(Onze heures quarante-trois minutes)
La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : À l'ordre! Bonjour. Ayant constaté le
quorum, je déclare la séance de la Commission de la culture et de l'éducation
ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir
éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.
Le mandat de la commission est de poursuivre
les auditions publiques dans le cadre de la consultation générale sur le projet
de loi n° 14, Loi
modifiant la Charte de la langue française, la Charte des droits et libertés de
la personne et d'autres dispositions
législatives.
Mme
la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La
Secrétaire : Oui, Mme la Présidente.
Mme Charbonneau (Mille-Îles) sera remplacée par M. Kelley (Jacques-Cartier).
Auditions
(suite)
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci. Pour ce qui est de l'ordre du jour, cet avant-midi, nous entendrons la
Voix des anglophones de Québec et l'Association des comités de parents
anglophones. Cet après-midi, nous poursuivrons avec l'Ordre des conseillers en
ressources humaines agréés, l'Association des commissions scolaires anglophones
du Québec et M. Gérald Larose.
La
voix des anglophones du Québec (VEQ)
Donc, ce matin, nous avons comme premier
groupe la Voix des anglophones du Québec. Bienvenue à l'Assemblée nationale.
Vous allez disposer d'un temps, pour faire votre présentation, de 10 minutes.
Par la suite, suivra un échange avec
les membres de la commission. Donc, je vous cède la parole. Je demande au
porte-parole de se présenter et également les personnes qui
l'accompagnent. La parole est à vous.
Mme
Walling (Helen) : Bonjour, je suis
Helen Walling, je suis la présidente de Voice of English-speaking Québec, qu'on
appelle en anglais Voice of English-speaking Québec ou la Voix des anglophones
de Québec. Je suis représentée avec moi ici,
M. Jean-Sébastien Jolin Gignac, qui est notre directeur général, et M. Warren
Thomson, qui est notre vice-président du conseil d'administration.
Premièrement, laissez-moi vous dire merci beaucoup de nous
donner la chance d'être ici aujourd'hui et de présenter
notre mémoire. Je vais vous parler quelques minutes de c'est quoi, la Voix des
anglophones de Québec. Nous sommes un
organisme communautaire à but non lucratif qui est dédié à la préservation et à
la promotion de la communauté d'expression
anglaise dans la région de Québec. Nous sommes gouvernés par un conseil
d'administration de 21 bénévoles et nous avons au-delà de 2 200
membres ici, dans la région.
Notre volet… Nous avons cinq volets
principaux qu'on travaille. La première qui est très, très importante, c'est l'attraction et
l'intégration des nouveaux arrivants. On met beaucoup d'énergie et d'efforts
sur ce volet-là. On regarde aussi la
recherche d'emploi pour les jeunes anglophones et francophones. On organise des
activités culturelles. On a un support aux aînés. Et on fait de la
représentation politique quand nécessaire.
VEQ est très, très fier des partenariats
qu'on a développés depuis 1982. Toutes ces années-là, nous avons au-delà de 70 partenariats avec la communauté d'expression
anglaise et la communauté francophone. Nous avons aussi le partenariat dans le
milieu communautaire, les affaires et le réseau public. VEQ est subventionné
par des ministères fédéraux, le ministère de
la Santé et des Services sociaux, la ville de Québec et diverses fondations et
des entreprises privées. Je laisse à mon collègue, M. Thomson, parler un
petit peu plus de notre organisation.
M. Thomson (Warren) : Bonjour. Je ne vous apprends rien en
disant que la communauté anglophone de Québec est dans notre région depuis des siècles. Alors, on
a toujours contribué d'une façon positive et constructive du
développement de notre région et le Québec entier. Selon notre dernier
recensement, 1,9 % de la population de la ville de Québec se disent anglophones, ça représente à peu près
15 000 personnes. Il est important de dire que 25 % de notre
population se renouvelle aux cinq ans.
La communauté anglaise de la grande
région de Québec est une communauté intégrée mais non assimilée qui a toujours mis
l'emphase sur des solides partenariats avec la majorité francophone afin de
préserver ses institutions. Nous croyons
fermement que la collaboration entre les communautés francophones et
anglophones représente la façon la plus efficace de garantir la survie
et la prospérité de nos deux collectivités linguistiques.
C'est
d'ailleurs cette approche qui nous a permis de convaincre le gouvernement
fédéral, la ville de Québec, plusieurs fondations et une multitude de
partenaires des secteurs public, privé et communautaire d'investir dans l'intégration des
nouveaux arrivants anglophones à Québec. En effet, nous sommes parvenus à faire
la démonstration que notre région
tout entière tire profit d'une capacité accrue d'intégrer avec succès les
nouveaux arrivants anglophones au sein des deux collectivités
linguistiques de notre région.
À chaque année, VEQ
facilite l'intégration d'environ 500 nouveaux arrivants d'expression anglaise.
Et, c'est évident, la première chose qu'on
leur dit en arrivant, c'est d'apprendre le français. C'est impossible qu'on
peut garder les personnes ici, à Québec, les nouveaux arrivants, s'ils
n'apprennent pas le français. Alors, c'est un devoir de nous autres,
c'est une fierté de nous autres d'aider les anglophones, quand ils arrivent
dans notre région, d'apprendre le français.
Et on veut travailler en collaboration avec le gouvernement, avec la ville pour
mieux intégrer nos nouveaux arrivants anglophones.
• (11 h 50) •
M.
Jolin Gignac (Jean-Sébastien) : Bonjour, Jean-Sébastien Gignac, je suis directeur
général de l'organisme. Moi, j'ai le mandat de vous présenter plus
spécifiquement des éléments qui nous apparaissent problématiques pour
notre communauté dans le projet de loi n° 14. On a bien sûr étudié
minutieusement l'ensemble des modifications qui sont proposées dans le cadre du
projet de loi n° 14, et c'est certain que nous, on estime que ce
projet de loi là, si appliqué comme tel,
aura des effets substantiels et négatifs sur notre communauté, sur la capacité
des anglophones de notre région de
contribuer à la vie socioéconomique du Québec et de notre région, mais
également sur la région entière. On pense que c'est un projet de loi qui
peut être également... qui a des conséquences négatives pour la communauté
francophone de notre région.
Vous
avez certainement pris connaissance de notre mémoire. Il y a plusieurs éléments
qui sont mentionnés dedans. Bien sûr, on a peu
de temps aujourd'hui, donc on va se concentrer sur trois éléments en
particulier, le premier étant les articles
relatifs à la section 29 de la Charte de la langue française, donc les
modifications sur la façon dont est octroyé ou maintenu le statut des
municipalités bilingues. Dans la région de Québec, il n'y a pas de
municipalités qui disposent de ce statut-là,
et, en dépit de ça, on s'objecte à cette modification-là parce que, la façon
dont c'est formulé dans le projet de loi, ça fait que ça sera, à toutes
fins pratiques, impossible pour toute autre municipalité de ne jamais obtenir
ce statut-là, et, en soi, pour nous, c'est problématique.
Mais
je vais me permettre ici de lire rapidement une partie de l'article 29, qui
mentionne : «Peuvent notamment être pris en compte la présence historique d'une
communauté d'expression anglaise», et là la phrase continue. Pour nous, cette formulation-là est au mieux injuste envers
la communauté anglophone. De dire qu'on peut en prendre compte, ça n'implique pas l'obligation de le faire ni même la
volonté réelle de le faire. Donc, en soi, pour nous, c'est
problématique.
Par
ailleurs, le pourcentage qui est utilisé par le gouvernement du Québec, de
50 % plus un, pour donner des droits ou des services à une minorité nous apparaît
également injuste puisque, si on compare ce pourcentage-là avec ce qui
prévaut ailleurs au Canada ou ailleurs dans
le monde, c'est vraiment très élevé et ça rend, comme je le disais, presque
impossible de maintenir les statuts qu'on a ou d'en obtenir dans le futur.
Bien,
le deuxième point qu'on veut aborder, et, cette fois, ce n'est pas une
modification, mais l'ajout pour les
entreprises comptant entre 26 et 49 employés. Il y a beaucoup des
employeurs qui emploient les membres de notre
communauté qui sont dans ces eaux-là, de moyennes entreprises entre 26 et
49 employés. Nous on est préoccupés sur la façon dont cet ajout à
la loi toucherait particulièrement les écoles de langues. Les écoles de langues
sont souvent le premier employeur des nouveaux arrivants anglophones à Québec,
puisque ça leur permet de gagner leur vie tout en apprenant le français.
Maintenant, si cet article-là s'applique à ces écoles de langues là et que ça
devient impossible pour ces gens-là de
commencer à travailler dans leur langue ou, en tout cas, en partie dans leur
langue, ça va être impossible pour eux de continuer d'apprendre le
français tout en gagnant leur vie, si bien qu'on ne sera pas capables de les
intégrer à la région, ils vont repartir. Et je ne pense pas que c'est
profitable pour quiconque si c'est le cas.
Finalement,
le dernier point qu'on veut toucher, c'est, bien sûr, la modification, dans le
cadre du projet de loi n° 14,
qui veut retirer l'exemption à l'école
anglaise aux familles de militaires. Dans notre mémoire, on a, bien sûr, énoncé
nos arguments. On des craintes réelles quant à l'avenir, à la vitalité, à la
survie même de certaines de nos institutions d'enseignement.
Et bien sûr,
également, on a pris connaissance du document qui a été déposé par Mme la
ministre la semaine dernière, lors de la
présentation de la commission scolaire Central Québec, et c'est certain que
nous, on est en désaccord avec les
interprétations qui sont dans ce document-là et, bien sûr, les interprétations
que la ministre en a tirées. Nous, on continue
de penser qu'il y a au moins deux écoles, l'école primaire de Valcartier et
l'école Dollard-des-Ormeaux, qui est une école secondaire et primaire,
qui fermeraient ses portes à court ou moyen terme, mais, pour nous, c'est une
certitude.
Par
ailleurs, dans le document qui a été déposé par la ministre, où on explique le
pourquoi de l'exemption, encore là, on est en
désaccord avec l'interprétation qui est présentée dans ce document-là. Les
anglophones, les militaires anglophones
avaient déjà accès, de par les autres dispositions de la loi 101, à l'école
anglaise, donc ils n'avaient pas besoin d'une exemption. L'exemption, selon notre perception, elle a été faite
d'abord et avant tout pour les militaires francophones.
Donc,
c'est les trois points qu'on voulait mentionner avec le temps qu'on a. C'est
certain que nous, on va le répéter, on fait
partie de la région, on est ici depuis des siècles, on croit à l'importance du
français, on pense qu'on est un outil pour
le gouvernement du Québec dans sa volonté de faire que tous les Québécois
maîtrise la langue française, mais, ceci
étant dit, on s'objecte au projet de loi n° 14 et on va s'objecter à tout
projet de loi futur qui semble envoyer le
message que la communauté anglophone fait partie du problème, alors que nous,
on croit fermement qu'elle fait partie de la solution. Merci beaucoup.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci. Nous allons débuter les échanges et nous allons commencer du côté du gouvernement. Mme la ministre
responsable de la Charte de la langue française, vous avez la parole.
Mme De Courcy : Alors, bien, je vous remercie d'abord
d'avoir pris la peine de vous présenter à cette
commission parlementaire et aussi d'avoir fouillé les questions qui sont
importantes pour vous tous et toutes. Je ne ferai qu'un commentaire, si mes collègues le désirent, ils pourront poser des
questions, mais un seul commentaire et qui m'apparaît d'importance, à savoir que les institutions
publiques... les institutions anglophones m'apparaissent très importantes.
Et j'ai, depuis le début, et même avant que j'aie ce mandat, j'ai toujours
milité et travaillé en faveur du maintien des institutions
anglophones, qui font partie de notre patrimoine historique. Et je sais que
l'association des parents estparticulièrement
inquiète autour de ces questions-là, et que votre association aussi l'est.
Alors, je tiens à vous rassurer, là, concernant…
C'est un patrimoine historique important et un patrimoine vivant aussi qui est
en évolution. Alors, pour ma part, il n'y a pas de souci à cette égard.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : M. le député de
Saint-Hyacinthe.
M.
Pelletier (Saint-Hyacinthe) : Merci, Mme la Présidente. Alors, je souhaite la
bienvenue à nos interlocuteurs ici ce matin.
Mme Walling, et M. Thomson, et M. Jean-Sébastien Jolin Gignac, bienvenue.
Alors,
j'ai lu une partie de votre mémoire qui... Vous avez une préoccupation, c'est
sûr, c'est, dans la région de Québec, le maintien des institutions, l'impact de
la loi n° 14 qu'il
pourrait y avoir sur les anglophones. Mais, au niveau de la langue... au niveau
des entreprises de 26 à 49 employés, j'aimerais en savoir un peu plus sur
ce que vous dites dans votre mémoire.
Vous dites que les écoles de langues sont souvent les
premiers employeurs des nouveaux arrivants
anglophones dans votre région et vous craignez que ces entreprises soient
menacées par des dispositions visant les entreprises de 26 à 49. Selon vous, quelles sont les dispositions que ces entreprises
en particulier ne seraient pas en mesure de réaliser aujourd'hui — on parle bien de 2013‑2014 — et pourquoi ne seraient-elles pas en mesure de le
faire, même avec la loi 101 qui est appliquée, et tout, là, au Québec, là? On
vit au Québec actuellement.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Merci, M. le
député. M. Gignac.
M.
Jolin Gignac (Jean-Sébastien) : Bien, à l'heure actuelle, bien sûr, c'est un ajout, donc
il n'y a pas de point qui touche la taille de... les entreprises qui ont
cette taille-là. Dans le cas qui nous préoccupe, pour les écoles de langues,
c'est que, comme je le disais, il y a
beaucoup de nouveaux arrivants anglophones qui arrivent ici, c'est leur premier
emploi, pourquoi? Parce que la dynamique de travail peut se faire dans les deux
langues.
Si les
dispositions s'appliquent, à partir du moment où il y aurait un des professeurs
de l'école de langues qui exigerait que le
tout se passe en français, ça rendrait la chose impossible pour nos nouveaux
arrivants anglophones de maintenir ou d'obtenir ces emplois-là parce
qu'à court terme, je le dis… on désire qu'ils apprennent le français, et ils le
font, mais, à court terme, ils ne seraient pas en mesure de travailler
immédiatement uniquement en français.
C'est la beauté des écoles de langues, c'est que ça
permet à ces travailleurs-là de poursuivre leur francisation ou l'amélioration de
leur français tout en gagnant leur vie, ce qui permet de s'intégrer de façon
efficace sur le plan social et professionnel dans notre région. Donc
c'est là qu'est notre crainte par rapport aux écoles de langues.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Merci.
M. Pelletier
(Saint-Hyacinthe) : C'est beau.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Parfait. Nous allons maintenant du côté de l'opposition officielle. M. le député de LaFontaine, vous avez la
parole.
M.
Tanguay : Oui,
merci beaucoup. D'abord, merci à vous d'avoir pris le temps de rédiger un
mémoire qui ajoute, je pense, beaucoup de
pertinence à votre propos, qui étaye votre proposition. Alors, merci beaucoup
d'avoir pris le temps de le rédiger, de le déposer et d'être présents, vous
trois, ici aujourd'hui, à cette audition.
D'abord,
une statistique qui m'amène un questionnement. Je pense que c'est M. Thomson,
qui l'a souligné, donc. Mais ma question se
pose à l'un de vous trois. Vous dites que 25 % de votre population se
renouvelle aux cinq ans. Pouvez-vous m'expliquer quel phénomène se produit aux
cinq ans? Vous pouvez étayer la...
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : M. Gignac.
M.
Jolin Gignac (Jean-Sébastien) : Bien, il y a différents facteurs qui entrent en ligne de
compte pour expliquer ces... Parce que c'est
quand même un renouvellement de population qui est assez substantiel. Bien,
d'abord, on a une population qui est
vieillissante. Donc, on perd une partie de notre population par le processus
naturel du vieillissement. Et on est
capables de maintenir notre poids démographique ou de l'augmenter — en fait, en 2011, c'était pour la première fois qu'il y
avait une légère augmentation au sein de la population anglophone — par l'intégration des nouveaux arrivants de langue anglaise, qu'ils soient immigrants ou
migrants, donc.
Et
l'autre facteur qui est très important aussi, c'est la communauté militaire,
parce qu'il y a beaucoup de militaires, et, par définition, les militaires, dans
l'exercice de leurs fonctions, ils sont au Québec pour un temps qui est
relativement court, donc de deux à
trois ans, donc ils font partie de notre communauté, ils participent à nos
activités, ils utilisent nos
institutions pour le temps qu'ils sont ici, ensuite ils s'en vont et ils sont
renouvelés par l'ajout de nouveaux militaires.
Donc,
il y a ces deux composantes-là : l'aspect militaire et l'aspect qu'on fait
des efforts quand même assez impressionnants
dans l'intégration des nouveaux arrivants. Et, à ce niveau-là, dans nos
chiffres, là, je ne veux pas noyer les
gens avec des statistiques, mais c'est sensiblement 60 % à 70 % qui
sont des migrants canadiens alors qu'on en a entre 30 % et
40 %, année après année, qui sont des immigrants.
M.
Tanguay : Et, en
ce sens-là, je pense que votre appel est tout à fait pertinent. Et, comme vous
l'avez souligné un peu plus tôt dans votre
présentation, le projet de loi n° 14 lance un message qu'il
y a une menace, menace, menace anglophone,
bilinguisation. Vous, j'aimerais savoir… de un, évidemment, que vous étayiez en
quoi vous n'êtes pas une menace. Mais,
de deux, peut-être de façon plus étayée, que faites-vous de façon tangible
justement pour faire en sorte que les nouveaux arrivants, qui,
d'aventure, il se pourrait, ne parlent que l'anglais… que faites-vous et quels
sont vos résultats, donc, qu'est-ce que vous mettez en place?
• (12 heures) •
Mme
Walling (Helen) :
Je veux juste commencer à aborder la question. Premièrement, on sent vraiment qu'on n'est pas une menace. Moi, personnellement, j'ai
grandi ici à Québec, j'ai grandi a Loretteville, je suis allée à l'école anglaise. Mes parents étaient... ma mère était
française, une Verrette de Loretteville, avec mon père qui était
anglophone. On a grandi dans ce milieu-là.
On ne se sent vraiment pas une menace à personne puis on est vraiment ici,
comme on a dit au début, pour essayer d'aider la communauté à bien
travailler ensemble.
Ça
fait que qu'est-ce qu'on fait avec les nouveaux arrivants? C'est clair que,
quand ces gens arrivent là, ils sont en mode de transition, ils sont un petit peu
perdus, ils ne sont pas encore très, très bien ici. On les aide, surtout avec
le langage, on les aide avec des services.
Mais, comme qu'on a dit au début, c'est clair, la première chose qu'on leur
dit, c'est : Apprenez le français; si
vous ne parlez pas le français, vous n'allez pas être bien. Mais d'apprendre le
français, ça ne se fait pas rapidement. Ça
fait qu'on est là, on offre des services, on aide… un support. Mais la plupart
de ces gens-là, ils demeurent bénévoles, mais ils sont très, très bien
dans la communauté d'expression française aussi, ça fait que, c'est juste...
C'est surtout le moment de l'arrivée. On parle de
peut-être un an, un an et demi, deux ans, peut-être. Ensuite, ils volent de leurs
propres ailes et ils décident eux-mêmes de joindre soit la communauté
d'expression française soit nous ou faire les deux. Je pense que le
message qu'on veut passer, c'est que ce n'est pas juste anglais ou français,
c'est vraiment... on est capables de marier
les deux puis d'avoir une vie extraordinaire ensemble. Puis je pense que même
moi, je suis preuve d'être capable d'être anglophone et je suis québécoise, je
suis Helen Walling, qui est Québécoise, mais je suis anglophone aussi.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Merci,
Mme Walling.
M. Jolin Gignac
(Jean-Sébastien) : J'aimerais
rajouter un point là-dessus.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : M. Gignac,
allez-y.
M.
Jolin Gignac (Jean-Sébastien) : On mentionnait... Pour nous, là, c'est autant une
question de principe qu'une question de survie de nos institutions. Si on ne
disait pas aux nouveaux arrivants d'apprendre le français, ils ne
resteraient pas ici, et ça serait contreproductif pour nous comme pour la
majorité francophone. Encore là, on croit fermement à l'importance du français. Pour nous, c'est essentiel. On estime être un
outil, qui n'est probablement pas très utilisé à l'heure actuelle par le gouvernement du Québec, mais un outil
néanmoins qui pourrait aider le gouvernement dans certains de ses
objectifs. Je pense ici à toute la volonté ou... le programme de
régionalisation, comment attirer des anglophones ou des immigrants de Montréal
vers Québec, utiliser les outils que vous avez sur place, dans les autres
régions.
Ces gens-là vont pouvoir rassurer les gens. Parce que
c'est ça, l'idée. Quand une famille anglophone…
Disons, une femme va trouver un emploi, va
essayer de convaincre son conjoint de venir ici. Au départ, ils ne sont pas
rassurés parce qu'ils se
disent : Bien, on ne parle pas français. Nous, on va les aider dans cette
période transitoire là, on va les amener à s'intégrer dans les deux communautés linguistiques. Ceux qui vivent à
Québec ou qui sont déjà venus à Québec, vous savez bien qu'il n'y a pas de ghetto anglophone à
Québec. Donc, l'idée, pour nous, là, c'est de les amener à être en mesure
de communiquer avec 98 % de leurs voisins, de leurs collègues, de leurs
fournisseurs de services. C'est le rôle qu'on pense qu'on pourrait avoir pour
aider le gouvernement du Québec à atteindre ses objectifs.
M.
Tanguay : Oui.
Autre élément également. Avec le temps qui nous est imparti, je vais faire
rapidement. Le projet de loi n° 14 vient proposer des modifications à la Charte des droits et
libertés de la personne. Il y a trois
articles, les articles 56, 57 et 58. 56 vient modifier le préambule de la
Charte des droits et libertés de la personne, mais l'article suivant, le 57, vient modifier... vient ajouter un
nouvel article qui se lirait comme suit : «Toute personne…» Ce serait
le nouveau 3.1 : «Toute personne a droit de vivre et de travailler au
Québec en français dans la mesure prévue dans la Charte de la langue
française.» Fin de la citation.
On sait qu'une charte comme la Charte québécoise des
droits et libertés de la personne est quasi
constitutionnelle. En ce sens-là, littéralement, il y a une hiérarchisation,
cette loi-là passe devant d'autres lois et viendrait... si tant est qu'il y
avait une contradiction, c'est la Charte des droits et libertés de la personne
qui prévaut sur toute autre loi, toute, toute autre loi.
Que ce
soit une loi en matière d'éducation, en matière d'harmonisation des relations
de travail, elles sont assujetties.
Ici, on vient dire qu'à travers des motifs de
discrimination, l'article 10… on ne peut pas discriminer, dire : Je l'engage parce que c'est une femme ou je l'engage
parce que c'est un homme. Alors, on ne peut pas discriminer sur le sexe, la race, la langue, entre autres. Ici, on
vient dire : Bien, la langue pourrait, en quelque sorte, dans son
application, parce que le législateur ne
parle pas pour ne rien dire, être un motif de discrimination. Vous, clairement,
vous êtes contre ça. Parce qu'il est
difficile pour un législateur sérieux d'en prévoir tous les impacts, qui
pourraient, dans certains cas, être positifs
mais, dans d'autres cas, qui pourraient être négatifs. Il faut faire attention
quand on dit que c'est délicat. J'aimerais par contre vous souligner que la CAQ, le deuxième groupe d'opposition,
est en faveur de cette modification à la Charte des droits et libertés.
J'aimerais vous entendre là-dessus, vous. Qu'en pensez-vous, de cette
modification proposée?
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : M. Gignac.
M. Jolin Gignac
(Jean-Sébastien) : Oui. Bien, c'est
certain que nous, écoutez, que ce soit cet élément-là ou l'ensemble des autres mesures qui semblent lancer
le message que, pour améliorer le français, on doit absolument brimer ou
réduire les droits qui sont offerts à la
minorité linguistique, on est contre ça, c'est certain. Pour nous, la
démocratie, ce n'est pas la dictature de la majorité, c'est de prendre
sciemment et consciemment la mesure des intérêts de la majorité francophone tout comme de la minorité anglophone.
Mais je pense qu'on doit s'émanciper de la théorie selon laquelle, pour
protéger le français, il faut absolument brimer les gens qui utilisent la
langue anglaise.
Donc,
c'est certain que, pour nous, des modifications comme ça, qui amèneraient à la
primauté de cet aspect-là précis que vous avez exposé sur d'autres droits
fondamentaux, on a une certaine crainte par rapport à ça, c'est certain
parce que c'est difficile, à l'heure
actuelle, d'en mesurer les impacts réels et à long terme, comme vous l'avez
mentionné. Donc, c'est certain que, pour nous, c'est une préoccupation.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Merci. M. le
député de Jacques-Cartier.
M.
Kelley : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. À mon tour, bienvenue aux représentants de VEQ,
comme on dit plus
souvent, parce que, dans le réseau des groupes anglophones VEQ a une longue
histoire qui est de toujours être un point de chute pour les intérêts de
la communauté d'expression anglaise ici, à Québec. Je ne peux pas passer sous silence — je vais faire ma publicité — VEQ vient de publier un magnifique livre. Et c'est un
beau projet intergénérationnel parce que les étudiants des écoles secondaires ont
fait les entrevues avec des personnes âgées pour certaines réalités
vécues dans les régions de Québec et
Chaudière-Appalaches. Alors, je pense que c'est un très beau projet. Pour tous
les collègues qui cherchent de la
lecture pour la pause pascale, je fais la proposition: Mémoirs of the
English-Speaking Community : Bridging Generations in Québec
Cityand the Chaudière-Appalaches Region. Bravo. Mais je pense que
c'est typique du genre de travail et
l'approche toujours très modérée que le VEQ a prise dans ses propos, dans sa
façon de représenter la communauté d'expression anglaise ici, dans la
région de Québec.
Mais
j'écoute et j'ai beaucoup de sensibilité autour de la fragilité de la
communauté d'expression anglaise, donc
l'importance des institutions qui existent ici. Vous avez commenté sur la
question de la commission scolaire Central Québec,
et, je pense que qu'est-ce qui est proposé est une menace directe, quand une
commission scolaire risque de perdre 17 %
de ses effectifs, au niveau de la vitalité, au niveau de la masse critique, de
continuer le travail. M. Thomson, je le sais parce que, dans votre vie professionnelle, vous êtes le directeur de
l'école secondaire Québec High ici, à Québec. Alors, c'est quelqu'un qui connaît très bien le réseau
scolaire. Alors, c'est une menace directe à la vitalité d'une commission
scolaire qui rend un service important à la communauté anglophone.
Et
également il y a le St. Lawrence College de Champlain et il y a là les
changements qui sont proposés ici. Et Champlain, encore une fois, c'est une institution
très importante pour la communauté. Il y a beaucoup de non-anglophones
qui sont étudiants à collège Champlain, St. Lawrence avant de continuer à
Laval. Quand j'ai parlé au directeur Jean Roberge, je pense que c'est comme
80 % ou 70 % des finissants du collège Champlain qui vont étudier à
Laval, l'Université Laval après. Alors, il
n'y a pas de perte, il n'y a pas de menace. C'est vraiment juste dans le
parcours des personnes dans la
région. Mais, pour la communauté anglophone, c'est quand même des emplois
importants au collège Champlain, et ça fait partie de ces institutions
importantes pour la communauté, qui est très vulnérable, les chiffres le démontrent. Ce n'est pas une grande communauté en
croissance, malgré vos efforts personnels, M. Thomson. Parce que c'est quelqu'un qui vient de l'extérieur du
Québec, qui a maîtrisé le français. Alors, je pense que c'est la preuve du
travail que vous faites et votre engagement personnel.
