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Version finale

39e législature, 1re session
(13 janvier 2009 au 22 février 2011)

Le mercredi 18 août 2010 - Vol. 41 N° 32

Mandat conféré par une loi - Entendre les dirigeants des établissements d'enseignement de niveau universitaire


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures trente-trois minutes)

Le Président (M. Marsan): À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

Je vous rappelle que le mandat de la commission est de tenir des auditions publiques afin d'entendre les dirigeants des établissements d'enseignement de niveau universitaire en application de la Loi sur les établissements d'enseignement de niveau universitaire.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Malavoy (Taillon) remplace M. Curzi (Borduas).

Auditions (suite)

Le Président (M. Marsan): Alors, comme ordre du jour, nous avons le grand plaisir d'accueillir les représentants de l'Université Laval, d'abord, l'université où ses représentants feront un exposé d'environ 30 minutes qui sera suivi d'une période d'échange de 2 h 30 min.

Il me fait plaisir d'accueillir M. le recteur, M. Brière. Et je vais vous demander, d'entrée de jeu, de nous présenter les gens qui vous accompagnent et de poursuivre avec votre présentation qui devrait être environ de 30 minutes.

Université Laval (UL)

M. Brière (Denis): Alors, merci beaucoup, M. le Président. Distingués membres de la Commission de la culture et de l'éducation.

D'entrée de jeu, là, je peux vous dire que je ne peux que me réjouir de l'occasion qui m'est donnée aujourd'hui d'échanger avec vous sur ce qui caractérise l'Université Laval, ses réalisations, ses retombées, ses perspectives de développement et les défis auxquels elle est confrontée dans l'avenir. Alors, pour m'assister dans cette tâche, je suis accompagné de membres de notre équipe de direction et de personnel, de personnes-ressources. Alors, à la table, je vous présente, à ma gauche, M. Éric Bauce, vice-recteur exécutif et au développement; à ma droite, Mme Barbara Poirier, qui est présidente de la Confédération des associations d'étudiants et d'étudiantes de l'Université Laval, mieux connue sous le nom de CADEUL; et, à mon extrême gauche, M. Sylvain Mercier, qui est président de l'association des étudiants et étudiantes de Laval inscrits aux études supérieures, et aussi mieux connue sous le nom de l'AELIES.

J'aimerais aussi, également, souligner, sans les présenter individuellement, la présence de plusieurs membres de notre communauté universitaire qui pourront répondre à des questions peut-être un peu plus pointues en ce qui concerne la gestion de l'Université Laval.

Dans le document de présentation déposé ce matin, vous remarquerez que je ne reprends pas intégralement le contenu du document déposé en mai dernier. Je vous en présenterai plutôt les principaux éléments à travers quatre grands principes de gestion qui guident, à l'Université Laval, l'ensemble de nos décisions et de nos actions, à savoir l'imputabilité, l'efficacité et l'efficience, l'adaptation, surtout dans un grand monde de changement, et finalement... par un principe de gestion qui est la cohérence.

D'abord, je commence avec la notion d'imputabilité parce que c'est, à mes yeux, une responsabilité qui doit transcender l'ensemble de nos actions et qui est au coeur de nos façons de faire à tous les paliers décisionnels. Je ne peux d'ailleurs que saluer cet exercice de reddition de comptes devant la commission, ce qui nous permet de mettre en relief les efforts constants que nous déployons afin d'appliquer les meilleures pratiques de gouvernance universitaire et d'assurer une saine gestion des fonds privés et publics qui nous sont confiés. La gouvernance de l'Université Laval repose d'ailleurs sur diverses instances décisionnelles, lesquelles profitent de l'appui et des avis de différents comités, ce qui permet d'assurer l'amélioration continue de nos processus décisionnels, de nos mécanismes de gestion des risques et de nos outils de suivi de performance. Par exemple, le conseil d'administration, qui est composé de 30 membres, profite, en matière de saine gestion, du soutien du comité de vérification et du comité de placement et de trésorerie. Le conseil universitaire composé de 75 membres, formé, quant à lui, de représentants de tous les membres de la communauté universitaire, exerce les pouvoirs de l'université sur les questions ayant des incidences sur l'enseignement et la recherche.

Le conseil d'administration et le conseil universitaire, un point très important, sont également appuyés par trois commissions permanentes, à savoir la commission des études, la commission de la recherche et la commission des affaires étudiantes. Le conseil d'administration et le conseil universitaire ont également adopté, en février 2008, le document Horizon 2012 que je vous montre, que vous avez probablement vu et qu'on peut retrouver sur le site de l'Université Laval, lequel présente les grandes orientations de développement de l'Université Laval et qui a été conçu après une grande consultation au niveau de la communauté universitaire.

Nous avons de plus développé des indicateurs repères qui nous permettent de suivre l'évolution, dans le temps, des différentes facettes de notre mission universitaire telles que la diversité et la pertinence de notre offre de formation, le dynamisme de nos activités de recherche et d'internationalisation, le niveau de satisfaction de nos étudiants et des membres du personnel, la santé financière de notre institution et l'impact environnemental de nos activités. C'est en quelque sorte ce qu'on appelle, à l'interne, notre tableau de bord. Notre comité exécutif voit également à l'exécution des politiques et décisions du conseil d'administration et du conseil universitaire et assure l'administration courante de l'université.

Le deuxième principe de gestion est efficience et efficacité. L'Université Laval a mis en place plusieurs mesures qui visent à utiliser, de façon efficiente et efficace, les ressources humaines et les fonds à sa disposition. Entre autres, le comité exécutif s'est doté d'un comité de budget qui a la responsabilité d'encadrer le processus budgétaire annuel. Dans le cadre de cet exercice, chaque unité fait état du portrait financier de l'année qui s'achève et présente ses prévisions pour l'année à venir, notamment en matière de ressources humaines et d'effectifs étudiants. Les unités en difficulté financière ont également l'obligation de présenter un plan de redressement. Nous pouvons de plus nous enorgueillir d'être la seule grande université québécoise à avoir atteint l'équilibre budgétaire en ce qui a trait à ses opérations courantes, et ce, pour les exercices 2003-2004 à 2008-2009.

**(9 h 40)**

Cet ambitieux défi a été relevé grâce aux importants efforts consentis par toutes les unités. Selon nos prévisions, l'exercice 2009-2010 devrait également être à l'équilibre, et ce, en incluant les contributions additionnelles de l'ordre de 1 million pour combler les déficits de notre régime de retraite. Pour l'atteinte de ces résultats financiers exceptionnels, l'Université Laval a notamment effectué un suivi très serré de ses dépenses et mis en place plusieurs mesures de restriction sur le plan budgétaire.

À cause du temps assez restreint, je vous donne quelques exemples. Mentionnons que, sans altérer la mission de l'Université Laval, des règles budgétaires ont été mises en vigueur afin de limiter le rythme moyen de renouvellement du corps professoral. Grâce à cette mesure, une économie annuelle de plus de 27 millions de dollars a été réalisée. Une entente historique et unique au Québec a de plus été négociée récemment avec nos professeurs qui ont renoncé à de futures augmentations salariales et à certains avantages sociaux. Cette entente assure le remboursement par les effectifs... par les participants actifs de 50 % du déficit de capitalisation appréhendé du régime de retraite des professeurs, pour des économies annuelles de 6,9 millions de dollars. Les mêmes objectifs sont poursuivis dans les négociations en cours concernant le régime de retraite des professionnels de l'Université Laval. Diverses autres compressions dans les budgets des facultés et services ont généré une économie annuelle de plus de 8 millions de dollars. De plus, en mai 2009, leur capacité de dépenser a été réduite de 40 millions de dollars, et ce, pour une optique de saine gestion de nos risques financiers.

Le moratoire mis en place depuis deux ans quant à la création de postes dans le secteur technologique et des communications représente également un effort important de réduction des dépenses de nature administrative.

L'Université Laval s'est conformée, depuis février 2008, aux dispositions de la Loi sur l'équité salariale, ce qui représente des coûts récurrents de l'ordre de 10 millions de dollars pour les deux premières années et de 25 millions de dollars depuis 2001.

Malgré nos efforts de rationalisation, cet équilibre budgétaire demeure précaire, et un mur se dresse devant nous. Le sous-financement chronique de nos coûts de fonctionnement, depuis plusieurs années, conjugué au déficit de capitalisation de nos régimes de retraite, laisse présager un manque à gagner de l'ordre de 40 millions de dollars dès l'année 2011-2012. Cette situation menace non seulement la réalisation de notre mission d'enseignement et de recherche, mais également notre compétitivité et le maintien de notre contribution au mieux-être et au progrès de la société.

Voici d'ailleurs quelques chiffres qui illustrent l'importance de cette contribution de l'Université Laval dans l'économie du Québec et de la région de Québec. Pour l'année 2007, l'Université Laval a permis de maintenir ou de créer, à travers l'ensemble de ses activités, 15 000 emplois directs, indirects et induits, soit 11 600 dans la région de Québec--Chaudière-Appalaches. Pour cette même année de référence, nous estimons que la valeur ajoutée de l'Université Laval à la production intérieure s'élève à près de 900 millions, dont près de 600 millions dans la région immédiate de l'Université Laval. Des activités de l'Université Laval et de ses fournisseurs ont également procuré, en 2007, des recettes de l'ordre de 265 millions de dollars au gouvernement du Québec et du Canada. Ces retombées économiques sont d'autant plus importantes qu'elles sont récurrentes, à chaque année. À cet impact, dit statique, dans le langage comptable, s'ajoute également un impact, dit dynamique, lequel est spécifique aux universités et correspond aux retombées que produisent l'augmentation du capital humain et la création de nouvelles connaissances générées par la formation et la recherche universitaires.

Sur la base des résultats de l'étude dévoilée par Desjardins, que vous avez probablement déjà vue alors, je vous montre le fascicule. Ce n'est pas nous qui le disons. Alors, basés sur cette étude de Desjardins en novembre 2008 et de nos propres hypothèses de travail, on peut estimer que la valeur de l'impact dynamique de l'Université Laval s'élève à 3,4 milliards de dollars pour l'ensemble du Québec et à près de 2,2 milliards de dollars pour la seule région de Québec.

Le capital humain correspond à la différence entre ce que les diplômés gagnent annuellement et ce qu'ils auraient gagné sans une formation universitaire. Pour votre information, nous comptons 131 000 diplômés de l'Université Laval dans la région de Québec, 209 000 au Québec, 10 000 hors Québec et 6 700 à l'étranger.

La valeur des nouvelles connaissances produites correspond à la valeur des gains de productivité provenant des innovations scientifiques et des améliorations technologiques issues des recherches menées par nos chercheurs. La preuve, regardez, le Parc technologique à Québec, qui est né il y a environ 20 ans, comprend 85 entreprises et 5 000 employés. Alors, c'est une retombée directe des recherches et de la formation qu'on exécute à l'Université Laval. À ces retombées tangibles on peut également ajouter toute une série de services et d'ajouts dont l'ensemble de la collectivité bénéficie grâce à la présence de l'Université Laval dans la région.

Notons, mentionnons notamment les nombreux événements à caractère social, culturel et scientifique qui ont lieu sur le campus et qui desservent diverses clientèles régionales, nationales et internationales, la vocation régionale du PEPS qui est en voie de réalisation, dont... pour cent des nouveaux plateaux du super PEPS seront réservés à l'usage de la population de Québec, aux nombreuses ententes de collaboration aussi qui ont été développées avec des entreprises et organisations de la région, à la forte aussi implication des membres de la communauté universitaire dans les causes communautaires et humanitaires. Si on compare l'ensemble des retombées aux quelque 550 millions de subventions qui nous ont été versés en 2008-2009 par les deux paliers de gouvernement, n'a-t-on pas là une démonstration claire des avantages à investir massivement dans la formation et la recherche universitaires? Si vous le souhaitez, on pourra revenir sur ce sujet lors de la période d'échange.

Le troisième principe de gestion est l'adaptation. Dans un monde qui est en changement et très rapidement, l'Université Laval se démarque également en matière de formation, de recherche et d'internationalisation de ses activités, et ce, grâce à sa capacité d'adaptation, un autre principe de gestion qui nous permet de nous ajuster aux nouveaux besoins de la société, en favorisant l'innovation et la créativité. Ces innovations et cette créativité se manifestent d'abord dans notre offre de formation. Par exemple, nous déployons d'importants efforts pour maintenir, à la fine pointe du savoir et en phase avec les nouvelles réalités des étudiants et de la société, nos quelque 400 programmes d'études, lesquels sont soumis à un processus continu d'évaluation et d'actualisation. L'Université Laval se soucie également de développer des programmes de formation qui répondent à des demandes provenant directement de diverses communautés et qui sont complémentaires à l'offre déjà présente sur leurs territoires d'appartenance.

Outre nos 188 ententes D.E.C.-bacs donc des cégeps avec l'université, avec les collèges de la province, nous offrons aussi plusieurs programmes en collaboration avec d'autres universités québécoises. Afin de répondre aux besoins sociétaux actuels et de favoriser la conciliation travail-vie personnelle-études, nous investissons également beaucoup d'efforts dans l'enrichissement constant de notre offre de formation continue et de formation à distance. L'Université Laval est d'ailleurs l'une des plus importantes universités bimodales au pays, offrant une quarantaine de programmes entièrement à distance et au total quelque 450 cours, dont 90 % sont disponibles sur Internet. Plus d'une centaine de cours à distance sont aussi en développement. C'est d'ailleurs avec une grande fierté que nous célébrons cette année les 25 ans de notre offre de formation à distance. Entre autres, l'an dernier, plus de 3 500 personnes ont fréquenté notre Université du 3e âge, l'UTAQ, ce qui favorise l'engagement des aînés dans la vie sociale et culturelle de la région. Nous avons aussi consenti des investissements importants à la mise en place d'un nouvel environnement numérique d'apprentissage, connu sous le non de l'ENA, centré essentiellement sur les besoins des étudiants. Ce portail novateur intègre et réunit en un seul endroit la multitude de services, de sources d'information et de ressources numériques propres à chaque usager.

**(9 h 50)**

D'ailleurs, dans un article du Figaro, en juin, il y a eu une étude qui a été menée par la Caisse des dépôts et l'OCDE, et on nous comparait, notre avancement dans le numérique, avec MIT, ce qui n'est pas peu dire. Alors, je pense qu'on est vraiment... on fait figure de proue en ce qui concerne le développement de nos technologies d'information qui, on croit, est la clé pour le futur, pour nos étudiants et pour notre formation et notre recherche.

Notre projet santé, regroupant, sous un même toit, nos facultés de médecine, pharmacie et sciences infirmières, est un autre exemple remarquable de notre volonté d'offrir une formation novatrice en matière de pédagogie et un environnement d'apprentissage à la fine pointe de la technologie dans le domaine de la santé. C'est un projet de 81 millions de dollars sans précédent dans l'est du pays. Le Centre Apprentiss est un des plus importants du genre au pays avec une trentaine de laboratoires permettant des simulations cliniques sur place ou à distance.

Plusieurs de nos programmes offrent également à nos étudiants la possibilité de choisir un profil spécialisé, soit le profil coopératif, le profil entrepreneurial et le profil international et, à compter de cet automne, le profil en développement durable. L'université est d'ailleurs très fière de sa contribution au développement d'une culture entrepreneuriale dans la région et du caractère novateur de son programme de mobilité étudiante dont bénéficient chaque année 800 à 1 000 étudiants et qui a remporté, en novembre dernier, le prix d'excellence du Bureau canadien de l'éducation internationale.

Entrepreneuriat Laval, un concept original qui, depuis sa création, en 1993, a permis de lancer 385 entreprises. Certaines de ces entreprises aujourd'hui emploient jusqu'à 250 personnes. Si on parle de transfert de connaissances, je pense que c'est un élément et un outil absolument intéressants et importants pour l'Université Laval et pour la société.

Profil international. On offre à nos étudiants la possibilité de faire un séjour d'études ou un stage de une ou deux sessions dans un pays étranger afin de leur permettre d'acquérir une perspective internationale, de développer leurs compétences dans d'autres langues et d'établir des réseaux à l'échelle mondiale. En 1999, l'Université Laval devenait la première université en Amérique du Nord à pouvoir estampiller sur ses diplômes la mention «profil international». Depuis, des milliers d'étudiants ont effectué un séjour à l'étranger. Plus de 16 millions de dollars en bourses ont été octroyés par l'université, et 350 protocoles d'échange d'étudiants ont été signés avec des établissements dans 40 pays de tous les continents.

Regardons maintenant l'internationalisation. Cette ouverture sur le monde est non seulement essentielle pour nos étudiants et diplômés, mais elle est également une question de survie pour les universités. Les enjeux de société et le savoir n'ont plus de frontière. Pour tenir compte de cette tendance lourde, nous faisons encore ici preuve d'une grande capacité d'adaptation. L'Université Laval a en effet établi, au fil des années, un vaste réseau de partenariats stratégiques internationaux en formation et en recherche et elle s'est investie dans plusieurs projets de coopération et développement international. Nous entretenons des liens avec quelque 450 partenaires dans près de 65 pays. Par exemple, en matière de formation, nous développons, conjointement avec des universités partenaires à l'étranger, des formations à distance et des programmes menant à une double diplomation, par exemple, avec l'Université de Bordeaux et l'Université de Paris, Sorbonne. Nous offrons également un baccalauréat, entièrement à distance, en informatique dans huit pays d'Afrique de l'Ouest. Par l'intermédiaire de notre Faculté de foresterie, de géographie et de géomatique, nous avons aussi contribué à la relance de la formation et de la recherche universitaires en écoforesterie et écoagriculture à l'Université de Kinshasa, au Congo. L'Université Laval a aussi une longue tradition de collaboration internationale en matière de recherche et de création.

L'Université Laval a également mis en oeuvre de multiples stratégies de recrutement international pour amener à Québec autant des étudiants que des professeurs-chercheurs d'origine étrangère. De nombreuses mesures pour favoriser leur intégration et leur insertion professionnelle ont été mises en place. Avec ses quelque 4 000 étudiants internationaux et plus de 1 000 employés d'origine étrangère, l'Université Laval est d'ailleurs un important acteur d'internationalisation de la région de Québec.

Regardons maintenant les aspects de recrutement, fidélisation et réussite. Notre capacité d'innovation et de créativité se manifeste de plus dans nos efforts de recrutement étudiant, de fidélisation et d'appui à la réussite. L'Université Laval a accueilli, en 2008-2009, quelque 44 000 personnes différentes, inscrites à des cours et des programmes crédités. Les récents résultats de l'année 2009-2010 démontrent une hausse de notre population étudiante de 4,7 % en effectif étudiant équivalent à temps plein pondéré, comparativement à l'année 2008-2009 qui affichait une hausse de moins de 1 %.

Cette augmentation de notre population étudiante est en partie attribuable à la qualité de nos programmes et aux importants efforts déployés par les facultés et notre bureau de recrutement pour hausser notre taux d'attraction. Il s'agit, sans conteste, d'un exploit en soi, considérant que l'Université Laval ne bénéficie pas de l'important bassin de population de la région de Montréal ni de son taux de croissance démographique des dernières années. La région métropolitaine de Montréal comptait 3,8 millions de personnes au 1er juillet 2009 versus 746 000 personnes dans la région métropolitaine de Québec. Les plus récentes perspectives de l'évolution de la population du Québec démontrent également que cet écart se creusera au cours des 20 prochaines années, puisqu'on estime que la population de la Communauté métropolitaine de Montréal pourrait augmenter de 20 % d'ici 2031 pour atteindre 4,3 millions d'habitants, tandis que celle de Québec ne croîtrait que de 13 % pour atteindre 819 000 personnes.

De plus, notre bassin historique de recrutement, soit les régions de l'Est du Québec, est déjà entré dans une phase de décroissance démographique, laquelle pourrait s'amplifier significativement au cours des 20 prochaines années. Cette situation désavantage doublement l'Université Laval quant à ses ressources possibles de financement. Elle ne peut, d'une part, tirer profit des conditions démographiques favorables qu'offre la métropole ni, d'autre part, être admissible au financement gouvernemental particulier dont bénéficient les composantes de l'Université du Québec en région. En tant que seule université complète du centre de l'Est du Québec, l'Université Laval assume pourtant des responsabilités particulières qui devraient, à notre avis, être davantage soutenues notamment dans les programmes de secteurs clés du développement socioéconomique du Québec et de la région, mais où la faible taille des cohortes est problématique. En exemple de secteurs forts du développement socioéconomique du Québec et de domaines importants pour la région mais avec de faibles cohortes, mentionnons les mines, la foresterie, l'agriculture, la médecine dentaire et la Faculté de musique.

Outre les efforts majeurs développés pour augmenter notre effectif étudiant, l'Université Laval investit également d'importantes ressources dans l'appui à la réussite. Nous avons notamment entrepris un vaste chantier visant à hausser le taux de persévérance et de diplomation de nos étudiants. D'ailleurs, ce sera le thème de cette rencontre annuelle de demain avec les membres de notre personnel qui occupent un poste d'administrateur. Parmi les mesures d'appui à la réussite, nous avons créé récemment un programme institutionnel de bourses de leadership et développement durable, lequel vise non seulement à appuyer financièrement des étudiants qui se démarquent par leur leadership et leur engagement dans leur milieu, mais également à solliciter de nouvelles sources de financement auprès de nos partenaires privés. Ceci constitue certainement un autre bel exemple de notre souci constant de saine gouvernance et de saine gestion des fonds qui nous sont confiés.

Passons maintenant à la recherche. Notre capacité d'innovation et de créativité se manifeste aussi de façon particulièrement éloquente par le succès de nos activités de recherche et de création. En 1971, l'infrastructure de recherche de l'Université Laval proposait sur un seul institut 10 centres de recherche et environ 10 millions de dollars en financement. En moins de quatre décennies, le portrait de l'université a bien évolué. L'Université Laval se classe aujourd'hui au septième rang des grandes universités de recherche canadiennes. On peut compter plus de 280 millions de dollars, en fonds de recherche, annuels, faisant de la Capitale-Nationale le deuxième plus important lieu de réalisation de la recherche universitaire du Québec. De ce montant, 50 millions de dollars, soit 20 %, sont investis par des partenaires privés. Il s'agit là de l'une des plus grandes proportions du budget de recherche des universités canadiennes provenant du secteur privé.

**(10 heures)**

La performance de l'Université Laval en matière de recherche est attribuable aux efforts de ses quelque 1 400 professeurs-chercheurs de calibre qui oeuvrent au sein de 230 regroupements et chaires de recherche. Mentionnons plus particulièrement la très forte capacité de recherche présentée au sein de nos neuf établissements affiliés du réseau de la santé.

L'Université Laval se démarque de plus dans les domaines émergents tels que la science des matériaux, la bio-ingénierie, la muséologie et la culture numérique. Elle est également l'hôte de trois réseaux de centres d'excellence parmi les 14 réseaux canadiens. Je les nomme: ArcticNet, GEOIDE, géomatique, et l'Institut canadien pour les innovations en photonique. Notre expertise en matière d'études nordiques, de géomatique et d'optique-photonique nous a d'ailleurs valu l'obtention, en mai dernier, de deux des 19 prestigieuses chaires d'excellence de recherche au Canada, pour un investissement total record de 60 millions. L'Université Laval est la seule université québécoise à avoir obtenu deux de ces prestigieuses chaires. À ma connaissance, ce sont les plus importants investissements, au sein d'une même chaire de recherche, de l'histoire du Québec. De quoi être très fiers, vous en conviendrez.

Ces deux nouvelles chaires portent d'ailleurs à 24 le nombre de chaires créées et à 120 millions de dollars les investissements réalisés dans le cadre de notre Programme pour l'avancement de l'innovation et de la recherche, mieux connu sous le nom PAIR, lancé en janvier 2008. Ce programme, l'un des plus ambitieux jamais mis sur pied au Québec, visait à créer 100 chaires et à attirer 100 millions d'investissement en cinq ans. En moins de trois ans, l'objectif de financement est déjà dépassé. Quelque 60 partenaires de partout au Québec et au Canada sont associés à ce programme, dont plusieurs ont des activités bien au-delà de nos frontières. Plus d'une trentaine de nouveaux projets de chaire sont actuellement en développement.

Ces données démontrent l'ampleur de nos efforts pour accroître non seulement notre capacité de recherche, mais pour également diversifier nos sources de fonds et maintenir à la fine pointe du savoir nos programmes de formation grâce à l'avancement et au partage des connaissances. Nous entendons de plus poursuivre nos représentations auprès du gouvernement fédéral pour qu'il assure, à l'instar du gouvernement québécois, sa juste part des frais institutionnels de recherche découlant des subventions qu'il octroie. L'Université Laval tient également à saluer la nouvelle stratégie québécoise de la recherche et du Canada annoncée par le gouvernement du Québec, laquelle permettra de soutenir la relève scientifique et de consolider notre position en matière de recherche sur la scène nationale et internationale. Nous croyons toutefois que la recherche fondamentale et la recherche en sciences humaines et sociales mériteraient d'être davantage reconnues et encouragées compte tenu de leur importante contribution à l'innovation sociale et du développement culturel et économique.

M. le Président, le temps... je vais passer au développement durable en résumant un peu ce que vous avez déjà dans le document. Le développement durable à l'Université Laval, ce n'est pas qu'un virage vert. Le développement, ça va devenir la signature de l'Université Laval et ça encourage l'ensemble de la communauté à poser des gestes en fonction du développement durable, que ce soit au niveau social, que ce soit au niveau environnemental ou que ce soit au niveau économique. Alors, chacun des gestes posés, et c'était le thème de la rencontre des administrateurs l'an passé, chacun des gestes posés par les membres de la communauté se retrouve dans un milieu cohérent. Et c'est exactement... c'est très innovateur comme approche, assez qu'on est en train de développer le même principe avec l'Université de Bordeaux et l'Université de Barcelone, au niveau international.

Alors, c'est sûr que cette approche-là, pour l'Université Laval, à une université complète et ouverte est une approche qui va favoriser notre rayonnement au niveau international.

Le dernier principe, et c'en est un de cohérence, j'y passe quand même rapidement. C'est sûr que, dans... on peut espérer assurer la pérennité de la qualité de vie des générations actuelles et futures sans voir à maintenir un équilibre entre les efforts investis aujourd'hui. Et ça, dans cette structure-là, pour atteindre cet équilibre, l'Université Laval a entrepris, en 2008, la mise en place d'une démarche structurée misant sur la concertation et la mobilisation de toute la communauté universitaire.

M. le Président, en conclusion, après plusieurs années de sous-financement, le système universitaire québécois est aujourd'hui sérieusement fragilisé. Cette situation menace non seulement la réalisation de notre mission universitaire, mais nous fait également perdre du terrain par rapport aux universités des autres provinces canadiennes et des pays qui investissent massivement, comme la France, qui, dans le cadre du grand emprunt national, consacrera 11 milliards d'euros à l'enseignement supérieur et 7,9 milliards d'euros à la recherche en milieu universitaire. En Allemagne, le gouvernement vient également de s'engager à accroître de 12 milliards d'euros d'ici 2013 le budget consacré à l'éducation. Il s'est depuis fixé pour objectif d'allouer 10 % de son produit intérieur brut, son PIB, à l'éducation et à la recherche d'ici 2015.

Le financement des universités est un choix de société, M. le Président, et doit être une responsabilité partagée par tous les acteurs qui bénéficient de la formation qui y est donnée et des recherches qui y sont réalisées, à savoir la société dans son ensemble, les étudiants, les diplômés et les entreprises.

En ce qui nous concerne, nous proposons d'enclencher une réflexion qui viserait à bonifier l'effort des entreprises au financement du réseau universitaire. La confédération des associations d'étudiantes et d'étudiants de l'Université Laval, la CADEUL, ici représentée par sa présidente, et l'association des étudiants et étudiantes de l'Université Laval inscrits aux études supérieures, représentée ici par son président, et l'administration de l'Université Laval suggèrent tout particulièrement d'évaluer l'idée de mettre en place une nouvelle formule s'apparentant à celle prévue à la Loi favorisant le développement et la reconnaissance des compétences de la main-d'oeuvre. Cette idée mérite, selon nous, d'être considérée et débattue sérieusement en prévision du rendez-vous des partenaires de l'éducation à l'automne.

Je dois aussi mentionner, M. le Président, qu'en tant que recteur de l'Université Laval on a un phénomène un peu nouveau où des présidents de compagnie et des présidents d'entreprise en général viennent nous voir pour nous sensibiliser à la rareté de la relève et qu'ils sont très inquiets au niveau de la relève, au point d'aller recruter des étudiants ou d'aller recruter des cerveaux hors Québec et hors Canada. Ça m'inquiète au plus grand... Ça m'inquiète beaucoup. Et c'est une réalité à laquelle il va falloir faire face. Et ces gens-là sont prêts à contribuer pour pouvoir assurer une relève et assurer leur compétitivité. Il appartient naturellement, bien sûr, au gouvernement de faire les arbitrages nécessaires quant à la contribution de chacun de ces acteurs.

Au terme de la rencontre économique de Lévis, l'hiver dernier, il est apparu clairement nécessaire de faire de l'éducation une priorité pour le Québec. Nous espérons que la rencontre des partenaires de l'éducation qui aura lieu cet automne sera une réelle occasion de se donner collectivement les moyens d'assurer le développement de notre société. Merci beaucoup de votre attention.

Le Président (M. Marsan): M. le recteur, je vous remercie bien sincèrement pour la qualité de votre présentation et les informations que vous nous donnez sur l'Université Laval.

Avant de passer aux premiers échanges, je voudrais simplement saluer notre collègue la députée de Taschereau qui se joint à nous pour nos travaux ce matin. Et je vais immédiatement céder la parole à la députée de Mille-Îles pour commencer cette période d'échange. Nous faisons des périodes d'échange d'environ 20 minutes du côté ministériel et du côté de l'opposition officielle, mais nous avons un total de 2 h 30 min environ pour tous les échanges. Alors, Mme la députée de Mille-Îles, la parole est à vous.

Mme Charbonneau: Merci, M. le Président. Bonjour à vous, bonjour aux gens d'en arrière. Et, comme on a dit dans une rencontre précédente, ça n'a aucun double sens, c'est vraiment juste pour pouvoir vous saluer, les étudiants et les gens de l'université.

Je pense que vous avez de quoi être fiers. Votre présentation vient de mettre la table pour démontrer aux gens d'ici mais aussi aux gens qui nous écoutent l'importance de l'Université Laval à Québec. Je vous fais un peu un clin d'oeil ce matin, puisque je suis une fille de Laval et j'ai toujours trouvé amusant, malgré le fait qu'il y a un historique, que j'habite à Laval et que l'université est juste à côté du condo que j'ai à Québec, puisqu'on aurait pensé que l'Université Laval pourrait être à Laval.

J'ai aussi le privilège, puisque je me situe à un endroit privilégié à Québec, de voir votre clientèle étudiante tout alentour d'où j'habite et l'émergence de l'économie qui va avec ça aussi, puisque ces jeunes sont au même IGA que moi à compter leurs sous devant certains comptoirs. Et, dans toutes les activités où je suis, je rencontre la plupart de vos étudiants.

Je vais commencer ma première question avec, je crois, le sujet qui se doit d'être un peu de l'heure mais qui sensibilise l'ensemble des gens qui sont assis avec vous à la table. Vous avez fait part d'innovation et de cohérence, et je pense qu'au niveau du financement des universités vous avez fait de grands pas. Je pense à l'entente que vous avez signifié que vous avez, qui est une entente extraordinaire, avec votre équipe enseignante par rapport aux économies propices à cette entente-là. Par contre, je ne vous ai pas entendus, ou peut-être que je l'ai manqué, par rapport aux cadres de l'université. Y a-t-il une entente qui se ressemble ou... Je vous dirais que je n'ai pas l'habitude de prendre de grandes phrases pour me rendre au but, mais il y a eu, dans les journaux, des annonces importantes faites sur les bonis forfaitaires, ou les bonis de rendement, ou l'argent qu'on donne à un cadre qui quitte ou un cadre qui change de place, et je pense que c'est important de faire valoir le point de vue administratif de votre côté, puisque, nous, on doit se faire aussi une tête sur cette réflexion-là.

Donc, j'aimerais vous entendre sur si vous avez déjà ou si vous avez enclenché un processus quelconque.

**(10 h 10)**

M. Brière (Denis): D'abord, je dois vous dire que la notion de boni n'existe pas à l'Université Laval. On n'a pas de boni de performance ou quoi que ce soit. On a un travail à faire, et c'est... les gens sont rémunérés de façon fixe. Et il n'y a pas, à la fin de l'année, des bonis qui sont accordés.

Maintenant, en termes de... pour les cadres en général, je vais laisser le vice-recteur exécutif et au développement, Éric Bauce, vous donner plus de précisions sur ce sujet-là.

M. Bauce (Éric): En fait...

Le Président (M. Marsan): Alors, c'est M. Bauce, c'est ça?

M. Bauce (Éric): Oui, c'est ça.

Le Président (M. Marsan): Je vous demande de vous identifier. C'est pour les fins de nos transcriptions.

M. Bauce (Éric): Éric Bauce, vice-recteur exécutif.

Le Président (M. Marsan): Je vous remercie. Allez-y.

M. Bauce (Éric): En fait, on est en négociation. On travaille présentement avec nos cadres pour appliquer, développer la même mesure qu'on a faite avec les professeurs.

Mme Charbonneau: Je comprends que, puisque vous êtes en train d'y réfléchir et d'échanger, la réponse sera courte. Je souhaite la même ouverture chez les cadres que vous avez eue chez les enseignants. Je pense que c'est important de regarder ce principe-là aussi. Puisqu'on est sur le principe de financement et, depuis le début de ces auditions, on entend souvent l'équité, à travers le Canada et à travers les autres pays, sur le financement de l'éducation, on dit «l'éducation», puisque c'est très large, hein?

Il ne faut pas oublier que, dans cette éducation-là, il y a primaire, secondaire, préscolaire, et université, cégep. Mais plusieurs universités nous ont parlé de la parité, nous ont parlé du financement qui se fait à l'extérieur du Québec, celui qui se fait ici. Et je me risque à chaque fois, puisque je pense que c'est quelque chose que j'aime entendre de la part des hauts dirigeants ou, et j'apprécie beaucoup ce matin que vous êtes accompagnés par vos présidents d'associations étudiantes, ou des étudiants sur le fait qu'on a parlé de la formation qu'on donne à l'intérieur, des cours qu'on donne à l'intérieur de nos universités, et l'équipement différent pour chacune de ces formations-là. Vous avez mentionné «dentiste» un petit peu plus tôt. Bien, quand on s'en va dentiste, l'équipement dont j'ai besoin pour mon apprentissage est vraiment différent de celui que j'ai en sociologie, ou muséologie, ou les autres cours qui sont un petit peu plus théoriques. Par contre, ma facture est la même ou pratiquement la même. Mes équipements médicaux doivent se changer régulièrement parce que la technologie avance à des pas de géant, et vous le voyez probablement dans votre Département d'informatique mais pas nécessairement dans d'autres cours qui sont un peu plus... que j'appellerai plus statiques, et ce n'est pas péjoratif, là, je ne veux pas en faire un débat, mais qui sont différents.

Donc, est-il plausible de penser... Et ne répondez pas par oui ou par non, s'il vous plaît. Je vois M. Bauce vous passer un papier. Il fait des réponses courtes, il m'inquiète.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Charbonneau: Mais est-il possible d'imaginer une facture différente, dépendamment de la formation ou dépendamment de mon orientation de carrière?

M. Brière (Denis): J'apprécie votre question, parce qu'on en a débattu à l'intérieur de la communauté universitaire. C'est sûr qu'à premier abord ça peut paraître quelque chose qui soit attrayant que d'avoir ce qu'on appelle des frais modulés, hein, par discipline, mais, dans le fond, après avoir bien regardé ça, notre communauté universitaire que je représente n'est pas en faveur de cette modulation-là pour plusieurs raisons, dont la principale: il y a toujours l'accessibilité aussi à une formation.

Qu'on parle d'une formation en sciences humaines, ou qu'on parle d'une formation en sciences, ou qu'on parle d'une formation en médecine, c'est une formation. Alors, on assure une formation et on assure cette accessibilité à cette formation-là. Et c'est sûr que les frais modulés, ça peut paraître attrayant, mais il ne faut pas oublier que, dans une formule de financement où on a un sous-financement dans les universités, ce n'est pas un apport important. Je vais vous donner un exemple, là: on admet 200 étudiants, par année, en médecine. Alors, qu'on mette les frais de scolarité à 10 000 $ par année, ce n'est pas ça qui va venir améliorer nos conditions financières, alors. Mais c'est sûr que l'accessibilité est le dénominateur commun dans notre réflexion qu'on a eue dans la communauté... l'accessibilité et avoir deux poids, deux mesures ou d'avoir des différenciations au niveau d'une formation, parce que la formation, que je considère, que ce soit en philosophie ou que ce soit en sciences humaines ou en sciences sociales, apporte autant à la société que d'autres formations, sinon plus, à certains égards.

Alors, c'est sûr qu'aller distinguer et moduler les frais... Ce n'est pas simplement le recteur qui vous répond, c'est la communauté universitaire, parce qu'on s'est penchés sur cette question-là.

Mme Charbonneau: Il reste combien de temps, M. le Président?

Le Président (M. Marsan): Plus que 10 minutes.

Mme Charbonneau: Il me reste plus que 10 minutes. J'apprécie la réponse, parce que ce n'est pas simple, là, ce n'est pas simple quand on parle d'équité, puisque les universités sont financées de façon fort différente des autres institutions pédagogiques du Québec. On sait qu'il y en a quelques-unes qui ne sont financées que par le gouvernement, d'autres sont financées par différents aspects. Mais, dans votre cas et dans votre réflexion, ce qui est intéressant, c'est que... Puis je pense à M. votre collègue d'à côté, M. Bauce, qui a passé dans Le Devoir dernièrement pour parler du financement qui viendrait ou qui pourrait venir du privé.

Je me demandais si vous pourriez peut-être élaborer un peu plus sur l'apport du privé, puisqu'un petit peu plus tôt, je me permets de me le rappeler en vous le disant, vous avez parlé des gens qui ont sorti de l'école, qui sont maintenant sur le marché du travail, le partenariat aussi entre l'employeur et la demande de relève, puisqu'on l'a vu dans d'autres endroits en éducation, il y a des métiers qui s'éteignent, mais il y en a d'autres qui nous arrivent, qui n'existaient pas il y a 10 ans, hein? Il y a des nouvelles formes de pratique qui font en sorte que vous devez élaborer de nouvelles façons de faire, et j'imagine que les employeurs sont de bons partenaires pour venir vous dire quels sont les besoins et ça ressemble à quoi.

Bon. Donc, quand on parle d'un financement qui vient plus du privé... Et vous avez compris aussi que c'est aussi pour fins pédagogiques, de notre côté, puisqu'il y a des gens qui vous écoutent, qui sont autant de votre ville, qui s'appelle l'Université Laval, que d'ailleurs. Mais, quand on parle du financement du privé, vous entendez quoi et comment?

M. Brière (Denis): Merci pour la question, parce que c'est... Il y a certaines notions qu'il faut mettre de l'avant avant de parler de financement privé, O.K.?

C'est sûr, lorsqu'on regarde au niveau de notre fondation, on appelle ça... s'il y a des fondations ou des gens privés qui contribuent à notre fondation, c'est un aspect d'un financement, O.K.? Et on a aussi le financement au niveau de la recherche, financement au niveau de la recherche où on a les chaires industrielles que je vous ai mentionnées tantôt. Que ce soient des chaires avec les agences subventionnaires, et tout, d'ailleurs qui sont très, très bien structurées et qui exigent une contribution financière du privé, c'est très, très bien encadré, mais il faut mettre ça dans un cadre où le privé qui s'associe à l'université veut améliorer sa compétitivité par l'avancement des connaissances. Donc, c'est vraiment de la recherche qui est faite dans tous les secteurs et qui...

**(10 h 20)**

D'ailleurs, l'interdisciplinarité commence à jouer un grand rôle dans cette approche-là aussi, mais ça, c'est une autre contribution, mais une contribution à la formation comme telle, à un problème qui nous a été amené et qui continuellement nous est amené... et qu'on cherche des façons, comme vous dites, de pouvoir pallier à ce manque de ressources, de personnel hautement qualifié. On n'a pas de mécanisme. Maintenant, on en a discuté. L'idée a germé au niveau de nos associations étudiantes.

On n'a pas la formule exacte, mais je pense que ça demande une réflexion sérieuse, parce que, si les gens viennent nous voir et veulent participer à la formation par différents moyens, bien, nous, on met en place... on s'adapte à ça, mais on met en place des solutions ponctuelles, alors que ça demanderait peut-être une solution un peu plus globale, parce qu'on s'aperçoit que le problème dans le moment, c'est la pointe de l'iceberg, parce que dans le futur il va falloir avoir une solution plus globale que les solutions qu'on apporte vraiment de façon pointue et qu'on répond à certaines demandes de formations plus spécialisées ou adaptées à des entreprises. Quand je dis «entreprises», là, c'est autant «publiques, parapubliques que privées», là. Alors ça, on est dans ce mode-là. Mais vous comprendrez que ça demande quand même beaucoup de temps, beaucoup d'efforts et que, si on avait une approche plus globale d'une contribution du privé, ça nous aiderait certainement à répondre mieux à la demande et à répondre à une demande... que des gens ne s'aperçoivent même pas de ce qui va se passer dans deux, trois ou quatre ans.

Vous savez, on a eu des interactions avec certaines entreprises que je n'ai pas besoin de nommer. Aussitôt que d'autres entreprises ont su qu'on avait fait ça, ils ont dit: Bien, nous autres aussi, on veut le faire.

Alors, il semble y avoir comme une cascade de besoins, de besoins de la société et qui fait en sorte que, nous, on sent que ces secteurs-là bénéficient de la formation, et des recherches, qui se fait au niveau universitaire... je n'exclus pas le reste de l'éducation non plus, là, ce n'est pas ça que je veux dire, mais on parle pour les universités ici... et qui bénéficient de cette formation et des recherches, et qui les rend plus compétitifs, et qui... Leur compétitivité dépend de ça aussi. Je peux vous dire une expérience très personnelle. Lorsque j'étais doyen, j'ai monté huit chaires industrielles, rencontré des présidents de compagnie, rencontré des gens du gouvernement, public, parapublic. Oui, on parlait de l'avancement des connaissances. Avec tout ce qu'on a, et surtout au Québec, on a quand même des crédits, à la recherche, de 35 %, ce qui est quand même très unique au niveau canadien puis, je pense, qu'on doit continuer à avoir. Mais les gens, en bout de ligne, nous disaient toujours: On est intéressés par les gens que vous formez à l'intérieur de ces chaires industrielles là.

Alors, c'est sûr qu'il y a un manque. Il y a un manque qui est évident aujourd'hui et qui va... selon moi, ne va que s'accentuer dans le futur. Je ne sais pas si, Éric, tu veux compléter.

Le Président (M. Marsan): M. Bauce.

M. Bauce (Éric): Je vais peut-être compléter. Puis vous m'avez ouvert la porte d'être un petit plus long que tout à l'heure, mais je vais me retenir, quand même.

On est profondément convaincus que, dans un premier temps, l'éducation... l'investissement dans les universités, c'est un investissement, ce n'est pas un coût. Et c'est un peu le modèle, la façon de penser que l'on a quand on discute avec nos partenaires. On est aussi convaincus que l'avenir économique du Québec et des entreprises québécoises passe par l'innovation. Il est clair que c'est par des produits de niche, là, qu'on va être capables de se développer, et ce n'est pas par des produits de masse, puis ça, c'est assez évident, là. On n'a pas la capacité de compétitionner avec des économies comme la Chine, et autres, de ce côté-là, donc il faut qu'on innove. On a des ressources absolument exceptionnelles au Québec et notamment la matière grise, qui est une de nos plus grandes ressources au Québec, stabilité politique, et tout ça. Donc, on a tout ce qu'il faut finalement pour développer notre économie dans ce sens-là. On dit souvent... et les étudiants sont venus nous voir avec cet élément de solution, ils nous ont dit: Nous, on a une solution durable. Évidemment, le terme «durable», nous, ça sonne bien, parce que c'est la base de notre développement et de toutes nos décisions. Et là on s'est mis à discuter. Et c'est une solution qui est fort intéressante dans le sens qu'il y a déjà des mécanismes qui existent, dont on peut s'inspirer. Donc, il ne s'agit pas de tout rebâtir.

On parle de la contribution pour la formation à la main-d'oeuvre. Il faut comprendre que c'est quand même assez majeur, là, cette contribution des entreprises à la formation de la main-d'oeuvre. En 2008, là, c'était une contribution d'autour de 660 millions par année, qui a été déclarée. Évidemment, on parle de montants qui commencent à être assez intéressants pour régler le problème des entreprises. Je ne dis pas qu'on va parler d'un pourcentage ou quoi que ce soit, ça doit être débattu.

Notre point est que tous les acteurs qui bénéficient de ce qu'on fait collectivement doivent contribuer. Et là il faut qu'on s'assoie ensemble et qu'on arrive à déterminer des façons puis des façons, autant que possible, qui ne sont pas trop compliquées. Les choses trop compliquées, généralement ça prend du temps puis généralement ça n'aboutit pas. Et on pense que c'est le moment de réfléchir à ces choses-là en prévision de la rencontre qu'il va y avoir à l'automne et de préparer cette rencontre-là en fonction des défis, parce qu'il est clair, et là je vais m'arrêter, là, avant qu'on me coupe, il est clair que le monde universitaire va faire face à un mur, un mur financier important.

Et il y a eu beaucoup d'efforts qui ont été faits et il y a beaucoup d'efforts de rationalisation, mais il faut faire excessivement attention à ne pas venir mettre en péril la mission du réseau universitaire. Et ce qui s'en vient, honnêtement, c'est la mise en péril du réseau universitaire, qui va avoir inévitablement des conséquences en domino sur l'économie et le développement du Québec.

Le Président (M. Marsan): Ça va? Alors, merci beaucoup. Nous allons poursuivre cette fois avec l'opposition officielle, et je vais céder la parole à celle qui est la porte-parole en matière d'enseignement supérieur, la députée de Taillon. La parole est à vous.

Mme Malavoy: Merci, M. le Président. Bonjour, M. le recteur, M. Brière, bonjour à toutes les personnes qui vous accompagnent. Je vois que, dans la présence des étudiants et des étudiantes, il y a une, je dirais, il y a une reconnaissance de leur rôle absolument crucial dans le développement de votre université. Mais je reconnais bien vos collaborateurs, vice-recteurs et vice-rectrices, qui sont là aussi. Donc, je sais que votre université est plus près que d'autres, mais ça nous fait grand plaisir de voir que vous êtes nombreux et nombreuses à vous être déplacés aujourd'hui.

Vous avez abordé, tant dans vos documents dont nous avons pris connaissance que dans votre présentation, un certain nombre de défis qui sont propres à votre université mais qui sont également des défis de l'enseignement supérieur au Québec, on en conviendra bien. Et donc dans ces échanges j'essaierai de voir des choses qui vous sont spécifiques mais tout en comprenant bien qu'il y a d'autres enjeux qui sont globaux pour la société québécoise. Vous l'avez bien dit, vous-mêmes.

Premier enjeu, qui est vital tout autant que le financement, c'est celui du recrutement, celui de la clientèle étudiante. D'après ce que j'ai pu percevoir, au premier cycle, vous avez une clientèle qui est à peu près stable, je crois... augmentation plus aux deuxième et troisième cycles. Et donc ce que j'aimerais peut-être aborder dans un premier temps, c'est votre façon de faire face à ce défi du recrutement de clientèle. Vous avez noté dans votre intervention ce matin que, pour des raisons de bassin géographique, de localisation géographique aussi par rapport à Montréal, vous craignez d'être défavorisés. Donc, il y a, autour du recrutement, qui est le nerf de la guerre tant que la formule de financement sera ce qu'elle est, il y a, à ce niveau-là, un défi important pour votre université.

Et j'aimerais, dans un premier temps, que vous m'entreteniez de cette question du recrutement des étudiants dans vos programmes.

**(10 h 30)**

M. Brière (Denis): Alors, merci pour votre question, parce que c'est une préoccupation majeure. Lorsqu'on parle d'équilibre budgétaire, c'est sûr qu'on peut travailler sur nos dépenses, on peut travailler sur la rationalisation au niveau de la gestion de l'université, mais l'autre aspect pour atteindre l'équilibre budgétaire, c'est certainement notre population étudiante. Qu'on soit d'accord ou pas avec la formule, c'est ça. Donc, on doit vivre avec une formule qui... nous recevons des subventions en fonction du nombre d'étudiants.

Ce qu'on a entrepris en 2009, on a fait le tour de chacune des facultés, et non pas les facultés qui sont venues nous voir, là, parce que ça a un impact psychologique aussi, là, de chacune des facultés pour parler justement de recrutement, parce que c'est, comme on dit communément, c'est le nerf de la guerre. Alors, c'est sûr qu'en faisant le tour de chacune des facultés on a sensibilisé la communauté en général de l'importance du recrutement. Ça peut paraître évident, mais dans certains cas, parfois, on n'a pas... lorsqu'on n'a pas cet éveil-là, ça devient quelque chose qu'on met de côté, puis on dit: Ah, bien le recrutement, ce n'est pas de notre responsabilité.

