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Version finale

39e législature, 1re session
(13 janvier 2009 au 22 février 2011)

Le lundi 16 août 2010 - Vol. 41 N° 30

Mandat conféré par une loi - Entendre les dirigeants des établissements d'enseignement de niveau universitaire


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Table des matières

Journal des débats

(Quatorze heures quatre minutes)

Le Président (M. Marsan): À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la culture et de l'éducation ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre les sonneries de leurs téléphones cellulaires.

Je rappelle le mandat de notre commission, c'est de tenir des auditions publiques afin d'entendre les dirigeants des établissements d'enseignement de niveau universitaire, en application de la Loi sur les établissements d'enseignement de niveau universitaire.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Malavoy (Taillon) remplace M. Curzi (Borduas).

Le Président (M. Marsan): Je vous remercie. Je vous rappelle notre ordre du jour qui consiste... à 14 heures, avec les remarques préliminaires, ensuite nous recevons les représentants de l'Université Concordia, et ensuite nous allons ajourner nos travaux.

Remarques préliminaires

Nous débuterons, sans plus tarder, avec les remarques préliminaires. M. le député de Charlesbourg, vous disposez de 7 min 30 s pour vos remarques d'ouverture. M. le député.

M. Michel Pigeon

M. Pigeon: Merci, M. le Président. Permettez-moi tout d'abord de saluer nos invités, que je rencontre aujourd'hui avec beaucoup de plaisir. Je voudrais saluer aussi mes collègues et les collègues de l'opposition, qu'on retrouve aujourd'hui, après les vacances d'été. Alors, bienvenue, et c'est un plaisir de travailler avec vous.

Il m'apparaît important de souligner à quel point l'exercice d'aujourd'hui est significatif et est lourd de sens. Les universités ont un rôle extrêmement important dans notre société. Les universités sont les lieux où l'avenir se prépare. Les universités jouent un rôle social extrêmement important.

Par ailleurs, le gouvernement du Québec, et donc la société québécoise, investit beaucoup d'argent dans les universités, et je me permets bien sûr de dire deux choses à ce sujet-là. D'abord, que la société québécoise, par rapport à sa richesse collective, investit plus par étudiant dans les subventions aux universités que la plupart des autres provinces canadiennes; et, d'autre part, qu'il y a eu un certain réinvestissement, même un réinvestissement certain. Je n'ai pas le chiffre exact, mais c'est de l'ordre de 200 millions de dollars, je pense, récurrents, là, qui a été investi, réinvesti dans les universités au cours des dernières années.

Et donc il est important et fondamental que les universités puissent venir rencontrer les parlementaires et nous transmettre un peu, là... nous expliquent comment elles s'acquittent de leur mission universitaire. La démocratie a besoin, les citoyens ont besoin de savoir comment les universités s'acquittent de leurs missions. Comment ils font le choix des programmes de formation, par exemple; lesquels ils offrent ou n'offrent pas. Quels efforts ils font pour la qualité de la formation, la qualité de la recherche. La qualité de la gestion aussi, je pense, c'est important. On vit dans une société où -- dans toutes les sociétés, en fait -- les moyens sont limités et donc il est important que l'argent soit utilisé au mieux.

Et donc les universités... Et c'est l'Université Concordia aujourd'hui, là, qui commence la série, mais les universités doivent expliquer non seulement ce qu'elles font de bien, et je sais que les universités font de grandes choses et de belles choses, et je pense que la société québécoise est fière de ses universités, mais je pense que les universités doivent aussi expliquer les défis auxquels elles sont confrontées. L'avenir n'est pas évident. Le contexte international de compétition entre universités bien sûr joue, et je suis sûr que Mme la rectrice va nous en parler. Il y a une compétition non seulement donc au niveau international, mais même parfois au niveau national et au niveau de la société québécoise.

Il y a le contexte démographique aussi qui joue. On sait que le contexte démographique fait en sorte que tranquillement le nombre d'étudiants au primaire, au secondaire, ça a commencé à baisser. On arrive au cégep. Qu'est-ce qui va arriver aux universités? Est-ce que les universités pourront compenser, par une plus grande proportion d'étudiants qui vont à l'université, cette baisse démographique appréhendée? Et je pense qu'il va être intéressant aussi que les universités nous expliquent comment elles tiennent compte du nouveau contexte des changements sociaux et des changements technologiques récents. Et, par changements sociaux, évidemment on peut penser aux défis que pose la formation continue, ce que les Anglais appellent le «lifelong learning». Je pense que ça, c'est un défi important.

On vit un monde où les gens doivent continuer à se former. D'autre part, les jeunes ont changé. Le contexte social a changé. Les jeunes font face maintenant à des défis de conciliation travail-famille-social-études, etc., qu'on vivait moins avant, je pense. Je pense aussi aux changements technologiques qui sont importants, à la formation en ligne, et donc il y a tout un nouveau contexte, et je suis sûr que tous mes collègues ici seront très heureux d'entendre l'Université Concordia, là, et la rectrice nous expliquer comment l'université veut faire face, là, à ces nouveaux défis. Alors, je m'en tiens à ça, et j'ai hâte de vous entendre.

**(14 h 10)**

Le Président (M. Marsan): Merci, M. le député de Charlesbourg. Je vais maintenant reconnaître Mme la députée de Taillon, qui est la porte-parole en matière d'enseignement supérieur pour l'opposition officielle. Mme la députée.

Mme Marie Malavoy

Mme Malavoy: Merci, M. le Président. Je me permets également de vous saluer à ce retour de vacances. À voir les mines des uns et des autres, je pense qu'il y en a qui en ont profité, ma foi! Et aujourd'hui on plonge dans le vif d'un sujet très important, très sérieux, très profond. C'est rare qu'au milieu du mois d'août comme ça on s'intéresse, pendant deux semaines de temps, aux universités, mais on va le faire, je crois, avec bonheur, parce que les universités, mon collègue vient de le dire, sont tellement importantes pour le développement du Québec. Elles ont fait tellement pour l'État du Québec, depuis les dernières décennies, qu'on a tout à fait raison, à juste titre, de mieux les écouter, de mieux les comprendre, de mieux les accompagner, et je souhaite vraiment que cet exercice se fasse avec beaucoup de sérieux.

C'est un type d'exercice, contrairement, par exemple, à une étude de crédits où on essaie, bon, quelquefois, de se talonner un peu sur un certain nombre de données. Là, c'est un exercice, honnêtement, que l'on fait, de part et d'autre, vraiment de bonne foi, vraiment pour l'intérêt de mieux comprendre la dynamique de nos universités.

Aujourd'hui donc, on va recevoir l'Université Concordia. On est très heureux de vous saluer et de commencer avec vous. Mais en fait cet exercice, il vient du fait que l'État du Québec, comme dans bien d'autres endroits du monde, investit beaucoup dans l'enseignement supérieur. C'est une responsabilité de l'État, et c'est un choix que l'on fait. C'est un choix, nous, que nous souhaitons voir certainement maintenu, c'est-à-dire qu'on pourrait penser, par exemple, puis il y a certains discours, à certains moments donnés, qui nous amènent de ce côté-là, on pourrait penser que, comme c'est les individus qui vont profiter de leur formation, c'est à eux d'en assumer l'essentiel des coûts. En fait, c'est important que l'État accompagne financièrement les universités puisqu'on va former des citoyens et des citoyennes, mais aussi qui vont faire tourner l'ensemble des rouages de la société. Mais en même temps, puisqu'on investit beaucoup, bien, il faut bien aussi se demander: Où investit-on? Comment cet argent est-il utilisé? D'où l'exercice de reddition de comptes que nous commençons aujourd'hui et qui va permettre de faire la lumière sur un certain nombre d'enjeux auxquels les universités sont confrontées.

Les universités, elles sont d'une part uniques, chacune. On va parler de Concordia aujourd'hui. On sait très bien que l'histoire de l'Université Concordia n'est pas celle du réseau des Universités du Québec qui ont des antennes dans différentes régions, n'est pas celle non plus d'une autre université anglophone, par exemple comme McGill, qui a une tradition un peu différente, qui a sa propre culture.

Donc, les universités, elles sont uniques en leur genre et d'où d'ailleurs un débat qu'on ne reprendra pas à ce moment-ci, mais qui est quand même dans l'air depuis ces dernières années: toute la gouvernance des universités, elle se fait, cette question-là et ce débat, avec, comme toile de fond, les particularités, l'unicité de chaque université. Et je tiens à le dire, parce que, même si c'est un exercice qu'on va faire, pendant deux semaines, de façon intensive, je tiens, moi, vraiment à assurer chaque université qu'on va la regarder en elle-même avec sa culture, son histoire, ses propres défis.

En même temps, il y a des enjeux communs -- mon collègue en a soulevé un certain nombre -- il y a des enjeux communs, inévitablement. Comment, par exemple, évoluent les clientèles, hein, entre le temps plein, le temps partiel, les études des femmes, les études des hommes, les âges aussi auxquels on étudie, la formation continue, bon? Comment évoluent les clientèles? On doit se poser ces questions-là. Comment également réussit-on à embaucher des professeurs? D'abord, à maintenir un équilibre entre les professeurs dont c'est la carrière principale, qui sont à plein temps, et les gens que l'on recrute de l'extérieur comme chargés de cours? Comment aussi réussissons-nous à faire face à une certaine concurrence? Et, quand je pense aux universités anglophones, je sais qu'entre autres la concurrence est d'autant plus vive que, dans le monde anglophone, il y a le Canada, il y a les États-Unis, qui sont vraiment à portée de main et qui accentuent probablement les difficultés de recrutement parfois.

Comment réussit-on aussi à maintenir un équilibre financier? On le sait, il y a des déficits accumulés importants dans l'ensemble des universités. Quels sont les défis de ce point de vue là? Comment réussit-on donc à surnager, et quelles questions peut-être on va nous renvoyer, à nous, comme parlementaires? Puis aussi on se permettra d'en aborder quelques-unes. Dans les questions d'équilibre financier, il y a, bien entendu aussi, la part que l'on demande aux étudiants et aux étudiantes, que ce soit en termes de contributions directes, de droits de scolarité ou de frais afférents, c'est probablement des choses que, mes collègues et moi, on aura envie d'aborder tout au long de ces deux semaines.

Autre défi que toutes les universités ont: celui de la recherche. Puis, quand je dis: La recherche, ce n'est pas simplement comment réussir à subventionner, à accompagner les professeurs dans leur rôle de chercheurs, mais aussi comment maintenir une recherche de haut calibre qui soit indépendante d'intérêts privés, ce qui ne veut pas dire ne pas avoir de liens avec des entreprises privées, mais il y a un enjeu, je pense, autour de ça.

Autre enjeu qui est peut-être moins vrai pour Concordia mais qui l'est très certainement pour d'autres universités: leur localisation. On est passés d'universités, au Moyen Âge, qui étaient l'apanage de castes, on pourrait dire, très privilégiées dans des mondes un peu reculés. On a encore un peu ce symbole; d'ailleurs, on parle de «collines universitaires», à certains moments. En même temps, on a des universités qui sont en pleine ville, c'est le cas de Concordia, et surtout on a fait face ces dernières années, et c'était déjà vrai quand l'exercice s'est fait de reddition de comptes il y a trois ans, on a, ces dernières années, eu à se poser la question de la localisation des universités et même de la délocalisation qui est devenu un enjeu: Est-ce que les universités doivent être à un endroit? Est-ce qu'elles peuvent se promener partout où il y a des demandes? C'est des questions qu'il nous intéressera d'aborder.

Alors, vous voyez, la liste peut être longue, elle peut être presque infinie, mais je tiens simplement à dire, au nom de mes collègues et de moi-même, que nous abordons cet exercice avec beaucoup d'intérêt, avec beaucoup de sérieux; ça va être très intense, ça va être très riche, et j'ai hâte d'entendre donc, M. le Président, la première université qui va venir nous faire sa présentation.

Auditions

Le Président (M. Marsan): Je vous remercie, Mme la députée. Je voudrais rappeler le temps alloué pour la période de présentation et la période d'échange. C'est de 30 minutes pour la présentation par les universités et ensuite il y aura des échanges pour une durée de 2 h 30 min, répartis en 75 minutes pour les groupes d'opposition dont l'opposition officielle, et 75 minutes pour le groupe formant le gouvernement. Nous allons procéder aussi par échanges de 20 minutes pour chacun des groupes; donc, nous aurons, pour chacune des formations politiques, l'opposition et le gouvernement, trois périodes de 20 minutes, plus une de 15 minutes.

J'aimerais demander à la rectrice de l'Université Concordia, que nous accueillons aujourd'hui -- ça nous fait plaisir de vous avoir avec nous -- de se présenter et de présenter les gens qui l'accompagnent. Nous allons maintenant débuter cette période d'échange pour une durée de 30 minutes. Mme la rectrice.

Université Concordia

Mme Woodsworth (Judith): Merci, M. le Président. Mmes et MM. les membres de la commission, je vous salue aussi, et puis j'aimerais tout d'abord vous dire à quel point je suis heureuse de connaître l'importance que le gouvernement du Québec accorde aux universités. Et nous partageons aussi votre avis, et aujourd'hui je serai très heureuse de vous présenter les progrès réalisés par l'Université Concordia depuis trois ans et de vous donner un aperçu de nos projets et de nos perspectives d'avenir.

Alors, tout d'abord, j'aimerais présenter mes collègues, les collègues qui sont ici avec moi. Ici, à ma gauche, mon lieutenant, le président exécutif aux affaires académiques, M. Graham, David Graham; ici, à ma droite, Bradley Tucker, directeur de la planification institutionnelle; Daniel Therrien, directeur exécutif, Services financiers; et, derrière moi, et ça n'a pas de signification, M. Russell Copeman, vice-recteur associé, Relations gouvernementales, que vous connaissez tous; et enfin Bram Freedman, vice-recteur, Relations externes et secrétaire général.

**(14 h 20)**

Et, comme vous me l'avez demandé, je me présente aussi. Je suis détentrice d'un doctorat en lettres françaises de McGill. J'ai fait mes débuts à Concordia, en 1980, comme professeur de traduction, et puis, après 17 ans pendant lesquels j'ai aussi occupé des postes administratifs, je suis passée en Nouvelle-Écosse comme vice-rectrice à l'enseignement et à la recherche, et puis après ça j'ai fait un saut en Ontario, dans le nord de l'Ontario, à Sudbury, à la Laurentienne, université bilingue, et puis, quand j'étais dans ma sixième année comme rectrice là-bas, on m'a recrutée afin de revenir à Concordia, devenir la première femme rectrice, poste que j'occupe depuis deux ans. Alors, voilà.

Alors, quand je suis revenue à Concordia, j'ai constaté que c'était une université -- c'était après 11 ans d'absence -- université en plein essor, en pleine expansion, et j'ai constaté à quel point l'université avait changé. Et Concordia a connu d'importants changements même depuis notre passage devant cette commission en 2007; donc, depuis trois ans, beaucoup de changements. Nous sommes de plus en plus engagés à faire de Concordia un lieu d'apprentissage où la vitalité étudiante et l'engagement communautaire s'associent à l'excellence universitaire, et je vais revenir là-dessus.

Je vous présenterai, en premier lieu, notre mission, nos valeurs, notre vision, qui forment la base de notre plan stratégique. Ensuite, je ferai un bref exposé de nos réalisations et finalement de nos qualités particulières, donc de notre unicité. Par la suite, j'aurai le plaisir de répondre à vos questions et puis aidée par mes collègues.

Comme vous le savez peut-être, Concordia est le fruit de la fusion, en 1974, du collège Loyola et de l'Université Sir George Williams. C'est une université à vocation dite généraliste. C'est un établissement donc qui offre un éventail de formations disciplinaires et professionnelles -- en excluant la médecine et le droit, notamment. Nous offrons plus de 300 programmes de premier cycle et 200 programmes de deuxième et de troisième cycles: en sciences naturelles, en sciences humaines et sociales ainsi qu'en administration, beaux-arts, génie et informatique. Depuis 2009, 11 nouveaux programmes de maîtrise et de doctorat ont été mis sur pied dans des domaines d'une importance stratégique pour le Québec. Par exemple, un doctorat en éducation, une maîtrise en évaluation des impacts environnementaux et une maîtrise en génie des logiciels. Enfin, par l'entremise de eConcordia, nous offrons des cours en ligne crédités de plus en plus, et c'est une offre qui est en pleine croissance. Je pense que ça répond à votre question, mais on peut revenir là-dessus.

Dynamique et cosmopolite, reconnue pour son innovation et son excellence, Concordia contribue grandement au caractère unique de la métropole.

Notre mission. Au-delà de la grande qualité de son enseignement, l'Université Concordia représente des valeurs d'ouverture, d'accessibilité et d'engagement social. Audacieuse, elle met à profit sa riche diversité pour transformer les personnes, améliorer la société et enrichir le monde.

Établissement de langue anglaise, situé au coeur de Montréal, avec près de 44 000 étudiantes et étudiants, nous nous classons parmi les 12 universités en importance au Canada en ce qui concerne la taille de la population étudiante. Au cours de la dernière décennie, nos inscriptions ont d'ailleurs augmenté de près de 25 %. Cette hausse est comparable à celle des autres universités canadiennes, mais elle dépasse sensiblement la moyenne de 13 % au Québec. Nos 4 400 étudiants internationaux provenant de plus de 150 pays représentent 11 % de nos inscriptions dans des cours crédités, proportion parmi les plus élevées au Québec. Concordia compte plus de 154 000 diplômés à travers le monde.

Avec plus de 6 500 employés, personnel enseignant et non enseignant, à temps plein et à temps partiel compris, l'université est un employeur important à Montréal, et, pour mieux vous donner l'ordre de grandeur, nous avons plus d'employés que des sociétés comme SNC-Lavalin ou AbitibiBowater au Québec. Alors, ça vous donne une idée. La masse salariale représente 2 070 000 000 $. Avec la gamme de services que nous offrons à nos étudiants, avec la gestion de plus de 470 000 m² dans plus de 50 édifices, l'université s'apparente à une petite ville, et des fois je me fais appeler «mairesse».

Concordia a une longue histoire de gestion responsable et rigoureuse. Depuis 2008, l'université a déclaré des surplus modestes, ce qui nous a permis de réduire notre déficit accumulé de 12 millions à 4 millions de dollars. Mais la situation financière de l'université, telle qu'elle est rapportée dans les documents demandés par la commission et par les graphiques devant vous, doit être plus nuancée. Concordia a une dette à long terme de 200 millions de dollars provenant d'obligations qu'elle a émises en 2002, avec l'approbation du gouvernement du Québec, afin de financer le développement immobilier nécessaire à la réalisation de notre mission. Annuellement, le paiement des intérêts sur ces obligations ampute le budget de 10 millions de dollars. Ce fardeau budgétaire n'est pas représenté dans nos dépenses de fonctionnement. Autrement dit, ce qui apparaît comme étant un surplus important est plutôt un budget équilibré, mais c'est quand même ça, c'est un budget équilibré.

Le choix d'avoir un budget équilibré nous impose des rationalisations tant sur le plan administratif que dans des domaines de recherche et de l'enseignement. Dans un contexte de pénurie de ressources, le choix entre une saine gestion et la qualité des services offerts à nos 44 000 étudiants demeure difficile. Pour l'exercice en cours, nous avons élaboré un plan budgétaire triennal. Pendant cette période de trois ans, nous pouvons procéder à des ajustements en tenant compte non seulement de nos objectifs stratégiques, mais aussi des fluctuations annuelles de revenus. Cependant, il serait très avantageux d'arrimer notre planification triennale sur une éventuelle planification à long terme du MELS afin de garantir un financement stable et prévisible. Donc, c'est une suggestion qu'on vous fait.