Alors,
je veux juste vous entendre davantage sur la menace pour nos institutions,
parce que, je pense qu'elles sont vitales,
elles sont essentielles pour la communauté d'expression anglaise ici. Et les
chiffres qui sont en question sont très mineurs dans le grand univers du nombre
d'étudiants au Québec.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : M. Thomson.
M. Thomson
(Warren) : Bonjour. C'est évident,
quand on sort les chiffres, on voit le nombre d'élèves qui fréquentent nos
écoles, le nombre d'élèves militaires, on a parlé des statistiques, des 700
élèves, des 800 élèves, des 17 %, moi,
je travaille avec ces jeunes-là, ce n'est pas nécessairement des statistiques
pour moi, c'est des familles. J'ai eu deux
familles, cette semaine, qui sont venues me voir lundi, un, le père est posté à
Ottawa et l'autre, c'est Halifax. J'ai dit :
Ces jeunes-là, là, ils vont se faire déraciner et ils vont aller vivre dans un
autre milieu. Est-ce qu'ils sont capables de poursuivre leurs études en français et en anglais, dans un milieu
anglophone, peu importe? C'est qu'ils sont déracinés de chez eux. Alors, ils ont un sentiment
d'appartenance dans nos milieux. On prend soin de ces jeunes-là et de ces
familles-là. C'est déjà un stress pour ces jeunes-là
d'avoir des parents qui peuvent déménager en tout temps, qui peuvent aller en exercice, qui peuvent aller même outre-mer et
mettre leur vie en danger. On comprend ce milieu-là. Quand on trouve,
dans nos écoles, la majorité des élèves qui sont des familles militaires, nos
parents, nos enseignants, nos secrétaires, ils comprennent très bien ces
jeunes-là.
Alors,
oui, si on retire les enfants militaires francophones de nos écoles, ça va
avoir un effet sur nos écoles. C'est sûr qu'il
y a des écoles qui vont fermer. Mais, plus important que ça, c'est 700 jeunes,
on est entrain de marginaliser, mettre à
risque la réussite de 700 jeunes pour une question, disons, d'équité. Mais
équité envers qui? Je n'ai aucune idée, là, parce que ce n'est pas équitable pour ces jeunes-là, je peux vous dire
ça, là. Eux autres subissent déjà quelque chose qui n'est pas équitable avec le reste des jeunes de
leur âge, et tout ça, alors on peut-u leur laisser au moins la chance de
bien réussir, d'avoir un sentiment de
sécurité dans nos écoles et d'être bien compris? Alors, c'est évident qu'on ne
veut pas qu'on touche à nos jeunes. Alors, on parle des familles des
militaires, mais, dans le fond, c'est les jeunes qui vont payer le prix. Alors,
oui, c'est sûr qu'on ne veut pas que cette partie de la loi passe. Merci.
• (12 h 10) •
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Merci, M.
Thomson. Peut-être le mot de la fin, M. Gignac?
M.
Jolin Gignac (Jean-Sébastien) : Oui. Bien, écoutez, je continuerais sur la notion de
l'équité parce que c'est quelque chose qui a été mentionné par la Mme la
ministre la semaine dernière, lors de la présentation de la commission scolaire Central Québec. Si on tient à en faire
une question d'équité — parce qu'on
s'entend sur le fait que ces 700 jeunes là ne menacent pas la survivance du fait français au
Québec — si on veut être équitables, soyons-le
envers les militaires francophones pour qu'ils aient le même type d'encadrement que les
militaires anglophones ont dans les autres provinces.
C'est plus qu'une école, madame, c'est un milieu de vie
où les gens comprennent la réalité et sont outillés pour les aider à faire
face à l'anxiété de départ, au stress. À chaque fois qu'il y a une nouvelle
chez nous, on écoute les nouvelles puis
on voit : Un militaire a été tué, pour nous, après cinq minutes, on n'y
pense plus réellement, pour eux, toute l'école est affectée pendant une
semaine. Si on veut être équitables envers les militaires francophones du
Québec, les fils et les filles du Québec, offrons-leur le même support qu'ils
ont dans les autres provinces, et, pour ça, ça passe par le maintien de ces
écoles-là et le maintien de l'exemption.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci beaucoup. Nous allons maintenant du côté du
deuxième groupe d'opposition. Mme la députée
de Montarville, vous avez la parole.
Mme
Roy (Montarville) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. D'abord, veuillez excuser mon
retard. Je m'en excuse. Pour combien de temps?
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Trois minutes, mais disons que, comme le temps n'a pas
été pris complètement dans les différents
partis politiques, je peux peut-être vous donner une minute ou deux de plus.
Mme Roy
(Montarville) : Merci, parfait.
Madame, messieurs, merci, merci pour votre mémoire. Excusez également mon
retard à l'entrée.
Écoutez,
pour nous, il est important de défendre la langue française, mais également de
protéger les droits de la minorité anglophone. C'est très important. On est
à l'étude, on regarde, on écoute, on écoute, on prend des notes, on vous
entend, et il y aura des études plus
exhaustives avec de grands juristes, mais les droits de la minorité anglophone
doivent être protégés. Comment trouverons-nous l'équilibre? C'est la question
qu'on va se poser.
Vous
parliez des enfants de militaires, des militaires francophones, finalement.
Tout comme vous, nous voulons protéger ce
droit qu'ils ont, qui leur a été accordé en 1977 par nul autre que M. René
Lévesque. Également, vous parlez du statut des municipalités bilingues. Il n'y
en a pas ici, à Québec, mais c'est une préoccupation pour nous également. On
veut que les municipalités... que ce ne soit pas le ministre, sur un nombre,
qui décide, mais que les municipalités décident elles-mêmes ce qu'elles veulent
faire avec leur statut bilingue.
Maintenant,
dans votre mémoire, ce qui est intéressant, c'est aussi quand vous parlez de
toute la démographie. Et j'aimerais vous entendre... Peut-être l'avez-vous
dit d'entrée de jeu, malheureusement j'étais absente, mais j'aimerais
que vous m'expliquiez parce que je suis intriguée lorsque vous nous parlez de
votre démographie et que vous dites que la communauté anglophone de la grande
région de Québec — parce qu'on est à Québec
ici, et vous parlez des gens de Québec — souffre
d'un taux de chômage et d'un pourcentage d'individus vivant sous le seuil de la
pauvreté maintenant plus élevé que ceux de la majorité francophone. Ça, ça frappe
l'imaginaire. On a tendance à penser que les anglophones sont riches,
font de l'argent, ont des business, tout va bien. Pouvez-vous élaborer
là-dessus, je vous prie?
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : M. Gignac.
M.
Jolin Gignac (Jean-Sébastien) : Certainement. Effectivement, ces chiffres-là sont basés
sur des études très récentes qui ont été produites et qui ont analysé les communautés
anglophones partout à travers le Québec. Effectivement, il y a beaucoup
de gens qui ont la perception selon laquelle la communauté anglophone est plus
riche, plus fortunée, plus éduquée que leurs
confrères et consoeurs francophones. C'est loin d'être le cas dans notre
région. Et une partie de ça, c'est parce que, quand les gens arrivent
ici, c'est difficile pour eux de trouver un emploi ou de trouver un équivalent de ce qu'ils avaient ailleurs. Donc, c'est pour ça
que, pour nous, c'est fondamental de les aider à se franciser le plus
tôt possible afin d'accroître leurs
possibilités d'employabilité. Ça, c'est un des facteurs qui fait qu'on a
beaucoup de familles qui ont un revenu moyen
familial beaucoup en deçà de la moyenne francophone pour notre région. Et nous,
les trois, on pourrait en témoigner, les trois, on fait du bénévolat à chaque
année pour la campagne des paniers de Noël pour la communauté anglophone, puis
les besoins sont systématiquement grandissants.
Donc, encore là, le
message qu'on doit envoyer comme communauté, et on espère que le gouvernement
sera d'accord là-dessus, c'est que ces gens-là sont les bienvenus et qu'on va
les aider là-dedans. Par contre, comme on l'a mentionné,
certaines des mesures qui sont incluses dans le projet de loi n° 14 semblent contreproductives à
notre égard dans l'atteinte de cet objectif-là. C'est des gens qu'on doit outiller, ils
ont le désir de parler français. Vous savez, les gens, quand ils arrivent ici, les immigrants ou immigrants
anglophones, la plupart, là, et je parle de la très, très grande majorité,
ils le savent bien que Québec est un milieu
très, très francophone, ils savent qu'ils n'arrivent pas à Montréal. Mais il
faut les aider, il faut leur donner
cette période de transition là où on ne les traitera pas comme des parias
simplement parce qu'ils n'ont pas encore la maîtrise de la langue
française pendant leur première année à Québec.
Mme
Walling (Helen) :
Je pense qu'il y a aussi un mythe à briser. Voilà des années peut-être que les anglophones étaient vus... ils demeuraient tous à Sillery
puis ils avaient beaucoup d'argent. Comme qu'on dit maintenant, les anglophones ne sont plus... Il n'y a pas de ghetto
ici pour les anglophones de Québec, puis les anglophones demeurent partout, autant à Loretteville, Charlesbourg,
Québec, Sillery. Ça fait qu'il y a vraiment... Cette mentalité, ce mythe
que les anglophones sont riches, il faut
vraiment, là, qu'on change cette idée-là. Parce que, comme qu'on dit, on fait
des paniers de Noël pour ces familles-là, puis on est vraiment... on vit
une difficulté.
Mme Roy
(Montarville) : Et la problématique
est vraiment au niveau de leur intégration parce qu'il y a une problématique de
francisation.
M. Jolin Gignac
(Jean-Sébastien) : Bien, en fait,
c'est sûr qu'au niveau de la francisation c'est un peu plus complexe pour un migrant canadien d'avoir accès à
certains services que ça peut l'être pour un immigrant. Bon, ce n'est
pas le but de la commission à l'heure actuelle. Mais nous, notre travail, c'est
justement de les aider. Et c'est pour ça que tantôt
on le mentionnait, pour les écoles de langues, c'est des avenues excellentes
comme premier emploi parce que ça leur
permet de gagner leur vie tout en améliorant le français ou en passant par un
processus de francisation en bonne et due forme. Donc, il faut
absolument outiller ces gens-là, il faut qu'on travaille ensemble, communautés
francophone et anglophone, pour l'atteinte
de cet objectif-là. Parce qu'effectivement il y a toute la problématique, qui
n'est pas unique à cette communauté-là, qui touche aussi les immigrants,
mais la reconnaissance des diplômes, le transfert des acquis. Et la langue
aussi, bien sûr, à court terme, est problématique.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci beaucoup. Merci, Mme Walling, MM. Thomson et Gignac. Et je vais
demander à l'association des parents anglophones de prendre place. Nous allons
suspendre les travaux pendant quelques instants.
(Suspension de la séance à 12 h
18)
(Reprise à 12 h 19)
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Nous reprenons nos travaux. Nous avons maintenant l'Association des
comités de parents anglophones. Je vous demanderais, messieurs, de vous
présenter. Est-ce que ce sera M. Chouinard qui sera le porte-parole? Donc, M. Chouinard, je vous demande de vous
présenter et de présenter également la personne qui vous accompagne. Vous aurez un temps de 10 minutes
pour faire votre exposé. Par la suite, suivra un échange avec les
membres de la commission. Donc, M. Chouinard, vous avez la parole.
Association des comités de parents anglophones (ACPA)
M. Chouinard
(Pierre) : O.K. Bonjour, Mme la
Présidente, mesdames et messieurs. Mon nom est Pierre Chouinard, je suis le président de l'Association des comités de parents
anglophones du Québec, EPCA en anglais, English Parents' Committee Association, qui est l'équivaut de la Fédération des
comités de parents au Québec. À mon côté, j'ai M. Eric Dunn, qui est
directeur représentant une de nos neuf commissions scolaires anglophones.
Merci de nous avoir
invités pour participer à cette discussion importante sur l'éducation de nos
jeunes, une éducation pour aujourd'hui et demain, et non d'hier. Nous
représentons les neuf comités de parents anglophones au niveau des parents. Nous sommes ici pour défendre l'avenir de la plus
importante ressource naturelle au Québec, nos jeunes. Ils ont droit à
une éducation complète pour être capables de fonctionner dans un monde qui est
universel aujourd'hui. On n'est plus juste dans notre petit patelin. M. Dunn.
• (12 h 20) •
M.
Dunn (Eric) :
Bonjour, mesdames et messieurs, Mme la Présidente. Merci de nous avoir
accueillis. Je me présente ici en tant que Québécois immigrant anglophone — et, dans ce cas, j'espère que mon français est à la hauteur aujourd'hui — représentant du ACPA
et, plus important, comme parent et bénévole.
J'aimerais commencer avec l'extrait du
préambule de la Charte de la langue française, un extrait qui a été ajouté en 1984, après
les pressions exercées par M. Gérald Godin, du Parti québécois, qui se
lit : «L'Assemblée nationale entend poursuivre
cet objectif dans un esprit de justice et d'ouverture, dans le respect des
institutions de la communauté québécoise
d'expression anglaise et celui des minorités ethniques, dont elle reconnaît
l'apport précieux au développement du
Québec.» On trouve que tout se résume avec cet esprit de justice, ouverture et
respect. Ça a été aussi bien exprimé par M. Albert Camus : «La
démocratie, ce n'est pas la dictature de la majorité, c'est le respect des
minorités.»
On parle souvent de la situation
présente. Si on regarde les sources que j'ai utilisées, que 50 % de la population se déclare unilingue francophone, mais
94 % professe une connaissance de la langue française, il n'y a que
4,5 % de la population qui est
unilingue anglophone. Actuellement, dans nos écoles puis nos commissions
scolaires anglophones, depuis
l'adoption de la Charte de la langue française, en 1977, on a vu les
inscriptions baisser d'autour de 250 000 à autour d'à peu près une
centaine de milliers, qui est une baisse autour du 60 %.
Malgré
les compressions budgétaires continuelles aux écoles et aux commissions
scolaires et la baisse des inscriptions aux
écoles anglophones, les administrations ont démontré une excellence en leur
gestion de nos institutions. Aussi,
on a un niveau de diplomation et réussite qui est parmi les meilleurs au
Québec, et dans toutes les matières. Nos enfants sont enseignés au
minimum deux langues, le français et l'anglais, des fois, trois et,
d'expérience personnelle, même quatre, et ceci, au niveau primaire, en école
publique.
En tant que parents, on exige toujours des
améliorations continues dans l'éducation de nos enfants. Mais, avec le projet de loi
proposé, on s'inquiète sur la bureaucratie supplémentaire et les exigences
accrues destinées aux commissions scolaires anglophones et leurs
étudiants. On s'oppose surtout aux mesures négatives, coercitives ou punitives,
au centre de bien des changements proposés.
Pendant que des milliers d'étudiants
choisissent des écoles françaises au lieu des écoles anglaises, par exemple, on attaque
quelques centaines d'étudiants de familles militaires ou d'immigrants
temporaires. Pour les immigrants, si on a le succès de les bien
instruire, de les convaincre à rester ici, au Québec, puis devenir partie de la
société québécoise, ils ne se sont pas
applaudis, ils se sont punis, les enfants sont déracinés d'une communauté puis
une école qui les a accueillis et sont mis dans une autre école, une école
francophone, où ils ne sont pas habitués. Cela, ce n'est pas ce qui est le meilleur pour les enfants. Pour les militaires,
c'est pareil, on doit aussi se concentrer sur ce qui est le meilleur pour
les enfants. Nous pouvons être déplacés à
n'importe quel moment. Ils ont besoin des connaissances et des supports que
les écoles anglophones puissent leur donner et qui ont été démontrés.
Les
points spécifiques concernant le projet de loi sont bien indiqués dans notre
mémoire qui a été déposé à la commission,
alors je ne veux pas passer mon temps là-dessus. J'aimerais par contre terminer
avec le fait que lescommunautés de
langue française et anglaise bénéficieraient d'un accroissement des échanges et
le partage des meilleures pratiques pour la promotion de la réussite de
tous les enfants du Québec. Au lieu de plus de restrictions sur l'accès à l'éducation dans les écoles de langue anglaise, en
veillant à la durabilité de ces écoles, on devrait assurer la poursuite
de l'excellence dans l'enseignement et l'administration montrée par les écoles
et les commissions scolaires. L'action de produire
des lois négatives contre la langue anglaise démontre une méconnaissance du
succès que les commissions scolaires anglaises
anglophones ont eu à éduquer les élèves à devenir des membres de la société qui
sont pleinement fonctionnels et bilingues dans tous les aspects. Alors,
merci beaucoup. Pierre.
M. Chouinard (Pierre) : En conclusion, aussi, j'aimerais vous
dire qu'au niveau du côté militaire, je suis un
enfant qui a vécu... a été élevé par un militaire. J'ai quitté ma ville natale
du Québec pour me rendre en Allemagne, où j'ai appris à parler en français par les Belges parce qu'il n'y avait pas
d'école sur les bases qui était du Québec. J'ai quitté l'Europe pour m'en aller à CFB Borden, où est-ce
que «oui» et «non» n'étaient pas dans mon vocabulaire, et j'ai appris
l'anglais avec l'aide… et non dénigré mais intégré et en respectant qui
j'étais.
Comme enfant, on est appelé à partir à
n'importe quel temps, n'importe où. Malheureusement pour moi, tous mes déménagements ont
eu lieu dans l'année scolaire, pendant l'année scolaire, dont deux dans le
temps des fêtes. Mon père est un
vétéran de la Corée, et ça me fait très mal au coeur de voir le manque de
respect qu'on a envers nos militaires, j'aurais pu perdre mon père en
Corée. On perd des membres des Forces armées. Je crois qu'ils méritent un
respect énorme de toute notre part, indépendant de notre philosophie politique.
En
terminant, nos parents demandent, et encore récemment dans ma propre
commission scolaire, les parents demandent
que, quand les enfants sortent de nos écoles anglophones, ils soient
fonctionnels, complets, écrivent, lisent et parlent le français et pas avec un accent d'un anglophone qu'on n'est
pas capable de comprendre du tout. Ils veulent, ils exigent de nos commissions scolaires qu'ils
peuvent vivre et bien fonctionner parmi les Québécois, leurs amis
québécois, dans les industries québécoises, dans les bureaux québécois.
Il ne faut pas avoir la tête dans le sable, l'anglais fait
partie de l'univers dans lequel on vit. On veut être pilote d'avion, il faut
parler en anglais. Les Chinois, les Japonais, tout le monde reconnaît que la
loi d'affaires est anglaise. Il y a une
raison pour ça. Et je pense que, si on se protège parmi les 400 quelques
millions d'anglophones alentour de nous en Amérique du Nord, c'est plus facile à protéger notre langue que se
cacher et penser que 6 millions peuvent le défendre.
Moi, je suis une personne ouverte
d'esprit sur ce point-là. Je parle, je traverse le Canada continuellement et je peux vous dire que personnellement je ne me sens jamais
attaqué ou mal placé quand je parle français quand nous sommes deux ou trois Québécois ensemble. On n'a jamais eu
de mauvaise aventure. Je pense qu'il faut avoir un esprit ouvert. Une
société, c'est important d'être d'esprit ouvert dans ce grand monde qui s'en
vient petit.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci, monsieur. Nous allons commencer les échanges. Je vais maintenant du côté du gouvernement. Mme la
ministre responsable de la Charte de la langue française, vous avez la
parole.
Mme De
Courcy : Alors, bonjour, messieurs.
Merci d'avoir participé à cette commission parlementaire. Simplement, d'abord et en premier lieu, vous dire
que j'ai toujours, je dirais, un préjugé très favorable à l'égard des
parents qui s'engagent dans la structure de participation
des parents des écoles, des commissions scolaires et des associations comme la
vôtre parce que souvent, leurs points de vue ont une influence très grande sur
les décisions qui sont prises dans les écoles ou dans les commissions
scolaires.
• (12 h 30) •
Deuxièmement,
je sais et je vous le mentionne, je sais que les résultats scolaires de
l'ensemble des commissions scolaires
anglophones au Québec sont excellents, sont excellents. J'ai d'ailleurs eu le
plaisir de pouvoir aller vérifier, dans mon
ancienne vie, comment ça fonctionnait et qu'est-ce qu'on pouvait importer dans
le système francophone pour nous
aider à mieux performer. Alors donc, mes félicitations pour l'engagement
citoyen que vous démontrez en venant ici à cette commission
parlementaire et dans votre action comme parents membres de cette association.
Ceci
étant dit, vous comprendrez aisément que je ne partage pas vos inquiétudes… En
fait, je partage vos inquiétudes mais je ne
partage pas les remèdes que vous mettez de l'avant, les propositions que vous
faites. Mais, par ailleurs, vos inquiétudes
me préoccupent, à savoir que vous voulez préserver la vitalité, vous voulez
préserver ce que vous faites et les
conditions d'apprentissage des élèves. Alors, je vous dis que je lirai et
relirai attentivement ce que vous mettez de l'avant pour tenter d'en
tenir compte, mais clairement nous avons de la difficulté à nous rejoindre, là,
dans les propositions ou les commentaires que vous faites.
Quant à la question
des militaires, je n'aborderai pas en détail la question des militaires, elle a
été largement médiatisée. Je vais demander
par ailleurs à un des... à la commission de remettre un document que j'ai
déposé, qui vous donne des
questions-réponses qui sont, de mon avis, un autre point de vue, un autre point
de vue. Et je profite de l'occasion puisque
vous avez parlé plus personnellement de la situation de votre père et d'un fils
de militaire, bien, très clairement vous comprendrez que j'ai beaucoup de respect pour le travail valeureux des
militaires au Canada et partout dans le monde. Ceux et celles qui défendent leur patrie méritent tout
notre respect. Malheureusement, la question n'est pas là. La question
n'est pas une question, pour ma part, de
respect, mais nous pouvons ne pas partager ce point de vue. Alors, je vous
remercie. Mes collègues auront des questions à vous poser.
M. Chouinard
(Pierre) : ...
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Oui, M.
Chouinard.
M.
Chouinard (Pierre) : ...vous permettriez, Mme la ministre. Nous avons vécu des cas
dernièrement, et il s'agit d'enfants, ce n'est
pas une question de parents. Et j'ai vu, dans ma propre école où est-ce que je
suis assis sur mon conseil d'établissement,
un jeune élève — mon école à moi où est-ce que je
représente comme parent pour initialement être
où est-ce que je suis présentement — cette enfant a commencé son école avec la maternelle — notre école va de
maternelle à secondaire V — elle était rendue en train de
faire son secondaire II, son père a pris sa retraite, et on lui a donné
quelques jours pour trouver une école francophone. On n'a pas regardé l'élève,
on n'a pas regardé la personne qui était
impliquée dans ça, on a froidement décidé, une jeune personne, de la revirer de
bord et dire : Tu n'as plus d'affaires dans une école anglophone.
Et je n'utiliserai pas, madame...
C'est mon école, je suis très au courant comme «Governing
Board Chair» de qu'est-ce qui s'est passé.
Même, je peux vous dire que, dernièrement, on a encore un cas où est-ce qu'on a
l'attitude : Grand-papa est mort… On fait des jokes avec ça. Mais on a deux des trois enfants de la même famille dans
l'école et le troisième ne peut pas aller à l'école avec ses frère et soeur. Donc, moi, ici, on peut
s'obstiner comme adultes, on peut avoir des différends, moi qu'est-ce
qui est important, c'est qui est pris dans le milieu et n'a pas de voix.
Mme
De Courcy : Je
vais intervenir, monsieur, sur ce que vous venez de dire parce que probablement
que vous l'ignorez. Mais j'ai passé plus de 20
ans dans le milieu scolaire francophone québécois, en toute harmonie d'ailleurs
avec le milieu scolaire anglophone. Je suis extrêmement sensible aux injustices
qu'on puisse faire à des enfants. Et la situation que vous décrivez, si elle
est telle que vous la décrivez, n'est absolument pas acceptable, évidemment. On
n'est pas dans des contextes où il faille aller dans des extrémités de ce type.
Et je vous invite... Je ne remets pas votre parole en
cause mais, si vous avez des cas comme ceux-là, je vous invite, à la fin de cette commission, à transmettre à mon
adjoint Maxime, qui est ici, les cas que vous avez, et nous allons transmettre avec grand plaisir à la ministre de
l'Éducation une telle situation parce que c'est totalement inacceptable
qu'on ne tienne pas compte de façon humaine, humaniste, de conditions comme
celles-là.
Par
ailleurs, je vous avoue que je suis très surprise que, dans une commission
scolaire, on ait pu tolérer un tel comportement
et qu'on n'ait pas fait appel à des autorités supérieures. On ne fera pas le
débat ensemble, on va le vérifier, puis je m'engage auprès de la
commission à revenir avec les renseignements parce que, quand on déclare ce
type d'événement là en commission…
Ceci rejoint par
ailleurs des propos que notre collègue le député de Jacques-Cartier a tenus
lors de séances précédentes, où, en effet, les questions de réglementation
doivent être souples. Et il y avait un célèbre auteur, qui était Félix Leclerc,
qui disait qu'une loi ou un règlement, c'est comme un soulier, hein, il faut
qu'il soit confortable. Alors donc... Je ne le dis pas exactement comme il le
disait. Alors, je vous invite donc très fortement à donner ces détails-là. Je
vous le répète, là, pour ma part, ce n'est pas du tout l'esprit de ce projet de
loi, ni même notre intention gouvernementale. Merci.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Merci, Mme la
ministre. Je reconnais maintenant le député de Saint-Hyacinthe.
M. Pelletier (Saint-Hyacinthe) : Merci, Mme la Présidente. Bonjour,
messieurs. Je vais vous emmener sur la question des militaires, ça m'interroge aussi
parce qu'on semble vouloir faire une différence entre les jeunes
militaires québécois francophones et les jeunes militaires canadiens
anglophones. On semble vouloir faire une différence. On semble dire que le jeune militaire anglophone qui arrive au Québec
s'inscrit dans une école anglaise, mais le jeune militaire francophone, lui, qui s'en va dans des bases
militaires à l'extérieur du Québec, il faut absolument qu'il soit dans des
écoles anglaises. S'il ne connaît pas
l'anglais, il est dénaturé, il est déstabilisé, alors qu'on prêche l'inverse.
Puis les mémoires qui sont présentés ici disent à peu près la même
chose. C'est comme si on fait deux niveaux de jeunes. Il y a des jeunes qu'il faut qu'ils soient bilingues, puis il
y a des jeunes qui n'ont pas nécessairement le besoin d'être bilingues
quand ils arrivent ailleurs. Et ça, ça me chicote un peu, de la façon qu'on
défend cette approche-là.
Et
vous avez mentionné des statistiques en début. J'ai mal compris la proportion,
j'aimerais ça que vous me la répétiez. Vous avez parlé, je pense, de francophones,
là, 50 % ou 60 %, et des anglophones, 94 %. Mais je veux
juste, comme vous me dites, le libellé que vous avez utilisé parce que je n'ai
pas compris tout à fait.
M.
Chouinard (Pierre) : Pour qu'est-ce qui est de la réalité de la vie militaire, c'est certain
que, si on est à des endroits comme pas loin de Winnipeg ou on est à Portage La Prairie, où
est-ce qu'il y a une grosse commission scolaire, si on est proche de la région de Toronto, si on regarde, CFB Borden à
Toronto, il est rendu avec une grande commission scolaire anglophone
aussi, c'est certain qu'à des endroits de même l'éducation francophone est
possible.
