(Neuf heures trente-deux minutes)
Le Président (M. Ciccone) : S'il
vous plaît, veuillez prendre place.
Des voix : ...
Le Président (M. Ciccone) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la culture et de l'éducation ouverte. Je demande à toutes les personnes dans
la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils
électroniques.
M. LeBel : ...
Le Président (M. Ciccone) :
Oui, M. le député.
M. LeBel : ...si possible.
Le Président (M. Ciccone) :
Oui, allez-y.
Discussion générale concernant
le déplacement
de la commission en région
M. LeBel : J'aimerais avoir de l'information de la commission sur... Je
pense que ça faisait consensus ici,
on voulait se déplacer en région, au
moins deux régions, pour aller entendre les médias régionaux. J'aimerais savoir
où on en est rendus avec ça. Le temps
presse, et, si on veut se rendre en région, permettre aux gens de venir déposer
des mémoires, on devrait avoir une décision le plus rapidement possible.
Le
Président (M. Ciccone) :
Mais je crois comprendre que la demande a été acheminée auprès de la Commission
de l'Assemblée nationale, puis nous sommes toujours en attente d'une décision,
là.
M. LeBel : J'invite tout
le monde à faire des pressions auprès
de cette commission pour qu'elle décide rapidement de nous autoriser les frais, parce que
tout le monde serait heureux, je pense, d'aller entendre les
gens en région de ce qui se passe en région par rapport aux médias.
Merci.
Le Président (M. Ciccone) : Merci,
M. le député, votre message... Oui, monsieur...
M. Poulin : ...je remercie le député de Rimouski
de nous rappeler à l'ordre. C'était un souhait de l'ensemble des membres de la commission, de se déplacer en région. Entre autres, on avait ciblé deux régions où on souhaitait passer du temps pour pouvoir rencontrer les médias, prendre
le temps de les écouter, de les entendre. Alors, de notre côté, nous
avons réitéré le souhait d'aller visiter ces
deux régions-là, et effectivement, M. le
Président, vous faites bien de le
rappeler, on est en attente de la décision de la Commission de
l'Assemblée nationale.
Le Président (M. Ciccone) :
Merci. Oui, Mme la députée de Verdun.
Mme Melançon : Merci. Je suis totalement d'accord
avec le collègue de Rimouski, on s'en était parlé. Moi, ce que je tiens à mentionner... parce que,
malheureusement, dans le salon bleu, ça a déjà été
dit que, si la commission était lente, puis si notre... la ministre avait dit : C'est long, puis c'est long, la commission,
puis je ne comprends pas que ce soit si long. Puis là — je
vais regarder le député de Saint-Jean — on
s'était tous regardés en se disant : Bien là, c'est parce que
tout allait très, très bien. Je veux juste exprimer à la caméra que ce
n'est pas le souhait des élus, actuellement, de retarder quoi que ce soit dans cette commission-là. On a toujours
mis vraiment l'épaule à la roue. Tout le monde travaille en collégialité. Mais là il faut quand même
qu'on puisse avoir rapidement un retour parce que, rendus à la fin du
mois de septembre, on va tous être à l'Assemblée nationale et on n'aura
plus le temps d'aller en région, on le sait très bien. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Ciccone) : Merci,
Mme la députée. M. le député de Beauce-Sud.
M. Poulin : ...en terminant,
pour faire du pouce sur ce que ma collègue la députée de Verdun vient de dire, effectivement, on est en attente de la Commission
de l'Assemblée nationale, qui ne
relève pas du gouvernement du
Québec puis qui ne relève pas de la ministre. Je pense que le souhait de l'ensemble
de la population du Québec, c'est que cette commission-là puisse aller rapidement. C'est le souhait également
du gouvernement du Québec. Alors, je
pense que nos travaux vont bien jusqu'à
présent, vont rondement, et on est en attente, effectivement, de la Commission de l'Assemblée nationale,
qui, je souhaite le rappeler, ne relève pas du gouvernement du Québec. Mais
je pense que le point d'ordre de mon collègue de Rimouski pourra peut-être
amener une pression supplémentaire, particulièrement auprès de la présidence de
l'Assemblée nationale.
Le
Président (M. Ciccone) :
Merci. Et moi, je souhaiterais qu'on débute la commission, on a des invités
qui sont avec nous aujourd'hui. Merci beaucoup.
Alors, la commission
est réunie afin de poursuivre les
auditions publiques dans le cadre des consultations particulières
concernant le mandat d'initiative portant sur l'avenir des médias
d'information.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements
pour ce mandat?
La
Secrétaire : Oui, M. le Président. Mme Labrie (Sherbrooke)
est remplacée par Mme Dorion (Taschereau) et Mme Hivon
(Joliette), par M. LeBel (Rimouski).
Le
Président (M. Ciccone) : On
m'indique qu'il y a consentement pour les remplacements suivants pour
toutes les séances de cette semaine.
La Secrétaire :
M. Asselin (Vanier-Les Rivières) sera remplacé par M. Allaire
(Maskinongé) et Mme Grondin (Argenteuil), par M. Thouin (Rousseau).
Le Président (M. Ciccone) : Oui, Mme
la députée de Verdun.
Mme Melançon :
Nous allons, bien sûr, donner notre consentement, mais ce que nous
souhaiterions du côté, aussi, gouvernemental,
c'est que la collaboration puisse aller dans les deux sens pour ce genre de
collaboration dans les différentes commissions.
Auditions (suite)
Le Président (M. Ciccone) : Merci,
Mme la députée de Verdun.
Cet
avant-midi, nous entendrons la Centrale des syndicats du Québec, la Fédération
professionnelle des journalistes du Québec, l'Association des
journalistes indépendants du Québec et l'Association des médias écrits
communautaires du Québec.
Maintenant,
je souhaite la bienvenue aux représentants de la Centrale des syndicats du
Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre
exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter
ainsi que les personnes qui vous accompagnent et à procéder à votre
exposé. La parole est maintenant à vous.
Centrale des syndicats du Québec (CSQ)
Mme Éthier (Sonia) :
Merci, M. le Président. M. le Président, membres de la commission, je vous
remercie beaucoup de permettre à la CSQ de
présenter son point de vue sur l'avenir des médias. Je vous présente
Mme Nicole de Sève, conseillère au dossier, et moi-même, Sonia
Éthier, présidente de la Centrale des syndicats du Québec.
Vous le savez
sûrement, la CSQ représente 200 000 membres et compte 10 fédérations, 240
syndicats affiliés en fonction de
leurs secteurs d'activité et, en particulier, nous représentons le Syndicat des
employés en radio-télédiffusion de Télé-Québec.
Donc, la CSQ
tient vraiment à souligner l'initiative de cette commission, qui est non
partisane et qui est vraiment très
importante, parce que l'écosystème dans lequel évoluent l'ensemble des médias
est plus que transformé, on le sait, on le voit, par... cette semaine,
les nouvelles technologies de l'information.
Donc, comme
vous avez pu le constater à la lecture du mémoire, nous avons choisi de
consacrer presque exclusivement notre mémoire aux enjeux entourant
Télé-Québec, parce que c'est notre télévision publique nationale et aussi pour
son rayonnement en région. D'ailleurs, nous
connaissons quand même bien Télé-Québec, puisque nous y sommes
intéressés depuis plusieurs années, et on
croit que son unicité réside dans sa mission d'éducation, de culture et
d'information totalement différente
des réseaux privés. Donc, on réitère que le gouvernement a la responsabilité de
protéger la seule chaîne publique québécoise,
dont la voix permet à l'ensemble de la population de participer à tous les
grands débats qui la concernent. Et c'est un élément que nous avions dit, en 2004, dans notre mémoire, lorsqu'il y
a eu la consultation du groupe de travail chargé de l'examen de
Télé-Québec.
Puisque vous
avez pris connaissance du mémoire, nous allons quand même aborder les éléments
qui nous semblent les plus importants
et on va vous faire part de nos recommandations. Premièrement, dire que
Télé-Québec, c'est une petite et une grande télévision publique nous
amène à faire trois constats qui sont vraiment très importants. L'auditoire de Télé-Québec est en hausse. Entre autres, on sait
que Télé-Québec a rejoint 3,8 millions de téléspectateurs en moyenne
chaque semaine et donc 51 % des
francophones. Et rappelons aussi que 75 % des émissions sont offertes sur
le site Internet telequebec.tv, lancé en 2004, et on y retrouve quand
même 963 000 visiteuses et visiteurs par mois, et ce site est le cinquième
site télévisuel le plus visité.
• (9 h 40) •
D'ailleurs, dans son rapport annuel, le
diffuseur public précise qu'en tant que média public francophone
multiplateforme Télé-Québec doit être présente sur toutes les plateformes
numériques pour répondre à son mandat d'accessibilité
sur le territoire. D'ailleurs, dans une entrevue radiophonique, la ministre de
la Culture suggère une piste de réflexion
très intéressante, qui est d'utiliser la plateforme numérique de Télé-Québec
pour diffuser de l'information, en disant que celle-ci est sous-exploitée, et ça rejoint, vous allez voir, une de
nos demandes. Et rappelons qu'en 2018, dans le cadre de la nouvelle politique culturelle, l'ancien
gouvernement a octroyé 13,7 millions de dollars à Télé-Québec sur trois
ans pour accroître la diffusion de
contenu audiovisuel sur la plateforme telequebec.tv. Donc, une première
recommandation, c'est que nous tenons
à souligner cette contribution supplémentaire, qui a été bienvenue pour Télé-Québec, et on demande
aussi au gouvernement du Québec d'assurer à l'ensemble du réseau de Télé-Québec le financement qui lui est
nécessaire pour lui permettre de se développer adéquatement.
Donc, un autre
élément important, depuis 2014, on retrouve sur le site Web du diffuseur La
Fabrique culturelle, qui est un média à
100 % numérique. Et, comme vous le savez sûrement, on y retrouve
1,1 million de visites d'internautes, plusieurs membres et des demandes de branchement. C'est donc une
plateforme unique qui constitue un canal d'information culturelle régionale, parce que vous savez que
nous sommes dans 10 régions, 10 régions, plus précisément, et ce qui
est bien important, c'est que ça contribue à la vitalité économique des
régions.
Mais
il y a quand même une certaine problématique, c'est qu'il y a
340 000 ménages qui n'ont pas accès à Internet, malgré le
programme Branché qui avait été lancé en 2016, et il y a seulement neuf projets
qui ont été acceptés sur les 82 soumis.
Donc, une deuxième recommandation, c'est qu'on pense que le gouvernement
devrait peut-être accélérer le financement
de ces projets en attente dans le cadre du programme Branché afin de permettre
à toutes les régions d'avoir accès à
Internet. Et on a aussi une autre recommandation, qu'on invite le gouvernement
à déposer un plan qui vise à déployer un service de haute vitesse
performant dans toutes les régions du Québec et de discuter avec les MRC qui
sont intéressées par ce projet.
Malgré
la présence dans les 10 bureaux régionaux, on sait bien que, les citoyens,
il y a un droit, je dirais, fondamental, mais qu'ils ont le droit de se reconnaître et de revendiquer une
présence à l'écran à travers leur fenêtre nationale. Donc, on l'avait mentionné à la page 7 de notre
mémoire, cette absence se vérifie aujourd'hui, on le sait, et risque de se
faire sentir encore plus, parce que
les hebdomadaires régionaux de la presse écrite sont durement touchés, et ça
laisse craindre à des déserts médiatiques, que plusieurs régions ou
localités n'auront accès à des nouvelles qui les concernent.
On
se rappelle, hein, que les géants du Web, par une concurrence, on va dire,
déloyale, ont déjà entraîné la fermeture de 28 % des journaux régionaux, et ça continue, et ça, depuis 2010,
donc on est inquiets. Et les problèmes vécus par Le Groupe Capitales
Médias illustrent l'ampleur du problème, et on pense que le gouvernement doit
trouver des solutions qui sont durables. Et
on prend un petit moment pour exprimer notre solidarité envers les
travailleuses et travailleurs qui traversent cette période. Et on veut quand même saluer le geste du gouvernement
pour l'aide ponctuelle apportée. Et il faut trouver collectivement des
solutions, mais c'est vraiment à court terme qu'il faut le faire.
En
fait, on croit que Télé-Québec ne peut pas remplacer ces médias, ça, c'est bien
important de le noter, mais elle peut
contribuer à maintenir une vitalité d'information dans toutes les régions.
Peut-être devrions-nous consacrer plus d'efforts à la production d'émissions d'affaires publiques ou de
bulletins d'information régionaux. C'est une question qu'on peut se
poser ici. Donc, une autre recommandation,
on invite le gouvernement à réfléchir à accorder un mandat d'information
régionale à Télé-Québec. Donc, c'est une réflexion qu'on soumet.
Sur la question du
financement, on sait que les dépenses, à Télé-Québec, sont plus importantes que
les revenus. Il y a eu, dans le rapport
annuel, un déficit, un manque à gagner de 4 millions. Et, malgré l'aide
supplémentaire qui a été apportée,
c'est un pas dans la bonne direction, mais c'est insuffisant. Pour nous, il
faut un financement qui est stable et récurrent. Est-ce que le
gouvernement pourrait faire plus? On pense que oui. Et donc on a quelques
petites solutions, c'est-à-dire qu'on invite la commission... le gouvernement
d'investir une partie de la taxe de vente du Québec perçue par Revenu
Québec — puis
je pense qu'il y d'autres organisations qui ont aussi soumis ces
propositions — auprès
des grandes compagnies comme Amazon, etc.,
dans des mesures aux médias québécois, particulièrement Télé-Québec, et
aussi... Et, à l'image de ce qui se fait dans certains pays européens, est-ce
que le gouvernement du Québec pourrait étudier la possibilité d'obliger les gros joueurs de l'information à payer des
impôts et des redevances à l'État du Québec pour contribuer au
financement des médias québécois? On sait que le fédéral a fermé la porte à
cette possibilité, mais on croit que le gouvernement
du Québec pourrait faire preuve d'un courage politique afin de permettre aux
médias régionaux de continuer leur mission.
Donc, en conclusion,
ce que je pense qu'il est important de retenir, c'est la pérennité de Télé-Québec,
son développement régional, en assurer le financement. Et rappelons-nous
aussi qu'une information de qualité, c'est aussi le gage d'une démocratie
en santé. Et je le rappelle... je l'ai dit au départ, mais que Télé-Québec,
c'est un bien collectif, et le gouvernement a la responsabilité de protéger la seule chaîne québécoise
dont la voix permet à l'ensemble de la population de participer à tous les
débats.
Le Président (M.
Ciccone) : Merci beaucoup pour votre exposé. Nous sommes maintenant
rendus à la période d'échange, et on commence avec la partie gouvernementale
pour 15 minutes, avec le député de Beauce-Sud.
M. Poulin : Merci beaucoup, M. le
Président. Je vous salue. Merci également
pour votre présence en commission parlementaire ce matin. Merci de nous parler également
de Télé-Québec. On ne répétera jamais
assez l'importance de cette télévision
québécoise, l'importance de la financer, de la soutenir, également de tenir des
émissions d'affaires publiques, vous l'avez
bien signifié. Depuis déjà plusieurs années, à Télé-Québec, on a assisté à un
tournant qui est fort intéressant, où on retrouve de nouvelles émissions
d'affaires publiques qui brassent, qui remettent en question, et qui, je crois,
font bouger le Québec, et offrent surtout une programmation de grande qualité
aux Québécois.
Évidemment,
il faut investir dans Télé-Québec. Le nerf de la guerre, on l'a vu, là, depuis
déjà plusieurs jours, le nerf de la
guerre, ça demeure l'argent. Alors, il faut investir des sommes financières qui
sont importantes, je pense qu'on l'a fait également dans le dernier
budget, mais tout part aussi de la projection qu'on souhaite donner à
Télé-Québec.
Avant,
peut-être, de venir à ma question, vous nous avez parlé d'Internet haute
vitesse. Effectivement, c'est très important.
Le gouvernement du Québec va proposer un plan, au cours des prochaines
semaines, des prochains mois, qui va viser
à répondre à ce souhait d'avoir Internet haute vitesse le plus rapidement
possible dans toutes les régions du Québec, donc, qui va nous permettre, effectivement, de consommer à son maximum
des médias québécois. Donc, ça, c'est un élément fort important sur
lequel on est déjà au travail. Ça aurait dû être fait depuis longtemps, mais,
pour l'instant, on agit.
Et je veux
vous parler du mandat, que vous proposez, d'information régionale du côté de
Télé-Québec, dans un moment où, oui,
on souhaite une diversité d'information dans les différentes régions, mais à un
moment où on a déjà des médias
régionaux privés, dans les régions du Québec, qui vivent des moments aussi
extrêmement difficiles. Vous avez fait référence,
tout à l'heure, à Capitales Médias. Alors, j'aimerais avoir votre vision sur
une cohabitation entre un nouveau modèle d'information publique en région, où Radio-Canada se trouve déjà, et le
fait qu'on a déjà des joueurs privés mais également des hebdos coopératifs, que ce soit du Web, de la
télé, de l'écrit, et là d'en ajouter un autre, tout dans cette optique du souhait
d'avoir une pluralité d'information, de la
diversité d'information, d'avoir plus de joueurs qui se retrouvent dans la
même région. Mais comment vous verriez cette
cohabitation-là, qui ne pourrait pas nuire à des joueurs en place qui ont déjà
des défis?
Mme Éthier
(Sonia) : Bien, écoutez,
ce que je disais tout à l'heure, il ne
faut absolument pas qu'on installe
une compétition. Ça,
c'est vraiment important dans le traitement que la commission
va devoir traiter, dans les réflexions que vous allez avoir, il n'est pas question d'entrer en compétition. Je pense
qu'il peut y avoir une complémentarité, et Télé-Québec peut assurément avoir un rôle à l'intérieur de toute
la question de l'information.
M. Poulin : Est-ce
que, dans ce rôle-là, vous voyez quelque chose d'extrêmement précis? C'est
sûr que les bulletins de nouvelles régionaux quotidiens demeurent très importants. Ça se fait en complémentarité, souvent, avec le
quotidien du coin, parce qu'on sait que, quand même, pour remplir un bulletin de nouvelles de 30
minutes à tous les jours, ou de 45 minutes, ou d'une heure, ça nous prend du contenu, ça nous prend de la nouvelle,
donc ça nous prend des journalistes qui vont sur le terrain, qui creusent la nouvelle, qui, par exemple, dans une région comme le Saguenay—Lac-Saint-Jean, ont à couvrir un large territoire.
Alors, ça prendrait des ressources assez importantes, parce
que l'objectif, ce serait de le faire
mais de le faire bien, de ce que je comprends de ce que vous me dites.
• (9 h 50) •
Mme de
Sève (Nicole) : Il y a une
différence entre dire : Nous allons avoir une chaîne de télévision
publique qui ferait de l'information quotidienne... Il peut y avoir différentes hypothèses qui sont
développées, exemple un bulletin d'information régional et local qui pourrait être hebdomadaire ou mensuel, ce n'est pas... ou bien
des émissions d'affaires publiques qui mettent
en jeu des enjeux régionaux. On a déjà eu Droit de parole, mais ce n'était pas
très local et régional. Il peut y avoir cette mission-là qui est confiée...
Si on a été
capables de créer Espaces autochtones, c'est parce qu'il y avait une population qui était tout
à fait oubliée dans l'appui
journalistique au Québec. Bien, si on est capables de le faire et de rendre
enfin... parce qu'ils vont avoir enfin leur premier bulletin francophone hebdomadaire à compter de l'automne, bien,
pourquoi on ne le ferait pas pour l'ensemble de la population qui vit dans des régions où... Je
m'excuse, mais moi, j'ai commencé, quand j'étais très jeune, au Clairon
de Saint-Hyacinthe, mais je sais que la plupart des hebdos... ou des
hebdos, même, de quartier dans plusieurs villes ont disparu. Il n'est plus question de ce qui se passe. Mes
marchands ne savent pas à qui s'adresser. Ce n'est pas vrai qu'ils vont
tous annoncer dans la La Voix de l'Est, La Tribune ou
quoi que ce soit. Donc, qu'est-ce qu'on fait pour faire rayonner pas simplement la nouvelle nationale, mais la nouvelle
régionale, les enjeux régionaux, qu'ils soient économiques, qu'ils soient
sportifs, qu'ils soient culturels? Et c'est pour ça qu'elle a sa place, je suis
convaincue.
Maintenant,
le modèle est à travailler avec Télé-Québec. Mais, si on a été capables de
développer ce créneau-là en matière
de La Fabrique culturelle et d'être capables de développer et de faire
connaître nos artistes qui sont partout en région, on est capables de le faire pour l'ensemble des
autres médias d'information sans écraser personne, parce que, de toute
façon, il y en a la majorité qui sont déjà
morts. Alors, pourquoi ne pas utiliser ce que nous avons peut-être de meilleur,
qui est notre télévision publique?
M. Poulin :
Bien, Mme Éthier et Mme de Sève, elle était là aussi, mon
interrogation, à dire : Si on ajoute un nouveau joueur, de quelle façon on peut y trouver bien sa
place sans que ça enlève quelque chose aux autres? Puis, je pense, vous mettez le doigt sur un bobo hyperimportant. Les
«success stories», si vous me passez l'expression en anglais, qui
existent déjà à la télévision québécoise,
avons-nous la possibilité de les déplacer davantage en région, qu'ils parlent
davantage des régions? Notre Tout
le monde en parle, à Radio-Canada, ils ne se sont pas bien, bien déplacés
dans les régions au cours des dernières années, puis Dieu sait que c'est un succès à la télévision québécoise.
Alors, de faire parler les régions dans nos émissions de télévision
québécoises actuelles, je pense qu'il y a des incitatifs que nous devrions
créer pas seulement à Télé-Québec, mais
également dans les grandes chaînes de télévision, à dire : Parlez-nous
plus des régions et mettez en valeur cette information régionale là.
Je me souviens d'une émission à Radio-Canada, La
petite séduction,qui se promenait dans les villages du Québec puis
qui mettait en valeur les trésors de nos villages au Québec, et il en faudrait
plus, de ça, il en faudrait plus, de moments où on peut mettre en valeur ce qui
se passe dans nos régions. Alors, je pense, vous avez bien raison, puis effectivement Télé-Québec doit être un partenaire précieux.
En vous remerciant, je vais céder la parole à un de mes collègues.
Le Président (M.
Ciccone) : Je reconnais maintenant le député de Saint-Jean.
M. Lemieux :
Merci, M. le Président. Évidemment, vous l'avez dit d'entrée de jeu, votre mémoire
est beaucoup concentré sur
Télé-Québec, mais j'ai aimé entendre ce que vous avez dit par rapport aux
raisons pourquoi vous en arrivez là
et la description que vous faisiez, entre autres de la région autour de
Saint-Hyacinthe, des médias écrits. Et c'est un peu ça que je voulais vous entendre nous dire, dans la
mesure où, aussitôt qu'on parle de Télé-Québec puis d'information, tout
le monde pense au passé. On est en 2019,
vous réclamez de l'Internet pour tous, partout, tout le temps, à haute vitesse,
parce qu'on veut faire pas nécessairement ce
qu'on a connu dans le passé en termes de contenu et de production télévisuelle,
mais je vous ai entendues répéter ce qu'on a
entendu de la ministre, la semaine dernière ou la semaine d'avant, qui parlait
d'une plateforme de contenu écrit aussi.
Quelqu'un me soulignait récemment qu'il y a probablement plus de contenu écrit
sur la plateforme de radiocanada.ca/info que...
sinon nulle part ailleurs, que dans beaucoup d'autres plateformes de médias
écrits. Donc, il y a une espèce de convergence des contenus en ce moment.
Expliquez-moi ce que vous avez en tête. Et je
comprends que vous êtes la partie syndicale, là, O.K.? D'ailleurs, Télé-Québec
vient nous voir mercredi après-midi, on va pouvoir leur demander à eux. Mais,
de votre point de vue, ces contenus-là régionaux, locaux auxquels vous rêvez,
ce serait quoi?
Mme Éthier (Sonia) : Bien, je pense que Mme de Sève a bien répondu, tout à
l'heure, sur la spécificité que Télé-Québec peut avoir. Et moi, j'insiste sur le fait qu'il y a une question de
démocratie, d'expression de la démocratie par rapport à ce que
Télé-Québec peut faire et sa mission première, hein, mission première, on l'a
dit tout à l'heure : éducation, culture, information.
Et je pense que les citoyennes et citoyens des régions doivent et peuvent avoir
accès à ce qui se passe au niveau régional
pour exprimer leur... en toute démocratie. Par exemple, quand il y a des
élections, s'il n'y a pas de médias écrits ou s'il n'y a pas de possibilité pour les citoyens de connaître ce qui se
passe dans leur région, bien, je pense que ça pourrait être un aspect
qui pourrait être abordé par Télé-Québec, là.
M. Lemieux : Justement... À
moins que vous ayez quelque chose à rajouter, madame?
Mme de
Sève (Nicole) : Vous parlez de... Il y a un exemple,
moi, qui me vient en tête. Quand entendons-nous parler du secteur des pêcheries sur les grands médias
télévisuels? Rarement, sauf quand il
y a une crise de la morue ou bien
non qu'on n'est pas capables de sortir nos
bateaux pour la pêche au crabe, nos crabiers. Il me semble que ça, ça peut
être intéressant, dans une région, de
poser l'ensemble des enjeux, qui peut être même repris, après ça,
sur la scène nationale, mais d'essayer de voir, dans le quotidien, qu'est-ce
que ça veut dire, la crise des pêcheries, comment ça peut se résorber. C'est
dans ce sens-là où il y a des enjeux.
À part Montréal, là, il y a des enjeux au
Québec. Je suis une petite fille de Montréal, ça fait que je n'ai pas de problème
de le dire, mais il y a des enjeux qui sont sérieux dans le développement économique,
dans le développement culturel. La vitalité
des cégeps en région, tout ce qui se fait au niveau de la culture dans
nos cégeps, qui n'est jamais
repris. C'est bien beau, le Rideau vert,
c'est bien beau, La Cordée, c'est bien beau, mais il y a
des choses qui se passent. C'est dans ce
sens-là où il peut y avoir cet agenda politique qui nous permet de fouiller certaines questions
qui vont aller chercher le coeur des
gens. Ils vont savoir qu'on parle de Maria, de Carleton ou d'ailleurs.
Puis ça, c'est important, mais on n'en entend jamais parler. On va parler...
oui, quand ils vont sortir le bateau, puis quand ils vont rentrer, puis les
quotas, mais il y avait
d'autres choses à discuter dans ces enjeux-là.
Donc, ça peut
être un exemple. Je ne parlerai pas au nom de Télé-Québec, mais ce que je veux dire, c'est qu'il y a... l'imagination au pouvoir, ça peut faire des
merveilles.
M. Lemieux : J'ai presque envie de vous dire que vous prêchez
à un converti, mais en même temps je voudrais vous entendre davantage sur
votre vision de ce que ce serait... Et je comprends très bien que ce n'est pas
vous qui faites la programmation. Mais les
arguments, là, sur la montréalisation des ondes, déjà hier, en une
demi-journée, on en a empilé pas mal.
Puis je suis d'accord avec vous par rapport aux besoins que les régions ont de
parler au reste des Québécois, mais ils ont besoin de se parler entre eux aussi. Ils ont besoin de savoir c'est
quoi, les faits, pour être capables d'en discuter dans une grande émission d'affaires publiques et une tribune, dont
vous parliez tout à l'heure, qui ressemble à La Fabrique culturelle,j'en suis, mais il faut qu'on commence
par savoir ce qui se passe chez soi. Est-ce que c'est ça, votre vision? Est-ce
que vous voulez que Télé-Québec participe à la dissémination de
l'information de base dans les régions aux régions?
Mme de
Sève (Nicole) : J'aurais envie de vous répondre, monsieur, que, si
jamais vous allez dans ce sens d'élargir le mandat de Télé-Québec, il y a plusieurs intervenants, au Québec, qui
vont être heureuses et heureux de s'asseoir pour discuter de ce que... Mais ce n'est pas aujourd'hui que je vais vous
dire comment ça va se faire, de toute façon, je n'ai pas cette capacité-là, mais on peut s'asseoir et de
voir. Et à ce moment-là, là, vous pouvez asseoir vos MRC, vous pouvez
asseoir plein d'actrices et d'acteurs, vos
réalisateurs qui sont déjà dans le champ, qui sont déjà dans le milieu et de
voir ça serait quoi. Et on peut y aller progressivement, on ne va pas
transformer ça du jour au lendemain.
Mais je pense qu'aujourd'hui on ne peut pas...
même vous, vous ne seriez... vous ne pourriez pas le faire. Donc, essayons de dire : L'acceptez-vous, l'élargissement
du mandat, comme gouvernement? Si vous l'acceptez, si vous le passez, à
ce moment-là, on va se rasseoir, groupe de travail, puis on va avancer, puis on
peut avancer très vite.
M. Lemieux :
On va en reparler avec Télé-Québec demain, puis je ne veux pas aller trop loin
dans le dossier par rapport à la
direction et pas le syndicat. N'empêche qu'en 2011 le rapport Payette, qui
était probablement le dernier rapport conséquent
par rapport à ce qu'on est en train de faire aujourd'hui, proposait d'étudier
la faisabilité d'une plateforme d'information
interrégionale. J'ai presque envie de dire que c'était très visionnaire, à
l'époque parce que c'est un peu ce dont
on est en train de parler en ce moment. D'ailleurs, en 2012, ils ont travaillé
là-dessus puis ils ont effectivement publié un projet relativement concret, à l'époque. Vous opinez du bonnet, vous
le connaissez aussi bien que ce que j'ai pu en lire moi aussi. Sans
dire : Oui, c'est ça que ça prend, c'est l'esprit de ce que vous voudriez
voir, je pense, je veux savoir.
Mme de
Sève (Nicole) : Encore une fois, je vous répète que, oui, il y a des
choses qui étaient très intéressantes dans le rapport Payette. Moi, je nous invite, si vous prenez cette
orientation-là, que nous nous assoyons et nous regardons comment nous
pouvons le développer.
M. Lemieux :
Vous avez parlé de démocratie tout à l'heure. Effectivement, c'est un
leitmotiv. Il n'y a pas personne qui
vit, ces jours-ci, sans savoir que l'information est reliée à la démocratie. Le
problème de ceux qui viennent nous voir, c'est qu'ils ont besoin de retrouver une marge de manoeuvre financière. Ce que
je conclus de ce que vous nous dites, c'est qu'il faut élargir le
mandat, mais ça va prendre des gros moyens pour aller avec aussi.
• (10 heures) •
Mme Éthier
(Sonia) : C'est
incontournable pour nous, puis je pense qu'on... Je lisais le rapport de Daniel
Giroux, de l'Université Laval, qui... il y
avait un élément qui était très important sur le soutien financier des
gouvernements, puis je pense que ça vaut la peine de se rappeler que
l'information, ce «n'est pas un bien comme les autres — là,
je le cite. D'abord parce [que ça] contribue au dynamisme de la vie démocratique
d'une société [...] qu'elle tisse des liens de nature diverse entre les
personnes qui la composent.»
Et il y a
plusieurs caractéristiques qui sont importantes, parce que les frais encourus
par la collecte de nos nouvelles, son
traitement, sa diffusion, c'est le même coût si on diffuse pour 10 000 ou
pour 100 000 personnes. Et là ce qui apparaît de plus en plus, je dirais, déterminant dans le
paysage, c'est que les nouvelles, lorsqu'elles sont publiées, échappent au
contrôle...
Le Président (M. Ciccone) : En
terminant, s'il vous plaît.
Mme Éthier (Sonia) :
Pardon?
Le Président (M. Ciccone) : En
terminant, s'il vous plaît.
Mme Éthier
(Sonia) : Oui, bien, c'est
ça, c'est que je pense que le gouvernement devra se questionner sur est-ce qu'on investit davantage, parce que c'est une
question de démocratie puis je pense qu'il y a... une société serait
gagnante à ce que les gens puissent connaître...
Le Président (M. Ciccone) : Merci.
Mme Éthier (Sonia) :
...oui.
Le Président (M. Ciccone) : Merci.
Je dois respecter le temps, malheureusement. Merci beaucoup.
Mme Éthier (Sonia) :
Parfait.
Le
Président (M. Ciccone) : Je
cède maintenant la parole, pour près de 10 minutes, à l'opposition officielle,
soit à la députée de Verdun. Allez-y.
Mme Melançon :
Bien, moi, vous étiez sur une lancée, je vous laisserais quelques minutes, en
tout cas, une ou deux minutes si vous voulez terminer, parce que, là, je
vous ai sentie pressée vers la fin. Est-ce que vous aviez d'autres choses à
ajouter? Parce que c'était quand même intéressant.
Mme
Éthier (Sonia) : Bien, ce
que je disais par rapport au questionnement sur l'information qui n'est pas un
bien, hein, comme d'autres biens... et c'est tout à fait dans l'intérêt du
gouvernement, et des citoyennes, et des citoyens que, justement, les citoyens puissent exercer leur démocratie, prendre
connaissance des enjeux régionaux qui les concernent pour être capables
de se les approprier puis de s'exprimer aussi.
Alors, est-ce
qu'on peut penser que le gouvernement laisse passer la parade, entre
guillemets, et puis... on l'a salué tout
à l'heure, là, le 5 millions qui a été rapidement prêté, là, pour qu'on
puisse continuer. On pensait de poursuivre jusqu'en décembre, ça ne sera malheureusement pas possible.
Mais c'est vraiment très... Puis là, en plus, je regardais, ce matin,
dans les médias, le gouvernement du Québec a dépensé 3,7 millions en
publicité sur la plateforme du géant Web, 12 % en 2018‑2019, mais 9 % l'année précédente. Alors là, il y a une
question à se poser : Est-ce qu'on peut continuer comme ça? Est-ce qu'il n'y aurait pas des éléments qu'on
pourrait... des gestes que le gouvernement pourrait poser pour encourager
les médias régionaux pour être capable de les sauver puis sauver cette
démocratie, nécessaire aux citoyennes et citoyens?
Mme Melançon : Merci. Je
voulais que vous puissiez aller jusqu'au bout de votre idée, donc, merci.
Je vais avoir
quelques questions en rafale pour vous, si vous permettez. D'abord sur
l'exemplarité de l'État, hein, on a
voté une motion, à l'Assemblée nationale, et j'ai posé la question à différents
groupes hier, à savoir est-ce que vous avez fait certains calculs, de votre côté, à savoir où va se
retrouver l'équilibre. Est-ce qu'on doit, comme élus, demander à
l'Assemblée nationale ainsi qu'au
gouvernement des publicités? On ne peut pas complètement ignorer les grands
joueurs du Web, mais en même temps ça
prend aussi l'équilibre. Et je voyais les différents tableaux, là, qui nous
montraient l'explosion, justement, où on
utilisait peut-être trop ces géants du Web. Alors, je ne sais pas si vous, vous
avez fait un calcul en pourcentage à ce que cela représente. J'ai posé différentes questions, plusieurs m'ont dit
non, là. Ce n'est vraiment pas une trappe, c'est juste pour savoir si
vous l'avez regardé.
Mme Éthier (Sonia) :
Nous n'avons pas fait ce travail-là.
Mme Melançon : D'accord. J'ai
trouvé ça intéressant, à l'intérieur du mémoire, vous parlez des 10 bureaux
régionaux. Donc, il y a quand même des régions où il n'y a pas de bureaux
régionaux, actuellement, donc où il pourrait y
avoir un désert, dont on parlait hier, un certain désert médiatique. Est-ce que
vous pouvez me cibler là où il n'y en a pas et là où on devrait en
avoir? Et, dans un deuxième temps, est-ce que vous avez calculé combien est-ce
que ça pourrait représenter... combien on a besoin pour arriver à peu près là
où vous nous amenez? Est-ce que vous l'avez chiffré?
Mme Éthier
(Sonia) : Absolument pas,
non, on n'a pas chiffré toute cette question, là. Au fond, ce qu'on
voulait faire, c'est d'amener des pistes de réflexion pour la commission, pour
réfléchir, pour trouver des solutions.
Mme Melançon : Parce qu'il faut réfléchir un peu à l'extérieur de la boîte, hein, on l'a dit assez souvent, là. Je pense que, le modèle, on est arrivés à une fin en
soi, là. Si on est tous là en commission, c'est qu'on voit qu'on a besoin de nouveaux modèles d'affaires, on a besoin de
réfléchir. Alors, je vais réfléchir à
l'extérieur de la boîte avec vous ce
matin. Par exemple, puis je le lance comme ça, là, en toute
réflexion avec vous, si on mettait Tou.tv, Illico... si tout le monde pouvait se regrouper sous un même chapeau pour tenter, justement,
d'être attrayant pour la population pour pouvoir se retrouver avec, bien sûr,
des vitrines plus régionales, sous un chapeau qu'on pourrait identifier comme
étant Télé-Québec, est-ce que vous pensez que c'est quelque
chose qui est faisable?
M. de
Sève (Nicole) : Vous êtes
rendue pas mal loin dans votre réflexion, dans les fusions d'organigrammes
et d'organisations. Tou.tv se
retrouve sur le site de Radio-Canada, Illico, à ce que je sache, c'est privé, et Télé-Québec,
c'est notre seule télévision publique. Une proposition comme la vôtre m'inquiète, dans le sens que... est-ce qu'on risquerait
de perdre, justement, cet aspect, qui est
extrêmement important, qui fait que Télé-Québec est une télévision
publique? Ça, ça m'inquiète. Pas
fermée, mais, encore là, j'aurais envie de dire qu'on met un peu la charrue en
avant des boeufs, pour prendre une
belle expression québécoise, dans le sens que, si vous acceptez, comme commission parlementaire, de recommander qu'il y ait, oui, un élargissement du mandat de Télé-Québec
et qu'on soit capables de... dans des formules, je pense que, là, à ce
moment-là, il pourrait y avoir ces ouvertures-là, parce que ces mesures...
Je vais
prendre un exemple. Moi, j'étais de la négociation pour le Régime québécois d'assurance parentale. Quand on me demandait combien c'était pour chiffrer, je
leur disais : Voulez-vous, on va reconnaître les principes, le congé
pour les mères, les pères, puis après les
actuaires vont aller à la Régie des rentes puis vont le calculer. Bien, je vous
fais la même proposition : Pouvez-vous être capable de regarder un
principe, un élément qui fait que, oui, et maintenant, après ça,
prendre à des groupes qui ont l'expertise de
dire combien ça va coûter, combien de taxes, combien on va imposer la masse
salariale, si on ferait un fonds, déjà...
C'est dans ce sens-là que... Vous nous posez des questions de mise en oeuvre,
et nous ne savons même pas si la commission va recommander quelque chose,
ça fait que c'est un peu ça.
Mme Melançon : Je vais vous
interrompre quelques secondes, là.
M. de Sève (Nicole) : Pas juste
vous, là.
Mme Melançon : Je pense qu'on
est tous là pour réfléchir ensemble.
M. de Sève (Nicole) : Oui, mais
pas aller aussi loin.
Mme Melançon : On en profite, mais je ne veux pas imputer à
quiconque ou... je ne veux pas aller là-dedans, je ne faisais que lancer
une idée. On vient de dire qu'il fallait réfléchir à l'extérieur de la boîte,
chose que je faisais.
Je vais
revenir à Mme Éthier, alors. Je lisais bien, à l'intérieur, aussi, du mémoire, en page 9, sur Netflix, vous êtes donc d'accord avec l'idée qu'on puisse faire un
fonds dédié avec le nouvel argent qui entre, actuellement, au gouvernement,
si j'ai bien saisi, là, la portée, en page
9, là, de votre mémoire. Donc, vous, vous êtes d'accord avec un fonds dédié.
Moi, j'étais un petit peu plus large lorsque j'ai fait la proposition, là, je voyais vraiment un fonds pour et la culture... Parce que,
dans le fond, là, on a un contenant, puis le contenant, bien, c'est les
Facebook, c'est les GAFA, on va se le dire comme ça. Le problème, c'est le contenu, et là, actuellement... et c'est dans
le droit d'auteur. Il est là, le problème, là, c'est sur le droit d'auteur, tant pour... Là, on parle des médias,
moi, je le voyais un peu plus large, parce que le contenu québécois...
tout est dans tout. Mais vous, vous étiez un peu plus directe. Pouvez-vous
aller plus loin dans votre idée, s'il vous plaît?
• (10 h 10) •
Mme Éthier
(Sonia) : Bien, sur la proposition qu'on a faite, je pense qu'à la base ce qu'on se disait, c'est que,
sur la question de la taxe de vente du Québec — c'est à ça que vous référez — qui est prélevée, bien, à la base, est-ce
qu'on peut répondre à cette
question-là? Si le gouvernement accepte de prendre une partie de ce qui est
prélevé pour investir dans les médias, dans les médias et dans Télé-Québec...
bien, premièrement, oui ou non? Si c'est oui, combien? Et on va régler
une partie du problème, parce que je pense
que c'est une source de revenus qui... c'est faisable. Je ne pense pas que ça,
c'est une volonté politique, c'est faisable, ça peut se faire.
Puis ensuite, bien, l'autre possibilité que nous
disions, c'était de percevoir des impôts, là, sur les grands joueurs, parce que...
Je regardais aussi, il y a quand
même 74 % de la part que se partagent Facebook, Google sur
6,8 milliards en publicité au
Canada. Ce n'est quand même pas rien, tout ça, là, ce n'est pas rien. Ça fait
que je pense qu'il y a des gestes à poser,
il y a une... Ça, ça part de la volonté politique. Et une fois que ça, ça sera
fait, moi, je pense que, quand on a des revenus supplémentaires, bien, il reste qu'après il y a bien des choses qu'on peut
faire puis qui vous seront soumises en commission, ici, par les
différents intervenantes et intervenants.
Le Président (M. Ciccone) : Je
reconnais la députée de Saint-Laurent. Il vous reste 26 secondes.
Mme Éthier (Sonia) :
Oh! j'aurais dû parler moins.
Mme Rizqy : Mme Éthier, je
l'ai fait, le calcul, avec mes collègues, juste avec une taxe GAFA de 3 %,
c'est 20 millions. J'aimerais vous
entendre rapidement. Il y a une réforme collégiale — je sais que, le principe, on est
d'accord, Mme de Sève, mais il
faut aussi trouver des solutions, après ça, pour le long terme — réforme collégiale... l'Université de
Washington a créé un nouveau cours qui
s'appelle «Calling Bullshit», c'est pour aider aussi les citoyens à comprendre
c'est quoi, de la vraie information, puis
voir ce qui est de la désinformation. Dans notre réforme collégiale, est-ce que
ce serait souhaitable?
Le Président (M. Ciccone) : Mme la
députée, il ne reste plus de temps, malheureusement.
Mme Rizqy : Bien, est-ce qu'on
peut avoir un oui ou un non, avec consentement, ou une courte réponse, avec
consentement?
Le
Président (M. Ciccone) :
Oui? O.K., on rajoute du temps, on a un consentement. Une réponse rapide, s'il
vous plaît.
Mme Éthier (Sonia) : Bien, je ne saurais pas quoi vous répondre sur la question de la
réforme collégiale, mais à votre...
Mme Rizqy :
...formation de la citoyenneté, est-ce que, justement, on est rendus là, avec
tellement de désinformation, qu'on
pourrait faire ce que l'Université de Washington a fait et créer un nouveau
programme de trois crédits qui, justement, s'appelle «Calling Bullshit»?
Mme Éthier
(Sonia) : Je pense que ça va
être aux gens du réseau collégial de répondre, mais, sur le fond de ce
que vous dites, sur la question de la désinformation...
Le Président (M. Ciccone) : En
terminant, s'il vous plaît, en terminant.
Mme Éthier
(Sonia) : ...je suis tout à
fait d'accord, parce que, là, les gens s'informent sur Facebook, c'est
quand même... il y a une prise de conscience à faire.
Le
Président (M. Ciccone) :
Merci. Merci beaucoup. Je reconnais maintenant la députée de Taschereau pour
une période de 2 min 30 s.
Mme Dorion :
Merci, M. le Président. J'ai 2 min 30 s, je vais essayer d'aller
vite. Bon, on parle de plus en plus, à travers
le monde, d'impôt sur les grands joueurs du numérique, d'imposer leur chiffre
d'affaires qui est fait chez nous. Ils font des centaines de millions chez nous, ne paient aucun impôt, et cet
argent-là, qui serait récurrent puis qui grandirait en même temps que la révolution, qui arriverait dans nos
coffres... la révolution numérique, excusez-moi, qui arriverait dans nos
coffres pourrait nous permettre de financer les médias à long terme,
l'information au Québec à long terme.
Moi, en ce
moment, je suis plutôt inquiète de la non-position du gouvernement ou des
députés, aussi, du gouvernement dans
cet enjeu-là. On ne les a pas entendus parler de cette question-là. On a
entendu beaucoup de gens, en commission, venir nous dire : C'est une des options qui est à regarder puis qui est
très importante. Au fédéral, c'est la même chose, ils sont complètement
sur le neutre. Même eux, ils le disent : Ah! pas tout de suite... Ah! il
faut voir... bon.
Puisqu'il
s'agit quand même de la sauvegarde puis de la vie de notre culture, de notre
information locale, de ce qui anime notre identité — c'est
beaucoup plus large, l'information touche à beaucoup plus que juste
l'information elle-même — qu'est-ce qu'on fait si le fédéral refuse de
bouger, refuse, sur le long terme, de faire quoi que ce soit? Est-ce que
ça pourrait être une bonne idée de tenter de
rapatrier, comme ça s'est fait à d'autres époques... Aujourd'hui ça nous
apparaît bien extraterrestre, mais c'est des
mobilisations qu'on pourrait faire lever, de rapatrier tous les pouvoirs en
communications, en culture, de façon
à dire : Bien, nous, notre spécificité dans le monde, on va avoir tous les
pouvoirs pour la protéger. J'aimerais avoir votre avis là-dessus.
Mme de Sève (Nicole) : Je pense
que, dans l'état actuel des relations fédérales-provinciales, rapatrier tous
les pouvoirs, c'est un peu beaucoup. Par contre, si on est capables d'aller
chercher des ententes très significatives sur la main-d'oeuvre, de rapatrier des pouvoirs,
notamment, en ce qui concerne l'immigration, je suis convaincue qu'on peut
faire des pas de géant sur la culture,
d'autant plus que, comme vous l'avez si bien dit, c'est un créneau de notre
identité et qui est extrêmement
important pour la population québécoise. Ça vaut la peine de tenter le coup. Il
peut y avoir une mobilisation citoyenne.
Il y en a eu, du temps du gouvernement Harper, des mobilisations citoyennes
pour sauver Radio-Canada, si vous vous
souvenez, très fortes. Donc, il y a moyen, sûrement, de pouvoir augmenter les
pouvoirs. Je ne suis pas certaine que, dans le cadre actuel, on pourrait
tout rapatrier, mais je pense qu'on est capables. Sinon, bien, faisons à notre
tête, soyons maîtres chez nous.
Le
Président (M. Ciccone) :
Merci beaucoup. Je reconnais maintenant le député de Rimouski pour une
période de 2 min 30 s.
M. LeBel :
On ne peut pas commencer sur des meilleurs mots, «maîtres chez nous», ça
commence bien. Tout le monde ici,
autour de la table, se dit nationaliste de ce temps-ci, là, tous les partis
politiques sont devenus des nationalistes. Bien, si on est vraiment nationalistes, il faut aller revendiquer à
Ottawa ces mesures-là, rapatrier nos pouvoirs. C'est une question d'identité, c'est une question de
culture, c'est une question de langue, c'est beaucoup plus large que l'avenir
des médias, à mon avis.
Sur l'avenir
des médias, peut-être aussi... Moi, je vous fais une parenthèse, les
salles de presse ont certaines responsabilités déjà aujourd'hui. J'ai beaucoup de témoignages de journalistes en région qui
veulent vendre leurs topos au national,
puis ça ne passe jamais. Ils essaient bien de parler des crabiers puis du
bateau, mais à part le traversier Matane-Godbout, il n'y a rien qui passe au national. Et il y a
une responsabilité aussi des grands médias de laisser, de temps en temps, leurs journalistes en région
prendre un peu de place aux nouvelles nationales. Puis on concentre beaucoup...
Le Journal de Québec,
maintenant, on aime le hockey, M. le
Président, Le Journal de Québec, on va voir Les Remparts, mais bien rare qu'on
voit l'Océanic ou les Saguenéens, on parle
des Remparts. Pourtant, c'est des équipes de hockey dans nos régions, qui font
partie de notre identité aussi en région. Le
Théâtre les gens d'en bas, au Bic, ils sont en grandes difficultés,
actuellement, on se bat. Mais, si ce théâtre-là était ici, à Québec, on en entendrait
parler, il ferait la première page des journaux, mais là on est en
région, on en entend moins parler. Ça fait que c'est hyperimportant, là, ce que
vous dites.
Et je reviens
rapidement, Télé-Québec, effectivement, il y a quelque
chose à faire avec ça, plusieurs
en parlent. Hier, quelqu'un nous parlait des mutuelles de services, parce
qu'un peu comme disait mon collègue, là, Télé-Québec, il faut
qu'il prenne de la place en région, mais il faudrait qu'il ait une façon de
concerter avec les médias qui sont déjà en région. Si Télé-Québec pourrait aller chercher ce qui se passe aussi avec les
médias en région puis les propulser au niveau national, il y aurait
peut-être quelque chose à faire. Moi, Télé-Québec, O.K., mais avec une certaine
concertation, quelque chose de nouveau qu'on pourrait faire avec les médias qui
existent déjà en région.
Le Président (M. Ciccone) : En 30
secondes, s'il vous plaît.
M. LeBel : Désolé.
Mme Éthier
(Sonia) : C'est une
excellente conclusion. Il faut qu'il
y ait une concertation, puis, on le
disait tout à l'heure, il n'est pas question, dans les solutions
ou les propositions qu'on fait, de remplacer les médias qui
existent. Oui, effectivement, il pourrait y avoir une belle
concertation, puis c'est une excellente idée.
M. LeBel : Merci.
Mme de Sève (Nicole) : Prenez
juste l'exemple de Radio-Canada, qui va aller chercher des journalistes dans d'autres médias écrits et qu'ils font témoigner
dans des émissions et tout, on peut le faire dans une région, on peut le
faire avec l'antenne régionale, qui va
prendre les gens du quotidien ou des gens d'hebdos et de dire, sur cette
question-là... c'est possible.
Le
Président (M. Ciccone) :
Merci. Merci beaucoup. Je reconnais maintenant Mme la députée de Marie-Victorin pour
deux minutes.
Mme Fournier : Merci
beaucoup. Je trouve que votre proposition est extrêmement intéressante lorsque
vous mettez le doigt sur la nécessité d'assurer la diversité de
l'information partout dans nos régions. Donc, il n'est pas question de remplacer, mais bien d'assurer la diversité. Puis
ça me fait penser que, dans plusieurs pays scandinaves, comme la
Norvège, la Finlande, c'est exactement ce
qu'ils ont fait pour assurer la vitalité des médias en région. Lorsqu'il y
avait très peu de médias dans une
région donnée, le gouvernement, par exemple le gouvernement suédois, le
gouvernement norvégien, a décidé de
subventionner un joueur public pour venir l'ajouter dans l'équation et ainsi
donc assurer la diversité des médias. Donc, ça me faisait vraiment
penser à ce qui se fait là-bas.
Maintenant,
on a beaucoup parlé du futur, de l'avenir de Télé-Québec, mais est-ce que vous
avez des membres... est-ce que vous représentez des membres, à la CSQ,
qui sont à Télé-Québec? Et quel est l'état actuel des choses?
Mme Éthier (Sonia) : Bien, oui, on l'a dit, d'entrée de jeu, on
représente le syndicat des employés de Télé-Québec, qui sont environ 460 travailleuses et
travailleurs, là. Et, bien sûr, Télé-Québec, on le sait, a des difficultés
financières, a été aidé par le
gouvernement, mais je pense qu'il faut que Télé-Québec continue de vivre, que
le gouvernement continue de le faire rayonner. Comme on disait, c'est la
télévision publique qui nous appartient, et je pense que tous ces travailleuses
et travailleurs mettent la main à la pâte pour faire en
sorte que Télé-Québec rayonne. Et d'ailleurs combien de Gémeaux ont été
remportés par la qualité de ce qui se fait? Puis ça, bien, ça passe par les
travailleuses et travailleurs. Merci.
Le Président (M.
Ciccone) : Alors, merci beaucoup. Merci beaucoup pour votre
contribution à ces travaux. Surtout, merci, Mme de Sève, pour votre grande
passion. Merci beaucoup.
Je suspends les
travaux pour quelques instants.
(Suspension de la séance à
10 h 20)
(Reprise à 10 h 22)
Le Président (M.
Ciccone) : Merci. Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants
des fédérations professionnelles des
journalistes du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour
votre exposé, puis nous procéderons à
la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à
vous présenter ainsi que les personnes qui vous accompagnent et à
procéder à votre exposé. La parole est maintenant à vous.
Fédération professionnelle des
journalistes du Québec (FPJQ)
M. Giroux
(Stéphane) : Alors, merci, M. Ciccone. Mon nom est Stéphane
Giroux, et je suis président de la Fédération professionnelle des journalistes
du Québec. Je suis accompagné par notre directrice générale, Catherine Lafrance. Et on devine que vous avez pas mal tous
lu notre mémoire, alors je ne le lirai pas intégralement ce matin. Je
vais résumer les points et ensuite porter attention sur les événements des
derniers jours.
Notre organisme
existe depuis 50 ans. Il s'agit d'un OBNL qui regroupe environ 1 800
journalistes au Québec, répartis dans plus de 250 médias écrits et
électroniques. Pour vous donner une idée, 35 % de nos membres viennent de la presse écrite. La FPJQ est une association
professionnelle qui s'est donné le mandat de défendre la liberté de presse
et le droit du public à l'information. Nous
intervenons chaque fois que cette liberté nous semble menacée, que ce soit à
cause de facteurs économiques, de situations
politiques ou de contextes juridiques. Nous sommes régulièrement appelés à agir
quand nos membres se font refuser l'accès à
des assemblées publiques ou qu'ils ne peuvent obtenir des documents publics,
pour ne nommer que ces exemples. La FPJQ
distribue aussi une carte de presse, qui est reconnue à travers le monde. Pour
l'obtenir, nos membres professionnels
doivent démontrer qu'ils travaillent de façon régulière pour une ou plusieurs
entreprises de presse et doivent s'engager à adhérer et à respecter
notre code de déontologie.