Concordia s'établit sur deux campus: l'un au centre-ville, et l'autre, le campus Loyola, dans l'ouest de Montréal. Ce dernier est en pleine transformation. Deux nouveaux édifices sont en voie de réalisation sur le campus Loyola. Il s'agit du centre PERFORM et du Centre de génomique structurale et fonctionnelle. Le premier servira de laboratoire d'enseignement et de recherche en thérapie sportive et offrira aussi des services à la population locale. Le centre de génomique permettra à nos chercheurs de réduire notre dépendance envers les énergies non renouvelables. En effet, ce dernier vise à produire du bioéthanol, un biocarburant fort prometteur à partir de levure de champignons. Ces nouvelles installations comptent parmi les quatre projets financés par les gouvernements du Canada et du Québec dans le cadre du Programme d'infrastructure du savoir. Le succès que nous avons connu dans ce programme témoigne de notre position de chefs de file dans ces domaines de pointe.

**(14 h 30)**

Pour sa part, le campus Sir George Williams se transforme également. À l'automne 2009, le pavillon John-Molson a été inauguré. Comme vous le voyez -- c'est le pavillon à gauche -- il fait face au pavillon intégré de Génie, informatique et arts visuels qui date d'il y a cinq ans. Le nouveau pavillon est reconnu pour l'intégration de technologies écologiques d'avant-garde, y compris l'utilisation d'énergie solaire, ce qui lui a valu la certification LEED argent. Une nouvelle chambre climatique servant à la recherche dans les domaines de l'énergie solaire sera aménagée sur ce campus, encore une fois grâce au fonds d'infrastructures de recherche. C'est ainsi que se développe le Quartier Concordia, campus accueillant et unifié qui constitue une contribution importante au centre-ville de Montréal.

Concordia est présente dans le monde entier grâce à des ententes avec une centaine d'établissements dans plusieurs pays, ententes qui permettent la mobilité étudiante; grâce aussi à des chercheurs qui assistent à des congrès et autres événements internationaux; et finalement grâce à la participation des membres de la haute direction à des missions à l'étranger. Tout cela favorise la création de programmes conjoints, comme des programmes en cotutelle, et la mise sur pied de projets de recherche offrant des possibilités intéressantes à la fois pour nos chercheurs et nos étudiants.

Et voilà un autre exemple sur l'image que vous avez devant vous. Le gouvernement américain a accepté des recommandations de l'Institut montréalais d'études sur le génocide et les droits de la personne qui a été établi à Concordia. Cette décision de Washington a été prise à la suite d'une présentation faite par le Pr Frank Chalk, directeur de l'institut, que vous voyez à gauche, et l'honorable Roméo Dallaire, qui est associé à notre centre de recherche.

Notre vision de plus en plus réputée pour notre enseignement novateur et nos recherches avant-gardistes, nous figurons parmi les universités généralistes les plus audacieuses du Canada. Notre objectif est de nous classer parmi les cinq meilleures universités généralistes du Canada d'ici 10 ans. Et comment? En appliquant notre plan stratégique.

Trois cibles sont inscrites dans notre plan stratégique, intitulé Viser toujours plus haut, toujours plus loin, qui comprend des objectifs pédagogiques ainsi que des objectifs en matière de finances, de ressources humaines et d'infrastructures. Le travail est déjà commencé dans plusieurs secteurs, et nous comptons déjà un grand nombre de réalisations.

L'université a connu, au cours de la dernière décennie, un renouvellement du corps professoral sans précédent, ce qui a grandement revitalisé l'université. Au cours de la même période, les activités de recherche se sont intensifiées. Les revenus de recherche ont atteint plus de 30 millions de dollars. Les cinq dernières années, le financement de Concordia provenant des trois conseils de recherche du Canada a augmenté de 28 %. Ce taux de croissance dépasse celui des cinq établissements comparables à Concordia, et vous les avez sur l'écran. En plus, le portefeuille de contrats de recherche est de plus en plus diversifié, et les partenaires industriels, de plus en plus nombreux.

Nous avons mis de l'avant plusieurs initiatives dont l'apprentissage en petit groupe ainsi que des services de soutien pour les étudiants parents afin de les aider à réussir dans leurs études. Et nos étudiants sont satisfaits. D'ailleurs, sur ce tableau, nous pouvons comparer le rendement de l'Université Concordia avec celui d'autres établissements généralistes au Canada quant à la satisfaction des étudiants qui sont interrogés à propos de la formation qu'ils reçoivent. Donc, on demande aux étudiants: Est-ce que vous êtes satisfaits de la formation que vous recevez à Concordia? Et le pourcentage qui ont répondu excellente: 56 % parmi les étudiants en première année, 55 % en dernière année.

Nous souhaitons aussi que nos étudiants aient des occasions de s'engager sur le plan communautaire, que ce soit à Montréal, dans le reste du Canada ou à l'étranger, afin qu'ils deviennent bons citoyens. C'est une assise de la philosophie de Concordia. Cela fait partie de notre histoire, de notre ADN. C'est pourquoi nous avons créé un dossier officiel où sont consignées les activités bénévoles qui témoignent de l'engagement de l'étudiant envers la communauté, et c'est un dossier qui accompagne le bulletin de notes officiel. Nous sommes d'ailleurs la première université québécoise à instaurer un tel dossier. Nous avons aussi ouvert un centre qui permet à nos étudiants et à nos employés d'identifier des opportunités d'engagement communautaire, des opportunités de bénévolat.

Nous avons comme but de mettre nos recherches au service de la société, de démocratiser le savoir et d'améliorer notre environnement. Et je vous donne quelques exemples rapidement.

On vient de conclure une entente de partenariat avec Bibliothèque et Archives nationales du Québec qui aboutira à des projets communs de recherche et de diffusion du savoir. Nous prévoyons notamment une série de conférences intitulées La ville est monde: Montréal à travers les yeux de Concordia, où les chercheurs de Concordia iront à la bibliothèque, sur Saint-Denis, partager leurs connaissances sur Montréal avec le grand public.

Depuis le mois d'avril, tous nos chercheurs sont invités aussi à mettre en ligne leurs recherches et créations afin de les rendre accessibles gratuitement à l'ensemble de la population ici et à travers le monde. Et, à cet égard, Concordia est un des leaders au Canada.

Enfin, nous travaillons avec la communauté locale sur des projets de développement durable. Par exemple, notre initiative de compostage nous a valu un prix Forces Avenir et d'autres prix encore. Notre serre située au centre-ville est en mesure d'offrir des plants aux jardins communautaires montréalais, et toutes les récoltes qui en résultent sont utilisées pour la préparation de plats délicieux concoctés par des popotes roulantes de la région métropolitaine.

Nous avons modifié nos façons de faire afin d'être efficaces, transparents et fidèles à notre plan stratégique. Nous nous efforçons d'actualiser une saine gestion, que ce soit en matière de gouvernance, de ressources humaines, financières, technologiques ou immobilières, et en intégrant les meilleures pratiques à notre organisation, et puis y compris des pratiques d'utilisation d'énergie.

Tout comme les autres universités québécoises, Concordia traîne derrière ses consoeurs canadiennes en ce qui concerne le financement. Il nous est, par conséquent, plus difficile de recruter les professeurs -- vous l'avez dit -- le personnel et les étudiants les plus talentueux et donc de contribuer à la compétitivité du Québec sur les scènes nationale et internationale. De plus, Concordia reçoit moins de ressources de fonctionnement par étudiant à temps plein, 13 974 $, que la moyenne des universités québécoises, qui est de 16 603 $, et que la moyenne des universités canadiennes, 10 654 $. Et là il s'agit de la subvention gouvernementale et des frais de scolarité combinés. Bref, Concordia est contrainte, bien malgré elle, à faire des choix qui, à long terme, iront à l'encontre de notre mission.

J'aimerais maintenant vous attirer votre attention sur trois façons particulières dont Concordia contribue à la collectivité. C'est ce qui nous distingue et en même temps ce qui représente pour nous les plus gros et les plus beaux défis.

**(14 h 40)**

Premièrement, accessibilité et intégration sociale. Nous comptons une population étudiante extrêmement diversifiée sur les plans culturel, linguistique et socioéconomique. Du côté linguistique, 30 % de nos étudiants ne parlent ni l'anglais ni le français à la maison, comparativement à 20 % de la population sur l'île de Montréal. Du côté socioéconomique, 45 % de nos étudiants à temps plein reçoivent de l'aide financière et 70 % travaillent à temps partiel. Nous devons tenir compte de ces réalités en offrant des cours à temps partiel -- par exemple, nous comptons le plus grand pourcentage d'étudiants à temps partiel en quête d'un diplôme au Québec -- en offrant des cours du soir, en offrant des cours en ligne, en offrant des cours d'appoint et d'autres services. Mais permettre à tous nos étudiants, quel que soit leur profil, de réaliser leur potentiel, d'atteindre leurs rêves et de s'intégrer à la société québécoise, voilà notre objectif principal.

Les arts et la culture sont d'importants moteurs de l'économie. Ils contribuent aussi à façonner notre identité. À Concordia, nous jouons un rôle de premier plan dans le milieu des beaux-arts et nous nous imposons comme chef de file au pays comme à l'étranger. Les succès de nos créateurs sont une source d'immense fierté pour les Québécois, toutes communautés linguistiques et culturelles confondues. D'ailleurs, dans le réseau universitaire québécois, Concordia détient une proportion très élevée d'étudiants inscrits à des programmes de beaux-arts, jusqu'à près de la moitié dans certaines disciplines, comme la danse et le cinéma.

Offrir d'excellents programmes de beaux-arts exige des ressources considérables, des classes de petite taille, du matériel spécialisé et des locaux spécialement aménagés. Pour répondre à ce défi, un de ces défis, l'université a acquis la maison mère des Soeurs grises afin d'y aménager sa Faculté des beaux-arts. En 2007, l'université a acquis cette propriété, élément important du patrimoine de Montréal. On se propose d'y créer un site des beaux-arts, centre de renommée internationale entièrement voué à l'enseignement, à la recherche et à l'expression artistique. Naturellement, Concordia mettra tout en oeuvre pour préserver l'intégrité architecturale de ce précieux monument historique dans ses projets d'adaptation et d'utilisation des espaces. Ce projet unique à Montréal nécessitera tout le soutien de notre communauté universitaire ainsi que celui de différents secteurs et acteurs clés montréalais et québécois.

Voici qui met fin à mon bref survol. J'aimerais terminer en vous disant que c'est en faisant de l'éducation une véritable priorité que nous consoliderons nos acquis sociaux. C'est à nous tous ensemble de faire en sorte que Concordia, tout comme l'ensemble des établissements d'enseignement postsecondaire québécois, puisse poursuivre sa mission de faire avancer les connaissances et également de préparer nos diplômés à devenir des citoyens éclairés et engagés. En ce sens, nous avons besoin de tous les appuis possibles, dont le vôtre, et nous vous offrons en retour tout notre appui et toute notre collaboration.

M. le Président, Mmes et MM. les membres de la commission, je vous remercie de votre attention. Et je vais vous répondre, je vais répondre à vos questions avec plaisir.

Le Président (M. Marsan): Mme Judith Woodsworth, rectrice et vice-chancelière de l'Université de Concordia, nous vous remercions pour cette excellente présentation. Nous allons débuter la période d'échange, et je vais céder la parole à notre collègue le député de Charlesbourg et aussi l'adjoint parlementaire à la ministre de l'Éducation. M. le député de Charlesbourg.

M. Pigeon: Merci, M. le Président. Merci, Mme la rectrice, de votre présentation. L'Université Concordia est peut-être jeune, mais on voit que c'est une université qui est dynamique. Et c'est agréable de voir, je dirais, là, tout ce que vous faites et tout ce que vous faites pour remplir votre mission.

Vous nous avez quand même dit que l'université avait, je dirais, des difficultés à recruter parce que c'est difficile de compétitionner avec les universités dans le reste du Canada, que le financement est difficile, etc. Pouvez-vous expliquer un peu plus le contexte dans lequel vous êtes? Et quels sont vos principaux compétiteurs? Et comment vous voyez le développement, par exemple, du recrutement à l'international dans ce contexte-là?

Le Président (M. Marsan): Mme la rectrice.

Mme Woodsworth (Judith): Oui. Merci pour les commentaires. Merci pour la question. Oui, on a des difficultés de recrutement. Bon, je vais parler des étudiants de deuxième et de troisième cycle tout d'abord. Nos compétiteurs sont les universités québécoises mais aussi des universités canadiennes et les universités américaines aussi. Dans le reste du Canada et en Ontario -- et puis il y a des raisons bien précises pour ça -- les universités ont les moyens de financement des étudiants de deuxième, de troisième cycle que nous n'en avons pas, et des fois on accepte les étudiants et on les perd. On les perd, par exemple, à l'Université d'Ottawa, qui est tout près. Il y a une raison bien particulière, c'est qu'en Ontario il y avait un programme de prélèvement de fonds et où le gouvernement donnait des sommes dollar par dollar d'arrimage pour appuyer les universités qui faisaient les... qui avaient des campagnes de prélèvement de fonds. Alors, ça fait que les universités ont plus d'argent pour donner des bourses, et surtout à des cycles supérieurs. Donc, on a des problèmes, mais on essaie de remédier aux problèmes en faisant nous-mêmes nos campagnes de prélèvement de fonds.

On a quelques problèmes de recrutement des professeurs, mais, moi, je dirais que jusqu'à maintenant ça va assez bien. Montréal, c'est une ville qui attire beaucoup de monde, et Concordia, en étant très dynamique aussi et surtout dans certaines disciplines, les disciplines où on a tendance à vouloir recruter du monde, là, ça va assez bien. Mais la situation est précaire.

Quant aux étudiants étrangers, on arrive à attirer un bon nombre d'étudiants étrangers. On a, depuis très, très longtemps, une présence à l'étranger très forte en Chine, en Inde, on a des professeurs qui proviennent de ces pays-là, et ça attire aussi des étudiants. Donc, on a un fort pourcentage d'étudiants étrangers comparé aux autres universités québécoises et même aux universités canadiennes.

Mais continuer à attirer des étudiants, des professeurs de haute qualité, c'est ça, notre défi, et qui est relié au financement. Je ne sais pas si ça répond à la question.

M. Pigeon: Mais quel... Madame, merci. Si je peux me permettre, M. le Président, je dirais: Est-ce que vous entrevoyez des solutions à ce problème de financement? Est-ce que vous avez des suggestions à faire? Est-ce que vous avez des propositions?

Mme Woodsworth (Judith): Bien, je pense que vous savez bien que les universités demandent toujours plus d'argent. Ça, c'est une solution. On est aussi toujours à la recherche d'appuis du secteur privé. Et on a la chance, à Concordia, d'avoir un appui d'individus et de sociétés. Donc ça, c'est une bonne chose, et puis je pense que c'est bien. Il est juste que le secteur privé nous aide, parce que l'éducation postsecondaire profite à la société, à la prospérité de la société. Et puis on est contents aussi que, dans le budget du mois de mai dernier, le gouvernement québécois a signifié son intention de permettre une hausse des frais de scolarité. Donc, avec tout ça combiné, on va peut-être pouvoir arriver à quelque chose de mieux.

**(14 h 50)**

M. Pigeon: Oui, merci. Dans la question que vous venez d'aborder, là, de l'augmentation des frais de scolarité, comment voyez-vous ça versus l'accessibilité? La mission de l'université étant, je dirais, de donner accès au savoir au plus grand nombre, quel est votre avis sur cette question de la capacité qu'ont ou que n'ont pas les étudiants de payer plus de frais de scolarité? Quel serait votre avis sur cette question?

Mme Woodsworth (Judith): Bon, c'est certain qu'il y a des étudiants qui ne peuvent pas payer des frais de scolarité. C'est pour ça qu'il faut avoir une aide financière robuste. Et on essaie de faire de notre mieux en faisant le prélèvement de fonds, et je dirais que la plupart des donateurs veulent donner aux étudiants. Donc, on a le plus de succès chez les donateurs si on demande de l'argent pour les étudiants. Et les étudiants de premier cycle, les étudiants... des femmes, les étudiants autochtones, les étudiants de deuxième, de troisième cycle, on a du succès.

Donc, l'université fait sa part. Le gouvernement peut nous aider en établissant un programme d'aide financière plus solide. Et je dirais aussi que, moi, j'aimerais bien que les étudiants à temps partiel puissent avoir accès aux prêts et bourses, ce qui n'est pas le cas, je pense, actuellement, pour les étudiants à temps partiel qui ne travaillent pas, par exemple. Donc, ceci devrait aider avec le problème d'accessibilité. Et les étudiants qui peuvent, qui ont les moyens de payer les frais de scolarité, qu'ils le fassent. Donc, c'est mon avis.

M. Pigeon: Merci. M. le Président, si je peux me permettre de continuer cet échange, moi, un sujet qui me touche beaucoup, c'est toute la question de la formation continue, de la formation à distance et du potentiel qu'on peut développer pour permettre l'accessibilité et faire en sorte que des gens qui n'ont pas eu, par exemple, la possibilité de se former plus jeunes puissent revenir à l'université, comme vous dites, à temps partiel, ou en suivant les cours le soir, ou encore la formation à distance. Les technologies maintenant offrent tellement de possibilités. Vous avez touché un peu ce sujet-là, mais j'aimerais que vous développiez un peu plus cet aspect-là qui, moi, personnellement, m'apparaît extrêmement important pour l'accessibilité et aussi pour le futur.

On sait qu'à long terme... On se forme maintenant, mais est-ce que, dans 10 ans, dans 20 ans, notre formation va toujours être valable? Donc, on peut penser que de plus en plus on aura besoin de retourner à l'université, et donc ça devient une partie de la mission universitaire de ne pas uniquement former des jeunes mais d'offrir la formation à tous ceux qui en ont besoin. Et donc les nouvelles technologies peuvent certainement jouer un rôle.

Est-ce que l'Université Concordia a une politique précise de développement dans ces deux secteurs, là, de formation continue et de formation à distance puis de e-learning, si vous me permettez le mot anglais?

Mme Woodsworth (Judith): Oui, tout à fait. L'Université Concordia a eu cette mission depuis ses débuts. Et qu'on pense à l'Université Sir George Williams qui acceptaient les militaires, après la Deuxième Guerre mondiale, qui revenaient après la guerre, revenaient aux études. Moi, je rencontre souvent des diplômés de cette époque-là, des diplômés des années cinquante qui me racontent comment ça a été à cette époque. Ils revenaient aux études, ils travaillaient le jour, suivaient des cours le soir à Sir George Williams. Et finalement, au bout de quelques années, ils obtenaient un diplôme. Et puis ça nous fait tellement plaisir parce qu'on continue cette tradition. Et on accepte des étudiants de tous les âges. On voit des diplômés, des gens qui viennent obtenir leur diplôme et puis qui sont très, très vieux, et puis il y en a qui sont jeunes. Et puis c'est très, très bien.

Donc, on a cette tradition. Et, comme j'ai dit, on offre des cours à temps partiel. Et puis on ne fait pas de distinction entre les étudiants du soir et les étudiants du jour. Il n'y a pas de distinction de statut entre les deux catégories, le soir, le jour. Et puis les étudiants peuvent changer aussi de statut ou de catégorie. Et donc on le fait depuis très, très longtemps.

On a aussi une école de formation continue qu'on a rebaptisée School of Extended Learning. Et malheureusement, en français, on continue à l'appeler École de formation continue, mais, vous voyez, en français c'est l'apprentissage étendu, justement pour exprimer l'idée que ce n'est pas seulement l'éducation qu'on donne dans des classes au sens physique mais une éducation qui peut être offerte en ligne ou pas ou en partie en ligne, en partie dans une classe, créditée, non créditée.