Dans
d'autres endroits, c'est certain que les militaires ne sont pas toujours
alentour des grands centres, ils vont à des endroits isolés. Si on prend Gander au
Newfoundland, à Terre-Neuve, si on prend Shiloh dans le milieu de
l'Alberta, si on prend Cold Lake, qui est
une base d'aviateurs dans le nord de l'Alberta, sans en nommer d'autres, c'est
certain que l'éducation francophone n'est pas aussi accessible. Ce n'est
pas parce qu'ils ne veulent pas le donner — et j'en ai parlé
avec Sandi, qui est la présidente des commissions scolaires canadiennes — ce
n'est pas une question qu'on ne veut pas
donner d'éducation, il y a une question de sous, il y a une question de nombre
d'élèves aussi.
En venant, nos amis
anglophones, ils viennent ici puis ils prennent l'occasion d'éduquer leurs
enfants, oui, en anglais, mais tous parmi
eux veulent que leurs enfants sortent bilingues, ils veulent qu'ils soient
enrichis de la deuxième langue. Dans leur cas, ce n'est pas leur langue
maternelle, donc une deuxième langue. Donc, ici, il y a un... en tout cas, comme on dit en anglais, «a win-win»
situation. On a des anglophones qui viennent ici, leurs enfants apprennent
le français, apprennent la culture
québécoise, O.K.? Et, pour la majorité, ils partent avec une belle expérience
au Québec. Mais il faut aussi permettre à nos enfants qui sont de
familles québécoises d'être capables de faire le même quand ils quittent le Québec. Et, encore je répète, la
raison de ça, c'est que ce n'est pas toujours alentour des gros centres
qu'ils sont, nos militaires. Pour les statistiques, Eric.
• (12 h 40) •
M.
Dunn (Eric) :
O.K. Pour les statistiques, c'est écrit dans un papier publié par M. Richard
Bourhis, de l'UQAM, puis Pierre Foucher, de
l'Université d'Ottawa, c'était qu'en 2006 54 % de la population du Québec
était unilingue francophone. Le 94,5 %, c'est le pourcentage de la
population qui connaît la langue française.
M. Pelletier
(Saint-Hyacinthe) : Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : M. le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Pelletier
(Saint-Hyacinthe) : Je veux juste
réagir, parce que quand on parle de connaissance puis d'unilinguisme, c'est deux choses différentes. Connaissance, ce n'est
pas bilinguisme, là. En tout cas, je trouve que la statistique est
tordue quand vous la mentionnez.
Je
vais vous amener sur un autre sujet. Parce que moi aussi, au niveau des
militaires, je pense que je ne mets pas de lien entre la langue et puis les gens qui
défendent leur patrie ou leur patrimoine, par respect. Je vais vous amener sur
la question... Vous craignez, dans votre
mémoire, que l'adoption de la politique linguistique dans les municipalités
affecte les services dans les commissions
scolaires anglophones. Pouvez-vous m'expliquer le lien que vous faites entre
les deux? Et quels sont les services que les commissions scolaires
anglophones n'auraient plus en vertu de la loi n° 14 actuelle?
M.
Chouinard (Pierre) : Ce n'est pas une question qu'on n'a plus. C'est l'accessibilité facile
à ces services-là. Présentement, sans nommer
l'endroit ou quoi que ce soit, on a besoin de l'expertise sur la prévention du
suicide. Nos jeunes, aujourd'hui, pour la
raison qu'on veut invoquer, je ne sais pas si on peut dire il y a un abandon ou
la vie est plus dure, mais on cherche de l'aide, et, pour avoir de
l'aide, on est prêts à payer pour avoir ces services-là. Les CLSC ont très peu de personnes qui, un, veulent venir dans
les milieux anglophones, et les anglophones qui sont prêts à venir, il y
en a très peu, et ceux qui sont là sont
sollicités énormément. Donc, il n'y a pas assez de personnes pour nos écoles,
pour aider.
Ce
n'est pas une question de ne pas en avoir, c'est les effectifs qui ne sont plus
là. Et c'est certain que la loi n° 14 va
certainement avoir un effet avec ça aussi. Mais c'est certain que c'est le
monde qu'on n'a pas. Et on ne rend pas facile
pour les institutions anglophones d'avoir les services de CLSC en anglais. Puis
même on leur dit : Vous pouvez envoyer quelqu'un qui est
francophone, qui est capable de parler le français et il n'y aura pas de
problème, et on se fait dire : Non, il
faut que la personne sache parler anglais, parce que vous êtes une école
anglaise. Et c'est un débat… sans dire le mot «ridicule», là, mais c'est
un drôle de débat.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci, M. Chouinard. Nous allons maintenant du côté de l'opposition officielle. M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay : Oui, merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, merci
beaucoup à vous deux, M. Chouinard, M. Dunn, d'être présents ici aujourd'hui,
merci pour votre mémoire et également, donc, la présentation que vous en faites
aujourd'hui.
J'aimerais
ouvrir une petite parenthèse par rapport à l'échange que vous avez eu avec mon
collègue de Saint-Hyacinthe et juste
apporter une précision par rapport au niveau de services équivalents offerts
pour les militaires canadiens dans les autres provinces canadiennes. On
pouvait lire, dans le document qui a été déposé le 20 mars dernier par le
gouvernement, à la question 3, donc réponse à la question 3 : «L'accès à
l'école française dans les autres provinces canadiennes
s'est nettement amélioré. Les Forces canadiennes soutiennent d'ailleurs les
familles de militaires en ce sens.» Alors,
je pense que c'est important — fin de la citation — de
souligner, je vous dirais, cette réciprocité-là qui est offerte dans les autres provinces canadiennes, du Canada.
Également, vous parlez, dans votre mémoire — et j'aimerais vous entendre là-dessus — que vous êtes contre, donc, qu'il y ait une priorité, une priorité
collective qui viendrait indûment empiéter sur des droits individuels, donc,
que la distinction basée sur la langue… Et, quand je dis «distinction», une
autre appellation légale de ça, de «distinction», peut être, dans certains cas — pas dans tous les cas, mais dans
certains cas — une discrimination basée sur la langue. En ce sens-là, j'aimerais vous entendre sur une
disposition, et vous en traitez en page 9 de votre mémoire : Le projet de loi n° 14 viendrait modifier la Charte des droits et
libertés de la personne pour faire en sorte qu'on puisse… Et c'est l'article nouveau 3.1
de la Charte des droits et libertés de la personne qui viendrait faire en sorte
que… Il se lit comme suit : «Toute personne a droit de vivre et de
travailler au Québec en français dans la mesure prévue dans la Charte de la
langue française.» Donc, il y a là, on se rappelle, une Charte des droits et
libertés de la personne qui vient faire en sorte que, collectivement, l'on doit respecter les minorités, collectivement, l'on
doit respecter. Et l'appellation juridique de cela, ce sont les minorités qui sont historiquement
défavorisées. En ce sens-là, il y a eu un bon parcours qui a été fait, entre
autres, pour l'égalité entre l'exercice des
droits des hommes et des femmes. Il y a encore du chemin à faire, et ça, j'ai
eu l'occasion de le souligner.
Mais on voit, à l'article 10 de la Charte des droits et
libertés de la personne : «Toute personne a droit à la reconnaissance et à l'exercice en pleine égalité
des droits et libertés de la personne, sans distinction, exclusion ou
préférence fondée sur — et
là on y va d'une liste — la
race, la couleur, le sexe, la grossesse, l'orientation sexuelle, l'état civil[…] — j'en passe — la
religion[…], la langue, l'origine ethnique ou nationale», et ainsi de suite.
Là, la modification qui est proposée par le projet de loi n° 14, on dit : «Toute
personne a droit de vivre et de travailler au Québec en français», on vient
prendre un des motifs de l'article 10, et on vient de le dire : Bien,
c'est un droit que pourra plaider un individu ou un groupe.
Quels
sont les impacts de ça? Je ne prétends pas, ce matin, en avoir la réponse,
quels sont les impacts réels et tangibles de cela. Par contre, comme le
législateur ne parle pour ne rien dire, il parle pour avoir des effets
tangibles, force est de constater que le fardeau est au gouvernement de nous
démontrer quels seront les impacts. Moi, je me rappelle d'avoir lu un article spécialisé en la matière. Il y avait des
universitaires en droit qui disaient : Ça n'aura aucun impact, et d'autres qui vont dire : Non, ça
va avoir un impact parce que c'est une pièce législative qui est quasi
constitutionnelle, qui viendrait donc enrayer l'effet d'autres lois en
matière d'éducation, et vice versa.
Alors,
moi, j'aimerais vous entendre là-dessus, vous, comment vous percevez ça,
comment vous recevez ça, toujours évidemment en soulignant que, pour cette
modification-là à la Charte des droits et libertés de la personne, évidemment, la Coalition avenir Québec est en
faveur, deuxième groupe d'opposition. Alors, je pense que c'est
important de vous entendre. Quel est donc, vous, votre perception des impacts
potentiels?
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
M. Dunn.
M. Dunn (Eric) : Pour adresser les choses en ordre,
bien, premièrement, pour adresser le fait du support pour les francophones en dehors du Québec comme
militaires, il faut se souvenir que, même s'ils ont accès à l'éducation en français, la grande communauté dans laquelle ils
vont appartenir pendant un temps n'est pas francophone, alors c'est
autant ça que ça aide les services que nos
écoles puissent leur donner. En termes des égalités des droits, puis le
changement, puis mettre le français
de l'avant, il y a beaucoup... bien, comme parents, je ne suis pas avocat,
mais, quand les mots utilisés changent
de qu'est-ce qui a été accepté et qu'est-ce qu'on voit ailleurs, il faut
s'inquiéter puis penser à ce serait quoi, les impacts sur nos services puis notre milieu. On peut voir que travailler
en premier en français, comme droit, ça soulève des grosses questions en
termes d'une commission scolaire anglophone où, oui, on a besoin de services en
anglais. Alors, peut-être dire que le
premier droit, c'est de travailler en français, n'est pas très bien... n'est
pas très bien pensé pour une organisation qui a besoin de fournir des
services en anglais à une communauté anglophone.
À part de ça, ça commence à passer en haut de
mes compétences et peut-être de qu'est-ce que nous autres, on traite comme
association en représentant des parents. Notre «concern» est surtout les
services des commissions scolaires, les services du ministre de l'Éducation et la bonne administration de nos
écoles pour bien livrer l'éducation de nos enfants.
M. Tanguay : Mme la Présidente, alors, on voit
tout l'aspect délicat d'un débat extrêmement important. Nous sommes tous pour l'épanouissement du français. Il y a
différents moyens utilisés. Et il faut faire attention d'avoir de l'équilibre de la mesure, que tous respectent la
loi, qu'il y a des impératifs. Mais ça prend un équilibre, que l'on voit
à travers... et on voit la réussite de l'application de l'actuelle Charte de la
langue française et les résultats.
Le français, au Québec et au Canada, sera toujours un défi,
il faut toujours demeurer vigilant. Mais, lorsque l'on parle d'ouvrir un débat sur la charte et que l'on propose des
mesures telles le projet de loi n° 14, ce n'est pas
anodin. Quand également on propose d'ouvrir
la Charte des droits et libertés, comme on vient de le démontrer, ce n'est pas
anodin. Il faut être sûr des impacts et il faut faire attention à ce que l'on
initie.
Et là on vient de parler
d'un élément important : distinction basée sur la langue. Je suis d'accord
avec vous, il ne faut pas qu'il y ait d'abus dans un sens comme dans l'autre. Mais, quand
on commence à donner des distinctions sur la langue... Moi, j'ai soulevé
régulièrement une préoccupation très nette. L'article 33 — puis j'aimerais vous entendre là-dessus — du projet de loi n° 14 vient ajouter un article
88.2.1 à la Charte de la langue française. En somme, on dit ici qu'au niveau des
cégeps, au niveau des cégeps chaque cégep anglophone devra adopter une
politique de l'établissement qui va faire en sorte de donner priorité à
un élève anglophone. Autrement dit, je reprends cet exemple-là de ma fille qui sort du secondaire V, a une moyenne académique de
85 %, elle est francophone, pour plusieurs bonne raisons veut aller
au cégep anglophone. Bien, s'inscrire en
sciences, pour elle, à un cégep anglophone — puis elle a un dossier
académique de 85 % — elle pourrait être
mise de côté au profit d'un étudiant anglophone qui aurait 65 % de dossier
académique, moins reluisant, mais qui prendrait sa place.
Alors, vous voyez, ici, on n'est pas en train
de dire qui doit prioriser... Nous, ce qu'on prône ce n'est pas qui doit prioriser des droits sur l'autre basés sur la langue,
mais ce sont des critères d'acceptation, et la langue ne devrait pas en être un au cégep. Et ça, quand on parle
d'ouvrir un débat, droits de la personne, Charte de la langue française, ça
prend de la mesure, ça prend également des
propositions réfléchies et étayées. Alors, en ce sens-là, je sais que vous en
faites un élément important de votre mémoire. Et ça, ça s'applique
partout et évidemment au premier titre aux préoccupations que vous nous
soulevez ce matin. Je ne sais pas si vous avez des commentaires là-dessus.
•
(12 h 50) •
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
M. Chouinard, oui.
M. Chouinard (Pierre) : Je vais peser mes mots parce qu'une
des affaires que je n'ai jamais comprises ici,
au Québec, c'est comment que... on a laissé
passer un droit fondamental de choisir dans quelle éducation que nos
enfants étaient pour se rendre. On n'a pas
dit un mot, on a laissé passer ça. Être égoïste, comme père d'un enfant qui
s'en va au cégep dans deux ans,
j'aurais la tendance de vous dire : Bien, moi, ça m'enlève un stress à la
maison, mon gars qui va appliquer au cégep, va avoir de la place. Mais
mon coeur, ma tête, mon coeur dit que les meilleurs élèves qui veulent choisir
ou en français, ou en anglais... Et on a des francophones, des anglophones qui
font les inverses. On a des anglophones qui se revirent de bord et qui vont au
cégep francophone pour finir certaines études, comme on a des francophones qui veulent aller au cégep anglophone
pour finir des études. Donc, ma tête dit que c'est la logique que c'est
les meilleurs élèves aient les places
nécessaires pour continuer leur éducation. Mais c'est certain que, papa,
j'aimerais avoir la place à mon gars tout de suite.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
M. le député de Jacques-Cartier.
M.
Dunn (Eric) : Est-ce que je peux…
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Oui? Oh, excusez-moi! M. Dunn.
M. Dunn (Eric) : Oui. Parler du cégep, c'est un peu...
bien, nous autres, on représente les parents jusqu'à l'école secondaire. Oui, ça nous préoccupe. Puis, dans les
années passées, on a vu qu'il y a un manque d'espace dans les cégeps anglophones mais même aussi dans les cégeps
francophones autour de l'île de Montréal. Alors, avoir de la place,
c'est quelque chose de très important. Et, comme Pierre l'a démontré, bien on
aimerait que tous nos élèves qui sont compétents
aient de la place au cégep, mais on n'aimerait pas voir ça, que ça vient d'une
limitation sur les francophones, avec lesquels nos étudiants anglophones
peuvent faire un échange, autant que les étudiants anglophones qui vont au
cégep francophone. Je pense qu'on se trouve tous, en fait… passé l'éditorial
qui a paru dans LeJournal de Montréal, LeJournal de
Québec, qui traitait cet article-là de discrimination contre les
francophones en mettant une telle limite sur l'accessibilité au cégep.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci. M. le député de Jacques-Cartier.
M.
Kelley : Merci beaucoup, Mme la
Présidente. Très rapidement, mais je veux dire à mon tour bienvenue, «welcome», M. Chouinard, M. Dunn, et juste
souligner le travail de nos parents dans nos écoles. Je pense qu'on ne
peut pas insister trop, les conseils
d'établissement, les activités, les levées de fonds, les parents jouent un rôle
très important. Et moi, je sais d'expérience, règle générale les comités
de parents, dans le réseau scolaire anglophone, ont toujours mis beaucoup de pression sur les commissions scolaires
pour assurer qu'il y ait l'enseignement de qualité en langue française dans nos écoles. Nous avons eu des exemples hier
de la commission scolaire Lester-B.-Pearson, leur comité de parents a témoigné. Alors, je ne sais pas si vous avez des
exemples, très rapidement, ou des projets, des choses que les parents
ont insisté pour améliorer la qualité de l'enseignement en français dans les
écoles anglaises.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
En quelques secondes. M. Chouinard.
M. Chouinard (Pierre) : Oui. Présentement — je vais prendre connaissance de ma propre commission scolaire dans laquelle
je représente — on est en train de faire un comité de
planification et on a commencé avec le comité de
parents de… ce mois ici, et, unanimes alentour de la salle, les parents
demandent à la commission scolaire de où est-ce que j'appartiens de s'assurer de l'éducation du français pour que non
seulement qu'on peut se parler ou que je peux lire les textes, mais que je peux fonctionner à 100 %
à l'égalité de quelqu'un qui a suivi son éducation en français. Et les
parents sont très clairs sur ça, autant
anglophones que francophones, qui sont dans notre système, ils veulent une
réussite totale des
deux langues dans notre système. Ma commission scolaire, c'est Riverside.
Riverside est l'instigateur du «French Immersion», et ça fait au-dessus
de 40 ans de ça, et nous en sommes très fiers. Mais on a gradué de ça, on
a des programmes encore plus avancés…
La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci, merci beaucoup. Nous allons
maintenant du côté du deuxième groupe
d'opposition. Mme la députée de Montarville, vous avez la parole.
Mme Roy (Montarville) : Merci beaucoup, Mme la Présidente.
Merci, messieurs, merci de vous être déplacés,
merci pour le mémoire. D'entrée de jeu, je
voudrais faire un petit commentaire, d'abord, pour dire que moi, j'ai
beaucoup aimé entendre ce que vous disiez au
sujet de cet enfant, que j'apprécie le fait que la ministre veuille en savoir
davantage, veuille être informée et
peut-être même agir s'il y a eu abus dans le cas de cet enfant, à qui on a dit,
en l'espace deux jours : Bien, ton parent militaire est décédé,
change d'école, va-t'en de ton école anglophone...
Une
voix : Retraité. Retraité.
Mme
Roy (Montarville) : Oui, oui, mais,
c'est-à-dire...
Une
voix : ...c'est retraité. Il n'est
pas mort, c'est retraité.
Mme
Roy (Montarville) : C'est retraité,
pardon. Mais, à tout événement — j'ai pris des notes, et c'est mal écrit — à tout événement, ça me satisfait de voir que la ministre veut
faire un suivi là-dessus, et nous allons faire en sorte, effectivement, d'avoir des réponses, si réponses il y a à
donner, parce que ce que nous craignons, et c'est ce que nous voulons éviter par cette commission, c'est qu'il y
ait des dérapages ou encore des cas d'abus, de manque de jugement dans l'application peut-être d'une future loi. Donc,
ça, c'est important pour nous de voir qu'il n'y en ait pas actuellement
au premier chef, mais pour le futur également.
Cela dit, il est important que vous sachiez
que nous voulons défendre la langue française, mais nous voulons aussi protéger les droits de la minorité anglophone. C'est
très important que vous le sachiez, parce qu'il y aura tout un débat qui sera fait, et une étude qui sera faite,
très détaillée, de tous les mémoires que vous nous soumettez, mais
également de tous ces articles de
modification à ce projet de loi. Il faudra voir l'impact, l'impact concret que
chacun des articles aura. Et c'est très technique, c'est très légal.
Mais moi, je voudrais vous entendre sur un
côté plus humain. Vous avez déjà commencé à le faire, et je trouvais ça très touchant
lorsque vous parliez de votre propre vie en tant qu'enfant de militaire. Et
nous, nous nous battons pour ce ces enfants de militaires puissent
conserver ce droit, ce droit qui a été réitéré à plusieurs reprises lors de
plusieurs décrets par le Parti québécois et même à l'époque où notre première
ministre était ministre de l'Éducation.
Alors, dans quelle mesure vos jeunes, des
enfants de ces parents que vous représentez, pourraient être pénalisés s'ils devaient ne plus avoir à fréquenter
l'école de leur choix, incidemment l'école anglophone pour des francophones?
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
M. Chouinard, vous avez la parole.
M. Chouinard (Pierre) : Je vais ouvrir, après ça, je vais
te... C'est certain que, si je comprends bien,
l'anglophone qui vient ici va continuer à
aller à l'école en anglais. Le militaire francophone, les jeunes vivent dans un
milieu anglophone dans la plupart du restant... bien, dans le restant du
Canada. Les bases, pour toutes fins pratiques, ont des services en français
aujourd'hui, mais c'est certain qu'on n'a pas les mêmes services en
Colombie-Britannique, et c'est naturel, on n'a pas les mêmes services en
Colombie-Britannique au niveau du bilingue qu'on a peut-être ici au Québec et
en Nouvelle-Écosse, qui est plus proche du Québec et peut-être qu'il y a plus
de francophones qui y demeurent.
Pour le jeune d'un militaire, c'est
important d'être capable de vivre dans sa communauté. Et, dans la plupart des bases, les
militaires vivent sur les bases des Forces armées, donc leur milieu est avec
les anglophones. Et c'est important pour moi qu'un jeune... puis, pour
moi, ce l'était par après, j'étais complètement bilingue quand j'ai quitté la
base de Borden, et avec ça, j'ai réussi aux
autres transferts que mon père a faits, et on est revenus au Québec à la fin de
sa carrière, français, anglais, et mes quatre enfants, on va s'assire
ici, puis on peut vous étourdir. On va échanger, aux quatre mots, d'un français
à l'anglais, d'un français à l'anglais. Vous allez dire : Arrête, là...
La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Je suis désolée, M. Chouinard,
de vous interrompre. Malheureusement, le temps
qui était alloué est dépassé. Je tiens à vous remercier, M. Chouinard,
M. Dunn. Et je vous souhaite à tous un bon appétit. à tous et à toutes.
Et la commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures
cet après-midi.
(Suspension
de la séance à 13 heures)
(Reprise
à 15 h 1)
La
Présidente (Mme Vien) : Bonjour,
Mmes, MM. les députés, madame, monsieur à la maison.
Alors, nous reprenons nos travaux aujourd'hui,
concernant, donc, ce projet de loi n° 14, c'est la Loi modifiant la
Charte de la langue française, la Charte des droits et libertés de la personne
et d'autres dispositions législatives.
Comme à notre habitude, donc, nous entendons des groupes.
C'est la période des consultations générales. Et
nous entendrons, pour débuter, cet
après-midi, l'Ordre des conseillers en ressources humaines agréés. Alors, pour
que ce soit agréable, je demande à chacun et à chacune d'éteindre leurs
téléphones portables, leurs appareils électroniques, ce serait très apprécié.
Alors,
M. Florent Francoeur et Mme Justine Delisle, bienvenue à vous deux, bienvenue
dans votre Assemblée nationale. La parole est à vous pour 10 minutes, après quoi s'ensuivront
des échanges entre vous et les parlementaires. Je vous écoute.
Ordre des conseillers en
ressources
humaines agréés (Ordre des CRHA)
M.
Francoeur (Florent) : Merci. Alors, Mme la Présidente, distingués membres de la Commission de
la culture et
de l'éducation, alors, je me présente, Florent Francoeur, le
président-directeur général de l'Ordre des conseillers en ressources
humaines agréés, et, à ma droite, Mme Justine Delisle, qui est coordonnatrice à
la recherche, à l'ordre.
Alors,
permettez-moi d'abord, Mme la Présidente, Mme la ministre, Mmes et MM. les
députés membres de la commission, de vous
remercier de nous permettre, de permettre à l'ordre de présenter sa position
relativement au projet de loi n° 14.
Nous
sommes heureux de participer aux consultations sur un thème qui touche, bien
entendu, toutes les sphères de la société
québécoise, mais de manière encore plus aiguë le monde du travail, où nous
passons, il faut quand même le rappeler,
près du tiers de notre vie. Alors, une réflexion approfondie sur la langue de
travail, 35 ans après l'adoption de la Charte
de la langue française, s'avère alors pour l'ordre est ses membres d'une
opportunité et d'une importance cruciale.
Permettez-nous d'abord
de nous présenter brièvement. Alors, l'Ordre des conseillers en ressources
humaines agréés regroupe plus de 9 000 membres présents dans les secteurs
public, parapublic et privé. Ils agissent à titre de directeurs, de conseillers ou de consultants dans les organisations de
toutes tailles au Québec. L'ordre est le seul organisme au Québec à décerner à ses professionnels de la
gestion des ressources humaines un titre qui atteste de leurs
compétences.
La langue de travail
constitue, bien évidemment, l'un des enjeux particulièrement sensible, à la
fois pour les travailleurs et pour les employeurs. D'entrée de jeu, je vous
rappelle que l'ordre a mené, au début de l'année, une consultation auprès de ses 9 000 membres sur, justement, le thème
de la langue de travail. Les principaux chiffres et constats qui apparaissent dans le mémoire et qui ont été
déposés plus tôt par l'ordre, essentiellement, concordent avec ceux qui
ont été présentés par l'Office de la langue
française, et donc, je ne les répéterai pas, sachant qu'ils vous ont déjà été
communiqués. Et, enfin et surtout, je dirais, l'ordre réaffirme avec vigueur
qu'au Québec la langue de travail et des services doit être le français.
L'un des changements
les plus importants introduits par le projet de loi concerne l'obligation pour
les petites entreprises d'obtenir un certificat de francisation, notamment à
l'article 38. Jusqu'à maintenant, la démarche était facultative. L'ordre est
tout à fait convaincu de la nécessité de mettre en place toutes les mesures qui
permettent aux travailleurs de travailler en français. Toutefois, les PME ne
disposent pas toujours des mêmes ressources humaines et financières que les grandes entreprises. De plus, leur survie et leur
croissance reposent beaucoup plus étroitement sur leur capacité à réagir
rapidement.
Nous croyons que le programme de francisation proposé
devrait donc être allégé, et éviter autant que
possible la lourdeur administrative observée
dans des démarches de plus grande envergure. En fait, le mot qui pourrait être
utilisé, ça serait «flexibilité». Il faut
rappeler que, dans les PME, la gestion des ressources humaines relève plus
souvent et dans le meilleur des cas
d'une seule personne. Climat de travail, performance, recrutement,
perfectionnement de la main-d'oeuvre, le conseiller en ressources
humaines doit résoudre toutes les situations qui se présentent et adapter
rapidement ses solutions. En dépit du fait
que le programme de francisation vient s'ajouter à une fonction déjà bien
remplie, il peut aussi favoriser l'instauration d'une culture
organisationnelle qui est partagée, d'une appartenance qui est renforcée et,
par conséquent, d'un climat de travail plus sain et plus productif.
Des
mesures de francisation bien adaptées ne peuvent que faciliter la gestion de la
diversité culturelle de plus en plus
caractéristique des entreprises québécoises et améliorer la qualification des
travailleurs qui en bénéficient, à la condition,
bien sûr, qu'elles soient réalistes, simples et applicables. Les employeurs qui
se verront obligés d'implanter des mesures
de francisation dans leur entreprise doivent non seulement pouvoir compter sur
leurs professionnels en ressources humaines, mais également et, je
dirais, surtout sur l'Office québécois de la langue française. Le soutien de ce
dernier est essentiel et la forme qu'il prendra sera déterminante pour le
succès de la démarche.
Il faut aussi se
rappeler que les PME font le plus souvent appel à des professionnels — nos membres CRIA, CRHA — qui sont externes, car elles ne disposent pas des
ressources nécessaires pour se doter d'un service des ressources humaines interne. Il est donc d'autant plus
essentiel que les programmes proposés par l'office et leur administration soient simplifiés afin de les mener à terme avec
succès. Et on pourrait rappeler, à cet égard-là, l'application de la Loi
sur l'équité salariale, où, encore aujourd'hui, je dirais, l'implantation dans
les entreprises demeure problématique. Alors, en
bref, on considère qu'il est important pour le Québec d'être en mesure de
travailler dans la langue française. D'ailleurs, une proportion de
travailleurs y arrive, mais l'enjeu pour l'employeur de l'obligation
d'implanter des mesures de francisation doit aller de pair avec l'assurance que
l'office a la capacité de lui assurer un soutien adéquat.