Il
a beaucoup été question des médias dans la crise que l'on connaît mais peu des
journalistes. Alors, je vous invite donc
à vous poser cette question : Qu'est-ce que c'est, un journaliste? Et
voici comment on vous répond, à la FPJQ : C'est quelqu'un qui exerce une fonction de journaliste,
la personne qui travaille à la diffusion d'informations ou d'opinions
sur des questions d'actualité dans une optique d'intérêt public, au service des
citoyens et non pas d'intérêts particuliers. Cette définition est, à notre sens, importante, parce que, si on ne sait pas
ce que fait un journaliste, on ne comprend pas bien pourquoi il faut
défendre le ou les médias pour lequel ou pour lesquels il travaille. Si on ne
comprend pas bien qu'un journaliste travaille pour le public et seulement pour
lui, le but de l'exercice auquel nous nous adonnons aujourd'hui est futile.
La
FPJQ a été témoin, depuis un demi-siècle, de grands changements dans le monde médiatique, mais la
crise dans laquelle des journaux sont
plongés n'a aucune mesure avec tout ce que nous avons vu jusqu'ici. Un rapport
du Forum des politiques publiques au Canada a recensé la fermeture
de 225 hebdos et 27 quotidiens depuis 2010. C'est des centaines
de postes de travailleurs de l'information qui ont disparu durant cette
période, et c'est sans compter la menace qui pèse sur les quotidiens du Groupe Capitales Médias. Il faut
endiguer la saignée, stopper cette érosion de l'information avant que
des régions entières du Québec ne se retrouvent dans une espèce de trou noir.
Pour ce faire, alors, nos recommandations sont les suivantes.
Nous demandons à
Québec de mettre sur pied une aide pour plusieurs types de médias, qu'ils
produisent de l'information quotidienne ou
hebdomadaire, numérique ou imprimée, que leur modèle d'affaires repose sur
l'abonnement ou la gratuité des contenus.
Cette aide pourrait prendre la forme d'un crédit d'impôt pour les entreprises
de presse semblable à celle annoncée dans le dernier budget fédéral.
Nous
demandons une réduction de l'effort financier imposé aux journaux, notamment en
diminuant la compensation exigée dans la valorisation des matières
résiduelles, le recyclage.
Nous
demandons au gouvernement du Québec qu'il fasse pression sur Ottawa pour que
des redevances pour la presse productrice de contenu journalistique
soient exigées aux entreprises du GAFA. J'espère qu'on n'a pas besoin de
répéter que veut dire «GAFA».
Nous demandons au
gouvernement québécois qu'il fasse pression pour qu'Ottawa amende ses lois sur
le droit d'auteur pour contraindre les
géants du Web à respecter les droits d'auteur en obligeant les plateformes en
ligne qui publient du contenu journalistique à conclure des ententes
avec les auteurs de contenu.
Nous
demandons au gouvernement québécois qu'il revendique auprès d'Ottawa la gestion
des droits d'auteur et des redevances qui y sont associées au nom de la
souveraineté culturelle du Québec.
Nous
demandons à toutes les municipalités du Québec qu'elles recommencent à publier leurs
avis publics dans les journaux
régionaux et, évidemment, on demande à Québec de les contraindre à le faire.
Nous demandons la même chose au gouvernement, qu'il soit provincial ou
fédéral.
Sur l'urgence d'agir, les quotidiens et les
hebdos ne peuvent tout simplement pas lutter à armes égales avec Google et Facebook. Ils font face à un ennemi
1 000 fois plus puissant qu'eux. Notre mémoire, à l'instar de plusieurs
autres, démontre la
profondeur de la crise dans laquelle sont plongés les journaux, mais c'est
l'actualité des derniers jours, quand Le Groupe Capitales Médias a annoncé qu'il se plaçait sous la protection de
la Loi sur la faillite, qui prouve hors de tout doute l'urgence d'agir. La fermeture de ces six
quotidiens, si elle devait se réaliser, représenterait la disparition de la
moitié des quotidiens de langue
française au Québec. Imaginons un instant ce qui arriverait si le seul journal
pour la région de l'Outaouais fermait
ses portes, même chose pour Trois-Rivières, Granby, Sherbrooke et, évidemment,
Saguenay, la perte de couverture journalistique en région serait
catastrophique pour ces communautés, et l'effet domino de ces fermetures.
Je pense au Soleil,
qui assure une présence dans l'Est du Québec et la Gaspésie, où on ne retrouve
aucun quotidien. J'ai moi-même
commencé ma carrière en Gaspésie en écrivant pour Le Soleil. Les
réactions ont été nombreuses depuis cette annonce. Certains remettent en
question le modèle d'affaires des journaux et se demandent, par exemple,
pourquoi les contribuables devraient payer
pour soutenir une presse qui n'est plus financièrement viable. La réponse est
simple : Parce que le prix à
payer pour la société québécoise serait énorme. Le prix à payer, c'est la
disparition des sources d'information, la fin, dans certaines régions, de l'essentielle pluralité des voix dans
une démocratie en santé et le retour à l'obscurantisme. En région, ce
sont souvent les journalistes de la presse écrite qui couvrent les assemblées
des conseils municipaux, qui s'intéressent
au travail des élus, par exemple. Sans eux, les décisions seraient prises
derrière des portes closes sans que les citoyens n'en soient avisés.
C'est la porte ouverte à des petites dictatures, on en a vu.
• (10 h 30) •
Oui, la
presse a besoin de l'aide de l'État en ce moment. Elle est loin d'être la seule
industrie dans cette situation. L'avionnerie
s'est aussi tournée vers le gouvernement, les industries culturelles le font régulièrement,
pour ne parler que de ceux-là.
Plusieurs voix s'élèvent déjà pour laisser entendre que, si la presse est
subventionnée par l'État, elle devient un outil de propagande. Bien, il n'en est rien. Donnons l'exemple de
Radio-Canada, qui est financée en partie par le gouvernement fédéral, et son service de l'information est l'un
des plus crédibles et respectés au Canada. La majorité des grands médias
adhèrent à un code de déontologie très
strict, qui les met à l'abri de toute influence extérieure. Et je vous rappelle
la description des journalistes que nous avons faite un peu plus tôt,
les journalistes travaillent pour le public, seulement pour le public, et des
mécanismes existent pour protéger et assurer l'indépendance journalistique. Je
vous remercie.
Le
Président (M. Ciccone) :
Merci beaucoup, M. Giroux. C'est maintenant le temps de passer, justement,
à la partie gouvernementale pour une période de 15 minutes. Je
reconnais le député de... voyons, Beauce-Sud. Merci.
M. Poulin : Merci, M.
le Président. Je pense que vous ne
l'oublierez plus d'ici la fin de la semaine ou la fin de la journée, du
moins.
Merci à la
FPJQ d'être avec nous aujourd'hui, fort apprécié. Félicitations pour votre
campagne, également, que vous avez mise en place sur les réseaux sociaux, qui
vise justement à mettre de l'avant le travail qui est fait par
nos hebdos locaux, entre autres,
mais, bien sûr, par les quotidiens et la presse dans son ensemble. Il ne suffit
pas non plus de prendre une photo puis
de la mettre sur les réseaux sociaux, on s'entend. Il faut poser des gestes, et
je pense que ces gestes-là devaient être posés il y a plusieurs années, doivent l'être aujourd'hui et devront l'être dans le futur. Alors, sachez que vous avez une
oreille attentive des élus de l'Assemblée nationale également pour le futur.
On a beaucoup
de questions, du côté de la partie ministérielle,
alors je vais faire très vite. Vous avez parlé d'indépendance des médias, du droit des auteurs, on pourra y revenir,
mais je veux parler de votre relation avec les patrons de presse, compte tenu du fait que vous avez à lutter
pour s'assurer qu'on puisse avoir des salles de nouvelles qui sont
remplies, des salles de nouvelles qui visent
une destination, qui est celle de donner le plus d'informations possible aux
citoyens. On veut également protéger
le journalisme d'enquête, on veut s'assurer qu'il y ait plus de ressources qui
y soient accordées mais, au même
moment, on ne veut pas délaisser la nouvelle quotidienne, qui est très
importante, entre autres dans les régions.
Donc, quelle
est votre relation avec la majorité des médias de presse au niveau de la façon
dont on peut mettre en place nos
salles de rédaction? Parce qu'on parle beaucoup des revenus dans le cadre de
cette commission parlementaire là, et c'est
important, mais l'investissement, qui, pour plusieurs, peut être considéré
comme une dépense — moi,
j'aime mieux parler
d'investissement — il faut
aussi en parler, alors le fait qu'on investit dans une salle de nouvelles, ce
que ça rapporte, pas juste en termes de publicité, mais ce que ça
rapporte en termes de crédibilité, également, de l'information. Alors, actuellement, quelle est votre relation avec les
principaux médias pour la place des journalistes dans les salles de
nouvelles et s'assurer qu'on puisse en avoir le maximum?
M. Giroux (Stéphane) : Je vais
laisser Mme Lafrance répondre.
Mme Lafrance
(Catherine) : Merci,
Stéphane. Merci. On n'a même pas besoin d'appuyer sur le bouton. C'est
bien, ça se fait tout seul.
Bien,
écoutez, première des choses, nous, à la FPJQ, évidemment, on ne fait pas d'ingérence,
on ne se mêle pas d'administration des salles de rédaction des entreprises de presse, des modèles
d'affaires. On n'a ni les compétences ni l'intérêt pour le faire. Cependant, notre relation — pour
répondre à votre question — avec
les entreprises de presse et les grands
patrons, patronnes d'entreprise de presse, elle est excellente. Plusieurs
sont membres chez nous, d'ailleurs. Pourquoi? Parce qu'on travaille tous dans le même but. Le but, c'est de faire de
l'information la meilleure information possible pour le public québécois, et c'est ce qu'on a à coeur
aussi. Donc, on défend non seulement le droit du public à l'information
mais la qualité de l'information.
Et non
seulement la relation des patrons d'entreprise de presse, elle est bonne avec
nous, mais les patrons d'entreprise de
presse se parlent. Ils ont de bonnes relations entre eux. Évidemment,
vous vous en doutez bien, ils sont tous dans la même industrie, malgré la compétition et malgré ce
qu'on peut croire vu de l'extérieur. Cependant, ils sont tous bien
conscients que,
écoutez, pour reprendre, si vous voulez, un exemple ou une allégorie avec
ce qui se passe dans l'actualité en ce moment, la forêt brûle, et il est temps d'endiguer ça, il est temps de contrôler
tout ça. Je pense que les patrons de presse ont à coeur, d'abord et avant tout, l'information. Ce sont des
gens qui sont impliqués dans le milieu de l'information. Beaucoup sont d'anciens journalistes. Ils ont toujours fait de l'information toute leur vie, pour la
plupart. C'est ce qu'ils défendent d'abord et avant tout avant de
défendre des intérêts financiers.
Bien sûr, ils
ont ça à coeur, mais je ne suis pas sûre qu'en ce moment ça soit leur seule
préoccupation. Je pense qu'ils veulent tous éviter les fermetures et ils
veulent tous conserver, continuer à embaucher des journalistes. Et, dans le
meilleur des cas, idéalement, d'ici quelques années, ils aimeraient tous
réembaucher des journalistes. Parce que je vous rappelle qu'au Québec, au cours des dernières années, il s'est perdu
des dizaines et des dizaines, voire des centaines d'emplois de journaliste dans la province, dans toutes les
régions. Il y a des régions qui sont moins bien desservies maintenant qu'elles l'étaient il y a encore quelques années, et ça, c'est terrible.
C'est terrible pour les travailleurs, pour les emplois mais pour la population
d'abord et avant tout.
Donc, je
pense que tous s'entendent pour dire qu'il faut, oui, sauver la presse mais il
faut que la presse ne soit plus sur l'espèce
de respirateur artificiel sur lequel il est branché depuis des années. Il faut
que la presse soit viable. Il faut qu'elle soit prospère. Pourquoi est-ce qu'on ne peut pas se mettre à penser à une
certaine prospérité? Le Québec, la société
québécoise et les Québécois méritent une presse écrite en santé, en santé
financière, en santé et méritent que tous les territoires soient couverts et que des journalistes puissent
travailler partout, parce que, comme on le dit et on le répète, les
journalistes travaillent pour le public. J'espère que ça répond à votre
question. J'ai débordé un peu.
M. Poulin : Non, mais fort
intéressant. Merci beaucoup. Je vais céder la parole à l'un de mes collègues de
la partie ministérielle.
Le Président (M. Ciccone) : Merci.
Je reconnais le député de Sainte-Rose.
M. Skeete : Merci
beaucoup, M. le Président. Merci et bienvenue. Je pense que vous êtes bien placé,
M. Giroux, pour parler de la réalité
des médias anglophones, j'aimerais ça vous entendre. Comment ça se compare, les
médias d'expression anglaise, versus
la situation, l'état des faits ou l'état actuel, là, des
médias francophones et anglophones? S'il y a un écart, j'aimerais ça l'entendre. Et aussi comment vous
voyez cette crise-là dans l'optique, justement, où est-ce que les GAFA, bien, vraiment,
sont plus traditionnellement en anglais? Donc, on pourrait penser que les
médias anglophones sont plus vulnérables par cette compétition plus
internationale, j'aimerais ça vous entendre.
M. Giroux
(Stéphane) : Bien, les
médias anglophones au Québec font face aux mêmes problèmes que les
médias francophones. Le problème est
universel à travers le Canada, à travers l'Amérique du Nord. Au Québec,
puis je me fie, évidemment, au fait que j'ai travaillé dans quelques médias
anglophones, quelques médias francophones, ça se rejoint beaucoup.
La différence, c'est que, du côté anglophone, ces médias-là doivent en plus
faire face à la diminution constante de la communauté anglophone.
The Gazette, à Montréal, comparé à
ce que c'était il y a 25, 30 ans, c'est tout mince, là. Ils peinent à
faire une couverture adéquate parce que les ressources, les budgets ne sont
plus là. Ils appartiennent, évidemment, à des intérêts financiers importants où peut-être que le... ils voient l'avenir
différemment. Je pense au Sherbrooke Record, où j'ai publié mes premiers textes il y a 33 ans. À l'époque, c'était un grand
quotidien, même si le tirage était très mince. Maintenant, c'est un tout petit journal qui en arrache chaque année.
Je parlais à l'éditrice, l'autre jour, qui disait : On n'est jamais sûrs
si on va être là l'année prochaine. En
Gaspésie, il y a un tout petit hebdo qui s'appelle The Spec, qui existe
depuis au-dessus de 40 ans. Eux
autres, ils survivent presque uniquement par abonnements, par des nostalgiques,
et ils reçoivent des dons, ils reçoivent
de la publicité locale mais, encore là, eux autres ne savent jamais, d'une
année à l'autre, s'il va être encore là. C'est pour ça que, du côté anglais, c'est plus complexe. On le sait, eux
autres, c'est la perte de marché publicitaire et la décroissance
démographique qui les affectent encore plus.
M. Skeete :
Pour résumer, au Secrétariat des relations avec les Québécois d'expression
anglaise, on met beaucoup d'emphase
pour réduire l'exode des Québécois d'expression anglaise du Québec. Donc, si
d'un côté le gouvernement agit concrètement
là, compte tenu des résultats de cette commission, on serait en mesure,
peut-être, d'aider aussi la communauté anglaise et les médias
anglophones.
M. Giroux
(Stéphane) : Ah! absolument. La FPJQ défend la presse, le journalisme
au Québec, qu'il soit francophone ou anglophone. Et d'ailleurs...
Mme Lafrance (Catherine) : Et
même la presse ethnique.
M. Giroux
(Stéphane) : Plusieurs de nos membres représentent la presse ethnique.
Les communautés culturelles, bien souvent, ont des journaux au Québec,
et ceux qui respectent notre code de déontologie font partie, évidemment, de
notre organisation.
M. Skeete : ...merci beaucoup.
Je cède à mes autres collègues.
Le
Président (M. Ciccone) :
Merci beaucoup. Je reconnais maintenant le député de Maskinongé. À vous la
parole.
M. Allaire : Merci,
M. le Président. Hier, la question me brûlait les lèvres — finalement, je pense, vous étiez
vraiment la bonne organisation pour recevoir
cette question-là — moi, je m'interroge beaucoup sur la santé du
métier de journaliste, actuellement.
On le sait, plusieurs intervenants nous l'ont dit aussi hier, c'est une crise
qui était quand même prévisible, là. Déjà,
il y a 10 ans, il y avait des signes avant-coureurs. Il y a eu, au cours
des 10 dernières années, beaucoup de réorganisations, probablement engendrées par l'employeur, des concessions qui ont été
demandées, d'ailleurs, aux journalistes pour un peu, probablement, en prendre un peu plus dans leur
cour, là. On parlait des journalistes-orchestres, là, hier. Est-ce qu'il y
a eu beaucoup de journalistes qui ont quitté
la profession par eux-mêmes dans les... Vous en avez peut-être abordé un peu
tantôt... vous l'avez abordé tantôt, là,
mais j'aimerais que vous alliez un petit peu plus loin là-dedans, donc, pour
nous démontrer est-ce que, vraiment, le métier de journaliste, là, a
perdu une certaine expertise, là, au cours des dernières années.
• (10 h 40) •
M. Giroux
(Stéphane) : Énormément,
énormément. Je n'ai pas de chiffre à vous donner, mais la plupart des
grandes salles de nouvelles au Québec
ont offert des forfaits, des packages, là, de mise à la retraite pour leurs
employés les plus séniors, qui, par
définition, coûtent plus cher. On engage des jeunes de plus en plus de façon
précaire, des petits contrats à court
terme, pour une fraction des salaires qui ont déjà existé dans le milieu. Les
revenus, les conditions de travail qu'on connaissait dans les
années 80, c'est fini. Il y a eu une époque où — bon,
hier, les représentants de La Presse en ont parlé — la
semaine de quatre jours était la norme. Ça fait des années que c'est fini, ça.
Les salaires stagnent depuis très longtemps.
On est chanceux, dans nos renouvellements de convention collective, si on
réussit à avoir le coût de la vie. On essaie
de garder nos acquis. Il y a de moins en moins de journalistes syndiqués. Les
salaires sont bas. Le salaire moyen, c'est 50 000 $ par année. Ce n'est pas mauvais mais, pour un
journaliste qui a passé quatre ans à l'université... À un moment donné, on veut se marier, on veut avoir des enfants, on
cherche une stabilité. Il y en a beaucoup qui sont tentés de quitter le métier. Et
je vais laisser Catherine compléter là-dessus, parce que je crois...
Mme Lafrance
(Catherine) : Je ne veux vraiment pas t'interrompre.
M. Giroux
(Stéphane) : Oui. Mais ce
qu'il faut retenir, c'est que... Oui, je connais beaucoup de gens qui ont
quitté la profession. C'est souvent des
jeunes, hein? Ils ont fait quelques années, cinq, six ans, ils sont toujours en
bas de l'échelle, ont toujours
très peu de séniorité, et puis ils sont dans la jeune trentaine, puis on les
voit, ils quittent, ils deviennent attachés politiques, attachés de
presse, responsables des communications dans le privé. Il y
en a beaucoup, de ça. Toutes des professions nobles,
mais ultimement ils ne font plus de journalisme pour l'intérêt public.
Mme Lafrance
(Catherine) : Est-ce que je pourrais compléter?
M. Giroux
(Stéphane) : Je vais laisser Catherine compléter, oui.
Mme Lafrance
(Catherine) : Je suis
vraiment désolée. Je voulais juste compléter, parce qu'évidemment nous,
dans nos bureaux de la FPJQ, on voit les
membres, on leur donne leur carte de presse, on connaît un peu leur historique,
si vous voulez, de carrière, là. Et,
oui, effectivement, Stéphane a raison, c'est assez effroyable de voir les
changements dans la profession. Et,
quand on parle des journalistes, peut-être qu'on devrait dire aussi «travailleurs de
l'information», parce qu'il y a des
journalistes qui ont quitté mais il y a des photographes qui ont quitté le
métier, il y a des caricaturistes qui ont quitté le
métier. Ça a un effet domino sur toutes les strates, si vous voulez, de cette
profession-là.
Ça
a un impact aussi sur les journalistes pigistes, qui sont peut-être
plus nombreux qu'ils l'étaient avant parce
qu'il est de plus en plus difficile
d'obtenir un emploi stable. Certains le font par choix, mais d'autres le font
parce qu'ils n'ont pas le choix non
plus. Le salaire médian, le salaire moyen des pigistes a baissé. C'est devenu
presque impossible maintenant, au Québec,
de vivre quand on est pigiste. Je pense que... et là je ne donnerai pas ma main
au feu, là, mais je pense que le salaire est à peu près
22 000 $ par an, le salaire moyen pour les pigistes au Québec, et ce sont
souvent des gens qui travaillent énormément.
Ce n'est pas parce qu'ils ne travaillent pas beaucoup mais c'est parce que le
prix au feuillet, bien, c'est devenu presque
dérisoire. Les conditions sont de plus en plus difficiles
pour tous les types de journalistes, si vous voulez, et de travailleurs
de l'information.
M. Allaire :
Merci.
Le Président (M.
Ciccone) : ...le député de Saint-Jean, il vous reste
1 min 50 s.
M. Lemieux :
Oupelaïe! Merci, M. le Président. Je ne peux pas m'empêcher de remarquer une
phrase de votre mémoire, parce que j'enchaîne sur ce que vous disiez,
Mme Lafrance : «Pendant que les postes de journalistes
disparaissent, le gouvernement concentre son aide aux infrastructures
numériques. La question qui se pose, c'est : À quoi serviront ces
infrastructures quand il n'y aura plus de journalistes pour les alimenter?»
En fait, vous avez,
en bons journalistes que vous êtes, travaillé beaucoup en questions et un peu
en réponses aujourd'hui. Vous avez posé la
question : Qu'est-ce qu'un journaliste?, vous avez fourni la réponse. Vous
avez posé la question, puis je
voudrais revenir là-dessus, M. Giroux : Pourquoi payer pour ces
services-là? En fait, la question est double, parce que les gens, maintenant, ne paient plus ou, en tout cas,
généralement parlant, là, on donne l'information. Donc, dans le fond, ce qu'on va faire ou ce qu'on attend que le
gouvernement fasse, c'est de payer pour le public qui ne paie pas pour avoir l'information en espérant
que ça s'améliore.
Mais il n'y a pas
vraiment de bonne solution, parce qu'il n'y a pas encore de bon modèle
d'affaires, jusqu'à preuve du contraire.
Vous avez dit tantôt que ce n'était pas dans votre cour, les modèles
d'affaires, mais, de votre point
de vue, qu'est-ce qu'il faut qu'on fasse pour que les
citoyens du Québec, qui ont droit à l'information en vertu de
l'article 44 de la charte, aient plus
d'information, aient encore une aussi bonne, sinon une meilleure information
partout sur le territoire?
Le Président (M.
Ciccone) : En 30 secondes, s'il vous plaît.
M. Lemieux :
Woups! Excusez-moi.
M. Giroux (Stéphane) : Alors, très rapidement, l'information n'est pas
gratuite. Les gens pensent que parce qu'ils lisent un grand titre sur leur téléphone cellulaire, c'est gratuit. Elle
doit être payée. Et, comme on l'entend depuis hier, le fait est que des
géants comme Google, Facebook, ramassent notre contenu...
Le Président (M.
Ciccone) : En terminant.
M. Giroux
(Stéphane) : ...le distribuent gratuitement, et puis on n'est pas
rémunérés au bout du compte.
Le Président (M.
Ciccone) : Merci beaucoup, M. Giroux. Je reconnais maintenant la
députée de Saint-Laurent pour une période de 10 minutes.
Mme Rizqy :
Bonjour. Bonjour, Mme Lafrance, M. Giroux, bienvenue. Tantôt, vous
avez dit : Il faut sauver la presse. Puis moi, j'ai envie de
dire : Il faut sauver la démocratie, notre pilier. Et, si vous... Vous
autres aussi?
M. Giroux
(Stéphane) : Il ne peut pas y avoir de démocratie s'il n'y a pas de
presse libre.
Mme Rizqy :
Exactement. Puis ça, c'est le plus haut tribunal, aussi, du Canada qui l'a dit.
Et on est en train de réfléchir, oui,
à des solutions immédiates, parce qu'il y a urgence d'agir, le feu est pris. On
peut faire cette commission puis on
va la faire, mais en attendant il y a quand même une mise à jour économique
puis il y en a un, pompier, il s'appelle le ministre des Finances. C'est lui, là, qui a la capacité, là, lors de sa
mise à jour économique, de dire : Non seulement, oui, on fait une aide immédiate, mais non seulement ça, on
peut avoir une taxe GAFA immédiate pour le Québec. On est autonomes. On
a notre propre Agence de revenu du Québec, où est-ce qu'on peut collecter les
géants du Web, puis immédiatement il y
aurait des entrées d'argent. On peut le faire dès la mise à jour économique,
qui arrive au mois de novembre. On peut aussi s'assurer d'avoir des
redevances. Tout ça, c'est quelque chose qu'on est capables de faire, et on ne
pourra pas attendre.
Mais
je veux aussi... Hier, on en a parlé, des chiffres puis de la fiscalité. Moi,
j'ai envie aussi de voir un peu plus au court et moyen terme, parce qu'éventuellement nous, on va écrire un
rapport. En Éducation et en Enseignement supérieur, il y a des questions qui se posent au niveau
collégial. Vous avez préparé 30 secondes avant d'y croire. Dans la réforme
collégiale, pensez-vous qu'on pourrait
réfléchir à ce que ce cours entre dans le cursus obligatoire? Parce que,
clairement, clairement, il y a de la
désinformation. La vitesse, là... l'infobésité, c'est un nouveau terme, parce
qu'il y a tellement d'information que les gens ne sont même plus capables de savoir le vrai du faux, et on gobe de
l'information sans nécessairement vérifier si elle vient même d'une
source fiable.
M. Giroux
(Stéphane) : La désinformation, les fausses nouvelles, c'est
probablement la pire catastrophe du XXIe siècle
dans la démocratie, et c'est un petit peu à la lumière de ça qu'on a lancé le
programme 30 secondes. C'est une des grandes réalisations de la FPJQ. Maintenant, oui, j'aimerais ça que
ce soit enseigné, pas juste au collégial, au secondaire puis, si c'était
juste de moi, au primaire, parce que la désinformation commence très tôt.
Et
une des grandes raisons pourquoi le grand public est rendu méfiant envers la
presse, n'est plus trop sûr si on doit nous
croire, nous faire confiance, c'est justement parce que les gens, là, ils
consultent leurs nouvelles non pas dans un journal reconnu mais sur leur page Facebook. La page
Facebook, là, l'algorithme, il n'est pas programmé en fonction de ce qui
est vrai, de ce qui est faux, il est
programmé en fonction de vos croyances. Alors, les gens reçoivent des avis, des
«updates», puis on ne sait jamais, c'est
tellement bien fait maintenant, là, que c'est à s'y méprendre. Vous et moi, on
sait faire la différence, on a une
formation, mais quelqu'un à la maison qui a perdu l'habitude de lire son
journal avant d'aller travailler le matin, peut-être que cette
personne-là ne le sait pas. Moi, j'ai des gens dans ma famille, très, très bien
éduqués, qui viennent me voir : J'ai
entendu dire telle affaire, c'est-u vrai? Je suis, là : Non, où tu as vu
ça? Puis là je regarde le titre. Ah! là, je vois ce qui s'est fait, je vois la manipulation qui s'est faite. Puis les
gens qui font de la déformation, qui font de la... eux autres, bien, ils
sont tout aussi habiles, ils vont aller dire : Non, non, c'est les médias
traditionnels qui font de la propagande, c'est eux autres qu'il faut se méfier.
C'est
parce que nous autres, on a une formation pour bien le faire, un code d'éthique à suivre et puis, évidemment,
on doit montrer patte blanche à chaque fois
qu'on publie quelque chose. On a un conseil de presse qui nous force à
respecter nos normes déontologiques. C'est pour ça que, selon nous, un programme
comme 30 secondes devrait faire partie d'un curriculum à l'école.
Catherine aimerait compléter.
• (10 h 50) •
Mme
Lafrance (Catherine) : Je
veux juste vous dire et vous annoncer que ce formidable programme,
30 secondes — je prêche pour notre paroisse,
évidemment — eh bien,
il connaît un tel succès qu'on est en train de travailler sur une version, justement, pour des adultes et
éventuellement on travaillera sur une version aussi pour, enfin, tous les
adultes, pour les gens un peu plus âgés
aussi, parce que c'est toutes les couches de la société qui est frappée par ce
phénomène de, je dirais,
désinformation mais aussi de manque de connaissance des médias. Alors donc, on
travaille là-dessus, et je pense que plus cette formation sera donnée
d'une façon ou d'une autre, mieux ça sera.
Et je voudrais juste reprendre ce que
vous disiez à propos de l'énoncé économique. Oui, l'argent est le nerf de
la guerre, et on est ici, entre autres, pour
parler de ça, bien sûr, mais je vous rappelle que, dans notre campagne qu'on a
lancée très récemment, dont il a été
question il y a quelques minutes, ce qu'on dit, nous, à la FPJQ, c'est :
C'est toute la société qui doit
soutenir ses journaux, toute la société. Je pense aux municipalités qui, depuis
plusieurs années, ont cessé de publier les avis dans les journaux. Pour les municipalités, c'est une infime partie
de leur budget, je pense que c'est moins de 2 %. Pour un journal, c'est un sérieux coup de main. Il faut
que les municipalités recommencent à publier leurs avis dans les
journaux. Il faut que le gouvernement du Québec publie dans les journaux ses
avis, ses publicités. Il faut que le gouvernement fédéral le fasse également. Il faut que l'entreprise privée le fasse. Il
faut que toute la société se mette à comprendre que, si elle n'encourage pas les journaux, bien, ils vont
mourir. C'est comme vouloir avoir un restaurant de quartier, un restaurant
au coin de chez soi, puis jamais ne vouloir
y aller, bien, il ne va pas pouvoir continuer à exister, ce restaurant-là.
Donc, tout le monde doit mettre la main à la pâte et tout le monde doit
soutenir les journaux.
Le Président (M.
Ciccone) : Merci. Je reconnais maintenant la députée de Verdun.
Mme Melançon :
Merci beaucoup. Alors, bonjour à vous deux. Merci d'être là. Moi, j'ai décidé,
bien sûr, de joindre votre mouvement.
On a été plusieurs à le faire. Et, non, ce n'est pas uniquement de prendre une
photo et de dire que je soutiens mon
journal mais c'est aussi de pouvoir mettre de la publicité dans les journaux,
c'est une façon de soutenir nos journaux locaux. Et sachez que c'est en ce sens où moi, j'ai voulu le faire, que
plusieurs élus l'ont fait. Et j'invite vraiment l'ensemble de la population à prendre une photo, bien sûr,
avec leurs journaux, et dire qu'ils le soutiennent, et le lire, et le dire.
Alors, voilà, je voulais simplement faire ce point.
C'est
très intéressant, la campagne 30 secondes, de savoir aussi qu'on va
élargir le tout, parce que, oui, c'est vrai que souvent on peut s'y méprendre, et savoir qu'on va y aller avec les
adultes. J'espère qu'on pourra, du côté de l'Assemblée nationale, tenter
de vous aider là-dessus, parce que c'est vraiment... c'est de l'éducation, de
l'éducation grand public. Alors, bravo pour ça!
Mme Lafrance
(Catherine) : ...
Mme Melançon :
J'ai passé le message, voilà. Je veux revenir. Hier, on a entendu plusieurs
syndicats qui nous disaient : Oui, on a
besoin d'investissements qui viennent de l'État, justement, pour revoir, dans
le fond, le modèle économique des
médias mais que ces investissements-là viennent avec des obligations. Et je me
lance et je vous pose la question, parce qu'il a déjà été question pour les journalistes d'avoir un statut, un
ordre professionnel aussi pour pouvoir, justement, rassurer. Vous parliez de méfiance, tout à l'heure,
M. Giroux. Est-ce que la FPJQ, là-dessus, a une nouvelle réflexion? Parce
que je me rappelle, là, ça fait presque huit, neuf ans, là, où cette
discussion-là avait eu lieu. Où est-ce qu'on en est, de votre côté?
M. Giroux
(Stéphane) : Écoutez, la question a été largement débattue lors de la
sortie du rapport Payette au début de
la décennie. Le principe semble intéressant à certains égards si c'est pour
distinguer ceux qui se collent ou non à un code déontologique. Mais, si le gouvernement ou un organisme non
journalistique a son mot à dire sur notre façon de travailler, c'est non. C'est pour cela que les détenteurs de
la carte de presse, par exemple, de la FPJQ, jouissent d'une bonne
réputation, parce qu'ils doivent se
soumettre à des critères sérieux et rigoureux. C'est pour ça... selon nous,
faire partie d'un organisme reconnu
auquel les grandes organisations de presse sont déjà impliquées est un rempart suffisant. Mais je vais
être honnête avec vous, la question continue à diviser, même parmi nos
membres.
Quant à un ordre
professionnel, là, c'est beaucoup plus difficile. Un ordre professionnel comme
ceux qui représentent les médecins, avocats,
ingénieurs, c'est absolument incompatible avec la liberté d'expression telle
que garantie par la Charte des droits et libertés. On ne peut pas
s'imaginer un monde où la liberté d'expression, d'opinion, de faire des reportages, de contester le gouvernement serait
tributaire d'une permission d'un organisme de contrôle. Un journaliste
qui dérange se ferait réduire au silence si,
tout à coup, l'organisme de contrôle devenait politisé. C'est impensable puis
juridiquement impossible, alors c'est pour ça que la question n'est même
pas soulevée dans la plupart des pays occidentaux.
Le Président (M.
Ciccone) : Merci. Il reste 10 secondes, Mme la députée.
Mme Melançon :
Oh! zut de zut! J'aurai d'autres questions, principalement sur le recyclage, où
on va devoir aussi, bien sûr... On
veut prendre les GAFA, là, on veut leur parler. Bien, Amazon est souvent
ignoré, avec le suremballage, les boîtes de carton, on va devoir en
reparler.
Le Président (M.
Ciccone) : Merci. Merci beaucoup. Je reconnais maintenant la députée
de Taschereau pour 2 min 30 s.
Mme Dorion :
Merci. J'ai lu votre mémoire, qui est superintéressant, puis on appuie
beaucoup, beaucoup des suggestions que vous faites là-dedans, qui sont
intelligentes et à suivre absolument.
Mais
j'ai une autre question, et là je ne veux pas vous mettre mal à l'aise, c'est
vraiment une question que beaucoup de
gens, surtout dans ma génération, se posent, et j'aimerais avoir des réponses à
leur donner. Il y a eu une baisse de confiance envers les journalistes dans les dernières années. Il y a beaucoup de
monde qui disent : Moi, je ne consomme même plus ça, je ne crois
plus à ça. Sur le blogue de la FPJQ, il y a Jean-François Cliche qui écrivait à
ce sujet puis qui disait : «Cette confiance,
nous l'avons collectivement laissé s'étioler au fil des décennies, même si
notre métier en dépend.» Et on ne s'en parle pas entre journalistes,
comme si on n'avait pas de pouvoir d'action là-dessus.
Là, la confiance du public, moi, je la
vois comme plus que jamais nécessaire, surtout s'il faut financer une
partie de la vie médiatique avec des fonds
publics. Est-ce que la FPJQ ou les journalistes se posent la question entre
eux, à savoir est-ce qu'on a une responsabilité dans cette
désaffection-là du public? S'il y en a une, est-ce qu'on fait partie aussi du problème? Et, dans les deux cas, est-ce qu'on peut
faire partie de la solution puis comment pour regagner la confiance du
public, qui est vraiment nécessaire à notre démocratie?
M. Giroux
(Stéphane) : Je peux répondre. Dans le fond, effectivement, il y a eu
une érosion. Durant les années 80, en télévision, dans l'écrit, il y a eu une espèce de virage vers ce qui
rapporte financièrement pour les entreprises de presse plutôt que la qualité. Ça devenait plus payant de
mettre quatre journalistes sur les faits divers que de mettre un
correspondant à Washington, mettons. Et puis on ajoute à ça l'arrivée de
l'Internet, des médias sociaux, qui a ouvert la porte à la désinformation, les gens se mêlent, et puis là on
se retrouve dans une situation où, effectivement, les gens ne sont plus
trop sûrs s'ils peuvent faire confiance ou
non. Oui, on se pose la question sur la crédibilité, et ça me fait plaisir de
vous annoncer aujourd'hui que ça va être le thème de notre congrès au
mois de novembre, à Saint-Sauveur.
Le Président (M.
Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.
M. Giroux
(Stéphane) : Et puis évidemment les députés, s'ils ont des doutes, là,
ils sont invités à participer.
Le Président (M.
Ciccone) : Merci beaucoup. Je reconnais maintenant le député de
Rimouski pour 2 min 30 s.
M. LeBel :
Oui, bonjour. «Québec demande à Ottawa qu'il impose aux entreprises du GAFA»,
«Québec fasse pression sur Ottawa afin d'amender les lois», «Québec revendique
auprès d'Ottawa la gestion des droits d'auteurs». Qu'est-ce qu'on fait si
Ottawa n'écoute pas?
M. Giroux
(Stéphane) : Écoutez, Ottawa, en ce moment, est dans la même situation
que plusieurs autres pays qui font
face à ce problème-là. Puis je pense qu'à l'international ce qu'on découvre,
c'est qu'il y a une certaine... hein, qui bouge en premier? On vient de voir que la France s'est décidée à agir. Le
président américain dit : Bien, si vous faites ça à mes GAFA, moi,
je vais taxer votre vin. Il y a des enjeux qui dépassent malheureusement ça,
mais ce serait bien le fun que quelqu'un se réveille, à Ottawa, parce que le
gouvernement à Ottawa, qu'il soit conservateur ou libéral, ils ont laissé tout
couler il y a une dizaine d'années.
• (11 heures) •
M. LeBel :
Est-ce que vous seriez fiers de nous si la commission, de façon unanime, on
s'entend pour revendiquer tous ces droits-là qu'on devrait avoir d'Ottawa?
Si on s'entendait dans une déclaration unanime, tout le monde, qu'on demande à
Ottawa de bouger, vous seriez fiers de nous?
M. Giroux
(Stéphane) : Je pense que ça va faire partie de votre travail et de
votre message.
M. LeBel :
On va essayer. On va essayer de vous rendre fiers.
M. Giroux
(Stéphane) : L'histoire du Québec s'en est...
M. LeBel : Moi, j'ai juste un commentaire, puis c'est un peu
en lien avec ce que ma collègue vient de dire, on écoute les bulletins de nouvelles maintenant,
il y a une grande partie des bulletins de nouvelles que ce n'est pas des
topos, c'est des commentateurs qui viennent nous dire quoi penser. Moi,
j'aimerais mieux avoir un topo de temps en temps dans mes régions puis de décider moi-même qu'est-ce que
j'ai à penser avant de me le faire dire par un commentateur. Vous ne
trouvez pas qu'il y a
un problème là? De plus en plus, c'est comme ça, tu ouvres le topo, tu as cinq
minutes de discussion avec un commentateur. Il me semble... Il
n'y a pas un problème là?
M. Giroux
(Stéphane) : La question
est intéressante et puis... J'ai participé à une étude, il y a
quelques années, avec le syndicat
Unifor, puis on avait fait l'analyse du coût des reportages, et le fait est,
là, qu'une enquête journalistique peut coûter jusqu'à 10 000 $
et peut-être même 100 000 $ sur les gros dossiers...
Le Président (M.
Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.
M. Giroux
(Stéphane) : ...et puis une
chronique, ça ne coûte rien, ça ne coûte rien. Alors, des fois il y a
des médias à court de budgets pour faire du journalisme d'enquête...
Le Président (M.
Ciccone) : Merci beaucoup, M. Giroux.
M. Giroux
(Stéphane) : ...vont faire du commentaire.
Le Président (M. Ciccone) : Merci. Je reconnais maintenant
la députée de Marie-Victorin pour une période de deux minutes.
Mme Fournier : Merci. C'est superintéressant, puis je voulais justement
faire du pouce sur ce qu'ont dit, avant moi, les collègues de Verdun, Taschereau et Rimouski
concernant toute cette question-là de la confiance, puis je pense que ça
a un lien avec la place de plus en plus grande de l'opinion dans les médias. Et
la députée de Verdun faisait référence au statut
de journaliste, qui a déjà été discuté dans les années passées, mais je vous
soumets bien humblement que je crois que c'est une partie de la solution, dans le sens qu'il y a beaucoup de gens
qui perdent confiance dans l'information parce que c'est devenu difficile pour le citoyen de distinguer ce
qui est de l'opinion versus ce qui est une information rigoureuse,
vérifiée, écrite par des journalistes qui,
eux, suivent un code de déontologie auquel ne sont pas tenus des chroniqueurs
ou des blogueurs, par exemple, qui
n'ont pas le statut de journaliste ou qui ne sont pas journalistes. Donc, vous
ne croyez pas que ça pourrait être, disons, une idée à réétudier dans ce
contexte-là, par exemple, à votre congrès du mois de novembre?
M. Giroux
(Stéphane) : On peut certainement en parler, mais vous voyez tout de
suite le problème, où il y aurait deux
statuts de journaliste : un pour ceux qui font de l'opinion, qui ont
certaines responsabilités, d'autres, ceux qui font de la nouvelle, qui ont d'autres responsabilités. Moi,
j'ai toujours l'inquiétude de : Un instant, j'ai la liberté de presse,
j'ai le droit d'écrire ce que je
veux, où je veux, quand je veux, comment je veux. C'est là, là. Je veux dire,
la liberté de la presse, la liberté
d'expression, c'est un des plus grands dons de la démocratie, ça peut être mal
utilisé. Moi, j'ai toujours dit : Ça serait le fun si les journaux étaient un petit peu plus sérieux dans la façon de
séparer bien précisément ce qui est
la nouvelle, ce qui est l'information, mais ce n'est pas si simple que
ça, tu sais.
Le Président (M. Ciccone) : En
terminant, s'il vous plaît.
Mme Fournier :
Mais le citoyen au coeur de ça, je pense qu'il a besoin de davantage d'outils
pour distinguer les deux parties de l'information.
M. Giroux (Stéphane) : L'éducation,
l'éducation.
Le
Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup. Merci beaucoup de votre présence. Votre contribution est
inestimable pour cette commission.
Je
demanderais cependant au groupe de l'Association des journalistes
indépendants du Québec de prendre place rapidement, car nous avons
quelques minutes de retard.
Je suspends pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 11 h 4)
(Reprise à 11 h 5)
Le Président (M. Ciccone) : On
prend place rapidement, s'il vous plaît. Merci beaucoup.
Je souhaite maintenant
la bienvenue aux représentants de l'Association des journalistes indépendants du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de
10 minutes pour votre exposé. Je vous invite donc à vous présenter ainsi
que les personnes qui vous accompagnent et à procéder à votre exposé. La parole
est à maintenant vous.
Association des journalistes indépendants du Québec (AJIQ)
Mme Brassard-Lecours (Gabrielle) :
Bonjour. Gabrielle Brassard-Lecours, présidente de l'Association des
journalistes indépendants du Québec et journaliste indépendante. Je suis
d'ailleurs une récipiendaire de la bourse de 30 secondes,
du programme qui a été exposé juste avant moi. Donc, voilà, merci beaucoup de
nous recevoir à la commission.
À l'instar de
nos collègues, donc, de la fédération des journalistes professionnels du
Québec, et ceux de la Fédération nationale
des communications, à laquelle nous sommes affiliés, et de la plupart des
groupes qui défilent devant vous cette semaine, on partage les
inquiétudes quant à l'avenir des médias, comme nous le démontre aussi la
récente crise chez Le Groupe Capitales
Médias. Nous partageons également plusieurs des solutions qu'ils proposent pour
sortir de l'impasse.
Pour vous
mettre en contexte, l'Association des
journalistes indépendants s'est fondée à Montréal en 1988. Elle défend l'indépendance des journalistes face aux
pressions économiques et politiques qui s'exercent sur le métier et elle
participe, par ses actions et son discours
public, au renouvellement des perspectives sur le journalisme indépendant et
l'évolution des pratiques journalistiques contemporaines.
Il était
important pour nous aujourd'hui de témoigner de la réalité particulière des
journalistes indépendants dans cette crise,
dont mon collègue va vous parler dans quelques instants. Sachez toutefois que
les journalistes pigistes indépendants sont
de plus en plus nombreux. Même quand ils travaillent à temps plein dans les
médias, ils sont souvent sur des sièges éjectables. Ils sont aussi présents autant à Montréal que partout dans
la province. Les pigistes sont d'ailleurs parfois les seuls correspondants régionaux qui alimentent nos médias
nationaux. Et les journalistes de l'AJIQ sont aussi des professionnels
au même titre que tous les autres journalistes qui répondent à un code
déontologique et travaillent avec rigueur et éthique. Il y a d'ailleurs de
nombreux journaux et magazines qui dépendent largement des pigistes pour leur
contenu.
M. Van
Vliet (Simon) : Bonjour. Simon Van Vliet, vice-président de
l'AJIQ. Donc, les conditions de travail des journalistes pigistes comme Gabrielle, et moi, et les membres de l'AJIQ
sont caractérisées par une très grande précarité. Mais, à une certaine époque pas
si lointaine, des journalistes de renom quittaient leurs postes salariés et
syndiqués pour devenir pigistes.
C'est le choix qu'a fait notamment René Lévesque en 1956. Et beaucoup de
gens, à cette époque-là, choisissaient la
liberté et l'autonomie professionnelle que confère le statut de pigiste pour
développer, avancer leur carrière, pouvoir faire plusieurs choses différentes, pas être dépendants d'un seul employeur.
Et c'est ce qu'on pourrait appeler l'âge d'or de la pige, là, où on avait beaucoup d'opportunités, des
bons tarifs, des contrats décents. Ça, ça s'est poursuivi, disons,
jusqu'au tournant des années 80, puis, à partir de là, on a vu un virage
brutal vers la précarisation du statut et des conditions de travail des
journalistes indépendants.
Aujourd'hui, dans certaines rédactions, c'est
30 % à 50 % des effectifs de la salle de rédaction qui sont des surnuméraires, c'est-à-dire des pigistes qui sont
sur le «payroll», si vous me passez l'expression, mais qui n'ont aucune
sécurité d'emploi, qui sont à contrat à la
semaine, au mois. Et pour les autres, bien, sauf quelques rares exceptions, là,
les tarifs qui sont pratiqués dans
l'industrie ont stagné depuis le début des années 80, ce qui fait que les
pigistes ont vu leurs revenus diminuer d'à
peu près 30 % en 30 ans, entre les années 80 puis le début des
années 2010. Et la tendance à la précarisation s'est accélérée
grandement dans les années 90‑2000 et préfigurait à bien des égards la
crise que le milieu connaît depuis une dizaine d'années dans son ensemble.
• (11 h 10) •
Il faut dire
que l'absence d'un cadre de négociation collective désavantage très nettement
les journalistes indépendants, qui
n'ont pratiquement aucun pouvoir de négociation individuel face aux grands
groupes de presse. D'autant plus que le marché québécois, tant dans le
secteur de la presse écrite, des quotidiens, les hebdos, les magazines que dans
la presse audiovisuelle, en
radiotélévision... sont contrôlés par des oligopoles qui profitent de leur
position dominante pour imposer des contrats
abusifs, pour maintenir des contrats
au strict minimum, ce qui pousse bien des pigistes à diversifier leurs activités,
notamment en prenant des contrats à côté, parfois dans des zones déontologiques
plutôt floues, et surtout de faire plus avec moins en moins de temps.
Depuis le
tournant des années 2000, la plupart des éditeurs de périodiques au Québec
exigent de la part de leurs collaborateurs
pigistes des cessions complètes de droits sans aucune autre rémunération qu'un cachet de première publication souvent déjà minime. Parfois, on demande même de renoncer aux droits
moraux dans les contrats, et, sans signer ces contrats-là, on ne peut pas collaborer. Donc, c'est ce qu'on appelle
les contrats d'adhésion, c'est non négociable. Et donc cette espèce de spoliation là des journalistes indépendants par
les entreprises de presse, à bien des égards, est très similaire
à celle qu'on connaît avec les Google, Amazon et Facebook, qui reprennent,
sans payer, des contenus produits à grands frais par des entreprises
de presse. Et c'est la même réalité qui fait que les entreprises
de presse sont aujourd'hui au bord de la faillite pour certaines et que de nombreux journalistes
indépendants peinent à joindre les deux bouts en travaillant à la pige, et
c'est pour ça que ma collègue va maintenant vous parler de l'enjeu du
financement des médias.
Mme
Brassard-Lecours (Gabrielle) :
Alors, il y a plusieurs propositions qu'on a entendues ici depuis le début des
travaux de la commission ainsi que la
solution qui est... une des solutions qui est envisagée pour Le Groupe
Capitales Médias, qui ne sont pas
nouvelles à celles de l'AJIQ. La plupart des médias indépendants et beaucoup
de médias communautaires qui sont...
qui survivent, certains depuis 30 ans, d'autres qui sont plus récents, qui
se sont formés sur le Web, se forment dès le départ en coopérative ou en organisme à but non lucratif non seulement pour des raisons économiques, mais pour des raisons évidentes d'indépendance,
qui est une valeur cruciale et indissociable de notre métier de journaliste.
Si la
syndicalisation des journalistes est venue assurer l'indépendance des salles de rédaction par la mise en place de conditions favorisant le respect de la déontologie
journalistique, la protection syndicale n'a jamais complètement éliminé la possibilité pour les propriétaires de s'immiscer dans les salles de nouvelles. En
2013, une étude du Conseil de presse du Québec soulignait d'ailleurs
que la convergence d'intérêts commerciaux, publicitaires et corporatifs au sein
des grands groupes de presse menace l'indépendance journalistique. Il semble évident, et depuis longtemps,
que l'unique modèle actionnaires-publicitaires
ne fonctionne plus pour les médias. Il est impératif de repenser l'économie
complète des médias. Aucun média ne devrait être la propriété d'un seul
individu ou d'une poignée d'actionnaires.
Mais, dans
cette foulée, à notre avis, il est essentiel de pouvoir bénéficier d'une
aide de l'État, que ce soit sous forme d'aide récurrente au fonctionnement ou pour des projets spéciaux. Cette aide étatique doit être équitable
et ouverte à tous les médias. En France, une enveloppe budgétaire dédiée
aux médias est assurée, peu importe le gouvernement au pouvoir. D'autres initiatives innovatrices existent aussi, comme le site Web
jaimelinfo.fr, qui réunit plus d'une centaine de médias que le public peut financer à la carte. Même chose aux
États-Unis, avec la très récente apparition de civil.co, une
plateforme qui héberge des rédactions
de partout dans le monde, financée par le public via une cryptomonnaie interne,
ce qui permet la décentralisation complète de la plateforme. La mise en
place de programmes de financement calqués sur ceux destinés au secteur culturel permettrait non seulement aux médias traditionnels de traverser la crise actuelle, mais également de favoriser l'émergence de nouveaux médias qui explorent des modèles
économiques, techniques et éditoriaux qui offrent de nouvelles voies au
journalisme indépendant de qualité.
M. Van
Vliet (Simon) : Ce modèle-là
du système culturel, il existe depuis des décennies. Il est
déjà en application dans certains
secteurs de l'industrie des médias, dont la production télévisuelle et
cinématographique, les périodiques, les médias communautaires. Ce système-là
existe depuis plus de 50 ans et n'a jamais donné lieu à des ingérences politiques
notables, même pour les sociétés d'État, qui sont financées en majeure partie directement par l'État.
C'est pour ça qu'on suggère de
reproduire cet écosystème de financement là dans le système...
dans l'écosystème des médias et, pour cela, donc, de reconnaître les
médias d'information comme des organisations culturelles qui peuvent être admissibles
à du soutien similaire aux industries
culturelles et aux organismes artistiques. Plus spécifiquement, on peut
s'inspirer de la mécanique qui existe
en créant des programmes balisés et normés sous forme de soutien au
fonctionnement mais aussi aux projets pour les organismes à but non lucratif, de crédits d'impôt, de prêts, de garanties de prêt pour les organismes à but lucratif et
des mesures directes de soutien pour les
journalistes indépendants sous forme de bourses de recherche, de création, de
formation, de production, comme c'est le cas pour les artistes.
Le Président (M. Ciccone) : En
terminant, s'il vous plaît.
M. Van
Vliet (Simon) : Enfin, ça
fait 15 ans que le modèle de la négociation collective a été évoqué, d'abord dans le rapport Bernier en 2003, ensuite dans le rapport Payette en 2011. Cette
idée-là de s'inspirer de la loi sur le statut de l'artiste, c'est ce
qu'on prône, à l'AJIQ, depuis 30 ans. Merci de le considérer.
Le
Président (M. Ciccone) :
Merci. Merci beaucoup. Je reconnais maintenant le député
de Beauce-Sud pour une période de 15 minutes.
M. Poulin : Merci beaucoup, M.
le Président. Merci pour votre présentation fort intéressante. Très intéressant
également, quand on parle d'indépendance des médias, donc, de vous entendre particulièrement
sur ce volet à titre de journalistes indépendants.
J'ai plusieurs
questions, je vais essayer d'y aller de façon assez courte. Au niveau de la rémunération des journalistes indépendants, pour les gens qui nous écoutent à la maison, vous avez dit
que, depuis le début des années 80, ça a stagné, alors, ça, ça ne date pas d'hier. On peut penser à quoi, en termes de rémunération? Certains sont rémunérés au mot, d'autres
au texte, d'autres à l'ampleur de l'exclusivité. Donc, j'aimerais que vous nous
dressiez un portrait de la rémunération que vous avez.