Donc, on a ça comme mission. Et, depuis quelques années, on a ce qu'on appelle eConcordia. Et puis eConcordia a créé, crée de plus en plus de cours crédités qui font partie de programmes reconnus, des cours en ligne, et ce qui permet à un étudiant, par exemple, même un étudiant qui vit à Montréal mais qui est très occupé avec le travail, avec les enfants, de faire le cours, de suivre son cours quand il veut ou quand elle veut: au milieu de la nuit, le samedi, n'importe quand. Et puis c'est une souplesse qui permet l'accès aux études.

Et puis je vais demander peut-être à mon collègue le vice-recteur de vous expliquer ce qu'on fait dans le domaine de eConcordia, parce que c'est lui qui s'en occupe. M. Graham.

Le Président (M. Marsan): M. Graham.

M. Graham (David): Merci, M. le Président. Merci, Mme la rectrice. Effectivement, Concordia s'est dotée d'une unité qui s'appelle eConcordia il y a déjà plus de cinq ans. Et, la croissance, il faut dire que la croissance dans les inscriptions en ligne a été remarquable. Aujourd'hui, Concordia offre environ un quart de million d'inscriptions aux cours sur une base annuelle. Et, sur ces inscriptions, 10 % environ, près de 25 000, sont dans des cours en ligne offerts par eConcordia mais aussi par les facultés dites traditionnelles de Concordia.

Pour la population des étudiants de Concordia, effectivement, l'enseignement en ligne, l'enseignement électronique est quelque chose qui leur permet de profiter de l'enseignement supérieur beaucoup plus qu'ils ne pourraient le faire autrement, parce que, comme vous le savez, beaucoup de nos étudiants étudient à temps partiel, beaucoup de nos étudiants qui étudient à temps plein, entre guillemets, travaillent, comme l'a souligné la rectrice au cours de sa présentation. Donc, beaucoup de nos étudiants sont un peu plus âgés que la moyenne, ont déjà des familles, des responsabilités d'ordre familial et aussi professionnel, et l'enseignement en ligne leur permet donc de profiter pleinement de l'éducation supérieure.

Donc, comme université, nous nous sommes engagés pleinement à augmenter le nombre des cours que nous offrons en ligne. Nous avons un plan de développement de eConcordia, et les choses vont bon train.

M. Pigeon: Oui, merci. Est-ce que vous avez une idée, là, du nombre de cours en ligne que vous offrez? Et offrez-vous des programmes entièrement en ligne?

M. Graham (David): M. le Président, avec votre permission. Merci. Pour l'instant, nous n'offrons pas de programme en ligne. Lorsque eConcordia a été créé, il faut dire qu'il a été créé dans le but justement de ne pas offrir des programmes entiers, et cela, pour ne pas drainer les étudiants des salles de cours traditionnelles. Par contre, depuis un an ou deux, nous sommes en train d'élaborer, avec eConcordia, un plan de développement qui nous permettra, je le souhaite, d'offrir d'ici quelques années des programmes entiers en ligne, à commencer sans doute par des certificats pour aller ensuite vers des mineures, des majeures et ensuite, si les choses vont bien, des diplômes entiers.

Donc, je ne sais pas si ça répond à votre question.

M. Pigeon: Mais le nombre de cours en ligne que vous offrez, à peu près, là.

M. Graham (David): En ce moment, une cinquantaine.

M. Pigeon: Une cinquantaine de cours en ligne. D'accord. Merci. J'aurais une autre... Je peux continuer, M. le Président?

Le Président (M. Marsan): Allez-y, M. le député de Charlesbourg.

**(15 heures)**

M. Pigeon: Merci. Je vais me tourner vers un autre aspect, Mme Woodsworth, si vous permettez, et c'est la question de la qualité de la formation. Alors, on a parlé entre nous tout à l'heure des classements Maclean's et de tous ces classements qui existent et qui tentent de donner, là, je dirais, aux jeunes, et à leurs parents, et à leurs amis, je dirais, un guide pour savoir quelle est la meilleure université. Mais, bon, ces classements-là, on pourrait en discuter longuement. Disons que ce n'est pas nécessairement parfait comme système.

Et vous avez soulevé un point que peut-être des gens, ceux qui nous écoutent, ne connaissent pas tellement, et c'est ce que les Anglais appellent familièrement NSSE, là, National Survey of Student Engagement. Et je vais vous poser une question là-dessus parce que ça, pour moi, ça m'apparaît intéressant. On veut juger de la qualité d'une université, mais, en bout de ligne, de quoi on veut juger, c'est de la qualité de la formation, et il y a deux aspects que je voudrais soulever. D'une part -- et j'aimerais que vous en parliez un peu plus -- est-ce que les étudiants sont satisfaits et, deuxièmement, est-ce que leurs employeurs sont satisfaits? Parce qu'on va à l'université pour chercher un diplôme, on veut une bonne formation. Et évidemment comment fait-on pour savoir si on a une bonne formation ou une meilleure formation dans telle université que telle autre? Alors, il y a différentes manières de voir.

Les classements internationaux classent surtout la recherche en fait, hein, ils ne classent pas véritablement la qualité de la formation, mais ce système, là, en Amérique du Nord, du National Survey of Student Engagement est intéressant parce que c'est des enquêtes qui demandent aux étudiants: Est-ce que ça a été intéressant? Avez-vous bien appris à l'université? Aviez-vous des bons profs? Aviez-vous de l'interaction, etc.? Et par ailleurs il y a la question des employeurs. Donc, j'aimerais que vous élaboriez un peu plus sur cet aspect-là de la qualité de la formation, et je suis sûr que vous le ferez avec plaisir.

Mme Woodsworth (Judith): Oui, et puis, oui, c'est intéressant parce qu'on réfléchit aussi, nous, à Maclean's, et puis on le voir venir aussi, au mois de novembre, et puis à chaque fois que Maclean's sort, nos étudiants, nos diplômés nous disent: Nous, on a beaucoup aimé Concordia, on est très satisfaits. Pourquoi est-ce qu'on est en bas de la liste? Et puis on essaie d'analyser ça. Il y a plusieurs raisons à ça. Maclean's a, comme indicateurs, les facteurs reliés aux finances, et, si vous regardez bien, sauf une exception, toutes les universités québécoises sont plutôt faibles dans Maclean's, et c'est relié au financement global, subventions gouvernementales, frais de scolarité compris, parce que Maclean's va, par exemple, tenir compte du nombre de livres à la bibliothèque, du financement accordé aux étudiants, des services aux étudiants. Donc ça, ce sont des facteurs reliés aux finances qu'on reçoit, mais on ne tient pas compte de la satisfaction des étudiants ni du taux d'emploi. Et, par exemple, nos étudiants, six mois après leur diplôme, 92 % sont employés, et deux ans après leur diplôme, 96 % sont employés, et les employeurs sont très satisfaits. On a des programmes coop. Par exemple, à peu près 1 200 étudiants sont des étudiants dans des programmes coopératifs, et les employeurs se déclarent très satisfaits. Mais Maclean's ne tient pas compte de ces choses-là.

Il y a aussi le facteur d'âge aussi, je dirais. Les étudiants les plus... les universités les plus vieilles au pays sont souvent classées parmi les meilleures universités parce que ce sont des universités qui ont des réputations de longue date et aussi des fonds de dotation et puis le plus grand nombre de diplômés. Donc, c'est très, très compliqué. Et nous, à Concordia, dans des sondages où on demande aux étudiants leur avis, on demande aux étudiants quelle est leur satisfaction, on réussit bien, mais dans Maclean's, c'est moins bien, mais on essaie de faire de notre mieux. On va acheter des livres à la bibliothèque et puis on essaie de faire en sorte que nos professeurs obtiennent plus de subventions. Et voilà, on fait de notre mieux.

Je vais peut-être demander à mon collègue ici, à droite, qui est responsable de la recherche institutionnelle, s'il veut ajouter quelque chose. M. Tucker.

M. Jon Tucker (Bradley): Merci, Mme la rectrice.

Le Président (M. Marsan): M. Tucker, c'est ça?

Mme Woodsworth (Judith): Tucker.

M. Jon Tucker (Bradley): Je m'excuse.

Le Président (M. Marsan): ...pour les fins d'enregistrement. Je vous remercie. Allez-y.

M. Jon Tucker (Bradley): Merci, M. le Président. Alors, en ce qui concerne NSSE, l'enquête nationale sur la participation étudiante, j'aimerais remarquer seulement qu'il n'y a pas de différence entre les «benchmarks» de l'Université Concordia, ils sont comparables, et on cherche toujours les moyens pour améliorer l'expérience de nos étudiants.

Le Président (M. Marsan): Je vous remercie. Ceci termine notre premier bloc avec le parti ministériel. Nous allons poursuivre avec l'opposition officielle, et je vais reconnaître la porte-parole en matière d'enseignement supérieur, Mme la députée de Taillon. La parole est à vous.

Mme Malavoy: Je vous remercie. Alors, cette fois-ci, c'est vrai, là, ce n'est pas des remarques préliminaires, c'est un début d'échange avec vous. J'ai bien écouté ce qui s'est dit dans les dernières minutes. J'aimerais revenir sur certaines grandes caractéristiques de votre université, et à la fois les contraintes que cela impose, mais en même temps peut-être les possibilités que cela ouvre. Alors, vous avez une université, vous dites, généraliste, vous dites ça à plusieurs reprises dans votre présentation, une université aussi qui a un pourcentage important, si j'ai bien compris, 30 % d'étudiants et d'étudiantes à temps partiel, une université aussi avec une proportion importante, on pourrait dire, d'étudiants allophones ou enfin tout au moins qui ne parlent ni français, ni anglais chez eux à la maison, donc qui proviennent d'autres communautés, donc pour lesquels l'anglais n'est pas la langue maternelle. Vous avez une université aussi qui, d'après ce que j'ai pu voir, maintient assez bien un équilibre entre les professeurs à temps plein et les chargés de cours. Il y a d'autres universités où les chargés de cours prennent le devant. Chez vous, ça semble être assez équilibré.

Ce que j'aimerais, dans le fond, peut-être comme première question, c'est que vous me disiez, avec ces caractéristiques qui sont à la fois des opportunités puis parfois des contraintes, comment vous décririez la place que votre université peut avoir au Québec, quel rôle vous pouvez jouer, quelle est votre mission essentielle, avec ses grandes caractéristiques. C'est une question large, mais je reviendrai de façon plus pointue après.

Mme Woodsworth (Judith): Je pense que c'est une excellente question, et puis c'est justement ce qu'on a souligné, c'est une des trois particularités de Concordia, c'est d'accueillir des populations diverses. Ce sont des populations étudiantes qui peut-être n'iraient pas à l'université s'il n'y avait pas la souplesse des horaires qu'on offre, ou les services qu'on offre, ou le climat aussi. Ça a toujours été à Concordia et puis aux établissements fondateurs. Sir George Williams et Loyola aussi, c'étaient des universités où il y avait des communautés allophones. Et puis je dirais que ces étudiants se sentent chez eux. Et on essaie, parce qu'on est bien conscients de cette diversité, on est bien conscients et puis on essaie de prendre des mesures aussi pour assurer la qualité de tous les étudiants.

J'ai parlé du potentiel de chaque étudiant. Il faut non seulement les accepter tous, parce qu'on veut avoir un grand nombre d'effectifs, mais il faut faire en sorte qu'ils réussissent dans leurs études et puis qu'ils terminent à la fin. Et, moi, je suis bien sensible à ça, j'ai été la première de ma famille à fréquenter l'université et à obtenir un diplôme. Donc, au moment de la collation des grades, quand il y a des étudiants qui sont des premiers de leur famille et puis je vois la famille les applaudir, ça me rend heureuse. Et donc on est très sensibles et puis on essaie d'instaurer des services particuliers. Et, dans le cadre du plan stratégique, on favorise l'apprentissage étudiant, l'expérience étudiante de haute qualité, on a développé certains programmes. Par exemple, même s'il y a des classes où il y a beaucoup d'étudiants, des classes nombreuses, on essaie de simuler des petites classes, on essaie d'embaucher des étudiants qui puissent agir en tant que mentors pour d'autres étudiants qui ont plus de problèmes. Dans le cadre de l'École de formation continue, il y a des programmes pour des étudiants en difficulté, et on essaie de surveiller tout le temps, tout le temps, les progrès de nos étudiants.

Donc, c'est une université qui accueille et qui essaie d'intégrer les étudiants à la société québécoise, et puis on fait ça de plusieurs façons. Au moyen des programmes coopératifs par exemple et d'autres programmes où il y a des stages, on envoie les étudiants sur le marché du travail où ils ont une expérience professionnelle, une expérience du travail qui complète la formation dans les salles de classe, et puis souvent c'est un travail qui se fait en français. On offre aussi un éventail de cours de français à tous les niveaux au Département d'études françaises et aussi à l'École de formation continue. Donc, voilà plusieurs exemples. Je ne sais pas si j'ai répondu à la question, sinon dites-le-moi, et puis on pourrait continuer.

**(15 h 10)**

Mme Malavoy: Ça va très bien. Vous répondez globalement comme moi j'ai posé ma question aussi globalement, mais je voudrais reprendre certains éléments pour bien cerner les défis particuliers auxquels vous faites face. Bon. Quand on a 30 % d'étudiants à temps partiel, ça veut dire que ça prend plus de personnes pour faire un étudiant en équivalence temps complet. Or, les universités sont financées sur la base d'équivalence temps complet. Alors, c'est quelle contrainte pour vous, ça, cette caractéristique qui est finalement de rendre des services importants à une population un peu plus âgée parfois, qui a des contraintes familiales, qui, pour un certain nombre, doivent travailler en même temps, etc.? Qu'est-ce que ça a comme impact dans l'organisation de votre université compte tenu du fait que le financement n'est pas programmé, si je peux dire, pour tenir compte de cette réalité-là?

Mme Woodsworth (Judith): Oui. Oui. Vous avez bien raison. On est subventionnés au crédit et non pas à la personne, et chaque personne demande une attention particulière. Même si cette personne suit un cours de trois crédits ou plusieurs cours pour un total de 30 crédits, une personne entre à l'université et est servie par une série de personnes, de conseillers et puis utilise la bibliothèque, utilise d'autres services, la navette pour se déplacer du centre-ville à Loyola, et ainsi de suite. Donc, on estime que ça nous coûte plus cher de former ce fort pourcentage d'étudiants à temps partiel, et c'est vrai qu'on a fait des représentations auprès du ministère à propos de ce défi. Et c'est quelque chose que j'ai connu dans d'autres universités, notamment en Nouvelle-Écosse, où il y avait un fort pourcentage d'étudiants à temps partiel, et puis la conclusion qu'on tire, c'est que ça coûte cher, plus cher qu'avoir une population d'étudiants à temps plein. Alors, c'est juste.

Mme Malavoy: Est-ce que cela a également un impact sur l'organisation de tout ce qui est services aux étudiants? Est-ce que vous devez prendre une part plus importante justement de votre financement pour offrir des services aux étudiants de toute nature, ça peut être depuis des services financiers, des services psychologiques, des services d'aide de différentes manières, puisque vous avez une clientèle donc qui a des particularités que vous avez bien décrites?

Mme Woodsworth (Judith): Oui. Oui. Tout à fait. Tous les services que vous avez décrits, on a une doyenne des étudiants qui s'occupe de toutes sortes de choses de ce genre, et puis y compris les étudiants qui sont parents. J'ai parlé de ça brièvement, mais on a tout un programme pour appuyer les étudiants parents. Il y a des étudiants qui sont monoparentaux, hommes et femmes, mais il y a aussi des familles qui ont des problèmes de garde, et puis il y a des étudiants qui ont des problèmes pour gérer leurs finances. Donc, il y a toutes sortes de services, de conseils qu'on donne aux étudiants, et puis ça en prend plus quand il y a des populations étudiantes comme les nôtres.

Mme Malavoy: Est-ce que vous allez jusqu'à demander qu'on réévalue le financement des universités en tenant compte de cette réalité-là?

Mme Woodsworth (Judith): C'est un argument qu'on avance, oui.

Mme Malavoy: Mais, en même temps, en ce sens, vous êtes différents d'autres universités qui ont une clientèle essentiellement à temps plein.

Mme Woodsworth (Judith): Bien, il y a d'autres universités qui ont des étudiants à temps partiel aussi, mais on a un fort pourcentage. Moi, je ne peux pas parler pour les autres, il y en a qui ont moins que nous, il y en a d'autres qui ont presque le même pourcentage que nous, mais c'est vrai, il faut tenir compte de ce facteur.

Mme Malavoy: Quand vous pensez à d'autres universités, est-ce que, par exemple, vous trouvez des similitudes avec l'Université du Québec à Montréal, de ce point de vue là?

Mme Woodsworth (Judith): Oui.

Mme Malavoy: Oui. C'est ça. Donc, avec les mêmes contraintes et éventuellement les mêmes difficultés de financement.

Toujours en tenant compte de ces caractéristiques, dans un autre domaine, est-ce qu'il y a un impact sur toute la question de la persévérance scolaire? Parce que là j'essaie de bien suivre les données que nous avons. Il semble qu'au total vous ayez un pourcentage de persévérance et de réussite qui soit important, mais, quand on regarde certaines années, on a l'impression, puis vous me direz si je me trompe, mais que dans certaines disciplines ça prend plus longtemps avant d'obtenir un diplôme de premier cycle. Un diplôme de premier cycle, normalement, c'est trois ans, et, dans certains tableaux qu'on a, on a l'impression que c'est plus long que trois ans. Est-ce que ça peut tenir compte à votre clientèle et à ses caractéristiques ou est-ce qu'il y a d'autres facteurs liés à ça?

Mme Woodsworth (Judith): Le taux de persévérance ou le taux de diplomation n'est pas mauvais pour Concordia. C'est vrai qu'il y a des problèmes pour certains étudiants qui sont à temps partiel ou qui ont des familles, des responsabilités, des étudiants même qui sont à temps plein, mais qui travaillent beaucoup, quand ils travaillent, ils sont à temps plein, mais peut-être pas cinq cours à la fois, quatre cours à la fois, donc nos étudiants ont des contraintes qui influencent le taux de diplomation. Mais en même temps on a des mesures pour aider les étudiants et puis on essaie, à chaque année, d'améliorer les taux de diplomation. Je vais peut-être demander à mon collègue, M. Graham, de donner d'autres exemples.

Le Président (M. Marsan): M. Graham.

M. Graham (David): Merci, M. le Président, ce sera avec plaisir. Effectivement, Mme la députée, le taux de participation des étudiants à temps partiel affecte les services à Concordia de plusieurs façons. En ce qui concerne, comme l'a souligné la rectrice, les services délivrés directement aux étudiants, parce que cinq étudiants qui suivent deux cours demandent quand même plus de soutien et de services qu'un seul étudiant qui suit 10 cours, cela est manifeste. Mais il faut insister aussi, je crois, sur l'usure des infrastructures causée par la présence sur le campus d'un plus grand nombre de personnes. Il faut insister également, comme vous l'avez fait, sur le taux de diplomation et de persévérance.

Nous savons, et cela est vrai non seulement pour Concordia, mais aussi pour l'UQAM et pour toutes les universités avec une forte proportion d'étudiants à temps partiel et d'étudiants qui travaillent, nous savons que la vie leur est tout simplement plus difficile et que la persévérance et la réussite le leur sont également. Il faut comprendre que l'étudiant de Concordia, à temps plein ou à temps partiel, suit en moyenne six cours par an seulement et non pas 10. Donc, il est normal, pour l'étudiant de Concordia, en moyenne, que cela prenne cinq ans et non pas trois pour compléter un diplôme de trois ans, normalement de trois ans.