Alors, on a essayé de responsabiliser chacune des unités au niveau du recrutement. Et, comme vous avez pu voir, là, dans le document, ça a vraiment porté fruit. Le 4,7 % qu'on a eu cette année, c'est vraiment quelque chose d'extraordinaire, et, les statistiques, on n'aime pas trop, trop se prononcer là-dessus, là, mais disons que ça augure bien pour l'an prochain. Parce que je ne veux pas mettre de chiffres, non, non, mais ça augure bien quand même pour l'an prochain. Et on reconnaît que c'est vraiment l'ensemble de la communauté qui a fait en sorte qu'on a pu augmenter le recrutement. Maintenant, ça a des limites, définitivement. Même à l'intérieur de toutes les limites que vous avez énoncées et que j'ai énoncées, au point de vue démographique et au point de vue situation de l'Université Laval, en dehors d'une grande métropole, c'est sûr que notre attractivité est de par nos programmes et par la notoriété qu'on a au niveau de la recherche.

Vous avez mentionné un premier cycle, deuxième cycle, troisième cycle. C'est sûr qu'aux deuxième et troisième cycles un étudiant ne vient pas à l'Université Laval pour l'Université Laval, l'étudiant en deuxième ou troisième cycle se joint à une équipe de recherche. Et, comme vous avez pu voir, l'évolution de la recherche à l'Université Laval a fait en sorte... Et je vais insister encore une fois parce que je pense que c'est majeur. Simplement l'obtention, cette année, de deux chaires d'excellence, une dans l'Arctique et une en optique-photonique, nous donne un rayonnement absolument incroyable parce que c'est une reconnaissance. Ce n'est pas une reconnaissance, par exemple, d'un concours qui se base sur une capacité de recherche, qui résulte de deux ou trois ans, ça résulte... Moi, je sais que c'est une victoire régionale, ces deux chaires d'excellence là, parce que ça résulte d'efforts des 30, 40 dernières années où on a vraiment développé une expertise qui est reconnue de façon internationale. Le CNRS de France va investir, dans la chaire dans l'Arctique, 17 millions de dollars. Ils déménagent une partie de leur laboratoire sur le campus de l'Université Laval.

Alors, c'est sûr qu'en fait de rayonnement, si on parle d'international, si on parle de recrutement, ça devient extrêmement important, une notion de développement durable aussi. Je pense que la génération montante est très sensible et répond très, très rapidement à toute action qui est en relation avec le développement durable. Alors ça, c'est un autre aspect. Vous avez parlé de premier, deuxième, troisième cycle. Je vais laisser Éric donner plus peut-être de statistiques de ce côté-là. Mais c'est sûr que notre capacité d'accueil dans le moment est une chose sur laquelle on doit travailler. Parce qu'avec le sous-financement, ce qui se passe, on peut avoir plus d'étudiants, mais il faut aussi augmenter le nombre de professeurs et de chargés de cours. Donc, on est pris un peu entre un sous-financement qui nous empêche d'engager des professeurs et des chargés de cours et une augmentation du nombre d'étudiants. Alors là, il faut vraiment bien rationaliser.

On a eu des discussions, pas plus tard que la semaine dernière, sur certains programmes et on essaie de mettre en place une façon d'accepter le plus d'étudiants possible parce que c'est important.

La rétention est aussi un aspect. On appelle ça la gestion des effectifs étudiants. Ce n'est pas simplement d'attirer des étudiants mais de faire en sorte que les étudiants complètent leurs études. Et ça, c'est extrêmement important parce qu'on a déjà fait l'effort de les recruter, et après ça on en perd au niveau... C'est sûr que, dans un système universitaire, disons que les étudiants vont s'élaguer de façon un peu naturelle ou ils viennent, ne sont pas, à cet âge-là, ne sont pas peut-être sûrs de leur choix. Mais quand même on pense qu'on peut avoir un meilleur système de mentorat et un meilleur système de maintenir les étudiants dans leurs programmes d'études. D'ailleurs, demain, comme je disais tantôt, on va se pencher là-dessus avec l'ensemble des administrateurs.

Mais je crois qu'on a... En fait de capacité d'accueil et de mécanisme d'accueil, c'est sûr qu'on peut y mettre plus de ressources, mais ça nous préoccupe beaucoup. Alors, Éric va peut-être vous donner un peu plus de statistiques.

Le Président (M. Marsan): M. Bauce.

M. Bauce (Éric): Oui. Alors là, en fait, l'idée, quand on parle de recrutement, et le recteur l'a bien précisé, c'est vraiment de la gestion d'effectifs étudiants. Donc, il faut qu'on attire les étudiants, il faut qu'on les garde, il faut qu'on les diplôme. Chacune des étapes, il y a des actions à faire, et c'est dans ce contexte-là qu'on travaille.

On parlait des investissements en recherche. C'est très important parce que la recherche, c'est un outil de formation. La grande différence entre la recherche dans une université et la recherche dans un centre privé, c'est qu'à l'université on fait de la recherche comme outil de formation avant tout, et ça, c'est important. Et évidemment, pour nous, financièrement on attire les étudiants gradués, ça permet évidemment d'avoir des effets positifs sur le budget de fonctionnement. Donc, quand on reçoit des fonds de recherche, quand, à l'intérieur des fonds de recherche, il y a des critères qui obligent à ce qu'un pourcentage aille directement en bourses aux étudiants, évidemment ça a des effets très positifs sur nous. Il y a des défis, puis évidemment tous ces défis-là sont basés sur le fait que l'on doit s'adapter.

On doit s'adapter aux besoins de la société mais aussi et indirectement à la réalité des étudiants qu'on reçoit. Les générations évoluent, et évidemment il faut qu'on s'adapte à ça. Les clientèles avec le temps viennent à évoluer. Elles n'ont pas les mêmes besoins, n'ont pas les mêmes façons de penser, n'ont pas nécessairement les mêmes objectifs. Et ça, il faut qu'on s'adapte, au niveau de la formation, pour les rendre productifs au maximum pour la société. On a développé et on a mis beaucoup d'efforts dans les aspects technologiques. Il est clair que la technologie, ça fait partie du quotidien. On a des étudiants, on dit: Ils sont nés avec une souris dans les mains. Alors, il faut qu'on soit en mesure de répondre à ça. Et, au niveau technologique, il y a plusieurs aspects fort intéressants où il faut qu'on réponde à leurs besoins de ce côté-là. Il faut qu'on s'adapte évidemment à l'évolution technologique mondiale. Et, si on a des étudiants, on peut les amener, les attirer chez nous ou on peut aller les chercher, donc leur donner de la formation.

Et c'est pour ça qu'on développe beaucoup la formation en ligne, qu'on appelle la formation à distance, formation en ligne qui... on la développe dans un contexte, aussi, hybride, parce qu'on ne peut pas tout faire en ligne, là, il y a certaines manipulations, etc. Puis on n'apprend pas à faire ça sur un ordinateur. Donc, une partie sur place, une partie à distance, et ça, c'est important et c'est une façon d'aller chercher de la «clientèle» étudiante, j'utilise le terme parce qu'il est assez utilisé, mais que... sans être péjoratif, là, la clientèle étudiante pas seulement au Québec, mais à travers le monde. Et, à travers le monde, il y a d'énormes possibilités de recrutement via la formation en ligne et la formation à distance.

Et ça, pour nous, c'est une des raisons pourquoi on met autant d'efforts dans les développements technologiques. Et, même si ça paraît cher, ça paraît des gros investissements au niveau technologique, ça coûte quand même moins cher que de mettre du béton un peu partout à travers la province ou à travers le monde.

Le Président (M. Marsan): Merci.

Mme Malavoy: Bien, ça m'amène à vous poser une question peut-être un peu plus large, mais je trouve que, pour moi en tout cas, c'est le bon moment.

Vous parlez des défis donc de recrutement, vous parlez d'aller chercher les clientèles là où elles sont. À d'autres endroits, dans vos perspectives, vous parlez de décloisonnement. J'aimerais vous entendre sur votre vision de ce que votre université est en train de devenir, c'est-à-dire d'un modèle plus classique où les étudiants se déplacent pour venir suivre des cours pendant tant de temps, qui demeure, là... ce modèle-là demeure, mais à un modèle plus décloisonné. Et, en termes disciplinaires, j'aimerais vous entendre là-dessus. Et, en termes aussi tout simplement de rapports pédagogiques avec une approche différente, vous l'avez évoqué avec la formation à distance, à quoi assiste-t-on comme transformation de ce qu'est votre université et est-ce que ce sont des tendances lourdes et donc des voies d'avenir incontournables si on veut continuer d'exister comme Université Laval qui est une université ancienne, prestigieuse puis en même temps qui fait face aux mêmes défis que toutes les universités?

Donc, est-ce que vous êtes en train de subir, pas dans le mauvais sens du terme, mais de vivre des transformations qui sont votre salut mais en même temps qui vous posent des défis parce que ça change un certain nombre de choses qu'on est habitués de faire depuis des décennies?

Le Président (M. Marsan): Bonjour. Je vais vous demander de vous présenter.

M. Brière (Denis): Je vais faire juste une introduction...

Le Président (M. Marsan): Oui.

**(10 h 40)**

M. Brière (Denis): ...M. le Président, là, à la question et la raison pour laquelle la vice-rectrice adjointe aux études et aux affaires internationales se joint à nous, parce que c'est une question fondamentale, question fondamentale de défi où est-ce qu'on s'en va comme université.

C'est sûr qu'avec toutes les tendances qu'on a présentement, qu'on observe, que ça soit famille-études, travail-études, que ça soit les études à temps partiel, de plus en plus on a une augmentation d'étudiants à temps partiel. C'est parce qu'ils veulent conjuguer certaines responsabilités. Ça peut être une vie personnelle, ça peut être travail-études, ça peut être la famille, ça peut être arrêter pendant un petit bout de temps pour faire un voyage, ça peut être toutes sortes de considérations. Mais c'est sûr que cette tendance-là, elle est là au niveau... Ce n'est pas comme il y a 15 ou 20 ans, on rentre à l'université en première année puis on finit en quatrième année, puis c'est fini. La tendance n'est plus ça dans une grosse portion, là, des étudiants. Et la façon, et Éric en a quand même élaboré une, solution, qui est certainement la formation en ligne, formation à distance, qui ne répond pas à... ne répond pas à tous les besoins...

Mais je pense qu'on doit être à l'avant-garde au niveau de la formation à distance. Et je vais laisser Nicole vous présenter un peu, sous sa responsabilité, là, le recrutement.

Le Président (M. Marsan): Mme la vice-rectrice, si vous voulez vous présenter, s'il vous plaît.

Mme Lacasse (Nicole): Alors, Nicole Lacasse, vice-rectrice adjointe, études, activités internationales.

Le Président (M. Marsan): ...

Mme Lacasse (Nicole): Votre question est très large, sur la vision de devenir, sur les défis. Je vais permettre de partir un peu assez loin, puisque vous partez d'assez loin en amont de la question, pour dire: À la base, l'université n'a plus le monopole de la recherche et de la formation qu'elle avait il y a plusieurs années. Et, puisque vous partez d'assez loin, je vais vous parler de nos défis.

M. le recteur a parlé des entreprises qui ont des besoins spécifiques en formation de main-d'oeuvre et que, si on ne répond pas à leurs besoins, ils n'attendent pas après nous, il y a des entreprises qui appellent l'université de leur nom d'entreprise et qui forment leurs gens. En recherche, de plus en plus de recherches se font à l'extérieur de l'université. Là, je suis plus globale qu'au Québec, je suis dans le monde, et en disant: Donc, la recherche se fait et à l'université et ailleurs. Et, pour demeurer pertinents socialement, je dirais, il faut avoir cette vision que, pour garder, je dirais, notre place et notre mission fondamentale, il faut qu'on fasse très bien ce qu'on fait autant en formation qu'en recherche et qu'on demeure bien connectés sur les besoins immédiats et de la société et des étudiants, et c'est là que je rejoins M. le recteur sur le recrutement, un de nos grands défis dans la vision du devenir. Et, quand vous avez parlé de recrutement... le recrutement, ce n'est pas juste aller chercher des gens et leur vendre un produit, l'amener à l'université, on vend de la formation, O.K.? Et ce n'est pas du savoir. Et on développe du savoir et donc on ne vend pas du savon.

Et le recrutement, ça veut donc dire l'effort d'avoir, je vais vous dire, le produit, entre guillemets, qui est pertinent et dont les gens ont besoin, ce qui veut dire de s'assurer vraiment toujours de la pertinence sociale de nos programmes. Et, quand même qu'on fera les plus belles campagnes de recrutement du monde, si notre formation n'est pas adaptée à ce que les jeunes d'aujourd'hui veulent et ce que les employeurs veulent... bien, notre défi, c'est ça, c'est de demeurer pertinents socialement et de demeurer au niveau de... Éric a parlé d'attractivité, mais c'est le dynamisme de nos programmes et de nos recherches qui assure notre place. Et notre défi, il est le même qu'hier, qu'aujourd'hui, avec des enjeux de compétitivité qui n'étaient pas les mêmes au niveau du recrutement, c'est-à-dire qu'aujourd'hui il y a beaucoup plus de mobilité et des jeunes et des gens et surtout dans nos pays développés. Et donc cette mobilité veut dire que la concurrence, oui, elle est entre les universités québécoises, mais elle est entre les universités canadiennes mais encore plus aux études supérieures.

La concurrence, elle est mondiale. Alors, l'étudiant qui veut venir à l'international, il part, il a le choix. Est-ce qu'il va aller en France, en Australie, aux États-Unis ou au Canada et pourquoi au Québec? Et donc notre défi important est de demeurer pertinents socialement, de demeurer au niveau qu'il faut au plan mondial pour attirer les meilleurs cerveaux au niveau international, ce qu'on avait quand même, comme université assez ancienne, vous l'avez dit, réussi, et on avait une réputation internationale mais qu'il faut maintenir. Et le lien avec le financement est évident, et d'où, dans notre vision de recrutement, d'attractivité, si on n'arrive pas à maintenir le niveau de nos programmes, au niveau international, où il est, le niveau de nos recherches, notre place au niveau international, le recrutement va devenir un phénomène où on s'échange des étudiants que les autres ne veulent pas, et ce n'est pas nécessairement notre vision de l'avenir.

Vous parlez de notre vision de devenir. C'est de rester, au rang mondial, une université, je dirais, respectable et qui a des défis, et ça, ça passe par la recherche, ça a été bien dit. Et ensuite, évidemment, il faut garder nos contacts et nos réseaux au niveau tant du territoire québécois... On a parlé de nos relations avec les cégeps, les collèges, mais, au niveau des études supérieures, c'est des réseaux au niveau international qu'il faut entretenir. Puisqu'on vient voir une équipe de recherche, comme a dit M. Bauce, on n'arrive pas en disant... on ne nous trouve pas sur Internet... et dire: Tiens, je vais aller faire un doctorat à l'Université Laval. C'est un peu... Ce n'est pas la réalité. On rencontre une équipe, on rencontre le professeur et on veut travailler avec cette équipe parce qu'elle a une réputation dans le domaine où on veut faire de la recherche.

Et peut-être le dernier point, parce que je ne veux pas être trop longue. On a abordé l'aspect, dans nos défis, le lien entre la recherche et la formation. Et, dans les sciences humaines, on a des grands défis à faire les ponts entre la recherche en sciences humaines, la formation et les autres disciplines. De plus en plus d'enjeux qui nous sont posés arrivent avec des enjeux multidisciplinaires à ce niveau-là, et on a de la difficulté dans nos structures à y faire face et dans nos modes de financement, puisque la recherche appliquée, je dirais, avec des résultats assez immédiats, est beaucoup plus encouragée que la recherche sciences humaines ou la recherche plus fondamentale. Ça a été aussi souligné. Et, dans nos défis, de garder, nous... de se garder pertinents avec les besoins des entreprises et des choses mais de voir un peu plus loin que le besoin demain matin, il faut voir après demain et un peu plus loin.

Et, même chose en formation, on va-tu cesser de former des théologiens et des philosophes parce qu'on ne voit pas aujourd'hui ce que ça nous donne? Mais peut-être qu'on commence à voir qu'on a peut-être besoin des gens qui ont une vision plus globale et cette vision un peu utilitaire... on doit être utilitaires, mais pas juste utilitaires, cette vision du savoir et du développement. Et je reboucle ma boucle pour les étudiants, ces besoins-là et je boucle ma boucle en disant: Les besoins, ce sont nos étudiants tels qu'ils sont aujourd'hui. Et là, M. Beauce aussi l'a évoqué, ils ont évolué, ils n'ont plus les mêmes demandes, et il faut ajuster beaucoup notre offre par rapport à la souplesse à l'adaptation, la formation à distance, vous l'avez bien dit, les formules pédagogiques. Un professeur qui aujourd'hui arrive en classe, qui défile ses trois heures de théorie, ça ne passe plus vraiment parce qu'ils ont... on a appris à zapper aussi.

Alors donc, il y a de grands défis au niveau de l'adaptation, l'attractivité de nos programmes et du positionnement international au niveau de la compétitivité, et pas juste pour attirer des étudiants internationaux, pour garder nos étudiants québécois qui... les plus brillants, rendus au deuxième cycle, si ce n'est pas chez nous, c'est ailleurs qu'ils vont avoir des bourses et des offres pour aller faire... Donc, ce n'est pas que pour attirer les clientèles internationales, c'est pour que nos gens, ceux qui sont dans la classe peut-être plus diplômée au Québec, continuent d'envoyer leurs enfants chez nous et qu'ils ne disent pas: Bien, moi, je vais envoyer les miens aux États-Unis, parce que c'est là que ça se passe maintenant, ou je vais les envoyer ailleurs.

Et donc, pour que nos Québécois continuent à être formés à haut niveau chez nous, notre défi, c'est de rester au niveau qu'il faut. Et d'où le recrutement, c'est le bout, là, le bout de la ligne, mais il y est lié sur la qualité de notre formation et de nos programmes.

Le Président (M. Marsan): Je vous remercie. Ceci termine notre période d'échange avec l'opposition officielle. Nous revenons avec le parti ministériel, et je vais céder la parole à Mme la députée de Trois-Rivières.

Mme St-Amand: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, c'est à mon tour de vous souhaiter la bienvenue. Bonjour. Merci d'être là. C'est grandement apprécié.

En lisant votre bilan, il y a un constat que j'ai fait, qui me questionne un peu. Au niveau de votre proportion d'étudiants, on note qu'il y a une baisse d'hommes importante, dans les différents secteurs, d'ailleurs, de discipline, hein? Quand on regarde, c'est quand même assez, sauf au doctorat, où il y a peut-être une petite augmentation. Mais sinon est-ce que vous êtes... J'aimerais ça savoir comment vous expliquez ça.

M. Brière (Denis): Oui, bien...

Le Président (M. Marsan): M. le recteur.

**(10 h 50)**

M. Brière (Denis): ...une question un peu difficile à répondre. Bien, c'est sûr que, lorsqu'on regarde la tendance présentement dans la majorité de nos programmes, vous avez entièrement raison. En sciences pures, il y a peut-être un besoin de faire plus... de sensibiliser plus les femmes à venir en sciences pures, en sciences et génie. Mais en général c'est sûr que, si on regarde nos autres programmes... Je ne me rajeunirai pas, là, mais, moi, quand j'étais étudiant en foresterie, il y avait une femme, et maintenant c'est presque 50 % de la clientèle étudiante.

Alors, c'est sûr qu'il y a une tendance. Comment l'expliquer? C'est un peu difficile. C'est peut-être un désintéressement des hommes au niveau scientifique. Et ça, il y a eu des études de faites là-dessus. C'est sûr que ça peut jouer à ce niveau-là. C'est sûr que, lorsqu'on parle de manque de main-d'oeuvre, il y a peut-être... sont peut-être plus tentés, là, je présume, là, plus tentés d'aller travailler plus tôt et de faire en sorte, là, qu'ils ont des responsabilités financières ou des gains financiers plus rapides. C'est difficile à comprendre. C'est sûr que, si on regarde la performance, parce que ça recommande... plusieurs facultés commandent des cotes R élevées, et les filles, en général, en tout cas dans ma famille à moi, sont plus studieuses.

C'est très, très difficile, là, très, très difficile de pouvoir mettre le doigt sur la cause à effet, mais c'est un phénomène. C'est sûr qu'il est là. Est-ce qu'on doit faire quelque chose à ce niveau-là en tant que société? Je ne suis pas sûr non plus, là. C'est quand même un libre choix, là, des hommes et des femmes, là, de s'intégrer dans la société. Je ne sais pas si, Éric, tu as la formule magique, là.

M. Bauce (Éric): En fait, je n'ai pas la formule magique, mais il faut comprendre que tout ça, c'est un continuum, hein? On commence à la maternelle puis on se retrouve à l'université, et, entre la maternelle et l'université, il y a plusieurs étapes, il y a plusieurs aspects. Évidemment, quand on regarde les chiffres, là, de décrochage chez les jeunes garçons au secondaire, bon, des fois ça peut être assez dramatique, là... des chiffres récemment à Montréal, entre autres, là, c'est un peu inquiétant. Par contre, est-ce que c'est... Il faut différencier un peu le fait que dans les universités il y a de plus en plus de filles, mais ce n'est pas un problème en soi. Et, si c'est 50 % ou 60 % de filles, 40 % de gars, bien, tant mieux. Le jour peut-être où ce sera 90 % de femmes et 10 % d'hommes, bien là peut-être qu'on va se... il va falloir se poser des questions de ce côté-là. Mais, quand il... Présentement, on voit un équilibre et peut-être, finalement, c'est merveilleux parce que c'est du rattrapage historique qu'on espérait probablement tous.

Le Président (M. Marsan): Mme la députée.

Mme St-Amand: Je vais aller un peu plus loin dans ma question. Vous savez que la commission ici a une très grande préoccupation pour la réussite scolaire. On a des travaux d'engagés là-dessus. Alors, évidemment, c'est ce qui a initié ma première question.

La deuxième question que je veux vous poser -- c'est parce que, pour, en tout cas, pour moi, c'est extrêmement préoccupant: Est-ce que vous avez envisagé des moyens à prendre pour augmenter la diplomation chez nos gars, augmenter le recrutement chez les hommes? Est-ce que c'est quelque chose qui... Puis je continue, je veux juste être certaine que j'ai bien compris vos dernier propos. Est-ce que c'est une préoccupation? Est-ce que c'est quelque chose sur lequel vous envisagez travailler ou, si, pour vous, vous vous dites: Bien... Parce que j'ai compris dans vos derniers propos: Bien, écoutez, quand ça sera vraiment extrême, on verra. Ou, si ça vous préoccupe et s'il y a des choses qui sont envisagées...

Le Président (M. Marsan): M. Bauce.

M. Bauce (Éric): Ce que l'on pense présentement, c'est qu'il y a peut-être des actions à faire en amont de notre système où, là, on voit des choses. Et, quand le recteur mentionnait bien l'histoire des cotes R et ces choses comme ça, au niveau de l'entrée, il y a peut-être effectivement des difficultés, là, qui risquent de s'amplifier avec le temps. Quand on regarde un petit peu vers le primaire, parce que ça, c'est des gens qu'on va avoir un jour... et peut-être que, là, il y a cette chose-là. À ce stade-ci, présentement, dans notre université, on ne prévoit pas de faire d'action de ce côté-là.

Mme St-Amand: Merci. Je voudrais continuer au niveau des ressources humaines, parce que je lisais dans votre bilan qu'il y a une importante baisse de la proportion des cours, qui sont donnés par les chargés de cours, par rapport à votre dernier bilan qu'on avait eu ici. Est-ce qu'il y a eu une politique particulière? Est-ce qu'il y a eu des changements qui ont fait en sorte que vous avez moins de chargés de cours que vous en aviez?

Des voix: ...

Le Président (M. Marsan): M. le recteur, si vous voulez nous présenter...

M. Brière (Denis): Oui, oui.

Le Président (M. Marsan): ...s'il vous plaît.

M. Brière (Denis): Alors, Claude Paradis, vice-recteur adjoint aux ressources humaines, va vous donner plus de détails. C'est la raison pour laquelle on a une équipe ici, c'est pour répondre à des questions plus pointues, comme celles-là, statistiquement. Alors, Claude, s'il vous plaît.

M. Paradis (Claude): Bien, en fait, je suis un peu...

Le Président (M. Marsan): Alors, M. Paradis, la parole est à vous.

M. Paradis (Claude): Oui. Merci. En fait, je suis un peut étonné, je ne pensais pas avoir vu, là, qu'il y avait une diminution du nombre de chargés de cours. Au cours des dernières années, en fait le nombre des chargés de cours est allé en croissant. Le corps professoral a diminué de 250 professeurs au cours des 15 dernières années et une partie des... Et en même temps il faut savoir aussi que les fonds de recherche sont allés en croissant.

Alors, le travail des professeurs s'est déplacé légèrement vers la recherche, ce qui a fait en sorte que nous avons procédé à l'engagement de plus de chargés de cours au cours des 15 dernières années. Nous avons aussi créé une nouvelle classe de chargés de cours qui s'appelle les chargés d'enseignement. Nous avons des chargés de cours à temps plein. Maintenant, nous en avons plus que... nous en avons environ 115 à notre emploi. Alors, non, je crois, là, que... Ce qui est arrivé, c'est qu'à cause du sous-financement et des difficultés financières de l'université nous avons essayé de restreindre le nombre de cours que nous avons donnés à l'ensemble de l'effectif étudiant. Ça, ça a pu créer un effet sur le nombre de charges de cours qui ont été données.

Mme St-Amand: Je m'excuse, je veux juste préciser, M. le Président, parce qu'effectivement, dans le bilan, ce que, moi, j'avais noté, c'est qu'il y avait eu une baisse de la proportion des cours donnés par les chargés de cours. Donc, on parlait de 40 % à 31 %, entre 2005 et 2010. Je m'excuse, je me suis mal exprimée.

Je trouve intéressant que vous parliez de ces chargés d'enseignement là. Est-ce qu'ils sont considérés ou dénombrés comme des chargés de cours ou comme des enseignants, comme des professeurs?

M. Paradis (Claude): Non, ils sont... En fait, techniquement, madame, ils sont membres du Syndicat des chargés de cours de l'Université Laval. Ils ne sont pas considérés comme faisant partie du groupe qu'on appelle les professeurs.

Mme St-Amand: O.K. Excellent. Merci. Il nous reste du temps, M. le Président? O.K. Peut-être un dernier sujet à aborder, au niveau des partenariats, parce que vous parlez beaucoup des partenariats dans votre bilan, notamment du programme PAIR, entre autres, avec 100 chaires de recherche qui seront créées d'ici 2013. C'est vraiment fort intéressant. Bon, moi, je viens d'une région où on a une université en région, ce qui est différent de l'Université Laval, qui oeuvre vraiment en milieu plus urbain avec un rayonnement qui est différent aussi. J'aimerais ça vous entendre sur les partenariats que vous créez avec l'entreprise privée.

M. Brière (Denis): Je vais avoir des commentaires, mais je vais demander à Éric, là, de répondre.

M. Bauce (Éric): En fait, évidemment, on pense que notre recherche doit être utile à court, moyen et long terme. Et plus on se déplace vers le court terme, plus le monde industriel est présent, et plus c'est facile de les attirer. On développe. On a restructuré, et ça, c'est particulièrement important, parce que, dans une grande institution comme la nôtre, il y a beaucoup, beaucoup de chercheurs, il y a beaucoup, beaucoup de recherche, mais il n'y a pas beaucoup de monde qui savent tout ce qu'on fait. Et, quand une personne, évidemment un industriel, quelqu'un qui veut développer quelque chose cherche, a des besoins, c'est très difficile d'identifier où est la réponse.

Alors, on a mis en place dans notre système ce qu'on appelle le Bureau des chaires, un numéro de téléphone où les gens peuvent appeler et... Bien, moi, j'ai des besoins dans tel secteur. Et on a une équipe qui va accompagner la personne pour identifier les besoins et voir si on a les ressources pour répondre à ces besoins-là. Et ça, c'est majeur, c'est la base un peu, c'est la base de l'évolution du partenariat en recherche dans notre institution et c'est ce qui fait que ça fonctionne bien parce que ça simplifie la vie à notre partenaire. Et, il faut comprendre aussi, il y a d'autres aspects qui sont particulièrement intéressants autant pour les partenaires que tous les gens qui sont impliqués dans ces partenariats-là, c'est cet aspect de besoin de personnel hautement qualifié. Et, lorsqu'on fait un partenariat, souvent l'étudiant va être impliqué assez rapidement au niveau de l'entreprise, faire son stage, faire ses recherches à l'intérieur de l'entreprise, ainsi de suite. Et ça, ça amène une intégration assez rapide qui évidemment nous donne le meilleur des ambassadeurs possibles au niveau de cette entreprise-là et qui permet d'assurer une durabilité à ce partenariat.

Parce que ça, c'est un aspect très important, d'assurer que ces partenariats sont durables, sont sur du long terme. L'idée, ce n'est pas de faire un projet de recherche qui va durer un an, qui va durer trois ans, puis après ça c'est fini. Donc, il faut les bâtir de façon durable pour amener cette culture. Et il est assez facile de convaincre le monde du privé que faire de la recherche en milieu universitaire, ça coûte pas mal moins cher que de le faire en milieu privé, pour toutes sortes de raisons, dont les merveilleux avantages... et ça, il faut saluer cette chose-là, les avantages fiscaux que le Québec peut donner en matière de crédits de recherche, et autres, à un industriel. Un industriel va faire de la recherche chez lui, ça va lui coûter pas mal cher.

Nous, on a une infrastructure, on a de l'expertise, on a cette idée et ces... c'est pour faire rattacher un peu à la question qui a été posée tout à l'heure, de décloisonnement. On veut décloisonner et décloisonner au niveau de la recherche et aussi au niveau de la formation de premier cycle. On a parti un certain nombre de programmes où plusieurs unités, plusieurs facultés sont impliquées dans des programmes de formation, et ça, c'est important. Et financièrement, pour nous, c'est majeur, pour ne pas dupliquer les choses. Là, je m'en vais un petit peu sur un autre terrain, là, mais c'est ça. En fait, je pourrais vous en parler pendant des heures, du partenariat. Je vais me limiter.

**(11 heures)**

Mme St-Amand: Vous pourrez revenir. Merci beaucoup.

Le Président (M. Marsan): Je vous remercie. Nous allons faire une courte pause de cinq minutes et au retour nous reprendrons nos échanges avec les partis de l'opposition officielle.

Et je suspends donc pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 11 h 1)

 

(Reprise à 11 h 11)

Le Président (M. Marsan): Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux, et je vais immédiatement céder la parole à la porte-parole en matière d'enseignement supérieur pour l'opposition officielle, Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Merci. On n'a que l'embarras du choix de toutes les questions qu'on aimerait aborder avec vous, alors donc je fais un tri, parce que je veux partager aussi avec mes collègues qui ont envie d'échanger.

Je vais prendre encore une question un peu large mais qui me semble fort importante ces temps-ci concernant les universités, c'est toute la question de leur mode de gestion, de leur gouvernance, de leur défi à la fois de reddition de comptes, mais en même temps leur tradition d'autonomie qui est largement inscrite dans l'histoire des universités québécoises ou ailleurs dans le monde. Il y a dans le décor, donc, certaines législations que vous connaissez comme moi; une qui est là depuis, ma foi, déjà des années concernant la gouvernance des universités, une autre qui est plus pointue, qui est liée à des mesures budgétaires, qui est la loi n° 100.

J'aimerais savoir comment vous souhaitez que l'on perçoive les universités, qu'on reconnaisse leur besoin d'autonomie tout en acceptant bien, d'après ce que je comprends, que ces universités largement financées par les fonds publics aient des comptes à rendre. Alors, c'est une question large, mais je trouve que ça vaut la peine, pour moi, au-delà des chiffres que vous présentez, d'aborder cet aspect-là. J'aimerais bien vous entendre là-dessus, M. Brière.

Le Président (M. Marsan): M. le recteur.

M. Brière (Denis): Oui. Répondre à ça, c'est répondre en général pour la diversité de chacune des universités au Québec. Je pense qu'il y a une culture qui s'est construite.

La diversité, elle est là pour chacune des universités. C'est sûr que l'autonomie est un facteur très, très, très important dans notre marge de manoeuvre au niveau universitaire. C'est reconnu de façon internationale si on parle d'autonomie des universités. Qu'on parle de la loi n° 38 sur la gouvernance ou qu'on parle de la loi n° 100 sur... l'implication de la loi n° 100 au niveau des universités, notre position, elle est très claire, on l'a fait connaître autant au niveau de la gouvernance via la CREPUQ... et je ne parle pas en tant que président de la CREPUQ, là, je veux être très, très clair, mais via la CREPUQ lors de la commission parlementaire en ce qui concerne la loi n° 38. C'est sûr que les universités et l'Université Laval supportent ça, qu'on aimerait mieux des ententes de partenariat. Mais ces ententes de partenariat là, selon moi, seraient plus productives que l'imposition de d'autres règles. Et d'ailleurs on a beaucoup, beaucoup de règles de reddition de comptes qu'on fait présentement. On vient juste de passer à travers les PCGR.

Écoutez, moi, je pense qu'au niveau reddition de comptes, si on regarde l'ensemble des données qu'on fournit au ministère de l'Éducation et au gouvernement en général, je pense qu'on performe très, très, très bien en termes de gouvernance. C'est sûr qu'il y a peut-être des raffinements à apporter, mais je pense que ce serait beaucoup plus productif d'avoir des ententes de partenariat autant au niveau de la gouvernance et surtout de la loi n° 100, parce que notre conseil d'administration s'est prononcé en faveur d'un retrait de l'Université Laval en ce qui concerne la loi n° 100 et de favoriser plus des ententes de partenariat qui donneraient, selon nous, les mêmes résultats et peut-être même des meilleurs résultats si on établit une meilleure communication.

Je résumerais peut-être ma pensée parce que c'est complexe. Vous avez vu un peu la complexité de la gestion d'une université lorsqu'on parle de formation, lorsqu'on parle de recherche, et c'est sûr que d'aller faire du mur-à-mur avec les universités, c'est très dangereux pour le système universitaire global et la contribution qu'on peut apporter à la société québécoise. Regardez simplement au niveau de l'internationalisation. C'est quand même des vecteurs de développement qui sont spécifiques à plusieurs universités mais de façon différente et c'est ça qu'il faut reconnaître. Je pense qu'il faut reconnaître la diversité, il faut reconnaître la spécificité de chacune des universités.

Est-ce que je peux résumer ma pensée autrement? C'est quand même difficile, mais je pense qu'on rentre dans une ère, au niveau des universités, où, comme Isaac Newton disait, les hommes sont portés à construire plus de murs que de ponts, puis on est en faveur de construire des ponts... que d'ériger des murs. Alors, c'est sûr que ce n'est pas en érigeant des murs que je crois qu'on va bénéficier... parce que c'est très particulier, vous savez, la dynamique, à l'intérieur des universités. Ce n'est pas une entreprise, là, O.K., c'est quand même un lieu de haut savoir, un lieu où on développe des connaissances, un lieu où on doit avoir des marges de manoeuvre au niveau de notre développement et au niveau de notre contribution à la société et, comme on a pu le démontrer, qui est quand même majeure... cette contribution-là. Alors, on insiste, encore une fois. Éric l'a dit tantôt... Éric Bauce l'a dit, vice-recteur exécutif et développement, on est là beaucoup plus pour recevoir des fonds privés et publics en tant qu'investissements qu'en tant que dépenses et de faire en sorte que ces fonds-là...

Et ça, la reddition de comptes, on est parfaitement d'accord avec ça. La loi n° 100 aussi, ce qui vient interférer un peu avec nos conseils d'administration... Quand même, les conseils d'administration sont là pour voir et faire un genre de surveillance de nos modes de gestion, et je pense que, si de l'extérieur, par une loi, on nous dit où couper et comment couper, ça enlève une flexibilité au niveau des conseils d'administration respectifs des universités. Et ça, moi, je pense que... Si on a cette structure-là, qu'on a construite au cours des années, je pense qu'il faut faire confiance à nos conseils d'administration de... et à l'ensemble des comités, comme je vous ai dit tantôt, et faire confiance aux conseils d'administration. Sans ça, ils perdent un peu leur place au niveau des universités.

Alors ça, ça résume un peu ma pensée. Et je pense... Je suis très, très sincère quand je dis ça. Et c'est dangereux d'embarquer dans une espèce de... de multiples règlements et lois régissant les universités, alors que la façon la plus productive et de créer des synergies est vraiment d'avoir une meilleure communication par des ententes de partenariat où chacun peut s'exprimer et chacun peut donner sa vision et ses défis.

Le Président (M. Marsan): Merci. Je vais céder la parole au député de Drummond maintenant.

M. Blanchet: M. le recteur, bonjour. Les audiences qui ont lieu présentement ont comme décor le financement des universités et les discussions qui ont lieu dans les médias essentiellement depuis plusieurs mois, et je suis enthousiasmé, je dirais, un peu par ce que j'entends parce qu'en février vous aviez dit que vous ne pouviez pas demander au secteur privé de financer davantage les universités, que ce n'était pas leur rôle et qu'il fallait donc aller du côté des étudiants et là j'entends qu'il faudrait développer une formule pour aller du côté des employeurs pour financer le réseau, puisqu'ils sont des bénéficiaires directs de... Autrement dit, c'est une forme de qualité d'approvisionnement, si je peux m'exprimer ainsi.

Je suis curieux, bien que je voie, à chaque bout de la table, une partie de la réponse, je pense, de connaître le cheminement de la réflexion qui nous amène là ce matin.

Le Président (M. Marsan): Alors, M. le recteur.

**(11 h 20)**

M. Brière (Denis): Oui. La solution du privé... et c'est pour ça que j'avais apprécié la question tantôt, là. Il faut séparer un peu la contribution au niveau du privé. C'est sûr qu'en février... ou il y a environ un an d'aller parler d'une contribution du privé en pleine crise économique, ce n'était pas le bon temps et, je vous le dis, c'est comme ça que je l'ai libellé aux étudiants lorsqu'ils ont présenté cette avenue-là. J'ai dit: Amener ça dans un moment où on a une crise économique, ce n'est pas le bon temps, et ça pourrait tuer toutes les initiatives dans ce sens-là, parce qu'il pourrait y avoir une levée de boucliers vis-à-vis la contribution du privé.

Maintenant, comme je disais tantôt aussi... et ça s'est accentué, les demandes qu'on a de la part des entreprises pour des formations pointues se sont accentuées depuis ce temps-là aussi, ce qui nous a fait réfléchir d'autant plus, de savoir: Est-ce qu'il y aurait une solution plus globale à tout ça? Et, moi, je pense que le privé démontre qu'il a des besoins criants et doit répondre d'une façon ou d'une autre. C'est une réflexion qu'on veut entreprendre. On ne dit pas... On ne met pas 1 %, on ne met pas 0,5 %, on ne met rien, mais je pense qu'en termes de partenaire du financement, en tant que société, le privé commence à être plus sensibilisé au fait qu'ils ont besoin de cette formation-là, ils ont besoin des recherches des universités, ils ont besoin du personnel hautement qualifié. Et c'est pour ça que tantôt, dans ma conclusion, je disais que c'était un problème de société, parce qu'on contribue à la société et au développement de la société en général.

Et ce n'est pas une affirmation que nous faisons, on vous dit que c'est une piste de réflexion qui est vraiment intéressante et qu'on doit l'apporter dans un contexte non pas de crise économique, mais dans un contexte où on a de plus en plus besoin de personnel hautement qualifié.

M. Blanchet: Je crois en effet que c'est une piste de réflexion et qu'il est trop tôt pour écrire la conclusion de cette réflexion-là, mais elle est d'emblée intéressante sur son principe. Ça, c'est très clair.

Cela dit, on a vu d'autres... on a rencontré d'autres recteurs, dont le recteur de l'UQTR, qui hier nous disait que la position de l'UQTR risquait d'être passablement alignée sur celle de la CREPUQ. Alors, vous êtes le porte-parole de la CREPUQ et vous êtes aussi le premier recteur à avancer une piste de réflexion très concrète quant à vers où on pourrait aller. Alors, je veux voir, parce que c'est sûr que la question va être posée, sinon ouvertement, au moins dans les officines, où est la ligne entre votre intervention comme président de la CREPUQ et votre intervention comme recteur de l'Université Laval.

Bref, est-ce que cette réflexion-là a activement cours dans les instances de la CREPUQ?

M. Brière (Denis): Cette proposition-là n'a pas été présentée au conseil d'administration de la CREPUQ. J'ai l'intention de la présenter. Maintenant, à l'Université Laval, ça fait un bout de temps qu'on y pense et qu'on voit le pour et le contre de ça. Vous savez, la solution au déficit, au manque d'investissement dans les universités... Et on a parlé tantôt d'un mur de 40 millions en 2011-2012, là. Je pense qu'on ne peut pas aller demander à une composante de pouvoir remplir ce déficit-là ou pouvoir combler ce déficit-là, que ce soient les étudiants, que ce soit le gouvernement ou que ce soit le privé, mais je pense qu'on est rendu à un point tournant où c'est l'ensemble de la société qui doit contribuer pour les retombées que le système universitaire apporte à la société québécoise.

M. Blanchet: Et, puisque les représentants étudiants siègent à vos côtés, je me permettrai de leur adresser une question. Nous savons que l'idée qui est à la base est une idée de votre association étudiante qui y travaille depuis plusieurs années. Elle était assez précise dans sa facture et donc, là, elle serait davantage nuancée.

Ce que je souhaite savoir, c'est jusqu'à quel point il y a une ouverture sur le modèle, quelle est la réaction des autres composantes du mouvement étudiant à votre proposition, parce qu'il y a d'autres gros joueurs. Est-ce qu'il y a des débuts de réaction du secteur privé pour qu'on s'évite ce dont on n'a pas besoin, personne, un affrontement entre les étudiants et les employeurs? On veut tous absolument éviter ça. Et est-ce que j'entends dans les différentes composantes appelées à contribuer que la CADEUL ouvrirait la porte à une possible augmentation des droits de scolarité aussi?

Des voix: ...

M. Blanchet: Ça commence fort!

Le Président (M. Marsan): Alors, c'est Mme Poirier. C'est ça?

Mme Poirier (Barbara): Oui. Dans le fond, la première idée qui avait été émise par rapport à une contribution des entreprises, ça avait été une idée qui avait été calquée sur la loi du 1 %. Mais par la suite on a découvert aussi qu'il y avait d'autres taxes sur la masse salariale, comme le Fonds des services de santé.

Donc, on a continué à étudier la possibilité de demander une contribution aux entreprises. Mais, pour tout ce qui est de la question de la technicalité ou des modalités d'application, on s'est dit: C'est tellement technique, mais l'idée... On conserve l'idée de la contribution, mais, pour ce qui est des technicalités, on va pousser notre réflexion encore plus loin avant de proposer une formule. Dans le fond, c'est de faire passer le message de la contribution des entreprises au réseau de l'éducation postsecondaire pour pouvoir le financer adéquatement, même combler le sous-financement.

Pour ce qui est de la question des autres acteurs dans le mouvement étudiant, l'idée circule depuis 2008-2009... cette idée d'une contribution des entreprises. Les associations de la TACEQ, la table de concertation étudiante universitaire du Québec, appuient cette idée-là. Nos partenaires aussi du communiqué de presse d'hier, l'Association pour une solidarité syndicale étudiante appuient aussi l'idée d'une contribution aux entreprises. Puis présentement on a des pourparlers avec la Fédération étudiante universitaire du Québec pour leur présenter notre idée. Ils ne se sont pas prononcés sur cette question-là, mais l'idée fait du chemin dans le mouvement étudiant. Et, non, ce n'est pas la CADEUL ou même l'AELIES, ils ne sont pas ouverts à une hausse des frais de scolarité. La hausse des frais de scolarité, ce n'est pas une solution qui va nous permettre de combler le sous-financement. Je pense qu'il y a une réflexion plus globale à faire.

Et, nous autres, à l'Université Laval, on a décidé de se mettre en mode solution, de s'asseoir autour d'une table puis de réfléchir à trouver des moyens pour combler ce sous-financement-là sans nuire à l'accessibilité aux études pour nos étudiants.

M. Blanchet: Effectivement, je pense qu'on ne s'assoit pas autour d'une table de discussion en écrivant à l'avance les conclusions de la discussion. C'est d'emblée sage, mais, les susceptibilités étudiantes étant ce qu'elles sont, toute possibilité de hausse suscite aussi parfois des réactions.

Pour avoir une base de travail, est-ce que le modèle que vous proposez a déjà été développé, et appliqué, et testé dans d'autres juridictions, ailleurs?

Mme Poirier (Barbara): Ailleurs...

M. Blanchet: À l'étranger, dans d'autres provinces.

Mme Poirier (Barbara): Ah, mais il y a une taxe à l'apprentissage en France, où les entreprises sont appelées à contribuer au réseau de l'éducation postsecondaire. On peut regarder aussi dans les autres provinces canadiennes. Si on regarde au Manitoba, il y a un fonds qui existe pour le financement de l'éducation postsecondaire, pour financer le réseau globalement. Donc, ce n'est pas une pratique qui est inconnue un peu partout ailleurs. Mais, nous, on essaie d'amener cette réflexion-là ici, au Québec. Est-ce qu'on veut mettre de l'avant des solutions qui sont concrètes? Une contribution des entreprises privées au réseau de l'éducation postsecondaire pourrait enrayer le sous-financement de nos universités.

M. Blanchet: M. le recteur, très rapidement donc, j'imagine un recteur d'une université aussi majeure que l'Université Laval, qui avance une idée de ce type-là... il doit y avoir des entrepreneurs qui pognent le téléphone puis qui appellent dans les huit secondes qui suivent. A-t-on un début de réaction des milieux d'affaires?

M. Brière (Denis): Non, du tout, on n'a pas eu de réaction des milieux d'affaires. Si vous vous souvenez, à Lévis, et c'est peut-être ça qui a renforcé un peu l'idée, ce que les étudiants ont amené comme solution, la contribution des entreprises... il y a des gens du milieu des affaires qui ont déclaré officiellement, dont Monique Leroux, dont Paul Desmarais, que l'éducation doit être une priorité. Et ça, c'est des gens du milieu des affaires. Ils ne le disaient pas simplement pour dire ça en général, mais je pense qu'ils s'aperçoivent qu'eux autres mêmes, à l'intérieur de leurs entreprises... qu'ils considèrent que c'est extrêmement important que l'éducation devienne une priorité au Québec et qu'on donne les moyens aux universités de mieux se développer et mieux compétitionner aux niveaux national et international. Alors, c'est sûr que... Non, pour répondre directement à votre question, je n'ai eu aucun, aucun téléphone, aucune communication soit par courriel ou autres.

M. Blanchet: Je vous remercie et pour la réflexion et pour la réponse.

Le Président (M. Marsan): Je vais maintenant céder la parole à la députée de Taschereau. Mme la députée.

Mme Maltais: Merci, M. le Président. Alors, je suis très heureuse d'assister à cette audition. Je suis heureuse de vous saluer, M. le recteur, ainsi que les gens de l'université, les étudiants, les gens de la CADEUL. M. Brière, vous faites un beau travail à la tête de l'université.

M. Brière (Denis): Merci.

Mme Maltais: Elle est importante, cette université, pour la région. Vous avez dans votre introduction bien, bien décrit son importance tant au niveau économique qu'au niveau dynamisme. L'université a provoqué la venue de centres de recherche, la création du Parc technologique, et ce sont aujourd'hui des atouts majeurs pour la région et pour la diversification économique de la région. Bon. Donc, je voulais vous dire: Mes amis, mes collègues se sont occupés du volet éducatif, je vais parler un peu de la région.

**(11 h 30)**

Je veux saluer ce côté, cette façon que vous avez eue de reprendre le flambeau du développement et du dynamisme de la région. Maintenant, je suis obligée d'aborder un peu un dossier qui fait couler de l'encre dans les médias ici, qui est en fait... fait partie du dynamisme de l'université et qui est son implantation sportive et sa place dans le développement sportif de la région, dans le développement donc du réseau de santé aussi, parce que le sport fait partie de la santé. L'autre chose aussi, c'est que ce site attendu qui est, je vais le nommer, le super PEPS fait aussi partie de la vision qu'on a de la possibilité d'avoir des Jeux olympiques à Québec, et tout, du développement du rayonnement sportif international de la Capitale-Nationale.

Alors, dans le passé, on a déjà eu à... j'ai déjà eu à vous contacter pour savoir où en étaient rendus les travaux. Jamais on n'en a fait une lutte partisane. Vous êtes très ouverts, très à l'aise avec la... Vous m'avez toujours donné l'heure juste sur les échéanciers du super PEPS. Là, aujourd'hui, où en est-on? Je sais que vous m'aviez dit qu'il devait y avoir lancement de l'appel d'offres au printemps concernant le stade de soccer. Maintenant, quand verra-t-on l'appel d'offres du super PEPS lui-même se faire? Et puis où en est-on rendu dans les échéanciers, premièrement, et, deuxièmement, dans les coûts du super PEPS? Est-ce que tout s'est...

Parce que ça a quand même été annoncé, en 2007, à 75 millions. On est rendu à peu près à 85. Où est-ce qu'on en est maintenant?

Le Président (M. Marsan): M. le recteur.

