L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Commission de la culture et de l’éducation

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission de la culture et de l’éducation

Version finale

40e législature, 1re session
(30 octobre 2012 au 5 mars 2014)

Le mercredi 1 mai 2013 - Vol. 43 N° 28

Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 23, Loi modifiant la Loi sur l’instruction publique concernant certains services éducatifs aux élèves âgés de moins de cinq ans


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Auditions (suite)

Fédération québécoise d'établissement d'enseignement (FQDE)

Université du Québec à Montréal (UQAM)

Centrale des syndicats du Québec (CSQ), Fédération des syndicats de l'enseignement (FSE),
Fédération des professionnelles et professionnels de l'éducation du Québec (FPPE)
et Fédération des intervenantes en petite enfance du Québec (FIPEQ)

Coalition des garderies privées non subventionnées du Québec

Intervenants

Mme Dominique Vien, vice-présidente

Mme Lorraine Richard, présidente

Mme Marie Malavoy

Mme Francine Charbonneau

Mme Nathalie Roy

Mme Danielle St-Amand

Mme Jeannine Richard

*          Mme Lorraine Normand-Charbonneau, FQDE

*          Mme Lise Madore, idem

*          Mme Michèle Demers, idem

*          Mme Monique Brodeur, UQAM

*          Mme France Capuano, idem

*          M. Marc St-Pierre, idem

*          M. Marc Bigras, idem

*          Mme Louise Chabot, CSQ

*          Mme Manon Bernard, FSE

*          Mme Thérèse Cyr, idem

*          Mme Johanne Pomerleau, FPPE

*          Mme Sylvie Tonnelier, FIPEQ

*          Mme Marie-Claude Collin, Coalition des garderies privées
non subventionnées du Québec

*          Mme Jacinthe Lavoie, idem

*          Mme Line Fréchette, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Onze heures trente-sept minutes)

La Présidente (Mme Vien) : Alors, bonjour, mesdames messieurs, et bonne matinée. Bienvenue à ces consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 23 qui, je vous le rappelle, est la Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique concernant certains services éducatifs aux élèves âgés de moins de cinq ans.

Alors, d'entrée de jeu, je vous demanderais de vérifier la sonnerie de vos téléphones cellulaires et tous autres appareils électroniques, donc, pour que ce soit sur sourdine.

Mme la secrétaire, signalez-vous des remplacements aujourd'hui?

La Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. M. Roy (Bonaventure) sera remplacé par Mme Richard (Îles-de-la-Madeleine) et M. Sklavounos (Laurier-Dorion), par Mme St-Amand (Trois-Rivières).

Auditions (suite)

La Présidente (Mme Vien) : Bien. Nous allons entendre aujourd'hui la Fédération québécoise des directions d'établissement d'enseignement, qui sera suivie de l'Université du Québec à Montréal; et, cet après-midi, nous entendrons la Centrale des syndicats du Québec et ses fédérations affiliées, et nous terminerons avec la Coalition des garderies privées non subventionnées.

Alors, bonjour à nos premières invitées de la Fédération québécoise des directions d'établissement d'enseignement, alors trois dames qui sont avec nous. Bienvenue dans votre Assemblée nationale. Vous disposez de 10 minutes pour nous livrer l'essentiel de votre message… de votre mémoire, après quoi s'ensuivront des discussions, des échanges entre les parlementaires et vous trois. Ça vous convient?

Des voix : Oui.

La Présidente (Mme Vien) : Alors, Mme Normand-Charbonne?

Fédération québécoise d'établissement d'enseignement (FQDE)

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Lorraine Normand-Charbonneau — bonjour — présidente.

La Présidente (Mme Vien) : Pardon, excusez-moi. Oui, il manque…

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Présidente.

La Présidente (Mme Vien) : …deux lettres, ici. Toutes mes excuses. La parole est à vous. Si vous voulez nous présenter les gens qui vous accompagnent.

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Oui, je vous présenterais les gens qui sont avec moi.

Mme Madore (Lise) : Lise Madore, vice-présidente de la FQDE.

Mme Demers (Michèle) : Michèle Demers, conseillère aux communications et à la vie politique, FQDE.

La Présidente (Mme Vien) : Bienvenue. On vous écoute, madame.

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Donc, dans un premier temps, la fédération voudrait vous remercier de nous accueillir et de nous donner l'opportunité, là, de présenter notre mémoire concernant le projet de loi n° 23.

Donc, la Fédération québécoise des directions d'établissement d'enseignement est le principal organisme professionnel représentant plus de 2 100 directions d'établissement d'enseignement en provenance de 22 associations régionales.

La mission de la fédé est de promouvoir le développement professionnel et l'excellence dans la direction des établissements d'enseignement au Québec ainsi que de défendre les droits des directions et directions adjointes d'établissement d'enseignement.

Ce mémoire présente la position de la Fédération québécoise des directions d'établissement d'enseignement à l'égard du projet de loi n° 23, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique concernant certains services éducatifs aux élèves âgés de moins de cinq ans.

«Les programmes d'éducation et de protection de la petite enfance devraient mettre en valeur le développement global de l'enfant et non se limiter à faciliter la transition de ce dernier vers la scolarité formelle. Une protection de l'enfant de grande qualité, notamment pour les enfants issus de milieux défavorisés, encourage la motivation, la confiance, le développement cognitif et linguistique et prépare à l'entrée à l'école.» C'est une citation de l'UNESCO.

• (11 h 40) •

D'emblée, la Fédération québécoise des directions d'établissement d'enseignement tient à faire valoir et comprendre aux différentes instances gouvernementales les besoins de ses membres pour mener à bien leur mandat de gestion et ainsi permettre aux élèves du Québec de recevoir les services les mieux adaptés à leurs besoins. Les directions d'établissement sont confrontées quotidiennement à une organisation du travail complexe et à une réalité de gestion d'établissement d'enseignement autour desquelles gravitent tous les acteurs locaux : parents, intervenants scolaires et communautaires. Considérant ces enjeux majeurs, la fédération croit que les directions d'établissement d'enseignement doivent bénéficier d'un droit de gestion autonome et responsable dans le but de répondre aux besoins spécifiques des élèves, de leur école et de leur environnement communautaire. Les décisions doivent se prendre près des élèves, et les directions d'école doivent disposer d'une marge de manoeuvre sur l'ensemble de leurs ressources afin de favoriser le succès de leurs élèves.

Tel que mentionné par le Conseil supérieur de l'éducation dans son avis paru en août 2012, Mieux accueillir et éduquer les enfants d'âge préscolaire, une triple question d'accès, de qualité et de continuité des services, la petite enfance est une période déterminante pour l'épanouissement de chaque individu, particulièrement chez la clientèle issue de milieux défavorisés. Permettre à l'enfant d'évoluer dans un environnement riche où, dès son plus jeune âge, il développera ses habiletés sociales et expérimentera des activités de littératie et de numératie, peut influencer de façon appréciable son parcours scolaire et surtout, à plus long terme, lui permettre de s'engager de façon positive dans la société. C'est pourquoi la Fédération québécoise des directions d'établissement d'enseignement salue la volonté de la ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport, Mme Marie Malavoy, de mettre en place, de manière progressive, la maternelle quatre ans à temps plein en milieu défavorisé.

L'investissement en éducation dès la petite enfance est un choix auquel nous adhérons. De plus, l'offre de services spécifiques aux plus vulnérables contribue à réduire les inégalités dans une société où l'accès à l'enseignement est un droit fondamental.

Un questionnement qui subsiste. La fédération croit que la modification à la Loi sur l'instruction publique concernant certains services éducatifs aux élèves âgés de moins de cinq ans amène bon nombre de questionnements et que ceux-ci devront être éclaircis avant de procéder à toute forme d'implantation de nouveaux services de maternelle quatre ans à temps plein auprès de la clientèle défavorisée.

Il est clair que l'implantation progressive du programme durant la première année facilitera la logistique de son déploiement. Elle facilitera également l'évaluation et le suivi du taux de réussite de cette première cohorte, mais encore faut-il que l'évaluation et le suivi soient effectués de manière ponctuelle et rigoureuse pour assurer l'atteinte de l'objectif premier qui est de favoriser l'insertion scolaire harmonieuse des enfants issus de milieux défavorisés.

Toutefois, il est évident que des choix déchirants devront être faits dans la sélection des enfants qui formeront l'unique classe de la commission scolaire. L'unique classe permettra-t-elle à ce projet d'être à la hauteur de ses ambitions? Comment sera déterminée l'école d'accueil de cette première cohorte? Les règles établies pour le choix des écoles, comme par exemple : La disponibilité des locaux répond-elle aux besoins réels des milieux? Quelles sont les véritables conditions nécessaires à mettre en place pour assurer la réussite de l'implantation? Le programme académique sera-t-il prêt? Comment les parents des territoires sélectionnés seront-ils rejoints? L'école a-t-elle les ressources suffisantes et nécessaires pour intervenir efficacement auprès de cette clientèle?

Permettre l'accès à la maternelle aux enfants de milieux défavorisés dès l'âge de quatre ans ne peut être l'unique façon d'augmenter leurs chances de réussite et de prévenir le décrochage scolaire. La recherche universitaire démontre également l'importance d'intervenir auprès des parents afin de les amener à participer au développement de leur enfant, notamment en lisant avec lui tous les jours et en lui faisant prendre conscience de l'omniprésence de l'écrit dans notre société.

Les apprentissages faits à l'école par l'enfant doivent se consolider à la maison. Si aucune mesure ne vient soutenir les parents, l'énergie déployée à l'école aura peu d'effet. Il faut briser l'isolement social engendré par la pauvreté et l'analphabétisme et travailler davantage en amont pour accompagner les parents et les diriger vers des services pour leurs enfants dès l'âge de deux ou trois ans.

L'implantation des maternelles quatre ans nécessite une organisation et une structure adaptées aux besoins des enfants de ce groupe d'âge. Qu'il s'agisse d'encadrement, de ratio, d'accompagnement ou encore d'aménagement physique des locaux, il est primordial de bien identifier les conditions gagnantes à la mise en place de ce projet.

L'intervention en groupe n'est pas toujours efficace auprès des jeunes enfants. Pour la majorité d'entre eux, comme nous pouvons le constater chaque jour, dans nos écoles, dans les classes du préscolaire, des interventions individuelles seront nécessaires. La qualité de l'accompagnement pédagogique dispensé sera alors tributaire de la formation appropriée des éducatrices et éducateurs.

L'actuel baccalauréat en éducation préscolaire et en enseignement primaire offrant peu de formation destinée à la petite enfance, les enseignants n'ont actuellement pas les outils pour intervenir adéquatement auprès de cette clientèle. Un programme de formation continue devrait être dispensé aux enseignants qui interviendront auprès de ces groupes afin qu'ils soient à la fine pointe des recherches et des nouvelles approches pédagogiques.

Sortir l'enfant de son milieu pour l'amener à l'école où il se retrouvera dans un groupe de 18 élèves qui ont peu ou pas fréquenté le service de garde nous apparaît un projet ambitieux qui mérite une grande réflexion si on ne veut pas qu'il soit voué à l'échec dès son implantation. Comment mener des interventions efficaces avec un ratio 1/18? La qualité du service dispensé dépendra des ressources qui seront allouées.

Les baisses de ratios dans les groupes durant les deux dernières années ont engendré de criants problèmes d'organisation scolaire. Actuellement, dans plusieurs régions du Québec, les écoles débordent et les élèves doivent vivre dans des locaux trop petits et bien souvent mal adaptés à leurs besoins. Qu'en sera-t-il avec ces classes? Pourront-elles bénéficier d'allocations spécifiques ou bien les restrictions budgétaires obligeront-elles, encore une fois, à fournir des services à rabais infructueux? Pour assurer la réussite de cette implantation et la longévité du projet, il est clair que les budgets devront être souples et permettre une latitude dans leur gestion et leur organisation. Les écoles pourront-elles utiliser les allocations en fonction des besoins de leurs milieux ou devront-elles se soumettre à des restrictions les encarcanant dans un dédale bureaucratique laissant peu de place aux réels besoins de chaque école? De plus, il nous apparaît nécessaire de rappeler que chaque classe devra être équipée d'une salle de toilette, d'un lavabo et d'un mobilier adapté à la taille des enfants. Les sommes requises pour l'aménagement de ces locaux sont-elles prévues dans le budget de 8,1 millions lors de la première année d'implantation?

Recommandations. La réussite de ce projet repose sur plusieurs facteurs que nous avons énumérés précédemment. Ajoutons qu'il est primordial que les décisions soient prises près des élèves en tenant compte des besoins des jeunes enfants et des facteurs susceptibles d'influencer leur cheminement scolaire. Il importera d'éviter l'improvisation et l'ouverture de classes tous azimuts sans avoir au préalable bien définis l'encadrement et les services qui doivent accompagner ces groupes.

Comme l'a souligné la ministre, Mme Marie Malavoy, l'implantation des maternelles quatre ans dans les milieux défavorisés vise les enfants n'ayant pas fréquenté un service de garde avant l'entrée à l'école. Nous espérons fortement que des efforts seront mis de l'avant pour faire en sorte de cibler cette clientèle.

Le nouveau programme devra tenir compte de la clientèle visée et nécessairement s'appuyer, entre autres, sur les dernières recherches en littératie et numératie pour mettre de l'avant un contenu qui respecte le processus d'apprentissage d'un enfant de quatre ans présentant des besoins particuliers.

En plus de ces recommandations, nous réitérons la position que nous diffusons depuis mars 2013 : la Fédération québécoise des directions d'établissement d'enseignement croit fermement qu'il faut respecter les besoins des milieux et éviter d'instaurer méthodiquement une classe par commission scolaire. Les régions où la concentration d'enfants défavorisés est plus grande et la vaste étendue des territoires desservis par une seule commission scolaire doivent absolument être considérées.

Il importe de consulter et d'impliquer les directions d'établissement qui ont une excellente lecture des besoins des jeunes et des parents de leur milieu et qui travaillent en étroite collaboration avec les organismes communautaires de leur région. Elles sont bien outillées pour contribuer à cette implantation.

Comme conclusion, le déploiement des maternelles quatre ans à temps plein en milieu défavorisé est un des sujets médiatiques de l'heure. Il est évident qu'il est actuellement d'une grande importance pour les instances gouvernementales. L'amélioration de la condition des enfants de quatre ans en milieu défavorisé est une cause noble à laquelle personne ne peut s'objecter. Mais la réalité veut que, l'an prochain, lorsque ce sujet ne fera plus la manchette, les directions d'établissement et leur équipe-école devront, malgré tout, considérer et régir les problématiques entourant l'implantation de ce nouveau service.

Un projet qui, au départ, est d'une grande noblesse, un projet qui aide non seulement les enfants, mais également leurs familles, ne peut se réaliser par le biais d'une quelconque improvisation et avec des demi-mesures s'il veut être à la hauteur de ses ambitions.

Pour assurer la réussite de ce projet dans nos milieux respectifs, nous avons besoin de soutien et de ressources adéquates, sans quoi il pourrait malheureusement s'ajouter à la liste des projets gouvernementaux qui ont avorté. Nous espérons que le ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport aura le courage de ses convictions pour mener ce dossier à bon port.

La Présidente (Mme Vien) : Merci, madame. Vous avez... Ah non, mais on a senti les efforts que vous avez mis pour arriver à l'intérieur du 10 minutes. Je vous félicite.

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : ...été alimenté avant.

La Présidente (Mme Vien) : Vous avez été très disciplinée. Ça vous a demandé un effort; ça s'entendait. Merci pour cette contribution.

On va débuter immédiatement les échanges entre Mme la ministre, et le côté ministériel, et vous trois.

Mme Malavoy : J'ai combien de temps, finalement?

La Présidente (Mme Vien) : Finalement, vous aurez 14 min 30 s.

• (11 h 50) •

Mme Malavoy : Bon. Alors, écoutez, je vais y aller avec célérité. Bien, merci d'être là, parce que vous êtes des partenaires absolument essentiels de ce projet-là. Je comprends que, sur le fond, vous êtes en accord avec nous qu'on… Moi, je dis, pour faire image, qu'on ajoute une porte d'entrée pour des enfants qui ne sont pas rejoints autrement, sans juger le réseau des centres de la petite enfance, qui font vraiment tout ce qu'ils peuvent. Mais il y a un certain nombre d'enfants de quatre ans qui bénéficieront d'une entrée à l'école en maternelle plus tôt que s'ils attendaient cinq ans. Donc, là-dessus, on s'entend.

Je peux vous rassurer, peut-être déjà, sur un certain nombre de choses. De notre côté, bon, vous savez qu'il y a un comité qui est en train de préparer le programme, qui est en train de répondre à un certain nombre de questions que vous vous posez. Je peux également, parce que j'ai abordé ça hier, la question de la formation des enseignants qui seront dans ces classes de quatre ans… et je peux vous dire que, dans notre esprit, cette formation sera aussi accessible aux directions d'école, O.K., parce qu'on commence quelque chose de nouveau. Alors, on évoquait, hier, six jours de formation qui pourraient être offerts dans chaque cas, mais pourraient se joindre les gens qui sont à la tête des écoles. Parce que, bien évidemment, c'est un petit changement, qui a l'air comme ça peut-être anodin, d'ajouter une classe, mais vous avez raison de dire : Il y a toute l'organisation matérielle des lieux, il y a tout le changement que ça fait quand même dans la vie d'une école. Vous aurez donc compris qu'on va faire tout en notre pouvoir pour qu'on soit prêts. Puis, en même temps, c'est une implantation progressive, donc c'est une classe pour le moment. On ne veut pas aller trop vite.

Mais je voudrais vous dire aussi qu'on a besoin de vous. On a besoin que vous partagiez avec nous, donc, ce projet, qu'il y ait des réponses que, vous, vous trouverez dans vos écoles parce que c'est vous qui avez la compréhension fine à la fois de l'organisation de votre école mais aussi du territoire. Alors, j'aimerais peut-être que vous me parliez d'abord de votre point de vue de la façon de rejoindre les élèves dont on parle. On a dit, il faut que ce soient des élèves de milieux défavorisés — on a évoqué l'indice de défavorisation 9 et 10 — qui viennent de quartiers, donc, identifiés défavorisés. On a également fait attention pour que ce ne soit pas l'enfant qui ait l'étiquette, O.K.? Ce n'est pas un enfant qui, dans son sac à dos, a une étiquette : «Je suis un défavorisé.» Mais on comprend qu'il y a ce qu'on appelle des unités de peuplement — ou, en tout cas, c'est le mot technique — qui font qu'on sait très bien que, dans certains quartiers, la grande majorité des gens sont de milieux défavorisés.

Alors, comment on va faire, selon vous — puis là je vous parle à vous parce que vous êtes quand même à la tête de nos écoles — pour les identifier, les enfants, et pour réussir à former une première classe? J'aimerais vous entendre là-dessus.

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Bien, effectivement, pour la fédération, c'est quelque chose qui nous interpelle; j'en ai souvent parlé à M. Veilleux. Ce que la fédération trouvait intéressant dans votre projet, c'était le fait que vous vous attardiez aux 20 quelques pour cent pour des enfants qui ne fréquentent pas un service de garde, un CPE, ou qui n'ont pas de service, là, au niveau, là, des CLSC, par exemple. Ce que j'entends dans le milieu, c'est que ce n'est pas nécessairement ça, là, qui se fait dans certains cas; c'est plus une facilité, là, de prendre les élèves qui sont... les enfants qui sont dans le projet Passe-Partout, par exemple, et de les mettre à temps plein. Donc, la fédération, ce qu'on voudrait, c'est qu'on voie dans le milieu une volonté, des efforts supplémentaires pour aller chercher, là, cette clientèle-là. Et, dans certains milieux à travers le Québec, il y a des beaux projets, là, qui se font, là, à ce niveau-là.

Pour les unités de peuplement, ce qu'on disait aussi, c'est, lorsque tu es dans une école défavorisée indice 9 et 10 et que malheureusement ton indice de peuplement fait en sorte que, dans la même bâtisse, tu n'as pas le droit… tu n'aurais pas le droit, là, au préscolaire quatre ans parce que ton code postal n'est pas sur la bonne rue, nous, ce qu'on voyait, dans le fond, c'est les besoins des enfants. Donc, indépendamment, là, du code postal, si l'enfant a des grands besoins, qu'il n'y a pas de service extérieur et que d'être à l'école au préscolaire quatre ans à temps plein ça peut l'aider à obtenir une meilleure réussite quand il va arriver en première année, nous, on ne voit pas de différence. On trouvait que c'était un frein, là, de... Je comprends que les unités de peuplement, c'est ce qui nous montre vraiment, là, la population défavorisée, mais c'est vraiment le service à l'élève pour les plus démunis ou les jeunes qui ont le plus de besoins, là, qui nous importait.

Mme Malavoy : Je voudrais enchaîner là-dessus parce que… bon, vous comprenez que nous, on introduit quelque chose de nouveau qui n'est pas universel. On n'est pas en train d'implanter une maternelle quatre ans pour tous les enfants du Québec, on ajoute quelque chose pour ceux et celles qui ne sont pas rejoints pour le moment. En même temps, il faut qu'on se trouve un minimum de règles. À partir du moment où ça n'est pas universel, c'est quoi? Qu'est-ce qui fait, par exemple, que je vais être capable de former un premier groupe dans chaque commission scolaire?

Alors, la règle que nous, on s'est donnée puisqu'il en faut une, c'est : visons des milieux qui sont identifiés, avec nos critères, comme étant particulièrement défavorisés. Il faut, moi, que j'arrive à faire quelque chose qui ne soit pas trop aléatoire, qui ne soit pas trop : «Pourquoi lui et pas moi?» Vous comprenez ce que je veux dire? Je sais que, dans certaines commissions scolaires, déjà on me dit... En fait, on me dit deux choses. On me dit, dans certains cas : On en veut plus qu'une, classe, on pourrait en remplir plus qu'une. Puis, dans d'autres, on me dit : Bien oui, mais on n'est pas sûrs d'en remplir une. Et, dans ce cas-là, je dis : À partir de six enfants, on vous financera pour un groupe d'une moyenne de 15.

Donc, j'aimerais vous entendre. Je comprends vos préoccupations. En même temps, moi, il faut que je me trouve des règles qui soient défendables au nom de l'équité. Et je ne peux pas être complètement discrétionnaire parce qu'à ce moment-là je crains, moi, de m'attirer des critiques que je croirais justifiées.

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : …pour un début, il faut avoir des règles, il faut que ce soit honnête, légitime, là, pour les familles. Mais la grande crainte qu'on a, c'est vraiment les jeunes qu'on va cibler, parce qu'on voit présentement, dans le réseau, que ça devient facile de prendre les enfants qui sont venus s'inscrire en maternelle quatre ans et de faire une première classe à temps plein. Il y a des milieux… C'est ce que j'entends. Il y a déjà des milieux, là, qui ont commencé.

Ce que je vous dirais d'emblée, on accueille favorablement le fait que vous avez mis la pédale douce et que c'est un groupe, là. C'est certain que certains endroits, ils n'ont pratiquement pas de clientèle défavorisée. Par contre, il y a d'autres endroits, c'est beaucoup de clientèles défavorisées. Donc, en implanter une dans un endroit où il n'y a pratiquement pas d'enfants défavorisés, tandis que, dans l'autre milieu, la plupart de nos milieux, c'est... dans le quartier, la plupart des familles sont défavorisées… Mais on comprend qu'il faut un début. Où on avait un questionnement, c'est que le fait de les faire arriver à l'école, ces enfants-là qui ont des besoins spécifiques, est-ce que ces enfants-là vont avoir le droit au psychologue de l'école, à l'orthophoniste de l'école?

Ce que j'entends, dans certains milieux présentement, pour les maternelles quatre ans ou pour Passe-Partout, ce n'est pas tous les endroits que les enfants ont accès aux professionnels de l'école. Donc, il faudra s'assurer que ces professionnels-là, qui sont là pour les enfants de cinq ans, au primaire, là, jusqu'à la sixième année... bien, que ces enfants-là aient aussi le droit aux professionnels.

Donc, c'est des questionnements qu'on a, au niveau de l'organisation. On sait que, présentement, la maternelle quatre ans, c'est souvent le dernier local de l'école. Je l'ai vécu par expérience, c'est le local qui est au sous-sol. Il n'y a pas beaucoup de place, dans les écoles, parce qu'il y a moins d'élèves dans les regroupements. Donc, il faut s'assurer, si on veut que les enfants aient les plus beaux apprentissages, que l'endroit soit agréable pour les enfants. Il faut avoir les conditions gagnantes. Puis c'est ça qu'on a peur un peu : qu'il y ait des règles qui sont établies… qu'on envoie l'argent selon des règles spécifiques et, à un endroit par exemple : Je l'ai, le local, mais c'est du matériel pédagogique que je n'ai pas, que j'aurai besoin, là, d'acheter du matériel pédagogique. Dans les matériels pédagogiques, il y a des jeux que j'aurai à acheter; parfois, c'est des livres. C'est cette latitude-là qu'on veut avoir, dépendamment du milieu dans lequel tu es, d'avoir la possibilité de s'ajuster selon les milieux.

Une voix : Est-ce que je peux...

Mme Malavoy : Comme on n'a pas énormément de temps, je voudrais continuer… bien, d'abord, en vous précisant que, dans les calculs que nous faisons pour financer ces élèves-là, il y a une somme réservée à des services supplémentaires et à du matériel didactique, O.K.?

Une voix : Ah bon!

• (12 heures) •

Mme Malavoy : Près de 600 $. C'est un estimé, là, O.K., dans notre... Per capita, là, il y a une somme. Donc, je reconnais tout à fait avec vous qu'il faut… Précisément, si c'est des enfants qui sont vulnérables, il faut qu'ils puissent avoir accès à certains services.

Pour ce qui est de l'organisation matérielle, c'est certain que nous, on dit aux écoles : Écoutez, on va en choisir une qui pense qu'elle a ce qu'il faut. On n'est pas dans un modèle où on peut agrandir l'école avec ce projet-là. On commence modestement puis ce qu'on souhaite, c'est ce que ça marche bien puis… donc, après, qu'on rejoigne les enfants qui sont ciblés, mais on va commencer modestement.

J'aimerais vous entendre sur le rôle du conseil d'établissement. Certains sont venus nous dire qu'ils souhaiteraient que le conseil ait un rôle à jouer, puis ça comprend des parents qui, également, veulent avoir voix au chapitre. Quel rôle voyez-vous au conseil d'établissement par rapport à ce projet spécifique?

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Je vous dirais que, le conseil d'établissement, son rôle est global dans l'école, il n'est pas seulement là pour les maternelles quatre ans, il est là pour tous les enfants. Il doit s'assurer que, dans l'école, on sert les intérêts des élèves. Moi, ce que je verrais plus, c'est le rôle des parents de ces enfants-là — je sais que vous allez donner des sommes d'argent aussi pour être capable, là, d'avoir des projets avec les parents — parce que ce qui fonctionne dans les écoles, c'est d'avoir des moments où les parents peuvent venir à l'école soit accompagner leurs enfants, soit assister à des miniformations de prélecture, de préécriture. C'est ces sous-là qu'il nous faut pour les parents.

Je vous dirais que le conseil d'établissement, comme je vous ai dit tantôt, c'est un rôle… c'est un rôle global de s'assurer que, dans l'école, le service est adéquat pour les enfants. Donc, je ne le vois pas spécifiquement pour la maternelle quatre ans. C'est pour tout le monde dans l'école.

Mme Madore (Lise) : Par contre, est-ce que je peux rajouter...

Mme Malavoy : ...

Mme Madore (Lise) : Excusez, Mme la ministre. Par contre, ce que j'aimerais rajouter, moi, ce que j'ai pu constater, les milieux où les conseils d'établissement ont, autour de la table, des gens de la communauté et surtout des partenaires du milieu de la santé et des services sociaux... Tout à l'heure, on a parlé de ce qui pourrait être positif par rapport à l'établissement des maternelles quatre ans en milieu défavorisé puis comment cibler la clientèle. Je sais que les écoles où il y a eu des projets en collaboration avec les services sociaux et la santé, c'est plus ouvert et, je dirais, plus facile pour eux de passer à l'action.

La Présidente (Mme Vien) : Merci. Mme la ministre.

Mme Malavoy : O.K. Vous avez abordé une autre question qui a été touchée également hier et dans les jours précédents, la question de la formation des enseignants. Les personnes qui sont chez vous ont un baccalauréat, une formation de quatre ans, quatre années universitaires, baccalauréat en enseignement préscolaire et primaire. Certaines personnes sont venues nous dire qu'ils n'étaient pas sûrs d'avoir la formation qu'il fallait. Vous avez évoqué ça, vous aussi, mais vous connaissez les enseignants de maternelle... ce que vous en connaissez, parce que c'est des personnes qui sont vraiment dédiées à la petite enfance et, souvent, qui ont une formation pour aller dans d'autres échelons, mais qui décident que, vraiment… se consacrent plus à la petite enfance. Pensez-vous qu'avec un peu de formation et évidemment un programme adapté elles peuvent jouer le rôle positif qu'on attend dans notre projet?

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Effectivement, pour les gens déjà en place...

La Présidente (Mme Vien) : Mme Charbonneau. Une minute pour répondre, Mme Charbonneau.

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Pour les gens, les enseignantes ou les enseignants déjà en place, effectivement, des formations, ça serait utile. Ce que les gens du milieu nous disent, c'est que le baccalauréat au niveau du préscolaire — parce que le baccalauréat, c'est préscolaire, élémentaire — il y aurait lieu de regarder les programmes pour mettre un peu plus, là, d'accent sur le préscolaire. Mais effectivement il y aurait lieu, là, de donner de la formation. Les gens ont de l'ouverture aussi, là, à la formation.

Je vous dirais que le programme, on en a noté... on l'a noté aussi, là, que ce soit vraiment un programme qui répond à ces enfants-là et non pas un programme qui est la maternelle à quatre ans mi-temps multiplié par deux.

La Présidente (Mme Vien) : Merci beaucoup, Mme Charbonneau. C'est le temps que nous avions pour nos collègues du côté ministériel. Du côté de l'opposition officielle, Mme la députée de Mille-Îles.

Mme Charbonneau : Qui porte le même nom de famille que vous, Mme Charbonneau. Mesdames, bienvenue chez vous. Merci pour la présentation. J'ai 12 minutes, alors je ne ferai pas beaucoup de flaflas, je vais aller dans mes questions puis je suis sûre que vous allez me suivre.

Je poursuis un peu dans la même ligne que la formation, parce qu'effectivement il y a plusieurs personnes qui nous ont interpellés sur la formation, et, à partir du moment où on se questionne, il faut quand même se le rappeler, nos enseignants, la plupart au préscolaire, sont des enseignants de très grande expérience parce que, quand on rentre au préscolaire, on veut rester au préscolaire. Par contre, dans le projet qu'on a vu hier, qui est de l'école Saint-Zotique, il y avait deux intervenants. Il y avait une enseignante qui était accompagnée, et c'était fort intéressant, d'autant plus qu'il y a probablement eu d'autres personnes qui se sont jointes tranquillement, parce qu'il y a une étude... Il y a des chercheurs qui ont donné un coup de pouce. Vous y voyez une personne, deux personnes? Le ratio 1-15, ça vous va? Par rapport à cet... Le principe de l'équipe, là, vous voyez ça comment?

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Effectivement, le projet de Saint-Zotique, parce que j'ai assisté à la présentation, même avec une personne le matin à mi-temps, ils ont dû faire des choix. Ils ont décidé que la personne serait le matin puis que, l'après-midi, c'était plus léger. Mais, ce qu'on pense à la fédération, c'est, effectivement, quand… que ça soit 18 élèves ou que ça soit 15 élèves, quand tu amènes des enfants à l'école, de ces milieux-là, les enfants ont besoin d'aide. Donc, nous, ce qu'on voit, c'est : Oui, ils devraient avoir les ressources disponibles, de l'accompagnement avec une enseignante. Présentement, il y a des maternelles quatre ans, je l'ai vécu dans mon école : une enseignante avec 15, 18 élèves qui sont identifiés par les CLSC, seule dans sa classe. Ce n'est pas facile. Donc, effectivement, il faut de l'aide ponctuelle, soit d'éducateurs, à avoir accès aux services professionnels de l'école. Et, oui, 15, c'est mieux que 18, mais c'est encore pas... c'est comme les CPE à neuf.

Mme Charbonneau : Les CPE, c'est 1-10 pour les quatre ans.

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : 1-10.

Mme Charbonneau : Mais, s'ils sont deux et ils sont 15, j'imagine... Hier, le Conseil supérieur de l'éducation disait : Plus d'yeux, c'est toujours mieux. Il a dit : Quatre paires d'yeux, mais il voulait dire quatre yeux et non quatre paires, là. Mais, ceci dit, plus d'yeux, c'est mieux, plus de mains, c'est mieux. Quand c'est le temps de mettre des diachylons puis de faire des caresses, c'est toujours plus facile quand on a plus de gens pour le faire.