Concernant
la main-d'oeuvre, l'ordre est tout à fait d'accord avec la position selon
laquelle un employeur ne peut exiger de ses
travailleurs une compétence linguistique ou autre non nécessaire à l'exécution
de tâches reliées à un poste. Toutefois,
l'article 19 du projet de loi nous apparaît susceptible d'entraver le potentiel
de croissance des entreprises et leur souplesse de réaction. L'économie
du Québec se mondialise à vitesse grand V, et nous pouvons anticiper sans risque de nous tromper qu'elle s'exprimera à moyen terme
dans bien d'autres langues que le français et l'anglais. L'obligation pour les
employeurs d'évaluer de façon rigoureuse les besoins linguistiques réels
associés à un poste et de réévaluer périodiquement ces besoins peut parfois
signifier des occasions manquées pour leur entreprise.
Le
marché du travail actuel est extrêmement compétitif et la recherche de
travailleurs compétents de plus en plus fastidieuse. Il faut quand même rappeler que, dans
une région, par exemple, comme Québec, il y a certaines entreprises qui ne peuvent prendre de contrat actuellement
parce qu'ils n'ont pas nécessairement les ressources pour pouvoir faire
le travail. Alors, il importe que les
entreprises puissent conserver une certaine marge de manoeuvre pour réagir
rapidement et efficacement quand une affaire
en or — et, pour nous, une affaire en or veut dire un talent
exceptionnel — se présente.
Le français au travail
est une nécessité et une richesse pour le Québec. Une main-d'oeuvre compétente
et polyvalente l'est tout autant pour la
compétitivité et le dynamisme des entreprises. En ce sens, c'est vraiment
l'équilibre qui pourrait caractériser tout ça. Alors, en ce sens, on l'ordre
demande plus de précision quant aux obligations que les modifications prévues à l'article 19 du projet pourraient créer chez les
employeurs du Québec. Plus spécifiquement, on se questionne sur les moyens que détiendra l'Office québécois de la langue
française pour s'assurer de l'application de ces modifications. Il
importe, ici aussi, que ces moyens soient facilitateurs pour les employeurs et
non contraignants. Par ailleurs, nous
questionnons beaucoup le retour au comité sectoriel comme étant un acteur quasi
principal de l'application de cette politique dans les entreprises.
Concernant
l'immigration, alors les difficultés du marché du travail liées à la pénurie de
main-d'oeuvre iront, de toute évidence, en s'aggravant au cours des
prochaines années. La démographie du Québec fait en sorte qu'une
proportion croissante de la population active proviendra de l'immigration. La
force de travail des personnes immigrantes est et sera de plus en plus
essentielle. Il faut donc consacrer de manière plus intensive que jamais des
efforts pour que ces personnes trouvent, au Québec, une terre d'accueil qui
facilite leur intégration économique, sociale et culturelle. L'article 65 du
projet de loi réaffirme la volonté du Québec de renforcer la francisation et
l'intégration des personnes immigrantes et
de favoriser leur établissement dans les régions du Québec. C'est tant mieux,
mais, pour l'instant, on ne peut pas
dire que c'est un grand succès. Alors, l'ordre approuve donc cette volonté,
d'autant plus que les PME du Québec peinent à recruter une main-d'oeuvre
qualifiée.
Nous
avons été aussi heureux d'entendre la ministre Mme De Courcy, lors de
l'ouverture des auditions, nous dire qu'une
connaissance approfondie du français sera valorisée dans la sélection des
personnes immigrantes et que des moyens
seront mis en oeuvre pour que leur apprentissage de la langue commence avant
même leur arrivée au Québec. Toutefois, le message que nous désirons
envoyer est qu'il est essentiel que les nouvelles mesures annoncées pour
faciliter la francisation doivent aussi tenir compte des besoins du marché du
travail. En introduisant une formation qualifiante dans des programmes
d'apprentissage du français, les personnes immigrantes atteindront plus
aisément une maîtrise du français adaptée au contexte professionnel.
• (15 h 10) •
Nous
croyons qu'une intégration professionnelle encadrée et soutenue contribuera directement
à une intégration sociale réussie.
À cet égard, des
mesures de soutien seront indispensables afin de maintenir à la fois la
vitalité des entreprises et le dynamisme de la société québécoise, car, ne
l'oublions pas, le chômage touche encore aujourd'hui beaucoup plus durement les personnes immigrantes que les
natifs. En fait, on parle à peu près de deux fois plus. Alors, il faudra
donc éviter à tout prix… de privilégier à
tout prix la maîtrise de la langue française au détriment de compétences
professionnelles indispensables aux
entreprises du Québec. Nous songeons plutôt à mettre en place des mesures de
francisation appliquées a posteriori réellement efficaces.
Alors,
comme recommandation. L'article 65 du projet de loi donne une valeur plus
importante au fait qu'une personne qui veut
immigrer au Québec maîtrise le français, nous sommes d'accord. Nous désirons
toutefois rappeler que cela ne peut pas se faire au détriment des
besoins du marché du travail. La solution idéale serait évidemment d'avoir des
personnes immigrantes qui maîtrisent le français et qui possèdent les
compétences professionnelles reliées aux besoins du marché du travail, et un
effort doit continuer d'être fait afin de tendre le plus possible vers cet
idéal.
Alors, en conclusion,
l'Ordre des conseillers en ressources humaines agréés a pour mandat de soutenir
des professionnels qui, quotidiennement,
relèvent des défis considérables. La pénurie de main-d'oeuvre et la diversité
n'en représentent qu'une partie. Avec les
modifications qu'apporte le projet de loi n° 14, leur responsabilité en ces matières s'accroît sensiblement, et nous sommes d'accord.
Leur rôle devient ainsi encore plus déterminant au sein des organisations, puisqu'ils deviennent en quelque
sorte des agents d'intégration et de cohésion. La langue est l'élément
qui unit et permet aux individus qui la
partagent de se reconnaître et de comprendre leurs différences. Faire du
français la langue normale et habituelle de travail au Québec est une
priorité pour l'ordre, et soyez assurés que toutes ces actions convergeront
vers cet objectif. Je vous remercie.
La
Présidente (Mme Vien) : M. Francoeur, Mme Delisle, vous êtes très disciplinés, vraiment.
Félicitations. C'est vrai, que vous vous êtes fait des petits signes, mais ce n'est pas
grave, vous êtes entrés en plein dans le temps. Bravo, bravo.
Bien, Mme la ministre,
la parole est à vous pour une période de 22 minutes. Et puis, tout de suite
après, nous passerons la parole à M. le porte-parole de l'opposition
officielle.
Mme
De Courcy :
Merci. Madame, monsieur, bien d'abord, bienvenue et merci d'avoir participé à
la commission parlementaire, commission
parlementaire importante, comme vous l'avez mentionné, compte tenu du sujet. Et
j'ai été très heureuse quand j'ai constaté
votre participation comme conseillers en ressources humaines agréés. C'est
important pour nous, surtout que, curieusement, nous touchons des entreprises
de 26 à 49 employés qui n'ont pas souvent des conseillers
en ressources humaines agréés. Alors, tout au long du mémoire, j'ai senti
votre... en tout cas, j'ai cru comprendre votre grand intérêt pour la question
et j'aimerais vous poser deux questions à cet égard.
D'abord, je pense que les petites entreprises de 26 à 49
employés auront besoin de l'expertise que votre
association possède, que les membres de votre association possèdent, qu'elles
seraient privilégiées de pouvoir compter sur votre participation et celle des comités sectoriels de la main-d'oeuvre.
Alors, je vous pose la question en vous disant que j'ai compris que vous seriez là si nous faisons appel à
vous et que vous seriez disponibles pour travailler à épauler les
petites entreprises, notamment dans toute la
question du choix des postes, la documentation des postes, s'il y a lieu, pour
s'assurer, et ça va sûrement être le cas, que des postes bilingues, c'est
normal qu'il y en ait et comment on fait ça sans que ce soit lourd pour des
processus permanents, pour… bon, etc. Est-ce que je me trompe en affirmant ça?
Ça, c'est ma première question.
M.
Francoeur (Florent) : Ah, je vous dirais que vous ne vous trompez pas. Et c'est à deux
niveaux,essentiellement.
D'abord, je dirais, comme ordre professionnel, je dirais, une partie de notre
mission, c'est de s'assurer que nos
membres soient bien formés, soient bien informés. Ce sont eux qui, en fait,
gèrent les ressources humaines au quotidien.
Et nous, estime que ça fait un peu partie de notre mandat, de s'assurer que ces
gens-là ont les connaissances et, je dirais, les outils pour pouvoir,
souvent, dans certains cas, implanter, par exemple, de nouvelles lois dans le
milieu du travail. Mais alors, oui, à ce
niveau-là. Et on est disponibles et, je dirais, non seulement on est
disponibles, mais, je dirais, on a l'expérience, je dirais, en quelque
sorte de ce type d'intervention là.
Et l'autre niveau,
c'est au niveau des professionnels eux-mêmes, des professionnels en ressources
humaines eux-mêmes, parce que, vous l'avez bien indiqué, souvent, les petites
entreprises n'ont pas de service des ressources humaines, mais en général, je vous dirais, à partir du moment où on
parle de 26 à 49, on parle d'entreprises qui ont quand même de grands
besoins, qui ont besoin de l'aide en matière de gestion des ressources humaines
et qui souvent font affaire avec des membres, des membres, souvent des
consultants qui sont membres chez nous et qui, eux, peuvent aider ces
entreprises-là.
Mais
encore faut-il qu'ils aient les outils pour le faire. Et c'est pour ça, tantôt,
que j'ai brièvement souligné la question,
par exemple, du cas de l'équité salariale, où c'est une loi qui a quand même
été implantée en 1996 avec, je dirais, un
vote unanime à l'Assemblée nationale. Et ce qu'on pouvait constater, c'était
que, 10 ans plus tard, il y avait à
peine 50 % des entreprises qui se conformaient à la loi. Et ce qu'on dit,
dans le fond, c'est qu'il faut que,comme
on dit, les bottines suivent les
babines et il faut d'abord que, je dirais, lorsqu'on implante, je dirais, des
modifications importantes comme ça à la loi, bien il faut d'abord penser à
avoir les outils pour faciliter les choses. Et, je dirais, à ces deux niveaux-là,
je pense qu'on peut... on est certainement là pour aider.
Mme
De Courcy : Puis
je vous remercie d'illustrer aussi concrètement le besoin pour les petites
entreprises et l'offre de services. Vous avez mentionné l'importance de connaître le
marché, l'industrie, les entreprises, le milieu des affaires. Nous avons la prétention de penser que
les comités sectoriels de main-d'oeuvre sont des instruments gouvernementaux
qui peuvent nous permettre... et qui ont cette connaissance-là du marché du
travail. Est-ce que vous pensez qu'il est
possible que cette collaboration-là se fasse entre les ordres, l'ordre que vous
représentez et les comités sectoriels de main-d'oeuvre?
M. Francoeur
(Florent) : Oui, encore une fois,
mais en partie. Parce que, dans le fond, je dirais, ce qui nous inquiète un
peu, c'est l'importance qu'on accorde ou qu'on voudrait donner aux comités
sectoriels dans... quelque part dans
l'application des modifications à cette loi-là. Parce qu'il faut quand même
rappeler les comités sectoriels sont un outil qui essentiellement a été créé... qui provient d'un besoin des
entreprises, du milieu, souvent avec uneparticipation qui est paritaire. Alors, l'outil est là, mais, quand on
regarde en termes d'application, est, on pourrait dire, largement non
utilisé.
Des chiffres du gouvernement du Québec, dans le fond,
lorsqu'on regarde les comités sectoriels, il y a une étude qui a été publiée qui dit que 26 % des
entreprises québécoises qui sont couvertes par un comité sectoriel savent qu'il
existe un comité sectoriel. Alors, vous vous
imaginez qu'on part de loin à ce niveau-là. Et, quand on va plus loin,
parmi les 26 % de ces entreprises-là
qui sont capables d'identifier, qui savent qu'ils ont un comité sectoriel, il y
en a seulement que 12 qui sont capables de nous dire qui les représente
sur ce comité sectoriel là. Alors, c'est conférer...
Et
je vous dirais que le travail réalisé par les comités sectoriels, je dirais,
est à géométrie variable. Je siège à la
Commission des partenaires du marché du travail, mais il y a un comité
sectoriel qui va disparaître parce qu'il est
inactif, pourtant pas dans un secteur d'économie qui est... On parle du secteur
ferroviaire, qui n'est quand même
pas, je dirais, un secteur de
l'économie qui est à négliger, où, peut-être, dans ce cas-là, je dirais, toute
la question de la francisation jouerait un rôle important, mais qui est
en train de disparaître.
Alors,
je dirais, à quelque part, c'est soit qu'on s'assure que les comités sectoriels
soient parfaitement opérationnels, mais, je
dirais, on est très, très loin de cette situation-là, avant de leur donner, je
dirais, de nouvelles responsabilités. Mais
il faut quand même rappeler que ça ne faisait pas partie, au départ, des
responsabilités des comités sectoriels
de s'impliquer dans des dossiers comme ça. Les comités sectoriels sont là pour
corriger des besoins communs exprimés
par le milieu. Lorsqu'on arrive par-dessus en leur donnant des responsabilités
qu'ils n'ont pas nécessairement souhaitées, je dirais, ça peut être plus
difficile.
Et, encore une fois, si on se ramène à
l'équité salariale, à l'origine, lorsqu'on a appliqué la Loi sur l'équité salariale, on comptait
beaucoup sur les comités sectoriels pour pouvoir aider, je dirais, à implanter,
à faire en sorte que les programmes d'équité salariale se réalisent dans
les entreprises. Force est de constater que, 15 ans plus tard, je dirais, à peu d'exception près,
sauf erreur, il n'y a pas de comité sectoriel qui s'implique à ce niveau-là.
Alors, il faudrait juste s'assurer que, si on confie des responsabilités
à des organisations, il faudrait qu'elles aient les moyens, parce qu'on parle quand même de 30 comités sectoriels avec des
budgets d'un demi-million de dollars; on ne va pas très loin avec ça,
là. Alors, c'est juste la mise en garde
qu'on fait en disant : On semble mettre beaucoup de pression sur les
comités sectoriels, pas sûr qu'ils ont nécessairement les moyens d'aider
à ce niveau-là.
Mme De Courcy : Alors, si j'entends bien ce que vous
me dites, c'est un instrument intéressant, mais il faut qu'il soit lui-même bien soutenu pour être... et un mandat
clair?
•
(15 h 20) •
M. Francoeur (Florent) : Un mandat clair, bien soutenu, et une
implication, entre autres, je dirais, véritable. Encore une fois, c'est un organisme qui
est paritaire et, je dirais, souvent avec des représentations, encore
une fois, qui sont à géométrie variable.
Alors, souvent, on va déplorer, je dirais, la faible participation tantôt des
syndicats, tantôt des travailleurs,
tantôt des employeurs. Alors, il faut vraiment, je dirais, que, si on conserve
l'idée d'en faire des acteurs
importants au niveau de l'application de la loi, il faut s'assurer à la base
que ces comités-là fonctionnent adéquatement.
Ils
fonctionnent adéquatement, actuellement, mais dans des secteurs d'activité qui
sont... lorsqu'on parle... Lorsqu'un secteur d'activité a des besoins criants
de main-d'oeuvre, alors ils ont des besoins communs et ils veulent s'organiser, ils veulent... Ils se réunissent et
ils se disent : Bien, qu'est-ce qu'on peut faire? On va travailler avec le
milieu de l'éducation — vous
le savez mieux que moi — alors on va travailler avec le milieu
de l'éducation pour faire en sorte qu'on
puisse former des travailleurs. Alors, là, on a un besoin commun. Dans ce
cas-ci, ce n'est certainement pas un besoin commun qui a été exprimé par les
comités sectoriels, je dirais, de prendre cette responsabilité-là. Alors, c'est
à... Et il faut aussi vous dire, si vous me...
Mme De Courcy : Ce n'est pas des échos qu'on en a,
là. Parce que ce qu'on a reçu comme échos, c'est que les grands conseils,
Conseil québécois du commerce de détail, l'entreprise indépendante, croient
beaucoup dans ces comités sectoriels et considèrent que c'est... et
partagent votre point de vue, à savoir qu'il y en a que c'est d'inégale valeur,
mais que, quand ça fonctionne, ça fonctionne
très bien et que vraiment ça devient un outil intéressant. Je partage
votre point de vue cependant qui dit que, pour que ça fonctionne partout, il
faut qu'ils soient épaulés; sinon, ça va devenir un peu compliqué.
Je vous remercie. Je trouve ça très intéressant, cet éclairage-là que
vous apportez, ce qui fera en sorte qu'on va faireune validation encore
plus précise autour des comités sectoriels de main-d'oeuvre, ce que je ferai
d'ici la fin de la commission parlementaire, c'est certain, et que je
partagerai avec mes collègues de la commission parlementaire, c'est évident.
M. Francoeur (Florent) : Si vous me permettez une précision,
il faut rappeler que les comités sectoriels
n'ont pas de membership, hein? Alors, un
comité sectoriel, par exemple, comme celui du commerce de détail, il y aessentiellement, grosso modo, 25 000
entreprises qui le chapeautent, mais n'a pas de liste des 25 000
entreprises. Alors, je vous dirais que, ça, c'est...
Mme
De Courcy : Mais, ça, les...
M. Francoeur (Florent) : Alors là, je vous dirais, on parle
déjà d'enjeux, là. Encore faut-il regrouper, mais il faut être capable de pouvoir communiquer. Alors, encore une fois, je
ne veux pas dire que les comités sectoriels ne font pas le travail. Ce que je
dis, c'est qu'il faut qu'ils aient les outils pour pouvoir...
Mme De Courcy : J'ai bien compris que vous ne
contestez pas les comités sectoriels de main-d'oeuvre, là, pas à la Commission des partenaires du marché du travail,
j'en suis convaincue. Mais j'entends bien. Et on va refaire une vérification supplémentaire
parce que vous comprenez que c'est un instrument gouvernemental tellement
important. Je vous remercie.
La
Présidente (Mme Vien) : Du côté
ministériel, M. le député.
M.
Roy : De Bonaventure.
La
Présidente (Mme Vien) : De Bonaventure,
vous avez bien raison. C'est tellement beau, en plus.
M.
Roy : Oui. 300 kilomètres de plages,
Mme la Présidente.
Une
voix : Il va vous dire la bonne
aventure.
M. Roy : Non, je... Bonjour, M. Francoeur, Mme
Delisle. À la page 10 de votre mémoire, à la conclusion, et je cite : «Le
projet de loi n° 14
a pour effet de renforcer la notion de langue de travail pour les entreprises
québécoises. Bien que l'ordre désire attirer l'attention de la Commission de la culture et
de l'éducation sur le besoin de faire quelques nuances au sein des milieux de travail relativement à la
question de la langue de travail, il croit fermement au droit et au
besoin de travailler en français au Québec.»
Selon vous, comment doit-on faire pour s'assurer à la fois
de la maîtrise du français par les immigrants et
d'une réponse adéquate aux besoins du marché du travail?
M.
Francoeur (Florent) : En fait, il y a déjà eu d'abord des réflexions qui avaient été faites
il y a quelques années au niveau, je dirais, de l'accueil, si on pourrait dire, des immigrants
au Québec, et, nous, ce qu'on a tenté de mettre en évidence, c'est le fait de privilégier, nous, ce
qu'on appelait les immigrants, on pourrait dire, de catégorie
économique. Autrement dit, bien sûr
privilégier, on l'a dit dès le départ, bien sûr privilégier un immigrant qui a
soit la volonté ou soit qu'il est
déjà capable de s'exprimer en français, mais surtout que cette personne-là qui
va arriver au Québec puisse avoir un emploi
dans son domaine et qui correspond, dans le fond, dans beaucoup de cas, là… je
dirais, on s'en va vers... Nous, je dirais, les problèmes démographiques
commencent. Alors, mais, dans le fond, que cette personne-là va arriver ici, au
Québec, et va avoir des chances raisonnables d'occuper un emploi dans son
secteur d'activité.
Il faut
quand même rappeler que, dans les prochaines années — ce n'est pas des chiffres qui sont nouveaux, hein? — on parle de 1,4 million de postes à combler dans
différents secteurs d'activité. 70 % des
emplois vont nécessiter soit un diplôme d'études collégiales, soit un diplôme
d'études universitaires. Et, pour nous, ce qui est important, dans le fond,
c'est de faire un peu l'appariement entre les besoins du marché du travail
québécois avec des disponibilités de main-d'oeuvre
qui sont à l'étranger et, dans le fond, s'assurer que ces personnes-là qui sont
disponibles sachent déjà que, lorsqu'on
vient travailler au Québec, la langue de travail, c'est le français et qu'ils
doivent, à tout le moins, avoir un intérêt pour pouvoir rester.
Ce
qu'on constate aujourd'hui, c'est que, encore une fois, ce n'est pas nouveau,
là, mais on a une capacité d'attirer au Québec des immigrants, le problème qu'on a,
c'est de les retenir. Alors, c'est là que le travail doit se faire, alors.
Et, pour les retenir, bien, ça veut dire que
l'immigrant qui arrive a, encore une fois, des chances raisonnables
d'occuper un emploi dans son domaine d'activité.
M. Roy : Merci.
La Présidente (Mme
Vien) : M. le député de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
M.
Breton : Merci,
Mme la Présidente. Bonjour. Bien, écoutez, je pense qu'il était nécessaire que
vous soyez ici dans le cadre de ces consultations parce que je pense que vous jouez un
rôle important. Il faut absolument qu'on prenne en compte, justement, la
situation des petites et moyennes entreprises. Moi qui est député d'une
circonscription dans le centre-ville de
Montréal, je suis confronté, je suis interpellé par tout ce qui a rapport,
justement, avec la francisation des immigrants, la francisation des
entreprises.
J'en
ai parlé ce matin avec d'autres personnes qui sont venues présenter leur
mémoire et je disais que ça m'est arrivé, dans
ma circonscription, d'arriver dans des commerces où les gens ne parlaient pas
français, ce qui m'étonne toujours. Je dois
vous avouer... Je me rappelle, dans les années 1970, début 1980, de se promener
dans le centre-ville, de se faire
interpeller en anglais, c'était presque la norme. Ça a changé beaucoup dans les
années 1980, 1990, mais là on sent qu'il y a une espèce de recul.
Et
donc vous dites que vous êtes tout à fait en faveur de favoriser la
francisation des commerces, la francisation
des entreprises de 26 à 49 employés puis vous dites : Il faut quand même
avoir les moyens de nos ambitions. C'est ça que
vous dites. Et c'est une autre question que je pose à la ministre parce que je
veux qu'on ait les moyens de nos ambitions. Donc, vous, les évaluations
de postes, à quelle fréquence vous croyez qu'on devrait regarder ça?
M. Francoeur
(Florent) : En fait, il n'y a pas
de... Je dirais, la réponse, à ce niveau-là, c'est flexibilité, dans le fond,
parce que, dans certains cas, il y a des entreprises qui sont capables de dire,
dans le fond : Dans mon secteur d'activité — un
exemple pourrait être le commerce de détail — j'ai peu de chances de penser
que le travail va évoluer à ce point dans les
cinq, 10 prochaines années que... Dans d'autres cas, je vous dirais, si on
parle, par exemple, tout ce qui va concerner
les technologies de l'information, en fait, tout ce qui est le domaine de la
gestion, le monde du travail change, et change très, très rapidement.
Alors, dans le fond, l'idée, c'est qu'il s'agirait, là, d'y aller avec un
chiffre… peut partiellement faire le travail, mais c'est surtout dans l'application
où on dit : Il faut qu'il y ait une certaine flexibilité à ce niveau-là.
M. Breton : Bien, justement, c'est là où je me sens particulièrement
interpellé parce qu'il y a beaucoup d'entreprises
de technologies de l'information, de nouveaux médias, de multimédia qui sont
dans ma circonscription : dans
le Vieux-Montréal, la Cité du multimédia, que vous connaissez, Warner Bros., à
la Place Dupuis, juste en face de mon
bureau. Là, je pense qu'il se pose un problème... pas un problème, mais un défi
particulier. Donc, j'aimerais ça vous entendre, justement, sur les gens
par rapport aux nouveaux médias, technologies de l'information, nouveaux
médias.
• (15 h 30) •
Mme
Delisle (Justine) : Bien, en fait, écoutez, c'est sûr que, dans des cas spécifiques comme
ça, c'est vrai que la technologie bouge très,
très, très rapidement. On a aussi différentes particularités. Vous prenez
l'exemple de Warner Bros. qui est dans votre
circonscription. Oui, il y a un bureau à Montréal, mais il y a plein de bureaux
aussi, dans le fond, aux États-Unis, un peu partout. Il doit y avoir une
communication aussi entre le bureau de Montréal et les autres bureaux à différents égards. Et, bon, là, on parle
de langage de programmation informatique, et tout ça, et là, c'est vrai que,
dans ces cas-là, le travail, déjà, là, de
programmation se fait souvent beaucoup plus en anglais qu'en français, et ça,
c'est certain. Les logiciels sont souvent mis à jour beaucoup plus rapidement
en langue anglaise qu'en langue française. Donc, en effet, à ce niveau-là, là, vraiment,
l'application s'avère un réel défi. Si on parle plus du commerce, là, de
détail ou des gens, dans le fond, qu'on voit qui sont plus dans des entreprises
de services, là, à ce niveau-là, ça devrait être suffisamment simple lorsqu'on
parle de la langue de travail, le français devrait inévitablement être, dans le
fond, une nécessité.
Si
on va sur le niveau d'évaluer exactement à quelle période on devrait réévaluer
un poste, c'est sûr que nous, on prône, en fait, pour des bonnes pratiques de
gestion qui disent qu'environ deux fois par année un patron devrait
s'asseoir avec son employé pour un peu voir l'évaluation de son rendement, voir
un peu où est-ce qu'on pense aller dans les prochaines
années, c'est quoi, les objectifs d'affaires. Et ça, c'est sûr que ça peut être
un bon moment, en effet, pour voir si des
compétences que l'employé a fonctionnent un peu avec, dans le fond, les défis
qui s'en viennent pour nous. Donc, c'est sûr que c'est quelque chose qui
doit se faire périodiquement.
Et,
en effet, à ce niveau-là, le défi de définir qu'est-ce qui va être périodique
ou de moyenner le terme «périodique» pour l'ensemble du Québec, que ce soit
Warner Bros. qui est à Montréal ou que ça soit pour une petite entreprise
qui est en Gaspésie, le défi est
vraiment, vraiment à ce niveau-là, et ça va être difficile de le moduler. Et on
comprend bien, là, que c'est quelque
chose qui va représenter une difficulté, mais c'est certain que, dans le fond,
ce n'est qu'en essayant de trouver,
de qualifier cette périodicité-là, qu'on va pouvoir aider les entreprises puis
les supporter pour savoir exactement à quel moment ils devront revoir
ces compétences-là linguistiques.
M.
Breton : Je ne
sais pas si on vous a interpellés là-dessus ou si on vous a demandé de
réfléchir à ça, mais moi, il y a des gens avec qui je travaille dans les
nouveaux médias, dans le multimédia qui m'ont dit qu'on se retrouve
peut-être à une espèce de croisée des chemins, c'est-à-dire qu'on pourrait
faire en sorte de créer un créneau particulier dans les nouveaux médias avec
tout un créneau en français pour tout le monde francophone à travers le monde
et qu'on a des habilités, on a des compétences à la fois au niveau français
mais aussi multimédia qui pourraient faire en sorte qu'on pourrait développer
une expertise pointue qui pourrait nous mettre à l'avant-poste de ce qui se
fait à travers le monde. Je ne sais pas si on vous a parlé de ça.