Pour la persévérance, qui nous tient à coeur, et pour la réussite académique de nos étudiants, nous nous fions désormais beaucoup plus à l'École de formation continue, à la School of Extended Learning, à laquelle la rectrice a fait allusion tout à l'heure, et effectivement le doyen de l'école travaille de concert avec les facultés pour récupérer beaucoup plus systématiquement, avant qu'ils ne tombent en difficultés sérieuses, les étudiants qui sont en train de subir des problèmes de réussite ou de persévérance. Nous savons, et vous le savez sans doute, que les problèmes de persévérance ont très souvent des causes multiples: difficultés d'ordre physique ou mental, difficultés de préparation, difficultés parascolaires, familiales, professionnelles, et autres. Et désormais, donc, nous essayons d'offrir à nos étudiants un soutien beaucoup plus ferme afin de les empêcher de tomber dans une difficulté académique irrécupérable. Donc, vous avez mis le doigt effectivement sur un point sensible et sur un point qui nous tient vraiment à coeur.

**(15 h 20)**

Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Il reste combien de temps à cette période d'échange?

Le Président (M. Marsan): Un peu plus que cinq minutes.

Mme Malavoy: Cinq minutes. Alors, je vais continuer en prenant appui sur des choses que vous avez fort bien expliquées mais qui m'ont intéressée également dans ce que j'ai lu de votre bilan et vos prospectives. C'est l'importance, ma foi, extrêmement grande -- je ne sais pas si je l'ai vu autant dans d'autres universités -- que vous accordez à l'engagement étudiant, à la responsabilité sociale. Vous en avez fait une orientation stratégique précise. Puis vous avez trois orientations stratégiques, vous n'en avez pas 15, vous en avez trois. Et, dans ces trois-là, vous en avez une qui touche vraiment la responsabilité sociale et l'engagement communautaire. Enfin, je crois que c'est à peu près dans ces termes-là que vous en parlez.

J'aimerais que vous m'en parliez un peu plus. Est-ce que vous considérez que c'est une caractéristique de votre université, est-ce que c'est quelque chose qui apporte aux étudiants et aux étudiantes quelque chose du point de vue même de leur apprentissage et un peu même peut-être quelle est l'histoire de cette orientation qui me semble assez particulière et insistante à Concordia?

Mme Woodsworth (Judith): Bien, merci. Quand je suis revenue à Concordia, on m'a confié la tâche d'élaborer le plan stratégique et, avant de le faire, j'ai questionné bon nombre de personnes, des anciens de Corcordia, les membres du conseil d'administration, les gens de la communauté, et la perception de tous ces gens-là était que Concordia, c'était une université de la ville, une université dans la ville, une université très engagée. On parlait de nos étudiants comme des étudiants très engagés, activistes, et puis activistes dans le mauvais sens, dans le bon sens aussi, et tout le monde souhaitait qu'on devienne une université très connue pour son excellence académique, les recherches, mais on ne voulait jamais perdre cette qualité d'engagement. Et on ne voulait jamais perdre l'accessibilité, l'ouverture à toutes ces populations non plus.

Alors, on a décidé, en élaborant le plan stratégique, d'intégrer cet engagement communautaire dans les objectifs principaux de l'université. Et tout le monde était d'accord avec ça: les étudiants, les professeurs, les membres du conseil, et ça a comme conséquence de... c'est reflété dans tout ce qu'on fait. La recherche qu'on fait, souvent, c'est une recherche très pointue, mais souvent les recherches que les professeurs font, ce sont des recherches qui sont directement liées aux besoins de la société. Et je vous donne quelques exemples: On fait des recherches en génie sur des énergies renouvelables, sur l'énergie solaire. À l'École de gestion John-Molson, on fait des recherches et puis on fait la formation sur les entreprises durables, sur la responsabilité sociale. On fait des recherches aussi sur l'obésité des enfants.

Donc, ça se reflète dans les recherches qu'on fait, dans la formation qu'on offre aux étudiants et aussi aux expériences des étudiants eux-mêmes. Avant que j'arrive, ce n'était pas quelque chose que j'ai fait, mais, avant que j'arrive même, il y avait des étudiants qui avaient lancé un programme de bénévolat en Ouganda. Ils avaient gagné un prix: le prix des Forces Avenir pour ça. Et ce programme continue. Il y a des étudiants en génie qui font partie d'Ingénieurs sans frontières et ces étudiants vont tous les ans au Ghana. Il y a des étudiants de Concordia qui ont lancé le groupe -- c'est Vision...

M. Graham (David): Fusion, Fusion Jeunesse.

Mme Woodsworth (Judith): ...Fusion, Fusion Jeunesse. Je m'excuse. Fusion Jeunesse, c'est un programme qui vise à remédier au problème de décrochage scolaire, et maintenant... D'abord, c'étaient les étudiants de Concordia qui allaient dans une école où il y avait un fort pourcentage de décrochage, et maintenant c'est toutes les universités de Montréal qui participent à ce programme dans plusieurs commissions scolaires de Montréal.

Donc, ce sont des étudiants qui sont très, très engagés, et c'est pour ça qu'on a maintenant instauré un centre pour justement centraliser les opportunités. Donc, un étudiant ou une étudiante qui veut faire du bénévolat n'a qu'à se présenter au centre pour savoir où est-ce que je peux trouver six semaines de bénévolat quelque part, ou encore un organisme de la communauté peut appeler Concordia et demander des bénévoles. Donc, c'est quelque chose qui fait partie de tout ce qu'on fait, et on en est très fiers. Et je pense que ça nous distingue. Bien sûr, toutes les universités sont très engagées, sont très dévouées à la communauté, mais je pense qu'on le fait de façon beaucoup plus globale.

Mme Malavoy: Merci.

Le Président (M. Marsan): Ceci termine cette période de 20 minutes avec l'opposition officielle. Je vous suggérerais... nous allons prendre une pause de cinq minutes, et je demanderais à tous les députés et à nos invités de revenir assez rapidement pour qu'on puisse poursuivre nos travaux.

Alors, sur ce, je suspends pour quelques instants. Merci.

(Suspension de la séance à 15 h 26)

 

(Reprise à 15 h 34)

Le Président (M. Marsan): On va reprendre nos travaux. À l'ordre, s'il vous plaît! Et je vous remercie pour votre assiduité. Alors, nous allons poursuivre avec une autre période de questions de 20 minutes du côté ministériel, et je vais reconnaître notre collègue la députée de Gatineau.

Mme Vallée: Merci, M. le Président. Alors, bonjour à toute l'équipe, ça fait plaisir de vous retrouver, ça fait plaisir de participer aujourd'hui à ces rencontres puis d'échanger avec vous sur les différents enjeux, les différents défis auxquels vous faites face à titre d'institution universitaire.

Vous avez soulevé, dans vos présentations puis suite aux échanges avec les collègues, certains éléments qui ont capté mon attention puis sur lesquels j'aimerais qu'on puisse peut-être élaborer davantage. Alors, j'ai quelques questions qui sont un petit peu diffuses en fait de sujets, parce qu'il y a certains éléments qui m'interpellent.

Vous avez -- et on ne fera pas du temps pour faire du temps, on va aller directement dans le vif du sujet si ça ne vous incommode pas -- vous avez, lors de votre présentation, parlé du sous-financement particulier de l'Université Concordia. Vous avez mentionné que, bon, parmi vos enjeux, il y avait une problématique découlant du financement moyen par étudiant que l'université avait, puis on entend parfois lors de nos rencontres avec différents collègues -- différents nouveaux collègues -- ils vont dire, bon: Chez nous, notre université est sous-financée. On a l'impression parfois que c'est soulevé régulièrement chez certaines universités en disant: Nous, on est l'université la plus sous-financée, ou on est la plus... on est celle qui devrait avoir une attention particulière.

J'aimerais que vous m'expliquiez votre moyenne de 13 974 $ par étudiant. Ça, c'est tout financement inclus; c'est-à-dire, c'est l'ensemble autant des frais de scolarité, du financement gouvernemental. Et est-ce que ça inclut également le financement privé, ou vous avez mis de côté le financement privé, à 13 974 $?

Mme Woodsworth (Judith): Le fonds de fonctionnement.

Mme Vallée: Le fonds de fonctionnement, d'accord. Et lorsque vous dites: Nous sommes l'université qui a le financement le plus bas, qu'est-ce qui explique, selon vous, cette situation, puis comment cette situation pourrait-elle évoluer? Qu'est-ce qui pourrait être fait afin d'atteindre un niveau qui, pour les fins de votre université, serait acceptable et vous permettrait de faire face au défi de recrutement? Alors, il y a peut-être... il y a plusieurs sous-questions.

Le Président (M. Marsan): Mme la rectrice.

Mme Woodsworth (Judith): Bien, nous avons fait une analyse de cette question et nous nous sommes rendu compte qu'à part les fonds de fonctionnement courants, selon la grille de financement, bon, à part ça, il y a d'autres fonds qui sont alloués à certaines universités québécoises. La majorité reçoivent des fonds discrétionnaires, des fonds qui proviennent d'une enveloppe qui s'appelle Mission et Région. Alors, presque chaque université québécoise reçoit quelque chose pour une mission reconnue, parce que l'université est en région; alors, je pense que 13 sur 19 universités obtiennent ça. Mais Concordia n'est pas en région, n'a pas de mission reconnue, donc on ne reçoit pas d'argent de cette enveloppe, et cette enveloppe remonte à à peu près 90 millions de dollars. Alors...

Mme Vallée: Enveloppe Mission et Région?

Mme Woodsworth (Judith): Oui, une mission, disons, discrétionnaire, qui est à part les budgets de fonctionnement réguliers. Alors, c'est pour ça qu'on essaie d'évaluer quelle est notre mission particulière, et puis ce que je vous ai expliqué, on peut parler de la mission accessibilité et intégration sociale, on peut parler aussi des beaux-arts. Parce que les beaux-arts sont financés selon la grille de financement, mais on estime que les beaux-arts sont sous-financés, parce qu'à chaque fois qu'on évalue, disons, les revenus et les coûts, les dépenses en beaux-arts, on voit que les beaux-arts sont toujours en déficit par rapport à d'autres facultés. Alors, ce sont deux choses sur lesquelles on aimerait revenir et puis faire valoir que Concordia a, elle aussi, des missions particulières.

Mme Vallée: Est-ce que vous avez évalué le financement moyen idéal, c'est-à-dire on parle, pour votre situation, à 13 974 $ par étudiant. Dans le monde idéal, là, où tout le monde est beau, tout le monde est fin, quel serait le financement idéal pour l'Université Concordia? Je sais que c'est une question particulière, mais c'est parce qu'on peut parler longtemps; si on n'a pas établi un objectif, on va parler vraiment longtemps puis on n'arrivera pas à aucune destination.

**(15 h 40)**

Mme Woodsworth (Judith): C'est ça. Bien, d'abord, on peut parler d'équité. Et c'est ça, d'abord on aimerait qu'il y ait équité entre les universités, et puis après on verra. Parce qu'on estime, au Québec, que toutes les universités québécoises sont sous-financées par rapport aux autres universités canadiennes, et ça nuit à la compétitivité du Québec. Donc, si je me rallie aux efforts de la CREPUQ, là je dois avancer cette position-là, mais, à l'intérieur de cette position, Concordia est sous-financée par rapport à ses consoeurs. Mais le financement idéal, bon, on peut toujours en avoir plus, plus, mais idéal... je ne sais pas si mon collègue en finances a une réponse à la question, ou M. Graham? Oui?

M. Graham (David): Avec votre permission, M. le Président? Oui, merci. Effectivement, vous aurez remarqué, sur cette diapositive, où la rectrice faisait état justement de l'écart entre Concordia et la moyenne des universités québécoises, un écart encore plus grand entre Concordia et la moyenne des universitaires canadiennes. Et je crois que la position dans la CREPUQ justement veut que le financement global des universités québécoises atteigne un jour la moyenne des universités canadiennes. Et je crois me souvenir -- je cherchais cette diapositive, que je n'ai pas retrouvée -- je crois me souvenir d'un écart d'environ 5 000 $. Donc, 5 000 $, il suffirait de multiplier justement par le total des étudiants pour avoir le total du financement requis. Donc, 18 654 $, d'après mon collègue. Donc, cela doit nous donner une idée. Je ne sais pas si M. Therrien souhaiterait ajouter quelques éléments complémentaires.

M. Therrien (Daniel): Mme la députée, je crois que la position de la CREPUQ est que justement les universités québécoises atteignent la moyenne canadienne. Trouver un financement idéal: comme la rectrice l'a mentionné, le plus d'argent qu'on a, le mieux qu'on peut remplir notre rôle, c'est sûr, mais déjà, atteindre une parité à l'intérieur du Québec et atteindre les moyennes canadiennes, seraient pour nous déjà un très, très, très gros pas.

Mme Vallée: D'accord. Merci. On a souvent, et là je... Mais ça a un lien avec le financement, mais c'est aussi un lien entre la reddition de comptes et l'établissement de normes. On a, il y a quelques années, tenté d'instaurer les contrats de performance pour évaluer les différentes universités. Comment verriez-vous la mise en place justement de normes pour évaluer la performance des universités sur une base un petit peu plus homogène pour permettre une évaluation au niveau du taux de diplomation, de mettre en place des indicateurs de performance au niveau du taux de diplomation, au niveau de la recherche, au niveau des différents secteurs? Comment percevez-vous cette idée-là de tenter de mettre en place justement des indicateurs de performance qui permettront par la suite d'avoir une reddition peut-être plus homogène des sommes publiques investies dans le réseau universitaire québécois?

Mme Woodsworth (Judith): Moi, je suis d'accord avec cette approche-là, et puis d'ailleurs Concordia a, depuis cinq ans -- c'est cinq ans? -- instauré un instrument d'indicateurs. Chaque année, on publie sur notre intranet, on publie une compilation de tous les indicateurs, à peu près une centaine; donc, c'est une brique d'indicateurs, qu'on appelle «Measuring Excellence at Concordia University»; on mesure l'excellence, et puis là-dedans il y a toutes sortes d'indicateurs qui portent sur les étudiants, sur leurs recherches, sur tous les aspects de l'administration, de l'enseignement de Concordia, et...

Bon, des fois, on est très sévères aussi à notre égard à nous et à l'égard de nous-mêmes; on se compare à d'autres, on se compare à soi-même, et puis on essaie de faire des progrès là où on voit qu'il faut faire des progrès, et c'est un outil qui nous aide dans notre planification. Et donc, s'il y avait des outils pareils pour tout le secteur, moi, je serais d'accord avec ça, pourvu que, sur certains aspects, il y ait une différenciation selon les missions particulières de chaque institution. Par exemple, sur le plan du taux de diplomation, qu'on tienne compte de la mission de Concordia, qu'on tienne compte du fait qu'il y ait plus d'étudiants à temps partiel. Donc, on ne va pas nous mesurer avec une autre université où il y a plus d'étudiants à temps plein. Mais les indicateurs de performance, ça, c'est quelque chose à laquelle on est très, très habitués. Donc, je pense que c'est une bonne idée, c'est une bonne idée de les publier pour tout le public. Moi, j'aimerais mieux voir ça publié que Maclean's, parce que c'est quelque chose qu'on peut surveiller nous-mêmes, et on sait que les données sont précises, exactes, et tout ça. Donc, on est parfaitement d'accord avec ça.

Mme Vallée: Merci. Je n'ai pas pu m'empêcher tout à l'heure d'accrocher sur le taux relativement élevé que vous avez d'étudiants internationaux. Qu'est-ce que vous faites de particulier ou de différent qui amène autant d'étudiants de l'international à choisir l'Université Concordia, à se tourner vers votre université et à s'y rendre? Est-ce que vous avez une façon de faire particulière au niveau du recrutement? Est-ce que vous avez... Vous vous y prenez de quelle façon pour aller vers l'international et rechercher ces jeunes-là et les amener ici, au Québec?

Mme Woodsworth (Judith): Bon, il y a plusieurs facteurs. Moi, je m'occupe d'affaires internationales depuis très longtemps, depuis une quinzaine d'années, et puis j'ai fait ça en Nouvelle-Écosse et puis dans le nord de l'Ontario, donc je connais un peu la situation. Montréal, comme ville internationale, attire beaucoup de monde. Il faut dire qu'une université anglophone attire les Chinois plus qu'une université francophone, et il y a beaucoup d'étudiants chinois qui sortent de la Chine pour faire des études à l'étranger parce qu'il manque de place dans les universités de la Chine; même chose en Inde. Donc, comme ça, on a un fort pourcentage de Chinois et d'étudiants de l'Inde chez nous. Donc, d'une façon, on ne fait rien, ils viennent.

Par contre, il faut dire qu'on fait aussi des efforts précis dans certains marchés ciblés, aux États-Unis, en Inde, en Chine, un petit peu au Moyen-Orient, aux Émirats. On envoie des gens en mission, il y a souvent des missions organisées par le gouvernement. Par exemple, moi, j'ai accompagné le premier ministre en Inde, je suis allée en Chine avec le maire de Montréal, et puis à chaque fois j'en profite pour signer des ententes avec des universités partenaires.

Mais ça fait suite à une longue tradition de Concordia. Concordia est présente en Chine depuis les années soixante-dix, ce qui est très, très, très tôt, et Concordia est présente en Inde aussi. On a 5 % des professeurs de Concordia... 5 % des professeurs à temps plein sont d'origine indienne. Alors, c'est beaucoup, ça, et ça fait que ces professeurs ont encore des liens avec les universités où ils ont fait des études, ce qui fait qu'ils attirent... ils font venir des étudiants faire des maîtrises ou des doctorats.

Donc, c'est en partie une tradition qui continue, en partie des efforts ciblés qu'on fait. On envoie aussi des gens à des foires d'éducation. Et parfois c'est le hasard, c'est l'Internet. Les étudiants étrangers magasinent sur l'Internet, ils «surfent» et ils trouvent une université à Montréal qui a l'air accueillante et ils viennent.

Autre chose -- dernière chose: nous avons des programmes qui attirent les étudiants étrangers. Le génie, la gestion, ce sont deux domaines qui attirent beaucoup d'étudiants étrangers. On en a un petit peu en économie, ailleurs en mathématiques, mais c'est surtout en génie et en gestion qu'on en a le plus. Alors, voilà la situation.

**(15 h 50)**

Mme Vallée: J'ai constaté que l'université avait mis en place des programmes de francisation, des programmes pour l'intégration de ces étudiants étrangers là. Au-delà de ce qui est fait pour intégrer les étudiants pendant leur séjour à l'université, est-ce qu'il y a des démarches particulières faites à l'université pour retenir, pas seulement attirer les étudiants étrangers, mais les retenir ici, au Québec? Compte tenu du défi qu'on aura, le défi démographique et le défi qu'on a à combler certains emplois particuliers, est-ce qu'il y a un effort fait, à l'intérieur des murs de l'université, pour retenir et pour intéresser ces jeunes-là à s'établir au Québec?

Mme Woodsworth (Judith): On le fait, je dirais, au moyen des partenariats avec l'industrie, des stages, des projets de recherche avec l'industrie, surtout dans le domaine de génie et puis en gestion aussi. Donc, souvent, les étudiants travaillent comme partie de leurs études, ils vont faire des stages dans des banques, ou bien, en génie, ils vont faire des stages chez Bombardier et ça leur permet d'avoir accès à des emplois quand ils terminent leurs études. Et on constate... Ça nuit à nos statistiques un petit peu et puis à nos ressources un petit peu aussi: on constate que souvent les étudiants deviennent résidents et cherchent la citoyenneté déjà à partir de la deuxième année d'études. Donc, ils arrivent comme étudiants étrangers, avec un visa d'étranger, mais souvent ils convertissent et puis ils deviennent résidents en quête de citoyenneté bientôt après. Et on a évalué aussi le taux de rétention de tous nos étudiants, tout le monde compris, Québécois, Canadiens, étudiants étrangers, le taux de rétention au Québec est de 66 %, c'est ça?

Une voix: Oui.