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : ...à la FAE où ils n'ont pas d'accompagnement, et ce n'est pas facile.

Mme Charbonneau : On leur posera des questions quand ils seront là…

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : C'est ça.

Mme Charbonneau : …ça nous fera plaisir. Des fois… pas «des fois», la plupart du temps, en éducation, on s'organise comme on peut, puis vous en savez quelque chose puisque vous êtes des directions d'école. Vous en savez quelque chose. Donc, le ratio, c'est réglé.

Vous disiez : C'est un programme qui va s'implanter doucement, tranquillement, puis avec raison, parce qu'on ne peut pas bousculer une bonne idée. Une bonne idée, elle est bonne si elle est bien gérée. Elle devient très mauvaise, malgré toutes ses valeurs, si elle n'est pas bien faite.

Par contre, vous n'êtes pas les premiers à nous dire : Dans certains milieux, il serait intéressant d'en avoir plus; dans d'autres milieux, ce n'est peut-être pas nécessaire. Je vous pose la question, puis elle n'est pas piégée, rien, là. Je la pose parce que j'ai l'opportunité de le faire : Dans une commission scolaire comme Montréal — je vais prendre la plus grosse, là — où on peut identifier avec beaucoup de facilité l'îlot de défavorisation, il y en a plusieurs, est-ce que ça serait plus intéressant d'ouvrir plusieurs groupes dans une commission scolaire, je vais dire au détriment — le mot est mal choisi, mais j'ai compris, hier, en utilisant «ghetto» que j'utilise souvent les mauvais mots, ça fait… — d'autres commissions scolaires qui auraient plus de difficultés à en mettre en place? Et je reviens au principe d'équité et d'égalité. Par contre, peut-être que, dans un milieu où je ne peux pas faire de groupe, je peux faire des places en CPE, puis là j'amène un service qui peut être équitable puisque mon service est diversifié, au Québec, pour aider mes enfants… les enfants. Donc, est-ce que ça serait acceptable par votre fédération de dire : Bon, bien, dans un milieu, on peut en ouvrir trois, parce que c'est plus facile, parce que les ressources sont plus là, parce que le besoin est plus nécessaire? Parce que 18 élèves à Montréal puis 18 élèves dans une commission scolaire anglophone de la Côte-Nord, ce n'est pas pareil. Donc, est-ce que je suis équitable? Je vous pose la question.

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Je vous disais que vous allez être équitable en autant qu'un ne nuira pas à l'autre. Donc, qu'il y en ait plus à Montréal parce qu'il y a plus de poches de pauvreté, je n'ai pas de problème avec ça. Mais, si, par exemple, sur la Côte-Nord ou en Abitibi, c'est ce que j'entends, où les gens vont avoir de la difficulté à faire un groupe de 18 parce qu'ils sont sur un territoire qui est vaste... il faudra, comme vous disiez tantôt, là, peut-être créer des places dans des CPE pour accueillir ces enfants-là. Donc, en autant que les gens qui ne sont pas dans les centres urbains ou dans les poches où il y a moins, là, de pauvreté, que ces gens-là aient des services accessibles, il n'y a pas de problème.

• (12 h 10) •

Mme Charbonneau : Le programme, vous l'avez abordé avec la ministre, donc j'ai compris que vous étiez à l'aise avec un rehaussement de la qualité au programme de nos enseignants, là, au niveau du préscolaire, dans la formation des maîtres.

Je veux revenir sur un sujet qui est difficile mais qu'il faut adresser, parce que, veux veux pas, on a beau dire 8 millions d'un côté, 500 $ par enfant pour investir, mais il faut penser à l'autre aspect, c'est-à-dire, quand j'arrive en première année, deuxième année, est-ce que j'ai encore des services? Parce qu'il y a des coupures qui se font en éducation, puis c'est important de se le rappeler.

Donc, vous avez mentionné les ressources. Est-ce que, de votre côté, il se vit des coupures dans les décisions que votre commission scolaire prend? Parce que vous avez à gérer les décisions du conseil des commissaires qui redescend vers vous. Est-ce qu'il y a des décisions qui se prennent qui touchent directement le service à l'élève, soit par le biais de l'orthophonie ou les choses comme ça, qui pourraient être défavorables? Malgré tous les efforts que je mets en quatre ans, quand j'arrive en première année, si je n'ai plus de services, bien, mes efforts, les efforts, les vôtres comme ceux des intervenants, viennent de s'égrener un petit peu parce que je n'ai plus grand-chose rendu là, là. Donc, de votre côté, est-ce qu'il se vit une espèce de différence par rapport à une volonté de mettre en place un service... mais le déchirement qui arrive, après ça dans les autres cycles, du manque de service?

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Effectivement, présentement, le service à l'élève est affecté. Je vous dirais que ce n'est pas seulement qu'en première année, ça va être en maternelle quatre ans. S'il n'y a pas de soutien qui arrive avec le projet de loi n° 23, avec l'implantation des maternelles quatre ans, ce n'est pas avec les ressources que j'ai présentement dans mon école pour maternelle cinq ans — un, deux, trois, quatre, cinq, six — que je vais être capable d'aller en donner aux quatre ans. Donc, tu en as un minimum, puis c'est avec ça que tu as à gérer ton école. Donc, l'arrivée de ces enfants-là dans l'école, si ces enfants-là ne génèrent pas de l'aide supplémentaire, je vais l'égrener encore plus.

Mme Charbonneau : Ça ne me rassure pas, mais on va...

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : C'est ce qu'on vit présentement.

Mme Charbonneau : Oui, oui, oui. Bien, on est tous sur des territoires scolaires.

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : C'est ça.

Mme Charbonneau : On entend tous à peu près la même chose et on sait qu'il y a des décisions qui se prennent qui sont difficiles. Puis ça, on le sait, on sait que ce n'est pas simple. Puis vous avez à couvrir du moins le strict minimum, et ça, la marge de manoeuvre est pauvre.

Au niveau des emplacements, vous avez parlé que, quelquefois, le préscolaire quatre ans est situé dans l'école d'une façon... le mot est encore mal choisi, de façon poche, mais, en même temps, on essaie de donner un service à mi-temps dans la meilleure possibilité. La ministre a bien dit, puis je pense que c'est important de se le rappeler : La commission scolaire devra choisir où elle peut donner du service. Donc, j'imagine qu'elle va faire un choix soucieux des locaux, puis de l'endroit, puis de la proximité des services aussi pour les jeunes. Ça, j'en suis certaine. Par contre, les années vont avancer, puis je vais avoir besoin d'ouvrir des locaux peut-être ailleurs, puis c'est peut-être là que je vais me ramasser dans un endroit un peu moins intéressant. Mais la cour d'école… Je me le demande parce que j'ai vu des endroits où la cour d'école était aménagée, pour les cinq ans, en retrait pour ne pas trop les mélanger. Mais là, à quatre ans, en tout cas, dans ma vision à moi, j'ai... Tranche d'histoire, j'ai trois enfants, ils ont un an de différence. Ils vont m'en vouloir à vie d'avoir dit ça, mais j'ai trois enfants, ils ont un an de différence, et je me souviens qu'entre quatre et cinq, là, il y a une différence, une différence de grandeur, il y a une différence de mobilité, il y a une différence d'agilité. Est-ce que, dans les cours d'école scolaires du Québec, je suis habilitée pour recevoir mes jeunes de quatre?

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : C'est vrai que la différence entre quatre ans et cinq ans, j'ai le même problème avec les enfants de première année, deuxième année. Dans la cour d'école, il y a des endroits où les première, deuxième, troisième vont aller jouer, les quatre, cinq, six vont aller jouer. Donc, j'ai la même problématique au niveau de la cour d'école avec les autres groupes d'âge.

Puis peut-être tantôt, quand vous avez parlé de cibler… que la commission scolaire va cibler l'endroit, nous espérons que les directions d'école vont être partie prenante de la décision, là, parce que ce que j'entends dans le milieu présentement, ce n'est pas toujours le cas. Donc, les directions d'école, c'est nous qui sommes sur le terrain, on connaît notre... des fois, on connaît un voisin qui connaît un voisin qui sait qu'il y a un enfant qui ne vient pas à l'école, donc nous espérons que nous allons participer, là, à ce débat-là.

Mme Charbonneau : C'est drôle, de mon côté, je ne suis pas inquiète. Parce qu'habituellement après vos inscriptions on compte le nombre de chaises qui va avec le nombre... je ne vous dirai pas comment je le disais avant parce qu'ici c'est antiparlementaire, mais on compte le nombre de chaises pour aller avec le nombre d'enfants et on s'assure des places disponibles et des locaux multifonctionnels, hein? Si vous avez encore une bibliothèque, bravo, mais il y a des écoles qui n'ont plus de bibliothèque parce qu'ils ont fait des choix d'utiliser le local disponible. Mais je suis sûre que vous allez être mis à contribution. Je suis vraiment... C'est drôle, moi, de mon côté, ce n'est pas ça qui m'inquiète. Ce n'est pas votre participation puisque la direction générale va vous donner un coup de fil pour vous dire : Vous avez des places disponibles? Yé! On va les utiliser.

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Ce que j'entends présentement dans le milieu, dans certains endroits, ce n'est pas ça qui se passe.

Mme Charbonneau : O.K. Bon, bien, on en prend bonne note. Ne craignez rien, c'est la bonne place pour le dire. La ministre de l'Éducation est assise avec nous. Prête pour la rentrée scolaire?

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : La direction d'école, c'est tout le temps la personne qui est sur le plancher puis qui essaie, là, de mettre en place un bon service. C'est pour ça que nous, ce qu'on disait, on appréciait que ça soit quelque chose qui soit fait, là, avec la pédale douce, comme Mme Malavoy, là, vous l'avez souligné. Mais, même avec la pédale douce, il y a des endroits où il n'y aura pas la qualité et les conditions gagnantes pour que les enfants, là, soient bien dans l'école. On est dans un dilemme. Est-ce que c'est mieux de les amener à l'école dans des conditions minimales ou de les laisser à la maison, ne pas leur donner de services? C'est souvent ça qu'on... à ça que la direction d'école a à faire face, là. En maternelle quatre ans présentement, là, il y a 15, 16, 17, 18 enfants qui ont des besoins spécifiques ensemble dans une classe avec un enseignant. Des fois, tu vas en avoir un qui a une grosse problématique. Tu vas dire : O.K. je n'en prendrais pas 15, je vais en prendre 14, parce que tel élève en demande plus, parce que tu n'as pas d'aide, là.

La Présidente (Mme Vien) : Merci beaucoup, Mme la députée de Mille-Îles. Mme la députée de Montarville, c'est maintenant votre tour pour une durée de trois minutes à peu près.

Mme Roy (Montarville) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci, mesdames. Merci pour votre mémoire. Je constate à sa lecture que vous êtes en faveur du principe, qui est très louable, à aider les petits de quatre ans qui ne seront pas passés par les CPE. Cependant, je vois aussi, puis je vous entends aussi, qu'il y a beaucoup de crainte, crainte à l'égard de l'implication. Vous êtes sur le terrain, vous êtes dans les écoles. Je vous soumets l'hypothèse... la suivante. Vous avez parlé des conseils d'établissement. Ne pensez-vous pas que les conseils d'établissement, qui sont en première ligne, devraient en grande partie être le partenaire pour l'implantation et prendre, en quelque sorte, la responsabilité et garantir cette implantation-là de ces maternelles puisque vous êtes là et vous savez ce que vous pouvez faire?

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Je vous dirais que le conseil d'établissement, oui, c'est un de ses mandats, mais c'est le mandat de toute l'école. C'est certain que, si le conseil d'établissement... Au conseil d'établissement, il y a le personnel de l'école, il y a le personnel professionnel, le personnel de soutien. Je veux dire, si les gens, ensemble, voient que les conditions gagnantes ne sont pas là, c'est certain que ces gens-là peuvent faire des pressions politiques pour aller chercher de l'aide. Mais c'est les chiens de garde de l'école, de s'assurer que les services de leurs enfants sont les meilleurs.

Mme Roy (Montarville) : Que diriez-vous à l'hypothèse que nous pourrions inscrire dans la loi le fait que les conseils d'établissement soient justement les responsables de cette implantation puisqu'ils sont sur le terrain, ils sont là, ils le savent? Vous souleviez des craintes, entre autres à l'égard des locaux non disponibles, des ressources non disponibles. Les conseils pourraient identifier les endroits pertinents où c'est possible ou non possible, mais qu'eux le décident ou, du moins, en aient cette responsabilité.

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Je vous dirais que, présentement, ces marges de manoeuvre là, même si vous le mettez dans la loi, que ça appartient au conseil d'établissement... On ne les a pas, les marges de manoeuvre présentement parce qu'à la commission scolaire on n'a pas... On a tant de sous, on ne peut pas les donner parce qu'on ne peut pas mettre des lavabos, mettre des salles de... des toilettes. Je vous dirais que, même si vous leur donnez la responsabilité, ils n'auront pas les marges de manoeuvre pour le faire. Ils n'auront pas... Dans le système, ils n'auront pas la latitude d'être capables de l'organiser correctement, parce qu'il va manquer telle chose, telle chose. Il n'y aura pas les sous, il n'y a pas l'organisation.

Ça serait la meilleure chose, parce que le conseil d'établissement, c'est la communauté, là, éducative. On parlait, tantôt avec madame, là, des services santé et services sociaux dans l'école. Ton conseil d'établissement, c'est ceux qui ont le droit de regard. C'est les gens qui ont le droit de regard, qui regardent si tout va bien dans l'école. Mais il faut quand même leur donner la marge de manoeuvre. Quand on vient pour approuver le budget de l'école, le budget de la commission scolaire... J'ai déjà vu mon conseil d'établissement dire : Non, je rejette le budget. Ce n'est pas parce que moi, je n'avais pas fait mon travail. Mais ils ont rejeté le budget de la commission scolaire. Donc, une fois que tu as rejeté le budget de la commission scolaire, c'est un gouvernement local, donc il dit : Regarde, tu vas avoir ces argents-là, le conseil d'établissement ne peut pas rien faire. Et on le vit à chaque jour, ça, dans les écoles.

Mme Roy (Montarville) : Je vous remercie beaucoup.

Mme Normand-Charbonneau (Lorraine) : Ça me fait plaisir.

La Présidente (Mme Vien) : Mesdames, merci beaucoup de votre contribution aujourd'hui. Bon retour.

Je suspends quelques instants, le temps de recevoir les représentants de l'Université du Québec à Montréal. Merci infiniment.

(Suspension de la séance à 12 h 20)

(Reprise à 12 h 22)

La Présidente (Mme Vien) : ...plaisir ce matin de recevoir l'Université du Québec à Montréal, avec sa porte-parole, Mme Monique Brodeur. Comme toujours, vous avez 10 minutes pour nous présenter l'essentiel de votre mémoire et de vos réflexions, après quoi s'ensuivent des discussions avec les parlementaires.

Alors, Mme Brodeur, merci d'être là. Veuillez, s'il vous plaît, nous présenter les gens qui vous accompagnent. Et nous sommes en mode écoute tout de suite après. Merci.

Université du Québec à Montréal (UQAM)

Mme Brodeur (Monique) : Ça me fait plaisir de vous présenter France Capuano et Marc Bigras, professeurs à l'UQAM — Christa Japel n'a pas pu être avec nous malheureusement ce matin — et Marc St-Pierre, qui a été directeur général adjoint à la commission scolaire de la Rivière-du-Nord.

Il y a près de 50 ans, le rapport Parent affirmait que «l'on ne s'engagera à fond dans les réformes pédagogiques, administratives et financières que si l'on est fermement convaincu du droit de chacun à la meilleure éducation possible. La reconnaissance de ce droit est en définitive la raison principale pour faire tous les changements proposés.»

Le Québec peut être fier des progrès accomplis depuis les années 60. Toutefois, les statistiques relatives au décrochage scolaire et à l'analphabétisme indiquent qu'un problème majeur persiste en milieux défavorisés. Pour le résoudre, il nous faut poursuivre nos efforts et orchestrer soigneusement nos actions afin que les enfants de milieux défavorisés bénéficient eux aussi de la meilleure éducation possible. La maternelle quatre ans à temps plein avec curriculum enrichi représente une mesure éducative vitale pour l'atteinte de ce but.

En ce début du XXIe siècle, naître dans une famille où la mère est peu scolarisée et où le revenu familial est sous le seuil de la pauvreté ne permet pas à un enfant de bénéficier de façon optimale des ressources nécessaires à son plein développement. Au Québec, la défavorisation est présente dans toutes les régions. Sur l'île de Montréal, elle y atteint toutefois un niveau alarmant. On y retrouve en effet près de 30 % des écoles les plus défavorisées du Québec. La majorité de celles-ci se retrouvent à la CSDM.

Dans son étude En route pour l'école, la Direction de santé publique de Montréal, en 2008, constate que 35 % des enfants montréalais sont vulnérables au moment de leur entrée à l'école. Or, les enfants vulnérables manifestent, au début de leur scolarisation, des lacunes cognitives importantes et un niveau plus élevé de comportements problématiques comme l'agressivité physique, l'hyperactivité et l'inattention. Ils risquent, à divers égards, d'éprouver des difficultés dans leur cheminement scolaire.

L'examen des trajectoires de développement des enfants qui manifestent fréquemment des difficultés de comportement à la maternelle révèle qu'un grand nombre d'entre eux vont maintenir un taux élevé de difficultés comportementales tout au long de leur scolarité. Ils sont également à risque de présenter des difficultés sur le plan académique, de décrocher de l'école ainsi que de manifester des problèmes de délinquance et d'intégration sociale. Les coûts sociaux associés à cette problématique sont énormes.

Une étude québécoise récente va dans le même sens, précisant que les difficultés en lecture à sept ans, le fait d'être peu altruiste et de provenir d'une famille à faibles revenus caractérisent les enfants à risque de décrochage scolaire. Au Québec, le nombre de décrocheurs est de 26 %. Ce pourcentage peut s'élever à 52 %, voire à 59 % dans certains quartiers défavorisés de Montréal. Plusieurs d'entre eux sont analphabètes complets ou fonctionnels. Ils peinent à gagner leur vie, à demeurer en santé et à s'intégrer socialement. Rappelons que le Québec compte 49 % d'analphabètes contre 42 % au Canada.

Afin de permettre aux enfants de milieux défavorisés de se libérer de cette situation et de pouvoir se développer pleinement, que faire? Un consensus se dégage quant à l'importance d'intervenir dès la petite enfance. L'analyse des services actuels révèle pourtant que la qualité nécessaire actuellement n'est pas au rendez-vous. Donc, quoi faire?

Le bien-être et le plein développement des jeunes enfants reposent sur deux conditions essentielles. Premièrement, ils ont besoin de relations stables et affectueuses avec un nombre limité d'adultes capables de répondre à leurs besoins. Deuxièmement, il est essentiel qu'ils puissent s'épanouir dans un environnement sécuritaire, prévisible, stimulant. Améliorer la qualité des services préscolaires signifie agir sur la structure des services, le ratio, l'environnement, la formation et l'accompagnement des intervenants. C'est aussi agir sur les interactions adultes-enfants et sur les activités éducatives. Les expériences démontrent qu'on obtient des résultats positifs à court et à long terme grâce au programme High/Scope avec un ratio éducateur de 1-5. Actuellement au Québec, pour les enfants de quatre à cinq ans, le ratio est de 1 pour 10.

L'aménagement doit évidemment être aménagé de façon sécuritaire et stimulante. Le principal investissement est considéré dans le développement de l'offre de services éducatifs préscolaires et la qualification et la formation des intervenants. Ils doivent être capables de créer un lien de confiance avec l'enfant et de construire autour de lui un environnement stimulant. Cela est possible grâce à une qualification universitaire avec une spécialisation en développement de l'enfant qui favorise les pratiques de qualité. Il existe un lien fort entre les qualifications spécialisées, des pratiques de qualité et la performance des enfants. Le niveau de formation des intervenants représente un meilleur prédicteur de qualité des pratiques que le ratio éducatrice-élèves ou la taille du groupe. Il importe donc de bonifier la formation initiale et continue des intervenants et de veiller à ce que les personnes qui occuperont les postes aient les qualités requises.

Le programme préscolaire québécois s'inspire du programme High/Scope. Or, depuis 50 ans, High/Scope a beaucoup innové. L'approche par le jeu demeure toujours au coeur du programme. Toutefois, les enseignants sont maintenant invités notamment à favoriser l'engagement des enfants dans des activités reliées à des contenus spécifiques. Ils sont également encouragés à soutenir les enfants dans leur apprentissage de la résolution de conflits cognitifs et socioaffectifs. Une étude réalisée en Ontario montre qu'un programme de maternelle quatre ans temps plein a un impact positif même en cinquième année. Enfin, une méga-analyse conclut que la stimulation en bas âge s'avère un très bon prédicteur de la réussite scolaire, tout particulièrement pour les jeunes provenant de milieux défavorisés. Cette stimulation précoce est d'autant plus efficace si elle est structurée, menée par des gens compétents en la matière et regroupe une quinzaine d'enfants et est intensive.

Les programmes éducatifs préscolaires visent les enfants de milieux défavorisés, ont démontré leur efficacité pour préparer les enfants à l'école, comportent tous une composante familiale. Il importe également d'établir une collaboration étroite avec tous les autres partenaires pour réussir à rejoindre les familles de milieux défavorisés. Le projet pilote de Saint-Zotique a été présenté hier et est décrit dans l'annexe que vous avez reçue. Donc, je vais passer rapidement. La plupart des enfants vulnérables de cette école ont peu ou pas fréquenté de services de garde lors de leur petite enfance, puis une étude de leurs besoins en 2007 révélait qu'il fallait intervenir. Donc, l'école a contacté des chercheurs de l'UQAM avec qui, c'est important de le dire, elle travaillait déjà depuis plusieurs années pour des programmes de prévention en lecture à cinq ans et en première année, et ce, avec succès.

L'enseignant effectivement était accompagné, le matin, par l'éducateur. C'était un choix dû aux limites budgétaires. L'idéal aurait été qu'il soit présent... que l'éducateur soit présent toute la journée également. Donc, les intervenants ont participé à de la formation offerte par les chercheurs et ont été accompagnés par eux, et la direction de l'école a favorisé l'accès à des services spécialisés aux enfants qui avaient des retards de développement et des difficultés de comportement avec des intervenants du CSSS Saint-Henri, qui a également offert du soutien aux parents.

En enrichissement du programme de l'école québécois… donc, des activités ciblées ont porté sur des dimensions critiques favorables à la préparation à l'école. Ensuite, un soutien aux familles est offert par la travailleuse sociale rattachée au CSSS, ce qui a permis finalement une collaboration entre le réseau de la santé et celui de la santé et services sociaux de façon à ce que les parents d'enfants en difficulté de comportement bénéficient de services à domicile. Les résultats préliminaires sont encourageants. On s'entend que c'était limité à une école seulement.

Donc, au terme de ça, il y a des conclusions qui nous touchent. Il faut signaler aussi, peut-être, un élément important avant de voir les recommandations. C'est possible de reproduire des interventions de ce type-là à plus grande échelle. Marc St-Pierre, tantôt, pourra vous dire comment on procède.

• (12 h 30) •

Donc, c'est important que les personnes en position d'autorité veillent à ce qu'à tous les niveaux tout le monde travaille ensemble dans la même direction pour trouver des solutions à une implantation de qualité. Il faut : assurer la mixité d'appartenance socioéconomique des enfants; garantir un ratio de deux adultes par groupe d'élèves; ensuite, assurer la qualification, la formation, l'accompagnement des enseignants et des éducatrices en lien avec le caractère spécifique du quatre ans en milieu défavorisé; implanter un curriculum enrichi fondé sur des avancées scientifiques en matière de développement global et de préparation à l'école; établir une collaboration et une concertation entre les différents intervenants du milieu éducatif élargi; soutenir les interventions en milieu défavorisé à l'école de la maternelle quatre ans jusqu'à la fin du premier cycle du primaire, notamment en littératie et au niveau des habiletés sociales; procéder à une étude longitudinale de la maternelle quatre ans jusqu'à la fin du premier cycle du primaire en vue d'évaluer l'efficacité de la maternelle quatre ans temps plein au Québec et d'apporter les ajustements nécessaires pour qu'elle produise les effets escomptés.

En vue d'implanter des maternelles quatre ans temps plein en milieu défavorisé au Québec afin justement d'obtenir ces résultats, il est gagnant de miser sur des projets appuyés par la recherche dont les résultats témoignent d'une meilleure préparation et réussite à l'école. Prendre en compte ces travaux fait en sorte que les élèves pourront bénéficier plus rapidement de pratiques favorables à leur développement. Dans une perspective de respect des enfants, des intervenants ainsi que des fonds publics, il est essentiel que la mesure de maternelle quatre ans temps plein aux enfants de milieux défavorisés soit offerte par des personnes dûment formées et repose sur un curriculum enrichi.

La Présidente (Mme Vien) : Vous êtes vraiment impressionnante et très disciplinée, Mme Brodeur. Vous avez pris le temps qui vous était alloué de façon vraiment très disciplinée. On va tout de suite commencer la période d'échange avec Mme la ministre.

Mme Malavoy : Bonjour, Mme Brodeur. Je salue également les personnes qui vous accompagnent et je sais que vous suivez ce projet-là avec beaucoup, beaucoup d'attention. Je sais également que vous avez fait partie des personnes qui souhaitaient qu'on arrive là, parce que vous y croyez, vous pensez qu'il y a un certain nombre d'enfants qui vont vraiment bénéficier de cette maternelle quatre ans et qui ne bénéficieront pas ailleurs de services tout simplement parce qu'ils n'iront pas.

On a peu de temps, donc je vais me concentrer sur trois sujets, mais vous en abordez bien plus. Le premier, c'est que j'aimerais que vous m'illustriez ce qu'on appelle curriculum enrichi. Parce qu'une des questions qui nous est posée ou une des craintes que certains expriment parfois, c'est : Vous allez faire de la scolarisation précoce des enfants. Alors, essayez de nous rassurer par rapport à ça, mais en illustrant... pas juste avec des principes théoriques, là, mais en illustrant il se passe quoi dans cette classe qui fait qu'il y a un curriculum enrichi puis pas de la scolarisation précoce; c'est autre chose.

Mme Brodeur (Monique) : Alors, je vais passer la parole à ma collègue France Capuano.

Mme Capuano (France) : Alors, quand on regarde un... quand on parle d'un curriculum enrichi, on parle nécessairement d'un curriculum qui respecte le développement des enfants, c'est-à-dire qu'à cet âge-là les enfants doivent être placés dans des contextes de jeu, ils doivent être exposés à des activités qui les placent dans des activités variées qui favorisent le développement de leur... qui favorise leur développement global, finalement. Quand on parle d'un curriculum enrichi, ce qu'on veut, nous, spécialement, c'est d'exposer les enfants à certaines pratiques qui se sont montrées efficaces. Par exemple, en littératie, on veut que les enfants, que ce soit dans des contextes de jeu… qu'on organise l'environnement pour qu'ils bénéficient d'activités où... qui sont riches en littératie, mais on veut aussi que les activités soient initiées par... dans certaines situations, par l'enseignant qui va de façon explicite enseigner certaines habiletés aussi à cet âge-là.

Donc, on veut s'assurer, entre autres, que les enfants puissent être exposés à des expériences riches dans les domaines de la littératie, de la numératie, l'autorégulation, les habiletés sociales. Donc, aussi, il y a des activités où on peut travailler ces différentes dimensions là à travers la musique, à travers l'art, à travers les activités motrices aussi. Alors, il y a différents contextes où on veut s'assurer que les enfants, à travers toute la journée... À travers les transitions, par exemple, les enseignants vont utiliser ces moments-là qui sont très privilégiés pour enseigner… pour utiliser ces temps-là pour enseigner la littératie aux enfants ou pour faire baigner les enfants dans des activités riches, mais dans différents domaines.

Alors, le curriculum, on touche les activités, mais on touche aussi beaucoup la qualité de l'environnement. Alors, s'assurer que les enfants sont placés dans un environnement où le matériel est adéquat, la disposition du local favorise les apprentissages, où les relations entre enfants sont positives, donc où les relations avec l'enseignant aussi sont positives. Donc, la qualité de l'environnement, c'est d'abord les relations avec l'enseignant, que cet enseignant-là soit soutenant, qu'il favorise le développement de l'enfant, que les relations entre enfants soient positives, mais aussi que les activités qui sont proposées aux enfants sont stimulantes et qu'elles soient basées sur des pratiques qui ont été démontrées efficaces en recherche.

Mme Malavoy : Certaines personnes nous ont dit qu'entre quatre ans et cinq ans il y avait une grande différence. Je ne remets pas ça en question, là, c'est vraiment des âges différents, et une année à cet âge-là, là, ça fait une grande différence. Et donc, par déduction, on peut se demander : Oui, mais est-ce que, justement, un certain nombre de choses que vous évoquez font partie aussi de la conception de la maternelle cinq ans, hein? À cinq ans, on apprend aussi par le jeu, on n'est pas encore en première année. Les objectifs d'apprentissage ne sont pas les mêmes.

Est-ce que vous êtes capable de différencier et aussi indiquer que quatre ans, c'est vraiment adapté à du quatre ans et ça n'est pas une... je dirais déjà des apprentissages pour des enfants un peu plus vieux?

Mme Brodeur (Monique) : Mme Malavoy, je vous répondrai par un aspect plus spécifique pour illustrer, justement, la distinction. Par exemple, au niveau de la préparation à la lecture, on sait qu'à cinq ans il y a certaines dimensions qui doivent être travaillées de façon très explicite et systématique en enrichissement avec le curriculum régulier, qu'un travail sur ces aspects-là, ça permet effectivement aux enfants de mieux apprendre à lire.

Si on regarde au niveau de la conscience phonologique dont on a entendu parler beaucoup les dernières années, on sait qu'à cinq ans l'enfant, si on le fait travailler au niveau de la syllabe, c'est trop facile pour lui, souvent même en milieu défavorisé. Il faut travailler vraiment au niveau des phonèmes qui sont la plus petite unité sonore de la langue, là, comme «a» dans «lac», alors qu'à quatre ans, là, on voit une distinction importante. Vraiment, travailler au niveau phonémique, c'est trop difficile pour l'enfant, on va devoir travailler sur des activités syllabiques.

Dans le cadre des travaux qu'on a menés pour La forêt de l'alphabet qui, en passant, a été subventionnée par le MESS et distribuée à des fins non lucratives — je me permets de le dire parce que, des fois, on entend des choses étonnantes à cet égard-là — bien — puis c'est un programme qui a fait l'objet de plusieurs études publiées dans plusieurs revues scientifiques, même du côté américain — des enseignantes qui, déjà, faisaient des activités de ce type-là en cachette parce que ce n'était pas, semble-t-il, permis il y a 10 ans, bien, elles travaillaient au niveau, par exemple, des syllabes. Puis là on se disait : Elles font déjà un travail exceptionnel. On leur demande de faire des efforts dans le cadre d'une recherche pour respecter un protocole. Puis je suis allée les voir à la fin de l'année puis je leur ai dit : Je suis désolée de vous avoir fait travailler si fort, vous faisiez déjà du si bon travail. Puis elles m'ont dit : Nos enfants n'ont jamais si bien progressé parce que le programme nous a amenés à travailler au niveau des phonèmes plutôt qu'au niveau des syllabes. Et, en travaillant justement sur quelque chose qui est dans la zone proximale de développement, ça permettait de voir de façon tangible, par des intervenantes, les progrès des élèves. Donc, c'est une façon d'illustrer de façon assez fine et assez spécifique les différences, mais on peut observer de ces différences-là dans différents domaines.

Mme Malavoy : Alors, ça m'amène à une autre des préoccupations que nous avons et que bien des personnes ont qui est la formation des enseignantes. Parce que je trouve ça fort intéressant, vous distinguez, avec un exemple très précis, la différence d'approche selon qu'on a quatre ans ou qu'on a cinq ans. On a des enseignantes qui sont formées pour du préscolaire et le primaire et qui sont venues nous dire d'ailleurs qu'elles ne pensaient pas être bien formées pour s'occuper de nos maternelles quatre ans, mais, bon, ça m'a un peu étonnée. Mais mettons que je le prenne d'une façon positive en me disant : Que devons-nous faire pour que, précisément, ces enseignantes soient habilitées à s'occuper d'enfants de quatre ans provenant de milieux défavorisés? Il ne faut pas l'oublier, là, c'est une maternelle ciblée pour des enfants plus vulnérables, ce n'est pas une maternelle universelle. Que devons-nous faire?