Mme Brassard-Lecours
(Gabrielle) : Bien, c'est un
des gros problèmes pour les journalistes pigistes, c'est qu'en ce moment,
au Québec, il n'y a pas de tarification de base, donc c'est vraiment
à la carte et c'est vraiment selon l'entreprise pour laquelle on
travaille.
On peut vous
donner un exemple. Par
exemple, Le Devoir, qui a le même tarif depuis à
peu près 25 ans, paie, par
exemple, 50 $ pour un texte de
500 mots. Vous comprenez que ce n'est pas beaucoup, hein? C'est ça. Donc,
ils paient 50 $ pour... oui,
c'est ça, 500 mots... 250 mots, donc 100 $ pour un texte, ce qui
n'est pas assez pour vivre. Donc, vous comprenez qu'il faut qu'on multiplie beaucoup les contrats pour pouvoir payer la
vie avec ça. Il y a les magazines, il y a certains magazines qui paient un petit peu, par exemple 125 $ au
feuillet — un
feuillet, c'est 250 mots ou 1 500 caractères — mais ce n'est vraiment pas le cas dans les médias en général, là. C'est très
fluctuant, ce qui fait que c'est difficile de... Le portrait est très, très inégal, de la tarification. Et justement
c'est pour ça qu'on prône un peu un statut plus balisé qui nous permettrait
au moins d'avoir un tarif de base, peu importe pour qui on travaille, et l'AJIQ
travaille beaucoup en ce sens-là.
M. Van
Vliet (Simon) : Si je peux ajouter, donc on a Le Devoir à
50 $ du feuillet, là on est dans la moyenne de ce qui se fait en presse écrite quotidienne. Il y a
des endroits où ça va descendre jusqu'à 35 $ du feuillet, parfois même
moins. Parfois, c'est un forfait unique pour
un texte, peu importe le nombre de mots, parfois avec une photo, qui n'est pas
rémunérée. On peut avoir des publications, surtout des publications
scientifiques ou des publications spécialisées, qui vont aller jusqu'à
135 $, 150 $ du feuillet. Ça, c'est en presse écrite.
La
photographie de presse, là, c'est tout un autre secteur où, là encore, il y a
une très grande disparité : parfois on paie les photos, parfois on ne les paie même pas, parfois on demande à un
photographe professionnel d'en faire mais parfois on demande au journaliste, qui n'est pas photographe,
de simplement fournir une photo prise avec son téléphone. Et, dans le domaine de la radiotélédiffusion, là, souvent on
est soit dans des tarifs horaires sous forme de surnuméraire, ou à
contrat, ou carrément à forfait, avec des forfaits à la journée, des forfaits à
la semaine.
Donc, on a
une disparité énorme qui fait que c'est très dur, surtout pour les journalistes
qui débutent dans le métier, de
savoir qu'est-ce qu'il est raisonnable d'exiger. Parce qu'évidemment la
question de la rémunération, elle n'est jamais abordée dès la commande par le client ou quand on soumet une proposition
au client. On soumet une proposition : Ah oui, ça vous intéresse? Parfait. Puis là c'est seulement
en cours de route que, là, il faut finir par poser la question : Mais
c'est combien que vous payez? Puis là
souvent on a la mauvaise surprise de réaliser qu'on va travailler deux jours,
une semaine sur un projet qui va nous
rapporter 200 $, 500 $ si on est chanceux. Alors, c'est vraiment ça,
l'enjeu de base, la rémunération, clairement.
• (11 h 20) •
M. Poulin :
Et j'imagine que, dans la valorisation du métier de journaliste, il doit être
extrêmement difficile, auprès de vos membres, de dire : Justement,
toi, tu demandes combien?, versus un autre, puis de quelle façon on peut
négocier, puis en même temps offrir un certain standard en lien avec la
rémunération. Donc, ça doit être extrêmement difficile.
Et comment vous faites pour naviguer, à l'ère de
l'exclusivité? On a vu des médias québécois remercier des journalistes s'ils partageaient leur voix, par
exemple, avec d'autres médias qui sont en compétition. Alors, vous,
comment vous faites pour réussir à naviguer, à l'ère de l'exclusivité? On comprend
que votre texte est exclusif. Lorsque vous le vendez, vous vendez également une exclusivité, vous vendez une nouvelle, en tout cas, du moins, le plus souvent possible. Mais comment vous faites pour réussir à tirer votre
épingle du jeu puis à convaincre les directeurs
d'information que, même si, dans deux ou trois semaines, ils vont vous
lire dans un autre média, peut-être sur un autre sujet... Alors, comment vous
faites pour traverser le temps de l'exclusivité?
M. Van
Vliet (Simon) : Bien, il y a beaucoup de règles implicites,
évidemment, il n'y a aucune règle formelle. Mais ce qui est certain, c'est que beaucoup du développement de carrière des
journalistes indépendants se fait sur une base de relation de confiance avec les rédactions, ce qui
fait que, si on propose un sujet à une rédaction, bien, on attend
minimalement d'avoir une réponse de ce
média-là avant de le proposer ailleurs. On peut aller jusqu'à dire : Si
vous ne le prenez pas, je vais aller
le proposer à quelqu'un d'autre. C'est une question de confiance, à ce
moment-là, de dire : Bien, moi, je suis confiant de pouvoir
continuer à avoir des contrats avec cette entreprise de presse là. Il s'agit
seulement de faire preuve d'un certain jugement
et de s'assurer de nouer des relations avec les rédactions avec lesquelles on
collabore. Puis ce n'est pas facile parce qu'il y a énormément de pression dans les rédactions, il y a énormément
de roulement aussi, avec toutes les coupures de postes qu'il y a eu, ce qui fait que c'est très, très
difficile. Puis c'est vraiment une question de parfois marcher sur des oeufs,
parfois se retenir de proposer quelque chose
à une entreprise de presse concurrente de peur de perdre les contrats plus
réguliers qu'on a avec une autre entreprise. C'est un travail
d'équilibriste sur un fil très précaire.
Mme Brassard-Lecours
(Gabrielle) : Ce qu'il faut
ajouter aussi, c'est qu'il y a plusieurs entreprises qui comprennent bien cette clause d'exclusivité là et qui exigent
qu'on cède la totalité de nos droits d'auteur. C'est-à-dire qu'ils achètent
notre texte pour 100 ans sur toutes les
plateformes, «forever», qu'on ne peut pas du tout, du tout vendre ailleurs,
tout ça. Donc, ça aussi, c'est difficile, parce que ça fait qu'on ne
peut pas, là, justement, proposer ailleurs.
Puis souvent
les pigistes qui ont du succès, là, disons, bien, ils tirent leur épingle du
jeu, par exemple, en proposant un
sujet mais en proposant des angles différents à plusieurs médias. Donc, comme
ça, ils peuvent un peu rentabiliser le même
sujet mais pas tout à fait avec le même angle. Mais ça, c'est dans le cas où,
justement, on ne se fait pas demander de céder nos droits d'auteur. Et nous, on conseille souvent à nos membres
de ne pas accepter ce genre de contrat là, mais en même temps ils ont besoin de manger, ils ont
besoin de vivre, donc on se retrouve dans un cercle vicieux qui est un
peu difficile. Puis c'est pour ça qu'on
revendique un peu d'avoir un statut un petit peu plus affirmé, là, pour qu'on
puisse se protéger un peu de ça.
M. Van
Vliet (Simon) : Parce que, dans la réalité, si je peux me permettre,
c'est seulement les journalistes les plus privilégiés qui peuvent se permettre de refuser de céder leurs droits,
qui peuvent se permettre de renoncer à collaborer avec un média, parce qu'ils savent qu'il va y en avoir
d'autres. Mais la plupart des jeunes journalistes qui commencent n'ont
pas ce luxe-là de dire non à des clauses abusives comme celle de renoncer à ses
droits d'auteur.
M. Poulin :
Puis vous êtes des entrepreneurs aussi, alors l'objectif, c'est que... Quand on
a un contrat, si on dit non une fois, ils risquent de ne pas nous
rappeler, par la suite, puis ils disent : Arrange-toi, c'est ça?
Mme Brassard-Lecours
(Gabrielle) : Exactement. Donc, c'est un jeu d'équilibre où on veut
cultiver un peu nos bonnes relations avec les rédactions. Donc, c'est
ça, on navigue...
M. Poulin : Peut-être que je vois une opportunité pour
vous — avant de
céder la parole à mon collègue — parce qu'on a beaucoup parlé de niches et l'importance d'avoir des niches
extrêmement précises. Évidemment que, s'il y aurait une direction de dire : Sur une masse
salariale, il y a des crédits d'impôt dans les salles d'information, et tout
ça, c'est sûr que, là, on entre dans quelqu'un qui est embauché, si on
parle de la masse salariale. On pourrait définir par la suite le journalisme en tant que tel, qui pourrait être,
donc, les journalistes à la pige, et tout. Mais, dans un volet où on veut
des niches en région, où on veut plus
d'exclusifs, on veut plus de journalistes d'enquête, on veut plus de médias
d'information en région qui couvrent
des sujets extrêmement précis, est-ce que vous voyez une opportunité pour les
journalistes indépendants de s'inscrire rapidement dans ce volet-là et
qui pourrait aider vos membres, d'une certaine façon?
Mme Brassard-Lecours (Gabrielle) :
Vous voulez dire une niche spécialisée?
M. Poulin : Si le gouvernement, dans sa façon dont on
souhaite que l'information soit communiquée, donc qu'il y ait plus de médias de niche ou encore, du moins, de
sujets de niche... est-ce que vous voyez une opportunité pour les
journalistes indépendants d'avoir des sujets très précis qui pourraient être
supportés davantage?
Mme Brassard-Lecours
(Gabrielle) : Bien, je pense que, oui, ça pourrait être une option,
dans la mesure où on a plusieurs de nos membres qui sont déjà un peu
spécialisés, là, c'est-à-dire qui ont des enjeux avec lesquels ils se sentent plus à l'aise de... ils ont des sujets qui leur
tiennent plus à coeur que d'autres, donc, j'imagine que ça pourrait être une
option. En même temps, je vous dirais que, par exemple, l'aide fédérale qui est annoncée en ce moment
n'aidera pas les médias qui sont nichés, justement, spécialisés, donc ça
va être un peu...
M. Poulin : ...prendre un média qui existe déjà et
l'amener vers certaines niches ou l'amener vers certains volets qui ne
sont pas suffisamment apportés, entre autres les régions du Québec.
Mme Brassard-Lecours (Gabrielle) :
Bien, ça veut dire que ce serait plus intéressant, si c'était à un niveau individuel, que pour des médias indépendants, qui
seraient obligés, un peu, de transformer leur mission, si vous voulez.
Mais, à un niveau individuel, oui, j'imagine que ça pourrait être une option.
M. Van
Vliet (Simon) : C'est qu'il
y a deux grands modèles pour vivre de la pige : c'est soit on se
spécialise puis on devient la
personne de référence que les médias vont appeler s'il y a des sujets à faire
en agriculture, en agronomie, en sciences,
mais l'autre modèle, c'est d'être un généraliste, mais là on se retrouve à
travailler un peu dans les platebandes des médias
généralistes, qui ont déjà leur personnel, et donc on a les restants, si on
veut, on a les cahiers spéciaux, on a les commandes
que les gens réguliers n'ont pas le temps de faire ou refusent de faire parce qu'ils ont des clauses de conscience dans leur contrat que, comme
pigistes, on n'a pas. Donc, c'est ça, la réalité des journalistes indépendants
qui ne se spécialisent pas, c'est que ça leur laisse très peu d'espace pour
développer leur marché, si je peux dire.
M. Poulin :
Merci beaucoup. Je laisserai la parole à...
Le Président (M.
Ciccone) : Merci beaucoup. M. le député de Saint-Jean, vous avez la
parole.
M. Lemieux :
Oui. Quatre minutes, c'est ça?
Le Président (M.
Ciccone) : 4 min 3 s.
M. Lemieux :
Trois secondes?
Le Président (M.
Ciccone) : Oui, quatre minutes.
M. Lemieux : Quatre minutes. Merci, M. le Président. Vous
avez beaucoup parlé de vos conditions de travail, de rémunération. Je voudrais parler de la réalité
terrain, parce qu'à la page 3 de
votre mémoire vous dites : «Si les journalistes indépendants vivent des difficultés liées à la
précarité et aux contrats inéquitables dans les grands centres, la situation
est pire en région.» Et là je pensais que ça voulait dire avec les médias
régionaux, mais vous rajoutez : «Pourtant les journalistes indépendants
des régions représentent une force pour nos médias concentrés à Montréal.»
La
réalité au quotidien pour la majorité, là, de vos membres, c'est qu'ils
travaillent en région pour Montréal ou pour les grands centres ou ils
travaillent en région pour les médias régionaux?
Mme Brassard-Lecours
(Gabrielle) : Bien, ils travaillent en majorité pour les médias qui
sont concentrés à Montréal, parce que
souvent, en région, il n'y a qu'un seul journal, qui a déjà un peu ses
employés. Donc, oui, c'est sûr qu'il collabore,
là. Par exemple, on a des membres en Abitibi, on en a deux, trois, qui
collaborent régulièrement avec Radio-Canada en Abitibi mais ils alimentent aussi, tu sais, un peu Radio-Canada
national quand c'est nécessaire et ils témoignent souvent... Ils alimentent beaucoup les médias qui sont à
Montréal, parce que souvent les médias concentrés à Montréal n'ont pas
de correspondant en région ou très peu, donc
ils font un peu les deux, mais c'est aussi parce que les opportunités de
travail, s'ils se concentrent seulement sur les médias de leur région, sont un
peu limitées pour les journalistes indépendants.
M. Lemieux :
On a parlé de gruyère et de désert médiatique à certains endroits sur le vaste
territoire québécois, et ce n'est pas parce
qu'il n'y a pas de monde dans ces vastes territoires là. Je vous signale que je
suis député de Saint-Jean. Saint-Jean-sur-Richelieu,
100 000 personnes, 11e ville au Québec, on a deux hebdos et une
station de radio musicale, donc, et
la montréalisation des ondes fait en sorte qu'on n'en voit pas, de médias de
Montréal. M. le député de Rimouski et moi, on partage la même opinion là-dessus. Mais, dans votre cas, ce
territoire-là, il vous appartient. Le problème, c'est vos clients, parce que vous êtes capables de le couvrir, vous
êtes suffisamment nombreux pour le couvrir, c'est juste qu'il n'y a pas
personne pour acheter votre matériel.
Mme Brassard-Lecours
(Gabrielle) : ...puis ça, bien, c'est lié à l'enjeu plus large de la
montréalisation générale de l'information, là, qui a bien de la misère à
sortir de la métropole, et tout ça. Donc, c'est sûr que, par ricochet, bien, ça
atteint aussi les journalistes indépendants.
M. Lemieux :
Mais on s'entend... je ne sais pas si on va s'entendre, mais la nature
médiatique étant ce qu'elle est, la montréalisation
des ondes, on ne remettra pas le génie dans la bouteille, là, ça, c'est pas mal
réglé. Mais est-ce qu'on peut produire
plus et mieux de contenus régionaux, au moins, pour les régions et
interrégional? Après tout, l'Internet, ça marche des deux bords, hein?
• (11 h 30) •
Mme Brassard-Lecours (Gabrielle) : Bien, tout à fait, puis nous, à l'AJIQ, en
général, on prône le travail collaboratif. Donc, c'est pour ça qu'on
fait appel... on encourage nos membres à vendre le plus de sujets possible au
plus de médias régionaux, nationaux,
montréalais, tout ça. Donc, moi, je pense qu'une des solutions aussi à une
partie de la crise, c'est le travail collaboratif, là. On n'est plus à
l'époque où on peut travailler en silo. Puis, si on pouvait sortir un peu du
modèle actionnaires-publicitaires puis qu'on
se batte pour tirer notre bord de la couverte... ça serait très bénéfique de
pouvoir travailler beaucoup plus ensemble, justement, interrégionaux,
avec Montréal. Ça nous paraît essentiel de sortir d'un carcan individualiste,
là, à travers cette crise-là.
Le Président (M.
Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.
M. Van
Vliet (Simon) : Bien, il a été question, là, de donner un rôle
régional à Télé-Québec, par exemple. C'est certain que les pigistes en région pourraient être une source
d'information importante pour une espèce d'agence de presse régionale
que Télé-Québec pourrait devenir. Ça, ce serait très intéressant, relativement
à faible coût.
M. Lemieux : C'est la question
que je n'ai pas le temps de vous poser. Merci.
Le Président (M.
Ciccone) : Merci beaucoup. Je reconnais maintenant la députée de
Verdun.
Mme Melançon :
Merci beaucoup d'être présents aujourd'hui. On va tenter de mettre un peu de
viande autour de l'os, parce que,
dans le fond, c'est très intéressant, puis vous arrivez justement avec une
nouvelle idée avec le statut de l'artiste, et, moi, c'est un peu plus là-dessus, là, où je voudrais nous guider
ensemble. L'attractivité, donc, au milieu journalistique, on en a parlé un peu plus tôt ce matin et hier aussi
avec un professeur d'université, et on comprend qu'avec la diminution
des conditions socioéconomiques que vous
vivez, 30 % en 30 ans, là, ce n'est pas rien, là, on va se le dire. Je
pense que de savoir et d'expliquer aux gens qu'il n'y a pas vraiment
d'encadrement sur votre métier, c'est assez surprenant, surtout lorsqu'on fait
le choix, comme vous le disiez un peu plus tôt, de devenir journaliste
indépendant.
Vous savez qu'avec la politique culturelle,
donc, qui a été déposée par l'ancien gouvernement et qui a été bien acceptée, je vais le dire comme ça, là, par le
nouveau gouvernement, il y a les deux lois sur le statut de l'artiste qui
doivent être réouvertes. J'imagine que ce
que vous souhaitez aujourd'hui, et c'est ce que j'entends, c'est qu'on puisse
introduire dans ces lois-là... parce
qu'une fois que les lois sont faites et sont fermées, c'est difficile de les
rouvrir, mais là, comme on doit les réouvrir avec la nouvelle politique
culturelle, j'imagine que votre souhait, c'est que vous puissiez intégrer ce
statut de l'artiste là pour avoir un encadrement.
M. Van
Vliet (Simon) : Absolument. Puis vous parliez, avec nos collègues de
la FPJQ, du statut de journaliste, à l'AJIQ,
bien, on a, depuis les débuts, une revendication sur la reconnaissance du
statut juridique des journalistes indépendants spécifiquement, et c'est
parce que la Loi sur le statut de l'artiste venait d'être adoptée quand l'AJIQ
a été fondée.
Il faut
savoir que la négociation collective existe seulement dans la loi sur les
métiers de la scène et de l'audiovisuel et que les... bien, oui, donc la scène, le théâtre, la danse et la
télévision, l'enregistrement sonore mais pas dans le domaine de la littérature. Donc, nous, c'est certain qu'une
grosse partie des revenus des journalistes pigistes se fait en presse écrite,
dans les magazines, donc, dans ce qui
retomberait sous le coup de la loi sur la littérature. Donc, si on envisageait
d'intégrer le statut de... la reconnaissance des journalistes
indépendants comme artistes au sens de la loi, il faudrait, à tout le moins,
inclure dans la loi sur la littérature le même mécanisme de négociation
collective que celui qui existe dans l'autre loi.
L'alternative,
ce serait de créer un régime particulier pour les journalistes indépendants,
mais c'est certain que ce serait un
peu contre-productif de créer une loi spécifique à un corps de métier alors
qu'on a déjà deux lois qui encadrent l'ensemble des professions de la culture. Et donc il s'agirait simplement d'élargir
un petit peu la portée de ces deux lois-là pour inclure les métiers de la culture et des communications.
Et à ce moment-là, effectivement, ce serait le bon moment de le faire
dans l'étude de ces deux lois-là, qui datent d'il y a plus de 30 ans, quand
même.
Mme Melançon :
Tout à fait, mais qui avaient quand même été réouvertes au début des années
2000, je me souviens très bien de ces
moments-là. J'en prends bonne note. Je ne sais toujours pas à quel moment on va
être à l'intérieur de ces deux lois,
puisque j'ai déjà posé des questions en ce sens-là. Je ne sais pas à quel
moment, là, du côté gouvernemental, on a l'intention de rouvrir, mais sachez que j'ai bien entendu... et je
connais plutôt bien ces deux lois-là, donc on pourra sans doute s'en
reparler.
J'aimerais
revenir avec vous sur... Vous avez parlé d'une possible agence de presse
régionale, là, avec Télé-Québec, là,
un peu ce qu'on mentionnait tout à l'heure, et je sais que vous êtes très au
fait. Mais il y a aussi des problématiques avec La Presse
canadienne,actuellement, parce qu'il y a un effet domino avec la
situation qu'on vit depuis deux semaines avec les six quotidiens en
région, là. Si on n'a plus des quotidiens à nourrir, cette agence de presse là
va être mise à mal, assurément, alors il
faut s'assurer d'une survie. Est-ce que vous ne voyez pas, dans un doublon
comme celui-là, une possibilité, justement, qu'on affaiblisse un pour
essayer de redonner un peu à l'autre?
Mme Brassard-Lecours
(Gabrielle) : Moi, j'ai envie de dire que, si La Presse
canadienne engage nos journalistes indépendants,
c'est super. Mais, si ce n'est pas le cas, bien, justement, nous, on essaie de
trouver, dans le fond, des espaces pour
que nos journalistes puissent vivre, puissent couvrir leurs histoires. Si ça se
fait à travers soit une agence régionale ou un genre de plateforme, on n'est pas fermés à ça. Tu sais, on ne veut pas
affaiblir personne, là, on essaie juste de trouver un peu des solutions,
là, mais, oui...
Mme Melançon :
Parfait. Non, mais c'est parce que moi, j'essaie de le voir quand même dans la
globalité, vous comprenez? Puis
j'entends très, très, très bien aussi votre proposition, mais ce que j'entends
en même temps, c'est que, pour vous,
la meilleure façon de donner des emplois aux journalistes indépendants, c'est
la diversité des sources d'information.
M. Van
Vliet (Simon) : C'est certain. Puis, pour répondre à votre question un
peu plus globale, il y aurait peut-être
des possibilités de convergence, si je peux utiliser ce mot-là sans la
connotation politique, entre La Presse canadienne
et une éventuelle agence régionale de
Télé-Québec par le biais d'une association coopérative entre deux
organisations. C'est là qu'on est, et
il faut aller vers ça, de mettre en commun nos ressources pour faire mieux avec
le peu de ressources qu'on a et être
capables d'aller générer davantage de revenus pour l'ensemble des joueurs du
milieu. Donc, oui, la crise met en cause, éventuellement, la survie de La Presse canadienne en
français au Québec, mais peut-être qu'il y a une opportunité, dans cette
crise-là, de redéfinir les rôles des différents acteurs de l'information au
niveau régional.
Mme Melançon :
Lorsque vous parliez tout à l'heure de la renonciation des droits moraux,
est-ce que — et je
ne connais pas la réponse, donc c'est une
vraie, vraie, vraie question — un journaliste indépendant a droit de regard
sur le titre qu'il y aura à son article?
M. Van
Vliet (Simon) : S'il renonce à ses droits moraux, certainement pas.
S'il n'y renonce pas, a priori, oui, mais ça dépend vraiment des
pratiques dans les rédactions.
Mme Melançon : C'est inégal.
M. Van Vliet (Simon) : Il y a
des rédactions qui demandent de suggérer des titres et des sous-titres, il y a
des rédactions qui n'en tiennent pas compte,
donc c'est très variable. Mais je vous dirais que la renonciation aux droits
moraux va beaucoup plus loin que ça, parce que ça permettrait théoriquement à
un média de reprendre des éléments de contenu, notamment des citations attribuées à une source, puis de les mettre dans
un encadré publicitaire dans un contexte complètement différent. Je veux
dire, il y a peu de médias qui font ça mais ils s'arrogent le droit de faire ça.
Et,
accessoirement, on parlait des droits d'auteur aussi, beaucoup de contrats
demandent les cessions de droits pour les adaptations au cinéma, au
théâtre, en roman, alors que les entreprises de presse n'ont ni les moyens ni
l'intention d'exercer ces droits-là mais se les réservent pour éviter d'avoir à
demander la permission ultérieurement.
Mme Melançon :
Je crois qu'on va devoir se reparler, parce qu'on est vraiment pressés dans le
temps, puis il y en a tellement à
dire. Mais sachez une chose, pour un statut... en tout cas, dans le statut de
l'artiste, je pense qu'il y a vraiment un lieu d'atterrissage possible, il faut le regarder de tous les angles. Je
vais céder la parole à ma collègue, qui brûle d'envie de vous poser des
questions.
Le Président (M. Ciccone) : Je
reconnais la députée Saint-Laurent pour 1 min 45 s.
• (11 h 40) •
Mme Rizqy :
Bonjour. L'an dernier, j'étais au Salon du livre et j'ai eu l'occasion de
rencontrer Frédérick Lavoie et Jasmin Lavoie,
deux journalistes internationaux indépendants qui sont partis, bien, de
Chicoutimi, allés à l'extérieur du pays,
un au Pakistan, en Inde, et ils ont fait un échange épistolaire qui a donné un
livre, Frères amis, frères ennemis. Et je trouvais que, quand ils sont
revenus au Québec, mais... ils ont donné des conférences, ils ont
publié un livre, mais que non seulement ils ont couvert la presse internationale, et même suite à... qu'ils reviennent au Québec,
ils nourrissent nos réflexions de qu'est-ce qui se passe, là, à l'extérieur du pays, qu'est-ce
qui se passe à l'intérieur du Québec.
Ils font beaucoup, quand même, de conférences. Et j'étais en train de
réfléchir à comment qu'on peut aider... car, évidemment, on ne devient
pas riche en publiant, nécessairement, un
livre et pas riche quand on fait la couverture internationale de façon
indépendante. Et j'ai regardé même...
Est-ce que vous avez réfléchi, par exemple, à des mesures de défiscalisation?
J'ai vu aussi que, par
exemple, Frédérick Lavoie a aussi une
bourse... une subvention, pardon, du Conseil des arts canadien pour la
publication d'un deuxième livre.
J'aimerais vous entendre sur... défiscalisation et aussi possibilité d'avoir
des subventions, parce qu'il y a aussi la pédagogie qui se fait à
travers tout ce travail par la suite, quand ils reviennent ici, au pays.
Le Président (M. Ciccone) : En 25
secondes, s'il vous plaît.
Mme Brassard-Lecours
(Gabrielle) : ...que c'est des pistes intéressantes. Mais je peux vous
dire, pour les connaître aussi, ils
ne gagnent pas super bien leur vie. Il n'y a personne qui a payé leur billet
d'avion pour qu'ils s'installent en Asie, tout ça. Moi-même, comme je disais, je suis récipiendaire de la bourse
30 secondes, qui va m'amener à faire 15, 20 ateliers, cet automne, à travers
le Québec, mais, tu sais, c'est 3 000 $, là, c'est loin d'être un
salaire annuel.
Le Président (M. Ciccone) : En
terminant, s'il vous plaît.
Mme Brassard-Lecours
(Gabrielle) : Donc, il faut
réfléchir, mais, oui, c'est dans nos plans d'obtenir plus de bourses.
Le
Président (M. Ciccone) :
Merci beaucoup, merci beaucoup. Je reconnais maintenant la députée de
Taschereau pour 2 min 30 s.
Mme Dorion :
Je n'ai pas longtemps puis j'ai deux questions, ça fait que, pour la première,
vous pouvez y aller dans une réponse
la plus courte possible. Vous parlez beaucoup de soutien public. Est-ce qu'on
devrait, pour permettre ça, entre autres, imposer les géants du
numérique?
M. Van
Vliet (Simon) : Oui, mais peut-être qu'on pourrait envisager d'autres
choses, comme de taxer les achats publicitaires au Canada. Il y a des
entreprises qui ont les moyens d'acheter de la publicité, pourquoi est-ce
qu'elles ne contribueraient pas à un fonds à travers une taxe sur leurs achats
publicitaires?
Mme Dorion :
Merci. Puis on parle aussi beaucoup de but non lucratif. On sait qu'il y a des
journalistes, en ce moment, qui
essaient de créer une coop pour sauver les journaux de Capitales Médias. Il y a
d'autres tests qui sont avancés, des
OSBL, des petits organismes média sans but lucratif. Pouvez-vous nous dire en
quoi c'est un avantage ou quels sont les avantages de ça par rapport aux
modèles qui sont soumis à la pression du profit puis du clic?
Mme Brassard-Lecours
(Gabrielle) : Bien, on l'a un peu exposé tout à l'heure, mais nous, on
pense qu'il n'y a aucun média qui devrait être la propriété unique d'un
individu ou de deux, trois actionnaires. Le modèle coopératif, OBNL, ça remet un peu le pouvoir aux artisans et aussi
aux lecteurs, et donc ça peut changer beaucoup la donne sur, un, le type
d'information qu'on
fait, hein, parce qu'on parlait un peu de la crise de confiance, il y a ça
aussi dans la crise des médias, puis
on n'en parle pas beaucoup, mais peut-être que, si l'information était un petit
peu plus proche des gens, les gens se sentiraient
plus investis dans leurs médias et, quand il y a des crises comme ça, se
sentiraient plus interpelés, et peut-être qu'il y aurait aussi moins de crises. Et, c'est ça, donc ce modèle-là
remettrait un peu le pouvoir dans les gens qui font le journal et dans
les gens qui le lisent, et on pense que ce serait une des solutions.
M. Van
Vliet (Simon) : Regardez, La Presse a été capable
d'aller chercher plusieurs centaines de milliers de dollars en dons depuis qu'elle est un OSBL. Je ne pense
pas qu'il y a beaucoup de gens qui auraient donné de l'argent à La Presse
quand elle appartenait à Power Corp. Donc,
il y a clairement un levier là qui renforce la confiance, qui donne le contrôle
au public sur l'information et qui est très
clairement porteur pour nous. D'autant plus que, on ne se le cachera pas, des
entreprises de presse qui font de l'argent
avec l'information, il n'y en a pratiquement plus, donc peut-être que c'est le
temps de mettre le modèle à but lucratif de côté pour ce qui est de
produire de l'information.
Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup. Maintenant, la parole est au
député de Rimouski pour une période de 2 min 30 s.
M. LeBel :
Merci. J'ai appris beaucoup, je ne connaissais pas votre situation comme ça
puis comment vous travaillez, les
relations avec les médias. J'ai appris beaucoup de votre présentation. Vous
êtes beaucoup en région? Il y a beaucoup de pigistes qui sont un peu
déployés partout au Québec?
M. Van
Vliet (Simon) : Il y en a beaucoup. Il y en a qui font leur travail
pour des magazines ou des publications spécialisées
qui ne sont pas forcément basées à Montréal puis il y en a un certain nombre
qui alimentent ou alimentaient les quotidiens nationaux par leur
travail. Mais, oui, on n'a pas de chiffres, mais il y en a plusieurs dizaines,
voire quelques centaines, là, d'éparpillés, si je peux dire, à travers le
Québec.
M. LeBel :
Dans le fond, dans l'objectif de diffuser de l'information qui vient des
régions sur les grands médias nationaux, pour que le Québec sache ce qui se
passe dans les régions, vous êtes des éléments importants là-dedans. Je comprends qu'en vous aidant, en vous soutenant, on
va faire en sorte aussi qu'on va parler des régions du Québec dans les grands médias, et vous faites partie de la
solution, et ça, c'est ce que j'ai compris. Et, pour ça, il faut peut-être...
avec le statut d'artiste, qu'on
pourra regarder, là, mais, effectivement, ça fait partie de la solution pour
faire connaître les régions.
L'international
aussi, là, on vient d'en parler. Hier, les gens de La Presse
nous ont parlé de ça aussi, il y a de moins en moins d'information qui vient de l'international. Vous faites aussi
partie de la solution là-dedans, parce que vous produisez de
l'information internationale.
Mme Brassard-Lecours
(Gabrielle) : Tout à fait. On a énormément de pigistes qui voyagent,
et, moi, c'est un de mes chevals de
bataille, pour avoir fait une maîtrise en journalisme international ici, à Laval. On trouve ça très important,
surtout que c'est un peu le parent pauvre, là, de l'information au Québec, je
trouve, l'information internationale.
Et
par ailleurs l'indépendance des journalistes leur permet aussi de partir,
hein, puis de voyager, c'est juste que c'est difficile pour eux. On a deux ou trois pigistes qui sont capables de rentabiliser leur voyage, quand ils partent à
l'étranger, en vendant plusieurs piges,
mais, tu sais, ils ne font pas un profit énorme. Cependant, comme les régions,
souvent, c'est des journalistes qui
sont des genres de correspondants pour les médias nationaux ici, donc, souvent,
ils sont les seuls sur place à couvrir un conflit ou un enjeu important.
Le Président (M.
Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.
Mme Brassard-Lecours
(Gabrielle) : Donc, oui, on est là-dedans aussi.
Le Président (M.
Ciccone) : Mme la députée de Marie-Victorin, la parole est à vous pour
deux minutes.
Mme Fournier :
Merci beaucoup pour votre présentation. Il y avait beaucoup de franchise dans
votre mémoire aussi. Je pense que c'est un des avantages de
l'indépendance.
À
la page 4 de votre mémoire, vous faites le lien, justement, entre les balises
déontologiques qui fléchissent, la qualité de l'information qui diminue, avec la crise de confiance du public à
l'égard des journalistes puis du monde des médias en général. Je trouve ça intéressant, que vous
dressiez un tel lien de causalité. Je me demandais, selon vous, de votre
perspective, quelles sont les raisons qui font en sorte, justement, que les
balises déontologiques diminuent et affectant, du coup, la qualité
d'information.
M. Van
Vliet (Simon) : Il y a deux éléments de réponse. De un, il y a le fait
que les médias eux-mêmes ont de moins
en moins d'indépendance financière, donc dépendent de plus en plus de leurs
revenus publicitaires, ils sont prêts à faire de plus en plus de compromis. Dans la soi-disant muraille de Chine
entre la publicité puis la rédaction, il y a de plus en plus de trous.
Et,
d'autre part, les pigistes sont dans cette situation-là au niveau individuel et
sont parfois obligés d'accepter de faire
des cahiers spéciaux qui sont en réalité des publireportages, de faire parfois du
marketing de contenu qui n'est pas identifié
comme tel. Ça, c'est la pression économique qui s'exerce tant sur les
entreprises de presse que sur les journalistes eux-mêmes qui explique
ça. Il y a un lien très, très clair de cause à effet.
Mme Fournier :
Est-ce que vous sentez une certaine pression pour produire un contenu qui va
générer des réactions, par exemple, virales
sur le Web? On parle souvent de la dictature du clic, tout ça. Est-ce que c'est
une expérience que vous voyez sur le terrain?
Mme Brassard-Lecours (Gabrielle) :
Bien oui, c'est sûr. Puis, tu sais, nous, on ne connaît aucun journaliste
indépendant qui vit 100 % de la presse écrite pure et dure en faisant
juste du journalisme, là. Tu sais, on est obligés de diversifier notre activité, et ça nous arrive de faire des top 10 pour
MSN, là. Tu sais, on fait ça des fois juste parce que, bien, c'est vite
fait, c'est payant, tout ça.
Le Président (M. Ciccone) : En
terminant.
Mme Brassard-Lecours (Gabrielle) :
Mais ce n'est évidemment pas notre aspiration profonde.
Mme Fournier : C'est
bon. Merci.
Le Président (M. Ciccone) : Merci
beaucoup à vous deux pour votre contribution.
J'inviterais,
s'il vous plaît, l'Association des médias écrits communautaires du Québec à prendre
place rapidement, s'il vous plaît.
Je suspends pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 11 h 48)
(Reprise à 11 h 50)
Le
Président (M. Ciccone) :
Veuillez prendre place, s'il vous
plaît. Je souhaite la bienvenue aux représentants de l'Association des médias
écrits communautaires du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes
pour votre exposé, puis nous
procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je
vous invite donc à vous présenter ainsi que les personnes qui vous
accompagnent, à procéder à votre exposé. La parole est maintenant à vous.
Association des médias écrits communautaires
du Québec (AMECQ)
M. Girouard
(Yvan Noé) : Bonjour. Yvan
Noé Girouard, directeur général de l'AMECQ. Je suis accompagné du
président de l'association, François Beaudreau.
L'AMECQ a été fondée en 1980, et, présentement,
on a 81 journaux qui sont membres. On entend par journal communautaire... qui est un journal de propriété
collective et de gestion démocratique. Alors, nous, nos journaux, c'est
de l'information locale et régionale. On pourrait dire aussi hyperlocale, parce
qu'on a des tout petits journaux qui font de l'information dans leurs villages. Je vois autour de la table, ici, il y a
quelques députés qui ont des journaux communautaires dans leurs circonscriptions,
alors vous savez pas mal dans quoi ça consiste, et leurs difficultés de financement
aussi. On va y revenir tantôt.
Il y a une étude qui a été menée par la firme
Advanis-Jolicoeur en février 2018, auprès de 3 150 personnes, qui démontre que le nombre moyen de lecteurs par foyer
est de 1,39, que le temps lecture moyen est de 30 minutes et que la
durée de conservation d'un exemplaire est de
9,2 jours. Et de plus 94 % des sondés affirment que leur journal
communautaire reflète bien la communauté
locale. Alors, ce sont des gens qui, dans leur milieu, disent : Il n'y a
pas d'information qui vient chez nous, donc on va prendre des moyens puis on va se doter d'un outil
d'information. Ce sont, pour la plupart, des bénévoles, O.K.? Je
dirais, l'AMECQ, il y a près de 1 500 bénévoles dans l'ensemble des
journaux, 700 qui sont de façon plus régulière. Puis, on pourrait dire, des employés de soutien qui sont payés... qui
font du travail administratif et des pigistes, ça pourrait aller autour de 200 personnes, mais, généralement,
ce sont des bénévoles. Et, même s'il
y a des employés payés, il y a des bénévoles qui gravitent autour
d'eux. Je vais laisser la parole à François.
M. Beaudreau
(François) : Vous savez,
pour produire un journal communautaire, il y a beaucoup
d'énergie qui est dépensée pour
récolter les fonds nécessaires pour la survie de ces journaux-là, pour le
fonctionnement de ces journaux-là. Parmi
les ressources qui sont à notre disposition, il y a la publicité locale.
Elle aussi, elle souffre du développement du Web, des
achats en ligne, des choses comme ça. Dans nos petites municipalités, là, beaucoup de nos commerces ferment, puis ils ne seront pas remplacés, puis ce n'est pas nécessairement
faute de relève, hein? Alors, c'est plus difficile pour nous. Cela dit, nos journaux continuent quand même
d'offrir une vitrine intéressante à cette clientèle-là, parce que
ce n'est pas tous les commerces qui
se destinent au Web, au commerce branché. On a encore une place de choix vis-à-vis
de ça, sauf qu'on a des revenus autonomes, comme ça, qui s'en vont en
diminuant.
Et puis il
faut mentionner aussi qu'est-ce qui était important pour nous, c'est la
publicité gouvernementale. On parle ici d'un énoncé de politique gouvernementale
qui remonte à 1995 et puis qui a été préparé par le Conseil exécutif, qui invitait les ministères, les sociétés d'État, les
organismes qui relèvent des ministères à allouer 4 % de leur budget de
publicité existant, 4 %, aux médias
communautaires. On s'entend, les médias communautaires, ce n'est pas seulement
les journaux, c'est aussi la radio,
c'est aussi les télévisions autonomes. Bon, ça n'a jamais été atteint, cet
objectif-là, sauf qu'il y a longtemps, dans les années 90 et au détour des années 2000,
il y avait suffisamment de revenus publicitaires générés par l'État
québécois qui étaient investis dans les
journaux communautaires, qui permettaient même de faire nos frais avec ces
montants-là, hein? On parle, par
exemple, au détour des années 2000, là, il y avait à peu près
500 000 $ qui étaient alloués à l'ensemble des journaux
communautaires. 2018, l'État québécois a dépensé 78 000 $ dans les
journaux communautaires, répartis dans 80
journaux. Contentez-vous, le fédéral : zéro avec une barre. Donc, ce
serait primordial, à ce moment-là, que les médias écrits communautaires reçoivent la part qui est
prévue, la juste part qui est prévue à cet énoncé de politique gouvernementale
là.
Et
puis ensuite je vais vous parler brièvement du numérique, du papier versus le
Web. Vous le savez, peu importe le support,
hein, qu'il soit numérique, qu'il soit papier, pour les médias communautaires,
l'enjeu, c'est la production du contenu, d'un contenu de qualité. Ça, on
s'assure de le faire, nous autres, avec notre association, qui va dispenser des
formations continues, qui va dispenser des
formations thématiques dans le cadre de différentes activités, qu'on rejoint
tous nos membres, nos 80 membres...
81. Mais, maintenant, pour alimenter le contenu sur une plateforme Web,
évidemment, c'est différent un petit peu
du papier. Vous savez, quand on met en ligne une page Web, vous avez en moyenne
quatre secondes pour attirer l'attention
du lecteur, c'est très différent du papier. Et puis les revenus, évidemment,
sur le Web, ne suivent pas du tout. On n'a pas trouvé le modèle
d'affaires, on le cherche.
Vous
savez, des fois, comme Yvan Noé le mentionnait tantôt, on a des communautés
qui sont à petite échelle, hein, qui
ont 400... par exemple — vous
connaissez ça, vous, M. Émond — à
Saint-Aimé—Massueville, il y a
400 portes. Quand vous faites le
tour, là, dans votre campagne, il y a 400 portes. Ce n'est pas beaucoup,
hein, mais, pour rejoindre ces gens-là, évidemment, si on met une publicité
Web, bien, avec le nombre de clics, on n'y arrivera pas, hein? On a même des
journaux qui ont été jusqu'à faire du
porte-à-porte pour dire : Visitez notre site Web, tout ça. Non, le papier
est encore pertinent chez les médias écrits communautaires. Yvan Noé le
mentionnait tantôt, c'est 1,39 lecteur par foyer, qui passe au-delà d'une
demi-heure là-dessus. Alors, dans ce contexte-là, il est primordial que l'État québécois
rétablisse sa politique d'achat conformément
à cet énoncé de politique gouvernementale. Pour nous, là, c'est une question
de survie et puis c'est essentiel. Voilà, je te repasse la parole.
M. Girouard
(Yvan Noé) : O.K. Je
voudrais vous parler de la problématique de RecycleMédias. Actuellement, le montant demandé, le montant moyen, aux journaux
qui dépassent le 15 tonnes est de 3 000 $ par année, dont une
partie sous forme de publicité pour
RecycleMédias. Le contrat publicitaire de deux ans a été donné, là, à une
agence du gouvernement qui s'appelle
l'agence Challenge Média. Le gouvernement
du Québec se doit d'intervenir,
surtout en considérant que cette taxation
est déjà perçue plusieurs fois par les papeteries, les imprimeurs, les
journaux. Alors, l'intervenant
RecycleMédias ne fait que contribuer au
déclin des journaux communautaires.
Malgré les récentes subventions accordées par le ministère de la Culture et des Communications et aussi du
ministère de l'Environnement et de la Lutte contre les changements
climatiques à RecycleMédias, nous persistons
à croire que cette taxe devrait complètement être abolie. Cette taxe ne fait
que confirmer que les journaux et, par ricochet, l'information locale et
régionale qui est transmise sont considérés, excusez-moi, comme des déchets.
Alors,
les journaux communautaires, quels sont nos défis à relever? Nos principaux
défis sont variés : l'adaptation au
Web et au vidéojournalisme, l'arrimage entre la version papier et les médias
sociaux, l'atteinte de l'objectif du 4 % en matière
de publicité gouvernementale, la migration du journal communautaire vers le
multimédia, la mise à contribution des
MRC pour la création de médias communautaires régionaux, la recherche de
personnes aptes à faire du financement et à s'occuper du sociofinancement, le maintien des trois principales
sources de financement, gouvernemental, municipal et publicitaire, la recherche de solutions pour
contrer le vieillissement des bénévoles et l'exode des jeunes. Malgré ces
défis de taille, les journaux communautaires
de l'AMECQ persistent à penser que, dans 10 ans, ils existeront toujours. La
principale fierté des journaux est leur
longévité. Le fait d'avoir réussi à durer en étant toujours là pour leurs
communautés et surtout en étant appréciés par leurs lecteurs, ne jamais
tomber dans la facilité et demeurer pertinents constitue un credo pour la
plupart des journaux communautaires. Le journal communautaire est aimé des
petits et des grands, des enfants et des grands-parents.
On peut sentir l'attachement de la population au journal communautaire, qui
est, entre autres, là pour donner des
moments de gloire à des individus ordinaires. En somme, un journal
communautaire, c'est un reflet de la communauté. Quand leur journal parle d'eux, que ce soit d'un bénévole d'un organisme
du milieu, d'un artiste local ou d'une personne ordinaire qui vient
d'accomplir un geste extraordinaire, les gens s'y reconnaissent.
En
conclusion, bien, j'aimerais dire que les journaux écrits communautaires jouent
un rôle de premier plan dans la production
et la diffusion de l'information dans leur milieu. Plus encore, un média écrit
communautaire est un lieu de débat, d'expression,
un outil de développement, un outil essentiel pour appuyer la production
artistique et culturelle qui émane des
régions. Les médias communautaires du Québec font partie de l'essence même de nos régions. Toujours
disponibles, ils ont survécu aux nombreux
changements des dernières années, que ceux-ci fussent politiques,
technologiques ou sociaux. Ils
résistent aux pressions et aux changements. Le dévouement des bénévoles permet
de conserver ces parties intégrantes du
tissu social des régions desservies,
car les médias écrits communautaires sont là pour renseigner les résidents
locaux sur ce qui se passe dans leurs quartiers, dans leurs villages.
• (12 heures) •
Le Président (M. Ciccone) :
Merci. Merci beaucoup.
M. Girouard
(Yvan Noé) : Je lance un cri du coeur : Sauvons les médias écrits
communautaires.
Le Président (M. Ciccone) : Merci. Je pense que les députés vous ont entendu.
Je passe maintenant la parole au député de Beauce-Sud pour
15 minutes.
M. Poulin :
Merci, M. le Président. M. Beaudreau, M. Girard, merci pour votre
présence, merci pour votre témoignage, également, en commission parlementaire.
Merci de rappeler l'importance du papier parce que, dans cette ère du numérique, on pourrait oublier assez
facilement l'importance, oui, effectivement, de l'industrie, qui en est une,
avec les imprimeries qui sont fort
importantes, entre autres dans les régions du Québec, mais l'importance, qui
est encore agréable, d'aller chercher
son journal, de le lire, de l'étendre sur la table, d'acheter un livre papier,
pas seulement de le consommer de
façon numérique. Et ça, c'est pour tous les âges, hein? On pourrait penser que
les jeunes, on aime mieux le numérique, là. Moi, dans mon cas, j'ai un
très grand plaisir à lire du papier. Voyez-vous, j'utilise énormément de papier
ici, en commission parlementaire, puis ça me
fait grandement plaisir de le faire. Et vous faites bien de le réitérer, en
région et dans les grands centres,
l'importance, donc, du papier, des médias communautaires aussi. On aura, tout à
l'heure, l'association des radios
communautaires et d'autres gens qui oeuvrent dans le secteur. Vous êtes souvent
le seul média au monde à parler des
gens de cette région-là, à parler des gens de la municipalité, alors ça, c'est
très important. Et, quand on parle de démocratie, de préserver
l'importance de l'information, il faut inévitablement préserver les médias
communautaires.
Mais ça ne date pas
d'hier, hein? 2004, Dominique Vien, qui était une excellente députée de
Bellechasse, avec qui j'ai eu le plaisir de
travailler, rédigeait, à titre d'adjointe parlementaire à la ministre de la
Culture et des Communications... à ce
moment-là, elle était adjointe parlementaire de Line Beauchamp, avait rédigé un
rapport fort intéressant, que j'ai eu la chance de lire en fin de
semaine, Les médias communautaires au Québec. Aviez-vous collaboré, à
l'époque? Bien, probablement que votre association, oui.
M. Beaudreau
(François) : Oui, on a été interpelés.
M. Poulin : Probablement que votre association... certainement.
Et ce qu'on retrouve à l'intérieur de ce rapport-là, dans certains cas, c'est une mine d'or, c'est des choses qui auraient dû
être faites, qui auraient pu être faites. Il y a des choses qui ont été faites, mais on voit qu'il y a
des problématiques qui existaient en
2004 et qui existent encore aujourd'hui. Entre autres, on dit :
«Plusieurs médias communautaires ne [génèrent] pas suffisamment de revenus pour
assumer pleinement l'embauche des employés
nécessaires, ils font appel aux programmes d'emploi des gouvernements du Québec
et du Canada. Cependant, ces programmes
n'autorisent que des emplois sur une base ponctuelle et généralement peu
rémunérés, ce qui ne permet pas à
l'employé de s'engager à long terme dans l'organisme. Ils constituent des
solutions palliatives acceptables, mais qui ne permettent pas de combler les besoins de personnel régulier.»
Alors, j'imagine que c'est encore un défi au niveau de l'embauche
aujourd'hui.
Autre
sujet qui était abordé dans cet excellent rapport, on disait : «La
notoriété des médias communautaires auprès des annonceurs, des groupes et des individus des collectivités visées»
est un défi. Depuis 2004, est-ce que vous avez réussi ou sentez-vous que
vous pourriez vous doter d'une stratégie pour laquelle le gouvernement pourrait
être partenaire pour sensibiliser davantage
les entreprises? Je parle du privé, de l'argent privé à investir dans nos
médias communautaires écrits.
M. Beaudreau
(François) : Pour
sensibiliser les... on est assez présents. Ça dépend de la taille des médias,
ça dépend des endroits. Si vous
prenez, par exemple... on a des médias qui ont un tirage de, quoi,
400, 600 exemplaires, le cercle est assez
restreint. À quelles entreprises... des fois, c'est des villages où est-ce qu'il y a une désertification de l'activité commerciale et industrielle, hein, c'est déporté vers les villes plus
grandes, ce serait plus difficile. Les journaux qui ont des plus grandes tailles... On en a, des journaux à Montréal,
par exemple, et puis ailleurs qui ont au-delà de 40 000 exemplaires en tirage. Eux le font bien, eux réussissent à
intéresser... bien, investir, on s'entend, on parle d'investissements publicitaires. Dans la
participation, à ce moment-là, ça émane plus des citoyens, bon, qu'ils soient
corporatifs ou pas, mais ça émane plus des citoyens. C'est de l'information qui
est prise en charge par le milieu. C'est ça, un petit peu, les journaux qui
sont membres de l'AMECQ.
M. Poulin :
En même temps, et je vous fais une suggestion, moi, je suis député de
Beauce-Sud, donc une région extrêmement
rurale, j'ai 24 municipalités, j'ai des petits médias dans chacune des
municipalités, j'ai même des journaux municipaux — là, c'est autre chose, c'est géré par la
municipalité — mais le
coût de publicités dans vos médias n'est pas très élevé et rejoint énormément de gens quand on le
compare au per capita. Alors, de dire qu'il y a seulement
400 personnes dans la municipalité,
oui, mais le coût de la publicité est tellement peu élevé que je rejoins
énormément de gens, somme toute. Et
moi, je vous invite... puis je pense qu'on devra réfléchir, comme commission
parlementaire, à vous appuyer dans cette stratégie de mise en valeur des médias écrits communautaires, qui
rejoint énormément de gens et qui coûte très peu, en termes de
publicité. Une moyenne, un quart de page chez vous, là, ça peut coûter combien?
M. Beaudreau
(François) : Bien, chez nous, on a 21 000 exemplaires, ça va
coûter à peu près 400 $
M. Poulin :
Pas cher, monsieur, là.
M. Beaudreau
(François) : Non. Ça fonctionne, aussi, hein?
M. Poulin :
Bien oui, je le sais, que ça fonctionne, je le sais.
M. Beaudreau
(François) : Bien, vous voyez, les revenus gouvernementaux ont fondu.
On survit, hein? Alors, on fait notre job sur le terrain.
M. Poulin :
Mais c'est important que le coût de la publicité... vous réussissiez à
rejoindre énormément de gens, et c'est encore peu élevé.
M.
Beaudreau (François) : ...que vous le mentionniez, M. le député, parce
que, justement, on entame une démarche prochainement
auprès des intervenants des journaux communautaires comme ça — Yvan Noé pourrait vous en parler un
petit peu plus longuement — pour rapprocher, justement, le milieu dans
lequel on évolue, chacun, pour rapprocher les gens du milieu, de quelque horizon qu'ils soient, qu'ils
soient du milieu commercial ou sans but lucratif, pour les rapprocher de
leurs médias communautaires.
M. Girouard
(Yvan Noé) : Effectivement, dans une petite municipalité, les
commerçants se disent : Je dois être là, parce que le commerçant, il s'identifie aussi au milieu communautaire.
La mentalité est différente dans les villes plus grandes, là. Mais je ne sais pas, je prends en note votre
suggestion, mais je ne sais pas si d'augmenter le coût de la publicité, ça
va être bien vu de la part des commerçants dans les petites municipalités, bon,
en tout cas.
M. Poulin : ...pas demandé de
doubler, là. Il y a peut-être un juste milieu à y avoir aussi.
M. Girouard
(Yvan Noé) : Peut-être, mais il faut voir, c'est libre à chacun de nos
journaux, hein, nous, on ne se mêle pas
de leur gestion. On a un projet présentement, on a une étude qui va être mise
en marche cet automne, on veut faire le portrait de l'artisan de la presse communautaire, aussi bien l'employé,
le bénévole, aussi les organismes communautaires qui participent au journal communautaire, parce qu'il
y a beaucoup de journaux qui reçoivent des communiqués de la part des organismes communautaires de leur milieu, alors on
veut avoir leur opinion aussi à eux. Et, bien sûr, les commerçants
locaux vont être questionnés sur leur
perception du journal communautaire dans lequel ils annoncent, puis on pourra
peut-être ajouter une question à savoir s'ils sont prêts à augmenter le
coût.