Mme Woodsworth (Judith): Oui, 66 %. Donc, tout le monde confondu, 66 % restent au Québec, ce qui n'est pas mal si on tient compte du fait qu'il y a pas mal de Québécois qui partent travailler en Alberta, ou il y a des Québécois, des Canadiens qui viennent ici, qui repartent, donc on est assez contents de ça, mais on est conscients de la situation et puis on va essayer d'en faire plus; ceci fait partie de notre mission et puis des objectifs de notre plan stratégique.

Mme Vallée: Et vous avez évalué le taux de rétention pour l'ensemble des étudiants de l'université, est-ce que vous avez une idée du taux de rétention au niveau des étudiants à l'étranger?

Mme Woodsworth (Judith): Non... statistiques...

Mme Vallée: D'accord.

Mme Woodsworth (Judith): ...on peut essayer de faire l'étude, parfois, c'est difficile, si les étudiants étrangers changent de catégorie...

Mme Vallée: De statut.

Mme Woodsworth (Judith): ...changent de statut.

Mme Vallée: D'accord. Je comprends.

Mme Woodsworth (Judith): Mais on peut essayer de les suivre et puis, si on a une idée, on peut essayer de vous envoyer le chiffre, mais, pour l'instant, c'est compliqué.

Mme Vallée: Je vous remercie.

Le Président (M. Marsan): Ça va?

Mme Vallée: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Marsan): Ça termine vraiment le temps qui était imparti au parti ministériel. Nous allons poursuivre avec l'opposition officielle, et je vais reconnaître Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Merci. Je vais poursuivre l'échange et puis j'ai des collègues qui également ont des questions à aborder avec vous. J'aimerais aborder la question des finances de l'Université Concordia sous différents angles. D'abord, je veux bien être sûre d'avoir saisi correctement ce que vous avez dit dans votre présentation. La décroissance du déficit annuel, c'est ce que vous avez dit...

Mme Woodsworth (Judith): Accumulé.

Mme Malavoy: ...accumulé, qui était de 12 millions -- c'est ça -- et qui serait réduit... Redites-le-moi, là, simplement dans vos termes. Il me semble que j'ai capté ça dans votre présentation, mais...

Une voix: La dette à long terme.

Mme Woodsworth (Judith): C'était le déficit accumulé qui était à 16 millions, réduit à 12 millions quand je suis arrivée, et puis qui sera à 4 millions cette année.

Mme Malavoy: Et qui sera à 4 millions cette année. Ça, c'est le déficit accumulé.

Mme Woodsworth (Judith): C'est ça.

Mme Malavoy: Donc. Et...

Mme Woodsworth (Judith): De fonctionnement, sur le...

Mme Malavoy: Est-ce à dire qu'il n'y a... Ça, c'est le déficit accumulé. Pour ce qui est de l'équilibre de votre budget annuel, il est atteint...

Mme Woodsworth (Judith): Oui.

Mme Malavoy: ...si je comprends bien?

Mme Woodsworth (Judith): Oui. Oui.

Mme Malavoy: Il est atteint? O.K. Par contre, vous avez abordé tout à l'heure quelque chose qui avait l'air tout de même assez lourd, c'est le poids d'engagements en immobilisations qui vous coûtent, si j'ai bien compris, environ 10 millions par année simplement en intérêts. J'aimerais que vous repreniez cet aspect-là, parce que ce n'est pas unique à Concordia, je pense qu'il y a d'autres universités qui ont des problèmes du même ordre. Et j'aimerais peut-être que vous puissiez me le redire avec un peu plus de précisions que dans la présentation globale.

Mme Woodsworth (Judith): Oui. Donc, en 2002, on avait besoin d'espace, Concordia avait beaucoup d'édifices qu'on louait, on était dans des petites maisons et puis on était éparpillés un peu partout dans le centre-ville et puis sur l'autre campus aussi. Et, pour pouvoir construire des immeubles, des pavillons convenables, comme le gouvernement ne pouvait pas tout donner, le gouvernement québécois a approuvé notre demande de prendre des obligations de 200 millions de dollars, ce qu'on a fait en 2002. Mais on a fait ça avec l'approbation du gouvernement, et ça nous a permis de renouveler les deux campus, et on a construit, sur chaque campus, des espaces. Ce qui fait qu'aujourd'hui on n'est plus en espaces loués, on n'a plus à payer les loyers, et on a des pavillons appropriés à notre mission. Mais ça nous laisse quand même 10 millions par année en intérêts. Il y a une autre partie... en fait, c'est 13, 14 millions par année, mais le gouvernement nous appuie pour une partie des intérêts, mais on a quand même à notre charge 10 millions tous les ans, et ça réduit notre budget de 10 millions. Alors...

Mme Malavoy: Et, quand vous projetez ça dans le temps, vous en avez pour combien de temps à avoir cette charge donc de 10 millions?

Mme Woodsworth (Judith): Justement, les obligations sont pour une période de 40 ans. Jusqu'à maintenant, on n'a rien fait pour repayer notre dette, mais, cette année, on a pris des mesures et puis on a un horaire de repaiement de cette dette, mais ça va prendre une petite portion de notre budget quand même. On a mis de côté une somme qu'on avait prélevée auprès des donateurs, et puis on va ajouter des sommes annuellement pour pouvoir repayer la dette à long terme de 200 millions, mais d'ici 38 ans... 32 ans...

Une voix: 32 ans.

Mme Woodsworth (Judith): 32 ans. D'ici 32 ans, on aura quand même 10 millions par année, plus une portion pour repayer la dette.

Mme Malavoy: Je ne suis pas sûre d'être là pour vérifier, dans 32 ans, où vous en êtes...

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Malavoy: ...mais, dit autrement, est-ce que vous considérez que la situation est sous contrôle? C'est-à-dire que les choses se déroulent comme vous les aviez planifiées, même si c'est étalé quand même sur plusieurs dizaines d'années?

**(16 heures)**

Mme Woodsworth (Judith): Il faut dire que c'est une situation qui nous inquiète, qui m'inquiète personnellement. C'est pour ça qu'il faut quand même avoir un budget de fonctionnement équilibré et ne pas avoir un déficit là aussi, et c'est pour ça que j'ai fait allusion à des choix difficiles. Pour avoir le budget équilibré tous les ans, annuellement on prend des décisions, on fait des choix difficiles. Et, avec un peu plus d'investissements, un peu plus de financement, on pourrait faire beaucoup mieux, engager plus de professeurs à temps plein, ajouter des services pour les étudiants, contribuer plus à l'aide financière des étudiants, rénover des espaces qui sont déjà assez âgés. Et, par exemple, au pavillon Hall, qui a été construit dans les années soixante, il y a l'escalier mobile qui est toujours en panne, et ça devient la blague de tous les étudiants au moment de la collation des grades. Mais là on est en train de réparer ça, mais ça coûte une fortune. Et ça, c'est le problème pour toutes les universités qui ont des immeubles assez anciens.

Donc, il y a plein de choses qu'on pourrait faire qu'on ne fait pas parce qu'on ne veut pas dépasser le déficit. C'est ajouter à la dette à long terme.

Mme Malavoy: Je sais qu'une des questions qui se pose parfois, c'est l'utilisation d'argent du budget de fonctionnement pour justement combler des déficits du côté des immobilisations. Est-ce que, dans votre cas, il y a ce transfert du fonctionnement vers les immobilisations ou ce sont des choses étanches? Je le sais parce qu'il y a des universités où le problème s'est posé de devoir prendre de l'argent qui aurait pu, dans le budget de fonctionnement, permettre, bon, un certain nombre de services d'ordre pédagogique et qui, dans le fond, a dû être mis de côté pour éponger, bon, des intérêts sur une dette en immobilisations.

Mme Woodsworth (Judith): C'est pour ça en partie qu'on a pris les obligations. C'est pour ça aussi qu'on essaie de faire le prélèvement de fonds auprès des donateurs. Et on a pu ramasser une partie des argents auprès des donateurs. Mais là je vais peut-être reposer la question ou laisser à mon collègue M. Therrien.

Le Président (M. Marsan): M. Therrien.

M. Therrien (Daniel): Merci beaucoup, Mme la députée. Effectivement, une partie du fonds de fonctionnement doit être, année après année, réalisée en surplus pour permettre de combler, entre autres, le paiement de cette dette. Il faut garder en tête par contre que l'argent de ce 200 millions là a servi à mettre sur pied les divers locaux qui sont utilisés par les étudiants, qui nous permettent de continuer à offrir les services. Donc, ce n'est pas une ponction nécessairement sur les services actuels pédagogiques des étudiants parce qu'on a généré les locaux qui permettent aux étudiants de faire la recherche, de suivre les enseignements avec des buildings qui sont considérés ou des immeubles qui sont considérés comme des édifices de fine pointe. Mais c'est tout à fait vrai, par contre, que l'Université Concordia doit générer sur les 32 prochaines années, année après année, un surplus minimum de 10 millions pour couvrir les frais de cette dette-là.

Les autres types de dépenses qui peuvent être réalisés sont notre maintenance au niveau technologique, notamment tous les systèmes -- vous excuserez le terme anglais, là -- de Voice over IP. On a dû investir dans toutes les communications à l'université. Ces dépenses-là sont enregistrées au fonds d'immobilisations, et on repaie ces investissements-là au travers des années par les économies qu'on a réalisées en mettant en place des projets de cet ordre-là, mais non pas au détriment du pédagogique des étudiants.

Mme Malavoy: D'accord. Mais une question peut-être avant de passer la parole à l'un de mes collègues, une question peut-être plus précise, parce que c'est quelque chose que j'ai du mal à comprendre. Dans un des documents que vous nous avez envoyés... Attendez un petit peu que je voie le titre. Le titre, c'est Rapport financier annuel 2008-2009, et c'est à la page... -- attendez un petit peu -- c'est à la page 3. C'est à la page 3 et à la ligne 19, je crois. C'est parce que c'est écrit... ce n'est pas écrit. À la ligne 20, plutôt. 20, oui. La ligne 19, on dit: «Déduire: déductions internes». Puis on met ensuite: «Redressement des années antérieures». On indique: Voir page 15, mais, moi, je n'ai pas la page 15. Et on voit une somme de 76 millions, et je me demandais ce que c'était. Puis, quand on la fait varier un peu, là, on arrive à quelque chose... un chiffre encore plus précis.

Cette portion-là de la conciliation du solde de fonds, pouvez-vous me l'expliquer pour que je comprenne ce que ça veut dire, parce que c'est quand même une somme qui me semble importante?

Mme Woodsworth (Judith): Oui. Encore une fois, j'aimerais passer la parole à mon collègue.

Le Président (M. Marsan): M. Therrien.

M. Therrien (Daniel): Oui, merci, Mme la députée. C'est sûr que je vais devoir vérifier par la suite pour être sûr que l'information que je vais vous donner est adéquate. Le 75 millions était dû à l'application, si je me souviens bien, en 2008-2009, de la nouvelle politique de capitalisation du ministère. La politique venait modifier de façon historique, si vous voulez, ou rétroactive les normes de capitalisation de l'université. Donc, on a dû redresser l'information qu'on vous a présentée année après année en suivant les nouvelles règles du ministère quant aux différents groupements d'immobilisations.

Donc, c'est simplement un ajustement qu'on dirait comptable pour tenir en compte d'une différenciation dans les méthodes d'amortissement utilisées dans les immobilisations. Autrement dit, pour faire un sommaire très rapide, on utilisait une méthode x avant la mise en place de la politique de capitalisation du ministère et on utilise maintenant une méthode y qui nous a forcés à redresser nos soldes d'ouverture.

Mme Malavoy: Est-ce que c'est ce qu'on appelle l'application de nouvelles normes comptables ou de...

M. Therrien (Daniel): C'était à deux volets. On a cette année, en 2009-2010... on passe aux principes comptables généralement reconnus canadiens, mais il y a eu une première ébauche en 2008-2009 qui ne touchait que le fonds d'immobilisations. Donc, ce n'est pas l'ensemble des ajustements que vous allez voir en 2009-2010.

Mme Malavoy: Donc, il y en a pour 76 millions de cette ébauche, si je peux dire.

M. Therrien (Daniel): Effectivement.

Mme Malavoy: Mais en fait c'est une façon différente de dire les choses, mais ce n'est pas une dépense nouvelle. C'est une façon de comptabiliser différemment des dépenses engagées de toute façon.

M. Therrien (Daniel): Votre compréhension est exacte. C'est effectivement une modification des méthodes d'amortissement qu'on utilisait par le passé selon les nouvelles règles du ministère.

Mme Malavoy: Je vous remercie. Là, je ne sais pas qui de mes collègues veut prendre la... Vous les voyez mieux que moi.

Le Président (M. Marsan): M. le député de Drummond, porte-parole en matière d'affaires étudiantes.

M. Blanchet: Bien le bonjour. D'emblée, je suis, comment dire, rassuré par ce que vous me dites, parce que les médias présentent, dans les derniers mois, une image effrayante de la situation des universités québécoises. Et ce que j'ai lu, c'est des défis, assurément, mais une université bien gérée avec des projets, des nouvelles infrastructures, architecture attrayante, une vision porteuse et portée, une situation financière, de façon générale, saine. Et, dans ce contexte-là, je me dis... Si je peux paraphraser, on dit parfois: Quand je me regarde, je me désole; quand je me compare, je me console. Je me dis que, si on se compare à nos voisins, on est inquiets, mais, si on se compare à nos besoins, ça ne va pas si mal.

Par contre, je me suis permis de fouiller un peu sur Internet et j'ai regardé effectivement les classements des universités. Puis je suppose que, quand on est à l'Université Concordia, on regarde ça puis on est un peu choqué des fois. On dit: Bien voyons! Pourquoi est-ce qu'on est là? Est-ce qu'on ne mérite pas effectivement un meilleur sort tant à l'échelle canadienne qu'à l'échelle nord-américaine? Et vous avez parlé des paramètres de comparaison, et c'est de ça que je voudrais, encore une fois, plus entendre parler, parce que c'est l'argument fondamental: les universités québécoises seraient un peu pitoyables comparé à ce qui se fait ailleurs mais sur la base de critères vachement occultes, un peu comme l'âge de l'université, une espèce de prestige hérité, et qui va à l'encontre d'une certaine modernité dont vous semblez être porteurs.

Qu'est-ce que vous connaissez des critères de Maclean's, par exemple? Et qu'est-ce qui pourrait être clairement amélioré et dit publiquement qu'il faut que ce soit amélioré pour que ça vaille quelque chose, ce genre de classement là?

Mme Woodsworth (Judith): Vous parlez du classement Maclean's?

M. Blanchet:Maclean's ou n'importe quelle forme de ces... Il y en a plusieurs qui existent. Sur Internet, on en trouve plusieurs.

**(16 h 10)**

Mme Woodsworth (Judith): Oui. Je pense qu'il n'y a aucun classement qui soit parfait, premièrement. Il n'y a aucun classement qui permette vraiment de comparer les universités, qui ont des missions différentes. Et Maclean's a des défauts d'utiliser des indicateurs reliés soit à l'argent soit à des facteurs qui ne sont pas pertinents.

Alors, je vais vous donner un exemple. Je pense qu'ils ne le font plus, mais ils utilisaient comme indicateur le nombre d'étudiants hors province. Alors, une université au Nouveau-Brunswick, Mount Allison, qui était sur la frontière du Nouveau-Brunswick et de la Nouvelle-Écosse, recevait beaucoup d'étudiants hors province, alors qu'à la Laurentienne on était très loin de la frontière. Nous, on n'avait pas beaucoup d'étudiants hors province. Alors ça, c'est une question de géographie. Ça n'a rien à voir avec la qualité. Et puis j'en avais parlé avec la rédaction de Maclean's, et puis, eux, ils ont dit: Ah, tant pis!

Et, à la même époque que j'avais parlé à la rédaction de Maclean's, j'ai dit: Pourquoi ne pas utiliser le taux d'emploi des étudiants? Ah, mais, si on faisait ça, certaines universités qui sont dans des économies où ça va plus mal ne seraient pas contentes. Mais vous voyez, c'est parfois aléatoire. Alors, créer un sondage qui soit vraiment scientifique et valable, c'est très, très compliqué.

Mais, ceci dit, on aimerait bien réussir mieux dans Maclean's. Un facteur, c'est un sondage sur la réputation. On s'en tire pas mal, on est sixième sur 11 universités. Avant, on était huitième. Donc, on n'est pas en bas de la liste, mais on pourrait être mieux si on faisait un peu plus de publicité à l'extérieur du Québec. Et combien ça coûterait, une campagne de publicité, des annonces dans le Globe and Mail ou des annonces à la télévision? On pourrait faire ça. Mais est-ce qu'on fait ça au détriment des services pédagogiques? Vous voyez? Mais cette catégorie dans Maclean's, ça compte pour 25 % de... 20 % de la note finale. C'est quand même important. Mais, moi, je me vois mal investir tant d'argent sur la publicité quand il y a des services pédagogiques à fournir.

Donc, il y a toutes sortes de choses, mais on étudie la question et puis on essaie. Par exemple, ce qui nous touche dans Maclean's, c'est peut-être la réussite de nos professeurs dans des concours nationaux. On essaie de faire mieux dans cette catégorie-là, le nombre de subventions, les prix gagnés par les étudiants. Et, bon, si c'est important pour nous, on va mettre un peu d'efforts là-dedans.

M. Blanchet: Merci. J'attends la permission du président.

Le Président (M. Marsan): Oui.

M. Blanchet: J'attendais votre permission pour parler. Vous savez comment je suis discipliné, hein?

Le Président (M. Marsan): Oui, on en prend bonne note.

M. Blanchet: Moi, je suis discipliné. C'est extraordinaire.

Le Président (M. Marsan): Alors, vous pouvez poursuivre, M. le député de Drummond.

M. Blanchet: La finalité, c'est la diplomation et l'embauche des étudiants, c'est la carrière qu'ils vont se donner, quitte à ce que ce soit comme travailleurs autonomes. À cet égard-là, qui est le concurrent d'un étudiant diplômé, sinon un autre étudiant diplômé? Ou, pour être cru, y a-tu bien du monde qui débarque de Harvard pour pogner des jobs à Montréal, tu sais? Qui est le concurrent de l'étudiant? Et, plus bêtement encore, est-ce qu'un diplômé de Concordia va avoir un moins bon salaire qu'un diplômé de McGill ou un diplômé de York?

Vous voyez où je m'en viens avec ça. C'est que la formation de Concordia vaut-elle la même chose que la formation d'une de ces universités concurrentes auxquelles on se compare souvent avec une certaine tristesse? Jusqu'à quel point il y a une différence dans la valeur du diplôme?

Mme Woodsworth (Judith): Bon, je vous ai parlé du taux d'emploi de nos étudiants, qui est tout à fait respectable. Est-ce que nos étudiants gagnent autant qu'un étudiant diplômé de Harvard? Moi, je pense que oui. Et, dans le monde des affaires, par exemple, où on peut... c'est ça, on peut suivre nos étudiants de plus près, dans le monde des affaires, les gens vont nous dire qu'ils aiment beaucoup les diplômés de Concordia, qu'ils réussissent mieux dans l'examen de comptabilité et qu'ils sont très, très bien formés. Donc, les banques nous le disent, les compagnies d'investissement nous le disent. Dans le monde de l'aérospatiale aussi, on nous dit que les diplômés de Concordia valent beaucoup. Donc, on est très fiers.

On est très fiers de certains de nos diplômés qui sont très célèbres. André Desmarais est diplômé de Concordia. Dominic D'Allessandro est diplômé de Concordia. Jacques Ménard est diplômé de Concordia. On en a beaucoup qui ont bien réussi dans le monde, donc... Et puis c'est eux qui sont déçus quand Maclean's sort chaque année, parce qu'eux, ils ont bien réussi et puis ils gagnent pas mal d'argent aussi, il faut le dire.