• (12 h 40) •

Mme Brodeur (Monique) : Donc, la formation, on le sait, des enseignants relève à la fois de la formation initiale et de la formation continue. C'est clair qu'au niveau de la formation initiale, par exemple, je pense que, l'ensemble des universités... Puis, à l'UQAM, on a déjà amorcé des travaux de façon, justement, à consolider tant au niveau des cours à l'université que dans les stages. Et Yolande Brunelle, étant justement une superviseure de stages, aide à raffiner la façon d'accompagner les stagiaires dans ces nouveaux milieux. Donc, il y a un travail à faire au niveau de la formation initiale, tant dans les cours, comme je le dis, que dans les stages. Ensuite, au niveau de la formation continue, si je reprends l'exemple de La forêt de l'alphabet, si c'est un OBNL qui le distribue, c'est qu'on ne voulait pas que ça soit vendu sur les tablettes puis que les enseignantes prennent ça comme une recette, parce que ce n'est justement pas une recette. C'est une approche, c'est une démarche qui demande de la formation continue, ce qu'offre justement l'OBNL en question, qui est le Centre de psychoéducation du Québec. Donc, la formation continue est inévitable. Elle est essentielle si on veut justement que les enseignants développent les compétences professionnelles nécessaires afin de vraiment faire la différence.

Parce que je tiens à souligner... Parce que toute l'équipe ici a été beaucoup sur le terrain avant d'être à l'université, et je pense qu'en ce sens-là on a tous pu voir de très près — et même à faire des visites à domicile — que, malgré une mesure comme celle-là, qui est vitale, il est entendu qu'on peut penser que ces enfants-là ne recevront pas tout le soutien, parfois, que des familles, des personnes autour de la table seront en mesure d'offrir à ces enfants-là.

Donc, c'est un minimum, un plus qui est essentiel à donner, puis vraiment, à ce moment-là, c'est important que ça soit donné avec la plus grande qualité possible, donc justement par des personnes dûment formées. Puis ça, il faut travailler à la fois à la formation initiale et continue.

Mme Malavoy : Je vais en profiter quand même, puisque vous êtes doyenne d'une faculté de l'éducation, pour vous demander de développer un peu sur la formation initiale. Vous avez compris que certains la critiquent, hein, disent qu'elle n'est pas habilitante pour répondre aux besoins de nos maternelles, spécifiquement pour les quatre ans. Quelle évaluation faites-vous et est-ce que vous pensez qu'il y a lieu de revoir plus en profondeur les contenus?

Mme Brodeur (Monique) : Moi, je crois que, si on regarde l'état des connaissances — j'en faisais part tantôt, c'est présent dans le mémoire — il est certain que les recherches démontrent — et encore, des recherches récentes — que des personnes qui ont un baccalauréat en enseignement ou dans un domaine comme en éducation préscolaire sont des personnes qui ont de plus grandes... ont de grandes capacités pour être en mesure de répondre aux besoins des enfants, ce qui ne veut pas dire qu'il n'y a pas lieu d'améliorer la formation actuelle.

Donc, il est entendu, comme je le mentionnais tantôt, qu'à l'heure actuelle il y a déjà des enseignantes qui interviennent dans les classes de quatre ans à demi-temps. Il me semble que c'est important de reconnaître que ces femmes, ces personnes-là... je dis des femmes parce que, bon, en majorité, elles sont féminines, mais c'est clair qu'elles font déjà un excellent travail. Donc, je pense qu'il faut faire attention à ce qu'on dit, il faut reconnaître le travail de ces personnes-là. Assurément, il faut mieux les soutenir dans l'exercice, là, de leur rôle qui est très, très déterminant pour un parcours développemental à long terme qui soit favorable à l'éducation de citoyens en mesure, justement, de bien s'intégrer socialement. Mais c'est clair que, dans ce domaine-là comme dans plusieurs autres, je vous dirai que… bon, je côtoie fréquemment des doyens d'autres facultés qui sont responsables de d'autres programmes, la formation est toujours un processus en développement. C'est évolutif, en fonction de l'évolution des connaissances. Donc, oui, il y a des efforts à faire, mais il faut reconnaître que les enseignantes du Québec, à l'heure actuelle, au préscolaire, font du bon travail.

Mme Malavoy : On aura l'occasion, probablement, de revenir à ça. Comme le temps file, je vais aborder une autre question. Vous parlez idéalement d'une mixité des groupes. Vous comprenez que moi, je dois autoriser... enfin, j'ai autorisé une classe par commission scolaire. Et mon objectif, c'est de viser les enfants qui sont les plus vulnérables et qui sont donc de milieux défavorisés. Il faut donc que j'aie des points de repère pour arriver à ça. Je n'implante pas une maternelle en disant que ceux qui ont envie d'envoyer leurs enfants là y aillent. Je dois avoir des critères pour être capable de dire : Oui, on va composer le groupe en fonction de tels critères, avec mon objectif en tête. Donc, j'aimerais que vous conciliiez à la fois les exigences que j'ai de mon côté, les obligations, et votre approche de mixité.

Mme Brodeur (Monique) : D'accord. Je vais laisser Marc St-Pierre, un grand expert du terrain, répondre à votre question.

M. St-Pierre (Marc) : Mme la ministre, à partir du moment où la mesure vise les écoles qui se situent au neuvième ou 10e rang décile de défavorisation, ça veut dire que ces écoles-là desservent des territoires qui sont relativement homogènes en termes de défavorisation. Bien sûr, il peut arriver que, sur un territoire d'une école de neuvième rang décile, il y ait une ou deux rues où les enfants ne correspondent pas au profil de l'école. Mais, de façon générale, le milieu est relativement homogène.

Moi, ce que j'avais compris de l'implantation, c'est qu'on n'allait pas cibler les enfants défavorisés à partir de leur adresse mais qu'on allait cibler des écoles de neuvième et 10e rangs déciles qui étaient situées en milieu défavorisé et qui accueillaient des enfants qui, majoritairement, venaient de familles défavorisées. À partir de là, qu'on en échappe quelques-uns qui ne sont pas défavorisés, à mon sens, c'est un demi-mal, parce que, si on ne met pas à jour ces jeunes-là, si on ne permet pas une certaine récupération à partir de quatre ans, cinq ans, ces gens-là... ces jeunes-là arrivent en première année, ils ne sont pas à niveau, puis ce que les enseignants disent puis ce qu'on remarque, c'est qu'à partir du moment où, à cause de problèmes de stimulation ou autres, il y a des jeunes qui ne sont pas prêts à apprendre, qui, à la fin de la première année, peinent encore à lire, bien, ils ont tendance à tirer tout le groupe vers le bas. Ça fait que ça n'avantage pas plus mes jeunes qui sont sur les deux rues où il n'y pas de famille défavorisée.

Donc, je pense que la façon d'atteindre l'objectif, c'est de dire : Bien, on implantera des classes dans les écoles de neuvième et 10e rang décile puisque, si ces écoles-là sont à ce niveau-là de défavorisation, c'est qu'elles desservent une population qui est relativement, là, homogène. Parce que je m'imagine mal... Je vais prendre un exemple, je vais parler de l'école Sainte-Paule, à Saint-Jérôme. 10e rang décile de défavorisation. Il y a à peu près le quart des élèves de cette école-là qui ne proviennent pas, mais pas du tout d'un secteur défavorisé, là, l'autre côté de la rue Bélanger, à Saint-Jérôme. Le quart de l'école, une centaine d'enfants. Alors, demain matin, je vais rencontrer des parents en rencontre d'information pour dire à ces parents-là : Non. Vous, vos enfants, ils n'iront pas dans cette classe-là parce qu'ils ne sont pas pauvres.

La Présidente (Mme Vien) : Merci. Merci, M. St-Pierre. Ce sera votre mot de la fin pour la question du côté ministériel. Je vais maintenant du côté de l'opposition officielle. Merci.

Mme Charbonneau : Je vais taquiner ma collègue en lui disant : On dirait qu'on s'est fait une réunion, ce matin, pour les questions, parce que les questions qu'elle soulevait étaient en jaune sur ma feuille, sur les recommandations. Mais je reste sur le sujet parce que je ne suis pas d'accord avec vous. Je vous explique pourquoi, puis on va pouvoir... je vais pouvoir mieux comprendre.

Vous dites de cibler l'école. Je vais vous en cibler une, moi. À Sainte-Rose, à Laval, l'école Du Parc. Elle est identifiée… je crois qu'elle est 7. Elle n'est pas 9, 10. Par contre, si je m'élève un peu puis je regarde mon aire de desserte, eh bien, j'ai un endroit, dans l'aire de desserte de cette école-là, qui est vraiment reconnu 9, 10. Mais, parce que je fais une moyenne puis mon calcul de défavorisation est ainsi fait, bien, mon école, elle n'arrive pas à 9, 10. Je ne serai pas équitable si je ne peux pas offrir le service.

Puis je comprends quand vous dites : Je vais choisir, puis la commission scolaire va avoir une difficulté avec une classe par commission scolaire, mais, en même temps, l'implantation est tranquille, mais je vais avoir de la difficulté à dire à une école : Écoute, tu n'es pas assez pauvre pour avoir droit à la classe, même si tu as les installations, même si la proximité des élèves est intéressante. Alors, on ne pourra pas l'offrir là. On va l'offrir à un autre endroit qui, elle, cette école-là, malgré la mixité, parce que... Je reprends toujours le principe d'Hochelaga-Maisonneuve, là. Je vous ferais visiter des condos à jeter à terre dans Hochelaga-Maisonneuve, mais il n'y en a pas suffisamment pour défaire la cote de défavorisation. Mais il y en a.

Donc, le jeu de la défavorisation entre la localisation de l'établissement scolaire et l'adresse de l'élève... Je trouvais intéressant le fait que la ministre nous disait : Ça va être l'adresse du jeune et non l'adresse du bâtiment scolaire, parce que les commissions scolaires vivent une espèce d'iniquité face à cette volonté-là, puis je la comprends, je l'ai mis... j'ai travaillé au sein d'une commission scolaire. Je comprends qu'il faut identifier un bâtiment scolaire comme en défavorisation, ça vient avec des budgets. On ne se cachera pas, là. Mais, quand on peut offrir un service équitable à partir de l'adresse du jeune, je trouve qu'il y a là quelque chose de plus favorable, malgré que toute situation met en place de l'iniquité. Tu sais, si c'est l'école, il y a une iniquité, si c'est l'adresse du jeune, il y a une iniquité aussi, là. Mais c'est là que réside le fait que je ne suis pas d'accord avec le principe du bâtiment plutôt que le principe de l'élève. Rapidement...

M. St-Pierre (Marc) : ...là-dedans, parce qu'il y a un phénomène qui nous échappe, c'est le phénomène des attentes des enseignants par rapport aux élèves qu'ils ont devant eux. Alors, si, moi, je suis un élève qui provient d'une rue, là, dans une école de sixième ou septième rang décile, où il y a beaucoup de défavorisation, je me retrouve dans une école où le niveau de favorisation est là. Je risque de bénéficier, de baigner dans cet environnement-là. Et il est toujours possible également, à partir de la connaissance que les directions d'école ont de ces élèves-là, de dire : Bien, ces élèves-là, il faudra leur faire attention, puis on peut mettre en place des mesures pour permettre une certaine récupération à partir de la maternelle cinq ans.

Par contre, moi, ce que je dis, c'est... Je m'imagine mal de dire à un enfant — puis les enfants, là, ils ne sont pas fins, hein, les uns avec les autres des fois, là, puis ça prend des gros efforts pour les rendre fins, hein? — de dire : Écoutez, eux autres, là, ils sont dans une maternelle quatre ans parce qu'ils sont pauvres.

• (12 h 50) •

Mme Charbonneau : …rassurez... non.

M. St-Pierre (Marc) : On ne le dira pas, mais, écoutez...

Mme Charbonneau : On ne le dira pas, et je vous dirais même qu'éventuellement avec le temps ça va probablement être connu, mais par les parents. Les parents qui vont se rencontrer une fois par... Ils vont se regarder dans les yeux puis ils vont se dire : Ah! Toi, aussi tu as été choisi. Ah! O.K. Mais normalement, dans l'école, les directions d'école, les enseignants ont une prudence et une attention particulière pour la non-identification. Déjà qu'un élève handicapé est très reconnu... Mais on n'ira plus là, on n'y va plus, on change le sujet, parce que je vais prendre tout mon temps de questionnement que là-dessus. Et, pour avoir vécu avec le principe de défavorisation puis l'avoir vu, qu'à Laval on n'était pas assez pauvres puis pas assez loin pour avoir des budgets, je peux vous dire que vous faites revivre une forme de frustration qui m'habite, puis je ne veux pas vous la faire subir. Croyez-moi, je ne veux pas vous la faire subir.

Je voulais vous entendre, Mme Brodeur — bonjour — sur la place du parent. On a beaucoup parlé de Passe-Partout, on a parlé aussi d'Agir autrement, qui sont des façons différentes de faire une approche auprès autant de l'élève que de la famille. Mais, dans le programme Passe-Partout, ce qui est fort intéressant, c'est l'approche auprès du parent. Dans le fond, on le dit malhabilement, mais c'est la formation continue du parent. On devient parent avec le temps. On n'est pas parent parce qu'on a un enfant. Donc, dans le projet que vous avez eu avec Saint-Zotique ... Puis je peux vous dire qu'elle rayonne en arrière, hein? Ça n'a l'air de rien, là, mais elle rayonne, cette dame, en arrière, qui vous écoute depuis tantôt. Dans le projet que vous avez fait avec l'école, est-ce que le parent avait une place ou un endroit de formation continue ou de relation avec l'école qui faisait en sorte que je ne fais pas juste grandir le jeune, je fais grandir sa famille aussi?

Mme Brodeur (Monique) : D'accord. Donc, je vais laisser France répondre à la question.

Mme Capuano (France) : Dans un premier temps, ce qu'on a fait déjà, dès l'entrée des enfants à l'école en septembre, lors de la réunion de parents, on a demandé aux parents comment ça se passait à la maison avec les enfants. Et il y a des parents qui nous ont rapporté avoir des difficultés importantes avec leur enfant, notamment au plan ducomportement, des difficultés graves, et ça se manifestait aussi à l'école, donc des enfants qui avaient même besoin d'aide, là, plus particulière. Et nous, on a fait une collaboration avec le CSSS de Saint-Henri qui a offert des visites à domicile très fréquentes, une fois par semaine, là, une fois aux deux semaines, et avec de l'aide très concrète. Ce qu'ils travaillaient, c'est d'abord réduire le stress des parents, parce que c'est des parents qui étaient dans des situations de grande détresse, ensuite, les pratiques éducatives, donc des parents qui avaient de la difficulté à gérer de façon adéquate les comportements difficiles de leur enfant, et puis toute la relation parent-enfant, qu'on a travaillée à travers des situations de jeu, où on plaçait les parents et les enfants dans des situations de jeu. Puis souvent on travaillait avec l'ensemble de la famille parce qu'il y avait des enfants plus âgés qui étaient aussi en difficulté. Donc, une aide très individualisée pour certains parents. Et je sais qu'à l'heure actuelle la travailleuse sociale, c'était son objectif, puis elle l'a réalisé cette année... l'année passée : elle a fait un groupe de parents.

Donc, je pense que c'est très important de rejoindre les parents, mais la modalité peut varier vraimentdépendamment du quartier, des besoins des parents, parce que de penser à regrouper les parents, c'est souvent une façon de penser où on se dit : C'est plus facile, c'est plus économique, il y a du soutien social entre les parents. Mais, souvent, les parents sont tellement en grande difficulté qu'ils ne veulent pas venir à l'école dans un premier temps, et c'est nous qui devons, si on veut les rejoindre, aller vers eux. Et, dans le cas de l'école Saint-Zotique, particulièrement les deux premières années d'implantation, on a rejoint des familles pour qui l'aide a été déterminante et où les enfants, maintenant, sont intégrés à l'école, et ça va bien. Donc, voilà.

Mme Charbonneau : Ce que j'apprécie le plus dans votre réponse, c'est que chaque milieu peut s'ajuster à la réalité de ses parents. Et je trouve ça intéressant, parce que ce qui nous inquiétait par rapport au projet Passe-Partout puis un projet de préscolaire quatre ans, c'était cet abandon-là qu'il y avait entre les deux, hein? Parce qu'à plusieurs intervenants scolaires on a dit : Vous voyez la place du parent comment? Et la réponse reçue, c'était : Comme ceux du préscolaire cinq ans. Je vous dirais que, de notre côté, ce n'est pas satisfaisant, parce que ce que vous avez démontré, c'est que, quand il y a un soutien dans l'aspect global de l'environnement de l'enfant, j'aide non seulement cette personne-là qui est toute petite et remplie d'espoir, mais j'aide aussi son milieu, qui fait que son apprentissage est en prolongement autant à l'école qu'à la maison, puis on sait que c'est les deux endroits... Des fois, il y en a juste un qui est plus stable, qui est l'école, mais on sait que c'est les deux endroits où l'enfant passe le plus de temps, l'école et la maison.

Dans vos recommandations, la huitième, vous dites : «Procéder à une étude longitudinale en vue d'évaluer l'efficacité de la maternelle quatre ans…» Vous en avez parlé un peu plus tôt. Dans le temps, vous voyez une étude après cinq ans? Vous voyez une étude... J'ai compris que vous avez dit : Dans le premier cycle, mais, en même temps, la première cohorte, si je peux la suivre plus longtemps, est-ce que c'est plus payant?

Mme Brodeur (Monique) : …c'est toujours très difficile, hein, de faire des études à très, très longue échéance, mais déjà, si on pouvait prendre chaque enfant par la main, pour reprendre les paroles de Mme Malavoy, de quatre ans à cinq ans, à six ans, à sept ans, à la fin du premier cycle du primaire, où on sait qu'à la fois en lecture puis au niveau du comportement, si c'est difficile, on a presque un parcours direct, là, vers le décrochage scolaire puis ensuite de ça vers les autres problématiques... Donc, une étude longitudinale serait intéressante et expérimentale. Ça demande une bonne préparation. C'est sûr que la façon dont les classes vont être attribuées cette année, ça va influencer le devis, il va falloir le travailler ensemble, puis, à grande échelle... Je tiens peut-être à passer la parole à Marc St-Pierre parce qu'une étude comme celle-là il faut que ça se travaille en collaboration. Ça ne peut pas être les chercheurs tout seuls, il faut la travailler avec des partenaires du milieu, des gens qui ont de l'expérience.

La Présidente (Mme Vien) : Pour deux minutes, M. St-Pierre, on vous écoute.

M. St-Pierre (Marc) : Bien, écoutez, on a travaillé, à Rivière-du-Nord, avec 90 groupes de préscolaire la première année puis, après, on a investi au niveau de la première puis de la deuxième année à la fois au niveau de la littératie puis des comportements à partir d'approches efficaces. On ne pouvait pas se contenter de juste être là en cinquième... en maternelle cinq ans. Il faut continuer d'appuyer ces efforts-là, il faut persister, il faut durer puis il faut se rappeler. Alors, c'est ce qu'on a mis en place. Et on a travaillé de façon conjointe là-dedans avec les gens des universités, mais, en même temps, nous, on avait la préoccupation qu'il se fasse un transfert d'expertise aussi. C'est-à-dire que moi, j'avais dit aux gens de l'université puis du centre de psychoéducation : D'ici deux ans, j'aurai deux, trois, quatre conseillères pédagogiques qui seront agréées puis qui seront capables d'accompagner toutes mes enseignantes puis d'offrir cette formation-là pour que je me crée une certaine compétence à l'interne pour être capable de développer ça. Mais, même si c'était le cas de la maternelle quatre ans en milieu défavorisé, le travail n'est pas fini à quatre ans parce que, si, demain, on retourne en maternelle cinq ans, puis c'est «business as usual», comme on dit en latin... Non, il faut enrichir le programme dans le même sens à cinq ans, il faut enrichir le programme en littératie à six ans puis il faut enrichir le programme en littératie à sept ans. Alors, il faut taper sur le clou longtemps puis il faut persévérer. Voilà.

La Présidente (Mme Vien) : Merci beaucoup. Ça...

Mme Charbonneau : Il faut s'imposer la même discipline qu'on leur impose. Il faut persévérer, il faut apprécier l'école puis il faut s'assurer d'aller jusqu'à sa réussite. Et c'est ce que je souhaite au programme quatre ans et, en même temps, je nous souhaite d'avoir les sous pour le faire.

La Présidente (Mme Vien) : Merci beaucoup, Mme la députée. Mme la députée de Montarville, pour un peu plus de trois minutes.

Mme Roy (Montarville) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Mesdames, merci, merci pour votre mémoire. Messieurs, merci pour ce mémoire, merci pour votre présence. Écoutez, vous êtes des chercheurs. Vous avez été impliqués dès le départ avec la réussite de l'expérience, et qui n'est plus une expérience maintenant, de la maternelle quatre ans à l'école Saint-Zotique. Vous avez identifié les marqueurs essentiels de réussite de l'implantation d'une maternelle quatre ans dans le milieu défavorisé. Avec ce que vous savez du projet de loi et ce que vous avez entendu des autres témoignages et mémoires également, pensez-vous que ce sera possible, pour septembre 2014, d'y arriver, d'arriver avec cette qualité qu'on a à Saint-Zotique...

Une voix : ...

Mme Roy (Montarville) : ...pour — 2013, oui, pardon — pour les prochaines... pour les commissions scolaires où il y aura implantation? Est-ce que c'est possible? Est-ce que c'est faisable dans le laps de temps qu'il y a devant nous?

Mme Brodeur (Monique) : Marc.

M. Bigras (Marc) : Bien, merci, Monique, de me passer la parole, mais je ne suis pas certain de pouvoir répondre. C'est surtout les gens... Le ministère de l'Éducation, les commissions scolaires et les directions d'école sont habitués d'implanter des programmes et des nouveaux programmes, et moi, en ce sens-là, je leur fais confiance. Mais c'est un jugement que j'aimerais plutôt confier à M. St-Pierre qui, lui, est dans le milieu, puis il peut vous dire si l'échéance est raisonnable.

• (13 heures) •

M. St-Pierre (Marc) : Écoutez, il y a eu un an 1 à Saint-Zotique, hein? Il y aura un an 1 dans une école par commission scolaire en septembre 2013. Et par ailleurs, par ailleurs, on parle d'une classe dans une... Il y a des commissions scolaires qui en ont demandé deux, parce que je sais que mon ancienne commission scolaire a fait la demande pour deux écoles, une dans le secteur d'Argenteuil puis une à Saint-Jérôme, puis je ne fais pas de la représentation pour eux ici, mais, à partir du moment où on met ça en place, on a l'expertise pour la mettre en place, on n'est pas... on n'a pas à nourrir 350 classes, là, qui vont avoir besoin de formation demain matin. On a à développer des minicentres d'expertise, d'établir là des pionniers, des pionnières qui vont développer ce projet-là.

Puis, si je peux me permettre une espèce d'échelle de grandeur, entre moi puis vous, là, puis les gens qui travaillent en éducation, demain matin, on me dirait : Marc, en septembre, tu ouvres une classe de maternelle quatre ans dans ta commission scolaire, à l'école Saint-Julien, à Lachute, je vais vous dire une affaire, c'est pas mal moins compliqué que quand Le Bouclier m'appelle pour me dire : Il y a quatre élèves TED 4 ans qui viennent d'arriver sur le territoire. Il faut que tu ouvres une classe TED en septembre puis que tu trouves une enseignante puis des ressources spécialisées. Ça, là, c'est un défi qui est au moins 500 fois plus important.

Mme Roy (Montarville) : Le temps presse. On a identifié des marqueurs essentiels de réussite. Entre autres, vous parlez du nombre d'adultes, deux adultes par classe. Est-ce que ça sera primordial pour que ça fonctionne, la maternelle quatre ans?

Mme Brodeur (Monique) : Selon les renseignements qu'on a, c'est sûr qu'il faut voir le nombre. S'il y a six enfants en Basse-Côte-Nord, on n'a peut-être pas besoin de deux adultes, mais, si les groupes sont plus nombreux, ça serait une bonne idée.

Pour revenir à votre question de tantôt, si, moi, j'avais, demain matin, à prendre cette responsabilité d'implanter des écoles, j'irais assurément chercher quelqu'un comme Marc St-Pierre, qui est habitué à du transfert à grande échelle, quelqu'un comme Yolande Brunelle, qui a développé le projet dans une école, tirer profit des gens qui ont développé une expertise.

Le danger, c'est d'y aller avec des gens, justement, qui n'ont pas l'expertise nécessaire, alors qu'on a la chance, actuellement au Québec, d'avoir des personnes qui viennent de prendre leur retraite, qui ont du temps, qui ont l'expertise et la détermination pour le faire. Je pense qu'il faut en profiter.

La Présidente (Mme Vien) : Mme Brodeur, merci beaucoup. Merci également à vos collaborateurs. Je vous souhaite une belle fin de journée.

Je suspends les travaux. Vous pouvez laisser vos choses ici, les collègues, puisque la salle sera sécurisée. On reprend les travaux à 15 heures. Merci.

(Suspension de la séance à 13 h 2)

(Reprise à 15 heures)

            La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, nous allons sans plus tarder poursuivre les auditions. J'invite maintenant les représentants de la Centrale des syndicats du Québec, la Fédération des syndicats de l'enseignement, Fédération des professionnelles et des professionnels en éducation et Fédération des intervenantes en petite enfance du Québec à prendre place.

Bonjour, mesdames. Bienvenue à l'Assemblée nationale. Je pense, Mme Chabot, que c'est vous qui allez être la porte-parole. Donc, dans un premier temps, je vais vous demander de nous présenter les personnes qui vous accompagnent, et, comme vous représentez plusieurs groupes, donc nous allons vous donner un temps de 20 minutes pour nous faire part de votre exposé. Par la suite, suivront les échanges avec les membres de la commission. Vous avez la parole, Mme Chabot.

Centrale des syndicats du Québec (CSQ), Fédération des
syndicats de l'enseignement (FSE), Fédération des professionnelles
et professionnels de l'éducation du Québec (FPPE) et Fédération
des intervenantes en petite enfance du Québec (FIPEQ)

Mme Chabot (Louise) : Merci, Mme la Présidente. Mme la ministre, Mmes, MM. les parlementaires, bonjour, et permettez-moi, à mon tour, de vous souhaiter un très joyeux bon 1er mai. Et merci de l'invitation, c'est vraiment un plaisir d'être ici.

Louise Chabot, je suis présidente de la CSQ. À ma gauche, oui, Manon Bernard, présidente de la Fédération des syndicats de l'enseignement. Je continue : Johanne Pomerleau, présidente de la Fédération des professionnels et professionnels de l'éducation; Sylvie Tonnelier, présidente de la Fédération des intervenantes en petite enfance du Québec — c'est tout du beau monde CSQ, vous avez compris; à ma droite, Véronique Brouillette, conseillère syndicale au dossier éducation, dont notamment la petite enfance; et Thérèse Cyr, conseillère syndicale à la FSE, Fédération des syndicats de l'enseignement. Et la CSQ, c'est 200 000 membres, dont 130 000 membres en éducation. Ça fait que nous sommes l'organisation syndicale la plus représentative en petite enfance et en éducation.

 Donc, vous comprendrez que, pour nous, l'éducation doit être une priorité nationale et que l'éducation, ça commence tout petit, dès la petite enfance, et c'est pour ça que notre mémoire va vous présenter que, pour le développement de nos enfants, on va favoriser un développement global. D'ailleurs, nous avons organisé un important rendez-vous de la petite enfance les 12 et 13 avril, auquel certaines ou certains d'entre vous étiez, dont Mme la ministre. On vous en remercie. Et, d'entrée de jeu, vous dire d'emblée que la CSQ va accueillir favorablement l'ajout de services éducatifs pour les enfants de quatre ans issus de milieux défavorisés, qui constitue pour nous une des mesures pour favoriser l'accessibilité des services éducatifs à la petite enfance, et c'est un moyen important pour favoriser l'égalité des gens.

Mais ce qui compte le plus dans notre avis, c'est que tous les enfants ont une chance égale et que deux grands principes président à ça, c'est-à-dire l'accessibilité, la qualité et la complémentarité dans les différents services offerts. Ça, nous l'avons bien compris, et c'est comme ça que nous le voyons. On s'inscrit dans des services complémentaires à ce qui existe déjà pour offrir des services à nos enfants qui, malheureusement, ne fréquentent aucun service.

Mais, bien sûr, comme tout bon projet de loi, plusieurs ou, je dirais, certains ajustements s'imposent, et c'est ce que nous ferons valoir au cours de notre présentation. Je passe immédiatement la parole à Mme Bernard.

Mme Bernard (Manon) : Alors, bonjour. La Fédération des syndicats de l'enseignement représente 60 000 enseignantes et enseignants francophones à tous les secteurs de l'enseignement préscolaire, primaire, secondaire, formation professionnelle et éducation des adultes. Nous sommes aussi en cartel avec l'association provinciale des enseignants anglophones du Québec, ce qui fait que nous représentons 70 000 enseignants et enseignantes sur l'ensemble du territoire québécois.

Alors, même si nous ne connaissons pas toutes les modalités du projet ministériel d'implantation des maternelles quatre ans, nous estimons que des amendements doivent être apportés à ce projet de loi, notamment pour s'assurer que les mécanismes de consultation du personnel enseignant prévus à la présente Loi sur l'instruction publique puissent être garantis dans la nouvelle version de la loi, tout comme le respect de l'autonomie professionnelle des enseignants dans leur établissement. C'est le sens des recommandations 1, 2 et 4 que vous retrouvez dans le mémoire.

Par ailleurs, nous demandons aussi que les conditions et les modalités établies par la ministre assurent une entrée progressive d'au moins cinq jours de classe au préscolaire en modifiant le régime pédagogique. Si cette entrée progressive est cruciale pour les enfants de cinq ans, elle l'est d'autant plus pour les enfants de quatre ans. Cela correspond à la recommandation 3 dans le mémoire.

Nous demandons la levée du moratoire sur la liste des écoles pouvant offrir la maternelle quatre ans à demi-temps. La maternelle à demi-temps pour les enfants de quatre ans existe depuis les années 70 pour les enfants de milieux défavorisés et pour les enfants handicapés. Elle n'a pas connu de développement depuis le moratoire de 1997. Or, depuis 1997, la carte de défavorisation a évolué. Afin d'outiller les commissions scolaires pour l'attribution des classes de maternelle quatre ans à demi-temps, il serait important de lever le moratoire sur cette liste et de remettre à jour la liste des écoles reconnues comme étant en milieu défavorisé.

La CSQ recommande au ministère de l'Éducation de mettre en place une nouvelle méthodologie fiable pour classer les écoles du Québec en remplacement de données provenant du recensement fédéral qui, vous savez, a changé. On retrouve les recommandations 5, 6 et 7 à cet effet dans notre mémoire.

Par ailleurs, j'aimerais rappeler toute l'importance d'accorder au projet de maternelle quatre ans les conditions de son succès, c'est-à-dire accorder aux enfants fréquentant la maternelle quatre ans à temps plein l'équivalent de financement octroyé aux enfants fréquentant la maternelle quatre ans à demi-temps ou la maternelle cinq ans. Le financement pour les enfants handicapés doit être garanti de même que le financement des services de soutien. On insiste aussi sur l'aménagement des locaux en fonction des besoins des enfants, ce qui vous a été demandé par plusieurs intervenants.

La taille des groupes est aussi un incontournable. 18, pour nous, c'est inacceptable. Je sais que la ministre s'est montrée ouverte à réduire la taille des groupes. Nous sommes présentement à consulter les enseignants du préscolaire. Les informations qui nous parviennent vont dans le sens d'un ratio plus bas que 15 avec des services. De plus, nous sommes d'avis que cette nouvelle mesure soit accompagnée d'un mécanisme de suivi de l'implantation qui permette d'en évaluer la qualité et l'impact afin de faire les ajustements nécessaires. On se réfère là aux recommandations 9, 10 et 13.

En terminant, j'aimerais rappeler qu'il faut accorder à l'implantation des maternelles quatre ans les ressources nécessaires à sa réussite en tout respect des besoins et réalités des milieux.

• (15 h 10) •

Mme Pomerleau (Johanne) : Bonjour. La Fédération des professionnelles et professionnels de l'éducation représente environ 7 000 professionnels qui travaillent dans la très grande partie des commissions scolaires au Québec. On parle d'orthophonistes, de psychologues, de psychoéducateurs, de conseillers pédagogiques, etc.

Moi, j'aimerais d'abord vous parler du service Passe-Partout et des conseillères et conseillers à l'éducation préscolaire qui offrent ce service. C'est à la fin des années 70 que le service d'animation Passe-Partout a été créé. Il visait un objectif complémentaire aux maternelles quatre ans de l'époque, soit celui de soutenir les compétences parentales des parents provenant de milieux défavorisés et à favoriser la collaboration entre l'école et la famille. Le programme Passe-Partout vise toujours trois grands objectifs : offrir un soutien aux parents, soutenir la relation parent-enfant et soutenir l'enfant lui-même.

Selon plusieurs études, une meilleure relation entre l'école et la famille représenterait un facteur de protection en milieu défavorisé et un facteur de persévérance scolaire chez les enfants. Plusieurs parents qui ont de mauvais souvenirs de leur propre fréquentation scolaire ont besoin d'aide afin de reconstruire une relation de confiance avec l'école pour ensuite devenir de réels partenaires. C'est une condition incontournable pour que l'enfant lui-même puisse développer une relation positive avec l'école. Les conseillères et conseillers à l'éducation préscolaire travaillent dans les écoles avec les parents à qui ils offrent du soutien afin que ceux-ci améliorent leur sentiment de compétence parentale pour pouvoir mieux accompagner leur enfant dans l'ensemble de leur parcours scolaire.