M. Brière (Denis): Merci pour l'opportunité. Je vais faire un commentaire général, d'abord.

Et, je l'ai mentionné dans mon allocution, vous savez, le super PEPS, au niveau d'ouverture sur la région, je pense que c'est un modèle qui va être probablement adopté dans d'autres universités aussi. De voir les trois paliers de gouvernement, de voir le fédéral au niveau de 35 millions, le provincial au niveau de 35 millions et la ville au niveau de 10 millions comme contributions, moi, je pense que c'est extraordinaire. Et le fait aussi que 70 % des utilisateurs vont provenir de la région... c'est sûr que l'université est fière de le faire, la partie de l'ouverture sur la région. Et, comme vous l'avez bien dit, c'est sûr qu'au niveau engagement sportif, au niveau exercice... qu'on sait qui est la base de... une des clés de la santé, je pense qu'on envoie un message clair au niveau de la population de Québec.

Maintenant, oui, il y a eu des délais. On en a discuté, vous m'avez appelé, et tout. C'est sûr qu'un projet de ce niveau-là, lorsqu'on a trois paliers de gouvernement, moi, je comprenais que c'est peut-être un peu plus complexe, là, que simplement un financement. On est passés à travers des élections, on est passés à travers le Chantiers Canada. Il y a eu en tout cas plusieurs étapes. Il y a eu aussi les PPP.

Alors, écoutez, je pense que tout le monde a appris à travers ça, je pense que tout le monde a... pour les autres projets aussi de Chantiers Canada, en passant. Mais, pour vous donner l'heure juste, où on en est, si vous passez sur le campus, là, c'est peut-être moins beau que c'était avant, parce qu'on est en train de construire le stade de soccer. Mais le stade de soccer... les appel d'offres, oui, ont été ouverts au mois de juin, et le contrat a été alloué à Pomerleau. Et l'échéancier pour la réalisation du stade du soccer, parce que c'est quand même... C'est pour ça qu'on y va en deux étapes, là. C'est un projet qui est... On ne connecte pas ça. On ne se trouve pas à avoir une connexion entre les infrastructures existantes. Donc, c'est un projet plus qu'on peut séparer, ce projet-là, parce que c'est un projet entier de lui-même.

Alors, la réalisation du projet est prévue pour l'été 2011 pour le stade, pour le stade de soccer.

On a rentré dans nos budgets lors de l'appel d'offres. Et je peux vous dire qu'on regarde ça de très, très près, surtout la personne à ma gauche. On regarde ça de très, très près et on va rentrer dans nos budgets. On a eu certaines modifications qui n'affectent pas du tout la nature du projet tel qu'on l'avait défini au début au niveau international, au niveau du fait qu'on peut attirer des événements internationaux, surtout pour les deux autres plateaux où que ça s'appelle le gymnase et la piscine, mais on s'en va en appel d'offres pour ces deux plateaux-là à l'automne. C'est difficile de mettre une date exacte, là, parce qu'on est en train encore de travailler sur les appel d'offres, mais c'est sûr qu'à l'automne il va y avoir l'appel d'offres pour les deux autres plateaux et une réalisation pour l'été 2012.

Et on est très, très, très stricts. Le fait qu'on va rentrer dans nos budgets, c'est un peu notre mode de fonctionnement à l'université de tous nos grands projets. On a parlé tantôt du pavillon de la santé, un projet de 81 millions, et qu'on est rentrés à l'intérieur de notre budget.

Mme Maltais: Merci beaucoup. Donc, vous dites que, pour tout l'ensemble du projet du super PEPS, vous prévoyez commencer l'été prochain les travaux... été 2011.

M. Brière (Denis): Pour les deux plateaux.

Mme Maltais: Pour les deux plateaux.

M. Brière (Denis): Les deux plateaux. Le stade de soccer, c'est déjà débuté.

Mme Maltais: ...le stade, je sais, oui.

M. Brière (Denis): Oui. Pour les deux autres plateaux, ça va commencer probablement au...

Mme Maltais: ...piscine.

M. Brière (Denis): Écoutez, on s'en va en appel d'offres, alors ça va être au printemps 2011.

Mme Maltais: Ce qu'on appelle le projet du super PEPS, c'est-à-dire l'ensemble.

M. Brière (Denis): L'ensemble va être complété pour l'été 2012...

Mme Maltais: L'été 2012.

M. Brière (Denis): ...avec une première étape de complétée avec le stade de soccer à l'été 2011.

Mme Maltais: Donc, je sais que la région espère beaucoup recevoir et vous espérez beaucoup recevoir, pour 2014, les événements sportifs universitaires, les Universiades... Je ne sais pas comment on les appelle.

M. Brière (Denis): Les Universiades, c'est 2017. On regarde pour 2017.

Mme Maltais: 2017? J'avais 2014. 2017.

M. Brière (Denis): 2017, oui. C'est les jeux d'hiver.

Mme Maltais: C'est les jeux d'hiver.

M. Brière (Denis): Oui, qui est très différent que les jeux d'été, là.

Mme Maltais: Donc, si on rentre dans les échéanciers, la région n'échappe pas, là, toute la mécanique de développement. O.K.

Bien, merci beaucoup de cet échange. Et vraiment vous continuez à être très ouverts sur... Oui, j'apprécie beaucoup cette facilité que vous avez de livrer les dates et échéanciers des travaux.

Le Président (M. Marsan): Merci, Mme la députée. Nous allons poursuivre, et je vais vous adresser la prochaine question, et c'est toujours dans le domaine de la recherche.

Vous nous en avez parlé un peu. Vous nous avez parlé des deux chaires extrêmement importantes qui font partie maintenant de la recherche à l'Université Laval, dont celle en photonique. Mais, par expérience, je sais aussi que vous avez des secteurs de recherche qui sont extraordinaires. On n'a pas parlé de la médecine, mais, pour avoir déjà dirigé dans le passé l'Institut de cardiologie de Montréal et avoir travaillé avec les gens de l'Institut de cardiologie de Québec, l'Hôpital Laval, ils étaient tellement bons à l'époque que même leur directeur, le Dr Dagenais, avait été choisi par l'Université de Montréal pour devenir le doyen de la Faculté de médecine. Alors, c'est pour vous dire que les gens de Laval rayonnent vraiment, même dans d'autres universités.

Alors, je voudrais en profiter pour vous demander, M. le recteur, de nous dresser un tableau peut-être d'ensemble pour les différents secteurs de recherche qui sont les secteurs de pointe et qui font beaucoup de fierté à l'université.

M. Brière (Denis): Je vais demander à Éric de passer en revue cet aspect-là et peut-être aussi à notre vice-recteur Recherche, là... savoir si ça vous satisfait ou pas. C'est sûr que, moi, ce qui me vient à l'esprit tout de suite, là... Dr Bergeron, avec toutes les recherches qu'il fait présentement au niveau de la prévention, je pense que c'est vraiment... au niveau du sida, au niveau de la prévention, alors c'est sûr que c'est... Le génie tissulaire qui est reconnu, on est un des quatre plus grands laboratoires au monde, qui est à l'Université Laval. Naturellement, les deux chaires, de par eux autres mêmes, font leur propre publicité, que ce soit en optique-photonique ou dans l'Arctique. Ça, c'est extrêmement important. Mais je vais laisser Éric, là, peut-être donner plus la...

Le Président (M. Marsan): ...

M. Brière (Denis): C'est parce que c'est vraiment bien défini dans la tête. Le meilleur test qu'on a, c'est lorsqu'on va aux organismes subventionnaires puis on leur demande: Quels sont les grands créneaux, quels sont les centres d'excellence, quels sont... l'excellence à l'Université Laval? Bien, c'est sûr que les trois centres d'excellence que j'ai définis tantôt, que ce soit en géomatique, GEOIDE, c'est sûr que c'est reconnu, mais notre plus grand défi, si je peux sauter à la conclusion avant qu'Éric parle, notre plus grand défi, c'est de les faire connaître. Et ça, c'est un des grands défis qu'on a au niveau de l'Université Laval, parce qu'on a tellement de projets, et de centres de recherche, et de résultats de recherche qui sont extraordinaires. C'est des choses qui ne sont peu connues.

Je vais vous donner un exemple dans lequel on est très, très fiers: une des plus grosses chaires que Michelin a au monde, c'est avec l'Université Laval. Ils n'ont pas d'opération au Québec.

Alors, c'est sûr qu'il y en a plusieurs comme ça. Puis des fois on pense qu'on en annonce trop, parce que souvent on n'a pas la couverture médiatique qu'il devrait y avoir.

Le Président (M. Marsan): Alors, merci, M. le recteur. M. Bauce.

**(11 h 40)**

M. Bauce (Éric): Oui. Je vais aller un petit peu avant la conclusion. En fait, il faut comprendre qu'évidemment, avec plus de 260 millions de dollars de recherche annuellement à l'Université Laval, il y a une grande diversité.

C'est une université complète qui a beaucoup d'expertise dans différents champs. Et je ne voudrais pas évidemment faire une liste interminable, là, de projets ou de secteurs de recherche, on mise l'excellence dans tous nos secteurs. Il y a des secteurs évidemment qui sont plus de l'heure, je dirais, qui vont chercher plus de financement puis il y a des cycles au niveau de la recherche comme ça. Les secteurs de l'heure, bien on parle tout ce qui est l'infectiologie, tout ce qui est dans l'aspect au niveau médical, l'obésité, toute la cardiologie, le cancer, on a de très fortes équipes de recherche. Et ce qui fait notre force dans le domaine de la santé, c'est essentiellement nos liens très étroits avec les centres hospitaliers où se fait la recherche clinique, entre autres, et avec ce qu'on appelle le RUIS, qui est le réseau universitaire UL et centres hospitaliers, les institutions hospitalières.

Et ça, ça a créé une masse critique, une force absolument incroyable au niveau de la recherche et au niveau aussi du transfert des résultats de recherche à l'intérieur de la société.

Maintenant, je ne me limiterai pas évidemment seulement à la médecine, où on est évidemment très forts. La Faculté de médecine, il faut comprendre que c'est considérable, là, à l'Université Laval. Juste en termes de budget d'opération, là, 10 % de notre budget, c'est la Faculté de médecine. La moitié des fonds de recherche à l'Université Laval, c'est dans le secteur médical que ça se fait, ce qui n'empêche pas évidemment de dire qu'on a de très hautes qualités de recherche dans d'autres secteurs. On pense à toutes les recherches qui se font au niveau du Nord, toute les recherches qui se font au niveau de la photonique, des technologies, de la biologie, de l'environnement, toutes les recherches qui se font au niveau social. Et pour nous c'est majeur, tout le secteur social. L'Université Laval a une longue histoire de recherche et de production, particulièrement reconnue au niveau international, dans tout le domaine social, le domaine des lettres, le domaine de la culture, le multimédia et ces choses-là.

Et une des forces que l'on a, c'est d'être une université complète. Et un des grands défis que l'on a, c'est d'arriver à faire l'intégration, l'intégration de tout ça dans une optique et dans un objectif de dire finalement que, la recherche, on fait ça pour les gens. On aura beau développer toutes les technologies les plus sophistiquées au monde, si on n'est pas capables de les faire atterrir dans la société, elles ne servent à rien et même elles peuvent nuire. Et on mentionnait tout à l'heure l'importance de l'intégration des aspects sociaux. Et peut-être un exemple qui a été fait à l'Université Laval... je pense au réseau GEOIDE, qui est un centre d'excellence national qui implique une multitude d'universités, dont des universités américaines. Il y a une obligation à l'intérieur de ce réseau-là, qui est un réseau qui est essentiellement de la géomatique, de la télédétection et ces choses-là, de garder un montant à l'intérieur du réseau pour financer l'aspect social, donc des projets à caractère social, pour faire atterrir ces technologies-là dans la société.

Le Président (M. Marsan): Merci beaucoup. Je voudrais poursuivre avec l'enseignement à distance. C'est un domaine qui n'est pas nécessairement nouveau chez vous mais qui a pris une certaine ampleur plus récemment. Voulez-vous nous en parler et même peut-être déborder sur le plan international? Vous nous avez fait part, là, d'un projet avec six autres pays, je pense, au niveau de l'enseignement à distance. M. Bauce.

M. Bauce (Éric): Oui, je peux peut-être vous en parler rapidement. Bien, comme je vous disais, c'est un élément stratégique de développement pour l'Université Laval, l'enseignement en ligne, l'enseignement hybride.

On a des plateformes technologiques qui permettent de répondre à ça, parce qu'évidemment on peut bien dire: On va faire de l'enseignement en ligne, mais ça prend la capacité technologique de le faire. On a tout le système ENA qu'on est en train de développer, qui va bientôt être mis en place, qui est un petit peu une base qui va nous permettre d'augmenter finalement notre capacité de ce côté-là, capacité pas seulement technologique, mais aussi de cohérence et de convivialité des systèmes pour le donner, parce qu'on fait affaire quand même avec plusieurs pays où il n'y a pas nécessairement un historique de ce côté-là, et il y a beaucoup de travail à faire aussi dans certains pays sur la capacité technologique d'interagir. On a 25 ans d'histoire de développement de ce côté-là, en termes de contenu, et ça, c'est majeur, parce qu'en fait le nerf de la guerre, c'est d'avoir du contenu, hein? Sur Internet, il y a bien des choses qui circulent, puis des fois le contenu est un petit peu douteux.

Et là-dessus on a de l'expérience, on a de la qualité au niveau de nos professeurs et des connaissances qui vont être sur Internet. On travaille pas mal avec l'Afrique. On parlait tout à l'heure de la région maghrébine, où on donne un bac complet en informatique. On travaille avec la France, notamment Bordeaux. On a des liens assez étroits où on donne des cours à distance à cette université-là et on fait des échanges aussi parce qu'on veut l'avoir dans les deux sens. On veut que nos étudiants puissent bénéficier aussi de l'expertise qu'il y a dans les autres pays et les amener aussi en formation à distance.

Donc, ce n'est pas seulement, nous, donner de la formation en ligne à distance, mais aussi en recevoir pour augmenter finalement l'offre de formation et de bénéficier, dans les deux sens, de l'expertise qui existe un peu à travers le... partout à travers le monde. Parce qu'il faut comprendre qu'une université, ça a le mot «univers» dedans et ça travaille à une échelle de la planète. Ça travaille, ça a beaucoup de plaisir à travailler à une échelle régionale, mais ça a aussi une grande fonction de travailler à une échelle planétaire.

Le Président (M. Marsan): Tantôt, vous avez parler d'ENA, et ma collègue me demandait: Qu'est-ce que ça veut dire, ENA? Et nos chercheurs viennent de nous communiquer que c'est l'environnement numérique d'apprentissage. C'est bien ça?

M. Bauce (Éric): C'est un système tout à fait unique qu'on présente d'ailleurs dans des grandes foires informatiques, là. On est invités à présenter cette chose-là. C'est une vision un peu différente.

Il faut comprendre que les systèmes en ligne présentement sont axés sur le cours. Alors, on donne un cours en ligne, un autre cours en ligne, ainsi de suite. L'ENA, c'est basé sur l'expérience d'apprentissage d'un programme de formation. Concrètement, l'étudiant est là, il a accès à tout. Il peut même avoir accès à son fil de presse qui est particulier à son domaine de formation, échanger avec les autres étudiants, être dans une salle virtuelle, complètement virtuelle, où les gens se parlent via Elluminate, qui est une composante, là, à l'intérieur de tout ça. Donc, c'est un environnement d'apprentissage. C'est important et c'est basé sur le programme de formation et l'expérience de vie, donc ça implique aussi les activités sportives, les commandes de livres, etc. C'est un peu... On est dans un univers, là.

Le Président (M. Marsan): M. le recteur, vous nous avez mentionné dans votre présentation au début que vous avez retrouvé l'équilibre budgétaire, et ce, depuis un certain nombre d'années. Et vous travaillez toujours, c'est difficile, mais vous travaillez toujours avec cet objectif-là année après année.

Je voudrais vous demander: Est-ce que vous pouvez nous décrire la façon dont vous avez procédé pour atteindre l'équilibre et pour le maintenir?

M. Brière (Denis): Oui. C'est une bonne question, un peu complexe quand même, mais je vais commencer à prendre l'attitude ou les réponses de mon vice-recteur, répondre par un mot, qui est la «communication».

C'est sûr qu'on ne peut pas atteindre l'équilibre budgétaire comme ça, sans avoir derrière nous l'ensemble de la communauté universitaire. Je vous l'ai dit tantôt, lorsqu'on parle de dépenses, lorsqu'on parle de restrictions, il faut l'expliquer, il faut l'expliquer à la communauté universitaire. Lorsqu'on parle de recrutement pour augmenter nos revenus, lorsqu'on parle de recherche pour augmenter nos revenus, ça prend des gens qui sont dynamiques, des gens qui sont prêts à faire application sur différents programmes. Alors, c'est sûr que c'est l'ensemble, c'est un effort pour l'ensemble de la communauté. Et j'en profite, vu qu'on est dans le domaine public, de les remercier grandement, l'ensemble de la communauté universitaire, parce que sans eux ça aurait été complètement impossible de le faire. C'est sûr que la ligne était assez simple, parce qu'on nous l'a quand même fait remarquer, hein, il y a d'autres universités qui sont en déficit, pourquoi pas nous autres être en déficit?

C'est vraiment une ligne qu'on a gardée du point de vue gestion. Et je pense qu'il y avait des questions, il y a eu des questionnements au début, mais les gens s'aperçoivent aujourd'hui que l'Université Laval, on peut prendre nos propres décisions, on n'est pas en plan de redressement d'une façon ou d'une autre et que, si on a des coupures à apporter, on est aussi bien de les apporter nous autres mêmes et de démontrer que l'Université Laval a une préoccupation, au niveau de sa gestion interne, de faire en sorte qu'on est en équilibre budgétaire. Je vous le dis, là, ce n'est par de gaieté de coeur qu'on l'a fait non plus, parce que ça a quand même fait mal dans plusieurs unités, mais les gens ont compris et nous ont supportés.

Et la clé, je pense, dans tout ça, ça a été de mobiliser l'ensemble de la communauté. Et je les remercie grandement d'avoir répondu à l'appel, parce que ce n'est pas le recteur et l'équipe de direction qui est derrière moi qui pouvons faire ça seuls, c'est impossible. Ça prend l'aval, ça prend quand même la collaboration de l'ensemble de la communauté, et ça, je pense qu'ils ont extrêmement bien répondu. Faire des coupures, c'est peut-être quelque chose qui est difficile, dans le sens où on est obligés de rationaliser, mais où ils ont contribué énormément, c'est au niveau du recrutement, comme vous avez bien pu le constater.

Vous savez, 4,7 % d'augmentation de nos étudiants, c'est très significatif sur notre budget.

Alors, c'est sûr qu'on a regardé les deux côtés: les dépenses et les revenus. C'est ce qui fait l'équilibre, l'équilibre budgétaire. C'est assez simple comme principe, mais, de le mettre en application, je pense que ça demandait une très grande consultation. Et le document Horizon 2012, dès qu'on est rentrés en fonction, je pense, a aidé beaucoup, parce qu'on a consulté l'ensemble de la communauté sur notre vision, sur comment on était pour développer l'université. Je pense qu'on a continué, on a maintenu la qualité de nos... Toutes les évaluations de nos programmes sont extrêmement positives. Et je pense qu'on a maintenu la qualité au niveau de la formation et certainement au niveau de la recherche, parce que c'est sûr que le nombre de chaires qui se multiplie prouve qu'on a quand même une capacité de recherche qui est bien reconnue.

Alors ça, ça fait partie de notre rayonnement. Mais, au niveau de la communauté en général, oui, ce sont des questions qu'au début, lorsqu'on voulait atteindre l'équilibre budgétaire... M. le Président, il y a beaucoup de questions qui se sont posées, oui.

**(11 h 50)**

Le Président (M. Marsan): Peut-être une dernière question. Vous savez qu'on peut faire face à court terme à une pénurie de main-d'oeuvre dans plusieurs secteurs d'activité au Québec. Et, vous, vous pouvez être frappé par cette pénurie-là, mais en même temps vous êtes aussi celui qui peut régler ce problème-là en formant plusieurs de nos futures infirmières, ingénieurs, ou autres, professeurs. Alors, est-ce que c'est quelque chose qui peut être dangereux pour l'université, cette pénurie annoncée?

M. Brière (Denis): Bien, c'est sûr que la pénurie de main-d'oeuvre comme telle, dans les entreprises en général, que ce soit public, parapublic ou privé, dans la société en général, c'est à nous à s'adapter à ces besoins-là. Il y a des besoins, puis c'est à nous... Comme on l'a montré dans mon allocution et par les réponses qu'on a apportées, c'est sûr qu'il faut s'adapter aux besoins.

À un moment donné, c'est ça. On s'est posé cette question-là non simplement à l'Université Laval, mais à l'ensemble des universités, avec les associations, que ce soit l'AUCC, ou le G13, ou même la CREPUQ. C'est sûr que ça va nous affecter au niveau universitaire aussi à un certain moment donné parce que ce n'est pas tous les doctorats qui reviennent dans l'enseignement à l'université. Au contraire, il y en a plusieurs qui s'en vont dans le privé aussi ou qui vont ailleurs lorsqu'ils ont des meilleures conditions. Mais ça va nous affecter. Si ce sous-financement-là demeure, ça va certainement nous affecter de pouvoir... d'attirer, le pouvoir attractif, de pouvoir attirer des professeurs et des chercheurs qui sont des sommités au niveau international. Puis regardez les chaires d'excellence. Je reviens tout le temps à ça, vous allez me dire, mais, les chaires d'excellence, on a réussi parce que ça faisait partie d'un des critères. C'était un des critères d'avoir quelqu'un de l'international. Alors, c'est un Brésilien qui est venu en optique-photonique et un Français qui est venu au niveau de l'Arctique. C'est sûr qu'on n'aurait pas pu attirer ces gens-là avec une chaire qui aurait été minimale. Ce sont des chaires, comme on l'a dit tantôt, là, qui environ ont généré, avec le privé, avec les agences subventionnaires, environ 30 millions par chaire. Bien, c'est sûr qu'une sommité y voit une façon de progresser plus rapidement dans son secteur d'activité et c'est de cette façon-là qu'on va attirer les meilleurs.

Les meilleurs attirent les meilleurs aussi. Je peux vous dire qu'il y a des gens qui veulent se joindre à ces deux chaires d'excellence-là et qui nous envoient leurs C.V. au niveau international, disent: Nous, on aimerait se joindre à l'équipe. C'est sûr. C'est ça, l'excellence. C'est ça, les sommités et les créneaux d'excellence qu'on développe.

Le Président (M. Marsan): Je vous remercie. Un court commentaire en terminant: J'apprécie également le fait que vous vous soyez présentés avec les représentants des associations étudiantes. Et vous leur faites une place de choix, nos collègues ont pu les questionner. Alors, c'est très apprécié également. Et je termine là-dessus puis je vais passer tout de suite... je vais céder la parole à Mme la députée de Taillon.

M. Brière (Denis): Si vous permettez, j'aimerais les remercier aussi, parce que c'est assez unique quand même comme approche. Mais comme ça, comme vous avez mentionné, au niveau de l'équilibre budgétaire, c'est la communication, c'est finalement de se mettre en mode solution dans tous les problèmes qui nous apparaissent dans notre institution.

Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Merci. Le temps file, et j'ai d'autres collègues qui veulent également poser des questions, mais, moi, il y en a une qui me chicote. Je vous la pose bien franchement. Ça concerne la politique linguistique de l'Université Laval. Dans un projet de loi qui porte le numéro 103, je crois, et qui aura des auditions publiques bientôt, on demandera dans ce projet de loi qu'il y ait une politique linguistique qui soit rendue accessible, qu'elle soit révisée périodiquement. Or, l'Université Laval n'est pas la seule dans ce cas-là, mais l'Université Laval, ça a été mis en lumière particulièrement l'année dernière, offre un certain nombre de cours entièrement en anglais, une quinzaine, je crois, en administration.

Et j'aimerais vous entendre sur la politique linguistique de votre université et votre conception donc de l'offre de cours dans une autre langue, compte tenu du fait que vous êtes, par excellence, une université francophone de haut niveau, et de longue histoire, et de longue tradition.

M. Brière (Denis): C'est sûr qu'au niveau de la langue offrir des cours en français, c'est une priorité dans notre institution. Je vais vous dire que, si on offre un cours en anglais, il y a un pendant français, et dans quelque temps il va y avoir un pendant espagnol aussi.

Je pense que pour les étudiants, si on ne veut pas que les étudiants aillent étudier ailleurs parce qu'on n'a pas aucune formation en anglais, et qui devient de plus en plus demandée... On est là pour répondre à des besoins, on n'est pas là pour répondre à des demandes. Je ne crois pas qu'on sacrifie la langue française lorsqu'on donne un cours en anglais. Je ne le crois pas. Ça peut être attrayant aussi pour nos étudiants internationaux. Pourquoi qu'on n'a pas beaucoup d'étudiants chinois au premier cycle? Bien, c'est parce qu'on est totalement en français. Et ça, ce n'est pas ça qui doit justifier notre approche. Mais on a une école de langues, on essaie de travailler sur ce dossier-là. Mais, moi, je pense que l'université ne perd pas son identité au niveau du français, même si elle offre certains cours dans d'autres langues, que ce soit l'anglais ou que ce soit l'espagnol. J'espérais, à un moment donné, qu'on en donne un peu en mandarin aussi, là, mais c'est quand même... il y a un intérêt pour ça. Et, si des étudiants de la région de Québec vont migrer à Montréal parce qu'on ne donne aucun cours en anglais, ça me préoccupe, parce que, dans leur formation, dans leur objectif d'internationalisation, je pense que la maîtrise de l'anglais... Et, si on donne... en donnant les cours en français et en anglais, parce qu'il y a toujours un pendant français, je pense que ça vient enrichir ces jeunes-là qui peuvent choisir le cours, par exemple, dans un trimestre, en anglais et choisir un autre cours en français dans leur formation.

Alors, c'est sûr qu'il y a eu une évolution vis-à-vis ça. Et, je voulais vous dire, il y a trois ou quatre ans, les gens n'étaient peut-être pas aussi prêts qu'ils le sont aujourd'hui à s'ouvrir sur des cours en d'autres langues, que ce soit l'anglais, ou l'espagnol, ou autres langues. Et les professeurs sont d'accord avec cette approche-là aussi. Et donc je pense que ce sont des programmes qui peuvent bénéficier à des Québécois qui veulent, par exemple, avoir des carrières un peu plus à l'international ou comme faire partie des ambassades ou quoi que ce soit.

Je pense que cette maîtrise-là est aussi importante et je ne crois pas qu'un étudiant perd son identité. On le voit très bien par les 800, 900 étudiants qui vont à l'international, qui doivent quand même maîtriser la langue où ils vont. Ce n'est pas simplement l'anglais, là, il y en a qui vont en Russie, il y en a qui vont au Mexique... alors, qui doit maîtriser cette langue-là, reviennent vraiment enrichis, hein, à cause de cette communication et du réseau qu'ils peuvent développer dans d'autres langues.

Mme Malavoy: Je comprends bien, M. le recteur, qu'il y ait une demande. Ça, ça ne fait aucun doute. Ce que je souhaiterais, c'est que ce soit balisé par une politique linguistique, autrement dit, qu'on ne fasse pas que répondre à une demande qui va venir de toute façon, puis, honnêtement, le mandarin m'inquiète moins que l'anglais ou me préoccupe moins que l'anglais, mais que ce soit balisé par une politique linguistique qui soit connue. Et, bon, il y aura des débats là-dessus d'ici quelque temps, mais je me permets quand même d'aborder cette question aujourd'hui parce que je la trouve malgré tout importante. Puis je vais laisser ensuite mes collègues poser d'autres questions.

**(12 heures)**

M. Brière (Denis): Si vous me permettez, avec l'évolution que nous avons, c'est sûr qu'une politique on va certainement y travailler, mais il fallait avoir des balises un peu au début. Mais je pense que, là, on a quand même certaines balises, on a certaines expériences, là, qu'on peut incorporer dans une politique.

Le Président (M. Marsan): Alors, je cède maintenant la parole à Mme la députée de Champlain.

Mme Champagne: Merci. Alors, messieurs mesdames, bienvenue à cette commission. Vous savez, votre réputation a dépassé les frontières, a même atteint Trois-Rivières, parce qu'on sait que vous faites également du travail là et que vous avez plusieurs étudiants qui viennent de notre région. Et ce partage-là, cet échange-là entre les diverses universités, je pense que c'est à la fois bénéfique, mais on comprend, tout le monde, que chacun essaie d'y trouver son créneau et se démarquer.

Puis vous avez des similitudes avec d'autres universités. Et autant vous faites une belle place bien évidemment à vos étudiants, et ce matin, de façon particulière, ils sont assis à la table pour répondre à nos questions, autant vous regardez aussi l'autre clientèle, qu'on appelle les gens du troisième âge, avec votre Université du 3e âge. Et Trois-Rivières s'est donné cette formule-là également l'an passé. Ma collègue de Trois-Rivières et moi avons assisté aux premiers balbutiements de cette université-là qui rejoint une belle clientèle et qui vient, je pense, boucler un peu la boucle en disant: Regarde, on a nos plus jeunes, c'est vous autres, la base de l'université, mais il ne faut pas oublier qu'il y en a d'autres qui ont le goût de continuer également dans une formation à l'université.

Or, j'aimerais que vous m'en parliez. Je vois que, l'année passée, vous en avez eu 3 500, personnes qui ont fréquenté cette université-là, ce qui favorise bien sûr l'engagement des aînés à la vie sociale et sûrement un bel échange avec vos étudiants plus jeunes. Alors, un petit peu l'historique... en tout cas, je vous laisse aller là-dessus, là, me donnant quelques informations.

M. Brière (Denis): Je vais, pour l'historique... je vais demander à Bernard Garnier de vous faire l'historique, là, de notre Université du 3e âge. Bernard, mémoire institutionnelle...

Le Président (M. Marsan): Comment il s'appelle?

Une voix: ...

Le Président (M. Marsan): Alors, M. le recteur, voulez-vous nous le présenter?

M. Brière (Denis): Oui. Bernard Garnier, qui est vice-recteur aux études et aux affaires internationales, va prendre la parole et va répondre à la question.

Le Président (M. Marsan): Alors, M. Garnier, la parole est à vous.

M. Garnier (Bernard): Je n'ai pas tout l'historique, disons, de l'Université du 3e âge, mais je peux vous dire que c'est une composante qui est en croissance à l'Université Laval, qui est très appréciée aussi et qui offre une gamme de services de plus en plus développés, y compris en région. Ainsi donc, on a un chapitre en Beauce, et il y a même une association d'étudiants du troisième âge donc qu'on rencontre régulièrement. Et on a une programmation de tout premier plan dans laquelle on a des grands conférenciers comme Florian Sauvageau, des professeurs qui ont pris leur retraite et qui ont un petit peu de temps et le désir d'enseigner.

Donc, ça contribue, je pense, au rayonnement de l'Université Laval et des universités en général. Puis je vous félicite d'avoir... que l'UQTR, votre région puissent bénéficier d'une telle initiative.

Mme Champagne: Une petite question supplémentaire. Après ça, je vais passer la parole à mon collègue aussi. Est-ce que cette formation-là est... je vais dire le mot «isolée» dans son action comme telle ou s'il y a de l'interlien avec les étudiants que j'appelle réguliers, qui sont fort nombreux? Alors, comment s'inscrit cette formation-là à l'intérieur de la formation de l'université même?

M. Garnier (Bernard): Il faut comprendre. Ce n'est pas une formation créditée, hein, on s'entend là-dessus, et donc il n'y a pas nécessairement d'exigence, d'examen, etc. Donc, c'est quand même une unité un peu particulière qui est... disons, qui bénéficie de l'appui logistique de notre Direction générale de la formation continue. Je vous ai dit aussi qu'il y avait une association étudiante aussi, qu'il y avait des enseignants qui sont soit à la retraite ou soit encore actifs, des professeurs, des chargés de cours, et on leur donne accès à nos services quand même, par exemple, de formation à distance. Donc, on leur ouvre les portes, hein, je leur ouvre les portes pour qu'ils puissent s'arrimer à nos services généraux.

Mais on ne peut pas dire que les étudiants de l'UTAQ, disons, côtoient quotidiennement les étudiants réguliers de nos programmes.

Mme Champagne: Donc, ce sera peut-être à venir, mais il n'y a pas nécessairement une intergénération appliquée. C'est ça que je comprends. Mais ça pourrait être un élément de recherche, je crois, hein? Pourquoi pas?

Une voix: ...

M. Garnier (Bernard): Et je sais que parfois les gens trichent sur leur âge pour accéder aux cours de l'UTAQ.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garnier (Bernard): Alors donc, normalement, on fait dans les 58 ans, puis là tu as des...

Le Président (M. Marsan): C'est très, très rare.

M. Garnier (Bernard): ...personnes qui ont 45, 50, 52.

Le Président (M. Marsan): Oui. Je vais céder la parole à M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): Alors, merci. Bienvenue en cette enceinte, M. le recteur. Et je vois que vous êtes très, très, très appuyé dans votre université, alors j'en suis très heureux.

Maintenant, moi, je veux vous emmener sur un dossier que j'ai... Je proviens d'une région qui est quand même à caractère fort agricole, alors la région de Saint-Hyacinthe, et je lisais, dans Le Soleil de... c'est récent, que la Faculté d'agriculture et d'alimentation avait des problèmes de recrutement actuellement et qu'il y avait eu des problèmes dans les dernières années. Alors, vous passez de 1 200 à 900. 900 sur 30 quelques mille étudiants, ce n'est peut-être pas beaucoup, mais je pense que pour le Québec c'est une expertise qu'on doit continuer de développer et que c'est nécessaire au développement de nos régions de garder une expertise. Et je sais que la Faculté d'agriculture de l'Université Laval possède quand même une renommée au-delà des frontières du Québec et internationales. Alors, je tiens à le souligner. Et puis en même temps, bien, je me questionne fortement sur... On sait qu'on est en concurrence mondiale, hein, on est en concurrence sur le développement, sur la recherche, et je me pose la question, à savoir... On a quand même une faculté d'agriculture à McGill, on a une faculté d'agriculture à Québec, on a l'école de médecine vétérinaire à Saint-Hyacinthe, on a plusieurs cégeps qui dispensent des cours en agriculture, on a deux campus ITA, on a un campus au collège Macdonald.

Je me posais la question puis je pense que c'est une réflexion qu'il faudrait tenir: Est-ce que ce ne serait pas... Pour justement avoir un centre d'excellence au Québec en agriculture, ça prend une masse critique, hein, dans tout développement, et, cette masse critique-là, je pense qu'actuellement elle s'est effritée, là, au niveau du Québec parce que c'est large, l'agriculture, et ça couvre beaucoup de terrain. Mais je me demandais si ce ne serait pas une vision, une vision d'agriculture future de centraliser ou de concentrer la recherche et la formation dans un centre peut-être unique au Québec, parce que justement, si on veut concurrencer le futur, je pense qu'il faut quand même avoir une vision à long terme et future pour que le Québec demeure un pilier ou un leader dans le domaine de l'agriculture.

Et je me demandais... J'aimerais ça voir votre vision de cette... cette approche-là là-dessus. Puis j'arriverai avec quelques exemples après.

M. Brière (Denis): Je vais faire un commentaire général. C'est parce qu'il y a deux aspects à votre intervention. Il y a un aspect recherche. Ça, c'est un aspect de recherche. Et c'est vrai qu'on a quand même, si on parle de l'Institut des nutraceutiques, on a quand même des très belles expertises à l'Université Laval en ce qui concerne l'agriculture et... est très peu comparable en fait d'envergure à beaucoup d'autres centres au Québec et même, je dirais même, dans l'est du pays.

Mais, au niveau de la formation, c'est sûr que c'est l'intérêt. Et on a au début parlé de recrutement. Et c'est sûr qu'au niveau de la Faculté d'agriculture, lorsqu'on l'a rencontrée, on a insisté beaucoup là-dessus, mais il y a les cycles, hein, c'est vraiment... il y a des cycles d'intérêt. Si vous avez vu, il y a quelques années, c'était au niveau des mines, il n'y avait pas beaucoup d'étudiants dans le programme des mines, mais on l'a soutenu. C'est une responsabilité sociale. Je vous dis qu'on l'a soutenu malgré que ça, c'était déficitaire, parce qu'il n'y avait pas un grand nombre d'étudiants. Aujourd'hui, avec l'industrie qui va mieux, c'est plus populaire. Et, même au niveau de la recherche, c'est plus populaire aussi, il y a plus de centres de... il y a plus de chaires industrielles qui se font dans le secteur des mines. Alors, ça varie.

Mais je vais demander à Éric, là, de peut-être compléter cette observation-là. Mais, au niveau de la recherche, je ne suis pas tellement inquiet. Ça, je pense qu'on est bien positionnés, on va continuer d'être bien positionnés. On a quand même l'institut conjoint, avec la région d'Aquitaine. Alors, au niveau national, au niveau international, on se démarque, mais, au niveau de la formation puis au niveau du recrutement, c'est très difficile à voir une cause à effet. Mais il y a certaines années qu'il y a un manque d'intérêt pour la Faculté d'agriculture, oui.

M. Bauce (Éric): Je pense effectivement...

Le Président (M. Marsan): M. Bauce.

**(12 h 10)**

M. Bauce (Éric): Merci. Merci, M. le Président. Je pense effectivement qu'il y a trois niveaux à l'intérieur de ça, là. Il y a la recherche. La recherche, ça va quand même bien, et il y a un bon arrimage avec les autres acteurs. Et ça, je dirais que c'est inévitable et c'est bien. Et c'est un peu l'orientation des organismes subventionnaires qui ont forcé un peu ça, de faire cet arrimage, et ça, c'est excellent. Et là, l'arrimage, on le fait à l'international, notamment en nutraceutique, avec Bordeaux.

Maintenant, l'attraction dans le secteur, attirer des étudiants qui veulent étudier en agronomie, là il y a un travail d'image à faire dans le secteur pour amener ces étudiants-là. Et, comme le recteur l'a mentionné, tout ça, ça génère des cycles. Vous voyez, le problème qu'on a présentement dans le secteur de l'agriculture, on a le même dans le secteur de la foresterie où on a de la difficulté à attirer des gens à cause de l'image du secteur. Et ça, il y a un travail à faire, qui est important, et pas seulement au niveau de l'université, mais au niveau beaucoup plus large. Et, nous, à l'université et en tant qu'université complète, on soutient ces secteurs-là qui effectivement ont des périodes difficiles, alors que d'autres ont des périodes plus faciles, et ainsi de suite.

Et ça, c'est le jeu de l'équilibre. Et ça, au niveau financier, je peux vous assurer que c'est marcher sur un fil et faire du trapèze et des quilles... faire du jonglage en même temps, là. C'est assez rocambolesque, mais c'est une responsabilité.

Je peux vous dire que présentement on forme des infirmières à l'Université Laval, mais ce n'est pas payant, là. Là, c'est le côté finances qui vous parle, là. Ce n'est pas payant, former les infirmières. Par contre, on a une responsabilité sociale de les former et on va continuer à les former, et ça, c'est tout l'équilibre du jeu budgétaire que l'on fait pour assumer ce rôle-là. Le secteur de l'agriculture, et on a en d'autres, des secteurs comme ça qui sont problématiques en termes de financement à l'université... et c'est là qu'en termes de mécanismes de gestion on a ce qu'on a mentionné un peu plus tôt, des plans de redressement. Alors, on suit nos facultés, on suit nos unités. Et on les suit, ils nous donnent des rapports à tous les trois mois.

Le Président (M. Marsan): Merci. Ceci termine notre échange. Vous avez, rapidement, une dernière question, M. le député de Saint-Hyacinthe?

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): Je veux juste amener sur... Vous parlez de concurrence internationale et mondiale, mais je veux juste amener l'exemple de Guelph, Ontario, où tout est centralisé, c'était ma question, où tous, tous les efforts dans l'agriculture sont centralisés à la même place. Alors, quand il est question d'attirer, d'avoir un pouvoir d'attraction, eux, ils l'ont peut-être un peu plus, que je voulais dire, qu'ici. Alors, je regardais si vous aviez une vision de ce côté-là pour pouvoir justement disperser et... Parce que, si on se disperse trop, je pense qu'on perd un petit peu, là, selon moi.

Des voix: ...

Le Président (M. Marsan): Ça va? Ça va ou voulez-vous... Alors, on vous remercie pour cette période d'échange. Nous poursuivons.

Et je voudrais, avant de céder la parole à notre collègue, saluer le député de Charlesbourg qui s'est joint à nous un peu plus tôt. Et, pour nos téléspectateurs, bien le député de Charlesbourg a déjà été, dans sa vie précédente, recteur de l'Université Laval. Alors, je vais céder la parole à Mme la députée de Mille-Îles. Mme la députée, la parole est à vous pour une durée d'environ six ou sept minutes.

Mme Charbonneau: M. le Président, six minutes, ça n'a pas d'allure! Vous avez compris que la fierté que vous aviez vient de se rapprocher bien, bien, bien proche de moi, là, en ce moment, juste par le fait d'avoir mon collègue qui vient de s'asseoir à mes côtés, mais qui, depuis le début de notre première rencontre... On se taquine un peu, puisque je viens du monde scolaire plus primaire et secondaire, et Michel s'amuse à me taquiner sur le monde universitaire, donc on a beaucoup de plaisir.

Six minutes, ce n'est pas long pour revenir sur des sujets qui m'intéressent par rapport à votre université. J'aurais pu rester sur le financement, puisque j'aurais aimé entendre parler de votre fondation, encore une fois l'occasion de pouvoir vous adresser à vos gens mais surtout de savoir qu'est-ce que vous faites. Et aussi, sur ce plan que vous avez mis en place en 2004, qui était pour la réussite au doctorat, là, il y avait un projet de financement, puis vous en aviez parlé, en 2006, mais je n'irai pas là. Donc, je me permettrai peut-être après mon six minutes. Mais je vous les donne comme ça, en rafale. Peut-être que vous en choisirez une, puis vous reviendrez. On a parlé de l'international, et j'ai beaucoup apprécié le jeu et la formation où on dit: Dans «université», il y a «univers». Je vais probablement vous citer quelquefois. J'ai bien apprécié ce principe-là.

Par contre, dans notre univers, il y a Rimouski, où est-ce que vous avez un projet d'une cohorte de médecins généralistes. J'aurais aimé vous entendre là-dessus aussi parce que c'est fort intéressant et parce que vous êtes accompagnés, de façon extraordinaire, de gens de votre université, je n'ose pas dire «de jeunes», puisque maintenant vous avez une génération plus importante du troisième âge. Donc, ils sont plus jeunes depuis plus longtemps, qu'on dit chez nous, mais c'est quand même vos étudiants.

Sur cette politique que vous avez mise en place en 2009, je vais la résumer et je vais le faire de façon très malhabile. Mais, sur la résolution de conflits, vous avez mis en place, de par votre gestion avec vos, je pense, avec vos étudiants, une politique pour regarder les conflits, comment est-ce qu'on arrive à les résoudre, comment est-ce qu'on arrive à faire cette gestion-là. C'est nouveau. J'ai le titre un petit peu plus loin. Ne bougez pas, je vais sûrement pouvoir revenir dessus... C'était pour améliorer la gouvernance. Là, j'essaie de me souvenir rapidement du titre, je ne l'ai pas, mais probablement que vous avez en tête... Vous avez mis cette application-là en 2009. On avait eu les jeunes du syndicat de l'université qui étaient venus nous en parler quand on a avait parlé du projet de loi de gouvernance de la ministre. Là, je vois les yeux se froncer. Je sens que je suis mieux de trouver le nom parce que je vais vous faire chercher encore plus.

C'est la Politique sur l'intégrité en recherche et création, sur les conflits d'intérêts et adoptée en mai 2009. Bon. Et je vois les sourcils se reposer. Et le privilège que vous avez, M. le recteur, c'est quand vous êtes accompagné par beaucoup de gens. Il y a beaucoup de points d'interrogation alentour de vous quand je pose une question qui n'est pas assez claire. Donc, je me demandais si c'était suffisamment pertinent de revenir là-dessus. Puis là je vais arrêter de vous les donner en rafale parce qu'il ne restera plus de temps pour en répondre. Donc, pigez-en une et revenez-moi.

Le Président (M. Marsan): M. Brière.

M. Brière (Denis): Oui. Lorsqu'on se regarde comme ça, c'est parce qu'on veut donner la meilleure réponse.

Mme Charbonneau: Tout à fait. Je n'ai même pas d'inquiétude. Jusqu'ici, ça a très, très bien été.

M. Brière (Denis): Bien, sur la politique, là, je vais laisser Éric, là, vu que c'est en 2009. Oui, c'est une politique qui est importante pour notre institution. Alors, Éric, est-ce que tu veux...

M. Bauce (Éric): En fait, c'est ça, on fronçait un peu les sourcils, parce que, nous, c'est un peu comme vous, là, des politiques, on en a, là, plusieurs et, si on n'a pas le vrai nom, là on peut se mêler un petit peu.

Cette politique est excessivement importante. Évidemment, elle touche la propriété intellectuelle, elle touche essentiellement, aussi, la protection de la propriété intellectuelle de nos étudiants. Il faut comprendre qu'on est dans une ère où on va faire de plus en plus affaire avec le privé. Il faut l'encadrer, et c'est encadré de deux façons: par cette politique-là et aussi par une autre politique qu'on a adoptée, qui est la politique des relations avec l'externe. Donc, il y a les deux étapes, là: comment on la bâtit, cette relation-là, et après ça, quand on a des fruits de tout ça, comment on encadre tout ça. Notre grande préoccupation dans tout ça, c'est de protéger la propriété intellectuelle de nos chercheurs, de nos étudiants, mais pas d'arriver dans un système où ça demeure un carcan pour amener ça au niveau de la société. Alors, dans certains cas, la propriété intellectuelle, elle est partagée, elle est partagée parce qu'il faut qu'elle atterrisse, cette propriété-là.

Mais tous les gens qui y participent doivent être protégés à l'intérieur de ça. C'est l'essence même de cette chose-là.

Au niveau évidemment des conflits d'intérêts qu'il peut y avoir, bien il y a des déclarations qui doivent se faire. Et ça, c'est géré notamment par notre comité exécutif et par notre conseil d'administration, où les gens doivent déclarer des positions de conflit d'intérêts et pas seulement déclarer l'apparence de conflit d'intérêts, mais comment ils vont la régler, comment on va la gérer, cette chose-là. Est-ce qu'elle est gérable ou est-ce qu'elle n'est pas gérable?

Donc ça, c'est tous des éléments qui sont à l'intérieur de cette politique-là et c'est particulièrement important dans le contexte de comment les choses évoluent avec une plus grande présence du privé et du secteur privé en général avec nos activités, nos interactions.

Le Président (M. Marsan): M. le recteur.

M. Brière (Denis): Oui. Je voudrais juste compléter, parce que c'est un aspect très important au niveau de la communauté en général et surtout au niveau de la communauté, au niveau de la recherche, au niveau des chaires industrielles qu'on développe. C'est pour éviter que des gens commencent à développer certains projets qui ne sont pas conformes à notre politique et qui se retrouvent après ça en face d'un mur puis disent: Ah, bien, si on l'avait su, on n'aurait pas commencé à travailler sur un projet et dépensé de l'énergie pour rien. Alors, c'est sûr qu'en le balisant les gens savent exactement à quoi s'en tenir et savent exactement de quelle façon ça va être développé.

Alors, c'est cet encadrement-là qu'on a senti très, très, très nécessaire, surtout avec les relations qu'on a avec le public, parapublic et privé. Ces relations-là doivent être encadrées, et c'est cette politique-là qui encadre, là, les relations.

Le Président (M. Marsan): Rapidement.

Mme Charbonneau: Rapidement. Bien, si on peut avoir rapidement juste un retour sur cette cohorte de médecine généraliste que vous développez avec Rimouski, ce serait intéressant, parce que l'Afrique, c'est super intéressant, mais Rimouski, ça m'intéresse beaucoup.

M. Brière (Denis): Rapidement, Éric.

**(12 h 20)**

M. Bauce (Éric): Pour faire rapidement, il faut comprendre que Rimouski a une base très forte notamment en médecine familiale, donc ils ont un noyau important de ce côté-là. Il y a des discussions. On développe avec cette université-là, avec l'UQTR...

Une voix: L'UQAR.

M. Bauce (Éric): ...avec l'UQAR -- excusez-moi, j'ai tendance à être mélangé... mais avec l'UQAR, celle qui est à Lévis est à Rimouski, je ne vais pas plus loin -- ces présences pour les externes, les internes, les résidents, ainsi de suite, donc de développer ce côté-là pour les stages, et il y a un pôle intéressant de ce côté-là.

Il y a des discussions et il y a des choses particulièrement intéressantes qui se font, et on va continuer à développer de ce côté-là pour permettre de développer dans cette région-là. Et on commence avec ce secteur-là de la médecine familiale où il y a la masse critique pour pouvoir recevoir les étudiants et les former, parce que ça, c'est important. On ne peut pas dire «on va développer des choses, former des gens au niveau médical» si on n'a pas une certaine masse critique sur place aussi. Et il y a la masse critique là-bas, donc ça devra aller très bien.

Le Président (M. Marsan): En terminant?