Et donc on est fiers de nos diplômés. Et je pense que ce qu'il faut faire, c'est de les encourager, les diplômés, ce que je fais. Je me promène à nos sections de diplômés au Québec, au Canada, aux États-Unis et puis à l'étranger quand je peux et j'encourage nos diplômés, qui sont très satisfaits d'être des ambassadeurs, ce qu'ils font. Et puis je pense que ça va s'améliorer un petit peu. Je pense que déjà on a tourné la page pas mal.

Le Président (M. Marsan): Je vous remercie beaucoup. Ceci termine l'échange avec le parti de l'opposition officielle. Nous allons poursuivre avec le parti ministériel, et je vais reconnaître Mme la députée de Mille-Îles.

Mme Charbonneau: Merci, M. le Président. Bonjour. Première journée, et c'est avec vous qu'on brise la glace du début des travaux. Vous mettez, je crois, la barre haute pour les autres universités qu'on va recevoir. Je vous en remercie. Je me ferai par contre plaisir en vous disant que je suis heureuse de voir une femme à la tête, entourée d'hommes, mais quand même une femme qu'on a été chercher pour sa qualité de personne pour être à la tête de Concordia, donc madame.

J'ai aimé, dans votre présentation, les qualificatifs que vous avez utilisés pour parler de votre université. Il y en a un qui m'accrochée plus, puisque c'est celui que je vais utiliser pour, comme on dit en anglais, vous challenger sur les questions que j'aurai. Mais je suis sûre que vous serez à la hauteur pour y répondre.

J'ai beaucoup apprécié le terme «audacieuse». Une université est quand même, un peu comme les autres institutions pédagogiques, un endroit où habituellement on souffre de pauvreté et d'humilité. Que vous vous dites audacieuse, j'approuve et j'en suis très heureuse. Maintenant, quand on est audacieuse, on se doit de mettre de l'avant certaines façons de faire qui sont différentes.

Ma première question sera un petit peu plus pédagogique. Vous avez différentes disciplines et, dans chacune d'elles, vous avez un ratio hommes-femmes différent. Je vous donne un exemple, la science pure et appliquée: 28 % des femmes, 72 % des hommes. Mais celle qui m'intéresse tout particulièrement est la discipline sur l'éducation: 81 % sont des femmes et 19 % sont des hommes. Dans la qualité d'une université comme la vôtre, qu'est-ce qu'on peut mettre de l'avant pour faire en sorte qu'on peut recruter plus d'hommes dans la matière d'éducation? Et je sais que ça ne dépend pas que de vous, là. Je me demande juste qu'est-ce qu'on peut faire au niveau des hautes études pour pouvoir mettre de l'avant un plan de match intéressant pour pouvoir recruter, pour le monde de l'éducation, un peu plus de personnes masculines.

Mme Woodsworth (Judith): Ça, c'est tout à fait... Je pense que c'est l'inverse de la question que j'avais prévue. J'avais prévu la question sur comment faire pour augmenter le nombre de femmes en génie. Mais c'est vrai que, dans le domaine de l'éducation et puis dans la pratique de l'éducation, il y a une prédominance de femmes. Et puis une théorie, c'est que cette prédominance de femmes, c'est ce qui décourage les jeunes garçons à poursuivre leurs études et à être sérieux, parce qu'il n'y a pas de modèle, il n'y a pas d'hommes instituteurs comme il y en avait à une époque.

Qu'est-ce qu'on peut faire? C'est compliqué. Il y a des gens qui ont des théories là-dessus: il faut faire de l'éducation une vocation respectable, bien rémunérée, aussi bien rémunérée que le métier d'homme d'affaires. Je ne sais pas, je ne sais pas. J'avoue que je n'ai pas la réponse, mais c'est une question à laquelle je réfléchis, comme je réfléchis à l'autre question, encourager les femmes à entrer dans des métiers non traditionnels comme le génie, l'informatique. Et il n'y a pas d'équilibre. Et puis on a un fort pourcentage aussi de femmes en général au niveau du bac, et puis plus on monte, moins il y a de femmes. Au niveau supérieur, il y a moins de femmes. Et, au niveau des profs, il y a moins de femmes. Et, au niveau des rectrices, il y en a très peu.

**(16 h 20)**

Mme Charbonneau: Ça faisait partie des félicitations du début d'ailleurs, parce qu'effectivement on a fait le décompte, et il y a très peu de femmes qui sont rectrices, au niveau des universités.

Question peut-être un petit peu plus facile. Au niveau de votre université, vous avez des chaires de recherche. Vous en avez 30 maintenant, mais vous en avez deux nouvelles. Je me demandais si vous pourriez rapidement nous parler des deux nouvelles que vous avez depuis quelque temps. Je pense que ça ne fait pas très longtemps, d'ailleurs.

Mme Woodsworth (Judith): Bien, je vais demander à mon collègue, M. Graham, de parler des chaires.

Le Président (M. Marsan): M. Graham.

M. Graham (David): Merci, M. le Président. Mme la députée, l'identité des deux chaires en question, je ne suis pas certain de pouvoir les identifier comme cela parce qu'écoutez nous avons un assez grand nombre de chaires de recherche. Ma collègue Mme Dandurand, la vice-rectrice à la recherche et aux études supérieures, n'a pas pu être présente aujourd'hui parmi nous. C'est elle qui est responsable de ce dossier.

Donc, je suis désolé de ne pas avoir comme cela sur le bout des doigts et sur le bout de la langue l'identité de toutes les chaires. Donc, si vous pouviez me rappeler le nom des chaires en question, là je serais certain de pouvoir vous en dire quelque chose. Mais les deux les plus récentes, je suis désolé.

Mme Charbonneau: Alors, je ne serai pas plus aidante que vous.

M. Graham (David): ...vraiment je suis désolé.

Mme Charbonneau: Puisqu'on avait la nouvelle que vous en aviez deux nouvelles, et je croyais que vous aviez... Mais, qu'à cela ne tienne, je suis sûre qu'éventuellement on aura le plaisir de partager sur cette bonne nouvelle que vous avez de votre côté.

Question un peu plus financière, puisque ça finit toujours par arriver à cette question-là, le financement. La plupart de mes collègues, de part et d'autre de la table, ont posé des questions sur le financement. Il y en a une qui me vient et qui reste toujours en tête, puisque je viens plus du monde de l'éducation primaire et secondaire, où la clientèle est plus statique, le financement est beaucoup plus égal partout, et on se pose moins de questions. Par contre, au niveau des universités, on sait que la question se pose. Et vous en avez fait un peu rapport plus tôt par rapport à l'équité, par rapport à l'aspect unique de chacune des universités. Il y en a une qui est intrigante, puisqu'elle s'est posée de différentes formes, mais je vais vous la poser comme elle me vient. Et, si jamais, de votre côté, vous pouvez réagir de façon audacieuse, j'apprécierais.

Chaque discipline convient à un métier différent. Vous formez des médecins, vous formez... Je dis «vous», j'y vais en général, là. Je n'énumérerai pas les disciplines. Mais un enseignant, à la fin de ses études, ne gagnera pas le même salaire qu'un génie, d'où peut-être le choix des métiers, puisque la volonté est différente. Par contre, le prix de mon étudiant est le même. Chacun d'eux va avoir des frais qui se ressemblent, dépendamment de la discipline qu'il...

Est-ce qu'on peut imaginer un frais différent de par la discipline à laquelle l'étudiant adhère? Si je m'en vais médecin, est-ce que je devrais avoir les mêmes frais que si je m'en vais enseignant?

Mme Woodsworth (Judith): C'est certain que ça, c'est une hypothèse qu'on a déjà avancée: dans le cas de la médecine, on peut faire payer plus parce qu'il y a beaucoup de compétition pour rentrer dans des écoles de médecine, et puis on sait qu'après, bon, les médecins sont tous très riches, donc ils peuvent payer plus. Mais, moi, je pense que c'est un peu risqué, dangereux, parce qu'on ne sait jamais. Peut-être pas pour les médecins, on va toujours avoir besoin de médecins. Donc, ils vont toujours être rémunérés de façon convenable. Mais parlons plutôt du métier d'avocat. Il y en a qui sont riches et puis il y en a qui ne sont pas riches. Il y a des avocats qui choisissent de travailler pour des organismes à but non lucratif, il y a des avocats qui choisissent de venir à l'université nous donner un coup de main. Donc, ils ne sont pas tous... Il y en a qui vont en politique. Donc, je sais que ça dépend beaucoup du choix personnel et ça peut fluctuer beaucoup. Donc, moi, je pense que ce n'est pas la bonne piste à prendre, à mon avis.

Mme Charbonneau: Je vous relance quand même en vous disant: On est quand même conscients que chacune des disciplines demande des installations et un regard différent sur le nombre de gens avec qui ils font affaire, puisque, si je m'en vais avocat, mon niveau de technologie est différent que si je m'en vais en médecine. Par rapport à vos équipements, par rapport à votre demande à vous, n'est-il pas plus équitable... Je vous lance la question, et soyez bien libres, là. Ce n'est pas un débat, là. Mais n'est-il pas plus équitable, si j'ai besoin d'une technologie supérieure, d'avoir des frais différents? Je pose la question puisque vous avez de votre côté, j'imagine, le devoir de faire une attribution équitable à chacune des chaires que vous avez pour vous assurer que l'équipement est là pour vos étudiants.

Mme Woodsworth (Judith): Oui, mais ça, c'est une autre hypothèse. Il y a certaines disciplines qui coûtent beaucoup plus cher à enseigner que d'autres. Il y a des disciplines en sciences humaines où on peut avoir des classes nombreuses, pas d'équipement et puis d'autres disciplines où, bien, comme j'ai parlé des beaux-arts, où, bon, à la rigueur aussi il y a peut-être une personne qui enseigne à une personne ou des petites classes avec des installations très compliquées, en génie, très compliquées.

Est-ce qu'on fait payer les étudiants plus cher ou est-ce qu'on demande des subventions plus élevées? On peut faire les deux. C'est le principe de la grille de financement. Il y a certaines disciplines qui sont comptabilisées plus haut, et puis là on reçoit plus d'argent du gouvernement. Donc, on peut peut-être avoir l'hypothèse que l'étudiant doit contribuer aux coûts supplémentaires, mais ça, ça fait partie du débat qu'on aimerait avoir peut-être au moment de la rencontre des partenaires à l'automne.

Mme Charbonneau: Dans cette même volonté d'être, de mon côté, un peu audacieuse -- vous avez compris que c'est moi qui s'en vient un peu plus audacieuse -- vous avez parlé de l'équité avec les autres universités au Canada. Dans cette volonté-là, vous avez aussi, j'imagine, dans votre discours, compris que la facture des étudiants est différente ici comme celle du Canada.

Quand vous parlez d'équité, est-ce que vous vous lancez dans le débat sur l'équité sur l'ensemble de la facture ou vous ne parlez que du financement de l'université par le biais du ministère?

Mme Woodsworth (Judith): Bon, on parle de la somme globale. Et, si je me souviens bien, il y avait une époque où le gouvernement du Québec payait le plus par étudiant. Maintenant, le gouvernement du Québec est rendu en cinquième place. Il y a quatre autres provinces où le montant par personne est plus élevé. C'est dommage d'être... Mais au moins on n'est pas en dernier lieu. Mais, si on comprend... si on met tout ensemble, les frais de scolarité, les subventions du gouvernement tout compris, on est en dernière place par financement par étudiant. Donc, ça vient de là, cette notion d'équité canadienne.

Mme Charbonneau: Au niveau du financement global, donc autant la facture étudiante qu'autant le financement par les deux gouvernements, fédéral et provincial.

Mme Woodsworth (Judith): Global. Global, oui.

Mme Charbonneau: Ça va pour le financement. Je pense que je vais lâcher prise.

J'ai juste une dernière question, par contre, et celle-là, elle est un peu plus technique. C'est par rapport au e-learning. Quand je suis un étudiant, je vais à l'université, je m'inscris, j'ai des frais. Quand je fonctionne par ordinateur, je suis à l'étranger, j'ai le goût de suivre, parce que vous avez une clientèle à l'étranger, j'ai envie de faire un cours à Concordia, comment ça fonctionne? Je reçois une facture? Ça marche par ordinateur? Je n'ai pas trop suivi, et la technologie va plus vite que moi habituellement. Je n'ai pas la même performance que mon collègue d'en face. Donc, je me demandais: De votre côté, comment ça fonctionne pour la facturation pour le cours pour l'étudiant?

Mme Woodsworth (Judith): Bien, vous vous inscrivez et puis vous payez la facture. Vous envoyez un chèque, et puis là vous êtes inscrite.

Mme Charbonneau: ...simple comme ça, là.

Mme Woodsworth (Judith): Et puis vous pouvez suivre le cours même si vous êtes en Chine. Et puis on a des étudiants qui sont à l'étranger.

Mme Charbonneau: Oui. Vous avez un pourcentage de 11 %, je pense, à l'extérieur... ou plus que ça. On me dit non en arrière de moi.

Mme Woodsworth (Judith): On a 11 % d'étudiants étrangers internationaux qui sont à Concordia.

Mme Charbonneau: Ah, qui sont ici.

Mme Woodsworth (Judith): Qui sont ici. Mais il y a un certain nombre d'étudiants... Par exemple, un étudiant qui vient ici, qui suit son cours ici mais qui retourne en Chine pour des vacances et puis qui reste six mois, il peut quand même suivre un cours quand il est là-bas. Et puis il y en a comme ça qui déménagent ou qui vont travailler et puis qui continuent à suivre les cours électifs par e-learning. Ça se fait.

Mme Charbonneau: Donc, ce n'est pas plus compliqué qu'un abonnement dans une revue, c'est-à-dire que je m'abonne, j'envoie un chèque puis je peux suivre le cours. C'est fort simple, vous avez tout à fait raison. Ça va bien, M. le Président? Je peux continuer?

Le Président (M. Marsan): Oui, vous pouvez.

**(16 h 30)**

Mme Charbonneau: J'ai diversifié, mais je me promène d'une fonction à l'autre. Je vous dirais que je m'amuse beaucoup.

Vous avez mentionné que les universités du Québec comme ceux de l'extérieur sont des compétiteurs. Ça me chicote un peu. Ça me chicote dans ce sens où, pour moi, une institution d'enseignement est plus un partenaire qu'un compétiteur. Je comprends par contre que, pour certains cours que j'appellerai de base, sans vouloir dénigrer rien, là... peuvent se donner partout, et là il peut y avoir une compétition de performance, et j'ai compris que, d'après le Maclean's, on vous lance un peu cette volonté-là de compétition.

On a la même chose au niveau des écoles secondaires. Au Québec, on a le fameux Actualité qui compare des pommes, des poires et des tomates, mais qui donne un pourcentage à tout le monde de la même façon, en disant que la meilleure école est x, et la moins bonne est y, avec des comparatifs qui sont quelque peu questionnants. Est-ce que ça existe, des partenariats entre universités? Je connais la réponse, mais...

Mme Woodsworth (Judith): Tout à fait, oui.

Mme Charbonneau: ...mais, de votre côté -- je connais plus celle de Montréal que celle de Concordia -- donc, de votre côté, des partenariats entre universités pour soit compléter, soit rendre une chaire plus importante ou une recherche plus accommodante, ça existe?

Mme Woodsworth (Judith): Oui, tout à fait. On a un certain nombre de programmes conjoints. Il y a un doctorat qui implique toutes les universités montréalaises, doctorat de gestion, où il y a l'UQAM, McGill, l'Université de Montréal par HEC et Concordia. Doctorat en communication: il y a trois universités montréalaises qui participent; Il y a des programmes de recherche comme Hexagram qui est une... c'est une merveille où l'UQAM travaille avec Concordia, et il y a plusieurs partenariats comme ça.

Il y a eu parfois, dans le temps, des rationalisations. J'ai participé à ça. La dernière fois qu'on a eu une récession dans les années quatre-vingt-dix, on a décidé, à Concordia, que le Département de géologie, il y avait beaucoup plus de professeurs qu'il y avait d'étudiants. Donc, on a décidé de fermer le département, mais on a quand même envoyé certains professeurs à McGill où le Département de géologie était fort et puis en bonne vie, et on a gardé un certain nombre de professeurs, on les a mis en géographie. Mais voilà un exemple où on s'est dit: On ne peut pas tout faire; ça va mal en géologie, bon, McGill, ça réussit bien, bon, voilà, et... Donc, il y a beaucoup de conversations qui ont lieu.

Et Montréal a l'avantage, dans toutes les villes du Canada, d'avoir un grand nombre d'universités et d'établissements d'éducation postsecondaires qui sont rapprochés les uns des autres. On peut prendre le métro, on peut aller à pied et puis on est vite à McGill ou à l'UQAM. Et même à l'UDM, de l'autre côté de la montagne, on prend le métro et on est là. Et par contre, à Toronto, pour aller du centre-ville jusqu'à York, c'est tout un voyage. Donc, on a cet avantage, on est proche physiquement et puis il y a beaucoup de partenariats.

Mme Charbonneau: Bien, merci. Avant de fermer mon micro pour le reste de la journée -- j'imagine? -- je voulais vous féliciter pour la volonté de mettre en place un principe de bénévolat. Souvent et malheureusement, on tend à parler de nos jeunes impliqués, on n'en parle pas beaucoup, on n'en parle pas suffisamment, et, de la façon que vous avez mis les choses en place pour permettre à vos étudiants, mais aussi de démontrer une certaine performance auprès du bénévolat, je vous lève mon chapeau. Je pense que c'est tout à votre honneur. J'oserais même dire, même sous micro, qu'il y a une mentalité différente, au niveau de l'éducation, qu'on peut voir entre l'éducation qui se donne de façon anglophone et francophone, à l'Université Concordia, on voit une implication sociale forte.

Je me demandais si l'université se donnait aussi un mandat précis par rapport à une ou une autre forme de bénévolat. Je vous donne un exemple pour vous donner un peu plus une idée, je vais en prendre un que je connais beaucoup, le Club des petits déjeuners. Est-ce qu'on ne laisse que l'étudiant s'engager ou est-ce que l'université, elle a sûrement une fondation qui lui appartient et qui s'occupe d'elle-même, mais est-ce qu'elle a aussi une implication plus forte dans un regroupement quelconque, ou vous laissez les étudiants juste choisir et vous les encouragez de cette façon-là?

Mme Woodsworth (Judith): Jusqu'à maintenant, on n'a pas imposé quelque direction que ce soit sur les étudiants. Et puis, moi, nos étudiants sont ici, j'aimerais féliciter nos étudiants. Notre président est là. Prince, lève-toi! Prince, c'était le président. J'aimerais féliciter nos étudiants, parce que les initiatives sont celles de nos étudiants.

Ce qu'on a fait... Moi, j'estime que ce que j'ai fait, c'est de mettre l'engagement communautaire comme pilier du plan stratégique. Et puis, plan pratique, on a mis sur pied le Centre de bénévolat, qui va faciliter la tâche. Un étudiant qui se dit: Moi, j'aimerais faire quelque chose mais je ne sais pas quoi, bien, on aide cet étudiant, et les étudiants qui ont des idées précises, on a des... J'ai eu un étudiant qui voulait aller en Haïti faire du bénévolat. Bon, on lui a donné un coup de main, mais, bon, bien, il a eu l'idée lui-même. Donc, on peut donner un coup de main, des fois des fonds aux étudiants, mais on aime bien que ce soient leurs initiatives.

Le Président (M. Marsan): Je vous remercie. Ceci complète notre dernier bloc de 20 minutes. Il vous reste un bloc de 15 minutes, et je vais passer la parole maintenant à l'opposition officielle, et je vais reconnaître Mme la députée de Champlain.