Par contre, pour être efficaces, les interventions doivent être sur une base régulière et de longue durée, car, en plus de proposer de l'information et des conseils aux parents, elles favorisent le changement de certains comportements. On ne change pas des comportements en une rencontre d'une heure.

Le programme Passe-Partout a fait ses preuves. Il est crucial de le maintenir et de le renforcer, car c'est un programme complémentaire aux maternelles quatre ans, et on doit aussi le rendre accessible à l'ensemble du territoire québécois. C'est le sens des propositions 14 et 15 de notre mémoire.

À la Fédération des professionnels, nos inquiétudes à ce sujet sont de deux ordres : que, malgré la volonté de la ministre, que nous saluons, de donner des services aux parents également, le budget prévu pour soutenir les parents soit insuffisant pour donner un réel service professionnel dans les milieux où le service Passe-Partout n'est pas implanté et qu'on offre un service inadéquat. Présentement, ce qu'on lit dans le projet des règles budgétaires, à 56 $ par enfant, nous semble totalement insuffisant.

Aussi, on craint que, dans les commissions scolaires où le service Passe-Partout est implanté, compte tenu des coupures qu'ils subissent, il y ait des commissions scolaires qui décident de couper ce service au profit d'une maternelle quatre ans et donc de remplacer un service par un autre plutôt que d'augmenter l'offre de service aux enfants de quatre ans. Dans ce sens, nous avons d'ailleurs été informés que deux commissions scolaires ont déjà fait part au comité de relations de travail de leur intention de réduire le service Passe-Partout en parlant de modification de services à rendre. Peut-être est-ce des cas isolés, mais nous sommes inquiets.

Finalement, qu'en sera-t-il des services complémentaires pour ces groupes? Tout le monde s'entend sur l'importance de dépister, d'intervenir le plus rapidement possible pour réduire les conséquences d'une difficulté ou d'un retard sur la réussite éducative des enfants. Par contre, depuis l'annonce de l'implantation progressive des maternelles, peu de choses ont été dites sur les services complémentaires offerts à ces enfants, et rien n'est prévu à cet effet dans le projet des règles budgétaires. Des psychologues, des orthophonistes, des psychoéducateurs ou des ergothérapeutes, notamment, devraient pouvoir intervenir en amont avant même l'entrée à la maternelle. Il faut pouvoir rapidement mettre en place un accompagnement adéquat pour des enfants qui présentent de réels problèmes et apporter du soutien aux intervenants. Pour cela, il faut une volonté politique et un financement adéquat. C'est le sens de la proposition 16 de notre mémoire.

Plus vite on intervient et plus on réduit les risques que les difficultés de l'enfant ne deviennent une montagne à surmonter, quelques années plus tard, avec les conséquences que l'on connaît. Mais, afin que cela soit possible, il faudra d'abord trouver une solution à l'insuffisance de professionnels et professionnelles dans les commissions scolaires.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci, Mme Pomerleau. Mme Tonnelier.

M. Tonnelier (Sylvie) : Rebonjour. Donc, moi, je suis... je représente la Fédération des intervenantes en petite enfance du Québec. Nous représentons 13 600 responsables de services de garde en milieu familial qui sont reconnus par un bureau coordonnateur et qui offrent des places à 7 % et plus de 2 000 salariés de centres de la petite enfance. Nous, pour nous, la question de la maternelle quatre ans, évidemment, nous a interpellés puisque c'est des enfants qu'aussi nous recevons, des enfants de quatre ans que nous recevons dans nos services. Et, pour nous, le fait de développer des services en milieu scolaire, maternelle temps plein en milieu scolaire, est un plus et non une concurrence, je dirais, dans l'offre de service aux enfants. On dit que ces enfants-là ne fréquentent pas... les enfants ciblés ne fréquentent pas aucun service actuellement et que c'est déplorable pour eux. Nous, on considère que d'augmenter l'offre de service va donner plus de choix aux parents et de choisir le meilleur pour leur enfant, selon eux, évidemment.

Nous, dans nos services de garde, qui sont les CPE et le milieu familial, comme je le disais, notre mission a été, depuis de très longues années, de concilier famille, travail. Mais on fait plus que ça dans les centres de la petite enfance, on a un rôle éducatif important à jouer, on a un programme éducatif que le ministère nous impose et on passe nos journées, tout en jouant...En permettant aux enfants de jouer, nous, on s'assure qu'on voit à leur développement global pour qu'ils soient... ils se développent comme il faut et qu'ils soient prêts à passer aux étapes suivantes de leur vie.

On a des contacts aussi très fréquents avec les parents le matin, le soir, donc on a des liens qui sont proches. La qualité de nos services aussi est au rendez-vous. Toutes les enquêtes qui ont été menées prouvent que, bon, plus la qualité des services est bonne et plus c'est bénéfique pour les enfants. Toutes les études démontrent que, dans les CPE et les garderies en milieu familial, on est au rendez-vous. C'est important pour les enfants. Et ce qu'on souhaite, c'est que l'aspect éducatif dont je parlais soit plus valorisé aussi pour donner un réel choix aux parents. Le parent, il faut qu'il puisse se dire : Bien, je vais dans un milieu éducatif, que ce soit en milieu scolaire ou en service de garde, je n'y vais pas pour un service de garde, j'y vais parce que c'est un milieu éducatif, et cet aspect-là devrait être valorisé.

Concernant la fréquentation des enfants en milieu défavorisé, il existe une mesure à laquelle les parents ont droit : ils peuvent être exemptés de la contribution réduite, c'est-à-dire ce qu'on appelle le 7 $. Mais, à cela, il y a des conditions. D'abord, il faut qu'ils bénéficient de l'aide sociale, des mesures d'aide. Donc, ils ont droit à deux journées et demie par jour. Pour nous, ce n'est pas suffisant pour aider...

Une voix : ...

M. Tonnelier (Sylvie) : …par semaine, excusez-moi — ce n'est pas suffisant. C'est difficile, c'est plus difficile, et de un, de pouvoir les accueillir, parce que c'est des temps partiels, et de deux, c'est plus difficile aussi de les faire progresser de façon continue. Il y a toujours une rupture quand ils reviennent après. Et pour les parents qui peuvent être complètement exemptés, il faut qu'il y ait une référence qui vienne des professionnels de la santé. Et, à ce moment-là, ils peuvent être à cinq jours-semaine, mais il faut qu'il y ait une référence des organismes sociaux.

Alors, pour nous, c'est très clair que, si on veut donner un réel choix aux parents, il faut qu'on soit capables d'assurer l'accessibilité. Donc, nous, et vous le verrez à la recommandation 17 de notre mémoire, pour nous, il faut qu'on puisse assurer la gratuité aux enfants — pour commencer, aux enfants issus de milieux défavorisés — donc, qu'il s'avère que les parents aient un véritable choix, c'est-à-dire soit aller à l'école maternelle temps plein quatre ans ou en service de garde, que ce soit donc gratuit pour ces familles-là. 

Et aussi ce qu'on souhaiterait au niveau de... On souhaiterait avoir un arrimage aussi plus grand avec le milieu scolaire. Actuellement, ce sont deux réseaux qui ne se fréquentent pas tellement. On aimerait qu'il y ait plus de partage pour que l'enfant qui passe de notre service... d'un de nos services en milieu familial ou en CPE, qu'il passe à l'école, il y ait un suivi qui se fasse au niveau des professionnels notamment, au niveau des enseignants également. Ce serait gagnant pour les enfants et aussi pour les parents.

Et ce qu'on souhaiterait également, ce qu'on sait, c'est qu'il y a deux façons de voir comment... où se situent les zones de défavorisation. Il y a un système pour le ministère de la Famille, il y a un système au ministère de l'Éducation — j'ai fini — et on voudrait qu'il y ait... ça soit un arrimage qui se fasse, et qu'il y ait une vision globale, et que les mêmes formules soient employées.

Mme Chabot (Louise) : Vous aurez compris, en conclusion — puis je sais qu'on va avoir la chance d'échanger — que, pour nous, cette vision des maternelles quatre ans pour le milieu des défavorisés, ce qu'on en comprend, c'est qu'actuellement au Québec on a milité beaucoup pour un vaste service éducatif à la petite enfance réussi, mais on voit qu'il y a des enfants qui ne sont nulle part. Et on veut... l'objectif avec le... pour lequel nous sommes en accord, c'est que ça devient un service de plus qu'on offre aux parents pour ces enfants-là, et on ne vient pas remplacer, se substituer aux services. Ça, pour nous, c'est essentiel. Et la deuxième chose, si on veut une entrée progressive dès 2013‑2014, il faut absolument que les conditions soient réunies pour en faire un succès... de l'objectif, un succès. Parce qu'on parle des tout-petits, là, c'est d'abord à eux qu'on pense dans le cadre de ce projet de loi. Merci.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci, mesdames. Nous allons débuter les échanges. Mme la ministre, vous avez la parole.

Mme Malavoy : Je veux vous demander une directive d'abord, si vous permettez, parce qu'on a un bloc de deux heures, hein, parce qu'on a donc des groupes qui se sont joints. Est-ce qu'on fait des alternances de 20 minutes chacun, à peu près?

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Vous pouvez.

Mme Malavoy : On pourrait faire ça?

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Avec le consentement, on peut tout faire, Mme la ministre. On va s'ajuster, nous, au niveau du secrétariat.

Mme Malavoy : Ça irait plutôt que de faire un gros bloc? Parce qu'il va me venir d'autres idées en cours de route. Donc...

Une voix : ...

Mme Malavoy : D'accord. Ça vous va aussi?

• (15 h 20) •

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Parfait. Donc, vous pouvez débuter, Mme la ministre, et on va organiser le temps de ce côté-ci.

Mme Malavoy : Merci bien. Bien, mesdames, merci beaucoup. Je dis mesdames, oui, mesdames, c'est bien ça. Merci d'être là. Je trouve que c'est... Honnêtement, c'est intéressant et rassurant de vous entendre, parce que vous représentez beaucoup de monde, une variété également d'intervenantes dans ce milieu-là. Et donc de sentir que vous appuyez les fondements du projet de loi, pour moi, c'est important. C'est sûr que vous posez des questions, vous avez des demandes, des recommandations, même certaines vont peut-être au-delà de ce que le projet de loi lui-même peut fournir, mais je le comprends bien, là, parce que vous voyez l'éducation comme un tout, et je suis bien à l'aise avec ça.

Une des questions qui a été débattue depuis le début, puis j'aimerais commencer par ça... J'aurai des questions plus pointues à d'autres moments, mais, sur le fond de la question, une des questions qui a été débattue, c'est : Qu'est-ce qu'on ajoute à ce qu'on offre actuellement en implantant, pour des enfants de milieux défavorisés, une maternelle quatre ans? J'aimerais ça avoir votre avis là-dessus. Vous êtes d'accord qu'on l'offre, vous trouvez que c'est un service complémentaire. Mais, si vous essayez de l'illustrer avec les besoins particuliers des enfants que nous visons, de leurs familles, vous diriez quoi? Qu'est-ce que cette porte d'entrée là va ajouter par rapport aux services auxquels nous sommes habitués jusqu'à maintenant?

Mme Chabot (Louise) : C'est une large question. Je vais y aller... Bien, actuellement, je vais repartir, parce que j'ai parlé du vaste réseau des services éducatifs à la petite enfance qui se sont déployés depuis 1997, et, vous vous rappelez, les fondements même de ces services étaient voulus... étaient des services voulus universels où tous les enfants pouvaient... C'était ça, l'objectif de départ, là. Et je pense qu'on a accompli des grands pas dans ce sens-là. Mme Tonnelier signifiait de plus que, là, maintenant, que le développement se poursuit, la notion de qualité ou la notion éducative devient importante. Mais ce qui nous frappe quand même, c'est que, malgré ce vaste déploiement, le taux de fréquentation des enfants de quatre ans est autour de 65 %, on dira d'autres chiffres pour le milieu défavorisé, mais 65 %, donc. Il y a quand même un pourcentage de nos enfants qui ne fréquentent pas aucun service, que ce soit tout ce qu'on a pu développer avec les Passe-Partout, nos services éducatifs, et il y a certainement plusieurs raisons à ça. Et la levée du moratoire des maternelles qui existent déjà, quatre ans... Ça fait longtemps que la CSQ militait aussi en faveur de lever le moratoire parce qu'on trouvait que, pour des enfants, particulièrement en milieu défavorisé…

On sait que les enfants ne naissent malheureusement pas tous égaux et que l'égalité des chances parfois, au départ, pour leur donner une bonne chance de départ… Et, pour nous, de savoir que ces enfants, dans le fond, qui en ont le plus besoin, qui sont les plus vulnérables... de permettre un ajout de services qui va répondre... Je ne dis pas que… On ne dit pas du tout que les centres de la petite enfance ou le milieu familial régi n'y répond pas, mais que ça soit un service de plus qui peut répondre au plan éducatif et au plan d'agir en amont sur ces enfants-là qui leur manque peut-être des atouts pour arriver dans leur parcours scolaire, pour nous, ça ne peut être qu'un plus. Et, dans ce sens-là, on s'inscrit... Nous, on a reçu très positivement l'avis… l'esprit de l'avis du Conseil supérieur de l'éducation qui...

Mme Malavoy : ...impression, c'est que vous êtes assises ensemble, à la fois des représentantes du milieu scolaire et du milieu des services de garde. Et c'est pour ça que je vous pose la question : Quel est l'intérêt...

Une voix : ...

Mme Malavoy : Pardon?

Mme Chabot (Louise) : Vous êtes étonnée?

Mme Malavoy : Je ne suis pas étonnée, mais je le constate avec bonheur. Mais je peux vous dire que, depuis qu'on a commencé ces études, ces consultations publiques, on a eu des versions très variables selon les personnes qui venaient. Et donc, effectivement, c'est la première fois, là, que sont ensemble des gens qui représentent ces deux milieux-là. Et donc c'est une question très importante, parce qu'il peut y avoir une certaine tendance à dire, bien, comme à chacun sa spécialité, O.K.? Avant l'âge de la maternelle cinq ans, c'est ailleurs que ça se passe — je simplifie un peu, là — puis, à partir de l'école, bien, c'est dans le milieu scolaire.

Là, ce que vous dites, c'est : On est d'accord qu'on implante, donc, ces maternelles quatre ans de façon progressive dans les milieux défavorisés. J'aimerais savoir ce que votre expérience vous indique quant à l'intérêt que cela a pour ces familles-là, pour le choix que font ces familles-là qui ne font pas l'autre choix. Puis je sais qu'il sera intéressant également de voir du côté du service de garde, particulièrement en milieu familial, qui ne sont donc pas le milieu des installations des centres de la petite enfance, mais qui est un milieu plus proche de la famille... Donc, qu'est-ce qu'on apporte à des parents qui ne font pas ces autres choix? Pourquoi ne les font-ils pas? Et pourquoi feraient-ils celui, selon vous, de nos maternelles, celles dont on parle?

Mme Chabot (Louise) : Je vais faire un bout de réponse, s'il y a des collègues qui veulent compléter... On se comprend qu'on est sur les formats, parce que, comme vous le dites, on aura peut-être... Quand vous dites que, oui, il y a un consensus de notre côté, parce qu'on trouve que c'est un ajout supplémentaire, mais là on verra qu'il y a des conditions pour que ça devienne vraiment un ajout qui soit complémentaire et de qualité. Mais il peut avoir plusieurs raisons. J'en entendais d'ailleurs, durant la commission parlementaire qui est en cours, qui sont justes. Pour certains parents, de fréquenter un service de garde, bien, ce n'est pas un choix. Il y a des parents qui vont dire : Bien, moi, j'aime mieux garder les enfants chez moi, certaines communautés, certains milieux culturels. Par contre, en milieu familial régi, ça peut correspondre à un besoin, puis il y a peut-être une fréquentation différente pour des familles venant de communautés différentes aussi. Ça, je pense, ça répond à un besoin.

Mais il y a quelque chose dans notre système. L'éducation au Québec, c'est un droit, tandis que la petite enfance, ce n'est pas inscrit comme un droit au même titre que l'éducation. Ça fait que peut-être que, pour des parents, le fait d'aller à l'école va contribuer pour ces parents-là à dire : Bien, mon enfant va à l'école. Puis on voit, avec le service Passe-Partout... Donc, pour eux autres, il y a... Écoutez, je n'ai pas toute la recherche scientifique là-dessus, mais ça peut les aider à dire : Bien, c'est important que mon enfant fréquente, puis l'école, je vais la fréquenter, parce que ça correspond, pour eux, à un schème ou à une valeur qui est importante. Ça fait que ça, je pense que c'est des considérations qui peuvent être prises en compte.

D'ailleurs, au Québec, c'est assez étonnant, hein? La majorité de la population croit que les maternelles cinq ans, c'est obligatoire, alors que ça ne l'est pas et qu'il y a un taux de fréquentation à plus de 95 %. Et je pense que ça… Quand on s'adresse aux enfants de quatre ans, ce n'est pas la même chose, mais on est quand même dans le préscolaire, où il y a une offre de service et de milieu différents qui peut correspondre à des besoins. Puis on ne pense pas que ça soit magique, que ça se peut que toujours, après tant d'années... Mais, si on regarde les modèles qui se passent ailleurs, il y a des... si on se compare, puis sans copier les modèles, il y a des modèles qu'il y a des taux de fréquentation, comme le Danemark ou la Suède, à plus de 94 % des enfants de quatre ans dans un modèle comme ça. Je pense que c'est ce qu'il faut viser, puis il manque quelque chose qui peut répondre à un besoin mais qui ne devient pas la panacée, là.

Mme Malavoy : Si vous permettez, j'aimerais bien entendre Mme Tonnelier aussi sur le même sujet. Parce que vous, vous voyez ça d'un autre point de vue puis vous venez dire avec des personnes qui sont ici : Effectivement, c'est une idée à laquelle on adhère, que d'introduire les maternelles quatre ans progressivement pour des enfants de milieux défavorisés. J'aimerais ça vous entendre là-dessus également.

M. Tonnelier (Sylvie) : Écoutez, c'est certain qu'il y a un pourcentage d'enfants, un certain nombre d'enfants quatre ans qui ne sont à nulle part, là, qui sont à la maison, probablement, et c'est cette clientèle-là — «clientèle» entre guillemets, là — qui est visée, finalement, pour que les enfants fréquentent un service éducatif. Donc, dans ce sens-là, au point de vue de l'enfant, nous, on abonde dans le sens où, oui, ça serait important que ces enfants-là fréquentent un service. Mais, peu importe le service qu'ils vont fréquenter, il faut que ce soit un service soit à l'école, soit en CPE, ou en milieu familial, peu importe, c'est au choix du parent, et il faut que le parent ait un réel choix, par contre.

Puis pour répondre à... en tout cas, une expérience plus personnelle par rapport aux enfants qui sont... pourquoi ils ne viennent pas dans nos services, ces enfants-là, ça a été tellement un développement... Le développement des services de garde a tellement été fait en lien avec la conciliation famille-travail, c'est : Bon, bien, si tu ne travailles pas, pourquoi tu irais mettre ton enfant dans un service de garde? Tu n'as pas besoin de service de garde. Alors, c'est pour ça que l'aspect éducatif doit être mis plus en valeur, à mon avis.

Et l'autre facteur aussi, le fait que les parents devaient payer quand même une partie des frais, c'est-à-dire deux jours et demi, s'ils voulaient les mettre à temps plein, là, deux jours et demi à 7 $, et… Ça peut être aussi un effet restreignant, là, pour les familles, c'est un coût, quand même, et aussi le manque de places. Ça, c'est clair qu'on prenait moins facilement des enfants à temps partiel parce qu'on avait des demandes à temps plein aussi.

Alors, c'est pour ça qu'on souhaite que, pour les enfants de quatre ans issus de milieux défavorisés, ce soit gratuit et à temps plein. Puis, au niveau éducatif aussi, le suivi est plus facile quand tu peux les avoir tout le temps.

• (15 h 30) •

Mme Malavoy : Oui, je pense que c'est éclairant, ce que vous dites, et, effectivement, le lien entre services de garde et parents qui travaillent, effectivement, c'est vraiment une influence dans les choix qui sont faits.

Ça m'amène donc à notre projet, je l'ai dit depuis le début, qui est un projet en complémentarité avec ce qui s'offre du côté des services de garde. Les services de garde demeureront un modèle que le Québec a privilégié, qui remplit ses promesses, et qui est de qualité, et qu'on a envie, d'ailleurs, de compléter. Je pense qu'on l'a indiqué depuis que nous sommes au gouvernement.

Mais on dit : Il y a, vous l'avez rappelé, un certain nombre d'enfants qui ne font pas ce choix... enfin, leurs parents ne font pas ce choix, et donc ils se retrouvent... quand on dit à nulle part, en fait, on espère qu'ils ne sont pas à nulle part. Ils doivent être chez eux, ils sont... Dans le fond, ils ont des services de garde à domicile. Ils n'ont pas besoin d'être gardés ailleurs. Mais c'est eux qu'on vise.

Là, on a fait le choix, mais ça, personne ne va nous le contester, de dire : On y va de façon progressive, et pour des questions financières, et pour des questions aussi, je dirais, de suivi de ce projet-là, et parce qu'on ne veut pas faire du mur-à-mur ni là-dedans ni ailleurs, là. Il ne s'agit pas d'implanter quelque chose pour tous les enfants.

Mais le défi que nous avons, puis je veux vous entendre là-dessus, c'est de les rejoindre, de rejoindre les bons enfants. Alors, on a des obligations de par la loi, O.K.? La loi nous oblige à rendre service à des personnes. On veut viser des enfants de milieu défavorisé. En même temps, c'est une contrainte. J'entends ce que vous dites. Vous dites : Il faut revoir toute la carte de défavorisation. Puis je ne dis pas que je ferme la porte à ça, mais moi, j'ai besoin... je vais avoir besoin, bientôt, de retomber sur mes pieds par rapport à ce projet. Comment j'identifie les enfants pour éviter un étiquetage personnel? En même temps, pour rejoindre les bons enfants, hein, être sûre que je ne vais pas avoir des classes de maternelle quatre ans pour des enfants qui ne sont pas ceux qui en ont le plus besoin, surtout que c'est un bien précieux. Pour le moment, je vais avoir une classe par commission scolaire.

Comment je fais pour les rejoindre, pour les identifier sans tomber dans les difficultés ou les pièges que j'ai évoqués? Je sais que c'est une grande question aussi, là, mais, dans le fond, vous êtes assez nombreuses que je trouve qu'on peut poser des grandes questions.

Mme Chabot (Louise) : Je vais commencer, mais ça va me donner le goût de la relancer, la question, parce que ce n'est pas par hasard qu'on insiste tant sur l'indice de défavorisation. Il faut avoir les bonnes données. Je peux comprendre qu'à court terme, là, pour septembre l'an prochain, là, ça va être difficile. C'est d'ailleurs une des raisons pourquoi qu'on demande cette levée de moratoire, parce que ce qu'on a déjà pour les maternelles à demi-temps, c'est... on n'a plus les bons indices, et ça va... Puis, en plus, ce ne sont pas les mêmes indices dans le milieu... au niveau du ministère de la Famille et au niveau du ministère de l'Éducation.

Quand on parle de conditions gagnantes, c'est très important, la question que vous nous posez. Ça veut dire d'identifier les bons enfants. Et vous avez tout à fait raison de dire que ça doit être progressif, pas mur à mur. Ça, on le salue. Mais, en même temps, cette offre complémentaire de service, c'est pour répondre à des besoins.

Ça fait qu'on est aussi moins favorables à l'idée que ça devrait être une par commission scolaire. Quand on parle de progressivité, il faut peut-être regarder la progressivité en fonction de ce qui existe déjà et des besoins, dans certains milieux, des enfants. Si ça fait en sorte que c'est dans certains secteurs ou certaines régions du Québec qu'on doit insister plus... Puis là je prends l'exemple de ce qui se passe dans le déploiement des places en services éducatifs à la petite enfance. Bon, alors, je sais que je ne suis pas dans les enfants défavorisés, mais c'est quand même… le nombre de places est attribué en fonction des besoins. Mais, pour offrir des classes de maternelle quatre ans en milieu défavorisé, il faut que ça réponde aux besoins de l'enfant. Ça fait qu'il faut avoir cette capacité-là. Ça fait qu'on est loin d'être certain que de dire que la progressivité, c'est… une classe par commission scolaire, que ça soit la meilleure approche.

Mme Malavoy : En même temps, vous comprenez que, moi, il faut à la fois que je sois capable d'avoir des nuances, mais à la fois que j'aie les choses simples. Si j'offre une nouvelle porte d'entrée, un nouveau service, il faut que j'aie des critères relativement simples et qui, de façon très, très visible, dénotent une équité. Si je dis : Je vais, moi, aller décider sur vos territoires de commission scolaire qui pourrait y avoir droit ou qui n'y aurait pas droit, j'introduis, de ma part... bon, j'ouvre la porte à un jugement. J'introduis une discrimination moi-même. Si je dis aux commissions scolaires, d'autant que, là, je parle d'une classe : Bien, écoutez, vous avez actuellement des écoles qui sont classées... En fait, ce qui est classé, c'est l'environnement dans lequel est l'école, hein? L'indice de défavorisation, c'est par rapport à un milieu, à un quartier. Et donc vous savez quels sont les milieux les plus défavorisés, et moi, je vous dis : Choisissez une école à l'intérieur de ça.

Si je pensais qu'il y a, je ne sais pas, la moitié des commissions scolaires qui n'ont pas de milieu défavorisé, peut-être que mon approche ne serait pas la bonne. Mais la très grande majorité ont des milieux défavorisés et pourraient donc théoriquement trouver de quoi remplir une classe. Et je veux bien que vous me disiez : Ce n'est peut-être pas la meilleure approche, mais, moi, vous comprenez, il faut aussi que je sois capable de justifier mon choix, et qu'il n'ait pas juste l'apparence, mais qu'il soit équitable et qu'il donne une chance à travers le Québec. Je ne peux pas dire : L'indice de défavorisation est beaucoup plus élevé à Montréal, et donc je privilégie Montréal. Je dis : Il y a des questions de défavorisation à travers le territoire. Donc, je dis à chaque commission scolaire : Faites une classe.

Ça n'enlève pas le problème de réviser éventuellement la question de la défavorisation. Mais, si on parle de septembre prochain, effectivement, je dois fonctionner avec ce qui existe. Et j'ai besoin de démarrer. J'ai besoin de démarrer quelque chose. Puis, au fur et à mesure, on aura certainement à s'ajuster. À l'an 2, à l'an 3, on aura expérimenté quelque chose et on aura expérimenté dans le sens fort du terme, avec un suivi, puis on aura révisé peut-être aussi notre allocation de classes. Mais, pour le moment, j'essaie de voir comment je pourrais faire autrement que de dire ce que j'ai dit jusqu'ici : J'offre à chaque commission scolaire une classe dans les milieux les plus défavorisés avec les paramètres dont nous disposons actuellement, même si on peut dire qu'il faudrait réviser ça pour la suite des choses. Aidez-moi.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Mme Bernard.

• (15 h 40) •

Mme Bernard (Manon) : ...ça ne bouge pas. Bon. C'est parfait, alors, je vais bouger moi-même. Bien, une tentative de réponse. À l'heure actuelle, si on regarde le demi-temps pour les quatre ans, dans plusieurs milieux, on retrouve les quatre ans avec des cinq ans parce qu'il n'y a pas suffisamment d'enfants pour former un groupe ou de quatre ans ou de cinq ans. C'est ça, la réalité. On va parler, à ce moment-là, de dispersement au niveau d'un territoire. Les territoires, là, ne sont pas tous... Ce n'est pas tout du... Il y a du urbain... Tu as du urbain, semi-urbain, puis rural. Alors, le défi ne se pose pas de la même façon. C'est pour ça, quand on parle, on revient sur l'élément... l'annonce qui a été faite de l'implanter progressivement, est-ce que le «progressivement» ne pourrait pas se déployer différemment? On a, actuellement dans des commissions scolaires sur le territoire, une concentration de milieux défavorisés. Alors, est-ce que, pour l'an un — ça ne veut pas dire qu'il n'y aura pas ultimement pour tout le monde, parce que c'est déjà prévu que ça va se faire progressivement — ça ne serait pas mieux de cibler ces régions-là?

On a des commissions scolaires... il y en a peu, quand même, mais des commissions scolaires qui, à l'heure actuelle, n'ont aucun indice de défavorisation pour les ratios — il n'y en a pas beaucoup...

Une voix : ...

Mme Bernard (Manon) : ...c'est ça, deux, mais ça existe aussi — alors que ces milieux-là vont quand même avoir une classe, alors qu'il y a d'autres endroits où... Je vais prendre, bon, une commission scolaire sur la Rive-Sud de Montréal, une, entre autres, où il y a quand même une plus grande...

Une voix : Marie-Victorin.

Mme Bernard (Manon) : …oui, je le sais — Marie-Victorin, qui est quand même... où il y a plus de concentration, ou à Québec, à... bon. On a des endroits comme ça où il y a une plus grande concentration. Vérifiez. Est-ce que ces enfants-là, les enfants qui sont là, ils ont accès, ils vont dans les CPE ou pas, et tout ça?

Et ce qui a été dit par ma collègue tout à l'heure, pourquoi que les parents ne choisissent pas d'aller au CPE? Parce que, pour beaucoup de parents, c'est comme faire garder, et ça, ils ne veulent pas faire garder quand ils sont à la maison. Ça, ça explique parfois le choix.

Puis, pour l'indice de défavorisation, quand on revient à 1997, le moment du moratoire, la liste qui a été constituée à ce moment-là reposait sur le recensement de 1991. Ça fait que c'est des données… Quand même, là, la réalité économique a sûrement changé depuis ce temps-là. C'est pour ça qu'on parle de données qui sont là depuis plus de 20 ans.

Mme Malavoy : Pour le moment, comme on y va de façon progressive et avec une... J'ai encore un peu de temps ou pas?

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Oui, vous avez encore du temps, Mme la ministre.

Mme Malavoy : Avec une classe par commission scolaire, on touche... on ajoute quelque chose, c'est-à-dire que... Puis ça, c'était important, je pense, de le préciser dès le départ, donc les maternelles mi-temps, là où elles sont, elles demeurent. Certaines sont dans des milieux qui n'ont pas les indices de défavorisation les plus élevés, O.K., mais nous, on n'est pas là pour perturber ce qui se passe, on est là pour ajouter quelque chose. Donc, les maternelles mi-temps, même si elles sont dans des quartiers moins défavorisées, demeurent, Passe-Partout demeure. On ajoute la maternelle plein temps pour des enfants de milieu défavorisé, et donc on est plus dans un modèle là encore à plusieurs portes d'entrée.

Probablement qu'au fur et à mesure les jonctions, éventuellement, vont se faire. Par exemple, vous insistez, à juste titre, sur l'importance de rejoindre les parents dans les projets dont nous nous inspirons puis dans les travaux préliminaires qui se font par rapport au programme, c'est sûr que les parents sont importants. Alors, il y a le modèle Passe-Partout qui peut être inspirant. En même temps, il n'est pas lié à une maternelle plein temps quatre ans, mais il peut être inspirant parce qu'il y a là une approche qui est intéressante.

Et une des données aussi, d'après ce que je comprends, avec lesquelles on va devoir composer, c'est que ce n'est pas parce qu'on l'offre que tous les parents qui pourront en bénéficier et tous les enfants vont s'y précipiter. Là, je réfléchis avec vous, là. Ce n'est pas une science exacte, mais... C'est pour ça que nous, on s'est dit : Même si un groupe n'est pas complet, on va pouvoir l'autoriser, parce qu'il y aura peut-être un effet d'entraînement. Mettons qu'au lieu d'avoir une moyenne de 15 enfants, qui est la norme, c'est... 18, c'est le maximum, la moyenne, c'est 15. Mettons qu'il y ait sept, huit enfants à un endroit, bien, ça crée peut-être un effet d'entraînement dans un milieu, dans une communauté.

Moi, je crois qu'il y a des parents qui, probablement, vont apprivoiser ce que c'est, hein? Les parents qui n'ont jamais fait ce lien de... que leurs enfants quittent la maison avant l'âge de l'école, peut-être que, si quelque chose existe dans leur milieu, ils vont être enclins à s'en servir. Et ça peut prendre un peu de temps avant que le groupe soit complètement rempli.

Donc, il faut qu'on ait des nuances. Peut-être qu'à certains endroits on aura 15 enfants et peut-être même 16, 17 tout de suite. Mais, à d'autres, ça va être un peu plus long. Et, ça aussi, dans notre progressivité, il faudra en tenir compte.