Mme Charbonneau: Pour terminer, puisqu'il le faut, sinon on vous garderait tout l'après-midi, vous êtes fort intéressants, je voudrais vous remercier. Merci aux gens qui étaient sur la première ligne. On appellera ça la ligne de tir, puisque vous êtes les premiers à recevoir les questions. J'ai aussi ma collègue d'à côté qui me taquinait puis qui me disait que vous avez, vous, le droit de dire des choses que, nous, on ne peut pas dire, puisque de dire que les infirmières, ce n'est pas payant... jamais on ne va dire ça, nous autres, mais on a compris le contexte dans lequel vous l'avez dit, donc c'est...

M. Bauce (Éric): ...

Mme Charbonneau: Oui, c'est ça, c'est dans la formation. Et sachez qu'on reconnaît, je crois... Je vais le dire de façon personnelle, mais je suis sûre que la matière grise est une matière la plus difficile à quantifier dans sa valeur. On peut parler de la maladie. C'est deux dossiers importants au gouvernement, la santé et l'éducation, mais ce sont deux dossiers qui se quantifient mal. Et, la journée qu'on va trouver la bonne façon de quantifier, de financer et de faire les choses correctement, équitablement, parmi le privé, le public et la masse étudiante, on aura trouvé un calcul fort intéressant qu'on pourra multiplier, mais pour l'instant on est toujours dans le calcul.

Donc, merci infiniment, puis au plaisir de se retrouver.

Le Président (M. Marsan): Je vous remercie, Mme la députée. Je vais maintenant céder la parole à la porte-parole de l'opposition officielle en matière d'enseignement supérieur, Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Ce sera pour une brève période, mais je vais terminer par le nerf de la guerre, je vais terminer par la question de financement. M. le recteur, vous l'avez évoqué à quelques reprises, vous avez bien dit également ce matin dans votre document de présentation que vous alliez frapper un mur à brève échéance. J'aimerais, dans les quelques minutes qui nous restent, que vous fassiez un peu le point sur votre situation.

Je comprends qu'il y a un équilibre des opérations courantes que vous avez réussi à atteindre à l'aide de beaucoup d'efforts de toute la communauté universitaire, et c'est remarquable, mais vous avez aussi une dette accumulée qui est importante. Dans les derniers documents que nous avions au moment de l'étude des crédits, c'était chiffré à un peu plus de 116 millions. Je ne sais pas si c'est toujours le cas ou... Enfin, j'aimerais que vous me disiez si ces données-là sont valides, et comment vous entrevoyez donc la suite des choses au-delà des efforts que vous avez pu faire déjà, et quel dernier message, en termes de financement, vous pourriez nous lancer.

M. Brière (Denis): Je vais me réserver la conclusion et je vais demander à Éric d'aller dans les détails au niveau... Parce que vous avez mentionné le 116 millions, là. C'est les détails qu'Éric peut vous dire, mais ce 116 millions n'est pas une dette complète, là. Alors, je vais demander à Éric de préciser.

Le Président (M. Marsan): M. Bauce.

M. Bauce (Éric): Oui. Et c'est bien, parce que Denis réserve la conclusion avant de me passer la parole. Il l'a dit avant, c'est un petit peu embêtant. Mais, juste pour préciser, sur le 116 millions, là, il faut comprendre que ça inclut ce qu'on appelle les appoints de rente. Notre dette réelle lorsque... ce qu'on doit emprunter à la banque, là, puis financer, là, c'est autour de 87 millions. Et on est la seule université qui a ces appoints de rente là dans ses chiffres. Les autres universités ne l'ont pas. Alors, c'est important quand on compare les choses, là. Et ça, on le dit à chaque fois, là, notre dette, elle n'est pas une dette accumulée, sur les opérations... là, elle est autour de 87 millions. Face à ça...

Mme Malavoy: Pouvez-vous juste préciser ce dont... la différence entre le 87 et le 116, c'est les?

M. Bauce (Éric): Les appoints de rente.

Une voix: ...

M. Bauce (Éric): Bon. Ça, c'est une bonne question. Alors, je vais vous l'expliquer de façon...

Une voix: ...

M. Bauce (Éric): ...très brève. En 1998, les gens se disaient que les retraites n'étaient pas assez élevées, alors il y a eu un engagement, qui a été pris, de bonifier les retraites des gens en question et juste pour ces cohortes-là pour le futur. Donc, c'est des dépenses qui vont venir plus tard. C'est l'aspect un peu virtuel des choses. Ce n'est pas les dépenses d'aujourd'hui. C'est qu'à chaque année il y en a, de ces morceaux de dépenses là, là, un peu comme à la fin de l'année, quand vous commencez une année, vous allez devoir payer les vacances des gens, mais vous allez les comptabiliser quand vous allez les payer.

Maintenant, les appoints de rente, c'est un des éléments des PCGR, les principes comptables généralement reconnus, où on doit comptabiliser tout ce qu'on... tous nos engagements financiers que l'on a si demain matin on faisait faillite. On pourrait faire un grand débat là-dessus puis vous expliquer les affres de chiffres que ça va générer, là, mais ça, peut-être un autre jour. Peut-être pour... Vous avez ouvert la porte «au mur» évidemment qui nous attend. Il y a un mur qui nous attend et il est colossal. Je peux vous dire qu'en 2011-2012, présentement, nous, on se pose la question. On a un mur, on l'a évalué en 2011-2012. L'année prochaine, on devrait être en équilibre, mais, en 2011-2012, le mur, c'est 40 millions de dollars que l'on a. Il y a différentes causes. C'est des augmentations de coûts de système puis l'écart entre l'indexation, les augmentations de coûts de système, il y a les impacts de la crise économique sur les régimes de retraite, qui sont majeurs.

Évidemment, toutes ces choses-là font partie du décor. Ce qu'on a fait durant les deux dernières années, je peux vous dire qu'on a réduit globalement la capacité de dépenser de notre institution et de nos unités d'environ 13 % de notre budget. C'est au-delà de 60 millions. Ça, c'est des efforts considérables. On est rendus à un stade où on a une responsabilité de ne pas venir affecter notre mission. Donc, la rationalisation, les nouvelles façons de faire, je pourrais vous dire, tous les comités qu'on a mis en place puis tout ce qu'on demande aux gens en termes de reddition de comptes et de repositionnement durant l'année en fonction des budgets qu'on a donnés est important, mais là on est rendus à un stade où il va falloir penser au financement de tout ça.

Je crois qu'à l'Université Laval, et j'en remercie très sincèrement toute l'équipe de direction et toute la communauté universitaire qui a fait des efforts... J'aimerais mentionner, en passant, qu'un système aussi complexe qu'une université, ça ne se gère pas par microgestion, par interventions bien pointues, ça se gère par signaux. Le signal qu'on a envoyé à notre communauté, c'est le respect des valeurs du développement durable, et la gestion financière va à l'intérieur de ça.

Mme Malavoy: Conclusion du recteur? Bien, M. le recteur, vous aviez une conclusion à faire. Je l'attends, simplement.

M. Brière (Denis): Je pense qu'Éric a très, très, très bien répondu. Mais vous avez posé la question tantôt: De quelle façon qu'on a atteint l'équilibre budgétaire?

Bien, c'est sûr que, je l'ai dit, c'est en mobilisant la communauté en général par une bonne communication. Je peux vous dire qu'en tant que recteur je trouverais ça extrêmement dommage qu'il n'y ait pas un réinvestissement majeur qui fait en sorte que, ce mur-là, on ne le frappe pas, à l'Université Laval, à cause des efforts qu'on a faits à venir jusqu'ici. Parce que, si on se retrouve en déficit budgétaire en 2011-2012, je peux vous dire que la communauté ne serait pas très, très enthousiaste à continuer les efforts. Je vais vous le dire, là, c'est très, très clair, hein, parce qu'on aurait fait tous ces efforts-là, des efforts quand même, qui sont quand même très, très majeurs, et on se retrouve quand même en déficit. Là, je pense que ça serait mal perçu et mal reçu. Je pense qu'on est rendus à un point où, on vous l'a dit, si on frappe ce mur-là, c'est notre mission qui va être mise en cause. Et ça, je pense que ça serait au détriment de la société québécoise de mettre en péril la mission des universités au Québec. Alors, en conclusion...

Le Président (M. Marsan): Merci...

M. Brière (Denis): ...je vous dis que, ce mur-là, il faut trouver des solutions, et c'est la raison pour laquelle tout le monde est ici. Autant les étudiants, autant la communauté, on se met en mode solution.

Le Président (M. Marsan): Merci...

M. Brière (Denis): On ne se met pas en mode de simplement de décrire une situation ou de décrier une situation, mais on se met en mode solution, comme on...

Le Président (M. Marsan): Alors, merci...

M. Brière (Denis): ...le fait depuis des années.

Le Président (M. Marsan): ...merci bien, M. le recteur. Ceci met un terme à cette période d'échange.

Document déposé

Avant de terminer, je voudrais déposer le document présenté par l'Université Laval à la Commission de la culture et de l'éducation.

Et, sur ce, auparavant remercier bien sincèrement pour la qualité de votre présentation et la qualité des échanges que nous avons tous eus avec vous. Alors, je voudrais remercier M. le recteur, M. Brière, M. Bauce, M. Mercier, Mme Lacasse, M. Garnier, Mme Poirier et M. Paradis.

Et, sur ce, la commission suspend ses travaux jusqu'à 14 heures. Bon appétit.

(Suspension de la séance à 12 h 30)

 

(Reprise à 14 h 3)

Le Président (M. Pigeon): À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la culture et de l'éducation ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones portables.

Et je vous rappelle que le mandat de la commission est de tenir des auditions publiques afin d'entendre les dirigeants des établissements d'enseignement de niveau universitaire en application de la Loi sur les établissements d'enseignement de niveau universitaire.

Alors, nous allons entendre cet après-midi, au début de l'après-midi, les représentants de HEC Montréal, et je vous rappelle qu'il y a une trentaine de minutes de réservées pour l'exposé de l'université et 1 h 45 min pour les échanges avec les membres de la commission, le temps étant réparti également entre le groupe formant le gouvernement et les deux groupes, l'opposition officielle et le deuxième groupe d'opposition, s'il se présente. Si le deuxième groupe d'opposition est là, ils auront droit à environ 10 minutes; l'opposition officielle, 42 minutes; et le groupe formant le gouvernement, 52 minutes.

Alors, je demanderais au directeur de HEC Montréal de s'identifier et de présenter ceux qui l'accompagnent.

HEC Montréal

M. Patry (Michel): Merci, M. le Président. C'est avec plaisir. Mon nom est Michel Patry, je suis directeur de HEC Montréal. M'accompagnent, à ma droite, Jacques Nantel, qui est professeur titulaire et secrétaire général, M. Georges Montplaisir, qui est notre directeur des finances, et M. Denis Hamel, directeur des relations gouvernementales. Merci beaucoup.

Le Président (M. Pigeon): Alors, M. Patry, je pense que vous allez commencer tout de suite par votre présentation d'une trentaine de minutes.

M. Patry (Michel): Merci, M. le Président, avec votre permission. Alors, écoutez, ça nous fait grand plaisir de vous rencontrer. Je vous remercie déjà à l'avance de l'attention que vous accorderez à cette présentation comme à toutes les autres présentations. Je pense que votre tâche est importante, vous jouez un rôle important. En préparant cette petite présentation, il m'est venu à l'esprit que vous pourriez vous imaginer être à la place des gens qui, au milieu du XIXe siècle, se réunissaient pour définir les paramètres du développement de l'industrie de l'acier et des chemins de fer qui allait être vraiment l'infrastructure qui allait permettre le développement de l'industrialisation, de l'industrie manufacturière et finalement lancer l'économie du XIXe, XXe siècle.

Nous sommes aujourd'hui, dans le domaine de l'éducation, dans une situation similaire à l'industrie de l'acier, des locomotives et des chemins de fer au XIXe siècle, hein? Les chemins de fer et l'acier étaient à l'économie manufacturière ce que les universités et l'ensemble du dispositif d'innovation sont à l'économie des connaissances du XXIe siècle. Donc, je pense que vous avez un rôle extrêmement important. Et, moi, je vous encourage à le jouer de manière visionnaire, en regardant à très long terme les implications pas seulement pour les universités bien sûr, mais pour l'ensemble de la société québécoise. Alors, la présentation que nous vous avons préparée est assez courte. Je veux vous laisser quelques idées, messages clés qu'on voudrait laisser à la commission en réflexion. Je vais vous donner quelques indications de ce qu'est HEC Montréal aujourd'hui. Je sais que vous avez beaucoup de documentation, qu'on vous a distribué un rapport, donc je ne vais pas reprendre beaucoup, beaucoup d'éléments ou de statistiques de ce rapport. Je vais vous parler un petit peu de l'avenir tel que, nous, on l'envisage, à HEC Montréal, et des défis que nous avons tous en partage.

Alors, quelques mots d'abord sur le contexte que je viens d'évoquer. Je crois sincèrement, je le disais au président de la commission juste avant le début des délibérations officielles, que le Québec est privilégié parce qu'il dispose d'un système universitaire de grande qualité, globalement. Je dis ça sans flagornerie ou... Quand vous vous promenez à travers le monde, il y a relativement peu d'endroits où vous voyez des systèmes universitaires que vous voudriez changer avec celui du Québec. C'est certain qu'il y a énormément de qualités et d'excellence notamment chez nos voisins du Sud qui ont un système d'une profondeur et d'une qualité exceptionnelles à bien des égards, mais, quand on prend une vue globale, le Québec s'est doté, au fil des ans, d'un excellent réseau. Moi, je pense que l'ensemble des constituantes constituent un excellent réseau. On n'est pas dans une situation où il faudrait partir de novo à partir de rien.

Donc ça, c'est une bonne nouvelle. Les universités québécoises sont présentes.

Par contre, le défi est de taille. Je viens d'évoquer le parallèle avec l'économie industrielle et les chemins de fer au XIXe siècle. Et les universités québécoises doivent s'élever, et l'ensemble du réseau universitaire et du système d'innovation québécois doit s'élever pour relever ce défi. Et, moi, je vous soumets que ça devrait être la priorité, sinon une des priorités vraiment fondamentales du gouvernement. Je comprends qu'il y a des enjeux de santé qui préoccupent tout le monde, mais, quand on parle du développement économique et social et des fondements de la compétitivité, de la productivité pour le siècle qui vient, on va convenir que c'est un enjeu de taille. Donc, il faut viser haut, il faut voir loin, se dire qu'on part d'une situation où on a des actifs, si vous me permettez ce parallèle financier, on a des actifs, mais nous avons des défis de taille. Et, lorsqu'on regarde nos partenaires mêmes au Canada, depuis quelques années, nos partenaires canadiens ont fait des investissements extrêmement importants dans le réseau universitaire, nos voisins ontariens ont fait des investissements, mais partout à travers le Canada... Et les Européens et beaucoup de nos partenaires commerciaux font présentement d'énormes investissements.

**(14 h 10)**

Alors, premier message: Nous avons un très bon système. Deuxième message, c'est qu'il ne faut pas tomber dans la complaisance. Plus que ça, je crois qu'il y a urgence au Québec. Le Québec possède un bon réseau. Le Québec, à bien des égards, est compétitif dans la plupart des domaines de la recherche au Canada. Le président de la commission sait très bien tout ça parce qu'il a présidé aux destinées d'une grande université. Mais il sait également que cette position est précaire, ces acquis sont fragilisés. La concurrence pour les chercheurs, pour les professeurs, pour les meilleurs étudiants, les meilleurs stagiaires postdoctoraux qui font porter finalement la recherche fondamentale et appliquée est énorme. Et le Canada en général a fait des investissements, dans les autres provinces, extrêmement importants.

Le Québec est présentement sixième pour les subventions globales par étudiant. Donc, le gouvernement québécois, je crois, fait sa part, il est dans la moyenne canadienne. Par contre, lorsque l'on combine toutes les sources de financement par étudiant, notre position relative est beaucoup plus faible.

Et, comme, moi, je le dis souvent, et plusieurs de mes collègues le disent, en éducation comme dans d'autres domaines, la qualité a un prix. Alors, on ne pourra pas parvenir à faire des progrès importants... Parce que je pense qu'on doit avoir l'ambition de faire ces progrès et de ne pas viser à être juste dans la moyenne, mais d'être à l'avant-scène. On peut le faire. On ne pourra pas y parvenir s'il n'y a pas, d'une part, les moyens et l'autonomie confiés aux établissements. Évidemment, avec cette autonomie vient un besoin de rendre compte, une reddition de comptes, une imputabilité, j'en suis tout à fait conscient. Et je crois que tout le monde dans le réseau vous dira la même chose. Et donc doit venir avec ça une forme de réglementation la plus efficace possible, orientée vers les résultats plutôt que vers les processus.

Alors, dans ce contexte, c'est un peu la lecture que, nous, on fait, à HEC Montréal.

Comment vous décrire la trajectoire que nous avons connue récemment et la trajectoire que l'on voit se dessiner pour les prochaines années? Alors, c'est l'objet de mes remarques pour les 10, 15 prochaines minutes. Je vous rappelle que HEC Montréal, c'est un succès, d'une certaine façon, mais c'est un succès improbable. Pourquoi c'est un succès improbable? Parce qu'il suffit de vous rappeler que l'École des HEC a été créée il y a maintenant 103 ans dans un Québec extrêmement catholique, assez hostile au développement des affaires, où les gens qui avaient quelques qualités intellectuelles se voyaient encouragés à épouser le droit, ou la carrière ecclésiastique, ou la médecine. Mais les affaires, parce que, nous, les affaires, c'est notre coeur de métier, ce n'était pas très bien vu.

Vous auriez demandé à des observateurs canadiens, en 1900, dans quelle province serait créée la première école de commerce ou la première faculté d'administration au Canada, je ne crois pas qu'il y a beaucoup de gens au Canada qui auraient imaginé que ce serait au Québec et encore moins qui auraient imaginé que ce soit dans le Québec francophone. Et pourtant, et ça, c'est... ça dit quelque chose du courage aussi des élus à l'époque et de leur vision. En 1907, le gouvernement a décidé de créer une école des hautes études commerciales. Vous imaginez les dépenses que ça représentait, construire un édifice, créer un nouvel établissement. C'était un peu en dehors du réseau. C'était un établissement non confessionnel en dehors des structures qui existaient déjà. Il s'était présenté, à la première année, 32 étudiants. Vous pouvez imaginer le... Moi, j'ai lu, là, les reportages dans les journaux à l'époque. Il y a beaucoup de gens qui ont crié au scandale en disant: Aïe, quelle perte de fonds, quelles dépenses! C'était un investissement.

Et ce que je veux illustrer, c'est que cet investissement était très profitable. Grâce à ce geste, dès les premières années, l'école s'est imposée comme un lieu de savoir dans le domaine des affaires, a formé les premières générations de francophones pour les affaires et par la suite a accompagné le développement économique du Québec à chacune des grandes étapes: pendant la Révolution tranquille, pendant les années 1970-1980 et, par la suite, lorsque l'économie s'est mondialisée.

Alors, aujourd'hui, l'école a l'ambition de se présenter non seulement au Québec, mais au Canada comme un établissement de tête. C'est une ambition. Vous en jugerez vous-mêmes, si elle est démesurée. Nous, on pense que non. On a certains succès. Il y a des choses qu'on doit améliorer. Mais, notre ambition, c'est de se dire: Il ne suffit pas d'être bons dans la partie nord de Montréal, il ne suffit pas d'être bons au Québec, on pense que, nous, on peut offrir au Québec, on peut offrir au Canada, on peut offrir au monde une solution originale. Et je vais esquisser à grands traits cette originalité-là. Je vous ai laissé quelques éléments, statistiques vitales. Alors, de nos 32 étudiants admis en 1907, là, 32 qui foulaient le pas de l'édifice sur la rue Viger, bien dans quelques jours... en fait, c'est déjà commencé, parce que, nous, on enseigne, y compris l'été, mais dans quelques jours, au début de la session officielle de l'automne pour le premier cycle, c'est 13 000 environ étudiants qui vont se présenter.

Alors, l'école a été la première école de gestion au Canada, la première à recevoir des agréments, la triple couronne, les trois agréments internationaux les plus convoités dans notre domaine. C'est près de 13 000 étudiants, dont près de 4 000 sont des étudiants qui sont soit des résidents permanents soit des étudiants étrangers sur visa, et ça fait quelques années qu'on est entre 30 % et 32 % de contingents d'étudiants. Nous avons près de 65 000 diplômés. Alors ça, c'est HEC aujourd'hui.

Derrière ça, qu'est-ce qu'il y a? Bon, cet improbable succès, dans le fond, ce que c'est, c'est une certaine originalité, une certaine spécificité et c'est là-dessus que, nous, on veut tabler. Ce n'est pas une proposition ou une formule, on pense, qui devrait être adoptée ou qui est bonne pour d'autres, c'est notre identité à nous puis notre façon de nous projeter vers l'avenir.

Je retiens juste trois caractéristiques en fonction du temps qui m'est imparti. Nous, on aime dire que HEC Montréal, c'est certainement la plus européenne des écoles de gestion d'Amérique du Nord. Il y en a plus de 2 000 en Amérique du Nord. On est probablement la plus européenne, de plusieurs façons, de ces écoles de gestion, mais on est certainement la plus nord-américaine des grandes écoles. Il y a des écoles de gestion qui ont le statut un peu d'université spécialisée un peu partout dans le monde, notamment en France, en Belgique et ailleurs. Certainement que, quand on se compare à ce groupe-là, nous sommes la plus nord-américaine. Premier trait. Je vais y revenir dans une minute.

Un autre trait qui nous différencie des écoles de gestion dans le monde, il y en a environ 12 000, écoles de gestion, dans le monde, au moment où on se parle, c'est la taille, la taille de l'école, la taille de son portefeuille. La taille moyenne d'une «business school» aux États-Unis, c'est environ 46 professeurs. Nous en avons 250. Ça vous donne une idée. Le Québec a des écoles de gestion de grande taille. L'UQAM est une école de taille très importante, et Concordia également.

Troisième caractéristique: l'école, depuis 25 ans, c'est un travail long, a réussi finalement à développer une réputation, une renommée, une sorte de marque en dehors du Québec et à l'échelle internationale. Notre conviction, c'est que cette réputation internationale sert le Québec, prépare les femmes et les hommes qui viennent chez nous pour aller dans le domaine de la gestion dans les secteurs privé, public, coopératif, etc., parce que la réalité internationale est extrêmement importante. Vous savez tous aussi bien que moi que le Québec exporte plus de la moitié de son produit intérieur brut hors de ses frontières. Ce n'est pas tellement une question optionnelle au Québec, quand vous êtes dans le domaine économique, de vous soucier de ce qui se passe en dehors des frontières. Mais nous pensons également que, faisant ceci, on contribue au rayonnement du Québec et au développement et au soutien des activités des entreprises et des organisations québécoises un peu partout dans le monde.

Alors, très rapidement, première caractéristique: HEC Montréal, si vous y pensez un peu et vous regardez un petit peu, c'est un modèle un peu original qui est un croisement d'un... Et c'était voulu, si vous retournez voir les pères fondateurs et les mères fondatrices, mais il y avait surtout des pères en 1907. C'était conscient, c'était vu comme ça. On a pris un modèle des grandes écoles européennes qui étaient rattachées à des chambres de commerce et qui étaient distinctes des universités puis on l'a transposé au Québec, mais on lui a fait tout de suite des ajustements de telle sorte que, par exemple, HEC Montréal ne relevait pas de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, bien que la chambre de commerce ait été dès le début un partenaire. Donc, c'est un croisement entre la tradition grande école et la tradition «business school», la tradition faculté de gestion. Et on ne retient, jusqu'à aujourd'hui, des traits des deux traditions... Par exemple, la tradition grande école.

Nous avons une gouvernance de grande école. Nous avons notre propre conseil d'administration, notre propre autonomie. Nous sommes une université spécialisée avec un accent très fort sur l'internationalisation, qui n'est pas une nouveauté, qui était là en 1907, qui était dans l'intention du législateur en 1907. D'ailleurs, lorsque l'école a été créée puis qu'on a dessiné ses armoiries, il y avait un globe puis un petit bateau. Le petit bateau, c'est parce que tout le commerce se faisait par le port de Montréal, et on se disait: Bien, pour que le Québec se développe économiquement, il faut que les gens soient formés à l'économie et à ce qu'on appelait les affaires maritimes à l'époque. Donc, l'internationalisation était là dès le début, le multilinguisme également, très présent en Europe, très présent dans les écoles européennes.

Et évidemment, par contre, l'approche pédagogique, la nomenclature des diplômes, la culture d'affaires, la culture de l'enseignement, c'est un ancrage nord-américain. Donc, première caractéristique: ce croisement.

**(14 h 20)**

La deuxième, c'est la taille. Je l'ai évoqué, je ne reviendrai pas là-dessus, mais l'École des HEC est parmi les écoles de gestion à travers le monde... à travers les 12 000 écoles au monde qui disposent du portefeuille d'activités, de programmes, de professeurs parmi les plus importants. Et ce n'est pas en soi une qualité, c'est un défi en même temps, parce qu'il y a la question de la focalisation, la question de la spécialisation. Et donc, pour nous, on a décidé d'en tirer le meilleur parti dans... de chercher la qualité dans cela mais en étant conscients qu'il y a un risque.

Mais donc la taille du portefeuille et du corps professoral de l'école et la réputation, comme je le disais, qui s'est construite sur tout le siècle, mais en particulier dans les 25 dernières années, les agréments... l'école est une des 48 écoles dans le monde qui possèdent les trois agréments internationaux, les classements, dont aucun n'est parfait, dont aucun ne satisfait totalement les collègues à l'école... On est tous d'accord que ces classements sont une sorte de mal nécessaire, mais en même temps ils sont incontournables, certainement en gestion, parce que c'est dans le domaine de la gestion qu'il y a le plus de classements, qu'il y a le plus de sondages, le plus de palmarès, et certains sont meilleurs que d'autres.

Alors, nous, on a décidé qu'on n'allait pas tenter de définir nos programmes ou les attributs de notre formation en fonction de ces classements, on définit ça en fonction de nos objectifs fondamentaux et de nos priorités. Cependant, on ne peut pas négliger ces classements-là, parce qu'ils sont un signal, à l'échelle internationale, de ce que vous êtes. Alors, quand vous allez... vous tentez de recruter un professeur finlandais ou allemand ou un étudiant pour venir dans un programme à HEC... qui vient de Chine ou du Brésil, cet étudiant va sur les sites Web et se demande: Vous existez comment? Comment vous vous comparez à Laval, mais à Queen's, à HEC Paris? Et les agréments, les classements sont des indicateurs imparfaits mais sont des indicateurs de cela.

Donc, l'école s'enorgueillit du fait que, dans les 10 dernières années, on a un palmarès qui n'est pas mauvais. On a fait plusieurs des grands classements.

On a un pouvoir d'attraction grandissant. C'est le corollaire de la première constatation. Nous avons maintenant 31 %, 32 % de notre corps étudiant qui sont étrangers, résidents permanents ou sur visa. Ils proviennent de 127 pays. Ceci apporte à l'école une couleur extrêmement importante. S'ajoutent à ces 4 000 étudiants environ 500 étudiants, à chaque année, qui viennent en échange pour un trimestre. Ça veut dire que chez nous, chaque année, il y a environ 4 500 étudiants qui sont dans les salles de cours, qui ne sont pas des ressortissants canadiens ou des Québécois. Et par conséquent, dans chaque classe, chaque cours, dans presque tous les programmes, nos gens sont dans un environnement où il y a des personnes qui viennent d'un peu partout. Et ça, ça enrichit le climat d'apprentissage. Ça rend les choses parfois plus compliquées, mais c'est comme ça qu'on apprend, et ça fait partie pour nous de notre stratégie d'apprentissage.

On veut exposer, on veut présenter aux Québécois et Québécoises le contexte international. On peut le faire par des cours, mais on veut le faire aussi par des échanges entre les collègues en classe ou dans d'autres activités et on encourage nos étudiants à aller à l'étranger. C'est notre programme Passeport pour le monde dans lequel maintenant on a 100 établissements, 100 partenaires à travers le monde. Et donc, à chaque année, on a environ 400 de nos étudiants qui vont passer un trimestre... parfois plus, mais généralement un trimestre à l'étranger. On reçoit un nombre équivalent d'étudiants. Et la demande est très grande. On travaille présentement à développer ce réseau. On a aussi développé des campus internationaux qui nous permettent d'envoyer nos étudiants pour des périodes plus courtes sur des thématiques, exemple, l'industrie des médias ou l'industrie «arts and entertainment», tout ce qu'on a fait au printemps dernier à Los Angeles. Alors, vous avez un groupe d'étudiants pour lequel vous développez un programme qui peut durer trois semaines, et, en Californie, on va faire les visites des studios, etc., et ces gens-là vont revenir chez nous. On accueille aussi de ces campus.

Évidemment, vous le savez, vous avez vu ça dans la documentation, l'école a mis beaucoup d'efforts dans les 15 dernières années pour développer de l'enseignement en espagnol, en anglais. On enseigne. On a le chinois des affaires parce qu'on a un grand nombre d'étudiants qui vont en Chine pour une période d'un trimestre ou moins. Et nous avons évidemment développé un programme de B.A.A. trilingue dans lequel il y a environ présentement... il y a 170 nouveaux candidats puis entre 350 et 400 candidats au total. Donc, c'est un programme qui fonctionne très bien. Ce n'est pas un tout petit programme. Et les gens dans ce programme font le tiers de leurs cours en français, le tiers en anglais, le tiers en espagnol. Nous avons évidemment développé d'autres programmes bilingues, comme notre E.M.B.A.

Alors, la langue nous aide à participer à cette internationalisation.

Dernière section de ma présentation concernant l'école: notre trajectoire à partir de maintenant, notre ambition. HEC a la même mission qu'au début du siècle, servir le Québec, rendre à la communauté québécoise tous les services en matière d'éducation universitaire en affaires auxquels elle est en droit. Et notre ambition, dans le fond, c'est d'assumer cette responsabilité de façon excellente. Comment faire ça? Nous hisser parmi le peloton de tête des établissements au Canada et à l'échelle internationale, mais le faire, partant de ce que nous sommes, le faire... on ne peut pas copier ce que d'autres font, le faire en partant de notre réalité. C'est pour ça qu'on dit que nous tentons cette année dans notre plan stratégique de mettre en oeuvre des actions qui vont nous permettre de devenir ce que nous sommes, de pousser plus loin notre identité. J'ai évoqué trois caractéristiques il y a quelques instants.

Et, quand je parle de notre boussole, bien c'est notre... c'est un instrument pour évaluer les innovations et les projets qui sont nombreux chez nous. Alors, quand quelqu'un vient voir mes collègues puis qu'on dit: On a une innovation, on voudrait créer un centre dédié aux entreprises familiales, on dit aux gens: C'est très bien, ça, mais on n'a pas d'intérêt à développer un centre comme ça qui va être le 67e au Canada et le 22e au Québec. Est-ce que vous avez un plan de match qui nous permettrait, sur trois ans, de faire en sorte que ce centre devienne un des foyers certainement au Québec mais même au Canada? Est-ce qu'on peut identifier les moyens pour faire en sorte que, d'ici cinq ans, ce centre-là soit un des trois, quatre, cinq foyers au Canada, un des foyers parmi les 20 foyers internationaux, hors États-Unis, et parmi les 100 à travers le monde, y compris les États-Unis?

C'est une boussole, ce n'est pas une religion, ce n'est pas un modèle précis, mais ça nous permet d'évaluer. Et, dans le cas de ce centre, je donne ce centre-là comme un exemple, on est retournés à la table à dessin, on est revenus et on a décidé que la façon d'arriver à ces fins, c'était de s'associer avec McGill. Et donc on a créé un centre international des familles en affaires avec la faculté Desautels, à McGill. Et ça fait deux ans que ce centre existe, et je crois qu'aujourd'hui il est certainement, certainement dans les cinq centres les plus actifs au Canada. Et là ce qu'on veut, c'est pousser un peu et faire en sorte que les gens puissent dire: Bien, c'est un centre comparable ou qui se rapproche de ce que Harvard ou l'INSEAD font dans le monde.

Alors ça, c'est notre ambition modestement, à partir de ce que nous sommes, en demeurant ce que nous sommes, une institution francophone établie à Montréal. Et on dit souvent même: Exploiter notre montréalité. Il y a de grands avantages à être établis à Québec, mais, nous, on est à Montréal, hein, et Montréal, donc c'est une ville de commerce, c'est une ville multiculturelle. On veut tabler sur cela.

Alors, je n'élaborerai pas beaucoup, là, sur la prochaine diapo. Ça vous donne une idée de l'orientation en formation, en recherche, dans les activités de transfert, comment on va opérationnaliser, décliner finalement cette ambition. Alors, par exemple, au plan de la formation, tout le monde dit qu'il fait de la formation de qualité. Alors, nous, on dit: Comment on va faire pour que notre formation de qualité permette d'être reconnue au Québec, au Canada, à l'étranger? Alors, on a identifié plusieurs choses, par exemple l'environnement d'apprentissage. Certains de chez nous ont fait énormément d'investissements dans l'environnement d'apprentissage. On a des... On s'est donné des protocoles très rigoureux. Il n'y a pas de groupes, par exemple, au premier cycle qui ont une taille supérieure à 60 étudiants. L'environnement technologique est particulier. Il y a tout un maillage avec les ressources informationnelles. On forme nos professeurs à exploiter ça. On vient de créer une direction de l'apprentissage et de l'innovation pédagogique pour que les meilleures pratiques se diffusent.

**(14 h 30)**

Exploiter notre montréalité, c'est exploiter les atouts du Québec et de Montréal pour attirer le talent chez nous. On a quelques succès là-dedans. C'est une grande bataille parce que le talent est mobile. Mais Montréal a beaucoup d'avantages, le Québec a beaucoup à offrir. Donc, on exploite cette montréalité, ce multiculturalisme, cette culture d'ouverture qu'il y a au Québec, qui est extraordinaire, quand on se promène à travers le monde, où les gens sentent qu'ils peuvent toucher vraiment et la culture européenne et l'environnement nord-américain.

Alors, construire sur notre portefeuille d'expertise, c'est un beau grand mot, ce que ça veut dire, c'est... Je vous parlais de notre taille. C'est un désavantage à certains égards. L'avantage, c'est qu'avec 250 professeurs de carrière puis une quarantaine de programmes de formation il y a peu de domaines de la gestion où on ne peut pas recomposer une offre avec des expertises et arriver, de façon très pointue, à satisfaire des besoins. Donc, capitaliser sur notre portefeuille, c'est voir les complémentarités qu'on peut exploiter pour offrir des formations qui sont uniques au Québec, mais au Canada et même à l'échelle internationale. Alors, c'est beaucoup le travail que nous faisons présentement. Même chose en recherche, où, depuis quelques années, non seulement on a développé notre capacité de recherche, l'école est... dans les classements de recherche apparaît maintenant à l'échelle mondiale, tout confondu, là, après Harvard, Harvard Business School, etc. On apparaît environ au 60e... ou 70e rang. On est, depuis très longtemps, la seule école de gestion qui apparaissait dans les 100... la seule francophone en tout cas au monde, la seule au Québec et la seule au Canada pendant quelques... un bout de temps. Il y a cinq universités canadiennes maintenant dans ce classement, environ. HEC Paris est la deuxième institution au monde qui est apparue récemment. Donc, voilà.

Et, pour conclusion, cette trajectoire, ça, c'est la nôtre. Ça, c'est la carte qu'on s'est donnée, la boussole qu'on s'est donnée pour pousser plus loin ce que nous faisons, pour mieux servir les Québécois et les Québécoises, mieux servir les entreprises du Québec et accompagner les Québécois, les Québécoises puis les entreprises qui sont à l'étranger, parce que ça, c'est une chose que nous faisons aussi, et on découvre qu'il y a beaucoup de liens à faire là. Nous, on pense que l'ensemble des universités québécoises est capable d'excellence, chacune avec sa mission, chacune en exploitant sa personnalité, son identité. On pense que le gouvernement québécois doit être exigeant vis-à-vis les établissements universitaires, vis-à-vis les universités. Par contre, il faut donner aux universités les moyens et la marge de manoeuvre pour réaliser ces ambitions. Mais ce qui est important dans ce message que je veux vous laisser en conclusion, c'est... Je vous invite à viser haut, à viser loin. Le Québec est capable d'offrir au monde des solutions dans le monde universitaire qui sont extrêmement enviables. Il y a non seulement le potentiel, mais il y a beaucoup d'éléments présents.

Dans chacune des institutions que je connais, moi, au Québec, je vois des pôles d'excellence.

Maintenant, on ne doit pas se contenter de dire: Bon, on fait dans la bonne moyenne, on peut accueillir tous les étudiants qui sortent des cégeps, et puis il y a assez de fauteuils, puis l'électricité fonctionne, donc le système universitaire fonctionne. Il faut garder en tête que le système universitaire est au centre de l'économie du XXIe siècle. C'est le noyau qui, avec le système d'innovation, va permettre le développement de l'économie du XXIe siècle. Nos partenaires ailleurs au Canada, dans bien des cas, semblent avoir compris et semblent faire des investissements, mais, plus que ça, les pays dits en développement font des investissements accélérés. Cette espèce d'avance que les économies occidentales et que le Canada ont obtenue dans le domaine de l'enseignement supérieur ne va pas durer éternellement.

Je reviens d'un séjour en Chine et je peux vous dire qu'on prend ça sérieusement. Alors, il y a encore énormément de choses que les Chinois disent vouloir apprendre de nous, mais il y a énormément d'investissements que ces gens-là font. Et j'ai rencontré de jeunes vice-recteurs d'universités chinoises qui avaient dans la quarantaine, qui avaient étudié dans les meilleures universités aux États-Unis et en Europe, qui parlaient couramment l'anglais, parfois l'allemand, j'en ai rencontré qui parlaient le français et qui ont des ambitions très grandes.

Alors, il n'est pas vrai que, nous, au Canada, aux États-Unis, en Amérique du Nord ou en Occident, on jouit, là, d'une sorte de répit et on va pouvoir abandonner un certain nombre de secteurs à faible valeur ajoutée en se disant: Ce n'est pas grave. La haute valeur ajoutée, nous allons l'assumer.

Le Président (M. Pigeon): ...obligé de vous demander...

M. Patry (Michel): Oui. Bien, alors, je conclus. M. le Président, vous me permettez de conclure avec une phrase. Donc, je crois que le Québec mérite des universités de premier plan à l'échelle internationale. Et, plus que ça, il ne peut pas s'en passer, et d'où la tâche qui vous incombe et qui nous incombe à nous aussi. En tout cas, moi, je peux vous assurer de notre détermination à relever ce défi. Et je vous remercie de votre attention. J'espère que je n'ai pas abusé du temps qui m'était imparti, M. le Président.

Le Président (M. Pigeon): Merci, M. le directeur. Et nous allons tout de suite, donc, procéder à la période d'échange en rappelant, je me permets de le rappeler, toute l'importance de l'exercice qui permet, là, aux parlementaires d'exercer, là, leur devoir de surveillance sur la gestion des universités. Et je pense que c'est un exercice important. Alors, merci, M. le directeur, de votre exposé qui était, je pense, très clair.

Et, pour commencer les échanges, je vais donner la parole, pour une vingtaine de minutes, à une représentante du parti gouvernemental. Alors, Mme la députée de Mille-Îles, la parole est à vous.

Mme Charbonneau: Merci, M. le Président. Bonjour à vous. Depuis le début des auditions, on a compris que la fierté venait avec chaque institution. Donc, on a eu le plaisir de rencontrer plusieurs universités jusqu'ici, et chacune d'elles, avec grand bonheur, nous exposait leur fierté d'avoir à gérer ou à s'occuper ou... d'une université québécoise et où elle se situait aussi.

Ce qui est fort intéressant, c'est qu'on connaît peu où se situent, dans différents créneaux, nos universités. En exemple, je vous citerais ce matin. On avait l'Université Laval qui nous donnait les différents créneaux dans lesquels elle était. Au début de la semaine, c'étaient d'autres universités. Et, en vous écoutant, on voit bien que chez vous aussi il y a, avec grande fierté, des créneaux où vous vous démarquez. Ce qui est assez particulier par contre mais qui est tout à votre honneur, n'en doutez point, c'est que chez vous on parle de commerce. Donc, le ratio hommes-femmes, on ne peut pas le chicaner autant qu'on le fait quand on parle de la discipline en éducation ou en sciences pures, appliquées, puisque je pense que votre ratio hommes-femmes se maintient assez bien, quand même. Il y a peut-être juste un endroit, là, où c'est diversifié, mais autrement je pense que vous êtes assez 50-50.

Il y a une question qui me préoccupe à chaque fois qu'on reçoit une nouvelle université puis, pour mes chers collègues qui ont la pénible tâche d'écouter cette question se répéter à chaque fois... mais je ne peux pas faire autrement que de la poser, puisque chacune des universités vient avec le même vocabulaire. Puis, un peu comme mon collègue, je viens du monde de l'éducation. Donc, j'ai compris que c'était un monde qui avait été développé par la religion. Donc, le voeu de pauvreté, on l'a fait voilà bien, bien longtemps, là. Ça fait qu'à chaque fois qu'on revient on a toujours cette problématique-là. L'éducation, ce n'est pas une dépense, c'est un investissement, j'en conviens. Et vous avez par contre, contrairement aux autres institutions scolaires que je connais, du financement qui vient de trois places différentes: le fédéral, le provincial et... bien, je pourrais dire «quatre», hein, je pourrais dire «le privé et les étudiants». On dit souvent qu'on aimerait avoir la même parité dans la volonté du financement du Canada au Québec ou des autres tranches des autres provinces.

J'aimerais savoir ce que vous pensez de la parité de la facture élève aussi, puisque ce n'est pas pareil partout non plus. J'aimerais aussi vous entendre sur un autre aspect de cette facture-là, c'est-à-dire est-ce que je dois avoir la même facture, dépendamment du cours auquel j'adhère, une facture modulée dépendamment des équipements et des choses que je dois faire ou avoir avec moi pour avoir un meilleur enseignement? C'est une question que j'ai étirée à chaque fois parce que je veux avoir l'opinion de chacun. Ce matin, on avait le privilège d'avoir des étudiants. Puisque l'Université Laval est juste à côté, c'est facile. Mais j'aimerais quand même vous entendre, puisque je suis à peu près certaine que chez vous aussi ça a fait étude, et les gens se sont penchés sur la question.

Le Président (M. Pigeon): M. le directeur.

**(14 h 40)**

M. Patry (Michel): Merci pour votre question qui va au coeur d'un enjeu absolument fondamental.

Pour faire simple, la moyenne des droits de scolarité au premier cycle dans le domaine de la gestion au Canada est environ de 5 000 $, là. Enfin, j'ai le montant exact là-dedans. On est à peu près à 2 000 $. Si je prends les 10 meilleures écoles, entre guillemets, de gestion au Canada, vous pouvez faire des petits ajustements, là, selon la liste que chacun se ferait, cette moyenne est à peu près de 11 000 $, si vous prenez les 10 meilleures écoles. Nous, on a l'ambition d'être dans ce peloton-là. Et on ne voit pas pourquoi on ne pourrait pas offrir à Montréal ou au Québec la même qualité de formation qu'on a à Toronto ou à Edmonton, à U of A ou à UBC.

Alors, c'est certain que le financement public compense en partie selon les provinces, mais là vous voyez qu'on ne parle pas d'un écart de 1 000 $, là. Quand on parle de 2 000 $ à 5 000 $, on parle de 3 000 $ par étudiant; de 2 000 $ à 10 000 $, on parle de 8 000 $ par étudiant. 8 000 $ par étudiant, là, si j'ai 5 000 étudiants au premier cycle, c'est 40 millions par année. C'est considérable. C'est certain pour nous que le financement qui provient des étudiants à tous les cycles, et là je vais parler pour HEC, je ne m'aventurerai pas dans d'autres domaines, devrait être haussé. Je pense qu'il y a des façons de le faire. Il y a des modalités, il y a une progression. Il faut avoir aussi un souci de l'accessibilité, mais il ne faut pas que ce souci de l'accessibilité nous fasse sacrifier la qualité à long terme. Et présentement ce n'est pas juste le problème de HEC Montréal, c'est le problème de l'ensemble du réseau. Les ratios étudiants équivalents temps complet par professeur de carrière, au Québec, sont beaucoup plus élevés que nos partenaires canadiens, sont beaucoup plus élevés que les meilleurs partenaires dans le monde. Et là j'enlève les universités privées américaines de cet examen-là. Ça, c'est une première manifestation. La deuxième manifestation, c'est que les ratios, au Québec, de chargés de cours par rapport aux professeurs de carrière sont beaucoup plus élevés que dans les très bons établissements ailleurs au Canada et très bons établissements dans le monde.

Donc, il y a une équation, là, qui est imparable: ou bien les universités obtiennent des financements additionnels pour améliorer la qualité de ce que nous offrons, qui viendraient des fonds publics, ou bien on demande aux étudiants de faire une contribution plus grande. Quand je regarde la part du financement qui provient des clientèles étudiantes au Québec par rapport à ce qu'il y a ailleurs au Canada, je pense que c'est incontournable qu'on doit regarder une hausse des droits de scolarité.

Alors, j'essaie de répondre, là, de façon assez directe à votre question. Est-ce que maintenant on devrait moduler cela par programmes, par cycles? Je pense que la question de premier ordre, c'est qu'il faut se fixer comme objectif de hausser la part du financement étudiant. Je serais plutôt favorable, moi, à ce qu'il y ait une modulation par programmes ou par cycles parce que... Par exemple, prenez, dans notre environnement, quelqu'un qui vient faire son M.B.A., et qui est un programme très énergivore en termes de ressources humaines et matérielles, et qui va retourner dans l'entreprise ou dans le secteur public mais avec des perspectives de revenus relativement grandes. On pourrait imaginer que ça justifie une contribution plus grande.

Mais je dirais que la question de premier ordre, c'est de nous assurer qu'on trouve une façon sans sacrifier l'accessibilité. Donc, en prenant une portion importante des droits de scolarité supplémentaires ou majorés et en les dirigeant vers l'aide aux étudiants, je crois qu'on pourrait permettre aux universités de faire pas mal de chemin.

Le Président (M. Pigeon): Mme la députée de Mille-Îles.

Mme Charbonneau: Vous vous êtes lancé un petit peu plus loin que certains de vos collègues. Je vous en remercie. Ça donne du moins un aperçu différent.

Vous avez un peu touché le sujet des étudiants partiels. Contrairement à certaines universités, dans votre premier cycle, vous, vous avez beaucoup d'étudiants partiels. Comment on explique ce phénomène? Parce que, vous l'avez bien dit, vous êtes financés à temps plein, vous n'êtes pas financés aux partiels. Mais quand même, au premier cycle, on le voit souvent au deuxième et au troisième cycle de l'université, mais au premier cycle c'est quand même assez rare. Comment vous expliquez qu'au niveau du premier cycle, vous, vous êtes déjà à un taux de partiels assez élevé?

M. Patry (Michel): Merci. C'est une autre excellente question. Vous parlez d'étudiants qui étudient à temps partiel, c'est ça?

Une voix: ...

M. Patry (Michel): C'est simple, c'est notre rôle social, c'est notre mission. C'est notre mission depuis le début du siècle.

Quand l'école a été créée, la grande majorité de ses étudiants, dans les premières années, étaient des gens qui étaient commis de bureau ou qui travaillaient dans une banque et qui voulaient gravir des échelons, qui n'avaient pas de formation universitaire, alors qui ont pris des cours de tenue de livres et de comptabilité et qui... Bon, la grande majorité, l'immense majorité des gens qui sont dans nos programmes de certificat viennent prendre trois cours, quatre cours et s'arrêtent là. Ils ou elles sont, par exemple, infirmières, veulent accéder à un poste de supervision mais n'ont aucune formation en supervision de personnel. On leur offre un module, trois cours. On ne vous demande pas de faire un doctorat, on vous dit: Avec ces trois cours-là, vous allez avoir les bases de la supervision de personnel, l'évaluation de personnel, la gestion, mettons, des conflits. Ça fait le travail.

Donc, nous, on le voit comme une partie de notre mission. C'est très original, il y a très peu d'écoles de... très peu d'universités... D'ailleurs, les certificats sont presque une particularité du Québec. Quand vous vous promenez ailleurs dans le monde, les gens ne connaissent pas vraiment ça. Nous, les agréments... les visites, qu'on a, d'agrément des Américains, des Britanniques, des Français, ils regardent ça et ils sont... il faut leur expliquer longuement. Ils ne comprennent pas tellement comment on fait ça. Alors, lorsque ça se fait ailleurs, ça se fait dans le «continuing education», là, ou éducation aux adultes. Alors, chez nous, c'est notre rôle. Il y a beaucoup de néo-Québécois chez nous qui viennent s'inscrire dans ces programmes de certificat. Souvent, ils ont une très solide formation universitaire. Il y a des gens qui ont des maîtrises, des diplômes de deuxième cycle, qui viennent d'un autre pays, qui se sont établis au Québec et qui réalisent qu'il leur manque des petits bouts.

