. Birnbaum : … et ces
chiffres sont en montée... qu'il y a un problème qui se réglerait par des...
l'imposition accrue des limites sur l'immigration?
M. Sabourin (Patrick) :
C'est une façon de voir la chose. Mais l'autre option, c'est aussi d'avoir une
sélection des immigrants qui est >différente. J'en ai parlé dans mon
allocution, la politique de sélection des immigrants du Québec est un grand
succès sur le plan linguistique. Ça a vraiment permis de rehausser l'apport des
transferts linguistiques vers le français et ça a bien fonctionné.
M. Birnbaum : Un
immigrant francotrope qui maîtrise le français risque de parler l'espagnol, le
polonais, anglais à la maison. Est-ce que, ça, c'est inquiétant?
M. Sabourin (Patrick) :
Oui, mais il peut... Qu'il parle espagnol, polonais à la maison, ce n'est pas…
c'est-à-dire... n'est pas une question d'être inquiétant ou pas, c'est une
question : Est-ce que ça a un impact sur la pérennité du français au
Québec? Donc, si des Mexicains parlent espagnol à la maison et parlent, par
exemple, régulièrement le français aussi, ça nous indique que, dans l'espace
public, ils vont probablement travailler en français et consommer de la culture
française, etc.
M. Birnbaum : Je reviens
à ma question : Où est la pertinence, en termes d'indicateurs de la
pérennité du français au Québec, d'évaluer la langue parlée à la maison?
M. Sabourin (Patrick) :
C'est-à-dire, ce n'est pas tant les langues maternelles des immigrants qui
comptent, mais bien les langues… la langue officielle qu'ils choisissent en
arrivant ici — quand je dis «langue officielle», je parle de la langue
officielle canadienne, soit l'anglais ou le français — et ça, ça a un
impact. Si les immigrants choisissent l'anglais en arrivant et qu'ils parlent
l'anglais à la maison, ça nous indique que, dans l'espace public, ils vont
aussi utiliser l'anglais, donc ça nous donne l'indicateur de la pérennité du
français.
M. Birnbaum : Comment ça
indique ça? On a, devant nous, plein d'exemples de gens qui parlent une autre
langue que le français à la maison, qui sont dévoués et fiers de l'être
d'envoyer leurs enfants aux écoles françaises, qui passent leur journée au
travail en français. Est-ce que c'est une nette équation que vous faites? Et de
quelle façon?
M. Sabourin (Patrick) :
Vous dites : des gens qui parlent anglais à la maison et qui travaillent
en français, qui vivent en français.
M. Birnbaum : Voilà.
M. Sabourin (Patrick) :
Oui. Bien, ça, c'est votre expérience personnelle, mais moi, je n'ai pas cette
expérience personnelle, c'est... On regarde les données, et les données
montrent...
La Présidente (Mme Thériault) :
...plus de temps. Et je n'ai plus de temps, malheureusement, M. Sabourin.
M. Sabourin (Patrick) :
Pas de problème.
La Présidente (Mme Thériault) :
Je vais regarder maintenant la députée de Mercier pour son 2 min 45 s...
50 s.
Mme Ghazal : Merci, Mme
la Présidente. Merci pour votre présentation. On va continuer sur la langue
parlée à la maison, parce que moi, je prends cette question-là un peu personnelle,
et je ne veux pas juste parler de mon cas individuel, où je vis ma vie en français,
mais que je parle à la maison une autre langue. Je ne veux pas dire que c'est
juste partir de mon expérience personnelle. Ce que je veux, c'est entendre le
démographe.
Là, vous avez dit, tout à l'heure, qu'il y
a un flou dans les statistiques et les questions qui sont posées, par exemple,
par Statistique Canada sur la langue du travail. Est-ce que vous proposez
d'autres indicateurs qui seraient encore plus importants et qui nous
donneraient une meilleure indication que... la langue parlée à la maison, par
exemple, pour l'OQLF, en tant que démographe?
• (16 h 30) •
M. Sabourin (Patrick) :
Oui, oui, certainement, il y a déjà des indicateurs qui <existent...
>
16 h 30 (version révisée)
<
Mme Ghazal : ...et les
questions qui sont posées,
par exemple, par
Statistique
CanadaT sur la langue du travail.
Est-ce que vous proposez d'autres
indicateurs qui seraient encore plus
importants et qui nous donneraient
une meilleure indication que la langue parlée à la maison,
par exemple,
pour l'OQLFV
en tant que démographe?
M. Sabourin (Patrick)T :
Oui, oui,
certainement. Il y a déjà des indicateurs qui >existent.
Le problème, c'est qu'on a une collecte de données qui est sporadique, qui n'est
pas régulière. Et donc on n'a pas beaucoup de données, on n'a pas de série
chronologique fiable. Mais on collecte des données sur ce qu'on appelle la
langue d'usage public, donc la langue qui est utilisée avec les amis... pas
avec les amis, pardon, dans les commerces, à la banque, par exemple, avec son
médecin, avec le gouvernement, bon, etc. Donc, ça, c'est d'autres indicateurs
qui nous permettent de mieux cerner l'utilisation que les gens font de la
langue au quotidien.
Le problème avec la question sur la langue
de travail... Excusez-moi, je ne veux pas vous couper.
Mme Ghazal : ...couper, parce
que j'ai peu de temps. Donc, si on avait ces indicateurs-là puis qu'ils étaient
faits de façon beaucoup plus précise, autre que la langue parlée à la maison,
dans ce cas-là, les démographes laisseraient tomber peut-être un peu ou
regarderait un petit peu moins l'indicateur langue parlée à la maison et se
concentreraient plus sur les autres indicateurs, langue d'usage, langue parlée
au travail, si les données étaient beaucoup moins floues et que les enquêtes
étaient faites de façon beaucoup plus sérieuse et plus précise, n'est-ce pas?
M. Sabourin (Patrick) : Certainement.
Tout dépend des questions qu'on a, tu sais, tout dépend des questions qu'on a.
Mais il y a une espèce de pensée magique où les gens se disent : Ce n'est
pas grave si personne ne parle français à la maison, tant que les gens parlent français
dans l'espace public. Mais la recherche nous montre que ça ne peut pas arriver.
Si tout le monde parle anglais à la maison, les gens vont parler anglais aussi
dans l'espace public.
Mais ça, ça n'a pas rapport, je le
souligne encore, avec les langues maternelles des immigrants. Donc, si vous
parlez espagnol à la maison, ce n'est pas un indicateur de... vous avez peu de
chance de parler espagnol dans l'espace public, vous allez devoir transiger en français
ou en anglais, alors ce n'est pas un indicateur de la vitalité du français qu'il
y ait plus de gens qui parlent espagnol à la maison, ce n'est pas ça l'enjeu.
L'enjeu, c'est la compétition qu'il y a entre le français et l'anglais.
Mme Ghazal : Puis même
l'anglais aussi comme langue parlée à la maison a diminué, moins que le français,
mais il a diminué. Sauf que ce qui est important, c'est la langue parlée au
travail ou dans l'espace public.
M. Sabourin (Patrick) :
C'est relativement stable... Oui, oui. Je vous corrige, c'est ça, l'anglais
diminue moins vite que le français et est relativement stable, hein? Si on
regarde à travers les recensements, là, c'est pas mal... Surtout pour la langue
parlée à la maison. La langue maternelle, ça diminue un petit peu, mais la
langue parlée à la maison, c'est stable, même.
Mme Ghazal : Parce que
c'est sûr, quand on amène des immigrants, mathématiquement, vous êtes
démographe, ça va faire en sorte que la langue parlée à une maison va diminuer,
c'est mathématique. O.K. Merci.
La Présidente (Mme Thériault) :
Et ça termine l'échange. Merci. Donc, nous allons aller maintenant du côté du député
de Matane-Matapédia. 2 min 50 s vous aussi.
M. Bérubé : Merci et
bienvenue. Je partage plusieurs de vos constats lorsque vous parlez des actions
du gouvernement du Québec qui vont à l'encontre de ce que ce projet de loi
voudrait incarner, c'est-à-dire une volonté d'assurer l'avenir du français.
Lorsque vous parlez du collège Dawson,
vous avez raison, c'est un choix politique. C'est un choix politique du
gouvernement libéral reconduit par le gouvernement de la CAQ. Royal Victoria, c'est
exactement la même chose. Nous avons eu le courage de le dénoncer. Le
financement historique des institutions <anglophones...
M. Bérubé : ... du
français.
Lorsque vous parlez du collège Dawson,
vous avez raison, c'est un choix
politique. C'est un choix politique du
gouvernement libéral reconduit par le gouvernement de la CAQ. Royal Victoria, c'est
exactement la même chose. Nous avons eu le courage de le dénoncer. Le
financement historique des institutions >anglophones, on pourrait avoir
un débat là-dessus, sur le vrai poids démographique. La minorité anglophone au
Québec a vraiment des conditions que je souhaiterais que les francophones hors
Québec puissent avoir. Mais c'est un autre débat. On nous dit, dans le cadre de
cette pandémie, qu'il faut écouter la science. Je suis heureux de vous écouter,
démographes, qui avez étudié cette question-là.
Sur la fréquentation des institutions
postsecondaires, notamment le cégep, vous vous êtes exprimés là-dessus.
J'aimerais vous entendre sur ce qui est votre réflexion. Vous connaissez notre
position. Nous croyons que les francophones et les nouveaux arrivants devraient
fréquenter les institutions francophones, sinon on finance notre assimilation.
Quelle est votre position là-dessus?
M. Sabourin (Patrick) :
Sur? Vous voulez parler des cégeps en particulier?
M. Bérubé : Oui,
l'application de la loi 101.
M. Sabourin (Patrick) :
Donc, ma position à moi, c'est que la meilleure méthode, c'est l'application de
la loi 101 au cégep. Je suis conscient que c'est une mesure qui n'est
peut-être pas sexy au préalable, mais il semble... j'ai vu les derniers
sondages, il semble que les francophones, finalement, sont d'accord avec cette
mesure et avec raison. C'est une mesure qui est juste et qui est cohérente avec
le reste de la politique linguistique.
M. Bérubé : Mais vous
savez, les mesures n'ont pas besoin d'être sexy ou populaires. Si l'enjeu est
réel, et c'est ce que vous indiquez, ça prend les mesures aussi fortes que
nécessaires. Là, où vous me donnez espoir de convaincre le gouvernement, c'est
que vous me dites qu'il y un sondage qui montre que c'est populaire. C'est
peut-être avec ça qu'on va réussir à les convaincre.
M. Sabourin (Patrick) :
Oui, chez les francophones, là, c'est vraiment... il y a eu nettement un
changement de tendances, là, dans les dernières années, là, que... Ça fait
longtemps quand même que ça traîne. La loi 101 au cégep, c'était dans les
cartons déjà depuis au moins 15 ans, là. Alors, il y a des choses qui ont
changé. Il y a vraiment un appui qui est plus marqué, là, présentement.
M. Bérubé : Et je vous
suggère que, sur la position de la fréquentation du cégep en français,
plusieurs personnes ont évolué. Christian Dufour est venu nous dire ça hier.
Guy Rocher va venir nous dire ça. Le Parti québécois, nous sommes les seuls à
le défendre. Québec solidaire me chuchote le PQ, ils n'ont pas ce courage. Nous
l'avons. La seule formation politique qui défend ça et qui est sérieuse, c'est
le Parti québécois...
La Présidente (Mme Thériault) :
Je dois...
M. Bérubé : ...quoiqu'en
dise Québec solidaire, qui ricane devant moi présentement. On verra bien la
suite.
La Présidente (Mme Thériault) :
Et je dois vraiment mettre fin aux échanges. Merci. Donc, merci beaucoup
M. Sabourin de votre présence en commission parlementaire.
Et je vais maintenant suspendre les
travaux pour pouvoir permettre au prochain intervenant de se joindre à nous.
Merci.
(Suspension de la séance à 16 h 36)
<
>
(Reprise à 16 h 41)
La Présidente (Mme Thériault) :
Nous reprenons nos travaux.
Donc, je souhaite maintenant la bienvenue
à M. Guy Rocher, professeur émérite de sociologie à l'Université de
Montréal. M. Rocher, nous allons... de la manière dont nous procédons,
vous allez... je vais vous céder la parole tout de suite après mon intervention.
Vous avez une dizaine de minutes pour nous faire votre exposé. Vous pouvez
enlever votre masque, évidemment, pour faire votre exposé. Et, par la suite, il
y aura des échanges avec les députés. Donc, sans plus tarder, la parole est à
vous.
M. Guy Rocher
M. Rocher (Guy) : Merci,
Mme la Présidente. Merci de m'accueillir. Je vous présente mes excuses pour
n'avoir pas été en mesure de vous présenter un mémoire, comme j'aurais aimé le
faire et comme j'aurai dû le faire, mais ça ne m'a pas été possible, je le
regrette.
Ce que je veux vous dire, c'est que,
depuis 1977, c'est-à-dire depuis le moment où l'Assemblée nationale a
sanctionné la loi 101, le Québec et le reste du monde a connu d'immenses
changements, des changements économiques, sociaux, politiques, géographiques.
Et, de ces changements, évidemment, il y en a un grand nombre qui ont affecté
le statut de la langue française au Québec, qui ont affecté le statut des
langues au <Québec...
M. Rocher (Guy) :
...
d'immenses changements, des changements économiques, sociaux,
politiques, géographiques. Et, de ces changements, évidemment, il y en a un
grand nombre qui ont affecté le statut de la langue française au Québec, qui
ont affecté le statut des langues au >Québec et qui affecteront pour
l'avenir, c'est certain, étant donné que ces changements vont continuer, qui
affecteront l'avenir du statut de la langue française pour les décades à venir,
les décennies à venir. C'est donc dire l'importance de votre commission, c'est-à-dire
l'importance de cette loi, qui sera sans doute historique, je le pense.
Et ce que je veux dire... Ceci, deux
choses. Premièrement, pourquoi j'appuie le projet de loi, et ce que je voudrais
qu'on y change, deuxièmement.
Premièrement, j'appuie le projet de loi n° 96
pour deux raisons. La première, c'est que je trouve que ce projet de loi
s'inspire des mêmes sources que celles... les sources qui ont inspiré la
loi 101, il y a déjà un peu plus de 40 ans; et que ce projet de loi,
comme la loi 101, cherche à établir le français comme langue officielle et
langue commune sur l'ensemble du paysage québécois, que ce soit
l'administration, l'enseignement, le monde des affaires, etc. C'est donc dans
ce sens-là que je pense que ce projet de loi demeurera historique.