Mme Champagne: Merci, M. le Président. Madame, messieurs, il y a quelques années, en fait entre 2003 et 2005, j'ai eu la chance de participer à la reddition de comptes des universités dans un précédent mandat, et, au-delà de toutes les comparaisons souvent, malheureusement, je dirais boiteuses, que ce soit Maclean's ou peu importe, là, ça me fait toujours penser aux fameux sondages, là, tu sais, c'est un portrait qui souvent est tout, tout croche. Alors, je pense qu'il ne faut pas juger de nos universités en région ou à Montréal de ça parce que souvent les critères sont... bien, ils ne le sont pas souvent, ils ne sont, je dirais, pas parfois, mais souvent boiteux, et c'est difficile de comparer en donnant des plus ou des moins, là, parce que je pense que chaque université, avec l'expérience que j'en ai vécue de la nôtre à Trois-Rivières, à l'Université du Québec à Trois-Rivières, ou qu'on peut vivre ailleurs, chacun tente et a la fierté, se donne un devoir, une obligation de résultat en mettant les efforts sur place. Mais, qu'on tourne ça comme on veut, on en revient toujours au fameux argent. Il faut arriver, il faut joindre les deux bouts, hein? Ça vaut pour nos familles, et l'université, bien, c'est une très grande famille.

Or, il y a donc quelques années, il manquait un 375 millions, et j'en était marquée, parce que je l'avais entendu plusieurs fois. Là, on continue avec des déficits quand même importants dans chacune des universités. Alors, pour le combler, ce déficit-là, puis, un jour, dans un monde de rêve, arriver à dire qu'on avance, bien sûr avec des réserves mais avec une forme, je dirais, moi, de liberté d'action, bien, il faut toujours regarder la colonne des revenus et la colonne des dépenses. Puis, quand je regarde la colonne des revenus, il y a les droits de scolarité, puis on sait que les étudiants sont près de ça. Puis, quand ils vont augmenter, puis il y a eu de grosses augmentations entre 2004-2005, 2009-2010, ils ne veulent pas qu'on les reclenche, en bon québécois, hein, et qu'on aille chercher dans leurs poches, surtout que plusieurs de nos étudiants travaillent énormément en même temps qu'ils étudient. On a de grandes réserves, de ce côté-ci particulièrement et peut-être face à nos collègues, de telle sorte qu'on ne veut pas non plus les étrangler. Or, il y a toutes sortes d'écoles de pensée là-dessus, là, puis il ne faut pas partir en peur puis s'imaginer qu'on peut aller chercher toujours dans la poche des étudiants. Puis on a tous, pour plusieurs d'entre nous, eu des enfants, là, et on sait qu'est-ce que ça donne.

Il y a bien sûr les droits eux-mêmes de scolarité qui ont pris toutes sortes de formes avec les frais afférents qui ont augmenté également, et je vois les étudiants qui opinent du bonnet, ils sont d'accord avec moi. Il y a bien sûr les étudiants étrangers qu'on évalue d'une autre forme. Puis il y a toutes sortes d'autres revenus avec les fameuses fondations, or là il y a un grand travail qui se fait sur le terrain. Mais les dépenses sont toujours là, puis tout à l'heure ma collègue parlait peut-être de voir à évaluer les entrées d'argent différemment selon les programmes. On a tous de grandes réserves, parce qu'il y a des effets collatéraux majeurs.

Alors, si j'avais à vous poser la question, et ça va être ma question aujourd'hui: Si, demain matin, vous êtes au Conseil des ministres ou vous êtes la ministre de l'Éducation, Mme la rectrice -- et je vois mon ami, M. Russell Copeman, en arrière, qui a eu à présider une commission que j'ai bien aimée dans le temps -- vous suggéreriez quoi, et votre premier geste à poser pour arriver à régler en partie du moins les fameux déficits des universités -- parce qu'on va entendre ça, là, pendant deux semaines de temps -- quel geste vous poseriez? Puis influencez-nous, c'est important. On ne sait jamais, nous, ce qui nous attend, de ce côté-ci de la Chambre, dans quelques années. Alors, on aimerait ça avoir vos conseils immédiatement, ce serait bien important. Alors, quel geste en premier, Mme la rectrice et messieurs qui vous accompagnent, vous aurez à poser, parce que vous êtes à la tête de ce fameux ministère de l'Éducation qui s'occupe des universités pour aider à corriger ce déficit, là, qui semble incurable?

**(16 h 40)**

Le Président (M. Marsan): Alors, Mme la ministre.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Woodsworth (Judith): Il faut dire que, si j'étais la ministre, je serais un peu plus préparée pour ce genre de questions.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Champagne: Dites-moi une suggestion, madame.

Mme Woodsworth (Judith): Donc, qu'est-ce que je ferais demain? Je ne sais pas, mais je pense qu'il faut avoir une longue vue de la chose, et ce qui est certain, c'est qu'il faut une plus grande participation à l'éducation postsecondaire. Le Québec est en retard par rapport à d'autres provinces, et le Canada en général est derrière les États-Unis en ce qui concerne surtout les deuxième, troisième cycles. Et, s'il y a plus de diplômés très qualifiés, ces gens-là gagneraient plus d'argent, paieraient plus d'impôts, donc voilà quelque chose pour les revenus. Mais ça a été démontré dans certains États américains: dans certains États américains où le niveau de participation à l'éducation est supérieur, il y a une plus grande prospérité. Donc, c'est mieux pour l'économie et c'est mieux aussi pour la santé des gens. Les gens qui ont plus d'éducation ont une meilleure santé, donc moins de dépenses pour le ministre de la Santé et il y aurait plus pour l'éducation. Mais tout ça, c'est à long terme.

Et je pense que, si j'étais ministre de l'Éducation, je ferais beaucoup d'efforts pour mettre ensemble tous les niveaux d'éducation -- les universités, les cégeps, les écoles secondaires -- pour attaquer le problème du décrochage scolaire et s'assurer que les jeunes n'abandonnent pas et continuent au cégep, continuent à l'université, restent à l'école et terminent leurs études. Parce que c'est comme ça que le Québec deviendrait plus prospère et plus compétitif. Donc ça, ca pourrait être un premier geste. Parce que maintenant il y a très peu de liens entre les différents groupes et, nous, on peut faire quelque chose. Les cégeps font quelque chose, les écoles secondaires font des choses, mais ensemble on pourrait faire mieux. Donc, voilà une idée, sans avoir beaucoup de préparation.

Mme Champagne: Une toute petite question également puis je vais aller vers l'idée de la persévérance scolaire. On entend «décrochage scolaire», mais c'est un terme qu'on commence à détester; donc, on parle de persévérance scolaire, du moins c'est plus positif. Et, quand vous parlez de l'interlien entre les différents niveaux, que ce soit primaire, secondaire, universitaire, est-ce qu'au niveau de l'Université Concordia ce genre de lien là vous le tentez, dans vos plans stratégiques ou autres, de créer ce lien-là? Parce que je sais que ça se fait également, de telle sorte qu'il y a même des étudiants universitaires qui ont fait du travail, au niveau primaire, au niveau secondaire, afin d'aller sur pratiquement toute une cohorte d'étudiants de niveau primaire, regarder où ça accroche et comment on pourrait améliorer les choses.

Alors, est-ce que chez vous, à Concordia, c'est également quelque chose qui se fait déjà... tout en ayant bien entendu ce que vous disiez tantôt qu'il faut encore une fois pousser davantage pour que tous ces niveaux-là travaillent ensemble parce que c'est le même étudiant tout petit qu'on aide à cheminer. Et je suis tellement d'accord avec vous quand vous dites qu'un étudiant bien formé, un étudiant qui gagne bien sa vie rapporte, oui, davantage et est peut-être un problème de moins au niveau santé dans la société. Je pense qu'on s'entend sur le message, là, surtout qu'on a participé, là, à une petite tournée sur la persévérance scolaire et on sait qu'on a raison.

Donc, est-ce qu'à Concordia... En fait, on a raison sur plein de choses, mais il faut maintenant le mettre en place, là. Or, est-ce qu'à Concordia vous faites déjà ce genre de lien là important avec le niveau cégep, collège, puis avec le niveau primaire, secondaire, au moment où on se parle, sur la persévérance scolaire?

Mme Woodsworth (Judith): Bon, moi-même, j'ai essayé d'être en contact avec tous les directeurs de cégep et puis certains directeurs de commissions scolaires pour discuter de ces questions. Nos étudiants, il y a eu deux projets de bénévolat chez les étudiants, un projet qui a abouti à cet organisme qui s'appelle Fusion Montréal, dont j'ai parlé, qui se développe bien. Un autre projet: les étudiants qui sont allés à la «reservation» mohawk, Kahnawake, un groupe d'étudiants qui sont allés développer un programme après scolaire. Après l'école, chaque étudiant donne une formation particulière, une formation en informatique, une autre étudiante une formation en cirque parce qu'elle a fait partie du Cirque du Soleil, quelqu'un d'autre en sciences, et tout ça après l'école. Et les élèves de l'école secondaire restent parce que ce sont des étudiants de l'université qui sont comme modèles pour eux mais qui aussi enseignent des matières. Et ça, c'est un beau projet, parce que je suis sûre que ça va encourager ces jeunes, à Kahnawake, de persévérer. Alors, quand on a des projets comme ça chez les étudiants -- moi, encore, je félicite mes étudiants -- ça peut mener à d'autres projets ailleurs et servir d'exemple. Donc, on a ces exemples-là, et puis aussi à l'école de l'éducation permanente, on a beaucoup de liens aussi avec la communauté sur ces sujets-là.

Le Président (M. Marsan): Je vais maintenant reconnaître M. le député de Saint-Hyacinthe. La parole est à vous.

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): Alors, merci, M. le Président. Mme la rectrice, les accompagnateurs, étudiants, je suis très heureux de voir qu'au moins il y a des conseils d'administration ou il y a des organisations qui reconnaissent la compétence des femmes au Québec, alors j'en suis très heureux.

Maintenant, je sais qu'à l'Université Concordia vous avez des racines quand même qui remontent à beaucoup... à 150 ans et plus, alors c'est quand même bien, c'est quand même mémorable même, là, parce que ça part des petites institutions francophones avec les Jésuites. Et puis tout ça, ça a monté, et je pense que vous avez fait votre marque au Québec, et vous êtes reconnus aussi, en ce sens-là.

Moi, personnellement, concernant les fameux sondages ou les fameux classements, ce que je peux en penser, vous l'avez dit vous-mêmes, je pense, que vos meilleurs ambassadeurs, ce sont vos propres diplômés de par le monde qui vendent leur université. Puis ça, ça s'adresse à toutes les universités aussi du Québec qui peut-être sont déclassées pour certains critères. Mais je pense que, moi... donc, je pense qu'on peut tous être fiers de ce qui se passe, de ce qui se fait ici en termes d'enseignement puis en termes d'enseignement universitaire. C'est bien sûr qu'on ne peut pas ignorer qu'au niveau budgétaire le gouvernement se doit de mettre des balises. Alors, on est tous d'accord avec ça.

Et j'ai une question là-dessus, c'est une question soit que je n'ai pas bien compris, mais j'aimerais ça me la faire expliquer. Tantôt, on m'a dit qu'on avait atteint l'équilibre budgétaire en 2009-2010. Cette année, vous atteignez l'équilibre budgétaire, c'est ça? Est-ce que ça veut dire qu'à l'intérieur de cet équilibre budgétaire là le 10 millions qui est accordé, que vous dégagez pour payer, mettons, la dette à long terme, là, sur les immobilisations, des choses de même, est-ce que le 10 millions est inclus dans cet équilibre budgétaire là ou si c'est comptabilisé à part? Je n'ai pas saisi trop, trop, tantôt.

Mme Woodsworth (Judith): Oui, M. Therrien.

Le Président (M. Marsan): M. Therrien.

M. Therrien (Daniel): Oui, merci beaucoup. M. le député de Saint-Hyacinthe, effectivement, ce qu'on fait, c'est que le 10 millions comme tel est payé du fonds de fonctionnement au fonds d'immobilisation où est comptabilisée la dette. Autrement dit, on réalise un surplus minimum de 10 millions pour permettre la couverture de cette dette-là; donc, ça fait partie de notre atteinte d'un équilibre budgétaire, effectivement; donc, l'équilibre est tenant compte de cette dépense-là, oui.

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): Merci.

Le Président (M. Marsan): Oui. M. le député de Drummond, la parole est à vous.

**(16 h 50)**

M. Blanchet: Merci, M. le Président. Informatique aidant encore, il y avait un article, dans La Presse de ce matin, d'une étude qui a été faite et qui suggère, qui semble démontrer que les frais de scolarité moins élevés en médecine font en sorte que des étudiants originaires de milieux moins favorisés accèdent à la médecine davantage que dans les universités comparées et retournent davantage dans les milieux défavorisés, donc facilitent l'accessibilité et pour le patient et pour l'étudiant. Est-ce que vous croyez que ce raisonnement-là -- et c'est la première de deux questions que je vous envoie vite -- est-ce que ce raisonnement-là vous semble applicable dans d'autres secteurs d'étude?

Et la deuxième question. Vous avez identifié les facteurs, vous avez une clientèle vulnérable... le nombre d'étudiants, le pourcentage des étudiants bénéficiaires d'aide financière aux études et le nombre très élevé et le pourcentage très élevé d'étudiants qui travaillent en même temps font que vous avez une clientèle relativement vulnérable.

Parmi les critères de persévérance de rétention des étudiants, je n'ai pas entendu la mention du critère économique. Est-ce qu'on peut supposer que la fragilité économique de ces étudiants-là est un facteur qui pourrait faire en sorte qu'on en échappe en cours de route?

Mme Woodsworth (Judith): Eh bien, quant aux étudiants de médecine, je ne sais pas, il faut que je voie l'étude en question. Il est vrai que, si on prend des étudiants... ça fait mon expérience dans le Nord de l'Ontario où on a créé une école de médecine, et on avait démontré qu'auparavant, si on prenait des étudiants du Nord de l'Ontario, ils étaient plus sûrs de rester là-bas pour être médecins là-bas. Mais, si on prend quelqu'un d'un milieu défavorisé économiquement, est-ce que ça veut dire aussi qu'ils vont rester dans ce milieu, là je suis moins sûre, ou bien, si les frais sont plus bas, est-ce que ça va les encourager à entrer en médecine? Il y a tellement de facteurs. Moi, je pense que, de toute façon, si les frais sont plus élevés en médecine, il faut avoir un programme d'aide financière pour les étudiants qui en ont besoin. Mais là il faut que je voie l'étude pour avoir un avis là-dessus.

La deuxième question portait...

M. Blanchet: La rétention des étudiants, compte tenu... parce que la...

Mme Woodsworth (Judith): Oui.

M. Blanchet: ...facteur économique est un facteur pour...

Mme Woodsworth (Judith): Oui.

M. Blanchet: ...lutter contre le décrochage ou donc assurer la persévérance et le taux de diplomation, compte tenu de la clientèle vulnérable.

Mme Woodsworth (Judith): C'est certain que les étudiants travaillent beaucoup plus maintenant, de nos jours, qu'il y a quelques années quand j'étais étudiante. Et le résultat c'est que, même si les étudiants arrivent à compléter les cours, à réussir aux examens, ils passent moins de temps sur le campus à discuter avec des amis, à lire -- à lire les journaux, à bouquiner à la bibliothèque -- et ça a un impact sur la qualité de l'enseignement. Je pense que, là aussi, c'est une question d'aide financière. Si vraiment les étudiants ont besoin de travailler parce qu'ils ont besoin de revenus, il faut avoir le moyen de les appuyer avec des bourses. Qu'ils travaillent un peu moins et là il y a moins de problème... on résout le problème de la rétention.

Il faut aussi les conseiller. Parfois, j'ai l'impression que les étudiants travaillent pour avoir un peu plus d'argent, mais parfois, ça ne vaut pas la peine parce que, là, ils vont compromettre leur succès et leur chance d'avoir un bon emploi à la fin. Donc, il faut qu'ils soient bien conseillés pour qu'ils entreprennent juste assez de travail et pas trop, donc c'est assez compliqué. Parfois, on peut les aider en offrant des postes, des emplois sur le campus même, à l'intérieur de l'université; comme ça, ils n'ont pas besoin de voyager pour un emploi à l'extérieur de l'université.

On peut aussi les encourager à participer à des programmes coopératifs où il y a des stages payés. Et ça, c'est quelque chose qu'on vise dans notre plan stratégique: d'augmenter le nombre d'étudiants dans des programmes coopératifs. Parce que, si un étudiant fait le programme coop en génie, en finance, en économie, en chimie, dans des domaines comme ça, ils ont pratiquement l'éducation gratuite et ils sont presque certains d'avoir un emploi à la fin. Donc, on va essayer d'augmenter le nombre d'étudiants dans ces programmes-là, mais ces programmes-là nous coûtent un peu cher parce qu'il faut les surveiller, il faut une administration beaucoup plus lourde pour gérer ça.

Le Président (M. Marsan): Je vous remercie. Ceci termine cet échange de 20 minutes. Il reste deux périodes d'échange de 15 minutes pour chacun des regroupements politiques.

Et je voudrais me permettre de débuter cet échange-là en vous parlant d'un problème que vous connaissez bien et qui nous préoccupe beaucoup, c'est l'avenir des universités avec les pénuries de main-d'oeuvre que nous connaissons. Alors, vous n'êtes pas sans savoir tout ce qui se passe dans le monde du travail, que ce soit dans le domaine de la santé avec les médecins, les infirmières, dans le domaine du génie, les ingénieurs, il en manque beaucoup. Et c'est la même chose pour les professeurs, professeurs-chercheurs.

Alors, on aimerait savoir de vous si c'est un problème qui est très aigu actuellement ou si c'est quelque chose qui est en devenir, et quel est l'état de vos préoccupations, à ce sujet-là, pour l'avenir de l'Université Concordia?

Mme Woodsworth (Judith): On pense à la pénurie de la main-d'oeuvre et puis, là, on pense rendre service à la société québécoise en formant la main-d'oeuvre et aussi en attirant des étudiants qui seront des citoyens québécois, des étudiants de l'étranger. Et puis, à cet égard, on est très contents que le gouvernement québécois va maintenant donner le certificat de sélection aux étudiants qui sont diplômés d'une université québécoise parce que ça nous aide à recruter des étudiants internationaux et ça va encourager les étudiants à rester ici et ça va aider le problème de la pénurie de main-d'oeuvre en général.

Quant à l'université elle-même, jusqu'à maintenant on n'a pas eu trop de problèmes pour recruter des gens qualifiés, on n'a pas vraiment de problème de rétention de notre personnel de soutien ni de nos professeurs. Les gens viennent ici, à Montréal, et puis... pas ici, à Montréal, chez nous et puis ils sont bien contents, ils ne quittent jamais... ou presque jamais, sauf dans quelques cas pour des raisons personnelles. Il y a toujours des exceptions, mais on est contents de notre taux de rétention.

Mais, comme j'ai dit avant, c'est une situation précaire et puis il se peut qu'à l'avenir, avec... Bon, il y a des coûts qui augmentent et les budgets qui n'augmentent pas aussi vite. Il est possible qu'on ait aussi des problèmes de concurrence, parce qu'on est dans un contexte nord-américain et on est en concurrence avec les universités aux États-Unis et au Canada et au Québec. Donc, on pense à ça, et c'est pour ça qu'on essaie aussi de faire un peu de marketing aussi de ce qui nous distingue, ce qui nous rend dynamiques et audacieux pour qu'on puisse attirer vraiment la main-d'oeuvre qu'il nous faut.

Le Président (M. Marsan): Vous allez me permettre une deuxième question; dans le domaine de la recherche, cette fois. Vous êtes une jeune université et, bon, vous n'avez pas tout l'historique de d'autres universités, mais je vois quand même que vous faites des investissements quand même assez importants, on parle d'une trentaine de millions.