Mme
Delisle (Justine) : Ce n'est pas vraiment quelque chose sur lequel on a été mis davantage
au fait, mais c'est sûr qu'en effet, depuis
plusieurs années, dans le fond... Puis même le gouvernement a beaucoup
contribué à faire en sorte que Montréal et
le Québec, si on veut, soient vraiment une plaque tournante pour les nouveaux
médias en injectant des fonds et en
soutenant les entreprises, dans le fond, à venir s'implanter ici. Pensons
seulement à Ubisoft qui est l'exemple que
tout le monde connaît. Donc, c'est sûr qu'on développe l'expertise technique,
donc, les compétences, vraiment plus le savoir-faire à ce niveau-là, et,
en effet, ça peut être une bonne idée d'amener le fait français aussi,
d'amalgamer les deux pour desservir une
place importante du monde francophone, là, dans cette sphère-là, mais ce n'est
pas quelque chose qui a été apporté, là, précisément à notre attention.
La Présidente (Mme
Vien) : Il reste une minute.
M.
Breton : Bien,
bref, j'aimerais ça qu'on s'en reparle plus tard parce que j'aimerais ça vous
rencontrer là-dessus. Je vous remercie.
La Présidente (Mme
Vien) : Nous allons passer maintenant
du côté de l'opposition officielle avec le député de LaFontaine, le
porte-parole en la matière.
M. Tanguay : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, j'aimerais à mon
tour vous saluer, M. Francoeur, Mme Delisle. Merci beaucoup pour le
mémoire que vous nous avez présenté et également pour votre présentation
aujourd'hui. Je pense que vous avez... Votre présence est importante. Et, à cet
effet-là, j'aimerais vous référer à la page 7
de votre mémoire, puis vous me permettrez d'en citer un paragraphe parce
qu'évidemment il s'agit là, par votre présentation
aujourd'hui, je pense, de publiciser les résultats de vos analyses, de vos
recherches, et évidemment ce n'est pas tout
le monde à la maison qui aura accès à votre mémoire, et je pense que c'est un
paragraphe particulièrement important :
«Plusieurs raisons
peuvent expliquer le recours grandissant à l'anglais dans les milieux de
travail québécois. La mondialisation des différents secteurs économiques en est
sans aucun doute l'une des principales. D'ailleurs, la progression de la part du PIB nominal du Québec expliqué par
l'exportation de produits et des services à l'international le démontre
bien. Cette ouverture de l'économie québécoise sur le monde engendre bien
souvent la nécessité pour les travailleurs du Québec d'utiliser une autre langue
que le français au travail. C'est pourquoi les entreprises du Québec exigent de plus en plus de leurs employés la
maîtrise d'une autre langue que le français.» Fin de la citation. Et, quand
vous dites «une autre langue que le français», évidemment on pense tout de
suite à l'anglais.
Vous
avez brossé deux tableaux. Vous nous indiquez qu'il s'agit, je crois… Et
j'aimerais vous entendre nous faire part
verbalement de votre analyse et des résultats. Nombre de répondants, 823
répondants qui, je crois, étaient un échantillonnage
de vos membres, n'est-ce pas, alors des personnes qui sont membres de votre
Ordre des conseillers en ressources humaines agréés.
Alors, si l'on porte
notre attention au tableau 1 : «Indiquez la principale langue de travail
utilisée au sein de votre entreprise pour
chacune des activités…» Et là je me permets une conclusion qui, je pense, est
également la vôtre. Il y a évidemment utilisation du français en des
proportions, là, 75 %, 80 %, 85 % et plus sous différentes
catégories d'activités, et l'utilisation de
l'anglais ressort plus marquée. Il y a 10 %, 11 %, 13 % pour
certaines catégories d'activités, mais
il y a 20 %, 22 % et 25 % pour un usage de l'anglais quant aux
communications avec les fournisseurs, avec un usage externe
et avec les clients également. J'aimerais que vous nous commentiez les
résultats de votre analyse et que vous étayiez davantage ce que vous y avez
constaté.
Mme Delisle (Justine) : Bien, en fait, merci beaucoup pour
votre question, ça nous permet aussi de mettre,
en fait, un peu plus de l'avant, là,
évidemment l'expertise de nos membres à ce niveau-là. Comme vous le savez bien,
c'est souvent eux, dans le fond, dans les
entreprises, qui sont là pour faire l'évaluation des postes, les descriptions
de poste, bon, travailler à ces
niveaux-là, donc c'est définitivement, là, les personnes qui sont les plus
habilitées à répondre à ce genre de questions là.
Alors, on leur demandait, dans le fond, pour
essayer de documenter, là, le fait de parler la langue anglaise, dans le fond, pour un
peu venir supporter nos données… on essayait de leur demander quand est-ce que
cette fameuse langue anglaise là
était utilisée, là, dans les entreprises. Et force est de constater qu'en effet
à l'interne, lorsqu'on discute avec nos collègues ou avec notre patron, lorsqu'on produit des documents à
l'interne, la plupart du temps, là, évidemment, c'est la langue
française qui est utilisée. Donc, à ce niveau-là, on peut dire qu'on a quand
même une part du travail qui est relativement,
là… je ne voudrais pas dire accomplie, mais disons qu'il y a un bon bout du
chemin de fait. Et, de facto, là, c'est
lorsqu'on parle plus avec les fournisseurs et les clients qui, bon, souvent,
proviennent d'ailleurs soit au Canada ou d'ailleurs, bon, dans le monde,
que, là, ça se complique un peu, et que, là, définitivement, on parle davantage
d'avoir la maîtrise de l'anglais.
Et qu'est-ce qu'on voulait venir vraiment
faire ressortir, c'est finalement que, dans les prochaines années, on voit vraiment que notre économie s'ouvre vers
le monde. C'est vrai pour le Québec puis c'est vrai pour, en fait, plusieurs autres pays, plusieurs autres régions du
monde. On s'en va vraiment dans une optique de mondialisation qui devient réelle. Et là on se disait que
probablement, en effet, que ces besoins-là ou ces compétences-là de devoir
parler la langue anglaise avec les fournisseurs ou les clients va
probablement... on peut croire, à tout le moins, qu'elle va aller en
grandissant.
Et
c'est à ce niveau-là, dans le fond, qu'on voulait mettre quelques réserves pour
dire : Bon, oui, si j'estime que, dans
les cinq prochaines années, par exemple, je vais avoir du potentiel pour
développer des relations avec les clients anglais et qu'à ce moment-ci dans mon entreprise, ce n'est pas quelque
chose qui est le cas, bien peut-être que, si j'ai à recruter une nouvelle personne, bien je vais
m'assurer qu'elle maîtrise l'anglais et je vais le mettre dans la
description de poste, là, où est-ce que je
vais vraiment vouloir qu'elle détienne cette compétence-là. Et c'est là qu'on
voyait des fois que ça pouvait devenir un peu moins flexible, là, les
dispositions qu'il y avait dans le projet de loi à cet égard-là.
M. Tanguay : Et toujours sur la même lancée, le
tableau 2, donc, qui est le résultat de votre sondage auprès de vos membres
conseillers, donc, membres de l'ordre, conseillers en ressources humaines, le
tableau 2 est intitulé Pour chacunedes catégories d'emploi, puis on entend par catégories d'emplois,
employés manuels, de soutien administratif, techniques, professionnels et cadres et gestionnaires.
Donc : «Pour chacune de ces catégories-là, veuillez indiquer — vous posiez la question à vos membres — parmi les connaissances linguistiques listées,
lesquelles sont généralement un critère d'embauche au sein de votre
entreprise.»
Et on voit que les proportions, ici, au
niveau du français, nous sommes tous à... sauf exception une fois, employés manuels, là,
66 % le français, mais, pour ce qui est des neuf autres cas, c'est
90 % et plus, 97 %, 96 % pour le français.
Axons notre regard sur l'anglais pour les
quatre dernières catégories. La première d'entre elles, soutien administratif, connaissance de l'anglais parlé — il y a une statistique — et anglais écrit,
alors : 58 % anglais parlé, 49 %
anglais écrit, soutien administratif. Employés techniques : 52 %
anglais est une exigence, anglais parlé, donc; et anglais écrit,
39 %. Pour les professionnels, les proportions augmentent : 70 %
anglais écrit, 63 % anglais... anglais parlé,
70 %; anglais écrit, 63 %. Et finalement cadres, gestionnaires :
anglais parlé, 74 %, et anglais écrit, 67 %. Alors, on voit que, mis à part la première des cinq
catégories, pour les quatre dernières catégories, soutien administratif,
employés techniques, professionnels, cadres et gestionnaires, c'est 50 %
et plus, très clairement, pour lesquels, ces postes-là, on exigeait l'anglais.
Quelle est votre analyse, si vous poursuivez sur...
•
(15 h 40) •
M.
Francoeur (Florent) : Une corrélation
entre les deux tableaux.
M.
Tanguay : Oui.
M. Francoeur (Florent) : Parce qu'essentiellement ce que ça
montre, c'est que les gens dont, je dirais, une
partie du travail est tournée vers
l'extérieur — alors là, je parle de l'extérieur de
l'entreprise — doivent de plus en plus avoir des connaissances
en anglais. Autrement dit, si je suis un employé manuel qui travaille
directement dans l'organisation, qui produit quelque chose, qui
produit... et qui n'a pas de contact avec quelqu'un de l'extérieur, avec un
client, avec un fournisseur, là, je dirais, on regarde, ça travaille en
français et les exigences sont reliées essentiellement au français.
Dès qu'on parle d'un personnel de vente,
lorsqu'on parle, je dirais, d'ingénierie, lorsqu'on parle de tout l'ensemble des services
ou de tout autre... dès qu'on parle de l'extérieur de l'entreprise, la culture
québécoise fait en sorte qu'on se dit :
Si je veux grandir… Nous sommes une économie de petites entreprises, et la
croissance se fait généralement vers l'extérieur
de la province, donc de façon générale vers le marché anglophone. Alors, le
moindrement que je suis un chef d'entreprise
et que je dis : Je suis en Beauce et, dans deux ans, je veux traverser la
frontière, alors c'est clair qu'à ce moment-là,
dans mon critère d'embauche, je vais garder en tête que mes prochains
clients... je vais peut-être commencer en Beauce, mais que, mes prochains
clients, on risque de faire des affaires en anglais. Et là j'en fais en quelque
sorte... souvent, on parle d'une exigence, mais ça peut être modulé
encore une fois, là, pour certains secteurs d'activité.
M.
Tanguay : M. Francoeur, prenons un
cas d'espèce. Vous êtes le responsable des ressources humaines pour tout le Québec, votre entreprise, c'est
toutes les entreprises du Québec, et les gens que vous avez à placer, ce
sont tous les nouveaux arrivants, entre 51 000 et 53 000. Et, si je
vous dis, dans un cas pur — évidemment, ce n'est
pas la réalité, mais c'est un cas pur, juste
pour illustrer votre propos : Les 51 000 nouveaux arrivants que vous
devez placer, 100 % parlent français, 0 % n'ont aucune notion
d'anglais, est-ce que vous avez un problème pour leur trouver de l'emploi?
M. Francoeur
(Florent) : En fait, il n'y aura pas
de... Dans la mesure où les gens... En fait, tout est lié aux compétences des gens, hein? Je veux dire... Bien
sûr, ça prend la connaissance, je dirais, il faut être capable de déjà travailler… être capable de pouvoir travailler en
français, mais tout est lié à la compétence. Ce que nous avons besoin…
Tantôt, je vous disais que 70 % des emplois qui se créent actuellement
demandent au moins un diplôme d'études collégiales
et universitaires, c'est parce qu'au Québec on est dans l'économie du savoir,
je dirais, on maintient un petit peu nos
emplois dans le secteur manufacturier, mais essentiellement notre croissance se
fait dans l'économie du savoir, et c'est à ce niveau-là, dans le fond,
où on dit : Actuellement, ce que je cherche, ce sont des personnes qui
sont capables de faire le travail directement.
Bien
sûr, dans un monde idéal, une personne qui parle en français, ça va
probablement être, je dirais, la première
démarche qu'on va faire, mais, si jamais… — encore une fois,
tantôt je parlais de perle rare — si je trouve la perle rare qui
serait, par exemple, mettons, un unilingue anglophone, on préférerait que cette
personne-là puisse... qu'on puisse encore
une fois lui dire clairement que, dans un horizon assez court, il faut
comprendre que chez nous, au Québec, on travaille en français et que,
donc, on va estimer que déjà, lorsque tu arrives, que tu devrais déjà être, je
dirais… tu devrais déjà savoir qu'on est très sérieux à ce niveau-là, alors on
veut travailler en français.
Mais
encore une fois, je dirais, c'est surtout la connaissance technique où on
dit : L'emploi que j'ai à créer, là…
Tantôt, quand je vous parlais d'entreprises qui disent : On a des
contrats, mais on n'a pas les ressources. Alors, probablement que cette
entreprise-là dirait : Bien, je serais peut-être intéressée à faire
quelques compromis. J'ai un projet
informatique, et, si cette personne-là dit : Bien, je suis capable de le
faire dans mon coin, je dirais, en parlant en anglais, mais, dans la mesure où il y a un engagement pour lui de
pouvoir travailler en français… Je veux dire, c'est cette forme-là de
flexibilité qui peut jouer.
M.
Tanguay : …M.
Francoeur, et je ne pense pas que vous êtes en train de dire que vous n'auriez
pas un défi très particulier. Mais je reprends
mon exemple. Avec les proportions que vous nous donnez, quatre catégories
d'emploi, et les quatre dernières exigent 50 % et plus la connaissance de
l'anglais, si vous, comme responsable des ressources humaines de l'entreprise
qui est toutes les entreprises du Québec, vous aviez 51 000 nouveaux
arrivants à placer et que les 51 000, sans exception — évidemment c'est un cas d'espèce — n'ont aucune connaissance de l'anglais, zéro, vous devrez les confiner à des postes qui n'exigeront
pas l'anglais et vous aurez un énorme défi pour leur trouver des emplois
qui ne seraient pas ceux uniquement ségrégués, là où il n'y a absolument aucune
exigence de connaître l'anglais. Vous auriez
malheureusement... on ne doit pas dire... Il n'y a pas de petits ni de grands
emplois, mais vous n'aurez malheureusement qu'une catégorie très, très
limitée d'emploi à leur offrir. Alors, c'est en ce sens-là que j'aimerais vous
entendre.
M. Francoeur
(Florent) : Mais tout à fait, vous
avez tout à fait raison. Dans le fond, ce qu'on va privilégier encore une fois, c'est, je dirais, les habiletés,
on pourrait dire, techniques de cette personne-là, bien sûr la
connaissance de la langue française, mais définitivement que l'anglais est
clairement un atout pour, je dirais, les gens qui sont en situation, par
exemple, de recherche d'emploi ou pour les gens de ressources humaines qui
actuellement sont en train d'embaucher.
M. Tanguay : Merci beaucoup. Pas d'autres questions.
La Présidente (Mme
Vien) : M. le député de
Jacques-Cartier.
M. Kelley : Oui. Merci beaucoup, Mme la Présidente. À mon tour,
bienvenue et merci beaucoup pour les précisions.
Je vois, sur la page 8, qu'il y a un paragraphe en haut : «Comme le
montrent les résultats de la consultation des membres de l'ordre, un nombre important d'emplois nécessitent la
maîtrise d'une autre langue que le français. Il est essentiel que l'évaluation périodique des besoins
linguistiques des emplois ne soit pas un frein au dynamisme des entreprises.»
Je pense... Moi, je
représente un comté dans l'Ouest-de-l'Île de Montréal, et c'est souvent des
entreprises qui ont des bureaux à travers le
Canada, aux États-Unis, alors souvent la concurrence, ce n'est pas au Québec,
mais c'est à l'interne de leurs
entreprises d'avoir la division des technologies de l'information transférée à
Montréal plutôt que la garder à
Toronto. On a toujours essayé d'aider nos entreprises, d'encourager les emplois
de Toronto de migrer vers le Québec. Je pense qu'on a tout intérêt
d'avoir ces genres d'entreprises.
Alors,
pouvez-vous juste davantage... C'est quoi la flexibilité, c'est quoi... pour
éviter que quelque chose devienne un frein sur
le dynamisme des entreprises? Avez-vous quelque chose d'un petit peu plus
précis pour nous aider à... c'est quoi la flexibilité? Parce que, je pense, en
tout temps, on a besoin d'une certaine flexibilité et souplesse dans nos
règlements? Parce qu'un règlement souple, parfois c'est presque une
contradiction.
M.
Francoeur (Florent) : Bien, en fait, je vous dirais, encore une fois tout est dans
l'application. En fait, il y a la loi, mais il y a l'application de la loi, si on
peut dire. Et c'est pour ça que nous, on parlait de flexibilité à ce niveau-là,
c'est savoir comment
ça va être interprété. Vous savez, vous êtes dans un comté de l'Ouest-de-l'Île,
vous vous rappelez certainement du cas où des infirmières sont arrivées
de l'extérieur, unilingues anglophones, et qu'on a littéralement retournées parce que, trois ans après, elles ne
maîtrisaient pas suffisamment le travail en français pour pouvoir
fonctionner. On leur a dit : Bien, le… À quelque part, le deal était de
trois ans.
Alors, à ce niveau-là,
dans le fond, l'idée, c'est d'avoir un contrat clair. Pour nous, les gens qui
s'en viennent travailler au Québec, il faut
que le contrat soit clair. On fait de plus en plus de missions pour attirer des
gens pour venir travailler au Québec,
mais il faut qu'au départ dans le fond, dans cette mission-là, on puisse
mettre, je dirais, à quelque part, un
contrat tacite entre l'individu et l'employeur à l'effet qu'on va te chercher,
on aimerait ça que tu viennes travailler chez nous, il y a des emplois chez nous qui t'attendent, souvent des
emplois qui sont très bien rémunérés, mais, encore une fois, avant que tu traverses la frontière, on veut
juste te rappeler qu'à court terme tu dois maîtriser suffisamment le
français pour pouvoir offrir un service. Alors, c'est à ce niveau-là qu'on...
Et même vous allez rencontrer plus tard le Conseil interprofessionnel qui va pouvoir vous en parler plus en détail, mais
l'idée, dans le fond, c'est d'introduire à quelque part des mécanismes
de flexibilité, c'est-à-dire dans l'interprétation, à quelque part, de ces
lois-là.
• (15 h 50) •
M.
Kelley : Parce
que, il faut noter, souvent ces personnes vont travailler souvent en anglais.
Parce que j'ai des entreprises, dans mon comté, où 90, 95 % de leurs clients soit aux
États-Unis ou soit dans les autres provinces canadiennes. Alors, dans le quotidien… Et c'est plus difficile
de maîtriser le français. C'est beaucoup plus facile... Quand je suis
arrivé ici comme attaché politique, il y a
23 ans, de l'Ouest-de-l'Île de Montréal, c'est un apprentissage, un bain
linguistique. Mon patron était Claude
Ryan, l'ancien rédacteur en chef du Devoir, alors j'avais vraiment
un professeur hors pair pour la langue française.
Mais, si j'arrive de Toronto pour travailler dans une entreprise où, la plupart
de la journée, on travaille avec les clients
à l'extérieur du Québec, c'est quand même bon pour l'économie québécoise
d'avoir ces entreprises établies ici plutôt qu'à Mississauga parce
qu'ils paient des impôts ici et sont des personnes importantes pour le
dynamisme de notre économie, mais il faut de la flexibilité.
Alors,
c'est toujours ça que je cherche à mieux comprendre, comment on peut s'assurer…
les bons équilibres. Parce que, trop souvent, j'ai des personnes dans mon comté qui essaient
de recruter des personnes et des mandats additionnels pour leur
entreprise, et la maison mère, qui est aux États-Unis, qui est en Europe, va
regarder aller tout ça : Bon, peut-être
que c'est plus facile d'aller s'installer à Mississauga plutôt que faire ça sur
l'île de Montréal, ce que je trouve
regrettable. Alors, je cherche toujours... Je ne remets jamais en question
l'économie générale qu'il faut travailler en français, ce n'est pas ça, mais de toujours avoir ce genre de
flexibilité, que tout ça, dans vos mots, ne devienne pas un frein pour
l'expansion de l'économie montréalaise.
M.
Francoeur (Florent) : Et c'est pour ça, dans le fond, que, pour la flexibilité, bien on peut
aussi parler, à quelque part, je dirais, de
travailler plutôt en modules. C'est-à-dire qu'on sait actuellement dans quels
secteurs d'activité, par exemple, on a de la rareté de main-d'œuvre, dans
certains secteurs, on a des pénuries de main-d'œuvre qui peuvent ralentir le
développement des entreprises. Et, à ce moment-là, on dit : Bien là, c'est
là qu'on peut, à quelque part, être plus...
Dans certains secteurs d'activité, on peut être moins flexibles, dans d'autres,
on pourrait l'être un peu plus. Tout est sujet à interprétation à ce
niveau-là. Mais on ne peut pas le traiter en mettant juste soit une date, soit... Lorsque des entreprises cessent ou
ralentissent leur croissance parce qu'elles ne sont pas capables d'attirer de
gens, je dirais, c'est toute l'économie
québécoise, c'est nous, comme Québécois, qui en subissons les conséquences,
dans le fond. Alors, l'idée, c'est d'y aller avec un peu plus de... en fait, de
fuir le mur-à-mur, si on peut dire.
La Présidente (Mme
Vien) : Merci, monsieur. M. le député
de LaFontaine.
M.
Tanguay : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Et justement, dans ce monde extrêmement tangible
et concret dans lequel vous évoluez, vous,
conseillers en ressources humaines, vous précisez, à l'intérieur de notre
mémoire : «L'ajout...» Parce
qu'évidemment on sait que, là, le projet de loi n° 14 fait en sorte que,
pour ceux qui sont assujettis, dont les PME, il faudra prouver chacun
des postes, le démontrer. Donc, évidemment, il faut prendre le temps d'en faire
une évaluation, le temps évidemment de communiquer le tout à l'office et
d'attendre que l'office nous revienne avec probablement des éléments à modifier,
à changer. Et là ça enclenche une correspondance qui pourra avoir un impact plus grand — c'est le paradoxe — au fur et à mesure que l'on diminue le nombre d'employés.
À un certain moment donné, vous n'êtes plus
là, vous autres, il n'y a pas de conseillers aux ressources humaines
malheureusement, et là c'est le propriétaire unique et le propriétaire de
l'entreprise qui en a le fardeau.
Vous
parlez de soutien adéquat. L'ajout est au-delà des grands débats de société et
des effets de toge, en disant : On va
modifier la Charte de la langue française. Vous dites quelque chose de très
tangible qui parle beaucoup : «L'ajout pour l'employeur de l'obligation
d'implanter des mesures de francisation — comme on vient de le voir — dans son entreprise doit aller de pair avec
l'assurance que l'office a la capacité de lui assurer un soutien adéquat.» Et
là on n'en est pas à la modification de la
charte, on en est dans le jour, le jour, là. Lundi matin, 9 h 15, là,
qu'est-ce que l'office pourrait faire en sorte... ou devrait faire en
sorte de vous donner comme outils pour faire en sorte que cette avancée vers la
francisation-là soit... ait des résultats tangibles? Je ne sais pas si vous
avez des exemples.
M. Francoeur
(Florent) : En fait, encore une fois,
je vais vous répondre par la... Je dirais, probablement que l'élément premier, c'est l'interprétation, je vous
dirais, avec flexibilité. Ça pourrait probablement être, je dirais,
l'outil le plus important. C'est-à-dire que,
si on se met, du jour au lendemain, à interpréter la loi au sens strict, les
entreprises vont avoir de la misère. Alors que l'on dit : Si, dans
certains... Je me répète, mais, si, dans certains secteurs d'activité, on se dit : À ce
moment-là, on va faire preuve d'un peu plus de souplesse… Dans certains
secteurs, on n'en a pas besoin, dans d'autres, on en a un peu plus.
Alors, à quelque part, c'est cette pondération-là qu'il faut exprimer.
Vous
savez, tantôt, vous parliez des postes à combler. Je dirais, normalement,
lorsqu'on est en ressources humaines, on va avoir un poste à combler, on va écrire sur
papier un peu, je dirais, le profil du candidat parfait. Et, dans certains
cas, on va dire : Bon, bien, là, dans
trois, quatre ans, je vais peut-être penser, je dirais, à développer vers l'international,
alors je vais exiger que... je vais demander
que mon candidat idéal soit... maîtrise... puisse travailler, bien sûr, en
français, mais avec une connaissance minimale de la langue anglaise. En
pratique, lorsqu'on arrive avec, je dirais... lorsqu'on a les candidats devant nous, il y a toujours un choix
entre, je dirais, la dizaine de qualités d'un versus la dizaine de
qualités de l'autre, et qui sont, je dirais, souvent avec une certaine forme de
convergence, mais souvent avec des différences, et on fait des…
Je
dirais, un processus d'entrevue, c'est une question de compromis. Alors, dans
beaucoup de cas, encore une fois — lorsqu'on on faisait référence au tableau tout à l'heure — si on dit que, dans beaucoup de cas, dans la majorité des postes cadres, on va exiger, je dirais, des
connaissances de la langue anglaise, il peut arriver que, pour un poste de contrôleur qui va travailler juste à l'interne
avec... dans l'entreprise, bien l'exigence de la langue anglaise ne sera pas
du tout importante, alors que, dans un autre
cas, bien le vice-président ressources humaines ou vice-président finances,
qui, lui, doit se déplacer continuellement à
l'étranger parce que nos projets sont là, bien là l'exigence de la langue
anglaise... je dirais, la connaissance de la langue anglaise va être un facteur
de discrimination.
La Présidente (Mme
Vien) : Sept secondes, monsieur...
M. Tanguay : Merci beaucoup. Merci.
La Présidente (Mme
Vien) : C'est tout le temps qu'il lui
fallait pour vous remercier. Il aura l'occasion de le faire plus avant tout à
l'heure. Alors, je cède la parole maintenant à la députée de Montarville pour
une période, Mme la députée, de 5 min 30 s.
Mme
Roy (Montarville) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci, madame, merci, monsieur,
merci pour votre mémoire. De mémoire, vous
êtes le premier ordre professionnel qui est devant nous. Et j'aimerais un petit
peu dépasser le cadre de votre mémoire,
parce que, ce qui est intéressant aussi, c'est que, dans le projet de
loi n° 14, il y a des mesures
qui vont toucher le Code des professions. À moins que je ne m'abuse, vous êtes
soumis au Code des professions puisque vous êtes un ordre professionnel.
D'entrée de jeu, je
veux vous dire d'abord que, tout comme vous, nous croyons que le droit de
travailler en français au Québec, c'est
important. Mais, pour un ordre professionnel, les nouvelles mesures, qui seront
les articles 61 et 62 du pl n°14, je voulais juste savoir un petit peu
votre pouls là-dessus, sans élaborer de façon exhaustive, mais les nouvelles
mesures vont faire en sorte que les exigences linguistiques menant à la
délivrance d'un permis par un ordre professionnel, donc par vous, ces nouvelles
exigences linguistiques seront rehaussées. Vous en pensez quoi? Vos membres en
pensent quoi, surtout vos membres en devenir, là, qui s'en viennent?
M. Francoeur
(Florent) : Bien, en fait, je vous
dirais, globalement, entre autres, vous allez avoir le Conseil interprofessionnel qui vient quelque part au mois
d'avril et qui représente, en fait, les 44 ordres professionnels. Et je
peux vous dire qu'on souscrit à l'ensemble
des recommandations qu'ils font à ce niveau-là. Mais essentiellement, encore
une fois, c'est... Oui, il y a un
rehaussement des exigences. Pour nous, ça cause... je dirais, on est
relativement à l'aise avec ça. Ça correspond bien avec ce qu'on voit sur
le marché, avec les exigences du milieu du travail, et, je dirais, on est quand
même relativement à l'aise avec ça.