Je donne un dernier exemple. Il y a beaucoup de gens qui, par exemple, sont dans une profession en finances, en comptabilité, proviennent d'un autre pays, s'aperçoivent qu'ici il y a des ordres et que ces ordres ont des exigences d'admission. Alors, on a conçu des programmes passerelles qui sont tels qu'on dit à la personne: Si vous prenez tel, et tel, et tel cours, ça va couvrir les éléments. Vous pourrez vous présenter puis faire votre carrière et continuer. Donc, c'est un programme qui permet à des gens de venir au Québec puis de poursuivre.

Mme Charbonneau: Merci.

Le Président (M. Pigeon): Oui, Mme la députée de Mille-Îles toujours.

Mme Charbonneau: Oui, oui. J'essaie de mélanger des choses, mais je vais essayer de me démélanger avant d'ouvrir la bouche. Vous avez, depuis 2005, le programme B.A.A. On voit qu'il y a une augmentation de 252 %, qu'on me dit, sur votre clientèle.

M. Patry (Michel): Trilingue.

Mme Charbonneau: Trilingue. Ah, ça, c'est encore plus intéressant, puisque les universités qu'on a reçues étaient soit anglophones ou francophones, et je pense que vous vous démarquez par le principe trilingue.

Si j'avais l'opportunité ou si je vous donnais l'opportunité de prendre une décision sur le financement des universités et que je vous donnais page blanche pour imaginer le financement de vos élèves, qui vient du provincial, qui ne soient pas nécessairement temps plein, est-ce qu'on peut imaginer un principe de financement pour le temps partiel, puisqu'en ce moment vous n'êtes financés que pour la reconnaissance temps plein? Si je ne me trompe pas, là, les universités sont financées sur reconnaissance temps plein, et je me retrouve, un peu comme mes collègues, à entendre plusieurs universités nous parler de cette accrue... d'essor de temps-partiels, de gens qui sont déjà sur le marché du travail et qui viennent se perfectionner, d'autres qui reviennent dans les institutions, des jeunes parents qui se retrouvent dans des situations où ils travaillent, ils ont une famille et ils veulent continuer leurs études. C'est vraiment une opportunité que je vous donne, là, si vous voulez la saisir.

Si vous aviez à imaginer un financement, puisque, si je ne vous finance plus que du temps plein, je dois prendre les sous, je dois les répartir d'une différente façon, je ferais ça comment?

Le Président (M. Pigeon): M. le directeur.

**(14 h 50)**

M. Patry (Michel): Je vais être tenté de répondre à votre question, qui est une question... pas difficile parce qu'elle est troublante, mais difficile parce que notre financement est basé sur des étudiants équivalents à temps complet. Donc, nos étudiants à temps partiel sont convertis en étudiants équivalents à temps complet, nous touchons un financement.

Par contre, votre question très justement, et je pense que c'est ça que vous mettiez en évidence, attire l'attention sur le fait que d'avoir un étudiant qui vient prendre, par exemple, un cours de certificat chez nous... on en a quelques milliers, cet étudiant-là, il a un coût fixe. Il a un dossier au registrariat. Et, lui, il se pointe à notre Service de gestion de carrière, dont on se targue d'avoir un des meilleurs «track records» pas juste au Canada mais dans le monde, et, lui, il veut le service complet, là. Ça, ça nous pose des difficultés, c'est sûr, financières, parce qu'offrir une gamme de services pour quelqu'un qui est à temps complet... on peut comme amortir, si vous voulez, la dépense sur l'ensemble de l'activité, alors que, là, on a plusieurs milliers d'étudiants qui viennent et qui sont évanescents, qui viennent et qui vont, mais qui voudraient accéder aux ressources informationnelles de la bibliothèque, les services de gestion de carrière.

C'est certain que, sur le plan financier, en termes de coûts, ça représente quelque chose. Je n'ai pas, moi, de réponse. Je ne sais pas si on peut demander... Est-ce qu'on peut autoriser mon...

Mme Charbonneau: ...dans le fond, je vous demande un peu d'être ambitieux, un peu dans les mêmes termes que vous aviez au début de votre présentation, puisqu'effectivement 20 élèves temps plein qui consomment les services peuvent prendre moins d'énergie que 40 élèves à temps partiel, puisqu'ils vont consommer le double sur le même principe, donc. Mais je vous rappelle ou j'aimerais vous rappeler qu'en bout de ligne, sur la table, moi, j'ai la même somme. J'ai une somme à investir en éducation, qui appartient au domaine de l'université. Donc, comment je fais pour mieux répartir mes sommes pour reconnaître mon partiel sans pénaliser mon temps plein?

M. Patry (Michel): Mme la députée de Mille-Îles, là, si vous m'ouvrez si gentiment la porte, si vous m'autorisez à m'y engouffrer, je vais avancer une idée. Je ne prétends pas, là, que c'est la solution complète à cette question.

Il est certain que, chez nous, une voie qu'on a utilisée pour parer à ces difficultés, c'est d'offrir plus de services à nos étudiants et de demander une contribution de la part de nos étudiants par des frais afférents. Et, chez nous, si vous allez examiner, vous allez voir, les frais afférents sont plus élevés que la moyenne des universités. Puis on n'a eu aucune difficulté quand est venu le temps de demander à nos étudiants: Voulez-vous continuer de payer ces frais afférents puis avoir ces services ou bien si vous nous dites, là: On ne veut pas payer ça, mais, nous, on va devoir couper dans les services?

Il est certain qu'une façon de permettre à des clientèles comme celle-ci d'avoir accès à des services importants, c'est de permettre, de donner des marges de manoeuvre pour financer ces services. Puis, je vous donne un exemple de... une manifestation de cela, on vient de conclure chez nous, là, une entente avec Harvard Business School, qui est une entente pour une durée déterminée, là. C'est une sorte d'expérience que la Harvard Business School fait, qui va mettre en ligne, qui va mettre de façon virtuelle, qui va rendre accessible la collection de Harvard Business Review et d'un certain nombre... les cas de l'Université Harvard et un certain nombre d'autres sources informationnelles à nos étudiants, évidemment pour un prix qui n'était pas démesuré, là, mais évidemment qui... on ne parle pas de quelques centaines de dollars. Nous, on a voulu l'offrir. C'est dans notre philosophie, là, de qualité de l'environnement d'apprentissage. On veut l'offrir à nos étudiants, puis on voulait l'offrir à tous nos étudiants. Donc, on a commencé à déployer ça. Ça, c'est un exemple.

On peut enrichir ce que l'on fait. Il faut qu'on trouve un moyen de le financer, d'une certaine façon. Et c'est certain que, les étudiants au certificat, quand on leur demande: Voici le menu un peu de services qu'on pourrait vous donner, ils voudraient souvent en avoir davantage. Si on n'a pas les moyens de les financer, on est obligés de faire des arbitrages. Alors, soit qu'il y a une queue, tu sais, il y a une sorte de rationnement parce qu'on ne peut pas servir tout le monde en même temps, soit qu'on doit déployer de façon plus progressive.

C'est un exemple et c'est une piste. Ce n'est pas une solution complète, là, mais c'est une façon certainement de composer avec la réalité que vous évoquiez.

Le Président (M. Pigeon): Mme la députée de Mille-Îles, il vous reste environ deux minutes.

Mme Charbonneau: Il me reste deux minutes. C'est assez complexe. Le financement est un sujet assez tabou, je vous dirais, mais, puisqu'on a l'opportunité ici d'y aller un petit peu plus pointu dans le financement, c'est toujours intéressant. Donc, dans le peu de minutes qui me restent, dites-moi donc, votre collaboration avec le privé pour le financement chez vous, ça va comment?

M. Patry (Michel): Essentiellement, la source principale, c'est les campagnes de financement. Je reconnais d'emblée et d'entrée de jeu que c'est relativement plus facile pour une école de gestion de faire des levées de fonds que pour une faculté de théologie, par exemple. Je présume, là. Je ne veux pas offenser personne, au contraire.

Alors, il reste que c'est un travail de très longue haleine dans lequel les universités québécoises... auquel les universités québécoises se sont... sur lequel les universités se sont penchées mais assez tardivement, c'est-à-dire, par rapport aux universités anglophones et américaines qui font ça depuis des centaines d'années. Alors, il y a deux... La source principale d'appui du secteur privé, je crois que ça va venir par des campagnes de levée de fonds, de financement. Il y a deux choses qu'il faut dire. C'est que c'est... il ne suffit pas juste de demander. Pour avoir le moindre succès dans ce domaine-là, comme dans le domaine de la santé ou autres, vous devez arriver avec un projet ou une idée qui fait que les gens vont se dire: On va faire une différence. Et donc c'est très lié à votre mission par votre façon d'articuler votre proposition.

Et le deuxième point, j'en profite pour le mentionner au passage puisqu'il revient à la première question que vous avez posée. Nous, nous constatons que la faiblesse des droits de scolarité au Québec constitue un handicap pour convaincre ou pour parler à des donateurs, parce qu'il y a des gens qui nous disent: Écoutez, là, pourquoi vous donnerais-je de l'argent pour un programme de bourses quand les étudiants ne paient que des frais symboliques déjà? Ça, je vous le confirme, je vous l'assure. Je l'ai entendu pas une fois, là. Mon voisin ici, qui est responsable de la fondation HEC, pourrait vous le... Nous l'entendons régulièrement. Les...

Le Président (M. Pigeon): M. le directeur, la première période de 20 minutes se terminant, je peux vous demander très rapidement de conclure, et on va passer...

M. Patry (Michel): Alors, voilà, je pense que c'est la source principale. Il y a une deuxième source qui est par certaines activités chez nous, qui dégagent des marges de manoeuvre, la formation pour cadres par exemple. En toute honnêteté, si vous faites une analyse de nos états financiers, vous allez voir que c'est une contribution, mais c'est très marginal dans l'ensemble du dispositif de financement. Donc, pour les universités, je pense que la levée de fonds offre une avenue importante.

Le Président (M. Pigeon): Merci, Mme la députée de Mille-Îles. Mme la députée de Taillon et porte-parole en matière d'enseignement supérieur. Mme la députée.

Mme Malavoy: Merci. Merci, M. le Président. Bien, bonjour. Bonjour, messieurs. Je suis heureuse d'avoir l'occasion de participer à cet échange. Et je dois dire qu'on a commencé seulement avant-hier, mais c'est assez extraordinaire d'avoir un coup d'oeil comme ça général sur l'ensemble de nos universités en peu de temps. Alors, merci de vous prêter à l'exercice.

Je vais commencer par parler de vos caractéristiques en termes de clientèle. Aussi, il y a un certain nombre de réponses que vous avez données aux questions précédentes, mais j'aimerais reprendre certaines choses pour bien comprendre, je dirais, votre «visage», si je peux dire, pour prendre un mot simple, votre visage actuel et votre visage peut-être anticipé ou imaginé à plus long terme. On l'a dit, vous avez une clientèle à temps partiel qui est très importante, et cela implique des coûts. Vous avez aussi une clientèle importante de gens qui ne vont pas s'inscrire dans des programmes de premier, ou deuxième, ou troisième cycle complètement, qui vont venir suivre donc des activités. Vous avez 32 %, à peu près, d'étudiants étrangers. Donc, ce n'est pas loin du tiers. Je ne sais pas si c'est en progression dans votre esprit... mais en tout cas un nombre important. Vous avez donc une configuration, je dirais, qui vous est propre, assez originale par rapport à des universités plus traditionnelles. Et ce qu'il m'intéresse de savoir, c'est quel est l'impact, quel est l'impact de ces caractéristiques pas seulement sur les questions de financement mais sur, je dirais, votre offre pédagogique. Qu'est-ce que ça fait comme différence que d'avoir une clientèle de telle nature? Qu'est-ce que ça fait comme différence en termes de programmes, de conception de programmes, de relations pédagogiques, d'enseignement? Et, bon, le financement, là, on en a parlé un petit peu, mais, au coeur de votre mission, là, le fait d'avoir cette clientèle-là, qu'est-ce que ça impose ou qu'est-ce que ça permet?

Là, je ne dis pas que c'est forcément une contrainte, mais c'est très différent, ce que vous avez comme univers, de l'univers d'une université plus classique qui a des cohortes d'étudiants qui entrent et qui sortent, avec une certaine attrition, trois ans ou quatre ans après.

**(15 heures)**

M. Patry (Michel): Merci beaucoup. Évidemment, ce visage du corps étudiant chez nous, c'est quelque chose qui s'est développé progressivement. On n'entrevoit pas de transformation radicale ou importante de cette image, si vous voulez, pour les prochaines années. On pense qu'on devrait se situer, dans les 10 prochaines années, dans la fourchette 30 % à 35 % d'étudiants étrangers. On est confortables avec ça. Il y a une sorte de zone de confort. Par contre, ce que nous voulons, c'est attirer les meilleurs étudiants. Donc, au fur et à mesure qu'on a davantage de demandes, ce que nous avons fait à chaque année, depuis 10 ans, dans nos programmes, c'est qu'on hausse, dans le fond, nos critères d'admission.

On veut attirer les meilleurs étudiants. Ce que ça a comme incidences? Il y en a plusieurs. La première, c'est évident, c'est... d'abord, vu que nous enseignons principalement en français mais, dans certains programmes, également en espagnol, en anglais, on a dû nous assurer que nous avons le corps professoral qui était à l'aise et qui pouvait fonctionner dans cet environnement-là, ce qui n'a pas posé de difficulté principale. Mais, si vous observez de près l'évolution du corps professoral, vous voyez que notre corps professoral s'est beaucoup internationalisé dans les 20 dernières années. Deuxièmement, ça change de façon importante l'expérience d'apprentissage, ce que j'ai évoqué brièvement dans mes remarques en introduction. Même au B.A.A., si je prends le B.A.A., vous avez des groupes qui sont extrêmement diversifiés par la provenance des étudiants, et on essaie d'en tirer, nous... d'«exploiter», si je peux utiliser cette expression-là, cette diversité-là de façon bénéfique pour l'apprentissage. Or, c'est une chose que de dire: Les économies du Brésil, de la Russie, de la Chine deviennent plus importantes, etc., c'est autre chose que d'avoir un professeur en échange qui vient d'une institution brésilienne ou des étudiants qui sont chinois et qui disent: Bien oui, mais attendez, là, nous, chez nous, ça se présente comme ça.

Ça change complètement la dynamique de l'enseignement. Ça va jusqu'au point où, dans certains programmes, nous fixons la composition des équipes. Une anecdote, là... mais ça veut dire que, si on laissait, dans certains programmes ou certains cours, les étudiants se constituer eux-mêmes en équipes pour faire certains travaux, on retrouverait les jeunes hommes et jeunes femmes de Québec qui sont ensemble, les francophones de Montréal ensemble, les anglophones... Bon. On s'assure que les équipes représentent une diversité.

Donc, ça a beaucoup d'incidences, ça a beaucoup d'incidences dans la formule de notre enseignement, ça a beaucoup d'incidences dans l'approche pédagogique. Il faut appuyer les professeurs dans cette démarche-là également parce que ça amène une pédagogie qui est souvent, chez nous, basée sur une méthode de discussion et de cas. Donc, il faut aider nos professeurs là-dedans. Donc, on a fait des investissements. On s'est donné des outils pour ça, pour améliorer les talents et améliorer la compétence de nos professeurs à gérer ces choses-là. Ça entraîne aussi des changements assez importants dans la façon d'opérer, notamment pour le recrutement, par exemple, de nos étudiants, où c'est évident que maintenant on passe un temps assez important à aller, oui, en France, mais au Brésil, au Mexique, en Chine, en Roumanie présenter l'école, présenter le Québec et dire: Nous avons une solution intéressante.

Au passage, on suit maintenant, depuis quelques années, de très près la carrière des gens qui sont venus choisir HEC et qui ont terminé. Et je viens juste de recevoir les résultats d'une enquête pour les étudiants qui viennent de la France, qui est le premier contingent... à peu près 25 % du contingent d'étudiants internationaux chez nous. Trois ans après la fin de leurs études, après qu'ils aient obtenu leurs diplômes, il y a 50 % des étudiants français qui ont choisi HEC Montréal, qui sont encore au Canada. Ils ne sont pas toujours à Montréal, ils sont encore au Canada. Il y a 50 % qui sont repartis. Ils ne sont pas tous retournés en France. Par contre, il y en a qui sont allés aux États-Unis, il y en a qui sont allés ailleurs. La grande majorité de ce deuxième groupe est retournée en France. Mais ce que l'on constate, c'est qu'on attire des gens qui s'établissent au Québec.

Alors ça, c'est pour la partie... le visage du corps étudiant.

Et évidemment il y a des incidences également en termes d'investissements qu'on doit faire. Vous devinez, par exemple, que notre programme trilingue bien exige qu'on ait, par exemple, du matériel pédagogique ou des cas en espagnol, en anglais, en français et de bonne qualité. On offre aussi des cours pour aider les gens qui peuvent avoir des difficultés. Donc, on a une direction de la qualité de la communication, qui offre des cours dans ces langues pour aider les gens à poursuivre. Alors, ça demande beaucoup d'investissements, mais on le fait parce qu'on est persuadés que, d'abord, c'est très apprécié. La preuve en est que ces programmes sont très populaires. La preuve en est aussi que les gens qui passent à travers ces programmes, qui sont, pour la majorité, des Québécois d'origine québécoise, là, demandent davantage de places là-dedans et sont très intéressés par nos programmes d'échange, etc.

Donc, on fait ces investissements. On pense que ce sont de bons investissements. Mais ça demande des changements dans chacun de nos processus, de l'admission au recrutement, à l'évaluation.

Je prends un dernier exemple, Mme Malavoy, vous qui êtes très familière avec ça. C'est certain qu'on reçoit des demandes d'admission de gens, d'écoles en Turquie ou en Bolivie qu'on connaît beaucoup moins que le réseau des cégeps ou des lycées français. Donc, ça veut dire qu'on investit à chaque année. On a des gens aux admissions qui apprennent, qui doivent comprendre le système sud-américain, d'Europe centrale pour nous assurer qu'on attire des bons candidats. On ne veut pas attirer les candidats qui vont avoir des difficultés, qui ne pourront pas réaliser leurs attentes. Je ne sais pas si je réponds à votre question sur le visage, là, suffisamment.

Mme Malavoy: Ah, mais enfin, pour le temps qu'on a, oui, j'apprécie bien vos propos.

Est-ce que je résumerais bien en disant que finalement vous êtes atypique par rapport à ce que sont les universités de façon classique, qui ont plus de temps-pleins, qui ont plus de cohortes régulières, bon, et que vous vous débrouillez de différentes manières pour financer les services additionnels que cela vous occasionne et pour vous ajuster? Mais votre modèle n'est pas un modèle classique, vous allez continuer à être financés par équivalences temps complet. Vous allez continuer à avoir tant pour les services aux étudiants par équivalences temps complet. Vous allez continuer à avoir un environnement, je dirais, de politique publique qui soit fait pour un autre modèle que le vôtre où est-ce que j'exagère quand je dis ça, là? J'essaie de pousser un peu, là, pour voir jusqu'à quel point vous êtes donc obligés de vous débrouiller de diverses manières pour faire face aux exigences de votre modèle qui est en même temps votre image de marque et qui est une réussite, là.

Je ne questionne évidemment pas ça. Vous êtes dans les très bonnes écoles d'administration qui existent, mais vous avez des moyens qui sont dictés par un environnement de politiques publiques qui ont été pensées autrement que pour vous.

M. Patry (Michel): Je pense que vous avez fait une lecture extrêmement perspicace de la situation. L'école a développé un modèle qui, à bien des égards, est singulier, si vous voulez. C'est une adaptation à une réalité qui est la nôtre, qui nous a permis de réussir certaines choses et qui demande beaucoup de débrouillardise et d'innovation. Et je ne sais pas si le président me permettrait ou permettrait à mon voisin de dire quelques mots, parce que, dans ces questions de financement de nos programmes, le vice-président de la débrouillardise est assis à ma gauche.

Le Président (M. Pigeon): Alors, oui, tout à fait. J'imagine que la commission est d'accord et donc je vous demanderais... je demanderais à la personne qui vous accompagne de s'identifier pour les fins de l'enregistrement.

M. Montplaisir (Georges): Georges Montplaisir. Donc, je suis le directeur des finances. Alors, je dirais, ce qui me frappe à HEC, c'est sûr, c'est la rigueur de la gestion, mais aussi beaucoup de dynamisme pour répondre aux besoins perçus dans le milieu à travers tous ces programmes. Et finalement ce qui est très important pour l'école, c'est de conserver et de développer l'autonomie de gestion pour être capables de s'adapter aux besoins changeants. C'est une caractéristique de HEC. Et HEC, comme institution, je crois, doit conserver ça pour continuer d'être innovatrice, de répondre à ces besoins-là du milieu dont nous faisons partie.

M. Patry (Michel): Est-ce que vous me permettez de...

Le Président (M. Pigeon): Oui, M. le directeur, allez-y.

**(15 h 10)**

M. Patry (Michel): Merci, M. le Président. Comme M. Montplaisir l'évoque, et je pense que vous l'avez vu avec beaucoup de justesse, quand nous nous comparons avec nos concurrents, cette comparaison se fait toujours par programmes, parce que nous sommes très atypiques dans l'univers des écoles de gestion. Il y a des écoles qui sont des écoles, à toutes fins pratiques, de M.B.A. seulement ou de deuxième cycle, il y a des écoles de premier cycle, il y a très peu d'écoles qui couvrent les trois cycles et les programmes de certificat, comme vous l'avez dit.

Donc, chez nous, pour réussir à atteindre les cibles d'excellence qu'on s'est données dans les programmes avec recherche au deuxième cycle, notre M. Sc., notre Ph. D., nos diplômes d'études supérieures, le M.B.A., il y a un modèle économique global qui permet de faire ça. Mais la débrouillardise a comme une sorte de limite. C'est pour ça que nous avons avancé que, si on veut que HEC en tout cas poursuive sur cette lancée puis qu'on continue, que nous puissions nous démarquer dans les prochaines années, il va falloir qu'on ait des revenus, sinon parfaitement comparables, mais qui nous permettent de nous rapprocher de nos concurrents même canadiens.

Et, ceci étant, on continuera d'avoir une logique ou une stratégie un petit peu singulières. C'est la nature... Nous sommes la seule université spécialisée en gestion au Canada. Il n'y a pas d'autre université au Canada où tous les étudiants sont dans le domaine de la gestion.

Mme Malavoy: Est-ce que c'est terminé ou il me reste...

Le Président (M. Pigeon): Il vous reste environ six minutes.

Mme Malavoy: Ah, mais c'est très bien.

Le Président (M. Pigeon): Mais oui, tout à fait.

Mme Malavoy: J'aimerais poursuivre sur la notion d'autonomie de gestion peut-être en commençant par faire un commentaire par rapport à ce que vous avez dit à l'occasion d'une réponse à une question du côté du gouvernement.

On vous a demandé si vous ouvririez la porte à une modulation par disciplines. Bon, il y a la question des droits de scolarité en elle-même puis qui fera certainement l'objet de nombreux débats bientôt lors des rencontres de l'automne, entre autres, sur le financement des études postsecondaires, mais il y a cette question de modulation par disciplines. Et, au-delà de ça, moi, je vous le traduis en termes de préoccupation de ma part, on ne finira pas le débat aujourd'hui, mais, moi, j'ai une certaine crainte que les universités québécoises s'en aillent vers un modèle américain d'universités mises en concurrence les unes avec les autres, certaines ayant de grands moyens, on peut penser à des universités montréalaises mais plus générales que la vôtre, qui seraient capables d'attirer des professeurs qui valent très cher, faire payer des droits de scolarité, qu'ils géreraient eux-mêmes, très chers.

Bon, ce dont je vous parle, c'est en gros le langage que va tenir, par exemple, l'Université McGill assez facilement. Et, moi, j'ai une certaine crainte, puis je l'exprimerai dans les forums où ce sera pertinent de le faire. Et, quand je dis: J'ai une certaine crainte, notre parti a une certaine crainte aussi d'en arriver à un modèle plus de concurrence entre les universités, de modulation par disciplines plutôt qu'une approche qui a été l'approche québécoise de ces dernières décennies et qui, ma foi, malgré tout a fait ses preuves, qui est de dire: C'est un investissement de l'État, donc de tout le monde, qui doit permettre au plus grand nombre d'avoir accès. Et ce qui financera cela, c'est une politique d'imposition sur le revenu qui ira chercher, parmi les mieux nantis, de quoi réinjecter dans le système.

Ce sont des visions... presque des visions du monde qui peuvent être différentes, et j'aimerais donc vous entendre. Quand vous parlez d'autonomie de gestion, jusqu'où voulez-vous aller? À quel genre d'université voulez-vous ressembler?

M. Patry (Michel): Peut-être deux choses assez rapidement. La première, c'est qu'à toutes fins utiles, pour les directions d'université, que le financement additionnel provienne, entre guillemets, de droits de scolarité, ou de droits afférents, ou de fonds publics, l'enjeu, c'est d'avoir les moyens de porter l'ambition des universités québécoises plus loin. Et ça, je reconnais totalement que c'est une question, c'est un arbitrage social, c'est un arbitrage de priorités et que ce sont les élus qui vont faire ce... qui vont prendre cette décision. Ça, c'est la première remarque.

Deuxième remarque: je pense que la faiblesse des droits de scolarité au Québec est un handicap, un handicap à plusieurs égards. Et, en disant ça, je ne veux pas... je n'insinue pas qu'il faille nécessairement nous positionner tout de suite ou très rapidement à la moyenne américaine ou canadienne, etc., mais la faiblesse actuelle des droits de scolarité, je l'ai mentionné, est un handicap. D'abord, c'est un signal, pour beaucoup d'étudiants internationaux, c'est un signal de faible qualité et pour plusieurs donateurs c'est presque un découragement.

Ceci étant, mon dernier point là-dessus, et, avec la permission du président, mon collègue, à ma droite, le secrétaire général, je crois, pourrait développer sur mon dernier point, je vous ferai remarquer qu'il y a concurrence entre les établissements universitaires présentement qui ne s'exerce pas sur les droits de scolarité, bien entendu, mais il y a une sorte de concurrence qui... Ce n'est pas nécessairement mauvais. Bon, je suis économiste de formation et je pense qu'il y a quelque chose de sain et il y a une émulation qui s'installe. Et la formule présentement de financement, qui est basée sur les inscrits, sur les étudiants équivalents temps complet, a aussi des implications, et elle induit des comportements, et elle induit une certaine course à des clientèles. Alors, vous avez des effets de cette concurrence. Lorsqu'elle ne se fait pas par le prix, par les droits de scolarité, elle se manifeste autrement. Elle peut se manifester par des décisions de localisation, elle peut se manifester de différentes façons.

Il ne faut pas oublier que cette concurrence, de toute façon, va se manifester. Maintenant, je suis tout à fait d'accord avec vous, que le système québécois a une personnalité qui lui est propre, et qui s'insère dans les grandes valeurs de la société québécoise, et qu'il faut préserver ces valeurs d'accessibilité. Mon propos a été de dire: Il ne faut pas que ceci se fasse au détriment de la poursuite de la qualité. Le Québec peut et le Québec, d'après moi, doit offrir aux Québécois et au monde une solution de très grande qualité.

Est-ce que le président autoriserait mon collègue, Jacques Nantel...

Le Président (M. Pigeon): M. le directeur, on termine approximativement la période d'échange, alors peut-être rapidement. M. Nantel, si vous voulez vous identifier, là, pour les fins de l'enregistrement, puis très brièvement...

M. Nantel (Jacques): Oui. Merci, M. le Président. Et je serai très bref. En fait, je vais juste enchaîner sur ce que M. le directeur a mentionné. Alors, Jacques Nantel, secrétaire général, HEC, et professeur titulaire.

J'entends bien ce que vous me dites, Mme la députée, mais en même temps il faut faire attention. Une certaine forme d'atomisation des ressources au Québec comporte un certain nombre de dangers. Et la lecture du modèle américain peut se faire mais sur plusieurs dimensions. Sur l'atomisation, vous savez, je veux juste prendre un exemple qui n'est pas dans mon secteur comme tel. Nous avons développé, à Montréal, et là j'entends HEC, Polytechnique, Université de Montréal, McGill, un pôle dans le domaine de la recherche opérationnelle et de la gestion des transports, qui est le deuxième meilleur au monde, là. Il y a MIT, puis après ça c'est chez nous. On a réussi à le faire parce qu'il y a concentration de ressources. Si on voulait que chaque région ait à peu près un morceau de cette tarte-là, on arriverait à une certaine forme d'atomisation qui ne serait pas nécessairement pour le plus grand bénéfice du Québec. Mais en contrepartie on a trouvé, au Québec, des façons de faire pour développer, dans certaines régions, des expertises qui sont absolument uniques. Je ne serai sûrement pas le seul ici à mentionner l'exemple de l'Institut maritime, à Rimouski, qui est absolument unique. Il ne faut pas que ce soit à Montréal, ça va de soi.

De faire une duplication de tout ce qui existe dans une région dans toutes les régions, sous prétexte que tout devrait être nivelé, je pense que c'est une erreur.

Et le modèle américain n'est pas un modèle unique. Vous avez de très grandes écoles publiques, de très grandes institutions publiques aux États-Unis, vous en avez d'autres qui sont spécialisées dans certaines régions. Je pense qu'il y a matière à une réflexion qui nous sortirait, et, pour ma part, je l'espère, d'un mode de normalisation qui mènerait à une atomisation qui est au détriment du système québécois.

Le Président (M. Pigeon): Merci, M. Nantel. Alors, merci, Mme la députée de Taillon. Ça termine le premier bloc. Et donc je me tournerais vers les gens qui représentent le gouvernement. Alors, Mme la députée de Gatineau.

**(15 h 20)**

Mme Vallée: Merci, M. le Président. Alors, bonjour, messieurs. Vous avez effleuré un sujet fort intéressant qui est l'atteinte de l'excellence dans le domaine universitaire québécois en général, pas exclusivement pour votre université, mais aussi pour l'ensemble du réseau universitaire québécois. Je comprends qu'on y voit, là, peut-être une crainte d'une direction qui pourrait être prise vers un modèle américain.

Mais, lorsque vous parliez d'excellence en général dans le réseau universitaire québécois, à quoi faisiez-vous référence? Parce que vous l'avez effleuré, mais c'est un sujet qui est très, très intéressant. On a eu, au cours des derniers jours, de vos collègues qui sont venus nous présenter leurs bons coups, parce qu'il y a effectivement de très belles choses qui se font dans le milieu universitaire québécois, un petit peu partout, fort méconnues. Mais comment pouvons-nous faire en sorte que notre système universitaire rayonne davantage? Ça, ça m'intrigue beaucoup de vous entendre là-dessus.

M. Patry (Michel): Je crois que, sur le fond, la valeur ou le désir de poursuivre ou d'atteindre l'excellence dans la recherche, dans l'enseignement, c'est un sentiment qui est partagé.

Votre question: Comment on fait pour se rendre là? Je crois, moi, fermement que c'est à chaque université à définir comment elle va le faire. Ce dont je peux attester, c'est la façon dont, nous, on a procédé. Et essentiellement ça veut dire, premièrement, nous fixer des objectifs, des objectifs opérationnels et, deuxièmement, mesurer notre progrès via ces objectifs, troisièmement, identifier les actions qu'il faut mettre en oeuvre pour y parvenir. Et on le fait, ça, par programmes. On ne le fait pas pour l'ensemble des programmes, on le fait pour chaque programme, on le fait pour chaque grande activité de recherche ou secteur de recherche. Si je prends un exemple parmi d'autres, si on prend nos programmes de deuxième cycle, par exemple le M.B.A., alors on a identifié de façon très précise quels étaient les programmes canadiens, les programmes internationaux qui sont vus par différentes sources comme étant les meilleurs et comment était perçu notre programme, comment nous assurer que, notre programme, sa valeur relative s'améliore par rapport aux autres programmes, c'est quoi, les attributs sur lesquels il faut travailler.

Et évidemment ceci va se refléter par des mesures de performance, la qualité des étudiants que vous admettez, le taux de placement de vos étudiants, les classements, les palmarès, les agréments.

Alors, on a un... Pour chacun de nos programmes, on s'est donné un certain nombre d'instruments, de tableaux de bord, si vous voulez. Et derrière tout ça il y a l'ambition de se dire: On ne veut pas se satisfaire d'offrir un bon programme ou dire: On a un excellent programme pour le Québec, on veut que ce qu'on offre ici aux Québécois et aux Québécoises soit comparable en qualité, pas dans le contenu ou dans la façon, parce que chacun va le faire... soit comparable à ce qu'il y a de meilleur n'importe où ailleurs au Canada. Et, nous, on pense qu'on peut le faire avec les meilleures écoles internationales. Et donc, constamment, chacun des gestionnaires, nous, de programmes chez nous, la directrice des programmes, le directeur de la recherche, ils font des exercices de positionnement de leurs programmes, évaluent. Et on se dit: Bien, les gens qui ne viennent pas, par exemple, s'inscrire chez nous, qui ont fait une demande, là, où est-ce qu'ils sont allés, pourquoi ils sont allés là? Est-ce que c'est les conditions d'enseignement, le prix?

Mme Vallée: ...cette analyse-là.

M. Patry (Michel): On le fait régulièrement. Et sinon, bien, vous ne savez pas... On le fait pour le recrutement des professeurs. Chacun des professeurs qui refuse une offre, nous, à l'école, on cherche à savoir où cette personne a été embauchée, lorsqu'on peut le savoir, quelles étaient les conditions, pourquoi elle n'a pas pris notre offre. C'est certain que, si on est en concurrence avec une grande université américaine, pour reprendre l'exemple qu'on nous donnait tantôt, et que la décision se prend sur des questions financières, nos chances sont très minces. Mais, même là, il y a toutes sortes de facteurs. Je parlais de Montréal tantôt. Montréal offre, a des avantages importants pour attirer le talent. Alors, on le fait.

Je ne sais pas si vous trouvez réponse à votre question. Ça veut dire fixer de façon précise... relativement précise, pour chacun des grands registres, chacun des grands domaines chez nous, des cibles qui vont refléter l'ambition de dire: On veut se positionner comme un établissement de tête au Canada. Alors, la formule 5-20-100, là, c'est un peu ça, là: parmi les cinq meilleurs au Canada, les 20 meilleurs à l'extérieur des États-Unis et les 100 meilleurs dans le monde. Donc, si vous m'arrivez avec un projet: Je veux que vous développiez une nouvelle maîtrise en logistique hospitalière, on pense qu'on peut le faire. La question que les gens chez nous vont vous poser, c'est: Oui, mais qui fait ça présentement? Et est-ce qu'on a les moyens, d'ici cinq ans, de le faire de façon excellente et d'être comparés aux meilleurs au Canada? Si vous me dites: Non, parce qu'il y a juste une personne, il manque des ressources, on va vous dire: Revenez avec un plan, et on va trouver les ressources ou on ne le fera pas.

Parce que, si on se met à faire un petit bout dans chaque projet, on ne pourra pas concentrer les ressources.

Mme Vallée: Je comprends l'exercice que vous faites à l'intérieur de votre université. Est-ce qu'un exercice comme ça, est-ce que... Si vous étiez du côté... On se remet, parce qu'on a fait l'exercice il y a quelques jours, à la place du ministre de l'Éducation. Vous êtes le ministre de l'Éducation, vous envisagez, parmi vos objectifs, d'aller de l'avant et de faire en sorte que l'ensemble du réseau universitaire québécois rayonne davantage. Est-ce que ça implique de... Qu'est-ce que ça implique face à ce qui est demandé aux universités et face à ce qui peut être offert, du point de vue gouvernemental, comme support pour atteindre... ou pour se diriger vers cette excellence-là dans l'ensemble de ce qui est offert ici, au Québec?

M. Patry (Michel): Je pense que, si vous prenez la perspective d'une ministre ou d'un ministre de l'Éducation, comme dans toute grande organisation, c'est la vision, l'objectif à long terme que vous allez vouloir fixer. Vous allez laisser aux universités le choix des moyens, et des instruments, et des mesures. Mais vous devez être exigeant, demander qu'on se fixe des objectifs, à chacun des établissements, demander comment vous pensez que vous allez atteindre ces objectifs, quels sont les moyens que vous allez mettre en oeuvre et comment vous mesurez l'atteinte de vos objectifs. Cette réponse-là n'est pas très originale, parce que, dans n'importe quelle organisation privée ou publique, en tout cas c'est ce qu'on enseigne chez nous, là, c'est ce qu'on va vous dire.

La ministre, je pense, est la défenderesse... ou le ministre... ou la ministre, dans ce cas-ci, est la défenderesse des valeurs fondamentales et de la vision, où est-ce qu'on veut que ce réseau... où est-ce qu'on veut que l'ensemble des universités aillent. Ma présentation, moi, je l'ai commencée en vous disant: Le Québec possède un excellent réseau, mais il ne faut pas tomber dans la complaisance. La concurrence est féroce, et l'enjeu est majeur, parce que l'économie de la connaissance... l'économie du XXIe siècle, le facteur clé, ça va être la connaissance. Ce l'est déjà. Donc, c'est un enjeu fondamental. Moi, je n'ai pas la prétention de dire ce que la ministre devrait faire, mais je pense qu'elle devrait être obsédée par ça, elle devrait se sentir investie de cette mission de préparer les 50 prochaines années, parce que c'est la capacité du Québec d'attirer le talent, de développer le talent et de préparer des gens hautement qualifiés qui ne seront pas en nombre... On n'aura pas pléthore de ces gens-là pour affronter les défis des 50 prochaines années. C'est un enjeu fondamental.

Donc, je pense, la vision, les valeurs et après ça s'assurer que les moyens sont utilisés de façon correcte.

Mme Vallée: Est-ce qu'il vous est arrivé d'abandonner certains programmes, d'abandonner certaines formations parce que justement HEC Montréal n'arrivait pas à atteindre cet objectif d'excellence que vous vous étiez fixé?

M. Patry (Michel): À chaque année.

Mme Vallée: Donc, vous faites une révision régulière?

**(15 h 30)**

M. Patry (Michel): Oui. Vous savez, si vous ne faites pas ça, il y a deux problèmes, là: d'abord, ou bien vous allez butiner sur des lancées ou des initiatives que vous ne pourrez pas porter aussi loin que vous voulez ou bien c'est que vous ne prenez pas assez de risques. Moi, je dis souvent à mes collègues... Parfois, il y a des collègues qui disent: Ah, c'est dommage, on avait tel projet. On ne pourra pas, étant donné les objectifs qu'on a. Je leur dis: Il faut que vous en ayez, des projets qu'on ne peut pas poursuivre, sinon c'est parce que vous n'avez pas assez d'imagination. Il faut avoir beaucoup de projets et s'essayer. Et, si vous prenez l'histoire de l'école, c'est extraordinaire, parce qu'on a fait beaucoup, beaucoup d'innovations, mais il y a beaucoup de choses qu'on a abandonnées.

L'autre chose que vous allez vous rendre compte en regardant un petit peu l'histoire de l'école, je dis ça sans prétention, on pourrait le faire dans chaque université, c'est que souvent... Lorsqu'on a lancé notre programme Virtuose, qui exigeait le déploiement du... l'ordinateur portable à tous les étudiants, etc., il y avait très peu d'écoles dans le monde qui avaient ça, et les programmes qui existaient le faisaient pour 100, 150 étudiants. Nous, on a voulu le faire pour 1 000 étudiants. On n'a pas les ressources financières de MIT, ou de Columbia, ou de d'autres et pourtant on l'a fait. On a trouvé des astuces, des moyens, et puis, ce projet-là, on l'a mené à terme. Il y en a d'autres qui avaient l'air d'être des bonnes idées, qu'on a dû abandonner.

Alors, la réponse, c'est: Oui, on en abandonne. Et en fait, demain et après-demain, mes collègues et moi, on s'enferme et on prend la liste des innovations et des changements qu'on veut apporter en recherche, en enseignement, en formation des cadres et dans l'organisation et on évalue lesquels est-ce qu'on va mettre de l'avant et lesquels on va décider de garder, dans le fond, là, en deuxième position, et il y en a un certain nombre qu'on va laisser tomber.

Mme Vallée: Lorsque vous faites... Parce que vous avez abordé la question du suivi auprès des étudiants qui choisissent de ne pas aller chez vous. Face aux enseignants qui choisissent de ne pas accepter une offre, quels sont vos constats? Quel est le constat moyen? Un étudiant, par exemple, qui s'est inscrit chez vous et qui décide de ne pas y aller... qu'est-ce que vous constatez? Quelle est la raison... ou le motif habituel? Il va où, cet étudiant-là?

M. Patry (Michel): C'est une superbe question. C'est une question qui nous préoccupe beaucoup. Je vais vous faire une réponse assez courte étant donné que le temps est limité.

Cette réponse, pour les étudiants, varie énormément selon les programmes. Je vais prendre l'exemple du M.B.A. où, là, on a une clientèle internationale. La réponse est différente au M.B.A. de la réponse au certificat. Au certificat, un étudiant qui fait une demande chez nous, qui est accepté et qui décide d'aller ailleurs peut nous dire: Parce que le trajet de mon domicile à HEC était plus long que d'aller à tel autre endroit. Donc, c'est une composante. Au M.B.A., ou à la M. Sc., ou dans certains programmes spécialisés au deuxième cycle, vous n'aurez pas ce genre de commentaire là, vous allez avoir: Bon, votre programme m'intéressait, mais soit que, par exemple, ma maîtrise du français est insuffisante... Bon, on peut l'aider, mais on ne peut pas... Soit que la personne va nous dire: J'ai eu une bourse importante qui m'a été donnée par Queen's, qui m'a été...

Bon, les réponses sont très variées pour les programmes, et tandis que, pour les enseignants, on voit très bien le groupe d'établissements dans le monde avec lesquels nous sommes en concurrence. C'est certain qu'il y a une sorte de zone de confort en termes de rémunération, et là il y a une guerre du terrain qui se fait, et le talent se paie. Et c'est évident que, nos ressources financières étant ce qu'elles sont, il y a des gens, malheureusement, qui nous échappent et qui vont chez nos voisins, en Ontario, en Alberta, en Colombie-Britannique, en Europe. Autrement, les autres facteurs vont être très, très variés pour les professeurs-chercheurs, hein? Ça, ça va être souvent le conjoint, la situation du conjoint, ça peut être des considérations familiales. Le, entre guillemets, le marché pour les professeurs-chercheurs de talent est vraiment un marché très globalisé. Et la chose peut-être qui a le plus changé dans les 20 dernières années, c'est qu'au moment où, moi, j'ai commencé ma carrière... donc, il faut dire plutôt «30 dernières années»... les Québécois qui étaient allés étudier à l'étranger revenaient tous à peu près au Québec, alors que maintenant vous allez voir des Québécois qui sont aux études aux États-Unis, ou en Australie, ou en Europe, ce n'est pas parce qu'ils viennent du Québec qu'ils vont revenir au Québec.

Alors, il faut que vous ayez une proposition d'environnement de recherche, d'insertion dans des collaborations scientifiques ou de... il faut que vous ayez une proposition globale. La rémunération va être un facteur. Ce ne sera pas le seul facteur.

Mme Vallée: Donc, ce n'est pas seulement que des facteurs économiques.

M. Patry (Michel): Non. Mais le facteur économique est un facteur important, là.

Mme Vallée: Est-ce qu'il me reste...

Le Président (M. Pigeon): Une toute petite minute, Mme la députée de Gatineau.

Mme Vallée: Bon. Bien, là-dessus je la garderai en réserve pour un bloc. Je vous remercie beaucoup, M. Patry.

Le Président (M. Pigeon): Alors, merci. Et donc on retourne du côté de l'opposition. Est-ce que... Mme la députée de Taillon, toujours?

Mme Malavoy: Oui. Oui, oui. Et puis mon collègue de Saint-Hyacinthe posera une question après. Mais là j'ai une grosse question.

Des voix: ...

Mme Malavoy: Ah, oui, je suis sûre que je ne vous surprendrai pas avec ma question. Mais, honnêtement, il y a une préoccupation réelle de ma part quant à l'offre de services dans plusieurs langues.

Vous avez évoqué dans l'histoire de votre école qu'elle était la première école francophone... enfin, la première école d'administration, et il se trouve qu'elle était à Montréal, qu'elle était francophone. Je comprends parfaitement les pressions réelles qui viennent de l'environnement, des besoins des étudiants, des besoins de formation, de votre approche d'internationalisation, je comprends tout ça, mais, je vais vous le dire très franchement et très simplement, l'impression que j'ai, c'est qu'il n'y a pas de balise. Je vais le dire comme ça, puis, si je me trompe, bien vous me corrigerez. Mais je vais le dire comme ça. Au moins, ce sera plus franc. J'ai l'impression qu'il n'y a pas de balise. C'est-à-dire qu'on met une grande école, une «business school», comme ça, qu'on est fiers... puis je ne demande pas d'abandonner de la fierté, là, mais d'avoir un programme trilingue, qu'on a finalement une ouverture grande au nom des besoins de l'internationalisation et d'étudiants qui proviennent en partie de l'étranger, en proportion importante, on l'a dit tout à l'heure, on a donc pris... ce n'est même pas un virage, c'est comme si on s'était adapté, de fil en aiguille, à une situation, et maintenant, voici, HEC offre des programmes trilingues.

Alors, ma question, elle est très sincère, puis je ne suis pas la seule à me la poser, mais est-ce que vous avez des balises? Est-ce que vous avez des préoccupations linguistiques? Comment situez-vous cette ouverture à des programmes dans d'autres langues compte tenu de votre spécificité comme université francophone québécoise?

**(15 h 40)**

M. Patry (Michel): Je suis content que vous posiez cette question parce que la réponse, j'espère, va vous convenir. Mais, oui, nous avons des balises très précises.

D'abord, HEC Montréal, c'est une institution francophone. La vaste majorité de ses programmes et de ses enseignements sont en français. Deuxièmement, en matière de langues et en matière de qualité de la langue notamment, j'ai même la prétention qu'on est assez à l'avant-garde pour le français. Nous avons créé, il y a 20 ans ou presque, une direction de la qualité de la communication qui administre des tests de qualité du français à tous les étudiants qui participent à nos programmes et qui offre aussi des cours pour améliorer la qualité de la langue. Et je pense qu'on a un peu fait école. On est très en avant de la parade dans ce domaine-là.

Ensuite, quant à l'offre de cours dans une langue autre que le français, les balises sont très précises. Au premier cycle, on offre des cours français, anglais, espagnols et notamment à travers cette cohorte trilingue qui est majoritairement une cohorte d'étudiants qui sont des Québécois, qui ont appris l'espagnol à l'école, qui attirent un certain nombre d'étudiants étrangers mais qui desservent les Québécois qui maîtrisent des langues. Au deuxième cycle, le seul programme où on a une offre en anglais et en français, c'est le programme de M.B.A., qui est en soi aussi un domaine très particulier. Le marché, à l'échelle internationale, du M.B.A. est en anglais, à toutes fins pratiques, et les francophones, y compris les francophones québécois, pour la vaste majorité, beaucoup souhaitent faire un M.B.A. en anglais.

Donc, chez nous, on offre le même programme en français et en anglais, mais on a donc des balises très précises sur le déploiement de l'offre de cours dans les langues.

On a évidemment mis beaucoup d'efforts pour améliorer la maîtrise des langues parce qu'on veut que nos étudiants qui proviennent de Montréal ou d'ailleurs au Québec, que tous les étudiants qui viennent chez nous aient une maîtrise des langues meilleure. Pourquoi? Parce que la langue est un instrument important pour accéder à la culture et s'insérer dans les réseaux internationaux.

Mais le français est premier là-dedans, et la Direction de la qualité de la communication, je pense, a fait oeuvre de pionnier chez nous, là, ce qui fait qu'il n'y a aucun étudiant, par exemple, au premier cycle chez nous qui termine son premier cycle et qui va être diplômé s'il n'a pas satisfait les tests de langues. Je ne connais pas beaucoup d'écoles, je ne connais pas beaucoup de programmes, même d'universités totalement francophones, etc., qui ont cette exigence-là. Et c'est pour ça qu'on a développé donc un service pour suppléer, parce que, bien qu'on teste les gens à l'entrée, il y en a qui peuvent éprouver des difficultés. Donc, il faut qu'ils parviennent à un certain niveau de la maîtrise de la langue écrite et parlée.

Alors, sur les balises, je vous donne une idée rapide, là, mais vous voyez qu'on a, là, dans cette matière, des paramètres bien, bien définis.

Mme Malavoy: Est-ce que ça veut dire que tous vos étudiants étrangers qui viennent, parce qu'on a dit que c'était presque un tiers, doivent satisfaire à cette capacité de parler et de communiquer en français à un niveau que vous estimez exigeant?

M. Patry (Michel): Pour tous les programmes, pour les 13 000 étudiants, sauf pour le M.B.A. cohorte anglophone pour lequel la maîtrise du français n'est pas exigée, mais pour lesquels nous offrons des cours de français. D'ailleurs, ils appellent ça «French on Friday» parce que les cours sont le vendredi, là, mais, pour tous les autres programmes, donc les 13 000 moins les environ 100, parce qu'il y a 100 étudiants dans cette cohorte, là, vous voyez de quoi on parle, oui, la maîtrise du français est une condition de diplomation. Et, pour s'assurer que les gens n'ont pas de problème, ils font l'objet de tests, y compris aux certificats, y compris dans les cours des étudiants à temps partiel, ce qui est assez singulier, là aussi.