M. Poulin :
C'est fort important. Moi, j'ai oeuvré dans les médias communautaires, à la
radio, j'ai renouvelé des sciences...
des licences, pardon, avec le CRTC. On avait un gros travail de pédagogie à
faire sur la vente de la publicité dans les médias communautaires à l'effet que ce n'était pas très élevé. J'ai
travaillé en radio privée, là, je parle de la radio, on vendait un spot de 30 secondes 100 $, et à la
station communautaire, on le vendait 30 $, tu sais, et pourtant j'avais
des très bonnes cotes d'écoute puis j'avais, tu sais, de très bonnes
possibilités d'être entendu.
Au niveau du
taux de lectorat des médias communautaires, on parle des territoires, là, qui
sont couverts, là, par vous, là, vous
parliez de 21 000 portes, mais est-ce que vous avez les moyens
d'étudier le taux de lectorat ou est-ce qu'on pourrait, justement, vous appuyer dans cette mesure de taux
de lectorat qui vous permettrait d'aller davantage devant les
annonceurs?
M. Girouard
(Yvan Noé) : ...une étude qui a été faite en janvier 2018, là,
vous pouvez la consulter, elle est en ligne sur notre site Web
www.amecq.ca.
M. Poulin :
Est-ce que vous pouvez partager peut-être quelques faits saillants avec les
membres de la commission?
M. Girouard (Yvan Noé) : Vas-y.
M. Beaudreau
(François) : Oui, bien, justement, le taux de lectorat, le taux de
pénétration, qui est très bon, le taux de
perception des publicités aussi. Je n'ai pas les chiffres, là, en mémoire, là,
je n'ai pas l'étude avec moi. Tu pourrais donner les faits saillants, tu
as, toi, le résumé.
M. Girouard
(Yvan Noé) : Bien, oui, j'ai le taux d'appréciation, j'ai... Qu'est-ce
que vous voulez savoir, exactement, comme...
M. Poulin :
On pourra peut-être se reparler, puis, pour nos travaux, c'était pour prouver
le taux de lectorat de vos médias écrits communautaires, de prouver que
les gens le lisent et que... C'est ça que je souhaitais entendre, là.
M. Girouard
(Yvan Noé) : C'est là. Moi, je vous invite à aller sur notre site puis
aller lire l'étude détaillée, là, c'est assez volumineux.
M. Poulin :
O.K., parfait, parfait, on va s'en occuper sans problème. Alors, je vous
remercie puis je vais céder la parole à un membre de mon gouvernement.
Le Président (M. Ciccone) :
Alors, je cède la parole au député de Sainte-Rose.
M. Skeete :
Merci, M. le Président. Je me demande, dans vos données, c'est quoi, l'âge
moyen des consommateurs des journaux communautaires.
M. Girouard
(Yvan Noé) : Il est assez élevé. La moyenne d'âge... attendez un petit
peu, 65 ans et plus, c'est sûr que c'est le plus élevé, c'est
57 %, parce que... en région, parce que les...
• (12 h 10) •
M. Skeete :
Je pose la question parce que... puis c'est un constat que je fais, là, ce
n'est pas une opinion, mais je me
demande si, justement, la difficulté à transitionner vers l'ère numérique est
due au fait que les gens sont habitués d'avoir leur journal. Moi, j'ai la chance de me souvenir aussi des journaux quand
il n'y avait rien d'autre, puis je suis un consommateur, maintenant, de mes nouvelles de manière numérique, ça fait
que je pense que je suis bien positionné pour voir les deux côtés. Je me demande si vous n'êtes pas
un peu en décalage de qu'est-ce que les médias nationaux ont vécu. Et je
me demande si, en focussant sur la clientèle
qui ne veut pas, justement, faire cette transition numérique là, vous ne vous
mettez pas davantage en péril. Je me demande si vous avez analysé ça.
M. Girouard (Yvan Noé) : Mais
on se met... On a engagé un programme, là, du ministère de la Culture et des Communications. On a le réseau ADN, là, des agents
de développement numérique. Alors, depuis quelques mois, on a une personne qui travaille chez nous pour ça, trouver
des solutions, comment dire à nos journaux : Voici, il existe des
médias sociaux par lesquels vous pouvez, là,
faire connaître davantage le journal. On travaille là-dessus, il n'y a pas de
problème.
Maintenant, c'est
sûr que, dans les petites municipalités en région, la population, elle est
vieillissante, puis il y a des villages...
je lisais un reportage dernièrement, là, il y a peut-être une vingtaine de
villages qui peuvent fermer, là, au cours des deux, trois prochaines
années...
M. Poulin : ...en passant.
M. Girouard (Yvan Noé) : Hein?
M. Poulin : Ce n'était pas
vrai, ça.
M. Girouard (Yvan Noé) : Ce
n'est pas vrai, ça?
M. Poulin : Hein, Harold, ce
n'était pas vrai?
M. Girouard (Yvan Noé) : Bon,
tant mieux, bonne nouvelle.
M. Poulin : «Fake news».
M. Girouard
(Yvan Noé) : Tant mieux. Et les jeunes, quelqu'un me disait :
Oui, mais les jeunes, dans les villages, ils pourraient travailler sur le numérique pour le journal. Oui, mais le
jeune, là, il s'en va ailleurs, il quitte le village, il s'en va étudier à l'extérieur, et tout ça. Est-ce que
lui aurait le goût de dire : Moi, je suis à Sherbrooke puis je vais
travailler pour le petit journal qui est à Lingwick, par exemple? Je ne
le sais pas.
M. Skeete :
Vous êtes le deuxième à venir ici puis d'évoquer une tendance démographique
aussi. Puis je pense que ça, c'est
dans l'angle mort — chers
collègues, je vous soumets ça — un peu de nos analyses, il y a aussi un
enjeu démographique. Alors, la
solution ultime, je pense, doit passer par une considération démographique
aussi par rapport à la solution qu'on va avoir, parce qu'on parle de la montréalisation des médias en même temps
qu'il y a un... on vide nos régions. Alors, je pense qu'on doit aussi
s'attarder là-dessus. Bien, merci beaucoup.
M. Beaudreau
(François) : ...M. le député, que cette clientèle-là, 57 % de nos
lecteurs, mérite aussi d'être desservie, hein, fut-elle âgée de 65 ans et plus. Et, deuxièmement, on multiplie
les efforts, à l'association, pour le virage numérique, formation après formation, et tout ça, et puis on
emboîte le pas. Et puis c'est encore un petit peu délicat de nos jours,
parce qu'il y a des régions où est-ce que le Web, bon, ne voyage pas à la même
vitesse que chez nous, par exemple, tu sais.
M. Skeete :
Vous avez un bon point, et ce n'était surtout pas pour dire que les citoyens
plus âgés, qui consomment encore le
papier, ne sont pas importants, sauf qu'on cherche une solution à moyen, long
terme, et j'aimerais ça, du moins... peut-être
je suis un peu arrogant de penser ça, mais j'aimerais ça que la solution qu'on
propose soit viable dans 30, 40 ans, alors c'est pour ça que je pose la
question, la démographie et la tendance aussi. Merci beaucoup, M. le Président.
M. Girouard
(Yvan Noé) : ...aussi la solution, on est conscients qu'il faut
prendre ce virage numérique. Vous savez, dans notre étude, on posait la question : Est-ce que vous savez que
votre journal... Parce que les journaux qui ont été... les gens qui ont été interviewés, c'étaient tous des gens
issus... dans leur région, c'était un journal qui était aussi sur le Web.
On leur demandait : Savez-vous que
votre journal est sur le Web?, bien, je pense qu'il y en avait 47 % qui disaient :
Oui, on le sait. Mais combien
allaient le consulter, là? C'était 5 % des gens qui allaient voir le
journal sur le Web. Alors, ce qu'on veut faire présentement, en se servant des médias sociaux, Facebook, entre autres,
Instagram, et tout ça, c'est d'inciter les lecteurs de ces journaux-là à
aller sur le Web pour aller lire le journal aussi, on travaille là-dessus. La
solution, là, moi, je ne l'ai pas encore, mais on cherche.
Le
Président (M. Ciccone) :
Merci beaucoup. Je reconnais maintenant le député de Saint-Jean pour
1 min 40 s.
M. Lemieux :
Pas beaucoup de temps. Je voulais vous rappeler qu'hier j'ai dit, à un moment
donné, que, Le Groupe Capitales Médias, la crise qu'ils ont vécue la
semaine dernière, ça avait le bon côté d'amener les projecteurs sur cette commission et que le
public entende davantage parler de ça. Mais je me trompe ou, de votre côté,
c'était presque une mauvaise nouvelle,
dans le sens que tous les projecteurs allaient aller là, justement, puis que le
secteur communautaire n'allait pas recevoir
l'oreille, l'attention et les soins qui font en sorte que vous, vous n'avez pas
déclaré faillite ou bien vous n'avez pas demandé la protection du tribunal contre la faillite la semaine
dernière? Mais le cri du coeur que vous avez essayé de lancer, en terminant, puis le président, vous l'a laissé
faire, mais de justesse... mais je regrette que personne ne le voie, là,
parce que, dans le mémoire, vous avez écrit
ça tout petit partout, puis là, à la fin, c'est très gros, c'est :
«Sauvons nos médias écrits communautaires!» Vous êtes en péril, à
quelque part, là, vous, là.
M. Girouard
(Yvan Noé) : On est en péril pour différentes raisons. Il y a la
publicité qui n'est pas au rendez-vous, surtout la publicité gouvernementale, si ce n'était seulement que le
4 %, ce serait bien. Il y a la publicité locale, que c'est difficile aussi pour les commerçants locaux. Il y
a aussi le vieillissement des bénévoles, le recrutement des bénévoles,
on voit que nos bénévoles sont âgés. Écoutez, moi, ça fait 29 ans que je suis
là. Quand je suis arrivé, j'étais dans la jeune trentaine dynamique...
Le Président (M.
Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.
M. Girouard
(Yvan Noé) : Hein?
Le Président (M.
Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.
M. Girouard
(Yvan Noé) : En terminant? Bien, c'est ça, c'est la difficulté. Les
bénévoles d'âge plus jeune, ils ne sont comme pas là, et les... Vous
m'avez fait perdre le fil.
Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup. Je suis désolé de vous couper
dans votre cri du coeur à chaque fois, mais
je dois respecter le temps. Je reconnais maintenant la députée de... voyons,
Saint-Laurent pour une période de 10 minutes.
Mme Rizqy :
Bonjour, messieurs, bienvenue parmi nous. Juste avant de commencer, tantôt, le
député de Beauce-Sud avait un
rapport. J'imagine qu'il prend l'engagement de le déposer à la commission et
surtout un engagement de tenir tout ce qui était inscrit avec son gouvernement,
parce que...
M. Poulin :
Le rapport est déjà public, effectivement.
Mme Rizqy :
Oui, mais le rapport...
M. Poulin :
Est-ce qu'on en...
Mme Rizqy :
Mais je n'ai pas terminé. Je pense que je m'adresse à la présidence et je n'ai
pas terminé.
Le Président (M.
Ciccone) : S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît!
M. Poulin :
Oui, absolument.
Mme Rizqy : Mon propos, c'est que, puisque nous sommes le
27 août 2019 et non pas le 27 août 2018, la campagne est loin, est terminée, la campagne électorale, je
pense qu'aujourd'hui on doit faire un travail vraiment rigoureux, mais
aussi un travail qui nous apporte des solutions. On peut regarder le passé ou
on peut agir maintenant. Puis, si on veut agir maintenant, si vous déposez le rapport puis que vous prenez l'engagement
de mettre les solutions que vous avez mentionnées immédiatement de
l'avant, on va vous soutenir. Fin de la parenthèse.
Maintenant, je me tourne vers vous... Mais je n'ai
pas entendu si vous allez dire oui, si vous prenez tous les engagements là-dedans, mais vous êtes quand même maintenant au
pouvoir. Alors, je me tourne vers vous, parce que justement, tantôt, vous avez mentionné que certains députés, dans
leur comté, ont des journaux communautaires. Bien, c'est le cas, par
exemple, pour ma collège la députée d'Acadie
et moi-même, on a le Journal des Voisins, qui fait un travail vraiment
remarquable, hyperlocal, et c'est des réalités, là, vraiment du quotidien.
Tantôt,
j'entendais les gens qui disent, d'une part : Moi, j'aime ça papier,
d'autres qui disent : Ah! non, non, il faut faire un virage numérique. Je regarde, par exemple, chez nous, dans
notre comté, bien oui, il y en a beaucoup qui aiment avoir leur journal papier puis qui l'annotent, puis
d'autres que c'est aussi pour des raisons d'acuité visuelle. Moi-même, je
souffre de sécheresse oculaire, donc
j'achète encore mes livres papier puis j'aime bien lire mes livres papier,
j'aime ça, lire mon journal papier encore.
En ce qui a trait à
la question d'augmenter vos tarifs publicitaires, je ne pense pas que ça
appartient à nous de commencer à vous dicter
comment faire. Puis d'ailleurs l'indépendance et la distance nécessaires...
faire en sorte, je crois, que ce
n'est pas notre rôle, à moins que je me trompe, de vous dire comment tarifer
vos publicités, vos placements publicitaires, hein, n'est-ce pas?
M. Girouard
(Yvan Noé) : Non, ce n'est pas à nous de faire ça. De toute façon...
M. Beaudreau (François) :
Mais... Oui, vas-y.
M. Girouard
(Yvan Noé) : Bien, on peut discuter avec nos membres, mais, en tout
cas...
M. Beaudreau
(François) : On respecte la gestion de normes de nos membres,
hein?
M. Girouard
(Yvan Noé) : Vous savez, on
fait des rencontres régionales, et on rencontre nos journaux, puis on discute avec eux pour savoir qu'est-ce que nous, l'AMECQ, on peut faire pour eux puis, bon, qu'est-ce qu'ils aimeraient éventuellement qu'on fasse pour les aider. Mais la
question de publicité, c'est sûr, on a des rencontres en Abitibi au mois
de septembre, et, en Gaspésie, on va discuter de ça aussi.
Mme Rizqy :
J'ai eu, à quelques occasions, la chance d'aller à FM 103,3, qui est dans
le comté, je crois, de ma collègue de
Marie-Victorin, et on discute de sujets, des fois, qui sont moins populaires. À
l'époque, moi, une des premières fois
que j'ai été invitée, c'était pour parler de la lutte contre les paradis
fiscaux, puis justement c'est vraiment... ça nous donnait l'occasion de
vraiment discuter de façon beaucoup plus longue, hein, parce que les entrevues,
souvent, dans les radios communautaires,
bien, ce n'est pas du six minutes où est-ce qu'on doit vraiment condenser notre
propos, des fois on a 30 minutes,
des fois même une heure, et ça nous permet d'aller beaucoup plus en profondeur
avec, bien, le journaliste qui nous
interroge mais aussi avec la population, des fois on prend aussi des appels.
Trouvez-vous, justement, que ça nous permet de faire davantage, des
fois, de pédagogie avec le travail qui est fait avec le communautaire?
• (12 h 20) •
M. Beaudreau
(François) : ...de pédagogie aussi puis d'importance d'être près du
terrain qu'on couvre. Je pense aux
sempiternels gaz de schiste, ça a commencé chez nous, ça, hein? À
Saint-François-du-Lac, il a commencé à y avoir des forages exploratoires, tout ça, on a été les
premiers à couvrir ça, pas parce que c'était un scoop, tout ça, mais c'était
anodin, c'était dans le champ d'un
agriculteur et puis... qu'on connaissait, tout ça, puis on a approché ça, et
puis on a commencé à gratter ça un
petit peu. Puis plus tard, après ça, quand il y a eu... quand les médias plus
importants se sont mis à s'intéresser à cette question-là, bien, ils nous consultaient. On travaille avec notre
milieu. Et puis... de pédagogie aussi, quand on est invités, on va dans les écoles, on va leur parler de
comment rédiger un communiqué, des choses comme ça. Et puis plusieurs le
font, hein, dans nos membres, c'est sûr.
Mme Rizqy :
Oui, d'ailleurs... puis j'ai étudié, et vécu en Estrie, et même travaillé comme
professeure pendant presque 10 ans.
Puis d'ailleurs, par exemple, les algues bleues, c'est le réseau communautaire
qui s'est mis ensemble et... par la
voix de différents journaux, puis en Estrie, il y en avait quand même beaucoup,
de journaux communautaires qui ont permis, justement, de mettre en
lumière une problématique très, très, très locale, qui a pris des proportions
nationales.
Je
reste encore dans le communautaire, par exemple la Télévision Rive-Sud, qui est
toujours, je pense, encore dans le comté
de Marie-Victorin, et ça nous permet, encore une fois, d'avoir des émissions mais
aussi, pour plusieurs, leurs premiers emplois dans le monde des médias.
Et ma collègue la députée de Fabre, elle, elle aime beaucoup... elle émane du communautaire et elle nous parle souvent que ça
donne la première chance et même, des fois, une occasion à d'autres de trouver une tribune et de se donner les outils
pour, par la suite, prendre davantage d'assurance. Est-ce que je me
trompe?
M. Beaudreau (François) : ...on a une jeune chroniqueuse qui tient des
blogues, qui fait des chroniques sur les parutions, les livres, les livres québécois qui sont parus, et puis ça
lui offre, à ce moment-là, un tremplin qu'elle apprécie beaucoup, d'avoir ce rayonnement-là beaucoup plus
important que sur le Web, par exemple, et puis de rejoindre une
clientèle comme ça, là, à chaque fois. Oui,
oui, c'est sûr, puis c'est tellement vrai, ce que vous dites, c'est sûr que,
souvent, des gens qui ont été formés
dans les médias communautaires, après ça, vont malheureusement nous quitter
mais pour de meilleurs jours. Voilà.
Mme Rizqy :
Oui. Merci beaucoup. Puis, puisque c'est à la jeunesse... je regarde le député
de Beauce-Sud, qui est aussi secrétaire à la jeunesse, je sens qu'on a
eu son oreille très attentive, à ce moment-ci.
Des voix :
...
Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup. S'il vous plaît, ne pas vous
interpeler, s'il vous plaît. Vous savez que vous ne pouvez pas vous
interpeler, M. le député. Maintenant, je cède la parole à la députée de Verdun.
Mme Melançon :
Écoutez, merci beaucoup d'être avec nous aujourd'hui. C'est vrai que vous êtes
une école, je vais dire ça comme ça,
mais je le dis avec beaucoup de remerciements dans la voix, parce que les
jeunes... puis on voyait, tout à l'heure,
des journalistes indépendants qui étaient avec nous, disaient à quel point ça
pouvait être complexe. Il faut se faire d'abord la main aussi, il faut avoir des endroits où on peut débuter.
Et, bien sûr, vous les perdez rapidement, là, c'est ce que j'entends
aussi dans votre propos.
Je veux quand même
revenir sur... On a reçu Marie-Ève Martel hier devant la commission, qui nous a
parlé de problématiques, quand même, en
région, et je voulais savoir si, de votre côté... parce que, bien sûr, là, on
parlait de quotidiens ou d'hebdos en
région, mais je voulais savoir si vous viviez aussi ces mêmes problématiques
là. Si vous devez, par exemple, couvrir de l'information municipale,
est-ce que c'est facile d'avoir le lien avec la municipalité ou avec les élus
ou si c'est compliqué?
M. Girouard
(Yvan Noé) : Ça dépend des municipalités. Il y a des endroits, la
collaboration est très, très bonne puis
il y a d'autres endroits... Je pense à un village dans Chaudière-Appalaches où
j'ai dû me rendre pour aller rencontrer le maire,
c'est que les bénévoles écrivaient... il y avait deux bénévoles, ils ont écrit
des textes, mais ça allait à l'encontre, peut-être,
de l'idéologie de la municipalité, du maire entre autres, et la directrice
municipale n'avait pas aimé. Elle a même téléphoné au ministère de la Culture et des Communications pour dire que
le journal n'existait plus, mais qu'elle voulait que la subvention soit transférée à la municipalité. En tout cas, des
affaires comme ça, là, c'est des histoires d'horreur, si bien que les deux bénévoles ont cessé d'écrire leurs
chroniques sur la politique municipale. Mais, bon, en tout cas, ça,
c'est un exemple qui ne va pas... ce n'est pas généralisé, mais il y a des cas
comme ça qui arrivent de temps à autre.
Mme
Melançon : Et donc j'imagine que vous êtes aussi à la merci... parce
qu'on parlait de publicité tout à l'heure, un peu comme les autres, à la
merci de... s'il y a des gens qui n'aiment pas ce que vous écrivez, ne mettront
pas nécessairement de publicité, et, bon, là...
M. Girouard
(Yvan Noé) : Il y a des journaux que leurs locaux étaient dans
l'édifice municipal, là, dans le centre communautaire et que le maire a
décidé de... bon, le journal, là, vous sortez de là. Il y a deux cas comme ça.
Mme Melançon :
Vous vous êtes fait évincer.
M. Girouard
(Yvan Noé) : Oui, oui, absolument. Mais, bon, dans d'autres cas, c'est
très bien, là. La municipalité va
donner un montant et ils vont publier leurs pages, là, les séances du conseil
vont être publiées dedans, de... En général, ça va bien, mais il y a
quelques cas où, quand c'est affreux, c'est affreux.
Mme Melançon :
Et depuis les dernières années, est-ce que... Il y avait combien de médias,
disons, il y a 10 ans, communautaires écrits? Puis aujourd'hui?
Est-ce que vous en avez perdu beaucoup dans les dernières années?
Le Président
(M. Ciccone) : En 25 secondes, s'il vous plaît.
M. Girouard
(Yvan Noé) : Dans les
10 dernières années, non, mais on en a déjà eu 100, disons, dans les
années... fin des années 90, début 2000, là, on était 100, donc, on a
baissé à 80.
Mme Melançon :
O.K., parfait. Merci.
Le Président (M. Ciccone) : Merci
beaucoup, Mme la députée. Je reconnais maintenant la
députée de Taschereau pour une
période de 2 min 30 s.
Mme Dorion : Merci,
M. le Président. On comprend, de
votre mémoire ainsi que de celui de beaucoup d'autres, qu'il va falloir une
multiplicité de mesures pour soutenir les médias en général puis les médias communautaires
en particulier, des mesures qui vont soit
venir des fonds publics, d'une manière ou d'une autre, soit d'une partie du
public. Parmi ces mesures-là, est-ce
que vous considérez que ça serait une erreur, de ne pas faire contribuer les
géants du numérique, qui sont à l'origine de la crise des médias, qui
font des millions, des centaines de millions de dollars au Québec et qui ne
paient pas d'impôt?
M. Girouard
(Yvan Noé) : Bien, c'est sûr qu'ils devraient contribuer, là, mais il
y a aussi le fait que... Je ne sais pas
si le gouvernement du Québec... où il place son argent. Si seulement que le
gouvernement du Québec respectait le 4 % de publicité, ça irait déjà beaucoup mieux. Est-ce que le gouvernement
du Québec va faire de la publicité sur Google, sur Facebook, et tout ça, là? Je ne sais pas s'il y a
des chiffres que vous... ça serait à vous de me le dire. Mais c'est comme...
il faut que le gouvernement du Québec commence par être un bon citoyen
corporatif lui-même, là.
Mme Dorion :
Pour l'idée du 4 %, je suis vraiment d'accord avec vous, puis on est...
Mais en fait c'est... on va de plus
en plus reprocher au gouvernement d'avoir mis beaucoup de publicité dans les
géants du numérique, justement. C'est sûr
que, là, c'est rare que je vais être compréhensive avec le gouvernement, mais
je suis d'une génération qui est sur les réseaux sociaux beaucoup, puis... Là, le gouvernement va être pris entre
deux choix avec cet argent-là, soit soutenir les médias ou soit atteindre les gens qu'il veut atteindre avec sa
publicité. Des fois, il veut atteindre principalement les jeunes, des
fois il veut être sûr d'atteindre une partie de la population, puis, avec la
publicité, c'est beaucoup plus facile.
Par
contre, ce n'est pas normal, que les compagnies, les géants du numérique
fassent autant d'argent avec un contenu qui est créé par vous, par vos membres ou par d'autres journalistes et
qu'ils ne paient rien en redevances. Donc, s'ils font de l'argent, moi, ça devrait revenir aux médias,
finalement, qui sont la raison pour laquelle les gens vont sur les
plateformes, se branchent sur Internet, etc.
Une voix :
...
Le Président
(M. Ciccone) : En 20 secondes, s'il vous plaît.
Mme Dorion :
Allez-y.
M. Beaudreau
(François) : Oui, excusez.
Ils viennent exploiter nos contenus, mais je pense que votre
réflexion, votre suggestion,
elle est d'autant plus appropriée. On parlait tantôt des médias régionaux que
sont, par exemple, dans notre coin, Le Nouvelliste ou La Tribune,tout ça, nous autres, ça nous ébranle aussi. C'est nos locomotives,
c'est... quand on voit le travail, là-dedans, qui est bien fait.
Le
Président (M. Ciccone) :
Merci beaucoup. Je reconnais maintenant le député
de Rimouski pour 150 secondes.
M. LeBel : Merci. Merci. Des fois, il y a...
c'est... puis en lisant votre mémoire, on le voit, des fois, il y a
juste des choses qui ne seraient pas
si compliquées à changer, puis ça vous donnerait un coup de main. Je pense,
entre autres, à Postes Canada, que vous dites, qui est... que c'est très cher,
là, faire la diffusion. Peut-être juste une façon que Postes Canada adapte ses affaires à votre réalité ou aux besoins, ça aiderait. D'ailleurs,
je pense qu'il faudrait mettre Postes Canada
dans notre déclaration commune de revendication par rapport à Ottawa, on
va le rajouter dans nos affaires.
Le recyclage,
ça aussi, il me semble qu'on devrait être capables, au niveau du gouvernement, de dire : Bien là, il y a une situation
particulière, est-ce qu'on est capables d'adapter notre programme,
ne pas vous traiter comme on traite tous les autres, parce que...
L'autre
élément, vous êtes les seuls à en avoir parlé, puis on en a parlé un peu
tantôt, c'est le vieillissement de la population. Il ne
faut pas prendre ça comme un problème,
là. La population vieillit dans nos villages, puis là on a
besoin de vous autres, on a besoin des
médias communautaires comme vous
autres, qui vont continuer à parler à ces gens-là, à ces gens-là de 65 ans et plus. Puis moi, je suis
content de voir, là, le pourcentage de 65 ans et plus qui vont lire vos
affaires. C'est très important, là,
ces gens-là, il ne faut pas les laisser isolés. On sait que la population
vieillissante devient isolée. Vos médias, c'est une façon de sortir de l'isolement. Moi, je prends ça en note, je
suis porte-parole aussi du dossier des aînés. Pour moi, ce que vous venez de dire là, je vais garder ça dans
ma réflexion par rapport à comment on va adapter nos sociétés au vieillissement de la population. Vous êtes des
outils importants pour faire en sorte que nos aînés ne soient pas isolés.
Puis les médias communautaires, c'est des
médias proches du monde, proches de nos communautés. On veut la
revitalisation du monde rural, on veut
s'assurer que nos villages vivent, bien, pour ça, ça prend aussi des médias
communautaires qui vont parler des
villages, qui vont parler entre eux autres, des médias comme le vôtre aussi,
des bulletins de liaison, mais ça prend ça pour que le monde puisse se
parler puis qu'on puisse continuer à vivre dans nos villages.
Puis les
médias communautaires, c'est aussi une façon de faire passer des courants
d'idées différents. Je pense, entre
autres... Il y a plusieurs artistes qui écrivent dans certains
médias. Chez nous, on a un média, Le mouton noir, qui amène, tu sais, des idées différentes. C'est très, très
important, et ça va faire partie, sûrement, de nos revendications. Merci. Ce n'est pas une question, c'est
un appui total.
Le
Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup, M. le député. Mme la
députée de Marie-Victorin pour deux minutes.
Mme Fournier : Merci
beaucoup. Moi, ça va faire bientôt
trois ans que je suis députée, et, quand je suis arrivée, il y avait
deux journaux communautaires qui couvraient ma circonscription. Il y avait,
bien sûr, le Point Sud mais également MédiaSud, qui était mené par feu Maurice Giroux, mais qui a depuis, malheureusement, fermé ses portes, faute de relève. Pourtant, il était entièrement déjà sur le Web. Le journal Point Sud est
encore distribué partout dans ma circonscription,
puis c'est ça qui est intéressant, c'est
tangible. En même temps, tout le monde peut mettre la main dessus, va couvrir
des histoires qu'aucun autre média ne couvre, toutes les belles choses
qui se font, justement, dans le milieu communautaire.
Et on a parlé
beaucoup de la réalité en région plus éloignée. Des
journaux communautaires comme ça, mais les journaux aussi en milieu urbain ont de la difficulté, également,
à renouveler leurs bénévoles. Pourtant, eux ne sont pas affectés par l'exode des jeunes, par exemple. Est-ce que vous avez étudié ça, le phénomène plus spécifique des
journaux communautaires en milieu urbain? Pourquoi c'est si difficile
d'aller recruter, par exemple, de nouveaux bénévoles?
M. Girouard
(Yvan Noé) : On ne s'est pas
penché vraiment là-dessus, mais... C'est sûr que tout est plus
difficile, les rapports, les contacts
humains, en milieu urbain, on dirait... bon, les gens sont tassés les uns sur
les autres, c'est vrai, mais ils ne
se connaissent pas. Dans une petite municipalité, tout
le monde connaît à peu près
tout le monde, c'est juste ça. Moi, je vois juste ça,
comme raison, là.
• (12 h 30) •
Mme Fournier : Donc,
l'effritement du sentiment de communauté dans les milieux plus urbains, vous
diriez?
M. Girouard (Yvan Noé) :
Sentiment d'appartenance, peut-être.
Mme Fournier : Oui,
sentiment d'appartenance.
M. Beaudreau
(François) : Les gens la
consomment, les gens embarquent dans un média communautaire et puis pour
la durée, c'est-à-dire qu'ils vont passer 20, 30, 40 ans à collaborer avec leur
journal. Quand arrive le moment de renouveler,
souvent, on n'y pense pas — on
se pense éternel un petit peu — c'est
comme, on s'y prend un petit peu
tard. On veut installer ça aussi chez nos membres, on en parle...
Le Président (M. Ciccone) : En
terminant, s'il vous plaît.
M. Beaudreau
(François) : ...d'être
conscients de cette réalité-là et puis de penser à la relève aussi, de
travailler aussi fort là-dessus que pour le virage numérique, qui, en passant,
chez les médias communautaires, est supporté par les journaux papier.
Mme Fournier :
Merci.
Le
Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup, M. Beaudreau, M. Girouard. Merci beaucoup
pour votre contribution.
Chers collègues, merci beaucoup de votre participation.
Je vous rappelle que cet après-midi nous serons à la salle Marie-Claire-Kirkland.
La commission suspend ses travaux jusqu'à 14
heures pile. Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 33)
(Reprise à 14 heures)
Le
Président (M. Ciccone) : La
commission reprend ses travaux afin de poursuivre les auditions publiques
dans le cadre des consultations particulières concernant le mandat d'initiative
portant sur l'avenir des médias d'information.
Cet
après-midi, nous entendrons la Fédération des télévisions communautaires
autonomes du Québec, l'Association des radiodiffuseurs
communautaires du Québec, l'Association des journaux régionaux du Québec,
Hebdos Québec et le MPV Radio.
Alors, je
souhaite la bienvenue aux représentants de la Fédération des télévisions communautaires
autonomes du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de
10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période
d'échange avec les membres de la commission.
Je vous invite donc à vous présenter et ainsi que les personnes qui vous
accompagnent, à procéder à votre exposé. Vous avez maintenant la parole.
Fédération des télévisions communautaires autonomes du Québec
Mme Hinse
(Amélie) : Merci. Bonjour à
tout le monde. Merci de nous avoir invités à cette commission, on est
très heureux. Donc, je me présente, Amélie Hinse, je suis la directrice
générale de la fédération, et je suis en compagnie de Sylvain Racine, qui est président de la fédération ainsi que directeur général de la Télévision régionale des Moulins, à Terrebonne.
M. Racine (Sylvain) : C'est
bien ça.
Mme Hinse
(Amélie) : Voilà. Donc,
j'imagine que vous aviez tous pris connaissance du mémoire qu'on a
déposé en mai dernier, si je ne me trompe
pas, donc on ne va pas revenir le lire en entier devant vous, mais on va peut-être
insister un peu sur les points principaux qu'on pensait important de
mettre de l'avant aujourd'hui.
Mais avant ça
j'aimerais présenter un peu c'est quoi, les télévisions communautaires
autonomes au Québec. Il y a 40 membres,
à la fédération. On est présents dans 14 des 17 régions administratives de la province. Les télévisions communautaires autonomes
couvrent à peu près 400 municipalités partout dans la province, ce qui est
quand même beaucoup. C'est souvent des municipalités qui ne sont pas
desservies par les médias, les grands conglomérats, les médias traditionnels, surtout en ce qui a trait à la
télévision. Les TV produisent en moyenne six heures de programmation originale par semaine sur à peu près 39 semaines par
année. Il y a une majorité des télévisions qui sont fermées l'été, mais elles
sont fermées... c'est qu'elles ne diffusent
pas de la programmation originale, mais souvent elles vont, en fait, la
produire, donc filmer et le montage,
etc. De ces six heures-là, en moyenne, il y a presque deux heures complètes qui
sont de l'information locale par semaine, donc ça, c'est quand même
assez important.
Les TV, sinon, c'est 112 emplois à temps
plein plus une trentaine à temps partiel, mais c'est surtout à peu près 1 000 bénévoles qui gravitent autour des
télévisions communautaires partout au Québec. Et puis le contenu qu'on
produit, qui est... Je vous inviterais à aller voir la programmation des
télévisions dans vos régions. J'ai regardé, puis il y en a dans pratiquement toutes vos circonscriptions,
probablement que vous les connaissez déjà. En Gaspésie, il y en a quatre
dans la circonscription de la Gaspésie, et
ils sont très nécessaires parce que la télévision se... les grands réseaux ne
se rendent que très rarement à
Mont-Louis. On produit pour à peu près 550 $ de l'heure les émissions, ce
qui est à peu près 10 fois moins cher que la télévision commerciale
ou la télévision d'État, donc ça, c'est quelque chose qui est considérable.
Vous avez
déjà vu... parce que, bon, c'est votre deuxième journée quand même, puis vous
avez eu un bel exposé de Marie-Ève
Martel hier sur l'importance des nouvelles locales, comment c'était
indispensable à la démocratie. Eh bien, les médias communautaires en général, donc nous aussi en particulier, on
participe à cette démocratie-là, parce que les médias communautaires, c'est aujourd'hui le seul espace
citoyen où les gens, la population peut s'exprimer librement, où ils
peuvent se sentir représentés à la télévision. Donc, c'est pour ça qu'on pense
qu'on est d'autant plus importants.
On assure,
évidemment, une information de proximité, qui est devenue de plus en plus rare
avec la montréalisation de
l'information, avec la concentration des médias. Puis, je dirais, ce qui fait
notre plus grande particularité par rapport aux médias plus traditionnels, c'est que nos médias sont là pour servir
l'intérêt public et non les intérêts pécuniers. Donc, nous, on n'est pas là... les télévisions communautaires ne sont pas là pour
faire de l'argent, mais bien pour dépenser l'argent pour servir le
citoyen en information, en culture, éducation, c'est notre mission de base.
Donc, c'est
un très grand moteur aussi de développement des régions, et ça, on ne le dira jamais assez, parce que les régions où il n'y a pas de médias, qui ne sont pas capables de se voir à
la télé, s'entendre à la radio, se lire dans les journaux, c'est sûr et certain que le développement économique et social ne peut pas se faire pleinement. Donc, on pense
que, là aussi, on a un très grand
rôle à jouer. Maintenant, je vais passer la parole à mon président,
Sylvain Racine, qui va parler un peu des dernières réglementations du
CRTC puis l'impact que ça l'a eu sur nous.
M. Racine
(Sylvain) : En effet, le
CRTC révise sa politique environ à tous les cinq ans, et, lors de la dernière
révision en 2016, ils ont adopté une
réglementation qui permet aux câblodistributeurs de réaffecter l'argent de la
licence communautaire vers les
stations dites locales. Stations locales, pour votre information, c'est TVA
Sherbrooke, TVA Gatineau. Or donc, il est
question de prendre l'argent destiné à la télé communautaire pour le verser à
l'entreprise privée. Ça s'est déjà fait, parce qu'il y a plusieurs câblos qui se sont prévalus de cette
réglementation-là. Entre autres, Shaw, à Vancouver, s'en est servie, il
y a également Rogers, dans la région d'Edmonton et de Toronto. Vidéotron ne l'a
pas encore fait dans la licence de Montréal,
mais ça demeure une inquiétude pour les télévisions qui sont dans la couronne
de Montréal, qui pourraient être affectées
grandement par une telle réaffectation de l'argent. Alors, si Vidéotron
décidait, du jour au lendemain, de fermer son canal communautaire et de ne plus subventionner les télévisions — il y a sept télévisions communautaires dans
la couronne de Montréal — bien, c'est des pertes de financement très,
très, très importantes que les télévisions communautaires subiraient. Donc,
c'est pour nous une espèce d'épée de Damoclès qui plane au-dessus de nos têtes
et qui nous inquiète grandement. Ça fait partie de l'ensemble des autres sujets
d'inquiétude, mais, vous allez voir, on en a quelques-uns à vous présenter à ce
sujet-là.
Une voix : ...
M. Racine
(Sylvain) : Oui. J'aimerais aussi vous parler du fameux 4 % de
publicité gouvernementale. Vous savez, les
télévisions communautaires, nous n'avons pas droit à la publicité
conventionnelle. Je ne peux pas faire de publicité, dans un poste de télévision, pour une entreprise, je ne
peux pas donner de prix, je ne peux pas donner de produits, je ne pas
faire grand-chose, donc j'ai très peu
d'accès à la publicité dite conventionnelle. On a droit à la commandite de
prestige : Cette émission vous est présentée grâce à la
collaboration de X, mais il n'y a pas beaucoup de gens qui sont intéressés à
juste subventionner une télévision communautaire. Ils veulent vendre leurs
produits, et on les comprend.
Alors, ça a
pour effet que la seule publicité... auquel on a vraiment accès, c'est la
publicité gouvernementale, ce fameux
4 % qu'on n'atteint jamais. Si on regarde le dernier rapport, la moyenne
pour l'ensemble des ministères et des agences gouvernementales, c'est environ 3 % qu'on a atteint. Je pense que
Mme la ministre Nathalie Roy, dans une de ses premières interventions, a soulevé cette problématique-là.
Il faudra voir maintenant comment on peut essayer de trouver une
solution à ce problème. En fait, c'est un décret qui a été énoncé. On
souhaiterait que ça passe comme une loi, plutôt, pour forcer l'ensemble des ministères et l'ensemble des
agences à respecter ce fameux 4 %, parce que c'est de l'argent
supplémentaire qui arriverait dans les
télévisions communautaires sans pour autant impliquer de dépenses
additionnelles pour le gouvernement. L'argent,
il est déjà là, il est dans les ministères. Les budgets sont déjà alloués pour
la publicité. Qu'on donne le 4 % à tous les médias communautaires,
et on va s'en porter que mieux, définitivement.
• (14 h 10) •
Mme Hinse (Amélie) : Sinon, ce
que je voulais ajouter avant de terminer, en fait, c'est que la crise des
médias actuelle, ce pour quoi on est en
commission aujourd'hui, ce n'est pas une crise de manque d'intérêt du public.
Les gens, toutes les études l'ont démontré, consomment les nouvelles locales, en
veulent, pensent que c'est important et indispensable pour la démocratie
puis l'exercice de la citoyenneté. La crise, elle est financière, et puis les
revenus sont en baisse pour tout
le monde, la télévision, pour tous les médias, en fait, les journaux, télés,
radios. Et puis évidemment on essayait... on essaie d'apporter des solutions, on redouble d'efforts pour l'autofinancement,
mais même les grands conglomérats ne l'ont pas
trouvée, la solution miracle.
Le Président (M. Ciccone) : En
terminant, s'il vous plaît.
Mme Hinse
(Amélie) : Donc, c'est sûr
qu'on ne prétend pas avoir, nous non plus, la réponse, mais on pense
qu'avec votre aide, votre participation, on va y arriver.
Le
Président (M. Ciccone) :
Alors, merci beaucoup. Je vous remercie pour votre exposé. Maintenant,
je suis prêt à entendre la partie gouvernementale pour 15 minutes, avec le
député de Beauce-Sud.
M. Poulin :
Merci beaucoup, M. le Président. Merci pour votre participation à cette commission parlementaire et votre
mémoire, qui était fort intéressant. Nous recevions un peu plus tôt aujourd'hui les médias écrits communautaires, nous allons recevoir les radios communautaires tout à l'heure, alors bien
content de pouvoir entendre, cette fois-ci, la télévision communautaire.
Évidemment,
lorsqu'on pose cette question-là ici, on peut parler des revenus, des dépenses,
des investissements, mais vous l'avez
effleurée de bon aloi, toute la question de la publicité mais également le coût
d'une publicité lorsqu'on se retrouve,
par exemple, dans les télévisions communautaires, le coût de production qui
peut être plus élevé, par exemple, qu'un spot de radio de 30 secondes, ou encore l'écrit comme tel, ou ce qu'on
peut retrouver à l'intérieur des pages radiophoniques. Alors, j'aimerais
savoir le coût de production moyen, on va dire ça comme ça, d'une publicité
dans la télévision communautaire, que ce
soit, entre autres, les publicités de prestige, que vous appelez, lorsqu'un
commanditaire achète, et également le coût qu'il coûte à acheter, en
moyenne, là, pour le commerçant ou encore l'industrie.
M. Racine
(Sylvain) : Bien, en fait, comme on n'a pas droit à la publicité
conventionnelle, il y a très peu de publicité qui circule sur les canaux communautaires. La publicité, quand on dit
«la commandite de prestige», bien, évidemment, les coûts de production ne sont pas tellement élevés,
parce qu'on parle de quelques secondes en début où on dit «cette émission
vous est présentée grâce à la collaboration de», ça ne nécessite pas
nécessairement des investissements importants. Par contre, si on regarde les coûts par rapport à la
publicité gouvernementale, bien, on parle d'environ 45 $ par parution
de 30 secondes.
M. Poulin :
Vous me parlez de l'achat ou de la production?
M. Racine
(Sylvain) : De l'achat.
M. Poulin :
L'achat. L'achat, hein?
M. Racine
(Sylvain) : De l'achat, parce que la production, ce n'est pas les
télés qui la font, c'est des agences.
M. Poulin :
En sous-traitance, O.K., d'accord. Concernant le 4 %... puis je vais
revenir au rapport de Dominique Vien,
qui est un bon rapport, soit dit en passant, je tiens juste à le signifier, sur
les médias communautaires, qui a été déposé en 2004, et il y a des éléments fort intéressants à l'intérieur
concernant le placement gouvernemental. Et là, vous allez voir, ça ne touche aucune bannière politique, ce que je
vais dire. Je pense que tout le monde y passe. Alors, on dit : «L'adoption
par le gouvernement, en février 1995, de la
Politique concernant certaines dépenses de placement publicitaire visait à
accroître les dépenses publicitaires du
gouvernement dans les médias communautaires jusqu'à un minimum de 4 %.
Après 10 [ans] d'application de cette
politique — on est
en 2004, O.K., donc après 10 ans, là, donc de 1994 à 2004 ou de 1995, on
dit, selon les données d'application de
cette politique — force
est de constater que cet objectif n'a jamais été pleinement atteint.»
Alors, ce que vous nous dites aujourd'hui,
en 2019, est vrai mais, en 2004, était aussi vrai. Alors, ça prouve qu'il y a
un effort à faire et, je pense, ça
devra être écrit presque noir sur blanc à l'intérieur de notre rapport.
Et : «Selon les données fournies par [le directeur général] de l'information gouvernementale, responsable de
l'application de la politique, les placements globaux du gouvernement se
situent en moyenne à 2,5 % [au] total des sommes investies en placement
publicitaire.»
Et
les sociétés d'État, on le vit aujourd'hui dans les nouvelles, où Le Devoir
a fait un bon travail de nous dire, les sociétés d'État, quel était le pourcentage... c'est important de se
rappeler que les dépenses des médias communautaires en 2004 ne représentent que 1,3 % de leurs
dépenses globales de placement publicitaire. Et la mission de certaines
sociétés, on pense à Loto-Québec, à la Société des alcools, peut sembler
contradictoire avec la nature du matériel publicitaire axé sur des produits ne pouvant parfois pas être diffusés dans
ce type de média, donc ça revient à ce que vous nous disiez tout à
l'heure. Or, la presque totalité des budgets
de Loto-Québec et de la SAQ est actuellement consacrée à des campagnes
marketing de produits et non à des
campagnes sociétales. Alors, ça aussi, c'est un enjeu qui est fort important,
de voir de quelle façon on dépense
cette publicité-là des fois, oui, à des fins sociétales mais aussi des fois à
des fins de marketing proprement dit. Donc, pour les médias communautaires, il peut y avoir un élément fort
important pour les campagnes sociétales, entre autres, de dire : On achète un pourcentage de produits
parce qu'on souhaite sensibiliser davantage la population, entre autres
dans les régions du Québec. Alors, je trouvais fort intéressant ce passage de
ce rapport.
Et,
si on disait... et je vous pose la
question bien humblement, si on réussissait, oui, comme gouvernement, à
atteindre ce 4 %, et je pense que c'est l'objectif que nous avons,
collectivement, les sociétés d'État, et on le constate ce matin, doivent faire
une réflexion beaucoup plus grande et puis beaucoup plus profonde de la façon
dont ils investissent leur financement, est-ce qu'on devrait réfléchir à un
pourcentage extrêmement précis qu'il pourrait être très avantageux de le mettre
à l'intérieur du communautaire, et au niveau gouvernemental, et peut-être au
niveau également des entreprises privées?
Puis je vous demande la question, puis je trouve ça important, sur le coût de
votre publicité, parce que ce n'est pas énorme, là. 45 $ l'achat, ce n'est pas élevé, et vous rejoignez
beaucoup de gens. Alors, de quelle façon on peut avoir des réflexes de
se tourner vers vous pour pouvoir rejoindre ces gens-là?
Mme Hinse
(Amélie) : Bien, cette question-là, en fait, on se la pose depuis
longtemps, parce qu'à chaque année ou presque
on rencontre, en fait, soit les directeurs des communications de tous les
ministères, puis en fait le travail est toujours à refaire parce qu'il y a un roulement de personnel particulièrement
élevé. Bon, ça, je le comprends, mais on a... Cette année, à l'interne,
au ministère de la Culture, ils ont fait une espèce d'enquête interne au sein
des ministères pour savoir, bon, pourquoi,
comment ça que vous n'investissez pas dans les médias communautaires malgré le
décret qui existe. Et puis la réponse, c'est souvent : Bien, on ne le
savait pas, puis tout le monde se relance la balle. Donc, nous, on ne sait plus
à quelle porte cogner, en fait, parce qu'on cogne aux portes à toutes
les années.
Et
puis pour revenir sur ce que vous disiez sur la moyenne de 2,5 % en investissement, vous savez, le
4 %, en soi, bon, c'est sûr
qu'on pourrait demander 6 %, 12 %, 20 %, là, tu sais, il n'y
aurait pas de limite, sauf que 2,5 % en moyenne, c'est un peu biaisé de le montrer comme ça, parce
que, si on regardait la médiane, qui est un chiffre qui parlerait
beaucoup plus, ce serait bien en deçà de ça, parce qu'il y a un ministère ou
une agence qui a investi 36 % de son budget, mais évidemment c'est sur... 44 000 $ sur une année, donc ce n'est
pas un montant énorme au bout du compte, quand même, mais ça fait
augmenter la moyenne considérablement puis ça ne veut rien dire, là,
finalement, là. Donc, déjà, si le 4 % était respecté par tous les ministères... Parce que, là, c'est un tiers des
ministères seulement qui ont rempli leur... je ne dirai pas un quota, mais qui ont investi dans les médias
communautaires, un tiers seulement. Donc, on parle de 2,5 %, mais il y a
les deux tiers qui ont investi zéro.
Donc,
c'est ça, je ne pense pas que... Oui, je pense que de parler d'un pourcentage,
de l'élever... Parce que, on ne se le
cachera pas, depuis 10 ans, les investissements en publicité gouvernementale
ont chuté drastiquement, donc le 4 % reste le même. Même s'il était
atteint, je pense qu'on n'arriverait même pas au niveau des investissements qui
étaient faits il y a 10 ou 15 ans parce que
les montants, ils ont diminué à la source, puis ça, bien, on veut bien le
comprendre, là, tu sais, tout le
monde essaie de maximiser. Puis la publicité Web coûte beaucoup moins cher que
la publicité traditionnelle, donc ça permet de rejoindre plus de
personnes en investissant moins. Donc, c'est plein de facteurs un peu comme ça.
M. Poulin :
Très intéressant, ce que vous dites là, Mme Hinse. Puis, sur le numérique,
bien, deux éléments. Est-ce qu'il ne
faudrait pas encourager davantage les combos? Je m'explique. On sait qu'on l'a
vu, entre autres, au niveau privé, de dire :
Une radio communautaire et une télévision communautaire pourraient travailler
davantage ensemble au niveau de la vente
de publicité, même si on sait que, les lois, au CRTC, il y a certains défis. Et
mon autre question est : Est-ce qu'on pourrait, d'une certaine façon, imaginer une possibilité
également qu'on puisse mieux travailler en collaboration également, oui,
avec différents journalistes qui se
retrouvent à la fois à la radio communautaire et à la télé communautaire, qui
pourraient réduire un certain coût de
main-d'oeuvre mais qui assurent quand même une source d'information qui peut
être complémentaire? Parce que, souvent, un journaliste communautaire
dans une radio, il va avoir 25 heures-semaine — je vous donne un exemple — puis vous pourriez, vous, lui offrir 15 heures-semaine,
donc on aurait un beau 40 heures-semaine à offrir à quelqu'un, dans la région, qui fait du média
communautaire. Alors, comment votre fédération pourrait travailler
davantage, exemple, avec les radios puis, je
dirais même, avec les médias écrits pour peut-être réduire un peu notre coût de
masse salariale puis voir à plus long terme pour offrir une meilleure
information, avec peut-être les mêmes... les trois fédérations qu'on rencontre
aujourd'hui?
• (14 h 20) •
Mme Hinse
(Amélie) : Bien, ça, c'est des questions qu'on s'est déjà posées, puis
c'est évidemment dans un monde idéal,
absolument. Sauf que, quand on regarde les territoires couverts par les
licences de radio, de TV, les endroits où il y aurait un chevauchement qui serait pertinent, qui couvrirait les mêmes... soit MRC,
ou comtés, ou villes, très, très peu, parce
que...
Une voix : ...
Mme Hinse
(Amélie) : ...c'est ça, souvent, dans un endroit où il y a une
télévision communautaire, bien, il n'y a pas un besoin, nécessairement, de la population de se partir une radio
ou un journal. Donc, je ne dirais pas qu'on se sépare le territoire, mais ça adonne comme ça, et, bien, on
pense que, de toute façon, c'est très bien parce que ça permet d'avoir
des nouvelles locales sur un territoire beaucoup plus grand.
M. Poulin : Oui, à certains
endroits, par exemple, on a les deux. Donc, peut-être qu'à ce niveau-là il y a quelque
chose à regarder.
Télévision
numérique, le virage numérique, je veux vous entendre là-dessus.
Si les gens vous écoutent, c'est qu'ils sont dans le confort de leur foyer, souhaitent écouter la télévision
communautaire. Comment vous voyez le transfert vers le numérique? Moi, je pense à Beauce.tv, chez nous,
là, qui a toutes les archives de la télévision communautaire, de beaux
trésors se retrouvent sur le Web. Je crois beaucoup
également au domaine des archives, lorsqu'on veut aller retrouver quelque
chose facilement qui s'est fait à la télé
communautaire à une certaine époque. Même que nos grands diffuseurs ont un gros
travail à faire pour rendre faciles nos
archives sur le numérique. C'est du gros travail, ça coûte assez cher. Mais
souvent on aimerait ça réécouter une
reprise de Virginie puis on ne peut pas le faire. Alors, je me dis, il y
a peut-être une façon qu'on peut créer des choses
davantage. Alors, je veux vous entendre sur ce virage numérique qui est
superimportant.
Mme Hinse
(Amélie) : Avant de laisser
parler Sylvain, Beauce.tv, ce n'est pas une télévision communautaire,
par contre, là, c'est vraiment régional et...
M. Poulin : Ils ont été achetés
par le privé récemment, mais avant c'était communautaire.
Mme Hinse (Amélie) : Non, en
fait...
M. Poulin : C'était la
télévision communautaire de Beauceville, qui l'a mis sur Beauce.tv.
Mme Hinse (Amélie) : Non,
exactement, c'est là que vous vous trompez, mais on pourra en parler.
M. Poulin : Non, non.
Mme Hinse (Amélie) : Oui, je
les connais très bien. Beauceville sont membres chez nous.
M. Poulin : Bien, Martin...
Vous connaissez Martin?
Mme Hinse
(Amélie) : Oui, bien, c'est
ça, Martin a pris le canal, l'ancien canal. Beauceville a été obligée de
se transférer sur un autre canal, mais il n'a pas acheté, ça a été fait de
manière insidieuse, je dirais.
M. Poulin : Mais la télévision communautaire de Beauceville
se retrouve sur Beauce.tv, au niveau des archives.
Mme Hinse (Amélie) : Oui, très
possible.
M. Poulin : Bon, parfait.
Merci.
M. Racine
(Sylvain) : Bien,
d'ailleurs, grâce au Plan culturel numérique, il y a plusieurs
de nos télévisions qui ont pu bénéficier de subventions pour créer des
archives et mettre sur archives des émissions que... Je sais que, chez nous, en tout cas, on a des émissions qui datent de 1978 qui sont
maintenant en archives et que les gens peuvent aller visionner, des gens
qui ont participé, alors c'est toujours bien agréable pour ces gens-là d'avoir
accès à l'information.