Mme
Roy (Montarville) : Parfait. Je vais passer à un autre sujet, j'ai peu de temps. Puis là on
va passer à une bonne nouvelle parce que, dans votre mémoire, vous arrivez avec une
statistique d'Emploi-Québec qui est très intéressante sur laquelle... il faudrait se rappeler cette
statistique. Il va se créer «au Québec, entre 2010 en 2020, 316 000
nouveaux emplois. [Et,] durant cette même
période, il sera nécessaire, principalement en raison des départs à la
retraite, de remplacer 27 % de
la main-d'oeuvre [qui est] actuellement en emploi. [Alors,] Emploi-Québec
estime que le marché de l'emploi devra accueillir près de
1,4 million de travailleurs au cours des 10 prochaines années», en fait,
sur ces 10 ans. Alors, c'est un défi de
taille, qui nous attend, mais un défi intéressant. Et vous, en tant que
spécialistes des ressources humaines, quel sera le défi? Parce que les
immigrants seront une grosse portion de cette main-d'œuvre-là. Dans quelles
mesures ils faut les franciser? Et on en a besoin.
M.
Francoeur (Florent) : En fait, les défis sont très, très grands à ce niveau-là. Mais
essentiellement, dans le fond, la réponse se
situe au niveau de, bien sûr, nos jeunes, parce que 1,4 million d'emplois
à combler au total, il y a un... Actuellement,
il y a plus de gens au Québec qui quittent le marché du travail que des gens
qui arrivent sur le marché du travail, et ça comprend l'immigration.
Alors, la solution passe par les jeunes, alors, je dirais, contrer le
décrochage.
Un
meilleur accueil des immigrants. Actuellement, là, on en parle, mais on pense
que les immigrants devraient être à hauteur de
17 %. La Colombie-Britannique a 29 % de ses travailleurs, je dirais,
des gens qui sont nés à l'extérieur du pays,
l'Ontario a 27 %, nous, sauf erreur, je pense qu'on est à 13 %.
Alors, il y a des efforts importants à faire, en fait. Et moi, je prends
souvent l'image de dire : Il faut qu'au Québec on passe de immigrants
voleurs de jobs à immigrants créateurs de richesse pour le Québec.
Mme Roy (Montarville) : Il y a toute une différence.
M.
Francoeur (Florent) : Toute une
différence.
Mme
Roy (Montarville) : Et, en terminant,
vous valorisez ou priorisez les mesures qui sont des mesures d'accompagnement
de l'office pour aider vos entreprises, aider vos clients?
M. Francoeur (Florent) : En fait, des mesures, d'abord, je
dirais, de... Il faut que ce soit clair, il faut que les règles du jeu soient
claires au départ, mais, en même temps aussi, il faut pouvoir donner des outils
à ces gens-là. Ces gens-là, dans le
fond, vont devoir appliquer, tout à coup, du jour au lendemain, une autre loi,
de nouveaux formulaires, alors il faut être capables, dans le fond, de
rendre ça le plus simple possible.
Et je soulignais, à cet égard-là, que
quelques exemples récents, notamment la Loi sur l'équité salariale, bien ça ne s'est pas... je dirais, on ne peut pas dire que ça a
été un très, très grand succès, là. On est encore à... C'est une loi qui est applicable, qui touche l'ensemble des
travailleurs québécois et pour laquelle on n'a pas encore réussi à faire en
sorte que toutes les entreprises du Québec se conforment à la loi.
Alors, on se dit : C'est déjà pas fait
dans certaines lois, et on rajoute une autre loi. Et tantôt on a remis en question, je dirais, l'implication des comités sectoriels.
Alors, on dit : Ça va prendre quelqu'un qui va prendre… je dirais, à quelque part, qui va prendre la pôle, qui va aider
les gens. On ne peut pas prendre... d'un côté, dire : On va appliquer
une loi et, de l'autre coté, demander à des
organisations comme les comités sectoriels de dire : Bien là, vous allez
vous arranger avec le travail à faire. Pour nous, tout passe par le
leadership de la commission.
•
(16 heures) •
Mme
Roy (Montarville) : Et, avec le
nombre de mesures qui ont été ajoutées pour les entreprises, toutes les entreprises pratiquement, vous, qui connaissez le
personnel et également l'employeur, vous dites, il y a déjà des lois qui
ne sont pas encore adoptées, l'équité
salariale, celle-ci, telle qu'elle est actuellement, avec le projet de
loi n° 14, comme… sur quelle période? Pensez-vous que ce
serait réalisable d'appliquer chacune des mesures. surtout en ce qui a trait à
l'entreprise?
M. Francoeur (Florent) : Si on travaille avec les mêmes moyens
que ce qui s'est passé avec l'équité
salariale, ça veut dire… on peut parler de
15, 20 ans, on est à plus de 15 ans avec l'équité salariale, et ce n'est pas
encore terminé, alors on peut parler de 15, 20 ans. Si on travaille avec
des moyens différents, on peut aller plus vite.
Mme
Roy (Montarville) : Merci infiniment.
C'est précis. Merci à vous.
La
Présidente (Mme Vien) : M. Francoeur,
Mme Delisle, merci infiniment pour votre contribution. Bon retour et joyeuses
Pâques.
(Suspension
de la séance à 16 h 1)
(Reprise
à 16 h 3)
La
Présidente (Mme Vien) : Alors,
mesdames, messieurs, on va reprendre nos travaux. Nous recevons maintenant
l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec.
Bienvenue, messieurs, dans votre Assemblée
nationale. Ça nous fait grandement plaisir de vous recevoir dans le cadre des auditions du projet de
loi n° 14. Alors, comme pour les autres groupes, vous disposez de 10
minutes pour nous livrer l'essentiel de
votre mémoire. Vous le livrez de la façon que vous le souhaitez et par la suite
s'ensuit un échange entre vous et les parlementaires ici présents.
Alors, qui est le porte-parole?
Association des commissions
scolaires
anglophones du Québec (ACSAQ)
M. D'Aoust (David C.) : ...Mme la Présidente, David Birnbaum,
qui est notre directeur général de
l'association, et M. Frank Verrillo, qui est le vice-président de notre
association.
La
Présidente (Mme Vien) : On vous
écoute, monsieur.
M. D'Aoust (David C.) : Merci beaucoup. Premièrement,
j'aimerais vous annoncer qu'on ne vous ennuiera
pas en lisant notre mémoire, vous l'avez reçu, j'imagine. Alors, quelques
notes. À titre de la voix élue de l'enseignement public anglophone, l'Association des commissions scolaires anglophones
du Québec, l'ACSAQ, si vous me permettez, tient à coeur le résultat du
projet de loi n° 14, lequel résultat compte défendre et promouvoir la
place du français ici, au Québec, notre Québec, que l'on soit francophone ou
anglophone.
Nous exprimons cet intérêt au nom de nos neuf
commissions scolaires qui sont membres et qui représentent près de 100 000 élèves inscrits au 340 écoles
primaires et secondaires, aux centres d'éducation des adultes et de formation professionnelle anglophones ainsi que les
13 000 enseignants professionnels, administrateurs et membres du
personnel de soutien dévoués et qui desservent ces élèves et les communautés
scolaires qui en dépendent partout au Québec.
Les commentaires suivants sont basés sur une déclaration de
la première ministre du Québec, et c'était lors
de son discours inaugural à l'Assemblée
nationale le 20 octobre 2012. J'étais présent. Et, lors de cette allocution,
Mme Marois a déclaré, et je la cite,
qu'«une majorité d'entre nous est d'accord pour défendre et promouvoir la place
du français dans notre société, et
ce, en tout respect de la communauté anglophone». Nous faisons partie de cette
majorité et nous désirons souligner que nous soutenons les deux
objectifs énoncés dans cette déclaration. Mais, avec le plus grand respect,
l'ACSAQ est d'avis que le projet de loi présenté à la commission ne répond à ni
ne valide aucun de ces objectifs.
Maintenir
le taux d'inscription dans les écoles publiques anglophones, ça s'est avéré une
tâche difficile de même qu'une source de préoccupations constantes pour
nous. Le projet de loi n° 14 risque de compromettre davantage
l'avenir de notre réseau scolaire ainsi que
la pérennité de nos écoles et nos centres d'éducation des adultes et formation
professionnelle en faisant fi du rôle incontestable et actif que nos écoles
jouent dans la francisation du Québec.
Le gouvernement actuel
propose de renverser un règlement qui dispense de façon légitime et légale les
enfants à charge de militaires affectés au Québec, des restrictions liées à
l'accès des écoles publiques anglophones du Québec.
Un gouvernement péquiste précédent a reconnu l'importance d'octroyer par
règlement cette exemption militaire. Le
gouvernement actuel affirme qu'il ne fait que corriger une échappatoire de la
Charte de la langue française. Avec tout le respect que je vous dois, surtout ce jeudi avant une longue fin de
semaine, Mme la ministre, l'ACSAQ soutient que le gouvernement élimine
un droit qui devrait être maintenu. Et là-dessus je vais passer la parole à M.
Birnbaum.
M.
Birnbaum (David) :
Merci. À ce sujet, nous vous invitons à considérer le complément d'information
que nous venons
de faire circuler aux membres de la commission et aux membres des médias, qui
présente quelques arguments à la
suite du document déposé jeudi dernier par la ministre auprès de cette même
commission parlementaire. Essentiellement, nous nous penchons sur deux
points clés.
Premièrement,
nous offrons notre point de vue relatif à la suggestion surprenante de Mme la
ministre De Courcy selon laquelle l'exemption
militaire que nous défendons est en quelque part abusée, exploitée et
contournée par les parents membres des forces militaires pour faire fi aux
objectifs de la Charte de la langue française.
Deuxièmement, nous
offrons quelques réflexions relatives à la suggestion de la ministre selon
laquelle nos collègues de la commission
scolaire Central Québec se sont trompés lorsqu'ils soutenaient que le retrait
de l'exemption militaire mettait à risque au moins deux écoles de cette même
commission scolaire. Nous maintenons qu'ils avaient tout à fait raison.
L'ACSAQ
défend l'exemption militaire qui accorde aux familles concernées le droit
temporaire de fréquenter l'école anglaise. La ministre, sans avoir à
modifier la loi de quelque façon que ce soit et à l'appui de la
jurisprudence, a actuellement tous les
moyens à sa disposition pour décider des demandes d'accès permanent à l'école
publique anglophone provenant de ces
parents. La priorité que nous partageons avec nos collègues de la commission
scolaire Central Québec et avec tout notre réseau est de sauvegarder
l'exemption temporaire. Nous soutenons que cela est une priorité légitime et
honorable. Nous avons de la difficulté à décrire la position du gouvernement
actuel de la même façon.
Une voix : M. Verrillo.
• (16 h 10) •
M.
Verrillo (Frank) :
De plus, le projet de loi n° 14 contient beaucoup d'autres dispositions
qui méritent autant notre attention.
Permettez-nous de signaler quelques-unes, dont cette modification de l'article
73.0.1, et je cite : «Il ne doit pas être tenu compte dans l'application
de l'article 73 d'un enseignement reçu en anglais dans le contexte de
l'illégalité d'une fréquentation scolaire. Il en est de même lorsque
l'enseignement en anglais invoqué repose sur une astuce, un subterfuge ou une
situation ponctuelle artificielle dont le seul but est de contourner les
dispositions de la présente loi.» Fin de
citation. L'article 77 de la charte pare déjà un tel événement, et nous ne le
contestons aucunement. Je cite de la
charte : «Une déclaration d'admissibilité obtenue par fraude ou sur le
fondement d'une fausse représentation est nulle de nullité absolue.» Fin
de citation.
L'ACSAQ
est vivement préoccupée par le fait que le gouvernement a jugé nécessaire
d'adopter une mesure si extrême. Il demeure
que nous sommes inquiets que l'impact de cette modification, et malheureusement
peut-être l'intention réelle des
législateurs lorsqu'ils l'ont rédigée, vise à intimer les bureaucrates... la
bureaucratie à établir et à imposer
des barrières, des délais d'attente, des obligations additionnelles aux parents
qui font une demande d'admissibilité à l'école publique anglaise pour
leur enfant.
Plusieurs
commentaires publics ont suggéré que ce projet de loi contient des passages qui
ne relèvent pas que de la rhétorique et de la partisanerie et qui sont donc sans conséquences
importantes. Nous ne sommes pas d'accord. Il s'agit d'un principe
juridique selon lequel les mots doivent avoir une portée juridique. Si
l'exemple cité plus haut a une portée juridique, cela est d'autant plus
inquiétant.
M.
D'Aoust (David C.) : Pour conclure, l'ACSAQ s'est efforcée de sensibiliser la population de
même que les gouvernements successifs aux
efforts substantiels et concluants déployés par le système scolaire anglophone
pour aider chacun des élèves à maîtriser la
langue française et ainsi contribuer pleinement à l'avenir et l'économie du
Québec. Cela est la mission de base des
conventions de partenariat de réussite scolaire cosignées par chaque commission
scolaire, chaque de nos neuf commissions
scolaires et le ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport. Des programmes
hors pair d'immersion française existent de
longue date dans notre système. Au-delà de 75 % de nos élèves sont en
immersion.
Nous ne cachons pas notre déception après
avoir lu les articles à la fois longs et quelque peu redondants qui prévoient des examens et évaluations encore plus poussés
de l'enseignement du français langue seconde dans nos écoles. L'ACSAQ s'est
jointe à un consensus clairement exprimé des Québécois s'opposant à l'intention
de cegouvernement
d'appliquer les restrictions linguistiques de la Charte de la langue française
aux étudiants d'âge adulte désirant
étudier dans un cégep anglophone. Nous sommes reconnaissants que le
gouvernement n'y ait pas donné suite. Merci. Néanmoins, nous sommes
préoccupés par une disposition plutôt vague du projet de loi, article
88.2.1(3), exigeant des cégeps anglophones
d'accorder une admission prioritaire aux élèves provenant des écoles
anglophones. Que les choses soient
claires, l'ACSAQ accorde une grande importance aux cégeps anglophones et au
rôle fondamental qu'ils jouent au nom de la communauté qu'elle dessert.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci, monsieur. Ce sera votre mot de la fin, à moins que la ministre n'en
décide autrement pour vous laisser poursuivre.
Mme
De Courcy : Absolument. Ça me fait
plaisir.
M.
D'Aoust (David C.) : 30 secondes,
madame, pour finir...
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Poursuivez. Poursuivez, monsieur.
M. D'Aoust (David C.) : Ce gouvernement nous a assuré qu'il
partage notre croyance inconditionnelle que
les établissements anglophones du Québec
doivent être activement appuyés et maintenus. Le projet de loi n° 14,
dans sa forme actuelle, va à l'encontre de chacune de ces déclarations.
Merci.
La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci, M. D'Aoust. Alors, la parole
est maintenant à Mme la ministre pour un
échange avec vous.
Mme De Courcy : Alors, messieurs, bonjour. Il me fait
très plaisir de vous revoir à nouveau. Vous me
voyez, par ailleurs, profondément désolée
que votre lecture du projet de loi vous incite à considérer que les propos que
j'ai tenus concernant l'importance de la minorité d'expression anglaise
et l'importance que j'accorde aux institutions ne vous paraissent pas être reflétés. Vous me voyez extrêmement déçue de cela.
Je réitère, par ailleurs, l'importance que j'accorde aux institutions anglophones pour y avoir
travaillé de nombreuses années à ce maintien et à cet équilibre. Je
reconnais d'ailleurs des collaborateurs ici
que j'ai eus. Alors, bon, nous pouvons ne pas partager le même point de vue, ça
ne fera pas en sorte que je ne
tiendrais pas compte des avis que vous mettez, bien sûr, avec beaucoup
d'éloquence dans votre mémoire.
Je viens de prendre connaissance, tout en
vous écoutant... Puisque j'avais lu votre mémoire, ça m'était facile de prendre connaissance des différentes questions que vous
remettez de l'avant. Et j'avoue que j'aime beaucoup cette approche très pédagogique qui permet des échanges
intéressants et qui permet de confronter des points de vue de la manière
la plus respectueuse et courtoise possible, et c'est ce que je constate à la
réponse des questions que vous mettez de l'avant.
Certaines, je partage votre point de vue, d'autres moins. Je vais vous indiquer
rapidement ce sur quoi je m'interroge et
ce sur quoi surtout je vous indique un profond désaccord. Pour le reste, compte
tenu que j'ai reçu aujourd'hui même et pendant
votre présentation, je me réserve, au retour de la semaine de relâche
parlementaire, le loisir de pouvoir répondre comme ministre à chacune de vos affirmations et de pouvoir aussi donner
ces réponses à l'ensemble des membres de la commission parlementaire,
Mme la Présidente, comme ça, nous aurons un échange plus juste, et bien sûr de
vous le faire parvenir et de le rendre public.
Il
y a une chose, avant de céder la parole à mon collègue Daniel Breton qui désire
vous parler...
Une
voix : ...
Mme
De Courcy : Pardon, il ne faut pas
que je dise ça. Député de... Il faut que je dise député de…
Une
voix : Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mme
De Courcy :
Sainte-Marie—Saint-Jacques, excusez-moi.
Alors donc, avant de lui céder la parole, à la question 4, vous indiquez, au
dernier paragraphe : «La décision de la Cour suprême du Canada ne pourrait
être plus claire, l'accès à l'école publique
anglaise, l'accès permanent…» Bon, et là je ne répéterai pas tout. Ce que vous
dites dans le fond, c'est : Le gouvernement du Québec dispose des
instruments pour... sans modifier l'exemption, qu'on peut se prévaloir des outils existants pour refuser ces
demandes. Ce n'est pas ma lecture, ce n'est pas notre lecture et ce n'est
pas la lecture des services juridiques du ministère, pas depuis le jugement de
la Cour suprême. Alors, je vous inviterais... Je
ne débattrai pas de ça avec vous aujourd'hui, mais je vous inviterais, de votre
côté, comme je le ferai du mien… Je vais refaire une vérification pour être bien certaine que nous ne nous
trompons pas. Mais j'avoue l'avoir vraiment, vraiment vérifié depuis un
bon moment...
M.
Birnbaum (David) : ...même si on peut
répondre pour assurer qu'une compréhension de votre...
Mme De Courcy : O.K. Je vous en prie. Je vous en
prie. Je veux juste qu'on ne soit pas dans un débat juridique. Ce n'est pas
le lieu. Mais honnêtement je suis très étonnée que vous affirmiez cet élément.
Mais… Parce que, si c'est le cas,
vous comprenez que, si ceci est vrai, ça sera vrai pour un grand nombre de cas
entourant les écoles passerelles. Et j'avoue que les parlementaires de
toutes les formations seront très surpris que nous ayons cette possibilité-là.
Je vous écoute sur cette question.
La
Présidente (Mme Vien) :
M. Birnbaum.
Mme De
Courcy : J'en aurai une autre après.
M.
Birnbaum (David) :
Si je peux, parce qu'on veut que notre position soit comprise. Puis on va avoir
le débat à un
moment donné. On parle ici d'une jurisprudence qui est tout à fait pertinente,
à notre lecture, et c'est le cas Gosselin devant la Cour suprême dont on est d'accord entièrement. Et ça parle
d'un critère qui passe devant les autres, c'est-à-dire que Québécois francophone, en principe, voilà l'un
des noeuds de l'affaire, de la Charte de la langue française, n'est pas
éligible à l'école anglaise. C'est la décision Gosselin, ce qu'on accepte
entièrement.
Deuxièmement,
ça met en contexte le coeur de notre position sur les militaires. On vous dit
fièrement et clairement qu'on parle d'une
exemption, pas un séjour temporaire comme un autre, une exemption due aux
particularités tout à fait claires et
pertinentes, qui ont été reconnues d'ailleurs par l'ancien premier ministre du
Québec et les gens à l'origine de la
Charte de la langue française. C'est une exemption qu'on cherche. Ça n'a rien à
faire avec l'accès permanent. Et, comme on dit, la décision de la Cour
suprême dans l'affaire Gosselin, de notre lecture, donne la marge de manoeuvre
nécessaire à la ministre.
• (16 h 20) •
Mme
De Courcy :
Pendant que vous évoquiez l'arrêt Gosselin — que j'avais vu — autour de
cette question-là, la juriste qui est derrière moi, qui travaille sur le projet de loi m'indique
et réitère que non. Il y a des dispositions, que je vous expliquerai plus avant, qui, depuis le
jugement de la Cour suprême, nous indiquent que ça ne peut pas être
soumis.
Maintenant, je trouve
intéressant que vous ayez mis votre point de vue de l'avant, maintenant... Et
je ne vous demande pas de me répondre
sur-le-champ autour de cette question-là. Et, comme je veux faire les
vérifications nécessaires pour rendre justice à votre mémoire, je vous
le réitère, nous allons vous redonner les informations que nous avons. Je
fonctionne de façon très transparente, vous le savez. Et ça va me faire plaisir
de vous les donner, comme vous l'avez fait pour nous.
Par
ailleurs, vous dites : Ceci, cette question 4 fait en sorte que c'est
là-dessus que nous nous reposons pour la question de cette exemption. La question que je
pose, c'est : À partir du moment où le gouvernement du Québec
n'aurait pas cette possibilité-là, et je
suis convaincue qu'il ne l'a pas, bien je présume que ça modifiera votre point
de vue. Alors, je ferai donc les
démarches nécessaires pour clarifier la situation et la clarifier pour la
commission parlementaire. Je répète
que le comité des législations du gouvernement du Québec et la légiste qui
travaille au dossier nous indiquent que non. Je vous invite à revisiter
le jugement de la Cour suprême. Ça sera très important pour la poursuite des
débats.
M. D'Aoust (David
C.) : ...Mme la ministre, pour nous,
de revoir notre décision et notre réponse, mais... Et vous agissez comme bon prof, vous recevez du matériel de vos élèves et
vous voulez le vérifier, c'est beau, mais on reste fermes là-dessus, et
j'espère qu'on aura un bon résultat.
Mme
De Courcy :
Bien, écoutez, si vous avez raison, je le reconnaîtrai avec grand plaisir, mais
je ne m'attends pas à ce que nous soyons dans cet univers-là, pas du tout. Vous
comprenez que c'est la première chose qu'on a vérifiée. Je vous en
remercie. M. Breton va s'adresser à vous.
La Présidente (Mme
Vien) : Alors, c'est bien le député
de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mme De
Courcy : C'est vendredi après-midi.
La Présidente (Mme
Vien) : Jeudi.
Mme De
Courcy : Jeudi.
Des voix : Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme
Vien) : Il n'y a pas d'offense, Mme
la ministre. Alors, M. le député.
M.
Breton : Merci,
Mme la Présidente. Bonjour, messieurs. Moi, je vais commencer par vous dire une chose : Je suis fils de militaire. Mon père était
dans la Royal Canadian Air Force. Il a travaillé sur l'Avro Arrow. Ça doit vous
dire quelque chose, ça?
Une voix : …
M.
Breton :
Oui. Et puis moi, mon père m'a beaucoup raconté la difficulté monumentale qu'il
a eue à parler en français dans l'armée. Et je
pourrais même vous dire que ce n'était pas seulement une difficulté de parler
français, mais il y avait une discrimination très claire.
Cela
dit, j'ai été choqué à plusieurs reprises, depuis quelques jours, par
l'amalgame qu'on a fait à dire que c'est de ne
pas reconnaître le sacrifice qui a été fait par les militaires qui se sont
battus dans la guerre de Corée et dans la Deuxième
Guerre mondiale que la disposition du projet de loi n° 14 par rapport aux
militaires, c'est comme si, dans le fond, on disait : On ne les
honore pas.
Honnêtement, ça me choque parce que, si on retourne un peu
dans le passé, messieurs, on se rend compte
qu'il fut une période où il y avait des gens qui avaient des privilèges, à
l'époque seigneuriale, en fonction d'un statut que ces gens-là s'achetaient — par exemple, on s'achetait des titres de noblesse — dans un cadre prédémocratie. Que je sache, quand les gens sont
allés se battre, ces soldats-là sont allés se battre pour défendre des valeurs
démocratiques. Ces gens-là se sont battus pour des valeurs auxquelles on
croit et ils croient. Je vois mal comment ces gens-là, qui disent être allés se
sacrifier pour des valeurs démocratiques,
des valeurs de respect, pourraient se sentir — comment
dirais-je? — non respectés par le projet de loi n° 14. Je vais vous dire
honnêtement, ça me choque. Je suis certain que, si mon père était encore
vivant, il serait encore beaucoup plus choqué que moi.
Une voix : ...
M.
Breton : Je n'ai
pas fini. Je pense que, lorsqu'un militaire francophone veut faire en sorte
d'enseigner que son fils ou sa fille puisse parler anglais, il peut très bien faire comme
moi, et tous les gens de ma génération l'ont fait, aller à l'école française puis apprendre l'anglais. Tous
les gens de ma génération, tous les gens que je côtoie, à 95 %,
sommes allés à l'école française et avons appris l'anglais. I speak fluent
English. I understand you perfectly well.
Et,
là où ça devient intéressant, c'est que vous parlez du fait que vous avez fait
des efforts concluants dans les écoles anglaises pour faire apprendre le français
aux gens des communautés anglophones. J'ai ici devant moi le mémoire du Comité des enseignants de français langue
seconde des collèges du Québec. Et je vais lire ce qu'ils écrivent dans
leur mémoire. «Le fait que les étudiants du
collégial suivent leurs derniers cours obligatoires […] exige que nous […]
mesurions l'atteinte du niveau de maîtrise [du français]. Si le secteur
francophone sanctionne les compétences en français avec l'Épreuve uniforme […], un test standardisé, le secteur anglophone ne
mesure rien d'autre que la compétence liée aux cours suivis par ces
étudiants. Donc, nous n'avons pas [de] mesure standardisée du niveau de maîtrise
pour chacun des étudiants sur une échelle précise combinée à des données
sociodémographiques, une lacune qui empêche de bien comprendre la
problématique. […]En termes clairs, nous n'avons aucune donnée valide sur le
niveau de maîtrise des étudiants qui nous permettrait de décrire présentement
leurs compétences.»
Ça
fait qu'à la lumière de ce que je découvre de la part de ces enseignants et à
la lumière de ce que j'ai constaté, c'est que la réalité, c'est que oui, je vous le
dis, j'ai des amis anglophones qui parlent bien français, mais la
proportion de gens francophones qui parlent
un bon anglais est de beaucoup supérieure au nombre de gens anglophones qui
parlent bien français. Ça fait que ce
que j'entends... J'entends vos commentaires, mais je dois vous dire qu'à bien
des égards je vois là-dedans des choses avec lesquelles je suis en
profond désaccord. Je voudrais avoir vos commentaires là-dessus.
La Présidente (Mme
Vien) : Je pense qu'ils vont se faire
un plaisir de vous les donner, leurs commentaires. M. D'Aoust, vous aviez envie
d'intervenir tout à l'heure. Alors, c'est important de laisser le parlementaire
faire ses observations. La parole est à vous, on vous écoute.
M.
D'Aoust (David C.) : Je veux juste dire au député de Sainte-Marie que je suis un ancien
militaire, moi aussi. Puis, à l'époque, dans les années 1960, ce n'était pas plaisant d'avoir
un nom comme D'Aoust dans la marine. Je comprends d'où vous venez. Mais, depuis ce temps-là, on a
fait beaucoup de progrès. Être respectueux pour nos militaires et même l'inverse, les militaires pour les règlements et
ce qui se passe au Québec, c'est assez modeste d'insister qu'ils
respectent ce qui se passe au Québec. Bien d'accord.