Deuxièmement, j'appuie ce projet de loi parce
qu'il crée quatre institutions que je trouve extrêmement importantes — et
cette partie de la loi me paraît extrêmement importante — quatre
institutions qui vont contribuer dans l'avenir — c'est ce qu'on
espère — à l'application de la loi, c'est-à-dire : l'Office de
la langue française, le ministre et son ministère, le Commissaire à la langue
française et Francisation Québec. Ce sont quatre organismes auxquels j'accorde
beaucoup d'importance parce que je sais, d'expérience, que ce sont ces
organismes qui seront les moteurs, les agents de l'application de la loi dans
les années à venir à la condition, bien sûr, qu'ils recevront l'appui
financier, l'appui des ressources humaines de la part du gouvernement, et
l'appui du pouvoir politique. C'est certain, c'est toujours la condition.
Par ailleurs, je suis obligé de dire que
je m'oppose — et c'est la deuxième partie de mon court
exposé — je m'oppose à la solution que vous avez trouvée pour l'accès
aux cégeps anglais. Je m'y oppose pour plusieurs raisons, mais la première, la
principale, c'est la suivante : selon mon expérience des cégeps, et elle
est assez longue, les cégeps sont une des institutions d'enseignement qui
exercent peut-être le plus d'influence à la fois sur la société québécoise et
sur les étudiants et les étudiantes qui les <fréquentent...
M. Rocher (Guy) :
...
selon mon expérience des cégeps, et elle est assez longue, les
cégeps sont une des institutions d'enseignement qui exercent peut-être le plus
d'influence à la fois sur la société québécoise et sur les étudiants et les
étudiantes qui les >fréquentent. Je tenais à vous dire une chose, là. Il
y a 50 ans, quand on a conçu et créé les cégeps, j'étais là, eh bien, nous
ne pouvions pas nous imaginer ce qu'ils allaient devenir. Nous ne pouvons pas
surtout nous imaginer ce qu'ils sont devenus, les cégeps.
Depuis 50 ans, j'ai suivi de près
l'évolution des cégeps parce que ça m'est apparu une des institutions les plus
importantes sorties de la commission Parent. Et ce à quoi nous avons assisté au
Québec, c'est le développement extraordinaire de cette institution d'enseignement
sur tout le territoire du Québec, et son implantation, et l'influence
économique, culturelle, sociale que les cégeps ont exercée partout sur le
territoire du Québec, et particulièrement dans les régions, et deuxièmement
l'influence extraordinaire que les cégeps exercent sur les étudiantes et les
étudiants qui les fréquentent.
Je vais vous avouer une chose. Quand nous
avons conçu ces cégeps puis quand nous les avons créés, j'étais persuadé que
deux années ou trois années de cégep, c'était bien peu, et trop peu, et que ces
cégeps n'auraient pas certainement d'influence, une très forte influence sur
ceux qui allaient les fréquenter. Je me trompais.
Ce que j'ai observé depuis 50 ans
parce que j'ai continué à observer les cégeps, ce que j'ai observé, par
exemple, chez les étudiants que j'ai connus à l'université, que j'ai beaucoup
questionnés sur les cégeps, eh bien, c'est que, pour les étudiants et les
étudiantes, pour la très grande majorité d'entre eux qui ont fréquenté les
cégeps, ces cégeps, cette période de deux ou trois ans a été marquante dans
leur vie, très marquante dans leur vie, à une époque, d'ailleurs, à un âge où
l'institution devient très importante.
Au sortir du secondaire, le cégep est une
institution dans laquelle les jeunes deviennent matures, dans laquelle les
jeunes s'orientent. Comme beaucoup d'étudiants m'ont dit, je me suis réorienté
au cégep. Beaucoup d'étudiants ont développé le... ont découvert le travail
intellectuel, la joie du travail intellectuel au cégep. Beaucoup d'étudiants
ont compris la culture québécoise au cégep. Beaucoup d'étudiants se sont fait
des amis pour le reste de leur vie au cégep. Il y en a qui ont même trouvé leur
conjoint ou leur conjointe au cégep, là.
Si bien que ce que je veux dire, c'est que
le choix du cégep, de l'anglais ou du français, n'est pas banal, n'est pas
anodin. Et c'est pour cela que je m'oppose au fait que le cégep soit un choix
libre en ce qui concerne la langue. Parce que cette institution marque
tellement les jeunes et marque tellement la société québécoise qu'il est
essentiel à mon avis que les <francophones...
M. Rocher (Guy) :
...
cela que je m'oppose au fait que le cégep soit un choix libre en ce
qui concerne la langue. Parce que cette institution marque tellement les jeunes
et marque tellement la société québécoise qu'il est essentiel à mon avis que
les >francophones et les allophones fréquentent le cégep français, que
cela fait partie de notre système d'éducation au complet.
Mais je dirais qu'en 1977, nous avons fait
une erreur. Nous aurions dû porter la loi 101 jusqu'au cégep, et même, je
dirais, jusqu'au baccalauréat à l'université. Il est normal, dans un système d'éducation
public en particulier, que les étudiants et étudiantes fréquentent une institution
de la langue commune, de leur langue.
Et c'est en ce sens-là que je trouve que
la solution que vous avez trouvée me paraît bancale, elle me paraît, j'ose
dire, tordue, parce que vous avez voulu éviter que l'on impose la loi 101
au cégep, ce qui m'aurait paru tout à fait normal et souhaitable dans la situation
actuelle. En réalité, nous aurions dû le faire en 1977. Je considère que c'est
une erreur de notre part, nous avons fait une mauvaise évaluation de la situation.
Nous avons cru, et c'est le raisonnement que nous nous sommes fait, nous avons
cru qu'ayant étudié en français au primaire et au secondaire, les étudiants
allaient normalement passer au cégep de langue française.
• (16 h 50) •
Or, les conditions ont changé, le contexte
a changé. Le Québec de 2020‑2021 n'est plus celui de 1977. En particulier, la
poussée de l'anglais n'est plus ce qu'elle était en 1977. Et, à cause de cela,
je dirais que nous avons cru aussi que le cégep — et c'est une autre
interprétation que je fais — en 1977, nous avons cru que le cégep
allait être une institution insignifiante, je le dis en toute simplicité, parce
qu'en 1977, c'était au tout début de l'implantation des cégeps. Les cégeps ont
commencé à être implantés en 1967, 1968, 1969. En 1977, nous ne les
connaissions pas beaucoup, ça nous paraissait une institution transitoire où
les étudiants passeraient assez rapidement pendant deux ans, trois ans en
allant vers l'université. Donc, l'institution du cégep n'était pas, d'ailleurs,
considérée comme de l'enseignement supérieur à l'époque, c'était un niveau
intermédiaire, comme on disait, entre le secondaire et l'université ou entre le
secondaire et le marché du travail pour... Et donc le cégep n'a pas été, <en
1977...
M. Rocher (Guy) :
...
n'était pas d'ailleurs considérée comme de l'enseignement supérieur
à l'époque, c'était un niveau intermédiaire, comme on disait, entre le
secondaire et l'université ou entre le secondaire et le marché du travail pour...
Et donc le cégep n'a pas été, >en 1977, apprécié comme il l'est devenu
par la suite, et je pense que nous n'avons pas pu imaginer à ce moment-là ce
que c'était.
Il m'arrive, en visitant les cégeps...
Parce que j'ai eu l'occasion de travailler avec la Fédération des cégeps, avec
beaucoup de cégeps. Encore récemment, j'étais dans un cégep, au moins
virtuellement, le cégep de Saint-Jérôme, qui fêtait son 50e anniversaire.
J'ai eu l'occasion de visiter un bon nombre de cégeps à cause des
50e anniversaires, parce qu'on m'attribue le titre de père des cégeps. Et
alors donc j'ai développé un grand respect pour les cégeps. Je n'ai jamais
enseigné dans les cégeps. Je ne fus pas un ancien des cégeps. J'ai un D.E.C.
honorifique des cégeps cependant et...
Mais je considère que le cégep est une des
institutions qui est sortie le plus directement de la Révolution tranquille.
C'est l'institution qui représente le plus les objectifs de la Révolution tranquille,
c'est-à-dire la démocratisation du système d'enseignement, l'accès du système
d'enseignement à tous et toutes et la contribution du système d'enseignement au
développement économique, culturel, social du Québec. Les cégeps, d'une manière
étonnante, font cela. Et je voudrais toujours, quand je vais dans les cégeps,
être accompagné par les autres membres de la commission Parent, qu'ils voient
avec moi, ce que nous avions vite rêvé, même pas, s'est réalisé bien au-delà de
ce que nous avions pu imaginer.
La Présidente (Mme Thériault) :
Et je dois mettre fin à votre exposé sur ces sages paroles. Donc, le ministre
vous a déjà octroyé à peu près une minute et demie de plus. Donc, M. le
ministre, la parole est à vous. Il vous reste 15 min 23 s.
M. Jolin-Barrette :
Merci, Mme la Présidente. M. Rocher, bonjour. Un grand merci pour votre
présence ici, en commission parlementaire. C'est fort apprécié que vous veniez
nous donner vos lumières relativement au projet de loi n° 96 et, je crois
dire, pour les membres de la commission aussi, c'est un honneur de vous
recevoir, sachant le rôle que vous avez joué dans le Québec moderne, avec la
Révolution tranquille, et notamment aussi par rapport à la rédaction de la
Charte de la langue française, à l'époque, avec M. Laurin. Je pense que le
Québec vous doit beaucoup, alors merci beaucoup d'être présent aujourd'hui, de
nous partager vos connaissances.
Je voudrais vous poser une question qui
touche à la fois la langue et la culture. Parce qu'en 1977 il y a eu le dépôt
de la loi 101, et, l'année suivante, je crois que M. Laurin avait
déposé également une politique de développement culturel. Comment voyez-vous
les deux, la langue et la culture, notamment le concept de convergence
culturelle? Croyez-vous que ça va de pair? Comment <voyez-vous ça...
M. Jolin-Barrette :
...
Parce qu'en 1977 il y a eu le dépôt de la loi 101, et, l'année
suivante, je crois que M. Laurin avait déposé également une politique de
développement culturel. Comment voyez-vous les deux, la langue et la culture,
notamment le concept de convergence culturelle? Croyez-vous que ça va de pair?
Comment >voyez-vous ça?
M. Rocher (Guy) : Merci
beaucoup de cette question, parce que je crois, en effet, que, comme vous le
dites, ça va de pair. Je crois qu'il y a des liens, que j'appellerais
indissociables, entre la langue et la culture. Et quand nous avons fait la loi 101,
c'était notre regret de ne pas réussir à intégrer la culture dans ce projet de
loi, d'en faire seulement un projet de loi de la langue. C'était notre regret,
je le dis. Et c'est pour cela que nous n'avions même pas fini les travaux sur
la loi 101 que, déjà, le ministre Laurin nous demandait de travailler à la
préparation d'un livre blanc sur les politiques culturelles. Mais ça marquait
la dissociation entre les deux, la langue d'un côté, dans la loi 101, et
puis les politiques culturelles dans un livre blanc.
Or, j'espère que votre projet de loi
réussira le tour de force d'intégrer la culture dans votre projet de loi,
d'intégrer la culture dans les responsabilités, par exemple, du commissaire à la
langue, dans les responsabilités du ministre de la langue, dans les travaux...
dans les responsabilités des comités de francisation, évidemment, aussi, dans
les responsabilités de l'Office de la langue française. Donc, je vous souhaite
de trouver... Et ce serait l'innovation que vous pourriez faire, et une
innovation historique, d'intégrer, dans un projet de loi sur la langue, la
culture, ce que nous n'avons pas réussi à faire en 1977.
Et, à cet égard, je voudrais rappeler un
document, que vous avez au gouvernement, qui est quelque part, qui avait été
demandé par Mme Hélène David, quand elle était ministre de la Culture, au
Conseil supérieur de la langue française, à l'époque, un document qui s'est
intitulé L'affirmation des liens entre la langue et la culture nationales
pour la défense... pour la valorisation, pardon, de la langue française.
C'est le titre que Conrad Ouellon, qui était le président du conseil à l'époque,
avait donné à son rapport, un titre que je trouve absolument extraordinaire
parce qu'il dit tout. Et à mon avis ce titre est un programme en lui-même. Quel
que soit le contenu de ce rapport, je me souviens d'avoir participé aux
entrevues que M. Ouellon faisait à l'époque, ça date de... d'en 2017, si
je ne me trompe, Mme David, je crois. Et c'est dans cet esprit que, me
semble-t-il, dans l'esprit de ce <titre...
M. Rocher (Guy) :
...
Quel que soit le contenu de ce rapport, je me souviens d'avoir
participé aux entrevues que M. Ouellon faisait à l'époque, ça date de...
d'en 2017, si je ne me trompe, Mme David, je crois. Et c'est dans cet
esprit que, me semble-t-il, dans l'esprit de ce >titre extraordinaire
qu'avait trouvé Conrad Ouellon pour expliquer... pour exprimer ce que, d'ailleurs,
il appelle dans son rapport, les liens, lui-même le dit, indissociables
entre...
Et je vous ferai remarquer que, dans la
loi 101, nous n'avons pas pu insérer même le mot «culture». Dans votre
loi, vous l'avez mis à trois endroits, à ma connaissance : dans les
préliminaires, dans l'article 1 et dans l'article 88.9, 3°, où vous
dites que la loi permet la participation et la contribution à la culture
nationale de cette société, quelque chose comme ça. Je cite de mémoire, mais c'est
à peu près ça. C'est dans...
Eh bien, ce que je souhaite, c'est que
cette définition de la langue commune... parce que c'est dans le chapitre où
vous définissez la langue commune que cette idée apparaît, mais je souhaite que
cette idée, elle devienne en action dans votre projet de loi sous différentes
formes, celles qui j'ai mentionnées, mais il y aurait bien d'autres manières. J'ai
confiance dans l'imagination des juristes que j'ai connus pour trouver aussi d'autres
manières de lier la langue et la culture dans votre loi. Ce serait, à mon avis,
un très grand changement d'attitude à l'endroit de la langue que d'en faire un projet
de loi de la langue et de la culture en même temps.