Mme Chabot (Louise) : C'est bien certain, Mme la ministre, que, comme vous, nous avons certaines... Certaines de vos questions sont pour nous aussi des questions, d'où notre préoccupation de comment se fera la progressivité, et on n'a pas toutes les réponses. Mais, d'entrée de jeu, dire que ça va être progressif puis que ça va être une... une pour une classe par commission scolaire… peut-être qu'on ne vous aide pas en vous le disant, mais, si l'objectif, c'est d'aller rejoindre le plus d'enfants possible qui en ont besoin, peut-être qu'il y a une autre façon de faire la progressivité pour bien les identifier. Parce que, justement, il y a des régions ou il y a des milieux, là, que, pour former un groupe, ça va peut-être poser un défi plus grand aussi que dans d'autres régions, là, ne serait-ce que... Écoutez, on a déjà les images, ne serait-ce que la grandeur du territoire, ou tout ça. Moi, je peux comprendre que chaque région… S'il y en a juste deux qu'il n'y en a pas, tout le monde va s'attendre à ce qu'il y ait une réponse, mais est-ce que c'est... parle pas pour plus tard, mais est-ce que c'est vraiment la meilleure manière de commencer? Nous, on n'en est pas convaincus, même si on n'a pas toutes les réponses à nos questions.

Mme Malavoy : Juste de façon complémentaire, parce qu'après on va alterner, mais vous le décideriez comment? Est-ce que vous voulez que, d'autorité, je dise : Il y en a aura là et pas là? Moi, là, ce que j'ai fait comme choix, c'est...

Mme Chabot (Louise) : Une consultation de la CSQ, ça serait bien.

Des voix : Ha, ha, ha!

Mme Malavoy : Oui, je vous le concède, mais une consultation, c'est une chose, O.K., dire : Je consulte et puis, à un moment donné, je décide. C'est quand même une décision ministérielle à ce moment-là, même après consultation. Moi, le choix que j'ai fait pour le moment, c'est de dire : J'offre à chaque commission scolaire le choix de faire cet exercice et d'identifier son école, c'est ça, le choix que j'ai fait, plutôt que de faire moi-même ce que j'appelle d'autorité... c'est le choix des milieux qu'il faut choisir à ce moment-ci et qu'il faut rejoindre.

Mais je vais rester quand même avec la question ouverte, là, on pourra y revenir, mais ça me permet de comprendre votre point de vue, puis, si on veut avoir plus qu'un bloc, je vais arrêter celui-ci ici.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci, Mme la ministre. Nous allons maintenant du côté de l'opposition officielle. Mme la députée de Mille-Îles, vous avez la parole.

Mme Charbonneau : Merci, Mme la Présidente. Mesdames, la ligne, elle est bien complète, merci. Vous avez fait parvenir un mémoire fort étoffé. Vraiment, j'ai retrouvé là plusieurs questions qu'on se posait depuis lundi par rapport à certains gestes et certaines visions, mais vous avez été plus loin même. Donc, j'ai beaucoup... je l'ai lu avec beaucoup d'attention.

Puisque j'ai le privilège d'avoir des gens qui touchent à la même catégorie d'élèves ou de jeunes, donc quatre ans, mais à différents niveaux, je vais vous poser une question que je n'ai pas posée encore à personne mais qui me titille depuis le début. Accessibilité et qualité, on l'a dit, il y a des jeunes qu'on ne rejoint pas. Ça peut être une volonté de la famille comme ça peut être juste parce qu'on n'a pas réussi à les retrouver sur le territoire puis les gens n'ont pas pris accès aux services qu'on leur offre. Ça peut être un choix financier qui fait qu'on a choisi de ne pas prendre autre chose que l'accueil cinq ans préscolaire, parce qu'effectivement on pense que c'est obligatoire, même si c'est encore facultatif. Mais est-ce que, si je donne une formation à quatre ans au scolaire et que j'ai un enfant qui est en milieu familial à quatre ans puis un autre qui est dans un CPE avec un groupe de 10, est-ce qu'ils vont arriver avec la même qualité et avec la même égalité des chances au préscolaire à cinq ans? Puis je pense que vous êtes les meilleures personnes pour me répondre puisque vous touchez à différents aspects de ça. J'ai quelqu'un en milieu familial; j'ai des gens du scolaire. Donc, est-ce que, dans ma volonté de mettre en place la qualité et l'accessibilité, à travailler plus d'un côté ou plus de l'autre, j'arrive au même résultat, c'est-à-dire, quand j'arrive à cinq ans au préscolaire, le terme est mal choisi, mais tout le monde est égal?

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Mme Bernard.

Mme Bernard (Manon) : C'est la beauté de la chose, le fait que ce soit complémentaire. À l'heure actuelle, pour plusieurs… bien, pour plusieurs, quand ça arrive dans des milieux défavorisés, puis je vais parler même d'indice 10, où des enfants n'ont eu accès à aucun service, qu'ils n'ont jamais tenu une paire de ciseaux dans leurs mains, ni un crayon, ni entendu des histoires et puis... Bon, là, je ne raconterai pas, mais ça arrive. Alors, ça existe. Tout ce qu'il peut y avoir comme stimulation va diminuer l'écart qu'il y aurait autrement. Ça fait que ça passe par un CPE, ou par un service de garde en milieu familial, ou par du préscolaire quatre ans, ou même, je dirais, jusqu'à la maison quand il y a une stimulation puis des... Je veux dire, on est plusieurs à avoir été des parents ici, puis c'est ce qu'on a fait avec nos enfants, les stimuler. Bien, l'écart va être moins grand que s'il n'y a rien eu.

Alors, dans ce sens-là, je ne répondrai pas pour les autres personnes pour avoir leur point de vue, mais, je me répète, c'est la beauté d'avoir des services complémentaires, d'avoir une offre de service diversifiée, puis, pour ce qui est de l'égalité des chances, on tente, puis c'est un objectif à atteindre. Tu sais, ce n'est pas tout le monde pareil.

• (15 h 50) •

Mme Charbonneau : Ça va? Tout le monde s'accroche à cette réponse?

Mme Chabot (Louise) : Oui, oui, tout à fait. Puis j'ajouterais... C'est parce que la beauté de nos services éducatifs à la petite enfance régis, je tiens à le dire, je dirais publics, c'est qu'il y a déjà un programme éducatif qui est pensé aussi pour les enfants, mais… Puis le programme éducatif pourrait être pensé autrement dans les maternelles quatre ans à temps plein, mais ça vise le même objectif. L'important sur la question de la qualité, tout le monde le dit, c'est l'amélioration de l'aspect éducatif, puis l'accessibilité, ça va devenir important. Par exemple, si on parle de services complémentaires, ça va bien, mais il faudrait effectivement qu'il n'y ait pas un problème d'accès en raison de règles différentes d'un milieu à l'autre, toutefois, quant au financement pour ces enfants-là.

Puis une autre façon que nos enfants arrivent à peu près tous égaux en cinq ans ou qu'on leur ait donné le maximum de chances, c'est aussi de regarder les enfants à besoins particuliers. Là, je sais que je... C'est parce que les enfants à besoins particuliers, on en parle beaucoup dès le scolaire. Mais un enfant à besoins particuliers, ça arrive bien... Tu sais, il n'arrive pas à cinq ans : J'ai un besoin particulier, hein? Souvent, c'était peut-être déjà tout petit. Ça fait que d'avoir des mesures en plus des services éducatifs, mais d'avoir des mesures pour être en mesure de soutenir déjà ces enfants-là… Mme Tonnelier l'a dit, dans nos services éducatifs, si c'est des enfants qui sont déjà référés par les CLSC, bien, nous savons que, pour ces enfants-là, il y aura des services, parce que c'est le CLSC qui les réfère. Mais il y en a qui ne sont pas nécessairement rendus là, mais qui ont besoin d'être identifiés. Ça fait que ça aussi, c'est important. Puis, quand on parle de qualité, c'est tout ça.

Mme Charbonneau : Je vous dirais que, dans le vocabulaire scolaire, on appelle ça un élève à risque, hein? Il n'est pas assez... pour avoir un tag bien particulier, mais il est à risque, parce qu'on sait qu'il a une problématique qui est dans son environnement proche, proche, dans ses attitudes puis dans ses façons de faire. Donc, oui, je comprends ce que vous me dites.

Par contre, le préscolaire quatre ans mi-temps a aussi été mis en place pour les élèves à défis particuliers. Je pense à une commission scolaire que je connais bien qui, pour les enfants avec un problème de surdité, les accueille temps plein à l'école J.-Jean-Joubert, à Laval, temps plein, et l'autre moitié de l'année, c'est la commission scolaire qui absorbait les coûts pour être capable de ne pas les voyager, là, à l'intérieur de quatre heures, tu sais? Bon.

Donc, oui, il y a des services puis il y a une précaution à prendre, puis je suis heureuse de vous entendre, parce que, depuis lundi, je reçois des courriels, il y a des gens qui m'interpellent puis qui me disent : Oui, mais là ça n'a pas d'allure, quatre ans, ils sont trop petits. Et de vous entendre dire : Non, non, non, c'est la mixité, c'est la complémentarité puis c'est le service ouvert à tous… Et on répète à chaque fois qu'on a une chance de le dire, c'est-à-dire : Tu as le choix d'utiliser le service ou de ne pas l'utiliser. Donc, c'est intéressant de voir votre opinion là-dessus aussi.

Page 14 de votre mémoire, vous revenez un peu sur la formation et vous avez parlé d'un programme qui, moi, me touche beaucoup et que je connais bien, qui s'appelle le programme Passe-Partout, qui a 20 ans et plus d'expérience sur le terrain. Donc, quand on dit qu'on part... On part peut-être à neuf, on part aussi avec des choses qui existent déjà, qui ont fait leurs preuves, comme le programme Passe-Partout. Ce matin, on parlait à d'autres gens qui nous ont parlé de Fluppy, qui est un programme qui existe aussi. Il y en a d'autres qui sont en train de se développer, mais il y a des gens qui ont de l'expérience dans nos écoles, qui peuvent contribuer à ce regard-là qu'on porte sur la formation au préscolaire.

À chaque fois qu'on adresse le principe de la formation, on rappelle avec prudence que nous croyons que nos enseignants sont extraordinaires. Plus souvent qu'autrement on se dit : leur formation continue, c'est au quotidien qu'ils l'ont faite, avec toutes sortes de choses qu'ils ont pratiquées, puis ils reconnaissent que, dans leur milieu, il y a des choses qui sont différentes. Donc, apprendre à découper, apprendre à lire, apprendre les chiffres, ça peut être différent dans un milieu plutôt que dans un autre.

Qu'est-ce que je peux faire, comme gouvernement, pour améliorer la formation, pour assurer qu'au niveau préscolaire, qui va être quasiment rendu un cycle, hein, quatre ans, cinq ans, ça fait deux années de file, ça fait presque un cycle, après ça, je tombe première année, deuxième année, un autre cycle, puis je continue comme ça jusqu'en sixième... Qu'est-ce que je peux implanter, proposer, mettre en place à la formation des maîtres pour m'assurer que, quand mon enseignante choisit — même si, des fois, ce n'est pas un choix — le préscolaire, elle est plus habilitée à faire face à ce groupe qui… Pour l'instant, on dit peut-être 15, peut-être 18 dans un principe de maximum. Alors, qu'est-ce que vous nous proposez dans l'amélioration de la formation?

Mme Bernard (Manon) : Il y a un élément qui pourrait être regardé, c'est, quand on parle de la formation pratique, de s'assurer qu'il y ait, pendant la formation pratique, des stages disponibles au niveau du préscolaire, ce qui n'est pas le cas... Ça varie d'une université à l'autre. Ça fait que ça, c'est probablement un des éléments qui devraient être regardés.

Pour nous, la formation initiale, au niveau du baccalauréat, ça doit être... devrait être un processus d'amélioration continue. Là, ici, on est en commission parlementaire pour parler des enfants de quatre ans. Donc, on cible beaucoup la formation pour le préscolaire. Mais je vous dirais qu'on parlerait des élèves en difficulté, des élèves à risque, et tout ça, et on voudrait aussi porter un regard au niveau de la formation initiale là-dessus.

Alors, à chaque fois qu'il arrive quelque chose, on se dit... quand on se retrouve avec des chercheurs aussi, bon, bien, on se dit : Le transfert des connaissances entre la recherche... Bon, on devrait aussi regarder quelque chose au niveau de la formation initiale. Ça, c'est à peu près comme... la même chose pour les écoles, là, toutes les responsabilités qu'on voudrait que les écoles fassent. Ça fait que je pense que c'est... Il y a des organismes qui existent, la CAPFE, qui devraient regarder ce qui peut être fait au niveau de la formation initiale, mais le regarder dans une vision d'ensemble, dans un premier temps.

Dans un deuxième temps, pour ce qui est des enseignants, c'est un processus d'accompagnement des enseignants. Alors, on va parler ici d'insertion professionnelle. On parle quand même, là, d'une formation initiale de quatre ans, baccalauréat de quatre ans, avec une formation pratique très importante. Ce n'est quand même pas rien, c'est... Si on se compare à d'autres provinces ou d'autres pays, on n'a pas à être gênés. Au contraire, tout au contraire. Ça fait que ça, ça démontre la qualité des enseignants qui arrivent sur le marché du travail, mais l'accompagnement, la mise en place de... Nous, on demande une politique au niveau de l'insertion professionnelle. Alors, ça pourrait faire partie de l'accompagnement. Et s'ajoute à ça la formation continue, comme vous l'avez placée, et c'est essentiel, parce qu'une formation initiale aussi bonne soit-elle ne pourra jamais prévoir tout ce qui arrive comme développement au niveau... que ce soit au niveau des programmes, au niveau de la réalité. Alors, la formation continue, c'est déjà prévu, dans la Loi de l'instruction publique, que les enseignants doivent maintenir un haut de degré de compétence, bien, encore faut-il qu'il y ait une formation continue et un financement prévu pour cette formation-là.

Mme Charbonneau : C'est un mot qu'on utilise quelques fois, le mot «financement», quand on parle du scolaire.

Mme Bernard (Manon) : Oui. Oui.

• (16 heures) •

Mme Charbonneau : Vous avez raison. Page 12 — je recule un peu, mais ça va dans l'ordre des choses que j'avais notées — vous parlez des ratios. Et, juste avant la recommandation 9, vous avez un paragraphe très intéressant qui parle des recherches, des ratios qui se sont faits un peu partout. Vous revenez aussi sur le ratio. En milieu familial, c'est 1-6; en CPE, c'est 1-10; au niveau scolaire, bien là il y a eu le projet à l'école Saint-Zotique, qui a été 1-18, donc... mais avec deux personnes, une personne à mi-temps, une personne temps plein. Mais vous, vous revenez en disant : un enfant de quatre ans n'a pas les mêmes besoins qu'un enfant de cinq ans — là, je pensais de lire une phrase que j'avais écrite moi-même, parce que je l'ai dit une couple de fois aussi — mais, dans ce contexte, si nous nous comparons à d'autres provinces et États, nous sommes d'avis qu'il serait préférable de diminuer le ratio actuel des maternelles quatre ans à un adulte pour un maximum de 15 enfants. Donc, pour vous, 1-15, une personne, ça marche?

Une voix : …compléterai, si tu veux.

Mme Chabot (Louise) : Bien… Oui, parce que... Je vais la laisser, mais... Ça marche, oui, je vais laisser Mme Bernard... Mais effectivement je veux juste qu'on n'oublie pas, là... C'est que ce n'est pas un enseignant tout seul avec 15 enfants qu'il n'y a pas de service autour, là, avec tout ce qui est service puis qui... Quand on parle de Passe-Partout, là, pour nous, la maternelle quatre ans pour... Les quatre ans en milieux défavorisés ne disposent pas de Passe-Partout, là. Ça devient... Donc, quand on parle de ratio, bien, c'est en fonction de notre vision qu'il y a des services qui entourent ces enfants-là.

Mme Charbonneau : ...Passe-Partout à l'école.

Mme Chabot (Louise) : Ah, tout à fait!

Mme Charbonneau : Donc, pour vous, le programme de préscolaire quatre ans est non seulement complice des autres organisations que je peux avoir, mais il est...

Mme Chabot (Louise) : Bien oui.

Mme Charbonneau : Passe-Partout est complémentaire, il est rattaché à mon service. Vous me dites oui.

Mme Chabot (Louise) : Bien, c'est important parce qu'il y en a qu'il y a eu beaucoup de... en disant : Bien, on va mettre la maternelle quatre ans dans toutes les commissions scolaires puis ça va remplacer Passe‑Partout. Pour nous, c'est non, ça ne remplace pas Passe-Partout.

Mme Charbonneau : O.K.

Mme Chabot (Louise) : Passe-Partout a des objectifs spécifiques pour les parents… La relation parent-enfant, tout ça, il faut que ça soit maintenu. En plus, on parle des enfants de quatre ans en milieux défavorisés. Ça fait que, quand on parle de ratio… je laisse... enfants…

Mme Charbonneau : Oui, oui.

Mme Chabot (Louise) : …c'est en lien avec... c'est avec tout ça. Puis il faut penser aussi aux services. Ça, on en a moins parlé, mais, après...

Mme Charbonneau : Non, mais je m'en venais, là.

Mme Chabot (Louise) : C'est ça, les enfants, après...

Mme Charbonneau : Je vous revenais, là.

Mme Chabot (Louise) : ...les services de garde en milieu scolaire, hein, c'est un tout, aussi.

Mme Charbonneau : Mais, moi, avant que vous répondiez, je vous le dis, là, moi, ce que j'ai compris duprogramme qu'on s'apprête à offrir, ce n'était pas un Passe-Partout à l'intérieur d'une école. Passe-Partout, c'est une chose; l'école, c'est une autre chose. Il y a une complémentarité dans la communauté. Et c'est comme ça, et peut-être que je l'ai mal compris, c'est là que j'utilise la couleur de mes cheveux à chaque fois pour dire : Vous savez, ça se peut que j'aie mal compris. Mais la façon que j'ai lu les documents puis de la façon qu'on fait nos échanges depuis le début, Passe-Partout, c'est une chose, le préscolaire quatre ans, c'est autre chose. Donc, je n'enlève pas le service de Passe-Partout, c'est clair. La ministre l'a reconnu, c'est important où il est implanté. On se souviendra qu'il n'est pas du tout à Montréal, hein, il est toujours en... Il est en région, mais, à Montréal, il n'y a pas beaucoup de Passe-Partout. S'il y en a, je serais surprise. Ceci dit, il n'était pas intégré au programme préscolaire quatre ans. C'est un programme à côté, puis le préscolaire quatre ans... Donc, moi, ma question, c'était... Je suis un peu surprise, c'est pour ça que j'étais surprise du 1-15. Mais là je viens de comprendre que, pour vous, 1-15, c'était un adulte de référence avec des services alentour et d'autres adultes qui se joignent.

Puis je ne suis pas rendue non plus aux ressources complémentaires qui peuvent être mises en place en orthophonie, ortho… et toutes les autres orthos que je peux retrouver alentour des services d'un jeune qui a un besoin de soutien parce qu'il a des problématiques reconnues par le milieu de la santé et donc il a besoin... puis l'école devrait avoir les moyens de fournir ces services-là. À date, on n'est pas sûrs de ça non plus. Mais confirmez-moi ou infirmez-moi le fait que, pour vous, Passe-Partout était à l'intérieur du programme du quatre ans à l'intérieur de l'école.

Mme Pomerleau (Johanne) : Je vais faire un petit bout sur le programme Passe-Partout avant de laisser la parole à…

Mme Charbonneau : Oui.

Mme Pomerleau (Johanne) : …Mme Bernard sur le ratio. Mais, si on regarde notre recommandation 15, c'est clairement indiqué que le service soit partie intégrante et indissociable de la maternelle pour les enfants de quatre ans. Présentement, dans les endroits… et vous avez tout à fait raison, il n'y a malheureusement pas le service Passe-Partout dans la région de Montréal. Je dis «malheureusement» parce qu'il y a quand même beaucoup de défavorisation. Le service Passe-Partout s'est d'abord développé en région, et souvent c'étaient ou les maternelles quatre ans à temps partiel ou le service Passe-Partout. Mais il y a certaines commissions scolaires qui ont eu la bonne idée d'associer les deux et de donner les deux services, et, nous, c'est ça qu'on demande. Parce qu'on dit que la classe, c'est pour l'enfant, et le service Passe-Partout, c'est pour la relation parents, c'est pour développer les habilités parentales et pour, je dirais, apprivoiser le parent de milieu défavorisé afin qu'il accompagne mieux son enfant pour la suite. Et ça, pour nous, ce n'est pas un... Ce n'est pas le travail de l'enseignant dans la classe de développer le volet parental, c'est vraiment un travail qui est beaucoup plus complémentaire, donc on parle de services complémentaires de professionnels.

Donc, pour nous, c'est vraiment associé, ce n'est pas un ou l'autre; on pense qu'on doit développer les deux en… en harmonie, disons. Mais peut-être que ça exigera de faire certaines modifications, au niveau du programme Passe-Partout qui, présentement, a un volet plus enfant, qui, s'il y a des maternelles quatre ans temps plein, va aller plus du côté enseignement. Mais on ne peut pas les voir, selon nous, de façon...

Mme Charbonneau : ...

Mme Pomerleau (Johanne) : ...oui, ou bien en silo, il faut trouver une façon de les intégrer. Je laisse Manon poursuivre.

Mme Bernard (Manon) : Sur le chiffre 15, oui, le ratio, vous savez que, tout dépendant s'il y a un groupe ou deux groupes, une moyenne va devenir un maximum. Quand on a juste un groupe... Dans notre convention collective, actuellement, c'est comme ça.

Si on regarde les diminutions importantes qu'il y a eu du nombre d'élèves dans les classes au cours des dernières années, pour vous donner un ordre de grandeur, en milieu défavorisé, des élèves de sixième année, la moyenne est de 18 actuellement. Là, on parle d'enfants de quatre ans, ça fait que c'est pour ça que je vous ai dit aussi, au-delà de la recommandation qui est là dans la présentation du mémoire, que la consultation qu'on est en train de mener auprès de nos enseignants du préscolaire dans les données qui sont entrées, c'est inférieur à 15.

Mme Charbonneau : Avec du complémentaire.

Mme Bernard (Manon) : Avec du… Effectivement, avec du complémentaire...

Mme Charbonneau : J'insiste.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : ...

Mme Charbonneau : Merci. Je vais la garder pour tantôt.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Parfait. Nous allons l'additionner sur le second bloc. Donc, nous allons maintenant du côté du deuxième groupe de l'opposition. Mme la députée de Montarville, vous avez la parole pour un temps de 5 min 30 s.

Mme Roy (Montarville) : Merci beaucoup, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Je fais juste vous préciser que, si vous deviez dépasser votre temps...

Mme Roy (Montarville) : Oui, oui, ce sera enlevé sur l'autre.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : ...on va le répartir par la suite.

Mme Roy (Montarville) : Merci. Bonjour, mesdames. Merci. Merci pour votre mémoire. Merci pour vous être déplacées. J'ai lu avec intérêt votre mémoire et, si je vous amène au point 17 de vos recommandations, entre autres, et on en parlait tout à l'heure, le fait que certains parents n'envoient pas leurs enfants en garderie, entre autres parce qu'il y a un coût, il y a un coût financier qui est tout de même… est quand même rattaché à la garderie, et on parle, entre autres, de milieux défavorisés, ma question est la suivante. Selon l'expérience que vous avez du milieu, l'expérience que vous avez des parents, les connaissances que vous avez de l'entourage des CPE et de nos écoles, selon vous, si les CPE étaient vraiment, mais vraiment gratuits pour cette clientèle défavorisée qu'on tend à rejoindre par ces maternelles quatre ans, dans quelle proportion, dans quel pourcentage, pensez-vous, ces parents qu'on ne réussit pas à rejoindre seraient tentés d'envoyer leurs enfants aux CPE plutôt qu'en maternelle quatre ans? Avez-vous une idée de cette clientèle qu'on pourrait aller chercher davantage chez les CPE qu'en garderie? Ou que feraient-elles si elles étaient totalement gratuites, ces garderies, comme vous le suggérez? Parce que vous voudriez qu'elles le soient, effectivement.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Mme Chabot?

Mme Chabot (Louise) : Mme Tonnelier, d'abord.

Mme Tonnelier (Sylvie) :

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Allez-y, Mme Tonnelier.

• (16 h 10) •

M. Tonnelier (Sylvie) : Merci. Je pense que ce qu'il faut... ce qu'il faut… je veux dire, je ne peux pas répondre à votre question, là, je ne sais pas exactement quel serait le pourcentage d'enfants qui fréquenteraient les CPE ou le service de garde en milieu familial, mais, chose certaine, ce qui est important à faire, c'est que le parent ait le choix puis que les services qui sont offerts, que ce soit dans n'importe quel milieu, ils sont comparables et que le bénéfice pour l'enfant sera le même. C'est ça qui est important.

Alors, quand on dit : Bien, il faut offrir la gratuité aux parents de ces enfants-là, c'est pour faciliter… ça va être quelque chose qui va être facilitant. Est-ce que ça va être déterminant? Ça va aider; en tout cas, ça ne peut pas nuire. Qu'ils soient à temps plein... Du point de vue de l'enfant, ce serait important qu'il fréquente à temps plein parce qu'il y a toute la continuité. Comme je disais tantôt, il y a tous les acquis qu'ils peuvent faire dans la vie de groupe. Quand tu viens deux jours et demi par semaine, il faut que tu recommences… Tu reviens en arrière un petit peu puis il faut que tu recommences à te réhabituer, à te réadapter, alors tu perds un peu de... comme, pour l'enfant, il perd un peu de connaissances déjà d'intégration dans un groupe, là.

Donc, ce n'est vraiment pas... On ne peut pas le trancher au couteau, mais, à partir du moment où on offre la palette de services, le parent va pouvoir choisir le service qui lui convient, qui est peut-être plus proche de chez lui, qui peut-être répond mieux à ses aspirations, en autant que le parent se sente à l'aise… Il faut qu'il se sente à l'aise d'aller dans un CPE ou dans un service de garde en milieu familial. Puis c'est pour ça… Je veux dire, il faut valoriser l'aspect éducatif qui se fait dans nos services. Mais il faut qu'il ait le choix, le parent, il ne faut pas qu'il se sente coupable d'aller dans un endroit ou un autre. Il faut qu'il soit rassuré qu'il a sa place, que l'enfant a sa place là.

Mme Roy (Montarville) : Mais, à tout événement, vous croyez que cette gratuité-là pourrait faire en sorte que vous alliez chercher cette clientèle qui n'est pas accessible ou qui ne vient pas?

Mme Chabot (Louise) : Je pense que l'idée...

Mme Roy (Montarville) : Oui.

Mme Chabot (Louise) : En tout cas, l'idée, nous, qu'on a comprise puis qu'on retient, là, c'est de ne pas mettre en place un système de concurrence où des enfants qui fréquentent déjà nos centres de la petite enfance quitteraient le centre de la petite enfance pour aller dans les... Ces enfants-là occupent déjà un service.

Mme Roy (Montarville) : ...

Mme Chabot (Louise) : Non, mais ce que je veux dire, c'est, quand on demande la gratuité, là, c'est parce que… Pour être simple : si, à l'école, c'est gratuit puis, dans les CPE, actuellement, c'est du demi-temps par semaine, bien, nécessairement, on va faire de la concurrence si on ne régularise pas ça. C'est ce qu'on pense.

Mme Roy (Montarville) : Ça, je le comprends. Mais ma question est la suivante. C'est qu'en mettant ça gratuit, ces garderies, ces CPE, pour ces gens qui peut-être sont difficilement rejoignables, entre autres parce qu'il y a un coût, je me demandais si vous aviez une idée du volume ou du pourcentage de parents que vous pourriez aller rejoindre et qui pourraient ainsi venir dans les CPE puisque ça ne leur coûterait rien, tout comme l'école ne leur coûterait rien.

Mme Chabot (Louise) : Ça serait difficile parce que ce n'est certainement pas la seule raison qui fait que les parents ne fréquentent pas... Ça serait difficile. Mais, si on l'aborde comme ça, c'est parce qu'on a... Si on l'aborde de cette manière-là, c'est pour camper clairement que, dans les services, ils sont complémentaires et il faut que ça soit les mêmes règles. Ça fait que c'est... Est-ce que ça va faire en sorte qu'il y aura plus de parents qui vont fréquenter les services éducatifs à la petite enfance? Bien, tant mieux si ça donne ça aussi. Mais il y a d'autres raisons aussi, on le disait tout à l'heure. Il y a des parents que ça va demeurer un service de garde puis peut-être qu'ils n'iront pas, mais peut-être que ça va favoriser...

D'autre part, dans les services éducatifs à la petite enfance, du deux jours et demi, là, par semaine, ce n'est pas si simple non plus à organiser en termes de places. Quand on parlait que, bon, là, le déploiement des places arrive presque à terme, c'est sur la qualité qu'il faut agir, mais, d'organiser des places à temps plein pour les parents qui travaillent, puis des demi-places, des deux jours et demi semaine pour les enfants, ça n'a peut-être pas non plus aidé. Ça fait que c'est toutes sortes de facteurs qui... Si on veut rejoindre... Si l'objectif, c'est de rejoindre les enfants qui ne fréquentent pas de service, bien, donnez des chances. C'est pour ça qu'on vise aussi d'améliorer les chances en services éducatifs à la petite enfance et l'école, on agit sur les deux plans...

Mme Roy (Montarville) : Et je vous ai bien comprise.

Mme Chabot (Louise) : ...en espérant qu'il y ait le plus de parents et d'enfants possible qui vont fréquenter...

Mme Roy (Montarville) : L'un ou l'autre.

Mme Chabot (Louise) : ...l'un ou l'autre des services. Pour nous, ce n'est pas qu'ils fréquentent l'école ou qu'ils se...

Mme Roy (Montarville) : J'ai compris.

Mme Chabot (Louise) : Ça va?

Mme Roy (Montarville) : Je vous ai bien comprise. Merci.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci. Nous retournons du côté du gouvernement. Mme la ministre, pour le dernier bloc, vous avez la parole pour un temps de 21 minutes.

Mme Malavoy : Merci beaucoup. C'est très bien d'avoir deux blocs comme ça, je trouve que ça permet de revenir à la discussion, et donc ça nous permet aussi d'utiliser, je dirais, les réponses que vous avez faites à d'autres pour ajuster nos propres questionnements.

Si vous permettez, je vais simplement reprendre d'abord certaines de vos recommandations pour vous dire que je pense qu'on est sur la même longueur d'onde, O.K.? Donc, je ne suis pas ici pour donner tous les détails, mais je vais en prendre un certain nombre, puis je m'arrêterai peut-être un petit peu plus à la question du soutien parental. Mais je prends les recommandations de 10 à 14. Alors, vous dites que vous voulez un financement des ressources qui soit adéquat. J'ai indiqué à quelques reprises que notre financement, bien sûr, va être par enfant, par élève, considérant qu'à partir de six on finance un groupe comme s'ils étaient 15. Donc, évidemment, on ne diminue pas s'il y a moins d'élèves parce que, sinon, ça serait matériellement impossible de, par exemple, payer une enseignante. Et on a calculé également un ajout pour des services pédagogiques et services complémentaires. C'est sûr que c'est un estimé, là, ce n'est pas... Je dirais, c'est à prendre comme une indication. Mais les services complémentaires et matériel didactique pour chaque élève de quatre ans, c'est 593 $ qu'on calcule, nous, dans notre montant global, alors que, pour les cinq ans, c'est l'équivalent de 218 $. Donc, il y a, pour nous, une bonification au titre de ce qu'on appelle services complémentaires et matériel didactique. Tout ça devra se matérialiser, mais déjà, dans nos calculs, je voulais vous indiquer cela.

Vous insistez d'autre part sur la formation continue. Alors, ce que nous avons prévu pour le moment, c'est qu'il y ait au moins une formation de démarrage, mais ça va dans le sens d'une formation continue puisque les enseignantes ont… on l'a évoqué, elles ont une formation, elles ont un baccalauréat en enseignement préscolaire et primaire. Mais on comprend bien que l'insistance n'a pas été mise, dans leur formation, sur le préscolaire à quatre ans. Donc, pour le moment, on a identifié... ça pourrait éventuellement s'ajuster, mais au moins six journées qui soient, donc, dédiées à cela. Et j'ai indiqué, ce matin, qu'on pourrait inclure des directions d'école, du personnel de direction d'école qui voudrait, en même temps, participer à ça pour, bon, être au courant des éléments de formation qu'on offrirait.