Je ne sais pas combien d'autres universités au Québec s'assurent que l'ensemble de leur clientèle, même à temps partiel, maîtrise le français. Je vous dirais que c'est aussi un moyen, au passage, parce que, dans les cours de certificat, il y a beaucoup de néo-Québécois, c'est une façon d'améliorer la maîtrise du français d'un très grand nombre de néo-Québécois dans nos cours de certificat. Et tantôt madame en face, votre collègue d'en face, évoquait les coûts pour les étudiants à temps partiel. Je vous dirais que, nous, on le voit comme partie de notre mission, mais c'est certain que ces gens-là tirent un certain bénéfice à parfaire la maîtrise des langues à travers nos activités pour parfaire leur français.

Donc, je pense que ce programme sert très bien la communauté québécoise et sert le Québec en amenant à l'intérieur, au Québec... en amenant, dans le groupe francophone, des gens dont la maîtrise de la langue est parfois vacillante.

Mme Malavoy: Je comprends que vous contribuez à améliorer, au cours de leurs études, la qualité de la langue. Si...

M. Patry (Michel): Bien, la personne qui dirige cette unité, c'est Mme Marie-Éva de Villers, qui est bien connue dans le domaine des linguistes, et elle veille au grain.

Mme Malavoy: On n'en doute guère. Je n'en doute guère. Est-ce que vous vous sentez en concurrence avec certaines, justement, universités ailleurs au Canada ou même à Montréal qui offrent des programmes en anglais? Est-ce que... Autrement dit, vous répondez à quoi quand vous avez un M.B.A. entièrement pour anglophones? Est-ce que vous avez une offre de services telle qu'on va aller prendre ce M.B.A. chez vous et il faut que ce soit à HEC Montréal plutôt que dans une école anglaise, soit québécoise ou limitrophe, là, ailleurs?

M. Patry (Michel): C'est évident que la réponse à cette question dépend, dans ses modalités, des programmes. Là, vous avez évoqué le M.B.A. Il y a une réalité par programmes.

C'est certain qu'il y a une concurrence. Mais HEC est une école francophone. Donc, par exemple, pour le premier cycle, quelqu'un qui dit: Je n'irai pas à HEC, je vais aller dans une institution qui offre le premier cycle en anglais. Nous, on dit: Soit, nous, notre premier cycle, il est en français. Si vous venez le prendre en français, vous voulez parfaire votre anglais, votre espagnol et même le chinois, chemin faisant, on va vous aider, mais le programme est en français, les examens sont en français, etc. On n'a pas l'intention d'essayer de cloner... Ce ne serait même pas stratégiquement très astucieux d'essayer de nous substituer à d'autres écoles dont c'est leur identité. Donc, oui, il y a une concurrence, mais, nous, on offre quelque chose de différent.

Au M.B.A., seule exception sur le plan de l'exigence de la maîtrise du français à l'entrée, là la question est un petit peu différente. C'est un marché, dans le fond, complètement globalisé. Les gens qui ne viennent pas chez nous peuvent aller à HEC Paris ou à Liège. Ils vont le faire en anglais également. Mais, le fait que la langue puisse représenter, pour un certain nombre de candidats, un facteur de choix qui nous place en deuxième position, nous, on n'y peut rien.

On offre une solution qui est francophone, avec une ouverture sur l'international et sur le multilinguisme, mais ça, c'est nous. Si vous voulez faire votre premier cycle intégralement en anglais, c'est correct, c'est bien.

Mme Malavoy: M. le Président, je sais que le temps file, mais mon collègue avait une question. Donc, si vous voulez lui autoriser maintenant, je sais que j'aurai moins de temps après, tout simplement.

Le Président (M. Pigeon): Alors, M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): Alors, merci, ma collègue, merci, M. le Président. Ma collègue est assez... Ma question va être assez simple parce que je veux revenir sur le financement, le coût, les frais de scolarité aux étudiants, que j'ai cru comprendre au début. C'est sûr que vous avez... Vous mentionniez tantôt que vous êtes une école particulière, vous êtes la seule école... la seule université spécialisée au Canada dans votre domaine, dans le domaine de l'administration. Et je pense que c'est reconnu. Et j'en suis fier aussi parce que mon fils a étudié chez vous aussi.

Mais la question que je me pose, et je veux être sûr d'avoir bien compris ce qui s'est dégagé tantôt: En quoi le financement public et privé augmenté d'une université peut diminuer le rayonnement de votre université, l'excellence, la qualité sur le recrutement, recruter des talents? Parce que, selon moi, le fait de regarder des coûts un petit peu plus bas pour l'accessibilité à vos études pour les étudiants, ça fait en sorte que vous avez un bassin plus grand de recrutement, vous pouvez aller chercher plus de personnes, puis ça permet aussi à nos régions ici, au Québec, d'avoir accès à votre formation qui, si les coûts étaient plus élevés... peut-être elles ne seraient pas là. Moi, je pense que c'est un enrichissement collectif de regarder des coûts, accessibilités, mais je ne vois pas le lien que vous faites.

En tout cas, expliquez-moi-le. Je ne vois pas le lien que vous faites entre le recrutement, le talent, la qualité et le maintien de l'excellence si ça, c'est du financement qui vient du gouvernement ou du privé versus... au lieu d'aller chercher dans la poche des étudiants. Alors, j'aimerais ça avoir un peu plus d'explications là-dessus.

M. Patry (Michel): Essentiellement, comme je le mentionnais plus tôt à la fin de l'exercice, si, par étudiant, les universités québécoises disposent d'un financement qui se compare, disons, aux bons établissements, aux établissements, en moyenne, au Canada, que ce financement provienne des étudiants ou de subsides gouvernementaux, ça ne fait pas vraiment de grande différence. Alors ça, c'est la première chose, là. Ce qui compte, c'est les ressources financières, et autres, dont les universités disposent, par étudiant.

Ce que je constatais, c'est que, dans le domaine de la gestion, qui est, nous, notre domaine à nous, bien le financement par étudiant, à peu près partout ailleurs au Canada, est substantiellement plus important et que la différence provient principalement de ce financement supérieur des droits de scolarité, qui sont en moyenne, si je prends juste le premier cycle, plus du double de ce qu'ils sont au Québec puis, si je prends les 10, 15 meilleurs établissements au Canada, dans le domaine de la gestion, qui sont le triple ou quatre fois plus élevés qu'au Québec. Alors, encore une fois, si tant est que le gouvernement québécois pouvait augmenter son soutien aux universités, les universités parviendraient à offrir des conditions d'apprentissage, des programmes, à réduire le nombre d'étudiants par professeur, à donner des ressources informationnelles de la même façon que si ce financement-là provenait des étudiants.

Il reste, dernier point que nous avons évoqué mais de façon un petit peu éclectique, que les frais de scolarité très faibles, ce que je vous ai dit, avaient aussi comme effet pervers d'envoyer un signal de qualité. Moi, je le constate souvent. Il faut qu'on explique beaucoup lorsqu'on recrute internationalement. Les frais de scolarité étant beaucoup plus faibles, on a la perception que le... On ne peut pas acheter une Mercedes au prix d'une Lada. Donc, comment il se fait que vous procédez comme ça? Mais c'est un facteur très secondaire par rapport aux deux premières observations que j'ai faites. Ce qui compte, c'est le financement par étudiant. Et c'est une décision politique. Quelle est la source qui va... Quel est le partage de ce financement entre les différentes sources?

Le Président (M. Pigeon): Merci, M. le directeur. Alors, ce deuxième bloc, là, pour l'opposition officielle étant terminé, on va passer...

Une voix: ...

Le Président (M. Pigeon): Oui. Et je me permettrais peut-être, en tant que représentant du gouvernement, de poser quelques questions. Il reste environ 12 minutes d'un côté et de l'autre. Alors, je me permettrais, en tant que membre de la commission, peut-être de poser une ou deux questions.

Et, étant donné qu'on est dans un exercice de reddition de comptes, moi, j'ai posé la même question à une autre université, j'aimerais savoir quels sont vos programmes, comment vous procédez pour vous assurer de la qualité de votre gestion, de l'efficacité de la gestion, de, je dirais, de l'efficacité, là, optimale de ce que vous recevez à la fois des étudiants, qui paient une part, et du gouvernement.

Comment vous assurez-vous, là, que votre gestion est vraiment optimisée? Ou les coûts de gestion...

**(15 h 50)**

M. Patry (Michel): Il y a une partie à laquelle je vais répondre rapidement, puis peut-être que mon voisin de gauche va vous parler de l'aspect purement administratif.

Pour chacun de nos programmes, il est certain qu'on a des... non seulement une revue de programmes, mais on a annuellement une revue qui permet de voir les taux de diplomation, la cote R... bon, à l'admission, la cote R, les tests normalisés, comme le GMAT ou les tests de langues, nos propres tests linguistiques à l'entrée. On examine donc la qualité des étudiants qu'on a recrutés, on examine la qualité des débouchés et les taux de placement. Pour chacun des programmes, à chaque année, on a un rapport sur chacune de ces dimensions.

Il y a une deuxième dimension, M. le Président, à votre question, qui est davantage l'aspect contrôle de gestion et gestion rigoureuse, dans le fond, des coûts. Si vous permettez de reconnaître mon voisin...

Le Président (M. Pigeon): Je vous en prie.

M. Patry (Michel): ...je lui passerais la parole. Mais, c'est évident, l'école a une tradition de gestion extrêmement serrée, ce qui nous permet de maintenir un équilibre budgétaire.

Le Président (M. Pigeon): Alors, une fois de plus, si vous voulez vous identifier.

M. Montplaisir (Georges): Georges Montplaisir, directeur des finances, de HEC Montréal.

À HEC, un des outils principaux en termes d'optimisation des coûts, c'est le système de contrôle budgétaire, qui est assez détaillé, et je dirais que ça amène beaucoup de rigueur dans la gestion parce qu'il y a une grande prise de conscience des responsabilités qui incombent quand on alloue des budgets. Et il y a une revue. Et ce système de contrôle budgétaire fonctionne pendant toute l'année, en sus d'une ronde budgétaire qui est très importante. Et on alloue des ressources à ce système de contrôle budgétaire que je trouve assez importantes mais qui valent vraiment la peine, et je peux... Comme preuve, entre autres, c'est que, HEC, dans notre fond de fonctionnement, par exemple, on a un solde positif. Donc, il y a des systèmes de contrôle de gestion pour s'assurer qu'on atteint nos objectifs financiers. Et en même temps, toute l'innovation dont le directeur parlait, dans l'école il y a des demandes constantes, et on les regarde de façon... on les évalue de façon constante et on n'hésite pas à éliminer des choses qui ont moins leur place.

Alors, ça fait partie de la culture de l'école. Les gens en sont fiers. Les gens croient qu'une gestion serrée, ça fait partie de la mission de l'école.

Le Président (M. Pigeon): Merci. Je vais tout à l'heure passer la parole à la députée de Trois-Rivières, mais j'aurais une deuxième question concernant, là... On a beaucoup parlé de concurrence internationale, bon, etc., de votre position dans le monde, qui est quand même enviable. Et ça doit quand même rendre le recrutement de très bons profs difficile, j'imagine. Et j'aimerais que vous nous expliquiez... Est-ce que vous avez, par exemple, une structure salariale adaptée qui fait que vous pouvez offrir une prime à un tel, dans telle circonstance. Qu'est-ce que vous offrez, je dirais, comme environnement aux profs qui viennent, pour être capables, là, de jouer ce jeu de la concurrence internationale?

M. Patry (Michel): Concurrence, M. le Président, que vous connaissez bien, qui est féroce, en particulier dans le domaine de la gestion, je dirais, à cause du déséquilibre entre l'offre et la demande à l'échelle internationale. Il y a un tel développement des écoles de gestion dans le monde et notamment dans les pays en développement qu'il y a une pression sur les Ph. D. Alors, on a déployé beaucoup d'efforts dans les 15 dernières années, les 10 dernières années en particulier, et ça, je peux en parler, parce qu'avant d'être directeur j'étais responsable de l'ensemble du corps professoral, et on a modifié complètement notre processus de recrutement.

Pour vous donner une idée, là, on va, dans une année normale, recevoir, environ, entre 800 et 1 000 manifestations d'intérêt pour finir avec peut-être 15 à 20 embauches chez nous. Et donc, entre le 800 et le 15, il y a toute une série de sas. Il y a la dimension rémunération que vous avez évoquée. C'est certain que, chez nous, nous avons une échelle salariale. Il y a des échelles salariales. On a par contre développé, depuis 15 ans, un ensemble de systèmes de rémunération complémentaires mais qui sont par programmes. Alors, ce qui veut dire... Par exemple, on a des ateliers. Quelqu'un qui participe à des ateliers va pouvoir se qualifier pour une rémunération. Quelqu'un qui produit telle sorte de matériel... Donc, on fait un assemblage pour tenter de rendre nos offres les plus concurrentielles. Dans certains cas exceptionnels, il y a des compléments salariaux qui peuvent être ajoutés, mais c'est marginal, en toute honnêteté, par rapport à l'ensemble de l'appareil parce que notre système de rémunération est essentiellement basé, d'abord, sur une échelle puis ensuite sur des activités de publication, etc.

Je vous donne un exemple que vous connaissez probablement. Chez nous, pour encourager la qualité de publication, on a développé une nomenclature des revues scientifiques et professionnelles. Il y a les revues A+, A, B. Et, si vous publiez dans une revue A ou A+, ça va vous donner un boni de tant.

Alors, on va offrir un ensemble d'instruments à des candidats prospectifs pour tenter de rendre notre offre comparable à celle des bonnes institutions. Mais, au-delà de ça, il y a beaucoup votre approche de recrutement, votre présence dans les réseaux internationaux, votre accueil des gens, votre capacité d'accueillir les gens, d'accueillir leurs conjoints, conjointes, de les aider à solutionner le problème de déploiement. Et on joue beaucoup les atouts que nous avons, donc l'importance, la taille de l'école, son lien avec l'Université de Montréal, les réseaux qu'on peut créer. Mais c'est évident que la concurrence en matière financière est un... c'est une préoccupation, c'est un facteur important.

Les gens qu'ont veut recruter ont des offres. Et, moi, je dis souvent à mes collègues: On ne veut pas tellement les gens qui n'ont pas d'offre de d'autres institutions, on veut des gens qui sont sollicités. Et on réussit à en attirer un certain nombre et on perd un certain nombre de candidats.

Le Président (M. Pigeon): Je vous remercie. Alors, Mme la députée de Mille-Îles.

Mme Charbonneau: Il reste combien...

Le Président (M. Pigeon): Il reste environ cinq minutes.

Mme Charbonneau: Bon. Alors, on fera avec les cinq minutes puisqu'on peut avoir des questions toute la journée.

Je remarque beaucoup, dans la différence du discours que vous tenez... puis je ne sais pas si ça va vous faire une fleur ou vous choquer, mais le ton et les remarques sont très, je vais dire, business plutôt qu'universitaires. Ça ne vous enlève pas toute la qualité d'université que vous avez, mais on voit que ce que vous donnez comme formation a...

Des voix: ...

Mme Charbonneau: ...a déteint, ou vice-versa. Donc, comme je vous dis, je ne sais pas si c'est une qualité ou un défaut, mais je trouve ça intéressant de vous entendre, puisque votre perception est quelque peu différente des autres discours que j'ai entendus. Dans les documents qu'on a eus, j'ai pris connaissance d'un fait que je trouvais assez intéressant. Vous avez une augmentation de clientèle étrangère d'à peu près 4,5 % en 2007-2008, mais une augmentation du revenu de cette clientèle-là de 45 %.

Ça fait que je ne sais pas si mes chiffres sont mélangés ou si la couleur de mes cheveux vient me jouer un tour, mais je trouvais que l'application entre la facture élève et le nombre d'élèves que vous recevez venait me jouer un tour, là, dans ce que je voyais, là, entre le revenu qui augmente de 45 %, alors que votre effectif étudiants étrangers n'augmente de 4,5 %... Je me demandais s'il y avait...

**(16 heures)**

M. Patry (Michel): Est-ce que vous avez l'endroit dans le rapport où on évoque ça, parce que...

Mme Charbonneau: Ce n'est pas un document, je pense, que vous avez. C'est un document que, moi, j'ai, mais je le lis peut-être de façon...

M. Patry (Michel): D'accord. Je vais m'aventurer à deux... Je vais m'aventurer à une ou deux remarques. Je serais étonné, là, que...

Mme Charbonneau: Ne bougez pas, ne bougez pas, dérangez-vous pas, ça a l'air que c'est ma couleur de cheveux qui vient de me jouer un tour, c'est de la façon que je lisais la phrase. Ma collègue d'à côté vient de me susurrer à l'oreille que le 4,5 %, ce n'est pas vous, c'est moi. Donc, je vais me limiter à ça. Je vais me raccrocher à une autre question.

Lors des dernières auditions, vous avez souligné avoir mis en place une bourse d'accélération pour les étudiants en doctorat. Je me demandais... pour qu'ils terminent leurs travaux plus rapidement, là. Je me demandais: Vous en êtes rendus où ou quel est le bilan que vous faites de ça? Puis, bien honnêtement et bien innocemment, puisque, tant qu'à avoir l'air folle, on va le faire à temps plein...

Une voix: ...

Mme Charbonneau: ...je trouve ça drôle de les faire sortir rapidement, puisque c'est les services et tout ce qui va avec qui fait que vous recevez un financement, donc le bilan que vous faites de la rapidité pour y arriver.

Le Président (M. Pigeon): M. le directeur, je me permets de vous signaler qu'il reste un tout petit deux minutes pour votre réponse.

M. Patry (Michel): D'accord, M. le Président. Alors, nous avons implanté ce programme. Il a eu beaucoup de succès. Donc, non seulement on a dépensé toutes les sommes qu'on avait ciblées, mais il y a une demande pour continuer.

La question sur la durée, que vous évoquez, c'est qu'au doctorat chez nous... Mais c'est un problème assez généralisé. En tout cas, en administration... en administration... je siège sur un conseil international, américain principalement, et c'est une question qui est souvent discutée. Les gens prenaient beaucoup, beaucoup de temps, faisaient toute leur scolarité, déposaient... et prenaient jusqu'à sept ans, huit ans pour compléter, ce qui cause toutes sortes de problèmes et qui augmentait le taux de non-complétion des études.

Donc, ce programme d'accélération visait à faire en sorte que les gens, dès qu'ils avaient défendu leur proposition de thèse, demeuraient à plein temps pour faire la thèse évidemment jusqu'à la fin ou en faire un grand bout, et ça a assez bien fonctionné, à telle enseigne que, là, on est en train de revoir ce programme pas pour le diminuer, mais pour voir quelle est la taille optimale qu'on peut y donner. Parce qu'on pourrait augmenter de façon très significative la taille de notre doctorat. On a déjà, à peu près, 140 candidats au doctorat chez nous. C'est un programme très coûteux, également. Mais on pense qu'il nous reste un rôle à jouer.

On a un rôle important à jouer, comme institution, de produire des spécialistes qui vont se disséminer un peu partout au Canada et dans le monde. Alors, ça a eu beaucoup de succès.

Le Président (M. Pigeon): Alors, merci, M. le directeur. Et donc je passe la parole du côté de l'opposition, au député de Drummond. M. le député de Drummond.

M. Blanchet: M. le directeur, bonjour. J'ai entendu dans votre réponse, tout à l'heure, à mon collègue que le revenu par étudiant était plus important que là d'où allait venir l'argent.

Ma question a quelque chose d'un peu historique, mais vous connaissez ça mieux que moi. Les HEC seront reconnues historiquement comme ayant été un élément essentiel de l'émancipation économique des Québécois francophones, comme outil, comme fer de lance pour entrer dans le monde des affaires. La question est fort simple: Est-ce que les HEC auraient existé si les droits de scolarité des HEC avaient été au même niveau que ce qui se pratique dans les grandes institutions canadiennes et américaines, en anglais?

M. Patry (Michel): C'est une question intéressante, très hypothétique, là, parce que ce que vous me demandez de faire, c'est d'essayer d'évaluer s'il y a 50 ans on avait eu des droits de scolarité très différents... si on aurait joué le même rôle social.

Moi, j'avancerais, pour avoir... je ne vous parlerai pas de 75 ans, mais, si je regarde les 30 dernières années, les droits de scolarité au Québec étaient beaucoup plus près de la moyenne des droits de scolarité dans l'ensemble du Canada il y a 30 ans qu'ils ne le sont aujourd'hui. Ça n'a pas empêché l'école, depuis les années soixante, de voir le développement qu'elle a eu. Et ça ne l'empêcherait pas, d'après moi, de jouer avec efficacité ce rôle-là s'il y avait une contribution un peu plus substantielle exigée des étudiants. Mais ça, c'est une projection, si vous voulez.

J'essaie de répondre à votre question, là, de la manière la plus directe possible. Mais j'attire votre attention sur le fait que les droits de scolarité, au début de... fin des années soixante, début des années soixante-dix, au Québec étaient beaucoup plus près, en termes réels, des droits de scolarité dans l'ensemble du Canada qu'ils ne le sont aujourd'hui. Donc, il y avait une sorte de décrochage par rapport à la moyenne nationale.

M. Blanchet: Et, très rapidement, existe-t-il des écoles d'administration hautement prestigieuses dans des juridictions où les droits de scolarité sont équivalents ou moindres qu'au Québec, qui soient malgré tout prestigieuses et auxquelles vous voudriez être comparés, même si les droits de scolarité sont inférieurs?

M. Patry (Michel): Écoutez, il y a environ 12 000 écoles de gestion dans le monde, là. Il y en a certainement...

M. Blanchet: ...en Allemagne...

M. Patry (Michel): En Angleterre, en Allemagne, il y en a plusieurs semblables. Il y a des... Par exemple, dans les pays nordiques, Copenhague a une «business school», et une des meilleures écoles dans le monde en dehors de l'Amérique du Nord, certainement reconnue. Je crois qu'à CBS les droits de scolarité sont virtuellement nuls, ils sont tous, presque, totalement symboliques. Il y a un financement public par contre qui est beaucoup plus important. Donc, la réponse à votre question, c'est: Oui, il y a des cas, il y a certainement des cas qu'on pourrait documenter.

Vous ne trouverez pas d'école comme ça. Vous en trouvez très peu en Europe. Là où les droits de scolarité sont totalement symboliques ou nuls, en France par exemple, vous n'avez pas d'école très importante. Vous avez le régime des grandes écoles françaises qui est complètement disjoint des universités. L'Angleterre, ce n'est pas le cas non plus. Puis, l'ensemble du Canada, vous avez... bien, je vous ai décrit la moyenne tantôt, là. On n'est pas si dramatiquement loin, là, de cette moyenne. Mais, oui, on peut trouver quelques points.

M. Blanchet: Merci.

Le Président (M. Pigeon): Ça va, monsieur?

M. Blanchet: Oui.

Le Président (M. Pigeon): Alors, nous revenons donc, pour la dernière part donc, à Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Oui. Merci. Je sens que le temps se resserre, mais j'aimerais aborder une question que vous avez touchée à quelques reprises depuis les deux dernières heures, mais j'aimerais que vous me la situiez un peu dans le temps, c'est tout le volet recherche, qui est un volet en grand développement aux HEC, qui est moins une évidence au départ quand on crée une école de gestion, tout au moins. Bon, je parle peut-être aussi avec ma propre façon de voir les disciplines, mais mon souvenir, c'est qu'au point de départ... alors que, si on a, je ne sais pas, moi, une faculté des sciences exactes, c'est absolument évident que la recherche est intrinsèquement liée au développement de ces secteurs. En gestion, ça n'a pas été évident toujours.

Or, j'aimerais que vous me refassiez peut-être rapidement un peu l'histoire du développement de la recherche et que vous me situiez bien à quel point maintenant c'est essentiel, et vous vous situez dans des créneaux d'avenir de ce point de vue là.

**(16 h 10)**

M. Patry (Michel): Très belle et vaste question! J'adore cette question.

Je vous dirais, encore une fois, avec beaucoup de justesse, vous avez lu la situation des écoles de gestion. Quand je disais que les précurseurs et les fondateurs de l'école ont pris leur modèle des grandes écoles en Europe et l'ont transplanté en Amérique du Nord, les grandes écoles ne font pas de recherche, ne faisaient pas de recherche, en faisaient même relativement peu, jusqu'à tout récemment. Et tout de suite, entre les années 1907 et 1925, tout de suite les deux premiers directeurs d'école, qui étaient des Belges par ailleurs, ont pris cette décision de dire qu'en transposant le modèle des grandes écoles en Amérique du Nord il fallait développer le vecteur de la recherche. Entre 1907 et 1920, cette recherche s'articulait principalement autour de deux domaines: les méthodes quantitatives, les mathématiques, les statistiques, et l'économie. Et c'est ce qui a donné, dès le départ, à l'école une couleur un peu différente des autres écoles d'administration qui ont commencé à pousser ailleurs, où la recherche n'est apparue que dans les années soixante-dix, quatre-vingt.

HEC, pour une raison historique, là, la vision de ses premiers directeurs, il a été entendu... Et il y a eu un débat. Et, si vous lisez l'histoire de l'école, par Pierre Harvey, il fait état de ce débat qui a fait rage. Pour nous, les universitaires qui sont autour de la table, vous vous amuseriez à voir ça, parce qu'il y a des gens qui ont dit: Non, «it's a trade school», c'est une école qu'on doit construire sur le modèle de... qu'il y avait quelques écoles aux États-Unis... des «trade schools» pour former des comptables, on n'a pas besoin de recherche. Et tout de suite les Européens, qui étaient économistes ou mathématiciens de formation, ont dit: Non, si c'est pour être dans le réseau universitaire, il faudrait qu'il y ait de la recherche.

C'était visionnaire parce qu'on sait maintenant que la recherche est le support, un soutien indispensables au développement des cycles supérieurs. C'est l'outil pour nous assurer qu'on est à la fine pointe des connaissances et c'est l'outil qui nous permet de transférer, dans la communauté, les résultats de la recherche les plus pertinents. Parce que, moi, un des développements les plus importants des cinq dernières années à l'école, c'est qu'on a beaucoup investi dans le transfert de connaissances, donc prendre les résultats de la recherche et les rendre accessibles à la communauté. Ceci n'est possible que si vous avez des traducteurs et des gens qui sont habilités à identifier les éléments fondamentaux.

Donc, pour conclure, cette lecture amène maintenant presque toutes les écoles de gestion dans le monde, à l'extérieur de l'Amérique du Nord et donc principalement en Europe, à investir dans la recherche. Et là vous avez les grandes écoles et les écoles européennes qui faisaient relativement peu de recherche, qui font d'énormes investissements pour tenter de se construire une base de recherche, alors que les écoles américaines en particulier, pour toutes sortes de raisons, avaient commencé à faire des investissements significatifs. Le Québec a été très chanceux encore une fois à cette enseigne parce que pas juste HEC, mais McGill, Concordia, l'UQAM, Sherbrooke, toutes les universités au Québec assez tôt ont pris l'orientation de développer des programmes de recherche. Et les universités québécoises donc en gestion sont bien dotées en recherche.

Pour l'école, l'enjeu est majeur. Parce que, si vous prétendez que vous êtes à la fine pointe dans certains créneaux, vous devez pouvoir attester de cela en disant que vous avez des gens qui publient dans les meilleures revues, qui sont dans les circuits, et c'est ce que notre bilan de recherche atteste, je pense.

Mme Malavoy: Là-dessus, j'imagine, c'est terminé?

Le Président (M. Pigeon): Il reste peut-être deux ou trois minutes, là, madame...

Mme Malavoy: Bien, écoutez, je vais juste enchaîner. Est-ce que vous pensez, et j'ai bien vu vos ambitions, pouvoir maintenir cette avance? Dans le fond, vous êtes au confluent de deux cultures, ce qui est aussi un des avantages du Québec, de façon générale, d'avoir à la fois une inspiration européenne pour les bonnes choses et une inspiration nord-américaine pour les bonnes choses, et on peut faire le meilleur avec ces deux sources. Est-ce que vous avez bonne confiance donc de maintenir votre, je dirais, avantage concurrentiel, de ce point de vue là, particulièrement dans le domaine de la recherche, puisqu'on termine là-dessus?

M. Patry (Michel): Tout à fait. Et, je te dirais, je le croyais lorsque, dans une vie antérieure, j'étais directeur de la recherche ou du doctorat et par la suite... et j'en ai même la plus profonde conviction depuis que j'ai le privilège d'être directeur de l'école parce que je vais davantage à l'étranger.

Et ce que je vois pour l'école, c'est cette possibilité d'affirmer cette identité, de profiter, dans le fond, de notre double appartenance à l'espace européen et nord-américain. Le potentiel de recherche qu'il y a chez nous est énorme, mais je le vois pour les universités québécoises en général. Et, encore une fois, c'est pour ça que je pense qu'on doit avoir de grandes ambitions au Québec. Nous avons un réseau universitaire qui est déjà très, très bon, qui a d'excellentes antennes et un bon ancrage et qui peut offrir une solution et une proposition extrêmement intéressantes pas juste pour le Québec, mais pour le monde.

Le Québec a quelque chose à offrir au monde, et je ne vois pas pourquoi on garderait ça comme un secret bien gardé. Et ce n'est pas le fait de l'école. Je veux dire, je regarde, moi, je suis au conseil de l'Université de Montréal, je regarde, c'est un trésor, il y a beaucoup de... Je sais que c'est vrai à Sherbrooke, je sais que c'est vrai à Laval, je sais que c'est vrai... Mon collègue évoquait des collaborations au Québec. C'est une autre chose, la culture québécoise, qu'on a développée, qui n'existe à peu près pas. Moi, je me promène dans le monde, je décris à des gens qu'il y a des centres de recherche dans lesquels il y a six universités en recherche opérationnelle, par exemple, ou en logistique. Les gens sont complètement étonnés. Et on le fait. Et on ne s'en rend pas compte. On fait ça depuis longtemps, et ça marche.

Donc, je crois qu'on est autorisés à avoir de grandes ambitions. Et je conclus là-dessus en vous disant: Vous avez un rôle important pour porter cette ambition puis pour inviter les participants à... toutes les parties prenantes au système universitaire à offrir ce qu'elles ont de mieux et ce qu'elles ont de meilleur au monde entier.

Le Président (M. Pigeon): Alors, merci, M. le directeur. Merci aux personnes qui vous accompagnent. Merci à mes collègues de l'Assemblée.

Et nous allons suspendre quelques brèves minutes, le temps d'accueillir les représentants de l'École nationale d'administration publique.

(Suspension de la séance à 16 h 15)

 

(Reprise à 16 h 23)

Le Président (M. Pigeon): À l'ordre, s'il vous plaît!

Une voix: ...

Le Président (M. Pigeon): Mais je constate quand même que le quorum est de retour. Alors, je voudrais rappeler, là, tout de suite, maintenant que les représentants de l'École nationale d'administration publique sont installés, rappeler le temps alloué pour la période de présentation et la période d'échange, soit 30 minutes pour l'exposé de l'institution universitaire et 1 h 45 min pour les échanges avec les membres de la commission.

Et, d'entrée de jeu, je demanderais au directeur général de l'École nationale d'administration publique de s'identifier et de présenter les gens qui l'accompagnent.

École nationale d'administration
publique (ENAP)

M. Proulx (Marcel): Merci, M. le Président. Je suis Marcel Proulx, je suis le directeur général de l'ENAP. Je suis accompagné de deux membres de notre équipe de direction: M. Nelson Michaud, qui est le directeur de l'enseignement et de la recherche, et Mme Madeleine Moreau, qui est directrice des services aux organisations.

La délégation de l'ENAP, je voudrais le souligner de l'arrière-ban, comprend aussi des représentants de notre association étudiante, dont son président, M. Widler Jules.

Le Président (M. Pigeon): Merci. Et donc, M. Proulx, allez-y pour votre exposé.

M. Proulx (Marcel): D'abord, je veux vous dire que je suis très heureux d'avoir l'occasion de présenter à cette commission un bilan de nos réalisations, en particulier cette année, au moment où l'ENAP arrive au terme de son plan stratégique 2004-2010. Nous avions un plan sur six ans qui arrive à son terme. Vous nous donnez ainsi la chance de mieux faire connaître notre institution, dont on pense qu'elle n'est pas encore suffisamment connue, et de parler de nos réalisations, des réalisations dont nous voulons dire, en toute absence de modestie, que nous sommes particulièrement fiers.

Ma présentation se déroulera en trois temps. Dans un premier temps, je vous présenterai l'ENAP, sa mission, ses principaux champs d'activité. Dans un deuxième temps, je tracerai avec vous un bilan sommaire des réalisations de notre plan stratégique sur six ans en évoquant, on le sait, les réalisations de notre institution au cours des deux années et demie qui se sont écoulées depuis la dernière comparution devant cette commission. Et puis finalement j'évoquerai avec vous les perspectives d'avenir de l'école en soulevant quelques enjeux qui nous préoccupent particulièrement.

Quelques mots d'abord pour présenter l'école, et il faut le faire. Vous le savez, le milieu universitaire est très diversifié, et toutes les universités ne sont pas sur le même modèle. Je disais tout à l'heure à mon collègue Michel Patry que j'allais nous présenter comme le HEC de l'administration publique. Vous verrez qu'il y a beaucoup d'éléments qui se ressemblent dans nos deux institutions mais que nous avons nos particularités propres.

Quelques mots d'abord sur la mission de l'école. L'école est née en 1969, comme le reste du réseau de l'Université du Québec, est née de la volonté de doter le Québec d'une institution de haut savoir, d'une institution universitaire dans le domaine de l'administration publique à une période de turbulence dans la constitution de l'administration québécoise afin de favoriser le développement d'une gestion publique moderne et rigoureuse. L'ENAP s'est donc vu confier comme mission de contribuer au développement de l'administration publique au Québec à la fois comme champ de pratique et comme champ de connaissances, ce qui explique que nous sommes une école professionnelle certes tournée vers la pratique mais aussi une école qui a une vocation dans le domaine de la recherche. Cette mission particulière de notre institution concerne tous les secteurs de l'administration publique.

Même si on a longtemps cru que l'ENAP était l'ENAP de la fonction publique québécoise, notre mission couvre tous les secteurs: non seulement la fonction publique québécoise, mais aussi la fonction publique fédérale au Québec, le secteur de la santé, de l'éducation, des services sociaux, des affaires municipales et aussi des affaires régionales. Nous formons, en outre, des gestionnaires des sociétés d'État, du milieu policier, nous avons de plus en plus de policiers, des militaires et des cadres d'organismes sans but lucratif, bref avec une vision large de ce qu'est l'administration publique et du secteur public. J'ai envie de dire pour paraphraser un homme célèbre que rien de ce qui touche à la gestion publique ne nous est étranger.

Sur le territoire de notre institution, parce qu'il y a des débats sur le territoire d'intervention, vous le savez, des universités québécoises, l'ENAP a une vocation claire, de répondre aux besoins de formation en gestion publique sur l'ensemble du territoire québécois. En pratique, cela se traduit pour nous par des implantations permanentes à Québec, évidemment où est notre siège social, mais aussi à Montréal, à Gatineau, à Saguenay, à Trois-Rivières. Nous sommes aussi partout... sans avoir d'implantation permanente, un peu partout au Québec, partout où se constituent des groupes qui réclament notre présence. Nous privilégions en cela les demandes des acteurs du milieu, en particulier les acteurs institutionnels, y compris nos collègues des institutions à vocation régionale. Je vous parlerai tout à l'heure des collaborations que nous avons, par exemple, avec l'UQO dans la région de Gatineau et avec l'UQAT en Abitibi-Témiscamingue. C'est ainsi que nous avons offert... ou offrons actuellement des programmes en Beauce-Appalaches, dans l'Estrie, en Montérégie, dans les Laurentides, dans Lanaudière, dans la région du Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie et en Abitibi.

L'ENAP, vous l'aurez compris, est une université atypique, une université à part entière, mais une université atypique à plusieurs égards. Atypique d'abord parce que nous n'oeuvrons qu'aux deuxième et troisième cycles. Le seul équivalent dans ce domaine, c'est l'INRS; ensuite, parce qu'elle se limite à un seul champ d'activité, celui de l'administration publique. La clientèle de l'école nous distingue aussi des autres universités: environ les deux tiers de notre clientèle étudiante est constituée de praticiens de l'administration publique qui étudient à temps partiel, ce qui laisse en gros 35 % de notre clientèle constituée d'étudiants qui proviennent directement du baccalauréat et qui ne sont pas en emploi, sinon pour des emplois à temps partiel. L'ENAP est aussi exceptionnelle par la place qu'y occupent ce qu'on appelle chez nous les services aux organisations, c'est-à-dire des services qui sont non subventionnés, destinés à appuyer les organisations publiques dans leurs activités. J'en dirai quelques mots par la suite. Ces services aux organisations, qui sont des services tarifés, vendus, sur une base concurrentielle, aux organisations publiques, comprennent à la fois des formations de courte et de moyenne durée non créditées, ce qu'on appelait jadis du perfectionnement; des activités de conseil en gestion -- nous sommes de plus en plus actifs en conseil en gestion auprès des organisations publiques; des activités aussi d'évaluation de compétence à des fins de sélection mais aussi à des fins de développement des personnes.

Les services aux organisations, et c'est, je pense, là une particularité de notre école, font partie intégrante de la mission de l'école au même titre que l'enseignement accrédité et la recherche scientifique.

**(16 h 30)**

Enfin, l'ENAP est aussi atypique par la place importante qu'elle accorde aux praticiens dans son corps enseignant et de recherche. Non seulement la majorité de nos chargés de cours sont des praticiens d'expérience, mais en outre l'école accueille en son sein une vingtaine d'administrateurs en résidence, fonctionnaires prêtés à l'ENAP ou jeunes retraités, qui contribuent à ancrer nos formations et l'ensemble de nos activités, y compris en matière de recherche, dans la pratique. Vous verrez, cette idée d'ancrage dans la pratique constitue chez nous une sorte de leitmotiv de notre action.

Je ne voudrais pas vous accabler de chiffres, mais je vous propose quelques chiffres qui vous donneront une idée de l'envergure de l'ENAP et de sa progression récente. L'ENAP a des revenus de l'ordre de 30 millions, en croissance de 15 % depuis deux ans. Nous avons doublé nos revenus au cours des 10 dernières années... enfin, plus que doublé, nous étions, il y a neuf ans, à 14 millions, nous sommes autour de 30. Notre clientèle étudiante est constituée d'à peu près 2 000 étudiants qui représentent environ 815 équivalents temps complet. Cette clientèle a augmenté de 11 % au cours des deux dernières années. La moitié de notre clientèle est à Montréal, où se trouve la plus grande partie des agents publics, pas dans la fonction publique, mais dans les institutions publiques. Donc, la moitié de notre clientèle est à Montréal. Environ le quart étudie à Québec, et puis le reste est éparpillé partout, sauf à Gatineau, qui représente à peu près la moitié de Québec.

Les activités de services aux organisations, pour leur part, ont généré, l'an dernier, des revenus de 6 millions de dollars sur un budget de 30 millions. Ce n'est pas négligeable. Et, si on ajoutait à cela les quelque 2 millions d'activités internationales et autour de 2 millions de recherches commanditées, on se rend compte que l'école est à presque 40 % autofinancée et ne dépend pas, à cet égard, des subventions à l'enseignement. Nos activités de formation continue ont rejoint, l'année dernière, 11 000 jours-personnes avec une clientèle, en personnes, de l'ordre de 7 000 personnes. Donc, assez considérable.

Le personnel d'enseignement et de recherche est constitué d'autour de 200 personnes: 43 professeurs réguliers, 30 professeurs invités et associés, où on retrouve ces praticiens qui interviennent dans l'enseignement, 34 professionnels de recherche et 88 chargés de cours. Une centaine de formateurs associés, encore là, des praticiens, contribuent par ailleurs aux activités de services aux organisations. Une bonne part d'entre eux sont des retraités. Je le souligne parce qu'alors qu'on parle de transfert d'expertise, de départs à la retraite, qu'on s'inquiète de cette perte de compétences chez des gens qui partent à la retraite à un âge que je n'oserais qualifier d'indécent mais à un âge où on est encore capable de donner beaucoup nous croyons qu'il est important de récupérer cette compétence dans un milieu universitaire, qui est un milieu favorable à son expression, et de la redonner aux organisations publiques. Et ça marche fort bien.

Parlons maintenant, si vous le voulez bien, de la vision stratégique qui a animé et qui anime le développement de l'école. Notre plan stratégique, qui arrive à son terme, retenait quatre orientations majeures, et j'y reviendrai dans la présentation de nos réalisations: la première: assurer une plus grande pertinence aux actions de l'école par un meilleur ancrage dans le milieu -- c'est le leitmotiv que j'évoquais tout à l'heure; la deuxième orientation visait à accroître la visibilité et le rayonnement d'une école jusque-là un peu trop discrète -- nous avons toujours considéré chez nous que le bien ne faisait pas de bruit, nous pensons maintenant que le bien doit faire du bruit; troisième orientation: étendre l'occupation du territoire de l'administration publique... notre occupation du territoire de l'administration publique par une meilleure emprise dans les régions, je l'ai évoqué tout à l'heure, et par la pénétration de secteurs de l'administration publique qui jusque-là ont été négligés; dernier objectif qui tient au fait que la femme de César doit être irréprochable: nous pensons que notre gestion doit être exemplaire notamment en matière de rigueur budgétaire et de saine gouvernance. Je l'évoquerai par la suite.

Une conviction forte sous-tend l'ensemble de ces orientations, c'est celle selon laquelle notre école n'a de raison d'être que si elle répond aux besoins actuels et anticipés de l'administration publique québécoise et que si elle sait mettre son expertise au service de l'action, bref tout le contraire de la tour d'ivoire, tout le contraire aussi de la complaisance, mais tout le contraire de la tour d'ivoire.

Si vous le voulez bien, je vous parlerai maintenant des réalisations qui découlent de ce plan stratégique. Qu'avons-nous fait à partir de ces grandes orientations? D'abord, il faut dire que le plan stratégique, de façon transversale, mettait résolument l'accent sur la croissance du volume d'activités de l'école. Cette orientation, croyons-nous, s'imposait si nous voulions être en mesure de répondre aux demandes d'un milieu qui nous sollicite énormément. Ces attentes découlaient et découlent toujours de l'augmentation considérable des besoins de formation en gestion publique au moment où les organisations publiques doivent composer avec des départs massifs à la retraite, renouveler leurs effectifs avec des jeunes qui ont une compétence de base certaine mais une connaissance et des savoir-faire dans le domaine de la gestion publique plutôt limités.

Elles tiennent aussi, ces demandes, à l'évolution marquée des pratiques de gestion dans le secteur public, qui obligent à des investissements importants en matière de formation continue des gestionnaires mais aussi des professionnels de l'Administration. Donc, accent sur la croissance. Les résultats, il faut bien le dire, ont été au rendez-vous. Les données quantitatives relatives à l'évolution de l'ENAP au cours de cette période de six ans montrent que le développement de l'école a été, et je le dis sans aucune modestie, très impressionnant. Nos revenus ont crû de l'ordre de 39 % en six ans, ce qui est quand même significatif, avec une augmentation de la clientèle des programmes crédités de 21 %.

Une croissance de l'effort de recherche. Notre école avait beaucoup de chemin... avait un peu de retard en matière de recherche. Notre croissance de l'effort de recherche en termes de subventions et de contrats a été de l'ordre de 130 % en six ans, ce qui est loin d'être négligeable, et une croissance du même ordre, autour de 130 %, des services aux organisations, donc formation continue, services-conseils, évaluation des compétences, etc. On peut donc en conclure que, si le test de marché est significatif, et on pourrait avoir une discussion sur le véritable test de marché, notre conviction, c'est que, dans un domaine comme le nôtre, où personne n'est obligé de venir à l'ENAP, personne n'a besoin d'un diplôme en administration publique pour faire carrière dans la gestion publique, personne n'a besoin de cette formation, elle n'est pas impérative... que la croissance de la demande est un excellent indicateur de notre pertinence.

Je l'évoquais tout à l'heure, le premier axe de notre plan stratégique, au-delà de cette vision générale de la croissance, portait sur la nécessité d'être ancrés dans notre milieu comme source de pertinence. Nous sommes convaincus que nous n'avons pas d'autre... nous n'aurions pas raison d'exister si nous cessions d'être ancrés sur les besoins des administrations, non seulement les besoins actuels, mais les enjeux prévisibles. Il ne s'agit pas d'être à la remorque de ce qui se fait, sinon être à la remorque des courants de modes, mais d'être capables de saisir où en est le milieu et d'être capables d'anticiper ses besoins en matière de formation pour que les gens que nous formons et qui sortiront dans cinq ans, six ans peut-être soient équipés pour faire face aux défis non seulement de maintenant, mais aux défis de l'avenir. Cette volonté de pertinence s'est traduite aussi bien dans nos programmes crédités que dans nos activités de recherche ou nos activités de services aux organisations.

Parlons d'abord de ce que nous avons fait en matière de programmes de formation crédités. Je l'ai évoqué tout à l'heure, on pense que nos programmes de formation supérieure, qu'il s'agisse de former des gestionnaires, parce que nous formons à la fois des gestionnaires et des analystes, nos plus âgés... nos plus âgés, qui ont 35 ans, et nos plus jeunes qui ont en gros 10 ans de moins, qui seront plutôt des professionnels... que ces formations n'ont de sens que si elles sont tournées vers la pratique. Il est donc essentiel pour nous, et nous y investissons beaucoup d'énergie, d'adapter de façon permanente nos programmes à la réalité des organisations et des gestionnaires publics. C'est pourquoi nous maintenons une veille systématique sur l'évolution des organisations publiques et sur l'enseignement du management public au Québec, au Canada, dans le monde de façon à pouvoir adapter en permanence nos programmes. Et nous profitons en cela de l'expertise reconnue de notre Observatoire de l'administration publique que, je pense, vous connaissez bien.

Notre souci de pertinence se manifeste aussi dans l'importance qu'on accorde chez nous à l'évaluation des enseignements. Tous les cours font l'objet d'une évaluation systématique, et loin d'être complaisante, de la part des étudiantes et des étudiants, cette évaluation portant à la fois sur les pratiques pédagogiques et sur la pertinence des cours proprement dite. Même si le questionnaire d'évaluation à chaud est un outil imparfait, il pousse chez nous les professeurs à se questionner en permanence sur la qualité de leur enseignement. Les résultats globaux de cette évaluation témoignent de ce souci constant de qualité et de pertinence pédagogiques. En effet, la moyenne de satisfaction de la clientèle étudiante se maintient, année après année, autour de 90 %, ce qui, pensons-nous, est à peu près le maximum qu'on puisse attendre.

**(16 h 40)**

La pertinence passe aussi par le développement de formats d'enseignement qui permettent de favoriser l'accessibilité géographique à nos programmes.

J'ai évoqué tout à l'heure cette volonté de rejoindre les groupes partout où ils sont sur le territoire, mais il arrive que, dans certains milieux, le nombre d'administrateurs publics à former est trop faible pour que nous puissions y aller, et c'est dans cette perspective que nous avons développé un programme d'abord de D.E.S.S., éventuellement qui deviendra un programme de maîtrise, à distance... à grands frais, mais on pense que cette offre à distance, dans un milieu où nous avons une vocation qui couvre l'ensemble du territoire, est essentielle.

Il serait sans doute trop long d'énumérer ici l'ensemble des transformations qu'on a apportées en six ans à nos programmes pour s'assurer qu'ils soient toujours aussi utiles et aussi attractifs. Mais, au vu de l'augmentation de nos clientèles étudiantes, nous avons toutes les raisons de croire que nous avons fait les bons choix, puisque nous attirons toujours plus de clients, alors que pourtant le discours actuel sur la gestion publique n'encourage pas vraiment les études en administration publique. Je l'évoquerai dans les menaces qui pèsent sur l'école mais aussi sur l'administration publique.

Un mot sur les services aux organisations, maintenant. Dans les services aux organisations, la pertinence, c'est un souci, pour ainsi dire, existentiel. Dans la mesure où nous vendons nos services à des organisations publiques sans aucune trace de monopole ni même de préférence, bien nos clients, qui sont à la fois des administrateurs publics mais aussi des organisations publiques, ne s'adressent à nous que lorsqu'ils sont convaincus et que parce qu'ils sont convaincus que nos formations, nos services leur sont utiles. La croissance spectaculaire, je l'ai évoqué tout à l'heure, qu'ont connue les services aux organisations montre bien que nous avons passé avec succès le test de pertinence. Cette poussée de croissance découle des efforts considérables qu'on a consentis chaque année pour renouveler le portefeuille d'activités de formation offertes aux gestionnaires. Elle résulte aussi du souci d'établir des partenariats.

Nous avons établi systématiquement des partenariats avec les organisations publiques, avec les acteurs institutionnels du secteur public québécois, à commencer par le Secrétariat du Conseil du trésor, le Secrétariat aux emplois supérieurs du ministère du Conseil exécutif et le Centre de services partagés. Nous avons aussi établi des partenariats, donc des relations durables, qui s'inscrivent dans une perspective à moyen, parfois même à long terme, avec plusieurs ministères et avec des associations de cadres.

Bref, nous sommes à la recherche, et ça fait partie de notre stratégie d'ancrage, de liens durables avec l'ensemble... avec le plus grand nombre de partenaires du milieu de l'administration publique.