Je
dois vous dire ceci, qu'il n'y a pas un militaire qui est francophone, que,
s'il veut faire instruire ses enfants hors d'une base militaire au Canada, sur 25, il y en a
24 qui offrent l'enseignement en français. Ça a évolué. Tu n'osais même pas dire… parler en français, à Victoria, quand
j'étais dans la marine. C'était quasiment contestable par tout le monde.
Tu étais haïs parce que tu étais francophone. Mais on a évolué.
Par
rapport à l'apprentissage du français puis à l'apprentissage de l'anglais, je
suis content que vous me disiez que vos amis francophones parlent bien anglais.
C'est la même chose avec moi, mais c'est dans ma perspective et c'est
dans ma communauté où je demeure. Ils ont fait un grand effort d'apprendre
l'anglais. Pensez-vous que l'anglais était
ma langue maternelle? Pas du tout. J'avais une mère qui était écossaise, puis
c'est mon père qui insistait que je parle français. Puis il était
francophone pure laine et avait de la misère à parler anglais, même quand il a
marié ma mère.
• (16 h 30) •
Tout ça à part, nous
avons beaucoup de respect pour nos hommes militaires et nos femmes militaires.
Tout ce qu'on demande, c'est de maintenir ce
qui existait dans la loi 101 au début. C'était une... pas un permis temporaire,
mais un brevet temporaire, exemption temporaire, pour assister à l'école
anglaise. Je pense que, si vous étiez dans leur cas aujourd'hui, vous diriez la même chose. On ne demande pas que ce soit
échangeable au bout de la ligne pour un certificat d'admissibilité
permanent. Ce n'est pas ça qu'on demande du tout. On demande qu'on respecte ce
qui est déjà écrit dans la loi 101. Pour que
ça aille plus loin, contourner la loi, Mme la ministre nous l'a annoncé, j'ai
de la misère à accepter que ces
gens-là utilisent ce certificat temporaire pour contourner la loi. Ils peuvent,
comme tout le monde, O.K.,francophones
ou autres, faire application à recevoir l'admissibilité à l'enseignement en
anglais, mais la ministre peut la refuser.
Puis, quant aux
cégeps, tout ce qui se passe par rapport à l'évaluation au cégep, c'est hors de
mon domaine, premièrement. Mais la ministre Malavoy ne me semble pas très
préoccupée par l'évaluation qui se fait au cégep. Je sais qu'on parle souvent de l'état de la langue française, tout le monde
le critique au lieu d'être fier des pas avancés par la population du
Québec par rapport au français, et on devrait se féliciter, mais non, on
continue à critiquer. Imposer cette
évaluation, je crois, relève du pouvoir de la ministre de l'Éducation, puis, si
elle décide, j'espère qu'elle aura la bonté de nous consulter. C'est
tout ce que je peux vous dire là-dessus.
Une voix : …est-ce que je peux insister sur juste un autre point?
La
Présidente (Mme Vien) : Monsieur...
monsieur…
Mme De Courcy : ...vraiment poser une question suite
aux commentaires que vous venez d'émettre,
d'ailleurs, où vous dites : Nous
serions d'accord pour revenir à l'application de la loi 101 originale ou
originelle, appelons-la comme ça. Et
vous dites... vous avez évoqué la question du droit permanent pour la
descendance que vous seriez prêt à laisser aller. Est-ce que c'est ça
que je comprends?
M. Birnbaum (David) : ...qu'il y a deux questions, ici. Il
y a l'exemption militaire qu'on défend, comme
vous voyez, du début à la fin. Notre point, c'est qu'il y ait des modalités
sans... pas sans condition, il y a des modalités à la disposition du bureau d'admissibilité, avec qui on a affaire chaque
jour, qui vous donnent les moyens nécessaires pour juger ces demandes
une fois qu'ils sont… il y a la demande de muter ça à un accès permanent. Ce
n'est pas à nous de donner des réponses à ces demandes-là. Nous insistons que
vous avez les moyens que vous avez besoin là-dessus.
J'insiste sur une chose quand on parle des
militaires. Vous allez... vous constatez qu'on avait deux volets quand on parle de ça.
Et un suit les paroles de la ministre, si je peux… ainsi que la première
ministre. On parle de la pérennité de notre système aussi. Et voilà des
étudiants... C'est un à un qu'on les...
Mme
De Courcy : Mais je suis intervenue
sur la question de la pérennité des institutions. Je vous repose ma question, parce que… admettons, admettons que nous
sommes dans l'hypothèse où il y a exemption des militaires, seriez-vous
prêts, si le gouvernement du Québec avait les moyens — je dis bien «si», et nous sommes dans une fiction — à renoncer au droit permanent à la descendance? C'est la
question que je vous pose.
M.
Birnbaum (David) : ...choix.
Mme
De Courcy : Très bien.
M.
Birnbaum (David) : Pour nous, c'est
inscrit dans la loi.
Mme
De Courcy : Merci. C'est votre point
de vue autour de ça. Très bien.
M.
Birnbaum (David) : C'est notre
compréhension.
Mme
De Courcy : J'ai bien compris.
La Présidente (Mme Vien) : M. D'Aoust, ça complète? M. Birnbaum?
Ça complète aussi. Autres questions du côté
ministériel? Ça va?
Mme
De Courcy : ...mais je vous remercie
de la franchise de l'échange.
La
Présidente (Mme Vien) : Bien. Nous
passons maintenant du côté de l'opposition officielle avec notre collègue le
député de Jacques-Cartier, pour une période, M. le député, de 22 minutes.
M. Kelley : Merci beaucoup, Mme la Présidente. À
mon tour, bienvenue aux représentants de, pour moi, QESBA, mais je vais
m'habituer à votre acronyme en français, mais... surtout M. D'Aoust, que je
connais depuis longue date. C'est quelqu'un qui était entre autres un
sous-ministre associé au ministère de l'Éducation, a travaillé dans le milieu
de l'éducation depuis plusieurs années. Alors, merci beaucoup pour votre
présence ici aujourd'hui pour le partage de votre expertise et votre engagement
tout au long de votre carrière envers l'enseignement.
On va prendre bonne note du document que vous
venez de distribuer sur les militaires. Comme vous savez, notre formation
politique appuie votre position. Je pense que le statu quo au niveau de la
question des militaires est quelque chose
qui est souhaitable, alors... Et on est très conscients de l'impact d'enlever
17 % des effectifs de la commission scolaire Central Québec, qui est une des neuf commissions
scolaires dans votre association. C'est serait une affaire
catastrophique pour la commission scolaire, ça met en question l'existence de
certaines de ces écoles. Alors, je ne reviens pas sur la question, je suis
convaincu, alors...
Mais je veux juste… Dans vos réponses à la
question n° 2, je vois
certaines données très, très partielles quant
à la question de… Est-ce que vous avez
évoqué un taux de roulement de la clientèle de 30 %? Le document que la
ministre a déposé suggère quelque chose contraire. Moi, je n'ai pas les moyens,
mais alors, s'il y a des données additionnelles à ce sujet pour éclairer les
membres de la commission, je pense que ça peut être important. J'ai vu qu'il y avait un article publié par une
journaliste ici, à Québec, qui a questionné certains... Je ne dis pas
juste qu'entre les demandes et les permis qui ont été donnés, il y avait
peut-être une nuance importante à donner au document que la ministre a
distribué il y a une semaine. Alors, je pense, dans un effort pédagogique, si
on peut avoir l'heure juste dans la mesure
du possible. Vous évoquez ici une année, 2001‑2002, où on parle de cinq sur 37
ou… en tout cas. Alors, si on peut
avoir un portrait encore plus complet, je pense que ça peut être intéressant.
Mais, comme j'ai dit, mettre tout ça à côté, de notre formation
politique, la position que vous prônez de maintenir une exemption pour les membres des forces militaires telle qu'elle
existait depuis 36 ans, notre appui est acquis dans cette question.
Et je reviens toujours un petit peu dans la foulée des
commentaires du député de Sainte-Marie—Saint-Jacques,
je vois, sur page 9 de votre mémoire, on parle de 88.0.1 et 88.0.2, c'est le
nouvel article, et surtout : «Le diplôme [des] études secondaires ne
peut être délivré à l'élève qui n'a du français, parlé et écrit, la
connaissance exigée par les programmes du
ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport.» Mes enfants ont dû finir
secondaire V et les examens existants.
Alors, qu'est-ce qu'on ne fait pas encore qu'il faut faire additionnellement
pour faire la preuve de leur connaissance de la langue française? Il y a
tout un régime pédagogique qu'appliquent de la première année du primaire
jusqu'au secondaire V tous nos élèves dans nos écoles. Et je vais toujours
insister, je vais saluer les commissions scolaires anglophones pour tous les
efforts que vous avez faits depuis 40 ans pour améliorer la qualité de la
langue française enseignée à nos enfants dans vos écoles. Bravo.
Alors,
quand je lis ces deux... C'est quoi, la preuve additionnelle? Moi, je pense, la
preuve est déjà faite que, dans les écoles anglaises au Québec, il y a un
engagement profond des commissaires scolaires, des parents, de tout le
monde, des enseignants, qui veulent que nos
enfants sortent avec une bonne connaissance de la langue française. Alors, je
lis ces deux articles, et qu'est-ce que ça prend de plus pour faire la
preuve de notre engagement envers le fait français?
M.
D'Aoust (David C.) : Pour nous, M. Kelley, on croit que l'évaluation est assez complète dans
notre réseau anglophone.
Il ne faut pas oublier que plusieurs de nos élèves, lorsqu'ils arrivent au
secondaire, suivent le programme en français,
ce n'est plus français langue seconde, c'est le programme de français que le
jeune va recevoir dans une école secondaire francophone au Québec. Et,
au bout de la ligne, secondaire V, ces élèves-là vont écrire le même examen, français langue maternelle. Et, surprenant, on a
eu une commission scolaire qui est au-dessus de la moyenne et qui a
atteint au moins un pourcentage de 95 % de réussite sur cet examen-là.
Autre
que ça, dans chacune de nos commissions scolaires, on encourage les élèves
d'écrire leur secondaire V en français,
l'examen d'évaluation du français langue maternelle. Et pourquoi? Parce que,
s'ils l'ont complété et ils ont réussi, ça
s'applique à la loi 101 s'ils deviennent un membre d'un ordre professionnel.
Deuxièmement, ils n'ont pas besoin d'écrire
un deuxième examen en français langue seconde. Mais, oui, on est fiers puis on
continue à évaluer pendant le premier cycle, deuxième cycle et troisième
cycle du primaire et au secondaire.
Je
vais vous dire aussi, parce que j'enseigne dans une école francophone, que
l'anglais langue seconde est aussi évalué,
mais très peu d'élèves vont écrire leur examen en anglais langue maternelle.
C'est dommage — je pense aux commentaires de votre collègue en face, là — c'est
très dommage parce que je pense qu'il y en a qui peuvent le faire.
• (16 h 40) •
M.
Kelley : Oui,
parce que j'essaie de comprendre 88.0.2, qu'est-ce qu'il faut faire de plus.
Parce qu'en tout cas il y avait tout le stress
dans notre maison, de mes enfants qui ont dû passer ces examens existants. Et,
si, comme législateurs, on va ajouter
encore... C'est quoi qui est cherché ici? Pour moi, les examens de secondaire V
sont exigeants, sont déjà en place
dans l'ensemble de nos écoles anglaises, alors qu'est-ce qu'on cherche de plus
avec ça? Je ne comprends pas. Puis je veux revenir sur page 6, et il y a
un autre... Oui?
M. D'Aoust (David
C.) : ...je vais vous dire que je
rencontre plusieurs élèves dans une journée. J'ai même enseigné la première
période avant de venir ici ce matin. Puis mes élèves me disent souvent :
J'ai de la difficulté en français. Leur langue maternelle. Alors, peut-être, on
est trop exigeants? Je ne sais pas. Ils ont toujours peur des examens de fin d'année, toujours. Ils ont plus de
confiance à écrire, comme ils disent, mon maudit examen en anglais langue seconde.
M.
Kelley : Oui, il
faut reconnaître le génie de l'anglais qui a créé le mot «the» plutôt que «le»
et «la». Ça simplifie la vie beaucoup, hein? Alors, il n'y a pas de concordance, il n'y a pas
le «e» additionnel qu'il faut mettre sur ça. Enfin, brillant. Je n'ai
pas rencontré ce monsieur encore, mais chapeau à lui.
Je veux revenir sur la
page 6 parce qu'il y a un passage, ici, que j'essaie de capter. Je sais que
toutes les questions de l'accès et la
transmission vers les enfants et les petits-enfants, c'est toujours compliqué.
Et vous avez des préoccupations quant
au libellé de 66.0.1. Et c'est un petit peu le jeu entre la Charte canadienne
des droits et également les exigences
de la Charte de la langue française. Et vous avez des craintes entre le
transfert de ces... Parce que l'économie générale était toujours... Il n'y a jamais une perte si les parents font
le choix d'envoyer leur enfant en français s'ils sont anglophones.
Alors, malgré le fait que j'ai mon petit certificat bleu, si je fais le choix
d'envoyer mes enfants à l'école française, le droit de choisir est maintenu, si
j'ai bien compris. Mais, dans le passage, ici, on remet ça en question. Alors,
pouvez-vous m'éclairer un petit peu sur cette question?
M.
D'Aoust (David C.) : Je vais commencer puis je vais passer la parole à M. Birnbaum. Nous
croyons qu'à partir de la troisième génération ça ne devrait pas cesser. C'est un droit
acquis par la loi, octroyé par la loi. Pourquoi l'enlever? Est-ce que ça veut dire... Est-ce que la langue
française et la culture française vont être menacées parce qu'un enfant
de la quatrième génération d'une famille
dite anglophone ou mélangée avec un anglais va décider d'aller à l'école
anglaise? Ça sera peut-être un privilège,
par le temps qu'il arrive là, quand on parle de la façon qu'on baisse de
clientèle. Alors, je crois fortement qu'on devrait respecter ce droit.
Je l'ai pour mes enfants, qui ont décidé d'envoyer leurs enfants à l'école française. Et probablement leurs enfants vont
faire la même chose. Mais est-ce que le contexte va changer après? Je
pense que, si le contexte change, ils devraient avoir ce droit-là.
M. Birnbaum (David) : Nous avons eu de la difficulté à
comprendre la portée de cet article… quelques-unes
des précisions. Mais c'est justement ça, c'est une opportunité peut-être pour
nous de vous sensibiliser, resensibiliser au fait que chaque élève inscrit dans une école
anglaise, c'est par dérogation. On le fait un à la fois. On a tenté de voir
l'impact potentiel de ce changement-là auprès de nos neuf commissions
scolaires, et ils m'ont parlé de centaines d'élèves par année. Mais je vous
invite à comprendre que des centaines d'élèves, c'est beaucoup, c'est très
significatif pour nous.
Et voilà la façon dont on rend des enfants
éligibles pour nos écoles. Il y a des façons limitées, et voilà la façon qu'on donne vie
au constat qu'on prend en bonne et... de respect, que la pérennité de nos
établissements est primordiale. Pour le faire, il faut rendre les enfants éligibles à l'école anglaise tout en
respectant les objectifs de la Charte de la langue française. Et en
voilà un exemple où on restreint ça plus.
Si
je peux, une autre chose qui est évidente ici et qui est évidente dans les
articles 88.1 jusqu'à 5 et aussi dans l'article
73, les changements proposés, tout cela risque de donner... parce que c'est un
des objectifs d'un projet de loi, d'une
loi, de donner l'indice aux fonctionnaires qu'il faut être très vigilant, très
vigilant. C'était ça, l'exemple dans nos remarques, au début, où on accepte que personne ne devrait se rendre
éligible par les modalités «fraudulent», mais, quand on répète ce langage légal dans un projet de loi à
quatre variations, où on invite le bureau d'admissibilité — avec qui on a nos
difficultés des fois et des fois un lien très coopératif — de suggérer à la bureaucratie qu'il faut serrer même plus
nous inquiète davantage.
M.
D'Aoust (David C.) : Juste une note
là-dessus...
La
Présidente (Mme Vien) :
M. D'Aoust.
M. D'Aoust (David C.) : Par le temps que la troisième
génération se marie, ait des enfants, oui, ait des enfants, là — ça paraît que je suis vieillard, hein — et
sont assez aptes à maintenir la langue française chez eux et la culture, ils voudront peut-être
que leur quatrième génération apprenne l'anglais. Qui sait? Ça devient de plus
en plus… Mais il ne faut jamais oublier
que, quand M. Birnbaum parle d'un enfant à la fois, notre clientèle en
maternelle, depuis le 30 septembre 2011 au 30 septembre 2012 — et Mme la Présidente est consciente de ces
baisses-là — a diminué, notre clientèle
maternelle a diminué de 12 %. C'est
alarmant, ça. Alors, on essaie d'oxygéner notre système anglophone. Le
système anglophone est contribuable à notre société. S'il vous plaît,
aidez-nous.
La Présidente (Mme Vien) : M. D'Aoust, messieurs, il y a notre
porte-parole en matière de Charte de la langue
française qui aimerait s'entretenir avec vous. Alors, M. le député de
LaFontaine.
M. Tanguay : Merci beaucoup, Mme la Présidente.
Merci, messieurs, d'être présents cet après-midi, aujourd'hui, d'avoir préparé ce mémoire et de nous en faire une
présentation très, très importante.
J'ai
deux volets que j'aimerais aborder avec vous, le premier sur les modifications
proposées par le projet de loi n° 14 à la Charte des droits et
libertés de la personne. La Charte des droits et libertés de la personne du
Québec nous dit,
à son article 10… Et nul besoin de repréciser qu'une charte des droits et
libertés, c'est un équilibre, c'est une protection des droits des minorités, c'est une protection
contre des formes de discrimination, et la liste n'en est jamais
exhaustive.
L'article 10 de l'actuelle Charte des
droits et libertés de la personne nous dit que «toute personne a droit...» nous enseigne que
«toute personne a droit à la reconnaissance et à l'exercice, en pleine égalité,
des droits et libertés[…], sans distinction,
exclusion ou préférence fondée sur la race, la couleur, le sexe», ainsi de
suite, et évidemment il y a, un peu plus loin, basée sur la langue,
entre autres.
Le projet de loi n° 14 ferait en sorte de venir
ajouter... ou d'ajouter, devrais-je dire, un nouvel article 3.1, nouvel article 3.1
qui se lirait comme suit, et il s'agit de l'article 56 du projet de
loi n° 14 :
«3.1. Toute personne a droit de vivre et de
travailler au Québec en français dans la mesure prévue dans la Charte de la
langue française.»
Vous soulignez, je crois, à juste titre, vos
préoccupations sur ce qui serait ici une nouvelle hiérarchie des droits de la personne
et libertés fondamentales qui serait introduite ici. Pour avoir fait les
vérifications, on peut regarder les analyses qui sont faites par des
docteurs en droit, certains vous diront que ça n'aura pas d'impact, d'autres
vous diront, oui, que ça a un impact. Et
évidemment nous sommes toujours avec la présomption que, lorsque le législateur
parle, il ne parle pas pour ne rien dire, il veut que ça ait un impact.
Évidemment,
je pense qu'il est important de souligner que la Coalition avenir Québec, deuxième groupe d'opposition, est en faveur de
cette modification par le projet de loi n° 14 à la Charte des droits et libertés de la personne. J'aimerais vous entendre
là-dessus et vous souligner qu'en ce qui nous concerne évidemment il y a là beaucoup, beaucoup de questionnements. Quels
seront les impacts positifs appréhendés? Quels sont les impacts négatifs
également appréhendés par rapport à cette modification-là? Quelle est votre
réflexion à ce sujet?
La
Présidente (Mme Vien) : M. D'Aoust?
M. Birnbaum?
M.
D'Aoust (David C.) : ...à M.
Birnbaum.
•
(16 h 50) •
M. Birnbaum (David) : Deux choses. Dans un premier temps,
on a de la grande difficulté avec cette
proposition parce que, pour nous, ça présuppose deux choses, dont, les deux, on
n'est pas d'accord. La première, peut-être, c'est pour un autre forum. Première
chose, c'est qu'il y a un grand problème à régler, et ce n'est pas notre
lecture de…
La deuxième chose qui, pour nous, est assez
primordiale, il y a à nouveau une suggestion, peut-être non voulue, mais une
suggestion mise de l'avant par le législateur que nous faisons partie du
problème et non de la solution. De suggérer que les moyens qui sont en place déjà ne sont pas
suffisants pour que tout le monde au Québec participe dans le
rayonnement du français nous semble surprenant. Les conséquences éventuelles
d'une telle hiérarchie, bon, ce n'est pas nous, les avocats, mais on peut
s'inquiéter de quelques-unes, dont d'avancer et de mettre en priorité, aux
dépens peut-être même de la réussite scolaire de nos élèves, le bien-être de
nos élèves, l'idée de travailler en français, l'idée de mettre en deuxième importance la possibilité pour nous, selon des mesures
innovatrices qui sont à nous de faire, d'aider les jeunes avec toutes sortes de déficiences à participer pleinement
dans la société. Ils ne vont pas peut-être
réussir aux examens du secondaire V en français. Si on parle d'une hiérarchie
qui touche à tout ce qui a trait au corps législatif au Québec, sur le terrain, est-ce que ça va mettre notre
particularité en péril? C'est ça qui nous inquiète sur le plan très concret. Et, comme je dis, pour nous,
c'est de s'adresser à un problème qui n'est pas présent. Et on regrette
le fait que ce n'est pas chacune des formations qui est du même avis.
M.
Tanguay : Autre élément également,
puisque... Et nous suivons, là. On est entrés dans ce chemin-là, alors
continuons dans ce chemin-là, où on dit : La langue sera un motif de
distinction. Et j'emploie le mot
«distinction». Autre motif de distinction qui, moi, comme père de
famille, j'ai eu l'occasion de le dire, me choque, c'est l'injustice à laquelle
donnerait cours le projet de loi n° 14 lorsqu'on parle de l'accès au cégep anglophone.
Vous avez soulignez :
Le gouvernement n'a pas mis dans le projet de
loi l'application de l'article 72 au cégep, donc interdisant l'accès au cégep anglophone aux
francophones. Par contre, il y a une disposition — et vous l'avez bien
relevé, et j'aimerais vous entendre
là-dessus — il s'agit de
l'article 33 du projet de loi n° 14, où il est dit que les
cégeps anglophones devront se doter de
politiques qui feraient en sorte qu'une priorité serait accordée à la clientèle
de langue anglaise.
Alors, premier élément, c'est quoi, ça, la
clientèle de langue anglaise? Est-ce que c'est la langue maternelle? Est-ce que c'est le
fait que l'on a été accepté par une exemption, dans la mesure où on n'était pas
militaire canadien, parce qu'on ne l'aurait
plus? Alors, on a eu une exemption et on a pu aller à l'école en anglais.
Est-ce que je suis de la clientèle anglaise? Alors, concept tout à fait nouveau, la clientèle de langue anglaise — puis je ferme la parenthèse, c'est le premier volet de ma question — mais, le deuxième
volet, ce qui voudrait donc dire que priorité serait donnée aux anglophones
dans une politique que mettrait de l'avant
un cégep anglophone, ferait en sorte que ma fille qui terminerait son
secondaire V, dossier académique — qui est un critère majeur et central — 80 %, pourrait s'inscrire… ou ne pourrait pas
s'inscrire dans un cégep anglophone en
sciences, par exemple, parce qu'un anglophone qui aurait un dossier académique
par ailleurs à 65 % aurait, lui, le don
de parler la bonne langue ou d'être considéré clientèle anglophone. Alors, moi,
j'y verrais une injustice. Et je le
sais, et vous le dites dans votre mémoire, ce n'est pas du tout cette
logique-là que vous voulez mettre de l'avant. Et, ça, vous ne le voulez
pas, vous ne le demandez pas. J'aimerais vous entendre là-dessus.
La
Présidente (Mme Vien) : Il reste un
peu moins de trois minutes, messieurs.
M. D'Aoust (David C.) : On n'est pas au niveau du cégep, on
ne sait pas quels sont leurs critères de
sélection, mais on voudrait bien que les
mêmes critères s'appliquent à l'anglophone et au francophone ou à la personne
qui est allophone, là, qu'ils s'appliquent. Ils ont un devoir, selon la
Loi sur l'instruction, d'offrir un service d'éducation de qualité au niveau du cégep. Et les registres, les personnes
qui reçoivent toutes les applications doivent imposer les mêmes critères
sur tous les élèves. Il peut y avoir un
francophone qui fait 90 % en français et qui parle assez bien anglais et…
Je ne sais pas leurs critères. Alors,
il faudrait qu'on leur demande quels sont leurs critères. Il faut faire place
aux meilleurs élèves qui sont aptes à avoir du succès au cégep.
M.
Tanguay : Et là-dessus peut-être, sur
votre expérience, qui n'est pas au niveau des cégeps, mais primaire,
secondaire, c'est quoi, pour vous, ça veut dire quoi, basé sur votre
expérience, «clientèle de langue anglaise»?
M. Birnbaum (David) : C'est justement. Premièrement, comme
notre président a dit, on n'est pas d'accord,
ni la Fédération des cégeps, avec qui on travaille de très près, on est
contents de voir qu'ils reflètent la même position.
Voilà un problème aussi parce qu'on veut
privilégier tout un mélange d'expériences. On sait qu'hier, aux yeux de la loi, accès à
l'école anglaise, des fois, pour les gens qui sont ayants droit, qui parlent
français, c'est une richesse. Il y en a d'autres, comme vous avez dit vous-même, des jeunes anglophones qui
auraient étudié en français, qui auraient voulu faire le choix de se placer au cégep. On ajoute ces choses-là, ces
ambiguïtés, ces difficultés à l'idée de base qu'un grand consensus de
Québécois ont dit qu'on ne veut pas légiférer aux adultes le choix. Et, sur ces
principes-là, on est bien à l'aise avec le statu quo, on avoue, à nouveau.
M.
D'Aoust (David C.) : Mon épouse a
assisté au cégep Marie-Victorin pour avoir son diplôme comme technicienne en
éducation spécialisée. C'est une anglophone, elle a été sélectionnée parmi
combien d'élèves, je ne le sais pas. Mais, pour elle, c'était une richesse dans
sa vie.
M. Verrillo (Frank) : Peut-être un dernier commentaire sur
les cégeps. On sait que les universités, nos
cégeps, nos écoles secondaires anglophones
et francophones reçoivent beaucoup d'élèves de l'étranger pour rester
temporairement pour une année, deux années ou trois années. C'est une richesse
qu'on a ici, au Québec, qui n'existe pas à nulle autre part du monde...
La
Présidente (Mme Vien) : Merci,
monsieur...
M. Verrillo (Frank) : Et peut-être que c'est une façon d'attirer des jeunes chez
nous, parce qu'ils peuvent apprendre les
deux langues. Certains décident de passer six mois en anglais, six mois en
français. Mais on n'en parle pas. C'est une richesse qu'on doit regarder
et peut-être promouvoir un peu parce que...
La Présidente (Mme Vien) : M. Verillo, je vous remercie
infiniment. Je dois passer la parole maintenant à notre collègue de Montarville pour un temps de
5 min 30 s.
Mme Roy (Montarville) : Merci beaucoup, Mme la Présidente.
Merci, messieurs, merci pour votre mémoire.