Autre élément dont vous parlez, vous parlez d'une approche pédagogique équilibrée. Moi, j'ai bien compris que tous les efforts qui sont faits actuellement, et y compris à la table à laquelle vous participez, sont faits pour développer justement un programme qui soit bien adapté non seulement à du préscolaire, mais à des enfants de quatre ans. Parce que des enfants de quatre ans et des enfants de cinq ans, ce n'est pas pareil. Ce matin, on a eu, avec la doyenne de la faculté de l'éducation de l'UQAM, une belle illustration des différences au plan langagier, là, de ce qu'un enfant de quatre ans peut comprendre puis de ce qu'un enfant de cinq ans comprend. Moi, ça m'a éclairée, en tout cas. Et c'est... Je ne dirais pas que c'est un monde, mais... parce qu'il y a des enfants qui ont plus ou moins de facilité que d'autres, mais il reste qu'il y a des seuils dans le développement des enfants. Donc, il faut s'ajuster à ça, et, on le comprend bien, on travaille à un programme équilibré.

Vous parlez de suivi. On veut effectivement... d'autant plus que c'est une progression, c'est-à-dire une implantation progressive... On veut commencer, donc, une classe à l'automne, et, en même temps, se dire : Bien, on va regarder de près ce que ça donne parce que, si ça fonctionne — ce qu'on pense — l'année d'après, on double. Et donc il faut qu'on sache quoi ajuster et en cours de route et pour une année suivante. Là-dessus, je pense qu'on est... enfin, vous avez peut-être des exigences plus pointues que ce que je dis, mais je pense qu'on est quand même dans un raisonnement qui se ressemble.

Vous parlez d'un programme de soutien parental et, à plusieurs reprises, vous êtes revenues sur le programme Passe-Partout. En fait, le programme Passe-Partout, pour nous, il est un modèle, et il inspire actuellement la réflexion sur la maternelle quatre ans. Parce qu'on sait fort bien que... d'autant plus qu'on vise des enfants qui viennent de milieux où on n'a pas choisi de les envoyer en service de garde et de milieux aussi où on a, le moins qu'on puisse dire... quelquefois, c'est une hésitation par rapport aux bienfaits de l'école. Donc, les parents doivent être intégrés à la démarche, et Passe-Partout est un repère, est un repère, pour nous.

Il y a une recommandation que vous faites sur laquelle j'aimerais vous entendre un peu plus. Mais, sur tout ce que je viens de dire, vous pouvez réagir, évidemment, si vous le souhaitez, mais je voulais quand même poser ces jalons. Mais il y a une recommandation sur laquelle j'aimerais peut-être qu'on arrive à bien préciser, de part et d'autre, de quoi on parle. C'est votre quatrième recommandation qui demande de s'assurer que les conditions et modalités... Là, vous prenez les termes mêmes qui sont dans le projet de loi. Le projet de loi dit que la ministre peut établir les conditions et modalités visant l'organisation des services éducatifs d'éducation préscolaire. Et vous demandez que l'on respecte l'autonomie professionnelle des enseignants, du personnel enseignant. Alors, je voulais entendre votre préoccupation à cet égard et peut-être aussi vous préciser ce que nous, on entend par «conditions et modalités». Mais commençons peut-être par préciser, de votre côté, cette recommandation 4 que vous faites et qui concerne votre autonomie professionnelle, puis moi, je pourrai peut-être, par la suite, déployer un petit peu les contenus par rapport à ça.

• (16 h 20) •

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Mme Bernard.

Mme Bernard (Manon) : Oui, merci. Alors, c'était dans le sens de l'article… dans le projet de loi, étant donné qu'on dit que les conditions et modalités peuvent, notamment, préciser les responsabilités des différents acteurs du milieu. Nous, on veut s'assurer... Comme on dit que le projet de loi donne un espace, une ouverture pour préciser les responsabilités des différents acteurs du milieu scolaire, on veut s'assurer que nos responsabilités, que notre autonomie professionnelle va être respectée à l'intérieur... comme c'est prévu à l'article 19. De la façon que nous lisons la proposition telle que là, c'est comme si vous aviez les pouvoirs de… je ne dirais pas… pas de déroger, là, mais d'appliquer d'autres modalités ou d'autres éléments que ce qui est déjà prévu. Alors, c'est pour ça qu'on fait cette recommandation-là.

Mme Malavoy : Oui. Est-ce qu'on peut peut-être les regarder? Parce que je trouve que c'est un point qui est important, là. Et l'article 19 dit que «l'enseignant a le droit de diriger la conduite de chaque groupe d'élèves qui lui est confié». C'est ça, l'autonomie professionnelle pour moi, et j'y tiens absolument, et c'est ce qui fait d'ailleurs que je ne souhaite pas voir, pour aucun dossier, une attitude pour dire : C'est ça que tout le monde doit faire, en même temps, d'ici telle année. Il y a une autonomie des enseignants.

Toutefois, dans mon projet de loi, là, d'aujourd'hui, le projet de loi n° 23, à l'article 3, on ajoute un nouvel article qui est 461.1. Mais le 461 d'origine dit ceci… Il commence par ceci : «Le ministre établit, à l'éducation préscolaire, les programmes d'activités.» Donc, ça, ça demeure. O.K.? Les programmes... De même que les programmes sont établis pour l'enseignement, parce que ça dit : «à l'enseignement primaire et secondaire». Donc, les programmes d'activités préscolaires, primaires, secondaires sont établis par la ministre.

Mais votre article 19 vient dire — et c'est ça, l'autonomie professionnelle, dans ce je comprends : «l'enseignant a le droit de diriger la conduite de chaque groupe», c'est-à-dire qu'il applique un programme mais avec, par exemple, les choix pédagogiques qu'il souhaite faire, et il y a une variété de cheminements possibles pour arriver à un objectif et à un programme. Je veux être sûre qu'on se comprenne dans notre façon de voir les choses, là, ces deux articles-là qui sont tous les deux dans la loi et auxquels, moi, je ne touche pas. Je ne change pas l'esprit de ce qui est là.

Mme Cyr (Thérèse) : Je vais tenter une réponse.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Oui. Allez-y, Mme Cyr.

Mme Cyr (Thérèse) : Deux choses. Dans l'article 3, on disait : «Les conditions et modalités établies en application du premier alinéa peuvent être différentes de celles prévues [du] régime pédagogique.» Elles «peuvent notamment préciser les responsabilités»… Et c'est ce bout-là qui nous dérangeait : «peuvent être différentes de celles prévues par le régime pédagogique». On se dit, donc, on veut s'assurer que notre autonomie professionnelle, par le biais de ce deuxième alinéa là de l'article 3, ne soit pas affectée; c'est vraiment là-dessus.

Et je me permettrais de faire une autre réponse sur une question au niveau des règles budgétaires, ou une question. Vous nous avez dit que vous financeriez une classe si on avait juste six élèves. Les règles budgétaires prévoient que, quand on est au préscolaire, en première ou en deuxième année, la minute qu'il y a six élèves dans une école, la commission scolaire... le ministère va permettre l'ouverture d'un groupe. Le financement supplémentaire occasionné par le peu d'élèves dans la classe est financé par ce qu'on appelle «l'organisation scolaire». Quand on regarde au niveau des règles... le projet des règles budgétaires, quand on regarde pour la maternelle quatre ans à temps plein, on ne voit pas de montant prévu pour le volet «organisation scolaire» qui permet à une commission scolaire d'être compensée par la présence de seulement six, sept, huit élèves, donc qui n'a pas atteint le maximum. Quand on regarde le projet, il n'y a pas de montant prévu par ça. C'est ça, le questionnement qu'on se fait. Puis on se demande : Est-ce que les élèves vont être financés, au préscolaire quatre ans temps plein, de la même façon? Parce qu'une commission scolaire qui déciderait d'ouvrir un groupe à six, sept, huit élèves, il va falloir qu'elle prenne de l'argent ailleurs parce qu'elle ne recevra pas assez d'argent, compte tenu que vous n'avez pas prévu de montant d'argent possible pour l'organisation scolaire. C'est là toute la question qu'on se pose.

De plus, vous avez spécifié qu'il y a des services complémentaires et du matériel prévu pour 593 $. Dans le projet, on ne le voit pas. Je ne dis pas qu'il ne l'a pas, mais, dans le projet, on ne le voit pas. Mais, dans le projet, quand on regarde aux maternelles cinq ans par contre, il y a un montant d'argent pour les autres dépenses éducatives. Quand on regarde la maternelle quatre ans temps plein, il n'y a pas de somme prévue pour les autres dépenses éducatives que celles de la maternelle elle-même.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : C'est terminé, Mme Cyr?

Mme Cyr (Thérèse) : ...

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Mme la ministre.

Une voix : Mme Pomerleau pourrait ajouter quelque chose, Mme la ministre. Ça vous va?

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Oui, oui, allez-y, Mme Pomerleau.

Mme Pomerleau (Johanne) : Oui? Merci beaucoup. C'est juste... J'ai le goût de faire un petit cri du coeur, si vous permettez.

Mme Malavoy : Allez-y, les micros sont ouverts.

Une voix : C'est filmé, là.

Mme Pomerleau (Johanne) : C'est filmé? O.K. C'est que vous avez mentionné... Il y a une question qui vient d'être posée par rapport au montant pour les services complémentaires et le matériel pédagogique; on ne l'a pas trouvé dans le document. J'imagine qu'on va avoir une réponse à ce niveau-là; ce n'est pas ça, mon malaise.

Les services complémentaires, c'est des personnes. Le matériel didactique, c'est des choses, c'est des objets. Au niveau du personnel, est-ce qu'il y aurait moyen de ne pas mettre les gens à la même place que les livres ou la peinture des murs? On est souvent... Au niveau des services professionnels, longtemps on a dit : Nous sommes la marge de manoeuvre des commissions scolaires. Ça fait que, s'il vous plaît, est-ce qu'il y a moyen de séparer ça, dans les règles budgétaires, pour que ce soit clair lorsqu'on parle de personnes et d'individus à engager et non pas de livres, ou de pupitres, ou de petites balles pour mettre en dessous des chaises, s'il vous plaît? Merci.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci, Mme Pomerleau. Mme la ministre.

Mme Malavoy : Alors, comme on l'a dit avant que vous preniez la parole, tout cela est enregistré et filmé…

Des voix :

Mme Malavoy : …et donc on pourra... On en prend bonne note. C'était tout à fait pertinent de profiter de l'occasion pour le dire.

Je reviens à la question, tout à l'heure, de mes groupes. Les règles budgétaires que vous avez n'ont pas prévu ce que j'ai ajouté depuis le début de la consultation, et donc, quand je vous dis que nous allons financer comme étant un groupe d'une moyenne de 15 enfants des groupes de plus petites dimensions, c'est quelque chose que j'ajoute, et donc... Puis, comme je l'ai dit, je crois, hier : À force de le répéter, j'en fais une règle. Alors donc, au début, j'étais un peu plus timide. Je pense, j'ai dit... pas timide, mais j'ai dit : On envisage que. Mais, je pense, c'est la quatrième fois que je le dis, donc vous pouvez prendre pour acquis, donc, qu'à partir de six on financera un groupe, et effectivement ce n'est pas dans les règles budgétaires qui ont été déposées il y a déjà quelque temps.

C'est pour ça d'ailleurs qu'on fait un exercice de commission parlementaire : pour ajuster des choses au fur et à mesure, à la fois de ce que vous allez exprimer mais aussi, ensuite, de ce que la réalité va nous montrer. Parce qu'on peut bien avoir une norme, mais, dans la vie, là, ça ne marche pas toujours comme ça. Donc, moi, je veux que, dans des régions du Québec où on a des enfants vulnérables et qu'on veut desservir, on ne soit pas arrêté parce qu'on n'a pas tel nombre exactement.

Pour ce qui est du projet de loi, et là je ne suis pas, moi, d'une... je n'ai pas la compétence de nos juristes, mais je veux vous dire ce que j'en comprends : le deuxième paragraphe auquel vous faites référence, quand on parle de «modalités différentes de celles prévues par le régime pédagogique», c'est entre autres parce qu'actuellement il n'y a pas de maternelle plein temps à quatre ans, il n'y a que des mi-temps. Donc, il faut pouvoir prévoir des modalités autres.

Et, tant qu'à être dans ces explications-là, quand on parle de «conditions et modalités», tout ça pour montrer que c'est différent de ce qui est de l'ordre de l'autonomie professionnelle. «Conditions et modalités», ça va être les enfants visés, ça va être à partir de quel âge précisément. Vous savez que, si on dit… peu importe, si on dit quatre ans, il faut que ce soit à partir de telle date, ça va être le nombre d'élèves par classe, ça va être les critères d'inscription, etc.

Conditions, modalités, ça va être... De qui parle-t-on? Comment on va constituer les groupes, à partir de quels critères? Mais, une fois que les enfants sont dans une classe avec une enseignante, c'est la responsabilité de l'enseignante, avec toute son autonomie professionnelle, de conduire cette classe. Et donc, ça, je peux vous rassurer là-dessus, là, c'est un... Et ce n'est pas juste par simplement respect légaliste, là, des droits des enseignants. Moi, je suis profondément convaincue que c'est un gage de succès : c'est qu'une enseignante y mette d'elle-même, de son approche, avec ses talents, ses caractères, ses valeurs, ses principes et... Elle doit respecter un programme, mais chaque personne est différente, et cette liberté-là, c'est ce qui fait la réussite, je pense, de la profession enseignante. C'était mon petit cri du coeur, moi aussi, madame. Voilà. Est-ce qu'il reste encore du temps?

• (16 h 30) •

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Oui. Vous avez encore trois minutes.

Mme Malavoy : Très bien. Une chose qui m'intéresse, je peux peut-être aborder ça, bon, rapidement pour le dernier bout, c'est l'arrimage entre, donc, les deux milieux. Vous représentez, je l'ai dit d'entrée de jeu, à la fois... quelqu'un qui vient du milieu plus des services de garde et, donc, d'autres qui viennent du milieu scolaire. Et on ne veut pas que ça soit des mondes séparés, on veut que ça soit des mondes qui se parlent. Comment cet arrimage peut-il se faire? Comment peut-on se renseigner? Comment peut-on justement être ensemble, attentifs aux besoins, à la détection des enfants vulnérables et à la réponse à ses besoins... aux enfants vulnérables?

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Mme Chabot.

Mme Chabot (Louise) : On a hésité à le mettre en recommandation, parce que notre mémoire en parle, là. Ce qu'on trouve important, c'est comment peut se faire, justement, le passage entre les services de garde et l'école, le préscolaire.

Et, dans notre texte, là — je ne sais pas si, Véro, tu pourras me l'indiquer pour que je puisse vous le dire — on donnait plusieurs exemples, comme le fait qu'en fin de parcours dans ton service éducatif à la petite enfance tu puisses visiter une école, tu puisses déjà t'approprier les lieux, l'environnement, rencontrer les enseignantes, et les enseignants, et le personnel de l'école. Pour un enfant qui a déjà des besoins ou qui est déjà pris en charge aux services éducatifs, qui a déjà... je ne veux pas dire un... c'est peut-être large, je ne veux pas dire «dossier», là, mais qu'il y a déjà une feuille de route — une feuille de route, je vais le dire comme ça — qui mériterait, dans le fond, qu'elle soit connue quand tu arrives dans le milieu scolaire... bien, de ne pas faire en sorte qu'on ait à tout recommencer.

Quand on le voit en complémentarité, c'est justement ça, c'est de dire : Tant la nouvelle maternelle quatre ans temps plein que ce qui se fait déjà dans nos services éducatifs à la petite enfance, c'est autant... puis Passe-Partout, je ne l'oublie pas, mais c'est autant de moyens pour aider l'enfant. Mais il faut qu'il y ait des passerelles, là, qu'il y ait des passerelles entre nos services de garde et le milieu scolaire, comme on le fait un peu dans le milieu scolaire, des passerelles D.E.C.-bac ou qu'on soit de formation professionnelle et — c'est un peu l'esprit — puis que ça ne soit pas tout à recommencer pour nos enfants.

Il se fait des choses extraordinaires du côté des services de garde éducatifs à la petite enfance. Puis ils les connaissent, les enfants. Il faut qu'ils soient capables, quand nos enfants arrivent à l'école... que ça soit partagé, transmis, et ça peut seulement être riche pour les deux. Ça fait qu'on n'a pas mis de recommandation, là, mais cette transition-là, à notre avis, est majeure si on a toujours dans l'esprit que ce qu'on fait ici, c'est dans l'objectif de développer de façon globale nos enfants. Donc, une approche globale, une approche holistique puis une approche aussi qui fait en sorte qu'on n'est pas dans... bien, je suis dans la famille quand je suis dans les CPE ou les milieux familiaux régis puis...

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci beaucoup. Je suis désolée, Mme Chabot...

Mme Chabot (Louise) : Ah, mon Dieu! Je suis emballée, là.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Nous devons aller maintenant...

Des voix : ...

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Nous devons aller du côté de l'opposition officielle. Mme la députée de Trois-Rivières, vous avez la parole.

Mme St-Amand : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, écoutez, j'aurais un commentaire et une question. Je retournerai la parole à ma collègue députée de Mille-Îles par la suite.

J'ai un commentaire que je ne peux pas m'empêcher de vous faire. Et c'est probablement un vieux réflexe de fille qui a travaillé dans le milieu syndical, particulièrement à la Fédération des employés de soutien dans l'ancien temps de la CEQ. Je suis surprise de ne pas voir Mme Cinq-Mars ici. Je suis surprise quand on sait que nos éducatrices en service de garde, quand on sait que nos éducatrices spécialisées, notamment nos préposées... On parle de nos enfants qui sont en milieu défavorisé. Ces gens-là seront possiblement interpellés.

D'ailleurs, Mme Pomerleau le disait tantôt... D'ailleurs je veux vous saluer. Je m'excuse, hein, Mme Chabot, Mme Cyr, Mme Brouillette, Mme Bernard, Mme Pomerleau et Mme Tonnelier. La ministre l'a dit tantôt, on en a parlé, puis vous l'avez bien relevé, le matériel didactique, avec les services complémentaires, si on parle de 15 élèves à 600 $, on arrive à 9 000 $. Je pense que mes anciens collègues ont des bonnes chances d'être interpellés pour ces enfants-là, parce qu'évidemment dans une clientèle défavorisée il y aura besoin de soutien.

Alors, je tenais à vous faire ce commentaire-là parce que... puis, je vous le dis, c'est probablement un ancien réflexe, mais je sais que ces gens-là seront probablement très, très intéressés aussi par le dossier des maternelles quatre ans.

Mme Chabot (Louise) : Mais j'aimerais...

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : ...

Mme St-Amand : Oui.

Mme Chabot (Louise) : Mais j'aimerais bien répondre tout de suite pour notre collègue Mme Cinq-Mars, présidente...

Une voix : ...

Mme Chabot (Louise) : Non. Vous verrez dans le mémoire que le point de vue de notre fédération a été pris en compte, parce qu'on sait qu'il y a des enfants qui se retrouveraient en préscolaire, comme c'est le cas des maternelles, après, c'est le milieu des services, et avec… Il y a un ensemble... Quand je parlais de la complémentarité des milieux, vous allez très bien le trouver dans notre mémoire. Et ce n'est pas l'absence physique de Mme Cinq-Mars qui justifie la non-reconnaissance, parce que, pour nous, c'est très important. Par ailleurs, comme groupe, si je le regarde d'un point de vue externe, le personnel de soutien scolaire n'a pas été spécifiquement invité par la commission parlementaire.

Mme St-Amand : Mais c'est correct. Je tenais juste... C'était mon petit éditorial. Ceci étant dit, écoutez, je me souviens qu'à l'été dernier, en août dernier, Mme Chabot, parce qu'on était en fin de campagne électorale, il y avait eu un communiqué de presse qui avait été émis, notamment par… il me semble que vous étiez là-dedans avec Mme Cinq-Mars, sur le fait de l'importance d'augmenter les places en maternelle quatre ans — on était au début de la rentrée scolaire — dans les milieux défavorisés et, en même temps, sur le fait d'augmenter les places en CPE. On a eu des discussions hier, et, bon, on le sait, que nos gens, du point de vue légal, vont regarder ça, mais, avec la ministre, on parlait du fait que, même s'il y a une volonté... la ministre exprime une volonté que ce soient les enfants de milieux défavorisés, il n'y a présentement rien qui nous dit que ce sera inscrit. Ça ne l'est pas dans le projet de loi. Et on peut penser que, d'ici quelques années, tous les enfants de quatre ans iront en maternelle quatre ans.

Puis là j'ai bien aimé, tantôt, quand vous avez dit : Les gens pensent que c'est obligatoire, la maternelle cinq ans, alors que ça ne l'est pas. Mais on sait que ça devient des choses qui s'installent dans notre société. J'aimerais ça connaître votre point de vue à vous puis quelqu'un de votre groupe sur le fait... si on a le choix... Parce qu'on s'entend qu'on s'adresse à une clientèle quatre ans. Alors, on en a en CPE, on en a présentement… parce qu'on a quand même certaines classes, notamment pour les enfants handicapés, en maternelle quatre ans. Si on avait le choix, est-ce que, vous, vous privilégiez la mixité, c'est-à-dire qu'on ouvre les places en service de garde qu'on a besoin et qu'on privilégie la maternelle quatre ans uniquement pour les enfants de milieux défavorisés?

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Mme Chabot.

Mme Chabot (Louise) : Je pense que la... En tout cas, il y a déjà une partie de réponse. C'est qu'on parle bien de maternelle. Pour nous, c'est... Nous sommes d'accord avec l'idée de la mise en place de maternelles quatre ans pour les enfants en milieu défavorisé. On serait... On aurait peut-être une opinion différente si on nous avait dit aujourd'hui : On va instaurer des maternelles quatre ans pour tous les enfants de quatre ans. On aurait eu un point de vue différent dans l'approche qu'on vous a amenée. Là, pour nous, c'était... Ces enfants-là sont déjà... sont déjà avec eux-mêmes, je dirais. C'est déjà un groupe. Ça fait que c'est important d'aller les rejoindre. Ça fait que notre point de vue s'inscrit pour les enfants en milieux défavorisés.

• (16 h 40) •

Mme St-Amand : Si je complète, je comprends que, pour vous, cette opinion-là, qui était là à la fin de l'été, c'est la même, c'est-à-dire l'ouverture de places en service de garde pour les enfants de quatre ans demeure une priorité, et ce que vous privilégiez, c'est vraiment le milieu défavorisé pour les quatre ans maternelles.

Mme Chabot (Louise) : Oui, tout à fait.

Mme St-Amand : Ça répond à ma question. Merci. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Mme la députée de Mille-Îles.

Mme Charbonneau : Il reste du temps, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Oui, il vous reste du temps.

Mme Charbonneau : Je vais l'utiliser.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Parfait. La parole est à vous.

Mme Charbonneau : Dans le mémoire que vous aviez, j'y reviens, à la page 13, vous soulevez quelque chose qui m'inquiétait beaucoup. Je n'ai pas toujours l'élégance d'une parole juste, mais, habituellement, je me fais comprendre.

Dans un CPE, un enfant de quatre ans est logé et nourri. Dans un préscolaire quatre ans, il est logé. Alors, je vous amène sur le principe de ce que moi, j'appelle la facture insidieuse. Puisqu'on parle d'un milieu défavorisé et que je m'apprête à l'accueillir dans une école… et je ne veux pas qu'il soit identifié. Et ça, je pense que c'est clair, il n'y a personne ici qui veut que cet enfant-là soit identifié. Donc, je sais, pour connaître un peu le milieu scolaire, qu'il y a d'autres services qui sont offerts à mon école, auxquels mon parent va avoir accès probablement : le service des dîneurs, parce qu'il faut qu'il dîne, cet enfant-là, puis il va y avoir le service de garde, peut-être que ce sera utilisé, peut-être pas. Il n'aura pas nécessairement besoin de l'aide aux devoirs. Ça, c'est clair. Mais il va avoir besoin d'un...

Une voix : ...

Mme Charbonneau : Oui, c'est ça. Moi aussi, j'espère. Il va avoir besoin d'un sac d'école, il va falloir l'habiller correctement, parce qu'on est au Québec, puis il y a une partie des mois, au Québec, où il faut que je sois habillé chaudement pour aller jouer dans la cour. Et, des fois, puis je le sais, qu'au préscolaire quatre ans ça n'arrivera pas, mais il ne faut pas oublier de le mentionner, que, des fois, mon école exige une paire de souliers de course pour l'intérieur puis une paire de souliers de course pour l'extérieur, parce qu'il faut entretenir du mieux possible les infrastructures qu'on a, parce qu'on n'a pas toujours l'argent pour l'entretenir. Ça fait qu'on fait de la prévention.

De ce fait, bien, l'implantation d'une préscolaire quatre ans pour la clientèle défavorisée, est-ce qu'il n'y a pas là peut-être une facture insidieuse? Vous vous posiez la question. Je veux vous entendre là-dessus, puisque vous en nommez quelques-uns. Vous nommez le service de garde, le transport scolaire, vous en parlez aussi, les services de repas du midi, le recours aux services d'une éducatrice spécialisée, mais je ne la mets pas dans ma facture insidieuse, celle-là, parce que je pense que toute commission scolaire devrait, si elle veut vraiment poser les gestes en amont auprès du quatre ans, avoir des services que j'appellerai complémentaires, qui ne fait pas partie d'une somme de matériel ou de jeux, mais qui est vraiment une personne des ressources humaines qui est... Je pense souvent à l'orthophonie parce que le problème langagier est probablement un des premiers problèmes qu'on détecte chez nos tout-petits. Mais la facture insidieuse qui se présente à moi comme parent, parce que je ne le vois pas nécessairement venir, je pense que l'école, c'est gratuit, puis c'est le premier contact que j'ai avec elle. Donc, comment je fais pour mettre le meilleur programme en place puis ne pas avoir ce souci-là?

Mme Chabot (Louise) : J'espère qu'on aura ce souci-là de faire en sorte que ces enfants-là soient accueillis comme ils sont et sans avoir trop d'exigences du petit sac d'école puis des deux, trois paires de souliers, puis que, s'il y a peut-être juste deux paires de pantalons dans sa vie, bien, que ça puisse être ces pantalons-là qu'il mette. Je pense que le souci, c'est... Ils ont un milieu de vie, ces enfants-là. Souvent, c'est leur cour à la maison, c'est chez les parents, c'est leur milieu, ils sont ensemble. Ça fait que les accueillir à l'école, bien, je vous dis ça comme ça, j'espère qu'on n'aura pas... ce n'est pas parce que... oui, l'école devra s'adapter si on le met dans... Je pense qu'il faut adapter les locaux puis le milieu pour répondre à ces petits bouts de chou là qui ont besoin... Mais est-ce qu'on doit avoir des exigences qui seraient démesurées à l'égard des parents ou pour des considérations qui sont tout à fait justes? Je pense qu'on ferait une grave erreur.

Mme Charbonneau : Et, on se comprend, l'heure du dîner existe dans toutes les écoles, et j'en connais de moins en moins qui les retourne à la maison pour le dîner, là. Je vous le dis, j'en connais de moins en moins. Puis probablement que vous avez des revendications de vos membres, parce que, quand ils reviennent en classe pour faire de la pédagogie, ça sent la sandwich aux oeufs dans leur classe, puis ils sont bien tannés de ça parce qu'au préscolaire comme au primaire il n'y a pas de cafétéria, du moins, il y en a très peu, à moins que l'école ait transformée de secondaire à primaire. Autrement, on mange en classe.

Donc, il y aura nécessairement un principe de surveillance. Peut-être que vous pouvez me guider à partir de ce qui se passe au préscolaire cinq ans. Mais, moi, ce que je connais, c'est le service de dîneur avec une économie rendue au troisième enfant qui rentre dans la commission scolaire, parce que, là, mon service a... parce que j'ai une multiplication des coûts. Ma commission scolaire reconnaît là un principe d'économie. Mais, si j'en ai un et qu'il rentre à l'école, bien, j'ai une facture de dîneur, c'est rare que je ne l'ai pas. Peut-être qu'il y a des services qui existent que je ne connais pas, puis vous pouvez peut-être me guider là-dessus.

Mme Chabot (Louise) : À ma connaissance, moi, peut-être des modèles avec nos maternelles ou maternelles cinq ans peut-être, mais, à notre connaissance, là, on n'a pas abordé cette question-là.

Mme Charbonneau : Bien, je suis un peu surprise parce qu'ici on parlait de la qualité des services, les ressources matérielles, puis vous veniez un peu toucher au principe du service de garde en milieu scolaire, du transport scolaire puis des services de repas. Je pensais que vous aviez regardé cet aspect-là, d'autant plus que ça fait presque 10 ans maintenant que vous avez ajusté le programme préscolaire cinq ans à temps plein, parce qu'on le faisait à temps partiel il y a à peine 10 ans, bien, vers 1998 qu'on l'a changé, et là il y a eu des modalités qui ont été ajustées pour s'assurer que le battement — je n'ai pas trouvé d'autre nom — scolaire a été ajusté pour les enseignants du préscolaire et les enseignants du primaire et le suivi auprès des élèves. Donc, je pensais que vous l'aviez abordé, mais il n'y a pas de souci, je passe à l'autre sujet et...

Mme Chabot (Louise) : …abordé dans le mémoire, effectivement, c'est une bonne réflexion, là, que vous nous soulevez.

Mme Charbonneau : Moi, je l'ai vu un peu à la page 13, c'est pour ça que je l'ai abordé avec vous. Je l'avais annoté parce que je trouvais ça intéressant comme souci. La place du parent auprès...

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Mme la députée de Mille-Îles, peut-être que madame...

Mme Charbonneau : Oh!

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Je pense que Mme Bernard veut peut-être rajouter...

Mme Bernard (Manon) : Oui.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Si vous le permettez, hein, Mme la députée.

Mme Charbonneau : Oui, oui, oui. Oui, avec plaisir, Mme Bernard.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Allez-y, Mme Bernard.

Mme Bernard (Manon) : Alors, le paragraphe auquel vous faites allusion...

Mme Charbonneau : ...

Mme Bernard (Manon) : …oui, à la page 13, fait référence à la qualité des services au niveau des ressources matérielles, et on a fait un descriptif de tout ce que ça implique pour l'arrivée d'un enfant, mais tout ce qui est là, c'est la même chose pour ceux de cinq ans ou les quatre ans qui existent déjà, tous ces éléments-là doivent être pris en compte. Ça fait que c'est pour ça... Mais on n'a pas apporté des recommandations particulières sur l'élément par rapport à tout ça.

Mme Charbonneau : Je comprends. Merci de la clarification. La place du parent — parce qu'on a parlé de Passe-Partout, je vous ai dit que je l'appréciais beaucoup puis que je le voyais dans ma soupe — auprès de l'école, dans le programme Passe-Partout, on donne l'opportunité au parent de devenir un meilleur parent, hein, on lui donne de la formation, il y a un lien avec le CLSC. Il y a une volonté de donner ce que moi, j'appelle une formation continue aux parents. La place du parent, vous, vous la voyez où, parmi le quatre ans? Est-ce que vous lui donnez... Là, j'ai compris tantôt que vous voyez Passe-Partout en complémentarité, mais j'ai bien compris que Passe-Partout, il n'est pas en complémentarité : il y a Passe-Partout, puis il va y avoir le préscolaire quatre ans.

Au niveau du parent, est-ce que vous le voyez dans la même indication qui est en ce moment au niveau du préscolaire cinq ans ou vous y voyez peut-être une façon de faire différente qui fait qu'on inclut le parent dans cette nouvelle façon de faire là pour le quatre ans?

Mme Bernard (Manon) : Alors, pour avoir participé à la première rencontre du comité de… je dirais comité de suivi pour le préscolaire quatre ans pour le projet, l'approche qui était préconisée pour le parent nous semblait très intéressante à l'effet de l'associer davantage, de l'impliquer et non pas d'éduquer. Et cette approche-là nous semblait intéressante, puis c'était en se basant sur ce qui se fait déjà actuellement au niveau de Passe-Partout. Ça fait que c'est clair... Et, dans les travaux qui sont faits aussi au niveau du programme, c'est un élément qui va être regardé.

Alors, ça va être important de bien placer, de bien définir ce rôle-là du parent puis justement des parents qu'on veut viser. Parce que c'est bien beau que l'enfant passe une partie de son temps en classe dans la journée, mais encore faut-il qu'il y ait, je vous dirais, un accompagnement. Alors, c'était placé comme ça, comme un accompagnement un peu plus important auprès du parent. Ça fait qu'on a la même préoccupation que vous.

• (16 h 50) •

Mme Charbonneau : Oui, oui. Vous l'avez dit un peu plus tôt, ce n'est pas tout que d'accepter un enfant dans le monde scolaire et ce n'est pas tout de dire : On va travailler en amont, il faut aussi le voir avec une volonté que sa persévérance scolaire, puis son goût de l'école, et sa curiosité — la ministre en parle souvent, de la curiosité qu'un enfant peut avoir pour apprendre — restent. Parce que je peux le faire entrer à l'école à quatre ans, mais, si je n'ai pas mon suivi correctement, autant auprès de sa famille qu'auprès de ce jeune, bien, rendu en troisième année, tous les efforts que j'aurai faits n'auront pas donné ce que j'aurais voulu que ça donne parce qu'il va décrocher pareil. Il n'aura pas l'intérêt, son parent non plus, et, de ce fait, je ne serai pas... je n'aurai pas bien investi, autant dans le monde scolaire que dans la défavorisation, pour l'amener à être un meilleur élève.