Le souci de pertinence s'est aussi, en matière de services aux organisations, traduit par la volonté d'élargir la palette des services offerts aux organisations publiques. C'est ainsi qu'au cours des dernières années l'école a beaucoup investi dans le développement de ses services de mesure puis d'évaluation des compétences. Nous avons la prétention d'être en pointe mondiale dans ce domaine, donc évaluation des compétences aussi bien à des fins de service aux personnes, aider le développement des personnes en leur renvoyant une image de leurs compétences, qu'à des fins de sélection. C'est un secret bien gardé, il commence à l'être un peu moins, le rôle que joue l'école dans la sélection des cadres supérieurs dans la fonction publique mais aussi dans les réseaux de diverses catégories de cadres, en particulier aux niveaux très supérieurs.

L'ENAP a aussi étendu son offre de services aux activités de conseil stratégique et d'accompagnement des organisations. Elle a pour cela systématiquement recours à des retraités du secteur public qui s'ajoutent à l'expertise propre de l'école. Elle s'est notamment associée à cette fin à un regroupement de hauts fonctionnaires retraités, connu sous le nom de Réseau d'expertise en conseil stratégique, dans lequel on retrouve, par exemple, l'ancien secrétaire général du gouvernement et plusieurs personnalités de la haute fonction publique québécoise.

Finalement, l'offre de services aux organisations s'est aussi élargie pour inclure de nouveaux modes de formation complémentaires par rapport aux activités traditionnelles. On parle ici de services d'accompagnement, de coaching, comme on dit, de services d'accompagnement, de mentorat, etc., de tout ce qui concerne les nouvelles formes non traditionnelles de formation et d'accompagnement des personnes.

Quelques mots sur la recherche, maintenant. La question de la pertinence se pose avec la même acuité en matière de recherche. Comme toutes les universités, l'ENAP s'attend à ce que ses professeurs contribuent à l'avancement des connaissances et à l'innovation dans leurs domaines. Ça va de soi. Mais, dans une université à caractère professionnel comme la nôtre, cela implique que l'on favorise particulièrement la recherche appliquée en phase avec les enjeux actuels de la gestion publique et en cherchant à anticiper les enjeux d'avenir. C'est dans cette perspective que l'ENAP s'est dotée, au cours des deux dernières années, d'une politique de recherche et d'un ambitieux plan de recherche... plan de développement de la recherche.

La croissance remarquable de l'effort de recherche, en tout cas des subventions et contrats de recherche au cours des six dernières années, montre bien la priorité qui a été accordée chez nous à cet élément du développement de l'école. Ce développement a principalement reposé sur la création de pôles d'expertise, regroupements de chercheurs autour de thématiques porteuses. Ces centres de recherche s'investissent non seulement dans la recherche subventionnée classique, ça va de soi, qui a énormément progressé à partir d'un niveau relativement faible, presque rudimentaire, maintenant nous sommes dans la bonne moyenne des universités québécoises, mais aussi dans des recherches contractuelles. Nous considérons que la recherche contractuelle, la recherche commanditée, comme on disait avant le fameux scandale, que la recherche contractuelle est une source d'ancrage dans l'administration publique mais aussi une façon de redonner aux organisations publiques l'expertise dont nous disposons dans notre école.

Outre l'Observatoire de l'administration publique, qui existait avant 2004 mais qui s'est beaucoup développé depuis six ans, on a vu émerger à l'école un bon nombre de nouveaux centres de recherche. J'en nomme quelques-uns: le Centre de recherche et d'expertise en évaluation; le Laboratoire sur les politiques publiques et la mondialisation, qui est financé par le ministère des Relations internationales; le Centre de recherche sur la gouvernance; la Chaire de la Capitale en leadership dans le secteur public; et le Groupe d'études sur les politiques publiques et la santé. Et je vous annonce en primeur que nous recevrons très bientôt deux nouvelles chaires Canada qui s'ajouteront à ces pôles d'expertise. La recherche est ainsi passée, en six ans, d'un mode relativement artisanal, reposant surtout sur le travail de professeurs isolés, à un mode plus collectif misant sur des équipes de professionnels de recherche regroupées autour des professeurs. Bref, nous avons largement modernisé notre effort de recherche.

Le plan stratégique insistait aussi sur l'importance des relations avec l'association étudiante et les diplômés comme outil d'ancrage dans le milieu. Bien que les relations avec notre association étudiante soient excellentes, je dois le dire, nous n'avons pas encore acquis le réflexe d'associer systématiquement celle-ci à la réflexion sur le développement de nos programmes. Il faudra faire mieux sur ce plan à l'avenir. Il faut cependant souligner que c'est à la demande insistante de notre association étudiante que nous avons renforcé de façon marquée notre offre de services aux étudiants.

Troisième axe du plan: notoriété de l'école. Je l'ai évoqué, notre école était une école confidentielle, discrète, connue des seuls initiés. Nous avons voulu, à une époque où on doit attirer des jeunes vers les métiers de l'administration publique et non pas seulement des gens de l'administration publique, étendre cette image, et c'est pour cela que nous nous sommes dotés d'une politique et d'un plan de développement de l'image de l'école qui commencent déjà à porter fruit. Cette stratégie mise sur deux composantes majeures. D'une part, nous avons incité nos professeurs à être davantage présents dans les médias et à se prononcer sur les enjeux de l'administration publique qui font l'actualité en reconnaissant que, dans une école d'administration publique, cela fait partie intégrante de la tâche du professeur que d'être présent dans les médias, avec les risques que ça comporte, mais qu'on est prêts à assumer. D'autre part, nous avons organisé systématiquement des activités de réflexion portant sur divers aspects de la gestion publique. Cette stratégie a porté fruit, du moins dans le milieu de l'administration publique, puisqu'une étude de notoriété réalisée récemment a démontré que nous sommes bien connus par les professionnels et gestionnaires publics et que la très grande majorité d'entre eux ont une image positive de notre action.

Il reste cependant beaucoup de travail à faire pour faire connaître l'ENAP dans le milieu des jeunes étudiants que nous voulons attirer aux métiers de l'administration publique et à la formation que nous leur donnons, et je ne parle pas de l'image dans l'ensemble de la population qui est, pour dire le moins, assez floue... l'image de l'ENAP.

Quant au déploiement sur le territoire, qui est le troisième axe de notre plan de développement, j'ai évoqué tout à l'heure les efforts que nous faisions pour couvrir davantage, pour répondre davantage au milieu, aux besoins du milieu en dehors des grands centres où nous sommes depuis longtemps très présent. Le renforcement de cette présence, je l'ai évoqué, s'est traduit par notre offre de formation à distance, d'abord. C'est aussi en utilisant des moyens non conventionnels que nous offrirons, d'ici la fin de l'année 2010, un programme de formation de deuxième cycle à l'intention des administrateurs des premières nations.

L'ENAP a aussi voulu améliorer ses services dans la région de Gatineau où nous estimions que les fonctionnaires fédéraux ne profitaient pas suffisamment de nos services et nous avons eu, notamment grâce à un partenariat avec l'UQO, en nous installant dans les locaux de l'UQO -- mon collègue Jean Vaillancourt vous en a glissé quelques mots, je crois -- et en établissant un partenariat pour l'offre de formation avec l'UQO, nous avons connu, au cours des dernières années, des croissances spectaculaires de clientèles dans la région de l'Outaouais avec, certaines années, des croissances de l'ordre de 35 %, ce qui est, dans notre milieu, inespéré. Nous nous sommes aussi enracinés en Abitibi-Témiscamingue, où il y a un besoin de formation des administrateurs, en particulier dans le secteur de la santé, en nous associant avec l'UQAT. Nous sommes dans la région de Saint-Jérôme maintenant, où nous n'étions pas, avec nos amis de l'UQO qui nous accompagnent. Et puis nous continuerons. Nous avons offert un peu partout au Québec nos formations et nous continuerons à le faire.

**(16 h 50)**

Nous sommes aussi très actifs sur le plan international. Je vous rappelle à cet égard que l'ENAP est, depuis 30 ans, sur la scène internationale surtout par ses programmes de formation continue de gestionnaires formateurs et ses activités de services-conseils, auprès des gouvernements étrangers, en matière de réforme administrative.

La période de 2004-2010 a été marquée par un changement majeur à cet égard, puisque nous avons commencé à exporter nos programmes crédités à l'étranger avec notre D.E.S.S. à distance mais aussi en offrant sur place, non pas selon un mode de délocalisation qui est une forme finalement de dévolution de nos responsabilités à une autre institution... Nous avons choisi, nous, d'offrir, avec nos ressources, nos programmes à l'étranger mais en bénéficiant de la collaboration d'une école ou d'écoles, d'institutions étrangères. Nous travaillons toujours avec un partenaire étranger, mais nous gardons la maîtrise de nos propres programmes. C'est ainsi qu'on a donné notre programme de maîtrise à distance dans une dizaine de pays africains, d'Afrique subsaharienne, d'Afrique du Nord, d'Amérique latine et même d'Asie, nous sommes au Vietnam, et que nous offrons... nous avons offert notre maîtrise au Rwanda, nous l'avons offert au Mali, et que nous sommes actuellement... nous venons de commencer l'offre de notre programme de maîtrise au Vietnam, ce qui est en soi une aventure.

L'autre volet original de nos activités internationales porte sur notre contribution à la politique des relations internationales du Québec. La politique des relations internationales, qui a été lancée en 2006, a été à l'origine de la création, au sein de l'ENAP, de ce que l'on a appelé le Centre de valorisation internationale de l'expertise publique québécoise. Ce centre, qui est financé par le ministère des Relations internationales et par le MDEIE, vise à mettre à la disposition des pays en développement l'expertise du personnel de la fonction publique québécoise, qui est une source de développement pour les gens qui y participent et une façon pour le Québec d'avoir une action internationale pertinente en matière de coopération. Le centre joue le rôle de gestionnaire de projets internationaux sur une base d'autofinancement des projets et en remboursant les frais engagés par les organisations publiques participantes. Il s'appuie sur la longue expérience de l'ENAP en matière de gestion de projets internationaux.

C'est dans le même esprit que l'ENAP internationale gère le projet de coopération du gouvernement du Québec en Haïti avec l'appui financier de l'ACDI et en puisant dans le bassin de l'expertise à la fois de l'administration québécoise et de l'ENAP. Ce programme d'appui à la gestion publique en Haïti, le PARGEP, est l'un des rares projets de coopération actuellement menés dans ce pays qui visent à améliorer la capacité du gouvernement haïtien à faire face à ses responsabilités. Amorcé avant le séisme de janvier 2010...

Le Président (M. Pigeon): Je vais vous demander de conclure dans une très brève petite minute.

M. Proulx (Marcel): C'est bien. J'y arrivais. Dernier élément: gestion exemplaire. L'ENAP a toujours considéré que sa gestion ne devait pas être en décalage de ses enseignements et que nous devions être particulièrement exemplaires en matière de gestion. C'est d'abord en matière de gestion financière que l'ENAP se veut exemplaire.

C'est ainsi que, contrairement à la majorité des universités québécoises, l'ENAP n'a pas eu de déficit pendant toute la période d'application de notre plan stratégique. Le développement qu'a malgré cela connu l'école au cours des six dernières années nous a obligés à une systématisation de nos pratiques de gestion. Il faut cependant noter que le développement des politiques et des services à l'école s'est fait avec une économie de moyens notable. Au sein de l'Université du Québec, l'ENAP est l'institution qui dépense le moins en termes relatifs pour ses fonctions administratives et de soutien. En outre, le pourcentage de notre budget consacré au service administratif est de 10 % inférieur à la moyenne générale de l'Université du Québec.

Quelques mots sur nos perspectives de développement. Nous pensons que, loin de s'essouffler...

Le Président (M. Pigeon): M. le directeur général, nous arrivons au terme des 30 minutes. On a même légèrement dépassé. Alors, dans 10 secondes, s'il vous plaît.

M. Proulx (Marcel): Oui. Bref, nous pensons... et j'aurai l'occasion en réponse aux questions, j'espère, de vous dire que nous croyons que notre mission est plus d'actualité que jamais. Nous avons des craintes quant à l'impact qu'a l'image un peu difficile, déficiente de l'administration publique sur la demande non seulement en formation, mais sur l'intérêt pour les métiers de l'administration publique. Et nous y travaillons de concert avec l'Administration. Merci à vous.

Le Président (M. Pigeon): Merci, M. le directeur général, de cet exposé que vous venez de faire et qui a suscité, j'en suis sûr, beaucoup d'intérêt. Et donc nous allons prendre maintenant, là, le temps d'avoir un échange avec les membres de la commission. Donc, la députée de Mille-Îles commencera pour le parti ministériel.

Mme Charbonneau: Merci, M. le Président. Bonjour à vous, aux gens d'en arrière aussi. Puisque vous les avez nommés comme ça au préalable, je me permets de le faire aussi.

Si tous vos employés ont la même énergie que vous quand ils expliquent et ils sont devant leurs cours ou leurs classes, je pense que je comprends, du moins, 70 % du succès de votre école. Vous avez une belle énergie qui se dégage quand vous parlez de votre établissement. C'est fort intéressant.

Avant de devenir députée, j'oeuvrais auprès des commissions scolaires dans une fonction politique, mais j'ai connu votre établissement de cette façon-là, puisque les jeunes enseignants qui veulent devenir directeurs d'école vont compléter des cours chez vous, et les directeurs d'école qui s'en vont à la retraite font quelquefois un bout de chemin chez vous. Et je trouve ça fort intéressant de pouvoir vous rencontrer comme ça puis de voir l'étendue que vous avez, puisque vous avez fait une espèce de constat de l'ensemble et de l'étendue que vous avez. Je trouve ça très intéressant de vous savoir un peu partout, puisque l'administration publique, elle est partout. Elle ne se concentre pas qu'à Montréal ou dans les centres urbains, elle est aussi dans les centres un petit peu plus éloignés.

Il y a une question qui revient de ma part à chaque fois qu'on rencontre une nouvelle université, puisque c'est une question qui, pour moi, est un peu d'actualité, et ça ne va dans à peu près rien de ce que vous nous avez parlé, puisque vous avez effleuré le sujet très, très vite, ça va dans le financement des universités. Il y a eu un grand débat, il est encore là. Je pense que ça va être un débat tant qu'il n'y aura pas un terme de fait, complet sur cette question-là qui va rester, c'est le financement des universités. Bon. La plupart des universités reçoivent du financement de quatre fonctions différentes, et on revient tout le temps à la question, le financement qui vient de la part de la facture élève. Je vais la dire comme ça, parce que je sens qu'avec vous je peux prendre des termes de commission scolaire. Vous allez me comprendre.

Que pensez-vous, un, de la parité? On regarde les frais universitaires ou le financement des universités à l'extérieur du Québec, donc prenons le Canada pour se faire plaisir et le financement qu'elles reçoivent de chacune de leurs provinces, mais aussi la facture élève dans chacune de ces provinces est aussi différente. Donc, pensez-vous que la facture devrait être améliorée ou de façon différente par rapport du provincial, du fédéral? Devrait-on regarder du côté de la facture élève? Vous en pensez quoi, vous? Et nécessairement j'entends dans le «vous» qu'en arrière de vous il y a des gens de votre regroupement étudiant et qu'ils ont sûrement aussi formé une opinion que vous allez être capable de nous transmettre dans la question.

M. Proulx (Marcel): Je ne vous étonnerai pas en vous disant que, comme toutes les universités, nous n'avons pas les moyens financiers de nos ambitions mais que nous ferions de très belles choses en plus si nous avions de meilleurs moyens.

Cela dit, il est clair qu'il y a un débat au Québec sur la façon de financer la hausse des revenus des universités. Je suis de ceux qui considèrent qu'il s'agit d'un débat de société et que la question qui consiste à savoir quelle est la part relative qui relève des étudiants et celle qui relève du gouvernement dans le financement de l'université n'est pas une question technique mais qui est finalement une question de partage des richesses à l'intérieur d'une société. Il est clair cependant que, si la tendance se maintient, nous ne voyons pas le jour où le gouvernement du Québec aura suffisamment de marge de manoeuvre financière pour augmenter de façon considérable, ce qu'il devrait faire, le budget des universités. La comparaison avec les autres universités n'est qu'un... avec les autres provinces n'est qu'un indicateur comme un autre. Mais je vois mal comment nous pourrions justifier être beaucoup moins financés que les autres universités canadiennes et prétendre que nous sommes correctement financés. Il y a une sorte de norme implicite qui est en train de se dégager là.

Quant à savoir si nous devrions demander davantage à nos clientèles étudiantes, bien sûr que c'est une solution attrayante, c'est la solution de la tarification qui est une solution controversée. Nous avons ces discussions aussi à l'intérieur de notre communauté. Nous l'avons avec l'association étudiante.

**(17 heures)**

Personnellement, mais mon opinion n'a pas davantage de valeur que l'opinion de quelques citoyens québécois, j'ai tendance à considérer que le 50 % d'étudiants, il y a en gros 50 % des étudiants universitaires qui finissent sans aucune dette... pourraient sans doute contribuer un peu davantage, à condition que l'on n'aggrave pas le sort de l'autre 50 % qui s'endette et en particulier, peut-être, du 20 % à 30 % d'étudiants pour qui la hausse des frais de scolarité pourrait être une menace, dont on ne connaît pas l'envergure, mais à l'accessibilité, de sorte qu'il me semble que ces éléments... et que la question de l'accessibilité est indissociable de la question de la hausse des frais de scolarité. Et je comprends la réticence des associations étudiantes qui se disent: Et, si on augmente les frais de scolarité et qu'il n'y a pas de réinvestissement, au moins, équivalent dans les prêts et bourses, nous serions en difficulté.

Je suis aussi de ceux qui considèrent que, si on doit faire ce type de rééquilibrage, bien il n'appartiendra pas aux universités elles-mêmes de financer l'accessibilité, mais que ça doit relever d'un système de prêts et bourses québécois.

Mme Charbonneau: Merci. J'avais pour les autres universités une question de modulage de facture dépendamment du cours et de la formation que je veux me donner, mais dans votre cas je pense qu'elle ne s'applique pas très bien, puisque vous êtes dans une... je vais utiliser, et je ne veux pas être péjorative, «dans un seul axe d'études», qui est à dire, bon, des grandes classes puis... Par contre, j'ai vu que vous avez déterminé un nombre d'élèves par enseignant, ce qui n'est pas nécessairement partout pareil. Mais, vous, vous avez... je pense que c'est 25 étudiants par classe, élèves que...

M. Proulx (Marcel): La taille maximum de nos classes est de 28 étudiants, alors qu'en moyenne, au M.B.A., ça dépasse... puisqu'on se compare généralement au M.B.A., ça dépasse en général 40.

Mme Charbonneau: Bon. Ça vient me donner une meilleure idée. On a vu aussi, et c'est aussi une de vos particularités, le nombre de partiels au nombre de temps-pleins. Si j'ai très bien compris votre présentation, votre nombre de partiels est exponentiel, comparé au nombre de temps-pleins.

M. Proulx (Marcel): C'est à peu près deux tiers pour un tiers, mais ça explique... Si vous me permettez, votre question sur la modulation des frais de scolarité se poserait chez nous mais de façon un peu différente.

Pour nos étudiants à temps partiel, qui sont habituellement dans les organisations, habituellement ils ne paient pas leurs frais de scolarité. C'est les organisations qui paient leurs frais de scolarité. Et je dois dire qu'à 5 $ de l'heure, c'est ce que ça coûte, un cours universitaire, qu'à 5 $ de l'heure les organisations publiques pourraient certainement absorber une augmentation, pas nécessairement colossale, mais une augmentation des frais qu'on leur impose, d'autant plus que nos clients qui viennent des organisations publiques ont parfois des attentes en termes de types de service qui dépassent ce que nous pouvons leur offrir. Par exemple, certains groupes souhaiteraient que nous fassions des mesures d'évaluation de compétences avant, après, ce qui est un outil extraordinaire en développement de cadres, mais une mesure d'évaluation rigoureuse des compétences avant un suivi dépasse ce que nous pouvons faire dans le cadre des frais de scolarité réglementés.

Et une certaine déréglementation des frais de scolarité pour ce type de clientèle, nous avons quelques idées sur la manière dont ça pourrait se faire, ne pénaliserait pas les étudiants individuels qui paient leurs propres frais de scolarité et n'alourdirait pas de façon si significative la facture des organisations qui paient les frais de scolarité des, probablement... on n'a pas de statistique précise, mais des deux tiers de nos étudiants.

Mme Charbonneau: Vous avez en partie devancé ma question, puisque j'allais vous demander: Vous êtes financés aux temps-pleins et non aux temps-partiels; comment voyez-vous cette façon de faire là, puisqu'en ayant un tiers-deux tiers ça devient plus complexe quand c'est le temps du financement? Mais je pense que vous avez bien complété sans que j'aie à la poser par rapport à la particularité aussi du financement que vous avez, puisque, pour les nommer comme vous l'avez fait... c'est-à-dire, le client, qui est celui que, moi, je connais, qui fait affaire avec vous, donc la DIGEC, qui est les commissions scolaires, qui est les différents organismes, a une façon de voir le cours complémentaire que vient suivre l'étudiant, qui est peut-être déjà un enseignant, peut-être un directeur d'école, peut-être quelqu'un aux ressources humaines ou à l'administration même d'une commission scolaire, ne finance pas de la même façon puisque, lui, c'est son employeur qui va payer son financement, puisqu'il veut utiliser la compétence à l'intérieur même de sa structure.

Donc, c'est intéressant de vous entendre sur la façon différente de regarder le financement de votre établissement par rapport à cette complémentarité que vous avez avec les établissements publics, ce qui est tout à fait particulier. Je vous le dis parce que je vous découvre en même temps une autre facette, puisque maintenant je suis assise dans une chaise différente. Avant, on se demandait si la personne avait suivi les cours de gestion chez vous. Maintenant, je suis plus à regarder comment vous donnez les cours à ces gens-là.

Mais il est clair que, dans l'éducation, ce qui est fort intéressant, c'est de voir que c'est un enseignant qui devient directeur d'école, qui devient quelqu'un qui est gestionnaire à l'intérieur de la commission scolaire. Son parcours est presque dessiné s'il a le goût de devenir quelqu'un d'autre au sein de sa commission scolaire. Et ça passe par vous. Ça ne passe pas par n'importe où, ça passe vraiment par votre institution. Donc, je trouve ça intéressant.

Je voulais aussi vous entendre un petit peu plus sur la reconnaissance des acquis. Je pense que vous avez un modèle qui est... je vais utiliser «particulier», parce que vous le disiez au départ, que vous n'aviez pas d'élève de premier cycle. Par contre, pour pouvoir, je pense, les prendre dès le deuxième cycle, pour reconnaître le deuxième cycle chez un individu, je crois que vous avez des façons de faire... qui fait que vous reconnaissez les acquis en expériences autres que celle des études. Ça se peut que je me trompe, vous allez sûrement me corriger, mais c'est ce que j'ai entendu. Puis j'aimerais ça vous entendre là-dessus.

M. Proulx (Marcel): Il est possible chez nous, pour quelqu'un d'exceptionnel dont le caractère exceptionnel a été reconnu par sa progression de carrière, donc d'arriver directement à la maîtrise sans avoir obtenu au préalable un diplôme de baccalauréat. On le fait pour des gens qui sont exceptionnels. Et il est rare effectivement de nos jours que sans baccalauréat on puisse atteindre des niveaux supérieurs, mais nous croyons que nous ne pouvons pas considérer que quelqu'un ne peut pas faire une... est incapable de faire une maîtrise en gestion s'il est déjà à un niveau très supérieur dans une organisation et qu'il a fait la preuve, sur le terrain, de ses compétences.

Donc, c'est cela que l'on reconnaît. Ça a déjà été plus important à l'école. C'est moins important maintenant parce que de façon générale les gens qui progressent dans les organisations maintenant ont un premier cycle.

Nous avons une autre façon originale de reconnaître les acquis. Puisque les gens que nous recevons chez nous proviennent... ceux de la maîtrise pour gestionnaires, bon, pas nos jeunes, proviennent de toutes sortes de milieux, ont toutes sortes d'expériences et toutes sortes de cheminements de carrière, nous leur proposons de bâtir leurs programmes de maîtrise à partir d'un grand éventail de cours. Il y a très peu de cours obligatoires à la maîtrise pour gestionnaires précisément pour que les gens n'investissent pas là où ils ont déjà des compétences, déjà des acquis et puissent choisir les cours dans les domaines où ils sont plus faibles, donc se bâtir en quelque sorte un plan personnalisé. Quelqu'un, par exemple, qui a déjà un baccalauréat en gestion, qui a fait de la comptabilité, on ne lui imposera pas, dans notre programme de maîtrise, des cours de comptabilité. Par contre, quelqu'un qui vient de relations industrielles ou de psychologie et qui n'en a jamais fait, nous allons lui suggérer de se développer dans ce champ-là.

Donc, c'est notre façon de reconnaître que les gens n'arrivent pas chez nous sans compétence et de leur demander... et puis ces gens, habituellement, nos étudiants jouent le jeu, de leur demander de développer davantage leurs faiblesses que de réinvestir là où ils sont déjà forts.

Mme Charbonneau: J'imagine que ça vient aussi donner un point d'ancrage intéressant pour les gens qui nous arrivent de l'extérieur puis qui doivent compléter une formation pour être reconnus par des ordres ou par différentes institutions. Si j'arrive... J'essaie d'en prendre une sans... Si j'arrive de la Chine, et j'ai une formation x, et je veux pratiquer la même chose ici, au Québec, et on me dit que j'ai des lacunes, je peux aller chez vous, je vais compléter, puis tout se passe, dans la mesure du possible, bien pour pouvoir après ça aller sur le marché du travail et me faire reconnaître la compétence que j'avais auparavant, aussi.

M. Proulx (Marcel): Nous avons des ententes avec des ordres professionnels mais à des fins de perfectionnement professionnel. Vous savez que plusieurs ordres obligent leurs membres, et c'est sain, à avoir un perfectionnement. Cela se fait soit par l'intermédiaire de la formation créditée soit par l'intermédiaire de formation non créditée aux services aux organisations. Nous ne sommes pas encore reconnus par les ordres professionnels, compte tenu de la nature de ce que nous faisons, pour ce qui est de l'habilitation des professionnels d'origine étrangère. Ça pourrait venir, mais ça se passe généralement dans des créneaux très spécialisés dans lesquels nous ne sommes pas très actifs.

Mme Charbonneau: Trois minutes? Trois minutes. J'essaie de garder mes questions longues pour d'autres moments puis mes questions courtes quand il reste trois minutes. La plupart des universités nous ont parlé du financement au niveau de la recherche, vous en avez touché un brin tantôt par rapport à l'observatoire et tout ce qui s'ensuit, mais habituellement le domaine de la recherche est financé par le privé. J'ai le goût de vous poser simplement: Comment ça va?

**(17 h 10)**

M. Proulx (Marcel): Bien, notre recherche n'est pas financée, chez nous, par le privé parce que même les contrats de recherche sont des contrats qui viennent d'organismes publics. D'une part, ça correspond à notre mission. On en est très heureux. D'autre part, les organismes publics ne sont pas richissimes de nos jours, vous le savez. Et ce n'est pas la... C'est une excellente façon de financer de la recherche pertinente, mais ce n'est certainement pas une façon de financer la recherche, par ailleurs.

D'autre part, le ministère de l'Éducation donne pour tous les contrats qui proviennent des organismes gouvernementaux des frais indirects, donc finance au nom des ministères qui donnent ces contrats, donne des frais indirects de l'ordre de 50 % aux universités, ce qui est vraiment une source d'oxygène, d'autant plus que, chez nous, nous le réinvestissons dans le développement de la recherche.

Le Président (M. Pigeon): Il reste deux minutes.

Mme Charbonneau: Allez-y de l'autre côté, puis on va récupérer, là.

Le Président (M. Pigeon): Alors, on va tout de suite, dans ce cas-là... Merci, Mme la députée de Mille-Îles. Nous allons passer à la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Merci. Bonjour, M. Proulx. Je salue également les personnes qui vous accompagnent. Je reconnais, moi aussi, votre dynamisme. Et vous parlez, avec beaucoup de passion, de l'univers de votre école qui a à la fois un défi de monodisciplinarité, si je peux dire, mais en même temps, de la façon dont vous l'envisagez, c'est une vision très large de votre mission et ce n'est vraiment pas une approche où cette discipline est repliée sur elle-même, loin de là.

Une première question sur, dans votre organisation, je dirais, le mélange, entre guillemets, là, des clientèles. C'est-à-dire que vous avez, pour une bonne part, des gens qui ont une expérience de travail, qui viennent parfaire des études supérieures mais déjà avec un bagage et très certainement des questions qu'ils se posent. Probablement qu'il y a des gens qui sont en processus de promotion ou qui ont de nouvelles responsabilités et qui sentent le besoin d'acquérir des compétences. Et par ailleurs vous avez aussi des clientèles plus jeunes, j'imagine, qui ont formation de premier cycle et qui enchaînent avec une formation de deuxième cycle et peut-être même de troisième, chez vous.

Comment se fait ce mariage des genres, si je peux dire, à la fois dans la vie réelle mais aussi dans la constitution des programmes que vous offrez?

M. Proulx (Marcel): Cela n'a pas toujours été simple. Une partie des cours sont réservés à l'une ou l'autre des clientèles dans la mesure où le type de savoir-faire et les méthodes pédagogiques supposent dans un cas, par exemple, qu'on table beaucoup sur l'expérience et que nos étudiants qui n'en n'ont pas se retrouveraient marginalisés et, dans d'autres cas, des cours plus spécialisés, plus orientés vers une pratique professionnelle, où normalement on s'attend de retrouver surtout nos clientèles plus jeunes.

Mais une bonne part de nos cours s'adresse à l'une et l'autre clientèle, et c'est là que tout le savoir-faire du professeur joue. On a tous les ingrédients d'une explosion quand, d'un côté, il y a ceux qui évoquent systématiquement la théorie, de l'autre, ceux qui évoquent systématiquement l'expérience. Et j'ai déjà vu des classes se transformer presque en camps retranchés où, de part et d'autre, on trouvait que ça... on trouve que l'expérience, ça va bien, mais parlons d'autre chose, et puis ils parlent trop, et que les plus âgés avaient tendance à trouver que les jeunes n'en savaient pas assez. Je pense qu'on a réussi à trouver l'équilibre dans la plupart des cours et de faire en sorte qu'il y ait une... que la richesse de nos jeunes étudiants, qui arrivent avec un bagage théorique, des intérêts différents de nos étudiants un peu plus âgés... que les uns et les autres puissent s'entraider et travailler ensemble. Il y a un apprentissage à faire, à expliquer à quelqu'un qui n'a pas d'expérience les leçons que l'on peut tirer de sa propre expérience. Et par ailleurs la confrontation avec le regard souvent vif, avec la curiosité forte de nos étudiants de la maîtrise pour analystes est très profitable aussi, je pense, pour nos étudiants à la maîtrise pour gestionnaires.

Mais c'est un défi constant pour nos professeurs. Et je dois dire que c'est plus difficile d'enseigner à des classes qui sont hétérogènes dans ce sens-là qu'à des classes homogènes. Mais ça fait partie du défi de l'enseignement chez nous.

Mme Malavoy: Je comprends que ça peut être transformé en valeur ajoutée si les professeurs savent s'y prendre, au sens où d'avoir un bassin d'expériences, évidemment ça fait tout de suite un contact avec l'application de la théorie, qui est immédiat. Les gens arrivent avec leurs propres expériences et même probablement leurs questions. Avant même qu'on les mette sur une piste, ils abordent les choses avec un questionnement. Mais il faut que les deux groupes trouvent leur profit dans cette approche pédagogique, et je comprends que c'est concluant.

M. Proulx (Marcel): Et ça a été un choc de cultures il y a 15 ans, quand sont arrivées les premières promotions de notre maîtrise pour analystes avec des professeurs qui avaient l'habitude d'établir un dialogue avec leurs classes en disant: Je vous fournis la théorie, les modèles, vous me fournissez l'expérience, et puis on va ensemble bâtir quelque chose. Parce qu'il y a une sorte de coconstruction et que chez nous ça a toujours marché comme ça. La logique de coconstruction est un peu différente. C'est la même, mais elle est modulée différemment avec des plus jeunes.

Mme Malavoy: Vous avez indiqué tout à l'heure que les gens viennent chez vous en grand nombre. Vous avez une augmentation de clientèle, qui est réelle. Et en même temps vous avez indiqué, je crois: Il n'y a pas d'obligation, si on veut faire carrière dans la fonction publique, de suivre nos cours.

Donc, je me posais la question suivante: Est-ce que vous souhaiteriez que ce soit un passage obligé ou est-ce que vous trouvez que c'est, à tout prendre, préférable que ce soit un libre choix et donc que les gens viennent parce qu'ils le veulent et qu'ils fassent la preuve que le facteur d'attrait, c'est la qualité de ce que vous offrez?

M. Proulx (Marcel): Les choses seraient évidemment plus faciles pour nous s'il y avait un passage obligé par l'école. Et on peut même se mettre à rêver d'être une école comme les écoles nationales d'administration dans le monde, où les étudiants sont des fonctionnaires qui sont payés pour étudier. Mais c'est un rêve que nous ne caressons pas et qui par ailleurs... Dans le fond, nous pensons que, si nous sommes... puis nous sommes convaincus d'être bons, il faut bien le dire, là, mais que, si nous sommes devenus bons, c'est...

Mme Malavoy: Ça paraît un peu.

M. Proulx (Marcel): L'heure n'est pas à la modestie. On s'autocritique beaucoup entre nous, rassurez-vous. Mais, si nos professeurs ont une telle qualité pédagogique, c'est parce qu'ils ont la conviction que, si nous n'étions pas bons, que si nous n'étions pas pertinents, les gens nous abandonneraient. Et donc le fait que nous soyons constamment sur la corde raide... Et nous n'avons pas d'échappatoire. Si on cesse d'être pertinents, si les gens ne viennent plus chez nous, nous allons péricliter, et éventuellement nous disparaîtrions, et donc nous n'existerions plus. Et donc ça crée une pression, je dirais, salutaire sur l'ensemble de l'institution et ça nous garde particulièrement sensibles à l'évolution de notre milieu.

Mme Malavoy: Vous diriez que... Je ne sais pas si ça peut s'identifier, mais quelle proportion des cadres de la fonction publique passe chez vous?

M. Proulx (Marcel): De la fonction publique, au sens strict? Très peu. Très peu passent dans nos formations créditées pour des raisons qu'on a du mal à s'expliquer. Non, les cadres de la fonction publique québécoise ont tendance davantage à bénéficier de nos services aux organisations. Nous offrons, par exemple, un programme pour les nouveaux cadres, pour les nouveaux... pour les nouveaux cadres, même pour les nouveaux cadres des niveaux très supérieurs. Nous travaillons, avec les emplois supérieurs, à des formations courtes pour les nouveaux titulaires d'emplois supérieurs.

Bref, ça marche très bien dans le non-crédité, mais nous avons un peu échoué à convaincre l'Administration, les autorités de l'Administration et les administrateurs publics qu'il est nécessaire d'investir dans une maîtrise pour développer les compétences. Nous avons réussi avec beaucoup de succès auprès des administrateurs du milieu de la santé et des services sociaux, nous avons formé une partie importante de l'encadrement de la santé et des services sociaux, dans une moindre mesure en éducation. Mais, dans la fonction publique, je dirais, nous avons une clientèle significative, mais ça reste finalement assez marginal, assez marginal. Dans d'autres secteurs, et en particulier dans certaines régions... Je pense au Saguenay --Lac-Saint-Jean, où on faisait une tournée récemment et on se rendait compte qu'une très, très grande partie de l'encadrement de la santé et des services sociaux dans cette région était constituée de nos diplômés. Et en région c'est très évident.

Dans la fonction publique, c'est, je dois dire, assez marginal, mais en même temps ce sont ces mêmes gestionnaires de la fonction publique qui fréquentent de façon systématique nos services aux organisations, nos activités de formation continue, qui constituent la majeure partie des 7 000 personnes qui nous fréquentent bon an, mal an.

Mme Malavoy: Donc, c'est du sur-mesure, si on peut dire. Ils vont venir chez vous pour des formations sur mesure, au sens où ça va être des formations plus courtes correspondant à des besoins bien identifiés.

Tout à l'heure, vous m'avez dit que vous ne caressiez pas le rêve que l'ENAP soit un passage obligé. Est-ce que vous caresseriez celui qu'il y ait, tout au moins, plus de personnes de la fonction publique qui s'inscrivent à vos programmes?

**(17 h 20)**

M. Proulx (Marcel): Bien sûr. Notre souhait, et nous en faisons régulièrement la proposition aux autorités gouvernementales, aux autorités de la fonction publique, c'est que nos programmes de maîtrise soient utilisés pour les fins de la préparation de la relève, que l'on identifie assez tôt les jeunes les plus prometteurs comme on le fait maintenant à peu près partout dans les organisations du secteur privé... les gens prometteurs sont identifiés et qu'on leur propose un parcours de formation qui peut s'étendre sur cinq, six, sept ans.

Les maîtrises modernes n'ont pas besoin d'être faites à la course. On peut prendre son temps, on peut retourner au travail, revenir, le faire à un rythme qui permet d'avoir une tâche accaparante, de sorte que, dans cinq ans, on aurait un bassin de jeunes qui seraient prêts à assumer des fonctions de gestion auxquelles ils vont avoir accès, avec les départs à la retraite, assez rapidement, plus jeunes qu'il y a 10 ans, par exemple. Et donc on aurait préparé le terrain. Les plus astucieux, les plus ambitieux perçoivent, chez les jeunes, perçoivent déjà ça et s'inscrivent chez nous. Ils sont appuyés par leurs organisations, mais il ne s'agit pas d'initiative institutionnelle. Et nous souhaiterions la renaissance de ce qu'on a appelé, il y a quelques... il y a plusieurs années, le programme Formacadres, où notamment les gens venaient chez nous pour se préparer à l'exercice des fonctions de gestion.

On a réussi à vendre cette idée plus facilement à la fonction publique fédérale. C'est avec le conseil fédéral au Québec, donc la réunion des plus hauts fonctionnaires fédéraux au Québec. Nous leur avons proposé, et ça a marché, que le programme de maîtrise soit offert aux gens les plus prometteurs, qu'ils identifient les plus prometteurs -- ils font une première sélection, et nous faisons la nôtre -- et qu'ensemble nous discutons du contenu de notre maîtrise. Notre maîtrise est flexible, on peut en discuter, pas sur le niveau mais sur la nature des cours, sur ce que nous offrons.

Et nous souhaitons que la même chose se fasse avec l'administration publique québécoise.

Mme Malavoy: Mais j'essaie de comprendre d'où viennent les résistances. Pourquoi est-ce qu'avec le fédéral, par exemple, il y a une ouverture et pourquoi n'y en aurait-il pas au Québec? Les résistances sont de quel ordre? Est-ce qu'il y a des questions financières? Est-ce que c'est des questions de culture? Est-ce que... Ça tient à quoi?

M. Proulx (Marcel): Les raisons ne sont certainement pas d'ordre financier, parce que le perfectionnement, qui n'est pas subventionné, par ailleurs, coûte beaucoup plus cher au client immédiat que la formation créditée.

Non, ça tient à deux phénomènes, je crois. Le premier phénomène tient au temps qu'exige une maîtrise. Il faut voir les choses dans une perspective à long terme pour se dire: Bien, une maîtrise qui peut prendre à temps partiel cinq ans va être un bon outil de formation. Il faut être patient, et on est un peu impatient, les personnes sont aussi impatientes. Le deuxième élément est plus hypothétique, mais je pense que ça joue. C'est que le concept de maîtrise, dans l'imaginaire collectif, est encore associé à des études très théoriques un peu éloignées de la réalité. Nos collègues des M.B.A. ont réussi, et ça a été un beau succès, je dois dire, un peu partout, ont réussi à convaincre les organisations du secteur privé qu'un M.B.A., c'est tout à la fois... c'est de niveau universitaire mais que c'est aussi éminemment pratique.

Je pense que c'est moins évident de réussir à convaincre qu'une maîtrise en administration publique est aussi pratique, parce que nos programmes de maîtrise, nos programmes crédités sont aussi enracinés et aussi pratiques que ce que nous faisons aux services aux organisations. C'est souvent les mêmes personnes qui font les... qui donnent les mêmes formations. C'est le même esprit, c'est la même utilisation de cadres d'analyse. Les gens ne viennent pas chez nous pour avoir des trucs, ils viennent chez nous pour avoir des cadres de référence utilisables dans l'action.

Et donc on a encore du travail à faire pour convaincre notre milieu que c'est un bon placement, que c'est un investissement que de libérer les gens pour faire des études de maîtrise. C'est aussi très lourd, il faut bien le dire, pour les personnes. Quand on étudie à temps partiel le soir, pendant cinq ans, à un âge où on commence à avoir une famille, les conjoints trouvent ça lourd. Et donc ce n'est pas un investissement facile, parce qu'on n'étudie pas à... Chez nous, on étudie surtout le soir.

Mme Malavoy: Mais, pour que ça marche, il faut que le milieu de travail reçoive, de façon très positive, cette formation additionnelle.

Moi, j'ai connu le principe, par exemple, dans le domaine du travail social, des études de maîtrise à temps partiel pour des gens en emploi, mais ils savaient que, faisant cela, il y avait un avantage presque immédiat de retour dans leur milieu de travail, que ce n'est pas juste pour le plaisir de se former, ça a aussi un avantage pour la trajectoire d'emploi que l'on a.

Et est-ce que là-dessus vous trouvez qu'il y a des choses à améliorer, c'est-à-dire que le retour dans le milieu de travail indique que cet investissement valait la peine et qu'il y ait une valeur ajoutée à son travail?

M. Proulx (Marcel): Je pense que, pour ceux qui étudient chez nous et pour les milieux qui les reçoivent, on se rend parfaitement compte qu'il y a un retour, d'abord, parce que, l'essentiel des travaux que mènent les étudiants, ceux qui sont déjà en organisation, ils les mènent dans leurs organisations. Ils étudient leurs organisations en long, en large et en travers, au point qu'à la fin de leurs études de maîtrise ils ont vraiment l'impression d'avoir fait le tour. Et il y a donc un véritable réinvestissement. Les gens qui sont déjà en gestion utilisent de façon immédiate... Ils nous le disent quand on fait l'évaluation. Ils nous disent: J'ai utilisé ce que j'ai appris, de façon immédiate. Ceux qu'il faut convaincre, ce n'est pas ceux qui sont chez nous, c'est ceux qui envisagent de faire la maîtrise et les autorités qui les y encourageraient.

Mme Malavoy: Est-ce qu'il me reste du temps ou pas, M. le Président?

Le Président (M. Pigeon): Il vous reste environ 2 min 30 s.

Mme Malavoy: 2 min 30 s. Bien, je vais aborder rapidement un autre élément de votre mission, que j'ai eu le plaisir de voir à l'oeuvre, qui est celui d'héberger certaines écoles. Je pense à l'école d'été de Femmes, Politique et Démocratie, donc des écoles d'été pour des groupes assez particuliers mais pour lesquels c'est extrêmement important de savoir que l'ENAP a cette ouverture et donne cette reconnaissance que d'offrir une formation donc sur mesure.

Vous situez ça comment? J'aimerais vous en entendre parler, vous. Est-ce que c'est marginal? Est-ce que c'est vraiment ancré dans votre mission? Comment vous percevez cet aspect?

M. Proulx (Marcel): Je laisserai peut-être mes deux collègues en parler: Nelson Michaud, qui est responsable... parce qu'il est responsable des programmes crédités de l'école d'été qui est créditée, et Madeleine Moreau, qui est codirectrice du groupe de développement Femmes et Démocratie.

Le Président (M. Pigeon): M. Michaud, je vais vous demander de vous identifier pour les fins de l'enregistrement.

M. Michaud (Nelson): Oui. Nelson Michaud, directeur de l'enseignement et de la recherche à l'ENAP.

Donc, très rapidement. Pour répondre à votre question, Mme la députée, c'est un objectif que nous avons d'investir davantage ce type de créneau. Nous sommes parfaitement conscients des retombées extrêmement positives que ça représente. Certaines et certains d'entre vous avez peut-être vu le reportage au téléjournal hier soir justement sur ce sujet, et de voir les témoignages des personnes qui suivent ces formations-là démontre la pertinence et l'utilité. Nous n'avons pas un très grand éventail de produits de ce type, mais c'est assurément l'une des voies de développement qui nous attendent.

Le Président (M. Pigeon): Est-ce que vous pouvez aussi vous identifier, s'il vous plaît?

Mme Moreau (Madeleine): Oui, bien sûr. Madeleine Moreau, donc, de l'ENAP.

J'ajouterais qu'à titre informatif, cette année, par exemple, il y a 72 femmes qui ont suivi l'école, qui n'est plus d'été parce qu'elle a lieu en toute saison maintenant mais dont on a gardé le nom «école d'été», école Femmes, Politique et Démocratie. Et plus de 450 femmes ont aussi participé à différentes activités.

Ces activités-là, pour l'ENAP, sont très importantes parce qu'elles s'inscrivent dans la continuité de notre action. Tout à l'heure, vous parliez du large spectre de l'action publique. L'action publique, c'est aussi l'action politique, à certains égards. C'est aussi la... C'est tout ce qui converge autour de la gouvernance. C'est là où cet investissement avec ce groupe-là, ce partenariat-là prend un sens du point de vue de son contenu et des objets de formation. Mais aussi c'est aussi la cause des femmes qui nous intéresse, puisqu'au plan international notamment l'ENAP a toujours été, au premier chef, avec l'expertise de l'administration publique québécoise... de faire valoir l'importance de l'équité, l'importance de l'égalité en emploi et de la place des femmes dans l'exercice des postes de pouvoir. Alors donc, nous sommes associés à cette cause-là par sa nature même, donc du fait que ce soit... qu'elle s'adresse aux femmes, et aussi par la nature des activités qui touchent la gouvernance.

**(17 h 30)**

Alors, nous sommes en renégociation présentement d'une entente avec les partenaires financiers également, dont le gouvernement du Québec, et on espère beaucoup avoir votre appui dans ce sens-là avec le Groupe Femmes, Politique et Démocratie pour pouvoir continuer et même élargir passablement nos actions.

Le Président (M. Pigeon): Merci. Alors, nous retournons du côté du parti ministériel. Alors, Mme la députée de Gatineau.

Mme Vallée: Merci. Alors, bonjour. Il me fait plaisir de vous recevoir. Vous ne serez pas étonnés que certaines de mes questions touchent un peu votre partenariat avec l'UQO, qu'on a eu la chance d'entendre hier, M. Vaillancourt, qui est venu nous faire part des enjeux particuliers de l'Outaouais. Et j'aimerais bien, compte tenu de votre partenariat avec l'UQO, compte tenu de votre implication sur le territoire outaouais depuis bon nombre d'années, avoir votre perception, vous qui avez des racines un petit peu partout à travers le Québec, qui avez su créer des partenariats avec d'autres régions.

J'aimerais avoir votre perception du milieu universitaire outaouais et des défis du milieu universitaire de l'Outaouais.

M. Proulx (Marcel): Un des défis dans la région de la capitale fédérale, vous le savez, c'est le défi de la crédibilité universitaire. C'est le défi, en ce qui nous concerne, mais c'est aussi vrai pour l'UQO, de convaincre les clientèles qui gravitent autour de l'administration fédérale qu'en français le Québec dispose des compétences, des ressources universitaires pour offrir une formation de haut niveau. L'Université d'Ottawa le fait en partie en français, mais il y a une sorte de drainage des clientèles, on le voit avec nos amis de l'UQO, vers l'Outaouais ontarien, vers les universités ontariennes.

Le partenariat que nous avons proposé à l'UQO, qu'on a discuté ensemble, parce qu'il y a longtemps qu'on a une complicité, consiste précisément à dire: Il y a un marché important de jeunes qui vont étudier à l'extérieur du Québec parce qu'ils considèrent que c'est la voie royale pour intégrer l'administration fédérale. Et nous avons, je dois dire, été un peu trop timides dans le passé dans la formation des fonctionnaires fédéraux, considérant que notre mandat, ce qui est vrai, est, d'abord et avant tout, un mandat québécois. Et nous avons été amenés progressivement à nous rendre compte que les fonctionnaires fédéraux qui interviennent, qui sont québécois, doivent être traités comme on traite l'ensemble des administrateurs publics au Québec, et avec succès. On a réussi à passer le message, avec succès, auprès de l'administration fédérale. Notre crédibilité est de plus en plus forte, et nous souhaitons que cette crédibilité soit aussi celle de l'UQO. On a longtemps pensé qu'on était meilleurs quand on travaillait tout seuls. Maintenant, on se rend compte qu'on est meilleurs quand on travaille avec d'autres partenaires, quand on a réussi à combiner nos forces, pas être en concurrence, mais à combiner nos forces, et c'est ce qu'on essaie de faire avec l'UQO. Ça a commencé en nous établissant dans les locaux de l'UQO. C'est plus facile d'établir une complicité quand on vit dans la même maison. Nos professeurs... on a aussi décidé d'établir des professeurs. On n'avait qu'un seul professeur à Gatineau, on en a maintenant, quoi, quatre?