Mais le
numérique a aussi un côté un petit peu insidieux, parce qu'il ne faut pas oublier
que nos subventions, nos sources de
revenus proviennent du canal linéaire, actuellement, toutes les sources de
revenus à part le PAMEC, et ça coûte cher,
le numérique, ça coûte cher, les médias sociaux, mettre nos émissions en
archives, mettre notre programmation... Nous, on a beaucoup d'émissions en direct qui sont simultanément
diffusées sur le Web. Bien, tout ça, ça coûte cher, mais on n'a pas de revenu qui nous provient d'Internet,
actuellement, aucune source de revenus. Alors, c'est un endroit où on
aimerait éventuellement qu'il y ait des
interventions qui se fassent, parce
qu'on participe au contenu, mais il n'y a
pas d'argent qui nous vient
d'Internet. Alors, pour nous, c'est plus difficile, ça demande des efforts
considérables. On est conscients que c'est une nécessité qu'on soit sur
Internet, mais on n'a pas les revenus qui viennent avec la dépense.
Mme Hinse
(Amélie) : C'est un peu ça,
le problème, parce que la plupart de nos membres sont présents en
ligne, c'est-à-dire qu'il y en a qui
vont diffuser en direct sur Internet, en simultané, que sur le canal linéaire.
Il y en a qui vont mettre leur émission en ligne le lendemain que c'est
diffusé pour la première fois.
Une voix : ...
Mme Hinse
(Amélie) : Oui, mais c'est évident
que c'est nécessaire pour rejoindre plus de gens, pour rejoindre ceux qui n'écoutent pas la télévision — je parle de la machine — sauf que, c'est ça, ça ne rapporte à peu
près rien de plus, mais c'est des
dépenses supplémentaires puis c'est là, le problème. C'est pour ça qu'on en a
parlé, puis je pense que tout le monde qui
va passer devant vous va en parler, de l'importance de faire participer ceux
qui offrent le moyen que l'information se rende aux gens, Internet, les canaux comme ça puis les nouveaux canaux de
distribution, ils doivent participer à la création du contenu, sinon
c'est sûr que ça ne peut pas... on ne peut pas survivre.
M. Poulin : Bien noté. Merci
beaucoup.
Le Président (M. Ciccone) : Merci
beaucoup. Je reconnais maintenant le député de Saint-Jean.
M. Lemieux : Pour combien de
temps, M. le Président?
Le Président (M. Ciccone) :
1 min 26 s.
M. Lemieux :
Merci beaucoup, M. le Président. Je voulais justement essayer de comparer,
parce que, vous avez raison, on a
tous des télés communautaires, mais il y a quelque chose de particulier, c'est
qu'elles ne se valent pas toutes, elles
ne sont pas toutes semblables. Je ne connais pas aussi bien Beauce.tv que mon
ami de Beauce-Sud, mais je sais qu'il y en a qui sont très agressives
sur le Web, d'autres moins. Je voudrais que vous me fassiez un petit portrait,
avec les 40 secondes qu'il vous reste,
d'où on est dans la moyenne. La bonne moyenne, la bonne fourchette de la
moyenne, elle se situe où par rapport au genre de contenu qu'on fait et
au genre de contenant qu'on envoie sur le Web?
Mme Hinse
(Amélie) : Oui, j'ai des
chiffres, mais je dirais que 80 % de nos membres sont présents en ligne.
Puis c'est sûr que, pour le direct, c'est loin d'être tout le monde qui peut le
faire, puis il y en a que c'est par contrainte du câblodistributeur, parce que le câblodistributeur, qui, lui, considère qu'il paie
pour la production, veut avoir l'exclusivité parce que,
pour beaucoup de ses membres, de ses abonnés, c'est-à-dire, c'est un moyen de rétention, d'offrir le canal communautaire.
Le Président (M. Ciccone) : En
terminant, s'il vous plaît.
Mme Hinse
(Amélie) : Donc, il faut
qu'il attende de le mettre... que ça passe à la télévision avant. Mais sinon
c'est la très, très grande majorité de nos membres qui sont en ligne, là.
M. Lemieux : Merci.
Le Président (M. Ciccone) : Merci
beaucoup. Je suis prêt maintenant à reconnaître un membre de l'opposition
officielle. Mme la députée de Verdun.
Mme Melançon : Bonjour à vous deux. Merci beaucoup d'être présents aujourd'hui. Écoutez, je vais vous poser certaines questions, et rappelons-nous une chose,
on n'est pas des experts du CRTC ici, on laisse... Actuellement, c'est
un autre palier de gouvernement, là, qui regarde le tout. Mais je veux quand même que vous puissiez
expliquer pourquoi vous n'avez pas le droit de faire de la publicité, parce
que c'est important, là, que les gens puissent bien comprendre.
M. Racine
(Sylvain) : Je vous dirai
qu'au cours des 10 dernières années j'ai participé à trois reprises aux
audiences, j'ai comparu devant le CRTC, et,
à chaque fois, on arrivait avec les mêmes demandes d'accès à la publicité.
Maintenant, il y a un lobby qui se fait, venant des stations dites
commerciales, qui, eux, prétendent que la tarte, elle est déjà
petite et qu'ils ne veulent pas la
partager. Moi, je ne suis pas d'accord avec ce principe-là. Je ne pense pas que
Ford Canada va annoncer à la
télévision communautaire de Beauceville. Et je n'ai rien contre ça, mais il
faut penser à une publicité plus locale. Le fleuriste du coin va annoncer, le petit garagiste
va annoncer, et ça n'enlève rien aux médias nationaux, mais le lobby
fait en sorte qu'ils font des pressions auprès du CRTC continuellement pour ne
pas qu'on ait accès à la publicité commerciale.
Mme Melançon : Alors, ma prochaine question sera la suivante.
Depuis tout à l'heure, on parle du 4 %, et, juste pour éclairer ceux et celles qui nous regardent ou ceux
qui ne le savent pas, ce 4 % là n'est pas atteint, année après année,
puis ce n'est pas parce qu'il y a un manque d'intérêt, là. Moi, je
peux vous dire que j'ai déjà été directrice de cabinet dans une autre vie, là, au ministère de la Culture, où on faisait
écrire les ministres, je pense que vous vous rappelez très bien de ça, où
on faisait envoyer la note. Et
malheureusement, dans un premier temps, je vois... puis je regardais les
chiffres, encore une fois, avec
consternation, je vais dire ça comme ça, où c'est dommage qu'on ne soit pas en
mesure d'atteindre le 4 %. Mais, si on l'atteignait, le 4 %, en dollars sonnants, ça représente quoi?
Parce que des pourcentages, on peut en parler, là, puis ça... il
faudrait juste avoir une idée pour que tout le monde puisse être sur le même
pied d'égalité.
M. Racine
(Sylvain) : Bien, je peux quand même vous dire que, si on atteignait
le 4 % aujourd'hui, on serait quand même très loin des sommes qu'on avait il y a une dizaine d'années. On
s'entend que les budgets publicitaires ont été réduits considérablement, et le pourcentage étant ce qu'il
est, bien, hein, c'est une cause à effet, alors c'est sûr que ça ne serait
pas suffisant. Nous, on souhaiterait que le
4 % soit refermé, c'est-à-dire que ça soit une loi ou quelque chose du
genre. Puis, si c'était bonifié,
bien, ce serait encore mieux, parce qu'évidemment les télés communautaires, on
ne se le cachera pas, l'argent, c'est le nerf de la guerre, et
actuellement, bien, on manque d'argent, définitivement.
Mme Hinse (Amélie) : Je dirais
que c'est à peu près...
Mme Melançon : On ne fera pas
une grosse guerre, c'est ce que j'entends, là.
Mme Hinse
(Amélie) : On ne tofferait pas longtemps. Mais c'est de
12 000 $ à 15 000 $, à peu près, par télévision, on est une quarantaine. Puis ça, c'est pour les
TV, parce qu'après ça la production et les prix ne sont pas les mêmes
pour la radio et les journaux. Donc, je ne
pourrais pas parler en leur nom, mais je dirais que ça pourrait ressembler à ça
pour nous.
Mme Melançon : D'accord. Vous
me parlez de 112 emplois. Je le disais un peu plus tôt avec les médias
écrits communautaires, j'imagine que vous
êtes une école extraordinaire et j'imagine aussi que les jeunes qui peuvent
sortir de certains cégeps ou certaines universités vont chez vous, se
font la main, et vous les perdez rapidement aussi, j'imagine.
• (14 h 30) •
M. Racine
(Sylvain) : Évidemment qu'on les perd rapidement. Si je vous donnais
la liste des journalistes que
vous connaissez qui ont passé par la
télévision communautaire, vous seriez peut-être surprise. Qu'on pense à Jocelyne Cazin, qu'on pense à Joël Goulet, qui étaient à TVA,
qu'on pense à... il y en a une multitude, une multitude. Ils ont pour la
plupart passé par les télévisions
communautaires et ils sont venus se faire la main. Et, bon, évidemment,
dès qu'ils sont bons, on les perd un petit peu. Moi, j'en ai perdu un il
y a quelques mois à peine, il est parti à Radio-Canada. C'est ça, puis c'est
normal, on est une école.
Mme Melançon : C'est une
pépinière.
M. Racine (Sylvain) : Voilà.
Mme Melançon : Alors, dites-moi, là, j'ai bien lu, là, mais moi,
je veux vous l'entendre dire, puis je ne veux pas qu'on aille là-dedans, là, mais je veux
vous entendre... la suite, parce que, là, on est là pour parler de l'avenir des
médias.
M. Racine
(Sylvain) : Bien, l'avenir
des médias va passer, selon moi, par la réforme du système, qui est en
révision, actuellement, au CRTC. On sait qu'il y a
une commission qui a été créée également au CRTC pour revoir la loi. On ne sait pas
où ça va nous mener, on ne sait pas jusqu'où ils vont pouvoir se rendre. Il va
y avoir un changement, peut-être, de gouvernement ou pas, alors ça reste un
gros point d'interrogation pour nous, l'avenir.
Mme Melançon : Comme on est quand même à la remorque, je
dirais, du CRTC, de notre côté, j'imagine que, tout comme moi, vous avez été surpris d'apprendre que,
le 11 janvier dernier, le gouvernement du Québec n'a pas cru bon déposer aucun mémoire pour la révision des deux lois,
celle en radiodiffusion et celle en télédiffusion. Moi, de mémoire, là, je
n'ai pas souvenir qu'on ait laissé un pan
aussi important... malheureusement, qu'on n'ait pas comblé ce vide-là. Je me
rappelle qu'on a déjà
déposé... et là je vous pointe un peu plus du doigt, là, qu'on avait déposé des
demandes bien claires, on était ensemble là-dessus. J'imagine que vous
étiez surpris de voir qu'on n'avait pas pris le crayon pour déposer la position
du Québec.
M. Racine
(Sylvain) : Bien, on se pose
toujours bien des questions. Évidemment,
on souhaiterait que les intérêts du Québec soient toujours défendus. Maintenant, je ne connais pas
les motivations qui sont derrière cette décision-là, mais évidemment
nous, en tout cas, on fait des représentations et on va continuer d'en faire.
Mme Hinse
(Amélie) : On travaille toujours
en... bien, pas en collaboration, mais on contacte toujours
le ministère de la Culture quand il
y a dépôt de mémoire au CRTC, parce
qu'eux demandent à voir le nôtre, parce qu'ils veulent nous appuyer, parce que
souvent... parce qu'on sait... Le ministère, c'est un allié pour nous, il finance les TV.
Puis on n'est peut-être pas d'accord sur tout, puis on demande l'indexation, au
minimum, de notre programme d'aide, sauf que, c'est ça, on travaille
ensemble. Puis, quand je les ai contactés, ils m'ont dit : Non, je ne
pense pas qu'on va en écrire un cette année.
Mme Melançon :
D'accord. Moi, ça, ça me trouble, et,
je tiens à le répéter ici, il faut assumer un leadership. On peut bien parler de l'avenir des médias en long et
en large, mais encore faut-il que le gouvernement prenne la plume lorsque c'est le temps. Moi, je veux vous remercier vraiment d'être présents aujourd'hui, parce qu'il
y a une chose que je me rappelle... Et j'invite aussi les élus à
participer aux télés communautaires. Je sais que vous demandez ça. Ces six
heures de programmation dont vous parlez,
là, vous avez besoin de les combler. Nous autres, on est des personnages qui ne
vous coûtent rien. Je le dis un peu à
la blague, mais, très honnêtement, on doit faire plus d'émissions publiques,
vous le disiez tout à l'heure. J'espère vraiment qu'on va continuer puis
j'espère que tous les élus ici vont aller au micro devant la caméra des télés communautaires. Et vous pouvez compter sur
moi, parce qu'on va continuer à poser les bonnes questions, parce que
l'avenir des médias, je vous le dis, ça
passe par le CRTC, en télévision. Vous êtes la première télé que nous recevons
aujourd'hui. Vous allez pouvoir compter sur
moi pour que je puisse continuer à m'assurer qu'on ait une présence assidue,
parce que le Québec mérite d'avoir une voix à Ottawa. Merci beaucoup.
M. Racine
(Sylvain) : ...règle générale, on a une excellente collaboration de la
part des élus, et que tout le monde participe volontiers à nos
émissions.
Mme Melançon : Tant mieux.
C'est de la musique à mes oreilles.
Le
Président (M. Ciccone) :
Merci beaucoup. Est-ce que vous avez d'autres intervenants?
1 min 15 s, Mme la députée de Saint-Laurent.
Mme Rizqy :
Je vais y aller un peu plus au niveau des chiffres, si vous me permettez, parce
que tantôt vous avez parlé que — ma collègue l'a souligné — il n'y a pas eu de demande au niveau du CRTC
en janvier dernier. Et il y aura bientôt une campagne électorale au
niveau fédéral. Est-ce que vous pensez qu'il serait important que le
gouvernement du Québec ait des demandes,
notamment, pour aller de l'avant avec
une demande sur une taxe GAFA, qui peut générer... Quand même, juste pour Facebook, une taxe de 3 % peut générer 20 millions d'entrées d'argent pour le Québec
seulement. Pensez-vous que ça devrait être une demande immédiate lors de cette
campagne?
Mme Hinse (Amélie) : C'est
évident que le momentum, il est parfait, là. Vous allez terminer les travaux de
la commission, puis eux vont être en campagne électorale, c'est le moment
idéal. Le panel d'experts en charge de la révision
de la loi a sorti en juin dernier ce qu'il avait entendu dans ses
consultations, mais ça va aller à l'année prochaine avant qu'il remette
son rapport. On ne sait pas quel gouvernement qu'on va avoir là, mais c'est le
temps, là, de leur dire qu'est-ce qu'on veut, là.
Le
Président (M. Ciccone) :
Bien, merci beaucoup. Merci beaucoup. Je suis maintenant rendu à reconnaître
un membre du deuxième groupe d'opposition. Mme la députée de Taschereau, pour 2 min 30 s.
Mme Dorion : Je me
pose une question. Beaucoup de mémoires disaient : Ce 4 % là, c'est
essentiel. Pourquoi ça ne s'est
jamais fait? Puis, bon, c'est de l'argent qui diminue, en plus, comme vous le
disiez tantôt. Mais en même temps on reconnaît
aussi, dans beaucoup des mémoires, le rôle essentiel, la fonction du service
essentiel à la population de l'information, puis de l'information locale, puis de l'information communautaire, puis
ça, moi, je suis à fond là-dedans, je l'ai remarqué plusieurs fois. Tu sais, autant, sur les réseaux
sociaux, on va cibler des gens qui nous ressemblent ou qu'on veut
atteindre, autant... Quand j'ai, moi-même,
commencé à écrire dans un journal communautaire de quartier à Québec... puis
là, si je veux rejoindre mon voisin à qui je ne parle jamais, je veux
rejoindre du monde, c'est différent puis c'est sur une base géographique. Ça
rapproche les gens, c'est vraiment essentiel.
Puisque c'est un besoin essentiel, puisque les
fonds publics vont être nécessaires pour faire survivre les médias communautaires en général, pourquoi est-ce qu'au
lieu de dire : Bien, mettez donc de la publicité, le gouvernement,
dans nos médias... pourquoi est-ce qu'on
n'exigerait pas plus clairement : Participez donc à notre financement, au
fonctionnement de manière récurrente, sans
qu'on ait besoin de toujours faire des demandes à toutes sortes de patentes?
Est-ce que ça ne pourrait pas être
plus simple? Parce que, d'un point de vue gouvernemental, faire une pub très,
très efficace pour pas cher ou moins efficace pour plus cher...
M. Racine
(Sylvain) : Il existe déjà un programme, au ministère de la Culture,
qui s'appelle le Programme d'aide aux
médias communautaires, qui aide financièrement au fonctionnement. C'est un
programme qui est en révision, actuellement.
On doit participer, d'ailleurs, et soumettre nos idées à cet effet-là. Bon, on
souhaite toujours que le programme soit
bonifié, mais c'est quand même... Ça fait plusieurs années que, sur le plan du
fonctionnement, on a de l'aide gouvernementale, et, pour certaines
télévisions, ça peut représenter tout près de 40 000 $ à
45 000 $ par année.
Mme Dorion : Puis ça serait...
c'est comme gênant d'en demander plus? Qu'est-ce qui fait que...
Mme Hinse (Amélie) : Ah non! On
ne se gêne pas.
M. Racine
(Sylvain) : On ne se gêne pas pour le faire.
Mme Dorion : Non, hein? O.K.,
parce que ce serait une bonne idée qu'il y en ait plus, finalement.
M. Racine (Sylvain) : Mais il y
a des normes, c'est basé sur le nombre d'heures de production, etc. Alors, on
respecte le programme, mais là le programme, il va être en révision.
Mme Dorion : Donc, ce serait
une bonne idée qu'il soit bonifié?
M. Racine (Sylvain) : Bien, absolument.
Mme Dorion : Ça vous
libérerait, finalement, plus que de...
M. Racine (Sylvain) : On ne
dira pas non à ça.
Le
Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup. Je reconnais maintenant le
député de Rimouski
pour une période de 2 min 30 s.
M. LeBel : Merci
beaucoup. Bonjour. J'ai déjà été
dans les télés communautaires, du temps que j'avais des cheveux, ça fait déjà assez longtemps, et l'importance
de l'autonomie, pour moi, c'est ça qui est majeur. Mais, quand je suis à
Rimouski, moi, je suis câblé Telus, quand je
veux voir le conseil de ville, c'est maCommunauté qu'il faut que je syntonise.
Quand je suis à Québec, je suis câblé
Vidéotron, si je veux voir les choses de la ville, c'est MAtv. Et, quand... On
dit que Bell, il y a un autre
système, tvONE. Puis là Rogers, mais, quand on va sur leur site, eux autres,
quand... si tu cliques «télé communautaire», tu tombes sur MAtv,
maCommunauté puis ces affaires-là. C'est quoi, vos relations avec les câblos?
• (14 h 40) •
M. Racine
(Sylvain) : À la fin des
années 70, quand la loi sur la télévision communautaire a été créée, c'était
une exclusivité des câblodistributeurs.
Donc, quand Bell est arrivée sur le marché avec les satellites, etc., ils
n'avaient pas droit à ça. Maintenant,
Bell, avec la fibre, ils sont un peu plus dans la section câblodistributeur,
ils ont maintenant droit... On a fait des demandes aux dernières audiences, en disant : On souhaiterait
être diffusés par l'ensemble des câblos d'un territoire donné. Moi, dans
mon territoire, Vidéotron représente à peu près
50 % des abonnés. Si j'étais
également diffusé sur Bell, bien, je rejoindrais
facilement 90 %, 95 % de ma population. Mais actuellement, encore une
fois, la façon dont les règles sont faites au CRTC, bien, on n'a pas
cette possibilité-là, qui serait, je pense, une solution idéale.
M. LeBel : Et MAtv puis maCommunauté,
ces affaires-là, c'est comme des télés communautaires maintenant?
M. Racine
(Sylvain) : Bien, MAtv, ce n'est pas une station communautaire, hein,
ça reste une station qui est du câblodistributeur comme tel, qui est
financée à même les fonds communautaires, mais...
M. LeBel : C'est de la compétition qui ne devrait pas être
faite, à mon avis. On devrait garder les télés communautaires autonomes.
M. Racine
(Sylvain) : Bien, vous savez, encore une fois, dans la dernière
réglementation, le pourcentage qui était alloué aux télés communautaires, qui était, à l'époque, 2 %, a été
coupé à 1,5 %, parce que le CRTC
disait : Il y a trop d'argent dans le communautaire.
Le Président (M. Ciccone) : En
terminant, s'il vous plaît.
M. Racine
(Sylvain) : Ce qu'il voulait dire, je pense, c'est qu'il y a trop
d'argent au niveau des câblos, mais les câblos ne le partagent pas avec les télés communautaires autonomes ou
très peu, alors c'est ce qui fait qu'on a moins de sous.
M. LeBel : C'est comme la
météo, ce n'est pas fiable.
Le Président (M. Ciccone) : Merci.
Je reconnais maintenant la députée de Marie-Victorin pour deux minutes.
Mme Fournier : ...à Longueuil,
j'ai la chance d'être couverte par la Télévision Rive-Sud, donc TVRS, sur le territoire
de l'agglo. Malheureusement, c'est juste diffusé pour les gens qui ont
Vidéotron à la maison, comme vous l'avez si bien dit. Puis, dans votre présentation, ça m'a interpelée, le fait
que vous disiez que vous sentiez que vous aviez comme une épée de Damoclès au-dessus de la tête en ce qui a
trait aux licences en raison, justement, des fameuses décisions du CRTC. Alors, j'aimerais que vous puissiez nous en dire
plus à ce sujet-là. Où en sont vos discussions avec Vidéotron? Est-ce qu'ils ont vraiment
l'intention de retirer leur licence? Quelle est la situation?
M. Racine
(Sylvain) : Écoutez, c'est
très difficile à dire, parce qu'on est conscients que MAtv, c'est quand même un groupe de personnel syndiqué.
Vidéotron ne va pas annoncer, trois mois d'avance ou quatre mois d'avance,
qu'ils ont l'intention de le fermer, ça va
se faire comme ça. Alors, on ne sait pas. Nous, ce qu'on se dit, ce n'est
pas : Est-ce qu'ils vont le faire? La question qu'on se pose, c'est : Quand vont-ils le
faire?, parce que les concurrents l'ont fait ailleurs. Et, personnellement, je vous le dis, si j'étais à la tête de TVA, bien, je réclamerais ces
sous-là pour aider mes stations locales. Mais, comme je suis à la tête de la fédération, je dis non à ça,
parce que c'est de l'argent du public qui va aller, encore une fois, à l'entreprise privée, et
ça ne devrait pas être le cas.
Mme Hinse
(Amélie) : Et surtout ça ne
va pas financer des vraies nouvelles locales, selon nous, parce que
nous, on est présents dans des petites municipalités, puis ce n'est pas vrai que TVA va venir couvrir quelque chose à Warwick, là, parce qu'il a pris l'argent de la télévision communautaire
pour aller couvrir le local, tu sais, donc...
Mme Fournier : ...on n'a pas
non plus de petites stations, par exemple, de TVA à Longueuil.
Le Président (M. Ciccone) : En
terminant, s'il vous plaît.
Mme Fournier :
Bien sûr, on est couverts par la télé nationale. Donc, à ce moment-là, dans
toute la périphérie, on se trouverait à perdre de l'information.
Le Président (M. Ciccone) : Merci
beaucoup pour votre grande contribution à cette commission.
Je vais
suspendre quelques instants pour permettre à l'Association des radiodiffuseurs
communautaires du Québec de prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 14 h 43)
(Reprise à 14 h 46)
Le Président (M. Ciccone) : Je
souhaite la bienvenue aux représentants de l'Association des radiodiffuseurs communautaires du Québec. Je vous rappelle que
vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous
procéderons à la période d'échange avec les
membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter ainsi que les
personnes qui vous accompagnent et à procéder à votre exposé. La parole
est à vous.
Association des radiodiffuseurs communautaires du Québec
(ARCQ)
M. Bougie
(Martin) : Merci. Mmes, MM. les commissaires, citoyens à l'écoute, mon
nom est Martin Bougie et je suis
directeur général de l'Association des radios communautaires du Québec, ARCQ
pour les intimes. Je suis aujourd'hui accompagné
de Tanya Beaumont, notre présidente, François Carrier, notre
vice-président, qui est aussi directeur général de la radio CHIP Pontiac, et Éric Tétreault,
également administrateur de l'association et directeur général du FM 103,3
à Longueuil.
Donc, nous
sommes l'Association des radios communautaires du Québec et vous remercions de
l'opportunité que vous nous donnez de
prendre part à cette conversation collective sur l'avenir des médias et du
droit du public à l'information. Ce
droit du public à l'information doit être au centre de nos préoccupations,
parce que les vrais perdants, si on ne fait rien, ce seront les citoyens
du Québec. Nous avons une responsabilité collective de préserver ce droit.
La radio
aussi est un média d'information, et la radio communautaire ne fait pas exception.
Ce débat nous anime et nous
interpelle. Présentes dans le paysage médiatique québécois depuis bientôt
50 ans, c'est aujourd'hui une quarantaine de radios communautaires qui desservent des centaines
de municipalités au Québec. 24 heures par jour, sept jours par
semaine, ce sont 250 employés et
2 000 bénévoles qui participent à la programmation et la gestion de
nos organisations. Elles sont solidement ancrées dans leur milieu,
appuyées par plus de 20 000 membres qui prennent part à leur vie
démocratique.
La radio
communautaire est aussi un outil de démocratisation des médias en ouvrant ses
ondes aux citoyens et aux différents groupes communautaires. Nos radios
sont toutes portées par une mission qui trouve une grande partie de sa pertinence aujourd'hui dans la production d'une
information de proximité. Pour les médias nationaux et régionaux, qui
s'adressent à un large public, qui doivent faire des liens à partir d'enjeux
plus globaux, toute nouvelle locale n'est pas forcément
pertinente. Par exemple, en temps d'inondations, ces médias ne peuvent
s'attarder à faire le point sur la situation prévalant dans tel ou tel village, c'est beaucoup trop pointu pour leur
angle, et pourtant cette information est cruciale pour les citoyens
directement touchés. Combien de nouvelles ne seraient pas traitées sans la
présence de médias consacrés à l'information de proximité?
Le citoyen a
aussi besoin de ce regard local ancré dans sa réalité quotidienne, un regard
porté par un interlocuteur qui comprend
sa réalité, qui partage ses valeurs, son histoire, sa culture, sa langue et qui
parle avec son accent. Nos radios vivent au rythme de leurs communautés. Chaque jour, plus de 300 nouvelles
locales et hyperlocales sont produites par les journalistes dans nos
radios, favorisant ainsi la mobilisation des citoyens devant les enjeux locaux.
Grâce à un
modèle d'affaires hautement adaptable, la radio communautaire a su s'implanter
dans des milieux aux réalités très
diversifiées. À l'heure où on cherche de nouveaux modèles d'affaires, nous
pourrions commencer par observer les composantes de notre écosystème
médiatique et miser sur la complémentarité de ceux-ci au profit du citoyen. Si
la spécialité d'un média privé est d'opérer
dans des marchés les créneaux avec un potentiel commercial, force est de
reconnaître que de moins en moins de marchés
offrent un rendement intéressant. L'actualité nous le rappelle à chaque jour,
l'information a une valeur sociale très forte mais sa valeur économique est
négative. On ne peut plus se fier aux lois du marché pour garantir
l'information.
La
radio communautaire, comme nombre d'entreprises d'économie sociale, a tendance
à s'installer dans des marchés qui
ont des besoins mais qui sont jugés non rentables par le secteur privé. Selon
nos données internes, le surplus moyen d'une radio communautaire, le surplus moyen annuel, est de moins de
2 000 $, démonstration faite du faible intérêt commercial des marchés que nous desservons. Et pourtant elles
font de l'information de proximité. Pourquoi? Parce qu'elles poursuivent
une mission collective cherchant à maximiser l'impact social.
La radio communautaire, c'est aussi une garantie
de service local pour la collectivité qui la crée. En effet, son modèle de
propriété collective fait en sorte qu'elle ne peut être achetée. Sa mission ne
peut être changée sans un large consensus
social, un large consensus pour ses uniques propriétaires, c'est-à-dire les
membres de sa communauté. La radio communautaire devient donc un rempart
contre le mouvement de concentration des médias et de montréalisation de l'information. Par son modèle de gouvernance
démocratique encourageant la participation citoyenne, la radio
communautaire s'assure de la pertinence de
ses programmations. Citons l'exemple des conseils d'administration de nos
radios, qui sont tous composés de citoyens s'impliquant bénévolement à
la gestion stratégique de leurs médias.
L'ancrage de
la radio communautaire dans sa communauté est réel. Si on mesure la valeur d'un
média par l'appui qu'il reçoit par sa
communauté, la radio communautaire, dont l'existence même est le résultat d'une
volonté collective de se doter d'un
média local producteur d'information de proximité, eh bien, ça représente une
grande valeur aux yeux de ses citoyens.
• (14 h 50) •
Mme Beaumont (Tanya) : Cette
mission, elle est bien noble, elle est vitale pour nos communautés mais elle a un coût. Nos radios consacrent entre 25 %
et 40 % de leurs dépenses de programmation à la production d'information
de proximité. Elles évoluent dans un
environnement réglementaire complexe qui fait sa spécificité mais qui apporte
aussi son lot de défis. Elles doivent
assumer les mêmes dépenses de base qu'une radio privée. Elles font face aux
mêmes défis liés au numérique. Elles
doivent faire face à la transformation des métiers de la radio, à la
multiplication des plateformes de diffusion et aux changements des
habitudes de consommation. Elles fonctionnent souvent avec des moyens limités,
et la ligne entre survie et viabilité peut
être mince. Cette réalité les empêche souvent d'offrir des conditions de
travail compétitives, ce qui a un impact sur leur capacité d'embauche et
de rétention de leurs ressources.
Même s'il y a
plusieurs beaux exemples de gens qui font carrière dans nos radios, elles sont,
pour plusieurs, le point de départ,
la première expérience concrète avant de passer dans les médias privés et
publics. On peut le voir comme un problème
ou comme une opportunité de reconnaître le rôle de formation que nous jouons.
On dit souvent qu'on fait des miracles
avec des petits moyens en radio communautaire, mais on se pose la
question : Est-ce vraiment nécessaire? En bout de ligne, c'est la qualité du service aux citoyens
dont il est question. Un secteur communautaire habilité à pleinement
réaliser sa mission ne serait-il pas un objectif collectif à viser pour
préserver le droit du public à l'information?
Si l'ARCQ est
l'humble porte-parole de ses membres, c'est d'abord et avant tout un
regroupement de radios qui ont envie
d'évoluer ensemble et de mutualiser leurs efforts pour contribuer à
l'épanouissement de notre secteur. L'information est le moteur de nos
actions. Nous travaillons actuellement à la mise en place d'une agence de
presse interrégionale, plateforme alimentée
par les contenus de nos radios. Cette plateforme a comme objectif d'augmenter
la découvrabilité des contenus de nos médias et de faire rayonner
l'information locale.
S'il semble déjà y avoir un consensus social sur
la nécessité de soutenir nos médias d'information, une question se pose : Qui doit payer? Les citoyens? Nous
faisons face à la culture de la gratuité mais nous croyons que la propension
d'un citoyen à payer pour un service d'information est proportionnelle à la
valeur qu'il lui accorde. Dans le cas des radios communautaires, c'est en moyenne
30 % des revenus qui provient des levées de fonds diverses. Nos
communautés contribuent déjà à leurs médias.
La communauté d'affaires? On n'achète pas de la publicité dans un média pour
l'encourager mais parce qu'il est efficace
pour rejoindre un public cible. Une partie de la responsabilité va donc vers
les médias, qui se doivent d'être crédibles, professionnels et
pertinents.
Le droit du
public à l'information, c'est notre responsabilité à tous. Dans le contexte où
le marché ne permet plus de garantir
des services d'information, nous croyons qu'il est de l'obligation de nos élus
à mettre en place des mesures, des pratiques et des politiques pour
soutenir la production d'information.
Parlons de
publicité gouvernementale. Les messages du gouvernement sont d'intérêt public.
Il est de la responsabilité de nos
élus de s'assurer de rejoindre le plus de citoyens sur le plus grand territoire
possible. Dans ce contexte, l'achat de publicité
dans les médias locaux n'est plus un mal nécessaire mais bien un moyen du
gouvernement d'atteindre ses objectifs de
communication. Actuellement, on peut pointer du doigt certaines pratiques qui
pourraient être changées pour le bénéfice de tous. Si les placements publicitaires dans les GAFA peuvent faire
partie d'une stratégie globale, on ne peut pas tout mettre nos oeufs
dans le même panier, on doit diversifier les placements. Même en publicité
traditionnelle radio, les achats gouvernementaux sont souvent concentrés dans
les réseaux de Bell et Cogeco, qui rejoignent essentiellement les agglomérations urbaines. N'oublions pas que
50 % de la population vit en dehors des centres urbains. Le gouvernement
du Québec s'est donné une directive
d'investir au moins 4 % de ses achats publicitaires dans les médias
communautaires. Cet objectif n'a jamais été atteint depuis sa mise en
vigueur il y a plus de 20 ans, et ça devrait être écrit noir sur blanc
dans votre rapport.
Nous
appuyons, à l'ARCQ, toute mesure qui viendra supporter le coût de la mission
d'information de nos médias. C'est la
survie... qui en est question. Fonds de soutien au journalisme, crédit d'impôt
pour entreprises privées, redevances des GAFA et des fournisseurs d'accès, plusieurs solutions sont présentement
sur la table, nous croyons qu'elles doivent être étudiées. Mais toute solution mise en place devra reposer sur des
critères objectifs basés sur l'intérêt du citoyen et les besoins de nos régions. Le rôle de l'État n'est pas de
décider du sort de tel ou tel groupe média mais de s'assurer que chacune
de ses composantes de notre écosystème, notamment les éléments privés et
collectifs, contribuent aux objectifs en ayant les moyens de jouer leurs rôles
respectifs et complémentaires.
En
conclusion, parce que le respect du droit à l'information est une
responsabilité collective, l'ARCQ recommande que le Québec se dote d'une politique publique en information. Parce que
la radio communautaire a l'information de proximité au coeur de sa mission, une gouvernance
démocratique apportant ancrage et pertinence, une garantie de service local
par sa propriété collective, un modèle économique adaptable centré sur la
finalité sociale et peut jouer un rôle important et complémentaire dans le
maintien du droit à l'information...
Le Président (M. Ciccone) : En
terminant, s'il vous plaît.
Mme Beaumont
(Tanya) : ...l'ARCQ recommande que le rôle essentiel de la radio
communautaire dans le maintien de
l'offre d'information locale et régionale soit reconnu et que ce rôle soit
soutenu par des mesures concrètes de support à la production et de
diffusion de nos contenus journalistiques et d'encadrement des ressources.
Merci.
Le
Président (M. Ciccone) :
Merci. Je vous ai donné 25 secondes. Merci. Merci pour votre exposé. Nous
sommes maintenant rendus à la période
d'échange d'une durée de 15 minutes avec la partie gouvernementale, et on
débute avec le député de Beauce-Sud.
M. Poulin :
Mme Beaumont, M. Carrier, M. Bougie, M. Tétreault, merci
pour votre présentation fort intéressante.
Deux, trois
éléments. J'ai été dans les stations de radio communautaires, j'ai fait des
renouvellements avec le CRTC. Je sais
c'est quoi, qu'il y ait des pourcentages de gospel que je dois mettre à ma
programmation ou je dois tenter de rendre ça le plus intéressant possible, à longueur de journée, avec les
contraintes que le CRTC nous met, qui ne sont pas toujours mauvaises en tant que telles, qui sont des fois de
bon aloi puis qui permettent justement aux radios communautaires de diffuser un contenu qui est différent. Cependant,
la radio, elle est là pour rester. Malgré tout ce qu'on a pu dire dans
les dernières années, malgré les crises
qu'il a pu y avoir dans le monde des médias, la radio est un média qui a
traversé le temps parce qu'il a
toujours réussi à se renouveler. C'est sûr qu'il y a des défis. On pense à
l'art du «pretape», là, qui est rendu très
à la mode, où les animateurs radio ne sont plus du tout en direct, où ils
animent leur météo d'avance, ils diffusent ça plus tard. Bref, le métier
d'animateur radio a changé énormément. Le métier de journaliste également a
changé aussi.
J'aimerais
que vous parliez de l'expertise que vous avez développée mais qu'on se doit
encore de développer dans les radios
communautaires. Parce qu'il ne faut pas se leurrer, il y a de la compétition.
Lorsqu'un citoyen décide, par exemple, d'écouter
des stations de radio, il y a différents choix qui s'offrent à lui. Donc, pour
assurer une fidélité à son auditoire, c'est un défi, puis vous n'avez pas nécessairement les mêmes moyens puis vous avez
des contraintes supplémentaires qui vous sont mises devant le CRTC. Alors, de quelle façon pouvons-nous continuer de
convaincre les publicitaires de se tourner vers vous? Puis qu'est-ce que le gouvernement pourrait faire
pour tenter, malgré les contraintes du CRTC, qui, je le rappelle, ne
sont pas toutes mauvaises... On pourrait quand même vous appuyer dans cette
compétition-là du monde radiophonique, qui est superimportant. Pour plusieurs de ces radios, quand je regarde les
membres que vous avez... qui a diminué avec le temps, quand je regarde les membres que vous avez, il
n'en demeure pas moins que vous êtes très souvent la seule radio au
monde à parler de ces gens-là, alors c'est
important en termes d'information locale et régionale. Donc, qu'est-ce qu'on
peut faire pour vous aider et vous appuyer au niveau de l'expertise dans
ce monde extrêmement compétitif?
• (15 heures) •
M. Tétreault
(Éric) : Je suis bien placé pour en parler parce que j'ai une station
de radio, je gère une station de radio depuis 25 ans à Longueuil et j'ai
tout le débordement de Montréal. Et chez nous, oui, j'ai des employés, j'ai des
bénévoles, mais c'est tous des gens qui, à
quelque part, ont un mandat de qualité en ondes, et ça, c'est fondamental. Si
je n'ai pas cette notion de qualité là, on
n'existe pas, parce que, sur la bande FM, on peut se promener, il y a 32
stations dans la grande région de
Montréal, ça fait qu'il y a 32 autres raisons de m'écouter. Donc, ça, c'est
sûr, puis, je pense, c'est la même chose pour pas mal l'ensemble des
stations de radio, la notion de qualité, elle est là.
Souvent, les
gens ont toujours l'aspect de la perception du milieu communautaire, mais, je
peux vous dire, avec les années, on a beaucoup évolué. Le milieu a
beaucoup évolué puis également l'écoute a beaucoup évolué. C'est sûr, il y a une fragmentation, mais aujourd'hui les gens
sont beaucoup plus aptes à, nécessairement, nous essayer, à nous aimer
puis à nous écouter à chaque jour. Donc, la
notion de qualité, on ne peut pas la coller nécessairement à qu'est-ce qu'on
fait. La preuve, c'est qu'on forme
énormément de gens, des journalistes, des animateurs, on est vraiment une
pépinière à l'ensemble du Québec.
Nous, c'est 34 stations de radio partout au Québec qu'on rejoint, donc c'est quoi,
c'est plus d'un million de
personnes qu'on rejoint par semaine.
Souvent, il y a toujours
cette notion-là de... cette mauvaise perception là du milieu communautaire, ce
qui a toujours tendance à nous
aplanir un peu. Mais il ne faut pas oublier aussi qu'on a un modèle d'affaires
qui est un modèle d'entreprise d'économie
sociale, qui est un modèle unique, et on ne l'a pas parti voilà deux ans, là,
ça fait 40 ans qu'on l'a parti. Donc, il y a une grande expertise
que le ministère, aussi, possède. Notre ministère de la Culture est au courant de ça. On lui fait comme
des redditions de comptes à chaque année pour avoir une certaine subvention.
Donc, moi, c'est un point, par rapport à la
qualité, que... je fais le lien. Il y a un beau modèle, au Québec, même précurseur mondialement, d'un réseau des radios
communautaires qui produit énormément d'information partout au Québec, puis il est sous-exploité, puis souvent on n'en
parle pas beaucoup. Parce
que, dans les grands réseaux — je
suis bien placé, à Longueuil, pour, nécessairement, le savoir — on
essaie d'éviter de mentionner d'autres médias et, encore plus vrai, un
média comme le nôtre.
Vous
savez, notre force, nous, c'est qu'on appartient à la communauté, on est gérés
par la communauté et aussi on est
alimentés par la communauté. C'est un peu le modèle du média de demain, ça.
C'est qu'est-ce qu'on est, en tout cas, 34 stations de radio et plus de 160 médias communautaires au Québec,
mais souvent, c'est ça, on n'en parle pas beaucoup dans les revues. Il y a certaines stations de Montréal
qu'on parle, mais moi, je suis bien placé, à Longueuil, je suis à côté
des camions, je les vois passer, de tous les
réseaux, et c'est très rare qu'on parle de qu'est-ce qu'on fait. Ça fait que,
oui, la qualité, il y en a beaucoup. De toute façon, je sais qu'il y a
des gens qui passent dans notre réseau, vous pouvez nécessairement témoigner de
la qualité qu'il y a chez nous.
M. Poulin : En terminant, avant de céder la parole à mon
collègue, j'aimerais qu'on parle du virage radiophonique numérique. On
regarde QUB Radio, là, je prends l'exemple national, mais bien d'autres, Radio-Canada,
la radio de Radio-Canada a fait un virage assez important en mettant ses
podcasts qui sont disponibles. Nous-mêmes, là, ce soir, on va réécouter
certaines entrevues qu'on a manquées, parce que maintenant on peut consommer...
comme la télé, on peut consommer la radio
lorsqu'on le veut. Quel impact ça a auprès des radios communautaires, ce
changement-là? Puis est-ce qu'on pourrait vous supporter davantage dans
un virage numérique, sur du podcast qui est disponible en ligne, sur une
accessibilité qui est plus facile, de votre côté?
M. Bougie
(Martin) : Bien, écoutez,
la radio communautaire est une radio d'abord et avant tout, puis on fait
face au même environnement que tout le monde. Au Canada, on dit, en fait, que, dans les 35 ans et
moins, il y en a moins... plus de 50 %
qui n'ont pas de récepteur FM à la maison. Alors, un récepteur radio, c'est ça,
et ça va être ça demain, et pour nous, pour nos médias, c'est les auditeurs de demain à qui il faut penser, hein? De
plus en plus, nous serons des producteurs de contenu avec des plateformes de diffusion à notre portée.
Donc, il faut que nos médias s'adaptent, là, c'est une question de
survie, en fait. Il faut s'adapter aux
auditoires qui s'en viennent, parce
que leur monde est différent, ceux qui
ont 15, 20 ans aujourd'hui. Il ne sera pas différent demain, ils vont
continuer à vouloir consommer les contenus où je veux, quand je veux, comme je veux. C'est fini, l'heure des rendez-vous en radio. Ton émission de jazz le jeudi à 7 heures, ça
m'intéresse, mais je ne veux pas l'écouter le jeudi, pas à
7 heures, je veux l'écouter sur mon... donc il faut qu'on aille là.
Et
nos métiers sont en pleine transformation. On ne doit plus seulement rendre une
nouvelle... parce qu'on est ici pour parler d'information aussi, on ne peut plus juste rendre une nouvelle au
micro, il faut aussi l'agrémenter d'images puis d'un petit texte pour le site Internet. On a un
réalisateur audio, ça va prendre un réalisateur numérique, bien sûr,
bientôt pour faire un lien avec les
réseaux sociaux. Donc, vraiment, on fait face à ce changement-là puis on n'y
fait pas exception. On a un modèle
d'affaires, comme disait Éric, qui est là depuis plus que 40 ans. Bon, le
buzz sur Internet, c'est l'interaction entre les auditoires et les producteurs. Bien, nous, nous sommes des médias
interactifs depuis notre création. Notre modèle d'affaires, il est là.
Il suffit juste de l'encourager.
Si
je peux me permettre de glisser un peu sur votre question précédente, qu'est-ce
qu'on peut faire? Qu'est-ce que le gouvernement peut faire pour nos médias? On a parlé du coût de
la mission dans notre exposé. Il faut savoir, nos médias font face aux mêmes dépenses de base qu'une radio mais
dans un marché ou un créneau qui n'est pas rentable, et pourtant on continue à dépenser entre 25 % et 40 %
de nos budgets de programmation dans la production d'information. C'est là
qu'il faut qu'on soit aidés. Si on croit ce
modèle-là, qui est collectif, démocratique, qui est vraiment bien implanté déjà, on
n'a pas besoin de réinventer la roue, on est implantés dans notre paysage, si
on y croit, supportons nos services d'information.
Le Président (M.
Ciccone) : Merci. Je reconnais maintenant le député de Saint-Jean.
M. Lemieux : 34 stations, mais l'autre chiffre que j'ai retenu
de ce que vous avez dit, c'est un million d'auditeurs. Je ne connais pas le placement média. Je connais les
médias, mais, le placement, je n'en ai jamais fait mais j'ai une bonne
idée de comment ça fonctionne. Quand je
dépense, que ce soit du 4 % ou
que ce soit n'importe quoi d'autre, là, le 4 % gouvernemental ou n'importe quelle campagne de
pub, je veux acheter national, j'achète national. Il m'en manque combien
dans ma couverture nationale? Puis est-ce que je me trompe ou vous êtes ce qui
fait la différence du total?
M. Bougie
(Martin) : Écoutez,
on parle aussi... puis je pense que c'est important, pour moi, c'est crucial dans
le débat, c'est la responsabilité du gouvernement dans son placement publicitaire. On peut parler
de pourcentage mais on peut parler de sa responsabilité. Le gouvernement ne peut pas avoir une attitude comme l'acheteur
privé, qui va rechercher à rejoindre
un certain pourcentage de son public cible, donc j'achète Montréal,
Québec, puis je patche dans quelques régions, puis j'ai atteint mon objectif. Non, le gouvernement, ses messages, ce sont des messages d'intérêt
public, il doit s'adresser à un maximum de citoyens sur le plus grand territoire
possible.
Ce
million d'auditeurs là qu'on a, oui, ils sont dans les zones urbaines, mais il ne faut pas oublier qu'il y en a plusieurs
qui sont en région, en fait, la grosse majorité,
et pour lesquels notre radio est le seul média à qui on parle. Donc, oui,
en radio, je peux acheter chez Bell et Cogeco, mais est-ce que je parle à la population
de la Côte-Nord? Est-ce que je parle à Carleton,
à Gaspé? Est-ce que je parle à... Bon, la liste est longue, mais je pense
que c'est ça qu'il faut ramener au centre. En tant que gouvernement, mais en tant qu'organisme public, on a cette responsabilité. Alors, la publicité dans nos médias, ce n'est pas un mal nécessaire, non, non. Je pense que c'est une logique
de gagnant-gagnant qui permet, oui, de financer nos médias mais
d'augmenter la portée des messages du gouvernement.
M. Lemieux : Voilà pour la publicité. Merci du message. Parlons
de contenu, maintenant. Le mixte radio d'une radio communautaire moyenne, au Québec — désolé de ramener ça à une moyenne, là, mais
il faut qu'on se comprenne puis il faut qu'on ramène ça à quelque chose de comparable — radio parlée, radio musicale, radio
d'information, on est où dans le mixte de... la moyenne des ours, là?
M. Tétreault (Éric) : Bien, la
moyenne... Veux veux pas, de toute façon, on est régis par le CRTC, ça fait que
la moyenne est assez facile à faire. À
quelque part, chacun a son mandat du
CRTC à respecter. Il y a un contenu
oral à respecter,
il y a des catégories de musique à respecter, ça fait qu'en vrai le format, il
se ressemble. C'est sûr qu'il y a peut-être un choix musical qui peut changer, mais les contenus francophones, c'est
la même réalité pour tout le monde, et donc on vit avec ça. Puis aussi, par rapport à l'information,
il y en a qui ont différents mandats. C'est sûr que, dans certaines
régions, c'est souvent... la salle de
nouvelles, c'est la seule salle de nouvelles qu'il peut y avoir. Bien, aussi,
dans des grandes régions... Je peux
vous dire qu'à Longueuil on a besoin des trois médias communautaires qui sont
là, parce que sans eux, bien, il y aurait un grand vide démocratique.
M. Lemieux :
Oui, bien, justement, mon collègue de Beauce-Sud, tout à l'heure, parlait aux
gens de la télé communautaire en
disant : Il me semble qu'il y aurait des alliances naturelles. On est en
2019, et vous êtes multiplateformes de plus en plus, n'est-ce pas? Je lisais,
d'ailleurs vous l'avez... ce que vous avez dit tout à l'heure, vous l'avez
écrit au paragraphe 45, le principal
défi, il n'est pas technique, c'est les métiers de la radio qui évoluent. Vous
êtes de plus en plus multiplateformes. Vous ne pourriez pas travailler
ensemble, avec la radio, puis avec la télé, puis l'écrit?
M. Tétreault
(Éric) : Bien, écoutez... content, comme, d'entendre ça parce qu'en
2009 j'ai préparé un plan d'affaires pour
réunir l'ensemble des médias communautaires. Ce projet-là a été appuyé par
Christine St-Pierre, qui était ministre à l'époque, qui est venue lors du lancement au Théâtre de la ville, à
Longueuil, qui était emballée, nécessairement, par ce projet-là parce que ça pouvait faire boule de
neige partout au Québec. Malheureusement, le monde communautaire, c'est difficile de travailler ensemble et ça a été
difficile. Ensuite, bon, la télé a eu ses raisons, puis le journal a eu plein
d'autres raisons, donc, du fait qu'avec le
temps, bien, à quelque part, ce projet-là s'est effrité et s'est éteint voilà
pas longtemps, avec, nécessairement, comme le décès d'un des
fondateurs...
• (15 h 10) •
M. Carrier
(François) : Si on me permet
également, il y en a déjà, des collaborations, il faut dire. Puis, dépendamment aussi de l'écosystème où on est, nous
autres, chez nous, dans le Pontiac, c'est sûr qu'on collabore avec les journaux locaux qui y sont et davantage aussi
parce que nous, on a deux communautés de langues différentes, donc les anglophones et les francophones, donc on s'assure
de faire tout ça. Mais moi, je peux dire que, déjà, lorsque c'est
nécessaire, on le fait, à mon avis, puis c'est très complémentaire, ce qu'on a
pour le moment.
D'ailleurs,
si on regarde... tantôt, votre question concernant, entre autres, ce qu'on fait
tous les jours, parce que je pense
que l'information, c'est vraiment ce qui nous intéresse, nous, durant les
inondations qu'on a vécues récemment, on était vraiment seuls sur notre territoire avec 19 municipalités à
couvrir, ce qui n'était vraiment pas évident. Et notre rôle a tellement été nécessaire et gratifiant, je dirais, à cet
effet-là, et c'est là qu'on a attiré le plus d'auditeurs et aussi de publicité
locale, aussi. Ça, il ne faut pas l'oublier
également, on a quelque chose d'intéressant, je pense, à offrir. Et je pense
que c'est comme ça également qu'on
réussit, de notre côté, à avoir notre image de marque, c'est-à-dire d'être là,
d'être présents quand c'est le bon moment.
Il y a des événements parfois malheureux mais il y a des événements où ce qui est intéressant, c'est que les gens pensent à nous maintenant. Ils pensent
directement, à savoir, oui, il y a des médias sociaux... mais à
27 reprises, nous, de notre
côté, on a dû intervenir pour faire en sorte que des rumeurs ne soient pas
propagées dans notre communauté, ce qui n'était pas évident. Alors,
c'est ce genre de chose là aussi, je pense, qu'il faut retenir en termes
d'information.
M. Lemieux :
J'avais souligné le paragraphe 45, mais il y a le 47 que je trouvais
passionnant aussi : «Le pouvoir a changé
de mains. De plus en plus, nous devenons des producteurs de contenu — je fais rapidement parce qu'il ne reste
pas beaucoup de temps — [...]il
doit être au service et complémentaire au produit en ondes.»
J'ai retenu
aussi un autre chiffre, tantôt : 2 000 $, la différence entre la
fin de l'année puis les profits puis les pertes, là. Avez-vous les moyens de compléter le virage? Parce que ça en prend
un, de toute évidence, avec les podcasts puis tout ce dont on parlait,
là. Avez-vous les moyens de le faire?
Le Président (M. Ciccone) : 45
secondes.
M. Bougie
(Martin) : Bien, est-ce qu'il y a quelqu'un au Québec qui a les moyens
de le faire en ce moment? Je pose la
question. Ce n'est pas... mais ça demande des investissements énormes, et puis
c'est beaucoup plus un centre de coûts qu'un centre de profits, présentement. On n'a pas le choix d'être là, comme je
le disais tantôt, ne serait-ce que pour faire face aux prochains auditeurs. Il faut être là, mais c'est
des énormes investissements. Le Plan culturel numérique a contribué,
mais c'est une longue marche pour nos médias, pour essayer, oui, de mettre
ensemble la mission de radiodiffusion sur toutes les plateformes, là, dans les
conditions financières qui sont les nôtres.
Le Président (M. Ciccone) : Merci
beaucoup. Je suis maintenant prêt à reconnaître un membre de l'opposition
officielle. Mme la députée de Verdun.
Mme Melançon :
Merci. Merci à vous quatre d'être présents. Je connais assez bien les radios
communautaires, parce qu'on a déjà
fait le tour, on s'est parlé à quelques reprises aussi. Je veux aussi
souligner, pour ceux et celles qui nous écoutent, actuellement, l'importance, bien sûr... là, vous
l'avez dit, en sécurité publique, on le voit... on l'a vu chez vous, là, dans
le Pontiac, dernièrement. Moi, je me rappelle, là, d'un échange qu'on avait eu
avec Natashquan, parce que, justement, il n'y
a personne qui se rend là-bas, puis, lorsqu'il arrive, en tout cas, des
événements, qu'ils soient malheureux ou, en tout cas, d'ordre de
sécurité, le gouvernement est toujours bien, bien, bien heureux de pouvoir se
tourner vers vos radios.