M. Jolin-Barrette :
L'importance de lier la culture et la langue, je crois qu'elle est au niveau notamment
de l'intégration des personnes immigrantes, parce qu'un des souhaits de la
loi 101, c'est de faire en sorte de pouvoir intégrer les personnes
immigrantes qui choisissent le Québec en français au Québec. Et donc, si j'y
vais sur ce raisonnement-là, puis vous me direz si vous êtes en accord avec
moi, c'est également de les intégrer à la culture québécoise, donc, de les
intégrer en français à cette culture québécoise là, notamment par opposition au
multiculturalisme canadien parce qu'au Québec on a un modèle d'intégration qui
est distinct. À quel point vous considérez important d'établir clairement un
modèle distinct dans la loi en termes de vivre-ensemble, en termes
d'intégration des personnes immigrantes par rapport au multiculturalisme
canadien?
• (17 heures) •
M. Rocher (Guy) : Tout à
fait. Je suis tout à fait d'accord avec ce que vous dites. Vous complétez ma
pensée parce qu'en ce qui concerne la francisation des immigrants et leur
intégration, ce n'est pas tout de leur faire apprendre le français comme langue
de communication. C'est trop peu parce que ce qu'on doit faire... faire valoir,
c'est que cette langue française du Québec, elle est en même temps partie d'une
culture québécoise propre, une culture québécoise qui s'est <implantée
ici depuis...
>
17 h (version révisée)
< M. Rocher (Guy)T :
...de leur faire apprendre le français comme langue de communication. C'est
trop peu, parce que ce qu'on doit faire valoir, c'est que cette langue
française du Québec, elle est en même temps partie d'une culture québécoise
propre, une culture québécoise qui s'est >implantée ici depuis
300 ans, qui a... une culture québécoise qui a son territoire, qui a ses
coutumes, qui a ses valeurs, qui a aussi une manière d'être et de penser, de
s'exprimer.
Et je dirais que ce n'est pas seulement
pour les immigrants, je... pour tous les francophones et, pour tous les
anglophones du Québec, de bien comprendre que, pour les anglophones comme pour
les francophones au Québec, le respect de la langue française, ce n'est pas
seulement le respect d'une langue de communication, c'est une langue qui fait
partie d'une culture, qui exprime une culture. Et c'est en ce sens-là qu'on
peut valoriser, comme le dit le titre du rapport Ouellon, que l'on peut
valoriser la francisation.
Pour ma part, j'ai connu le système des
COFI autrefois et je considère que c'est encore un modèle. C'est bien dommage
qu'on ait aboli les COFI en 1999, 2000, parce que c'était une institution où,
justement, on se préoccupait à la fois de la francisation et aussi de ce qu'on
peut appeler l'acculturation des immigrants, c'est-à-dire de présenter, en même
temps, la société québécoise, les valeurs québécoises, la culture québécoise,
en même temps que l'apprentissage de la langue. C'était la beauté des COFI, et
je pense que c'est le modèle auquel on devrait revenir, me semble-t-il.
M. Jolin-Barrette : Sur
la question de la nation québécoise, on vient, avec le projet de loi, insérer
dans la Constitution canadienne le concept de nation et également le fait que
la langue officielle du Québec, c'est le français.
Qu'est-ce que vous pensez de ces
dispositions-là, de venir inscrire par nous-mêmes qui nous sommes dans la
Constitution?
M. Rocher (Guy) : Bien,
je crois que ça renforce beaucoup le statut du français au Québec et ça
explicite la notion de nation québécoise. Parce que je ne suis pas certain
qu'on ait vraiment explicité cette notion de nation que l'on a développée et qui
est de plus en plus acceptée, semble-t-il, mais, justement, c'est en lui
donnant un caractère constitutionnel en même temps que de la substance, c'est peut-être
ce vers quoi on peut s'assurer qu'un certain avenir sera plus certain pour le
Québec.
Parce que, si je suis ici, c'est parce que
je suis inquiet pour l'avenir de la langue française au Québec, comme le sont
mes amis démographes, comme le sont Castonguay et Lacroix, que vous allez
entendre. Je participe à leurs inquiétudes pour l'avenir. J'ai le droit à mon
âge de m'inquiéter de l'avenir. Et je le fais volontiers.
M. Jolin-Barrette :
Croyez-vous qu'avec les <différentes...
M. Rocher (Guy) :
... comme le sont mes amis démographes, comme le sont Castonguay et Lacroix,
que vous allez entendre. Je participe à leurs inquiétudes pour l'avenir. J'ai
le droit à mon âge de m'inquiéter de l'avenir. Et je le fais volontiers.
M. Jolin-Barrette :
Croyez-vous qu'avec les >différentes mesures que nous avons dans le projet
de loi, ça va permettre de freiner le déclin du français et de redresser la
situation, sous réserve de votre position sur les cégeps?
M. Rocher (Guy) : C'est
mon espoir, oui. C'est pour cela que je suis venu appuyer votre projet de loi,
parce que nous avons besoin d'un espoir en ce moment et nous avons besoin d'une
loi... excusez-moi, j'allais dire 21, d'une loi 101 renouvelée en quelque
sorte, renforcée. Parce que ce que fait votre projet de loi, c'est une nouvelle
loi 101, renforcée pour l'avenir, et c'est prometteur pour moi. C'est pour
cela que je l'appuie, c'est pour ça que j'espère qu'il sera renforcé, ce projet
de loi, et que, et je l'ai dit tout à l'heure, ce qui me permet d'espérer, ce
sont les quatre organismes que vous avez mis dans la loi.
Parce que je peux vous dire qu'en ce qui
concerne la loi 101 l'organisme auquel Camille Laurin tenait le plus, c'était
l'Office de la langue française pour la francisation des milieux de travail,
parce que c'était l'organisme qui est le noyau des quatre organismes que l'on
créait à ce moment-là avec la loi 101. Mais là vous créez d'autres organismes
qui remplacent, et ce que je... ce pourquoi j'appuie, c'est qu'au moins, à ces organismes,
vous donnez des responsabilités étendues et des pouvoirs, et pouvoirs de
sanction même, et en ce qui concerne l'Office de la langue française, un
pouvoir d'ordonnance que l'office n'avait pas.
Donc, oui, vous me donnez espoir, à mon
âge, d'un avenir auquel je ne participerai pas.
M. Jolin-Barrette :
...de l'espoir, M. Rocher. Je vais céder la parole à mes collègues, mais
je tiens à vous remercier chaleureusement d'avoir contribué aux travaux de la commission
puis de nous avoir partagé votre opinion. Donc, je vais céder la parole à mes collègues.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. Donc, ça sera M. le député de Saint-Jean, et vous avez trois minutes au
total.
M. Lemieux : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. M. Rocher, c'est un honneur de vous poser des
questions et d'accueillir vos opinions, ici. Vous venez de dire que vous êtes
inquiet pour l'avenir du français. Il y a à peine 30 minutes, en
commission, avec un autre témoin, je disais : Je pense qu'il va toujours
falloir protéger le français. C'est dans sa nature. J'ose à peine imaginer ce
que les 40 quelques dernières années auraient été <considérant...
M. Lemieux : ...
inquiet pour l'avenir du français. Il y a à peine 30 minutes, en
commission, avec un autre témoin, je disais : Je pense qu'il va toujours
falloir protéger le français. C'est dans sa nature. J'ose à peine imaginer ce
que les 40 quelques dernières années auraient été >considérant
l'avènement de l'Internet, la montée du mondialisme, de la globalisation de la
planète. J'ose à peine penser où on serait aujourd'hui sans votre loi 101
et celle de Camille Laurin.
Aujourd'hui, par rapport à 1977, il y a beaucoup
de choses qui ont changé. Qu'est-ce qu'il fait que vous avez, et vous venez de
le dire, quand même plus d'espoir, parce que vous l'avez vu le résultat de
votre travail, ce qu'on est en train de faire, c'est d'aller un peu plus loin,
d'aller un peu plus fort, mais essentiellement on poursuit votre travail, si
j'ai bien compris? C'est à peu près tout, là.
M. Rocher (Guy) : On
poursuit le travail, mais je trouve qu'on le fait dans... on essaie de le
faire, me semble-t-il, avec ce projet de loi, dans le nouveau contexte, dans le
contexte de 2021 et, dans le contexte de ce qu'on peut imaginer pour les 25,
30 prochaines années, c'est-à-dire que le contexte dans lequel nous vivons
maintenant, tout d'abord, c'est un contexte de mondialisation qu'on ne pouvait
pas imaginer en 1977, premièrement.
Deuxièmement, c'est un contexte où le développement
technologique a pris un tel essor depuis 40 ans, là, on ne pouvait pas
imaginer ce changement-là. Et, troisièmement, nous vivons sous l'empire d'un
empire britannique de... excusez-moi, d'un empire américain à la fois
militaire, économique, politique et culturel surtout, dont la présence de
l'anglais n'est pas du tout ce qu'elle était en 1977 et c'est cette grande,
cette grande poussée de l'anglais dans le monde presque entier, et au Québec en
particulier, qui fait qu'il faut agir encore plus. C'est-à-dire que la situation
en 1977 était certainement difficile, je dirais qu'aujourd'hui la situation est
plus compliquée qu'elle n'était en 1977. C'est la différence que je vois. Oui.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci beaucoup. Donc, sans plus tarder, je vais du côté de l'opposition
officielle avec une intervention de Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys. La
parole est à vous.
Mme David : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Alors, M. Rocher, je joins ma voix, évidemment,
à celle des collègues pour dire que, si on avait la moitié du quart de votre
perspicacité, intelligence, mémoire, on serait tous très, très, très heureux.
Alors, vraiment, c'est un honneur aussi partagé, donc de pouvoir vous écouter
de façon trop rapide, malheureusement, mais de pouvoir vous écouter. Et ce qui
me fait particulièrement plaisir, et je pense qu'on partage la même passion, c'est
celle de la création des cégeps et de ce qu'ils sont devenus. Il n'y en a pas
un que je n'ai pas visité, il n'y a pas un centre de <transfert de...
Mme David : ... de
façon trop rapide,
malheureusement, mais de pouvoir vous écouter. Et, ce
qui me fait
particulièrement plaisir, et
je pense qu'on partage
la même passion, c'est celle de la création des cégeps et de ce qu'ils sont
devenus.
Il n'y en a pas un que je n'ai pas visité, il n'y a pas un
centre de >transfert de... un CCTT, centre collégial de transfert de
technologie, que je n'ai pas visité. Vous avez raison de dire que probablement,
mais là je l'entends de votre bouche, que ça s'est développé bien au-delà de ce
que vous croyiez, et vous dites : À l'époque, ça ne faisait pas partie de
l'enseignement supérieur. Maintenant, c'est clair que ça en fait partie.
• (17 h 10) •
Il y a un très grand nombre de professeurs,
maintenant, au collégial, ce n'était peut-être pas le cas en 1968, 1969, et
même après, qui ont leur doctorat et qui enseignent au cégep. Moi, j'ai envoyé
je ne sais combien d'étudiants qui avaient un doctorat enseigner au cégep,
parce que j'ai dit : Je pense que tu vas être plus heureux au collégial
qu'à l'université. Mais ça, on s'en reparlera, là, parce que le «publish or
perish» ils trouvaient ça vraiment très, très difficile. Et donc la qualité des
enseignants s'est énormément, disons, améliorée, et ne cesse de s'améliorer.
C'est vraiment, ce sont des institutions d'enseignement supérieur.
À partir du moment où on se dit... et vous
avez tellement raison de dire qu'on ne peut plus fermer un programme en ce
moment, il est question, là, des soins infirmiers, est-ce qu'on va enlever le
D.E.C. technique, ça serait une catastrophe nationale, une catastrophe
d'enlever le D.E.C. technique en soins infirmiers, 46 cégeps ont ce programme-là.
Alors, je l'ai déjà dit à la ministre de l'Enseignement supérieur :
N'allez pas là, c'est une vraie catastrophe. On en a d'autres, solutions. Il
faut protéger ce que les cégeps représentent dans chaque région, dans chaque
ville, dans chaque territoire, et chacun a développé ses spécificités en
recherche. Ils font partie, maintenant, ils peuvent postuler au CRSNG, ils
peuvent postuler dans tous les organismes de recherche, ce sont des vrais
centres de recherche, et ils participent avec les universités, qui sont très
contentes de les avoir, pour aller faire des expérimentations, en autres,
Polytechnique va à l'école d'aérotechnique de Longueuil du cégep Édouard‑Montpetit,
pour ne citer qu'un exemple.
Alors, une fois qu'on a dit ça, que chaque
cégep a sa signature, son histoire, qu'est-ce qu'on fait? Comment peut-on
reculer? Ou comment vous voyez, si jamais... et, nous, on a clairement dit
qu'on ne l'espérait pas vraiment, et puis le ministre l'a dit aussi, de dire :
O.K., on va appliquer la loi 101 aux cégeps. Mais ces signatures, ils
l'ont tous, les signatures, autant les cégeps anglophones que francophones. Qu'est-ce
qu'on... comment peut-on toucher à ces signatures d'institutions qui ont
maintenant 50 ans, qui ont développé tout leur réseau de recherche?
M. Rocher (Guy) : Bien,
voyez-vous, moi, j'ai un grand respect pour les cégeps anglophones, parce que
je les ai un peu fréquentés, aussi. Et ces cégeps anglophones qui, au début,
ont hésité d'entrer dans le cégep, hein, on se souvient, mais finalement...
souvent, les cégeps anglophones sont des modèles, <et avec...
M. Rocher (Guy)T :
...
cégeps anglophones, parce que je les ai un peu fréquentés, aussi. Et
ces cégeps anglophones qui, au début, ont hésité d'entrer dans le cégep, hein,
on se souvient, mais finalement... souvent, les cégeps anglophones sont des
modèles, >et avec raison, précisément parce que les cégeps anglophones
ont su développer leur culture particulière et d'avoir leur identité
particulière. Mais ce qui me frappe en ce moment, c'est que l'engouement des jeunes
pour le cégep anglais me paraît malheureusement créer une nouvelle hiérarchie
dans ces cégeps, c'est-à-dire que le cégep anglophone tout à coup est valorisé
au-dessus du cégep francophone. C'est ce que je trouve malheureux. Et c'est...
Et j'y vois une dévalorisation de nos cégeps francophones surtout dans la
région de Montréal ou à Québec, là, où c'est possible d'avoir accès aux cégeps
anglophones par le libre choix et par la formule que vous avez conservée
encore.