Est-ce que vous pourriez nous indiquer quels sont vos organismes subventionnaires où vos chercheurs vont chercher des fonds et qu'est-ce qu'ils font avec ces argents-là? Nous donner juste quelques exemples de vos projets de recherche.

**(17 heures)**

Mme Woodsworth (Judith): C'est ça, on est bien jeunes, et puis à une époque, peut-être à l'époque où j'ai commencé, en 1980, il y avait moins de professeurs qui faisaient des recherches. Maintenant, on a fait beaucoup de progrès et puis depuis l'arrivée de la vice-rectrice à la recherche, Mme Dandurand, qui est parue devant cette commission la dernière fois -- elle est arrivée il y a cinq ans -- et puis on a mis en place beaucoup de mesures pour encourager les professeurs à faire des demandes de subvention aux organismes subventionnaires fédéraux et provinciaux, et il y a aussi des projets de recherche en partenariat avec l'industrie, et notamment dans le milieu aérospatial. On a pas mal de partenariats dans le milieu de l'énergie aussi, avec Hydro-Québec. On a, par exemple, deux chaires de recherche appuyées par Hydro-Québec dans le domaine de l'énergie. On fait des recherches dans plusieurs domaines -- et puis tantôt je vais demander à mon collègue de donner des compléments d'information -- mais déjà on est... on a atteint plus de 30 millions de dollars en financement de recherches et en plus on a des chaires de recherche du Canada puis des chaires qu'on a créées nous-mêmes et des centres de recherche qui sont fort intéressants, des chaires, des centres originaux comme le centre sur le génocide, dont j'ai parlé, et par exemple aussi un centre sur l'entreprise durable, et ça aussi, c'est original et très novateur. Je vais demander à M. Graham de vous donner d'autres explications, des exemples.

Le Président (M. Marsan): M. Graham.

M. Graham (David): Merci, M. le Président. Effectivement, pour revenir sur certains éléments de la présentation de la rectrice, de tout à l'heure, et pour ajouter quelques compléments d'information, pour ne citer que quelques exemples, je vais vous parler de certains projets qui me tiennent à coeur et je vais commencer par un projet d'ARUC, une Alliance de recherche Universités-Communautés, qui est un des projets que je chéris particulièrement à Concordia, abrité au Département d'histoire, dirigé par la Chaire de recherche du Canada Steven High. C'est un projet qui vise à récolter les biographies des Montréalais qui ont été déplacés par des épisodes de violence ou de génocide un peu partout dans le monde pour venir s'établir à Montréal. Or, c'est un projet d'histoire orale où l'équipe de M. High et ses partenaires d'organismes communautaires s'en vont dans la communauté, accompagnés d'étudiants des cycles supérieurs et de postdocs, pour récolter effectivement ces histoires qui sont saisissantes, très difficiles à raconter, très difficiles à écouter mais saisissantes pour l'actualité du Québec, du Canada et du monde. Donc, voici un projet.

Dans sa présentation, la rectrice a parlé de deux nouveaux centres de recherche que nous avons à Concordia: PERFORM et le Centre de recherche en génomique structurale et fonctionnelle. Or, le centre PERFORM, abrité au Département des sciences de l'exercice, est un centre de rééducation, de recherche et de services communautaires qui porte justement sur la réhabilitation et sur la rééducation des accidentés du travail, des victimes de commotions cérébrales et de victimes d'accidents sportifs.

Au CSFG, le Centre de recherche en génomique structurelle et fonctionnelle, comme l'a dit la rectrice, il y a des projets qui visent à recycler les effluves industriels en bioéthanol et en autres produits qui peuvent nous aider à nous sortir de la crise énergétique qui nous préoccupe tellement.

Dans d'autres centres de recherche de Concordia, on travaille sur des projets fascinants en alphabétisation, par exemple au Centre sur la performance et l'apprentissage, et, dans le Centre de bioneurologie au Département de psychologie, sur tout ce qui a trait aux causes des addictions, donc de l'obésité, de la narcomanie, de l'alcoolémie, entre autres. Nous avons une chercheure au Département de sociologie, et j'en passe et des meilleurs, qui travaille sur l'addiction au jeu qui est un phénomène relativement récent mais qui nous préoccupe énormément au Québec ces jours-ci. Donc, voici quelques exemples, il y en a énormément d'autres que je pourrais vous citer, mais le temps nous manque.

Le Président (M. Marsan): Alors, je vous remercie beaucoup. Je vais céder la parole à mon collègue le député de Charlesbourg.

M. Pigeon: Merci, M. le Président. Brièvement, Mme la rectrice, on a parlé de revenus et de dépenses, on a parlé des difficultés financières, je voudrais brièvement aborder la question des coûts de gestion, parce que, bon, vous n'êtes pas sans savoir qu'il y a le projet de loi n° 100, qu'il y a des réflexions qui sont faites sur la gestion. Et, moi, j'aimerais avoir votre idée là-dessus. Est-ce que c'est possible pour vous d'améliorer la gestion, je dirais, au sens large, d'avoir des processus plus efficaces, d'économiser, soit d'avoir moins de paperasse, d'utiliser plus les technologies de l'information? Enfin, est-ce que vous avez fait une réflexion dans ce sens-là pour tenter quand même d'améliorer au maximum, là, je dirais, la machine administrative? On sait que toutes les grandes machines, c'est toujours un peu lourd, il faut toujours être en train de regarder qu'est-ce qu'on peut faire. Avez-vous, là, et puis probablement, je dirais, avec l'aide de votre conseil d'administration qui doit aussi, parfois, vous poser des questions là-dessus, avez-vous fait une réflexion dans ce sens-là?

Mme Woodsworth (Judith): Tout à fait, et puis on a commencé avant que la loi n° 100 nous dicte ça, on a commencé il y a deux, trois ans. Avant que j'arrive, il y avait un déficit accumulé assez important, et puis on a déjà... cette année-là, avant que j'arrive, parce qu'on ne voulait pas me laisser tout ce déficit, on avait commencé un processus d'élimination de postes administratifs. Donc, on a déjà commencé. On a déjà fait un grand pas parce qu'il y a un comité qui examine toutes les vacances de poste et, si on demande à remplacer quelqu'un qui est parti, le comité examine et décide si le poste est comblé ou pas, et ça, avec ça, on a réussi à déjà éliminer quelques postes administratifs, et ça, c'est administratif, non pas des postes d'enseignants. Mais par contre le vice-recteur fait la même chose sur le niveau académique et puis réalloue les postes vacants, parfois décide où doit aller le poste dans ce cas-là, mais sans réduire le nombre de profs. Au niveau administratif, on a voulu réduire l'administration. Donc, quand la loi n° 100 nous dicte ça, c'est un peu embêtant parce qu'on a déjà commencé. Est-ce qu'on va pouvoir comptabiliser nos réussites jusqu'à maintenant ou pas? Ça, c'est une question que j'ai posée au ministre des Finances, l'autre jour, et puis il en a pris note.

Mais on a réfléchi à d'autres choses. Par exemple, dans le domaine de la technologie, jusqu'à maintenant, il n'y avait pas d'uniformisation, d'harmonisation des types d'ordinateurs qu'on achetait. C'est une grande organisation, on achetait toutes sortes d'équipements, un peu partout, différents. Les logiciels n'étaient pas uniformisés, et on pense qu'on peut faire pas mal d'économies en ayant des politiques bien, bien définies. C'est ce qu'on est en train de faire, et puis aussi peut-être en allongeant le cycle de renouvellement des ordinateurs, peut-être pas tous les deux ans ou tous les trois ans, mais tous les quatre ans, remplacer les ordinateurs. Donc, il y a plusieurs choses. On a réfléchi à tout, tout, tout, parce qu'on veut absolument avoir un budget équilibré et rendre le plus possible des services pédagogiques aux étudiants.

M. Pigeon: Est-ce qu'il me reste une minute?

Le Président (M. Marsan): Oui.

M. Pigeon: Est-ce que, Mme la rectrice, vous avez examiné aussi, du côté académique par exemple, soit la possibilité... Vous avez parlé... vous avez évoqué un peu qu'il y avait des programmes conjoints avec des universités de la région, là. Mais, dans les programmes à faible taux d'inscription, peut-être avoir des partenariats avec d'autres universités, ça, c'est une des voies. Et, moi, dans une vie antérieure, j'étais prof, entre autres, et j'ai vécu une réorganisation dans mon propre département, le Département de génie civil, on avait en quelque sorte nettoyé la liste des cours à option et on s'était assurés qu'on faisait le plus efficace possible, et je peux vous assurer que, il me semble, les étudiants formés maintenant sont aussi bons qu'avant. Et on avait quand même réussi, là, je dirais, à faire des gains de ce côté-là en examinant de façon stricte les cours qu'on offre, etc. Est-ce que cet examen-là, je dirais, de l'ensemble des opérations a été fait?

Mme Woodsworth (Judith): Oui, il y a toujours une révision de tous les programmes de façon cyclique, et, dans le cadre de la révision des programmes, on examine tous les cours qui sont donnés et puis on fait ce genre de nettoyage. Le vice-recteur aux affaires académiques a élaboré un plan d'embauche triennal et en même temps un plan académique, et puis il essaie de faire ça en lien avec les gens qui planifient le budget. Donc, ce n'est pas fait de façon isolée, c'est fait de façon très, très intégrée, et puis je peux lui demander aussi de donner des exemples là-dessus. M. Graham.

**(17 h 10)**

M. Graham (David): Merci, Mme la rectrice et M. le Président. Effectivement, en tant qu'ancien universitaire, vous savez que l'élagage des programmes n'est pas la tâche la plus facile à entreprendre au sein des universités. Il est souvent dit, et avec raison, que les universités sont très aptes à crier et très inaptes à réduire. Et c'est pour cette raison que j'ai demandé à mon vice-provost associé aux études de mettre en place un nouveau système d'appréciation des demandes de création de nouveaux programmes. Et, à chaque fois que nous recevons désormais une demande de création de programmes, nous portons un regard désormais beaucoup plus sévère sur les programmes existants et justement sur le nombre de cours existants et sur les coûts éventuels des nouveaux programmes, et cela, dans le but évidemment de réduire, sinon à zéro, de réduire au maximum le coût additionnel des nouveaux programmes. Donc, vous pourriez être certains que tous les indicateurs que nous adoptons au secteur académique de Concordia sont adoptés dans le but d'assurer soit l'efficacité maximale, soit la qualité maximale, soit les deux. Donc, l'efficacité nous tient à coeur.

Le Président (M. Marsan): Je vous remercie. Ceci termine l'échange avec la partie ministérielle, il reste une période de 15 minutes avec la partie de l'opposition officielle, et je vais reconnaître Mme la députée de Taillon, porte-parole en matière d'enseignement supérieur.

Mme Malavoy: Je vous remercie. Bien, merci pour votre présence et votre constance dans la réponse aux questions, c'est un exercice qui prend un peu de temps, mais c'est très, très instructif pour nous.

J'aimerais poursuivre la réflexion sur la question de la recherche. On l'a abordée un peu, mais j'aimerais reprendre peut-être certains éléments. D'abord, comment expliquez-vous qu'il y ait une telle augmentation de subventions chez vos professeurs? Est-ce qu'il y a eu un coup de barre qui a été donné? Est-ce qu'il y a eu un appui qui leur a été octroyé? Est-ce que c'est une politique institutionnelle qui a conduit à cela? Parce qu'on sait que les universités, qu'on le veuille ou non, se démarquent de plus en plus maintenant par leurs produits de recherche, si elles ne veulent pas être des universités uniquement vouées à la formation de premier cycle. Et donc comment ça s'est déroulé chez vous?

Mme Woodsworth (Judith): Eh bien, depuis une dizaine d'années, on a renouvelé la moitié du professorat, ça, c'est une chose, et ça se passe comme ça dans beaucoup d'universités aussi, c'est une question de démographie, mais on a fait ça à Concordia, donc sur 1 000 professeurs, 500 sont nouveaux et assez jeunes, pas nécessairement jeunes de façon chronologique, mais jeunes dans leur carrière. Et ces jours-ci, des fois, avant d'obtenir le doctorat, les gens publient ou les gens ont déjà un programme de recherche établi et ils arrivent avec des publications, des laboratoires, des subventions parfois, donc ils sont déjà chercheurs, et ce n'était pas le cas il y a 20 ans, donc il y a un nouveau type de profs qui arrive. Ça, c'est une chose.

Autre chose, on a eu effectivement une politique, une volonté d'augmenter la quantité de recherche à Concordia, et c'est pour ça qu'on a embauché pour la première fois une vice-rectrice à la recherche. Avant ça, on avait un vice-recteur associé à la recherche, mais une vice-rectrice à la recherche, Mme Dandurand, qui, elle, a mis sur pied un tas de mécanismes, elle avait un plan, elle avait tout un programme d'appui aux chercheurs. Les chercheurs qui n'ont pas de subventions obtiennent des subventions internes, des petites subventions, pour pouvoir lancer leurs travaux et ils ont aussi, ces chercheurs-là ils peuvent profiter des conseils de Mme Dandurand et de son équipe qui revoient les demandes de subventions attentivement. Je me souviens que, dans le temps, moi-même, j'ai eu une subvention du Conseil de recherche en sciences humaines, mais ça m'a pris deux ans avant d'obtenir ma subvention. La première fois, je ne l'ai pas obtenue, la deuxième fois, j'ai eu l'aide d'un collègue et puis ça a marché. Mais cette fois-ci, bon, Mme Dandurand et son équipe, ils lisent toutes les subventions, ils donnent des conseils, il y a des ateliers, ça ne se fait pas tout seul, obtenir des subventions. Donc, il y a tous ces mécanismes-là, l'encouragement et une politique institutionnelle, et on réussit. Ce n'est peut-être pas là où on voudrait être, on aimerait avoir plus de subventions encore et peut-être être plus haut dans les sondages Maclean's, mais pour l'instant on est contents des progrès qu'on a faits.

Mme Malavoy: Un des éléments clés souvent pour la formation des étudiants aux études supérieures, c'est de pouvoir les associer à des projets de recherche et de pouvoir les payer pour finalement faire leurs études et même de pouvoir faire un lien entre, par exemple, leurs mémoires ou leurs thèses et des projets de recherche pour lesquels leurs professeurs ont des subventions.

Est-ce que chez vous c'est une réalité, est-ce que c'est une préoccupation, est-ce que vous êtes engagés sur cette voie?

Mme Woodsworth (Judith): Tout à fait. Et puis d'ailleurs c'est un critère dans l'octroi des subventions, l'implication des étudiants. Quelqu'un qui demande une subvention qui implique les étudiants dans le projet de recherche a plus de chances de se voir octroyer la subvention. Et maintenant qu'on a des programmes de deuxième et de troisième cycles, on peut embaucher les étudiants pour participer à des projets de recherche et puis on peut embaucher aussi les étudiants de premier cycle. Et on croit que c'est important pour les étudiants de pouvoir participer à la recherche des professeurs et aussi important pour les professeurs de se voir aidés par les jeunes.

Mme Malavoy: Bon. Je trouve ça intéressant de vous entendre parce que, quand on parle des étudiants aux études supérieures, mon souvenir de certaines recherches que j'ai pu voir, c'est que, s'ils doivent travailler une proportion importante de leur temps à l'extérieur de leurs études, ce n'est vraiment pas intéressant et c'est un facteur dissuasif pour la poursuite des études. Si, par ailleurs, ils peuvent travailler et compléter, par exemple, ce qu'ils ont comme bourses ou comme prêts par des études liées à leurs projets personnels, bien, il y a beaucoup de chances qu'ils terminent leurs études. Donc, c'est vraiment un facteur de réussite qui est réel.

Toujours dans le domaine de la recherche, je voudrais aborder une question peut-être un peu plus générale. Mais on a vu ces derniers temps, que ce soit dans des politiques fédérales ou provinciales, poindre l'idée qu'on favorisait des types de recherche qui avaient une retombée assez immédiate au plan, entre autres, économique. Il y a eu même, si je me souviens bien, une subvention fédérale, un ajout dans un budget au fédéral -- je crois que c'était un peu plus de 17 millions de dollars, vous devez vous en rappeler également -- qui était lié au fait que des recherches aient un impact sur le domaine des affaires, quelque chose comme ça. Ça pose toute la question de la liberté de la recherche universitaire et du lien entre des organismes subventionnaires et les critères de sélection des projets de recherche et bien sûr la liberté des chercheurs.

Est-ce que ce sont des préoccupations que vous avez? Est-ce qu'il y a chez vous des débats de cet ordre-là? Est-ce que de temps en temps, bon, vous abordez ces questions-là qui ne sont pas propres à Concordia mais qui me semblent être quand même dans les préoccupations actuelles?

Mme Woodsworth (Judith): Je dirais que, parmi les préoccupations de mes collègues au sein de l'Association des universités et collèges du Canada, l'AUCC, une préoccupation importante, c'est la défense des sciences humaines, sciences sociales, parce qu'on trouve qu'il y a beaucoup d'attention accordée à la science et à la technologie. Et parfois on va nous dire: Ah, bien, la science, ça comprend les sciences humaines, les sciences sociales. Mais pas pour nous. Et ça décourage ce qu'on considère des recherches importantes. Donc, il faut toujours être à la défense non seulement de la liberté en général, mais de la liberté d'exercer dans ces domaines-là. Et, pour Concordia, on a une majorité de professeurs qui oeuvrent dans ce domaine-là. Et, à mon avis, ce sont des domaines qui sont très, très importants pour la société. La science et la technologie, oui, c'est important, c'est important pour l'économie, pour la société, mais, quand on constate les problèmes, les enjeux du monde, il y a des problèmes de démocratie, de droits de la personne, des problèmes de génocide et des problèmes d'économie aussi. Ce sont des problèmes qu'on va résoudre non pas par la science et la technologie, mais par les sciences sociales, les sciences humaines. Donc, moi, je suis avocate, défenseure de ces domaines-là.

**(17 h 20)**

Mme Malavoy: Je suis heureuse de vous entendre. Moi, je suis également des sciences sociales, donc, je ne peux que renchérir sur ce que vous dites.

Il y a un autre débat qui s'en vient cet automne, c'est celui de la fusion des organismes subventionnaires du Québec. Je ne vous demande pas forcément de vous prononcer là-dessus aujourd'hui, là, vous en aurez l'occasion, mais je pense que ça soulève aussi cette question-là. Parce que la grande crainte qu'on peut avoir, c'est que ce soient les sciences humaines, les sciences sociales, les beaux-arts aussi, parce que vous avez des secteurs très importants à Concordia qui font votre réputation, mais dont l'impact n'est pas toujours mesurable de la même manière qu'une découverte technologique.

Donc, pour moi, ça impose beaucoup de vigilance quand on regarde la façon dont sont décidées et octroyées les subventions de recherche. Je pense qu'on aura à surveiller ça très précisément. Mais je suis heureuse d'entendre votre point de vue qui est aussi très nuancé de ce point de vue là.

Écoutez, M. le Président, je pourrais en avoir d'autres, questions, mais je trouve qu'on termine sur une belle pensée de Mme la rectrice, alors je m'en voudrais de faire dévier le sujet sur autre chose. Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Marsan): Je vous remercie, Mme la députée de Taillon. Et à mon tour de vous remercier bien sincèrement, Mme Woodsworth, M. Graham, M. Therrien, M. Tucker, M. Freedman et M. Copeman, merci pour cette présentation-là, et merci aux collègues pour la qualité des échanges également.

Alors, bonne fin de journée. Et, sur ce, avant d'ajourner, je vais distribuer le document qui est la présentation qui a été faite par Mme Woodsworth de même que le rapport de la rectrice 2009.

Et, sur ce, j'ajourne les travaux jusqu'à demain, 9 h 30. La commission se réunira, afin de poursuivre son mandat, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine. Merci et bonne soirée.

(Fin de la séance à 17 h 22)

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