Moi, je vais
passer un commentaire tout de suite, puis ça aura été dit, puis j'aurais dû le
faire aussi tout à l'heure avec les télés communautaires. Pour
plusieurs, lorsqu'on parle des radios ou des télés communautaires, on se
rapporte aux années 80,
où il y avait des problèmes majeurs de décor ou, en tout cas, où le son ne
sonnait pas tout à fait juste. Juste dire aux gens, là, qui n'ont pas
écouté la radio communautaire dernièrement, c'est formidable, ce que vous
faites avec des montants, en tout cas, pas
substantiels dans le cas où on parle actuellement. Mais je peux vous dire que,
pas plus tard que la semaine
dernière, j'étais avec CFUT, donc, j'étais avec Robert Bernard, et je suis
allée écouter, on a du temps, on peut échanger,
on est à Shawinigan, où on peut prendre le temps, justement, d'échanger. Et
bravo pour le travail que vous faites, je voulais minimalement le dire.
Je lisais
aussi que, pour arriver à boucler la boucle... Moi, je me rappelle toujours de
CKRL, qui fait son radiothon. Cette
année, je pense que c'est autour de 50 000 $ qu'on a été capable
d'amasser, hein, avec le radiothon. Ce n'est pas drôle d'être obligé, à chaque fois, là, de passer le
chapeau, je vais dire ça comme ça, bien que ce ne soit pas... mais il faut
que vous soyez créatifs à chaque fois.
Bien sûr, le
4 %... puis là vous me voyez arriver, là. Pourquoi le 4 % puis
pourquoi... On doit faire un travail, mais je pense qu'on va devoir aussi se baser ailleurs, parce que ça ne fait pas
deux, trois, quatre ou cinq reprises qu'on essaie de faire atteindre le 4 %, là. J'ai joué dans ce
film-là, je le sais, de quoi il est question, c'est superdifficile. Puis je le
disais tout à l'heure, je pense que,
dès qu'il va y avoir une sortie de 1 $ qui sera faite par le ministère du
Conseil exécutif, parce que c'est là
où c'est rendu pour la publicité, bien, il y a 1 $ qui part, mais il y a
un pourcentage qui devrait automatiquement être versé dans un autre compte, là, pour assurer que ça s'en
aille dans les médias communautaires. Ça, je suis prête à faire ce
débat-là.
Je veux quand
même vous poser la question, parce que, là, on est en radiodiffusion, et je
l'ai posée... vous m'avez entendue,
tout à l'heure, dire... moi, j'étais surprise de voir que le gouvernement du
Québec n'ait pas voulu déposer quoi que ce soit à Ottawa, et ça vous regarde, vous aussi. Quelle aurait été une
demande que vous auriez pu faire pour la révision des deux lois au CRTC?
M. Bougie (Martin) : Par
rapport au gouvernement du Québec?
Mme Melançon : Oui.
M. Bougie
(Martin) : Bien, en fait...
Bien là, écoutez, c'est de juridiction fédérale, là, je
ne veux pas me prononcer sur... Mais en fait, nous, on a déposé un
mémoire dans le cadre de cette révision-là, puis c'est clair, bon, on parlait
des contraintes du CRTC, les contraintes...
Nous, oui, ça complexifie un peu la gestion de nos médias, mais on pense que
ça nous campe aussi dans la... ça nous force à réaliser notre mission.
Mais la chose
la plus importante, puis ça peut toucher aussi les discussions qui
ont lieu ici concernant les GAFAM de ce
monde, mais je pense que c'est aussi que l'espace canadien, mais ici l'espace québécois, soit ouvert
aux joueurs, mais que tous les
joueurs qui sont dans cet espace-là jouent les mêmes règles du jeu, autant au
niveau réglementaire que fiscal. Alors, on ne peut plus aujourd'hui — je le crois, c'est mon avis, et je le partage,
là — tolérer
qu'il y ait des grandes entreprises qui viennent, qui vont chercher nos
contenus, nos revenus. Il y a une cassure au niveau économique aussi, là. Ce
n'est pas nécessairement les producteurs de
contenu qui font l'argent dans les territoires numériques, là. Donc, c'est les
fournisseurs d'accès, c'est les grands,
c'est les GAFA de ce monde, donc il faut retrouver une certaine équité fiscale
dans ce monde-là.
Mme Melançon :
J'ai une question pour M. Tétreault. Tout à l'heure... Moi, je me
rappelle, en 2009, là, de ce que vous
aviez fait comme proposition, c'est très clair dans ma mémoire. Là, vous me
dites que c'est fini, mort, enterré? Parce que j'étais pour vous... Là,
vous m'avez devancée, je voulais savoir on en était où.
M. Tétreault
(Éric) : C'est vrai que c'est fini, mort, enterré parce que celui qui
m'a aidé à mettre ça en place, il est décédé voilà un an.
Mme Melançon : Oh!
M. Tétreault (Éric) : Il
s'appelait M. Maurice Giroux.
Mme Melançon : Oui, bien sûr,
bien sûr.
M. Tétreault
(Éric) : Il a été le membre fondateur de notre station de radio. Donc,
oui, à quelque part, chacun avait des
intérêts un peu différents là-dedans, donc tout ça est parti dans différentes
directions. Moi, j'ai toujours continué, c'est moi qui ai préparé le
plan d'affaires. J'avais quand même pas mal de données de tout ça, mais la télé
avait d'autres objectifs.
Il ne faut
pas oublier aussi que c'est quand même difficile d'amener... Moi, je travaille
déjà avec le privé, je suis en partenariat
avec plein de privés autour de moi, je n'ai aucun problème avec ça, mais le
domaine communautaire, il a d'autres philosophies
et d'autres valeurs, ça fait que ce n'est pas toujours évident de,
nécessairement, amener à travailler ensemble. Mais, si aujourd'hui ce projet-là serait... nécessairement, là,
10 ans après, bien, je pense qu'on serait un joueur... un des plus
gros joueurs sur le territoire, ça, c'est sûr.
Puis la
Rive-Sud, c'est grand, là, on ne s'en rend pas compte, c'est 500 000 de
population, hein, si on prend l'accès à environ, là, 10 minutes des ponts, et on est, quoi, cinq... il y a
cinq hebdos et trois médias communautaires, c'est comme le territoire de la Capitale-Nationale. On n'est pas
beaucoup pour couvrir tout ce qui se passe, je pourrais vous dire. Ils
ont besoin de leurs médias communautaires et
principalement d'une station de radio aussi, puis c'est pour ça qu'on est là.
Puis on n'a pas de radio régionale,
il n'y a pas de télé régionale, comme disait tantôt Catherine, il n'y a pas...
ce n'est pas payant. Ils sont juste
l'autre bord du pont, ce n'est pas du tout dans leurs plans. Il y a
Radio-Canada qui a essayé de faire quelque chose, à un moment donné, aussi,
canal 10/30, puis ça n'a pas fonctionné. Ça fait que notre modèle, nous, qui
est, à quelque part, sans but lucratif, avec d'autres façons de
financer, c'est le modèle qui fonctionne dans un marché extrêmement compétitif.
Mme Melançon :
Je vous pose la question parce que, c'est pour les membres de toute la
commission, là, il ne faut pas qu'on
commence à dire : Oui, peut-être est-ce qu'on pourrait essayer de les
marier de force, là. Je pense qu'on a entendu
clairement qu'il y a... Non, mais c'est vrai, c'est parce qu'on va devoir
écrire quelque chose, à un moment donné, puis je voudrais que ce soit
bien enregistré.
M. Tétreault
(Éric) : ...c'est de nous reconnaître et d'investir. Ce n'est pas un
don, ce n'est pas... Tu sais, le 4 %, souvent, bon, O.K., on va lui donner le 4 % pour qu'il se ferme. Ce
n'est pas ça, c'est d'investir. Puis même, ce n'est même pas 4 %, dans notre tête à nous, 4 %, on
parlait de ça en 1996. On est en 2019, c'est 6 % aujourd'hui, et c'est ça
qui doit être investi dans les médias
communautaires. On parle, nécessairement, pour les 160 qu'il y a au
Québec, c'est ça qui manque présentement
puis c'est ce coup de pouce là qu'on a de besoin. Et ça, en plus, ce n'est même
pas... c'est de l'argent qui est déjà là. C'est de répartir
différemment, ce n'est pas du nouvel argent.
Mme Melançon :
Je voulais surtout indiquer, M. Tétreault... c'était surtout le fait de
dire : Bien, on ne peut pas faire des
économies d'échelle en allant mettre et la télé, et l'écrit, et la radio
ensemble. Ce n'est pas ça, le but. Parce que, vous savez quoi, le travail que vous faites, là, il est
trop important au quotidien pour qu'on essaie de faire des économies. Il
n'y en a plus, d'économies à faire. Je pense que vous l'avez...
M. Tétreault
(Éric) : ...dire, on est spécialistes là-dedans.
Mme Melançon :
Ah oui.
M. Tétreault
(Éric) : Ça fait 25 ans, moi, que je monte des échelles, là.
Mme Melançon :
Vous l'avez fait, l'effort.
M. Tétreault
(Éric) : Je suis pas mal spécialiste là-dedans, je peux vous dire.
Mme Melançon :
Tout à fait, tout à fait. Il me reste combien de temps, M. le Président?
Le Président (M.
Ciccone) : 1 min 50 s.
• (15 h 20) •
Mme Melançon :
O.K., 1 min 50 s. Si on se tourne vers l'avenir, là, pour vous,
il est heureux, parce que, là, je vois que
vous êtes quand même là, on s'en est quand même sorti, et je voyais les chiffres, un peu plus tôt, où on
démontrait qu'en publicité il s'en était moins perdu en radio que dans
les autres médias. Est-ce que c'est vrai? Puis là je continue à vous regarder
parce que c'est vous qui êtes...
M. Tétreault
(Éric) : ...moi, chez nous, j'ai une baisse quand même assez
importante. C'est sûr que la radio s'en sort mieux par rapport à son
format, par rapport au numérique, ça, c'est sûr et certain. Mais, nous, c'est
toute la volonté du gouvernement d'investir qui n'est pas là. Parce que les
montants, c'est des montants ridicules qu'on a, en placement publicitaire national, c'est ridicule. J'aime
mieux même ne pas le dire, comment c'est ridicule. Par rapport à la portée
qu'on a puis les gens, nécessairement, qu'on
rejoint sur le territoire, c'est des montants qu'on trouve... On a bien beau
essayer de travailler avec les agences, tout le monde, il n'y a rien qui
bouge parce qu'au gouvernement ça ne bouge pas, le lien ne se fait pas.
M. Bougie
(Martin) : Parce que... si je peux me permettre, je vous dirais que,
oui, au niveau de la vente de publicité, on note surtout que la publicité locale ne décroît pas très vite, preuve
en est faite de l'importance que les commerçants voient pour la contribution de nos radios. Mais il faut
comprendre aussi que la plupart de nos radios sont dans les marchés qui
sont peu attrayants pour les grands
annonceurs nationaux commerciaux, alors c'est pour ça que l'impact des achats
gouvernementaux est si important.
Juste un mot sur le
4 %...
Le Président (M.
Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.
M. Bougie
(Martin) : Pardon?
Le Président (M.
Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.
M. Bougie
(Martin) : Oui, je vais juste terminer rapidement. Je veux juste le
mettre... Le 4 %, en 2017‑2018, il était de 1 million, à
3,2 %. Atteindre le 4 %, ça voulait dire 1,2 million, divisé par
les 160 médias communautaires, On parle de 7 800 $ en moyenne,
annuellement, par média. Donc, ce n'est pas la solution, c'est une partie de la
solution.
Le
Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup. Je suis prêt maintenant à
reconnaître la députée de Taschereau pour 2 min 30 s.
Mme Dorion :
Merci. Je lisais, dans votre mémoire, que vous recommandiez que «les règles
[...] soient les mêmes pour tous, peu importe leur taille, leur nature
et leur provenance». Ça veut dire quoi?
M. Tétreault
(Éric) : ...information locale, on en produit, on a
50 journalistes dans notre réseau, on couvre toutes les régions du Québec. Juste chez nous, c'est cinq à
huit nouvelles par jour qu'on diffuse en ondes, 13 bulletins qu'on met
sur Internet, qu'on met sur Facebook, tout
ça, c'est énorme. Mais on a de la misère à faire reconnaître ça. Je regarde
juste, là, les dernières semaines, on parle rarement de ce qui est
produit dans nos salles de nouvelles. On est là, on est un joueur important au
Québec.
Mme Dorion :
Mais c'est quoi, les règles qui devraient être les mêmes pour tous?
M. Bougie
(Martin) : Bien, sur les règles ici, on faisait aussi beaucoup
référence aux règles fiscales, là, j'en ai parlé tantôt, c'est l'équité fiscale, l'équité par rapport à tous les joueurs
qui sont là. Donc, oui, tu es un joueur, tu offres tes contenus. Au Québec, bien, on a des taxes à payer, et il
faut que ce système-là tourne et aide à financer ceux qui produisent des
contenus.
Mme Dorion :
Donc, vous parlez plus spécifiquement de quelles compagnies?
M. Bougie
(Martin) : Bien, c'est, en gros, les GAFA de ce monde, là, oui.
Mme Dorion :
Vous en avez parlé, d'autres en ont parlé, l'information, surtout l'information
de proximité locale, est un bien
public. C'est une nécessité, dans une société en santé, d'en avoir puis qu'il
n'y ait pas de désert médiatique où on n'est plus capables de comprendre
notre société. Pouvez-vous nous dire... Vous avez parlé de l'économie sociale,
qui est un modèle de demain pour les médias.
La crise des médias, en ce moment, en tout cas, nous indique un peu... c'est
une des voies, peut-être, à suivre.
Pouvez-vous nous dire en quoi ce serait préférable, pour la qualité de
l'information, pour le bien public que ça représente, par rapport à
l'entreprise privée, dont la raison d'être est le profit?
M. Bougie
(Martin) : Bien, écoutez, comme on disait dans notre présentation, il
y a un écosystème en place. L'entreprise
privée a sa spécialité, nous avons la nôtre. Pourquoi une propriété... La
propriété collective, qu'est-ce que ça amène?
C'est la garantie de service. Une radio communautaire ne peut pas être achetée,
sa mission ne peut pas être changée. Donc, à l'heure où est-ce qu'on
voit les médias... L'entreprise privée doit maximiser le rendement. Je ne porte
pas de jugement, c'est sa nature, et
l'information, ça coûte cher, ça ne rapporte rien, et donc c'est normal qu'on
coupe là en premier. L'entreprise sans but lucratif, elle est sans but
lucratif, mais elle a un très grand but social.
Le Président (M.
Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.
M. Bougie
(Martin) : Donc, cette information-là, on continue à la faire et...
donc, la propriété collective et aussi la participation à la gestion
démocratique, qui nous permet de rester pertinents.
Le Président (M.
Ciccone) : Merci beaucoup. Je reconnais maintenant le député de
Rimouski pour 2 min 30 s.
M. LeBel :
Merci. Chez nous, à Rimouski, j'ai une bonne radio communautaire qui est très
présente un peu partout. Aux
Îles-de-la-Madeleine, la radio communautaire, c'est La vie des Îles, ce n'est
pas compliqué. Puis on est loin des caricatures de François Pérusse, là,
quand qu'on parle des radios communautaires, tu sais, on est rendu ailleurs.
Je
me pose quand même une question sur le placement média du gouvernement. Je ne
me trompe pas, là, c'est le... services
partagés du Québec qui choisit, il y a une direction ou il y a une décision qui
est prise d'acheter de la publicité un peu partout. Est-ce que vous pensez que le placement média, qui n'est déjà
pas beaucoup dans le milieu communautaire, dans les radios communautaires... est-ce que vous pensez qu'il est distribué
équitablement dans toutes les régions du Québec?
M. Bougie
(Martin) : Non. Premièrement, c'est une directive hein, on va se le
dire, ce n'est pas une politique, donc il n'y a personne qui est tenu de
le faire. Donc, ensuite... Là, j'ai perdu mon fil. Votre question était sur
la...
M. LeBel :
Bien, c'est parce que c'est un groupe de fonctionnaires à Québec qui décide de
placer les...
M. Bougie
(Martin) : Ah! l'équité. O.K. Il n'y a aucun objectif d'équité dans
l'énoncé, il n'y a aucun objectif d'équité,
aucun objectif de couverture territoriale, rien. C'est juste une volonté de
placer un pourcentage dans les médias communautaires.
M. LeBel :
Ça fait qu'on pourrait atteindre... Mettons que c'est 2 %, 3 %, là,
qu'on est rendus, les 2 %, 3 % pourraient être focussés à Québec puis à Montréal, puis ils
auraient atteint... ça serait du placement dans le milieu communautaire,
puis il pourrait n'y avoir rien dans les régions.
M. Bougie
(Martin) : Bien, ça pourrait être ça, oui. C'est pour ça que nous, on
prône... on rappelle que c'est une responsabilité du gouvernement, de s'assurer
qu'il va placer dans toutes les régions. Puis, à ce moment-là, ce placement-là
dans les médias communautaires vient aider à maximiser la portée de ces
messages-là.
M. LeBel :
Est-ce que vous...
M. Carrier
(François) : Si je peux me permettre également...
M. LeBel : Je n'ai pas beaucoup de temps, mais...
juste deux secondes. Est-ce qu'on pourrait penser que la décision de faire du placement média dans le milieu
communautaire en respectant l'enveloppe pourrait être prise par des
directions régionales d'une façon équitable?
M. Carrier (François) : Je pense que, oui, il y aurait moyen de le faire.
Nous, on veut juste... Entre autres, un exemple rapide, maladie de Lyme, c'est dans notre région où on peut avoir le
plus haut taux d'avoir cette maladie-là, et pourtant on n'a eu aucun placement publicitaire. Par contre,
je prends mon auto, j'arrive à Montréal, j'écoute une autre station de radio et là je l'entends à quelques reprises. Alors, il y a quelque chose là-dedans, là, il y a une analyse qui n'est pas faite. Et même chose aussi lors des élections municipales,
également, qui ont eu lieu en 2017, ça a été vraiment
assez pitoyable. De notre côté, on avait des postes pour travailler pour
les élections, mais c'était à Gatineau qu'on entendait, justement, cette publicité-là
et pas chez nous, et il y a 150 kilomètres entre les deux.
M. LeBel :
C'est l'effet de la centralisation des décisions à Québec. Souvent, les gens
qui prennent des décisions ne connaissent pas les réalités des régions
et ne connaissent pas les radios communautaires dans les régions. Merci.
Le Président (M. Ciccone) : Je suis prêt maintenant à reconnaître la députée
de Marie-Victorin pour deux minutes.
Mme Fournier :
Merci beaucoup à vous quatre. Moi, d'entrée de jeu, je vais répondre à l'appel
de M. Tétreault et témoigner de
la qualité qu'on retrouve dans les radios communautaires. Évidemment, je
connais bien Éric. Je souligne aussi la créativité incroyable dont ils
font preuve, parce que ce n'est vraiment pas facile, le marché de la région de
Montréal, évidemment, la compétition avec
les réseaux nationaux. Mais c'est tellement important, d'un point de vue
démocratique, parce que, sans la présence des médias communautaires comme les
vôtres, on n'aurait tout simplement pas accès à des nouvelles locales, à des
nouvelles régionales.
Puis
tantôt j'interpelais, donc, l'Association des médias écrits communautaires puis...
qui me faisaient part que c'était vraiment
au niveau du sentiment d'appartenance en milieu urbain qu'il fallait travailler
pour augmenter l'attractivité des médias
communautaires. Et, au 103,3, justement, à Longueuil, je sais, Éric, que vous
avez travaillé beaucoup sur un projet pour
faire, justement, mousser ce sentiment d'appartenance, puis je trouvais que ce
serait une bonne idée que tu en fasses part ici, aux membres de la
commission, comment ça a été généré.
M. Tétreault
(Éric) : ...c'est un projet identitaire. On s'est rendu compte que,
sur le territoire, l'identité manquait ou peut-être qu'il n'y avait pas de porteur de drapeau sur l'aspect
identitaire, et on a décidé, vu que la radio, c'est un haut-parleur qui rejoint l'ensemble de la population, qui
divertit puis qui, aussi... on est toujours en contact avec la population, on
s'est dit : On a un rôle à jouer
là-dedans de, nécessairement, s'assurer que les gens, bien, ont bien été
informés, mais aussi sont fiers d'habiter
un territoire. C'est plus facile de passer un message comme ça à la radio que
de le mettre sur papier, ça, c'est sûr et certain. Mais, nos médias, on
a un mandat aussi, bien, culturel, musical, tout l'aspect identitaire, on a un
mandat très important dans notre communauté.
Nous, à Longueuil, comme c'est un projet qui nous tient à coeur, c'est vraiment
de faire rayonner cette fierté-là d'habiter notre territoire.
Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup. Merci beaucoup. Merci beaucoup
pour votre contribution aux travaux de cette commission.
Je
vais suspendre les travaux quelques instants afin de permettre aux
représentants de l'Association des journaux régionaux du Québec... Il y
aura également interprétation simultanée, on va vous l'expliquer. Merci.
(Suspension de la séance à
15 h 30)
(Reprise à 15 h 33)
Le Président (M. Ciccone) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de l'Association des journaux régionaux du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de
10 minutes pour votre exposé. Je vous
invite donc à vous présenter ainsi que les personnes qui vous accompagnent et à
procéder à votre exposé. La parole est à vous.
Association des journaux
régionaux du Québec (AJRQ)
Mme Goneau (Sylvie) : Merci.
Sylvie Goneau, je suis la directrice générale de l'Association des journaux
régionaux du Québec, et Michael Sochaczevski, qui est un membre du conseil
d'administration.
Doris
Haddock a dit : «La démocratie n'est pas quelque chose que nous possédons
mais bien quelque chose que nous
exerçons.» Notre mémoire parle justement d'un outil démocratique et
l'inquiétude que les communautés anglophones du Québec affrontent avec la menace imminente de la fermeture des
journaux anglophones communautaires. À la une, nous pouvions lire : Fermeture imminente des
journaux de Capitales Médias, une triste réalité. Mais je voudrais vous
rappeler que le Stanstead Journal, un
journal qui a servi sa communauté anglophone depuis 1845, a publié son dernier
journal le 29 mai 2019. 16 journaux communautaires anglophones
ont fermé les portes depuis 1980. Dans la majorité de ces instances, ces communautés n'ont aucune autre source
d'information locale, et c'est cette même absence de nouvelles qui contribue
au sentiment d'isolement, de séparation et de désinformation dans les
communautés anglophones du Québec.
Le travail de
collaboration entre le gouvernement et le QCNA doit débuter aujourd'hui si nous
voulons maintenir la diffusion de nouvelles locales libres d'influence
partisane. Le QCNA voit d'un bon oeil cet exercice de consultation et garantit au gouvernement son entière
collaboration dans l'atteinte de nos objectifs respectifs, qui est
d'assurer la survie de nos journaux locaux,
leur intégrité et surtout leur indépendance journalistique. Cette survie à
laquelle nous faisons référence est
d'une importance vitale pour le développement, l'épanouissement et le bien-être
des communautés anglophones.
Nous pouvons
lire, dans l'étude effectuée par le
QCNA et financée par le Secrétariat des relations avec les Québécois d'expression anglaise, que les médias
communautaires contribuent à informer les gens sur la santé et les services
sociaux, aider à comprendre les enjeux
communautaires, en plus d'informer sur les décisions politiques locales.
40 % des gens qui ont accès à un
journal communautaire se disent informés, contrairement à 25 % des gens
qui n'y ont pas accès du tout. Nous pouvons
aussi lire qu'un grand nombre de citoyens n'ont tout simplement pas accès à des
médias communautaires et, dans ces situations, 82 % de ces citoyens
se tournent vers des médias nationaux, qui contiennent très peu et souvent
aucune information locale.
Nous avons
choisi trois enjeux qui, dans notre opinion, pourront faire une différence
indispensable dans la viabilité économique des journaux communautaires.
Je vais vous parler de la distinction entre le modèle d'affaires des journaux
communautaires francophones et anglophones.
Voici ce qui
est écrit sur le site Internet de la commission de la Culture et des Communications. La vision est : «Être le
catalyseur d'une culture unique, diversifiée, accessible, inclusive, laquelle
appelle aux partenariats et à la participation citoyenne.»
Mais le Québec n'a pas qu'une seule culture, et nous sommes un
peuple diversifié, et nous devons être inclusifs. Dans le programme de
financement Soutien aux médias communautaires écrits, il n'y a aucune
considération pour cette diversité.
En français, nous définissons «journaux
communautaires» automatiquement comme étant un OBNL issu de la communauté, du bénévolat. Par contre, dans la
culture anglophone, la National Newspaper Association définit «journaux communautaires» comme «tous journaux qui s'affichent
étant engagés à servir une communauté spécifique». Nous pouvons aussi
retrouver une définition similaire avec Wikipédia et dans les travaux
universitaires.
Plus de
65 journaux communautaires reçoivent un financement du ministère, et
seulement deux sont anglophones. Ces journaux reçoivent en plus le
fameux 4 %, que personne ne semble recevoir, de publicité du gouvernement.
Nous demandons à la commission de
reconnaître que nous atteignons tous les objectifs du programme, sauf le modèle
d'affaires. Les journaux communautaires anglophones du Québec servent leurs
communautés, produisent des nouvelles originales appuyées sur la réalité locale et encouragent la participation via son
implication dans les organismes communautaires, comme le QCGN, en plus de cultiver une attitude
d'excellence parmi ses membres. Nous rencontrons tous les critères, sauf
un : nous ne sommes pas un OBNL. Mais
d'utiliser ce seul élément pour refuser l'appui aux journaux communautaires est discriminatif en plus de
démontrer une malconnaissance du sujet, parce que seulement trois journaux sur
32, au Québec, remplissent ce critère.
• (15 h 40) •
M. Sochaczevski
(Michael) : Mr. President, «membres distingués», thank you for
hearing us and for understanding the importance of
local news.
I'm a board member of the QCNA
and I'm the publisher of The Suburban newspaper, Québec's largest
English weekly newspaper. On Wednesdays, we
publish over 100,000 copies, that compares to 45,000 copies by the Montreal
Gazette on Wednesday. We've been in business for 50 years. We've seen
and undergone much technological change. We have survived and we have thrived.
This
year, we will have a loss, and the cause is the Québec Government, not the
Internet, not technological change, not lack of customers, just the policies of the
Government. Good news, most of these policies were inherited. But, if
you do not change them now, you will preside over the demise of the community
newspaper industry in Québec.
Four
problems we can fix. Number one : Government Public Works not using
advertising for newspapers. You've heard this before. When the last election came,
Premier Legault did not go visit Google or Facebook, but he did come to visit The Suburban and many other local
newspapers. When the Government needs to broadcast a message, say
changing the election date, they use
full-page adds in the newspapers because they know people will see it and will
read it. They don't put it on the
Internet where somebody might see it, they don't just put it on their Web site
and hope somebody is going to go there, but, when it comes to publishing their obligations, or public tenders,
or job openings, or whatever else the Government must advertise, then, it is OK? No, it is not. And to
spend those millions of dollars that end up in foreign pockets instead of
keeping those dollars within the province, spending in local media, that's
foolish. And then you bail out the papers that fail
because you understand that local news is important.
Number
two : legislation allowing municipalities to not publish their bylaws. Two
years ago, legislation was introduced
exempting municipalities from publishing their bylaws in newspapers. This
creates a lessen-form democracy and
leads nowhere good. Some municipalities continue to publish their bylaws, but
they pick and choose which ones. Readers think they see everything. That's not a good situation. «Chers membres»
of the panel, when was the last time you checked out your municipality's Web site to see what laws
changed? Anybody? Because I didn't either. I don't know anyone who does.
Are we better off? So, Hampstead saves a few
thousand dollars from their multimillion-dollar budget, and its 8,000
households have no idea that it's illegal to
water their lawn on Wednesday — I'm making that up. Oh! you didn't
know? Too bad. It's on
our Web site. Too late, law is passed. It's not a good idea for anyone, but, if
you don't correct it fast, it will be too late. There will be no more
local media to publish in, and then you spend money bailing out the newspapers
that fail because you understand that local news is important.
Problem three : the recycle tax,
a noble idea gone wrong. In 2010, it was introduced to help cover the cost of the recycling box. A few
problems. Paper, which is easily recyclable, and valuable, and gets sold for
value, is treated the same as the
items that have no value in the box. The tax has increased more than 500% since
2010. Imagine your house. Taxes are, what,
$10,000 on your house? Imagine now they're $50,000. Can you afford that? We
can't afford the increase either. Over the last four years, our industry
has reduced the tonnage by 20%, only to be met with an increased cost per ton.
Imagine The Suburban is the only newspaper left. We have to pay the
whole $9 million? The law doesn't work, it's ridiculous. When La Presse stopped printing, everybody's cost per ton jumped. We have no input
on the cost, we have no ability to decrease our share, and 65% to 75% of the
recycling ends up in the garbage anyways.
Last one : help is too long and
too onerous. There are good government programs. In December 2017, I applied for a grant to help study and
convert our print paper into an Internet paper, which will happen over time,
but we cannot get ahead of our
readers' habits. We have moved, but we can't go faster than the readers. We
applied for the program, we paid... past phase I, we didn't have
phase II.
Le Président (M.
Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.
M. Sochaczevski (Michael) : It's been two and a half years. We
were the only one who could apply because the documents were so long and so complicated to fill
out. Out of 30 members of the QCNA, we were the only ones who managed to
hand in the documents and we're still waiting, two and a half years later.
Le Président (M. Ciccone) : Thank
you, sir. Thank you very much. Nous sommes maintenant rendus à la période d'échange avec la
partie gouvernementale pour une période de 15 minutes. Et je reconnais le député
de Sainte-Rose.
M. Skeete :
Merci beaucoup, M. le Président. Mme Goneau, thank you very much for being here. J'aurais
une question pour vous par rapport... Mme Goneau, en passant, par rapport... vous avez
touché sur un point important, notamment à l'intérieur de... puis, vu que vous avez touché rapidement, je veux
juste essayer de comprendre. Vous avez parlé de... les affiches de santé et services sociaux, les
indications d'éducation à l'intérieur des journaux. Pouvez-vous me parler un
peu plus de ça? C'est quoi, l'impact précis
dans la communauté d'expression anglaise par rapport à ces
notifications-là qu'on peut trouver dans les journaux locaux
communautaires?
Mme Goneau
(Sylvie) : Merci. Dans
l'étude qui a été faite par QCNA en collaboration avec le secrétariat — je
ne redirai pas le nom parce qu'il est vraiment long — on
est allés chercher, justement, des témoignages de gens, ce qu'un journal communautaire veut dire pour eux. Puis
certains des communautaires, je les ai pris en note ici, c'est : «Nous
voulons savoir ce qui se passe dans la
communauté, et notre journal est la source de cette information.» Quand on a un média local dans la communauté, on se sent informé, branché, en santé, énergisé,
impliqué. Les médias stimulent l'économie locale avec un partage d'information sur
les emplois, sur les investissements, au niveau de la santé et les services
sociaux, les campagnes de vaccin, les
services sociaux en cas de sinistre ou l'aide, les changements au niveau
des services sociaux. Ce sont
tous des éléments que les gens ont ramenés dans l'étude comme étant une source
d'information qui était vitale et primordiale à leur bien-être.
M. Skeete :
Merci beaucoup pour cette clarification-là. Vous avez aussi parlé d'une
différence d'écart entre les plans d'affaires,
ce qu'on reconnaît dans le réseau francophone pour financer, puis vous avez
parlé, notamment, d'une différence de définition du mot «communautaire».
Je vous demanderais, s'il vous plaît, d'ajouter un peu là-dessus.
Mme Goneau
(Sylvie) : Oui, bien, c'est typique pour nous. Dans la culture
francophone, quand on parle de communautaire,
que ça soit le centre communautaire, tout ça, ce qu'on vient à l'idée tout de
suite, c'est, tu sais, les soupers spaghetti,
le bénévolat, le tee-shirt, les activités pour les jeunes, puis tout ça. Mais,
dans la communauté anglophone, quand on
parle de «community» puis surtout «community news», «local community
newspapers», on fait référence à une nouvelle qui est locale, qui est issue du milieu, un journal qui est enraciné
dans sa communauté, qui dessert l'information à laquelle les gens ont besoin pour, justement, se sentir
branchés, pour que la communauté puisse évoluer, s'épanouir, se sentir
comme si elle était vraiment partie intégrante.
Puis il faut se
souvenir qu'au Québec c'est à peu près un petit peu plus de 1 million de
citoyens qui sont anglophones, c'est
13,7 parties de la population. Ils sont souvent très isolés, puis c'est à
l'intérieur du journal communautaire qu'on
se sent, justement, branchés puis qu'on se sent pleinement québécois,
impliqués. Donc, quand on regarde, quand on fait allusion seulement à un modèle d'affaires, on exclut toute la richesse
que le journal communautaire livre à sa communauté, son engagement et son dévouement de livrer une
nouvelle qui est juste, et puis qui est locale, puis qui est démocratique
en même temps. Ce n'est pas juste de
l'appuyer seulement sur un mot, il faut regarder au-delà de la formule. Puis,
je vous le garantis, il n'y a pas un
propriétaire d'un journal communautaire au Québec qui va faire retraite
millionnaire, je vous le dis.
M. Skeete :
Merci beaucoup. You were... sir, a couple of moments ago, about a fourth
problematic, you ran a little bit over time. I'd like you maybe to give us a little bit more
information about the help that's there, people, historic governments, this Government. The Government wants
to help, but there are problems accessing. Can you give me a little bit
more detail there?
M. Sochaczevski (Michael) : Absolutely. There was a great government program announced to help us convert to the Internet, not
today, to do a proper study, to do a study of our readers, to do a study of
what they want and how to convert it,
great program. The documents were so onerous to do. Of the 30 newspapers in the
QCNA, only one managed to fill it out. And
it had to be in French, OK, but it's just another hurdle and another burden.
And the level of detail and questions that were in there were enormous.
It took almost a full-time personal month to fill this out. Then we hand it in,
that's just phase I. Congratulations,
you qualified for phase I. Here is your prize : another document,
three times as big. Now, you fill out the documents for phase II.
We hand that in, we make the deadline and we haven't heard since.
M.
Skeete : How long ago was that, sir?
M. Sochaczevski (Michael) : We started the process in December
2017. We finalized phase II maybe six months ago.
Still waiting.
M. Skeete : OK. So, would it be fair to say that... Because,
in the past budget, we doubled the allocation for the secretariat. And one of the ways that we support
communities, the Government of Québec that is, is by helping build
capacity, and one of the ways that we build
capacity is by helping various community groups with giving them resources in
order to access government programs that exist. That's something that's useful?
M.
Sochaczevski (Michael) : That would be wonderful. Thank you.
M.
Skeete : OK. Wonderful?
M.
Sochaczevski (Michael) : Wonderful.
• (15 h 50) •
M. Skeete : OK. I would
like you also to speak a little bit more about the recycling tax. I had heard
about this before because
I've had some conversations with Barrell, not to name him, and Barrell was quite passionate about his plea about the recycling tax. Can you
give me a sense... Because I think Quebeckers in general would say that recycling is a good
thing and that creating any type of
incentive that removes the desire of companies to produce less paper... I think
Quebeckers would tell us : Well, you know, we like this, we like
this idea of putting a cost on waste. Can you help me understand the bone
that you have to pick with that particular aspect of...
M. Sochaczevski (Michael) : At the outside of the recycling tax,
we all thought it was a good idea. No problem, we'll pay our share, part of it was in dollars,
part of it was in advertising. We were happy to be good corporate citizens.
As we worked to reduce our tonnage, we were
penalized. Ah! you worked hard, you reduced your tonnage, guess what? Next
year's per-ton rate went up three times.
M.
Skeete : So, you're saying, at the same time
that you reduced your... the amount of waste...
M.
Sochaczevski (Michael) : We reduced the number
of tons...
M.
Skeete : ...the rate went up.
M. Sochaczevski (Michael) : ...the rate went up to cover the
difference. So, there is no incentive in the tax
because when La Presse stopped printing, I got... my bill went up three times.
M.
Skeete : So, La Presse leaves the paper market,
and then the amount doesn't change.
M.
Sochaczevski (Michael) : I'm the only guy
left.
M. Skeete : So, the waste went down, but the
amount doesn't change, and you guys got stock with the rest of the bag.
M.
Sochaczevski (Michael) : Exactly.
M.
Skeete : I see.
M. Sochaczevski (Michael) : The law, as it is, doesn't work. It
creates a disincentive. The incentive is now :
print under a certain threshold, then you
don't have to pay it all. A whole bunch of papers don't pay at all because
they're under a certain threshold. If you add up all those papers, it's
a significant amount.
M. Skeete : I see. Thank you very much.
Mme Goneau
(Sylvie) : I
would just like to add to that, newspapers are archived. Newspapers are
archived because of
their important democratic
informational content, right? They also represent the community's culture, the community's history. Everything that happens in a community is
written in the newspapers. You find the people's history, and trials, and
tribulations, and successes. They're all reported in newspapers, which is why
they are so important, and they're archived, right?
M. Skeete : So, if I
understand your point correctly, you're trying to say, then, that here we are
taxing this waste, and you're saying : Well,
that's not waste, it's actually similar to a book.
Mme
Goneau (Sylvie) : Yes.
M.
Skeete : It's not recycling a glass bottle, it's similar to a book,
which...
Mme
Goneau (Sylvie) : Exactly.
M.
Skeete : Do we tax a book?
Mme Goneau (Sylvie) : You
don't tax a book, right? And I understand taxing a can of empty beans, but I don't understand taxing and comparing a newspaper to a can of empty
beans. I really don't get that. And that's disrespectful towards our communication, and our transparency,
and the way this civilization communicates with its population and how the communities communicate and bind amongst each
other. This is the tool that makes a community blossom and thrive, and
we are taxing it like an empty can of soda. Something wrong with that.
M.
Skeete : Thank you for clarifying. M. le Président, j'ai terminé.
Le Président (M.
Ciccone) : Merci. Maintenant, la parole est au député de Saint-Jean.
M. Lemieux : Je vous
ai bien entendue, Mme Goneau, but your president, your chairman was also
saying that, when it
started, it was a very good idea, it just went wrong somewhere, so much so that...
isn't that true that last year, under our Government, and the year before that, most of RecycleMédias extra funds
needed for that upgrade you're were talking about, and the fact that it was multiplied by two or by
three because La Presse stopped printing, it was pardoned,
sort of thing. There was a bigger credit last year and the year before
that, wasn't there?
M.
Sochaczevski (Michael) : ...last year.
M. Lemieux :
Yes. OK. Parlons de «community papers», madame.
Mme Goneau
(Sylvie) : Excusez...
M. Lemieux :
Oui, Mme Goneau.
Mme Goneau
(Sylvie) : ...mais c'était quand même très minime, là, sur la facture
totale, là.
M. Lemieux :
Oui, oui, je n'ai pas dit que...
Mme Goneau
(Sylvie) : Oui, oui. Tu sais, parce qu'il ne faut pas dire... tu sais,
parce qu'on a... Puis je comprends la volonté, puis moi, je suis très
reconnaissante de ce qui a été donné, tu sais, mais...
M. Lemieux :
C'est juste ça que je voulais entendre. C'est correct.
Mme Goneau
(Sylvie) : Oui, bien, c'est ça, mais il ne faut pas se dire qu'on a
résout le problème.
M. Lemieux :
Non, non, non, mais, cette année, il y a eu un énorme effort de fait dans le
budget.
Je
veux parler des «community newspapers». Je comprends très bien la sémantique de
l'affaire. On pourrait même faire de l'étymologie puis on pourrait faire
un petit peu aussi de prospective à l'intérieur des cultures particulières, des
communautés. On peut s'en aller voir la
Gaspésie et l'importance
des «community newspapers» en Gaspésie, même si, dans certains cas, ils sont privés. Et, dans votre
rapport, le tableau que vous nous donnez est très éloquent. Quand on
compare, entre autres, les journaux francophones hors Québec
et les journaux anglophones au Québec,
c'est presque inversement proportionnel, ils sont pas mal tous OBNL francophones puis ils sont pas mal tous entreprises,
bon. Mais, moi, ce que je veux savoir, c'est, à part le 4 % du communautaire, là, dont on a parlé avec les médias
écrits communautaires, avec les radios communautaires, avec les télés communautaires, le fameux 4 %,
à part ce 4 % là, qu'est-ce que ça va changer pour vous si on considère
cette façon de voir le «community newspaper»
comme si c'était un journal communautaire? J'imagine que vous demandez
ça pour avoir ce statut-là.
Mme Goneau (Sylvie) :
Bien, tout à fait, parce que, un, on ne peut pas obtenir le 4 % à moins
d'être reconnu puis on ne peut pas
être reconnu dans le programme si on n'est pas un OBNL, donc on vient
systématiquement d'éliminer tous, sauf
trois, journaux communautaires anglophones, au Québec, de recevoir tout
financement du Québec, sauf la transformation numérique. Donc, nos homologues francophones reçoivent du financement au
fonctionnement, un appui au fonctionnement, puis, nous, de notre côté, tous les journaux ne peuvent pas y accéder.
Puis là on ajoute à ça le 4 %, parce que, si tu es reconnu à l'intérieur de ce programme-là, bien là, tu es
incorporé dans le fameux 4 % que... j'aime l'idée du 6 %, là, mais,
c'est ça, tu es finalement incorporé à l'intérieur de ça.
M. Lemieux :
Yes, perhaps we can chat on that a little bit.
M. Sochaczevski (Michael) : If I can just add to that, if you add
our proper share, not a lot but just our proper share, we have 1 million Anglophones in the Province of
Québec, if we get our proper share of advertising, and you take off the recycling burden, and you
put back the municipal bylaws having to publish, we'll take care of ourselves.
We won't need a handout; you won't need a bailout to Groupe Capitales or
anybody else.
M. Lemieux : Yes.
We'll keep talking about that for 1 min 30 s, because it's a
level-playing field in that respect, whatever you just mentioned, it's the same thing
for most papers in Québec in terms of the RecycleMédias tax and in terms
of the other automatic gains they had from the cities that they don't get
anymore after Bill 122, and all of that. It's a level-playing field. My question, my point was, if you're the
biggest newspaper, if The Suburban is so big and so businesswise, why is
it so important to get the community recognition? Because all you're going to
get there is 4%.
M.
Sochaczevski (Michael) : ...
Mme
Goneau (Sylvie) : Si... mais juste... pardon.
M. Lemieux :
He was just telling me something important there.
M.
Sochaczevski (Michael) : The 4% is 4% of your spending budget. Your
spending budget is enormous. The dollars
that trickle down to my fraction of that 4% is as significant for our
enterprise. The trickle-down effect of the dollars kept in this province
affects the newspapers...
M. Lemieux : Sorry, I
just have 20 more seconds. I thought that, businesswise, it was more a good
deal for you to get the advertising dollars then the
4%, or eventually 6%, that we were talking about earlier.
M.
Sochaczevski (Michael) : I'm talking about the
advertising dollars, the advertising dollars coming out of...
M. Lemieux : But that's what the community...
Le Président (M.
Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.
Mme Goneau
(Sylvie) : En fait, dans nos
recommandations au gouvernement, c'est un... c'est de pouvoir modifier la définition, justement, pour qu'on puisse y
avoir accès, au 4 %, mais aussi c'est d'incorporer un 13 % de
publicité dirigée aux médias anglophones, parce que ce 13 % là
représente la population québécoise.
Le Président (M.
Ciccone) : Merci, Mme Goneau. Merci beaucoup.
Avant
de poursuivre, est-ce que je peux avoir le consentement pour redistribuer le
temps de Mme la députée de Taschereau,
qui a quitté, avec les partis d'opposition?
Des voix :
...
Le Président (M.
Ciccone) : Mais c'est l'opposition...
Des voix :
...
Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup. Alors, je donne la parole à la
députée de Westmount—Saint-Louis
pour un temps de 11 min 30 s.
• (16 heures) •
Mme Maccarone :
Merci beaucoup, M. le Président. Merci beaucoup pour votre mémoire. J'ose espérer que
d'autres membres de la communauté
vont déposer également leurs réflexions pour que les membres de cette commission puissent en prendre connaissance,
parce que ce que vous avez partagé avec nous, c'est très important. Ça fait que
merci beaucoup.
Mme Goneau,
je ne sais pas si vous voulez compléter qu'est-ce que vous avez commencé à
dire, ça fait qu'étant donné qu'on a deux minutes de surplus je vous
cède la parole.
Mme Goneau (Sylvie) : Oui,
justement, on représente tous les journaux communautaires du Québec, donc, tu sais, les membres, donc, c'est tout près de, tu
sais, une trentaine de journaux, là, anglophones. Et puis le 4 %, pour
nous, c'est important,
mais ajoutez à ça... on représente une communauté qui est vraiment isolée. Même
à l'intérieur d'un centre urbain, une
communauté, tu sais, d'expression anglaise se sent isolée. Donc, pour nous,
c'est 13,7 % de la population que les journaux desservent. Donc, on demanderait au gouvernement, dans son
budget de publicité et puis d'annonces publiques... c'est de s'assurer
que ce pourcentage-là retourne, justement, vers les médias anglophones pour
s'assurer que les communautés à travers le
Québec sont bien informées, et bien desservies, puis au courant de ce que vous
faites, parce que vous faites des bonnes choses, il faut s'en vanter des
fois, et vantez-vous à ce que le monde le lit.
Mme Maccarone :
Merci. J'étais supercontente de voir le tableau que vous avez élaboré, avec le
partenariat que vous avez avec l'APF, l'Association de la presse
francophone. Entre autres, étant donné... dans mon comté de Westmount—Saint-Louis, je fais la lecture du Westmount
Independent, Canadian Jewish News, The Suburban, The
Senior Times, alors j'ai trouvé ça fort intéressant de voir le partenariat
puis la collaboration que vous avez déjà en place.
J'aimerais
vous entendre un peu par rapport à, exemple, l'impact sur The Sherbrooke
Record, par exemple, parce qu'on
sait que la distribution, ça se fait par l'entremise de La Tribune.
What can... just to show
how it's not just an anglophone community issue, it has a direct impact because they're tied together,
right? So, the anglophone and the francophone medias are really... it's a marriage, in many cases, in
many of the communities. Can you explain to us a little bit about the
impact on the francophone media and how that will have a contributing impact on
the anglophone media?
Mme Goneau (Sylvie) : Oui. En fait, dans certaines communautés...
certaines communautés, je pourrais dire, sont très choyées parce qu'on retrouve plusieurs
formes de médias, on va avoir des médias communautaires francophones et des médias communautaires anglophones. Par contre, dans certaines autres
communautés, on retrouve un ou l'autre, et puis plusieurs endroits à
travers le Québec n'ont plus aucune source de média communautaire, elles sont
disparues presque à jamais.
Dans les
communautés où on retrouve un média communautaire, souvent, maintenant, on
trouve une collaboration où il y a
une page qui est insérée à l'intérieur du journal communautaire, puis cette
page-là va représenter la communauté, si
c'est un journal anglophone, soit la communauté francophone ou, à l'inverse, ça
va être une page anglophone. Mais ce n'est
pas suffisant pour nourrir la communauté, puis vraiment bien informer, puis
garder les gens à l'affût de qu'est-ce qui se passe en ce moment.
Je voudrais
dire, la menace de fermeture n'affecte pas nécessairement juste les journaux
anglophones, mais on fait face à ça
quotidiennement, nous. Et puis, comme je disais, souvent, dans les communautés
où c'est un journal anglophone, quand il disparaît, il ne reste aucune
autre forme de média communautaire anglophone. Il n'en reste... il n'y a juste
plus rien.
M. Sochaczevski
(Michael) : Nobody wants a handout, not a French paper, not an English
paper. All we want is an environment where the laws
are not making it more restrictive. It's a tough, competitive environment
today, we understand that. We're
rising to the challenges, but the laws in place by the Government cannot take
away from what we had before, at a time when we're dealing with all
these other changes.
Mme
Maccarone : Could you tell the members of this committee a little bit
more about the impact of finding talent, right, so journalists, for the anglophone media
networks or any other minority language networks? I know we're tied
right now, we're speaking with regards to
the anglophone community, but it's not the only minority language community
that will have a significant impact with the
decline of local print newspapers. I know, for example, The Suburban,
the distribution is completely
changed in Laval, for example, not at all the same type of news, not the same
paper. In fact, it's not news, it's entertainment,
right, it's completely evolved. So, what about having access to journalists and
the impact that that's had on you?
M. Sochaczevski
(Michael) : Go ahead.
Mme Goneau (Sylvie) : O.K. On a justement le... Patrimoine Canada a
financé un programme de stagiaires pour des journalistes ou d'autres
services professionnels que les journaux avaient de besoin, puis, en région
éloignée puis même certaines régions
urbaines, les journaux qui avaient postulé puis qui voulaient avoir, justement,
un stagiaire, un journaliste, tout
ça, se sont désistés du programme parce
qu'ils étaient incapables de trouver
un journaliste qui était prêt à se déplacer en région. Souvent, la subvention n'est pas adaptée aux conditions de vie,
au coût de vie. Les jeunes ne veulent pas nécessairement aller
s'installer aux Îles-de-la-Madeleine pour travailler à la radio communautaire, ou à Blanc-Sablon, ou, tu sais, en
Gaspé pour travailler dans le journal
communautaire. Et puis ces gens-là, ils se retrouvent avec zéro ressource puis
ont déjà de la difficulté à fournir de l'information journalistique. Souvent, ils prennent des journalistes à la pige.
M.
Sochaczevski (Michael) : Also supply and demand : smaller
population, smaller pool of students to pool from,
higher prices you have to pay.
Mme Maccarone : And
less advertising.
M.
Sochaczevski (Michael) : And less... Well, advertising is there, we
just have to provide the value for the customers.
We can, we will. News is important. You understand, we understand, news is
important. The format is the question. The
format today is still a hard print copy. We have 225,000 readers; I know
20,000 of my readers are reading online. But, if I go tell my advertisers that I have 20,000 readers online
instead of the 225,000 readers that they want to advertise to,
they're not paying.
So, I will get there, we will move, but today we're still in print. And, in
Laval, the Chomedey News is still in print, and all the community newspapers in the Pontiac, it's the only
source of local news available. The Economic Sense is
still a print newspaper today.
Mme Maccarone : Still in
print, but the distribution has significantly changed, hasn't it? I mean, we
know now, for
example, it's not coming in the Publi-Sac anymore because that's too expensive.
And so, we're having to be more creative in how we're getting that news out to the community, which is of concern
specifically for our seniors, as we've mentioned here many times, over and over again, so that they're not isolated, so
that they do have access to that local community news.
As a former advertiser myself, I've
bought advertising, I used to sell it, often, by saying — I
don't know if anybody out
there is listening — that if you're trying to date
somebody, and you're doing it in the dark, and you're winking, the only person that knows that you're doing it is you. So,
advertising is really crucial, important to get the word out there.
You mentioned earlier, when you were
talking about the conversion to Web and the program, and I understand the difficulties behind the
program. All of that work and effort that went into working toward that, how
much money did that represent for you in terms of funding that you would
have received toward a conversion program?
M.
Sochaczevski (Michael) : How much money did we spend or how much
money...
Mme Maccarone : How much
money did you spend and how much were you hoping to receive as part of a subsidy?
M. Sochaczevski (Michael) :
We probably spent $10,000 to $15,000 in time and organization. We had to create a study and send it out
to be eligible. The first phase paid us back probably about $17,000, so we were
even for the first phase. But now we
were able to apply for phase II. If we are successful in phase II, it
could represent about $200,000 to help us in a year-long conversion.
• (16 h 10) •
Mme Goneau
(Sylvie) : Puis le problème avec ce programme-là, spécifiquement ici,
dans tous les membres que le QCNA a,
il y a un journal seulement qui a eu la capacité puis les ressources de remplir
au complet le formulaire puis de passer à travers du processus. Quand QCNA a approché le programme pour
dire : Nous, on voudrait avoir le financement qui va représenter l'ensemble des membres, puis QCNA va
aider avec cette transformation-là, puis nous, on va faire l'étude, puis
pour tous les différents journaux, puis
aider avec la mise en place, le gouvernement... le programme nous a
répondu : Bien, on vous donne le
maximum qu'un journal peut recevoir. Bien là, j'ai dit : Bien là, ce n'est
pas à l'avantage... Si tu me donnes le même
montant que chacun... un montant que chacun peut aller chercher, j'ai dit, moi
ce n'est pas viable, puis c'est une perte pour les journaux. Ils sont aussi bien de le faire eux-mêmes, parce
qu'il y a trop d'argent sur la table. Mais il n'y avait pas d'ouverture d'esprit pour qu'un organisme qui
représente les journaux communautaires puisse, elle, faire les démarches
pour aller chercher ces subventions-là pour
que les journaux puissent faire une transition numérique. Donc, on est encore
dans une impasse, même quand les journaux
veulent avancer. Puis, comme organisme, nous, on tente de faciliter cette
transition-là, on a une fin de non-recevoir du programme qui est déjà
mis en place par le gouvernement.
Mme Maccarone : Vous avez mentionné auparavant... accès aux fonds
de Patrimoine Canada . Est-ce que votre organisation a aussi accès à
des fonds de Patrimoine? Et les plus petits organismes qui sont des OBNL, est-ce qu'eux, ils ont accès à, mettons, des fonds d'ententes
Canada-Québec? Et, si oui, comment est-ce qu'ils peuvent faire une application
pour recevoir ces fonds-là?
Mme Goneau
(Sylvie) : Mon Dieu!
Le Président (M.
Ciccone) : En 30 secondes, s'il vous plaît, 30 secondes.
Mme
Goneau (Sylvie) : QCNA reçoit son financement... une partie de son
financement opérationnel par PCH, et puis
les membres, ses membres peuvent postuler sur la majorité des programmes
gouvernementaux canadiens, parce que la définition n'est pas limitée sur un plan d'affaires. Donc, ils
desservent la communauté pour le gouvernement du Canada, ils remplissent
un service des langues officielles...
Le Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup. Merci beaucoup. Je reconnais
maintenant le député de Rimouski pour un temps de
3 min 15 s.