Donc, une des caractéristiques des cégeps
québécois, c'est qu'il n'y a pas de hiérarchie dans les cégeps québécois. Il
n'y a pas eu de palmarès. Il n'y a jamais eu de palmarès des cégeps québécois,
hein? Chaque cégep a sa qualité et chaque cégep est reconnu pour lui-même. Sauf
que, maintenant, avec l'engouement pour les cégeps anglophones, on est en train
de créer, tout à coup, une hiérarchisation. Les cégeps anglophones sont plus
attirants que les cégeps francophones. Et ça, je trouve que c'est... C'est ça,
un danger pour moi qui menace la... Et comme vous dites, d'ailleurs, ce qui me
frappe beaucoup, et c'est pour ça qu'il faut ne pas perdre la qualité des
cégeps francophones, qu'il ne faut pas les dévaloriser, c'est que, comme vous l'avez
dit tout à l'heure, les cégeps francophones ont attiré un corps d'enseignants,
et des administrateurs, et du personnel qui s'est consacré au cégep, et qui l'a
créé, et qui les a faits ce qu'ils sont. C'est ce qui me frappe.
Je me souviens, et je l'ai souvent dit,
quand les cégeps ont été créés, nous avions rencontré des Français qui nous
disaient : Avec les cégeps, vous allez développer un corps d'enseignants
toujours frustrés parce qu'ils ne seront pas admis à l'université comme
professeurs d'université. Or, ces braves Français se trompaient parce que tous
les professeurs de cégep que je connais aiment leur cégep et ne veulent pas
devenir professeurs d'université à cause de tous les ennuis que l'on doit vivre
quand on est professeur d'université, et toutes les contraintes que l'on a.
Et donc oui. Et non seulement cela, mais
les cégeps ont créé, je dirais, une classe intellectuelle en créant une classe
de professeurs que nous n'avions pas en 1950, de professeurs à temps plein. Les
universités et les cégeps ont créé au Québec une classe d'intellectuels de
langue française et de langue anglaise qui contribue énormément au
développement culturel du Québec et au développement économique du Québec à <travers
tout...
M. Rocher (Guy) :
...
à temps plein. Les universités et les cégeps ont créé au Québec une classe
d'intellectuels de langue française et de langue anglaise qui contribue
énormément au développement culturel du Québec et au développement économique
du Québec à >travers tout le territoire du Québec. Et ça, je trouve, c'est
un acquis extraordinaire que le Québec... que les cégeps ont apporté, et que
les universités et le réseau universitaire a apporté.
Mme David : Je vous
écouterais pendant des heures sur les cégeps. Je suis tellement d'accord avec
vous. Et j'ose vous soumettre une idée que nous avons proposée dans notre plan
d'action, 27 propositions du Parti libéral... et, sur les cégeps, nous
proposons ce que le ministre va peut-être... on va peut-être finir par le
convaincre, on a la tête dure, d'inclure, dans le cursus, j'allais dire universitaire,
vous voyez, dans le cursus collégial, des cégeps anglophones, obligatoirement,
au moins trois cours suivis, non pas de français, pas des cours pour apprendre
le français, des cours en français. Donc, tu fréquentes un cégep anglophone en
sciences humaines, tu es obligé d'avoir au moins trois cours, sciences
politiques, histoire du Québec, donnés en français, évalués en français par des
professeurs qui le donnent en français. Il y a énormément, énormément de
professeurs francophones qui enseignent dans les cégeps anglophones. Frédéric
Lacroix a, d'ailleurs... enseigne à Dawson, hein? Alors, c'est un exemple de
ça. Et qui a fait son doctorat à McGill, d'ailleurs.
Alors, donc, qu'est-ce que vous pensez de
cette idée de bilinguiser, d'une certaine façon, le cégep anglophone?
La Présidente (Mme Thériault) :
Vous avez environ trois minutes pour répondre à la question de la députée,
M. Rocher.
M. Rocher (Guy) : ...
La Présidente (Mme Thériault) :
Oui, vous avez trois minutes pour pouvoir le faire.
M. Rocher (Guy) : Ah
bon! Oui, bien, c'est-à-dire, je ne pense pas que ce soit de bilinguiser, à mon
avis, mais ce serait peut-être d'introduire plus de culture québécoise dans le
cégep de langue anglaise. Moi, c'est ça qui me préoccupe, c'est la valorisation
du français comme langue de culture et la culture comme participation de la
langue.
Et je... la langue, dans le sens que vous
dites, je dirais que, oui, trois cours, mais qui seraient en particulier aussi
sur la culture québécoise, en particulier dans cette perspective à la fois
historique, culturelle, anthropologique, je dirais. Ça fait partie, je pense,
me semble-t-il, de ce patrimoine commun que nous avons, anglophones et
francophones du Québec, de pouvoir connaître notre histoire commune et nos
valeurs communes qui sont importantes. Oui, tout à fait.
Et je pense qu'il y a... malheureusement,
j'ai assez fréquenté d'anglophones québécois, comme d'autres, ailleurs, pour savoir
que, malheureusement, nous ne nous connaissons pas assez. Ça, c'est certain. Je
l'ai expérimenté bien des fois. Nous avons nos préjugés, ils ont les leurs. Et
je souhaiterais souvent, et je l'ai dit... mes amis anglophones québécois, qu'ils
soient, eux, les messagers de notre culture québécoise et de notre point de vue
québécois auprès du Canada anglais. Parce que c'est peut-être eux qui
pourraient nous protéger <contre...
M. Rocher (Guy)T :
... préjugés, ils ont les leurs. Et je souhaiterais souvent, et je l'ai dit...
mes amis anglophones québécois, qu'ils soient, eux, les messagers de notre
culture québécoise et de notre point de vue québécois auprès du Canada anglais.
Parce que c'est peut-être eux qui pourraient nous protéger >contre le
«Québec bashing» dont on parle. Eux, ils nous connaissent mieux que ceux du Manitoba
ou de la Saskatchewan. Nous vivons côte à côte, francophones et anglophones, au
Québec. Et, à cause de cela, je crois qu'ils pourraient être nos ambassadeurs,
et nos messagers, et nos explicateurs.
Mme David : Très intéressant.
Alors, vous parlez de culture. Le ministre a parlé de culture. Je serai toujours
là si on parle de culture et de langue pour les mettre ensemble. Alors, juste
pour ça, je trouve que c'est formidable, la discussion qu'on a.
Parce que la langue fonctionnelle, savoir
comment franciser quelqu'un, c'est une chose. Mais le français, c'est le français
dans la culture québécoise. Et ça, je pense qu'on est plusieurs... et il y a plusieurs
mémoires qui vont dans ce sens-là. Je pense que le ministre a l'air sensible à
ça.
Alors, on va le faire, comme vous dites...
notre grand possible pour trouver les bonnes avenues pour mettre plus de
culture dans le projet de loi. Merci beaucoup, M. Rocher.
M. Rocher (Guy) : Vous
m'en voyez ravi.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. Donc, sans plus tarder, nous allons passer du côté de la députée de Mercier.
• (17 h 20) •
Mme Ghazal : Merci. Merci
beaucoup, M. Rocher, pour votre présence. Merci aussi pour le fait d'avoir
oeuvré pour la loi 101 avec les grands comme Camille Laurin et les autres.
Et moi, je me considère fièrement comme
une enfant de la loi 101. Donc, je suis le produit de l'oeuvre que vous
avez faite il y a 40 ans... 44 ans. Et même je suis émue de votre
présence, pour vous dire la vérité, et... parce que cette loi-là aussi son objectif
était d'inclure aussi les immigrants, de les inclure dans la société québécoise,
et ça, c'était fondamental.
Je suis aussi le produit des cégeps. Vous
en avez parlé, c'est vrai, ça a été... c'est des années extrêmement
importantes. Moi, j'ai été au cégep Bois-de-Boulogne, donc un cégep francophone,
il y a très longtemps.
Et j'aimerais vous entendre — pas
si longtemps que ça — j'aimerais vous entendre sur votre évaluation
des cégeps aujourd'hui, de leur état, les cégeps en région, par exemple, le financement.
Parce que, oui, on peut, par exemple, mettre... Vous proposez de mettre la
loi 101 dans les cégeps, mais ce qui est important et ce qu'il faut se
demander, c'est pourquoi nos cégeps francophones ne sont pas aussi attractifs
que les cégeps anglophones.
Vous parlez d'une hiérarchisation. Et on
parle peu du financement et du sous-financement chronique, que ce soit dans les
lieux mais aussi les programmes. Ça ne les rend pas attractifs pour les jeunes,
et ils veulent quitter et aller en anglais.
Donc, j'aimerais vous entendre là-dessus
aujourd'hui, sur leur état aujourd'hui et qu'est-ce qu'on doit faire.
M. Rocher (Guy) : Vous
avez bien raison, merci beaucoup de souligner cela, parce que, tout d'abord, ce
que je considère, c'est que, dans les régions, les cégeps sont extrêmement
précieux pour les régions elles-mêmes. D'abord, ils ont permis de garder
beaucoup de jeunes dans les régions, ce qui n'était pas le cas autrefois, et
puis de contribuer au <développement des...
M. Rocher (Guy) :
...
que je considère, c'est que, dans les régions, les cégeps sont
extrêmement précieux pour les régions elles-mêmes. D'abord, ils ont permis de
garder beaucoup de jeunes dans les régions, ce qui n'était pas le cas
autrefois, et puis de contribuer au >développement des régions. Mais, en
même temps, le financement des cégeps, surtout en ce moment, un moment où la
démographie peut mettre en danger certains cégeps dans les régions, le
financement des cégeps est devenu, à mon avis, primordial, tout comme, je
dirais, le financement de l'enseignement supérieur dans son ensemble. Parce que
j'aime bien, maintenant, parler de l'enseignement supérieur dans la situation
des cégeps parce que je crois... À mon avis, ce que la... Ce qui est resté de
la Révolution tranquille de plus fort au Québec, c'est notre enseignement
supérieur, à la fois collégial et universitaire, et qui a le plus besoin encore
aussi d'être... d'être plus...
À mon avis, le chaînon faible dans notre
système d'enseignement, c'est le secondaire. C'est là que nous avons des
pertes, c'est là que nous n'avons pas suffisamment développé l'école
polyvalente comme elle devrait l'être. Et c'est là qu'est, à mon avis, le
chaînon faible.
La Présidente (Mme Thériault) :
Et ceci...
M. Rocher (Guy) : Tandis
que le cégep est vraiment polyvalent. Il a la polyvalence que les polyvalentes
n'ont pas.
La Présidente (Mme Thériault) :
Et ceci mettra fin à l'échange avec la députée de Mercier. Donc, je me tourne
du côté du député de Matane-Matapédia pour 2 min 50 s, vous
aussi.
M.
Bérubé
:
M. Rocher, je suis touché et ému aussi de vous accueillir. Vous êtes
associé à une réalisation historique d'un gouvernement du Parti québécois, le
gouvernement de M. Lévesque, la loi 101 dont tout le monde se réclame
aujourd'hui. Toutefois, sur votre proposition quant à la fréquentation des
cégeps, seul le Parti québécois vous suit. Seul le Parti québécois vous appuie,
mais je me sens moins seul de savoir que vous êtes avec nous dans cette demande
exigeante. Vous seul maintenant peut témoigner du courage qu'il a fallu au
Dr Lorrain, à René Lévesque et ses amis, dont vous êtes, pour faire
adopter une loi qui ne faisait pas consensus. Ce n'était pas l'objectif, c'était
le courage et la nécessité qui a guidé votre action.
Alors, j'aimerais que vous puissiez
indiquer au gouvernement du Québec, par cette tribune, le courage qu'il a fallu
et la nécessité aujourd'hui, parce que vous êtes toujours un témoin attentif,
d'adopter une règle quant à la fréquentation des cégeps pour les francophones
et les allophones. Le gouvernement refuse cette mesure. Je la crois nécessaire.
Je vous offre tout mon temps de parole.
M. Rocher (Guy) : Oui,
vous... Je vous remercie, parce qu'en effet, il y a plus de 40 ans, je
participais, pendant quelques heures, à la commission parlementaire concernant
la loi 101, touchant la loi 101. Eh bien, je peux vous dire que cette
commission parlementaire était beaucoup plus agitée que celle-ci. Elle était
d'abord beaucoup plus longue. Elle a duré des <semaines...
M. Rocher (Guy) :
...
je participais pendant quelques heures à la commission parlementaire
concernant la loi 101, touchant la loi 101. Eh bien, je peux vous
dire que cette commission parlementaire était beaucoup plus agitée que
celle-ci. Elle était d'abord beaucoup plus longue. Elle a duré des >semaines,
un grand nombre de gens sont venus témoigner, et le ministre Laurin a dû
essuyer un grand nombre d'injures pendant cette commission parlementaire, parce
que je peux vous dire qu'en 1977 le projet de loi n° 101 divisait le Québec beaucoup
plus que le projet de loi n° 96 ne le fait aujourd'hui.
Et donc Camille Laurin a été un homme très
courageux, d'abord, je peux le dire, de présenter le projet de loi n° 101 au Conseil
des ministres, je dirais même de le présenter au premier ministre, parce que ce
n'était pas acquis au départ que le M. Lévesque aillait accepter tel quel
le projet de loi qui lui paraissait énorme et, à l'intérieur du Conseil des
ministres, il a fallu attendre à plusieurs sessions pour... Donc, dans son
propre parti, M. Laurin a eu le courage d'affronter des oppositions et
surtout, aussi, dans l'opinion publique particulièrement anglophone, mais
francophone. Il faudrait relire les éditoriaux de Claude Ryan qui était
directeur du Devoir à l'époque et qui était férocement opposé à une
partie de la loi 101. Et donc, oui, je trouve que nous vivons dans une
période plus calme en ce moment, qui me semble plus consensuelle.
M. Bérubé : ...sur les
cégeps...
M. Rocher (Guy) : Mais
pas sur les cégeps. Peut-être pas.
La Présidente (Mme Thériault) :
Et je dois mettre fin à votre échange.
M. Bérubé : Continuons
notre travail de convictions.
M. Rocher (Guy) : Et
donc je suis venu...
La Présidente (Mme Thériault) :
Je suis désolée, je dois mettre fin à l'échange. J'ai déjà concédé beaucoup
plus de temps que je ne l'aurais dû, parce que c'est aussi de l'équité pour les
autres parlementaires. Merci, M. Rocher, de votre présence en commission
parlementaire.