Donc, c'est pour ça que j'y revenais un peu, puis on se le disait : Si les parents n'ont pas choisi ni le service de garde, ni les CPE, ni en milieu familial, c'est peut-être parce qu'il veut... il a une opinion sur faire garder son enfant, puis l'envoyer à l'école, c'est peut-être une bonne chose. Par contre, il a peut-être un préjugé défavorable auprès de l'école parce qu'il a vécu des échecs, des mauvaises expériences, puis il n'a pas plus le goût de l'envoyer à l'école, et, quand son enfant revient enjoué, il lui rappelle peut-être quelquefois que ce n'est pas si le fun que ça, puis tu vas voir en grandissant. Tandis que, si je prends mon parent en charge aussi, je m'assure d'une complémentarité auprès de la famille qui fait que j'amène mon jeune à la réussite et au goût de l'école. Donc, c'est pour ça que je crois qu'à quatre ans... Parce que, dans le milieu familial, c'est extraordinaire : il y a un bilan le matin puis il y a un bilan le soir; il y a une relation avec le service qui est... Dans un service… dans un CPE, c'est pareil aussi. Mon parent est en relation toujours avec les éducateurs. À l'école, ça peut être différent, puis la relation avec le parent peut être aussi différente.

Vous dites : Pour des services éducatifs de garde à la petite enfance accessible et de qualité, et là vous revenez un peu sur le parent monoparental. J'ai pris une petite note de côté, mais vous en faites un peu un bilan. Je suis à la page 20 — on me fait checker l'heure une fois de temps en temps pour être sûr que je ne dépasse pas — et vous revenez sur certains aspects de... le développement important des services de garde éducatifs à l'enfance, contributions réduites à partir de 1997. Vous revenez un peu sur le bilan des choses qui ont été faites, M. Fortin, M. Godbout, M. St-Cerny, la participation des femmes et l'accessibilité que ça a donné. Vous semblez avoir un regard sur le principe même de la famille monoparentale puis l'accessibilité qu'elle a au niveau des services de garde.

Au niveau de l'école, si je suis monoparentale, je ne peux peut-être pas aller le reconduire puis aller le chercher. Je peux peut-être... peut-être que je suis sur le marché du travail, donc il va devoir prendre l'autobus et tout ce qui s'ensuit. Je n'ai rien vu par rapport au transport. Ce n'est pas un souci, pour l'instant, qui vous chatouille parce que vous, vous êtes plus au niveau de la pédagogie ou si, dans le déplacement dans la clientèle, il y a un souci qui a été soulevé de votre côté?

Mme Chabot (Louise) : Oui. Si je peux commencer, parce que je... peut-être que répondre à toutes vos questions fort pertinentes, on n'aura peut-être pas le temps. Mais il y a quelque chose qui... je vous écoutais, le rôle des parents, puis l'enfant, puis le suivi rigoureux. Nous en sommes, mais j'aimerais vous dire quelque chose : ce qu'on veut surtout, c'est que ces enfants-là soient dans un milieu et qu'ils soient heureux, qu'ils nagent dans le bonheur. Ça fait que l'idée, là, ce n'est pas de... L'idée, c'est qu'ils s'épanouissent. Ça fait que je sentais... donc, c'est donner les conditions de ça. C'est pour ça qu'on n'est pas dans l'approche...

Mme Charbonneau : Mais je vous arrête, parce qu'il peut être épanoui de 8 h 30 à 2 h 30 puis s'éteindre à 3 heures si je n'ai pas mis alentour de lui des conditions gagnantes.

Mme Chabot (Louise) : Ah! Mais on est tout à fait d'accord avec vous. On en demande beaucoup, puis ces enfants-là... À la maternelle, les enfants, là, la maternelle cinq ans, les services de garde en milieu scolaire prennent le relais, hein? Bien, il faut penser la même chose pour nos enfants de quatre ans. On ne les déplacera pas, s'il y a une maternelle quatre ans puis il y a des parents qui choisissent toujours sur une base volontaire, on ne les déplacera pas. Il y a toute une organisation, la question du transport. C'est toutes des choses... C'est pour ça — je pense que je vais conclure avec ça — que notre mémoire pose de façon essentielle les conditions à mettre en place pour que ça soit gagnant, ça, parce qu'il faut se rappeler, là, il faut se rappeler que, si nous sommes là et s'il y a ça, c'est parce que notre préoccupation centrale, c'est les enfants. Bien, je ne vous dis pas ça, je le dis à l'ensemble. Ça fait que les conditions, pour nous, sont majeures.

Mme Charbonneau : Les conditions gagnantes. J'ai compris que l'intérêt supérieur que vous aviez, c'étaient les jeunes. Ça, j'ai compris cet aspect-là.

Par contre, je ne peux pas m'empêcher de vous dire, pour des choix qui m'ont été personnels...

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : En quelques secondes, Mme la députée.

Mme Charbonneau : On avait mis plus de temps sur mon cadran. Moi, il me restait deux minutes. Ceci dit, je veux juste vous dire que le souci, c'est pour s'assurer d'une continuité, mais, en même temps, le moins d'intervenants possible, s'il vous plaît, parce que, quand j'ai quatre ans, je n'ai pas besoin d'avoir six intervenants dans ma journée; deux, c'est en masse. Je vous laisse là-dessus.

Mme Chabot (Louise) : Dans le plaisir et le bonheur. Merci.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci beaucoup. Nous allons maintenant du côté du deuxième groupe d'opposition. Mme la députée de Montarville, vous avez la parole pour un temps de cinq minutes.

Mme Roy (Montarville) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, mesdames, prise deux. Avec l'expertise que vous avez, moi, j'aimerais savoir, et selon l'analyse que vous avez faite de la situation, dans le pratico-pratique, à quoi est-ce qu'il faudrait absolument s'attarder pour réussir, pour septembre prochain, cette intégration, cette maternelle quatre ans dans les milieux défavorisés? À quoi particulièrement est-ce qu'il faut s'attaquer et il faut se pencher? Qu'est-ce qui est la donne, là, qui va faire que ça va marcher ou que ça ne marchera pas, selon vous?

Mme Chabot (Louise) : Je peux...

Mme Roy (Montarville) : Mais allez-y.

Mme Chabot (Louise) : C'est sûr qu'il y avait des conditions, mais, d'entrée de jeu, je pense que je peux répondre à ça. Il y a un grand défi, là. Il y a un grand défi, en quelques mois, de dire que l'ensemble des conditions vont être réunies, ça, je pense qu'on le reconnaît. Et c'est pour ça que, déjà, tant sur la formation que sur le programme éducatif que sur la consultation des personnels… j'ai dit programme éducatif, là, mais l'approche pédagogique qui va être... c'est un ensemble de questions qui n'a pas... on n'a pas toutes les réponses. Puis on doit se dire qu'en même temps qu'on annonce... parce qu'on veut les mettre en place, puis c'est heureux, mais, en même temps, il y a des travaux aussi en cours sur des questions par le groupe de travail puis les sous-comités où on n'a pas complètement terminé les travaux, puis il y a encore des questions importantes. Ça fait que ça va être un défi. C'est pour ça que, minimalement, ça demande une consultation assez rapide sur les lieux physiques, dans quelles régions ou dans quels milieux on va exercer la progressivité. C'est sur la notion de progressivité que c'est... C'est le coeur pour que ça fonctionne.

Mme Roy (Montarville) : Vous aimeriez qu'une progressivité se fasse plutôt dans les milieux où il y a plusieurs milieux défavorisés...

Mme Chabot (Louise) : Où que c'est...

Mme Roy (Montarville) : ...et les autres où il y en a moins peut-être...

Mme Chabot (Louise) : Puis regarder ce qui existe actuellement. Ce qui existe, est-ce qu'on peut les développer encore plus, s'ils existent? Parce qu'il y a déjà un facteur de... des indices, donc...

Mme Roy (Montarville) : Dans l'éventualité où c'est la position de la ministre qui demeure à une classe par commission scolaire pour septembre prochain, pensez-vous qu'il y a un risque que ça ne fonctionne pas?

Mme Chabot (Louise) : Bien, il y a certainement un risque que ça soit moins gagnant que de le faire autrement. C'est parce que ça va être très difficile. Il y a des endroits où ça va être très difficile, malgré qu'on peut reconnaître que chaque région doit... Ça va être beaucoup plus difficile si on veut assurer un suivi rigoureux que de le faire vraiment dans des secteurs où on se donnerait plus des conditions à court terme de le mettre en place, oui.

Mme Roy (Montarville) : Alors, c'est à cet égard-là, sur l'échéancier.

Maintenant, j'aimerais poser une question peut-être un petit peu à caractère psychologique pour les enfants, parce qu'on parle d'enfants de quatre ans, certains auront trois ans, pas encore quatre ans en septembre prochain, et ils pourraient avoir accès à cette maternelle quatre ans. Un enfant de quatre ans — c'est des questions qu'on a et qu'on se posait entre collègues, et des parents, même, nous posaient la question — psychologiquement, dans quelle mesure s'adaptera-t-il bien ou pas bien à fréquenter des enfants qui pourront avoir 10, 11 ans, dans une maternelle quatre ans, puisqu'ils seront dans la même école, peut-être, comparativement au fait d'être avec des tout-petits en CPE? Dans quelle mesure est-ce qu'il y a une adaptation psychologique ici qui pourrait être importante?

Des voix :

Mme Chabot (Louise) : Bien là, je pense que c'est par un milieu... Je comprends, au niveau psychologique, mais je pense que c'est par un milieu stimulant pour eux. On a l'air à vouloir dire que les enfants seraient... cinq ans et moins devraient être ensemble puis qu'il y a une mixité qui n'est pas possible avec d'autres enfants d'autres âges. Pour nous, on pense que, si le milieu est stimulant et qu'il répond, il n'y a pas d'entrave, pour nous, sur cette question-là.

Mme Roy (Montarville) : Je vais reposer ma question différemment. Est-ce que c'est mieux, pour le développement d'un enfant, surtout lorsqu'on parle...

Une voix : ...

Mme Roy (Montarville) : Oui, un enfant en difficulté. Mais, outre ça, pour ce qui est de leur développement, est-ce que c'est mieux qu'ils soient dans des groupes d'âge… du même âge ou cette mixité-là avec des grands?

Voyez-vous, je me pose des questions parce que des parents, ils nous disent : Ça nous inquiète de savoir que des petits de quatre ans ils vont côtoyer les grands qui ont 10, 11 ans puis... un peu d'insécurité.

Une voix : ...

• (17 heures) •

Mme Roy (Montarville) : Bien, peut-être dans une même école, là. On ne sait pas où seront implantées ces maternelles. Je vous pose la question.

Mme Chabot (Louise) : Ils sont séparés. Ils sont séparés. Même dans une école, ces enfants-là vont être séparés, comme sont séparés les enfants de cinq ans... Ils sont même séparés, dans les services éducatifs à la petite enfance, par groupes. Donc, ça va être la même chose, là.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Mme Chabot, j'ai vu que Mme Bernard voulait ajouter quelque chose. Je vous laisse moins d'une minute, Mme Bernard, si possible.

Mme Bernard (Manon) : Bien, je voulais... pour faire... Pour continuer sur les propos de Mme Chabot, à l'heure actuelle dans les écoles où il y a du quatre ans puis du cinq ans, c'est aménagé sur l'heure... Je veux dire, ils ont des groupes... Bien, ils ne sont pas dans la même classe dans la journée, tout le monde le sait. Mais, quand il va arriver l'heure du dîner ou l'heure de la récréation, il va y avoir une section, parce que, sur les jeux, ce n'est pas aménagé de la même façon. En général, là, une école regarde pour mettre en place des mesures, tout dépendant de la grosseur de l'école, ça va être variable aussi, là, hein? Parce qu'il y a des endroits où, déjà, les quatre, cinq ans sont ensemble.

Mais que ça va créer des problèmes psychologiques parce qu'ils sont avec des grands ou tout ça? Moi, je vous dirais qu'au contraire j'ai vu, dans les écoles — parce que je suis une enseignante, là, moi aussi, puis j'ai quand même été plus de 20 ans dans une école — où c'était les grands de sixième qui aidaient les enfants du préscolaire, qui les accompagnaient pour... s'ils avaient des autobus à prendre, ou s'il y avait autre chose, ou... On a vu plus ça.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci beaucoup. Merci beaucoup, mesdames.

Une voix : Avec plaisir.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Malheureusement, c'est tout le temps qui était alloué. Même que j'ai été très, très généreuse. Donc, merci beaucoup. Et nous allons maintenant recevoir les représentants de la Coalition des garderies privées non subventionnées.

Et je suspends les travaux quelques minutes. Bonne fin de journée, mesdames.

(Suspension de la séance à 17 h 2)

(Reprise à 17 h 7)

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Donc, nous reprenons nos travaux. Nous recevons la Coalition des garderies privées non subventionnées. Bonjour, mesdames. Bienvenue à l'Assemblée nationale. Je vais demander... je pense, Mme Collin — je le prononce bien?

Coalition des garderies privées
non subventionnées du Québec

Mme Collin (Marie-Claude) : Oui.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : ...d'accord — qui est la porte-parole. Je vais vous demander de présenter les personnes qui vous accompagnent. Vous allez avoir un temps de 10 minutes pour nous faire part de votre mémoire. Par la suite suivra un échange avec les parlementaires. Donc, sans plus tarder, la parole est à vous.

Mme Collin (Marie-Claude) : Merci, Mme la Présidente. Alors, je souhaite saluer Mme la ministre ainsi que Mmes les députées. Je suis Marie-Claude Collin. Je suis présidente de la Coalition des garderies privées non subventionnées du Québec. Je suis accompagnée aujourd'hui par la vice-présidente de la coalition, Mme Line Fréchette, et de Mme Jacinthe Lavoie, et non Lajoie, Mme la Présidente. Mme Lavoie, elle est ancienne enseignante de maternelle quatre ans en Ontario ainsi que représentante de la coalition dans la région de Québec et de l'Est du Québec. Alors, merci à vous.

La Coalition des garderies privées non subventionnées du Québec apprécie l'opportunité qui lui est offerte de s'exprimer sur le projet de loi n° 23. Notre coalition a analysé ce projet en s'appuyant sur la vaste expérience de ses membres développée au cours des 20 dernières années en travaillant avec les enfants, notamment ceux de quatre ans.

Pour lancer notre réflexion, nous avons retenu un passage de l'article du journal Le Devoir du 14 mars 2013, cité par Mme Malavoy, Mme la ministre Malavoy : «Cette intervention "précoce" auprès des enfants défavorisés leur [permettrait] de "partir du bon pied"[...].

«De l'avis de la ministre, plus l'enfant est pris en charge tôt, moins il risque de décrocher au cours de son cheminement scolaire.» Nous adhérons à cette thèse.

Le rôle que jouent nos services de garde. Ce sont des services qui répondent aux plus hauts standards, respectent la réglementation. Nous sommes obligés d'offrir un programme éducatif. D'ailleurs, présentement, les enfants de quatre ans représentent environ 25 % de notre clientèle. Nous offrons déjà l'encadrement souhaité aux enfants de quatre ans. La vraie question est maintenant de savoir comment nous pourrions rejoindre les enfants de quatre ans qui ne fréquentent pas le réseau des services de garde du Québec.

• (17 h 10) •

Peu importent les raisons qui motivent ces familles, nous n'appuyons pas la création de la maternelle pour les enfants de quatre ans. Nous verrons apparaître une forme de profilage. Un enfant provenant d'un milieu pauvre irait à la maternelle, et un enfant provenant d'un milieu riche fréquenterait un service de garde. Ne devrions-nous pas encourager la mixité plutôt qu'une concentration d'individus partageant les mêmes difficultés et ainsi créer des ghettos? Comme besoins, ceux des enfants de quatre ans diffèrent considérablement de ceux des enfants de cinq ans comme la stabilité, les besoins éducatifs, affectifs, le niveau de pensée et l'anxiété nécessitent une plus grande attention, d'où l'importance du ratio une éducatrice pour dix enfants de quatre ans en milieu de garde ou... au lieu d'un professeur préscolaire pour 18 enfants de quatre ans dans une école. Donc, si nous allons strictement sur une base administrative, il existe déjà une grande disparité entre les services offerts par les écoles.

Plusieurs écoles, notamment en milieu défavorisé, souffrent déjà d'un manque criant d'effectifs spécialisés pour répondre à la demande des élèves. Est-il réaliste d'ajouter de nouvelles classes dans ces écoles plutôt que d'investir dans le développement des services actuels? Nous croyons qu'il serait judicieux d'utiliser encore davantage les réseaux de garderies du Québec.

La véritable problématique tient au fait que les familles à faibles revenus recourent moins que les autres à des services de garde que les enfants issus de familles aisées. Plusieurs raisons peuvent expliquer cette réalité, et une recherche approfondie devrait être menée pour en identifier toutes les composantes. Par exemple, est-ce qu'une meilleure communication des bienfaits des services de garde sur le développement des enfants pourrait encourager des familles à y avoir recours? Malgré tout, nous savons déjà qu'une des explications est liée au manque de disponibilité dans les réseaux de garderies à contribution réduite. Par exemple, à Montréal, le nombre de places dans les services de garde régis est en général proportionnellement moins élevé dans les quartiers défavorisés que dans les secteurs mieux nantis. Le milieu familial est en déclin au Québec, en particulier pour les enfants de quatre ans. C'est certainement une piste à approfondir, et des mesures incitatives comme une bonification de l'aide gouvernementale... encourager les parents en milieux défavorisés à envoyer davantage leurs enfants dans les services de garde reconnus. Enfin, l'expérience a démontré que la fréquentation d'un service de garde éducatif avant l'entrée à l'école peut avoir une influence positive sur le développement des enfants, en particulier ceux de milieux défavorisés. N'est-ce pas l'objectif du projet de loi?

Nous reconnaissons tous que le Québec a su développer un réseau de garde de qualité appliquant des normes élevées et offrant des services éducatifs adaptés. Maintenant, que ce soit en permettant la construction de nouvelles garderies dans des secteurs déjà en surplus de places ou en retirant des milliers d'enfants de quatre ans du réseau pour les emmener vers la maternelle, il faut éviter de fragiliser le réseau des services de garde que nous avons bâti. D'un point de vue logistique, la création de la maternelle pour 8 000 enfants de quatre ans aura un double impact. Plusieurs écoles ne disposent pas des infrastructures pour les accueillir, et les garderies qui devaient les accueillir souffriront de leur départ. La migration des enfants de quatre ans de milieux défavorisés vers la maternelle présente des coûts élevés autant pour les enfants que pour la société.

Il n'y a pas lieu de se précipiter en septembre pour la maternelle quatre ans. Si nous partageons l'objectif, nous ne partageons pas les moyens. Il serait préférable de compléter le développement du réseau de garderies et d'offrir à chaque famille, en particulier celles des milieux plus défavorisés, un accès à des places subventionnées. Nous avons demandé à la ministre Léger de mettre sur pied dans les plus brefs délais un comité spécial formé d'experts qui devraient évaluer région par région les endroits où de nouvelles places devraient être créées versus les secteurs où il serait plus avantageux de convertir des places existantes en places à contribution réduite. Rappelons qu'une telle démarche n'a rien d'unique puisqu'elle s'inspire d'un mécanisme utilisé en 1997 pour convertir des garderies privées en garderies à contribution réduite. Et le ministère de l'Éducation devrait s'y joindre pour une meilleure réflexion.

Si l'objectif est de s'assurer que les enfants provenant de milieux défavorisés bénéficient des mêmes outils de développement et des mêmes stimuli que les autres, il serait préférable de s'assurer qu'ils intègrent le réseau des services de garde. De plus, il faut éviter de retirer les enfants qui fréquentent déjà des services de garde pour les intégrer à ces nouvelles classes de maternelle. Pour toutes ces raisons, nous croyons qu'il n'est pas souhaitable que le gouvernement aille de l'avant avec son projet de maternelle pour les quatre ans. Nous préférons poursuivre le développement du réseau des garderies pour assurer un accès à toutes les familles. D'ailleurs, les garderies privées non subventionnées ont, dès aujourd'hui, la capacité, tant en termes d'infrastructures que de services éducatifs, d'accueillir de nouveaux enfants de quatre ans. Nos garderies ne font pas de distinction entre les différentes classes sociales et offrent déjà aux familles en milieux défavorisés des programmes éducatifs de qualité adaptés aux enfants de quatre ans.

Les Québécois sont fiers de leurs services de garde, et nous devons d'abord nous assurer d'y inclure toutes les familles avant d'envisager d'en exclure certaines. Alors qu'à l'origine la création du réseau québécois des services de garde visait à offrir à toutes les familles un service de qualité uniforme et accessible à tous, nous risquons de nous retrouver avec des garderies pour les riches et de la maternelle pour les pauvres.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Est-ce que je le prononce bien, Colline ou Collin?

Mme Collin (Marie-Claude) : Collin.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Collin, bon, Mme Collin. Donc, nous allons débuter les échanges. Mme la ministre, vous avez la parole pour le premier bloc.

Mme Malavoy : Je vous remercie. Bonjour, mesdames. Ça a le mérite d'être parfaitement clair, votre opinion. C'est assez radical et, je comprends bien, en désaccord avec le projet de loi que nous avons sous les yeux. Mais c'est fait pour ça, des rencontres, des discussions, et pour s'éclairer les uns les autres. Et donc je voudrais me permettre, bon, peut-être de rétablir certaines choses, mais aussi, quand même, de vous questionner sur votre position.

Je voudrais toutefois commencer peut-être par rétablir une chose, je voudrais qu'il n'y ait pas de confusion. Quand, dans votre conclusion — je commence par ça — vous dites qu'il ne s'agit pas de retirer des milliers d'enfants de quatre ans du réseau pour les amener vers la maternelle et vous dites : On fragiliserait le réseau de garderies que nous avons bâti, je veux préciser une chose. Les enfants auxquels nous pensons dans ce projet de loi, ce sont des enfants qui ne sont pas dans des services de garde, quels qu'ils soient. On pourra discuter un peu des raisons pour lesquelles ils n'y sont pas, mais il ne s'agit pas... Moi, je veux vraiment que ce soit très, très clair. Même si on est en désaccord, il faut au moins qu'on soit en désaccord avec des données de base qui soient précises. Nous croyons qu'il y a actuellement des services de garde de grande qualité, avec différentes modalités, qui ont été implantés au Québec, et vous êtes un des maillons de ce réseau de service de garde, mais que notre projet s'adresse à des enfants qui, précisément, pour différentes raisons, ne les intègrent pas. Et donc on n'est pas en train de faire de la, je dirais, concurrence déloyale comme si on ouvrait un service à côté d'un autre service en disant : On invite les enfants à traverser la rue puis à prendre notre maternelle quatre ans plutôt qu'un service de garde. On pense que, si on se fie à l'avis du Conseil supérieur de l'éducation, il y a, d'après leur estimation, 27 % d'enfants de quatre ans au Québec qui ne bénéficient d'aucun service. Eux, ils appellent ça accueil ou intégration, mais ça veut dire des services, donc, qui sont régis. Ça ne veut pas dire que ces enfants-là ne reçoivent pas des services à la maison, mais il reste que, quand on regarde, parallèlement à cela, le nombre d'enfants de quatre ans qui arrivent ensuite à cinq ans mal préparés à la maternelle, donc qui se retrouvent dans une situation d'inégalité par rapport aux autres enfants, on se demande — et moi, je considère honnêtement, pour moi, que c'est un devoir moral, très honnêtement — quoi faire pour ces enfants-là.

Alors, j'aimerais d'abord vous entendre là-dessus parce que je veux au moins qu'on parte d'une bonne perception des choses. Il y a plus du quart des enfants qui ne vont pas dans vos services à vous, qui ne vont pas dans les CPE, qui ne sont pas rejoints, et, parmi eux, beaucoup d'enfants de milieux défavorisés, et c'est eux qu'on veut rejoindre. Alors, en quoi cela vous dérange-t-il qu'on ajoute quelque chose pour des enfants qu'on ne vous enlève pas, qui ne sont pas chez vous, qui ne sont pas là? Puis on pourra approfondir les raisons pour lesquelles ils ne sont pas là. En quoi cela vous nuit-il qu'on ajoute une porte d'entrée des nouveaux services pour ces enfants de quatre ans?

• (17 h 20) •

Mme Collin (Marie-Claude) : Alors, pour répondre à votre question, j'ai... il m'en vient une, question : Comment vous allez savoir que les enfants ne sont pas inscrits dans les services de garde? Parce qu'il n'y a aucun registre. Donc, n'importe quel enfant de n'importe quel service de garde, parce qu'on parle de maternelle quatre ans, vont peut-être vouloir aller vers la maternelle quatre ans. Mais un enfant qui est déjà dans une garderie à contribution réduite va payer le même prix en s'en allant à la maternelle quatre ans. Comment vous allez faire pour savoir que les enfants ne sont pas inscrits? Comment faire pour aller voir que ce sont des enfants qui ne reçoivent aucun service régi par un service de garde reconnu? Donc, je pense que, là, on a déjà une problématique.

Vous dites qu'il y a 27 % des enfants qui ne reçoivent aucun service. Ces enfants-là, aussi, c'est peut-être par choix parental qu'ils ne veulent pas les inclure dans une maternelle ou dans une garderie.

L'intégration... Vous parlez de l'intégration à la maternelle. Je me souviens que la maternelle, au départ, était l'intégration pour l'école, pour la première année, pour l'apprentissage. Maintenant, avec les services de garde reconnus au Québec, qui sont extraordinaires, qu'il n'y a nulle part ailleurs dans le monde, on fait déjà l'intégration à la maternelle. Donc, l'enfant est déjà intégré dans un groupe, un petit groupe, qui s'en va, lui, vers la maternelle. Et, de la maternelle, on va l'intégrer pour aller apprendre, en première année, le programme scolaire. Donc, on la fait déjà, l'intégration.

Avant d'aller ouvrir d'autres maternelles dans les écoles et les surcharger encore, pourquoi ne devrait-on pas obliger ou aider les parents à intégrer les services de garde à quatre ans, les sortir des milieux familiaux et de fairel'intégration vers l'école à ce niveau-là? Vous allez aller chercher à peu près toutes les clientèles et offrir des services à peu près à tous les niveaux. Et puis, dans nos services de garde, il n'y a aucune distinction.

Mme Malavoy : Alors, je vais préciser deux choses. D'abord, j'ai la plus grande estime pour la qualité des services de garde au Québec. C'est le Parti québécois qui a créé ce réseau universel, à l'époque, de garderies à 5 $ qui est devenu à 7 $. On a un réseau public, on a un réseau privé, on a un système qui peut, à certains moments, avoir des frictions, mais on a malgré tout un système qui existe, et je pense qu'il n'y a personne qui voudrait qu'on revienne en arrière, O.K.? On a un système dont on reconnaît la qualité. Et je reconnais d'emblée que, pour les enfants qui vont en service de garde, quelles que soient les modalités, il y a effectivement une bonne préparation à l'entrée au milieu scolaire, je reconnais ça, et que, bien qu'on sache que la question de la transition, O.K., elle puisse être améliorée… Les gens qui étaient là, tout à l'heure, je pense que vous les avez entendus, ils ont dit : Il y a quelquefois des informations que l'on possède dans les services de garde qu'on devrait pouvoir transmettre à l'école précisément pour qu'il y ait un suivi. Parce que la transition est quelque chose qui est très, je dirais, délicat. C'est souvent dans les transitions que des enfants ratent des choses : transition de la garderie à la maternelle, du premier cycle du primaire au deuxième, du primaire au secondaire, etc. Les transitions, elles sont importantes.

Là où je ne vous suis pas, puis vous avez utilisé un mot, je ne sais pas si vous l'avez échappé ou si vous le pensez vraiment, je vous demanderais peut-être de préciser, vous avez dit : Est-ce qu'on ne devrait pas obliger les parents à utiliser les services de garde? Alors, j'essaie de comprendre, parce que le modèle que nous avons implanté, quel qu'il soit, et même encore les maternelles ici, c'est vraiment sur une base volontaire. Mais pourquoi dites-vous : Est-ce qu'on ne devrait pas obliger les parents à passer par un service de garde?

Mme Collin (Marie-Claude) : Pas tous les parents, c'est sur base volontaire, mais, ceux qui le veulent, d'intégrer, avoir des endroits dans les services de garde pour intégrer ces enfants-là. On disait tantôt... J'écoutais... Je crois, c'est Mme Saint-Amand qui parlait, qui disait que c'est non obligatoire, la maternelle, mais c'est devenu... tous les enfants du Québec vont à la maternelle. Dans la tête des parents, c'est devenu presque obligatoire, la maternelle. Donc, pourquoi pas... peut-être pas obliger, on peut enlever le mot «obliger», inviter les parents à venir vers la garderie quatre ans et après s'en aller à l'école à la maternelle. Parce que le problème des tout-petits enfants de… Il y en a qui vont rentrer à l'école à trois ans et huit mois parmi des grands de 10, 11, 12 ans. C'est tout un choc pour eux. Déjà que 10 dans un local, à la garderie, c'est beaucoup, ils ont besoin de soins particuliers, ces enfants-là. Quand on va arriver avec un professeur, avec 18 enfants dans la même classe, déjà qu'à la maternelle ils ont beaucoup d'ouvrage, ça fait qu'avec les tout-petits de trois ans, c'est encore beaucoup.

Mme Malavoy : Vous avez suivi, je suis certaine, un peu nos discussions dans le cadre des consultations. Je vais rependre certains éléments d'explication que des gens ont donnés, et puis y compris, hier, une maman qui est intégrée au projet de l'école Sain-Zotique.

Donc, si on résume, il y a des parents qui font le choix de garder leurs enfants à la maison. Pourquoi? Ils ne veulent pas aller dans les services de garde. Que ce soient les CPE à tarif réduit, ou que ce soit en milieu familial, ou que ce soient des réseaux privés, ils ne veulent pas. Ils ne veulent pas parce qu'ils disent : Moi, mes enfants, je peux les garder. On est venus nous dire ça. Ils ne veulent pas parce qu'ils perçoivent le service de garde comme étant plus approprié pour des parents qui travaillent et donc qui, pendant qu'ils travaillent, doivent faire garder leurs enfants. D'ailleurs, une des raisons du développement de ce réseau, ça a été précisément de répondre aux besoins de parents qui travaillaient, puis on en a profité pour avoir des services éducatifs de qualité dans le réseau des centres de la petite enfance. Donc, il y a des parents qui ne se sentent pas rejoints.

Il y a des parents qui viennent de communautés culturelles, et particulièrement dans des milieux comme Montréal, où c'est la famille élargie qui s'occupe de l'enfant. Ça peut être les grands-parents, souvent les grands-parents ou quelqu'un d'autre de la famille. Bref, il y a bon nombre de parents pour qui envoyer ses enfants dans un service de garde, ce n'est pas leur approche, ce n'est pas leur volonté, ce n'est pas leur goût, ça ne les intéresse pas.

Et une maman aussi, hier, est venue nous dire — c'est un argument qui s'ajoute que... mais je trouve qu'il a beaucoup de sens : Bien, moi, mon enfant a quatre ans, ma petite fille a quatre ans, elle n'a pas été en service de garde avant, et, pour elle, là, rendue à quatre ans, j'aime mieux qu'elle s'acclimate à l'école plutôt que de l'amener dans un groupe où les enfants sont là depuis qu'ils ont un an, deux ans, trois ans. Mais elle dit : Moi, là, je trouve que j'ai fait le choix d'être à la maison, de m'occuper de mes enfants, mais, rendue à quatre ans, je suis consciente qu'il y a des apprentissages peut-être que mon enfant n'a pas faits, entre autres au plan de la sociabilité, bon, mais ce n'est pas le service de garde que je choisis. Si vous avez des... — elle, elle est inscrite au projet, donc, d'une maternelle à plein temps — si vous avez ça, je préfère ça.

Donc, on peut imaginer ces raisons des parents. Pourquoi ne peut-on tout simplement pas dire : Ça existe, on le reconnaît, ils ont des besoins? Il n'y a pas un seul modèle au Québec, il peut y en avoir plusieurs, et donc nous, pour nous conformer à ces besoins, on ajoute quelque chose, pas de façon universelle, ce n'est même pas la maternelle quatre ans qu'on ouvre, là, tous ceux qui veulent y aller, y vont, c'est une maternelle quatre ans à plein temps pour des enfants de milieux défavorisés. Puis on aura des critères assez stricts pour être sûrs qu'on vise ces enfants-là. Pourquoi on ne pourrait pas ajouter ça à nos services?

Mme Collin (Marie-Claude) : ...laisser Mme Lajoie vous répondre.

Une voix : Lavoie, c'est Lavoie.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Bienvenue, Mme Lavoie.

Mme Lavoie (Jacinthe) : Pour répondre un peu à votre question, à votre argumentation par rapport aux parents qui ne veulent pas envoyer leur enfant en service de garde parce qu'ils considèrent que c'est pour des parents qui travaillent à temps plein, souvent c'est parce que le service est offert uniquement à temps plein. La plupart des garderies vont préférer accepter des enfants à temps complet plutôt que de prendre des temps partiels et de les jumeler.