M. LeBel :
Bien, j'en ai gagné un peu. Merci. Bien, bonjour. J'aimerais... Il y a une
semaine ou deux, là, c'était la crise
de Capitales Médias, les grands quotidiens, et tout ça. Et là, bien, les gens
qui nous écoutent, ils nous entendent parler des journaux communautaires, ils peuvent dire, que : C'était quoi,
là, qu'est-ce qui s'est passé?, comme si on ne parlait pas de la même chose. Mais on parle des mêmes enjeux,
du droit des citoyens à avoir de l'information, et je suis content qu'on
prenne le temps d'en parler.
Ce
que vous dites par rapport à votre communauté, c'est la même chose qu'on a dans
les régions. C'est important, d'avoir
des médias communautaires qui parlent de notre monde, qui parlent de chez nous,
qui parlent de nos affaires, de nos...
Puis ce serait même important que, des fois, ce qui se passe dans votre
communauté, on entende, nous autres aussi, chez nous, de ce qui se passe
chez vous. Des fois, il faut partager ces informations-là, je trouve ça
important.
Tantôt,
vous avez parlé de la différence entre un journal communautaire, là, puis votre
définition. Il faut trouver une solution à ça. Mais en même temps ça
voudrait dire, si je prends votre définition, mon hebdo local devient un
journal communautaire?
Mme Goneau
(Sylvie) : ...dans le programme
comme tel, il y a une limitation sur le nombre de publications. Tu ne
peux pas avoir un quotidien, ça ne cadrera pas.
M. LeBel : C'est un hebdo?
Mme Goneau (Sylvie) : Il y a un
maximum de fois que le journal peut être publié pour rentrer dans la catégorie
«journal communautaire».
M. LeBel : O.K. En tout
cas, il faudra regarder ça comme il
faut, parce que c'est sûr que, moi, chez nous, l'avantage, là, le journal... l'hebdo local de Rimouski,
bien, c'est sûr que c'est très communautaire, là, ils parlent des gens de chez
nous, mais ce n'est pas un journal
communautaire à notre façon. Il faudrait... en tout cas, il faut... Mais je suis sûr qu'on est capables de
faire ça, me semble, on est du monde intelligent, on devrait être capables d'y
arriver.
Mme Goneau
(Sylvie) : Moi, je pense que oui. On est allés sur la lune,
apparemment, à un moment donné. Ça, c'est vraiment plus simple. Vous et
moi, un café.
M. LeBel :
On devrait être corrects. Sur le recyclage, vous avez allumé beaucoup de
lumières, là. Il faut regarder comme il faut qu'est-ce qui s'est passé.
Votre explication tantôt, là, je pense que ça nous alerte, là, si la loi ne
donne pas les résultats.
Dans votre
mémoire, vous ne parlez nullement du fédéral. Presque tous les autres mémoires
en ont parlé, sur le fait que le
fédéral devrait imposer les Google, Amazon, les affaires de ce monde pour aller
chercher un peu d'argent pour aider, entre
autres, le financement des médias communautaires, protéger les journalistes,
les droits d'auteur des journalistes. Et il y a une grande... ça semble faire consensus, là, qu'il faudra faire de
la pression sur le gouvernement fédéral pour participer à résoudre le problème de la crise des médias au
Québec. Est-ce que vous êtes de cette mobilisation-là? Est-ce que vous
êtes de cette réflexion-là aussi?
Le Président (M. Ciccone) : In 30
seconds.
M. Sochaczevski (Michael) : The federal Government gave a grant
for writers this year, a tax credit for writers this year. So, we called the federal... because our
taxes are due now, we called the federal Government, they said : MRQ
is processing this. We called MRQ, he
says : I don't know. What do we do? There's a tax credit available, the
federal Government says MRQ is taking
care of it, MRQ doesn't know what's... Please, coordinate so that the programs
out there, we can take access to, please.
Le
Président (M. Ciccone) : Thank you. Thank you. Merci.
Merci beaucoup. Je suis maintenant prêt à reconnaître la députée de
Marie-Victorin.
M. LeBel : ...petit dernier
mot.
Le Président (M. Ciccone) : Bien, si
la députée de Marie-Victorin veut laisser répondre.
M. LeBel : Ah! bien non,
garde-les, là.
Le Président (M. Ciccone) : Pour
2 min 15 s.
Mme Fournier : Merci
beaucoup pour votre présentation. Mme Goneau, vous avez, en fait, commencé
votre exposé en nous expliquant la
différence, dans la culture anglophone versus la culture francophone, bon, de
la définition de «médias
communautaires», si on veut, mais vous avez omis de parler... Quand même,
il y a une différence, justement, entre la
culture francophone et la culture anglophone, dans la philanthropie. Par exemple, on sait que, dans la culture anglo-saxonne, c'est une culture beaucoup
plus ancrée.
Donc, dans ce
contexte-là, ma première question serait : Pourquoi, puisque,
dans le milieu anglophone, il y a
cette culture-là qui est plus développée, le modèle d'affaires d'économie
sociale, d'OBNL ne serait-il pas un modèle intéressant pour vos médias anglophones? Et ma deuxième
question, à laquelle vous pourrez répondre en rafale, concerne peut-être
plus spécifiquement... Je sais qu'il y a un
média, en Estrie, un média anglophone, je crois, qui fonctionne par
abonnements, c'est un média local. Je me demandais si c'était une
pratique répandue dans le milieu anglophone. Si oui, pourquoi? Si non, est-ce
que ça pourrait être une voie de solution?
Mme Goneau
(Sylvie) : Il y en a. Juste pour... je vais commencer avec votre
dernière question. Il y en a, des journaux qui choisissent l'abonnement pour limiter le coût de distribution,
justement, parce que les journaux tentent de limiter les coûts le plus possible pour pouvoir avoir une entreprise
qui est viable, économiquement viable, puis pouvoir continuer à livrer la nouvelle, donc ils
n'ont pas le choix. Puis il y a certains endroits qu'ils couvrent tellement des
grands territoires que d'avoir une
livraison à chaque porte n'aurait pas de sens non plus, nécessairement. Ça fait
qu'il y a différents enjeux qui font... qui parlent de différentes
façons de livraison.
Puis,
pour ce qui est du modèle d'affaires, bien, écoutez, il y en a certains... Il y
a un nouveau... Le Gleaneravait fermé, puis là il est réouvert, il est seulement sur Web, il a très peu
de parutions mais il en a quand même. C'est un OBNL maintenant, donc,
oui, ça arrive. Le Spec, à Gaspé, c'est un OBNL. Mais, tu sais, le Stanstead,
qui a fermé, il était...
Le Président (M.
Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.
Mme Goneau
(Sylvie) : ...il a commencé en 1845. Je veux dire, il y en a beaucoup,
de ces journaux-là. Ils n'ont pas été
ouverts hier, là, tu sais, ça fait que tu ne dis pas à quelqu'un qui a une
entreprise : Ferme ton entreprise pour la convertir en OBNL pour
que tu puisses aller chercher des subventions.
Le Président (M.
Ciccone) : Merci. Merci beaucoup pour votre contribution. Thank you
very much, sir, for your contribution.
Je suspends les travaux
quelques instants pour permettre à Hebdos Québec de prendre place. Merci
beaucoup.
(Suspension de la séance à
16 h 17)
(Reprise à 16 h 20)
Le Président (M. Ciccone) : Je souhaite la bienvenue aux représentants d'Hebdos Québec. Je vous rappelle que vous disposez de
10 minutes pour votre exposé. Je vous invite donc à vous présenter ainsi
que la personne qui vous accompagne, ou vice
versa, ou les personnes qui vous accompagnent et à procéder à votre exposé. La
parole est maintenant à vous.
Hebdos Québec inc.
M. Chartier
(Benoit) : Alors, merci, M. Ciccone, de l'accueil cet après-midi
à l'Assemblée nationale, on est très heureux.
Alors, je me présente, je suis Benoit Chartier, je suis président d'Hebdos
Québec. Hebdos Québec est une association d'hebdomadaires à la grandeur du Québec. Je reviendrai un petit peu plus
tard vous expliquer qu'est-ce qu'Hebdos Québec. Personnellement, je suis président éditeur d'un groupe de presse qui
édite cinq journaux. Entre autres, parmi les cinq journaux que nous éditons, nous éditons Le Courrier de
Saint-Hyacinthe, qui est le doyen de la presse française en Amérique
du Nord, fondé en 1853. Nous sommes à notre
169e année d'existence, et, je vous le dis tout de suite, on est ici
aujourd'hui, on va aller à 200 ans, c'est notre but.
Alors,
ceci dit, à ma gauche, j'ai le président de notre comité mémoire d'Hebdos
Québec, notre ami Renel Bouchard, qui
a présidé le comité pour mettre à jour notre mémoire qu'on vous a déposé au
mois de juin. M. Bouchard est aussi éditeur du journal Le Canada Français et propriétaire de plusieurs autres
journaux à travers la province de Québec. Et, à ma droite, j'ai Mme Josée Pilotte, éditrice fondatrice
du journal l'Accès Laurentides, qui est un journal publié à
Saint-Sauveur, et qui est une entrepreneuse très connue dans la région
des Laurentides.
Alors,
je vais vous brosser un peu le portrait d'Hebdos Québec. Alors là, on n'est pas
du tout dans le communautaire ici, là,
cet après-midi. Dans le cas d'Hebdos Québec, Hebdos Québec va parler au nom de
l'ensemble de la presse hebdomadaire régionale du Québec. Alors, on
parle de 120 hebdomadaires, 3,4 millions d'exemplaires imprimés par semaine, distribués à chacune de vos portes, vous,
les députés, dans vos comtés, et à toutes les autres portes des
résidents du Québec, près de cinq millions
de lecteurs, 150 millions de chiffre d'affaires, 900 emplois directs,
près de 1 200 à 1 300 emplois indirects, une couverture totale du Québec. Comme je l'ai mentionné,
chacun de vous reçoit un journal de votre comté. Nous avons une salle de rédaction qui vous suit, chacun
de vous. Vous devez connaître, probablement, chaque journaliste de votre
comté qui couvre votre territoire. Nous connaissons aussi vos attachés de
politique très bien. Donc, on est vraiment intimement liés.
Aussi,
les 120 journaux qui sont publiés au Québec depuis de nombreuses années
sont tous publiés par des entrepreneurs.
C'est ça qui est important. Alors, ici, chaque éditeur, comme on peut
mentionner, est vraiment à l'affût de tout
qu'est-ce qui se passe à son journal et il est vraiment... excusez un peu
l'expression, là, mais il est vraiment au bat, présentement, avec la publication de ses journaux. Alors, c'est vraiment
une association qui est à but lucratif, qui existe depuis de nombreuses
années, et qui touche à l'ensemble des Québécois, et qui joue un rôle majeur
dans la démocratie. C'est qu'est-ce qui est important à mentionner.
Je
vais céder la parole à mon collègue Renel Bouchard, parce qu'on a quand même
une liste d'épicerie pour vous, parce
que je vous avoue que les temps sont durs depuis trois ans. Bon, on a eu
l'histoire de Capitales Médias la semaine passée, c'était peut-être un
peu annoncé depuis deux ans, mais, même dans la presse régionale hebdomadaire,
les temps sont extrêmement difficiles. On parle d'une baisse majeure des
revenus pour l'ensemble des journaux depuis de nombreuses années. On ne reviendra pas, là, sur toutes les
causes de ça, je pense qu'on les sait toutes, là. On en parle depuis deux
semaines, là, ad vitam paparmane, comme on
peut dire. Et par contre nous, on s'est penchés... puis on a plusieurs
solutions à vous proposer aujourd'hui. Et alors à toi, Renel.
M. Bouchard
(Renel) : Merci. Merci de nous recevoir et de nous écouter. Alors, je
voudrais attirer votre attention d'abord
sur le fait que la presse hebdomadaire mais la presse écrite en général, dans
le moment, ne traverse pas seulement une crise, on traverse un changement social qui va nous mener ailleurs, qui
va changer notre société et qui va changer surtout notre industrie,
notre façon de voir.
Alors, on
pense qu'on est rendus à une époque où il va falloir une forme d'aide
permanente pour la fabrication des produits
journalistiques, pour soutenir le journalisme professionnel et, forcément, nos
salles de rédaction, que ce soient les salles de rédaction des hebdos
comme les nôtres ou d'autres salles de rédaction dans la radio ou chez les
quotidiens.
Alors, les changements permanents qu'on
souhaite. Évidemment, le gouvernement... vous l'entendez depuis deux jours, vous allez l'entendre pour le reste de
la semaine, là, il faut que le gouvernement aille chercher de l'argent chez ceux qui profitent de l'information. Et, cet argent-là, bien, on pense qu'il y en a une partie qui, de façon
permanente, doit revenir pour soutenir les salles de rédaction. Alors,
on pense que la première mesure, c'est évidemment de contribuer à 25 % de
la masse salariale des équipes qui sont nécessaires pour produire l'information
dans nos journaux.
Vous en avez
entendu parler assez largement tantôt, mais évidemment le problème du... la
taxe sur le recyclage est très
importante dans notre industrie. On remercie les deux derniers gouvernements,
qui ont fait un effort important dans les deux derniers budgets pour nous soulager un peu, mais je voudrais juste
vous faire remarquer qu'une taxe imposée comme celle-là aux journaux, pour le recyclage du papier, c'est quelque chose
qui est unique dans le monde, au niveau où on parle. Alors, on ne pense pas que les journaux au Québec devraient
avoir à payer une taxe comme ça. On pense qu'on devrait être considérés comme le livre, dans le fond, puis
qu'on aura... c'est mettre un poids supplémentaire sur les journaux à une
époque où on ne peut pas se permettre, où on
n'a pas des marges de manoeuvre pour payer ces montants-là, qui sont quand
même assez importants. Heureusement, le
gouvernement nous a aidés dans le dernier budget, mais il n'y a rien de fait
pour le prochain. Pour la prochaine
année, dans l'année 2019 qu'on budgète, là, on n'a rien, on n'a rien de
prévu. Alors, je pense que c'est un problème important sur lequel vous
devriez vous pencher pour nous aider.
Il est clair que la crise des avis publics a
frappé les hebdos plus que d'autres, parce qu'on couvre les 1 300 municipalités du Québec. Puis il
ne faut pas se le cacher, là, quand le gouvernement a permis que les avis
publics sortent des journaux, ça
s'est fait à vitesse grand V. Il nous en reste, il y a des municipalités qui
ont continué de vouloir contribuer, dans
le fond, à l'information locale et régionale de leur coin de pays, mais la
majorité, ils sont sortis. Puis il ne faut pas se conter d'histoire, là, un avis public, dans le
fond, d'un site Web d'une grande ville, là, ça n'a pas d'impact, puis le
problème, c'est que souvent ça fait l'affaire de certains élus, même,
malheureusement. Alors, la population, elle, elle mérite d'être informée, de savoir ce qui se passe, et on pense
que les avis publics doivent revenir dans les journaux. Ils peuvent
revenir sous forme numérique ou sous forme papier mais ils doivent revenir dans
des organes d'information régionale.
Et il y a même des municipalités qui ont
commencé à se faire des bulletins, à faire leurs propres bulletins d'information, qu'ils vont sortir aux deux
semaines, par exemple, puis ils vont vendre... ils ont commencé à vendre de
la publicité là-dedans, comme s'ils
voulaient devenir eux autres même des journaux. Alors, il y a un besoin
d'information mais il y a un besoin
d'information qui va être fait avec du recul puis par des professionnels. On ne
peut pas laisser les municipalités s'en
aller dans ce secteur-là parce que, finalement, si on laisse aller les choses
comme elles vont là, dans une dizaine d'années, on va avoir le même... non seulement des déserts journalistiques dans
certaines régions, comme vous l'avez déjà entendu, mais en plus la démocratie municipale va
ressembler à la démocratie scolaire qu'on a aujourd'hui, donc un désintérêt
de la population qui est généralisé. Alors,
ça serait des conséquences assez graves, parce que la démocratie municipale,
c'est un des piliers de notre organisation sociale, au Québec.
Je vais vous
parler aussi de l'apport de la publicité gouvernementale. Malheureusement, la
publicité gouvernementale, elle passe par un secrétariat qui a trois
agences d'accréditées au gouvernement pour gérer ces campagnes-là, et ces trois agences-là, là, la dernière chose qu'ils
veulent avoir, c'est de ce casser la tête avec des hebdos communautaires
puis, en plus, encore moins avec des hebdos
régionaux. Puis, avec une centaine de journaux, pour faire des campagnes là-dedans,
tout est compliqué pour eux autres. Puis,
regarde, c'est bien plus facile de prendre un gros budget de 1 million,
là, puis mettre ça dans leur... ils
ont tous formé, quasiment, des compagnies soeurs pour gérer les publicités
numériques. Alors, ils font une cote
comme agence de publicité puis ils donnent le sous-contrat de gérer la
publicité numérique, la programmatique à une de leurs filiales. Ça fait
que, de même, c'est vite fait, c'est bien payant pour eux autres, mais ça ne
rend pas service aux citoyens du Québec. Je pense que le...
Pour vous
donner un exemple, nous autres, les hebdos, on a une agence de publicité
nationale qui dessert l'ensemble de
notre industrie au complet puis qui serait très bien capable de faire les
placements publicitaires pour l'ensemble de nos journaux puis pour même d'autres médias aussi. Mais, quand ça passe
directement par les grandes agences de Montréal, on s'entend, là, le Québec, ce n'est pas la
préoccupation principale, et malheureusement c'est mal réparti. On n'est pas
les premiers à vous le dire mais on ne sera
probablement pas les derniers, mais on pense qu'on devrait avoir une part
importante de ces budgets-là, qui pourrait aller jusqu'à 30 % à 40 %.
C'est parce que c'est ce que représente le poids des régions.
• (16 h 30) •
Le Président (M. Ciccone) : En
terminant, s'il vous plaît.
M. Bouchard
(Renel) : Alors, en
terminant, il y a deux aides particulières qu'on doit vous demander
pour une période de transition. Il y en a une qui nous apparaît plus
importante que d'autres...
Le
Président (M. Ciccone) :
Merci. Le temps est écoulé, mais je pense que vous allez avoir le temps de
revenir, une chance de revenir, là, je suis persuadé. Je regarde le député de Beauce-Sud,
vous avez la parole.
M. Poulin : Oui, mais vous
pouvez continuer, monsieur, oui.
Le Président (M.
Ciccone) : Parfait.
M. Bouchard
(Renel) : ...qui est la
crise des commerces de proximité. Aujourd'hui, là, le petit... dans une région... une ville comme Saint-Jean ou Saint-Hyacinthe, on a 2 000 commerces,
et ces commerces-là, c'est en grande majorité des commerces de proximité qui souffrent du Walmart,
qui souffrent d'Amazon, qui souffrent de tout ça, donc ils sont dans la même crise que nous autres. Alors, une des choses
qu'on vous demanderait puis qu'on pense qui pourrait aider non seulement
nous autres, mais aussi ces commerces-là, on
pense que, pour une période de transition, le gouvernement pourrait
donner un crédit d'impôt additionnel.
Mettons que quelqu'un a un commerce de détail qui est propriété d'un petit
commerce dans une ville, s'il décide
d'acheter de la publicité dans notre journal, soit de la publicité papier ou
soit de la publicité numérique, parce que
tous nos journaux, aujourd'hui, offrent des produits numériques aussi, alors,
quand il achète de la publicité chez nous, son crédit d'impôt devrait
être égal à... ça devrait être déductible d'impôt à 150 % pour raffermir
le lien entre les petits commerçants, qui
sont, à 90 %, 95 %, de nos villes, dans nos régions, et c'est la
grosse majorité de nos commerçants... Et il faut être conscients du fait aussi que le plus grand expert en marketing
qu'un grand nombre de ces petits commerçants là vont voir dans leur vie, ce n'est pas un V.P. marketing, ils n'ont pas
le moyen de s'en payer. Puis ce n'est pas une agence de publicité qu'ils vont voir non plus, ça prend des
budgets de 50 000 $, 100 000 $ pour être capable de faire
affaire avec une agence. Alors, leur
plus grand expert, entre guillemets, pour faire leur propre promotion, c'est
souvent quelqu'un de notre équipe d'hebdos, de conseillers.
Alors, notre
dernière demande, on pense que, pour une période de transition, on pourrait
avoir... bon, Hebdos Québec, à
travers sa fondation, pourrait recevoir un montant de 4 millions, qui nous
permettrait de revisiter toutes les salles de vente et les salles de rédaction aussi des 100, 120 hebdos
au Québec et de reformer toutes nos équipes de vente traditionnelle à
des nouveaux produits, au numérique, parce
que, dans nos salles, on a du personnel de tous les âges, bien entendu, mais
on a du personnel, de façon importante, dans une période de transition comme
celle-là, qui doit être recyclé pour mieux servir l'ensemble des petits
commerces de nos villes, de nos régions. Merci.
Le Président (M. Ciccone) : Merci
beaucoup. Je reconnais maintenant le député de Beauce-Sud, toujours.
M. Poulin :
Absolument. Ce ne sera vraiment pas très long. Félicitations pour votre mémoire
très concret, très clair, et il y a
plusieurs solutions. Également, vous avez souligné le rôle des agences de
médias, vous dites, des V.P. marketing, et tout ça, mais c'est important, ce que vous dites, parce que souvent les
concessionnaires automobiles se font conseiller par des firmes de plein d'endroits, qui disent : Là,
ton budget, là, il faut que tu mettes au moins 80 %, 90 % sur les
réseaux sociaux, c'est là que ça se passe, là, ton journal, oublie-le.
Et, je pense, pour moi, il y a non seulement une méconnaissance du marché publicitaire, une méconnaissance d'où les
gens se trouvent. Au-delà de l'importance de l'information régionale et
de sauvegarder nos hebdos dans nos localités, je pense que ces agences de
marketing là, qui sont parfois des bien-pensants, devraient plutôt se rapprocher de la réalité. Je pense qu'ils ont
intérêt à vous connaître, et ça, c'est très important, tout comme ils
ont intérêt à connaître les médias communautaires, qu'on a entendus plus tôt
aujourd'hui.
Hebdos Québec, vous avez reçu, en 2017‑2018, un
montant de 293 992 $ et, en 2018‑2019, un montant de 73 000 $, pour un total de
367 000 $. Ça avait été donné, donc, par une subvention pour couvrir
une partie des frais liés à la réalisation
du projet intitulé Virage numérique intégré Web — plateforme de contenu et application mobile.
J'aimerais savoir, avec ces sommes-là
qui ont été remises, ce 367 000 $, est-ce que ça atteint vos
objectifs. Est-ce que ça a permis de faire ce virage numérique là? Ça
avait été donné par le ministère de la Culture à l'époque.
M. Chartier (Benoit) :
Exactement, voilà, ça fait à peu près deux ans que le montant...
M. Poulin : Oui, effectivement.
M. Chartier
(Benoit) : ...c'est la
plateforme Millenium. Nous nous sommes associés à une plateforme
européenne qui nous a aidés à numériser
notre contenu sur les tablettes et mobiles, mais, bon... et en même temps, parallèlement à ça, ça nous
a aidés aussi à nos ateliers de montage, là, en lien à la production de nos
journaux. Écoutez, oui, ça a réussi à aller rechercher du leadership numérique et ça a
été très, très intéressant pour l'association. Ceci dit, nous, je ne crois pas qu'à l'association
nous allons renouveler l'expérience avec cette plateforme-là. On va plus
laisser chaque éditeur opérer ses liens numériques avec la communauté.
M. Poulin : O.K. Donc, est-ce
que ce 367 000 $ là, vous jugez que... a permis
d'atteindre les objectifs que vous souhaitiez?
M. Chartier (Benoit) : Oui,
oui, nécessairement, là.
M. Poulin : Oui, du moins
exploratoires?
M. Chartier
(Benoit) : Du moins exploratoires. Mais moi, je veux revenir sur le
fait des conseillers, que vous dites, publicitaires,
au niveau numérique. Ça, il y a un grand rôle qu'on ne parle pas beaucoup,
présentement, depuis le début de la commission,
c'est le rôle des agences de publicité au Québec. Ils se sont jetés dans les
bras du GAFA, carrément, ils ont laissé tomber les médias traditionnels du Québec. Bon, il faut dire,
aujourd'hui, que les grandes agences appartiennent à tous des grands consortiums japonais, ou européens, ou
américains, mais c'est un fait, ça, que les agences n'aident pas les
médias traditionnels,
n'aident pas la presse écrite, présentement, depuis les trois, quatre dernières
années, conseillent leurs clients, que
ce soit le concessionnaire automobile, le fabricant automobile ou... Même à ça,
à la SAQ ou Hydro-Québec, ils font affaire
avec des grandes agences, et c'est eux qui conseillent les gens d'aller
annoncer sur le GAFA, là, et ça, c'est très, très insidieux comme
technique, et en même temps c'est très dévastateur pour l'ensemble des médias
traditionnels.
M. Bouchard
(Renel) : Puis ça fait aussi qu'il y a beaucoup de lecteurs qui ne
sont pas... beaucoup de citoyens qui ne
sont pas rejoints par ces moyens publicitaires là. Vous savez, des fois, quand
on est dans cette industrie-là, qui a des passages difficiles, on se
pose des questions. Nous autres, récemment, dans notre organisation... On est à
Victoriaville, où il y a le journal La Nouvelle.
C'est un très bon journal, qui est là depuis bien longtemps. On veut savoir
qu'est-ce que les gens pensent de
notre journal. On a fait un sondage au printemps, bien, il y a 74,4 % de
la population qui lit notre journal au moins
une fois par semaine. C'est un journal qui est publié deux fois par semaine.
Dans 61 % des foyers qui lisent le journal, il y a plus que deux
lecteurs, puis il y a 51 % des lecteurs seulement, de tous ces
lecteurs-là, qui consultent le site Web. Et, parmi les lecteurs, les gens de 55
ans et plus, bien, les trois quarts, là, ils s'informent uniquement sur papier.
Le problème
des agences de publicité, pour revenir à ce que Benoit disait : ils
accélèrent un mouvement social qui est naturel. Ça s'en va vers ça, mais
eux autres, ils accélèrent ça en fonction de leurs intérêts à eux autres, pas
en...
M. Chartier (Benoit) : ...c'est
ça.
M. Bouchard
(Renel) : ...oui, donc pas en fonction des besoins puis des intérêts
des communautés qu'ils desservent puis
des clients qu'ils desservent, nécessairement. Alors, il y a comme une
dysfonction entre les projections des budgets publicitaires numériques et l'endroit où la population est rendue
là-dedans. Alors, c'est sûr qu'on s'en va, à chaque année, de plus en plus vers le numérique, mais on n'est pas
là puis il y a une partie de la population qui n'est pas là. Il faut en
tenir compte, puis c'est important que le gouvernement en tienne compte aussi
quand il fait de la publicité.
M. Chartier
(Benoit) : Ces agences-là auraient dû être invitées à la commission,
venir parler de leurs pratiques. Moi, je
vous le dis, c'est une pratique qui est... Enfin, en tout cas, ils auraient dû
être invités puis ils auraient dû être ici pour répondre à vos
questions.
M. Poulin :
...un échange préalable à ce niveau-là. L'important, c'est de laisser beaucoup
l'espace, effectivement, à vous.
Mais, sur les agences, comme telles, de placement, là, effectivement, il y a
des enjeux qui sont extrêmement spécifiques puis très importants. Je
pense que mon collègue de Richelieu avait effectivement une question.
Le Président (M. Ciccone) : Merci. À
vous la parole, M. le député de Richelieu.
M. Émond : Merci, M. le
Président. J'attendais d'être reconnu, monsieur...
Le Président (M. Ciccone) : Oui,
mais c'est parce que je voyais des députés qui s'interpelaient, là. Merci.
M. Émond : Merci
beaucoup. Merci pour votre présence.
M. Chartier, vous êtes ici, bien
sûr, à titre de président
d'hebdos médias. Vous avez dit, un peu plus tôt, que vous êtes également
éditeur pour cinq hebdomadaires, dont dans ma région, à Sorel-Tracy.
M. Chartier (Benoit) :
Exactement, Les 2 Rives,le célèbre journal Les 2 Rives,
de Sorel.
M. Émond : Exact. J'en profite, d'ailleurs, pour saluer
Marcel, Jean-Philippe, avec qui j'ai eu le bonheur d'accorder une
entrevue ce midi.
M. Chartier (Benoit) : Et mon
ami Jean-Philippe, exactement.
M. Émond : Je souligne la présence, également, de Philippe,
un propriétaire d'un autre journal dans un autre coin de la Montérégie,
qui suit les travaux avec beaucoup...
M. Chartier (Benoit) : ...ici
avec nous, là, qui nous écoute.
M. Émond : ... — exact — Philippe,
que j'ai connu, avec Anne-Marie, dans une autre vie. Puis c'est
volontaire que je nomme les gens par leur prénom, parce que, selon moi, les
hebdos régionaux, vous faites partie de la famille dans chacune de nos régions.
Vous êtes essentiels à la collectivité puis...
M. Chartier (Benoit) : On
connaît vos attachés, on vous connaît tous personnellement.
M. Émond : D'accord. Ceci étant dit, j'ai pris connaissance
avec beaucoup d'intérêt de votre mot que vous avez publié, à saveur éditoriale, dans les derniers
jours, dans vos hebdos, une pratique pas très courante, je pense, c'était la
première fois que je vous lisais, puis un véritable cri du coeur.
• (16 h 40) •
M. Chartier
(Benoit) : Exactement.
M. Émond :
Vous avez mentionné, dans votre mot, un peu comme M. Bouchard l'a fait
tantôt, le retrait de la publication des
avis publics de la part des municipalités, qui a été mis en place précédemment. Est-ce que
vous avez mesuré l'impact financier chez vos membres d'Hebdos Québec
mais également chez vous, avec vos cinq publications?
M. Chartier
(Benoit) : C'est plusieurs centaines de milliers de dollars. Et je ne
comprends pas encore... là, je m'excuse,
mais je ne comprends pas encore le gouvernement libéral, précédant le gouvernement de la CAQ, d'avoir accepté... Nous
avions fait des présentations ici. Je suis venu ici... pas dans cette salle-là,
parce qu'elle n'existait pas, là, je suis venu dans le salon rouge, là, dire qu'on ne devait pas
retirer les avis publics. C'était le ministre
des Affaires municipales, à
l'époque, là, monsieur... enfin, son nom
m'échappe, là. Et, pour nous, là, déjà, voilà deux ans, la crise était commencée dans
les médias, puis là, en plus, on nous
enlève les avis publics dans l'ensemble du Québec. On parle de millions de dollars pour les
hebdos.
Au-delà des sous,
c'est aussi une démocratie qu'on enlève, là. Alors, les gens veulent se tenir
informés de qu'est-ce qui se passe dans leur
ville, dans leur région, ils veulent savoir les changements de zonage. Là, on
l'envoie, comme dit Renel, sur le
site Internet de la ville, dans le troisième onglet, 10e page, en bas. Ça
prend quasiment... il faut que tu ouvres le «sitemap» de la ville pour comprendre où aller lire l'avis. Quant à
moi, c'est carrément antidémocratique, ce geste-là. On m'avait expliqué qu'on était en 2017, à l'époque,
puis que c'était comme ça, la vie, aujourd'hui. On m'avait même
dit : S'il y avait un journal qui
partirait aujourd'hui, probablement que les avis publics seraient juste sur
l'Internet. Mais, pour nous, là, c'est assez critique puis c'est
dommageable, c'est un préjudice.
M. Bouchard
(Renel) : Pour donner des chiffres, ça peut représenter à peu près
5 % du budget d'un journal.
M. Émond :
O.K. Dans votre mémoire, vous dites également que vos hebdos sont la meilleure
tribune, pour un député, maire, pour
rejoindre les électeurs en région. Nous le faisons tous, je crois, dans nos
régions respectives, publier non seulement sous forme d'entrevue, de
communiqué, mais de publicité, là, pour...
M. Chartier
(Benoit) : Nous sommes là tout le temps.
M. Émond :
Oui, oui, exact. Je m'excuse. Tantôt, vous avez parlé des GAFA, bien entendu.
Avec des intervenants précédents, on
a des collègues qui ont dit que la tendance, le phénomène est là pour rester.
On n'est pas en train de dire que c'est une bonne chose ou que c'est une
mauvaise chose, mais, dans ce contexte-là... Puis on essaie, avec différents intervenants, de faire sortir des chiffres. Quel
serait, selon vous, le pourcentage acceptable, pour les unités
gouvernementales, le gouvernement mais les
députés ou autres unités gouvernementales, pour le taux de placement dans les
médias traditionnels versus la publicité numérique dans les GAFA? Est-ce
qu'un 20 %-80 %, un 10 %-90 %...
M. Bouchard
(Renel) : Je vais répondre à votre question mais de façon un peu
différente. Au lieu de donner des budgets
immenses, mettons, à placer sur Facebook... C'est qu'à l'intérieur des budgets,
même les placements sur Facebook et
les placements sur Google ou les autres formes de publicité numérique, si
vous... il y a aujourd'hui au moins une dizaine de formes de publicité
numérique qui finissent par rejoindre les GAFA d'une façon ou d'une autre.
Alors, c'est que ces campagnes-là, il faut
prendre l'habitude... il faut que nos commerces prennent l'habitude de les
planifier, justement, avec des
personnes locales, des gens comme nos représentants publicitaires, ou les
représentants publicitaires des quotidiens, ou ceux de la radio, mais ne
pas faire affaire directement avec les GAFA ou ces choses-là. Il faut que ça...
Il faut trouver un moyen...
Dans
le fond, dans l'évolution de notre industrie... Nous autres, on travaille en
région, puis ce qu'on essaie de... On a commencé à chercher... Dans le moment, c'est un moyen de régionaliser le
fameux courant de publicité numérique. On n'ira pas à l'encontre de la publicité
numérique. On l'intègre dans nos plateformes. Vous pouvez aller voir... Par
exemple, il y a un site Web qu'on a lancé
cette semaine, notre organisation, on a 21 hebdos au Québec, ça s'appelle
icisolutions.ca. Vous allez voir, là, c'est
une panoplie d'une dizaine, douzaine de formes de publicité numérique. Alors,
on est à une époque où, dans nos
hebdos, là, je peux vous dire que, d'ici très peu de temps, vous ne pourrez
plus acheter juste une publicité papier chez nous. Notre publicité, quand vous allez l'acheter chez nous, elle
va être à la fois papier, elle va être à la fois sur votre site Web, si vous en avez un, elle va être sur un site
Web d'une autre organisation, elle va être sur votre page Facebook puis
sur la page Facebook de notre organisation automatiquement. Ça n'existera même
plus, une publicité papier, comme tel. On s'en va dans la bonne direction.
M. Émond :
...M. Bouchard, je vous remercie. Puis je vais juste passer la parole à
mon collègue de Saint-Jean pour lui permettre de poser rapidement sa
question.
Le Président (M.
Ciccone) : M. le député de Saint-Jean, vous avez 50 secondes.
M. Lemieux :
50 secondes? M. Bouchard ou M. le président, dans votre recommandation
pour l'incitatif pour les commerçants,
c'est clair, là, 50 %, tout ça... mais, juste avant, quand vous
l'expliquez, vous dites : Toute l'économie régionale est tributaire de la santé des hebdos, c'est
95 % de notre chiffre d'affaires. Mais c'est aussi bon pour tout ce monde-là,
ce que vous êtes en train de demander?
M. Bouchard (Renel) :
Exactement, ça va renforcer... Dans le fond, pour beaucoup de ces petits
commerçants là, qui en arrachent
aussi dans la crise des médias de proximité parce qu'ils ont des nouveaux
concurrents, eux autres aussi, Amazon, qui
est le plus facile à énumérer... alors ces gens-là... C'est une mesure qui
aiderait non seulement nous autres, mais qui aiderait tous les petits
commerces de proximité dans toutes nos villes puis nos régions.
Le Président
(M. Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.
M. Bouchard
(Renel) : J'ai terminé.
Le Président
(M. Ciccone) : Merci beaucoup, formidable, formidable. Je vais
passer maintenant la parole à l'opposition officielle pour une période de
11 min 30 s. Je donne la parole à la députée de Verdun.
Mme Melançon : Alors, bonjour. Merci beaucoup de vous être
déplacés. Je veux saluer les gens qui vous accompagnent aussi derrière. Alors, merci beaucoup d'être
présents. C'est important, votre présence, et vous faites bien de dire que
votre présence dans chacune des régions,
hein... Vous êtes une forme de tissu social, je vais dire ça comme ça. Et je
vais vous poser une question, puis je
ne veux pas avoir l'air dure, mais je sais que vous avez la réponse, mais je
veux que tout le monde puisse l'entendre : Pourquoi un annonceur se
tourne vers les GAFA, actuellement?
M. Chartier
(Benoit) : Deux raisons, peut-être trois. Un, peut-être le prix qui
est moins cher; deux, parce que peut-être
qu'il y a une certaine agence de publicité ou un conseiller à l'extérieur de
notre périphérie... lui conseille d'aller sur le GAFA; et aussi peut-être au niveau du ciblage, là, parce que, le
GAFA, on parle beaucoup... parce que c'est mesurable et ciblable. Alors
là, ça, c'est un peu l'argument massue qu'a le GAFA face aux médias
traditionnels.
Mme Melançon :
Je vous pose la question parce que moi, là, dans Verdun, je le sais, que mon
hebdo va être un peu partout, va être
dans tous les commerces, va rester là pendant plusieurs jours, va les
atteindre, les gens... plus difficile à savoir le nombre de clics. Mais
en même temps est-ce qu'on peut se dire, entre nous, qu'à un moment donné, le
nombre de clics, on peut se poser des questions sur ce qu'on nous vend?
M. Bouchard
(Renel) : Vous savez qu'on dit souvent, dans l'industrie, qu'un taux
de clic de 0,08 %, moins de 1 %, c'est un bon taux de clic moyen.
Bien, si un journal est distribué à 50 000 copies, pensez-vous qu'il
n'y a pas 50 personnes qui vont le lire? Voyons donc. Tu sais, le problème
qu'on a, nous autres, dans notre industrie, on n'est pas capables de le mesurer
sous cette forme-là.
M. Chartier
(Benoit) : On n'a pas le clic officiel de l'ordinateur, du serveur,
mais on peut parler quand même de 1,5 lecteur par copie, minimum. À
50 000 copies, là, on rejoint quasiment 75 000 personnes.
Mme Melançon :
Donc, on peut peut-être se dire, entre nous, qu'il faudrait répéter ce qu'on
est en train de se dire là. Là, je
vois des gens derrière qui font signe : Oui, oui, oui. Mais on a acheté, à
un moment donné, une mode, je vais dire ça comme ça... Puis, bien sûr,
là, je vous le dis, là, moi, je suis sur Facebook, je suis sur Twitter, vous
l'êtes aussi...
M. Chartier
(Benoit) : On l'est tous.
Mme Melançon :
...mais je pense qu'on doit prendre... on a pris ce virage-là. Mais je voulais
vous poser la question, parce que je
pense que c'est des choses qui doivent être dites à un moment donné, et... Le 2
mai dernier, vous en faisiez part, il y a eu une motion à l'Assemblée
nationale pour parler de l'exemplarité de l'État. Moi, j'ai une question pour
vous, parce que vous êtes mieux branchés que
quiconque : Est-ce que vous savez s'il y a eu ou non une directive qui a
été émise par le gouvernement, actuellement, pour la publicité?
M. Chartier
(Benoit) : Non.
Mme Melançon :
Non, vous ne le savez pas ou, non, il n'y en a pas eu?
M. Chartier
(Benoit) : Non, il n'y a pas eu de... On n'a pas vu de changement, pas
à notre connaissance, là. Moi, je n'ai pas vu de changement.
D'ailleurs...
Mme Melançon :
D'accord. Donc, ça va être intéressant, là, aussi, à ce qu'on puisse, tout le
monde ensemble, là, voir peut-être à exiger des directives de la
commission. Parce que, dans le fond, quand on fait une motion comme ça à
l'Assemblée nationale, qui est votée...
M. Chartier
(Benoit) : Il est supposé y avoir des suites.
Mme Melançon :
...bien sûr, qui est votée à l'unanimité, moi, je m'attendais que, le 3 mai,
rapidement, il y ait un sous-ministre ou une ministre...
M. Chartier (Benoit) : Oui,
mais vous allez affronter vos agences de publicité qui vous conseillent...
Mme Melançon :
Clairement, mais...
M. Chartier
(Benoit) : ...et ils vont vous dire : Vous ne faites pas la bonne
décision. C'est ça qu'elles vont vous dire, les agences de publicité et
de placement.
Mme Melançon :
M. Chartier, est-ce que vous étiez là, tout à l'heure, lorsque je disais
qu'à chaque dollar qu'on veut investir...
puis là je parlais aux médias communautaires, mais à chaque dollar qui doit
sortir, bien, qu'on envoie un pourcentage...
M. Chartier (Benoit) : Bien
oui.
Mme Melançon :
Bien, je pense qu'il va falloir qu'on fasse la même chose avec nos hebdos si on
veut avoir la suite dans les idées.
M. Chartier
(Benoit) : Ça va prendre une loi en bonne et due forme, votée à
l'Assemblée nationale, pour que ça puisse devenir réalité pour les
médias traditionnels du Québec.
• (16 h 50) •
Mme Melançon :
Génial. J'ai deux petites questions en rafale, parce qu'après ça j'ai ma
collègue aussi qui veut intervenir.
Le 25 % pour la masse salariale, est-ce que vous, vous l'avez défini ou
non? J'explique ma question, parce que, là, il y a le député, tantôt, de Richelieu, là, qui est allé dans mon
80 %-20 % que je pose depuis hier, mais, moi, ce que je veux savoir, c'est que, dans le 25 % de la masse
salariale, est-ce que c'est la masse salariale juste de la rédaction. Comment
vous le voyez... de la masse salariale, de votre côté?
M. Bouchard
(Renel) : On parle de tous les employés qui sont affectés à la
production du journal, parce que ce n'est pas juste les journalistes. Maintenant, dans les salles de rédaction
modernes, avec les nouveaux médias, on a des gens qui sont spécialisés dans les plateformes Facebook, on a
des graphistes qui sont spécialisés pour faire à la fois des maquettes
sur papier et retransmettre ça sous forme
numérique. Alors, les salles de rédaction, c'est moins... ce n'est pas
cloisonné comme avant. Alors, je
pense qu'un des problèmes qu'on voyait, à l'origine, dans la mesure fédérale
qui a été annoncée, ça semblait trop restrictif, ça ne représente pas
les salles de rédaction modernes.
Mme Pilotte (Josée) : ...
Mme Melançon : Pardon? Je n'ai
pas entendu.
Mme Pilotte (Josée) : Nos
journalistes sont devenus multitâches aussi.
Mme Melançon : Ah! oui, tout à
fait, tout à fait, d'accord, excellent. M. le Président, comme vous
voulez...
Le Président (M. Ciccone) : Je passe
la parole à la députée de Saint-Laurent. À vous la parole.
Mme Rizqy :
Oui, effectivement, on n'explique pas comment ça se fait, que les gens comme
Facebook et Google, qui... Alphabet...
ne sont pas présents. C'est comme arriver à une scène d'accident, prendre la
déposition des témoins, des accidentés,
des victimes, puis de laisser aller le chauffard, puis on ne lui demande pas
c'est quoi, son avis à lui, puis comment ça se fait qu'il ne paie pas
d'impôt.
Mme Pilotte,
je suis contente de vous voir. Vous représentez un journal qui est aussi dans
un milieu touristique, puis les gens,
souvent, quand ils arrivent dans un milieu touristique, bien, ils ne savent pas
tout ce qui se passe, mais des fois ils rentrent dans un café puis ils l'ont, votre journal, ils peuvent savoir
les différentes petites activités qu'a lieu... À moins que je me trompe, la dernière fois, moi, je suis allée
dans les Laurentides, j'ai pu voir votre journal puis je savais qu'il y avait
quelques activités où est-ce que je pouvais prendre part...
Mme Pilotte (Josée) : Oui,
exactement.
Mme Rizqy :
Donc, ça permet aussi... Il y a aussi, là-dedans, une économie sociale qui se
crée, puis tout ce que ma collègue disait, en matière de tissu social,
que vous êtes capables de vous maintenir en région.
Mme Pilotte
(Josée) : Bien, nous, on représente 10 municipalités, 10 petites
municipalités qu'on doit faire rayonner, c'est quand même un grand territoire. Alors, vraiment, je veux dire,
c'est un journal qui essaie vraiment de faire rayonner tous les petits
villages, tu sais, à chaque semaine, puis écrire la petite histoire, à chaque
semaine, de ça, d'aller à tous les conseils
municipaux de chaque ville, alors c'est beaucoup pour des petites salles de
presse. Maintenant, on a peut-être un journaliste, deux journalistes à
temps plein. Alors, c'est beaucoup de travail pour...
Mme Rizqy : Pour couvrir 10
municipalités.
Mme Pilotte (Josée) : Oui.
Mme Rizqy : Mais,
d'entrée de jeu, on l'a mentionné, vous êtes une femme entrepreneure. Je suis
pas mal certaine que vous payez vos impôts.
Mme Pilotte
(Josée) : Oui.
M. Chartier
(Benoit) : On les paie tous.
Mme Rizqy : Oui, bien, j'aimerais ça entendre vraiment
Mme Pilotte à titre de... Vous, vous n'avez pas beaucoup parlé mais vous avez quand même
bien parlé, puis je vais donner l'occasion à Mme Pilotte de pouvoir nous
parler de sa réalité à titre de femme d'affaires aussi. Vous, vous payez
des impôts, vous assurez aussi la masse salariale sur vos employés. Si je vous dis que vos revenus
publicitaires, évidemment, vous le savez, sont imposables, mais Facebook,
pour une portion de 2,9 milliards de dollars de revenus qui ont été générés au Canada
en matière de revenus publicitaires, ont payé zéro impôt, êtes-vous
heurtée?
Mme Pilotte
(Josée) : Je suis
scandalisée, moi aussi, oui, puis c'est difficile... Tu sais, je veux dire,
moi, je regarde... pour un petit
journal comme moi, c'est difficile. Je veux dire, on paie énormément
d'impôt, on peut se le dire, alors c'est difficile, même, de faire de l'argent, tu sais, pour un entrepreneur comme moi. Tu sais, je veux dire, j'ai deux journaux, je veux dire, on fait vivre une vingtaine de
familles, je veux dire, on participe à l'économie locale, on essaie
d'inciter à l'achat local aussi, à l'esprit d'appartenance. Donc, oui,
c'est scandaleux quand on entend ça, surtout qu'ils viennent voler notre
contenu, en plus.
M. Chartier
(Benoit) : En plus.
Mme Rizqy :
En plus, oui. Et là je vais reprendre mon petit chapeau de fiscaliste, si vous
permettez. Lorsque l'article 19, dans la loi
de l'impôt, avait été rédigé, on voulait vraiment s'assurer que, les
dépenses publicitaires, on favorise la presse
écrite locale. Maintenant, on sait qu'on n'a pas modernisé la loi. Par
conséquent, tous les médias numériques peuvent avoir quand même droit à cette dépense. Il y a, évidemment, une campagne fédérale qui se dessine maintenant, il me
semble qu'il serait juste et à propos
d'avoir des revendications pour le gouvernement
du Québec... Pour tous les partis
politiques qui veulent avoir notre vote, qui veulent nous représenter et qui
sont des défendeurs de la grande démocratie, il me semble que la moindre des choses, c'est d'avoir une taxe
GAFA puis de moderniser, justement, l'article 19 de la loi de l'impôt
pour s'assurer que, justement, la presse
écrite non seulement soit sauvegardée, mais que notre démocratie ne soit pas en
péril.
Mme Pilotte
(Josée) : Oui, tout à fait.
Mme Rizqy :
Pour la mise à jour économique qui arrive prochainement, à l'automne 2019, au
niveau du gouvernement du Québec,
pensez-vous que le Québec... Avez-vous cette demande-là face... un peu comme à
l'instar de la France... et va de
l'avant avec la taxe GAFA, qui pourrait générer immédiatement, là, juste avec
Facebook... je n'ai pas fait Google,
inquiétez-vous pas, je vais faire mes chiffres, je vais mettre à jour mon
tableau, mais peut générer 20 millions
de dollars? Il me semble que, dès maintenant, le ministre des Finances du Québec
peut agir. Il a la capacité... Et, Revenu Québec, on est autonomes, on est indépendants, on n'a
pas besoin d'Ottawa pour agir. On l'a fait pour Netflix, maintenant
il faut s'occuper de Facebook. Pensez-vous que, dès la mise à jour économique,
on devrait avoir déjà un engagement du gouvernement actuel?
Mme Pilotte
(Josée) : Bien, je crois que oui, je pense que c'est clair.
Mme Rizqy :
Bon, moi aussi, c'est clair. Moi, je n'ai plus de question.
Le Président (M.
Ciccone) : Il reste 1 min 20 s.
Mme Rizqy :
Si vous avez des demandes, c'est le temps, là, vous avez le micro.
M. Bouchard
(Renel) : ...par exemple, Benoit, il est propriétaire d'un journal qui est à copie vendue, moi, Le
Canada français, à Saint-Jean, et nos lecteurs paient la TPS puis
la TVQ quand ils achètent leur copie. C'est facile de ne pas payer ses
taxes quand on fait affaire avec Facebook, mais, quand on fait affaire avec
nous autres, on...
M. Chartier
(Benoit) : Moi, honnêtement,
c'est incompréhensible, ce qu'on vit depuis les quatre dernières années,
là. On est comme dans un film où le monde
marche à l'envers, là, c'est de coup dur en coup dur tout le temps, tout le temps, et on dirait que personne... les paliers
gouvernementaux ne réagissent pas à tout ça, puis je ne suis pas le premier à
le dire. Bon, il y a eu la France, là, qui a quand même réagi, mais on
voit que Donald Trump a quand même répondu assez...
Mme Rizqy :
Oui, mais ils se sont entendus hier, là.
M. Chartier
(Benoit) : Oui, bon, enfin...
Mme Rizqy : Alors là, c'est réglé, il ne taxera pas le vin,
ils vont aller de l'avant, il y a une entente. Et j'aimerais juste vous
répondre... Avant de faire la lutte contre les... avant de me lancer en politique,
je faisais la lutte contre les paradis fiscaux...
M. Chartier
(Benoit) : Oui, oui, oui, on vous a vue à la télévision.
Mme Rizqy : ...je le fais encore. Et j'aimerais vous dire
que, dans le cas de Netflix, on l'a faite, la bataille, là on va la
faire pour Facebook. Et il y a aussi des choix personnels que tous les
députés...
M. Chartier
(Benoit) : Puis Google
aussi, parce que Google est le plus gros joueur qui fait le plus mal,
présentement.
Mme Rizqy : Oui, oui, tout le monde, oui, absolument,
vous avez raison, là je prenais l'image de Facebook. Et, si vous me permettez, c'est qu'il y a
une réalité... tous les députés, on peut choisir de ne pas faire de publicité.
Moi, c'est un choix que j'ai décidé de faire. Je n'en fais pas, de
publicité sponsorisée sur les médias sociaux, zéro puis une barre.
Le Président (M.
Ciccone) : Merci beaucoup.
M. Chartier
(Benoit) : Bravo! Félicitations!
Des voix :
...
Le Président (M. Ciccone) : Je vous demanderais, s'il vous plaît, de ne pas applaudir dans une salle de commission. Je passe maintenant
la parole au député de Rimouski pour 3 min 15 s.
M. LeBel : Bonjour. Pour les avis des municipalités, je suis d'accord avec vous,
mais, pour l'instant, personne ne veut
s'engager... Du côté gouvernemental, on ne s'est pas engagé de revenir en
arrière, mais c'est certain qu'on ne peut pas faire... on ne peut pas passer
à côté de ça dans notre rapport final, il faudra en parler.
M. Chartier
(Benoit) : C'est M. Coiteux, d'ailleurs, son nom m'est revenu,
là, qui avait fait le changement de...
M. LeBel :
...
M. Chartier
(Benoit) : Pour la loi n° 22, oui, c'est ça.
M. LeBel :
Le placement média, je suis d'accord avec vous, là, c'est très centralisé,
aucune idée de l'impact dans les régions.
Est-ce qu'une nouvelle façon, pour le gouvernement, de faire le placement
média, en décentralisant les décisions
dans les directions régionales des ministères, pourrait être une façon de
coller le placement aux réalités des régions puis plus proche de vos
journaux? Ça pourrait-u être une façon?
M. Bouchard
(Renel) : Les centres de
décision sont conscients de chacune des régions du Québec.
C'est sûr que ça peut avoir un... ça
va avoir un impact sur les placements. Des régions vont exister, premièrement...
puis ce qui n'est pas toujours le cas dans les grandes agences à Montréal,
puis, bon, s'ils existent, les régions, ils vont placer dans leur
région, ils vont avoir des budgets pour ça. C'est une des solutions possibles.
Ce n'est pas la seule mais c'en est une.
M.
LeBel : Parce que souvent
les directions régionales des ministères le voient, les directeurs voient la situation,
puis ils n'ont pas le pouvoir de placer...
ils font des activités en région mais ils ne peuvent pas, eux autres même,
décider de mettre une publicité dans leur hebdo, parce qu'il faut que ça passe
par Dieu le Père, qui est à Québec, qui décide tout.
M. Chartier
(Benoit) : Exactement.
M. Bouchard
(Renel) : Tu sais, il y a quelqu'un
qui vous donnait l'exemple, là, la maladie de Lyme, là, ils font la
publicité à Montréal, mais il n'y en a pas, de bibittes pour ça...
M. LeBel : Ce matin, à Radio-Canada à Rimouski,
le propriétaire du journal Le Placoteux — c'est un hebdo du Kamouraska — disait...
parce qu'on a proposé ici souvent, là, le crédit d'impôt à la masse salariale
pour les journalistes ou un fonds
pour les journalistes, le propriétaire disait : «Pour faire virer un
journal, il y a l'équipe de graphisme, de publicité, etc. Quand on voit les autres secteurs d'activité qui
reçoivent de l'aide, c'est pour tous les employés. Pourquoi ce ne serait
pas la même chose pour nous? Il faudrait être plus équitable.»