Et nous allons suspendre nos travaux
quelques instants pour permettre à l'autre groupe de prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 17 h 26
)
17 h 30 (version révisée)
(Reprise à 17 h 34)
La Présidente (Mme Thériault) :
Donc, nous reprenons nos travaux. Nous allons maintenant souhaiter la bienvenue
au Mouvement national des Québécoises et des Québécois. Vous avez environ 10 minutes
pour nous exposer votre mémoire, votre point de vue, et, par la suite, ce sera
les échanges avec le ministre et les partis d'opposition. Donc, je vous
inviterais à vous présenter, et la parole est à vous.
Mouvement national des
Québécoises et Québécois (MNQ)
M. Bissonnette (Simon) :
Alors, merci beaucoup, Mmes, MM. les députés de la commission. C'est avec
honneur que le Mouvement national des Québécoises et des Québécois comparait
devant vous aujourd'hui pour faire part à l'Assemblée nationale de ses observations
et recommandations à propos du projet de loi n° 96.
Je suis ici aujourd'hui, au même titre que
mes prédécesseurs, au mouvement national, venu commenter, d'une génération à
l'autre, toutes les grandes étapes historiques des enjeux linguistiques qui ont
marqué l'histoire de notre nation. C'est avec beaucoup de fierté, donc, que je
vous présenterai les observations et propositions d'amendements sur ce que nous
qualifierons, d'entrée de jeu, comme étant la plus importante réforme
linguistique depuis l'adoption de la Charte de la langue française en 1977.
Je suis, donc, Simon Bissonnette,
directeur général du Mouvement national des Québécoises et Québécois. Et je
suis accompagné par Me François Côté, avocat, chercheur, chargé de cours et
conférencier, au niveau international, en droit civil et linguistique, donc,
pour discuter avec vous des aspects juridiques et législatifs de ce projet de
loi.
Depuis quelques années, donc, le Québec
commence enfin à prendre conscience d'une réalité : la loi 101 n'a
pas atteint les objectifs qu'elle s'était fixés en 1977 afin de contrecarrer le
déclin de la langue française au Québec. Cette loi était destinée à s'inscrire
dans une démarche d'émancipation nationale voulant que le Québec... voulant le
Québec pleinement maître de ses leviers politiques et culturels. Toutefois,
après avoir été confinée et contrainte depuis 1982, elle a, tout au plus,
ralenti la tendance, et pendant un temps seulement, aujourd'hui manifestement
révolu. 40 ans plus tard, donc, les chiffres parlent douloureusement. La
langue française <recule...
M. Bissonnette (Simon) :
...
Toutefois, après avoir été confinée et contrainte depuis 1982, elle
a, tout au plus, ralenti la tendance, et pendant un temps seulement,
aujourd'hui manifestement révolu. 40 ans plus tard, donc, les chiffres
parlent douloureusement. La langue française >recule de plus en plus à Montréal,
où elle est en passe de devenir la langue minoritaire, mais le phénomène
s'étend et s'accentue maintenant du côté de Laval, en Montérégie et dans bien
d'autres régions du Québec. Sur le terrain, le français recule constamment et
est aujourd'hui traité, à bien des endroits, surtout à Montréal, comme langue
optionnelle, d'accommodement, d'exception, dont on peut très bien se passer. Le
Mouvement national refuse de céder au fatalisme, mais l'heure est grave, et il
faut avoir la lucidité de le reconnaître.
Heureusement, la prise de conscience
sociale semble avoir eu lieu, et, dans cette perspective, le mouvement ne peut
que se réjouir de vous voir vous réapproprier, au nom du Québec, cet enjeu
indissociable de l'identité québécoise. En soi, votre démarche est forte,
puissante, et ne peut qu'être saluée.
Cependant, au-delà des intentions, le mouvement
reste un peu mitigé sur le contenu et les effets concrets à anticiper de
certains aspects du projet de loi et des renforcements qu'il propose à la Charte
de la langue française. De l'avis du mouvement, le projet de loi constitue un
excellent premier pas, mais ce projet de loi aurait grand avantage à être
bonifié par des mesures plus effectives et plus concrètes. Nous avons devant
nous un projet de loi juridiquement solide face aux tribunaux, mais il doit
aussi raviver le statut du français au Québec et avoir des effets sur les
secteurs névralgiques qui ont le plus besoin d'interventions, sinon l'ensemble
de l'oeuvre risque de rater sa cible.
Dans cette perspective, je cède maintenant
la parole à mon collègue, Me Côté, pour la suite de notre présentation.
M. Côté (François) :
Merci, M. Bissonnette. Mmes et MM. les députés membres de la commission,
comme mon collègue le soulignait, le projet de loi n° 96
propose une réforme de la Charte de la langue française qui laisse, selon nous,
sur un bilan mitigé. Il brille d'audace et d'intelligence législative sur ses
volets strictement juridiques, mais en revanche, sa timidité détonne lorsqu'il
est question des mesures de fond. C'est un premier pas fort louable, mais il
faut faire plus, il faut faire mieux.
Nous avons rédigé et déposé un mémoire de
47 pages compilant nos observations et neuf propositions d'amendements que
nous estimons nécessaires au projet de loi n° 96 pour
le rapprocher de ses objectifs et consolider quelques-unes de ses vulnérabilités
potentielles. Le temps manquant cruellement dans une présentation orale de
10 minutes, j'irai ici à l'essentiel, en invitant respectueusement les
membres de cette commission à se rapporter à notre mémoire écrit pour plus de
détails et à soulever des points de discussion plus ciblés lors de la période
de questions.
Sur le plan strictement juridique, le
projet de loi constitue un puissant geste d'affirmation nationale qui pose
nettement la distinction, non seulement culturelle et linguistique, mais aussi
juridique du Québec par rapport au reste de la fédération. Il fait réaliser au
Québec plusieurs gains légaux très importants pour protéger et promouvoir la
langue française dans son ordre juridique interne. C'est à souligner, et nous
nous en réjouissons.
Le projet de loi inscrit foncièrement la
Charte de la langue française dans une approche territoriale du droit
linguistique et se distancie de l'approche individualiste jusque-là prisée par
les tribunaux et le fédéral pour <traiter la loi...
M. Côté (François) :
...
réaliser au Québec plusieurs gains légaux très importants pour
protéger et promouvoir la langue française dans son ordre juridique interne.
C'est à souligner, et nous nous en réjouissons.
Le projet de loi inscrit foncièrement
la Charte de la langue française dans une approche territoriale du droit
linguistique et se distancie de l'approche individualiste jusque-là prisée par
les tribunaux et le fédéral pour >traiter la loi 101 comme une
exception restrictive à contourner à chaque occasion possible. Ce recadrage
théorique était nécessaire. Et nous recommanderons... nous recommandons,
dis-je, amendement 1, de le formaliser dans le préambule de la charte.
• (17 h 40) •
Dans ce même état d'esprit, le mouvement
tient particulièrement à saluer les avancées constitutionnelles réalisées par
le projet de loi n° 96 au bénéfice du Québec. On saluera les modifications
constitutionnelles proposées aux articles 90Q.1 et 90Q.2, de la
Constitution de 1867 en affirmant le statut du Québec en tant que nation
ainsi que le statut constitutionnel du français comme seule langue officielle
du Québec. Pour éviter tout glissement interprétatif qui le présenterait
autrement, nous recommandons cependant, amendement 2, de préciser qu'il
constitue aussi la seule langue commune du Québec. Cette reconnaissance est de
nature à entraîner de puissantes ramifications touchant la place, la
distinction et les pouvoirs du Québec dans la fédération. Et cette modification
constitutionnelle, tel que nous l'avons démontré dans notre étude Restaurer
le français langue officielle, est tout à fait légale et valide du point de
vue juridique, nombreux précédents à l'appui.
Dans la même lignée, nous saluons aussi le
fait d'avoir enfin, 40 ans plus tard, répliqué formellement à l'arrêt
Blaikie de la Cour suprême du Canada pour restaurer le statut du français comme
langue officielle souveraine au Québec en matière de législation en obligeant
la traduction automatique en français de tout jugement entendu en anglais par
un tribunal québécois et en exigeant des corporations et des personnes morales
de faire traduire leurs procédures judiciaires en français. Idée que nous
proposons, d'ailleurs, amendement 3, d'étendre aussi aux mises en demeure.
Ces mesures, qui sont, à notre avis, parfaitement légales et valides,
entraîneront de puissants effets sur la normalisation et l'accessibilité du
français comme langue du droit et de la justice au Québec.
Pour conclure sur ce volet juridique,
c'est, selon nous, à bon droit que législateur a eu recours aux dispositions dérogatoires
pour protéger la Charte de la langue française contre les validations
constitutionnelles par les tribunaux canadiens. Le projet de loi n° 96
n'est, selon nous, certainement pas discriminatoire. Mais, l'histoire nous en
est témoin, le Québec ne peut pas faire aveuglément confiance à l'orientation
idéologique des tribunaux canadiens lorsqu'il est question de reconnaître la
distinction juridique québécoise fondée dans un modèle davantage civiliste et républicain
que celui de la common law libérale du Canada anglais lorsque vient le temps de
juger l'affaire nationale, linguistique ou culturelle. Par ce recours préventif
aux dispositions dérogatoires, le Québec s'assure que la fleur de lis ne sera
pas jugée et condamnée au nom de la seule offense de ne pas être une feuille
d'érable.
Ensuite, sur le fond effectif, cependant,
le projet de loi n° 96 aurait, selon nous, grand avantage à recevoir
quelques bonifications. D'emblée, ayons la lucidité de le reconnaître, la
question linguistique au Québec ne peut se dissocier de celle de l'immigration.
Une intégration correcte et réussie de notre immigration est une condition sine
qua non pour que celle-ci participe positivement au renforcement de la langue
française au Québec et pour que ses membres, les premiers intéressés, puissent
pleinement s'épanouir socialement, culturellement et linguistiquement dans leur
société d'accueil. Vraiment, nous invitons le législateur à fortement
considérer, amendement 5, que le moment est plus que venu de conduire une
étude sur la capacité d'intégration migratoire du Québec, en lien avec nos
politiques linguistiques.
De <manière connexe...
M. Côté (François) :...
et pour que ses membres, les premiers intéressés,
puissent pleinement s'épanouir socialement, culturellement et linguistiquement
dans leur société d'accueil. Vraiment, nous invitons le législateur à fortement
considérer, amendement 5, que le moment est plus que venu de conduire une
étude sur la capacité d'intégration migratoire du Québec, en lien avec nos
politiques linguistiques.
De >manière connexe, amendement 6,
il serait aussi intéressant d'adjoindre le projet de loi n° 96 d'une
politique de convergence culturelle pour renforcer l'attractivité centrale du
français et de l'identité québécoise comme pôle de référence à l'intégration et
au vivre-ensemble sociaux au Québec. Mentionnons-le, l'Institut de recherche
sur le Québec a réalisé une importante étude sur la convergence culturelle, il
y a quelques années, accompagnée d'un projet de loi modèle dont le législateur
pourra avoir avantage à s'inspirer.
Nous sommes également d'avis, amendement 7,
que le projet de loi n° 96 devrait aller plus loin, en matière d'éducation
supérieure, et étendre la Charte de la langue française aux cégeps ou, au
moins, subsidiairement revoir foncièrement les critères d'admissibilité aux
cégeps publics anglophones. Dans l'état actuel des choses, les cégeps
anglophones sont non seulement grossièrement surfinancés par rapport à leur
représentation démographique réelle, mais, au surplus, grâce à ce
surfinancement, il recrute plus de deux tiers de leurs étudiants chez les
francophones et les allophones. Or, de nombreuses études l'ont démontré, les
études collégiales ont une influence beaucoup plus puissante que l'éducation
primaire et secondaire sur l'intégration à un pôle linguistique à un autre. Il
faut avoir la lucidité d'aborder ce domaine névralgique.
Ensuite, amendement 8, un mot rapide
sur les villes bilingues. Nous croyons qu'il est inapproprié de permettre à une
municipalité qui ne rencontre plus le seuil démographique requis de conserver
un statut bilingue. Le retrait de ce statut devrait être automatique après le
constat de la perte de ce seuil pendant un certain temps. Et nous soumettons
qu'il serait plus approprié de faire appel aux chiffres de l'Institut de la
statistique du Québecplutôt qu'à Statistique Canada.
Je vais redonner maintenant la parole à M. Bissonnette
pour présenter notre dernière proposition et le mot de la fin. Merci de votre
attention.
M. Bissonnette (Simon) :
Merci beaucoup, Me Côté. Nous allons effectivement conclure notre présentation
avec une dernière proposition, peut-être un peu plus audacieuse, mais nous
croyons fermement que le fruit est mûr pour renouer avec l'idée initiale de la
Charte de la langue française en matière de publicité. Nous croyons justifié,
et il s'agit de notre neuvième et dernière proposition d'amendement au projet
de loi, de revenir ainsi à l'esprit même de la loi 101, en exigeant que
l'affichage et la publicité commerciale, chez les entreprises de 25 employés
et plus, nous visons, donc, ici les géants commerciaux qui s'imposent et qui
dominent le marché, que cette publicité soit faite, donc, exclusivement en français
au Québec. Cette publicité occupe une place très importante dans la
normalisation linguistique présentée au public, particulièrement auprès des
jeunes et de l'immigration.
Nous croyons que les grandes entreprises
ont une responsabilité, en tant que citoyens corporatifs au Québec, et
constituent une force plutôt qu'un obstacle à la qualité du français dans le
quotidien, au travers de la publicité. Et l'état du français, à Montréal, en
atteste, il est, donc, plus que temps d'en tenir compte. Cette mesure serait,
selon nous, elle aussi, tout à fait valable juridiquement non seulement à la
lumière de la jurisprudence antérieure, mais aussi, et encore plus, vu le
recours aux dispositions dérogatoires déjà proposées, déjà prévues dans le projet
de loi.
Voilà, donc, ce qui conclut notre
allocution d'ouverture, présentation. Au nom, donc, du Mouvement national des
Québécoises et <Québécois et...
M. Bissonnette (Simon) :
... elle aussi,
tout à fait valable juridiquement non
seulement à
la lumière de la jurisprudence antérieure, mais aussi, et encore plus, vu le
recours aux
dispositions dérogatoires
déjà proposées,
déjà
prévues dans le
projet de loi.
Voilà donc ce qui conclut notre
allocution d'ouverture, présentation. Au nom donc du Mouvement national des
Québécoises et >Québécois et de nos 19 sociétés affiliées partout
sur le territoire, je vous remercie de votre attention, et, bien entendu, nous
sommes prêts à échanger avec vous.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci beaucoup pour votre présentation. Vous avez pris une minute de plus, qui
sera offerte par le ministre sur son temps, donc il n'y a pas de problème. M.
le ministre, vous avez 16 minutes. Allez-y.