M. Michaud (Nelson): Au total, trois professeurs réguliers et deux professeurs associés.

M. Proulx (Marcel): Donc, on a cinq professeurs qui sont eux-mêmes en contact avec les professeurs de l'UQO, ce qui crée une belle synergie. Et nous pensons que nous allons pouvoir non seulement à la maîtrise, mais aussi au doctorat ouvrir de nouvelles perspectives en travaillant avec les ressources de l'UQO.

Mme Vallée: Est-ce que vous considérez, au même titre que le recteur Vaillancourt, qu'il devrait y avoir un statut particulier d'accordé au niveau du milieu universitaire dans la région de l'Outaouais? Est-ce que vous partagez l'opinion de M. Vaillancourt?

M. Proulx (Marcel): Je ne plairai pas à mon ami Jean Vaillancourt. La question du statut particulier est une question qui se pose, mais elle se pose pour toutes les universités qui ont toutes de bonnes raisons, y compris nous, pour dire que nous mériterions un statut particulier compte tenu de notre situation particulière. Et, dans un milieu où l'enveloppe est fermée, bien c'est un peu normal que chacun essaie d'expliquer et de façon très légitime d'ailleurs et avec raison que nous manquons des moyens pour réaliser notre mission. C'est certainement vrai de nos amis de l'UQO. J'aurais tendance à dire: C'est vrai pour nous aussi. Mais je ne vois pas d'université qui ne pourrait pas tenir le même discours actuellement.

Mme Vallée: En tout cas, ce n'est pas ce qu'on entend depuis le début de la semaine.

M. Proulx (Marcel): Peut-être mes collègues sont-ils moins plaignards que nous.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Vallée: Dites-moi comment vous déterminez les partenariats qui sont... ou le choix des partenariats, pardon, que vous établissez sur le territoire du Québec. Comment vous avez... Qu'est-ce qui vous a amenés, par exemple, à choisir d'établir un partenariat en Abitibi? Qu'est-ce qui vous amène à établir... Bien, je comprends le partenariat en Outaouais, ça va de soi, avec la fonction publique qui est très forte, mais qu'est-ce qui va vous amener vers un partenariat particulier avec une autre université?

M. Proulx (Marcel): Je pense que le critère premier, c'est le critère de la complémentarité. Est-ce que nous pouvons faire ensemble des choses que nous ne pourrions pas faire aussi bien tout seuls? Il serait déraisonnable, pour nous, d'aller offrir nos programmes de formation à l'intention des administrateurs publics de la région de l'Abitibi. Ça nous coûterait une fortune en déplacements. Nous n'avons pas un ancrage fort dans cette région. Les clientèles sont relativement restreintes. Donc, le travail et de démarchage, d'installation et d'offre de cours serait excessif.

L'Université du Québec en Abitibi est bien implantée, a des relations fortes avec cette clientèle, a besoin de notre expertise par ailleurs qui se combine bien avec leur expertise, et on a pensé que c'était le genre de partenariat qui serait une solution gagnant-gagnant. Là où nous avons les mêmes compétences, la même expertise, là où le partenaire n'aurait rien à nous apporter, habituellement on n'a pas intérêt à créer d'entente. D'ailleurs, nos collègues ne nous le demandent pas. Dans certaines régions... Nous sommes, par exemple, au Saguenay. Nos collègues de l'Université du Québec à Chicoutimi sont dans des créneaux différents. On n'est pas en concurrence. On est très contents de loger dans des locaux de la Fondation de l'UQAC, qui nous rend de très bons services. On travaille ensemble. On a un partenariat mais sur la base de ressources matérielles, dans ce cas-là, et puis une complicité, si un jour elle émerge. Et donc ce n'est pas le partenariat absolument, mais, chaque fois qu'il y a une possibilité de faire des choses ensemble...

Et l'avantage de l'Université du Québec, c'est que nous nous voyons régulièrement et que nous avons la possibilité, de temps en temps, de voir si on pourrait organiser soit des petites choses soit des choses un peu plus grosses ensemble.

Mme Vallée: Vous aviez mentionné... vous vous démarquez beaucoup par vos chaires de recherche, par la spécificité de ce que vous offrez. Avant vous, vos collègues des HEC mentionnaient l'importance de viser vers l'excellence du monde universitaire québécois, pas seulement dans le milieu des affaires, mais en général. Comment, vous, au sein de l'ENAP, faites-vous pour justement arriver à vous orienter vers cette excellence-là? Est-ce que vous travaillez avec des indicateurs particuliers?

Est-ce que vous avez une philosophie particulière qui vous mène justement à mettre en place des programmes qui deviennent finalement des incontournables?

**(17 h 40)**

M. Proulx (Marcel): L'excellence en matière de recherche universitaire passe, d'abord et avant tout, par des professeurs qui sont animés par le désir de faire de la recherche de haut niveau.

Donc, ça passe d'abord par nos politiques de sélection. On a engagé... On a renouvelé une bonne part de notre corps professoral au cours des 10 dernières années, et cela fait partie des critères importants de recrutement que d'avoir des professeurs qui seront non seulement d'excellents professeurs, l'enseignement est très important chez nous, mais qui seront des chercheurs mobilisés. Nous avons aussi, et cela fait partie de notre nouveau plan de développement de la recherche, toutes sortes d'outils d'incitation. Un de ceux-là, et il est majeur, consiste à réinvestir dans le développement de la recherche, parce que le nerf de la guerre dans ce domaine-là, c'est beaucoup l'argent, de réinvestir des frais indirects qui normalement devraient servir à financer nos services administratifs. Selon les règles du ministère de l'Éducation, on s'attend à ce que les frais indirects servent à financer l'infrastructure, notamment l'infrastructure matérielle. Nous avons accepté de sacrifier, et nos collègues des services administratifs ont accepté ce sacrifice, de sacrifier des sommes qui normalement devraient servir à des fins administratives et de les détourner vers le développement de la recherche.

Donc, à notre échelle, nous avons investi beaucoup de moyens, des moyens financiers, mais qui se traduisent par toutes sortes de moyens concrets, dans le développement de la recherche.

Nous avons aussi réussi, et nous en sommes assez fiers, à débaucher des professeurs, «débaucher» dans le sens français, à aller chercher des professeurs d'autres universités qui sont déjà des chercheurs prestigieux et qui ont choisi de venir chez nous parce que nous sommes une plus petite université, que nous ne faisons que du deuxième et troisième cycle, parce qu'on fait du multidisciplinaire, bref parce qu'on leur a proposé un cadre stimulant, enthousiasmant, croyons-nous. Et nous avons été chercher comme cela un professeur... une professeure, déjà solidement établie, de l'Université McGill et un autre, une grande vedette internationale en matière de recherche, de l'Université de Montréal, dans une institution qui, il faut bien le dire, n'offre pas toujours des salaires comparables à ce qu'on offre dans ces institutions, et pourtant ils ont choisi de venir chez nous.

Mme Vallée: Est-ce que, dans le recrutement, la marge de manoeuvre financière est aussi un obstacle? J'imagine.

M. Proulx (Marcel): Certainement. Certainement. Quand nous avons des compressions au cours des années... Je disais tout à l'heure: L'école n'a pas eu de déficit au cours des six dernières années. En fait, l'école n'a pas eu de déficit au cours, si je me rappelle bien, des 15 dernières années. Nous avons absorbé les compressions notamment en réduisant la croissance de notre corps professoral, en ne renouvelant pas notre corps professoral et, ce faisant, en sacrifiant en partie notre effort de recherche, alors que d'autres, il faut bien le dire, ont maintenu le cap sur les dépenses, on fait des déficits, ce qui leur a permis de maintenir un corps professoral plus considérable que le nôtre. Nous payons encore le prix... Même si nous commençons à relever la tête notamment en matière de recherche, nous payons le prix des efforts que nous avons faits pour assurer l'équilibre budgétaire. Rien n'est gratuit en ce bas monde, et les collègues des autres universités... Les autres universités qui ont fait des déficits n'ont pas gaspillé cet argent, ils ont maintenu notamment leur corps professoral à un niveau que nous n'avons pas pu maintenir.

Mme Vallée: Merci.

Le Président (M. Pigeon): Alors, oui, il reste six minutes. Alors, Mme la députée de Trois-Rivières.

Mme St-Amand: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, à mon tour de vous souhaiter la bienvenue. Je lisais dans votre document, dans votre bilan que votre plan de développement se termine cette année. Est-ce que vous avez un nouveau plan de développement qui est prévu pour les cinq prochaines années?

M. Proulx (Marcel): Nous aurons forcément un plan de développement. Nous sommes, il faut bien vous le dire, dans une année de transition, puisque j'arrive à la dernière année de mon mandat, je suis dans la dixième année de mon mandat de directeur général, donc mon deuxième mandat, et qu'il ne serait pas très sage d'amorcer un plan de développement avant de savoir ce qu'il en sera pour la prochaine direction générale. Donc, ça explique que nous sommes... actuellement nous terminons ce plan et qu'une fois que l'incertitude quant à la direction de l'école aura été levée... je pense que ce sera la première tâche de la prochaine année, de commencer.

Mme St-Amand: Est-ce que vous avez des projets de développement pour les cinq prochaines années?

M. Proulx (Marcel): Ah, nous avons, dans nos cartons, des projets pour alimenter un plan de développement sur 15 ans.

Vous parliez de dynamisme tout à l'heure. Vous n'avez sans doute... Vous n'avez pas eu l'occasion d'entendre le dynamisme de mes collègues. Mais, pour moi qui vois ce qu'ils ont dans leurs cartons, je vous assure que, tant en développement de la recherche, en développement de l'enseignement qu'en développement de l'ensemble de nos services aux organisations, nous avons un potentiel de doublement de la taille de notre institution au cours des cinq à huit prochaines années. Juste les projets que nous avons donnent le vertige, donc je ne suis pas très inquiet quant aux plans de développement que nous allons nous donner. Le problème va être plutôt l'inverse, de nous restreindre dans ce qui est faisable dans le contexte économique actuel.

Mme St-Amand: Parfait. Merci. Je pense que je reviendrai tout à l'heure.

Une voix: ...

Le Président (M. Pigeon): Oui, il reste quatre minutes.

Mme Charbonneau: Bon. Question un peu technique, M. le directeur. Depuis quelques années, le rôle d'un directeur d'école... je reviens toujours sur le même sujet, mais un rôle de directeur d'école a beaucoup changé, et on a vu un rôle de leader pédagogique, dans une école d'une commission scolaire, devenir un rôle de gestionnaire, contrairement à un rôle au niveau du cégep, où on voit le directeur des services éducatifs devenir le directeur général, puis, au niveau des universités, c'est différent un peu, aussi.

Quand on regarde cette façon différente de gérer un établissement public scolaire, comment on ajuste le cours de votre côté pour s'assurer qu'on suit un peu la vision du ministère mais aussi la bonne gestion d'un établissement, qui tout d'un coup devient un établissement où le directeur doit faire du financement, il doit regarder tout l'aspect ressources humaines de son établissement... à un directeur avant qui n'était qu'un visionnaire et qui... bien, pas que... mais qui était un visionnaire et un leader pédagogique? Donc, sa gestion était complètement différente à celle qui est maintenant. Et comment percevez-vous... et c'est une opinion que je vous demande d'émettre, mais, si vous n'êtes pas à l'aise, vous ne le faites pas, comment percevez-vous le fait qu'on pourrait donner plus de responsabilités à un gestionnaire scolaire qu'il a déjà maintenant?

M. Proulx (Marcel): Je suis de ceux qui croient qu'il serait dangereux de déconnecter la gestion administrative du coeur de métier des organisations et que, si votre direction générale... le patron de quelque établissement que ce soit devient un technicien de la gestion et se désintéresse de la mission puis de la manière dont elle s'exerce, le vrai leader sera à un autre niveau ou les vrais leaders seront à un autre niveau. Et je pense qu'il faut être tout à la fois... et c'est ça, le défi des gestionnaires modernes, à la fois compétent, solide en gestion, mais aussi solide dans la conduite du métier, dans la vision, dans l'orientation. Autrement, on se prive de ce qui est la richesse de la gestion. Et c'est vrai, je pense, dans notre institution, et je pense que c'est vrai aussi là où les gestionnaires sont les meilleurs et sont à la fois un et l'autre.

Mme Charbonneau: Je vous remercie, parce que ça vient mettre un sens différent dans le leadership de la gestion d'une organisation publique. On a souvent vu un ou l'autre. On a rarement entendu une opinion qui venait joindre le leadership de quelqu'un avec sa vision un peu plus administrative. Donc, merci pour cette perception-là, qui est quelque peu différente mais qui va donner un avenir. Et c'est un peu la tâche que vous avez, de faire émerger, chez nos nouveaux gestionnaires scolaires, quelque chose de différent.

Le Président (M. Pigeon): Merci, Mme la députée de Mille-Îles. Nous retournons de l'autre côté, et je reconnais la députée de Champlain.

Mme Champagne: Bonjour. Bienvenue. Écoutez, on en apprend tous les jours, et je pense que ça fait partie de la beauté du travail qu'on fait.

Dans un premier temps, juste bien me situer... Vous avez déjà eu... vous avez toujours un partenariat avec l'Université du Québec à Trois-Rivières où il y a eu formation sur place avec des professeurs de chez vous, de l'ENAP. Ça se continue toujours? Je ne me trompe pas?

M. Proulx (Marcel): Oui. En fait, nous sommes logés, à Trois-Rivières, nous sommes logés dans les locaux de l'Université du Québec à Trois-Rivières. C'est un programme qui est le nôtre. On utilise aussi des ressources de la région, mais on n'a pas de partenariat formel de formation avec l'UQTR, sinon dans l'utilisation des locaux.

Mme Champagne: Donc, vous êtes sur place puis depuis plusieurs années, je crois.

M. Proulx (Marcel): Tout à fait, depuis une vingtaine d'années.

Mme Champagne: Bon. Parfait. Alors, ça me rassure, et de un. Et, de deux, c'est une question un petit peu plus large, puis je vais vous laisser aller, parce que j'ai ma collègue également de... voyons, ma collègue de Taschereau qui a quelques questions également.

Alors, écoutez, je lisais en quelque part dans vos documents que l'ENAP croit, puis probablement avec raison, là, qu'il y a trois menaces qui pèsent sur son développement à court terme, là. Dans les trois menaces, c'est évident que les compressions sont une menace, puis on l'a entendu tantôt. Et j'entendais que plusieurs universités demandent un statut particulier ou veulent être reconnues avec un statut particulier et je pense qu'après quelques jours elles ont toutes un statut particulier, c'est-à-dire qu'elles sont toutes sous-financées. Alors, je pense que je viens d'en découvrir un, là. Alors donc, il va falloir qu'on regarde cela. Puis on va entendre ça la semaine prochaine, pendant cinq jours, également, j'en suis convaincue.

Or, la première compression, je pense qu'elle va peut-être être un peu... Il y a peut-être une pression qui se fait avec la fameuse loi n° 100. J'aimerais vous entendre là-dessus. Le deuxième... Vous savez que le discours médiatique, vous en avez parlé un peu tantôt... je pense que c'est aussi un autre élément où présentement... En ce qui regarde la fonction publique, il y a tellement de choses qui sont dites que ça pourrait soit apeurer ou éviter... ou empêcher quelqu'un de vouloir aller dans le domaine, mais je ne suis pas certaine. Puis la troisième, bien c'est évidemment que toutes les compressions financières que vous avez eues et vos attentes que vous avez face autant aux appuis de toutes sortes... mais qu'aux gouvernements qui sont en place et qui ont déjà été en place, là...

Alors, pourriez-vous me ramasser ça un petit peu et me dire, comme vous êtes si bien capables de le faire, si ces trois menaces-là sont gérables à court, à moyen ou à long terme?

**(17 h 50)**

M. Proulx (Marcel): Je dois vous dire que nous avons trouvé profondément regrettable que la loi n° 100 vise explicitement le perfectionnement vu comme une source de gaspillage dans l'administration publique. Non pas qu'il n'y a pas de perfectionnement qui puisse être futile... mais que, parce que certaines activités de perfectionnement pouvaient être futiles, d'imposer à l'ensemble des organismes publics une compression ciblée de 25 % dans les frais de perfectionnement, nous trouvons que c'est un message désolant qui est envoyé quant à l'importance du perfectionnement, quant à l'importance de la formation dans une société du savoir.

Dans une société où on mise sur des compétences, où on a besoin de compétences, je trouve que, là, on a sacrifié, je dois dire... À partir d'un discours médiatique excessif contre le perfectionnement, on a jeté littéralement le bébé avec l'eau du bain. 25 % du perfectionnement de moins, outre le fait que ça fait mal, outre le fait que chez nous, qui vivons de ces budgets de perfectionnement, c'est extrêmement lourd... je trouve que l'impact symbolique est encore pire parce que ça dit: C'est là qu'est le gaspillage. Et je suis persuadé que ce n'est pas vrai, je suis absolument persuadé. Nous pensons que ça va peut-être nous affecter moins que d'autres parce que nous avons la réputation d'offrir des formations assez conventionnelles, assez sérieuses. On n'a rien de fantaisiste chez nous. Ça peut être amusant, la formation, mais on n'est pas des fantaisistes.

Cela dit, je trouve que ce procès fait à la formation est un mauvais procès et que ça ne sert ni les intérêts de l'administration publique... certainement pas les intérêts de l'ENAP.

Je trouve aussi que, sur le discours médiatique, il y a une grande menace qui plane sur la qualité de la gestion de l'État québécois. Si on continue à dire aux jeunes que l'administration publique est un milieu triste, à la limite un milieu où il n'y a pas de défi, un milieu inintéressant, si on continue à déprécier ce qui s'y fait et les artisans du secteur public, nous n'attirerons plus désormais dans l'administration publique que les moins bons, que les restants. Or, si la tendance se maintient, il y aura moins de monde dans la gestion publique, il y aura des compressions d'effectifs,  et donc ceux qui sont là devront être des bons, devront être les meilleurs. Et, si on veut attirer les meilleurs, la première chose... On le sait, les entreprises qui réussissent à attirer des gens réussissent à attirer d'abord des gens par l'image de leur entreprise, le salaire venant relativement tard. Un jour ou l'autre, il faudra parler du salaire des fonctionnaires, mais c'est autre chose.

Mais c'est d'abord l'image, et l'image, chez les jeunes, du secteur publique québécois et de l'emploi dans le secteur publique est terriblement dégradée.

Par ailleurs... dernier élément. Comme toutes les autres universités, nous parlons du relatif sous-financement de l'école et nous ne sommes pas originaux. Ce qui nous attriste cependant, c'est que les efforts que nous avons faits pendant toutes ces années pour avoir un budget équilibré... et les sacrifices que nous avons dû faire pour y parvenir... On a parfois l'impression... Et ça, on a un sentiment d'injustice. Souvent, dans notre collectivité, dans notre communauté, on a parfois l'impression que c'est ni reconnu ni récompensé et que finalement on récompense ceux qui ont eu la stratégie inverse, de sorte que nous avons constamment des collègues... la pression qui dit: Pourquoi nous ne faisons pas de déficit? Nous pourrions faire tellement de plus belles choses. Puis, après tout, tout le monde l'a toujours fait, et qui s'en est trouvé plus mal? Et au contraire ceux qui en ont fait ont de meilleures causes pour expliquer qu'ils en méritent plus. La preuve, c'est qu'ils ont des déficits, comme si... Et j'ai déjà entendu, de la part de collègues de la fonction publique... en disant: Vous ne vous plaignez pas, vous, l'ENAP, vous êtes toujours bien, donc vous n'avez pas de problème.

C'est comme si, pour être reconnus... c'est la roue qui grince, qui reçoit de l'huile... que, pour être reconnus, il faut se mettre dans une situation qui ne correspond pas à nos valeurs.

Nous ne voulons pas faire de déficit. Nous croyons que ce n'est pas à nous de décider comment la société québécoise va investir l'argent public, et que c'est une responsabilité qui est la vôtre, et que je n'ai pas et que nous n'avons pas la légitimité pour endetter les Québécois. Mais on ne voudrait pas que ça desserve notre mission. Et là-dessus il y a une menace. Si on ne trouve pas un jour une façon de récompenser, je vais le dire de façon caricaturale, les bons élèves... et nous avons toujours été de bons élèves et nous allons continuer à l'être, peut-être les bons élèves ne le seront-ils pas éternellement.

Mme Champagne: J'apprécie énormément ces commentaires. Je trouve que c'est fondé, c'est précis. Merci beaucoup.

Le Président (M. Pigeon): Oui, Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais: Merci, M. le Président. Bonjour, M. Proulx. C'est un plaisir de vous rencontrer, M. Michaud, Mme Moreau. Simplement, j'ai bien écouté que vous adaptez vos formations aux individus, non pas la formation au complet, mais les besoins, là, vous essayez d'aller chercher les faiblesses des individus.

Je veux vous poser la même question de l'adaptabilité de vos programmes mais par rapport à une société. Je veux dire qu'on voit actuellement qu'en matière de gouvernance un des plus grands débats qu'on a dans la société québécoise actuellement, c'est sur l'éthique, l'éthique des organisations, la place des lobbys, les paliers de pouvoir, la place du politique, du personnel politique, mais de la volonté politique, le devoir de parole quand on voit quelque chose versus le devoir de réserve. Ce sont toutes des notions de gouvernance. Ils sont tous associés, ces problèmes d'éthique, hein, à la façon moderne de gouverner.

Est-ce que, dans ce temps-là, une université comme vous, par exemple, peut réagir? Est-ce qu'elle propose des formations nouvelles? Est-ce qu'elle... Comment pouvez-vous vous servir... Le faites-vous, vous servir d'un enjeu sociétal et le transplanter immédiatement, mettons, dans des formations ou dans des propositions de formation à notre administration publique?

M. Proulx (Marcel): Bien sûr. Il y a quelques années, quand nous avons ouvert un poste en éthique, nous avons fait sourire un peu, nous avons dû convaincre nos collègues que c'était un enjeu majeur dans la formation des administrateurs publics, avec toujours le risque de dire: Bien, est-ce que nos étudiants vont accepter de suivre un cours de morale? Un cours d'éthique, ce n'est pas un cours de morale, mais il y a toujours cette idée que finalement ça pourrait devenir un peu prêchi-prêcha. Or, non seulement on a engagé ce professeur qui est très actif, Yves Boisvert, qui est très actif en recherche, mais c'est un grand, grand succès auprès de nos étudiants qui comprennent que les enjeux éthiques sont des enjeux contemporains, majeurs.

Par ailleurs, les formations en éthique aux services aux organisations sont des formations qui marchent très bien précisément parce qu'on a réussi à dépasser le discours un peu moralisateur prêchi-prêcha et faire en sorte que les formations en éthique soient des formations sur le raisonnement éthique de finalement... d'habiliter les gestionnaires publics à être capables de raisonner sur des enjeux éthiques, d'être capables de faire face à des enjeux éthiques qui, vous le savez, se posent dans le quotidien. Ils se posent certainement pour les élus. Ils se posent aussi pour les administrateurs publics à tous les niveaux.

Et je dois dire que c'est un des beaux succès, que nous avons eus au cours des dernières années, de réussir à convaincre les milieux que la formation en éthique est un élément essentiel de la compétence de tous les acteurs de l'État.

Mme Maltais: Et avez-vous réussi à convaincre l'administration publique, dans le sens de la fonction publique, d'investir dans ce domaine pour essayer d'un peu clarifier les situations que vivent nos administrateurs quotidiennement et avec lesquelles ils vivent difficilement, parfois?

M. Proulx (Marcel): C'est une préoccupation majeure des hauts fonctionnaires que nous fréquentons, des administrations. Je dois dire que ça explique le succès de nos formations non créditées. Là, crédité, c'est plutôt les individus qui le choisissent. Dans ce cas-là, les organisations choisissent. Et c'est une vraie préoccupation, je pense, à tous les niveaux de l'administration publique. Nous pensons d'ailleurs qu'il va falloir passer à une vitesse supérieure à cet égard et que, loin de s'arrêter et de s'interrompre, nous entrons dans une époque où on va devoir pousser pas mal plus loin la réflexion éthique.

Mme Maltais: Merci beaucoup. J'apprécie cette préoccupation.

Le Président (M. Pigeon): Merci, Mme la députée de Taschereau. Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Il doit rester juste quelques minutes, mais je vais enchaîner sur une question qui va bien, je pense, avec ce que mes collègues vous ont posé comme question. Parmi les menaces qu'on a évoquées tout à l'heure, celles qui sont d'ordre financier, je les comprends parfaitement. Celle qui tient à l'image de l'administration publique, j'aurais cru, moi, que ça pouvait être un facteur d'attrait. J'aurais cru que ça peut intéresser des gens justement de venir étudier les raisons pour lesquelles l'administration publique a mauvaise presse ou a une image négative, autrement dit, que ça pouvait se retourner dans l'autre sens et devenir même un objet d'étude.

Comment se fait-il qu'au Québec, mais ce n'est pas propre au Québec... comment se fait-il qu'au Québec, en Amérique du Nord... que l'administration publique ait mauvaise presse, que ça n'intéresse pas forcément des jeunes générations, alors que c'est vital? Un État ne peut pas se développer s'il n'a pas une fonction publique forte. Et l'État du Québec a eu la chance d'avoir, depuis quand même plusieurs décennies, une fonction publique forte et relativement stable. Contrairement à d'autres pays du monde où, quand le pouvoir politique change, tout change, on a, nous, une tradition qui est autre. Il y a des changements bien sûr, mais il y a malgré tout une certaine stabilité, ce qui fait qu'il y a des résultats en termes de politiques publiques, bon, en termes de gestion de l'État. Et il me semble que c'est un défi tel que ça devrait susciter de l'intérêt plutôt qu'être démobilisateur.

Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus. Est-ce que je... Est-ce que ma réaction est étrange ou bien est-ce que vous la comprenez?

**(18 heures)**

M. Proulx (Marcel): C'est sans doute vrai pour un observateur de la chose publique. Si nous donnions des formations qui seraient des formations d'analyste, d'observateur... Bien sûr, c'est un milieu d'observation intéressant, absolument passionnant. On en a fait notre métier, donc on trouve ça passionnant. Ce que nous formons, ce sont des acteurs, des intervenants. Et ce qui est important, c'est que les gens aient l'impression qu'ils puissent se développer, apporter quelque chose à cette administration, que c'est un milieu où on valorise la compétence, l'excellence, ce qui est le cas.

Mais le discours actuel est un discours sur la médiocrité de nos administrations. Le discours actuel laisse entendre que nos administrations sont minables. On n'a pas ces héros, on n'a pas développé le culte du héros. L'administrateur public est discret, prend les coups et n'y répond pas. Personne ne le défend. Puis, quand on essaie de le faire, nous, on est un peu en conflit d'intérêts. Et donc, alors que dans le privé on a cultivé le mythe du héros qui est un gestionnaire, dans le secteur privé, dynamique, qui peut se défoncer, faire des choses extraordinaires, on a cultivé l'image du médiocre, du rond-de-cuir, de celui qui se contente de pousser des papiers, de suivre des règlements, aucune initiative. C'est faux. C'est faux, mais on ne le dit pas. Et nous souhaitons que se crée une grande coalition, on y travaille avec d'autres partenaires, que se crée une grande coalition pour la valorisation non seulement de l'administration publique, du rôle de l'État, c'est une chose, mais du travail extraordinaire que font dans les milieux les administrateurs publics.

Dans les milieux hospitaliers, plutôt que de dire: Si ça va mal, c'est parce qu'on a de mauvais gestionnaires, on devrait être capables d'expliquer à quel point c'est héroïque actuellement, dans le milieu hospitalier, de faire fonctionner des machines compliquées et que ça prend des gens de très grande compétence, que c'est autrement plus compliqué de gérer un hôpital ou un ministère que de gérer une petite entreprise qui fait des portes et fenêtres, avec respect pour les gens qui font des portes et fenêtres. Pourtant, les héros sont du côté des portes et fenêtres. Et qui dit qu'être sous-ministre de la Santé, c'est une tâche colossale, que ça prend quelqu'un qui a des nerfs, de l'intelligence, etc.? Personne, personne. Personne ne connaît le sous-ministre de la Santé... enfin, vous certainement, mais à l'extérieur.

Et donc il y a un travail à faire, de valorisation de ces hommes et de ces femmes, qui font un travail extraordinaire... et que nous avons tous, je pense, une responsabilité, nous qui les fréquentons, d'en faire la défense et l'illustration.

Mme Malavoy: Puis juste pour terminer...

Une voix: ...

Mme Malavoy: Il me reste une minute? Bon, vous avez mis donc ces menaces... vous les avez rendues explicites, mais il reste que celle-là dont on parle, elle est profonde, et ça ne se revire pas facilement.

Vous parliez de la loi n° 100. Bon, c'est une loi. Elle pourrait être adoptée, ne pas l'être, être modifiée. Bon. C'est quelque chose qui peut se circonscrire. Mais ce dont vous parlez, c'est vraiment l'atteinte à l'image de la fonction publique, de la perception négative de la fonction publique, et il me semble que c'est là un défi vraiment majeur que de rétablir cela. Mais je suis contente que vous partagiez ça avec nous parce que je ne le voyais pas à ce point. Je le vois bien dans le discours public, mais je ne voyais pas à quel point ça peut atteindre les gens qui sont dans ce système-là et dont on a absolument besoin.

Je pense que vous vous en faites bien le porte-parole, de cette préoccupation.

M. Proulx (Marcel): Et, paradoxalement, ceux qui malgré cela choisissent de se former en administration publique ont un enthousiasme, un désir de faire des choses qui est véritablement une stimulation extraordinaire pour ceux qui leur enseignent. On a des étudiants extraordinaires, motivés parce qu'ils croient précisément que les défis sont à la mesure de toutes les capacités, toutes les compétences qui seront développées. Et donc ce qu'on souhaiterait, c'est qu'il y ait plus de gens et que les meilleurs étudiants choisissent, comme on voit dans certains pays, choisissent le secteur public, parce qu'on a besoin des meilleurs.

Il faudra après ça trouver le moyen d'aller les chercher. Le fédéral est en train d'écrémer les meilleurs étudiants en administration publique au Québec parce que le fédéral met un genou à terre pour les supplier de venir dans l'administration. Au Québec, on est encore un peu timide.

Le Président (M. Pigeon): Alors, merci. Ça termine ce bloc. Et donc nous sommes de retour au parti ministériel, et je vais me permettre à mon tour de poser quelques questions.

Et, avant de poser une question, j'aimerais faire un bref commentaire concernant ce qui vient d'être dit. J'ai eu l'occasion, dans une vie antérieure récente, de travailler au ministère des Transports du Québec et je dirais que l'élément que j'ai retenu, qui est peut-être le plus fort, c'est la qualité de la fonction publique. Alors, j'abonderais dans le même sens que vous, M. le directeur général.

Ceci étant dit, j'ai des questions de divers ordres. Je vais poser la première question, que j'ai posée presque à tous les dirigeants d'institution: Quelles sont les politiques que vous mettez en oeuvre, quelles sont les manières de faire que vous utilisez pour vous assurer de la plus grande qualité possible de la gestion des fonds publics qui sont mis à votre disposition?

M. Proulx (Marcel): Il n'y a pas de recette et de politique, je dirais, universelles pour cela.

Ce qui nous pousse à faire un usage parcimonieux de nos fonds, des fonds publics tient en partie à nos ambitions, je dois dire. Si on veut pouvoir avoir dégagé des marges pour la recherche, si on ne... On ne peut pas négliger l'enseignement, je vous l'ai expliqué, parce que, si nous commençons à négliger l'enseignement, nous allons perdre nos étudiants. Donc, nous sommes face à un principe de réalité. Et le fait que nous ne puissions pas faire de déficit non seulement parce que c'est la conviction de l'ensemble de l'équipe de direction, mais c'est aussi la conviction forte de notre conseil d'administration, qui est constitué, en gros, aux deux tiers de hauts fonctionnaires de tout ordre...

Donc, dans le fond, nous sommes pris avec une sorte de principe de réalité que nous vivons avec les sommes qui nous sont consacrées et donc on en fait un usage particulièrement parcimonieux. La logique, que nous avons adoptée, d'économie est une logique de restriction de nos services administratifs. Il m'arrive de penser que nous en payons le prix et que c'est désormais les gens de nos unités opérationnelles, enseignement, recherche et services aux organisations, qui font pression pour que nous augmentions la taille puis l'investissement en matière de services administratifs. On a sous-investi. Ça tombe mal. Juste au moment où on décide que, dans l'ensemble du secteur public, il faut réduire les services administratifs, nous, on se rend compte que pendant des années on a dit aux gens des services administratifs: Patientez. Notre raisonnement a toujours été le même: Développons, augmentons nos services, nos clientèles, et après ça on s'arrangera pour alimenter l'intendance. Et bien là ce serait rendu le temps d'investir dans les services administratifs, puis on tombe à un mauvais moment.

Cela dit, cet esprit-là, il est facilité dans un contexte où nous ne faisons pas et ne ferons pas de déficit.

Le Président (M. Pigeon): Merci. Une autre question. On a parlé du corps professoral. Avez-vous des chiffres sur la structure ou la pyramide d'âges des professeurs? Est-ce qu'il y a eu beaucoup de renouvellement récemment chez les professeurs de carrière, là? Quelle serait la structure d'âges, environ?

M. Proulx (Marcel): On a fait un important renouvellement. Quoi, on doit avoir, quoi, le tiers de nos professeurs qui ont été engagés au cours des 10 dernières années?

M. Michaud (Nelson): Ah, facilement. Ça s'approche du 40 %, 45 %, oui.

**(18 h 10)**

M. Proulx (Marcel): Ce qui impliquerait en principe un rajeunissement, 40 %, 45 %. En pratique, il faut vous dire que nous engageons nos professeurs pas très jeunes parce qu'ils enseignent à des praticiens, parce qu'on valorise des gens qui non seulement ont fait des doctorats, mais qui ont souvent fait autre chose. Nos jeunes professeurs ont parfois sept, huit ans de carrière dans l'administration avant de le faire, ce qui fait que nos professeurs ont autour... nos jeunes professeurs ont autour de 40 ans... entre 35 et 40 ans, et nos plus vieux ont autour de 55.

Ça fait qu'on a une pyramide qui est assez tassée, on n'a pas une pyramide très étendue. Notre moyenne d'âge, je pense, est à 52, 53 ans, ce qui est à peu près la moyenne québécoise, je pense.

Le Président (M. Pigeon): D'accord. Et, concernant l'enseignement, bon, il y a eu des questions, là, sur tous les défis qui se posent, je dirais, par rapport à l'objet de vos travaux, c'est-à-dire la fonction publique et le développement de l'administration publique. Est-ce que vous songez à développer de nouveaux programmes, de nouveaux cours, de nouvelles façons de faire pour vous adapter aux nouvelles réalités de la fonction publique, aux nouveaux défis qui sont posés, qui sont maintenant? On a mentionné les défis éthiques, environnementaux, etc.

Comment se fait le travail, là, de réflexion sur l'avenir et ce que doit devenir ou ce que deviendra une école comme la vôtre, et le contenu des cours et des programmes?

M. Proulx (Marcel): Nous croyons qu'un bon programme de formation est fait d'un mélange équilibré de développement d'activités fondamentales.

Les compétences fondamentales n'ont pas changé au cours des 30 dernières années. La forme en change, et évidemment les cours évoluent, mais la base reste la même. Et par ailleurs, et on le fait de façon systématique, introduire des nouveaux cours qui correspondent aux préoccupations actuelles. On a parlé d'éthique tout à l'heure. On pourrait parler de gestion des risques. On peut parler de gestion de crise. Un administrateur public qui n'est pas ferré en gestion de crise... en tout cas, qui n'a pas de compétence de base en matière de gestion de crise a des sacrés problèmes. C'est vrai en gestion des risques. On est beaucoup plus sensibles maintenant. On l'a toujours été. Mais on est plus sensibles à la gestion des risques. Ce ne sont que des exemples de types de cours qu'il faut injecter en évitant de détruire le fond de commerce des habiletés de base.

Les services aux organisations servent souvent de banc d'essai pour ces nouveaux cours, parce que par définition, aux services aux organisations, on doit être constamment en pointe par rapport aux enjeux de l'heure, y compris en sacrifiant aux effets de mode à certains moments... ce qui fait que ça sert souvent de banc d'essai. Ce qui est développé aux services aux organisations est souvent à l'origine de cours qui vont émerger plus tard à l'enseignement crédité. L'enseignement crédité... on s'inscrit dans la durée un peu plus, on essaie d'être moins ballottés par les modes.

Mais, cela dit, il est fondamental de s'ajuster. Ça inclut les nouveaux programmes. On n'a que des programmes en administration publique, mais on les décline dans différentes concentrations. Et, par exemple, nous venons de lancer une maîtrise pour gestionnaires en gestion des communications gouvernementales. Je pense que, là, on est en pointe. De plus en plus, on pense que les administrateurs publics, pas juste les directions de communications, vont devoir avoir une compétence en matière de relations avec les médias, de communications. Et nous lançons cette nouvelle maîtrise dont on est en train de tester le succès. Et il y a dans les cartons plusieurs projets de cette nature qui visent des compétences particulières, des segments particuliers.

Ça va toujours s'appeler maîtrise en administration publique, mais ça va être décliné différemment.

Le Président (M. Pigeon): Et, dans le domaine des ressources humaines, dans le domaine de la gestion des ressources humaines, on entend beaucoup parler des problèmes de stress au travail, de la manière dont il faut faire en sorte que chaque individu au travail ait un environnement de travail qui est sain, etc. Est-ce que ce sont des sujets que vous abordez?

M. Proulx (Marcel): Tout à fait. Nous avons actuellement recruté un nouveau professeur associé qui est à l'Université Laval mais qui est aussi chez nous pour intervenir dans les organisations publiques, pour créer une sorte d'observatoire sur la qualité de vie au travail dans le secteur public. C'est une préoccupation aussi dans notre enseignement crédité, évidemment. La question des ressources humaines se pose de façon générale dans tous les enseignements du management. On ne peut pas enseigner la gestion publique puis oublier les personnes. Donc, c'est plutôt transversal. On a des cours de ressources humaines, mais c'est une préoccupation transversale. Mais explicitement, sur toute cette question de qualité de vie au travail, de santé au travail, c'est une préoccupation majeure qui va se développer en recherche, qui a commencé à se développer à travers les actions d'intervention conseil et de formation à la Direction des services aux organisations et qui va, comme c'est l'habitude, contaminer l'ensemble de notre organisation.

Le Président (M. Pigeon): Et, dans un autre domaine, dans un domaine connexe mais qui m'intéresse beaucoup, qui est toute la question des technologies, les Anglais disent l'e-learning, je vois que vous avez créé un diplôme entièrement à distance. D'abord, je me posais la question: Est-ce que c'est en mode synchrone ou asynchrone? Mais je voulais voir aussi un peu avec vous, là, quelle était votre vision du développement de votre enseignement avec l'utilisation des nouvelles technologies, ce qui pourrait, là... Étant donné les gens avec qui vous travaillez, ça peut être un cadre qui est à Baie-Comeau et qui est dans le domaine de la santé ou ça peut être un directeur d'école ailleurs.

Quelle est votre vision du développement, là, de l'utilisation des nouvelles technologies, qui me semble particulièrement pertinent pour votre cas?

M. Proulx (Marcel): Ça va jouer un double rôle. Le premier rôle, c'est de rejoindre, vous l'avez évoqué, des clientèles qui sur le territoire sont trop loin et qu'on ne pourrait pas rejoindre. Mais on pense que les clientèles qui vont le plus bénéficier de notre enseignement à distance sont ceux qui sont inscrits dans nos programmes réguliers et qui vont persiller leur formation parce que... de cours à distance parce qu'à certains moments de leur carrière, compte tenu des mandats qui sont les leurs, ils ne peuvent pas constamment se déplacer trois heures par semaine pour aller à des cours. De toute façon, la formule trois heures par semaine, pendant 15 semaines, tous les soirs, est une formule qui commence à être éclatée aussi. Et donc ce qui va apparaître et qui commence à apparaître aussi, c'est une plus grande utilisation des technologies à l'intérieur de cours qui sont des cours traditionnels en salle, où le professeur va peut-être fréquenter beaucoup moins ses étudiants en salle, va faire beaucoup moins de transmission de connaissances, va s'appuyer davantage sur les médias pour la transmission de connaissances et faire ce qui est peut-être ce qu'il y a de plus... qui est de la plus grande valeur ajoutée en classe, l'interaction, la construction ensemble, le débat, le travail en équipe, le travail avec le professeur... et qu'on va probablement, à travers les nouvelles technologies, voir émerger de nouvelles pédagogies.

Le Président (M. Pigeon): Et, dans ce domaine-là, est-ce que vous privilégiez surtout les cours en mode synchrone ou asynchrone? On sait que monter un cours complètement asynchrone, qui se tient par lui-même, c'est quand même assez complexe, et assez lourd, et assez onéreux.

M. Proulx (Marcel): Jusqu'à maintenant, on a fait surtout de l'asynchrone, à grands frais. Heureusement, on a financé le développement. Nos cours nous ont coûté une fortune. Ils ont été financés par l'ACDI parce qu'on l'a d'abord offerte, notre maîtrise, à l'étranger, pour nos clientèles internationales. Et on récupère notre investissement à l'interne. On a de trop petits groupes pour rentabiliser, c'est pour ça qu'on progresse lentement, pour rentabiliser le coût, pour amortir le coût extraordinaire du développement d'un bon cours, qui correspond à notre démarche interactive pédagogique de nos cours traditionnels, parce qu'on ne veut pas baisser le niveau parce qu'on le fait à distance. Vous comprendrez.

Le Président (M. Pigeon): Puis le D.E.S.S. entièrement en ligne, ça couvre quel secteur et vous visez quelle clientèle?

M. Proulx (Marcel): C'est la maîtrise pour gestionnaires. Actuellement, le D.E.S.S. existe parce qu'on l'a offert en ligne à distance. Il est offert sous une forme... On l'offre progressivement. Actuellement, il est en format de programme court, et c'est destiné à nos clientèles pour gestionnaires. Mais les cours de cette maîtrise pour gestionnaires pourront être pris en cours optionnels dans certains cas par nos étudiants de la maîtrise pour analystes. Tout est modularisé chez nous.

Ça fait que, quand on a des petites clientèles, il faut faire preuve d'imagination dans l'offre de cours.

Le Président (M. Pigeon): Écoutez, moi, je vous remercie, là. Ça termine, je pense, à moins qu'il y ait... Il resterait une petite minute. Non? Ça va. Alors, je vous remercie beaucoup, M. le directeur général, et je redonne la parole à Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Je vous remercie. On va terminer également, de notre côté.

Vous nous avez indiqué d'entrée de jeu que vous aviez tous les moyens de faire un bilan des dernières années. Puisque votre plan stratégique vient à échéance en 2010, moi, j'aimerais bien peut-être terminer sur la suite des choses en ce qui vous concerne. Et, à l'intérieur de ça, il y a une question qui me préoccupe, je ne sais pas si c'est dans votre perspective de prochain plan stratégique, mais c'est le taux de diplomation des étudiants et des moyens que vous mettez en oeuvre pour favoriser donc qu'ils aillent jusqu'au bout de leurs études. C'est un défi particulier pour cette clientèle qui est donc une clientèle, pour une bonne part, en emploi, qui doit avoir toutes sortes de raisons, à un moment donné, de ne pas aller jusqu'au bout.

Le taux de diplomation que vous nous indiquez actuellement est tout de même satisfaisant, mais est-ce que c'est dans vos préoccupations d'avoir des mesures plus larges encore de rétention de la clientèle? Mais, plus largement que ça, votre prochain plan stratégique, qu'est-ce qu'il comprendra? Et sur quoi voulez-vous mettre l'accent?

**(18 h 20)**

M. Proulx (Marcel): Sur le taux de rétention... ce n'est pas un enjeu majeur chez nous. Notre taux de diplomation est de l'ordre de 80 % chez nos étudiants à temps plein, ce qui est très bien. Par ailleurs, la statistique globale ne veut pas dire grand-chose, parce que nos étudiants à temps partiel n'ont pas à faire de course. De plus en plus, nous nous rendons compte que ce qui est important, c'est que nos étudiants soient assidus et qu'à la limite, s'ils prennent 12 ans pour faire leur maîtrise, c'est peut-être un peu long, mais que, s'ils prennent sept ou huit ans, ce n'est pas une tragédie s'ils continuent à prendre des cours, continuent à investir. On parle d'éducation à vie. Donc, notre enjeu est beaucoup moins là.

Notre plan stratégique, si je regarde la boule de cristal, parce qu'on va devoir consulter, on va consulter le milieu, on va consulter notre communauté mais largement le milieu... mais je pense qu'il y a deux éléments auxquels on ne pourra pas échapper. Le premier, c'est le développement de nouveaux enseignements, de nouveaux programmes et en particulier auprès de clientèles institutionnelles... nos clientèles ont toujours été des personnes... et qu'à l'avenir on pense que ce sont des organisations qui vont s'adresser à nous et qui vont prendre en charge la responsabilité de développer pour ceux qui sont en emploi, de développer les compétences et que pour cela nous devrons être capables d'avoir à la fois la flexibilité mais aussi la fermeté.

Il ne s'agit pas de donner les maîtrises au rabais, donner les... ou des doctorats au rabais. Et donc qu'on va devoir renforcer nos partenariats pour offrir ces formations, c'est vrai aussi pour les jeunes, pour la formation de la relève... donc qu'on va devoir travailler avec les institutions. On travaille bien avec les individus. Aux services aux organisations, on travaille bien avec les institutions. Il va falloir joindre les deux.

Le deuxième défi, et il est important, c'est celui de la recherche. Je pense que de plus en plus les politiques publiques, les réformes administratives seront fondées sur des données probantes. Le monde évolue. On est moins à des... à l'engagement dans des démarches sur la base de données approximatives et d'intuitions. On s'attend dans le monde moderne que les réformes s'appuient sur des diagnostics rigoureux, sur des données probantes. C'est l'«evidence-based policymaking», là, les politiques fondées davantage sur des faits, sur la science... et que ça va accentuer le besoin d'une recherche en administration publique, en gestion publique, en politiques publiques de qualité et que nous devrons, nous, être équipés, nous et les autres mais puisque c'est notre champ, l'administration publique, pour répondre aux besoins considérables dans ce domaine. Déjà, notre Observatoire de l'administration publique est sollicité systématiquement par toutes les administrations qui, au moment où elles envisagent de nouvelles mesures, ont le bon réflexe de se poser la question: Que font les autres ailleurs dans le monde? Et notre observatoire s'est spécialisé là-dedans.

Ce sera vrai en évaluation de programmes, où on a déjà un créneau, mais il y a plein d'autres créneaux où nous devrons développer des centres d'expertise pour répondre aux besoins de l'administration. Et ça, ces deux chantiers à eux seuls risquent de consommer beaucoup d'énergie dans notre organisation et sans doute beaucoup de ressources.

Mme Malavoy: En termes d'échéancier, vous pensez procéder comment? Et vous pensez avoir en main un prochain plan stratégique à quel moment?

M. Proulx (Marcel): La dernière fois, nous avons mis deux ans à produire un plan stratégique. C'est pour ça qu'on l'a étendu sur six ans. Tant qu'à prendre deux ans, aussi bien qu'il serve pendant longtemps.

Je ne sais pas ce qu'il en sera. On a pris de la maturité depuis. Mais, si on veut faire le travail sérieusement, consulter tous les groupes, mobiliser nos étudiants, je pense qu'on ne l'a pas suffisamment fait la dernière fois, mobiliser les milieux de l'administration publique, les administratifs mais aussi les politiques, bien ce sera un travail qui exigera sans doute, au moins, un an. Mais ça vaut le coup. Ça vaut le coup de le faire sérieusement plutôt que de le faire dans le bureau du directeur général parce que c'est... Je pense que c'est comme ça que notre plan stratégique a été mobilisant, parce que ça a été le plan non seulement de notre communauté, mais de la collectivité élargie.

Mme Malavoy: Surtout si vous voulez, par exemple, prendre un virage, c'est-à-dire avoir peut-être pas uniquement des formations pour des individus mais vraiment des formations pour des organisations, avant de le mettre dans votre plan, il faut que vous alliez tâter le terrain et puis vous assurer que ça va répondre à une préoccupation ou tout au moins que le terrain est fertile pour accueillir une telle idée, qui me semble être majeure, là, dans l'orientation d'avenir de votre institution. Ce n'est pas mineur comme changement, ça.

M. Proulx (Marcel): Tout à fait, on s'est déjà engagés dans cette voie. Ce n'est pas tout à fait nouveau. Mais c'est certainement un saut quantique.

Mme Malavoy: Bien. Bien, écoutez, moi, le saut quantique me va comme phrase finale. Je n'ajouterai rien à ça. Nous sautons.

Le Président (M. Pigeon): Alors, dans ce cas, il me reste à remercier les représentants de l'École nationale d'administration publique, qui ont fait, je pense, une présentation fort intéressante et qui ont bien répondu aux questions des membres de l'Assemblée nationale. Alors, merci beaucoup.

Je remercie aussi mes collègues. On a eu une séance qui s'est bien déroulée.

Documents déposés

Et je me permets de vous dire que je dépose les documents soumis par HEC Montréal et par l'École nationale d'administration publique à la Commission de la culture et de l'éducation.

Et la commission donc ajourne ses travaux à demain, à 9 h 30, afin de poursuivre ce mandat.

(Fin de la séance à 18 h 25)

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