M. Bouchard
(Renel) : Bien, c'est pour ça qu'on vous dit que la taxe, le 25 %
sur la masse salariale, ce serait sur la masse salariale de tous ceux qui
produisent, qui sont attachés à la production du journal. On voit ça plus
large.
M. LeBel : Mais on a quand même, nous autres, l'objectif
de s'assurer qu'il y ait des salles de nouvelles solides.
M. Bouchard
(Renel) : Solides, oui.
M. LeBel :
Comment on fait pour s'assurer de tout ça?
M. Bouchard
(Renel) : Bien, tu sais, il
faut... tu ne peux pas donner de subvention à un journal qui n'a pas une
bonne... qui n'a pas une salle de rédaction
qui fait de l'allure, là. Il y a un minimum que le... Bien, le fédéral est en
train de regarder ses... il veut mettre un
minimum de journalistes. Il faut qu'il y ait un minimum de journalistes puis
que ça aille même en priorité à
subventionner une masse salariale pour les journalistes, c'est une excellente
chose. C'est une excellente chose parce
que, tu sais... Mais je comprends la difficulté, pour un gouvernement, quand il fait des règlements,
de tirer une ligne. Mais il est clair
que c'est une priorité, de subventionner d'abord les journalistes et tous ceux
qui gravitent autour pour faire...
• (17 heures) •
M. Chartier
(Benoit) : ...les photographes...
M. Bouchard
(Renel) : Un photographe de presse, c'est nécessaire.
M. Chartier
(Benoit) : ...secrétaires de rédaction, correcteurs, infographes,
producteurs de contenu.
Le Président (M.
Ciccone) : En terminant, s'il vous plaît.
M. LeBel : Parce que vous faites de l'excellent travail dans
nos régions, mais vos salles de journalistes, c'est de plus en plus petit, et on a des grandes régions, c'est difficile à couvrir. Ça fait
qu'on couvre les villes principales puis on...
Des voix :
...
M. LeBel :
C'est ça.
M. Bouchard
(Renel) : Il faudrait
inclure les pigistes, parce que, dans une région comme la vôtre, les pigistes
sont extrêmement importants, à cause des distances qui sont grandes.
Le Président (M. Ciccone) : Merci
beaucoup, merci beaucoup. Je
reconnais maintenant la députée de Marie-Victorin pour une période de 2 min 15 s.
Mme Fournier :
Merci beaucoup. Je vais y aller rapidement. J'ai deux questions, vous y
répondrez en rafale.
Je
crois que c'est une excellente idée, le 50 % de crédit d'impôt pour la
publicité pour les PME, mais je vous lance la question :
Réalistement, est-ce qu'on doit rester, dans le monde de l'information, vers un
modèle d'affaires axé sur la publicité quand — on va se parler franchement — par exemple, un quart de publicité dans un
hebdomadaire local, ça peut coûter
autour... en tout cas, chez nous, ça coûte 1 000 $, ça peut être en
page 15, un peu plus loin parfois, puis je pourrais couvrir, par exemple, l'équivalent de 1,5 fois la
taille de ma circonscription pour le même montant sur les réseaux
sociaux? Donc, je me demandais si vous aviez
quand même la réflexion vers un autre modèle d'affaires qui pourrait être
possible, parce que c'est ce à quoi on réfléchit ici, notamment, à la
commission.
Deuxièmement,
la question des Publi-Sac, qui est quand même très abordée dans l'actualité par
les temps qui courent, ça représente
combien, en termes financiers, pour les hebdos locaux? Je pense que c'est
important qu'on en parle. Et quelles pourraient être les solutions si ce
n'était pas des Publi-Sac?
M. Chartier
(Benoit) : Je vais répondre à la question du Publi-Sac puis je
laisserai mon collègue Bouchard répondre à la question de la publicité. Au niveau du Publi-Sac, nécessairement,
là, il y a un enjeu majeur aussi, on en parle dans le mémoire. On n'en a pas parlé ici, là, mais il y a
un enjeu majeur en lien avec le fait que le Publi-Sac fait partie intégrante
de l'écosystème de la presse hebdomadaire au
Québec. C'est notre réseau de distribution, qui nous aide à aller à chaque
porte à toutes les semaines à un coût raisonnable. Alors, c'est clair que, là,
on entend des débats, là, autour du Publi-Sac, entre guillemets, environnementaux, qui fait que, bon, il y a peut-être
quelques villes qui se questionnent à savoir est-ce que c'est nécessaire encore et est-ce qu'on ne devrait
peut-être pas... on devrait peut-être jouer plus sévère avec le Publi-Sac.
C'est sûr que ça va avoir un impact direct sur chaque hebdo, ça, c'est clair.
Mme Fournier :
Vous n'avez pas le montant en particulier?
M. Chartier
(Benoit) : Bien, un montant en particulier... C'est au niveau des taux
de distribution, des coûts de distribution,
selon le coût de distribution et la diffusion du journal en question. Alors, il
y a des hebdos qui tirent... Dans ta région,
Le Courrier du Sud est à 120 000 copies, alors ce journal-là
dépense beaucoup pour distribuer ses journaux. Il y a d'autres journaux où c'est 20 000,
25 000 copies de diffusion. Alors, ça varie selon les journaux, sauf qu'on
ne peut pas...
Le Président (M.
Ciccone) : En terminant.
M. Chartier
(Benoit) : ...la problématique. Le réseau du Publi-Sac est comme très
important.
Le Président (M.
Ciccone) : Merci. Merci beaucoup. Je vous remercie pour votre
contribution aux travaux de la commission et merci pour votre grande passion
pour vos hebdos ici, du Québec.
Je fais une pause pour accueillir le MPV Radio,
qui prendra place dans quelques instants.
(Suspension de la séance à 17 h 4)
(Reprise à 17 h 7)
Le
Président (M. Ciccone) : Je
souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de MPV Radio. Je
vous rappelle que vous disposez de
10 minutes pour votre exposé. Je vous invite donc à vous présenter ainsi
que les personnes qui vous accompagnent et à procéder à votre exposé. La
parole est maintenant à vous pour 10 minutes.
MPV Radio inc.
Mme Vachon (Isabelle) :
Bonjour. Je suis Isabelle Vachon, je suis vice-présidente de MPV Radio. Je suis
accompagnée de Catherine Vachon, qui est la
présidente de MPV Radio. Et, tout de suite, nous sommes soeurs, alors
c'est le même Vachon, on va régler ce détail-là tout de suite.
Alors, M. le Président, Mmes et MM. les parlementaires, merci d'être ici. Si vous êtes ici,
c'est parce que vous avez un intérêt
pour les médias, pour les médias en région, pour l'information. Le nom de notre
entreprise le dit, radio, MPV Radio, on
n'est propriétaire d'aucune station de radio, nous sommes une maison de représentation en publicité nationale. Et on va vous parler du nerf de la guerre, on va vous parler d'argent, parce que
l'argent, c'est ce qui fait vivre les médias en région et c'est ce qui
manque cruellement en ce moment.
Je suis dans cette salle et j'étais dans le
salon rouge depuis hier à écouter tous les intervenants avec énormément d'intérêt. C'est notre raison d'être, nous, à MPV
Radio, la radio régionale, donc... une maison de représentation en publicité nationale
spécialisée dans l'obtention des budgets publicitaires pour les stations de
radio régionales. On a bâti notre crédibilité sur notre expérience, notre expérience du terrain, notre connaissance
des médias, de l'intérieur comme de l'extérieur. En fait, Catherine et moi, on a oeuvré toute notre vie dans
les médias. C'est une entreprise familiale, MPV Radio, c'est nos parents
qui l'avaient, qui l'ont bâtie. Mon père a
passé sa vie dans les médias, «born and raised». Désolée d'utiliser cette
expression anglaise, mais c'est vraiment ce que nous sommes.
• (17 h 10) •
Je vous
dirais que, maintenant, on représente, à ce jour, une trentaine de stations de
radio au Canada mais, pour la plupart,
des stations au Québec, que des stations de radio francophones. On en a sur la
Côte-Nord, dans l'Est du Québec, dans les
Laurentides, dans les Hautes-Laurentides, dans les Bois-Francs, la Montérégie,
le Témiscamingue, la Gaspésie, la Beauce. Ça résonne. Ça nous donne, ça, une vision claire de ce qui se passe sur
le terrain et ça nous donne une légitimité aujourd'hui, même si on est une entreprise, de vous dire
comment les budgets du gouvernement ont fondu comme neige au soleil. Ça
fait 10 ans que je suis chez MPV Radio.
Je vous dirais qu'en 10 ans la situation s'est détériorée. Il y a
10 ans, quand on avait des placements
du gouvernement, c'était, pour plusieurs ministères, pratiquement systématique,
d'utiliser toutes les stations de radio
régionales, c'était très important. Et maintenant, bien, les agences
choisissent certaines régions pour toutes sortes de raisons, mais une chose est certaine, c'est qu'en
ce moment il n'y a aucune campagne du gouvernement qui couvre toutes les
régions du Québec. Et nous, on négocie avec
l'agence de publicité Cossette, on les voit, les budgets, on voit ce qui se
passe. Et notre rôle, c'est de nous assurer que toutes les stations, toutes les
régions du Québec, toutes les régions que nous représentons soient retenues
dans la planification des campagnes publicitaires qui touchent tous les
Québécois.
Aujourd'hui,
je vais vous parler spécifiquement des placements du gouvernement du Québec.
Bien, le gouvernement doit quand même
être un leader et montrer l'exemple. En tant que maison de représentation en
publicité nationale, on se fait la voix des stations de radio régionales
qu'on représente. Et, comme je vous le disais, on le constate, que les
campagnes publicitaires fondent, et, quand
on demande pourquoi, on nous dit : Ah! on n'a pas d'argent. C'est
indéfendable. On ne peut pas
dire : C'est parce qu'on manque d'argent. Vous avez de l'argent pour un
grand marché comme Québec, vous avez un grand... vous avez de l'argent pour Montréal, pas d'argent pour Sorel,
pas d'argent pour Baie-Comeau, pas d'argent pour Rimouski, pas d'argent pour Sept-Îles. Il n'y a pas de citoyens de
deuxième classe au Québec, à ce que je sache. Il y a des gens qui paient des impôts et qui ont droit d'être
informés. Pas d'argent, pour nous, là, ce n'est pas une excuse qui est
justifiable, et c'est une situation que l'on qualifie d'injuste.
Puis ça devient
préoccupant quand il s'agit de messages d'intérêt public qui concernent la
sécurité et la sécurité des Québécois.
Par exemple, on pense à des ministères comme le MSSS, des campagnes de grippe.
Pourquoi est-ce qu'on peut se
justifier de dire qu'il y a certains marchés où il n'y aura pas de publicité?
Puis on parle de... Moi, j'ai des marchés exclusifs, là. À Mont-Laurier, la station de radio qui est
là, c'est la station de radio de la région. Si vous voulez écouter autre
chose, vous allez avoir Radio-Canada, qui
est une station de radio de grande qualité mais qui n'a pas de publicité. Mais,
si le MSSS veut dire à ces gens-là
qu'il y a une campagne de vaccination contre la grippe, par exemple, bien, il
faut utiliser la station de radio régionale. C'est important de le
faire, c'est important de parler à ces gens-là. Donc, quand il est question de sécurité, on se dit : Il y a une inéquité. Il
faut absolument que tous les gens du Québec, que tous les citoyens, et peu
importe leur appartenance géographique ou
démographique, doivent être exposés avec la même fréquence, la même intensité
aux messages du gouvernement, ça, c'est une
question d'équité. Et ce n'est pas le cas, il y a des stations qu'on représente
qui en reçoivent, d'autres qui en ont une
fraction et d'autres qui n'en ont pas du tout. On est tellement dedans, je peux
vous donner un exemple de ce que
c'est, une campagne qui est étrangement planifiée. Il y a eu une campagne sur
les algues bleues. C'est important, les algues bleues, dire aux gens : Lavez vos bateaux,
attention, nos lacs, nos forêts, notre écologie. Des stations des Hautes-Laurentides, des Basses-Laurentides, de
Lanaudière, de l'Estrie... personne n'a le message. C'est
incompréhensible. Pourquoi? On ne le sait pas.
Alors, c'est
pour ça qu'on vous parle aujourd'hui puis qu'on vous dit : En tant que
parlementaires, en tant que députés, il
est important de s'assurer que le message passe, que vous deveniez des leaders,
de dire : Nous, on veut que ça, ça se rende aux gens qui paient des
impôts et qui ont besoin de savoir cette information-là, et surtout que le
dollar publicitaire du gouvernement,
gouvernement du Québec, c'est un moteur d'économie régionale. Les Québécois ont
le droit à une information de
qualité, peu importe la région où ils vivent, et cette information doit être
ancrée dans leur réalité. C'est ce que leur offre la radio régionale privée. C'est un média
traditionnel dont l'écoute demeure très stable au fil des ans, mais dont la
survie est menacée par un glissement des budgets publicitaires vers le
Web.
Bien sûr, on
en parle depuis le début de cette commission, des fameux GAFA. Annoncer sur
Google, Facebook, c'est des dollars
qui sont dépensés à l'extérieur du Québec. Les budgets publicitaires dépensés
en radio régionale sont directement injectés dans l'économie locale pour
une meilleure vitalité économique. Annoncer sur le Web en région — et
ça, c'est important pour nous — n'a pas du tout, mais pas du tout le même
impact qu'en milieu urbain, car la population y a plus difficilement accès, Internet étant souvent moins
rapide, moins accessible et moins performant. On le sait, on parle de,
quoi, 340 000 familles qui ne sont pas
branchées. Il y a des analphabètes, il y a des gens qui n'ont pas accès à
l'information en région autrement
qu'en écoutant la radio régionale, et c'est vraiment important. Et, quand on
nous dit parfois, lors de planifications de campagne : Nous allons prendre les grands marchés, et, pour le,
on ira sur le Web, j'ai envie de leur dire : Mais faites l'inverse, c'est dans les régions, qu'on doit
annoncer à la radio. Je ne dis pas de ne pas le faire dans les grands marchés,
loin de là, mais de se contenter des grands marchés et de dire : Le Web va
faire le reste pour les régions, selon nous, c'est manquer sa cible.
D'ailleurs,
il y a eu une campagne de publicité, il n'y a pas si longtemps, de la SAAQ,
c'était sur le cellulaire au volant.
Il y a des grandes routes qui sont extrêmement dangereuses au Québec, on pense
à la 117, la 138, la 158. Les stations qui
desservent la population qui vit sur ces routes-là n'ont pas été sélectionnées
dans la campagne de publicité, et, à l'époque, le ministre Poëti avait dit : On a manqué notre cible. Bien, il
faut, selon nous, apprendre de ça et utiliser les outils. Les stations de radio régionales, elles sont là, elles sont
écoutées, elles sont vivantes, mais elles veulent continuer de vivre et elles
ont besoin de l'argent des publicités du
gouvernement. Mais ce n'est pas de la charité, c'est une meilleure distribution
du budget pour que le gouvernement puisse mieux passer son message.
Donc, tout le monde gagne : votre argent est mieux distribué, la
population est mieux informée, et les stations de radio reçoivent leur part de
ce budget-là, et, pour nous, c'est extrêmement important.
Le Président (M. Ciccone) : En
terminant, s'il vous plaît.
Mme Vachon
(Isabelle) : En terminant, les bénéfices, bien, c'est un outil de
survie essentiel pour la radio régionale dans un contexte qui est difficile. On a parlé beaucoup de la crise des
médias, et je trouve qu'on n'a pas beaucoup parlé de la radio. Puis je tiens à dire que la radio, c'est un
média d'information, que c'est un poumon pour les régions puis ça permet
à la culture de demeurer vivante. Merci.
Le
Président (M. Ciccone) :
Merci beaucoup, merci beaucoup. Ça paraît, que vous travaillez à la radio, vous
avez arrêté à zéro seconde. Bravo! Bravo! Je
suis prêt maintenant à reconnaître la partie gouvernementale pour
15 minutes. Le député de Beauce-Sud, la parole est à vous.
M. Poulin :
Merci beaucoup, M. le Président. Wow! Mme Vachon... Mmes Vachon,
merci infiniment pour ce beau témoignage, j'en ai presque des frissons.
J'ai fait de la radio privée, je me souviens de voir, dans mon «log» de radio, MPV Radio et de savoir exactement les placements
publicitaires que vous faisiez. Merci également de faire de la business
en famille. J'imagine que ce n'est pas
toujours facile mais ça permet de traverser le temps, et ça, c'est important.
Quand vous parliez que vos parents
avaient fondé l'entreprise, je suis allé voir sur votre site Internet. C'est
fort intéressant, votre historique, et
j'aurais beaucoup de plaisir à discuter plus amplement avec vous, malgré le
15 minutes qui nous est alloué, de notre côté.
Je veux revenir
sur la publicité gouvernementale. Je suis extrêmement préoccupé par ce que j'ai
entendu, entre autres dans les choix publicitaires qui sont faits. On a
beau investir pour faire la conceptualisation d'une publicité, mais, si la diffusion, elle est ratée, pour moi, la publicité
n'existe pas. Et, si on fait un choix, comme société — bien, on fait un choix aussi, comme gouvernement — de faire de la conceptualisation, de faire
des publicités et qu'on les diffuse mal, pour moi, j'y vois un grand
problème.
On se connaît depuis quelques secondes, mais
j'imagine que vous avez déjà transmis ces revendications-là et j'aimerais
savoir la réponse que vous avez eue, au Secrétariat à la communication
gouvernementale.
• (17 h 20) •
Mme Vachon
(Catherine) : ...représentations auprès du gouvernement. On a fait des
représentations, à plusieurs reprises,
auprès de Cossette, qui est responsable des achats mais pas de la planification
de tous les ministères. C'est sûr que les
agences jouent un rôle très important. Et, quand on a rencontré le
gouvernement — parce
qu'en fait ça ne date pas de la crise
des médias, qu'on revendique une équité dans la distribution des messages
publicitaires du gouvernement au Québec, parce que c'est une grande injustice, selon nous, et les stations qu'on
représente se sentent vraiment comme des citoyens de seconde zone, personnellement, parce qu'on
considère qu'ils ne valent pas la peine d'être exposés à un message et
aussi comme source de revenus très
importante pour leurs stations de radio — on nous a répondu que le mandat, c'était bel
et bien de diffuser en région, mais les
régions, c'est comme un grand fourre-tout. Il y a les centres urbains puis il y
a les régions, puis
les régions, bien, ce n'est pas juste Sherbrooke, Trois-Rivières, Gatineau et,
bien, Rimouski, parce que c'est des villes dans lesquelles il y a des stations régionales appartenant à des groupes
comme Bell et Cogeco. Et ça, c'est des achats, je dirais, sans vouloir être péjorative, faciles pour les
agences, parce qu'ils disent : Ça y est, c'est réglé, on a acheté les
réseaux, on a acheté les régions.
Vous n'êtes pas sur la Côte-Nord,
vous n'êtes pas à Baie-Comeau, vous n'êtes pas à Sept-Îles, vous n'êtes pas à Gaspé, vous n'êtes pas à Matane, vous n'êtes
pas à New Carlisle, vous n'êtes pas à Mont-Laurier, vous n'êtes pas à Granby, et, jusqu'à tout récemment,
ils n'étaient pas à Saint-Georges de Beauce. On s'est battu bec et ongles, et
ils ont reconnu que c'était un
non-sens. Donc, il y a, je pense, une... je ne sais pas si c'était un
manque de personnel, un manque de ressources.
On se fait
dire aussi que c'est facile, avec les réseaux sociaux, parce qu'on a des résultats à la semaine en
termes de sondages et de fréquentation,
alors que, pour la radio, quoique ça tend à changer parce qu'on a maintenant une
deuxième source de sondages...
M. Poulin : Les PPM.
Mme Vachon (Catherine) : ...mais
avec Numeris, en région, pour ceux qui avaient les moyens de s'abonner...
M. Poulin : De se le payer,
bien oui, très dispendieux.
Mme Vachon
(Catherine) : ...parce que
ça coûte cher, un sondage par année, à l'automne, mais... Puis c'est
plus difficile de montrer ça à ton client,
que ça soit le gouvernement ou que ça soit GM, de dire : Bon, bien, on
va se fier sur les sondages
d'automne, quand il y en a un, ou des sondages d'automne d'il y a
trois ans, ou pas pantoute, on va y aller parce que c'est la seule station. Parce que
c'est facile de comprendre que, quand tu es dans un marché exclusif puis qu'il y a
une station de radio, bien, les gens
écoutent cette station de radio là, tu sais, mais c'est plus difficile à
défendre. C'est un peu la lecture que nous, on en fait.
M. Poulin : Non, mais vous avez raison. Nous, on a fait de
nombreux sondages en Beauce, puis j'étais, le matin, le plus écouté, toutes stations de radios de Québec
concurrentes dans ma région. Puis c'est vrai, puis ça augmentait vite, à
part de ça, ça allait super bien.
Mais l'enjeu
que vous soulevez est très important, sur le snobisme envers les régions du Québec.
Et, depuis que je suis député, donc
ça ne fait même pas un an, on doit se battre, dans tous les ministères,
partout à travers le Québec, pour rappeler
c'est quoi, les régions du Québec, donc ce que vous nous dites aujourd'hui ne me surprend pas. Et vraiment ce n'est pas des compétitions
entre régions, c'est une méconnaissance et/ou un snobisme qu'il y a, que ce
soit lorsqu'on développe des programmes,
lorsqu'on fait de la politique publique, où on oublie, effectivement, certaines régions du Québec. Alors,
moi, je ne suis pas surpris, tout en étant surpris, en étant préoccupé sur le
fait qu'on exclut certaines régions de messages publicitaires. Alors, vous me dites : Ça ne date pas d'hier. Sachez
qu'on va tenter de trouver la solution afin de sensibiliser davantage
aux gens qui font les achats. Oui, effectivement, il y a Cossette qui peut faire certains placements
publicitaires, mais, d'abord et avant tout, ça passe de la commande puis d'une
volonté du client...
Mme Vachon (Isabelle) : Voilà,
c'est la commande. Tout est là.
M. Poulin : ...exactement, la volonté du client de bien faire
ses placements publicitaires à la grandeur du Québec. Et ça ne coûte pas
plus cher, là, vraiment, là, c'est des choix qu'il faut faire.
Mme Vachon
(Isabelle) : Les gens qui
vivent en région, là, ce n'est pas une punition, c'est un désir. C'est un
plaisir, de vivre là et d'être là. Et c'est
vrai qu'il y a toujours quelque
chose d'un peu péjoratif quand on
parle des régions. Non, les régions,
c'est les régions, c'est des gens qui sont là, c'est des entreprises qui sont
belles, des gens qui ont envie de vivre là, qui ont envie d'avoir leurs budgets publicitaires. Ils ont envie d'entendre
parler de vous, ils ont envie d'entendre ces messages-là. Et surtout, dans les régions, bien, il n'y a
pas de «mixed media» autant que dans les grands centres, donc la radio
devient encore plus importante, ça devient un véhicule important et majeur.
Mme Vachon
(Catherine) : Pour ajouter peut-être
à une question qui avait été posée : Quel serait le
pourcentage idéal de répartition
publicitaire entre les GAFA et les médias traditionnels?, on ne peut pas
répondre à cette question-là facilement,
parce qu'en région, justement, comme
il n'y a pas de «mixed media», bien, il devrait y en avoir plus. Puis en
plus ils n'ont pas accès à Internet haute
vitesse encore, ça va sûrement venir, donc il devrait y en avoir plus. Donc, c'est
une répartition... c'est un travail, puis, ce travail-là, je ne suis pas
certaine qu'il est fait correctement. Puis c'est un snobisme peut-être, oui,
mais c'est surtout une méconnaissance, tu sais.
M. Poulin : Oui, bien, on en est là. Puis, avant de céder la
parole à mon collègue le député de Saint-Jean, je pense que, si... et c'est pour ça que, tout à l'heure, on l'a abordé,
les agences de presse, la façon dont on explique à nos clients où ça fonctionne, où ça fonctionne moins. J'étais à
Chapais-Chibougamau cet été, la radio, le journal a un rôle clé
hyperimportant. On fabrique des vedettes
locales incroyables avec nos stations de radio et nos différents médias. Alors,
c'est évident qu'il va falloir faire
un tour de roue supplémentaire, mais, si le gouvernement donne l'exemple,
je pense qu'il y a bien des gens qui vont suivre par la
suite. Merci.
Le Président (M. Ciccone) : Merci.
Je cède maintenant la parole au député de Saint-Jean.
M. Lemieux : J'ai déjà animé Génies en herbe, alors on va... Vous
vous souvenez comment ça marchait, Génies en herbe? Là, on est
rendus à la fin, ça va aller vite. Je veux juste savoir, dans votre vision des
choses et dans la pratique que vous faites, est-ce que c'est la même
chose, selon vous, dans les mêmes marchés, pour l'écrit.
Mme Vachon
(Catherine) : Je suppose que
oui, je suppose que oui. Nous, évidemment, c'est la radio, qui est notre
client, mais la façon dont on se fait
répondre, dans les agences, sur la façon dont les choses sont planifiées...
C'est sûr que nous, on est
tributaires des réseaux, des réseaux de radio. Donc, quand ils disent qu'ils
s'en vont... on couvre les régions, je m'excuse, Rimouski, bien, ça ne
couvre pas New Carlisle.
M. Lemieux : Ah! puis ils ont
leur propre station, à New Carlisle, et René Lévesque était...
Mme Vachon (Isabelle) : Oui,
c'est ça, mais elle n'est pas achetée.
Mme Vachon (Catherine) : Mais
elle n'est pas achetée, c'est ça.
M. Lemieux : Oui, non, je sais bien. Bien non, mais, je veux
dire, ça ne couvre pas New Carlisle. Bien, vous n'auriez pas gagné à Génies
en herbe, c'est juste cinq secondes.
Bon, l'autre
question, relativement rapide : Est-ce
que c'est la même réalité? Puis je
n'essaie pas de ménager le gouvernement là-dedans, là, mais vous avez d'autres gros
clients à part le gouvernement, hein, vous avez parlé de GM, vous avez
d'autres gros clients nationaux. Est-ce que c'est le même combat?
Mme Vachon (Isabelle) : Pas
pour tous les clients.
M. Lemieux : Parce que?
Mme Vachon (Isabelle) : Parce
qu'il y en a qui reconnaissent la valeur de la radio régionale et qui
l'utilisent amplement. Il y a des grands clients qui regardent où sont leurs
concessions. S'il y a une station de radio, ils l'achètent systématiquement, et
ça existe.
Mme Vachon
(Catherine) : On a des
franchisés... bien, prenons un exemple au hasard, McDonald's ou Tim
Hortons à Mont-Laurier, s'il y a de la
publicité nationale sur sa station de radio locale et qu'il voit un impact
direct sur ses ventes, il reconnaît la valeur de l'apport publicitaire
en radio, bien, il va revenir.
Mais, juste
pour ajouter, le gouvernement, ce n'est pas un client comme les autres. Le gouvernement, en plus de vouloir
rejoindre, avec une stratégie efficace, le plus de gens possible, a le
devoir... bien, un devoir moral d'équité. Donc, c'est ça qu'on défend.
Mais là, en plus, s'ajoute la question de survie dans le cas d'une crise. Ça
fait que, là, ce n'est plus une question
juste d'un budget qu'on n'a pas, puis qu'on devrait avoir, puis que ce n'est
pas juste, c'est que, là, cet argent-là, on en a besoin pour notre survie. Ça fait qu'avant de parler d'opération
sauvetage, si on pouvait juste régler cette question-là, qui est un
«win-win», là, bien, au moins on aurait un petit bout de chemin de fait, puis
après ça on verra s'il y a d'autres solutions qui pourraient être apportées.
M. Lemieux : Je suis tout
à fait d'accord, d'autant plus que c'est une responsabilité, de la part du
gouvernement, de parler à chaque citoyen,
quelle que soit l'urgence, ou la cause, ou la raison, là. À quelque part, il
n'y a pas de citoyens de deuxième zone, mais il y en a qui sont dans une
zone... Moi, je dis toujours que Montréal, c'est juste l'autre moitié du Québec, hein? C'est méchant, de le dire comme ça,
mais à quelque part, quand on est dans les régions, on finit par le
voir, là, à quelque part. Vous alliez dire quelque chose, je vous ai coupée.
Mme Vachon
(Isabelle) : Bien, j'allais dire que le seul moment où le gouvernement
utilise toutes les stations... bien, pas
le gouvernement, mais, quand c'est le temps des élections, quand c'est le temps
de faire sortir le vote, le DGEQ achète systématiquement toutes les
stations de radio.
Une voix : ...les partis,
hein?
Mme Vachon (Catherine) : Les
partis? Non.
Mme Vachon (Isabelle) : Non,
pas les partis.
M. Lemieux :
Justement, faites notre éducation et puis... à moins que des mains se lèvent de
mon côté de la table, il nous reste 3 min 10 s.
Une voix : On est les
derniers, on peut continuer.
M. Lemieux : Non, non, mais il
y en a d'autres.
Le Président (M. Ciccone) : Quatre
minutes.
M. Lemieux :
Ah! quatre minutes, c'est encore mieux, faites notre éducation. Parce que j'ai
travaillé toute ma vie dans les médias, mais le placement média, ça
reste encore un mystère, puis je pense que c'est parce que les gens qui travaillent dedans veulent que ça le reste, à
quelque part. C'est dur à suivre. Même quand on est dans les médias, c'est
dur à suivre. Pourquoi vous, vous faites ça?
Pourquoi ils ont besoin d'intermédiaires? Pourquoi vous faites juste ceux-là
puis pas les autres? Parce qu'il y en a d'autres, indépendants, tu sais.
Mme Vachon
(Catherine) : Bien, dans les régions, ils n'ont pas... la vente
nationale, c'est très différent de la vente locale, où les gens ont leur
représentant sur place qu'ils vont rencontrer, les commerces de proximité,
puis, bon, ils se connaissent, et tout. Pour
la vente nationale, c'est de la négociation avec des agences du Québec, de
Toronto, même des États-Unis, puis ça
prend, disons, une expertise un peu différente. Et, nous, pourquoi on a une
expertise en radio régionale? Parce que les grands groupes ont déjà une
force de vente qui est capable de faire ça pour leurs stations.
M. Lemieux :
Là, vous venez de mettre le doigt sur... pas une partie du problème mais une
partie de la raison pour laquelle le
grand public ne comprend pas. Quand on dit «nationale», dans la tête du monde,
c'est national. Alors, quand vous dites
«les grands groupes», vous parlez des deux grandes chaînes qui sont assises à
la table nationale. Mais combien de pourcentage
du Québec, en têtes de Québécois, ils couvrent, les deux grands groupes radio
au Québec, grosso modo, là? Plus ou moins 5 %?
Mme Vachon
(Catherine) : Bien, je ne pourrais pas vous donner de pourcentage,
mais ce qui arrive, c'est que ces groupes-là, Cogeco et Bell, sont
présents dans les mêmes marchés, les deux. Ils sont achetés, les deux, dans les
mêmes marchés. Il y a comme une
surexposition dans certains marchés puis une non-exposition ou sous-exposition
dans d'autres. Qu'est-ce que ça
représente, comme pourcentage? Il faudrait faire le calcul, là. On le sait, où est-ce
qu'ils sont : Montréal, Québec, Gatineau, Sherbrooke,
Trois-Rivières, Rimouski.
• (17 h 30) •
M. Lemieux : Je vais poser ma
question à l'envers. Combien du Québec est un désert... Combien de... pas de pourcentage, mais... la proportion québécoise non desservie ou mal desservie, parce qu'il y a des exceptions, comme
Beauce, là, récemment, mais combien du
territoire est mal desservi, quand on dit : Ah! on
a acheté national, nous autres, on a fait un «mixed media» puis on a
mis national radio?
Mme Vachon
(Catherine) : Bien, comme
Isabelle disait tantôt, dans toutes les régions qu'on représente — on ne les représente pas toutes — le seul organisme gouvernemental qui retient
les stations qu'on représente, c'est Élections Québec, et ça tend à baisser dans tous les ministères. Le
ministère des Transports annonçait, le MSSS annonçait. Là, c'est des
pinottes, puis des fois, certaines stations, zéro.
M.
Lemieux : On s'est fait
dire, tout à l'heure... là, c'est
vrai que mon temps achève, par exemple, mais on s'est fait dire, tout à l'heure, que même les médias
sociaux... oui, on peut remonter, après ça, jusqu'aux GAFA, mais que
M. Bouchard, d'Icimédias, avec les hebdos, disait : On est capables
de gérer l'investissement média de notre client. Mon vendeur de souliers, qui me donne 10 000 $ pour sa
campagne, il en veut un peu, de médias sociaux ou il en veut même beaucoup.
Puis, si moi, je lui place... faire du
placement, je n'ai pas compris ça encore, là, mais, si moi, je lui place, au
moins je peux faire une cote
là-dessus, au moins je peux gérer sa campagne, il y a de l'argent pour moi
là-dedans. Le «mixed media», il a changé énormément. Est-ce qu'on est
rendus au bout du changement, là, ou ça continue de bouger énormément?
Mme Vachon (Isabelle) : On
n'est pas au bout du changement.
M. Lemieux : Non?
Mme Vachon (Isabelle) : Je
pense qu'on ne verra pas le bout.
Mme Vachon
(Catherine) : On remarque, cependant... nous, dans les achats qu'on
reçoit par les clients nationaux réguliers,
qui sont les bannières, là, les grosses bannières qui sont présentes dans tous
les marchés, on a remarqué, au fil des ans,
là, avec l'arrivée des médias sociaux, des tentatives de... bon, cette année,
woups! tout d'un coup, on n'avait plus de budget ou une baisse de
80 % puis on apprenait par la bande que ça s'en allait aux réseaux sociaux...
Le Président (M. Ciccone) : En
terminant, s'il vous plaît.
Mme Vachon (Catherine) : ...puis
l'année suivante, ils revenaient.
M. Lemieux : Merci. Vous gagnez
Placements en herbe. Merci.
Le Président (M. Ciccone) : Merci
beaucoup. Je reconnais maintenant un membre de l'opposition officielle, Mme la
députée de Verdun.
Mme Melançon : Mmes Vachon, bonjour. Vous avez été très
assidues, je tiens à le dire, là, on voyait, hier, votre écoute. Et ce que je comprends de ce que vous
abordez, c'est d'abord qu'il n'y a pas de coordination régionale, un manque de connaissances quand il y a quelque chose qui se passe
dans une région puis que, finalement, on ne l'aborde pas dans ladite région où est-ce qu'on devrait le faire. La
différence, je vous dirais, entre la... puis là c'est ma lecture à moi, là,
puis vous me corrigez si j'ai tort, mais la
différence entre la pub gouvernementale puis la pub qui vient de grands
acheteurs, c'est que ça rapporte aux
grands acheteurs, puis ils le savent, que ça leur rapporte dans certaines
régions, alors que, le gouvernement, ça ne rapporte pas. Et c'est sur
ces balises-là, je trouve, où il y a une déficience, puis là on en apprend jour
après jour, heure après heure, là.
Je connais très, très bien CHLC, mon ami Georges
Daviault, parce que moi, j'ai fait le choix, un jour...
Mme Vachon (Isabelle) : ...nous
écoute, en ce moment.
Mme Melançon : Ah! bien, alors, cher Georges, je te salue. Il va
rire, parce que je les connais très bien. Moi, j'ai
fait le choix d'aller à Baie-Comeau il y a plusieurs années, j'ai habité la Côte-Nord
pendant près de cinq ans. Et c'est vrai que, lorsque l'on parle des
régions, c'est comme si on parlait des régions, hein, parce qu'on veut... Et
pourtant, et pourtant, les régions, c'est le
nerf de la guerre du Québec. Et je suis très fâchée d'entendre ce que vous
m'avez... ce que vous avez dit tantôt, je vais le dire comme ça, là. Je
trouve ça dérangeant, choquant, et je ne sais pas qui s'occupe du côté gouvernemental, puis je vous regarde, puis là je
n'envoie pas aucune flèche, je tiens à le dire officiellement, mais il va
falloir qu'il y ait un spécialiste à bord,
puis qu'il reste là, puis qu'on ait du monde de talent qui vont comprendre ce
qu'on est en train de discuter,
actuellement, puis qui vont rester là aussi, parce qu'il y a souvent des jeux
de chaise musicale, c'est vrai. Puis dans
les ministères, là... Moi, j'ai été à la tête d'un ministère comme ministre,
mais j'ai aussi été dans des ministères comme directrice de cabinet, puis on avait beau envoyer des directives... et
là vous me voyez venir. Le 2 mai dernier, parce que je sentais la chose venir, j'ai moi-même présenté une
motion à l'Assemblée nationale, qui a
été votée par l'ensemble des élus. Et là j'apprenais tout à l'heure...
j'ai posé la question, parce que je ne le savais pas, s'il y avait eu une
directive, et clairement on m'a répondu que
non, on m'a dit qu'on n'avait rien vu encore, de changement. Je pense qu'un des
gestes urgents à poser, c'est
celui-ci. Et là je me tourne vers les membres de la commission et de la partie
gouvernementale : passez le message.
Moi, je ne serai pas fâchée si ça commence là, là, mais, honnêtement, il y a
quand même un problème. Entre le 2 mai...
juin, juillet, août, bientôt septembre, quatre mois, on a voté une motion à
l'Assemblée nationale. Je comprends qu'on revient de vacances, là, puis je comprends, mais je pense que tout ne ferme
pas l'été. En tout cas, moi, mon bureau de comté, ça a roulé tout l'été.
Ça fait que, mesdames, je veux juste vous dire que, ce côté-là, moi, je l'ai
entendu, moi, je vais le défendre. Puis,
s'il y a un manque de leadership, bien, je vais prendre l'oxygène qu'il y a
puis je vais le prendre, le leadership, s'il faut qu'on le prenne. Mais
clairement, actuellement, il y a une directive qui aurait dû être donnée.
Je vous
reviens sur l'idée des GAFA, puis j'entendais... donc les Google et Amazon, les
Facebook qui viennent, puis j'ai posé
la question tout à l'heure, puis, j'imagine, c'est la même chose, parce qu'à la
radio il y a aussi des clics, hein? Vous autres, vous le savez, combien de personnes viennent cliquer. Puis
souvent, du côté des Amazon et Google, ils veulent faire calculer le nombre de clics. Comment est-ce que
vous... Êtes-vous compétitifs? Je vais dire ça comme ça, puis là, «let's
go», vendez-moi votre affaire, parce que...
Mme Vachon (Catherine) : Vas-y.
Mme Vachon (Isabelle) : Bien,
en fait — tu
pourras compléter — si
la radio est compétitive?
Mme Vachon (Catherine) : En
termes de qualité de sondages?
Mme Vachon
(Isabelle) : Bien, oui, en qualité... en termes d'écoute, de sondages
et de réinvestissement dans... ne serait-ce
que ça. Parce que l'argent qui est dépensé dans la station de radio locale,
elle reste dans la région, elle est réinvestie, tu sais, c'est un dollar qui se promène puis qui revient. Celui qu'on
prend puis qu'on envoie dans les GAFA, on l'envoie par en arrière puis
on l'envoie en Californie.
Mme Melançon : Puis on ne le
voit plus.
Mme Vachon (Isabelle) : Puis on
ne le voit plus.
Mme Melançon : C'est ça. Alors, hier — vous
étiez là, et je vous ai senties même un peu interpelées — il
y a un groupe... et là j'oublie lequel, je ne voulais pas aller
refouiller dans chacun de mes onglets, mais il y a un groupe qui a
dit : Tout ce qui s'appelle publicité,
qui est envoyé dans les GAFA... parce que, dans le... les gens reçoivent un
crédit d'impôt, hein, les entreprises
qui font de la publicité, là, peuvent avoir un crédit d'impôt. Si on les
soustrayait pour pouvoir, justement, vous rendre encore plus attractifs,
est-ce que vous pensez que ça peut changer le visage de la façon dont sera faite
la publicité chez certains?
Mme Vachon
(Catherine) : Bien, il
faudrait voir les raisons pour lesquelles les agences de publicité, qui ont
quand même beaucoup de pouvoir, à ce que nous, on en comprend, en termes
stratégiques, elles choisissent d'aller vers les médias sociaux.
Nous
autres, quand on parle d'équité, on parle d'équité en termes géographiques,
mais je pense que démographiques aussi,
c'est important. Puis de s'adresser juste aux jeunes, bien, tu
rates ta cible, surtout quand tu dis que les vieux sont... parce qu'ils disent ça beaucoup, là, qu'en radio
régionale l'auditoire est plus âgé. Mais, quand j'entends une publicité du
MSSS dire que les
dangers de la grippe sont particulièrement sévères chez la population plus
âgée, bien, comment ça se fait, que vous n'êtes pas à la radio, là? Tu sais, il y a quelque chose, dans une uniformisation de planification, qui ne tient même pas
compte de la cible à laquelle tu t'adresses.
Puis, en termes de mesures, la radio devient de plus en plus compétitive,
avec une nouvelle firme de sondage
avec laquelle les stations deviennent beaucoup partenaires. Il y a eu beaucoup
de partenariats qui ont été signés,
parce que c'est plus abordable, puis la mécanique est... passe par le streaming
sur le Web, donc ça va être mesurable de façon aussi compétitive que ce
qu'on retrouve sur le Web.
Mme Vachon
(Isabelle) : Sur le Web,
oui, avec des données hebdomadaires, là, ce qu'on n'a pas avec Numeris,
en ce moment.
• (17 h 40) •
Mme Melançon : J'en ai parlé un peu plus tôt, et là ça va être un peu plus une critique, du CRTC...
parce que, de toute façon, vous connaissez par coeur, vous autres, le
CRTC, là, j'en suis persuadée. Qu'est-ce qu'on devrait, comme Québécois, dire à
Ottawa, actuellement, des lois sur le CRTC en radiodiffusion?
Mme Vachon
(Isabelle) : À quel niveau?
Mme Melançon : Bien, en représentation,
parce qu'on a manqué certaines ouvertures pour aller... Parce que vous
savez qu'ils ont réouvert les deux lois.
Mme Vachon
(Isabelle) : Oui, oui, oui.
Mme Melançon :
Moi, je veux savoir, si vous étiez ministre de la Culture, qu'est-ce que vous
iriez dire directement à Ottawa pour défendre les intérêts du Québec au
CRTC.
Mme Vachon
(Isabelle) : Bien, en fait, c'est de maintenir, du moins, ce qu'on a
en ce moment, là, de ne pas détruire ce
qui est en place. Je ne sais pas si c'est à ce niveau-là, que vous voulez
m'amener, mais pour maintenir la culture vivante, il faut qu'elle soit exposée dans toute sa diversité,
et, pour ça, ça prend des médias un peu partout, ça prend des médias
différents puis ça prend des médias régionaux, puis ça, il ne faut pas toucher
à ça.
Mme Melançon :
C'est très clair et c'est très bien entendu. Je veux juste vous dire, si les
artistes font des tournées dans chaque région, c'est justement pour
pouvoir faire, hein, rayonner leur savoir-faire, puis là je...
Mme Vachon
(Catherine) : ...
Mme Melançon :
Pardon?
Mme Vachon
(Catherine) : Ils aiment ça.
Des voix :
Ha, ha, ha!
Mme Melançon :
Bien, oui, c'est exactement là où je m'en allais, ils veulent aller...
justement, ils veulent faire la tournée.
Mme Vachon
(Catherine) : Bien oui, absolument.
Mme Melançon :
Et je veux juste revenir sur la radio, parce que vous parlez de démographie.
Souvent, on se dit qu'on est dans une
population vieillissante, là, mais est-ce que je suis rendue «out» à ce
point-là, de penser que je suis... Moi, j'aime ça, la radio, puis je
pense que je ne suis pas trop vieille, mais je pense que les jeunes aiment ça,
la radio.
Le Président (M.
Ciccone) : En 20 secondes, s'il vous plaît.
Mme Vachon
(Catherine) : Bien, je pense que, oui, les jeunes aiment ça, la radio.
Oui, ils sont... Nos enfants ont 25
ans, là, puis ils ne sont pas... ils sont nés avec la radio qui jouait dans la
maison mais ils ont des habitudes de consommation différentes. Mais je pense qu'en région, quand tu
y retournes, parce que, bien souvent, tu vas étudier dans un grand
centre, tu reviens en région, tu veux savoir
ce qui se passe à ton conseil de ville, tu veux savoir si ton équipe de balle
molle a gagné, puis ça, ça ne changera pas, puis il y a juste la radio
qui peut te donner ça...
Le Président (M.
Ciccone) : Merci beaucoup. Je suis prêt, maintenant, à reconnaître la
députée de Taschereau pour 2 min 30 s.
Mme Dorion :
Merci. Bonjour. Merci pour la présentation. J'aimerais savoir, dans la
trentaine de radios que vous représentez,
est-ce que toutes font de l'information. Est-ce que toutes ont un journaliste?
Puis est-ce que c'est de l'information locale, sur quoi ils travaillent?
Mme Vachon
(Isabelle) : Oui. Toutes les stations de radio font de l'information
locale mais pas au même niveau. Elles
y vont selon leurs moyens, et malheureusement, bien, les moyens diminuent. Et
souvent, bien, c'est là qu'elles ont tendance
à couper, parce que c'est ce qui coûte cher, souvent, dans une station de
radio, mais elles sont écoutées pour ça, les stations de radio locales...
Mme Vachon (Catherine) : C'est
leur raison d'être.
Mme Vachon
(Isabelle) : ...parce que c'est leur raison d'être, parce qu'elles
parlent aux gens de leur région. Puis d'ailleurs
le taux de rétention d'un message sur une station de radio locale est plus
important que s'il est entendu sur une station
nationale, par exemple. Vous vous promenez en voiture, vous entendez le même
message sur votre station de radio locale
de votre ville, il s'adresse à vous. Vous l'entendez, le même message, sur une
station de radio nationale, il s'adresse moins à vous. Ça fait que c'est
pour vous dire à quel point ce qui est diffusé sur une station de radio locale
est important.
Mme Dorion : Mais donc il y a
des journalistes qui, sur place, pour la radio, enquêtent sur la réalité
locale.
Mme Vachon (Isabelle) : Sur
place, bien oui, certainement. Oui, oui, oui.
Mme Vachon
(Catherine) : De la même
manière que dans les hebdos. Pas de salle de nouvelles dans une station
de radio locale, ça ne se peut pas, même s'il y a
juste un journaliste. Mais c'est sûr qu'à un moment donné, quand tu
n'as plus les budgets, tu coupes, tu coupes, tu coupes. Les
réceptionnistes sont aussi un peu vendeuses, un peu...
Mme Vachon (Isabelle) : Un peu
scriptes, un peu routage, un peu tout.
Mme Vachon
(Catherine) : ...un peu
scriptes, un peu routage, un peu comptabilité. S'il y a un poste où on
essaie de garder une certaine étanchéité
puis une certaine indépendance, c'est celui du journaliste, puis c'est important
qu'il soit là, sinon ça n'existe
plus. Ce n'est pas de la radio divertissement de la façon dont on l'entend dans
les grands centres, c'est une radio d'information.
Mme Dorion : Puis, dernière question, il nous reste
15 secondes, mais est-ce qu'on devrait imposer le revenu des GAFA,
ici, qui ne paient pas d'impôt, des grandes entreprises numériques pour
redistribuer ça?
Une voix : Oui.
Mme Dorion : Merci.
Le
Président (M. Ciccone) : Merci beaucoup. Merci beaucoup. Je suis prêt, maintenant, à reconnaître le député de Rimouski pour une période de
2 min 30 s.
M. LeBel : Merci. J'ai posé la question
aux gens des radios communautaires
sur l'équité des placements médias, ils n'étaient pas certains mais ils avaient deviné que ce n'était pas
équitable, là, même dans son propre réseau, il y avait des radios communautaires en région qui n'avaient pas
les mêmes montants que d'autres, puis le gars du Pontiac, qui disait
que, lui, il vivait quelque chose par
rapport à la maladie de Lyme et que l'investissement en médias était fait dans
les Laurentides ou bien ailleurs, tu sais. Ça fait que je pense qu'il y
avait quelque chose là. Les hebdos nous ont dit à peu près la même affaire. Puis là, moi, quand je vois ça, là, ça me
met en beau saint-sacrement, de voir que le ministère des Transports,
aucune campagne régionale, Hydro-Québec... Puis quel imbécile qui a pensé qu'en
mettant ça juste à Rimouski, il va couvrir tout le Bas-Saint-Laurent? Tu sais,
il y a peut-être des cours de géographie qui devraient se donner, au
gouvernement.
Puis, tu
sais, quand on parle des GM puis McDo, à Rivière-du-Loup, GM et McDo, c'est sûr
qu'il va dire à son réseau :
N'achetez pas à Rimouski, ce n'est pas ma clientèle, il faut acheter... — bien, Groupe Simard, je les connais,
moi, la gang de Rivière-du-Loup — c'est là qu'il faut aller. Tu sais, c'est
eux autres, qui vont rejoindre la clientèle. Les autres, ils ont allumé,
les GM et les McDo. Pourquoi il n'y a
personne, au gouvernement, qui allume? Puis augmenter aussi les budgets,
augmenter la publicité dans nos médias
régionaux. On parle d'équité, mais, je pense qu'on est rendus là, il faut aussi
encourager nos médias, augmenter la
publicité. Dans le Bas-Saint-Laurent, une personne sur quatre qui a 65 ans
et plus, quelqu'un devrait aussi allumer que c'est des personnes
vieillissantes, qu'on doit passer par la radio si on veut les atteindre, puis
passer par la radio pas juste à Rimouski, partout, à Montmagny, à
Rivière-du-Loup, à Matane, à New Carlisle, un peu partout.
J'ai posé
tantôt... je me suis dit : Est-ce qu'une façon de faire ça, de s'assurer
que ça va en région, de décentraliser la décision aux directions
régionales des ministères plutôt que de garder ça à Québec, ça pourrait être
une des solutions?
Mme Vachon
(Catherine) : Bien, au fond,
ce qu'il faut, c'est bien, bien simple, là, c'est que ça soit systématiquement
dans toutes les régions, parce que le message, il s'adresse très, très rarement
à une partie de la population. Un message du gouvernement, c'est un message qui
s'adresse à l'ensemble des Québécois, sauf, je ne sais pas, moi...
Mme Vachon (Isabelle) : ...où
il y a des régions qui ne sont pas touchées...
Mme Vachon (Catherine) : Oui,
oui, bon, c'est ça.
Mme Vachon
(Isabelle) : ...ou un problème d'Hydro-Québec sur certains ponts ou certains
barrages.
Mme Vachon (Catherine) : Mais
le pot...
Mme Vachon (Isabelle) : ...le
cellulaire au volant...
Mme Vachon
(Catherine) : ...la grippe, ça s'adresse à tout le monde, donc ça
devrait être systématique, puis il n'y a plus de calcul à faire, c'est
comme ça, puis c'est tout le monde qui l'a.
Le Président (M. Ciccone) : En
terminant.
M.
LeBel : Juste dire que ce n'est vraiment pas une punition, de vivre en
région, puis il y a plein de choses qui se vivent en région, puis on a besoin d'entendre parler de ça, puis on a
besoin de donner à nos médias la possibilité d'en parler : les cégeps, les universités, la recherche, la
culture, le ROSEQ, dans l'Est du Québec, il y a plein de choses à faire.
Merci.
Le
Président (M. Ciccone) :
Merci, M. le député de Rimouski. Je reconnais maintenant la députée de Marie-Victorin
pour deux minutes.
Mme Fournier :
Merci beaucoup pour votre présentation. Je partage la surprise et
l'indignation, en quelque sorte, de
mes collègues quant au placement publicitaire qui est réalisé par le
gouvernement, surtout quand on pense que c'est des informations d'intérêt public, donc des choses,
comme vous l'avez bien dit, qui doivent être entendues par un maximum de
Québécois partout en région. Entendons-nous bien, il y a quand même, je dirais,
peut-être deux types de publicité gouvernementale.
Il y a tout ce qui est d'intérêt public, donc les informations, vous avez fait
référence au cannabis, on a parlé de
maladie de Lyme, et tout ça. Bon, il y a aussi l'autre partie, qui est
peut-être plus la promotion de certaines politiques publiques ou, par
exemple, quand on fait la promotion du budget, tout ça, qui ne sont pas
nécessairement dans la même catégorie, en
tout cas, de mon point de vue. Et je serais curieuse, justement, de savoir
quelle est la proportion, si vous avez l'information, entre, je dirais,
peut-être les campagnes d'information publiques versus la promotion, disons, de
certains programmes gouvernementaux.
Mme Vachon
(Catherine) : Bien, d'une manière générale, comme on disait tantôt, la
plupart des messages sont d'intérêt
public mais relèvent également de ce qu'on appelle la publicité du gouvernement
du Québec. La SAAQ... la SAQ et les
loteries, c'est sûr qu'on ne peut pas mettre ça dans la même catégorie, que
tout le monde a droit de savoir que le rosé est en vente cette semaine, mais il reste quand même que c'est planifié par
les mêmes gens selon les mêmes barèmes. Puis, quand on va au-delà de l'équité puis qu'on parle de
moteurs de survie économique, bien, moi, je ne fais plus de distinction,
rendue là, parce que je me dis que, les SAQ,
il y en a partout, puis pourquoi ne pas avoir la publicité de la Société des
alcools dans toutes les régions? Pourquoi certaines plutôt que d'autres?
Le Président (M. Ciccone) : En
terminant, s'il vous plaît.
Mme Fournier : Est-ce
que vous catégorisez ou vous rentrez tout ça dans la même...
Mme Vachon
(Catherine) : Mais ce n'est pas nous qui faisons les catégories, c'est
les agences elles-mêmes, puis ça rentre dans le budget global du
gouvernement.
Le Président (M. Ciccone) :
Merci beaucoup, Mme Vachon et Mme Vachon. Je vous remercie pour votre
contribution.
La commission
ajourne ses travaux jusqu'à demain, mercredi 28 août 2019, à 9 h 30,
au salon rouge. Merci beaucoup.
(Fin de la séance à 17 h 50)