M. Jolin-Barrette : Oui.
Merci, Mme la Présidente. Bonjour, M. Bissonnette, Me Côté, merci de
participer aux travaux de la commission. J'en profite également pour saluer la
présidente du mouvement national des Québécois et des Québécoises qui, je sais,
est familière avec la députée de Marguerite-Bourgeoys.
D'entrée de jeu, Mme la Présidente, je
voudrais poser la question aux témoins. Vous l'avez abordée un petit peu, tout
à l'heure, Me Côté, relativement à l'utilisation des dispositions de
dérogation ou, on pourrait appeler ça également, les dispositions de souveraineté
parlementaire. Je voudrais savoir, selon vous, est-ce que le fait d'utiliser
ces dispositions-là, ce n'est pas une démonstration qu'il y a violation de
droit, mais plutôt, bel et bien, que ce sont les parlementaires qui choisissent
l'ordonnancement juridique qui va s'appliquer sur le territoire québécois par
rapport au statut linguistique.
M. Côté (François) :
Absolument. Le recours aux dispositions dérogatoires, l'histoire du Québec en
atteste, a eu lieu à de très nombreuses reprises. Plus d'une centaine de fois
depuis l'entrée en vigueur des chartes, le Québec a eu recours préventivement
aux dispositions dérogatoires pour souligner... Et remarquez qu'en démocratie,
dans notre système civiliste, le dernier mot doit revenir au législateur élu.
Et ici le recours aux dispositions dérogatoires est une manière pour le
législateur de dire : Cet enjeu est d'une importance telle que nous
choisissons de le protéger d'une manière particulière au nom des intérêts
collectifs de la société québécoise. Et il ne s'agit pas du tout — et
je tiens à casser de manière péremptoire toute telle prétention — d'un
aveu de violation des libertés fondamentales, absolument pas. C'est simplement
que le législateur utilise son droit d'être en désaccord potentiellement avec
les tribunaux pour dire : Nous ne partageons pas forcément votre vision
des choses et nous voulons rappeler la souveraineté parlementaire et l'importance
que le législateur élu par la population ait le dernier mot lorsqu'il est
question d'affaires juridiques de cette importance. Donc, oui, tout à fait, c'est
rappeler qu'en démocratie le pouvoir appartient au législateur élu, qui a le
droit d'avoir le dernier mot de manière souveraine.
M. Jolin-Barrette :
Pouvez-vous également nous renseigner... Vous avez, dans votre réponse, abordé
la distinction et la spécificité québécoises au niveau de son droit civil par
opposition au Canada avec la common law. Pourquoi l'approche républicaine,
l'approche civiliste est importante dans l'ordre juridique québécois?
M. Côté (François) :
Elle <n'est pas...
M. Jolin-Barrette :
... également nous renseigner... Vous avez, dans votre
réponse, abordé la distinction et la spécificité québécoises au niveau de son
droit civil par opposition au Canada avec la common law. Pourquoi l'approche
républicaine, l'approche civiliste est importante dans l'ordre juridique
québécois?
M. Côté
(François) : Elle >n'est pas qu'importante, elle est
capitale. Alors, je ne vais pas me lancer dans un cours de droit, on n'a malheureusement
pas 45 heures devant nous, mais, pour le résumer au plus simple, il y a
une différence dans la manière de penser le droit. Dans plusieurs concepts
cruciaux, dans la méthodologie juridique, dans le sens de certaines notions,
que veut dire, par exemple, le mot «égalité»? Si on s'en fie à la jurisprudence
de la common law anglocanadienne, l'égalité, c'est l'égalité réelle, c'est
l'égalité de résultat. Ce n'est pas la même notion d'égalité que la vision
civiliste, qui parle d'une égalité formelle, qui parle d'une égalité de
chances. Donc, on a déjà des conceptions du droit qui sont complètement
différentes, et, dépendamment du genre de rapport juridique qu'on va mobiliser
pour aborder une question, on va atteindre le jour ou la nuit au niveau de la
réponse juridique.
Je vous donne un exemple :
l'encadrement des symboles religieux. Ça, c'est un dossier qui occupe un peu l'actualité
sur d'autres plans, mais, si vous regardez dans la tradition civiliste,
l'encadrement du port de symboles religieux est tout à fait légitime et légal.
Il y a de très nombreux précédents en Europe, en France, ainsi de suite, où,
oui, tout à fait, l'égalité de tous devant la loi n'est pas interdite si tous
font face à la même restriction. Mais, de l'autre côté, en common law
anglocanadienne, américaine, britannique, non, au contraire, c'est une égalité
qui est vue dans une perspective subjective et individuelle, où, là, on va se
concentrer sur l'effet ressenti par un individu et non pas l'égalité formelle
de tous devant la loi. Et on a des critères analytiques différents, on pense
différemment, et on va nécessairement interpréter, comprendre et appliquer le
droit différemment.
Le rappel de la tradition civiliste au
Québec, dans cette perspective, est extrêmement importante, parce qu'il
souligne notre façon différente de penser le droit, qui nous est pourtant
reconnue historiquement depuis l'Acte de Québec de 1774. Nous avons, au Québec,
une distinction sociale, pas uniquement dans notre manière de parler et de vivre,
mais aussi dans notre manière de comprendre et d'appliquer cette science qui
s'appelle droit, qui nous est reconnue depuis des siècles et qui est une part
intégrante de notre identité, que l'on doit absolument promouvoir et défendre.
• (17 h 50) •
M. Jolin-Barrette : O.K.
Une autre question. À la page 27 de votre mémoire, là, vous affirmez que
la langue française comme langue commune, ça constitue un élément important au
niveau des impératifs démocratiques. Pourquoi est-ce que vous énoncez cela?
M. Côté (François) :
Alors... voilà. Donc, le français langue commune fait partie des impératifs
démocratiques, parce que c'est intimement lié à la notion même du peuple et de
la société québécois. Le fait d'avoir une majorité francophone fait partie de
ce qu'est le Québec en tant que nation. Bien entendu, il y a une pluralité de
langues individuelles qui en font partie, mais notre langue commune, c'est le
français. Si vous enlevez la langue française, vous enlevez une part cruciale de
ce que c'est que d'être Québécois. Et notre démocratie, c'est une <question...
M. Côté (François) :... fait partie de ce qu'est le Québec en tant que nation. Bien
entendu, il y a une pluralité de langues individuelles qui en font partie, mais
notre langue commune, c'est le français. Si vous enlevez la langue française,
vous enlevez une part cruciale de ce que c'est que d'être Québécois. Et notre
démocratie, c'est une >question, pour une vision civiliste, pour une
vision québécoise, qui est historiquement la nôtre depuis des siècles, être Québécois,
ce n'est pas qu'une affaire individuelle, c'est une affaire de société dans
laquelle notre nature même, en tant que peuple, en tant que nation francophone,
est absolument liée à nos enjeux démocratiques et à notre existence même en
tant que société distincte.
M. Jolin-Barrette : Sur
la question de la société distincte, vous avez vu, on a inséré dans le projet
de loi le fait que le Québec est une nation, on l'a inscrit dans la
Constitution de 1867, dans la Loi constitutionnelle de 1867 , en indiquant
également que la langue officielle du Québec est le français. Tout à l'heure,
on avait M. Rocher qui témoignait, et il faisait un lien entre la langue
et la culture et l'intégration, notamment, des personnes immigrantes, et c'est
la trame narrative de la Charte de la langue française, de la loi 101, qui
a été déposée en 1977.
Est-ce que nous devrions utiliser le projet
de loi n° 96, notamment, pour parler de culture et également pour faire en
sorte d'indiquer très clairement que le Québec a un modèle d'intégration
distinct du multiculturalisme canadien? Est-ce que le projet de loi n° 96
est le véhicule approprié pour indiquer clairement l'aspect culturel et
l'aspect d'intégration des personnes immigrantes, que notre vivre-ensemble doit
se faire d'une façon distincte de celui du multiculturalisme canadien?
M. Côté (François) :
Si vous me permettez, j'aimerais répondre. Alors, oui, absolument, mais il ne
peut pas en être le véhicule exclusif. Dans ce sens que le projet de loi
n° 96 serait, selon nous, une excellente occasion de parler de convergence culturelle, de rappeler le lien
consubstantiel entre la langue et la culture au Québec, les deux sont
indissociables, et de le mettre de l'avant comme un pôle référentiel central de
l'intégration culturelle au Québec. Et c'est dans cette perspective que nous
avons proposé au gouvernement, c'est un des amendements suggérés, de commencer
à faire référence à une politique de convergence culturelle qui pourrait
s'accompagner... donc, nous avons le projet de loi d'une part, et on pourrait
adopter des politiques de convergence culturelle, on pourrait adjoindre le projet
de loi n° 96 avec un projet de loi modèle de convergence culturelle qui
irait de pair et qui ferait synergie avec le projet de loi n° 96 et la
convergence culturelle.
Oui, l'occasion est la bonne, et je pense
même que... Excusez-moi. Oui, l'occasion est la bonne, et je pense même que
c'est nécessaire de le rappeler, il y a une distinction fondamentale au Québec
dans notre rapport face à l'intégration de la diversité culturelle. Le Québec
n'est pas multiculturaliste ni interculturaliste. Il appartient à la
convergence culturelle comme modèle d'intégration de notre diversité. Cette
réalité, on l'observe historiquement depuis la Nouvelle-France, depuis le début
du Régime britannique, depuis le début du XIXe, XXe et aujourd'hui le XXIe
siècle, nous sommes différents du reste du Canada anglais, et le
multiculturalisme n'est pas et n'a jamais été notre modèle d'intégration. Il
serait approprié de le mentionner dans la loi et de faire suivre une telle
mention de mesures <effectives...
M. Côté (François) :... depuis la Nouvelle-France, depuis le début du Régime
britannique, depuis le début du XIXe, XXe et
aujourd'hui le XXIe siècle,
nous sommes différents du reste du
Canada anglais, et le multiculturalisme
n'est pas et n'a jamais été notre modèle d'intégration. Il serait approprié de
le mentionner dans la loi et de faire suivre une telle mention de mesures >effectives
comme des politiques gouvernementales et un projet de loi modèle.
M. Jolin-Barrette : Quel
est... Quel serait l'effet de ne pas joindre l'élément culturel à l'élément
linguistique pour l'avenir du français au Québec, selon vous?
M. Côté (François) :
Ce serait tomber dans le piège de, disons... le piège du multiculturalisme de...
à la Pierre Elliott Trudeau, qui avait fait la diffraction, d'une part,
bilingue... bilinguisme et multiculturalisme pour essayer de dissocier la
langue française de la culture, et on le voit, ce que ça donne après 40 ans
de Charte canadienne des droits et libertés, ça ne fonctionne pas. Vous ne
pouvez pas dissocier la culture de la langue sans vous retrouver avec des
problématiques d'intégration de la diversité. La langue fait partie de la
culture. Si on commence à présenter la langue comme un simple outil de
communication qui n'a aucun poids culturel, on rate la cible. Et, dans le
contexte nord-américain, vous avez besoin de joindre la langue et la culture
pour renforcer l'attractivité du français au Québec. Si on ne présente le
français que sous son volet utilitaire en le déchargeant de toute sa charge et
son poids culturel, l'attractivité du français en Amérique du Nord... Nous
sommes aux portes du géant américain et enclavés dans la fédération canadienne.
On est sept millions de francophones dans un océan d'anglophonie de
360 millions. Donc, si on évacue la culture et qu'on ne regarde le
français que comme une langue de communication, comme un simple outil sans
aucune charge sociale et nationale, son pouvoir d'attractivité de la jeunesse,
de l'immigration, de la diversité culturelle chute, et ça donne les résultats
qu'on voit, ça donne de l'anglicisation, ça ouvre la porte à la domination de
l'anglais dans l'attractivité auprès de la jeunesse et de l'immigration. Donc, il
ne faut pas faire ça, langue et culture sont liées et indissociables au Québec.
M. Bissonnette (Simon) :
Intimement.
M. Jolin-Barrette : Je
vous remercie pour votre présentation. Je vais céder la parole à mes collègues,
mais un grand merci au Mouvement national des Québécois pour la présentation du
mémoire.
M. Côté (François) :Merci, M. le ministre.
M. Bissonnette (Simon) :
Merci, M. le ministre.
La Présidente (Mme Thériault) :
Donc, sans plus tarder, M. le député de Chapleau, la parole est à vous. Je vous
indiquerai le temps dans quelques secondes...
M. Lévesque (Chapleau) : D'accord,
merci.
La Présidente (Mme Thériault) :
...lorsque mon écran reviendra.
M. Lévesque (Chapleau) : D'accord.
Merci beaucoup, Mme la Présidente. Bonjour, M. Bissonette et Me Côté, vraiment
un plaisir, merci de votre présentation. J'aimerais peut-être un peu, là, continuer
dans la même lignée que le ministre. Donc, deux approches différentes, deux
concepts différents. Vous aviez parlé de l'approche territoriale, davantage
civiliste, et également l'approche plus individuelle, l'approche de common law.
Vous avez dit que ce serait peut-être intéressant de l'introduire, de
l'inscrire de façon formelle dans la charte. Pouvez-vous nous éclairer sur
votre vision de cette inclusion-là et ce que ça pourrait permettre de faire?
Merci.
M. Côté (François) :
Alors, pour le résumer rapidement pour le bénéfice de tous, la différence entre
l'approche territoriale et l'approche individualiste, c'est que l'approche
territoriale, c'est une approche du droit linguistique qui préconise qu'une
langue a un <statut...
M. Lévesque (Chapleau) :
... sur votre vision de cette inclusion-là et ce que ça pourrait permettre de
faire? Merci.
M. Côté
(François) : Alors, pour le résumer
rapidement pour le
bénéfice de tous, la différence entre l'approche territoriale et l'approche
individualiste, c'est que l'approche territoriale, c'est une approche du droit
linguistique qui préconise qu'une langue a un >statut particulier sur
l'ensemble d'un territoire et doit servir de langue commune. Donc, c'est la
langue des institutions, c'est la langue normale et habituelle, de façon
généralisée, pour l'ensemble de la population, tandis que l'approche
individualisée va viser à protéger uniquement et exclusivement le droit d'un
individu de pouvoir s'adresser à une autorité dans la langue protégée.