Nous, on aura ce service-là dans une de nos installations qui est en région et qui dessert du milieu défavorisé, du milieu rural et du milieu urbain. Puis on a découvert que les parents étaient intéressés à avoir un service de prématernelle, étaient intéressés à les intégrer dans les garderies, mais ils ne voulaient pas avoir du temps plein. Ils voulaient avoir du temps partiel pour avoir la possibilité de passer du temps avec leur enfant puis ils voulaient s'impliquer aussi dans le service de garde. Alors, c'est des parents qui vont venir faire du bénévolat, qui vont venir nous aider lors des sorties. Ils sont à la maison, ils ne travaillent pas, ils ont fait le choix de rester à la maison pour s'occuper de leur enfant, mais ils veulent s'impliquer.

• (17 h 30) •

Alors, si on leur donne cette possibilité-là en service de garde, si on fait la... on promeut les classes à temps partiel, on intègre ces enfants-là à temps partiel en faisant des jumelages, un enfant trois jours jumelé avec un enfant deux jours ou encore un enfant le matin et l'autre enfant l'après-midi, ça comble nos classes à temps complet puis ça comble les besoins du parent qui n'a pas besoin d'un service de garde à temps plein mais qui veut que son enfant socialise.

Si on parle du milieu... Moi, j'ai été enseignante pendant plusieurs années en prématernelle quatre ans. Je l'ai fait en milieu... dans la ville d'Ottawa qui était... C'était vraiment dans un milieu très huppé, avec des parents qui étaient très aisés, qui avaient des nounous à la maison. Je l'ai fait également à Québec, ici, dans un milieu défavorisé. Ce que je peux voir au niveau des lacunes, c'est surtout au niveau organisationnel, au niveau logistique, quand on a 18 petits de quatre ans à mettre sur l'autobus le soir, qui sont dans cinq autobus différents. Là-dessus, on a des gardes partagées, on a un enfant que, lundi, mardi, il est avec maman, mercredi, jeudi, il est avec papa, il faut changer les autobus. C'est beaucoup pour un enfant de quatre ans. Ça cause beaucoup d'insécurité pour l'enfant en début d'année, de devoir prendre l'autobus, ne pas savoir : Je vais-tu me rendre chez mon parent? Je vais-tu...

Puis il y a aussi le fait des collations, des repas, et tout ça. Si on s'en va en milieux défavorisés, bien, souvent, l'enfant n'a pas de lunch le midi, il n'a pas de collation, alors que, dans nos services de garde, on leur offre un repas chaud, on leur offre deux collations par jour, on leur donne du lait aux repas. Ça fait qu'on vient combler tous ces besoins-là. Un enfant de milieux défavorisés, il y a beaucoup d'enfants qui vont manquer... ils vont avoir des lacunes.

Comme on disait tout à l'heure, il n'a pas été en service de garde, il n'a pas été en contact, il n'a pas socialisé avec d'autres enfants. Alors, on le met avec 18 autres enfants dans une classe. L'enseignante, elle doit partager son attention avec 18 enfants. Au service de garde, on en a 10. Alors, avec 10 enfants, elle va partager son attention avec 10 enfants, puis parfois ce n'est pas toujours facile. Alors, moi, personnellement, je trouve que le milieu de garde permet de mieux encadrer ces enfants-là, permet de leur donner une attention, un support individuel qu'on ne peut pas faire quand on en a 18. Ça nous permet aussi plus de relations avec les parents parce que l'éducatrice rencontre le parent presque à tous les jours, alors il y a un suivi qui se fait. Puis, pour la passerelle entre l'école et la garderie, la plupart des services de garde font une fiche d'évaluation. Ici, à Québec, on a la passerelle qui existe, en collaboration avec la commission scolaire de la Capitale, qui est vraiment très bien faite, qui a une évaluation qui se fait avec l'enfant de la part du service de garde, du parent. C'est remis à l'école toujours avec la collaboration, l'autorisation du parent, puis ça permet à l'enseignant d'avoir une bonne idée.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci, Mme Lavoie. Comme vous le savez, il faut maximiser le plus possible les échanges. Et je vois, depuis tantôt, que la députée des Îles-de-la-Madeleine a bien hâte d'intervenir. Mme la députée des Îles-de-la-Madeleine, vous avez la parole.

Mme Richard (Îles-de-la-Madeleine) : Merci, Mme la Présidente. Alors, bonjour mesdames. Je reconnais très bien l'argument que vous apportez. On est d'accord que le service de garde, c'est un milieu fantastique pour les enfants, et il y a un bel encadrement. Tout ça, on est d'accord, vraiment, nous avons les mêmes arguments. Le problème, c'est que notre 27 % d'enfants dont on veut s'occuper, ils n'y vont pas, dans les services de garde. Ce n'est pas nécessairement dans leur culture ou, comme on a dit, il y a même des parents qui diraient : Bien, je ne peux pas envoyer mon enfant au service de garde. Qu'est-ce que je vais avoir l'air, puisque je suis à la maison? Alors, il y a toute une culture qui va faire qu'il y a certains parents qui vont accepter d'envoyer l'enfant de quatre ans à l'école mais qui ne l'enverraient pas au service de garde. Pas parce que ce n'est pas des bons services, évidemment, mais ce n'est pas dans leur culture ou leur vision. Alors, on ne peut pas opposer une façon ou l'autre. C'est un service supplémentaire qu'on veut offrir.

Et ma question irait dans le sens : Dans les garderies privées non subventionnées, quel est le pourcentage d'enfants qu'on pourrait dire qu'ils viennent de milieux défavorisés, qui fréquentent? Parce que le taux doit être quand même assez élevé, au montant par jour pour les garderies. Est-ce que vous avez une idée du taux d'enfants qui fréquentent les...

Mme Lavoie (Jacinthe) : …où est située notre garderie. Moi, j'ai une installation à Québec, puis je peux dire que le taux est pratiquement nul. J'ai une installation en région, puis les parents nous disent : Ça me coûte moins cher que 7 $ par jour, parce qu'ils sont à très faibles revenus. Alors, à ce moment-là, c'est certain qu'au début c'est une barrière parce que le parent voit le gros 35 $ par jour. Par la suite, bon, bien il voit, woups, finalement, avec les versements anticipés, et tout ça, ça me revient beaucoup moins cher. Ça fait que c'est beaucoup relatif avec l'endroit où est située notre installation. Mais, comme je dis, en région, on va avoir un plus gros besoin que... On va en avoir plus dans nos installations qu'on va en retrouver en milieu urbain. Ça dépend toujours où est-ce que l'installation est située.

Mme Richard (Îles-de-la-Madeleine) : Parce que, normalement, c'est ça, vos services ne recueillent pas nécessairement les enfants des milieux défavorisés, ils vont s'adresser à une clientèle un peu plus aisée, du fait justement de la barrière des paiements.

Mme Collin (Marie-Claude) : Pas nécessairement. Si vous me permettez, on en a de tous les niveaux. Les parents viennent nous voir, là, on le sait, ils doivent nous payer. Souvent, on a des appels du CLSC pour accueillir les enfants en milieux défavorisés parce que le CPE ne les accueille pas, la garderie privée subventionnée ne les accueille pas, et ils nous appellent pour voir si on peut les accueillir. Dans plusieurs de nos services de garde, on accueille les enfants en milieux défavorisés. Souvent, on ne leur charge pas et on leur donne un soutien. Souvent, on va faire affaire avec la paroisse. Dans les milieux ruraux, on va faire affaire avec la paroisse. On va aider, une journée ou deux, les enfants qui sont à faibles revenus, sont non identifiés au restant de la garderie, et on ne leur charge pas. Ça fait que, donc, on contribue, là. Souvent, les CLSC nous appellent pour savoir si on a de la place pour ces enfants-là, parce que ni le CPE ni la garderie subventionnée ne les accueillent. Ça fait qu'alors on les accueille, les enfants en milieux défavorisés, dépendamment toujours des régions, hein, parce qu'il y a des régions qui sont moins ciblées que d'autres.

Mme Richard (Îles-de-la-Madeleine) : Merci beaucoup, c'est précieux de savoir ça.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci. Nous allons maintenant du côté de l'opposition officielle. Mme la députée de Trois-Rivières, vous avez la parole.

Mme St-Amand : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, Mme Collin, Mme Fréchette, Mme Lavoie, bienvenue. En fait, je dois vous dire, d'entrée de jeu, que je... Tantôt, Mme Lavoie, avec la particularité que vous nous avez donnée sur ce que vivent les enfants de quatre ans en maternelle, avec l'autobus, la garde partagée, j'en ai eu des frissons sur le corps, surtout avec l'image que Mme Collin a donnée, il y a des enfants de trois ans et huit mois qui vont rentrer à l'école. Alors, là, j'ai eu un petit...

En fait, la première chose que je veux vous dire, c'est… Tantôt, il y a eu une ambiguïté par rapport au fait... du projet de loi... par rapport au fait des maternelles quatre ans en milieux défavorisés. Je veux juste que vous sachiez que, pour nous aussi, il y a eu une ambiguïté et que, dans les cinq articles du projet de loi, en fait, présentement il n'y a rien qui confirme que ça s'adresse aux enfants défavorisés. Vous n'êtes pas le premier groupe à qui ça arrive. On sait que la ministre travaille très fort présentement... On aura à étudier le projet de loi article par article, parce que c'est la volonté qu'elle a exprimée très clairement ici que ce projet de loi là s'applique aux milieux défavorisés. Maintenant, dans le libellé, avec les gens... les législateurs, il faudra qu'il y ait un travail qui se fasse à cet égard-là. Alors, vous n'êtes pas les premiers à avoir vu ça de façon ambiguë.

Ma première question, parce que, tantôt, la ministre faisait référence à une obligation… bon, quand vous avez parlé de... quand vous vous êtes exprimée. Je veux juste être sûre que je comprends bien. Si les enfants ciblés pour aller en maternelle quatre ans étaient ciblés pour aller dans vos services, est-ce que c'est ça... Est-ce que ce que vous voulez dire, c'est, dans le fond : Est-ce qu'on ne pourrait pas cibler ces enfants-là pour les amener dans les services de garde plutôt que de les amener en maternelle quatre ans? Est-ce que c'est ça que vous vouliez dire?

Mme Collin (Marie-Claude) : Oui.

Mme St-Amand : O.K. Alors, vous, vous dites : On aimerait ça avoir un incitatif qui les amènerait plutôt en service de garde.

Mme Collin (Marie-Claude) : Bien, pour l'enfant, il serait préférable que l'enfant commence par le service de garde dans un petit groupe, bien intégrer sa vie sociale avec les autres enfants, avec une éducatrice pour 10 et, après, grossir le groupe quand il s'en va vers la maternelle. Oui, c'est dans ce sens-là.

Mme St-Amand : Hier, on a parlé beaucoup de la crainte qu'on a de faire des ghettos, compte tenu du fait qu'on n'aura des enfants que de milieux défavorisés ensemble. Je donne un exemple, à un moment donné, de dire... Parce qu'en fait il y a aussi — puis je vais vouloir vous entendre, Mme Lavoie, là-dessus — le fait qu'on sait l'importance que ça peut avoir pour un enfant d'être le plus grand, et là je me disais : Mon Dieu! Ces enfants-là, de quatre ans, vont rentrer à l'école, ils vont être les plus petits puis ils vont être les petits pauvres en plus parce qu'ils vont être tous ensemble dans une classe... dans la même classe. Vous dites : Nos garderies ne font pas de distinction entre les classes sociales, que vous avez peur, vous autres aussi, des ghettos. En fait, qu'est-ce que ça va être, qu'est-ce que ça peut être, les impacts sur nos enfants de quatre ans?

• (17 h 40) •

Mme Lavoie (Jacinthe) : Bien, les impacts, c'est certain que, sur la confiance en soi... On sait qu'un enfant qui a confiance en lui, qui a l'impression qu'il est bon, qu'il est capable de réussir, bien, il va avoir des réussites. Puis un enfant qui n'a pas confiance en lui puis qui part avec : Je ne suis pas capable, je ne suis pas bon, c'est moi, le plus petit, c'est moi, le moins bon, bien, il va partir d'une façon négative dans la vie. Dans nos services de garde, nous, on travaille beaucoup là-dessus, la confiance en soi, la motivation, pour que les enfants soient fiers : Aïe! On est grands, on est rendus à quatre ans, on est bons. On travaille beaucoup, beaucoup là-dessus pour que l'enfant arrive à l'école, puis qu'il ait eu des réussites, puis qu'il ait appris à avoir confiance en lui. On travaille beaucoup là-dessus. Ça fait que, c'est certain, tu sais, on parle de dérogation scolaire, souvent, on n'encourage pas nécessairement un enfant à commencer l'école une année avant. Puis moi, ce que je dis toujours à mes parents, c'est : Regarde, votre enfant va commencer un an plus tard, il va avoir confiance en lui, ça va être lui le plus grand de la classe. Vous lui donnez un plus dans la vie. Alors, s'il commence tout de suite, il va être le plus petit de la classe, il va se sentir le moins bon parce qu'il va être plus petit par rapport aux autres. Il va avoir moins confiance en lui. Alors, vous partez avec un enfant qui part avec une moins grande confiance en lui dans la vie. Ça fait que c'est un peu ça que je vois, moi, comme impact : confiance, la confiance en soi.

Mme St-Amand : O.K. Merci. Je ne relirai pas votre texte, mais, évidemment, vous avez mis votre recommandation, qui est à l'avant-dernière page, sur la mise en place d'un comité spécial. Vous avez ajouté quelque chose que j'ai noté tantôt parce que... puis je veux dire, d'entrée de jeu, qu'on le sait, nos intervenants de notre réseau de service de garde, vous avez à coeur le bien-être de nos enfants. Ça, on le sait. Vous êtes des gens de coeur, vous êtes là parce que vous voulez... puis, tantôt, la députée l'a bien dit à ma collègue des Îles qu'en fait vous êtes là pour le bien-être des enfants.

Une voix : ...

Mme St-Amand : Non, des Îles-de-la-Madeleine. Je m'excuse. Mais vous avez ajouté une chose, à votre paragraphe tantôt, que j'ai noté, que vous dites : Le ministère de l'Éducation devrait s'y joindre, à votre comité que vous demandez pour une meilleure réflexion. Et, bon, ce qu'on sait, on a 27 % de nos petits enfants, présentement, qui ne fréquentent pas de services de garde. L'idée, c'est d'aller s'assurer que ces enfants-là, ceux qui sont en milieux plus défavorisés, puissent avoir accès à un soutien, parce qu'ils en ont besoin.

J'aimerais ça savoir qu'est-ce que vous pouvez faire pour soutenir… Quand vous avez ajouté ça, tantôt, est-ce que ça veut dire que, bon, vous seriez prêts à collaborer avec le ministère de l'Éducation? Est-ce que ça veut dire qu'en fait il y a un pas que vous êtes prêts à faire? Parce que, tantôt, la ministre a dit : Ça a le mérite d'être clair, bon, ce que vous avez dit là-dedans. Mais, en même temps, moi, je sentais un peu d'ouverture dans ce que vous avez dit là. J'aimerais ça vous entendre là-dessus.

Mme Collin (Marie-Claude) : Oui, on a une ouverture parce que, comme on dit, on n'est pas contre la maternelle quatre ans en milieux défavorisés. Une maternelle quatre ans, dans une commission scolaire, pour aider les enfants… C'est sûr que, quand un enfant va dire qu'il entre à l'école à quatre ans, il est pointé du doigt : Tu es pauvre. C'est méchant, des enfants entre eux, hein? Donc, il va être pointé du doigt au départ. À quatre ans, il est pauvre.

Avant de répondre à votre question, Mme St-Amand, il y a juste un point d'interrogation. C'est qu'on parle depuis tantôt de la maternelle quatre ans en milieux défavorisés, mais là j'entends beaucoup parler de culture. Maintenant, un parent qui a fait le choix de ne pas envoyer son enfant à l'école, même s'il est riche, comme ça, il va pouvoir l'envoyer aussi à la maternelle quatre ans parce qu'il a fait le choix de rester avec lui durant sa petite enfance. C'est qu'à quatre ans l'enfant a un besoin de sociabilisation, il va rentrer à la maternelle quatre ans, même s'il est riche, il va y avoir droit, là, O.K.? Parce que, tantôt, c'était comme un petit peu de culture différente, parce que j'ai fait le choix de rester à la maison, puis là, à quatre ans, il est prêt d'aller à l'école. C'est un peu ça, là, qui me fait peur dans la maternelle.

Si on n'aurait seulement qu'une classe de maternelles quatre ans par commission scolaire en milieux défavorisés, ça peut aller, mais ce que j'entends ici, c'est qu'on vient d'élargir la maternelle quatre ans, là. Oui, on est prêts à faire un pas avec le ministère de l'Éducation si c'est pour aider les enfants dans nos services de garde. Est-ce que l'intégration des enfants dans nos services de garde de quatre ans, nos tout-petits de quatre ans qui viennent passer la dernière année dans les services de garde... Le projet éducatif peut peut-être être travaillé avec le ministère de l'Éducation. Il y a encore plein d'ouverture qui peut se faire, il y a plein de moyens qui peuvent se faire rapidement et constructifs avant d'aller ouvrir des maternelles quatre ans dans des commissions scolaires où il manque déjà des effectifs pour répondre à leurs besoins.

Mme St-Amand : Je laisserai la ministre vous donner des explications possiblement après la rencontre. Je voudrais vous entendre maintenant… Parce que vous avez parlé aussi tantôt, puis c'est un côté un peu plus caché qu'on ne connaît pas des garderies privées, mais vous avez parlé d'enfants avec des difficultés, qu'on parle de difficultés motrices ou d'autres problématiques. Vous avez parlé de liens avec le réseau, notamment, j'imagine, avec les CLSC, des références que vous recevez parce que, justement, les CPE ne veulent pas de certains enfants, ne veulent pas les prendre. J'aimerais ça que vous nous en parliez un peu plus.

Mme Fréchette (Line) : Écoutez, effectivement, souvent, pas nécessairement parce qu'ils les refusent mais parce qu'ils ne font pas partie de la liste d'attente, ces enfants-là, souvent, les CLSC recommandent aux parents de les intégrer à des services de garde, et, souvent, on est interpellés. Effectivement, on n'a aucune subvention, donc c'est aux frais du service de garde de les prendre en charge, de prendre le surplus de tâches. Et on vient à une alternative avec les parents. Mais jamais on ne va dire à un enfant : Tu as un handicap ou tu n'as pas les moyens de payer. On essaie toujours de trouver une solution à la base, justement parce qu'on est des gens de coeur.

Mme St-Amand : Vous recevez beaucoup... D'abord, je veux juste dire que je me suis mal exprimée, hein, quand je disais : Ne veulent pas. Il faut bien comprendre que... «ne peuvent pas». Alors, c'est bien important. Désolée si j'ai été mal comprise. Je veux juste que vous nous... aller un petit peu plus loin, que vous puissiez aller un petit peu plus loin. Vous recevez des références du réseau, vous êtes en contact avec le réseau, est-ce que c'est bien ça que je comprends?

Mme Fréchette (Line) : Oui, on est en contact avec le réseau quand le parent est déjà intégré dans le système du CLSC. Ils sont référés. Ou, si l'enfant est chez nous et il y a un diagnostic du CLSC, le CLSC va venir dans nos installations à nous. Mais, n'étant pas subventionnés, nous n'obtenons pas les subventions pour les enfants à troubles d'apprentissage ou handicapés, mais on les reçoit et on s'adapte avec... puis selon les conditions.

Mme St-Amand : J'aimerais ça maintenant vous entendre, parce qu'effectivement j'entendais tantôt ma collègue qui disait : Les garderies privées, est-ce qu'on reçoit les enfants à faibles revenus? Il ne doit pas y en avoir beaucoup. Évidemment, vous êtes à même, probablement, de nous parler du versement anticipé pour crédit d'impôt qui, possiblement, permet aux enfants qui viennent de milieux défavorisés d'avoir accès au service de garde en milieu privé. Juste pour parler du fonctionnement, comment ça fonctionne et puis comment le parent arrive à pouvoir défrayer ces...

Mme Collin (Marie-Claude) : En fait, on doit avancer aux parents environ trois mois avant qu'ils puissent nous débourser un sou pour la garde en milieux défavorisés, pour un enfant en milieu défavorisé. Le parent va faire la demande de remboursement anticipé, souvent, va nous donner un montant minime pour garder sa place. Et, après deux ou trois mois, lorsqu'il reçoit son premier remboursement anticipé, là, il commence à nous payer.

Mais, je vous dirais, pour un parent en milieu défavorisé, ce qui est très dur, comme Mme Lavoie disait tantôt, c'étaient les premiers mois, le 35 $ par jour qui, pour lui, est énorme. Imaginez-vous la semaine. Alors, nous, on devance cet argent-là. On attend que le parent nous paie. Des fois, ça peut prendre jusqu'à trois mois avant de recevoir un petit montant, et, de là, va s'ajuster… Ça peut prendre jusqu'à six mois avant qu'on arrive à un roulement régulier. Souvent, ce qui arrive avec le remboursement anticipé, c'est qu'à la fin de l'année, si le parent a envoyé sa demande une journée trop tard, bien là on peut attendre un deux mois, trois mois, encore une fois, avant de recevoir l'argent. Donc, c'est très compliqué pour eux, mais nous, les garderies privées, on accepte des conditions, des fois, de non‑paiement pour aider le parent en milieu défavorisé, et, des fois, le parent quitte sans même nous avoir payés. C'est notre réalité.

Mme St-Amand : Merci. La routine d'un enfant de quatre ans... parce que c'est quand même une préoccupation qu'on a. On en a parlé tantôt, là. On parlait d'entre autres, là, la difficulté de l'autobus, l'organisation. Mais on le sait, qu'un enfant qui est en service de garde a une certaine routine. Est-ce que vous pensez... Comment on peut adapter ça en milieu scolaire et comment ça peut se passer? Vous l'avez vécu, Mme Lavoie. Et l'importance... Je pense juste au dodo de l'après-midi, à la sieste de l'après-midi. Les besoins d'un enfant de quatre ans sont certainement différents — bon, on en a parlé depuis deux jours — de ceux d'un enfant de cinq ans.

• (17 h 50) •

Mme Lavoie (Jacinthe) : Ce qui est difficile, c'est, je vous dirais, le nombre, le nombre d'enfants. Avec 18 enfants, là, vous vous imaginez quand ça vient le temps de les sortir à l'extérieur, quand... On en a 10 en service de garde, puis ce n'est pas évident, pendant l'hiver, quand ils arrivent avec leurs vêtements, de tous les habiller pour aller à l'extérieur, puis là on a certains... En milieu scolaire, c'est encore pire, parce qu'on a, mettons, 45 minutes pour aller jouer dehors parce qu'après ça il y a une récréation pour les plus vieux; on ne doit pas être en même temps. Il faut que ces enfants-là soient habillés pour aller jouer, pour faire leurs 45 minutes, mais il leur reste 10 minutes pour jouer dehors; ça leur a pris 35 minutes pour s'habiller.

Puis tu as le côté aussi collation. Les enfants apportent une collation de la maison, mais la classe n'est pas nécessairement outillée. On n'a pas nécessairement des lavabos tout le temps dans les classes. La classe est mise en place selon les besoins en début d'année, mais ce n'est pas nécessairement... Souvent, c'est des classes d'appoint qu'on a mises en place, justement, parce qu'on avait un nouveau groupe de quatre ans à mettre en place.

Au niveau des dodos, bien, on n'a pas de petits matelas. L'enfant va apporter une couverture de la maison, il va coucher à même le sol parce que les matelas... Dans les écoles, on n'a pas de matelas pour le repos des enfants. Puis on s'entend qu'à quatre ans il y a des enfants qui vont commencer à délaisser leur dodo d'après-midi, mais, pour d'autres enfants, ils vont encore avoir besoin d'une sieste de 45 minutes à une heure en après-midi, sinon, bon, bien, on se retrouve avec des enfants, là, qui ont des troubles de concentration, des troubles d'apprentissage.

Ça fait que c'est un peu... La problématique d'adapter ça, c'est... au niveau de la logistique, l'organisation de la classe puis le nombre d'enfants pour l'enseignante.

Mme St-Amand : Quels seraient les facteurs... Si on disait : On veut que nos services de garde puissent accueillir plus d'enfants en milieux défavorisés, pour vous, quels seraient les facteurs qui seraient facilitants, qui permettraient de faire en sorte que le parent... Parce que, bon, on l'a compris, là, depuis deux jours, il y a des parents qui ne veulent pas envoyer leurs enfants en service de garde, il y a des parents qui, par choix, restent à la maison et il y a d'autres parents qui, pour toutes sortes... Puis c'était bien intéressant, tantôt, de vous entendre sur le mi-temps ou le temps partiel qui a fait en sorte d'avoir de nouveaux parents. C'est quoi, les facteurs qui feraient en sorte qu'on pourrait... Parce que, bon, on peut toujours cohabiter, là, les deux ensemble, dans la mesure… mais, bon, qu'il y a du... défavorisé. Quels sont les facteurs qui pourraient permettre ça?

Mme Lavoie (Jacinthe) : S'il y avait un incitatif... Parce que c'est certain qu'au niveau organisation, logistique, dans un service de garde, c'est plus facile d'avoir des enfants qui sont tous à temps plein que d'avoir des temps partiel. Pour avoir vécu les deux, là, ce n'est pas toujours facile de jumeler. Les parents, ils ne veulent pas toujours les journées qu'on leur propose. Souvent, les journées, le lundi, le vendredi, bien, il n'y a personne qui les veut, ces journées-là.

Par contre, s'il y avait un incitatif, je ne sais pas, que les versements soient plus élevés pour les parents qui... Il faudrait vraiment mettre un comité là-dessus puis voir les solutions qu'il y aurait, mais mettre un incitatif pour que les garderies acceptent, dans un plus grand nombre, des enfants qui sont à temps partiel et non pas juste accepter des enfants à temps partiel parce qu'on n'a pas comblé nos places à temps plein, vraiment un incitatif là-dessus, puis encourager, finalement, les services de garde à accepter davantage de temps partiel.

Mme St-Amand : Alors, ce que je comprends, c'est que, pour vous, le temps partiel est une des pistes de solution, alors que nous, on parle de la maternelle quatre ans à temps plein.

Mme Lavoie (Jacinthe) : Il faut que les parents veulent. Souvent, pour un parent qui est à la maison, le parent veut du temps partiel, il ne veut pas du temps plein.

Mme St-Amand : Merci beaucoup. Merci, Mme la Présidente. Merci.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci. Merci beaucoup. Alors, ça sera au tour du deuxième groupe d'opposition. Mme la députée de Montarville, vous avez cinq minutes.

Mme Roy (Montarville) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci, mesdames, bonjour. Je reconnais des visages ici. Deux questions. D'abord, j'ai une petite question de chiffres qui me fatigue, puis peut-être que Mme la ministre pourrait répondre d'ici la fin de la commission. Au niveau des chiffres, on parle de 27 % d'enfants qui n'ont pas de service de garde, soit. On a reçu les chiffres, au début de la commission, des CPE qui nous disent effectivement : Le bassin d'enfants visés par la mesure maternelle quatre ans est constitué de 26,8 % des enfants, donc ce 27 %. J'imagine que vos chiffres venaient de l'Institut de la statistique du Québec. De ce nombre — et là c'est les CPE qui parlent — sur ce 27 %, on compte déjà plus de 6 000 enfants inscrits en maternelle quatre ans et environ 10 000 inscrits au programme Passe-Partout. Donc, ce sont des enfants qui ne sont pas en service de garde mais qui reçoivent des services éducatifs sous une forme ou sous une autre. Donc, il ne reste que 7 120 enfants qui ne sont ni en maternelle, ni en milieu de garde, ni à Passe-Partout. J'aimerais ça qu'on vérifie ces chiffres-là, si c'est effectivement de 7 000 enfants qui n'ont aucun service, quel qu'il soit, et on comprend qu'il y a 27 % qui ne sont pas en service de garde.

Cela dit, j'aimerais vous entendre parler... Dans vos garderies à vous... Parce que, pour nous, ce qui est très important, c'est le dépistage précoce chez les enfants. Qu'il se fasse à la maternelle ou qu'il se fasse en service de garde, dans les garderies, c'est hyperimportant. Vous, sur le terrain, que faites-vous? Comment pouvez-vous intervenir? Et comment pouvez-vous justement intervenir? Et qu'arrivez-vous à récupérer quand vous voyez qu'il y a une problématique?

Mme Fréchette (Line) : Écoutez, tous les services de garde ont des principes de base pour le programme éducatif, hein? Chaque enfant est unique, le développement de l'enfant au processus global et intégré, l'enfant apprend par le jeu. Et chaque petit groupe... Justement, ils sont en petits groupes. Chaque éducateur est formé pour observer le développement de l'enfant, et on remplit des grilles d'évaluation, et on est capable de dire : Bien, dans notre programmation, on va changer telle, telle activité pour travailler plus cette sphère du développement de… parce que mon groupe d'enfants ou tel enfant a plus de difficulté. Donc, le programme est déjà adapté pour observer les enfants, c'est déjà fait, ça, et on aurait juste à faire un transfert entre l'école et la garderie pour que le dossier suive. Mais c'est déjà tout implanté dans les services de garde.

Mme Roy (Montarville) : ...stages?

Mme Fréchette (Line) : Oui.

Mme Roy (Montarville) : Par la suite, comment intervenez-vous?

Mme Fréchette (Line) : Avec des plans d'intervention avec l'éducatrice et la directrice. Souvent, c'est comme ça que ça se passe. Ensuite on rencontre les parents, on met un plan d'intervention, on va chercher l'aide aussi au niveau du CLSC quand les parents... on dit : L'enfant a des besoins au niveau de l'orthophonie, il devrait être suivi au niveau... en ergo. On donne les pistes de solution aux parents.

Mme Roy (Montarville) : Et ça, on le fait très tôt?

Mme Fréchette (Line) : Oui, très tôt, dès l'âge de deux ans. Tu sais, nous, on le voit, là, le processus, mais avant deux ans, souvent, on ne se prononce pas, on n'avise pas, mais, après l'âge de deux ans, on dit aux parents : Bien, peut-être que vous seriez mieux d'aller consulter pour l'orthophonie, peut-être qu'au niveau... des rencontres avec une psychologue pour un trouble de comportement. Dès l'âge de deux ans, on commence déjà à dire aux parents... on donne des pistes.

Mme Roy (Montarville) : Et vous déplorez le fait que, souvent, ce dépistage que vous avez fait ne suit pas jusqu'à l'école.

Mme Fréchette (Line) : Effectivement.

Mme Roy (Montarville) : Donc, on repart à zéro lorsqu'on arrive à l'école.

Mme Fréchette (Line) : Toujours, toujours, toujours.

Mme Lavoie (Jacinthe) : Il y a des écoles qui nous envoient des grilles d'évaluation à compléter pour avoir un portrait général de l'enfant ou encore qui vont nous appeler pour avoir plus d'information chez un enfant spécifique. Alors, à ce moment-là, oui, avec l'accord du parent, on leur transmet l'information, mais ça serait bien que ça soit utilisé de façon plus globale, que ce soit utilisé dans toutes les écoles, parce que c'est certain que l'enfant qui arrive à la maternelle puis qu'on a déjà travaillé, on a déjà mis en place des outils avec cet enfant-là, bien, qu'ils ne repartent pas à zéro, tu sais, qu'ils continuent où est-ce qu'on était rendu avec l'enfant. Ça fait que ça, ça serait bien, justement, que ça soit mis davantage en place, qu'il y ait plus de collaboration entre le service de garde et l'école.

Mme Roy (Montarville) : Ce que vous me dites actuellement, c'est que c'est du cas par cas. Il y a certaines écoles qui ont une plus grande sensibilité à cet égard-là et d'autres ne l'ont pas.

Mme Fréchette (Line) : Au niveau rural, moi, je parle pour moi, là, je suis en rural, l'école me téléphone à chaque année parce que mes 10 petits amis de quatre ans s'en vont à la maternelle, puis là on fait... on prend chaque enfant, on identifie deux enfants ou... ensemble… s'ils font la fête, souvent, on les divise déjà pour que ça soit moins compliqué pour l'apprentissage. On est déjà capable de déceler s'il y a des troubles de comportement ou de l'hyperactivité. Donc, on ne met pas trois enfants hyperactifs dans la même classe.

Mme Roy (Montarville) : Je vous remercie beaucoup, mesdames.

La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci beaucoup, Mmes Fréchette, Collin et Lavoie. Merci infiniment d'être venues échanger avec les parlementaires.

Ceci met fin à nos travaux pour la journée. Nous allons ajourner jusqu'à demain, jeudi 2 mai, après les affaires courantes. Merci.

(Fin de la séance à 17 h 59)

Document(s) associé(s) à la séance