D'entrée de jeu, vous le savez, nous défendons, entre autres, particulièrement
votre position en ce qui a trait à la protection
de cette exemption pour les enfants de militaires, nous le défendons. Et ce
qu'il ne faut pas oublier non plus, et je vous le répète — c'est que
vous étiez absents ce matin — mon collègue le député de
La Peltrie a d'ailleurs déposé une
pétition, pétition de 11 000 noms, ce matin, à l'Assemblée nationale, de
gens... un peu plus de 11 000 noms, de gens qui, comme vous et comme nous, croyez que cette exemption devrait
demeurer, puisque ces enfants qui bénéficient de cette exemption ne sont pas une menace à la langue française. Et nous
pensons que le but du pl n° 14, modifier la charte, c'est pour protéger la langue. Et, de l'aveu même
de la ministre, ces enfants-là ne sont pas une menace. Alors, pour nous,
il est important de les défendre, au même
titre que ce soldat qui nous disait : Je vais défendre les valeurs et la
démocratie en Afghanistan pour que les
enfants là-bas aillent à l'école. Quand je reviens ici, qu'est-ce que mon
gouvernement me fait? Il enlève le
droit à un de mes enfants. Alors, ça, je trouve que ces gens-là ont le droit
d'être choqués pour ces raisons-là.
Cela dit, j'aimerais vous entendre parce que l'exemption
porte particulièrement sur le statut temporaire. Et, dans le document que vous nous avez soumis, vous parlez du
statut temporaire en tant que commission scolaire, et j'aimerais que vous nous
parliez de ce que vous écrivez. Parce qu'on semble insister sur le statut
temporaire, mais, du côté des commissions
scolaires, je crois comprendre qu'il est difficile de suivre l'évolution, le
parcours de la maternelle à la sixième année
de cet enfant-là, et qu'il y a un bon pourcentage d'enfants qui bougent, et qui
bougent continuellement. Si je peux vous citer, on dit ici : «Les
départs périodiques et entrées variables de clientèle à cette école sont
particulièrement éloquents : à l'école
Dollard-des-Ormeaux, située sur la base militaire de Valcartier, on note un
taux de roulement de la clientèle de 30 % par année.» Pourriez-vous
élaborer, je vous prie?
M. Birnbaum (David) : C'est pourquoi on insiste sur
l'exemption. Ce n'est pas un séjour temporaire comme un autre, par définition. Vous avez l'exemple ce matin
dans le National Post. Il y a six pilotes québécois francophones de Bagotville qui se trouvent en Islande selon
leurs obligations OTAN. Temporaire, dans les militaires, il n'est pas
avec date. Si on parle de séjour temporaire,
ce pour quoi on rejette la réponse de la ministre sur la question 2, ce n'est
pas un séjour avec une date limitée.
On ne le sait pas. Est-ce que quelques-uns de ces élèves risquent de se trouver
au sein d'une de nos écoles de la
maternelle peut-être jusqu'à la cinquième année, ici, et, là, jusqu'au
cinquième secondaire avec les exemptions
remises? Oui. Notre réponse est claire, c'est oui. On est dans le militaire,
c'est, par définition, temporaire. On ne
veut pas suggérer que, oh, après trois ans, oui, on comprend, on va jeter cet
enfant de nos écoles. C'est une exemption qu'on défend.
Mme Roy (Montarville) : Moi, j'aimerais comprendre si vous
comprenez ce qui justifie que maintenant, en
2013, on veuille changer cette réglementation-là alors qu'en 1987, entre
autres...
Une
voix : 1997.
Mme Roy (Montarville) : ...1997, oui, mais il y a eu d'autres
dates avant aussi. 1997, la dernière fois, cette
mesure a été reconduite, et c'était madame
notre première ministre qui était là et qui l'a acceptée. Qu'est-ce qui a tant
changé, selon vous?
•
(17 heures) •
M. D'Aoust (David C.) : J'espère que rien, j'espère qu'on
continue de la même façon, c'est ça qu'on
demande. Il ne faut pas oublier que les militaires peuvent être affectés à
Bagotville ou autres postes puis, deux mois plus tard, ils sont envoyés outre-mer ou à travers le Canada. Et
souvent leur conjoint ou conjointe décide d'aller rester avec la famille
au lieu de rester sur la base, puis ils
reviennent trois ans plus tard. Alors, si leur permis temporaire est échoué,
ils doivent avoir droit de faire
application pour un autre permis temporaire. C'est des militaires. Ça serait
heureux pour eux s'ils avaient le même
statut que les diplomates, et ça réglerait le problème pour la vie, je crois,
puis ça les mettrait, les militaires, à un niveau où est-ce qu'ils doivent être acceptés par nous et honorés par
nous. Et les joueurs de hockey aussi ont ce droit...
Mme Roy (Montarville) : ...demander effectivement. Messieurs,
je vous remercie beaucoup pour les précisions.
M.
D'Aoust (David C.) : De rien. Ça nous
fait plaisir. Puis merci pour votre vote de confiance.
La
Présidente (Mme Vien) : Messieurs,
merci pour votre contribution, de vous être déplacés aujourd'hui à votre
Assemblée nationale. À la prochaine. Merci beaucoup.
On
suspend…
Une
voix : …
La
Présidente (Mme Vien) : Merci
à vous.
Mais on suspend
quelques instants, le temps de recevoir le prochain invité.
(Suspension de la séance à
17 h 1)
(Reprise à 17 h 4)
La Présidente (Mme
Vien) : Alors, nous sommes de retour
pour poursuivre ces auditions qui portent sur le projet de loi n° 14.
Nous recevons notre
dernier invité. M. Gérald Larose, vous êtes là, ici, à titre personnel, c'est
ce que je comprends. Nous vous souhaitons la
bienvenue. Vous aurez 10 minutes pour livrer l'essentiel de votre message,
après quoi il y aura des entretiens entre vous et les parlementaires, en
commençant par le groupe formant le gouvernement. Alors, bienvenue, M. Larose,
et nous vous écoutons.
M. Gérald Larose
M.
Larose (Gérald) :
Merci, Mme la Présidente. Je suis ici à titre personnel parce que je suis... J'ai
grandi dans un
village des Cantons-de-l'Est qui s'appelait Bury, dans une condition
minoritaire, pour reprendre une expression toute canadienne, mais j'ai fait aussi de la prospection minière dans tout le
Canada. J'ai présidé la CSN, je suis professeur à l'UQAM, j'oeuvre dans deux réseaux internationaux
et j'ai présidé les états généraux de la situation et de l'avenir de la langue française en l'an
2000-2001. Et toutes ces vies antérieures me font m'intéresser beaucoup à
la langue parce que la place, le rôle et l'avenir de la langue se posent... est
un problème de société.
La langue, ce n'est
pas neutre, et je dirais que c'est un élément majeur de la vie en société.
C'est d'abord une question de justice, une
question de dynamique, une question d'innovation, de cohésion et même de paix.
En six petits points, je vais vouloir
vous dire à ma manière d'où on arrive, de quoi on parle. On est présence de
deux régimeslinguistiques qui se
chevauchent, se contredisent et se concurrencent. Le projet de loi n° 14 va dans le bon sens, mais il lui manque quelque chose et puis peut-être qu'un jour
il faudra changer de terrain.
Alors, on vient d'où?
Je dirais qu'on vient de loin. On a connu un siècle et demi où on a marché et
nommé ce continent en français, deux siècles
et demi où on a échappé à plusieurs attentats, mais on a appris à se battre et,
depuis 40 ans, d'abord, sur une lame de
fond, on a commencé à se décoloniser et, avec une alliance des mouvements
sociaux et des mouvements nationaux, on a réussi quand même à restaurer la
langue française dans sa fonction sociale, culturelle,
économique et politique. C'est devenu un outil de cohésion, de développement et
d'une extraordinaire richesse linguistique. On est ici quatre fois plus
bilingues que n'importe quel territoire en Amérique du Nord et sept fois plus trilingues que partout en Amérique du Nord, et
même les langues amérindiennes se portent un peu mieux ici qu'ailleurs.
On a un héritage lourd, mais on a su se redresser.
De
quoi parle-t-on? Je pense qu'il faut rappeler qu'il faut distinguer toujours
les compétences institutionnelles par rapport
aux compétences individuelles. Il faut distinguer les fonctions de la langue
par rapport au registre de la langue. Il
peut y avoir un registre familier, public, littéraire, mais il y a des
fonctions à la langue, qui sont des fonctions utilitaires, citoyennes,
identitaires et politiques.
Et
mon troisième point, c'est d'affirmer que les deux régimes linguistiques qui se
concurrencent sur ce territoire le sont sur
une base de la fonction politique des langues. Pourquoi les pensionnats
autochtones dans le passé? C'était pour
abolir les langues amérindiennes et assimiler les Amérindiens. Pourquoi Ben
Gourion a ressuscité une langue morte, l'hébreu? C'est parce qu'il
créait un nouveau pays. Pourquoi le règlement 17 en Ontario? Pourquoi les
cantons suisses unilingues en Suisse? Tout ça parce que la langue a une
fonction politique.
La
langue fait les nations ou défait les nations. Et le régime linguistique
canadien est un régime qui précisément veut défaire une nation. On veut que ce soient
deux majorités et deux minorités dans une symétrie fictive. Ce ne sont
pas des droits collectifs, mais des droits
individuels. Ça n'a pas de caractéristique territoriale, ce sont des droits
ambulants; la preuve, le débat sur les militaires. Et même ce ne sont pas des
droits politiques, ce sont des droits juridiques. Jadis, il y avait un pouvoir
de dénonciation des législations provinciales. Maintenant, c'est la Cour
suprême qui est mandatée de faire ce travail. Elle l'a bien fait, il faut le
dire, ces récentes années.
La
loi n° 14 — c'est mon quatrième point — dans le carré de sable qu'est le nôtre, parce que c'est
quand même une loi à l'intérieur des règles
constitutionnelles actuelles, fait une avancée importante quand elle donne aux
dispositions linguistiques le statut supérieur, un statut constitutionnel.
C'est conforme, d'ailleurs, à la proposition 12 et 14 du rapport des états généraux du début des années
2000-2001 que j'avais eu l'honneur de présider. On avait accoté ou joint
à cette proposition celle de la citoyenneté
québécoise en refaisant l'histoire de la loi n° 22 et de la loi 101, qui notamment avaient permis à la société québécoise de passer
sur le côté offensif de l'affirmation de la langue comme étant la langue
commune, la langue citoyenne.
• (17 h 10) •
Deuxième
avancée dans la loi n° 14
qu'il m'intéresse de souligner, c'est effectivement sur la langue de travail, qui correspond largement au chapitre 5 du même
rapport. Si la langue ne nous permet pas de gagner notre pain, si elle ne
permet pas de mettre le beurre sur ce pain, cette langue est morte. Donc, la
langue de travail, le dilemme, c'est : ou bien on fait en sorte que les
lieux de travail sont français ou bien on anglicise les travailleurs, mais on
ne peut pas être entre les deux.
Le choix de la loi n° 14, c'est de continuer à franciser les lieux de travail de telle sorte
que l'anglais, c'est un atout. L'anglais, c'est un atout quand on l'a, mais ce
n'est pas un obstacle quand on ne l'a pas. Alors, c'est toute la
perspective de la loi n° 14. Et je salue, à ce chapitre-là, la contribution
des conseils sectoriels, des comités sectoriels de la main-d'oeuvre. À mon avis, c'est un dispositif, déjà
là. Et le seul élargissement de leur mandat sera une contribution
importante à la francisation des milieux de travail.
Et la loi n° 14
aussi a des avancées intéressantes au chapitre de l'éducation, je veux le
souligner. Là où ça manque, mais ce n'est
peut-être pas tellement la loi, et c'est un des chapitres qu'on a beaucoup
développé dans le rapport, qui correspond aux propositions 81 à 86 et
qui touche davantage les mécanismes d'application de la langue, c'est de concevoir l'intervention davantage comme des
opérations d'animation de la francisation dans les milieux de travail.
Plutôt que d'être, je dirais, à dépister, je dirais, des erreurs ou des fautes,
il faudrait qu'on soit dans une culture d'animation de la francisation.
Et
je termine en disant que tout ça n'est pas gagné. De toute manière, le combat
de la langue va demeurer un combat permanent.
Par contre, je souligne, et je pense que je ne révèle rien, jadis le Canada a
pu rouler sur le corps de la loi 101
avec la Constitution non signée par le Québec parce qu'il y avait une
complicité au niveau du Québec, Trudeau avait 74 des 75 députés, aujourd'hui la direction canadienne n'a même
plus besoin de cette complicité et nous invite à dormir sur les deux
oreilles, étant sûrs qu'on va se réveiller morts. Voilà.
La
Présidente (Mme Vien) : Merci beaucoup, M. Larose. Alors, nous allons entreprendre les échanges
avec le groupe formant le gouvernement. Nous
allons commencer avec le député de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
M.
Breton : Merci,
Mme la Présidente. Bonjour, M. Larose. Je remercie la ministre de m'avoir accordé le privilège de
vous saluer d'entrée de jeu parce que je connais bien le travail que vous
faites. Je pense que vous connaissez bien
le travail que je fais depuis des années. Moi qui parle beaucoup d'être maîtres
chez soi, qu'il s'agisse de richesses naturelles, d'énergie ou de
langue, il y a beaucoup de points communs là-dedans.
Vous
avez parlé, dans votre mémoire… Vous notez le caractère structurant du projet
de loi n° 14,
notamment la reconnaissance d'un statut
constitutionnel au droit linguistique. J'aimerais beaucoup que vous me parliez
de ça, j'aimerais que vous élaboriez
là-dessus, en quoi vous considérez que c'est un apport qui semble à vos yeux
important. J'aimerais que vous me parliez de ça.
M.
Larose (Gérald) :
J'ai essayé de le dire au détour. D'abord, c'est que la question de la langue,
dans toutes les nations, dans tous les
peuples, dans toutes les sociétés, c'est une notion... c'est un élément central
de justice d'abord. Je répète ou je rappelle
que Camille Laurin disait souvent que la loi101, avant d'être une loi
linguistique, c'est une loi de justice sociale. C'est que le peuple a le
droit de gagner sa vie dans sa langue. On construit des 749... ou 747, plutôt,
en Pologne, en polonais, il devrait y avoir moyen de gagner son sel, et son
pain, et son beurre en français au Québec. Donc, c'est une loi de justice
sociale.
Deuxièmement,
la langue est une question très délicate dans les sociétés. On a vu des tas de
querelles. Ici, ça a été plutôt calme, là,
disons, il n'y a pas eu de morts beaucoup. Mais c'est une question délicate.
C'est une question de société. Le premier
ingrédient de la cohésion de la société, c'est le fait qu'il y ait du ciment.
La langue est une langue commune, une langue publique, une langue de la
citoyenneté, et tous les peuples travaillent à ce qu'il y ait une langue — le Canada aussi, soit dit en passant — et donc c'est un ingrédient de base. Et, comme tous les
ingrédients de base du vivre en société, eh
bien ça a un statut spécial, comme l'égalité, comme, je dirais, le droit à la
présomption d'innocence, comme tous les grands droits.
La
langue… et d'ailleurs, dans la Constitution canadienne, il est question de la
langue. Il est tellement question de la langue
qu'on nous a empêchés… on nous a plutôt enlevé un droit qu'on avait depuis
1791, le droit exclusif sur la langue. Donc, ce n'est pas banal, la question
des droits linguistiques. Et c'est au nom de ce droit constitutionnel que la Cour suprême, en sous-traitance par rapport à
l'instance politique, a laminé la loi 101. Il est tout à fait important
que nous donnions, même dans le cadre canadien, le plus haut statut qui est
celui effectivement des droits dans la Charte des droits et libertés du Québec. Alors, je pense qu'on se sentira un peu
plus à l'aise pour défendre la langue française, qui est la langue commune, soit dit en passant, et on sera
peut-être un peu plus attentifs à ce droit-là, y compris dans les cours du
Canada.
M.
Breton : Merci.
La Présidente (Mme
Vien) : Mme la ministre.
Mme De
Courcy : Bien, d'abord,
M. Larose, merci d'avoir pris la peine de venir à Québec un petit jeudi, 5 heures. Ça me fait très plaisir que vous
ayez... vous vous soyez inscrit à cette commission parlementaire.
Évidemment, c'est toujours un plaisir de vous entendre. Que les gens soient
d'accord ou non, c'est un plaisir de vous entendre, vous êtes un orateur
exceptionnellement bon, évidemment.
J'apprécie
évidemment votre lecture du projet de loi n° 14, même si elle est critique, cette lecture, j'en conviens. J'apprécie parce qu'elle met en perspective,
dans le fond, ce que fondamentalement le projet de loi n° 14
visait, à savoir la langue de travail, la
langue de travail. Je considère que, depuis 35 ans, la charte a beaucoup dormi,
qu'il y avait des dispositions qui étaient présentes qui ont peu ou pas
été appliquées, mais que la langue de travail était vraiment un secteur qu'il
fallait toucher. À cet égard-là, la responsabilité que j'ai voulu mettre de
l'avant est une responsabilité collective, partagée. Le projet de loi n° 14
donne cette amplitude-là.
Maintenant, on se base sur les comités sectoriels de
main-d'œuvre, auxquels vous avez fait allusion, et j'aimerais que vous nous en parliez. On a eu des
informations pour le moins contradictoires sur ces comités sectoriels. Certains
disent, et les entrepreneurs, le commerce de
détail, entre autres, petites entreprises, disent : Oui, oui, c'est le bon
secteur. Les conseillers en ressources humaines disent : Attention, c'est
plus fragile. Le Conseil du patronat dit : Oui, ça marche, mais pas tout
le temps.
Alors,
vous qui avez fait beaucoup pour les comités sectoriels de main-d'oeuvre,
j'aimerais vous entendre sur... Bien,
d'abord : Quelle est votre lecture de ces comités? Et, deuxièmement, quel
type de mandat précis croyez-vous qu'il
faille leur donner? Il y en a de suggérés, là, dans le projet de loi, à savoir,
bon, un appui. Mais plus encore, mais encore, comment, à votre avis, ça
devrait fonctionner, d'ailleurs autant dans les entreprises syndiquées que non
syndiquées? Parce qu'il y en a beaucoup au Québec.
• (17 h 20) •
M. Larose
(Gérald) : D'abord, il faut rappeler
que les comités sectoriels de main-d'oeuvre sont des vieilles institutions, hein, disons. C'est peut-être les
premiers lieux de la concertation des acteurs du marché du travail qui
ont été créés, d'abord sur la base de la nécessité d'ajuster la formation
professionnelle, et puis, bon, ils ont évolué aussi avec les nouveaux dispositifs qu'on a mis en place au
cours des années 1980, 1990, bon, la Société de développement de la
main-d'oeuvre, ensuite Emploi-Québec, etc.
Bon.
Alors, il y a un acquis, c'est qu'il y a une pratique. Il y a une pratique de
concertation entre les acteurs du marché du travail, c'est-à-dire les syndicats, le
patronat. Alors, ce n'est pas chromé égal, on va le reconnaître. Ça
dépend des secteurs, lesquels évoluent
eux-mêmes, mais au moins il y a une base historique et de pratique, et c'est
habituellement toujours mieux de partir avec des organisations qui ont déjà des
pratiques et dont les acteurs connaissent un peu les tenants et aboutissants
plutôt que d'inventer carrément un nouveau dispositif.
L'autre
valeur des comités sectoriels, c'est qu'il y en a dans la... En tout cas, il me
semble qu'à l'époque, il y en avait dans une trentaine de secteurs industriels;
c'est peut-être un peu plus aujourd'hui. Et donc, il y a, comme je le
dis, une base matérielle. Ces comités ont
déjà des mandats, bon, qu'ils exécutent, je dirais, à la couleur des secteurs.
Alors, ajouter un mandat… Parce que, qu'on
le veuille ou pas, la francisation des milieux de travail, ça interpelle et les
employeurs et les salariés. Et donc, vaut mieux que les programmes de
francisation soient issus d'une démarche de concertation, de dialogue, et
surtout si c'est, je dirais, accompagné et même stimulé par le dispositif…
Alors,
c'est un peu ce que je parlais dans mon cinquième point. Si les mécanismes
d'application de la loi étaient massivement... plutôt d'être proactifs dans la
francisation et qu'ils accompagnaient, non seulement qu'ils
accompagnaient, mais qu'ils faisaient des propositions aux comités sectoriels,
moi, j'ai comme l'impression qu'on pourrait progresser beaucoup plus
rapidement, sans beaucoup de heurts, avec des économies importantes. Parce que,
là, on parle des comités sectoriels, je
dirais, ce n'est pas rien que la petite entreprise, là, parce que les comités
sectoriels, c'est aussi la grande
entreprise. Puis, comme je dis souvent, il suffit de s'entendre avec les gros
pour que les petits trouvent que c'est intéressant. Puis, sur ce
volet-là, tout le monde va travailler dans le même sens. Moi, j'y vois beaucoup
de potentiel, à travailler avec les comités sectoriels.
Mme De
Courcy : Merci.
La Présidente (Mme
Vien) : Quelqu'un d'autre? M. le
député de Bonaventure, pour quatre minutes.
M.
Roy : Oui, oui,
merci beaucoup. Bonjour, M. Larose… ou bonsoir. Une question très simple :
Compte tenu de la lecture du contexte
linguistique au Québec que vous avez, quelles seraient les principales
recommandations que vous pourriez faire ou, à tout le moins, modifications au
projet de loi n° 14?
M. Larose
(Gérald) : C'est-à-dire, alors, au
projet de loi n° 14, bon, je sais qu'on travaille dans le contexte constitutionnel actuel, je sais aussi qu'on
travaille dans un contexte politique interne au Québec. Tu sais, je ne veux
pas me nourrir et nourrir les gens d'illusions. Moi, je pense que, bon, il y a
là un morceau intéressant. Alors, j'avoue que ça consolide et ça va dans la
bonne direction.
Ce
qu'on pourrait espérer de plus, c'est plus dans un travail avec les mécanismes
d'application de la loi. Ça, on n'a peut-être pas besoin d'amendements de la loi
pour faire ce travail-là. C'est vraisemblablement des directives
internes puis surtout des débats avec les
directions de ces organismes-là. Moi, personnellement, là, je pense qu'on est
peut-être au maximum de ce qu'on peut avoir. En tout cas, c'est
l'impression que j'aurais à ce moment-ci.
M. Roy : Merci beaucoup.
La
Présidente (Mme Vien) : Merci. Alors, je cède la parole maintenant au député de LaFontaine.
Alors, M. le député, c'est maintenant votre
tour pour une période d'à peu près 13 minutes.
M. Tanguay : Oui, merci beaucoup, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme
Vien) : Ça me fait plaisir.
M.
Tanguay :
Bonjour M. Larose, merci pour votre présence. Vous avez lu le projet de loi n° 14, et j'aimerais vous
entendre sur, d'une part, le rôle qui serait toujours joué par l'office dans
l'application, dans son rôle d'application de la Charte de la langue française, de mener les
inspections, de mener des enquêtes et, à cet effet-là, d'avoir les
ressources, les enquêteurs nommés en vertu
de la Loi sur les commissions d'enquête, d'une part, et, d'autre part, le
pouvoir qu'aurait la ministre chargée de l'application aussi de la
Charte de la langue française, d'avoir ce rôle-là également très large
d'appliquer la charte et de pouvoir nommer des inspecteurs, des enquêteurs au
même titre, en vertu de la Loi sur les commissions
d'enquête. J'aimerais vous entendre quant à votre analyse, de un, au niveau des
dédoublements potentiels et, de deux,
au niveau de l'efficacité de cette façon-là ou de la justification de ce
dédoublement, si vous me permettez l'expression.
M. Larose
(Gérald) : Peut-être, d'abord, un mot
sur l'office comme tel. Quand je parle des mécanismes d'application de la loi, moi, je pense qu'il y a un rôle sur lequel on
pourrait insister, c'est que l'office soit davantage en proactivité du
côté de la francisation. Et donc la dimension inspectorat, pour moi, est une
dimension importante, mais, je dirais, on
est à la pêche à la ligne, hein? Moi, je suis plutôt d'une approche
structurelle et structurante. Et donc les mécanismes devraient favoriser
la francisation des lieux de travail et, quand les lieux de travail sont
francisés, les travailleurs ont intérêt à,
disons, posséder puis à maîtriser le français. Alors, dans le choix de
l'allocation des ressources, quant au mandat, c'est plutôt le choix que
je fais.
Sur les pouvoirs de la
ministre, je ne suis pas un spécialiste, mais, en régime britannique, j'ai
compris que, disons, les ministres, ils ont
droit de vie à peu près sur tout, là, tu sais, c'est dans la culture du système
britannique. Alors, je n'ai pas,
disons, étudié particulièrement cette question-là. Mais je sais que, si je
prends celui qui s'occupe des impôts, là, au ministère du Revenu, il a pas mal de pouvoir, en santé aussi. Alors, je
ne sais pas s'il y a un problème de dédoublement, mais je ne serais pas
surpris qu'on puisse autoriser les ministres à avoir ces pouvoirs-là.
M. Tanguay : Merci beaucoup. Je n'ai pas d'autre question.
La Présidente (Mme
Vien) : Alors, je cède maintenant la
parole à la députée de Montarville pour un temps de 3 min 30 s.
Mme Roy
(Montarville) : Merci beaucoup.
Merci, Mme la Présidente. Merci, M. Larose, merci pour votre mémoire. Je
prenais des notes lorsque vous parliez. Vous avez dit une phrase qui m'a
interpellée, et je vous cite — il y a peut-être quelques petites erreurs, vous me
corrigerez : Plutôt que de dépister des erreurs ou des fautes — on parlait dans l'environnement
de travail — il faudrait plutôt avoir des mesures d'animation. Pourriez-vous
m'expliquer un petit peu ce que vous entendiez
par là?
M. Larose
(Gérald) : Bien, c'est un peu ce que
je disais tantôt, c'est que, bon, les ressources ne sont pas illimitées. Oui, il faut de l'inspectorat parce
que, s'il n'y a pas d'inspectorat, c'est un peu comme… Je dirais, s'il n'y
a pas d'inspecteur d'impôts, ça se peut bien que les gens s'amusent d'avoir...
On voit ça un peu, d'ailleurs, là. Alors, il en faut. Mais moi, je pense que ce
qu'il y a de plus efficace, c'est d'allouer des ressources du côté de
l'animation d'un processus de francisation dans des approches sectorielles
larges.
Exemple :
on prend le secteur pharmaceutique, ou on prend le secteur, disons, de
l'informatique, ou bien celui, je ne sais pas, moi, de la métallurgie, tu sais. Donc,
on élabore un plan stratégique de francisation des plus grandes entreprises
jusqu'aux plus petites et, dans un rapport qu'on a avec le secteur, les
regroupements sectoriels mais aussi avec les entreprises
de ce secteur-là, on peut conduire une offensive de francisation. Alors,
l'allocation des ressources, moi, je la conçois plutôt de cette
façon-là.
Mme
Roy (Montarville) : ...peut-être, ou corrigez-moi à nouveau si je me trompe, sur
l'incitation, le soutien, l'aide, l'apport…
M.
Larose (Gérald) :
Oui. Bon. C'est sûr qu'il y a des recherches, un minimum de recherches à faire,
c'est-à-dire... Ensuite, il y a un plan
logistique à développer, mais il faut le développer avec les acteurs. Alors,
tantôt, je parlais des comités sectoriels, je pense qu'il y a un gros travail à
faire avec les comités sectoriels. Et je pense que c'est de cette façon-là
qu'on aiderait beaucoup les entreprises à accélérer du côté de la francisation.
Mme Roy
(Montarville) : Je vous remercie
beaucoup, M. Larose, pour avoir précisé ce point. Merci.
• (17 h 30) •
La
Présidente (Mme Vien) : M. Larose, ça complète. Alors, merci infiniment de vous être déplacé en
ce jeudi de Pâques. Alors, c'est très
apprécié. Alors, on vous souhaite un bon retour.
Mesdames
messieurs, ça met fin à nos travaux avant le long congé et la semaine en circonscription.
On se retrouve la semaine suivante. Alors,
soyez prudents sur les routes. Au revoir.
J'ajourne donc nos
travaux à ultérieurement.
Merci à vous tous et à
vous toutes.
(Fin de la séance à
17 h 31)