Le modèle individualiste peut tout à fait
fonctionner pour des populations qui sont minoritaires au sein de leurs territoires
et qui n'ont accès à aucun levier de contrôle politique. Cependant, ce n'est
pas le cas du Québec, qui est majoritaire sur le territoire de l'État du
Québec, mais minoritaire au sein de la fédération et noyé dans l'océan de
l'anglophonie nord-américaine. Dans ce cas, uniquement l'approche territoriale
peut fonctionner parce que c'est la seule qui soit capable de maintenir une
majorité nationale. L'approche individuelle va, au contraire, saborder cette
mesure.
Donc, pour bien recadrer et bien souligner
l'appartenance du projet de loi n° 96 et la vision
civiliste de l'approche territoriale dans notre projet de loi, nous avons
proposé, à l'amendement n° 1, de modifier le
préambule de la Charte de la langue française pour qu'il se lise comme suit,
donc : «En vertu de la souveraineté parlementaire, il revient au Parlement
du Québec de confirmer le statut du français comme langue officielle et langue
commune — et là notre ajout — pour l'ensemble du territoire
du Québec ainsi que...» là, je continue avec la lecture, «ainsi que de
consacrer la prépondérance de ce statut dans l'ordre juridique québécois tout
en assurant un équilibre entre les droits collectifs de la nation et les droits
et libertés de la personne.» Cette inclusion de parler du modèle territorial,
les tribunaux ne pourront pas l'ignorer, et on ferait un recadrage théorique
important qui va entraîner des grosses conséquences interprétatives sur ce qu'il
va se passer une fois que le projet de loi va se retrouver à être analysé sous
l'oeil juridique et judiciaire.
La Présidente (Mme Thériault) :
Il vous reste 2 min 30 s, M. le député.
M. Lévesque (Chapleau) :
Une autre question. Vous avez fait mention, justement... lorsqu'il est question
de faire une modification constitutionnelle à l'acte constitutionnel de 1867,
vous avez mentionné «seule langue officielle». On a eu un débat, hier, du
moins, un intervenant est venu nous entretenir sur le mot «seule». Je sais que
c'est un peu de sémantique, là, mais il y avait une réflexion quant au mot
«seule». Est-ce que vous avez également une interrogation, une préoccupation
quant aux mots «seule langue», ou le retrait de ce mot-là pourrait aussi faire
le même travail voulu?
• (18 heures) •
M. Côté (François) :
Alors, si vous me permettez, je n'ai pas eu le bénéfice de suivre cette intervention.
Cependant, en ce qui concerne l'utilisation du mot «seule», seule langue
officielle, et on propose même «seule langue commune», et, ailleurs dans notre
mémoire, on utilise également le mot «seule», c'est important. Il faut rappeler
qu'au Québec nous avons une seule langue officielle, une seule langue commune,
le français, et non pas le français et l'anglais. Donc, c'est une manière de
dire... c'est une manière de contredire, de contrecarrer, de résister, disons,
à la pression fédérale qui voudrait faire, passivement, au travers des langues
officielles, et ainsi de suite, mais c'est... Bon, excusez-moi, je vais
reformuler. Mais c'est une <manière de résister...
>
18 h (version révisée)
< M. Côté
(François)T : ...le
français et non pas le
français
et l'anglais, donc c'est une manière de dire... c'est une manière de
contredire, de contrecarrer, de résister, disons, à la pression
fédérale
qui voudrait faire passivement, au travers des langues officielles, et ainsi de
suite, mais c'est — bon, excusez-moi, je vais reformuler — mais
c'est une >manière de résister à l'approche voulant que le français et
l'anglais soient toutes deux des langues officielles et surtout toutes deux des
langues communes.
Or, à partir du moment donné où on
commence à reconnaître ça au Québec, et là je ne veux pas parler du fédéral,
mais, à partir du moment donné où on commence à reconnaître au Québec que, oui,
le français est une langue officielle tout comme l'anglais, «that's it», on a
sabordé complètement tous les efforts de protection de la langue française, qui
ne peut fonctionner qu'avec le modèle territorial, et ce modèle territorial ne
fonctionnera pas si vous avez deux langues officielles. Il faut vraiment
rappeler que seul le français est la langue officielle et commune du Québec
pour éviter, justement, toute prétention à l'effet contraire ancrée notamment
dans des positions multiculturalistes voulant que oui, le français est une
langue officielle, mais pas la seule. L'exclusivité est extrêmement importante
ici.
M. Lévesque (Chapleau) :
D'accord. Vous avez parlé, tout à l'heure, également de Statistique Canada
et également l'Institut de la statistique du Québec. On a également eu un
intervenant précédemment qui nous a parlé de cet enjeu-là, d'une certaine
problématique qu'il y voyait également. Vous pouvez peut-être nous éclairer,
nous dire qu'est-ce que vous voyez en termes de statistiques entre les deux,
là, puis comment les utiliser.
La Présidente (Mme Thériault) :
En 15 secondes, s'il vous plaît.
M. Bissonnette (Simon) :
Bien, rapidement, dans le fond, on tenait le propos en lien avec les
statistiques sur les anglophones dans les municipalités en lien avec le statut
bilingue de ces villes-là. On a l'impression que, si on tenait nos propres
statistiques grâce à notre institut, on pourrait maintenir des données non
seulement plus fiables, mais probablement plus à jour sachant que Statistique
Canada tient compte de ces données au rythme de ses recensements qui ne sont
pas fréquents. On serait probablement capable avec nos propres outils...
La Présidente (Mme Thériault) :
Et je dois mettre fin à l'échange. Désolé, M. Bissonnette, je dois mettre
fin à l'échange.
M. Bissonnette (Simon) :
...d'être plus précis. Ça va. Ça va. Ça va.
La Présidente (Mme Thériault) :
Et je vais aller du côté de la députée de Marguerite-Bourgeoys. Vous avez
11 min 20 s.
Mme David : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Vous avez des considérations nombreuses,
importantes, et ce n'est pas habituel, mais ce n'est certainement pas manque
d'intérêt ou d'inspiration, mais, par respect pour le rôle de présidente du MNQ
que joue ma soeur Thérèse, je vais m'abstenir d'intervenir dans la discussion
et je vais passer tout de suite la parole à mon collègue le député de
La Pinière.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. M. le député de La Pinière.
M. Barrette : Merci, Mme
la Présidente. Alors, je fais quelques commentaires introductifs qui sont
importants et qui sont adressés surtout au ministre, dans une certaine mesure,
mais à vous aussi de l'union.
Regardez, je constate, dans votre mémoire,
que... Vous savez ce que je trouve le plus intéressant dans votre mémoire, ce
sont vos notes de bas de page, et je constate essentiellement que, tous les
gens qu'on a entendus aujourd'hui, bien, vous êtes tous dans les mêmes
documents. Les documents sont quasiment des copiés-collés, vous vous citez tous
les uns les autres, alors ça fait une certaine uniformité du commentaire, et je
vois, au travers du masque du ministre, que ça fait son affaire. Je peux le
comprendre, évidemment, mais, à un moment donné, <on ne peut pas faire
autrement ...
M. Barrette : …tous les
gens qu'on a entendus aujourd'hui, bien, vous êtes tous dans les mêmes documents.
Les documents sont quasiment des copier-coller, vous vous citez tous les uns,
les autres, alors ça fait une certaine uniformité du commentaire, et je vois,
au travers du masque du ministre, que ça fait son affaire. Je peux le
comprendre, évidemment, mais, à un moment donné, >on ne peut pas faire
autrement que le nommer, là. Alors, vous avez des mémoires similaires, vous
vous citez les uns et les autres, alors ça m'autorise, moi, à prendre certaines
interventions de vos prédécesseurs que vous n'avez pas faites pour vous poser
une ou deux questions.
Vous nous dites… Regardez, il y a une
intervention qui a été très intéressante, qui a été faite par M. Sabourin,
que vous citez vous-même, dans votre documentation, à l'effet que la
problématique des francophones et des anglophones est la même, j'insiste, les
francophones et les anglophones, parce que les deux se sous-reproduisent, alors
on se retrouve, donc, dans une problématique numérique qui fait en sorte que
les deux communautés se retrouvent en compétition pour avoir accès aux
immigrants qui deviennent ipso facto la condition de leur survie. Et vous venez
de nous dire, dans votre présentation, Me Côté, d'une façon très
étonnante, que le projet de loi n° 96 n'est pas discriminatoire. Bien oui,
il l'est, là, dans une certaine mesure, parce que vous avez besoin, besoin — puis
j'en suis, là, ne pensez pas que je n'en suis pas, j'en suis — il y a
un besoin de franciser les allophones. Alors, franciser les allophones, c'est
une… il y a une certaine difficulté, la loi s'y adresse, mais ne venez pas me
dire que ce n'est pas discriminatoire en soi, là.
M. Côté (François) :
Puis-je répondre?
M. Bissonnette (Simon) :
Oui, oui, allez-y, Me Côté.
M. Côté (François) :
Alors, M. le député, j'aurais plusieurs choses à répondre. La première, c'est
que, oui, écoutez, il est possible que les esprits se rencontrent et il est
possible que plusieurs chercheurs et plusieurs juristes partagent des mêmes
conclusions. Donc, oui, c'est possible qu'on dise les mêmes propos que certains
autres de nos confrères qui ont passé avant nous, mais soyez assuré de notre
indépendance et de notre autonomie intellectuelle.
Ensuite, bien, permettez-moi d'exprimer
mon désaccord total avec votre proposition. Je le maintiens, le projet de loi
n° 96, la Charte de la langue française n'est pas discriminatoire, pas du
tout. Elle propose une vision de l'égalité formelle qui s'applique à tous de
même manière, elle ne vise pas ni particulièrement la communauté anglophone, ni
particulièrement quelque communauté que ce soit, elle s'applique à tout le
monde. Et, ici, il faut garder en tête qu'au Québec nous avons une société qui
se définit... la société québécoise se définit par sa majorité francophone. Nos
institutions publiques, financées par l'État, par les taxes et les revenus des
contribuables québécois, l'ensemble de la population ne devraient pas être utilisées
comme un véhicule d'anglicisation du Québec au sens tel qu'on le voit, qu'au
travers d'une Charte de la langue française qui a été criblée de trous par <40 ans
de jurisprudence…
M. Côté (François) :
…l'État, par les taxes et les revenus des contribuables
québécois, l'ensemble
de la
population, ne devraient pas être utilisées comme un véhicule
d'anglicisation du Québec au sens tel qu'on le voit, qu'au travers d'une Charte
de la langue française qui a été criblée de trous par >40 ans de
jurisprudence de la Cour suprême du Canada. On se retrouve avec un français qui
diminue, qui diminue. Et, notamment, c'est en allant chercher, en allant
rejoindre et en intégrant le plus possible de notre immigration au pôle de
référence francophone que ça devient une condition sine qua non pour la survie
de la société québécoise, pour la survie linguistique du français au Québec, et
ça, c'est au bénéfice de tous.
Mais j'aimerais qu'on m'explique selon
quelle acrobatie intellectuelle, et je ne dis pas ça pour vous porter ombrage,
mais selon quelle acrobatie intellectuelle on peut voir une quelconque forme de
discrimination en disant qu'au Québec nos institutions publiques, et on ne
porte pas du tout ombrage aux institutions privées, si vous voulez aller à
l'école privée pour recevoir de l'éducation en anglais, en allemand, en
japonais, il n'y a rien qui ne vous en empêche. Mais on parle du système public,
et il est là. On a un système public qui reconnaît notre minorité historique
anglophone. Les droits acquis puis l'accès à l'éducation publique en anglais, ne
venez pas me dire que ça n'existe pas, M. le député, ne venez pas me dire qu'on
n'a pas accès aux institutions anglophones pour la minorité historique
anglophone, ce serait déconnecté de la réalité.
M. Barrette : On n'est
pas dans une compétition oratoire. Vous savez que j'ai moins de temps, je vous
vois aller…
M. Côté (François) :
Fort bien.
M. Barrette : …je pense
que vous pourriez prendre les 20 prochaines minutes dans mon discours.
M. Côté (François) :
C'est possible.
M. Barrette : Mais, dans
votre dernier propos, vous avez redit ce que j'ai dit, puis vous réécouterez.
Me Rousseau, lorsqu'il est venu
devant nous, il est cité aussi dans votre document, il était très fier et il le
dit avec beaucoup de joie, que les dispositions, dans la loi n° 96,
sur l'affichage passeraient le test des tribunaux, la charte. Est-ce que vous
pourriez nous indiquer, à votre avis, dans le projet de loi, les éléments qui
ne passeraient pas le test de la charte ou peut-être que vous pensez que tout y
passerait?
M. Côté (François) :
Je suis d'avis que… et regardez-moi, là, je suis d'avis, c'est mon opinion
juridique.
M. Barrette : Bien, je
vous regarde.
M. Côté (François) :
Parfait. C'est mon opinion juridique que le projet de loi n° 96 n'est pas
discriminatoire, que le projet de loi n° 96 et la Charte de la langue
française ne violent en rien les libertés fondamentales et les droits et
libertés de la personne. Le recours aux dispositions dérogatoires, ici, il est
ici fait de manière préventive pour rappeler la souveraineté parlementaire et
rappeler notre distinction juridique. J'en ai déjà parlé, le Québec a sa propre
tradition juridique qui nous est constitutionnellement reconnue, soit dit en
passant, et nous avons un intérêt national, social, collectif à le maintenir et
à l'affirmer. Donc, non, le projet de loi n° 96 n'est pas discriminatoire.
Oui, il passerait le test des tribunaux. Mais il s'agit d'une question d'une telle
importance où notre société ne peut pas prendre le risque que ce dossier se
termine en conflit d'idées politiques devant les tribunaux nommés par Ottawa.
M. Barrette :
<Vous
être en train…
M. Côté
(François) : …projet de loi
n° 96
n'est pas discriminatoire. Oui, il passerait le test des tribunaux, mais il
s'agit d'une
question d'une telle importance où notre société ne peut
pas prendre le risque que ce dossier se termine en conflit d'idées politiques
devant les tribunaux nommés par Ottawa.
M. Barrette : >Vous
êtes en train… Vous venez de me dire, là, essentiellement, là, que c'est un
coup de gueule juridique. Vous venez de me dire, vous venez d'affirmer que,
selon vous, juristes, 100 % du projet de loi n° 96 passerait le test
des tribunaux, et qu'on le met là essentiellement pour des raisons cosmétiques.
Vous m'en voyez étonné.
• (18 h 10) •
M. Côté (François) :
Non, ce n'est pas ce que j'ai dit. Ce n'est pas ce que j'ai dit. Vous avez mal…
M. Barrette : Je vois
l'étonnement, d'ailleurs, dans le regard du ministre.
M. Côté (François) :
Bon, M. le député, si vous me permettez de répondre rapidement, ce que je
suis en train de dire, c'est que, si vous avez une lecture civiliste du projet
de loi conforme à nos paramètres de droit, conforme à notre conception du droit
et de la justice dans ses prémisses fondatrices et dans sa méthodologie, non,
le projet de loi n'est pas discriminatoire.
Si vous le regardez avec une optique de
common law, avec une optique de multiculturalisme, d'accommodements raisonnables,
d'égalité réelle, toutes des notions qui passent mal, ou pas, au Québec,
effectivement, vous pourriez lever les sourcils et vous pourriez déboucher sur
des propos judiciaires qui y verraient ombrage, et c'est une question
politique, ce n'est pas une question juridique. Lorsqu'on est dans le modèle
civiliste qui est le nôtre et qui est tout à fait légitime, je l'affirme, le
projet de loi n° 96 n'est pas discriminatoire. Ce que nous voulons éviter,
c'est que le droit québécois soit mis en invalidation au nom d'un modèle qui
n'est pas le nôtre et qui ne l'a jamais été. C'est ça, la souveraineté
parlementaire, M. le député.
M. Barrette : Ah! Et…
Des voix
: Ha, ha, ha!
M. Barrette : Ceci étant
dit, je regrette profondément de ne pas avoir plus de temps, parce que je
repartirais là-dessus pendant bien, bien longtemps.
M. Côté (François) :
On pourrait avoir du plaisir.
M. Barrette : Mais je
souhaite que mon collègue le député D'Arcy-McGee ait le temps de s'exprimer lui
aussi. J'imagine que vous n'avez pas de problème avec ça.
La Présidente (Mme Thériault) :
Et vous avez exactement 2 min 15 s pour le faire, M. le député.
M. Birnbaum : Merci, Mme
la Présidente. Merci à M. Bissonnette et à Me Côté pour votre
présentation.
Je veux m'assurer que moi, j'ai compris,
et les gens qui nous écoutent ont compris, l'étendue de votre proposition n° 5, qui se lie un petit peu aux interventions précédentes
sur le seuil migratoire. Est-ce que je peux bien comprendre deux choses, dans
un premier temps, vous êtes préoccupés par la migration des gens des autres…
pas juste l'immigration en ce qui a trait à la francisation, vous êtes, dans un
premier temps, préoccupés par la migration potentielle des autres provinces du
Canada, dans un deuxième temps, c'est votre lecture que les changements
proposés par le ministre rendraient possible pour le Québec de légiférer
là-dessus? Est-ce que j'ai bien compris?
M. Côté (François) :
Si vous me permettez, je crois que peut-être des précisions... parce que, non,
ce n'est pas tout à fait ce qu'on a dit. C'est que notre...
M. Birnbaum : Pas tout à
fait. En quelque part?
M. Côté (François) :
Non, justement, <le diable est dans les…
M. Birnbaum : ...lecture
que les changements proposés par le
ministre rendraient possible pour le
Québec de légiférer là-dessus.
Est-ce que j'ai bien compris?
M. Côté
(François) : Si vous me permettez, je crois que
peut-être
des précisions parce que, non, ce n'est pas
tout à fait ce qu'on a dit.
C'est que notre...
M. Birnbaum : Pas tout
à fait. En
quelque part?
M. Côté
(François) : Non,
justement, >le diable est dans
les détails. Permettez-moi de donner les détails. Ce que nous demandons, c'est
qu'il faut procéder à une étude de la capacité migratoire. On n'est pas en
train de commencer à tenir des conclusions avant même la tenue d'une telle
étude. C'est simplement qu'une étude des seuils migratoires au Québec, et de
sa...
M. Birnbaum : ...pas
beaucoup de temps, je n'ai pas beaucoup de temps. Vous voulez une étude sur la
migration interprovinciale aussi.
M. Côté (François) :
Non, non.
M. Birnbaum : Et
peut-être afin de légiférer là-dessus.
M. Bissonnette (Simon) :
Globale, globale.
M. Côté (François) :
Globale, attention, globale, et ajuster nos politiques en conséquence. On ne
demande pas de la réglementation à ce stade, on demande juste qu'on fasse les
études pour le savoir, c'est quoi, la capacité migratoire du Québec qui doit
tenir compte non seulement de l'immigration internationale, mais aussi
interprovinciale. On est simplement à la recherche de données, tout simplement,
ne lisez pas plus loin. Il faut simplement avoir les données pour mieux
s'orienter pour la suite.
M. Bissonnette (Simon) :
C'est ça.
M. Birnbaum : Juste avec
les 15 secondes qui restent, je prends note que, quand vous parlez
d'échanger la fleur de lis pour la feuille d'érable, vous êtes en train de
suggérer qu'il n'y a aucune légitimité dans notre système juridique partagé Québec-Canada?
M. Côté (François) :
Je vous ferais remarquer que : Est-ce que nous avons signé la Constitution
de 1982? J'ai beau chercher, je ne trouve pas la signature d'aucun premier
ministre du Québec en dessous. Et s'il y a quelque chose, notre fédération en
elle-même est légitime. Et vous savez quoi? Dans notre fédération, on reconnaît
la distinction juridique.
M. Birnbaum : Le système
juridique, je parle des cours, des tribunaux.
M. Côté
(François) :Mais nos tribunaux sont
parfaitement légitimes.
La Présidente (Mme Thériault) :
Il ne reste plus de temps, malheureusement, désolée, Me Côté. Je dois
maintenant céder la parole à la députée de Mercier pour
2 min 50 s.
Mme Ghazal : Merci, Mme
la Présidente. Merci, messieurs. Au Québec, quand on veut opposer... en fait,
le modèle d'intégration qui s'oppose au multiculturalisme, ça a toujours été
l'interculturalisme. Gérard Bouchard est un grand défenseur de
l'interculturalisme, et il y en a d'autres, mais ça n'a jamais été appliqué par
aucun gouvernement. D'ailleurs, il y a même le ministre qui avait déposé un
projet de loi, il y a quelques années, sur l'interculturalisme, je ne sais pas
s'il va le ressortir, et vous, ce que vous dites, c'est que, pour s'opposer à
ce modèle-là, il faudrait plutôt parler de convergence culturelle, et, dans
votre proposition n° 6, vous voulez remplacer
«communication interculturelle» par «convergence culturelle».
Moi, ce que je sais, c'est que l'ancien
ministre, Gérald Godin, donc, ancien député de Mercier aussi, j'aime
beaucoup le dire, il avait flirté avec l'idée de la convergence culturelle et,
après ça, il l'a laissée tomber à cause de sa dimension assimilatrice de
l'immigration, ce qui n'est pas la façon de faire au Québec. J'aimerais que
vous me définissiez «convergence culturelle».
M. Côté (François) :
Pour le définir rapidement, la «convergence culturelle», c'est le fait de poser
l'identité québécoise avec sa langue, ses valeurs, sa culture, ses institutions,
comme étant le pôle de référencement commun vers lequel toutes les identités
nouvelles et arrivantes doivent converger, <mais ce n'est...
Mme Ghazal : ...vous
me définissiez «convergence culturelle».
M. Côté
(François) : Pour le définir
rapidement, la «convergence
culturelle», c'est le fait de poser l'identité
québécoise, avec sa
langue, ses valeurs, sa culture, ses
institutions, comme étant le pôle
de référencement commun vers lequel toutes les identités nouvelles et
arrivantes doivent converger, >mais ce n'est pas de l'assimilation. Et
c'est peut-être pour ça que la pensée a évolué depuis Gérald Godin, parce
qu'il y a eu des décennies d'évolution du concept. C'est que ce n'est pas de
l'assimilation parce que le nouvel arrivant est invité à apporter avec lui son
enrichissement culturel et à contribuer à l'enrichissement de la culture et de
la société d'accueil, mais en convergeant vers un point de rassemblement. Ça se
distingue de l'interculturalisme, qui propose plutôt un entre-deux. Et puis
l'idée de l'interculturalisme a bien sûr ses mérites théoriques, mais, en
pratique, sur le terrain, il y a peu de choses qui la distinguent du
multiculturalisme, donc c'est pour ça qu'on préconise la convergence
culturelle, projet modèle de loi à l'appui.
Mme Ghazal : Mais
pourquoi vous dites que l'interculturalisme, dans la pratique, ça ne fonctionne
pas? C'est parce qu'il n'y a jamais eu de politique gouvernementale, il n'y a
jamais aucun gouvernement qui a pris ça au sérieux et qui l'a mis partout au
Québec. Mais il y a des pratiques, il y a des exemples, par exemple, dans des
organismes communautaires, dans des universités où il y a toutes sortes
d'expériences interculturelles qui sont mises en place, et ça fonctionne, mais
ça n'a jamais été… il n'y a jamais eu de politique gouvernementale. Donc,
pourquoi vous dites que ça ne fonctionne pas?
M. Côté (François) :
Alors, ce n'est pas que ça ne fonctionne pas, c'est qu'en pratique on a de la
difficulté à le distinguer du multiculturalisme. Les deux théories ont leurs
distinctions théoriques, mais en pratique, les voies de mise en oeuvre de
l'interculturalisme… Tous les accommodements raisonnables, par exemple, sont
les voies de mise en oeuvre de l'interculturalisme. En pratique, dans bien des
domaines, on a peine à les distinguer, tandis que le modèle de la convergence
culturelle, on revient là-dessus, va vraiment poser un pôle d'intégration avec
une identité commune, des valeurs communes, une langue commune qui est ouvert
à…
Mme Ghazal : …
M. Côté (François) :
Pardon?
Mme Ghazal : Non, je…
Excusez-moi, c'est…
La Présidente (Mme Thériault) :
Bien, de toute façon, je dois mettre fin à l'échange.
Mme Ghazal : Ah! il n'y a
plus de temps. Bon, ce n'est pas grave. Merci.
La Présidente (Mme Thériault) :
Désolée.
M. Côté
(François) : Ah! non.
La Présidente (Mme Thériault) :
Il ne reste plus de temps.
Mme Ghazal : Merci.
M. Côté (François) :
Désolé.
La Présidente (Mme Thériault) :
Donc, je me tourne maintenant vers le député de Matane-Matapédia. Comme vous le
voyez, c'est très rapide 2 min 50 s, question, réponse.
M. Bérubé : Merci, Mme la
Présidente. Me Côté, M. Bissonnette, c'est un plaisir de vous
accueillir.
J'aime bien qu'on ramène la mémoire de
Gérald Godin, comme celle de Camille Laurin et des grands artisans du
Parti québécois, ses politiques publiques, et on est très fier de cet héritage
qui est le nôtre, et qu'on continue de faire fructifier à travers la modernité,
à travers les débats qui sont les nôtres.
Aujourd'hui, on parle de l'avenir de la
langue française au Québec et, si on est moindrement sérieux, si tout le monde
convient qu'il y a un déclin, si tout le monde convient que finalement la
loi 101 était nécessaire, parce que tout le monde s'en réclame aujourd'hui,
bien, il faut accepter que les chiffres démontrent que ça prend des mesures
énergiques, ça prend des mesures courageuses, et c'est maintenant que ça se
passe. Et à travers ces échanges qu'on a avec vous et avec d'autres, on
souhaite, en tout cas pour le Parti québécois, influencer le gouvernement de la
CAQ pour qu'il prenne ça au sérieux. Le projet de loi ne doit pas être
consensuel, il doit poser les gestes nécessaires, et ça passe notamment par la
fréquentation du cégep en français, notamment.
<Alors, Me Côté…
M.
Bérubé
:
…on souhaite,
en tout cas pour le
Parti québécois, influencer le
gouvernement
de la CAQ pour qu'il prenne ça au sérieux. Le
projet de loi ne doit pas
être consensuel, il doit poser les gestes nécessaires, et ça passe
notamment
par la fréquentation du cégep en français,
notamment.
>Alors, Me Côté, j'aimerais
vous offrir davantage de temps pour exposer la nécessité d'adopter cette
mesure, qui est de plus en plus soutenue par les Québécois. On a entendu Guy Rocher
aujourd'hui, on a entendu plusieurs groupes déjà, on a entendu Christian Dufour
dire ça hier. Pourquoi, selon vous, il y a nécessité de poser des gestes
courageux qui ne seront pas nécessairement consensuels, mais nécessaires pour
l'avenir de la langue?
La Présidente (Mme Thériault) :
Et vous avez 1 min 30 s pour répondre à la question.
M. Côté (François) :
Alors, je vais répondre à la vitesse de l'éclair. Le cégep, c'est la dernière
étape d'intégration du jeune esprit étudiant qui devient adulte, qui se
familiarise avec le monde réel pour passer de l'adolescence et l'enfance vers
le marché du travail. C'est cette dernière étape qui va avoir la plus grande
influence, de nature à même éclipser celle de l'instruction publique, sur le
rattachement à un pôle linguistique ou à un autre. Pour vous donner des
chiffres, je pense que c'est... l'IRFA a réalisé une étude. Si vous prenez des
étudiants qui ont fait leur cheminement à l'instruction publique en français et
que vous les envoyez dans un cégep francophone, 99 % d'entre eux vont
continuer à garder le français comme langue première; et chez les allophones,
il y a quand même 35 % d'entre eux qui conservent le français langue
première. Si vous les envoyez au cégep en anglais, donc, ils ont fait leur
instruction en français et ils s'en vont au cégep anglophone, ce chiffre
«shit»… chute, pardon, à 74 % chez les francophones — on en a
perdu le quart — et à 4,4 % chez les allophones, abyssal! Donc,
le cégep est une étape charnière au rattachement à un pôle linguistique ou à un
autre, et les chiffres parlent. Le cégep en français contribue à la francisation.
Le libre marché linguistique contribue à l'anglicisation. Les chiffres sont là.
La Présidente (Mme Thériault) :
…remercie.
M.
Bérubé
:
…Me Côté.
La Présidente (Mme Thériault) :
Pile dans la fin du temps. Donc, merci, M. Bissonnette, merci, M. Côté,
pour votre participation à nos travaux.
Et, sans plus tarder, je vais ajourner les
travaux de la commission jusqu'à jeudi 23 septembre après les affaires
courantes. Merci. Bonne soirée, tout le monde.
(Fin de la séance à 18 h 20)